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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 21 février 1990 - Vol. 31 N° 19

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le cadre de l'étude de l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

La Présidente (Mme Marois): J'invite les membres à prendre leur siège, on va reprendre nos travaux. Je vous rappelle que nous avons un mandat de consultation générale et d'auditions dans le cadre de l'étude de l'avant-projet de loi, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives.

Nous entendrons aujourd'hui six groupes. J'inviterais dès maintenant les représentantes du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail à venir prendre place devant nous, de telle sorte que nous puissions entendre leur point de vue. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: oui, mme la présidente. m. atkinson (notre-dame-de-grâce) sera remplacé par m. holden (westmount) et m. chevrette (joliette) par mme harel (hochelaga-maisonneuve).

La Présidente (Mme Marois): Merci. J'aimerais prévenir aussi les membres de la commission de même que nos invités que la députée de Hochelaga-Maisonneuve, comme elle préside la commission de l'éducation, puisque ce matin la commission de l'éducation a aussi un mandat, va être un petit peu en retard à nos travaux, mais elle devrait être présente de la même façon, je crois, que le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle devra s'absenter pour une participation au Conseil des ministres. Il nous laisse entre bonnes mains, comme il me l'a mentionné, avec sa collègue, la ministre déléguée à la Condition féminine et à la Famille, qui sera avec nous pendant cette séance de travail.

Alors, je vous inviterais à vous présenter et à nous présenter votre mémoire en une vingtaine de minutes. Par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission sous forme de questions, de discussions, de commentaires. Bienvenue.

Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail

Mme Robert (Andrée): Merci, Mme la Présidente. Je me présente, Andrée Robert, je suis présidente du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail. Je suis accompagnée de Mme Lyse Leduc, qui est directrice du Conseil d'intervention.

Il nous fait plaisir de pouvoir contribuer aux réflexions et discussions publiques concer- nant les conditions minimales de travail. Nous avons choisi de nous prononcer ici sur des sujets qui touchent plus particulièrement les femmes et d'émettre des recommandations susceptibles d'apporter les changements nécessaires à la pleine intégration de la femme dans l'organisation du travail.

Concilier la vie professionnelle et la vie familiale n'est pas chose facile actuellement. C'est pourtant une réalité à laquelle peu de femmes échappent. Cependant, le marché du travail ne tient pas compte de cette réalité. Au chapitre des congés parentaux, par exemple, le Canada se classe avant-dernier, devant les États-Unis, parmi les pays industrialisés.

En fait, des lacunes importantes existent à tous les niveaux dans la présente Loi sur les normes du travail et, au moment où le déficit démographique devient notre principal défi, les conditions minimales de travail devraient refléter cette réalité.

L'avant-projet de loi modifiant la Loi sur les normes du travail démontre l'intention du gouvernement du Québec de pallier les dispositions de la loi incompatibles avec les responsabilités parentales. Il suggère des pistes intéressantes et comporte sans conteste des améliorations, mais ne peut solutionner tous les problèmes identifiés.

Le CIAFT désire donc attirer l'attention du législateur sur des thèmes sans lesquels toute politique visant à l'amélioration des conditions de travail serait incomplète. On va y aller par thème.

Alors, en ce qui concerne le congé annuel, les dispositions actuelles de la Loi sur les normes du travail sont nettement insuffisantes et désavantageuses pour l'ensemble des travailleurs et travailleuses du Québec. L'avant-projet de loi prévoit qu'une salariée qui justifie entre un an et cinq ans de service continu chez le même employeur a droit à un congé annuel payé d'une durée minimale de deux semaines.

Même améliorée, cette norme est invalidée par révolution actuelle du marché du travail. La précarité grandissante des emplois, l'augmentation constante du recours à la sous-traitance, l'instabilité économique, l'implantation de nouvelles technologies font que peu de travailleurs et travailleuses justifient ou justifieront les cinq ans et plus de service continu leur permettant d'avoir droit à plus de deux semaines de congé annuel. D'ailleurs, selon une étude du MMSR, 50 % de la main-d'oeuvre ne demeure pas cinq ans en emploi chez le même employeur.

Comment les travailleurs et travailleuses peuvent-ils exercer leurs obligations familiales et

conserver une qualité de vie minimale quand on exige d'eux 50 semaines de travail dans un bureau, un restaurant ou une usine pour avoir droit à deux semaines de congé annuel payé? Donc, nous avons à la page 6 les recommandations en vertu des responsabilités parentales et des congés annuels, dont la principale est que le salarié qui justifie une année de service continu chez le même employeur ait droit à un congé annuel d'une durée minimum de trois semaines, dont deux semaines continues.

Au niveau des congés pour responsabilités familiales, le CIAFT constate avec satisfaction que l'avant-projet de loi sur les normes du travail reconnaît aux parents salariés le droit de s'absenter lorsque leur présence est requise auprès de leurs enfants ou de leurs parents. Cependant, dans la grande majorité des cas, ce sont les femmes qui prennent un congé. Cette réalité s'explique par le fait qu'elles supportent encore largement le poids des obligations familiales.

L'écart salarial est un autre facteur explicatif de pourquoi ce sont les femmes qui prennent ce congé. Il est donc nécessaire de reconnaître le droit de s'absenter du travail pour prodiguer des soins aux enfants, mais aussi la nécessité que ce droit s'exerce sans pénalité financière. Nous savons toutes et tous que, dans la grande majorité des cas, c'est à la femme que reviendra la responsabilité des soins si ce congé n'est pas rémunéré. De plus, à l'heure où l'on parle de désinstitutionnalisation et de vieillissement de la population, notre société doit aussi se pencher sur les responsabilités qui incombent à chacun de nous, face à nos propres parents. Il importe donc de planifier des jours de congé afin que nous puissions prendre soin de nos familles respectives. Ainsi, nous recommandons que les travailleurs et travailleuses aient droit à cinq jours de congé payés par année pour obligations familiales.

Les congés de maladie. On remarque encore que l'avant-projet de loi ne prévoit pas de congés de maladie pour les travailleurs et travailleuses. Pourtant, il arrive à chacun de devoir s'absenter à cause d'une maladie pour une période plus ou moins longue. La perte de revenus et le risque de congédiement que cette absence entraînent sont tout à fait inacceptables. Il est donc impératif que le législateur prenne les mesures qui s'imposent afin de corriger cette situation. Nous recommandons que la Loi sur les nonnes du travail accorde au travailleur et à la travailleuse une demi-journée payée par mois qu'il ou elle peut utiliser en congé de maladie, pour un total de six jours cumulatifs pendant l'année et que l'employeur réinstalle le ou la salariée dans son poste régulier à la suite d'un congé de maladie, en lui accordant les avantages dont il ou elle aurait pu bénéficier si il ou elle était restée au travail.

Le congé de maternité. En matière de congé de maternité, on ne peut plus accepter qu'une femme subisse une perte des revenus lorsqu'elle accouche. Les versements d'allocation chômage-maternité ne couvrent que 15 des 18 semaines et sont souvent les seules allocations remplaçant le salaire de la mère. Enfin, une baisse de niveau de vie de la famille survient après la naissance d'un enfant. Et ça, on vous a donné des statistiques vous démontrant, vous illustrant les baisses de revenus. Considérant que la maternité devrait être reconnue socialement comme une fonction essentielle, compte tenu du faible taux de natalité au Québec mettant en situation précaire l'avenir de notre société et que les Québécoises ne devraient pas être économiquement ou socialement désavantagées du fait qu'elles portent et mettent des enfants au monde, nous recommandons que la période continue et maximale du congé de maternité soit de 20 semaines et qu'il soit rémunéré à 95 % du salaire sans délai de carence, c'est-à-dire qu'il y aurait une caisse complémentaire aux allocations d'assurance-chômage.

Le congé de paternité. Dans la perspective d'une politique familiale, il est essentiel de prévoir des mesures destinées à permettre aux pères de jouer pleinement leur rôle. Actuellement, l'avant-projet de loi sur les normes du travail accorde, au moment de la naissance ou de l'adoption d'un enfant, un droit d'absence de deux jours avec solde et de trois jours sans solde aux pères et aux parents adoptifs Cette période est nécessaire pour permettre au père d'assister sa conjointe au moment de la naissance.

Compte tenu du fait que les trois jours de congé accordés dans le cadre de la révision de la Loi sur les normes du travail ne sont pas payés, on peut supposer que seulement un infime pourcentage des pères s'en prévaudront. En effet, on ne peut pas mettre de côté le fait que la Loi sur les normes du travail s'adresse d'abord à une population à faible revenu.

Considérant que l'accès à un congé de paternité plus long est un pas vers l'élimination de la ségrégation des rôles, nous recommandons que les salariés puissent bénéficier d'un congé de paternité, sans réduction de salaire, d'une durée de cinq jours ouvrables, ce congé pouvant s'appliquer à la naissance ou à l'adoption de l'enfant.

Le congé parental. Il est important de permettre aux travailleurs et travailleuses de se prévaloir d'un congé prolongé à la suite d'une naissance ou pour s'occuper d'un enfant à temps plein si il ou elle le désire. Ce congé permettrait aussi de s'adapter aux changements qu'impose la naissance ou l'adoption d'un enfant. Le gouvernement doit prendre les mesures qui s'imposent pour favoriser une meilleure conciliation des tâches professionnelles et parentales et, donc, en arriver à ce que parents et enfants ne soient plus les victimes des conditions de travail mal

adaptées à une politique familiale efficace.

Nous recommandons que tout salarié ait droit à un congé parental, à la suite du congé de maternité, d'une durée maximale et continue de 32 semaines: 15 semaines rétribuées à 95 % du salaire et 17 semaines à 60 %, après lesquelles l'employeur devra réinstaller le ou la salariée dans son poste régulier en lui accordant les avantages dont il ou elle aurait pu bénéficier si il ou elle était restée au travail. Nous insistons sur le fait que le congé parental se doit d'être rémunéré car le ou la salariée pouvant bénéficier d'une telle mesure dans le cadre de la Loi sur les normes minimales du travail ne pourrait en jouir autrement, compte tenu de sa capacité financière. nous ne pouvons passer outre le salaire minimum lorsqu'on parle de hausser le taux de natalité, car 64 % des travailleurs au salaire minimum sont des femmes. considérant que les femmes apportent actuellement une contribution considérable à la production des biens et services dans notre société, qu'elles travaillent pour assurer leur sécurité, leur survie et leur épanouissement, que le travail entraîne des dépenses de l'ordre des frais de garderie, transport, repas, habillement, nous croyons qu'une des premières mesures à apporter pour favoriser une politique familiale est d'ajuster le salaire minimum en vigueur actuellement.

Le salaire minimum est resté au même taux de 1981 à 1986 et cela, malgré un taux élevé de variation de l'indice des prix à la consommation durant cette même période. Les augmentations récentes sont bien loin de combler l'écart qui s'est creusé entre l'augmentation du coût de la vie et le revenu réel des gens rémunérés au salaire minimum. Dans les faits, une partie de la population n'a cessé de s'appauvrir depuis des années et dans le langage commun, tous les gens s'entendent pour dire qu'un enfant, ça coûte cher.

Vivre au salaire minimum entraîne stress, conflits et diminution de la qualité de vie des familles et des individus qui la composent. Une politique familiale efficace et réaliste doit reposer sur l'idée d'un soutien économique et d'une amélioration des conditions de vie des plus pauvres.

De plus, on ne peut ignorer le fait que la pauvreté égale souvent maladie, dans l'équation des conditions de vie des plus démunis. Pour ces raisons, nous recommandons que le salaire minimum soit augmenté selon le taux de variation de l'indice des prix à la consommation depuis 1981 et ajusté annuellement, selon le même critère.

La durée du travail. On fixe la semaine normale de travail à 44 heures. Dans les faits, tout le monde croit que la semaine normale est de 40 heures. Cette norme est donc désuète et largement dépassée. De plus, le fait que la foi ne stipule pas de nombre maximum d'heures quoti- diennes de travail entraîne de nombreux abus.

Dès le début du XXe siècle, les travailleurs ont obtenu la reconnaissance légale des journées de travail normales de neuf heures et, peu de temps après, de huit heures. Le Québec est déjà en retard, par comparaison à plusieurs pays industrialisés. On vous donne le nombre maximal d'heures travaillées dans les autres pays, on peut faire une très grande comparaison avec le Québec. Ainsi, on recommande, du moins, que la durée de la semaine normale actuellement fixée à 44 heures soit réduite à 40 heures.

Pour le temps supplémentaire, on sait que le temps supplémentaire est devenu une obligation, la personne refusant de faire du temps supplémentaire peut être congédiée dans certains secteurs. Donc, nous demandons d'accorder le droit à tout salarié de refuser d'accomplir du temps supplémentaire, sans risque de représailles, tel le congédiement. Il est plus difficile pour les femmes, principalement pour les femmes monoparentales, de pouvoir faire du temps supplémentaire. Donc, ce sont des personnes à risque à ce niveau.

Le travail à temps partiel. Je sais que vous n'avez pas fait de recommandations là-dessus, mais, pour nous, c'est important de voir avec quel esprit on considère le temps partiel. La croissance rapide des emplois à temps partiel est l'un des bouleversements qu'a connus le marché du travail au cours des dernières années. Les femmes sont fortement majoritaires au sein de la main-d'oeuvre à temps partiel et cette représentation s'accentue légèrement. Pour les travailleuses, le temps partiel offre certains avantages, dont une meilleure conciliation des obligations familiales et professionnelles. Toutefois, cette formule comporte aussi des inconvénients. Dans la plupart des cas, le travail à temps partiel offre un revenu moindre que le travail à temps complet, alors que les dépenses sont similaires. L'accès aux avantages sociaux et à des régimes de pension est souvent limité. Le travail à temps partiel se caractérise aussi par des horaires irréguliers, des heures de travail brisées et l'absence de garanties quant au nombre minimal d'heures de travail. Évidemment, les possibilités de perfectionnement, de promotion ou de choix d'un emploi à temps plein sont généralement absentes.

La présence d'enfants et l'âge de ces derniers influencent la propension des femmes à exercer un emploi à temps partiel. Pourtant, ce motif est de moins en moins invoqué. La pénurie d'emplois à temps plein est une raison qui revient de plus en plus souvent. Ainsi, plusieurs femmes occupent un emploi à temps partiel, faute de pouvoir travailler à temps plein.

Le CIAFT, en raison de son objectif de privilégier l'autonomie financière des femmes, a toujours favorisé le travail à temps plein. De meilleures conditions de travail permettant la gestion du temps favoriseraient l'accès des

femmes à des postes à temps plein parce qu'elles tiendraient compte des responsabilités familiales que les travailleurs et travailleuses doivent assumer. Le CIAFT reconnaît la situation de fait qui existe, à savoir que les emplois à temps partiel ont connu un développement sans précédent dans les dix dernières années. Toutefois, le travail à temps partiel ne doit pas être considéré comme la solution de l'avenir ni comme un moyen à privilégier dans l'organisation du travail.

Nous recommandons, concernant le temps partiel, que l'employeur soit obligé de verser un salaire horaire égal à celui versé à un salarié à temps complet effectuant un travail équivalent et que la notion de travail équivalent soit définie comme étant un travail de même valeur globale, si on considère les habiletés requises pour l'accomplissement du travail, les responsabilités, les efforts, les conditions de travail et le nombre d'heures travaillées dans une semaine; que le salarié à temps partiel puisse accéder proportionnellement aux mêmes avantages sociaux que les employés à temps complet; que l'employeur soit tenu d'offrir prioritairement à un travailleur ou à une travailleuse à temps partiel un poste à temps complet, en considérant l'ancienneté; qu'il soit interdit pour un employeur de faire disparaître, de quelque façon que ce soit, un poste à temps complet, dans le but de créer des postes à temps partiel, mais le fait que des employés demandent à partager un même poste dans une perspective de plein emploi ne vise pas cette interdiction; que le gouvernement oblige tout employeur à offrir un temps plein dans le cas où il peut offrir deux postes à temps partiel et qu'il n'ouvre que des postes à temps partiel que lorsqu'il n'a pu combler le temps plein.

La reconnaissance de l'ancienneté. Dans le cas où un employeur procède à des licenciements, la Loi sur les normes du travail ne prévoit pas l'obligation pour l'employeur de tenir compte de l'ancienneté et de la répartition numérique d'hommes et de femmes en emploi. De plus en plus de femmes travaillent par nécessité et non par désir d'apporter un revenu d'appoint à la famille. Elles sont souvent les dernières engagées, puisque leur avènement sur le marché du travail est encore relativement récent. Elles ont ainsi moins d'ancienneté que leurs homologues masculins. Lors d'un licenciement, on assiste à une discrimination systémique qui ne tient compte que du seul facteur d'ancienneté des employés.

Une mesure de redressement s'impose et nous recommandons que soit incluse, dans la Loi sur les normes du travail, l'obligation pour l'employeur qui procède à un licenciement de tenir compte de l'ancienneté de ses employés et de maintenir la répartition numérique proportionnelle d'hommes et de femmes à son emploi, en considérant les secteurs d'activité affectés dans l'entreprise, la répartition numérique proportionnelle primant l'ancienneté, à condition de non- équivalence, au niveau de l'ancienneté, des hommes et des femmes affectés par le licenciement. Je pense que je vais...

La Présidente (Mme Marois): II vous reste encore quelques minutes, mais, si les membres de la commission y consentent, vous pouvez prendre le temps nécessaire pour passer à travers les autres thèmes que vous vouliez aborder.

Mme Robert: Les autres étaient pour nous moins... L'essentiel est passé à l'intérieur de ce que je viens de dire. Nous sommes quand même heureuses de constater que l'avant-projet de loi apporte une amélioration importante face à l'accessibilité des recours en réintroduisant la mesure visant à défrayer les services gratuits. On a parlé aussi dans les autres normes... Ce dont on s'aperçoit, c'est que les gens sont très peu informés des nonnes du travail, donc on recommande que l'employeur fournisse à tous les salariés les documents d'information relatifs aux normes du travail reçues de la commission.

En fin de compte, pour conclure, nous considérons l'avant-projet de loi du gouvernement comme le point de départ d'une vaste consultation à la suite de laquelle des modifications seront apportées au projet initial, afin qu'il réponde enfin aux besoins des travailleuses. Il en va de leurs besoins et de leurs choix comme de leur autonomie. En ce sens, les recommandations formulées par le CIAFT sont des ajustements nécessaires à la juste valorisation du rôle de la femme dans l'économie et la société. Le CIAFT réitère donc ses positions en faveur d'une application globale de la Loi sur les normes du travail. Celle-ci doit donc s'appliquer aussi aux bénéficiaires de l'aide sociale participant à tous les programmes d'employabilité.

En terminant, nous désirons mentionner notre enthousiasme face à l'amendement suggéré à la Loi sur les normes du travail concernant le travail domestique. L'intention d'accorder la protection à ces employées nous semble essentielle quant à l'universalité de la loi et de son caractère fondamental. Nous remercions les commissaires et Mme la Présidente d'avoir bien voulu entendre ce mémoire.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre présentation. J'inviterais maintenant la ministre déléguée à la Condition féminine et à la Famille à échanger des idées avec vous, poser des questions. (10 h 30)

Mme Trépanier: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue mesdames. Au tout départ, je dois vous dire qu'en vous saluant tout à l'heure j'ai constaté votre inquiétude et votre déception, peut-être, à la suite des annonces fédérales hier. Je dois vous dire que je les partage et que j'espère que vos appréhensions ne sont pas fondées et qu'on aura de bonnes nouvelles quant

au financement des groupes de femmes. C'est très inquiétant et je partage ça avec vous ce matin.

Votre organisme, sa réputation n'est plus à faire. Vous êtes actifs depuis 1984, si je ne m'abuse. Vous avez une action très orientée vers le travail des femmes et je suis convaincue que la commission pourra profiter de vos expériences. Mme la Présidente, vous disiez, il y a quelques minutes: Vous auriez dû ou je constate que vous n'avez pas fait de propositions sur le travail à temps partiel. Si vous relisez les commentaires du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle il y a quelques mois à ce sujet, il voulait justement que les organismes fassent des propositions, parce que c'est un dossier extrêmement vaste et complexe et nous voulions profiter de cette commission pour recueillir vos impressions et, surtout, vos suggestions pour que vous nous aidiez à trouver des solutions intéressantes pour ce vaste champ du temps partiel et qui concerne très majoritairement - peut-être pas majoritairement, mais de façon très importante - les femmes.

Je pense que c'est dans votre document qu'on disait que 43 % des travailleurs à temps partiel sont des femmes. Alors, vous avez fait des suggestions intéressantes et je vais commencer par le temps partiel. Vous suggérez dans votre mémoire, à la page 18, d'accorder aux personnes à temps partiel les droits et les avantages sociaux, les mêmes avantages que les gens à temps plein, au prorata des heures travaillées. Le problème de la proportionnalité des avantages sociaux, c'est qu'avec tes protections non liées au revenu il y aurait possiblement un désavantage, parce que les travailleurs à temps partiel ne pourraient pas être couverts de la même façon. Est-ce qu'il y aurait une autre façon de moduler pour que les travailleurs à temps partiel n'aient pas à défrayer plus pour avoir les mêmes avantages parce que si c'est au prorata des heures travaillées, par exemple, si on considère les avantages comme les soins dentaires et tout ça, ils pourraient être défavorisés. À certains endroits, certaines entreprises offrent maintenant, aujourd'hui, un autre aménagement qui permet aux travailleurs à temps partiel de profiter des mêmes avantages. Ne craignez-vous pas ce problème-là?

La Présidente (Mme Marois): Mme Leduc ou Mme Robert, peu importe.

Mme Leduc (Lyse): C'est que, quand on demande qu'ils puissent participer, j'imagine... Je ne sais pas si je comprends bien votre question, Mme Trépanier, c'est que leur participation serait aussi... On doit considérer dans le fait - et je sais que l'assurance dentaire, c'est ce qui coûte le plus cher - qu'ils participeraient aussi, que leurs cotisations ne seraient pas les mêmes que pour les travailleurs à temps plein et possiblement qu'il y aurait une possibilité aussi...

Mme Trépanier: Mais pour avoir droit à la même protection...

Mme Leduc: Exactement à la même, il faudrait qu'ils participent.

Mme Trépanier: II faudrait qu'ils défraient plus.

Mme Leduc: Oui.

Mme Trépanier: Et vous êtes d'accord avec ça.

Mme Leduc: C'est toujours sur une base assez volontaire, si les travailleurs le désirent.

Mme Trépanier: O.K.

Mme Leduc: Mais je pense que, dans toutes les études qui ont été faites, normalement, quand on pose la question aux travailleurs, ce qui les intéresse particulièrement, c'est l'assurance-maladie. Ils sont peut-être prêts à laisser tomber les assurances dentaires et autres choses qui leur reviendraient plus cher. Alors, je pense qu'il y aurait des aménagements à faire et aller voir vis-à-vis des personnes qui sont à temps partiel ce qui les intéresse vraiment et ce sur quoi elles sont prêtes à cotiser. À ce moment-là, peut-être que les avantages qui coûtent très cher, on pourrait les laisser tomber et, au moins, avoir le régime de retraite, le régime d'assurance-maladie et certains autres avantages sociaux.

Mme Trépanier: Et l'assurance salaire, entre autres.

Mme Leduc: Et l'assurance salaire, entre autres, au prorata de leur salaire. Alors, je pense qu'on pourrait, qu'il y aurait moyen, en allant vraiment vérifier auprès des personnes, d'avoir des aménagements qui satisferaient les travailleuses et travailleurs et les employeurs.

Mme Trépanier: Est-ce que c'est unanime, cette position, dans vos groupes? Il nous semble que ce soit un sujet assez complexe, mais controversé aussi dans la population. On a de la difficulté à avoir des consensus là-dessus.

Mme Leduc: Quand vous parlez de nos groupes, est-ce que vous parlez des groupes de femmes ou du CIAFT?

Mme Trépanier: Le CIAFT, oui.

Mme Leduc: D'accord.

Mme Robert: C'est une position qui est

unanime, effectivement.

Mme Trépanier: Pour les membres du CIAFT.

Mme Leduc: Là, je ne m'avancerai pas pour les autres groupes de femmes. Je pense que c'est à elles...

Mme Trépanier: Je sais que vous vous côtoyez beaucoup, que vous partagez des positions sur d'autres dossiers, alors c'est pour ça que je me permets de vous demander ça en ce qui concerne le temps partiel. Je dois vous dire que la très grande majorité des groupes n'a pas exprimé de position sur le travail à temps partiel, c'est pour ça que je vous demande si vous avez fait des consultations chez vos collègues.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme Robert.

Mme Robert: Ce qu'il est important aussi de souligner, c'est qu'on demande ça pour le temps partiel mais, en même temps, c'est toute la philosophie qui est derrière ça et, pour nous, c'est de ne pas développer le temps partiel. C'est principalement ça.

Une voix: Oui, oui.

Mme Robert: On est prêts à donner des choses pour les travailleuses à temps partiel parce que c'est un phénomène qui existe, et on ne peut le nier, mais ce qu'on demande prirv cipalement, c'est de ne pas favoriser par des lois ou par toutes sortes de choses le temps partiel.

Mme Trépanier: J'y arrivais avec ma deuxième question. Vous dites dans votre mémoire: Nous sommes contre la transformation des postes à temps plein en temps partiel. Vous dites presque, vous dites carrément que si, par exemple, l'employé est d'accord pour garder... Expliquez-moi donc votre problématique. Vous dites: On est contre la transformation d'un poste à temps plein à du temps partiel sauf si les employés sont volontaires, s'ils sont d'accord pour le faire. Alors, vous donnez à l'employé le choix, dans le fond.

Mme Leduc: C'est toute la différence entre le temps partagé et le temps partiel.

Mme Trépanier: Là, vous parlez de temps partiel ici.

Mme Leduc: Oui. Là, on parle de temps partiel. On dit: Nos positions sur le temps partiel ne vont pas jusqu'à dire: On rejette le temps partagé. Ce n'est pas pareil, le temps partagé. Ce sont des employés qui décident de partager un poste. Ce n'est pas la même chose qu'un employeur qui n'offre que des emplois à temps partiel, parce qu'on sait qu'il y a des avantages pour les employeurs et pour les employés, d'une certaine façon, au temps partiel. Il y a un accroissement de la productivité des employés à temps partiel. Il y a une baisse de l'absentéisme pour les employés à temps partiel. Alors, ce sont des avantages pour les employeurs. Les mêmes avantages se retrouvent avec le temps partagé, évidemment. Mais, à ce moment-là, pour nous, le temps partagé émane d'une volonté des travailleurs ou travailleuses, à ce moment-là. Et si elles le désirent, bon, bien, allons-y, laissons le temps partagé. Et le temps partagé s'adresse beaucoup aux travailleurs et travailleuses qui ont des conditions de travail intéressantes. On parle ici de travailleuses au salaire minimum. Le travail à temps partiel s'adresse plutôt à des travailleurs et travailleuses qui ont moins de revenus. Alors, c'est pour ça que pour nous, le temps partagé, on se dit: On ne va pas rejeter le temps partagé si des hommes ou des femmes... Dans le fond, ce qu'on souhaiterait, c'est que ça se partage également entre les hommes et les femmes, ceux qui décident de choisir cette formule-là. Pourquoi met-on vraiment la pédale douce sur le temps partiel? Parce que 71 % des femmes sont à temps partiel. Là-dessus, il y en a 35 % qui disent qu'elles occupent un emploi à temps partiel parce qu'on ne leur offre pas d'emploi à temps plein.

Mme Trépanier: Quel est le pourcentage?

Mme Leduc: Un pourcentage de 71,3 % en 1987.

Mme Trépanier: Ce sont des femmes.

Mme Leduc: Ce sont des femmes, des travailleuses.

Mme Trépanier: Et 35 % parce qu'elles n'ont pas la possibilité d'avoir un poste à temps plein.

Mme Leduc: Et 35 % n'ont pas la possiblité d'avoir un emploi à temps plein. Et les autres qui disent préférer le temps partiel, c'est à cause de leurs responsabilités familiales. Alors, à ce moment-là, on ne changera jamais les mentalités et on ne défera pas la ségrégation des rôles si on considère que le temps partiel, oui, c'est bien et, à ce moment-là, ça permet aux messieurs de garder leur emploi à temps plein et aux femmes de continuer d'assumer les responsabilités familiales tout en apportant un revenu à la famille parce que, de plus en plus, quand il n'y a qu'un seul revenu, tu tombes dans les ménages pauvres. C'est pour ça que nous, on souhaite que le temps partiel réponde à un certain besoin. Les mentalités ne sont pas pour changer le lendemain. Les responsabilités familiales partagées également entre les hommes et les femmes, ce

n'est pas pour demain. Alors, c'est pour ça qu'on ne dit pas actuellement: Aucun temps partiel. Mais, pour nous, on ne veut pas que ce soit considéré comme une solution au problème des responsabilités parentales. On veut vraiment que ça soit partagé.

Mme Trépanier: Ça, c'est clair. Mais il reste tout de même qu'il y a 40 % des femmes qui ne peuvent se permettre autre chose que du travail à temps partiel de par le temps qu'elles ont à consacrer. Je pense que c'est important aussi d'y songer. Ça, c'est une chose. Vous...

La Présidente (Mme Marois): Je crois que Mme Robert voulait ajouter quelque chose.

Mme Robert: Oui. C'est par rapport aux gens... Quand on parle de 35 % qui désireraient avoir un temps plein et quand on compare la source de revenu des gens à 35 % et des gens qui sont contents d'avoir un temps plein, habituellement, les gens qui sont dans l'autre proportion que des 35 % ont des revenus plus élevés également qui leur permettent d'avoir une certaine autonomie financière. Dans le sens que faire du temps partiel, quand le revenu annuel est de 40 000 $, bon, bien, tu te retrouves avec un revenu de 25 000 $, c'est intéressant. Mais pour des femmes à faible revenu, un temps partiel, habituellement, elles n'en veulent pas. Ça leur coûte cher. Et aussi, il faut regarder par rapport aux responsabilités familiales. Les femmes qui travaillent à temps partiel, on les retrouve beaucoup dans les services, c'est-à-dire dans les caisses, dans le secteur de la vente, dans le secteur de la restauration, et je vais vous dire qu'elles travaillent habituellement au moment où les enfants sont à la maison, et non pas quand les conjoints sont au foyer ou pourraient s'en occuper. Donc, ça ne règle pas la responsabilité familiale, au contraire, ça la complique.

Mme Trépanier: Je ne sais pas si vous avez des chiffres là-dessus, mais la proportion de femmes chefs de famille monoparentale qui travaillent à temps partiel doit être énorme, aussi.

Mme Leduc: On n'a pas de chiffres sur les familles monoparentales, mais je penserais que non, parce qu'elles, elles doivent pourvoir aux besoins de la famille. Si elles ont un emploi à temps partiel, elles ne peuvent pas le faire. Elles ne peuvent vraiment pas le faire, les femmes chefs de famille monoparentale. Un emploi à temps partiel, ça ne leur permet pas de faire vivre leur famille. Et on sait ce que c'est, les pensions alimentaires, il y en a pendant un petit bout de temps, mais elles ne peuvent pas se fier là-dessus.

Mme Trépanier: Mais faut-il qu'elles le trouvent, l'emploi à temps plein. Mme Leduc: Oui, c'est ça. Mme Trépanier: C'est ça.

Mme Leduc: Un autre chiffre qui donne un peu l'idée aussi, c'est que dans le fond, si on regarde... Il y a des hommes et des femmes qui travaillent à temps partiel, mais les hommes qui travaillent à temps partiel, c'est dans la catégorie des 15-24 ans - alors, on voit que ce sont des étudiants, ce sont des gens qui préparent une autre carrière - tandis que c'est entre 25 et 44 ans, la grosse proportion des femmes qui travaillent à temps partiel. Donc, on voit tout de suite, finalement, ce que ça illustre de la ségrégation des rôles dans notre société. Et c'est ce qui explique un peu notre position, parce que nous, ce n'est pas notre but, comme organisme, de perpétuer ça.

Mme Trépanier: Une proposition qui vous démarque des autres groupes concerne le licenciement. Vous parlez de proportionnalité hommes-femmes dans le licenciement. Est-ce que vous avez vérifié cette proposition avec la Charte des droits? Est-ce qu'il n'y aurait pas un problème, là? Vous dites de garder la proportion d'une entreprise hommes-femmes dans les licenciements. Alors, si vous avez quatre hommes et deux femmes dans une entreprise et que vous faites deux licenciements, ça fonctionne comment votre affaire, là? Vous ne parlez pas d'ancienneté. Vous dites: II faudrait que la proportion hommes-femmes joue autant que l'ancienneté.

Mme Robert: On parle quand même d'ancienneté, là. Il ne faut pas...

Mme Trépanier: Oui, quand même, mais...

Mme Robert: Mais c'est un peu ce qui pourrait...

Mme Trépanier:... quelle priorité vient la première?

Mme Robert: O. K. C'est un peu comme l'obligation contractuelle, en fin de compte. Ce qu'on demanderait, c'est que les employeurs soient obligés de respecter cette proportion-là, puisqu'on sait que dans les licenciements ce sont les femmes qui vont être mises à pied les premières, parce que ce sont les femmes qui sont entrées les dernières. C'est aussi logique que ça. Je veux dire, la proposition est là, on n'a pas encore regardé toutes les sous-propositions qui pourraient aller avec, mais nous, ce qu'on pense, comme les programmes d'accès à l'égalité, comme l'obligation contractuelle, c'est qu'il serait temps qu'on en parle également au niveau des licenciements et que ça fasse partie des mesures favori-

sees par le gouvernement, dans sa propre entreprise et au niveau des entreprises privées.

Mme Trépanier: D'accord. Il ne me reste à peu près plus de temps. J'aurais aimé vous poser des questions sur les congés parentaux. Vous appuyez le regroupement.

Mme Robert: Oui.

Mme Trépanier: Mais vous avez une position un peu différente qui est, je dirais, améliorée, par rapport à la position des regroupements. J'y reviendrai avec l'autre groupe. Je pense que Mme Leduc participe à l'autre discussion, alors nous y reviendrons. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Marois): Merci. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi de saluer Mme Robert et Mme Leduc et de leur dire tout le bien que je pense du CIAFT depuis toutes ces années où vous répandez votre expertise dans tous les milieux, puisque, finalement, le CIAFT est l'expression de la volonté d'intervenantes de différents milieux, et pour avoir eu l'occasion de participer à votre congrès l'automne passé et d'avoir bénéficié aussi de toute l'information qui circulait. Vous allez m'excuser - Mme la Présidente l'avait fait déjà - de mon retard à vous rejoindre, n'ayant pas le don d'ubiquité et étant retenue en commission parlementaire de l'éducation. (10 h 45)

D'abord, je voudrais vous interroger sur les mesures protectionnistes, c'est-à-dire qu'il y a une sorte de débat qui se poursuit, dans le fond, durant cette commission qui peut se résumer ou se simplifier peut-être trop de la manière suivante: Faut-il introduire des mesures? Pensons, par exemple, à ce qui est dans l'avant-projet de loi quant au droit de refus de faire du temps supplémentaire, qui est accordé simplement au salarié qui a des responsabilités familiales et qui peut être tempéré par la directive de l'employeur, douze heures à l'avance, d'en faire. Mais ça, c'est vraiment une mesure protectionniste parce que ça veut dire qu'elle n'est réservée qu'à un salarié qui a des responsabilités familiales.

Là, comme souvent les droits n'existent que sur le papier parce que les conditions d'exercice ne sont pas facilement réalisables, il y a plein d'intervenants qui nous disent: Oui, mais tout ça ne nous mènera à rien parce que le salarié va-t-il devoir garantir que c'est bien son enfant et non pas l'enfant de sa conjointe, etc.? Et, pour toutes ces raisons, il vaut mieux des mesures où on pense famille sur l'ensemble du marché du travail, c'est-à-dire avec une réduction des heures de travail et, à ce moment-là, une répartition des responsabilités familiales qui ne sont pas qu'à l'égard des jeunes enfants mais qui peuvent être aussi à l'égard de leurs parents, etc. Alors, vous, je pense que vous êtes plus tentées de proposer, justement, cette réduction des heures normales de travail.

Là, la question que je vais vous poser, c'est la suivante. Vous dites: Une journée normale de huit heures. Mais vous savez qu'une journée normale, ça veut dire qu'après cette journée-là commence à être payé le temps supplémentaire. Ça ne veut pas dire qu'il commence à être possible de refuser d'en faire. Ça, c'est une autre notion: la journée maximale.

Par exemple, en Ontario, il n'y a pas de journée normale. Il y a juste une semaine normale, mais il y a une journée maximale de huit heures. En Ontario, au moment où on se parle, un travailleur ou une travailleuse peut refuser de faire du temps supplémentaire après huit heures, mais il est payé en temps supplémentaire juste après quarante-quatre heures. Qu'est-ce que c'est votre point de vue là-dessus? Parce que, dans le Code canadien, c'est l'inverse. Il n'y a pas de journée maximale, mais il y a une journée normale de huit heures, mais le travailleur ou la travailleuse est toujours tenu de faire le temps supplémentaire qu'on lui demande mais il est toujours payé temps double après huit heures. Selon le Code canadien, il vaut mieux agir comme ça parce que ça amène les employeurs, puisque ça les oblige, chaque jour, à payer du temps supplémentaire après huit heures, à embaucher plutôt que de payer du temps supplémentaire. Qu'est-ce que vous en pensez?

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme Robert ou Mme Leduc.

Mme Leduc: Si je prends la première question, sur le temps supplémentaire, je pense que nous, notre position s'adresse à tous les travailleurs et à toutes les travailleuses. C'est qu'on demande le droit de pouvoir refuser de faire du temps supplémentaire. Ça va un peu dans l'optique... C'est sûr que ce sont les parents mais, comme vous le disiez tantôt, de juste "proportionnaliser" mais comment, à ce moment-là... Est-ce qu'un employeur va commencer à faire de la discrimination et dire: J'aime mieux embaucher une célibataire... parce qu'un parent ou une parente va pouvoir me refuser de faire du temps supplémentaire? Alors, c'est en ce sens-là qu'on l'applique à tous. C'est sûr que, dans les faits, ce sont peut-être plus souvent les parents qui vont devoir refuser, non pas nécessairement vouloir refuser mais devoir refuser, pour leurs obligations, le temps supplémentaire mais, pour nous, c'est notre position là-dessus. C'est sûr, en tout cas, dans l'esprit de notre proposition, je pense que ce qu'on veut, c'est qu'après huit heures le temps supplémentaire soit payé. C'est ça. C'est...

Mme Harel: Et non pas qu'il puisse être refusé.

Mme Leduc: On veut qu'il soit refusé mais, s'il est accepté, il faut qu'il soit payé, après huit heures. On demande qu'il puisse être refusé.

Mme Harel: Oui, alors ça, c'est la journée maximale.

Mme Leduc: C'est ça. Mme Harel: C'est ça.

Mme Leduc: Oui, qu'il puisse être refusé et, s'il est accepté, à ce moment-là, qu'il soit payé après huit heures et non pas après la semaine - nous autres, on demande quarante heures, là - mais non pas après le cumul. Ce qui veut dire que - je pense qu'on l'explique - quelqu'un pourrait travailler douze heures une journée sans être payé en temps supplémentaire si, après ça, il y a une journée où il ne rentre pas. Alors, je pense que c'est l'esprit de notre proposition.

Mme Harel: Que la journée maximale coïncide avec la journée normale.

Mme Leduc: C'est ça.

Mme Harel: C'est ça. J'ai juste une réserve sur la proportion numérique, du fait, justement, qu'elle peut introduire une mesure protectionniste et que l'employeur peut considérer qu'embaucher des femmes, c'est compliqué parce que, ultime-ment, ça met toutes sortes de complications. Alors, je ne sais pas, j'aimerais qu'on s'en reparle, si vous avez un point de vue là-dessus. C'est surtout que, dans votre mémoire, à la page 21, vous vous dites très heureuses de constater que I avant-projet apporte une amélioration importante, parce que vous considérez que ça réintroduit la mesure visant à défrayer les services gratuits d'avocat aux plaignants et plaignantes. Là-dessus, je trouve que vous êtes pas mal euphoriques par rapport à la réalité, parce que la loi actuelle...

Des voix:...

Mme Harel: Vous êtes d'accord?

Mme Leduc: On s'en était rendu compte, hier soir, en lisant la proposition bien à fond...

Mme Harel: O.K. Bon, alors je n'insiste pas.

Mme Leduc: Là, j'ai mis un gros point d'interrogation à côté du paragraphe.

Mme Robert: On ne savait pas si c'était vraiment gratuit, au niveau des services d'avocat.

Mme Harel: il n'y a pas juste ça. C'est blanc bonnet, bonnet blanc. Vous prenez la loi qui dit que la Commission peut intervenir - la loi actuelle - et vous prenez l'avant-projet de loi qui dit: "La Commission peut représenter..."

Mme Leduc: C'est ça...

Mme Harel: Dans un cas comme dans l'autre, ça ne change rien vraiment.

Mme Leduc: On avait lu qu'à ce moment-là on revenait... Notre première interprétation, c'est qu'on revenait à la position de 1982.

Mme Harel: D'accord.

Mme Leduc: En fouillant ça, j'ai dit: Ce n'est pas ça du tout.

Mme Robert: Notre enthousiasme est moins grand.

Mme Harel: Je savais que vous étiez de bonnes élèves... Le problème reste entier. Vous le posez bien, avec le taux d'annulation des plaintes à 69 %, le problème reste entier: des gens, des femmes en particulier, des hommes, de toutes ces personnes qui sont congédiées et qui n'ont pas les moyens de faire valoir les droits que la loi leur reconnaît.

Une dernière question, avant que ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière vous interroge. Vous recommandez, dans le fond, un an pour obtenir le recours de congédiement sans cause juste et suffisante, un an pour les vacances. Considérez-vous que ce serait intéressant qu'on s'entende pour uniformiser, d'une certaine façon, l'accès à tous ces droits de la loi et que quelqu'un n'ait même pas besoin d'aller voir le CIAFT pour vérifier si c'est trois ans, trois mois, un an, cinq ans, que ce soit un an; qu'après un an de service continu chez un employeur, toute cette protection de base soit offerte?

Mme Robert: Oui, je pense que ça va avec nos propositions, d'ailleurs. C'est à peu près ça qu'on demande partout, un an de service continu, étant donné que c'est presque impossible, avec le marché actuel, d'être cinq ans chez le même employeur.

Mme Leduc: C'est ça. Comme on l'a mentionné dans la présentation, les chiffres eux-mêmes du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle disent qu'il n'y a qu'à peu près la moitié de la main-d'oeuvre, au Québec, qui parvient à atteindre cinq ans de travail continu chez le même employeur. C'est très limitatif, à ce moment-là, si on dit que c'est cinq ans. C'est pour ça que nous ramenons ça à un an et on

serait d'accord si on uniformisait à peu près, dans l'ensemble des recours.

Mme Harel: Je ne pensais pas surtout vous interroger, ce matin, sur toute la question des congés de maternité ou parentaux parce que, dans l'avant-midi, il y aura le Regroupement, il y aura l'Intersyndicale avec lesquels on pourra développer toute cette proposition qui est sensiblement la même, je pense, pour vous que pour elles.

Mme Robert: II y a peut-être une différence.

Mme Harel: La différence des 52 semaines. Peut-être que vous voulez en parler?

Mme Robert: C'est important pour nous et il faut peut-être le souligner, que le congé ne se prolonge pas au-delà d'un an. Pourquoi? Je suis une travailleuse aussi, je travaille avec des femmes qui retournent sur le marché du travail. On s'aperçoit de l'obsolescence qui se produit après un an d'absence du marché du travail. C'est-à-dire que les gens perdent confiance en eux. Ils ont plus de difficultés à réintégrer. Ce sur quoi on serait d'accord, c'est de le prolonger s'il y avait, disons, une femme qui désirait rentrer à temps partiel, et faire plus de temps partiel. Nous, c'est un maximum d'un an, si on ne veut pas recommencer. Pour nous, notre objectif, c'est vraiment l'autonomie financière des femmes et l'intégration des femmes sur le marché du travail. Donc, donnons-lui la possibilité d'y retourner.

Mme Harel: J'ai bien remarqué que vous insistiez pour que la Loi sur les normes s'applique à l'ensemble des programmes d'em-ployabilité mis en place. C'est compte tenu de l'expertise que vous avez, j'imagine, dans ce domaine.

Mme Robert: Oui.

Mme Harel: J'inviterais peut-être...

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, s'il vous plaît.

Mme Carrier-Perreault: Merci, Mme la Présidente. Dans votre mémoire, j'ai remarqué qu'il y a beaucoup de suggestions, si on veut, qui reviennent par rapport à d'autres groupes qu'on a entendus hier, beaucoup de choses qui touchent les femmes aussi par rapport au travail à temps partiel. D'ailleurs, le Conseil du statut de la femme avait aussi fait des suggestions à cet égard. J'espère que le ministre en tiendra compte. Sur les dossiers de femmes, en particulier, je trouve qu'il y a beaucoup de bonnes suggestions.

Il y a une chose aussi qui m'intéresse beaucoup, c'est l'équité salariale. Dans ces termes, à travers votre mémoire, je n'ai rien trouvé. Je n'ai rien vu comme tel, équité salariale mise à part. Je ne sais pas si c'est à ça que vous faisiez allusion lorsque, à un moment donné, par rapport au temps partiel, vous emmenez en plus une définition de la notion du travail équivalent. Est-ce que c'était pour vous une façon d'établir un genre de principe sur l'ensemble du dossier de l'équité salariale? Parce que vous mettez aussi les critères d'évaluation des emplois, et tout ça. Est-ce que c'est dans ce but-là que...

Mme Leduc: Bien, c'est-à-dire qu'actuellement le CIAFT ne s'est pas encore prononcé publiquement sur l'équité salariale. On est en processus d'évaluation et d'étude pour savoir quelle sera notre position. Alors, c'est pour ça qu'ici on n'en parle pas et qu'on ne trouvait pas de place à le mettre. De toute façon, même s'il y avait eu de la place, on n'a pas de position officielle. Alors, comme groupe, nous sommes en train de l'élaborer et de la faire accepter, et elle viendra en temps et lieu. C'est dans ce sens-là qu'on n'a pas du tout abordé ce sujet-là, sauf, évidemment, parce qu'on parlait de travail équivalent et que ça nous semblait difficile de passer à côté.

Mme Robert: Mais la position du CIAFT va tout de même sortir bientôt puisque c'est un sujet qui est à l'étude.

Mme Carrier-Perreault: Alors, disons qu'il y a des groupes avec lesquels on a parlé hier et qui nous ont dit: Bon, ce serait peut-être intéressant de mettre ça dans la loi, d'ajouter le principe dans la loi. Par contre, ce serait peut-être plus intéressant si la loi était pro-active dans le sens que, plutôt qu'un système de plainte... Mais comme vous n'avez pas encore pris position on attend votre position.

La Présidente (Mme Marois): Ça va, Mme la députée? Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions qu'on souhaiterait soulever? Oui, M. le député? Non, ça va? Alors, nous vous remercions pour l'intéressante représentation. Je relisais les données qui sont contenues au mémoire. C'est toujours intéressant aussi, je pense, pour les parlementaires qui ont à se pencher aussi sur d'autres thèmes, d'autres sujets de débat, d'avoir parfois en tête des explications et des éléments d'information comme ceux que vous nous apportez et qui concernent la place des femmes dans notre société. Ça va? Alors, merci de votre contribution aux travaux de cette commission.

Mme Robert: Merci beaucoup.

Regroupement pour des congés de maternité et parentaux

La Présidente (Mme Marois): J'inviterais maintenant les personnes représentant le Regroupement pour des congés de maternité et parentaux à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît. Alors, bonjour et bienvenue à la commission. J'aimerais que le porte-parole se présente - parce que vous représentez différents groupes - et présente les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter te mémoire, après quoi nous passerons aux échanges de vues ensemble.

Mme Thibault (Charlotte): Mme la Présidente, mon nom est Charlotte Thibault. Je suis secrétaire provinciale de la Fédération des femmes du Québec et porte-parole officiel de la Fédération. Mme Hébert et moi-même allons lire des extraits du mémoire.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

Mme Thibault: À ma gauche, à l'extrême gauche, Mme Leduc, que vous avez déjà rencontrée précédemment, et Mme Sylvie Boulanger, première vice-présidente de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, et Mme Danielle Hébert, responsable du dossier de la condition féminine à la CSN.

Rappelons que le Regroupement pour des congés de maternité et parentaux payés s'est formé au printemps 1989, à la suite d'un appel lancé par le comité de la condition féminine de la CSN. Je vous rappellerai la liste des groupes et des organismes signataires du mémoire qui vous est soumis. Donc, Action travail des femmes, Au Bas de l'échelle, la Centrale de l'enseignement du Québec, les Cercles de fermières du Québec, le Collectif des femmes immigrantes, le Comité des femmes du syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec - ici, il y a une petite erreur dans le texte - c'est la Confédération des syndicats nationaux et non pas seulement le Comité de condition féminine, la Confédération des organismes familiaux du Québec, COFAQ, le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, la Fédération des agricultrices du Québec, la Fédération des femmes du Québec, la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, Naissance-Renaissance, L'R des centres de femme et le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. Au bas mot, ces groupes représentent plus de 600 000 personnes au Québec.

Rappelons que plusieurs des groupes précités sont aussi membres du Fonds de défense des non-syndiqués et que certains groupes présentent aussi, à titre individuel, des mémoires. C'est la raison pour laquelle nous n'interviendrons pas sur l'ensemble de la Loi sur les normes minimales, mais uniquement sur la question des congés de maternité. Je vais demander à Mme Hébert de nous lire l'essentiel de nos demandes. (11 heures)

Mme Hébert (Danielle): Bonjour.

La Présidente (Mme Marois): Bonjour.

Mme Hébert: Alors, effectivement, les propositions que l'on vous soumet ce matin ont été préparées par le Regroupement et, vraiment, le sujet de notre... je dirais, du fait qu'on se soit réunis ensemble, c'a été les congés de maternité. Notre analyse s'est évidemment basée sur toute la composition actuelle du marché du travail. Tous les groupes membres du Regroupement, en fait, sont profondément convaincus que la situation va toujours être la même, à savoir que les femmes vont demeurer sur le marché du travail.

Alors, je vais lire les propositions à partir de la page 7 du mémoire qui vous est soumis ce matin. Parce que les pages précédentes, je le souligne, sont en fait des critiques et de la réforme de l'assurance-chômage et de la situation actuelle.

En lisant l'avant-projet de loi et le document de présentation qui l'accompagne, on peut attendre les changements suivants au chapitre des congés parentaux. Alors, l'abolition de l'exigence de 20 semaines d'emploi préalables qui donne droit au congé de maternité sans solde; l'augmentation de deux à cinq jours du droit d'absence lors de la naissance ou de l'adoption, dont les deux premiers jours payés par l'employeur; la possibilité pour la mère suite à l'accouchement, pour le père suite à la naissance et pour les parents adoptifs, de prendre un congé sans solde pour une période pouvant atteindre 34 semaines; cinq jours par année de congé sans solde pour demeurer auprès d'un enfant mineur; le droit pour une personne ayant des responsabilités parentales, de refuser de faire du temps supplémentaire si elle n'a pas été avisée au moins douze heures à l'avance, sauf dans des circonstances exceptionnelles.

D'autres propositions effectivement, telles que les trois semaines de vacances annuelles après cinq ans d'ancienneté au lieu des dix ans actuellement prévus seraient aussi appréciables pour les parents, même si cela n'est pas suffisant.

Au niveau de l'applicaton des droits et des recours, l'avant-projet de loi propose d'indiquer clairement que la période ou la présomption de congédiement illégal s'étend sur au moins 20 semaines après le retour au travail, suite aux congés liés aux responsabilités parentales. De plus, les travailleuses et travailleurs pourraient se faire représenter gratuitement devant la Commission des normes du travail suite à un congédiement.

Si ces propositions de modifications nous apparaissent intéressantes, elles ne sont pas

suffisantes. Pour nous, la question fondamentale reste celle du remplacement de revenu durant les congés parentaux et il est plus que temps que le gouvernement du Québec s'engage fermement dans cette voie. Une majorité de Québécoises et de Québécois identifient les congés de maternité et parentaux payés comme une mesure devenue nécessaire. Particulièrement depuis le dépôt des recommandations du comité consultatif sur la politique familiale en avril 1986, on nous a menés d'une promesse à l'autre sur cette question.

Par les années passées, une percée importante a été effectuée par la négociation, dans les conventions collectives, de dispositions relatives aux droits parentaux. Dans cette vague, les employés des secteurs public et parapublic ont obtenu un congé de maternité de 20 semaines, payé à 93 % du salaire, durant lesquelles l'employeur comble la différence entre le salaire et le montant des prestations d'assurance-chômage. Par ailleurs, dans d'autres secteurs, les employeurs se sont contentés de s'aligner sur la loi sans aller plus loin. Si l'on ajoute à cela qu'une majorité de travailleuses ne sont pas syndiquées, nous sommes loin d'un régime de congés parentaux payés pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec. Au Regroupement, nous croyons que ces congés représentent une condition minimale à l'égalité des femmes sur le marché du travail et à une prise en charge plus collective de la responsabilité des enfants.

Les lois et programmes actuels comportent de nombreuses lacunes. Le nombre de congés liés aux responsabilités parentales est nettement insuffisant et la formule de remplacement de revenu durant ces congés vient confirmer la non-reconnaissance sociale de l'importance de mettre des enfants au monde.

Au Regroupement donc, les principes et préoccupations suivants nous ont guidés dans notre recherche des améliorations. Alors, la reconnaissance pour les travailleuses et travailleurs qui désirent avoir des enfants, de leur droit au travail dans de bonnes conditions; le remplacement intégral du revenu lors de la prise d'un congé de maternité ou d'autres congés liés aux responsabilités parentales par la constitution d'une caisse québécoise des congés parentaux, et l'amélioration sensible des conditions d'accès à de tels congés.

Nous ne nous sommes pas attardés à étudier des solutions telles que l'amélioration des régimes d'assurance-invalidité offerts par l'employeur. Même s'il est souhaitable d'étendre le champ d'application - et, en passant, dans les négociations de conventions collectives, on tente toujours de le faire - de la garantie de ces régimes afin que les congés, suite à la naissance d'un enfant, y soient reconnus, trop peu de travailleuses et de travailleurs bénéficient de ces régimes d'assurance.

D'autre part, l'élargissement du régime d'assurance-chômage afin que les congés de maternité et parentaux soient entièrement payés, ne nous apparaît pas non plus la solution. Elle serait beaucoup trop longue à appliquer et nous croyons que le Québec a un rôle important à jouer et qu'il doit reconnaître l'importance sociale de mettre des enfants au monde.

Donc, la constitution d'une caisse québécoise des congés parentaux. Ici, nous avons considéré les sources actuelles de financement des congés parentaux, à savoir le régime fédéral d'assurance-chômage et la prestation complémentaire de 240 $ offerte aux femmes qui sont admissibles au chômage, afin de compenser partiellement la perte de revenu durant la période de carence. Pour le moment, nous avons opté pour un régime complémentaire de revenu durant les congés liés à l'exercice des responsabilités parentales. Pour le Regroupement, il est plus que temps que le gouvernement du Québec finance lui-même aussi les congés parentaux.

Par ailleurs, si le gouvernement du Québec veut récupérer les prestations d'assurance-chômage actuellement versées pour les congés de maternité et d'adoption ainsi que la nouvelle prestation que le gouvernement fédéral se propose d'instituer, nous ne nous opposons pas à une telle méthode. Nous ne voulons tout simplement pas que la constitution d'une caisse québécoise des droits parentaux dépende uniquement de la ferveur des négociations entre le Québec et le gouvernement fédéral. Nous pouvons agir chez nous dès maintenant.

Nous croyons alors qu'il faut maintenir le modèle d'une assurance sociale où les prestations sont reliées aux gains antérieurs. La caisse québécoise de congés parentaux serait donc financée de façon tripartite, employé-employeurs-gouvernement et servirait à payer les prestations durant les congés lors de la naissance et à d'autres moments de la vie des enfants.

Le niveau des prestations accordées serait égal à 95 % du salaire antérieur. Afin d'assurer un niveau de revenu raisonnable, le salaire maximum assurable serait égal à 150 % du salaire maximum assurable par le régime actuel d'assurance-chômage. Pour être admissible à ce programme, dix semaines de travail assurables durant l'année précédente seraient exigées.

Le Regroupement est d'avis que le gouvernement fédéral doit continuer d'assumer sa part au régime d'assurance-chômage afin d'assurer un programme minimum à travers tout le pays. En effet, les deux paliers de gouvernement doivent contribuer au financement des congés parentaux, afin d'affirmer leur soutien aux familles et aux enfants.

Le gouvernement du Québec assumerait 25 % du coût d'un régime québécois complémentaire. Le partage se ferait alors selon les proportions de la caisse d'assurance-chômage au cours de la décennie 70: salariés, 31, 3 %, employeurs, 43, 7 %

et gouvernements, 25 %.

Dans le document. "Quelques notes pour aider à évaluer un régime québécois des congés parentaux" que vous avez eu en main, les coûts de ce régime sont évalués pour trois options différentes et pour l'ensemble des congés payés à même celui-ci.

La mise sur pied de la caisse québécoise des congés parentaux permettrait de donner des prestations à une population plus large que celle qui reçoit actuellement des prestations d'assurance-chômage, puisque les conditions d'admissibilité sont plus généreuses.

Quel que soit l'organisme qui se verrait confier le mandat d'administrer cette caisse, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire de créer un nouvel organisme, afin d'éviter les dédales administratifs que cela pourrait comporter. alors notre première revendication, le congé de maternité accessible à toutes les travailleuses, d'une durée de 20 semaines payées à 95 %. en passant, à la page précédente, on dit que les calculs ont été faits pour trois hypothèses, trois options, en fait. et celle qui est retenue par le regroupement, c'est la deuxième option, à savoir 20 semaines de congé de maternité et 15 semaines de congé pour soins d'enfants. en fait, ce sont les revendications qu'on explique plus loin.

Un certain nombre de travailleuses québécoises bénéficient actuellement d'un congé de 20 semaines et cela nous apparaît tout à fait adéquat. Il permet aux travailleuses enceintes de donner naissance à leur enfant et de se rétablir. Nous sommes d'accord avec la proposition contenue dans l'avant-projet de loi québécois modifiant la Loi sur les normes du travail, à l'effet d'abolir l'exigence de 20 semaines d'emploi préalable pour avoir droit au congé de maternité sans solde. De plus, la travailleuse qui a 10 semaines assurables à la caisse des congés parentaux a droit aux prestations complémentaires et cela, sans délai de carence.

Le congé payé pour soins d'enfants. Ce congé s'adresse autant aux parents biologiques qu'aux parents adoptifs et leur permettrait de rester un certain temps auprès de l'enfant. Cette proposition correspond à l'ajout de semaines de prestations parentales dans le projet de réforme de l'assurance-chômage. Cette réforme vient en fait confirmer la nécessité de recevoir un revenu lors du congé parental. Nous proposons donc un congé parental de 15 semaines payées pour soins d'enfants accessible au père ou à la mère qui a amassé 10 semaines d'emploi assurables a la caisse des congés parentaux. Ce congé pourrait être pris dans l'année suivant la naissance de l'enfant.

Le Regroupement adhère à l'idée qu'il faille favoriser entre la mère et le père le partage des responsabilités face aux enfants entre les deux parents. Dans un sens, qu'une partie de ce congé de 15 semaines soit octroyé à la mère et l'autre au père et que l'indemnité ne soit pas trans- férable à l'autre conjoint nous apparaît une idée fort intéressante. D'ailleurs, lorsque l'on étudie les différents régimes existants dans d'autres pays, on voit que l'adoption de ce type de congé est la meilleure façon de favoriser le partage des responsabilités entre les conjoints. De plus, il nous assure que la mère ne sera pas trop longtemps absente du milieu de travail afin de lui en permettre la réinsertion.

Le congé pour adoption. Alors, le nombre de ces congés pour adoption est actuellement très faible. Il ne faut pas cependant négliger ces cas de parents qui veulent adopter un enfant. Bien souvent, les services sociaux exigent que l'un des parents reste à la maison durant six mois puisqu'il s'agit d'adoption d'enfants plus vieux ayant eu leur lot de problèmes. Nous proposons donc un congé pour adoption de neuf semaines payées. Ainsi, jumelé au congé pour soins d'enfants, cela permettrait aux prestataires de se rapprocher des exigences des services sociaux.

Les congés payés pour visites médicales durant la grossesse. Les femmes enceintes doivent normalement faire des visites médicales de contrôle au cours de la grossesse. Pourtant la majorité des travailleuses ne peuvent s'absenter de leur travail pour ces visites prénatales. Il faudrait prévoir cinq jours de congé payés pour ces visites médicales, jours de congé pouvant être pris en demi-journées.

Les congés payés pour responsabilités parentales. Une plus grande flexibilité au niveau des horaires de travail favoriserait un partage des responsabilités entre les femmes et les hommes. De plus, l'ajout de congés pour responsabilités parentales, c'est-à-dire de congés spéciaux, permettrait aux parents de s'absenter du travail pour prendre soin de leurs enfants en cas de maladie ou afin de les conduire chez les spécialistes de la santé par exemple.

Actuellement, les personnes utilisent leurs propres congés de maladie, lorsqu'elles en ont, pour prendre soin de leurs enfants. Dans la très grande majorité des cas, ce sont les femmes qui prennent un congé car leur revenu est plus bas.

Il va de soi que le Regroupement appuie les demandes des travailleuses et travailleurs qui ne bénéficient pas de congés de maladie pour que ce droit fondamental aux congés de maladie, sans perte de salaire, devienne une norme minimale au Québec. Nous proposons, de plus, cinq jours de congés payés pour responsabilités parentales lorsque la présence d'un des parents est absolument requise auprès d'un enfant.

Les congés pour responsabilités familiales. Dans la perspective d'une préoccupation collective pour la qualité de vie des enfants et d'un soutien aux responsabilités parentales, il est essentiel que l'on tienne compte des besoins et obligations des parents travailleuses et travailleurs.

Nous proposons cinq jours par année de

congés sans solde afin de permettre à une personne de s'absenter lorsque sa conjointe ou son conjoint avec enfant (s) est malade, de même que dans les cas de personnes s'occupant de leurs parents.

Les congés de paternité. Il y a dix ans, les secteurs public et parapublic obtenaient un congé de paternité de cinq jours. La prise de ce congé a favorisé le rapprochement des pères et de leurs enfants et ceux qui en ont bénéficié estiment que ce congé demeure une condition nécessaire et doit être étendu à tous les travailleurs. Lors de la naissance d'un enfant, nous demandons dix jours de congé au père, dont cinq seraient rémunérés.

Les congés parentaux sans solde. Il arrive que les travailleuses, pour tout un ensemble de raisons, ne peuvent ou trouvent extrêmement difficile de retourner au travail après un congé de maternité. Présentement, si elles se trouvent dans cette situation, leur seul choix serait de démissionner de leur emploi. Dans certains cas, le père ou la même voudrait tout simplement rester auprès de son enfant dans les premiers mois du développement.

Les congés sans solde suite à l'accouchement doivent être permis. Par ailleurs, il faut être conscient que les mères ou les pères prennent ces congés lorsqu'elles ou ils en ont la capacité financière. Nous demandons un congé sans solde d'une durée maximale de deux ans pour la mère ou le père, en prolongation du congé de maternité, du congé pour soins d'enfants ou du congé pour adoption.

La protection des travailleuses et des travailleurs. Voici les droits que le Regroupement souhaite voir reconnus aux salariés lors de leur retour au travail. Les salariés doivent être assurés, suite à tout congé lié aux responsabilités parentales, d'être réinstallés à leur poste ou à un poste équivalent, avec les avantages qui s'y rattachent. Ces congés comprennent notamment le cumul des congés de maladie, des vacances, de l'ancienneté et de l'expérience.

De plus, nous croyons que la Loi sur les normes du travail doit garantir une période de protection de l'emploi après un congé de maternité ou un congé parental afin d'éviter que certains employeurs contournent l'esprit de la loi.

Nous demandons que la protection de la travailleuse enceinte contre le congédiement ou la mutation d'emploi, telle que prévue dans les normes minimales, soit maintenue pour une période de six mois après la fin du congé de maternité ou du congé parental sans solde et que cette période de protection soit aussi accordée au père qui revient au travail après un congé parental. (11 h 15)

Alors, le retrait préventif de la travailleuse enceinte, c'est court, mais je ne le lirai pas. Évidemment, on est très conscientes que ça ne fait pas partie de la Loi sur les normes minimales, mais on tenait à souligner, en fait, qu'il y a encore d'énormes problèmes d'application quant au retrait préventif de la travailleuse enceinte et qu'on doit faire en sorte, effectivement, que la loi, telle qu'écrite, s'applique. Et si on l'a souligné, en fait, c'est aussi que, lorsqu'on parle de congé ou, enfin, de toute condition entourant la reproduction sur le marché du travail, il y aurait intérêt éventuellement à ce que les différentes législations, règlements ou lois sur ces questions soient regroupés et qu'on ait, effectivement, une politique de la maternité et de la paternité qui soient beaucoup plus cohérentes que ce n'est le cas en ce moment.

Alors, dans l'ensemble, c'est ça. Je tiens à souligner, peut-être en guise de conclusion, qu'il y a, évidemment, plusieurs congés qui sont demandés par le Regroupement en ce moment. Que ce qui nous apparaît important et essentiel, ce sont les congés directement liés à la naissance de l'enfant, à savoir les congés de maternité et de soins d'enfants, et que ces congés nous apparaissent de plus en plus urgents à obtenir et particulièrement dans la situation que l'on vit au Québec en ce moment.

La Présidente (Mme Marois): Merci, Mme Hébert, de cette présentation. J'inviterais maintenant la ministre déléguée à la Condition féminine et à la Famille à échanger certains propos avec vous.

Mme Trépanier: Merci, madame. Votre intervention était attendue. Plusieurs organismes qui se sont présentés ici ont appuyé votre position sur les congés parentaux. Le gouvernement, par les propositions qu'il met de l'avant dans l'avant-projet de loi, a montré, je pense, son intérêt, et surtout son intention de favoriser, de permettre aux femmes, aux parents de fonder une famille et d'exercer efficacement leurs responsabilités familiales. Les régimes de remplacement de revenu ne font pas l'objet de cette consultation et ne font pas l'objet surtout de cet avant-projet de loi, mais peuvent faire l'objet de cette consultation parce que, comme vous l'avez si bien mentionné, ils vont de soi et ils vont de pair. Il est naturel que nous profitions de cette commission pour avoir vos positions sur de telles propositions. Vous avez sûrement entendu parlé, vous avez sûrement pris connaissance de la position du Conseil du statut de la femme. j'aimerais qu'on revienne sur votre proposition de congé parental, de congé de maternité parental et peut-être essayer de faire un parallèle avec celle du conseil du statut de la femme pour voir quels sont les consensus, ce qui se dégage. vous en avez parié un petit peu dans votre présentation, vous êtes d'accord avec une position de l'avant-projet pour les 20 semaines continues. ça, c'est acquis, c'est important,

effectivement. Votre position, votre projet, c'est une prestation de maternité, plus 20 semaines à 95 % du salaire brut, c'est ça, plus une prestation parentale suivant le congé de maternité de 15 semaines à 95 % du salaire brut. Vous dites: Une partie à la mère ou au père, non transférable. Peut-être que je vais revenir tout de suite là-dessus parce que tout le monde n'est pas d'accord avec la non-transférabilité des congés. Vous, vous dites: Sensibilisons les pères. Obligeons-les à se responsabiliser. Il y aurait peut-être une position mitoyenne. Par exemple, si je prends la position de la Suède où on permet une transférabilité, mais en obligeant quand même le père à une certaine portion du congé. Je ne sais pas si vous êtes flexibles sur cette position ou si... Est-ce que vous avez comme motif la motivation du père, la sensibilisation des deux parents, d'une part? Mais y a-t-il aussi motivation pour la mère à retourner au travail, la possibilité de la mère de réintégrer le marché du travail de façon plus facile? Est-ce que c'est un de vos objectifs également ou si...

Mme Hébert: Effectivement, pour nous, dans la mesure où le congé de maternité, alors, celui-là qui suit la période de l'accouchement, en fait, soit suffisamment long. Nous, on parle de 20 semaines. Bon, le Conseil du statut parle de...

Mme Trépanier: 18.

Mme Hébert: ...18 semaines. En fait, nous parlons de 20 semaines. Dans la mesure où ce congé-là... Il nous apparaît que 20 semaines, 18 semaines enfin, c'est à peu près la même chose, c'est un nombre de semaines minimal pour que la mère puisse, effectivement, se reposer. Parce qu'il y a une question de repos physique pour la mère.

Maintenant, les congés pour soins d'enfants, et évidemment, c'est une chose qu'on a regardée de plus en plus et que même, en fait, les modifications à l'assurance-chômage proposent, donc, c'est quelque chose qui est de plus en plus dans les airs, il nous apparaît que s'il y a une partie de ces congés pour soins d'enfants qui ne sont pas transférables, en fait, oui, ça peut être un moyen, effectivement, de sensibiliser les pères. On ne parle pas, nous, dans notre proposition, d'un nombre de semaines égal. Bon, le Conseil du statut, par exemple, parle de six semaines à la mère et six semaines au père, non transférables. On n'a pas été jusque dans ce détail-là, mais il nous apparaît qu'effectivement un nombre de semaines, et dans ce cas-là plus restreint, pourrait ne pas être transférable et serait une motivation intéressante. Parce qu'il ne resterait que... Bon, admettons qu'il y ait là-dessus, huit semaines à la mère, c'est une hypothèse, eh bien, 20 semaines plus 8 c'est 28 semaines qu'elle pourrait prendre. Donc, c'est une période qui nous apparaît assez intéressante, assez longue, et qui, en même temps, donne et permet la possibilité au père de le faire. Et, en Suède, d'ailleurs, ce congé-là a déjà été transférable, et en fait c'est à l'expérience qu'on en a fait maintenant un congé non transférable, parce que les hommes ne le prenaient pas. Évidemment, les pressions qu'ils subissent dans les lieux de travail sont souvent le motif et, évidemment, comme je travaille avec des syndicats où il n'y a que des hommes ou presque, je sais aussi que ce genre de pressions existe énormément encore.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme Thibault.

Mme Thibault: Je voudrais juste ajouter aussi que ce qu'il y a d'intéressant dans le fait que les pères commencent à prendre un congé, et qu'il ne puisse pas être transférable à la mère, c'est qu'on dit toujours que quand on engage une jeune femme, on a un risque de congé de maternité potentiel. Et c'est vraiment un désin-citattf à engager une jeume femme. Bon, bien il y aura un risque de congé de paternité, si vous voulez, ou parental potentiel pour tous les jeunes hommes qu'on engage et qui veulent avoir des enfants. Et je pense que ça va être positif pour les jeunes femmes.

Mme Trépanier: Et aussi, en fait, on veut qu'il y ait un soutien familial à la maison, mais pour permettre aussi à la mère de réintégrer le marché du travail, parce que je suis sensible aux propos du CIAFT, tout à l'heure, qui disait que, si une personne est absente - homme ou femme - trop longtemps du marché du travail, c'est difficile d'y revenir. Et pour l'employeur, c'est un incitatif à ne pas embaucher des femmes. Là, je porte des jugements, mais je suis convaincue que ça doit entrer en ligne de compte également. Pour continuer votre proposition, en plus, je pense, plus les 15 semaines, vous ajoutez 9 semaines possibles à des parents adoptifs. Là, vous allez m'expliquer ça. Pourquoi vous ajoutez 9 semaines aux 15 semaines? C'est ça, hein?

Mme Hébert: II faut d'abord dire que les congés pour adoption, vous le savez, sont très peu nombreux, ça, c'est un fait, c'est de plus en plus difficile l'adoption, ou bien d'enfants du Québec ou d'enfants d'ailleurs.

Mme Trépanier: Mais on parle de principe, là.

Mme Hébert: Mais ce qui nous a amenés à... Oui...

Mme Trépanier: Je pense que le nombre n'est pas important.

Mme Hébert: ...ce qui nous a amenés à regarder ça, ce sont deux raisons, en fait, deux

raisons principales, dont une est mentionnée dans le mémoire, à savoir que très souvent les services sociaux vont exiger une longue période. Mais l'autre raison, c'est que, avec la modification qu'il va y avoir à la Loi sur l'assurance-chômage, les parents adoptifs avaient droit, jusqu'à maintenant en fait, à 15 semaines de congé pour adoption. Il y a donc une légère diminution dans leur cas, et comme ce sont des cas extrêmement peu nombreux et que, d'autre part, on peut interpréter et dire que ces gens-là, en fait, font de gros efforts dans les circonstances actuelles pour aider, je dirais, à l'augmentation de la famille, dans ce sens-là, on a pris cette voie-là. Maintenant, il est évident que si le congé tel qu'on le demande, à savoir de 20 semaines plus 15, il y a quand même 15 semaines qui pourraient être prises par la mère, c'est déjà un congé fort intéressant dans le cas d'adoption. Mais il ne faut pas oublier une chose, c'est qu'avec les modifications de l'assurance-chômage, ces parents-là vont y perdre un petit peu.

La Présidente (Mme Marois): Vont perdre un peu?

Mme Hébert: Ils perdent un peu, ces parents-là, avec les modifications à l'assurance-chômage.

Mme Trépanier: Les parents adoptifs perdent...

Mme Hébert: Oui, cinq semaines.

Mme Trépanier: Vous avez fait allusion à des exigences dans votre mémoire. Là, parliez-vous de provinciales?

Mme Hébert: Oui.

Mme Trépanier: Expliquez-moi donc ça. Vous dites qu'il y a des exigences de Santé et Services sociaux?

Mme Hébert: Oui, pour l'adoption.

Mme Trépanier: Sur la disponibilité des parents?

Mme Hébert: Exactement. Par des enfants d'ici, effectivement; des enfants qui sont adoptés et qui ont vécu dans des foyers d'accueil, ont des problèmes psychologiques...

La Présidente (Mme Marois): C'est souvent pour les enfants plus vieux, en fait.

Mme Hébert: Oui, ce sont des enfants plus vieux.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça.

Mme Hébert: Mais comme les enfants très jeunes...

Mme Trépanier: Là, vous me dites que lorsqu'il y a adoption, on est plus exigeant sur la disponibilité...

Mme Hébert: Oui.

Mme Trépanier: ...des parents. Je dois vous dire que ça nous a frappés parce que c'est revenu dans quelques mémoires. Je me suis informée et, à notre connaissance, il n'y a pas d'exigences formelles quant aux disponibilités de parents adoptifs. Moi, je considère que ça fait une discrimination entre les parents biologiques et les parents adoptifs dans votre projet.

Mme Thibault: II faut vous dire que cette demande nous est venue de gens qui ont été en adoption et qui, clairement, se sont fait demander par les travailleurs sociaux une disponibilité de six mois. Donc, c'est pour ça.

Mme Trépanier: Je m'excuse. Est-ce que c'était dans le cas d'adoption d'enfants.

Mme Thibault: Plus âgés.

Mme Trépanier: ...qui présentaient des problèmes spécifiques, des problèmes psychologiques?

Mme Thibault: Oui. C'est-à-dire que tout enfant qui est quand même d'un certain âge peut presque être évalué comme ça.

Mme Trépanier: II y a déjà...

La Présidente (Mme Marois): Une période d'adaptation.

Mme Trépanier: C'est ça, d'adaptation de... Mais il n'y a pas d'exigences formelles. C'est que, j'imagine...

Mme Hébert: Pas pour toutes les adoptions, mais comme la plupart des adoptions se font d'enfants plus vieux qui ont eu des problèmes, maintenant, ou bien c'est l'adoption internationale. En ce moment, c'est ça. Donc, quand il s'agit d'enfants québécois plus vieux ayant eu des problèmes, les Services sociaux, effectivement, ont des exigences par rapport aux parents qui les adoptent. Il y a, d'ailleurs, un cas de congédiement, en Ontario, d'une femme qui, effectivement, a voulu répondre aux exigences et a perdu son emploi. Je pourrais vous retrouver la...

La Présidente (Mme Marois): C'est ça. Ce ne sont pas, en fait, des exigences formelles, mais...

Mme Hébert: Non, ce n'est pas écrit dans...

La Présidente (Mme Marois): ...c'est dans le plan de travail établi avec la personne qui adopte...

Mme Thibault: C'est ça.

Mme Hébert: Et là, on s'entend sur un certain temps à consacrer. .

Mme Trépanier: Vous considérez que c'est un nombre assez important pour justifier un congé comme ça, statutaire, défini dans un programme. Vous considérez que les 15 semaines ne sont pas suffisantes.

Mme Hébert: Bien moi, je vous dirais que je le prendrais à l'inverse exactement, c'est-à-dire qu'ils sont tellement peu nombreux ces cas-là...

Mme Trépanier: Pourquoi ne pas les régler?

Mme Hébert: ...pourquoi ne pas leur donner des conditions particulières? Je pense que dans le contexte actuel... Effectivement, on ne met pas le focus dans notre mémoire là-dessus, mais peut-être que dans le contexte actuel, ce sont des gens qui font de gros efforts pour...

Mme Trépanier: O.K.

Mme Thibault: Et pourquoi ne pas harmoniser les demandes de deux, dans le fond, les demandes d'un ministère et ce qu'un autre ministère pourrait apporter. C'est un peu ça, là.

Mme Trépanier: Je constate qu'avec le CIAFT, vous avez un point de dissension, je devrais dire, concernant les prolongations de congé sans solde. Vous, vous favorisez, vous donnez la possibilité de deux ans de congé sans solde suite à un congé de maternité. Donc, ça veut dire trois ans, ça, là, avec une année. Est-ce que vous n'êtes pas sensibles aux arguments de Mme Leduc du CIAFT?

Mme Hébert: Écoutez, il y a un bémol très clair dans notre texte là-dessus, vous savez. L'expérience, on l'a, d'ailleurs, avec les conventions collectives. Il y a très peu de gens qui prennent un congé sans solde de deux ans pour la simple et bonne raison qu'il faut des sous pour le faire. Par ailleurs, c'est intéressant que ce droit-là existe. Mais dans les faits, ce sont les autres conditions qui sont davantage importantes, à savoir les différents congés payés. Par ailleurs, on se dit, bon, que la possibilité existe, c'est intéressant, mais on sait très bien que dans les faits...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme

Leduc, vous vouliez ajouter...

Mme Leduc: Oui, ceci est une coalition. Alors, c'est évident que dans les coalitions, il y a des positions qui sont communes et c'est pour ça qu'on présente d'autres... Notre objectif, qui est l'autonomie financière des femmes et l'intégration des femmes au marché du travail, nous fait mettre un bémol là-dessus, mais si on regarde la liste des gens qui sont ici, eux, il y en a certains pour qui le soutien à la famille est plus important que l'autonomie financière des femmes. Alors, c'est ce qui explique un peu la différence dans nos positions et c'est pour ça qu'on tenait à maintenir notre position, compte tenu des objectifs spécifiques qu'on a à faire. (11 h 30)

Mme Trépanier: Oui. Et comme Mme Thibault nous disait que la possibilité que les femmes puissent prendre ce congé-là est très faible, je trouve ça un peu inquiétant d'avoir cette disposition-là dans un programme comme désincitation à l'embauche. Moi, j'ai toujours cette préoccupation de la désincitation à l'embauche parce qu'on n'a pas encore gagné ce combat-là. Quand on sait que dans les faits, ça sera utilisé très peu, je suis toujours inquiète d'une telle disposition.

Mme Thibault: Mon inquiétude, par contre, c'est toujours les cas de femmes, par exemple, avec des enfants ayant un handicap physique, qui sont dans l'obligation, pendant un an ou deux, de se retrouver à la maison, qui se voient congédiées. Il faut trouver une solution pour ce type de personnes-là. Évidemment, c'est l'exception au Québec. On sait très bien que la majorité des enfants n'ont pas ce genre de problème. La majorité des couples n'ont pas les moyens d'avoir une personne qui, pendant deux ou trois ans, va rester à la maison sans solde. Je suis d'accord que ça peut être vu comme un désincitatif, d'une certaine façon.

Mme Trépanier: Suite à ça, est-ce que vous considérez que, pour le retour des congés parentaux, l'emploi devrait être aussi protégé? Vous pariez de protection suite à un congé de maternité et vous êtes...

Mme Hébert: Oui, aussi.

Mme Trépanier: Oui? Alors, même avec un congé sans solde de deux ans...

Mme Hébert: Oui.

Mme Trépanier: ...c'est un poste protégé. C'est gros, hein!

Mme Hébert: C'est-à-dire, vous savez que dans la réalité il faut s'entendre très clairement sur ces questions. Si on se fie à l'expérience

concrète, oui, il faut que l'emploi soit protégé, parce que, autrement, il ne le sera jamais. Maintenant, on sait très bien que sur une période relativement longue, il y a des choses qui se modifient, dans le milieu de travail. L'organisation du travail peut changer, etc. Évidemment, il faut se conformer à cela. Ce que ça veut dire, c'est que la femme qui retournera, ne perdra pas les conditions qu'elle avait, ne sera pas rétrogradée, ne perdra pas son salaire, etc. C'est cela que ça veut dire.

Mme Trépanier: Un poste équivalent, et non pas reprendre son poste.

Mme Hébert: Après le sans solde.

Mme Trépanier: Je veux avoir votre opinion. J'aurais dû vous poser la question plus tôt, ça m'a échappé. Qu'est-ce que vous pensez de la proposition d'universalité de prestations du Conseil du statut de la femme?

Mme Hébert: A savoir, des prestations qui pourraient aller...

Mme Trépanier: Qui pourraient aller aux femmes au foyer aussi.

Mme Hébert:... aux femmes au foyer. Bon. Très, très honnêtement, sur cette question-là, le regroupement n'en a pas parlé, tout simplement pour des raisons concrètes, pratiques, de temps, etc. Maintenant, par ailleurs, le Conseil du statut, lorsqu'il a fait une tournée de consultations, évidemment en a parlé à plusieurs groupes. En fait, même si la discussion n'a pas été faite en profondeur chez nous, il est clair qu'on pourrait très bien regarder une proposition comme celle-là. En passant, et c'est personnel, ce que je vous dirai, les primes qui sont données à la naissance, si on veut parler effectivement de prestations qui seraient universelles, pourraient très bien, je crois, être transformées, justement, pour des primes qui seraient universelles. Parce que, évidemment, les primes à la naissance - et je pense à la mère qui a trois jeunes enfants - c'est peut-être elle qui va rester au foyer pendant quelques années avec ses trois jeunes enfants. Évidemment, à ce moment-là, on pourrait parler d'un partage différent de cet argent-là, parce qu'il est là l'argent, il existe.

Mme Trépanier: C'est la proposition du Conseil, d'ailleurs. C'est une partie du financement.

Mme Hébert: Une partie du financement.

Mme Trépanier: Je vous remercie, madame.

La Présidente (Mme Marois): Ça va? Merci,

Mme la ministre. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Je salue avec plaisir Mme Hébert, Mme Thibault, Mme Boulanger et à nouveau Mme Leduc. Mme Hébert, c'est avec plaisir que je vais poursuivre cet échange que nous avons déjà eu l'occasion d'entreprendre.

D'abord, vous dites, à la page 9 de votre mémoire: Québec a un rôle important à jouer. En fait, ce que vous dites, ce matin, c'est qu'il faut agir dès maintenant. Ce que je retiens de votre mémoire, c'est un peu la différence qu'un journaliste me demandait hier, par rapport à celui du Conseil du statut. Ils ont parfois un peu de difficultés à se retrouver dans tous ces mémoires. Essentiellement, vous, vous dites: Agissez dès maintenant, n'attendez pas le résultat ultime de négociations qui - et là, ce n'est pas dit, mais, j'imagine, compte tenu de ce qui se passe avec Meech - pourraient durer très très longtemps, et ne rien donner du tout. Est-ce que je résume bien?

Mme Hébert: Exactement. Cette question aussi nous a été posée. Est-ce que vous êtes contre le rapatriement des sommes de l'assurance-chômage? Ce n'est pas l'idée. L'idée, c'est qu'on ne veut pas que la constitution d'une caisse au Québec soit tributaire de négociations qui seraient périlleuses et longues et qu'on fasse de ce débat un débat constitutionnel, alors qu'il est profondément un débat qui concerne les femmes et leurs conditions de travail.

La Présidente (Mme Marois): Vous ne voulez pas que ce soit un prétexte, si je comprends bien.

Mme Hébert: Voilà! Exactement.

Mme Harel: C'est donc, d'une certaine façon, très intéressant, parce que vous dites que déjà, dans le secteur public, le gouvernement, comme employeur comble la différence entre le salaire versé et le montant des prestations d'assurance-chômage en tant qu'employeur, alors, en tant que législateur il pourrait instaurer - c'est bien ça, en fait, votre point de vue - une...

Mme Hébert: Exactement.

Mme Harel:... caisse de congés parentaux québécois qui procéderait de la même façon.

Mme Hébert: Oui.

Mme Harel: En lisant votre mémoire, je passais quelques commentaires à mes compagnes en disant que si les hommes accouchaient, ça fait bien longtemps qu'il y aurait des congés payés...

Une voix: Absolument.

Mme Harel: ...parce que c'est évident que les mères québécoises, et c'est le Conseil du statut qui rappelait que, en matière de remplacement de revenu, toutes les autres législations mettent sur un même pied d'égalité, c'est-à-dire à 90 % du salaire assurable, les bénéficiaires de tous les autres régimes québécois d'assurance sociale, que ce soit les travailleuses en retrait préventif, les bénéficiaires victimes d'accident de travail, les victimes d'actes criminels, d'accidents de la route, etc., et qu'en définitive il n'y avait que les mères québécoises en emploi qui étaient traitées différemment. Et là, on revient à la situation des autres provinces - moi, je me sens femme de ménage dans les normes minimales, et j'espère qu'on va faire du ménage en matière de rattrappage - parce que les autres législations, juste nos voisins d'à côté, finalement, sont depuis pas mal d'années rafraîchies par rapport aux bouleversements du marché du travail, compte tenu de l'entrée massive des femmes, mais compte tenu surtout des changements structuraux et technologiques et de l'entrée massive des femmes, on l'a vu en matière d'équité salariale en Ontario, ou à l'égard des indemnités généreuses lors des fermetures. Mais l'ensemble des autres provinces finalement n'a pas d'autres législations que celle de l'assurance-chômage, hein, à peu de choses près, là.

Mme Hébert: Oui.

Mme Harel: Et c'est comme si elles s'en contentaient. C'est un peu la question que je voulais vous poser. Vous dites, dans votre mémoire: L'élargissement du régime d'assurance-chômage, afin que les congés de maternité et parentaux soient entièrement payés, ne nous apparaît pas non plus la solution - elle serait beaucoup trop longue à appliquer - et nous croyons que Québec a un rôle important à jouer et qu'il doit reconnaître l'importance sociale de mettre des enfants au monde. Ça me semble être comme le point de départ de toute votre proposition. Je voudrais simplement savoir si, à votre connaissance, il y aurait d'autres législations en matière de remplacement de revenu dans d'autres provinces parce que, à notre connaissance, il n'y en a pas. C'est bien le cas?

Mme Hébert: H n'y en a pas, mais je répondrais à ça que le taux de natalité du Québec est joyeusement plus bas en ce moment que celui des autres provinces et je pense aussi que le gouvernement semble être alarmé par cette situation. Donc, on croit que c'est très important de remettre ce débat-là à l'ordre du jour. Je dis "remettre", parce que ça fait au-delà de 15 ans, maintenant, qu'on en discute.

Je ne sais pas si vous vous souvenez de la série d'articles qu'il y avait eu dans La Presse par un journaliste, M. Falardeau, sur la natalité, la dénatalité, et tout. Il y avait effectivement un sondage de fait auprès de la population québécoise qui identifiait le congé de maternité payé comme l'un des éléments essentiels d'une politique permettant de concilier travail professionnel et maternité. Moi, j'avais fait les comparaisons à ce moment-là avec les chiffres, en fait, de dix ans auparavant, et dix ans auparavant, les Québécois et Québécoises n'identifiaient pas le congé de maternité comme étant quelque chose d'essentiel, en tout cas pas une majorité de Québécois et de Québécoises. C'était donc aussi un bon miroir de notre société québécoise qui, sur cette question, évolue et voit les choses de façon différente. Alors, je pense que, non, c'est vrai que les autres provinces n'ont pas ce genre de législation mais qu'on est quand même... Moi, je pense qu'ici, au Québec, on est rendu à attaquer ce problème-là de fond, d'une part, parce qu'on en parle depuis plusieurs années, et d'autre part, parce que notre situation en matière de natalité est différente de celle des autres provinces.

Mme Harel: Je suis contente que vous nous le rappeliez parce qu'il y a deux phénomènes qui sont complètement différents, et c'est peut-être parce qu'on est une société distincte quelque part, c'est que l'entrée massive des mères d'enfants de moins de trois ans est absolument phénoménale sur le marché du travail. Vous le rappelez dans votre mémoire, à la fin du siècle, c'est presque 90 % des mères de jeunes enfants au Québec qui sont sur le marché du travail, et ce n'est pas du tout la même progression en Ontario ou dans les provinces canadiennes. L'autre phénomène, c'est que le taux de natalité est autour de 2 % dans les provinces de l'Ouest, de 1,7 % ou 1,8 % en Ontario, et que le taux de 1,4 % au Québec, 1,45 %, 1,5 %. Évidemment, on considère que ce sont surtout les naissances qui ont été reportées qui ont pu hausser ce pourcentage l'an passé, mais, chose certaine, c'est loin encore quand même du taux qui a l'air, dans les autres provinces, de les satisfaire. Bon, alors on revient à votre proposition, puis j'aimerais l'examiner par rapport à l'annexe que vous avez déposée, qu'on n'a pas jusqu'à maintenant examinée.

À la page 7, vous nous parlez du mode de répartition entre les travailleurs, employeurs et le Québec. Il y a une question qui m'est venue. En fait, j'ai numéroté les pages... oui elles sont numérotées. En fait, vous voyez, il y a comme une sorte de paradoxe, par exemple, maintenant. Vous dites que le gouvernement fédéral devrait continuer d'assumer sa part du régime d'assurance-chômage, mais il ne le fera plus et il a annoncé qu'il ne le fera pas, et avec le budget Wilson hier, on est maintenant certains qu'il ne le fera pas. Donc, il se retire complètement du

financement et, d'autre part, vous-mêmes nous dites, en tout début de votre mémoire, que le groupe d'étude sur la garde des enfants a estimé que te gouvernement fédéral économisera environ 23 % des coûts totaux des congés parentaux, compte tenu de tous les mécanismes de récupération que vous nous expliquez très très bien, à savoir que le coût d'une extension des congés parentaux, non seulement amène des emplois à être occupés par des personnes qui pouvaient être en chômage ou sur le bien-être social, mais amène finalement deux sortes de cotisations à l'impôt: la cotisation de la personne qui est en congé et la cotisation de celle qui la remplace, etc. C'est très bien indiqué. Et, si on se fie à vos chiffres, le gouvernement fédéral va économiser. Il ne paiera plus un sou, puis c'est le gouvernement québécois qui, lui, va combler, parce que, dans le fond, on reviendrait à ça: le gouvernement québécois va combler la différence et tout ça va avoir comme effet que le gouvernement fédéral va économiser au bout de la ligne, parce que cet élargissement-là va lui faire réaliser des économies. C'est ça qu'il faut comprendre.

Mme Hébert: Non. Alors, tous les calculs qui sont faits effectivement à partir de la page 7, le sont pour un régime complémentaire, donc pour la partie qui n'est pas à ce moment-ci payée par l'assurance-chômage.

Mme Harel: Mme Hébert, je comprends, mais je veux suivre votre raisonnement. Ce régime complémentaire va avoir comme impact l'élargissement des congés parentaux. C'est bien le cas? Et cet élargissement des congés parentaux, vous nous dites ailleurs, au tout début, que ça a un effet d'économie sur le gouvernement fédéral. C'est le cas aussi.

Mme Hébert: C'est le cas aussi.

Mme Harel: Alors l'un s'additionne avec l'autre et ils ne se contredisent pas.

Mme Hébert: Alors là, il y a plusieurs possibilités. Dans ce cas-ci, si le gouvernement fédéral ne contribue plus comme il le fait actuellement, c'est ou bien les cotisations des travailleurs et travailleuses et des employeurs au niveau de l'assurance-chômage qui vont augmenter, ce qui va se produire effectivement au bout d'un certain nombre d'années, peut-être pas la première...

Mme Harel: C'est une augmentation assez substantielle de 15 %, hein?

Mme Hébert: Oui, c'est ça. ...ou bien, effectivement, on parlera au Québec d'une proportion plus grande pour le gouvernement québécois. Alors ça, c'est un calcul qu'on n'a pas fait effectivement, mais il y a ces deux possibilités. Ou bien ce sont les travailleurs et travailleuses qui en paieront plus, ou bien c'est le gouvernement. Nous, on croit qu'actuellement le pourcentage ou la partie de ce que les travailleurs et travailleuses paient, parce que, comme vous le voyez, on a fait des calculs à partir des pourcentages qui sont versés à l'assurance-chômage, c'est certainement le maximum où ces gens-là, en termes de cotisations pour le Québec, pourraient aller. Alors évidemment, si on fait le décompte ensuite, cela voudrait dire que la cotisation du gouvernement québécois, elle, devrait être augmentée sensiblement.

Mme Harel: Et vous comprenez que ce sont des vases communicants. Plus elle est augmentée, plus ça élargit les congés parentaux, puis plus, à l'autre bout de la ligne, le gouvernement fédéral en profite par une réduction finalement ou par une augmentation de ses revenus fiscaux, compte tenu du nombre de personnes plus importantes qui sont sur le marché du travail. Je veux juste qu'on le sache, qu'on se le dise aussi, parce que ce n'est pas indifférent dans le fond tout cela, au fait que le Québec aura sans doute, pour les deux prochaines années, à assumer en plus 700 000 000 $ de manque à gagner en matière de services sociaux, de soins de santé et d'éducation postsecondaire. (11 h 45)

À la page 10, vous nous évaluez le coût total annuel d'un régime complémentaire québécois de congés à la naissance.

Et je regarde à la toute fin de la page 10, l'hypothèse moyenne pour 42 695 bébés admissibles. En fait, c'est là aucune augmentation par rapport au nombre de femmes qui, chaque année, ont droit aux congés de l'assurance-chômage. C'était à peu près 43 000, l'année dernière. Ça veut dire que les travailleuses autonomes, l'ensemble de celles qui n'ont pas leurs 20 semaines continues chez le même employeur, on ne les a pas calculées, il faut les ajouter aussi.

Mme Hébert: C'est ça, il faut les ajouter

Mme Harel: On se comprend. À ce moment-là, pour 29 semaines, ça revient à peu près à 250 000 000 $. C'est bien ça?

Mme Hébert: Oui.

Mme Harel: Pour 35 semaines, à 350 000 000 $ puis 41 semaines à 464 000 000 $. C'est ça. Et quand on regarde à la dernière page, à la page 15, le coût total pour l'ensemble des propositions, c'est 421 000 000 $. Ça, ce sont 421 000 000 $, sans récupérer d'Ottawa?

Mme Hébert: C'est ça

Mme Harel: Et puis, à ce moment-là, vous

considérez que ce serait un taux de cotisation qui serait de quel ordre pour le travailleur et l'employeur.

Mme Hébert: Vous avez ça à la page 11 du document où on parle effectivement des taux de cotisation qui, par rapport à ce que les travailleurs, travailleuses et employeurs paient actuellement, seraient légèrement augmentés. Alors, pour les salariés, on parle d'une augmentation de 0,14 $ par 100 $; pour les employeurs, de 0,19 $, etc. Alors, les taux de cotisation... On parle toujours, nous, de la deuxième hypothèse, celle calculée sur 35 semaines. Alors, là, c'est 0,20 $ d'augmentation.

Mme Harel: Et, à ce moment-là, vous n'avez pas considéré - je l'ai bien compris dans la réponse que vous avez faite à Mme la ministre - l'introduction des prestations universelles qui, pour vous, continuent à être versées, les prestations universelles à la naissance d'un premier, les primes de 4500 $ pour le troisième. Ça, ça continue d'être versé en surplus.

Mme Hébert: C'est-à-dire que dans les calculs que nous avons faits, cet argent-là n'a pas été additionné. Puis ça représente plus, en fait, que les 240 $ qui sont actuellement versés. Maintenant, dans la perspective où ces prestations seraient universelles et qu'on parle d'y ajouter ces montants, c'est quelque chose qui est tout à fait regardable pour nous. Évidemment, le problème que ça pose, et je le soulève maintenant... Le régime dont on parle dans nos documents, c'est un régime contributoire. Donc, il faudrait définir un certain nombre de règles, évidemment, pour des femmes ou, enfin, des personnes qui ne contribueraient pas de la même façon.

Il y a toute la question du régime contributoire où on doit avoir, pour avoir droit aux prestations, un certain nombre de semaines de contribution. Alors, ça, c'est le problème.

Mme Harel: c'est très intéressant, en tout cas. vous nous donnez vraiment des études de coûts qui vont être très utiles. mais, à la page 4...

Mme Hébert: Oui.

Mme Harel: ...vous savez, le point e, atteinte à l'universalité du programme, ça m'a terriblement inquiétée, dans le fond, à relire ce paragraphe-là pour me rappeler que, oui, dorénavant, il allait y avoir un remboursement.

Mme Hébert: Oui.

Mme Harel: Jusqu'à 30 % des prestations de maternité de l'assurance-chômage pour une salariée dont le revenu excède 44 000 $. Là, le problème est moins grave, parce qu'il n'y en a pas beaucoup qui excèdent 44 000 $. Mais vous nous rappelez que, compte tenu de la désindexa-tion et des régimes d'impôt et compte tenu du manque d'argent qui a l'air tellement énorme du gouvernement fédéral, la tentation peut être très, très grande d'aller, chaque année, gruger, de façon à éventuellement écarter toute la classe moyenne du programme.

Alors, il y aurait un programme, finalement, qui n'est pas accessible, en aucune façon, aux femmes pauvres, parce qu'il y a quand même un enfant sur six, au Québec, qui accouche d'une femme assistée sociale, qui n'a pas d'autre chose que sa prestation. D'autre part, les femmes qui obtiennent une certaine équité salariale et qui réussissent à améliorer leur niveau de rémunération vont se retrouver victimes de ces coupures au niveau des programmes de congés de maternité. On ne penserait pas couper de programmes, par exemple, d'assurance automobile ou d'accidents du travail, etc., alors je me demande si on n'aurait pas intérêt, le plus tôt possible, à le rapatrier, ce champ-là.

Mme Hébert: Ha, ha, ha! Avant qu'on nous l'enlève complètement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Parce que, d'une certaine façon, si c'est vrai, ce que vous nous dites, si ça s'avère exact, c'est qu'à un moment donné ça ne voudra plus rien dire pour bien des salariées.

Mme Hébert: D'autant plus, d'ailleurs, que le gouvernement fédéral - et ça, c'est un peu indécent, en tout cas en ce qui me concerne - a vendu, entre guillemets, ces modifications à l'assurance-chômage en disant qu'il y aura maintenant de meilleurs congés de maternité et soins d'enfants; c'est vrai. Maintenant, effectivement, il y a ce dont on parle là, l'érosion des programmes, mais, de plus, les conditions d'admissibilité au chômage qui vont être rendues de plus en plus difficiles. Elles vont s'appliquer aussi aux femmes qui vont venir d'avoir des enfants. Alors là, il y a comme un problème aussi.

Maintenant, oui, peut-être que vous avez raison qu'il faut aller vite dans le rapatriement, mais en même temps - et je le répète - pour nous, ça ne doit pas devenir une condition à ce qu'on commence à discuter vraiment de ce que c'est, au Québec, une caisse de congés de maternité.

Mme Harel: D'accord. Est-ce qu'il y a un peu de temps pour Cécile?

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Marie-Victorin, s'il vous plaît.

Mme Vermette: En fait, moi, je veux revenir sur ce qui concerne les congés d'adoption, pour être responsable du dossier de l'adoption. Si j'ai bien compris, ce que vous faites ressortir, c'est qu'il n'y a pas... De toute façon, même la Charte canadienne reconnaît qu'il peut y avoir, dans certains cas, une discrimination, en fait, en autant que c'est jugé raisonnable dans une société démocratique, et ce qu'il faut ressortir, c'est non pas basé sur la discrimination entre un parent biologique et un parent adoptant, mais en fonction des besoins de l'enfant. C'est bien ça, en fait...

Mme Hébert: Oui.

Mme Vermette: ...ce que vous avez fait ressortir, d'une part? Et, d'autre part, il faudrait tenir compte aussi que, dans le cas d'une adoption, il n'y a pas tous les problèmes de l'accouchement ou de la grossesse comme telle, mais c'est d'un autre ordre. C'est d'accomplir des démarches pour arriver à une adoption. C'est ça. Ma question est à savoir, maintenant: Est-ce que vous avez des statistiques qui démontrent combien de femmes - parce qu'on parle du quart des congédiements et surtout des congés de maladie - ont eu des congédiements à la suite d'un congé de maladie? Avez-vous des statistiques là-dessus?

Mme Hébert: Non

Mme Vermette: En tout cas, ça peut être déguisé, mais vous n'avez rien là-dessus... Est-ce que d'après vous autres ça pourrait être une des raisons aussi de congédiement face à une grossesse? Est-ce que ça pourrait devenir une problématique à ce niveau-là?

Mme Hébert: C'est pour ça, vous savez, qu'une caisse de congés de maternité, c'est tout à fait important. Même moi, à la rigueur, les congés payés par les employeurs, je dirais que, dans le cadre d'une législation qu'on veut modifier en ce moment, ça pose des problèmes très graves parce que là, effectivement, les effets pervers de ce genre de politique peuvent avoir un effet direct sur les femmes Quand on parte d'une caisse où tout le monde cotise, bien là, on se place de façon différente, c'est-à-dire que si tous les employeurs, qu'ils embauchent ou non des femmes, doivent cotiser dans cette caisse, bien, ça a un effet moins difficile sur les femmes. On sait que, effectivement, il y a souvent eu ce genre d'effets pervers et c'est ça qu'on veut éviter dans une mesure qui s'applique de la même façon à tout le monde.

Mme Vermette: Merci.

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme Thibault.

Mme Thibault: Je voulais faire une intervention sur deux ou trois aspects. Entre autres, je sais que le CIAFT est intervenu aussi pour dire qu'il faut avoir de la documentation sur la loi sur les normes. Il en faut, évidemment, sur les congés de maternité. J'aimerais souligner qu'il faudrait que cette documentation-là existe en plusieurs langues parce que, parmi les travailleuses non syndiquées, il y a énormément de femmes de communautés culturelles et ce serait important qu'elles puissent comprendre qu'elles ont droit à des congés de maternité et qu'elles ont accès à un certain nombre de choses. Il y a ça que je voudrais souligner.

Mme Harel: Que l'on fasse de l'information sur le programme qui existe à l'assurance-chômage.

Mme Hébert: La loi sur les normes... Mme Harel: La loi sur les normes, O.K.

Mme Thibault: Moi, c'est sur le programme québécois comme tel. Je m'occupe principalement du programme québécois. Je trouve ça important que les femmes immigrantes soient bien au courant de ce qui existe au Québec comme tel. Hier, au Téléjournal, on nous pariait d'un rythme pour l'adoption du projet de loi, ce qui nous faisait passer à 1991 pour l'application du projet de loi. Je voulais vérifier si c'était exact que ce serait seulement à partir de 1991 que la loi sur les normes et les congés de maternité seront appliqués. En même temps, je voulais vérifier: Est-ce que, au moment de l'adoption des règlements, il y aura possibilité d'être entendu et de commenter particulièrement l'aspect des congés de maternité et parentaux?

La Présidente (Mme Marois): Mme la ministre.

Mme Trépanier: Mme Thibault, on m'informe que la Loi sur les nonnes du travail est publiée présentement en cinq langues: anglais, français et trois autres...

Une voix: J'imagine, l'italien.

Mme Trépanier: ...ainsi que la documentation à la loi. Je pense qu'on s'entend sur plusieurs points ici. C'est rare, mais c'est le cas. Les conditions financières des gouvernements sont extrêmement difficiles. Les besoins des familles sont énormes, ils sont criants et les femmes réclament des droits à la maternité et aux responsabilités parentales. Donc, notre responsabilité, elle est énorme dans ce sens-là. Je pense qu'on s'entend sur certains principes. Il va falloir se serrer les coudes, s'unir, aller de l'avant et trouver des solutions parce que c'est le Québec qui en dépend, je pense. Merci pour

votre précieuse contribution à ces travaux et soyez assurées qu'on tiendra compte de tous vos commentaires.

La Présidente (Mme Marois): Je pense que vous étiez occupée parce qu'on vous donnait de l'information. Je pense que Mme Thibault a soulevé une question. Je ne sais pas si...

Mme Thibault: Oui. Hier au Téléjournal, on nous disait que la loi s'appliquerait, donc aussi la question des congés de maternité parentaux, à partir de 1991. On nous décrivait un échéancier législatif, au Téléjournal. Je veux vérifier si cela est exact. Et, dans un deuxième temps, comme je vous l'avais déjà mentionné, Mme Trépanier, lorsqu'on s'était rencontrées, je trouverais intéressant que, lors de l'élaboration du règlement, et tout ça, les groupes puissent être consultés, qu'on puisse être entendus pour s'assurer, évidemment, que le règlement soit conforme.

Mme Trépanier: Oui. Si vous me permette/. Comme la loi relève de mon collègue, je vais m'informer auprès des gens de son...

La Présidente (Mme Marois): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: Je pense qu'hier, en commission parlementaire, le ministre a parlé d'un éventuel projet de loi en mai, mais que, sans doute, il devrait le reporter à l'automne. Alors, un projet de loi à l'automne, éventuellement, ça veut dire son adoption à Noël.

Une voix: Et les règlements après. Mme Harel: Alors, on parle...

La Présidente (Mme Marois): C'est même tôt, enfin, 1991.

Mme Trépanier: On me confirme qu'effectivement ce sera en janvier 1991 et la réglementation suivra.

Mme Thibault: Alors, on vous spécifie qu'on aimerait être entendus à ce moment-là.

Une voix: Sur la réglementation. Mme Thibault: Sur la réglementation.

Mme Harel: Sur le projet de loi aussi. N'oubliez pas que le projet de loi...

Mme Thibault: Éventuellement aussi.

Mme Harel: ...peut ne pas ressembler à l'avant-projet de loi. Espérons-le.

La Présidente (Mme Marois): II y a M. le député de Fabre qui voulait soulever une petite question.

M. Joly: Merci, Mme la Présidente. Moi, je suis drôlement heureux, en fait, d'être présent et d'écouter ce que tout le monde a un petit peu à dire. J'étais d'autant plus heureux d'entendre la suggestion que vous avez mise de l'avant, à savoir le régime contributoire, mais avec trois partenaires. Dans le fond, je pense que, si on veut s'orienter vers un certain succès ou, du moins, enlever des réticences à un tel régime, il faut nécessairement que chacun réalise que c'est la responsabilité d'une société que de penser, justement, à avoir un taux de natalité qui peut augmenter et favoriser ainsi l'avenir de chacun. Moi, j'aimerais, sans choquer quiconque, peut-être revenir avec Mme Leduc, mais sur le mémoire antérieur où j'aurais peut-être voulu poser deux petites questions parce que...

Mme Leduc: Si ce sont les règles. Des voix: Ha, ha, hal

M. Joly: Ça peut être acceptable parce que...

La Présidente (Mme Marois): Ce n'est peut-être pas selon les règles, mais, comme on a un fonctionnement souple, on va accepter.

M. Joly: Mais, quand on regarde aussi les organismes qui se présentent devant nous ce matin, ils sont à peu près tous un peu interreliés.

Mme Harel: II reste les règles.

M. Joly: Ils sont tous un peu interreliés et, souvent, les mêmes choses reviennent. D'ailleurs, Mme Thibault a ouvert une parenthèse tantôt lorsqu'on a parlé justement d'une des suggestions du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, qui était l'obligation de l'employeur de remettre à son personnel tout document d'information reçu de la CNT sur les normes. Est-ce que vous vouliez laisser supposer que, souvent, l'employeur ne le fait pas ou ne le fait pas assez ou est-ce que vous auriez peut-être aussi envisagé des moyens tels que peut-être l'inclure à l'intérieur du chèque d'allocations familiales? On sait que le chèque d'allocations familiales est dirigé vers la femme. Alors, est-ce qu'à ce moment-là - surtout j'entends - c'est un peu ce que vous aviez en tête ou est-ce que c'est tout à fait différent de ce que, moi, j'avance?

Mme Leduc: Bon. Si on parle du chèque d'allocations familiales, ce n'est pas vraiment ça.

M. Joly: Mais comme moyen. Je veux dire comme moyen de communication.

Mme Leduc: Non, mais ça ne serait pas vraiment celui-là parce qu'au moment où il est mis dans le chèque d'allocations familiales il faut que la travailleuse ou le travailleur, selon le cas, soit au courant de ses droits, au moment où il peut les exercer. Alors, introduire cette information-là, pour une femme qui est à la maison et qui n'a pas entrepris sa démarche d'intégration au marché du travail, elle va peut-être la regarder. Comme vous le savez, il y a beaucoup de paperasse que tout le monde reçoit, ça ne nous concerne pas directement, on n'en prend pas connaissance. Alors, pour nous, c'est vraiment au moment soit de l'embauche ou à assez court terme, au moment où l'employeur embauche une personne, qu'il lui remette, à ce moment-là, quels sont ses droits, parce que c'est là que ça va l'intéresser, à ce moment-là, qu'il y ait obligation et qu'il y ait une certaine vérification pour que ce soit connu. Parce que les personnes ont des droits et, des fois, elles ne le savent même pas. Alors, c'est en ce sens-là: pour qu'elles puissent vraiment jouir des privilèges ou des droits que la loi sur les normes leur donne, parce qu'un employeur peut très bien ne pas donner un congé férié, la personne ne sait même pas qu'elle a droit à son congé, etc. Il faut être informé pour pouvoir savoir si on respecte nos droits. Alors, c'est en ce sens-là, et c'est plus au moment, sur les lieux du travail qu'on verrait cette information-là donnée, parce que ça va accrocher, à ce moment-là.

M. Joly: Au niveau de l'embauche? Mme Leduc: Oui... M. Joly: Oui.

Mme Leduc: ...ou dans les premières semaines d'emploi, oui.

Mme Thibault: Moi, je voudrais vous spécifier que, comme fédération, on appuie le mémoire du CIAFT et de l'organisme Au Bas de l'échelle; vous allez recevoir une lettre en conséquence. C'est très bien, l'idée des allocations familiales, sauf que ça va être utile au niveau du congé de maternité pour un deuxième bébé, parce que la femme qui reçoit des allocations familiales, normalement, elle aurait dû déjà, possiblement, avoir un congé de maternité.

M. Joly: C'est parce que...

Mme Thibault: Donc, au niveau de l'information, c'est peut-être mieux que comme travailleuse arrivant à l'emploi.

M. Joly: Ce que j'envisageais, ce que je pensais, c'est toujours aussi une question de contrôler les coûts. Si on a déjà l'enveloppe, ça ne nous coûte pas plus cher, si vous voulez, autre que le coût de production et le coût de manutention mais, partant de là, mais on est certains que ça se rend, on est certains que ça va entrer dans la maison. Alors, partant de là, je pense que la femme aussi qui est au travail, qui reçoit le chèque, voit - parce que vous allez peut-être me dire que ce ne sont pas toutes les femmes qui ont des enfants - mais c'est un moyen de confirmer davantage. Je n'ai rien contre l'idée qu'on puisse l'émettre à l'embauche, mais s'il y a lieu d'aller avec ce que Mme Thibault suggérait, je pense que ce ne serait peut-être pas méchant.

Mme Leduc: C'est ça. Mais vous avez justement souligné une des lacunes. C'est que les femmes qui ne reçoivent pas d'allocations familiales...

M. Joly: C'est ça. Oui, oui.

Mme Leduc: ...ne seront pas au courant. Alors...

M. Joly: Je comprends.

Mme Leduc: ...c'est sûr que pour les congés de maternité, c'est intéressant, ça va rejoindre les personnes mais, pour tous les autres travailleurs et travailleuses... parce que là, on a mis beaucoup le focus sur les congés, mais la loi sur les normes s'adresse à l'ensemble des travailleurs et travailleuses, il ne faut pas l'oublier.

M. Joly: C'est ça. Oui, j'abonde dans le même sens. J'aimerais que vous élaboriez sur la demande que vous faisiez, en disant: Permettre de s'absenter trois jours consécutifs pour maladie sans devoir fournir un certificat médical. Est-ce que c'était dans un souci d'économiser de l'argent au gouvernement? Parce qu'on sait que le certificat médical qui n'est pas toujours nécessaire, dans biens des cas, et qui coûte nécessairement à l'État, et l'État, c'est la population, c'est le payeur de taxes et le payeur d'impôt, alors est-ce que c'était dans ce but-là, mais additionné aussi, disons, d'un autre but que vous aviez?

Mme Leduc: Bien, c'est-à-dire que ça peut être un but de souci d'économie, parce que c'est sûr qu'on peut avoir besoin de s'absenter sans nécessairement avoir une maladie grave et devoir consulter. Alors, on se dit que, souvent, trois jours, c'est admis comme ça, on a une grippe, on est sur le dos, ce n'est pas nécessaire, nécessairement, de consulter un médecin pour avoir un certificat. Alors, c'était en ce sens-là: économiser l'argent de l'État et aussi les énergies des gens qui sont malades. Si tu as une absence

courte et que tu dois en plus de ça, tu es supposé te reposer, aller faire la file d'attente... Parce qu'on sait que c'est dans les cliniques d'urgence, trois jours, sans ça tu n'as pas de rendez-vous chez le médecin, là, à brève échéance, alors tu dois passer une demi-journée de ton congé de maladie, tu ne récupères pas beaucoup. Alors, c'était en ce sens-là, en se disant: Bien, trois jours... si c'est plus de trois jours, oui, il faut un certificat mais, trois jours, ça pourrait être sur justification verbale de l'employé lui-même.

M. Joly: Alors, je vous remercie beaucoup et, excusez-moi encore une fois, disons, d'avoir peut-être pris un autre chemin pour en arriver aux questions que j'avais à poser. Merci.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre intéressante contribution aux travaux de la commission.

J'inviterais maintenant les personnes représentant l'Intersyndicale des femmes à prendre place. On va suspendre une minute.

(Suspension de la séance à 12 h 4)

(Reprise à 12 h 7)

Intersyndicale des femmes

La Présidente (Mme Marois): À l'ordre, s'il vous plaît! Si les membres de la commission veulent bien reprendre leur siège, nous allons reprendre nos audiences.

Je vais souhaiter la bienvenue aux représentantes de l'Intersyndicale des femmes. J'aimerais que la porte-parole se présente et nous présente les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et, par la suite, le temps qui restera nous permettra d'échanger certains points de vue avec vous, de poser des questions, comme vous avez pu le constater avec les groupes qui vous ont précédées. Bienvenue à la commission.

Mme Gosselin (Danielle Maude): Merci. Je suis Danielle Maude Gosselin, du Syndicat des fonctionnaires. Je vais agir comme porte-parole. Les personnes qui m'accompagnent sont des représentantes des autres syndicats composant l'Intersyndicale des femmes. Alors, à mon extrême droite, Ghyslaine Fleury, de la CEQ; à ma droite, Sylvie Bélanger, du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec; à mon extrême gauche, Michèle Bourget, de la CEQ...

Une voix: CSD.

Mme Gosselin: CSD, excusez-moi. Ça part mal.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gosselin: Et à ma gauche, Sylvie Boulanger, de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec.

La Présidente (Mme Marois): Vous avez remarqué là, il y a une madame qui s'appelle Sylvie Bélanger et une autre qui s'appelle Sylvie Boulanger. Bienvenue.

mme gosselin: je vais essayer de faire la présentation dans 20 minutes; cependant, je vais essayer de couper des choses. ce n'est pas toujours facile.

La Présidente (Mme Marois): Comme vous l'avez vu avec d'autres groupes, Mme la ministre et Mme la députée, je veux dire...

Mme Gosselin: Oui, d'accord.

La Présidente (Mme Marois): Oui, c'est ça. On peut prendre un petit peu plus de temps. C'est parce qu'on doit terminer...

Mme Gosselin: Oui.

La Présidente (Mme Marois): ...nos travaux à 13 heures.

Mme Gosselin: À13 heures, d'accord.

La Présidente (Mme Marois): Souvent, les gens ont des engagements. Alors, ça donne un petit peu moins de temps pour l'échange, mais prenez quand même bien le temps de nous présenter votre point de vue.

Mme Gosselin: D'accord. Alors, on veut vous dire que c'est, avant tout, au nom des conditions de vie des travailleuses québécoises que nous avons choisi, l'Intersyndicale des femmes qui regroupe environ 200 000 femmes travailleuses au Québec, d'intervenir sur les modifications à la Loi sur les normes du travail, car on estime que ce sont les droits de toutes les travailleuses qui nous préoccupent car, syndiquées, nous avons acquis, grâce à de longues luttes, des droits mieux garantis que nous considérons essentiels, non seulement pour nous-mêmes mais pour l'ensemble des travailleuses et des travailleurs du Québec. De ce fait, et parce que l'intention clairement exprimée du législateur va dans le même sens, nous avons choisi d'analyser la Loi sur les normes du travail ainsi que les modifications proposées en regard d'un impératif, la conciliation des responsabilités familiales et des responsabilités professionnelles.

Bien que le gouvernement ait pris la peine de préciser que cette législation n'est pas le lieu d'élaboration d'un programme de remplacement du revenu du travail pendant les congés de mater-

ntté, nous avons choisi de présenter ici nos exigences à ce chapitre pour deux principales raisons. Soit que depuis au moins dix ans on n'a eu aucune opportunité de discussion sérieuse à ce chapitre qui a été offerte aux Québécoises. Il n'y a eu ni commission parlementaire, ni livre blanc ni énoncé de politique. Nous croyons donc opportun de soulever cet aspect essentiel, d'autant que, selon les modalités qui pourraient être élaborées, les normes pourraient nécessairement devoir en tenir compte.

D'autre part, il nous apparaît fallacieux de dissocier la discussion sur les modifications à la Loi sur les normes de celle concernant un programme de remplacement du revenu, puisque nous parlons ici des travailleuses et des travailleurs les moins protégés, les moins payés, ayant le moins de sécurité d'emploi, etc. Comment peut-on sérieusement penser que des congés sans traitement sont une solution pour ces personnes nombreuses maintenues dans la trappe de la pauvreté par des salaires trop bas?

Notre intervention portera donc plus spécifiquement sur trois aspects des normes du travail qui influencent directement la qualité de vie familiale, soit les revenus et la stabilité d'emploi, l'aménagement du temps de travail et les droits parentaux spécifiques.

Notre proposition quant à un programme de remplacement du revenu sera intégrée au troisième thème afin d'établir une concordance complète entre les modifications nécessaires à la Loi sur les normes et ce nouveau programme.

Notre mémoire n'aurait pas été complet sans quelques remarques sur certains sujets touchant plus spécifiquement les femmes: le travail à temps partiel, le travail de gardiennage d'enfants, le harcèlement sexuel et l'équité salariale.

Nous sommes, bien sûr, conscientes de l'importance d'autres modifications proposées et c'est pourquoi nous tenons à préciser que nous partageons les revendications de nos organisations respectives sur ces aspects que nous n'aborderons pas ici.

Dans un premier temps, les revenus et la stabilité d'emploi. Nous estimons que, dans le cadre d'une politique familiale globale, il est essentiel que les gens aient un revenu décent pour pouvoir assumer la charge des enfants. En ce sens-là, on vous parle d'abord de la stabilité d'emploi. C'est sûr qu'aucune société ne peut garantir à tous ses citoyens et citoyennes la stabilité totale d'emploi, mais nous estimons que l'écart reste grand entre cet extrême et celui que nous connaissons aujourd'hui, où un employeur peut, pendant cinq ans, congédier une personne sans cause juste et suffisante et sans que cette dernière ait de recours, si ce n'est dans le cas de congédiements illégaux. Dans le cadre d'un marché du travail déjà en lui-même très instable, où la précarisation de la main-d'oeuvre atteint des proportions de 50 %, où les passages du travail au chômage, à l'aide sociale sont nombreux et fréquents, rien ne justifie un pareil laxisme, d'autant plus que les secteurs fortement féminisés sont souvent aussi ceux qui connaissent les plus forts taux de roulement de personnel.

La norme du Code canadien du travail, qui est de douze mois, nous paraît déjà plus acceptable, d'autant plus qu'elle trouve aisément des justifications qui font paraître le délai que nous connaissons au Québec disproportionné et sans fondement. En effet, une période de douze mois paraît un délai raisonnable de mise à l'essai ou de probation dans à peu près tous les types d'emploi. Là-dessus, je vous ferai grâce des exemples. Effectivement, est-ce que ça prend cinq ans pour évaluer quelqu'un qui lave la vaisselle?

On dit: Même, lorsque le travail est plus complexe, une année est généralement considérée comme une période d'essai suffisante, qu'il s'agisse, par exemple, d'un travail de comptabilité, d'informatique, de niveau technique ou même professionnel. Il est donc impératif de modifier cette norme. En conséquence, nous recommandons la modification de l'article 124 de la Loi sur les normes du travail de manière à ce que les recours à l'encontre d'un congédiement sans cause juste et suffisante soient applicables après un an de calendrier passé au service de l'employeur.

Le revenu. Nous estimons, selon le même type d'argumentation, que la législation devrait garantir, pour une semaine normale de travail, un salaire qui ne soit jamais en deçà de ce que la société admet comme seuil minimal. Selon le gouvernement lui-même, les objectifs de la loi sont de définir des droits de base et de sauvegarder une certaine qualité de vie pour les travailleuses et les travailleurs. À l'heure actuelle, le salaire minimum se situe loin en dessous du seuil de pauvreté calculé par Statistique Canada pour une personne seule et 70 % des travailleurs au salaire minimum sont des travailleuses.

Nous estimons que, déjà en 1987, le salaire minimum aurait dû être de 5,55 $ l'heure pour correspondre au seuil de pauvreté de Statistique Canada, dans le cadre d'une semaine normale de travail. En 1989, il devrait se situer, avec les augmentations, plus aux alentours de 6,10 $.

Quand on prend les normes de seuil de pauvreté, celles de Statistique Canada sont les plus faibles. Quand vous prenez celles du Sénat canadien, c'est plus élevé. Alors, on estime que c'est vraiment le minimum.

Nous recommandons donc que l'article 40 de la Loi sur les normes du travail soit modifiée de manière à fixer immédiatement le salaire minimum au moins au seuil de pauvreté calculé par Statistique Canada, pour un nombre usuel d'heures de travail, et à y intégrer un mécanisme d'indexation au coût de la vie, automatique et

annuel, lui permettant ainsi de suivre la progression de la richesse collective. La pratique d'un salaire minimum différent et inférieur pour le travail à pourboire devrait de plus être interdite.

L'aménagement du temps de travail. On vous dit que, comme les deux faces d'une même médaille, le temps et l'argent sont indissociables et constituent les deux pôles entre lesquels les parents québécois doivent trouver un juste équilibre pour garantir la qualité de leur vie familiale: assez d'argent pour assurer les besoins de la famille et assez de temps pour la connaître et répondre aussi aux besoins affectifs.

Avec l'appauvrissement que connaissent actuellement les familles québécoises et canadiennes depuis une dizaine d'années, il devient de plus en plus illusoire de croire à la flexibilité de l'aménagement du temps de travail pour tenir compte de la vie privée. Comment choisir de travailler un peu moins pour avoir un peu plus de temps, lorsque le revenu ne permet déjà pas de joindre les deux bouts? Ce ne sont pas des choix individuels de réduction volontaire du temps de travail qui apporteront une réponse satisfaisante à la nécessité de concilier les responsabilités familiales et professionnelles. La société dans son ensemble doit effectuer le choix d'un meilleur équilibre et se donner les règles qui permettront de le réaliser.

La durée du travail. Deux aspects de la Loi sur les normes de travail devraient, selon nous, être sérieusement modifiés, soit la durée de la semaine de travail et les règles régissant la gestion du temps supplémentaire. La durée de la semaine prévue actuellement dans la loi dépasse ce que l'on retrouve dans la majorité des autres législations canadiennes et n'a plus aucun rapport avec la réalité de l'organisation réelle du travail, puisque la moyenne des heures hebdomadaires de travail se situait, incluant le surtemps, d'ailleurs, en 1989, à moins de 38 heures par semaine. Que penser de la vie familiale avec des horaires de 44 heures, quand la journée de travail est de neuf heures, plus le temps de transport, plus le temps d'aller chercher les enfants à la garderie, etc. ? C'est quelque chose qui n'est absolument pas vivable. Sans compter tout le transfert de services quand on parle du bénévolat de plus en plus demandé aux parents dans les garderies, dans les services scolaires; ce sont des horaires qui sont beaucoup trop longs et qui doivent être revus. En ce sens-là, nous recommandons que l'article 52 de la loi soit modifié pour prévoir une semaine régulière de travail de 40 heures et un maximum quotidien de 8 heures.

Nous estimons aussi que les règles qui régissent la gestion du temps supplémentaire dans le cadre de la loi sur les normes doivent, pour leur part, être complètement renversées, de manière que l'utilisation du travail à temps supplémentaire devienne une exception volontaire et limitée plutôt qu'une condition normale de travail. Les modifications proposées à l'article 51. 1 visent à permettre à une travailleuse ou à un travailleur ayant des obligations familiales de refuser de faire du temps supplémentaire s'il n'en a pas été avisé au moins douze heures à l'avance ressemblent, d'après nous, plus à une formule de style qu'à autre chose. En effet, un délai de douze heures ne peut garantir une possibilité acceptable d'organisation dans beaucoup de contextes familiaux et ne permet donc pas de protéger adéquatement la santé et la sécurité des enfants. Ce n'est pas que nous contestions les délais prévus, c'est l'obligation du temps supplémentaire elle-même que nous remettons en question. Dans une société qui se dit préoccupée du chômage, du partage du travail et où le développement des nouvelles technologie réduit de plus en plus la quantité de travail humain nécessaire à la production des biens et services, le temps supplémentaire ne devrait pas servir à encourager la paresse des gestionnaires, mais plutôt être un outil de dernier recours pour les employeurs. Nous estimons que la loi devrait être modifiée de la façon suivante. Que l'article 51 soit modifié et prévoie que le temps supplémentaire soit volontaire. Les exceptions devraient se limiter à des cas de force majeure pouvant mettre en cause la santé et la sécurité, en accord avec les normes et les lois en vigueur; à des cas de bris d'équipement importants pouvant entraîner des pertes sérieuses et identifiables pour l'employeur.

Dans le même sens, la possibilité de compensation du temps de travail en temps supplémentaire instituée par l'article 55 ne devrait pas dépendre de l'accord de l'employeur, mais devrait être un droit, d'autant plus qu'elle vise à permettre aux parents un meilleur aménagement de leur temps. Dans la mesure où l'employée, lorsqu'elle accepte de faire du temps supplémentaire, répond aux besoins de l'employeur au détriment de ses propres besoins en temps, la compensation devrait être effectuée en donnant priorité aux besoins de l'employée et non à ceux de l'employeur. La possibilité de compenser en temps répond effectivement à un besoin puisque, là où elle existe, le personnel s'en prévaut très majoritairement. Dans le syndicat dont je fais partie où le salaire moyen est très en deçà du salaire industriel moyen, 80 % des personnes se prévalent des congés en temps et non pas en argent. Nous recommandons donc un renforcement de l'article 55 qui pourrait se lire comme suit: Tout temps supplémentaire effectué peut être compensé en temps plutôt qu'en argent lorsqu'un ou une employé-e en fait la demande explicite. La compensation s'effectue selon le choix de l'employé après avis raisonnable à l'employeur. Là-dessus, d'ailleurs, dans l'addenda que nous avons déposé ce matin, nous parlons d'une fiche technique qui devrait être utilisée, de façon à permettre le remboursement, parce que si le remboursement n'est pas fait en argent, dans les semaines qui suivent, on craint que, dans

certaines petites entreprises où il n'y a pas de comptabilité informatisée ou globale, ça ne se fasse pas. Alors, que la commission émette des formulaires types qui permettent aux personnes d'obtenir un remboursement plus tard, s'il est justifié comme tel.

Le temps hors travail. Alors, là-dessus, si la gestion du temps de travail est un élément essentiel pour améliorer la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles, l'augmentation du temps hors travail est fondamentale. Deux aspects de la loi sur les normes doivent être sérieusement améliorés, selon nous, pour répondre aux besoins des parents québécois: les jours fériés et chômés de même que les vacances. Ni la loi elle-même, ni les compensations envisagées, ne prévoient la rémunération ou la compensation des jours fériés et chômés lorsqu'ils interviennent en dehors des jours ouvrables. Cependant, les enfants, lorsqu'on en a, obtiennent ces congés qui demandent aux parents des trésors d'ingéniosité puisque, de façon générale, les garderies et les services de garde parascolaires bénéficient aussi de ces congés. Alors, on estime que la famille québécoise bénéficierait certainement beaucoup plus d'un congé qu'elle peut partager que du casse-tête dont elle est actuellement l'héritière lorsqu'un jour férié ou chômé intervient en dehors des jours ouvrables. D'ailleurs, la majorité des législations canadiennes contiennent une telle rémunération de compensation et nous recommandons que la Loi sur les normes du travail prévoie que les jours fériés et chômés soient reportés ou compenses, même lorsqu'ils interviennent en dehors des jours ouvrables. pour ce qui est des vacances annuelles, la proposition gouvernementale nous apparaît non seulement timide, mais surtout vieillotte en cette dernière décennie du xxe siècle. alors que la population française bénéficie de vacances annuelles de quatre semaines depuis 1936 et de cinq semaines depuis 1982, notre gouvernement nous propose un maigre trois semaines après cinq ans de service continu. nous estimons que le besoin de repos et de vacances n'a rien à voir avec les années de service chez l'employeur; c'est plus un ensemble global qui permet aux personnes de se ressourcer et de se reprendre avant de reprendre l'année de travail. on estime que c'est plutôt une mesure sociale de repos qu'une mesure qui devrait être mise en parallèle avec le temps travaillé pour un employeur. nous croyons impératif que le nombre de semaines de vacances annuelles soit immédiatement porté à quatre pour tous et toutes après un an de service et qu'au moins deux de ces semaines puissent être prises consécutivement.

Je vais vous faire grâce de l'aménagement du temps de travail pour la famille, mais aussi pour la société. Nous en avons parlé souvent, des réductions globales du temps de travail; je pense que c'est un sujet qui est très connu en termes de développement par les organisations syndicales.

Je vais en venir aux droits parentaux. Choisir, comme société, de donner une priorité aux besoins des familles implique que nous partagions avec ces dernières les responsabilités et les coûts qu'impliquent les enfants qu'elles ont ou qu'elles auront. Dans le contexte actuel, non seulement les parents assument-ils seuls les coûts engendrés par la venue d'enfants, mais ils doivent de plus subir des pertes de revenu parfois importantes lorsque les responsabilités familiales les obligent à s'absenter du travail. Aucune protection de leur revenu et, pire encore, aucune protection de leur emploi dans bien des cas ne permet aux parents d'affronter leurs obligations familiales sans en être pénalisés.

Bien que la Loi sur les normes du travail contienne une amorce de protection quant aux absences du travail liées aux obligations parentales, ni les quelques congés sans traitement déjà acquis, ni les modifications envisagées ne répondent adéquatement aux besoins des familles québécoises. Il faut garder à l'esprit que la majorité des familles s'est appauvrie au cours des dix dernières années, malgré le fait que les deux conjoints soient très souvent sur le marché du travail. D'ailleurs, dans beaucoup de familles, le second revenu permet de se maintenir tout juste hors de la trappe de la pauvreté. Bien des données le démontrent, si le deuxième revenu n'était pas là, le nombre de familles pauvres augmenterait de 50 %.

On ne peut donc en aucune manière considérer qu'une perte de revenus, à des moments où généralement les dépenses augmentent, soit une solution acceptable. C'est ce que nous propose le gouvernement avec les congés sans traitement Les femmes qui doivent s'absenter du travail pour mettre un enfant au monde, ou les parents qui le font pour assumer d'autres types de responsabilités parentales, produisent dans ces moments un travail d'une valeur sociale. À nous de choisir si nous considérons ce travail-là assez important pour l'assumer collectivement. C'est donc à travers des modifications importantes à la Loi sur les normes du travail qu'il faut agir pour protéger des droits, mais ceux-ci ne seront véritablement respectés quant à leur accessibilité que dans la mesure où nous prendrons aussi nos responsabilités comme société par la mise sur pied d'un programme de remplacement du revenu.

Les recommandations énoncées dans les pages qui suivent représentent pour nous une hypothèse réaliste pour une première intervention sérieuse dans le domaine de la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles. Il ne s'agit assurément pas d'une solution idéale et nous tenons à souligner que nous sommes parfaitement en accord avec les revendications d'autres organisations qui s'orientent vers des périodes de congés parentaux plus longues. Nous avons cependant choisi de fonder nos recomman-

dations sur une situation déjà réalisée, celle des secteurs public et parapublic et de la compléter, le cas échéant.

Pour ces raisons, nous tenons à souligner notre ralliement à la proposition gouvernementale concernant la protection des travailleuses au retour du congé de maternité. Cinq mois nous paraissent acceptables dans un premier temps, bien qu'il soit souhaitable d'élargir cette protection à tous les parents qui se prévalent de congés parentaux.

Des modifications à la Loi sur les normes du travail. Cinq éléments doivent être considérés dans la législation pour garantir aux travailleuses et aux travailleurs le droit de concilier leurs responsabilités familiales et professionnelles: le congé de maternité proprement dit, le congé de paternité, le congé parental et des congés pour responsabilités parentales, des congés pour visites de santé pendant la grossesse. Pour ce qui est du droit au congé de maternité, nul doute qu'un consensus se soit établi à cet égard dans la société québécoise. La Loi sur les normes du travail, quant à elle, doit prévoir une période précise de congé de maternité, séparée des autres types de congé parentaux, de manière à garantir aux femmes une période de repos et de récupération avant et après l'accouchement, qui ne puisse être confondue avec l'ensemble des absences pour responsabilités parentales. De plus, le congé parental sans traitement devrait, selon nous, pouvoir être accessible pour une durée maximale de deux ans, excluant les congés de paternité ou de maternité, ce qui respecte l'intention gouvernementale de réduire l'écart entre les normes et les conventions négociées. D'ailleurs, selon l'argumentation même du gouvernement, un congé sans traitement d'un an a un impact financier, somme toute, minime sur les employeurs, lié à peu près strictement aux inconvénients du remplacement. Or cet inconvénient varie peu, si toutefois il varie, peu importe la durée du congé, et il permet l'accès au travail à des personnes sans emploi.

Nous proposons donc que l'article 81. 3 soit modifié pour prévoir... Et, là, je vais vous demander de vous référer à l'addenda, parce que, suite à des discussions que nous avons eues après le dépôt du mémoire, on l'a modifié un petit peu. Malheureusement, il n'a pas été paginé. Alors, je vais vous demander d'aller... C'est à la quatrième page de l'addenda, où on veut modifier le texte de la façon suivante: Nous proposons que l'article 81. 3 soit modifié pour prévoir un congé de maternité de 20 semaines, un congé parental sans traitement d'une durée maximale de deux ans qui peut être pris à la suite du congé de paternité, du congé de maternité, ou dans le cas d'une adoption.

De plus, pour les mêmes raisons, le premier paragraphe de la page 23 qu'on va voir plus loin va être modifié pour respecter l'équilibre des droits entre les parents naturels et les parents adoptifs en disant que, enfin, le programme de remplacement de revenu remplacerait directement le salaire complet d'un des parents adoptifs ou naturels pour les dix premières semaines du congé sans traitement. On va le voir plus loin.

C'est parce que, là, on a eu des problèmes, comme beaucoup de groupes, avec le congé pour adoption. C'est toujours le même problème qu'on rencontre. C'est que les services sociaux exigent - je ne sais pas le nombre - six mois dans la majorité des cas et ça peut être un motif pour ne pas avoir d'enfants adoptés si les parents ne sont pas prêts à prendre six mois de congé.

Alors, pour ça, on proposerait - vous l'avez à la page suivante - que les exigences des services sociaux en cette matière puissent donner accès au remplacement de revenu pour toute la période de disponibilité exigée, dans la mesure seulement où ces exigences sont justifiées auprès des responsables du programme de remplacement du revenu par les services sociaux eux-mêmes, ce qui permettrait un congé un peu variable. Si c'est quelques semaines, ça va, mais si c'est plus longtemps, ça pourrait être plus longtemps.

Alors, si je reviens au mémoire, nous disons que les modifications proposées à l'égard du congé de paternité nous semblent aussi à parfaire. Qu'il s'agisse d'une naissance ou d'une adoption, cinq jours ne sont certes pas un luxe en regard de l'adaptation importante qu'exige l'arrivée d'un enfant dans une famille. Or, ce congé, même s'il comprend une possibilité totale de cinq jours, restera, à toutes fins pratiques, de deux jours dans beaucoup de cas, car il faut bien prendre conscience que la Loi sur les normes du travail s'applique à des travailleuses et à des travailleurs dont le salaire, comme les conditions de travail, est souvent minimal.

Étant donné le niveau de revenu familial, peu de gens auront donc les moyens de prendre trois jours sans traitement, d'autant plus que l'arrivée d'un enfant représente généralement une augmentation importante des dépenses de la famille. Nous proposons la modification de l'article 81. 1 qui traite du congé de paternité pour prévoir cinq jours d'absence rémunérés pour la naissance ou l'adoption d'un enfant, à partir du début du processus de l'accouchement jusqu'à quinze jours après l'arrivée de l'enfant à la maison.

Les congés pour responsabilités parentales sans traitement introduits par l'ajout de l'article 81. 2 nous semblent, eux aussi, bien timides. S'ils représentent une innovation dans le contexte nord-américain, ils sont nettement en deçà des conditions que connaissent les familles suédoises, norvégiennes ou françaises qui bénéficient, à cet égard, de congés payés et plus nombreux.

L'argument du gouvernement selon lequel s'ils étaient payés, ils représenteraient, à toutes fins pratiques, des congés de cinq jours de plus par année à assumer par les employeurs tient

plus ou moins, parce que tous les travailleurs et toutes les travailleuses ne sont pas parents et des justifications de plus pourraient être exigées pour ce type de congés.

Les congés sans traitement ont aussi un effet pervers en regard d'un autre objectif, celui de la redéfinition des rôles dans la famille. Comme les femmes gagnent encore moins de 70 % du salaire des hommes, dans la majorité des couples, c'est le salaire de l'homme qui est le plus élevé, donc, ce seront nécessairement les femmes qui prendront ces congés-là.

Nous estimons aussi que cinq jours ne sont pas nécessairement suffisants dépendant des besoins particuliers. Nous proposons donc la modification de l'article 81.2 de manière à prévoir cinq jours d'absence rémunérés, lorsque justifié, pour responsabilités parentales, ainsi qu'une possibilité de cinq jours complémentaires sans traitement sur justification.

Nous estimons aussi utile d'ajouter une nouvelle norme qui est celle de congés pour visites de santé pendant la grossesse. Ce que nous prévoyons, ce sont quatre jours rémunérés pour visites de santé pendant la grossesse qui peuvent être pris en jour ou en demi-jour. Il faut savoir que la plupart des examens et des visites de spécialistes se font nécessairement pendant les heures de travail et que les contrôles nécessités par l'hôpital, que ce soit une amniocentèse ou une échographie. se font habituellement entre 8 heures et 16 heures. Alors, on doit aussi protéger la santé des futures mères et de leurs bébés. C'est donc important de les prévoir. (12 h 30)

Maintenant, le programme de remplacement de revenu. Considérant que les parents, lorsqu'ils décident d'avoir des enfants, assument de nombreux frais supplémentaires qui réduisent considérablement leur qualité de vie; considérant que l'augmentation du taux de natalité au Québec est un enjeu fondamental pour tous les partenaires sociaux et économiques et que la responsabilité des mesures nécessaires à la réalisation de cet objectif doit être partagée; que l'ensemble des coûts du programme que nous proposons existent déjà actuellement sous diverses formes - coûts de l'absentéisme pour les employeurs, contributions à l'assurance-chômage, pertes de revenus pour les parents, mesures gouvernementales partielles - et que les parents en assument la plus grande part; qu'il s'agit donc pour la société d'une redistribution de coûts et non d'une augmentation, nous proposons la création d'un programme de remplacement du revenu pour obligations parentales dont le financement serait assuré conjointement par les travailleuses et les travailleurs, les employeurs et l'État.

La répartition que nous proposons serait la suivante: 50 % pour les employeurs, 25 % pour les travailleuses et les travailleurs et 25 % pour le gouvernement. Ce programme couvrirait toutes les travailleuses sur le territoire québécois, y compris celles travaillant sous juridiction fédérale. Il remplacerait directement le salaire complet de la mère pour la durée du congé de maternité de 20 semaines prévu dans la Loi sur les normes du travail. Il rembourserait de plus aux employeurs, une fois par an, le coût des congés pour responsabilités parentales, des visites de santé pendant la grossesse et des congés de paternité. Il remplacerait aussi directement le salaire d'un parent adoptif ou biologique pendant les dix premières semaines du congé sans traitement prévu à l'article 81.3 de la Loi sur les normes du travail. Je vous réfère à l'addenda pour les petites modifications que nous avons introduites au texte. Ce programme complet de remplacement du revenu commande le rapatriement au niveau provincial de cet aspect du programme d'assurance-chômage fédéral et des sommes qui y sont rattachées.

Nous considérons plus opportun de créer un programme social général plutôt que de remettre l'entière responsabilité du paiement de ces congés aux employeurs. Nous connaissons pertinemment les effets pervers désastreux pouvant découler d'une responsabilité individuelle des employeurs; les femmes paieraient ce droit de leur accès à des emplois.

La responsabilité que nous croyons cependant fermement que les employeurs doivent assumer se retrouve dans la répartition des frais du programme, soit 50 %, comme c'est actuellement le cas dans les secteurs public et parapu-blic québécois. Le paiement d'une part de 25 % par les travailleuses et les travailleurs remplit lui aussi un objectif de redistribution des responsabilités, puisqu'il permettra que les travailleuses et les travailleurs sans enfant paient tout autant que les parents.

Il faut aussi remarquer que le coût d'un tel programme ne représente pas une augmentation nette des budgets de l'État québécois, loin de là, sa part n'étant que de 25 % du total. Comme employeur, il paie d'ailleurs déjà sa part du congé de maternité de près de 30 % des travailleuses, si l'on considère que les secteurs public et parapublic représentent environ 30 % de la main-d'oeuvre féminine.

Nous sommes parfaitement conscientes du coût que représente notre proposition, soit près de 500 000 000 $ selon diverses estimations, mais nous croyons qu'une société qui dit faire de la natalité un objectif prioritaire doit se donner des moyens efficaces, et la société québécoise a les moyens de se donner cet outil dont l'efficacité a déjà été démontrée ailleurs, notamment chez nos cousins français qui ont réussi à maintenir leur taux de natalité à un niveau viable. Ces sommes doivent d'ailleurs être vues comme un investissement dans notre avenir, étant donné le coût élevé des problèmes qui découlent déjà de la dénatalité et qui augmenteront si rien n'est fait.

Ce programme pourrait aussi permettre une intervention plus cohérente dans le domaine de la famille en concentrant l'ensemble des programmes financiers de soutien à la famille.

Conscientes des aléas du rapatriement du programme fédéral, nous pensons cependant qu'un tel programme complet de remplacement du revenu pour responsabilités parentales pourrait être mis en place d'ici cinq ans, à moins que le 23 juin, il n'y ait des changements...

Une voix: Majeurs, cela pourrait être fait plus rapidement.

Mme Gosselin: ...qu'ils fassent quelque chose... Cela pourrait aller plus vite. Des mesures transitoires sont donc nécessaires pour assurer les Québécoises et les Québécois d'une meilleure conciliation de leurs responsabilités familiales et professionnelles dans cet intervalle. Nous proposons donc, dans un premier temps, que le montant de 240 $ fourni aux mères québécoises pour compenser les deux semaines d'attente de l'assurance-chômage soit augmenté à 488 $, ce qui, représente l'équivalent du salaire minimum pour deux périodes hebdomadaires de 40 heures, selon le taux du salaire minimum correspondant au seuil de la pauvreté proposé dans ce mémoire.

Nous proposons, enfin, que le programme soit immédiatement amorcé et que les employeurs québécois soient tenus de verser progressivement au fonds collectif des sommes permettant de compenser une partie de la proportion de 35 % du salaire non payée par l'assurance-chômage pour le congé de maternité. Cette participation progressive pourrait s'effectuer à raison de 10 % par an, jusqu'à atteindre la part prévue des employeurs de 50 % la dernière année.

Derniers aspects, les aspects spécifiques du travail des femmes. Alors, nous avons voulu intervenir sur d'autres points. Nous disons, dans le cas du harcèlement sexuel, que bien que la Charte des droits de la personne prohibe explicitement le harcèlement sexuel comme, d'ailleurs, la discrimination en général, les recours prévus sont parfois difficiles. Nous croyons opportun de faire en sorte que la Loi sur les normes du travail prévoie des recours dans les cas de harcèlement ou de discrimination, de manière que les droits des individus soient mieux protégés.

Nous proposons donc d'inclure à la législation une définition du harcèlement sexuel en milieu de travail qui pourrait être celle qui a été retenue dans le Code canadien du travail, ainsi que la responsabilité explicite de l'employeur d'assurer un milieu de travail exempt de harcèlement sexuel. Nous proposons de plus qu'une démission dans un contexte de harcèlement sexuel ou de discrimination soit présumée être un congédiement illégal pour les fins des recours prévus à la loi.

Le travail à temps partiel. Alors, là-dessus, le gouvernement mentionnait dans la présentation de i'avant-projet de loi son ouverture quant à des propositions qui pourraient concerner l'amélioration des conditions de travail à temps partiel. Nous tenons à souligner que certaines des propositions soumises à d'autres chapitres, comme la réduction des heures de travail, par exemple, pourraient avoir un impact bénéfique à travers un meilleur partage du travail. Nous ne pouvons cependant discuter de l'ensemble de cette problématique dans le cadre de ce mémoire.

Le travail de gardiennage d'enfants. Nous pensons que la décision de resserrer les définitions de la loi de manière à éviter une exclusion systématique des domestiques lorsqu'il y a en partie garde d'enfants est une heureuse initiative. Il faut cependant constater comme société l'aberration de la situation actuelle: II est normal de bénéficier du salaire minimum pour laver les planchers, mais pas pour garder des enfants. Cependant, on est conscientes que souvent, c'est une nécessité qui amène les femmes à ça. Ce sont des femmes à faible revenu qui doivent exploiter d'autres femmes à faible revenu pour s'en sortir. On a déjà fait part l'année dernière, lors d'un mémoire sur les services de garde, des nécessités de développer plus de services de garde dans ce sens-là et de nouvelles formes qui pourraient aussi être subventionnées par l'État.

Pour ce qui est de l'équité salariale, on sait pertinemment que le principe est garanti par la Charte des droits du Québec, mais que cette protection s'avère passablement inefficace puisque le fardeau de la preuve repose sur le dos des salariés et non sur celui de l'employeur. Nous savons aussi qu'il serait inutile de faire inscrire encore une fois un principe dans une loi qui n'aurait pas de dents pour le faire respecter. Nous ne demandons pas d'inscrire le principe de l'équité salariale dans la Loi sur les normes du travail, mais nous profitons de l'occasion pour souligner au législateur que le Québec est loin d'être à l'avant-garde dans ce domaine pour ne pas dire qu'il est maintenant un peu arriéré. Il est difficile de croire en la bonne foi d'un gouvernement qui ne connaît que l'immobilisme en ce qui concerne le droit à l'égalité de ses concitoyennes. Une loi pro active sur l'équité salariale nous semble à l'heure actuelle indispensable pour que les travailleuses québécoises puissent bénéficier, comme leurs consoeurs d'autres provinces canadiennes, d'un juste salaire.

En conclusion, nous connaissons d'emblée les principaux arguments qui seront utilisés à rencontre de nos recommandations: coûts pour l'État, augmentation des coûts de main-d'oeuvre, impact sur la compétitivité des entreprises, etc. Non seulement les connaissons-nous, mais nous savons aussi que ces arguments soulèvent beaucoup plus de questions qu'ils n'apportent de solutions, lis sont depuis plusieurs années le sauf-conduit de l'inaction et l'excuse idéale pour ne rien faire.

Il nous faut mettre ces coûts en perspec-

ttve, les comparer, évaluer sérieusement l'équilibre de la balance entre les coûts de l'action et ceux de l'inaction. Les coûts d'une intervention efficace pour relever le taux de la natalité sont-ils vraiment si élevés en regard des bénéfices? Les coûts du partage du travail sont-ils plus importants que ceux du chômage chronique que connaît le Québec? Et surtout, les coûts à court terme ne sont-ils pas, somme toute, beaucoup moins élevés que les coûts à long terme de la dénatalité?

Les coûts pour l'État de 25 % du programme de remplacement du revenu pour responsabilités familiales représentent des sommes annuelles d'au plus 100 000 000 $ ou 150 000 000 $. De tels montants ne paraissent pourtant pas excessifs quand il s'agit de les donner en subventions aux entreprises pour la recherche ou pour l'emploi. Dans de telles circonstances, nos gouvernements croient que la dépense vaut bien l'objectif poursuivi de santé économique et de création d'emplois. L'objectif poursuivi ici est tout aussi fondamental. Il s'agit non seulement de la santé de l'économie, mais de la santé de la société québécoise et de sa survie. Pour les entreprises, l'investissement représente quelques centaines de millions de dollars, c'est un fait. Mais combien leur coûtera à moyen et à long terme la baisse de la natalité, la baisse de la consommation, l'augmentation du chômage, l'augmentation des coûts de santé, le ralentissement de la construction, etc.? D'ailleurs, l'effet d'une telle augmentation des coûts de main-d'oeuvre doit être questionné sérieusement. Les pays, que ce soit la Suède ou la France, qui ont déjà fait leur choix d'assumer leur part dans le renouvellement de leur population ne semblent pas s'en porter plus mal. Leurs entreprises demeurent compétitives sur la scène internationale et leur économie semble en aussi bonne santé sinon meilleure que celle du Québec.

Il ne suffit pas de dire: Faites des enfants, le pays en a besoin. Les femmes et les parents en général n'acceptent plus d'être les seuls à s'appauvrir, les seuls à courir et les seuls à renoncer à des projets. Toutes les composantes de la société doivent prendre leurs responsabilités, y compris les entreprises qui bénéficieront, elles aussi, d'une hausse du taux de natalité. Et on concluait en vous donnant certains chiffres qui ont été indiqués dans le documentaire "Disparaître": à revenu inférieur, les Français ont un meilleur niveau de vie que les familles québécoises, compte tenu des mesures.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre présentation. Il nous restera une vingtaine de minutes pour échanger certains propos. Une dizaine de minutes, Mme la ministre, et, de ce côté-ci, la même chose.

Mme Trépanier: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue. Vous avez fait un survol de tous les points. Votre mémoire est très bien présenté. Mes collègues ont manifesté l'intérêt de vous poser plusieurs questions. Alors, je reviendrai uniquement sur un point que vous avez été les seules à soulever de tous les groupes qui présentent des mémoires. C'est au sujet du harcèlement sexuel, de la discrimination. Vous savez que dans la Charte des droits, c'est là qu'on définit le harcèlement. Vous trouvez intéressant et nécessaire qu'on l'insère également dans la Loi sur les normes du travail. Quels avantages y voyez-vous? Pour mettre plus de précision, pour avoir... Vous partez de recours plus faciles.

Mme Gosselin: C'est pour tenter d'avoir des recours plus faciles et aussi pour préciser que nous voulons un milieu de travail exempt de harcèlement sexuel. La charte est une loi générale, globale, qui fonctionne sur plaintes individuelles si on est victime de harcèlement, mais il n'y a aucune loi québécoise qui garantit aux travailleuses quelque chose qui est plus large et plus englobant, qui spécifierait vraiment les termes du harcèlement sexuel. Parce que les femmes qui en sont victimes, d'abord, les recours à la commission des droits, il faut savoir que ça prend facilement deux à trois ans, une plainte de harcèlement sexuel, avant que ça ne débouche sur quelque chose; c'est plus décourageant qu'autre chose, et les femmes le supportent. Mais il n'y a rien, nulle part, qui dit que c'est de la responsabilité de l'employeur d'assumer un milieu de travail exempt de harcèlement sexuel. Et ça, on pense que c'est essentiel.

Mme Trépanier: Merci, madame.

La Présidente (Mme Marois): M. le député de Fabre, s'il vous plaît.

M. Joly: Merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux que Mme la ministre puisse nous consentir quelques minutes, surtout quand on sent qu'il y a eu, quand même, un travail de préparation assez sérieux. Mais je dois aussi dire qu'on retrouve dans votre mémoire des choses qu'on a déjà, peut-être, entendues de certains autres organismes, tel que, je pense, le Regroupement pour des congés de maternité et parentaux, et tout ça.

Mais j'aimerais quand même revenir, moi, à votre première demande, qui se situe encore... Et il y en a plusieurs qui reviennent avec ça, fixer le salaire minimum au seuil de la pauvreté. Quoique dans votre présentation, Mme Gosselin, je ne peux pas dire qu'il y avait de l'agressivité, mais il semblait y avoir des convictions profondes sur ce que vous étiez pour avoir comme réponse, à savoir que vous disiez que vous connaissiez d'emblée, en fait, tout ce qu'on pourrait invoquer. Mais je pense qu'on se doit de regarder une situation telle que celle qu'on présente aujourd'hui, toujours dans sa globalité,

parce que si on la sort et qu'on l'analyse juste sur une base très personnelle, et bien c'est sûr que tout ça, je pense, ça a du bon sens. Mais il faut quand même considérer que si on veut donner un salaire minimum qui est toujours, aussi, en regard avec ce qui se fait ailleurs, parce que si, à l'intérieur du Canada, on s'isole et qu'on ne devient plus compétiteurs, bien, à ce moment-là, c'est bien certain qu'on va produire, mais notre produit va demeurer sur la tablette, Alors partant de là, ça crée un problème à l'inverse. Et de ça, je pense que vous êtes conscients et conscientes. Alors c'est pour ça que je me dois quand même de vous souligner qu'entre 1981 et 1986, le salaire minimum est demeuré le même. En 1986, on l'a augmenté de 8 %; en 1987, de 5 %; en 1988, de 4 %, et en 1989 de 6 %. Avec la proposition que vous faites, vous suggérez qu'on l'augmente encore de 13 % actuellement. Alors, je pense qu'on s'est, je n'aime pas le mot, "gearé", mais qu'on s'est ajusté un peu sur ce que l'Ontario fait, et que tout le monde s'accorde à dire que l'Ontario, c'est notre compétiteur naturel. Alors si vous nous demandez d'augmenter de 13 % et de tomber à 5,65 $, quelles sont les conséquences que vous entrevoyez?

Mme Gosselin: D'abord, il faut savoir si le salaire minimum s'applique vraiment tant que ça dans l'industrie. Je ne vous dis pas que ça n'existe pas dans certaines petites PME, mais on le retrouve beaucoup plus dans le domaine des services, où c'est principalement nous, en termes de Québécoises et de Québécois, en termes de restauration et tout ça... Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas une question de tourisme aussi qui entre en ligne de compte, mais ce n'est pas tant dans l'industrie et dans la production qu'on retrouve les gens au salaire minimum, comme tel.

Il y a aussi le fait que c'est désincitatif. Quand vous êtes à un salaire qui ne respecte même pas le seuil minimal de la pauvreté, vous avez beaucoup plus de gens qui, plutôt que d'aller travailler, vont choisir, en tout cas, peut-être de se cultiver un peu par eux-mêmes ou de demeurer chez eux et de ne pas avoir de charge de travail. Surtout quand vous pensez aux gens qui ont de jeunes enfants. Pour chaque dollar gagné, quand vous quittez l'aide sociale pour entrer au salaire minimum, il y a 0,80 $ qui restent à l'État comme tel dans différents programmes et différentes mesures. On serait, à la limite, prêts à accepter que cet étalement-là puisse se faire sur trois ans. Parce qu'on sait que, peut-être, d'une année à l'autre, ça peut changer. Mais ce qu'on voudrait à ce moment-là, et ça c'est notre contre-proposition, c'est qu'au 1er janvier 1991 ce soit ajusté à 10 % du seuil minimum de pauvreté, au 1er janvier 1992, 5 % et, au 1er janvier 1993, rejoindre le seuil de pauvreté. C'est sûr que ce n'est pas parce qu'il y a eu des retards pendant certaines années que ces gens-là ont à assumer seuls maintenant ce fardeau-là. On vous rappelle que ce sont des femmes à 70 %, que ce sont des travailleuses qui sont au salaire minimum et quand on vous demande aussi une proposition d'équité salariale, c'est intimement lié à cela.

M. Joly: Je suis conscient, madame, des points que vous apportez et je pense que nous en sommes tous conscients, d'ailleurs. C'est ce qui fait que l'échange, comme ça, peut nous permettre d'avoir, peut-être, des points de vue élargis et c'est ce qui fait que, suite à ces commissions parlementaires, vous voyez des projets de loi qui ne sont peut-être pas tout à fait dessinés comme chacun de vous aimeriez les voir, mais il faut toujours quand même respecter un peu l'ensemble des points dont je vous faisais mention et qu'il faut prendre en considération.

Dans votre mémoire aussi, vous parlez de rendre le temps supplémentaire volontaire, mais avec une petite parenthèse qui dit: Sauf exception. Vous faites allusion à quoi quand vous parlez d'exception? (12 h 45)

Mme Gosselin: On veut parler des cas de force majeure qui mettraient en cause la santé et sécurité s'il y a un ou des bris d'équipement. Il peut arriver, effectivement, qu'il y ait un bris d'équipement dans une entreprise, quelque chose, où il faut, effectivement, protéger immédiatement les biens de l'entreprise contre une détérioration plus grande et ça peut être pour la santé. C'est sûr qu'à ce moment-là, l'employeur n'a pas le temps de se retourner et de demander; il faut fonctionner. Mais dans les cas normaux, si on pense, par exemple, beaucoup où ça s'utilise dans les commerces et des choses comme ça, ça peut, normalement, se prévoir et je suis persuadée qu'il y a des gens qui vont y aller de façon volontaire. Pensez juste quand il y a eu le projet d'ouverture des commerces, avant que l'Ontario remette ça aux municipalités, on disait: On va demander aux gens, sous forme volontaire, de travailler les fins de semaine. Il semblait qu'il y en avait. On en trouve des personnes pour ça, habituellement. Mais c'est de ne pas forcer les gens qui ont des charges familiales de devoir en faire, mais en tenant compte, cependant, des problèmes majeurs qui pourraient survenir.

M. Joly: Est-ce que vous verriez dans les exceptions, en fait, parce qu'il faut toujours penser à l'employeur qui a quand même de la difficulté à administrer ces formules-là... Il y a un quart de travail qui en remplace un autre et il y a un employé qui ne se présente pas. Est-ce qu'à ce moment-là vous verriez ça un peu comme étant un état majeur où ça pourrait justifier un employeur de demander et d'insister pour avoir du temps supplémentaire pour une heure ou pour deux heures?

Mme Gosselin: Ça dépend du quart de travail et du type d'emploi. Quand on vous dit de protéger la santé et la sécurité des individus, c'est plus en regard de ça qu'on le voit, mais, habituellement, quand il y a une demande pour faire du temps supplémentaire, et je peux vous répondre plus particulièrement pour la connaissance que j'ai de ma propre organisation syndicale, c'est extrêmement rare que l'employeur ne trouve pas des gens qui sont volontaires parce qu'ils veulent se ramasser soit de l'argent ou du temps pour prolonger leurs vacances ou prolonger d'autres types de congé. À toutes fins pratiques, c'est rare que vous ne trouviez pas de personnes pour le faire.

M. Joly: Où avez-vous pris, en fait, la règle pour en arriver à dire: Accordez quatre semaines de vacances après un an de service? Quatre semaines de vacances après un an de service; et les quatre semaines et un an. Est-ce que vous vous inspirez de ce qui se passe dans d'autres pays ou de ce qui se passe ailleurs?

Mme Gosselin: La loi française est comme ça depuis 1936. Ça a été ajouté à cinq semaines en 1982, ça fait huit ans. C'est ce qui se vit actuellement dans les secteurs public et parapu-blic. Nous estimons que c'est un minimum pour être capable de se reposer et de se ressourcer, parce que travailler 50 semaines - on vous a dit qu'on présentait ça principalement en regard des gens qui ont des enfants - et avoir uniquement deux semaines de congé, je pense que ce n'est même pas productif pour l'employeur à moyen terme, parce que vous avez des gens épuisés et vous allez les payer par absentéisme, possiblement pour d'autres congés et d'autres types de mesures.

M. Joly: Remarquez bien que je ne trouve pas ça démesuré. C'est parce que je regardais General Motors qui disait: Exiger six mois de travail pour avoir droit à une indemnité de vacances. Partant de là, je pense...

mme gosselin: en fait, c'est sur le même principe, c'est au prorata du temps travaillé. si la personne a travaillé six mois, c'est deux semaines.

Une voix: Mais, en France, les cinq semaines, c'est après combien d'années de service?

La Présidente (Mme Marois): Je pense que M. le député... Oui, madame.

Mme Gosselin: Un an Une voix: Un an?

M. Marcil: C'est pour tout le monde. Quand tu vas en vacances en août, tu te ramasses sur les plages...

La Présidente (Mme Marois): M le député de Salaberry-Soulanges.

M. Joly: Je n'avais pas terminé, Mme la Présidente. Il me restait une petite sous-question.

La Présidente (Mme Marois): Ça ne me fait rien. J'aimerais que vous vous entendiez avec votre collègue. D'accord?

M. Joly: On va s'entendre. La dernière question: Imposer immédiatement et progressivement une cotisation aux employeurs concernant le programme de remplacement du revenu pour obligation parentale. Imposer aux employeurs. Vous semblez différer d'opinions - en tout cas, la manière dont vous le présentez - avec l'organisme qui vous précédait, à savoir qu'on favorisait un partenariat à trois: l'employé, l'employeur et l'État. J'aimerais que vous élaboriez deux petites minutes.

Mme Gosselin: Pour les motifs suivants, on vous a proposé un partenariat aussi qui est de 50 % par les employeurs, 25 % par l'État et 25 % par les travailleurs et travailleuses. Pour ce qui est des travailleurs et des travailleuses, ils le paient déjà en partie par le Régime d'assurance-chômage; c'est en attendant. Comme je vous dis, c'est une mesure transitoire au programme. Pour ce qui est de l'État, il le paye déjà par le complément, ce qu'il verse aux travailleuses des secteurs public et parapublic, travailleuses principalement et à certains travailleurs pour les congés de paternité. Pour le reste, c'est pour permettre de mettre en place une caisse pour pouvoir assumer le paiement de ces congés sur une période X.

M. Joly: Vous voyez l'administration confiée à l'employeur entièrement et...

Mme Gosselin: Non, c'est une caisse d'État, ce qu'on vous suggère. En ce sens, l'employeur, pour ne pas être pris à payer - c'est vrai que c'est fastidieux, tous les jours, une journée ici et là, le congé de paternité - transmettrait à l'organisme d'administration une facture à la fin de l'année pour ce qui est des congés de pater nité et des congés pour responsabilités parentales. Dans le cas du congé de maternité, cependant, qui est de 20 semaines, c'est l'organisme qui prend la relève tout de suite.

M. Joly: Merci.

La Présidente (Mme Marois): M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Marcil: Très rapidement, parce que je ne

voudrais pas prendre du temps de madame. Dans tous les mémoires qu'on a vus jusqu'à maintenant, la plupart des propositions se ressemblent en général, sauf qu'il y a des points particuliers. Vous avez parlé du harcèlement sexuel, je pense, qui est un élément important. Il y a un autre point sur lequel la plupart des mémoires oublient ou n'ont pas tellement développé, c'est le temps partiel. Je sais qu'au niveau de la réforme de l'avant-projet de loi, s'il y a un élément qui est un peu absent de l'avant-projet de loi, probablement parce qu'on attend des suggestions ou des recommandations, c'est l'organisation du temps partiel. Vous dites que ça semble être bien difficile d'en parler. Y a-t-il une raison?

Mme Gosselin: Pas vraiment. C'est que, cette fois-ci, on a axé notre mémoire sur d'autres choses parce qu'on a déjà présenté des mémoires sur la réduction du temps de travail et sur le temps partiel. Notamment, au niveau du temps partiel, notre position est de se dire qu'il faut arrêter de parler, entre autres, pour les avantages sociaux de prorata, au niveau des avantages sociaux, qu'il faut revoir d'autres politiques pour assurer à l'ensemble - ça, nous l'avons déjà d'ailleurs développé dans d'autres mémoires... Cette fois-ci, comme c'était beaucoup les droits parentaux, on l'a axé là-dessus, mais notre position, quant à nous, c'est de revoir les principes de prorata. Il faudrait peut-être fouiller plus la question, l'étudier plus dans le cadre d'un projet de loi pour faire des propositions en ce sens: Comment ça pourrait s'appliquer au niveau des avantages sociaux et de la sécurité d'emploi. Entre autres, quand on vous parle d'un an de calendrier pour congédiement sans cause juste et raisonnable, c'est justement pour prévoir les conditions des travailleuses et des travailleurs à temps partiel, où on ne veut pas que ce soit le temps accumulé, parce que quelqu'un qui travaille deux jours semaines, ça va prendre deux ans et demi. C'est pour ça qu'on a parlé de calendrier, entre autres.

M. Marcil: Merci.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le député. Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Mme Gosselin et vous qui l'accompagnez, je veux d'abord vous dire mon admiration pour l'Intersyndicale des hommes. J'espère toujours... Des femmes.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: C'est un gros lapsus.

Une voix: Ça n'existe pas.

Mme Harel: Justement, j'allais vous dire, ce qui est intéressant, c'est que ce soient des femmes qui aient réussi à transcender leur organisation syndicale pour réaliser l'Intersyndicale des femmes et qu'il faut en espérer certainement autant pour qu'un jour il y ait une intersyndicale des organisations syndicales elles-mêmes.

Vous savez, Mme Gosselin, en vous voyant ce matin, je vous ai dit: Alors, le quatrième s'en vient parce que, l'an dernier, lors des travaux de la commission parlementaire sur les services de garde, vous aviez mis à la disposition des membres de la commission votre expertise sur les services de garde, compte tenu de vos trois enfants, et, là, vous mettez à notre disposition votre expertise en matière de congés de maternité et parentaux.

D'abord, le travail à temps partiel. Ne vous en faites pas parce qu'il y a un mémoire extrêmement fouillé là-dessus, celui du CIAFT - et on l'a reçu ce matin - et le Conseil du statut de la femme avait déjà, hier, assez abondamment parié de cette question. Sur la question du harcèlement sexuel, la CEQ en a également beaucoup parlé hier et M. Johnston a, notamment, fait valoir la nécessité d'introduire, dans la loi sur les normes, les dispositions concernant également les motifs interdits de discrimination dans la Charte des droits de même que la question du harcèlement, pour des raisons d'applicabilité, puisque la charte, finalement, ne donne pas un recours devant le commissaire du travail et ne donne pas un recours devant la Commission des normes, et qu'il est peut-être souhaitable qu'il y ait de tels recours, ce qui, de toute façon permet à la Commission des droits de vaquer à d'autres tâches aussi prioritaires dans d'autres milieux, mais que le milieu du travail ne peut pas se soustraire, finalement, à ses responsabilités dans ces domaines.

Je vous remercie pour l'annexe 2 dans laquelle vous publiez la disposition du Code canadien du travail concernant le harcèlement sexuel. Ça peut certainement être utile pour la suite de nos travaux. Je veux vous demander si vous en faites une règle générale parce que, dans votre mémoire, vous dites, à un moment donné: Les congés sans traitement ont un effet pervers parce qu'ils ne redéfinissent pas les rôles dans la société, compte tenu du fait que les femmes ont toujours un revenu inférieur, à 70 %, à celui des hommes sur le marché du travail et que les congés sans traitement, bien, ce sont les femmes qui les prennent. Est-ce que pour vous, c'est une question de fond qu'il vous semble devoir mettre de côté, les congés sans traitement?

Mme Gosselin: Non, il faut distinguer. On a parlé dans ce cas-là pour les congés courts, les congés pour les soins aux enfants, par exemple, et le congé de paternité qu'on voudrait aussi qui soit payé, parce qu'autement on sait que les gens

ne le prendront pas. On demande, cependant, l'application de deux heures de congé sans traitement suite au congé de maternité ou au congé de paternité. Bien sûr, comme vous l'a dit Mme Hébert qui nous a précédées tout à l'heure, on sait très bien, par l'interprétation de nos conventions collectives, que ce n'est pas tout le monde qui utilise ces congés-là, mais dans certains cas, surtout en cas de naissances rapprochées, pour certaines personnes c'est un besoin qui est nécessaire. En ce sens-là, là-dessus on estime qu'on doit quand même prévoir pour certains cas et pour certains aménagements une possibilité d'un congé sans traitement pouvant aller jusqu'à deux ans suite à la naissance.

Nous sommes cependant plus ou moins d'accord avec la proposition du Conseil du statut de la femme à l'effet de réserver absolument un congé au père pour les motifs suivants. Sur le plan du principe pour le partage des rôles, oui, mais on n'a pas encore refait le marché du travail au Québec et les hommes gagnent encore plus souvent et ce qu'on risque, c'est que les hommes ne le prennent tout simplement pas, comme en Suède d'ailleurs et comme dans d'autres endroits.

Mme Harel: Vous avez des textes là-dessus sur l'expérience de la Suède. Ça nous intéresserait.

Mme Gosselin: J'aurais peut-être quelques petites choses qu'on pourrait vous faire parvenir là-dessus.

Mme Harel:... communiquer peut-être à la commission.

La Présidente (Mme Marois): peut-être, madame, vous pourriez les déposer à la commmis- sion et on se chargerait, nous, de les faire parvenir aux collègues.

Mme Gosselin: Oui, on va s'en occuper. Ce qu'on risque, c'est qu'il n'y ait qu'une partie, en fait, que ce ne soit que les femmes. Il y a aussi la question qu'on ne peut forcer des gens dépendants de leur travail. Notre milieu n'est pas encore changé. Les hommes se retrouvent beaucoup plus dans des emplois de type compétitivité, dans les banques, dans des entreprises comme ça, où il va être très difficile par la pression ou le travail à commissions de pouvoir, dans les faits, prendre ce congé-là. Il y a quelques femmes... Je vais vous donner mon exemple: avec mon quatrième qui s'en vient, soit dit en passant, si je n'avais pas eu de congé de maternité payé, je ne me serais pas rendue là, je n'aurais pas pu l'assumer. J'ai un travail dans une organisation syndicale; je ne peux pas en prendre de congé sans solde; je ne peux pas m'absenter longtemps. C'est mon conjoint qui va devoir le faire. Mais s'il y avait un congé nécessairement pour moi, je ne pourrais pas le prendre plus. C'est un cas individuel. Habituellement, ce sont les hommes qui le vivent, mais ce sont des choses dont il faut tenir compte.

Mme Harel: Ah, vous pensez que ça devrait être interchangeable homme-femme?

Mme Gosselin: Interchangeable homme-femme.

Mme Harel: Ah, ce n'est pas bête, ça.

Mme Gosselin: Je ne vous dis pas que ce ne sera pas principalement les femmes, mais, si on a une belle politique d'équité salariale, si on a une loi proactive et que les femmes arrivent au même revenu, puis insèrent après les programmes d'accès à l'égalité les mêmes emplois, je suis bien prête à revoir ça dans cinq ans pour qu'il y ait un partage plus grand. C'est simplement pour tenir compte des caractéristiques actuelles du marché du travail.

Mme Harel: C'est intéressant parce que Mme Marois, qui est rentrée une semaine après son accouchement, aurait peut-être pu suggérer...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Très certainement.

Mme Harel:... son conjoint.

La Présidente (Mme Marois): D'abord, en politique, ce n'est pas nécessairement très facile, non plus, de laisser. Ha, ha, ha!

Mme Harel: C'est en général les femmes qui en réclament des congés de maternité qui peuvent le moins les prendre pour elles-mêmes, étant donné les emplois qu'elles occupent, qui en réclament pour les autres.

Mme Gosselin: Oui.

Mme Harel: Vous avez certainement, en tout cas, été le groupe qui nous avez soumis le mémoire le plus fouillé sur le temps supplémentaire. Sur cet aspect-là, vous dites et je dois bien comprendre que vous proposez une journée maximale...

Mme Gosselin: Maximale de huit heures.

Mme Harel: Oui, ce n'est pas la journée normale. On se comprend. C'est bien ça? On sait ce que les mots veulent dire.

Mme Gosselin: Oui.

Mme Harel: C'est-à-dire qu'il a droit de refuser de faire du temps supplémentaire, mais le temps supplémentaire est payé après la semaine normale de 40 heures.

Mme Gosselin: De 40 heures et après les huit heures.

Mme Harel: Après les huit heures? Mme Gosselin: Aussi.

Mme Harel: Donc, pour vous, la journée maximale, ça coïncide avec la journée normale.

Mme Gosselin: La journée normale.

Mme Harel: Bon. Puis, vous nous proposez que, dans la loi, il y ait... Ça, c'est vraiment un renversement, je pense. Étant donné que vous êtes dans une intersyndicale, vous connaissez, évidemment, le sens de ces dispositions législatives. Il y a un renversement où, finalement, c'est l'employeur qui, dans un recours, va devoir démontrer que, oui, c'était un cas de force majeure et que, oui, il y avait des bris d'équipement.

Mme Gosselin: Tout à fait.

Mme Harel: C'est ça. Alors, vous souhaitez que, dans la loi, il y ait maintenant des dispositions qui déterminent les exceptions...

Mme Gosselin: C'est ça.

Mme Harel: ...avec les conséquences que ça pourra avoir. Par exemple, dans l'actuelle négociation avec les employés d'entretien de la STCUM, l'enjeu, c'est le temps supplémentaire, n'est-ce pas?

Mme Gosselin: En bonne partie, oui.

Mme Harel: En bonne partie, dit-on, parce que le ministre des Transports, hier, a parlé d'une loi spéciale et je me demandais ce matin: Est-ce qu'ils peuvent faire une loi spéciale pour obliger les travailleurs à faire du temps supplémentaire? Parce que tout ce qu'ils ne font pas, c'est le temps supplémentaire.

Mme Gosselin: C'est un peu comme le conflit des infirmières. Quand on est rendu dans un système où le système ne fonctionne pas de façon normale, entre guillemets, sans surtemps, je pense qu'il faut se poser des questions sur l'organisation globale du système, sérieusement.

Mme Harel: Oui, parce qu'on nous dit que, chaque jour, il y a 300 autobus qui sont mis de côté, non utilisés. Mais si c'est régulier, comment se fait-il qu'ils font du temps supplémen- taire pour les mettre en circulation? Alors, on verra de toute façon. Mais le temps supplémentaire, c'est l'enjeu, d'une certaine façon. Il y en a d'autres, le congé de maladie et bien d'autres choses. Mais ce sera certainement un enjeu d'actualité, parce qu'il y a beaucoup de conflits de travail qui, maintenant, se font sur la question du temps supplémentaire. Est-ce que j'ai du temps supplémentaire?

La Présidente (Mme Marois): Vous avez encore une minute, Mme la députée.

Mme Harel: Une minute seulement. Bien. Alors, tout simplement pour vous remercier et vous dire combien les travaux que vous soumettez, l'Intersyndicale des femmes, sont fouillés et combien c'est une contribution importante pour la commission.

Mme Gosselin: On vous remercie. On va vous déposer, d'ailleurs, quelques feuillets tout de suite sur les ajouts supplémentaires.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci de votre présentation et de votre contribution à la commission. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 11)

La Présidente (Mme Marois): La commission des affaires sociales va reprendre ses travaux. Nous entendrons trois groupes cet après-midi. J'inviterais les personnes représentant le premier groupe à venir prendre place à l'avant, s'il vous plaît, soit la Confédération des organismes familiaux du Québec.

Je vais demander à la présidente, d'une part, de se présenter aux membres de la commission et de présenter les personnes qui l'accompagnent. Par la suite, vous aurez une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et cette présentation sera suivie par un échange et des questions de la part des membres de la commission. Bienvenue.

Confédération des organismes familiaux du Québec

Mme Godbout-Perreault (Pierrette): Bonjour, Mme la Présidente, Mmes et MM. les députés. Je suis accompagnée, pour cette commission parlementaire, de Diane Germain, qui est secrétaire générale de fa COFAQ, et de Pierre Brassard, qui est un agent de recherche.

J'avais l'occasion, la semaine dernière, devant cette commission, de venir défendre un mémoire que la COFAQ avait présenté, où on demandait qu'on reconnaisse les organismes familiaux, que l'on finance leurs structures, que

l'on tienne compte davantage de la famille dans les projets de loi, qu'on parle de prévention. Alors, aujourd'hui, nous venons faire une des actions pour lesquelles nous demandons qu'on finance nos structures.

Je vous demanderais aussi, s'il était possible - parce que nous avons pensé de vous offrir une présentation un peu plus dynamique - que, lorsque Mme Germain et M. Brassard interviendront, ils puissent intervenir simultanément. Est-ce que ça serait possible?

La Présidente (Mme Marois): C'est tout à fait possible, madame.

Mme Godbout-Perreault: Très bien. Alors, je précise, pour ceux qui ne le sauraient pas, que la COFAQ regroupe des fédérations provinciales et régionales d'organismes familiaux, des associations locales et régionales de familles qui sont implantées dans tout le Québec.

La COFAQ est née en 1971 du désir des organismes familiaux de se doter d'une structure démocratique de représentation qui puisse être le porte-parole des familles. C'est donc au nom des familles que nous venons vous parler de ce projet de loi et nous avons aussi permis aux familles et aux organismes de travailler ensemble à l'élaboration d'un projet de société que nous nommons politique familiale globale.

Les principes de cette politique familiale globale dont nous faisons la promotion sont: la reconnaissance du rôle social de la famille, la reconnaissance des parents comme premiers responsables des enfants, la reconnaissance de l'enfant comme personne unique à part entière, la reconnaissance de l'égalité des adultes parents à l'intérieur de la famille et le respect des choix libres des personnes quant à leur mode de vie familiale. Et puisque les familles sont une composante essentielle de la société, les enfants, un enrichissement collectif indéniable, l'État doit être le maître d'oeuvre de cette politique familiale et la collectivité, s'engager à tenir compte des familles.

Parler du monde du travail pour la COFAQ, ce n'est pas un début. Dès 1980, parce que nous avons publié notre manifeste "Pour la défense de la nouvelle famille", nous demandions à l'État de reconnaître l'acte social d'avoir un enfant en accordant à la famille des droits fondamentaux dans tous les aspects de sa réalité En 1984, nous avions un congrès dont un des ateliers avait comme thème "Famille et travail". En 1985, les membres des organismes ont souligné l'importance des responsabilités parentales dans la commission de consultation sur la politique familiale et, en 1987, notre assemblée générale a entériné un document qui s'intitulait "Le monde du travail et les responsabilités parentales". Au cours de 1989, il y a eu plusieurs activités. Nous avons joint le regroupement pour l«s congés do maternité et les congés parentaux. Nous avons aussi publié un document qui portait le nom: "Pour que les parents puissent mieux concilier monde du travail et responsabilités parentales". Nous avons rencontré le Conseil du statut de la femme dans le cadre de sa tournée de consultation et nous avons écrit un mémoire, formé un comité qui a écrit un mémoire, que nous déposons devant vous aujourd'hui. Maintenant, il y a aussi eu entre-temps l'avant-projet de loi, qui a été rendu public en juin dernier, et la publication du document "Familles en tête", qui parle aussi du travail.

Premièrement, l'énoncé de politique parle aussi du champ d'application de la politique familiale. On dit que, dans le domaine du travail, on doit viser à faciliter la conciliation des rôles de parents et de travailleurs et de travailleuses. Donc, c'est à ce titre que nous venons faire part au gouvernement de la position des familles quant aux congés parentaux et familiaux. C'est donc par rapport à ce volet du projet de loi que nous interviendrons quant aux positions que nous vous demandons d'ajouter pour tenir compte vraiment, dans notre société, de la place que devraient occuper les familles et tenir compte du rôle que doivent tenter d'assumer les parents quand ils sont aussi sur le marché du travail. C'est Mme Germain et M. Brassard qui vous les présenteront.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

Mme Germain (Diane): Est-ce que l'autre micro pourrait être allumé simultanément?

La Présidente (Mme Marois): ça fonctionne, vous n'avez pas à vous en préoccuper, dès que vous commencez à intervenir les micros prennent bien vos voix.

Mme Germain: D'accord. Donc, pour introduire très brièvement la dimension travail et famille, peut-être que plusieurs d'entre vous avez des enfants, en tout cas, c'est mon cas. Donc, nul besoin d'insister sur la dimension de la dose de stress importante qu'injecte le travail dans la vie familiale. Nul besoin de s'attarder non plus sur la rigidité des horaires, des normes, des conditions de travail, coinçant littéralement les parents entre leurs responsabilités familiales et professionnelles. Nul besoin, également, de mentionner que beaucoup d'onfants sont laissés pour compte et plus ou moins soignés lorsqu'ils ne sont pas assez malades, ou lorsqu'ils sont assez grands pour se passer de papa et maman à la maison. Autant de conditions, la liste est longue, quand on énumère les conséquences du monde du travail sur la famille.

La Présidente (Mme Marois): Si vous voyez les membres de la commission s'interroger mutuollomonl. c'est quo chacun so (iomundo combien d'enfants... Ha, ha, ha!

Mme Germain: Combien d'enfants...

La Présidente (mme marois): non, combien d'enfants ils ont, là. c'est vous qui avez suscité ce questionnement. alors les gens disent: bien moi cinq, moi trois, moi quatre.

Mme Germain: Ah! bien, tiens! C'est intéressant de se le dire.

Mme Trépanier: La moyenne est pas mal.

La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha! La moyenne est assez élevée, je pense.

Mme Germain: Oui? Donc chacun de nous avons une expérience personnelle et ça tombe dans un terrain sensible que cette dimension travail versus famille. Effectivement, c'est un lien quotidien que les gens ont à vivre entre le travail et la famille. C'est pourquoi, étant donné que c'est une dimension prioritaire, entre autres, la politique familiale, nous considérons que l'État québécois doit être maître d'oeuvre d'une politique de congés parentaux.

Dans un premier temps, nous voulons mettre en lumière que les mesures et programmes existant actuellement sont morcelés entre deux paliers de gouvernement: le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. En plus, au niveau du gouvernement provincial, il y a un morcellement à l'intérieur même du gouvernement provincial entre les différents niveaux, que ce soit le versement de l'allocation pour palier la carence lors du congé de maternité, que ce soit au niveau du retrait préventif qui est géré par la CSST, en fait, toutes sortes de mesures qui font que ça alimente un certain éparpillement et que ça ne donne aucune base pour démontrer une volonté réelle de mettre sur pied une politique de congés parentaux. Et cet éparpillement engendre également la fragmentation des moments de vie d'une famille, et non pas le respect de son développement.

Donc, on déplore, entre autres, au niveau de l'avant-projet de loi... On aimerait qu'il y ait une section de l'avant-projet de loi qui parle directement de la dimension parentale et qui mette des mesures qui concernent plus spécifiquement le lien parent-enfant parce qu'on sait très bien que c'est cette dimension, entre autres choses, qui amène énormément d'absences au travail, que c'est cette dimension qui gruge le temps et l'énergie et appeler cela juste un domaine familial fait qu'on met tout dans le même sac et ça n'incite pas l'État à prendre des engagements concrets à l'égard du lien parent-enfant versus le monde du travail.

Entre autres choses, nous considérons que la pierre angulaire de cette préoccupation pour le lien parent-enfant se retrouve au niveau du volet maternité. Non pas que nous disions que la famille repose uniquement sur les épaules des femmes, non, mais nous disons que la pierre angulaire de l'élaboration d'une véritable politique de congés parentaux se situerait, dans un premier temps, dans la récupération du volet maternité au niveau de l'assurance-chômage pour que ce puisse être... Et il y a d'autres groupes qui ont défendu également cette position-là avant nous, mais nous voulons la resouligner parce que, en tant que famille, nous considérons que si le volet maternité n'est pas intégré dans un même régime, ça n'incite pas, encore une fois, l'État à un engagement clair et consistant à l'égard des familles.

C'est dans ce sens que nous recommandons donc, dans la foulée du Conseil du statut de la femme, dans la foulée, également, du Regroupement pour des congés de maternité et parentaux que vous avez entendu ce matin, que soit créé un régime intégré d'assurance parentale.

M. Brassard va vous faire la lecture plus spécifique de nos recommandations qui concernent cette fin de chapitre.

M. Brassard (Pierre): D'accord. En ce qui concerne la création d'un régime d'assurance parentale au Québec, nos recommandations sont les suivantes. Nous recommandons que l'État québécois devienne le maître d'oeuvre d'une politique intégrée et cohérente de congés parentaux. Pour ce faire, évidemment, nous recommandons aussi que le gouvernement rapatrie le volet maternité et, éventuellement, le volet parental avec la réforme de la Loi sur l'assurance-chômage du gouvernement fédéral et, de plus, que le gouvernement injecte les fonds récupérés dans l'infrastructure de contribution tripartite que nous demandons, c'est-à-dire dans le financement du régime éventuel, que les fonds de l'assurance-chômage participent au financement et que le gouvernement mette en place tous les mécanismes pour que l'ensemble des travailleurs et travailleuses de toutes catégories ainsi que leurs employeurs et l'État puissent contribuer adéquatement au financement dudit régime.

De plus, que la Commission des normes du travail, responsable de l'application de la Loi sur les normes du travail, se voit confier un mandat élargi, aussi, de promotion et de défense des droits des travailleurs, en rapport aux congés parentaux. Évidemment, ça dépasse aussi les congés parentaux mais, nous, on recommande là-dessus précisément. Nous recommandons aussi que la Régie des rentes participe à la gestion du programme, c'est-à-dire au prélèvement des cotisations et au paiement des prestations aux travailleurs salariés et travailleuses, que la Loi sur les normes du travail soit amendée pour que les articles traitant des droits parentaux s'appliquent au plus grand nombre possible de travailleurs et travailleuses. On sait qu'actuellement il y a des limitations... Il y a des catégories de travailleurs qui ne sont pas touchés par la Loi

sur les normes du travail, donc nous désirons que son champ d'application soit élargi. En fait, c'est ça au niveau de cette partie de nos recommandations. Si tu veux continuer.

Mme Germain: Plus précisément, en ce qui concerne les congés parentaux dont vous avez entendu parler par d'autres groupes, je veux simplement vous présenter la problématique sous un angle qui est typiquement familial, parce que nous parlons vraiment au nom des familles. En ce qui nous concerne, au niveau des congés parentaux, ce qui justifie largement, au plan social, l'existence d'une telle mesure dans un régime intégré d'assurance parentale, c'est la situation sociale actuelle des familles où elles se retrouvent ni plus ni moins que dans un étau, en ce sens que si on regarde les responsabilités accrues qui retombent sur les épaules des parents et des adultes productifs actuels et même à venir, étant donné le vieillissement de la population et le fait que la population productive va diminuer, les jeunes restent de plus en plus longtemps à la maison. Il n'est pas rare, également, étant donné la désinstitutionnalisation, que les aînés deviennent à la charge des familles. En plus, comme société, comme État, on préconise davantage la natalité. Alors, on voit un petit peu les pressions accrues qui sont sur le dos des familles. Une famille, des adultes n'ont pas le choix de gagner leur vie. C'est une nécessité; donc, on doit aller travailler. Quand on considère, d'une part, ce poids accru et, d'autre part, la nécessité d'aller travailler, on se trouve obligés de donner un support adéquat aux familles dans ce contexte, si on ne veut pas que les gens, en travaillant, y laissent leur peau.

Pour nous, c'est: un plus un égale deux. En ce sens, les congés de maternité demeurent une mesure absolument nécessaire et on préconise que ce soient 20 semaines plutôt que 18 semaines et d'autres groupes l'ont demandé également.

Également, dans la foulée du Conseil du statut de la femme, on demande qu'il y ait une mesure universelle d'ajoutée en ce qui concerne une allocation pour toutes les femmes qui donnent naissance à un enfant au Québec. Je pense qu'hier le Conseil du statut de la femme a dû vous en parler et nous nous joignons à cette même demande et, pour nous, le principe auquel nous adhérons ici est un principe d'égalité entre toutes les femmes qui donnent naissance à un enfant et c'est un principe fondamental en ce qui concerne le respect du choix des modes de vie.

Également, en ce qui concerne le congé de maternité qui se verrait inclus dans le régime d'assurance parentale, nous demandons, dans la foulée d'autres organismes pour travailleurs, comme entre autres les syndicats et le Regroupement pour des congés de maternité et parentaux dont nous faisions partie, que ce soient 10 semaines de contribution et d'emploi continu et non pas 20 semaines qui puissent permettre à la travailleuse, entre autres, d'avoir droit aux prestations du régime d'assurance parentale.

En ce qui a trait à la dimension d'universalité du congé de maternité, là, nous ne parlerions plus de prestations, mais bien d'allocations, puisque c'est donné à toutes les femmes qui accouchent. Alors, en ce qui concerne cette dimension du congé de maternité, M. Brassard va vous faire le résumé des recommandations.

M. Brassard (Pierre): O. K. La COFAQ recommande donc, pour les congés de maternité, que la Loi sur les normes du travail soit amendée pour que le congé de maternité soit porté à 20 semaines sans perte de revenus et accessible à toutes les travailleuses; que 10 semaines consécutives d'emploi effectuées dans l'année précédant la naissance et assurables à l'éventuel régime d'assurance parentale soient requises comme condition d'admissibilité de la travailleuse aux prestations de maternité; ensuite, que le congé de maternité en tant que formule universelle qui s'adresse à toutes les femmes, travailleuses ou non, soit d'une dimension incluse au régime d'assurance parentale; que les allocations de maternité liées à l'universalité du congé de maternité soient versées à toutes les femmes, travailleuses ou non, sans égard à leurs revenus; qu'une partie des fonds actuellement alloués par le gouvernement du Québec aux primes à ta naissance servent à financer la nouvelle allocation de maternité.

Mme Germain: O. K. Maintenant, toujours dans le volet des congés parentaux, il y a la dimension du retrait préventif, c'est inclus dans notre mémoire, mais comme on a peu de temps, on n'insistera pas davantage là-dessus. On va insister davantage sur les congés pour soins d'enfants, mesure dont vous avez probablement entendu parler également par le Regroupement pour des congés de maternité et parentaux et également le Conseil du statut de la femme.

En ce qui nous concerne, en tant que représentants des voix des familles, nous voudrions faire valoir que cette mesure est extrêmement importante, en ce sens qu'elle permet une égalité des conjoints, parce que cette mesure est accessible tant au père qu'à la mère. Je n'insisterai pas sur l'explication de cette mesure, parce que je pense que vous en avez déjà entendu parler, mais nous recommandons que ce soit 16 semaines qui soient des semaines de congé pour soins d'enfants. D'accord? Et qu'il soit accessible au père et à la mère, mais moitié-moitié, c'est-à-dire c'est le principe de non-transférabilité dont le Conseil du statut de la femme vous a probablement fait mention. (15 h 30)

Pour nous, c'est une mesure novatrice et qui est très intéressante parce que c'est une mesure incitative pour les pères et c'est une

mesure aussi qui promeut l'égalité entre les conjoints au niveau des responsabilités parentales. C'est une mesure qui permet aussi d'établir que le milieu du travail soutienne réellement rétablissement de bases stables entre un parent et son enfant.

Dans ce sens, avec les 16 semaines que nous recommandons, le père pourrait prendre 8 semaines et la mère 8 semaines, mais si l'un ou l'autre ne les prend pas, elles ne peuvent pas être récupérées par l'un ou l'autre.

Alors, la recommandation se résume comme suit...

M. Brassard (Pierre): O. K. En ce qui concerne les congés pour soins d'enfants, la COFAQ recommande que toute travailleuse ayant effectué des cotisations au régime d'assurance parentale pendant 10 semaines consécutives d'emploi ait droit à 8 semaines de prestations pour soins d'enfants à la suite de son congé de maternité et aussi que tout travailleur ayant cotisé au régime d'assurance parentale pendant 10 semaines consécutives ait droit aussi à 8 semaines de prestations pour soins d'enfants; que les semaines et les prestations réservées à l'un ou à l'autre parent soient non transférables entre eux; que les semaines et les prestations puissent être touchées à taux réduit si l'employé a été autorisé à prendre son congé parental sous la forme d'une journée ou d'une semaine de travail aménagée.

Mme Germain: Nous aborderions maintenant le volet des congés d'adoption et nous aimerions insister ici parce qu'on croit qu'on est un des seuls organismes a requérir la recommandation suivante: Nous avons lu différentes positions, avis et mémoires et nous avons remarqué que... Enfin, il y en a très peu qui prennent en considération la dimension du nombre de semaines requises par les centres de services sociaux, à savoir, en ce moment, 24 semaines de présence continue d'un des deux parents auprès de l'enfant au moment de l'adoption, ce qui fait que la demande qu'on fait à la présente commission et le volet qu'on aimerait voir inclure dans le nouveau projet de loi sur les normes du travail, c'est qu'on ne sait pas si ça demeurera toujours 24 semaines. Ça, ça peut changer, je crois, avec les services sociaux, mais qu'il y ait une dimension où la loi tienne compte de ce qui est demandé à un parent au niveau des services sociaux et ce qu'on lui donne comme possibilité d'absence et que ce soit, encore là, une absence avec prestations possibles, que ça soit inclus dans le régime d'assurance parentale, mais qu'il y ait un souci de jonction entre les exigences des services sociaux et les possibilités qu'on donne à un salarié ou à une salariée vis-à-vis de ses conditions de travail.

Alors, notre recommandation est la suivante...

M. Brassard (Pierre): Pour le congé d'adoption, il est recommandé par la COFAQ: que la Loi sur les normes du travail soit amendée afin que soit reconnu le congé pour adoption d'enfant (s), accompagné d'un mécanisme d'ajustement de ce congé en conformité avec les exigences des centres de services sociaux; que ce congé s'applique pour l'adoption d'enfant(s) de moins de six ans également accessible au père ou à la mère; de plus, que tout travailleur ou travailleuse qui a accompli au moins 10 semaines d'emploi assurables au régime d'assurance parentale dans l'année précédant l'adoption d'un enfant soit éligible à des prestations, sans perte de revenus et ce, pour la totalité du congé d'adoption.

Mme Germain: II est à noter que, pour nous, cette dimension de 24 semaines de congé d'adoption est distincte du congé pour soins d'enfants. Ça, c'est distinct du congé pour soins d'enfants parce que, sinon, ça fait un nombre de semaines énorme qui surpasse le nombre de semaines auquel une personne pourrait avoir droit, parce qu'elle donne naissance à un enfant. Notre souci est vraiment un souci d'équation entre les services sociaux puis la loi, puis qu'un individu ne se retrouve pas pénalisé parce qu'il adopte et non parce qu'il donne naissance. Voilà.

Maintenant, c'est le volet des visites médicales pendant la grossesse. La logique est très simple. C'est qu'en fait une travailleuse qui est enceinte puisse se prémunir de dispositions lui permettant de s'absenter pour... Nous, notre recommandation, c'est 5 jours ou 10 demi-journées. La logique de ça, c'est qu'une travailleuse enceinte n'ait pas nécessairement à prendre dans sa banque de journées de maladie pour s'absenter, parce qu'il faut qu'elle aille voir son médecin, inévitablement, ou parce qu'elle a un malaise et, en ce sens, amputer sa propre santé quand elle sera vraiment malade.

Donc, vraiment, ce sont des mesures distinctes. Et tout ça va dans le sens d'un État québécois qui supporte réellement les parents dans leur choix de donner naissance à un enfant. Donc, notre recommandation est la suivante...

M. Brassard (Pierre): Que soient accordés 5 jours de congé payés ou 10 demi-journées pour les examens de contrôle et les traitements médicaux reliés à la grossesse.

Mme Germain: Volet congé de paternité. En ce qui nous concerne, nous demandons que l'actuel congé de paternité soit porté à 5 jours rémunérés et 5 jours non rémunérés, lors de la naissance ou de l'adoption d'un enfant. Et la logique de ça, c'est que si, comme État québécois, on supporte la natalité, on veut plus d'enfants, on veut plus de familles nombreuses, eh bien, on peut penser qu'à la suite de la naissance d'un troisième enfant, par exemple, il y

en a deux autres avant qui sont là et qui demandent des soins. Donc, il serait pertinent qu'un père puisse être là pendant 5 jours, ne serait-ce que pour supporter la mère dans ses relevailles et prendre soin des deux autres qui sont présents. Il s'agit d'être cohérents avec les souhaits qu'on a comme société québécoise. Notre recommandation est donc la suivante...

M. Brassard (Pierre): Concernant le congé de paternité, la COFAQ recommande: que la Loi sur les normes du travail soit amendée pour que soit assuré un congé de paternité de 5 jours rémunérés et 5 jours non rémunérés, lors de la naissance ou de l'adoption d'un enfant.

Mme Germain: Maintenant, le volet congés parentaux sans solde. En tant qu'organisme familial, évidemment, nous plaidons en fonction du temps possible et auquel un travailleur ou une travailleuse peut postuler s'il fait le choix de rester plus longtemps avec son enfant. Donc, ce serait une mesure, au niveau des congés parentaux sans solde, également accessible au père ou à la mère, mais, pour nous, on demande que ce soient 2 ans de congés parentaux sans solde. Notre rationnel est évidemment pour que les gens qui décident de le faire puissent se prémunir d'assises stables dans leurs relations éducatives. Notre recommandation est donc la suivante...

M. Brassard (Pierre): En ce qui concerne les congés parentaux sans solde, la COFAQ recommande: que la Loi sur les normes du travail soit amendée de telle sorte que les parents travailleurs et travailleuses puissent se prévaloir d'un congé parental de 2 ans sans solde, selon les modalités suivantes: que ce congé puisse être pris à la suite du congé de maternité, par la mère ou le père, ou les deux en le partageant; ensuite, qu'au terme du congé, la réintégration à l'emploi ou son équivalent soit assurée.

Mme Germain: Une dernière disposition au chapitre des congés parentaux, il s'agit des congés pour responsabilités familiales. On inclut dans ça non seulement la dimension du deuil qui demande inévitablement une absence quand il y a de la mortalité, mais on inclut une dimension élargie des responsabilités familiales en ce sens. Il y a beaucoup de dispositions qui supportent les parents dans la naissance ou l'adoption d'un enfant la première année, à la suite de la naissance d'un enfant, ou la deuxième année, mais les responsabilités familiales ne s'arrêtent pas là. Des fois, on peut avoir un enfant qui est hospitalisé. Parfois aussi, ce sont les soins aux personnes aînées où, dans l'optique de notre société, ça devient de plus en plus fréquent. En ce sens, les responsabilités familiales sont beaucoup plus englobantes que les seuls moments de deuil ou les deux premières années qui suivent la naissance d'un enfant. Alors, c'est cette optique qui nous amène à requérir que ce soient 5 jours de congé sans solde dont un travailleur ou une travailleuse puisse se prémunir pour effectuer ses responsabilités familiales.

Pour les autres volets, je vois qu'on a pas mal fini notre temps d'intervention.

La Présidente (Mme Marois): Oui, vous avez un petit peu dépassé même. Je vous laissais filer parce que je me disais: II reste un ou deux points, si vous pouviez les ramasser en quelques minutes.

Mme Germain: Pour le reste, ce sont les mesures de protection nécessaires en ce qui concerne la réintégration au travail à la suite d'un congé parental de longue durée ou même un congé de maternité. Ça, le Regroupement et le Conseil du statut de la femme vous en ont parlé et on s'inscrit dans la foulée de leurs demandes.

J'aimerais peut-être conclure, finalement... Pour les autres dimensions, il y a aussi d'autres organismes qui les mettent de l'avant. J'aimerais conclure - c'est plus là-dessus que je mettrais les deux petites dernières minutes - que je demande à la présente commission, et je me demande: Est-ce que ce sont toujours les familles, dans le fond, qui doivent se contorsionner dans leur vie quotidienne pour s'ajuster aux vicissitudes du monde du travail? Est-ce que, par le biais d'une législation, par le biais de la réelle volonté politique... Quels sont les engagements que le gouvernement est en mesure de prendre pour soutenir réellement cette faisabilité de travailler et d'être en même temps parent? Et, en ce sens, je vous réfère au plan d'action "Familles en tête", où il y a la phrase suivante qui est fort éloquente et qui dit: "II faut en arriver à ce que les parents et les enfants ne soient plus les victimes de conditions de travail qui, faites sur mesure pour des personnes qui n'ont aucune responsabilité parentale, sont mal adaptées à la situation de ceux et celles qui assument de telles responsabilités." Je demande donc dans quel sens pourraient aller les engagements du gouvernement de manière à soutenir réellement les travailleurs et les travailleuses qui sont aussi parents.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre présentation. J'inviterais maintenant le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle à échanger avec vous.

M. Bourbeau: Avec votre permission, Mme la Présidente, on va laisser ma collègue...

La Présidente (Mme Marois): Certainement.

M. Bourbeau: ...la ministre déléguée à la Condition féminine et à la Famille, le plaisir de poser des questions à nos invités.

La Présidente (Mme Marois): Dix minutes.

Mme Trépanier: Bienvenue aux gens de la COFAQ, un regroupement extrêmement important au niveau des familles. Vous êtes partout sur le territoire québécois. Vous représentez beaucoup de familles et c'est important d'avoir votre position, votre point de vue sur les normes minimales.

Vous nous avez parlé de la politique familiale. Le plan d'action, un volet important concerne les normes minimales du travail. Nous faisons une priorité, cette année, de ce volet-là. C'est le cadre donnant les droits aux uns et aux autres. Il est évident que c'est une première étape dans l'esprit de plusieurs pour arriver plus tard à une prise en charge plus grande par l'État.

Vous avez abordé vraiment les congés parentaux. Vous en avez fait le point principal et l'unique point de votre présentation. Vous faites vôtres la position du Conseil du statut de la femme et celle du Regroupement. Vous nous l'avez dit à quelques reprises. Mais il y a quand même des divergences. Il y a quand même des différences entre les deux positions. L'esprit est le même. Vous parlez de congés parentaux rémunérés. Ça, c'est important. Je pense que c'est ça, l'esprit de ce que vous voulez avancer.

Il y a certains petits points que je voudrais éclaircir avec vous, avant les congés parentaux, concernant les normes en général. Il y a un point. Vous avez parlé de champ d'application que vous vouliez voir élargir. Vous n'avez pas été beaucoup plus loin que ça. La COFAQ travaille au niveau des familles, donc des familles qui se servent très souvent de gardiennes à la maison. Quand vous parlez d'élargissement des normes du travail, est-ce que vous incluez aussi les gardiennes d'enfants? Comment voyez-vous ça? Nous, on voit des problèmes. On a de la difficulté à trouver des solutions dans ce champ d'action là et on compte sur cette consultation pour nous aider à trouver des solutions pertinentes. Est-ce que vous jugez bon d'inclure tout le monde dans la loi des normes, les domestiques et les gardiennes d'enfants? Faites-vous des différences? Faites-vous des exclusions? Comment voyez-vous ça?

Mme Godbout-Perreault: Si on est en lien avec les demandes qu'on fait, c'est que toutes les femmes soient éligibles au régime d'assurance parentale. Donc, si elles sont éligibles, ça veut dire qu'elles ont droit de cotiser.

Mme Trépanier: Là, vous dites qu'elles ont droit à l'assurance parentale...

Mme Godbout-Perreault: Oui.

Mme Trépanier: ...et à l'assurance-matemi-té.

Mme Godbout-Perreault: Oui.

Mme Trépanier: Là, je fais abstraction de ça et je parle des normes minimales du travail. Vous avez dit que vous étiez en accord avec un élargissement des normes minimales du travail. Est-ce que vous pensez que des gardiennes d'enfants devraient être incluses? Le projet des normes minimales veut inclure les domestiques excluant les gens qui gardent les enfants, qui font de la garde exclusive d'enfants.

La Présidente (Mme Marois): Mme Germain ou M. Brassard.

Mme Germain: M. Brassard va répondre. La Présidente (Mme Marois): M. Brassard.

M. Brassard (Pierre): O.K. En fait, dans notre optique, Mme la ministre, c'est qu'on s'était penchés surtout au niveau des congés parentaux comme tels...

Mme Trépanier: Vous n'avez pas du tout discuté...

M. Brassard (Pierre): ...et, en fait, on a repris un peu ce que d'autres organismes, comme le CSF, avançaient dans leurs recommandations...

Mme Trépanier: O.K.

M. Brassard (Pierre): ...comme de quoi il était important que la loi des normes du travail s'adresse au plus grand nombre de travailleurs possible, y incluant certaines catégories, si on prend les femmes dans les entreprises agricoles, les travailleuses domestiques, mais il faut dire qu'on ne s'est pas penchés sur la question des gardiennes dans le détail... (15 h 45)

Mme Trépanier: Spécifiquement.

M. Brassard (pierre): ...spécifiquement, parce que notre optique était d'amener une position sur les congés parentaux, si vous voulez.

Mme Trépanier: O.K. Parfait! Parce que je l'avais vu dans votre mémoire, vous avez repris certaines positions du Conseil. En ce qui concerne la position du Conseil, qui parle et qui veut instaurer l'universalité, une prestation universelle chez toutes les mères, est-ce que vous êtes d'accord avec cette position-là ou si vous voyez plutôt un régime comme celui du Regroupement qui parle moins de prestations universelles pour toutes les femmes qui ont un enfant, même les femmes à la maison? Est-ce que vous pariez des travailleuses, vous autres, ou si vous pariez de tout le monde?

Mme Germain: Non, on parie vraiment, on souscrit vraiment à la...

Mme Trépanier: À la position du Conseil.

Mme Germain:... dimension d'universalité. Pour nous, c'est extrêmement important parce que, dans notre société, et surtout lorsqu'on parle des normes minimales du travail, on parle de productivité économique. Alors, il y a un danger qui est celui d'oublier les femmes qui font un autre choix, qui font le choix - certaines les appellent les travailleuses au foyer, là, je veux dire qu'elles ne travaillent pas à l'extérieur - de travailer à l'intérieur. Elles font un autre choix et elles ont le droit d'être reconnues socialement. Et je crois que cette mesure d'universalité nous semble très intéressante parce qu'elle établit un dénominateur commun entre les femmes qui donnent naissance à un enfant. C'est une question de valorisation du rôle de la mère.

Mme Trépanier: C'est une reconnaissance de la maternité, dans le fond.

Mme Germain: C'est une reconnaissance de la maternité, et il y a un mécanisme de jonction que le Conseil du statut de la femme a prévu au niveau des dimensions de prestations au régime d'assurance parentale, en ce sens que cette dimension des allocations universelles, pour ce qui est des travailleuses, pour ce qui est des femmes qui sont travailleuses et qui recevraient l'allocation universelle, cette allocation universelle ne vient pas se juxtaposer aux prestations du régime d'assurance parentale, mais est calculée jusqu'à ce qu'il n'y ait aucune perte de revenus à la fin. Donc, ça ne vient pas comme une somme qui est donnée à tout le monde et, après ça, que les travailleuses reçoivent. C'est calculé, il y a un calcul qui est fait. Ce n'est pas une simple juxtaposition.

Mme Trépanier: Vous avez, au début de votre exposé, parié abondamment de responsabilisation des deux parents dans la famille quand vous avez abordé la "non-transférabilité" des droits des parents. Je trouve ça important aussi. Vous êtes d'avis qu'on devrait accorder, que le gouvernement devrait accorder des congés de longue durée, devrait permettre des congés de longue durée sans solde, qui iraient jusqu'à 2 ans, si j'ai bien lu. Vous pariez de réinsertion sur le marché du travail. Je considère qu'après 2 ans, effectivement, ça prend une réinsertion. Moi, donc, personnellement, je ne suis pas tout à fait d'accord parce que je considère que c'est très long, 2 ans. Vous pariez de réinsertion sur le marché du travail pour la femme. Mais, à ce moment-là, si on a un congé parental qui peut être... Quand vous pariez de congé parental sans solde, c'est le père où la mère. Pourquoi faites- vous une spécification pour la réinsertion de la femme sur le marché du travail. Elle pourrait être aussi importante pour l'homme, si ce sont des congés de longue durée comme celui-là? Vous ne voyez pas un danger à ça?

Mme Godbout-Perreault: Nous étions simplement en accord avec ce qui se vit actuellement. C'est bien sûr que je pense qu'il faudrait aussi des mesures pour les hommes, si les hommes se décident à prendre des congés sans solde de 2 ans. Mais je n'ai pas l'impression que c'est, actuellement, ce qui va se faire. Tant que les hommes auront un salaire beaucoup plus élevé que les femmes, ce seront davantage les femmes qui prendront les congés sans solde, parce que les couples doivent compter. Et quand on compte et qu'on a un choix à faire, on prend celui qui coûte le moins cher. Donc, ça pourrait être des mesures pour réintégrer les deux sur le marché du travail, mais quand les salaires seront égaux, je pense.

Mme Trépanier: Donc, vous pensez que les hommes ne les prendront pas, les congés sans solde. Ils gagnent trop cher.

Mme Godbout-Perreault: Actuellement.

Mme Trépanier: C'est un collègue qui me souffle ça.

Mme Germain: II y a une volonté. On sait aussi que le changement passe par les mentalités. Si l'État prend réellement ça en charge et qu'il y a un changement, qu'il y a, par exemple, au niveau des congés pour soins d'enfants, une possibilité pour le père de prendre sa part de congés, tout ça peut inciter, éventuellement, une modification du profil social, là. Mais, c'est vrai, ne serait-ce qu'au niveau mathématique du nombre de semaines, si on prend le congé pour soins d'enfants auquel une femme pourrait postuler, qui serait de 8 semaines, plus son congé de maternité, en soi, mathématiquement, ça lui fait déjà plus de semaines d'absence qu'un homme du marché du travail. Déjà, à ce moment-là, alors...

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, je crois, voudrait vous poser une question.

M. Bourbeau: Oui, juste une question parce que le temps est pratiquement écoulé.

La Présidente (Mme Marois): II vous reste une minute, M. le ministre.

M. Bourbeau: Dans votre mémoire, vous demandez de préciser les circonstances exceptionnelles qui permettraient à un employeur d'exiger de faire du temps supplémentaire, même s'il n'a pas donné le préavis de douze heures, à

la page 25 de votre mémoire. Est-ce que les précisions que nous avons apportées dans lavant-projet de loi vous apparaissent satisfaisantes ou non? Je vous rappelle que dans le projet de loi on dit que malgré que le préavis de douze heures n'a pas été donné, un employeur peut exiger d'un salarié qu'il travaille des heures supplémentaires "si, en raison d'un événement imprévisible, l'absence de ce salarié met en danger la santé et la sécurité d'une personne", ou encore "si des travaux urgents doivent être effectués sur des équipements ou des installations, mais uniquement dans la mesure où ils sont nécessaires, pour éviter une perturbation importante des activités de son établissement". Est-ce que ces précisions-là vous semblent suffisantes ou si vous souhaitez qu'on aille un peu plus loin dans l'élaboration de ces précisions?

Mme Germain: Je ne vais malheureusement pas vous parler dans un langage technique. Je vais vous répondre comme au nom des familles qui seraient prises dans un dilemme comme ça. J'aimerais que - et c'est peut-être un point qui serait un débat plus au niveau de la Commission des normes du travail qu'un point législatif comme tel - soient pris en considération, oui, les aspects urgence et danger de l'entreprise à laquelle le travailleur ou la travailleuse appartient, mais que soient pris aussi en considération les aspects urgence et danger de l'enfant que le parent a à sa charge à ce moment-là et que la dimension d'obligation soit assortie d'une dimension de communication. Il peut y avoir une urgence aussi au niveau de la famille qui empêche le travailleur, malgré sa bonne volonté. Alors, je ne peux pas répondre complètement à votre question.

M. Bourbeau: Ce n'est pas facile d'y répondre non plus, je dois dire.

La Présidente (Mme Marois): Ça va? M. Bourbeau: Oui.

La Présidente (Mme Marois): Merci, M. le ministre.

Une voix: Est-ce qu'il me reste du temps?

La Présidente (Mme Marois): Non, pas du tout, malheureusement. Peut-être à la fin. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

Mme Harel: Oui. Alors, merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de saluer les porte-parole de la COFAQ, particulièrement Mme Godbout-Perreault, qui est déjà venue à quelques reprises devant les membres de la commission parlementaire, Mme Germain et M. Brassard

Alors, vous nous rappelez, avec raison, les heurts constants entre les contraintes du travail et les responsabilités familiales et vous posez, dès le départ, le danger de continuer à éparpiller les programmes de prestations comme c'est le cas présentement. Je prends bien note que vous recommandez la mise en place d'un régime d'assurance parentale. C'est le nom que vous lui donnez; c'est intéressant et on y reviendra sur l'aspect assurance, justement, parce que le mot "assurance" signifie contribution, contributoire. Un régime d'assurance, c'est un régime contributoire. Vous nous dites que ce régime d'assurance parentale suppose "la récupération des fonds provenant des congés de maternité de l'assurance-chômage et des primes à la naissance actuellement octroyées par le gouvernement à la suite des deux premiers enfants" et vous considérez que cela assurerait une base suffisante. Bon!

J'avais hâte que vous veniez en commission parce que, lorsque le Conseil du statut a rendu publique sa proposition, je me suis demandé: Qu'est-ce qu'en pense la COFAQ, surtout à l'égard du troisième enfant et à l'égard de la récupération des primes à la naissance sous une forme universelle d'allocation de maternité? Ce que je veux savoir de vous, c'est ceci. D'abord, des régimes d'assurance sociale, ce sont des régimes contributoires. À la page 13, vous dites: Toutes les femmes qui accouchent devraient avoir droit au congé de maternité; leur éligibilité devrait être la même. Est-ce qu'il faut comprendre que vous proposez que toutes les femmes contribuent ou bien que seules les... Enfin, ce régime d'assurance, parce que je veux vous le rappeler là, si on dit bien ce que ça veut dire, ça protège des risques de perte du revenu, hein, des régimes d'assurance? Et ce sont des risques de perte du revenu soit à cause de la vieillesse, de la maladie, d'un accident de la mort, hein, des régimes d'assurance, ou de la maternité, parce que c'est un risque aussi et qu'il y a une perte de revenus possible. Ça, c'est différent des régimes universels; ce sont des régimes contributoires.

Je suis très favorable à la proposition du Conseil, mais la proposition du Conseil n'est pas la même pour toutes les femmes que pour celles qui ont contribué. Pour celles qui ont contribué, elle rembourse 90 %. Pour toutes les autres, elle leur assure une allocation égale de 100 $ par semaine pendant 18 semaines, non imposable. La grande question, c'est: Sera-t-elle aussi non déductible des autres revenus sociaux? Est-ce que ce serait équitable, socialement, qu'une femme qui est la conjointe, dans une famille où le revenu familial est de 70 000 $ - ça arrive - puisse... Sans que ce soit imposable, oui, je suis d'accord, dans la mesure où une femme bénéficiaire de l'aide sociale va aussi pouvoir toucher ce montant d'argent, sans que chaque dollar versé lui soit déduit de la presta-

tion de 450 $, selon son statut - mettons de 513 $ - qu'elle reçoit. La première chose que je veux savoir de vous: Êtes-vous d'accord avec la proposition du Conseil du statut qui, dans le fond, établit quand même une catégorie différente d'allocation pour celles qui ont contribué avec un remboursement à 90 % et pour les autres, avec une allocation, si vous voulez, universelle mais moindre? Ou si ce que vous proposez, c'est l'éligibilité pareille de toutes les femmes? On se comprend?

La Présidente (Mme Marois): Mme Germain, ou Mme la présidente, peu importe.

Mme Godbout-Perreault: Je vais partir du principe qu'on reconnaisse qu'une femme qui met au monde un enfant ait droit à l'allocation universelle. Pour cette partie, pour nous, il n'est pas question de contribution. C'est la reconnaissance de la naissance...

Mme Harel: Qu'est-ce que c'est, l'allocation universelle, pour vous?

Mme Godbout-Perreault: C'est la somme dont on a parlé, un mécanisme qui calculerait à partir d'une fois et demie le salaire moyen canadien.

Mme Harel: 90 %?

Mme Godbout-Perreault: Non L'allocation universelle, c'est une somme qui est identique pour toutes les femmes qui mettent un enfant au monde.

Mme Harel: Je vous pose une question tout de suite, Mme Godbout-Perreault, parce que c'est une question qui me préoccupe trop pour que je ne la pose pas. Vous me dites, à ce moment-là: Toutes les femmes devraient avoir la même allocation universelle, qu'elles aient contribué ou non. Si je comprends bien, il faut qu'elle soit non imposable pour que, validement, ça puisse reconnaître l'apport social de la naissance. C'est le cas? Imposable ou non imposable?

Mme Godbout-Perreault: Je dois dire que, dans le document, nous ne nous sommes pas prononcés. Honnêtement, ce n'est pas écrit.

Mme Harel: Mais vous y avez réfléchi?

Mme Godbout-Perreault: Ce qui arrive actuellement, c'est que nous avons toujours parlé d'une caisse maternité. Lorsqu'on nous a parlé d'une allocation universelle, cela correspondait, pour nous, à l'idée que l'on avait de caisse maternité. Donc, une allocation universelle, si l'on veut qu'elle reconnaisse que les femmes ont mis des enfants au monde, il se peut qu'il soit préférable qu'elle ne soit pas imposable. Mais, actuellement, nous ne nous sommes pas prononcés.

Mme Harel: cette allocation universelle - je veux bien comprendre - elle est la même pour toutes ou on en ajoute un peu plus pour celles qui ont contribué?

Mme Godbout-Perreault: La contribution, c'est autre chose.

Mme Germain: C'est la mécanique du Conseil du statut de la femme, c'est-à-dire que.

Mme Harel: Vous, est-ce que vous approuvez la proposition du Conseil qui donne une allocation différente durant les 18 premières semaines, différente pour celles qui ont contribué que pour celles qui n'ont pas contribué? Est-ce que vous approuvez?

Mme Germain: Ce n'est pas la même chose Je ne sais pas si on a fait la même lecture, mais moi, ce que j'ai compris de la proposition du Conseil - et j'ai vérifié par téléphone - c'est que l'allocation est la même, sauf que, dans le cas où ça s'applique à une travailleuse, ça s'insère à même les prestations du régime d'assurance parentale et ça devient calculé dans la somme globale qui lui permet d'avoir jusqu'à 90 % du revenu.

Mme Harel: Ce que n'a jamais l'autre personne qui n'a pas contribué.

Mme Germain: L'autre personne va avoir simplement... le Conseil dit 100 $.

Mme Harel: Oui. Tandis que la travailleuse va avoir 90 % de son revenu assurable.

Mme Germain: Oui, mais incluant l'allocation et les...

Mme Harel: Oui, je veux bien croire, mais elles n'ont pas le même montant. Je ne sais pas si on peut s'entendre là-dessus, c'est bien important. Parce que, voyez-vous, quelque part, il faut une certaine équité sociale. Oui, pour reconnaître la part importante de la femme au moment de la naissance, je suis favorable à une allocation universelle. Mais de là à penser qu'il faut que ce soit la même pour tout le monde, je me dis que, quelque part, ça peut devenir extrêmement inéquitable socialement. Ça peut permettre, par exemple - et ce ne serait pas absurde - qu'une femme puisse en profiter pour aller - tant mieux pour elle - vivre convenablement sa grossesse dans sa résidence secondaire pendant qu'une ouvrière va reconduire ses deux jeunes enfants en garderie pour contribuer, entre autres, à l'ensemble des autres prestations sociales. Je ne veux pas dire par là qu'il ne faut

pas reconnaître la nécessité d'une allocation au moment de la maternité, mais il faut la situer dans un régime de sécurité sociale qui fasse que ça ne devienne pas inéquitable. (16 heures)

Mme Germain: Effectivement, il y a peut-être encore un travail à faire au niveau de la jonction de cette mesure d'universalité avec l'ensemble des programmes sociaux. Il est vrai que des organismes comme le Conseil du statut de la femme, qui sont mieux équipés que nous - vous savez, on est un organisme communautaire...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Germain:... et on n'a pas des ressources à tout casser en termes...

Mme Harel: Non.

Mme Germain: C'est vrai, vous posez une très bonne question. Et je pense que si on est favorables à cette mesure-là, c'est peut-être encore embryonnaire en ce qui a trait à tous les mécanismes de jonction pour qu'il y ait effectivement une équité.

Mme Harel: Mme Germain, en tout cas, moi, je m'intéresse à ce qui se passe à la COFAQ et j'avais hâte d'avoir votre point de vue aussi. Je suis toujours soucieuse de ce que vous publiez, ça m'intéresse et tout, mais je ne voudrais pas qu'on en arrive à laisser comme une sorte de complaisance sur des propositions qui nous conduise à la déception après l'engagement qui n'a pas été rempli de donner la Régie des rentes aux femmes au foyer. Parce que la rente est un régime contributoire, c'est un régime d'assurances puis on avait dit, pas nous, mais eux ont dit: C'est facile puis on va le donner à toutes les femmes au foyer. Ça fait cinq ans de ça puis là, depuis ce temps-là, ils ont dit: Non, c'est trop compliqué. Alors, qu'on ne commence pas à faire accroire des affaires au monde si vraiment ce n'est pas ça qu'on a l'intention d'appliquer.

Mme Germain: Bien, on pourra continuer à se téléphoner après...

Mme Harel: Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Godbout-Perreault: Pour nous aussi, il y a une différence entre l'allocation et la prestation. La prestation, c'est ce qui vient à la suite d'une contribution et l'allocation, c'est ce qui est accordé à toutes les femmes.

Mme Harel: D'accord, excellent! Dans votre mémoire, à la page 27, il y a des choses bien intéressantes: il y a l'idée de l'aménagement des horaires de travail. Je pense que vous êtes les premiers, à ma connaissance, à nous parler de l'aménagement des horaires de travail et puis vous proposez des recommandations pour faciliter, finalement, cet aménagement des horaires. Ça m'a rappelé qu'il y a un programme d'aménagement d'horaires de travail au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, qui était expérimental, il y a quelques années, et qui est devenu exceptionnel, et on aura l'occasion à une commission parlementaire - ça en est gênant, en tout cas - de voir à quel point ce programme d'aménagement des horaires de travail est devenu rien du tout. Pourtant, si je comprends bien, vous en faites un aspect important d'une politique de réconciliation du travail et de la famille, si je dois comprendre.

Mme Germain: Oui, dans l'optique où, pour nous, c'est clair, avec notre profil social actuel, que les rôles ne sont plus aussi clivés entre l'extérieur et l'intérieur. Ça, c'est irrévocable, ça ne changera pas et, même si on a plus d'enfants, je ne pense pas que les femmes veuillent moins se réimpliquer dans le monde du travail. Donc, on n'a plus ce clivage-là. Alors, effectivement, il faut donner plus de liberté de choix et de créativité aux gens dans l'aménagement de leur temps de travail, tout ça dans le but de réduire le presto de la vie familiale.

Une voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: En tout cas, vous revenez de façon très claire avec le congé de grossesse pour visite médicale. Puis, il faut toujours se rappeler que, même enceinte, une femme peut être malade, avoir une maladie courante comme une grippe, et qu'elle peut épuiser, si tant est qu'elle en ait, des congés accumulés. C'est assez rare parce que, dans le secteur privé, il y a 70 % des non-syndiqués qui n'ont ni banque de congés, ni garantie de retour à l'emploi après une maladie et, évidemment, à ce moment-là, ça peut être... Et ça, ce serait payé par la caisse, si j'ai bien compris. Ces congés, ce n'est pas l'employeur qui les assume à lui seul?

Mme Germain: Nous, ce qu'on recommande, ce sont des congés sans solde.

Mme Harel: Pendant la grossesse?

Mme Germain: Des congés pour visite... Excusez-moi, peut-être que je dis n'importe quoi, là...

Mme Harel: Non, non, non. Cinq jours pour visite médicale pendant la grossesse et cinq jours de paternité.

Mme Germain: Oui, mais cinq jours de visite

médicale, ce n'est pas payé par...

Mme Harel: Ça, c'est avec solde?

M. Brassard (Pierre): En fait, les cinq jours de congé pour visite médicale pendant la grossesse sont sans solde. En fait, on veut qu'ils soient inscrits dans la Loi sur les normes du travail comme...

Mme Germain: Un droit d'absence. Mme Harel: Un droit d'absence.

M. Brassard (Pierre):... un droit d'absence de cinq jours.

Mme Harel: Ah! d'accord!

Mme Germain: Un droit d'absence.

Mme Harel: Puis les congés de paternité, ça c'est un droit avec solde?

Mme Germain: Avec solde: cinq jours avec solde; cinq jours sans solde.

M. Brassard (Pierre): C'est ça, dix jours. Mme Harel: Ah oui! C'est ça.

La Présidente (Mme Marois): Votre temps est malheureusement écoulé.

M. Joly: Est-ce qu'il reste une petite minute?

La Présidente (Mme Marois): Oui, avec l'assentiment de mes collègues il n'y a pas de problème, allez-y, M. le député de Fabre.

M. Joly: Merci, Mme la Présidente. En fait, je voudrais revenir un peu sur le même volet que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneu-ve - c'est ça, le nouveau comté - a touché, qui est la formation du fonds pour créer cette assurance parentale. En fait, on rapatrie l'assurance-chômage. Voyez-vous, ça me chicote encore un peu, c'est quand on parle de l'abolition des primes de naissance. Ce qu'on retrouve ici, ce sont surtout des mouvements qui viennent défendre la femme qui travaille. La femme qui ne travaille pas, la femme qui demeure à la maison parce que c'est son choix, c'est un libre choix, on n'a pas vu beaucoup de mouvements qui viennent la défendre. En plus de ça, on a tendance à vouloir lui enlever ce qu'il y a déjà d'acquis, mais en disant: On va remanier la formule, puis on va tout mouler ça ensemble et on va redistribuer ça en se servant de deux mots: un qui devient de l'allocation et l'autre de la prestation.

L'allocation pour trois enfants veut dire: le premier, 1000 $; le deuxième, 1000 $; le troisième, 4500 $. On en arrive à 6500 $ de primes, comme vous avez établi dans votre mémoire, pour la femme qui a nécessairement trois enfants, qu'elle travaille à l'extérieur ou qu'elle décide de demeurer chez elle. Pardon?

Mme Harel: C'est sur trois ans, là.

M. Joly: Non, non, actuellement, le système actuel. Bien oui, bien sûr. Mais si c'étaient des triplets, on paierait, partant de là.

Mme Harel: Oui, mais même la prime pour le troisième est sur trois ans.

M. Joly: Oui, oui, mais même à ça, l'argent est là quand même. L'acquis est là. Ce qu'on veut faire, c'est qu'on veut donner 100 $ par semaine, multiplié pendant 18 semaines, trois fois pour avoir la même logique, trois enfants. Vous arrivez à 5400 $ versus 6500 $. Celle qui nécessairement a décidé qu'elle travaillait, vous la rendez admissible en lui chargeant une contribution de 10 semaines, dans le fond, qui est le minimum. Avec ce qu'on a établi ce matin comme étant les taux, ce qu'ils ont été rechercher, à 0, 14 $ le cent dollars, on prend un salaire hypothétique de 300 $, on arrive avec 0, 42 $ de cotisation par semaine, pendant 10 semaines. Ce qui veut dire que 4, 20 $ de cotisation en arriverait à qualifier la dame qui travaille d'une façon bien différente de celle qui ne travaille pas. Alors, je me demande si, à ce moment-là, les mouvements sont ici pour défendre toutes les femmes ou une partie des femmes. Alors, c'est un peu ça qui me chicote.

Mme Godbout-Perreault: Moi, je vais vous dire. Quand on parle de l'allocation universelle, c'est parce que comme principe à la COFAQ, pour nous, le premier enfant est aussi important que le troisième ou le quatrième. Donc, actuellement au Québec, le premier vaut moins cher, le deuxième un peu plus, et le troisième et les autres valent plus, parce qu'on donne une allocation de naissance qui augmente chaque fois. Ce qu'on a aussi voulu dire, c'est que quel que soit le rang de l'enfant, pour nous, il est important et on a pensé que cette allocation universelle pourrait reconnaître que chaque fois qu'on met un enfant au monde, c'est important.

Maintenant, quand vous faites des calculs de 0, 42 $, des choses comme ça, moi, je ne peux pas vous suivre sur ce plan-là. Ce que je peux seulement vous dire, c'est que si on trouve un moyen de reconnaître que des femmes qui décident de s'occuper d'un enfant, on en tient compte... Les autres aussi s'en occupent, mais celles qui font le choix de demeurer avec l'enfant et de ne pas être sur le marché du travail, qu'on cherche un moyen de reconnaître ce geste-là. Je pense que quand on dit qu'on

veut qu'on reconnaisse les choix de mode de vie, dans ce sens-là, on. le fait.

M. Joly: En essayant de respecter le principe que vous défendez, on crée quand même une forme d'injustice sur des acquis qui ont déjà été consentis. Alors, c'est là que j'ai de la difficulté à embarquer. Merci, madame.

La Présidente (Mme Marois): Merci.

Mme Harel: Mme la Présidente, je ne voudrais pas qu'on laisse nos invités sur la conclusion...

La Présidente (Mme Marois): Alors, une intervention de part et d'autre.

Mme Harel: Ce n'est pas du tout mon opinion. Alors, je ne la partage pas du tout. Ou bien on la discute là, ou bien on dit que...

La Présidente (Mme Marois): Est-ce qu'on s'entend qu'il y ait une intervention de la part de la députée de Hochelaga-Maisonneuve et une intervention de votre part, Mme la ministre ou M. le ministre, peu importe?

Mme Trépanier: Je voudrais intervenir mais je voudrais que le ministre conclue, par exemple.

M. Bourbeau: On va laisser la parole à madame.

Mme Trépanier: Et puis on va revenir.

La Présidente (Mme Marois): Madame et madame ici, d'accord, chacune une intervention.

Mme Harel: Je vais simplement conclure avec votre mémoire, celui de la COFAQ, à la page 27, qui dit ceci: "La véritable question qui se pose est d'adapter l'ancienne optique et organisation du travail fondée sur l'homme pourvoyeur et la femme responsable, domestique-éducatrice. En cette fin de siècle, il est clair que les rôles entre hommes et femmes ne sont plus clivés selon la délimitation intérieure et extérieure du foyer. Hommes et femmes sont désormais aussi participants l'un que l'autre à l'activité socio-économique."

C'est dans vos mots, cette illustration d'une réalité que l'on vient nous témoigner depuis le début de nos travaux, à la fin du siècle, 90 % des mères de jeunes enfants seront sur le marché du travail et l'État, la société qui ne cherche pas à concilier cette réalité va se réveiller avec un taux de dénatalité comme celui qui nous inquiète maintenant.

La Présidente (Mme Marois): Est-ce que vous voulez avoir une réaction, Mme Germain?

Mme Germain: Oui, tout à fait dans votre sens, pas seulement de dénatalité, mais le stress qu'impose la non-considération de la vie familiale. Si le monde du travail ne tient pas suffisamment compte du quotidien familial et du stress que ça impose, non seulement on va se ramasser avec une dénatalité, mais avec d'autres conséquences: qu'on pense à la violence, qu'on pense aux ruptures, qu'on pense à tout ça. Des gens qui ne sont pas capables de se donner le temps parce qu'ils travaillent trop, parce qu'ils ont des conditions rigides, le temps d'être ensemble, le temps d'être avec leurs enfants, c'est ça qui crée un environnement social où les familles sont défavorisées.

La Présidente (Mme Marois): Mme la ministre?

Mme Trépanier: Deux petits points, Mme la Présidente. Quand vous dites que le premier enfant vaut autant que le troisième, j'en suis, sauf que le principe sur lequel le gouvernement s'est appuyé est le suivant, c'est que les familles plus nombreuses, les families de trois enfants et plus, statistiquement, ont des besoins financiers plus importants, d'une part. D'autre part, je ne suis pas ici pour défendre l'avis du Conseil du statut de la femme, mais j'ai posé la même question que Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve et les 100 $ sont une allocation de reconnaissance à la maternité, donc pour tout le monde, et le deuxième, 90 %, c'est un remplacement de revenu, alors pour les personnes qui avaient un revenu sur le marché du travail. Je ne pense pas que les deux principes viennent en contradiction. C'est le principe sur lequel se fonde, se base le Conseil du statut de la femme. Je voulais apporter cette spécification.

La Présidente (Mme Marois): Ça va? Est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose, Mme la présidente?

Mme Godbout-Perreault: Non, je voulais seulement vous remercier et vous dire que, dans le projet de loi, il y avait eu un départ pour penser aux familles. J'espère que vous irez beaucoup plus loin et tiendrez compte de nos demandes.

La Présidente (Mme Marois): Merci. Oui, M. le ministre?

M. Bourbeau: Simplement pour remercier les membres de la Confédération des organismes familiaux du Québec pour un mémoire très bien présenté, très bien fabriqué aussi et qui va certainement provoquer une réflexion importante au sein de l'appareil gouvernemental. Merci.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre contribution aux travaux de la commission.

J'inviterais maintenant les personnes représentant la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec.

(Suspension de la séance à 16 h 15)

(Reprise à 16 h 18)

La Présidente (Mme Marois): Si les députés veulent reprendre leur place, les députés et ministres, on va reprendre nos travaux aussi.

M. Bourbeau: C'est la fin de la récréation.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça, c'est la fin de la récréation. Il faut dire que c'est la deuxième journée et la cinquième séance. Oui, le gouvernement est presque en famille. On vous souhaite la bienvenue à la commission des affaires sociales. Vous connaissez nos règles, mais je vous les rappelle rapidement: une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et, par la suite, il y a des échanges avec les membres de la commission, le temps étant réparti également de chaque côté de la table. Merci et bienvenue. Évidemment, la personne qui va présenter le mémoire se présente et présente les personnes qui l'accompagnent.

Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec

M. Bissonnette (Michel): Bonjour, je suis Michel Bissonnette, je suis président de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec. Pour la présentation de notre mémoire, aujourd'hui, je suis accompagné de Benoit Savard, qui est conseiller jeune à l'exécutif du parti, et également de Mario Dumont, qui est coordon-nateur aux affaires politiques pour la Commission-Jeunesse du parti.

Avant de procéder techniquement à la présentation de notre mémoire, nous tenions à pouvoir vous spécifier pourquoi la Loi sur les normes du travail revêtait une importance capitale pour nous. Le gouvernement a décidé, dans son avant-projet de loi, d'actualiser la seule loi qui assure un minimum pour l'ensemble des travailleurs québécois et on croyait que c'était important, en tant que groupe jeune de pouvoir faire part au gouvernement de certaines préoccupations qu'on a quant à l'avant-projet de loi, autant sur certains points qui sont présents dans l'avant-projet de loi, que sur d'autres points que nous aimerions retrouver dans l'avant-projet de loi.

En tant que Commission-Jeunesse, il est bien évident qu'on est un groupe politique partisan formé des membres du Parti libéral du Québec âgés de moins de 25 ans. Au cours des dernières années, on a toujours eu comme souci d'aller au-delà d'une activité partisane. Bien sûr, on fait des activités au sein de nos structures, sauf qu'il est important, pour nous, de pouvoir déborder de cela et d'aller un peu vers l'extérieur pour pouvoir influencer davantage l'action gouvernementale. Donc, c'est certain qu'on a toujours trouvé, dans le Parti libéral du Québec, un lieu privilégié pour faire avancer nos idées. D'ailleurs, bon nombre de propositions présentes dans notre mémoire ont été votées démocrati quement dans nos structures. Nous voyons, par contre, dans cette commission parlementaire, un moyen pour faire part au gouvernement de nos aspirations plus techniques par rapport à cet avant-projet de loi. Il est malheureux, je crois, qu'on soit le seul groupe jeune à pouvoir participer à cette commission parlementaire, parce que bon nombre de points dans cet l'avant-projet de loi touchent particulièrement les jeunes. Sans avoir la prétention d'être représentatifs de l'ensemble des jeunes du Québec, on croit néanmoins que nos structures font qu'on peut représenter bon nombre de jeunes et que nos commentaires peuvent défendre, à ce moment-là, leurs intérêts.

Donc, notre mémoire se divise en trois grandes parties: premièrement, Benoit Savard vous présentera nos commentaires quant à l'ensemble de la politique familiale présente dans l'avant-projet de loi; deuxièmement, Mario Dumont vous présentera nos préoccupations quant à certains aspects bien spécifiques de la loi - nous avons, entre autres, l'exemption des colonies de vacances à but lucratif de la Loi sur les normes du travail et également le droit de recours en cas de congédiement - et, finalement, je présenterai tout le volet temps partiel qu'on aimerait voir présent dans la loi, de façon à pouvoir assurer une équité de traitement à cette clientèle ou à ce type de travailleur. Donc, je passe la parole à Benoit Savard.

M. Savard (Benoit): Merci. Politique familiale versus le travail. Lorsqu'on a rédigé notre mémoire, on a tenu compte de deux objectifs principaux, objectifs qui, à notre avis, sous-tendent l'avant-projet, qui doivent être inclus, bien sûr, dans le projet. C'est que, dans un premier temps, il faut faciliter la conciliation des responsabilités parentales et de la vie au travail et, dans un deuxième temps, amener une plus grande flexibilité du travail à l'égard non seulement des mères, mais également des pères de famille. Alors, plutôt que de reprendre une à une les propositions de l'avant-projet de loi avec lesquelles nous sommes d'accord, je profiterai du temps qui m'est offert pour plutôt parler des deux réserves que nous avons à l'égard, justement, de certaines propositions de l'avant-projet de loi, c'est-à-dire, dans un premier temps, le congé de naissance de courte durée et, dans un deuxième temps, le refus de faire du temps supplémentaire lorsque le préavis de douze heures n'est pas respecté. En ce qui concerne les autres propositions, bien sûr, on ne les endosse pas en blanc. On les endosse dans la mesure où

on trouve que c'est un bon pas vers l'avant de la part du gouvernement. Sauf que, justement, le gouvernement, face à ces propositions, ne devrait pas reculer, mais endosser et adopter ce que nous trouvons légitime.

Alors, le premier point, c'est-à-dire le congé de naissance de courte durée. Ce que l'avant-projet de loi soumet, ce sont deux jours rémunérés et trois jours sans solde. Ce que la Commission-Jeunesse demande, c'est qu'il y ait cinq jours totalement rémunérés. Pourquoi cinq jours rémunérés? À notre avis, c'est pour que les parents puissent bénéficier ensemble d'une période minimale d'une semaine suivant la naissance, sans être pénalisés de façon financière. Qu'est-ce qui nous a amenés à cette conclusion-là? C'est que, premièrement, il faut voir l'importance de la présence du père et de la mère, du couple, auprès de l'enfant, tout particulièrement lors de la première semaine, également l'impact minime que cela peut avoir sur la masse salariale des entreprises et, bien sûr, que les effets positifs pour les familles dépasseront largement, à notre avis, les possibles effets négatifs sur les entreprises. Il faut également se référer à l'esprit qui guide cette partie importante de l'avant-projet, c'est-à-dire combattre le problème de dénatalité au Québec et, bien sûr, le tout en instaurant un contexte d'emploi favorable à la vie familiale. Il faut également se dire que la dénatalité est un problème de société et qu'il y va de la responsabilité collective pour résoudre ce problème, alors une part des entreprises, du gouvernement et également des employés.

Le deuxième point était le droit de refuser d'effectuer des heures supplémentaires. Ce qu'il y a dans l'avant-projet de loi, c'est que l'employé a le droit de refuser, si l'employeur ne l'a pas prévenu douze heures d'avance. Ce que la Commission-Jeunesse dit, c'est que c'est insuffisant, 12 heures. Un préavis raisonnable, à notre sens, permettant à des parents de planifier leur temps en fonction de leurs enfants devrait être d'au moins 24 heures et j'expliquerai pourquoi. Dans un deuxième temps, ce que la Commission-Jeunesse demande, c'est que, justement, ce droit devrait appartenir à toute personne salariée, ce que je vais vous expliquer également.

Préavis de 24 heures plutôt que 12 heures, pourquoi? Parce qu'on considère, comme je l'ai dit, que c'est insuffisant et on voit là-dedans un problème d'application, c'est-à-dire que, normalement, le temps supplémentaire se fait en fin de journée. Alors, de façon réaliste, il est assez difficile de concevoir que l'employeur pourrait appeler son employé à 5 heures du matin pour lui dire qu'il va faire du temps supplémentaire à 5 heures du soir. Alors qu'avec 24 heures, ce que nous trouvons tout à fait raisonnable, ça donnerait amplement le temps à la famille de s'adapter à la situation du lendemain, c'est-à-dire qu'on aurait vraiment un avertissement la journée d'avant. Nous croyons que c'est dans l'esprit d'une bonne gestion d'entreprise et que c'est possible de le faire. Maintenant, les réserves que l'avant-projet de loi soumet à l'égard de certains cas particuliers sont des cas, à notre avis, très compréhensibles.

Pourquoi veut-on l'appliquer à tous les salariés? Dans un premier temps, même s'il n'a pas de responsabilité parentale, on considère qu'un travailleur a le droit d'organiser son temps en fonction de ses activités. Ces 24 heures-là pourraient le lui permettre. Deuxièmement, et surtout - et c'est en fonction de cet argument que nous nous sommes basés - c'est pour éviter que les employeurs ne soient tentés, justement, de discriminer les parents dans l'embauche de leur personnel, sous prétexte que cette nouvelle restriction en ferait des employés moins disponibles. En fait, ce qu'on ne veut pas, c'est qu'il se crée deux classes de travailleurs laissant en sorte qu'on aurait des travailleurs qui ont des responsabilités parentales et qui seraient implicitement moins disponibles, puisqu'on devrait leur donner cet avis, et, d'un autre côté, des travailleurs qui, eux, ne seraient pas parents et qui seraient implicitement, pour les employeurs, plus disponibles. Alors, c'est ce qu'on craint et c'est la raison pour laquelle on préférerait que cette mesure s'applique à tous les salariés.

Donc, de façon générale, la Commission-Jeunesse accueille avec satisfaction les mesures contenues dans l'avant-projet de loi, en ce qui concerne la flexibilité du travail vis-à-vis de ceux et celles qui ont à assumer la tâche de parents. Cependant, il est important de rappeler que le Québec, malgré une légère augmentation l'an dernier, a encore l'un des indices de natalité les plus bas au monde et que le gouvernement a le devoir de valoriser et de faciliter le fait d'avoir des enfants au Québec. La Loi sur les normes du travail peut être un levier pour agir dans ce sens.

C'étaient les deux principales réserves que nous avions à soulever en ce qui concerne les congés parentaux, le contexte familial versus le travail. Maintenant, je vais passer la parole à Mario Dumont qui, lui, va vous parler de différents aspects de la loi sur lesquels nous avons soulevé quelques réserves également.

M. Dumont (Mario): Oui, alors, les points que je vais soulever, je ne pense pas qu'on puisse les coiffer d'un grand thème. Ce sont des points particuliers sur lesquels on a quand même des réserves qu'on considère comme importantes.

Le premier point, c'est le droit de recours à rencontre d'un congédiement sans cause juste et suffisante. On sait que, présentement, la loi demande qu'on ait cinq ans de service continu pour avoir ce droit de recours. Maintenant, l'avant-projet de loi apporte une certaine amélioration en disant: Même si on a des contrats à durée limitée qui se succèdent, on a quand même une période de service continu. Ce

que la Commission-Jeunesse demande, c'est que cette période de cinq ans soit réduite à deux ans. Pour nous, deux ans seraient un maximum, compte tenu que - et là on a une petite statistique - en 1984, il y avait les deux tiers des personnes non syndiquées, qui sont les principales intéressées par la Loi sur les normes du travail, qui avaient moins de cinq ans d'ancien neté, donc seulement un tiers des personnes principalement visées auraient pu avoir ce droit de recours-là. Donc, si on veut une main-d'oeuvre flexible pour l'économie québécoise, il serait important d'adapter notre Loi sur les normes du travail en réduisant le nombre d'années de service continu nécessaires pour avoir un droit de recours à rencontre d'un congédiement sans cause juste et suffisante.

L'autre point qu'on désire soulever, ce n'est pas une revendication comme telle, c'est que, bon, il y a des procédures, plusieurs procédures, qui ont été facilitées dans l'avant-projet de loi modifiant les normes du travail et, ça, on est entièrement d'accord avec ça. Là, je parle de la représentation par la Commission de certains travailleurs pour qu'ils puissent faire valoir leurs droits, je parle de service de médiation dans les cas de congédiement, je parie aussi du droit de recours pour congédiement sans cause juste et suffisante, qui a déjà été élargi et que, nous autres, on veut encore élargir. On considère que cet ensemble de mesures-là, qui me paraissent, en tout cas, très très positives pour que les travailleurs puissent faire valoir leurs droits, va certainement faire augmenter le nombre de plaintes et également nécessiter davantage de ressources humaines. Et je vais soulever peut-être un exemple: dans les départements de protection de la jeunesse, on a élargi les normes pour faciliter les recours, sauf qu'on n'a pas investi les ressources humaines nécessaires et qu'on se retrouve avec, bon, des attentes, en termes d'années, qui sont beaucoup trop longues et qui contraignent beaucoup les bénéficiaires de ces services-là. Donc, on espère qu'à la Commission des normes du travail et avec la Loi sur les normes du travail les ressources humaines nécessaires seront consenties pour qu'on ne se retrouve pas dans ce même genre de situations.

Autre demande, au niveau des vacances annuelles. L'avant-projet de loi diminue de dix ans à cinq ans le nombre d'années de service continu nécessaire pour le droit à trois semaines de vacances annuelles. Alors, la Commission-Jeunesse est évidemment d'accord avec cette proposition mais, pour dix ans de service continu, la Commission-Jeunesse propose une quatrième semaine de vacances annuelles. D'ailleurs, ça se fait déjà ailleurs au Canada, en Saskatchewan, une province avec laquelle le Québec peut, je pense, être très avantageusement comparé sur le plan économique. En même temps, ce serait une évolution dans le même sens que le secteur syndiqué. Quand on considérait que la mesure proposée dans l'avant-projet de loi initialement représentait, pour les coûts totaux de production de l'ensemble des entreprises, 0,0 % arrondi à la première décimale, je pense que l'impact d'une telle mesure sur les finances des entreprises serait minime. (16 h 30)

L'autre point qui est un point très, très important, c'est celui des organismes à but non lucratif. On a deux réserves là-dessus et la première, qui est certainement une des plus importantes, c'est la proposition du ministre d'exempter les colonies de vacances à but lucratif de certaines dispositions de la loi. On sait que les colonies de vacances à but non lucratif sont déjà exemptées de certaines dispositions de la loi et c'est un principe que la Commission-Jeunesse peut accepter, compte tenu que les organismes à but non lucratif ont une vocation communautaire et ont le service de la communauté comme objectif, sauf que les colonies de vacances à but lucratif ont, comme toute autre entreprise, comme but ultime le profit de l'entrepreneur ou des entrepreneurs qui les exploitent. Dans ce sens-là, on ne pense pas que le.. Les arguments, d'ailleurs, qui sont soulevés par l'Association des camps du Québec pour demander cette exemption-là, ce sont la concurrence avec l'Ontario et la concurrence avec certains États américains. Bon, quand on y pense comme il faut, dans bien des secteurs, entre autres le secteur manufacturier, la concurrence se fait assez serrée avec l'extérieur et il n'est quand même pas question de ne pas soumettre les travailleurs à ces dispositions-là simplement pour minimiser la concurrence. Donc, nous demandons tout simplement le retrait de cette proposition-là.

Autre point que nous désirons soulever, et je pense que ça tient du fait qu'on est le seul groupe de jeunes aujourd'hui à venir présenter nos points en commission, c'est que, dans cette exemption-là pour les organismes à but non lucratif - bon, on accepte le principe que les organismes à but non lucratif, étant donné les arguments de service à la communauté, puissent être exemptés de la loi - ce qu'on n'accepte pas, c'est que ce soit seulement dans le cas des étudiants que cette exemption-là soit accordée. Là, on se dit: Si le principe est de permettre aux gens qui travaillent dans le milieu communautaire, pour les organismes sans but lucratif, de ne pas être soumis à certaines dispositions de la loi, on ne voit pas pourquoi ce seraient seulement les étudiants qui devraient faire ce service-là à la communauté. Donc, ce qu'on propose, c'est que le mot "étudiant" soit remplacé par un terme plus large qui sort "salarié" ou "travailleur", mais un terme qui englobe l'ensemble des travailleurs.

Le dernier point - ce sera très court -c'est seulement pour saluer l'abolition du pouvoir de règlement qui était dans la loi et qui permettait au gouvernement de fixer un salaire mini-

mum différent en fonction de l'âge. Déjà, en 1986, le gouvernement libéral avait ajusté le salaire minimum pour les moins de 18 ans et pour les plus de 18 ans. Maintenant, le pouvoir de règlement très discriminatoire qu'il y avait va être abrogé et nous accueillons cela très favorablement.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Bissonnette: Finalement, la troisième section de notre mémoire, qui a trait au temps partiel. On ne vous apprendra rien en vous disant que le nombre de travailleurs à temps partiel augmente d'année en année. En 1975, la proportion des travailleurs à temps partiel représentait 7,2 %; en 1987, c'était 13,5 % et encore cette année, elle subit une augmentation. Durant la même période de temps, la proportion de travailleurs a temps partiel voulant ou préférant travailler à temps plein est passée de 17 % à 34 %. Donc, on se retrouve aujourd'hui avec des travailleurs à temps partiel qui ne le sont pas nécessairement par choix, mais plus par obligation parce que ce sont les seuls emplois qui leur sont offerts et, également, qui reconnaissent une précarité d'emploi par rapport à bon nombre de travailleurs à temps plein. Par contre, il faut quand même garder en considération que certains de ces travailleurs-là le sont par choix, mais ce n'est pas l'ensemble de ceux-ci. Donc, on retrouve dans cette catégorie de travailleurs majoritairement des femmes et des jeunes. En 1987, parmi les jeunes de moins de 25 ans, le nombre de travailleurs représentait 20 % de l'ensemble des travailleurs au Québec. Par contre, il représentait 40 % des travailleurs à temps partiel, ce qui démontre à quel point les jeunes sont fortement concentrés dans les emplois à temps partiel.

Je pense qu'il est important de pouvoir reconnaître ce type d'emploi là dans la mesure où le travail à temps partiel répond à un besoin du marché du travail, qui est le besoin d'une main-d'oeuvre plus souple, plus flexible. Jusqu'à une certaine limite, le travail à temps partiel peut répondre à ce besoin. Par contre, dans l'état actuel des choses, bon nombre de travailleurs à temps partiel connaissent une précarité d'emploi par rapport au temps plein. Ce qui est essentiel pour la Commission-Jeunesse, c'est que, si les employeurs ont recours à du travail à temps partiel pour pouvoir répondre à un besoin de main-d'oeuvre, c'est louable. Par contre, s'ils reconnaissent dans le temps partiel un moyen de pouvoir économiser parce qu'il y a moins de normes qui les régissent par rapport aux travailleurs à temps plein, on pense qu'à ce moment-là ce sont des mesures qui favorisent la précarité de l'emploi et qu'elles ne vont plus dans le sens même de la Loi sur les normes du travail qui est d'assurer un minimum pour l'ensemble des travailleurs au Québec.

Donc, la Loi sur les normes du travail, c'est la seule loi qui permette cette protection-là à l'ensemble des travailleurs. On sait que 75 % des travailleurs à temps partiel sont non syndiqués et c'est uniquement par la Loi sur les normes du travail qu'on peut leur assurer une certaine protection. Pour nous, c'est essentiel que dans l'avant-projet de loi qui va modifier la loi - d'ailleurs, ça fait un bon nombre d'années qu'elle ne l'a pas été - on puisse prendre en compte cette réalité-là et on puisse assurer l'équité de traitement aux travailleurs à temps partiel. Donc, ces mesures-là permettraient à la fois de protéger les travailleurs et à la fois également de pouvoir limiter l'augmentation de la précarité de l'emploi chez les travailleurs au Québec.

Donc, ce qu'on demande au gouvernement par l'équité de traitement, ça se résume en deux grands volets: premièrement, l'équité salariale et, deuxièmement, l'équité quant aux avantages sociaux. Il y a également un point qu'on développera un peu qui s'appelle l'équité par rapport à l'ancienneté. Donc, différents rapports ont déjà spécifié, quant à la rémunération... Certains citent que 20 % des travailleurs à temps partiel sont discriminés par rapport à ceux à temps plein, d'autres rapports, c'est 30 %. Ce qu'on demande au gouvernement, c'est de pouvoir inclure dans son avant-projet de loi, premièrement, un chapitre spécialement pour ceux à temps partiel et, au niveau de l'équité salariale, que les employeurs doivent respecter la même échelle salariale pour l'ensemble de leurs employés, peu importe leur statut. Donc, on arrête de retrouver une échelle salariale pour le temps plein et une échelle salariale pour le temps partiel, quand on trouve dans ces deux catégories de travailleurs des gens qui font exactement le même ouvrage. À ce moment-là, ça encourage l'employeur à avoir davantage d'employés à temps partiel et ce n'est plus pour répondre à un besoin de main-d'oeuvre souple et flexible, mais c'est pour répondre à un besoin d'économie, parce que cette catégorie de travailleurs n'est pas protégée dans la Loi sur les normes du travail.

Également, au niveau des avantages sociaux, il y a cinq points importants: par rapport aux jours fériés, par rapport aux vacances annuelles, aux régimes de pension, aux régimes d'assurances et aux autres congés, également au niveau de l'ancienneté, où on retrouve dans l'ensemble de ces points une inéquité entre le temps partiel et le temps plein.

Je vais commencer rapidement, pour chacun des points, parce que je pense qu'ils sont bien clairs dans le mémoire, mais je ne voudrais pas prendre beaucoup de temps pour les expliquer pour pouvoir avoir plus de temps pour la période de questions.

Par rapport aux jours fériés, présentement la loi sur les normes permet difficilement aux employés à temps partiel de pouvoir bénéficier

des jours fériés. Nous pensons qu'il serait important de pouvoir leur accorder une indemnité proportionnelle, c'est-à-dire que dans bon nombre de cas les temps partiel n'ont pas droit à un remboursement des jours fériés alors que les temps plein, eux, y ont droit. Si on pouvait calculer au cours des quatre dernières semaines une moyenne quotidienne du nombre d'heures travaillées, il y aurait moyen, à ce moment-là, que les jours fériés puissent être remboursés également aux temps partiel.

Par rapport aux vacances annuelles, un phénomène qu'on retrouve dans certains cas, c'est que l'employeur qui a un employé à temps partiel qui travaille trois jours par semaine . calcule que son employé n'a pas besoin de semaines de vacances dans la mesure où il a déjà deux jours par semaine où il ne travaille pas. Je pense qu'on n'a pas besoin de répéter que, si l'employé est à temps partiel, c'est bien souvent parce que les deux autres journées de la semaine il fait quelque chose d'autre. Je pense que c'est important de pouvoir avoir droit à des congés. Ce qu'on demande, c'est que l'employé puisse avoir droit à ses 4 % de vacances annuelles en termes de congés payés et non pas juste en termes de paiement ou rémunération compensatoire.

Au niveau du régime de pension, la loi 116 qui a été amendée dernièrement a fait un grand pas permettant à l'ensemble des travailleurs à temps partiel qui travaillent plus de 700 heures par année, donc en moyenne 14 heures par semaine, de pouvoir participer au régime de pension. Par contre, selon Statistique Canada, en 1984, 43 % de l'ensemble des travailleurs à temps partiel travaillent moins de 700 heures par semaine, donc ne peuvent pas bénéficier de l'amélioration qui a été faite à la loi 116. Ce qui est important pour nous, c'est que, pour l'ensemble de ces employés-là qui ne peuvent pas bénéficier de la loi 116, parce qu'ils ne travaillent pas 700 heures par année, la part que l'employeur aurait fournie au régime de pension leur soit remise en indemnité salariale ou en compensation salariale. À ce moment-là, ça représenterait pour l'ensemble des employeurs, peu importe le type d'employé, le statut de l'employé, un même déboursé à faire et, à ce moment-là, on aurait des employés à temps partiel répondant à un besoin de main-d'oeuvre et non pas pour encourager la précarité.

Au niveau du régime d'assurance, on est conscients que le concept d'universalité, de façon générale, pour les employés à temps partiel est fort difficile d'application parce que bon nombre des employés à temps partiel n'ont pas la possibilité de participer au régime d'assurance-vie, au régime d'assurance-invalidité, d'assurance pour soins dentaires, et je passe les autres.

Comme solution pour établir l'équité entre les deux types d'emploi en ce qui a trait aux régimes d'assurances, on note que, dans la Loi sur les normes du travail, deux alternatives sont offertes aux employés. Donc, premièrement, permettre à l'employé à temps partiel de participer aux régimes d'assurances avec les mêmes cotisations qu'un employé à temps plein, si c'est son désir. Même si ses cotisations vont être plus élevées par rapport à son salaire hebdomadaire, si lui, par choix, décide de participer aux régimes d'assurances, je pense que ce serait un droit qu'il devrait avoir et qu'il n'a pas présentement. Deuxièmement, pour les employés à temps partiel qui considèrent que cette cotisation représente un pourcentage trop élevé par rapport à leur salaire, qu'on puisse leur permettre de participer aux régimes d'assurances, mais suivant un taux de cotisation moindre, c'est-à-dire un taux qui soit ajusté à leur revenu hebdomadaire. Il est évident qu'à ce moment-là l'indemnisation ou les compensations des assurances seraient moindres parce que la cotisation de l'employé serait moindre, mais, par contre, ça permettrait quand même à l'employé d'avoir droit à certains privilèges que les employés à temps plein ont et qu'eux n'ont pas.

Quant aux autres congés, dans l'avant-projet de loi, déjà le ministre a aboli l'exigence de 20 semaines de service continu pour avoir droit au congé de maternité, ce qui marque un grand pas pour les employées à temps partiel, parce que, sur ce volet-ci, elles deviennent maintenant au même statut que les employées à temps plein.

Quant à l'ancienneté, l'action que la Commission-Jeunesse réclame est l'instauration d'une règle de prorata, c'est-à-dire que l'ancienneté doit être comptabilisée sur une même liste pour les temps partiel que pour les réguliers. Évidemment, il va de soi que les temps plein accumulent l'ancienneté plus vite que les temps partiel peuvent le faire, mais, par contre, ce qui est important, c'est qu'on puisse retrouver une équité dans ces deux types d'emploi. Donc, un employé à temps partiel, suivant ce principe, deviendrait au même statut qu'un employé régulier et sa période d'heures accumulées lui permettrait de pouvoir calculer lui aussi son ancienneté. Ce qu'on soulève dans ce volet, c'est que bon nombre de temps partiel, lorsqu'ils accèdent à un statut de temps plein, perdent l'ensemble de l'ancienneté qu'ils ont pu accumuler à temps partiel parce que l'entreprise calcule deux échelles d'ancienneté. Donc, la personne va faire 5 ans comme employée à temps partiel, mais, quand elle accède à un statut comme employée à temps plein, si c'est le cas, elle retombe à l'ancienneté zéro parce que l'entreprise avait calculé ça. Donc, pour bon nombre d'employeurs, quand ça devient trop dispendieux d'avoir à offrir des avantages marginaux, ils transfèrent les gens à un statut de temps plein et repartent leur ancienneté à zéro. Le principe qu'on développe, c'est qu'il devrait y avoir une seule échelle d'ancienneté et,

peu importe dans quelle catégorie d'employés on se retrouve, que notre ancienneté puisse être cumulée.

Pour résumer l'ensemble, ce dont on parle, c'est d'une égalité de traitement et l'étude sur l'égalité salariale et l'octroi des avantages sociaux aux personnes travaillant à temps partiel, qui a été publiée par le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, définissait l'égalité de traitement ainsi: II y a égalité de traitement lorsque le coût horaire pour couvrir le salaire, la cotisation au régime de pension, la rémunération des jours chômés, la cotisation aux régimes de protection du revenu, est identique. À cette liste, nous ajoutons les cotisations au régime d'assurances et tout avantage social monnayé. Donc, ce qui est important pour nous - et je le répète, parce que c'est un point fondamental - la seule loi qui peut protéger les travailleurs à temps partiel, quand on sait que 75 % d'entre eux sont non syndiqués, c'est la Loi sur les normes du travail, et c'est important que dans cet avant-projet de loi on puisse ajouter un chapitre pour les protéger. Que le temps partiel réponde à un besoin du marché du travail, je pense qu'il va falloir s'adapter aux défis qui s'en viennent pour les années à venir, mais il ne faudrait vraiment pas que les emplois à temps partiel augmentent d'année en année uniquement parce que ça coûte moins cher aux employeurs d'avoir ce type d'employé, et qu'à ce moment-là on crée deux types de travailleurs au sein même de l'entreprise. Je pense qu'en ne faisant pas un chapitre spécial dans l'avant-projet de loi, on n'est pas conscients de l'impact que ça peut créer au sein des entreprises et des conséquences que ça peut avoir à long terme.

C'étaient, grosso modo, nos positions que Benoit vous a spécifiées et nos commentaires quant aux congés parentaux. Un point important pour nous, ce sont les colonies de vacances à but lucratif. Si on ouvre la porte à ce dossier-là, à ce moment-là, on vient d'ouvrir la porte à l'ensemble des entreprises qui se considèrent en concurrence avec l'Ontario ou l'État de New York. On enlèverait la Loi sur les normes du travail et je pense que l'objectif de la Loi sur les normes du travail est . d'assurer un minimum pour tous les Québécois. Si on commence à exempter davantage d'entreprises de ce minimum, c'est dire qu'on préfère encourager le profit des entreprises plutôt que le bien-être des travailleurs qui sont à l'intérieur et, bien sûr, pouvoir voir également le temps partiel inscrit dans l'avant-projet de loi.

La Présidente (Mme Marois): merci de votre intéressante présentation. j'inviterais le ministre, la ministre, leurs collègues à poser des questions et à échanger chacun pendant dix minutes. d'accord?

M. Bourbeau: Mme la Présidente, vous comprendrez que c'est avec un plaisir...

La Présidente (Mme Marois): Je n'en doute pas. Ça m'étonnerait, d'ailleurs, que ce soit le contraire. Ha, ha, ha! (16 h 45)

M. Bourbeau: ...certain que j'accueille notre jeunesse, le seul groupe de jeunes qui se présente devant la commission. Il y a beaucoup de choses qu'on pourrait dire. D'abord, je tiens à vous féliciter pour le sérieux du travail accompli. Pour parler un peu du temps partiel, pour tenter d'amener un peu d'éclairage sur cette problématique, on doit dire que la loi, telle qu'elle existe présentement, s'applique autant aux travailleurs à temps partiel qu'aux travailleurs à temps plein en ce que sens que les travailleurs à temps partiel ont droit à une protection, par exemple, au salaire minimum, aux 4 % de vacances, à tout ce qui est minimum. Mais c'est quand on veut excéder le minimum que, là, il peut y avoir une discrimination. Par exemple, dans le régime actuel, un employeur pourrait payer, pour une même tâche, 8 $ l'heure pour une caissière à temps plein, puis payer le salaire minimum pour une caissière à temps partiel ou un caissier. C'est là que le bât blesse un peu, un peu beaucoup, je dois le reconnaître, et on a dit dans les documents que, justement, on sollicite l'avis des intervenants afin d'éventuellement introduire dans la loi des articles à ce sujet-là.

Il y a un sujet que j'aimerais porter à votre attention, c'est la question de l'ancienneté. Vous proposez de comptabiliser l'ancienneté en fonction du nombre de jours travaillés au lieu du service continu, ce qui est la pratique actuelle, aux fins, notamment, des vacances et des recours. Or, dans la loi actuelle, de la façon qu'on la comprend, les personnes qui travaillent à temps partiel... Par exemple, vous travaillez à temps partiel pendant cinq ans, vous avez, à toutes fins pratiques, vos cinq années de service continu. Donc, la loi actuelle est plus avantageuse que ce que vous proposez en ce sens que, si on ne compte que le nombre de jours travaillés, le prorata, on pourrait aller à dix ans peut-être avant d'avoir droit aux recours. Alors, la loi actuelle semble donc concéder plus de droits que ce que vous proposez. Je ne sais pas si vous interprétez ça comme ça aussi.

M. Bissonnette: Si vous me permettez de répondre. Sur ce point de l'ancienneté, ce qui est essentiel pour nous, c'est que dans bon nombre de cas, quand l'employé passe du statut à temps partiel au statut à temps plein, il perd l'ensemble de l'ancienneté qu'il a pu avoir parce que l'employeur calcule sur deux échelles d'ancienneté: donc, une échelle d'ancienneté pour les temps plein et une échelle d'ancienneté pour les temps partiel. Si l'échelle d'ancienneté était la même pour les deux types de travailleurs, à ce moment-là, peu importe quand l'employeur à

temps partiel passera au statut de travailleur à temps plein, il ne perdra pas l'ensemble de l'ancienneté qu'il a pu accumuler. C'était le point qu'on voulait soulever dans ce volet-là.

M. Bourbeau: Alors, là, je tente de savoir de mes experts en arrière comment ça fonctionne. On me dit qu'évidemment, s'il y a des conventions collectives, ça peut être différent, mais d'après la loi générale... La loi générale s'applique à tout le monde. Il faudrait peut-être qu'on précise ça un peu. Mais, de toute façon, sur ce point précis, peut-être que ça vaudrait la peine qu'on en discute, que vous en discutiez ou qu'on en discute ensemble pour voir s'il n'y a pas une injustice, même une illégalité peut-être.

Les congés de courte durée. Là, vous proposez cinq jours rémunérés, congés à la naissance, alors que, dans la loi actuelle, il n'y a aucun jour rémunéré et deux jours sans solde. Nous faisons, je pense, un pas en avant important en disant: Le statu quo, c'est deux jours sans solde; on propose deux jours avec solde et trois jours sans solde. Vous, vous voulez faire une marche encore plus grande, cinq jours rémunérés. Évidemment, ce serait l'idéal, bien sûr, quoiqu'on pense que la marche pourrait être un peu haute en ce sens qu'on serait certainement la seule province à proposer un système comme celui-là. Ce que j'en sais, c'est qu'actuellement il n'y a aucune province canadienne qui ne propose aucun jour rémunéré. Il n'y aurait que le Nouveau-Brunswick qui a un congé parental de sept jours consécutifs sans solde, disons une semaine sans solde. Il pourrait peut-être y avoir un danger là-dedans. Si on est la seule province qui le fait ou, enfin, s'il n'y en a pas d'autres qui le font, et qu'on prend une telle avance, est-ce que vous ne pensez pas que ça pourrait inciter un employeur à discriminer à l'encontre d'une jeune femme, par exemple, en âge de procréer en disant: Si c'est pour me coûter une semaine à chaque naissance, peut-être qu'on serait portés...

Mme Harel: C'est son mari.

M. Bourbeau: Oui, je m'excuse, je m'excuse.

Mme Harel: C'est son conjoint, pas le mari.

M. Bourbeau: Vous avez bien raison. On serait portés à engager des...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Des femmes, des gens qui ne sont pas de jeunes couples, autrement dit, qui n'ont pas de jeunes femmes en âge de procréer.

Mme Harel: On peut être un vieil homme et procréer quand même.

M. Bourbeau: Oui, effectivement.

Mme Trépanier: Alors, on va être encore privilégiées.

M. Bourbeau: Alors, je reviens. On serait portés, disons, dans l'embauche, à privilégier des gens, hommes ou femmes, enfin, disons, qui ne seraient pas le conjoint d'une personne qui pourrait se situer dans cette situation-là. Enfin, je vous laisse ça comme question, je ne sais pas ce que vous en pensez.

M. Savard: Vous disiez que la marche était haute un peu et qu'on ne retrouvait pas ça dans les autres provinces. C'est peut-être justement parce qu'on est une société distincte qu'on ne le retrouve pas ailleurs, dans un premier temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savard: D'autre part, sérieusement...

M. Bourbeau: Une réponse un peu facile, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: On parle de la compétitivité des entreprises aussi.

Une voix: Un à zéro. Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça ne vous enlève pas de moyens, M. le ministre.

M. Savard: Non, sérieusement...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: On pensait que c'était sérieux.

M. Savard: J'étais sérieux, mais maintenant pour passer à autre chose de moins sérieux, donc. Cinq jours, peut-être que la marche est un peu haute, mais, comme on l'a argumenté tout à l'heure, on croit que ça n'aurait pas un effet à ce point dommageable pour la masse salariale des entreprises. Il faut regarder ce qu'on peut apporter de positif dans cette mesure. Si on considère, par exemple, que la femme, lors de l'accouchement, va peut-être passer deux ou trois jours à l'hôpital, alors, cette semaine, justement, de congé pourrait servir d'espèce d'adaptation, dans le cas tout particulièrement d'un premier enfant et même dans le cas d'un enfant supplémentaire. Lors de ces premières journées, lors de ces deux journées payées, rémunérées, on croit que c'est insuffisant. Trois jours non rémunérés, ça pénalise, d'une certaine façon, financièrement le couple. Nous, ce qu'on demande, c'est que le

couple ne soit pas pénalisé, à tout le moins durant une semaine, de façon financière et qu'il puisse bénéficier de cette période pour, justement, s'adapter à la situation nouvelle qui vient de se créer.

M. Bourbeau: Écoutez, moi, je ne suis pas du tout opposé à ça. Vos arguments sont très valables. Il s'agira de peser ça avec le marché, disons, pour voir ce qui est possible. Il y a la question des droits de recours après deux ans plutôt qu'après cinq ans. Je dois dire que vos arguments sont assez convaincants. Vous proposez deux ans, je crois. Est-ce que c'est deux ans?

Une voix: Oui.

M. Bourbeau: Pourquoi deux plutôt qu'un, plutôt que trois? Est-ce que "deux", c'est la conclusion d'une étude exhaustive ou si c'est...

Une voix: Nos actuaires.

M. Dumont: La Commission-Jeunesse n'a pas dans ses budgets la possibilité d'engager des actuaires. Non, c'est un...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dumont: Si on regarde les statistiques, et je pense qu'on a un tableau à la page 10 qui donne une certaine idée de ça, si on regarde les pourcentages entre un et cinq ans, c'est la colonne la plus haute, ce qui fait qu'on pense qu'en ramenant à deux ans la ligne de démarcation, on pourrait inclure un nombre important de travailleurs là-dedans. Maintenant, pour ce qui est de la ramener à un an, on ne militera certainement pas pour s'y opposer. On pensait qu'un an, pour faire la part des choses, peut-être que pour l'entrepreneur, un an, c'est une période qui lui... En tout cas, il est peut-être encore dans une période de vérification de son employé. Donc, c'est en ce sens qu'on a fixé deux ans comme étant une limite, mais c'est surtout en fonction du tableau de la page 10 qui nous montrait qu'une grande proportion de travailleurs allaient être inclus maintenant, qui allaient pouvoir bénéficier d'un tel droit de recours.

M. Bourbeau: C'est sûrement une proposition qui est très intéressante, je dois dire, et sur laquelle on va se pencher attentivement. C'est un des points, je pense, où il y aura lieu de pousser la réflexion au cours des prochaines semaines avant d'accoucher d'un projet de loi définitif. Mais je retiens la recommandation au sujet du droit à des recours après une période moins longue que cinq ans.

On pourrait peut-être passer aux colonies de vacances, si vous voulez. Là, évidemment, pourquoi est-ce qu'on arrive avec cette propo- sition? C'est un peu parce que, dans la loi actuelle, on fait déjà une exception pour les colonies de vacances à but non lucratif, pour les étudiants, entre autres, et qu'on a eu des représentations, bien sûr, des colonies de vacances à but lucratif qui prétendent que ça fait une compétition un peu difficile, même déloyale, et que ça les met dans une position... Bon. On n'a pas tellement l'intention de privilégier l'entreprise privée à ce point qu'on va aller chercher les colonies de vacances plutôt que d'autres entreprises, mais il reste quand même que c'est un type d'entreprises un peu particulier qui ne doit pas être si lucratif que ça, même si on peut appeler ça lucratif à l'occasion. Ça joue un rôle important dans la société, les colonies de vacances. Il y a la compétition, bien sûr, avec les colonies de vacances dans les autres provinces ou dans les États limitrophes.

Alors, c'est la raison pour laquelle on s'est rendu aux arguments de ceux qui nous ont fait valoir que c'était un peu injuste que de traiter différemment les colonies de vacances à but lucratif. Mais le point sur les étudiants, ça, je dois dire que c'est un peu plus difficile de dire pourquoi on discrimine, chez ces travailleurs-là par rapport aux étudiants plutôt qu'à ceux qui ne le sont pas. Je dois dire, quant à moi, que la loi actuelle a été faite comme ça, puis on a simplement étendu la loi aux colonies de vacances à but lucratif. On va regarder attentivement les raisons profondes, on va retourner dans l'histoire, qui ont fait qu'on a "zoomé" sur les étudiants et non pas sur les autres. Probablement qu'on pourrait soit l'étendre à tous les employés ou, enfin, avoir un traitement plus équitable.

M. Dumont: Pour ce qui est des colonies de vacances, si je peux y revenir, c'est que j'insiste sur la distinction entre les objectifs des deux sortes d'entreprises. C'est-à-dire que si j'accepte de travailler 75 heures/semaine à 2 $ l'heure pour une entreprise à but non lucratif, c'est que la marge qu'il y a entre ce que j'accepte de faire et ce que les normes minimales du travail pourraient m'assurer, si j'y étais soumis, je le fais comme un service à la communauté, alors que si je travaille pour un organisme à but lucratif ce travail supplémentaire, entre guillemets, c'est du "cheap labour", ça veut dire que je le fais pour participer aux profits de l'entrepreneur en question, et c'est là que nous autres, on en a.

M. Bourbeau: oui, je comprends. disons que l'exemple est odieux un peu, là, 75 heures à 2 $ l'heure. je serais plutôt porté à penser que c'est...

Une voix: Un million d'heures, un million de piastres.

M. Bourbeau: Oui. Enfin, j'aimerais bien

penser que ce n'est pas à 2 $ l'heure, que c'est plutôt le nombre d'heures par rapport... J'espère que le salaire est au moins le salaire minimum. Mais c'est un point de vue qui se défend, c'est un point de vue qui se défend. On va réfléchir à ça profondément.

M. Bissonnette: Sur l'argument des camps de vacances du Québec comme quoi la concurrence, par rapport à l'État de New York ou à la province de l'Ontario, est grande, on accède très peu à cet argument-là. Je crois que si les familles québécoises envoient leurs enfants dans des camps, justement, ontariens ou américains, c'est beaucoup plus une question de leur permettre d'apprendre une langue seconde qu'une question de coût moindre parce que, ce qu'ils ont à débourser pour aller conduire leur enfant là-bas et pour autre chose, je ne crois pas que ce soit vraiment sur la base, par rapport au prix que peut coûter une semaine de vacances. On veut réitérer aussi ce qui est important pour nous. Quand, en tant que travailleur, je décide de travailler pour le camp Centraide qui permet, pour les enfants qui sont atteints de paralysie ou pour les enfants à faible revenu, d'avoir deux semaines de vacances, moi aussi, en tant qu'individu, je fais un service à la communauté, comme le camp à but non lucratif le fait. Sauf que pour un camp à but lucratif, sur la seule raison de la concurrence, si on ouvre la porte à ça, sur ce cas-ci, si on lui ouvre la porte, c'est qu'on ouvre la porte à bon nombre de cas par après. Et je pense que ça peut être dangereux, parce que la Loi sur les normes du travail, dans la mesure où c'est un minimum, je ne vois pas en quoi ça peut tant affecter l'employeur que ça.

La Présidente (Mme Marois): D'accord. Merci.

M. Bourbeau: C'est un argument qui a pas mal de poids, je dois dire.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous plaît.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis contente de vous rencontrer, M. Bissonnette - je vous ai entendu à la radio sur le lac Meech, puis je trouvais ça bien intéressant - M. Savard et M. Dumont...

M. Bourbeau: On est dans les colonies de vacances, là; ce n'est pas le lac Meech.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): On peut discuter aussi du lac Meech.

Mme Harel: Est-ce qu'il y en a un de vous trois qui est parent? M. Savard: Moi.

Mme Harel: Ah! il me semblait, M. Savard, que vous en parliez en connaissance de cause, de ces jours...

M. Savard: C'était mon argument ultime.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savard: Je le gardais en réserve.

Mme Harel: Alors, je vais vous poser une question. J'ai bien des questions à vous poser. Je considère que la contribution que vous faites à notre commission sur tout l'aspect temps partiel est vraiment très très très importante, mais d'abord, une question à vous, M. Savard. Est-ce que vous pensez que les jeunes chefs de famille de moins de 35 ans qui, on le sait, ont les revenus qui ont le moins augmenté, pour ne pas dire qu'ils ont été stationnaires ou ils ont diminué en termes de pouvoir d'achat relatif, ont les moyens de se prévaloir d'un congé de longue durée sans solde?

M. Savard: Je ne veux pas faire de mon cas un cas particulier, mais je ne serais pas capable de me prévaloir d'un congé sans solde de ce nombre de semaines.

Mme Harel: D'accord. Merci.

M. Savard: C'est...

Mme Harel: Merci, merci, c'est tout.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: J'ai trop d'autres questions.

M. Savard: Non, non, je veux quand même...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Allez-y.

M. Savard: Non, je veux quand même poursuivre.

Mme Harel: Non, non, je vous donne la parole. Allez-y.

La Présidente (Mme Marois): Allez-y, M. Savard. (17 heures)

M. Savard: De façon très honnête, il est effectivement possible que beaucoup de jeunes couples ne soient pas en mesure, justement, de se payer ce congé sans solde de plusieurs semaines. Toutefois, chose qu'il n'y avait pas avant,

c'est que ce n'était pas à la disposition des travailleurs, des jeunes travailleurs comme des travailleurs seniors, pour ne pas dire des travailleurs âgés. Sauf que maintenant, c'est à la disponibilité de ces gens-là. Il y a possibilité maintenant, quitte à faire certains sacrifices. Moi, je serais peut-être prêt à le faire durant un certain nombre de semaines, non pas 34 semaines dans mon cas, c'est évident, sauf que peut-être quelques semaines, je le ferais. Alors, là, la porte est ouverte. Il s'agit de concilier tout ça ensemble: la carrière, les enfants, le contexte familial, le contexte du couple. Je crois que...

Mme Harel: Est-ce que vous considérez que les exigences de conciliation sont les mêmes pour vous que pour votre conjointe?

M. Savard: Dans un couple, en tout cas... Je ne veux pas qu'on fasse de mon cas un cas type, mais je veux dire que les questions de couple se règlent entre couple, à mon avis.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savard: Vous riez, mais ce n'est pas toujours évident. Ha, ha, ha!

Mme Trépanier: On est entre nous.

La Présidente (Mme Marois): Personne ne nous écoute dans...

M. Savard: Non, je crois que justement, je veux dire... La possibilité est offerte aux deux. Maintenant, ce sera une question très personnelle et très individuelle en ce qui concerne ces personnes concernées. Ce sera aux personnes concernées de décider selon leur cas, je veux dire. Si mon épouse ou si l'épouse de quelqu'un décide, elle, de demeurer à la maison, c'est son choix. C'est à la lumière de ces faits-là que le couple va décider.

Mme Harel: Évidemment, c'est un choix qui n'est possible qu'à la lumière d'une rémunération ou d'un manque à gagner qui ne soit pas trop important. Comme on sait que déjà les travailleuses font 70 % du revenu d'un travailleur, donc, déjà, pour un congé de maternité de longue durée sans solde, il y a toujours la possibilité de versement de l'assurance-chômage mais encore faut-il avoir eu 20 semaines de service continu chez le même employeur. Il y a 50 % des Québécoises qui ont accouché l'an passé et qui n'ont pas touché une seule prestation. Et on pense qu'un bon nombre de celles-là, finalement, travaillent soit comme travailleuses autonomes ou à des emplois qui ne permettent pas, notamment à temps partiel, d'accumuler, même si elles ont droit à l'assurance-chômage, un revenu qui, d'une quelconque façon, leur permette de laisser le marché du travail. De toute façon, on a entendu beaucoup d'intervenants toute la journée. Je pense que, sans exception ou presque, on a passé une journée complète sur cette question-là et, comment vous dire, c'est un consensus extrêmement large qu'il ne faut pas que ce soit une coquille législative vide, les dispositions sans solde. Puis, il faut donc qu'il y ait toutes sortes de formules qui soient proposées pour qu'il y ait une rémunération ou, en tout cas, pour qu'il y ait une compensation du manque à gagner, comme c'est le cas si on a un accident de travail ou un accident d'automobile ou, enfin, toutes les autres prestations de notre régime de sécurité sociale.

Pardon, excusez-moi. Il y a une chose que je veux absolument savoir de vous. Vous avez parlé des exclusions, avec raison. Vous avez bien illustré qu'il ne devait pas y en avoir, notamment en matière, comment dit-on, de vacances, de colonies de vacances. J'avais pensé que vous nous parleriez aussi de l'élimination de la discrimination salariale à l'égard des jeunes, particulièrement dans les clauses grands-pères. Vous avez déjà fait valoir votre point de vue, il n'y a pas très longtemps, à l'égard des conventions collectives. Mais, finalement, c'est une pratique qui n'est pas interdite dans la Loi sur les normes du travail et qui ne l'est pas dans i'avant-projet non plus. Des groupes sont venus devant la commission recommander qu'à la suite d'une sorte de période de normalisation il y ait un certain délai de transition, mais que toutes les dispositions qui établissent des conditions inférieures pour les nouvelles personnes salariées soient réputées illégales après un certain temps à la suite de l'adoption de la loi. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Bissonnette: Je pense que ce qui a trait aux clauses grands-pères, c'est un dossier qui nous touche à coeur qu'on a discuté dans le cadre du congrès jeunes de notre parti, en 1987, et maintenant qu'on a un engagement électoral ferme qui a eu lieu pendant la dernière campagne électorale. Sauf que, quand il y a une clause grand-père ou une clause orphelin, peu importe le libellé qu'on veut bien lui donner, c'est quand il y a bel et bien une convention collective de signée. À ce moment-là, on fait nos pressions beaucoup plus pour avoir des amendements au Code du travail que sur la loi des normes minimales du travail.

Mme Harel: Paraît-il que c'est une pratique... L'organisme Au Bas de l'échelle qui reçoit un assez grand nombre... Enfin, il ne reçoit pratiquement que des bas salariés et il semble, en tout cas, nous indiquer qu'il y a des rémunérations inférieures qui sont souvent faites aux nouveaux employés. Ils ne sont pas nécessairement jeunes, mais ils sont nouveaux et ils ont tendance à être jeunes. C'est une pratique qui vaut aussi pour les non-syndiqués.

M. Bissonnette: Quand on parte, autant pour les emplois à temps partiel que pour les emplois à temps plein, d'avoir une seule et même échelle salariale, peu importe, quand c'est un emploi comparable, je pense que si on apportait cette modification-là pour les emplois à temps partiel, automatiquement, on réglerait le problème par la clause grand-père.

Mme Harel: Non, parce que la clause grand-père... C'est-à-dire qu'offrir des conditions inférieures peut aussi se pratiquer dans des emplois à temps complet.

M. Bissonnette: Oui, absolument, mais si on peut inclure que, pour un emploi égal, le salaire soit égal, donc pour un emploi comparable, le salaire soit égal, à ce moment-là, oui, on protège le temps partiel et, à ce moment-là, on protégerait également les employés à temps plein qui vont avoir la même définition de tâches. Donc, on va faire d'une pierre deux coups, et je suis certain que le ministre va donner suite à cette demande fort pertinente.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Marois): Par ailleurs.

Mme Harel: D'accord. Vous avez peut-être omis, je ne sais pas si vous y avez réfléchi, de parler de cette autre exclusion des personnes assistées sociales qui participent à certains programmes gouvernementaux, de développement de l'employabilité, et qui sont exclues de l'application de la loi. Est-ce que vous y avez réfléchi?

M. Bissonnette: C'est un domaine qu'on n'a pas abordé du tout dans le mémoire, et je dois vous avouer qu'il nous manque de l'information pour pouvoir commenter sur ce point technique présentement.

Mme Harel: Parce que plusieurs intervenants finalement, notamment la FTQ, la CEQ, ont recommandé que les participants à des programmes de développement de l'employabilité soient aussi assujettis pour ne pas qu'il y ait deux catégories, finalement, de personnes dans notre société: celles qui n'ont aucun droit et celles à qui on en reconnaît quelques-uns.

D'autre part, je pense que c'est M. Dumont, vous avez dit que c'était très très positif, les dispositions dans l'avant-projet de loi concernant les recours. Vous avez parlé, entre autres, de la médiation. Vous avez parlé aussi de la représentation possible par la Commission. Et puis, ça vous semblait extrêmement nouveau, mais peut-être ignoriez-vous que déjà la Commission avait le pouvoir de représenter et que, fondamentalement, entre l'avant-projet de loi et la loi actuelle, le pouvoir reste le même. Il n'y a pas plus d'obligation de le faire. Il y a juste un pouvoir que la Commission peut, à son libre arbitre, là, occuper ou non. Et d'autre part, la médiation, ça a été un sujet très très controversé, parce que beaucoup d'intervenants disent: C'est une protection de base minimale et ça n'a pas à être négocié. La Commission des droits, la Commission des normes, plutôt, n'a pas à faire de la médiation. Le salaire minimum, il se paie, on n'a pas à négocier ou à faire de la médiation. Et il en va de même pour les congédiements illégaux, etc., et qui recommandent que la Commission ne soit pas dans un rôle de neutralité, mais qu'au contraire la Commission, activement, ait à appliquer cette protection de base minimale. Alors, j'aimerais ça peut-être vous entendre là-dessus.

M. Dumont: Ah! bien, je ne pense pas que la Commission soit dans un rôle de neutralité dans la situation actuelle où on dit que la Commission va représenter des travailleurs pour faire valoir leur cause.

Mme Harel: Peut, peut représenter. On le dit, c'est dans la loi actuelle aussi.

M. Dumont: O.K. Maintenant, si je ne me trompe pas, c'est que cette disposition-là était dans la loi actuelle, sauf que pour des... Bon, ça avait été contesté juridiquement, il y avait eu des problèmes de cet ordre-là, et là, bon, on veut confirmer ce pouvoir-là à la Commission. Ce que, nous, on disait en demandant que les ressources humaines nécessaires soient consenties, ça va dans le même sens que ce que vous avancez. C'est-à-dire que la Commission peut ou doit, mais présentement la Commission peut, si les ressources humaines nécessaires y sont consenties. Il me paraît évident que la Commission non seulement va pouvoir, mais va aller de l'avant et puis va, avec les ressources humaines nécessaires, appliquer ces ressources humaines là à cette tâche-là.

Mme Harel: Je ne sais pas si vous, vous avez eu des garanties d'amélioration, en termes d'augmentation du personnel, mais la grande crainte des intervenants qui connaissent tout ce domaine-là, c'est qu'il y ait engorgement, parce qu'il n'y a pas de garantie qu'il y aurait pour autant une augmentation du personnel.

M. Dumont: Oui.

Mme Harel: Donc, vous sembliez tellement contents, j'ai pensé que vous saviez peut-être des choses que, moi, j'ignorais.

M. Dumont: Bien, on n'a pas de garanties. Si on avait des garanties, on n'aurait pas inclus cette inquiétude-là dans notre mémoire, mais on espère que d'ici peu, en réponse à notre demande

d'affecter les ressources humaines nécessaires, le ministre nous donnera les garanties qu'ils vont pallier ces inquiétudes-là.

Mme Harel: Ah! vous êtes très très habiles! Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: L'autre aspect, c'est peut-être toute la question des délais. Bon, vous proposez des modifications: par exemple, deux ans pour avoir droit au recours de congédiement sans cause juste et suffisante plutôt que les cinq ans actuels; vous faites valoir que, finalement, au-delà de 65 %, je crois, des employés non syndiqués ne complètent pas les cinq ans de service continu. Et, finalement, si on souhaite s'ajuster aux législations des voisins d'à-côté, par exemple, la législation ontarienne - non, c'est le Code canadien plutôt - on prévoit, même sur le territoire québécois, pour les travailleurs assujettis aux entreprises de juridiction fédérale, un an de service continu. C'est un an de service continu pour à peu près tout, si vous me le permettez: un an de service continu pour les vacances, un an de service continu pour les recours, un an de service continu de façon que l'application d'une telle loi, parce qu'elle peut valoir... On dit que le tiers des bas salariés ont des conditions de travail inférieures aux normes et les droits qu'on peut adopter peuvent ne jamais être appliqués parce qu'il peut y avoir un risque de représailles et la personne va mettre dans la balance la peur qu'elle a de les faire appliquer en regard des avantages ou des inconvénients que ça va représenter et c'est peut-être intéressant.

On me fait valoir que, par exemple, toutes les conventions collectives prévoient que c'est six mois à un an - ça ne varie pas plus que ça - la période où on n'a pas droit à des procédures de grief. Est-ce qu'il n'y aurait pas intérêt - comme on s'interroge à la commission, je pense bien que le ministre aussi doit s'interroger, je l'espère - à ce qu'il n'y ait pas toutes sortes de délais différents pour que la personne soit obligée quasiment d'aller voir un avocat ou un spécialiste des normes pour savoir après combien de délais j'ai droit à un congé; une vacance, c'est après combien de temps, un recours, etc., de façon qu'un an, ça devienne le délai normal après lequel on a ou pas droit à certains avantages? Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Bissonnette: Quand je vois, Mme Harel, que vous comparez avec d'autres exemples d'autres provinces canadiennes, je me dis: II doit y avoir un intérêt quelconque. Moi, je pense que la raison pour laquelle on a fixé deux ans, c'était justement pour ne pas faire la marche trop haute, donc, passer de cinq ans à deux ans, sauf que dans la mesure où l'ancienneté d'un an serait présente dans d'autres mesures, contre la vertu, on n'en aurait certainement pas. Donc, je pense que oui, dans la mesure où un employeur qui a un employé, après trois mois, ordinairement, ou six mois, il va déjà savoir si, oui ou non, il est intéressé à le garder ou non ou s'il est compétent ou non. La différence de deux ans à un an, on pourrait très bien, là, être d'emblée avec une proposition pour un an. Là-dessus, on peut s'entendre.

Mme Harel: Ça, là-dessus, on pourrait s'entendre.

M. Bissonnette: C'est ça.

Mme Harel: Alors, je veux vous remercier pour votre contribution. Ça a été bien intéressant.

M. Bissonnette: Merci.

La Présidente (Mme Marois): M. le ministre, ça va?

M. Bourbeau: Oui, ça va très bien. Vous me permettrez, Mme la Présidente, de remercier et de féliciter nos amis, les jeunes du Parti libéral du Québec, pour une contribution extrêmement positive. Je peux vous assurer que plusieurs des choses dont vous avez parlé, on va en rediscuter intensément entre nous dans les prochaines semaines.

M. Bissonnette: Merci.

La Présidente (Mme Marois): Merci de nous avoir apporté aussi votre expérience de personnes plus jeunes, sans doute, sur le marché du travail. Ça a été très apprécié. Merci. Et de parents, aussi.

J'inviterais maintenant les personnes représentant le Conseil québécois du commerce de détail à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.

On va suspendre pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

(Reprise à 17 h 18)

La Présidente (Mme Marois): C'est ça, vous vous présentez, vous vous identifiez auprès des gens de la commission et vous présentez les personnes qui vous accompagnent. Vous avez ensuite une vingtaine de minutes pour présenter votre point de vue. Par la suite on procédera à des échanges de propos avec vous.

Conseil québécois du commerce de détail

M. Lafleur (Gaston): Merci, Mme la Présidente. Mon nom est Gaston Lafleur. Je suis

président et directeur général du Conseil québécois du commerce de détail. Les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, à ma gauche immédiate, Mme Ginette Bazzocchi, à ma gauche éloignée, M. Normand Gascon et, à ma droite, M. Michel Fournier.

Dans un premier temps, j'aimerais remercier les membres de la commission de nous donner l'occasion d'exprimer le point de vue du Conseil québécois du commerce de détail sur la question relative aux normes du travail. Le Conseil québécois du commerce de détail est un mécanisme à but non lucratif qui regroupe l'ensemble du secteur du commerce de détail au Québec, le secteur du commerce de détail qui, en termes économiques, regroupe environ 325 000 salariés qui représentent une masse salariale supérieure à 4 500 000 000 $ au Québec et qui représente, en termes d'établissements commerciaux, environ 67 000 établissements commerciaux.

Nous avons indiqué dans notre mémoire que nous avions eu l'occasion d'étudier le mémoire du CPQ, le Conseil du patronat du Québec. Nous savons que le CPQ sera là demain matin. Afin de répondre aux exigences de temps auxquelles la commission doit faire face, nous nous limiterons uniquement aux aspects que nous avons soulevés, article par article, dans notre mémoire.

La manière dont nous avons l'intention de procéder serait la suivante. M. Fournier, à ma droite, va traiter de l'aspect du préavis de douze heures de temps supplémentaire et aussi de la question du paiement en temps supplémentaire en temps. M. Gascon va nous parler de l'aspect du congé annuel et il va aussi traiter de l'article 811 concernant le congé de naissance et d'adoption et le congé du statut parental, les cinq jours de congé de statut parental. Mme Bazzocchi va entretenir la commission sur l'aspect du congé parental de longue durée, l'article 81.3 et M. Gascon nous parlera, en dernier lieu, de la présomption créée par l'article 45 ainsi que la recommandation relative à la fête nationale.

En ce qui me concerne, j'aimerais immédiatement situer la commission sur un aspect qui concerne la question du temps partiel. Pour les gens de la commission, comme vous le savez, le Conseil québécois, à ce moment-ci, n'a pas fait d'étude et ne se prononce pas sur la question du temps partiel, mais a indiqué au ministre son intention de collaborer avec lui dans une démarche qui devrait approfondir ce dossier extrêmement complexe. Par conséquent, je demanderai aux gens de la commission, si possible, de ne pas nous questionner sur l'aspect du temps partiel. Sur ce, je vais céder la parole à M. Fournier.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Lafleur: En passant, excusez-moi, pour vous identifiez un peu les secteurs d'activité économique dont on parle...

La Présidente (Mme Marois): Oui

M. Lafleur: ...M. Fournier représente une entreprise, un magasin à rayons important au Québec et au Canada, Mme Bazzocchi représente le secteur des pharmacies détaillantes et M. Gascon représente le secteur de la distribution et du détail alimentaire. Nous n'avons couvert qu'une légère partie, étant donné le nombre de chaises restreint.

La Présidente (Mme Marois): Ha, ha, ha!

M. Gascon (Normand): Je vais céder la parole à mon collègue.

La Présidente (Mme Marois): En autant que votre point de vue peut être bien présenté, ça va.

M. Fournier (Michel): Bonjour tout le monde.

La Présidente (Mme Marois): Bonjour.

M. Fournier: Au départ, j'aimerais faire le point sur le fait qu'on a quand même un certain consensus au niveau de l'approche prise par le Conseil québécois. Donc, si on examine l'article 14 sur le temps supplémentaire et les cas d'urgence, il y a, à prime abord, deux facettes importantes à souligner dans cet article. D'une part, il y a le délai de douze heures, qui serait exigible de l'employeur pour pouvoir exiger de son employé de faire du surtemps. Il faut quand même concevoir que, dans le secteur privé, la notion de surtemps est une notion d'urgence, une notion qui n'est pas planifiée à l'avance. Donc, d'exiger de l'employeur de fournir douze heures à l'avance un avis à ce parent-là devient une situation hors de contrôle. Il faut quand même, dans plusieurs cas, concevoir le fait que, lorsqu'il y a enfants, il y a aussi parents, au pluriel, et que l'employé n'est pas nécessairement, disons, le seul responsable de l'enfant, dans plusieurs cas. Il reste aussi que, à l'intérieur de l'entreprise, l'aspect pratico-pratique créerait, par rapport à la situation actuelle, un déséquilibre, d'une part, sur la base de savoir qui est parent et qui ne l'est pas, au point de vue de l'attribution du temps et du surtemps. Donc, la notion actuelle d'équilibre est établie par l'ancienneté. Au départ, la majorité des conventions collectives et du secteur du travail en général va permettre et offrir le temps supplémentaire, d'une part, sur une base volontaire, du plus ancien au plus jeune et, d'autre part, sur une base imposée du plus jeune au plus ancien, pour finalement arriver à un nombre de ressources humaines nécessaire à l'activité du travail ou à accomplir l'urgence. Donc, on créerait, par une imposition des douze

heures et par une tenue du fait que l'employé est parent ou pas, un déséquilibre sur la notion de qui est parent et qui ne l'est pas, et cette notion va aussi à rencontre de l'ancienneté, qui est fondamentale dans le principe des relations de travail, et elle donnerait un préjugé favorable, si on veut, aux plus jeunes par rapport aux plus âgés. Par exemple, le plus jeune pourrait donc se sauver, disons, du surtemps, et ce serait l'employé qui est peut-être plus âgé en service et en âge qui devrait se le farcir, comme on dit en bon canadien. Donc, c'est notre point de vue sur l'article 14 concernant le temps supplémentaire.

J'aimerais aussi enchaîner sur l'article 16, qui résume l'aspect du paiement même du surtemps, où on apporte une nouvelle notion, qui est le remplacement du paiement par un temps équivalent au surtemps fait, temps pour temps et demi. C'est une notion qui est quand même relativement nouvelle dans le principe des relations de travail et nous, sans nous opposer au fait de rémunérer l'employé en temps plutôt qu'en argent, pensons que la majorité des gens qui préfèrent le temps, c'est pour éviter de payer de l'impôt. Parce que, comme ils le disent, il leur reste plus d'argent sur le surtemps qu'ils font, ils préfèrent justement prendre du temps en termes de temps pour temps et non pas temps pour temps et demi. Donc, notre position serait, si vous voulez, d'amener cette notion de possibilité de remplacer par le temps, qu'au moins que ça se fasse sur une base minimale de temps pour temps. Si l'employeur veut bien donner, disons, du temps et demi, bien alors, à ce moment-là, laissons les choses évoluer d'une façon naturelle. Merci beaucoup.

M. Gascon: En ce qui a trait à l'augmentation de la durée des congés annuels, la position du Conseil québécois en est une où l'on accepte, d'une certaine façon, l'augmentation de la durée du congé annuel mais avec une progressivité plus lente que celle proposée dans le projet de loi. Comme vous pouvez le voir à notre mémoire, ce que l'on propose, c'est trois semaines après neuf ans à l'entrée en vigueur de la loi et trois semaines après huit ans, un an après l'entrée en vigueur de la loi. Essentiellement, dans le commerce de détail, on a affaire à de petits commerçants lorsqu'on parle d'une moyenne et on se retrouve dans la situation où la majorité des gens sont couverts par la Loi sur les normes du travail. Il y a un impact économique ainsi qu'un impact de remplacement compte tenu du faible nombre d'employés qui travaillent dans ces commerces de façon générale. Ce qu'on suggère, c'est une progressivité beaucoup plus lente.

Au niveau de l'article 81.1, article qui prévoit la possibilité pour tout salarié de s'absenter du travail pendant cinq journées à l'occasion de la naissance ou de l'adoption d'un enfant, les deux premières journées d'absence étant rémunérées, la position du Conseil québécois: Nous sommes en accord avec le nombre de jours qui peuvent être accordés à l'occasion de la naissance ou de l'adoption mais nous préférons que cette notion soit de congé sans solde. Nous considérons que c'est un coût social et le coût devrait être partagé par l'ensemble de la population. Ce qu'on indique au mémoire: Nous considérons qu'aucun de ces jours ne devrait être rémunéré. Étant donné que cette disposition s'attache essentiellement et en pratique au père de l'enfant, nous ne pouvons voir le justificatif pour lequel l'employeur devrait rémunérer le père à l'occasion de cette absence. D'autre part, nous considérons qu'il est important, comme le mentionne le Conseil du patronat du Québec dans son mémoire, que le législateur stipule clairement que les cinq journées de congé mentionnées à l'article 81.1 concernent une norme de base et non pas un ajout aux caisses ou aux banques de journées utilisables existantes.

D'autre part, l'article 81.1 au deuxième alinéa, nous porte à croire que le législateur a l'intention d'accorder l'exercice de ce congé à un salarié qui ne cohabiterait pas avec la mère d'un enfant qui vient de naître, lorsqu'on parle du retour au domicile de l'enfant du père ou de la mère. Étant donné que l'objectif du législateur en édictant cette disposition est d'aider la mère de l'enfant et l'enfant lui-même à l'occasion de sa naissance et son intégration à son domicile familial, il nous apparaît essentiel d'insister sur la nécessité de la cohabitation du père et de la mère de l'enfant qui vient de naître. En effet, tel que formulé actuellement, l'article permettrait à un père qui ne cohabite pas avec une mère de prendre cinq jours de congé du simple fait de la naissance de l'enfant dont il est le père, sans qu'il y ait cohabitation. Ceci nous apparaît inacceptable et pour le moins contraire aux intentions du législateur. Par conséquent, il y aurait lieu que le législateur s'attarde non seulement à l'occasion donnant lieu au congé, mais aussi s'assure, par une condition préalable de cohabitation, que l'exercice du congé remplira l'effet recherché face à la mère, à l'enfant et au père lui-même. (17 h 30)

En ce qui a trait à l'article 81.2, disposition qui permettrait au salarié de s'absenter de son travail pendant cinq journées par année, sans salaire, pour remplir des obligations reliées à la garde, à la santé ou à l'éducation de son enfant mineur, ce congé pouvant être fractionné en journées ou en demi-journées, le Conseil québécois est d'accord avec le principe que, dans certaines circonstances, le salarié peut se voir dans l'obligation de s'absenter de son travail dû à des circonstances imprévisibles ou hors de son contrôle dans le but de remplir des obligations qui sont reliées à la garde, à la santé ou à l'éducation de son enfant mineur. De telles

circonstances, qui peuvent survenir occasionnellement en milieu de travail, font l'objet d'ententes mutuelles entre l'employeur et l'employé.

Le législateur croit maintenant qu'il est nécessaire de légiférer sur cette question et d'en faire une norme du travail. Nous constatons cependant que l'article, tel que rédigé, se trouve tout simplement à ajouter cinq jours de congé sans solde au père et à la mère d'un enfant dont ils ont l'autorité parentale. En fait, cet article consacre un congé de cinq jours par année à ceux qui ont l'état de père ou de mère. L'article 647 du nouveau Code civil prévoit que les pères et mères ont, à l'égard de leurs enfants, le droit et le devoir de garde, de surveillance et d'éducation. Ce droit et ce devoir sont constants et perpétuels et ce, jusqu'à la majorité de l'enfant.

Nous soumettons cependant que l'article 81. 2 a sa raison d'être, non pas dans le cadre de son exercice normal des obligations que comporte l'autorité parentale, mais plutôt dans les cas où ces obligations ne peuvent être exécutées en dehors des heures normales de travail. Par conséquent, nous croyons que l'article 81. 2 devrait être rédigé de telle sorte que l'absence au travail du salarié pour remplir ses obligations reliées à l'autorité parentale doit être justifiée dans les cas d'urgence ou les cas exceptionnels.

Il nous apparaît essentiel que l'employé ne puisse s'absenter que lorsque l'exécution de son obligation ne peut être faite en dehors des heures normales de travail et que, d'autre part, l'exécution de l'obligation reliée à l'exercice de l'autorité parentale ait été de nature imprévisible et due à des circonstances hors du contrôle du salarié au moment où il doit s'absenter. Nous croyons que l'imprévisible et l'absence de contrôle du salarié sont nécessaires à l'exercice du droit d'absence prévu à l'article 81. 2 sinon les employeurs s'exposent à l'usage abusif et inconsidéré d'une absence que l'on veut diriger pour les fins de l'exécution de l'obligation reliée à l'autorité parentale.

D'autre part, nous considérons qu'une absence au travail de trois journées par année représente un nombre de jours suffisants, considérant qu'en aucun endroit en Amérique du Nord une telle disposition n'existe en ce moment. D'autre part, le Conseil québécois s'oppose à ce qu'un tel congé puisse être fractionné en demi-journées. Le salarié qui s'absente moins d'une journée sera rémunéré pour les heures travaillées, cependant la période d'absence équivaudra à l'utilisation d'une journée complète.

En dernier lieu, nous considérons que les dispositions de l'article 81. 2 ne devraient pas s'appliquer à un salarié qui bénéficie, en vertu d'une convention ou d'un décret, d'une banque de congés occasionnels ou de maladie.

Mme Bazzocchi (Ginette): Avec l'article 813, j'aimerais commencer en vous disant que, concernant cet article, on est d'accord avec la suggestion du CPQ. Donc cet article prévoit la possibilité pour un salarié de s'absenter de son travail sans salaire pour cause de maternité, de paternité ou d'adoption suivant les conditions et modalités à être fixées par le règlement, la durée de l'absence ne devant cependant pas excéder un an.

En premier lieu, nous considérons que les conditions et les modalités d'exercice ne devraient pas être fixées par le mécanisme réglementaire, pas plus que la durée de l'absence. Nous croyons, d'autre part, qu'il y aura lieu d'intégrer à la Loi sur les normes du travail la réglementation actuelle relative aux congés de maternité.

En effet, les matières qui y sont traitées comportent des conséquences sociales et économiques importantes pour l'ensemble de la population. Par conséquent, ces matières devraient être traitées et décidées par l'organe législatif plutôt qu'être déléguées au pouvoir exécutif par voie de la réglementation.

Nous croyons qu'il est essentiel de conserver des conditions d'admissibilité à l'exercice d'un tel congé. Le congé parental devant donc être assorti d'une condition préalable à l'effet que le salarié doit avoir accompli 20 semaines d'emploi normal précédant la date du début du congé et être à l'emploi de l'employeur le jour précédant le préavis de congé.

D'autre part, le congé parental relié à la naissance ou à l'adoption d'un enfant devra être exercé par l'un ou l'autre du père ou de la mère ou partagé entre le père et la mère de façon qui leur convient, sous réserve que la mère ait la priorité de choix. Pour la mère, ce congé parental doit s'exercer immédiatement après l'expiration de ce congé de maternité. Au moins 30 jours francs avant son départ, le salarié doit donner par écrit à l'employeur un avis indiquant son intention de se prévaloir de son congé parental en lui indiquant la date de départ et la date prévue de son retour au travail. La durée totale de son congé parental ne peut excéder douze semaines consécutives. L'ensemble des congés reliés à la naissance ou au congé parental ne peut excéder 30 semaines.

La sécurité d'emploi sera assurée pendant l'exercice du congé parental. À la fin du congé parental, l'employeur pourra réinstaller le salarié dans son poste régulier ou à un poste équivalent en lui accordant les avantages dont il aurait bénéficié s'il était resté au travail. Je laisse la parole à Normand.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Gascon: En ce qui a trait à l'article 45, il ajoute à l'article 123. 2 à la loi, lequel a pour objet de prolonger la présomption visée au premier alinéa de l'article 123 pour une période de 20 semaines après le retour au travail du

salarié à la suite d'un congé parental visé par l'article 81.3. Le Conseil québécois appuie la prise de position du Conseil du patronat du Québec sur cet article.

D'autre part, cette présomption jointe à l'absence de conditions d'admissibilité, 20 semaines d'emploi continu, précédant l'exercice du congé parental prévu à l'article 81.3, pourrait présenter des situations où l'employeur pourrait ne plus bénéficier de la période de probation - normalement trois mois, si on calcule au niveau de l'entreprise en général - pour évaluer l'employé. Si le législateur entend donc édicter cette nouvelle présomption à laquelle nous nous opposons d'ailleurs, il devient obligatoire et nécessaire de fixer des conditions d'admissibilité à l'exercice du congé parental en établissant comme prérequis que tout salarié doit avoir accompli 20 semaines d'emploi continu et normal pour un même employeur, tel que formulé dans nos recommandations sur l'article 81.3.

On n'est pas contre la présomption comme telle, ce qu'on dit, à ce moment-là, c'est qu'il faut prévoir des conditions d'admissibilité, parce qu'on pourrait se retrouver dans un contexte, par exemple, où un père, récemment embauché, ait droit... évidemment, on ne lui demandera pas nécessairement s'il est futur père d'un enfant ou d'un enfant à naître, et se retrouver dans un contexte où il partirait en congé de paternité au sens de la loi. Évidemment, on ne connaît pas nécessairement toutes les modalités, puisque ce qu'on mentionnait tout à l'heure c'est que ça devrait être dans la loi, mais on parle de réglementation, et se retrouver avec une présomption, par la suite, où on se retrouverait dans des circonstances lorsque, à son retour au travail, on n'aurait pas de moyen ou de possibilité d'évaluer son emploi, puisque sa période de probation pourrait se retrouver, à ce moment-là, expirée, et, compte tenu du fait qu'il y a une présomption, évidemment, créer un contentieux qui n'est pas nécessairement nécessaire dans ces circonstances-là.

Le Conseil québécois, en ce qui a trait à la fête nationale, réitère son appui à la recommandation du Conseil du patronat du Québec dans son mémoire de janvier 1990 et croit qu'il y aurait des avantages importants d'efficacité et de commodité, autant pour les détaillants et leurs salariés, à ce que le 24 juin et le 1er juillet deviennent des congés mobiles, comme la fête du travail chômée le 1er lundi de septembre. Nous encourageons le législateur à étudier le plus tôt possible cette alternative.

Une voix: Juste un commentaire, Mme la Présidente.

M. Fournier: II serait important, quand même, j'aimerais aussi souligner, en ajout à notre mémoire, en fonction des avantages ou de la protection de la mère lors de son absence pour un congé de maternité où on apporte la notion de réinstaller le salarié dans son poste ou à un poste équivalent, ce qui n'existe pas présentement, disons, au niveau de la Loi sur les normes du travail, et qui est une notion qui est unique au Québec. Partout au pays les notions de réintégration et de protection du congé de la mère vont dans une réintégration dans un poste équivalent. Donc, la notion du même poste n'existe pas et ça crée, dans le cas où c'est un poste unique, quand même certaines difficultés au niveau de l'employeur. Donc, ça devrait être élargi légèrement et incorporer cette notion d'équivalence.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. Lafleur.

M. Lafleur: À titre de conclusion, comme vous le voyez, les commentaires particuliers que nous amenons sont à l'effet que les détaillants sont certainement prêts à supporter une politique qui se veut plus ouverte au niveau de la natalité au Québec et favoriser les parents à pouvoir avoir une ambiance ou un milieu de travail qui leur permette d'exercer leurs droits. Cependant, le Conseil québécois croit que le coût financier ne doit pas nécessairement être supporté par les détaillants comme tels parce que déjà, eux, font leur part de support en accordant le congé, en supportant des frais administratifs, etc., et que, dans le fond, les mesures qui s'appliquent aux compensations financières devraient être des mesures sociales et, donc, être absorbées par l'ensemble de nous tous et non pas seulement l'employeur et le travailleur et la travailleuse, mais l'ensemble de la population. Alors, c'est ça.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre présentation. C'est intéressant, je pense, les ouvertures que vous faites. M. le ministre.

M. Bourbeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, l'avis du temps supplémentaire, vous vous objectez à ce qu'on légifère pour imposer l'obligation de donner un préavis de douze heures. Bon. Alors, je comprends très bien votre point de vue. C'est évident que, pour une entreprise, ça serait préférable de ne pas avoir cette enfarge-là. Mais si on se place du point de vue du parent qui a aussi des problèmes qui surgissent à l'occasion, par exemple, de jeunes enfants à la garderie quand on a des habitudes d'aller chercher un enfant, comment réagissez-vous par rapport à ça, la mère qui se fait dire: Bon, il faut rester, alors que l'enfant est sur le trottoir à la garderie? Avez-vous une suggestion? Moi, je n'ai pas d'objection à amender la loi et changer le système. Par contre, si vous aviez une suggestion à nous faire qui pourrait atteindre les mêmes objectifs sans vous imposer les mêmes contraintes, j'aimerais l'entendre.

La Présidente (Mme Marois): II y a une autre chose que j'ajouterais, si vous me le permettez, M. le ministre.

M. Bourbeau: Oui, ça va.

La Présidente (Mme Marois): vous disiez tout à l'heure: bon, souvent il y a deux parents qui sont impliqués. mais on sait qu'avec les nouvelles familles, il y a beaucoup de situations où il n'y a qu'un parent aussi.

M. Bourbeau: Ma question n'est pas dans le but de vous piéger mais je me dis que si ce qu'on propose...

La Présidente (Mme Marois): C'est ça

M. Bourbeau: ...n'est pas acceptable, est-ce qu'il y aurait quelque chose que vous pourriez suggérer?

La Présidente (Mme Marois): C'est quoi, l'alternative?

M. Bourbeau: Ou qu'on pourrait peut-être étudier?

M. Lafleur: Écoutez, je ne voudrais pas ici entrer dans le débat qui aura certainement lieu demain matin avec mon collègue, M. Dufour. Nous ici, tout ce qu'on voulait identifier, c'est de dire: Bien, écoutez, nous, on appuie la position du CPQ. Comme je vous le dis, je ne veux pas entrer dans la position du CPQ, mais ayant son rapport ici, bon, un des aspects qui semblent importants, c'est que lorsque l'on parle de temps supplémentaire en termes de durée, on parle en moyenne de 0,9 heures supplémentaires par demande suivant ce que le Conseil du patronat établit. Alors, je pense qu'il faut le regarder dans une perspective aussi de situation. Vous avez d'autres industries que nous ne représentons pas ici mais on pourrait, par contre, parler de l'industrie de l'automobile, la question des chaînes de montage et des situations qui dépassent le cadre du commerce de détail mais qui vous seront certainement exposées demain matin. La suggestion, nous, en principe, on considère que déjà actuellement dans les relations entre les détaillants et leurs employés, nous n'avons pas, selon nous de situations qui justifient, vous savez, l'imposition d'une norme. Nous croyons, nous, actuellement, que les détaillants qui ont des situations où, justement la mère a des difficultés, on prend l'exemple de la garderie qui ferme à cinq heures, bon bien, évidemment, écoutez, selon nous, s'il y a des détaillants qui ne comprennent pas cette situation-là, et qui vont laisser l'enfant dehors, bien, évidemment, ça pose un problème. Mais la question que l'on doit considérer, nous, de notre côté, c'est: Est-ce que le préavis constitue une fin de non-recevoir, surtout dans le contexte où l'on regarde le principe d'ancienneté qui est appliqué, qu'on soit syndiqué ou pas. On sait que chez nous, la syndicalisation est peut-être un peu moins prononcée qu'ailleurs, mais il y a quand même une reconnaissance implicite du principe de l'ancienneté. Et une mère de famille qui malheureusement a un enfant de 20 ans, aujourd'hui, va devoir, si j'applique la disposition, laisser son droit d'ancienneté, après 20 ans de travail dans une entreprise, à une personne plus jeune, du fait qu'elle a la qualité de père ou de mère. Vous voyez? À moins qu'un préavis supérieur à 12 heures lui soit donné. Et comme l'a expliqué mon collègue ici, souvent, il s'agit de situation d'urgence. Donc déjà la période de 12 heures, comme telle, est disproportionnée. C'est-à-dire qu'il y a vraiment une disproportion. (17 h 45)

M. Bourbeau: La situation d'urgence, elle existe aussi pour l'enfant qui attend après sa mère et qui... Il faut comprendre que ça vaut des deux côtés, là. D'ailleurs, c'est ça le débat qui a lieu présentement, tenter de concilier les impératifs parentaux avec les lois du commerce ou des affaires, du marché.

M. Gascon: On peut peut-être le regarder aussi dans une autre perspective. Évidemment, on parle de temps supplémentaire, là. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'au niveau d'une gestion, c'est difficile. C'est sûr que ce serait facile si on pouvait avoir des solutions. Le projet de loi en a proposé certaines, mais il faut regarder aussi que dans le commerce du détail, en matière d'heures normales, on se retrouve avec des jeudis soirs, et des vendredis soirs, et souvent, ces gens-là doivent travailler. Évidemment, on se trouve dans une situation où la garderie doit fonctionner, ces gens-là travaillent, ou bien ils ne travailleraient pas dans le commerce de détail. On parle d'ouvrir les possibilités. Il faut peut-être essayer de prévoir d'autres solutions que nécessairement celle-là, dans les circonstances. Le préavis de 12 heures, là, on ne le sait pas toujours dans des conditions d'imprévisibilité, mais, dans la notion d'heures d'affaires, ces gens-là, j'imagine qu'ils ont quand même trouvé une façon de fonctionner dans le système actuel.

M. Bourbeau: Le problème ne se pose pas quand on parle de travail régulier. Là, vous parlez du jeudi soir, du vendredi soir; on planifie ça d'avance, et quand quelqu'un travaille le jeudi soir, il s'organise. D'ailleurs, la plupart du temps, les personnes qui travaillent sont capables de s'organiser. Puisqu'elles travaillent c'est qu'elles ont des façons de s'occuper de leur enfant, des gens qui s'occupent de leur enfant. Le problème, c'est quand ça arrive sans préavis, à une heure d'avis ou deux heures d'avis. C'est là que ça cause des problèmes. Mais, étant donné que certains d'entre vous...

La Présidente (Mme Marois): Mais il y a des réactions, je pense, attendez un peu.

Une voix: Mais, vous demandez 12 heures... M. Bourbeau: Pardon?

La Présidente (Mme Marois): Vous êtes trois à vouloir réagir.

M. Bourbeau: Écoutez, je vais poser une question qui va vous amener à répondre.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

M. Bourbeau: On vous a présenté tantôt, vous, monsieur, vous êtes avec une chaîne de magasins assez importante, madame de pharmacies assez importantes, bon. J'imagine que vos chaînes de magasins doivent avoir des succursales en Ontario, je présume. Alors dans ces conditions-là, comment vos salariés vivent-ils avec la situation qui prévaut en Ontario où on peut refuser de faire du temps supplémentaire après huit heures de travail? Vous devez le vivre le problème en Ontario, comment vous en tirez-vous?

M. Fournier: On peut y répondre très simplement, disons, en tout cas, chez nous, c'est parce que, d'une part, ce n'est pas un problème. Alors, pourquoi créer un encadrement restrictif quand ce n'est pas un problème. Selon les contacts que j'ai dans l'industrie dans laquelle je suis, on semble, par ce projet de loi ou par cet ajout-là, disons, faire un monstre d'une chose qui n'existe pas. Parce qu'en général, la structure qui est déjà établie dans les relations de travail qui se font n'amplifie pas cette chose-là, mais je suis certain, par exemple, en tant qu'employeur, que, si j'ai une remorque qui a été retardée par une tempête de neige, qui est pleine de fruits et de légumes, à la porte de mon magasin, c'est une urgence. Mais ça, je ne l'ai pas planifié douze heures à l'avance. C'est ça, cette contrainte-là, qu'on semble complètement ignorer, l'aspect pratico-pratique des faits de la vie. On dit: O.K., la maternité, la paternité ou la parentalité, disons, c'est un fait de la vie, mais il y a aussi, là, les petits détails qui sont drôlement importants dans une notion de rentabilité de l'employeur.

M. Bourbeau: Oui, mais le problème est le même en Ontario. En Ontario...

M. Fournier: Non, mais...

M. Bourbeau: ...quand la remorque arrive, c'est la même chose.

M. Fournier: ...comme on dit, c'est que, dans l'industrie, on ne voit pas, du moins je n'ai jamais entendu parler d'un conflit de travail qui tournait autour de la disponibilité face à du surtemps.

M. Bourbeau: Mais, nous, on en a entendu parler puisqu'on l'a mis dans la loi. Si on le met dans la loi, c'est qu'il y a des cas. Peut-être que ça ne s'applique pas chez vous. À ce moment-là, tant mieux, il n'y aura pas de problème. Mais vous dites: Ça n'arrive pas, donc pourquoi le mettre dans la loi? Moi, je vous retourne la question: Puisque ça ne vous dérange pas, pourquoi vous objecteriez-vous à ce qu'on le mette, puisque dans d'autres cas ça arrive?

M. Fournier: Parce que ça crée des contraintes additionnelles qui ne sont pas nécessaires.

M. Bourbeau: Oui, mais en Ontario? Pourquoi est-ce qu'en Ontario on...

M. Fournier: Ça ne veut pas dire qu'on est d'accord avec l'Ontario, par exemple, là.

M. Bourbeau: Mais non. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Mais pourquoi nos parents, ici, seraient traités d'une façon plus sévère ou plus dure que les parents ontariens à qui on a permis de refuser de faire du temps supplémentaire après huit heures? Puisqu'on veut, justement, favoriser la natalité, il me semble que ça serait le temps, au moins, d'essayer de faire aussi bien que l'Ontario. Il y a bien des domaines où on ne réussit pas parce qu'on n'a pas les moyens, mais, là, on pourrait peut-être essayer de le faire. Enfin, je vous pose la question. Je vous lance la...

M. Fournier: Ouf!

La Présidente (Mme Marois): Moi, j'aimerais que vous élaboriez aussi - et je pense que c'est intéressant - sur le fait que vous dites: On n'en a pas de problème. Alors, comment procédez-vous? Comment cela se passe-t-il?

Mme Bazzocchi: Premièrement, nous autres, côté pharmaceutique, quand on embauche un employé, on lui dit qu'il y aura sûrement des heures supplémentaires, qu'on ne travaille pas de 9 heures à 17 heures, que ce sont des heures flexibles et l'employé accepte, à l'embauche, de travailler les samedis et les dimanches et qu'il n'y ait pas d'heures spécifiques. On parle de temps plein et on parle de temps partiel. On a plus de 75 % de nos employés dans nos pharmacies, nous autres, qui travaillent à temps partiel. Donc, ça fait partie d'un contrat de travail quand on les engage. Le surtemps, je

veux dire, ça peut arriver qu'une employée ne rentre pas un matin parce qu'elle est malade ou qu'elle doit arriver à 17 heures l'après-midi pour remplacer le chiffre de 18 heures et qu'elle n'arrive pas. Donc, on demande à l'employé qui travaille de 9 heures à 17 heures, si c'est possible, de travailler jusqu'à 21 heures pour la remplacer. S'il ne peut pas, on appelle, parce qu'on a toujours des gens à temps partiel. Donc, on a toujours une solution à ce problème-là. Mais, dans notre cas, à l'embauche, directement, on leur dit: On a des heures flexibles, ce n'est pas du lundi au vendredi, c'est un commerce de détail et on travaille sept jours par semaine. Donc, pour nous autres, c'est un temps supplémentaire qui devient une logique dans un sens.

La Présidente (Mme Marois): II nous reste peu de temps. Je vais me permettre de vous poser une question et ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve reprendra par la suite.

À la page 5 de votre mémoire, en parlant de l'article 81.1, vous dites: "...la possibilité, pour tout salarié, de s'absenter du travail pendant cinq journées à l'occasion de la naissance ou de l'adoption d'un enfant, les deux premières journées d'absence étant rémunérées", et vous revenez plus bas en disant que vous avez des objections à cela. Parmi les propositions des groupes qui sont venus devant nous, une des propositions est à l'effet de constituer une caisse de congés parentaux et de congés de maternité, etc., qui permettrait de remplacer le salaire, lorsque la personne est en congé de maternité, selon des règles à définir qui pourraient être celles que vous proposez ou celles que d'autres groupes proposent. Ce n'est pas sur ça que j'en ai. Ils proposent aussi que les congés, qui seraient rémunérés dans le cas d'adoption ou de prise de congés pour soins d'enfants, quelques jours par année, soient payés à même cette caisse, à laquelle contribueraient évidemment les employeurs, les travailleurs, les travailleuses et le gouvernement, ce qui ferait en sorte qu'on désalourdirait le fardeau pour une toute petite entreprise qui a justement, peut-être, quelques employés et, de la même façon d'ailleurs, pour la grande entreprise qui, elle, en a beaucoup et à qui ça coûte énormément. Donc, on répartirait un peu le fardeau. Dans une perspective comme celle-là, est-ce que vous seriez d'accord pour que ces congés puissent être rémunérés et donc remboursés par la caisse?

M. Lafleur: Je vous dirais, Mme la Présidente, que, si cette caisse est formée des sommes disponibles aux fins d'assurance-chômage, la réponse est que le Conseil québécois ne serait pas en accord avec ça, parce que la caisse d'assurance-chômage doit servir essentiellement à titre d'assurance pour les travailleurs qui, à cause de circonstances économiques ou autres, se trouvent sans emploi. L'utilisation des fonds, à toutes autres fins que celle-ci, ne rencontre pas les objectifs du Conseil. Si on parie d'une caisse qui vient du fonds consolidé du revenu ou qui provient d'un impôt qui s'applique à l'ensemble des citoyens et qui devient l'application d'une mesure sociale que l'on fait supporter par l'ensemble de la population, à ce moment-là, je vous dirais que c'est une chose qui est concevable. Mais, si on fait porter le fardeau financier d'une caisse comme ça à l'employeur et aux salariés, je dois vous dire... Dans d'autres situations, par exemple la formation professionnelle, le ministre est certainement au courant de ça, mais les syndicats et le patronat s'entendent pour dire que les sommes qui sont versées à l'assurance-chômage ne doivent pas être utilisées à d'autres fins. C'est le caveat que j'avais à dire. Mais si c'est autre chose, une autre caisse-La Présidente (Mme Marois): M. Fournier veut intervenir, mais, peut-être, juste avant qu'il n'intervienne, dans les propositions qui sont devant nous - évidemment, ce sera au gouvernement, sûrement, à faire un certain choix, à décider de son orientation à cet égard - certaines proposent de prendre la partie qui actuellement concerne les congés de maternité et qui est à l'assurance-chômage, de l'extraire - parce qu'elle est payée actuellement, qu'on le veuille ou non, c'est couvert par la caisse d'assurance-chômage - d'extraire cette partie-là et de créer, à partir de ces sommes, une nouvelle caisse à laquelle on ajouterait évidemment des contributions, selon les hypothèses qui sont devant nous. Mais on enlèverait du régime d'assurance-chômage actuel tout l'aspect de couverture relié à la parentalité ou à la maternité. Oui, et il y a ma collègue qui...

M. Fournier: J'aimerais juste... Une petite notion rapide, là, c'est que lorsqu'on parie de donner des congés, disons, les fameux cinq jours ou deux jours payés, on pense qu'il y a une notion qui se perd dans tout ça, c'est que, à peu près dans 85 % des cas, cet employé absent doit être remplacé par une autre personne. Donc, en termes de coût, ce qu'on demande, c'est du temps double, c'est de payer deux fois. Pour nous, d'accorder le temps et de protéger les bénéfices et l'emploi de cet employé, c'est déjà quelque chose, mais qu'on nous demande en plus de ça de le payer en double, en termes de profit, là, on est moins d'accord.

La Présidente (Mme Marois): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Je suis contente de vous saluer. Vous savez, chaque fois que j'ai à me demander en quoi on est une société distincte, je ne pense pas à M it sou ou à

Big Mac, ça va vous étonner, mais je pense à vous. Ça va vous surprendre - et on en avait déjà parlé à une réunion - parce que, contrairement à toute l'Amérique du Nord, le commerce au détail représente justement - puis vous nous le rappelez, là - 70 % des activités économiques reliées au commerce au Québec, tandis que c'est l'inverse, finalement, dans le reste de l'Amérique du Nord où c'est la grande surface ou la chaîne qui représente, finalement, ce même pourcentage. Alors, cela dit, c'est très intéressant, parce qu'en vous entendant je me disais: Jusqu'à quel moment utilise ton la comparaison avec l'Ontario quand il y a un avantage? Par exemple, dans votre mémoire, vous l'utilisez pour essayer de réduire la semaine de vacances, après un certain nombre d'années de service, parce que, là, il y a un avantage à tirer, mais vous n'utilisez plus la comparaison avec l'Ontario quand il y aurait un inconvénient. Par exemple, la journée maximale de huit heures, en Ontario, permet à tout salarié de refuser de faire du temps supplémentaire. D'une certaine façon, la comparaison devrait sans doute être utilisée de façon plus uniforme. Si on veut être concurrentiel, on n'accepte pas simplement de l'être quand il y a un avantage à tirer, mais aussi quand il y a un ajustement et un rattrapage à faire, en fait, parce qu'il y a eu un retard. En Ontario... Parce que moi je partage votre point de vue que c'est irréaliste l'idée de l'octroyer seulement à un salarié qui a des responsabilités familiales, avec toutes les familles reconstituées... Alors, quand perd-on ses responsabilités, quand en acquiert-on? Et puis, est-ce que les deux, dans deux entreprises différentes, pourraient faire valoir des responsabilités pour prendre un congé en même temps, pour se donner du bon temps? Imaginez-vous, ce sont des mesures protectionnistes, ça, qui se veulent généreuses mais qui, à mon point de vue, vont avoir exactement l'effet contraire de ce qui est recherché. Parce qu'à la longue, ces mesures-là sont perverses comme celles qu'on avait introduites pour protéger les femmes dans la législation du travail. Alors, je me demande d'abord si vous seriez favorable à ce qu'une telle mesure soit élargie à l'ensemble des salariés et que. comme en Ontario, il y ait une journée maximale de huit heures? Je ne dis pas "journée normale", je dis "maximale", on se comprend. La semaine normale, c'est celle au-delà de laquelle on fait du temps supplémentaire. Mais c'est une journée au-delà de laquelle on peut refuser d'en faire, la journée maximale.

La Présidente (Mme Marois): Oui, M. Gascon.

M. Gascon: dans un contexte, par exemple, dans le domaine du détail, si on prend, je veux dire... je suis plus porté au niveau de l'alimentation, où ce qu'on appelle des quarts de travail qui sont de dix heures, à savoir de 9 heures du matin à 9 heures du soir... Compte tenu de tout ça, je ne suis peut-être pas assez familier avec la loi ontarienne, est-ce que ça vient empêcher cette notion-là? On parle d'heures supplémentaires, mais on parle d'heures normales dans notre jargon à nous. Quelqu'un qui fait un quart complet de dix heures est finalement douze heures au travail, parce qu'il a une heure de dîner et une heure de souper, mais qui finalement est là de 9 heures du matin à 9 heures du soir, c'est considéré comme des heures normales pour lui.

Mme Harel: En Ontario, la semaine maximum - on s'entend bien sur les notions - est de quarante-huit heures, mais la journée maximum est de huit heures. Donc, ça peut, théoriquement, donner l'équivalent de six jours de huit heures, au-delà de quoi il n'y a pas de temps supplémentaire. C'est ça, la situation en Ontario.

M. Gascon: Parce que si on regarde chez nous dans la...

La Présidente (Mme Marois): II peut y en avoir sur demande?

Mme Harel: C'est le droit de refus.

La Présidente (Mme Marois): Le droit de refus.

M. Gascon: C'est volontaire.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça.

Mme Harel: C'est ça, c'est-à-dire la journée ou la semaine maximale, c'est pour commencer à calculer le droit de refus.

La Présidente (Mme Marois): C'est ça.

M. Fournier: Si on regarde dans certains secteurs, à la demande des employés, ils ont des horaires à temps plein sur trois jours, où ce sont des "shifts" de douze heures et demie par jour durant trois jours et, après ça, bonjour. Ça fait qu'à ce moment-là, dans une notion de même, ça deviendrait peut-être difficilement conciliable avec la demande aussi des employés.

La Présidente (Mme Marois): Quand vous pariez d'expériences comme celles-là, c'est-à-dire de réalités comme celles-là, est-ce dans le cas où il y a des conventions collectives ou si c'est aussi dans le cas des gens couverts tout simplement par la loi des normes?

M. Fournier: Ce sont des gens couverts par la loi des normes.

La Présidente (Mme Marois): D'accord.

Mme Harel: J'ai été surprise que le ministre ne fasse pas valoir que dans son avant-projet de loi il n'arrive pas à trois semaines de vacances après cinq ans, immédiatement. À l'article 21 on prévoit que ça se fasse dans une certaine transition, c'est-à-dire que c'est après sept ans d'abord et, un an après, c'est après six ans et deux ans après l'adoption de la loi, c'est après cinq ans. C'est actuellement deux ans et il y a quand même une autre réalité, c'est qu'au Québec s'applique le Code canadien qui assujettit quand même un certain nombre de travailleurs qui sont dans des entreprises de juridiction fédérale et voyez, c'est déjà trois semaines après six ans. En Alberta, c'est après cinq ans; en Colombie-Britannique, après cinq ans. Au Manitoba c'est après quatre ans. En Saskatchewan, c'est après un an. Vous nous citiez le cas de l'Ontario, mais c'est finalement une exception parce que, autant dans les autres provinces que dans le Code canadien, c'est finalement des semaines de vacances après un délai beaucoup plus court qu'en Ontario.

M. Fournier: J'aurais quelque chose... La Présidente (Mme Marois): Oui.

M. Fournier: ...c'est que, comme vous l'avez mentionné tantôt, le Québec, par la structure, disons particulière, de son commerce au détail a une plus grande probation en termes de petits employeurs à deux, trois employés par rapport aux grandes chaînes, même si je représente une grande chaîne. Donc, pour eux, le fardeau... Et dans ces petites entreprises-là, il y a du long terme. Il y a des employés de plusieurs années de service. Pour eux, ça devient un fardeau économique excessif. Surtout de passer d'une notion "drastique" de dix à cinq, définitivement, ça aura un impact négatif majeur. Je vois mal le petit dépanneur du coin pouvoir facilement absorber cet ajout de coûts.

La Présidente (Mme Marois): Ça va?

Mme Harel: Je vous remercie beaucoup. J'ai trouvé qu'il y avait une certaine ouverture... une ouverture certaine. Je ne ferai pas la comparaison avec d'autres... Ha, ha, ha! Mais on sent chez vous quand même un intérêt. Vous ne nous l'avez pas indiqué, mais la main-d'oeuvre féminine doit être élevée, j'imagine. Elle doit être de 80 %?

M. Fournier: Chez nous, 58 %.

La Présidente (Mme Marois): 58 %?

M. Lafleur: À certains endroits, ça peut friser au-delà de 60 %.

Mme Bazzocchi: Oui, plus de 60 %. Nous autres, on a beaucoup de femmes. On parle de vente.

Mme Harel: Je vous remercie pour votre contribution.

La Présidente (Mme Marois): Merci beau- , coup. Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: J'aimerais simplement remercier les représentants du Conseil québécois du commerce de détail. Je sais que vous aviez rencontré des fonctionnaires du ministère, spécifiquement M. Réal Bouchard et M. René Rheault, le 7 novembre dernier, et vous avez eu la gentillesse de les remercier. Je sais que vous avez apprécié cette séance d'information. De notre côté, nous avons apprécié aussi votre mémoire et nous allons l'étudier attentivement.

La Présidente (Mme Marois): Merci de votre contribution aux travaux de la commission.

Une voix: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Marois): Nos travaux sont ajournés à demain, 10 heures, et c'est le député de Fabre et vice-président de la commission qui prendra la relève.

(Fin de la séance à 18 h 5)

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