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(Quinze heures seize minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! Je demanderais à chacun des parlementaires de bien
vouloir prendre sa place.
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à une consultation générale et de tenir
des auditions publiques dans le but d'étudier le document d'orientation
"Pour une politique de sécurité du revenu". C'est donc là
le mandat de la commission. Nous avons quorum. Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Laporte
(Sainte-Marie) sera remplacé par M. Doyon (Louis-Hébert); M.
Chevrette (Joliette) sera remplacé par M. Desbiens (Dubuc) et Mme
Vermette va remplacer...
Le Président (M. Bélanger): Mme Vermette est membre
de la commission, il n'y a donc pas de problème.
À la suite d'une entente intervenue entre les leaders des deux
partis, nous avons une heure par groupe pour l'audition. L'heure est
répartie de la façon suivante: 20 minutes pour le groupe qui
présente son mémoire et 40 minutes pour les parlementaires qui
désirent poser des questions aux intervenants. Ces 40 minutes sont
généralement divisées en deux. Lorsque les
représentants des partis indépendants veulent intervenir, ce
temps est pris à même la banque de 40 minutes, donc soustrait de
façon équitable entre les deux formations.
En fait, on veut fonctionner selon le même principe qu'on avait
mis en pratique lorsque la commission s'est réunie pour examiner la
question de la santé mentale. Cela avait très bien
fonctionné. Je ferai une gestion du temps assez serrée pour
éviter que des groupes qui doivent passer à 21 heures puissent le
faire et non pas être retardés jusqu'à 22 heures ou 22 h
30, ce qui feur cause souvent des problèmes pour fe retour. Donc, je
vais essayer de faire un gestion du temps très serrée pour qu'on
arrive dans les heures qui nous sont imparties. Il n'y a donc pas de question
sur les procédures, c'est clair pour tout le monde?
Pour commencer, j'inviterais M. le ministre à faire ses remarques
préliminaires. Par la suite, j'inviterai la représentante de
l'Opposition à faire les siennes et, s'il y a lieu, les
députés indépendants pourront profiter de 20 minutes eux
aussi pour les mêmes fins.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie,
madame.
Mme Harel: Avant que nous commencions nos travaux, tels que
déterminés au calendrier, j'aimerais soumettre à
l'attention des membres de la commission l'intérêt que nous
aurions, comme commission, à souhaiter la télédiffusion
des débats que nous allons entreprendre. Je le suggère, M. le
Président. Les démarches peuvent très certainement
être faites rapidement de façon que nous puissions avoir une
réponse positive qui permettrait aux milieux concernés par ces
débats sur leur propre sort, de suivre nos travaux.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse de vous
interrompre, mais cette démarche est déjà faite. J'ai
demandé aux leaders des deux partis de bien vouloir convoquer le
comité ' responsable de la télédiffusion des débats
pour qu'il se réunisse le plus rapidement possible, sinon aujourd'hui,
tout au moins demain, afin que nous puissions télédiffuser ces
débats. La décision leur revient. Malheureusement, on ne peut que
souhaiter qu'elle soit favorable.
J'invite donc, sans plus tarder, M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu à faire ses remarques
préliminaires. M. le ministre, vous avez 20 minutes.
Remarques préliminaires M. Pierre
Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, en
convoquant une commission parlementaire dans le but d'étudier le
document d'orientation "Pour une politique de sécurité du
revenu", nous visons trois objectifs spécifiques. D'abord, nous voulons,
par cet exercice démocratique, fournir une occasion à tous les
intervenants intéressés au régime de
sécurité du revenu de participer activement à la
réflexion conduisant à la mise en place de cette politique. Au
cours de ces semaines en commission parlementaire, nous écouterons
attentivement tous les intervenants venus exposer leur opinion sur la
proposition gouvernementale. Nous accorderons une attention toute
particulière aux suggestions qui seront faites et qui contribueront
à la réalisation des grands principes de cette politique.
Je l'ai affirmé autant privément que publiquement et je le
répète. Je suis disposé à écouter toute
personne ou organisation. La poursuite de la consultation sur ce projet ne sera
jamais escamotée et j'ouvre la porte aux modifications qui bonifieraient
la politique, pour autant que les principes soient respectés.
Le deuxième objectif que nous désirons atteindre par la
tenue de cette commission parlementaire en est un d'information. Ainsi,
à ia lecture des mémoires et des déclarations faites
par les médias par différents intervenants, autant avant
qu'après la publication du document d'orientation, nous avons
constaté que certains intervenants ont émis publiquement des
commentaires qui portaient sur des éléments qui n'ont pas
été bien compris ou qui demeurent obscurs. Nous croyons que cette
commission parlementaire permettra à la population, aux prestataires de
l'aide sociale et aux familles à faible revenu d'obtenir divers
renseignements sur le contenu véritable de cette politique.
Enfin, le troisième objectif se résume à permettre
un forum ou l'échange d'une foule de renseignements, de connaissances,
d'expertises qui ne pourra qu'entraîner une bonification dudit projet et,
par conséquent, bénéficier à notre
société, aux clientèles à qui est destinée
cette réforme, ainsi qu'à l'ensemble de la population.
Convaincus que le projet suscite un vif intérêt dans la
population, conscients que cette politique touchera directement plus de 750 000
personnes et confiants que, tant du côté des parlementaires que du
côté des intervenants, l'approche positive,
réfléchie et sérieuse sera de mise lors de nos assises,
nous entamons cette autre étape de consultation avec un esprit
réceptif certain, animés que nous sommes par une volonté
profonde de dialogue, d'information et de vulgarisation.
Pour nous, il est primordial que les discussions de cette commission
parlementaire portent sur les besoins de la clientèle et sur les
meilleurs moyens pour satisfaire ses besoins, eu égard aux attentes de
la population. D'ailleurs, à ce chapitre, est-il nécessaire de
vous rappeler que lors de la campagne électorale, nous nous
étions engagés à réformer te système d'aide
sociale, étant très conscients que la Loi sur l'aide sociale de
1969 ne répondait plus aux besoins de la clientèle actuelle. La
clientèle d'alors était composée d'une très forte
proportion, soit les deux tiers considérés inaptes au travail
alors qu'actuellement, les trois-quarts de la clientèle sont
considérés aptes au travail.
Le Parti libéral du Québec s'était donc
engagé à accorder un traitement équitable aux plus
démunis, à inciter les personnes aptes à intégrer
ou à réintégrer le marché du travail et à
accorder la parité aux jeunes de moins de 30 ans. Nous nous sommes donc
mis au travail. Nous avons provoqué la collaboration de tous les
intervenants gouvernementaux et suscité une consultation
préliminaire de nombreux intervenants intéressés à
ce dossier. Parallèlement, nous avons dû assurer une meilleure
gestion des finances publiques dans ce domaine mettant ainsi fin au laxisme et,
par conséquent, dégageant des sommes nécessaires pour
assurer la viabilité financière de cette réforme.
Lors de la publication du document "Pour une politique de
sécurité du revenu", nous avions déclaré que cette
politique était soumise à l'ensemble des concitoyens et
concitoyennes du Québec pour discussions et échanges. Plus de
deux mois après sa publication, nous pouvons croire que ce document a
fait l'objet de réflexion de la part de plusieurs personnes et
organismes intéressés. Ainsi, plus de 125 mémoires ont
été transmis à la commission, ce qui consacre
l'intérêt suscité par cette politique.
Avant d'entendre les intervenants, M. le Président, il nous
apparaît donc nécessaire de rappeler que cette politique comprend
trois volets spécifiques, soit Soutien financier; APTE, ou Actions
positives pour le travail et l'emploi et APPORT, ou Aide aux parents pour leurs
revenus de travail.
Le premier de ces programmes, Soutien financier, s'adresse aux personnes
ou ménages dont l'un des conjoints connaît un état physique
ou mental altéré de façon significative et
prolongée et qui, pour ces raisons, demeurent dans
l'impossibilité de subvenir à leurs besoins de base, ils sont
considérés comme non employables. Nous estimons qu'environ 100
000 personnes ou ménages correspondent à cette
définition.
Les barèmes qui sont proposés pour ce programme
couvriront, au moins, l'ensemble des besoins de court, moyen et long terme des
adultes et des enfants qui composent le ménage et leur permettront de
vivre plus convenablement. Ces barèmes sont supérieurs au niveau
d'aide qui est actuellement offert. Ils seront indexés annuellement en
fonction de l'évolution du coût de la vie.
Ce nouveau programme reconduira aussi tous les besoins spéciaux
reconnus dans le programme actuel. L'administration du programme sera
simplifiée et les contrôles plus souples. La clientèle du
nouveau programme pourra aussi, si elle le souhaite, participer aux mesures de
maintien et de développement de l'employabilité du programme APTE
tout en conservant les avantages conférés par te programme
Soutien financier. Nous évaluons les coûts additionnels de ce
programme à quelque 100 000 000 $, ce qui en portera le coût total
à 650 000 000 $ sur une base annuelle. En mettant de l'avant cette
proposition, le gouvernement vise l'équité pour les plus
démunis.
Le second volet de la politique de sécurité du revenu,
Actions positives pour le travail et l'emploi - soit le programme APTE -
s'adresse à quelque 300 000 personnes ou ménages
considérés employables. Ce programme vise essentiellement deux
objectifs: accorder la parité aux jeunes de moins de 30 ans et fournir
un appui aux efforts de ceux et celles qui veulent intégrer ou
réintégrer le marché du travail en leur offrant les moyens
d'accroître leur employabilité.
À cette fin, des prestations ainsi que le niveau des exemptions
de gain de travail seront désormais fonction de la durée de
présence et de la participation ou non à des mesures de maintien
et de développement de l'employabilité.
Dès son admission au programme APTE,
une personne se retrouvera en recherche intensive d'emploi et ce, pour
les neuf premiers mois Les barèmes couvriront alors une partie de ces
besoins de long terme tout en tenant compte de la capacité de gagner
certains revenus de travail.
Toutefois, des clientèles cibles pourraient pendant cette
période être admises à participer à certaines
mesures de développement de l'employabilité et l'acceptation
d'emplois saisonniers ou temporaires sera facilitée.
Après neuf mois de présence au programme APTE, une
personne pourra se voir offrir de participer à des mesures de maintien
ou de développement de son employabilité. Qu'il s'agisse de
formation individuelle et sociale, d'activités de services
communautaires, d'insertion permanente dans les secteurs de compétence
professionnelle, les mesures traduiront les préoccupations
gouvernementales d'individualisation, de formation, de régionalisation
et d'incitation au travail.
Par ailleurs, certaines des personnes ou certains des ménages
aptes au travail pourront être considérés comme non
disponibles et obtenir le barème établi à cet effet.
Les besoins spéciaux couverts par le programme APTE seront ceux
reliés à la santé des individus.
Les barèmes et les prestations proposés par le programme
APTE seront ajustés par le gouvernement en fonction de paramètres
tels que le salaire minimum, l'incitation au travail, l'évolution du
coût de fa vie.
Le coût du programme APTE évalué, sur une base
annuelle, à quelque 1 900 000 000 $ variera selon le nombre de
participants aux mesures d'employabilité. Il pourra fluctuer d'un
minimum de 1 500 000 000 $ dans le cas d'une participation nulle jusqu'à
un maximum de 2 300 000 000 $ dans le cas d'une pleine participation.
Le troisième volet de la politique de sécurité du
revenu, le programme APPORT - Aide aux parents pour leurs revenus de travail -
a été conçu pour inciter les personnes ayant un ou des
enfants à charge, et dont les revenus de travail sont faibles ou
insuffisants, à demeurer ou à retourner sur le marché du
travail. APPORT effectue la jonction nécessaire entre le programme APTE
et le marché du travail et constitue un encouragement à conserver
un emploi. (15 h 30)
Nous estimons à environ 44 000, dont 24 000 monoparentales, le
nombre de familles qui pourront se prévaloir de ce programme.
L'objectif est d'apporter un supplément mensuel aux revenus de
travail des familles à faible revenu. Une de ses principales
caractéristiques vise également à ce que les frais de
garde des enfants ne constituent plus une barrière à
l'entrée sur le marché du travail. À cet effet, il est
prévu que quelque 50 % de ces coûts seront assumés et ce,
peu importe le mode de garde retenu par les parents. Nous évaluons les
coûts du programme APPORT à quelque 65 000 000 $ sur une base
annuelle.
Avec APPORT, le gouvernement vise l'incitation et le maintien au travail
pour les familles à faible revenu,
Soulignons que le programme APPORT sera appliqué pour
l'année 1988, tel qu'annoncé lors du dernier discours sur le
budget. Par conséquent, la présente consultation portera
essentiellement sur le programme pour les années ultérieures.
Par ailleurs, au chapitre de la détermination des besoins
à être assumés par le régime, il convient d'indiquer
que des changements ont été introduits. Jusqu'à
maintenant, les besoins étaient déterminés à partir
du budget type conçu en 1949 par le Dispensaire diététique
de Montréal. La politique de sécurité du revenu
suggère plutôt de s'appuyer sur l'analyse des dépenses de
consommation des familles travaillant à faible revenu et des besoins
reconnus pour les travailleurs dans le régime d'imposition.
II importe de préciser que d'autres caractéristiques
peuvent affecter l'un ou l'autre des trois programmes de sécurité
du revenu. Mentionnons, entre autres, la définition de conjoint de fait,
le partage du logement, les ressources du ménage et la contribution
alimentaire parentale,
La politique de sécurité du revenu exigera du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
une réorientation énergique de ses programmes et de ses effectifs
vers le développement de l'emptoyabilité de ces
clientèles. En plus d'assurer l'attribution efficace de l'aide
financière, le ministère devra offrir un soutien
personnalisé à toutes les personnes employables ainsi qu'une
gamme variée de services leur permettant de se prendre en charge
dès le départ et d'entreprendre ainsi une démarche
progressive vers le marché du travail.
Des éléments de la politique de la sécurité
du revenu ont fait l'objet de réserve ou d'interrogations de la part de
certains intervenants. Ainsi nous avons eu à répondre, et la
commission parlementaire nous fournit une autre occasion d'informer ces
personnes sur les motifs qui ont conduit à l'élaboration de notre
projet de politique. Cette proposition gouvernementale est le résultat
d'une longue réflexion et elle comporte des choix, des décisions
que le gouvernement a pris pour des raisons de justice et
d'équité sociale.
Parmi ces choix qui nous étaient offerts, l'incitation au
travail, un traitement plus équitable pour les plus démunis et la
réalisation de l'engagement électoral d'accorder la parité
de l'aide sociale aux moins de 30 ans ont guidé nos décisions.
À titre d'exemple, permettez-moi, M. le Président, de citer
quelques cas, sous forme de questions et de réponses, qui illustrent
bien les choix politiques que nous avons effectués.
La politique de sécurité du revenu doit-elle
considérer différemment les bénéficiaires aptes
au travail, les bénéficiaires non employables et tes
bénéficiaires qui sont des bas salariés? Nous croyons que
oui. Le gouvernement croit qu'il doit proposer trois programmes distincts
répondant aux besoins de trois clientèles distinctes,
Doit-on reconnaître les besoins des bénéficiaires
basés sur les dépenses réelles de consommation des bas
ssalariés? Nous croyons que oui. Le gouvernement croit que cette
méthode de calcul est la plus réaliste, la plus équitable
et la plus conforme à l'objectif d'incitation au travail.
Les prestataires d'aide sociale, même en participant aux mesures
d'employabilité à raison de 20 heures pas semaine, doivent-ils
recevoir un revenu disponible supérieur aux salariés travaillant
au salaire minimum? Nous croyons que non. Le gouvernement soutient qu'il est
important d'encourager toute personne à intégrer ou à
réintégrer le marché du travail et que, pour ce faire,
l'aide sociale doit comporter des éléments incitant au travail
à plein temps.
Les prestataires de l'aide sociale doivent-ils recevoir davantage de
l'État que ce que consent le système de prêts et bourses
aux étudiants à plein temps à l'université ou au
cégep? Nous croyons que non. Tout comme pour le travail, le gouvernement
estime qu'il est de son devoir d'encourager les jeunes à demeurer ou
à retourner à l'école plutôt que de les inciter
à recourir à l'aide sociale.
Pour une famille qui compte un enfant qui étudie à plein
temps et un autre qui reçoit des prestations d'aide sociale, les parents
doivent-ils contribuer dans une même proportion aux besoins des deux
enfants? Nous croyons que oui. Le gouvernement préconise que les parents
doivent fournir le même effort financier ou autre à tout enfant,
peu importe son statut ou son occupation, qu'il soit étudiant ou
prestataire de l'aide sociale.
L'État doit-il mettre à la disposition de tous les
bénéficiaires aptes au travail des mesures leur permettant
d'augmenter leur employabilité? Nous croyons que oui. Le gouvernement
soutient qu'il se doit de favoriser une meilleure formation de ces personnes
afin qu'elles aient une meilleure chance de se trouver un emploi.
Doit-on avoir des barèmes supérieurs pour les
bénéficiaires inaptes au travail, donc susceptibles de demeurer
à l'aide sociale pour une longue période, comparativement aux
bénéficiaires aptes qui, par définition, sont de passage
à t'aide soc'ale? Nous croyons que oui. Le gouvernement estime que la
société se doit de traiter plus équitablement les
personnes incapables de subvenir à leurs propres besoins en raison d'un
handicap mental ou physique.
Le gouvernement doit-il arrimer les montants des prestations d'aide
sociale aux sommes qui sont versées aux prestataires des mesures ou
autres programmes offerts par l'État? Nous croyons que oui. Le
gouvernement est d'avis que l'aide sociale doit demeurer un programme de
dernier recours et qu'il doit donc être plus avantageux d'être
prestataire d'un autre programme gouvernemental que de l'aide sociale.
Doit-on tenir compte des biens du ménage dans l'attribution des
prestations de l'aide sociale? À titre d'exemple, mentionnons la
deuxième automobile, la valeur d'un terrain ou d'une résidence.
Nous croyons que oui. Le gouvernement soutient qu'il se doit d'établir
certains critères préservant la notion de dernier recours propre
au programme d'aide sociale.
Doit-il y avoir un incitatif financier à participer à des
mesures d'employabilité? Nous croyons que oui. Pour le gouvernement, ii
est essentiel que les bénéficiaires soient encouragés
à améliorer leur formation par le biais des mesures
d'employabilité. Pour y arriver, nous croyons que l'une des
possibilités est d'accorder un certain avantage financier
attribué en fonction de la participation.
Les besoins reconnus dans la politique de sécurité du
revenu doivent-ils correspondre à ceux reconnus dans le système
fiscal pour tous les contribuables? Nous croyons que oui. Le gouvernement
prétend que les besoins de base des personnes aptes
bénéficiant de l'aide sociale sont les mêmes que pour les
autres citoyens du Québec, de là l'importance d'ajuster les
besoins consentis dans la politique de sécurité du revenu
à ceux reconnus par la fiscalité.
Doit-on mettre en place un programme permettant aux familles avec
enfants d'avoir un réel intérêt à demeurer ou
à retourner sur le marché du travail en accordant un
supplément à leurs revenus et en défrayant directement une
grande partie de leurs frais de garde? Nous croyons que oui. Partant du
paramètre que le gouvernement se doit d'encourager toute personne
à travailler, l'État se doit donc d'inciter au maximum les
familles à faible revenu à demeurer ou à intégrer
le marché du travail. Nous croyons que cet objectif peut entre autres
être atteint en amenuisant une barrière importante pour plusieurs
femmes qui veulent travailler à l'extérieur de la maison, soit en
permettant à ces familles d'obtenir jusqu'à 50 % du remboursement
par l'État des frais de garde des enfants.
Doit-on tenir compte des économies réelles
réalisées par les personnes partageant un logement au même
titre que les conjoints demeurant dans le même logement? Nous croyons que
oui. Le gouvernement estime qu'il est temps que cesse cette forme de
discrimination et qu'il tienne compte que le partage du logement
représente un impact d'ordre financier pour toute personne qui cohabite
à l'exception des personnes non employables qui peuvent partager un
logement pour une meilleure qualité de vie et par
nécessité.
Doit-on avoir une structure de barèmes reflétant le plus
possible la situation particulière de chaque bénéficiaire,
à savoir: non employable, apte participant à des mesures, apte
non par-
ticipant non disponible personne seule, couple sans enfant monoparentale
un enfant monoparentale deux enfants biparentale un enfant biparentale deux
enfants? Nous croyons que oui. Le gouvernement est d'avis que les prestations
ne peuvent être traitées uniformément et sans distinction,
tel que le préconise entre autres la députée de
Maisonneuve. D'ailleurs, le seul candidat encore en lice à la
présidence du Parti québécois, M. Jacques Parizeau s'est
dit plutôt favorable à une approche similaire à celle que
nous avons choisie. Dans le quotidien, Le Soleil du 16 février
1988, M. Parizeau déclarait au sujet des grands programmes sociaux qu'il
va falloir mettre I'accent sur ce qui différencie les gens plutôt
que sur les normes bureaucratiques. Nous aussi, du gouvernement, croyons que
les prestataires doivent être traités de façon
personnalisée et adaptée à leurs besoins.
Quant au plein emploi objectif que tous partagent il doit
nécessairement et absolument passer par une meilleure formation de la
main-ci oeuvre. Nous sommes d'avis qu'avec une formation scolaire plus
poussée dans certains cas, une expérience de travail
adéquate dans d'autres les prestataires du régime de
sécurité du revenu pourront enfin avoir une chance de se trouver
un emploi et intégrer ou réintégrer le marché du
travail.
Tous les experts s'entendent d'ailleurs sur le fait que I'arrivée
de nouvelles technologies a comme conséquence la création
d'emplois spécialisés et la disparition d'emplois non
spécialisés. De même s'entendent-ils sur le fait que le
principal motif de chômage chez les jeunes n'est pas le contexte
économique, mais les carences individuelles. C'est d'ailleurs M. Marcel
Pépin, ancien président de la CSN qui incitait récemment
les parents à maintenir leurs enfants à l'école au moins
jusqu'à l'obtention d'un secondaire V. À titre d'exemple qui
illustre bien notre conception du plein emploi, je vous citerai un article
d'Albert Juneau, publié le 19 janvier 1988, dans te quotidien Le
Devoir, qui décrit que dans l'est de Montréal - y inclus
votre comté, Mme la députée - en 1985-1986 bien que
l'augmentation des emplois ait été plus élevée
à cet endroit que dans l'ensemble de la métropole, près
des deux tiers des emplois sont occupés par une main-d'oeuvre qui habite
à l'extérieur de cette zone, la plupart des sans-travail
étant mal préparés à profiter de nouveaux emplois
qui se créent.
Au gouvernement, nous misons sur les connaissances, la formation,
l'expérience de travail et sur tous les moyens améliorant
l'employabilité des prestataires afin qu'ils puissent se
présenter sur le marché du travail et disposer de chances
suffisantes pour décrocher un emploi et ainsi obtenir l'espoir, la
dignité et l'autonomie auxquels ils ont droit. Le programme APTE qui
vise I'amélioration de l'employabilité des prestataires capables
de travailler se veut donc l'élément de base essentiel sans
lequel l'expression plein emploi ne rime à rien, sinon à tromper
et les bénéficiaires et la population. Avec les trois quarts des
prestataires qui sont considérés aptes au travail, dont 60 %
n'ont pas complété leur cours secondaire, 40 % n'ont pas
d'expérience de travail et 36 % sont analphabètes fonctionnels la
politique de sécurité du revenu doit aborder la question de
I'emploi avec réalisme. Les lacunes individuelles constituent à
coup sûr la principale raison qui explique la majeure partie des
difficultés des personnes aptes au travail à décrocher un
emploi. II faut donc s'y attaquer. Le développement de
l'employabilité demeure pour ces personnes la clé de l'avenir et
cest à cela que la politique de sécurité du revenu
proposée par le gouvernement s'attaque.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, une minute, M. le
Président, avec le consentement. En élaborant et en
présentant cette politique le gouvernement a été
perçu par plusieurs observateurs comme ayant accompli un grand pas en
avant dans l'harmonisation des programmes sociaux et fiscaux. II a
également été encouragé à poursuivre dans
cette voie et a été incité à s intéresser
réellement à cette partie de la population qui, pour plusieurs,
n'est pas préparée à intégrer ou à
réintégrer le marché du travail tel que nous le
connaissons présentement et tel qu'il le sera dans les années
à venir. Ce pro|et gouvernemental entraînera éventuellement
le dépôt d'un projet de loi qui contiendra les grands principes de
base de cette politique de sécurité du revenu. Cependant, au
risque de me répéter, je tiens à assurer tous les
intervenants que cette commission parlementaire sera, quant à nous, un
moyen privilégié pour recueillir des éléments
visant la bonification de cette politique et que nous n'hésiterons pas
à apporter toute modification qui respectera cependant les grands
principes d orientation, soit d'accorder la parité aux moins de 30 ans,
de traiter plus équitablement les plus démunis de notre
société et d'inciter les prestataires considérés
aptes à intégrer ou réintégrer le marché du
travail.
Je vous remercie de votre attention et je tiens également
à transmettre mes remerciements les plus sincères aux
parlementaires qui siègent à cette commission. Je sais que,
depuis le début de janvier, ils ont eu à participer aux audiences
sur la politique familiale, sur la santé mentale et, maintenant, sur la
sécurité du revenu. Leur expérience s'avérera un
atout précieux. À nos invités, je souhaite la bienvenue et
je les assure que nous sommes ouverts à la discussion et au dialogue
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le ministre.
Je cède la parole à Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Comme nous
avons pu le constater, le ministre a choisi de faire l'éloge - nous
pouvions, en fait, nous y attendre - de son propre projet, sans tenir compte
des nombreuses critiques qui, depuis sa parution en décembre dernier, se
sont multipliées au Québec. J'aimerais, à cette occasion,
rappeler que nous entendrons plus d'une centaine de mémoires
d'organismes qui ont choisi, malgré les courts délais, de se
faire entendre. Parmi la très grande majorité des mémoires
qui nous sont actuellement parvenus, au-delà de 80 % d'entre eux, donc
au-delà de 80 % des organismes représentent soit des jeunes, des
personnes handicapées ou des personnes qui ont des difficultés en
santé mentale, soit des organismes qui sont représentatifs de
groupes de femmes, de groupes familiaux, de milieux syndicaux comme des milieux
de développement économique, des intervenants en matière
de santé, de services sociaux, de corporations professionnelles, des
organismes - nous aurons aujourd'hui même l'occasion d'entendre un
certain nombre d'entre eux - en matière de services, en matière
charitable, en matière religieuse, des groupes d'assistés sociaux
eux-mêmes, des groupes de recherche, de formation, des groupes en
matière juridique, des coalitions populaires viendront, dans un concert
presque unanime, dire au ministre qu'il se trompe. Qu'il se trompe non
seulement sur les modalités du projet qu'il a déposé, mais
qu'il se trompe dans les orientations qu'il entend préconiser.
M. le Président, nous aurons l'occasion durant les prochaines
semaines - et cela nous mènera certainement jusqu'à Pâques
- de nous faire ce portrait des coûts engendrés par la
pauvreté au Québec. J'invite tous les observateurs à
être présents le plus possible lors des audiences, parce que nous
entendrons des témoignages sur ces coûts qui sont engendrés
par la pauvreté. Je pense notamment au département de
santé communautaire de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont dans l'est
de Montréal qui illustrait, par des chiffres assez éloquents, que
25 % des cas d'hospitalisation le sont pour cause de carence alimentaire ou de
malnutrition. Alors nous pourrons certainement prendre le profil de ce que
coûte la pauvreté, ce dont ne tient pas compte l'actuel ministre
de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. (15 h 45)
M. le Président, en l'écoutant, le ministre nous dit que
la situation économique actuelle exigeait des réponses nouvelles.
J'entendais le ministre faire état d'une situation de chômage,
d'une situation où la main-d'uvre avait des déficiences sur
le plan de sa formation. J'avais devant moi le rapport Boucher, rapport du
comité d'étude sur l'assistance publique publié en juin
1963. Je l'ai feuilleté dernièrement, et je me rappelais que nous
pouvions retrouver à peu près le même état de
situation il y a 25 ans maintenant. Le rapport Boucher disait
déjà: Comme les allocations sont versée aux personnes dans
le besoin, le pourcentage élevé des bénéficiaires
peut également être expliqué par la faiblesse de
l'économie québécoise. Un haut niveau de chômage a
traditionnellement caractérisé l'économie du
Québec. Le rapport Boucher dit: Le taux de chômage est constamment
plus élevé au Québec que dans l'ensemble du pays. Seules
les provinces de l'Atlantique l'emportent sur le Québec sous ce
rapport.
M. le Président, 25 ans plus tard, il faut simplement retrouver
en annexe du document confidentiel que le Front commun des personnes
assistées sociales du Québec rendait public la semaine
passée les tableaux des familles, des ménages
bénéficiaires d'aide sociale, pour se rendre compte que le
Québec détient toujours un volume de ménages
bénéficiaires qui équivaut à l'ensemble des
ménages des provinces maritimes, y compris Terre-Neuve.
Alors, cette situation qui prévaut toujours est une situation qui
s'ajoute au fait qu'il y a des déficiences sur le pian de la formation
de la main-d'uvre. A cet égard, déjà, le rapport
Boucher signalait qu'en plus de l'inégale répartition des
occasions d'emplois selon les régions, il est manifeste que
l'insuffisante qualification des travailleurs influence fortement la
stabilité de leur emploi. Des milliers d'ouvriers non qualifiés
ou à compétence restreinte sont mis à pied de façon
saisonnière ou à cause de l'automation. C'était
déjà en 1963. La réponse de la Commission Boucher
était d'abolir la multiplication des programmes qui
catégorisaient les bénéficiaires de programmes de
transfert au Québec, de manière à faire reconnaître
un principe, le principe des besoins Indépendemment des causes qui
occasionnent ce besoin.
Alors, nous entamons certainement un débat qui met en cause une
question majeure, capitale, au coeur même de ce qui doit être un
débat de société, un débat qui, pour être
réussi, doit être le plus large, le plus franc, ouvert et public.
Ce débat essentiel est le suivant: Quels sont les besoins, ces besoins
essentiels que nous considérons comme société de voir et
pouvoir reconnaître à chacun et chacune de nos concitoyens?
Je déplore amèrement que le ministre ait choisi la voie de
la désinformation et du double langage pour mener un tel débat.
Comment comprendre que l'information soit filtrée au point où il
faille compter sur des fuites pour obtenir les véritables chiffres?
Comment expliquer que le sort de centaines de milliers de personnes se joue sur
des omissions, que, par exemple, aucune analyse ne soit- encore disponible des
résultats plus que mitigés sur la participation des moins de 30
ans aux mesures d'employabilité que l'on veut pourtant étendre
aux 300 000 ménages?
Cette attitude du ministre jette du discrédit sur le débat
qui s'ouvre aujourd'hui et qu'il
prétend cependant souhaiter. Comment d'ailleurs ne pas parler de
cette campagne de suspicion qui a été entretenue depuis la
nomination du ministre contre les bénéficiaires de l'aide
sociale? Rappelons-nous la conférence de presse en plein mois de juillet
I'an passé au moment d une grève appréhendée des
postes pour jeter le doute sur les bénéficiaires de 6500
chèques non réclamés. A-t-on vu des rétractations
alors que le ministre sait maintenant que des déménagements ont
été comme a chaque année, responsables de cet état
de fait?
Heureusement que la présente commission pourra nous permettre de
corriger les mauvaises impressions que s'est employé à
s'accréditer le ministre depuis deux ans et saura rendre justice
à I immense majorité des hommes et des femmes qui ont droit
à tout notre respect. Nous invitons le ministre de bien prendre garde de
ne pas confondre principe et stéréotype.
Depuis quelques semaines, le ministre a à répondre
à de nombreuses critiques qui sont formulées à
l'égard de son projet d orientation, le ministre fait état de
principes, dit-il, les principes de base sur lesquels se fonde sa
réforme.
Le principe d'une saine gestion publique ne doit pas être confondu
avec le stéréotype qu'il y a plus de fraudeurs à l'aide
sociale qu'ailleurs. Mais plus encore, et plus d'actualité, le principe
qu'une incitation au travail est souhaitable ne doit pas non plus être
confondu avec le stéréotype que la misère fait
travailler.
Nous déplorons que l'équité pour les plus
démunis signifie plus pour le ministre rendre équitable la
pauvreté entre les familles pauvres elles-mêmes. Là
désincitation au travail vient bien plus du fait que les revenus de
travail ne sont pas supplémentes pour tenir compte des charges
familiales.
La présente commission, M. le Président, va mettre en
lumière que la société québécoise a besoin d
une vraie réforme en matière de sécurité du revenu.
Je suis rassérénée après la lecture de plus d'une
centaine de mémoires de constater que la solidarité
québécoise s'est enfin, dirais-je, massivement enclenchée
pour exiger du gouvernement et du ministre responsable, tout au long de la
présente commission, un vrai projet de la sécurité du
revenu pour tous nos concitoyens et concitoyennes à faible revenu,
qu'ils aient un travail ou qu'ils n'en aient pas. Un vrai projet, pour leur
permettre de se sortir de la misère et de la pauvreté en gagnant
honorablement leur vie, mais aussi un vrai projet qui ne les pénalise
pas d'essayer, même si ce n'est pas pour très longtemps,
même si ce n'est que pour un emploi offert à temps partiel ou
occasionnel.
À cet égard, M. le Président, Je veux vous rappeler
qu'une fois examiné l'ensemble des 42 catégories de
bénéficiaires qui seraient produites par la réforme, quel
que soit le niveau de pleine activité des bénéficiaires,
en admettant qu'il s'agisse d'un niveau de pleine activité - imaginons
un retour aux études à temps plein, des travaux communautaires un
stage en entreprise - qui s'ajouterait aux exemptions de gains de travail qui
sont permises et en additionnant les pleins barèmes, les allocations de
participation et les gains d emploi jamais un bénéficiaire qui se
rend responsable de cette pleine activité en plus des gains d'emploi ne
pourra dépasser sans être taxé les besoins essentiels qui
lui sont reconnus.
C'est donc dire que les exemptions qui doivent encourager les
bénéficiaires a travailler vont lui permettre, selon les
catégories, tout au plus de gagner de 1000 $ à 2000 $ par
année. Au-delà de ces sommes, on réduira de 1 $ leurs
prestations de base pour chaque dollar gagné. C'est donc dire que le
taux de réduction des prestations désincitera les
bénéficiaires de l'aide sociale à retourner sur le
marché du travail et maintiendra la trappe de la pauvreté.
M. le Président, un projet qui soft une véritable
politique de sécurité du revenu est un projet qui tient compte
à la fois des aspects économiques, c'est-à-dire un
développement du plein emploi, des aspects fiscaux, à savoir
l'intégration des régimes d'imposition et de transfert, des
aspects sociaux, à savoir une politique de la famille, la promotion de
l'égalité entre les hommes et les femmes et la lutte contre les
iniquités et la pauvreté sociale.
Nous souhaitons la présence du ministre
délégué à la Famille, de même que la
présence de la ministre déléguée à la
Condition féminine. Nous pensons qu'ils ne peuvent pas se dérober
à l'examen que nous allons faire et que l'heure de vérité
approche en matière de politique familiale et en matière de
condition féminine, pour le présent gouvernement.
Contrairement au rôle joué par l'actuel gouvernement
lorsqu'il était dans l'Opposition, nous n'avons pas l'intention, M. le
Président, de faire à personne des promesses que nous n'allons
pas tenir par la suite. Mais nous avons cependant l'intention d'assumer
pleinement nos responsabilités, comme parti et comme Opposition, en
faisant connaître, dès la fin des travaux de cette présente
commission et à la lumière de ces travaux, nos propositions
concrètes en vue d'une véritable politique de
sécurité du revenu. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la députée de Maisonneuve. En réponse à une demande
que vous faites, Mme la ministre de la Condition féminine m'a
prévenu que, lorsque des groupes de femmes ou des groupes qui
s'approchent de l'intérêt de la condition féminine seront
présents ou présenteront leur mémoire, elle fera tout en
son possible pour être présente. Si, en vertu de l'article 132 des
règlements, les membres de la commission désirent qu'elle
participe aux travaux, on pourra, par exception, le lui permettre. Mais elle
sera présente à ces moments-là. Elle m'a
prévenu.
Mme Harel: Alors, c'est très heureux, M le
Président et nous souhaitons que l'invitation soit lancée au
ministre responsable des politiques familiales.
Auditions
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, nous lui
transmettrons votre invitation. Cela termine donc les déclarations
d'ouverture. J'inviterais donc le premier groupe à se présenter
à la table des témoins. II s'agit du Front commun des personnes
assistées sociales du Québec qui sera représenté
par Mme Lynda Gagné, Mme Marlène Jacob, Mme Denise Allard, Mme
Diane Denault, Mme Solange Giffard et M Sylvain Janvier. Je vous inviterais
à vous asseoir, s'il vous plaît. Si celle qui va présenter
le mémoire pouvait s'asseoir au milieu, cela serait plus facile pour des
questions de convenance pour la commission. Alors le porte-parole sera donc Mme
Lynda Gagné Mme Gagné, je vous en prie Oui Mme la
députée de Maisonneuve?
Mme Harel: Merci, M. le Président. On m'informe que le
Front commun des personnes assistées sociales du Québec a
préparé un tableau pour illustrer la présentation de son
mémoire, ce qui permettrait une meilleure compréhension pour
l'ensemble des membres de la commission. Je propose, M. le Président,
que nous lui permettions de nous mieux faire connaître son point de vue
en l'illustrant. Et je me réfère à tous les
précédents qu'a connus ce salon rouge, particulièrement
lors des audiences d'Hydro-Québec qui a réussi à quelques
occasions à le tranformer en salle de cinéma. Alors, je pense
qu'on peut fort bien permettre à nos invités de nous
présenter leur tableau.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve, on m'avait effectivement prévenu
de ce désir du groupe du Front commun des personnes assistées
sociales du Québec de se servir d'un tableau. Je préciserais
quand même dans quel contexte peuvent être utilisés des
tableaux. Ce n'est pas un contexte de propagande ou de quoi que ce soit. Cela
devrait être vraiment dans un but didactique, c'est-à-dire aider
à mieux faire comprendre ou à mieux expliquer Dans le cas
d'Hydro-Québec, c'était pour des comparaisons de coûts.
Avec tous les chiffres, c'était plus facile ainsi. Or, dans ce
contexte-là, il est évident que nous accepterons la
présentation de vos tableaux.
Je vous prie donc, Mme Gagné, de bien vouloir commencer Vous
connaissez les règles. Vous avez exactement 20 minutes.
Mme Gagné (Lynda): Oui.
Le Président (M. Bélanger): On ne débordera
pas Je vous en prie.
Mme Harel: On a besoin du tableau dès le début de
la présentation du mémoire.
Mme Gagné: C'était vrai.
Mme Harel: Peut-on souhaiter que ce tableau.
Le Président (M. Bélanger): C'est à leur
convenance. Dès que les porte-parole en auront besoin ils ont
l'autorisation de la présidence de le faire. Alors, quand vous sentirez
le besoin d utiliser votre tableau, vous l'apporterez.
Mme Gagné: II y avait aussi deux personnes de
prévues pour tenir te tableau.
Le Président (M. Bélanger): Il n'y a pas de
problème. Des porte-tableaux seront acceptés. Ils ne seront pas
porte-parole, donc ils seront muets. II y a un chevalet ici. S'il peut
être.
Mme Harel: Il me semble qu'il y a un problème avec la
sécurité qui...
Le Président (M. Bélanger): Effectivement, oui.
Mme Harel:.. n'aurait pas compris le sens de votre
décision
Le Président (M. Bélanger): Les directives avaient
été données à la sécurité de ne
laisser entrer aucune banderole, pancarte, ou quoi que ce soit. Cela n'est
normalement pas toléré à l'Assemblée nationale ou
en commission. Mais pour des fins didactiques ou de compréhension, oui.
Alors vous pouvez prévenir la sécurité que
là-dessus, il n'y aura pas de problème. Vous pouvez, Mme la
secrétaire.
Mme Harel: M le Président, parce que ça ne porte
pas le nom du ministre.
Le Président (M. Bélanger): Je leur fais confiance.
Ils nous le diront.
Mme Gagné: Ce tableau sert à illustrer nos
conditions de vie. En attendant qu'il arrive, je pourrais peut-être..
Le Président (M. Bélanger): Vous pouvez commencer
votre exposé. Le tableau devrait arriver dans quelques minutes.
Mme Gagné: Je vais présenter les porte-parole du
front commun. À ma gauche, Mme Mariène Jacob, qui va
répondre aux questions avec moi, Mme Francine Goulet remplace Mme
Solange Giffard, cette dernière étant malade, Mme Diane Denault,
M. Sylvain Janvier et Mme Denise Allard. Notre tableau sert à illustrer
nos conditions de vie. II ne faudrait pas perdre trop
de temps, mais j'espère qu'il va arriver assez vite parce qu'on
commence avec cela.
Le Président (M. Bélanger): II s'en vient. La
directive a été donnée à la sécurité.
Vous pouvez donc commencer.
Mme Gagné: On ne peut pas débuter sans le tableau.
C'est là le problème.
Le Président (M. Bélanger): Nous suspendons les
travaux pour quelques secondes jusqu'à l'arrivée du tableau. Je
demanderais à tous de rester très près de leur
siège dans le but d'éviter une perte de temps. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 1) (Reprise à 16 h
05)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place et aux
spectateurs de bien vouloir s'asseoir. La commission reprend ses travaux.
J'invite donc le Front commun des assistées sociales et
assistés sociaux du Québec à faire la présentation
de son mémoire en utilisant son matériel didactique. Merci.
Front commun des assistées sociales et
assistés sociaux du Québec
Mme Gagné: Le front commun ne pouvait pas parler de
réforme d'aide sociale sans parler de notre vécu, sans dire ce
qu'on vit à l'aide sociale. On a fait une maquette qui nous
représente, nous, les assistés sociaux, la façon dont on
se voit quand on est dans le piège de l'aide sociale.
Si vous voyez, on l'a représentée par une femme parce
qu'on est une majorité de femmes chefs de famille, puis on a fait des
barreaux qui ressemblent à une prison. Quand on tombe dans l'aide
sociale, c'est bien difficile de s'en sortir. D'abord, l'incitation au travail
est négative. Quand on essaie de s'en sortir par des projets, c'est bien
difficile ensuite de retrouver un vrai job parce que les projets ne
mènent nulle part et on retombe dans l'aide sociale. Ensuite, les
emplois décents sont quasi inexistants, spécialement pour la
femme; c'est encore plus difficile pour une femme de se trouver un emploi
décent. Il n'y en a déjà pas beaucoup pour les hommes non
plus.
C'est aussi une prison à cause des coupures dans les besoins
spéciaux. Tantôt, avec les témoignages, vous allez voir que
ce n'est pas vrai que tous les besoins spéciaux sont couverts. Aussi,
à cause des contrôles abusifs: des campagnes anti-Boubou macoutes,
l'histoire de remplir une formule annuelle trois ou quatre fois par
année, de présenter tous ses papiers. Ensuite, la
désindexation qui fait que nos besoins essentiels ne sont pas tous
couverts. La discrimination pour les moins de 30 ans. Il y a le manque de
garderies qui rendent difficile le retour sur te marché du travail,
ainsi que le manque de logements décents.
Sur toutes ces barrières-là, on retrouve même des
personnes victimes de préjugés qui sont centrées sur leur
survie et victimes de coupures dans leurs besoins spéciaux. À
partir de témoignages - Marlène va peut-être animer un peu
cette partie-là - vous allez vraiment voir ce qu'est vivre de l'aide
sociale et ce que fera la réforme proposée.
Mme Jacob (Marlène): Francine, tu vas nous faire le
premier témoignage. Tu es présentement inapte au travail. Avec la
réforme, tu te demandes aussi si tu seras encore inapte au travail et si
tu seras sur le Soutien financier. Pourrais-tu nous dire ce que tu vis
présentement?
Mme Goulet (Francine): Présentement, je vis dans un petit
appartement d'une pièce et demie; c'est très petit. Je peux vous
dire que ce n'est pas rose. Je paie 220 $ par mois pour le loyer et au moins 30
$ pour ie téléphone et l'électricité. Je devrais -
je dis bien: Je devrais - me faire une épicerie d'au moins 200 $ par
mois parce que, à cause d'une diète spéciale étant
donné mon problème de santé, j'ai besoin de
supplément alimentaire et ce n'est pas couvert par la
carte-médicaments, donc c'est très dispendieux et je n'en ai pas
les moyens; cela dépasse le montant de 487 $ par mois en tout, si on
compte tout au complet.
Je dois payer une partie de mes médicaments qui ne sont pas
couverts non plus par ia carte-médicaments; ils l'ont déjà
été. mais ils ne ie sont plus. Cela dépasse
déjà 500 $ par mois. Alors, je ne peux me payer de loisirs.
Disons que pour les vêtements, iI faut que j'aille m'en procurer soit
dans des comptoirs de linge ou encore, des amis m'en donnent.
Je suis une personne inapte au travail. Je suis atteinte d'une maladie
chronique physique. Il s'agit d'une thrombopénie, c'est un
problème de coagulation. Dans ce cas, II y a un gros problème
d'hémorragies digestives qui entre en jeu. Cela m'est arrivé
souvent dans les années passées et cela m'arrive encore.
Pour cela, j'ai besoin de médicaments dispendieux. J'ai besoin
d'Ensure, entre parenthèses. C'est un produit qui complète les
aliments que je ne peux pas absorber.
Maintenant, il n'est pas couvert par la carte-médicaments. C'est
quelque chose de très dispendieux. Cela me prendrait au moins 300 $ de
ces produits par mois. Je dis bien "au moins", parce que cela peut jouer
jusqu'à 500 $ par mois.
Je suis obligée d'en acheter en très petites
quantités et assez souvent ou pas du tout, parce que, avec 487 $ par
mois, vous comprendrez qu'il est difficile d'arriver à payer mon
logement,
me nourrir, etc
Mme Jacob: Maintenant tu vas nous dire ce que tu prévois
qu'il peut t'arriver avec la réforme d'aide sociale.
Mme Goulet: Étant inapte au travail, j'ai vu dans le
projet de la réforme qu'on pouvait aller chercher un supplément
allant jusqu'à 100 $ par mois. Je n'ai pas la capacité daller le
chercher. De toute façon y a-t-il vraiment un patron qui accepterait un
jour de m'engager pour gagner un petit montant de 100 $ par mois? Je me le
demande. Cela ne serait même pas suffisant comme montant pour combler mes
besoins.
Je me demande s'iII y aura vraiment une amélioration de ma
situation financière et de mes besoins spéciaux si on continue
à l'aide sociale à couper dans les besoins spéciaux. Je me
demande aussi si à l'aide sociale, on va demander une contre-expertise
médicale pour faire une preuve contraire à celle que mon
médecin me donne présentement sur certificat médical et
que l'aide sociale ne me considérerait pas, à un moment
donné apte au travail. C'est une question que je me pose.
Avec toutes ces coupures, je crains que le nouveau projet de
réforme ne me donne pas beaucoup de chance de m'en sortir et de vivre
convenablement. Je pourrais vous dire que je ne suis pas la seule dans ce cas.
Cela m'inquiète véritablement.
Mme Jacob: Merci, Francine. Maintenant, Diane, tu es une personne
apte au travail. Tu vas nous dire ce que tu vis présentement et
qu'est-ce que tu soupçonnes pouvoir vivre avec le projet de
réforme aussi.
Mme Denault (Diane): Nous sommes une famille de quatre personnes.
On est deux adultes, deux adolescents de 17 et 15 ans. Cela fait deux ans et
demi qu'on vit de l'aide sociale parce que mon man est malade. II fait des
crises cardiaques et de l'arthrose généralisée. Nous
n'arrivons pas présentement. On n'a plus de nourriture à la fin
du mois. Si on a des médicaments à payer, on ne peut pas. On est
obligé d'avoir du linge usagé parce qu'on ne peut pas en acheter
du neuf.
Je demeure dans un HLM, parce que j'ai fait un choix de vivre dans un
HLM avec les problèmes que cela comporte, pour être capable de
mieux nourrir ma famille. Maintenant, je risque d'être
pénalisée et de combien, compte tenu du fait qu'ils veulent
considérer la différence entre un loyer de HLM et un loyer
privé comme de l'argent économisé'' Chose certaine, cela
va m'appauvir davantage.
Si j'embarque dans un programme d'employabilité avec le montant
que je reçois, présentement je n'ai pas suffisamment d'argent
pour me transporter et m'habiller pour me chercher un emploi, je ne pense pas
que la réforme me le permettra. Même si on me donne un montant
supplémentaire, il faudrait l'utiliser pour la nourriture.
Présentement le gouvernement entrevoit que 30 % des gens aptes au
travail vont bénéficier des programmes d'employabilité
Est-ce que je vais être dans les 30 %? Tout cela, ce sont des subventions
déguisées en entreprises. Cela ne nous en donne pas plus.
À Sherbrooke, il y a beaucoup de chômage et presque pas d'emplois
et, en plus, des salaires très bas. Avec un nombre incroyable de
barèmes différents, c'est très compliqué. Je n'ai
pas pu me situer. Moi je suis apte et mon mari est inapte. Quel barème
aurons-nous et dans quelles conditions de vie vivrons-nous? Mon man
étant cardiaque et moi si je suis participante à un programme,
s'il tombe malade, qui va s'en occuper? Qu'est-ce que I'avenir réserve
à mes enfants, puisque je nai pas assez d'argent pour leur faire
poursuivre leurs études? Merci. (16 h 15)
Mme Jacob: Merci, Diane Sylvain toi, tu as moins de 30 ans. Tu es
encore un des jeunes qui étais supposé vivre avec la
parité et qui n'es pas encore là. Peux-tu nous dire
présentement ce que tu as à vivre et si aussi dans la
réforme tu prévois que tu vas avoir une vraie parité?
M. Janvier (Sylvain): Je suis bénéficiaire de
l'aide sociale depuis deux ans et deux mois et je suis âgé de 23
ans. J'ai survécu au départ avec le petit chèque pendant
cinq mois. Ne pouvant plus survivre là-dessus, jai commencé
à participer au programme d'emploi proposé par le gouvernement
qui me promettait, en fin de compte, un vrai job avec un vrai salaire Belles
promesses, belles promesses, je me suis rendu compte qu'on m'exploitait
royalement, mes espérances ne tenaient plus. Cela ne pouvait plus
continuer ainsi. Alors, j'ai décidé de retourner aux
études en rattrapage scolaire pour terminer mon secondaire V et pour
survivre. Je vois qu'aussi il y a là de grandes contradictions dans ce
programme. Premièrement, on n'a pas ta parité et j'ai en ce
moment 387 $ par mois, deuxièmement, si je tombe malade plusieurs jours
à cause de stress ou je ne sais quoi, ou que je ne me sens pas bien
durant un cours, alors, je me fais couper carrément, car il n'y a
personne pour motiver automatiquement nos absences.
Et maintenant, une autre réalité que je voudrais
souligner. Depuis plusieurs semaines, je pense partager un logement avec un
"chum" Mais réflexion faite, je crois que je vais rester seul car dans
la réforme proposée par le ministre Paradis, si je reste avec
quelqu'un en appartement en 1989 je serai coupé de 115 $ par mois. Cela
n'a aucun sens logique de sa part, car tu veux te sortir de la misère et
de l'isolement, on te coupe encore. Réflexion faite, seul sur le petit
chèque, ou seul sur les programmes, on ne s'en sort pas vainqueur. Donc,
ou est la parité là-dedans pour enfin vivre décemment?
Mme Jacob: Merci, Sylvain. Denise, toi tu es une femme chef de
famille. Tu es une des 95 % des femmes qui sont chefs de famille à
l'aide sociale.
Mme Allard (Denise): Je suis une mère chef de famille avec
trois enfants qui partagent un logement avec une autre mère chef de
famille et ses deux enfants. Nous sommes sept à partager un cinq et
demi. C'est un peu petit. Nos revenus actuels de l'aide sociale sont trop bas
pour faire face aux dépenses nécessaires pour vivre même en
partageant les frais de logement. Je vais vous apporter deux exemples qui le
démontrent. Les 35 $ alloués à l'entrée scolaire
sont ridicules, quand on pense que cette année, cela m'a
coûté 151, 98 $ pour ma fille qui est au secondaire. Les 85 $
alloués pour un logement est illogique. Nous avons dû
déménager dernièrement à cause de
l'insalubrité de notre logement. Le logement qu'on a pu trouver
coûte 330 $ par mois. Pour faire face à des dépenses
obligatoires comme le loyer, il faut couper sur l'essentiel, comme la
nourriture et s'habiller dans des ventes de charité.
Avec une telle situation, il est inacceptable qu'avec la réforme
de M. Paradis on nous coupe de 115 $ parce qu'on partage un logement en
prétendant qu'on fait une économie. Si c'était le cas,
comment expliquer que présentement J'ai 8, 79 S dans mon compte de
banque? Cette coupure de 115 $ laisse entendre que nous n'avions pas besoin de
cet argent. Appliquer une telle décision, cela signifie que le
gouvernement vient d'écraser davantage les familles
bénéficiaires de l'aide sociale qui avaient trouvé un
petit moyen d'améliorer leur revenu, qui sont déjà en bas
du seuil de la pauvreté.
Avant de terminer, je veux dénoncer cette réforme qui veut
réinsérer sur le marché du travail une femme comme moi,
selon le modèle de la grande diversion américaine. Je rappelle
d'abord qu'il y a plusieurs sans-emplois et qu'il y en a qui ne se trouvent pas
de travail. On offre une main-d'oeuvre à très bon marché
aux entreprises qui pourront s'enrichir davantage avec la pauvreté des
bénéficiaires de l'aide sociale. Si je suis obligée de me
présenter dans une entreprise pour travailler, qu'arrivera-t-ii aux
travailleurs, surtout ceux qui ne sont pas syndiqués? Le patron pourra
en congédier un et m'engager à sa place, parce que je ne lui
coûte presque rien. Plusieurs travailleurs sont appelés à
perdre leur emploi pour devenir à leur tour, après leur
période de chômage, des assistés sociaux. C'est un cercle
vicieux.
Il faut savoir également que, en retournant sur le marché
du travail, je serai obligée de débourser de l'argent
supplémentaire pour mon habillement et mon transport. De plus, je serai
perçue dans la société comme une voleuse de job. Cette
politique provoquera davantage de divisions, de frustrations profondes et de
violence dans les familles québécoises. C'est une politique qui
ne vise finalement le bien-être de personne.
L'objectif inavoué ne consiste qu'à recueillir encore
pleinement des sommes d'argent auprès de ceux qui sont au bas de
l'échelle dans notre société. Je considère que ce
projet de réforme vient m'appauvrir et m'écraser davantage. C'est
également le cas des familles assistées sociales qui vivent des
situations semblables à la mienne. Merci.
Mme Jacob: On remercie les personnes assistées sociales
qui ont bien voulu témoigner de leurs conditions de vie difficiles. Mme
Lynda Gagné va maintenant vous expliquer l'ensemble de nos
revendications, notre politique de sécurité du revenu.
Mme Gagné: Cela s'est fait à partir du travail au
front commun, cela veut dire après des sondages auprès de tous
nos groupes d'assistés sociaux. D'abord, qu'est-ce qu'on demande? La
première des choses, c'est un minimum vital de 70 % du seuil de la
pauvreté. On l'appelle minimum vital, parce que cela couvre seulement
les besoins essentiels. Ensuite, on demande des gains de travail permis
jusqu'au seuil de la pauvreté, sans impôt ni coupure. On demande
aussi que le revenu soit basé sur l'individu en tenant compte du nombre
d'enfants qu'il a à sa charge, le maintien des besoins spéciaux,
l'arrêt des contrôles abusifs et de vrais programmes d'emploi. On
est conscient que, à travers cela, par une telle réforme de
l'aide sociale, on ne peut pas réformer seulement l'aide sociale, il
faut changer autre chose dans notre système. Ce qu'on demande, c'est
l'augmentation du salaire minimum et l'amélioration des normes du
travail. Ensuite, on demande une politique de plein emploi. Aussi, pour arriver
à cela, il faut une réforme fiscale, il va falloir que les riches
paient de l'impôt et que les pauvres en paient moins. Il faut une
politique de soutien aux familles.
Le Président (M. Bélanger): Madame, je vous
demanderais de conclure, s'il vous plaît.
Mme Gagné: Oui, il m'en reste seulement deux:
l'universalité et l'amélioration des services sociaux et des
logements adéquats pour tout le monde. Disons que nos trois grands
principes de base sont d'abord, la lutte contre la pauvreté, une
meilleure répartition des richesses et l'autonomie financière des
personnes. C'est seulement cela qui va faire que les assistés sociaux
vont retrouver leur autonomie financière et leur dignité
aussi.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie.
J'inviterais M. le ministre de fa Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu à poser ses questions.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je
remercie le Front commun des personnes assistées sociales du
Québec pour son mémoire et sa présentation. Je vais tomber
immédiatement dans le vif du sujet, parce que ia façon que vous
avez choisie de présenter votre point de vue est un peu une
continuité pour celui qui vous parle et qui, sauf quelques exceptions,
à tous les samedis matin, fait du bureau de comté. C'est un peu
le type de cas que vous nous avez présentés que l'on retrouve au
bureau de comté. Je vais tenter d'apporter les explications et les
clarifications nécessaires et tenir compte des suggestions que vous nous
apportez..
Les deux premières personnes qui sont intervenues, soit Mme
Francine et Mme Diane - je vais les nommer ainsi si vous me ie permettez - sont
des cas qui se situent dans le volet 1 de la politique de
sécurité du revenu que nous proposons, c'est-à-dire tes
personnes qui sont considérées dans notre société
comme incapables de travailler sur une base régulière.
Quant à ce programme-là, on a tenté de simplifier
au maximum les barèmes qui se trouvent à la page 23 du document
que nous avons rendu public "Pour une politique de sécurité du
revenu". Vous serez à même de constater que pour cette
clientèle - vous êtes environ 100 000 personnes ou chefs de
ménage dans la province de Québec dans cet état - il y a
partout, comparativement au système actuel indexé, des gains nets
qui varient de 45 $ par mois à 147 $ par mois. Dans le cas d'une
personne seule, c'est 142 $ et, dans le cas d'une famille monoparentale avec
deux enfants et plus, c'est une addition de 147 $ par mois.
Je ne prétends pas, comme ministre, que c'est - si vous me passez
l'expression - le paradis. Mais je vous dirai que comparativement à la
situation actuelle pour ces 100 000 personnes, c'est 100 000 000 $ additionnels
que le gouvernement a décidé d'accorder à cette
clientèle, juste en ayant un esprit un peu plus d'équité,
parce que nous sommes conscients de la misère dans laquelle vous
vivez.
Je vous dirai également que nous n'avons pas voulu - je pense que
cette réponse s'applique davantage à Mme Goulet - faire en sorte
de ne pas vous permettre en sus de ces augmentations, d'avoir des gains de
travail ou de participer aux mesures d'employabilité si votre
état physique ou mental le permet. Nous n'avons voulu fermer aucune
porte à cette clientèle. Donc, nous ne prétendons pas que
vous allez aller le chercher. Nous avons tenté d'en tenir compte dans
l'augmentation des barèmes.
Mais pour celui ou celle qui peut aller le chercher... On sait que la
société s'automatise de plus en plus. Prenez le cas d'un
handicapé physique, de plus en plus, il va être capable d'aller le
chercher. On ne voulait pas le pénaliser s'il allait en chercher
davantage.
Cette partie de la réponse va plutôt intéresser Mme
Diane Denault qui se demandait ce qui arrivera, parce que son conjoint est
incapable de travailler et elle, elle est capable de travailler. Est-ce que
l'unité, le ménage, va se qualifier dans la politique de
sécurité du revenu?
À la page 21 du document que nous avons rendu public le 10
décembre, le programme Soutien financier est défini comme suit,
je pense que vous allez retrouver la réponse è la question que
vous posez: Le programme Soutien financier s'adressera aux personnes ou aux
ménages dont l'un des conjoints connaît un état de
santé physique ou mental altéré de façon
significative, etc.
Il s'agit qu'il y en ait un des deux pour que le ménage, comme
tel, soit qualifié sous ce programme qui dans n'importe laquelle des
éventualités, bonifiera votre situation actuelle. Si vous avez
des exemples à nous donner de quelqu'un qui est inapte au travail et qui
pourrait y perdre, à la suite de cette réforme ou de cette
nouvelle proposition, nous vous saurions gré de nous le souligner, parce
que notre prétention - nous ne prétendons pas avoir raison
à 100 % - est en ce sens que tout le monde qui est
considéré inapte au travail se doit de gagner dans cette
mesure-là.
Je vais essayer de faire ça rapidement. Habituellement, on a un
peu plus de temps au bureau de comté. On est moins régi par les
règles de commission parlementaire. Sylvain, celui qui a
expérimenté des mesures d'employabilité qui ont abouti
nulle part et qui s'est dit: Bon, je vais retourner compléter mon
secondaire et qui même là, en complétant, en participant
à cette mesure dans le système actuel, n'obtient pas ce qu'il
appelle la parité, même s'il participe à une mesure,
Sylvain, je vais te dire quelque chose. Le fait que tu sois devenu convaincu
que c'était important pour toi, après une expérience de
vie, de compléter ton secondaire, tu es à moitié sorti. Il
reste l'autre moitié et elle n'est pas plus facile que la
première. Je te dirais qu'avec...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
à l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je te dirai qu'avec le tableau que
tu retrouves aux pages 28 et 29 du document "Pour une politique de
sécurité du revenu" sauf - là, je l'indique - si tu as un
problème, si je peux le qualifier ainsi, de contribution alimentaire
parentale - je ne sais pas si tu as acquis ton statut d'indépendant,
mais d'après les renseignements que tu m'as donnés, tu as acquis
ton statut d'indépendant - tu vas obtenir ce qu'on appelle la
parité avec tes autres. Plutôt que de recevoir les 387 $ que tu me
mentionnais - si je prends le barème d'un participant qui est de 420 $
et que j'ajoute son allocation de participation de 60 $ et ses frais de
participation de 40 $ - c'est un barème de 520 $. (16 h 30)
Non, encore une fois, ce n'est pas le Klondike. Mais comparé
à ta situation actuelle,
c'est une amélioration. De plus, au moment où on se parle,
si on maintenait le système actuel, tu n'aurais pas le droit d'effectuer
des gains de travail supérieurs à 25 $ par mois. Avec le nouveau
système, tu vas avoir des exemptions jusqu'à 80 $. Ce qui va
t'approcher, si je peux utiliser l'expression, ou ce qui peut t'accorder un
revenu de 600 $ par mois, alors que l'individu qui travaille au salaire
minimum, lui, à cette époque, va faire 689 $. Il va te rester une
incitation à travailler ou à occuper un emploi à temps
plein de 89 $ par mois.
Si on augmentait quelque barème que ce soit, on diminuerait
d'autant cette incitation qui se trouve dans le système pour que tu
occupes un emploi à temps plein. Peut-être... vous m'avez
parlé par voie de tableau qui est éloquent et les images valent
bien des mots. Cela frappe. J'avais fait préparer un tableau qui
indiquait le niveau du salaire minimum et les contributions, ainsi que les
exemptions que vous pouvez recevoir dans la nouvelle politique de
sécurité du revenu. Tu seras à même de constater,
Sylvain, qu'à 600 $, si on augmente ton incitation à travailler
à 89 $, automatiquement - je peux l'indiquer - ton barème serait
de 420 S, ton allocation de participation de 60 $, tes frais de participation
de 40 $, une exemption pour gains de travail de 80 $. Ce qui t'amène,
comme participant, à 600 $...
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, je me
permets de vous interrompre. Pour les fins de l'enregistrement du Journal
des débats...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela va. Alors que le salaire
minimum est à 689 $, la marge de manoeuvre, de quelque côté
de la table qu'on se retrouve, à un moment donné, doit tenir
compte de cette réalité. Est-ce que le salaire minimum n'est pas
assez élevé? Il est assez élevé. J'ai entendu un de
vos arguments à un moment donné qui disait: Oui, vous devriez
sans doute le revoir. Je vous indique que depuis la venue de ce gouvernement,
à chaque année, le salaire minimum a été
augmenté parce qu'il y avait beaucoup de rattrapage à faire
à la suite de l'inaction du précédent gouvernement.
Pendant cinq ans, le salaire minimum n'avait pas bougé. Il a
été augmenté plus que l'augmentation du coût de la
vie. Au moment où nous nous parlons, ce n'est pas un dossier qui dort
sur tes tablettes ou sur le bureau du ministre. C'est un dossier qui est actif
de façon permanente.
M. Janvier: Laverais-tu la vaisselle à 4, 55 $
l'heure?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai pas saisi, Sylvain.
M. Janvier: J'ai dit: Laverais-tu la vaisselle à 4, 55 $
l'heure?
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
juste pour les règles de fonctionnement, on adresse toujours les
questions au président de l'Assemblée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question de Sylvain, c'est:
Laverais-tu, comme ministre, de la vaisselle à 4, 55 $ l'heure, etc.
?
Je vous dirai que durant ma vie, je n'ai pas toujours été
ministre. Je n'ai pas toujours été député de
l'Oppposition. Je n'ai pas toujours été avocat, non plus. J'ai
déjà été étudiant et j'ai peut-être
déjà eu à gagner mes études comme étudiant.
Si vous voulez la nomenclature des jobs que j'ai faits à ce
moment-là au salaire où je les ai faits, je vais vous les
fournir. Je n'ai rien à cacher à la commission.
L'autre argument qui m'a été apporté concernait la
question surtout, je pense, c'était Diane ou Denise... du partage du
logement. Question qui n'est pas facile à régler.
Au moment où nous nous parlons, ma correspondance comme ministre
de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu que j'entretiens
avec les députés des deux côtés de la Chambre touche
principalement la question de la déduction des 85 $ par mois chez les
personnes qui sont inaptes au travail. Présentement, on applique chez un
inapte qui demeure chez un parent une déduction de 85 $ par mois.
Je ne vous dis pas que dans la proposition, c'est 115 $. Ce qu'on me dit
- et je suis prêt à réviser les chiffres - c'est que c'est
ce que cela va représenter comme économie réelle que vous
effectuez si vous partagez le logement a 115 $. Si c'est 105 $, c'est 105 $. Si
c'est 118 $, c'est 118 $. Je pense que là-dessus, on peut d'un
côté ou de l'autre réviser nos devoirs et s'assurer que les
chiffres qu'on met de l'avant sont véridiques.
Mais j'ai insisté auprès des représentants du
Conseil du trésor et cela n'a pas été facile,
auprès des représentants du ministère des Finances,
auprès d'autres ministères, pour que ce partage du logement ne
s'applique plus, à compter de la mise en vigueur de la présente
politique de sécurité du revenu à ceux et à celles
qui sont des inaptes. Mais, d'un autre côté, il a fallu qu'on
arrime si on veut se débarrasser de la fameuse notion de vie maritale
qui a donné lieu à des enquêtes dans des chambres à
coucher au cours des dernières années. Il a fallu penser à
quelque chose qui soit juste et équitable. On s'est dit que lorsqu'il y
a partage du logement et que, véritablement, pour les personnes qui sont
aptes au travail, les coûts sont épargnés, on
suggère l'introduction de cette notion. Si vous avez de meilleures
propositions à nous faire qui tiennent compte de l'ensemble, nous sommes
réceptifs. Nous sommes intéressés à les
entendre.
Voilà les premières réactions que j'avais aux cas
qui m'ont été apportés. Je tiens à souligner quand
même que le mémoire va beau-
coup plus loin que la politique de sécurité du revenu qui
est déposée. Il y a des remarques qui s'adressent - et je les
notais en entendant la lecture du document - au ministre du Travail. Disons que
j'en prends bonne note surtout quant à l'amélioration des
conditions de travail. II y a des remarques qui s'adressent au ministre des
Finances, quant aux modifications à la fiscalité. II y a des
remarques qui s'adressent à la ministre déléguée
à la Condition féminine et au ministre
délégué à la Famille. II y a des remarques qui
s'adressent au ministre responsable de l'Habitation, au ministre de
l'Éducation, etc. Vous avez vraiment pris le problème le plus
large et dans son sens de société et ce sont des
éléments auxquels nous avons été confrontes au
ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu
dans l'élaboration de cette politique. II y a peut-être encore des
gains à obtenir auprès d'autres ministères. Les remarques
que vous avez faites vont dans le sens de certaines des interventions que nous
avons présentées auprès d autres ministères. Je
vais céder.
Mme Allard: Juste pour répondre.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie,
Madame. Pouvez vous donner votre nom, s'il vous plaît?
Mme Allard: Denise Allard.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
Mme Allard: C'est juste pour dire que Comme M Paradis a dit que
lorsqu'on partage un logement on fait une économie de 115 $, comme je
l'ai expliqué tout à I'heure, si j'avais fait une économie
de 115 $, je vous ai dit que j'aurais été assez intelligente pour
les mettre à la banque. J'ai fait un calcul avant de venir ici. Si,
depuis treize ans que je partage un logement, j'avais mis 115 $ à la
banque, j'aurais aujourd'hui 17 640 $ à la banque. Mais je n'ai pas
été capable de mettre un cent noir à la banque, sauf 8, 79
$ aujourd'hui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas vous contredire sur
les chiffres ou sur votre calcul Je vous ai dit que sur le plan des chiffres.
Avec les groupements qui vous représentent, etc. Nous sommes ouverts
à les regarder, non pas à les cacher, à les regarder et
à voir quel est le véritable coût ou épargne. Si
vous me dites que depuis le temps que vous partagez un logement, vous n'avez
pas épargné cela, je vous crois. Je vous dirai que
présentement on le calcule à 85 $ et que dans le passé on
l'a calculé à un autre niveau. Je ne pense pas que quelqu'un qui
est bénéficiaire de l'aide sociale ait le moyen de faire des
économies quelles qu'elles soient, parce que les barèmes -
surtout dans le passé - étaient basés sur les besoins
strictement essentiels. À partir de ce moment-là, il n'y a pas
moyen d'épargner.
Mme Allard:.... parce que même aujourd'hui, j'aimerais bien
avoir un logement à 85 $. II ny en a nulle part à 85 $
aujourd'hui. J'ai fait toute la ville de Saint-Hyacinthe depuis le 1er
février parce que mon logement n'est plus habitable. Je n'ai
trouvé aucun logement à 85 $ Parce que je l'aurais pris s'il
avait été habitable.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
à I'ordre!
M Sylvain: Janvier.
M. Janvier: M. Paradis, la dame d'à côté a
énoncé la politique de "cheap labour" comme quoi on fout dehors
les travailleurs et qu'on les remplace par des jeunes, à bon
marché Vous n'avez pas pris ça en note tantôt. Je veux
juste vous dire que c'est bien dégueulasse.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sylvain, l'ensemble des
problèmes qui sont soulevés. Je ne me fais pas d'illusion. Je
pense que dans une heure de présentation avec quelque organisme que ce
soit, nous n'aurons pas le temps de les vider. Mais cet argument-là est
repris, Sylvain, par d'autres organismes. Je peux te donner des indications et
des pistes. Je ne pense pas quon puisse parler de "cheap labour" dans les
programmes de rattrapage scolaire mis de l'avant, à un moment
donné. On peut, peut-être dans certains cas, si on veut, trouver
des cas où des travaux communautaires peuvent être
assimilés, peut-être même des stages en entreprise comme
tels. Pourquoi? On est conscient au ministère et on tente de faire une
vérification pour que cela ne se produise pas. Mais on peut quand
même, au nombre qu'il y a s'en faire passer quelques-uns et, si vous me
dites que vous avez un exemple à me donner, je vais vous dire que vous
avez probablement raison, Sylvain. Mais sur la moyenne, nous prétendons
que ce n'est pas si pire.
Deuxièmement...
M. Janvier. Les gars qui ont lâché les programmes de
stage en entreprise sont tous sans abri Ils sont dans la rue.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, à 170 $ par
mois ou 178 $ comme c'est le cas présentement, vous ne payez pas ce
qu'on appelle les besoins de base qui sont le logement et la nourriture. C'est
pourquoi nous avons entrepris cette tâche difficile de modifier cette
situation qui nous a été léguée par quelqu'un
d'autre. Mais aujourd'hui, nous en sommes responsables. Si vous me dites que
quelqu'un à 176 $ n'a pas le moyen de se payer un logement et n'a pas le
moyen de se nourrir convenablement, je vous dis que vous avez raison.
Le Président (M. Bélanger): Madame...
Mme Jacob: J'aimerais savoir à quelle étape on va
passer aux questions précises sur nos revendications. Le temps passe et
je pense qu'on est en train de se faire expliquer la proposition de
réforme de M. Paradis et on la comprend très bien. Nous aimerions
apporter des clarifications sur ce qu'on veut changer parce que nous savons
qu'avec nos revendications, nous corrigerions tous les problèmes quon
soulève depuis tantôt. Cela fait qu'on aimerait apporter des
précisions sur nos revendications.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. J'aurai au moins
l'occasion précisément de faire en sorte qu'on connaisse mieux
votre proposition de sécurité du revenu. Par ailleurs,
permettez-moi simplement de signaler au ministre, pour les fins de son tableau,
qu'il faudrait qu'il puisse prendre en considération que pour un
montant, qui n'est pas modeste, de 100 000 000 $, il y aura des
économies de 115 $ à la rubrique "partage de logement", qui
pourront réduire d'autant les 520 $ - c'est-a-dire la prime de base, le
barème de base 420 $, et les frais de participation 100 $, pour un total
de 520 $ - mais il y aura bien du monde qui aura à payer les 115 $ de
partage de logement, puisque le ministre évalue lui-même, compte
tenu du document que vous avez rendu public et qui nous permet maintenant
d'avoir les chiffres, à près de 100 000 000 $ l'économie
qu'il réalisera avec le partage de logement. C'est 40 % du total des
bénéficiaires qui auront à verser cette économie de
partage de logement. C'est donc un montant de 405 $ - je termine
là-dessus - que recevrait le bénéficiaire qui participe et
qui partage son logement. Quand le ministre fait la comparaison avec le salaire
minimum, il faut lui rappeler un programme qui n'avait peut-être pas
l'efficacité qu'on lui souhaitait, mais qui aurait pu et qui devrait
être bonifié, qui s'appelle le SUPRET, et qui était
précisément un programme pour supplémenter le revenu de
travail au salaire minimum. II faut souhaiter que les écarts, ce ne soit
pas toujours à la baisse et que le test d'équité du
ministre, ce ne soit pas toujours l'égalité dans la malchance,
mais que cela puisse être aussi des programmes pour supplémenter
des revenus de travail par en haut plutôt que de venir diminuer des
barèmes de prestations par en bas.
Cela dit, vous ne nous avez pas beaucoup parlé de toute la
question des conjoints de fait. Je pense que c'est certainement au coeur des
actions que vous avez menées depuis un an. Vous avez rendu public un
chiffre qui était assez alarmiste. Je l'ai repris en commission
parlementaire. Le ministre ne l'a pas infirmé. Je ne sais pas si,
aujourd'hui, il sera en mesure de le confirmer. Vous nous avez dit être
en mesure de vérifier que 80 % des coupures de prestations à la
suite de visites à domicile l'avaient été pour des motifs
de vie maritale. C'est donc essentiellement pour ce motif de vie maritale que
l'État avait fait des coupures dans les prestations. Est-ce que c est
bien exact?
Mme Gagné: On n'a pas fait de statistiques à la
grandeur de la province de Québec, mais cela se confirme. Dans nos
locaux, 80 % des coupures le sont pour motif de vie maritale.
Quand quelqu un nous appelle, a besoin d'aide que ses prestations sont
coupées complètement la plupart du temps, c'est pour motif de vie
maritale.
Mme Jacob: D'ailleurs, II serait intéressant de ne pas
toujours aller dans le passé il serait intéressant d'aller dans
la réforme qu'on nous propose. Toute la notion d'autonomie des
personnes, nous considérons qu'il n'y a absolument rien pour
régler cela et ce, à deux niveaux. Premièrement, chez les
jeunes, parce que c'est une fausse parité quon donne aux jeunes. On va
voir la moitié d'entre eux, soit 17 000, sortir de l'aide sociale. Les
autres vont voir leurs prestations baisser d'au moins 100 $ par mois, et c'est
un minimum, selon le revenu des parents. On dit que la parité va
être là pour l'autre moitié d'entre eux, environ 25 000
jeunes, mais on ne dit pas qu'ils vont être aussi pauvres. Ils vont
être pareils aux autres, mais tout le monde va être aussi pauvre.
Donc, c'est la parité, ce sont des revenus à la baisse pour tout
le monde. Pour répondre à cela, on revient toujours en disant:
Oui, mais écoutez, les revenus de travail vont être
supérieurs. D'accord, les revenus de travail vont être
supérieurs, mais l'emploi n'est pas supérieur. Comment peut-on
dire qu'on peut aller gagner plus d'argent en baissant les barèmes
d'aide sociale quand ce n'est pas du tout un problème d'incitation au
travail, mais un problème de manque d'emploi? Au départ, le
débat est faussé. C'est pour cela que nous disons que les 219 000
000 $ qu'on va économiser sur le dos des aptes au travail, c'est de la
foutaise. C'est de la foutaise, quand on dit que les assistés sociaux
vont être moins pauvres que présentement. Cela concerne une
catégorie.
Également, on dit que c'est essentiel d'avoir une contribution
alimentaire parentale parce que cela va désinciter les jeunes à
aller aux études C'est quand même effrayant. Au Québec, on
est en train de dire que les Québécois et les
Québécoises. Premièrement, on a commencé par dire
que c'étaient des fraudeurs. Après, on a dit que c'était
du monde paresseux et, là, on dit que les jeunes veulent demeurer
bénéficiaires de l'aide sociale jusqu'à 55 ans parce que.
à 55 ans, cela va être merveilleux pour eux, ils pourront choisir
s'ils seront aptes disponibles ou aptes non disponibles. On trouve
épouvantable d'entendre un discours comme celui-là. (16 h 45)
Aussi, pour la contribution alimentaire parentale, on se
réfère toujours au régime des
prêts et bourses. Mais le régime des prêts et bourses
est un régime déjà déficient qui garde les
étudiants et tes étudiantes dans des conditions pénibles
quand ils ne viennent pas de parents assez aisés. Quant à
l'autonomie des jeunes, on n'y répond pas du tout. Pour les femmes,
encore moins, je pense. Une femme enceinte, jusqu'à ce que son enfant
n'ait atteint deux ans, sera apte non disponible. Apte non disponible veut
dire, pour elle, qu'elle n'aura plus droit aux besoins spéciaux et aussi
qu'on lui donnera un barème inférieur à celui des
personnes qui seront sur le programme Soutien financier. C'est quand même
une bonne différence. Ensuite, on dit aux femmes: Quand l'enfant aura
deux ans, pas de problème, il y a de belles mesures pour toi, pour
améliorer ton employabilité; ton enfant, envoie-le en garderie;
il n'y en a pas, mais arrange-toi et on va te donner 10 $ par jour pour le
faire garder on ne sait pas où, mais c'est ton problème. Donc,
pour les femmes, on ne répond pas du tout au fait qu'elles soient
autonomes.
En récompense, par rapport à toute la notion de vie
maritale dont on pariait tantôt, les 80 % de coupures, on dit aux femmes:
Bon, la première année, pas de problème, mesdames. Restez
avec qui vous vouiez; on ne vous achalera pas; les Boubou macoutes ne viendront
pas chez vous tout de suite. Toutefois, on va vous couper parce que vous
partagez le logement M. Paradis disait tantôt que ce n'est pas sûr
que ce sera une coupure de 115 $. Cela veut dire que cela pourra aussi
être plus. C'est ce que cela veut dire, oui?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... le coût.
Mme Jacob: D'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, je voudrais être
précis. On a indiqué que c'était le coût. On a dit
que, si c'est 115 $, ce sera 115 $. Si c'est 105 $, ce sera 105 $ et, si c'est
118 $, c'est 118 $. C'est le coût.
Mme Jacob: Si c'est 160 $, ce sera 160 $, comme les femmes
monoparentales sur Apport.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais il y a quand même
des limites.
Mme Jacob: D'accord. À partir de cela, on dit aux femmes:
La première année, on va te couper; la deuxième
année, selon ce qui va se passer dans ta vie privée, tu seras
probablement considérée comme un couple. Alors, là, la
femme deviendra un couple à l'aide sociale et ses barèmes
baisseront donc encore comparativement à ce qu'elle aurait en partageant
un logement. Ce sera plus payant pour la femme de se déclarer comme un
couple, que de partager un logement parce que... là, je vous vois dire
non... C'est cela. Deux personnes seules qui partageront un logement auront
chacun une coupure, disons, d'environ 115 $ et, si elles deviennent couple,
elles auront te barème de couple qui sera supérieur à la
première année.
Donc, on va encourager les femmes à se déclarer encore
comme couple, avec tout ce que cela veut dire. Pour l'autonomie, on ne fait
rien du tout. Il faut vous dire qu'on trouve cela discutable. Normalement, les
politiques du Québec suivent beaucoup celles de l'Ontario. L'Ontario
vient de réglementer que cela va prendre trois ans avant que les femmes
soient déclarées comme couple; en ptus, on ne tiendra pas compte
non plus du secours mutuel qu'elles auront de personnes qui pourraient les
aider. On trouve que c'est un net recul, malgré qu'on ne le revendique
pas non plus, sur l'Ontario. Selon nous, la réforme qu'on nous propose
ne répond pas du tout à l'autonomie des personnes.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, évidemment, II y a tellement
d'éléments qu'on a parfois l'impression que tout cela est une
bouillabaisse. Si on reprend les gains de travail, avec l'exemple d'un jeune
homme seul, vous dites que les gains de travail, on doit les comprendre, compte
tenu du document confidentiel que vous avez rendu public, le document du
ministère, que jamais, pour aucune catégorie de
bénéficiaires, pour aucun d'entre eux ou d'entre elles, ces gains
d'emploi pourront dépasser les besoins essentiels sans être
taxés. Quand ils dépasseront les besoins essentiels, chaque
dollar additionnet gagné viendra réduire de 1 $ sa prestation. Si
ce n'est pas la trappe de pauvreté, je ne vois pas où elle peut
être en dehors de cela puisque toute initiative, même passer La
Presse - distribuer La Presse rapporte environ 60 $ par semaine, disons,
dans mon quartier - quatre semaines, cela veut dire 240 $ par mois... Je
vérifiais que même un couple, pour deux personnes, le maximum du
gain d'emploi admissible, c'est 205 $. Alors, même pour un couple,
à 205 $. ce serait moins que de passer La Presse. Même en
passant La Presse, il y aurait une réduction de prestation, parce
que chaque dollar supplémentaire gagné au montant de 205 $ serait
réduit à 100 %. Cela s'appelle le taux marginal d'imposition. Ce
sont des mots savants pour dire qu'on va continuer de maintenir des gens dans
la pauvreté parce que s'ils font un petit effort de plus on
réduit automatiquement pour 1 $ le dollar gagné.
Relativement à la question des 70 % du seuil de pauvreté
de Statistique Canada, je peux vous dire que j'ai été surprise.
Je vous le dis simplement, mais je suis les débats et je pense parfois
qu'être dans votre situation on a tendance à vouloir demander.
Compte tenu des difficultés avec lesquelles on se débat dans la
vie
quotidienne, 70 % du seuil minimal, en fait, de statistique est
raisonnable. Comment en êtes-vous arrivés à cette
définition?
Mme Gagné: On y est arrivé en calculant nos besoins
essentiels. On ne demande pas à être riche à l'aide
sociale. On ne veut pas rester sur l'aide sociale. On veut aller travailler,
mais dans de vrais emplois. D'après les calculs qu'on a faits, on a
conclu que les 70 % sont pour combler nos besoins essentiels. Comme les
barèmes sont rendus avec la réforme, un jour ou l'autre on va se
retrouver trop pauvres pour aller travailler. Si on n'a pas de vêtements
à se mettre sur le dos, on va voir un employeur et il nous ferme la
porte avant même de nous avoir entendu. Je pense que cela se produit
déjà pour les moins de 30 ans.
C'est qu'on voulait avoir seulement nos besoins essentiels couverts mais
on voulait être capable de se nourrir convenablement et d'aller faire de
ia recherche d'emploi. Ce n'est pas avec 405 $ par mois qu'une personne peut se
déplacer et aller chercher de l'emploi.
Mme Jacob: Ce qu'on s'est dit, c'est que pour vivre de
façon décente au Québec, ce que cela prendrait
idéalement en 1989 c'est que chaque personne puisse atteindre le seuil
de pauvreté de Statistique Canada indépendamment de sa situation,
travail ou sans travail. On s'est dit: Wo! En 1989. c'est un peu vite. Il
faudrait un agencement des autres politiques autour de cela. C'est pour cela
qu'on est arrivé au pourcentage de 70 % du seuil de pauvreté.
Quand on dit qu'on est parti des besoins des gens, on a fait l'inverse
du gouvernement. Le gouvernement, lui, se base sur les dépenses des
travailleurs et travailleuses tes plus pauvres du Québec. C'est toute la
différence. Nous, nous partons des besoins. Le gouvernement part des
dépenses. Pourquoi partir des dépenses de consommation? En
passant, ce sont des dépenses de consommation qui assurent seulement un
confort minimal. Pourquoi partir de cela? C'est vraiment fausser la question.
Voici un exemple assez concret. Une personne à faible revenu n'a pas les
moyens de se payer des loisirs quand elle reçoit le salaire minimum. Que
fait-elle souvent? Elle va réduire son panier de provisions, elle va
manger moins bien, elle va avoir un logement moins grand qu'elle ne devrait
avoir pour le nombre de personnes dans la famille. Elle va donr réduire
la consommation de ses besoins essentiels pour pouvoir se payer un
cinéma par semaine.
Si on se base sur de telles choses pour établir les vrais
besoins, nous ne sommes pas d'accord. En partant, les personnes qui
revendiquent le droit de vivre décemment et le gouvernement s'en vont
à des points opposés. C'est inconcevable de partir de
dépenses de consommation surtout quand ce sont des personnes qui sont
déjà pauvres. C'est pourquoi on s'est dit qu'il fallait
arrêter de penser à une politique de sécurité du
revenu en fonction de millions. Les personnes, ce ne sont pas des millions. Les
personnes ont des besoins. Il faut qu'elles se logent, qu'elles mangent,
qu'elles aient des loisirs, qu'elles aient une bonne santé mentale.
C'est pour cela qu'on est parti des besoins des gens. On est tout à fait
en désaccord avec le principe de partir des dépenses de
consommation.
Aussi, on parle de 70 % du seuil de pauvreté. À quoi cela
pourrait-il correspondre? Pour une personne seule, cela correspond au salaire
minimum. C'est pourquoi on revendique les 70 % du seuil compte tenu aussi du
fait qu'il n'y a pas d'emplois pour tout le monde. Même si du jour au
lendemain tout le monde améliorait son employabilité, il n'y a
toujours pas d'emplois pour tout le monde, n'est-ce pas? On va tous être
plus fins, mais il n'y aura pas plus d'emplois. C'est pourquoi on revendique
les 70 % de revenu garanti pour chaque personne, personne assistée
sociale ou personne pauvre, recevant le salaire minimum, à temps
partiel, un revenu garanti. Si on a un travail, tant mieux! Il vient s'ajouter
à nos revenus.
Mme Harel: Vous le voyez s'ajoutant sans taxation, sans
imposition jusqu'au seuil de 100 % du seuil de pauvreté de Statistique
Canada. C'est cela?
Mme Jacob; C'est cela.
Mme Harel: M. le Président, on va peut-être
seulement souhaiter que le ministre envisage, plutôt que de rendre plus
équitable la pauvreté entre les pauvres, de se donner comme
responsabilité une redistribution sociale entre les riches et les
pauvres.
Mme Jacob: C'est bien cela qu'on revendique.
Le Président (M. Bélanger): Vous êtes encore
sur votre période de temps, Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, c'est excellent, M. le Président. Cela me
permettra de terminer en vous rappelant que dans le mémoire, vous
parliez de la nécessité d'incitation positive au travail. Vous
dites: L'absence d'incitation positive constitue un véritable
piège. Quand vous parlez d'incitation positive, vous en parlez en termes
d'incitation à participer au programme, j'imagine. Pour les jeunes de 18
à 20 ans, concevez-vous qu'il serait souhaitable qu'ils participent de
façon coercltive ou que l'ensemble des bénéficiaires
devraient de façon simplement facultative participer au programme pour
augmenter leur prestation?
Mme Gagné: Quant à moi, je le verrais
facultatif. Je pense qu'on n'a pas vraiment besoin d'incitation au
travail, niais si en plus l'incitation est négative, qu'on se retrouve
plus pauvre parce qu'on s'est embarqué dans les programmes et qu'on est
obligé de prendre sur notre nourriture les dépenses que cela nous
occasionne, là on parle vraiment d'incitation négative. Disons
qu'on n'est pas contre les programmes de réinsertion à condition
que cela débouche sur de vrais emplois. On ne veut pas non plus
être des voleurs de jobs.
M. Janvier: C'est-à-dire qu'on serait passé et cela
fait des guerres sociales entre les travailleurs et les assistés
sociaux. Comme chez Hyundai, on a engagé 200 jeunes, "cheap labour", et
les travailleurs sont rendus sur le chômage. C'est cela qui va arriver.
C'est beau le progrès.
Mme Harel: C'est déjà fait. Je pensais que
c'était juste une promesse du ministre. Je ne pensais pas que
c'était déjà réalisé.
M. Janvier: Cela a passé aux nouvelles.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous me permettez, je pourrais
répondre immédiatement.
Mme Harel: Oui, je vais le permettre au ministre et je vais
reprendre mes trois minutes après, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): C'est sur votre temps.
Je ne peux pas...
Mme Harel: Si c'est sur mon temps, je ne lui permets pas. Mais si
c'est par consentement, il veut...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Par consentement, j'aimerais
préciser. Qu'on ne le prenne sur le temps de personne.
Mme Harel: D'accord.
M. Paradis {Brome-Missisquoi): Juste pour apporter la
précision. Les travailleurs vont être engagés comme les
autres travailleurs et ils bénéficieront des mêmes
conditions de travail et des mêmes droits que tous les autres
travailleurs de l'entreprise.
Mme Harel: Alors, vont-ils continuer à percevoir leur
barème? Donc, ils ne sont plus bénéficiaires de l'aide
sociale.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ils deviennent... Le gouvernement
aura utilisé son pouvoir moral de persuasion pour négocier dans
des programmes de main-d'oeuvre qui s'appliquent à plusieurs centaines
de travailleurs, quelques centaines de bénéficiaires d'aide
sociale qui seront considérés comme des travailleurs
réguliers dans l'entreprise, à salaire égal avec tous les
droits des autres travailleurs.
Mme Harel: II s'agit donc de personnes qui ne seront plus
considérées comme bénéficiaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Une fois qu'ils vont être
embauchés par la compagnie, ils quitteront les rangs de l'aide sociale
pour joindre les rangs des travailleurs.
Mme Harel: Ils sont exclus, de toute façon, des
programmes. Il ne s'agit plus d'un programme à ce moment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau du ministère de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, il s'agit de ce
qu'on appelle les nouvelles approches.
Mme Harel: Cela n'est pas le programme d'aide sociale, à
ce moment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne retrouverez pas cela dans
les crédits pour vous donner une indication dans les programmes normes,
etc., sauf les programmes de formation qui s'appliquent à l'ensemble des
travailleurs au Québec. Ce qu'on fait, c'est qu'on donne une meilleure
chance à celui et à celle qui était un peu
pénalisé dans la vie d'avoir accès à un niveau de
vie décent.
Mme Harei: Donc, ces programmes sont des programmes pour
l'assisté social présentement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au moment où nous nous
parlons, le recrutement n'est pas fait. Donc, ces personnes sont des
assistés sociaux, le recrutement va se faire. Dès qu'ils
obtiendront l'emploi, Ils ne seront plus considérés comme des
assistés sociaux.
Mme Jacob: Leur emploi est garanti après.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Autant que tes autres
travailleurs, au même titre.
Mme Jacob: Merci.
Mme Harel: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: En terminant, je voudrais simplement relever un des
témoignages qui a permis de mettre en lumière, peut-être,
une coupure qui n'avait pas encore été bien identifiée et
qui est celle qui consistera à faire un test de revenu pour les
personnes vivant en HLM. Je ne sais pas. Le ministre n'a pas réagi
à l'information qui était donnée par, je ne sais
plus...
Une voix: Par Diane.
Mme Harel:... par Diane, à savoir que le coût
réel du logement serait considéré comme un avantage
économique et déduit des prestations. Faut-il croire que les
personnes vivant en HLM seraient elles aussi sujettes à une telle
réduction de barème?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Aucune modification à ce
chapitre n'est apportée par la politique de sécurité du
revenu.
Mme Harel: Alors, aucune modification; il n'y aurait donc aucun
partage de logement qui serait induit d'une habitation à loyer
modique?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Cela n'affecte pas la notion de
partage de logement.
Le Président (M. Bélanger): Alors, en
conclusion.
Mme Harel: Cela ne l'affecte pas, c'est-à-dire que le
partage de logement s'applique. N'oubliez pas que...
M.. Paradis (Brome-Missisquoi): Là où c'est
applicable; s'il s'agit d'une personne inapte, cela ne s'applique pas ou
lorsqu'il s'agit d'une personne où cela s'applique, cela se fait
régulièrement. Mais il n'y a pas de changement, il ne faut pas
tenter de trouver un changement entre l'administration actuelle des programmes
et la réglementation et la nouvelle politique de sécurité
du revenu en ce qui concerne les HLM.
Le Président (M. Bélanger): Alors, en conclusion,
Mme la députée de Maisonneuve, si vous voulez remercier le
groupe.
Mme Harel: Oui. M. le Président, je constate donc que,
contrairement à ce qu'on peut lire à la page 43 du document
d'orientation, ['introduction du test de revenu pour les
bénéficiaires habitant un HLM est donc écartée.
C'est quand même une bonne nouvelle. J'espère qu'on en aura une
comme cela par jour, comme il y en avait tellement et qu'on aura à
siéger 30 jours, je pense qu'une bonne nouvelle par jour ne serait pas
insuffisante. Je vous remercie.
Mme Allard: M. le Président, je suis contente de voir que
M. le ministre va créer des emplois pour que j'aille travailler demain
matin.
Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. M. le
ministre, en conclusion.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, en conclusion.
Peut-être pour répondre à madame - ce n'est peut-être
pas dans sa région malheureusement - le gouvernement actuel en
matière de création d'emplois a un bilan que je n'ai pas
l'intention de vous réciter, mais qui est qualifié par les
observateurs de très positif. Je vous dirai que, comme ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, j'ai une
Inquiétude additionnelle et je l'ai soulignée dans mes notes
d'ouverture. Cette inquiétude se révèle lorsque le ou les
gouvernements, par leurs actions, réussissent à attirer dans une
région qui s'appelle l'est de Montréal, plus de création
de nouveaux emplois que n'importe où ailleurs dans la grande
région métropolitaine. La conséquence de cela, c'est que
les gens de la rive sud, de la rive nord et d'ailleurs à Montréal
occupent ces emplois et que les 10 000 assistés sociaux, pour faire des
chiffres ronds, 22 000 bénéficiaires de l'aide sociale sont
encore là après cette création d'emplois. Il faut se poser
des questions additionnelles à ce moment-là. Est-ce que le fait
que ces personnes, dans la majorité des cas, n'avaient pas
terminé leurs études secondaires et, dans certains cas,
étaient des analphabètes et, dans d'autres cas, avaient des
carences sur le plan de l'employabilité, ne les a pas
éliminées de cette compétition pour un emploi
rémunérateur qui se trouvait dans la cour chez elles, dans leur
quartier? Je vous invite, comme représentants de ces gens, à
m'apporter vos réflexions sur cette question. Pourquoi ne
réussit-on pas encore? On tente d'apporter une réponse au
gouvernement en disant: SI on réussit à améliorer leurs
caractéristiques d'employabilité, peut-être que ces
gens-là, la prochaine fois qu'une entreprise s'installera dans l'est de
Montréal, auront une chance égale d'avoir l'emploi. Mme la
députée de Maisonneuve me montre le rapport Boucher de 1963,
peut-être que te travail n'a pas été fait.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie,
mesdames et messieurs les représentants du Front commun des personnes
assistées sociales du Québec.
J'invite le prochain groupe, la Société
Saint-Vincent-de-Paul qui sera représentée par M. André
Boyer, président du conseil central de Montréal, par M. Jean-Paul
Parent, président du conseil provincial et par M. Jean Séguin,
membre du comité d'étude et ex-directeur des affaires sociales de
la ville de Montréal.
On suspend les travaux seulement pour deux minutes. On reprendra
à 17 h 5.
(Suspension de la séance à 17 h 4)
(Reprise à 17 h 5)
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
j'inviterai chacun à bien vouloir reprendre sa place. Nous accueillons
à la table des témoins la Société
Saint-Vincent-de-Paul. Si le porte-parole veut bien présenter son
compagnon.
Société Saint-Vincent-de-Paul M. Boyer
(André): André Boyer, président
du conseil central de Montréal de la Société
Saint-Vincent-de-Paul. Le mémoire est présenté au nom de
la Société Saint-Vincent-de-Paul de Montréal. À ma
gauche, Jean Paul Parent, président du conseil provincial
malheureusement, M. Séguin n'a pas pu venir. II a de la mortalité
dans sa famille. Alors il nous prie d'excuser son absence.
Le Président (M Bélanger): Vous connaissez nos
règles de procédure. Vous avez 20 minutes fermes pour
présenter votre mémoire. Je vous fais signe quand il vous reste
deux minutes ou je vous demande de conclure. Par la suite les parlementaires
ont 40 minutes pour vous interroger, c'est-à-dire pour chacun des partis
en présence. Je vous invite donc à commencer, si vous voulez.
M. Boyer: Merci, M. le Président. Quoi qu'on en pense
vivre des prestations d'aide sociale n'a rien de bien réjouissant et
cela ne permet certes pas de rouler sur l'or. Au Québec, c'est une
personne sur dix qui dépend de cette source minimale de revenu.
Aujourd'hui, la Société Saint-Vincent-de-Paul de Montréal
veut, dans la présente démarche exposer un point de vue objectif
qui est fort d'une expérience variée sur le terrain.
Les commentaires du mémoire que vous avez entre les mains sont le
fruit d'une réflexion d'un groupe de travail issu de divers points de
services de la société à Montreal et à Laval.
Comme vous avez pu le voir dans le mémoire, l'an passé la
Société Saint-Vincent-de-Paul de Montréal a consenti des
secours pour environ un million de dollars à des
bénéficiaires de l'aide sociale en majorité, soit
près de 83 % des familles ou des personnes seules que nous avons
aidées. C'étaient des bénéficiaires de l'aide
sociale de la région de Montréal et de Laval.
Les demandes immédiates ou ce qui nous vient comme besoin
immédiat, ce sont, la plupart du temps, des insuffisances de fonds pour
satisfaire des besoins essentiels, par exemple, surtout en fin de mois, des
besoins de nourriture et plus particulièrement dans la région de
Montréal, à cause d'un coût très élevé
du logement. L'été passé, la Société
Saint-Vincent-de-Paul a fait une étude à même les personnes
qui avaient été aidées durant la dernière
année et on s'est rendu compte que le coût du logement dans la
région de Montréal représente environ 46 % des revenus des
bénéficiaires de l'aide sociale.
Alors, cela veut dire qu'une fois le besoin du logement recouvert, il
reste très peu pour la nourriture, l'habillement et les besoins dits
essentiels, ce qui fait que, souvent, lorsque les fins de mois arrivent, la
Société Saint-Vincent-de-Paul doit dépanner.
Sur le fond, je pense qu'on est d'accord avec la mesure gouvernementale
qui vise à mettre en place un nouveau système de
sécurité du revenu. Le fait de vouloir favoriser le retour sur le
marché du travail, je pense que la Société
Saint-Vincent-de-Paul est en accord avec ça également. Encore
faut-il qu'il y ait des emplois rémunérateurs qui existent et que
les emplois qui existent déjà ne soient pas perdus.
II va falloir également que le gouvernement mette en place des
mesures et qu'il intervienne d'une façon beaucoup plus rigoureuse pour
soutenir le marché du travail. Voici une question que la
société se pose. Comment par exemple, quelqu'un dans la
cinquantaine avancée dont I'usine ferme ses portes pour toutes sortes de
raisons - je pense à des usines du secteur Hochelaga-Maisonneuve ou de
Saint-Henri -comment cette personne, dis-je, qui est non compétitive sur
le marché du travail, pourra-t-elle retourner sur le marché du
travail ou vraiment faire les démarches qu'on lui demandera?
Également, la recherche et la mise en application d'une politique
de sécurité du revenu devrait s'articuler avec une politique
familiale et s'articuler avec la politique de désinstitutionnalisation
des ex-patients psychiatriques avec lesquels vous avez eu des travaux en
commission parlementaire. Je pense qu'il faut que ce soit un tout. On ne peut
pas avoir seulement une politique de sécurité du revenu. II faut
vraiment articuler l'ensemble des politiques.
Pour ce qui est de la clientèle employable, voici une autre
question que nous nous posons, nous les membres de ta Société
Saint-Vincent-de-Paul. Comment un individu pourra-t-il assumer une
responsabilité supplémentaire de se retrouver seul un emploi?
Voilà une chose qui nous apparaît comme dépassant souvent
la capacité, la possibilité de plusieurs
bénéficiaires de l'aide sociale.
Tantôt, Je vous donnais l'exemple des usines qui ferment, du
travailleur qui pendant 30 ans a peut être été en usine, et
se voit brutalement sans emploi. Souvent, cette personne est face à des
limites de formation et de compétence très limitées. Je
pense qu'il faudra tenir compte de cette modalité dans une politique de
sécurité du revenu. Déjà, ce n'est pas facile de
trouver du travail. II y a risque que ces gens viennent grossir le rang des
travailleurs qui auront beaucoup de difficulté à se reclasser,
compte tenu de leur âge, de leur expénence et de ta
sous-scolarisation
Également, quant à la structure de barèmes telle
que proposée, pour quelqu'un qui est employable, si on l'intègre
dans un programme APTE, le travailleur aura des frais supplémentaires.
II aura à se déplacer. Il aura à chercher du travail
quotidiennement II faudra faire en sorte que cela soit considéré
dans les allocations qui lui sont versées.
On souligne également ce fait. On donne l'exemple d'une femme qui
vit en situation de famille monoparentale, qui choisit de demeurer au foyer
pour faire l'éducation de ses jeunes
enfants. Elle ne devrait pas être pénalisée à
cause de ce choix qu'elle fait La même chose, par exemple, pour une
personne d'un certain âge qui déciderait de prendre soin d'une
mère ou d'un père handicapé ou d'une personne
âgée. Il devrait y avoir des modalités qui feraient en
sorte que cette personne puisse bénéficier de l'aide sociale sans
être pénalisée, autant du côté de la jeune
mère de famille que de la personne qui veut s'occuper de ses parents
âgés.
On se demande également ceci, dans la partie de
l'employabilité. Le rôle de l'agent d'aide socio-économique
nous apparaît comme quelque chose qui sera primordial et très
important. La mesure de notion de contrôle ne devrait pas prendre le
dessus sur toute la notion de support et d'intervention, auprès des
bénéficiaires.
On se dit aussi qu'il serait important de retrouver un mécanisme
d'appel pour des personnes qui se sentiraient lésées dans cette
formule d'évaluation d'employabilité. Dans cette perspective de
mécanisme d'appel, on pense qu'il devrait y avoir des personnes neutres,
qui ont une bonne expérience du secteur de l'aide sociale et,
également, avec l'appui des fonctionnaires concernés.
Quant aux besoins spéciaux, là aussi on a des
interrogations. À titre d'exemple, actuellement, pour un jeune qui entre
à l'école, on l'a mentionné tantôt, 35 $ par mois,
c'est déjà insuffisant. Est-ce que ces besoins ou cette mesure
sera maintenue? De quel ordre? La même chose pour les victimes
d'incendie. Qu'est-ce qui pourra arriver à quelqu'un qui, même
s'il ne reçoit pas beaucoup d'aide sociale... Il y a certains quartiers
de Montréal, vous le savez aussi bien que moi, où les assureurs
refusent carrément d'assurer des personnes qui y demeurent. De quelle
façon y aura-t-il des couvertures advenant un incendie? Actuellement, il
y a des mesures dans ta Loi sur l'aide sociale ou encore c'est la
Société Saint-Vincent-de-Paul qui, lors de situation d'urgence, y
fait face.
La question du partage du logement, on l'a mentionnée aussi
tantôt. Pour nous, ce n'est pas nécessairement je pense... Si on
se rend compte que dans la région de Montréal, le coût du
logement prend souvent 45 % du revenu des gens qui reçoivent de l'aide
sociale, on trouve que le partage du logement est une mesure, au contraire, qui
aide les gens à réussir à subvenir aux besoins ou à
passer à travers à la fin du mois, surtout quand arrive l'hiver
et le chauffage.
On mise aussi beaucoup dans la politique proposée sur le retour
au marché du travail. On se dit qu'il va falloir que ce soit
cohérent avec l'éducation également. Le ministère
de l'Éducation a révisé un certain nombre de programmes.
Je pense, par exemple, au programme de cheminement particulier professionnel
court qui a été révisé. L'enseignement
professionnel, je pense que les membres de la commission savent aussi bien que
nous que ces réformes ne sont pas toujours cohérentes avec les
besoins du marché du travail. Les jeunes qui sont dans ces programmes
sortent souvent de l'école avec très peu de moyens pour
être compétitifs sur le marché du travail. Ce n'est pas
tout de dire qu'il faut les inciter à aller travailler ou faire en sorte
que les jeunes aillent sur le marché du travail, encore faut-il que les
programmes leur donnent les moyens de le faire.
Enfin, dernier commentaire. La Société
Saint-Vincent-de-Paul pense qu'il serait souhaitable que ce programme soit
davantage mis en application par étapes. On pense, par exemple, à
des gens de moins de 30 ans, à des bénéficiaires de l'aide
sociale depuis moins de 2 ou 3 ans. Peut-être qu'à titre
expérimental, on pourrait commencer par mettre le programme en
application avec cette clientèle d'abord, en évaluer les effets
en cours de route et la rentabilité et après, l'appliquer
peut-être plus progressivement.
Voilà, M. le Président, les commentaires de la
Société Saint-Vincent-de-Paul de Montréal. Peut-être
que mon collègue, M. Parent, président du conseil provincial,
aurait des choses à ajouter. {17 h 15)
M. Parent (Jean-Paul): Pas pour le moment. On va peut-être
attendre la période de questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie. Alors,
M. ministre de la Main-d'uvre et de la Sécurité du
revenu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas, M. Parent, si on
peut l'appeler la période de questions, peut-être période
d'échanges dans le but de s'enrichir mutuellement.
Dans un premier temps, je tiendrais à vous remercier d'avoir pris
le temps de nous produire un mémoire. Vous l'indiquez dans votre
mémoire, vous êtes souvent là en fin de mois, lorsque
l'argent gouvernemental est disparu. Les gens qui demeurent dans les secteurs
où vous oeuvrez peuvent quand même compter sur votre
participation, le bénévolat de vos membres et certaines
ressources financières que vous réussissez à
décrocher un peu partout. Au nom de ces gens-là, je tiens
à vous remercier.
Votre mémoire est pris un peu dans ce sens-là. Non pas
parce qu'on vise à avoir une politique du revenu où on peut
complètement se passer de bénévolat et d'apport
communautaire. Je ne pense pas qu'on puisse jamais atteindre ce degré de
perfection et que vous allez toujours avoir une place mais cette place vous la
voulez sans doute - et les bénéficiaires aussi - la plus
légère possible.
Je vais prendre le problème le plus crucial, à mon avis,
qui a été soulevé par M. Boyer et qui n'a pas
été soulevé encore en commission par les autres
intervenants, du moins de vive voix, le cas des travailleurs âgés
qui, subitement, perdent leur emploi. M y avait dans certains secteurs
d'activité économique, quand même un créneau assez
restreint, un programme fédéral qui
s'apparentait un peu a I'assurance-chômage et qui s'appelait le
PARCQ du gouvernement fédéral qui intervenait dans des industries
tel le textile, entre autres. Depuis le mois d'août dernier, il n'y a
plus aucun programme pour ces travailleurs. Présentement il y a des
négociations en cours avec le gouvernement fédéral dans le
but d'universaliser ledit programme, cest-à-dire qu'il ne s'applique non
plus seulement comme créneau d'activité mais qu'il s'applique
à l'ensemble des activités économiques. Les
négociations progressent mais pas suffisamment rapidement. Et je suis
d'opinion que la politique de la sécurité du revenu. Vous avez
d'ailleurs constaté que nous avons inclus une catégorie de 55-64
ans ou on offrait d'autres mesures. Je suis convaincu qu'il faut offrir
davantage et qu'il faut aboutir dans nos négociations avec le
gouvernement fédéral à un programme pour ces
gens-là qui du jour au lendemain, perdent leur emploi. Ils sont plus
âgés que les autres travailleurs parmi lesquels il faut investir
mais investir avec prudence également et en tenant compte de tout ce
qu'ils ont donné et contribué à la société.
Vous avez raison de soulever le problème. Je ne prétends pas que
la politique de sécurité du revenu telle que nous l'avons
proposée présentement réponde aux besoins de ces gens
licenciés collectivement. Je veux simplement vous dire que nous sommes
à élaborer avec le gouvernement fédéral un
programme pour remplacer I'ancien PARCQ et que, dans une de nos demandes nous
incluons la rétroactivité pour les gens qu! auront
été licenciés collectivement entre le mois daoût
dernier et le moment ou nous le mettrons en vigueur de façon que
personne ne passe à travers ce filet d'assurance sociale.
Il n'y a pas beaucoup de commentaires dans votre mémoire qui
touchent la question des inaptes au travail. Je présume que vous avez
pris connaissance de ce volet de notre politique ainsi que du volet du
programme APPORT. Votre mémoire semble plutôt centré sur le
programme APTE. Brièvement et de vive voix, nous apprécierions
recevoir vos commentaires sur le programme. Soutien financier, tel qu'il est
proposé dans le document d'orientation et sur le programme APPORT.
M. Boyer: Je pense qu'il nous apparaît y avoir une
amélioration surtout pour la clientèle que vous concevez inapte,
sauf qu'il faudrait éviter une trop grande catégorie de
bénéficiaires encre là dans cette clientèle. On
l'avait regardé rapidement mais c'est peut-être une partie du
document sur laquelle on a porté moins d'attention parce que l'on
sentait qu'il y avait là une amélioration des barèmes
prévus. Ce qui nous faisait peut-être le plus peur, c'était
la question de la catégorisation la-dedans.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je veux bien saisir. Lorsque vous
parlez de catégorisation, de quelle façon on détermine si
un individu ou un chef de ménage est considéré comme
étant apte ou inapte?
M. Boyer: C'est cela.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. J'aimerais
également avoir vos commentaires sur la procédure que nous
entendons suivre et que nous avons expérimentée avec les jeunes
de moins de 30 ans. Notre expérience nous enseigne que, dans la
très grande majorité des cas, cela ne pose pas de
problème. II y a des cas qui ne sont pas en zone grise. Ils sont
carrément aptes ou carrément inaptes et, à partir de ce
moment-là cela ne pose pas de problème. Dans les cas ou cela pose
des problèmes, il y a une première expertise médicale qui
est effectuée par le médecin de l'individu ou du chef de famille.
Si le ministère remet en question cet examen médical ou ce
résultat, il y a contre-expertise par un médecin du
ministère. Si les deux expertises concordent le dossier est
réglé. Si les deux expertises ne concordent pas, la personne peut
faire appel, et cela rejoint un des autres arguments que vous avez
apportés à la Commission des affaires sociales pour
déterminer son statut. C'est la méthode qui a été
expérimentée jusqu'à présent. C'est la
méthode que nous proposons Si vous en connaissez une meilleure, nous
sommes comme nous l'avons indiqué, réceptifs aux suggestions.
M. Boyer: M le Président ce qui nous effrayait un peu
c'était la place que I'on donnait à la profession médicale
dans ce domaine. Je n'ai rien contre les médecins, mais je trouve qu'on
donne beaucoup de latitude aux médecins pour déterminer si une
personne est inapte au travail. Cela avait particulièrement
attiré notre attention.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le médecin a un rôle
important au premier niveau, mais mentionnons qu'en ce qui concerne l'appel -
si on peut l'appeler ainsi - à la Commission des affaires sociales,
cette dernière est composée de gens issus de presque tous les
milieux. Oui, vous avez, sur le plan de l'expertise médicale, des
médecins, vous avez également des travailleurs sociaux, des
juristes, etc. C'est beaucoup plus multidisciplinaire à l'endroit
où est rendue la décision finale qui affecte l'individu dans ses
droits.
M. Boyer: M. le Président, je parlais tantôt de
l'appel et je ne référais pas nécessairement à la
Commission des affaires sociales. II faudrait qu'il y ait un mécanisme
souple, simple, rapide qui puisse faire en sorte que la personne puisse
être entendue plus tôt. Je connais très bien le
mécanisme d'appel à la Commission des affaires sociales et je
trouve que cela risque d'être un peu plus lourd Tantôt, je disais
que la profession médicale semblait avoir une large part dans cette
évaluation. II faudrait aussi tenir compte
d'autres professionnels du secteur des affaires sociales qui pourraient
également donner une expertise psychosociale et faire en sorte que ce
soit aussi considéré, et non pas seulement I'expertise
médicale.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. C'est noté.
M. Boyer: Je voudrais revenir sur la dimension de la politique
concernant les jeunes. II y a, dans le mémoire, une recommandation,
à savoir que les jeunes soient à la charge de leur famille pour
les deux premières années. Je ne me souviens plus de la
recommandation, je vais essayer de la retrouver. C'est vers la fin. Quant
à la contribution alimentaire - la recommandation 6 - que l'État
dans sa réglementation du principe reconnaissant I'obligation des
parents à pourvoir à l'alimentation de leurs enfants,
considère comme indépendante toute personne âgée de
18 ans ou plus sans considération du temps écoulé depuis
quelle a établi résidence en dehors du milieu familial. C'est
dans le sens suivant. Si on donne à un jeune une entité juridique
à 18 ans, on considère qu'il est habilité à voter,
habilité à faire des dettes, habilité à faire un
tas de choses. II est vraiment autonome. Je ne vois pas pourquoi les parents
d'un jeune qui quitte son milieu familial devraient continuer, durant un
certain temps, à contribuer à son entretien.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais répondre à
cela par une question. De quelle façon arrimez-vous cet
énoncé avec l'existence - cela existe dans la
société, je ne pense pas que c'est demain que cela sera aboli -
d'un système de prêts et bourses aux étudiants, là
où, dans la quasi-totalité des cas, l'argent est remboursable? On
sait qu'à l'aide sociale, I'argent n'est pas remboursable. Ne
croyez-vous pas, si cette notion de contribution parentale est retirée,
que le phénomène d'attraction ou d'incitation pour les jeunes
à quitter les études et à se retrouver
bénéficiaires de l'aide sociale ne sera pas très
important?
M. Boyer: M le Président, je disais tantôt que s'il
y a une concertation avec l'éducation, s'il y a des politiques, surtout
chez les jeunes les plus vulnérables - je parlais tantôt des
anciens programmes de professionnels courts, des nouveaux programmes qui ont
été mis sur pied récemment sur des cheminements
particuliers - s'il y a une concertation et que ces programmes sont bien
articulés, cela n'incitera peut-être pas les jeunes à
quitter l'école mais, dans le contexte actuel, je pense que les
programmes, avec les changements quasi annuels, ne sont certainement pas de
nature à maintenir les jeunes à l'école.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis conscient des changements
qua apportés l'an passé et que continue d'apporter le
ministère de l'Éducation dans ses programmmes de façon
à tenter de tes ajuster un peu plus au problème que vous
soulevez, et avec raison. Mais ma question demeure. L'étudiant a droit,
surtout s'il vient d'un milieu défavorisé, à un
système de prêts et bourses aux étudiants qui est
qualifié, etc. Ce que je vous dis, à moins qu'on puisse me
démontrer le contraire, c'est que la contribution parentale dans l'aide
sociale est calquée et identique à celle du système de
prêts et bourses aux étudiants.
Nos prétentions sont à l'effet qu'il y a peut-être
lieu de bonifier les prêts et bourses, le ministre de l'Éducation
s'apprête peut-être à le faire aussi, et à ce
moment-là on pourra s'ajuster. Mais ne pensez-vous pas qu'un
système d'aide sociale, de loin beaucoup plus généreux que
les prêts et bourses aux étudiants, n'incitera pas les
étudiants des milieux défavorisés à quitter
l'école et à devenir assistés sociaux?
M. Boyer: Je ne le pense pas. Pas nécessairement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous voulez dire qu'en donnant,
prenons seulement la prestation de base, 400 $ par mois non remboursables,
à un jeune, comparativement à un système de prêts et
bourses qui tient compte d'un lien de dépendance d'une contribution
alimentaire qui est, non pas un don, mais un prêt dans la quasi
totalité des cas, il n'y aura pas d'attraction?
M. Parent (Jean-Paul): Il faudrait peut-être penser un peu
aujourd'hui au contexte familial qui n'existait pas autrefois. Quand on pense
qu'aujourd'hui la plupart des jeunes, avec le système de la famille, se
retrouve soit avec la mère ou avec le père, avec seulement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un des deux.
M. Parent (Jean-Paul):... un des deux, je pense qu'on ne peut pas
tenir la mère responsable de son fils de 18 ans et plus et, le
père de l'autre côté qui est souvent obligé de payer
une pension alimentaire a le même problème, plus souvent, il est
pris pour payer deux fois ou même trois fois à deux ou trois
ménages différents. Je ne pense pas que le gars qui demeure
à la maison, avec le problème familial qui existe à
l'intérieur de la boîte, sera plus porté à retourner
aux études ou à parfaire ses études parce qu'il vit avec
sa mère qui est aux prises avec un tas de problèmes dans la
maison.
Aujourd'hui, surtout quand on va dans l'agglomération
montréalaise, tout ce monde vit dans de petits appartements. À
16, 17 ou 18 ans, les parents commencent même déjà à
mettre les enfants hors de la maison. D'ailleurs, eux-mêmes sont pns soit
avec un problème de concubinage ou autre. Ils ne sont pas tellement
prêts non
plus à aider leurs enfants à poursuivre leurs
études. Le gars ou la fille est pris avec ce problème et il a
à vivre dans ce contexte. Si on force les enfants à demeurer a la
maison avec leurs parents, je pense que les conditions familiales ne se
prêteront pas à cela pour la grande majorité des
assistés sociaux.
M, Paradis (Brome-Missisquoi): Il me reste huit minutes, à
ce qu'on m'indique II y a un autre sujet. Vous avez traité de la
question des enfants de famille monoparentale jusqu'à l'âge de
deux ans, etc, et cette question m'intéresse. Mme Harel reviendra
peut-être à cette question. Je ne veux pas lui en suggérer.
Je voudrais, si possible vider avec vous la question des prêts et bourses
aux étudiants.
Vous avez la famille monoparentale ou la famille biparentale avec deux
enfants. Un enfant décide de poursuivre des études à temps
plein il est issu d une famille bénéficiaire de l'aide sociale -
au niveau collégial ou universitaire, I'autre enfant décide, pour
des raisons personnelles, daller à l'aide sociale ou iI est
condamné à y aller, parfois ce n'est pas une décision.
Est-ce que vous ne considérez pas que la contribution parentale, son
existence ou non, ne doit pas être identique à l'endroit des deux
enfants? Considérez-vous que des obligations doivent être
différentes entre l'enfant qui choisit de continuer ses études et
l'enfant qui choisit ou qui est condamné à l'aide sociale?
M. Parent (Jean-Paul): C'est assez difficile à expliquer.
La condition familiale peut parfois permettre d'aider un des enfants à
le faire et, pour le deuxième, la famille n'est peut-être pas
placée pour le faire. Les enfants ne sont pas tous égaux aussi,
sur le plan de l'instruction ou de la formation. Ce n'est pas tout le monde qui
a le goût de poursuivre des études dans une même famille. Je
viens d'une famille de sept enfants et on est seulement deux qui avons
poursuivi des études, parce que notre famille n'avait pas les moyens,
à ce moment, de nous payer des études.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais est-ce qu'une politique
gouvernementale de sécurité du revenu doit être - je vais
mettre le mot entre guillemets - plus "généreuse" envers celui
qui décide de ne pas continuer ses études ou envers celui qui
décide de les continuer ou doit-elle faire abstraction du choix de
l'individu en le plaçant dans une neutralité où iI choisit
lui-même? (17 h 30)
M. Parent (Jean-Paul): Je n'ai peut-être pas
étudié le problème assez en profondeur de ce
côté. Je ne sais pas ce que André pense de...
M. Boyer: Bien, c'est peut-être là une question
d'interprétation, M. le Président. À la
société, on a plutôt regardé en termes de
clientèle de familles qui viennent nous demander de laide en fin de
mois. On a peut-être moins approfondi cette question. Ce qui nous
préoccupait le plus par rapport aux jeunes qui décrochent de
I'école et qui vivent à l'extérieur de leur famille, c'est
que si on veut conserver les liens, le tissu entre le jeune et sa famille, ce
n'est peut-être pas le meilleur moyen d'aller récupérer
chez le parent une partie du montant de laide sociale qui est versé, si
on veut, dis-je, conserver un tissu familial. C'est peut-être dans ce
sens.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et est-ce que votre remarque
s'applique également à la contribution parentale des prêts
et bourses aux étudiants?
M. Boyer: Elle pourrait peut-être.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est juste dans cette
perspective. Cela va. Je vais céder le micro à Mme Harel qui a
sans doute des questions à poser, quitte à revenir pour des
précisions.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, M le Président. Cela me fait vraiment
plaisir de vous voir ici, vous qui représentez la Société
Saint-Vincent-de-Paul. Je pense que c'est assez rare que la
société se déplace. Je n'ai pas vraiment eu l'occasion
à d'autres reprises de vous voir participer à une commission
parlementaire. Je ne sais pas si vous-mêmes ou d'autres
représentants l'avez fait dans le passé J'imagine que oui.
Une voix: En 1976.
Mme Harel: Pardon?
M. Parent (Jean-Paul): En 1976.
Mme Harel: En 1976 Sur quelle loi était-ce à ce
moment?
M. Parent (Jean-Paul): La Loi sur l'aide sociale aussi.
Mme Harel: Ah bon! C'est donc peu fréquent et c'est
d'autant plus important, compte tenu de votre expertise, de profiter de votre
présence ici parce que, d'une certaine façon, l'expertise que
vous avez est celle des plus mal pris de notre société.
J'appelle souvent le Café Ozanam qui fait partie du réseau
de la société à côté de mon bureau et qui
fait littéralement des miracles. La semaine passée, il a servi le
75 000 repas en cinq ans sur un poêle à quatre "ronds" simplement
avec la récupération et du bénévolat. C'est presque
miraculeux.
On retrouve souvent dans les services communautaires que vous avez
ouverts des ex ex-psychiatrisés, ex-prisonniers, finalement souvent des
gens exclus au sens "ex-clus" de la vie en société.
Vous avez une conception des problèmes de
désintégration des liens familiaux et sociaux. Je croîs que
vous avez I'expertise. Quand le ministre vous interroge sur la question de la
contribution parentale j'aimerais tellement que vous le convainquiez.
J'aimerais tellement cela. Je suis certaine que vous êtes capables
d'aller chercher tous les arguments qu'il faut pour lui montrer que ce genre de
mesure en est une de désintégration familiale. Parce quelle
s'adresse à des personnes qui vont devoir prouver le dénuement
pour pouvoir profiter du plein montant. Donc, c'est quand la famille ne
fonctionne pas que l'État l'aide. Mais la famille qui remplit ses
responsabilités, qui fait son possible, on ne l'aide pas. Ce sont
là des mesures qui ont des effets pervers et on en a adopté
beaucoup Malheureusement, le présent gouvernement. s'apprête
à en examiner quelques-unes. L'ancien en a adopté. Je pense qu'il
faut mettre fin à ce genre de mesures perverses ou, par exemple, on a
plus d'argent à garder les enfants des autres que les siens. II y a le
cas d'un veuf, avec quatre enfants, qui n'arrivait pas avec les barèmes,
après le deuxième, il n'y a pas de hausse sauf les allocations
après le troisième. Le BSS de l'Est a proposé qu'il mette
deux d'entre eux en foyer d'accueil, ce qu'il a fait. Comme il n'arrivait pas
beaucoup plus, on lui a proposé d'en prendre deux lui-même en
foyer d'accueil. Il est devenu foyer d'accueil pour deux enfants des autres en
mettant deux des siens en foyer d'accueil Voyez-vous, il s'est suicidé,
par exemple.
Ce sont là des situations totalement absurdes. Ce sont des genres
de situation ou conduisent nos politiques. Une politique comme celle-là,
c'est finalement une sorte d'ajustement à la baisse, mais cet ajustement
il faudrait évidemment se demander si pour rendre tout égal il ne
faudrait pas ne donner que des bourses. Même le prêt et la bourse,
pourquoi alors ne pas tes transformer? C'est encore injuste. Il faudrait
transformer peut-être à ce moment le barème en prêt
et bourse. Pourquoi ne le fait-on pas? Pourquoi n'introduit-on pas totalement
la logique de l'égalité? Parce que c'est absurde.
Collégial et universitaire, c'est un investissement. C'est tellement
vrai que c'est un prêt qu'on fait parce que c'est un investissement dans
l'avenir, sachant que c'est inversement proportionnel au taux de chômage,
le niveau de scolarité. Le secondaire, c'est un investissement dans la
personne, mats ce n'est pas vraiment un investissement, si vous voulez,
nécessairement, qui va rapporter beaucoup. C'est un investissement de
base qui est minimal.
De toute façon, j'aimerais bien vous entendre sur plein de
choses, mais notamment, sur toute cette question des tests qui font que lorsque
l'État aide, c'est simplement quand on abdique ses
responsabilités. Bon, par exemple, sur la question des cheis de famille
monoparentale. Vous en avez parié, je pense, à la page 6 ou vous
disiez, justement, que vous considériez qu'il fallait laisser le libre
choix de rester à la maison pour s occuper de l'éducation des
enfants. II en valait de même, je pense, pour un très grand nombre
de mesures, comme celle du partage du logement.
Relativement à toutes ces mesures ou I'individu cherche à
améliorer son sort l'impression que j'avais en lisant votre
mémoire, est que finalement vous conceviez que lorsque l'État met
son nez c'est pour taper sur les doigts de ceux qui cherchent un peu plus de
solidarité familiale, sociale, ou autres Est-ce que j'ai tort?
M. Parent (Jean-Paul): Si on regarde notre clientèle
à l'Accueil Bonneau, l'Accueil Bonneau présentement c'est au
moins 70 % des jeunes qui se présentent par rapport à la
clientèle de clochards qu'on avait autrefois. Si on scrute un peu en
profondeur ia provenance de ces jeunes, ils viennent tous de familles avec
problèmes. Donc, eux autres déjà sont devenus des
marginaux parce qu'ils ont dû se départir, à un moment
donné, de leur situation familiale. Ils se retrouvent en plein coeur de
Montréal, ils viennent d'un peu partout dans la province et du bas de la
ville. Donc, ils sont en contact presque direct avec des gens qui sont
marginaux de leur côté aussi, mais qui ont aussi peut-être
perdu des habitudes de travail parce que depuis un an, deux ans, trois ans,
quatre ans, ils fréquentent des milieux un peu malsains. Donc, ils
tombent dans le problème de l'alcoolisme, de la drogue et le reste.
Même s'ils sont des assistés sociaux, je pense bien que sur
le plan médical, on dirait que ce n'est peut-être pas strictement
de la maladie, mais par contre, ce sont des gens qui sont complètement
dépourvus parce qu'on leur a donné des habitudes de vie depuis X
années, ce qu'ils aiment. Cela ne leur a pas permis, à un moment
donné. En fait, ils ont été exclus indirectement de la
société parce qu'ils ont de nouvelles habitudes, ils n'ont pas pu
entrer sur le marché du travail parce que le marché du travail
était assez fermé à Montréal à ce
moment.
Par contre, on parlait aussi tout à l'heure des prêts et
bourses. On a déjà un membre de la société, un
jeune, qui va à l'Université du Québec. C'est sûr
qu'un jeune qui vient d'un milieu défavorisé, qui est pris avec
un prêt et bourse, lorsqu'il va tomber professionnel, déjà
il commence avec un endettement en partant. Une personne de milieu riche en
général n'est pas en mesure d'affronter cette situation parce que
ses parents peuvent lui payer ses études et il commence
déjà sur un bon pied. II n'y a pas de problème.
Déjà, il me semble que quand on entreprend
des études avec un prêt et bourse, quand on vient dun
milieu défavorisé on est défavorisé à cet
égard, parce qu'on sait qu'on prendra peut-être un an, deux ans ou
cinq ans de recul, même sur le plan professionnel. C'est sûr que le
jeune, lui, qui bénéficie de l'aide sociale, je pense bien que ce
n'est pas la meilleure solution pour survivre. Par contre, je pense bien que ce
n'est pas un incitatif pour celui qui veut absolument faire quelque chose dans
la vie. Celui qui veut absolument faire quelque chose dans la vie se trouve des
moyens autres que le bien-être social pour y aller. Que lui fournit-on
à ce moment-là lorsqu'il est capable de le faire, par exemple?
C'est peut-être un problème qui existe présentement
concernant nos jeunes. Ce ne sont pas tous nos jeunes qui se ramassent seuls,
présentement, dans le bas de la ville ou dans les maisons d'habitation
les moins coûteuses. Même dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve,
je pense bien que vous avez beaucoup de maisons de chambre. Ce sont des jeunes
qui y viennent de milieux défavorisés, en général,
mais qui ont peut-être encore des aptitudes à développer
sur le plan du travail. Leur fournit-on toute la matière qu'il faut
à ce moment, vraiment?
C'est peut-être là leur problème. Qu'est-ce qu'on
est en mesure de faire, à ce moment, du côté du
gouvernement? Je ne le sais pas. Ce n'est pas nous autres qui prenons les
décisions. Mais on sent quand même qu'ils vivent ces
problèmes et qu'ils ne sont pas capables d'y faire face. II y a un
blocage. Ou bien ils vont prendre, comme disait l'autre jeune tout à
l'heure, du "cheap labour" qui va les laisser toujours dans un bas niveau. Le
petit gars qui va entrer peut-être à l'âge de 17, 18 ans
pour porter des commandes dans une épicerie, reste un petit commis
d'épicerie longtemps. La grosse industrie qui s'est
développée dans l'est - je le sais, je demeure dans l'est de
Montréal - c'est sûr que ce n'est pas une industrie qui favorise
l'intégration des jeunes qui sont bénéficiaires du
chômage parce que nos jeunes ne sont pas formés encore sur le plan
technologique. C'est de la grosse industrie technologique qui se
développe. C'est sûr que l'on va chercher des personnes de
l'extérieur qui répondent peut-être à. C'est parce
que le milieu, en fait, d'un nouveau développement ne répond pas
à leurs besoins directs. Cela peut être une réponse
à la question de tout à l'heure. Lorsque c'est de la grosse
industrie qui s'installe, cela demande de la technologie et nos jeunes ne sont
pas préparés pour cela.
Mme Harel: Une excellente mesure était contenue dans les
engagements électoraux du parti ministériel et consistait
à proposer un crédit d'impôt à l'embauche de la
main-d'uvre locale. Cet engagement a finalement été
écarté, mais c'était là une mesure avantageuse pour
I'entreprise qui, s'installant, aurait pu pendant deux ou trois ans obtenir une
certaine réduction d'impôt dans la mesure où elle portait
le fardeau d'embaucher de la main-d'oeuvre locale. Là on va retrouver un
programme, on l'espère. On en est l'objet et on est content d'une
attention particulière du ministre. On applaudit, on applaudit, on en
demande davantage. C'est le succès qui entraîne le succès,
oui. Mais il est évident qu'il y a un certain nombre de nos concitoyens
qui seront donc toujours devant un problème de pauvreté, qu'ils
aient un emploi ou qu'ils n'en aient pas. À 17 ou 18 ans un emploi de
livreur de commandes, cela peut toujours aller, mais a 27 ou 28, quand on veut
se marier et avoir des enfants, il est sûr que, à ce moment, le
problème se pose, parce que le salaire ne tient pas compte des charges
familiales. Là, la question de fond pour un gouvernement, c'est est-ce
qu'on réduit des programmes de transferts parce qu'ils sont trop
généreux, ou bien si on bâtit des programmes de
supplément de revenu pour qu'ils tiennent véritablement compte
des charges familiales? On a, à ce moment, ce qu'on appelle une vraie
politique familiale, comme il y en a dans les pays européens où,
par exemple, avec un troisième enfant, on va avoir presque
l'équivalent du salaire minimum. Ce sont des questions qu'on n'est pas
toujours obligé de résoudre par en bas, en baissant d'une
certaine façon.
D'ailleurs, vous résolvez la question des personnes très
en difficulté en disant. À la place des barèmes du Soutien
financier, vous proposez les barèmes du Conseil canadien du
développement social. Quand j'ai lu cela, je me suis dit. Finalement, ce
sont les plus hauts par exemple, cela est plus haut que Statistique Canada. Ce
sont donc des barèmes. Pouvez-vous nous expliquer votre point de vue
là-dessus? Cela a dû être débattu, j'imagine, au sein
de la société.
M. Boyer: Oui, M. le Président. Si on regarde la
société, j'essayais de voir rapidement les mois ou la
Saint-Vincent-de-Paul de Montréal est le plus sollicitée, ce sont
les mois de la rentrée scolaire août, septembre où,
à cause de versements qui sont consentis actuellement, qu'on le veuille
ou non, l'éducation et les frais de scolarité, c'est
évidemment gratuit. On mentionnait tantôt que tout ce qui gravite
autour de cela, quand vous entrez à l'école les cahiers
d'exercices, les survêtements etc, ne sont pas gratuits, c'est une
dépense supplémentaire. Ce sont deux mois ou la
Société Saint-Vincent-de-Paul est énormément
sollicitée Interviennent après, les mois d'hiver, de novembre
à mars où, à cause du chauffage et de l'augmentation des
coûts de l'électricité, c'est la même chose, la
Société Saint-Vincent-de-Paul est énormément
sollicitée à I'occasion des fins de mois. Surtout, dans la
région de Montréal. Pourquoi a-ton pris ce barème? Je
pense que ce qui nous a énormément incités à
utiliser ces chiffres, c'est que, comme je disais tantôt, une
étude en cours d'été nous a révélé
que 46 % des coûts actuels étaient consacrés au logement.
Alors, c'est bien évident
qu'on s'est dit à travers ceta, avec ce qui est proposé.
Si le même pourcentage devait être consacré au logement - et
je ne pense pas que les coûts de logement diminuent dans la région
de Montréal - quels seraient les montants minimaux qui seraient
nécessaires pour que les gens puissent vivre de façon
décente?
C'est à partir de ça qu'on en est venu à trancher
pour ces chiffres. C'est pour ça qu'à certains endroits dans le
mémoire vous voyez aussi qu'on essaie de tenir compte de la
réalité particulière de la région de
Montréal. C'est la région qu'on connaît le plus. C'est
évidemment notre conseil central de Montréal qui fait la
représentation. Ce sont des données du coût de logement qui
nous inquiètent beaucoup par rapport à la clientèle de
bénéficiaires d'aide sociale.
Le Président (M. Bélanger): D'autres questions, Mme
la députée de Maisonneuve?
Mme Harel: Étant donné que l'échange a
porté sur autre chose, il ne me semble pas vous avoir entendu sur la
question des chefs de famille monoparentale, parce que votre point de vue
là-dessus, c'est, je pense... Vous prônez le libre choix quant au
mode de vie. C'est bien le cas?
M. Boyer: Oui. Mme Harel: C'est ça.
M. Boyer: Si on prend la situation actuelle des chefs de famille
monoparentale, c'est bien évident que ce qu'on constate... Ce que j'ai
décrit à l'occasion des rentrées scolaires, quant aux
coûts de logement, c'est amplifié, parce que les barèmes
actuels sont déjà moindres pour les personnes qui sont chefs de
famille et où il y a seulement une personne.
Il faudrait que je retrouve mes chiffres, mais je sais que la population
que la Saint-Vincent-de-Paul aide, c'est en général, d'abord, des
familles monoparentales.
Mme Harel: Je posais plutôt ta question sur les chefs de
famille monoparentale qui choisissent de rester...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel:... à la maison pour la garde d'un enfant de
plus de deux ans qui, selon le projet proposé, deviendrait comme un
refus de participation et verrait donc les prestations coupées.
M. Boyer: Exact.
Mme Harel: Quel est votre point de vue là-dessus?
M. Boyer: Jusqu'à ce que les enfants soient d'âge
scolaire, personnellement, je pense que la mère de famille qui voudrait
demeurer à la maison pour élever ses enfants devrait avoir le
choix de le faire.
Mme Harel: Et comment faire lorsque l'enfant, par exemple, est
d'âge scolaire, quand on sait que présentement il n'y a aucune
allocation en période estivale pour la garde d'enfants d'âge
scolaire? Cela s'arrête abruptement au mois de novembre et la garde
d'enfants d'âge scolaire reprend seulement en septembre, parce que durant
trois mois, durant les vacances de Noël, durant celles de Pâques,
enfin, l'équivalent, ça doit vous faire un bon trois mois plus ou
moins par année sur les douze mois. Il n'y a aucun service de garde pour
un enfant d'âge scolaire.
M. Boyer: M. le Président, c'est pour ça qu'au tout
début, ce que je disais, c'est qu'il faut faire en sorte que cette
politique s'articule avec une politique familiale, avec une politique
auprès des personnes que le rapport Harnois décrit, toute la
question de la désinstitution-nalisation, parce que c'est bien
évident que le problème des garderies - on pourrait
s'étendre là-dessus - est un problème majeur dans la
région de Montréal et probablement dans les autres régions
de la province.
C'est pour ça qu'il faut que ce soit articulé avec une
politique familiale afin de faire en sorte que même après les
heures de classe, ce soit la même chose. Le jeune enfant qui retourne
à la maison, parce que l'école se termine à 15 h 10 et
dont la mère est à la maison à 18 heures le soir,
qu'est-ce qui se passe durant ce moment-là?
Il y a déjà des programmes de garderie en milieu scolaire
qui ont été implantés. Ce n'est pas
généralisé et c'est dans ce sens-là qu'il faut
avoir une politique familiale qui vienne se greffer à ça. C'est
un tout. Quant à la politique de sécurité du revenu, pour
la Société Saint-Vincent-de-Paul, elle doit graviter autour d'une
politique familiale. Cela doit faire un ensemble, un tout et non pas seulement
une politique de sécurité du revenu.
Mme Harel: Je vais vous remercier. J'ai pensé, en vous
écoutant, que comme cette commission débute, je vais aller durant
la pause me chercher un petit cahier dans lequel je vais noter le profil de la
pauvreté. J'ai l'impression qu'à la fin de la commission, cela va
être assez chargé. Simplement le chiffre que vous nous indiquez,
soit que 46 % des revenus sont consacrés au logement dans le territoire
que vous desservez chez les personnes à faible revenu, c'est finalement
semblable à 45 %. Vous voyez, c'est à 1 % près des
chiffres que le CLSC Hochelaga-Maisonneuve m'avait remis à l'occasion de
Noël.
Et de savoir que c'est en août et septembre que vous êtes le
plus sollicités, au moment où la rentrée scolaire exige
des déboursés, je ne crois pas que dans le document
proposé il y ait maintenant - peut-être que le ministre pourra
répondre - au niveau des besoins spéciaux une augmentation de
l'allocation de retour à l'école. Il a déjà pris
l'engagement de la hausser. On aura peut-être une deuxième bonne
nouvelle aujourd'hui.
La première, c'est que le test de revenu ne s'appliquera pas dans
les HLM. Je vais me faire un petit cahier à côté pour le
noter aussi pour ne pas l'oublier, pour le lui rappeler. Je vous remercie
beaucoup. Dites-vous que le fait de vous être déplacés est
une contribution très importante à nos travaux.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
députée de Maisonneuve. M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, vous avez une question?
M. Thuringer: Oui, M. le Président. Merci. Vous avez
mentionné, en passant, les médecins et leur rôle dans cela.
Mais je n'ai pas remarqué vos commentaires sur l'agent d'aide
socio-économique. Quelle est votre réaction sur ce rôle,
cette personne qu'on plaint dans toute l'affaire?
M. Boyer: M. le Président, j'en ai dit un mot tantôt
quand je disais qu'il va falloir que le rôle de l'agent
socio-économique soit une personne qui ne soit pas seulement axée
sur le contrôle mais qu'elle ait aussi un rôle d'aide, de support
dans le cheminement. On parle d'un plan personnalisé pour chacun des
bénéficiaires. Il va vraiment falloir que ce soient des gens qui
aient un rôle de support. Dans ce sens, je pense qu'il va falloir qu'un
certain nombre d'agents actuellement en place soient recyclés ou encore,
pour toutes sortes de raisons, c'est plus l'application actuellement des
mesures d'aide sociale, de contrôle de revenu, etc. Si on veut vraiment
faire en sorte que les gens soient aidés, acheminés, il va
falloir que la formation soit accrue et que ce soient des gens qui aient une
formation en relation d'aide ou de ce genre.
Le Président (M. Bélanger): D'accord. Merci. Cela
va? En conclusion, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je voudrais vous remercier. On a
toujours tendance, la société, à abuser du
bénévolat, j'aimerais vous demander d'en faire encore un petit
peu pour les bénéfices de l'ensemble des membres de la
commission, parce que j'ai deux questions à vous adresser. Mais je ne
pense pas que vous ayez indiqué que, dans un cas, vous n'avez pas les
données et dans l'autre, je ne pense pas que vous les ayez non plus...
Auriez-vous l'amabilité d'acheminer à la commission les
réponses...
La première question touche naturellement une réflexion
approfondie de votre organisme sur la question de prêts et bourses aux
étudiants versus la contribution alimentaire parentale à l'aide
sociale. Vous demanderez à vos experts, à vos pratiquants
quotidiens, si je peux utiliser l'expression, de vraiment fouiller cet aspect
parce qu'on tient, comme gouvernement et comme parlementaires, à avoir
la réponse la plus éclairée possible de votre organisme
sur ce sujet.
Le deuxième élément touche les proportions de vos
clientèles. Vous indiquez, à la première page de votre
mémoire, 83 % des personnes ou familles dont le revenu principal ou
l'unique revenu est l'allocation de l'aide sociale. Est-ce que vous pourriez
avoir l'obligeance de nous ventiler les autres 17 % ? S'agit-il de personnes
qui ne sont inscrites nulle part? Des itinérants qu'on appelle, des gens
qui bénéficient de l'assurance-chômage ou des travailleurs
au salaire minimum?
M. Boyer: C'est un peu de tout cela. Ce sont des gens, par
exemple, qui sont en attente de prestations d'assurance-chômage. Ce sont
des gens qui reçoivent le salaire minimum, de petits salariés
qu'on aide à l'occasion. Ce sont des personnes âgées pour
qui le revenu, même avec le supplément du revenu garanti, est
parfois insuffisant. Je pense que c'est l'ensemble. On pourrait
également vous les ventiler. C'est, pour une bonne part, la
clientèle que je viens d'énumérer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous le demande, M. Boyer,
parce qu'il y a beaucoup d'éléments de notre politique qui sont
basés sur ce qu'on appelle le salaire minimum et son niveau. Si on se
rend compte que dans la société les gens qui reçoivent le
salaire minimum se retrouvent massivement dans les bras d'organismes
bénévoles comme le vôtre, on a des questions additionnelles
à se poser comme gouvernement et comme société. SI on se
rend compte que c'est l'exception, on peut peut-être y arriver par
d'autres moyens palliatifs sans cesser d'augmenter graduellement le salaire
minimum. Mais c'est une question qui me préoccupe
particulièrement comme ministre. Si vous aviez l'obligeance de nous
accommoder sur ces deux questions, nous vous en serions encore plus
reconnaissants.
Je profite de l'occasion, au nom de tous les membres, pour vous
remercier pour votre mémoire, vous remercier pour votre
présentation et vous remercier par anticipation pour les deux
réponses que vous allez nous apporter.
M. Boyer: M. le Président, on va essayer de trouver les
réponses et les faire parvenir au président de cette commission
parlementaire.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remer-
cie infiniment. On vous remercie de votre participation.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures,
(Suspension de la séance à 17 h 54)
(Reprise à 20 h 8)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun d'entre vous de bien vouloir prendre
place afin que nous puissions reprendre nos travaux.
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à une consultation générale et de tenir
des auditions publiques dans le but d'étudier le document d'orientation
"Pour une politique de sécurité du revenu".
Ce soir, nous accueillons le YMCA de Montréal et the Coalition
for the Rights of Welfare Recipients.
J'invite donc le groupe du YMCA de Montréal à
s'approcher.
Le YMCA de Montréal est représenté par Mme Sylvana
Anania, Mme Deborah Bonney et Mme Céline Charpentier. Je demande donc au
porte-parole de bien vouloir s'Identifier et de nous présenter les
représentantes du groupe. Je vous demanderais aussi, à chaque
fois que vous répondez à une question ou si vous devez faire une
intervention, de bien vouloir vous nommer auparavant. C'est tout simplement
pour la transcription du Journal des Débats. C'est important,
parce que les transcriptrices ne sont pas familières avec votre voix.
Vous avez exactement 20 minutes pour présenter votre mémoire. Si
vous n'avez pas terminé dans ce délai, je vous demanderai de
conclure très rapidement. Les parlementaires auront 40 minutes pour
poser des questions à la suite de votre présentation.
Je demanderais donc au porte-parole de s'identifier, de présenter
ses compagnes ainsi que le mémoire.
YMCA de Montréal
Mme Bonney (Deborah): Merci beaucoup. Bonsoir, M. le ministre,
mesdames et messieurs. Je suis Deborah Bonney. Je suis membre du conseil
d'administration du YMCA de Montréal et je préside le
comité de développement communautaire et de la politique sociale.
À ma gauche, Mme Sylvana Anania, directrice du développement
communautaire au YMCA de Montréal, et, à mon extrême
gauche, Mme Céline Charpentier, directrice du département
communautaire à notre succursale Hochelaga-Maisonneuve.
Ce soir, le YMCA de Montréal se présente devant vous et
nous sommes très reconnaissantes d'avoir cette occasion. Le YMCA de
Montréal est un organisme sans but lucratif qui existe depuis 135 ans et
qui a plus de treize points de services. Notre budget total est de 15 000 000
S, dont 93 % sont assumés par les revenus que génèrent les
programmes et services de notre réseau. Avec une programmation
diversifiée, le YMCA a acquis une vaste expertise auprès des
divers milieux de la société. Le YMCA se préoccupe de la
situation du chômage, de l'emploi, des conditions de vie et des
sans-emploi depuis plusieurs années. En ce qui concerne la
création d'emplois, le YMCA a directement contribué à
rétablissement de corporations de développement économique
communautaire dans trois quartiers, soit le programme économique de
Pointe-Saint-Charles, la Corporation de développement économique
et communautaire du Centre-sud et le programme Action-Revitalisation
Hochelaga-Maisonneuve.
Le YMCA a aussi récemment ouvert un centre d'Entreprise jeunesse,
dans le Vieux-Montréal, qui satisfera les besoins particuliers des
jeunes relativement au lancement de petites entreprises. Nos connaissances et
compétences dans ce domaine remontent à plus de cinq ans, tant au
niveau local que national.
Le YMCA offre aussi un programme de préparation à l'emploi
à l'intention des jeunes de 16 à 29 ans fortement
désavantagés sur le marché du travail. Ce programme,
Génération travail, fonctionne depuis 1983 et procure en moyenne
chaque année à 75 participants une formation à la
dynamique de la vie et aux techniques de recherche d'emploi. Nous avons aussi
développé une expertise auprès de jeunes mères
à Pointe-Saint-Charles et auprès d'ex-détenus. À
partir de cette expertise concrète et à cause des enjeux majeurs
de la réforme proposée, nous souhaitons faire connaître
notre point de vue.
Ce soir, nous allons mettre l'emphase sur la problématique de
l'employabilité et, si le temps nous le permet durant la période
de discussion, je crois que nous pourrons quand même discuter d'autres
points. Nous tenons pour acquis que vous avez déjà lu les
recommandations de notre mémoire. Nous aimerions donc en profiter, ce
soir, pour viser plutôt l'employabilité. Je demanderais maintenant
à Céline Charpentier de continuer ta présentation.
Mme Charpentier (Céline): Merci. Bien que le YMCA
possède une certaine expérience dans les Interventions
auprès des bénéficiaires de l'aide sociale et des
chômeurs, on ne prétend pas être des experts quant à
toutes les initiatives d'employabilité. Toutefois, notre
expérience nous a amenés à tirer certaines conclusions
concernant la proposition du gouvernement.
Une grande partie du contenu du document sur la réforme de la Loi
sur l'aide sociale est basée sur un seul facteur: la plupart des gens,
soit 73, 4 % des ménages, sont aptes au travail. Cela a amené le
gouvernement à recommander
plusieurs mesures que nous résumerons en cinq points: 1. Les gens
devraient être encouragés à trouver du travail, les
encouragements prenant la forme d'une diminution des prestations d'aide
sociale. 2. Les bénéficiaires prendront part à des
programmes limités en matière de recherche d'emploi, par exemple,
la méthode de recherche dynamique d'emploi. 3. Après neuf mois,
les bénéficiaires seront admissibles à des mesures plus
intensives, c'est-à-dire du type a) une formation définie comme
le développement d'une aptitude personnelle de compétence
professionnelle ou une éducation plus formelle pour les
décrocheurs et pour les analphabètes; et un deuxième type
b) des travaux communautaires ou des placements subventionnés sur le
modèle des bons d'emploi et des "grant diversion". 4. Ces initiatives
seront administrées par des fonctionnaires dont les services seront
retenus pour exercer les fonctions d'agent d'aide socio-économique. 5.
Que l'aide d'autres intervenants, tels les services sociaux, les
éducateurs, le patronat, les syndicats, etc., est essentielle pour
instaurer une gamme de nouvelles possibilités pour les
bénéficiaires d'aide sociale.
En résumé, dans ce contexte et étant donné
que très peu de détails ont été fournis quant
à la façon dont tout cela fonctionnera, nous percevons deux
lacunes graves dans cette proposition. La première lacune: Le programme
APTE au travail ne procure aucun encouragement, en ce sens qu'il punit
plutôt les gens qui font preuve d'un soi-disant manque de motivation.
Deuxièmement, la démarche utilisée pour résoudre le
problème d'employabilité n'a rien d'un investissement réel
puisque aucune somme additionnelle n'est injectée dans les
programmes.
Selon nous, une démarche fondée sur un investissement
implique l'établissement de politiques et de programmes qui
utiliseraient des tonds publics et privés afin d'encourager et appuyer
l'autosuffisance des bénéficiaires de l'aide sociale et
d'intensifier la croissance économique. Une telle démarche
consisterait principalement en deux choses: D'abord, mettre à la
disposition des bénéficiaires des ressources pour qu'ils se
trouvent un emploi et, deuxièmement, coordonner les efforts de toutes
les structures, y compris celles touchant la sécurité du revenu,
la formation, l'éducation, les services communautaires, les services
sociaux et le développement économique.
Un autre point maintenant, étant donné qu'une très
grande partie du document porte sur le terme "employabilité" nous
aimerions définir plus concrètement ce terme par des exemples.
Que signifie "être employable"? Examinons deux emplois et
déterminons ce dont une personne a besoin pour les occuper. D'abord,
l'exemple d'un serveur. La personne choisie devra savoir écrire et lire,
car elle doit écrire et lire des factures. Elle devra additionner des
factures. Elle devra donc posséder certaines compétences en
arithmétique. Elle devra avoir maîtrisé certaines
techniques, par exemple, comment servir les repas, nettoyer les tables, prendre
plusieurs assiettes et les transporter.
Pour occuper un emploi auprès du public, elle devra aussi
être capable de travailler avec le public, être polie, sociable,
propre et possiblement bilingue selon l'établissement.
Sur le plan physique, cette personne devra être en forme
étant donné qu'elle sera appelée à passer la
journée debout. Une bonne mémoire lui sera également utile
afin de se souvenir des commandes et des tables.
Prenons un autre exemple pour illustrer ce que veut dire "être
employable": Une réceptionniste. La personne choisie devra savoir lire
et écrire. Elle devra être en mesure d'utiliser un système
téléphonique probablement sophistiqué. Elle devra
être bilingue et, pour occuper un emploi auprès du public, elle
devra être également capable de travailler avec le public,
être polie, sociable et présentable. Comme c'est un emploi
sédentaire, très peu de résistance physique sera
nécessaire.
Ces exemples peuvent apparaître simples, mais ils sont utiles pour
définir ce que nous voulons dire. Le deux emplois décrits
précédemment sont considérés comme des emplois de
nouveaux débutants, c'est-à-dire des emplois qui ne
requièrent aucune compétence particulière et dont la
rémunération est très peu élevée. Il est
évident que toute personne possédant des compétences
limitées peut occuper ces postes.
Toutefois, nous n'avons mentionné aucune autre compétence
qui pourrait aider les gens à trouver et conserver ces emplois. Ces
compétences comprennent la confiance en soi, l'estime de soi, ta
discipline, la capacité de s'adapter au milieu dans lequel ces emplois
sont offerts, la connaissance des responsabilités d'un employé
envers son employeur, la connaissance du droit d'un employé, la
maturité, les aptitudes à l'organisation, ta capacité de
prendre des décisions, etc.
L'acquisition de ces compétences est communément
appelée formation à la dynamique de la vie. Une personne
bénéficiant de l'aide sociale est une personne marginale. Son
milieu est déterminé par le fait qu'elle reçoit de l'aide
sociale. Cela signifie que toutes les caractéristiques
énumérées précédemment sont souvent absentes
chez bon nombre d'assistés sociaux ou chez toute autre personne vivant
en marge de la société en raison de ses revenus, de sa race ou de
son statut social.
Le YMCA offre un vaste éventail de programmes pour les gens
bénéficiaires de l'aide sociale ou de l'assurance-chômage.
L'un de nos programmes, qui s'appelle Génération travail, vise
à aider les jeunes fortement désavantagés sur le plan de
l'emploi à devenir employables. Le programme comprend trois volets. Une
formation à la dynamique de la vie, la recherche d'emploi et une
expérience de travail. Plus de 50 % de notre programme intensif d'une
durée de trois
semaines met l'accent sur la formation à la dynamique de la vie.
En outre, nous ne subventionnons pas les expériences de travail et
recherchons des employeurs ayant des emplois à offrir à nos
jeunes participants ou intéressés à créer des
emplois à court terme à leur intention.
Notre suivi auprès de chacun des participants dure 18 mois et
nous les encourageons à communiquer avec leurs conseillers s'ils
éprouvent un quelconque problème. Notre taux de succès,
jusqu'à présent, frise les 90 %.
Un autre programme que nous offrons est le programme Jeune mère,
de notre succursale de Pointe-Saint-Charles. Il s'adresse aux jeunes
mères célibataires âgées de 16 à 20 ans. Ce
programme vise uniquement à développer les aptitudes à la
vie quotidienne de ces mères par l'entremise de programme
d'activités, comme des activités physiques, des cours sur la
gestion d'un budget, des discussions de groupe, etc. Nous croyons qu'une
mère inscrite à ce programme est en mesure de prendre une
décision relativement à sa vie future au bout d'environ douze
mois.
Ces deux programmes contiennent deux éléments essentiels.
Le premier: tous les par* ticipants sont motivés et y adhèrent de
plein gré. Ces programmes ne pourraient fonctionner, selon nous, s'il
n'y avait aucune motivation de la part des participants. Pourtant, la
proposition sur la réforme de l'aide sociale va à l'encontre de
ce principe en prévoyant une punition pour les
bénéficiaires de l'aide sociale. Le deuxième
élément essentiel est l'appui témoigné aux
participants pendant toute la durée du programme. Si ces
mécanismes d'appui n'étaient pas en place, les participants ne
pourraient pas survivre dans un milieu externe auquel ils ne sont pas
familiers. Nous avons essayé aussi d'aller voir ailleurs.
En passant en revue certains documents américains portant sur la
réforme de l'aide sociale, nous avons pris connaissance d'un article
intéressant paru dans la revue "Entrepreneurial Economy" - dont j'ai
copie ici - qui décrit une initiative fructueuse mise sur pied au
Maryland. Sur un bon nombre de plans, cette initiative ressemble à la
proposition du gouvernement, sauf qu'elle date de 1982. Elle comprend un
programme d'employabilité individualisé, jumelé à
une gamme d'activités diverses. Parmi celles-ci, on trouve une aide
à la recherche d'emploi, les modèles des "grant diversion" -
cette expression est reprise telle quelle dans la proposition du gouvernement -
une expérience de travail et une formation professionnelle. Ce programme
touche maintenant la moitié des bénéficiaires de l'aide
sociale du Maryland. La partie la plus intéressante de cet article
consiste en ce que les dirigeants du programme ont appris depuis 1982. Nous
voulons citer les leçons qu'ils en ont tiré. 1. La population
bénéficiaire de l'aide sociale est
hétérogène et a, par conséquent, des besoins
différents en matière d'emploi, de formation et de services.
Aucune activité, par elle seule, ne peut intégrer tous les
bénéficiaires de l'aide sociale au marché du travail. 2.
Les bénéficiaires les plus fortement défavorisés
qui ont besoin de tous les services profitent au maximum du programme. Il faut
donc trouver des fonds adéquats pour ce type de
bénéficiaires. 3. Bien que desservir les
bénéficiaires fortement coûte cher, ceux-ci permettent
habituellement de réaliser des économies sur le plan de l'aide
sociale. 4. Le succès des programmes d'employabilité
destinés aux bénéficiaires de l'aide sociale dépend
des conditions du marché de l'emploi local. En d'autres mots, s'il y a
peu d'emplois disponibles, les programmes sont voués à
l'échec.
À la lumière de ce dernier point, l'État du
Maryland a décidé de mettre en oeuvre deux nouveaux programmes en
1987. L'État canalise maintenant ces fonds en vue de: 1. Appuyer et
développer les efforts déployés par les organismes de
développement économique locaux afin de créer de nouveaux
emplois permanents; 2. Financer des organismes locaux afin d'offrir des
services de soutien complémentaires qui permettront aux
bénéficiaires de l'aide sociale d'occuper des emplois
nouvellement créés. Ces services de soutien comprendront des
services de garderie et des services de counselling permanents. De plus, il est
important de noter que ces programmes sont appliqués de manière
décentralisée.
En conclusion, nous croyons que l'ensemble de la proposition sur la
réforme de l'aide sociale n'aura qu'un Impact limité, à
moins que certaines conditions ne prévalent. 1. Que la conception et le
financement des programmes bénéficient de l'ampleur, de la
diversité, de la profondeur et de la compréhension requises et
que ceux-ci soient élaborés et mis en oeuvre avec la
participation du secteur non gouvernemental; 2. Que les stratégies de
création d'emploi requises pour permettre aux
bénéficiaires de l'aide sociale de devenir autosuffisants soient
mises en place; 3. Qu'une certaine coordination soit instaurée à
l'échelle provinciale et régionale afin d'assurer une
participation et une contribution égales de la part de toutes les
structures touchées.
Compte tenu de tous ces facteurs, nous espérons que le
gouvernement reconsidérera sérieusement son intention de
réduire les prestations versées aux bénéficiaires
qui sont jugés aptes au travail, étant donné l'absence des
fonds et des emplois nécessaires pour répondre à leurs
besoins.
Le gouvernement a transformé sa politique de
sécurité du revenu en un modèle de préparation
à l'emploi. Nous considérons que les programmes et le
modèle proposé ne permettent pas d'atteindre les objectifs
visés par la réforme.
Finalement, nous voulons dire que le gouvernement devra régler
les problèmes soulevés avant d'envisager l'application de cette
réforme. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions,
madame. Alors, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Très rapidement M. le
Président. Je souhaiterais vous remercier pour votre mémoire
ainsi que pour votre présentation qui ne contredit rien de ce qui est
contenu dans votre mémoire. Au contraire, vous avez choisi de
développer un aspect.
Mes remarques seront brèves, parce que je veux laisser à
des députés de ce côté-ci de la table, qui m'ont
indiqué qu'ils avaient des questions précises à vous
poser, le temps de vous les poser. Notre temps est également
limité du côté parlementaire.
Je vous dirai qu'en ce qui concerne le programme Soutien financier, sauf
votre argumentation contenue au mémoire, quant à l'application de
la charte discrimination etc, et sur laquelle nous avons des réponses
parce qu'il y a déjà eu des tests qui ont été
effectués par les tribunaux, dont la Cour suprême de la Colombie
britannique, qui a jugé qu'il ne s'agissait pas de discrimination, qu'il
s'agissait strictement de choix qu'un gouvernement effectue, à moins que
vous ayez d autres arguments en ce qui concerne la distinction entre employable
et non employable, c'est un point sur lequel on pourrait facilement se
réconcilier.
Vous avez des questions sur le programme APPORT Pourquoi ne
s'applique-t-il pas de façon universelle, un peu comme le SUPRET,
plutôt que de s'appliquer aux familles? Là-dessus c'est un choix
qui a été fait en fonction de l'orientation des politiques
familiales qu'a prise le gouvernement, que vous avez retrouvée dans le
dernier budget du ministre des Finances et que vous retrouvez également
dans cette politique de sécurité du revenu, parce que la
présence d'enfants dans le ménage est, d'après nous, un
frein important à la rétention ou à l'accession au
marché du travail.
Je vais parler des programmes d'employabilité et un peu de la
façon dont vous nous avez présenté la
problématique. Je vous dirai qu'avec un taux de succès de 90 %,
on n'a pas grand-chose à vous reprocher. On a avantage à regarder
sérieusement la façon dont vous vous y êtes pns parce que
s'il fallait qu'au gouvernement nous ayons un taux de succès de 90 %
dans l'ensemble de nos programmes, nous serions élus et
réélus à vie.
Je vous dirai que votre présentation m'a impressionné
ainsi que votre façon d'aborder la clientèle sur une base
individuelle à partir de groupes locaux impliqués dans leur
communauté et la façon que l'on tient à
privilégier. De plus, là où il semble y avoir une
incompréhension entre ce que vous avez pu retrouver et qui mérite
sans doute des clarifications et votre présentation, c'est l'aspect
punitif versus l'aspect incitatif. J'ai même trouvé que dans votre
mémoire, vous étiez allés assez loin en rendant
obligatoires quasiment certains programmes d'employabilité.
Je vous invite à regarder encore une fois le fameux tableau qui
se trouve à ma droite et à vous demander ou vous situeriez de
façon idéale le niveau de base de la prestation, le barème
en tenant compte comme vous nous l'avez exprimé, que nous devons inciter
les gens à participer à des mesures d'employabilité et que
nous devons également inciter les gens à travailler. Lorsqu'on
arrive avec le salaire minimum en haut à 699 $ et qu'on se retrouve,
dans le cas d'une participation, à un gain de 600 $ sur une base
mensuelle on se dit: Est-ce qu'on peut vraiment réduire cette incitation
au travail davantage? Donc, on part d'une prestation de base, d'une incitation
à travailler, d'une incitation à avoir des gains de travail et
une incitation à devenir un travailleur dans la société de
façon régulière. Et c'est la marge de manoeuvre. C'est
I'espace qui est le vécu de la société
québécoise aujourd'hui. Celui-ci c'est 125 000 travailleurs de la
société québécoise qui travaillent à ce
niveau-là de la société. Ce n'est peut-être pas
suffisant. Depuis deux ans nous avons augmenté le salaire minimum
à deux reprises. Il avait été gelé pendant cinq
longues années sous le précédent gouvernement. II y a
peut-être encore du rattrapage. Peut-être nous faut-il
accélérer l'élévation de cette ligne. Mais est-ce
qu'on peut vraiment augmenter ici? Et, est-ce qu'en n'offrant pas des
allocations de participation jointes à des frais de participation, on
n'incite pas, dans un premier temps, la personne à participer à
des mesures? Et, dans un deuxième temps, est-ce qu'on ne l'incite pas
à devenir un travailleur dans la société? C'est ma
question. Je laisserai, par la suite, la parole aux autres
députés.
Le Président (M. Bélanger): Mme Carpentier, si j'ai
bonne mémoire. C'est cela?
Mme Charpentier: Charpentier.
Le Président (M. Bélanger): Charpentier
Excusez-moi. (20 h 30)
Mme Charpentier: Ce n'est pas grave. Je suis habituée.
Ce qu'on a inscrit dans notre mémoire sur la question de comment
devrait être déterminé le montant des prestations. On a
essayé de l'établir en fonction de ce qui nous semble être
l'ultra minimum vital pour les gens. Et, malheureusement, on pense qu'il est
difficile d'aller en deçà de cette réalité, et,
dans la conclusion de notre mémoire, on ramenait un certain nombre de
conséquences possibles d'aller en deçà de ce que les gens
ont minimalement besoin pour vivre. Ce qui nous semble être quand
même le cas, même avec les montants qu'ils reçoivent
actuellement.
Par ailleurs, en ce qui concerne la nécessité d'inciter au
retour au travail, nous sommes d'accord. Peut-être qu'il est pensable
d'imaginer d'autres types de mesures fiscales qui permettraient cette
incitation sans couper les prestations avant que les gens soient en mesure
de
s'intégrer. Et, finalement, je dirais qu'il est un peu
contradictoire de devoir couper les prestations des gens dans la période
où on leur demande de se chercher un emploi, parce qu'il y a des
coûts importants reliés à la recherche d'emploi. On n'a
peut-être pas toutes les réponses à toutes les questions,
mais ce dont on est sûr, c'est qu'on ne peut pas demander aux gens de
vivre avec moins que l'ultra minimum vital sous peine de payer ces coûts
d'autres manières.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, |e vais demander
expressément au ministre lia permission d'interroger le YMCA. D'ailleurs
je vais au YMCA, Young Men's Christian Association, où sont les hommes,
mais on ne s'oppose pas. On est très content que vous soyez en
majorité totale. Je connais très bien votre organisme et,
surtout, la dame assise au centre, Mme Sylvana Anania, parce que votre
organisme est très actif dans mon comté de Sainte-Anne et plus
particulièrement à Pointe-Saint-Charles. Et, quand, dans votre
mémoire, vous référez à la page 2, au PEPSC,
programme économique de Pointe-Sainte-Charles, au centre Entreprise
jeunesse du Vieux-Montreal, je dois dire que j'étais impliqué
dès la première minute et que c'est grâce au gouvernement
du Québec - parce qu'on a tout de même fait une belle
contribution, après un peu de tordage de bras - si on a réussi
ces initiatives qui sont pour moi fantastiques. Parce qu'on a vécu cela
ensemble. On a travaillé ensemble là-dessus et il faut aller sur
ce chemin-là. Et quand vous demandez au gouvernement d'impliquer le
secteur privé, parce que vous êtes tout de même dans le
secteur privé, je suis certain que nous sommes tous d'accord avec
cela.
Avant de poser une question, j'aimerais vous dire que je suis
très content d'avoir, avec le ministre, très souvent,
rencontré tous les organismes à Pointe-Saint-Charles au cours des
deux dernières semaines. On m'a dit Maximilien, cela ne vaut rien; c'est
une commission bidon, Paradis a décidé, vous n'avez plus rien
à dire. Je ne pense pas. Je pense que nous sommes ici pour
écouter, pour apprendre et pour bonifier. Vous n'étiez pas ici
cet après-midi, je vous lis donc la première page de la
déclaration du ministre - c'est lui qui parle - "j'ouvre la porte aux
modifications qui bonifieraient la politique". Pour moi c'est de la musique
à mes oreilles et aux oreilles de plusieurs de mes collègues.
Nous ne sommes pas ici des "yes men" Nous sommes ici pour tenter de bonifier le
projet et vraiment trouver une solution. Je pense que, sur les principes, nous
sommes d'accord. Sur les modalités, on a aussi beaucoup de questions. On
se pose beaucoup de questions qui ont été soulevées
auparavant par d'autres groupes.
J'ai quelques questions. Maybe I should put some of them in English to
test Sylvana because
I noticed she feels very well at ease in English, and we discussed it
before I am one of those who believe that we should communicate in both
languages, knowing that the YMCA is serving its clientele also for a great part
in English and, at Pointe-Saint-Charles, your unit is very English oriented or
mixed, iet us say.
À la page 3, vous dites: La clé de notre succès -
vous parlez du YMCA - réside en la spécificité de notre
programme appliquée à la spécificité du groupe
cible. Vous dites: Nous travaillons sur un groupe particulier et on donne
vraiment un traitement personnalisé. Ce qui m'a touché dans le
document du ministre, c'est précisément quand on parle de ce
même traitement individualisé, quand on parle d'un dossier
personnalisé. Je connais très bien ceux qui vivent de l'aide
sociale et j'ai toujours été estomaqué de voir que la
personne n'était plus un individu, n'était plus traitée
comme un individu. Dans son programme et dans le programme du gouvernement, ce
qui m attire le plus, c'est qu'à un moment donné, on aura un
dossier personnalisé. Un fonctionnaire agit à titre de
conseiller, il s'assoit avec l'individu, homme, femme, fille ou garçon,
pour parler de son cas et tenter de trouver une solution afin de le ramener sur
le marché du travail. Êtes-vous d'accord avec cette approche
individualisée?
Mme Anania (Syivana): Je pense qu'il y a une différence
entre une approche individualisée et, ce dont on parle, une
spécificité du groupe cible. L'approche qu'on utilise dans
Génération travail, ce n'est pas une approche
individualisée. C'est une approche de groupe. Toutes les trois semaines
qu'on fait avec douze jeunes, cela se fait en groupe. On aimerait que le jeune
soit capable de s'adapter à un groupe. Il doit travailler avec d'autres
personnes. Alors, il doit s'exprimer, il doit apprendre dans une
collectivité qu'on appelle autres chômeurs ou jeunes
chômeurs. Je ne peux pas en dire plus de l'approche du gouvernement parce
qu'elle n'est pas détaillée, mais je ne suis pas
nécessairement d'accord avec une approche individualisée dans le
sens d'un conseiller et d'une personne toute seule. Je ne pense pas que
l'apprentissage du bénéficiaire va se faire de cette
manière. Je pense que la spécificité de la
problématique de la personne, que ce soient des jeunes mères, des
jeunes chômeurs ou des personnes de 40 ans et plus qui vivent dans le
quartier Hochelaga-Maisonneuve ou sur la Côte-Nord, doit être prise
en considération quand vous faites le dessin de l'approche. C'est
peut-être la différence.
M. Polak: Je pense que vous êtes peut-être tout de
même... J'ai peut-être mal exprimé ce que je cherchais,
c'est plutôt... Ce que je trouve intéressant, c'est le respect de
l'individu. Vous êtes d'accord avec cela, j'imagine?
Mme Anania: Oui.
M. Polak: D'accord. À la page 8, vous trouvez arbitraire
la division de quatre grilles entre apte et inapte. J'ai longuement
pensé à cela et j'en ai discuté souvent avec des groupes
communautaires puisque le même point de vue a été
soulevé. Vous savez que le document dit que chaque personne est
réputée être apte à moins que la personne soit
trouvée inapte. Cet après-midi, et cela me satisfait beaucoup -
et je vous donne peut-être un renseignement que vous n'avez pas
reçu parce qu'on apprend toujours en écoutant les autres
mémoires - le ministre a répondu et moi, cela m'intriguait ce qui
détermine apte et inapte et comment le processus fonctionne, puisque le
document n'en parle pas. Je peux vous renseigner un peu et vous pourrez
peut-être commenter là-dessus. J'ai compris du ministre cet
après-midi que l'individu a le droit de venir d'abord avec son propre
médecin en disant: Mon médecin me dit apte ou inapte; ensuite, le
gouvernement aura le droit de dire: Voici, on reçoit le document et on
voudrait vérifier cela; on vous envoie consulter un autre
médecin, faire une contre-expertise, et, si les deux sont d'accord,
comme le ministre le disait cet après-midi, le problème est
réglé, et s'ils ne sont pas d'accord, le cas tombe devant la
Commission des affaires sociales.
Cela me rassure beaucoup, parce que les groupes que j'ai
rencontrés m'ont dit: Maximilien, nous serons tous forcés de nous
présenter un matin devant le médecin choisi par le gouvernement
et il va passer cela vite, savez-vous? Tout le monde sera apte. Je suis
très content d'avoir appris cet après-midi qu'il est prévu
dans le processus que c'est le médecin de l'individu qui donnera la
première analyse. Êtes-vous d'accord avec cette approche?
Mme Charpentier: Quand on dit, dans le mémoire, que ce
jugement est arbitraire, ce qui suit ensuite,. c'est que, d'après nous,
tout le monde est apte au travail. Cela dépend des conditions, des
moyens et du financement qu'on est prêt à mettre en ligne de
compte. On n'est pas si loin de la période où le gouvernement
mettait de l'avant des politiques pour les handicapés, pour les
aveugles. Une question qu'on posait, par exemple: est-ce qu'une personne
aveugle est inapte au travail? Cela dépend de ce que la
société est prête à investir dans une
première mesure.
Dans ce sens-là, distinguer entre apte et inapte au travail,
d'une part, dans l'attribution... Ce ne sont pas seulement des
catégories comme cela, cela amène aussi à
déterminer des montants, mais c'est aussi discriminer, malgré
l'intervention tantôt de M. Paradis... c'est-à-dire juger et faire
des catégories. Il est sûr que cela prend des catégories
pour gérer un programme aussi vaste. Il y a une différence entre
faire des catégories pour offrir des programmes adaptés et faire
des catégories pour déterminer le montant des prestations, quant
à nous.
Un autre exemple qu'on pourrait prendre, un jeune en très bonne
santé physique, mais qui a des problèmes de toxicomanie est-il
apte ou inapte au travail? Autrement dit, la réalité est
extrêmement compliquée et il est très dangereux, dans la
pratique, de devenir arbitraire, et pas nécessairement pour des raisons
médicales. Donc, on pense que les gens de notre société
ont tous le droit au travail, qu'il y a des problèmes à leur
fournir actuellement du travail, mais qu'on ne doit pas mettre sur le dos de
leur aptitude ou de leur inaptitude le problème du manque d'emplois.
Dans une société où il y aurait 1 % de taux de
chômage, beaucoup de gens handicapés de toutes sortes auraient des
emplois, je pense qu'on aurait raison de s'en enorgueillir aussi.
M. Polak: Juste pour répondre, parce qu'on parle en
même temps que le ministre. Il vient de m'aviser, et il pourra
peut-être élaborer plus tard là-dessus, que
l'expérience vécue démontre que - il parle peut-être
dans 90 % des cas - cela ne donnera pas de problème. C'est un peu comme
la fameuse chasse des boubou macoutes. Dans mon comté de Sainte-Anne,
j'ai toujours dit: Si vous trouvez un abus, venez me voir comme
député. Vous n'avez pas besoin de professeurs de McGill pour
attaquer. Venez voir le député. Il connaît très bien
le ministre. On va régler le cas si on peut le régler. Personne
n'est encore venu me voir. Je posais cette question devant mes groupes
communautaires. J'ai dit: Je le savais parce qu'il y a deux ans que je posais
des questions. Donc, quand cette fameuse chasse a commencé,
j'étais prêt à les protéger.
Une dernière question parce qu'il faut qu'il reste un peu de
temps au ministre. In English because we received a letter from Alliance
Quebec. I will ask this question to Anania specifically because it is very
important to me. Alliance Québec wrote to the minister on January 14th:
Whether the program in question is "Stage en milieu de travail" "Jeunes
volontaires", "Travaux communautaires" or the "Services externes de
main-d'uvre", all are often not available in English to members of the
English speaking community. The proposed reforms effectively mean that not only
the members of our community have fewer options to Improve but, in addition,
they will be financially penalized as a result of a situation we ought to
control. "
So, they are raising the question of the unilingual English individual,
welfare case which, as you know, exists. They might write to me in Sainte-Anne
too. Under these programs they would like to embark, there is no such program.
Are you aware of that because, for me, this is a thing f am sure will come up
later on from Alliance Quebec? Have you heard about it?
You can answer in English. There is no problem.
Mme Anania: Mais je préfère répondre en
français.
M. Polak: Parfait.
Mme Anania: Dans le programme que nous avons qui s'appelle
Génération travail, nous avons deux groupes de jeunes qui
fonctionnent en anglais qui sont parrainés. Nous avons une grande
demande pour le programme parce qu'il semble qu'il existe très peu de
ressources dans la communauté anglophone.
Pour nous, le problème c'est que beaucoup de ces jeunes sont
unilingues anglophones. Alors, quand on leur offre des stages au travail,
très peu d'entreprises sont prêtes à engager des
anglophones unilingues. Alors oui, je suis d'accord. C'est un gros
problème dans la communauté anglophone pour ce qui est des
programmes et aussi pour ce qui est de l'unilinguisme des jeunes.
M. Polak: Merci, M. le Président. Je ne veux pas prendre
plus de temps parce qu'il faut...
Le Président (M. Bélanger): La parole est à
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Heureusement qu'il n'a pas pris trop de temps. En
fait, il a pris tout le temps consacré à la formation
ministérielle. Mais s'il a d'autres remarques, cela me fera vraiment
plaisir parce qu'on en apprend beaucoup avec les propos...
Le Président (M. Bélanger): il ne faut pas oublier
que c'est le député de Gouin qui a droit à une
période.
Mme Harel: Bon. Ce serait excellent.
D'une part, j'étais contente d'apprendre ta conception que se
fait de la défense des droits mon collègue, le
député de Sainte-Anne, parce que ce qu'il a sensibilisé ce
n'est pas le caractère odieux, par exemple, qu'une mesure
générale comme celle des enquêtes à domicile a pu
représenter pour ses concitoyens, ce n'est pas le discrédit qui a
été finalement jeté sur toute une catégorie de nos
concitoyens. C'est le fait qu'un seul abus juridique ne lui a pas
été rapporté. (20 h 45)
Je crois qu'il y a quand même à un moment donné des
droits collectifs, notamment celui de ne pas être considéré
comme une catégorie de personnes qui fraude plus que l'ensemble des
autres catégories dans notre société. Quand le ministre
répond à l'interrogation qui est contenue dans votre
mémoire concernant l'éventuelle atteinte à l'article 10 de
la Charte des droits et libertés de la personne, c'est l'article 15, non
c'est 10...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le mémoire c'est 10,
mais dans la charte, c'est 15.
Mme Harel: Non, l'article de la loi... de la Charte des droits et
libertés du Québec, c'est 10.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'accord. Cela va.
Mme Harel: Peut-être que du fédéral c'est 15,
mais du Québec, c'est 10.
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... c'était 15...
Mme Harel: C'est d'ailleurs ce qui m'amène à
l'inviter à mettre à jour sa jurisprudence, parce que quand il
nous cite la jurisprudence de la Colombie britannique à l'égard
de la condition sociale, quant à mol je l'inviterais à être
plus prudent Car que diraient nos tribunaux à l'égard d'une
Charte des droits et libertés du Québec, puisque c'est bien
l'article 10 de la Charte des droits et libertés du Québec qui
est mentionné, laquelle n'est pas, je pense, en vigueur, dans une
province comme la Colombie britannique. Il faudrait ne pas répondre trop
prématurément que les catégories ne sont pas d'une
atteinte aux abus, en fait, qui pourraient être considérés
comme un abus de droit en matière de condition sociale...
Cela m'amène à vous poser la question si vous-mêmes
avez fait faire des recherches en cette matière. Il y a
déjà, j'imagine, des causes en matière de condition
sociale, qui ont été peut-être, à votre
connaissance, portées devant les tribunaux. Ce que l'on sait, c'est
qu'un nouveau régime comme celui qui est proposé met une fin
à ce qui, depuis 25 ans, depuis le rapport Boucher, était
considéré comme le point de départ, comme le fondement,
comme l'assise d'une politique de sécurité du revenu et qui
était la reconnaissance des besoins indépendamment des causes.
Vous mentionnez dans votre mémoire, à la fin - cela m'a
intéressée parce qu'on le retrouve aussi dans le mémoire
du Conseil du patronat qui témoignera devant la commission à
l'ouverture, demain matin - que c'est là un changement fondamental, et
vous la qualifiez comme ceci. Vous dites, à la page 18: "Le gouvernement
a transformé sa politique de sécurité du revenu en un
modèle de préparation à l'emploi. " C'est ce que dit le
Conseil du patronat. Le Conseil du patronat applaudit.
Vous, vous dites: "Nous considérons que les programmes et le
modèle proposé ne permettent pas d'atteindre les objectifs
visés par la réforme". Donc, vous dites: II n'y aura plus de
politique de sécurité du revenu. Ce serait comme une sorte de
programme de préparation à l'emploi perpétuel si tant est
qu'il n'y a pas d'emplois pour ces personnes, qui s'ajoutent évidemment
aux 300 000 chômeurs au Québec. Il faut quand même parfois
le rappeler. Et vous ajoutez également: "Nous voulons aussi qu'une telle
réforme garantisse que la Loi sur l'aide sociale
sera toujours une mesure de dernier recours pour les personnes sans
revenu".
Est ce à dire que vous avez considéré le fait que
les besoins essentiels devaient être reconnus, ce minimum cette
subsistance minimale devaient être reconnus indépendamment du fait
que les gens soient jugés aptes ou inaptes? C'est en d'autres termes ce
que vous disiez. Ces catégories peuvent être utilisées aux
fins de programmes de formation de recyclage mais ne peuvent pas être
utilisées aux fins de déterminer des barèmes.
J'ai bien compris et cest la première fois que je vois une
distinction si nette entre I'usage qu'on peut faire des catégories pour
simplement faciliter l'administration, ou I'accès à certains
programmes, et l'usage qu'on en fait pour déterminer les barèmes.
J'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Charpentier: En fait, voici la troisième
recommandation qu'on fait à la fin du mémoire, page 15: Attendu
que les prestations d'aide sociale doivent répondre aux besoins
essentiels des bénéficiaires; attendu que nous ne pouvons pas
être d'accord avec la discrimination selon I'aptitude ou I'inaptitude au
travail, ou toute autre forme de discrimination, nous recommandons qu'une
échelle de prestations soit dressée pour tous les
bénéficiaires légitimes de l'aide sociale et quelle
reflète I'indice du coût de la vie au Québec.
Autrement dit, pour nous la question d'aptitude ou d'inaptitude, les
moins de 30 ans ou les plus de 30 ans, ou toute autre forme de distinction qui
ne donnera pas le minimum requis pour vivre au Québec, n'est pas
acceptable. Autrement dit, même si, et nous l'avons prouvé nous
avons commencé a faire des programmes d'employabilité bien avant
aujourd'hui, nous sommes d'accord pour dire qu'il faut effectivement travailler
à ce que les gens retournent sur le marché du travail, pas pour
nous d'abord, mais pour eux, pour qu'ils aient effectivement comme c'est dit au
début du document, la dignité et I'autosuffisance. Cela ne doit
pas se faire au détriment de la survie - je pense qu'on a aussi une
expertise sur la connaissance de la pauvreté à Montréal -
des bénéficiaires de l'aide sociale. On donne un exemple dans le
document. On dit qu'actuellement une femme seule ou un homme seul avec deux
enfants gagne 887 $ par mois avec l'aide sociale. C'est déjà
très difficile de vivre avec cela. II faudrait parfois faire des calculs
bien précis pour voir ce que cela donne vraiment, parce que ces chiffres
sont bien théoriques. II nous semble quasiment impensable que quelqu'un
puisse vivre avec 687 $ par mois, ce que cette personne aura dans les neuf
premiers mois ou elle sera bénéficiaire de l'aide sociale. Je
dirai seulement que les enfants là-dedans, on n'en parle pas beaucoup,
mais ce serait peut-être quelque chose dont il faudrait parler davantage.
Ce quon dit dans cela c'est oui, cela prend des programmes
d'employabilité. Oui, on pense que les gens doivent avoir le soutien
pour retourner sur le marché du travail. Oui, on pense quon doit
créer des emplois et non, on ne peut pas être d'accord pour faire
cela en enlevant en regard de la loi actuelle et des montants accordés,
sur le minimum vital. Pour répondre à d'autres questions non, on
n'a pas fait de recherches, quant à nous, sur la question de
jurisprudence mais la situation nous inquiète. C'est ce qu'on peut dire
jusqu'à maintenant et c'est ce qu'on a inscrit dans le mémoire.
On n'est pas convaincu qu il n'y aura pas de problème.
Mme Harel: Vous savez combien tout cela est complexe. II demeure
que le ministre, je pense, comme première remarque, vous a
référé au tableau qui est derrière lui. Comme vous
pouvez le constater, ce qui plafonne au tableau, cest le salaire minimum. Donc,
le raisonnement du ministre est à peu près le suivant: l'aide
sociale désincite au travai. Or, la réduction des barèmes
peut inciter au travail. II faut donc réduire les barèmes. Cela
s'appelle, en général, un sophisme. Pour trouver un sophisme que
le ministre peut comprendre, je pensais au suivant: le premier ministre du
Québec déteste la chicane, mais le premier ministre s'est
chicané avec son ministre. Donc le premier ministre n'aime pas son
ministre. C'est faux. Cest complètement faux Cela c'est un sophisme. Un
sophisme, c'est...
M Paradis (Brome-Missisquoi): II s'agit de la
députée de Maisonneuve et de son ancien chef.
Le Président (M. Bélanger): À I'ordre s'il
vous plaît.
Mme Harel:... cela a l'air d'un raisonnement vrai. Le sophisme,
c'est que cela a I'air dun raisonnement vrai, mais finalement cela
s'avère faux. La question que le ministre posait question qui est le
fondement, la pierre d'assise, la logique de tout le système est la
suivante: les besoins essentiels définis dans le projet, tel que
proposé, sont les besoins à partir des dépenses de
consommation des travailleurs à plus faible revenu. Donc, on parle de
ces dépenses de consommation qu'un groupe avant vous a
déjà critiquées du fait que ce sont là des
dépenses qui sont encore déjà réduites du fait
qu'elles le sont par les travailleurs à plus faible revenu de notre
société. Là, le propos du ministre, si vous regardez
toutes les catégories, brassez-les, vous pouvez agiter les dés
comme vous voulez dans n'importe quel sens, c'est toujours à partir du
principe que le salaire minimum ne tient pas compte des charges familiales. Or,
les programmes de transfert en tiennent compte. II faut donc réduire les
programmes de transfert. Cest le point de départ. C'est le point de
départ de ce tableau-là. Le tableau, par exemple, qui est
devant nous c'est pour des personnes seules. Bon. Sauf que le même
raisonnement vaut. Le même raisonnement vaut dans le sens ou il doit y
avoir une compétition qui incite au travail entre les barèmes et
le salaire minimum. Le ministre dit. Nous l'avons augmenté, nous
continuerons à l'augmenter, contrairement à I'ancien
gouvernement, etc. Mais il sait très bien qu'iI y a une limite à
I'augmenter et que cette limite est celle de ses compétiteurs des
provinces à côté qui lui dictent souvent... parce qu'ils se
sont entendus Québec et Ontario pour discuter ensemble, n'est-ce pas?
Disons ses partenaires, n'appelons pas cela des compétiteurs, appelons
cela des partenaires. Donc, le salaire minimum n'est pas entièrement
déterminé par le ministre, il l'est par les forces du
marché, aussi. Et ses barèmes vont I'être maintenant par
les forces du marché puisqu'il faut un écart que le ministre
considère être toujours de 100 $, ou presque, entre I'ensemble des
gains du salaire minimum et les gains qu'on peut obtenir avec les
barèmes, la participation et les gains de travail.
C'est le point de départ. À partir de ce moment, vous
êtes dans une sorte de logique implacable, ou vous êtes dans la
logique de la réduction des barèmes pour être incitatifs au
salaire minimum plutôt que du maintien, même bonifié ou
amélioré, d'un programme comme SUPRET, pour supplémenter
même pour les personnes seules, les gains de travail.
Vous dites dans votre mémoire, à la page 13 - c'est
évident que c'est assez sommaire - qu'une politique de plein emploi
coûterait, 1 800 000 000 $, c'est bien cela?
Mme Charpentier: Ce sont des programmes de pleine
employabilité.
Mme Harel: La pleine employabilité coûterait 1 800
000 000 $ et vous dites qu'il faudrait créer de 500 000 à 600 000
emplois pour répondre véritablement à l'objectif. C'est un
objectif social auquel tout le monde adhère. Tout le monde est pour le
retour au travail de tous ceux qui sont sans emploi.
La question est bien posée dans votre mémoire. Quand vous
nous avez présenté votre mémoire, vous nous avez
parlé dans des termes qu'on n'entend presque jamais ici. Vous nous avez
parlé d'estime de soi, de confiance en soi. Vous avez dit des mots qu'on
n'entend jamais, comme le mot "appui". Il semble que dans vos programmes, vous
donnez un appui durant trois semaines, un suivi. Des mots donc, qui ne sont pas
des mots de contrôle. Les jeunes ne vont pas se faire contrôler, si
je comprends bien lis vont se faire accompagner. Est-ce que je dois comprendre
que c'est.
Est-ce que leur incitation a pour but d'augmenter leur barème?
Qu'est-ce que c'est l'incitation qui fait qu'ils vont chercher chez vous cet
appui? Est-ce qu'ils ont une incitation financière? S'ils n'y vont pas,
est-ce qu'ils ont une réduction? S'ils y vont, est-ce qu'ils ont une
incitation?
Mme Anania: Au programme Génération travail
volontaire, nous avons un tiers des jeunes qui sont des assistés
sociaux, un tiers qui sont à l'assurance-chômage et un autre tiers
qui n'ont pas de revenu. Je ne peux pas vous dire ce qui les incite à
participer au programme, sauf qu'on ne les accepte pas s'ils ne sont pas
motivés.
S'ils ne veulent pas travailler, nous ne les acceptons pas dans le
programme. On ne peut pas travailler avec des jeunes qui ne sont pas
motivés.
Mme Harel: Et dans votre mémoire, vous recommandez une
sorte de nouveau programme, en fait de six nouveaux programmes, une
recomposition des programmes et vous déclarez qu'il faudrait qu'il y ait
un caractère obligatoire à la participation à ces
programmes. C'est un peu contradictoire avec la motivation et le
caractère volontaire de l'expérience que vous menez
maintenant.
Mme Anania: Nous proposons que le plan d'action des
assistés sociaux soit obligatoire. Nous ne voulons pas dire quel genre
de programme ces personnes auraient besoin. Nous sommes d'accord pour qu'un
bénéficiaire ait le choix de participer à tout genre de
programme. Les jeunes qui viennent chez nous veulent seulement une chose: avoir
un emploi. Ils ne sont pas prêts parfois à participer à un
programme de trois semaines parce qu'ils aimeraient avoir l'emploi demain.
Alors, cela prend beaucoup de motivation de notre part pour les convaincre
qu'ils ont besoin de ce programme de dynamique de vie, mais une fois qu'ils
sont dans le programme, ils apprennent beaucoup et, dans l'évaluation,
ils sont d'accord que c'est ce programme de dynamique de vie qui va leur donner
la chance de s'intégrer au marché du travail. Alors, on est
d'accord que ce soit obligatoire, mais ce qui est obligatoire c'est le plan
d'action personnalisé. (21 heures)
Mme Harel: Pour vous, est-ce que la participation au programme
d'action modifie ou non les barèmes? Est-ce que votre plan d'action est
un facteur qui détermine un barème d'assistance?
Mme Anania: Non, parce que pour nous, les barèmes doivent
être égaux, que la personne soit apte ou non.
Mme Harel: Quand vous avez rédigé le
mémoire.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, je dois vous dire que quand
j'ai pris la parole, il était un peu
plus de 20 h 45.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée, le chronométreur en arrière,...
Mme Harel: Je crois qu'on a 20 minutes Ici.
Le Président (M. Bélanger): Oui, mais le
chronométreur me fait signe qu'il vous reste deux minutes à votre
intervention.
Mme Harel: Trois minutes, me dit-on, M. le Président. Il
faudrait que vous...
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez
procéder, s'il vous plaît, en conclusion.
Mme Harel: En trois minutes? Le Président (M.
Bélanger): Oui.
Mme Harel: Alors, après avoir rédigé votre
mémoire, a été rendu public un document confidentiel du
ministère qui n'avait pas été rendu public par le
ministre, une sorte de livre du maître, le livre qui avait
été déposé ayant été un peu celui de
l'élève, si vous voulez, où il n'y avait pas toutes les
réponses. Dans ce document, vous retrouvez une contribution parentale de
100 $ qui doit être obligatoirement, non pas versée, mais
déduite de la prestation d'un jeune qui fait pour la première
fois une demande d'aide sociale et qui n'est pas marié ou qui n'a pas
habité deux ans comme conjoint de fait, ou qui n'a pas d'enfant, etc.
J'aimerais avoir votre point de vue si tant est que vous avez eu l'occasion de
réfléchir sur cette question de contribution parentale, vous qui
travaillez très près des jeunes et qui avez une expérience
auprès d'eux.
Mme Charpentier: En fait, dans notre mémoire, dans tes
différents éléments qu'on a traités, au
début on parlait du changement de la structure familiale. Ce qu'on
disait, c'est qu'effectivement il y a eu énormément de
changements et il y a beaucoup plus de familles monoparentales et la famille
est en crise. Tout le monde le dit, tout le monde le sait. Cela nous
apparaissait assez contradictoire avec la volonté d'imposer ce qu'on
appelle une solidarité familiale. Non pas que la solidarité
familiale ou le soutien des membres d'une famille l'un à l'autre ne soit
pas une bonne chose, mais on pense qu'elle est actuellement volontaire et
qu'elle doit le demeurer. Pour nous, il s'agisssait de plus d'un changement
d'attitude aussi assez important que cette loi amenait pour une des
premières fois. Dans ce sens, on pense que ta situation de la famille
est assez précaire en général. On pense aussi que les
jeunes, rendus à 18 ans, sont des adultes responsables et que les
familles doivent effectivement continuer à soutenir les enfants, mais
sur une base volontaire et non pas sur une base obligatoire. Cela nous semble
ouvrir la porte à toutes sortes d'autres mesures du type: les
prestations de vieillesse seront-elles liées au revenu des enfants de
ces personnes âgées? Il nous semble que ce soit une autre vision
qui demande à tout le moins à être discutée
sérieusement avant d'être acceptée.
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez
remercier, Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui. Je vous remercie beaucoup, M. le
Président, de me donner du temps pour les remercier. Cela a
été fort intéressant parce que vous avez une expertise qui
est indiscutable. Il n'y a personne autour de cette table qui, je pense, ne
sache pas le travail que vous avez réalisé dans tous les milieux,
à Montréal, anglophones comme francophones. Je crois que votre
mémoire a été bâti a partir de cette
expérience et cela va nous être très utile.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant de remercier, M. le
Président, j'ai pris en note certains points que vous nous avez
mentionnés. Également, quant à l'investissement
gouvernemental requis ou absolument nécessaire dans le cadre des mesures
d'employabilité, si vous regardez comme il faut à la page 35 du
mémoire, vous réaliserez que c'est un montant de 815 000 000 $.
ce n'est pas le milliard quelques centaines de millions, mais 815 000 000 $,
dans le cas d'une participation à 100 %, que le gouvernement met
à la disposition des prestataires, en argent neuf, frais et nouveau,
comparativement à la politique d'aide sociale présentement. Si
les bénéficiaires veulent s'en prévaloir, il s'agit de 445
000 000 $ additionnels.
Le deuxième point que je souhaiterais souligner, ce n'est pas
quelque chose qui a été discuté de vive voix, mais on le
retrouve à la page 7 de votre mémoire, lorsque vous parlez de la
femme enceinte. Je tenais à le souligner parce que vous avez une
interprétation de notre mémoire qu'on retrouve dans plusieurs
autres mémoires de divers groupes. C'est peut-être parce que ce
n'était pas suffisamment clairement exprimé. Lorsque vous dites
que la femme enceinte serait doublement pénalisée dans la
structure d'aide proposée en étant placée dans une
catégorie de non-admissibilité, j'ai compris de votre
rédaction que vous pensez que c'est obligatoire, à partir du
moment où une femme est enceinte. C'est une catégorie
additionnelle pour laquelle elle peut opter. Ce n'est pas une obligation qu'on
lui fait. Je ne sais pas si cette clarification peut aider votre
compréhension de l'approche que nous avons prise.
Dans un troisième temps, je vais vous réitérer mes
félicitations pour le succès à 90 % mais j'ai
constaté à la suite des réponses que vous avez
apportées à Mme la députée de
Maisonneuve, que bien que la clientèle dont vous vous occupez ne
soit pas la clientèle la plus facile, il ne s'agit pas non plus de la
clientèle la plus difficile chez les assistés sociaux. Lorsque
vous nous parlez d'une motivation de l'individu sans prestation additionnelle,
c'est ce que j'ai cru comprendre, on parte de la crème des
assistés sociaux. Mais je pense que votre approche, en les mixant avec
des gens qui viennent d'autres milieux, soit des gens qui sont prestataires de
l'assurance-chômage, donc en chômage depuis moins longtemps, ou
d'autres jeunes, un tiers, un tiers, un tiers, semble avoir du mérite
parce que les résultats que vous obtenez sont quand même
très satisfaisants. Je ne veux rien enlever, et le gouvernement se devra
de compter sur la participation de votre groupe et d'autres groupes similaires
qui oeuvrent dans le milieu près de la communauté et que les taux
de succès risquent...
Le Président (M. Bélanger): Brièvement, M.
le ministre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... d'être plus
élevés si on fait appel au type de groupe que vous êtes et
impliqués comme vous l'êtes. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, mesdames, nous vous
remercions de votre présentation et j'invite le prochain groupe: la
Coalition for the Rights of Welfare Recipients. Je vous répète
nos règles de procédure. Vous avez exactement 20 minutes pour
présenter votre mémoire et je vous prierais avant chaque
intervention, lorsque vous avez, soit à répondre à une
question ou à en poser une, de bien vouloir donner votre nom pour les
fins de la transcription au Journal des débats, pour qu'on puisse
l'enregistrer à ce moment-là parce que vos voix ne leur sont pas
encore connues. Alors, je demanderais donc au porte-parole du groupe ou
à la porte-parole du groupe de bien vouloir se présenter et de
présenter les autres participants et, par la suite, de procéder
à la présentation du mémoire.
Coalition for the Rights of Welfare Recipients
M. Kinloch (John): Je m'appelle John Kinloch et je suis
coordonnateur de Multi-Caf, une cafétéria communautaire qui
essaie de répondre aux besoins alimentaires des démunis de
Côte-des-Neiges, à Montréal.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous voulez
nous présenter vos...
M. Kinloch: D'accord. À ma droite il y a Vicky Nucciarone,
qui vient du YWCA Legal Clinic, Sandra Capponl. qui est une
bénéficiaire de l'aide sociale, Liesel Urtnowski du Conseil
communautaire de Notre-Dame-de-Grâce et Trish Murphy du projet PAL,
à Verdun.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Si
vous vouiez présenter votre mémoire.
M. Kinloch: The Coalition for the Rights of Welfare Recipients
comprend 23 groupes communautaires de Montréal qui travaillent de
près avec les défavorisés. La coalition se
considère comme une voix qui appuie les démunis anglophones, une
communauté souvent oubliée lorsqu'on parle de la pauvreté
à Montréal. Le président et les députés
présents ne sont peut-être pas au courant de la composition de
notre coalition; je vous offre donc une liste des organismes qui font partie de
notre coalition.
I would like to briefly address the measures outlined in the Employment
Incentive Program outlined in the Income Security Policy. The very name of this
program described in the Government's document is deeply offensive to us in the
Coalition, it places the blame for unemployment squarely on the shoulders of
those who - quote - "lack the incentive to work". The Coalition sees the
situation quite differently. We wonder what has to be done to provide an
incentive to get this Government to do its job, that is to say ensure decent
living conditions for the citizens it is supposed to represent.
The basic problem the Government deliberately fails to address is that
there are precious few jobs available in this Province. That is the reality,
Mr. Paradis. We stress this point because it is one you have failed to grasp.
In the Income Security Document, your Government congratulates itself for
having created jobs and allowed for an environment that is conducive to
economic growth. Again, the reality is different. The jobs that are being
created are few, part-time and concentrated in low-paying, dead end areas of
employment. The CSN brief you have no doubt received provides useful statistics
in this regard. Their figures reveal that most jobs created are clustered
around the minimum wage, an amount that, in itself, means poverty.
With specific regard to the Employment Incentive Program, we would like
to point out that during the eligible period, people are offered virtually no
support to find jobs, such as money for transportation, appropriate clothing or
day care. In addition, during this time, people who are in the - quote -
"intensive job search" have to allocate time to find necessary resources, tike
food from food banks, clothing, etc. During the - quote - "participation
period", a single person will only get t7 $ more than under the current indexed
rate for 1989 and this, at a time when people are unable to maintain themselves
under the current system.
The participation programs in place only respond to 25 % of those
eligible for them, a clear indication that the Government has no expectation of
addressing the employment needs
of the vast majority of so-called available employables. In addition we
want to know what kind of success rate the Government expects to achieve
through these programs. How many participants will end up with full-time good
paying jobs?
We can only conclude that through participation programs, the Government
will be creating a pool of workers who will be working at minimum wage or
sub-minimum wage ratesé. The overall effect of this is an attack on the
minimum wage and unaccepted labour standards.
On the issue of work income exemptions, we would make two points First,
people should be allowed to make up to the minimum wage, not the 155 S
presented Second, work income exemptions cannot be seen as a realistic
opportunity for people at a time when jobs are so scarce.
After the first nine months, a participant will work closely with the
"socio-economic agent" These agents, in fact, are nothing short of being
"boubou macoutes" in sheep s clothing It was not enough for these agents to
invade recipients' homes, now they will involve themselves in every aspect of
the welfare recipient's life.
The document describes this relationship between recipient and
socio-economic agent as equal but, in fact, it is based on an inherent
imbalance in power, with the recipient on the receiving end of the agent's
arbitrary power in sum, the Government is creating the conditions for the
further spiritual, physical and economical impoverishment of the already poor.
As the coordinator of a community cafeteria in Côte-des-Neiges, I
supervise ten "travaux communautaires" workers and I can attest to the desire
these people have to see their labour recognized The Employment Incentive
Program offers these people and others nothing. (21 h 15)
Mme Nucciarone (Vicky): The Government policy is an attack on
women and is both sexist and discriminatory towards women, particularly with
regard to single-parent families headed by women According to Government
statistics, two thirds of all families on welfare are single-parent families
and of these, 95 % are headed by single mothers Seven out of ten have had to
apply for welfare benefits after a change in their marital or family situation
and, despite legal recourses, we know that 84 % of these women are unable to
obtain any alimentary allowance for themselves or their children.
In Quebec, we know that a majority of women earn 67 % less than men,
work for minimum wage, occupy part-time positions and, consequently, four out
of ten households headed by women live below the poverty line Women are the
most disadvantaged, despite their contributions in both the economic and social
realms and despite their contributions, labour and support they provide for
others, their families and society
It is this population that the Government intends to coerce into
accepting part-time temporary work which is both low-paid and dead-end. Even if
these women obtain jobs, we know that day-care space for children under five
are seriously lacking and, for those under three, are nonexistent in addition,
the Government policy does not mention allocation for child care expense during
job search periods or under job participation programs or for children of
school age We feel that any mother should have the choice of caring for her
children, regardless of their age.
How can this Government explain the fact that one unemployable
individual will receive 585 $ a month and one single-parent family with a child
will also receive 585 S a month? During the first nine-month program, compared
to the present or current tariff of 684 $, this implies a minimal loss of 99 $
per month in addition to special needs being reduced Is it the intention of
this Government to save money at the expense of the health and welfare of women
and children? This particular situation is discriminatory.
If we take another example and compare the benefits proposed for a
two-parent family and a single-parent family, in the two-parent family, one
parent can be in the PWA program, the other can stay and care for the children
The single-parent family has no choice We feel this is a double standard and
discriminatory We feel participation should be voluntary so as not to place
children at risk.
We feel the only question one may ask as regards to this policy reform
is Are we prepared to live with the effects that the implementation of the
policy will have on women, children and society? Is this the kind of society we
desire? By cutting back on the already insufficient benefits provided for to
this population and putting increased pressure on women, we will see the
effects of increased mental health problems such as tension, stress,
depression, despair, suicide, homeless, increase in youth protection cases,
increase in accusations of shoplifting at the municipal courts.
Presently, the majority of all youth protection cases involve
single-parent families on welfare Women are considered neglectful if they leave
their children and lazy if they choose to remain at home with their children
Municipal courts are already overloaded with cases of shoplifting for food Is
the State aware of the unrealistic expectations and repercussions that this
policy will have on the already underfunded and overburdened social services in
our Province, for example, youth protection services, food banks, community
groups, hospitals, shelters for battered women, soup kitchen, and the list goes
on?
Presently, food banks are telling us that they are seeing children
lining up at food banks
all over the Province and having insufficient food. Is this the reality
this Government is prepared to live with?
Mme Urtnowski (Liesel): As we said in our brief, we are in
agreement with the Government's efforts to supplement low-waged family incomes,
because even a full-time job at minimum wage places a family of two well below
the Statistics Canada poverty line.
We are aware, at the same time, of this Government's apparent interest
in decreasing the number of welfare recipients. If that Is so, then it seems
contradictory to require 44 000 low-income breadwinners eligible for a work
supplement to register at Travail-Québec centres to join the APPORT
program. Will these workers now have to submit to the same controls and
humiliations as the recipients of social aid? Will these workers who formerly
received the SUPRET now be examined, judged, watched, labelled and categorized
like all other welfare recipients? Could the problems in the SUPRET program not
be resolved in another way? If the amounts were raised and the payments sent
more frequently, this income supplement would allow low-waged family heads to
maintain the dignity which comes with the recognition of being members of the
work force?
This Government needs to acknowledge the growing ratio of part-time jobs
to full-time ones and not penalize members of the part-time temporary labour
force with the controls of the social aid bureaucracy.
We also suspect that the administration of this program will be far more
costly than that of the SUPRET. New social aid workers will have to be trained
to manage the lives of low-income families. This means more visits, meetings,
paperwork which will increase the bill to the tax-payar. it would appear that
the real intention of this Government Is to eliminate the SUPRET which also
offered supplements to low-waged individuals. Without the SUPRET these
individuals, who may have been part-time workers, will be added to the
thousands who are searching for full-time jobs, or they will have to stop
working altogether and join the nine-month lineup for the participation
programs under the APTE. In this process, more social aid recipients will be
created.
Of course, this Government, In its desire to save money, might be
expecting many low income families who had been receiving SUPRET payments to be
reluctant to register for a program which will clearly identify them as welfare
recipients, a status which many are eager to avoid. These families, who do have
low-waged part-time jobs, will suffer their poverty rather than submit to the
indignities of the social aid system.
Some examples of the controls that they will be subjected to are the
regulations about the sharing of lodging in the case of two single parents who
hope to save a little money from their meager earnings and, at the same time,
break their isolation and give each other a little emotional support
Another example of the bureaucratic control is the application of the
defacto consort ruling which is an insult to women's dignity and independence.
Surely a woman and her children should not be forced to depend on a man for his
pay cheque. Or perhaps women should limit their relations with consorts to
eleven and three quarter months.
I would simply add that the 48 bureaucratic categories into which
recipients are to be slotted strike us as quite ridiculous. We envision that
even with the help of computers, social aid agencies and their supervisors,
their heads may burn out as recipients shift from categories of unemployable to
unemployable participant who are temporarily unavailable, whose conjoint of
twelve months is a single and pregnant parent in an Employment Incentive
Program, but perhaps newly unavailable. We predict this reform is unmanageable,
impossible to administer, that agents and lawyers will be kept running from
revision to revision, from appeal to appeal. The complicated scenario is
perhaps one for the theater of the absurd.
Mme Murphy (Trish): It is apparent to the members of the
Coalition for the Rights of Welfare Recipients that the Government has given
little thought to the serious consequences its reform package will have on the
lives of adults as well as children within the social welfare system. These
consequences have to be addressed.
Segregating beneficiaries into categories of unemployable and employable
has dangerous implications. Firstly, for those considered as unemployable,
categorizing these people as permanently unable to work is both stigmatizing
and limiting. In addition, we do not accept the Government's claim that this
new policy will in any way make adequate provisions for those under the
Financial Support Program. In fact, the Financial Support Program offers 13 $
less per month than what would have been received if trimestrial indexation of
existing benefits had not been abolished in 1986. Those under financial support
would still be well below the poverty line. Their opportunities for adapted
work experience would be minimized and their segregation within its society
increased.
Secondly, for those considered as employable, the proposed benefit
scales are inadequate and pose a direct threat to the health and security of
the person and the family. Specially within the first nine months, those
expected to be involved in an intensive job search will also be engaged in an
intensive resource search, whether it be for food banks, community soup
kitchens, cheap housing, temporary shelter
accommodations, free baby sitting and so forth.
Both these undertakings will be extremely difficult as there are no
provisions of the means for such job related necessities as transportation,
communications, day care and In many cases lodging. In order to survive, every
welfare recipient enroled in the Employment incentive Program will, during the
first nine months, have to procure a part-time job whose income does not exceed
or fall short of the allowable job rate exemptions. Where are they expected to
find this work? What kind of work are they expected to undertake? Cheap
baby-sitting? Collecting bottles in the streets? Prostitution? We already know
that between 5000 to 8000 persons per day are using emergency food services in
the Montreal area alone. If these are the present circumstances, what can we
expect under the new reform?
Within these two categories of employable and unemployable there are
many segments of this population who will be particularly hard-hit by this
Income Security Policy. We can begin by looking at youth. The high rate of
homelessness and unemployment among the young as well as the significantly high
suicide rate for those under 30 in Quebec speak out against any justification
for postponing parity for another two years.
In addition, we cannot accept the Government's intention to introduce a
ruling on parental contributions irrespective of the family's willingness to
contribute. This can only result in additional stress on families, higher rates
of domestic violence and to the same circumstances we have today, that of the
total destitution of the young. Other individuals who will be particularly
hard-hit by this reform package, include all three groups of persons who come
under the "able but unavailable for" category. The Government's proposal to
offer persons over 55 the option of claiming the unavailable status clearly
acknowledges their poorer chances for unemployment. It does not acknowledge,
however, that this is a situation that is likely to continue for another ten
years in the lives of these people. We hardly consider this period of time as
temporary. The real long-term needs of those over 55 must be met and the
proposed reduced benefits are not sufficient to do so.
For those unavailable due to poor physical or mental health and for
single-parent families with children under two, the insufficient means provided
in the proposed benefit scales can only serve to promote poor mental and
physical health and to deteriorate quality of life, specially for families with
young children. The new regulations concerning shared accomodations are
extremely punitive and will have negative consequences for all welfare
recipients. For those considered as unemployable, this risks ghettoising this
category as it would limit their possibilities to cohabit with welfare
recipients who would be docked 115 $, approximately, from their cheques.
For those considered as employable, this would penalize people for
availing of mutual aid in their private lives, one of the few means they have
surviving on the benefits they receive even under the present system
In our view, this reform package is really intended to make life on
welfare so difficult as to force many recipients into low-paying unregulated
jobs at the expense of their own health and well-being as well as that of their
families. We should not forget, however, that even this option is limited to a
few and that greater numbers will have no choice but to remain on the welfare
roles and under these oppressive conditions. This new policy should be
recognized as one designed to increase the incentive to stay on welfare rather
than to increase the incentive to work.
Mme Capponi (Sandra): The Ministry of Manpower and Income
Security introduced...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
en conclusion, maintenant.
Mme Capponi: Sorry?
Le Président (M. Bélanger): In conclusion,
please.
Mme Capponi: In conclusion?
Le Président (M. Bélanger): In conclusion.
Mme Capponi: Yes, this is in conclusion. The Ministry of Manpower
and Income Security introduced its position paper towards Income Security
Policy just before the Christmas break, allowing us only five weeks to respond.
The public has been led to believe that this position paper is a mere proposal,
yet to be discussed through a public consultation process. Yet the time
constraints, the refusal to hold hearings in Montreal, the refusal of funding
to allow poor people groups to respond, the vagueness and serious
contradictions within the document and the conspicuous absence of specific
information have thwarted attempts to critique this policy. As well, we fail to
understand how the Ministry, even before a consultation has begun, has already
implemented elements of this so-called proposed reform through the elimination
of the SUPRET program, through a bureaucratic Internal changes within the
welfare structures and through, the issuing of directives in line with this
reform policy.
In light of the content of the internal document only recently
accessible to us, we are shocked and outraged that the measures proposed within
the position paper are not the result of unknowing politicians and bureaucrates
who are in need of sensitization, but a deliberate and concerted attack upon
the poor of this Province. The Ministry's campaign, these last two years,
to
undermine and malign welfare recipients through claims of fraud and
welfare cheats, the pressing of charges against doctors who had issued medical
certificates and the deliberate distorsion of the reasons why a large number of
recipients have failed to pick up welfare cheques at local offices during the
mall strike last July...
Le Président (M. Bélanger): Sorry, the time is
finished.
Mme Capponi:... have all been used to manipulate and mislead
public opinion so as to substantially reduce any serious opposition to this
policy being introduced, and the Minister has never really substantiated his
claims. We urge this Government to put an end to the witch hunts and to begin
to seriously take into account the truth and painful realities of the ever
increasing numbers of poor and working poor. (21 h 30)
Le Président (M. Bélanger): It's now ail the time
we have for your presentation. This is now the time for question period. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Je trouve drôle, M. le Président,
l'alternance...
Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi, M. le
ministre.
Mme Harel: Cela me ferait plaisir, d'ailleurs...
Le Président {M. Bélanger): Oui, je m'excuse,
j'avais la tête ailleurs.
Mme Harel: Si c'était mon tour, je leur laisserais le
temps de terminer leur exposé. Il vous manque combien de temps?
Le Président (M. Bélanger): How much time do you
need?
Mme Capponi: About two minutes.
Le Président (M. Bélanger): Two minutes? Okay, we
will go on.
Mme Capponi: Because, Mr. Paradis, people are suffering here in
Québec and. the climate of fear created by you and your Ministry has had
the desired effects at a tragic human cost. People, men, women and children are
frightened. People who already have very real difficulties getting by from one
day to the next are suffering even more as a direct result of this campaign and
the very real threat this policy poses. Yes, our welfare system in in dire need
of reform, but real reform, designed to meet today's reality of high
unemployment. We need real jobs, not incentives. The poor too wish to
contribute to society and not have our potentials killed off as well as that of
our children.
The Government must take measures to reduce its bureaucracy rather than
to expand upon it and the money saved there be given over to the poor who
really need it. Calculations of benefit should be ajusted to meet the real
needs of individuals and all discriminatory categories abolished. The Ministry
must end its harassment techniques, especially the home visits, which are
described in the internal document as disincentives to remain on welfare, as
opposed to creating any real incentives to work.
Penalties for shared accommodations or HLMs must be abolished.
Escalating housing costs must be taken into account in the calculation of
benefit levels. A housing policy must be established so that all have access to
decent affordable housing and this should not be seen as separate from any
reform policy. Special needs must be maintained and improved upon, especially
where child care and medical expenses are concerned. Poor people's health
suffer already and to remove special needs while introducing a lowering of
benefits is nothing short of criminal and shifts enormous costs over to an
already overburdened health care system. The Government must take serious
measures to implement a full-employment policy, which is the only real means of
ensuring income security and equal opportunity for all citizens of
Québec.
In closing, we urge this Government to withdraw its position paper and
to introduce a real consultation process through which we might realize a more
just and sane reform policy. Mr. Paradis, while for you these proceedings may
be an empty exercise, real lives, ours and our children's, are being affected.
Are you willing to live with the very real and tragic consequences of this
policy paper?
Le Président (M. Bélanger): Thank you. M. le
ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Yes, I am going to start by
thanking you for your memoir and for having shown up here today to tell us what
you had to do. I am going to do the same thing as I did with the YMCA a few
minutes ago, I am going to try to tackle some of the facts, put in a few
questions, then let the MNA for NDG put some questions in because we are also
limited by the rules of the commission and our time is limited.
I will start whit what we appear, for a very slight moment, to be in
agreement upon: the Employment Incentive Program. Some aspects of it have to be
correctly interpreted. Where I start to disagree, it is when somebody said that
it is intended to save money. It is replacing the SUPRET, you are right. The
SUPRET has cost, during the most expensive year, the Québec Government
25 000 000 $. The Employment Incentive Program is expected to cost, during
the first year of operation, 65 000 000 $, so it is a lotal net of 40
000 000 $ of additional money. So, unless somebody lied to me at the Finance
Department, Treasury Board and within the Department, unless all those public
servants are liars, that is what I am told.
I want to correct one misinterpretation - and you are not the only group
to make it because it was and it used to be true - when you said that most of
the jobs created are part-time jobs. It used to be true, but between the month
of January, the twelve-month span, the last twelve months from January to
January, 120 000 new jobs have been created in Quebec. Among those jobs
created, 116 000 were full-time jobs and 4000 were part-time jobs. And that is
a trend. It is not an accident. From month to month, we are getting the
creation of what you call full-time jobs instead of what used to be part-time
jobs.
About the Financial Support Program, think we have major disagreements
there. 1 do not think we are cutting off any money. Altogether, for about 100
000 people who are on welfare - we are toid that those are the most difficult
cases on welfare - we are adding 100 000 000 $ a year of new money fully and
completely indexed. That might not appear to be a lot of money to some people
in society, but it is 1000 $ a year for those people and you can average it to
approximately 100 $ a month for those people. For those people, it is quite a
substantial increase. We can argue: Is it enough? Is it not enough? But
compared to what they would have retained, if the system had kept on, indexed
to 1989, it is 100 000 000 $ a year. That is what I am told by the top public
servants at the Finance Department, Treasury Board and within my own
department, unless they are all liars, and those numbers have been checked and
counterchecked.
I want to talk about the program for which you expressed more concern.
Sorry, my English... I missed it. The first program I discussed was the
Parental Wages Assistance, the one I am going to talk about. That is my
mistake. I want to talk about the Employment Incentive Program and I want to go
back to one major question that was brought to us: that we should allow people
to make at least up to the minimum wage. 1 think that is what I got from the
question.
We are of the opinion - we might be wrong and we stand to be corrected -
that we have to keep a little difference here, because if we allow people to
make as much as people on minimum wage, people are going to stay on welfare for
a very, very long time if we do not keep a tittle distance here: 689 $ as
minimum wage, 600 $ if the person gets the allocation and the participation
work. Is it your pretention - that is my question - that on top of those 80 $,
we should add another 89 $ so that person, without being taxed, should be
allowed to go up to as much as the minimum wage earner?
Mme Murphy: They should be allowed, in the job rate exemptions,
to reach the minimum wage levels However, one of the problems in cutting the
benefits back so drastically as you are proposing to do is that the job rate
exemption cannot be seen as a guarantee if raising the standard of living. For
those who are going to be under the Employement Incentive Program, within the
first nine months, there is going to be an incredible influx of people
competing for very few jobs along with those who are on unemployment insurance
or whatever. There is no possibility for an individual to survive on 405 $ a
month. Everybody will have to be competing for these jobs. We do not feel that
there is enough.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): You have a good point there, but
we have to take care especially of what I call the most difficult clientele.
Just for your information - you know, I learned it myself when I went through
the files of the Department - people who come on welfare, newcomers, contrarily
to public belief, 60 % of them go out of the welfare system, I would say
pratically by themselves within the first nine months.
Mme Murphy: Is it not stated in the document that 40 % go out? 60
% stay on welfare.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): 60 % stay in and 40 % go out.
Mme Murphy: But 60 % stay on welfare for more than nine
months.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Even 40 % - how would I say - of
people going out by themselves, it shows that a lot of them are interested in
getting out of the system, even the actual system. I will let the Member from
NDG go into details.
M. Thuringer: I too want to thank you for your brief. I am aware
of some of the concerns that were expressed to me in a number of meetings. I
guess the thing that strikes me is that your conclusion Is that we should
really scrap the whole bloody thing and start over again. My own feeling is
that there are some elements in here, in the support system, that are positive.
The key factor that I understand Is the question that you feel that the whole
thing is designed, and even with some of the references. I know some of the
examples in there, where we refer to the criminal aspect or the drug users and
so on. so that that image of welfare seems to be perpetuated...
On the other hand, you also say that unless we create jobs, nothing is
going to happen. It
seems to me that it is an aspect that we are working on. Secondly, it is
also the training, because we talked earlier this afternoon about the East End,
where a certain number of jobs were created and the actual availability of
people to qualify for those jobs was not there. So, that is another aspect that
we really have to home in on: the training side.
I guess my question is: In terms of categories, you feel very strongly
that we should not be categorizing people and I have some of your arguments,
because I have already met... You say-Keep the categories or put one scale for
everybody. But it seems to me, for those people who are unemployable - it is
not for the rest of their lives necessarily - that we treat those somewhat
differently than those who are employable. How would you see that
happening?
M. Kinloch: There are a couple of points that can be made on this
and maybe some can elaborate after. The very basic response to what you are
saying is: What we are saying is that the sole criterion for welfare rights
should be need and putting in all these different categories does not address
that question. In fact, what it does is make differences and make artificial
ones, make very arbitrary ones. So, recognizing need as the ground on which you
base a social welfare policy is important and this document does not do
that.
Mme Urtnowski: I would like to add that if you are unemployed
because you have a disability or are sick or because there are too few jobs,
too many people chasing too few jobs, you are not going to get one. You are
still a person with the same needs and I do not think one should be penalized
because you cannot find a job. It seems to me that the needs are the same. You
still have rent and food and clothing to pay.
Mme Murphy: In a number of aspects in the policy paper, it is
unclear to us how the Minister has arrived at those figures when calculating
needs. For example, in the internal document that was recently made public by
the "Front commun", It is calculated that a two-bedroom apartment somewhere can
be rented for 338 $ a month. The Government uses this amount to justify
penalties of 115 $ each for sharing accommodations. According to the Central
Mortgage and Housing Corporation's survey of April 1987, we can see, for
example, that in the Verdun area, in which the organization I work for is
located and in which Mr. Polak is MNA, the average rent for a two-bedroom
apartment is 413 $ and the average rent for a similar type of accommodation on
the Island of Montreal is 452 $. We also know that by 1990 these averages will
have increased by at least 10 %.
Another example, which is a more general one, of what we consider to be
arbitrary judgments concerning persons'needs are the means that the Government
has used to calculate the benefit scales for those in the Employment Incentive
Program. Rather than realistically calculating basic needs, the Government has
resorted to an irrelevant statement made by Statistics Canada regarding the
income of the poorest 10 % of Quebec's working population We feel that the
benefit scales have to be calculated in accordance with what it really costs to
live in Québec, what it costs to eat, what it costs to rent an
apartment, to raise families, to look for work and so forth. (21 h 45)
M. Thuringer: I think the results... We have heard from a number
of people today, and certainly your group has pointed out that in certain areas
where rent is taking 30 % and 40 % and even 50 % of the budget, one needs to
look at that component and also in the shared situation that you talk about. I
think we are prepared to look at that. I would also like to ask you a little
bit about the socio-economic agent and what your perception is of that very
important key person in the lives of welfare recipients.
Mme Capponi: Welfare agents to date have been little more than
police and certainly the powers being given over to them through this kind of
policy just gives a great deal more discretionary powers into their hands. It
is certainly allowing more control than ever. There is no reason for us to
believe that this is going to be of any help. It will not be of any help at all
to the welfare recipient who has only been harassed and intimidated. These are
not social workers. They are certainly not equipped. Perhaps Mr. Paradis could
address that kind of training that these so called socio-economic aid agents
would be receiving, that would endow them with all these wonderful
qualities.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: J'ai été assez surprise de voir le
niveau d'opposition assez élevé qui s'est manifesté dans
la communauté anglophone. Par exemple, deux pages complètes
provenant du département de service social de McGill étaient
reproduites dans ia Gazette, samedi il y a deux semaines. Même
The Monitor a fait la première page sur le programme. Il y avait
cet éditorial dans la Gazette de samedi. Pour le
bénéfice de mes collègues qui n'auraient pas pu en prendre
connaissance, il se terminait comme ceci: "A welfare reform like this one which
Increases rather than reduces hardships on great numbers of people is not
worthy of this society. " C'est peut-être la critique la plus vive qui
est venue d'à peu près tous les éditorialistes
jusqu'à maintenant. Vous savez que c'est complexe. Vous avez, je pense,
avec le front commun, rendu public le document confidentiel ministériel
la
semaine dernière. Je ne sais pas si vous avez pu demander au
ministre la copie anglaise. Cela vous serait peut-être pratique pour
faire le travail.
M Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une des lacunes au
ministère. C'est seulement la version française. D'ailleurs,
c'est une des plaintes des organismes anglophones.
Mme Harel: À la page 19, il y a un tableau. Je ne sais pas
si vous avez avec vous ce document que vous avez rendu public, mais il y a un
tableau qui nous indique qu'en ce qui concerne les barèmes - le tableau
divise les mesures d'employabilité et les barèmes d'allocation
proprement dits - avec la réforme, le ministère entend
épargner 112 894 000 $ malgré que les personnes dites non
employables, celles qui seraient les vraies. Sous-jacente à toute la
réforme, il y a la notion qu'il y aurait les vrais assistés
sociaux, les vrais étant ceux qui sont malades de naissance, les
invalides, les infirmes, les inaptes les handicapés, et les autres ne
seraient pas vraiment des vrais et, n'étant pas vraiment vrais, ils
auraient comme une sorte de purgatoire à vivre pour pouvoir finalement
obtenir ces allocations.
Or, malgré toute la générosité à
l'égard des vrais, 61 000 000 $ de plus, plus un autre montant de 25 000
000 $ pour l'allocation généreuse de 25 $ de plus, malgré
tout cela, il reste que les économies sont de 112 000 000 $ parce que,
essentiellement, deux nouvelles mesures sont maintenant apportées le
partage de logement, avec une économie de 100 000 000 $, et la
contribution parentale, avec une économie chiffrée à 82
000 000 $. Également, il y a la modification aux barèmes pour les
non-disponibles, 33 000 000 $ c'est bien les femmes enceintes de plus de six
mois M. le ministre, tant mieux si on peut apprendre une autre bonne nouvelle
ce soir. Je dois vous dire que, cet après-midi, le ministre a dit qu'il
n'y aurait pas de test de revenu pour les personnes vivant dans un HLM. On
serait bien d'accord pour apprendre une autre bonne nouvelle. Est-ce à
dire que pour les femmes enceintes, à compter de la seizième
semaine précédant la date prévue de l'accouchement
jusqu'à la cinquième semaine suivant l'accouchement, qui, dans le
document d'orientation, sont considérées comme admissibles non
disponibles et qui voient donc leurs prestations réduites du fait de
leur non-disponibilité, vous avez l'intention de modifier cet
état de fait?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que je peux répondre
tout de suite, M. le Président, si vous m'y autorisez? Si je peux vous
répondre, Mme la députée.
Mme Harel: Surtout si vous avez une bonne nouvelle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne sais pas si vous la
considérez comme étant bonne. Tout est subjectif dans la vie, Mme
la députée.
Mme Harel: Allez-y.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous dirai que la femme
concernée, on ne lui applique pas obligatoirement - je l'ai
souligné tantôt - le barème de non-disponibilité.
Elle peut continuer parce que chacune vit sa grossesse de façon
différente. II y en a pour qui cela amène des complications.
D'autres la vivent sans complication. Cela varie d une femme à
l'autre.
Mme Harel: Vous voulez dire qu'elle peut continuer, disons,
jusqu'à son neuvième mois, jusqu'à son dernier jour?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Selon son état.
Mme Harel: Et, le lendemain, elle peut recommencer. Est-ce
exact?
M Paradis (Brome-Missisquoi): Écoutez, je n'ai connu
personne, Mme la députée - vous tombez dans des
exagérations - qui ait pris un congé aussi court. Je n'en ai pas
connu, mais ce que je veux vous dire, c'est que votre interprétation
qu'à partir de telle semaine jusqu'à telle semaine elle est
automatiquement considérée et obligée d'être
considérée comme non disponible est une interprétation
erronée du document. Peut-être que le document n'était pas
suffisamment clair et qu'il mérite d'être clarifié à
ce point-là.
Mme Harel: Non Elle ne sera pas obligée. C'est donc dire
qu'elle pourra continuer...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Selon son état.
Mme Harel:... d'être admissible sans nécessairement
participer, parce que c'est une autre catégorie, admissible
nondisponible, admissible tout court, participer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elle a tous les choix.
Mme Harel: Ah, bon! Elle a absolument tous les choix, y compris
celui d'accoucher quand la nature va lui imposer de le faire Ah, bon! Cela va
bien, cela va bien.
Une voix:...
Mme Harel: Non, ce n'est pas assez. Bon. Si on revient
sérieusement la question des barèmes, vous dites que vous voyez
là, en fait, une atteinte au principe de la non-discrimination en ce qui
concerne la contribution parentale. Vous
dites, dans le résumé français que j'ai eu de votre
mémoire entre autres que cette contribution parentale réintroduit
la discrimination selon l'âge. Vous êtes l'un des premiers
organismes à nous parler de cela et je veux essayer de voir comment vous
concevez cette façon détournée de réintroduire la
discrimination selon l'âge.
Mme Murphy: Juste par l'information que...
Mme Harel: Vous pouvez parler en anglais si vous le voulez.
Mme Murphy: Je vais faire mon possible en français.
Mme Harel: Non c'est parce que je comprends bien. D'accord.
Mme Murphy: Juste par I'information que nous avons, 17 000 jeunes
bénéficiaires d'aide sociale seraient coupés. On voit cela
encore comme le même principe de la discrimination en raison de
l'âge. Nous pensons que cela aura des conséquences très
graves, les mêmes conséquen ces que celles avec lesquelles on vit
présentement, soit la destitution totale des jeunes. On ne peut pas
prendre au sérieux
Dans le document, il y a une clause pour la destitution totale - je ne
sais pas si c'est la bonne expression - qui ferait une exception dans le cas ou
une famille refuserait de payer une contribution. Jusqu'à maintenant, la
jeunesse du Québec n'a jamais eu recours à cette
possibilité. Pour l'avenir, on vous demande jusqu'à quel point
les jeunes devront souffrir avant que leurs besoins soient reconnus. C'est ce
qu'on aimerait savoir. On a vraiment peur des implications de la contribution
parentale pour les jeunes du Québec.
Une autre chose, si je peux continuer juste un peu.
Mme Harel: D'accord. Allez y. C'est le test de
dénuement.
Mme Murphy: La parité, est quelque chose qui doit
être traité maintenant. Elle doit même être
rétroactive. Ce n'est pas possible que les jeunes puissent vivre des
bénéfices qui leur sont disponibles maintenant. Un délai
de deux ans n'est pas justifiable.
Mme Harel: C'est le test de dénuement. C'est l'expression
française test de dénuement.
Mme Murphy: Oh! d'accord!
Mme Harel: Vous avez une expérience, comme coalition, en
matière de discrimination. Je croîs qu'à bien des reprises
vous avez élevé la voix sur la question de la discrimination. Je
me demandais si vous considériez que I'usage des critères comme
ceux de la dépendance peut être considéré comme de
la discrimination systémique un peu comme quand vous avez fait valoir
quil n était pas nécessaire à la police de Montréal
de décider qu'il n'y avait pas de femmes et de Vietnamiens, on a
simplement décidé qu'iI était nécessaire de mesurer
cinq pieds et huit pouces pour être accepté: c'était un
critère non pas contre les femmes mais un critère
systémi-que un critère qui faisait que dans le système
elles étaient écartées. Je me demande s'il n'y a pas des
critères systémiques qui font que, sans le dire
systématiquement, ce sont les Jeunes qui sont écartés.
Est-ce que cela vous semble une forme de discrimination de cette nature?
M. Kinloch: II y a une discrimination qui s'est faite dans ce
cas. On n'a qu'à regarder dans le mouvement étudiant. On
réclame depuis des années que le statut d'indépendant soit
aboli. Je pense que dans le cas du mouvement étudiant, il faut que ce
soit reconnu et dans le cas des bénéficiaires de l'aide sociale,
là aussi, il faut que ce soit reconnu.
Mme Urtnowski: | would like to just expand this a little more to
talk about small children We had a meeting in Pointe-Saint-Charles in which Mr
Maximilian Polak also wondered about mothers being forced to go to work with a
child of two and he, I think, believed that a mother should not be coerced with
the preschool children I think that we should be talking very much about young
people and children. They may suffer somewhat, indirectly, we may say, but I
think that it is a great suffering nonetheless when their parents are not
recognized And in the issue of day care, I think Mr Polak thought that perhaps
women should get together and offer self-help day care. But this is pretty
difficult if women have jobs at different hours. And their children will suffer
In the kind of parking spaces that they may end up having to put their
children. In because even under the APPORT program, only one half of the day
care is covered. And surely from the bit more that the single mother would get,
she would probably want to spend it on a decent day care if It were even
available, accessible in her area.
I think this is a major problem with this reform You are going along as
though children can be dumped just anywhere I do not think you would want your
children, and I did not want mine to be just put somewhere where it was
cheapest.
Mme Harel: M. le Président, il me reste combien de
temps?
Le Président (M. Bélanger): Cinq minutes.
Mme Harel: Cinq minutes. J'aimerais peut-être offrir un peu
de temps au ministre pour
qu'il nous indique comment se fera le test de dénuement, s'il est
d accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais accepter votre invitation
et, si vous le permettez, j'aurais à ajouter sur le dénuement et
sur quelques-uns des points qui me sont parus les plus importants que vous avez
discutés. Cela me donnerait l'occasion de préciser quelques
points, si vous êtes d'accord. Quant au dénuement total.
Mme Capponi: Would it be possible to speak in English please,
because. I do not really have enough grasp of French to understand. (22
heures)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): If you forgive my mistakes ahead
of time, I will do it. The "dénuement total" - I do not know how to
translate this one - total destitution, the definition of it which you find in
the document comes from the jurisprudence it already exists. If somebody in the
Province of Québec is with nothing to use the expression, and presents
himself or herself to a centre Travail-Québec there is what you call a
petty cash right there and it is in the law. They have the right to get that
money quick, fast, no administration, and that.
Mme Capponi: It is not our experience, I am sorry. Most offices
do not have those kinds of money available.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Well, if you have experiences like
that, I will say it has happened. It is not the first time that somebody
complains about the functioning of the system. The last complaint I had was
from the office in Sherbrooke and the complaint was founded. We corrected the
situation administratively. We have checked back and now it is functioning. You
might be right. In some offices, it might not function properly I will add that
on the Island of Montreal, you also have to make a distinction because we do
not administer the day-to-day operation. The City of Montreal is responsible
for the day-to-day administration, but even there we can have a level to
convince them. But I am going to get to the other points. What I am going to do
for the knowledge of the commission, I am going to give to the members of the
commission the up-to-date jurisprudence on the definition of "dénuement
total".
Mme Capponi: I would like to give the United Nations definition
of homelessness, because we have just ended the international Year of Shelter
for the Homeless Homelessness is no longer just considered as being without a
roof over your head it is also defined as those individuals who are paying so
much for shelter they cannot eat properly. Now, Mr Thuringer, you raised the
issue that people are paying, I think you said 30 to 40 %. I am sorry, it is
more like 60 to 75 %, in some cases 90 %, of their income on shelter alone.
M. Paradis {Brome-Missisquoi): Well, I can almost say you are
right if you are talking about a young person getting 178 $ a month You can
almost go in some cases, past the 100 % mark, because the cost of lodging is so
much. Those are a part of the problems we are trying to fix, but I would like
to address one problem that you raised, Mrs, over there the children are part
of it If you look at our "barèmes" very attentively, you will see that
wherever there is a child involved, or children involved, there is always a
"bonification" of the money that is granted to take care of the presence of the
child or children. But it does not fix - I agree with you - the day care
problem that you have raised it might not fix - that is a question that is up
for discussion in this commission - the problem of a single mother who has
children between the ages of two and six who are not in school. Those problems
are up for discussion within this commission. But the main thing - that is one
aspect that I am trying to correct - is that in no way does this policy aim at
saving money because I would have had an easy cruise, as minister responsible,
through the Department of Finance and through the Treasury Board. If we had a
heck of a tough time to go through those departments, it is because people who
have analyzed the figures know very well that compared to the current system,
the Financial Support Program is a net addition of 100 000 000 $. They know
very well that the Parental Wage Assistance Program compared to the SUPRET is a
net addition of 40 000 000 $ a year and they know very well that they are
risking a lot, depending on the reactions of the community, the groups and the
welfare assistance, they are risking an additional 445 000 000 $ of the
Employment Incentive Program. And that money will be, if the policies go
through, on the table. So, altogether, it is new money taken from somewhere
else in the system and being handed to somebody who badly needs it within the
system.
And on that, we would like your reaction.
Mme Murphy: If we think more long-term and go back to 1986, when
trimestrial indexation of benefits were cut, we will see that this program
actually is a cut, even for people under the Financial Support System. They are
receiving 13 $ less than they would have if their benefits had been indexed
trimestrially since 1986.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): I have not made the...
Mme Murphy: So we cannot see this as a gift that has been given
to people under the Financial Support Program.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): I have not made the calculation
but you are probably right. But can I tell you what problem the society had at
that time the major problems we had to deal with? We had when we came into
government a minimum wage that was frozen for five years and during most of
those five years - and you are right to mention it - welfare payments were
indexed trimestrially. So the situation that happened is that it was more
paying financially to be a welfare recipient than a worker on minimum wage. And
we have as a government.
Mme Capponi: The indignity suffered by being on welfare is such I
am sorry that even a minimum wage job is more attractive than those
indignities.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): If you put all aspects of life I
would agree with you. I was just saying that, monetarywise. It was more
attractive and the clientele of the Welfare Department was going higher and
higher. We have tackled the problem not only like it was mentioned. We tried to
take the minimum wage in the last two years and bring it up. And we are still
working on that We are not doing it alone like the députée de
Maisonneuve mentioned: We are doing it with other provinces and even other
States in the US, we are trying to raise it as much as possible. But as a
society, our problem is. Should it be or should you get more money being a
welfare recipient than working on welfare? And your answer seems to be Yes you
should get more money being on welfare And we have a major problem with
that.
Mme Harel: Le seul problème est. Pourquoi abolir le SUPRET
qui s'adressait justement à ceux qui ont le salaire minimum?
M Paradis (Brome-Missisquoi): I can answer that very easily. The
SUPRET never worked under your.
Mme Harel: Alors, faisons-le marcher.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): It never did work.
Mme Capponi: Not because there was not enough need!
Mme Harel: Faisons-le fonctionner.
Mme Urtnowski: Mr Paradis, you say that you always take into
account when there is child I think we.
Le Président (M. Bélanger): Please, could you
mention your name for the translator?
Mme Urtnowski: Liesel Urtnowski You mentioned that you always
take into account the existence of a child and I am a little confused about why
the 585 $ for an unemployable individual is offered to a woman with one child
waiting for nine months I find that a little confusing.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): If you take into consideration
your approach of a same tariff for everybody, no category?
Mme Urtnowski: No, even under your approach.
M Paradis (Brome-Missisquoi): No If you look at the table.
Mme Urtnowski: I think that under the
APPORT program these special needs will be eliminated the small benefits
that people get from being on the APPORT will probably go to day care and for
prescription drugs, for the kind of things that children need when they are
sick or just growing.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): I told you and I maintain that
every time you find the presence of a child or children within a monoparental
unit or a byparental unit, you will find-and you can go to page 26 - additional
money to take care of that perspective. I will tell you that the Minister
responsible for "la politique familiale" looked at that very closely If you can
show us wrong, we are here to be shown wrong So, give us...
Mme Capponi: It certainely strikes me as a family policy You
know, it is a great idea for those people who can afford It. Certainly, this
policy does not address the needs of poor families. It does not allow for
autonomy of individuals nor does. It allows for those families to stay
together, particularly when you look at the parental.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parental contribution.
Mme Capponi: Yes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parental contribution, you can
argue that it should stay in or it should be kicked out, but when you
intervened a few minutes ago, you said: We have the same problem with the loans
and bursaries system and from the Department of Education. My problem is the
following As Minister responsible for income security, can I have a program
that does not take into account the loans and bursaries system and incites
young people in society, because most of those people, like you have mentioned,
will be young people incite them financially to leave school? And then I have a
big question mark. But if you want to discuss it altogether, putting together
the loans
and bursaries system and what we are proposing and discuss it
philosophically, we can have great arguments, but if I am caught with loans and
bursaries and if I do not take ft into account, what will happen to these young
people who will be financially attracted out of the school system?
M. Kinloch: I think that you have chosen the wrong ministry. They
have shown themselves to be completely without regard to the real needs of
students in Québec just as you are showing yourself to be completely
without regards for welfare recipients in this Province.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): If that is what you think, I agree
that you should compare us because what we have copied is exactly what the
loans and bursaries system has. So If you qualify them like that...
M. Kinloch: And they were wrong too.
M. Paradis (Brome-Missisquoi):... you can qualify us like that
but my problem as Income Security Minister is the following: Can I have a
welfare payment that attracts young people out of the school?
M. Kinloch: You are playing people off against one another.
Mme Murphy: What about those 17 000 young people who are
considered as dependent on their parents? They will not qualify for the loans
and bursaries system or for full welfare benefits. If they do not have these
choices, what are they supposed to do if you are using the same criteria for
loans and bursaries as you are for full welfare benefits?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Or you go to school as a youngster
and you are eligible if you come from a family that...
Mme Murphy: But for the 17 000 who are considered as dependent on
their parents, they will not qualify for the loans and bursaries system even
with Its inadequacies.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oh yes! If they go to school, they
will qualify for loans and bursaries.
Mme Murphy: If they are dependent on their parents?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au collégial et à I
université, yes.
Mme Harel:... le rattrapage scolaire. Le Président (M.
Bélanger): À I'ordre!
Mme Murphy: You know, in your paper you say yourself that the
average level of education for young welfare recipients is not even high
school.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Yes.
Mme Murphy: So what provisions are made for them?
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez M. le
ministre, je suis obligé de vous interrompre. Nous avons même
déjà dépassé le temps. S'il vous plaît, en
conclusion et en remerciant les groupes.
Mme Harel:... conclusion.
Le Président (M. Bélanger) Bien sûr, madame
on vous invitera à le faire.
Mme Harel: Cela a été fort intéressant. Je
crois que ce que vous nous avez apporté notamment comme problème
- je pense entre autres à ce problème des chefs de famille
monoparentale - c'est aussi la question de savoir si l'État va dicter
des choix de vie à des femmes qui, jusqu'à maintenant, recevaient
le discours dune société qui disait qu'il fallait quelles
prennent soin de leurs enfants. J'ai eu à mon bureau, cette semaine une
jeune femme qui a un bébé de sept mois et un autre de trois ans.
Elle est chef de famille. Ce n'est pas adopté encore et pourtant,
déjà, elle a dû accepter une mesure. Cela ne veut pas dire
qu'il y aura un abus au sens qu'il pourrait y avoir une poursuite parce qu'on
lui a cassé un bras pour l'accepter, mais elle a été mise
en situation de ne pas pouvoir refuser. Être mis en situation peut aussi
vouloir dire qu'on ne peut pas refuser à un agent. On ne peut pas
plaider, on ne peut pas se justifier parce quon craint. C'est effectivement.
cela qui est arrivé. Sa mère garde le bébé. Sa
mère doit faire un autre quartier parce qu'elle habite dans Rosemont.
Les enfants ont été plus malades. Je ne sais pas quelles en sont
les circonstances, mais ils ont dû aller à l'hôpital trois
fois. Vous comprendrez que cela inquiète. Cest de toute évidence
contraire à ce quon peut espérer que l'État va permettre
aux femmes du Québec comme choix de vie.
Je vous remercie d'être venus devant cette commission Je crois que
cela a été une discussion très fructueuse. Votre groupe me
semble être très représentatif de bien des courants de
pensée à Montréal. Je souhaite que le ministre puisse
retenir les arguments que vous lui avez apportés.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre
M. Paradis (Brome-Missisquoi): I would like to thank you also I
would add to the comments of Mme la députée de Maisonneuve that
cases
that she has mentioned happened. This is why MNAs usually are in their
riding offices to try to correct those cases. This is why groups like yours
exist in society to make sure that people are not put in situation, if I can
use or borrow an expression from the Member for Maisonneuve.
On behalf of the people you help, for the quality of your argumentation
and the exchange we had, I would like to thank you for your efforts. I am not
saying that I will retain everything that would be impossible, but I can assure
you that some of the arguments that you have put to me will be carefully
reviewed If you find in the application of a final policy things a little bit
better, maybe you will have a contribution into it. Thank you very much.
Le Président (M. Bélanger). Merci beaucoup de votre
présentation. Considérant l'heure, la commission des affaires
sociales ajourne ses travaux à demain, le mardi 23 février
à 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 16)