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(Dix heures onze minutes)
La Présidente (Mme Marois): Nous allons poursuivre et
reprendre donc nos travaux de consultation dans le cadre de l'étude de
l'avant-projet de loi sur les services de santé et les services
sociaux.
Nous devrions entendre ce matin, d'une part, le Comité provincial
des malades, la Fédération des ACEF du Québec et le
Regroupement des parents pour déficients mentaux. On commence avec une
dizaine de minutes de retard, on va essayer de se reprendre dans le temps. Avec
un peu de discipline, je pense qu'on peut le faire.
Je rappelle les règles très brièvement. À
peu près une vingtaine de minutes de présentation. Si ça
vous prend un peu moins de temps, à ce moment-là, c'est du temps
qui est laissé à la commission; vingt minutes de part et d'autre
pour des questions. Je vous laisse la parole, madame. Vous allez vous
présenter, pour le bénéfice des membres de la commission,
s'il vous plaît.
Comité provincial des malades
Mme Lamquln-Éthier (Michèle): Mme la
Présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis
Michèle Lamquln-Éthier, directrice générale du
Comité provincial des malades.
Mme la Présidente, je vous prierais d'excuser M. Jean Clavel,
président du conseil d'administration, qui ne peut être
présent en raison de la grippe de Shanghai. Il est malheureusement
alité.
Nous vous avons remis des pochettes qui n'altèrent en rien le
contenu de notre mémoire, qui ne le modifient pas. Cette
pochette-là vous a été remise afin de vous sensibiliser
davantage aux services qui sont dispensés par le Comité
provincial des malades. La pochette a été articulée sous
trois chapitres principaux. Nous avons dressé un rapport sommaire de nos
activités pour les membres de cette Assemblée, auquel est
annexé un cumulatif de toutes les demandes que nous avons reçues
par téléphone durant la dernière année. Ça
va vous donner un reflet du travail concret du comité provincial. Nous
avons joint en deuxième partie le rapport complet de nos
activités de l'année dernière et la liste de nos
réussites qui sont mises à jour. Afin d'illustrer davantage
l'importance de supporter les comités de bénéficiaires, de
les éduquer, de les informer, nous vous avons remis des documents qui
ont été réalisés par le Comité provincial
des malades. Vous avez un formulaire d'affiliation qui vous parle de la devise
du CPM et sont annexés à ce formulaire-là
différents documents qui ont été conçus et
réalisés par le comité au bénéfice exclusif
du comité de bénéficiaires.
Le comité provincial représente plus ou moins 60 000
personnes âgées, malades ou handicapées à travers le
Québec. Au moment où on se parle, nous avons progressivement
atteint le nombre de 329 comités de bénéficiaires qui nous
sont affiliés et qui sont répartis à travers tout le
Québec. Nous sommes porteurs des décisions qui ont
été prises par l'assemblée des comités de
bénéficiaires et c'est le message des comités de
bénéficiaires à travers tout le Québec que nous
venons vous livrer.
Le présent mémoire est présenté par le
conseil d'administration du Comité provincial des malades et il
reproduit fidèlement les résolutions adoptées par
l'Assemblée générale des comités de
bénéficiaires de la province, principalement lors des
assemblées tenues les 15 septembre 1988 à Québec, 29 mai
1989 à Montréal, et le 19 septembre 1989 à
Québec.
Le 15 septembre 1988, l'Assemblée avait présenté
à Mme la ministre Thérèse Lavoie-Roux des
résolutions touchant le fonctionnement et la composition des
comités de bénéficiaires; c'était alors dans le
cadre de la vaste consultation de Mme la ministre suivant la parution du
rapport Rochon.
Le 29 mai 1989, l'Assemblée avait manifesté ses
réactions vis-à-vis le document "Orientations" publié en
avril 1989 par le ministère de la Santé et des Services
sociaux.
Le 19 septembre 1989, l'Assemblée réagissait à
l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur les services de santé et les
services sociaux et elle approuvait le présent mémoire. Ce
mémoire expose donc fidèlement la réaction de l'ensemble
des comités de bénéficiaires de la province concernant
l'avant-projet de loi. Il témoigne de plus de l'expérience et de
l'expertise acquises par le Comité provincial des malades dans la
réalité concrète du fonctionnement des
établissements de santé eu égard à la
qualité de vie des bénéficiaires. Le présent
mémoire a été adopté par le conseil
d'administration.
Les orientations: Les orientations publiées par le
ministère de la Santé et des Services sociaux, en avril 1989,
contenaient plusieurs énoncés qui nous ont plu et que nous
espérons retrouver dans les règlements adoptés par le
gouvernement en vertu de la loi. Notamment, nous étions en faveur des
mesures annoncées pour améliorer les services d'urgence des
hôpitaux et tout à fait satisfaits de constater que le
ministère invite enfin chaque établissement à se
doter d'un code d'éthique qui précisera non seulement les droits
des bénéficiaires mais également les recours disponibles,
les conduites du personnel jugées Inacceptables et les mesures
disciplinaires prévues. Nous faisons référence à la
page 56.
Le Comité provincial des malades se déclare prêt
à collaborer étroitement avec les établissements aux fins
de promouvoir l'adoption de codes d'éthique, de conseiller ces derniers
et, au besoin, d'informer le ministère des difficultés
particulières qu'il pourrait rencontrer Nous faisons, ici,
référence au mandat confié dans le document "Orientations"
à la page 56.
Nous avons également apprécié le chapitre II et
plus particulièrement la section portant sur le respect des droits et de
la dignité de la personne. Le CPM note avec satisfaction d'y voir
réaffirmer qu'aucun conflit de travail ne peut altérer le droit
aux soins et aux services de santé. Nous faisons référence
à la page 53. Le CPM a, d'autre part, été consterné
de constater de la part du ministère une acceptation à l'avance
et explicite de la normalité du ralentissement des activités
durant la période des fêtes, des vacances estivales ou de la
relâche scolaire. Compte tenu des longues listes d'attente pour obtenir
un hébergement ou une hospitalisation, le CPM proteste
énergiquement contre cette habitude de fermer des lits pendant ces
périodes et demande que la prestation des services soit assurée
à l'année longue avec la même qualité de soins. Le
CPM estime que le respect des droits et de la dignité de la personne
commandent d'assurer en tout temps le droit aux soins et aux services de
qualité.
Avant-projet de loi modifiant la Loi sur les services de santé et
les services sociaux. Relativement à l'avant-projet de loi, le CPM
aimerait maintenant soumettre à l'attention et à la
considération des membres de cette assemblée ses avis sur les
articles qui touchent de plus près l'ensemble de ses
activités.
Le conseil d'administration. Il nous apparaît d'abord tout
à fait irréaliste de demander à un conseil
d'administration d'administrer une quinzaine d'établissements de
façon efficace et efficiente. De deux choses l'une: ou un tel conseil
adoptera les projets aveuglément, par routine, ou il va jouer
consciemment son rôle et il devra se réunir deux ou trois fois par
semaine. Pour les membres du conseil, ce bénévolat devient
très exigeant. De plus, la voix des bénéficiaires sera
complètement étouffée de même que l'information
qu'ils seraient en droit de recevoir sur les décisions administratives
qui touchent leurs conditions de vie et de séjour.
Conséquemment, le CPM est en complet désaccord avec les
articles 43 et 44 de l'avant-projet de loi. De même, le CPM est en
désaccord avec la composition du conseil d'administration, telle que
mentionnée à l'article 49. Nous notons, en premier lieu,
l'absence quasi totale des bénéficiaires, d'autant plus que les
orientations proposaient et énonçaient spécifiquement:
Trop souvent des décisions qui concernent les personnes
âgées sont prises sans qu'elles soient partie prenante ou
même consultées. Pourtant, ce sont elles qui connaissent le mieux
les besoins et la meilleure façon d'y répondre. On devra donc
prévoir qu'une place leur soit spéficiquement accordée
dans les structures décisionnelles." Nous faisons
référence à la page 29.
Nous soumettons que ces paroles ont sûrement dû être
oubliées lors de la rédaction de l'article 49 de l'avant-projet
de loi. Nous considérons le travail d'un conseil d'administration trop
sérieux et trop important pour choisir quatre de ses membres lors d'une
assemblée publique où n'importe qui pourra tenir un beau discours
et se faire élire sans autre vérification de son
intérêt réel et véritable et sans autre
vérification de sa compétence et de son expérience
probante à pouvoir remplir de telles fonctions. En conséquence,
le CPM croit que ces assemblée publiques risquent d'être peu ou
pas fréquentées.
Il nous semble très clair que la composition du conseil, telle
qu'elle est proposée, s'inspire directement de l'idée très
à la mode de démocratisation de la composition des conseils par
la participation de toutes les catégories de citoyens à la
gestion des établissements. Le CPM dénonce de façon
vigoureuse ce principe très séduisant et ce, même s'il
admet qu'il est politiquement rentable. Le centre d'intérêt, voire
la raison d'être d'un centre d'hébergement et de soins de longue
durée demeure, d'abord et avant tout, le bénéficiaire. Le
CPM maintient que, pour composer un conseil d'administration, il ne s'agit pas
de faire plaisir à des personnes issues de tous les milieux, qui veulent
faire une expérience intéressante, mais bien qu'il faut choisir
des administrateurs qualifiés, qui sauront utiliser les ressources
disponibles pour assurer et dispenser aux bénéficiaires les
meilleurs soins et services et la meilleure qualité de vie. En fonction
de cet objectif fondamental, le CPM croit que les membres d'un conseil
d'administration doivent être choisis, d'abord et avant tout, pour leur
notoire engagement social et leur expérience administrative
indiscutable, après un examen attentif de leur curriculum vitae.
L'article 57 de l'avant-projet de loi. Il nous apparaît
très significatif de constater que l'article 57 précise ce qui
peut empêcher une personne d'être membre d'un conseil
d'administration et qu'il n'y ait aucun article pour préciser les
qualités, au moins souhaitables, que doit posséder tout membre
appelé à siéger à un conseil d'administration. Par
ailleurs, nous sommes entièrement en faveur du retrait du conseil, des
personnes rémunérées par les établissements. En
effet, notre expérience nous a démontré que la
présence des employés conduit
trop souvent à des conflits d'intérêts.
Nous avons souvent observé que l'employé aura ou peur de
contredire le directeur, ou, au contraire, il aura reçu la mission de le
contredire systématiquement, ou, pire, il prendra carrément
position contre lui uniquement pour des griefs personnels qui n'ont aucune
pertinence avec l'étude d'un point particulier. Et je pense que vous
pourriez nous citer de nombreux exemptes, comme nous, nous pourrions vous en
citer, qui illustrent de façon flagrante un manque d'objectivité
ou, encore, une complaisance tout à fait déplorable. Dans l'un ou
l'autre cas, de toute façon, ce n'est pas recevable.
L'article 64 de l'avant-projet de loi. Nous attirons également
l'attention des membres de cette commission sur l'article 64 qui stipule: "Le
président et le vice-président du conseil d'administration
agissent comme président et vice-président de chacun des
établissements que le conseil administre". Nous soumettons que la
rédaction de cet article prête à confusion, fait
naître des difficultés d'interprétation et qu'elle
mériterait d'être révisée et précisée.
Faut-il comprendre que chaque directeur général d'un
établissement est mis sous tutelle du président ou du
vice-président du conseil? Qu'est-ce que le président du conseil
ira présider dans chaque établissement où il n'y aura plus
de conseil d'administration? Que veut dire être le président d'un
établissement?
Recommandations. Le Comité provincial des malades soumet
respectueusement:
Recommandation 1. Que chaque établissement ou chaque couple
d'établissements fusionnés conserve son conseil d'administration.
En effet, il nous apparaît essentiel, voire même indispensable, que
les administrateurs restent près des problèmes qu'ils doivent
régler. Faut-il le répéter, il ne s'agit pas d'administrer
une industrie qui fabrique des objets, mais bien de prendre toutes
décisions propres à assurer aux malades, aux personnes
âgées et aux personnes handicapées le respect de leurs
droits et de leur dignité, et leur garantir la prestation de soins et de
services de qualité, dispensés par un personnel compétent
et véritablement intéressé.
Recommandation 2. Que le conseil d'administration soit composé de
neuf membres qui en font partie au fur et à mesure de leur
élection ou nomination:
Quatre membres nommés par le ministre sur recommandation de la
régie régionale, avec le commentaire suivant: Ces quatre membres
devraient être nommés sur recommandation d'un comité de
sélection de la régie régionale, lequel serait
composé d'un représentant provenant des organismes communautaires
ou des groupes socio-économiques, d'un représentant des
comités de bénéficiaires et d'un représentant des
autres composantes du conseil de la régie régionale.
Deux membres nommés par le comité de
bénéficiaires de l'établissement. Toutefois, lors- que
deux établissements sont fusionnés, chaque comité de
bénéficiaires nomme un de ses membres au conseil.
Deux membres nommés par les six premiers.
Le directeur général.
Afin d'éliminer l'actuelle lourdeur administrative de la
procédure de nomination des membres du conseil d'administration, suivant
les recommandations des divers groupes communautaires, le Comité
provincial des malades est d'avis que les personnes intéressées
à faire partie d'un conseil d'administration devraient soumettre leur
candidature et leur curriculum vitae directement à la régie
régionale.
Nous aimerions ajouter que, règle générale, un
conseil ou un comité qui comporte moins de dix membres travaille
beaucoup plus efficacement que lorsque te nombre est élevé. De
plus, avec un conseil restreint, point n'est besoin de créer un
comité administratif. Enfin, avec le mode de nomination proposé,
il y a une meilleure probabilité de pouvoir nommer des personnes qui ont
les qualités requises et nécessaires pour siéger à
un conseil d'administration.
Recommandation 3. À défaut par cette commission de
recevoir nos deux premières recommandations et si le conseil
d'administration devait être constitué selon les modalités
prévues à l'article 49 de l'avant-projet de loi, nous
recommandons qu'il faut y trouver deux personnes nommées par les
comités de bénéficiaires.
La structure administrative. En dehors de la composition du conseil
d'administration, le CPM accepte le système de collège
électoral et de régie régionale. Nous trouvons cependant
qu'en augmentant l'indice de démocratisation on augmente d'autant le
coefficient d'inertie du système.
Nous sommes particulièrement sceptiques à l'égard
du comité d'établissements constitué en vertu des articles
85 et 86 de l'avant-projet de loi. Il nous semble irréaliste de demander
aux directeurs généraux de planifier entre eux le partage des
subventions. Cette fonction de planification devrait, à notre avis, se
retrouver à l'intérieur de la régie régionale.
Le comité des bénéficiaires. Article 115 de
l'avant-projet de loi. Le premier alinéa de cet article élimine
la nécessité de mettre sur pied un comité de
bénéficiaires dans les hôpitaux de courte durée qui
ont une section de soins prolongés.
Nous comprenons, suivant les Orientations du ministère, que les
hôpitaux généraux et spécialisés doivent se
départir des soins de longue durée, mais, dans
l'éventualité où cette opération ne serait pas
complètement réussie à court terme, il nous apparaît
nécessaire de prévoir un comité de
bénéficiaires dans ces établissements où il y
aurait encore des soins de longue durée.
De même, lorsque deux établissements sont fusionnés
sous une même administration, il est
essentiel, pour respecter les objectifs et la raison d'être d'un
comité de bénéficiaires, de créer un comité
dans chacun des établissements qui sont ainsi fusionnés. En
effet, pour être efficace, le comité de
bénéficiaires doit garder un contact étroit avec les
bénéficiaires de l'établissement où il est
situé. Il peut difficilement connaître et défendre les
problèmes vécus par les bénéficiaires d'un autre
établissement, très souvent situé à une très
grande distance géographique du premier.
En conséquence, le CPM recommande que - recommandation 4 - le
premier alinéa de l'article 115 devrait se lire comme suit: 'Tout
établissement qui exploite un centre hospitalier psychiatrique, un
centre d'hébergement et de soins de longue durée, un centre de
réadaptation, ou tout établissement offrant les mêmes
services, doit mettre sur pied un comité de bénéficiaires
et lui accorder le budget particulier fixé à cette fin dans son
budget total. Lorsque deux ou plusieurs établissements sont
fusionnés sous une même administration, chacun des
établissements ainsi fusionnés doit mettre sur pied un
comité de bénéficiaires et lui accorder le budget
particulier fixé à cette fin dans son budget total."
L'obligation d'élire deux bénévoles. Le
deuxième alinéa de l'article 115 ne tient pas compte des demandes
maintes fois réitérées par les comités de
bénéficiaires de la province et véhiculées par le
comité provincial a Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux. La dernière mesure préconisée dans ce paragraphe
peut, d'ailleurs, être inapplicable car, dans plusieurs
établissements, il n'y a pas de services de bénévolat et
il est à peu près impossible de trouver une personne
bénévole oeuvrant dans rétablissement qui accepte de faire
partie d'un comité de bénéficiaires. Nous devons donc
réitérer avec force les demandes des comités de
bénéficiaires, soit: Que les bénéficiaires soient
toujours majoritaires au sein du comité; que, dans les institutions
très populeuses, le comité puisse compter plus de cinq membres
afin de partager le travail et de pouvoir être présent dans
l'ensemble de l'établissement auprès de tous les
bénéficiaires; que le comité puisse compter des
bénévoles, des parents ou des représentants de
bénéficiaires, mais sans en faire une obligation. (10 h 30)
En conséquence, nous demandons - recommandation 5 - que le
deuxième alinéa de l'article 115 devrait se lire comme suit: "Ce
comité se compose de cinq membres élus par les
bénéficiaires du centre. Toutefois, ce nombre peut être
porté à sept, ou à onze, dans les établissements
ayant respectivement de 500 à 1000 lits, et plus de 1000 lits. "La
décision d'augmenter le nombre de membres, le cas échéant,
appartient au comité des bénéficiaires et doit faire
l'objet d'une décision unanime au moins trois mois avant
l'élection des membres. "Les membres sont élus par les
représentants des bénéficiaires si leur état ne
leur permet pas d'exercer leur droit de vote. "Le comité peut compter
des personnes bénévoles ou parentes de
bénéficiaires, mais les bénéficiaires doivent
toujours être majoritaires."
Les représentants de certains bénéficiaires. Les
dispositions de l'article...
La Présidente (Mme Marois): Je m'excuse, madame, votre
temps est écoulé.
Mme Lamquin-Éthier: Ah bon, d'accord!
La Présidente (Mme Marois): On me signifie Ici qu'on est
prêt à continuer à vous entendre, si c'est possible, quand
même, de resserrer un peu la présentation...
Mme Lamquin-Éthier: D'accord.
La Présidente (Mme Marois): ...parce que je ne voudrais
pas, évidemment, que l'on déborde le temps prévu aux
autres organismes qui vous suivent.
Mme Lamquin-Éthier: Tout à fait normal. Je vous
prie de m'excuser. Je prie les membres de m'excuser.
La Présidente (Mme Marois): Ça va.
Mme Lamquin-Éthier: Alors, nous en étions à
la représentation des comités de bénéficiaires. Le
libellé de l'article 118.3 ne reproduit pas certains
éléments qui nous apparaissent nécessaires et qu'on
aimerait voir réintégrés. Lorsque l'état de
santé des bénéficiaires, tel qu'évalué par
les autorités médicales d'un établissement, ne leur permet
pas de faire partie d'un comité de bénéficiaires, les
parents ou représentants de ces bénéficiaires
élisent cinq d'entre eux pour former le comité de
bénéficiaires lors d'une assemblée convoquée par le
directeur général.
Quant au mandat du comité de bénéficiaires, le
texte tel que reproduit à l'article 116 fait preuve d'une
méconnaissance complète du fonctionnement et de la
réalité des comités de bénéficiaires. Il
serait irréalisable de penser faire une élection à tous
les ans. C'est un processus qui est beaucoup trop difficile et trop long.
Conséquemment, nous formulons une recommandation qui devrait
s'inscrire à l'article 116: Le comité adopte des
règlements pour sa régie interne et l'élection ou le
remplacement de ses membres. Toutefois, le mandat des membres est d'au moins
deux ans et d'au plus quatre ans. Ce mandat est renouvelable.
Nous pensons que ça serait heureux que le mandat soit
renouvelable puisque, lorsqu'un membre fait bien son travail et qu'il est
intéressé à le poursuivre, nous ne pensons pas qu'il
y aurait de raisons de ne pas reconduire son mandat. Si l'article
était ainsi rédigé, il faudrait, évidemment,
supprimer au dernier paragraphe de l'article 119, les mots "établir ses
règles de fonctionnement".
Quant à l'article 118 de l'avant-projet de loi, on
prévoit, fort justement, la création d'un conseil consultatif du
personnel clinique, d'un conseil des médecins et des dentistes, mais on
ne prévoit pas que le comité de bénéficiaires soit
reconnu comme un conseil consultatif. Il nous apparaîtrait important que
le comité de bénéficiaires soit reconnu comme un conseil
consultatif. Évidemment, ça aurait des effets aussi sur l'article
75 de l'avant-projet de loi. Il faut vraiment consulter les
bénéficiaires. Alors, si on veut véritablement les
consulter, qu'on l'insère une bonne fois pour toutes dans le texte de
loi.
La recommandation 8: Le directeur général d'un
établissement est tenu de consulter le comité de
bénéficiaires avant d'adopter toute mesure touchant les
conditions de vie et de séjour. Parce que ce n'est plus au conseil
d'administration qu'on consulte. On décide, mais on ne consulte pas. Si
la consultation se fait avant, il va falloir aménager des sentiers pour
que ça se fasse avant.
L'article 119 de l'avant-projet de loi supprime des fonctions du
comité de bénéficiaires celle de participer à
l'organisation des loisirs. Et c'est très important pour la
clientèle que nous représentons. Conséquemment, nous
sollicitons que soit réinstitué à l'alinéa 3 de
l'article 119: Participer à l'organisation des loisirs des
bénéficiaires et conseiller le directeur général de
l'établissement sur toute question relative aux loisirs et aux questions
qui ont trait aux conditions de séjour.
Il serait important de reconnaître l'importance des comités
de bénéficiaires de leur donner une reconnaissance. C'est eux qui
sont la raison d'être du réseau. Alors, il nous apparaît
à ce moment-là...
La recommandation 10: Ajouter l'alinéa suivant à la fin de
l'article 119: Le comité de bénéficiaires d'un
établissement est l'agent officiel et privilégié de
liaison entre l'administration et les bénéficiaires pour recevoir
les décisions administratives et les communiquer aux
bénéficiaires et pour renseigner l'administration sur les besoins
des bénéficiaires.
Il faut faire une distinction entre la consultation et
l'information.
Si les recommandations 1 et 2 de notre mémoire étaient
retenues et si chaque établissement avait son conseil d'administration
où siégeaient deux bénéficiaires, il y aurait lieu
pour nous de formuler deux recommandations additionnelles, les recommandations
11 et 12: "Que le comité de bénéficiaires adopte son
propre règlement pour élire ses membres au conseil
d'administration. Cette élection doit toutefois être
présidée par une personne qui n'est pas membre du comité
de bénéficiaires et qui est choisie à l'unanimité
des membres de ce comité. " "Que toute vacance au conseil
d'administration créée par un membre du comité de
bénéficiaires soit toujours comblée par un autre membre du
comité do bénéficiaires, nommé par le
comité. " Je vous remercie.
La Présidente (mme
marois): merci beaucoup, mme
lamquin-éthier. je vais maintenant demander au ministre s'il a des
questions à poser.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, certainement. D'abord,
quelques observations en tout premier lieu puisque c'est le premier
mémoire que nous entendons. De consentement avec l'Opposition, nous
avons définitivement choisi d'entendre en cette première
journée non pas les dispensateurs de services, mais davantage les
bénéficiaires de services puisqu'on a voulu et on veut dans cette
réforme faire en sorte que ce soit le bénéficiaire qui
soit la priorité de la réforme. On se devait donc de vous
entendre aujourd'hui et on vous remercie, malgré le court laps de temps
que ça a pu vous donner, de vous être rendus disponibles. C'est un
geste que nous avons posé délibérément pour donner
un signal à cette commission que notre intérêt, à
nous, ce n'est pas le béton; c'est davantage les
bénéficiaires qui nous intéressent et ce n'est pas
nécessairement des dispensateurs de services aussi, mais davantage les
bénéficiaires, puisque, vous l'avez dit vous-même dans
votre présentation, s'il n'y a pas de bénéficiaires, il
n'y a pas de béton, il n'y a pas de dispensateurs de services, et
ça nous apparaissait extrêmement important.
Évidemment, dans ce contexte-ci, on aurait pu dire: On a un
avant-projet de loi qui n'a pas été modifié et qui,
forcément, a des forces et des faiblesses. Ça donne au moins
l'avantage de se positionner par rapport à des choses qui sont dans le
projet de loi, qui sont questionnables. C'est ce que vous avez fait dans votre
présentation. Évidemment, je ne reprendrai pas chacun des
arguments ou chacune des choses que vous évoquez puisque, à mon
point de vue, il y a déjà, à l'intérieur de votre
mémoire, des propositions que nous allons retenir. Règle
générale, là-dessus, on passe rapidement, il y a des bons
points; où il y a des lacunes dans le document, vous les soulevez et
vous soulevez d'autres points qui me paraissent être normaux en termes
d'ajustements ou correspondre à ce qu'on fera comme ajustements.
Mes questions porteront, d'abord, sur d'autres volets de la
réforme, des idées peut-être un peu plus fondamentales et
quelques questions spécifiques sur des structures que vous interpellez,
pour tenter d'avoir votre opinion.
Dans l'avant-projet de loi et dans le document d'orientation, on parle
beaucoup des
droits reconnus aux bénéficiaires. On dit, par exemple,
dans l'avant-projet de loi, que l'on définit les droits actuels de
l'usager: droit aux services, droit à l'information, droit à
l'intégrité physique, droit à un plan de services
individualisé dans certaines circonstances, droit d'exercer un recours,
droit à l'assistance, droit à la protection et, enfin, droit de
recevoir des services dans sa langue, selon certaines dispositions. Est-ce que
ça a fait l'objet de votre interrogation, de vos analyses? Est-ce que
ça vous semble complet ou s'il manque des choses?
Mme Lamquin-Éthier: Nous avons été
très satisfaits de voir reproduire enfin, noir sur blanc, renonciation
de droits parce qu'on avait entendu à de nombreuses occasions: Tout le
monde connaît ses droits. On sait qu'ils ont des droits. Là, pour
une fois, c'est écrit et c'est important. Les
bénéficiaires ne connaissent pas leurs droits; les parents ne
connaissent pas les droits; les usagers ne connaissent pas leurs droits. Alors,
c'est donc nécessaire de les énoncer clairement et simplement et
ça les sacralise d'une certaine façon. C'est très
important, c'est une reconnaissance. Nous avons fait l'examen de ce qui
était mentionné et nous avons été satisfaits de
cette énumération-là.
Ce qui nous inquiète le plus, si vous me le permettez, M. le
ministre, par ailleurs, c'est les recours, la possibilité d'exercer des
recours. Ça, ça paraît moins évident et, encore
là, on nous dit souvent que les structures sont en place, sauf qu'on ne
comprend pas que, pour la clientèle que nous représentons, les
structures actuelles qu'on leur offre, ça ne répond pas de la
meilleure façon à leurs capacités, à leurs limites.
C'est un système qui est autrement complexe et le
bénéficiaire est tout à fait perdu dans tout ça. Il
n'a pas la santé, la capacité physique d'instituer de longues
procédures. Ça prend donc des choses qui soient efficaces,
rapides et dirigées avec intelligence. Ce ne sont pas toujours des
recours, vous savez, très élaborés que ça prend.
Nous sommes à faire une réflexion sur un document de travail et
les modes de protection quant aux personnes vulnérables, adultes
vulnérables, ça nous apparaît essentiel. C'est bon d'avoir
des recours, d'avoir des droits, mais il faut avoir la capacité de les
exercer. Ça nous apparaît aussi fondamental.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, à
partir du moment où on a des droits, il faut ôtre capable de les
faire valoir; il faut avoir des structures et des mécanismes qui
permettent de les faire valoir.
Mme Lamquin-Éthier: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, de
votre côté, vous ôtes à réfléchir sur
les mécanismes à ce moment-ci?
Mme Lamquin-Éthier: Oui, nous faisons cet examen-là
pour plusieurs raisons. D'abord, parce qu'on est très inquiets. Le
tableau que nous avons soumis va vous permettre d'apprécier la nature
des demandes qu'on reçoit. Vous allez remarquer qu'il y a beaucoup de
ces demandes qui sont orientées sur des questions qui touchent aux
droits: le droit à l'information, la liberté de choix quant au
médecin, à l'établissement. C'est donc très
significatif. Il y a vraiment des problèmes. Il va falloir que ces
problèmes-là soient abordés de façon pratique.
Alors, ce serait quoi la façon pratique pour des
bénéficiaires à l'heure actuelle d'avoir la meilleure
audition ou le meilleur règlement? Ça, ça nous
préoccupe beaucoup, beaucoup, beaucoup.
On va vous soumettre un document possiblement sur l'avenir des
comités de bénéficiaires. La survenance des ombudsmen dans
les établissements est venue modifier de beaucoup la
réalité des comités de bénéficiaires, les
mandats. D'après notre expérience, le vécu, sauf de rares
exceptions, les ombudsmen ce n'est pas la réponse efficace aux
problèmes. Ces gens-là sont nettement en conflit
d'Intérêts puisqu'ils dépendent de l'établissement.
Alors, ils peuvent difficilement faire valoir les points des
bénéficiaires et c'est très préoccupant. Il nous
apparaît fondamental que les comités de
bénéficiaires demeurent, mais c'est aussi fondamental qu'on leur
donne les outils et les moyens d'être efficaces, et on s'interroge sur
ces sujets-là.
M. Côté (Charlesbourg): Donc, vous avez une
réflexion et des propositions. Ce sera prêt dans combien de
temps?
Mme Lamquin-Éthier: Nous sommes à raffiner le
document, M. le ministre. On pourrait Idéalement vous faire parvenir
ça d'ici à la fin du mois de janvier.
M. Côté (Charlesbourg): Parfait. Comme on en a pour
deux mois et demi ici, si ça devait arriver à la
mi-février, il n'y a pas de problème.
Une voix: Même à la mi-mars.
M. Côté (Charlesbourg): Même à la
mi-mars.
Mme Lamquin-Éthier: D'accord.
M. Côté (Charlesbourg): Un deuxième point qui
m'a frappé, puisque vous y mettez beaucoup d"'emphase" dans votre
présentation, est définitivement celui d'une réprobation
des conseils d'administration unifiés. Vous avez une crainte qui est, il
faut l'admettre, un peu généralisée à ce moment-ci
lorsqu'on regarde les mémoires et qu'on entend les gens, une crainte de
conseils d'administration unifiés. Évidemment, on devra
réfléchir beaucoup là-dessus. C'est un peu
l'exercice qu'on fait. On parie de manque de
complémentarité entre les différents niveaux
d'institutions. Lorsqu'on parle de conseils d'administration unifiés, on
voit toujours la supergrosse structure, évidemment, puisque, si vous en
regroupez quinze, ça fait gros. Évidemment, la moyenne qui avait
été estimée par les gens qui ont travaillé sur le
dossier était d'à peu près quatre établissements
qui se regrouperaient. Est-ce que vous pensez qu'il y a possibilité
effectivement, tout en respectant ce que vous évoquez, le droit des
bénéficiaires, le respect des bénéficiaires,
d'arriver à une formule qui permettrait d'unifier certains conseils
d'administration?
Mme Lamquin-Éthier: En théorie?
M. Côté (Charlesbourg): Non. Bien, la
théorie, on en a parlé pendant longtemps parce qu'on va passer
bientôt à la phase pratique. La théorie pour la
théorie, ça ne m'Intéresse pas. Une théorie qui
peut être pratique, donc qui va s'appliquer et qui va donner des effets
dans le champ demain matin, c'est surtout ça qui m'intéresse.
Mme Lamquin-Éthier: Nous, en tout cas, on s'est
questionné et ça nous apparaît douteux. Ça nous
apparaît douteux parce qu'on a fait certains examens de certains secteurs
de CLSC et on a retrouvé beaucoup plus que quatre établissements.
Le quatre, j'aimerais ça... (10 h 45)
M. Côté (Charlesbourg): En moyenne. C'est une
moyenne provinciale. Mais, évidemment, vous allez prendre des
territoires où on est un peu plus choyés que d'autres.
Mme Lamquin-Éthier: Oui, bien, en tout cas.
M. Côté (Charlesbourg): II y a eu concentration des
différents établissements.
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Et c'est l'histoire qui a
fait ça. Évidemment, si vous vous retrouvez dans un territoire de
CLSC au centre-ville de Montréal, vous avez de fortes chances qu'il y en
ait pas mal plus que quatre.
Mme Lamquin-Éthier: C'est ça. Alors, quant à
nous, les investigations qu'on a faites nous ont conduits à pas mal plus
que quatre et c'est pour ça qu'on émet de sérieuses
réserves. Vous évoquez, et je comprends que vous le fassiez, que
ça ne représente pas une superstructure et que le risque semble
atténué. Quant à nous, il y a un risque et il n'est pas
atténué. Il est réel et concret. Nous, on a la
qualité d'être modestes et très simples et on a les pieds
sur le sol. Alors, on favorise ce qui est simple et ça nous
paraît, en tout cas, si on se place uniquement au niveau du
bénéficiaire, des comités de bénéficiaires
et de l'usager, une formule simple et accessible. C'est pour ça que le
contact va être beaucoup plus direct avec la base si la formule est
simplifiée. Pour nous, il nous semble beaucoup plus simple que chaque
établissement conserve son conseil d'administration et que les gens
restent près de la base.
M. Côté (Charlesbourg): Lorsqu'on parle de ces
structures, parce que cela fait, évidemment, l'objet de
préoccupations, vous êtes d'accord avec une régie
régionale...
Mme Lamquin-Éthier: Oui, en principe.
M. Côté (Charlesbourg): ...tout en conservant
l'identité propre, par son conseil d'administration, de chacune des
institutions. Évidemment, tout en faisant ça, on se rend compte
que, malgré le fait qu'il y ait des conseils d'administration
d'institutions, on a des problèmes aussi. En faisant l'analyse, on
retrouve des problèmes vécus aujourd'hui au niveau des conseils
d'administration non unifiés tels qu'on les connaît aujourd'hui,
qui sont donc près de la base et qui ont aussi des problèmes.
À partir de ce moment, dans votre document, vous analysez... En
tout cas, vous me corrigerez si je saisis mal, mais de ce que je comprends de
vos propos, la participation des usagers n'est pas un succès formidable
dans les conseils d'administration actuels. J'aimerais en entendre davantage
parce que usagers et bénéficiaires sont deux choses; je pense
qu'on se comprend. J'aimerais entendre parler à la fois de la
participation des usagers parce que, dans votre présentation, comme vous
êtes capables de le faire, évidemment, de manière
très subtile, on parle de démocratie, alors qu'une
démocratie qui fait que les usagers participent aux conseils
d'administration et des bénéficiaires, on l'interroge. On dit
qu'elle n'est pas toujours bonne parce que, si tu te présentes dans une
assemblée publique et que tu as une grande gueule, tu as des chances de
gagner par rapport à quelqu'un qui n'aurait peut-être pas une
grande gueule, mais des qualités pour le faire.
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, on
attaque des principes assez importants de démocratie où c'est
tout le monde qui vote. Dites-moi comment on fait pour régler
ça.
Mme Lamquin-Éthier: C'est-à-dire qu'on n'est pas
pour une démocratisation à tous crins où, en vertu d'un
principe de démocratisation, on donne ouverture à des gens qui
proviendraient de partout et qui auraient le goût, comme on le dit, de
vivre une expérience intéressante. Ce n'est
pas ça et, en tout cas, ça ne doit pas être
conçu comme ça. C'est pour ça qu'il nous apparaît
important, d'une part, d'enlever des conseils d'administration les
employés puisqu'on a, en de nombreuses occasions, constaté
réellement et concrètement que c'étaient des sources de
problèmes. Je peux vous donner des illustrations.
D'autre part, pour s'assurer que la participation de ces gens-là
soit valable, vraiment efficace et qu'elle conduise vraiment aux objectifs que
vous recherchez, il nous apparaît important de regarder la formation de
ces gens-là, l'intérêt et les antécédents
pour ne pas avoir des gens qui vont aller là soit pour dire oui ou soit
pour dire non, être là sans autres intérêts. C'est
ça qu'on veut faire passer comme message. La démocratisation,
oui, c'est sûr que c'est intéressant, c'est un principe qu'il faut
respecter, mais pas à tous crins, pas au point d'admettre des gens qui
n'auraient pas les qualités requises pour siéger sur de conseils
comme ça. C'est trop important.
La Présidente (Mme Marois): Si j'étais très,
très stricte sur le temps, on aurait terminé pour le gouvernement
et on devrait passer à l'Opposition, mais je pense qu'on pourrait
s'étendre quatre ou cinq minutes passé l'heure. Alors, M. le
ministre, si vous avez une ou deux autres questions.
M. Côté (Charlesbourg): J'en aurais bien d'autres,
mais je me réserve le plaisir de vous rencontrer ultérieurement,
lorsqu'on aura fait des choix chez nous, pour valider un certain nombre de
choses. Je ne le ferai pas avec tout le monde, mais les
bénéficiaires, pour moi, ça m'apparaît
extrêmement important.
Mme Lamquin-Éthier: Je m'excuse de vous interrompre. Au
niveau de la participation, on a parlé des usagers, mais comprenez bien
que notre intérêt, c'est d'abord et avant tout les
bénéficiaires.
M. Côté (Charlesbourg): Les
bénéficiaires.
mme lamquin-éthier: alors, c'est bien important que ces
gens-là conservent leur siège aux conseils d'administration et
que leur participation soit véritablement intéressante.
M. Côté (Charlesbourg): Juste une dernière
question concernant le conseil d'administration composé de neuf membres.
À votre recommandation 2, vous dites: "Quatre membres nommés par
le ministre, sur recommandation de la régie régionale. " Mais ce
que je comprends, c'est que le ministre va sortir son étampe et iI va
l'apposer. C'est un peu ça que vous nous proposez, non? Puisque vous
dites: Le ministre devrait en nommer quatre, mais vous en recommandez quatre.
Donc, ce n'est pas quatre d'une liste que vous recommandez, mais vous
recommandez quatre noms dans des secteurs spécifiques.
Mme Lamquin-Éthier: C'est-à-dire que ces quatre
membres sont nommés par le ministre, sur recommandation de la
régie régionale. Mais nous, pour avoir plus de
sécurité, on pense apporter une nuance et cette nuance-là,
c'est que les quatre membres devraient être nommés, sur
recommandation d'un comité de sélection. Donc, qu'il y ait un
comité de sélection de la régie régionale, lequel
comité serait composé d'un représentant provenant des
organismes communautaires ou des groupes socio-économiques, d'un
représentant des comités de bénéficiaires et d'un
représentant des autres composantes - je ne voudrais pas être
déplaisante là - pour s'assurer, disons, que la personne
nommée sera la plus apte à remplir les fonctions.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, dans ce
cas-là, c'est que finalement, ça pourrait facilement être
nomme par la régie régionale, de toute manière, parce que,
évidemment, le ministre là-dedans n'a aucun jeu. C'est
peut-être juste un palier d'arbitrage additionnel au cas où il se
passe des choses qui ne sont pas correctes.
Mme Lamquin-Éthier: Ouf.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, quand
vous en recommandez quatre et que vous dites au ministre: Tu nommes ces
quatre-là, il sort son étampe et il demande à son haut
fonctionnaire de la mettre dessus, puis c'est réglé.
Mme Lamquin-Éthier: Nous, ce qu'on veut, c'est qu'au
niveau de la régie régionale iI y ait un comité
constitué qui reçoive des curriculum qu'il en fasse l'examen et
qu'il fasse des recommandations. Et c'est ces recommandations-là qui
conduisent le ministre à choisir les personnes les plus aptes pour ne
pas. justement, que ce soit du...
M. Côté (Charlesbourg): o. k., mais le ministre n'a
pas de choix parce que vous expédiez quatre noms et il doit choisir les
quatre.
Mme Lamquin-Éthier: Écoutez, les recommandations
qui seront envoyées à la régie régionale, ça
pourrait être plus de quatre, mais, parmi celles qui seront
recommandées à l'attention du ministre, celui-ci pourra
retenir...
M. Côté (Charlesbourg): O. K. Çava.
La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre. M. le
leader de l'Opposition et critique.
M. Chevrette: Oui, madame Durant quelques
minutes, tout ce que je vais dire ne s'adressera pas à vous.
Hier, je faisais, d'entrée de jeu, certaines remarques. Puis, comme vous
âtes la première, mes remarques s'avèrent tout à
fait justes. C'est au ministre que je vais m'adresser et, après
ça, je reviendrai à vous. Hier, je disais que
précisément l'avant-projet de loi, tel que déposé,
ça constituait un carcan intellectuel auquel on ne pouvait pas
déroger. On ne peut pas demander au Comité des malades de se
prononcer sur d'autre chose que l'avant-projet qu'il a devant lui, alors que
tous les discours, hier, parlaient des vrais problèmes en santé,
que c'était d'autre chose que de la structurite et des conseils
d'administration, qu'il y avait du financement, qu'il y avait de la
régionalisation, qu'il y avait l'individu dans ce
système-là, qu'il y avait du monde qui était en position
de bénéficier de plus de soins de santé que d'autres. Et
vous avez répondu, en ce qui vous concerne, exactement à la
lecture que vous faites du projet de loi, en tant que groupe. Mais on se rend
bien compte que le processus législatif - et je le disais - est
faussé. Normalement, on soumet à la commission parlementaire des
orientations d'un Conseil des ministres. Normalement, on publie un projet, un
livre blanc, un livre bleu, il y a mâme jusqu'à rose. Là,
ça démontre une volonté gouvernementale de s'en aller dans
une direction.
Ce qu'on a présentement, on ne le sait pas, le ministre
lui-même vient de dire: On va vous rencontrer parce qu'il faut faire des
choix. Est-ce qu'il n'y a pas eu des orientations de départ? C'est
ça qui me faisait dire hier que le ministre ne croyait probablement
même pas à l'avant-projet sur lequel on consulte, puisqu'il vient
lui-même d'affirmer qu'il y aura des choix et qu'il vous rencontrera par
la suite. Le processus législatif et le processus le plus
démocratique pour un gouvernement, c'est d'abord de faire
connaître ses orientations, d'écouter le monde et de modifier ses
orientations si le monde n'accepte pas ses orientations.
Quand on a lu le discours du ministre - on l'a entendu hier - et qu'on
regarde le projet de loi qui amène les groupes à se prononcer sur
la structure, eh bien, il ne faut pas être surpris. Chaque groupe va
venir parler de sa place dans ce système-là alors qu'il y a des
enjeux au Québec. La décentralisation ferme, on est-u pour, on
est-u contre? On est-u pour une décentralisation, comme le disait M.
Castonguay hier, vers les établissements ou si on est pour une structure
régionale?
Vous autres, vous optez pour la régie régionale. D'autres
pourraient opter pour une structure au niveau d'un territoire de CLSC, une
décentralisation au niveau d'un CLSC. Un autre pourrait dire: On va
épouser les formes des MRC qui sont une créature d'État.
Un autre pourrait dire: On va opter pour une décentralisation vers les
régions administratives telles qu'elles existent. Voilà au moins
une forme de décentralisa- tion et on adapte les structures
après, mais il faut d'abord savoir s'il y a ou non une volonté
ferme de décentraliser.
Est-ce que c'est une déconcentration qu'on veut plutôt?
À ce moment-là, vous avez probablement raison d'exiger, dans
votre mémoire, que les personnes soient des personnes compétentes
dans le cadre d'une déconcentration. Votre sens de la démocratie
ne prend pas la même connotation si c'est une décentralisation
avec des pouvoirs de décider, parce que, si on met les pouvoirs de
décision en bas, ça suppose tout le processus démocratique
du milieu et ce n'est pas la même connotation de la démocratie.
Donc, ce carcan intellectuel dont je parlais hier, dans lequel on est
placés, on nous le prouve très bien par la présentation de
votre mémoire.
Ceci dit, vous avez quand même débordé sur un point
et j'aurai des questions en fonction, d'après moi, de ce qui aurait
dû être les questions fondamentales qu'on vous pose.
Êtes-vous d'accord avec une décentralisation, oui ou non? SI oui,
de quel type de décentralisation et à quel niveau la
voyez-vous?
Mme Lamquin-Éthier: Le Comité provincial, lorsqu'il
a produit ce mémoire, a volontairement choisi de le produire dans ces
termes-là et en utilisant ça, parce qu'on est porteurs du message
de la base et ce sont les choses que nous avons discutées avec la base.
C'est pour ça qu'on vous dit: Si vous prenez nos recommandations 1 et 2,
ce sera ça; si vous ne les prenez pas, bien, ce sera autre chose. On
essaie d'être pratiques, quand même.
Une décentralisation, ça peut être très
Intéressant, mais il faut voir comment elle va s'exercer. Ça,
c'est évident, au niveau du principe, c'est acquis. Ça va
être peut-être une solution à bien des problèmes
qu'on connaît, mais au niveau des modalités d'exercice, c'est
autre chose.
M. Chevrette: À supposer qu'on aille vers une
décentralisation certaine, est-ce que vous favorisez les régions
administratives ou des unités plus petites de l'étendue d'un
territoire de CLSC, par exemple, ou encore de MRC?
Mme Lamquin-Éthier: II y a certainement des gens qui vont
être plus en mesure que nous de répondre à ces questions en
fonction de l'expertise et de l'expérience qu'ils ont. Nous, ce que nous
pourrions vous faire, c'est un commentaire. Ça pourrait peut-être
être plus axé vers les besoins si c'était en fonction des
régions.
M. Chevrette: Est-ce que vous vous êtes penchés sur
le financement du système de santé au Québec?
Mme Lamquin-Éthier: Oui, on s'était penchés
là-dessus à d'autres moments par le passé.
On avait rencontré la ministre à plusieurs occasions pour
y aller de certaines de nos suggestions pratiques.
M. Chevrette: Est-ce que vous pourriez nous dévoiler les
suggestions pratiques que vous avez faites à la ministre, puisque c'est
une commission parlementaire publique?
Mme Lamquin-Éthier: Ce dont je peux faire état,
c'est que, par exemple, en 1988, on avait rencontré la ministre. On
était plus particulièrement préoccupés par la
question des urgences et c'est bien sûr qu'on avait abordé cette
question-là en utilisant des petits moyens très simples. On avait
proposé, par exemple, que dans un établissement on réserve
un certain pourcentage de soins de longue durée. Dans un centre
d'accueil d'hébergement, par exemple, on pourrait réserver X %
pour les soins de longue durée. L'usager qui n'est plus en mesure
d'être autonome ne quitte pas rétablissement.
L'établissement n'encourt pas nécessairement des ressources
additionnelles; on le monte d'un étage. Il reçoit un budget qui
est beaucoup plus intéressant. La personne est sécurisée,
elle est dans le même établissement, elle ne quitte pas et on lui
donne des soins jusqu'à ce qu'elle puisse, ou que malheureusement, elle
doive quitter l'établissement.
On avait parlé d'utiliser des ressources alternatives, les autres
ressources du réseau qui sont sous-utilisées. On avait
parié de développer des réflexes chez la population. On
avait parlé de prévention, un peu de modifier les
mentalités, les comportements. On avait observé le
Québécois et ça me comprend, moi, parce que j'ai trois
enfants et quand mes enfants sont malades, c'est toujours le soir ou à
Noël, de sorte qu'une des seules ressources que j'ai, c'est l'urgence. On
a le réflexe d'aller à l'urgence.
M. Chevrette: Est-ce que vous retrouvez ces
éléments dans l'avant-projet de loi?
Mme Lamquin-Éthier: C'est-à-dire que ce qu'on
retrouve... Il faudrait que je le regarde plus attentivement. Rapidement, comme
ça... Je ne l'ai pas relu dans l'ensemble hier soir; j'aurais dû
le faire.
M. Chevrette: Vous dites que...
Mme Lamquin-Éthier: II y a certainement des principes qui
sont là, qui vont assurer une meilleure répartition des
ressources, mais vous savez, ce n'est pas tout. Il faut que le système
aille avec le principe. Si on n'éduque pas les gens, si on ne
développe pas chez eux de nouveaux réflexes d'utilisation, si les
polycliniques n'ont pas des horaires compatibles, si les CLSC continuent
toujours à faire du 9 à 5, si entre deux CLSC il y a autant de
disparités, on peut bien discuter longuement des principes, mais,
concrètement, les changements vont être difficiles à
apporter.
M. Chevrette: Donc, à toutes fins pratiques, vous me dites
que vous recherchez, comme bénéficiaires, l'équité
dans les services ou l'égalité des services un peu à
travers le Québec. Est-ce que vous jugez... (11 heures)
mme lamquin-éthier: l'accessibilité, d'abord.
M. Chevrette: L'accessibilité et, au moins, les
mêmes ressources dans tous les milieux pour que ce soit
équitable.
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Chevrette: D'accord. Est-ce que vous seriez d'accord avec un
système privé qui viendrait permettre à ceux qui sont
mieux nantis de se débrouiller un peu plus facilement? Par exemple,
hier, à la sortie de cette commission, l'ex-ministre de la
réforme a dit qu'il voyait très bien qu'il puisse y avoir des
cliniques privées, parce qu'il a le 'loin" pour pouvoir se donner des
services additionnels. Est-ce que vous partagez ce point de vue là,
vous, comme bénéficiaires?
Mme Lamquin-Éthier: C'est une idée qui est
intéressante, qui mérite d'être examinée. Je ne
pense pas que je puisse la repousser d'un coup. Ça pourrait
peut-être ramener la qualité. La compétition, en soi, ce
n'est pas mauvais. L'usager aurait peut-être plus de possibilités.
Ça pourrait être intéressant. Vous savez, aujourd'hui, il y
a un grand magasinage qui s'exerce chez l'usager, mais est-ce que ce magasinage
ne s'exerce pas parce que, justement, il manque quelque chose? On voit un
médecin, on n'est pas satisfait et on sent comme le besoin d'en voir un
autre. S'il y avait des indices de qualité qui étaient plus
forts, plus présents, on couperait peut-être ce
magasinage-là.
M. Chevrette: Est-ce que vous jugez qu'il y aurait un
comité de bénéficiaires dans des cliniques privées
du genre de soins de longue durée?
Mme Lamquin-Éthier: Ça pourrait sûrement
être envisageable. Je ne vois pas pourquoi, dans la mesure où les
gestionnaires veulent avoir le pouls, le bon pouls, savoir comment ça se
passe... Je pense que la meilleure façon d'assurer la qualité,
c'est d'avoir...
M. Chevrette: Est-ce que vous le feriez par statut légal,
comme vous l'exigez dans les centres publics? Parce que, comme comité de
bénéficiaires, vous voulez représenter l'ensemble des
bénéficiaires du Québec?
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Chevrette: À supposer que le gouvernement, a
posteriori, après cette commission, décide qu'il y a des centres
hospitaliers de soins de longue durée privés... Vous exigez que,
dans le public, il y ait des comités de bénéficiaires sur
les conseils d'administration. Les bénéficiaires que vous voulez
représenter à la grandeur du Québec, est-ce que vous
pensez qu'ils ont la même place dans les centres hospitaliers de soins de
longue durée dans le secteur privé?
Mme Lamquin-Éthier: Absolument. De toute façon, la
lettre de la loi, c'est "tout établissement qui exploite un centre
hospitalier, psychiatrique." Enfin, dans la mesure où il y aurait des
soins de longue durée, il nous apparaîtrait essentiel qu'il y ait
des comités de bénéficiaires.
M. Chevrette: Mais vous savez que...
Mme Lamquin-Éthier: Évidemment, ce serait
peut-être plus laissé au bon vouloir de chacun, comme on l'observe
actuellement dans certains établissements où ils n'en veulent
pas, mais, de toute façon, c'est l'une des faiblesses du texte de loi,
à l'heure actuelle. On parte de l'article 118.1, on dit qu'on doit
mettre sur pied... Mais, en pratique, il n'y a absolument aucun
mécanisme qui a été prévu pour obliger qui que ce
soit à mettre un comité de bénéficiaires sur pied.
Et c'est un jeu de balle, on l'observe partout. C'est regrettable. Si chaque
établissement qui offre des soins de longue durée ou des soins de
même nature doit mettre sur pied des comités, qu'il le fasse et
qu'on prévoie des mesures pour qu'il les mette sur pied, autant pour le
privé que pour le public, puisque ce qu'on vise, c'est la qualité
des soins. Et la meilleure façon...
M. Chevrette: À supposer qu'on opte pour le privé,
vous savez qu'il n'y a pas de conseil d'administration?
Mme Lamquin-Éthier: Non.
M. Chevrette: C'est souvent un actionnaire.
Mme Lamquin-Éthier: Oui, oui. On les vit, ces
obstacles-là.
M. Chevrette: Quel est le rôle, à ce
moment-là, que peut jouer la régie sur la compétence de
vos bénéficiaires? Qui représenterait vos
bénéficiaires dans ces centres-là?
Mme Lamquin-Éthier: Le rôle sur la
compétence?
M. Chevrette: Oui, les régies. Vous êtes pour une
régie régionale...
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Chevrette: ...qui recommande des membres pour
représenter vos bénéficiaires.
Mme Lamquin-Éthier: Oui.
M. Chevrette: Vous allez même jusqu'à dire: Bien,
démocratie, pédale douce, s'il vous plaît, parce qu'on veut
avoir du monde compétent.
Mme Lamquin-Éthier: C'est ça.
M. Chevrette: Vous auriez beau en trouver quatre, cinq
compétents, si l'administrateur dans le privé n'en veut pas, de
comité de bénéficiaires, qu'est-ce que vous allez
faire?
Mme Lamquin-Éthier: Bien, c'est la difficulté qu'on
connaît actuellement aussi pour le public. Alors, il faut continuer, il
faut insister, il faut faire comprendre, il faut sensibiliser. Tant et aussi
longtemps que les comités de bénéficiaires seront
perçus comme des agents de griefs ou des gens qui n'ont pas d'apport
véritable à donner - "qu'ossa donne?" comme on dit. Ah! Ils ne
sont pas capables - on n'avancera pas. Qu'on cesse de penser que les
comités de bénéficiaires, ce sont des créatures qui
découlent d'un texte de loi, qui sont là, bidon, et qui ne font
rien de valable. Ces gens-là font des choses valables si on leur donne
l'occasion de le faire. Qu'on leur donne les moyens de le faire et ils vont
faire des choses valables.
M. Chevrette: Vous avez absolument raison sur ce point. J'ai
rencontré personnellement le comité des
bénéficiaires de Louis-H. Lafontaine. Quand on parle
d'incapacité, ceux qui se permettent de parler d'incapacité...
Quand on a jasé une couple d'heures avec les deux groupes, on doute de
la capacité de certains qui jugent les autres. Vous avez raison.
Mme Lamquin-Éthier: Mais les comités de
bénéficiaires à vocation psychiatrique, ce sont des
comités qui ont beaucoup de facteurs intrinsèques qui sont
différents. D'autre part, la population est très grande. Dans ces
comités, s'ils étaient plus, ils pourraient peut-être faire
leur travail plus facilement. Ils ont eu beaucoup de difficultés,
à celui que vous évoquez, d'une part, parce qu'il y a un conflit
de juridictions entre l'ombudsman et le comité de
bénéficiaires.
On pourrait faire avec vous un examen beaucoup plus attentif des
capacités du comité de bénéficiaires, parce qu'il
faut s'autocritiquer. C'est, d'ailleurs, pour ça qu'on va vous proposer
un document, parce qu'on est parfaitement conscients des réalités
qu'on vit au niveau des comités de bénéficiaires. Les gens
vieillissent de plus en plus, ils sont de plus en plus malades, de
moins en moins intéressés à faire partie de
comités de bénéficiaires. Pourquoi, pensez-vous? Il faut
vous poser ces questions-là. Dans la mesure où les gestionnaires
font tout pour ne pas avoir de comités de bénéficiaires,
il faut régler ce problème-là. S'ils en ont un
comité et qu'ils ne l'utilisent pas, il faut aussi régler ce
problème-là. Là, il faut vous demander aussi: Qu'est-ce
qu'on fait avec ces deux systèmes-là et quelle est la meilleure
façon de reconnaître la primauté des droits et l'exercice
pour ces gens-là?
Vous savez, si vous prenez un comité de
bénéficiaires - et Louis-H. fait du lobby, quand même, plus
fréquemment que les autres - il ne faudra pas tirer des conclusions qui
sont applicables à l'ensemble. Chaque comité de
bénéficiaires reflète une réalité qui est la
sienne. II ne faut pas généraliser. Nous, nous regroupons 329
comités de bénéficiaires. On tâte le pouls
régulièrement. On sait où sont les attentes, on sait
où sont les besoins et on sait que c'est bon, des comités de
bénéficiaires. On sait aussi que ça ne fait pas l'affaire
des directions et on sait pourquoi ça ne fait pas leur affaire, parce
que ça retourne le gestionnaire à ses propres capacités.
Il est obligé de se demander si la job qu'il fait est bonne et s'il la
fait bien. C'est pour ça que c'est fatigant.
La Présidente (Mme Marois): Merci M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, vous avez
très peu de temps, une ou deux questions tout au plus.
M. Trudel: Rapidement...
La Présidente (Mme Marois): Merci.
M. Trudel:.. une question parce que je vais séparer mon
temps et il reste deux minutes. Moi aussi, j'aurai quelques remarques à
rajouter, qui ne sont pas directement reliées à la
présentation de votre mémoire, sur ce que le critique en
matière de santé adressait au ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Très clairement, le ministre, dans ses observations à la
suite de la présentation de votre mémoire a donné deux
exemples qui nous font dire qu'on ne sait pas si on étudie le
véritable projet de loi sur l'intention du gouvernement. Sur les
conseils d'administration unifiés, sauf erreur, le ministre a dit: Comme
il semble y avoir une réprobation générale sur ces
mécanismes-là, qu'est-ce que vous en pensez? On sait ce
qu'à peu près tout le monde pense de ça au Québec,
sauf qu'on ne sait pas ce que le ministre, qui présente ce projet de
réforme, en pense, lui.
Deuxièmement, on a l'impression de refaire ce que j'ai dit au
ministre autour du 15 décembre, le coup des sages-femmes, dans le sens
suivant: il indique la volonté du gouvernement, mais, par ailleurs,
procède à une consultation particulière. Il a dit,
tantôt: J'aurai à vous revoir dans un cadre particulier. Ce cadre
particulier, bien sûr qu'il exclut l'Opposition toujours, ça va de
soi; et c'est un mécanisme dont on ne sait pas l'aboutissement terminal,
dans le sens: est ce qu'on reviendra auprès des gens concernés,
des groupes concernés pour savoir véritablement ce que ça
veut dire, ce projet de réforme là?
Une question qui s'adresse à vous maintenant, directement, sur la
protection des droits des bénéficiaires: Est-ce que vous pensez
que le projet de loi devrait indiquer clairement que les
bénéficiaires du système de santé et de services
sociaux du Québec devraient être protégés de
façon législative sous la responsabilité du Protecteur du
citoyen du Québec? Vous y avez fait une allusion tantôt, en
disant: Là où il y a des ombudsmen ou des protecteurs du citoyen,
de façon interne et ce n'est pas dans toutes les institutions au
Québec - ça ne va pas très bien. On sait que la...
Mme Lamquin-Éthier: Non.
M. Trudel:.. Loi sur le Protecteur du citoyen, au Québec,
actuellement, ne donne pas la responsabilité de la protection des droits
des bénéficiaires dans le système de santé et de
services sociaux au Protecteur du citoyen. Compte tenu de ce que vous avez dit,
est-ce que vous seriez d'accord pour que l'on inclue dans le mandat du
Protecteur du citoyen la protection des bénéficiaires et de leurs
droits en toute période, peu importe s'il y a conflit ou pas?
Mme Lamquin-Éthier: Nous avons rencontré le
Protecteur du citoyen et on l'a rencontré justement parce que son actuel
mandat ne lui permet pas d'embrasser notre clientèle et de faire des
choses avec lui. Maintenant, on a regardé si l'éventuelle
extension de son mandat changerait quelque chose. A priori, il n'apparais sait
pas que ça engloberait notre clientèle, mais, en tout cas, on est
en train de sonder encore ces pistes-là avec lui. Ça pourrait
être intéressant, oui. Il faudrait voir, encore là, les
modalités d'exercice. On a déjà abordé le
Protecteur dans cette optique-là.
Si on vous donne le tableau cumulatif des plaintes, c'est pour vous
montrer que le Comité provincial des malades, par ses actions depuis les
dernières années, se dessine de plus en plus comme étant
le protecteur des malades. Des gens se réfèrent à nous
parce qu'on est vraiment là pour les aider et c'est vraiment ce qu'on
fait. Le document sur lequel on travaille et qu'on va remettre aborde ces
questions-là. Qu'est-ce qu'on peut envisager en matière de
protection des droits? Est-ce que ça sera un organisme
indépendant qui découlera du Protecteur du citoyen, qui serait
au-dessous de ses bras ce n'est pas ça
que je veux dire, mais c'est ça que je dis - sous sa juridiction
et qui aurait donc des pouvoirs? Ou est-ce que ça pourrait être un
organisme indépendant qui pourrait dépendre directement, par
hypothèse, de l'Assemblée nationale et qui aurait des pouvoirs
d'intervenir, de faire enquête et qui pourrait, lui, être
doté d'une banque d'ombudsmen qui pourraient, eux, intervenir dans les
établissements? Ça soustrairait l'ombudsman au conflit dans
lequel il se trouve actuellement. Il y a plusieurs façons d'envisager
ça.
Actuellement, le mandat du Protecteur du citoyen n'englobe pas... Telle
que formulée, l'extension de mandat, ça ne l'engloberait pas.
Alors, c'est pour ça que nous, on se demande comment on pourrait arriver
à trouver une formule qui protège vraiment les malades. Et
ça serait bon que ça soit inclus dans un texte de loi mais il
faudrait qu'on vous soumette un document bien étayé à cet
égard-là.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme
Lamquin-Éthier. Je vais maintenant passer la parole au ministre pour
conclure, s'il vous plaît.
M. Côté (Charlesbourg): Uniquement...
La Présidente (Mme Marois): Nous avons terminé,
évidemment, le temps qui était alloué.
M. Côté (Charlesbourg): ...vous remercier et vous
réitérer, que ça fasse ou pas l'affaire de ceux qui sont
en face parce que le ministre sentira le besoin de consulter à nouveau
des gens avant d'en arriver à la réforme finale, c'est encore lui
qui a la responsabilité de ce qu'il déposera à
l'Assemblée nationale. Et, dans cet esprit-là, nous nous
reverrons, compte tenu de l'importance que vous avez comme représentants
des bénéficiaires. Et si l'objectif de tout le monde dans cet
exercice est le bénéficiaire, il me semble pleinement logique de
revoir les représentants du comité des
bénéficiaires pour voir si, effectivement, ce que nous ferons
comme mesure finale - parce que c'est un avant-projet de loi, ce n'est pas un
projet de loi... Si c'était un projet de loi, on serait dans un autre
forum. Comme on est dans un avant-projet de loi, c'est que, forcément,
il y a des choses à modifier et, s'il n'y avait rien à modifier,
on ne serait pas ici. Donc, il y a des choses à modifier. C'est comme
ça que j'ai pris le principe des différentes interventions et
soyez sûre qu'on vous reverra avec le plus grand des plaisirs.
M. Chevrette: Je voudrais aussi vous remercier, madame, et vous
rappeler une phrase que je disais hier: Le ministre apportera des modifications
substantielles à l'avant-projet de loi et j'envisage mal comment il
pourrait poursuivre le processus législatif sans tenir de nouvelles
audiences particulières.
M. Côté (Charlesbourg): Oubliez ça.
La Présidente (Mme Marois): Je vous remercie, Mme
Lamquin-Éthier d'être venue témoigner devant les membres de
la commission. J'inviterais maintenant la Fédération des ACEF du
Québec à prendre place à la table, s'il vous
plaît.
Je voudrais vous souhaiter la bienvenue à nos audiences, à
notre consultation. Évidemment, comme tout le monde a des obligations et
que les travaux de la commission doivent se terminer à 13 heures, on va
essayer de vous entendre et de poser les questions que nous avons à
poser à l'intérieur d'une enveloppe de 50 minutes. Et on
répartira ainsi le temps avec le gouvernement et l'Opposition. Essayez
de ne pas dépasser les 20 minutes et, si vous pouvez môme faire
votre présentation en une quinzaine de minutes, ça faciliterait
un petit peu les choses. Je vous inviterais à présenter aux
membres de la commission les gens qui vous accompagnent.
Fédération des ACEF du
Québec
M. Nolet (Donald): Bonjour à tous les membres de la
commission. Mon nom est Donald Nolet. Je vais vous présenter les autres
membres de notre commission qui s'appelle la Commission sur les dossiers
sociaux de ia Fédération des ACEF du Québec, et vous
présenter le déroulement de notre présentation. Il y aura
d'abord Henri Goulet qui nous introduira le sujet. Ensuite, Paule pariera de la
reconnaissance des groupes populaires, donc, en réaction avec
l'avant-projet de loi, et Philippe Dorais va nous parler de l'autonomie des
groupes populaires et je terminerai avec les recommandations que nous avons
à proposer. Henri. (11 h 15)
M. Goulet (Henri): Alors, brièvement, en guise
d'introduction, on tenait à rappeler quand même que la
réforme du dossier de la santé et des services sociaux au
Québec a mobilisé des énergies assez incroyables depuis
quasiment cinq ans maintenant. On mentionnait dans notre introduction de
mémoire: Plus de 6000 personnes rencontrées, 800
représentations écrites, plus de 20 000 pages d'études et
on nous annonçait, hier, au-delà de 243 mémoires à
entendre ici. Ça veut dire que le secteur de la santé et des
services sociaux intéresse énormément de monde et
ça touche énormément de citoyens et citoyennes au
Québec.
La Fédération des ACEF du Québec est un organisme
qui prétend être un intervenant social au Québec depuis
plus de 20 ans déjà. En passant, entre parenthèses, la
Fédération des ACEF n'a jamais réussi à percer les
critères de subventions du ministère des affaires sociales et du
ministère de la Santé et des Services sociaux pour être
subventionnée pour le travail social qu'elle fait depuis plus de 25 ans
au Québec. On
y reviendra de toute façon.
Dans notre présentation et en guise d'introduction, ce qu'on
voulait dire, c'est surtout... On ne pouvait pas passer sous silence le travail
qui a été fait au niveau du document "Orientations"
présenté par Mme Thérèse Lavole-Roux. Je voudrais,
premièrement, souligner très rapidement qu'il y a deux points
là-dedans qu'on voulait soulever, c'était que, enfin, à la
suite des rencontres qu'on avait eues avec la ministre lors de sa
tournée provinciale, on avait beaucoup discuté de cette
question-là avec elle, c'était que les problèmes
socio-sanitaires y sont enfin reliés à la situation
économique des familles, c'est-à-dire très
grossièrement, c'est évident que les familles à faible
revenu, les plus pauvres de notre société sont toujours plus
malades, vivent toujours dans des environnements plus pollués, plus
difficiles etc., et donc requièrent plus de services. Ça, on
trouvait ça très important que dans le document "Orientations" on
ait campé cette réalité-là de façon
très nette, finalement, à la suite de l'enquête de
Santé Québec qui venait tout juste de sortir.
La deuxième réalité qu'on voulait souligner de
façon très importante, c'est qu'enfin, dans un document
gouvernemental, on faisait une présentation fort intéressante,
une présentation de ce que c'est qu'un organisme communautaire au
Québec, un organisme communautaire travaillant, offrant des services en
santé et en service social. On a trouvé exactement une
façon de présenter, une façon de définir en
démarcation par rapport à des institutions du public ou du
réseau public qu'est-ce que c'est que la spécificité d'un
organisme communautaire. Dans quelques pages ramassées très bien,
on a réussi aussi à dégonfler l'espèce de dualisme
qu'on a toujours traîné partout dans beaucoup de ministères
entre des groupes de services et des groupes de défense de droits. Ce
n'est plus vrai que les groupes communautaires ont fait de la défense
des droits d'un côté et qu'on ne fait jamais de service.
Habituellement, c'est toujours les deux mêlés et l'un ne va jamais
sans l'autre. Donc, on ne peut pas être subventionné uniquement ou
reconnu uniquement pour des offres de service qu'on fait aux citoyens et
citoyennes ou pour des droits de défense. C'étaient les deux
points qu'on voulait mentionner et qu'on trouvait très importants dans
le document d'introduction.
Trois faiblesses qu'on trouvait importantes, c'était justement la
régionalisation, c'est-à-dire que, pour nous, ça nous
apparaissait dans ce document comme étant une espèce de
déconcentration administrative, je n'insisterai pas beaucoup
là-dessus. Donc, une situation de crise au ministère, je pense,
qui est assez évidente et que tout le monde reconnaît et qu'on
multipliait finalement ou qu'on voudrait multiplier par douze cette situation
de crise. Ça ressemble un peu étrangement à douze
sociétés distinctes qui originaient de Vancouver, il n'y a pas
longtemps.
L'autre point, c'est le silence sur les coûts des soins de
santé. Donc, encore une fols dans le document d'étude, le
problème majeur qui semble circuler partout depuis cinq ans, c'est la
hausse importante des coûts du réseau au Québec et,
bizarrement, dans ce document-là, on ne parle jamais finalement des
problèmes de coûts ou d'où origlnent finalement les
coûts dans le réseau public. Nous mentionnions, entre autres, que,
finalement, toute l'analyse de la rétribution à l'acte de la part
des médecins, c'était un problème majeur, c'était
un système qui est très onéreux, et on aurait beaucoup
souhaité que ce système-là soit révisé.
Malgré ces quelques critiques, mais surtout à cause des
perspectives intéressantes qu'on retrouvait dans ce document là
pour l'avenir des organismes communautaires au Québec, nous attendions
avec grande impatience l'avant-projet de loi. Je passe maintenant la parole
à ma collègue, Paule, pour aborder justement l'avant-projet de
loi.
Mme Drouin (Paule): Ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait une
analyse seulement des articles qui concernaient les organismes communautaires.
On retrouve ça à la page 8 de notre document. Mon
collègue, tantôt, parlait de la définition des organismes
communautaires qu'on avait très appréciée dans le document
"Orientations" ce qu'on ne retrouve pas dans lavant-projet de loi.
L'avant-projet de loi définit un organisme communautaire comme "un
organisme sans but lucratif, constitué en vertu de la troisième
partie de la Loi sur les compagnies, qui oeuvre dans le domaine de la
santé et des services sociaux et dont le conseil d'administration est
composé majoritairement d'usagers de l'organisme ou de membres de la
communauté", et ça s'arrête là. Et ça, c'est
contrairement aux divers établissements, les centres hospitaliers, les
CLSC ou les CSS qui, eux, sont très définis. Nous, on trouve que
la définition des organismes communautaires est limitative et qu'elle
passe sous silence la spécificité de nos objectifs, des services
qu'on offre et de notre fonctionnement et, finalement, de notre mission. Aussi,
elle évite de préciser qui on est et on pense aussi qu'une bonne
façon de ne pas reconnaître quelqu'un, c'est d'éviter de le
définir, justement. Et aussi on croit que de mentionner l'existence des
organismes communautaires, c'est différent du fait de reconnaître
le rôle qu'ils jouent. Je passe la parole à Philippe pour
continuer.
M. Dorais (Philippe): En ce qui concerne la question de
l'intégration des organismes communautaires dans la nouvelle structure,
il y a deux points majeurs que j'aimerais souligner. Tout d'abord, dans les
articles 27, 28 et 29 de l'avant-projet de loi, les organismes communautaires
apparaissent comme des palliatifs à l'insuffisance du système. On
est là, un petit peu
placés en bout de ligne, au cas où le système
serait incapable de répondre à la demande ou serait incapable
d'offrir les services nécessaires aux bénéficiaires. C'est
clairement établi dans l'article.
Si on continue un peu plus loin, l'article 157 accentue un petit peu ce
phénomène-là dans la mesure où cet
article-là semble vouloir concrétiser le rôle minimal des
organismes communautaires dans le sens où on leur offre d'une certaine
façon un rôle de sous-traitants dans le système. Or,
à notre avis, ça limite drôlement le rôle, en tout
cas, des organismes communautaires dans cette structure.
L'autre point que j'aimerais souligner, c'est la question de
l'autonomie. L'article 244 parle du rôle de la régie
régionale par rapport à la définition des tâches,
à la répartition des tâches entre les établissements
et les organismes, sauf que cet article-là ne reconnaît pas du
tout l'autonomie des organismes. Il n'y a rien là-dedans qui mentionne
ça. En fait, si on va plus loin, on voit que non seulement on ne
reconnaît pas vraiment l'autonomie, mais en plus on la menace, cette
autonomie, à l'article 243, puisqu'il est dit textuellement: "La
régie régionale peut, pour l'exercice de ses fonctions,
requérir des établissements et des organismes communautaires de
santé et de services sociaux de sa région, les renseignements
nécessaires sur les clientèles..." Or, je vous rappelle une
chose, c'est que plusieurs organismes communautaires dont les ACEF donnent des
services concrets aux bénéficiaires, aux usagers et on traite ces
dossiers-là de façon strictement confidentielle. Nous, c'est
toujours ce qu'on dit quand les gens viennent à nos bureaux, que nos
dossiers sont confidentiels. Personne n'a accès à ça.
Alors, pour nous, ce serait un précédent dangereux que de vouloir
obliger un tant soit peu les organismes communautaires à fournir des
renseignements personnels sur la clientèle qui bénéficie
de nos services.
On pourrait aussi mentionner l'article 240 de l'avant-projet de loi qui
dit que la régie doit, en collaboration avec les organismes
communautaires, entre autres, prévoir des programmes. Or, je ne sais
pas, il y a comme une possibilité, encore là,
d'empiétement sur l'autonomie de gestion des organismes communautaires,
je crois.
En conclusion, par rapport à ce que je viens de dire, je dirais
que les organismes communautaires, vus dans cette perspective-là, sont
comme poussés vers une certaine forme de marginalisation qui est
déjà un petit peu commencée. On ne semble pas
reconnaître du tout le rôle important des organismes communautaires
dans la mesure où ils apportent des solutions alternatives originales
et, surtout, peu coûteuses. Ça, je pense que c'est un
élément important, l'argent. Encore là, on ne
reconnaît pas cet aspect dans l'avant-projet de loi. Je vais passer la
parole à Donald.
M. Nolet: Au niveau des recommandations, la première qu'on
formule, c'est un moratoire sur les propositions de l'avant-projet de loi, en
tout cas celles qui concernent les organismes communautaires. Après
toutes les réserves qu'on a mentionnées avant, on n'en veut tout
simplement pas. Un moratoire de trois ans où il y aurait formation -
c'est une autre recommandation -d'un groupe de travail conjoint MSSS et
organismes communautaires, avec un mandat qui est détaillé dans
le document qui vise, évidemment, à redéfinir correctement
le rôle et la place des organismes communautaires. En attendant aussi,
pendant le moratoire, on suggère que le Service de soutien aux
organismes communautaires qu'on appelle le SSOC continue à distribuer
l'argent aux organismes communautaires.
Une autre recommandation pour répondre aux besoins criants des
organismes communautaires, une hausse immédiate du budget du SSOC
à 1 % du budget du MSSS. Finalement, on insiste sur la révision
de ia représentation des organismes communautaires au niveau des
régies régionales.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Alors, je vous
remercie, M. Nolet. Je vais maintenant passer la parole au ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Si j'ai bien saisi votre présentation et la lecture
du mémoire, vous retrouvez une distorsion entre les Orientations et
l'avant-projet de loi. Si on reprend les Orientations, à la page 82,
lorsqu'on parie de la reconnaissance des organismes communautaires, quatre
éléments sont définis. On dit: Premièrement,
définissent librement leur orientation, leur politique et leur approche.
Deuxièmement, réalisent soit des activités
bénévoles, soit des activités partiellement
rémunérées, mais sans but lucratif, dans le domaine de la
santé et des services sociaux. Troisièmement, sont
incorporés en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies et,
quatrièmement, ont un conseil d'administration composé
majoritairement d'usagers ou de membres de leur communauté.
Je comprends que ces quatre éléments sont acceptés
par les ACEF. Vous dites: On ne les retrouve pas nécessairement à
l'intérieur de l'avant-projet de loi et c'est ce qui crée de la
distorsion entre l'avant-projet de loi lui-même, donc la volonté
politique exprimée dans un avant-projet de loi, par rapport aux
orientations à l'intérieur du document. Effectivement, le premier
et le quatrième ne semblent pas à tout le moins très
clairement reproduits dans (es Intentions législatives parce que ce
n'est pas toujours facile de le faire non plus. Est-ce que j'ai bien saisi le
sens de votre présentation? S'il
y avait, à l'intérieur du projet de loi. très
clairement défini, ce qu'on retrouve à la page 82 à
l'intérieur des Orientations, ça éliminerait vos
inquiétudes ou du moins une partie de vos inquiétudes. Et
dites-moi quelle partie.
M. Goulet: Je peux essayer de compléter par rapport
à la question de M. le ministre. Effectivement, dans le document
"Orientations", on sentait une volonté, vraiment, un peu dans la
môme dimension ou de la même manière qu'on a pris le temps
de redéfinir ou de repréciser les tâches, les rôles
des centres hospitaliers et des centres d'accueil, de l'ensemble, finalement,
des établissements du réseau. On avait aussi pris le temps de
définir un peu le cadre de pratique des organismes communautaires que
nous venons représenter ici aujourd'hui. C'est l'objectif de notre
présentation ici. lorsqu'on a reçu l'avant-projet de loi et comme
on l'a souligné tantôt, c'est effectivement une définition
un peu simpliste qu'on y a retrouvée. je comprends aussi que, pour un
projet de loi, c'est probablement plus compliqué de mettre une
philosophie dans un projet de loi, mais je pense qu'il faut trouver le moyen de
le faire. mais la distorsion vient surtout du fait qu'étant
déjà réduit en termes de définition,
c'est-à-dire qu'un organisme communautaire sera dorénavant une
association incorporée sous la troisième partie de la lof sur les
compagnies, évidemment, ça ouvre la porte à peu
près à n'importe quoi et à tout le monde finalement. c'est
un point que je trouvais important dans le sens que tout ce qui suit par
après dans la restructuration ou dans la réorganisation du
ministère, évidemment, les groupes qui assument
déjà des tâches sociales ou des services sociaux
très importants, actuellement, à l'ensemble de la population, ces
groupes-là vont arriver en disqualification par rapport à
l'organisation ou la réforme majeure qui s'en vient. lorsqu'on pense
régionalisation, quelle place les groupes communautaires ou lesquels
groupes communautaires seront reconnus dans une structure
décentralisée? (11 h 30)
L'autre problème qu'on constate aussi, c'est l'augmentation
effarante des groupes qu'on reconnaît comme bénévoles et
communautaires au Québec. Je n'ai pas les derniers chiffres pour
l'année en cours, sauf que ce qu'on constate, actuellement, et je pense
que c'est partout dans toutes les régions, c'est que le réseau
public se dote d'organismes communautaires, dits communautaires, pour faire le
travail du réseau et ces groupes-là vont chercher les enveloppes
de subventions qui étaient, autrefois, octroyées aux groupes
communautaires. C'est ce qui se passe.
De la même façon qu'on dénonçait en fin de
semaine le fait que le premier ministre lui-même et tous les
députés du Québec, finalement, vont faire un effort pour
aller soutenir une campagne de levée de fonds pour le centre hospitalier
ou le CLSC local. Les groupes communautaires, on n'est pas compétitifs
à ce niveau-là. C'est impossible et on n'a pas de place dans
cette structure-là pour nous permettre de continuer, au moins de garder
les petits acquis que nous avions. Il faut comparer des budgets aussi. Le
budget du Service de soutien aux organismes communautaires, il est autour de 39
000 000 $, je pense, pour au-delà de 1500 groupes, ou tout près.
Et le budget global du gouvernement du Québec, pour les affaires
sociales, ou pour la préoccupation sociale, ça peut se chiffer
au-delà de 12 000 000 000 $. Ça veut dire qu'il n'y en a pas de
proportion là.
La reconnaissance, elle n'a jamais existé et on ne trouve pas que
dans l'avant-projet de loi, actuellement, cette reconnaissance-là est
confirmée ou qu'il y a une volonté de l'accentuer.
M. Côté (Charlesbourg): Vous posez une question qui
est très bonne, non pas seulement une question, mais on parle d'un
problème qui est réel. Le budget pour l'année en cours est
d'au-delà de 47 000 000 $ et la reconnaissance était de quelque
1500 organismes, 1600 organismes. Cela a connu un phénomène tout
à fait escalatolre sur le plan de la reconnaissance du nombre
d'organismes. Il faut dire qu'il y a l'habileté aussi du milieu à
en créer. Et il y a eu cette habileté là de créer
des groupes. Moi, je veux me créer une job. Je vais créer un
groupe. Il y a tel service qui n'est pas bien rendu. Je vais le faire
communautaire. Mais, communautaire, bien souvent ça veut dire aussi un
permanent qui est là, pas très très grassement
payé. Ce n'est pas vrai qu'avec 15 000 $ ou 20 000 $ de subvention le
gars va vivre ou la personne va vivre. D'où... Je vais en arriver
à ma question, parce qu'en lisant le mémoire... Vous me direz si
je me suis trompé. Je ne suis pas de ceux qui... Je crois aux valeurs du
communautaire, il faut que le communautaire continue d'exister, il faut qu'il
soit supporté, mais pas tous azimuts, n'importe comment et n'Importe
quand. Ce que j'ai pu déceler de la lecture, c'est à peu
près ce qui suit. Si je me trompe, j'imagine que, comme vous nous avez
parlé tantôt du lac Meech, vous ne vous gênerez pas pour
nous le dire non plus. Alors, à chacun sa distinction. Ce que j'ai
compris, et ce que je tire comme conclusion, c'est. Reconnaissez-nous,
donnez-nous de l'argent et foutez-nous la paix sur le plan de l'administration.
Est-ce que c'est ça que vous voulez? Si c'est ça, dites-nous le.
Si ce n'est pas ça, dites-moi le aussi.
M. Goulet: Non, c'est très mal connaître
l'administration des programmes de subventions.
M. Côté (Charlesbourg): Je la connais très
bien, ne vous inquiétez pas. Je la connais très bien.
M. Goulet: Non, mais c'est dans le sens que ce n'est pas vrai.
C'est vrai que les groupes communautaires, depuis 20 ans déjà,
tout ce qu'on est condamné à faire c'est de venir quêter,
finalement, des sommes existantes. Nous, ce qu'on vient dire actuellement,
surtout parce que ce problème-là devient un problème
majeur dans l'ensemble des régions, c'est le fait que le réseau
public se dote d'organismes communautaires et vient pour subventionner,
finalement, les services que lui-même devrait rendre, vient chercher les
enveloppes qui étaient octroyées aux organismes communautaires
auparavant. Lorsqu'on passe, en 1987, de 900 organismes subventionnés au
Service de soutien aux organismes communautaires à 1600 en trois ans, il
y a un phénomène qui se produit, évidemment. Les sommes
qui sont accordées au communautaire n'ont jamais été
accordées à leur juste valeur, c'est-à-dire qu'on n'a
jamais reconnu officiellement l'ensemble des services sociaux offerts par le
communautaire de sorte qu'il y a, effectivement, une disproportion qu'il
faudrait réduire. Sauf que cet argent, dans le communautaire, ce n'est
pas vrai qu'ils sont donnés dans le sens de "foutez-nous la paix",
c'est-à-dire que l'encadrement des programmes, il est très
sévère, il est très suivi, il est bien fait, à ma
connaissance, pour le nombre de rapports qu'on nous demande, en tout cas.
M. Côté (Charlesbourg): Je veux juste qu'on se
comprenne. Je n'ai pas dit que ce n'était pas bien fait. Quant à
moi, si on donne de l'argent, surtout pour des ressources qu'on veut
complémentaires ou supplétives, on va devoir donner des
orientations. Et si j'ai bien entendu la fin, vous avez dit: C'est quand
même bien fait. Alors, au moins, on partage cet avis. Ça prend
donc un certain encadrement de façon à ce qu'on ne se tire pas
dans le pied non plus avec notre argent. À partir de ça, parce
qu'il y a des organismes communautaires qui reçoivent des montants assez
substantiels, on est rendu avec deux catégories d'organismes
communautaires, si j'ai bien compris en regardant la chose, c'est qu'il y a des
gens qui reçoivent des montants substantiels - quand on parle de 100 000
$, 150 000 $, 200 000 $, 250 000 $, ça commence à être
substantiel comme argent - puis il y en a d'autres qui reçoivent 3000 $,
4000 $, 5000 $. Alors, ce qu'il faut, c'est faire une analyse de la situation
telle qu'elle est et de ne pas mettre sur le même pied les 3000 $, les
4000 $ et les 5000 $ et ceux qui reçoivent 200 000 $, 250 000 $ ou 150
000 $. Ce que vous trouvez, c'est qu'il y a peut-être un peu trop
d'encadrement, si j'ai bien compris.
M. Goulet: Non.
M. Côté (Charlesbourg): Non?
M. Goulet: On n'y a même pas accès, nous, à
ces programmes de toute façon.
M. Côté (Charlesbourg): Non, par contre vous avez
accès à d'autres à ce que j'ai compris: éducation,
protection du consommateur, me dit-on. Un excès de
générosité de celui qui m'a précédé,
qui a été le dernier ministre de la Santé et des Services
sociaux, M. Chevrette, en 1985. Mais de manière...
Une voix: Je ne m'en souviens pas.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, 50 000 $.
Une voix: Qu'est-ce qu'il dit? Il a fait un excès?
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, c'est
vrai que vous n'êtes pas reconnus chez nous. Vous avez revendiqué
pendant plusieurs années de l'être. C'est vrai que vous ne
l'êtes pas, pour différentes raisons que vous connaissez. Il
s'agira de voir ce qui pourrait être fait dans l'avenir. Mais une chose
est certaine, c'est qu'il y a des sommes plus substantielles. Les programmes
voulaient répondre, et ça c'est évolutif. Il s'agit de
regarder s'il n'y a pas des choses qu'on peut faire sur le plan de
l'amélioration, bien sûr, compte tenu de la vocation même du
ministère.
Dans le discours d'hier, ce que j'ai dit c'est qu'on met beaucoup
d'efforts sur le curatif. Il faut peut-être en mettre encore davantage
maintenant sur le préventif. Peut-être qu'on va finir par se
rejoindre à un moment donné, si on réussit à faire
le virage qu'on souhaite faire mais, évidemment, à ce que j'ai
compris, vous êtes davantage dans le préventif. C'est à
cette partie-là que vous vous associez.
Je veux revenir aux régies régionales. Vous avez un
constat très dur sur les régies régionales. Quelles sont
les améliorations que nous pourrions apporter aux douze - moi, je vous
dirais peut-être davantage, puisqu'il y a seize régions au
Québec - aux seize sociétés distinctes? Qu'est-ce qu'on
doit leur donner de distinctrf pour que ce ne soit pas une
déconcentration, mais qu'on donne au niveau régional - parce que
je suis un régional iste et on ne me changera pas demain matin - qu'on
donne au palier régional suffisamment de moyens pour être capable,
effectivement, de ne pas transférer uniquement un problème, mais
une partie des solutions aussi par rapport à l'avant-projet de loi?
mme drouin: ce que je pourrais peut-être vous dire
là-dessus, c'est que nous on s'est penchés davantage, à
propos des régies régionales, sur la composition des
régies régionales et la place des organismes communautaires au
niveau des régies régionales et dans les collèges
électoraux. ce qu'on a remarqué, c'est que les proportions
diminuent énormément entre les deux
paliers de la pyramide, si on peut dire, puisque dans le collège
régional - ça, c'est à l'article 278 - les organismes
communautaires comptent pour 25 % de représentants, puis, au niveau des
régies régionales, Ils comptent pour 13 %.
Aussi, ce qu'on remarque beaucoup, c'est que les régies
régionales, ce sont elles qui doivent désigner les organismes
communautaires qui seront aptes à siéger au collège
régional et c'est ie collège régional qui, lui, doit
élire les gens à la régie régionale. Seulement, en
ce qui concerne les organismes communautaires, c'est que nous on s'est
demandé c'était quoi notre place exactement là-dedans, si
ce seront les établissements qui devront décider quels organismes
communautaires seront aptes ou non à faire partie des régies, et
si on doit, finalement, seulement prendre le train en route.
M. Côté (Charlesbourg): Mais j'avais perçu
plus que ça dans votre intervention, sur le plan de la régie
régionale, parce que c'était quand même assez dur. On
crée la régie régionale, mais on crée douze
problèmes. On en a un au central, avec le ministère. Là,
on va créer douze problèmes différents au niveau des
régies. Mais ce que je comprends, là, c'est une question de
partage du conseil d'administration quant à la
représentativité. Il y aurait moins de problèmes si vous
étiez plus représentés, parce que c'est là-dessus
que ça porte.
Deuxièmement, évidemment, si vous êtes davantage
représentés, vous avez davantage voix au chapitre quant
à... Ce que j'avais davantage compris, tantôt, de l'intervention,
c'était: Bien sûr, si vous transférez aux régies
régionales, des problèmes, transférez-leur aussi des
solutions et des pouvoirs de décider ou d'arbitrer. La volonté du
document, c'était de dire. Oui, effectivement, les régions,
normalement, connaissent beaucoup mieux leur situation et sont davantage en
situation de décider elles-mêmes ce qu'elles veulent choisir de
manière prioritaire, en termes de développement ou en termes de
services qu'elles veulent offrir à leur population. J'avais compris,
tantôt, que vous interpelliez à la fols ce qu'on
transférait et la composition. Mais, de ce que j'entends de madame,
c'est peut-être davantage la représentativité du
communautaire, tant au conseil d'administration qu'au collège
électoral, que vous questionnez.
M. Goulet: Par rapport à cette question-là, il y
avait une position de base, finalement, ou une position de principe qui faisait
en sorte que notre analyse ne pouvait nous amener à dire que nous sommes
contre une décentralisation politique. Pour nous, c'est très
important que, de plus en plus, les services, les ministères soient
décentralisés. Pour nous, c'est une position de principe. Dans la
formule, dans la structure actuelle ou dans la façon dont c'est
amené actuellement, on ne pense pas que ça va régler les
problèmes. Sauf qu'on ie dit tout candidement parce qu'il est clair que,
nous, on ne représente pas les centres hospitaliers, finalement, les
"majors" qui sont touchés là-dedans. Ça va? On n'a pas
beaucoup de choses à dire. On regarde le train passer. On regardait le
train passer...
M. Côté (Charlesbourg): Via.
M. Goulet: ...pour dire que, finalement, là-dedans, nous,
on n'a pas grand-chose à dire. Et ce sur quoi on a quelque chose
à dire, finalement, c'est qu'on sent très bien qu'on va se faire
passer par-dessus le corps par le Goliath de la santé dans cette
restructuration-là, ça nous apparaît clair. Mais, dans la
façon de régler le problème qui nous et qui vous concerne,
je pense qu'on n'a pas beaucoup de pouvoir de frappe là-dedans,
d'organisation ou de proposition, finalement.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends,
pour...
M. Goulet: On est un peu en dehors de la carte.
M. Côté (Charlesbourg): ...synthétiser, c'est
que vous êtes pour une décentralisation politique...
M. Goulet: Oui
M. Côté (Charlesbourg): ...donc, du pouvoir
décisionnel.
M. Goulet: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Votre crainte est dans le
sens que la santé vous passe sur le corps.
M. Goulet: C'est-à-dire qu'il doit y avoir des principes
rattachés à une décentralisation; pour nous, ça
nous apparaissait clair, mais peut-être pas dans le document, comme tel.
Il doit y avoir des principes de base qu'on doit camper avant d'entreprendre
une décentralisation. Nulle part, ce n'est dit, ces principes-là.
C'est-à-dire que, dans le document "Orientations*, il y avait des
principes. On ne les retrouve pas dans l'avant-projet de loi, de sorte qu'on a
affaire beaucoup plus à une structure, à une réforme de
plomberie, d'administration. Et nous, à ce nlveau-là, on n'a
vraiment pas grand-chose à dire, sauf pour le bout qui nous concerne.
Arrêtez la machine, on ne veut pas que ça se passe,
c'est-à-dire la régionalisation des enveloppes du SSOC, parce
qu'on va se les faire avaler.
M. Côté (Charlesbourg): Je sais qu'il ne reste
pas...
La Présidente (Mme Marois): II vous reste encore une
minute. (11 h 45)
M. Côté (Charlesbourg): Je changerais
peut-être de sujet. Vous avez abordé le problème de la
hausse Importante des coûts auxquels le système est
confronté. Vous avez identifié un problème, un des
problèmes, ou la solution, le dispensateur de services. Alors, on a
parlé de médecins, donc à l'acte. Vous évoquez le
fait que, si c'était le salariat, on aurait peut-être - en tout
cas, j'étire peut-être un peu votre interprétation - moins
de problèmes. Il reste que, dans le système, II y a des abus.
Sans atteindre la gratuité, est-ce que vous croyez, au-delà de la
dispensation des services... Parce que lorsqu'on compare ce que les
médecins gagnent au Québec par rapport à ce que les
médecins gagnent en Ontario, la démonstration n'est pas dure
à faire, il y a un écart de 40 % entre les médecins du
Québec et de l'Ontario, sur le plan des revenus. C'est très
très important à ce niveau-là. Ce n'est pas la seule...
Est-ce qu'on est dans une situation où il n'y a pas des abus, dans
certains cas, de consommation de la part de la clientèle aussi? Parce
qu'on peut s'attaquer aux dispensateurs et, effectivement, II y a des
problèmes là, mais on peut s'attaquer... Pour qu'il y ait
consommation, il faut qu'il y ait un consommateur aussi. Est-ce qu'il n'y a
pas, de ce côté-là, des abus? Quelles seraient les
solutions que vous pourriez nous proposer pour éviter des abus de
consommation?
La Présidente (Mme Marois): M. Goulet... M. Goulet:
Oui.
La Présidente (Mme Marois): ...ou M. Nolet, peu
importe.
M. Goulet: Évidemment, sur la question des coûts, on
a tenu, nous, à souligner l'aspect important dans l'ensemble du budget,
entre autres le budget de la Régie de l'assurance-maladie du
Québec. Je pense que ça ne doit pas être loin des 2 000 000
000 $.
M. Côté (Charlesbourg): 2 400 000 000 $.
M. Goulet: 2 400 000 000 $?
M. Côté (Charlesbourg): 2 400 000 000 $.
M. Goulet: Alors, c'est assez impressionnant, comparativement
à d'autres types de personnes qui aussi travaillent très dur pour
assurer les services de santé et les services sociaux au Québec,
les organismes communautaires y étant aussi, évidemment. Comment
fait-on pour arrêter la machine, finalement? C'est un problème
qu'il faudrait discuter. C'est un problème qu'il faudrait mettre sur la
table. Il faudrait, d'abord, commencer à en discuter. Le
problème, c'est que depuis le début des études entreprises
par la commission Rochon, publiquement, cette question, à ma
connaissance, n'a pas été beaucoup abordée et je pense
que, clairement posée... On a entendu M. Castonguay, hier, en faire
mention directement, mais la question du mode de rémunération des
médecins principalement, parce que ça touche 80 % du budget de la
Régie, il faut commencer à mettre ça sur la table et voir
s'il n'y a pas un gaspillage éhonté de types de services qui sont
offerts et, en même temps, voir comment ce sont les autres secteurs de la
société qui, finalement, assument les frais de ça, nous,
les premiers. Ça coûte cher, les médecins, donc on ne peut
pas donner plus d'argent aux autres groupes. C'est évident.
Je pense que tout ce qu'on peut dire dans le moment, la question... On
sait que la rémunération à l'acte, tout le monde le
reconnaît internationalement, c'est peut-être la pire
méthode qu'on pouvait choisir. D'autres méthodes ne sont pas,
évidemment, une panacée non plus parce qu'on sait, par exemple,
qu'en France, actuellement, les médecins sont en grève parce
qu'ils sont salariés. Le problème n'est pas simple.
M. Côté (Charlesbourg): Je me permettrais une
question additionnelle à ma question principale parce que vous
êtes habile, vous n'avez pas répondu à ma question.
Étant donné la nature même des gens que vous
représentez... Il y a les médecins, je vous ai dit que oui,
effectivement, il y a des problèmes là. Mais un médecin ne
donne pas des soins à quelqu'un qui n'est pas là. Il y a donc
forcément des gens qui consomment aussi. Est-ce que, dans ces
cas-là, votre niveau d'appréciation ne fait pas ressortir aussi
un des problèmes, qu'il y a des consommateurs et qu'il y aurait, de ce
côté-là aussi, certains abus dans la consommation des actes
médicaux, pas de ceux qui dispensent - parce que j'ai toujours dit qu'il
y avait des abus de ceux qui dispensaient et des abus de ceux qui consomment
aussi... Est-ce qu'il n'y a pas aussi, de ce côté-là,
certaines lacunes?
M. Nolet: Oui. Je pense qu'on pourrait facilement admettre que,
du côté des consommateurs de services, de médicaments et de
tout, il y a certaines évidences d'abus. Nous, évidemment, on
aime mieux souligner la responsabilité qui vient des dispensateurs de
services, dans le cas des médecins et c'est pour ça...
M. Côté (Charlesbourg): Alors, merci.
M. Nolet: ...qu'on parle de coûts des médecins et de
salariat des médecins.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Alors, M. le leader
de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, je serai bref...
La Présidente (Mme Marois): Mme la Présidente.
M. Chevrette: Mme la Présidente, excusez-moi. Je voudrais
vous dire, Mme la Présidente, que chacun a ses sensibilités et il
ne faut pas occuper le poste de ministre de la Santé et des Services
sociaux pendant fort longtemps pour comprendre que la santé gobe la
très large part du budget de la Santé et des Services sociaux et
que, malheureusement, au Québec, très peu est mis sur la
prévention. Personnellement, depuis 14 ans, |'ai été
à môme de me rendre compte jusqu'à quel point j'ai pu
acheminer des gens qui sont sur le point de divorcer, parce qu'ils ont des
problèmes financiers, par exemple, ils ne sont même pas capables
d'administrer un budget. Je les ai référés à l'ACEF
locale et on a réussi à éviter de graves problèmes
et à conserver une famille unie. Et je voudrais vous rendre hommage
comme groupe, en partant, et vous expliquer mon excès, justement, de
générosité au cours de l'année où je l'ai
été...
Cela dit, M. le Président, je voudrais maintenant
également poser une seule question. C'est au niveau de la
décentralisation versus la déconcentration. Ce que j'ai compris
de votre mémoire, c'est que vous étiez en faveur d'une
véritable décentralisation et non pas d'une
déconcentration et, que, d'autre part, vous aviez une inquiétude,
s'il n'y a pas de réalignement des politiques, vous aviez une
inquiétude pour le communautaire en général, pour que ces
derniers ne soient pas étouffés par le secteur santé.
D'autant plus que la philosophie prévalant au niveau du communautaire
depuis quelques années, c'est: Sois beau, sois sous-contractant et on va
te donner des subventions, mais, si tu restes toi-même et que tu
travailles selon tes méthodes et ton habitude dans ton milieu, tu
n'auras rien. Est-ce que j'ai bien compris votre mémoire?
La Présidente (Mme Marois): M. Goulet ou M. Dorais.
M. Chevrette: Celui qui le voudra.
La Présidente (Mme Marois): C'est ça.
M. Dorais: Je pense que votre interprétation est
relativement juste en ce qui me concerne. Je crois que ce que nous
défendons là-dedans... Au fond, on sait que l'appareil actuel est
très lourd. On croit que ce qui est proposé actuellement ne
réglera pas le problème de lourdeur. On dit une chose, c'est que,
comme M. le ministre Côté parlait tantôt de solutions
à des problèmes de surconsommation ou autres, je crois qu'il en
existe des solutions. Je prends l'exemple des sages-femmes. On vient de... On a
décidé de faire une expérience-pilote avec les
sages-femmes. D'après mol, c'est un pas dans la bonne direction au
niveau de la réduction des coûts de santé. Il y a beaucoup
d'autres expériences qui se poursuivent actuellement dans les groupes
communautaires, tant sur le plan social que de la santé et on oublie
souvent que ces expériences-là, en tant que telles, sont
très peu coûteuses. Je ne peux pas parler pour l'ensemble de ces
expériences-là, mais il y en a plusieurs là-dedans qui
donnent des résultats très positifs. Mais, par contre, on ne les
reconnaît pas et c'est ce qui pose le problème à la
base.
La Présidente (Mme Marois): Oui? Vous voulez
compléter la réponse? D'accord. Ça va.
M. Goulet: Je veux juste compléter par rapport à la
question de M. Chevrette. Je pense que l'analyse, globalement, est pertinente
pour le communautaire. Mais en même temps j'aimerais revenir aussi sur la
question du ministre tantôt au sujet du comportement des consommateurs
par rapport aux services. Je pense, effectivement, qu'on fait face à un
problème social important, c'est-à-dire non pas uniquement -
parce qu'on s'en occupe aussi - la consommation de biens indéfiniment
accessibles sur le marché - II n'y a plus de limite pour les biens -
mais aussi, d'une certaine façon, ça entraîne par le fait
même une consommation excessive de services. Et c'est un problème
de société. Nous, quand on va dire, par exemple, qu'il y a une
consommation excessive de médicaments chez les
bénéficiaires d'aide sociale, chez les personnes
âgées de plus de 65 ans, parce que ça coûte de
l'argent et qu'on est capable de chiffrer ces montants-là, on est
d'accord pour dire que ça n'a pas de sens, que c'est énorme. Il y
a effectivement une consommation excessive. Comment change-t-on ça? On
coupe le programme ou on commence à dire: II y a une éducation
importante à faire sur l'utilisation des services publics. Mais
ça ne veut pas dire... Le problème aussi, c'est que les familles
à faible revenu et les secteurs... Et, dans le projet de réforme,
nulle part il n'est mentionné que certaines régions seront
favorisées parce que le revenu est plus faible. Ils ont donc des
problèmes beaucoup plus importants de santé, ils ont besoin de
beaucoup plus de programmes d'éducation, de services sociaux. Nulle part
il n'y a des réalités locales ou régionales qui sont
pointées ou qui sont visées, c'est-à-dire que tout le
monde va avoir la même chose sur un même pied. Et on pense que
ça n'a pas de sens, parce que, effectivement, dans certains secteurs, il
y a une proportion... Et je pense au Montréal métropolitain
surtout, les bénéficiaires de l'aide sociale sont majoritairement
concentrés là, les poches de pauvreté sont principalement
concentrées là aussi. Qu'est-ce qu'on va accorder dans ce
programme-là pour des programmes spéciaux à l'intention de
ces couches de population? Nulle
part, ce n'est dit.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, il vous reste une quinzaine de
minutes...
M. Trudel: Très bien. Je veux vous remercier de
votre...
La Présidente (Mme Marois): ...si je veux être
équitable par rapport à l'autre parti.
M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Présentation
et document extrêmement intéressants. On comprend, par ailleurs,
qu'il y a beaucoup d'éléments que vous soulevez dans votre
mémoire qui ne nous apparaissent pas complets, mais je pense qu'il faut
toujours comprendre qu'on ne peut pas demander à des associations ou
à des groupes, comme vous êtes, d'être à
l'extrême fine pointe de l'information et de connaître cette
espèce de monstre bureaucratique et administratif aussi qu'est devenue
l'organisation de notre système de santé et de services sociaux
au Québec. Mais vous soulevez des questions extrêmement
pertinentes et il y en a une, entre autres, sur laquelle je veux revenir, tout
comme le ministre l'a fait tantôt; en tout cas, pour ma part, si vous
aviez plus d'informations à nous donner, je pense que ça pourrait
être appréciable; c'est au niveau d'une politique de
reconnaissance des groupes au niveau de l'action communautaire au
Québec. Souhaitez-vous véritablement que l'aide de l'État
qui serait accordée, et on reviendra sur l'histoire de la politique
qu'à l'intérieur d'une aide qui serait accordée aux
groupes communautaires ce soit - et j'exagère un peu en le disant, mais
c'est pour bien faire voir la question - détaché des grands
objectifs que poursuivrait, par exemple, le système de santé et
de services sociaux au Québec? En somme, vos affaires, vos objectifs,
votre indépendance, votre autonomie et, par ailleurs, un financement
adéquat pour réaliser cela. La question vise uniquement à
comprendre quelle serait l'orientation fondamentale qui devrait présider
à toute politique de reconnaissance de l'action des groupes
communautaires au Québec.
M. Goulet: Je pense que l'éventail, si je comprends bien
la question, de réponses, ce pourrait être éventuellement
une formule un peu semblable à l'Ontario où on a comme
dissocié spécifiquement le secteur communautaire du secteur
santé et on en a fait même quasiment un ministère en soi.
Donc, ça voudrait dire que ça pourrait être une formule
applicable ici. Il faudrait l'étudier, il faudrait l'envisager. Nous -
on en a parié, on l'a écrit - même qu'on l'avait
présentée à la ministre dans le sens qu'on ne peut plus
fonctionner avec l'exemple du Goliath de la santé. On n'est pas du tout
dans la même logique, dans la même optique, dans le même plan
de travail, on ne peut pas se comparer à ça; on ne peut pas se
faire analyser de la même façon non plus. Ça n'a aucun
sens. Sauf que le problème social, il est important dans le sens que -
et ça, il faut être cohérent mini-malement - les
problèmes de santé, s'il y avait plus d'interventions au niveau
social, à notre point de vue et selon notre profonde conviction,
diminueraient. C'est le travail qu'on essaie de faire, de sorte qu'on a
toujours voulu, en principe et au niveau d'une politique globale et
complémentaire, rattacher, finalement, santé et services sociaux.
La formule est correcte, mais la reconnaissance n'a jamais suivie,
c'est-à-dire qu'on n'a jamais pris le temps d'accorder à Pierre
ce qui appartient à Pierre et à Jacques ce qui appartient
à Jacques. On a toujours voulu utiliser un créneau ou une formule
pour les deux. On n'a jamais créé une formule spécifique
pour le communautaire, et c'est ce qu'on réclame. Alors, s'il faut
dissocier et créer un autre ministère pour le faire, on ne le
sait pas; peut-être que oui, mais ce n'est pas évident. On ne le
sait pas, on ne connaît pas la réponse à ce
niveau-là.
M. Trudel: On comprend cette préoccupation et cette
préoccupation étant tellement large, comme vous venez de
l'exprimer, je mets ça en relation avec le moratoire de trois ans que
vous demandez sur tout ce qui concerne le communautaire dans ce projet de
réforme. Je vous avoue que, pour ma part, je suis un peu surpris de
ça dans le sens suivant: au moment où on s'engage au
Québec dans un très vaste débat sur toute notre
organisation des services de santé et des services sociaux et aussi dans
ce secteur en particulier de l'action communautaire, vous n'avez pas peur, en
réclamant ce moratoire, de vous faire oublier dans le décor et
qu'on oublie finalement, encore une fois, de développer cette
nécessaire politique de reconnaissance et de financement des groupes et
de l'action communautaire au Québec? (12 heures)
M. Dorais: Je pense qu'il n'y a pas de danger comme tel dans le
sens où, je pense, ça été écrit dans les
journaux, que la réforme qui est envisagée actuellement ne
s'appliquera pas dans six mois, ni même dans un an; ça va prendre,
deux, trois et même quatre ans avant que ce soit actualisé en
fonctionnement concret. Alors, je pense qu'il n'y a pas nécessairement
une contradiction là-dedans. Ce qu'on dit, ce que mon collègue,
Henri, disait, c'est qu'on ne peut pas envisager analyser les organismes
communautaires dans le même cadre que le reste du réseau. Il faut
le voir comme étant à part, parce qu'on ne fonctionne pas
nécessairement selon les mêmes principes. On vise peut-être
des clientèles similaires à certains points de vue, mais la
philosophie des principes de base diffère énor-
mément. Nous, ce qu'on dit, c'est: Avant de décider d'une
façon un peu péremptoire qu'il va y avoir deux
représentants des organismes communautaires à la Régie et
tant d'autres au Collège électoral, on devrait arrêter de
mettre des structures comme ça qui sont un petit peu artificielles, dans
le fond, pour vraiment envisager la problématique sous l'angle de:
Comment les organismes communautaires peuvent répondre aux
problèmes qu'on vit actuellement aux niveaux sanitaire et social. Et
ça, d'après moi, ça m'ap-paraît comme
déjà un pas dans la bonne direction.
M. Trudel: Très bien. Allons sur un autre volet de votre
présentation, en particulier à la section 3.4 qui est absolument
très éclairante sur le problème de société
auquel nous sommes confrontés en particulier au niveau de l'organisation
et de la dispensation des soins de santé et des services sociaux. Vous
avez probablement vu, comme tout le monde, qu'hier, l'ex-ministre responsable
de ce secteur d'activité à l'époque, M. Castonguay, a fait
appel à des dimensions d'introduction de concurrence entre les
établissements, entre les dispensateurs, les unités
dispensatrices de services dans le réseau. Il a fait appel aussi
à la notion d'une certaine privatisation en termes de compression de
l'offre de services compte tenu des coûts qui sont engendrés. Il a
fait appel également à une troisième dimension - je vous
les mets dans la même question parce qu'on a peu de temps - la notion
d'allocation des ressources en fonction de la performance, en fonction du
rendement des institutions. Évidemment, ça nous pose une nouvelle
définition de la base sur laquelle on devrait appuyer l'allocation des
ressources en termes de santé et de services sociaux et d'actions
communautaires, cela va de sol. au Québec. Qu'est-ce que vous pensez de
cela? Est-ce qu'on devrait s'attarder à cette approche-là? Et,
deuxièmement, si la performance, ça vaut pour ce type
d'établissement, est-ce que ça devrait valoir aussi pour les
organismes communautaires? Une question à double volet.
M. Goulet: Sur la privatisation d'abord?
M. Trudel: Oui, d'abord, et l'allocation des ressources en
fonction de la performance.
M. Goulet: Sur la question de la privatisation, nous on avait
déjà, de toute façon, analysé dans le premier
mémoire la question des HMO. On s'était informé un peu
sans avoir l'ensemble du contexte. Pour nous, c'est clair, c'est non. Toute
réorientation, toute réorganisation, tout projet de
décentralisation devrait au moins partir avec des principes de base:
accessibilité, équité, gratuité du système
pour tout le monde. Ça ne veut pas dire que le problème est
réglé pour autant, mais aussi incroyable qu'on puisse le
concevoir, c'est que, hier soir, nous on présentait un petit
mémoire au comité de travail d'accessibilité à la
justice. Le comité de travail mis sur pied par le ministre de la Justice
a posé une question: Qu'est-ce que ça pourrait être, une
déjudiciarisation du système, en plus de réviser le
programme d'aide juridique? Il a posé aussi la question au groupe:
Fournissez-nous des idées sur la déjudiciarisation
éventuelle, des alternatives. Lorsqu'on demande aux citoyens du
Québec de trouver des alternatives, moi, je pense qu'on est capable de
trouver, on est capable de trouver des choses intéressantes et qui ne
sont pas nécessairement de l'ordre de la privatisation. Sauf que la
question, on ne l'a jamais posée en termes d'alternatives. Si on veut
avoir des alternatives, que les responsables politiques posent la question et
on pourra en trouver, je pense.
M. Nolet: ...peut-être intervenir au niveau...
La Présidente (Mme Marois): L'autre volet, c'est
ça, de la question.
M. Nolet: ...de l'allocation des ressources selon le rendement.
Je rattacherais tout simplement l'exemple qui avait été...
La Présidente (Mme Marois): Voulez-vous monter le ton
parce que c'est...
M. Nolet: Oui.
La Présidente (Mme Marois): ...seulement vous qui pouvez
le faire. Le micro... Ha, ha, ha!
M. Nolet: Ah! Ici, là? Ce bouton-là?
La Présidente (Mme Marois): Non, non, par votre force de
voix.
M. Nolet: Ahl Je voudrais tout simplement reprendre l'exemple qui
a été donné tantôt. D'après moi, ce serait
beaucoup plus facile... Dans un secteur où il y a une population plus
fortunée, que les institutions qui desservent cette population
pourraient peut-être plus facilement obtenir un rendement et auraient
droit, à ce moment-là, à une plus grande allocation de
ressources qui n'est pas, effectivement, définie selon les besoins.
Comme on le disait, dans le fond, les poches ou les secteurs de populations
pauvres ont plus de besoins.
M. Trudel: Très bien. Vous insistez également, on
le comprend facilement compte tenu de votre mission, sur. les programmes
alternatifs d'éducation et de prévention. Il ne reste pas
beaucoup de temps. Est-ce que, dans vos relations avec les CLSC, vous
êtes satisfaits de ce type de relations que vous avez avec ces organismes
qui sont chargés de faire de la prévention et, s'il y a des
choses qui devraient
changer et qui devraient être introduites dans les pratiques
actuelles, comment devrait-on retrouver ça dans une nouvelle
définition de l'organisation du système de santé et de
services sociaux au Québec?
M. Goulet: Oui, c'est une question très importante.
Normalement, les liens entre le communautaire devaient s'arrimer avec le
réseau principalement à partir du réseau des CLSC. Je
pense qu'aujourd'hui, et on parle pour nos groupes, cet objectif, ce souhait ou
cette volonté ne s'est pas fait et c'est principalement à cause
d'une réorientation très importante dans la mission des CLSC,
c'est-à-dire que les CLSC répondent présentement à
un objectif, à 50 % généralement, qui touche une question:
le maintien à domicile. Et ils arrivent difficilement à assumer
leur programme d'éducation, leur programme d'intervention sociale et
leur programme communautaire. Lorsqu'on mentionnait tantôt, et c'est eux
qui sont visés, finalement, non pas parce qu'ils sont de gros
méchants, mais pour faire leur travail, ils créent des groupes
communautaires autonomes qui ont accès aux demandes de subventions et
ils peuvent essayer d'extensionner, finalement, leur travail... A notre point
de vue, c'est déplorable parce que ce sont des groupes champignons, des
groupes qui naissent, et ça n'a pas beaucoup d'impact ou pas beaucoup
d'avenir pour l'Intervention sociale et communautaire au Québec.
M. Trudel: Vous dites: Ils sont obligés de créer
ces groupes-là compte tenu de la faiblesse de leurs moyens probablement
et ils sont obligés de passer par la porte d'en arrière au lieu
de réaliser directement et ouvertement ce pourquoi ils avaient
été créés au Québec...
M. Goulet: Oui, et c'est très sérieux, ce qui se
produit.
M. Trudel:... compte tenu de l'insuffisance du support et de ce
qu'ils devaient réaliser comme mission.
M. Goulet: Oui.
M. Trudel: Une dernière, Mme la Présidente, si vous
me le permettez.
La Présidente (Mme Marois): Et ça terminera votre
temps de parole.
M. Trudel: Je n'élaborerai pas beaucoup sur la
régionalisation que vous dites être tout à fait
inadéquate en termes de présentation. Vous en avez discuté
avec le ministre. J'aimerais poser une question là-dessus. Vous dites:
On va pousser en douze morceaux le problème vers les régions sans
avoir politiquement fait son nid sur une véritable
décentralisation. Hier, dans sa présenta- tion, le ministre
soulevait la question de l'im-putabilité de ceux et celles qui
occuperont ou occuperaient éventuellement des responsabilités
à l'intérieur d'un mécanisme vraiment
décentralisé, et c'est une question qui doit se poser partout. Ce
sont les sous du public, ce sont les sous de l'État. À cet
égard, est-ce que vous avez l'impression - et c'est tout à fait
une hypothèse -qu'une régie régionale, qui gérerait
les budgets véritablement décentralisés et composée
très majoritairement de personnes élues directement par la
population, pourrait nous apporter une certaine solution concernant
l'imputabilité, c'est-à-dire qu'on pourrait tenir responsables
ces gens en termes de décision, par exemple, sur l'allocation des
ressources et on pourrait aussi, comme dans tout processus démocratique,
les renvoyer chez eux lorsqu'ils n'accomplissent pas les devoirs tels qu'on
pense qu'ils devraient être accomplis?
Est-ce que ça pourrait nous amener à une véritable
décentralisation dans la gestion du système de santé et
des services sociaux au Québec?
M. Dorais: Si on peut parler de décentralisation dans le
sens d'une démocratisation, c'est sûr que la participation des
usagers en soi, c'est bienvenu. Par contre, c'est un phénomène...
La participation de l'usager ne date pas de l'avant-projet de loi, elle
était commencée dans les années soixante-dix. On sait un
petit peu comment ça fonctionne. En pratique, c'est que les voeux qui
sont exprimés par le ministre ne sont pas souvent réalisés
sur le terrain parce qu'on conçoit que les usagers sont souvent un peu
des pions, des faire-valoir qui sont là pour légitimer les
politiques et non pas pour les remettre en question. Il faut se comprendre
là-dedans. La démocratie en soi c'est joli, c'est bienvenu, tout
le monde est pour la vertu, mais c'est au niveau du fonctionnement qu'il y a de
graves problèmes parce qu'actuellement, si on regarde les régies
régionales, la façon dont elles sont composées, je ne
pense pas que même si on élisait du monde là-dedans,
ça réglerait les problèmes parce qu'il y a des
intérêts politiques majeurs qui sont défendus dans ces
régionales-là.
Si les étblissements de santé occupent une grande place
dans les régies, ce n'est pas pour rien. C'est parce que c'est eux
autres qui ont le gros bout du bâton. En termes monétaires et
financiers, ils ont des intérêts à défendre et ils
sont appliqués à tous les autres organismes: CSS, CLSC, etc.
Mais, c'est justement, c'est cette logique-là qu'on ne peut pas
détruire simplement en élisant du monde. Il va falloir penser
à une autre façon de voir ça. Alors, je n'ai pas la
réponse complète à ce problème. On n'a pas eu le
temps, nous autres, à la Fédération, d'analyser cette
problématique-là, sauf qu'on se rend compte que la question de la
participation des usagers n'est pas nécessaire-
ment une réponse adéquate. C'est une partie d'une
réponse. (12 h 15)
M. Trudel: Très bien, merci.
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci. Ça va,
M. le député de Westmount? M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Dorais: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Merci de votre
présentation. J'inviterais maintenant le Regroupement de parents pour
déficients mentaux à prendre place à la table, s'il vous
plaît. Je fais des efforts pour qu'on se rattrape dans le temps, mais
chacun, de part et d'autre, demande une petite extension et on n'y arrive pas
trop, là.
Alors, M. Faulkner, c'est ça? Bienvenue à la commission.
Si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne et ensuite
procéder, comme vous avez pu le voir par rapport aux groupes qui vous
ont précédés.
Regroupement de parents pour déficients
mentaux
M. Faulkner (Marcel): Oui, bonjour. C'est Mme Suzanne
Côté, travailleuse communautaire chez nous, qui m'accompagne.
Bonjour, M. le ministre, bonjour tous les membres de la commission. Je n'ai pas
vu fonctionner les groupes précédents. Je suis en retard,
j'arrive à l'Instant.
La Présidente (Mme Marois): Alors, écoutez, une
phrase. Vous avez environ une quinzaine de minutes...
M. Faulkner: Oh!
La Présidente (Mme Marois):... pour présenter le
contenu de votre mémoire. Le ministre me dit - j'imagine que le leader
serait d'accord -qu'on peut extensionner un peu, mais d'une vingtaine de
minutes. Il ne faut quand même pas dépasser une vingtaine de
minutes. Et, par la suite, une période de questions se partage à
temps égal entre les représentants gouvernementaux et les
représentants de l'Opposition.
M. Faulkner: O. K., merci. D'abord, un mot sur l'organisme que je
représente, le Regroupement de parents pour déficients mentaux.
C'est une association de parents de la région de Montréal - on
regroupe environ 350 familles - qui ont tous la charge d'une personne
déficiente intellectuelle, et ce sont surtout des familles qui ont de
jeunes enfants. Alors, dans notre langage, on dit qu'on est de la
deuxième génération puisque nos enfants n'ont pas connu
l'institutionnalisation, les enfants qui sont nés, disons, après
1974, 1975 où on a cessé cette pratique pour le meilleur. On a,
évidemment, beaucoup axé sur toute la problématique de
l'Intégration sociale et du maintien dans le milieu naturel et, en
particulier, l'intégration en milieu scolaire. Je pense que ça,
ça campe un peu, ça nous différencie de beaucoup d'autres
organismes qui oeuvrent dans le même domaine, mais qui peut-être
rejoignent une population plus âgée et qui sont aux prises avec le
phénomène de la désinstitutlonnalisatlon.
En gros, notre mémoire, dans un premier temps, rappelait
certaines orientations du document pour améliorer la santé et le
bien-être au Québec et, dans un deuxième temps,
peut-être une partie plus critique qu'on a axée aussi sur les
groupes communautaires. En tout cas, de prime abord, il nous semble
déceler une espèce de contradiction tant dans le document
d'orientation que dans l'avant-projet de loi où l'on constate, selon
nous, un décalage entre les attentes de la population en matière
de participation à la gestion des services et la place qui est
réservée, finalement, tant aux groupes communautaires qu'aux
citoyens, dans le système tel qu'il existe et tel qu'il est
proposé.
Je repasse rapidement à la première partie où vous
constaterez que juste par les sous-titres - je suis rendu à la page 3 -
on reprend de très près le document pour dire, en somme, qu'on
est d'accord avec l'espèce de bilan qui est tracé dans les
premières pages du document d'orientation, en particulier aux pages 10
et 11, sur l'espèce de critique qu'on fait du système de
santé où il y a beaucoup trop de technocratiques, etc. Il y a
également un passage où l'on insiste sur les problèmes que
pose la discontinuité dans les services. Dans notre cas, c'est
particulièrement pertinent parce que, en particulier en ce qui a trait
à la déficience intellectuelle, je pense qu'on est obligés
d'avoir une approche, qu'on dit dans le document, multisectorieile. C'en est un
bel exemple où l'on ne peut pas se cantonner à un programme
limité même si la clientèle est spécifique. On
aimerait bien, éventuellement, avoir des services qui assurent une
espèce de suivi de la personne dans le temps et dans son cheminement.
Cette approche-là, forcément, déborde un peu,
peut-être, du champ de la santé et des services sociaux parce que
les loisirs peuvent être à toucher, le travail et, en ce qui nous
concerne, l'école. Mais c'est pour dire que ça manque
énormément.
Le nouveau guide pour l'action telle que proposée, on aime bien
ce qu'on retrouve dans le document au sujet du fait de centrer le service sur
la personne. Cette approche nous Intéresse beaucoup et je cite, en haut
de la page 5: Le document propose qu'on doive faire attention au respect,
à la dignité, à l'intimité, à
l'intégrité de la personne. Comme on représente une
catégorie particulièrement vulnérable, je pense que ces
mots ne sont pas de la théorie pour nous autres. Malheureusement, comme
tout le monde, on a appris par Le Point, la semaine dernière, un cas
qui nous rejoint, qui nous touche beaucoup - je ne suis pas
mandaté pour en parler - je vous parie du cas d'euthanasie qu'on a fait
sur un enfant mongolien à l'hôpital Notre-Dame de Montréal.
Je ne suis pas mandaté pour en parler, mais c'est juste pour vous dire
que ça, ça traduit déjà une attitude qui,
malheureusement, est trop répandue dans le milieu et en même temps
ça montre jusqu'à quel point notre clientèle, pour parler
dans les termes du jargon du ministère, est vulnérable.
Alors, on fait nôtre la recommandation qui est faite dans le
document d'orientation, que les établissements se dotent d'un code
d'éthique. Je pense que c'est une proposition intéressante qui
peut peut-être permettre aussi, justement, à des gens de pouvoir
intervenir à ce niveau.
Une approche plus globale en matière de la santé, bien,
les déterminants de la santé, le rapport Lalonde qui revient.
Tout ce qu'on note, c'est que ça fait quinze ans. Le rapport Lalonde
date de quinze ans. On est très sensibles à la nouvelle
définition qui est donnée dans le document de la santé
qu'on traduirait plus en termes, nous, d'adaptation sociale, finalement. La
santé, ce n'est plus juste par la négative de la maladie, c'est
un phénomène d'adaptation. Et quand on parle d'adaptation, il y a
la personne et il y a les services qui sont en face d'elle. Alors, cette
définition pourrait introduire une nouvelle dynamique à laquelle
on est très sensibles.
Au niveau des stratégies, encore une fois on est d'accord avec ce
qui est proposé: prévention, promotion. Évidemment, ce
sont des propositions qui nous apparaissent théoriques, mais, dans les
faits, on sait qu'on est loin de ça, en particulier la définition
qui est donnée de la promotion, à savoir l'intervention au niveau
du développement des conditions favorables à
l'amélioration de la santé, tout ce qui concerne également
l'apport du communautaire, le communautaire et les réseaux naturels. Si
on pense famille, réseaux naturels et réseaux communautaires, de
façon plus élargie, ça nous rejoint beaucoup.
Aussi, à la page 7 de notre mémoire, on note la
proposition qui est faite de voir à une coopération inter et
multisectorielle, éventuellement, dont le ministère serait le
maître d'oeuvre. Ça nous rejoint également, mais, par
contre, on ne peut pas s'empêcher de se demander si on est sérieux
quand on écrit ça. Parce que, dans notre domaine, qui est celui
de la personne handicapée, il y avait précisément - je
parle déjà au passé - il y a précisément un
office qui avait cette approche multisectorielle et qui, à la suite
d'une décision relative au transfert de programmes, va, à notre
sens, perdre sa substance et éventuellement sa raison d'être et
son expertise. On trouve ça malheureux parce qu'on avait justement
là un organisme qui avait une approche globale de notre
problématique, qui intervenait à plusieurs niveaux, dans
plusieurs domaines. À notre sens, on pense qu'on va procéder
à son démantèlement prochainement.
Au niveau de la recherche sociale, on a une proposition à faire.
Dans le document "Orientations", on a identifié les secteurs
prioritaires: santé mentale, adaptation et réadaptation et le
sida. Il nous semble que tout ce qui concerne l'approche communautaire devrait
faire l'objet de recherches sociales. On devrait ajouter ça comme
priorité parce que, premièrement, il y en a très peu de
recherches qui se font là-dedans. On Improvise beaucoup, les
expériences de désinsti-tutionnalisation le témoignent,
avec les résultats qu'on connaît, le phénomène des
sans-abri à Montréal, entre autres.
Au niveau des organismes communautaires, le document "Orientations"
semble alléchant à première vue. On propose une
reconnaissance. On propose même d'en faire des partenaires
associés. On va même jusqu'à dire qu'on veut s'assurer que
les organismes communautaires aient voix au chapitre, tant dans la
détermination des orientations du système - ça veut dire
ce que ça veut dire - et les choix d'allocations budgétaires.
C'est très intéressant, ça, sauf que lorsqu'on aborde plus
en détail l'avant-projet de loi et qu'on regarde les articles
correspondant à ça, on s'aperçoit qu'on a affaire à
une tout autre logique.
Alors, c'est là que je suis rendu. Donc, dans la deuxième
partie un peu plus critique, en gros, une représentation minimale des
citoyens et des groupes communautaires. Quand on regarde la mécanique,
les modalités de participation qui sont mises en place et la place qu'on
réserve, tant au niveau des conseils d'administration des
établissements qu'au niveau du conseil d'administration des
régies régionales, l'apport à la fois des communautaires
et des citoyens est minimal. Ça nous apparaît une espèce de
"family compact" qu'on veut créer, un club privé sélect
où les gens se "coop" entre eux, où il y a des échanges
entre un conseil d'administration de l'établissement et celui de la
régie et qu'on se renvoie l'ascenseur, des personnes qui vont
sûrement siéger sur les deux.
Évidemment, tout le problème de la participation -
j'entendais les intervenants qui m'ont précédé - c'est
quelque chose d'extrêmement complexe. On n'a pas de formule magique
à proposer. Malheureusement, on n'a pas eu le temps de se pencher
là-dessus et d'arriver avec des propositions nouvelles, mais le statu
quo nous apparaît préférable à ce qui est
proposé, au moins on peut dire ça.
Quant au partenariat, donc, par rapport aux groupes communautaires, je
pense que le problème central, c'est l'iniquité au niveau des
moyens. On peut bien proposer aux groupes communautaires: Venez siéger
à nos différentes tables de concertation, venez, on va discuter
de telle chose et de telle chose, mais on n'a malheureu-
sèment pas toujours les moyens, l'expertise, la formation
nécessaire, parce qu'il faut bien constater qu'on est en face d'une
machine, pas seulement d'une machine, mais de gens qui sont là-dedans
à ta semaine, qui ont développé des compétences.
C'est bien difficile pour les citoyens que nous sommes de s'impliquer, à
part égale, là-dedans.
Par contre, ce qui nous est proposé, c'est d'évaluer la
participation éventuelle du communautaire, l'évaluer en fonction
de programmes définis par le ministère, appliqués par les
régies régionales. On invite les groupes communautaires,
moyennant financement, éventuellement, à participer à ces
programmes. Je pense que ça va venir dénaturer le communautaire,
introduire des pratiques qui ne sont pas celles du communautaire, ni, non plus
peut-être les objectifs qui pourraient être différents.
C'est une dynamique différente, c'est un monde différent qu'on
risque, par ce qui est proposé, de tuer éventuellement. Alors, je
terminais en disant, à la page 13, qu'on craint une
institutionnalisation des groupes communautaires.
Je n'irai pas plus loin dans mon mémoire, je vous ferai
grâce de la dernière partie. Je voudrais juste conclure en disant
que, vu de la base, évidemment, le ministère et toutes ses
instances nous apparaissent toujours comme étant ce que j'appelle
souvent un monstre sacré. C'est comme si - et dans le document
d'orientation, ça paraît beaucoup - c'est comme s'il y avait une
force à l'intérieur de ce ministère-là qui ne peut
pas s'empêcher de centraliser quand il dit qu'il veut
décentraliser, qui ne peut pas s'empêcher d'essayer d'encadrer, de
mettre la main sur tout ce qui grouille.
J'ai un exemple très récent dans lequel j'ai
été impliqué pendant quatre ans dans la région de
Montréal, relativement aux politiques de soutien aux familles, qui sont
en voie d'élaboration. Nos interventions ont amené l'OPHQ
à redéfinir son approche là-dessus, sa politique qui a
été publiée récemment. Ç'a amené le
CRSSS de Montréal à redéfinir la sienne. Ç'a
amené l'ancienne ministre à un ajout de 2 000 000 $ pour le
soutien aux familles. Dans la région de Montréal, ça
voulait dire à peu près 600 000 $. On s'est rendu compte que, six
mois après, dans l'an II de ce budget-là, il y avait à
peine 15 % de cet argent qui étaient dépensés pour le
soutien aux familles. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas, finalement,
respecté les projets qui avaient été mis de l'avant par
les groupes communautaires, à la demande même du CRSSS, parce que
lorsqu'on a envoyé l'argent dans les régions, c'était
accompagné de directives tellement restrictives qu'il n'y avait plus
aucun groupe communautaire qui était capable d'opérer à
l'intérieur des normes fixées. On a fait des
représentations pour corriger ces normes là, brof, on est
remonté jusqu'à l'ancienne ministre. Finalement, ç'a n'a
rien donné. C'est un petit exemple qui nous indique cette espèce
d'appétit insatiable qui caractérise ce ministère qui nous
envahit tout le temps.
Je terminerai par un slogan: De grâce, laissez-nous vivre. On
parle de santé, laissez-nous vivre. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci beaucoup. M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): J'ai une situation double
vis-à-vis de votre intervention. Je vous suis des bouts, parce que c'est
un appel de quelqu'un qui vit de bénévolat avec le système
et qui défend le bénévolat, où le ministère
intervient, fait une proposition - elle est peut-être maladroite, elle
n'est peut-être pas adaptée aux besoins - mais, à tout le
moins, elle vise à faire en sorte qu'il y ait moins de choses qui se
décident au central - c'était ça, l'objectif - qu'il y ait
plus de choses qui se décident au niveau de la région. (12 h
30)
Ce qui m'étonne un petit peu, c'est que vous dites: Au lieu de
nous imposer ce que vous mettez dans votre projet de loi, laissez-nous donc le
statu quo, si j'ai bien compris. À partir du moment où on a une
problématique, il y en a... Parce que le statu quo, à ce que je
comprends, ne règle pas tous les problèmes, parce que vous venez
uniquement de nous évoquer, en terminant, un fait où le statu que
- si je comprends ce que vous dites - n'a pas réglé les
problèmes. Le statu quo a amené de l'argent et, là,
finalement, c'est que l'argent ne se dépense pas pour toutes sortes de
raisons qu'on peut qualifier d'administratives. Évidemment, si c'est un
chèque totalement en blanc, ce ne sera pas compliqué, là.
Ce qu'on va demander au ministère, c'est d'avoir dix personnes au budget
qui vont, à chaque année, faire la démarche d'aller
chercher 10 000 000 000 $ au Trésor et dire: Bon, parfait, tout est
transféré; maintenant, administrez-le comme vous voulez, sans
règle, sans norme. Mais quand on parie d'Imputa-bilité, il y en a
un qui répond. Et s'il y a une "flagosse" qui se passe sur le plan
administratif, ils n'iront pas questionner la régie régionale, au
moment où on se parie. C'est le ministre qui va être
questionné. C'est encore lui qui répond devant ses pairs à
l'Assemblée nationale.
Alors, je comprends le sens de l'oxygène. Ça prend de
l'oxygène pour vivre. Et ce qui est à la base de ça,
c'est, bien sûr, une volonté de donner plus de pouvoirs à
la structure régionale qui, elle, va décider d'un certain nombre
de choses. J'ai un petit peu de difficultés avec tout ça et,
finalement, si j'ai bien compris l'intervention, vous nous dites: On
préfère le statu quo, pas sur tout, mais sur des points
particuliers, le statu quo par rapport à la structure. D'autre
part, les objectifs, je pense qu'ils ne sont pas très très
questionnés. On dit: Dans les objectifs, ça ne va pas si mal;
cependant, dans l'avant-projet de loi, il n'est pas évident que
l'avant-projet de loi supporte très bien les objectifs ou atteint les
objectifs qu'on retrouve dans le document.
J'aimerais vous entendre un petit peu plus, parce que si vous vous
êtes fait avaler, vous vous êtes fait avaler aussi par la structure
actuelle. Donc, vous avez parlé du CRSSS de la région de
Montréal. Je vous pose la question carrément: Est-ce que vous
vous sentez mieux écoutés, mieux compris par le CRSSS de la
région ou par le ministère? Sans que ça blesse personne.
Ce n'est pas ça l'objectif. L'objectif est de dire qu'il va quand
même rester un ministère - il peut y avoir dix personnes dedans
comme il peut y en avoir 1100 - qui, lui, a une responsabilité sur le
plan administratif et il va continuer de l'avoir de toute façon. Ce
qu'on vise - je l'ai dit dans le discours, hier - c'est - bien sûr, moi
je suis un gars qui croit au régional - de transférer des choses
au régional avec des pouvoirs de décision, avec de
l'im-putabilité aussi, parce qu'au bout de la ligne, on va se retrouver
devant le même phénomène. Mais pour ça, peu importe
le niveau où vous allez être, il va falloir savoir que si on se
donne des objectifs de santé par l'entremise, d'abord, de la
prévention et du curatif - parce que le curatif, on ne pourra pas
l'éliminer complètement, mais mettre plus d'accent sur le
préventif... Ce sont des objectifs. Pour atteindre des objectifs, il va
falloir être capable de s'évaluer de temps en temps et avoir des
moyens de contrôle, et cela existe encore au niveau du ministère.
Ce qu'on dit: II y a une série de planifications, toute une partie de
planification et d "operational isation" des. décisions qu'on aura
prises qui peut être confiée - on parle des régies
régionales, ça peut être n'importe quelle appellation que
vous voulez - mais à un pouvoir régional véritable.
Ce que je comprends bien, c'est que vos problèmes ne sont pas
dans la régie, mais dans la manière dont elle est composée
et dans la volonté d'être capable de dire des choses et de ne pas
être étouffé par les professionnels. Et, moi, j'avais
compris, dans la réforme telle que je la vois, que les professionnels
étaient assis sur la chaise en arrière. En tout cas, c'est ce que
j'ai compris, quand on dit: Pas d'intérêts professionnels sur un
conseil d'administration. Évidemment, on est conscient de ça
aujourd'hui, sur les conseils d'administration, que les D.G., les
médecins, les professionnels, quand ils s'en vont là, s'en vont
là avec leurs gros documents et celui qui est sur le conseil
d'administration est vite perdu dans 80 %, 90 % des cas. C'est ce que j'avais
compris. Je pense que vous n'avez pas compris la même chose et j'aimerais
vous entendre là-dessus.
La Présidente (Mme Marois): Alors, si vous voulez y aller.
En fait, il y a commentaires et questions. On a bien...
M. Faulkner: J'ai compris.
La Présidente (Mme Marois): ...compris.
M. Faulkner: Je vais essayer d'éclairer notre position. On
n'est pas contre la décentralisation qui est proposée. C'est bien
clair. Elle ne nous apparaît pas tellement une décentralisation
comme une déconcentration. Je pense que le terme a été
utilisé tantôt. Il y a une différence. Le ministère
nous apparaît toujours très omniprésent.
Les programmes de santé doivent être nationaux, dans notre
esprit. Ça ne nous pose pas tellement de problèmes. Je pense que
tout ce volet-là, les attributions du ministère telles que
définies, ça nous rejoint. La volonté de
décentraliser vraiment, oui ça nous rejoint. Par contre,
où on accroche, ce sont les modalités, la mécanique qui
est là au niveau des régies régionales. Quand vous me
dites: II n'y a pas beaucoup de professionnels; au conseil d'administration de
la régie régionale, sur quinze personnes, il y en a sept qui vont
provenir des établissements, probablement des directeurs
d'établissements, sept sur quinze en partant.
M. Côté (Charlesbourg): Sept sur quinze, ça
ne veut pas dire que ce sont des professionnels. À partir du moment
où le conseil d'administration, unifié ou pas, n'a pas de
professionnels, il ne pourra pas déléguer un professionnel, il va
déléguer un membre du conseil d'administration qui n'est pas un
professionnel.
M. Faulkner: Qui aura le temps, la disponibilité, les
moyens et les ressources de siéger peut-être sur deux conseils
d'administration, celui des établissements et celui de la régie,
qui va avoir le temps et l'énergie de se familiariser avec toutes les
problématiques, surtout si on pense en termes de régie. C'est
presque comme le ministère, toutes les problématiques qui
gravitent autour de ça. Ça prend quelqu'un qui est à temps
plein; ce n'est pas un humble citoyen, comme moi par exemple, qui va avoir les
moyens d'occuper un poste comme celui-là et de pouvoir se prononcer pour
les déficients, pour les handicapés, pour les personnes
âgées, pour le maintien à domicile, etc. Ça ne finit
plus.
Quand on dit que... Finalement, notre objection vient du fait qu'on
invite des gens qui n'ont pas les moyens. L'intention est peut-être bonne
d'amener le citoyen à participer, c'est extrêmement
compliqué, on est d'accord avec ça. Mais on aimerait même
que le milieu communautaire soit plus présent numériquement, et
en termes d'expertise, qu'il soit préparé pour ce faire.
Quand vous demandez la position crûment: Est-ce qu'on est mieux
entendu au ministère qu'au CRSSS? On n'est pas mieux entendu au
ministère qu'au CRSSS, c'est bien sûr. Ce serait peut-être
souhaitable qu'on soit mieux entendu chez nous, dans nos régions. Les
régions sont différentes, c'est vrai, et les
problématiques sont un peu différentes, même dans notre
domaine, qu'on soit à l'extérieur des grandes régions ou
à Montréal, ça ne se pose pas dans les mêmes termes,
ce ne sont pas les mêmes besoins. On est d'accord avec cette
décentralisation-là. Ce qu'on veut, c'est d'avoir les moyens et,
d'autre part, quand vous parlez d'argent, l'argent qui m'intéresse... Je
n'ai pas fait d'intervention sur les services aux personnes déficientes,
|e l'ai pris sous l'angle du communautaire, donc en termes d'organismes de
représentation. Et, l'argent qu'on représente au
ministère, ce n'est pas beaucoup. Il y a une vieille revendication qui
est toujours la nôtre, que le service de soutien aux organismes
communautaires représente 1 % du budget du ministère et on n'est
pas rendu là, loin de là. Ce serait peut-être le doubler
que d'atteindre ce 1 %.
Et, en même temps, on se fait parler d'évaluation.
L'évaluation en fonction de programmes qu'on ne définira pas!
Dans le rapport Rochon, M. le ministre, il y avait une recommandation à
l'effet de créer, ils appelaient ça un comité
régional des priorités, qui nous apparaissait être une
initiative intéressante qu'on n'a pas retrouvée par la suite, qui
aurait peut-être permis à des gens justement qui ne sont pas du
réseau d'Intervenir - ce n'était pas une Instance
décisionnelle, c'était une instance de consultation - en amont,
pas au niveau de l'allocation des budgets, pas au niveau de la gestion des
budgets comme on fait dans un conseil d'administration d'établissement,
mais au niveau de priorités régionales, au niveau de
l'élaboration de politiques.
Je pense que ça aurait été un lieu d'intervention
important pour le communautaire. Parce que, bien souvent, le communautaire est
en avance sur le réseau, au moins pour sentir les besoins - je pense que
tout le monde va l'admettre - et peut-être aussi pour développer
des formules nouvelles qui collent peut-être plus à la
réalité. Ça, c'est la part du communautaire et on dirait
qu'à quelque part, le réseau ne veut pas entendre ça.
Pourtant, si on veut faire des économies, c'est peut-être une
occasion ou jamais de permettre précisément au communautaire
d'exister, non pas juste de survivre, de vivoter comme il le fait
présentement, mais d'exister et de pouvoir intervenir puisque c'est de
la prévention qu'on fait essentiellement et de la promotion telle que
vous la définissez, mais ça éviterait peut-être un
paquet de problèmes plus importants qui se poseraient par la suite.
M. Côté (Charlesbourg): Si, demain matin, on
était dans une situation où les régies régionales
sont créées, donc peut-être en mesure de mieux
connaître, de mieux sentir et de mieux apprécier les besoins
régionaux... Je ne crois pas, mol, que les priorités dans une
région soient forcément les mômes priorités
qu'ailleurs. Ça me paraît très très évident
et ça m'est toujours apparu que la région elle-même pouvait
déterminer ses priorités. Est-ce que vous auriez la même
crainte si le budget dévolu au communautaire qu'il soit de 1 %, qu'il
soit de 2 %, qu'il soit de 7/10 % là, si ce budget communautaire
était priorisé par les régions? Est-ce que ça vous
fait peur?
M. Faulkner: Ça nous fait peur dans le cadre qui est
proposé, à savoir l'existence de programmes qui seraient
définis par le ministère, et que les régies auraient pour
fonction d'appliquer, parce que ces programmes-là, le communautaire n'a
pas de prise dessus au niveau de son élaboration. Dans ce qui est
proposé, je pense que c'est aux articles 231, 232, de mémoire,
où l'on dit que le ministre, à sa discrétion, va
désigner les organismes provinciaux pour fins de représentation.
Autrement dit, le ministre pour se réserver le privilège de
consulter qui il veut, quand il le veut. Ça nous apparaît
antidémocratique d'une part et, comment on va intervenir pour
définir ce progamme-là? On n'a pas de place. On n'en a pas non
plus dans les régies. Ça, ça nous fait peur, d'une part.
d'autre part, le fonctionnement des groupes communautaires, je pense que les
intervenants précédents l'ont dit, il y avait une question qui
allait en ce sens-là, ça repose sur l'autonomie. la
volonté de prise en charge. je pense que c'est un langage que vous
pouvez comprendre. tous les groupes reposent là-dessus. on se
créq, non pas par plaisir, on se crée parce qu'il y a des besoins
qui ne sont pas comblés par le système. on se crée par
volonté de vouloir assumer nos responsabilités et laissez-moi
vous dire que dans mon secteur, en termes de déficiences, elles sont
extrêmement lourdes. on ne demande pas la charité mais, compte
tenu des sommes qui nous sont allouées via le service de soutien aux
groupes communautaires du ministère, c'est tellement dérisoire
là, on ne devrait même pas en parler. par contre on se permet,
dans l'avant-projet de loi, de dire: on va évaluer votre performance.
ça veut dire quoi notre performance? ça veut dire quoi pour un
groupe de promotion comme le mien? ma performance, aujourd'hui, m. le ministre,
c'est quoi? comment est-ce que je vais évaluer ça? et les
représentations qu'on fait comme organisme, à tour de bras,
à longueur de journée, pour obtenir des services auxquels on a
droit. ça va se mesurer comment cette performance-là? il y a
quelqu'un, il y a un fonctionnaire à la régie qui va dire. m.
faulkner, votre groupe n'a pas été performant cette année
parce que je ne sais pas: vous avez
eu 150 téléphones au lieu de 175.
M. Côté (Charlesbourg): J'aime ça que vous
preniez votre exemple. Qu'est-ce que vous recevez comme subvention
annuelle?
M. Faulkner: On existe, M. le ministre depuis 1982. On est
incorporés depuis 1982. J'ai fait plusieurs demandes aux services
communautaires. J'ai reçu deux fois 3000 $ sous deux régimes
politiques différents.
M. Côté (Charlesbourg): Dans ces
conditions-là, vous avez raison de poser ces questions pour 3000 $ ou
4000 $. C'est pour ça qu'au groupe précédent j'ai dit
qu'il y a des choses à changer et quand c'est 3000 $, 4000 $ ou 5000 $
...on ne demandera pas de faire de rapport. Je pense qu'il y a des choses
très importantes à ce niveau-là. Évidemment, vous
aurez compris que là-dedans, s'il y a 47 000 000 $ qui ont
été distribués l'an dernier, il y en a quand même
qui ont reçu des montants assez appréciables. Et l'autonomie,
moi, j'y crois. Je crois à ça l'autonomie, mais je crois aussi
à la possibilité de recevoir des réponses à savoir
comment l'argent est dépensé. 3000 $, 4000 $ quand vous
élaborez comme ça, évidemment Je comprends que...
M. Faulkner: Je me sens très autonome, M. le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends votre
intervention. Si vous aviez eu 200 000 $, je vous aurais posé d'autres
sortes de questions, vous pouvez être sûr de ça, parce qu'il
y a une distinction très nette entre les deux qui va se faire
éventuellement.
La Présidente (Mme Marois): Une dernière question,
M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, ce que je retiens,
c'est que pour que le système soit efficace, qu'on soit capable de
défendre les intérêts d'une communauté, il ne suffit
pas d'être membre d'un conseil d'administration, mais il faut être
surtout formé et préparé pour être capable. À
ce niveau-là, il doit y avoir une préparation et une formation
des gens qui auront à remplir ces responsabilités.
D'autre part, je retiens aussi la crainte d'être noyé dans
des gens représentant les institutions qui vont défendre leur
butin à eux, et le communautaire a peur de ça, et pas
nécessairement à tort non plus. Je retiendrai un certain nombre
de choses des interventions de gens qui reçoivent 3000 $ par
année pour défendre l'intérêt de leurs concitoyens.
(12 h 45)
La Présidente (Mme Marois): M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. J'aurai trois
questions. Tout d'abord, vous dénoncez particulièrement le peu de
place qu'a (e citoyen dans le système comme tel et la Complexité
du système, mais vous ne dites pas, en contrepartie, comment vous
envisagez votre participation pour qu'elle soit optimale. J'aimerais vous
entendre.
M. Faulkner: Je l'ai dit tantôt, malheureusement on n'a pas
eu le temps de se pencher là-dessus, compte tenu des délais qu'on
avait pour produire notre mémoire et que c'est extrêmement
complexe. J'ai moi-même déjà participé au conseil
d'administration d'un centre d'accueil et, si je me base uniquement sur cette
petite expérience, ça m'a pris a peu près un an avant de
comprendre ce qui se passait. On était en période de restrictions
budgétaires, il fallait couper etc., et je me suis rendu compte que ce
n'était pas un lieu d'intervention tellement pertinent pour les parents
parce que c'est une job de gestion et d'approbation de budgets, etc. Les
problèmes qu'on avait, ce n'était pas là qu'on les
exprimait; on les exprimait à l'extérieur. En tout cas, je n'ai
pas de formule. J'ai une longue citation d'un M. Julien qui a
déjà fait une étude du temps qu'il était à
l'ENAP sur la participation des usagers, tant dans le réseau de la
santé que dans celui de l'éducation. Il y a plusieurs constats
intéressants qui sont faits là-dedans. Ça ne fait que
poser le problème. Lui, il dit que la participation pose plus de
problèmes qu'elle n'en résout. Je ne ferais pas cette
affirmation-là. Il faut ouvrir le système. Mais comment l'ouvrir?
Je ne le sais pas.
Pour ce qui est des régies régionales, par exemple, il y a
les commissions administratives. Cela nous paraît un lieu peut-être
privilégié. Ce n'est pas sur un conseil d'administration, mais
les commissions administratives fonctionnent par problématique. Alors,
si on va, par exemple, dans le domaine de la déficience, on a affaire
aux gens qui sont préoccupés par ça. Ça nous
apparaît une place privilégiée d'intervention.
Dans l'avant-projet de loi, à ma connaissance, les régies
sont libres de créer les organismes ou les instances qu'elles veulent.
On ne mentionne pas de façon particulière les commissions
administratives. C'est un lieu privilégié. Ce qu'il y avait comme
proposition dans la commission Rochon, "les comités régionaux des
priorités", comme elle les appelait, c'est aussi une autre proposition
qui peut être intéressante. Ensuite, d'outiller les gens pour y
aller. Si on veut l'implication du communautaire, par exemple, pourquoi ne pas
demander au communautaire, nous donner le temps d'y réfléchir un
peu et en faire une proposition? Je pense que plusieurs groupes seraient
intéressés à travailler là-dessus.
M. Chevrette: Vous posez une question de fond, je pense. À
la page 15 de votre mémoire, je vous cite au texte: "La logique
technocratique de l'État est-elle concHiable avec la volonté de
prise en charge individuelle et collective préconisée par les
groupes d'entraide et de support?" C'est vous-mêmes qui posez cette
question.
Quand vous vous êtes posé cette question-là,
avez-vous élaboré certaines hypothèses de réponses
et s) oui, j'aimerais les connaître.
M. Faulkner: Malheureusement, non.
M. Chevrette: Vous avez touché du doigt le problème
sans...
M. Faulkner: C'est parce que c'est tel qu'on l'a vécu.
C'est une réaction, si vous voulez, qu'on faisait à ce
niveau-là. Puis, ça caractérise un peu la nature du
système, ce que j'appelais tantôt "son appétit insatiable",
aussitôt que ça bouge quelque part. Je reviendrai sur le soutien
à la famille, mon organisme entre autres, pour parler de ce que je
connais le mieux, qui a été un des premiers dans la région
de Montréal à élaborer un projet de soutien, c'est un
projet de répit gardiennage. Finalement, c'est le CRSSS qui a
avalé notre projet et il n'est pas capable de l'appliquer. On a
travaillé là-dessus pendant trois ans. C'est juste un petit
exemple. Non, pour répondre à votre question.
M. Chevrette: Mais vous me faites réfléchir sur
tout le mode de financement des organismes communautaires et je voudrais dire
tout haut ce que je pense depuis un certain temps et peut-être avoir
votre réaction. Ce sont les organismes communautaires eux-mêmes
qui se regroupent, à un moment donné, pour revendiquer. Je prends
les centres de femmes, les maisons de femmes, les maisons de jeunes. Ils se
regroupent dans une structure. Donc, le premier pas vers la structuration n'est
pas fait nécessairement par l'État. Il est fait souvent par la
base sous prétexte qu'il y a une revendication à faire ou
à poser, à un moment donné.
Vous dites, dans votre mémoire, à plusieurs reprises:
Peut-on imaginer, à toutes fins prati ques, qu'il y ait un soutien aux
organismes communautaires? Vous dites: Oui. Vous répondez à
celle-là d'une façon claire. Ça prend un soutien.
Laissez-nous notre autonomie. Et surtout, ne nous institutionnalisez pas. Je
vous suis jusque là. L'autonomie de pensée... et c'est vrai que
bien des organismes sont nés précisément parce qu'il y
avait des lacunes dans le système, des manques, à partir de
besoins spécifiques.
Mais, ceci dit, dès qu'on pense à une politique de
financement des organismes communautaires, moi je suis d'accord sur un point
avec le ministre, c'est qu'il faut faire la distinction entre un service qui
est généralisé à la grandeur du Québec et
qui devient, à ce mo- ment-là, très structuré. Tu
subventionnes per capita ou tu donnes un per diem, par exemple, pour une femme
violentée. C'est très différent d'un organisme
communautaire où on donne 3000 $, comme vous dites, 5000 $, 4000 $.
Ça peut être des organismes communautaires créés
pour des besoins très ponctuels dans un milieu. Il y en a d'autres,
c'est permanent. Dans votre cas, je reconnais que c'est permanent.
Mais le fait de ne pas vouloir être institutionnalisé
d'aucune façon, par rapport à l'obligation de l'État de
voir où vont les sous, comment conciliez-vous ça, vous?
Mettez-vous à la place d'un ministre ou d'un député, vous
dites: Un groupe communautaire pour les parents, c'est 10 000 $. S'il y en a un
à Saint-Charles-Bor-romée à Joliette, parce qu'il y a un
institut pour jeunes déficients mentaux, et qu'il y en a un autre
à Montréal, pourquoi ne pas donner à Joliette si on ne
donne pas à Montréal? Pourquoi? Ou, l'Inverse. Je veux dire: s'il
y en a un des deux qui l'a, pourquoi l'autre ne l'a-t-il pas? Je vous suis.
Mais II va falloir discuter d'une certaine forme pour dire: On vous le donne
pour faire une promotion. Sans que tu le veuilles, est-ce qu'il n'y a pas une
forme d'institutionnalisation dès que vous voulez étendre
l'ensemble du traitement à tous les groupes d'un même secteur?
Est-ce que ce n'est pas une forme d'institutionnalisation sans pour autant vous
créer des carcans administratifs du même genre de ceux qu'on
crée pour les grands organismes?
Je voudrais vous entendre là-dessus parce que dans votre
mémoire vous posez beaucoup de questions. Je ne vois pas poindre, en
tout cas, des éléments de solution qui pourraient aider à
trancher ce dilemme. Parce qu'on est tous pris, c'est vrai. Vous dites
même que vous avez eu 3000 $ du présent gouvernement, que vous en
avez eu 3000 $ du précédent. Bien sûr, 3000 $, mais |e dois
vous dire, moi, qu'il y a beaucoup à faire au niveau du ministère
parce que le ministre... Ça ne doit pas avoir changé, ce
système-là. Il y a 47 000 000 $, mais il y a des recommandations.
Au mois de mars ou avril, on lui dit: Bon, cette année, tu as ces
nouveaux-là, tu as des demandes de ces nouveaux-là. Quels sont
ceux que tu reconnais dans ça? Dans les anciens, tu as ceux-là.
Il y en a qui ont plus ou moins fait de travail, ils se sont chicanés
toute l'année et ils n'ont pas travaillé, puis ils demandaient 20
000 $ avant. Puis il y a ceux des réseaux normaux, par exemple, les
femmes violentées, les maisons de jeunes.
Je suis convaincu que c'est à peu près ça qui est
encore là et je suis convaincu aussi de l'importance d'en arriver
à avoir une politique de financement correcte, une politique
structurée et qu'on sait... Mais ça suppose - et j'aimerais
savoir si vous partagez ça - ça suppose une formule
d'accréditation ou de reconnaissance légale. Ne nous barrons pas
sur les termes, mais
ça suppose une formule où il y a au moins une
reconnaisance de base, avec certains critères. Ça suppose qu'il y
a au moins une possibilité - parce que, autrement, le gouvernement
serait irrresponsable, quel qu'il soit - d'avoir au minimum un rapport
quelconque. Ça suppose un certain suivi sans pour autant imposer des
façons de voir et des façons de penser. Est-ce que ça
sonne quelque chose dans votre tôte? J'aimerais vous entendre
là-dessus parce que je ne sais pas si on serait plus avancés. On
a beaucoup de bonnes questions, mais ces questions-là je dois vous
avouer que, personnellement, ça fait longtemps que je me les suis
posées. J'aurais aimé que vous contribuiez à me faire une
idée plus claire.
M. Faulkner: Malheureusement, je ne pense pas que je puisse
contribuer beaucoup à faire avancer votre réflexion
là-dessus. Moi-même je me pose ces questions-là depuis,
disons, deux ou trois ans. On n'a pas les moyens, malheureusement, de se
pencher, de regarder ça et d'essayer de proposer quelque chose. Je l'ai
dit tantôt et je le répète: Pourquoi est-ce que le
ministère ne prend pas l'initiative de faire une consultation sur la
question de la part du communautaire, du financement du communautaire? Je pense
que vous posez très bien... On est pognés dans une contradiction
où on préconise l'autonomie et on dit au ministère:
Finance-nous au moins en partie. On joue sur les deux tableaux. On est en
contradiction dans notre propre position. Évidemment qu'avec 3000 $ ou
4000 $ on se sent très libres, mais on en voudrait un peu plus et plus
on va en avoir, moins peut-être, on va se sentir libres. Ça pose
un problème.
L'accrédition du ministère de l'Éducation pour les
organismes, les OVEP fonctionne sur cette formule. Il y a des regroupements
d'organismes au sein du ministère, des organimes populaires,
d'éducation populaire, et ils font entendre leur voix au niveau du
ministère. Il n'y a pas l'équivalent dans le domaine du secteur
de la santé et des services sociaux. Chacun des organismes fait son
pèlerinage au service de soutien pour essayer d'avoir un peu plus chaque
année. La formule d'accréditation, je n'ai rien contre; il
restera à voir les critères. Il restera surtout à y mettre
beaucoup de souplesse. Je reviens à cette notion. Les groupes
communautaires, parce qu'ils sont "plogués" sur les besoins, identifient
souvent des besoins qui ne sont pas reconnus par les instances officielles. Une
formule d'accréditation pourrait étouffer l'expression de ces
besoins-là par sa non-reconnaissance des groupes qui, eux, les ont
identifiés.
M. Chevrette: Je vous arrête, juste sur ce point-là
bien précis. Je vous ai suivi jusque-là, mais dès que vous
dites: II faudrait que la formule d'accréditation soit très
très souple... À supposer qu'il y a une somme dans ce qu'on
appelle communément un pot ou un "pool'1 d'argent, vous avez
50 000 000 $, chiffre rond. Il arrive un événement dans votre
milieu, vous créez un organisme communautaire et, là, vous dites:
Bien, subventionnez-moi. Il est possible, d'abord, que la politique de
reconnaissance ait épuisé l'ensemble des montants d'argent
disponibles, premièrement, et deuxièmement, que ça puisse
ne pas être dans les priorités immédiates d'une formation
politique. Une formation politique peut avoir des orientations
différentes d'une autre. Mais si tu la reconnais, parce que ça
s'est créé, il faut que tu la reconnaisses, entre vous et moi,
ça conduit où, au bout de la course? Si c'est juste une question
de dire: II faut être un petit peu... Tout en mettant toute la souplesse
que vous voudrez au niveau des critères, est-ce que vous reconnaissez
qu'il nous faut tout d'abord, à partir de priorités qui peuvent
être connues, qui peuvent être rendues obligatoirement publiques,
à part ça, et discutées en commission parlementaire
spécifique là-dessus, peu importe, je ne suis pas contre
ça, moi... Là où j'en suis, c'est de dire: Est-ce qu'il
faut reconnaître, au départ, qu'il y a une formule de
reconnaissance - appelons ça reconnaissance pour ne par être
péjoratifs au niveau de l'accréditation parce que ça a
toujours des connotations syndicales. Si vous avez peur de ça, enlevez
tout ça... Mais est-ce que ça ne prend pas des critères de
reconnaissance et, au moins, aussi, un élémentaire... Les
organismes de loisirs, par exemple, sont obligés, devant les
institutions, de produire un rapport financier. Est-ce que vous reconnaissez
que ça prend au moins un élément de contrôle,
quelque chose du genre?
M. Faulkner: De toute façon, même dans le
système actuel, même pour mes petits 3000 $, je suis obligé
de faire un rapport financier au ministère; ça, on s'entend
là-dessus. Et dans nos demandes de subvention, on définit nos
activités et, avec la subvention, on rappelle les activités qu'on
doit faire. Je suis subventionné par l'OPHQ, c'est la même
formule, et on lui envoie toute notre documentation également. Ce
contrôle-là ne nous fatigue pas.
M. Chevrette: O.K.
M. Faulkner: Ce qui nous fatiguerait, c'est le contrôle sur
les activités et l'évaluation des activités. Ça,
c'est une autre paire de manches. Vous m'avez dit quelque chose, je voulais
enclencher, mais ça m'est sorti de l'esprit, un blanc de
mémoire.
La Présidente (Mme Marois): Si jamais vous y revenez, si
vous y repensez...
M. Chevrette: Vas-y.
La Présidente (Mme Marois): J'aurais une
question à vous poser et là je m'adresse plus à
l'utilisateur ou aux utilisateurs, à madame aussi, que vous âtes,
de services, parce que vous êtes parents ou enfin membres d'une
association de parents qui représente des enfants qui ont des
difficultés en termes de déficience. Vous avez dit, au
départ de votre intervention, que l'une des grandes
préoccupations que vous aviez - je ne le retrouve pas au texte, mais ce
n'est pas grave - c'était le risque pour vous de discontinuité de
services, si j'ai bien compris ce que vous avez mentionné. Et un de vos
objectifs fondamentaux par rapport à d'autres organismes, probablement
de défense des droits... Vous dites: Nous, notre préoccupation
majeure, on est la deuxième génération - et c'est donc
dans cette foulée-là - c'est l'intégration de la personne
au sein de la communauté, jeunes et moins jeunes.
Dans le projet qui est devant nous, est-ce que l'on répond aux
attentes fondamentales que vous défendez, qui est d'assurer une
continuité de services, d'une part, et, d'autre part,
l'intégration des personnes dans leur milieu naturel ou dans le milieu
normal, si on veut, entre guillemets?
M. Faulkner: Non, je n'ai rien vu qui répondrait à
ça parce que, finalement, dans l'avant-projet de loi, on parie plus de
structure Ce serait en référence aux programmes. Les programmes
ne sont pas là dans notre secteur. Les budgets sont par
établissement. Donc, l'argent va pour les centres d'accueil et pour la
deuxième génération, chez laquelle les enfants sont en
milieu familial, il n'y en a pas de budget. Il y a l'allocation spéciale
pour les enfants handicapés de 92 $ ou 94 $ par mois, point.
La Présidente (Mme Marois): Oui, c'est ça.
M. Faulkner: Donc, c'est à peu près tout. Ça
n'a jamais été une revendication, même de la part des
organismes dans ce secteur-là; ça n'a jamais été
une revendication de l'OPHQ. Ça a été le bonbon qu'on nous
a donné II y a dix ans pour qu'on ne fasse pas trop de bruit à
partir du moment où les institutions ont été
fermées. Puis on nous disait: Vos enfants, vous les prenez ou on va les
placer en familles d'accueil, puis oubliez-les. Alors, ça c'était
il y a dix ou douze ans. En termes de discontinuité, on est toujours
confrontés à ça et puis, malheureusement, si on...
Je pense au secteur scolaire, parce qu'à un moment donné,
nos enfants arrivent là, mais pour nous autres, c'est le deuxième
choc, après celui de la naissance. C'est la "débarque" quand on
arrive au niveau scolaire, parce que les travailleurs sociaux, etc., dans le
domaine de la santé ont une longueur d'avance au niveau de la
problématique, au niveau de la politique du maintien à domicile
dans le milieu naturel, de l'intégration. On arrive au niveau du
ministère et ce qu'on nous propose, ce sont des écoles
spéciales. Là, on dit: Bien non, ce n'est pas ça qu'on
veut. On ne commencera pas à les envoyer dans une école
spéciale ou même dans une classe spéciale, parce que,
là, c'est la fin, et les enfants ont six ans. Si on s'enligne sur un
milieu spécial, Ils vont mourir dans un milieu spécial. Puis, en
bout de ligne, quand ils vont avoir 21 ans, Ils ne pourront pas aller dans les
Institutions, on est en train de les vider. Alors, dans ce sens-là, il
n'y a pas de continuité.
SI on veut un service de transport, il faut s'adresser à qui? Au
ministère des Transports? Pour les loisirs, à un autre
ministère? Pour que mon petit gars puisse aller au parc
l'été, à qui vais-je m'adresser? A la municipalité,
au ministère du Loisir, à l'OPHQ pour avoir de l'accompagnement?
Il n'y a pas de continuité...
La Présidente (Mme Marois): D'accord. Donc, dans ce
sens-là, ce qui est...
M. Faulkner: ...et là-dedans, non plus.
La Présidente (Mme Marois): ...là ne vous
apparaît pas ouvrir vers ce que sont vos besoins, dans le fond,
actuellement?
M. Faulkner: Non.
La Présidente (Mme Marois): Moi, j'ai terminé, M.
le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Juste sur le dernier point,
parce que, effectivement, lorsqu'on pose le problème de
discontinuité de services, on le pose de la manière dont vous
l'évoquez. Dans le monde scolaire, on sait qu'il y a un projet
d'intégration scolaire en discussion actuellement pour approbation par
l'OPHQ. Si ma mémoire est fidèle, la déficience mentale
n'est pas incluse dans le projet que l'OPHO nous a proposé sur le plan
de l'intégration scolaire. Donc, le défenseur des droits des
personnes handicapées ou déficientes, c'est l'OPHQ et,
évidemment, ça pose un problème. Il peut y avoir
effectivement de la discontinuité, mais l'OPHQ est l'organisme qui doit
revendiquer et défendre les intérêts des gens qui sont
handicapés aussi bien que ceux des déficients mentaux. Donc, il y
a des problèmes aussi dans le réseau actuel, même
auprès de ceux qui ont à défendre vos
intérêts.
M. Faulkner: Je ne voudrais pas laisser passer ça, M. le
ministre. Je pense qu'il faudrait vérifier... J'ai lu, la semaine
dernière, le document de l'OPHQ sur le transfert des programmes
spécifiques en déficience intellectuelle. Il a déjà
été question, il y a deux ans, de ne pas transférer pour
cette clientèle.. C'était la position de l'OPHQ. Celui-ci a
changé sa position là-dessus et on...
M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes bien
sûr deçà?
M. Faulkner: Oui, je l'ai lu la semaine dernière,
monsieur; c'est signé Paul Mercure. Les discussions sont
déjà en cours.
M. Côté (Charlesbourg): II faut être
prudent.
M. Faulkner: Pardon?
M. Côté (Charlesbourg): On peut lire des choses,
mais celui qui signe le mémoire pour aller chercher de l'argent sur le
plan de l'intégration scolaire, c'est celui qui vous parle. À
l'occasion, entre ce qui est écrit et ce qui se fait, pas uniquement au
gouvernement, mais dans certaines officines aussi, il y a des
différences. Donc, il faudrait être prudent.
M. Faulkner: Je voudrais bien être prudent, M. le ministre,
mais je voudrais aussi vous rappeler que l'année dernière,
l'OPHQ, pour la clientèle de déficicients intellectuels, a
accordé du service à 686 enfants et que, cette année, il
s'en est ajouté, en plus de ceux-là, 707 ou 729 qui ne peuvent
pas être supportés par l'OPHQ.
M. Côté (Charlesbourg): il faut faire attention,
parce que le débat, on va l'avoir, le vrai débat sur l'OPHQ dans
pas grand temps. Il faut faire attention entre ce qui est
véhiculé et ta vérité. Effectivement, je suis celui
qui, actuellement, défend le dossier de l'intégration scolaire et
on pourrait s'en parler très longuement. C'est pour ça que j'ai
convoqué à mon bureau, au mois de février, la COPHAN. Avec
le conseil d'administration de l'OPHQ, on va tirer des choses au clair sur ce
qui se véhicule par rapport à la vérité.
La Présidente (Mme Marois): Alors, merci, M. le ministre.
M. le leader, ça va? Vous dites merci aux gens?
M. Chevrette: Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Merci de votre
présentation. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 6)
(Reprise à 15 h 5)
La Présidente (Mme Marois): Si les membres de la
commission veulent bien prendre place, nous allons reprendre nos travaux. Nous
avons trois groupes. Nous entendrons trois groupes cet après-midi. Nous
commençons par le Regroupe- ment des ressources alternatives en
santé mentale, qui sera suivi du Regroupement des maisons
d'hébergement jeunesse et du Mouvement Retrouvailles
adoptés-parents.
J'inviterais le Regroupement des ressources alternatives en santé
mentale à prendre place, s'il vous plaît. Est-ce qu'ils sont
là?
M. Côté (Charlesbourg): S'ils ne sont pas là,
ils ont jasé pas mal.
M. Chevrette: Compte tenu de la température, s'il y a un
groupe d'arrivé, on peut passer l'autre et...
La Présidente (Mme Marois): Voilà, c'est ce que
j'allais suggérer. Évidemment, ça peut aussi bousculer
l'autre groupe qui suit. Est-ce que le Regroupement des maisons
d'hébergement jeunesse... Est-ce qu'il y a des représentants qui
sont là? Pas encore. Le Mouvement Retrouvailles...
M. Chevrette: Je propose... Quel groupe, vous autres? C'est quel
groupe?
Mme Comeau (Cécile): Mouvement Retrouvailles du
Québec.
M. Chevrette: Bon, bien, vous allez...
La Présidente (Mme Marois): Si ça ne vous ennuie
pas et que vos membres sont là, on vous entendrait maintenant.
Mouvement Retrouvailles adoptés-parents
Mme Comeau: II n'y a pas de problème, Mme la
Présidente, mais nous aimerions d'abord distribuer de la documentation
à l'intention de la Tribune de la presse. Nous avons 30 exemplaires...
une trentaine d'exemplaires de notre mémoire. Nous aurions aussi des
pièces complémentaires à distribuer aux membres de la
commission.
La Présidente (Mme Marois): II n'y a aucun
problème.
Mme Comeau: Ça va?
La Présidente (Mme Marois): II y a des gens ici qui vont
se charger de ça même pour vous et qui vont nous distribuer...
Mme Comeau: ...ici ou là?
La Présidente (Mme Marois): ...ces documents.
Mme Comeau: Nous nous installons ici?
La Présidente (Mme Marois): Vous vous
installez à l'avant, aux sièges qui sont devant moi, qui
me font face. Je vous remercie et Je vous souhaite la bienvenue au
comité, c'est-à-dire à la commission des affaires
sociales. J'aimerais vous rappeler un petit peu, en une phrase, en fait, les
règles. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre
mémoire et nous demandons à ce que vous vous en teniez à
ces 20 minutes. S'il y a donc des éléments que vous devez
ramasser un peu, vous le faites. Le ministre et les représentants du
gouvernement ont une vingtaine de minutes à leur disposition pour poser
des questions et il en va de même pour l'Opposition, de telle sorte que
nous ne devrions pas dépasser une heure pour entendre votre point de vue
sur ce que nous étudions aujourd'hui, soit l'avant-projet de loi sur les
services de santé et services sociaux.
La personne qui est porte-parole, je crois que c'est Mme Andrée
Carrier, pourrait...
Une voix: Mme Lise Bérubé.
La Présidente (Mme Marois): Vous allez vous
présenter vous-même et nous présenter tes gens qui vous
accompagnent. Ça va?
Une voix: D'accord.
La Présidente (Mme Marois): Mme Bérubé, s'il
vous plaît.
Mme Bérubé (Use): Mme la Présidente et
membres de la commission, II me fait plaisir de vous présenter Mme
Andrée Carrier, ex-présidente de notre mouvement de 1984 à
1989, Mme Lise Bérubé, présidente intérimaire et
directrice de la région de Montréal, Mme Solange Hareng,
directrice à l'exécutif intérimaire, directrice de la
région de Portneuf et présidente du CGU de Québec.
La Présidente (Mme Marois): Qui est qui?
Mme Bérubé: Mme Solange Hareng est à ma
droite; Mme Carrier, à ma gauche; Mme Cécile Comeau,
conseillère politique et directrice adjointe à la région
de Québec.
La Présidente (Mme Marois): Parfait. Ça va... la
présentation de votre point de vue.
Mme Bérubé: Le point sur notre dossier, par ordre
chronologique, le mandat de notre organisme. La mission du Mouvement
Retrouvailles vise à représenter les parents naturels, adoptifs
et les enfants adoptés et non adoptés afin de favoriser les
retrouvailles. Tout ceci mis ensemble représente 1 000 000 de la
population du Québec, soit un sixième.
Rappel de certains faits récents. 1985: Le 20 septembre 1985, le
ministre Chevrette confie au secrétariat le mandat de mise en place et
de coordination d'un comité d'étude sur la recherche des
antécédents socioblologiques. 1986: En mai 1986, le comité
interministériel sur les recherches des antécédents
sociobiologiques a déposé un rapport; le rapport n'est pas rendu
public; dépôt d'une pétition de 42 000 noms. 1987:
Réaction du conseil d'administration du Mouvement Retrouvailles aux
hypothèses d'orientation à la suite d'une rencontre avec la
délégation ministérielle. 1988: Rapport de l'Association
des centres de services sociaux du Québec. Demande de ressources non
récurrentes afin de maintenir les services. En mai 1989, l'Association
des centres de services sociaux du Québec dépose un document sur
la planification annuelle de l'organisme. À la demande du gouvernement,
l'Association des CSS du Québec a élaboré un guide
pratique afin d'obtenir l'uniformisation de la pratique dans tous les CSS.
L'évaluation des besoins Indique 11 125 dossiers en attente.
Nos demandes, nos attentes: obtenir le budget spécial non
récurrent: 10 000 000 $ pour quatre ans attribués aux CSS pour
couvrir les dossiers de 1940 à 1975; obtenir l'engagement du ministre
d'assurer l'accessibilité à des services uniformes et complets
dans tous les CSS du Québec; obtenir l'accès aux banques
d'information gouvernementales afin de faciliter le travail des praticiens dans
les CSS.
Je passe maintenant la parole à Mme Andrée Carrier.
Mme Carrier (Andrée): Est-ce que je dois attendre
que...Cela va?
La Présidente (Mme Marois): Procédez avec votre
intervention.
Mme Carrier: J'aimerais faire un bref retour sur les actions
concrètes et les demandes concrètes du Mouvement Retrouvailles
depuis sa fondation et depuis que nous nous sommes présentés
à la commission Cadieux.
Nos recommandations, c'est la demande de trois droits: le droit aux
origines, ce qui veut dire pour nous l'accès à l'acte de
naissance original avec les nom, prénom des parents biologiques; le
droit à l'information; le droit d'accès au dossier d'adoption
pour les bénéficiaires concernés.
Comme vous le savez, le 14 juin 1984, la Cour d'appel du Québec a
tranché sur le droit à l'information. Depuis ce temps-là,
qu'est-ce qui se passe dans nos CSS? Rien. Nous n'avons pas encore reconnu le
jugement Carrier, le jugement de la Cour d'appel, à un tel point que,
après cedlt 14 juin, les CSS ont été
débordés par la demande d'informer nos parents ou d'informer
notre enfant, ce qui a donné comme suite l'engorgement dans les CSS, la
disparité dans les services, pour ne pas dire, à un moment
donné, l'angoisse totale au niveau de la pratique même, parce que
le phénomène des retrouvailles au
Québec est tout à fait nouveau. Mais il fallait un peu
s'attendre à ça, 20 ans après, que des gens qui sont
nés n'obtiennent pas le droit de connaître leurs
antécédents, le droit d'obtenir leur acte de naissance, le droit
d'obtenir des informations sur leurs parents et le droit de les retrouver s'il
y a demande. (15 h 15)
Dans un troisième temps maintenant, le droit aux retrouvailles,
le droit de rencontre avec le consentement des personnes impliquées.
Comment peut-on penser rencontrer ses parents ou son enfant si nous n'avons pas
l'accessibilité desdites personnes qui détiennent nos dossiers?
M. Chevrette nous disait à un moment donné, lorsqu'il nous a
rencontrés: Attention, les enfants! Il ne faudrait quand même
pas... Il faut faire bien attention; vous avez de ces "outsiders" qui
pourraient venir vous gruger, à un moment donné, venir vous
chercher d'une certaine façon. Mais je pense que vous, en tant
qu'État, vous devez nous protéger contre ces
"outsiders-là". De toute façon, ces droits-là que nous
avons revendiqués, le droit aux origines, le droit à
l'information, le droit aux retrouvailles, nous avons le même parler
aujourd'hui, nous avons les mêmes demandes. Dans ce sens-là, je
voudrais qu'au nom du gouvernement l'on tranche une fois pour toutes sur le
droit aux origines, le droit à l'information et le droit aux
retrouvailles. La demande était identique en 1984, mais elle s'est
désagrégée avec les services que nous n'avons pas
reçus durant les cinq dernières années, même
malgré la Cour d'appel.
Alors, je passe la parole pour la partie synthèse pour ce qui est
des demandes de revendications.
Mme Comeau: Mme la Présidente, MM. et Mmes les membres de
la commission, en bref, notre mémoire se situe dans la même ligne
de pensée que les mémoires présentés
antérieurement. Ceux de 1985 et de 1986 expliquaient le
bien-fondé de nos demandes qui était basé sur des
critères d'éthique, des critères légaux,
médicaux et psychologiques. La cinquième partie de notre
mémoire va s'attarder plus au comment, à la manière de
répondre à ces demandes de retrouvailles. Dans la partie V de
notre mémoire, si vous vous attardez au plan, on s'attarde surtout
à ce qui est travail de législation, clientèle
visée, modalités de fonctionnement et financement.
On a longtemps parlé de l'amendement de la loi 89, les articles
594-625. On a parié de la Charte des droits et libertés de la
personne, les articles 1, 4, 10 et 39 où on parie de la dignité
de l'être humain, de la personnalité juridique, de
l'égalité des droits, de la protection, de la
sécurité et l'attention des parents.
Nous ne comprenons pas, ici, en tant que citoyens, comment il se fait
que des parents qui abusent, qui maltraitent leurs enfants, se les voient
redonner à leur garde simplement après quelques séances de
psychothérapie chez un professionnel en santé mentale quand nous,
nos mères, qui ne nous ont fait aucun mal, ne peuvent même pas
savoir ce qu'il est advenu de nous. On n'est plus au Moyen Âge, on n'a
pas une administration ici au Québec qui relève d'une
république de bananes. Alors, comment se fait-il qu'on ne se donne pas
les outils pour réparer les torts qui ont été
causés à ces gens, des torts que les gens subissent encore 20,
30, 40 et même 50 ans après que les faits aient été
commis? Alors, le travail de législation va toucher aussi la loi sur
l'accès à l'information. Le projet de loi 154 doit être
débattu en Chambre dans les plus brefs délais.
Certaines de nos mamans sont âgées, pauvres et malades.
Elles n'ont pas les moyens de se payer le luxe des lenteurs administratives.
Ça n'a aucun sens. Depuis 1983 que les dossiers s'accumulent et on a su,
lors du comité ad hoc, qu'aucun travail n'avait été fait
concernant les modifications aux lois apportées au niveau du
ministère de la Santé et des Services sociaux.
Concernant la clientèle visée, vous verrez à la
partie III ou IV de notre mémoire de 1990 que nous endossons les
recommandations du rapport de la commission Cadieux ou, si vous
préférez, du Comité interministériel sur la
recherche des antécédents sociobiologiques. Nous aimerions
ajouter à cette clientèle les cas d'adoptions privées
parce que ces adoptions ont été effectuées au
Québec à cause de nos lois. Donc, les gens qui ont
été adoptés d'après ce mode d'adoption ont autant
droit que nous à ces services. Il ne faut pas oublier nos orphelins
aussi. Il ne faut pas oublier nos milliers d'enfants qui ont été
envoyés à l'étranger ou dans d'autres provinces
canadiennes. Ces gens ont droit aux mêmes services que nous et, si
possible, en anglais. Quand on vient de Burnaby, Colombie-Britannique, c'est
tout à fait compréhensible qu'on ne soit pas capable de lire des
documents en français. Alors ces gens ont droit aux mêmes services
que nous dans les mêmes délais.
Au niveau des modalités de fonctionnement, nous demandons
l'uniformisation des procédures de retrouvailles à tous les
niveaux. Nous demandons que des ressources humaines, en personnel
qualifié et en nombre suffisant, soient disponibles dans tous les
centres de services sociaux de la province de Québec afin que les
défais d'attente soient les mêmes d'un centre de service social
à l'autre. Nous demandons que nos travailleurs sociaux n'aient plus les
mains liées. C'est rendu que les travailleurs sociaux sont
obligés de s'en tenir à des vieux bottins
téléphoniques pour essayer de retracer des personnes.
C'est bien beau de dire "la confidentialité", qui sert à
toutes les sauces, mais c'est inadmissible qu'à l'intérieur du
secteur de la santé et des services sociaux un travailleur social qui
est
dans un centre de service social ne puisse pas aller dans un
hôpital ou dans un centre d'hébergement pour personnes
âgées pour retracer une personne en invoquant des pseudo-normes de
confidentialité. On demande l'accès aux bases de données
gouvernementales informatisées, aux archives. On veut que nos
travailleurs sociaux aient accès aux jugements d'adoption qui sont
conservés dans nos palais de justice, dans les greffes de notaires, par
exemple, qui auraient pratiqué des adoptions privées.
Il faut faire en sorte que nos travailleurs sociaux aient accès
aux informations pour pouvoir localiser les gens. On ne veut pas savoir si tel
enfant ou telle mère a eu le SIDA ou des choses comme ça.
Ça ne nous intéresse pas. Ce qu'on veut savoir, c'est où
est rendue la personne. Si nos travailleurs sociaux ont accès à
ces bases de données, ça va diminuer les coûts
d'opération de 80 % à 90 %, d'après les recommandations du
rapport Cadieux.
Au niveau du financement, vous comprendrez que nous n'accepterons pas
d'avoir à défrayer les coûts pour réparer des torts
qui ont été causés par une société qui
était tout à fait intolérante, qui nous a
discriminés, nous et nos mères, simplement parce qu'on n'est pas
né au moment opportun. Je crois que ces normes sociales étaient
basées seulement sur la bigoterie et n'avaient aucun fondement
légal. Aussi, au niveau du financement, nous refusons d'avoir à
défrayer les coûts de ces recherches-là simplement parce
que nous contribuons, par notre collaboration, notre travail, à
l'édification de notre société. Nous participons
déjà, par le biais de nos taxes et de nos impôts, au
financement de nos services de santé et nos services sociaux. Nous
sommes en droit de nous attendre à des services qui nous reviennent de
plein droit au même titre que les autres citoyens du Québec qui,
eux, n'ont pas défrayé un sou pour savoir qui sont leur
père, leur mère, leurs grands-parents.
Alors, ça c'est très important. C'est une question, je
crois, de choix politique que le gouvernement devrait faire parce que les
citoyens, les gens qui les ont élus veulent avoir des services d'abord.
Alors, je crois que les citoyens au Québec reconnaissent cette
primauté de la personne sur les entreprises et il va falloir que
ça transparaisse au niveau de nos services de santé et de nos
services sociaux. Pas question de nous jouer les uns contre les autres et dire:
On ne vous donne pas de sous à vous parce qu'il faut qu'on en donne aux
personnes âgées. Ce langage-là ne fonctionne pas avec nous
et nos représentants aux comités de bénéficiaires,
dans les centres de services sociaux, vont être très vigilants
à ce sujet-là. Nous sommes solidaires des autres usagers des
centres de services sociaux du Québec.
Quant au financement, pour en terminer, vous allez nous dire que la
province est en déficit, mais nous n'y sommes pour rien dans le
déficit de la province de Québec. Ce ne sont pas les maigres
sommes consacrées au service de retrouvailles qui ont creusé ce
trou béant. Vous allez nous dire qu'il y a des besoins partout, on en
est conscients. On a collaboré, par notre travail
bénévole, par notre travail d'accompagnement et d'information de
la population et de nos membres, à faire en partie le travail qui aurait
dû être fait par le gouvernement. On totalise des milliers d'heures
de bénévolat depuis 1983 et nous aimerions que, pour une fois, ce
soit reconnu, dans le sens où le gouvernement accepte de verser les 10
500 000 $ demandés sur une période de quatre ans. 2 500 000 $,
sur une marge de manoeuvre de 150 000 000 $ pour le MSSS, ce n'est pas
énorme, c'est très négligeable.
Si on parle des responsables. Bon, si on prend les BPC de
Salnt-Basile-le-Grand, par exemple. Ça a coûté à peu
près 10 000 000 $, 10 500 000 $ pour envoyer ça outre-mer. Il y
avait des responsables qui avaient généré ces stocks dits
industriels. Ont-ils payé, eux?
Alors, si vous me permettez de terminer sur les nouvelles technologies
de reproduction, il est évident que ces nouvelles technologies ne
devront pas faire en sorte qu'on crée des problèmes
d'identité tels que nous les vivons aujourd'hui. Il est très
important pour un enfant de pouvoir retrouver ses origines. Je cite comme
exemple l'ensemble des maladies héréditaires et familiales et
vous comprendrez très vite les raisons pour lesquelles il faut qu'on
puisse connaître ses origines. C'est un droit fondamental que tout
être humain doit avoir.
Concernant les droits des parents, ces nouvelles technologies ne devront
jamais faire en sorte que des parents biologiques soient destitués de
leurs droits de paternité et de maternité. On ne devra jamais
considérer, non plus, le corps de la femme comme un objet
d'expérimentation. Quant aux manipulations génétiques,
elles devront seulement s'arrêter à des questions
d'amélioration de la santé des individus. Quand on sait qu'il y a
250 000 gênes sur un chromosome et qu'il y en a 46, alors, imaginez que,
si on va foutre le bordel là-dedans, ça va causer des
problèmes pires que ceux qu'on voulait corriger.
En conclusion, mesdames, messieurs de la commission, nous avons
parlé ouvertement et franchement, comme tout bon enfant du Québec
se doit de le faire. Si, dans notre mémoire, on parle avec tant
d'insistance, c'est parce qu'on ne comprend pas encore pourquoi la
société québécoise tarde tant à nous
redonner les êtres que nous chérissons, pourquoi la
société québécoise tarde tant à faire en
sorte que des individus qui sont des citoyens à part entière
aient toute leur identité, comme n'importe quel citoyen? Je connais un
jeune homme qui a eu cinq Identités à un moment donné; II
n'a même pas été capable d'avoir un passeport pour aller en
Europe. Alors,
ce sont des choses qui sont inadmissibles.
On espère que les travaux de législation demandés
seront faits en quatrième vitesse parce que nous, ce qu'on veut, ce sont
des budgets pour le mois de mars, pour la prochaine année
budgétaire qui s'en vient. On veut que les travaux commencent dans les
centres de services sociaux. On en a assez des études, on en a assez des
rapports, c'est le temps de passer aux actions, maintenant. C'a
coûté une fortune, ces études-là, puis il n'y a rien
qui se passe. Il n'y a strictement rien au point de vue action, au point de vue
résultat tangible à l'autre bout. Et 10 500 000 $, ce n'est pas
énorme, compte tenu que les dossiers dorment depuis 1983 dans nos
centres de services sociaux. C'est un budget récurrent qu'on demande,
c'est-à-dire que, quand on aura répondu aux demandes qui sont
là, on pourra s'arranger peut-être avec 500 000 $, 750 000 $, 250
000 $, mais il faut à tout prix commencer.
La Présidente (Mme Marois): Madame, il vous reste à
peine quelques minutes, deux minutes, si vous désirez conclure, Mme
Bérubé, ou si ça va?
Mme Bérubé: Ça va.
La Présidente (Mme Marois): Parfait. Alors, on vous
remercie de cette présentation. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. J'ai été personnellement sensibilisé de
manière un peu spéciale lors de la campagne électorale.
J'étais loin de penser, à l'époque, que je me retrouverais
dans le fauteuil des responsabilités que j'ai aujourd'hui par rapport au
dossier. De toute façon, nous avons eu, avec le Mouvement Retrouvailles,
des rencontres ultérieures, au moins une, à tout le moins, avec
moi, pour une sensibilisation encore plus importante que ce que je connaissais
du Mouvement Retrouvailles, de ses difficultés sur le plan
législatif, de ses difficultés sur le plan financier pour
atteindre les objectifs qu'il vise, qui ne sont pas contestés par
beaucoup de monde, je pense, dans ce cas-ci.
Je me suis, bien sûr, assuré en arrivant au
ministère qu'il y a un certain nombre de choses qui pouvaient se passer,
compte tenu de ce que j'avais entendu lors de notre rencontre au cours de la
campagne électorale. Effectivement, je suis allé, dans un certain
nombre d'informations... Laissons de côté les 10 000 000 $, on y
reviendra, parce que j'aurai probablement la môme réaction que
j'ai eue au moment où vous m'avez rencontré. Donc, il y a un
problème d'accessibilité à l'information, li y a un
problème de disponibilité de ressources, de main-d'oeuvre au
niveau des CSS pour répondre aux demandes. Il y a des choses qui peuvent
être faites, qui vont effectivement permettre de diminuer les coûts
estimés de 10 000 000 $, et sur ça je pense qu'à peu
près tout le monde s'entend.
Évidemment, vous saisissez une opportunité qui est celle
de la réforme pour faire valoir votre point de vue. Ce n'est pas moi qui
vais vous en blâmer. Je pense que vous avez cette
habilité-là de vous servir de la tribune, alors qu'on doit parler
de la réforme du ministère qui est proposée.
Évidemment, la porte étant ouverte, vous venez sensibiliser les
parlementaires, et l'opinion publique par le fait même, à
l'importance de votre cause.
Avant de passer à des questions plus spécifiques sur cette
cause, ma première question serait peut-être sur la réforme
elle-même, en termes de propositions. Quels sont vos commentaires quant
à la réforme? À partir de ce moment-là, dans la
mesure où il y a des choses positives ou négatives, on pourra en
discuter, me laissant quelques instants pour être capable de discuter
avec vous du problème spécifique des retrouvailles. (15 h 30)
Mme Comeau: Concernant le projet de réforme à la
Loi sur les services de santé et des services sociaux, il faudrait faire
en sorte qu'à l'intérieur de notre réseau de la
santé et des services sociaux nos travailleurs sociaux aient
accès à des données, que ce soit autant pour le Mouvement
Retrouvailles que pour la recherche de personnes disparues ou des choses comme
ça. il va falloir donner à nos travailleurs sociaux, je crois,
une reconnaissance plus large de leur statut professionnel. Je m'explique. Les
travailleurs sociaux sont des gens qui, règle générale,
ont une excellente formation académique. Ce sont des gens qui sont
profondément humains. Ce sont des gens qui côtoient la souffrance
et la misère à longueur d'année. Ils ont un vécu
que bien des gens de l'ordinaire, de la rue, n'ont pas. Et, souvent, ils sont
obligés de se buter a toutes sortes de lois et de réglementations
qui vont faire entrave à leur travail, que ce soit au niveau des
recherches ou que ce soit au niveau des recommandations ou des actions qu'ils
recommandent.
J'ai souvent entendu dire de travailleurs sociaux qu'on ne peut pas
faire ça parce qu'il y a tel contrôle de telle façon. On ne
peut pas faire ça parce qu'on ne nous autorise pas à avoir
accès à telles et telles informations. Je crois qu'une
secrétaire médicale qui travaille dans un cabinet de
médecin a plus de latitude qu'un travailleur social parce qu'elle prend
des données confidentielles, elle les rentre dans le dossier et
ça vient de s'éteindre. Si jamais un autre cabinet de
médecin, un spécialiste, a besoin de consultation, ce qu'elle
fait, c'est qu'elle va aller chercher le dossier, elle va en parler au
médecin et elle va transmettre les informations. Tandis que nos
travailleurs sociaux qui sont, par exemple, dans un centre de service social
comme
celui de Québec, n'ont pas accès à des dossiers
médicaux, par exemple, pour essayer de retracer une personne. Pourtant,
c'est à l'intérieur du même ministère. Ils n'ont pas
accès aux fichiers de la Régie de l'assurance-maladie du
Québec. Pourtant, c'est le môme ministère qui chapeaute
tout ça. Ils n'ont pas accès à des informations contenues
dans des centres d'hébergement pour personnes âgées. Il y a
beaucoup de nos mamans qui sont quand même âgées, mais ils
ne peuvent pas donner les informations sur ces personnes-là, ne
serait-ce que la date de naissance, par exemple.
Prenez une dame qui s'appelle Tremblay et qui vient du Lac-Saint-Jean.
Quelle est la clé pour savoir si on a la bonne Mme Tremblay ou si on n'a
pas la bonne Mme Tremblay, sinon la date de naissance? On ne peut même
pas leur donner cette information-là. Si on a 50 Mmes Tremblay dans les
centres d'accueil de la région de Québec, bien là, c'est
quoi? Est-ce qu'on va tirer à pile ou face? Non, quand même, ce
n'est pas sérieux. Les moyens sont tout à fait
disproportionnés. Je ne crois pas que nos travailleurs sociaux, dans
toute l'histoire du Québec, aient transmis des informations dites
confidentielles. Moi, je n'ai jamais entendu dire qu'un travailleur social
n'avait pas respecté le secret professionnel par lequel il était
lié. Il y a peut-être des cas d'exception, mais il y a des
modalités à trouver pour tout ça pour faire en sorte que
les gens n'aient pas à attendre six mois ou n'aient pas à devoir
se démerder avec des bottins téléphoniques de
Montréal qui datent des années cinquante et quarante. C'est
inadmissible.
Il est dit dans ce projet de loi là que toutes les lois du
Québec devront être modifiées pour faire en sorte que cette
nouvelle loi puisse s'appliquer sans entrave. Alors, ne serait-ce que pour les
services postadoption, regardez toutes les lois qui entrent en contradiction.
Le Code civil, la loi sur l'accès à l'information, le droit..
Ça ne finit plus. Pourtant, ça serait si facile de
légiférer rapidement là-dessus.
M. Côté (Charlesbourg): Ça va amener ma
première question spécifique sur le droit d'accès à
l'information...
Mme Comeau: Oui.
M. Côté (Charlesbourg):.. parce que c'est une
question fondamentale. et, selon qu'on a accès ou pas, la facture
augmente ou diminue, en termes de coûts.
Mme Comeau: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Le coût, si j'ai
souvenir des conversations que nous avions eues, do 10 000 000 $ était
celui du statu quo actuel où on est obligé de faire des
démarches, de multiplier des démarches de part et d'autre dans le
but de faire ces retrouvailles.
Dans la mesure où, effectivement, le projet de loi qui, dans un
premier temps, avait été déposé, ou, à tout
le moins, au début des discussions autour de certaines modifications
à la loi sur l'accès à l'information... Il permettait,
quant à lui, de diminuer considérablement les coûts qui,
au-delà de tout ça, se situeraient à peu près
à 2 000 000 $ ou 2 500 000 $, si les chiffres sont encore bons au moment
où nous nous parlons. Donc, il y a une amorce de solution qui est dans
des amendements législatifs à la loi sur l'accès à
l'Information, qui doivent, de toute manière, quand même avoir
leur limite. Il me semble, dans mon esprit à moi, que le
législateur lorsqu'il a fait la loi d'accès à
l'information savait qu'il y a quand même certaines données qui
devaient demeurer confidentielles. Évidemment, c'est un problème
qui n'est pas facile. Vous avez, d'une part, des parents qui veulent retrouver
leur enfant, des enfants qui veulent retrouver leurs parents et il y a aussi
des gens qui ne veulent pas se retrouver. On peut se retrouver dans une
situation où un enfant veut retrouver sa mère et que sa
mère ne veuille pas revoir l'enfant. Il y a des problèmes... Ce
sont des problèmes que vous vivez, j'imagine, à chaque jour.
Est-ce que les mesures que vous aviez évoquées à
l'époque... Vous avez eu des rencontres avec ma
prédécesseure Mme Thérèse Lavoie-Roux et un
cheminement avait été établi à l'époque:
modification à la loi d'accès à l'information, protocole
uniforme au niveau des CSS quant au traitement des dossiers et, par la suite,
rencontre avec le ministère, parce que vous m'avez donné une
réponse tantôt que je n'avais pas encore eue au ministère
dans votre intervention sur le plan du partage des coûts. Le
comité qui s'est réuni avec le Mouvement Retrouvailles dans le
but de faire un certain bout de chemin pour régler une partie des
dossiers, ça s'est fait, me dit-on, à moins que je sois mal
informé. Dans cet aspect-là, on attend la réaction du
comité du Mouvement Retrouvailles sur certains documents que le
ministère vous a transmis. Je pense qu'il faut prendre le temps de les
regarder, mais il faut quand même admettre... On dit de manière
catégorique qu'il n'y a rien qui s'est fait, que c'est long. C'est vrai
que c'est long, de 1985 à aujourd'hui, c'est long pour celui qui attend,
pour celle qui attend. Je comprends ça. Mais quand on dit tout de go
qu'il n'y a absolument rien qui s'est fait, je pense qu'il y a un bout de
chemin qui a été fait. On est sur le point de régler un
certain nombre de dossiers Accès à l'information, vous dites
qu'il faut revenir à une législation le plus rapidement possible.
La loi d'accès à l'information, ça m'apparaît
évidemment un dossier qui a subi le test gouvernemental. On me dit,
puisque ça ne relève pas de moi, que ça a
nécessité certaines modifications pour lesquelles vous avez
été
consultés. Disons que c'est un processus qui est en cours sur le
plan législatif et qui devrait permettre un accès plus facile
à un certain nombre de données. Est-ce que vous avez...
Mme Comeau: Si vous permettez, M. le ministre, avant de passer la
parole à Mme notre présidente, Mme Bérubé, vous
avez soulevé le cas des problèmes avec la loi sur l'accès
à l'information: des problèmes juridiques, des problèmes
légaux. Je crois que le Québec ne s'est pas posé tant de
problèmes que ça quand il a transmis toutes les informations
contenues dans la base de données de la Régie de l'assurance
automobile du Québec aux amputés de guerre du Canada dans un but
militaire. Alors, les problèmes, il ne faudrait quand même pas en
voir où il n'y en a pas. Nous ne voulons pas avoir des informations sur
la vie personnelle des gens, tout ce qu'on veut, c'est qu'un travailleur social
dûment autorisé, pas nous, pas Pierre, Jean, Jacques, qui
arriverait de n'importe où, qu'un travailleur dûment
autorisé ait accès à ces bases de données, à
ces registres-là, manuels ou informatisés, pour pouvoir localiser
les personnes, pour éviter des coûts supplémentaires
à l'État dans le but de rationaliser.
Concernant les refus d'enfants ou le refus de parents de se retrouver,
il y a déjà des provisions dans la Loi sur l'adoption, à
cet effet-là. Maintenant, au niveau des coûts, l'une des
idées dans lesquelles le Mouvement Retrouvailles a accepté de
siéger en comité ad hoc, c'est que nous avons
énormément de ressources bénévoles à offrir.
Je crois que c'était... Le Mouvement Retrouvailles n'a jamais
refusé catégoriquement quoi que ce soit avant d'aller voir de
quoi il était question avant. Alors, pour le comité ad hoc
maintenant, je vous passe Mme Lise Bérubé, qui a assisté
à la dernière séance de travail.
Mme Bérubé: Si on fait un peu un historique du
mouvement du côté bénévolat depuis 1983, je pense
que depuis la fondation de ce mouvement, concernant le soutien à nos
membres et le soutien aux adoptés, on a économisé
déjà beaucoup de sous à notre gouvernement. Pour le
comité ad hoc que j'ai personnellement rencontré, je pense que,
d'une part, il faut aller chercher une autre fois l'approbation de nos membres
à ce niveau. Déjà en mars 1987, avec Mme
Thérèse Lavole-Roux, notre conseil d'administration avait
décidé qu'il n'entérinait pas des frais pour les
retrouvailles. Le comité actuel, le comité ad hoc, nous propose
un document de travail qui va être apporté à notre conseil
d'administration et à nos membres à travers la province pour
savoir et connaître leur idée face à tout ça.
Mais demander à des adoptés et des mères naturelles
de payer pour connaître leurs origines, je pense que c'est trop demander.
Les enfants dits naturels, entre parenthèses, n'ont jamais eu à
payer pour connaître leur identité.
M. Côté (Charlesbourg): Si ça peut être
une réponse, j'ai fait vérifier l'intention de la ministre des
Communications quant au projet de loi et il serait effectivement
déposé à la reprise de la session au mois de mars. Donc,
pour adoption à la session hivernale et printanière.
Quant à l'autre aspect qui est celui du recouvrement de certains
frais à moins que je me trompe, dans les conversations que j'avais eues
à l'époque avec un groupe plus restreint, j'en conviens,
même les gens disaient qu'ils étaient prêts effectivement
à payer une partie de certains frais, mais pas tous les frais. Donc, il
y avait un certain acquiescement de toute façon. C'est votre
liberté que d'aller consulter vos membres afin de savoir si c'est normal
de payer ou pas mais, évidemment, on peut prendre toutes sortes de
comparaisons qu'on voudra sur le plan de l'affectation des sommes
budgétaires du gouvernement par rapport aux besoins d'aujourd'hui. Votre
besoin en est un parmi tant d'autres où il y a des choix à faire
et ce que le principe législatif va faire par l'accès à
l'information c'est de diminuer la facture de 10 000 000 $ à 2 000 000 $
ou 2 500 000 $ et, à partir du moment où c'est fait, je pense
qu'il y a des décisions qui devront être prises sur X
années. Évidemment, dans ces circonstances-là vous
m'étonnerez un peu dans la mesure - et ça c'est votre
liberté mais c'est aussi la mienne de le dire - qu'il n'y ait pas cette
volonté personnelle de vouloir défrayer certains coûts
inhérents à cette recherche. Quand on parle de certains
coûts, ça ne veut pas dire tous les coûts. Et,
évidemment, c'est un choix que vous aurez à faire. C'était
pour ça que la création du comité avait été
mise sur pied, non pas pour dire: Vous allez payer, mais qu'on s'entende,
compte tenu de ce que j'avais vécu chez nous au moment où on
s'est rencontrés, sur un processus, sur un protocole identique
d'intervention au niveau des CSS parce que l'intervention ne se faisait pas de
la même manière partout. Donc, il y a uniformité dans
l'action pour que celui qui va à Montréal soit traité de
la même manière que celui qui va à Québec ou
ailleurs et ce protocole-là, me dit-on, vous a été
présenté ou soumis et le comité lui aussi a fait un
certain travail. On attendait après des réponses mais ce que je
comprends, sur le financement, la réponse est déjà
prête.
Mme Bérubé: Non pas qu'elle soit déjà
prête, mais je pense, qu'il faut quand même-Depuis 1985 qu'on nous
demande les mêmes choses, qu'on nous demande de payer des frais. En 1987,
lors d'un conseil d'administration, on s'était prononcés. Alors,
grâce au comité ad hoc qu'on a rencontré quand même
seulement voilà quinze jours, je pense qu'il faut aller chercher une
autre fois l'approbation de nos membres face
à cène demande.
M. Côté (Charlesbourg): si j'ai compris, mme comeau,
tantôt dans son intervention, ce qu'elle nous a dit, c'est qu'il
n'était pas question de payer.
Mme Comeau: En mars 1987, nos membres nous ont dit: On ne paye
pas. O.K. Comme Je vous ai dit tout à l'heure, le Mouvement
Retrouvailles n'a jamais refusé d'entendre la partie gouvernementale et
d'aller consulter ses membres après mais je vous le dis: Attendez-vous
de recevoir un refus parce que les gens ça fait tellement de fois qu'ils
se font poser cette même question qu'on ne vous garantit pas qu'ils
acceptent de payer. Ah, tu as accepté de payer des frais minimaux de 20
$, 25 $, 30 $, O.K., uniformes à tout le monde, et ça a
collé! 610 $ basés sur les normes d'admissibilité de
l'aide juridique, il y a une sacrée marge de manoeuvre là. Il ne
faut pas oublier une chose, nos enfants et nos parents vont avoir à se
déplacer pour se rencontrer. Parrainer une mère qui part du
Témiscamingue ou de l'Abltibi qui va rencontrer son enfant en
Gaspésie ou à Québec, ces gens-là vont être
obligés de débourser déjà de leurs poches pour se
rencontrer. Alors, baser ça sur des critères
d'admissibilité à l'aide juridique quand on sait qu'une personne
vivant seule, qui n'a pas de responsabilité parentale n'a pas
accès à cette aide juridique là à partir du moment
où elle gagne plus de 170 $ par semaine, c'est tout à fait
irréaliste. Les gens n'accepteront pas des critères aussi
serrés que ça. Encore une fois, comme on vous l'a dit, on est des
payeurs d'impôts et on contribue par notre travail à
l'édification de notre société. On va accepter de payer
des majorations de taxes et d'impôts pour améliorer nos services
de santé et nos services sociaux comme tous les citoyens se doivent de
le faire, c'est notre devoir. Mais on n'a pas, nous, à payer, en lieu et
place de la société, des frais pour des Injustices qui nous ont
été faites. Quand même! C'est comme si on demandait
à quelqu'un qui vient de se faire cambrioler de verser la prime que son
assurance contre le vol devrait lui verser.
La Présidente (Mme Marois): Merci. M. le leader de
l'Opposition. (15 h 45)
M. Chevrette: Moi aussi, je voudrais vous féliciter pour
votre habileté à profiter d'une tribune pour exposer votre
problème. Malheureusement, au sujet de la réforme ou de la
structure, je n'ai pas entendu un mot. Je m'étais préparé
des questions en fonction de la structure, mais je pense que vous voulez
traiter de votre dossier. Si le ministre a eu la chance d'en rencontrer une
quarantaine, moi j'ai eu la chance d'avoir deux bains de foule et ils
étaient pas mal plus nombreux que ça, 400 ou 500 à
Joliette et peut-être autant à Montréal durant
l'élection de 1985, et j'étais aussi ministre à
l'époque. je voudrais savoir, dans un premier temps, par rapport
à votre document-synthèse, parce que j'aurais une question... sur
un principe, j'ai toujours eu des nuances; sur d'autres, j'avais peu de
nuances, mais, sur un principe, j'ai toujours eu des nuances et je voudrais
savoir si votre dossier a évolué dans ce sens-là. quand
vous parlez de droit aux origines, vous voulez connaître le nom et le
prénom de vos parents biologiques. est-ce le cas
présentement?
Mme Carrier: À savoir si on maintient ce
droit-là?
M. Chevrette: Non, non, si vous avez ce droit
présentement.
Mme Carrier: Non, nous ne l'avons pas. M. Chevrette:
Bon.
Mme Carrier: Ce qui veut dire que le droit d'accès
à l'acte de naissance originel, avec les nom et prénoms des
parents biologiques, nous ne l'avons pas.
M. Chevrette: Bon. C'est exactement ce...
Mme Carrier: Pourquoi le détachons-nous, M. Chevrette, du
droit à l'Information? C'est que la personne qui a le droit de
connaître le nom de ses parents ne veut pas nécessairement passer
à l'étape des retrouvailles.
M. Chevrette: Non, non, je vous suis. Mme Carrier:
Oui?
M. Chevrette: Je vous suis, mais j'essaie de faire un lien entre
le point un et le point trois...
Mme Carrier: Bon.
M. Chevrette: ...de votre synthèse. Je prends pour acquis,
moi, en principe, que la liberté des uns ne doit pas entraver la
liberté des autres. Je ne sais pas si vous me suivez.
Mme Carrier: Puis...
M. Chevrette: A partir du point un...
Mme Carrier: Oui, oui.
M. Chevrette: ...par rapport au point trois, et suivez-moi bien
dans mon raisonnement.
Mme Carrier: Oui.
M. Chevrette: Si je vous dis que vous êtes la fille de
Lucie Tartempion et de Guy Che-
vrette, comment voudriez-vous sauver toute la liberté de Guy
Chevrette de faire connaître qu'il est votre père ou non, tout en
vous donnant votre droit de connaître Guy Chevrette? C'est là que
Je concilie mal le point un et le point trois. J'ai toujours eu de la
difficulté, d'ailleurs... Je vous al toujours dit, le temps que j'ai
été ministre, que je reconnaissais que vous aviez droit à
de l'information, que vous aviez le droit de dire: Je suis née d'une
mère qui était infirmière et tout le "kit", que vous aviez
le droit de demander si les parents voulaient vous voir. Mais, si on
reconnaît le droit à une mère, par exemple, qui
était, je ne le sais pas, de Joliette et qui s'est expatriée
à Québec et qui veut enterrer avec elle l'expérience
douloureuse qu'elle a vécue et dont elle ne voudra plus jamais parler...
Comment voulez-vous qu'elle puisse garder cette liberté-là si, au
point un, vous lui accordez... J'ai toujours le môme dilemme et je n'ai
pas eu de réponse de quelque groupe que ce soit là-dessus pour
essayer de rendre justice à tout le monde. Mais j'aimerais que vous
m'expliquiez cela parce que je ne saisis pas, et vous me comprenez bien, j'en
suis sûr.
Mme Carrier: Oui, je vous comprends bien. Je vous comprends assez
bien pour le temps qu'on s'est assis ensemble pour en discuter, à partir
du fait que nul n'a le droit de déchoir une personne de sa filiation, de
sa généalogie, sous prétexte que sa naissance était
comme pas correcte, et je m'explique. J'ai rencontré mes parents
biologiques et mon père serait fier de moi, aujourd'hui, de me voir
assise ici. Mais personne d'entre vous ne sait qui est mon père et j'ai
respecté l'anonymat. Vous avez affaire à une personne adulte. Mon
père a gardé ses grands secrets et il est mort comme il a
vécu, heureux. Je n'ai entravé ni sa vie privée ni sa vie
publique.
Lorsque nous mentionnons le droit aux origines...
M. Chevrette: Je vous arrête pour 30 secondes. Pour que
vous puissiez rencontrer votre père, c'est parce qu'il y a eu un
intermédiaire entre vous et votre père qui vous a dit: Je vais
aller demander à ton père s'il veut bien te rencontrer.
Mme Carrier: Oui.
M. Chevrette: Et votre père a dit oui. Mais, si votre
père avait dit non et que vous aviez connu le nom de votre père,
est-ce que vous pourriez présumer de votre réaction? C'est juste
là le hic. J'ai rencontré des gens qui m'ont dit: Moi, ma
liberté, monsieur, j'ai gardé ce secret bien à moi, j'ai
refusé de le dire à mon mari, il ne le sait même pas et, si
jamais vous deviez consentir au droit aux origines tel que stipulé par
le Mouvement Retrouvailles, vous risqueriez peut-être - je dis bien
peut-être, elle ne pouvait pas présumer de la réaction de
son mari - de désunir une famille que j'ai bâtie et je suis seule
à souffrir de mon passé. C'est dommage, mais j'ai
décidé de le faire. Est-ce que ce n'est pas la liberté de
cette personne aussi?
Je veux vraiment que vous compreniez le point de vue de ceux qui
s'expriment différemment.
Mme Carrier: Le cas que vous mentionnez ici, M. Chevrette, je
l'ai aussi vécu personnellement avec la mère qui a refusé
la rencontre, dont je connais le nom, la rue, le numéro de
téléphone et dont je respecte le refus.
M. Chevrette: Dans le cadre des lois actuelles et du travail du
travailleur social actuel, vous ne devriez pas connaître le nom de votre
mère, son adresse et son nom.
Mme Carrier: Elle a été informée. Il y a eu
une première rencontre et la mère a refusé.
M. Chevrette: II y a eu une première rencontre avec
vous.
Mme Carrier: Oui.
M. Chevrette: Ah! Donc, elle a accepté de faire une
première rencontre. C'est différent de ce que vous dites. Je ne
comprends pas d'abord.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce que c'est la
professionnelle qui a rencontré la mère ou si c'est
vous-même?
Mme Carrier: La professionnelle a rencontré la mère
et moi, j'ai rencontré la mère un petit instant, le temps qu'elle
me dise qu'elle n'ouvrait pas son 39e tiroir à l'époque. Alors,
j'ai respecté ça.
M. Chevrette: Donc, elle a accepté quand même de
divulguer... Je m'excuse, je vous arrête. Elle a donc accepté de
divulguer qui elle était.
Mme Carrier: Oui.
M. Chevrette: Sauf qu'elle ne voulait pas avoir de liaison avec
vous.
Mme Carrier: C'est ça.
M. Chevrette: Mais vous savez qui?
Mme Carrier: Oui.
M. Chevrette: Est-ce que c'est différent, et c'est
là, Mme Carrier, que je vous questionne... Est-ce que ce n'est pas
différent par rapport... À supposer que je suis fils sans
connaître les
origines biologiques de mon père et de ma mère et qu'ils
disent non avant même que je les rencontre, qu'est-ce que ça me
donnerait à moi de connaître leur nom s'ils ne veulent même
pas me rencontrer et qu'est-ce que ça me donnerait, sinon
peut-être de m'enligner précisément pour chercher à
les voir, chercher à leur faire savoir que je sais, chercher
peut-être à débalancer psychologiquement leur vie? C'est
ça que je veux savoir. C'est sérieux, c'est très
sérieux.
Mme Comeau: Je comprends les inquiétudes de M. Chevrette.
Il ne faut pas débarquer dans la vie privée des gens comme les
"Marines" l'ont fait sur les plages de Normandie lors de la dernière
Guerre mondiale. Ce n'est pas ça du tout que nous voulons faire. Il
n'est pas question que je me pointe chez mes parents après la
grand-messe du dimanche et dire: Bonjour, c'est mol, j'arrive. Absolument pas
du tout.
Ce que nous voulons, c'est que la confidentialité concernant le
passé de nos parents soit respectée, dans le sens que le
travailleur social n'aille pas le crier sur les toits, dans le sens que, moi,
je n'irai pas crier sur les toits que Mme X, que M. Y, sont mes parents
biologiques et qu'ils m'ont confié à l'adoption en 1953. On
s'entend très bien là-dessus. Si nos parents biologiques nous
demandent de garder confidentielles les informations qui les concernent, nous
allons le faire.
Les cas de refus maintenant. Il y a déjà...
M. Chevrette: Mme Comeau, pourriez-vous me permettre de vous
arrêter juste sur ce point?
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: Je vais essayer de suivre le raisonnement avec
vous.
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: Vous dites qu'il n'est pas question que vous criiez
sur tous les toits...
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: ...si vos parents biologiques demandent de ne pas
en parler. Mais qu'est-ce qui vous dit... Je suis votre fils...
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: Je sais que c'est vous qui êtes ma
mère.
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: Et vous me demandez à moi, Guy
Chevrette...
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: ...de ne pas dire que vous êtes ma
mère.
Mme Comeau: Oui.
M. Chevrette: Je vous dis: Écoutez, je fais une
dépression nerveuse, je me tiens chez vous, je me tiens au
téléphone pour vous parler, pour essayer de vous convaincre.
Est-ce que vous pensez que ça ne peut pas arriver, ces choses?
Mme Comeau: Comme dans toute situation, monsieur, il y a toujours
des cas d'exception. Mais, si vous êtes mon fils et que je suis votre
mère, si vous avez souffert de la séparation arbitraire que nous
avons subie, quand on se sera parlé entre les yeux pendant une couple
d'heures, vous allez comprendre les raisons pour lesquelles je ne voudrai pas
que vous divulguiez le secret qui nous lie. Alors, peut-être que si j'ai
20 ans ou 18 ans de plus que vous, si on nous volt ensemble, vous pourrez
passer pour mon amant, à la rigueur, mais il n'y a personne qui va se
douter que vous allez être mon fils. Tous les...
M. Chevrette: II y a des fils qui se maga-nent plus que leur
mère.
Mme Comeau: ...enfants à qui on a demandé de
conserver l'anonymat, ça s'est remarqué d'un bout à
l'autre du Canada, ils l'ont respecté parce qu'ils comprennent les
mobiles pour lesquels les parents demandent qu'on conserve cet
anonymat-là. Ce qu'on veut, nous, ce n'est pas une reconnaissance
publique de paternité ou de maternité. Ce qu'on veut c'est un
lien affectif pour combler un vide qu'on a eu dans notre vie. C'est juste
ça qu'on veut.
M. Chevrette: Je suis votre raisonnement, Mme Comeau. Et à
mon point de vue, si on devait arriver à l'octroyer, si on veut
être responsable, il faut d'abord préparer les mentalités
à un tel fait public. Ça ne peut pas se faire du jour au
lendemain par législation, si on est un tant soit peu responsable.
Écoutez, ce sont des concepts de droit et des concepts de
liberté. Des concepts de droit et de liberté, ça ne se
définit pas sans un long cheminement public pour préparer des
mentalités à ça. Pour que des gens aient le temps aussi de
préparer tes proches à un tel fait. Moi, je sais que je pourrais
très bien partager votre point de vue. Et, si j'étais dans la
même situation, je vous dirais: Pourriez-vous me donner une couple
d'années, peut-être, ou une couple de semaines, en tout cas, pour
que je prépare peut-être mon conjoint au fait...
Mme Comeau: Oui, monsieur...
M. Chevrette: ...que je lui ai fait des
cachettes pendant 20 ans, 25 ans? Savez-vous ce qui est arrivé
à Montréal? Je ne sais pas si je peux le raconter.
J'hésite même. En tout cas. Je ne donnerai pas les professions
parce qu'on pourrait peut-être deviner. Une femme qui est assise avec son
mari à souper avec ses trois enfants et, à l'heure du souper...
Il y a quelqu'un, une agence privée qui a trouvé les parents.
À l'heure du souper, il y a quelqu'un qui entre en pleurant: Moi, je
veux vous voir, maman. Elle a caché ça à son mari pendant
des années. Elle sait qu'il ne le savait pas. Qu'est-ce que vous pensez
qui arrive comme choc?
Au lieu d'avoir une personne qui est émotivement frappée,
vous risquez d'en avoir cinq. Vous ne croyez pas, à ce moment-là,
que...
Mme Comeau: Non ...
M. Chevrette: ...c'est quelque chose qui se prépare de
longue main? Ce sont des droits que tu peux reconnaître en principe, mais
tu dis, en pratique, ce n'est pas vrai qu'on peut passer à
l'étape de la reconnaissance immédiate sans avoir un cheminement
psychologique long, une préparation des mentalités. Il me semble
que ça aurait plus... Il me semble qu'au départ, en se tenant au
consentement...
Mme Comeau: II y a des solutions... Il y a des solutions à
tout ça, monsieur. Vous me dites qu'à Montréal, ce qui
s'est passé, c'est une agence privée. Justement, si le
Québec avait eu en temps et lieu des services compétents offerts
à ces personnes-là, ça ne se serait jamais passé de
cette façon-là. Alors, ça c'est un danger, des agences
privées. Je dois le reconnaître. Quand vous parlez qu'il faut
préparer les gens à ça, je vous donne l'exemple de la loi
en Nouvelle-Zélande. J'ai eu un compte rendu de M. K. Griffith, le
père de l'ouverture des dossiers d'adoption en Nouvelle-Zélande.
Soit dit en passant, depuis 1985, on a fait 8000 retrouvailles,
c'est-à-dire qu'on a fait se rencontrer 16 000 personnes.
À l'intérieur de cette loi-là, il y a une provision
qui dit que quelqu'un qui n'est pas prêt à retrouver son enfant ou
son parent, qu'il avertisse le centre de service social avec lequel il fait
affaire. Autrement dit, une femme qui attend, par exemple, que son conjoint
décède parce que son conjoint ne savait pas, ignorait qu'elle
avait eu un enfant avant de se marier et qu'elle voulait qu'il garde ses
illusions jusqu'à sa mort, on se comprend très bien, alors, cette
dame-là peut envoyer une lettre au centre de service social où
est le dossier de son enfant et dire: Présentement, je ne suis pas
prête à des retrouvailles parce qu'il faut que je prépare
mon mari. Il faut que je prépare les demi-frères ou les
demi-soeurs de cet enfant, mais je veux le retrouver. Moi, je veux le retrouver
à mon moment. Ça, on est tout à fait d'accord avec
ça.
M. Chevrette: à ce moment-là, je vous prends au
mot, reconnaissez-vous que votre point un ne pourrait pas être
appliqué tant et aussi longtemps...
Mme Comeau: Le point un...
M. Chevrette: Le droit à nos origines.
Mme Comeau: C'est qu'on a droit à nos origines. C'est
qu'on peut avoir droit à nos origines...
M. Chevrette: O.K., c'est un bout différent.
Mme Comeau: On a toutes sortes de transferts de
responsabilité ici, au gouvernement. Il y a des transferts de
responsabilité du fédéral au provincial, du provincial au
municipal, et ainsi de suite. Ne pourrait-on pas faire peser sur les
épaules de l'enfant qui demande à retrouver son parent, par
exemple, la responsabilité de la confidentialité des
données? Si tu paries, bonhomme, tu paies l'amende et tu vas en
prison.
M. Chevrette: Si je résume, Mme Comeau...
Mme Comeau: Est-ce qu'on ne pourrait pas faire des choses comme
ça?
M. Chevrette: Si je me résume, celui et celle qui ont
donné naissance à un enfant qu'ils ont confié à
l'adoption seraient donc la clé de départ pour octroyer le droit
aux origines.
Mme Comeau: Non, monsieur, parce que nous aussi on a droit
à nos origines. N'oubliez pas ça, là. (16 heures)
M. Chevrette: Bien, c'est parce qu'on s'explique mal. Je vais
essayer de reprendre, d'abord, ce que j'ai dit. Vous m'avez dit tantôt,
vous venez à peine de me dire... Oui.
La Présidente (Mme Marois): II faudrait terminer.
M. Chevrette: Oh! Je m'excuse, oui. Dernière question,
vite, vite. Vous m'avez dit, tantôt, que vous étiez prêts
à respecter le droit des autres aussi. A partir de là, si une
femme écrivait à un CSS et disait: Moi, il n'est pas question, je
n'accepte pas que vous entrepreniez, de quelque nature que ce soit, une
enquête pour fins de retrouvailles; j'étais fille-mère,
j'ai donné naissance à une fille qui a été
confiée à l'adoption et qui porte tel nom et, si elle fait des
démarches, je refuse. Malgré ça, vous, si vous
étiez sa fille, vous voudriez savoir le nom de la mère et le nom
du père. Est-ce que c'est ça que vous me dites? Malgré le
refus...
Mme Comeau: Moi, parce que j'y ai droit...
M. Chevrette: ..systématique...
Mme Comeau: II y a la notion de consentement, cher monsieur.
M. Chevrette: Mais c'est la clé.
Mme Comeau: II y a la notion de consentement. Même si des
parents consentent à ne pas connaître leur enfant, même si
des parents ont consenti de plein droit, de plein gré à laisser
leur enfant pour adoption, nous aussi, on est des êtres humains, on n'est
pas des chiens, on ne descend pas d'extra-terrestres, il faudrait comprendre
ça. Nous aussi, on a des droits. Vous disiez tantôt que les droits
de l'un s'arrêtent là où les droits de l'autre commencent.
Mais II ne faudrait pas seulement voir, non plus, les droits des parents qui,
souvent, ont eu des pressions sociales sur eux. Souvent, ces gens-là,
s'ils sont bien contactés par un travailleur social compétent,
toutes leurs défenses vont tomber une à une et il n'y aura aucune
pression ni aucune sollicitation qui va se faire de ce
côté-là.
M. Chevrette: Mais dans ce cas-là...
Mme Comeau: Les enfants aussi ont des droits.
M. Chevrette: Est-ce que je peux me permettre, quand même,
une dernière remarque ou un conseil? Pour vendre un tel droit, dans la
conjoncture actuelle, avec les mentalités comme elles sont, demandez
plutôt... À mon point de vue, si vous voulez faire cheminer votre
dossier, plutôt que de vous braquer sur le droit et faire face à
un mur de brique dans l'opinion publique, je pense que vous auriez avantage
à vous associer à des campagnes de sensibilisation pour le droit
aux origines en particulier. On a vécu, avec toutes nos contraintes
religieuses, que vous avez connues, qu'on a connues, que j'ai connues, des
ères où on le cachait. Et le fait de cacher, c'est une
liberté tout autant que le fait d'ouvrir et de faire connaître.
Moi, je prétends que vous auriez avantage à préparer les
mentalités à l'obtention ou à l'exercice... Je ne parle
pas du droit fondamental quant à la reconnaissance, je ne pense
qu'à l'exercice d'un droit. Il y a une différence entre un droit
dans une conjoncture sociale et l'exercice d'un droit dans une autre
conjoncture sociale. Ça m'apparait important que vous
réfléchissiez sur cet aspect-là parce que ça peut
mettre en cause les libertés des autres. C'est juste sur ce point que
j'ai voulu discuter parce que je m'aperçois que le cheminement n'a pas
été fait encore sur ce point-là, tandis que les autres,
c'est acquis assez bien.
Mme Comeau: Mme Carrier va vous répon dre à ce
sujet-là, monsieur, concernant la sensibilisation.
M. Chevrette: D'accord.
Mme Comeau: Vous allez voir que le peuple est beaucoup plus
sensibilisé que vous ne le croyez.
M. Chevrette: Tant mieux.
La Présidente (Mme Marois): Brièvement, s'il vous
plaît, compte tenu qu'on...
M. Chevrette: Ce n'est pas un reproche, ça, madame. Je
vous questionne.
La Présidente (Mme Marois): ...est en train de
dépasser le temps qui nous est imparti. Est-ce que vous ne vouliez pas
intervenir aussi, Mme Hareng?
M. Chevrette: Oui, elle n'a pas dit un mot, elle.
Mme Hareng (Solange): Quelques minutes. C'est parce que je
voulais répondre à M. Chevrette en disant aussi qu'aujourd'hui,
lorsqu'on parle d'enfants, soit dit entre guillemets, les enfants ont
peut-être 25, 30 et 40 ans. Nous ne sommes plus des enfants. Les
mentalités peuvent changer...
M. Chevrette: On est toujours l'enfant de sa mère.
Mme Hareng: de beaucoup. Comme vous disiez, le cas
spécifique que vous nous avez apporté, c'est une salade qui nous
est souvent apportée à nous et je le comprends. Mais, comme Mme
Comeau le disait, c'est quelque chose de privé. Et si on donnait les
moyens, les outils nécessaires à nos intervenants, des choses
comme ça ne seraient pas arrivées, voyez-vous? Alors, on reviens
toujours à la même source, ce sont les accès, ce sont les
outils dont on a besoin pour arriver à faire ça. J'ai fait un
petit calcul, comme ci comme ça. Depuis 1984, d'après le
jugement, on demande, justement, que les intervenants aillent avertir la partie
adverse. Si on prend tout ce temps-là, c'a été cahin-caha
parce qu'on n'a pas donné les outils, on n'a pas donné les
informations, on n'a rien fait pour les aider. Ils ont quand même fait un
bon travail. Mais on se retrouve, au bout de cinq ans, avec des montants
d'argent qui ont été quand même alloués à ces
intervenants, et ainsi de suite, encore à 11 215 dossiers qui sont en
attente, malgré 3 435 000 $ que ces intervenants ont touchés. Je
ne dis pas qu'ils n'ont pas travaillé, mais ils ne sont pas capables de
travailler qu'ils n'ont pas les accès. En réalité, toutes
les petites choses qui sont autour de ça, c'est ça; c'est
l'accès à l'information, ce sont les outils
nécessaires.
Ensuite, pour répondre aussi à votre idée,
comme je le disais, les gens mûrissent; les adultes, qui ont eu
des enfants, eux aussi ont mûri. Et, si on leur permet de changer
d'idée en les informant, par exemple... Un point que j'avais
amené au CSS, qu'ils ont trouve peut-être bon, c'est, lorsqu'on
envoie, par exemple, les chèques de pension, les chèques des
militaires, les chèques du bien-être social, les chèques
d'allocations aux personnes âgées, pourquoi ne pas insérer
de l'information? Parce que, parmi ces gens-là, il y en a sûrement
qui ont eu des enfants. Si on leur dit: Bien, c'est possible, aujourd'hui, que
vous le recherchiez, c'est possible que ces gens-là aient droit à
l'information, bien, le premier point va devenir plus facile parce que les gens
vont être sensibilisés. Alors, je trouve qu'on ferait
déjà un grand travail de ce côté-là. Je ne
sais pas si l'idée est bonne, mais je la lance.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, merci.
M. Chevrette: C'est bon.
La Présidente (Mme Marois): Si vous voulez conclure.
Mme Carrier: Alors, je conclus en vous disant, chers membres de
cette commission, que nous allons retourner et nous allons continuer de faire
ce que nous avons fait depuis cinq ans, c'est-à-dire sensibiliser la
population, mais non pas de façon disparate. Cette année, nous
avons fait 152 émissions, c'est peu et c'est beaucoup à la fois.
Il y a beaucoup de bénévolat là-dedans. Il y a beaucoup de
temps donné par nous tous. Alors, cette sensibilisation, je crois que,
de plus en plus, elle grandit et elle va chercher, je dirais, peut-être
pas les secrets, mais les confidences les plus étroites à travers
les foyers. Je vous garantis qu'on va continuer dans cette route-là.
La Présidente (Mme Marois): Merci, madame. Merci de votre
présentation. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Bien.
La Présidente (Mme Marois): Ça va. Merci.
J'aimerais maintenant inviter - je crois que tout le monde a
réussi à se rendre à la commission - le groupe qui
était prévu pour 15 heures, le Regroupement des ressources
alternatives en santé mentale. J'aimerais l'inviter à se
présenter à la table de la commission, s'il vous plaît.
Alors, Mme Claudine Laurin, c'est ça?
Mme Laurin (Claudine): C'est ça, oui.
La Présidente (Mme Marois): Alors, si vous voulez, Mme
Laurin, nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous avez
une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire et une
quarantaine de minutes que se partageront ensuite les gens ici, entre le
gouvernement et l'Opposition, pour vous questionner sur vos recommandations,
vos propositions ou vos remarques.
Regroupement des ressources alternatives en
santé mentale
Mme Laurin: D'accord. M. Pierre Whalen, qui est
vice-président du Regroupement des ressources alternatives en
santé mentale du Québec, et Mme Carole Hince, qui est permanente
au Regroupement des ressources alternatives. Notre façon de
procéder - c'est divisé en trois parties - nous ne lirons pas le
mémoire, nous avons sorti des choses... Les recommandations vont
être lues, mais il y a des choses plus spécifiques sur lesquelles
on voulait vous entretenir. Mme Hlnce va également faire une courte
présentation de ce qu'est le Regroupement des ressources.
Mme Hince (Carole): Bonjour. Le Regroupement des ressources
alternatives, c'est une fédération d'organismes communautaires
qui travaillent en santé mentale. On représente près de 60
ressources à travers la province. On en a dans toutes les régions
du Québec, sauf au Nouveau-Québec; on n'a pas encore de
développement dans ce coin-là.
Les ressources alternatives en santé mentale, ce sont des maisons
d'hébergement, des ressources d'intervention thérapeutique, des
groupes d'entraide, des groupes de défense de droits, qui travaillent
avec des gens qui ont des problèmes de santé mentale. Les
ressources sont ouvertes à toute la population, sauf que les trois
quarts de la clientèle qui fréquente nos ressources, nos groupes,
sont des personnes qui ont eu, en moyenne, quatre hospitalisations dans le
système psychiatrique.
Depuis 1989, depuis la sortie de la politique en santé mentale,
les ressources alternatives sont les premiers groupes communautaires à
être régionalisés. Donc, dans le moment, on est en plein
exercice de planification régionale et les ressources alternatives y
participent sur une base régionale. On peut, d'ailleurs, tirer certaines
conclusions de cette régionalisation-là.
Dans ce sens, nous sommes aussi membres de la Coalition des organismes
communautaires du Québec, la COCO, et nous appuyons les revendications
de ses fédérations membres. Mme Laurin.
Mme Laurin: Oui. Notre première lecture de l'avant-projet
de loi, disons, s'est située au niveau de l'objectif 1 de l'avant-projet
de loi qui disait que "le système de services de santé et de
services sociaux a pour but l'amélioration de la capacité
physique, psychique et sociale des
personnes d'agir dans leur milieu et d'accomplir les rôles
qu'elles entendent assumer. " Cette même logique, si on s'y
réfère, présupposait une présentation qui aurait
été différente de lavant-projet de loi,
c'est-à-dire qu'on aurait dû voir apparaître - si on se
réfère à notre table des matières, on a suivi la
logique de l'avant-projet de loi - donc, la personne, les
établissements, les ressources intermédiaires, les organismes
communautaires et les régies régionales.
Dans une logique où on veut redonner à l'individu la
primauté, on aurait, du moins, aimé voir apparaître la
personne au centre, les organismes communautaires, les établissements,
les ressources intermédiaires et les régies régionales.
Ça aurait été vraiment situer la pyramide à
l'envers et, justement, situer les paliers auxquels les individus,
normalement... Bon, en premier, ils s'aident eux-mêmes. Après, ils
font des groupes de support naturels, des solidarités nouvelles.
Après, ils en appellent aux établissements. Les
établissements conservent, dans cet avant-projet de Foi, une
primauté beaucoup trop importante par rapport au tissu social et
à l'individu. C'est un de nos premiers commentaires, disons, face
à l'avant-projet de loi.
Considérant, en fait, l'obligation... Là, je vais tomber
dans les recommandations. Au sujet de l'article 8, au niveau de l'obligation
pour rétablissement d'élaborer un plan de services, nous trouvons
qu'il aurait été préférable d'exiger - la
théorie du consentement éclairé, à l'article 6 - un
consentement écrit. Si on se réfère à la loi de la
cure fermée, pour nous, les organismes de santé mentale, les
établissements doivent donner l'information à la clientèle
de ses droits et ce n'est pas fait dans les trois quarts des cas. Donc, je
pense que de laisser à l'établissement ou aux professionnels de
la santé le soin d'expliquer au client quels sont les enjeux du
traitement, s'il n'y a pas consentement écrit, c'est un aléatoire
un peu grand.
Au niveau du plan de services Individualisé, ça,
là-dedans, je pense qu'en santé mentale on peut vous en parler
longuement. Nous trouvons pour le moins surprenant que ceci se voie
imbriqué dans un avant-projet de loi alors qu'au niveau de la
santé mentale il est encore à l'étape exploratoire. On ne
s'entend pas sur certains problèmes de fond, tels que l'éthique,
le respect de la confidentialité des dossiers. Ça entraîne
de nombreuses questions. Ce n'est pas réglé. Il n'y a
présentement aucun modèle et on voit dans l'avant-projet de loi
qu'il va s'exten-sionner à toutes les clientèles. On recommande,
à ce chapitre-là, que l'individu ait non seulement le droit de
participer, mais que tout établissement ou tout coordonnateur de plan de
services soit dans l'obligation d'amener l'individu dans le plan de services ou
son représentant, qu'il y ait également des mécanismes de
recours pour obliger l'évaluation à tous les trois mois du plan
de services Individualisé, sinon, ça va devenir un outil qui va
permettre de peut-être "chronlciser" davantage la clientèle et que
des mécanismes d'appel soient prévus au chapitre des plans de
services individualisés.
L'article 14 qui est le fameux droit du choix, en fait, de
l'établissement et du professionnel est, pour nous - dans le
mémoire, on vous l'a dit - de l'ordre du voeu pieux pour la santé
mentale, si on s'en réfère à la fameuse politique de
sectorisation à laquelle nous faisons face continuellement.
Montréal et la Montérégie ont mis sur pied des politiques
de sectorisation qui n'étaient pas pour empêcher l'Individu de
choisir son établissement, mais pour obliger rétablissement
à recevoir tout individu. Sauf que dans la pratique, dans les faits,
c'est l'inverse. SI vous vous présentez à un centre hospitalier
et que vous n'appartenez pas dans les adresses civiques à son
territoire, on vous refuse le traitement et on vous réfère
à l'hôpital de votre secteur. Nous considérons que la
régionalisation peut également entraîner encore une plus
grande pratique de sectorisation. Aussi, on demande de déclarer
illégale toute pratique de sectorisation.
On recommande également que les conseils régionaux aient
à prévoir, dans leur budget, des sommes, des montants d'argent
qui pourront permettre aux individus de changer de territoire si, pour eux, il
y a intérêt. En plus, on demande que tout professionnel qui refuse
de traiter un client - oui, il a le droit de refuser un client - ait
l'obligation de référer et d'accorder le support à la
référence. (16 h 15)
Au chapitre de la réadaptation, en 1975 - ça fait quand
même assez longtemps - le rapport Batshaw soulignait déjà
que la réadaptation était beaucoup trop
institutionnalisée. On retrouve encore dans l'avant-projet de loi le
mandat de réadaptation physique et mentale aux centres hospitaliers.
Notre recommandation serait d'en retirer le mandat au centre hospitalier et de
le laisser à des Institutions beaucoup plus légères et
à des organismes communautaires, considérant que la
réadaptation ne fait pas appel à un diagnostic ou à un
acte médical à proprement parler. Donc, pour nous, à
l'instar du rapport Batshaw de 1975, on s'attendait, en 1990, à voir
retirer le mandat de la réadaptation aux centres hospitaliers.
Le plus fort de notre recommandation, je pense, c'est la fermeture des
centres hospitaliers psychiatriques car, pour nous, de voir dans l'avant-projet
de loi qu'on a un article les déclarant centres hospitaliers
psychiatriques, créant une nouvelle classification, va à
('encontre même de la désinstitutionnalisation. Un mouvement de
désinstitutionnalisation ne devrait pas Institutionnaliser l'institution
psychiatrique
On recommande. à l'instar de la Colombie-Britannique, de faire un
plan quinquennal en vue de la fermeture de ces centres hospitaliers,
également de fermer toute nouvelle admission parce que, si on
veut fermer le centre hospitalier, il faudrait aussi fermer les nouvelles
admissions. Et on recommande l'ouverture de départements de psychiatrie
dans les centres hospitaliers généraux, des structures beaucoup
plus souples et plus normales à la communauté. Parce que, pour
nous, les hôpitaux psychiatriques ne feront jamais disparaître la
stigmatisation. Présentement, et je ne vois pas le jour du changement,
ces structures feront toujours office d'hébergement de fous dans la
population. Donc, si on veut vraiment faire une
désinstitution-nalisation, si on veut vraiment faire un projet
d'intégration communautaire au niveau de la santé mentale et
donner une chance à tout le monde, ceci va passer, justement par la
désacralisation de ces institutions et peut-être, justement, se
retrouver dans les hôpitaux généraux où toute
maladie est quand même traitée sans nécessairement en faire
un centre à part. Donc, pour nous, ce mouvement-là ne va passer
que par la fermeture des centres hospitaliers.
M. Whalen (Pierre): À l'article 43, nous trouvons qu'il y
a risque de voir les conseils d'administration axés uniquement sur la
gestion et dépouillés de la philosophie d'intervention. On
considère aussi le besoin reconnu dans le document "Orientations" de
définir des modes d'Intervention souples et personnalisés.
On considère aussi l'ampleur d'une telle structure faisant face
à différents types de clientèles avec des
intérêts et des besoins divers. Conséquemment, nous
recommandons le statu quo et ce, pour le plus grand respect des diverses
clientèles.
Pour les articles 57 et l'article 260 de la loi, considérant la
volonté d'ouverture du système et l'implication accrue des
communautés locales, à tout le moins, en tout cas, en ce qui
concerne la santé mentale; considérant le danger de politiser
davantage les lieux de décisions et considérant l'exclusion de
tous les groupes de base, qui n'apparaissent pas dans ces articles-là,
nous recommandons, pour les CLSC, les centres hospitaliers et les centres de
réadaptation, l'ouverture des conseils d'administration à la
population sans égard à son type d'emploi ou mode de
rémunération.
Pour l'article 115, considérant le syndrome de la porte tournante
en santé mentale et la notion de soins de longue durée sans
hébergement; considérant les nombreux pavillons privés ou
relevant de centres d'accueil; considérant qu'afin d'assurer une
continuité l'on confère un mandat de trois ans aux conseils
d'administration du réseau; considérant que le document
"Orientations" stipulait un montant au chapitre du budget devant être
alloué aux comités de bénéficiaires, nous
recommandons qu'un comité de bénéficiaires soit
obligatoire pour toutes les clientèles en santé mentale inscrites
au centre hospitalier aux fins de recevoir des services en externe, qu'une
enveloppe budgétaire soit connue et protégée pour les
comités de bénéficiaires et que le mandat de ces
comités soit porté à trois ans.
Pour l'article 116. considérant les clientèles adultes en
santé mentale en vertu de l'article 116, nous recommandons d'enlever
l'obligation, mais de garder le droit d'avoir des parents ou tuteur au sein du
comité.
Pour ce qui est de l'article 201 traitant des structures
Intermédiaires, considérant que la définition des
structures intermédiaires est une définition incomplète et
considérant la réalité bien différente de ces
structures versus les ressources alternatives et communautaires en santé
mentale, nous recommandons que soit inclus dans sa définition "la
provenance de la majorité de la clientèle vient d'un
établissement et sur référence". Dans ce sens-là,
nous considérons que la structure intermédiaire est directement
le prolongement de l'institution et que, de ce fait, il y a
nécessairement excroissance des coûts à long terme et aussi
probablement un changement au niveau du syndrome de la porte tournante qui ne
sera plus non plus l'hôpital, mais la structure Intermédiaire
elle-même.
Mme Hince: L'article 229 concernant les organismes
communautaires. Considérant la définition des organismes
communautaires comme incomplète; considérant la confusion qu'il y
a déjà entre la structure intermédiaire et la ressource
communautaire, nous recommandons que l'on prenne comme référence
la définition de la politique de santé mentale, soit: Le
ministère reconnaît comme organismes communautaires l'ensemble des
groupes issus de la communauté qui poursuivent soit des activités
bénévoles, soit des activités qui, même si elles
sont rémunérées, sont sans but lucratif, dans le domaine
de la santé et des services sociaux.
Pour fins de reconnaissance, le ministère fixe quatre conditions:
la communauté doit être à l'origine de la création
de l'organisme; l'organisme doit se livrer à des activités non
lucratives dans le secteur de la santé et des services sociaux;
l'organisme est autonome dans ses orientations et ses pratiques et son conseil
d'administration est composé majoritairement d'usagers de ses services
et de personnes de son milieu; le support de la communauté, financier ou
autre, contribue en partie à son fonctionnement.
Si vous me le permettez, on va retourner à l'article 157 qui
concerne les structures inter-médaires. Considérant
l'opportunité pour les institutions de générer leurs
propres ressources, soit les structures intermédiaires;
considérant le danger de voir émerger un autre
État-providence via les institutions et les structures
intermédiaires, nous recommandons qu'un protocole d'entente signé
soit obligatoire s'il s'agit d'une ressource déjà existante,
c'est-à-dire que si un
hôpital voulait "partir" sur un territoire une ressource
d'hébergement alors qu'il y aurait déjà une ressource
d'hébergement - communautaire sur le territoire, on demanderait un
protocole d'entente entre l'institution et l'organisme communautaire
déjà en place.
Par ailleurs, s'il s'agit d'une ressource à implanter, que
d'autres organismes communautaires soient impliqués dans la
démarche? Il faut que je retourne a mon autre page. Un instant, ce ne
sera pas long. S'il s'agit d'une ressource à implanter, ce que je
disais, c'est que d'autres organismes communautaires soient impliqués
dans la démarche; que l'établissement s'engage à rendre la
ressource autonome à l'intérieur d'une année et que
l'établissement en cause n'ait aucun droit de vote à
l'Intérieur de l'organisme communautaire nouvellement formé.
O.K. Là, je reviens à la page 12, merci, l'article
230.
Considérant que le document "Orientations" de Mme Lavoie-Roux,
reconnaît l'importance de préserver l'autonomie des ressources
communautaires; considérant la nature des services offerts par les
organismes communautaires, lesquels s'ajustent continuellement aux besoins de
leurs membres et non à ceux de l'institution, nous recommandons que sort
retirée à l'article 230 la réglementation concernant le
nombre maximum de personnes qu'il peut héberger et la durée
moyenne de séjour.
Mme Lauiin: Pour ce qui est du financement des regroupements
régionaux, j'Imagine que vous vous attendiez tous à avoir une
recommandation.
Considérant l'importance de l'organisation communautaire;
considérant la fragilité des ressources alternatives;
considérant l'importance d'un regroupement provincial structuré
dans un but de formation, promotion, recherche...
Ici, j'aimerais souligner, justement, l'importance d'un regroupement
provincial. On vient de vivre un colloque pancanadien de personnes
psychiatrisées. C'est une première au Canada et il s'est tenu
grâce au financement autant des niveaux provincial que
fédéral, mais il n'aurait pu avoir lieu que par le financement.
Si nous n'avions pas eu un regroupement structuré depuis cinq ans, avec
permanence, la logistique aurait été impossible à faire et
le colloque n'aurait pas eu lieu. Donc, l'importance du regroupement de la
structure a été très grande. Nous recommandons donc que le
ministère subventionne les regroupements provinciaux.
Considérant aussi que les regroupements provinciaux doivent
ôtre redevables à leurs membres - ça, nous ne le nions pas;
nous en tenons compte aussi - nous recommandons que la subvention du
ministère demeure à titre de financement de base et que les
groupes membres se voient greffer à leur budget une somme
supplémentaire servant à financer l'organisation provinciale de
leur choix. Ici, pour nous, il s'agit d'un genre de formule Rand, en fait, que
les groupes communautaires de base aient une somme supplémentaire. Et,
pour nous, c'est Important qu'elle soit supplémentaire; sinon, vous nous
faites faire "le choix de Sophie", c'est-à-dire que, si la somme n'est
pas supplémentaire et que l'organisme peut donner des services avec la
somme... Il faut qu'elle choisisse qui elle donne: Est-ce son gars qu'elle
donne aux Allemands ou si c'est sa fille? Est-ce que, philosophiquement, elle
adhère à un regroupement provincial qui va lui donner de la
formation, qui va lui donner des outils de recherche et tout, ou si elle donne
plus de services à la clientèle qui crie? Je trouve que c'est un
choix beaucoup trop difficile, c'est peut-être de la
responsabilité du ministère, de voir à ce qu'on ne soit
pas obligé d'en arriver là.
Considérant l'obligation, à l'article 240, pour les
régies régionales d'élaborer avec les organismes
communautaires des programmes de santé et de services sociaux;
considérant que la globalité d'approche fait la richesse des
interventions des ressources alternatives en santé mentale;
considérant également l'importance de préserver
l'autonomie des ressources, Importance qui a, d'ailleurs, été
soulevée et reconnue dans le document "Orientations", nous recommandons
que la philosophie d'intervention soit considérée dans la
dispensation des services, donc dans toute l'élaboration des
programmes-cadres, qu'on ne nous oblige pas à faire une planification
serrée où on ne pourrait pas tenir compte de la globalité
de nos services.
Considérant les difficultés - ça, c'est nouveau -
d'implantation que vivent les ressources résidentielles alternatives en
santé mentale - ce n'est pas dans l'avant-projet de loi, c'est une
recommandation de plus que nous faisons - nous recommandons qu'une
législation s'inspirant de la loi de Padovan soit mise de l'avant et ce,
afin de garantir une meilleure répartition des ressources Ça va
garantir l'Implantation des ressources, mais également une meilleure
répartition des ressources.
M. Whalen: Au titre des régies régionales,
considérant la responsabilité...
M. Chevrette: Ah!
Mme Carrier: Vous n'avez pas réglé la grève
d'Hydro, à ce que je vois. Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Marois): Nous avons fait fermer les
lumières qui sont utHes essentiellement lorsqu'il y a des
caméras.
Mme Carrier: Ah! O.K.
M. Chevrette: Les caméras sont parties
M. Whaien: Alors, considérant la respon-
sabilité du ministère face au maintien de la
qualité du système de services de santé et de services
sociaux; considérant que les régies régionales
deviendront, dans une régionalisation, juges et parties,
considérant que le ministère entend expérimenter un
nouveau mode de fonctionnement de gestion par la régionalisation, nous
recommandons qu'un canal de communication privilégié soit
maintenu entre les organismes communautaires et le ministère; que des
mécanismes de recours soient prévus afin de recevoir les plaintes
des régions qui se croiraient lésées soit par
malversation, abus de pouvoir, règles du jeu non respectées,
etc.
À l'article 260, considérant l'importance des mandats des
régies régionales et considérant que l'avant-projet de loi
confère aux organismes communautaires le quart du collège
électoral, nous recommandons que les organismes communautaires se voient
attribuer le quart des sièges du conseil d'administration des
régies régionales; que la composition des conseils
d'administration des régies régionales soit de six sièges
provenant des institutions, quatre sièges provenant du communautaire,
deux sièges provenant des communautés, deux sièges
provenant des groupes socio-économiques, un siège provenant des
comités de bénéficiaires et un siège pour le
directeur général. (16 h 30)
Considérant la volonté d'ouvrir les mécanismes de
prise de décisions aux populations locales; considérant
l'importance d'accroître la participation des communautés locales
et considérant l'accès à l'information comme outil de
pouvoir, nous recommandons que la fonction de président des
régies régionales soit ouverte à tous et chacun, sauf au
directeur général. Advenant que le ministère maintienne sa
position, qu'au moins te président-directeur général n'ait
pas le droit de vote. Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Marois): Merci. Je crois que cela fait
le tour de votre présentation. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. Je pense qu'une des
pièces maîtresses, si l'on veut, de la structure... Parce qu'on
est obligés de parler de structure à l'occasion, même si
ça ne fait pas toujours notre affaire. S'il n'y en avait pas, je pense
que tout le monde, à l'occasion, serait peut-être bien heureux,
hein?
Que je sache, vous vivez actuellement une expérience de
régionalisation dans la politique de santé mentale. C'est
peut-être une première et elle est en cours au moment où on
se parle. Évidemment, beaucoup de personnes ont peur de la
régionalisation et la craignent, des fois, parce qu'on ne la
connaît pas, des fois aussi parce qu'on n'a pas appris à
travailler avec. J'aimerais peut-être vous entendre un peu plus sur
l'expérience vécue par rapport à ce que nous souhaitons
faire, dans la proposition qui est devant nous, des régies
régionales.
Mme Laurin: Nous sommes embarqués dans la
régionalisation sans la connaître. Ce que l'on en tire, ce n'est
pas égal. Ça dépend beaucoup des dynamiques
régionales. Pour certains CRSSS, ça va relativement bien. On ne
peut pas parler, par exemple, d'un beau portrait dans l'ensemble du
Québec. Le partenariat ne se joue pas d'une façon égale.
C'est la promesse qu'on avait au niveau de la politique de santé
mentale. Les ressources en sortent énormément blessées. Je
ne sais pas si c'est dû à un manque de cadre serré et
strict. Je ne dis pas que la régionalisation est un échec. Je dis
que, peut-être s'il y avait eu un cadre plus serré, plus strict,
laissant moins d'interprétation, c'aurait été mieux.
Dans certains CRSSS, on retrouve des commissions tripartites qui
fonctionnent très bien. Dans d'autres, on les a mis non pas
consultatives au conseil d'administration, mais consultatives
déjà à une commission administrative qui, elle, est
consultative au conseil d'administration, ce qui fait deux ou trois structures.
Dans d'autres, la planification de l'organisation de services se fait
strictement par l'équipe des permanents des conseils régionaux,
par des comités d'experts et à la commission tripartite, on est
21, on reçoit des documents la journée même, on a à
les entériner ou à ne pas les entériner, ce qui fait,
finalement, une participation, dans certains CRSSS, un peu bidon de la base et
même des institutions. Et je dirais que ceux qui sont les plus
pénalisés sont, finalement, le troisième tiers qui, eux,
ne comprennent absolument rien au jargon de la santé mentale, soit le
tiers de la communauté.
On a des agents de probation, on a des villes, des municipalités.
Déjà, ils ne connaissaient rien du jargon qu'on a, et Dieu sait
qu'il est compliqué à comprendre. En plus, il faut qu'ils
embarquent dans la planification de services. Je pense qu'ils manquent de cadre
plus serré. C'est un peu pour ça que les organismes
communautaires demandent de maintenir un canal privilégié avec le
ministère dans le sens où, pour nous, on ne peut pas marcher
comme les CLSC dans les régions avec des regroupements forts, parce
qu'on n'est pas aussi nombreux. Pour nous, ce serait une garantie que le
ministère ait le pouls de la base, qu'il se garde un canal de
communication.
Il y aurait un beau travail à faire - j'ouvre la porte - au
niveau de l'étude de Topérationa-lisation" de la
régionalisation au niveau de la santé mentale, non pas pour la
détruire, mais probablement pour l'améliorer. On est prêts
à y participer.
M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, c'est
que là où ça va mal, c'est lorsqu'on est mis un peu
à côté.
Mme Laurin: Oui et des notions non com prises. Par exemple, on
est arrivés avec des mesures prioritaires. Le mot "groupe d'entraide"
n'est pas compris par tous. La notion de groupe de défense des droits
faite par un groupe communautaire, ce n'est pas compris partout. On voit
souvent même des gens du réseau nous dire: Bien, moi, comme
travailleuse sociale ou moi, comme infirmière, je la fais, la
défense des droits. C'est évident qu'on peut peut-être la
faire comme individu - ils ne sont pas tous mauvais - sauf que ce n'est pas
structuré, ce n'est pas ça qu'on entend comme groupe de
défense des droits. Ces notions n'ont pas été assez
définies.
M. Côté (Charlesbourg): À partir du moment,
dans l'expérience vécue actuellement, parce que ça peut
être une source extrêmement intéressante pour nous de voir
ce qu'il faut faire, et ce qu'il ne faut pas faire, dans la mesure où
l'accès est direct au conseil d'administration, est-ce que je dois
comprendre que ça se déroule quand même pas si mal?
Mme Laurin: Je pourrais vous nommer deux régions où
ça se déroule pas si mal. Il y a treize CRSSS.
M. Côté (Charlesbourg): Oui. O.K.
Mme Laurin: Ces deux régions, M. le ministre, si vous me
le permettez...
M. Côté (Charlesbourg): Oui
Mme Laurin: ...ce sont les deux régions où les
organismes étaient les plus structurés, où ils
étaient les plus nombreux. Je pense que ça tient compte de tout
ça aussi. Dans les régions où les organismes avaient
déjà une pratique dans les structures et avec les structures, la
Montérégie et Montréal, ça va assez bien dans
l'ensemble. Mais, si on parle des régions comme Gaspé
sie-Bas-du-Fleuve, si on parle de l'Abitibi, ce sont des réglons
où il n'y a pas eu de rassemblement au niveau des organismes
communautaires. Là, non, ça ne va pas bien.
M. Côté (Charlesbourg): O.K. En tout cas, je pense
qu'il faut en tirer profit sur le plan de ce qu'on s'apprête à
faire comme expérience parce que l'intention est pure.
Mme Laurin: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Évidemment, dans la
mécanique, c'est là qu'on frappe la difficulté des
personnes, des structures, des habitudes et ce n'est pas toujours facile
à changer.
Mme Laurin: C'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends maintenant
davantage. Je pense que c'est la résolution 244 au niveau des organismes
communautaires. 244, effectivement.
Mme Laurin: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprenais difficilement
la proposition où on souhaitait garder un canal avec le
ministère. Deuxièmement, finalement, on disait:
Décentralisation, oui, pour autant que cela en soit une bonne, mais on
garde quand même notre canal, notre bouée de sauvetage si jamais
ça va mal. Je pense que ça s'explique un peu mieux de par
l'expérience que vous vivez au moment où on se parle.
Évidemment, je m'adresse, à ce que j'ai compris, à
des gens qui connaissent ça et même, si je ne me trompe pas,
à des professionnels. Pour avoir mol-même été,
à l'occasion, membre d'un conseil d'administration, du temps où
j'étais un petit professeur en Gaspésie, mon lieu d'origine,
effectivement j'étais perdu. J'avais l'impression que les permanents de
la structure, ceux qui sont là et qui occupent tous les jours l'espace,
qui présentent des dossiers au conseil d'administration,
évidemment, on était des gens qui venaient avec l'étampe.
Et, quand le conseil d'administration se réunissait, évidemment,
tout était préparé d'avance, soit avec les médecins
de l'hôpital, soit avec le D.G., en tout cas, tout était bien
orchestré, avec une belle présentation. Tu venais de
décider des choses dont tu ne comprenais même pas les tenants et
les aboutissants. Tu les avals autorisées et ça paraissait dans
la résolution, aucun problème. Et là, tu
représentais le public.
C'est un peu ça qu'on souhaitait faire, faire en sorte que les
gens qui sont dans les conseils d'administration puissent effectivement
décider un certain nombre de choses et enlever ça des mains des
professionnels. Comme vous êtes là et que c'est peut-être la
première opportunité que j'ai, je pense que vous êtes
contre le fait, si j'ai bien compris, qu'on exclue les professionnels des
conseils d'administration. Expliquez-moi ça. Je voudrais bien comprendre
parce que, effectivement, il y a du monde ordinaire aussi qui ne haïrait
pas ça être capable de comprendre ce qui se passe dans ces
établissements et d'orienter certaines décisions. Je pense
qu'à ce moment-là il comprendrait un petit peu plus.
Mme Laurin: Quand on parle d'exclure les professionnels, un, on
n'est pas des professionnels. On dit qu'on donne des services professionnels,
mais on n'est membre d'aucune corporation. Il n'y a personne qui est au
titre... Nos ressources sont gérées, dans l'ensemble, par et pour
des psychiatrisés, soit majoritairement, soit au quart. SI on demande de
ne pas... c'est, justement, à cause de ça. C'est que nous, qui
sommes des ressources de base, vous nous excluez également
de la participation au conseil d'administration Je pense qu'il est
utopique de penser que quelqu'un va aller siéger à un conseil
d'administration s'il n'y a pas un intérêt qui n'est pas
strictement individuel. S'il est strictement individuel, ça va
être un intérêt politique ou peut-être syndical, mais
un intérêt collectif, il faut qu'il émane d'un groupe. Bien
souvent, il est supporté par un groupe pour avoir l'intérêt
collectif.
Vous coupez également toute personne psychiatrisée qui
vient en charge d'un groupe d'entraide, qui devient, par le fait même,
permanente. Il est permanent, il est payé et le groupe est
subventionné. Vous ne lui permettez plus d'aller siéger au
conseil d'administration parce que, malheureusement, II est devenu permanent,
le psychiatrisé, et on le pénalise. Celui qui devient directeur
du comité de bénéficiaires, c'est un ancien
bénéficiaire. A ce moment-là, on le pénalise, lui
aussi. Alors qu'il devient très actif, alors que, là, il est
armé pour s'en aller à un conseil d'administration, on le retire.
Le danger, c'est que les directeurs généraux, les permanents de
ces centres puissent véhiculer ce qu'ils veulent comme valeurs parce que
les gens sont là, esseulés, pas nécessairement
appuyés et le temps qu'on apprenne sur un conseil d'administration, si
on n'a pas de support, ça peut nous prendre deux ans et trois ans
même.
C'est là qu'on dit: Pour ne pas exclure... On comprend
l'idée de vouloir enlever les guerres de corporations. Ce sont des
luttes stériles. Cela aurait pu être un bon moyen pour l'enlever,
sauf qu'on trouve qu'on jette le bébé avec l'eau du bain parce
qu'on exclut même, comme je vous le dis, le bénéficiaire
qui devient directeur. À ce moment-là, nous autres, on
préférait prôner la libre démocratie, que tout le
monde y ait accès et par vote.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Verdun, vous souhaitiez soulever une question.
M. Gautrin: Juste une question, madame. À la page 14 de
votre document, vous faites état de la loi Padovan, dans l'État
de New York. La loi Padovan, à New York, c'est celle qui a
impliqué le monde municipal dans le développement des ressources
de santé. La question que j'aurais à vous poser, c'est: Comment
voyez-vous l'implication de notre réseau municipal ou des
municipalités régionales de comté dans le
développement ou dans la gestion du réseau de santé? Je
n'ai pas bien compris votre recommandation très générale
que vous faites à la page 14. Qu'est-ce que vous aviez
déjà dans l'idée? Est-ce que vous pouvez nous donner un
peu plus de précisions sur ce que vous voyez et ce que vous pensez
à ce niveau-là?
Mme Hince: On ne s'est pas arrêté aux
mécanismes de la loi Padovan qui est en vigueur dans l'État de
New York. Ce qui nous intéressait, c'était l'esprit de la loi.
Cette loi-là, dans l'État de New York, lorsqu'il y a implantation
de ressources résidentielles dans la communauté, ça oblige
à ce qu'il y ait une consultation. Et la seule raison pour refuser,
c'est la saturation du milieu. C'est-à-dire que, s'il y a
déjà trop de ressources résidentielles qui s'adressent
à un certain type de clientèle, c'est la seule raison pour
laquelle on peut invoquer le refus. C'est l'esprit de cette loi qu'on aimerait
voir étudier.
En ce qui concerne les mécanismes et l'implication des
municipalités, des MRC et tout ça, on n'est pas rendus à
cette étape-là. Par contre, si vous avez des travaux à
faire sur ce sujet, on serait prêts à y participer.
M. Gautrin: Donc, c'est la vision de la loi qui touchait la
consultation et non pas la structure municipale, des municipalités.
Mme Hince: Non.
M. Gautrin: O.K. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci. M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Vous semblez avoir épousé la position
d'à peu près tous les groupes communautaires, en ce sens que vous
craignez la régionalisation à cause du faible poids de
représentation que vous pourriez obtenir. Je suis obligé de vous
dire que vous avez raison un peu, pas mal. C'est beaucoup plus
pathétique, un cas de santé, par exemple, avec les
médecins qui vont se présenter et avec des exemples de personnes
âgées qui pourraient être fort malades. Effectivement, je me
demande comment vous pourriez, dans le cadre d'une décentralisation,
s'il n'y a pas de balises au moins minimales pour le communautaire... Je pense
que ça pourrait relever du pouvoir central de dire: Oui, je
décentralise mais il y a une portion du budget de
décentralisation qui doit nécessairement être
attribuée au communautaire. L'arbitrage pourrait se faire en
région, pareil. Est-ce que je me trompe en disant que votre crainte,
c'est le partage des ressources financières et la faible part de
représentativité qui pourrait vous être octroyée ou
qui vous est octroyée en vertu des structures, surtout si on regroupe
les conseils d'administration comme on semble le faire?
Deuxième aspect, vous abordez un sujet qui, à mon point de
vue, est loin d'être réglé et je pensais qu'il serait
amené d'une façon plus évidente que ça, c'est la
démédicalisation de la réadaptation. À mon point de
vue, la réforme ne vient rien faire dans le domaine de la psychiatrie,
d'autant plus qu'il m'apparaît que c'est 8 000 000 $ injectés dans
le budget, même pas indexés sur trois ans, un montant de 8 000 000
$ qui se répète, les mêmes 8 000 000 $ de la
première année ne sont pas augmentés la
deuxième, ne sont pas augmentés la troisième. Ce sont 8
000 000 $ constants qui semblent avoir réglé toute la question du
rapport Harnois. Est-ce que je me trompe ou si je lis mal l'actualité,
si je suis mal les événements au Québec ou si j'ai un
tantinet vu clair dans ce qui se passait? J'aimerais avoir votre opinion.
mme taurin: vous vous trompez peu. ha, ha, ha!
M. Chevrette: Bien, dites que j'ai raison beaucoup, d'abord. Ha,
ha, ha!
Mme Laurin: Ha, ha, ha! O.K. Vous avez raison beaucoup.
M. Chevrette: Ha, ha, ha! Si je me trompe peu, c'est parce que
c'est vrai beaucoup.
Mme Laurin: Je pense que les mesures prioritaires vont amener,
quand môme - il faut reconnaître à César ce qui est
à César - certaines régions à développer, au
niveau de la santé mentale, des groupes communautaires. Il faut quand
même dire que les mesures prioritaires - pour une fois, c'est
arrivé - étaient exclusivement réservées au
communautaire. Ça s'est avéré respecté, à
peu près, je dirais, à 72 %. C'est dommage parce que les
directives étaient vraiment censées être allées au
communautaire et, encore là, il y a des vices de forme.
Notre crainte, ce n'est pas tellement au niveau du partage. Ça
pourrait être une crainte. Mais la plus grande crainte vient du fait de
la non-reconnaissance en région et de la peur de se voir mis comme
complémentaire au réseau. Pour nous, en tout cas, les ressources
alternatives, c'est primordial. Un, on s'est fait enlever notre notion
d'alternative, on ne la retrouve plus nulle part. On nous met avec les
ressources communautaires, alors que notre priorité est de
développer une approche alternative en psychiatrie, de
démédicaliser, justement, autant la réadaptation que la
psychiatrie elle-même. (16 h 45)
À partir de là, quand on se retrouve en région,
souvent, ce qu'on va nous demander, c'est d'être complémentaire
à un centre hospitalier pour, justement, avoir accès au budget,
pour, justement, avoir accès à la planification de services. On
devient des voies de garage...
M. Chevrette: Des "sous-contractants".
Mme Laurin: ...la voie de sortie, oui. De la
complémentarité qu'on avait avec l'Individu qui, lui, nous
amenait à collaborer avec d'autres partenaires, mais c'est lui qui nous
amenait, là on va être obligés d'être
complémentaires à des structures, ce qui va tuer
complètement les mouvements communautaires dans beaucoup de
sphères, y compris surtout celle de la santé mentale qui est
très menacée. Il n'y aura plus de solidarités nouvelles;
on va tous être solidaires au réseau par
complémentarité de services. C'est un continuum mur à
mur.
M. Chevrette: Et il n'y a pas eu de définition des
rôles comme tous les groupes l'avalent demandé lors de
l'étude du rapport Harnois, la définition des rôles de
chacun. D'où le danger encore plus Imminent, à ce
moment-là, qu'on médicalise toute l'opération parce que,
majoritairement, ce sera la notion de santé curative qui va
primer...
Mme Laurin: Oui.
M. Chevrette: ...au détriment de la prévention ou
des alternatives, en tout cas, non médicales.
Mme Laurin: Oui. C'est, d'ailleurs, un peu ça qui nous a
amenés aussi à dire: Ne pas faire de conseil d'administration
unifié va également amener la pratique de l'hospitalocentrlsme
parce que, on le sait, on n'a pas enlevé dans les valeurs; tout est
versé vers le curatlf, dans le réseau. Donc, si je fais un
conseil d'administration unifié, nécessairement, c'est encore le
budget du curatif qui va gruger sur la prévention et sur les
méthodes alternatives. Les valeurs n'ont pas été
changées, les attitudes non plus. Donc, ce n'est pas une pensée
magique.
M. Chevrette: Oui, c'est de ça que je voulais vous parler.
Ma dernière question - mon collègue me regarde avec de gros yeux,
il veut quelques minutes - à la page 19, vous dites ceci: "Nous nous
retrouvons face à la pensée magique de l'assurance de la
continuité de soins et de services..." J'ai trouvé ça pas
mal beau comme expression, mais j'aimerais savoir quelle est votre
solution.
Mme Laurin: "Nous nous retrouvons face à la pensée
magique de l'assurance de la continuité..." Pour nous, un système
de services de soins intégrés aurait passé d'abord par la
compréhension de l'intégration d'un support communautaire. Si
nous ne montons pas un système d'intégration de support
communautaire, ce n'est pas en intégrant des services dans une
structure... Un système de support communautaire, c'est, d'abord, de
partir de la communauté. Vous revenez à mon point de
départ qui dit que l'avant-projet de loi aurait dû partir de
l'individu, des solidarités nouvelles, des organisations communautaires
que l'individu s'est données et de monter à
l'établissement.
Si je regarde le système d'intégration communautaire dont
Boston s'est dotée, bien, eux ont mis de l'avant des PC qui
fonctionnent, donc
des centres de crise, mais ils ont un système complet
d'Intégration communautaire où toutes les lignes se chevauchent,
où l'individu peut être autant dans une troisième ligne et
dans une première ligne. C'est un système d'intégration
communautaire qu'il faudrait monter et cesser de s'attaquer aux structures et
aux services dans les structures; sinon, c'est le service pour le service.
M. Chevrette: Là-dessus, moi, je conclus en vous disant
que vous avez absolument raison et je trouve que, du fait que le projet de loi
nous oblige ou nous force à parler de structures, on oublie
précisément les grands objectifs. Les quelque 60 que j'ai lus
à ce jour m'indiquent que chaque groupe est obligé de se
définir en fonction d'une structure et non pas en fonction des objectifs
sociaux, des objectifs de société. Vous avez entièrement
raison, je vous félicite de votre mémoire. On s'en inspirera le
jour où il y aura un projet définitif. Là, à ce
moment-là, on sera certain que le ministre croit à son projet
parce que ce sera le sien et non pas un avant-projet d'un autre.
La Présidente (Mme Marois): M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Trudel: En complémentaire, là-dessus.
La Présidente (Mme Marois): En complémentaire.
M. Trudel: c'est un peu inquiétant, à la page 3; en
tout cas, pour moi, c'est inquiétant, moi qui représente une
circonscription périphérique...
Mme Laurin: On ne vous entend pas. M. Trudel: Ah, il faut
s'approcher plus.
La Présidente (Mme Marois): Approche-toi, allez.
M. Trudel: À la page 3 de votre annexe, sous les
recommandations, il y a quelque chose d'inquiétant lorsque vous nous
parlez de la liberté de choix au niveau du centre, du lieu ou de
l'endroit où on pourrait recevoir le service, en disant môme - et
ça m'apparaît considérable - que la régionalisation,
c'est comme... "Considérant la régionalisation comme une menace
aliénant le choix à l'établissement et au choix du
professionnel..." Je ne vous demande pas de faire le choix, mais j'ai envie de
vous placer dans une situation d'hypothèse en disant: Est-ce qu'on doit
privilégier la liberté du choix du lieu ou de l'endroit ou du
type de service qu'on veut recevoir, le libre choix, ou, par ailleurs, assurer
qu'il y a des services partout au Québec pour le type de
problèmes qui nous intéresse ici? Vous comprenez très bien
le sens de ce que ça peut vouloir dire.
Mme Laurin: Oui. Si je vous réponds au niveau de la
santé mentale, je dirais qu'il faut "prloriser" le choix. Toute relation
thérapeutique qui s'engage doit s'engager sur un rapport égal,
sur un rapport où j'ai besoin que la personne me dise quelque chose et
que moi, je dise quelque chose à la personne. Nous nous sommes
inspirés de ce que l'on vit en santé mentale. Si vous avez lu le
mémoire, je vous raconte un fait seulement d'une dame qui a fait une
tentative de suicide, qui a été suivie dix ans de temps à
Albert-Prévost. Lors de sa tentative de suicide, la
préposée à l'admission a eu le bonheur d'apprendre qu'elle
demeurait maintenant sur la rive sud et lui a dit: Retourne-toi-z-en là.
C'est là que tu vas te faire traiter. Moi, je pense que je n'ai pas le
droit de dire qu'il faut que les services soient donnés partout sans
tenir compte aussi du fait que ça implique certaines formes de
traitement où la relation est plus importante que le traitement. Et, en
santé mentale, c'est la relation. On n'a jamais été
capable de me prouver que le traitement est plus important que la relation,
surtout en santé mentale et c'est nous, les premiers, qui devons vivre
avec l'aberration de la sectorisation qui est supposément
illégale. Et cela a été prouvé à la
Cité de la santé de Laval.
Bien, nous autres, malheureusement - c'est peut-être parce qu'on a
une clientèle qui est beaucoup sur le bien-être social et qu'on
n'a pas de ressources, qu'on n'est pas suffisamment financés pour
traîner en cour les hôpitaux qui font ça et aller
jusqu'à la Cour supérieure - on n'a jamais été
capables d'avoir un jugement qui nous dise que c'est illégal. On n'a
jamais eu les moyens d'aller se le chercher. Et notre clientèle est
refusée tous les jours. Encore pire, pour décongestionner les
urgences, on a créé des centres de crise à même des
budgets de décon-gestionnement d'urgences. Ces dix centres de crise sont
aussi obligatoirement liés à la sectorisation. Donc, là,
l'individu qui pique une crise, il faut qu'il sache qu'il va dans tel centre de
crise et l'adresse. Je trouve que là on complique et, en plus, on ne
donne plus la liberté à personne de choisir le thérapeute
avec qui il s'entend.
M. Trudel: Tout en s'entendant très bien, si je comprends
bien, qu'il faut assurer des services partout sur le territoire pour les
personnes qui ont besoin de ce type de services. Parce que ce que je crains un
petit peu - c'est une réflexion que je fais - c'est qu'on retrouve
peut-être un peu trop au centre l'ensemble des ressources pour
effectivement - et vous avez bien raison - permettre cette diversité et
cette différence dans la relation, mais aux dépens de services
qui, souvent, ne peuvent pas exister dans des centres plus petits parce que
les
ressources sont, forcément, limitées quelque part.
Je vais changer un petit peu de partie dans votre mémoire. Au
niveau de la politique ou de la reconnaissance des groupes, au niveau de
l'action communautaire des groupes, vous craignez, là aussi, beaucoup la
régionalisation et on comprend que c'est fondé sur
l'expérience, que ce n'est pas tout à fait seulement en principe
que vous nous en parlez. Est-ce qu'on ne devrait pas aller au-delà d'une
définition de ce qu'est un groupe communautaire, tel que vous le
retrouvez dans le rapport sur la santé mentale, pour également
retrouver une politique de reconnaissance des groupes communautaires, des
groupes de type communautaire, dans l'action communautaire et,
également, prévoir - et j'essaie de rejoindre une autre
préoccupation que vous avez mentionnée sur d'autres aspects - un
mode de financement qui soit triennal?
Mme Laurln: Oui, une politique pourrait être aidante et
prévoir aussi un mode de financement triennal. Nous, les organismes de
santé mentale qui postulons au poste - le poste, c'est la planification
de l'organisation de services dans lesquels nous allons vendre nos services -
on l'a, le triennal. Mais ce qui nous embête, c'est qu'il faut que
j'aille vendre mes services de la même façon qu'un centre
hospitalier va les vendre, de la même façon que le CLSC va les
vendre. Donc, il faut que je fasse des têtes de chapitres, des titres de
programmes. Il faut que je définisse des services. Ça, c'est me
mettre dans le système de pensée réseau et vous allez
être pris avec un autre réseau que vous-mêmes allez avoir
engendré parce que vous m'embarquez dans cette démarche. Et
là, à ce moment-là, vous m'éloignez vraiment de la
solidarité des groupes, des membres qui, eux, me faisaient faire la
démarche de planification, mais pas dans un sens aussi cartésien,
mais plus avec leurs besoins.
Il y a une phrase qui court dans le communautaire et qui dit: tout comme
le ministère, on croit que pour la régionalisation, le danger
croit à l'usage, comme la politique de tabac.
M. Trudel: Là-dessus, pour contrer ce type de
problème qu'on peut effectivement rencontrer, est-ce qu'un
mécanisme d'appel à une structure plus centralisée comme
le ministère serait suffisant pour garantir l'accès soit à
la reconnaissance, soit au financement? Est-ce que ce serait suffisant?
Mme Hince: Le canal dont on parlait, c'est pour faire appel, oui,
lorsqu'il y a lieu, au niveau des conseils régionaux, mais c'est pour
plus que ça. C'est aussi pour pouvoir échanger avec les gens du
ministère lorsqu'il est question d'orientations, pour qu'en fin de
compte les groupes de base aient comme un canal de communication direct pour
pouvoir s'exprimer et faire connaître les besoins de leurs organismes,
les besoins des gens qu'ils représentent. C'est pour faire appel, mais
aussi pour participer aux orientations.
M. Trudel: Très bien. Ça va, merci. M.
Chevrette: Pour revenir à...
La Présidente (Mme Marois): Oui, M. le leader de
l'Opposition, vous avez d'autres questions à poser.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Pour revenir
à la régionalisation, si le gouvernement ou le ministère
octroyait un cadre bien précis, octroyait des enveloppes
régionales, mais dans un cadre précis, en disant, par exemple: Le
communautaire ou le préventif - appelons ça comme on voudra - va
prendre une part x plus importante, si ça devient une politique de
l'État et qu'il exige le partage local dans ses paramètres,
est-ce que la régionalisation vous ferait tout aussi peur que
présentement?
Mme Laurin: Oui, oui, parce qu'il faut quand même
comprendre aussi que les enjeux de la régionalisation, c'est que nous
sommes aussi avec des partenaires que l'on rencontre tous les jours. Le pouvoir
politique, quand il est en région, est autrement plus fort que quand il
est à Québec. Tous les jeux politiques, tous les jeux de
corporation, tous les jeux syndicaux - je parle de pouvoir politique "at large"
- se vivent d'une façon beaucoup plus intense au niveau de la
région. Là-dessus, pour les organismes communautaires, ça,
c'est un gros danger.
Encore là, vous venez de parler de préventif. Il y a aussi
toute la notion, à savoir que la bataille n'est pas encore gagnée
puisqu'on a enlevé le mot "alternatif' de la politique. Je pense que les
ressources, justement à ce niveau-là, essaient de montrer
qu'elles ne sont pas que préventives, mais curatives à leur
façon, pas curatives dans le sens médical Au niveau de
l'alternative en santé mentale, c'est une approche différente,
mais qui prend la même clientèle, dans bien des cas, que le centre
hospitalier. Donc, c'est toute cette notion
M. Chevrette: Mais ce n'est pas à cause de votre statut
plus particulier où vous jouez sur la dimension préventive et
curative dans votre cas? Par rapport au communautaire...
Mme Laurin: Oui.
M. Chevrette: ..est-ce que vous reconnaissez que vous avez un
aspect particulier?
Mme Laurin: Oui.
M. Chevrette: Bon. Ça répond à ma question.
Si vous le reconnaissez, je ne suis pas certain que le communautaire, lui, par
exemple,
qui n'a pas cette dimension d'alternative aux soins
médicaux...
Mme Laurin: Non.
M. Chevrette:... ne serait pas plus rassuré si le national
fixait un cadre de partage préalable. Le danger que je voyais et que je
comprenais était le suivant: il est évident que, si on arrive
avec une enveloppe globale de x centaines de millions au niveau de la
région, les établissements de santé, à tous les
niveaux, à partir du centre d'accueil, du centre de réadaptation
et des soins de longue durée, de courte durée, des centres
psychiatriques justement, vont tout gober le budget et il va rester des miettes
pour le communautaire. C'est un peu ça, la réaction
première du communautaire; en tout cas, c'est ce qu'on m'avait
énoncé. Et on m'a dit, à ce moment-là: Attention,
le ministre ne peut pas décentraliser et nous laisser en pâture,
si vous voulez, au groupe santé en particulier. J'avais compris
ça. Dans votre cas, vous m'arrivez en disant: Même si le ministre
fixait un cadre communautaire et de santé, nous autres, on resterait
craintifs pareil. Je comprends très bien pourquoi, c'est parce que vous
êtes une alternative au fait qu'on a médicalisé, au sens
très strict du mot, la réadaptation et la psychiatrie. Donc, vous
avez une part à jouer dans la partie curative.
Mme Laurin: Oui. Mais les femmes...
M. Chevrette: Mais ça pourrait faire l'objet d'une
discussion nettement en dehors du communautaire traditionnel qui n'a pas
affaire avec la partie curative par rapport au... Parce que vous jouez sur les
deux.
Mme Laurin: Les maisons de femmes, à ce compte-là,
ne sont pas plus contentes du cadre départage...
M. Chevrette: Les maisons de...
Mme Laurin: Les centres d'hébergement pour femmes...
M. Chevrette: O. K. D'accord.
Mme Laurin:... ne sont pas plus contents; ça n'a pas
réglé... Et, au contraire, ce que ça risque
d'entraîner, dans le communautaire, des cadres de partage, quand on les
fait trop fixes, ce sont des approches tous azimuts, mur à mur, qui ne
tiennent pas nécessairement compte de toutes les solidarités.
M. Chevrette: Oui, je suis d'accord avec vous. (17 heures)
Mme Laurin: C'est un danger de tabler tout sur le cadre du
partage.
M. Chevrette: En ce qui concerne l'exemple que vous me donnez, je
vous donne raison, mais reconnaissez-vous avec moi que, lorsqu'ils viennent
revendiquer un cadre de financement, ils viennent d'Institutionnaliser leur
groupe dans un... Comment dirais-je? Ils viennent négocier un per diem
pour recevoir une femme. La méthodologie d'approche n'est pas à
discuter, mais pour l'hébergement dans le cadre d'une politique de
financement pour les groupes de femmes, si vous voulez en parler, il y a un per
diem pour le nombre de femmes que tu reçois. Il y a un per diem pour les
services de "counseling" auprès des femmes. Il y a de l'argent qui est
attribué à ça. Mais, le jour où tu entres dans une
politique de financement, tu viens d'entrer dans un réseau bien
précis. Tu es obligé de dire: J'ai tant de jours-femmes dans mon
centre. Est-ce que l'indépendance que vous voulez conserver - et c'est
là ma question - n'est pas au niveau des méthodologies de travail
auprès des personnes...
Mme Laurin: C'est ça.
M. Chevrette:... mais que vous acceptez au moins, cependant, de
reconnaître qu'il y a une responsabilité ou une
imputabllité quant à l'argent qui vous est octroyé?
Mme Laurin: Nous sommes prêts à répondre de
la responsabilité et de l'imputablité, on la reconnaît. Ce
que l'on dit, c'est: Pourquoi ne répondrions-nous pas par: nous autres,
on vous donne des mécanismes dans lesquels on peut s'enclencher? Ce qui
est dangereux dans le fait de nous institutionnaliser, c'est qu'on prend les
formules toutes faites du réseau et qu'on nous les applique. Moi, je
pense que les organismes communautaires sont en mesure de produire
eux-mêmes leurs grilles d'évaluation, leurs rapports de
statistiques dont le ministère a besoin.
La Présidente (Mme Marois): Nous avons terminé,
évidemment, notre temps. On vous remercie. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Peut-être juste
clarifier...
La Présidente (Mme Marois): Certainement.
M. Côté (Charlesbourg):... je pense, une situation
dans la décision gouvernementale concernant la politique de santé
mentale. On a dit tantôt que c'étaient toujours les mêmes 8
000 000 $. Je pense que c'était M. Chevrette. Ce sont 8 000 000 $ neufs
à chaque année, ce qui fait, en vitesse de croisière, 32
000 000 $ indexés. Je pense que c'est important de faire la
clarification pour ne pas qu'on se mêle dans les millions. Quand on en a,
au moins le dire.
La Présidente (Mme Marois): Oui, ça va. On vous
remercie beaucoup de cette présentation. J'inviterais maintenant le
Regroupement des maisons d'hébergement jeunesse à prendre place,
s'il vous plaît, l'un ou l'autre de ses représentants.
Alors, M. Archambault, je crois. Vous nous présentez la personne
qui vous accompagne. Vous avez une vingtaine de minutes pour présenter
votre mémoire et, ensuite, le temps qu'il nous reste est partagé
entre les gens du gouvernement et de l'Opposition pour vous poser un certain
nombre de questions ou échanger avec vous.
Regroupement des maisons d'hébergement
jeunesse
M. Archambault (André): Je vous remercie. Je voudrais
seulement dire qu'en plus d'être président du Regroupement je suis
aussi directeur de l'une des maisons membres. Donc, c'est aussi à titre
de membre que je viens présenter ce mémoire. Je voudrais vous
présenter aussi Mme Elisabeth Martin, qui travaille au Service
d'hébergement Saint-Denis, une maison d'hébergement pour jeunes
de 15 à 20 ans, à Montréal, et qui est également,
évidemment, membre du Regroupement.
Comme le ministre l'a souligné tantôt, nous sommes, nous
aussi, un des regroupements qui vivent des inquiétudes par rapport
à l'avant-projet de loi, peut-être parce qu'on ne connaît
pas assez encore la structure, peut-être aussi parce que certaines
expériences vécues par plusieurs de nos membres, à
différents titres, nous amènent à nous poser des questions
sur le concret de cette proposition. Je dois dire aussi que le Regroupement est
membre de la Coalition des organismes communautaires du Québec et.
à ce titre-là, nous sommes solidaires des positions qui ont
été présentées par l'ensemble des membres de la
Coalition.
On est inquiets à deux titres particuliers: d'abord, sur la
question de l'existence même de nos ressources telles qu'elles existent,
telles qu'elles sont, telles qu'elles veulent intervenir, et, ensuite, de
l'accessibilité des services que nous offrons aux jeunes sans-abri. Et,
dans la définition même de jeunes sans-abri, déjà
des inquiétudes se posent dans des termes de restriction,
c'est-à-dire que, pour nous, ces jeunes-là, ce sont des hommes,
ce sont des femmes qui ont entre 12 et 30 ans.
On trouvera cet écart d'âge peut-être un peu
important, sauf que, dans nos maisons, on rencontre des jeunes de 12, 13 ou 14
ans qui ont un vécu d'adulte qu'on ne saurait imaginer et on rencontre
également des jeunes de 26, 27 ou 28 ans qui ont encore, malgré
tous leurs efforts, un statut d'adolescent, sans premier emploi, sans statut
réel, sans place réelle dans cette société.
À notre avis, on ne peut restreindre les sans-abri à une
simple description de malades mentaux abandonnés ou de clochards
toxicomanes chroniques. Oui, ces problèmes-là existent, sauf que
cela nous apparaît très restrictif et, pour nous, nous parlons de
dizaines de milliers de jeunes qui sont frappés par la pauvreté,
par l'isolement social et par une espèce d'angoisse de vivre assez
intolérable marquée au timbre du sentiment d'impuissance, du
mépris de soi et du désespoir. Nous partons d'une
génération frappée de plein fouet par les crises
économiques successives et qui a un mal de chien à se tailler une
place, si petite sort-elle, dans cette société. Il y a un certain
discours économique qui se fait jour à l'heure actuelle et qui
propose, d'ailleurs, d'investir plus dans les générations qui
suivent en se disant que, de toute façon, pour la
génération précédente ou ceux qui en ont le plus
souffert, on ne peut plus rien faire. Nous nous portons, évidemment,
à rencontre de ce nouveau discours.
Ce qu'on veut manifester, c'est notre crainte de voir cet avant-projet
de loi ou cette loi sur la santé et les services sociaux réduire
la réalité de ces jeunes afin de les insérer dans les
cases administratives beaucoup trop étroites de la simple santé
mentale, de la toxicomanie ou de la clochardise, quoique ces problèmes,
nous ne les nions pas, mais ils ne sont pas exclusifs. Pour nous, les jeunes
avec lesquels on travaille sont beaucoup plus que ça; ils ne sont pas
simplement des personnes à problèmes. Quand on parle d'approche
globale en ternies d'action communautaire, on ne parle pas simplement d'agir
sur des problèmes spécifiques, mais d'agir aussi sur des
potentiels. Ça nous apparaît important.
Nous avons des inquiétudes par rapport à l'existence de
nos maisons d'hébergement. Quelles sont-elles ces maisons? On parle de
22 maisons à travers le Québec, qui sont réparties sur
l'ensemble du territoire, dans toutes les régions du Québec ou
presque toutes. Il est étonnant de constater que, sans concertation
préalable, depuis 1973, les initiatives ou les dynamiques locales ont
permis de créer des ressources qui ont chacune leur distinction et qui
se sont donné chacune leur vocation, mais qui respectent
fondamentalement une dynamique régionale. C'est peut-être une
forme de régionalisation anticipée. Elles ont des
différences, mais elles ont sûrement un même objectif qui
est d'aider les jeunes en difficulté et sans abri. Ce sont 22 milieux de
vie créés par la communauté et où se retrouvent des
milliers de jeunes chaque année; on parie de 3500. Ils viennent de la
rue ou ils viennent du réseau; ça n'a que peu d'importance pour
nous. Ce qui est important, c'est qu'ils viennent d'abord sur une base
volontaire. C'est un élément essentiel de notre travail et, sans
cet élément-là, on voit déjà des risques de
voir notre intervention communautaire un peu handicapée, sinon
beaucoup.
Les organismes communautaires sont le dernier point de contact, à
notre avis, d'une
population de jeunes qui fuient le système, qui fuient le
réseau public, qui se marginalisent de plus en plus et qu'on aura de
plus en plus de mal à trouver si on ne maintient pas ces points de
contact. Les rapports de confiance et de confidentialité, les rapports
volontaires et négociés sont les conditions essentielles de notre
action efficace.
L'avant-projet de loi nous propose des principes intéressants qui
nous rejoignent à certains égards. La notion de santé qui
dépasse une simple vision médicale de la non-maladie nous
apparaît un pas fort intéressant, surtout quand on parle de
prévention, pas simplement de prévention de type très
très large, mais de prévention spécifique comme celle que
nous pensons faire. Notion d'intervention qui reconnaît aussi les limites
du réseau, son incapacité à tout faire. Le réseau
peut accomplir certaines choses. Il y a des choses qu'il ne pourra jamais
accomplir de par sa structure et non pas de par la mauvaise ou la bonne
volonté des gens qui y participent et que nous reconnaissons.
Nous entendons donc, dans cet avant-projet de loi, l'intention de
favoriser la prise en charge de la communauté et la recherche
d'alternatives aux approches lourdes centrées surtout sur des crises
à régler ou sur des problèmes très
spécifiques à régler. Nous entendons également
l'intention de changer les conditions de vie, donc, à notre avis, de
prévenir. Ce qu'on reconnaît d'intéressant également
dans l'avant-projet de loi, c'est cette première reconnaissance qui,
pour nous autres, est un gain, de ce qu'est l'action communautaire, de ce que
sont les organismes communautaires. Pour la première fols, on se volt
nommés et ça nous fait un petit velours quelque part. D'autre
part, évidemment, on a l'impression qu'une petite partie a
été oubliée qui traite surtout de notre autonomie et de
notre droit à rendre compte de nos orientations d'abord à nos
assemblées générales, d'abord aux gens de notre
communauté et d'abord à ceux qui s'impliquent directement dans
nos milieux.
D'autre part, on ne nous dit pas si, dans cette reconnaissance du
communautaire, on va vouloir la privilégier ou privilégier
l'approche de ressources intermédiaires au détriment de nos
ressources. C'est une inquiétude.
À titre d'exemple précis, on pourrait nous traiter de
paranoïaques ou nous dire qu'on ne le sait pas, sauf que certains indices
nous permettent de croire, par exemple, que l'une de nos maisons membres n'est
plus membre depuis déjà quelques mois parce qu'ils ont
effectivement accepté de devenir, à toutes fins pratiques, une
ressource intermédiaire d'un centre d'accueil. Ça se passe sur la
rive sud. Ils reçoivent leur clientèle, à partir de
maintenant, exclusivement du centre d'accueil; ils reçoivent leur mandat
du centre d'accueil. Donc, en termes d'autonomie, en termes d'approche
volontaire, en termes d'ouverture et d'accessibilité des jeunes, on se
pose des questions à ce niveau. Est-ce que c'est une approche qu'on va
privilégier?
D'autres centres d'accueil nous ont contactés pour nous demander
comment nous faisions l'intervention communautaire parce qu'ils ont des maisons
qu'ils veulent réutiliser. Certaines fondations de centres d'accueil
sont propriétaires de maisons. Ils veulent les réutiliser, ils
voudraient créer une ressource communautaire et viennent nous rencontrer
pour nous demander comment on le fait. Ils sont un peu surpris qu'on leur dise
qu'une ressource communautaire, ça part, au premier chef, de la
communauté qui la crée. Il faut faire une nuance, à notre
avis, très importante entre ressource communautaire et ressource
intermédiaire. Ces nuances ne sont pas encore évidentes. Dans
l'avant-projet de loi, ce qui nous apparaît intéressant, c'est
qu'on fait au moins une première distinction de ce type. Des ressources
créées par les centres d'accueil pour les besoins de
désengorger les centres d'accueil ne nous apparaissent pas être,
au départ, des organismes communautaires.
Un autre exemple qui m'est plus personnel et qui touche les ressources
pour les plus de 18 ans. Il est évident que, dans le cadre de la
réforme au niveau de la santé mentale, des hôpitaux comme
l'hôpital Douglas dans le sud-ouest de Montréal peuvent être
intéressés à recourir à nos ressources pour des
questions de désengorgement, sauf que, quand on en vient presque dans la
situation où on a dû fermer nos portes pendant quelques semaines
pour des problèmes de fonds et qu'on vient nous proposer de devenir
partie intégrante du programme de l'hôpital Douglas, il y a
déjà une marge qui nous apparaît beaucoup plus importante
et qu'il nous apparaît important aussi de démarquer.
Sur la question de l'universalité, là aussi, on trouve
qu'il y a des éléments intéressants parce que,
effectivement, pour nous, c'est un principe qu'il faut réaffirmer pour
les raisons que les jeunes avec lesquels on travaille risquent de se voir
encore pénalisés si cette notion était compromise. C'est
toujours, à notre avis, ceux qui en ont le moins qui paient le plus
à ce niveau. C'est toujours ceux-là qu'on vise comme étant
des abuseurs du système, alors que nous pensons qu'il y a beaucoup de
façons d'abuser du système que ces quelques pourcentages de
personnes qui abusent du système ne coûtent peut-être pas
aussi cher que d'autres et que ce n'est peut-être pas ceux auxquels on
devrait s'adresser d'abord. À ce titre, nous sommes en désaccord
avec la position, évidemment, des centres hospitaliers qui nous
apparaissent réclamer presque un triple financement, d'une certaine
façon. On les sait très largement financés, si on les
compare à nous, c'est bien évident.
On sait, d'autre part, que l'avant-projet de loi veut leur confirmer un
droit ou un pouvoir d'aller chercher des fonds privés. C'est sûr
que ça nous fait mal quand nous, on est obligés de
négocier des subventions à coups de 10 000 $, 20 000 $, 25
000 $ et qu'on nous demande d'aller chercher la plus grosse partie de notre
financement. C'est sûr que, si on se rencontre sur le terrain avec les
hôpitaux, avec les fondations d'hôpitaux, on arrive
deuxième. On n'a pas les machines de recherche de fonds qui vont nous
permettre de les concurrencer, ça nous apparaît évident,
comme deuxième financement.
Comme troisième financement, que les propres usagers de ces
services aient à payer en plus des taxes qu'ils paient
déjà, ça nous apparaît un élément de
triple financement qui coûte cher. Nos jeunes n'auraient peut-être
pas les moyens de faire ça.
On reconnaît un souci d'organisation, de réorganisation au
niveau du réseau qu'on trouve très légitime, qu'on trouve
très Important.
D'autre part, si l'avant-projet de loi prend position pour la
santé, on doit reconnaître la nécessité d'un partage
plus équitable entre l'action curative et l'action préventive. On
est d'accord pour investir des masses Importantes d'argent au niveau de la
santé, du curatlf, du traitement de la crise, mais il y a
également toute une action préventive qui nous permettrait
peut-être, à long ou à moyen terme, de réduire des
coûts Importants si cette action pouvait être garantie de
façon continue sur une période assez longue pour qu'on puisse en
faire la preuve. Un des problèmes qu'on vit à l'heure actuelle,
c'est de ne pouvoir agir de façon continue, de façon accessible.
(17 h 15)
Le curatif peut aussi, à certains égards, constituer un
gouffre important, parce qu'il n'y en aura probablement jamais assez. Je pense
qu'il faut trouver des alternatives, il faut trouver des ressources dans la
communauté. Il faut être capable de mobiliser les gens de la
communauté. À ce titre-là, je pense que nos organismes
constituent des alternatives Importantes pour mobiliser la communauté.
Je sais que c'est un objectif qui a été mis de l'avant et je
pense qu'on est en mesure de faire ça et on le fait depuis
déjà très longtemps.
On a des malaises au niveau des objectifs qui ont été
proposés. On veut ajouter toutes sortes de choses à la
santé et à la vie. Cependant, à titre d'exemple - on l'a
mis de façon importante dans le mémoire - parier du taux de
cholestérol de nos jeunes ou parler de réduire leur taux de
cholestérol alors qu'on est inquiet sur le fait qu'ils vont manger ou
pas, notre priorité, à nous autres, serait placée au
niveau de leur pauvreté et de leur capacité à s'alimenter
avant de parier d'indicateurs, de ce qui nous apparaît être
beaucoup plus des indicateurs, sur un niveau de santé
générale. Ça nous apparaît donc important de placer
la pauvreté et la capacité de survivre de ces gens,
évidemment.
Sur la question de la prévention, je pense qu'il y a beaucoup...
Il y a le rapport sur la santé mentale. Il y a des expériences
dans les CLSC qui permettent de démontrer que, si on est capable d'avoir
un impact sur la pauvreté, sur l'Isolement des gens, on est capable
d'avoir un impact aussi sur le fait qu'ils vont voir moins souvent le
médecin, qu'ils requièrent moins souvent de soins, qu'ils
comptent plus sur leurs voisins, qu'ils comptent plus sur leurs amis. Et,
à ce titre-là, je pense que l'action préventive, ce n'est
pas illusoire ou ce n'est pas juste une idée en l'air de se dire que
ça va avoir un Impact sur les coûts.
Sur la question du programme-cadre, c'est peut-être
l'élément qui nous Inquiète le plus. On a peur un petit
peu d'être appelé - et c'est un petit peu le thème de notre
mémoire - à troquer un petit peu notre vocation contre un
financement qui serait peut-être plus confortable, mais qui nous
demanderait de faire ce qu'on ne s'est pas donné comme mandat de faire.
A titre d'exemple, on peut reprendre l'exemple de la santé mentale. Nous
ne sommes pas des ressources alternatives en santé mentale. Nous ne
voulons pas que les maisons pour les plus de 18 ans soient associées
exclusivement à ce mandat. Nous nous adressons à tous les jeunes
et nous voulons rester ouverts à l'ensemble des jeunes. Nous ne voulons
pas être obligés d'aller dans des régies régionales
pour négocier un montant d'argent pour tel type de mandat ou tel autre
type de mandat, par petits morceaux, et que, si on acceptait d'aller dans cette
priorité de l'année, nous soyons obligés d'attendre
l'année suivante pour un financement adéquat. Ça nous
apparaît important de reconnaître les ressources pour ce qu'elles
font. C'est l'essentiel de notre projet.
La question de l'hébergement de dépannage pour les moins
de 18 ans est à l'honneur à l'heure actuelle. Je vais demander
à Élisabeth tantôt de peut-être vous en tracer un
portrait rapide. On ne veut pas, non plus, que les maisons pour les moins de 18
ans deviennent des garages pour désengorger le réseau. Je pense
qu'on s'est donné un autre mandat. On n'est pas seulement des pensions
pour jeunes, on est aussi des lieux d'intervention. Qu'elle soit à court
terme ou à long terme, on voudrait cette reconnaissance parce qu'on a
développé cette pratique. Ça nous apparaît
important.
Concernant les régies régionales, on ne s'est pas
penché très lourdement sur la mécanique. On voulait
simplement manifester une grande Inquiétude. On reconnaît que,
dans chaque région, II y a des besoins qui sont spécifiques et on
n'en disconvient pas. D'ailleurs, nos ressources se sont
développées de façon très autonome, en fonction de
ces disparités. On n'est pas très sûr, cependant, que la
proposition de régies régionales va servir le projet de
démocratisation annoncé dans l'avant-pro|et de loi Pour nous, la
place qui pourrait être occupée par les organismes communautaires
restera toujours marginale,
soit en termes de disponibilité, de capacité à se
mobiliser systématiquement pour répondre à un ensemble de
dossiers qui vont être vraisemblablement gérés
administrattvement. Est-ce qu'on va devenir seulement des "rubber stamps", des
sanctions, des cautions pour des décisions auxquelles on n'aura plus,
à un moment donné, accès, où on ne pourra plus
nécessairement se mobiliser? Quels vont être les pouvoirs
régionaux versus le pouvoir du ministre, la limite de ces
choix-là? Ça nous inquiète un peu.
D'autre part, notre projet communautaire, notre expérience en est
une de démocratie et de participation. On se dit qu'on pourrait
peut-être commencer à tabler sur nos regroupements, sur notre
présence régionale, sur notre volonté de collaboration,
d'autre part, qui ne s'est jamais démentie, mais qui a toujours
été volontaire et qui a toujours été
négociée volontairement avec l'ensemble des partenaires du
réseau. Évidemment, la perspective de voir disparaître nos
regroupements nous inquiète. Ça nous a pris quatre ans pour se
les donner démocratiquement. On s'est réuni librement,
gratuitement et démocratiquement. On est inquiet de cette perspective de
ne plus avoir de groupes qui nous représentent et qui
représentent l'ensemble de la réalité de nos
ressources.
Un dernier point, peut-être, concernant l'évaluation. On en
parle beaucoup. Je pense que notre Regroupement des maisons
d'hébergement est peut-être la meilleure garantie que
l'État peut avoir en ce qui concerne l'amélioration de la
qualité des services. Si on parle de l'évaluation en termes de
qualité de services, c'est un petit peu différent que d'en parler
en termes de contrôle administratif. On sait qu'on est imputable pour les
sommes qu'on reçoit et on n'a jamais refusé de rendre compte de
ça, d'aucune façon, en tout cas pour les montants qui nous
étaient alloués, étant donné que ça ne
correspond sûrement pas au total de ce dont on a besoin. Mais on a
toujours été redevable devant le gouvernement de ces sommes
d'argent qui nous ont été données.
D'autre part, en termes de qualité, il nous apparaît
cependant que la meilleure façon de contrôler cette
qualité-là, c'est quand les membres se regroupent pour essayer
d'échanger sur leur pratique, d'améliorer leur capacité
à intervenir et de se donner des meilleurs moyens. Je pense qu'on en a
fait la preuve. Si on accordait moins de temps à se battre pour notre
survie, à faire des représentations, à reparler de
reconnaissance et de financement après cinq, six, sept ans, on aurait
peut-être plus de temps pour parler entre nous de nos pratiques et les
améliorer. Ça nous apparaît un point important.
Un des dossiers chauds, à l'heure actuelle, qui nous donne
peut-être certaines indications sur nos craintes par rapport à la
régionalisation, c'est la question des jeunes sans-abri, 12-18 ans,
15-20 ans, 18-30 ans, on ne le sait pas. Ça nous inquiète et on a
fait des représentations à ce titre-là. J'aimerais
ça qu'Elisabeth puisse, un petit peu, vous présenter la situation
à ce niveau-là.
Mme Martin (Elisabeth): En effet, H y a...
La Présidente (Mme Marois): On vous laisse filer,
là, mais vous savez qu'il faut un petit peu...
Mme Martin: Je vais faire ça vite.
La Présidente (Mme Marois): ...se ramasser. Mais prenez
quand même le temps de nous présenter vos...
Mme Martin: O.K. Alors, il y a quatre principes qui
régissent l'action des maisons d'hébergement jeunesse. Ce sont
des principes qu'on veut préserver à tout prix parce qu'on se bat
pour ces principes depuis le début de l'avènement des maisons
d'hébergement et on désire que le projet de loi dont on parie
aujourd'hui nous permette de les préserver. Alors, il s'agit de la
mixité des sexes, de la mixité des âges, de la provenance
des jeunes qu'on reçoit et du principe de volontariat. Celui-là,
je le laisserai tomber parce qu'André en a déjà
parié. Je vous parierai quand même de la mixité des
âges, des sexes et de la provenance.
Ce qui caractérise la philosophie des maisons
d'hébergement jeunesse, c'est leur compréhension de
l'adolescence, période qui débute vers l'âge de 12 ans et
qui se cristallise vers 24 ans. Les jeunes mineurs que l'on retrouve dans nos
maisons doivent acquérir une autonomie beaucoup plus rapidement que ceux
qui peuvent encore bénéficier d'un soutien familial
adéquat. L'engorgement du réseau des services sociaux a
entraîné des listes d'attente qui relèguent les adolescents
derrière les jeunes enfants. On sait qu'à la DPJ ils sont
beaucoup plus préoccupés des jeunes enfants de deux ans que d'un
adolescent de dix-sept ans et demi qui vit une crise familiale avec ses
parents.
Une maison d'hébergement jeunesse devient alors, pour ces jeunes,
un milieu de vie privilégié où ils pourront faire des
apprentissages dans le respect des éléments de socialisation
qu'ils ont déjà acquis. La cohabitation des majeurs et des
mineurs présente alors des avantages notoires. Elle permet à ces
derniers d'abaisser la pensée magique des 18 ans à un niveau plus
réaliste, la pensée qu'à 18 ans tout se règle de
soi-même parce qu'on devient majeur. Et puis, qu'on le veuille ou non, la
coexistence des mineurs et des majeurs, tout comme la mixité des sexes
d'ailleurs, ça fait partie de la vie de tous les jours. À quoi
ça servirait de proposer un milieu de vie aseptisé,
détaché des réalités de la vie quotidienne, quand
le but poursuivi est la recherche de
l'autonomie et de l'intégration sociale? Sans compter que les
influences négatives, en tout cas, qu'on présume souvent seront
beaucoup mieux contrôlées dans des maisons d'hébergement
que dans la rue. Les jeunes qui sont dans nos maisons peuvent recevoir l'aide
d'intervenants pour reconnaître les pièges de la manipulation et
du principe du plaisir.
En présentant son cadre normatif, en juin dernier, le
ministère annonçait que les maisons auraient à choisir, et
ça a été reconfirmé, entre recevoir des jeunes de
moins de 18 ans ou des jeunes de plus 18 ans. Alors, il n'y aura plus
possibilité de recevoir à la fois des jeunes majeurs et mineurs
à l'intérieur d'une même maison.
En novembre dernier, on a appris qu'il n'y avait pas de
considérations légales à l'origine de cette
décision-là, que le ministère, finalement, invoquait des
considérations éthiques. Alors, les assemblées
générales, les CA, les intervenants des maisons
d'hébergement, eux aussi, ont des préoccupations éthiques.
C'est pourquoi le Regroupement n'hésite pas à reconnaître
qu'une maison ne peut accepter de faire cohabiter des jeunes dont
l'écart d'âge représenterait une trop grande
différence dans l'expérience de vie.
Toutefois, l'idée d'un âge précis comme clivage nous
apparaît plus légaliste que réaliste. Le jour de ses 18
ans, un jeune devient majeur, mais cela ne signifie pas, pour autant, qu'il
devient adulte et autonome. Le Regroupement définit que, pour les
maisons qui choisissent de travailler avec des jeunes mineurs et majeurs, un
écart maximal de six ans permettrait d'éviter que de jeunes
adultes ne se retrouvent à partager un môme toit avec des
adolescents plus jeunes. Ceux-ci, les plus jeunes, pourraient avoir de la
difficulté à intégrer l'expérience de vie d'un
grand frère peut-être un peu trop vieux.
Il y a aussi le principe de la mixité des sexes sur lequel on
veut s'attarder. On pense que, dans la société, il y a des femmes
et des hommes, et le fait que, dans nos maisons d'hébergement, il y ait
des femmes et des hommes, c'est aussi un portrait fidèle de la
société et ça permet aux jeunes d'échanger entre
eux sur, par exemple, le rôle de la femme, la place de la femme dans le
marché du travail et ça leur donne un excellent terrain
d'apprentissage pour partager leurs expériences de vie. Tout au long de
l'existence des maisons d'hébergement, II n'y a jamais eu aucune plainte
ni aucun scandale qui a fait en sorte de laisser voir que la mixité des
sexes ne doit pas exister a l'intérieur des malsons
d'hébergement.
La mixité de la provenance aussi, parce que, quand on parle de
jeunes sans-abri, de jeunes en difficulté, on parle de jeunes qui, s'ils
ont moins de 18 ans, peuvent être référés par les
services sociaux ou par les CLSC et il y a les jeunes aussi qui viennent
d'eux-mêmes, sans passer par toute la filière du réseau.
Pour nous, c'est Important aussi qu'il y ait un respect au niveau de la
mixité de la provenance des jeunes. Alors, que les jeunes viennent du
réseau, qu'ils nous soient référés ou qu'ils
viennent de la rue, pour nous, ce sont des jeunes qui ont des problèmes,
qui ont des difficultés de vie et il n'y a pas de discrimination. On ne
voudrait pas se voir Imposer seulement des jeunes qui viennent du
réseau.
Et le principe du volontariat, c'est le quatrième principe.
André en a parié, comme le temps est écoulé, je
vais m'abstenir.
La Présidente (Mme Marois): D'accord, merci. Alors, on
vous remercie de votre présentation. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Beaucoup de choses. Il y en
a des bonnes que j'ai écoutées avec beaucoup d'attention, qui me
touchent, peut-être parce que je suis originaire d'une région. Ce
n'est peut-être pas nécessairement la raison qui fait que je vous
donnerais raison sur certains points, mais, à tout le moins, ça
me permet de comprendre certaines interrogations que vous avez. C'est clair que
le comportement, au niveau d'une région, des maisons par rapport
à un milieu très urbanisé comme l'est celui de
Montréal... Forcément, les critères que nous avons
à Montréal peuvent s'appliquer à Montréal, mais ne
s'appliqueraient pas nécessairement dans le monde rural et la
barrière des 18 ans, à ce moment-là, est un
élément sur lequel on doit se pencher. J'ai compris que vous
allez rencontrer des gens tantôt pour continuer la discussion.
Je voudrais commencer par votre page des recommandations - je pense
qu'on a une bonne partie de l'essentiel des Interrogations à partir des
recommandations - et aller à 2B et, évidemment, en profiter
à ce moment-ci, parce que tous ceux qui sont venus défendre
l'intérêt des groupes communautaires ont fait à peu
près la même revendication, pour vous dire que, dans les
orientations, à la page 82, on retrouve bien défini... C'est ce
que vous dites, c'était bien dans les objectifs, dans les orientations,
mais on ne le retrouve pas à l'intérieur de l'avant-projet de
loi. Alors, pour ceux qui connaissent les difficultés que nous impose la
rédaction de textes sur le plan législatif, on a beau avoir le
meilleur des contentieux - c'est ce que j'ai au niveau du ministère - on
en arrive toujours à quelques petits problèmes au niveau du
Bureau des règlements et des lois qui Interprète de
manière différente et qui dit qu'on doit en mettre le moins
possible. Évidemment, l'objectif de base était de refléter
dans lavant-projet de loi, dans le texte, exactement ce qu'il y avait dans les
orientations. Le constat qu'on a, comme tout le monde s'interroge, c'est qu'on
n'a peut-être pas réussi et que ce sont des situations qui seront
éventuellement corrigées pour bien vous rassurer
à ce niveau-là. (17 h 30)
Je vais aller directement à un des os, votre recommandation 7:
"Limitation du pouvoir des établissements de réaliser des
campagnes de levée de fonds pour permettre aux organismes communautaires
de réaliser les leurs. " La communauté anglophone nous a
habitués... Parce qu'on ne l'était pas, les francophones.
D'abord, on n'avait pas les moyens et, avant môme que la
communauté francophone ne réussisse à avoir un certain
leadership dans le monde des affaires - parce que c'est là qu'est
l'argent - ça a pris un certain temps. Mais on a appris des
communautés anglophones que des levées de fonds, ça
pouvait faire des choses miraculeuses. Évidemment, les institutions se
sont ajustées vis-à-vis de la rareté des ressources,
prenons un terme comme celui-là, ça ne choquera personne. D'autre
part, on pourrait dire aussi que devant l'appétit constant et en forte
croissance des institutions on a trouvé le moyen d'aller chercher de
l'argent ailleurs pour faire ce qu'on voulait faire. Parce que ça, c'est
encore un principe très sacré de l'autonomie. Si on a eu... Quand
notre fondation est allée chercher notre argent, on peut se permettre de
mettre de la pression sur le gouvernement pour les budgets d'opération
et on peut aller acheter un scanner, par exemple. On dit: Vous n'avez
même pas à le payer. Nous on l'achète, mais vous allez
payer le coût d'opération.
Évidemment, tout ça est toujours fait dans le but
d'augmenter le service à la population. Je pense qu'on peut le dire
d'une manière générale. Comment est-ce qu'on fait pour
dire, demain matin, à tout ce monde-là qui, de manière
bénévole aussi - peut-être avec quelques permanents
payés, de l'hôpital ou d'un centre - fait des levées de
fonds... Parce qu'au bout de la ligne, s'ils vont ramasser 1 000 000 $ ou 2 000
000 $, dans certains cas, 11 000 000 $ ou 15 000 000 $, ce sont des sommes
très très appréciables. Et ça ne veut pas dire par
le fait même aussi que si on les faisait évacuer ce
champ-là, automatiquement, les groupes communautaires pourraient aller
chercher le même argent. Ça me paraît un peu difficile,
là. Dites-moi comment faire pour interdire purement et simplement que ce
champ-là soit occupé par les institutions?
M. Archambault: o. k. on n'a pas parlé d'interdire, dans
un premier temps, on a parlé de limiter. et ça, ça
m'apparaît important.
M. Côté (Charlesbourg): Comment est-ce qu'on limite
ça, alors?
M. Archambault: Pardon?
M. Côté (Charlesbourg): Comment est-ce qu'on limite
ça, alors?
M. Archambault: Je vais vous dire ça. Sérieusement,
je pense qu'il y a peut-être effectivement un écueil qui
apparaît important et je ne pense pas qu'il y ait de solution miracle. Et
si vous me demandez comment, je pense que ça peut être aussi en
fonction de reconnaître certains besoins. Je pense qu'on reconnaît
qu'il y a des besoins au niveau du réseau de la santé. On n'est
pas aveugles non plus. Cependant, on reconnaît qu'il peut peut-être
y avoir des limitations au niveau des montants, ou des limitations au niveau de
la portée ou de la durée. Il peut y avoir des limitations sur les
objectifs, c'est-à-dire pourquoi on ramasse de l'argent, si on le
ramasse pour un scanner, si l'hôpital à côté en a un,
etc. Il y a peut-être des façons de limiter sur des objectifs
à remplir.
On a vu des campagnes de financement qui se faisaient pour ramasser le
fameux scanner. Tout le monde semble en vouloir un maintenant. Si on dit: On
veut ramasser 1 500 000 $ pour un scanner, et ça paraît important
dans une région parce qu'effectivement c'est vital, je pense que ce sont
des objectifs qui sont légitimes. Si on y va "at large" parce
qu'effectivement, avant, il y avait un vide, il n'y avait rien dans la loi qui
permettait ou qui interdisait, maintenant elle le permet, elle le permet sans
limite, ça nous apparaissait absolument difficile pour nous. C'est bien
évident qu'on se ramasse dans un marché de compétition.
Ça devient presque intenable ou insupportable de penser qu'à
cause de l'ensemble des besoins on est obligés de
"compétitionner". Mais dans les faits, quand nous autres on va demander
un petit montant de 25 000 $ de plus, de temps en temps, on se fait dire:
Écoutez, il faut que vous soyez autonomes. Il faut que vous soyez
autofinancés. Faites un effort. On passe notre vie à faire
ça. En tout cas, moi ça fait un an que j'en passe un grand bout
à l'heure actuelle et il est évident qu'on ne peut pas monter
des... On est en train de travailler très fort à se créer
des appuis à l'intérieur de la communauté, même de
la communauté des affaires, ça c'est clair. Mais, avant que ce
soit fait, il y a un temps qui va se passer pendant lequel des ressources vont
mourir. Et ça nous apparaît aussi intenable et insupportable
à l'heure actuelle. Il est clair qu'on ne demande pas l'interdiction
parce qu'on reconnaît bien qu'il y a des limites et qu'il y a des
besoins, mais on proposerait peut-être d'aller vers des objectifs, ou
vers des limites d'argent ou de durée de cet ordre-là, à
titre indicatif, n'étant pas un spécialiste....
M. Côté (Charlesbourg): Oui, d'accord. On va... Non,
mais je comprends que c'est davantage dans le sens de trouver des balises qui
vont faire en sorte qu'il en reste pour les
autres.
M. Archambault: Exactement.
M. Côté (Charlesbourg): Revenons aux objectifs. Bon,
vous avez pris tantôt un exemple. Vous avez dit: Parfait, avant de tenter
de contrôler le cholestérol des jeunes, il faut peut-être
s'assurer qu'ils aient de quoi manger. Évidemment, ça c'est un
problème de gouvernement, auquel le gouvernement doit s'attaquer. Il est
évident de plus en plus qu'il y a un lien direct entre ton état
de santé et ta capacité de bien te nourrir.
Il y a 20 objectifs qui sont dans le document "Orientations".
D'après vous, le défi - j'ai des idées, moi, je pourrais
vous les dire, mais ce n'est pas ça que je souhaite là...
D'après vous, quelles sont les deux premières priorités
auxquelles le gouvernement devrait s'attaquer demain matin?
M. Archambault: Les deux premières priorités. Si du
siège où moi je me trouve... Je vous dirais très
spontanément et très personnellement, je vais sortir de mon
mandat de représentant du regroupement pour vous dire très
personnellement que je pense que la pauvreté, celle des jeunes en
particulier - la pauvreté des personnes âgées, j'ai
l'impression qu'il y a des gens qui vont venir vous en parler, je vais leur
laisser ça - et l'isolement, si on parie sur le plan social, l'isolement
des gens, dans toutes ses dimensions, m'apparaissent des priorités. Il y
a 25... Vous avez dit vous-même qu'il y avait 20 priorités et il y
a des gens qui viendraient s'asseoir à la même place que moi et
qui vous en nommeraient sûrement quelques autres. Si j'ai à me
prononcer là-dessus, moi, ce qui me préoccupe, c'est la
pauvreté de ces jeunes-là parce que beaucoup de choses
découlent de cette pauvreté et surtout de cet isolement. On
aurait tendance à croire à des problèmes individuels des
gens en disant: Ah! Ils sont maladaptés, etc., sauf que, quand on
regarde dans l'ensemble de la vie de l'ensemble des Québécois,
dans nos vies personnelles et un peu partout, l'isolement social des gens est
un problème pour les personnes âgées, pour les jeunes et
pour un paquet de monde. Je pense qu'on a à recréer des tissus
sociaux. Ça, ça ne se fait pas en un an; ça ne se fait pas
nécessairement par mandat annuel, c'est sûr; ça se fait sur
de longues périodes. C'est pour ça qu'on est venu vous demander
de faire un choix de longue durée, à long terme, sur des actions
préventives. On a galvaudé le préventif, on est d'accord
là-dessus. On l'a galvaudé à toutes les sauces, mais je
pense qu'il faut reconnaître qu'il y a des actions préventives qui
peuvent être cernées, qui peuvent être cadrées et qui
peuvent permettre aussi de réduire des interventions de type curatif.
Là-dessus, on en est convaincu, le vécu avec nos jeunes tous les
jours nous permet de le constater et on n'est pas médecin.
M. Côté (Charlesbourg): donc, si je vous comprends
bien, peu importe l'ordre... les deux premières priorités
devraient s'adresser à nos gens âgés, aux
difficultés que connaissent nos gens âgés, et à
notre jeunesse.
M. Archambault: C'est plus large que ça.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non, d'accord, je
comprends.
M. Archambault: C'est plus large que ça. M.
Côté (Charlesbourg): Oui
M. Archambault: Oui, je pense que ce sont deux groupes
d'âge - je ne suis pas sûr de vous voir venir encore - qui vivent
des difficultés...
M. Côté (Charlesbourg): ...les plus
vulnérables.
M. Archambault: ...d'isolement et de pauvreté et qui sont
plus vulnérables, le problème n'étant pas leur âge,
mais sûrement leur pauvreté et leur isolement.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, mais en tout cas...
Disons que, si je vous donnais mon opinion à moi, je pense que les deux
plus mal pris de notre société, ce sont les deux extrêmes,
en termes d'âge.
M. Archambault: Vous parlez de priorité ou de
clientèle plus vulnérable?
M. Côté (Charlesbourg): Deux objectifs, mais
ça vise effectivement - on va finir par y arriver - les
clientèles. Et avec le défi de demain, du vieillissement de notre
population, il est bien évident qu'en termes de choix de gouvernement on
n'aura pas d'autre choix, éventuellement, que de faire face à
ça. À l'autre bout, notre jeunesse éprouve aussi des
difficultés extrêmement importantes et, à partir de
ça, on va trouver les conditions qui font qu'ils vivent des
problèmes. C'est pour ça que je vous posais la question. Donc,
dans ce cheminement où nous partageons à peu près les
principaux éléments, serait-il logique et pensable, dans la
mesure où nous avons un programme-cadre sur le plan des subventions aux
organismes communautaires, qu'on oriente aussi nos disponibilités
budgétaires en fonction des priorités d'aujourd'hui? Ça
m'apparaît important parce que, en termes de rareté de ressources,
si on doit effectivement dire: Le problème numéro un est
celui-là, le numéro deux est celui-là, le numéro
trois est celui-là, est-ce que, dans ces conditions-là, la
logique ne voudrait pas que, sur le plan de l'allocation de nos ressources,
à tous les ni-
veaux - on parle de communautaire, mais à d'autres niveaux aussi
- nos efforts soient d'abord orientés en fonction de ces
objectifs-là?
M. Archambault: C'est une bonnel Si vous parlez de
priorités en termes d'économie de coût,
c'est-à-dire: On n'a pas assez d'argent pour tout, donc il faut choisir,
je vous dirais qu'avant de "prioriser", à l'intérieur même
du communautaire qui ne doit pas représenter une grosse masse là
- évidemment, il y a plusieurs millions là-dedans mais, par
rapport à l'ensemble du budget, ça ne représente pas une
masse énorme sur l'ensemble du budget - avant de "prioriser" à
l'intérieur même du communautaire, évidemment, de là
où je suis placé, moi, je vous dirais de "prioriser" le
communautaire. Les besoins sont partout. Ils sont pour les familles, ils sont
pour les jeunes, ils sont pour les personnes âgées. Je pense qu'il
ne faudrait peut-être pas une masse considérable d'argent pour
consolider, peut-être un millier ou deux milliers d'initiatives a
l'Intérieur même de la communauté et qui nous permettraient
- d'ailleurs, on n'a jamais demandé le total chez vous de toute
façon - effectivement de consolider sur l'ensemble. Je pense qu'il y a
de la place pour ça. C'est peut-être une des craintes qu'on vit
à travers la question des régies régionales, c'est
d'être obligés d'aller se battre, par exemple, avec le Centre des
femmes de Verdun ou avec tel autre centre ou tel autre groupe pour avoir un
petit morceau de ce qui devrait être prioritaire. Qui va décider
de ce qui va être prioritaire? Je sais, il y a des journées
ça ne doit pas être très facile de tracer ces
priorités-là, surtout en termes de budget, sauf qu'il nous
apparaît possible, je pense, compte tenu de la masse d'argent qui est
représentée par ce ministère et du peu qui est
demandé la plupart du temps par nos groupes, de répondre
adéquatement à l'ensemble. J'aurais, moi, beaucoup de mal
à défendre mon dossier contre un autre organisme communautaire
sachant l'ensemble des batailles que ces gens-là ont aussi à
mener de la même façon. Je ne voudrais pas me retrouver en
région, à être obligé de défendre la vie de
mon organisme contre celle d'un autre; ça, j'aurais effectivement
beaucoup de difficultés à le faire et je pense que ce n'est pas
à moi de le faire non plus.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends votre
intervention mais, évidemment, à partir du moment où on se
met dans une situation où on veut se situer dans des priorités et
des objectifs sur le plan gouvernemental, les sommes d'argent dévolues
à ce moment-ci... Tout le monde demande le 1 %, on sait ce que ça
représente; cette année 47 000 000 $, et 47 000 000 $ ce ne sont
pas des "pinottes". On veut bien le situer. Pour bien le situer dans le
ministère par rapport à son importance, le gouvernement, au cours
des dernières années, a reconnu un budget d'alour- dissement de
clientèle et c'est 45 000 000 $, le budget d'alourdissement de
clientèle. Donc, lorsqu'on dit 47 000 000 $, pour ceux qui sont dans les
groupes communautaires, évidemment, on souhaiterait bien en avoir 90 000
000 $ ou 100 000 000 $ et ça peut être légitime aussi. Mais
quand on regarde le problème auquel on fait face aujourd'hui et demain
en termes d'alourdissement de clientèle, donc, nos personnes
âgées qui sont entrées dans des centres
d'hébergement à 65 ans presque autonomes, perte d'autonomie qui
exige beaucoup d'heures-soin - c'était une heure et demie, c'est deux
heures et demie, c'est trois heures - on consacre donc comme effort ce qu'on
peut consacrer, 45 000 000 $. C'est donc important. C'est pour ça que je
ne vous oblige pas de répondre là. Je pense que je vous ai assez
torturé comme ça. Vous avez des intérêts à
défendre...
M. Archambault: Je dirais... excusez, terminez.
M. Côté (Charlesbourg): Allez.
M. Archambault: J'aurais peut-être plus tendance, à
des moments donnés, à comparer ces 47 000 000 $ à
l'ensemble des besoins lourds du réseau. Je vais prendre une rubrique
d'un journal, la semaine passée, où les hôpitaux
réclamaient 300 000 000 $, je pense, pour les réparations les
plus urgentes. Moi, j'ai tendance à tomber en bas de ma chaise dans ce
temps-là, d'une part, parce que je me dis: Mon Dieu, qu'on n'est pas
gros! Donc, à ce niveau-là, s'il fallait comparer, j'aimerais
autant comparer avec le réseau que le comparer avec mes confrères
et consoeurs du réseau communautaire, pour des raisons évidemment
d'intérêt aussi sûrement.
M. Côté (Charlesbourg): Je comprends. Finalement, on
prend toujours, quand ça nous concerne, la comparaison qui fait notre
affaire. Je comprends. Alors, j'ai pris celle-là aussi, mais je l'ai
prise dans un secteur où je me suis dit: C'est une des priorités
de demain, l'alourdissement des clientèles au niveau du réseau.
Comme vous êtes des gens qui travaillez dans le communautaire et qui,
effectivement, avez à donner des services aussi, de manière
globale, à ce genre de ressources, ce sont des choses dont on doit se
préoccuper sans pour autant négliger ce que je considère
l'élément jeunesse. Évidemment, je pourrais continuer.
Votre exemple de la rive sud, d'un de vos membres associés qui vous a
été littéralement piraté, ça pose tout le
problème de l'autonomie des institutions auxquelles on accorde des
budgets où on n'a finalement, au bout de la ligne, pas beaucoup de
droits de regard quant à l'action. Ça pose aussi le
problème d'autonomie des groupes communautaires qui sont
subventionnés et qui font fondamentalement un choix, à un moment
donné, de vous laisser pour aller vers le
plus lucratif, comme vous l'avez dit tantôt. (17 h 45)
M. Archambault: J'ajouterais là-dessus... Ah! Je
m'excuse.
La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'ils font vraiment le
choix à ce moment-là? La question se pose. Ou c'est l'obligation
qui les amène...
Mme Martin: C'est un faux choix. En quelque sorte, c'est un
choix: ou bien tu crèves ou bien tu continues parce que tu veux faire
une action auprès des jeunes, et tu vas prendre un autre créneau.
Je pense que c'est un faux choix. C'est un choix piégé, en tout
cas.
M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Ce qui est le
titre de votre mémoire.
Mme Martin: Oui.
M. Côté (Charlesbourg): Ce sur quoi je voulais
attirer votre attention, ce n'est pas nécessairement sur le fait qu'il
était piégé, mais davantage l'autonomie. On demande
aujourd'hui, à peu près dans tous les rapports, davantage
d'argent et davantage d'autonomie. Autrement dit: passez-nous plus d'argent,
mais ne vous mêlez pas de nos affaires, et ça, des fois, c'est
difficile à concilier. Je ne dis pas que c'est votre cas là.
M. Archambault: O.K. Mais je vous voudrais parler de
l'alourdissement. Vous parliez de l'alourdissement. Chez nous aussi, on le vit,
l'alourdissement. On reçoit des jeunes qui vivent des problèmes
de plus en plus compliqués. On peut constater qu'on a tardé
à intervenir, que c'est le milieu communautaire qui a, encore une fois,
mis le doigt sur certains problèmes en termes d'hébergement des
jeunes et qui a finalement trouvé les alternatives. Une fois que c'est
fait, quand on essaie de le cadrer, ça devient beaucoup plus
compliqué parce qu'on se dit: On est là, sur le terrain, depuis
déjà un bon moment, on a identifié des affaires, on a fait
des pas, on a développé des alternatives et, là, on nous
dit: Bien non, vous ne ferez pas ça de telle façon ou vous ne
ferez pas ça de telle autre façon. On dit: Un instant! Par
rapport à ça, les clientèles chez nous aussi
s'alourdissent et on ne refuse pas systématiquement non plus de recevoir
des clientèles lourdes, mais on veut les recevoir de la façon
qu'on a développée en termes d'intervention - et c'est ce qu'on
veut surtout préserver - et préserver cette dynamique qui existe
entre ce qu'on appelle la communauté qui s'implique dans nos ressources
et qui nous aide aussi à choisir et à orienter, ce qui nous
permet de nous revirer sur un trente-sous, alors que, pour d'autres
institutions du réseau, ça prend beaucoup plus de temps avant de
changer les orientations. Je pense que c'est un avantage non négligeable
pour l'ensemble des ressources.
La Présidente (Mme Marois): Je pense que Mme la
députée de Saint-Henri voulait soulever une question.
mme loiselle: merci, mme la présidente. ce n'est pas une
question, c'est un commentaire, un commentaire positif. ça fait du bien
de temps en temps. je voulais, au nom des jeunes démunis et en
détresse du sud-ouest de montréal plus précisément,
du quartier saint-henri, côte-saint-paul et ville-émard, vous
remercier publiquement. si on recule dix ans ou onze ans en arrière, je
me souviens de la première rencontre que j'ai eue avec vous, m.
archambault, ii n'y avait presque pas d'aide ou de ressources pour ces
jeunes-là pour se retourner et aujourd'hui, grâce à
l'acharnement, la volonté et la détermination des intervenants du
milieu qui oeuvrent auprès de la jeunesse comme vous et votre groupe, on
retrouve deux maisons de jeunes qui sont très actives, à
saint-henri et à vllle-émard, une maison d'hébergement,
hébergement du sud-ouest, une maison de jeunes pour les jeunes qui ont
de graves problèmes de drogue et d'alcoolisme. je vous dis merci et je
vous dis de ne pas lâcher. je suis derrière vous. merci.
M. Archambault: Ça fait du bien de l'en tendre. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme la
députée de Saint-Henri. Je suis persuadée que c'est un
commentaire que beaucoup de vos collègues autour de la table, tant d'un
côté comme de l'autre, partagent avec vous.
M. le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, s'il
vous plaît.
M. Trudel: Tout à fait, Mme la Présidente, je ne
veux pas rallonger là-dessus, mais, avec ce qu'on a entendu depuis un
certain nombre d'heures et de journées maintenant, vous nous
présentez un mémoire extrêmement articulé et une
pensée extrêmement articulée à l'intérieur de
ce que vous dites et de ce que vous constituez comme ressource dans la
communauté. Je dois vous dire tout de suite, en tout cas, que c'est la
première fois que le ministre, face à des groupes qui sont venus
nous présenter leur pensée, reconnaît assez largement que
le problème est beaucoup plus relié à la pauvreté,
à l'état de situation des populations qu'à des plans de
traitement, qu'à la réponse que l'on donne en termes de services
de santé et de services sociaux au Québec. Là-dessus, il
va falloir espérer que le ministre aille aussi Jusqu'au bout, au niveau
de l'allocation des ressources, en lui faisant remarquer, entre autres, que,
dans le domaine dans lequel vous oeuvrez, par rapport au problème de la
limitation des sommes à Injecter
dans le réseau, à la nécessaire limitation des
ressources de l'État... Il faut dire au ministre, et probablement qu'il
le sait, bien sûr, que l'on se prive, au Québec, d'une certaine
quantité de ressources financières parce que, par exemple,
l'action que vous menez auprès des jeunes en termes de prévention
- et vous avez tellement bien décrit ces interventions-là - elle
n'entre pas dans les compensations ou dans les calculs au niveau du
gouvernement fédéral pour rembourser le Québec, parce que
vous ne vous occupez pas des jeunes qui ont été
Incarcérés.
Le gouvernement fédéral redonnerait des ressources au
Québec pour vous aider à mieux faire votre travail, mais à
condition que ce soient des jeunes qui vous aient été
référés en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Là-dessus, on comprend que c'est un autre morceau qu'on doit assumer
seuls, au Québec, et que ça aide, que ça supporte ou que
ça contribue à la faiblesse de revenus que nous avons pour vous
aider en termes de ressources financières.
Ceci étant dit, toute cette problématique de la
reconnaissance des groupes communautaires, de leur financement et de
l'autonomie que ces groupes doivent avoir... Est-ce que vous reconnaissez
cependant qu'il est de ta responsabilité de l'État de fixer les
grands objectifs généraux vers lesquels on doit tendre dans une
société et qu'on est en mesure d'exiger - je fais exprès
pour utiliser le mot "exiger" pour caricaturer un peu - de la part des groupes
communautaires oeuvrant dans un secteur particulier, de se conformer à
ces grands objectifs et qu'en quelque sorte - il faut bien être clair -
ça amène une limitation de la définition d'autonomie?
Est-ce que c'est acceptable? Est-ce qu'on peut se rendre jusque-là
lorsqu'on serait en train de définir une politique de reconnaissance de
l'action des groupes communautaires au Québec?
M. Archambault: Je pense qu'effectivement on reconnaît
cette condition, soit que le ministère a à fixer les grands
objectifs. Dans la pratique et dans ses technicités, cependant, il
faudrait peut-être - et c'est peut-être un problème depuis
la loi 65 qui a lancé des grands objectifs d'universalité, etc.,
qui voulait une certaine uniformité sur l'ensemble du territoire, des
services pour tout le monde, tout ça - reconnaître aussi qu'il y a
une dynamique différente qui joue a contre-courant, dans ce
sens-là, mais pas nécessairement à contre-courant dans le
sens de rejoindre ces objectifs.
Les organismes communautaires sont issus du milieu. Ils naissent parce
que les gens reconnaissent, ou intuitivement, ou de toute autre façon,
des besoins et, éventuellement, ces initiatives se cristallisent dans
des groupes. Ce qui m'apparaît important, maintenant, et c'est
peut-être un des enjeux de cet avant-projet de loi et de la loi avec
laquelle on va vivre pendant 10 ou 20 ans, c'est de reconnaître le
besoin, une fois qu'on a défini un réseau d'ensemble de services
uniformes sur l'ensemble du territoire, d'apprendre à gérer la
différence. C'est-à-dire que, malgré tout ce
réseau, malgré ces grands objectifs, il va rester une masse de
besoins que les gens eux-mêmes vont vouloir rencontrer, pour lesquels ils
vont vouloir se solidariser et trouver des alternatives.
Il va falloir trouver à l'intérieur de cette loi un moyen
de reconnaître que l'État doit aussi gérer cette
différence. On parle de différences régionales, on parle
de différences d'Interventions, on parle d'alternatives. Il n'y a pas de
recette miracle et c'est un gros enjeu qui n'est pas facile à
rencontrer. Mais comment l'État va-t - il pouvoir gérer la
différence en reconnaissant cette différence, en reconnaissant
une dynamique qui fait qu'à Rimouski il s'est créé une
maison d'hébergement qui ne ressemble pas à celle de
Montréal, mais qui répond tellement bien aux besoins qu'on n'a
pas besoin de l'encadrer nécessairement dans un objectif
général, des objectifs spécifiques, des objectifs par
région, des mandats par région, des mandats
spécialisés, des mandats par clientèle? C'est ça
qui nous inquiète beaucoup plus que les objectifs
généraux, je pense, auxquels on pourrait tous ici se joindre sans
aucune difficulté. Je pense que tout le monde ici est de bonne foi et
voit l'ensemble des enjeux pour le Québec, c'est sûr. Je ne sais
pas si ça répond à votre question. J'espère que
j'ai répondu à votre question.
M. Trudel: Tout à fait, tout à fait parce que vous
vous doutez bien qu'on n'a pas... C'est normal. Ce n'est pas tous les groupes
qui nous ont répondu de cette façon-là. Il faut retrouver
cette espèce de marge, à la fois de liberté pour les
organismes qui oeuvrent dans tel ou tel secteur, mais il y a aussi la
responsabilité de l'État. Il y a aussi les grands objectifs. On
n'est pas sûr d'être efficace si on tire tous azimuts, dans toutes
les directions. Mais dans la mesure où vous êtes prêts,
vous, à dire et à participer à un travail qui
aménagerait ce corridor, vous souhaitez, d'ailleurs, la même chose
de la part de l'État en disant: Nous on est prêts à
collaborer. Il y a des aménagements, il y a des corridors à
dessiner, je pense qu'on peut en arriver à établir une politique
de reconnaissance et un mode de financement beaucoup plus stable pour faire en
sorte que vous puissiez remplir les objectifs pour lesquels vous êtes
nés, finalement.
À cet égard, je prends la précaution suivante avant
de poser cette autre question. Ce n'est pas pour vous mettre en contradiction
avec d'autres groupes. Il y a des gens, dans votre situation et dans votre
réseau, qui nous ont dit qu'ils voudraient un moratoire de trois ans sur
tous les éléments qui regardent l'organisation communautaire ou
la reconnaissance des groupes communautaires, tout ce qui regarde le
communautaire dans l'avant-projet de loi qui nous
est présenté Ici. Est-ce que vous êtes d'accord avec
cette grande période parce que ça me semble - pour faire mon
observation tout de suite - très long comme période? Du
môme coup, vous pourriez me répondre: Est-ce que vous pensez qu'on
peut faire ça assez rapidement, compte tenu des acquis, par exemple, que
vous avez dans votre propre réseau, la définition de cette
politique et des mécanismes afférents au niveau du financement?
Est-ce qu'on peut faire ça relativement rapidement?
M. Archambault: Je serais tenté de vous répondre
qu'effectivement je ne sais pas si on va avoir la patience, nous autres,
d'attendre trois ans. On est toujours un peu impatient par rapport à des
résultats. Il y a une ouverture qui est faite à travers le projet
de loi à l'effet d'une reconnaissance des organismes communautaires;
ça m'apparaît déjà un premier pas. Il y a des
volontés manifestées de s'asseoir à une même table,
et je pense que l'ensemble des groupes est sensible à ça. Il y a
une volonté du ministère de s'asseoir avec nous, en tout cas,
d'ouvrir la porte à des discussions; à preuve, aujourd'hui. Je
pense que les conditions sont quand même bien meilleures que si je
regarde il y a cinq ou dix ans. Et je pense que, oui, il y a lieu de faire ce
moratoire-là et de commencer tout de suite, maintenant, à se
parler, et pourquoi ne pas se parler le plus souvent possible là-dessus?
Moi, je trouverais ça long, personnellement, trois ans, ça fait
trop longtemps qu'on attend. Mais, si ça devait prendre ça,
j'accepterais peut-être d'attendre encore un grand bout, mais je voudrais
qu'on commence tout de suite à s'asseoir et à essayer de trouver.
On est un gros paquet de monde autour de la table, quand on parle du
communautaire. Il y a des enjeux. Il faudrait commencer dès maintenant.
Je pense qu'on peut y arriver quand même assez rapidement, à mon
point de vue. C'est une évaluation très sommaire, très
personnelle.
M. Trudel: Très bien. Tout ça ne visait pas
à vous mettre en contradiction avec d'autres groupes du communautaire
qui se sont exprimés dans ce sens-là. Le souci est le même,
mais votre expérience nous dit que ce serait possible de le faire assez
rapidement, pourvu qu'on ait la volonté politique de le faire et de
s'attabler à la réalisation et à la définition de
cette politique là. Il y a, à cet égard... Pardon?
Mme Martin: Je pense que si on utilisait... Il y a eu
déjà beaucoup d'études de faites sur la reconnaissance et
le financement des organismes communautaires, autant par le milieu
communautaire, autant par le milieu gouvernemental. Je pense que
déjà, si on sortait tout ça des tablettes, je ne suis pas
sûre que ça prendrait trois ans à en arriver à une
politique et à s'entendre sur quelque chose. Donc, j'ai l'impression que
trois ans, c'est peut-être un peu gros comme chiffre, mais la
volonté est là et d'agir rapidement aussi.
M. Trudel: Très bien, tout le monde...
M. Archambault: On a déjà des efforts de
concertation, j'ajoute, au niveau, en tout cas, de la coalition, sur certains
grands objectifs, au niveau de la coalition des organismes communautaires. Ce
sont quand même treize ou peut-être, bientôt, quinze
regroupements qui représentent beaucoup d'organismes et qui s'entendent
déjà sur certaines bases. On est loin d'une entente globale sur
plein de choses, mais II y a des arguments de fond qui reviennent dans
l'ensemble des groupes. Là-dessus, je pense qu'on se reconnaît
malgré toutes nos différences et malgré notre goût
de rester le plus proche de notre monde possible et différent à
travers ça.
La Présidente (Mme Marois): Mme la députée
de Chicoutimi. Vous avez une autre question?
M. Trudel: Oui, tout à fait. Permettez, Mme la
Présidente, au moins une dernière question. Le ministre nous
disait: Au niveau de la traduction des orientations dans l'avant-projet de loi
sur la réforme, il y a peut-être de petites choses qui ont
été oubliées au niveau de la définition des
organismes. Le ministre note, en passant, qu'il a un très bon
contentieux et qu'on va réussir à corriger ça, on est
heureux d'apprendre ça, qu'il y a un très bon contentieux au
ministère, ce n'est pas comme à l'Environnement, II y a du bon
monde. Il y a du bon monde qui est capable de travailler; on est sûr
qu'ils sont capables de réaliser ça, on est certain de cela. Et,
à cet égard...
M. Côté (Charlesbourg): D'ailleurs, je l'ai dit
parce que mes prédécesseurs l'ont dit aussi. Il y a une
continuité chez nous tout à fait exceptionnelle au niveau du
contentieux, incarné par Mme Demers...
M. Trudel: Dans votre ministère.
M. Côté (Charlesbourg):.. donc, c'est unanime des
partis politiques à l'Assemblée. (18 heures)
M. Trudel: Dans votre ministère, dans votre
ministère. Là-dessus, il y a tout cet aspect de votre avis au
niveau de l'établissement des régies régionales. Vous
êtes prudent. Vous dites: On n'est pas sûr, on a des craintes.
Finalement, est-ce que ça vaut la peine, dans la forme où
ça nous est présenté, que ces régies
régionales au niveau de la régionalisation, au moins, des
opérations, mais la régionalisation de la dispensation de nos
services de santé et de nos
services sociaux... Est-ce que le nombre de réserves que vous
apportez ne nous amènerait pas à conclure, finalement, que c'est
juste cosmétique, cette histoire-là, et que ça ne vaut pas
la peine de se lancer dans cette opération-là parce que ça
changerait peu de choses dans la réalité? Même, vous, vous
ajoutez: On a des craintes supplémentaires qu'on ne va que se retrouver,
finalement, à développer peut-être des luttes, en ce qui
concerne votre secteur, entre des groupes ayant des objectifs similaires. Mais,
finalement, la régionalisation, les régies, vous voulez qu'on y
aille ou qu'on n'y aille pas? Est-ce que ça vaut la peine ou est-ce que
ça ne vaut pas la peine?
M. Archambault: En tout cas, dans l'état actuel de ce qui
nous est présenté, compte tenu de la garantie d'existence qu'on
a, de la reconnaissance qu'on a, où on en est à l'heure actuelle,
c'est sûr que ça ne vaut pas la peine pour nous, pour nos groupes,
de participer à ça. Est-ce que ça vaut la peine pour le
réseau, en termes de rationalisation, en termes de meilleure
opérationalisation? Je ne le sais pas. Je vais être bien franc
avec vous, je ne le sais pas. Cependant, c'est sûr que, pour nous, il y a
de trop grosses inquiétudes pour dire: "Let's go", on y va et on verra
bien. On n'est pas prêts à prendre le risque de cette
expérience-là maintenant, compte tenu des quelques
expériences qu'on a pu vous présenter et qui nous disent: Si on
était assis aux mêmes tables que les gens du réseau,
malgré toute leur bonne foi et malgré tout ça - on ne
remet pas ça en question, d'aucune façon - on ne serait
peut-être pas gros dans la balance, on ne serait peut-être pas
très capables de faire valoir nos points de vue et, à la limite,
on serait peut-être, encore là, obligés de troquer notre
vocation contre un financement qui, dans le fond, ne ressemble pas à ce
qu'on... On a l'impression qu'on ne s'y retrouvera pas, nous autres,
là-dedans et que, à la limite, ça ne nous concerne pas
véritablement, ça ne nous interpelle pas véritablement, ce
projet de régionalisation. On pourrait très bien, via notre
regroupement et via le Service de soutien aux organismes communautaires,
à l'heure actuelle, continuer un dialogue qui s'est amorcé et,
parfois, qui a été difficile, parfois, qui a été
meilleur, mais qui s'est amorcé. Et il y a une continuité qu'on
souhaite, à l'heure actuelle, tant et aussi longtemps qu'on n'est pas
sûrs de ce qu'on s'en va faire en région, nous autres, et de la
place qu'on va occuper. On ne se sent pas très gros là-dedans,
c'est bien évident.
M. Trudel: Vous avez tellement d'appréhension qu'on n'a
pas suffisamment de garanties dans ce qui nous est présenté pour
courir le risque.
M. Archambault: À l'heure actuelle.
M. Trudel: C'est à peu près ça.
La Présidente (Mme Marois): Mme la députée
de Chicoutlmi, on devrait terminer d'ici deux ou trois minutes. Alors, il
faut...
Mme Blackburn: Alors, ça va être bref. Je veux
d'abord dire que je partage l'avis de mes collègues quant à la
qualité et à la nécessité de vos interventions dans
nos comtés et dans mon comté, en particulier. J'ai, je pense,
fait le tour un peu de votre réseau, je le connais bien, je sais ce que
vos gens ont fait. Une seule chose m'inquiète, et ça rejoint un
peu ce que dit le député d'Abitibi, ce sont les
appréhensions que vous avez quant à la capacité des
régions, si elles sont plus autonomes, de définir leurs propres
besoins et de se doter des outils nécessaires. En même temps que
vous reconnaissez que les besoins sont varies, différents selon les
régions, selon les villes, selon les villages, en même temps, vous
ne semblez pas vouloir faire confiance aux régionaux pour décider
de ce qui leur convient le mieux. Je dois dire que ça me laisse
perplexe, peut-être parce que moi, précisément, j'estime
que les régions, où qu'elles se trouvent, que ce soit la
région de l'est de Montréal, la grande région de
Québec, celle de la Gaspésie ou du Saguenay-Lac-Saint-Jean,
j'estime et j'ai toujours estimé que c'étaient les gens les mieux
placés pour faire une évaluation des besoins et pour se donner
les outils dont ils avaient besoin. Alors, ça m'étonne un peu. Je
me demandais si ce que je pensais qui pouvait être utile - en tout cas,
moi, c'est la perception que j'en avais - le pouvoir dans les régions,
mais l'assurance d'une concertation nationale... Je pense qu'on a perdu et on a
perdu beaucoup, particulièrement à l'éducation des
adultes, lorsqu'on a coupé les ressources aux tables nationales, aux
tables provinciales, dans les OVEP et ce genre de truc-là. On leur a
enlevé... On a arrêté de les financer, donc, ils ont de
moins en moins de possibilité de se réunir, de se concerter, de
voir ce qui se fait d'une région à l'autre, de pouvoir s'enrichir
les uns les autres; je pense que ça, à mon avis, c'est
indispensable. Mais pour le reste, moi, j'aurais privilégié plus
de décisions en région.
M. Archambault: Je pense qu'on reconnaît déjà
clairement qu'effectivement les gens qui sont les plus à même
d'identifier les besoins, ce sont les gens qui les vivent, d'une part, de
quelque région qu'ils soient et à l'intérieur même
de leur région. Ça nous amène à proposer,
effectivement, de laisser jouer certains dynamis-mes sociaux pour que les gens
se regroupent, avec des solidarités naturelles, et se les donnent, ces
organismes-là. Ce qu'on craint, ce n'est pas que ça se passe dans
les régions, c'est comment ça va se passer dans les
régions et qui vont être les véritables décideurs de
ces mandats-là, de ces
vocations-là. De lier notre financement à ça nous
inquiète beaucoup parce que les régies régionales, en tout
cas, les inquiétudes qu'on a, c'est qu'on ne puisse pas suivre le rythme
et que, finalement, ça devienne des lieux où on va dire
peut-être oui avec réserve, où on n'aura pas vraiment ni le
temps ni l'espace ni les moyens nécessaires pour faire jouer
véritablement la démocratie dans ce sens-là.
Je reviens, à ce moment-là, à ce que nous autres on
définit comme expérience démocratique qui est celle
où des groupes se regroupent selon des solidarités naturelles, et
ça ne renie pas le principe qu'effectivement ce sont les gens qui vivent
la situation qui sont les premiers. Je pense que c'est l'un des principes du
communau taire de reconnaître qu'ils sont les premiers à savoir ce
dont Ils ont besoin.
La Présidente (Mme Marois): On vous remercie de votre
intervention.
M. Archambault: Merci.
La Présidente (Mme Marois): Moi, j'aurais eu aussi
quelques...
Mme Blackburn: Ils sont centralisateurs.
La Présidente (Mme Marois): ..questions. Je pense que je
vais m'en permettre une. Sûrement que M. le ministre va prendre une
minute ou deux, je sais qu'il est pressé comme beaucoup d'entre
nous.
M. Côté (Charlesbourg): ..tout simplement vous dire
merci. Évidemment, c'était une ultime consultation, très
certainement pour tenir compte de ce qu'on veut nous dire et dans les
décisions finales.
M. Archambault: On l'apprécie.
La Présidente (Mme Marois): Juste une dernière
remarque. Vous avez mentionné dans une réponse au ministre que,
pour vous, il y avait essentiellement deux priorités auxquelles il
fallait s'attaquer d'une façon très sérieuse,
c'était la pauvreté et l'isolement. Évidemment, il y a la
pauvreté matérielle, il y a la pauvreté culturelle;
l'isolement, c'est la pauvreté sociale, jusqu'à un certain
point.
Si vous aviez une stratégie à proposer au gouvernement,
à quoi devrait-on s'attaquer en priorité?
M. Archambault: En priorité?
La Présidente (Mme Marois): Dans le sens de cette
pauvreté profonde, laquelle vous nous identifiez comme étant ce
à quoi un gouvernement ou une société devrait s'attaquer
Est-ce que c'est par essentiellement des mécanismes de
répartition de richesse que l'on s'y attaque, par des interventions un
peu plus significatives dans le domaine de la santé et des services
sociaux, par exemple, ou par des mesures de type économique?
M. Archambault: O.K. Je pense qu'il n'y a pas une solution en
soi. Au départ, je pense qu'il va falloir... En tout cas, si on parle
des jeunes, je vais vous parler des jeunes avec lesquels je vis et je
travaille. Il n'y a pas une solution en soi et je pense qu'il n'y a pas de
solution miracle, je n'en ai pas moi non plus. Cependant, ce que j'aurais
tendance à proposer pour rester cohérent avec tout ce qu'on a dit
depuis le début, c'est de laisser jouer ces dynamiques de
communauté qui font que des groupes se retrouvent, à des moments
donnés, pour parler de santé mentale, se retrouvent, travaillent
ensemble, se développent des outils. Certains groupes reconnaissent
qu'il y a des besoins spécifiques pour des jeunes, ouvrent des maisons
d'hébergement et essaient de développer des liens, des
réseaux avec d'autres organismes qui oeuvrent au niveau de l'emploi, par
exemple, et qui, eux, ont des actions complémentaires, travaillent de
façon volontaire. Le partenariat m'apparaît une chose
intéressante dans la mesure où il est volontaire, où il
n'est pas lié au financement. Je ne peux pas faire de partenariat avec
quelqu'un qui me dit: Si tu n'es pas avec moi, je ne te finance pas. Donc,
ça doit être volontaire. Je pense qu'en laissant jouer ces
dynamiques-là, en permettant aux gens de définir et de
créer, il va se créer, à mon point de vue, une forme de
régionalisation qui va être tout à fait naturelle et qui va
se lier sur des solidarités.
C'est clair que le réseau communautaire a toujours
été le premier à identifier des besoins, à chercher
des réponses et c'est par la suite qu'on les a plus
institutionnalisées, dans la plupart des cas. Laissons jouer ces
dynamiques, faisons en sorte que les gens puissent s'asseoir, se parler
ensemble, travailler ensemble sur une base volontaire et sur une base
négociée. Ça m'apparaft, moi, être non pas
l'anarchie mais la meilleure stratégie possible pour que les
communautés se reprennent en main Si c'est l'objectif de cet
avant-projet de loi, laissons les gens se reprendre en main.
La Présidente (Mme Marois): D'accord
M. Trudel: Merci beaucoup de cette participation. J'ai
l'impression que nous aurons à nous revoir puisque le ministre, de son
côté, dit que c'est l'ultime consultation et que, si vous voulez
avoir voix au chapitre, il faudra passer par l'Opposition quand il y aura un
projet de loi. Merci.
La Présidente (Mme Marois): Si vous le
permettez, M. le député, nous allons... Je vous remercie
à mon tour...
M. Archambault: Merci.
La Présidente (Mme Marois): Nous allons ajourner nos
travaux à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 10)