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(Neuf heures trois minutes)
Le Président (M. Laporte): La commission permanente des
affaires sociales se réunit afin de procéder à une
interpellation soulevée par M. Chevrette, député de
Joliette et chef de l'Opposition officielle, au ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux sur la situation du transport ambulancier au
Québec. Est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, Mme Vermette
(Marie-Victorin) sera remplacée par M. Chevrette (Joliette).
Le Président (M. Laporte): Merci. Pour fins d'information,
le député qui a donné l'avis d'interpellation intervient
le premier pendant dix minutes. Le ministre interpellé intervient
ensuite pendant dix minutes et il y aura, par la suite, alternance dans les
interventions: un député du groupe de l'Opposition par la suite,
le ministre, puis un député du groupe formant le gouvernement.
À la fin de la séance, vingt minutes seront allouées
ainsi: dix minutes, en premier, au ministre et, par la suite, l'interpellant
aura un droit de réplique de dix minutes.
M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. J'avais le
goût de proposer au ministre une formule différente des
interpellations traditionnelles. J'avais le goût de lui proposer, dans un
premier temps, qu'on puisse échanger des questions et des
réponses, plutôt que de stéréotyper en accumulant
pendant dix minutes quinze ou vingt questions. Je me demande au point de vue de
la compréhension de ceux qui nous écoutent, ce que c'aura l'air
de poser quinze questions et d'attendre cinq ou dix minutes. Si un
ministériel n'intervient pas, en plus, on pourrait se retrouver avec
quinze ou vingt questions et on ne saura plus à quelle question vous
répondez.
Pour l'intelligence du débat, cela m'apparaîtrait beaucoup
plus correct de faire un échange de questions et de réponses. Je
vais en faire la suggestion, en sachant que vous n'êtes pas obligé
d'accepter.
Le Président (M. Laporte): M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, je souhaiterais qu'on fasse un
exposé de départ certainement de dix minutes chacun et non pas
une période de questions initiale. Je pense que cela permettrait aussi
de situer les gens sur nos positions respectives. Par la suite, si on prenait
chacun cinq minutes, dans la deuxième partie de l'intervention, pour
questions et réponses, je pense que, oui, effectivement, cela pourrait
permettre de clarifier le débat. C'est la contre-proposition que je fais
au chef de l'Opposition.
Exposé du sujet M. Guy Chevrette
M. Chevrette: D'accord. Merci, M. le Président. Tout
d'abord, dans ce dossier, on se rappellera que le ministre a
déposé au mois de mai dernier un projet de loi, le projet de loi
34 - peu importe la date - qui visait à mettre de l'ordre dans les
services ambulanciers au Québec. L'Opposition a joué un
rôle et a voulu fixer les principes, le respect de certains principes
dans cette adoption de projet de loi, en particulier, l'amélioration -
vous vous le rappellerez - de la qualité des services non seulement sur
l'île de Montréal, mais dans tout le Québec, parce qu'on
sait très bien que c'est sur le territoire québécois et
non pas nécessairement à Montréal que la qualité
des services est moindre et faible.
L'Opposition a voulu également démontrer au ministre, par
la procédure parlementaire, qu'il y a des droits pour chacune des
parties en présence à la négociation. Cela veut dire des
droits pour les syndiqués et des droits pour les patrons. On n'abolit
pas le droit de propriété sans indemnité. C'est
également l'un des objectifs que Opposition officielle a fait valoir en
commission parlementaire.
Depuis ce temps, et même à l'époque où on
discutait fortement de cette loi, on a été à même de
constater ou bien que M. le ministre ignorait des aspects de son dossier, ou
bien qu'il était d'une naïveté totale, ou bien que le
ministre était incapable de diriger ce dossier, ou encore que
délibérément il nous livrait des
demi-vérités. J'ai l'intention, au cours de cette période
de deux heures, de démontrer les quatre aspects.
Pour bien faire comprendre à la population pourquoi je porte des
jugements aussi sévères envers le ministre, je vais lui donner
des exemples dès le départ, quitte à ce qu'on entre dans
le détail de chacun des qualificatifs pour bien démontrer, faire
une preuve hors de tout doute, qu'on n'avance rien sans preuve.
Tout d'abord, le ministre ne peut pas et ne doit pas ignorer, il n'a pas
le droit d'ignorer, comme ministre, que dans une négociation qui se
déroule en vertu du Code du travail il faut que les deux parties soient
assises à une table. Le ministre nous a dit en cette Chambre que les
parties avaient toujours été là, ce qui m'apparaît
être contraire à la vérité. Le ministre devra
rectifier lui-même. On n'a pas le droit de dire ici que le ministre a
menti, on doit dire qu'il a induit la Chambre en erreur ou qu'il n'a pas dit la
vérité. Je peux vous dire que - on dira ce qu'on voudra - ce
qu'il a dit est faux puisque dans la nuit même où il
répondait à ma question
en Chambre, en disant que les parties avaient toujours été
en présence, dans la nuit qui suivait - le ministre devra nous expliquer
comment cela se fait - seul le gouvernement négociait avec la partie
syndicale et tous les patrons étaient exclus. Donc, cela est
carrément contraire à la vérité.
Comment le ministre peut-il nous expliquer qu'il a toujours dit la
vérité à cette Chambre en nous disant que les patrons ont
toujours été d'accord, alors que le lendemain même de son
annonce de l'entente de principe la corporation des propriétaires
ambulanciers dénonçait cette entente de principe en disant
qu'elle était en profond désaccord. Pourtant, c'est l'une des
deux parties à la négociation. Comment le ministre, en
toute franchise, peut-il admettre que les patrons ont toujours
été à la table quand, dans une lettre du 5 juillet, les
propriétaires ambulanciers de Montréal lui disaient
carrément: Mais, M. le ministre, vous n'avez pas le mandat de parler
pour et en notre nom. Et Jean-François Munn, un engagé du
ministère, ne peut pas parler pour et en notre nom. On le tiendra
responsable s'il fait des concessions qui ne nous conviennent pas.
Donc, c'est un irrespect total du Code du travail qui autorise un patron
et un syndicat à négocier. Le ministre n'a jamais répondu
à ma question, soit en vertu de quel régime de négociation
il négociait. D'ailleurs, son M. Bergeron n'a jamais réussi en
commission parlementaire, pendant une demi-heure ou trois quarts d'heure de
questions, à répondre à cette question précise.
C'est simple, c'est parce qu'il ne veut pas admettre la vérité.
C'est que les syndiqués sont syndiqués en fonction du Code du
travail et que les deux parties ont le droit de négocier en fonction du
Code du travail. Si bien - vous le savez tous, si vous étiez francs vous
le diriez - que chaque employeur pourrait vouloir négocier avec ses
propres employés.
Entre vous et moi, il y a deux types d'ignorance dans la vie: il y a
l'ignorance tout court, ce qui peut être pardonnable mais pas pour un
ministre, et il y a l'ignorance crasse, celle de feindre de ne pas savoir,
faire semblant de ne pas connaître, mais connaître et
délibérément faire le contraire. C'est grave cela! Je ne
vous dirai pas laquelle des deux. Moi, je pense qu'il y a un peu de tout. Il y
a de la naïveté, il y a de l'ignorance, il y a de
l'incompétence, mais il y a aussi un aspect vicieux de ne pas admettre
les règles du jeu. Je le dis comme je le pense.
La nuit dernière, la nuit de mercredi à jeudi, il y a eu
négociation jusqu'à trois heures du matin. Est-ce que le ministre
pourrait nous dire, par exemple, dans son exposé s'il y avait des
patrons à la table? Est-ce que la corporation des propriétaires
ambulanciers était à la table? Est-ce que les
propriétaires ambulanciers de Montréal, représentés
par Me Guy Tremblay, étaient à la table? Est-ce qu'ils ont pu
donner leur opinion sur le contenu? Le ministre pour- rait-il être franc
et nous dire comment il se fait, si le 22 septembre il a annoncé son
entente de principe, que les propriétaires ambulanciers, le 6 octobre,
étaient obligés de lui écrire pour lui demander le texte
de l'entente de principe? Comment se fait-il qu'hier soir - on est rendu
à la fin d'octobre, cela fait plus qu'un mots - les mêmes
propriétaires n'avaient pas encore le texte de l'entente que le ministre
avait soi-disant conclue le 22 septembre? Il faut le faire! Vous savez, c'est
un ministre issu d'une PME, qui est supposé respecter la PME. Mais le
ministre ne respecte même pas les gens de la PME, puisqu'il ne leur
transmet même pas les données alors qu'il dit avoir lui-même
conclu une entente de principe avec le syndicat.
Il y a aussi la formation des coopératives. C'est peut-être
là aussi la naïveté du ministre. Il faudra qu'il me dise si
le gouvernement a déjà fait son lit pour amender la Loi sur les
coopératives. Vous lirez M. Gagné dans Le monde des affaires
et vous lirez les articles de la Loi sur les coopératives qu'on vous
citera tantôt. L'article 222 de la Loi sur les coopératives dit
carrément que... Ce ne sont pas des propriétaires de tôle,
il faut que ce soient des individus qui donnent du travail. Lorsqu'il va
créer son OSBL en vertu du projet de loi 34, les membres des
coopératives ne seront pas des gens qui donneront du travail aux
salariés, ce seront des propriétaires de tôle, point.
Comment conciliera-t-il la Loi sur les coopératives avec le projet de
loi 34 qu'il veut faire adopter? Il a déjà pris l'engagement de
modifier la Loi sur les coopératives. II y a là des questions
qu'on est en droit de se poser.
Je pense que le ministre aura intérêt aussi à nous
dire comment seront financées ces coopératives. C'est
intéressant pour le public de savoir quel type de concurrence il y aura
dans ce secteur, je pense que c'est important qu'on sache qui finance quoi,
où on s'en va. Est-ce que le ministre peut donner un même
traitement aux deux groupes syndicaux? Comment se fait-il, par exemple, que la
FTQ se fasse dire par les hauts fonctionnaires: On ne renouvelle pas le permis
d'un monsieur sur la rive sud, ça s'en va à la CSN, et qu'il ne
sort pas question que ça aille à la FTQ? Si les hauts
fonctionnaires disent ça à la FTQ et si la Société
de développement coopératif dit ça également
à la FTQ, ils n'ont pas inventé ça. Les hauts
fonctionnaires ne doivent pas mentir dans le dossier et la SDC, la
Société de développement coopératif, n'a pas
intérêt à mentir dans le dossier. Pourquoi, à ce
moment-là, le ministre m'a-t-il dit, à la période de
questions, que ce que j'avançais était faux?
Pour prouver qu'il y a un aspect vicieux dans les réponses du
ministre - je le dirai comme je le pense - et ce que j'appelle "dire le
contraire de la vérité", parce que je n'ai pas le droit de dire
le vrai terme ici, mais les gens vont comprendre ce que je veux dire, le
ministre a même tenté lui-même de dire qu'il y avait
deux
firmes d'avocats dans le dossier et qu'il n'était pas certain,
à savoir qui conduisait quoi. Or, depuis le 17 octobre, au moins un mois
avant que je lui pose la question en chambre, il connaît le mandat de Me
Monette; il connaît le mandat de Me Tremblay et il connaît
très bien le mandat que Me Comtois a dans le dossier. Pourquoi a-t-il
voulu induire la Chambre et le public en erreur, en répondant à
mes questions?
Donc, on pourra d'une façon détaillée regarder
ensemble, analyser ensemble comme quoi ou bien le ministre est d'une
naïveté totale - après trois ans au poste de ministre, c'est
impardonnable - ou bien il ne maîtrise pas encore ses dossiers et il
serait temps qu'il le fasse, ou bien purement et simplement il ne veut pas
donner les réponses appropriées parce qu'il craint d'être
démasqué et cela, on doit essayer de le faire.
Le Président (M. Laporte): M. le ministre. Réponse
du ministre M. Robert Dutil!
M. Dutil: Merci, M. !e Président. Effectivement, le chef
de l'Opposition a souievé une foule de points ici qui mériteront
d'être rectifiés, corrigés, améliorés et
bonifiés. Avant d'en arriver à cela et étant donné
que nous nous sommes donné cinq minutes qui nous permettront, de part et
d'autre, de discuter d'une façon un peu plus libre que la formule
habituelle des interpellations, je vais faire un bref résumé de
ce qui s'est passé depuis quelques années, plus
particulièrement depuis la période de juin dernier.
On se rappellera que, depuis décembre 1984, alors qu'une loi
spéciale avait été suivie d'un décret
négocié à Noël, de triste mémoire, par le chef
de l'Opposition, une série de rapports ont été
présentés sur ce dossier qui ont porté les noms, en
général, des titulaires de ces rapports: le rapport Marois, le
rapport Drouin, le rapport Tremblay et le rapport SECOR, le dernier en
titre.
À partir du dernier rapport en titre qui, lui, faisait une
révision globale de l'ensemble de la problématique non seulement
à Montréal, mais également en province, et des
difficultés qui se vivaient dans le transport ambulancier, le ministre,
par ma voix, a annoncé une réforme qui allait dans le sens de
certaines recommandations du rapport SECOR. Alors, on connaît ces aspects
de la réforme. On parlait de stabilisation de l'emploi. Il serait
important, au cours de ce débat, de rappeler de quoi il s'agit au sujet
de la stabilisation de l'emploi. C'est surtout en province qu'il y a des
difficultés, parce qu'à certains endroits le travail de
technicien ambulancier est fait par des gens qui sont en disponibilité
et qui ne peuvent gagner leur vie en faisant ce seul travail. Ils sont donc
obligés d'avoir deux emplois, un autre emploi à
l'extérieur, et ont à travailler quand disponible sur les
ambulances, avec toutes les conséquences que cela peut amener de
rotation de personnel, de manque de formation de ces personnes, de
difficulté de recrutement pour les services ambulanciers en
région.
Alors, c'était un des aspects importants de la réforme
pour les régions. Je tiens à le préciser, parce que, tout
à l'heure, le chef de l'Opposition parlait de la qualité du
service en province. C'est un élément fort important. On a
parlé de formation, on a parlé de centrale de coordination, on a
parlé d'une foule de choses lors de l'annonce de cette réforme,
mais j'en viens tout de suite au projet de loi non adopté le 22 juin
où le chef de l'Opposition nous avait, pour une troisième fois en
moins d'un an, promis ou prophétisé l'apocalypse.
L'apocalypse, selon l'Opposition, était censée arriver en
décembre dernier, elle était censée arriver en mars
dernier et elle était censée arriver le 1er juillet 1988,
semble-t-il, parce que, de l'autre côté, on laissait sous-entendre
que le ministre s'était engagé à faire adopter un projet
de loi, ce qui était inexact, pour une date précise. Ce qui
était inexact, j'ai trop de respect pour notre institution, pour
l'Assemblée nationale, pour m'engager sur des dates qui ne
relèvent pas de moi, mais qui relèvent d'une décision de
l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, à ce propos, sur le respect de nos institutions, je
fais un léger aparté qui m'apparaît bien important. On se
rappellera que, lors de l'une des journées de la commission
parlementaire, à la suggestion du chef de l'Opposition, nous avons
interrompu nos travaux parce qu'il y avait des moyens de pression dans le champ
qui risquaient de mettre en danger la santé et la sécurité
de la population. D'un commun accord - et je pense que ce sont des choses qui
méritent d'être dites, on n'est toujours d'accord ensemble,
l'Opposition et nous - et pour le respect de notre institution qui a
peut-être bien ses défauts, mais qui a une grande qualité,
à mon avis, celle d'être la meilleure que l'on connaisse, nous
avons interrompu nos travaux parce que l'Assemblée nationale a le droit
de siéger en toute quiétude, de poursuivre ses travaux sans que
des pressions indues soient faites, sans que la population soit prise en otage.
Cette interruption a duré toute la journée; d'ailleurs, le
travail a repris au cours de cette journée. Je pense que le message de
ce respect que les parlementaires de l'institution exigent, qui est une
institution qui évolue depuis deux siècles et qui est bien
importante pour notre société démocratique, a
été compris et que la reprise du travail s'est faite
rapidement.
Un autre point, après la non-adoption du projet de loi, a
été la volonté du gouvernement de s'assurer que la
santé et la sécurité du public ne soient pas
impunément mises en danger au cours de la période estivale et au
cours de
l'intersession. Nous avons proposé une loi pour assujettir et les
techniciens ambulanciers et les propriétaires d'ambulances à la
loi 160, loi qui, comme on le sait, en cas de désobéissance est
très sévère. Elle indique encore là la
volonté du gouvernement quelles que soient les difficultés que
nous puissions vivre sur le terrain, quels que soient les désaccords qui
se présentent soit à la table des négociations ou à
d'autres endroits dans notre société, de ne pas prendre en otage
les citoyens, surtout dans un service aussi essentiel que celui des ambulances.
De ce côté, l'Opposition nous a donné son consentement, qui
était requis, pour assujettir les techniciens ambulanciers et les
propriétaires à la loi 160. Je pense qu'encore là
c'était faire preuve de responsabilité de la part du gouvernement
et c'était faire preuve de responsabilité de la part de
l'Opposition qui nous a donné son consentement pour ce faire, pour nous
donner un instrument montrant le sérieux du gouvernement quant au
respect de la santé et de la sécurité de la
population.
À la suite de cette adoption de loi, l'été s'est
écoulé avec du travail qui s'est bien fait. Trois comités
ont été mis sur pied pour évaluer les besoins en
équipements, en véhicules et pour vérifier de quelle
façon on pourrait assurer dans toute la province la stabilisation de
l'emploi. Ce sont trois comités qui ont extrêmement bien
fonctionné et qui ont apporté les conclusions qui seront mises en
application éventuellement avec la mise en place de la réforme.
Mais, également, il y a eu des négociations au cours de
l'été. C'est le point d'achoppement sur lequel arrive le chef de
l'Opposition en disant: Bon, qu'est-ce qui fait que le gouvernement
négocie, semble-t-il et à ce qu'il dit, à la place des
propriétaires?
M. le Président, le chef de l'Opposition est parfaitement au
courant de la situation tout à fait inhabituelle de ce secteur. Quand il
parle de PME, de petite et de moyenne entreprise dans le secteur ambulancier,
il fait abstraction d'un phénomène important qui doit être
noté relativement au système d'ambulances. Le système
d'ambulances en est un où il y a des entreprises privées, il est
vrai, qui travaillent dans un système sans concurrence. Il n'y a pas de
concurrence dans le système ambulancier; chacun a sa zone, chacun a ses
revenus garantis. On ne peut s'installer comme entrepreneur d'un service
ambulancier aujourd'hui sans obtenir un permis que n'accorde pas le
ministère, parce qu'il limite le nombre de permis, le gouvernement
étant le principal payeur, comme on le sait, des services ambulanciers
dans la province. C'est un système qui, auparavant était
entièrement privé et entièrement payé par les
contribuables lorsqu'ils utilisaient ce service. Nous sommes passés
à un système, qui aujourd'hui, est payé à 90 % par
les contribuables par divers agents payeurs.
De faire croire qu'on peut laisser les patrons négocier avec les
employés - ce qu'ils ne veulent pas faire, remarquez bien, et je vais
expliquer pourquoi - et s'entendre sur une convention collective, en se
retournant vers le gouvernement après et en disant: Voyez-vous, on a
fait cette négociation tout seuls et c'est notre droit le plus absolu en
fonction des normes du Code du travail; maintenant, vous payez la facture,
messieurs du gouvernement... On a accordé ce qui a été
demandé par le syndicat parce que, de toute façon, c'est vous qui
allez payer la facture, on vous la refile. Donc, il est normal, important et
nécessaire que le gouvernement soit à la tables des
négociations.
Le chef de l'Opposition semble dire que les propriétaires ont
été exclus de la table des négociations, ce qui n'est pas
exact, je le maintiens. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de conflit, je ne dis
pas qu'il n'y a pas eu de difficulté, il est arrivé un moment
où, à la table des négociations - le climat est bien connu
du chef de l'Opposition dans ce secteur, particulièrement entre ceux qui
sont syndiqués avec la CSN et les propriétaires qui ont des
employés syndiqués à la CSN - il a fallu que chacun des
deux groupes soit dans une chambre à part. Le rôle du
gouvernement, à ce moment-là, a été de concilier
les positions de l'un et de l'autre qui étaient en chambre à
part. La situation n'est pas facile dans ce genre de circonstances. Je pense
que le rôle du gouvernement, en tant que principal payeur, est de
s'assurer que la population reçoive en tout temps des services de
qualité ininterrompus.
J'aurais pu expliquer davantage certains autres aspects, mais les dix
minutes sont déjà écoulées, ou presque. Nous avons
convenu de passer à une période de dix minutes de questions et
réponses plus rapides, je pense que cette formule, pour une courte
période, pourra permettre d'éclaircir des points. Je laisserai le
chef de l'Opposition me poser la première question.
M. Chevrette: On peut y aller pour dix minutes de questions et
réponses. Pas besoin d'en prendre cinq-cinq, si on est capable de se
répondre.
Le Président (M. Laporte): C'est ça, par
alternance, pour une période de dix minutes.
Discussion générale
M. Chevrette: M. le ministre, je vous réfère
à une lettre que vous avez sans doute dans votre dossier, qui est de Me
Guy Tremblay, qui dit: "Dans ce contexte, vous comprendrez aussi que nous
n'autorisons pas Me Jean-François Munn, ni qui que ce soit, à
négocier collectivement au nom des propriétaires ambulanciers du
Montréal métropolitain les conditions de travail applicables
à nos salariés. " Est-ce que vous avez pris connaissance de cette
lettre du 5 juillet?
M. Dutil: Oui.
M. Chevrette: Vous en avez pris connaissance.
M. Dutil: Absolument.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez pris connaissance du
communiqué de presse de la Corporation des services d'ambulance du
Québec, de M. Gilles Ricard, dans lequel nous pouvons lire, au
paragraphe 2: "Pour la corporation, ce geste gouvernemental est scandaleux et
inexcusable, d'expliquer son président, M. Antoine Fabi. "
C'était au lendemain de votre annonce concernant l'entente de principe.
Est-ce que vous avez pris connaissance de ça?
M. Dutil: Évidemment, monsieur, mon courrier est
très abondant ces temps-ci.
M. Chevrette: Bon. Vous avez pris connaissance aussi de la lettre
du 6 octobre de Me Comtois, du bureau Denis & Comtois, disant: "Auriez-vous
l'obligeance de nous faire parvenir copie du texte complet de l'entente de
principe?" L'entente de principe, vous l'avez annoncée le 22 septembre,
et on est rendu au 6 octobre: "Si de tels textes ne devaient pas exister soit
parce qu'il n'y a pas vraiment d'entente de principe, soit parce que vous ne
les avez pas en votre possession, auriez-vous l'obligeance de nous le confirmer
par écrit?" Est-il exact qu'en date d'aujourd'hui, 26 octobre, ils n'ont
pas encore les textes?
Le Président (M. Laporte): C'est le 28. M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, l'entente de principe qui est
intervenue l'a été sur des textes qui n'étaient pas
complètement finalisés et libellés. Je pense que le chef
de l'Opposition est bien conscient qu'une entente de principe n'est pas une
entente finale. C'est une entente où on dit: On pense que, si ces grands
principes sont acceptés, sujets à l'approbation du libellé
final qui se fait par la suite, qui se discute par la suite sur les principaux
éléments - comme d'habitude, ce n'est pas un
phénomène nouveau - à ce moment-là, la partie
syndicale sera d'accord, ainsi que la partie patronale qui, elle, a à
revoir les textes finaux à rediscuter, à vérifier si les
textes que nous libellons d'une façon définitive correspondent
à ce qu'eux avaient dit autour de la table des négociations aux
représentants gouvernementaux comme étant une offre à
faire aux syndiqués. Il est évident, M. le Président,
qu'il n'y aura pas de convention collective si les employeurs, après
avoir analysé le libellé final, disent: Nous ne signons pas la
convention collective, elle ne fait pas notre affaire.
M. Chevrette: M. le Président, sur le plan du gros bon
sens, de la grosse et grande logique, sachant qu'il y a deux parties, je me
demande comment le ministre peut annoncer une entente de principe sans
convoquer préalablement les employeurs pour leur dire: Vous avez le
droit d'être là en vertu du Code du travail. Vous êtes
légalement accrédités. Cependant, je prends votre place.
Et plus que ça, pour votre information, le chef de l'Opposition a
reçu une copie de l'entente de principe le 27 ou le 28 septembre. Et les
employeurs en date d'hier, à 16 heures, dans mon bureau, n'avaient pas
encore cette entente. Trouvez-vous ça décent, concevable,
acceptable, correct sur le plan des lois du travail que vous devez faire
appliquer comme ministre? Vous êtes ministre d'un gouvernement. Vous
savez ce que c'est que de négocier en vertu du Code du travail.
Trouvez-vous ça acceptable qu'une partie intégrante de la
négociation - il y a un syndicat et un employeur - l'employeur, n'ait
pas les copies en main et que le syndicat m'envoie une copie? Trouvez-vous
ça acceptable?
M. Dutil: Le texte auquel se réfère le chef de
l'Opposition, c'était l'interprétation de l'entente de principe
par le syndicat. Ce n'était pas le libellé final et loin de
l'entente que nous avons faite avec le syndicat. Je tiens à
préciser une autre chose quant à l'interprétation du fait
que les employeurs se soient dits en désaccord avec l'entente de
principe qui est fort importante. C'est que la veille de l'entente de principe
ou le matin même, étant donné qu'on fonctionnait toujours
avec la chambre à part, d'un côté le syndicat, d'un
côté les employeurs parce que la situation de... (9 h 30)
M. Chevrette:... Montréal.
M. Dutil:... tendresse... Est-ce que Montréal est avec la
CSAQ ou n'est pas avec la CSAQ?
C'est un autre point à éclaircir pour votre
information.
M. Chevrette: Vous savez que Me Tremblay... M. le ministre, ne
faites pas le naïf...
M. Dutil: On reviendra à ça.
M. Chevrette:... vous savez que Me Tremblay a le mandat de
négocier pour les propriétaires ambulanciers de Montréal
parce qu'ils négocient face à Urgences-santé et que c'est
différent. Vous savez ça. Pourquoi ne l'admettez-vous pas
ici?
M. Dutil: M. le Président...
Le Président (M. Laporte): Excusez-moi.
M. Dutil: Oui.
Le Président (M. Laporte):... pour qu'on ait la meilleure
procédure possible...
M. Dutil: On pourra revenir à la situation
de Montréal.
Le Président (M. Laporte):... à la question, des
réponses, M. le ministre.
M. Dutil: Je voudrais revenir à la situation de
Montréal et à Me Tremblay tout à l'heure. Je pense que
c'est un aspect important. Mais pour finaliser la question de la
présence des employeurs à la table des négociations, notre
version des faits est la suivante: les employeurs se sont fait dire par le
gouvernement: On pense qu'on pourrait régler sur ces points-là -
il y avait une série de sept, huit points - êtes-vous d'accord? On
est convenu d'un accord sur ces points-là avant qu'ils ne soient soumis
au syndicat à la table des négociations. C'est ce qui s'est
passé. Ce sont ces points-là qui ont été soumis,
à une seule exception - je dois le reconnaître - c'était la
durée de la possibilité d'intenter un grief. C'était le
seul point sur lequel nous nous sommes avancés davantage que ce que les
patrons souhaitaient, c'est-à-dire 60 jours au lieu de 30 jours,
contrairement à ce que demandait le syndicat, soit 90 jours.
Quant aux autres points, notre version des faits, quoi qu'en disent les
employeurs, c'est qu'ils avaient accepté le mandat qui a
été déposé et accepté par le syndicat et qui
a amené l'entente de principe. C'est ça notre version.
Le Président (M. Laporte): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: C'était quoi votre mandat sur la clause du
propriétaire qui veut continuer à travailler dans son
ambulance?
Le Président (M. Laporte): M. le ministre. M. Dutil:
Quant à la clause..
M. Chevrette: Vous parlez de contenu; on va en parler.
M. Dutil: Oui. Quant à la clause "propriétaire",
nous estimons actuellement que c'est une clause qui n'est pas encore
réglée. Je rappelle au chef de l'Opposition qu'il y a deux
regroupements de propriétaires. Nous avons renvoyé la clause
"propriétaire" - il y aura des discussions entre les employeurs et le
syndicat - à une discussion entre les deux pour compléter le
libellé. C'est ça qui se passe. Cette discussion-là, M. le
Président, je le précise, à ma connaissance, se fait avec
l'un des deux regroupements de propriétaires et elle se fera
éventuellement avec d'autres regroupements de propriétaires.
Le Président (M. Laporte): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Donc, il n'y avait pas d'entente sur ce point
précis.
M. Dutil: II y avait entente sur la façon de
procéder pour faire le libellé final qui était,
évidemment, de retourner la discussion en fonction des
propriétaires.
Le Président (M. Laporte): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Sur ce point-là, il y avait entente pour ne
pas s'entendre.
Le Président (M. Laporte): M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, je veux rappeler au chef de
l'Opposition qu'il le sait très bien. Évidemment, c'est son jeu
de faire semblant de ne pas le savoir, naïvement. Est-ce que c'est de
l'ignorance crasse ou de l'ignorance pure? Je ne le qualifierai pas.
Le Président (M. Laporte): M. te chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Je suis en train de réaliser
précisément votre attitude, M. le ministre. Là où
ça fait votre affaire, pour vous enlever l'odieux, vous laissez
ça au patron et au syndicat. Il y aura des grèves dans le
décor parce qu'on essaiera d'enlever le droit à un petit
propriétaire de deux ambulances. J'en connais. Un de mes cousins est
proriétaire ambulancier. Pour votre information, il gagne sa vie comme
chauffeur d'ambulance, comme technicien ambulancier. Si on lui enlève
son gagne-pain, qu'est-ce que ça lui donne d'être
propriétaire de deux petites ambulances? C'est fou comme balai et
ça, vous ne le réglez pas parce que vous dites au syndicat:
Allez-lui faire la "job". Vous ne voulez pas avoir l'odieux de lui faire la
"job". Ça, cest de l'irresponsabilité, M. le ministre. J'irai
plus loin. Vous faites fi carrément du fait qu'il y a des gens qui ont
le droit d'être à la table de négociations. Dans la nuit de
mercredi à jeudi, les employeurs étaient-ils à la
table?
Le Président (M. Laporte): M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, dans la nuit de mercredi
à jeudi, il n'y a pas eu de négociation. Il y a eu une rencontre
pour dire aux syndiqués que notre position était ferme, que nous
ne la changerions pas et que, s'ils ne l'acceptaient pas, les
conséquences seraient celles qu'elles pourraient être. C'est
ça qui s'est passé entre mercredi soir et jeudi matin, et pas
autre chose que ça.
Le Président (M. Laporte): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Est-il exact que c'est parce que la trouille vous a
pris parce que vous aviez pris connaissance de la lettre de Mario Cotton qui
est la suivante? "J'ai la désagréable tâche de
vous convoquer à vos assemblées générales
respectives. En effet, à l'annonce de l'entente de principe survenue
lors de la négociation de votre convention collective de travail ainsi
que depuis la tenue des assemblées générales d'adoption de
cette entente de principe à travers la province, nous avons
rencontré à plusieurs reprises nos vis-à-vis afin de
compléter la correction finale des textes. Or, au cours de ces
rencontres, nous avons eu la désagréable surprise de constater
que, de l'autre côté de la table - on parlait de vous autres -
l'on cherchait de plus en plus à modifier l'entente de principe en
nuançant à outrance les paroles données plutôt que
de chercher un règlement définitif. " La trouille vous a pris.
Vous avez reconvoqué Mario Cotton. Vous avez voulu éviter le
pire. C'est exactement ce qui s'est produit.
Le ministre pourrait-il dire à la population s'il se souvient
que, lorsqu'il annoncé son entente de principe et que M. Cotton a
convoqué son monde, M. Cotton a soumis l'adoption de la convention ou
l'entente de principe à deux conditions fondamentales: d'abord, le
régime de retraite et la demi-heure additionnelle du lunch le midi?
Pourrait-il expliquer aussi à la population le déroulement des
négociations, à savoir que lors d'une dernière
séance de négociation on était rendu à 18 points de
divergence et qu'encore hier soir il y avait des divergences de vues,
indépendamment de la signature de l'entente de principe? Est-ce qu'il
pourrait confirmer ces faits?
Le Président (M. Laporte): J'imagine qu'on aura le
consentement... Les dix minutes sont présentement
écoulées. J'imagine qu'on a le consentement des partis pour
répondre à cette question...
M. Dutil: Je réponds à cette question et on reprend
le processus habituel.
Le Président (M. Laporte):... pour, par la suite, revenir
à l'ordre habituel de l'interpellation.
M. Dutil: Oui.
Le Président (M. Laporte): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, je m'attendais que le chef de
l'Opposition soit reconnaissant de la souplesse que je manifestais pour
éclaircir certains points. ll semble dire qu'il me comprend de ne pas
continuer. Je pense que le processus d'interpellation, celui que l'on
connaît, permet, dans un délai de cinq minutes, à toutes
les parties intéressées...
M. Chevrette: Je propose, pour fins de discussion, qu'on continue
comme ça à discuter.
M. Dutil: Non, M. le Président. Je l'ai accepté
pour dix minutes tout à l'heure et je pense qu'on va poursuivre selon le
processus de l'interpellation.
Le Président (M. Laporte): Nous avions convenu de la
période de dix minutes. J'ai déjà une série
d'interventions prévues. Je vais laisser M. le ministre répondre,
comme la deuxième entente est intervenue entre les parlementaires, si je
peux m'exprimer ainsi, et nous reviendrons à l'ordre habituel de
l'interpellation.
M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, ce qui s'est passé
mercredi soir est la preuve de notre responsabilité dans ce
dossier-là. Ce que nous avons fait, quand nous avons vu que le syndicat
voulait reprendre ses moyens de pression, c'est que nous les avons
rencontrés pour leur dire ce que j'ai mentionné tout à
l'heure. Nous nous en tenons à l'entente de principe. Il n'y a pas de
réouverture en ce sens. Le libellé nous apparaît conforme
à ce qui a été convenu et nous tenons à vous
prévenir que nous n'irons pas plus loin, quelles que soient les
pressions que vous puissiez exercer, parce que nous estimons que nous sommes
allés au bout de ce qui était possible et raisonnable d'aller.
Point, à la ligne.
Le Président (M. Laporte): Nous allons recommencer selon
la procédure de l'interpellation, soit cinq minutes à chacun des
intervenants. J'aimerais cependant rappeler aux parlementaires qu'il faut
s'adresser continuellement à la présidence. C'est une des
règles non contestées, ici, en cette Chambre.
M. le chef de l'Opposition.
Argumentation M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout le monde se
rappellera que, mercredi, je questionnais le ministre. Je lui demandais en
vertu de quel régime de négociation il négociait. Il n'a
aucunement répondu. Cela fait quatre mois. Je suppose que, ce matin, il
a eu le temps de se forger une réponse. En vertu de quel régime
de négociation le ministre négocie-t-il? Si c'est en vertu du
Code du travail, qu'il le dise. Si c'est en vertu d'une autre loi qu'on ne
connaîtrait pas, qu'il le dise mais, à mon point de vue, quand des
employés sont accrédités face à un employeur, il
faut que les deux parties jouent le jeu de la négociation. C'est
inconcevable que le ministre n'ait pas encore fourni, croyez-le ou non, une
interprétation à la partie patronale d'une entente de principe
qui a eu lieu le 22 septembre.
Je vois sourire les députés du pouvoir, c'est vrai que
ça n'a pas d'allure. Je connais le député
Théorêt qui a un commerce, par exemple. Est-ce
qu'il accepterait que le gouvernement lui passe au-dessus de la
tête et dise: Je vais négocier avec tes employés, je vais
changer les heures de travail sans t'en parler. Je t'en parlerai un mois plus
tard et, si tu n'as pas de texte un mois plus tard, tu feras comme les autres,
tu chialeras un peu, ce n'est pas grave. Est-ce que quelqu'un accepterait
ça? Est-ce que les entreprises Dutil de la Beauce accepteraient qu'un
gouvernement leur passe par-dessus la tête, négocie avec leurs
employés et qu'un mois plus tard elles ne sachent pas encore ce qui a
été consenti à leurs employés? Je vois rouler les
roues de bicycle et elles rouleraient en mosus pour venir vers Québec!
Ce serait épouvantable! Le ministre sortirait du Nord, c'est certain, il
s'en viendrait en courant à Québec dire au gouvernement: Cela n'a
pas de bon sens! Cela n'a aucune allure! Mais là, ce n'est pas grave, il
trouve que ça a de l'allure, il l'a dit ce matin.
Mais, après avoir répondu à sa question en Chambre,
des gens du côté patronal qui l'avaient écouté ont
tout de suite écrit au ministre, le lendemain matin, pour lui dire: "M.
le ministre, vous ne finirez jamais de m'étonner - c'est Me Tremblay qui
écrit à M. Dutil. Mon mandat est pourtant très clair et
vos représentants le connaissent très bien. Il est regrettable
que vous soyez le seul à ne pas le connaître". Là, je pense
qu'il y a au moins un avocat, tout comme moi, qui s'est rendu compte que le
ministre ne connaissait pas grand-chose. "Pour dissiper dans votre esprit tout
doute, je vais vous le préciser". Et là, l'avocat
reprécise le mandat qu'il a, M. le Président, croyez-le ou non,
depuis au moins deux ans. Plus précisément, dans ce dossier des
négociations, c'est depuis 1983 que Me Tremblay négocie pour et
au nom des employeurs de Montréal. Ce ne sont pas des farces, le
ministre feint de ne pas connaître ce mandat-là en Chambre.
Il y a un autre mandat, et c'est là que le ministre a voulu
mêler subtilement la population en disant que, là, il y avait deux
firmes et qu'il ne savait pas trop pourquoi. Me Monette a l'autre mandat: non
pas celui de négocier les conditions de travail, mais le mandat
d'éventuelles ventes ou d'éventuelles étatisations ou, par
la bande, une étatisation d'abord coopérative pour en arriver
à une étatisation complète. Me Monette a ce
mandat-là. Qu'a-t-il dit? "Nous avons pris connaissance de la
déclaration que vous avez faite - il écrit au ministre Robert
Dutil le 27, encore - à l'Assemblée nationale le 26 octobre 1988
et, plus particulièrement, du passage suivant".
Le ministre dit: Je dois vous avouer qu'on a effectivement,
actuellement, toutefois un problème - voyez-vous que c'est confus: On a
actuellement toutefois un problème - à savoir qui
représente les propriétaires de Montréal, puisqu'un autre
bureau d'avocats s'est présenté avec un mandat de ces mêmes
propriétaires et qui n'est pas le même bureau d'avocats que celui
de
M. Tremblay. Nous avons là un imbroglio qui, à mon point
de vue, ne relève pas de nous, mais des employeurs qui, en cours de
route, semblent avoir change de représentant. Il faut le faire! "Nous
avons également pris connaissance - et là, c'est Me Monette qui
parle - de la lettre que vous expédie ce jour Me Guy Tremblay, de
l'étude Heenan Blaikie, et nous avons révisé les faits
énoncés dans ladite lettre. Nous sommes d'accord avec lesdits
faits qui représentent la vérité. Permettez-nous, M. le
ministre, de vous poser avec déférence la question suivante:
Comment pouvez-vous affirmer en Chambre connaître l'existence du mandat
d'un autre bureau d'avocats sans en connaître la teneur, puisque le
mandat concerné est par écrit et copie a été
transmise aux plus hautes instances de votre gouvernement, y compris le bureau
du premier ministre? Les termes du mandat concerné sont d'ailleurs
clairs et sont cités au deuxième paragraphe de la lettre de M.
Tremblay. Nous ne pouvons croire que vous ignorez à ce point les faits
du dossier des propriétaires ambulanciers dont vous avez la charge.
"
Le Président (M. Laporte): En conclusion.
M. Chevrette: "Dans de telles circonstances - je conclus -
l'affirmation qu'il y a là un imbroglio qui relève des employeurs
et non pas de vous et des représentants du gouvernement est pour le
moins excessive et devrait être corrigée. " En d'autres mots, ils
vous disent: Dites donc la vérité, M. le ministre, ou
informez-vous si vous n'êtes pas informé; sinon, ç'a a
l'air fou.
Le Président (M. Laporte): M. le ministre. M. Robert
Dutil
M. Dutil: M. le Président, puisque l'Assemblée
nationale, quand elle parte, a de telles répercussions et que notre
courrier est plus abondant, comme il l'a été le lendemain - on
s'aperçoit donc que les messages se rendent - il faudrait
peut-être demander à Me Tremblay si nous devons tenir compte ou
non de représentations verbales d'une troisième firme d avocats,
à la demande de l'un des propriétaires. Il pourrait demander
à ce propriétaire si on doit ou non en tenir compte. Mais,
là, ce n'est effectivement que verbal, alors il pourrait probablement
éclaircir ça lui-même avec l'un de ces sept
propriétaires.
Ce que je veux tout simplement dire pour illustrer cette anecdote, c'est
que ce n'est pas à deux, mais à trois que nous avons affaire,
sauf, effectivement, que c'est verbal et que cela vient déranger le
dossier. Il semble bien qu'à l'intérieur même de son groupe
de propriétaires M.
Tremblay ne fasse pas l'unanimité. C'est ce que nous sommes
obligés de constater quand on reçoit ce genre d'échos d'un
peu partout.
(9 h 45)
Mais le point que je tiens à faire concernant cette situation,
puisque le chef de l'Opposition citait une lettre de Me Tremblay dans son style
habituel, style ironique et piquant - nous sommes habitués à ce
genre de correspondance... Remarquez bien que c'est le même M. Tremblay
qui, au mois d'août dernier, lors d'une négociation, cette fois
pour les propriétaire contre le gouvernement - cela ne concernait pas
les employés - pour s'entendre quant au prix à déterminer
pour les véhicules, a menacé s'il n'obtenait pas satisfaction.
Nous ne croyons pas qu'il devrait obtenir satisfaction sur les demandes qu'il
fait parce que nous les estimons excessives. C'est notre droit. Nous sommes
là pour protéger les contribuables. Nous sommes là pour
essayer de payer le juste prix. Nous estimons sincèrement et
honnêtement que le prix demandé est trop élevé. Ils
estiment le contraire. Il faudra un jour résoudre cet imbroglio, cette
difficulté dans la négociation. C'est ce même M. Tremblay
qui, pour obtenir satisifaction, a menacé de couper les salaires des
employés de 20 %. Je pense que le chef de l'Opposition sait ce que
ça peut faire, quand on menace de couper le salaire d'employés de
20 %. Cela fait ce que ça risque de faire.
M. le Président, je suis certain qu'aujourd'hui il y a
certainement quelqu'un qui a un bon vidéo, qui est en train
d'enregistrer ça et qui repassera ce que je vais dire au moins six fois
pour bien comprendre et être bien sûr de mes paroles. Alors, je
pèse bien mes mots. J'estime personnellement que le conflit des
autocollants qui a été très déplorable et
très regrettable dans la province de Québec, et qui a duré
plusieurs semaines, est dû à cette provocation des employeurs pour
obtenir satisfaction quant à leurs conditions. Je rappelle que ce
conflit est dû à cette menace des employeurs de Montréal de
couper les salaires des employés de 20 % s'ils n'obtenaient pas
satisfaction sur des revendication que nous estimons, à tort ou à
rai- son est une discussion qu'on peut avoir e> e dans une situation aussi
explosive que la situation à Montréal, que Me Tremblay n'est pas
sans connaître. Il connaît très bien cette situation. Cela
ne l'a pas empêché de risquer de faire exploser le dossier pour
obtenir des choses qui, à notre point de vue, je le répète
- nous le pensons sincèrement et honnêtement - sont allées
trop loin, c'est trop fort dans les montants exigés.
Cela rentre également au dossier. Je comprends très bien
que ces choses n'aient pas été dites au chef de l'Opposition par
Me Tremblay. Évidemment, dans la version qu'il donne, il donne la
version des négociations et les autres versions. À mon point de
vue, il ne donne pas les versions importantes des gestes qu'il pose et qui, je
le répète, ont failli créer une situation dans la province
de Québec où la santé et la sécurité de la
population auraient été mises en danger pour qu'à une
table de négociations on donne quelques piastres de plus parce qu'ils
pensent qu'ils y ont droit et qu'ils peuvent forcer le gouvernement, par des
moyens semblables, à leur donner ce qu'ils veulent.
Quant aux négociations à Montréal, l'autre question
que soulevait le chef de l'Opposition, il sait que ce sont les
négociations les plus difficiles et les plus pénibles à
cause de l'état de détérioration des relations de travail
qui dure depuis de nombreuses années dans ce secteur. Je reviendrai sur
cette situation. Mon temps est écoulé. Je pense que j'aurai une
intervention de cinq minutes seulement sur ce point. Merci.
Le Président (M. La porte): Merci, M. le ministre. M. le
député de Laval-des-Rapides.
M. Guy Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Le
débat qui nous occupe ce matin a une portée beaucoup plus vaste
que le simple débat sur la tôle ou la possession des ambulances ou
des véhicules ambulanciers. Il s'agit de toute la problématique
de l'accès aux soins de santé dans les cas d'urgence, de tout le
domaine du préhospitalier. Cela est donc, je pense, est donc un
débat de fond beaucoup plus vaste et beaucoup plus important.
Le projet de loi couvrait ces aspects. Un des aspects que le projet de
loi prévoit ou essaie de corriger ou d'améliorer, c'est celui de
la stabilité ou de la stabilisation de la main-d'uvre.
Présentement, la main-d'oeuvre est instable en province, ce qui
entraîne toutes sortes de conséquences néfastes dans les
services offerts, tant pour la qualité que pour la disponibilité.
Je veux dire par là que la majorité des emplois d'ambulancier en
région, particulièrement, ce sont des emplois à temps
partiel, ce qui fait que les gens sont disponibles à certaines heures,
selon certains principes. Évidemment, cela pose des problèmes de
disponibilité et aussi de qualité.
Pour améliorer la qualité des services, il faut s'assurer
que nous ayons non seulement la disponibilité de véhicules
ambulanciers sur tout le territoire, mais aussi la disponibilité de
techniciens ambulanciers qualifiés qui soient en mesure de
répondre adéquatement aux besoins d'urgence en tout temps. On
sait que les premières minutes d'une intervention,
particulièrement dans les cas d'accidents automobiles, par exemple, les
premières minutes, ou la première heure d'intervention, ce qu'on
appelle "the golden hour", c'est probablement la plus importante et la plus
déterminante dans les soins préhospitaliers. Si, dans cette
première heure, des soins adéquats ou des gestes adéquats
n'ont pas été posés, les conséquences risquent
d'être très importantes pour la personne qui est victime de
l'accident.
Pour ce faire, il nous faut donc d'abord et avant tout stabiliser
l'emploi des techniciens
ambulanciers en leur offrant une rémunération suffisante
pour les intéresser à se rendre disponibles à assurer ou
à assumer ce genre d'emploi modulé en fonction des besoins de la
population. Cette stabilisation et cette disponibilité de la
main-d'oeuvre en province ne pourra se faire qu'au prix de l'implantation de
corps de travail à temps plein et à temps partiel, ainsi que
d'une rémunération pour les techniciens en disponibilité,
ce qui n'existe pas actuellement et ce qui pourrait difficilement exister dans
le système actuel.
C'est en prenant globalement le problème que nous permettrons aux
techniciens ambulanciers de pouvoir espérer des revenus suffisants, sur
une base annuelle, pour les attirer à faire carrière dans ce
secteur d'activité et à se former en conséquence,
acquérir et la disponibilité et les compétences
nécessaires pour l'exercice de leur profession ou de leur travail. Pour
améliorer la qualité des services de la population
particulièrement, en province, il faut assurer la disponibilité
des véhicules ambulanciers sur tout le territoire du Québec et,
pour atteindre cet objectif, il faut que des techniciens ambulanciers soient
également disponibles pour assurer, dans la mesure du possible, le
fonctionnement de ces ambulances avec qualité et avec
célérité.
Pour ce faire, on parle de mesures pour stabiliser l'emploi des
techniciens ambulanciers en leur accordant une rémunération
suffisante qui les rendrait ainsi disponibles par le fait qu'ils assumeraient
cet emploi sur une base permanente et non pas sur une base d'emploi à
temps partiel ou d'emploi de fin de semaine, de soir, ou de deuxième
job, comme on dit régulièrement. Ce sont là des
coûts additionnels de 11 500 000 $ qu'il faudra prévoir
là-dedans. C'est un des aspects de ce projet de loi qui me semble
négligé beaucoup. Je comprends que la tôle est importante.
Je comprends que les droits des propriétaires sont très
importants. Je suis un des premiers à les défendre et à
les respecter. Mais il y a aussi le droit du patient, celui qui, dans une
situation d'urgence, a besoin de soins de qualité puisque, dans bien des
cas, cette qualité d'intervention est déterminante pour sa vie
ou, tout au moins, sa santé. Merci.
Le Président (M. Laporte): Merci. M. le chef de
l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Le ministre faisait
état avec beaucoup de sévérité de la fameuse
campagne de "stickers" qu'il y a eue sur les ambulances, qui va d'ailleurs
coûter 3000 $, en moyenne, à chaque propriétaire. Il s'en
prenait au manque de sens de responsabilité de l'avocat qui est le
porte-parole des propriétaires. Je vous avoue très
honnêtement que je trouve que le ministre n'a pas le sens de la mesure.
En juin dernier, une grève illégale, sans aucun motif - parce que
les négociations étaient même à peine
démarrées - il y a eu grève. Le ministre pourrait-il me
dire s'il y a eu des poursuites? Aucune! Le ministre est-il au courant qu'il y
a eu une grève d'une journée complète, la semaine
dernière ou il y a quinze jours à peine, chez un
propriétaire ambulancier de Montréal? Ils sont assujettis
à la loi 160 depuis juin, le ministre m'a-t-il dit s'il a entrepris des
poursuites? Aucune!
Il négociait même durant ce temps sur
l'interprétation de sa loi, sur l'interprétation de son entente.
Quel sens des responsabilités! Quel sens de la mesure! C'est
épouvantable d'avoir des petits papiers collants, mais ce n'est pas
épouvantable d'avoir des grèves illégales ou des
grèves d'une journée, même quand on est assujetti à
la loi qu'il a lui-même présentée à la fin de juin.
Cela n'est pas grave.
Pour un gouvernement, le respect, cela se gagne, M. le Président.
J'allais dire au ministre délégué à Santé de
sortir de ses terres, d'arriver au parlement et de comprendre son rôle.
On n'est pas ensemble dans une commune à "mémé-rer"
ensemble, on est à l'Assemblée nationale et on doit avoir le sens
de la responsabilité. Le sens de la responsabilité et de
l'équité, quand on est au gouvernement, c'est de se placer
au-dessus des parties et de ne pas avoir un préjugé unique,
être capable de reconnaître les choses correctement.
À mon point de vue, les petits papiers collants, ce n'est pas
beau, c'est désagréable sur une ambulance. Cela crée des
préjudices à l'employeur lui-même parce qu'il doit payer
2000 $ ou 3000 $, surtout quand on lui donne trois ou quatre jours pour
décoller tout cela et pour tout repeinturer, comme c'est le cas à
Montréal, sept jours quand c'est une cotation 4. Je pourrais vous en
donner des feuilles, si vous n'en avez pas, M. le ministre, j'en ai
suffisamment pour vous renseigner, pour vous informer sur votre dossier. C'est
de 2000 $ à 3000 $ que cela coûte. Cela ne faisait pas mal aux
patients et cela ne mettait quand même pas en danger la vie du monde. Les
grèves de juin, quand, le matin même où j'ai proposé
de refuser de siéger, ce que vous avez appuyé, vous n'aviez pas
le choix parce que vous auriez eu l'air irresponsable, cela faisait... Quelles
ont été les procédures? Quelles ont été vos
déclarations, sauf de dire, timidement, que vous acceptiez de ne pas
siéger? Je vous trouve un petit peu injuste et vous manquez un peu du
sens de la mesure.
Maintenant, un type issu de l'entreprise privée, un homme comme
le ministre, M. le Président, qui a fait carrière dans
l'entreprise privée et qui fait fi complètement de la
présence de la partie privée dans toutes ces négociations
qui se font, je vous avoue que je ne comprends pas cela. Je vais vous lire un
télégramme que j'ai reçu ce matin, peut-être que le
ministre l'a reçu hier. C'est un télégramme qui a
été adressé à M. Bourassa et envoyé à
M. Robert Dutil et à moi-
même: "Nous sommes surpris de certaines déclarations
gouvernementales, à l'effet que les propriétaires d'ambulances du
Québec en seraient venus à une entente avec les techniciens
ambulanciers, alors que la Corporation des services d'ambulances du
Québec, association patronale, membre du CPQ, affirme que ses membres ne
sont pas partie à cette entente. "Il serait totalement inacceptable et,
d'ailleurs, contraire aux dispositions de nos lois du travail que des
représentants du gouvernement dans ce dossier signent des ententes de
travail avec les techniciens ambulanciers au-dessus de la tête des
propriétaires d'ambulances. Ceux-ci, en effet, sont en droit de
s'attendre à ce que les règles du jeu de la négociation
collective au Québec soient les mêmes pour eux que pour les autres
entreprises québécoises. "Nous vous demandons de vous assurer que
les droits des entreprises soient respectés dans le dossier et que les
porte-parole du gouvernement dans ce dossier des négociations soient
respectueux de ces droits. "
Le Président (ML Laporte):... le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Oui. C'est le Conseil du patronat qui a
envoyé cela au premier ministre, en lui indiquant: Vous avez un ministre
qui s'écarte, qui ne respecte pas les parties, qui ne connaît pas
son dossier ni le Code du travail. Voulez-vous lui dire qu'il y a deux parties
à la négociation et qu'il doit les respecter?
Le Président (M. Laporte): Merci.
M. Chevrette: Ce ne sont pas nos chums, ce sont les
vôtres.
Le Président (M. Laporte): Merci. M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, plusieurs points ont encore
été soulevés par le chef de l'Opposition sur lesquels je
veux revenir. Le premier point, c'est au sujet de ce qu'il appelle la
grève illégale du mois de juin, à la suite de laquelle
nous avons interrompu nos travaux à l'Assemblée nationale. Il
demande quelle a été notre réaction. Je voudrais rappeler
au chef de l'Opposition que l'une des difficultés vécues lors de
cette journée, c'est qu'il y avait des techniciens ambulanciers qui
étaient sur place et sur appel et qu'on nous a mentionné,
à tort ou à raison, qu'ils pouvaient aller sur les lieux du
travail.
De plus, je voudrais rappeler au chef de l'Opposition que le nombre
d'ambulances à Montréal a permis de répondre aux urgences
de niveaux 1 et 2. Je tiens à lui rappeler cela, c'est très
important, je pense, comme service à la population.
(10 heures)
Je tiens à lui rappeler une troisième chose. La raison
pour laquelle nous avons assujetti les techniciens ambulanciers et les
propriétaires à la loi 160 quelques jours plus tard, c'est
justement pour éviter que ne se renouvellent impunément de
pareils gestes. C'est pourquoi on a adopté la loi 46 - le chef de
l'Opposition se souviendra que cette loi avait été adoptée
très rapidement, plus rapidement que la loi 34 - qui avait pour effet
d'assujettir les techniciens ambulanciers et les propriétaires à
la loi 160, de façon à éviter qu'il n'y ait risque pour la
santé et la sécurité de la population et pour que nous
ayons les moyens d'agir, au cas où cela se reproduirait.
Le chef de l'Opposition se réfère à une
journée de cet automne qu'il appelle journée de grève. Ce
n'est pas notre interprétation de ce qui s'est passé. Ce qui
s'est passé à Montréal, c'est qu'à la demande du
propriétaire il y a eu vérification de véhicules
étant donné que le lendemain...
M. Chevrette:...
M. Dutil: On ne doit pas parler du même cas. Je me
réfère au cas de Lépine. Ce n'est pas à ce cas que
se réfère le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: C'est la vente des véhicules. Voyons!
M. Dutil: On pourra y revenir. Je me référais au
cas de Lépine qui, avant le passage de son entreprise à de
nouveaux propriétaires, avait décidé de faire
vérifier ses véhicules. Je suis certain que le chef de
l'Opposition va revenir là-dessus tout à l'heure, puisqu'il ne
semble pas que j'aie répondu à sa question de façon
précise.
Il a aussi parlé, au début, de la question des
indemnités aux propriétaires en disant: On a fait une grande
bataille sur les principes, à l'Assemblée nationale, au mois de
juin, et les deux raisons pour lesquelles on l'a fait, ce sont la
qualité des services en province et les droits d'indemnité au
propriétaire.
La qualité des services en province, j'ai eu l'occasion de
m'exprimer à maintes reprises là-dessus. Je résume ma
position en disant que la loi prévoit des choses pour la qualité
des services en province, mais que la loi n'est pas le seul instrument pour
améliorer les services en province. Dans la loi, la stabilité
n'est pas incluse; cela ne nous empêche pas de le faire. Dans la loi, la
formation n'est pas incluse; cela ne nous empêche pas d'avoir pris la
décision de rehausser la formation, partout en province, à un
niveau égal, alors que sous le régime du Parti
québécois il y avait de la formation supplémentaire
à Montréal. En province, c'était moins grave, on
considérait que la moitié de la forma-
tion qu'on donnait à Montréal, c'était
suffisant.
Quant au droit d'indemnité, je tiens à rappeler que nous
avons eu quelque 40 heures de débat à l'Assemblée
nationale et en commission parlementaire pour adopter l'article 1 et le
début de l'article 2 d'un projet de loi qui en contenait 24. J'ai
toujours dit ceci: Nous ne refusons pas de considérer la question de cet
article, qui est l'article 22, mais nous disons que ce droit d'indemnité
ne peut pas être considéré, en valeur, comme une
indemnité équivalente à celle - pour donner un exemple que
comprendra le chef de l'Opposition - que le Parti québécois a
décidé de verser quand il achetait l'amiante 40 $ l'action, alors
qu'elle en vaut 4 $ aujourd'hui. On n'achetait pas une entreprise en dehors de
tout système gouvernemental. Les ambulances, c'est payé à
90 % par l'État, ce n'est pas pareil, c'est différent. Quand on
parle d'indemnité, il faut vérifier de quelle façon on
change la nature de l'entreprise avant de l'établir. Mais, quoi qu'il en
soit, je l'ai mentionné, je le répète et le chef de
l'Opposition aura l'occasion de le voir ultérieurement, nous ne sommes
pas fermés à une indemnité en fonction d'une
évaluation du changement de nature de l'entreprise.
Le Président (M. Laporte): En conclusion.
M. Dutil: Ce à quoi nous sommes fermés toutefois -
je le dis pour que ce soit bien clair, parce qu'on ne semble pas le comprendre
- c'est à un achat global des entreprises. Nous ne voulons pas
nationaliser les ambulances à Montréal, contrairement à ce
que veulent les propriétaires actuellement.
Le Président (M. Laporte): Merci. M. le
député de Fabre.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. Cette semaine, j'avais
l'occasion d'intervenir sur un autre sujet et je mentionnais tout simplement
que, pour l'Opposition, cela allait bien quand cela allait mal, du moins en
apparence, et qu'on imaginait toutes sortes de tribunes. Donc, ce matin, on a
imaginé encore une fois se bâtir une tribune pour essayer d'aller
chercher une couverture; je ne sais pas si c'est pour une presse locale ou une
presse nationale.
Au fond, cela me fait quand même sourire, parce qu'on
répond un peu à ce qu'ils ont essayé de prédire
trois ou quatre fois, ce qu'on a qualifié d'apocalypse tantôt. Je
pense que notre ministre a assez bien couvert le sujet, en disant à nos
prophètes de malheur que, malheureusement, II n'y a rien de cela qui
s'est réalisé à ce jour.
La preuve qu'on est au courant du problème ou de la situation...
Comme le ministre le soulignait, cet été, il y a quand même
eu la formation de trois comités importants: un sur l'équipement,
l'autre concernant nécessairement les véhicules et, aussi, un sur
la stabilisation de la main-d'oeuvre. Quand on en arrive à identifier
les problèmes qu'on doit vivre à l'intérieur du
système ambulancier, cela n'a pas été imaginé
strictement par le ministre et son équipe. Mais on s'est quand
même appuyé sur des rapports sérieux - je fais
référence au dernier rapport qui est celui de SECOR. Là,
les problèmes ont été observés et, ensuite, on nous
a quand même proposé des solutions. À l'intérieur
des solutions, il y en a une qui a été touchée
tantôt par mon collègue et député de
Laval-des-Rapides, la stabilisation de la main-d'oeuvre. Il était aussi
question de rétablir la confiance entre les partenaires et
d'améliorer les systèmes de contrôle, rationaliser les
opérations et en arriver à être capable de fonctionner
à l'intérieur de coûts normaux, de coûts qu'on peut
considérer comme justifiés, et améliorer la qualité
des services.
Mon collègue a parlé longuement, bien longuement... Cinq
minutes, ce n'est pas tellement long quand on parle de stabilisation de
l'emploi, mais il a quand même essayé de cerner le sérieux
problème auquel on avait à faire face en région. Si on
considère qu'un employé qu'on peut qualifier d'employé
à temps partiel, parce que ne gagnant pas sa vie à
l'intérieur du système, se doit d'avoir un autre emploi pour
faire vivre sa famille, même avec toute la bonne volonté du monde,
on ne peut se fier sur cet individu, sur cette ressource, et le qualifier de
professionnel.
Alors, de là, on a établi que c'était une de nos
responsabilités importantes de qualifier le personnel, parce qu'on
Jouait avec la vie des gens. On pourrait revenir tantôt sur la "golden
hour". On a de la difficulté à imaginer un scénario
où on ne fait pas une intervention rapide. Pourquoi? Parce qu'on sait
tout simplement que, s'il n'y a pas d'intervention rapide et d'intervention de
qualité, on se retrouvera tantôt avec encore plus de gens devant
subir une invalidité prolongée, ou une hospitalisation
prolongée, avec tout ce que cela crée comme problèmes au
sein de la famille.
Je pense qu'on a essayé de dévier le débat en
s'attaquant strictement à un élément qui est
l'élément dont le député de Joliette et chef de
l'Opposition a parlé, soit les droits de l'employeur. C'est à peu
près ce sur quoi il a essayé d'orienter tout le débat. Je
pense qu'on fait fausse route si on s'éloigne du pourquoi du projet de
loi qu'on est en train d'établir. C'est surtout sur cela qu'à mon
sens on devrait tabler et essayer d'y mettre tout le sérieux.
Je trouvais cela comique que député de Joliette, le chef
de l'Opposition, nous rappelle le sens de la responsabilité. Le sens de
la responsabilité, alors qu'on est en avant des problèmes. On
essaie de les solutionner; cela ne va pas toujours comme on le voudrait, mais
on nous dit qu'avec la FTQ la négociation est bien amorcé; cela
va bien. La bonne volonté, c'est une chose;
je pense qu'on la manifeste; on démontre du sérieux et on
est en mesure de dire que le dossier s'achemine comme il devrait
s'acheminer.
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le
député de Fabre. M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Je suis content que le député de
Fabre me remercie, d'une certaine façon, parce qu'il disait que je me
cherchais une tribune. Si on ne lui en avait pas offert une, il aurait
été encore quelques mois sans se montrer à la
télévision. Donc, au moins, il a pu se montrer la "bette" et on
l'aura vu ce matin dans la ville de Laval.
Ceci dit, M. le Président, je suis surpris également que,
dans son exposé, le député de Fabre ne se rappelle
même pas, lui qui est en commission parlementaire, les groupes qui ont
déambulé devant nous. Tout le monde était contre sauf la
CSN et, rappelez-vous, les infirmiers, les infirmières
d'Urgences-santé, les médecins d'Urgence-santé, les CRSSS
sont venus dire que cela n'avait pas d'allure, à mots couverts. Vous
rappelez-vous tous ceux qui ont déambulé devant nous. Vous avez
la mémoire courte ou, encore, vous faites exprès pour ne pas vous
le rappeler. Qu'est-ce que la FTQ est venue dire sur la loi 34? Qu'elle
était contre, pas vrai? Donc, admettez les choses.
Pourquoi dites-vous cela à la population? C'est le contraire qui
s'est passé, et vous essayez de faire croire à la population ce
matin des choses qui se seraient passées en commission parce qu'il n'y
avait pas de télévision. C'est le contraire! Vous le savez,
à part cela! C'est ce qu'on appelle... Si j'avais le droit de le dire,
je dirais que vous mentez, mais je n'ai pas le droit de le dire. C'est de
valeur parce que je le dirais haut et fort, à part cela.
Deuxièmement, le ministre vient de dire, M. le Président -
c'est drôle - avant qu'il y ait un aparté du député
de Fabre: Écoutez, l'indemnisation des permis, cela ne vaut pas cher, il
ne faut pas donner plus que cela. C'est exactement ce que la CSN disait en
commission parlementaire. Pourtant, le même ministre recommande à
la Société de développement coopératif de financer
les coopératives CSN qui paient 105 000 $ par permis et ambulance
à Lépine-Cloutier, dont 12 ambulances sur 19 doivent être
remplacées dès cette année. Une ambulance qu'on doit
remplacer, combien cela vaut-il? Combien revend-on cela? Vous le savez, M. le
député de Fabre, pas cher, c'est ce que vous dites, pas cher.
Donc, si cela ne vaut pas plus de 4000 $ ou 5000 $, parce qu'il faut s'en
débarrasser et les remplacer par des neuves, 105 000 $ moins 5000 $,
cela fait 100 000 $ le permis. Vous ne vouliez pas reconnaître cela.
La même CSN, en commission parlementaire, disait que cela ne
valait rien et qu'il ne fallait pas que vous indemnisiez les
propriétaires. Or, elle-même est en train de s'approprier des
permis de l'ordre de 100 000 $, dans certains cas, parce qu'elle doit remplacer
12 des 19 ambulances qu'elle a achetées chez Lépine-Cloutier
dès cette année. Chez Paulhus, je crois, toutes les ambulances
sont à remplacer en plus, ou une autre compagnie - je peux faire erreur
sur la compagnie - c'est 6 sur 6. Chaque permis a été payé
105 000 $. Venez-vous me dire qu'on n'avait pas raison de se défendre et
de juger les faits? C'est le ministre lui-même qui recommande d'appuyer
le paiement et les emprunts par la Société de
développement coopératif. Belle concurrence!
Deux ans - M. le ministre ne pourra pas le nier, j'ai la lettre de la
Société de développement coopératif - sans paiement
d'intérêts, et les permis ne valaient rien, en juin? Cela ne
valait absolument pas une cenne d'indemnité? Cela n'avait pas d'allure,
ce que disait l'Opposition quand elle défendait le droit de
propriété? Cela n'avait pas d'allure? Cela avait tellement
d'allure et cela valait tellement cher que, lorsqu'il s'est fondé une
coopérative, le ministre lui-même a recommandé le paiement.
Si cela avait de l'allure, pourquoi disait-il le contraire en juin? Si j'avais
le droit de dire quelque chose, savez-vous ce que je dirais? Je ne le dirai
pas, parce que je n'ai pas le droit de faire indirectement ce qu'on ne peut pas
faire directement. J'aurais le goût de le dire, mais c'est contraire
à la vérité, en tout cas, vous le savez.
M. le Président, le ministre pourrait-il me dire, dans les 20 ou
25 minutes qui restent, s'il a lui-même analysé les états
financiers des employeurs. En a-t-il vérifié? Est-ce que ce sont
tous des voleurs, comme on l'a laissé croire dans certains milieux?
Est-ce qu'on les a vérifiés? Est-ce qu'on a pu comparer... Si
vous ne le savez pas, je peux vous dire où il y a des états
financiers vérifiés par le bureau de Chabot, qui n'est pas un
bureau d'incompétents, au contraire, c'est une firme reconnue et
compétente. On pourra dire au ministre où sont les états
financiers des trois dernières années. Ils sont même au
bureau du premier ministre, si je peux lui indiquer une piste; s'il ne peut pas
s'y rendre, on y va par le tunnel. Il pourra vérifier trois ou quatre
états financiers qui vont lui établir le coût horaire et
qui vont lui montrer, entre vous et moi, comment cela se situe exactement.
Le Président (M. Laporte): En conclusion.
M. Chevrette: Est-il vrai - oui, je vais poser une question au
ministre...
Le Président (M. Laporte): Brièvement.
M. Chevrette: Est-il vrai que le ministre a demandé des
soumissions publiques à Tilden et à deux ou trois autres
compagnies? Pourquoi, dans ses soumissions publiques, garantissait-il 5000
heures et pourquoi ne les garantit-il pas aux propriétaires?
Le Président (M. Laporte): Merci.
M. Chevrette: Pourquoi, à ces compagnies publiques -
dernière petite question...
Le Président (M. Laporte): Rapidement, rapidement, M. le
chef de l'Opposition.
M. Chevrette:... n'exigeait-il même pas le paiement de la
gazoline et des instruments nécessaires pour le transport des malades et
qu'il le fait pour les propriétaires? Pourquoi? Quel est ce jeu? Quelle
est cette "game", comme diraient, certaines personnes? Qu'est-ce que vous
cherchez avec cela? (10 h 15)
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le chef de
l'Opposition. M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: En cinq minutes, M. le Président, je vais avoir
bien de la difficulté, cela va m'en prendre deux pour répondre
à toutes les questions du chef de l'Opposition, mais il y a des
réponses, qu'il en soit sûr, et il nous reste au moins ce
temps.
Je voudrais revenir sur les coopératives et sur ce qui se passe
là. Est-ce que le chef de l'Opposition estime que 105 000 $, c'est le
juste prix pour un permis d'ambulance à Montréal? Si c'est oui,
la réponse, comme je le déduis de ce qu'il vient de dire, il
comprendra qu'actuellement, ce qui est demandé si jamais nous avions
l'intention d'acquérir - ce qui n'est pas le cas, je le
répète - par les propriétaires d'ambulances de
Montréal c'est 150 000 $, ce que nous estimons à 150 000 $ pour
acquérir les mêmes ambulances. C'est la même organisation,
c'est dans le même territoire, ce sont les mêmes normes de
transport et c'est à peu près la même organisation.
Certains sont peut-être plus efficaces que d'autres, donc, ils font plus
de profits; certains sont peut-être mieux organisés, donc, ils
font plus de profits; certains sont peut-être meilleurs administrateurs,
donc, ils font plus de profits.
Quoi qu'il en soit, est-ce qu'il estimerait justifié que
l'État envisage de payer 50 % plus cher, ce qui est demandé, que
ce qui se transige actuellement? À cette première interrogation,
ma réponse est non. Si nous avions l'intention d'acquérir ou
d'indemniser éventuellement les permis, ce serait dans l'ordre de
grandeur, évidemment, de ce qui se paie ou de ce qui se transige sur le
marché. Contrairement à ce qu'il prétend, je n'ai jamais
dit que cela ne valait rien. J'ai dit que ceia ne valait pas ce qui nous
était demandé. C'est bien différent cela! Cela ne valait
pas la somme gigantesque qu'au début on nous demandait, qui
dépassait beaucoup les 150 000 $. On semble être rendus autour de
150 000 $, c'est encore 50 % de plus que ce qui se paie sur le marché ou
à peu près.
Quoi qu'il en soit en ce qui a trait aux coopératives, le chef de
l'Opposition a également lancé de multiples accusations. Il y a
une coopérative qui existe depuis maintenant tout près d'un an.
Elle existait l'année passée, elle est entrée en fonction
à l'initiative des employés. À mon point de vue, c'est
l'une des conditions de succès d'une coopérative, c'est un
phénomème très acceptable que des travailleurs
désirent se prendre en main. Moi, je trouve cela correct, mais
l'initiative doit venir d'eux, et elle venue d'eux. Ils ont demandé -
ils ont fait une négociation eux-mêmes avec leur
propriétaire - de l'acquérir et, à la suite de cette
acquisition, ils ont postulé à un programme qui, le chef de
l'Opposition sera sûrement d'accord sur cela, existait avant que nous
soyons là, soit une société de développement des
coopératives en vue de développer des coopératives. Ils
ont obtenu une garantie de prêt et un rabattement de
l'intérêt pour deux ans conformes aux normes de ce programme qui
avait été établi par le Parti québécois.
Qu'est-ce qu'il a contre cela aujourd'hui? Pourquoi ce groupe de
travailleurs, aujourd'hui, n'aurait-il pas le droit de postuler à un
programme qui existe après avoir négocié avec son propre
patron en vue de devenir son propre patron, d'avoir l'initiative de prendre en
charge l'entreprise? Pourquoi aujourd'hui, pour quelle raison refuserait-on
dans le cadre d'un programme qui existe, à ces employés de
participer, malgré la garantie d'emploi qui est à peu près
de 50 % du coût et malgré le fait qu'il y ait un rabattement
d'intérêt de 100 % la première année, de 90 % la
deuxième année? Malgré ces faits, on semble dire que c'est
très généreux. Malgré ces faits, les transactions
qui se sont faites, elles se sont faites autour de 100 000 $ le permis, et non
pas 50 000 $, mais 100 000 $. Il y a une différence, là! Quand on
se met à multiplier 50 000 $ de plus par le nombre d'ambulances qu'il y
a dans la province de Québec - il y en a 400, M. le Président -
vous verrez qu'il y a une énorme différence de prix.
Ce qui s'est passé sur la rive sud, l'initiative est venue
également de Montréal, à la suite du fait que la loi n'ait
pas été adoptée à l'Assemblée nationale en
juin dernier. Ils ont pris l'initiative d'approcher les propriétaires
d'ambulances pour les acquérir à Montréal et
Lépine-Cloutier a accepté de vendre ses cinq entreprises selon la
même formule que sur la rive sud. Je voudrais savoir pourquoi le chef de
l'Opposition pense qu'on aurait dû le refuser à des travailleurs
qui désirent se prendre en main, qui désirent acquérir
leur entreprise, qui désirent fonctionner par eux-mêmes? Est-ce
qu'il estime qu'ils ne sont pas assez intelligents pour s'occuper de leurs
propres affaires? Pourquoi le gouvernement, à même un programme
qui existait
lorsque le Parti québécois était là, selon
les mêmes normes et les mêmes directives, refuserait-il à
des travailleurs qui désirent se prendre en main de postuler à un
programme, d'obtenir ce qui est prévu dans le programme et de...
Le Président (M. Laporte): En conclusion.
M. Dutil:... se prendre en main, surtout à un prix que le
chef de l'Opposition semble estimer excessif, qui est de 33 % inférieur,
si on le compte à la baisse - 50 % à la hausse, 33 % à la
baisse - aux offres actuellement faites par les propriétaires si
l'État avait l'intention de nationaliser, ce qu'il n'a pas l'intention
de faire, je le répète, parce que c'est bien important ici de
situer cette question.
En terminant, quand on dit que le gouvernement ne veut pas payer
d'indemnité, ce n'est pas ça, c'est la question du ratio des
indemnités qui est sujette à discussion. Merci.
Le Président (M. Laporte): M. le député de
Laval-des-Rapides.
M. Guy Bélanger
M. Bélanger: M. le Président, le chef de
l'Opposition et député de Joliette est, pour moi, un homme
très habile pour qui, en tant que parlementaire, j'ai une certaine
admiration. Il a cette facilité de parole, il a le verbe haut, il a la
répartie facile et une connaissance relativement intéressante de
ses dossiers, particulièrement dans le cas de ce dossier. On reviendra
tout à l'heure sur la raison pour laquelle il le connaît si
bien.
Une voix:...
M. Bélanger: Noël, ça approche encore! Il a
toujours cet art de faire indirectement ce qu'il ne peut faire directement. Ma
foi! il le fait tellement bien que c'est difficile de l'en empêcher! "Je
ne dirai pas que le ministre est menteur, je n'ai pas le droit de le dire",
mais il l'a dit. Je trouve ça terrible parce que lui, mieux que tout
autre, sait comment ce dossier n'est pas facile, comment c'est un dossier non
seulement fort complexe, mais qui a des racines, des antécédents
à ce point, je dirais, "maganés" - il y a une tout autre
épithète qui pourrait me venir en tête - pourris qu'il
devient de plus en plus difficile de trouver une solution qui, aux yeux de
tous, pourrait sembler raisonnable. Il y a tellement de choses qui se sont
passées dans ce dossier qui sont déraisonnables, de part et
d'autre, qu'à un moment donné, tu te dis: Cela prend une
intervention à un niveau supérieur pour arriver à mettre
fin à tout ce qui s'est passé là-dedans.
Je disais tout à l'heure que M. le chef de l'Opposition sait fort
bien ce qui en est dans ce dossier. Vous vous rappelez, M. le
député de
Joliette, un joyeux Noël que vous aviez passé à
négocier la situation des ambulances en 1984 - j'étais dans le
réseau, à l'époque, je m'en souviens fort bien - du 23
décembre au 27 décembre, vous me ferez grâce des heures et
des dates, à quelques jours près ou à quelques heures
près, je pense que je suis assez précis. Je pense que tout le
monde avait compris comment ça ne doit pas être facile,
après une session, en pleine période de Noël, alors qu'on
aurait besoin de repos et d'être dans sa famille, d'entrer dans de telles
négociations. Il fallait que la situation soit très urgente et
très complexe pour que, comme ministre - c'était un
précédent - vous ayez dû intervenir dans ce dossier. Vous
aviez compris l'urgence et je pense que vous avez agi d'une façon
très responsable à ce moment-là.
Cela n'avait pas réglé le problème parce que, comme
on le disait tout à l'heure, les enjeux et les motivations, ou ce qui se
passait sous-jacent à ces problèmes, ce n'étaient pas les
enjeux évidents ou apparents du dossier, de telle sorte qu'on n'a jamais
apporté de solution à cette problématique des services
ambulanciers et préhospitaliers qui dure et perdure depuis ce temps et
qui, maintenant, est à un point tel où il faut agir
énergiquement. Le projet de réforme vise simplement, après
plusieurs études - M. le ministre a mentionné tout à
l'heure toute la série d'études, Marois, etc., pour aller
jusqu'à SECOR, la dernière que j'ai devant moi ici - qui disent
qu'indépendamment des options que le gouvernement pourrait envisager sur
le plan du transport ambulancier plusieurs améliorations doivent
être apportées à la gestion du système de services
d'urgence et cela, de la façon la plus rapide possible... On donne une
série d'éléments ici qui démontrent que,
finalement, le conflit est devenu, je dirais, quasiment
institutionnalisé et qu'il va falloir intervenir, il va falloir modifier
les règles du jeu, changer beaucoup de choses.
C'est ce que le ministre tente de faire en respectant tous les
partenaires dans ce dossier: d'une part, les propriétaires ambulanciers,
d'autre part, les techniciens ambulanciers et aussi tous les services
paramédicaux qui s'y greffent. On oublie souvent tout l'aspect des
répartiteurs, l'aspect des systèmes de communication, les
infirmières, bref, ceux qui posent le premier diagnostic. il y a toute
une équipe qui intervient là-dedans. Il n'y pas juste la
tôle. Il faut donc regarder ce dossier-là avec un oeil totalement
différent et essayer de repartir à neuf un système qui, ma
foi, marche avec quatre pneus à plat depuis des années.
La situation commande des mesures. Le ministre en apporte. Je comprends
votre façon de vous opposer, mais je sais que vous êtes d'accord
que sur le fond du dossier il doit se passer quelque chose. C'est
évident. Ce n'est pas la même chose que ce que vous avez
tenté de faire parce que ce que vous avez fait dans le temps n'a pas
donné les résultats escomptés. Il faut
donc envisager aujourd'hui d'autres mesures qui sont peut-être
plus draconiennes, mais elles sont nécessaires. Merci.
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le
député de Laval-des-Rapides. M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais
rectifier tout de suite ce que le ministre a voulu laisser croire que j'avais
dit. Il devrait d'ailleurs se contenter de dire ce qu'il pense plutôt que
d'essayer d'interpréter les autres parce qu'il a
énormément de difficultés à concevoir son dossier
de sorte que... N'essayez pas d'interpréter, M. le ministre. Vous avez
beaucoup de difficultés à comprendre votre propre dossier.
Non seulement je trouve correct ce que la CSN a fait - je les en
félicite - mais ils sont plus vites que le ministre. C'est clair? Parce
que, après avoir dit en commission parlementaire en juin que cela ne
valait pas cinq cennes et qu'on ne leur donnerait rien, quand ils ont
décidé de former une coopérative, ils ont fait venir des
évaluateurs professionnels. Les évalua-teurs professionnels ont
conseillé à la CSN d'acheter. Même s'il y avait 12
véhicules ambulanciers sur 19 qui devaient être remplacés,
on leur a quand même conseillé de verser 105 000 $ par permis et
par ambulance.
Le ministre, qui est issu d'une famille de gens d'affaires, sait
très bien qu'un propriétaire actuellement peut être
propriétaire d'une ambulance qui peut valoir 50 000 $, 60 000 $ ou 70
000 $ et d'une autre, dans sa flotte, qui peut valoir 20 000 $. Il peut avoir
des autos pour les médecins. Il peut avoir un garage. Il peut avoir des
bureaux. Et tout ça n'a pas la même valeur que pour un autre
propriétaire qui n'a qu'une flotte d'ambulances dont 12 sur 19 sont
finies. Donc, je n'ai jamais voulu interpréter le quantum. Tout ce que
j'ai voulu - pour la compréhension du ministre qui semble très
lente - c'est lui faire comprendre que ceux-là mêmes qui, en juin,
disaient que ça ne valait rien ont reconnu, lors d'un achat, que
ça valait beaucoup. La preuve, c'est qu'ils ont payé 105 000 $
par permis pour 12 véhicules sur 19 qui devaient être
remplacés dès cette année.
Donc, le ministre devrait comprendre que je me réjouis de voir
que la CSN a évolué vers la reconnaissance d'un coût pour
le droit de propriété. Et c'est ça que la CSN
reconnaît par ses coopératives et le ministre n'a pas encore
reconnu ce fait-là. Imaginez-vous. On est rendu que c'est fait pour la
CSN, c'est compris par les salariés et il n'a pas encore compris qu'une
compagnie pouvait se vendre. C'est un homme d'affaires issu d'une famille
d'affaires et on me dit qu'il offre seulement 40 000 $ pour les permis, au
moment où on se parle, alors que ceux qui, en juin, disaient que
ça ne valait pas une cenne paient 90 000 $ à 95 000 $ le permis
pour des ambulances qui ne valent à peu près rien et qu'ils
doivent remplacer immédiatement cette année. Il faut le faire! Et
c'est un homme d'affaires! Une compétence, imaginez-vous! Donc, c'est
à ça que je m'en prenais.
Les congés d'intérêt. Je vous donne un exemple. Le
ministre, qui sait qu'une coopérative a un congé
d'intérêt de deux ans, va-t-il tenir compte de ce fait quand il va
établir le coût horaire pour la tôle? Si j'ai un financement
à 12 % et qu'un autre employeur n'a pas de financement à payer
pour deux ans, est-ce qu'il doit en tenir compte dans l'établissement du
coût horaire? Ce sont des questions que des gens lui posent et qu'il
devrait comprendre comme homme d'affaires. Il ne comprend pas ça. Il est
perdu dans les limbes, les nuages. Je comprends que le dossier lui a
glissé des mains et qu'il est rendu au bureau du premier ministre. Cela
n'a pas de bon sens. Un gars qui se dit homme d'affaires et qui ne comprend pas
ça. C'est facile à comprendre. Si mon coût d'exploitation
est inférieur, est-ce que je dois en tenir compte? Il me semble que le
ministre doit en tenir compte. (10 h 30)
Mais j'aurais à lui poser une question dans un autre domaine,
maintenant que j'ai fait la mise au point et que je me rends compte que la CSN
évolue beaucoup plus rapidement et comprend beaucoup plus rapidement que
le ministre lui-même. Vous avez créé des comités. Le
ministre était tout heureux de dire qu'il avait créé des
comités, trois comités, dont un sur les ambulances ou la
qualité des services ambulanciers. Je voudrais lui demander s'il fait
respecter la clause toute première du comité sur les
véhicules ambulances qui dit ceci: "L'ambulance devra être
fabriquée au Québec. " Est-il exact, M. le ministre, que des gens
achètent des ambulances aux États-Unis pour donner des services
sur la rive sud de Montréal, à la connaissance du
ministère, et qu'au Québec on a au moins trois industriels qui
fabriquent des ambulances, des boîtes pour installer sur les camions
ambulances, qui les fabriquent au Québec, qui créent des emplois
au Québec et que, pourtant, on fait venir de la Floride...
Le Président (M. Laporte): En conclusion, s'il vous
plaît!
M. Chevrette:... des boîtes au coût de 55 000 $ alors
qu'on peut les faire fabriquer au Québec? Est-ce exact? Si c'est
à la connaissance du ministre, pourquoi le ministre laisse-t-il faire
ça?
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le chef de
l'Opposition. M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Encore là, M. le Président, beaucoup de
questions de la part du chef de l'Opposition, beaucoup d'insinuations, mais la
pire, je pense, dans tout ça, c'est de mettre en relation le coût
du permis avec le coût de l'achat entier d'une entreprise. Le chef de
l'Opposition, tout à l'heure, a invoqué le fait que nous
estimions que le coût du permis était de 40 000 $. Il se posait la
question, à savoir pourquoi ce n'était pas 105 000 $. C'est bien
simple, M. le Président. C'est parce que ce n'est pas de l'entreprise
dont on parte. C'est du permis. Cela veut dire que les autres actifs, garages,
ambulances, etc., pourraient valoir en moyenne, par ambulance, quelque chose
comme 60 000 $. C'est ça que ça veut dire: 60 000 $ plus 40 000
$, 100 000 $. Est-ce que le chef de l'Opposition est capable de faire cette
addition? 60 000 $ plus 40 000 $, ça égale 100 000 $. C'est
ça la distinction.
Quand le chef de l'Opposition nous dit qu'on ne sait pas compter, je
vais vous dire qu'on n'a pas de leçon à recevoir de l'Opposition,
de l'autre côté, sur le fait de savoir compter ou de ne pas savoir
compter. Je pense bien que toute la population, n'importe quel citoyen va
comprendre la distinction entre payer pour un changement de nature d'une
entreprise - on parle de 40 000 $ - et payer pour l'achat complet d'une
entreprise. Actuellement, quand on regarde le marché et les transactions
qui se font, on parle d'environ 100 000 $.
C'est la même chose pour ce qu'il évoquait tout à
l'heure, la question des heures commandées, où il semblait dire
que, là, on ne fait pas les mêmes offres selon qu'on va en
soumissions publiques ou qu'on va ailleurs qu'en soumissions publiques. Je vais
lui faire la distinction entre 5000 heures commandées et 5000 heures
travaillées. Là où ça accroche, M. le
Président, c'est que nous nous disons prêts à commander
5000 heures. Ce qu'on demande, d'autre part, c'est 5000 heures
travaillées, c'est-à-dire que, s'ils ne sont pas en mesure de
livrer les heures commandées, il faut attendre qu'ils soient en mesure
de livrer les heures commandées, donc obtenir des heures
travaillées, pour devoir leur payer les heures travaillées.
Voyez-vous la distinction, la nuance importante? Nous, on s'engage à
commander les heures. Si l'entreprise ne les livre pas, que voulez-vous qu'on y
fasse?
Quant à la question qu'il soulevait concernant ce qu'il appelle
des soumissions publiques, il est bien évident que, comme administrateur
public, quand on voit une résistance pareille à des tarifs de la
part de propriétaires comme c'est le cas actuellement... Actuellement,
les propriétaires nous disent qu'on est dans les patates avec nos tarifs
et qu'il faudrait payer plus cher. C'est ça qu'ils nous disent. On se
pose la question et on essaie de voir s'ils ont raison. On a fait des calculs.
On a fait des vérifications.
On pense qu'on est correct, mais on veut s'en assurer, encore là
pour la protection des deniers publics. C'est notre rôle d'aller
défendre les deniers publics et de donner le juste prix pour ce que l'on
obtient comme services. C'est normal qu'on fasse des vérifications.
Alors, on a vérifié s'il y avait des possibilités
que quelqu'un d'autre s'intéresse à ça et dans quel ordre
de grandeur de prix ils pourraient nous situer leurs interventions.
Première vérification. Ce ne sont pas des soumissions publiques.
On ne peut pas faire de soumissions publiques, M. le Président. Il y a
des permis à Montréal et ces permis sont à des
propriétaires. La situation actuelle, c'est que l'on négocie avec
les propriétaires un tarif et, en cas de désaccord, le
gouvernement peut décréter des tarifs. C'est la situation. On ne
peut aller en soumissions publiques. Si la situation change et qu'on peut aller
en soumissions publiques ultérieurement, on verra. À ce
moment-là, le devis, évidemment - ça saute aux yeux - sera
le même pour tout le monde. Ce sera un véritable appel d'offres et
on verra si on s'en va là-dessus, évidemment. Je pense que c'est
logique, que ça tient debout.
Ce que l'on pense toujours actuellement, quant à cela, c'est que
notre proposition est un tarif valable, acceptable et raisonnable. Nous avons
un écueil avec les propriétaires d'ambulances qui estiment que ce
tarif est insuffisant, qu'il devrait être plus élevé et
qu'on devrait leur donner non pas 5000 heures de commandes, mais 5000 heures
travaillées. De quelle façon se résorbera cette situation?
Je l'ai expliqué tout à l'heure au chef de l'Opposition et il me
revient avec une comparaison entre une entreprise privée qui est dans
une situation de marché par rapport à une entreprise
privée, comme les ambulances, qui n'est pas dans une situation de libre
marché puisque...
Le Président (M. Laporte): En conclusion.
M. Dutil:... c'est un monopole et que c'est une
négociation, à toutes fins utiles, avec un seul client, qui est
l'État, qui doit trouver le juste tarif pour les entreprises qui donnent
ce service-là.
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le ministre.
M. le député de Fabre.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. Je pense que M. le
ministre a quand même assez bien couvert le sujet, tant pour ce qui est
du coût des permis que de ce à quoi on s'attend quant aux heures
travaillées. Il a conclu en mentionnant que c'était un monopole.
Durant les quelque deux heures où on a discuté, on a parlé
de ce qu'on peut appeler l'agent payeur et on a
mentionné que l'État était quand même l'agent
payeur à 90 %. Pour !e bénéfice de la population,
j'aimerais souligner qui sont vraiment les usagers du service des ambulances.
Je me réfère ici aux centres hospitaliers, à la
Régie de l'assurance automobile du Québec, à la CSST, aux
accidents du travail, à l'aide sociale, et vous avez aussi tous les
services fédéraux, partant du Solliciteur général
du Canada, la Défense nationale, les anciens combattants et Santé
Canada. C'est ce qui fait qu'à l'intérieur de la facture globale,
il y a environ 10 % à 12 % des propriétaires d'ambulances dont
les revenus proviennent de sources différentes que celle
gouvernementale. Je pense que c'est tout à fait logique et
légitime. Si on est là pour représenter les
intérêts de la population et qu'on a pris un mandat de bons
gestionnaires, de bons administrateurs, on ne peut pas payer n'importe que!
prix pour n'importe quoi.
On dit qu'il semble y avoir un écart entre ce qu'on peut offrir
et ce qui est demandé d'environ 50 000 $ par ambulance et on mentionnait
qu'il y en avait quand même 400 dans la province. Cela fait quand
même beaucoup d'argent. Un zéro tout seul, ce n'est rien, mais un
zéro additionné à bien d'autres, ça en fait quand
même beaucoup et on parle de plusieurs millions. Si le chef de
l'Opposition et député de Joliette n'a aucune objection à
l'argent, surtout quand ce n'est pas lui qui paie... Un gouvernement, ce n'est
pas un puits sans fond, c'est ça qu'il faut considérer. Un
gouvernement est élu pour respecter ceux qui paient des impôts et
des taxes. Il doit aussi considérer les services et en évaluer le
prix. C'est ce que nous faisons actuellement.
Je suis drôlement heureux de voir que l'apocalypse ne s'est pas
produite parce qu'on a pris position et que le dossier est acheminé vers
ce qu'on vise, de faire en sorte que toutes les parties soient les plus
satisfaites possible, que la population reçoive les services et
qu'à l'intérieur d'un temps raisonnable on puisse donner ces
services. Considérant qu'il reste encore de la négociation
à faire, je suis convaicu aue la bonne foi de toutes les parties
amènera un rapprochement et qu'on ne prendra pas la population en otage.
Merci, M. le Président
Le Président (M. Laporte): Merci. M. le
député de Fabre.
M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. !e Président. Si l'apocalypse ne
s'est pas produite, c'est précisément parce qu'on n'a pas
adopté le projet de loi 34. S'il avait fallu qu'on l'adopte tel quel,
vous auriez vécu un été chaud, très chaud. On vous
aura permis d'aller refaire vos classes, vos devoirs. On aura permis à
la CSN qui avait, de toute évidence, une entente avec le ministre, de
reconnaître maintenant le droit à l'indemnité juste et
équitable puisque, dans les transactions, ils ont négocié
de gré à gré l'achat de l'entreprise privée
On aura permis de faire la démonstration, la preuve publique
précisément, que ça se faisait. Mais là où
le ministre n'a pas répondu, c'est qu'N n'a pas dit qu'il était
allé en soumissions publiques, mais qu'il n'avait pas demandé les
fournitures médicales de base dans les soumissions publiques. Il n'a pas
demandé, dans les coûts a Tilden, par exemple, qui payait
l'essence. On l'a vérifié, M. le ministre, auprès des
intéressés. On ne parle par en l'air, là. On n'a pas dit
qui devrait fournir les draps. Allez demander aux intéressés qui
ont coté; ils ont coté sur la tôle, point. Ne venez pas
dire ici, quand ils vous ont soumis des prix à 19 S l'heure, que
s''auraient été les mêmes prix si on leur avait dit: Vous
allez fournir l'essence, les draps et les fournitures médicales de base.
Le tout serait évalué à 8 $ ou à 9 $ de plus
l'heure. Vous vérifierez ça, si vous ne l'avez pas, dans votre
dossier. On a pris la peine de le faire vérifier par des gens qui
connaissent ça, qui sont en communication avec les compagnies qui ont
même soumissionné. Et, M. le ministre, je vous sais, je
l'espère, assez honnête dans votre grande naïveté pour
reconnaître ces faits.
Il y a une question sur laquelle vous n'avez même pas
effleuré une réponse. Je vous ai dit: Sur la rive sud, il y a des
ambulances qui sont achetées à Miami, alors que, dans vos
comités de travail, la première obligation que vous faites, c'est
que ce soit fabriqué au Québec. L'ambulance doit être
fabriquée au Québec. Vous êtes-vous préoccupé
qu'elles soient fabriquées au Québec? Savez-vous qu'il y a un
fabricant d'ambulances à Joliette même, un dénommé
Gérald Perreault. et qu'il y en a deux autres au Québec - je n'ai
malheureusement pas les noms devant moi parce que je vous les donnerais - qu'il
y a au moins trois fabricants d'ambulances au Québec et que vous en
laissez acheter à Miami? C'est quoi cette condescendance? Pourtant, on
parle de politique d'achat chez soi, de fabrication chez soi, de
création d'emplois chez soi. Mon oeil! Pourquoi le ministre n'est-il pas
intervenu?
Je peux vous le dire, je ne suis pas hypocrite, j'ai parié
à Gérald Larose de ce fait-là vendredi dernier, il y a une
semaine jour pour jour. On est cohérent ou on ne l'est pas. On a des
principes ou on n'en a pas. On n'a pas de visage à deux faces, de ce
côté-ci. On n'essaie pas de tenir un discours et de faire le
contraire. Je trouve ça inconcevable. C'est pourtant dans votre propre
comité d'étude: les ambulances doivent être
fabriquées au Québec. Je vous ai parié des soumissions et
vous n'avez fait qu'effleurer le sujet. Mais, dans le fin fond, vous n'avez pas
répondu à la question: Allez-vous tenir compte, dans
l'établissement des coûts de base, du fait que des compagnies
n'ont pas
d'intérêt à payer? Vous n'avez pas répondu
durant 30 secondes à ça. C'est important de renseigner les gens.
Le débat parlementaire vise précisément que la
vérité sorte, mais la fameuse formule empêche
précisément questions et réponses, si bien qu'on se rend
compte qu'on esquive les questions et qu'on n'y répond pas.
Je vais vous en rappeler au moins trois avant, pour vous permettre de le
faire au début de vos dix minutes. Êtes-vous au courant que les
gens achètent des KKK à Miami et qu'on ne les fait pas fabriquer
au Québec, alors qu'on le pourrait? Êtes-vous au courant que les
soumissions que vous avez demandées n'exigeaient pas de matériel
médical de base, les draps, la gazoline, etc, et que ça aurait
changé les prix si vous l'aviez fait? Troisièmement, dans
l'établissement des coûts horaires, allez-vous tenir compte du
fait qu'il y en a qui paient plein intérêt et d'autres qui ne
paient pas d'intérêt dans l'établissement de votre
coût horaire? Allez-vous tenir compte de ça comme ex-homme
d'affaires, comme ministre responsable et comme personne qui se place au-dessus
de la mêlée et qui a analysé une situation? (10 h 45)
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Compte tenu de l'heure, j'inviterais le ministre à
conclure pour une période de dix minutes et, par la suite, le chef de
l'Opposition. M. le ministre.
Conclusions M. Robert Dutil
M. Dutil: M. le Président, le chef de l'Opposition a
souligné les faiblesses de la formule d'interpellation; on voudrait
plutôt que ce soit une période de questions allongée qu'une
formule d'interpellation où chacun explique ce qu'il estime être
les points importants et majeurs.,
Ce que je déplore des questions du chef de l'Opposition, c'est
qu'elles se concentrent sur des conflits internes, sur des difficultés
que nous avons avec les employeurs et les employés d'amener tout ce
monde à régler les problèmes autour de la même
table.
Finalement, les deux heures que nous avons passées ici ont
tourné autour de ce genre de conflit et non pas véritablement sur
la réforme et sur l'information à la population de ce que sera le
système ambulancier au Québec, lorsque nous aurons vaincu ces
difficultés qui sont très réelles, pénibles, que
nous affrontons et auxquelles nous trouverons des solutions.
Il me reste dix minutes et je veux parler de cette réforme, je
veux dire quel bienfait elle apportera à la population et pourquoi nous
la faisons. Nous avons déjà mentionné à
Montréal que nous établissions une nouvelle formule, un organisme
sans but lucratif qui détachera l'urgence du CRSSS de Montréal,
Urgences-santé, et qui intégrera les techniciens ambulanciers.
Nous avons exposé les raisons qui nous amenaient à faire
ça. Nous avons dit que, si ça dénaturait les entreprises,
il y avait une évaluation à faire de l'indemnité à
payer et que nous serions justes et équitables là-dessus.
Notre position sera connue très prochainement. Je pense que
ça devrait être reconnu comme juste et équitable par tous
les observateurs extérieurs. Les observateurs intérieurs qui ont
à défendre leurs intérêts - c'est normal qu'ils le
fassent et je ne leur reproche pas de le faire - évidemment, s'ils
pouvaient en avoir davantage, ce serait mieux et je ne doute pas qu'ils en
demanderont certainement davantage. Je ne leur reproche pas ça. Ce que
je dis, c'est que je me fie à ce que les observateurs extérieurs,
même extérieurs à cette Chambre, parce que je ne pense pas
convaincre l'Opposition non plus du bien-fondé de nos agissements... Je
pense que les observateurs extérieurs sont en mesure de conclure que
nous allons dans une façon de procéder et dans une
évaluation juste et équitable de ce côté.
Ici, on parle davantage des autres points de la réforme fort
importante pour la province. La stabilisation de l'emploi. Beaucoup de gens
nous demandent ce que ça veut dire, la stabilisation de l'emploi, et
quel impact ça va avoir. Il est important de donner des exemples de ce
qui se passe actuellement dans la province et de ce qui se passera après
la réforme dès qu'elle sera mise en place.
Je viens d'une région et je vis cette situation et beaucoup de
gens ici, à l'Assemblée nationale, viennent d'une région
et vivent cette situation. Dans la région, le système est fait de
telle sorte que des gens sont souvent en disponibilité en attendant un
appel et non pas en attente dans le véhicule. Évidemment, la
disponibilité n'est pas payée comme un salaire - actuellement, le
taux est de 1 $ l'heure - et on entend parler de ce taux depuis tellement
longtemps que je pense que tout le monde est au courant. Mais ces gens
travaillent ailleurs que dans le service ambulancier. Ils peuvent travailler
dans une usine, ils peuvent travailler dans un commerce, ils peuvent travailler
ailleurs. Lorsqu'il y a un appel, ils prennent l'ambulance et répondent
à cet appel. Évidemment, ça cause des problèmes de
qualité de service. Le chef de l'Opposition le comprend sûrement
facilement. Ces gens n'ont pas le temps de suivre toute la formation que nous
pensons devoir donner aujourd'hui, dans une société moderne, avec
les équipements et les véhicules qui, techniquement, sont
possibles aujourd'hui. Nous pensons également que la formation doit
suivre cette évolution, mais pour que cette formation que nous donnerons
aux techniciens ambulanciers, particulièrement en région, fasse
que les techniciens ambulanciers demeureront en région, il faut aussi
stabiliser l'emploi. Il faut que quelqu'un qui a suivi 825 heures de cours
puisse s'en aller en région et se dire: Je peux gagner ma vie
à être technicien ambulancier.
Ce que nous envisageons de faire, c'est de permettre à ces
individus de recevoir un salaire qui porte sur une période de 40 heures
par semaine, même s'ils sont en disponibilité pendant 168 heures,
c'est-à-dire toute la semaine parce que, dans ces zones, il y a un
faible débit d'appels. Ce n'est pas parce qu'il y a un faible
débit d'appels qu'on est justifié de ne pas offrir un service
dans un temps propice aux citoyens du Québec. Depuis quelques
années, vous pouvez relever dans les journaux les durées de temps
d'intervention, dans les régions en particulier... On s'aperçoit
qu'il y a possibilité d'avoir une amélioration
considérable si nous mettons en vigueur la réforme dont nous
avons parlé et c'est ce que nous ferons.
Cela va améliorer grandement les temps de réponse, surtout
dans les régions où il y a le plus faible débit de
transport ambulancier. Mais plus que ça, nous avons décidé
également qu'il y aurait des centrales de coordination dans l'ensemble
de la province d'ici à trois ans. Pourquoi? Parce qu'actuellement, dans
notre système de zones fermées, chaque propriétaire
d'ambulances s'il ne s'est pas regroupé de façon volontaire...
Certains l'ont fait, je le reconnais, et il y a des endroits où
ça marche très bien. Ils se sont regroupés de façon
volontaire et ils ont une formule de centrale de coordination embryonnaire ou
même avancée dans certains cas, où justement cette
perméabilité des zones peut se faire. On s'aperçoit que
cela apporte des résultats qui sont très probants, très
intéressants pour l'ensemble de la population.
Nous voulons faire ça dans l'ensemble de la province. J'ai
mentionné et je tiens à le répéter, je pense que
c'est important, que là où les propriétaires d'ambulances
voudront faire ce regroupement et l'organiser de façon adéquate
pour le service à la population, perméabilité des zones,
coordination des appels, etc., ce sera possible de le faire. Là
où les propriétaires ne s'entendront pas pour le faire, nous
estimons qu'il est de notre devoir, c'est à l'État de
déterminer ce que devrait être la qualité des services dans
la province. Nous pensons que des centrales de coordination, c'est
nécessaire même dans les endroits où, possiblement, les
propriétaires ne souhaiteraient pas le faire eux-mêmes; ça
peut arriver, c'est possible, c'est leur choix. D'une région à
l'autre, la situation peut varier ou dans des régions où ils ne
peuvent pas s'entendre, pour une raison ou pour une autre, pour offrir ce
service.
Donc, formation rehaussée. Quand nous parlons de 825 heures, je
mentionnais tout à l'heure que la formation à Montréal
était rendue, dans les faits, aux alentours de 300 heures et qu'en
région la formation était autour de 150 heures. C'est justement
pour illustrer ceci. Tout le monde a la formation de base. I! n'y a pas de
problème. Tout le monde a 150 heures. Mais c'était pour illustrer
que, dans les endroits actuellement où les travailleurs sont à
temps plein, ils vont chercher davantage de formation. Dans les endroits
où les travailleurs ne sont pas à temps plein, il se passe deux
choses: ou ils prennent la formation de base, ils se dévouent parce que
ce sont des gens qui se dévouent en dehors de leur travail ordinaire
pour donner le service d'ambulance depuis des années souvent, ou ils
vont chercher la formation de base et ils s'en tiennent à cela pour des
raisons de disponibilité. Ce n'est pas leur premier métier, ni
leur première tâche; ce n'est pas leur première vocation,
ils le font d'une façon excellente, mais avec les moyens qu'ils ont
actuellement. S'ils vont chercher plus que la formation de base, supposons 300
ou 400 heures, on les perd en région; ils s'en vont travailler dans des
endroits où ils peuvent gagner leur vie, 40 heures par semaine, dans ce
seul métier. Le but de la réforme, c'est également de
régler ce genre de situation.
Le chef de l'Opposition a soulevé une foule de questions, j'y
réponds rapidement. Bien sûr, les ambulances seront
fabriquées au Québec. Ce n'est pas parce qu'on a un prototype,
à un moment donné, qui vient de l'extérieur pour voir
comment c'est fabriqué que les ambulances ne seront pas
fabriquées au Québec.
Il parle des soumissions publiques. Nous ne sommes pas ailés, M.
le Président, en soumissions publiques, nous avons vérifié
s'il y avait possibilité d'obtenir de la part d'autres personnes des
services d'ambulance et quel en serait le coût, approximativement. Chose
à vérifier. J'ai expliqué, tout à l'heure, pourquoi
nous l'avons vérifié. Je pense que c'est normal, quand on est le
principal payeur d'un service, de voir si nos offres correspondent à
quelque chose qui est réel. Le chef de l'Opposition ne peut
sûrement pas nous reprocher de négocier ferme à la table et
de s'assurer, par des chiffres que nous établissons, que nous payons,
autant que possible et pour autant que les estimations puissent être
réalistes, le juste prix pour le service que nous voulons obtenir.
Quant à la demande, à toutes fins utiles, de
nationalisation de la part des propriétaires d'ambulances, j'ai dit que
la réponse était négative de ce côté. Cela
n'exclut pas la possibilité d'une indemnité, je l'ai
mentionné tout à l'heure, selon le changement de la nature de
l'entreprise et en tenant compte de ce qui se transige dans le marché.
C'est normal - j'ai fait une petite addition que le chef de l'Opposition a
certainement comprise, tout à l'heure - qu'on parle de quelque chose
comme 40 000 $ pour la question des permis parce que, lorsqu'on regarde ce qui
se passe dans le marché, c'est à peu près cela. Il y aura
60 000 $ pour les autres actifs et il semble y avoir 40 000 $ pour
l'achalandage: 60 000 $ plus 40 000 $, cela égale quelque chose comme
100 000 $ pour les permis.
Le Président (M. Laporte): En conclusion, M. le
ministre.
M. Dutil: Je conclus, M. le Président, en disant que c'est
sûr que le chef de l'Opposition a le droit de prendre les
difficultés que nous vivons dans ce dossier extrêmement
pénible, extrêmement difficile pour mettre d'accord tous les
personnages, tous les intervenants dans le dossier. C'est bien
évident.
Le Président (M. Laporte): Brièvement.
M. Dutil: Mais nous y parviendrons, nous réaliserons cette
réforme et ce sera pour le mieux-être de la population du
Québec.
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le ministre. En
terminant, M. le chef de l'Opposition, pour dix minutes.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, l'hypocrisie,
l'incompétence et les accrocs à la vérité doivent
être dénoncés, c'est le rôle de l'Opposition. Vous
aurez remarqué que, pendant deux heures, le ministre n'a pas
répondu à une question. On lui a demandé carrément:
M. le ministre, en vertu de quelle loi négociez-vous? Il n'a jamais
répondu. Il n'a pas dit que c'était le Code du travail, ce qui,
bien sûr, l'aurait forcé à respecter les deux parties, ce
qu'il l'aurait forcé à dire: C'est vrai, je n'étais pas
mandaté par les employeurs, depuis le 5 juillet, pour négocier
pour les propriétaires de Montréal. Ce l'aurait forcé
à dire qu'en vertu du Code du travail il ne pouvait pas exclure la
corporation des propriétaires ambulanciers, il y est obligé. Et
eux disent: C'est inexcusable, c'est impardonnable d'avoir été
exclus.
Le ministre n'a pas dit que les propriétaires ont
été obligés de demander la conciliation à son
collègue, le ministre du Travail. Ce ne sont pas des farces! Lui se
pavane, se targue, se pète les bretelles qu'il y a une entente de
principe alors que les propriétaires demandent la conciliation au
ministre du Travail au moment où l'on se parle. Il faut le faire! Dans
le même gouvernement, l'un parle d'entente de principe et l'autre va
être obligé d'accorder une médiation parce qu'ils n'ont pas
négocié et qu'ils n'ont pas participé. Il faut le
faire!
C'est pourquoi je comprends que le Conseil du patronat soit surpris. Je
comprends que la chambre de commerce soit surprise. Je comprends que les
propriétaires soient surpris. Je comprends que les porte-parole avocats
soient déboussolés. Le ministre n'a même pas compris encore
qu'il y avait une deuxième partie et qu'elle demande la conciliation,
alors que lui annonce des ententes de principe. Il faut le faire! Quelle
compétence! Imaginez-vous!
Bien sûr, j'ai posé des questions auxquelles on n'a pas
répondu. J'ai demandé s'il savait qu'il y avait des ambulances
qui étaient achetées à Miami. Il n'a pas répondu du
tout à la question qui était posée: Est-ce que dans vos
soumissions publiques vous avez tenu compte des fournitures médicales,
des draps? Il n'a pas répondu à cela, pas une minute. Dans
l'établissement de vos taux, allez-vous tenir compte du fait qu'il y en
a qui paient de l'intérêt et d'autres qui n'en paient pas? Pas une
réponse à cela, il n'a pas répondu aux questions. C'est
clair, il ne veut pas répondre aux questions. Il veut tout simplement
annoncer que cela va bien.
Dans quelques mois, si on fait des pressions, des grèves dans le
milieu pour empêcher les petits propriétaires de continuer
à gagner leur croûte, qu'est-ce que fera le ministre? Et
là, il a parlé de qualité des services ambulanciers dans
tout le Québec. Cela a été l'un des points sur lesquels
l'Opposition s'est le plus battue en disant: M. le ministre, la loi 34 n'est
faite que pour Montréal. Elle crée un nouvel organisme à
Montréal alors qu'il en existe un. Il n'y a pas un service d'aussi
grande qualité qu'à Montréal quand les techniciens
roulent. Il n'y a pas de critères de qualité dans la loi. Mais,
créer une structure pour Montréal, cela urgeait.
Le ministre dit qu'il a une grande préoccupation pour la
province, lui qui vient de la Beauce. Qu'a-t-il fait comme ministre, au moment
où il y avait une grève d'ambulanciers durant cinq à six
mois au Saguenay-Lac-Saint-Jean? Est-ce qu'il a convoqué le Parlement?
Est-ce qu'il a convoqué une commission parlementaire? Est-ce qu'il a
envoyé du monde sur place pour corriger la situation? Pas une minute! Ce
n'était pas grave, c'étaient des gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
D'ailleurs, votre collègue, M. Ryan, votre ministre de
l'Éducation, a déjà dit qu'on ne lisait pas par là!
On ne lit peut-être pas, mais des services ambulanciers, ils ont le droit
d'en avoir autant que les Montréalais. Cette sensibilité pour les
régions, si vous en avez une, M. le ministre, elle aurait dû au
moins tenir compte du fait que les gens du Saguenay--Lac-Saint-Jean ont aussi
droit à des services de qualité.
Ne vous en préoccupez pas exclusivement sur le plan du discours.
À Montréal, il y a une grève d'une journée et,
là, tout le monde "s'effervesce" dans le parlement. On plie sur tout.
Mais dans le reste de la province, ce n'est pas grave. Voyons! C'est seulement
le Saguenay-Lac-Saint-Jean qui est en grève. Cinq ou six mois, ce n'est
pas grave, cela, à la ville de La Baie. Qu'est-ce qu'il y a là?
Pas de problème! Et on parle de sensibilité aux problèmes
régionaux?
M. le ministre, je suis très heureux personnellement de constater
qu'au moins, enfin, vous reconnaissez les principes. Il y a ce bout qui peut
nous réjouir. Vous reconnaissez maintenant que toute l'argumentation de
l'Opposition, en juin, qui vous a amené à refaire vos travaux est
fondée. Vous reconnaissez que le principe de
l'indemnité juste, cela doit exister, ce à quoi vous
disiez non en juin, sauf une de vos propositions officieuses qu'on vous a
sortie et vous avez nié qu'elle existait. Mais dans l'entente officieuse
que vous êtes en train de négocier, c'est à peu près
le même patron qui s'en vient.
Vous avez nié, en juin, qu'on s'en allait lentement, mais
sûrement vers une forme d'étatisation. Vous êtes le seul
à avoir parlé d'étatisation ce matin. C'est ce qu'on vous
disait, nous: Pour un gouvernement qui parle de privatisation, vous êtes
en train d'étatiser. Le ministre a dit non à
l'étatisation, ce matin, et il pariait contre les monopoles. Qu'est-ce
qui va arriver lorsque le même employeur sera le syndicat? Qu'est-ce qui
va arriver sur l'île de Montréal si ce n'est pas un monopole?
Pauvre de vous! Je le dis bien, il faut au moins comprendre les choses. Bravo
pour ceux qui sont plus vites que le ministre, et continuez! Vous n'avez pas
besoin d'avoir peur, vous allez l'avoir sur toute la ligne, parce qu'il y a une
naïveté consommée. Il n'y a pas de problème. Mais,
à partir de là, reconnaissez les principes fondamentaux que vous
donne l'Opposition dans tout le débat des ambulances.
Premièrement, arrêtez de parler des régions et
agissez. Arrêtez de vous targuer que vous avez une sensibilité
régionale et arrangez-vous donc pour qu'il y ait au moins un ambulance
de service dans certaines zones qui n'en ont même pas. Ce serait
primordial à régler. S'il y a des citoyens pris dans le bois qui
n'ont même pas une ambulance pour les sortir, cela, c'est en
région, ce n'est pas grave. Demandez à vos fonctionnaires d'avoir
une grande sensibilité pour la province; eux vont comprendre le dossier
et, s'ils sentent que vous exigez d'eux qu'ils aient une sensibilité,
ils vont vous en inculquer une. Mais, pour le moment, donnez-leur donc cette
directive non seulement de bâtir vos discours en fonction d'une
sensibilité verbale, mais on voudrait voir une sensibilité dans
les faits pour la province. C'est ma grande préoccupation.
La deuxième préoccupation: que vous respectiez le droit
fondamental et la notion de propriété privée. Cela peut
vous surprendre, mais vous avez dit que le PQ a étatisé des
choses; il ne l'a pas fait hypocritement. Il a mis des spécialistes en
présence et il a dit: Évaluez les coûts. C'est ce que vous
devriez faire. Ne pas y aller hypocritement, M. le ministre, par des
soumissions sans exiger la même chose dans les soumissions, pour vous
donner une idée, que vous exigez de la part des propriétaires
actuels. Ne vous créez pas une image de type honnête quand vous
n'y allez même pas sur les mêmes bases. C'est de l'hypocrisie,
à mon point de vue, une telle façon de faire. Je ne parle pas de
la personne, je n'ai pas le droit de la qualifier, mais la façon de
faire, elle, est hypocrite, vicieuse et pernicieuse, et le ministre ne devrait
pas procéder de cette façon.
Aussi, M. le Président, il y a la négociation. M. le
ministre, si vous voulez avoir des relations de travail harmonieuses, ne vous
substituez pas aux parties. Amenez les parties en relations de travail... Le
rôle fondamental est d'amener les parties à s'entendre. Mais ce
n'est pas se substituer aux parties. La substitution aux parties, M. le
Président, risque purement et simplement... Moi, si j'avais
été employeur dans le présent conflit, je n'aurais pas
demandé exclusivement une médiation après que le ministre
eut annoncé une entente de principe. J'aurais déposé une
plainte au Tribunal du travail. J'aurais émis une injonction, à
part cela, parce qu'il n'a pas le droit... Quand j'ai un droit, personne n'a le
droit de se substituer à moi sans changer les lois. J'aurais pris une
injonction et vous auriez perdu devant les tribunaux parce que vous n'avez pas
le droit de vous substituer. Vous avez !e pouvoir, comme gouvernement, de
modifier les lois, vous ne l'avez pas fait et vous avez outrepassé les
lois. Cela est dangereux sur le plan de l'harmonie dans les relations du
travail. Il est inconcevable qu'un gouvernement fasse fi des lois. C'est lui
qui doit donner l'exemple pour le respect des lois. Si les lois ne vous
plaisent pas, changez-les; ayez le courage de les changer, mais ne vous
substituez surtout pas aux parties en présence.
M. le ministre, j'aurais honte, ce matin, si j'étais ministre. Un
mois après avoir annoncé une entente de principe, un mois
après vous être substitué aux parties, vous n'avez
même pas fourni une entente ou l'interprétation de votre propre
entente à la partie patronale. Cela fait dur! Cela fait
incompétent! Cela fait pernicieux dans les relations de travail! Cela
fait une situation pour le moins très ambiguë. Je vous avoue que je
ne vous confierais pas un autre mandat, moi! Je ne vous en confierais pas un
autre. Cela n'a pas de bon sens d'avoir agi comme cela. Un ministre
compétent, c'est un ministre qui respecte d'abord les lois. Un ministre
compétent, c'est un ministre qui respecte les cadres de juridiction de
chacune des parties. C'est un ministre qui respecte les parties et c'est un
ministre qui favorise l'harmonie entre les parties, mais non pas un ministre
qui se laisse doubler et qui prend partie. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laporte): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Grâce à la précieuse collaboration de tous,
la commission a pu remplir son mandat et ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 11 h 5)