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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission des affaires sociales procède à
une consultation générale et à des auditions publiques
afin d'étudier l'énoncé de politique sur les services de
garde à l'enfance déposé à l'Assemblée
nationale le 24 novembre 1988.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gervais
(L'Assomption) est remplacé par M. Després (Limoilou); M. Joly
(Fabre) par M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue); M. Leclerc
(Taschereau) par M. Poulin (Chauveau) et Mme Legault (Deux-Montagnes) par M.
Doyon (Louis-Hébert). C'est tout.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve, y a-t-il des remplacements de votre
côté?
Mme Harel: Non, pas aujourd'hui.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Donc, il n'y a
pas de remarques préliminaires. Nous procéderons donc à
l'audition d'un premier groupe que nous invitons à la table. C'est le
Regroupement des garderies privées du Québec inc.
Bonjour. Je vous explique un peu nos règles de fonctionnement.
Vous avez une heure pour faire votre présentation, c'est-à-dire
20 minutes pour présenter votre mémoire et 40 minutes de
discussions avec les parlementaires. C'est une enveloppe ferme. Vous comprenez
qu'on a des petits problèmes d'horaire et qu'il faut agir avec
célérité. Chaque fois que vous aurez à prendre la
parole, je vous prierais de bien vouloir vous identifier, ceci pour les fins du
Journal des débats, afin que les transcriptions soient
fidèles. Les transcriptrices ne vous connaissent pas, elles ne vous
reconnaissent pas; donc, si vous pouviez donner votre nom chaque fois, cela
nous aiderait. Alors, je vous prierais d'identifier vos porte-parole et de bien
vouloir présenter votre mémoire. Merci.
Regroupement des garderies privées du
Québec inc.
M. Caron (Serge): Mon nom est Serge Caron. Je suis membre du
Regroupement des garderies privées du Québec inc.
M. Beauregard (Léo): Léo Beauregard. Je suis le
président du Regroupement des garderies privées du Québec
inc.
Mme Vallières-Caron (Nicole): Mon nom est Nicole
Vallières-Caron. Je suis également membre du Regroupement des
garderies privées du Québec inc.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Alors, si vous voulez présenter votre mémoire, nous vous
écoutons.
M. Caron: M. le Président, membres de la commission,
mesdames et messieurs, nous vous sommes reconnaissants de nous donner la chance
d'exprimer nos points de vue sur le sujet. Nous espérons qu'ils
apporteront une contribution utile au monde des garderies, au monde de
l'enfant.
Nous venons nous exprimer aujourd'hui en tant que porte-parole du
Regroupement des garderies privées du Québec. Notre organisme a
été créé en 1985 et représente une vingtaine
de garderies. Nos principaux objectifs sont: développer la
qualité des services de garde, promouvoir le concept des services de
garde et assurer le libre choix des parents.
Terminologie. Dans le présent mémoire, on entend par RGPQ,
le Regroupement des garderies privées du Québec; OSGE, l'Office
des services de garde à l'enfance; loi, Loi sur les services de garde
à l'enfance; règlement, règlement sur les services de
garde en garderie.
L'énoncé de politique sur les services de garde
démontre une très grande ouverture d'esprit et comprend plusieurs
éléments très pertinents et constructifs. Ils aideront
certainement à faire évoluer le système des services de
garde au Québec. L'énoncé de politique sur les services de
garde emploie les termes "garderie non gérée par les parents" au
lieu de "garderie à but lucratif. Cette appellation définit de
façon plus juste la réalité de ces garderies et
s'avère beaucoup moins péjorative que la
précédente.
Subvention pour l'intégration des enfants handicapés.
L'énoncé de politique sur les services de garde attribue enfin
une subvention à l'intégration des enfants handicapés aux
garderies non gérées par les parents. Le RGPQ
dénonçait depuis plusieurs années le fait que les
garderies non gérées par les parents ne puissent recevoir une
subvention permettant l'intégration d'un enfant handicapé. Cela
était discriminatoire pour ces garderies qui acceptaient un enfant
handicapé, car elles ne recevaient aucune aide à cause de leur
statut.
De plus, cette politique entachait le libre choix des parents
puisqu'elle les forçait, à toutes fins utiles, à
fréquenter une garderie gérée par les parents, car
seulement celle-ci recevait une subvention. Mais l'intégration d'un
enfant handicapé doit se réaliser quelquefois avec de
l'équipement spécialisé très coûteux. Nous
osons espérer que la subvention à l'équipement dans le
cadre de l'intégration d'un enfant handicapé sera, elle
aussi, accessible aux garderies non gérées par les parents, sans
quoi l'intégration d'un enfant handicapé se réalisera de
façon boiteuse.
Subvention pour le perfectionnement. L'énoncé de politique
sur les services de garde reconnaît l'importance du perfectionnement et
du ressourcement des éducatrlces en garderie en attribuant une
subvention. Le RGPQ vous en est reconnaissant. Mais que cette subvention vienne
camoufler le manque de planification de l'OSGE, cela est Inacceptable. Lors de
l'adoption du règlement sur les services de garde en garderie en octobre
1983, l'article 9 portant sur les qualifications requises des membres du
personnel devait entrer en vigueur en octobre 1988. Ce délai de cinq
ans, pour permettre aux travailleuses et travailleurs de s'y conformer, nous
apparaissait suffisamment long et justifié.
Depuis cinq ans, tes éducatrices et éducateurs ont
sacrifié des temps de loisirs pour étudier et se rendre conformes
dans les délais prescrits et ce, à leurs propres frais,
malgré leur faible salaire. En prolongeant le délai de trois
années . supplémentaires, l'OSGE trahit les éducateurs et
les éducatrlces et les services qui recherchent la qualité et qui
se soumettent dans les délais prescrits. Ce sont principalement les
éducatrices et éducateurs en garderie non gérée par
les parents qui écopent le plus de cette anomalie, parce que ces
garderies, malgré le respect d'une même loi et d'un même
règlement, ne reçoivent aucune aide appréciable sauf de
maigres subventions que nous qualifions de miettes. Cette façon de
procéder de l'OSGE incitera désormais tous les éducateurs
et éducatrices travaillant en garderie à défier la loi et
le règlement. Qu'on se le tienne pour dit. Vous verrez.
Nous nous demandons si cette subvention ne vient pas pour nous faire
mieux accepter le recul de l'office sur un nouveau délai. Mais où
est donc la recherche de la qualité que prône l'OSGE? En
subventionnant le perfectionnement et le ressourcement des éducatrices
et éducateurs, vous pensez réaliser un noble geste,, mais une
garderie employant des éducatrices et éducateurs de plus en plus
perfectionnés ne devrait-elle pas s'attendre à payer des salaires
plus équitables? Or, il nous apparaît que le problème des
salaires en garderie ne fera que s'amplifier sans trouver de
réponse.
Les garderies en milieu de travail. L'énoncé de politique
sur les services de garde propose de développer 50 % des nouvelles
places en garderie dans les garderies en milieu de travail. Cela nous
apparaît comme un rêve irréalisable. En effet, depuis
plusieurs années, tout au plus, une douzaine de garderies en milieu de
travail ont été ouvertes dans le secteur privé. Voir le
rapport Presser du comité consultatif sur les services de 'garde. Ce
rythme lent de croissance démontre le peu d'empressement et le peu
d'Intérêt qu'a la grande entreprise et ceci, pour plusieurs
raisons.
Où est la cohérence de vouloir contingenter le
développement des garderies non gérées par les parents et
en même temps vouloir favoriser autant le développement des
garderies en milieu de travail? Mais avant de se lancer dans un
développement effréné de services en milieu de travail, il
nous apparaît urgent de préciser le règlement sur les
services de garde en garderie sur ce genre de services: par exemple, les
terrains de jeux, les espaces verts sur le terrain des vaches. L'environnement
immédiat du milieu de travail n'est pas toujours propice à
l'établissement d'une garderie et que penser des longues heures de
trajet pour se rendre au travail,. de la pression du milieu des entreprises. La
garderie en milieu de travail semble privilégier les parents,
atténuer leur anxiété, mais qu'advient-il des besoins de
l'enfant? La garderie n'est-elle pas avant tout un milieu de vie pour
l'enfant?
La qualité des services de garde. L'énoncé de
politique sur les, services de garde reconnaît la qualité des
services dispensés par plusieurs garderies non gérées par
les parents indépendamment de leur philosophie d'entreprise. Enfin, on
admet que la qualité d'un service de garde ne réside pas dans un
statut légal. Nous déplorons depuis des années la
faiblesse de l'OSGE dans le contrôle de la qualité. Le RGPQ ne
peut malheureusement remplacer l'OSGE dans cette fonction. Un service de garde
qui n'offre pas un service de qualité nuit à l'image de tous les
services du réseau des garderies. En effet, en 1986-1987, seulement 390
visites d'inspection ont été effectuées alors qu'on
dénombrait 731 garderies au 31 mars 1987. À ce rythme, il semble
que chaque garderie ne peut être visitée qu'une fois tous les deux
ans. Il est donc urgent d'augmenter le nombre, de visites afin que chaque
garderie soit visitée au moins une fois par année et d'engager le
nombre d'inspecteurs en conséquence. Voir le rapport Presser du
comité consultatif sur les services de garde.
La Loi sur les services de garde à l'enfance, le règlement
sur les services de garde en garderie, le conseil d'administration
composé majoritairement de parents, le . comité consultatif
même opérationnel, tous ces Instruments n'assurent pas la
qualité des services de garde. La qualité d'une garderie ne se
retrouve pas dans des mesures quantitatives, par exemple, le nombre de pieds
carrés, le nombre de fenêtres, etc. Elle se situe beaucoup plus
dans l'esprit d'équipe, le climat et l'atmosphère qui s'y
dégagent, les valeurs qu'elle transmet, la sélection du personnel
et la recherche du bien de l'enfant.
Il faut aller plus loin. Il nous apparaît urgent d'instaurer un
système d'évaluation dans tous les services de garde. On pourrait
s'inspirer des évaluations, comme celles, entre autres, du projet de
Medicine Hat, en Alberta. À la suite de cette évaluation, on
identifierait clairement les points sur lesquels on pourrait apporter des
améliorations. Les montants des subventions attribuées aux
garderies non gérées par les parents pourraient être
employés à améliorer les points observés dans le
rapport d'évaluation du service de garde. Ainsi, les craintes
formulées dans l'énoncé de politique sur les services de
garde quant à l'octroi de subventions aux seules fins de
l'amélioration de la qualité seraient dissipées.
L'on ne cesse de parler de l'amélioration de la qualité
des services, mais comment améliorer nos services si nous ne les avons
pas d'abord évalués? Cette évaluation de la qualité
nous apparaît primordiale. Le RGPQ demande aussi que l'OSGE soit vigilant
dans le contrôle des services de garde et que tout service de garde soit
fermé s'il entrave la Loi sur les services de garde à l'enfance
et le règlement sur les services de garde en garderie.
Le libre choix des parents. Comment peut-on prétendre respecter
le libre choix des parents et "prioriser" en même temps le
développement des garderies gérées par les parents en
accordant des subventions de l'ordre de 45 % des revenus? Comment
l'énoncé de politique sur les services de garde peut-il assurer
le libre choix des parents en appliquant un développement
concerté tel que proposé? En "priorisant" le développement
des garderies en milieu de travail (50% des nouvelles places) l'OSGE identifie
des milieux où la demande potentielle existe, mais où elle n'est
pas organisée, et devra intervenir pour rechercher un soutien à
l'organisation de cette demande (intervenants de CLSC, organismes privés
d'entraide, municipalités, etc.).
Mais alors comment peut-on parier d'un développement qui respecte
le libre choix des parents si on ne favorise en grande partie qu'un mode de
garde, soit la garde en milieu de travail? L'OSGE devrait renoncer à
faire de la liberté de choix un de ses objectifs car comment pourra-t-il
décider éventuellement de l'implantation ou de la
non-implantation de services de garde en concurrence?
La nécessité de la concurrence entre les services.
L'énoncé de politique sur les services de garde reconnaît
qu'il manque de services de garde. Seulement 62 % des besoins sont
comblés. Puisque les garderies non gérées par les parents
ne reçoivent aucune subvention d'implantation, comment expliquer que
l'on freine le développement de ces services? L'OSGE vous
rétorquera que nous devons développer dans les régions
où il manque de services. Nous sommes d'accord avec cet
énoncé. Mais si une garderie non gérée par les
parents décide d'ouvrir ses portes dans une région où il
existe déjà plusieurs services, cela est fait à ses
propres risques financiers et cela ne peut que stimuler toutes les garderies
avoisinantes puisque la saine compétition ne peut qu'avoir pour effet
d'améliorer les services. L'amélioration des services de garde
offrant une meilleure qualité, n'est-ce pas un des objectifs
visés par l'OSGE?
Nous demandons que l'OSGE n'interdise pas le développement de
services de garde même si ceux-ci doivent entrer en concurrence avec des
services déjà implantés et même si cela devait
entraîner une baisse de clientèle de ces services, ce qui serait
le signe que les services déjà Implantés ne
répondent pas de façon adéquate aux besoins de la
clientèle. Le développement des services de garde en concurrence
pourra, bien sûr, se traduire par la disparition de services que l'OSGE
aura contribué à implanter par ses subventions, avec là
perte de capital que cela suppose. (10 h 30)
Or, dans bien des cas, la concurrence potentielle ou, autrement dit, la
menace d'une éventuelle concurrence effective pourra être
suffisante pour atteindre le même résultat. Si bien que, dans ces
cas, il y aura élimination du coût de l'inefficacité sans
que cela n'entraîne de perte de capital. C'est tiré du rapport sur
le financement des services de garde de juin 1984, de François Dussault,
économiste. De quel droit une politique administrative de l'OSGE depuis
deux ans freine-t-elle le développement des garderies non
gérées par les parents surtout que, depuis quelques
années, le rapport annuel de l'OSGE démontre un nombre
supérieur d'ouvertures de nouveaux services dans les garderies non
gérées par les parents? Les 500 places par année
limitées aux garderies non gérées par les parents sont
discriminatoires et entravent la libre concurrence.
Le financement des services. À la page 62 de
l'énoncé de politique sur les services de garde, on
déclare: "Le mode de gestion des garderies à but lucratif et leur
philosophie d'entreprise, ayant un but lucratif déclaré,
indépendamment des objectifs de qualité poursuivis par plusieurs
rendent toutefois difficile un mode de subvention approprié qui
garantirait l'utilisation de subventions aux seules fins d'amélioration
de la qualité." Puisque le seul critère de subvention
jusqu'à ce jour, soit le conseil d'administration composé
majoritairement de parents, n'existe plus et que vous désirez maintenant
apporter un mince soutien aux garderies non gérées par les
parents, comment expliquer l'écart si grand de financement entre les
garderies gérées par les parents et les garderies non
gérées par les parents, toutes ces garderies étant
soumises à la même loi et au même règlement?
Vous semblez hésiter à subventionner davantage les
garderies non gérées par les parents en prétendant que
l'utilisation des subventions ne devrait qu'améliorer la qualité
des services. Vous désirez rendre le comité consultatif de
parents opérationnel. Alors, pourquoi ne pas confier aux parents de ce
comité la responsabilité de s'assurer que les subventions
serviraient aux seules fins d'amélioration de la qualité, ce qui
aurait pour effet d'enlever les craintes d'une mauvaise utilisation des
subven-
tions? Sous de tels critères assurant l'amélioration des
services des garderies non gérées par les parents, le RGPQ exige
de recevoir jusqu'à concurrence de la môme proportion de
subvention attribuée aux garderies gérées par les
parents.
Donc, le RGPQ dénonce le financement proposé par
l'énoncé de politique sur les services de garde qui n'attribue
à ces garderies non gérées par les parents que des maigres
sommes.
En conclusion, le réseau des garderies est fragile et il nous
apparaît primordial de penser en tout premier lieu à le consolider
et, par la suite, à s'occuper de le développer. On ne peut
développer sans s'assurer que le réseau actuel pourra continuer
à maintenir un service de qualité.
Les recommandations. Le RGPQ recommande de rendre accessible la
subvention à l'équipement dans le cadre de l'intégration
d'un enfant handicapé aux garderies non gérées par les
parents. Le RGPQ recommande que l'OSGE respecte dorénavant les
délais prescrits dans le règlement et ne recule devant aucun
groupe faisant pression. Le RGPQ recommande de développer des
instruments de mesure de qualité dans les milieux de garde. Le RGPQ
recommande d'instaurer un programme d'inspection systématique des
services de garde. Le RGPQ recommande de donner au comité consultatif de
parents le pouvoir d'administrer les subventions aux seules fins
d'amélioration de la qualité.
Le Président (M. Bélanger): SI vous me le
permettez, je vous inviterais à conclure rapidement. Il reste deux
minutes.
M. Caron: Le RGPQ recommande de respecter le libre choix des
parents en développant, de façon plus équitable,
différents modes de garde. Le RGPQ recommande que l'OSGE permette la
concurrence entre les services de garde et, en conséquence, ne fasse pas
obstacle au projet d'implantation d'un, service du fait que cette implantation
compromettrait la viabilité des services déjà
implantés. Le RGPQ recommande de donner aux garderies non
gérées par les parents les mêmes subventions que pour les
garderies gérées par les parents car elles respectent la
même loi et le même règlement.
Une dernière recommandation: Le RGPQ recommande d'accorder la
priorité à la consolidation, du réseau, des services de
garde et d'assurer l'amélioration de la qualité des services.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie, monsieur, de votre
présentation. J'anticipais beaucoup votre présence, ce matin,
parce que vous savez qu'il s'est dit plein de choses à votre sujet
depuis le début de la commission parlementaire qui portent à
réflexion. Cela va donc nous permettre de les éclaircir et de
vous interroger sur ces nombreux points qui ont été
discutés depuis le début de la commission parlementaire.
Avant de vous poser mes questions, je voudrais savoir comment le
Regroupement des garderies privées du Québec se
différencie de l'Association des propriétaires de garderies du
Québec. Est-ce que vous poursuivez les mêmes objectifs?
M. Caron: Nous sommes, évidemment, tous les deux de
l'entreprise privée, sauf qu'il y a certains points sur lesquels on
différait pour la poursuite de la qualité qui, pour nous, passe
avant toute chose, ce qui n'empêche pas, en fait, d'avoir une entreprise
privée en garderie. Au fond, quand on parle de profits dans l'entreprise
privée en garderie, c'est impossible qu'une garderie de 60 places puisse
faire ce qu'on peut appeler des profits. Les propriétaires peuvent
prendre des salaires, c'est juste, mais de là à dire qu'une
garderie de 60 places peut générer des profits, c'est presque
impossible.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, madame.
Mme Vallières-Caron: Un autre point qui peut nous
différencier ou auquel nous, on accorde beaucoup d'importance, c'est le
ressourcement de nos membres. On organise régulièrement des
ateliers, des congrès, où on peut, premièrement, discuter
de notre vécu et dans lesquels on implique les éducateurs aussi.
Pour nous, c'est important parce qu'on se sentait isolés. On sentait
qu'on n'avait pas les moyens dont disposaient les garderies sans but lucratif
parce que quand l'Office des services de garde à l'enfance organise des
sessions de ressourcement, très souvent, on n'est pas informés et
on n'est pas convoqués à ces réunions d'information ou de
ressourcement.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez parlé beaucoup de la
planification régionale - j'ai senti qu'il y avait un certain
désaccord - et aussi de l'ouverture de garderies à but lucratif
dans l'avenir. Vous dites: Depuis quelques années, depuis deux ans, vous
nous avez imposé une espèce de contingentement et, finalement,
pourquoi ne pas en laisser ouvrir. J'aimerais apporter certaines
précisions. Vous savez, au départ, qu'une garderie à but
lucratif qui décide d'ouvrir, rien ne nous permet actuellement dans la
loi... Si elle est conforme, on est obligés de lui remettre son permis.
Par contre, ça nous cause quand même certains problèmes
dans le sens que nous devons financer les parents qui envolent leurs enfants
dans de telles garderies. D'une part, nous n'avons pas le contrôle de
l'ouverture comme telle, mais, par contre, nous devons financer et accorder
l'aide financière aux parents qui envoient leurs enfants dans de telles
garderies.
Concernant la planification régionale, ce qui
est important, c'est que, justement, on ne veut plus faire de
développement spontané qui émerge de la demande, mais on
veut faire un développement qui soit beaucoup plus planifié avec
les intervenants du milieu, c'est-à-dire chaque municipalité et
municipalité régionale, tous les types d'Intervenants, les
garderies, les regroupements, tel le vôtre, et d'autres également,
les employeurs, et j'en passe, afin qu'on puisse vraiment déterminer
dans le milieu quels seront les besoins au cours des prochaines années
et identifier le type de services qui pourrait répondre à ces
besoins.
Une fois qu'on aura identifié ces besoins et qu'on aura fait une
planification, on ne pourra pas en laisser ouvrir comme ça, partout,
comme des champignons, par n'importe qui. Je pense qu'on va devoir, si cela a
été fait par les gens de la région, quand même se
limiter à ce genre de décision, de planification. Si, par
exemple, on a décidé que dans un quartier ça devait
être une garderie plutôt qu'une agence, une halte ou un jardin
d'enfants, à ce moment-là, le choix restera à l'un ou
l'autre, selon le choix du milieu. Mais je pense que la saine concurrence
pourra toujours revenir.
Vous savez qu'au nom d'une saine concurrence on ne peut pas, par contre,
non plus, après avoir subventionné une garderie sans but lucratif
et subventionné en plus le fonctionnement, se permettre, comme
gouvernement qui a à gérer les deniers publics, de laisser ouvrir
une autre garderie qui pourrait soutirer la majeure partie de la
clientèle. Je pense qu'il faut être beaucoup plus prudent dans les
développements et c'est pour ça qu'on veut faire notre
planification régionale. C'est dans ce sens, finalement, qu'on veut
planifier. Ce sont les raisons pour lesquelles aussi, au cours des
dernières années, on a dû imposer un certain
contingentement, parce qu'on sait très bien que si ce sont... Comme vous
le mentionniez tout à l'heure, je ne pense pas qu'on puisse faire des
profits dans les garderies à but lucratif; par contre, plusieurs se sont
ouvertes parce qu'on ne voulait pas attendre ou les listes d'attente
étaient trop longues, compte tenu du développement qu'on pouvait
faire. Comme je vous le dis, l'autre problème que cela causait, c'est la
question des parents qui sont quand même subventionnés. Donc, cela
crée un problème dans la gestion comme telle du budget.
Je ne sais pas si vous avez quelques remarques à faire à
la suite de ce que je vous ai dit.
Une voix: Non.
Mme Gagnon-Tremblay: Non. il y a une autre question que
j'aimerais vous poser. À la page 6 de votre mémoire, vous
mentionnez qu'il est urgent d'augmenter le nombre de visites d'inspection pour
que chaque garderie soit visitée au moins une fois par année.
Croyez-vous que les inspections, même annuelles, pourraient garantir la
qualité offerte quotidiennement? Est-ce que les parents ont suffisamment
de matériel ou les outils nécessaires pour leur permettre
d'identifier ce qu'est une qualité? Ce qu'on nous dit et ce qui se
passe, c'est que du seul fait d'avoir un permis qui est accordé, qui est
accroché dans une garderie et qui a été remis par l'Office
des services de garde à l'enfance, souvent, les parents croient qu'on
n'a pas à se soucier de la qualité puisque quelqu'un d'autre l'a
fait à leur place? Pour vous, c'est quoi? Est-ce que les parents sont
véritablement au fait pour vérifier? C'est votre souci, la
qualité, vous l'avez mentionné tout à l'heure. Est-ce
qu'ils sont suffisamment au fait pour savoir comment détecter cette
qualité? En plus, je voudrais que vous me parliez des inspections.
M. Caron: Concernant les inspections, on croit que le
règlement, c'est un minimum pour un niveau de qualité, et le
contrôle des parents dans des garderies subventionnées ou
gérées par les parents... L'office dit toujours que la
qualité d'une garderie réside dans le contrôle des parents
majoritaires au conseil d'administration. On pense que l'entreprise
privée, si elle n'est pas à l'écoute de sa
clientèle, donc du parent, ne peut pas résister longtemps. C'est
impossible, parce que le parent va décider d'aller ailleurs et c'est
vrai que, même s'il y a un permis, le parent peut penser que c'est
suffisant, mais cela ne l'est pas, en fait.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que dans votre garderie... oui,
madame.
Mme Vallières-Caron: Pour ce qui est des visites des
inspecteurs, lorsqu'on sait le nombre d'inspecteurs engagés à
l'office et le nombre de garderies, si vous faites brièvement le calcul,
vous allez vous apercevoir qu'en moyenne on est susceptibles d'avoir une visite
une fois par deux ans. Alors, juste le fait de savoir cela, ça
prédispose les gens, cela les met dans un certain état de dire:
II n'y a pas lieu de s'alarmer parce qu'on sait que les inspecteurs ne
viendront pas souvent.
D'autre part, je pense qu'effectivement les parents ne sont pas assez
outillés pour pouvoir juger de la qualité du service,
peut-être pas tous les parents, mais je dirais la moyenne. Quand ils
viennent visiter la garderie, on leur fait un exposé des services qu'on
offre, mais ils nous laissent les enfants le matin et ils partent au travail.
Ils ne sont pas là pendant la journée et c'est effectivement
pendant ces heures où les enfants sont à la garderie que se joue
la qualité des services et c'est pendant ces mêmes heures que les
parents n'y sont pas. Alors, ils vont juger de la qualité des services
sur ce qu'on va leur dire, sur ce que les éducateurs vont leur dire,
mais ils ne sont pas présents physiquement pour juger de la
qualité. Il y a quelques parents
qui vont venir, ici et là, à l'heure du dîner; on
n'est pas fermés à cela, mais Je pense que ce n'est pas suffisant
pour vraiment juger de la qualité du service qu'on offre.
M. Beauregard: J'aimerais ajouter à cela qu'il serait
peut-être important de sensibiliser les parents à quoi s'attendre
des garderies, quoi y chercher et comment mesurer la satisfaction du niveau de
qualité. Les parents ne sont pas bien Informés et
sensibilisés à cela, mais l'inspection annuelle d'une
durée d'une heure ou d'une heure et demie avec le directeur, le
propriétaire ou la coordonnatrlce de la garderie ne permet pas
d'évaluer le niveau de qualité. Cela permet tout simplement
d'aller chercher justement le minimum, soit les règlements
écrits. Vos ratios sont suivis, vos éducatrices sont
diplômées, mais qu'est-ce qui se passe globalement dans cette
garderie? Est-ce que les parents sont capables d'aller chercher ça?
S'ils ne sont pas capables, je pense que ce serait intéressant de
trouver un autre type d'inspection et de sensibilisation qui pourrait inclure
plus de monde dans ça, et pas que le coordonnateur. (10 h 45)
M. Caron: II semblerait que les parents qui viennent dans notre
garderie... Évidemment, je ne peux pas parler pour toutes les garderies,
mais la perception que nous avons des parents qui viennent dans notre garderie,
c'est qu'ils ne font pas le tour des garderies. Nous, on leur dit: Faites le
tour de trois garderies, au moins, et à trois moments précis: au
moment des activités, au moment du dîner et au moment des
activités libres, parce que si vous ne faites pas ça et si vous
ne visitez pas au moins trois garderies vous risquez de laisser vos
enfants...
En fait, ils vont à la garderie la plus près de chez eux
et c'est un peu dommage. Je trouve ça dommage que les parents... Je ne
vous dis pas qu'ils sont tous comme ça, mais c'est une perception qu'on
a, chez nous, de plusieurs parents. La garderie est près, alors on va
à cette garderie parce qu'elle est près. Pourtant, l'enfant,
c'est ce qu'il y a de plus Important pour un parent, je pense, mais il y a
comme une contradiction. Ils ne font pas le tour. Souvent, ils vont dans des
garderies qui sont plus ou moins de qualité - parce qu'on sait qu'il y a
toujours des garderies de moindre qualité que les
autresl'expérience n'est pas bonne, alors, là, ils
généralisent. Ils disent: Là, je suis allé dans
telle garderie. Je ne vais pas dans une autre garderie. Je vais aller à
la maison, au noir. Je pense qu'actuellement l'évaluation que j'en fais,
c'est que, de plus en plus, les parents vont délaisser les services de
garde structurés pour aller au noir, premièrement, à cause
de l'augmentation de coûts et, également, à cause du fait
qu'il y a encore trop, à mon sens, de garderies, quel que soit leur
statut, qui ne sont pas de qualité.
Il faut mettre l'accent sur la qualité, sur des contrôles
de qualité, parce que le parent, fi- nalement, s'il réalise que
l'image qu'il a des garderies au Québec est mauvaise, iI va aller au
noir. Je pense qu'il faut également... Il y a les mesures fiscales.
Évidemment, ce n'est peut-être pas le sujet, mais c'est quelque
chose qui peut également aider les parents d'une autre façon.
Mme Gagnon-Tremblay: Finalement, ce que vous suggérez,
c'est qu'on Inspecte davantage. Mais je pense aussi qu'en tout premier lieu,
c'est au chapitre de l'information qu'on doit donner aux parents, à
savoir comment être capable d'identifier cette qualité, quel que
soit le mode ou le type de services. Finalement, ce sont ceux qui sont les plus
présents et peut-être les meilleurs juges. Par contre, ça
n'exclut pas les inspections. Je me demandais, par contre, pour ce qui est des
inspections, si c'est l'office, par exemple, qui devrait doubler ses
Inspections ou si on devrait plutôt reléguer ça - je veux
que personne ne parte en peur - en donnant aussi l'enveloppe monétaire,
à un niveau beaucoup plus près d'une région, par exemple,
pour que ce soit plus une décentralisation des inspections qu'une
centralisation.
Mme Vallières-Caron: Personnellement, Je serais plus en
faveur d'un organisme qui serait beaucoup plus près du vécu des
gens, un peu comme les CLSC. Depuis quelques années, le trouve qu'on
s'est rapprochés des CLSC et on a beaucoup à gagner à
avoir des échanges de services avec les CLSC. S'ils connaissent mieux
nos services et nos besoins, c'est plus facile de dialoguer. C'est plus facile
d'exprimer nos besoins, quand on sent que quelqu'un est plus près de
nous, parce que l'office, dans sa grosse boîte, dans sa grosse tour,
c'est Impersonnel. Ils ne nous connaissent pas vraiment. Ce n'est pas en venant
une fois par deux ans qu'ils vont apprendre à nous connaître et
savoir ce qu'est notre vécu et quels sont nos problèmes. Tandis
que si on avait un organisme situé plus près de nous, ce serait
plus facile d'entrer en contact et de créer des liens.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce serait peut-être plus facile aussi
d'avoir les commentaires de la population et des gens du milieu lorsque
ça fait défaut.
Mme Valllères-Caron: Aussi d'avoir le "feedback" des
parents.
M. Caron: Mme Gagnon, je voudrais revenir un peu sur la
dernière intervention. Vous aviez soulevé quelque chose. On a un
peu changé de sujet, mais je voudrais revenir là-dessus. Souvent,
les parents vont dans une garderie. C'est difficile pour nous de faire leur
éducation dans le sens suivant, c'est qu'ils vont dans une garderie; ils
n'en visitent qu'une. Alors, s'ils tombent sur la mauvaise ou une moins
bonne,
évidemment, ils sont pris et on ne peut pas les aider, parce que,
nous ne pouvons pas leur expliquer. C'est difficile de faire l'éducation
des parents dans ce sens. En ce qui a trait à l'inspection et à
l'évaluation, c'est sûr qu'augmenter le nombre d'inspections,
c'est une bonne chose, mais ça ne devrait pas se traduire seulement par
l'augmentation du nombre de visites. Il faut que ce soit aussi au chapitre de
l'évaluation, afin qu'on puisse... À Medicine Hat, il y a une
expérience qui a été tentée, il y a trois ou quatre
ans. On a évalué et on a fait venir d'autres... Mais cela se fait
aussi ailleurs; ils ont tiré leur document de base d'un document qui
avait été fait à Philadelphie pour justement... Si on veut
augmenter notre qualité, il faut l'évaluer. Si on avait un outil
fait par des évalua-teurs, non pas des inspecteurs qui comptent le
nombre de pieds carrés, qui ont fait une évaluation, qui ont
passé quatre ou cinq heures dans la garderie, donc par des gens qui ne
font pas que calculer les pieds carrés mais qui ont vraiment une
sensibilité de ce qui ne se compte pas au fond. La qualité de la
garderie, ça ne se mesure pas, il faut la détecter. Cela prend
des gens très sensibles à ça et qui ont une certaine
expérience en garderie. Je ne veux pas dire que les inspecteurs n'en ont
pas, eux, mais ils ne comptent que les pieds carrés. Est-ce qu'on...
Mme Gagnon-Tremblay: On nous suggérait, hier, un
répertoire qui n'allait pas tout à fait dans le même sens,
mais pour identifier les garderies. Je commence à me demander si on ne
devrait pas faire comme dans l'hôtellerie: une, deux ou trois fourchettes
ou une quelconque identification par rapport à la qualité. C'est
vrai que c'est difficile à mesurer.
M. Caron: C'est sûr qu'il y aurait toujours ça, mais
cela peut aider la garderie à améliorer sa qualité. Je les
ai, mes 10 % de fenêtres. Maintenant, c'est un minimum, la
réglementation, c'est un minimum, mais, après ça, c'est la
qualité qui vient.
Mme Gagnon-Tremblay: Je me rends compte que les outils à
donner aux parents sont très importants parce que c'est sûr que
l'inspecteur qui va aller inspecter votre garderie, il est là,
naturellement, pour regarder quelque chose qui est beaucoup plus objectif, soit
les normes, etc., sauf que pour tout ce qui concerne la pédagogie ou
quoi que ce soit, il n'entrera pas nécessairement là-dedans.
C'est beaucoup plus tes parents, à ce moment-là, qui doivent
s'impliquer de même que les propriétaires, les gens du milieu, les
administrateurs, les gestionnaires. Ce sont eux qui doivent vraiment se soucier
de ce point très précis.
M. Beauregard: Ce serait tout de même important que
l'organisme du quartier soit aidé au point de vue du personnel et du
financement pour offrir ces ressources à la garderie ou à toutes
les garderies dans le quartier. On sait déjà que les CLSC sont
très chargés au point de vue des responsabilités, etc. Ce
serait important de reculer et de dire: Bon, d'accord, si on s'embarque dans
quelque chose comme ça, il faudrait aider à tous les points de
vue, ce monde, dans les CLSC.
Mme Gagnon-Tremblay: II me reste seulement deux minutes. J'aurais
beaucoup aimé vous parler du comité consultatif de parents. Vous
le mentionnez dans votre mémoire. Vous désirez qu'il soit
véritablement fonctionnel et nous aussi, c'est l'objectif que nous
visons. Est-ce que vous avez des suggestions pour les rendre plus fonctionnels,
ces comités? On sait qu'ils existent et, souvent, on nous dit: Cela
existe, donc il n'y a pas de problème. On sait très bien, par
exemple, à l'Office des services de garde à l'enfance que ce ne
sont pas tous les comités qui sont fonctionnels. Qu'avez-vous à
nous suggérer pour que ces comités puissent être
véritablement fonctionnels?
M. Caron: On n'a pas de suggestions sauf qu'en pratique il peut
s'avérer difficile... Par exemple, le gros point, je pense, pour la
qualité en garderie, c'est les travailleurs, leur formation, leurs
diplômes et le salaire qu'on peut payer à ces gens-là.
C'est l'un des points... C'est presque gênant d'embaucher des gens qui
ont un bac en éducation élémentaire et préscolaire
ou un DEC en techniques de garderie dans certaines garderies et de leur payer
le salaire qui leur est versé, dans les garderies gérées
par les parents ou non.
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est le salaire moyen, normalement, dans
les garderies de votre regroupement?
M. Caron: Pardon?
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est le salaire moyen dans les garderies
de votre regroupement?
M. Caron: Dans notre regroupement, nous ne l'avons jamais
calculé.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. En vous
écoutant parler avec Mme la ministre, je me demandais depuis combien de
temps existait le Regroupement des garderies privées du Québec
inc.?
M. Caron: Quatre ans.
Mme Harel: Quatre ans. Vous êtes propriétaires, M.
Beauregard et Mme Caron, je pense? M. Caron également?
Mme Vallières-Caron: Oui.
Mme Harel: Vous avez un lien de parenté?
M. Beauregard: Mol, c'est Léo Beauregard. Je suis avec M.
Caron et Nicole Caron.
Mme Harel: Ahl Beauregard, excusez! D'accord. Vous êtes les
propriétaires de la garderie?
Mme Vallières-Caron: Oui.
Mme Harel: Et vous de même, M. Beauregard?
M. Beauregard: Je suis propriétaire d'une garderie,
oui
Mme Harel: II y a quatre ans, vous avez... Vous étiez
auparavant membre de l'Association des propriétaires de garderies du
Québec?
M. Caron: On a été membres, lorsqu'il y a eu la
réglementation, 11 y a quatre, ans, pendant quelques mois, c'est
vrai;
Mme Harel: Et vous avez choisi de fonder votre propre
regroupement?
M. Caron: On trouvait qu'il n'était pas malsain qu'il y
ait une concurrence dans les associations. Cela existe pour les garderies
à but non lucratif. Je suis au courant qu'actuellement il y a une autre
association de garderies privées en formation. Ce n'est absolument pas
malsain qu'il y ait différentes associations de garderies
privées.
Mme Harel: Les 20 garderies que vous représentez
sont-elles toutes situées dans la même région ou est-ce
qu'elles sont réparties sur tout le territoire?
M. Caron: Elles font partie du Grand Montréal et de
Sherbrooke.
Mme Harel: Dans votre mémoire, à la page 2; vous
déclarez votre satisfaction quant au fait que l'énoncé de
politique des services de garde emploie le terme "garderies non
gérées par les parents" au lieu ' de "garderies à but
lucratif. Vous nous dites que cette appellation est moins péjorative.
Donc, vous trouvez, moins péjorative l'appellation énoncée
dans la politique que celle de "garderie à but lucratif". Pourtant, dans
votre mémoire, à la page 6, vous faites état de votre
philosophie d'entreprise et celle-ci est une philosophie à but lucratif.
Alors, comment la philosophie d'entreprise que vous poursuivez... D'ailleurs,
dans votre recommandation, vous ne vous en cachez pas; vous dites que vous avez
cette philosophie d'entreprise. Vous suggérez même au gouvernement
qu'elle prime la gestion des fonds publics. Vous en faites un principe
supérieur à la gestion, au point où, dans vos
recommandations, à la recommandation 7, Je pense, de mémoire,
vous dites: Même si tout cela a pour objet de compromettre la
viabilité de services déjà Implantés.
C'est-à-dire que vous en faites un principe supérieur aux autres
facteurs. Alors, comment pouvez-vous considérer comme péjorative
l'appellation...
M. Caron: À but lucratif?
Mme Harel: Oui. C'est votre philosophie d'entreprise. Vous
l'énoncez clairement, mais vous la considérez comme
péjorative.
M. Caron: C'est-à-dire qu'on peut avoir une entreprise
privée qui recherche la qualité d'un produit ou d'un service...
Il n'y rien d'incompatible entre le fait d'être une entreprise
privée et la qualité du produit. Si l'entreprise privée ne
donne pas un bon produit ou un bon service, la concurrence va faire en sorte
que cette entreprise va fermer ses portes un jour.
Mme Harel: Mais, M. Caron, l'appellation "garderie à but.
lucratif, n'est-ce pas là justement la philosophie de votre entreprise?
On parle en termes de philosophie d'entreprise. Qu'est-ce que c'est, votre
philosophie d'entreprise? Vous en parlez à la page 6.
M. Caron: Oui, je suis d'accord...
Mme Harel: Vous nous dites: "indépendamment de leur
philosophie d'entreprise", donc, la vôtre, c'est d'être à
but lucratif.
M. Caron: Oui.
Mme Vallières-Caron: C'est-à-dire qu'on est une
garderie privée, donc qu'on a un droit de regard sur notre
administration. Je n'ai jamais eu honte qu'on s'appelle "garderie à but
lucratif. Je sais très bien qu'en fin de compte, ce ne sont pas des
profits que j'en retire, c'est uniquement un emploi que je me suis
créé. Et si vous regardez les statistiques, elles le prouvent.
Dans les garderies privées, II y a très peu de profits en fin de
compte. Quand vous avez une garderie de 60 places, avec les coûts qu'on
doit défrayer, il y a très peu de profits en fin de compte. Tout
ce qu'on en retire finalement, ce n'est qu'un salaire juste et
équitable. Mais le fait d'avoir cette appellation, c'est sur ça
que les gens jouaient et c'était fausser la réalité.
Mme Harel: Pourtant, n'est-ce pas là même votre
philosophie? Vous dites: On crée son emploi. Comment expliquez-vous
l'écart de salaires illustré dans l'énoncé de
politique, de près de 2 $, entre les employés des garderies
à but lucratif et ceux des garderies sans but
lucratif?
Mme Vallières-Caron: Ce sont les subventions, tout
simplement.
M. Caron: Les 4,50 $ par semaine... Plusieurs garderies
gérées par les parents ont une différence de taux
journalier selon la différence de la subvention. Si cette marge continue
à grandir, le secteur privé ne sera plus concurrentiel.
Mme Harel: Et pourquoi faut-il introduire la concurrence?
M. Caron: C'est exact...
Mme Harel: Je vous pose la...
M. Caron: C'est justement...
Mme Harel: Pourquoi est-ce que c'est...
M. Caron: C'est comme dans le système... (11 heures)
Mme Harel: Permettez-moi juste une seconde. Pourquoi faut-il
introduire la concurrence en matière de services de garde, ce que
l'État ne fait même pas en matière d'école? Vous
savez très bien qu'il y a toute une distinction entre le permis et la
subvention. Pour avoir une subvention, une école privée doit
être reconnue d'intérêt public. Si elle n'est pas reconnue
d'intérêt public... Le fardeau de la preuve incombe au demandeur;
il faut qu'il prouve que c'est d'intérêt public d'avoir une
subvention. La libre concurrence ne joue pas non plus dans l'hébergement
des personnes âgées. Les centres conventionnés doivent
être démontrés comme étant d'intérêt
public. Vraiment, votre philosophie, vous l'exprimez comme une philosophie
d'entreprise qui, au nom du libre choix des parents, commande des subventions
à l'État.
Mme Vallières-Caron: C'est-à-dire qu'on est
forcés de respecter une même loi et une même
réglementation. À partir de ça, on dit que c'est
discriminatoire de ne pas avoir une certaine forme d'aide parce que vous nous
imposez une loi et une réglementation qui occasionnent des coûts
à la fin.
Mme Harel: Vous savez que même en conduite automobile... Il
y a des écoles de conduite automobile au Québec - pourtant, elles
n'ont pas la vulnérabilité des enfants - où des permis
sont émis avec des critères, des règlements stricts
à respecter.
Alors, vous dites "on a la même loi, la même
réglementation", mais cette loi et cette réglementation
m'amènent à une question de fond: Pour vous, le service de garde,
est-ce un service public ou un service privé entre le parent et le mode
de garde?
M. Caron: On peut être d'intérêt public,
comme...
Mme Vallières-Caron: Les écoles. M. Caron: ...les
écoles peuvent l'être.
Mme Harel: Mais pas nécessairement. Vous dites, à
la recommandation 7: "Qu'on soit ou pas d'Intérêt public." Dans le
fond, vous dites à l'État dans cette recommandation: Permettez la
concurrence, ne faites pas obstacle au projet d'Implantation même si
cette Implantation compromet la viabilité de services déjà
implantés.
Mme Vallières-Caron: Oui, tel que le réseau...
Mme Harel: C'est évident que ce type de concurrence ne
peut pas être d'intérêt public.
Mme Vallières-Caron: Oui, mais tel que le réseau
est présentement, il faut faire quelque chose, ça ne peut pas se
poursuivre comme ça. Deux types de garderie ou deux services de garderie
qui offrent les mêmes services de qualité parce qu'il y a une
même loi et une même réglementation, c'est comme doubler le
jeu. Vous avez deux services qui sont régis par la même loi et la
même réglementation et qui ne partent pas sur le même
pied.
Nous sommes disposés à toute forme de
modifications, mais pour que ce soit équitable et beaucoup moins
discriminatoire pour nous. On part perdant au départ. Écoutez,
quand vous avez 4,50 $ par jour par enfant, ne nous demandez pas de payer les
mêmes salaires. Le seul financement qu'on a, ce sont les frais de garde
qu'on demande aux parents. J'ai bien beau demander 110$ par semaine et offrir
les meilleurs salaires que je peux, mais je ne dispose pas des 4,50 $ par jour
par enfant. Si vous me donnez les 4,50 $ par jour, c'est bien sûr que je
vais les Inclure aux salaires des éducateurs.
Mme Harel: Et si le critère pour obtenir...
Mme Vallières-Caron: Nous sommes d'accord avec
ça.
Mme Harel: ...ces 4,50 $ est un critère collectif...
L'État représente l'intérêt de la
collectivité. Si la collectivité considère que
l'intérêt consiste à ce que ce soit géré par
les parents... Vous dites: "On ne part pas sur le même pied." C'est vrai
que vous ne partez pas sur le même pied; c'est tellement vrai qu'il y a
eu une explosion d'ouvertures de garderies privées pendant que les
garderies à but lucratif étaient reportées à des
plans de développement ultérieurs. J'ai les chiffres ici pour les
trois dernières années. Il y a eu beaucoup plus de garderies
à but lucratif que de garderies sans but
lucratif qui ont été ouvertes. Là, il faut penser
que tout ça est lié, évidemment, au fait que dans les
plans de développement les projets en attente de garderies à but
lucratif, qui sont très nombreux, ont été reportés
aux années ultérieures. Donc, il y a une demande très
forte d'ouverture des garderies à but non lucratif. Cette demande est
mise de côté, elle est mise en attente parce qu'il n'y a pas de
budgets et, vous, Vous connaissez une explosion d'ouvertures de garderies
à but lucratif.
C'est sûr que vous ne partez pas sur le même pied parce que,
si vous partiez sur le même pied, iI y aurait eu plus de garderies
à but non lucratif créées ces dernières
années. Alors, vous nous dites: Pour avoir les 4,50 $, si le choix de la
collectivité était qu'il faut que ce soit géré par
les parents et si justement, comme je le pense, vous avez mis sur pied votre
service pour créer un emploi, pourquoi ne pas convertir la garderie?
Pourquoi ne pas demander des subventions à la ministre pour
procéder à la conversion, comme le recommandait le rapport
Presser?
M. Caron: Â mon sens, les garderies privées doivent
rester à cause du fait que ce n'est qu'un chien de garde pour que la
qualité demeure. Parce que, quand on n'a pas de concurrence....
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît
dans la salle!
M. Caron: ...on n'invente pas. On n'essaie pas de
s'améliorer, on ne s'améliore pas. Et je pense que là
concurrence aide à la qualité. Et c'est dans ce sens-là
qu'on doit rester. Qu'il y ait une différence... Je veux finir.
Mme Harel: Allez-y!
M. Caron: Je comprends très bien que l'État ne peut
pas dilapider les fonds dans des garderies subventionnées par les
parents et, en même temps, laisser la porte ouverte aux garderies
privées. Mais, d'autre part, on ne coûte rien à
l'État et, ensuite, on suit la même réglementation.
Pourquoi l'État ne devrait-il pas utiliser les garderies privées
en faisant une surveillance plus étroite - on a parlé
tantôt d'Inspections et d'évaluations - mais en laissant justement
les garderies privées fleurir à travers le Québec? Cela se
fait depuis trois ans malgré une certaine contrainte qui, même si
elle n'est pas légale, est là un petit peu.
Il faut toujours qu'il y ait une différence entré les
deux. J'admets que l'État ne peut pas, peut-être, avoir en
même temps le pourcentage exact entre les deux, parce que si cela
arrivait il est sûr et certain que le réseau des garderies
gérées par les parents, tel qu'il est structuré, parce que
la structure même de ces entités-là n'est pas faite. pour
bien gérer... Telles qu'elles sont, le fait que les parents soient
membres du comité... Les conseils d'administration des parents... J'ai
perdu mon idée.
Mme Harel: Dans le fond, il y a une philosophie. Vous dites:
C'est la concurrence d'abord et avant tout. Alors, l'État n'a pas fait
ces choix-là, par exemple, dans les hôpitaux ni dans les services
sociaux. Pourquoi est-ce qu'on les ferait à l'égard de la garde?
Vous dites que ça ne coûte rien, mais ce n'est pas exact que
ça coûte rien. Vous savez très bien que
l'exonération financière aux parents... Évidemment,
là, le choix est respecté, mais il est évident que
l'exonération financière coûte plusieurs millions.
La question de qualité m'amène à vous poser une
question de fond. Depuis le début de nos travaux, on nous dit, dans le
fond, que la qualité consiste en trois choses: le ratio, la taille du
groupe, les conditions de formation du personnel et les conditions salariales.
Vous nous parlez de qualité mais, jusqu'à maintenant, je ne vous
ai pas entendu parler de ratio, ni de taille de groupes, sauf évidemment
là formation.
Sur cette question-là, j'aimerais vous entendre sur ce qui
apparaît, aux yeux dès spécialistes qui sont venus devant
nous, comme étant les critères à partir desquels on peut
évaluer la qualité d'un service. Et, évidemment,
j'aimerais aussi vous entendre sur le fait que les plaintes
considérées comme fondées à l'office des services
de garde à l'enfance, sont logées, dans 75 % des cas, par des
parents qui envoyaient leur enfant dans une garderie à but lucratif.
Alors, comment penser que c'est votre présence qui assure des
critères de qualité quand, dans le fond, manifestement, les
chiffres qu'on peut obtenir de l'office révèlent que c'est
là qu'il y a des problèmes de non-qualité?
Mme Vallières-Caron: Mme Harel, on n'a jamais dit que la
qualité des services de garde résidait uniquement dans les
garderies privées. On à dit que ça n'a rien à voir
avec le statut. Vous savez très bien que là qualité se
retrouve dans un statut comme dans l'autre. Mais ce n'est pas à nous de
faire les inspections et de veiller à ce que la réglementation
soit appliquée. Ce n'est pas notre rôle. Nous disons à
l'office: Soyez beaucoup plus vigilant. On est d'accord avec vous; on Vous
donne carte blanche et même notre bénédiction. Allez-y,
parce que cela nous fait du tort. On l'a dit dans l'énoncé; une
garderie qui ne donne pas un bon service, peu importe son statut, nuit à
l'ensemble du réseau. Là-dessus, on est d'accord avec vous. Il ne
faut pas nous demander de le faire, par exemple.
M. Caron: Au plan de là qualification, on n'en est pas
revenu. Une réglementation disait: Dans cinq ans, l'article 5 ou 6 devra
être en application, à savoir qu'un éducateur sur trois
devra avoir un diplôme. Là, il y à -quelques mois, pour
différentes raisons, on a reculé, je pense, de trois ans. Comme
on l'a expliqué un peu
tantôt, on trouve ça inacceptable. Pour nous, un sur trois,
c'est un minimum et, là, on a reculé. Beaucoup
d'éducateurs des deux statuts ont pris la peine, depuis quelques
années, d'aller se ressourcer pour obtenir un diplôme et,
aujourd'hui, on recule encore de trois ans. Alors, dire qu'on n'est pas pour la
qualité, je n'y crois pas.
Mme Harel: La question n'est pas que vous ne l'êtes pas ou
qu'il ne faut pas plus d'inspections. La question est aussi: Est-ce que les
critères, les règlements actuels permettent une véritable
qualité? On est venu nous dire devant cette commission qu'en soit le
ratio un sur cinq pour les poupons, ne permettait pas véritablement un
service adéquat pour les enfants de moins de dix-huit mois.
M. Caron: Tout le monde est pour la vertu et pour la
qualité, et tout le monde sera d'accord là-dessus. Personne ne
peut dire que, quand un éducateur s'occupe de trois enfants de moins de
dix-huit mois et jusqu'à cinq comme en Ontario, par exemple... C'est
évident que tout le monde est d'accord avec ça. Là
où cela ne fonctionne pas, est-ce que l'État a les moyens...
Quand on met une réglementation, tous les facteurs du règlement
impliquent des coûts. Qui paiera les coûts? L'État ou les
parents? Si c'est l'État, d'accord, mais en a-t-il les moyens? Oui, non,
je ne le sais pas. C'est le gouvernement qui décide. Mais s'il en a les
moyens... S'il ne les a pas, ce seront les parents. Le règlement actuel,
c'est le minimum; il peut être amélioré...
Une voix: ...avec des coûts supplémentaires.
M. Caron: ...sauf que cela implique des coûts. Si les
coûts deviennent trop exorbitants, ce qui me semble le cas
déjà, les parents vont aller vers la garde au noir et le
système, autant privé que public, va... L'image des garderies
n'est peut-être pas ce qu'il y a de mieux. Souvent, quand on parle de
garderie aux parents, dans leur tête, on garde les enfants. Cela a
beaucoup changé depuis dix ans dans les garderies. On fait plus que
garder les enfants en garderie, mais l'image est restée qu'en garderie
on garde les enfants. Cela fait quinze ans qu'on se bat pour essayer de changer
cette image et c'est très difficile parce que les gens pensent qu'une
garderie garde les enfants. Cela a beaucoup évolué de ce
côté-là.
Le Président (M. Thuringer): En conclusion. Mme Harel:
Déjà?
Le Président (M. Thuringer): Oui, Mme la
députée.
Mme Harel: J'aurais souhaité vous entendre sur le rapport
Presser. Je vais laisser ma conclusion pour avoir une réponse du
regroupement concernant la conversion et le programme de subventions qui
devrait être mis à la disposition des garderies à but
lucratif pour leur conversion en garderies sans but lucratif. Comment
réagissez-vous?
M. Caron: Non, non. On n'acceptera jamais une telle chose.
Mme Harel: Pourquoi, à ce moment-là, maintenir
même... Pourquoi, si c'est la qualité qui vous intéresse
avant toute chose, si c'est pour augmenter la participation des parents et si
ce n'est que pour créer des emplois? Pourquoi?
Mme Vallières-Caron: Parce qu'on a justement fait la
preuve qu'on peut offrir un service de qualité, en étant à
l'écoute des parents, en ayant un comité consultatif égal
à celui des garderies sans but lucratif. C'est la simple raison.
Venez visiter nos garderies et, si vous nous faites la preuve qu'on
n'offre pas le même service de qualité, je vous dirai: Cela va.
Mais on ne m'a pas fait la preuve que l'énoncé de politique
reconnaît que certaines garderies privées donnent un service de
qualité. Pourtant, on n'est pas subventionné et on part perdant
au départ. Alors, il y a une question de gestion dans ça. Quant
à moi, je trouve important que ce soit toujours la même personne
qui ait la gestion de la garderie. Elle est à l'écoute des
parents et il est nécessaire et obligatoire, si elle veut se maintenir,
qu'elle reste à l'écoute des parents. (11 h 15)
Le Président (M. Thuringer): Je m'excuse. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, alors, M. le Président, je pense bien
qu'il y a une philosophie derrière ça qui est vraiment
importante. Vous savez, le libre choix, en soi, ce n'est pas
nécessairement ce qui est de l'intérêt supérieur
d'une collectivité. Ça vaut pour la langue, "the free choice", ce
n'est pas nécessairement ce qu'on recherche,. mais ça vaut aussi
pour l'ensemble des services publics. Le libre choix, pour moi, ce n'est pas la
valeur suprême. La valeur suprême, c'est que collectivement on se
donne des services que l'on souhaite être à la mesure des valeurs
que l'on veut transmettre. C'est évidemment un choix qui doit être
bien clair. Moi, je pense qu'à l'avenir vous aurez intérêt
à envisager la possibilité d'une gestion par les parents. Si on
veut les impliquer, comme vous le souhaitez, pourquoi le faire aussi timidement
que vous le proposez? Je vous remercie.
Le Président (M. Thuringer): D'accord. Mme la
ministre?
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. En
terminant, j'aimerais apporter une précision sur le règlement de
la formation. Je ne
pense pas que l'Office des services de garde à l'enfance ait
reculé. On a dû accorder ce délai pour différentes
raisons et des motifs valables. Dans certaines régions, par exemple, on
n'avait pas pu obtenir cette formation parce que le cours ne se donnait pas ou
à cause de l'élolgnement et tout ça. Pour toutes sortes de
motifs je ne vous cache pas, par contre, qu'il y en a d'autres qui ont
carrément boycotté le système Je pense qu'on se devait
peut-être de donner ce délai parce qu'il y avait des motifs
valables aussi.
Je voudrais terminer en disant que le constat que Je fais de votre
argumentation. Lorsqu'on a décidé d'adopter la loi, on avait
décidé, au départ, de vous mettre à l'écart,
de faire disparaître les garderies à but lucratif. Soudainement,
l'ancien gouvernement, à la suite de pressions, a décidé
de vous faire réapparaître, mais sans vraiment penser au statut
que vous pourriez avoir. Par exemple, est-ce d'intérêt public pu
non? On a laissé ouvrir un peu comme ça, mais sans
véritablement encadrer. Là, aujourd'hui, c'est ce qu'on doit
faire. C'est pour ça que, dans le cadre de la planification, on doit
prendre tout ça en considération et il va falloir, je pense, se
pencher là-dessus et bien y réfléchir. Je vous remercie de
la présentation.
Le Président (M. Thuringer): Merci, Mme la ministre. Merci
pour votre présentation.
J'invite maintenant les représentants de l'Association des
travailleurs et travailleuses en garderies privées du Québec
à s'approcher de la table, s'il vous plaît. Pouvez-vous vous
Identifier, s'il vous plaît? Vous connaissez les règles du Jeu.
Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation et, après
ça, il y a une discussion de 20 minutes pour chacun des deux
côtés. Merci.
Association des travailleurs et travailleuses en
garderies privées
M. Boucher (Jean-Carol): Merci, M. le Président. Je suis
Jean-Carol Boucher, procureur et conseiller juridique de l'Association des
travailleurs et travailleuses en garderies privées du Québec. Je
suis accompagné ce matin, devant la commission, des personnes suivantes:
à mon extrême gauche, M. Dante Morizio, Mlle Diane Émond,
M. Gaston Morin, à ma gauche immédiate; à mon
extrême droite, Mlle Lynne Bernier et, immédiatement à ma
droite, Mme Linda Morin.
Mme la ministre, M. le Président de la commission, Mme la
présidente de l'Office des services de garde à l'enfance, Mme la
représentante de l'Opposition, la représentation que nous
faisons, ce matin, peut vous paraître un peu paradoxale en ce sens que
nous avons expédié au gouvernement, dès l'avis de la
commission parlementaire, un rapport dans lequel on retrouve en titre le terme
"SOS" à de nombreux endroits.
Effectivement, mesdames et messieurs les membres de la commission, nous
voulons ce matin vous lancer une demande pressante d'aide et vous expliquer la
problématique des travailleurs et travailleuses en garderies non
gérées par les parents. Ce que nous voulons faire avec vous ce
matin, c'est principalement échanger des vues, dialoguer et vous
demander surtout d'avoir, comme nous pouvons le présumer, l'ouverture
d'esprit nécessaire pour saisir véritablement la
réalité des problèmes que nous voulons vous
présenter.
Le premier et le principal de ces problèmes consiste dans une
forme paradoxale de situation qui est la suivante: nous sommes tous soumis
à la même loi, à la même réglementation et
tous les travailleurs que nous représentons ont les qualifications
requises par la loi, suivant la politique actuellement appliquée par
l'office.
D'autre part, nous donnons un service de qualité aux enfants.
Nous nous préoccupons des enfants de façon constante, nous sommes
en relation constante avec les parents de ces enfants et avec les
propriétaires des garderies. Dans une certaine mesure, nous ne nous
sentons point pris, par ailleurs, pour employer l'expression populaire, entre
l'arbre et l'écorce, parce qu'il existe, heureusement pour nous, une
relation de partenariat réel avec les propriétaires de garderies
et également des relations harmonieuses réelles et
sincères avec les parents qui nous confient leurs enfants.
Le paradoxe existe si on regarde ce que l'on reçoit en
contrepartie des services que nous rendons. On doit malheureusement se rendre
compte que les salaires que nous recevons sont . nettement inférieurs
à ceux qui sont offerts aux travailleurs en garderies
subventionnées, de sorte que, contrairement à toute la politique
que vous recherchez actuellement pour l'égalité des gens,
à travail égal nous ne recevons pas un salaire égal. Nous
recevons un salaire nettement Inférieur et nous offrons la même
qualité de services. Le paradoxe fondamental est là et nous
voulons discuter avec vous ce premier paradoxe.
Le second point que nous désirons porter à votre attention
tient essentiellement dans la recherche du gouvernement à consolider les
services de garde. Nous croyons qu'il s'agit là d'une démarche
très louable et qui est fondamentale sur le plan d'une saine gestion des
fonds publics. Alors, on se doit de féliciter le gouvernement pour cette
recherche d'une consolidation du réseau actuel.
D'autre part, pous sommes d'avis que la consolidation du réseau
passe absolument et nécessairement par des salaires décents pour
les travailleurs en garderies non gérées par les parents. C'est
dans ce contexte que nous requérons des membres de la commission une
ouverture d'esprit pour trouver des mécanismes et mettre en place des
solutions qui nous permettront de recevoir un traitement égal pour une
prestation de travail que nous donnons déjà de façon
égale.
Nous voulons également attirer votre attention sur
la problématique de la motivation des travailleurs en garderie. Il est
certain que la première motivation de chacun de nous est essentiellement
celle du bien-être de l'enfant et de la qualité des services
offerts. Dans ce contexte-là, la première satisfaction provient
nécessairement du contentement des parents, du bien-être des
parents et surtout de constater que, chez l'enfant, il y a de la joie, du
sourire et du bonheur a vivre en garderie avec nous. D'autre part, ce fait
étant établi, vous admettrez avec nous que de recevoir
hebdomadairement une prestation financière nettement inférieure
à ce que d'autres travailleurs en garderie reçoivent amène
une certaine frustration et peut démotiver. Nous vous demandons vraiment
comment vous croyez que l'on pourra poursuivre avec enthousiame le travail que
nous faisons actuellement si la nouvelle politique de financement des services
de garde vient établir un écart encore plus grand et plus
réel entre les fonds disponibles pour les garderies gérées
par les parents et ceux disponibles pour les garderies non gérées
par les parents.
Nous pensons être ceux qui sont le plus en contact
quotidiennement avec les parents. Lorsqu'il y a un problème, c'est au
travailleur que le parent parle. Lorsqu'on veut s'informer de la façon
dont l'enfant a passé la journée, c'est au travailleur que l'on
s'informe. En tant que travailleurs, les gens qui sont avec moi ce matin
peuvent vous dire formellement, quitte à modifier, nous
l'espérons, certaines des perceptions que vous avez, que, s'il est vrai
qu'un groupe de parents cherchent à s'intéresser à
l'administration directe d'une garderie, ce qui est très louable et ce
que nous respectons, il est également vrai et réel qu'un autre
groupe de parents d'une importance réelle ne tiennent pas, pour leur
part, à s'impliquer directement dans la gestion du processus de
garderie. Ils préfèrent que les quelques heures disponibles qui
leur appartiennent en dehors des heures de travail soient consacrées
directement à leur enfant plutôt qu'à des réunions
de gestion, d'administration ou autres réunions du genre dans les
garderies subventionnées.
Alors, lorsque l'on parle du libre choix des parents, c'est
ce libre choix des parents qu'on doit respecter. Il y a la volonté d'un
groupe de parents qui veulent s'intégrer à la gestion de la
garderie et la volonté d'un autre groupe de parents qui ne sont
aucunement intéressés à gérer une garderie mais
qui, d'autre part, ne sont pas désintéressés à ce
qui se passe en garderie. Cet autre groupe de parents est
intéressé à ce qui se passe en garderie, veut de
l'information, veut être informé sur une base périodique du
fonctionnement des programmes, mais sans nécessairement vouloir
s'attacher au processus d'administration réel de la garderie.
C'est dans ce sens que vous devez comprendre, le
pensons-nous, le libre choix du parent et c'est ce type de libre choix que nous
vous demandons de respecter. En d'autres termes, non pas un libre choix que
l'on peut conceptualiser d'une façon théorique qui est
très belle dans un volume ou dans une idéologie
sociale-démocrate, mais un libre choix qui repose sur la
réalité factuelle d'un parent qui. doit travailler de nombreuses
heures dans une journée et qui veut consacrer le temps trop court et
trop précieux qui lui reste pour rester avec son enfant. C'est ça
que nous vous demandons de respecter et c'est de ça que nous vous
demandons de prendre conscience fondamentalement.
Dans ce contexte d'un libre choix du parent, dans ce
contexte de reconnaître que la prestation du travailleur est
égale, quel que soit le type de garderie dans laquelle il travaille,
nous vous demandons de prendre des mesures pour que nos revenus deviennent
à l'égal des revenus donnés aux travailleurs en garderie
subventionnée. C'est pourquoi, dans ce contexte, Mme la ministre, nous
endossons sans réserve la demande des propriétaires de garderies
du Québec qui requièrent de votre part un
réaménagement de la subvention de 4 000 000 $ que votre
énoncé de politique consent à ce groupe de garderies et
nous vous demandons également d'innover et de chercher de nouvelles
solutions pour permettre qu'à travail égal une prestation
égale soit donnée. (11 h 30)
Essentiellement et sans faire d'angélisme et de
vision au microscope de la vie quotidienne en garderie, une chose est claire:
pour l'enfant qui vit en garderie, "lucratif, "non lucratif,
"gérée par les parents" ou "non gérée par les
parents", ça n'existe pas. Pour l'enfant en garderie et pour les
travailleurs qui travaillent avec l'enfant, la seule réalité est
celle d'un enfant qui évolue et qui s'épanouit quotidiennement
avec des services de qualité. La structure n'est pas que
littérature, malheureusement. Elle tient à une
réalité socio-économique qu'on se doit de respecter.
D'autre part, dans la société où nous
vivons, nous vous demandons, au nom des travailleurs en garderies non
subventionnées, de prendre en considération le paradoxe que je
vous énonçais au début et de faire preuve d'imagination,
d'innovation et d'équité sociale pour aider les travailleurs en
garderies non subventionnées à poursuivre un travail avec
motivation et dans des conditions financières valables et
sérieuses. Je vous remercie, M. le Président, Mme la ministre et
Mme la représentante de l'Opposition.
Le Président (M. Thuringer): Merci. Mme la ministre?
Mme Harel: Je m'excuse, M. le Président.
Mme Gagnon-Tremblay: Je veux remercier... Oui?
Mme Harel: Merci. Je ne voudrais pas que
ce soit amputé du temps de l'association qui est devant nous,
mais je dois dire que j'ai malheureusement un contretemps. Je souhaiterais que
nous puissions avertir, si tant est que cela convienne à Mme la
ministre, le groupe qui suivra, l'Association des propriétaires de
garderies du Québec Inc., que nous pourrions l'entendre au début
de la séance de cet après-midi, de manière à
pouvoir pallier un problème qui surgit et qui n'était pas
prévu ce matin.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est ce qu'on essaie de voir à mon
agenda, parce que j'avais également quelque chose de prévu entre
les deux. On essaie de s'ajuster.
Mme Harel: Oui. Il faut donner la réponse dans les plus
brefs délais, étant donné qu'une convocation de la tribune
doit être faite.
Mme Gagnon-Tremblay: On va me donner la réponse dans
quelques instants.
Mme Harel: Quelques instants?
Mme Gagnon-Tremblay: J'avais déjà également
quelque chose de prévu. Je vais voir si on peut contremander.
Le Président' (M. Thuringer): D'accord, Mme la
ministre?
Mme Gagnon-Tremblay: Alors, je vous remercie, Me Boucher.
J'imagine que vous êtes accompagné des éducateurs et des
éducatrices?
M. Boucher: Je m'excuse, d'abord, de vous avoir interrompue. Vous
voulez peut-être vous intéresser à la qualification
primaire ou un peu au secteur d'activité de chacun ou...
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce qui est important pour moi...
Je comprends qu'ils se sont fait représenter, mais j'imagine qu'ils sont
capables de...
M. Boucher:Assurément, ils sont capables d'articuler,
oui.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est leur point de vue que je veux
avoir.
M. Boucher: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Vraiment c'est la première fois qu'on
rencontre des éducateurs et des éducatrices en garderies à
but lucratif, et je voudrais bien les entendre. En somme, je voudrais savoir,
par exemple, quel niveau de formation ils ont. Est-ce qu'on a réussi
à atteindre la norme dans ces garderies? Par exemple, ça fait
combien d'années qu'on travaille? Quel est le salaire moyen? Comment
vit-on dans ces garderies? Je ne sais pas jusqu'à quel point:..
M. Boucher: Alors, avec votre permission, nous allons
procéder en deux temps. Je suis le dépositaire des statistiques
globales de l'association, mais je pense que les gens qui m'accompagnent seront
capables ensuite de vous donner une rétroaction de leurs
activités en garderies et de vous dire, dans leurs termes, pourquoi ils
sont ici ce matin.
Mme Gagnon-Tremblay: J'aimerais bien les entendre aussi.
M. Boucher: Pour répondre aux questions techniques et de
statistiques que vous vous posez, le salaire moyen dans nos garderies varie de:
5 $ à 7 $ l'heure, en moyenne. Un deuxième élément
que vous connaissez déjà, mais qu'il est bon de reprendre pour
les fins de cette commission, c'est que la qualification des membres de notre
association est de trois ordres: il y a un grand nombre de travaille, le plus
grand d'ailleurs, qui possèdent un diplôme d'études
collégiales en techniques de garderie. Il y a des diplômés
universitaires de premier cycle, par exemple, qui ont un bac en
éducation préscolaire ou en psychologie avec
spécialisation en enfance inadaptée ou en petite enfance. ll y a
un troisième groupe de travailleurs qui sont en route vers la
qualification prévue par le règlement pour obtenir un
diplôme en techniques de garderie des cégeps. Pour le reste, je
pense que les gens qui sont ici peuvent...
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'il y a des éducatrices et
des éducateurs parmi les gens qui vous accompagnent?
M. Boucher: Ce sont des éducatrices et des
éducateurs.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce sont toutes des éducatrices.
M. Boucher: Oui, à l'exception d'un gestionnaire:
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Comment vivez-vous la vie de
garderie, comparativement à vos collègues des garderies à
but non lucratif, par exemple? En tant qu'éducatrices et
éducateurs, par exemple, quelles sont vos activités hebdomadaires
ou quotidiennes et les heures que vous travaillez? J'aimerais vous
entendre.
Mme Morin (Linda): Je travaille dans une garderie depuis
déjà quatre ans. Je suis infirmière de formation. Je
travaille auprès des poupons. Depuis quatre ans, J'ai toujours
travaillé auprès des poupons. Ma journée commence tout
simplement avec l'arrivée des enfants, le matin, où j'ai un
contact avec tous les parents. Ensuite, ma journée se déroule
selon les normes des garderies et ce que les poupons demandent. C'est
une journée comme dans n'importe quelle autre
garderie non gérée ou gérée. C'est une
journée qui se déroule de la même façon, que je sois
moniteur ou que ce soit un moniteur d'une autre garderie. À part cela,
mon salaire est de 7 $ l'heure depuis quatre ans. Je trouve qu'avec la
formation que j'ai ainsi que les cours que je poursuis, mon salaire n'est
peut-être pas adéquat, si je décide de poursuivre dans ce
domaine, pour être capable de vivre décemment.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous n'êtes pas de la même
garderie, j'imagine.
M. Boucher: Non. Personne n'est de la même
garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Par exemple, madame, est-ce que dans votre
garderie il y a une stabilité ou un roulement de personnel assez
considérable?
Mme Morin: Disons que dans la garderie où je suis le
roulement de personnel n'est pas énorme. On a quand même un bon
milieu de travail et l'ambiance est très bonne. En moyenne, depuis trois
à quatre ans qu'on est ouvert, il y a un peu de roulement du personnel
temporaire. Pour le reste, c'est du personnel . qui est là depuis le
début.
Mme Gagnon-Tremblay: Et quel est le tarif de votre garderie
actuellement? .
Mme Morin: Cela se situe entre 5 $ et 7 $.
Mme Gagnon-Tremblay: Non. Je veux parier du tarif quotidien de la
garderie.
Mme Morin: Par enfant?
Mme Gagnon-Tremblay: Par enfant.
Mme Morin: C'est 17 $ par jour.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que c'est assez complet? Votre taux
d'occupation est d'environ combien?
Mme Morin: Notre taux d'occupation, pour la période
scolaire, est d'environ 90 % et de 75 % pour la période estivale.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Vous réclamez les
mêmes subventions pour les garderies, qu'elles soient ou non
gérées par les parents. Pourtant, rien ne nous garantit que ces
subventions de fonctionnement iraient grossir la masse salariale des
éducatrices dans un système où les choix dépendent
uniquement du propriétaire. Nous accordons une formation parce qu'on
trouve que c'est absolument essentiel. Que ce soit dans une garderie à
but lucratif ou à but non lucratif, je pense que pour les
éducatrices il faut réussir à atteindre cette formation.
En réclamant des subventions, qu'est-ce qui nous garantit que ces
subventions serviront à l'amélioration des conditions de travail
des éducatrices et des éducateurs?
M. Boucher: Mme la ministre, il y aurait deux choses
à prendre en considération. Je pense qu'on doit être
conscient que, si les travailleurs et travailleuses en garderies non
gérées par les parents sont informés publiquement - comme
vous le ferez certainement - de subventions qui pourraient servir à
payer des salaires, immédiatement, il va s'instaurer un dialogue, une
discussion pour demander aux propriétaires de garderies qu'à
l'intérieur de la nouvelle enveloppe budgétaire une somme soit
prévue pour les augmentations de salaire.
Il est certain que le jeu du partenariat dont nous faisions
état au début de notre présentation va encore une fois se
continuer. Et autant le propriétaire que le travailleur vont trouver un
terrain d'entente pour augmenter le salaire des travailleurs. C'est pour
ça qu'actuellement, dans les garderies non gérées par les
parents, le syndicalisme est à toutes fins utiles absent et ce, pour
deux raisons: les rapports sont excellents entre travailleurs et
propriétaires et, d'autre part, les travailleurs sont tout à fait
conscients de la capacité très limitée de payer des
propriétaires. Sauf que si on apprend, demain matin, qu'une augmentation
- Je dis une augmentation, c'est un euphémisme, ma foi, en ce sens qu'il
n'y a pas de subvention actuellement - ou qu'une subvention serait
accordée, il est certain que les travailleurs vont vouloir avoir leur
part de cette nouvelle masse monétaire. Sur le plan pratique, le
partenariat et les bonnes relations qui ont toujours existé vont faire
en sorte qu'on va trouver une terrain d'entente pour augmenter les salaires en
partie et la qualité toujours.
Mme Gagnon-Tremblay: Comment, Me Boucher, pouvons-nous
subventionner, par exemple, les salaires ou prendre des décisions sur le
plan des salaires, alors qu'on ne le fait pas pour les garderies sans but
lucratif puisque le gouvernement n'est pas l'employeur? Chaque garderie est une
garderie autonome et on ne veut pas se mêler des salaires. Je pense que
ce qui se passe, c'est que le gouvernement peut subventionner et donner un
budget, accorder un certain montant, mais ce n'est pas à nous de fixer
les salaires. Ce sont les parents, qui sont les administrateurs des garderies,
qui décident des salaires. Comment nous, par contre, si on ne le fait
pas pour les garderies sans but lucratif, pouvons-nous le faire, comme
État, pour les garderies à but lucratif et s'assurer
véritablement que ça s'applique aux salaires?
M. Boucher: Voici. Ma réponse sera en deux
volets. Dans l'hypothèse où vos conditions
seraient telles qu'il faudrait absolument assurer une portion aux
salaires, à ce moment-là, évidemment, nous nous rendrons
à la condition Imposée et, là, vous serez à
même de constater directement, par la condition qui sera rattachée
à l'octroi d'une somme pour les salaires, qu'elle sera
donnée.
D'un autre côté, dans le contexte - les
propriétaires de garderies vous en parleront cet après-midi -
où vous dites, avec raison, que vous respectez l'autonomie de chacune
des garderies comme étant une entité juridique propre, tout ce
que l'on vous demande, essentiellement, c'est de vérifier, à
môme les bilans que l'office reçoit annuellement, que les salaires
auront augmenté. Vous avez un moyen de contrôle très
facile, vous recevez annuellement les bilans vérifiés des
garderies, quel que soit leur statut. Alors, vous pouvez à môme le
bilan vérifier immédiatement comment sont utilisées les
sommes d'argent que vous Injecterez dans les garderies.
Dans ce contexte, je pense que vous avez cette assurance, d'autant plus
que le gouvernement a déjà vécu, avec les garderies non
gérées par les parents, une expérience de financement qui
s'est avérée fructueuse, je pense; cela a été lin
bon essai du gouvernement pour ce qui est des subventions pour le
réaménagement des locaux. Je pense qu'on n'a décelé
aucune problématique, tout s'est bien fait. Le gouvernement a
constaté qu'effectivement on a utilisé l'argent pour les fins qui
avaient été représentées par les garderies.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut ajouter
quelque chose? Non On à beaucoup parlé de rendre les
comités consultatifs beaucoup plus fonctionnels. Je sais que vous, les
éducatrlces et éducateurs, vous avez des contacts constants avec
les parents; comment fonctionnent ces comités dans chacune de vos
garderies?
M. Morin (Gaston): Bonjour. Comment ça fonctionne dans un
comité consultatif?
Le Président (M. Bélanger): M. Morin, c'est bien
ça?
M. Morin: Oui, c'est bien ça.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Morin: Le comité consultatif, voulez-vous parler des
relations entre les travailleurs et le comité?
Mme Gagnon-Tremblay: Comment fonctionne ce comité? Vous
savez que, dans la loi, on est censé avoir un comité...
M. Morin: Oui, oui.
Mme Gagnon-Tremblay: ...de parents...
M. Morin: Exactement.
Mme Gagnon-Tremblay: ...qui devrait être fonctionnel. On se
rend compte que, dans certains cas, ce comité n'est véritablement
pas fonctionnel et, dans d'autres cas, oui, il peut l'être. Comment
fonctionne ce comité dans votre garderie, les contacts avec les parents?
Comment fonctionne ce comité?
M. Morin: Alors, il y a des assemblées
générales qui sont organisées au cours de l'année,
ce qui inclut une élection par volontariat. Lorsque ce comité est
formé, il se rencontre quatre ou cinq fois par année pour
discuter de divers sujets comme, par exemple, le fonctionnement de la garderie.
Chez nous, ça va assez bien. Chaque fois qu'on se rencontre, on discute
de choses...
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que, par exemple, on discute du
programme pédagogique? (11 h45)
M. Morin: Chez nous, la relation entre parents et travailleurs
est très bonne. Ça va bien. On règle les problèmes
au fur et à mesure. Alors, lorsqu'on se rencontre, on résume ce
qui s'est passé et, éventuellement, on soumet de nouvelles
idées pour l'avenir.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que ça se passe de la
même façon? Est-ce que les parents s'interrogent? C'est ce que je
voudrais savoir. Est-ce que les parents s'interrogent sur l'éducation,
la prévention, en somme, tout ce qui touche le côté
pédagogique de l'enfant? Est-ce qu'on s'inquiète ou si,
finalement, on va reconduire son enfant en sachant qu'il est bien physiquement.
Je pense qu'il n'y a pas une éducatrice ou un éducateur qui ne se
préoccupe pas du bien-être de l'enfant. Je pense qu'on ne pourrait
pas, comme adulte, faire mal à un enfant. Indépendamment du
bien-être de l'enfant, est-ce que les parents s'interrogent et
s'inquiètent de ce qui se passe? Qu'est-ce qu'on leur donne comme
éducation? Est-ce qu'on les laisse devant un téléviseur
une journée entière ou si, au contraire, on s'occupe d'eux?
Est-ce qu'il y a des activités? Quelle est la réaction des
parents?
Mme Morin: Je crois que les parents s'interrogent autant dans nos
garderies qui sont non gérées par les parents que ceux qui sont
dans les garderies gérées par les parents pour la bonne et simple
raison que, quand vous amenez votre enfant à la garderie, ça vous
intéresse de savoir ce qu'il va faire dans une journée. Je trouve
important d'avoir un contact très rapproché avec les parents et,
en plus, avec l'employeur. Cela veut dire que si j'ai un problème,
demain matin, je n'aurai pas besoin de réunir un comité de
parents pour essayer de régler mon problème. Je vais directement
à la source pour essayer de le régler, et la source est
là. Elle est
là à 7 heures le matin, à 8 il 30, à 9 il 30
et à 13 h 30 si j'en ai besoin. Je trouve que si, pour un travailleur,
c'est important de pouvoir discuter d'un problème avec un parent, cela
devrait être la même chose pour un parent.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous constatez les mêmes
choses dans les autres garderies?
M. Morizio (Dante): Mon nom est Dante Morizio. Oui, ça se
passe de la même façon dans notre garderie. Il y a un dialogue
avec les parents et aussi avec le propriétaire de la garderie. Alors,
s'il y a des problèmes, on peut en parler directement et on n'attend pas
les comités de parents pour qu'une décision soit prise.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que, par contre, vous avez
l'impression, que les parents sont encore capables de fournir dans le
système?
Sont-ils encore capables de défrayer une partie du
système, si on veut, par exemple, pour améliorer le
développement, améliorer les conditions de travail, si on veut
abaisser les ratios?
Mme Morin: Vous voulez dire s'ils sont capables, au plan
salarial, de fournir...
Mme Gagnon-Tremblay: Sont-ils encore capables de faire un effort
supplémentaire avec le gouvernement pour améliorer toutes ces
conditions ou si seul le gouvernement est en mesure ou normalement devrait
être en mesure...
Mme Morin: Je crois que les enfants d'aujourd'hui ne sont pas la
responsabilité unique des parents. On est dans une
société, et la société se doit peut-être de
prendre un peu ses responsabilités face à ça, parce que
les enfants d'aujourd'hui seront peut-être assis à ces
places-là demain. Je me dis que ce n'est pas juste aux parents à
tout fournir, comme ce n'est pas juste à une personne de tout
fournir.
Mme Gagnon-Tremblay: En terminant - parce qu'on me dit que mon
temps est déjà écoulé - depuis combien de temps
votre association existe-t-elle?
M. Boucher: C'est une association qui s'est formée il y a
environ 18 mois, à la suite du rapport Presser et dans l'attente de
l'énoncé de politique du gouvernement. Les travailleurs avaient
manifesté aux propriétaires de garderies le désir de faire
des représentations spécifiques et autonomes, malgré
l'excellent contexte de partenariat qui existait. Alors, on a commencé
à favoriser la mise en place d'une association qui est en train de se
compléter actuellement. Évidemment, si, en théorie, on
pourrait techniquement contacter près de 2000 travailleurs et même
un peu plus, je dois vous dire bien hon- nêtement que nous n'avons pas
contacté ces 2000 travailleurs, mais qu'on en a contacté
plusieurs centaines actuellement. On est en voie d'organisation.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Qui est
président de l'Association des travailleurs et travailleuses en
garderies privées du Québec?
M. Boucher: C'est M. Morin. M. Morin: C'est moi.
Mme Harel: Alors, M. Morin. Je crois comprendre, M. Boucher, que
vous êtes à la fois procureur de l'association des travailleurs et
travailleuses et procureur de l'association des propriétaires.
M. Boucher: Oui.
Mme Harel:. Vous cumulez donc les deux fonctions. M. Morin,
l'association est-elle incorporée?
M. Morin: Non.
Mme Harel: L'association n'est pas incorporée.
M. Morin: Non.
Mme Harel: Avez-vous l'intention de l'incorporer?
M. Morin: Éventuellement. Mme Harel:
Éventuellement? M. Morin: C'est une possibilité.
Mme Harel: Combien d'éducateurs et d'éducatrices en
sont membres, en ce moment?
M. Morin: Approximativement 100 ou 125. Mme Harel: 100 ou
125? M. Morin: Oui.
Mme Harel: Est-ce que la majorité d'entre eux sont de la
région de Montréal ou de l'ensemble du territoire?
M. Morin: Cela couvre le territoire de Montréal.
Mme Harel: De Montréal? C'est plutôt
Montréal?
M. Morin: En banlieue.
Mme Harel: En banlieue de Montréal. Parmi vos 125 membres,
combien détiennent un certificat collégial, un DEC ou un bac?
M. Morin: II faudrait que Je fasse des statistiques.
Mme Harel: Est-ce que vous aimeriez mieux que je pose mes
questions à M. Boucher?
M. Morin: Non, cela va. Cela va, merci. Mme Harel: Cela va?
M. Morin: II faudrait faire des statistiques. Pour le moment, je
ne suis pas en mesure de vous répondre.
Mme Harel: Ce serait quand même important. Vous savez
que...
M. Boucher: Sous réserve.
M. Morin: Sous réserve, on pourra vous donner
l'information.
Mme Harel: ...pour une meilleure connaissance de votre
association...
M. Morin: Sous réserve, oui.
Mme Harel: ...ce serait vraiment utile qu'on puisse avoir cette
information-là. Comment devient-on membre de l'association des
travailleurs et travailleuses? Est-ce qu'il y a un coût d'entrée?
Est-ce qu'il y a une inscription?
M. Morin: Non, il n'y a aucun coût. Mme Harel: Qui finance
vos activités?
M. Morin: On essaie de trouver des fonds à même la
garderie pour laquelle l'employé travaillé.
Mme Harel: C'est-à-dire à même.
Mme Morin: II y a beaucoup de bénévolat aussi.
Mme Harel: Oui. Mais vos déplacements, par exemple, celui
d'aujourd'hui, c'est vous-mêmes qui défrayez vos
déplacements?
M. Morin: Oui, oui.
Mme Harel: Oui? Est-ce qu'il y a des frais, disons, de poste, de
correspondance? Vous voulez rejoindre 2000 membres potentiels, comme nous le
disait 'M. Boucher, tous ces frais sont considérables; on sait
qu'envoyer '1000 lettres, cela coûte 300 $. Est-ce que vous avez
déjà eu des contacts, des 'téléphones, des
coûts d'interurbain et -tout? Qui finance les frais d'administration de
l'association?
M. Morin: On se serre les coudes, madame. Tout le monde participe
ensemble à son petit patelin.
Mme Harel: Alors, il n'y a pas de contribution pour le
fonctionnement de l'association.
M. Morin: Non.
Mme Harel: Est-ce que vous envisagez qu'il y en ait une
éventuellement?
M. Morin: Ce serait une bonne chose. À la suite des
résultats de l'énoncé de politique, on pourrait
éventuellement se renforcer un peu.
Mme Morin: Nos augmentations de salaire peut-être.
Mme Harel: Qui paie M. Boucher alors?
M. Boucher: II n'est pas payé M. Boucher, madame.
Mme Harel: Ni par les propriétaires ni par l'association
des travailleurs et travailleuses?
M. Boucher: Pas par les travailleurs, mais par les
propriétaires, oui, parce que, avec les années, j'ai
réussi, à force de discussions avec l'office, à convaincre
l'office que l'association, qui était à but non lucratif, pouvait
enfin être subventionnée, comme je vais éventuellement
essayer de faire la même chose avec l'association des travailleurs. Tout
ça pour vous dire, madame, que, pendant plusieurs années, j'ai
travaillé pour un gros dollar annuel symbolique pour les garderies que
je représente et que, tout comme les travailleurs qui sont avec moi
aujourd'hui, on s'est serré les coudes et on se les serre encore pour
défendre une philosophie que les parents nous demandent eux-mêmes
de défendre.
Mme Harel: Alors je comprends, M. Boucher, que comme procureur,
à ce litre-là, vous êtes rémunéré par
l'association des propriétaires, mais que vous ne tirez pas de
rémunération de l'association des travailleuses et travailleurs.
C'est bien ça?
M. Boucher: Exactement. Ils n'ont rien, pauvre madame. On ne peut
rien tirer d'une roche.
Mme Harel: Bien. Alors... Des voix: Ha,ha, ha!
Mme Harel: Je veux comprendre. C'est intéressant. .
M. Boucher: Cela existe encore le bénévolat, vous
le savez, même dans les garderies à but lucratif.
Mme Harel: Oui? Hé bien, je suis heureuse de l'apprendre.
Est-ce que les travailleurs ont des contrats de travail signés ou
verbaux? Par exemple, vous, M. Morin, avec votre employeur, est-ce un contrat
de travail signé?
M. Morin: Dans certains cas, il y a des contrats. Ce n'est pas un
contrat établi, mais on nous demande de respecter certains
critères de base.
Mme Harel: Oui, vous voulez dire qu'il y a des exigences de la
part de l'employeur, mais vos 125 membres ont-il des contrats de travail avec
leur employeur?
M. Boucher: Je peux vous répondre
indirectement, par l'intermédiaire de l'association des
propriétaires. Je vous ai expliqué le partenariat qui existe. Il
y a quelques années, on a commencé à préparer des
formules de contrat type, d'abord pour les parents en coopération avec
l'Office de la protection du consommateur, pour les bien protéger. Par
la suite, nous avons préparé des formulaires dé contrats
d'engagement pour les travailleurs. Vous allez comprendre qu'une association
comme la nôtre étant volontaire, autant au niveau des travailleurs
que des propriétaires, certains propriétaires s'en sont servis et
certains employés ont des contrats et sont très
structurés. Dans d'autres garderies, c'est moins structuré. C'est
très variable.
Mme Harel: Est-ce que l'association, qui poursuit un but de
promotion des intérêts de ses membres, va faire la promotion des
contrats de travail. Je ne sais pas, je pose la question à M. Morin, le
président.
M. Boucher: On en a discuté. Je m'excuse
d'intervenir, M. Morin pourrait continuer tout aussi bien que moi. La seule
question étant que je veux vous faire comprendre qu'on est une
association naissante. Tous les éléments que vous avez
soulignés font déjà partie Intégrante de
discussions verbales et informelles qui ont eu lieu, mais nous
préférons procéder par étapes sur ces questions. La
première étape avait été celle d'assurer notre
représentation devant une éventuelle commission parlementaire
comme celle qui a lieu aujourd'hui pour s'assurer, justement, qu'un minimum
d'argent soit accordé aux garderies non gérées par les
parents.
Par la suite, suivant les résultats de cette
première étape, nous verrons à structurer davantage les
travailleurs éventuellement.
Mme Harel: Moi, je veux m'adresser aux éducateurs et
éducatrices qui sont avec vous, M. Boucher, pour leur dire que je suis
très sensible à la situation de leurs conditions de travail. Je
le suis d'autant plus que je pense que les conditions de vie des enfants, comme
on nous l'a rappelé devant cette commission, sont finalement les
conditions de travail qu'on fait aux personnes qui les gardent. On peut tout
autant être sensible à votre plaidoyer et différer sur les
conclusions. Votre plaidoyer, quel est-il? Le plaidoyer consiste à dire:
Les conditions ne sont pas bonnes parce que nos conditions salariales, nos
conditions générales ne sont pas conformes à celles qui
sont octroyées aux travailleurs et travailleuses de garderies à
but non lucratif. Alors, je renvoie la question aux travailleurs et
travailleuses à but lucratif: Pourquoi ne pas conclure à la
nécessité de convertir les garderies à but lucratif en
garderies à but non lucratif, comme le recommandait le rapport
Presser?
M. Boucher: Je vais vous répondre
là-dessus.
Mme Harel: Vous avez parlé tantôt au nom de
l'association des propriétaires qui vous rémunère, comme
vous me l'avez dit. Je préférerais entendre les éducateurs
et éducatrices.
M. Boucher: Vous allez avoir la même
réponse.
Mme Morin: Pour ma réponse, je pense qu'on est dans un
pays démocratique, alors on a un libre choix qu'on peut faire
nous-mêmes.
Le Président (M. Bélanger): Non, je regrette. Il
n'y a aucune manifestation, de quelque façon que ce soit,
d'acceptée ici.
M. Boucher:M. le Président, vous me
permettrez de m'excuser personnellement...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Boucher: ...au nom de Mme Morin qui,
évidemment, vous le comprendrez, n'est pas au courant des faits et des
règles de procédure des commissions parlementaires.
Mme Morin: Je refais ma réponse d'une autre façon
parce que je n'ai peut-être pas la formation nécessaire pour
parier à un ministre. Je m'excuse. C'est peut-être juste de vous
dire une chose. Je ne verrais pas pourquoi si je fais un travail égal,
si je donne les mêmes services et qu'on respecte les mêmes
règlements exigés par l'office de garde, pour quelle raison on
n'aurait pas le droit d'avoir une rémunération égale.
C'est surtout ça que nous, les travailleurs, on aimerait
défendre. On fait les mêmes choses, ce n'est pas une question de
dire qu'on est dans une garderie non gérée ou une garderie
gérée. Nous, ce qu'on dit: On a des enfants, on fait tout notre
possible pour leur donner le meilleur, alors, je ne verrais pas pourquoi on
n'aurait pas
le droit aux mêmes choses que les garderies qui sont
gérées par les parents. Ce n'est surtout pas une question de
qualité de travail de la garderie. SI elles n'étaient pas de
bonne qualité, on n'y serait pas.
Mme Harel: Bon. Alors, je vous repose la question. Vous dites: On
a des enfants, on fait tout notre possible pour leur donner le meilleur. Je
suis convaincue qu'il en est ainsi. Mais la question se pose, par exemple:
Pourquoi a travail égal, pour le même service, à la maison,
l'État ne rémunérerait-il pas, ne compenserait-il pas le
service de qualité, auprès des enfants? Vous invoquez le
principe: À travail égal, pour un même service. Pourquoi la
garde à la maison pour la mère au foyer ne serait-elle pas, elle
aussi, rémunérée? Pourquoi la garde en milieu familial ne
serait-elle pas rémunérée selon le même tarif? Dans
le cadre de l'agence de garde en milieu familial, si une personne fait un
service auprès d'un enfant, à ce moment, pourquoi pas aussi,
l'envisager pour un salaire?
M. Boucher: Je pense que là il y a... (12 heures)
Mme Harel: Non, non, Je vais terminer et vous allez avoir
l'occasion de réagir. L'État fait des choix et le libre choix
n'est pas nécessairement ce qui doit commander toutes les relations dans
une société. À ce moment-là, il pourrait y avoir
des hôpitaux privés et des écoles privées qui soient
entièrement subventionnés. Le libre choix, c'est un choix que
l'État, n'a pas nécessairement à financer. L'État
doit financer avec des deniers publics, en regard des choix que fait la
collectivité. À ce moment-là, l'État dit: La garde
à la maison pour la mère au foyer, on ne va pas la
rémunérer et la compenser, comme une garderie, même
à but lucratif. La garde en milieu familial n'est pas non plus
compensée de la même façon, parce que l'Etat a fait le
choix d'un réseau géré par les parents. C'est, d'une
certaine façon, la question que je vous pose en tant
qu'éducatrices et éducateurs de garderie: Ou bien vous demandez
à l'État de changer son choix ou bien vous lui demandez de
s'ajuster au vôtre.
Alors, si l'État change son choix, puis décide d'accorder
des subventions aux garderies à but lucratif, à ce
moment-là -je pose la question à Me Boucher cette fois-ci
directement - ne devrait-il pas y avoir un décret de convention
collective, dans la mesure où l'État va financer, pour qu'il y
ait amélioration des rémunérations? Il faudrait un
décret de convention collective comme II y en a dans tous les secteurs.
Vous savez, le libre choix, cela n'existe pas. On l'invoque beaucoup en
services de garde, mais cela n'existe presque pas dans des centaines de
secteurs, où il y a des décrets de convention collective qui les
régissent. Alors, s'il y a des subventions, acceptez-vous les
décrets de convention, Me Boucher?
M. Boucher: Mme Harel, on va d'abord, pour employer .
l'expression populaire, replacer l'église au milieu du village, si vous
le permettez, et de la façon suivante: Dans toutes les lois dont vous
avez fait état, il y a une différence, fondamentale avec la Loi
sur les services de garde à l'enfance. La loi sur les services de
gardé prévoit, à son article 2, le libre choix des parents
et l'égalité des services; ce que toutes vos autres situations ne
prévoient pas dans la loi, que je sache. Je vous entends parler, depuis
tout à, l'heure, du libre choix. Le libre choix est dans la loi et
l'État n'est pas au-dessus de la loi. L'État fait la loi, mais il
n'est pas au-dessus de la loi. Alors, nous devons tous nous conformer à
ce principe-là et, pour entrer dans la dialectique que vous proposez, il
y a une condition préalable: modifier d'abord l'article 2 de la loi,
rayer le libre choix prévu à l'article 2 et ensuite, vous et moi
nous ferons ensemble la discussion sur le libre choix ou non dans le domaine
des services de garde comme dans les autres domaines que vous avez
mentionnés.
Mais ce que je veux préalablement bien mettre au clair, c'est
cette existence du libre choix dans la loi, de sorte que, ni vous, ni la
ministre, ni personne ne puisse s'y soustraire. C'est dans ce
contexte-là que nous arrivons devant la commission parlementaire. C'est
le premier volet de ma réponse.
Le deuxième volet est le suivant: Vous dites que l'État a
choisi les garderies gérées par les parents. Je dois nuancer vos
propos: L'État n'a rien choisi, l'État a d'abord constaté
l'existence d'un réseau de services de garde qui était là
bien avant qu'il n'ait pris conscience de la réalité du service.
Je dois dire à ce chapitre-là, que l'État, comme
malheureusement trop souvent, est un peu à la remorque des situations
factuelles et sociales. Et dans le domaine des garderies, l'État
était effectivement à la remorque de la situation de fait que les
propriétaires avaient constatée depuis longtemps.
Alors, l'État n'a pas fait de choix. Ce qu'il a fait
actuellement, c'est de composer avec une préférence qu'une
théorie politique a bien voulu énoncer en 1979, à savoir
que l'on voulait Intégrer les parents à la gestion d'une
garderie, sauf que lorsque nous nous sommes présentés, en 1979,
devant la commission parlementaire nous avions souligné au ministre
Lazure, qui dirigeait la commission à l'époque, que sa position,
dans les faits, contredisait le principe premier qu'il défendait.
C'est à ce moment-là que le ministre a eu le choix
d'enlever son principe premier pu alors d'être conséquent avec
lui-même - ce qu'il a fait - et de maintenir les garderies privées
dans la loi et dans le réseau. Alors, on n'est pas dans une question du
choix de l'État. L'État a été pris dans une
situation pratique. L'État doit actuellement composer avec cette
situation pratique, ce qu'il fait, d'ailleurs, de façon quand même
assez bien dans l'ensemble, parce que nos services sont
de qualité actuellement. Nonobstant nos discussions et nos
divergences de vues, je pense que s'il y a une chose dont on doit se
féliciter, c'est que les structures, sous quelque gouvernement que ce
soit, ont amené aujourd'hui un réseau qui est de
qualité.
Ce qui est le véritable enjeu de la commission parlementaire
aujourd'hui, c'est de prendre conscience que les services de qualité qui
existent peuvent être menacés, selon les choix que l'on fera, et
c'est pourquoi les travailleurs en garderies non gérées par les
parents vous disent: Nous donnons de la qualité, mais nous pourrions
être démotivés. C'est ça.
Mme Harel: Je pense qu'il faudrait tout de suite vous dire que
c'est inexact, ce que vous mentionniez tantôt, à savoir que le
libre choix n'existerait que dans le cadre d'un service de garde et ne serait
pas tout à fait aussi présent dans le cadre de l'ensemble de
notre régime d'éducation ou de sécurité sociale. Le
libre choix dans la société dans laquelle nous sommes existe dans
la mesure où les parents peuvent se le payer, c'est-à-dire que
l'école...
M. Boucher: Ce n'est pas consacré législativement
comme dans la loi sur les services de garde.
Mme Harel: Si vous me permettez, je ne vous al pas interrompu,
alors, M. le Président, je vais vous demander de ne pas
m'interrompre.
M. Boucher: Oui, ah bon! Je m'excuse, Mme Harel. C'est ce que je
voulais vous préciser.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on va laisser Mme la députée...
Mme Harel: Le libre choix vaut pour l'école. Le parent
peut entièrement choisir l'école de son choix, mais il doit la
payer. Ce ne sont pas toutes les écoles qui ont des permis qui sont
subventionnées. Cela vaut pour tout notre régime de
sécurité sociale. Dans ce régime, au nom de
l'intérêt public, l'État fait des choix. Cela ne prime pas
pour autant le choix. Le choix est laissé aux parents de l'école
privée ou publique, subventionnée ou non subventionnée.
Mais l'Etat fait des choix.
Ces choix sont au-dessus des choix individuels que font les gens, en
fonction des ressources personnelles qu'ils ont. L'État fait des choix
en fonction de l'intérêt public, en fonction de
l'intérêt de la collectivité, en fonction des
priorités qu'il a décidé de reconnaître. Je pense
qu'il faut être bien clair là-dessus. Cela doit valoir pour les
services de garde, comme pour l'école, comme pour les hôpitaux,
comme pour l'hébergement des personnes âgées. C'est un
principe de société.
Alors, l'État ne se considère pas comme tenu de financer
tous les choix personnels, dans tous les domaines de notre vie sociale et
collective. La question est: Faut-il financer? Moi, je vous dis que je suis
très sensible à la situation que vivent les travailleurs. Ces
2000 travailleurs et travailleuses ne sont malheureusement pas
adéquatement représentés. Je considère qu'il y a
une réflexion à faire sur cette situation, mais autant je suis
sensible à votre plaidoyer, autant je trouve que vos conclusions sont
trop hâtives.
M. Boucher: Un dernier point que j'aimerais ajouter, si vous me
permettez. Sur le principe, ce que vous dites est vrai, mais dans les autres
lois, Mme Harel, il n'existe pas cette consécration législative
du libre choix, comme dans cette loi. À l'époque de son adoption,
vous n'y étiez pas, évidemment. Cela se comprend. Mais le
ministre Lazure expliquait et avait même fait la nuance à
l'époque en disant que cette loi innovait d'abord dans ses
caractéristiques premières, mais surtout dans cet
élément du libre choix et de l'éventail. Le ministre l'a
fait aux trois lectures devant le Parlement également. Vous pourriez
vous référer aux propos du ministre Lazure. Cela a
été établi.
Alors, c'est cette différence que je vous demande de faire. C'est
vrai que, socialement parlant, les questions de libre choix se posent pour
n'importe quelle loi, mais dans cette loi sur les services de garde le
législateur qui était de votre parti, madame, à
l'époque, a voulu bien l'indiquer. Je pense que, si le
législateur l'a indiqué, il l'a fait pour dire quelque chose.
C'est ça qu'on demande au gouvernement de continuer à respecter.
C'est tout.
Mme Harel: M. le Président, écoutez, j'ai un
contact fréquent avec le Dr Lazure. Nous avons parié du
glissement qui s'est malheureusement introduit dans l'énoncé de
politique à l'égard de ce qui se voulait, à l'origine, un
volet majeur de la politique de la petite enfance. Je pense bien que, sur cela,
c'est un principe fondamental parce que, si tant est qu'il y avait cette
liberté de choix, l'État conviendrait de rembourser
l'équivalent de ce qu'il investit dans son service régi par la
loi pour la garde à la maison puisque la liberté de choix
commanderait un traitement équivalent pour tous les modes. L'État
n'a pas fait ce choix, ni en 1979, ni dans l'énoncé de politique,
malgré que ce ne soit pas encore bien clairement exprimé. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le constat
que j'en fais, c'est qu'il faut que les règles soient claires un jour ou
l'autre. Jusqu'à maintenant, on sait que, selon l'article 31 de la loi,
l'office n'a pas le pouvoir ou l'étoffe de subventionner les garderies
à but lucratif. Si
l'on devait le faire, on devrait modifier notre loi. Comme nous nous
apprêtons à accorder des subventions pour des cas très
spécifiques, on devra s'ajuster en conséquence. Je pense que la
situation doit être très claire pour les garderies à but
lucratif. Jusqu'à maintenant, la loi a été
promulguée. On a toujours réclamé des subventions mais il
n'y en a pas eu. Finalement, il est temps qu'on sache, une fois qu'on l'aura
bien décidé, que ce soit clairement établi que celles qui
ouvrent feront le choix d'ouvrir, mais selon les normes, selon les conditions
ou selon les règles établies en toute connaissance de cause
comme, d'ailleurs, cela s'est fait jusqu'à maintenant. On ne peut pas
dire qu'il n'y avait pas une connaissance du statut et des règles, par
exemple, pour toutes les garderies qui se sont ouvertes depuis l'adoption de la
loi jusqu'à maintenant. il y a toujours des espoirs, alors, maintenant,
ce qui est Important après dix ans, c'est qu'on révise et qu'on
décide pour que les règles soient très claires. Je vous
remercie de votre mémoire et de votre discussion, mesdames et
messieurs.
M. Boucher: Mme la ministre, un seul mot de deux secondes. Je
pense que vous avez employé le mot "essentiel" quant à la
présentation des travailleurs en garderies non subventionnées.
Vous avez parlé d'espoir. Au nom de ces travailleurs, je voudrais vous
laisser avec l'espoir que, comme il nous a semblé ce matin, vous
comprendrez notre situation. Nous sommes convaincus que vous saurez, avec
l'imagination mais surtout avec le pragmatisme qui vous caractérise,
trouver la solution pour régler l'équivoque qui existe
actuellement. Nous vous remercions, Mme la ministre.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
des affaires sociales remercie l'Association des travailleurs et travailleuses
en garderies privées du Québec. Pour faire suite à une
demande de Mme la députée de Maisonneuve, est-ce qu'il y aurait
consentement de la commission pour que nous modifiions l'horaire de la
façon suivante, c'est-à-dire que nous suspendions les travaux
immédiatement et que nous les reprenions à 13 il 30 avec, comme
premier groupe, le Parti québécois de la région
Montréal-Centre?
M. Doyon: Le problème, c'est qu'il manque un certain
nombre de collègues. Il faudrait s'assurer qu'on ait bel et bien quorum
à 13 h 30.
Le Président (M. Bélanger): Cela nous prend cinq
membres pour le quorum. Je m'assurerai d'avoir le quorum à 13 h 30.
M. Doyon: Alors, consentement.
Le Président (M. Bélanger): Consentement.
Mme Gagnon-Tremblay: Je serai ici comme une seule femme.
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais aux gens
d'être ici à 13 h 30 pour qu'on commence à l'heure
précise vu l'horaire chargé de cet après-midi.
(Suspension des travaux à 12 h 14)
(Reprise à 13 h 41)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission des affaires sociales reprend ses travaux afin
de procéder à une consultation générale et à
des auditions publiques afin d'étudier l'énoncé de
politique sur les services de garde à l'enfance déposé
à l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988.
Nous recevons cet après-midi le Parti québécois de
la région Montréal-Centre. Vous connaissez nos règles de
procédure: vous avez 20 minutes pour votre présentation et 40
minutes de discussion avec les membres de la commission. Je vous prierais
d'identifier vos porte-parole et de vous identifier chaque fois que vous voulez
bien prendre la parole, ceci pour les fins de transcription au Journal des
débats. Je vous prierais de présenter votre
mémoire.
Parti québécois de la région
Montréal-Centre
M. Bouchard (Pierre): Je vous remercie, M. le Président.
Mesdames et messieurs, je suis Pierre Bouchard, président de la
région Montréal-Centre au Parti québécois et, avec
mol, j'ai Mme Danielle Veillet qui est présidente de l'association du
Parti québécois dans le comté de Mercier. Mme Veillet a
travaillé plus de douze ans dans les garderies. Nous vous remercions de
nous avoir invités à venir présenter notre
mémoire.
On doit vous dire d'entrée de jeu que ce n'est pas une
étude exhaustive que nous avons voulu faire dans ce mémoire. Il
ne s'agit pas non plus d'une alternative que nous proposons. Nous aurons
d'autres lieux prochainement pour présenter une telle alternative. Mais,
considérant l'importance du sujet, on tenait à souligner
certaines failles ou certaines faiblesses sérieuses que nous trouvons
à l'énoncé de politique sur les services de garde à
l'enfance.
On se serait attendus, dans un premier temps, lorsqu'on a annoncé
cet énoncé de politique, qu'on analyse les différents
besoins des parents et des enfants et qu'on organise une politique en fonction
de ces différents besoins exprimés par les parents et les
enfants. Ce que l'on a plutôt trouvé à l'intérieur
de cet énoncé de politique, c'est que le choix qui était
avant tout offert, c'était un choix à travers les
différents modes de gestion des garderies. Or, il nous semble que,
là-dessus, notre société devrait
rapidement prendre position pour reconnaître des services de garde
où les parents ont un droit et un devoir de gestion dans ces garderies,
ce qui devrait minimiser beaucoup l'importance accordée par le
gouvernement aux autres types de garderies.
Je vais laisser le soin à Mme Veillet de vous présenter la
première partie, me réservant la deuxième, la
conclusion.
Mme Veillet (Danielle): Danielle Veillet du Parti
québécois de Mercier. Dans la première partie, on met en
relation la qualité avec le financement. Le Parti
québécois de Montréal-Centre veut, dans un premier temps,
examiner la disparité dans la qualité de différents
services de garde selon les régions et les quartiers. Nous affirmons
qu'il est du devoir du gouvernement d'assurer des services de qualité
égale dans les différentes régions du Québec et,
à l'intérieur de ces régions, dans les différents
villages ou quartiers. Nous constatons que le mode de financement
présenté par le gouvernement va à l'encontre de ce
principe. Avant d'en examiner les raisons, nous aimerions rappeler l'histoire
du financement des commissions scolaires du Québec. Si nous voulons
rappeler cet épisode de l'histoire, c'est qu'il nous semble riche
d'enseignement en rapport avec le financement des services de garde.
Il faut se rappeler que les commissions scolaires, de 1846
jusqu'à l'application des recommandations du rapport Parent, se
finançaient à cinq sources différentes et que les deux
principales sources étaient les subventions provinciales et
l'impôt foncier qui était prélevé par les
commissions scolaires elles-mêmes localement et qui servait localement.
On peut imaginer, finalement, les inégalités régionales
qui ont pu en découler. On peut dire que la qualité des maisons
d'enseignement dépendait de la richesse des entreprises de la
région. Les entreprises payaient des impôts directement aux
commissions scolaires et finançaient régionalement leurs
écoles. Nous, du Parti québécois, pensons que mettre un
pied dans cette porte est dangereux. L'énoncé de politique le
fait.
Je passe à la page 6. Avant tout, pour assurer une qualité
de services sensiblement égale pour tous les enfants du Québec,
il importe de ne pas créer d'inégalité dans le financement
de ces services. La proposition du gouvernement contient le germe
inquiétant d'une telle inégalité. Comme pour les
commissions scolaires d'autrefois, cette inégalité est
basée sur la présence d'installations Industrielles,
d'entreprises et de commerces.
La proposition du gouvernement d'encourager les dons significatifs des
entreprises aux garderies nous semble à contre-courant des enseignements
de l'histoire. Il ne s'agit pas d'un impôt volontaire. Mais qu'à
cela ne tienne le gouvernement, pour encourager les entreprises à
donner, s'engage à verser un pourcentage des montants significatifs
qu'elles pourront fournir aux garderies. À ce point, il nous semble que
les entreprises vont donner aux garderies qui vont faire leur affaire, qui vont
servir à leurs propres employés. On voit dans le reste de
l'énoncé que, les garderies en milieu de travail étant
favorisées, les entreprises vont donner à ces garderies. On voit
comment, régionalement, ce don des entreprises peut favoriser un certain
type de garderies et automatiquement défavoriser les autres.
L'enveloppe globale du budget n'étant pas élastique,
chaque subvention gouvernementale faite à la suite d'un don d'une
entreprise viendra réduire les fonds disponibles pour les autres
garderies, déjà moins favorisées. Nous avons peur de voir
ce que cela peut donner après quelques années. Un écart se
creusera entre les garderies à entreprises donatrices et les autres,
celles-ci ayant bien des chances d'être les garderies de quartier.
On amène ici une suggestion. Il faut que ce soit examiné.
Si on veut impliquer les entreprises dans le financement des garderies,
peut-être qu'on pourrait imposer les entreprises et redistribuer ces
montants, non pas aux garderies choisies par les entreprises, mais plutôt
selon les besoins de garde dans chaque région ou chaque quartier.
Mais il y a beaucoup plus inquiétant. La politique du
gouvernement, si elle est appliquée, créera une
inégalité dans la qualité des services directement
proportionnelle aux ressources financières des parents. On sait que les
quartiers ont une certaine homogénéité sociale. On sait
que les quartiers favorisés pourront assumer certaines hausses de frais
de garde. Le gouvernement viendra y ajouter 45 %. Mais supposons, par ailleurs,
une zone défavorisée où l'on ne peut augmenter, à
moins d'égorger les parents financièrement; la garderie perd
alors les montants correspondant à cette augmentation qu'elle ne peut
faire et la subvention de 45 % reliée à cette augmentation.
Conséquemment, elle se retrouve avec le gel de ses revenus et, aussi
bien le dire, ces garderies disparaîtront à plus ou moins long
terme. Pendant ce temps-là, les garderies favorisées pourront
payer de bons salaires. Elles auront un fonds qui leur permettra de donner de
meilleures conditions. Elles entreront dans l'engrenage des situations
favorisées.
Quand on examine l'énoncé et qu'on voit la
possibilité pour les garderies d'avoir un tarif maximal à 120 %
du tarif moyen, si on extrapole en se disant que naturellement il y a des
garderies qui auront des tarifs à 80 %, on voit que cet écart est
énorme. On a fait quelques petits calculs. Cela nous conduit à
116 000 $ de différence entre deux garderies qui auraient exactement les
mêmes conditions, mais dont les tarifs seraient à 80 % pour l'une
et à 120 % pour l'autre. Cela nous semble tout à fait injuste.
Même si le gouvernement assurait un financement d'au moins le minimum de
ce qu'une
garderie peut recevoir maintenant, avec la hausse des tarifs, on verrait
de grands écarts se creuser entre les garderies.
Je passe à la page 8. Quand on sait que dans une entreprise de
services, comme une garderie sans but lucratif subventionnée, 80 % des
revenus sont consacrés à la massé salariale, il est bien
évident que les garderies qui auront des revenus plus
élevés pourront payer de meilleurs salaires, avec tout ce qui
s'ensuit. La disparité régionale ou de quartier serait-elle la
raison invoquée par le gouvernement pour justifier ces écarts de
salaire? Là aussi, on va à contre-courant. Nous connaissons peu
d'enseignantes qui accepteraient de gagner moins parce qu'elles travaillent en
région ou en milieu défavorisé. C'est ce qui va arriver
aux garderies défavorisées qui ne pourront payer d'aussi bons
salaires que lés autres.
Comme je le disais, même si le gouvernement assurait un seuil
minimal, ça se produirait. Nous sommes d'avis qu'il faut plutôt
établir des politiques qui donnent des chances égales aux
régions et aux quartiers. Il est essentiel de reconnaître
l'excellent acquis que représente une bonne garderie dans un milieu
défavorisé. Nous croyons que le gouvernement devrait
étudier sérieusement la possibilité de reconnaître
un statut particulier pour les garderies sans but lucratif
subventionnées qui se trouvent en milieu reconnu comme
défavorisé. Des ressources supplémentaires permettraient
ainsi d'améliorer le travail de ces garderies. Or,
l'énoncé de politique ne va pas du tout dans ce sens.
Le Parti québécois de Montréal-Centre
présente ici un point de vue - bien sûr, je parle des garderies
à but lucratif - tout à fait incomplet, mais c'est un point de
vue qui nous semble central. L'un des arguments souvent mentionnés par
les garderies à but lucratif, à leur avantage, c'est que ce ne
sont pas tous les parents qui veulent s'impliquer dans la gestion dés
garderies. Eh bien, dans lés garderies sans but lucratif non plus! Dans
toutes les garderies, il y a des parents qui s'impliquent très peu et
d'autres qui s'impliquent beaucoup. Le niveau d'implication varie
énormément d'un parent à l'autre, d'une année
à l'autre, selon les disponibilités et les intérêts.
Force est de constater qu'une garderie où on ne pourrait trouver assez
de parents pour s'impliquer dans le contrôle de la qualité du
service court le risque d'être un lieu d'abus envers les
éducatrices et envers les enfants, car s'il y a un lieu où les
valeurs se transmettent rapidement, c'est bien en éducation. La
négligence, la non-transparence et l'autoritarisme se transmettent de la
direction d'une institution à ses employés et à ses
usagers réguliers. On peut constater à quel point c'est vrai
aujourd'hui.
Le contrôle dés parents sur la vie de la garderie
représente une garantie du développement des valeurs
démocratiques dans notre société en général,
dans nos garderies et dans nos familles en particulier. Ces Valeurs et le
désir des parents que les enfants soient éduqués selon ces
valeurs commandent aux parents de s'impliquer dans la vie de la garderie de
leur enfant et de développer une relation harmonieuse entre la garderie
et la maison. Bien sûr, c'est difficile; cela demande une certaine
coordination entre les personnes impliquées, mais ce n'est pas une
raison pour s'en laver les mains. Nous croyons que certains parents qui,
à un moment donné, n'ont pas beaucoup de temps pour exercer ce
contrôle, devraient pouvoir compter sur une équipe de parents plus
disponibles pour le faire. En douze ans de travail en garderie, j'ai toujours
constaté qu'on pouvait trouver des parents qui pouvaient le faire.
Souvent, les parents, et encore plus les parents immigrants, ne sont pas
au courant de la possibilité de s'impliquer dans la gestion de leur
garderie. Il y a là une éducation à faire dans la
population en général et au sein de chaque garderie. Je peux vous
dire que, dans les garderies sans but lucratif, on a toujours eu une
préoccupation très grande pour l'intégration des parents.
L'intégration des parents, ça ne se fait pas automatiquement. Ce
n'est pas parce que les parents sont informés; il faut les voir, il faut
les rencontrer, il faut faire des fêtes. Au mois de septembre, on les
parraine, on les informe, on les intègre à la garderie. C'est
comme ça qu'ils peuvent arriver à gérer là
garderie.
L'implication et le contrôlé des parents sont des
conditions sine qua non de la qualité de la relation
éducatrice-parents-enfant. Nous recommandons instamment au gouvernement
de faire un choix clair quant au type de garde à privilégier et
de retirer tout appui financier aux services de garde à but lucratif. Le
choix du gouvernement n'est pas clair. N'oublions pas que les garderies
à but lucratif ont des tarifs plus élevés que les autres.
L'énoncé de politique va favoriser le financement des garderies
à but lucratif parce que les garderies qui ont des tarifs plus
élevés vont recevoir plus de subventions par le biais des
parents.
Au Parti québécois de Montréal-Centre, on critique
la décision du gouvernement de "prioriser" la garderie en milieu de
travail. On n'est pas contre l'idée d'une garderie en milieu de travail,
on est contre l'idée de "priorisér" la garderie en milieu de
travail. L'une des raisons principales, c'est qu'il nous semble que, pour
garder la garderie, le parent voudra garder son emploi. L'intégration
d'un enfant dans une garderie, c'est quelque chose qui est long à faire;
ce n'est pas quelque chose qu'on répète. Du fait que l'enfant
soit adapté dans la garderie, si le parent a un travail depuis un
certain temps, mais qu'il veut le laisser, il va hésiter à
laisser son emploi parce qu'il sait que l'enfant aura à revivre une
autre adaptation "en garderie. C'est quelque chose. Les parents ne devraient
pas mettre tous leurs oeufs dans le même plat et être
dépendants de leur travail du point de vue de la garderie de leurs
enfants. On peut rétor-
quer que, dans les garderies de quartier, iI y a aussi une rotation des
enfants due aux déménagements des familles, que les parents
déménagent beaucoup, que cela amène une instabilité
pour l'enfant dans sa vie de garderie. Mais les choses se passent
autrement.
Les parents vivent beaucoup en fonction de l'intégration de
l'enfant dans une bonne garderie. S'il doit y avoir un
déménagement, il se fera très souvent dans le même
environnement ou pas trop loin pour garder l'enfant dans son milieu. On
comptera souvent sur la même garderie pour un deuxième et un
troisième enfant. C'est une question de confiance et de
sécurité fondamentale. Quand on a trouvé une bonne
garderie, quand l'enfant est adapté, le parent va essayer de demeurer
à cette garderie. Nous nous demandons pourquoi le gouvernement encourage
autant une formule qui crée des contradictions inutiles et superflues
entre les besoins des parents et ceux des enfants.
Un parent malade, par exemple, ou qui prend une année sabbatique
pour étudier ou pour avoir un autre enfant peut quand même envoyer
son enfant à la garderie de quartier qui est située, par
définition, assez près de la maison. Mais qu'en sera-t-il de la
garderie en milieu de travail? Même si la garderie acceptait de garder
l'enfant durant ce temps, ce qui est loin d'être sûr dans le cas
d'un congé sabbatique, le parent aurait-il le temps d'aller reconduire
l'enfant tous les matins? Le milieu de travail est souvent
éloigné de la maison et le deuxième parent n'aura
peut-être pas le temps de reconduire l'enfant à la garderie. Il ne
faut pas oublier non plus les nombreux cas de familles monoparentales. Prenons
l'exemple d'une famille qui demeurerait à Laval et dont l'enfant de
trois ans est inscrit à la garderie en milieu de travail de la
mère à Saint-Laurent. Disons que le père travaille au
centre-ville, la mère vient d'accoucher et elle prend un congé de
maternité. Alors, qui va aller reconduire l'enfant à
Saint-Laurent?
Elle demeure à Laval. Pourra-t-elle, premièrement, laisser
l'enfant à cette garderie en milieu de travail? Qui ira reconduire
l'enfant? Est-ce que le père qui travaille au centre-ville va devoir
faire le détour par Saint-Laurent tous les matins? Est-ce que les
parents vont devoir retirer l'enfant de la garderie en milieu de travail pour
l'inscrire en garderie en milieu de quartier et le réinscrire plus tard
en garderie de travail? Est-ce que tous ces changements sont acceptables pour
un enfant de cet âge, un enfant de trois ans, quatre ans, dont le
sentiment de sécurité est basé sur la stabilité du
milieu? Je pense que dans une politique familiale on devrait tout faire pour
que les enfants puissent avoir un milieu stable. La politique en matière
de garderie devrait dépendre d'une telle optique.
La question du transport, maintenant. Dans l'énoncé, on
dit que le transport est favorisé. Ce n'est pas du tout ça.
Peut-être qu'il y aura quelques minutes de moins de transport du fait que
le parent n'a pas à arrêter à la garderie parce que la
garderie est en milieu de travail. Même là, ce n'est pas
ça, car même certaines garderies en milieu de travail, par
exemple, celle d'Hydro-Québec, ne sont pas dans l'édifice
même; elles sont situées plus loin. Il faut que le parent fasse un
détour pour aller reconduire à la garderie qui se trouve à
être en milieu de quartier de l'entreprise. Cela devient très
compliqué.
Je continue. Il est clair que le transport qu'on croit faciliter dans
l'énoncé est celui qui se fait en automobile et certainement pas
celui qui se fait en transport en commun. Vous n'avez qu'à essayer une
fois le transport en commun à 17 heures avec un enfant fatigué.
Le transport en automobile n'est pas tellement facilité non plus. Il est
de beaucoup préférable pour le parent de faire un petit
détour dans le quartier pour aller reconduire ou rechercher l'enfant,
que de faire un très long trajet en automobile avec lui dans un contexte
souvent d'embouteillage et souvent pressé le matin et souvent
fatigué le soir.
Par ailleurs, la garderie en milieu de quartier permet au parent de
prendre quelques minutes de repos avant de venir chercher l'enfant le soir,
après le travail. Ça, c'est excellent. Il faut se dire que les
garderies de quartier ont des heures plus longues, en général,
que les garderies en milieu de travail et cela, ça coûte un peu
plus cher. Mais pour les parents, c'est excellent. Je passe à la page
11.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me le
permettez, je vous inviterais à conclure. Il reste deux minutes.
Mme VeilIet: Deux minutes. Je laisse la parole à
Pierre.
M. Bouchard: Merci. Pour conclure, au chapitre du
développement, il y a deux ou trois choses qu'on a trouvées
réellement regrettables. Premièrement, concernant
l'énoncé des besoins, on a essayé de fouiller un peu les
chiffres, entre autres, à Statistique Canada, et un peu dans d'autres
lectures, et on se rend compte que dans l'énoncé de politique on
minimise les besoins qu'ont les parents en matière de services de garde.
On croit que, là-dessus, il y aurait des recherches un peu plus
poussées à faire, entre autres, quand on parle du sondage.
J'aimerais savoir combien coûtait la garderie dans la question qu'on
posait et c'est clair que, là, les besoins en services de garde peuvent
varier beaucoup. Selon qu'on vous dise que c'est 500 $ ou 3500 $, la
réponse va sûrement changer. (14 heures)
Concernant le plan de développement, on s'inquiète
beaucoup. Dans les trois dernières années, le
développement n'a pas été très grand. Or, on
était dans une période de prospérité
économique. Là, on nous propose un plan qui va
aller de l'avant, mais qui, dans le fond, va Juste continuer ce qui
s'est fait depuis que les services de garde existent, c'est-à-dire
doubler à tous les cinq ans. Il n'y a donc pas là quelque chose
de réellement très neuf comme énoncé de
politique.
Concernant le service de garde en milieu scolaire, si on avait
réellement eu l'intention de favoriser ce service, je crois que,
lorsqu'on a adopté le projet de loi 107, on aurait pu inclure que,
lorsque dix parents demandent un service de garde dans une école, la
commission scolaire est obligée d'y pourvoir. Or, le projet de loi 107 a
été adopté et une telle mesure n'a pas été
incluse. On se demande, au-delà des bonnes volontés, quel moyen
le gouvernement va avoir pour atteindre son objectif, puisqu'au mois de
décembre il ne s'est pas donné les moyens de les atteindre.
En conclusion, on croit que cet énoncé ne répond
pas aux besoins profonds du Québec et, comme on l'a vu depuis le
début de la commission parlementaire, pour celles et ceux qui oeuvrent
dans ces milieux, ça n'y répond pas du tout. Dans la mesure
où on veut avoir une politique familiale et s'attaquer
sérieusement au problème de la dénatalité au
Québec, comme dans l'énoncé, tel qu'il est parti -
d'ailleurs, c'est un peu sous-entendu que ça ne bougera pas comme taux
de dénatalité - il est clair qu'on va rester comme on est
présentement. On trouve que ça ne répond pas aux besoins
qu'ont les parents et les enfants présentement au Québec.
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme Veillet et M. Bouchard. Je pense
que votre mémoire est conforme aux orientations qu'on retrouve dans le
projet du programme de votre parti, qui a été adopté, je
pense, en janvier dernier, qui dit: Un gouvernement du Parti
québécois s'engagera à prendre les mesures qui s'imposent
pour soutenir l'instauration et l'amélioration des garderies scolaires
fonctionnant aussi pendant un congé, des services dé garde en
milieu familial qui répondent mieux à la variété
des besoins et aux réalités régionales, les garderies en
entreprises et dans les regroupements de petites entreprises, des banques de
gardiennes pour les gens ayant un horaire de travail flexible, des services de
garde pour les travailleurs et les travailleuses saisonniers, de même que
des haltes-garderies pour les parents au foyer et des services de garde ou de
soutien pour les parents d'enfants handicapés.
On peut quand même retrouver des similitudes avec
l'énoncé de politique, mais aussi de profondes divergences. Avant
d'en arriver à la discussion comme telle ou aux questions que j'aurai
à vous poser, c'est peut-être bon de faire, par contre, un bref
retour sur l'histoire des services de garde. Là, je ne remonterai pas
aux années soixante ou soixante-dix, mais je pense, entre autres...
Selon ce qu'on nous a dit au cours de cette commission parlementaire, nous nous
rendons compte d'une chose: on nous demande un développement
accéléré. On nous demande aussi d'abaisser les ratios. On
nous demande de meilleures conditions de travail et on sait fort bien que cela
exige des coûts. Cela comporte des coûts énormes. J'avais
l'occasion de poser la question, à savoir: Est-ce que c'est
l'État qui doit assumer les coûts, est-ce que ce sont les parents,
est-ce que ce sont les deux, puisqu'on nous dit que les parents n'ont pas la
capacité de payer? Et je leur disais qu'on ne pouvait pas non plus
essayer de faire ce rattrapage de dix ans dans l'espace d'un an.
Je regardais, entre autres, la presse de 1980-1981. On disait: Les
garderies se meurent. Ce n'est pas d'aujourd'hui, c'est pour ça que le
rattrapage est très grand. Les garderies crient au secours. Des
conditions de travail minables pour les garderies d'aujourd'hui, en 1982. Je ne
voudrais pas passer à travers tout ça. Nécessité
d'une politique des services de garde. Et vous savez très bien
qu'à l'époque, en 1982 entre autres, Mme Marois avait
été mandatée pour élaborer une politique d'ensemble
des services de garde. En 1985, cette politique-là était
inexistante. Donc, nous avons beaucoup travaillé à cette
politique. C'est sûr qu'elle ne répond peut-être pas
à toutes les aspirations de la population ou du milieu parce qu'il y a
aussi, comme on l'a vu hier, de profondes différences entre certaines
philosophies. Mais ce qui est important pour nous, c'est de présenter un
projet.
C'est la première fois qu'on a un plan de développement
basé sur cinq ans. C'est la première fois qu'on a prévu
des budgets pour les trois prochaines années. C'est la première
fois qu'on indexe les formules, parce que vous savez que la majeure partie des
problèmes qui existent actuellement provient d'une non-indexation des
nombreuses subventions qui ont été accordées lors de
l'adoption de la loi. Donc, tout ça pour vous dire que, oui, ce n'est
peut-être pas suffisant, mais aussi il y a des coûts reliés
à ça. Il y a des choix que le gouvernement doit faire aussi. Et
c'est pour ça qu'hier on posait la question: Est-ce qu'il y a des
priorités qui sont un peu plus - malgré le pléonasme,
comme on le mentionnait - prioritaires? Mais je pense que, si on ne peut pas
véritablement se donner ces priorités-là, le gouvernement
devra trancher et faire ses choix comme il le fait maintenant.
Ceci étant dit, je voudrais passer aux principales questions
parce qu'il y a des choses qui sont importantes. Vous parlez beaucoup des
garderies à but lucratif et vous savez, entre autres, qu'aujourd'hui,
c'est la journée des garderies à but lucratif. Je voudrais
savoir: Est-ce qu'un gouvernement du Parti québécois imposerait
un moratoire comme on nous l'a demandé - on nous a parlé de
transformation - ou si carrément on dirait qu'il n'en est plus question,
c'est-à-dire que c'est la mort des
garderies à but lucratif?
On sait fort bien que, même si on parle de transformation, elle
n'est pas facile à faire. Quand on parle de transformation, on parie de
transfert d'actif, d'évaluation d'actif, d'achalandage; cela suppose
aussi que les administrateurs... Est-ce qu'ils vont exiger, par exemple, qu'on
assure leur emploi? Cela signifie presque complètement un
désengagement. Il faut qu'on s'en sorte. On a vécu d'autres
expériences de transfert de permis, parce qu'on ne peut pas vendre, mais
on peut transférer, et on se rend compte, finalement, que c'est beaucoup
de problèmes aussi, et il faut que ces administrateurs sortent
complètement et qu'une autre équipe entre pour administrer la
garderie. Selon vous, est-ce le moratoire, la transformation malgré
toute la difficulté ou faut-il dire carrément: On n'ouvre plus de
garderies à but lucratif?
M. Bouchard: Concernant les engagements, les orientations que
l'on va prendre, on n'a pas terminé nos études, mais je crois
que, selon les indications que vous venez de nous donner, ce sont effectivement
des options qu'on étudie présentement. Concernant les
transformations, malgré les difficultés que vous énoncez
et avec lesquelles je suis d'accord, c'est clair que c'est l'une des voies que
l'on regarde sérieusement. Une chose est certaine, dans un tel
énoncé et un tel plan, on voit, quant au développement, la
multiplication du nombre de places en garderie à but lucratif se
réaliser. Quand on voudra parier de transformation et qu'une
société voudra dire: "Oui, c'est important que les parents soient
responsables même au chapitre des garderies", lorsque ce choix collectif
sera fait, on n'aura que multiplié le problème face à ces
transformations et on se retrouvera devant une espèce de fait accompli,
et je pense que peu de gens le souhaitent présentement.
Un moratoire sûrement. En tout cas, c'est clair qu'on
n'encouragera pas ce genre de garderie. Vous n'avez qu'à regarder les
études faites à ce sujet. Danielle pourrait citer une
étude qui vous a été remise. Je pense que les
recommandations qui y étaient formulées n'ont pas
été retenues.
Mme Veillet: Oui, il s'agit du rapport Presser qui recommandait
de ne plus donner d'exonération financière aux parents et de ne
plus émettre de nouveaux permis. En ne donnant pas de nouveaux permis,
cela minimiserait au moins le problème. Il faudrait au moins
arrêter de développer de nouvelles places en garderies à
but lucratif, pour commencer.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous êtes conscients, par contre, que
si, justement, on l'avait prévu dans la loi en 1980 on n'aurait pas
multiplié - même si je sais que la députée de
Maisonneuve va me répondre: Oui, mais vous auriez pu modifier la loi
depuis les trois dernières années et on aurait pu vous aider...
Mais, malgré ça, c'est quand même de 1980 à 1985 et
au cours des cinq dernières années aussi. Je ne veux pas non plus
blâmer la députée de Maisonneuve. C'est peut-être un
oubli qu'on avait fait à l'époque aussi. Remarquez, je pense
qu'on adopte des lois, mais que souvent, aussi, on ne pense pas toujours
à leur application comme telle.
Je voudrais aussi revenir à la formule de financement. Non
seulement vous le semblez, mais je pense que vous êtes en
désaccord avec la formule de financement proposée. En même
temps, vous n'adoptez pas une position dans laquelle le gouvernement acquitte
seul la totalité. Tout à l'heure, je vous ai dit que des groupes
et même des syndicats sont venus nous dire que les parents n'ont plus la
capacité de payer. On le dit tellement que je commence à me
demander si c'est vrai ou si on ne fait pas croire aux parents qu'on en est
rendus à ce point. On nous dit qu'on n'a plus la capacité de
payer, qu'il y a seulement l'État qui devrait assumer le
développement accéléré, les meilleures conditions
de travail, la baisse du ratio, etc. Cela ne semble pas être votre
position. Vous semblez quand même être davantage en faveur d'un
partage. Dans ce sens, quelle serait pour vous la proportion qui devrait
exister entre le gouvernement et les parents? Par exemple, est-ce que ça
devrait être 50-50, 60 % gouvernement et 40 %? Avez-vous une idée
de la proportion, finalement?
Mme Veillet: Le mouvement des garderies a beaucoup
évolué sur ce point de vue. Je pense qu'on ne peut
déterminer un pourcentage tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas
étudié la manière de financer les garderies.
Nous sommes vraiment contre le financement à 45 % et
l'exonération financière à 40 %. Le pourcentage des
revenus de garde en garderie va certainement amener une hausse des tarifs. Le
pourcentage de 40 % de l'exonération financière va aussi amener
des hausses de tarifs. Comme je vous le disais, c'est là qu'on en
est.
Mais déterminer à ce point-ci quels pourcentages le Parti
québécois va favoriser... Je peux vous dire que le pourcentage
que les regroupements favorisent, c'est 80-20. Je pense qu'il faut aller de
plus en plus vers une implication de l'État. J'ai l'impression qu'on va
revivre la même chose que l'histoire des écoles finalement. On va
vivre le même genre d'histoire que les écoles.
Mme Gagnon-Tremblay: Mme Veillet, tout à l'heure, je vous
disais que ça prenait un développement
accéléré. Vous-même, vous dites qu'on ne
développe pas encore suffisamment pour répondre à tous les
besoins, et nous en sommes fort conscients. Vous parlez aussi d'abaisser les
ratios, d'avoir de meilleures conditions de travail. Par contre, vous dites:
Nous pensons que ça devrait être absorbé - peut-être
dans des proportions très différentes - et par l'État
et
par les parents. Donc, Inévitablement, ça suppose des
augmentations des tarifs pour payer ces services qu'on va donner.
M. Bouchard: Sur cette question, je crois qu'on s'entend assez
bien pour dire que les parents sont rendus au seuil maximal qu'ils peuvent
fournir. Tout le développement, très majoritairement; va devoir
reposer sur l'assiette de tous les citoyens et citoyennes, celle qui est
confiée au gouvernement pour l'administration. Placé à
l'intérieur d'une politique familiale, je crois que le coût'
à débourser pour nos enfants devra de plus en plus être
partagé entre tous dans la société.
Je suis célibataire; je n'ai pas d'enfant. Il y a quelque chose
d'inacceptable quelque part du fait que je ne participé pas plus
à l'éducation et à la prise en charge des enfants qu'on a
au Québec.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui signifie que vous sériez
prêt à payer plus d'impôt pour pouvoir le faire.
M. Bouchard: Je crois qu'il va falloir aller vers cela, dans la
mesure où, comme peuple, on va décider de se prendre en main et
de régler ces questions de politique familiale et de
dénalité:
Mme Gagnon-Tremblay: Mais je reviens à...
M. Bouchard: II va falloir avoir le courage politique pour faire
un virement au-delà de quelques ajustements. En fin de compte, si je
regarde l'énoncé, il ne change pas le monde.
Mme Gagnon-Tremblay: Je reviens à ma question
première. Vous dites que le développement doit être
assumé par l'ensemble. Il y a beaucoup de choses qui sont
déjà assumées par l'ensemble de la population; je pense
que même les parents qui paient les frais de garderie sont
également' des contribuables. Mais' je reviens à la question en
ce qui concerne l'amélioration des conditions de travail, la baisse du
ratio. Tout à l'heure, vous avez dit que ça devrait être
partagé. On ne sait pas encore dans quelle proportion. Par contre, vous
me dites que les parents n'ont plus la capacité de payer.
Finalement; vous en arrivez à un cul-de-sac. C'est l'État,
ce sont les parents ou ce sont les deux et, si ce sont les deux, ça
suppose une augmentation de tarifs dans certains cas.
Mme Veillet: Bien oui. Cela suppose une augmentation des tarifs,
laquelle est toujours étudiée dans chaque garderie, chaque
année. Bien sûr qu'il va y avoir des augmentations de tarifs, mais
le pourcentage que l'Etat doit payer sur cette augmentation est à
déterminer. Et iI y a l'inflation; ll y a aussi les piètres
conditions de travail des travailleuses en garderie. Pendant les douze
années où j'ai travaillé, je me suis appauvrie par rapport
à l'inflation. Mon salaire remontait un peu, mais jamais au taux de
l'inflation. (14 il 15 )
Finalement, c'est toujours le dilemme entre les parents et les
travailleurs.
M. Bouchard: C'est clair que pour l'amélioration des
conditions de travail, les travailleuses et travailleurs dans les milieux de
garderie ne pourront pas compter sur des hausses de la participation des
parents présentement. L'effort qu'il faudrait mettre là-dedans
est tellement grand et, considérant l'opinion que nous avons
émise tantôt selon laquelle les parents ont atteint le seuit de
tolérance là-dedans au-delà des coûts marginaux, des
tarifs qui pourraient augmenter d'une façon marginale autour du taux de
l'inflation, le gouvernement doit faire un grand virage sur cette question.
Mme Gagnon-Tremblay: Justement, comme on en fait un grand, c'est
peut-être ce qui dérange actuellement. C'est ce qui semble
être insécurisant pour les gens. Justement, je pense que c'est
cela, on fait le virage actuellement. Tout à l'heure, quand vous
parliez, je disais qu'inévitablement, cela supposait des hausses de
tarifs. On attribue à la formule que le gouvernement suggère
actuellement une hausse des tarifs alors que, nous, nous faisons la
démonstration qu'inévitablement il y aura hausse des tarifs si on
veut se donner ces meilleurs services. Par contre, concernant cette hausse de
tarifs, notre formule est faite en fonction d'aider inévitablement cette
hausse de tarifs, d'une part, et en fonction d'aider davantage les parents qui
n'ont pas les moyens d'absorber cette hausse de tarifs. II ne faut jamais
dissocier les deux et c'est fait en fonction de ça.
M. Bouchard: Du fait que l'on doive dissocier les deux - je
m'excuse - ce que la politique fait, c'est qu'elle laisse la pression au milieu
concernant l'amélioration des conditions de travail des gens en
considérant que la contribution du gouvernement va être
liée directement, proportionnellement à la contribution que vont
faire les parents. C'est sur le dos de ces parents qui administrent, qui
gèrent des garderies, qu'on met le poids de l'amélioration des
conditions de travail des travailleuses et des travailleurs. C'est cela qu'on
trouve inacceptable. Le gouvernement se désengage, renvoie cette
responsabilité et, si une garderie veut et doit augmenter ses revenus,
le seul canal qui lui reste est celui d'augmenter les tarifs pour que la
subvention du gouvernement soit augmentée, à moins qu'elle ne
puisse obtenir une subvention d'une entreprise.
Mme Gagnon-Tremblay: Sur quoi vous basez-vous pour dire que le
gouvernement s'engage?
M. Bouchard: Tandis qu'autrefois - Je m'excuse, juste en
terminant - on pouvait compter sur le gouvernement qui passe du tarif de 2,50 $
à 3,50 $ jusqu'à 4,50 $ présentement, sans que les parents
aient à assumer une augmentation des tarifs.
Régulièrement, il y a eu de ces hausses.
Mme Gagnon-Tremblay: Le parent assumait davantage parce que la
subvention était fixe. Alors, chaque fois qu'il y avait une augmentation
des tarifs, le gouvernement n'injectait rien.
M. Bouchard: Mais, parfois, II n'y avait que le gouvernement qui
Injectait de l'argent, alors que les parents eux-mêmes n'avaient pas
augmenté leur participation.
Mme Gagnon-Tremblay: Je voudrais peut-être revenir... Hier,
des groupes, telles la CSN et la CEQ, revendiquaient un réseau de
garderies universel, accessible et gratuit. J'aimerais, c'est sûr que...
Je donnais suite en disant, par exemple, après nos calculs, que cela
pouvait représenter tout près de 2 000 000 000 $, au cours des
six prochaines années, d'ici à 1995, entre autres. Je sais que la
députée de Maisonneuve a semblé avoir un silence
approbateur. Elle n'a dit ni oui, ni non ou quoi que ce soit, êtes-vous
d'accord avec cette formule et croyez-vous qu'on pourrait défendre cette
position à l'intérieur de vos instances?
Mme Veillet: À long terme.
M. Bouchard: À long terme, oui, mais sûrement pas
demain matin.
Mme Gagnon-Tremblay: À long terme, cela veut dire
quoi?
M. Bouchard: Que ce soit un objectif lointain souhaitable,
certes, mais lointain. Je peux vous le dire, on ne prendra pas ce genre
d'engagement lors de la prochaine campagne électorale, mais on va tout
faire pour y tendre, par ailleurs.
Mme Gagnon-Tremblay: À long terme, cela veut dire quoi? Un
prochain mandat, dans deux mandats?
M. Bouchard: Cela, aucune idée. Mme Gagnon-Tremblay: Le
prochain? Mme Harel: Le prochain?
Mme Gagnon-Tremblay: Ah! je suis contente...
Mme Harel: Est-ce que vous pensez qu'on sera le prochain parti au
pouvoir?
Mme Gagnon-Tremblay: Je suis contente, parce que la
députée de Maisonneuve semble être d'accord, et plus
rapidement, peut-être, qu'on ne le croyait.
Mme Harel: Laissez-moi parier pour moi-même; ne
m'interprétez pas trop.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord.
M. Bouchard: Les engagements électoraux, on ne les fera
pas ici.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vais passer à la question de la
réglementation. Là aussi, il y a eu beaucoup de questionnement
sur la réglementation. Certains groupes sont venus nous dire qu'il faut
renforcer davantage la réglementation pour tout ce qui touche le milieu
familial, pour -d'autres types aussi, mais je parle surtout du milieu familial,
puisque c'est le milieu, maintenant, qui est régi, alors que les haltes
et les jardins ne le sont pas encore.
Compte tenu que vous vous dites favorables à ce type de services
- en somme, vous semblez quand même favorables à ce type de
services - quelle est votre opinion sur le renforcement de la
réglementation en milieu familial?
Mme Veillet: Oui, on est tout à fait d'accord avec le
renforcement de cette réglementation. La garderie en milieu familial
peut répondre à certains besoins, mais elle ne devrait pas aller
en bas d'un certain niveau de qualité. Il n'y a aucune
réglementation concernant la grandeur de l'appartement ou de la maison
de la personne qui garde, iI y a une petite cour, s'il y a un endroit pour
jouer, ce genre de choses. Je pense que ce sont des choses qui devraient
être réglementées.
Mme Gagnon-Tremblay: Autant que l'autre ou... Non?
Mme Veillet: Je ne peux pas vous dire. Mme Gagnon-Tremblay:
Merci, madame.
Mme Veillet: Mais ce sont des choses qui doivent être
réglementées.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux saluer le
président de Montréal-Centre et la présidente de Mercier
qui l'accompagne. J'ai déjà occupé la fonction que vous
occupez, M. Bouchard, pendant bien des années, et je veux vous
féliciter pour l'implication que la région a dans le dossier et
vous dire que votre point de vue
est pris en considération aussi par le parti et par la critique
de l'Opposition en matière de politique familiale et de condition
féminine. Nous aurons l'occasion de poursuivre nos travaux pour
présenter des engagements à la population.
Tantôt, la ministre a parlé d'un grand virage. "Le grand
virage de mon énoncé", a-t-elle dit. Ce grand virage consiste en
une méthode de calcul. Au fond, le grand virage, c'est la formule de
calcul. C'est bien la première fois depuis huit ans que l'entends dire
qu'un grand virage, au gouvernement, c'est une manière de calculer
plutôt que la somme qu'on met dedans. En définitive, depuis le
début, elle dit: Je fais ce que je peux avec ce qu'on me donne. On ne
m'en donne pas plus, alors je ne peux pas en faire plus.
Et qu'est-ce qu'on lui donne? Je pense que c'est cela qui est
intéressant. Cette année, on lui donne 43 000 000 $. Mais, en
fait, des 43 000 000 $, il y en a 5 000 000 $ qui viennent de son gouvernement
et 38 000 000 $ qui sont donnés par la nouvelle
générosité du gouvernement d'Ottawa. Les 5 000 000 $ qui
viennent de son gouvernement vont aller à la garde en milieu scolaire.
En ce qui concerne la contribution propre de son gouvernement - vous savez,
c'est comme quand on paie un loyer à deux, il y a l'argent qui vient de
l'un et l'argent qui vient de l'autre, et ce n'est pas parce qu'un mois l'autre
paie au complet qu'on est dispensé de payer sa part le mois suivant - la
part que le gouvernement du Québec va mettre dans l'Office des services
de garde à l'enfance pour 1989 est la même que pour 1988.
La ministre est Incorrigible. Elle est incorrigible parce qu'elle
reprend encore l'idée qu'il faut qu'elle fasse du rattrapage depuis dix
ans. Vraiment, elle ne peut pas faire cela en un an. Il faut qu'elle fasse du
rattrapage depuis dix ans. Il est évident que si elle mettait - ce ne
serait pas assez, mais ce serait déjà pas si mal - pour 1989,
simplement la part que le gouvernement précédent a mis chaque
année, ce serait déjà quelques millions de plus. Alors,
nous lui demandons, comme rattrapage, pour son budget de 1989, de se rattraper
sur les montants des années passées.
En termes pratiques, tout cela se chiffre. Ce n'est pas magique, ce que
je dis. Il y a eu des tableaux. Le tableau a révélé que le
gouvernement du Québec, pour l'Office des service de garde à
l'enfance, va diminuer en 1989 sa subvention de 4 % par rapport à 1988
et que, pour les années 1983, 1984 et 1985, l'augmentation annuelle du
gouvernement précédent a été autour de 17 %,
c'est-à-dire ce qu'il mettait de plus chaque année. Même si
c'était insuffisant, même s'il y avait des manchettes dans les
journaux, c'était quand même 17 %.
La ministre dit: On n'avait pas d'énoncé. Là, ces
gens ont un énoncé et ils ne mettent pas d'argent. Auparavant,
ils n'avaient peut-être pas d'énoncé, mais ils avaient plus
d'argent. Depuis trois ans qu'on est en attente d'un énoncé, le
budget supplémentaire était de 7,5 %. Et maintenant qu'on a la
chance d'avoir un énoncé, pour les trois prochaines
années, ils vont revenir à un budget d'une moyenne de 7 %.
Qu'est-ce que ce serait s'il n'y avait pas d'énoncé?
D'après moi, ils commenceraient à baisser. Ce n'est pas
caricatural.
Dans votre mémoire, il y a des chiffres que je n'avais pas
constatés et que je retrouve à la page 13. Vous n'en avez pas
parlé et, pourtant, ils sont importants. Ce sont les nouvelles places
créées. Vous nous rappelez qu'avec la belle assurance qui la
caractérise la ministre a justement un énoncé qui dit
qu'elle entend doubler les places d'ici à cinq ans. En 1989, le nombre
de places créées sera moindre que ce qu'il y a été
en 1981, en 1982, en 1985 et en 1986. Une chance qu'on a
l'énoncé! Si cela n'avait pas été de
l'énoncé, on aurait commencé à baisser.
Les chiffres sont là: en 1989, 5141 places; en 1981, il y en
avait eu 6903, en 1982, 6246, en 1985, 5496 et en 1986, 8925 - c'était
l'année qui terminait le mandat du dernier gouvernement. Ce sont
là des chiffres intéressants. Il y en a un autre à la
même page de votre mémoire qui nous explique pourquoi il est
urgent d'avoir des idées claires sur la question des garderies à
but lucratif. Vous nous rappelez que "pour la première fois de
l'histoire des services de garde - je vous cite - les garderies sans but
lucratif ont eu un développement moindre, 1175 places, que les garderies
à but lucratif, 1596 places." Vous dites: "Si c'est ça l'objectif
pour un meilleur équilibre, nous tenons à souligner que nous
allons nous y opposer fortement."
La grande question, évidemment, est celle des garderies à
but lucratif. La ministre me dit, depuis le début de la commission,
qu'il n'y a pas de disposition dans la loi qui lui permette de décider
d'accorder ou non un permis, que dès qu'il est demandé, si
ça correspond au règlement, elle est obligée de le
délivrer. Mais, dans son énoncé, elle ne propose pas de se
donner un pouvoir législatif pour accorder ou non un permis. Ce qu'elle
dit, c'est qu'elle veut une planification régionale où tout le
monde va être mis sur le même pied. La notion
d'intérêt public... Je ne sache pas que la ministre entend faire
en sorte de légiférer parce que si c'est son intention, on le lui
dit tout de suite, qu'elle le fasse dès l'ouverture de la session. Cela
fait 50 fois qu'elle répète, parce qu'elle a un double discours,
selon à qui elle s'adresse... Aux garderies à but lucratif, elle
dit: Je vais regarder ça. Aux garderies à but non lucratif, elle
leur dit: Je n'ai pas le pouvoir de resserrer, mais je vais me le donner.
Alors, il va falloir qu'elle clarifie sa position.
Ce que je veux, c'est que les gens s'assoient sur une chaise -
excusez-moi - les deux fesses sur la même chaise. Je pense que c'est la
meilleure façon de gérer des fonds publics dans une
société. Le développement des services de
garde est trop important pour avoir un double discours,
selon les gens qui sont dans la salle.
Vous êtes de Mercier, vous avez à peine
ébauché la question des enfants de familles immigrantes.
J'aimerais vous entendre là-dessus. Vous dites que ce n'est pas une
tradition, dans le milieu des communautés culturelles, que les parents
participent à la gestion. Comme cette présence est de plus en
plus importante... À Montréal, on dit que bientôt presque
40 % des enfants dans les écoles proviendront de familles immigrantes.
Cela va se refléter sur les services de garde. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Veillet: Bien, dans les garderies que j'ai connues,
l'intégration des parents immigrants est un peu difficile. Il y a des
problèmes de langue et aussi des problèmes de culture. Cela fait
que les parents n'osent pas s'intégrer dans la gestion de la garderie.
Il faut aller les chercher et les intégrer. Aussi, d'après ce que
j'ai pu voir dans les statistiques, les parents immigrants vont beaucoup vers
les garderies à but lucratif. Alors, je pense qu'il faut se poser des
questions. Il n'y avait pas énormément de parents venant des
communautés dans les garderies où j'ai travaillé, mais
ceux que j'ai connus ont toujours été un peu difficiles à
intégrer. Il faut toujours aller les chercher. C'est une question de
confiance et d'adaptation.
Mme Harel: C'est vraiment une dimension qui est presque absente
de notre réflexion. Je pense bien que c'est la première fois ou
presque qu'on l'aborde devant la commission. Pourtant, on sait, avec les taux
de natalité, que les familles allophones sont celles qui font le plus de
bébés. Elles ont le taux de 1,8 qu'on aimerait bien avoir, des
mesures familiales généreuses qu'on n'a pas mais qu'on aimerait
se donner; nous, nous sommes à 1,4. Donc, il y a une présence
accrue d'enfants de familles immigrantes. Comment se fait-il qu'on ne les
retrouve pas? Est-ce à cause du mode de financement? Maintenant, les
parents immigrants qui suivent des cours dans un COFI ont directement
l'allocation; ils peuvent choisir le mode qu'ils veulent, ils n'ont pas
à aller dans un mode financé par l'État. Est-ce que c'est
à cause de ça? Est-ce que c'est parce qu'il y a aussi la famille
élargie qui existe encore, ce qui fait qu'ils ont recours aux services
de la parenté? (14h30)
Mme Veillet: C'est sans doute ça. Il y a des garderies
où il y a de grosses populations de parents immigrants comme dans
Saint-Michel. Je pense que, là, il y a une réputation de bouche
à oreille qui se fait. Le parent immigrant qui est là... Il y a
déjà une communauté alors on va aller chercher... Si les
parents immigrants utilisent déjà les garderies à but
lucratif, ils les connaissent, ils vont amener les gens qu'ils connaissent
à ces garderies-là. Si on prend la garderie Saint-Michel
où il y a beaucoup d'enfants haïtiens, ceux-ci vont certainement
aller chercher les gens de la communauté haïtienne.
J'aimerais mentionner quelque chose qui est un peu à
côté de la question mais quand même, j'ai pu constater que
les parents Immigrants ne connaissent pas l'extérieur de la ville de
Montréal. Ils ne vont pas du tout à l'extérieur. Ils ne
prennent pas de vacances. Ce sont vraiment des situations très
difficiles pour les enfants. Et, à la garderie Saint-Michel, on
organisait des camps, beaucoup de sorties pour que les parents puissent
s'adapter. Je pense qu'il faut vraiment donner des services: par exemple,
peut-être des cours de langues qui pourraient être donnés le
soir dans les garderies mêmes. Ce sont des possibilités. On
rejoindrait directement les parents.
Mme Harel: Moi aussi, je réfléchis tout au long de
cette commission parce qu'on n'a pas d'idées toutes faites
nécessairement. En vous écoutant, je me disais qu'il faut
élargir... Ce n'est pas vrai que c'est juste un face à face
parents-gouvernement. Dans le fond, c'est une trilogie. Il y a les
employés aussi. C'est-à-dire que, finalement, le coût est
supporté soit par lès parents, soit par le gouvernement, soit par
les employés. Parce qu'il y a un prix à payer pour un service de
garde. Selon les études qu'on a pu voir devant la commission, ça
oscillait entre 30 $ et 35 $ par jour. Donc, si le parent en pale une portion
et le gouvernement une portion, c'est parce que dans le fond, ce n'est pas dit,
mais c'est sur les épaules des employés que repose l'autre
portion du service que la société donne en salaires non
payés.
M. Bouchard: Un peu comme les femmes l'ont fait dans notre
histoire.
Mme Veillet: Et, dans les garderies à but lucratif, je
dirais que les travailleurs paient le choix de gestion des
propriétaires. C'est vrai que c'est parce qu'il y a 4,50 $ de moins par
jour que les salaires sont plus bas. Mais ce sont les propriétaires qui
décident de ce style de gestion. Ce sont les propriétaires qui
décident de ne pas Impliquer les parents. Alors, ce sont les
travailleurs, les éducateurs et les éducatrices qui paient.
Mme Harel: Mais admettons qu'il devrait y avoir peut-être
une politique gouvernementale associée à ces trois dimensions,
c'est-à-dire que l'État dise: Voilà quel serait le salaire
minimum qui devrait être payé dans lés garderies,
voilà quelle est la contribution maximale qu'on serait en mesure
d'attendre des parents suivant leurs revenus et voilà que nous allons
devoir assumer la différence.
Évidemment, cela a l'air simple, mais ce n'est pas
comme ça. Vous seriez surpris, en vous promenant dans le parlement, cela
se discute beaucoup. J'entendais hier un député
ministériel
qui expliquait à des collègues de son comté qui
étalent venus dîner avec lui que dans le fond, l'État
faisait déjà beaucoup trop et que, quand les deux parents
travaillaient, ils devaient en porter les conséquences et payer le prix
de la garde. C'est là une opinion qui circule beaucoup
présentement.
Dans votre mémoire... C'est la première fois que je voyais
aussi - je trouve que ça va être utile - la liste des
différents besoins. On retrouve ça à la page 3. Vous nous
faites la liste des besoins pas en fonction des services qui existent, parce
que souvent on va reprendre ce qu'on connaît de services qui existent:
garde en milieu familial, haltes-garderies, gardiennage à la maison,
garderies, etc., et on va dire que ce sont les besoins. Tandis que, là,
vous nous faites la liste. Elle est bien plus impressionnante que les services
qu'il y a maintenant.
Vous nous dites qu'il faut de la garde à temps plein, à
temps partiel, de soir ou de nuit, régulière ou occasionnelle, de
longue durée. Surtout, j'imagine que pour de plus en plus de femmes - je
pense à celles qui vont aller travailler à la STCUM ou à
la police de Montréal - les heures de travail ne seront plus le neuf
à cinq du bureau. Vous mentionnez le préscolaire et le
postscolaire, les jours de congé d'école et la saison
d'été et, là, vous dénombrez finalement toutes les
occasions qui donnent lieu à des besoins de garde. On se rend compte
que, dans une politique de la petite enfance, si on voulait répondre
adéquatement aux besoins de garde, comme vous nous le signalez, on ne
viserait pas que les besoins de garde régulière pour les
mères qui travaillent à des heures régulières. Je
ne sais pas si vous voulez intervenir à ce sujet.
Mme Veillet: Je trouve que le gouvernement perd beaucoup de temps
à discuter des garderies en milieu de travail, des garderies de
quartier, des garderies à but lucratif et des garderies sans but
lucratif. Je pense qu'il faut faire des choix pour justement pouvoir passer aux
différents types de garde et voir quels sont les meilleurs moyens de les
satisfaire. Je pense qu'il faudrait commencer à un moment donné.
Le mouvement des garderies a vraiment commencé durant les années
soixante-dix, en 1970-1972. On sait ce qui en est présentement On
connaît la valeur d'une bonne garderie, on sait ce qu'elle peut apporter
aux enfants, aux parents et ce qu'elle peut apporter en milieu
défavorisé. Il faut régler la question du style de gestion
et, après, passer aux vrais choix de garde. Il faudra qu'on cesse, un
jour, de discuter de garderies à but lucratif et qu'on parle des vraies
choses.
Mme Harel: Vous dites: Le sentiment de sécurité de
l'enfant est basé sur la stabilité du milieu.
Mme Veillet: Ah oui! Certainement.
Mme Harel: C'est un autre élément souvent
amené devant la commission, lié à la stabilité et
lié aussi à la relation que les parents entretiennent avec les
éducateurs.
Mme Veillet: Oui.
Mme Harel: Je ne suis vraiment pas douée pour toutes ces
questions-là. Je me suis spécialisée dans autre chose que
la pédagogie ou l'éducation, mais un bon nombre d'intervenants
nous ont dit: C'est la relation visible que l'enfant constate entre
l'éducateur - non pas entre le coordonnateur, le directeur ou le
propriétaire - et le parent qui le rassure...
Mme Veillet: Oui, c'est ça. La sécurité. Mme
Harel: ...qui crée la sécurité.
Mme Veillet: Oui. C'est pour ça que cette relation est
très importante et l'enfant doit la voir, la constater. Je suis
allée souper chez des parents; j'ai amené mon groupe. On a
toujours établi des relations comme celles-là, de sorte que
l'enfant sent qu'il y a une vraie vie là, une vraie relation. Par
contre, j'ai entendu parler de garderies à but lucratif où la
directrice avait dit à ses travailleuses: S'il y a un problème,
vous nous téléphonez, vous ne téléphonez pas aux
parents; je ne veux pas que vous parliez aux parents le soir et que vous leur
disiez qu'il y a eu tel problème; c'est moi qui vais le leur dire. Ce
genre de choses ne devrait pas exister. Les enfants ne devraient pas vivre de
telles choses.
Les parents ont tellement besoin des garderies qu'ils acceptent des
choses. En plus, un parent n'ose pas faire de plaintes par peur, parce que
c'est son enfant qui est là. J'ai entendu des choses comme ça.
J'en ai entendu de tous les genres au sujet des garderies à but
lucratif. Je peux vous dire que, dans une garderie, la sécurité
de l'enfant est vraiment basée sur la relation du parent avec
l'éducatrice. Le parent doit arriver un peu plus tôt le soir pour
passer un peu de temps avec l'enfant; II doit venir à des fêtes;
le matin, il doit aussi arriver tôt pour ne pas lancer l'enfant comme
ça en lui disant: Vas-y! Il faut que le parent soit là et qu'il
parle un peu avec l'éducatrice pour lui dire ce que l'enfant a
vécu. Il faut que l'éducateur sache si l'enfant vient d'avoir un
petit frère ou une petite soeur, ce genre de choses-là. Il faut
que les éducateurs et les parents se parlent. Ils ont beaucoup de choses
à se dire.
Mme Harel: II faut, en définitive, que le milieu suscite
l'intégration du parent à la vie de la garderie.
Mme Veillet: Certainement. Les parents se parlent entre eux aussi
et cela crée un milieu très vivant et très
sécurisant pour les enfants.
M. Bouchard: En complément...
Le Président (M. Doyon): Et surtout en conclusion,
étant donné qu'il reste un peu moins d'une minute.
M. Bouchard: D'accord. En complément concernant les
garderies à but lucratif, je crois que les travailleurs et les
travailleuses dans ces garderies auraient ce réflexe. Bien souvent,
c'est l'atmosphère générale qui peut être
créée qui ne les autorise pas, d'une certaine façon,
à aller dans ce sens-là. D'ailleurs, on n'a qu'à regarder
dans les statistiques le taux de roulement du personnel, l'insatisfaction de
plusieurs à y travailler et le nombre de plaintes qu'ils
reçoivent.
Pour conclure, je crois que le gouvernement devrait
clairement faire son choix concernant le type de garderies que l'on veut
encourager au Québec - cela devrait être les garderies sans but
lucratif gérées sous contrôle des parents - et qu'on mette
l'argent nécessaire pour créer le nombre de places suffisantes et
baisser la pression financière faite aux parents qui ont fait le choix
d'avoir des enfants.
Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Je veux simplement vous remercier de vous être
déplacés et d'être venus présenter votre point de
vue à la commission.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Je trouve injuste de la part de Mme la
députée de Maisonneuve, lorsqu'elle parle de chiffres, de parler
uniquement...
Mme Harel: M. le Président, c'est en conclusion au groupe
que nous venons d'entendre.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est en conclusion... Mme la
députée de Maisonneuve, c'est en conclusion que j'interviens.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre a la parole. Mme
la ministre.
Mme Harel: Si elle veut une réplique... M. le
Président, Mme la ministre a le droit de conclure et non celui de
répliquer.
Le Président (M. Doyon): Un instant!
Mme Gagnon-Tremblay: II y a 500 000 000 $ au cours des trois
prochaines années, alors on ne peut pas parler uniquement de cette
année.
Lorsque je parlais de virage tout à l'heure - on
peut l'appeler grand virage ou changement de cap - c'est au-delà de la
formule de financement. Je parle de planification, par exemple de planification
régionale dans laquelle . on impliquera le milieu. Cela va aussi
impliquer des modifications législatives. C'est inévitable,
lorsqu'on parle de planification régionale...
Mme Harel: Franchement, M. le Président, je vais vous
demander...
Le Président (M. Doyon): Un instant, Mme la
députée de...
Mme Harel: ...d'inviter Mme la ministre à conclure.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre a le choix de sa
conclusion. C'est sa conclusion, et elle conclut à sa façon.
Mme Harel: Non. Sa conclusion n'est pas dans son temps de parole.
Ce sont des remerciements.
Le Président (M. Doyon): Elle conclut à sa
façon. Vous n'avez pas la parole, Mme la députée. Mme la
ministre a la parole.
Mme Harel: Pour remercier.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre a la parole.
Continuez, Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Alors, on peut aussi discuter de la question
des places. En somme, on veut diversifier le nombre de places. Finalement,
c'est beaucoup plus que juste une formule. De toute façon, je ne
voudrais pas mettre en colère la députée de Maisonneuve
parce que, jusqu'à maintenant, on s'est bien entendu au cours de cette
commission parlementaire.
Je tiens à vous remercier. Il me fait plaisir
d'avoir eu votre opinion à cette commission parlementaire sur les
services de garde.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Mme Harel: M. le Président, j'aimerais que vous soyez
remplacé, s'il vous plaît.
Le Président (M. Doyon): Je vous remercie.
Mme Harel: Je ne donne pas mon consentement.
Le Président (M. Doyon): Vous êtes remerciés
maintenant et j'invite le groupe suivant à se présenter à
la table des invités. Merci de votre présentation. Nous recevons
le groupe de l'Association des propriétaires de garderies du
Québec.
Alors, je souhaite la bienvenue à l'Association des
propriétaires de garderies du Québec inc. Je lui demande de
prendre place. La per-
sonne en charge du groupe pourrait, premièrement, s'identifier
et, deuxièmement, faire la présentation de façon qu'on
sache à qui on a affaire. Je vous demanderais de vous identifier chaque
fois que vous avez à prendre la parole, s'il vous plaît, pour
faciliter la transcription de nos débats.
Association des propriétaires de garderies du Québec
Inc.
M. Boucher: Merci, M. le Président. Mon nom est Jean-Carot
Boucher. Je suis le conseiller Juridique et porte-parole de l'Association des
propriétaires de garderies du Québec Inc. Je suis
accompagné cet après-midi des membres de l'exécutif de
l'association qui sont, à ma droite immédiate, Mme Denise
Normandin, présidente de l'association; à mon extrême
droite, Mme Hu-guette Bacon, vice-présidente de l'association; à
ma gauche Immédiate, Mme Bambina Gagliardi, secrétaire de
l'association; à mon extrême gauche, Mme Thérèse
Tardif et, à ses côtés, Mme Gemma Morin, qui sont membres
du conseil d'administration.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Les
identifications étant faites, vous pouvez procéder.
M. Boucher: M. le Président, Mme la ministre, Mme la
présidente de l'Office des services de garde à l'enfance, Mme la
représentante de l'Opposition, au nom des propriétaires de
garderies du Québec, j'aimerais cet après-midi procéder
à un échange de vues, concernant l'énoncé de
politique du gouvernement présenté en décembre
dernier.
Cet énoncé de politique s'intitule "Pour un meilleur
équilibre" et nous nous sommes hasardés à présenter
nous-mêmes un mémoire qui s'intitule "Pour un véritable
équilibre en matière de services de garde à l'enfance".
Notre présence cet après-midi s'Inscrit dans l'optique d'un
dialogue que nous espérons franc et ouvert avec le gouvernement pour
rechercher vraiment un meilleur équilibre dans le domaine des garderies
de Jour, mais, s'il y avait lieu, exempt de préjugés, exempt
d'affirmations gratuites et exempt également d'accusations de gauche ou
de droite et dont les fondements sont inexistants ou, à tout le moins,
douteux. (14 h 45)
Qui sommes-nous, essentiellement? L'association est Incorporée
depuis 1972, en vertu de la troisième partie de la Loi sur les
compagnies du Québec. Alors, nous sommes une association à but
non lucratif formée de membres ayant des statuts juridiques très
divers et je vous demanderais de bien vouloir noter que nous ne sommes pas un
groupe de garderies à but lucratif. Nous avons, parmi nos membres, des
garderies à but lucratif, mais iI y a également des garderies
à but non lucratif sans conseil majoritaire de parents et iI y a
également des garderies dont le statut est celui d'une
société enregistrée à propriétaire unique.
Alors, je pense qu'on doit par honnêteté intellectuelle ne pas
qualifier le groupe de garderies à but lucratif, parce que ce serait
dénaturer le sens de ce que nous représentons.
Je voudrais féliciter les auteurs du rapport à cet effet,
car je pense qu'ils ont trouvé le terme Juste en différenciant
l'élément principal qui caractérise les deux grands
groupes de garderies, à savoir le fait d'être gérées
ou non gérées par un conseil majoritaire de parents. C'est
vraiment l'élément fondamental, selon nous.
Sur le plan des statistiques, nous référant à
l'énoncé de politique même et aux différents
rapports de l'Office de services de garde à l'enfance, nous
représentons 32 % de l'ensemble des services de garde en garderie et 28
% de l'ensemble des places en garderie au Québec. Lorsque nous regardons
la distribution de l'aide financière du gouvernement, nous constatons
que, si nous représentons en moyenne 30 % de l'ensemble des places ou du
nombre de garderies au Québec, nous ne recevrons que 6 % de l'aide
financière selon la proposition formulée par le gouvernement,
alors qu'actuellement nous ne recevons aucune aide financière directe du
gouvernement.
Le premier élément que nous désirons porter
à l'attention de la commission est un élément de principe
et de politique générale. Nous aimerions sensibiliser le
gouvernement au fait que les services de garde et la politique familiale vont
de pair. Il est certain que le gouvernement a affirmé dans son
énoncé de politique cet élément du lien entre
services de garde et politique familiale. C'est un premier pas qui est louable.
Mais nous pensons que le gouvernement, s'il veut être
véritablement logique avec lui-même, doit faire le second pas
immédiatement et replacer les services de garde dans le créneau
véritable qui est le leur, soit la politique familiale, et même
transporter la juridiction de l'Office des services de garde à l'enfance
sous l'égide d'un véritable ministère de la famille et non
point seulement sous celle d'un ministère d'État à la
famille.
Nous constatons et nous admettons que, dans la situation actuelle, les
premiers jalons d'une politique familiale sont véritablement à
s'établir, qu'un ministre d'État à la famille constitue
une étape nécessaire et préalable à l'implantation
d'un véritable ministère de la famille, mais nous soumettons que
le gouvernement devrait réalistement en arriver là dans de
meilleurs délais.
Le second point que nous désirons porter à l'attention de
cette commission est le souci primordial que notre groupe de garderies attache
à la qualité des services de garde, plus particulièrement
en ce qui a trait à l'enfant et à ses parents. Nul besoin de vous
répéter que l'enfant et le parent sont la raison d'exister des
services de garde et veuillez croire qu'ils sont la
raison d'exister de nos garderies. Ce point est tellement vrai que
j'aimerais vous rappeler que nos services de garde existaient bien avant que le
gouvernement ne discute de services de garde. Notre plus vieux membre existe
depuis 1919 et, essentiellement, j'entendais tout à l'heure dans la
présentation précédente mentionner que les services de
garde existaient au Québec depuis 1970 ou, tout au moins, qu'on s'en
occupait depuis 1970. Je puis vous dire que bon nombre de nos membres, dans les
années cinquante, étaient déjà impliqués
dans les services de garde, ce qui vous démontre que
l'intérêt de l'enfant et l'intérêt du parent
étaient primordiaux pour nos membres bien avant que le gouvernement
n'accorde une prime monétaire quelconque pour ce genre de services.
Dans ce contexte et du fait que l'enfant et le parent soient primordiaux
pour nos garderies, nul besoin de vous répéter, je pense, que le
principe que nous respectons, fondamentalement, est celui du libre choix du
parent. Le libre choix du parent se situe, quant à nous, en fonction de
deux grand principes. Le premier principe est celui de la loi et le
deuxième principe est celui de fa structure politique et juridique de
l'institution en cause. Si vous me le permettez, M. le Président,
j'aimerais faire un bref parallèle entre les garderies et les
hôpitaux, les CLSC, les établissements de services sociaux, les
écoles ou le milieu scolaire pour vous démontrer qu'aucun des
critères qui sont applicables à ces derniers modèles
sociaux n'est applicable en matière de garderie. Si on peut parler de
libre choix politique dans les hôpitaux, CLSC, établissements de
services sociaux ou écoles, on ne peut pas appliquer le même
critère en garderie et je vous dis pourquoi.
En ce qui concerne la loi, la Loi sur les services de garde à
l'enfance est la seule loi qui fasse état formellement, à son
article 2, du libre choix du parent en rapport avec, évidemment, les
ressources existantes. La loi sur les hôpitaux, la loi sur les CLSC, la
loi sur les établissements de . services sociaux, la Loi sur
l'instruction publique n'en font pas mention. Deuxième point
fondamental, toutes les garderies au Québec sont privées quel que
soit leur statut. Les hôpitaux, les CLSC, les établissements de
services sociaux sont des établissements publics. Comment peut-on faire
un parallèle entre des pommes et des oranges? Troisièmement, les
garderies sont payées à la fois par l'utilisateur et par
subventions, dans le cas des garderies admissibles. Dans les hôpitaux,
les CLSC, les établissements de services sociaux, c'est payé par
l'État. Dans les garderies, l'employeur est privé. Toutes les
garderies sont privées, je me dois de le répéter. Dans les
hôpitaux, les CLSC, les établissements de services sociaux,
l'employeur est l'État. Comment peut-on nous dire que le libre choix
qu'on prétend appliquer en matière de services de garde est le
même que celui dans les hôpitaux et dans les CLSC et que c'est le
libre choix de l'État qu'on y appliquerait? En d'autres termes, nous
vous soumettons que, dans le cas des garderies, le gouvernement est soumis
à sa loi, doit respecter le libre choix et doit prendre des mesures
nécessaires pour que le libre choix existe véritablement et non
seulement dans l'écrit du texte législatif.
Sur la qualité des services, nous prétendons et affirmons
avec l'appui, d'ailleurs, des ministres qui vous ont
précédée, Mme la ministre... Je dois vous dire que les
ministres du Parti québécois, Mme Marois, Mme Lalonde, Mme
Leblanc-Bantey nous ont toutes affirmé, chacune à son tour, que
nous avions une qualité égale, dans nos services de garde,
à la qualité des garderies subventionnées. Mme Stella Guy,
dans la dernière entrevue qu'elle donnait au Devoir et que nous avons
annexée à notre mémoire présenté à la
commission parlementaire faisait état d'un réseau de services de
garde de qualité et également de la nécessité de
garder les garderies qu'elle appelait à but lucratif dans le
réseau pour autant que nous observions la loi et les règlements,
ce que nous faisons.
Plus encore, Mme la ministre, pour vous montrer combien nous avons de la
qualité, l'honorable ministre Lazure, au moment où il
présentait sa loi, en 1979, avait son enfant dans une de nos garderies.
Le ministre Marc-André Bédard avait également, à
une certaine période, son enfant dans nos garderies. Mme la ministre Use
Denis, qui a occupé, pendant quelques mois, le poste de ministre
déléguée à la Condition féminine, a
élevé ses enfants tous à la garderie de Mme Morin, qu'on a
pourtant si largement décriée devant cette commission. Il y a
également Mme Stella Guy, l'ancienne présidente de l'Office des
services de garde à l'enfance, qui, durant plusieurs mois, a fait garder
ses enfants dans une de nos garderies, avec plaisir d'ailleurs. Est-ce que tous
ces gens-là auraient choisi l'absence de qualité pour leur propre
enfant? Vous me permettrez d'en douter.
C'est dans ce contexte des affirmations ministérielles
précédentes, des gestes individuels posés par les
différents membres du gouvernement, qui étaient du Parti
québécois, que nous nous permettons d'affirmer sans honte et
véritablement que nous sommes des garderies de qualité, que nous
respectons les règles et que notre présence devant cette
commission, c'est justement pour assurer la continuité de la
qualité des services.
Dans ce sens, Mme la ministre, nous voulons vous dire que nous
déplorons un extrait de la page 62 de votre document où vous
faites état de nos garderies dont la philosophie viserait un but
lucratif déclaré, indépendamment des objectifs de
qualité poursuivis par plusieurs. Vous me permettrez bien
respectueusement, au nom de l'association que je représente, de vous
souligner que la qualité existe dans toutes nos garderies. Fort
probablement le texte vous a-t-il échappé ou une lecture rapide
du texte a-t-elle fait en
sorte que vous n'ayez peut-être point saisi toute la nuance des
mots. Le langage et la couleur des mots sont souvent particuliers et nous nous
permettons de vous demander un éclaircissement à ce sujet dans
vos commentaires ultérieurs.
Pour ce qui est du rôle des parents dans les garderies non
subventionnées et non gérées par les parents, qu'il en
déplaise ou non à plusieurs, un bon nombre de parents ne veulent
aucunement participer au processus de gestion des garderies, c'est un fait, et
c'est à ce besoin, entre autres, que nous répondons dans notre
structure qui est non gérée par les parents. Dans le cadre d'un
libre choix du parent, nous sommes d'avis que notre type de garderie est
nécessaire pour permettre le respect du libre choix des parents et pour
permettre à ces parents, qui veulent passer le temps précieux
qu'ils ont à l'extérieur du travail, avec leurs enfants, de le
faire.
Nous aimerions également, Mme la ministre, porter à votre
attention la vigilance et la responsabilité directe que les
propriétaires de garderie exercent quotidiennement. Les garderies
subventionnées rendent un service valable, nous sommes tous d'accord. On
doit cependant noter que dans une corporation sans but lucratif, où le
conseil est formé à majorité de parents, évidemment
la direction n'est pas présente quotidiennement, toute la
journée. Dans ce contexte, vous devez comprendre que, d'autre part, le
parent est à la fois client et directeur de la garderie. Est-ce qu'on
voudra sérieusement nous faire croire que le client admettra
l'incompétence de l'administrateur ou les faiblesses de l'administrateur
quand il occupe le rôle à la fois de parent et d'administrateur?
Je pense qu'on doit cesser de faire de l'angélisme et reconnaître
que la nature humaine fait en sorte que les parents auront tendance à
être bons pour eux-mêmes, ce qui est humain et acceptable, mais ce
qui expliquera, par ailleurs, que nos parents sont davantage critiques à
l'endroit de notre administration, parce qu'il n'y a aucun conflit
d'intérêts chez nous. (15 heures) . ;
D'autre part, dans nos garderies, le propriétaire assume une
responsabilité directe. Dans les garderies subventionnées,
à conseil majoritaire de parents, qui est responsable? Le conseil
d'administration, certes. Mais, si un parent veut rencontrer le conseil
d'administration, comment procède-t-on? On doit rencontrer plusieurs
personnes, on dort négocier, discuter, alors que dans nos garderies, la
plupart du temps, le propriétaire est unique. Vous avez une personne
physique à rencontrer et le dialogue se fait facilement, d'autant plus
que si le parent n'est pas heureux ou content de la gestion II emploie le
recours le plus direct, c'est-à-dire retirer son enfant de la garderie.
Dans ce contexte, évidemment, vous allez comprendre que le
propriétaire de la garderie sera le premier pénalisé.
Vous nous permettrez également de mettre en relief certains
éléments qui nous semblent un peu contredire votre
énoncé de politique.Vous parlez fondamentalement d'un meilleur
équilibre et du respect du libre choix des parents. On peut s'interroger
sur le véritable respect du libre choix des parents si un
réaménagement de la subvention de 4 000 000 $ que vous comptez
observer n'est pas encore accordé. Dans le contexte des 4 000 000$
prévus, nous sommes très limités, à savoir les
poupons, lès handicapés, la subvention de 1 % pour le
perfectionnement et enfin la subvention pour le matériel ou
l'équipement. C'est pourquoi nous vous demandons essentiellement, pour
assurer un minimum d'équilibre entre les deux groupes de garderies et
pour assurer un minimum de salaire décent à nos employés,
de nous permettre de disposer de façon plus large des 4 000 000 $ que
vous nous accordez pour l'opération de nos garderies.
Essentiellement, c'étaient nos commentaires, car nous sommes
limités à vingt minutes. Je me permettrai d'ajouter d'autres
éléments selon les questions et les commentaires qui pourraient
venir.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup. Mme la ministre. '
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Me Boucher. Je dois tout simplement
vous avouer que j'ai bien lu et relu le texte de l'énoncé de
politique. En somme, j'ai suivi de très près tout le processus de
son élaboration. Je pense que vous avez compris, que vous avez bien lu
ce qui est écrit dans l'énoncé de politique. Tout à
l'heure, vous avez dit que vous vous sentiez pénalisés. En quoi
l'Association des propriétaires de garderies du Québec est-elle
pénalisée parce que l'Office de service de la garde à
l'enfance est sous la juridiction de la ministre déléguée
à la Condition féminine? Est-ce que c'est une marque de
non-confiance à la ministre déléguée à la
Condition féminine?
M. Boucher: Mme la ministre, j'aimerais vous répondre
simplement par ceci. Rien n'empêcherait le premier ministre de vous
nommer ministre déléguée à la Famille et de placer
l'Office des services de la garde à l'enfance à nouveau sous
votre juridiction.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie, Me Boucher, de votre
confiance.
M. Boucher: Vous pouvez lui transmettre le message de
l'association.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vais vous poser une question très
directe. Je pense qu'on est ici pour se parler franchement.
M. Boucher: C'est ce qu'on a voulu, Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Et voici. Vous savez
fort bien que, depuis que la loi a été
adoptée, vous n'êtes pas subventionnés. On a rarement
laissé l'espoir que vous seriez subventionnés. Je sais qu'au
moment où on a fait des modifications à la réglementation,
on vous a accordé des subventions pour améliorer et
aménager vos locaux, par exemple. Vous vous souvenez de cela
également. Là, on décide de donner certaines subventions
précises rattachées à la qualité, pour ne pas
pénaliser les éducatrices et les éducateurs de garderies
ni les enfants qui sont dans ces garderies. Finalement, vous savez fort bien,
et vous le saviez en 1980 aussi, que vous n'êtes pas
subventionnés. Par contre, je pense que la députée de
Maisonneuve a raison de dire qu'il y a eu une montée incroyable
d'ouvertures de garderies à but lucratif. Pourquoi les garderies
à but lucratif ouvrent-elles quand même, alors qu'on le sait fort
bien, et vous nous le dites, que ce n'est pas payant, on ne fait pas de profit?
Par contre, ces dernières années, il s'en est ouvert
peut-être même plus que des garderies à but non lucratif.
Pourquoi ouvre-t-on malgré tout des garderies à but lucratif dans
ces conditions?
M. Boucher: Essentiellement, c'est très
simple. C'est simplement parce que des personnes diplômées en
éducation préscolaire ou en techniques de garde ont
décidé de se créer elles-mêmes un emploi
plutôt que d'aller présenter leur candidature à une
garderie déjà existante. La question fondamentale est là.
De la même façon, un, deux ou trois médecins vont ouvrir
ensemble Une clinique médicale et recevoir tous leurs revenus de la
carte-soleil. Ces médecins fonctionnent complètement à but
lucratif. Ils donnent un service social de premier ordre. Ils ont
décidé de se donner un emploi de cette façon plutôt
que d'aller travailler à salaire dans un hôpital. Alors, c'est la
même chose pour nous. Nos propriétaires de garderie sont des gens
diplômés en éducation préscolaire ou en techniques
de garde qui se créent un emploi, rien d'autre. On dit: On va se
créer un emploi, on va être son propre employeur plutôt que
d'aller travailler simplement, compte tenu d'un besoin qu'on a constaté
dans un secteur donné. C'est l'élément de base, ce n'est
pas qu'il se fait de l'argent. Vous avez les bilans, tous les ministres qui
vous ont précédée nous ont dit: On sait que vous ne faites
pas d'argent.
Alors, c'est clair, vous regardez les statistiques. Les
garderies subventionnées se plaignent, avec raison, qu'elles arrivent
difficilement. Comment voulez-vous, nous qui percevons le même tarif des
parents, nous qui payons nos employés un peu moins, nous qui
répondons aux mêmes normes de réglementation, que nous
pariions de profit? Quand je vois les gens nous parler de profit, de lucre et
tout, voyons, c'est de la blague! Tous les gens' qui ont étudié
les rapports financiers et autres, qui ont vu ce qu'on faisait, savent qu'on ne
fait que se créer un emploi. Ce que l'on appelle profit en garderie non
gérée par les parents, c'est l'égal du salaire de la
directrice en garderie subventionnée. C'est simplement ça.
Mme Gagnon-Tremblay: Mais sachant fort bien qu'il n'y a pas de
rentabilité, pourquoi, malgré tout, ouvrir une telle garderie?
D'accord, on peut peut-être se créer un emploi, mais, finalement,
on sait que les gens qui vont travailler dans cette entreprise auront des
difficultés. On est venu nous dire, ce matin, que le salaire moyen est
très bas. On voudrait avoir également des subventions parce qu'on
ne peut pas arriver à payer décemment les employés, les
éducatrices et les éducateurs. Pourquoi, à ce
moment-là, ne pas ouvrir une garderie sans but lucratif non
subventionnée? Il existe quand même des garderies sans but
lucratif non subventionnées.
M. Boucher: C'est une question de choix de l'individu, d'abord,
de la même façon que Mme Harel et vous, Mme la ministre, avez
décidé d'entrer en politique, alors que si vous étiez
à travailler dans l'entreprise privée vous recevriez probablement
beaucoup plus. Prenons un simple exemple, l'étude que la ville de
Montréal a fait faire sur le salaire du maire Doré; il est, par
rapport à l'entreprise privée, sous-payé. Le premier
ministre est sous-payé. Alors, je vous relance la question: Pourquoi
êtes-vous en politique, si vous feriez beaucoup plus dans l'entreprise
privée? Par choix, par amour, par défi. Mme la ministre, nos gens
sont ici par choix, par amour et par défi. C'est tout.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est une bonne question, monsieur.
On a beaucoup parlé, au cours de cette commission
parlementaire, de transformation des garderies à but lucratif. Je ne
vous apprends rien si je vous dis, par exemple, que c'est une
possibilité, c'est quelque chose que nous avons envisagé, que
nous avons regardé. Nous avons constaté, par contre, de grosses
difficultés. Qu'est-ce que vous pensez de cette transformation? Comment
peut-elle se faire, compte tenu d'un transfert d'actif, d'achalandage? Comment
voyez-vous ça? Est-ce que vous seriez prêt à les
transformer? Comment voyez-vous ça?
M. Boucher: Chez nos gens, vous allez avoir deux réactions
deux positions. Un groupe de propriétaires va vous dire: Oui, madame, on
se transforme demain matin. Un autre groupe va vous poser la question: Est-ce
que vous donneriez votre enfant en adoption à une autre personne? C'est
la réaction que nos propriétaires vont avoir, selon l'attachement
personnel de chacun, plus ou moins grand pour sa garderie, selon que
l'idée première est, d'abord et avant tout, d'aimer le service
auprès des enfants et des parents, de façon autonome et en
créant son
emploi, ou selon qu'on est davantage porté sur le crayon et qu'on
vise à ce que les revenus égalent les dépenses.
Alors, vous aurez deux attitudes différentes. On a
déjà posé la question en assemblée
générale chez nous. Majoritairement, les gens ont dit:
L'entreprise privée est un concept légitime, noble et acceptable;
le profit est le fruit légitime du travail. Dans ce contexte, il n'y a
de honte pour personne à le reconnaître, sauf la réaction
double qui peut se poser.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous parlez d'une subvention au
fonctionnement dans le but d'améliorer les conditions de travail et la
qualité. Nous ne voulons pas nous immiscer dans la négociation
des conditions de travail; d'ailleurs, on ne le fait pas dans les garderies
sans but lucratif. Nous ne voulons pas avoir à décider, parce
qu'on sait que dans les garderies sans but lucratif, c'est le conseil
d'administration, qui est composé majoritairement de parents, qui
décide des tarifs et des conditions de travail. Comment peut-on
subventionner une garderie à but lucratif sans s'immiscer dans les
conditions de travail et, finalement, en arriver à l'objectif que vous
visez?
M. Boucher: En fait, je pense que c'est très simple. On y
répondait déjà ce matin et la réponse demeure
la-même. Vous avez nos états financiers. Vous pouvez
contrôler la façon dont notre argent est utilisé. Et si
l'on vous dit que l'on reçoit l'argent ou une subvention
conditionnellement à ce qu'elle soit vraiment dépensée
pour les besoins réels des garderies, dans ce contexte-là, vous
pourrez le voir dès l'exercice financier suivant. Vous serez à
même de contrôler et il y aurait simplement lieu de prévoir
de pénaliser la garderie qui ne l'aurait pas fait. C'est très
simple, Je pense, comme moyen de contrôle. Ensuite, vous avez le meilleur
moyen de contrôle. Vous ayez nos états financiers annuels. On doit
vous donner un bilan vérifié. Et, là, vous savez que la
Loi sur les comptables agréés oblige le comptable qui donne un
bilan vérifié à vraiment certifier le bilan. Ce ne sont
pas les chiffres de la garderie qu'on prend quand on fait un bilan
vérifié. Le comptable engage sa responsabilité personnelle
et professionnelle. Alors, dans ce contexte-là, vous avez une
protection. Ce serait l'élément de base.
Mme Normandin (Denise): Et je crois que vous ne seriez pas
obligés d'attendre six mois pour savoir si les sommes sont
utilisées. Nos employés qui sauraient, demain matin, qu'on a des
fonds pour leur donner un salaire tandis qu'on n'améliorerait pas leurs
conditions financières quitteraient nos garderies ou iraient voir
ailleurs.
Mme Gagnon-Tremblay. Je sais que vous êtes toutes des
représentantes de garderie, des propriétaires mêmes de
garderie. Est-ce que vos garderies sont actuellement conformes à la
norme exigée par l'office ou sont-elles - en voie de l'être?
Mme Normandin: Elles sont toutes conformes.
Mme Gagnon-Tremblay: Elles sont conformes.
Mme Normandin: Et disons que les nouvelles garderies qui se sont
ouvertes depuis la nouvelle réglementation de 1984-1985 ont dû
appliquer la loi intégralement; . autrement, le permis leur était
automatiquement refusé.
Mme Gagnon-Tremblay: Quel est le tarif moyen de votre garderie?
Quel est le tarif de votre garderie? Je sais que vous êtes plusieurs. En
moyenne, quel est le tarif quotidien de votre garderie?
Mme Normandin: 88,50 $ par semaine. Si le parent a deux enfants,
il ne peut plus arriver. Nous percevons 158 $ par semaine pour deux
enfants.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous laissez beaucoup de place
aux parents? Par exemple, est-ce que vos comités consultatifs sont
opérationnels?
Mme Normandin: Très opérationnels, madame. Ils
travaillent au montage de notre journal qui sort de façon
périodique, à tous les trois mois, pour donner les programmes
d'activités de la garderie. Les parents choisissent les sorties
culturelles qu'on doit faire. Ils sont très favorables à toutes
ces sorties-là. Et même si on n'a pas de subvention, ils sont
prêts à débourser des coûts pour qu'on ait au moins
ces sorties. Disons que c'est à notre avantage d'être très
près des parents. Offrir un service dont les gens ne veulent pas,
ça signifie fermer nos portes demain matin et c'est notre seule garantie
de survie d'être au service des parents.
Mme Gagliardi (Bambina): Comme Mme Normandin le précisait,
nos comités consultatifs participent à l'élaboration du
programme pédagogique dans le sens qu'ils participent aussi au
financement des sorties. Ils vont faire des campagnes de financement. Ils ont
leur propre fonds pour ça. Et lorsqu'on a des réunions avec les
parents, on se met d'accord sur les sorties à faire durant la
période de l'année.
Le Président (M. Bélanger): C'était Mme
Gagliardi. C'est bien ça?
Mme Gagliardi: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-il vrai qu'on ferme la porte aux
parents. Les parents peuvent aller reconduire les enfants et les chercher mais,
en dehors des heures, on est très strict. On n'accepte pas que les
parents arrivent à tout moment du jour pour faire des
vérifications, vérifier, entre autres, ne serait-ce que la
nourriture, le menu. Êtes-vous soucieux justement du menu que vous
accordez?
Mme Gagliardi: Les parents peuvent venir dîner à nos
garderies s'ils amènent leur enfant. Si un parent a un rendez-vous chez
le médecin et qu'il amène son enfant vers onze heures et demie,
midi ou qu'il doive l'amener un peu plus tard dans l'après-midi, c'est
évident qu'il doit rentrer prendre son enfant. Il est en charge de le
déshabiller. Donc, s'il n'entre pas dans la. garderie, comment
fait-il?
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous affichez votre menu?
Une voix: C'est une réglementation.
Mme Normandin: Le menu est affiché. L'office l'exige et,
en plus, on en envoie une photocopie à chacun des parents et il
paraît dans le journal de la garderie. Et on a des parents qui ont des
formations. Il y a des professionnels, des fois, qui nous donnent des petits
conseils ou qui ont des recettes à nous suggérer et on en tient
compte. (15 il 15)
Mme Gagnon-Tremblay: Mon collègue avait une question, M.
le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Thuringen: Merci, M. le Président. J'ai
écouté vos propos depuis ce matin et je ne vois pas comment vous
réussissez à faire marcher la boutique. Admettons qu'on
subventionne ou qu'on mette d'autre argent à votre disposition, à
quel endroit utiliseriez-vous ces sommes d'argent et pour faire quoi? Quelle
est la principale priorité, selon vous?
M. Boucher: Essentiellement, l'association avait soumis à
la ministre, par la voie de son cabinet, des éléments auxquels on
pourrait appliquer les subventions. Vous avez évidemment les salaires
des employés, l'équipement et le matériel
pédagogique, l'équipement ordinaire de garderie, la
rénovation périodique des locaux, l'équipement
technologique et la vérification comptable, les sorties
pédagogiques et autres à l'extérieur de la garderie, les
activités culturelles qui peuvent s'organiser à
l'intérieur de la garderie, l'élément publicitaire. Mais
les éléments qui se rattachent à l'enfant, ce sont tous
ceux là. Tout ce que je viens de vous nommer, sauf la
comptabilité, se rattache directement à l'enfant.
Si on amène une troupe de théâtre en
garderie, par exemple,, pour parler des abus sexuels et autres chez les jeunes
enfants, on pale la troupe de théâtre qui vient à la
garderie. Ce sont des éléments comme ça. En fait, on
reçoit souvent des troupes de théâtre ou des manifestations
culturelles en garderie. On sort les enfants à l'extérieur de la
garderie. Il y a une foule de choses qui peuvent se faire.
M. Thuringen: Je comprends, mais il me semble...
Vous êtes déjà plus limité que si vous aviez plus
d'argent mais, si on mettait, admettons, 10 % de plus de subventions, quelle
partie garderiez-vous comme profit, par exemple? Il faut souffler un peu aussi,
n'est-ce pas?
M. Boucher: Je pense que les propriétaires
vous diront essentiellement qu'ils vont d'abord et avant tout fonctionner
à l'intérieur des questions salariales oui, mais des questions de
qualité du service à l'enfant. Vous pouvez peut-être, dans
le budget total, avoir simplement une suite normale à la hausse du
coût de la vie annuelle.
Mme Normandin: Avec presque rien, on l'a toujours
respectée. Pourquoi, avec un petit quelque chose, est-ce qu'on ne
continuerait pas? On ne changera pas notre philosophie demain matin.
Mme Gagliardi: Aussi, ce serait ne plus pénaliser le
parent en continuant à l'augmenter d'année en année.
Mme Normandin: II faudrait réellement, à mon avis,
exiger 125 $ par semaine pour arriver, actuellement, en garderie. 125 $, pour
celui qui a un enfant, c'est faisable, mais les parents ont souvent deux
enfants et même trois. À trois, on leur dit carrément qu'on
n'a pas les moyens de faire un spécial pour le troisième et que
ce serait plus avantageux pour eux d'aller en milieu familial.
M. Thuringen: Idéalement, combien d'enfants
devriez-vous garder pour que ce soit vraiment rentable pour vous?
M. Boucher: On avait fait une étude dans le
temps. Il y a un minimum. Je pense que les garderies qui ont moins de 40
enfants au permis ont beaucoup de difficultés à arriver. Pour
avoir des revenus équivalents aux dépenses et un salaire minimal
à peine décent, 40 enfants en moyenne, c'est la garderie
où vous pouvez vraiment arriver égal, revenus et
dépenses.
Les coûts de base sont les mêmes en
général pour certains éléments. SI vous achetez des
espaliers, par exemple, que vous ayez 45 ou 55 enfants, vous aurez un ensemble
d'espaliers pour la cour et, à ce moment-là, c'est le même
prix. Il y a des éléments comme ça dans la
garderie qui auront le même coût, que vous ayez 40 ou 50
enfants. Là-dessus, évidemment, 40 enfants, selon nos
études, constitue un seuil.
M. Thuringer: Merci.
Le Président (M. Bélanger): II vous reste le temps
d'une question, Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: II reste deux minutes. SI vous ayez quelque
chose d'autre à ajouter, je pourrais vous donner la chance de vous
exprimer.
M. Boucher: Oui, Mme la ministre, avec plaisir. J'aimerais
ajouter une chose. Tout au cours de la commission parlementaire, on a entendu
dire jusqu'à maintenant que la qualité des services était
incompatible avec le profit. Cette phrase est revenue constamment. Je voulais
simplement vous rappeler que, chez nous, ce qu'on appelle profit, c'est le
salaire du propriétaire.
Deuxième élément, je veux vous rappeler que, dans
le domaine de la santé, toutes les cliniques médicales sont
à but lucratif, les dentistes, les gens payés avec la
carte-soleil sont tous des gens qui opèrent pour leurs revenus
personnels, dans un but lucratif. Je n'ai jamais entendu personne soulever la
qualité des services dans le milieu de la santé.
Je pense que c'est faire une affirmation facile, voire même
gratuite, que de dire que la qualité des services est incompatible dans
un domaine où nous préconisons une saine gestion des fonds qui
nous sont confiés.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre ou Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je veux vous saluer,
mesdames et messieurs. Me Boucher, j'ai eu l'impression qu'il y avait un peu de
restriction mentale dans les exemples que vous nous donniez concernant le
fonctionnement de nos services dans notre société. Je
relève le dernier aspect que vous mentionniez - vous l'aviez
mentionné au début - celui des cliniques médicales, pour
vous rappeler que le gouvernement a justement jugé bon - pas simplement
le précédent, mais l'actuel gouvernement - de contingenter
l'installation des nouveaux diplômés en médecine de
façon telle que, lorsqu'ils s'installent sur des territoires urbains
comme Montréal, ils ne touchent que 70 % de la
rémunération qu'ils toucheraient s'ils étaient dans
d'autres régions, et 120 % s'ils s'installent là où le
gouvernement souhaite qu'ils aillent. Même dans le modèle que vous
nous donniez, comme étant le modèle du choix total, il y a un
contingentement en fonction des choix qu'a faits le gouvernement pour la
collectivité. Seulement 70 % de la rémunération pour un
diplômé qui crée son emploi en soignant des malades
à Montréal et 120 % en région, dans certaines
régions.
Je veux vraiment vous signaler qu'il faut que vous constatiez qu'autant
dans le secteur de la santé que dans celui de l'hébergement ou
des services sociaux, il y a des établissements privés
conventionnés. Vous nous avez dit qu'il n'y a que des
établissements publics. Je dois vous dire que je peux vous citer
évidemment des établissements où je vais tous les mots qui
sont des établissements privés conventionnés, parce que
l'État a décidé qu'il y avait là une question
d'intérêt public que ces établissements privés - je
pense à des hôpitaux de longue durée - soient
conventionnés, donc qui ont un per diem, comme il a jugé bon que
d'autres ne le soient pas, même s'ils ont un permis.
Cela revient à dire que dans tous les choix qu'on a faits comme
société - ça vaut pour la santé aussi, mais
ça vaut pour l'école évidemment, puisqu'il y a des
écoles qui n'ont qu'un permis, sans aucune subvention - les parents
décident d'y envoyer leur enfant malgré tout. Cela existe et ils
paient l'ensemble des frais de scolarité. Il y a d'autres écoles
qui sont privées, subventionnées, parce qu'elles ont un permis
considéré comme d'intérêt public, et d'autres qui
sont publiques. Cela existe dans tous les modèles de notre vie en
société.
M. Boucher: Je m'excuse. J'espère que vous ne croirez pas
que je vous interromps.
Mme Harel: Non, non. Allez-y.
M. Boucher: II y a une petite nuance, entre le modèle de
l'école et l'autre, que j'aimerais vous apporter. C'est peut-être
moi qui me suis mal exprimé. Je voudrais nuancer pour tenter de bien me
faire comprendre.
D'abord, je pense qu'on ne peut pas mettre l'école en
parallèle avec les garderies. On est obligés d'envoyer un enfant
à l'école depuis l'âge de six ans jusqu'à seize ans
et vous n'êtes pas obligés d'envoyer un enfant en garderie. C'est
un point bien important qui constitue toute la différence.
Sur le point des hôpitaux, j'ai simplement donné l'exemple
des hôpitaux tantôt, des CLSC, des établissements
d'affaires, mais sans parler des cliniques médicales. Je n'ai
Intégré les cliniques médicales dans mon exemple que pour
dire que qualité et profit sont compatibles. Mais pour tous les autres
éléments, il s'agissait d'institutions pour démontrer que,
dans ces cas, les lois et toute la structure opérationnelle
étaient complètement différentes de la loi et de la
structure opérationnelle des services de garde. C'est ça que je
voudrais simplement qu'on constate; on est dans un domaine unique. C'est
sûr qu'on peut faire des analogies, mais on ne peut pas faire des
équations ou une adéquation entre les garderies et le reste. Je
pense que
c'est important de le constater. Sauf évidemment, si on veut dire
que le gouvernement doit tout payer. Là, on change de système
politique, on change de philosophie, on n'est plus du tout dans la même
discussion.
Mme Harel: Mon propos est simplement de signaler que
l'État fait des choix dans toutes les dimensions de notre vie sociale et
l'État fait des choix à l'égard de ce qu'il
considère comme un réseau public, un réseau privé
conventionné et un réseau complètement privé qu'il
agrée en ce qui concerne les permis, mais qu'il ne subventionne pas.
C'est dans toutes les dimensions de notre vie. Il en va également de
même pour l'école. La différence, ce n'est pas que
l'école soit obligatoire. La différence, c'est que l'État
assume le coût de mettre l'école obligatoire. Il l'assume à
100 % en offrant un réseau public, et la différence, c'est que
l'État n'assume pas le fait que la garde, pour bien des parents, n'est
pas une question de choix; c'est une question d'obligation.
L'État n'assume pas ce fait en mettant un réseau à
leur disposition. C'est la différence, mais c'est parce que
l'État, en mettant l'obligation à l'école, assume le fait
de devoir offrir le service.
M. Boucher: On est d'accord avec cela.
Mme Harel: Je pense qu'il faut être bien clair. Vous savez,
ce qui est en cause, ce n'est pas je choix des parents d'envoyer leur enfant
dans les garderies privées - entendons-nous, les vôtres. Ce choix,
jamais l'État ne l'a remis en question. La question, c'est de savoir si
l'État doit le financer. Tantôt, vous avez cité Mme Stella
Guy. Je suis allée à votre mémoire, à l'annexe.
Vous aviez cité une entrevue qu'elle avait accordée au journal Le
Devoir. Je peux vous dire qu'on n'y a pas mentionné une seule fois le
réseau à but lucratif ou non géré par les parents,
comme vous voulez. Ce qu'elle dit simplement, c'est qu'on est devant un
réseau de services de qualité et elle ne qualifie aucune des
composantes du réseau.
Mme Normandin: Mais on fait partie du réseau.
M. Boucher: Mais nous sommes du réseau, madame.
Mme Harel: Oui, mais il faut faire attention. Attendez! C'est
autre chose. Vous écrivez nommément que Mme Stella Guy a reconnu
que les services donnés dans les garderies non gérées par
les parents sont de qualité. On ne peut pas passer d'une affirmation sur
la qualité en général à la qualité
particulière. Je ne vous dis pas le contraire. On ne peut faire ni l'une
ni l'autre. Tout ce qu'on peut dire, en quittant, c'est qu'elle
considère, qu'il y a un bon réseau de services de qualité,
point. Elle n'indique ni l'une ni l'autre des composantes du réseau
concernant la qualification qu'elle en fait, en général.
Ceci dit, on revient à la question de fond: le libre choix des
parents. Il est financé par l'exonération. L'État a fait
également un choix; pas maintenant, il y a dix ans. Il a fait le choix
de financer les parents, quel que soit leur mode de garde régi par la
loi, avec l'aide financière. Ce que l'État n'a pas fait, c'est de
financer la garde qu'il ne privilégie pas, vu que celle qu'il
privilégie ou qu'il prétend privilégier est celle qui est
gérée par les parents.
Là, vous nous dites - parce que, dans le fond, vous confondez les
deux - que le libre choix des parents est finalement financé par
l'État, puisque tous les parents ont l'aide financière, quel que
soit le mode de garde qu'ils choisissent. Ce que l'État ne fait pas,
c'est de financer un mode qui ne lui paraît pas être celui qu'il
doit privilégier, même dans l'énoncé de politique.
Immédiatement après le principe du libre choix, il y a celui
selon lequel le meilleur mode, c'est celui géré par les parents,
je pense.
Alors là, la grande question, c'est qu'il faut convaincre, pas du
fait que les garderies privées, c'est un bon choix... C'est un choix des
parents qui est respectable et légitime et vous nous citez des
personnalités qui l'auraient choisi. Cela ne me convainc pas de dire
qu'il faut collectivement, avec nos deniers publics, financer leur choix encore
plus que ce que l'État fournit déjà comme aide
financière.
Mme Normandin: Pourquoi financez-vous alors le parent qui va
choisir une garderie gérée?
Mme Harel: Parce que vous...
Mme Normandin: II a choisi d'aller là. Le gouvernement va
lui donner 0,45 $ pour chaque dollar qu'il va déposer. L'autre va
envoyer son enfant chez nous; il pourrait avoir ces 0,45 $. Si, à notre
garderie, on offre des services un peu plus coûteux et qu'on a des frais
d'administration supérieurs, parce que ce ne sont pas les parents qui
l'administrent, à ce moment-là, le parent peut payer 1 $ ou 2 $
plus par jour pour venir chez nous. Mais l'élément de base
pourrait être le même pour les deux, ce qui ferait que ce serait
vraiment un libre choix.
Mme Harel: L'État ne s'est jamais engagé à
tout financer dans aucun domaine de la vie sociale. L'État s'est
engagé à financer les choix qu'il fait au nom de la
collectivité. On prétend même, dans l'énoncé
de politique, que le choix est en faveur des garderies gérées par
les parents. La question que je vous pose porte sur les 8 000 000$ que vous
demandez. Dois-je comprendre que c'est une subvention de fonctionnement de 8
000 000 $, indépendamment de l'allocation-poupon ou pour l'enfant
handicapé?
C'est ça que je comprends. (15 h 30)
M. Boucher: Non, ce n'est pas 8 000 000 $, mais 4 000 000 $. On a
parlé de 8 000 000 $ dont on n'a pas eu l'occasion de discuter, parce
qu'on est limité à vingt minutes, mais ce montant de 8 000 000 $
provient d'une déclaration de Mme Loumède. On se demandait s'ils
existaient ou non.
Mme Harel: Je vous réfère à votre
recommandation 7.3. Vous recommandez 4 000 000 $.
M. Boucher: 4 000 000 $ redistribués.
Mme Harel: Plus une autre tranche de 4 000 000 $.
M. Boucher: Et une autre tranche de 4 000 000 $ qui viendrait des
8 000 000 $ dont Mme Loumède mentionnait l'existence pour subventionner
les déficits.
Mme Harel: Vous voulez dire que vous voudriez que des 8 000 000 $
attribués aux garderies gérées par les parents il y en ait
4 000 000 $ qui soient soustraits pour être affectés à vos
garderies?
M. Boucher: Non, qui soient soustraits... Que les 4 000 000 $
soient soustraits, mais qu'ils le soient d'ailleurs. J'aurai une remarque
à faire là-dessus après, mais je vais continuer dans la
logique de ce qu'on dit. On nous dit qu'il y a 8 000 000 $. Il faut savoir
s'ils existent ou non. C'est une question qu'on voulait poser à la
ministre, mais on n'a pas eu le temps de le faire. On basait notre affirmation
sur l'article de journal. On ne l'a pas trouvé dans
l'énoncé de politique, mais l'article de Journal nous dit que Mme
Loumède, de la fédération des affaires sociales, aurait
obtenu l'assurance de la ministre d'un montant de 8 800 000 $ pour
éponger les déficits. Là, nous n'enlevons rien aux
parents. Tous les systèmes, quels qu'ils soient, doivent au moins se
gérer de façon correcte; une bonne gestion suppose que les
revenus égalent les dépenses, qu'il y a peut-être des
profits ou des surplus, mais non des déficits continuellement. On dit
qu'on est d'accord pour aider les déficits, mais n'y aurait-Il pas moyen
de prendre 4 000 000 $ sur les 8 800 000 $ et de nous les transférer
pour nous aider à mieux fonctionner? C'est ce qu'on demandait
là-dessus.
Mme Harel: J'aimerais être bien certaine que je comprends
ce que vous demandez à là ministre. Vous lui dites que les
premiers 4 000 000 $, qui, de toute façon sont prévus dans
l'énoncé, vous les voulez comme subvention
générale.
M. Boucher: Générale de fonctionnement.
Parfait.
Mme Harel: Et vous lui dites que vous voulez un autre montant de
4 000 000 $. Est-ce que c'est cela que je dois comprendre?
M. Boucher: Oui, mais on dit qu'on veut 4 000 000 $ de la somme
que vous consacrez aux déficits.
Mme Harel: Mais elle a dit qu'elle n'en consacre pas.
M. Boucher: Voici, on se le demande. La ministre ne nous a jamais
répondu de façon officielle. On a été très
prudents dans notre rapport. On donne la source de nos affirmations. On ne dit
pas que c'est la ministre qui l'a dit. On dit: Mme Loumède affirme que
la ministre lui a dit. Alors, il va arriver ceci: la ministre va nous confirmer
l'avoir dit ou la ministre va nous dire: Je ne l'ai pas dit. À ce
moment-là, évidemment...
Mme Harel: Elle fait des grands signes que non.
M. Boucher: Si les 8 800 000 $ n'existent pas, la seule
sous-question qu'on pose: Est-ce qu'il y a des sommes réservées
pour les déficits? Si oui, où sont-elles? Comment sont-elles
gérées et, enfin, n'y aurait-il pas moyen qu'une partie de ces
sommes nous soit redistribuée? C'est tout.
Mme Harel: Et s'il n'y en avait pas?
M. Boucher: S'il y en a pas, écoutez bien, il y a une
chose qui est fondamentale pour nous. On est conscient et on admet que, dans
son choix politique, tout gouvernement puisse décider qu'un type de
garderies doive se développer davantage. On n'est pas pour nier les
choix du gouvernement. Je pense que si on voulait nier cela, ce serait nier le
système démocratique dans lequel on vit. Par ailleurs, ce que
l'on dit, dans le contexte de laisser au moins un véritable libre choix,
c'est: Donnez-nous au moins des sommes d'argent suffisantes pour rester en
place et faire en sorte que le libre choix existe même si, effectivement,
une catégorie reçoit plus qu'une autre. C'est ce qu'on dit.
Mme Harel: Et là, vous le chiffrez à combien? Ces 4
000 000 $, c'est un début ou si c'est récurrent chaque
année?
M. Boucher: C'est récurrent chaque année, au
minimum. Écoutez, d'un autre côté, on veut bien être
réalistes, en ce sens que les membres du comité qui sont ici
savent très bien que le gouvernement doit répondre au Conseil du
trésor et une fois que Mme la ministre a établi ses
règles, c'est déjà établi. Les fonds sont
donnés et on ne fera pas de bataille inutile là-dessus. On ne
cherche pas des victoires pyrrhiques ou
des choses qui n'existent pas. On veut être
réalistes. On a toujours été réalistes. C'est pour
cela qu'on arrive d'ailleurs, je vous le dis, parce qu'on sait voir les choses
comme elles le sont et non comme on voudrait qu'elles le soient. C'est dans ce
contexte qu'on dit qu'on va actuellement jouer avec ces 4 000 000$, et s'il y
avait possibilité d'obtenir une partie de l'aide aux déficits,
donnez-nous-la pour simplement garder une base de libre choix aux parents et
permettre, d'autre part, au gouvernement d'exercer les choix qu'il veut
exercer, lui.
Mme Normandin: De toute façon, je pense que le
gouvernement fédéral, alloue des sommes pour le financement des
garderies à but lucratif ou à but non lucratif, peu Importe le
statut. On fait partie de ce groupe. Si on respecte les normes, les sommes que
le gouvernement fédéral est prêt à donner pour
soutenir nos garderies, pour qu'on puisse donner un service à nos
parents, il me semble qu'on y a droit. On nous a souvent comparés
à d'autres provinces, mais, si on veut nous comparer à d'autres
provinces, qu'on nous compare sur toute la ligne. Ailleurs, dans les autres
provinces, il y a 75 % des garderies qui sont à but lucratif ou qui ne
sont pas gérées par les parents et qui reçoivent une
aide.
Mme Harel: Le gouvernement du Québec, qui réclame
la juridiction exclusive des sommes octroyées par Ottawa, invoque qu'il
veut consacrer, comme vous le savez sans doute, ces sommes au
développement, c'est-à-dire, qu'il entend privilégier - je
vous lis exactement ce qui est dans l'énoncé de politique - le
développement de services sans but lucratif. Est-ce que vous admettez
que le gouvernement du Québec, dans son énoncé de
politique, reconnaisse une préférence pour les services
gérés par tes parents?
M. Boucher: C'est une question de fait.
Mme Normandin: II reconnaît une
préférence, mais je pense qu'il croit aussi que nous sommes
importants et qu'il nous a ouvert une porte. Mais nous, ce que nous lui disons,
c'est ceci: Si vous nous ouvrez une porte, ne vous organisez pas pour que, dans
un an ou un an et demi, nous soyons encore devant une porte fermée,
parce qu'on ne peut pas continuer à vivre. Les autres garderies qui sont
venues, les autres mémoires, vous ont nettement démontré
que ça prenait des sommes épouvantables pour venir à bout
de gérer une petite garderie. Nous ne pouvons faire des miracles
longtemps; nous aussi avons besoin d'un minimum, et c'est ce minimum dont on
veut s'assurer, et on dit que si Mme Gagnon-Trembiay est prête à
nous déposer 4 000 000 $, peut-être qu'avec 2 000 000 $ ou 3 000
000 $ de plus, on va dire: Oui, on respire et on peut maintenir la
qualité que vous nous demandez.
Mme Harel: Mais, dans son énoncé, ces 4 000 000 $
sont exclusivement consacrés au développement de places pour
poupons et enfants handicapés.
M. Boucher: C'est pour cela qu'on intervient, justement, et on
demande à la ministre de prévoir un réaménagement
de cette somme, de la transformer en subventions. D'abord, l'enveloppe
budgétaire est là. C'est très facile de dire: Vous pourrez
l'utiliser en subventions de fonctionnement; un peu de cet argent pourrait
servir aux déficits. Nous, à ce stade-ci, nous allons survivre
encore avec ça, parce que, comme vous le disiez, et avec raison, nous
reconnaissons au gouvernement son choix. Il l'a fait, on le respecte. Nous
sommes des adultes, nous sommes capables de respecter un choix gouvernemental,
un choix politique, même si ce n'est pas l'idéal pour nous. On vit
en démocratie et on respecte le choix des gens qui nous gouvernent.
C'est tout.
Mme Harel: Cela passe tellement vite! On me dit qu'il me reste
trois minutes. C'est donc récurrent. Cela veut dire que vous voulez,
dans le fond, être financés dorénavant selon un mode de
fonctionnement...
M. Boucher: Partiellement, annuellement. Oui, exactement.
Mme Harel: Comment réagissez-vous aux propositions
énoncées dans la politique concernant la planification
régionale?
M. Boucher: Écoutez, cela, c'est bon.
Mme Harel: Vous savez que c'est une façon de
contingenter.
M. Boucher: Remarquez, c'est un contingentement qui
nous semble logique. Nous trouvions déjà ridicule que, par le
passé, on ait laissé s'installer une garderie en face d'une autre
garderie existante, alors qu'on aurait plutôt pu permettre l'ouverture
d'une garderie un peu plus loin et répondre à un service qui
était nécessaire là-bas, et que des fois on ait vu les
deux garderies fermer ou l'une des deux fermer parce que, justement, on n'avait
pas planifié le moindrement le lieu où s'établirait une
garderie.
Alors, je pense qu'on peut faire confiance au gouvernement
et aux gens de l'office là-dessus pour jouer le jeu honnêtement et
nous donner de véritables statistiques sur le développement
régional des garderies. Nous trouvons que c'est très valable, en
ce sens que le réseau de garderies doit se développer au
Québec; il doit se développer harmonieusement, logiquement et
avec une bonne gestion. Écoutez, nous ne sommes pas contre les principes
d'une bonne gestion; au
contraire, c'est ce qui nous a permis de rester en vie, alors nous
n'allons pas contredire l'a b c de nos opérations.
Mme Harel: Est-ce que vous reconnaissez que de cette
façon... Parce qu'à partir du moment où il y a une
planification, où il y a une certaine limite dans l'émission des
permis, compte tenu des besoins, une fois qu'ils sont comblés, la
garderie à but lucratif prend d'autant plus de valeur en termes
d'équité, puisque vous convenez que ce n'est pas le libre, choix
- on ouvre où on veut, quand on veut, comme on veut...
M. Boucher: Ce n'est pas cela le libre choix, pour nous.
Mme Harel: ...qu'il doit y avoir une planification.
M. Boucher: Oui, mais ce n'est pas ça le libre choix,
ouvrir comme on veut, quand on veut, non. Cela est un choix
désordonné, un développement sauvage, pourrait-on dire. Et
je pense que le développement des garderies ne doit pas se faire de
façon sauvage ou désordonnée; il doit être
cohérent et ordonné, et l'office, en ce sens, fait un bon
travail. L'amorce est excellente, pour nous.
Mme Harel: Malheureusement, il ne nous reste plus de temps.
À partir de ce moment-là, c'est évident que le permis aura
une valeur et une équité. Â partir du moment où on
diminue l'émission...
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, Mme la députée.
M. Boucher: Ce n'est pas la valeur du permis qui nous importe,
c'est d'opérer et de donner un service de qualité.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Boucher: La valeur du permis...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
Alors, Mme la députée de Maisonneuve, si vous voulez remercier le
groupe.
Mme Harel: II ne me reste plus de temps. J'aurais aimé
savoir si ça se vend cher ou non. Il doit y avoir une certaine
équité, malgré tout. Je remercie l'Association des
'propriétaires de garderies du Québec Inc. Je souhaite qu'on ait
une idée claire de ce que le ministre vous réserve et qu'on ait,
évidemment, des choix de financement qui soient conséquents avec
les choix d'orientation. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
M. Boucher: ...pour notre part, Mme Harel.
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Reconnaître que les services à
but lucratif peuvent être d'aussi bonne qualité que d'autres modes
de garde n'engage pas pour autant le gouvernement à des subventions sur
la même base. Le gouvernement est conscient qu'une forme de financement
orientée vers la qualité devrait permettre d'améliorer la
qualité. Finalement, c'est le choix qu'il fait dans
l'énoncé de politique actuellement. De toute manière, vous
avez soulevé tout de même des points importants. Il fallait avoir
votre point de vue. Comme je vous l'ai mentionné, on a eu quand
même différents commentaires depuis le début de la
commission parlementaire. C'était important de vous donner cette
possibilité de vous exprimer et d'éclairer plusieurs points. Nous
vous remercions de la présentation de votre mémoire, mesdames et
messieurs.
M. Boucher: On vous remercie, Mme la ministre.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie l'Association des propriétaires de garderies
du Québec inc. Avant d'appeler l'autre groupe, Je demande le
consentement de cette commission pour que M. Claveau, député
d'Ungava, puisse remplacer Mme Juneau, députée de Johnson. Est-ce
qu'il y a consentement de la commission?
Une voix:...
Le Président (M. Bélanger): II y a consentement.
Est-ce que M. Desbiens - à l'ordre, s'il vous plaît! - de Dubuc
peut être le remplaçant de M. Blais (Terrebonne)?
Une voix: Avec la même autorisation.
Le Président (M. Bélanger): Avec la même
autorisation. Je vous en remercie. Bienvenue à M. le
député d'Ungava et à M. le député de Dubuc.
J'appelle donc à la table l'Association des garderies de qualité
de l'ouest de l'île de Montréal-Association of Quality West-Island
Private Day-Care Centres.
Si vous voulez vous approcher de la table. Bonjour! Je veux vous
expliquer rapidement nos règles de fonctionnement. Nous avons une
enveloppe globale d'une heure pour votre groupe. On vous demanderait de
présenter votre mémoire. Vous avez vingt minutes ferme pour cette
présentation et quarante minutes de discussions avec les membres de la
commission. Je vous prierais aussi de bien vouloir Identifier vos porte-parole.
Chaque fois que vous avez à prendre la parole, durant la période
de questions, s'il vous plaît, si vous pouviez vous
rappeler de vous identifier. C'est pour les gens qui font la
transcription du Journal des débats. Eux, ils ne vous connaissent pas.
Je vous remercie. Si vous voulez procéder.
Association des garderies de qualité de l'ouest de l'île de
Montréal
Mme McPherson (Linda): Bonjour tout le monde! Good afternoon
everybody! My name Is LJnda McPherson. I would like to thank you, Mme la
ministre, for hearing us at this parliamentary commission. First of all, I
would like to introduce ourselves. My name is Linda McPherson...
Le Président (M. Bélanger): If you want to speak in
English, you can, but would you please speak slowly? Somebody here asked me
that. (15 h 45)
Mme McPherson: Okay. To my right is Daniel Hrycyk, a member of
our association; to his right is Susan Peebles, also a member of our
association, and to my left is a parent representing the parents on the private
day-care side.
First, I would like to start with the identification of our organization
and a little bit of overview of our members. Our name is the Association of
Quality West-Island Private Day-Care Centres, "l'Association des garderies
privées de qualité de l'ouest de l'île de Montréal".
We represent over 400 children and, as our name says, we are dedicated to
quality day-care services.
I would now like to begin a discussion on the nonfinancial aspects of
"Pour un meilleur équilibre". Despite a declining birthrate, the number
of children requiring day-care services is estimated to increase by 8.9 % from
1988 to 1994 due to the increasing number of working women. All day-care
centres accounted for only 17.6 % of demand for child-care spaces as of March
31st 1988. Private day-care centres play a major role in the provision of
child-care spaces in the province of Québec, notably in the Metropolitan
Montréal Area. And if you notice, at the very bottom, we present the
spaces provided by private day-care centres: Total Québec, 24.5 %;
Metropolitan Montreal Area, 31.5 % and all other Québec, 18.2 %. I would
also like to draw your attention to the estimate for the West-Island Section,
which Is a little bit more than 50 %.
Right now, I would like to make two... hypotheses. The urban environment
of Metropolitan Montreal is characterized by a faster, more stressful and
hectic pace of life versus the more tranquil less hectic and less stressful
pace of life experienced by rural dwellers. This leads to a lower desire by
parents themselves in Metropolitan Montreal to be involved In the
administration and operation of their child's day-care centre: their focus on
career is high and they prefer to spend their evenings and weekends with their
family and leave the administration of their child's day-care in the
hands of competent professionals. High career focus is a function of the
requirements of the chosen profession versus a low desire to be highly involved
in the administration and operation of their child's day-care centre. I am sure
that, as a busy career woman, Mme Tremblay, you can easily relate to this
point.
I would now like to discuss the determinants of quality day-care
services. What makes quality in a day-care centre? Number one Is the physical
elements. As noted in section 4.1 of "Pour un meilleur équilibre", all
day-care centres are subject, regardless of their status, to the same bureau
regulations setting quality standards. In fact, as seen in the attached
photographs included in our package, the three photographs of the day-care
centres in our association, a private day-care centre will often surpass the
Bureau's own requirements with respect to the physical elements.
Number two is staff qualifications and motivation. Our association is
completely in agreement with the point of view stated In section 4.1 of "Pour
un meilleur équilibre" that the quality and competence of personnel are
a key determinant of quality day-care services. It is also stated in "Pour un
meilleur équilibre", section 4.1.1, that, in general, a lower percentage
of staff at private day cares have recognized child training versus the staff
at nonprofit centres. However, our association prides itself in meeting and
often surpassing the minimum staff qualification requirements set out by the
OSGE. In the same section, it is correctly pointed out that the lack of
financial resources is a key factor behind this general phenomenon: without
staff salary subsidies, private day-care centres cannot possibly hope to match
the salary levels enjoyed by staff at nonprofit centres. Our association feels
that subsidies for staff training and upgrading must go hand in hand with staff
salary subsidies or there will be a dramatic negative impact on staff
motivation and turnover, resulting in poorer, not improved quality. The logic
behind this hypothesis is outlined In Appendix A that is attached.
In this fashion, the Government of Québec will have to bear
direct responsibility for negatively impacting the quality of life for children
of private day cares who, as has already been indicated, play a key role in the
provision of child day-care services, notably in urban areas.
Now, I would like to talk about the degree of parental involvement. In
the area of degree of parental involvement as a determinant of quality day-care
services, our association has a major difference of opinion versus that stated
in "Pour un meilleur équilibre". The Government is clearly implying that
if parents de not have prime responsibility In the establishment and operation
of a day-care centre, then the quality of the services must be poor. Also,
the absence of
prime parental responsibility in the establishment and operation of a
day-care centre discourages the consistency of values between the family and
the day-care environment, thereby having a negative impact on the day-care
milieu. The Government is also implying that parents are qualified to develop
the day-care's educational activities program, therefore the day-care staff is
not qualified to develop a day-care's educational activities program without
parental involvement. It is also implying that parents want to be involved in
the establishment and operation of a day-care centre.
Our association would like to address each of the three above implied
conclusions: 1. Our association's day cares offer high quality services without
major parental involvement, limited to the parent participation through the
consultative committee. We are a group of individuals with very high moral
standards and wholesome values consistent with those of our children's family.
We take pride in providing high quality services. Therefore, we are living
proof that major parental involvement is not a determinant of the quality of
day-care services. 2. Parents de not logically have any basis for the direction
of pedagogical activities since they de not have any formal training and
expertise in this area. After all, day-care staff are just as unqualified to
direct parents as are lawyers on how to Interpret the law or parents who are
plumbers on how to connect pipes. On the one hand, "Pour un meilleur
équilibre" very correctly states that day-care salaries are amongst the
lowest for people having this degree of qualification. On the other hand, it
states time and again that parents who do not have any of these qualifications
are perfectly capable of directing the pedagogical activities. The net result
is a complete insult to the professionalism and qualifications of day-care
staff.
As a result, it is quite common that major parental involvement in the
direction of pedagogical activities at nonprofit day-care centres produces
significant staff frustration and demotivatlon. 3. A verbal survey of parents
having children attending our association's day-care centres indicates that
they do not want to play a major role In the operation of the day care. Their
point of view is that they are paying good money for the service and are
comfortable In leaving the operation of the day-care's pedagogical program In
the hands of qualified and competent professionals. This can therefore leave
them to devote their precious free time, after allowing for the demands of
their career, to their children at home versus Immersing themselves In the
operation of the day care. After all, if they had all this spare time, why
would they need a day care for their child, in the first place?
The Government Is therefore completely wrong In assuming that all
parents want this prime responsibility. It Is also wrong in thinking that the
koy is to provide more assistance to the parents. Afterwards, when we get into
the discussion part, I am sure that Susan Lang, one of our parents, will be
more than happy to state her point of view.
It is difficult to understand how that same parent can, on the one hand,
state that private day cares cannot offer quality care and, on the other hand,
aspire to send his or her children to a private elementary school because it is
of high quality. For example, you do not hear private high schools called
profit high schools.
I would like to talk a little bit more about the status of nonprofit or
profit. Our association also has a major difference of opinion versus that of
the Government with respect to a day-care's status as either nonprofit or
private as a determinant of quality day-care services. In this area, the
nonprofit day-care community and the Québec Government are in clear
agreement: private day care cannot offer quality services.
Our association finds the above generalizations most disturbing. We are
living proof that these notions are completely untrue. I would just like to add
here that, yes, of course, there are bad apples, but there are bad apples on
both sides. The key to our success is that we are giving parents In our
community what they want: a high quality day-care service that does not require
major involvement on their part.
I would like to have a brief discussion on the logistic realities of
creating new day-care spaces. In light of opinions we have just expressed in
the area of parents' own desires to be involved, especially in urban areas, our
association is convinced that the proposed increases In technical and
informational assistance will de very little to stimulate parental involvement
- again, notably In urban areas. The net result will be a significant
under-achievement in the number of new spaces created versus the Government's
projections.
It is therefore crucial for the Government to note that despite its own
wishes, it cannot force parents to be involved in a major fashion in the
establishment and operation of a day-care centre. Involvement cannot be
legislated, It must be desired.
Right now, I would like to pass the floor on to Daniel Hrycyk, who will
have a discussion on the financial aspects.
M. Hrycyk (Daniel): Although our association commends the
Government on its recognition that private day cares are in need of subsidies,
we are also very disappointed with respect to the extent of the subsidies. In
section 5.1.2 of the document, it is pointed out that day-cares subsidized by
the Province's nonprofit centres are already confronted with financial
problems, particularly those arising from the following factors: the real cost
of service operations increases in operation expenditures because they
offer better working conditions for their staff, they say, and because
the subsidies barely allow for salary increases and other ajustments required
to maintain the quality of services.
In light of the above excerpts, our association wishes to ask the
following key question: If subsidized day-cares face financial problems despite
the fact that they already receive subsidies, how are the day cares in our
association able to offer high quality services despite the fact that we
currently de not receive one red cent of Government subsidies? The answer is:
Sound management.
Our association is well aware of numerous examples of wasteful
management by nonprofit day-care centres. In section 3.2.4, it is stated that
private day cares will, however, be subject to the same development criteria
which regulate the development of services managed by parents, notably with
regard to regional planning. Our association's position on this matter is that
we will not conform to regulations on regional development since we de not
receive any startup subsidies. All financial risk is assumed by us, the owners,
and not at all by taxpayers.
The financial impact of funding 60 new spaces with the financing formula
proposed in 'Pour un meilleur équilibre" is outlined in Appendix B
attached. This assumes 10 babies and 50 children over 18 months of age. The net
result? A total cost to taxpayers of over 1 000 000 $ over the first five years
for a nonprofit centre versus 88 000 $ for a private day care, a difference of
927 000 $, or nearly 16 000 $ per child.
Moreover, if, in the above example, there were no spaces for children
below 18 months of age, the private day care would receive a total subsidy of
approximately 3 000 $ per year or 15 000 $ over five years, versus over 1 000
000 $ for a nonprofit centre. This is inconsistent with the federal
Government's Bill C-144 on child care services wich dictates that private
day-cares must also have meaningful subsidy levels in order to ensure that
quality child-care services are made available to all Canadian children, not
just children at nonprofit centres, all children.
By providing significant subsidization of nonprofit day cares and only
token subsidization of private day cares, the Government will give nonprofit
day cares a significant advantage over private day cares, thereby eliminating
and not creating healthy competition. The net impact? Movement towards lowering
the quality of life for children at private day cares.
The Government surfaces a hypothesis, In section 5.1.2, that it is
difficult to provide subsidies to private day cares because there is no
guarantee that these subsidies will be utilized for the pursuit of higher
quality. This hypothesis Is completely false. In fact, the only thing that this
hypothesis serves to illustrate is complete abdication of the Government's
own respon- sibilities towards improving the quality of life for the
significant number of children already enrolled in private day cares.
We do not wish to simply critique the proposals without offering any
constructive recommendations to solving the dilemma facing all of us. These
recommendations are offered in section V attached and will be discussed after
the conclusion section that follows. Adoption of our recommendations would
clearly produce the following net results: more spaces, higher quality spaces
and a significant saving to taxpayers. We are living proof that successful
mobilization of the private sector can create many new quality day-care spaces
and at a significantly lower cost to taxpayers.
So, what can we conclude? In general, the document is recognized as a
major commitment by the Government of Québec to the provision of quality
child care, and we should congratulate it as a serious attempt in this area.
However, it fails to recognize many realities. And implementation of all of its
proposals would have a significant negative impact on the provision of quality
child-care spaces. Specifically, we have said: 1. Our association is - similar
to the Government of Québec, not different - totally committed to the
provision of quality child-care services. The generalization by some parties
that the profit motive and quality child-care are incompatible in all private
day-care centres not directed by the parents is therefore completely false and
misleading to the public.
(16 heures) 2. We all know there is a significant shortage of certified
day-care services In the province of Québec. 3. We have also shown you
that private day-cares play a major role in the provision of day-care services
in the province of Québec, notably in Metropolitan Montreal and
especially the West-Island, over 50 %. 4. All day-care centres, irregardless of
status, must follow the same OSGE guidelines. 5. Our association completely
agrees with the point of view that the quality and competence of personnel play
a key factor In the child's physical, mental and affective development.
However, subsidies for staff salaries must also be provided to private centres
along with the incentive for staff Improvement. Otherwise, the net impact will
be serious staff demotivation and higher turnover resulting in poorer, not
Improved quality. 6. We have shown that major parental involvement in the area
of pedagogical activities is completely unnecessary as a determinant of quality
day-care services. In fact, it can be argued that parents de not logically have
any basis for the direction of pedagogical activities since they de not have
any formal training and expertise in this area. As a result, it is quite
common that major parental involvement in the
direction of pedagogical activities at nonprofit day-care centres
produces significant staff frustration, demotlvation and high turnover. 7. The
document "Pour un meilleur équilibre" surfaces two completely
contradictory hypotheses with respect to staff qualifications. On the one hand,
it very correctly states that day-care salaries are amongst the lowest for
people having this degree of qualification. On the other hand, it states time
and again that parents who de not have any of these qualifications are
perfectly capable of directing pedagogical activities. The net result is a
complete insult to the professionalism and qualifications of day-care staff. 8.
The blas inherent in "Pour un meilleur équilibre" towards nonprofit
centres does not respect the choice of parents, notably in urban areas. The
document Is very noticeably absent of any survey inquiring into parents' own
preferences - not the Government's preferences - for centres requiring a major
Involvement on the parents' part versus centres where their involvement is
limited to membership on the consultative commitee and on a willingness to de
so. 9. Reliance on the parents, especially in urban areas, to create new spaces
is unrealistic in light of the tremendous time commitment and complexity of a
start-up project. The net result will be a significant underachlevement in the
number of new spaces created versus the Government's projections, again notably
in urban areas. 10. The proposed financing formula will create a significant
disequilibrium - not an equilibrium - between nonprofit centres and private
centres. 11. The hypothesis that it is difficult to provide subsidies to
private day-cares because there Is no guarantee they will be utilized for the
pursuit of higher quality is completely false. 12. Private day-cares not
administered by the parents will not conform to regulations on regional
development since they de not receive any start-up subsidies. All financial
risk is assumed by the owner and not by taxpayers. 13. "Pour un meilleur
équilibre" is inconsistent with the Federal Government's Bill C-144 on
child-care services. 14. Successful mobilization of the private sector can
create many new quality day-care spaces and at a significantly lower cost to
taxpayers.
So, what de we recommend? How can we help?
First of all, we should adopt the financing formula or the Government
should adopt the financing formula outlined in Appendix C, with the provision
that operating subsidies to private day-cares are conditional - that is fine -
on employees' salary parity with employees at nonprofit centres using T-4 slips
as proof. Proof cannot be provided, believe me.
2. do not provide any start-up subsidies to private day-cares but, at
the same time, de not subject them to regional development guidelines. In this
fashion, the only subsidy to private day-cares would be the variable operating
subsidy, variable in the sense that the only liability to taxpayers would be
for the number of spaces occupied, not for the number of spaces available or
for the fixed cost of starting up the centre. 3. Provide much stiffer penalties
for violators of the regulations on day-care centres in order to discourage the
entry of unqualified and undesirable individuals into the day-care sector.
And last, use part of the substantial savings generated by a
recommendation in Appendix C to hire additional inspectors. The prospect of
stiff penalties along with frequent inspections would create a
significant...
Le Président (M. Bélanger): May I ask you to
conclude right now?
M. Hrycyk: Yes. Those are my last three lines. So, there would be
a deterrent to unqualified, undesirable individuals. The net result of our
recommendation would be more spaces, higher quality spaces and, very
importantly for everybody, significant savings to taxpayers. Thank you very
much.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Mme la ministre,
auparavant?
Mme Gagnon-Tremblay: I want to thank you. As my colleague has to
leave in a few minutes, on va lui passer la parole.
Le Président (M. Bélanger): Yes, for sure.
Allez-y.
M. Thuringer: Merci, M. le Président. Thank you for your
brief. Can you Just fill us in a little bit on your background? How long has
your association been in operation?
Mme McPherson: We have been in operation since the beginning of
December 1988.
M. Thuringer: Of 1988? Mme McPherson: That is right.
M. Thuringer: And if I understand correctly, you have seven
members?
Mme McPherson: That is right.
M. Thuringer: What is the average size of the nurseries, day
nurseries or day-care centres?
Mme McPherson: 60 children.
M. Thuringer: You have talked obviously a
great deal, in your name even, of quality.
Mme McPherson: That is right.
M. Thuringer: One of the things that becomes somewhat difficult
when we talk about it is that even with a good number of inspectors, how can
one assess that quality and I want to hear from you, when you speak about
quality, what Is it that makes up that mass.
Mme McPherson: Okay. As I see it there are three major things
that make up a quality day-care program. One is the physical setting: the
building, the cleanliness, the space, the way it is orientated. Is it child
orientated? Is It adult orientated? de you have high sinks? Low sinks? The
physical setting. How much space Is there per child?
The second fact that makes up quality day care is staff qualifications.
What kind of qualifications de the teachers have? Are they people just off the
street? Day care is not just babysitting. It is far more than that. There is a
tremendous amount of programming involved, and background knowledge. Myself, I
have gone to school for seven postsecondary years to study the child under five
years of age. So, I think that a lot of it is to recognize that it is not just
baby-sitting. It is not putting children in a room and keeping them there for
seven or eight hours a day. It has to be very carefully planned and
organized.
And this, of course, you can see when you walk into any day-care centre.
When you have been there for fifteen minutes, you can see if there is thought
put into this or not.
The next fact would be a program. This sort of goes into staff
qualifications. What is happening there In the day? What Is happening? What is
going on? After spending a whole day at a day-care centre, you can see what is
going on. To me, those are the three things that make up quality.
M. Thuringer: We have talked a great deal, in the policy paper
and In the discussions so far, about the ratio of people, that is: educators,
child-care workers to children. I would like to hear a little bit of what your
feeling is there. What ratios are you talking about for young children? Are you
in agreement with our...
Mme McPherson: We are in agreement and right now, I should also
state - I do not know if we stated it - that all our day-care centres conform
to the present Bill, 100 % conform to the present Bill. Our policy Is open
doors. We would love anybody from the Government to come and visit our day-care
centres. Our policy is open doors. Come in and see the kind of quality that we
have. As a matter of fact my agent de liaison from the Office des services de
garde à /'enfance has brought several people to my particular day-care
centre to show it off as an example of what can happen.
M. Hrycyk: And you can see in the pictures that we have provided
the kind of buildings that we have. You know the expression "A picture is worth
a thousand words". You can see what kind of facilities we offer. The quality is
in the walls. It is in the structure. It is in the foundation. It is in the
building. We have put the quality into the place. You cannot hide it. We
welcome anybody to come and look at our places to show what kind of quality has
been put in.
M. Thuringer: We also heard a great deal about parents' choice,
Mr. President, and I am wondering, as a parent, what would make you choose
between a public and a private day-care centre? What would you be looking
for?
Mme Lang (Susan): As he said, my prime criterion is quality. Now,
what am I looking for when I am choosing? The physical setting is very
important. The windows, the space, you know, all that has already been
mentioned. When I choose a day-care centre, how am I greeted when I walk in? I
look at how the curriculum is presented to me, the liaison, the rapport that I
have with the teacher, with the whole staff there, which has been excellent
from the beginning.
M. Thuringer: Would the fact that the day-care centre Is close to
your home be a very determining point as opposed to being a few miles away?
Mme Lang: It is not a very determining point in that the day-care
centre that I presently attend is not two minutes away, it is convenient in
that my husband drives to work and it is on the way to work. But it is not a
block away from my house.
M. Thuringer: Does your association have any private day-care
centre? de you run any private day-care centre on a contract basis, let us say,
with an industry on the West-Island or with a school?
M. Hrycyk: No.
Une voix: None whatsoever.
M. Thuringer: What is your view concerning day-care centres in
the workplace?
M. Hrycyk: We think that it is an Important area of need. It is a
responsibility that commerces and businesses should share. It is a social
responsibility and we think that it is very proper that large businesses play
their part as well in the provision of quality child-care space to the people
who work In their institutions. We have absolutely no problem with that. We
think that it
is a very necessary component.
There are a number of different ways to deliver quality day care and a
number of different ways so that they can coexist. There is one philosophy, the
nonprofit philosophy, our philosophy, the private philosophy, there Is child
care sometimes In the child's home, there is In a workplace. There are
different ways of delivering quality child-care services, and there Is room for
coexistence for all of them.
M. Thuringer: We have chosen, as a government, to put the
emphasis on nonprofit daycare. What de you feel? I have no argument with the
fact that quality and service can be given in a private sector and, in some
Instances, whether it is private or public, that is not the issue. What would
you see as the appropriate balance, given the problems we have in terms of
limited budgets and so on? What would you see as the balance between publicly
and privately run day-care centres in Quebec?
M. Hrycyk: As far as giving a specific number, it is hard to say
what is the exact ratio. The only thing we can point out Is that we are living
proof that successful mobilization of the private sector can create many
quality child-care spaces, and at a significant cost to taxpayers. We did not
receive one red cent of anybody's subsidies to create our centres and yet, we
have 400 very high quality child-care spaces. We have done this without any
cost at all to taxpayers.
M. Thuringer: And are they all making profits and doing well?
M. Hrycyk: "Profit" Is a word that personally I have a problem
with. You de not send your child to a profit high school or to a profit
grade-school. You send your child to a private school. The word "profit"
implies a lot of things. We are private centres, which means that our
philosophy is that the administration and the operation of the centre Is
carried out by competent professionals, and that is our philosophy.
M. Thuringer: But what are you doing in terms of your objective?
You have to survive and you are not getting any...
M. Hrycyk: After our salaries, as It has already been said in a previous
presentation, there is virtually nothing left in the business. The simple fact
that you can see this... First of all, we have to charge competitive rates to
the parents. We have to pay competitive salaries to the staff. There are the
mortgages. After all that is done and accounted for, there is not much
leftover, I can assure you. If the non profit centres who already receive 70
000 $ a year in grants for day-care centres of 60 spaces are crying wolf, that
they cannot make de with that kind of grant, can you imagine how much we have
leftover? It is not magic. We cannot charge sky-high rates. We cannot pay very
low salaries. We have to be competitive in all these areas. When you look at it
very carefully, it does not take a financial genious to see that there Is not
much leftover. When you look at the buildings that we have, you can see what is
in the quality of those buildings.
Mme Lang: If I may add a point. You asked me before about the
choice between nonprofit and profit. I was once in a nonprofit and I switched
to private - again, I de not like the term "profit" - the reason being parental
involvement, and that is why I am here today. I took the time off - I have a
full-time job - to come here because it is important that I tell you how I feel
as a parent and how the parents in all the day-cares - there are 400 of them in
total - feel, and that is what I have come here to tell you. I am a health care
professional myself and, as it has already been mentioned, my time is full from
8 o'clock. I get home at 6 o'clock at night. I do not have time to devote to
financial or operating aspects, whatever may be. I am paying for a service and
I expect that service to be given to me, period. The bottom line Is quality.
Being myself, as I said, a health care professional, I treat patients, I know
what I am doing and I expect the people whom I am paying to de the job know
what they are doing too. I would not appreciate families telling me how to de
things when they de not have the qualifications to do so. You go through years
of training, schooling to make yourself a professional in this area. That Is
why you are there. (16 h 15)
M. Thuringer: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. I must advise
you that I will try to speak English with you, but it is at your own risk.
I would like to come back to something that you mentioned in your expose
when you said that the policy is inconsistent with the Federal Government's
Bill C-144 on child care services which dictates that private day-care centres
not administered by the parents must also have meaningful subsidy levels in
order to ensure that quality child care services are made available to Canadian
children.
First, I must tell you that Bill C-144 is not yet adopted. I am taking
this opportunity to press the Federal Government into respecting their
commitment to all the provinces in Canada before their election. I hope this
Bill will be adopted as soon as possible.
Another thing I also want to tell you is that even if the Federal
Government decides to give subsidies to commercial day-care centres, It
does not mean that the Provincial Government should de the same. You
know, the choices remain in the hands of the Provincial Government because ft
is still under provincial jurisdiction. Even if the Federal Government decides
to de something, we still have the choice and we want to keep that choice, you
know. We defended our position on the regulations because we did not want to
have national regulations on this, because it is under provincial jurisdiction.
It may be unfortunate for people like you but, if the Provincial Government
decides to make a choice, we are not depending on the Federal Government, we de
not make our choice according to the Federal Government's choice.
M. Hrycyk: We can appreciate that but I think what we feel is
important to outline to you is that deviating from that choice will have
significant negative repercussions on the quality of child care in the Province
of Québec in the private sector. We want to be very clear in saying that
to you. Of course, the provinces have their own jurisdiction. But, doing so in
this case and deviating from the Federal policy will create a significant
negative impact. That is what we are trying to say.
Mme Gagnon-Tremblay: In your énoncé, page 3-B, you
talk about urban environment which is something specific, something special in
Metropolitan Montreal. You say that it leads to a lower desire by parents
themselves in Metropolitan Montreal to be Involved In the administration and
operation of their child day-care centre. I know it is not easy for the opening
of day-care centres, but what kind of difficulties de the parents have? What de
you mean by that, that parents cannot administer the day-care centres as they
de in nonprofit day-care centres?
Mme McPherson: What I am referring to here is that in order to...
I can speak for myself. To open a day-care centre is a full-time job. It took
me over a year to get mine opened. It is not something that I do in my spare
time. It is a full-time commitment to open a day-care centre. This is what I am
stressing. I also feel that parents in the urban area already have jobs. They
are doctors, lawyers or secretaries. They de not have any expertise in how to
open a day-care centre. It takes time to find out what makes a good day-care
centre. How de you make a layout? How de you know how the rooms should be or
where the bathroom should be? I mean, the details are tremendous. The average
person... You de not just sit and think in your spare time that you are just
going to de one. It takes an awful lot of background. I was a teacher for seven
years and when I set to plan out my day-care centre, this is exactly what I
did, planning, based on what I had known for the last seven years. If I did not
have that experience, l would not know where to begin.
M. Hrycyk: We are in very close contact with our parents. We know
what our parents' needs are. They are our market, if you will. And we know
these people lead very busy lives. They drop their child off at 8:30, 9:00 in
the morning. They have to work a hard day. They corns back. The last thing In
the world they want to de is to be immersed, if you will, in a major
involvement in the operation and administration of the day-care centre. These
people lead very busy lives. They want to spend quality time at home in the
evening and on weekends with their family. They are content with leaving their
child in the administration of trained competent professionals.
Mme Lang: If I can speak... As a parent, it is exactly how I
feel. I mean, as I told you before, I have a full-time job and the time that I
do have left is time that I want to spend with my child. My child now, and I am
expecting another child, two children. I do not have the time, as it is now, to
devote to these things.
Mme McPherson: It is not to say that we de not encourage parents
to participate. Parents are welcome to participate. If they have extra time, or
work on a part-time job, if they have their afternoons off, and they want to
come and spend the afternoon, they can come and spend the afternoon. They are
more than welcome. But we de not force them to de this and we de not make them
feel guilty for not doing that. We go on trips. We have parent education
nights. We ask the parents what topics they would like to discuss, what kind of
speakers they would like us to have and what issues. They decide this. We use
them as a consultative committee. We encourage them to participate in that
sense, but it is myself, along with the teachers, who plan the program for the
children. Sure, we like suggestions. Sure, come and tell us: I would like to
see a trip here or a trip there. We take it into consideration but the bottom
line of it is that the professionals, the teachers and myself have gone to
postsecondary school to leam how to de that or qualify to de that.
Mme Lang: I, myself, am on the consultative committee and I am
perfectly satisfied with the rapport that I have with the teachers, with the
day-care centre. We meet once every three months and we discuss issues: Are we
satisfied with the way things are going? de we have suggestions? But I have no
intention to discuss pedagogical activities which I do not have a background
for to start telling anyone what to do. You know, I am sure other parents feel
the same way I do, as I know, because I have been in contact with them a lot
lately. So, that is one of the issues, again.
Mme Gagnon-Tremblay: Thank you.
Le Président (M. Baril): Thank you very much. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Cela me fart plaisir
d'avoir à prendre ta parole devant cette commission et de poser quelques
questions à propos d'un sujet aussi épineux que celui des
garderies, qui touche tout le monde d'ailleurs au Québec. Vous avez pu
vous en rendre compte la semaine dernière, alors qu'il y a même
une délégation d'Inuit qui est venue faire des
représentations à ce sujet. On a des dossiers d'ouverture de
garderies en milieu Inuit qu'on aimerait bien voir débloquer
prochainement. On aura sûrement l'occasion de s'en reparler.
Je voudrais remercier l'Association des garderies de qualité de
l'ouest de l'île de Montréal pour sa présentation. Je ne
peux m'empêcher de déplorer le fait qu'il n'y ait pas eu de
version française du mémoire qui nous a été
présenté. Cela aurait peut-être facilité le travail
de l'ensemble des membres de la commission et l'ensemble des parlementaires
d'avoir une copie française du mémoire, au lieu d'un simple
résumé sur une page 8 1/2 x 14. C'est l'office qui a fait le
résumé.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Pardon! Étant donné que certaines
subtilités de la langue anglaise ont pu m'échapper lors de la
discussion que vous venez d'avoir, il pourrait arriver que j'aie des questions
qui recoupent celles qui ont déjà été
posées, et pour lesquelles vous avez donné déjà des
éléments de réponse. Vous m'en excuserez et
j'espère que vous prendrez le temps, pour que tout le monde comprenne
bien, d'expliquer de nouveau à ceux qui n'auraient peut-être pas
très bien compris toutes les subtilités de votre
démarche.
Dans un premier temps, la première question qui me vient à
l'esprit, en lisant votre texte ou en regardant rapidement votre
présentation, c'est de savoir si, dans le secteur que vous desservez, I
existe d'autres types de garderie que les sept garderies qui sont membres de
votre association? Est-ce qu'il y a, par exemple, des garderies à but
non lucratif dans le même secteur? Il y a des garderies en milieu de
travail. Il y a la garde en milieu familial. Enfin, les différents types
de garderie existent sur le même territoire.
M. Hrycyk: Oui.
M. Claveau: Donc, il est possible pour la clientèle de
choisir entre la garderie sans but lucratif et la garderie à but
lucratif.
M. Hrycyk: Oui. La possibilité de choisir existe. Il y a
les deux genres de garderie, et les parents dans l'ouest de l'île de
Montréal ont la possibilité de faire un choix.
M. Claveau: D'accord. Mais, quand on parle de l'ouest de
l'île de Montréal, on parie d'une superficie qui est assez
grande.
M. Hrycyk: Oui.
M. Claveau: C'est un territoire où on ne peut pas toujours
marcher à pied, le matin, avant d'aller travailler.
M. Hrycyk: Certainement.
M. Claveau: Alors, est-ce que, par exemple... Vous nous avez
fourni ici des photographies de quelques-unes de vos garderies, je suppose.
Est-ce qu'il y a, dans les mêmes périmètres, dans les
mêmes quartiers, des garderies à but non lucratif aussi
accessibles à la même clientèle?
M. Hrycyk: Oui, il y en a. Oui.
M. Claveau: D'accord. Qu'est-ce qui fait, d'après vous,
que les gens choisissent d'envoyer leurs enfants chez-vous plutôt que
d'aller dans les garderies à but non lucratif?
M. Hrycyk: C'est le fait simplement que leur participation d'une
façon très majeure dans le fonctionnement et l'administration de
la garderie n'est pas requise. Ce sont des parents qui sont contents de confier
la garde de leur enfant à des professionnels compétents. Ce sont
des parents qui ont des journées très remplies et ils respectent
le fait qu'on est des professionnels dans le domaine de la garde de l'enfance.
Ils mettent leur confiance en nous pour prendre soin de leur enfant. C'est
très clair dans le cas des parents qui laissent leur enfant dans nos
garderies.
Mme Lang: Je peux vous dire, pour répondre en partie
à votre question, que j'ai changé d'une garderie à but non
lucratif dans le même secteur à une garderie privée
justement pour cette raison. Je n'étais pas membre d'un comité
à cet endroit, mais on me demandait continuellement: Pouvez-vous nous
aider, par exemple pour les rideaux, ou pour faire quoi que ce soit dans la
garderie? En regardant les autres, je me sentais parfois coupable de ne pas
pouvoir donner de mon temps à cette garderie. C'est un des aspects.
L'autre, c'était les locaux, la place même qui était
beaucoup plus intéressante à tous les points de vue. Donc, j'ai
changé de place.
M. Claveau: Est-ce que, d'après vous, dans une garderie
à but non lucratif, tous les parents sont sollicités
régulièrement pour participer à des activités de la
garderie ou s'il n'y a pas quelques parents qui pourraient être plus
intéressés pour toutes sortes de raisons, soit parce qu'ils ont
les compétences, ou qu'ils ont plus de
temps, ou qu'ils sont plus intéressés, ne serait-ce que
pour avoir une activité à l'extérieur de la maison
à l'occasion, qu'ils sont donc Intéressés à
s'engager dans la mécanique, dans le fonctionnement de la garderie,
alors que beaucoup d'autres parents qui envoient leurs enfants à la
même garderie ne sont pas sollicités ou n'ont pas à
intervenir régulièrement?
Mme Peebles (Susan): Si vous me permettez de répondre
à cette question. J'ai une garderie depuis huit ans dans le West-Island
et, même avant que l'office ait décidé d'obliger les
garderies à impliquer les parents au sein d'un comité consultatif
de parents, j'ai toujours eu un comité de parents dans mes garderies,
parce que je crois que le... Je ne peux pas servir un public dont je ne connais
pas les besoins. C'est pour cela que j'associe les parents dans un
comité dans ma garderie du West-Island. J'ai eu une réunion avec
les parents, il y a deux ou trois semaines. C'est une garderie qui a 60 enfants
et qui est pleine. J'ai 60 enfants chaque jour et il y a environ 80 parents. Il
y avait seulement 7 parents qui assistaient à cette réunion.
C'était la même chose, il y a trois mois. Chaque fois qu'on a une
réunion, ce sont les mêmes parents qui assistent. La raison, c'est
qu'ils n'ont pas le temps et ils ne s'intéressent pas. Je ne sais pas
comment forcer les parents à participer. La porte est ouverte. On
aimerait qu'ils participent, mais ils n'ont pas le temps. On ne peut pas les
forcer. (16 h 30)
M. Claveau: Lorsque vous avez fait les demandes... Si je
comprends bien, il y en a plusieurs parmi vous qui sont propriétaires de
garderies et qui exploitent leur propre garderie à but lucratif, parce
que c'est cela, à l'opposé de non lucratif, c'est lucratif.
Est-ce qu'au moment d'ouvrir vos garderies vous avez commencé à
faire des démarches pour recommencer ou mettre sur pied un organisme
à but non lucratif pour avoir peut-être plus de contrôle sur
la garde de vos propres enfants par rapport à une vision que vous aviez
du service de garde, ou si vous y êtes allés directement en vous
disant que vous mettiez sur pied une entreprise privée qui allait donner
des services de garde. Ce sera une garderie qui va être là pour me
faire vivre tout en donnant des services de garde à l'enfance.
M. Hrycyk: C'est la deuxième. Au départ, on a
commencé par des garderies privées pour le simple choix, pour la
différence de philosophie entre les garderies privées et les
garderies gérées par les parents. On est des personnes
professionnelles dans le domaine de la garde à l'enfance et on voulait
être sûrs qu'on contrôlerait la démarche, le
fonctionnement, l'administration de ces garderies. Mais ce n'est pas juste
cela. Connaissant notre marché, nous savions que plusieurs parents
voulaient cela aussi. Ce n'était pas seulement ce que nous, nous
voulions faire. On répond aux besoins de notre marché. Elle
mentionnait que le comité de parents depuis longtemps... Exactement! On
connaît notre marché. On connait nos parents. Les parents
eux-mêmes, dans l'ouest de l'île de Montréal, selon notre
opinion, préfèrent avoir des garderies privées pour leurs
enfants. Ils sont heureux de laisser avec confiance leurs enfants dans des
garderies entre les mains de professionnels compétents. Ils ne sont pas
intéressés à se lancer dedans et à s'immerger dans
l'administration et l'organisation de ces garderies.
M. Claveau: Vous venez de parler de professionnalisme et, tout
à l'heure, dans votre présentation il a été
question à quelques reprises du niveau de professionnalisme ou de
compétence des gens qui travaillent avec des enfants. En quoi
voulez-vous bien me dire une garderie privée à but lucratif
est-elle plus garante d'avoir un service professionnel qu'une garderie à
but non lucratif, dans laquelle les parents ont toute la possibilité de
s'engager et où il y a aussi des professionnels qui travaillent?
M. Hrycyk: Ce n'est pas que c'est meilleur. Il y a le choix entre
les deux philosophies qui existe. C'est le choix des parents de s'engager
complètement ou de le faire quand ils le veulent, de temps en temps,
parce qu'ils sont déjà très occupés par leur
carrière. Ils sont intéressés au bien-être de leurs
enfants. La seule chose qui est importante pour eux, c'est la qualité
pour leurs enfants. On ne veut pas dire qu'on est meilleur ou pire. Il y a
place pour que coexistent les deux genres de philosophie.
M. Claveau: Oui, vous avez probablement raison là-dessus,
mais je reviens à ma question au sujet de la compétence du
personnel. Depuis le début de votre présentation, i semble planer
un doute ou une hypothèse dans le sens que le personnel serait plus
compétent dans des entreprises à but lucratif.
M. Hrycyk: On n'essaie pas de dire ça du tout. Il y a du
personnel très compétent dans les garderies à but non
lucratif. On ne remet en question d'aucune façon la compétence du
personnel dans les garderies à but non lucratif, mais il est sûr
et certain, parce qu'on a engagé du personnel qui venait des garderies
à but non lucratif, qu'ils étaient extrêmement
frustrés par les démarches des parents pour administrer ces
garderies malgré le fait que ces parents n'aient pas les qualifications
requises pour le faire, Ils ont de bonnes intentions. Il y 60 parents, il y a
60 "sets" de valeurs individuelles, mais ce ne sont pas des personnes
qualifiées dans le domaine de la garde à l'enfance. Je peux
même dire qu'à un endroit U y avait eu un "turnover" de tout le
personnel dans une année, tellement il y avait de la frustration. On ne
remet pas en question la compétence du personnel, pas du tout.
M. Claveau: Je voudrais revenir à Mme Lang. Tout à
l'heure, à ma première ou deuxième question, vous avez
parlé de l'Importance des locaux et du fait que c'était plus
agréable, plus convenable et peut-être un peu mieux
équipé, je ne sais pas trop, qu'il y avait tout ce qu'il fallait
pour recevoir les enfants. Vous trouviez que, dans la garderie privée
où vous envoyez actuellement vos enfants, c'était plus
convenable, règle générale, pour les enfants que dans la
garderie à but non lucratif où ils étaient avant. Est-ce
cela?
Mme Lang: C'est ce que j'ai dit, mais aussi que ce n'était
pas l'unique raison. Ce n'est pas du tout la principale raison pour laquelle
j'ai changé de lieu, non plus. C'est à cause du degré de
participation que je peux donner.
M. Claveau: Est-ce que vous conviendrez avec moi que s'il peut y
avoir des garderies à but non lucratif où, pour des raisons de
revenus, de milieu, de contexte, les équipements soit un petit peu moins
bien, autant cela peut aussi se présenter dans des garderies à
but lucratif?
Mme Lang: Je ne peux pas vous le dire. Je peux juste vous dire ce
que je vis moi-même, à l'endroit où je suis.
M. Claveau: Est-ce qu'il y a une grosse différence entre
les coûts de garde dans les deux expériences que vous avez
vécues?
Mme Lang: Très, très minime. La différence
était de 2 $ par jour, donc de 10 $ par semaine. Ces 2 $ ne valaient pas
la peine que je reste où j'étais. Je ne dis pas qu'où
j'étais avant le monde était complètement
incompétent, que c'était horrible, parce que ce serait faux
aussi.
M. Claveau: Vous dites...
Mme Lang: Et je n'aime pas faire la comparaison. On dirait, du
moins pour moi, que c'est un débat entre les profits privés et
non privés; ce n'est pas cela qui est important du tout, pour moi. C'est
d'avoir la possibilité de choisir une place de qualité pour mon
enfant.
Une voix: Bien oui.
Mme Lang: C'est ce qui me préoccupe, comme parent. C'est
tout. Tout ce qui est discuté ici n'est pas ce qui est le plus
Important.
M. Claveau: Étant donné que vous êtes
là et que vous êtes Intervenue dans ce sens, est-ce que l'on doit
comprendre, d'après vos propos, quo pour vous le choix de la
qualité doit passer par la garderie privée ou la garderie
à but lucratif? Est-ce qu'il y a plus de chances, d'après vous,
que le personnel soit plus compétent, que les équipements soient
mieux adaptés ou plus récents, ou tout ce que vous voulez, dans
une garderie privée ou à but lucratif que dans une garderie
à but non lucratif?
Mme Lang: Je ne pourrais pas du tout généraliser
ça. Ce que je vous dis, tout simplement, c'est ce que j'ai vécu,
c'est ce que j'ai pu voir dans mon secteur. Je n'ai pas fait le tour de toutes
les garderies privées et non privées de Montréal. Non, je
ne peux pas vous dire ça du tout.
M. Claveau: D'accord. Donc, ce n'est pas pas un gage en soi que
la garderie à but lucratif soit plus intéressante que celle
à but non lucratif.
Mme Lang: Non.
M. Claveau: D'accord. Dans votre cas, il se trouve que c'est
cela, que ça s'est adonné comme ça, mais ce n'est pas
quelque chose à généraliser. On s'entend là-dessus.
D'accord.
Mme Lang: II y en a - comme on l'a déjà dit - des
bonnes et des mauvaises des deux côtés, j'en suis sûre. Il y
a du bon et du mauvais de chaque côté.
M. Claveau: D'accord.
Mmo Lang: Et c'est la responsabilité des parents de
vérifier, de faire le tour et de choisir.
M. Claveau: J'aimerais savoir de la part de ceux qui ont des
garderies actuellement... Vous nous dites que, dans le fond, c'est vous qui
vous portez garants, si je comprends bien. Vous devez, d'ailleurs, pour
conserver votre clientèle, vous porter garants du personne), de la
qualité, de la compétence du personnel que vous engagez pour
travailler dans vos garderies. Est-ce quo les conditions de travail, salaire
horaire, etc., dans les garderies privées sont similaires à ce
qui se passe dans les garderies à but non lucratif?
Mmo Peebles: Dans les garderies que nous représentons ici, dans
le West-Island, les salaires que nous payons aux employés qui
travaillent pour nous sont comparables aux salaires payés dans les
garderies à but non lucratif. La moyenne de salaires dans la garderie
que j'ai est de 7,50 $ l'heure. C'est comparable.
M. Claveau: Est-ce que le personnel que vous engagez...
Mme Peebles: Qui sont qualifiés.
M. Claveau: ...ce sont des gens qui ont déjà
travaillé dans les garderies à but non lucratif et qui
préfèrent aller chez vous, ou si ce sont des
gens qui viennent de l'extérieur du réseau?
Mme Peebles: II y en a qui ont changé, pas tous, mais il y
en a qui ont déjà travaillé dans des garderies à
but non lucratif. Il y en a qui ont changé, mais ce que Je peux dire,
c'est qu'au taux de 7,50 $ j'ai des employés qui sont avec moi depuis
cinq ans, six ans. Pourquoi restent-ils? C'est parce qu'ils sont satisfaits du
salaire qu'ils gagnent. Je pense qu'ils pourraient avoir une place mieux
payée que ça, parce que les gens qui travaillent dans les
garderies méritent beaucoup plus pour les qualifications qu'ils ont.
M. Hrycyk: il y a une chose qu'on peut dire, c'est que si on
recevait les subventions, on peut vous assurer non seulement qu'on pourrait
offrir les mêmes salaires, mais qu'on pourrait facilement les surpasser,
parce que nous avons une saine gestion. Si on recevait les subventions qui
existent présentement du côté des garderies à but
non lucratif, on dépasserait même les salaires payés dans
les garderies à but non lucratif. On pourrait faire cela.
Mme McPherson: I cannot help but ask you to ask yourselves if we
can de that, what is happening to all the public money right now that has been
given to all the non-profit centres? They get so much more than we already de
now. We get nothing. They get so much more. What is happening to that money? If
we can de what we can de now with nothing, with no government money, what is
happening to the extra 4,50 $ a day that they are getting now? Why is the
average salary of day-care workers now not at 10 $ to12 $ an hour? Why?
M. Claveau: On me dit qu'il me reste une question. J'aimerais
parier de la participation des parents. Vous nous avez dit que les parents
pouvaient participer, selon leur intérêt, à des
comités consultatifs et éventuellement donner leur opinion, etc.
Qu'est-ce qui se passe dans le cas d'un parent ou d'un groupe de parents qui
envoient leurs enfants dans vos garderies depuis quelques mois, quelques
années même, et qui tout à coup ne sont plus d'accord avec
les politiques de la garderie? Ils veulent maintenir leurs enfants chez vous
parce qu'ils sont plus près et pour toutes sortes d'avantages, mais ils
ne sont pas d'accord avec les orientations de la garderie et ils se rebiffent
un peu sur la façon dont cela pourrait être géré. SI
un cas semblable se présentait, qu'est-ce qui se passerait avec ces
parents et ces enfants?
M. Hrycyk: Comme dans une garderie sans but lucratif, ils
auraient toujours la possibilité de prendre leur enfant et de le mettre
dans une garderie qui est plus près de leur propre philosophie. Dans une
garderie à but lucratif, pour 60 enfants, disons, vous avez 60 "sets" de
valeurs, 60 sortes de parents qui n'ont pas tous la même opinion ni la
même attitude. Et, des fois, on rencontre, là aussi, des parents
qui ne sont pas toujours d'accord avec la philosophie d'autres parents. Dans
les garderies comme les nôtres, s'ils ne sont pas d'accord avec la
manière dont les choses sont présentées, Us ont toujours
la possibilité de mettre leur enfant dans un autre centre plus
près de leur vision de la garde de l'enfance.
M. Claveau: Cela veut dire que vous pouvez tout simplement
refuser de recevoir leurs enfants à l'avenir, si cela...
M. Hrycyk: Non, on ne les refuse pas du tout. Mais on a nos
politiques, nos normes et notre façon de faire les choses. C'est fait
d'une façon majoritaire, selon les souhaits des parents de notre
garderie. On respecte le choix de la majorité. On connaît notre
marché. Il y en a toujours qui feront exception. Cela existe. C'est la
"human nature", la nature humaine. Il y a des personnes qui ne sont pas
toujours d'accord avec ces choses.
Mme McPherson: For example, there was an issue at our day-care
centre just recently. We now open at 7:30 in the morning. Several parents had
asked me if it was possible to open earlier. So, I had a survey with all the
parents and we found out that only 4 % of the total 60 children, in fact,
needed it before 7:30. So, of course, 4 % does not warrant a big change of
opening earlier. However, if it was 50 % or a greater number of parents who
requested to have this change to 7:00 instead of 7:30... These are my clients,
of course.
M. Claveau: C'est mineur dans la gestion générale
de la garderie.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava...
M. Claveau: C'est plutôt petit comme...
Le Président (M. Bélanger): ...si vous voulez
remercier notre groupe. C'est tout le temps dont on disposait.
M. Claveau: On me dit que le temps est écoulé.
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement!
M. Claveau: On aurait pu en discuter encore pendant un certain
temps, cela aurait été agréable. Il m'a fait plaisir de
vous poser des questions et de pouvoir connaître vos
préoccupations au sujet du projet de réforme des services de
garde à l'enfance, et d'alimenter la réflexion
générale que nous faisons sur ce dossier.
le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je tiens à vous remercier pour votre
excellente présentation. Je pense que vous nous avez
démontré que vous avez à coeur aussi les enfants du
Québec. Je voudrais on plus vous féliciter pour votre
français. Je souhaiterais que mon anglais soft aussi bon que votre
français.
M. Hrycyk: Merci beaucoup.
Mme McPherson: Merci beaucoup. (16 h 45)
Le Président (M. Bélanger): Merci. La commission
des affaires sociales remercie l'Association des garderies de qualité de
l'ouest de l'île de Montréal, The Association of Quality
West-Island Private Day-Care Centres, et Invite à la table des
témoins le Mouvement pour la défense et l'avancement des
garderies privées du Québec inc.
Bonjour, bienvenue à la commission. Pour vous expliquer un peu
nos règles de fonctionnement, vous avez un maximum de vingt minutes pour
faire votre présentation - et c'est ferme, on doit malheureusement
limiter parce qu'il y a beaucoup de mémoires à entendre - et, par
la suite, il y a une période de quarante minutes de discussions avec les
membres de la commission.
Avant de commencer, je vous demanderais de bien vouloir identifier vos
porte-parole et les autres membres de l'équipe. Puis vous pourrez
procéder à la présentation de votre mémoire. Je
vous remercie.
Mouvement pour la défense et l'avancement des garderies
privées du Québec inc.
Mme Carpentier (Marthe): Merci, M. le Président. Je
m'identifie, Marthe Carpentier, porte-parole du Mouvement pour la
défense et l'avancement des garderies privées du Québec
Inc.; à ma droite, Mme Marcelle Dufour, travailleuse en garderie;
à ma gauche, Mme Camille Laporte, également travailleuse en
garderie. Elles sont toutes les deux membres du mouvement.
Le mouvement a pris naissance le 25 octobre 1985. Les principaux
objectifs du mouvement étaient d'améliorer la situation des
garderies du Québec, des garderies privées. Les membres sont
aussi bien des professionnels, des psychologues, des sociologues, des
travailleurs de garderie, des propriétaires de garderie, ainsi que des
parents. C'est un mouvement qui a été créé pour
regrouper tous les Intervenants à tous les paliers des garderies
privées du Québec.
Lors de l'adoption du projet de loi sur les services de garde à
l'enfance, en décembre 1979, les services de garde étaient alors
sous la juridiction du ministre des Affaires sociales. Cette juridiction
était compréhensible en raison du fait que ce ministère
avait certaines préroga- tives d'un véritable ministère de
la famille et vu le fait, d'autre part, qu'il n'existait alors au Québec
aucun ministère de la famille.
Par arrêté en conseil du 29 septembre 1982, le
gouvernement, pour des raisons strictement politiques, modifiait la juridiction
on matière des services de garde à l'enfance et soumettait
l'Office des services de garde à l'enfanco à la juridiction de la
ministre déléguée à la Condition féminins.
le Mouvement pour la défense et l'avancement des garderies
privées du Québec considère que les garderies ne sont
aucunement et n'ont jamais été une "affaire de femmes", mais
d'abord et avant tout une affaire de famille. Bien sûr, les femmes
étalent et sont encore aujourd'hui largement concernées par la
problématique des services de garde. Toutefois, considérant
l'Implantation du ministère de la famille et d'une politique
québécoise de la famille, le mouvement considère que le
gouvernement doit maintenant soumettre la juridiction de l'Office des services
de garde à l'enfance et toute la question des services de garde au
ministre délégué à la Famille.
Concernant l'énoncé dont on discute depuis quelques jours
devant cette commission, il fait référence, de façon
constante, à des principes politiques avec lesquels nous sommes en
complet accord. Ces principes sont fondamentaux en matière de
garderies.
Toutefois, lorsqu'on regarde les mesures pratiques
préconisées par le gouvernement du Québec, c'est le
désenchantement total. L'écart incroyable de subventions entre
les garderies géréos par les parents et les garderies non
gérées par les parents s'explique très mal, surtout
lorsque l'on considère que l'argent pour de telles subventions vient des
impôts tout aussi bien de parents utilisant les services de garderies
gérées par les parents que de parents utilisant les services de
garderies non gérées par les parents. Aussi, si le gouvernement
ne fait aucune préférence ou favoritisme dans la façon
dont iI va chercher l'argent dans les poches des parents qui placent leur
enfant en garderie et ce, sans égard au typa de garderie dans laquelle
les enfants sont placés, pourquoi fait-il une différence pour ces
mêmes parents quant au choix des garderies quo ces derniers font?
Le Mouvement pour la défense et l'avancement des garderies
privées du Québec est donc en complet désaccord avec
l'actuelle politique gouvernementale qui, à toutes fins utiles, va
creuser un fossé encore plus grand entre les deux types de garderies qui
existent au Québec.
Plus encore, dans l'optique d'une défense globale dos garderies
privées du Québec, nous considérons que les mesures
préconisées par le gouvernement constituent une forme de chantage
à l'égard des garderies privées non gérées
par les parents. le mouvement demande donc fortement au gouvernement de
réviser sa politique, ses prin-
cipes directeurs et son énoncé de financement, afin de
créer un véritable équilibre en matière de
financement des garderies.
Dans son énoncé de politique, la ministre responsable nous
annonçait 4 000 000 $. Cela peut paraître très beau,
lorsque l'on regarde l'ensemble total du montant accordé. Toutefois, si
on regarde plus attentivement à quoi doivent servir ces 4 000 000 $,
c'est le désenchantement total. En effet, très peu de garderies
ont des pouponnières, et, plus encore, très peu de garderies
reçoivent de façon régulière des enfants
handicapés. Les garderies reçoivent très peu de ce type
d'enfants, non point parce qu'elles refusent de le faire, mais parce qu'il en
coûte des sommes Importantes pour chacun des enfants en
pouponnière ou pour chaque enfant handicapé. Si le gouvernement
veut véritablement aider les garderies non gérées par les
parents, il doit modifier ses conditions d'octroi de subventions et transformer
ces 4 000 000 $ en une subvention de fonctionnement pour l'ensemble des
garderies privées du Québec, c'est-à-dire non
gérées par les parents.
D'autre part, notre mouvement a également pris connaissance de
l'article de journal où Mme Loumède fait état d'une
subvention de 8 800 000 $ par année pour combler les déficits des
garderies déjà subventionnées. Le mouvement
considère qu'une telle subvention au déficit encourage les
garderies subventionnées à gérer de façon facile et
Inconséquente leurs garderies, car le gouvernement sera toujours
là pour éponger les déficits. C'est encourager la
dépense, en ayant un crédit gouvernemental illimité.
Le Mouvement pour la defence et l'avancement des garderies
privées du Québec demande au gouvernement de réviser sa
position en matière de financement des garderies non
gérées par les parents, plus particulièrement quant aux
éléments suivants: 1° transformer la subvention de 4 000 000
$ accordée aux garderies privées en une subvention de
fonctionnement distribuée au prorata des places en garderie
non-subventionnée; 2° injecter une autre somme de plusieurs millions
de dollars, à tout le moins une autre somme de 4 000 000 $, afin de
permettre aux garderies non-subventionnées de faire face à la
concurrence et surtout de continuer à offrir les services de
qualité que l'on constate lorsque l'on visite les différentes
garderies privées du Québec.
Les garderies privées, une nécessité dans le
réseau. Le gouvernement parle, dans son énoncé politique,
d'accorder le libre choix aux parents en matière de services de garde
à l'enfance. Il parle également de consolider le réseau
existant. Pourquoi les autorités gouvernementales refusent-elles de
reconnaître et d'apprécier à leur juste valeur des
garderies qui existaient bien avant que le gouvernement ne décide de
tout prendre en main et de créer un nouveau système? Pourquoi
s'acharner à changer une recette gagnante? Les garderies privées
sont soumises à la même loi et aux mêmes règlements
que les nouvelles créées sous l'empire de la législation
de 1979, mais ne jouissent pas, en aucune façon, des mêmes
subventions ou aide financière de la part du gouvernement.
Notre société vit présentement à
l'ère de l'égalité, de l'indépendance
économique et du libre choix. Comment expliquer que le gouvernement
s'affaire à créer des différences économiques en
regard des enfants dont les parents doivent gagner leur vie? Comment expliquer
que les parents de jeunes enfants soient à la merci de décisions
politiques d'un gouvernement sans juste milieu ni équité sociale?
Combien de rencontres, de représentations devrait-on faire au
gouvernement afin qu'il rétablisse ses politiques et corrige cette
inéquité?
La dichotomie imposée par le gouvernement ne repose sur aucune
base raisonnable, puisque toutes les garderies du Québec, soumises
à la loi, doivent offrir un service d'égale qualité sous
tous les angles et dans la gamme des programmes. Le gouvernement impose ses
exigences, mais ne distribue pas de façon uniforme les sommes
nécessaires afin d'obtenir cette norme de qualité.
Au nombre des victimes de cette injustice, il ne faut pas passer sous
silence les travailleurs et les travailleuses en garderie. Encore une fois, ils
et elles doivent être compétents au sens de la loi, mais une
maigre compensation salariale les attend, comparativement aux sommes qui sont
versées à ceux et celles qui évoluent dans les garderies
choyées par le trésor québécois.
Bref, le dernier énoncé de politique gouvernemental, eu
égard aux garderies québécoises, offre encore une
démonstration flagrante de la démesure qui existe entre les
garderies gérées par des parents et celles non
gérées par des parents.
Voici, M. le Président, le résumé de notre position
sur le sujet. Évidemment, vous retrouvez à l'intérieur de
cela une espèce de ramassis de ce que les travailleurs vous ont
présenté, de ce que les propriétaires vous ont
présenté et j'imagine ce que les parents vous
présenteront.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup, madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie de votre
présentation. Pouvez-vous me dire, Me Carpentier, par exemple, combien
de garderies vous représentez? Quels sont les membres de votre
association? Vous êtes une association pour la défense et
l'avancement des garderies; cela peut représenter à peu
près combien de garderies à but lucratif?
Mme Carpentier: Nous avons environ 125 à 150 membres. Je
ne peux pas être plus précise que cela.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui veut dire que c'est pratiquement la
moitié des garderies.
Une voix: Non, ce sont des membres, ce ne sont pas...
Mme Gagnon-Tremblay: Ah! des membres!
Mme Carpentier: Des membres, qui peuvent être et des
propriétaires des garderie, et des parents, et des travailleurs et des
professionnels auxquels, à l'occasion, notre mouvement fait
référence dans une optique bien précise. Par exemple, le
mouvement a organisé des rencontres et des conférences avec
certaines personnes, comme des diététistes, pour Informer les
propriétaires. Ensuite, il y a certaines personnes qui sont venues voir
également les propriétaires de garderie pour leur donner un coup
de main quant à la gestion physique et à la gestion des
ressources humaines des garderies. Il y a également ou une rencontre,
une conférence qui a été donnée par le Dr
Lafontaine, pédiatre à l'hôpital Sainte-Justine. Ce sont
des activités qui touchent, sur plusieurs plans, les activités
normales des garderies.
Mme Gagnon-Tremblay: À la page 3 de votre mémoire,
vous dites que le mouvement considère que les mesures
préconisées par le gouvernement constituent une forme de chantage
à l'égard des garderies à but lucratif et sans but
lucratif, non gérées par une majorité de parents. On sait
qu'il existe, au départ, certaines différences fondamentales
qu'il ne faut pas ignorer. Je pense à toute la question du régime
fiscal, le cas des corporations qui reflète la question du régime
fiscal. On sait que dans bien des garderies, comme on le mentionne, iI n'y a
pas de profit, donc iI n'y a pas d'impôt à payer. Il y a aussi la
question de la propriété du capital et de la plus-value,
naturellement, qui s'accumule au fur et à mesure des années. Il y
a toujours la clientèle qui peut devenir monnayable au moment d'un
transfert. Donc, il y a des différences quand même fondamentales.
Aussi, je me demande de quelle façon les mesures financières
préconisées par le gouvernement constituent-elles pour vous une
forme de chantage? Je pense, entre autres, aux subventions qu'on a l'Intention
d'accorder pour les poupons et les enfants handicapés. Ce n'est pas
nécessairement aux garderies comme telles, à but lucratif ou aux
garderies, à qui nous accordons ces subventions. C'est beaucoup plus
pour aider les parents de sorte qu'ils n'aient pas à payer des sommes
considérables, parce qu'on sait qu'il en coûte beaucoup plus cher
pour, par exemple, garder un poupon ou un enfant handicapé. Je voudrais
que vous m'expliquiez comment vous pouvez croire que cela peut être une
forme de chantage.
Mme Carpentier: Sans être une spécialiste de la
question des personnes handicapées, je sais quand même qu'elles
ont des besoins bien précis, par exemple, en ce qui a trait aux
traitements qu'elles devraient recevoir à l'extérieur, de sorte
que la population des enfants handicapés dans les garderies non
gérées par les parents ne peut pas être énorme. Non
pas, encore une fois, que les garderies refusent de recevoir ces enfants, mais
ce serait vraiment un problème, pour un tas de raisons, parce que ces
enfants ont des besoins bien spécifiques, que ce soit de la
physiothérapie ou des exercices qui doivent être faits de
façon fréquente.
Finalement, après en avoir discuté, on s'est dit qu'un
enfant handicapé aurait probablement besoin d'un éducateur
spécialisé dans le domaine de son handicap. C'est la même
chose pour les pouponnières. Je suis certaine que Mme la ministre a les
chiffres de l'office. Il existe très pou de pouponnières en
garderies non gérées par les parents. Alors, si on prend le
montant de 4 000 000 $ que vous accepteriez de distribuer aux
pouponnières et aux enfants handicapés, la somme que vous voulez
distribuer ne sera pas énorme et n'apportera absolument rien pour
l'ensemble des garderies non gérées par les parents. (17
heures)
Mme Gagnon-Tremblay: C'est sûr que je suis tout à
fait consciente qu'il est possible, effectivement, que cette somme-là ne
soit pas dépensée. Mais ce qui est important pour nous, c'est de
mettre cet argent à la disposition des garderies qui pourraient offrir
ce genre de services.
Je voudrais revenir à l'exposé qui nous a
été fait par le groupe précédent. Ça
semblait être des gens très dynamiques, des jeunes qui se sont
engagés et je ne doute pas non plus de la qualité qu'ils peuvent
donner à cette garderie. Ces personnes venaient nous dire:
Écoutez, nous avons de la difficulté. Nous ne pouvons quand
même pas offrir les mêmes salaires, les mêmes conditions de
travail, ainsi de suite, que dans une garderie sans but lucratif, puisque nous
ne sommes pas subventionnés. Donc, nous ne pouvons pas concurrencer. Ils
nous disaient: Si seulement vous nous donniez un minime pourcentage de la
subvention qui est accordée actuellement aux garderies sans but
lucratif, non seulement nous pourrions très bien fonctionner, mais nous
pourrions même réduire les tarifs.
Croyez-vous qu'on puisse affirmer une chose comme ça? Est-ce
à cause de la gestion comme telle? Parce que, finalement, ce que tous
les groupes sont venus dire depuis la semaine dernière... Je pense qu'il
y a une saine gestion qui se fait actuellement, mais on est venu nous dire
qu'on ne pourra... Actuellement, même avec le statu quo, on se rend
compte qu'on exige beaucoup plus d'argent, ce qui est étonnant. Le
groupe précédent nous disait: Si seulement on nous donnait 4,50 $
- ce qui est donné dans les garderies sans but lucratif - nous pensons
que nous pourrions même baisser ou réduire les
tarifs.
Mme Carpentier Je dois vous dire que j'ai écouté avec
beaucoup d'attention l'exposé qui a été fait avant le
nôtre. Cependant, quant à réduire les tarifs, je ne crois
pas que le mouvement puisse endosser ou préconiser une telle mesure.
J'ai à mes côtés deux travailleuses en garderie et je suis
certaine qu'elles réclameraient de leur employeur leur part du
gâteau si la ministre décidait de verser des sommes d'argent aux
garderies non gérées par les parents. Cela est évident.
C'est la priorité. Les propriétaires de garderies font un gros
effort pour continuer à faire leur boulot, à bien fonctionner
avec des sommes d'argent très minimes. Les travailleurs et les
travailleuses en garderie doivent avoir un petit peu le môme feu
sacré que les propriétaires; sinon, ils ne seraient plus
là. C'est un fait - je n'ai pas de démontration
mathématique à vous faire là-dessus - qu'avec un salaire
entre 4,50 $ et 7 $ l'heure, ce n'est pas payant de travailler en garderie non
gérée par les parents. Alors, si la ministre versait des sommes,
il est évident qu'une grosse partie de ces sommes - en tout cas, pour ce
qui concerne nos membres - devrait aller en premier lieu aux travailleurs et
aux travailleuses en garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Avez-vous l'impression que dans vos
garderies vous donnez, par exemple, un service qui est différent de
celui qui est donné dans les garderies sans but lucratif? Je pense aux
parents qui ont à aller chercher les enfants beaucoup plus tard. Est-ce
qu'il se fait aussi de temps à autre de la garde occasionnelle des
services de fin de semaine pour des cas particuliers? Est-ce vous offrez ce
type de services? En quoi, par exemple, votre service pourrait-il se distinguer
d'une garderie sans but lucratif?
Mme Laporte (Camille): Peut-être pas pour les fins de
semaine, parce que c'est un travail de 40 heures par semaine et plus; 40 heures
auprès des enfants et le surplus est consacré à la
préparation pédagogique ou à des réunions. C'est
sûr que les fins de semaine ou le travail après les heures
requises, ce n'est pas pour nous. On donne nos 40 heures auprès des
enfants et le surplus, c'est pour les réunions, pour se préparer
pédagogiquement.
Mme Gagnon-Tremblay: Si vous pouvez vous exprimer sur cette
formule-là, vous pourrez le faire. Mais je sais que, comme vous
n'êtes pas subventionnés... Je pense à la subvention qui
est proposée dans l'énoncé de politique pour le
fonctionnement des garderies, 45 % des revenus. Je sais que ça ne vous
concerne pas, mais peut-être avez-vous eu l'occasion de vous pencher sur
cette formule. Vous pourrez donner des commentaires si vous en avez, mais
ça ne fait pas partie de votre mémoire.
Par contre, l'exonération financière, l'aide aux parents,
ça vous concerne puisque vous avez aussi dans vos garderies des parents
qui sont admissibles à l'exonération financière.
Pouvez-vous nous dire, à ce moment-ci, si, tel que mentionné dans
l'énoncé, l'aide financière qui sera modifiée vous
satisfait comparativement à ce qui était donné auparavant,
soit un montant de 10,50 $ par enfant par jour et, maintenant, c'est un montant
de 4,75 $ plus 40 % du tarif? Est-ce une amélioration par rapport
à l'autre formule ou êtes-vous en désaccord avec cette
formule d'aide financière accordée aux parents?
Mme Carpentier. Je ne serais pas honnête de vous dire que ce n'est
pas une amélioration. Cependant, si je pense plus
particulièrement aux travailleurs et aux propriétaires de
garderie, cela n'apporte finalement rien de concret à la fin de chacune
des semaines parce que, même en tenant pour acquis que la subvention
serait plus grande, le propriétaire de garderie pourrait expliquer
à son parent: Si tu as un peu plus d'argent, je pourrai probablement en
obtenir un peu plus, de sorte que les taux vont augmenter. C'est changer quatre
trente sous pour un dollar, comme on dit. Il n'en restera pas plus au
travailleur ni au propriétaire de garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela vous touche moins parce que ce n'est
pas une subvention directe, mais, pour les parents qui ont à envoyer
leurs enfants dans la garderie et qui auront à assumer des augmentations
de tarifs, est-ce que cette formule vous semble plus acceptable que l'autre qui
était ridige auparavant? Ou trouvez-vous que cette formule n'a pas
amélioré, par exemple, l'aide apportée aux parents?
Mme Carpentier. Je ne vols pas l'amélioration, le gros pas en
avant qu'apporte cette formule-là. Non. Encore une fois, il faut
toujours penser aux travailleurs et aux propriétaires de garderie. De
changer la façon gouvernementale d'apporter un certain type de
financement, cela demeure très minime.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est dommage que vous ne voyiez pas... Pour
les parents, peut-être... Je ne sais pas si vous l'avez
étudiée à fond, mais est-ce que vous avez informé
les parents de cette formule financière? Non? D'accord.
Je reviendrai peut-être aux comités consultatifs. On en a
beaucoup parié ce matin. On s'est fait dire à plusieurs occasions
que ces comités consultatifs n'étaient pas opérationnels,
et vous avez très bien vu, dans l'énoncé de politique, que
toutes les subventions qui seront accordées aux garderies à but
lucratif seront conditionnelles à ce qu'il y ait un comité
consultatif très opérationnel. Comment fonctionne, actuellement,
ce comité consultatif dans vos garderies? Est-il opérationnel ou,
pour vous, est-ce qu'il vous
apparaît utopique de demander un comité consultatif
opérationnel?
Mme Carpentier :Ni l'un ni l'autre. On ne peut pas dire que
c'est... La relation entre le travailleur, le propriétaire de garderie
et le parent se fait sur une base quotidienne. S'il y a un problème
quelconque, le parent prend rendez-vous avec le propriétaire de
garderie, vient dans la journée rencontrer la personne en
autorité de façon immédiate ou presque. La relation se
fait au jour le jour. Il y a un suivi quotidien là-dessus beaucoup plus
que... D'ailleurs, vous pourrez poser la question aux parents. Ils nous disent:
On convoque un comité trois, quatre ou cinq fois par année. Ce
sont toujours les mêmes quelques parents qui se présentent et on
n'a pas grand-chose à discuter.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qui signifie, finalement, que ce
comité n'est pas opérationnel ou très peu. Mais comment,
par exemple, déterminez-vous vos programmes pédagogiques pour les
enfants?
Mme Laporte: En fait, pour ce qui nous concerne, à la
garderie, notre comité de parents est très actif dans le sens
qu'il se réunit très régulièrement chaque mois et,
au tout début de l'année scolaire, le comité de parents et
les éducateurs se rencontrent pour faire une programmation de
l'année scolaire, des sorties qu'il pourrait y avoir. Il est très
très actif dans notre garderie.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame. Je n'ai pas d'autres
questions, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je vais commencer pas
vous saluer et vous remercier de votre présentation et pour être
venus défendre vos idées devant la commission parlementaire.
C'est encore le meilleur endroit pour parler si on veut finir par s'entendre.
C'est facile de discuter et de se chicaner dans la rue, mais, quand on arrive
dans des endroits où il faut avoir un peu plus de "standing" pour
réussir à émettre nos opinions et à en discuter,
c'est toujours plus agréable et cela a des chances d'avoir des
résultats plus concrets que de se contenter d'en parier à
l'extérieur. C'est pour ça que les commissions parlementaires
existent. C'est un excellent mécanisme en termes de démarche et
je suis toujours épaté par la participation, peu importent les
points de vue défendus. Quand quelqu'un a le courage de venir en
commission parlementaire pour défendre ses idées, cela permet
déjà et cela veut dire qu'on est prêt à faire un
cheminement tous ensemble. Je trouve ça toujours très
Intéressant.
M. le député de Rouyn-Noranda, n'avez-vous pas
demandé la parole?
M. Baril: Allez, allez. Cela va bien. le Président (M.
Bélanger): M. le député d'Ungava, c'est à vous.
M. Claveau: Cela dit, pour reprendre les paroles de mon
célèbre collègue, d'abord, j'essaie de comprendre ce que
vous êtes exactement comme organisation. On parle d'un mouvement, d'un
regroupement de garderies. Il y a du privé là-dedans, vous avez
aussi des garderies à but non lucratif dans lesquelles les parents ne
participeraient pas d'une façon majoritaire. Enfin, comment est
née l'idée de votre association et pourquoi? Quelle est sa
véritable place dans tout le monde cosmopolite des garderies?
Mme Carpentier C'est un mouvement qui est né et qui voulait
regrouper non seulement des travailleurs ou des propriétaires ou des
parents. Le mouvement est né, l'idée a été
lancée comme ça parce qu'on s'est dit: Des fois, II y a
peut-être de bonnes idées qui viennent des travailleurs, des
parents ou des propriétaires. On s'est trouvé une espèce
de lieu de rencontre et un moment pour discuter de ces choses, mais chacun
selon son vécu personnel. C'est ce qui permet de regrouper toutes ces
personnes qui ont parfois des intérêts très
différents, mais qui sont toutes et tous dans le monde des garderies
privées, c'est-à-dire des garderies non gérées par
des parents et non subventionnées.
M. Claveau: Même si c'est à but non lucratif?
Mme Carpentier: Exactement.
M. Claveau: D'accord. Comment votre organisme est-il
financé?
Mme Carpentier Cela se finance comme on le peut. Une fois, cela s'est
financé par un tirage qui a été organisé par les
membres afin d'obtenir les sous nécessaires pour organiser nos
activités.
M. Claveau: Mais est-ce que vos membres ont une cotisation
à payer?
Mme Carpentier II y a une cotisation annuelle de 85 $ qui est
évidemment volontaire. Chaque membre qui veut participer aux
activités, désire être Informé et recevoir la liste
des activités qui auront lieu, paie sa cotisation.
M. Claveau: Mais vos membres sont des unités sur le
terrain ou est-ce que ce sont des regroupements?
Mme Carpentier: Ce sont des unités sur le terrain. Chacun
à sa façon, qui croit pouvoir
aller chercher ou apporter quelque chose à l'intérieur du
mouvement, se joint à nous.
M. Claveau: Par exemple, avez-vous des liens ou faites-vous des
démarches spécifiques auprès des groupes comme
l'Association des propriétaires de garderies du Québec ou
l'association de l'ouest de l'île de Montréal qu'on avait tout
à l'heure, ou des regroupements de ce genre? Est-ce que vous faites des
démarches conjointes avec eux aussi?
Mme Carpentier: Oui. Par exemple, à l'occasion de cette
commission parlementaire, évidemment, il y a eu une consultation avec
les travailleurs, les propriétaires et les parents. Le mouvement a
émis son opinion, a écouté l'opinion des autres
regroupements et des autres associations, puis on s'est rendu compte que nous
allions à peu près tous dans la même ligne de
pensée. Alors, nous nous sommes permis de parler. Notre mouvement s'est
permis de présenter un mémoire avec l'appui de ses membres.
M. Claveau: Avec l'appui de ses membres et après
consultation auprès d'autres associations qui regroupent des
propriétaires de garderies dans la plupart des cas.
Mme Carpentier Exactement.
M. Claveau: Votre organisme est né en 1985.
Mme Carpentier: Oui.
M. Claveau: Mais c'est une démarche spontanée ou
quoi? J'essaie de comprendre un peu. Comment est-ce arrivé dans le
décor? Normalement, on a des associations de travailleurs de garderie ou
dans n'importe quel secteur, des associations de travailleurs ou
d'investisseurs ou de décideurs. Comment le besoin de ce genre
d'association a-t-il pu naître?
Mme Carpentier: Aucun événement bien précis.
Tout simplement, il y a des travailleurs qui disaient: On devrait
peut-être rencontrer des propriétaires, des parents. Ils nous
disaient: On aimerait rencontrer des propriétaires de garderie autres
que ceux de celles que fréquentent nos enfants, etc. C'est né
aussi banalement que ça.
M. Claveau: Mais ce sont les parents, les travailleurs ou les
propriétaires qui se sont assurés de faire la promotion de
ça au départ?
Mme Carpentier: C'est tout le monde et personne en même
temps.
M. Claveau: Une génération spontanée. C'est
incroyable!
Mme Carpentier: Pour le bien-être des garderies.
M. Claveau: Darwin n'en croirait pas ses oreilles. C'est une
farce.
Mme Carpentier: Je l'avais comprise. (17 h 15)
M. Claveau: Le député de Rouyn-Noranda n'avait
peut-être pas compris que c'était une farce. Dès le
début de votre mémoire, dans les premières pages de votre
mémoire, dans le fond, vous nous pariez d'un libre choix pour les
parents. Vous voulez finalement, élargir l'éventail du choix, aux
parents d'après les différentes gammes de services de garde
disponibles, particulièrement dans la garde de jour. Alors, selon notre
interprétation, en regardant cela, on se dit: D'accord, il y a
différentes sortes de services de garde qu'on peut donner, la garde en
milieu familial, la garde, éventuellement, en milieu scolaire par
exemple, en milieu de travail ou dans des garderies indépendantes ou,
enfin, en dehors de tous ces milieux, par quartier, par secteur
géographique. Cela me semble être diverses alternatives de
services à la clientèle. Mais en quoi le fait, par exemple, que
de promouvoir plutôt la garderie privée ou à but lucratif
que la garderie à but non lucratif ajoute-t-il un service nouveau
à la clientèle à laquelle vous vous adressez?
Mme Carpentier: Par le jeu des subventions, je crois que ce qui
va se passer, c'est qu'on va pénaliser le parent qui n'envoie pas son
enfant dans une garderie gérée par les parents. Cela va se faire
par le jeu des subventions. C'est-à-dire qu'un parent qui fait le choix
de rencontrer et de faire confiance aux travailleurs et aux
propriétaires de garderie, plutôt que de choisir sa gestion
personnelle, si je peux m'exprimer ainsi, de la garderie que son enfant
fréquente par le biais des comités, etc., ce parent-là est
pénalisé parce qu'il fait confiance, parce qu'il reconnaît
que les garderies non gérées par des parents sont des garderies
de bonne qualité. On dirait qu'on lui dit: Tu fais un mauvais choix
parce que tu fais un mauvais choix. Le propriétaire de ta garderie ne
recevra pas les mêmes sommes qu'on va donner, par exemple, à une
garderie à but non lucratif.
C'est ce qui résume un petit peu la revendication principale,
encore une fois, tant des travailleurs que des propriétaires. On
explique tout le principe, tout ce qui est derrière le système
des subventions du gouvernement du Québec et le parent se dit: Pourquoi
moi, parce que j'ai choisi une garderie non gérée par les
parents, parce que je ne veux pas m'impiiquer de façon quotidienne
à la gestion comme telle, serais-je pénalisé? Pourquoi la
garderie est-elle pénalisée?
M. Claveau: Je vois deux choses dans cela. D'abord, est-ce que
vous convenez avec moi que
le service que vous offrez n'est pas un nouveau produit sur le
marché? Vous offrez le môme service que la garderie à but
non lucratif du quartier ouvert à peu près à tout le
monde. Bon, ce n'est pas un service spécialisé ou ce n'est pas
quelque chose différent de ce qui est déjà sur le
marché. On n'augmente pas l'éventail des services disponibles.
Tout ce que vous faites, c'est que vous donnez un autre emballage au même
service que celui qui est donné par la garderie à but non
lucratif. À ce moment-là, le problème que vous avez devant
vous, n'en est pas un de permettre un éventail de choix énorme
à la clientèle, c'est de prendre votre part du marché par
rapport au marché qui est actuellement couvert ou occupé par les
entreprises à but non lucratif qui opèrent dans le domaine de la
garderie. Vous êtes en train de faire une lutte de part de marché
avec ce groupe qui s'adresse à cette même clientèle et non
de produire ou offrir un nouveau produit dans la gamme des produits disponibles
en termes des services de garde.
Mme Carpentier: Ce n'est pas une nouvelle part du marché.
Je pense sans prétention que c'est une part du marché que
certaines de nos garderies occupent depuis 40 ans. Elles sont là depuis
bien longtemps.
M. Claveau: Excusez-moi de vous couper la parole, madame. Vous
avez un mouvement qui vise, selon les termes mêmes de la
définition qu'il se donne, à promouvoir l'avancement des
garderies privées du Québec. Donc, si vous voulez promouvoir
l'avancement des garderies privées en offrant le même produit que
la garderie à but non lucratif, votre idée est d'aller chercher
une part du marché qui est actuellement occupée par ce type de
garderie?
Mme Carpentier: Je pense que là, on a un
problème.
M. Claveau: Comment voulez-vous définir autrement votre
genre d'Intervention. Vous nous dites que vous êtes d'accord pour les
multiservices, la gamme la plus Immense possible en termes de services offerts
aux parents. Par contre, vous vous définissez comme étant un
organisme qui fait spécifiquement la promotion d'un emballage d'un
produit particulier.
Mme Carpentier Quand on parle de garderies privées, c'est le
concept dont on s'est toujours servi. Ce sont des garderies non
gérées par des parents et non subventionnées. Je voudrais
qu'on soit sur la même longueur d'onde: quand on parle de garderies
privées, on tout cas, dans les documents qu'on a produits, on parle de
garderies privées, c'est-à-dire non gérées par les
parents.
M. Claveau: Oui.
Mme Carpentier: La part du marché qu'on va avoir, c'est la
part du marché que l'on a. Vous me parliez tantôt de services de
qualité. On doit offrir les mêmes services, la même
qualité de services que celle des garderies subventionnées. On
n'a pas le choix. Nous sommes tous soumis à la même loi et aux
mêmes règlements. On ne peut pas offrir un service de moindre
qualité. Par contre, on nous dit: Les subventions ne sont pas pour nous
autres. Là où le libre choix...
M. Claveau: C'est cela. C'est que votre problème revient
toujours sur une question de: Je veux avoir des subventions. À la
limite, on peut dire...
Mme Carpentier: Je suis d'accord avec vous.
M. Claveau: ...vous avez droit à des subventions, nous
autres, nous n'y avons pas droit et nous voulons y avoir droit. Dans le fond,
le débat...
Mme Carpentier On pose des...
M. Claveau: ...se situa beaucoup plus là qu'en ce qui
concerne la qualité des services, la compétence et tout cela.
C'est: Vous autres, vous avez des subventions, moi, je n'en ai pas et j'en veux
aussi.
Mme Carpentier: Quand il faut avoir la même qualité
et la même compétence...
M. Claveau: D'accord.
Mme Carpentier: ...c'est là l'inégalité,
c'est là le...
M. Claveau: Mais là, j'essaie de comprendre. La garderie
à but non lucratif, dans laquelle les parents s'impliquent, est
subventionnée. On s'entend là-dessus. Elle est
subventionnée, mais dans la mesure où iI n'y a personne qui fait
la promotion de cette garderie parce qu'il y a un bénéfice
à en retirer. Bon. Comme on l'a vu tout à l'heure, quelqu'un peut
être dans l'enseignement ou ailleurs, s'il laisse son emploi pour fonder
une garderie privée, ce n'est probablement pas pour avoir une diminution
de salaire. Peu importe le salaire qu'H va payer à son personnel de la
garderie, en tant qu'investisseur qui a acheté la maison, les
équipements et tout co que vous voulez, son taux de rendement doit
être, pour le moins, en bénéfices nets, égal
à ce qu'il avait avant comme salaire dans l'entreprise privée,
dans l'enseignement ou dans les services de santé, etc.
Donc, il y a un intérêt spécifique dans le fait
d'investir pour retirer de l'argent. Si je mets 100 000 $ pour établir
une garderie demain matin, c'est parce que je vais m'attendre à avoir un
taux de rendement minimal sur mes 100 000 $. Alors, comment voulez-vous
définir, finalement,
la part de bénéfices de l'investisseur dans l'entreprise
privée, qui crée la garderie à but lucratif? Parce que
c'est ça, il ne faut pas se raconter d'histoire. Comment voulez-vous
définir une participation du gouvernement qui ne serait pas une
augmentation de la marge de bénéfices de l'investisseur, ou
garantir que la totalité des sommes, des subventions qui sont
données par le gouvernement sera affectée exclusivement au
service des enfants ou à ce pourquoi elles sont données? On ne
donne pas des subventions pour faire augmenter des bénéfices, on
donne des subventions pour augmenter des services. Comment voulez-vous qu'on
puisse définir ça, en subventionnant une entreprise privée
à but lucratif dont le service à la clientèle s'appelle
une clientèle d'enfants à garder? Mais, c'est un investissement
semblable à celui qu'il aurait fait s'il avait obtenu une concession
d'automobiles, je ne sais pas.
Mme Carpentier: Si c'était l'entreprise
privée...
M. Claveau: Bien, tu mets 100 000 $, c'est pour que cela
rapporte. Si cela ne rapporte pas, tu le mets ailleurs.
Mme Carpentier. S'il s'agissait de l'entreprise privée que vous
décrivez, je n'aurais pas à rendre compte au gouvernement de la
qualité des services que j'offre et je n'aurais pas à respecter
les critères et les standards qui me sont imposés par la loi. On
ne me dirait pas: Voici, à côté de chez vous, il y a la
même garderie qui est opérée de la même façon
que celle que tu gères, mais elle aura une subvention de 4,50 $ par jour
par enfant au permis. C'est là que ça ne fonctionne plus. Le
marché... Une voix: Ce sont les mêmes éducateurs, ce sont
les mêmes gens qui ont été...
M. Claveau: Dans n'importe quel secteur d'entreprise, iI y a des
barèmes, des critères et des taux de rendement et des choses
à respecter. Ce n'est pas propre uniquement à la garderie. Dans
n'importe quoi où vous investissez, iI y a toujours un cadre de
fonctionnement minimal qu'il faut respecter, des critères de
qualité, critères d'environnement, critères de services
à la clientèle, etc., etc., le ministère du Travail,
normes du travail, CSST, tout ce que vous voulez. On exige plein de
critères dans n'importe quel investissement. Un investissement dans les
garderies oblige à observer un certain nombre de critères de
services à l'enfance qui doivent être les mêmes que pour une
entreprise qui n'est pas une entreprise d'investissements, mais qui est une
entreprise de services locale, qui peut retirer des subventions, mais où
l'on va s'assurer que tous les montants investis par le gouvernement, en termes
de subventions, vont être redistribués en services et non en
bénéfices. Je veux bien vous croire lorsque vous dites que
certaines entreprises n'auraient pas de critères. N'importe quelle
entreprise dans n'importe quel secteur a toujours des critères à
respecter. Si vous voulez Investir dans des produits chimiques, iI va falloir
que vous vous atteliez avec le ministère de l'Environnement et il est
probable que cela vous coûtera cher pour passer à travers toutes
les recommandations ou les normes du ministère de l'Environnement.
Mme Carpentier Certainement des subventions.
M. Claveau: II y a des problèmes d'investissements dans
les garderies.
Mme Carpentier: II y a certainement des subventions qui seraient
rattachées à ça si on décidait d'implanter. Il faut
voir ce qui s'est passé. La nouvelle loi dit: Voici, l'État
s'occupe des garderies dorénavant et il crée ce type de
garderies. Celles qui existaient déjà, cela va, on les respecte,
on les laisse là. On établit des normes et des standards qui sont
raisonnables parce qu'on parle de jeunes enfants et tout ça. On
établit un mode de financement et on dit: Vous, les nouvelles garderies,
voici avec quoi vous fonctionnez, en plus d'autres subventions qui sont
là au départ. Il y a un per diem. Il y a une subvention qui a
été accordée pour le nombre d'enfants au permis, mais on
dit aux autres garderies qui étaient déjà là: Vous
allez aussi respecter cette nouvelle loi et ces nouveaux règlements.
Certains délais ont été accordés. On a donné
le temps aux propriétaires de garderies privées de prendre
connaissance de la loi et d'essayer de vivre avec elle, sauf qu'on n'a eu
aucune somme d'argent pour fonctionner de la même façon qu'une
autre garderie qui a des subventions. C'est là notre problème.
C'est là l'inéquité qu'on veut souligner à la
ministre. C'est là qu'on demande: Pourquoi faudrait-il regarder les
budgets des garderies subventionnées grossir et grossir et regrossir
encore une fois et qu'on ne demanderait pas notre part du gâteau, comme
vous le disiez tantôt? On a une part du marché qu'on occupe
déjà et on ne nous donne pas la part du gâteau, et du
nouveau gâteau. C'est là notre problème.
Le Président (M. Bélanger): Je regrette de vous
interrompre. Le temps est écoulé. M. le député
d'Ungava, si vous voulez remercier nos invités?
M. Claveau: Je vous remercie de vous être
prêtées à ce questionnement et d'avoir répondu
franchement à ma question. Je me dois quand même, pour être
honnête, de vous dire que vos réponses ne me convainquent pas
pleinement de la pertinence de diviser l'assiette de financement entre les
différents types de garderies, en termes de subventions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: En terminant, Je voudrais tout simplement
apporter certaines précisions, par exemple, au chapitre des garderies
privées. Je sais qu'il y a une confusion incroyable dans la population:
garderies privées subventionnées, garderies à but
lucratif, sans but lucratif, subventionnées, non subventionnées.
Finalement, c'est un peu pour cela qu'on a mis dans le document
"gérées par les parents", pour les néophytes. Même
vous qui êtes dans le milieu, vous dites "garderies privées",
alors qu'on sait que toutes les garderies sont privées. Elles sont
toutes privées. Vous en avez à but lucratif et à but non
lucratif. On comprend que pour la population, c'est très difficile de
faire la différence. Je vous remercie, mesdames, de la
présentation de votre exposé.
Mme Carpentier Merci, Mme la ministre.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie le Mouvement pour la défense et l'avancement
des garderies privées du Québec et invite à la table
l'Association des parents de garderies privées du Québec.
Bonjour. La commission est heureuse de vous recevoir et de vous
expliquer un petit peu au départ nos règles de procédure.
Vous avez vingt minutes ferme pour la présentation de votre
mémoire et il y aura une période de discussion de quarante
minutes, plus ou moins, avec les parlementaires. (17 h 30)
Avant de commencer, je vous prierais d'abord de vous identifier et
d'identifier votre porte-parole. Chaque fois que vous aurez à prendre la
parole aussi, dans la période de discussion, si vous y pensez, veuillez
bien dire votre nom auparavant, ceci pour permettre à ceux qui font la
transcription du Journal des débats de le reproduire le plus
fidèlement possible. Cela les aide énormément. Je vous
prierais, s'H vous plaît, de procéder.
Association des parents de garderies privées du Québec
Mme Lépine (Nicole): Je me présente, Nicole
Lépine. Je suis présidente de l'Association des parents de
garderies privées du Québec. J'ai, à ma gauche, M. Claude
Thériault, qui est un parent dont l'enfant fréquente une garderie
non gérée par les parents et vice-président de
l'association. J'ai, à ma droite, Mme Delia Landry, également un
parent dont l'enfant fréquente une garderie non gérée par
les parents et secrétaire de l'Association des parents de garderies
privées du Québec.
Je pense que Je ne vous apprendrai rien sur à peu près
tout ce que vous avez entendu Jusqu'à maintenant. Notre mémoire
précisera, sinon répétera sûrement ce que les
parents ont déjà mentionné.
Il est sûr que nos enfants fréquentent tous des garderies
non gérées par les parents. Ces garderies n'ont aucune
subvention. Ces garderies sont toutes également sous l'égide de
la Loi sur l'Office des services de garde à l'enfance. Donc, on
présume tous, à titre de parents, que ces garderies fournissent
de très bons soins et des soins de qualité.
Lorsque nous avons choisi une garderie, nous ne l'avons peut-être
pas choisie à titre de garderie subventionnée ou de garderie non
subventionnée. Nous avons choisi une garderie qui nous plaisait,
où l'on sentait que notre enfant serait heureux, dont on avait
l'impression qu'elle était bien gérée. Au départ,
c'est sûr que nous avons requis de certaines garderies des
réponses à certaines questions. Nous avons suivi
également, sans doute, un certain questionnement.
Pour l'association des parents dont beaucoup de parents sont membres
présentement, il y a un point sûr, c'est que les parents ne
voulaient pas vraiment s'impliquer dans la gestion de la garderie comme telle.
Sans y voir d'antagonisme ou vraiment de retrait forcé, on a
plutôt choisi une garderie dans laquelle nous pouvions y laisser notre
enfant et dans laquelle nous n'avions pas de gestion à faire. C'est sans
doute notre malheur aujourd'hui, puisque ces garderies subissent des hausses de
coûts pour faire face aux augmentations des coûts réels et
quotidiens qu'elles ont à assumer et ces hausses de coûts, nous
les subissons, bien que nous ne voulions pas, pour toutes les raisons du monde,
changer de garderie. Nous ne vouions pas non plus que nos enfants aient
à subir un préjudice causé par un changement de garderie
parce que celles qu'ils fréquentent ne sont pas
subventionnées.
Nous sommes tous des contribuables et, à ce titre, nous payons
des impôts. Ces Impôts, on les paie. On paie également pour
les distributions que le gouvernement veut bien faire de ces impôts ou de
cet argent, et on veut bien, également, participer à une certaine
collectivité dans la société. Cependant, nous
désirons faire remarquer qu'il y a une solution. Si vous ne voulez pas
subventionner les garderies non gérées par les parents, alors,
subventionnez les parents. Il y a de nombreux parents dans l'association qui ne
sont admissibles à aucune subvention, puisqu'ils ont des revenus trop
élevés, juste 1 $ au-dessus de la limite, et je ne vols pas la
différence entre 1 $ au-dessus de la limite et la limite permise pour
établir l'obtention d'une subvention. Ces parents, j'en suis convaincue,
recevraient cette subvention avec bonheur.
Nous vous proposons certaines choses pour verser cette subvention. Nous
vous proposons de la verser à titre de pourcentage. Vous avez
prévu dans votre énoncé de politique un pourcentage
évalué à 45 %. On vous propose de
redistribuer cette portion de 45 % du coût total des frais de
garde annuels pour un parent au parent lui-même, et ce, Jusqu'à
concurrence d'un maximum admissible de 2000 $ par enfant. SI vous versez 2000 $
au parent qui paie en général une moyenne de 4000 $ de frais de
garde annuels, c'est assurer à peu près 45 % du coût total
des frais de garde annuels.
Nous vous proposons également une autre solution: un
crédit d'impôt remboursable. Ce serait faisable. Le montant de
2000 $ dont je vous parlais il y a quelques minutes, ce serait à titre
de crédit d'impôt remboursable. Il y a d'autres solutions: entre
autres, augmenter les déductions fiscales aux parents. Dans votre
énoncé de politique, vous avez émis l'idée que la
déduction fiscale était plus ou moins connue. Jusqu'en 1986, la
déduction fiscale était possible pour le parent dont le revenu
était le plus élevé. Il est sûr que, pour le parent
dont l'enfant fréquente une garderie et qui est aux études,
réduire 2000 $ ou 2500 $ de zéro, cela ne fait pas moins 2500 $,
cela fait zéro. Alors, il n'est pas possible de les déduire.
Cette déduction fiscale n'était presque pas employée par
les parents parce qu'elle était souvent plus ou moins applicable.
À ce moment-là, on vous demande d'augmenter la déduction
fiscale bien qu'elle soit maintenant admissible pour les deux revenus, peu
importe qu'elle s'applique plus haut ou au plus bas revenu. On vous demande
d'augmenter la déduction fiscale afin qu'elle équivaille à
ces 45 % des frais de garde.
Je vais m'arrêter ici pour faire un commentaire. Je suis ici
depuis ce matin. Je trouve qu'on a développé des antagonismes
certains. On a tous un but commun. Tous les groupes qui sont passés ou
qui passeront devant vous ont un but commun, c'est l'intérêt de
l'enfant. Je pense que l'intérêt de l'enfant a été
grandement oublié dans tout ce débat. Et si l'enfant
reçoit des soins de qualité, peu Importe où il est, c'est
l'intérêt collectif de la société dans laquelle on
vit. Je ne pense pas que ce soit une question d'argent. On est tous là.
On est tous contribuables. On pale tous des impôts. Je pense que c'est le
juste retour des choses que tout le monde reçoive un peu du
gâteau, que ce soit dans n'importe quel genre de garderie que l'on
fréquente.
Tout ce que je veux proposer, c'est d'ailleurs ce que l'association
préconise. L'augmentation des coûts dans les garderies
privées provoquera sans doute des fermertures et le gouvernement ne peut
pas se le permettre actuellement. Dans votre énoncé de politique,
vous reconnaissez un besoin de 200 000 places en garderie. Il y en a 60 000
actuellement. Il y a 12 000 enfants qui fréquentent des garderies non
gérées par les parents. Je pense que ce pourcentage est important
dans la société actuelle et on doit en tenir compte. On doit
tenir compte des parents dont les enfants fréquentent des garderies non
gérées. Je pense qu'on ne peut pas faire autant de discrimination
dans le choix d'un réseau de garde. Le réseau de garde est
là, il existe. Je pense qu'on ne peut pas être aussi
discriminatoire et pénaliser les enfants qui ont le malheur de
fréquenter une garderie non gérée par les parents.
Bien que je sois certaine que le gouvernement ou la ministre
déléguée à la Condition féminine n'ait pas
voulu émettre cette opinion, j'ai cru ressentir, à la lecture de
plusieurs pages de votre énoncé de politique, que vous sembllez
reprocher aux parents d'avoir choisi une garderie non gérée par
les parents. Vous sembllez dire que la responsabilité des parents
résidait dans le fait d'envoyer l'enfant dans une garderie dans laquelle
ils pourraient s'impliquer. Je vous dis que les parents dont les enfants
fréquentent une garderie non gérée par les parents sont
aussi impliqués. Ils ont autant à dire que dans une garderie
gérée par les parents. Je pense que s'ils ont quelque chose
à dire et que, s'ils ne sont pas satisfaits, ils le font voir.
Ce matin, j'ai également entendu qu'on ne pouvait pas entrer dans
une garderie à toute heure du jour, qu'on ne pouvait pas vérifier
les menus, qu'on ne pouvait pas... Mon expérience personnelle
démentira cela. C'est faux. Je suis entrée à plusieurs
reprises à ma garderie à toute heure du Jour et je n'ai jamais
senti cette réticence. Cependant, il est vrai qu'il y a de bonnes et de
mauvaises garderies, comme il y a de bons et de mauvais professionnels, de
bonnes et de mauvaises entreprises. Je pense que les garderies non
gérées par les parents sont un apport important et rendent un
service Important à la société d'aujourd'hui. Les femmes
veulent de plus en plus avoir accès au marché du travail. Il y a
un besoin économique pour bien des foyers d'obtenir un deuxième
salaire. À cet effet, je pense qu'on ne peut se permettre actuellement
de fermer une garderie ou de désavantager une garderie afin de provoquer
sa fermeture.
La liberté de choix des parents est reconnue par la Loi sur
l'Office des services de garde à l'enfance et elle est restreinte par
les ressources disponibles. Le gouvernement, s'il restreint la
disponibilité des ressources, restreint également la
liberté de choix des parents. Je pense que le gouvernement ne peut pas
se permettre, actuellement, de restreindre ce besoin. Il est là, il est
existant et je pense qu'on a besoin des garderies au Québec. Je pense
que les garderies non gérées par les parents sont de très
bonnes garderies et que nos enfants y sont très bien. Je ne croîs
pas qu'un parent qui se veuille assez honnête pourrait dire: Le matin, je
vais mener ce que j'ai de plus précieux au monde dans une garderie qui
n'assure pas des soins de qualité. Il y a des enfants maltraités,
vous savez; mais je pense qu'un parent normal et qui se respecte ne va pas y
mener son enfant un matin pour qu'il reçoive de mauvais soins. Je ne le
crois pas et je pense que tous les parents sont justifiés de croire que,
lorsqu'ils vont mener le matin leurs enfants dans
une garderie non gérée par les parents, laquelle est
régie par l'Office des services de garde à l'enfance, ceux-ci
reçoivent de très bons soins. Je pense que ce n'est pas une
question de soins, c'est un juste retour des choses que de dire: Nous sommes
tous égaux; ces enfants sont tous égaux et il n'y a pas de
classes sociales.
Le Président (M. Bélanger): M.
Thériault?
M. Thériault (Claude): Oui, je suis Claude
Thériault. J'aimerais peut-être rajouter quelques petits points
pour arrondir un peu et confirmer ceci. Je ne crois pas - pas plus que
l'association, règle générale, ne le croit - compte tenu
du fait qu'on fait face présentement à un manque de 130 000
places en garderie, un manque que demain matin on doit combler, qu'on puisse
arriver à le faire s) on doit favoriser, comme dans
l'énoncé de politique, une ligne directrice ou une autre, ou du
moins, s'il faut faire un retour en arrière pour essayer
d'éliminer un réseau qui est déjà existant et qui
roule très bien.
Je crois qu'il est tout à l'avantage du gouvernement d'analyser
plutôt le fait que le réseau peut se développer selon les
normes établies par l'Office des services de garde à l'enfance.
On demande justement aux parents de gérer les garderies, d'accord. En
même temps, je dirais: D'accord, mais si vous nous demandez de
gérer, à ce moment-là, transportons avec nous les
subventions qui vont à chaque enfant, tant pour le fonctionnement que
pour les subventions déjà accordées aux parents. En ce qui
concerne les 45 %, c'est un peu ce qu'il en est, c'est-à-dire que
lorsque l'enfant va dans une garderie, qu'elle soit à but lucratif -
d'accord? - ou qu'elle soit subventionnée, la subvention le suit. Donc,
la place est occupée, la subvention est payée. C'est ce qui fait
en sorte qu'il n'y a pas de déboursé inutile de la part du
gouvernement; les subventions suivent chaque enfant. Elles ne sont pas
accordées selon le nombre de places disponibles dans la garderie, mais
plutôt selon le nombre de places réellement occupées, peu
importe la garderie. Ce sont les ressources et il n'y en a pas,
présentement. On est à trois fois moins que ce qui serait
nécessaire pour combler tous les besoins.
Donc, comment le faire de façon efficace et au meilleur
coût possible? Cela semble être, je dirais, la meilleure solution.
On parle de limiter la croissance du réseau des garderies à but
lucratif. Je dis non; je ne suis pas nécessairement d'accord avec
ça. Si quelqu'un veut lancer son entreprise, créer son propre
emploi, comme l'Association des propriétaires de garderies du
Québec le disait, nous sommes d'accord. On ne le limite dans aucun autre
domaine, pourquoi le limiterait-on dans ce domaine? Par contre, II est vrai
aussi qu'il y a déjà une série de subventions à
l'implantation qui est accordée aux garderies subventionnées, qui
sont gérées par les parents.
C'est très bien, c'est une bonne initiative. Ce sont des gens qui
ont l'initiative de créer une garderie dans leur milieu. Il est
important de les aider, ils n'ont pas nécessairement
décidé d'assumer le risqua inhérent à cela, donc,
on leur accorde des subventions pour l'implantation. Je crois que cela est
juste aussi. Je crois que les deux réseaux peuvent très bien
évoluer et faire face, tout en maintenant un niveau de qualité
très équitable et en augmentant au maximum le nombre de places.
Il serait important que les subventions qui sont dirigées à
chaque enfant puissent bénéficier à chacun des enfants, et
que la subvention accordée aux parents continue telle quelle.
Donc, comme je vous l'explique, Mme la ministre, c'est simplement dans
le but de s'assurer que chaque dollar de subvention qui sera versé le
sera efficacement et rapportera ce qu'il doit rapporter, qu'il sera non pas
versé dans une disponibilité, mais bien dans une chose
concrète et existante, dans un état concret et existant. Je crois
que c'est une façon efficace de gérer les deniers publics et de
faire en sorte de développer et d'amener, pour chaque dollar Investi
dans notre service de garde, les résultats les plus efficaces. (17 h
45)
Mme Lépine: Sur ce qu'on vient de vous dire, M.
Thériault a 600 lettres signées par les parents concernant cette
subvention et leur statut de contribuable dans cette société.
Je vous les remets. Je profite de notre présence ici pour vous
les remettre également, à titre d'appui et de
représentation de l'association. C'est terminé.
Le Président (M. Bélanger): Oui. Mme la
ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie de votre
présentation, mesdames, monsieur. J'aurais le goût de vous
demander, en tout premier lieu, étant donné que vous
représentez les parents - je pense qu'on a là une bonne occasion
de vous poser des questions très spécifiques - qu'est-ce qui vous
a fait choisir une garderie à but lucratif plutôt qu'une garderie
sans but lucratif? Est-ce que c'est, par exemple, parce que, tout simplement,
vous ne voulez pas avoir le fardeau de vous impliquer davantage dans les menus
travaux ou quoi que ce soit de la gestion comme telle? Est-ce parce qu'il n'y
en avait pas dans votre milieu? Qu'est-ce qui, exactement, vous a fait choisir
une garderie à but lucratif au lieu d'une garderie sans but
lucratif?
Mme Lépine: Pour être honnête, au moment
où mon enfant a commencé à fréquenter la garderie,
au tout début - il avait huit mois à ce moment-là - je
n'étais pas très conscientisée aux différences
entre certaines garderies. J'ai choisi une garderie on raison de sa
proximité de la
maison et pour le genre de services qui y étalent offerts. J'ai
visité certaines garderies, J'ai communiqué par
téléphone avec d'autres, et je suis allée voir les lieux.
J'en ai choisi une parce qu'elle répondait à mes aspirations pour
l'enfant, parce qu'elle me semblait bien décorée, bien
gérée, et que je sentais que les gens aimaient les enfants et que
je pouvais y laisser mon enfant en toute sécurité. C'est ce qui
m'a fait choisir la garderie comme telle.
Je ne peux dire que j'ai vraiment comparé deux genres de
garderies; je n'ai pas essayé une garderie non gérée par
les parents et une garderie gérée par les parents. A ce
moment-là, je ne voulais pas m'impliquer dans la gestion d'une garderie
et j'ai arrêté mes demandes téléphoniques
là-dessus. Je ne voulais pas m'impliquer et je voulais plutôt une
garderie où je savais que mon enfant recevrait de bons soins, mais je ne
dénigre pas les autres garderies pour autant. Je dis tout simplement que
je n'avais pas ce temps-là. Je ne pouvais pas me permettre cela et je
préférais plutôt passer ce temps avec mon enfant, puisqu'on
se voyait très peu. C'était une question de choix au
départ.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce matin, on a parlé de
qualité et on a déploré, peut-être, le fait que
très peu de parents soient toujours en mesure d'identifier la
qualité dans une garderie. On sait que la qualité, cela peut
être très subjectif aussi et que ce n'est pas quelque chose de
palpable. Cela fait quelques années que vous avez des enfants maintenant
en garderie. Est-ce que vous, croyez avoir les outils suffisants pour
être capables de bien détecter la qualité? Est-ce que vous
avez suffisamment d'information à ce sujet ou bien si vous croyez que
les parents qui ont à faire un choix, justement, ne font pas un choix
suffisamment éclairé?
Mme Lépine: Mme la ministre, vous semblez souvent
émettre dans votre énoncé qu'il s'agit là de la
responsabilité des parents et je suis entièrement d'accord avec
vous. Lorsqu'un parent laisse son enfant dans une garderie, c'est sa
responsabilité de vérifier la qualité de cette garderie.
Pour ma part, pendant au moins deux mois, j'arrivais par surprise à
toutes les heures inimaginables dans une journée ouvrable de la
garderie, c'est-à-dire sans m'annoncer auparavant. J'ai toujours
vérifié que l'enfant recevait de très bons soins et qu'il
était bien traité au moment où j'y allais. C'est sûr
que cela appartient à chaque parent de le faire et ce serait la
même chose dans n'importe quel réseau de garderies, dans n'importe
quelle sorte de garderies. On n'est pas là, on ne peut pas savoir ce qui
se passe. C'est comme lorsqu'on laisse nos enfants sans surveillance; il se
passe la même chose. Les enfants imaginent des plans de nègre ou
font des choses, parce que la surveillance fait défaut. Je pense qu'il
est de la responsabilité de chaque parent de vérifier les soins
donnés à son enfant pendant la journée et je suis
convaincue qu'ils font tous comme moi, qu'ils font tous cela.
Mme Landry (Delia): Oui, moi aussi, j'en suis convaincue.
D'abord, tout ce qu'elle a dit jusqu'à maintenant, c'est tout à
fait la même chose que j'ai vécu par rapport au choix de la
garderie. Aujourd'hui, je peux dire que je préfère cela. Je ne
voudrais pas gérer. J'ai fait la même chose. J'ai
vérifié, je suis allée souvent à des heures
où personne ne m'attendait et je suis convaincue que les soins que mon
fils reçoit sont de qualité et que les travailleurs sont
professionnels dans leur domaine.
Mme Gagnon-Tremblay: Ce qu'on semble trouver difficile aussi,
c'est de gérer les salaires. Il y a toujours cette espèce de
conflit. Il semble difficile d'avoir à gérer les salaires et
surtout de demander cela aux parents. Par contre, vous comprenez que cela
représente 80 % du budget d'une garderie. Alors, si on ne gère
pas les salaires, il ne reste plus beaucoup de choses à
gérer.
Mme Lépine: Mais, vous savez, il faut avoir du talent pour
cela. Ce n'est pas évident, lorsque je suis parent et que je dois
retourner sur le marché du travail pour, économiquement, que ce
soit un peu mieux dans notre vie de couple, que j'aie pour autant le talent
d'aller gérer une garderie et d'aller m'impliquer. Je n'ai aucune
notion, je ne me sens pas capable de le faire. Comme je ne me sens pas capable
de le faire, j'aime mieux en laisser le soin aux personnes qui se sentent
compétentes pour le faire. Je n'ai pas le goût de le faire non
plus. Je n'ai pas envie de faire ça. Je veux bien que mon enfant
reçoive des soins de très bonne qualité - je pense
d'ailleurs que l'Office de services de la garde à l'enfance est
là pour ça - mais je n'ai pas envie d'aller m'ingérer,
d'aller passer du temps; même sans y passer de temps, je n'ai pas le
goût d'avoir ces tracas-là. Je pense que je préfère
passer ce temps-là avec mon enfant. Mais je comprends qu'il y ait des
personnes qui veulent s'impliquer. Je les encourage fortement, mais ce n'est
pas mon cas. Et je n'ai pas l'intention de le faire.
Mme Landry: Je me demande comment les parents peuvent
gérer les garderies s'ils n'ont pas accès aux subventions de
fonctionnement.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous nous suggérez une nouvelle
formule d'exonération financière aux parents ou d'aide aux
parents qui mérite réflexion. Si on subventionnait les parents,
à l'exception de la subvention de l'implantation, parce qu'on sait qu'il
faut quand même aussi soutenir les parents qui ne veulent pas s'impliquer
sur la base d'une entreprise, comme si c'était une petite entreprise...
Si la subvention d'implantation était accordée, est-ce que
ça veut
dire qu'avec cette nouvelle formule d'exonération
financière vous préféreriez que l'aide soit donnée
directement aux parents plutôt qu'aux garderies?
M. Thériault: Exactement. C'est un peu ce à quoi
ça revient Les 45 %... Dans votre énoncé, vous dites qu'il
est difficile de contrôler où irait l'argent advenant qu'on donne
une subvention directement à la garderie à but lucratif. Pour
résoudre ce problème-là, comme on dit, c'est simple. La
subvention est transportée par le parent. La subvention de
fonctionnement va au fonctionnement même de la garderie. Donc, elle est
attribuée à chacun des enfants. C'est une subvention par place.
D'accord? Donc, elle va directement au fonctionnement de la garderie pour
chacun des enfants présents. Le meilleur moyen de s'en assurer, c'est
simplement de faire suivre la subvention de fonctionnement avec le parent.
Mme Gagnon-Tremblay: Est-ce que vous suggérez ce
système-là uniquement pour les garderies à but lucratif ou
si c'est quelque chose que vous suggérez pour l'ensemble des services de
garde au Québec?
M. Thériault: "At large".
Mme Lépine: Pour tous les parents. Je pense qu'il n'y a
pas lieu d'exercer de la discrimination dans le réseau actuel. Tous les
parents devraient bénéficier de ce crédit
d'impôt.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela supposerait à ce
moment-là qu'il faudrait abolir la déduction fiscale.
Mme Lépine: Oui, oui, cela va de soi.
Mme Gagnon-Tremblay: Actuellement, le système fait en
sorte que l'exonération financière aide les parents qui sont les
plus démunis. Par contre, les autres parents, qui sont en mesure de
payer des services, ont droit à des déductions fiscales. À
ce moment-là, d'une part, vous avez ces parents-là qui ont besoin
d'aide supplémentaire, qui ont droit aux déductions fiscales, et,
d'autre part, vous avez aussi toute cette clientèle de femmes
travaillant à la maison qui ont aussi la garde de leurs enfants et qui
seraient en droit d'exiger un peu la même chose. Donc, ça
signifierait qu'au lieu de desservir peut-être 500 000 enfants, ce serait
peut-être 1 000 000 d'enfants.
Mme Lépine: La recommandation vise les services de garde.
Elle vise un crédit d'impôt remboursable à titre de service
de garde. Le pourcentage de ce crédit d'impôt est en rapport avec
le coût annuel des services de garde. Donc, il est nécessaire,
pour avoir ce crédit remboursable, d'avoir un enfant qui
fréquente une garderie, peu Importe le genre de garderie. Mais la
fréquentation d'une garderie est nécessaire. Cela ne vise pas
toutes les femmes au foyer. Cela vise les femmes dont l'enfant fréquente
une garderie. Je vous dis, on l'a mentionné tantôt, ça
représente 45 % du coût total annuel des frais de garde
jusqu'à un maximum de 2000 $; ce qui veut dire qu'une dame qui reste
à la maison, qui fait garder son enfant une journée ou doux par
semaine, totalise ses coûts de garde annuels et, finalement, elle
reçoit, à titre de subvention ou de crédit d'impôt,
45 % de cette somme.
Mme Gagnon-Tremblay: Quand vous parlez de garde, on s'entend
bien, j'imagine que vous parlez toujours de garde régie.
Mme Lépine: Non, non. On parle de garde régie.
Mme Gagnon-Tremblay: De garde régie. D'accord.
Mme Lépine: Oui, oui. Sous l'égide de l'Office des
services de garde à l'enfance. Oui, oui.
Mme Gagnon-Tremblay: D'accord. Toujours la garde régie.
Tous les types de services, mais garde régie.
Mme Lépine: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Les garderies à but lucratif ne sont
pas subventionnées et on sait que, dans bien des cas, les parents paient
plus cher. Par contre, Indépendamment de votre formule, parce que
l'autre formule que vous suggérez vise beaucoup plus à venir
aider directement les conditions de travail dans les garderies, les parents
paient plus cher, dans certains cas, dans vos garderies. Comment
réagissent-ils actuellement? Comment vous, comme parents,
réagissez-vous à la formule d'exonération
financière qui tient compte du tarif payé par les parents,
Indépendamment de votre suggestion, à la formule actuelle qui a
été proposée dans l'énoncé de politique?
M. Thériault: Vous voulez dire par rapport à la
subvention versée directement aux parents?
Mme Gagnon-Tremblay: Oui.
M. Thériault: La formule actuelle, c'est-à-dire la
nouvelle formule, en pourcentage.
Mme Gagnon-Tremblay: L'exonération financière de
4,75 $, plus 40 % du tarif.
M. Thériault: D'accord. Règle
générale, la réaction que j'ai eue aux réunions de
parents à notre garderie et à certaines garderies que j'ai pu
visiter, c'est qu'ils la trouvent plus mêlante,
dans le sens qu'ils ne savent pas tout à fait combien ils vont
avoir. Dans la majorité des cas, ceux à qui j'ai parlé ont
tous eu moins. Donc, il y a eu une certaine déception sur ce point.
Auparavant, comme je vous le dis, c'était un montant fixe,
c'est-à-dire, vous faisiez tant de revenu, vous aviez tel montant. Donc,
s'il y avait possibilité peut-être d'établir votre formule
actuelle selon un montant fixe qui serait plus palpable pour les gens en ce qui
concerne la subvention directe...
Mme Gagnon-Tremblay: Ne croyez-vous pas, par contre, que le
montant fixe est plus rigide et ne suit pas l'évolution des tarifs? Il y
a une chose sur laquelle je veux vous reprendre. Vous dites que tous les
parents étaient perdants. Dans l'énoncé de politique, il
est bien spécifié que les parents qui seraient perdants
n'auraient pas moins que les 10,50 $ actuellement; donc, le statu quo. Cela
veut dire qu'aucun parent n'aurait moins que ce qu'il reçoit
actuellement.
Mme Lépine: À condition qu'il soit admissible
encore à la subvention.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, c'est cela.
Mme Lépine: À la condition qu'il soit admissible,
et c'est là le problème.
Mme Gagnon-Tremblay: Ma question est la suivante: Dans vos
garderies, quel est le pourcentage, par exemple, de personnes admissibles
à l'exonération financière?
Mme Lépine: Dans ma garderie à moi, il y avait
peut-être 15 % ou 20 % de gens admissibles à la subvention. Et
c'est sous réserve, bien sûr, de vérification. Mais, pour
ma part, ce n'était pas un pourcentage très élevé.
C'est un pourcentage minime. Alors, il y avait dans cette garderie beaucoup de
parents qui n'étaient admissibles à aucune subvention et qui
n'étaient pas riches. Cela n'avait rien à voir avec la richesse,
mais on paie un petit peu pour tout le système. Je suis d'accord pour
que la société prenne ses responsabilités. D'ailleurs, on
vous l'a dit tantôt. Je pense qu'il est normal également qu'on
répartisse un peu les biens. Mais je pense aussi qu'à un moment
donné la vache à lait ne donne plus de lait. Ceux qui sont juste
un peu au-dessus des subventions paient toujours, finalement, pour tout le
monde. Ils paient pour les nantis et ils paient pour les démunis. Je ne
suis pas contre le fait de payer pour les démunis. Aucun parent de
l'association n'est contre cela. Mais je pense qu'on a le droit
également d'avoir une part du gâteau. (18 heures)
Mme Gagnon-Tremblay: Que pensez-vous des propositions qui nous
ont été faites hier, entre autres, par les syndicats, au sujet
des nouvelles formules de financement? Aussi, je voudrais vous poser la
question concernant d'autres groupes, entre autres, le groupe Concertactlon,
qui proposent d'augmenter la subvention de 4 $ à 9 $ et de 9 $ à
13 $ et 18 $, dans le cas de la CSN, entre autres.
M. Thériault: Ces formules ne nous ont pas
été soumises.
Mme Lépine: Je m'excuse. Je n'ai pas entendu les formules,
mais vous mentionnez encore la subvention qui est versée aux garderies
gérées par les parents, qui a été augmentée
de 4,50 $ à 9 $ par jour. Écoutez, si le gouvernement avait les
moyens de payer pour tout le monde, je dirais: Allez-y. C'est très beau.
Je suis bien contente pour les garderies gérées par les parents
qu'il augmente leur subvention et qu'il augmente leur revenu pour assurer des
soins de qualité. Je ne suis pas contre ce fait, mais le gouvernement a
une limite à sa capacité de payer. Et comme les parents ont
également une limite à leur capacité de payer pour tout le
monde, je pense qu'il va falloir qu'il y en ait qui soient malheureux. On ne
peut pas satisfaire tout le monde. Je pense qu'il y a des limites à
atteindre, à un moment donné. Il faut être conscient de ces
limites-là. Mais je suis contre la discrimination à
l'égard d'un parent par rapport à un autre.
Vous savez, on parle d'éducation et on parle d'enfants. Tous les
enfants fréquentent des garderies actuellement et toutes les garderies,
comme vous l'avez dit tantôt, sont privées bien que le
gouvernement privilégie les garderies gérées par les
parents. Je ne suis pas contre ce fait. Je suis contre le fait, cependant,
qu'on augmente une subvention en augmentant une discrimination, d'une part, et
que les parents qui paient beaucoup soient encore obligés de payer pour
ça. Il ne faut pas se leurrer, on va encore payer pour cette
augmentation à la fin. Là-dessus, oui, je suis en
désaccord.
Mme Gagnon-Tremblay: En somme, ce que vous suggérez, c'est
d'abolir la subvention directe aux garderies sans but lucratif et de la
transformer plutôt en subvention pour les parents qui auraient à
faire un choix.
M. Thériault: Oui, exactement. Mme Gagnon-Tremblay:
Merci.
M. Thériault: Ce qui permettrait de développer le
réseau de façon plus efficace.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président Je veux vous
féliciter pour votre présentation. C'est un
très beau mémoire qui a été
réalisé avec beaucoup de soin. Est-ce que ce mémoire est
le fruit de la cogitation collective des membres de votre association?
Mme Lépine: Oui, oui.
M. Claveau: II a été préparé par les
membres de l'association?
Mme Lépine: II a été préparé
par les membres de l'association et rédigé, bien sûr, par
une personne qui a fignolé les choses, mais II a été
endossé par toute l'Association des parents de garderies privées
du Québec.
M. Claveau: Mais préparé bénévolement
par les membres de l'association?
Mme Lépine: Ah oui! tout à fait
bénévolement, mon cher monsieurl
M. Claveau: Alors, le bureau d'avocats Gauthier, Dion qui a
transmis le document par bélino ou télex...
Mme Lépine: Non, c'est mon bureau... M. Claveau: ...l'a
fait bénévolement.
Mme Lépine: Non, c'est le bureau dans lequel je travaille.
Je me suis servie de leur "FAX" gratuitement. C'est moi qui paie.
M. Claveau: Ha, ha, ha! Dos voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Non, parce que je voyais que le document avait
été expédié le 20 janvier, donc le jour de la date
limite.
Mme Lépine: Tout à fait. C'est ça. C'est
pour ça que je me suis servie...
M. Claveau: ...à 11 h 58 par la firme d'avocats Gauthier
et Dion.
Mme Lépine: Oui, c'est parce que c'était quelques
jours après notre réunion générale des parents de
l'association.
M. Claveau: Mais ce sont les parents qui ont
travaillé...
Mme Lépine: Oui.
M. Claveau: ...collectivement à la rédaction du
document qu'on a sous les yeux?
Mme Lépine: Tout à fait.
M. Claveau: Votre association regroupe combien de membres?
Mme Lépine: Elle en regroupe 1500 actifs et 12 000
passifs, c'est-à-dire 12 000 enfants fréquentant les garderies au
Québec.
M. Claveau: Oui, mais ils n'ont probablement pas participé
à la rédaction de votre document.
Dos voix: Ha, ha, ha!
Mme Lépine: Presque. Ils l'ont motivé dans bien des
actions.
M. Claveau: De la même façon que les parents ont
choisi pour eux le genre de garderies où ils sont.
Mme Lépine: Vous savez, ce sont souvent les enfants qui
choisissent. Lorsqu'un enfant pleure le matin quand on le laisse dans une
garderie, je pense qu'il ne fera pas vieux os dans cette garderie. Il choisit
un peu.
M. Claveau: Vous avez de la chance. Dans mon milieu, il y a juste
une garderie et les enfants n'ont pas le choix.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: C'est déjà pas mal par rapport à
une discrimination potentielle. Je pourrais me sentir lésé dans
mon milieu d'avoir juste un genre de garderies et de ne pas avoir le choix
parce qu'on est en région éloignée. Vous voyez. On
pourrait reprendre votre discours de discrimination potentielle par rapport aux
gens qui travaillent dans notre milieu.
Mme Lépine: Mais on n'est pas discriminatoire
vis-à-vis des régions.
M. Claveau: Cela me fait plaisir de savoir que vous avez quand
même la possibilité de choisir et que les enfants peuvent aussi,
à l'occasion, participer au choix de la garderie dans laquelle ils sont
gardés, ce qui, à mon avis, devrait exister partout d'ailleurs,
soit dit en passant.
Mme Lépine Tout à fait.
M. Claveau: Je suis tout à fait d'accord avec ça et
je souhaiterais que ça existe partout.
Mme Lépine: Cependant, les médecins gagnent plus
cher en région.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Le salaire minimum est le même en
région.
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais
aux gens dans la salle de ne manifester d'aucune façon;
môme si c'est drôle, il faut se retenir. S'il vous plaît,
c'est absolument interdit ici.
M. Claveau: Vous faites la référence avec les
médecins, je ne voudrais pas entreprendre un débat stérile
sauf que, dans un comté comme le mien où il y a 40 000 habitants,
II y a une quinzaine de médecins. Ils ne font pas la loi, en
général. Ce ne sont pas eux qui font le barème ou le
critère d'évaluation de l'ensemble du revenu de la population. Il
n'y a pas plus de 15 à 18 médecins pour 40 000 habitants. Le
salaire minimum est le même, l'aide sociale est la même et le
chômage est le même. Cela se ressemble pas mal. Ceci étant
dit, j'aimerais essayer de comprendre quelque chose. Mme Lépine, tout au
long de votre exposé que j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt
- remarquez que ce n'est pas une attaque personnelle que je fais - j'essaie de
comprendre. Vous êtes présidente d'une association nationale, sur
l'ensemble du territoire québécois, je suppose.
Mme Lépine: C'est national, oui. Tout à fait.
M. Claveau: Donc, la présidente, c'est vous qui avez
signé le mémoire. La présidence de l'Association des
parents de garderies privées du Québec, c'est clair, c'est bien
précis, c'est sûrement un poste, une activité qui demande
passablement de temps, qui demande de vous déplacer, de vous mobiliser,
de travailler à la rédaction d'un texte.
Mme Lépine: Tout à fait.
M. Claveau: Donc, qui a dû vous demander quand même
probablement beaucoup de temps. J'essaie de comprendre dans la même
logique. Vous nous avez dit tout à l'heure que vous
préféreriez aller dans une garderie privée à but
lucratif où vous n'auriez pas à vous impliquer dans le
fonctionnement de la garderie. Par contre, vous semblez prendre un temps
énorme pour défendre ce type de garderies contre d'autres sortes
de garderies.
Mme Lépine: C'est vrai.
M. Claveau: Est-ce que, par exemple, étant donné
que vous-même avez dit dans votre exposé que ce n'était pas
une question d'argent, que c'était d'abord et avant tout le besoin des
enfants qu'il fallait prendre en considération... Ne serait-il pas plus
avantageux d'investir au chapitre d'une garderie que vous pourriez gérer
vous-même, plutôt que de prendre tout ce temps pour défendre
une sorte de garderie, pour défendre des intérêts bien
spécifiques comme des intérêts privés? Je vous pose
la question comme ça, pour essayer de comprendre le cheminement qui vous
amène à militer aussi activement à la défense
d'intérêts privés.
Mme Lépine: Vous savez, il y a une différence entre
une gestion quotidienne et une gestion d'association dans laquelle il y a des
réunions sporadiques et dans laquelle, lorsqu'il y a des temps chauds
comme maintenant, on agit. Pour moi, cela ne m'intéresse pas de
m'impliquer quotidiennement. Cependant, à l'occasion, lors d'une
commission parlementaire, je suis intéressée à participer
et à investir du temps. Mais je sais très bien que la commission
parlementaire doit se terminer dès que j'aurai passé cette
porte.
M. Claveau: Mais vous allez rester présidente de
l'association?
Mme Lépine: Pardon?
M. Claveau: Vous allez rester présidente de l'association
et vous allez continuer.
Mme Lépine: Bien oui, je vais rester présidente de
l'association. Vous savez, présidente d'une association, c'est de
l'échange d'information. Il y a plusieurs personnes qui sont
là-dedans. On a tous nos fonctions et on ne fait pas ça 24 heures
par jour. On fait cela une fois par trois mois et une gestion de garderie,
c'est quotidien. Je pense qu'il y a une grande nuance entre les deux.
M. Claveau: Cela dépend du domaine d'implication de
chacun. Il y a une garderie à but non lucratif où il y a 50
à 55 enfants pour 30 parents - mettez le chiffre que vous voulez - et un
conseil d'administration formé de 5, 7, 8 personnes où, à
l'occasion, on va demander une heure de bénévolat aux autres sans
obligation. Ce n'est pas évident que vous seriez obligée de vous
impliquer même si votre ou vos enfants étalent dans une garderie
à but lucratif.
Mme Lépine: Je comprends votre intervention, mais c'est
une question de choix et ce choix, je l'ai fait. Maintenant, mon enfant est
bien dans cette garderie et je ne vois pas pourquoi cela justifierait un
changement de garderie. J'ai fait ce choix et je n'ai pas changé ce
choix. Et ce n'est pas parce que je défends les causes des garderies que
je pourrais décider demain matin d'aller m'impliquer quotidiennement
dans la gestion d'une garderie. Cela ne m'intéresse pas.
M. Claveau: Vous défendez théoriquement la cause de
l'ensemble des garderies. Cependant vous êtes ici pour représenter
les parents qui défendent un groupe bien spécifique de garderies.
Ces dernières, quoi que vous en disiez, fonctionnent avec de l'argent,
parce que ce sont des gens qui ont Investi et qui doivent rentabiliser leur
capital.
M. Thériault: Écoutez, monsieur, j'aimerais
répondre à cela. Moi, personnellement, je ne remets pas du tout,
et en tant qu'association on ne remet pas du tout en question la qualité
des services de garde. On parle souvent, on dit dans le mémoire, entre
autres: Comment concilier le but lucratif et le fait d'offrir des services de
garde de qualité à un enfant? Écoutez, moi, je vais vous
retourner la question bien simplement. Avez-vous déjà vu une
entreprise qui était capable de rester en affaires si elle ne donnait
pas des services à sa clientèle? Je n'en connais pas. Excusez-moi
mais, en dedans de deux, elle fait faillite et ce n'est pas plus long que cela.
La personne qui a son entreprise est responsable de son entreprise. Elle doit
prendre les décisions qui vont amener une gestion efficace des fonds et
amener aussi un service de qualité. Les deux sont conciliables.
Mme Lépine: De toute façon, l'association des
parents de garderies privées endosse totalement les propriétaires
de garderies privées lorsqu'ils disent que les garderies existent pour
se créer un emploi. Vous savez, les garderies non gérées
par les parents sont présentement très concurrentes avec les
garderies gérées par les parents. C'est le môme tarif,
approximativement, à quelque 10 $ de différence par semaine.
M. Claveau: Cela vous coûte la même chose.
Mme Lépine: Cela nous coûte la même chose.
M. Claveau: Mais, à ce moment-là, quelle elle est
la différence pour vous, à partir du moment où vos enfants
sont bien gardés et que cela ne vous coûte pas plus cher que si
vos enfants étaient dans un autre type de garderie? Pourquoi
demanderiez-vous des subventions? Le reste, c'est leur bénéfice
à eux. Cela ne vous regarde pas comme parents.
Mme Lépine: On demande des subventions pour nous, pour que
les hausses de coûts auxquelles ils ont à faire face, on puisse
les assumer.
M. Claveau: Oui, mais même si vos enfants étaient
dans des garderies sans but lucratif, cela vous coûterait le même
prorata quotidien. C'est ce que vous me dites. Cela ne vous coûterait pas
moins cher, ou à peu près pas. Ce sont à peu près
les mêmes tarifs. Quelle est la différence? Ce n'est pas vous, en
tant que parents, c'est le propriétaire de la garderie qui, lui, veut
avoir plus d'argent.
Mme Lépine: Ce qu'on vous dit, c'est que dans les
garderies non gérées par les parents il y a une hausse de
coûts régulière actuellement qui varie de 5 $ à 10 $
par semaine par année.
Il va y avoir un plafond un jour qui va être de 150 $ ou de 200
$.
M. Claveau: Actuellement, vous avez tous les trois des enfants
qui sont en garderie?
Mme Lépine: Oui.
M. Claveau: Quel est le coût supplémentaire que vous
devez absorber du fait que votre enfant est dans une garderie à but
lucratif, à comparer à une garderie à but non lucratif qui
serait au coin de rue opposé?
Mme Lépine: Cela dépend de chacune des
garderies.
M. Claveau: Là, je vous le demande.
Mme Lépine: Pour ma part, c'est environ 20 $.
M. Claveau: Par?
Mme Lépine: Par semaine.
M. Claveau: Que cela vous coûte de plus?
Mme Lépine: Oui.
M. Claveau: Cela représente quoi en pourcentage?
Mme Lépine: Cela représente 20 % de plus. M. Claveau:
Quel est le tarif quotidien?
Mme Lépine: Le tarif quotidien? Je ne le sais pas. Moi, je
paie à la semaine. C'est 95 $ par semaine.
M. Claveau: Ils sont là cinq jours?
Mme Lépine: Pardon? Je ne sais pas le tarif. C'est
à la semaine.
M. Claveau: Sur cinq jours?
Mme Lépine: Sur cinq jours, oui, oui, à temps
plein.
M. Claveau: Bien, divisez votre montant par cinq.
M. Thériault: Dans le mémoire, il est clairement
établi que, d'un réseau à l'autre, il y a seulement une
différence quotidienne moyenne de 1 $ entre les deux types de garderie.
C'est la moyenne de différence qui existe. On parle de cette
différence. Je crois que, de toute façon, la discussion n'est pas
sur cela du tout. La discussion est plutôt de savoir que, demain matin,
cela nous prend 130 000 nouvelles places en garderie. C'est ce que cela nous
prend.
M. Claveau:130 000?
M. ThériauH: Nouvelles places. Le besoin est de 200 000
nouvelles places. Cela nous prend 130 000 nouvelles places. On en a 70 000.
M. Claveau: D'accord.
M. Thériault: Que fait-on maintenant?
M. Claveau: Ce que vous venez de me dire, si je comprends bien,
c'est que le but de votre intervention est de vous assurer que ces 130 000
nouvelles places vont s'ouvrir dans des garderies privées, puisque c'est
la raison d'être de votre organisme de défendre les garderies
privées?
M. Thériault: On se défend en tant que parents
fréquentant une garderie privée. Il y a un point aussi qui est
à remarquer: on parle seulement d'une différence de 1 $ par jour.
On parle vraiment d'un détail. Je ne veux pas en venir à une
confrontation. Je me dis une seule chose: Si les garderies à but
lucratif sont capables, avec seulement une différence de 1 $ par jour et
en ne recevant carrément pas de subvention présentement,
d'arriver dans leurs états financiers à la fin de l'année,
comment se fait-il, dans ce cas-là, qu'une garderie
subventionnée, avec le même nombre de places, n'arrive pas
à la fin de l'année en chargeant seulement une moyenne de 1 $ de
moins par jour? Moi, je me dis: Je suis contribuable, je paie mes impôts
au gouvernement du Québec, je demande que ces fonds soient
gérés de la façon la plus efficace possible. La
façon est simple, c'est d'utiliser l'argent pour chacun des enfants.
Comme je le disais tantôt, si quelqu'un veut ouvrir une garderie pour se
créer son emploi, comme l'Association des parents de garderies
privées du Québec le dit, tant mieux, c'est son initiative. Par
contre, que les ressources nécessaires soient les mêmes pour
l'enfant, peu importe la garderie qu'il fréquentera. C'est le point.
C'est une demande de contribuables que nous faisons. D'accord? C'est en
tant que payeurs d'impôt que nous demandons cela, et non pas en tant que
parents de garderies privées uniquement. On demande que, dans l'ensemble
du réseau, les ressources soient les mêmes pour chacun des enfants
qui le fréquentent.
M. Claveau: D'accord. Cela veut dire qu'à partir de ce que
vous venez de me dire, et à partir aussi de ce que nous disait Mme
Lépine un peu plus tôt quand elle disait que ce n'est pas une
question d'argent, ce qui nous intéresse, c'est que les enfants aient
tous les services possibles, et pensons à l'enfant au lieu de penser
à de l'argent. On est d'accord avec ça?
M. Thériault: Oui.
M. Claveau: Cela veut dire, dans le fond, que vous nous proposez
d'oublier la disparité ou la problématique du réseau
privé par rapport au réseau non privé et de trouver une
mécanique, une ligne maîtresse favorable pour tout le monde. Mais
si on dit, nous autres, qu'on est capable d'aller à cette ligne
maîtresse, mais on va y aller ensemble, dans le réseau non
privé, là, pour autant qu'on donne les mêmes services que
ceux que vous êtes en train d'exiger, vous n'avez pas un mot à
redire.
Mme Lépine: Parfait. Est-ce que le gouvernement est
capable de faire ça demain matin, d'accepter que toutes les garderies au
Québec soient transformées en garderies subventionnées?
Est-ce que la capacité financière du gouvernement est assez
grande pour le permettre?
M. Thériault: Parce qu'on n'a pas de places à
perdre, présentement. Il faut juste en créer.
M. Claveau: Ce que je vous demande, c'est: Est-ce que cela vous
conviendrait - je ne vous dis pas que c'est ce qui va se faire, mais vous
êtes ici en tant que parents qui travaillent ou qui défendent le
point de vue des garderies privées - si on vous disait d'oublier votre
histoire de garderies privées, ce que vous voulez, c'est le soin des
enfants, c'est que ça ne vous coûte pas plus cher et tout
ça? On est capable d'y arriver, mais on va y arriver exclusivement par
un réseau non lucratif, si les garderies sont privées mais non
lucratives.
M. Thériault: Un tel choix, selon mol, n'est pas
nécessaire. C'est ce que j'ai tenté de vous expliquer. Si les
parents, à un moment donné, veulent, dans un quartier ou dans une
région donnée... Par exemple, dans les régions
éloignées, c'est un point qui peut être très
important que les parents gèrent leur garderie, s'il n'y a personne qui
veut en ouvrir.
Présentement, on roule avec les deux systèmes. Il y en a
qui sont subventionnées, qui sont gérées par les parents,
et il y en a des lucratives. Pourtant, les services sont de qualité
égale. On peut maintenir un certain statu quo, oui, avec une croissance
des deux systèmes, tout en étant régis par le même
office; oui, on peut le faire. C'est ce qu'on dit.
On ne dit pas de préférer un réseau à un
autre, on dit: Le système est là, il y a possibilité, avec
le même argent, peut-être, de maximiser le nombre de places,
plutôt que d'essayer de préférer une ligne. De toute
façon, les normes sont les mêmes pour tous.
Mme Landry: Ce qui m'inquiète, c'est que le gouvernement
encourage la natalité; pour les garderies, c'est un peu effrayant de
penser à la situation dans une couple d'années.
M. Claveau: Cela, j'en conviens avec vous.
D'ailleurs, on est certain que les politiques qui sont actuellement
avancées par le gouvernement pour essayer de régler les
problèmes de garde créeront plus de problèmes qu'elles
n'en régleront. Ça va probablement diminuer la natalité,
au lieu de l'augmenter. Cela est fort probable. Je pense que, là-dessus,
on va s'entendre. Mais j'essaie de comprendre la dynamique...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Pourquoi croyez-vous nécessaire de
défendre le principe de la garderie à but lucratif comme
étant un vecteur important pour garantir un bon service de garde
à l'enfance, alors que ce que vous dites, éventuellement, peut se
réaliser à l'intérieur d'un réseau de garderies
à but non lucratif, tout aussi bien? Cela ne coûtera pas plus
cher.
Mme Lépine: Pour une raison très simple...
M. Claveau: Pourquoi croyez-vous que ce soit un vecteur de tout
premier ordre que de maintenir, de sauvegarder et même
d'accélérer la pénétration des entreprises à
but lucratif dans le secteur des garderies?
Mme Lépine: Pour une raison très simple: c'est
cette garderie-là que mon fils fréquente, et c'est cette garderie
qu'il veut garder.
M. Claveau: Oui, mais il n'y sera pas éternellement. Nous
autres, on doit penser en fonction d'une politique globale qui sera encore
là dans 20 ans. Probablement que dans 20 ans votre fils ne sera plus
à la garderie; les miens n'y seront plus, en tout cas.
Mme Lépine: Probablement.
Le Président (M. Bélanger): M. le député
d'Ungava, je me dois de vous interrompre, le temps est largement
écoulé. Si vous voulez remercier nos invités.
M. Claveau: Cela m'a fait plaisir d'avoir cette discussion avec
vous. Cela va sûrement faire avancer notre réflexion globale et
permettre d'en arriver à une véritable politique. En tout cas,
j'espère que cela va aider la ministre à élaborer Une
véritable politique des garderies, non pas un rapiéçage
malsain dans le fond, dans la mesure où tout le monde le conteste, d'un
côté comme de l'autre.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
ministre
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le
député d'Ungava n'a pas été capable de
préparer une politique d'ensemble sous son gouvernement, alors je pense
qu'il n'a pas tellement à blâmer le gouvernement actuel. Ce que je
veux vous dire par contre, c'est que, vous savez, on n'est pas un tribunal ici
et sachez que je ne vous considère pas comme des accusés. Soyez
très à l'aise parce que, si on avait eu à mettre en doute
la provenance des documents, de même que si vraiment les gens avaient
été consultés selon les règles à 98%, il y
aurait peut-être des gens qui auraient été
embêtés depuis le début de la commission parlementaire. Je
veux que vous sachiez qu'on vous remercie de votre présentation. Vous
nous faites des recommandations qui méritent notre attention, qui
méritent réflexion et nous les prendrons en
considération.
Mme Lépine: Merci, Mme la ministre.
Le Président (M. Bélanger): Bien. La commission des
affaires sociales remercie l'Association des parents de garderies
privées du Québec et, étant donné l'heure, suspend
ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 22)
(Reprise à 20 h 10)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à une consultation générale et aux
auditions publiques afin d'étudier l'énoncé de politique
sur les services de garde à l'enfance, déposé à
l'Assemblée nationale le 24 novembre 1988. Ce soir, est-ce qu'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire: Non.
Le Président (M. Bélanger): Bien, nous commencerons
donc avec M. Richard Cloutier. Si M. Cloutier veut s'approcher de la table.
Alors, M. Cloutier, nous avons une enveloppe de trente minutes pour vous
entendre. Donc, vous avez dix minutes pour la présentation de votre
point de vue et vingt minutes de discussion avec les parlementaires. Je vous
prierais donc, s'il vous plaît, de procéder à la
présentation de votre mémoire. Merci.
M. Richard Cloutier
M. Cloutier (Richard): D'accord. Il y a des gens qui m'ont dit
que j'avais beaucoup de courage de venir ici ce soir. Je vous dirai
qu'après ce que j'ai vécu au cours des deux dernières
années, cela me paraît plus facile maintenant. Je vais vous
présenter le reste de mon groupe. C'est ce qui reste du comité de
parents lorsque les garderies privées à but lucratif envoient des
brefs d'assignation pour poursuivre les membres. Celui-ci est au montant
de 330 000 $.
J'ai te goût de commencer mon exposé en vous disant, comme
Loto-Québec le dit: Voulez-vous savoir à quoi ressemble un grand
gagnant de la loterie 6/49. Moi, je vous dis: Voulez-vous savoir de quoi a
l'air un grand perdant des comités de parents? Le voilà. J'ai
adhéré à un comité de parents à la garderie
Lefebvre de l'île-Bizard, sur une base bénévole.
Après six mois de travaux de comité - c'était le premier
comité de parents à cette garderie - il y a deux
éducatrices qui sont venues nous voir un soir, chez moi, pour nous
raconter des choses épouvantables sur la garderie. Les membres du
comité - nous étions onze à ce moment - ont
questionné ces deux personnes jusqu'à tard dans la nuit, pour
savoir jusqu'à quel point cela pouvait être vrai, des choses comme
celles-là. Comme parents - c'est le plus gros de l'épreuve -
c'est de s'avouer qu'on a pu envoyer notre enfant dans un endroit où il
pouvait se passer des choses comme celles-là. Il y a des parents qui
pleuraient, d'autres qui voulaient défoncer des murs.
Finalement, on a décidé qu'on n'enverrait plus, pour le
moment, nos enfants là et qu'on ferait une plainte à l'Office des
services de garde à l'enfance, pour qu'il nous dise si on pouvait
continuer d'envoyer nos enfants là en toute sécurité. Il y
a des gens qui sont allés à la police, parce que la nature des
choses qui étalent dévoilées portait à croire qu'il
y avait même des choses qui étalent sous le coup de la juridiction
criminelle. Il n'y avait pas d'avocat dans le groupe. C'étaient des
parents de milieux divers, il n'y avait personne là qui pouvait agir
comme personne-ressource.
La deuxième chose que le comité de parents à
décidé de faire, c'est qu'on se devait, compte tenu de notre
mandat, d'avertir les autres parents qui étaient clients de la garderie.
Alors, on s'est confectionné une liste au meilleur de notre connaissance
et on a fait une chaîne téléphonique pour avertir tous ces
parents qu'il y avait une réunion le lendemain soir. Les deux
mêmes éducatrices sont venues raconter aux autres parents ce
qu'elles savaient ou ce qu'elles prétendaient savoir. À la suite
de cela, j'ai reçu, de la part de cette garderie, un bref d'assignation
dans lequel on me reprochait, ainsi qu'aux deux éducatrices, d'avoir
sali la réputation, nui au commerce, occasionné des dommages
psychologiques à ces gens, pour un montant de 330 000 $.
L'office a entendu la cause en audience. Il y a quatre personnes envers
lesquelles des accusations de voie de fait ont été
portées. Une première personne a été reconnue
coupable. L'office a aussi rendu son verdict dans cette cause, mais vous
comprendrez que je ne peux parler de cette cause parce que, d'une part, elle
est en appel à l'office.
Deuxièmement, il reste trois personnes qui doivent
être jugées en cour criminelle, qui sont en attente de
procès et cela fait plus de 18 mois qu'elles sont en train de monter une
facture légale mais pour s'en sauver, probablement, en supposant que les
témoins se perdent dans la nature. Enfin, Je ne peux vous livrer de
détails quant à la nature de la preuve. Je ne pense pas que ce
soit votre objectif de m'entendre parler de ces choses. De toute façon,
si vous voulez le lire, le jugement de l'office contient certains
détails.
Ce que je viens vous dire, Mme Gagnon, c'est que vous ne pouvez pas
demander à des parents de s'impliquer dans des comités dans
lesquels vous placez une grande confiance et les lancer là-dedans sans
que ces gens aient une expertise pour savoir ce que l'on fait, par exemple,
quand un scandale comme celui-là survient. Peut-être que c'est
vraiment comme la 6/49, peut-être qu'il y en aura un dans l'histoire du
Québec mais, à mon avis, c'est un de trop.
Lorsque le scandale est arrivé, beaucoup de parents m'ont dit que
je n'avais pas fait plus que les autres là-dedans. J'avais assumé
un certain leadership, d'accord. Alors, on a réuni un peu de fonds, mais
cela fait plus de 18 mois et iI n'y a personne avec mol aujourd'hui parce que
les gens s'occupent de leur boulot, sont pris par leurs préoccupations.
Moi, je reste seul avec mon avocat pour régler cette
affaire-là.
Aujourd'hui, c'est moins pire, mais au plus fort de la crise, au moment
où les journalistes tournent autour de vous comme des mouches, au moment
où vous recevez des appels anonymes la nuit, au moment où cette
garderie a été incendiée une semaine après le
scandale, on voyait qu'il y avait des gens qui étaient vraiment
sérieux là-dedans. L'enquête policière,
paraît-il, a révélé que la nature de l'incendie
n'avait pas été déterminée mais, quand on regarde
cela de l'extérieur, on voit et on constate qu'il y a des gens
sérieux.
Enfin, cette cause est unique. Il y en aura peut-être d'autres
moins graves. Quand je lis votre document, je dis qu'on va encore faire
confiance à ces comités. Je pense que le comité doit
être là. La preuve en est qu'il a servi à quelque chose
dans le cas de la garderie Lefebvre. Je ne pense pas que vous puissiez faire
porter ce fardeau par des gens qui, malheureusement, n'ont pas
nécessairement l'expérience. Si j'étais avocat
aujourd'hui, peut-être que je m'organiserais pour débouter cette
poursuite. Peut-être même que je poursuivrais à mon tour
parce que mon enfant a fréquenté longtemps cette garderie. Pour
le moment, étant donné que je ne suis pas au fait et que mon
avocat a plutôt tendance à me calmer de ce
côté-là, j'ai décidé de ne pas le faire.
Je pense que s) vous décidez d'aller avec des garderies à
but lucratif, vous devez décider d'aller avec des comités de
parents. Étant donné la nature même des
intérêts qui peuvent devenir opposés, une garderie, c'est
un business. Les gens peuvent se sentir menacés s'il y a des
parents qui, par exemple, décident de retirer leur enfant en
disant: Bien, J'ai vu cela à la garderie. Vous ne pouvez pas laisser des
parents se débrouiller comme cela. Alors, c'est le message que je
voulais vous laisser.
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions.
Mme la ministre?
Mme Gagnon-Tremblay: Effectivement, M. Cloutier, c'est une
expérience malheureuse que vous avez vécue et que vous vivez
encore. J'ai justement pris connaissance du dossier il y a quelque temps. J'ai
été un peu étonnée. Remarquez que je redoutais un
peu... Par nos professions, je connais aussi, par expérience les
responsabilités de membres de conseils d'administration, mais j'en ai
connu l'ampleur, par contre, quand j'ai pris connaissance de ce dossier. Non
seulement en ce qui concerne le comité consultatif, mais on a eu une
autre expérience aussi dans le sans but lucratif, à un moment
donné. On s'est rendu compte que, là aussi, les parents pouvaient
être mis en cause et être poursuivis même dans le sans but
lucratif. Je pense que cela mérite notre réflexion. Je pense
qu'on est rendu au point de se questionner, à savoir comment on pourrait
protéger ces parents parce que c'est sûr que, si vous avez eu
cette expérience et si d'autres parents ont aussi cette
expérience, aucun parent ne voudra s'Impliquer dans un conseil
d'administration, quel que soit le genre de corporation, finalement.
C'est certain, en plus de cela, que vous n'avez pas de ressource, vous
devez vous défendre. Lorsqu'on nous poursuit, naturellement, on doit se
défendre si on ne veut pas être accusé. Vous devez vous
défendre, finalement, par vos propres moyens. Je ne sais pas si vous
avez réfléchi sur... J'imagine qu'en consultant votre conseiller
juridique ce dernier a pu vous suggérer des moyens ou des mesures
à prendre qui nous permettraient de protéger justement les
membres d'un conseil d'administration de quelque organisme que ce soit.
M. Cloutier: On n'en a pas discuté comme tel. Moi, je
sais, parce que je ne m'occupe pas que de questions de garderies, je travaille
aussi, qu'il n'y a personne qui veut faire partie d'un conseil d'administration
d'une entreprise publique sans que la compagnie assume le coût d'une
police d'assurance pour des poursuites éventuelles venant de
fournisseurs, d'employés et d'autres. S'il y a une offre d'achat
publique, personne ne veut embarquer dans cela. Alors, la solution que le
secteur privé est obligé d'adopter, c'est d'offrir une police
d'assurance lorsque la personne agit à l'intérieur de son mandat.
C'est sûr que si la personne n'agit pas à l'intérieur de
son mandat, elle n'est pas protégée. Mais le comité de
parents auquel j'appartenais a agi à l'intérieur de son mandat,
c'est-à-dire que, premièrement, nous avons retiré nos
enfants; ensuite, nous avons informé les autres parents parce que, si
nous ne l'avions pas fait, je pense que nous aurions été sujets
à des poursuites de ces parents. Donc, quand on agit à
l'intérieur de son mandat, il faudrait donner une police d'assurance aux
parents à savoir que l'office va rembourser les frais d'avocat. Je pense
que c'est ce qu'il faut.
La question n'est pas de savoir si je suis coupable ou pas. Je sais que
je ne suis pas coupable, mais il faut que j'aille dire ça devant un juge
et ça va coûter des sous. En plus de ça, j'ai eu la chance
d'avoir un avocat que je connaissais parce que je suis dans le milieu des
affaires, mais je sais qu'il y a des gens qui ont beaucoup moins de ressources
qui vont peut-être avoir à retenir les services d'un avocat de
l'aide juridique qui ne s'intéressera pas à la cause. Enfin,
quand tu n'as pas de moyens, je sais ce qui peut se passer
là-dedans.
Mme Gagnon-Tremblay: Je sais que depuis que j'ai pris
connaissance de votre expérience malheureuse et d'une autre
expérience aussi qui s'est produite pour d'autres parents, j'ai
mandaté les conseillers juridiques de l'Office des services de garde
à l'enfance de travailler, de voir à quel niveau on pourrait
Intervenir et comment on pourrait le faire pour assurer une meilleure
protection aux parents qui désirent s'impliquer dans des conseils
d'administration parce que c'est sûr, comme je le mentionnais, que c'est
trop facile à ce moment-là. On ne pourra pas réussir
à ce que des personnes acceptent de faire partie de conseils
d'administration de quelque corporation que ce soit, que ce soit à but
lucratif ou sans but lucratif. Ces gens-là vont être très
prudents si, en plus de ça, Us deviennent responsables des gestes
posés ou de l'administration qu'ils ont à assumer au sein de ce
conseil d'administration. Quant à moi, je dois vous assurer que je suis
très préoccupée par cette question et que nous y
travaillons actuellement.
M. Cloutier: Je veux aussi vous dire que même si l'office
défrayait... Lorsque vous avez une poursuite contre vous en cour, cela
peut durer très longtemps. Même si l'office payait mes frais
d'avocat, j'ai toujours une poursuite contre moi. Cela veut dire que n'importe
qui qui fatt une enquête sur moi va voir que j'ai ça. Donc, a
priori, par exemple, si on faisait une enquête de crédit, je suis
en affaires, on peut trouver que j'ai cette poursuite contre mol. Même si
je dis que je ne suis pas coupable et même si je dis que l'office va
payer mes frais d'avocat, iI n'en demeure pas moins que ça fait 18 mois
que j'ai ça sur le dos et on est peut-être partis pour une autre
année, au rythme où vont les choses.
Donc, même si l'office donne cette garantie aux parents, il faut
être conscients que ce n'est pas une protection contre le fait
d'être poursuivi, parce que au Québec, on a le droit de poursuivre
quelqu'un. Si vous pensez que vous
êtes en droit de le faire, vous pouvez poursuivre. Vous pouvez me
poursuivre, si vous voulez, pour ce que j'ai dit ce soir, ce n'est pas garanti
que vous allez gagner, mais vous avez un droit de poursuivre. Et c'est souvent
utilisé, par exemple, pour faire taire des témoins dans une
cause, ce qui semble être le cas ici.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. Cloutier.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. D'abord, M. Cloutier,
Je veux vous féliciter pour votre présence parmi nous ce soir.
Évidemment, comme vous le signaliez, il peut toujours y avoir des
poursuites pour libelle ou diffamation en vertu des lois, sauf dans le cas des
parlementaires lorsqu'ils interviennent, comme vous le savez, au salon bleu,
puisqu'ils sont immunisés, mais dès qu'ils sortent, s'ils mettent
les pieds dans le corridor et qu'ils rapportent les mêmes propos, ils
peuvent l'être.
Ce qui m'intéresse vraiment, ce sont deux aspects dans
l'expérience malheureuse que vous vivez. D'abord, Mme la ministre a
parlé de deux expériences: la vôtre et une deuxième.
Elle me signale que c'est dans une...
Mme Gagnon-Trembiay: Ils n'ont pas été poursuivis,
mais ils ont été menacés.
Mme Harel: On me signale que ce serait une garderie à but
lucratif transformée en garderie sans but lucratif: la garderie Le
Criquet; c'est bien ça?
Mme Gagnon-Tremblay: Mais il n'y a pas eu de poursuites.
Mme Harel: II n'y a pas eu de poursuites. Mme Gagnon-Tremblay:
Non.
Mme Harel: On me signale aussi que les anciens
propriétaires siègent au conseil d'administration. Voyez-vous, la
première question qui m'est venue en vous écoutant était
la suivante. Vous nous dites: II y a un business - le business, c'est une
garderie - et il peut y avoir des intérêts opposés. En
écoutant la ministre mettre dos à dos à but lucratif et
sans but lucratif, je me suis dit: II y a là un problème. Parce
qu'à but lucratif il n'y a pas de conseil d'administration de parents
qui gèrent, tandis que sans but lucratif il y a un conseil
d'administration de parents qui gèrent. À but lucratif, c'est un
comité consultatif et, en plus, s'il y a de la bisbille, sans but
lucratif, c'est entre parents que ça se passe, puisque les parents
gèrent, donc ont des rapports avec d'autres parents.
Je veux savoir si vous pensez que la nature d'une garderie à but
lucratif peut générer des intérêts opposés,
comme vous l'avez signalé tantôt, de nature à amener une
attention plus grande à l'égard de la marge de manoeuvre que
doivent avoir les parents. En vous écoutant, je me suis dit: Finalement,
est-ce que le danger n'est pas tout simplement que, dans ce type de garderie,
les parents retirent l'enfant? Vous avez même dit une phrase qui m'a un
peu bouleversée. Vous avez dit: En plus de cette culpabilité
qu'on ressent, comme parents, d'avoir utilisé ce type de garde pour
notre enfant...
M. Cloutier. Ma réponse à cela serait que je ne lie pas la
situation que je vis au statut corporatif de la garderie. Je pense qu'une chose
comme celle-là peut se produire indépendamment du statut de la
garderie. Je ne vois pas l'aspect... Pas là-dessus, en tout cas.
Mme Harel: Votre enfant était là depuis deux
ans...
M. cloutier Oui.
Mme Harel: ...au moment où vous avez été
Informé des événements.
M. Cloutier. Oui.
Mme Harel: Comment est-il possible d'être un bon parent...
C'est tout à fait évident que vous l'êtes, il me semble
personnellement, de par mon propre Instinct de parent. Comment est-il possible,
pendant deux ans, d'avoir son enfant en garderie et que ce ne soit pas
lié au statut? Dans une garderie à but non lucratif, le parent
aurait nécessairement été amené à
gérer et, donc, à entrer en rapport avec les
éducatrices.
M. Cloutier: II y a une dimension d'un service de garde que les
gens qui étaient ici cet après-midi, l'avant-dernier groupe que
j'ai entendu, ont bien rendue, c'est celle de la confiance. Dans ce genre de
services, vous ne pouvez pas mettre 56 moyens de contrôle et penser que
cela va remplacer la confiance. Il n'y a pas de façon autre que la
confiance de vous assurer que votre enfant est bien traité.
Mme Harel: Est-ce que la présence ne pourrait pas aussi
venir favoriser...
M. Cloutier. Qu'est-ce que vous voulez dire par la présence?
Mme Harel: Pendant ces deux années, vous ou votre
conjointe alliez conduire l'enfant le matin et le chercher le soir. Ce fut
pendant deux années continues. Êtes-vous entré en contact
avec les éducatrices pendant ces années?
M. Cloutier Je ne peux pas répondre à des questions comme
celle-là parce que cela implique que je vais parler de l'objet des
plaintes à
I'endroit de la garderie et je ne veux pas m'embarquer dans ce genre de
discours étant donné que la cause a été
portée en appel à la Commission des affaires sociales.
Le Président (M. Bélanger): Je pense que,
là-dessus, vous avez raison. On va demander aux membres de la commission
de faire attention pour ne pas vous mettre dans une situation - vous, on tout
cas - qui pourrait être fort embarrassante par la suite.
Mme Harel: Oui. Moi, je suis avocate et je peux vous dire que les
questions que je vous ai posées n'ont rien à voir avec la cause.
Je vous demande si vous aviez des contacts avec les éducatrices on tant
que parent durant les deux années où vous allez reconduire
l'enfant à la garderie. Vous pouvez très bien souhaiter ne pas
répondre, mais la question reste posée pour moi. Pour vous, cette
expérience est très traumatisante, mais à titre de
gestionnaire, vous comprendrez que le gouvernement doit s'assurer que ce n'est
pas systémique, que ce n'est pas un effet du système que ce genre
de choses se produise. Il arrive que des plaintes considérées
comme fondées à l'office proviennent, en majorité, de
garderies à but lucratif.
M. Cloutier: Je vais vous répondre de la façon
suivante. Je pense que l'office devrait être extrêmement
sévère sur les activités des comités de parents. Il
devrait les imposer et en assurer le suivi, à condition, bien sûr,
qu'on encadre les parents, et Mme Gagnon était d'accord avec moi,
tantôt. Je pense que c'est la meilleure protection. Dès que le
comité de parents a commencé à travailler dans cette
garderie, l'abcès a éclaté.
Mme Harel: C'est donc parce que vous vous êtes
Impliqué en janvier 1987 et parce...
M. Cloutier: Oui.
Mme Harel: ...qu'un comité s'est impliqué que les
faits ont été portés à votre connaissance.
M. Cloutier: C'est-à-dire que les deux éducatrices
ont pu Identifier des gens qui étaient responsables. Il y avait un
interlocuteur.
Mme Harel: Ce que vous me signalez là est très
important. Cela veut dire qu'il n'est pas suffisant d'être un bon parent,
de prendre bien soin de l'enfant et de l'amener tous les jours, pondant des
semaines, des mois et des années, à la garderie, il faut que,
quelque part, iI y ait une relation entre les éducatrices et les
parents. Est-ce que c'est ça que je dois comprendre? (20 il 30)
M. Cloutier Oui. Et, aujourd'hui, je pourrais vous présenter
plusieurs bons parents, qui se pensent bons parents, des professionnels qui
refusent de croire ce qui s'est passé à cette garderie,
malgré les enquêtes et les condamnations. Ils continuent de dire:
Non, non, tout ça, c'est un coup monté. Le parent ne peut pas
admettre - c'est contre son principe - qu'il a envoyé son enfant dans un
endroit comme ça. On est en 1989, maintenant; ll n'y a pas un parent qui
va admettra ça. Il y a des parents qui ont cette barrière
tellement forte qu'ils vont aller jusqu'à nier des choses comme
ça, alors qu'il y a abondance de preuves, à mon avis. Ce n'est
peut-être pas l'opinion de tout le monde, mais, à mon avis, il y a
abondance de preuves.
Mme Harel: Je reviens toujours à la question parce que je
ne veux pas entrer en détail sur le genre de voie de fait ou
d'événement qui s'est produit, ce n'est pas ça qui
m'intéresse. Je tiens quand même à m'informer si, du fait
que vous y étiez allé pendant deux années, les autres
parents ne vous avaient pas permis, à ce moment-là, de prendre...
Comment se fait-il que vous n'ayez pas pu prendre contact ou être
Informé de ces événements, de ces pratiques?
M. Cloutler: Les deux éducatrices qui sont venues nous
voir au mois de mal n'étalent en fonction que depuis janvier. Et ce
qu'on a découvert par la suite, c'est que les éducatrices qui ont
accepté de témoigner, qu'on a dénichées par la
suite et qui étalent des ex-employées, préféraient
s'en aller, donner leur démission, plutôt que d'avoir à
supporter ce qu'elles auraient eu à supporter si elles étaient
allées au bout avec ça. Et là, je les comprends
maintenant, parce que je l'ai supporté. Et je sais pourquoi elle ne sont
pas allées jusqu'au bout. Et je sais maintenant pourquoi les gens
agissent comme ça en général. C'est très difficile.
Il faut vraiment être très convaincu... En tout cas,
l'idéal que J'avais, c'était que je le faisais pour les enfants,
pas juste mon enfant, mais les enfants qui avaient été là.
Et je trouve qu'on a peut-être perdu ça de vue.
Mme Harel: D'une certaine façon, c'est le système
devant lequel il est le plus facile d'abdiquer, en éloignant son enfant,
ou en s'éloignant comme employé, plutôt que de faire face.
C'est ça que vous nous indiquez ce soir.
M. Cloutier Oui. Par exemple, un parent pourrait probablement
décider, s'il voyait quelque chose qu'il n'aime pas à la
garderie, de retirer carrément son enfant en disant: J'ai trouvé
quelqu'un d'autre plus près de chez moi. En ne faisant pas de
poussière avec ça. C'est l'attitude qu'un parent risque
d'adopter.
Mme Harel: Je veux vous remercier. Et je peux vous dire que pour
moi ça confirme que, sans une gestion participative des parents et une
relation systémique, structurelle avec les éducateurs et les
éducatrices, II y a des risques que,
malheureusement, l'expérience que vous vivez se
répète.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Si
vous me permettez une intervention, comme député de
Laval-des-Rapides, sur le temps qui restait à la formation
ministérielle. Je comprends très bien ce que vous ressentez, ce
que vous avez pu vivre là-dedans. Ayant oeuvré dans ce
réseau de la santé et des services sociaux pendant plusieurs
années, j'ai eu à faire, à un moment donné, une
tutelle avec enquête d'un établissement. Il y avait eu des
problèmes graves. Et une des choses que j'avais réalisées,
malgré la présence de nombreux spécialistes et de gens
très bien formés au conseil d'administration, c'est que ces
choses-là ne se rendent que très rarement a ce
niveau-là.
Beaucoup de parents qui rencontraient régulièrement les
enfants n'étalent pas au courant et avaient même encore une
confiance aveugle, parce que je pense que tout le personnel n'était pas
mauvais là-dedans. Il y en avait plusieurs qui étaient des gens
de grande qualité, très dévoués et qui valaient la
peine et auxquels les parents avaient raison de faire confiance. Mais il y
avait certains éléments, évidemment, qui avaient
posé des problèmes assez sévères.
Je pense qu'il devient toujours difficile, autant pour les parents que
pour un conseil d'administration - selon l'expérience que j'ai
vécue, j'ai fait quand même trois à quatre tutelles du
genre - de savoir vraiment. Il y a souvent une consigne du silence qui existe
et qui devient très difficile à percer. Seul l'oeil de quelqu'un
de très averti et très au fait du genre de situation peut arriver
à détecter ou à inspirer suffisamment confiance pour les
détecter.
Je ne pense pas que le fait que ce soit à but lucratif ou sans
but lucratif change quelque chose. C'est la valeur des personnes qui sont
dedans. Souvent les gens préfèrent, comme vous le dites, s'en
aller, démissionner, chercher un autre emploi plutôt que d'agir.
Mais il me semble qu'il y a là quand même une question de fond qui
se pose. Ce n'est pas juste de parler qualité, mais voir comment on peut
aussi contrôler, vérifier ou donner des garanties
supplémentaires pour appuyer la confiance des parents dans ce genre de
situations. Ce n'est pas vraiment facile comme mécanisme.
Il y a une autre suggestion que je ferais, Mme la ministre. Il existe
une entente dans le réseau de la santé et des services sociaux -
j'ai vérifié pour être bien sûr de ce que j'allais
dire - qui ne fait pas partie des lois, mais chaque conseil d'administration a
une assurance "malpractice", qui est à peu près obligatoire, ou
qu'on a toujours prise, au cas où, et qui assure comme cela tous les
gens du conseil d'administration, pour prévoir ces situations. Cela
n'enlève pas les désagréments, c'est bien évident.
Ce que vous endurez doit être infernal, mais, au moins, cela couvre les
frais légaux et ça vous protège dans un certains sens.
Mais il est évident qu'il y aurait peut-être d'autres
mécanismes à prévoir aussi, et je ne sais pas si, par une
loi, on peut donner l'immunité à des administrateurs d'un
établissement puisqu'on est toujours responsable jusqu'à un
certain point.
Cela termine le temps. Donc, je suis obligé de m'arrêter.
Alors, Mme la ministre, si vous voulez remercier nos invités.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, je vous remercie. Je pense que cela
mérite réflexion.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. Cloutier.
Mme Harel: Vous avez oublié de me permettre de remercier
M. Cloutier.
Le Président (M. Bélanger): Vous l'aviez fait
tantôt, non?
Mme Harel: Je vais le faire à nouveau. Vous percez ce soir
la consigne du silence, et je pense qu'on peut vous en être
redevables.
M. Cloutier: Je le fais pour les enfants.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
des affaires sociales remercie...
S'il vous plaît, même si tout le monde a envie d'applaudir,
c'est malheureux, mais on ne peut vraiment pas le permettre ici. Je m'en
excuse. Alors merci, M. Cloutier.
Garderie Soleil du quartier Inc.
Nous invitons la garderie Soleil du quartier inc. Vous m'excusez, il y a
un petit aparté ici. Je pense qu'on est encore sous l'effet de la
discussion, mais je dois malheureusement vous Interrompre et accueillir nos
nouveaux invités, les représentants de la garderie Soleil du
quartier Inc. Je veux d'abord vous souhaiter la bienvenue, vous dire qu'on a
trente minutes. C'est bien cela, dix minutes pour la présentation de
votre point de vue et vingt minutes de discussion avec les parlementaires.
C'est court, c'est pourquoi je serai rigoureux sur le temps. Avant de
commencer, si vous vouiez vous identifier, identifier vos porte-parole et
procéder à la présentation de votre mémoire.
Merci.
Mme Levert (France): D'accord, merci. Je suis France Levert,
présidente du conseil d'administration de la garderie Soleil du quartier
qui est composé à la fois de travailleurs, de travailleuses et de
parents. J'ai avec moi deux autres personnes.
M. Chéron (Jacques): Mon nom est Jacques Chéron, je
suis membre d'un comité de parents à l'intérieur de la
garderie Soleil du quartier et je m'implique aussi au sein du Regroupement
des
garderies du Montréal métropolitain.
M. Tessier (Gilbert): Je me présente, Gilbert Tessier,
éducateur en garderie et membre du conseil d'administration de la
garderie en tant qu'éducateur.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Si vous voulez
procéder à votre présentation.
Mme Levert: D'accord, je vous remercie. Avant même d'entrer
dans le contenu du mémoire comme tel, nous voulons souligner une erreur
qui s'y est glissée, sur les subventions qui peuvent être
données sur les immobilisations en garderies à but lucratif. On a
mal interprété un élément de
l'énoncé, et on voulait le souligner au départ, avant
d'entrer dans le contenu et d'exprimer notre point de vue. J'espère
qu'on a droit à l'erreur.
Pour commencer je voudrais rappeler les objectifs du mémoire. Les
parents et éducatrices et éducateurs qui ont travaillé au
mémoire l'ont fait sur une base bénévole, et on n'a pas
voulu entrer dans des détails d'analyse des modalités du
mémoire quant à des pourcentages, des questions de
fiscalité ou ceci ou cela. On ne se considérait pas comme aptes
à le faire et on n'avait pas nécessairement le temps de le faire
non plus. Ce qu'on a voulu exprimer, c'est vraiment le témoignage d'un
conseil d'administration de parents travailleurs qui vivent tous les jours une
situation de garderie.
La garderie Soleil du quartier est quand même une des plus
vieilles garderies de Montréal et aussi une des plus grosses. Donc,
l'essentiel de notre propos porte plus sur le fond que sur des modalités
comme telles. C'est plus sur des principes que sur des modalités. Il y a
aussi certains éléments préalables que nous jugeons
importants de souligner au départ. On considère que
l'énoncé sous-utilise, si l'on veut, des évaluations qui
ont été faites préalablement à sa rédaction,
notamment par la commission Presser, et des contributions des regroupements
comme le Regroupement des garderies du Montréal métropolitain ou
de Concertaction.
Nous voulons rappeler aussi que nous sommes solidaires des positions qui
ont été exprimées dans leur mémoire par le RGMM,
Concertaction et aussi les regroupements syndicaux CSN et CEQ. L'approche qu'on
a prise pour exprimer notre point de vue dans le mémoire est une
approche un peu de questions-réponses sur quatre grands points. Je veux
juste rappeler l'essentiel de notre propos sur chacun des points. La
première question qu'on se posait en tant que parents et conseil
d'administration était tout simplement: Est-ce que ce qui est
proposé dans l'énoncé va apporter des bonifications comme
telles? On ne peut pas faire autrement que de reconnaître que
l'énoncé va effectivement apporter, à court terme, dans
les deux ou trois prochaines années, des bonifications sur le budget de
notre garderie. Il va y avoir des sommes additionnelles quand même assez
appréciables pour la garderie à la suite de la mise en
application des principes de l'énoncé.
C'est évident aussi que les parents qui ont regardé cela
ont dit: Effectivement, dans plusieurs cas, plusieurs parents vont avoir plus
d'argent dans leurs poches à court terme. Mais notre conclusion a
été de dire: Ce qu'on peut conclure de tout cela, c'est que cela
a un effet à court terme qui va permettre à la garderie de faire
du rattrapage parce qu'on a du rattrapage à faire, entre autres, pour
payer à leur juste valeur... On considère que les travailleurs
chez nous ne sont pas rémunérés de façon
très importante. De toute façon, c'est connu, les salaires des
travailleurs et des travailleuses en garderies ne sont pas très
élevés; ils sont même en deçà de ceux des
travailleurs qui oeuvrent dans le domaine de l'éducation et qui ont des
formations équivalentes. Pour nous, on considère que cela va
seulement permettre de faire du rattrapage et que ça ne règle
rien à long terme. On a l'impression très nette que d'ici
à deux ou trois années, enfin d'ici à quelques
années, on va se retrouver avec les mêmes types de
problèmes que l'on a à l'heure actuelle, c'est-à-dire
essayer de trouver toutes sortes de solutions plus ou moins heureuses pour
boucler le budget parce que c'est le fait de beaucoup de garderies. Chaque
année, les conseils d'administration de garderies, lors de
l'assemblée générale des parents, doivent se poser la
question suivante: Comment va-t-on faire pour boucler nos budgets? Et, la marge
de manoeuvre est très mince.
De toute façon, ce qu'on sait très bien, c'est qu'à
peu près 80 % des budgets des garderies sont consacrés aux
salaires des travailleurs. Quand on arrive, comme c'est arrivé
l'année dernière à notre garderie, avec un déficit
important en vue, on a eu à prendre la décision à la fois
de couper au chapitre de certains services et d'augmenter les cotisations des
parents. On pense que cela ne changera pas nécessairement la situation
à long terme, à ce point de vue.
Une autre question qu'on s'est posée, c'est évidemment au
chapitre de la qualité des services. En regardant
l'énoncé, il nous semble évident que ça met en
cause toutes les questions de qualité de services et on n'est pas
convaincus, en fait, que l'énoncé, tel qu'il est là, va
nous permettre des bonifications si on parle encore une fois de bonifications
concernant la qualité des services. Et, ce qui nous inquiète
beaucoup, ce sont les notions de productivité et de profits qui peuvent
être associées avec ce qu'on retrouve dans l'énoncé.
(20 h 45)
Ce que l'on dit aussi, c'est qu'en fait on n'est pas pour le gaspillage
dans les services publics et je ne pense pas qu'il y ait tellement de garderies
qui font du gaspillage. C'est loin d'être le cas. Je ne pense pas qu'il y
ait telle-
ment de dégraissage à faire dans les garderies. Avec les
budgets qu'on a, en tout cas, ceux qu'on a chez nous, il n'y a pas de
dégraissage à faire. Le dégraissage qu'on a pu faire a
déjà été fait. On est rendu plutôt dans les
os et dans les muscles que dans la graisse. Les décisions qu'il faut
prendre quand on dit qu'il faut couper des heures de conciergerie, des heures
de services, ouvrir plus tard ou fermer plus tôt, par rapport à
des parents qui sont sur le marché du travail, sont difficiles à
prendre et cela ne fait pas nécessairement l'affaire de tout le monde
non plus.
Tout cela pour dire qu'on considère que cela met en cause les
questions de qualité. En fait, quand on parle de notions de profits, on
trouve qu'on ne devrait pas nécessairement associer les notions de
profits avec un service qu'on considère comme éminemment public
comme les garderies. On n'a pas à parler de rentabilité par
rapport aux garderies. En fait, ce qu'on recherche, c'est une
rentabilité collective et sociale. Ce qu'on devrait chercher,
c'est...
Le Président (M. Bélanger): Je vous demanderais de
conclure, s'il vous plaît!
Mme Levert: Oui, j'aillais conclure.
Le Président (M. Bélanger): Je m'en excuse.
Mme Levert: En fait, je pense qu'un autre élément
Important qu'on voulait amener concerne tout l'aspect de la cogestion qui est
vécue dans notre garderie où on a un conseil d'administration,
comme je le disais, formé de travailleurs et de parents, où les
travailleurs participent activement à la prise de décisions et,
pour nous, c'est une garantie, justement, pour la qualité des
services.
En fait, les principaux points qu'on voulait amener en conclusion sont
la reconnaissance du caractère public des garderies, la reconnaissance
aussi du caractère éducatif des garderies, à savoir que
les enfants ne sont pas des êtres éducables seulement à
partir du moment où ils commencent à aller à
l'école mais bien avant aussi. Dans ce sens-là, si on parle Juste
en ce qui a trait aux conditions des travailleurs, on devrait en avoir de
similaires à celles des travailleurs du domaine de l'éducation.
En fait, on considère qu'il n'y a pas actuellement, et
l'énoncé n'en propose pas, de réseau intégré
des services de garde, ce qui amène une mise en compétition des
différents services, que ce soient les services donnés en
garderies en milieu - je vais juste finir, cela ne sera pas long - scolaire qui
entrent en compétition avec les garderies à but lucratif ou sans
but lucratif, pour les mêmes groupes d'âge, ce qui peut amener
d'autres problèmes budgétaires comme tels.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous remercie,
madame.Mme la ministre?
Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, madame, pour votre
exposé. Est-ce que votre garderie est située plutôt dans un
milieu défavorisé? Est-ce que vous avez beaucoup de personnes,
par exemple, admissibles à l'exonération financière?
Est-ce qu'on peut considérer comme...
M. Tessier: À l'origine, oui, mais de moins en moins.
Mme Levert: En fait, la garderie Soleil du quartier est
située sur le plateau Mont-Royal. C'est une population en
évolution. C'est peut-être à peu près la
moitié de la clientèle qui a l'aide comme telle.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez parlé tout à
l'heure... Oui, est-ce que vous avez quelque à ajouter?
Mme Levert: Non, pas vraiment.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous avez dit tout à l'heure que la
nouvelle formule vous accordait un rattrapage pour la prochaine année et
que vous vous inquiétiez, par exemple, au sujet de ce qui allait suivre
pour les années ultérieures. Avec la formule indexée,
est-ce qu'à ce moment-là, cela ne change pas vos
inquiétudes? Supposons que vous fassiez le rattrapage l'an
prochain...
Mme Levert: Oui, d'accord.
Mme Gagnon-Tremblay: ...et que, par la suite, étant
donné que la formule est indexée.. Est-ce parce que le rattrapage
ne vous apparaît pas assez élevé ou, s'il est suffisant,
est-ce que l'indexation pourra suffire par la suite?
M. Chéron: Oui. C'est sûr que l'indexation à
long terme va juste nous donner - excusez l'expression - une pitance de survie.
Pour la première année, on fait environ 71 000 $ avec la nouvelle
forme de calcul.
Mme Gagnon-Tremblay: Avec la nouvelle formule?
M. Chéron: Oui. Il y a trois raisons à cela. Notre
tarif est extrêmement élevé à 17,50 $. On a un droit
acquis de 96 places au permis. La nouvelle réglementation stipule un
maximum de 60 places. On a aussi un taux d'occupation qui n'est jamais descendu
en bas de 94 %. Donc, on réunit les conditions de la garderie
idéale, mais nos conditions ne s'amélioreront pas parce que,
justement, on a acquis les conditions idéales.
Donc, si nous avons une formule d'indexation à 4,5 %, elle sera
distribuée en salaires. Mais, comme telle, la garderie ne pourra pas
s'améliorer en immeuble ou, au point de vue pédagogique, pour
l'achat d'une quelconque structure possible pour les enfants. On va
juste
payer nos salaires. Ce n'est pas évident que 4,5 %, cela va
être suffisant pour les salaires si on a du rattrapage à faire.
À 8,46 $ l'heure, le rattrapage va nous demander des fonds
supérieurs à ça. Juste à titre Indicatif, la
première année, sur les quelque 70 000 $ qu'on ferait, 52 000 $
Iraient en salaires. Donc, qu'est-ce que 20 000 $?
Mme Gagnon-Tremblay. Cela équivaudrait à une augmentation
de combien à peu près?
M.Chéron:De10 %.
Mme Gagnon-Tremblay: Par personne?
M. Chéron: Oui.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela ferait passer vos salaires de quoi
à quoi?
M. Chéron: Ce serait une augmentation d'environ 1 $. Cela
passerait de 8,46 $ à quelque 9 $.
M. Tessier: Le salaire maximum gagné en garderie est de 9
$. Après cela, il y a l'échelle salariale qui descend. C'est dire
que môme avec 10 % on n'atteindrait pas 10 $ l'heure.
M. Chéron: Avec 96 enfants, ça prend quand
même beaucoup de moniteurs, 25 employés permanents et on ne compte
pas les remplacements et les chevauchements d'horaires là-dedans.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est une garderie qui existe depuis
longtemps pour avoir autant de places au permis. Vous avez un droit acquis vous
autres.
M. Chéron: C'est ça. Mais il faut vivre avec. Il
faut le gérer aussi.
Mme Gagnon-Tremblay: C'est cela, oui. Tout à l'heure, vous
avez soulevé une inquiétude. Vous m'avez dit que la garderie en
milieu scolaire allait chercher une certaine clientèle. Vous vous
inquiétiez un peu, je ne sais pas si j'ai bien saisi, du milieu
scolaire. Voulez-vous m'expliquer davantage ce que vous avez voulu dire?
Mme Levert: Avec le développement des services de garde en
milieu scolaire au cours des dernières années, et le fait que,
depuis je ne sais combien d'années, il y a des prématernelles et
des maternelles avec services de garde en milieu scolaire, on a aussi ces
groupes d'âges à la garderie. Il y a un groupe d'âge qu'on a
abandonné parce qu'il était effectivement en compétition
avec une école voisine, le groupe d'âge de la maternelle. Ce sont
des groupes, si on veut, qui aident beaucoup à rentabiliser une garderie
puisque ce sont des groupes où les ratios sont plus
élevés.
Enfin, les services de garde que nous pouvons offrir sont
évidemment plus coûteux pour les parents que le service de garde
on milieu scolaire étant donné que la partie prématernelle
ou maternelle qui est donnée est gratuite. Le reste du service de garde
peut coûter, si on veut, 40 $ ou 50 $ aux parents alors que pour un
parent qui amène son enfant à la garderie, qui a le même
âge que celui qui va a la prématernelle, ça va lui
coûter 87,50 $ par semaine. Donc, c'est directement on compétition
pour les mêmes groupes d'âges et ce sont, si on veut, les plus
rentables d'une garderie parce que ce sont les groupes où on a les
ratios les plus élevée. À ce moment-là, c'est une
compétition qui est vraiment directe et iI y a beaucoup de parents qui
se posent des questions sur le choix à faire entre les deux, notamment
en termes financiers. Cela leur coûte moins cher. On a un service qu'on
peut considérer comme équivalent, un service en milieu scolaire
qui, dans le fond... Cela coûte moins cher parce qu'il y a l'ensemble du
système scolaire qui supporte en fait tous les coûts fixes de ce
service, que ce soient les locaux ou toutes sortes de services à ce
niveau-là. Donc, c'est pour ça que, lorsqu'on parle d'un
réseau intégré, il y a des recoupements comme ça
qui font qu'il y a des compétitions et c'est encore plus difficile si on
parle d'essayer de rentabiliser et de fonctionner au maximum pour que les
garderies fonctionnent. Cela rend ça encore plus difficile.
Mme Gagnon-Tremblay: Malgré tout, je vois que vous
fonctionnez au maximum, même avec cette compétition.
Mme Levert: Quand on a perdu le groupe d'âge -
peut-être que tu pourrais en parler plus, Gilbert - de la maternelle, il
a fallu compenser autrement. Il y a toutes sortes de petits moyens qui sont
trouvés, ce qui fait qu'on va chercher quand même un petit peu
d'argent de plus parce que pour ces enfants qui vont en prématemelle ou
en maternelle, les écoles sont fermées en été.
Personnellement, je n'ai pas trois mois de vacances. J'ai à peu
près quatre semaines et c'est ça aussi pour la plupart des
parents. Donc, à ce moment-là, on peut prendre des enfants de
maternelle et prématernelle durant l'été pour
compenser.
M. Tessier On compense aussi en prenant des groupes plus jeunes
où les ratios sont plus bas, même si Ies ratios officiels sont
d'un pour huit, à partir de dix-huit mois. Ce n'est pas très
logique de penser qu'on passe d'un pour cinq à la pouponnière
à un pour huit le lendemain. C'est sûr que tous les groupes - on a
une très grosse pouponnière, un permis de 26 - qui s'ensuivent
sont déficitaires, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'on rejoigne
le ratio maximal. Donc, comme on se fait drainer notre population plus
vieille,
on se retrouve toujours avec des enfants en plus bas âge, avec des
ratios plus bas. On a beau rouler au maximum, on se retrouve quand même,
présentement, avec un assez gros déficit.
Mme Gagnon-Tremblay: Avec une clientèle aussi nombreuse,
combien d'éducateurs ou d'éducatrices avez-vous?
M. Tessier: On a présentement 25 personnes permanentes
mais, là-dessus, 2 personnes au bureau et 2 personnes à la
cuisine, et 21 éduca-trices.
Mme Gagnon-Tremblay: Cela commence à faire beaucoup de
personnel. Vous avez parié tout à l'heure dans votre
mémoire, si je ne me trompe pas, de cogestion. Comment vivez-vous la
cogestion dans votre garderie?
M. Tessier: La cogestion, je pense que c'est une formule qui
était à l'origine des garderies. Nous, étant une vieille
garderie, il y a quand même une bonne partie de l'histoire des garderies
à travers laquelle on a passé. La cogestion est justement le
meilleur garant ou un des bons garants pour les parents afin de s'assurer d'un
suivi et d'un contact avec l'éducateur, donc avec les activités
et le fonctionnement des enfants à l'intérieur de la
garderie.
Cela permet aussi à l'éducateur de récupérer
sa part de décisions dans tout ce qui entoure la garderie. Je pense que
c'est Important que l'éducateur ne soit pas seulement là pour la
pédagogie et le changement de couches. Il faut aussi qu'il participe
à toute l'élaboration de la structure de la garderie pour qu'elle
réponde le mieux possible aux besoins de l'enfant, parce qu'en
réalité, moi, comme parent, je suis là une demi-heure le
matin et une demi-heure le soir, mais celui qui vit avec mon enfant, en
garderie, c'est l'éducateur. Je me réfère aussi aux
témoignages qu'on a eus plus tôt, c'est une bonne formule pour
éviter cela, parce que le contact est constant et, à un moment
donné, les éducateurs s'intègrent à la vie de la
garderie et ça évite tout cela. Entre eux autres, ils
s'autogèrent autant au niveau pédagogie, santé,
hygiène qu'à tous les aspects de la garderie. Au niveau du
conseil d'administration, nous autres, on a un contact avec l'équipe de
travailleurs permanents. On a pas d'intermédiaire entre les
travailleurs, le vécu de la garderie et le conseil d'administration.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
Mme la députée de Malsonneuve.
Mme Harel: II me fait plaisir de saluer l'équipe de Soleil du
quartier. J'ai eu souvent l'occasion de déambuler devant l'installation
où vous êtes. Vous êtes toujours au coeur même du
milieu?
M. Chéron: Brébeuf et Laurier.
Mme Harel: Dans l'école qui a été
aménagée; c'est cela?
M. Chéron: C'est cela.
Mme Harel: C'est une école de la CECM qui a
été transformée?
M. Chéron: Oui.
Mme Harel: Vous dites, dans votre mémoire: Oui à la
rentabilité, non aux profits. C'est peut-être un peu caricatural,
un peu la marque de commerce. Et ça nous permet de souligner qu'il n'y a
pas encore une seule personne, sauf cet après-midi, qui a mis en cause
la capacité de gestion des garderies gérées par les
parents; ça a l'air que c'est un type de gestion qui permet quasiment de
faire des miracles avec des équilibres difficiles à
harmoniser.
Vous dites: On va bénéficier, à court terme. Vous
venez quand même devant la commission pour signaler que, malgré
tout, vous vous considérez comme étant
bénéficiaires du fait que vous avez une situation
particulière; c'est ce que je dois comprendre. C'est le fart d'avoir un
taux d'occupation de 94 %, d'avoir un tarif élevé, d'avoir le
nombre de places que vous avez qui vous permet d'avoir cette somme de 71 000 $.
Évidemment, c'est réparti parmi votre personnel - j'essayais de
faire des calculs - sur 52 000 $ que vous entendez consacrer, c'est à
peu près 2000 $ par employé. Est-ce que c'est cela? (21
heures)
M. Chéron: Approximativement, oui.
Mme Harel: Le budget total est de combien?
M. Chéron: Pour l'année 1989-1990, c'est 673 000 $
de budget total.
Mme Harel: D'accord. 673 000 $, c'est le budget?
M. Chéron: Excusez-moi! C'est 633 000 $, mais les revenus
seraient de 673 000 $.
Mme Harel: D'accord. Les revenus sont de 673 000 $. Est-ce que
c'est cela?
M. Chéron: Oui.
Mme Harel: Vous nous disiez tantôt, et votre mémoire
le signale aussi, que votre pouponnière était
déficitaire.
Mme Levert: En fait, de tous les groupes d'âge, les plus jeunes
sont déficitaires, comme Gilbert Tessier l'a souligné. Donc,
la pouponniè-
re, les groupes d'âge les plus jeunes, les vingt mois et les deux
ans et demi, jusqu'à ce qu'on arrive à un ratio plus
élevé, ces groupes d'âge sont déficitaires. Ce
déficit est compensé par les groupes d'âge plus vieux qui
sont plus payants, si on veut. Le raisonnement qu'on faisait était le
suivant: Si on perd ces groupes d'âge au profit des services de garde en
milieu scolaire, on a encore plus de problèmes à boucler le
budget alors que c'est déjà difficile. Donc, c'est aussi
ça, l'idée.
Mme Harel: ...puissiez faire des exercices comme ceux-là.
Dans votre mémoire, vous signalez que l'un des problèmes est que
les garderies commerciales pouvaient drainer plus facilement les groupes
d'âge plus vieux. C'est à la page... Le mémoire n'est pas
numéroté.
Une voix: Ce n'est pas paginé.
Mme Harel: Cela s'intitule "Une planification inadéquate
du réseau de garde". Vous nous dites: Les garderies commerciales
drainent la clientèle qui, traditionnellement, servait à
équilibrer les déficits d'exploitation des groupes d'âge
plus jeunes puisqu'elles se spécialisent uniquement dans les groupes
d'âge plus vieux. Peut-être étiez-vous ici cet
après-midi. Finalement, les gens de l'Association des
propriétaires de garderies du Québec Inc. ont dit à la
ministre qu'ils ne voulaient pas les 54 000 000 $ pour les groupes d'âge
plus jeunes, pour les poupons. Ils les voulaient pour leur fonctionnement, mais
ne voulaient pas avoir à donner ce service, même s'ils avaient la
subvention. M. Chéron.
M. Chéron: II est Important de noter que, dans la
garderie, la pouponnière a un effet d'entraînement et que c'est
Important. Donc, c'est dans la philosophie d'une garderie d'en avoir une. Le
ratio est en partie nécessaire pour une qualité de services.
Donc, dans la mentalité du conseil d'administration et des conseils
d'administration précédents, il est impensable - lui s'occupe des
dix-huit mois - de lui donner, au deuxième étage où la
garderie est située, huit enfants à habiller pour les sortir.
Nous, nous sortons les enfants.
Mme Levert: Le ratio actuel pour les dix-huit mois et plus, c'est
un pour huit enfants.
Mme Harel: Oui, mais, chez vous, c'est combien?
Mme Levert: C'est un pour cinq.
Mme Harel: Un pour cinq. Et pour les poupons?
M. Tessier C'est un pour quatre, à la pouponnière; un pour
cinq, de dix-huit mois à deux ans; un pour six, de deux ans à
deux ans et demi; un pour sept de deux ans et demi à trois ans; et,
à partir de là, c'est un pour huit.
M. Chéron: Cela donne aussi à l'éducateur
une qualité de milieu de travail qui est importante. Avec un ratio d'un
pour huit, iI n'y a pas de qualité du milieu de travail.
Mme Harel: Le loyer est-il élevé chez vous?
M. Chéron: C'est autour de 18 000 $, je pense.
Mme Harel: 18 000 $. C'est une portion relativement faible de
l'ensemble du budget de...
M. Chéron: 80 % de nos coûts vont directement en
salaires.
Mme Harel: Je veux le croire, mais le coût fixe du loyer,
étant donné qu'il est relativement faible par rapport aux autres
garderies, vous permet d'améliorer les ratios, par exemple, comme vous
me le signaliez il y a quelques minutes.
M. Chéron: Oui, mais il y a aussi d'autres facteurs. Il y
a le coût qu'on demande par jour.
Mme Harel: Le tarif.
M. Chéron: Le tarif nous permet de faire ça.
Mme Harel: Mme Levert, je ne vous fais pas du tout grief de
jongler avec les groupes d'âge d'enfants pour équilibrer, mais ne
serait-il pas plus souhaitable, plutôt que de concurrencer le groupe qui
est d'âge maternel, d'améliorer les allocations pour les groupes
d'âge plus jeunes qui sont nettement déficitaires et de ne pas
obliger la garderie à chercher le groupe d'âge plus vieux pour
compenser le déficit des plus jeunes?
Mme Levert: Je me suis peut-être mal fait comprendre.
L'idée qu'on exprime dans le mémoire, ce n'est pas
nécessairement de vouloir concurrencer. Comme c'est
présenté à l'heure actuelle, on souligne que ça
amène des situations qu'on considère qui ne devraient pas se
produire parce qu'il n'y a pas d'intégration entre les différents
services de garde. Effectivement, ce serait préférable d'aller
vers une allocation plus adéquate pour des groupes d'âge plus
jeunes et qu'il n'y ait pas ce genre de concurrence. Alors, c'est vraiment en
ce sens-là qu'on faisait le commentaire.
Mme Harel: Je suis heureuse de vous l'entendre dire. Finalement, c'est
le mode de financement du système qui, malheureusement, amène ce
genre de concurrence...
Mme Levert: C'est ça. Mme Harel: ...entre
réseaux.
M. Chéron: En fin de compte, ce sont des disparités
entre deux services qui devraient normalement se complémenter et non pas
se concurrencer. Présentement, c'est un peu la situation de par la
disparité de coûts que les deux services ont. Si la garderie
pouvait avoir plus de subventions pour les groupes d'âge jeunes, c'est
sûr qu'on préférerait ça parce que, par la suite, on
peut voir ces enfants progresser dans la garderie. Ce n'est pas un enfant qui
ne fait qu'une courte période.
Mme Harel: Baisser le ratio pour les poupons a vraiment
été une des demandes répétées devant la
commission, surtout en priorité prioritaire. Même par le Conseil
du patronat. Dans ses recommandations, M. Ghislain Dufour lui-même est
venu signaler à la ministre que, pour les poupons, puisqu'ils pensent en
ouvrir en...
Mme Levert: En milieu de travail.
Mme Harel: ...milieu de travail, c'était vraiment
difficile à Imaginer.
M. Chéron: II serait important aussi qu'on retrouve dans
l'énoncé des mesures pour créer des places pour les
poupons. Présentement, elles n'abondent pas nécessairement, dans
le milieu des garderies dû aussi au financement qui est assez difficile
à avoir.
Mme Harel: On me dit que c'est déjà terminé.
Je vais vous remercier. Vous nous avez signalé trois facteurs qui vous
caractérisaient: le tarif de 17,50 $, les 96 places au permis et les 94
% d'occupation; il y en a un quatrième, c'est le faible coût du
loyer. Vous allez me dire que c'est déjà élevé pour
vous, mais beaucoup de garderies sont venues devant nous avec des loyers de 30
000 $ par année et 40 places au permis. Alors, c'est une fraction bien
importante de leur budget qui est en coûts fixes.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je tiens à vous remercier de nous
avoir exposé votre opinion. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie la garderie Soleil du quartier inc. et invite
à la table la garderie Les Minimousses.
Bonsoir et bienvenue à la commission des affaires sociales. Vous
avez une enveloppe globale de trente minutes pour la présentation de
votre mémoire, c'est-à-dire dix minutes pour la
présentation de votre point de vue et vingt minutes de discussions avec
les membres de la commission. Je vous prierais, dans un premier temps,
d'identifier vos porte-parole et, lorsque vous avez à prendre la parole
par la suite, de bien vouloir vous identifier pour les fins de transcription du
Journal des débats afin qu'elle soit la plus fidèle possible. Je
vous invite donc à vous présenter et à commencer la
présentation de votre mémoire. Merci.
Garderie Les Minimousses M. Larouche (Daniel): Bonsoir. Le
Président (M. Bélanger): Bonsoir.
M. Larouche (Daniel): Je vous présente Mme Monique
Bluteau...
Mme Bluteau (Monique): Bonsoir.
M. Larouche (Daniel): ...coordonnatrice à la garderie Les
Minimousses; Mme Ginette Lavoie, éducatrice à la garderie Les
Minimousses...
Mme Lavoie (Ginette): Bonsoir.
M. Larouche (Daniel): ...et ayant dix ans d'expérience
dans ce métier. Je suis Daniel Larouche, parent, membre du conseil
d'administration de la garderie.
Au chapitre de la présentation, iI serait peut-être bien de
situer la garderie pour l'information des gens de cette commission. C'est une
garderie qui a à peu près deux ans, aujourd'hui, puisqu'elle a
été ouverte le 9 février 1987. Elle compte 52 places au
permis. L'édifice détenu par la garderie lui appartient en
propriété, il a été construit en 1987. La garderie
est située sur le campus de l'Université du Québec
à Chicoutimi. Elle dessert, en priorité, les gens du milieu
universitaire, mais également la clientèle environnante. C'est
une garderie qui n'est pas syndiquée, mais dont la gestion tente de
donner aux éducatrices des conditions qui soient équivalentes au
moins à celles des garderies syndiquées.
En termes de présentation, en notes liminaires, je vous indique
que les gens qui sont ici se sont tapé deux heures et demie de parc des
Laurentides et vont se retaper deux heures et demie tout à l'heure. Cela
ne veut pas vous indiquer qu'on fait pitié, c'est qu'on croit à
ce qu'on va vous dire et on tient beaucoup à ce que les choses qui
seront dites ici puissent être retenues et servir peut-être
à revoir certaines choses par rapport à l'énoncé de
politique. D'ailleurs, des personnes qui sont ici ce soir étaient
là pour le regroupement régional des garderies, il y a une
semaine. On évitera peut-être de revenir sur les mêmes
arguments, sauf que ce qui a été dit la semaine dernière
reste encore très valable pour nous.
En guise de présentation, je vous souligne qu'il y a eu des
ajouts au mémoire qui vous avait été soumis. Je crois
qu'ils ont été distribués. Ces ajouts vous seront
décrits de façon plus spécifique par Mme Monique Bluteau,
tout à l'heure. On va diviser notre présentation en trois blocs,
comme on l'avait fait la fois précédente.
Dans un premier temps, on va vous présenter ce qu'on appelle
l'approche Minimousses. On veut être très près.
Plutôt que de vous lire notre mémoire ou de vous
référer à ses recommandations, on va vous décrire
l'expérience concrète qu'on a vécue. D'abord, on veut
définir l'approche Minimousses, comment on a approché ce travail
de confection, d'élaboration et de fonctionnement d'une garderie. On va
parier ensuite de la qualité du milieu éducatif et aussi, enfin,
et de façon majeure, des paramètres de financement.
Au chapitre de l'approche des Minimousses, I est important de rappeler -
parce que la politique à cet égard esquive assez rapidement le
sujet - que, pour nous, le centre de la garderie, ce n'est pas avant tout le
service aux parents, c'est le milieu éducatif pour les enfants. À
cet égard, nous rappelons que le développement de l'enfant en
garderie, à l'âge où il est y est, c'est vraiment une des
étapes les plus cruciales de ses acquisitions à tous les plans:
plan cognitif, plan de sa socialisation, plan affectif, plan de sa
capacité d'échanger des interactions adéquates avec les
autres enfants qui seront aussi des adultes plus tard.
À cet égard, la garderie, comme on l'avait souligné
déjà, est un compromis. Ce n'est pas la solution idéale.
Sauf que nous croyons fermement - et ça, après avoir
examiné d'autres hypothèses - que c'est peut-être le
meilleur compromis qu'une société puisse se donner - nous parlons
de garderies sans but lucratif - pour encadrer de façon adéquate
et développer des enfants dont les parents travaillent.
La façon dont nous avons conçu notre garderie est assez
simple, môme simpliste. On s'est dit: On va essayer de construire une
garderie pour notre enfant, tout simplement. Quand il s'est agi de
déterminer l'ensemble des paramètres qui seraient fondamentaux
à propos de notre fonctionnement, on s'est toujours
référé à cette valeur de base: Qu'est-ce que je
veux pour mon enfant? Et c'est exactement la philosophie qui, depuis deux ans,
est maintenue à bout de bras par les parents, les gestionnaires et les
éducateurs impliqués dans la garderie. On avait aussi comme
objectif d'avoir la meilleure garderie possible. Sans aucune espèce de
prétention, on pense que le bout de chemin fait est fort
intéressant. Mais, d'ores et déjà, on volt les
pièges qui nous guettent et l'essoufflement qui guette aussi l'ensemble
des partenaires qui travaillent à l'intérieur de cette garderie,
que ce soient les parents, les membres du conseil d'administration, la
coordonnatrice ou les éducateurs. Les éléments de
l'énoncé de politique qui sont avancés nous ont fait
réagir assez vivement, pour ne pas dire presque violemment parce qu'il
nous apparaît très clair que, dans une perspective triennale ou
quinquennale, on va se retrouver avec de sérieux problèmes dans
les sentiers qui nous sont tracés.
Au point de vue des principes directeurs qui nous ont guidés, on
peut en évoquer quatre qui sont déterminants. D'abord, la
qualité des personnes, la qualité des personnes à tous les
niveaux. Qu'on parle de membres du conseil d'administration ou qu'on parie du
choix des gestionnaires et surtout des éducatrices, pour nous, on ne
pouvait pas faire de compromis là-dessus.
Le deuxième élément était la qualité
de la gestion. On ne peut pas se permettre d'avoir une gestion de type
artisanale dans une PME qui encadre douze ou treize personnes.
C'est également la qualité du partage des tâches. Ce
ne sont pas des choses qui sont évoquées souvent, sauf que les
garderies nagent dans des problématiques des fois très confuses.
Selon nous, cela tient souvent à des territoires peut-être mal
définis entre les différents partenaires. À cet
égard, on aurait peut-être souhaité que
l'énoncé de politique vise à mieux outiller les
milieux.
L'autre élément, c'est la concertation entre l'ensemble
des composantes de la garderie à tous les niveaux.
Quant à la qualité des personnes, le recrutement est le
nerf de la guerre. C'est la fonction essentielle, motrice, déterminante
du fonctionnement d'une garderie. Tout à l'heure, Mme Ginette Lavoie en
pariera d'une façon peut-être plus détaillée. (21 h
15)
Du côté des conseils d'administration, il faut se rendre
compte que les garderies n'ont pas toutes la chance que nous avons d'être
des gens d'un milieu relativement aisé et relativement cohérent.
Quand il s'agit de former un conseil d'administration et qu'on est dans un
milieu plus disparate, comment s'assurer qu'on ait les meilleures personnes et
qu'on puisse leur faire partager les mêmes visées? Ce n'est pas un
problème qui est simple.
Du point de vue du choix des coordon-natrices, des éducatrices et
même du cuisinier, tous ces choix sont extrêmement
stratégiques. Qu'on puisse évoquer simplement que le choix d'un
cuisinier peut faire que le coût des aliments peut varier d'un rapport de
1 à 2; on se rend compte que ce sont des choses qui sont
extrêmement sensibles. Nous n'avons rien trouvé là-dessus,
ni dans le fonctionnement actuel, ni dans l'énoncé de politique,
qui vraiment nous amène vers une situation qui soit meilleure.
Au point de vue du partage des tâches, notre philosophie est que
le conseil d'administration, les gestionnaires et les éducatrices ont
des rôles très distincts. Le conseil est là pour appuyer,
pour déterminer les objectifs à long
terme dans la garderie, pour assurer la qualité de sa vie globale
et son développement. Selon nous, ce n'est pas - et c'est la
dernière chose qu'un conseil d'administration devrait être - un
extincteur qui constamment ravage les garderies. À cet égard,
beaucoup de conseils d'administration - des expériences non loin de chez
nous nous l'indiquent - ont un rôle de pompier absolument effarant et
s'épuisent à régler des problèmes qui tiennent soit
à la gestion, soit à la vie éducative môme. À
cet égard, la situation actuelle est alarmante.
Du point de vue de la gestionnaire à la garderie, elle n'est pas
une éducatrice. C'est quelqu'un qui connaît bien le milieu
éducatif, qui le comprend et qui laisse aux éducatrices leur
place. On attend d'une gestionnaire de la rigueur, une capacité
d'écoute et une connaissance approfondie du milieu.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît. Il vous reste deux minutes.
M. Larouche (Daniel): Pour l'ensemble de la présentation?
Je vais laisser la parole immédiatement à mes consoeurs.
Mme Lavoie: Pour vous prouver les exigences de qualité, je
vais d'abord vous parler du recrutement du personnel à la garderie Les
Minimousses.
Le Président (M. Bélanger): Très
brièvement, il nous reste deux minutes.
Mme Lavoie: Oui, les normes de qualification et le rôle des
éducatrices. Pour ce qui est du recrutement, c'était clair, net
et précis que les parents désiraient avoir des modèles
très forts aux niveaux cognitif, affectif et social pour le
développement de leurs enfants. Les normes de qualification: on exige
trois sur trois. C'est la seule norme acceptable. Quand vous allez à
l'hôpital, par exemple, vous n'acceptez pas de vous faire donner une
piqûre par une garde-malade qui n'est pas qualifiée. C'est la
même chose pour les garderies.
Le Président (M. Bélanger): Ha, ha, ha!
Excusez.
Mme Lavoie: Le rôle des éducatrices en est souvent
un de dépistage. C'est aussi un rôle d'organisation des
activités, de discussion avec les parents sur les enfants, de formation
et, souvent, de réadaptation parce qu'on a des enfants qui sont des cas
difficiles et qu'on doit souvent faire voir par des psychologues ou des choses
comme ça et qui ont besoin de réadaptation. Le milieu doit donc
être formé en fonction de servir au maximum les enfants.
Le Président (M. Bélanger): C'était
là l'enveloppe de temps dont on disposait Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président, comme ce sont
des gens qui viennent de très loin, Je peux leur accorder du temps sur
mon enveloppe s'ils préfèrent..
Mme Harel: Moitié-moitié.
Le Président (M. Bélanger): Mesdames. Alors,
continuez, Mme Lavoie.
Mme Lavoie: Je vais céder la parole à Mme
Bluteau.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Bluteau: Nous croyons nécessaire Ici de vous rappeler,
parce que je vais vous parler de financement, que les opérations
financières chez nous sont très rigoureuses. La gestion de la
clientèle est un souci constant parce que nous voulons maximiser nos
revenus. D'autre part, les dépenses reliées à la masse
salariale, à la créance hypothécaire, à la
nourriture, au matériel éducatif, en constituant les principales
dépenses, ne laissent place à aucune improvisation. La gestion
des horaires, des repas, des achats, tout ça est fait de façon
systématique.
Maintenant, je voudrais qu'on vérifie l'impact réel du
nouveau mode de financement, par rapport à l'ancien mode, sur le salaire
des éducatrices, sur le salaire horaire. Vous allez me dire: Pourquoi le
salaire horaire? Parce que cette dépense représente 76 % des
revenus totaux des garderies. J'ai pris cette donnée dans le rapport
annuel de l'Office des services de garde à l'enfance. Donc, pour
vérifier réellement l'impact d'une subvention, il faut le
vérifier sur la dépense principale des garderies: les salaires
des éducatrices. Nous avons estimé la subvention requise par
place au permis et la subvention en pourcentage des revenus des parents. Si on
prend l'annexe 1 - je pense que vous l'avez reçue... Vous allez voir que
j'aime les tableaux, parce que cela fonctionne très bien et c'est
très compréhensible. Si on vérifie à l'annexe 1,
nous avons la garderie Les Minimousses qui est une garderie de 52 places. Le
tarif est de 15 $ et le taux d'occupation est de 85 %. Il y a donc une
performance, et ces chiffres sont ajustés à un exercice financier
très rigoureux. Il n'y a pas d'augmentation, à aucun poste de
dépenses, parce qu'il faut compter que le bénévolat que
les parents donnent n'est pas comptabilisé comme tel, en tant que
dépenses, mais I existe. Il est très difficile à
comptabiliser, mais il existe. Si on regarde le salaire horaire des
éducatrices, par exemple, c'est 8,50 $ l'heure. On remarque que, pour
avoir une subvention requise par place au permis, ça prendrait une
subvention de 5,48 $. La subvention de logement est incluse dans ce montant. Je
l'ai éliminée parce que c'est très
disparate, donc difficile à ajuster au point de vue des chiffres.
Si je veux donner un salaire horaire de 10,00 $ l'heure à mes
éducatrices, je retrouve la subvention par place au permis à 7,46
$, et ainsi de suite jusqu'à 12,00 $.
Tout à l'heure, Mme Ginette Lavoie vous a parlé de la
qualification. Quand on arrive avec une qualification d'éducatrice au
niveau d'un DEC bu d'un bac, il faut comprendre que ces chiffres sont minimes.
Ce n'est absolument pas comparable à ce qu'on pourrait
éventuellement trouver sur le marché du travail ou, à la
rigueur, à la fonction publique. Combien gagne une secrétaire? Je
vous laisse le soin de me donner la réponse. Je ne le sais pas, mais
j'imagine qu'elle n'a certainement pas un bac ou des techniques de garde,
à 9,50 $ l'heure. Elle ne s'occupe certainement pas de
l'éducation de nos enfants.
Si on prend l'annexe 2, on va vérifier l'impact de la subvention
requise, maintenant en pourcentage: Qu'est-ce que ça pourrait donner,
avec exactement les mêmes chiffres. Si on regarde 8,00 $ l'heure,
ça me prendrait une subvention en pourcentage de revenus des parents de
42 %. Vous avez vu que les 45 % que vous voulez nous accorder, disons,
n'existent pas. Ce n'est pas arrive dans mes chiffres. Mais si on prend le
salaire horaire moyen des éducatrices qui, a l'heure actuelle, est de
8,33 $, on arrive exactement à 45%, et ainsi de suite jusqu'à 12
$. Cela voudrait dire 87 %. Cela veut dire que chaque fois que le parent donne
1,00 $, si je veux être capable de respecter et de donner la
crédibilité à la qualification de mon personnel qui est le
pivot de la vie en garderie, il faudrait que l'effort soit réellement
beaucoup plus senti.
On veut démontrer par là que les parents, les
éducateurs, les gestionnaires, le conseil d'administration, tout le
monde est capable d'arriver à donner des services de qualité et
de gardé excellents. Mais encore faut-il avoir les moyens de le faire.
On remarque aussi qu'à l'heure actuelle, bien que les éducatrices
ne soient pas des travailleuses qui travaillent pour l'office, il les
reconnaît comme étant des partenaires privilégiées
qui assurent la qualité des services auxquels les enfants ont droit. Je
me demande comment on peut escompter valoriser ces gens et les
reconnaître à leur juste valeur? Ces gens sont le pivot, à
l'heure actuelle, de la vie pédagogique en garderie. Et la vie
pédagogique, c'est ce qu'on veut d'une garderie. Ce n'est pas un
désert aride de chiffres. On semble vous parier de chiffres et de
chiffres et de chiffres, mais ce n'est pas là notre point de vue. Les
chiffres sont Importants, mais l'Importance d'une garderie est la
qualité des services qu'on donne aux enfants et cette qualité
passe par le personnel. Si on n'est pas capable d'avoir un personnel qui a des
conditions minimales, acceptables et intéressantes, il va se passer la
même chose que chez nous.
On a vérifié depuis deux ans. On est ouvert depuis deux
ans; on a reçu 250 curriculum vitae d'éducatrices. On a fait une
démarche très sérieuse pour avoir
sélectionné 18 éducatrices. Combien d'éducatrices
sont parties? On s'est rendu compte que la moitié est partie, 50 %.
Quelles éducatrices sont parties? Ce sont les plus qualifiées, ce
sont celles qui avaient un bac. Sur les 18, on a recruté 15
éducatrices avec un bac et 3 avec des techniques de garde. Ce n'est pas
parce qu'on no veut pas des techniques de garde, loin de là. On a
cherché à choisir des éducatrices, des personnes. Pour nos
enfants, on veut des personnes avec certaines qualifications et non pas
n'importe qui parce que les éducatrices ont un rôle, les enfants
vont s'identifier à elles. On ne veut pas que nos enfants s'identifient
à n'importe qui.
Mais II reste que la tâche de gestionnaire est très lourde
parce qu'on n'est pas capable d'offrir des salaires décents, on perd ces
gens à une vitesse folle. On réussit à les avoir pour un
an. Pourquoi les avons-nous pour un an? Peut-être parce que j'ai la
garderie qui est près de l'université, les finissantes viennent
chez nous, pensent à chez nous. Après, où vont-elles? Si
le ministère de l'Éducation ou les écoles venaient voir la
richesse que j'ai au point de vue éducatrices, pour les
récupérer pour leur milieu scolaire, j'aime autant vous dire que
les écoles seraient drôlement chanceuses de les avoir. À
l'heure actuelle, quand elles quittent, où s'en vont-elles? Je vous le
donne en mille, elles s'en vont en Ontario. Pourquoi s'en vont-elles en
Ontario? Parce qu'ils n'ont pas de personnel qualifié pour la petite
enfance et le cours primaire, ils viennent le chercher chez nous. On le forme
chez nous, mais il s'en va à l'extérieur. Sur les neuf
éducatrices que j'ai perdues, déjà trois sont rendues en
Ontario. Je me pose de sérieuses questions. Maintenant, ce qu'on veut
démontrer par là. C'est sûr qu'on voudrait avoir... Dans
nos recommandations, on souhaite que vous mainteniez la forme de subvention
actuelle, mais en la bonifiant et en la bonifiant de façon assez
substantielle pour arriver à être concurrentiel et maintenir nos
éducatrices en place pour nos enfants. Nos enfants sont notre
première richesse. Il faut absolument y tenir. Je pense que le
gouvernement veut donner quand même des services de garde de
qualité. C'est un choix de société et il faut absolument
continuer dans ce domaine.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président.
J'apprécie, en premier lieu, que vous soyez venus de si loin ce soir
pour faire la présentation de votre mémoire, et je vous en
remercie. Quel est notre temps?
Le Président (M. Bélanger): II vous reste six
minutes, Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: J'avoue que j'ai sursauté aussi
lorsque j'ai vu dans votre mémoire un roulement de personnel aussi
considérable. Finalement, tout au cours des exposés des autres
intervenants, on se rendait compte que ce qu'on recherche, c'est la
stabilité. Finalement, vous avez un peu répondu à ma
question tout à l'heure lorsque vous avez dit, par exemple, que vous
faites un choix de personnes, d'éducatrices et d'éducateurs au
sein de votre garderie. Il y a une question que j'aimerais bien vous poser. On
en a parlé longuement depuis ces derniers jours et on a dit: Oui, cela
prend de meilleures conditions de travail. On souhaiterait aussi abaisser les
ratios. On a besoin d'un développement accéléré
aussi. Donc, on est conscients des coûts que cela comporte. On est
conscients qu'il y a des coûts considérables à investir
assez rapidement. Je vous pose la question que j'ai posée à
plusieurs: Pour vous, est-ce que ces coûts doivent être
divisés entre les parents et l'État et, si oui, dans quelle
proportion?
Mme Bluteau: Oui, ces coûts devraient être
divisés entre les parents et l'État. Dans quelle proportion? Cela
dépend du niveau de salaire, à ce moment-là, qu'on
voudrait payer avec les conditions qu'on a à l'heure actuelle.
Tantôt, je vous ai fait le tableau que vous avez vu à 12 $. Il
faudrait, à ce moment-là, 0,87 $ venant de l'État et 1 $
venant des parents. À l'heure actuelle, les parents sont rendus à
un niveau où on ne peut pas augmenter indûment les contributions.
Il faut comprendre qu'on est dans un milieu où la concurrence est quand
même forte. Il faut se tenir sur le marché; il y a un principe de
marketing dans ça. Si, moi, j'augmente mes coûts, mes clients vont
peut-être s'en aller ailleurs, où c'est meilleur marché. Il
faut que je maintienne le marché. Il faut que je fasse attention
à cela. Les parents sont prêts à défrayer une partie
des coûts, mais ils ne sont pas prêts à défrayer
indûment des coûts de garderie qui pourraient monter jusqu'à
20 $ par jour. C'est impensable. Pas de la façon dont on fonctionne
à l'heure actuelle. La part du gouvernement devrait quand même
tenir compte de la possibilité des parents d'organiser le service de
garde à meilleur coût.
À l'heure actuelle, on peut tenir la formule. On est capable
d'organiser des services de garde. Le milieu est capable de se mobiliser, on
l'a prouvé chez nous, pour donner des services de garde de
qualité. Nous, on veut que le gouvernement nous aide à nous
aider. On ne veut pas que vous preniez la place des parents. On ne veut pas que
les garderies deviennent étatisées. On ne veut absolument pas
ça. On veut que l'État fasse l'effort de nous aider à nous
aider. Je pense que c'est un gage de qualité, mais il faudrait arriver
à maximiser les coûts quelque part. Moi, c'est de valeur, j'essaie
de fractionner les cents. Je regarde ce que j'ai. Là, je suis rendue
à une capacité maximale. Je ne peux pas aller plus loin que
ça. Je. ne peux pas diminuer le budget que je donne à mon
cuisinier. À l'heure actuelle, il réussit à me sortir des
repas qui me coûtent en moyenne 0,80 $ le repas. Je ne peux pas lui
demander moins que ça Je ne peux pas non plus me payer une
secrétaire. Je ne peux me payer personne qui réponde au
téléphone à ma place. La tâche de la coordonnatrice
en est une de gestionnaire. À l'heure actuelle, pour minimiser mes
coûts parce que je n'ai pas les moyens d'avoir un concierge à
temps plein, quand c'est glacé dehors le matin, la première
tâche de gestionnaire que j'ai, c'est de regarder. J'ai du calcium
à mettre ce matin, un petit coup de gratte, un petit peu de calcium.
C'est ma première tâche en entrant le matin. Je ne veux pas qu'il
y ait d'accident. Je ne veux pas que ça me coûte cher. Je ne veux
pas avoir de formules à remplir, etc. Cela est une chose. Maintenant, je
rentre dans mon bureau le matin. Je reçois le parent. Bon, bien,
là, j'ai un petit peu d'écoute psychologique à faire. Le
parent a un petit peu de problèmes avec ses enfants. Qu'est-ce qui se
passe? Oui, madame, je vais vous écouter. J'essaie de l'aider à
trouver un cheminement et d'incorporer mes éducat rices dans ça,
mon conseil d'administration. Maintenant, je tombe dans la gestion. (21 h
30)
Tout ça, c'est mon quotidien. J'ai l'impression d'être la
femme-orchestre. Je veux continuer à être la femme-orchestre parce
que c'est un défi. C'est très intéressant, c'est
très motivant. Mais ce que je veux, c'est qu'on nous aide à
continuer, mais dans de meilleures conditions, pour ne pas arriver à
épuiser inutilement le milieu. À l'heure actuelle, à ce
rythme-là, je considère que d'ici deux ans, à la garderie,
j'aurai épuisé le milieu, épuisé les parents,
épuisé les bénévoles, épuisé mes
ressources. Demander des photocopias un petit peu partout, les quêter,
parce que je sais que ça coûte cher et que je n'ai pas les moyens,
c'est ça mon quotidien. Mais . il faut absolument pour ça que
l'état fasse sa part.
Une autre façon aussi - ce ne serait peut-être pas un choix
électoral intéressant - ce serait peut-être d'essayer
d'éliminer les petites subventions qui sont données un petit peu
partout et les ramener aux services de garde. Je vous dis que ce ne serait
peut-être pas un choix intéressant, mais c'est sûr
qu'à un moment donné, dans des situations difficiles, il faut
rectifier. Quand on rectifie, on n'est pas nécessairement populaire; par
contre, on a une vision à long terme. À l'heure actuelle, je
pense que ça pourrait être effectivement une avenue que de
rectifier une situation qui est difficile par des mesures qui sont quand
même strictes, mais des mesures qui seraient adaptées à nos
besoins. Nos services de garde, s'ils ne sont pas de qualité, c'est une
industrie boiteuse, un milieu qui sera complètement anéanti d'ici
à quelques années. Il y a une chose qui est sûre, c'est
que
le service de garde, les milieux de services de garde font rouler
l'économie en payant des salaires, ce qui fait payer des taxes, des
impôts, etc. Tout cela va finir par créer de l'emploi, donc ce
sont quand même des avenues pour le gouvernement. C'est une façon
de voir la chose. Mais il faut absolument que le gouvernement comprenne qu'iI
faut qu'il nous aide à nous aider. C'est le point qui est quand
même essentiel.
La Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, merci, M. le Président. Je suis heureuse
de vous entendre à nouveau. J'imagine que ça souligne bien les
corrections que vous souhaitez voir apportées à
l'énoncé politique, le fait que vous vous retrouviez pour une
deuxième fois devant la commission.
Cet effort du gouvernement, la part que vous souhaitez qui soit la
sienne, à quel pourcentage la chiffrez-vous?
Mme Bluteau: Je la chiffre à un pourcentage qui pourrait
aller de 1 $ pour le parent, 1 $ pour l'État. Donc, c'est à 100
%.
Mme Harel: Cela veut dire...
Mme Bluteau: Selon la formule qu'on a à l'heure actuelle.
Là, on dit: 45 % du revenu des parents. J'irais jusqu'à
moitié-moitié, 1 $-1 $, donc 100 %.
Mme Harel: C'est-à-dire 50-50.
Mme Bluteau: Non. 50-50, mais avec la formule que vous appliquez,
soit 45 %, ce n'est plus 45 %, c'est devenu 100 %.
Mme Harel: Oui. Cela veut dire selon votre tableau...
Mme Bluteau: Oui.
Mme Harel: ...si je le reprends - vos tableaux sont
extrêmement intéressants - ce serait l'annexe 3, en fonction du
salaire des éducatrices et selon le mode de financement...
Mme Bluteau: Oui.
Mme Harel: ...si c'était à 100 % des revenus des
parents...
Mme Bluteau: Oui.
Mme Harel: ...combien cela donnerait-il?
Mme Bluteau: A 100 % des revenus des parents?
Mme Harel: Oui.
Mme Bluteau: Vous vouiez savoir combien la subvention...
Mme Harel: C'est l'annexe 2 plutôt. Mme Bluteau: L'annexe
2, oui.
Mme Harel: À 100 % des revenus des parents...
Mme Bluteau: Oui.
Mme Harel: ...les salaires pourraient s'élever à un
petit peu plus que 12 $.
Mma Bluteau: Les salaires se situeraient aux alentours de 13 $ à
13,50 $. Je n'ai pas continué parce que ma feuille était
finie.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Vous savez, il y a un prérequis dont on ne
parle pas et qui est le suivant: Est-ce que l'état doit faire le choix
d'un mode de garde parapublic? Cela peut vous sembler étonnant que je
pose la question mais, au fil des travaux que l'on poursuit devant la
commission, je me rends compte que ce n'est pas un choix que le gouvernement a
vraiment fait. Je ne parle pas de la ministre. D'une certaine façon,
vous dites: N'émiettez pas trop un peu partout avec toutes sortes de
programmes en parallèle qui se multiplient - exonération dans le
programme APPORT, toutes sortes de choses - mais c'est justement, ces
programmes qui se multiplient, comme vous le savez, ne vont pas en allocation
pour les services de garde régis par la loi.
Mme Bluteau: Juste une petite note. L'exonération
financière aux parents, ce n'est pas une mesure de financement. C'est
une mesure de compensation des charges familiales trop lourdes. Attention! Ce
n'est absolument pas une source de financement pour mon service de garde; c'est
tout simplement la redistribution des ressources à des familles qui n'en
ont pas les moyens. Je n'ai absolument rien contre ça. Je trouve
même ça essentiel, parce qu'on donne un appui à nos plus
démunis. Mais je ne veux pas qu'on comprenne que l'exonération
financière est une source de financement, c'est réellement un
autre programme.
Il y a une chose aussi qu'on pourrait mettre en parallèle. Dans
les universités, quand le gouvernement donne des prêts et bourses
aux étudiants, est-ce que les prêts et bourses sont
considérés comme un mode de financement des universités?
Je ne le pense pas. C'est complètement distinct. Donc,
l'exonération financière est la même chose. Il faut la
considérer complètement à part. C'est une mesure de
compensation, de redistribution des ressources aux familles les plus
démunies. Il faut continuer de le faire.
Mme Harel: Mon Dieu! Mme Bluteau, que vous avez donc raison! Cela
semble si évident quand vous en parlez et, pourtant, ce n'est pas si
évident que ça. En d'autres termes, c'est un programme de
transfert aux familles.
Mme Bluteau: Effectivement.
Mme Harel: Et cela pourrait très bien se retrouver dans un
programme de transfert du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu ou du ministre délégué -
s'il y en avait un pour s'occuper des politiques familiales, mais il semble
qu'il n'y en a plus -parce que la ministre me dit que c'est vrai, que c'est la
moitié du budget de l'office. Finalement, ce n'est pas un budget de
financement du réseau ni du service. C'est vrai que c'est simplement un
financement. Ce n'est pas une source de financement, c'est une compensation
accordée aux familles à faible revenu. J'imagine qu'il y a des
étudiants, chez vous, qui en profitent.
Mme Bluteau: Les étudiants, c'est exactement cela. Il faut
absolument la dissocier, parce que ce n'est pas une source de financement pour
le service de garde; c'est une mesure pour les familles les plus
démunies.
Mme Harel: Cela a l'air de rien, vous savez, comme l'oeuf de
Colomb, mais c'est assez fondamental. Parce que ça ne s'impose pas de
soi; depuis bien des années, c'est toujours considéré
comme faisant partie du financement des garderies et, effectivement, cela ne
vous donne pas un sou de plus, le tarif reste le même. C'est juste une
façon de compenser les charges parentales.
L'autre question de fond que vous posez et, d'une certaine façon,
votre discours ne peut pas ne pas être reçu, parce qu'il ne peut
pas être discrédité par la prétention qu'il y aurait
des conflits d'intérêts. Vous voyez? Vous nous dites: Nous sommes
parents ou gestionnaires, et le tout repose sur la présence d'un
personnel stable, formé et compétent. Ce personnel, nous ne
pouvons pas nous le payer. Et vous dites au gouvernement: Si vous voulez un
service de qualité, il faut que vous donniez l'assurance d'une
contribution qui nous permette d'avoir ce personnel.
Mme Biuteau: Effectivement.
Mme Harel: Voyez-vous, tout l'énoncé de politique passe
à côté de ça, en renvoyant aux parents le soin de
négocier les salaires avec les employés. Cela devient du domaine
privé. La ministre dit souvent, d'ailleurs, qu'elle ne veut pas
s'immiscer dans ces questions-là. Vous, vous nous dites qu'au contraire,
c'est la question à laquelle le gouvernement ne peut pas ne pas
répondre, si je comprends bien.
Le Président (M. Laporte): En conclusion, Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui. Je laisse la conclusion à nos
invités.
M. Larouche (Daniel): Si vous me le permettez, je pense que
fondamentalement, ce qu'on s'est dit, c'est qu'il faut choisir des
éducatrices acceptables pour les enfants; on ne cherche pas à
avoir la meilleure personne au monde. Mais l'éducatrice acceptable, il
faut payer ce qu'elle coûte. Je vais vous donner un élément
de comparaison: l'office, qui encadre assez bien d'ailleurs les garderies, a un
salaire moyen par individu de 33 000 $. Nos éducatrices sont aussi
formées que les agents de liaison de cet office. Pourquoi, dans un cadre
où l'ensemble des personnes veut contribuer à donner un service
adéquat aux enfants et aux parents, on a tant de poids, tant de mesure?
On parle d'un rapport de deux à un dans les salaires. Nous nous
demandons ceci concernant le plancher que nous avons: Est-ce qu'on a une
personne qui peut éduquer de façon adéquate des enfants?
Est-ce qu'on peut lui offrir des conditions acceptables? Au-delà de
ça, on se retourne vers la capacité de payer des parents et on
dit: Ils sont à saturation. On se retourne vers l'État et on dit:
Est-ce que vous acceptez ça comme un choix de société de
donner 12 $ ou 13 $ l'heure à des gens qui méritent au moins
ça?
Le Président (M. Laporte): Merci. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci beaucoup. Cela a été utile. En
tout cas pour moi, ça a replacé des choses à la bonne
place.
Le Président (M. Laporte): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: En terminant, c'est sûr que
l'exonération financière, c'est la redistribution de la richesse,
et ce n'est pas nouveau ce soir. Si on a à assumer des tarifs et si on
aide davantage - parce que c'est une forme d'aide aux parents - on ne doit pas
dissocier cela quand même de l'aide qui est accordée aux services
de garde. On sait que ça fait partie de la facture globale du
gouvernement. Comme la députée de Maisonneuve le mentionnait,
ça représente quand même la moitié du budget de
l'office. Est-ce que c'est là qu'on le met, plutôt que sous une
autre forme?
Aujourd'hui, un groupe nous disait: Pourquoi ne donnez-vous pas
plutôt l'aide aux parents et ne laissez-vous pas le choix aux parents
plutôt que de donner l'aide directement aux garderies? Il y a des
pensées qui sont différentes. On ne peut quand même pas
ignorer que de 50 000 000 $ à 60 000 000 $ sont accordés
uniquement pour cette forme.
Je vous remercie pour la présentation de
votre mémoire et de vous être déplacés
d'aussi loin et je vous souhaite un bon voyage de retour.
La Président (M. Laporte): Nous tenons à remercier les
représentants de la garderie Les Minimousses. Nous vous souhaitons un
très bon retour.
J'inviterais à se présenter à la table la
représentante de la garderie La Sourithèque, Mme Fournier.
Mme Fournier, nous tenons à vous souhaiter la bienvenue au nom
des membres de cette commission parlementaire. Je n'ai pas à
préciser les règles du jeu, vous étiez présente
tout à l'heure. On va vous laisser tout de go présenter votre
mémoire.
Garderie La Sourithèque
Mme Fournier (Louise): Merci beaucoup. Bonsoir. D'abord, je tiens
à souligner que je représente ce soir les parents administrateurs
de la garderie La Sourithèque. Après étude de
l'énoncé de Mme la ministre, on a cru bon de venir vous faire
part de certaines inquiétudes et préoccupations sur des aspects
de l'énoncé.
Je vais d'abord vous situer La Sourithèque, je pense que c'est
important. C'est, me dit-on, la plus vieille garderie de Montréal; elle
a 18 ans. Il y a 18 ans, je n'étais pas là; j'étais
probablement en âge d'être gardée moi-même, mais c'est
ce qu'on me rapporte. On est situé dans le centre-sud de
Montréal. Pour les non-Montréalais, le centre-sud, c'est le
quartier qui se situe autour du terminus Voyageur. La population qu'on dessert
vit dans ce quartier, étudie dans ce quartier. On a beaucoup de parents
qui sont étudiants à l'UQAM, au cégep du Vieux
Montréal ou à l'ITHQ ou qui travaillent dans le quartier,
principalement, dans l'industrie privée, à Radio-Canada ou a
Télé-Métropole. Il y a la Régie de
l'assurance-automobile du Québec, place Dupuis, au coin de la rue,
où beaucoup de nos parents travaillent.
Les usagers de notre garderie sont très diversifiés. J'ai
pris un groupe, celui de ma fille, et j'ai contacté les parents en leur
demandant s'ils me permettaient de donner certaines caractéristiques.
Voici. J'ai recensé deux cuisiniers, deux éducateurs en garderie,
deux comptables agréés, six étudiants, une recherchiste
chargée de cours en sciences pures à l'UQAM, une recherchiste
à Radio-Canada, deux avocats, une responsable des services chez Bell
Canada et deux parents qui m'ont dit être entrepreneurs à leur
compte, l'un en aménagement et l'autre en conception d'émissions.
Là-dessus, il y a deux familles monoparentales; neuf des enfants sont,
entre guillemets, québécois pure laine; un petit garçon a
une maman marocaine et un petit garçon a un papa philippin et une maman
vietnamienne. Finalement, vu le sujet d'actuali- té - on en parle dans
les journaux depuis quelques semaines - je pense qu'il est important de dire
que huit de ces enfants sur un groupe d'onze sont des enfants uniques.
Ce qui nous chicote - en bon français - dans
l'énoncé de Mme la ministre, ce sont deux choses:
premièrement la privatisation et, deuxièmement, la
rentabilisation. Quand on lit l'énoncé de Mme la ministre, il
nous semble qu'il prône une privatisation de plus en plus grande des
services de garde et de trois façons: en privilégiant la
création de nouvelles places de garde en milieu de travail, en
augmentant les places de garde en milieu familial et en acceptant de
subventionner les garderies à but lucratif.
Je vais commencer par les garderies à but lucratif, c'est ce qu'y
y a de plus facile puisqu'on est contre. On s'oppose au principe môme de
ces garderies. Pour nous, en tant que parents, la notion de lucre ne devrait
jamais être associée à un système de garde ou
d'éducation. Il est d'ailleurs connu que ces garderies font souvent
l'objet de plaintes. Les parents se plaignent de la qualité des
services. Les éducateurs se plaignent non seulement de la qualité
de leurs conditions de travail, mais aussi de la qualité de
l'éducation qu'ils doivent donner aux enfants: manque de matériel
de bricolage, manque de disponibilité. On s'est fait dire par des gens
qui travaillent chez nous, qui viennent du milieu privé, que souvent on
ne remplace pas une éducatrice malade; alors, on se retrouve, pendant
deux semaines, avec un ratio de 1 pour 16 plutôt que de 2 pour 16. Alors,
les garderies à but lucratif, à notre avis, ne devraient pas
être subventionnées. (21 h 45)
Dans un second temps, on semble vouloir donner une place de plus en plus
grande à la garde en milieu familial. D'après nous, c'est une
autre façon de privatiser le réseau. Cela nous inquiète,
premièrement, parce que c'est souvent un choix secondaire, la garde en
milieu familial. Souvent, les parents n'ont pas réussi à trouver
de place dans des pouponnières, donc ils vont faire garder en milieu
familial; ou encore les parents ont des horaires irréguliers: une
étudiante qui étudie deux jours-semaine, elle ne peut pas trouver
de place en garderie en ce moment, car on n'accepte que des gens à temps
plein. On ne veut pas minimiser les gens qui offrent un service de garde en
milieu familial, mais il faut être réaliste; ce n'est pas un
service éducatif que ces gens offrent. Dans les meilleurs cas, les dames
vont sortir les enfants, les amener au parc; elles vont leur faire faire du
bricolage, mais il y a beaucoup trop de ces enfants qui sont branchés
à longueur de journée sur des téléviseurs. Cela, je
le souligne trois fois. En plus de ça, les locaux répondent
rarement aux critères d'un enfant de quatre ans qui a besoin de courir,
de s'exprimer et de grimper un peu partout.
En plus de ça, en tant que contribuables, la garde en milieu
familial, soyez réalistes, c'est une garde au noir. Les gens placent
leurs enfants et n'ont pas de reçus d'impôt. Ils les placent chez
des gens qui ne déclarent pas leurs revenus. Cela veut dire qu'ils ne
participent pas socialement. Ils ne paient pas de CSST, pas
d'assurance-chômage, pas de RRQ. D'accord, ils ne profitent
peut-être pas du système de rentes du Québec, mais souvent
ces gens ont accès aux mêmes services médicaux que tout le
monde. Ils ne participent pas à notre société. On
n'abordera même pas le cas de gens qui sont prestataires d'autres
régimes, soit de l'assurance-chômage, de l'aide sociale, etc.
Nous avons beaucoup de difficultés à accepter que la garde
en milieu familial soit prônée par le gouvernement, tant au plan
de la qualité de l'éducation que ça offre aux enfants - je
pense que Passe-Partout, c'est bien beau, mais six fois par jour, ce n'est pas
ça qui élève un enfant - et, deuxièmement, du point
de vue des contribuables. Il faut que tout le monde participe et cela n'axe pas
sur la participation.
Finalement, il faut discuter de la privatisation des garderies en milieu
de travail. C'est, de toute évidence, une tentative de privatiser le
réseau en transférant une partie de la responsabilité
à l'employeur. De prime abord, bravo, mais il ne faut pas que la
création de places de garderie en milieu de travail se fasse au
détriment des garderies comme la nôtre. Dans un premier temps,
dans les faits, ces garderies sont réservées exclusivement aux
employés. J'ai moi-même fait un sondage. J'ai appelé les
huit garderies du centre-ville de Montréal qui sont des garderies en
milieu de travail. J'ai essayé d'inscrire mes enfants; j'en ai deux, un
petit garçon de quatre mois et une petite fille de deux ans. Il n'y a
personne qui a pris mon nom. On me dit: Écoutez, je pourrais prendre
votre nom, mais la demande est telle que c'est impossible qu'il y ait des
places pour vous. Alors, dans les faits, ça sert seulement à un
nombre limité de personnes. Je parle du centre-ville de Montréal
parce que c'est là où je demeure.
Deuxièmement, ce sont les travailleurs les mieux nantis qui vont
amener les enfants dans ces garderies-là, parce que ce sont ces
gens-là qui ont les moyens d'avoir une auto dans le centre-ville de
Montréal. Les gens qui ne sont pas de Montréal ne sont
peut-être pas au courant, mais le stationnement à Montréal
coûte entre 100 $ et 150 $ par mois. Ce n'est pas tout le monde qui est
capable de se payer ça, et c'est illusoire de penser que quelqu'un qui a
le choix va se promener avec un jeune enfant en métro à l'heure
de pointe. On reviendra là-dessus. Le métro et les enfants ne
sont pas compatibles. Alors, ça s'adresse aussi à une population
un peu mieux nantie.
Troisièmement, d'après nous et parce qu'on a entendu
parler certaines personnes qui ont vécu la situation, il y a un certain
risque de conflit entre le rôle d'une personne en tant que travailleur
dans une boîte et parent dans une garderie. C'est difficile, si on est
membre du conseil d'administration, de dire à son patron qui a choisi la
directrice de la garderie, dont iI est emballé, qu'elle ne fait pas
l'affaire. Qu'est-ce qui se passe lorsqu'il y a un subordonné et un
supérieur au même conseil d'administration? Une ingénieure
et sa secrétaire? Je suis sûre que vous allez me dire que je
charrie un petit peu et que j'exagère, mais j'ai eu personnellement
connaissance d'un cas où un étudiant au doctorat a dû
changer de directrice de thèse parce qu'ils étaient tous les deux
au conseil d'administration d'une garderie et qu'ils en sont venus à ne
plus être capables de se voir. Il faut être réaliste. Il ne
faut pas mettre le travailleur en situation de conflit, en tant que travailleur
et en tant que parent dans sa boîte. De toute façon, on voit
régulièrement à la télévision des anecdotes
au sujet de parents de joueurs de hockey qui ont six ans et qui en viennent aux
coups dans les arénas. Il faut envisager le pire. Il faut se dire que
ça existe, et il faut donc tenter de créer un milieu de garde qui
soit le plus stable et le plus sain possible, eu égard au fait que nous
sommes tous humains.
Finalement, toute cette augmentation de places qui mène à
la privatisation nous inquiète, parce que ça nous démontre
un certain refus d'accepter que les garderies et la condition parentale
devraient être une préoccupation d'ordre public et social et que
ce n'est pas uniquement d'ordre familial et privé.
Quant à la rentabilisation, il y a bien des choses
établies ou bien des chiffres qui vous ont été
présentés. J'ai des grandes lignes. C'est évident qu'en
tant que parents administrateurs on a deux objectifs. Le premier, c'est de
minimiser les frais de garde pour les parents et le deuxième, c'est
d'offrir les meilleures conditions de travail possible à nos
éducateurs. Il n'y a rien dans l'énoncé qui nous
démontre une volonté politique d'améliorer de façon
concrète les conditions de travail des éducatrices en
garderie.
Le Président (M. Bélanger): Madame, je vous
inviterais à conclure, s'il vous plaît.
Mme Foumier C'est presque fini, monsieur.
Mme Gagnon-Tremblay: Si madame veut continuer, on peut lui
laisser le temps qu'il faut.
Mme Fournier Ce n'est vraiment pas très long encore.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Fournier Mon truc était pour dix minutes juste. Alors, nous
trouvons aberrant que ces gens-là soient si mal
rémunérés, car ils accomplissent une tâche
essentielle. L'éducation d'un jeune enfant devrait être d'une
importance
capitale dans cette société.
Ensuite, on nous demande de rentabiliser un système pour faire
place à un mode de financement proportionnel au revenu de la garderie.
Dans un premier temps, je peux vous dire que dans notre garderie - et je suis
au conseil d'administration depuis un an et demi - il n'y a pas de perte
d'argent ou de gaspillage. Il y a certaines administrations publiques qui
auraient avantage à nous imiter. On n'a pas assez d'argent pour en
gaspiller.
Dans un deuxième temps, la subvention proportionnelle nous fait
peur. Nous sommes une garderie, comme je le disais, avec une population
très diversifiée. Il ne faut pas, à un moment
donné, qu'en tant que conseil d'administration on prenne des
décisions en fonction des revenus plutôt que des enfants. Je vous
donne un exemple qui pourrait être affecté. Nous prenons nos
poupons à six mois; nous commençons par un pour trois, et
progressivement, cela va à un pour quatre, ratio que nous ne
dépassons jamais. Cela prend six semaines. Évidemment, on a une
grosse perte de revenus. Il faudrait repenser toute cette structure. Nos
groupes sont en dessous de toutes les moyennes, je ne savais même pas que
c'était un pour huit à partir de deux ans parce que, chez nous,
on n'a pas un seul groupe qui est à un pour huit; on est à un
pour cinq à deux ans, un pour six ensuite, et un pour sept plus tard.
Alors, vous voyez ce qu'on serait obligés de considérer. On a une
réduction pour le deuxième enfant; on serait obligés de
repenser cela complètement, mais surtout, et cela m'inquiète, on
va se retrouver avec une mentalité d'agence de recouvrement. Parce qu'on
a des parents yuppies, vraiment centre-ville de Montréal professionnels,
et on a des parents non saisissables. On regarde dans le Code de
procédure civile et on ne peut les saisir. Que faire quand ces gens ne
paient pas? Est-ce qu'il faut faire des enquêtes de crédit sur les
gens pour être certains que, s'ils ne paient pas, on pourra les saisir
pour avoir nos revenus à la fin de l'année? C'est très
dangereux. Il faut le prendre en considération.
Finalement, et je conclus là-dessus, on trouve que cette
politique ne fait rien pour nous encourager à avoir d'autres enfants, ce
qui semble être le but avoué de votre collègue, le ministre
des Finances, madame, parce qu'elle ne nous rassure pas sur une volonté
gouvernementale de nous aider à créer un service de garde
où le bien-être de l'enfant, de nos enfants, primerait toutes les
autres considérations.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci madame. J'avoue que certaines
remarques que vous avez formulées m'étonnent parfois, sauf que
c'est votre opinion et vous êtes en droit de la faire valoir. Je
remarque, entre autres, au tout début de votre exposé, que vous
nous dites que le gouvernement est en train de privatiser et vous nous donnez
quand même les raisons. Je vous dis qu'on ne peut privatiser ce qui est
déjà privé.
Vous nous parlez beaucoup aussi du milieu familial. Lorsque vous nous en
parlez - vous parlez de garde au noir - et j'ose espérer que vous voulez
bien parier davantage de la garde qui n'est pas régie, par exemple, par
les agences, parce que j'imagine que si les agences étaient au fait de
ce que vous avez pu avancer ce soir au sujet du milieu familial, je pense
qu'elles ne seraient pas tout à fait d'accord avec les services qu'il
s'y donne. Pour les agences il se donne vraiment un service de qualité
dans le milieu familial, et je pense que cela répond à un besoin
aussi. Dans votre mémoire vous mentionnez que cette garde peut remplacer
la garde en garderie pour des contraintes d'horaires, le soir et les fins de
semaine, et je dois vous avouer qu'à la suite de l'expérience que
j'ai je me rends compte qu'il y a très peu, finalement, de gardiennes en
milieu familial coordonnées par une agence qui offrent ce service. C'est
souvent assez difficile dans ce milieu aussi, sauf que les parents veulent bien
avoir ce choix et, entre autres, pour les jeunes enfants, souvent, c'est le
choix que font les parents. En tant que parents, parce que vous me disiez tout
à l'heure que vous étiez parents, ne croyez-vous pas que les
parents sont en mesure de faire ce choix, par exemple, entre celui du milieu
familial et une garderie?
Mme Fournier: Dans un premier temps, je vais vous répondre
que, quand on a un jeune enfant à placer et qu'on cherche une place de
garderie, ce n'est pas évident qu'il y en a, Mme la ministre. J'ai eu,
l'an dernier, à faire cette expérience. J'avais une petite fille,
je voulais retourner travailler et j'ai été chanceuse de trouver
une place dans une garderie parce que quelqu'un à la dernière
minute s'est désisté. C'était beaucoup plus facile pour
moi de contacter les gens dans le quartier qui offrent, par les journaux, leurs
services à la maison et je me faisais dire: Évidemment, il n'y a
pas de reçu, il n'y a pas de reçu. J'ai appelé le service
de garde Ville-Marie et on m'a dit: Oui, il y a un certain contrôle. Il y
a des visites aux deux semaines. Je vais vous dire franchement, mon
bébé n'est pas capable le soir de venir me raconter à la
maison ce qui se passe. Je n'ai pas besoin d'un contrôle aux deux
semaines. J'ai besoin de quelqu'un qui peut entrer dans une salle et voir ce
qui se passe à n'importe quelle heure du jour. J'ai besoin de savoir
qu'il y a autre chose que cela. On parle de relation de confiance entre le
parent et le milieu de garde, mais je veux dire que le milieu en garde
familiale, à moins de connaître la personne depuis fort longtemps,
je ne confierais pas mes enfants à quelqu'un que je ne connais pas,
même si c'est coordonné par une agence.
Mme Gagnon-Tremblay: Même si c'est coordonné par une
agence, môme si c'est une garde reconnue?
Mme Fournier: Même si c'est coordonné par une
agence. Je veux dire que j'ai fait l'expérience. J'ai rencontré
trois dames dont les noms m'avaient été donnés. Ce
n'était pas comparable à ce que m'offrait une garderie. Je veux
dire que lorsque j'ai commencé, dans ma tête, une garderie, il
n'en était pas question. Je ne connaissais pas le milieu, je ne savais
pas ce que c'était une garderie. J'ai commencé à en
visiter. J'ai commencé à visiter des maisons et je ne voyais pas
ma petite fille aller courir. Par contre, je voyais les autres enfants qui
connaissaient toutes les émissions: Passe-Partout, Winnie The Pooh, les
Calinours. C'était cela qui élevait les enfants et je ne dis pas
que les dames ne sont pas des personnes qui n'ont pas bien élevé
leur famille, que ce ne sont pas des personnes compétentes, mais ce
n'est pas de l'éducation. D'après mol, c'est du stationnement. Je
n'ai pas envie de stationner mes enfants de neuf à cinq tous les jours.
J'ai envie - parce que j'en ai deux maintenant, j'ai un petit garçon de
trois mois et demi - qu'ils soient dans un milieu où on va prôner
leur développement tant moteur que physique et affectif et je ne pense
pas que les personnes qui offrent des services de garde en milieu familial vont
chercher à développer l'enfant de la même façon
qu'une garderie, vraiment pas.
Mme Gagnon-Tremblay: On nous a parlé, depuis le
début de cette commission parlementaire, d'une réglementation
beaucoup plus stricte, c'est-à-dire qu'on exige, par exemple, une
réglementation aussi stricte dans ces milieux que dans les garderies.
Est-ce que vous seriez en faveur d'une réglementation beaucoup plus
stricte?
Mme Fournier: Honnêtement, je ne pense pas que toute la
réglementation au monde peut remplacer une garderie ouverte où
toute personne peut rentrer dans une salle, où on ne sonne pas,
où la personne qui possiblement abuse d'un enfant n'a pas le temps de
cesser l'activité, de remettre à l'ordre et de venir
répondre à la porte.
Mme Gagnon-Tremblay: Vous êtes d'accord quand même
qu'il y a des besoins très spécifiques. Naturellement, ce n'est
pas uniquement un type de garderie qui peut répondre à ces
besoins très diversifiés. Je pense, par exemple, à un
petit village, où la population ne permet pas l'ouverture d'une
garderie, même si c'est un milieu de travail. Tout à l'heure, vous
parliez du milieu de travail, là, encore, on ne peut pas ouvrir partout.
On n'a pas la clientèle suffisante. C'est très difficile. Alors,
II peut arriver que, dans des petits villages ou dans certains secteurs, on ne
puisse pas ouvrir une garderie. Aussi, c'est un choix qu'on laisse aux parents,
pour répondre souvent aussi à des services un peu
diversifiés. Ne croyez-vous pas quand même que, comme
gouvernement, on ne peut pas se permettre de ne développer qu'un seul
type de services?
Mme Fournier: Je ne suis pas contre le fait qu'il y ait d'autres
services parallèles qui soient développés mais,
personnellement, j'aimerais que l'accent soit mis sur les garderies sans but
lucratif. Je lisais dernièrement dans les journaux que Mme Paré
de la CEQ demandait que ce soit intégré à la CEQ. Je me
disais: Bien, ce n'est pas fou comme idée. À partir de cinq ans,
mes enfants vont être à l'école. Pourquoi le service ne
serait-il pas offert dès la jeune enfance? Là, je me sentirais
plus en sécurité, en tant que parent. Je vais vous dire que c'est
un choix de mettre mes enfants en garderie. Ce que deux enfants me
coûtent, plus une femme de ménage, je peux avoir quelqu'un
à la maison qui fait de la garde occupationnelle pour cela. C'est un
choix de chercher un milieu éducatif pour mes enfants. Cela est quelque
chose qu'on ne dit pas assez souvent. Je ne le fais pas parce que la garderie
est moins cher. Avec deux enfants - mon mari et moi sommes tous les deux
professionnels - on pourrait facilement avoir quelqu'un à la maison et
on ne serait pas obligé de se déplacer deux fois par jour. Sauf
qu'on a choisi de mettre nos enfants en garderie parce qu'on voulait qu'ils
aient quelque chose de plus que quelqu'un qui les garde à la maison.
C'est pour cela que je suis venue ce soir. C'est important pour moi de le
spécifier, que ce ne sont pas toujours les plus démunis de la
société ou les gens qui n'ont pas les moyens d'avoir autre chose
qui choisissent les garderies.
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui. C'est Mme Fournier? C'est bien cela? Oui.
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez un
instant. Compte tenu de l'heure, est-ce que j'ai le...
Mme Harel: Consentement, oui.
Le Président (M. Bélanger): ...consentement pour
que nous puissions continuer? Merci. Mme la députée.
Mme Harel: Vous savez sans doute, Mme Fournier, qu'il y a des gens dans
ce parlement qui, en vous écoutant, penseraient sans le dire ou ne le
diraient pas nécessairement devant un micro: Si vous l'avez choisi,
payez-le donc. En d'autres termes, c'est assez fréquent, cette
idée.
Ce que le parent choisit, alors, c'est sa responsabilité. Tout
cela est du domaine privé. Ce n'est pas du domaine collectif, ce n'est
pas du domaine public et le parent doit assumer les choix qu'il fait. Je
connais bien La Sourithèque. J'ai utilisé La Sourithèque
iI y a bien des années de ça. Vous savez, ce qui est embarrassant
ici, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui auront des décisions à
prendre et qui n'ont Jamais eu à faire garder les enfants qu'ils n'ont
pas. Alors, c'est difficile d'Imaginer ce que ça représente
d'être parent et le rapport qu'on peut entretenir avec un mode de garde.
Je me rappelle, par exemple, l'avoir utilisé dès trois mois
après l'accouchement. Je me rappelle que le mode qui
réapparaissait le plus Immédiat, le plus à
proximité, c'était la voisine de palier et cela me convenait
parfaitement parce qu'elle offrait de la sécurité, de l'affection
jusqu'à ce que je me rende compte qu'elle offrait aussi le sucre
à la crème tous les matins avec tout le reste aussi.
Une voix: Ce sont les frais de dentiste.
Mme Harel: Pardon? Les frais de dentiste. En d'autres termes,
c'est comme si on demandait aux parents de choisir quand ils sont à la
poursuite de plusieurs valeurs. C'est comme si on obligeait les parents
à renoncer à certaines d'entre elles au profit de certaines
autres. Du moment que le milieu est sécuritaire, affectueux, tout le
reste vient par surcroît et l'État n'a pas à s'occuper de
ça. C'est un peu le courant d'opinion ici, dans les corridors de ce
parlement. Vous seriez surprise de voir à quel point c'est
répandu. Faisons des inspections et, à la rigueur, c'est un choix
privé que les parents font. J'aimerais cela vous entendre
là-dessus.
Mme Fournier: D'accord. . Vous me dites que c'est un choix
privé que les parents font.
Mme Harel: Ce n'est pas moi qui le dis. Je vous dis ce qui se dit
et ça se dit beaucoup.
Mme Fournier: Non, non. Écoutez...
Mme Harel: Cela se dit énormément.
Mme Fournler Ce que j'entends, je suis maman, j'ai deux jeunes enfants
et je suis à peu près toute seule dans ma "gang" à penser
ça, j'en veux deux autres. Tout le monde me dit: Tu es folle. As-tu
pensé aux coûts? Cela n'a pas de bon sens. Par contre, M.
Levesque, lors du dernier budget, me dit: On va vous donner un gros montant de
500 $ pour votre deuxième enfant et 3000 $ par la suite. On veut vous
aider. On veut des enfants. Dernièrement, dans La Presse, il y a un
documentaire, "Sommes-nous portés à disparaître" et tout le
monde nous dit: II faut prôner la natalité. Il y a beaucoup de
gens comme moi qui sont bien prêts, qui en veulent des enfants.
Savez-vous à quoi serviront les 500 $ que j'ai reçus pour mon
fils? Ils serviront à remplacer la déduction de frais de garde,
parce que ma fille est en garderie. Pendant quinze semaines, je reçois
l'assurance-chômage, pendant ces semaines, mes frais de garde ne sont pas
déductibles, parce que je n'occupe pas un emploi. À mon taux
d'imposition, les 500 $ viennent de passer. Ce ne sont peut-être pas des
chiffres que vous connaissez, parce qu'on commence à vivre avec ces
subventions, mais c'est exactement ce que les 500 $ font. Vous allez me dire:
Vous êtes à la maison, vous avez votre jeune bébé,
pourquoi ne gardez-vous pas votre petite fille à la maison? Parce que si
je garde ma fille à la maison, je dois la sortir de la garderie. Si je
la sors de la garderie, je n'ai plus de place dans la garderie. Je recommence
à zéro.
Est-ce que je vais déstabiliser mon enfant de 22 mois, qui a
déjà le petit frère en compétition à la
maison, en la sortant d'une garderie pour épargner cet argent?
Mme Harel: Je vous pose des questions qui ne sont pas
posées, parce qu'ils ne sont pas ici pour les poser. La question qui
vous serait posée: Pourquoi ne restez-vous pas à la maison pour
les garder?
Mme Foumier: Bien, Mme Harel...
Mme Harel: Non, non, je veux entendre votre réponse.
Mme Foumier. Non, non, mais je vais répondre à ça,
parce que c'est important.
Mme Harel: Vous êtes en chair et en os, vous ne faites pas
partie uniquement des statistiques.
Mme Foumier C'est important de répondre à ça. Je
suis une très bonne maman, mais je ne suis pas une éducatrice.
Mon petit a trois mois et demi, je le trouve beau, je le trouve fin, mais je
commence à avoir drôlement hâte de retrouver mes dossiers
dans mon bureau. Ma fille, je ne considère pas que je suis la personne
la plus compétente pour faire du neuf à cinq avec elle, et je
vais vous dire, la patience que les gens ont de coller des petits bouts de
ouate sur des affaires de Noël, je ne l'ai pas. Ce n'est pas
compliqué!
Ces gens sont qualifiés pour élever des enfants, les
développer, d'une certaine façon, et moi, en tant que parent,
j'offre autre chose. On ne demande pas à un père de famille
pourquoi il ne reste pas à la maison pour élever ses enfants. On
ne demande pas à aucune femme professionnelle ici pourquoi elle ne reste
pas à la maison pour élever ses enfants. J'ai le droit, il me
semble, en tant que personne, de vouloir avoir des enfants et de travailler, et
d'être très compétente en tant qu'avocate et en tant
que
mère. Sauf qu'en tant que mère, si vous voulez m'inciter
à faire des enfants, bien, il va falloir que ça cède
quelque part. Il va falloir, quelque part, qu'il y ait un service de garde
adéquat. Il va falloir, quelque part, qu'il y ait des subventions, que
je ne sois pas pénalisée parce que je prends un congé de
maternité.
Mes frais de garde ne sont plus déductibles, je suis
pénalisée par l'assurance-chômage, parce que je perds tant
d'argent dans mon REER par année. Cela paraît niaiseux, mais en
tant que professionnelle, c'est tant d'argent de moins, de l'argent que je
n'aurai pas. On a compté, mon mari et mol, que chaque fois que j'ai un
enfant, cette année-là, je peux mettre 1500 $ de moins dans mon
REER. Alors, par enfant, cela fait des revenus d'à peu près 150 $
par mois de moins, au moment de la retraite.
Faites des enfants, vous allez faire des retraités pauvres; c'est
ce que cela nous dit. Je sais qu'on ne parie pas souvent de politique fiscale,
lorsqu'on parie de condition parentale, mais je pense qu'il faut aussi englober
tout cela dans les conditions parentales.
Mme Harel: Mme Fournier, en général, ce discours,
ce n'est pas aux femmes à le tenir car les femmes ont la vocation de
faire les bébés et, évidemment, celle aussi d'être
les plus pauvres dans notre société. Tantôt, vous avez dit:
Je veux en avoir deux autres.
Le Président (M. Bélanger): Je dois vous demander
de conclure, Mme la députée de Maisonneuve, malheureusement.
Mme Harel: En l'absence de services de garde, en feriez-vous deux
autres? Si tant est que le choix, c'était de rester à la maison
pour en avoir deux autres, est-ce que vous les feriez?
Mme Fournier: ...lâcher ma job?
Mme Harel: Oui.
Mme Fournier: Non, jamais, point à la ligne.
Mme Harel: C'est ce que je pense pour la majorité des
femmes. Je vous remercie beaucoup, Mme Fournier.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Gagnon-Tremblay: Je vous remercie, Mme Fournier, pour votre
témoignage.
Le Président (M. Bélanger): La commission des
affaires sociales remercie Mme Fournier de la garderie La Sourithèque
et, compte tenu de l'heure, ajourne ses travaux au mercredi 1er mars, à
10 heures, à la salle du Conseil législatif, pour la poursuite de
ce mandat.
Je vais rappeler aux membres de la commis- sion que nous
siégerons les 21 et 22 février, soit la semaine prochaine, afin
de procéder à l'étude du projet de règlement sur la
sécurité du revenu.
Mme Harel:...
Le Président (M. Bélanger): Non, c'est juste un
rappel qu'on n'est pas en vacances entretemps. Bonsoir à tout le monde
et bon retour.
(Fin de la séance à 22 h 9)