L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des affaires sociales

Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 24 octobre 1996 - Vol. 35 N° 43

Consultation générale sur le document intitulé «Pour vous et vos enfants : garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec»


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions


Intervenants
Mme Lyse Leduc, présidente
M. Rosaire Bertrand, président suppléant
Mme Louise Harel
M. Russell Copeman
M. Henri-François Gautrin
M. Lawrence S. Bergman
M. Serge Deslières
Mme Claire Vaive
*M. Maurice Boucher, ORCSN
*M. Roger Fraser, CARQ
*M. Claude Legault, Régie des rentes du Québec
*M. Theoharis Fournaris, Association des travailleurs grecs du Québec
*M. Frank Schlesinger, Fédération des services communautaires juifs de Montréal
*M. David Alper, idem
*M. Raphaël Assor, idem
*M. Jean-Marie Marcotte, FADOQ
*Mme Nicole T. Moir, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures vingt-sept minutes)

La Présidente (Mme Leduc): Alors, j'inviterais les parlementaires à prendre leur siège. Je constate qu'il y a quorum et je voudrais vous rappeler le mandat de la commission. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des audiences publiques sur le document de consultation sur la réforme du Régime de rentes du Québec intitulé «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec».

M. Gautrin (Verdun) remplace Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne).

Nous allons recevoir cet avant-midi l'Organisation des retraité-e-s de la CSN et la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec. Et le deuxième groupe que nous entendrons sera l'Association des travailleurs grecs du Québec.

Alors, j'inviterais le premier groupe à prendre place, s'il vous plaît. M. Boucher, si vous voulez nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter votre texte, et un temps égal est réparti pour les questions entre le côté ministériel et l'opposition. Alors, si vous voulez vous présenter et présenter vos collègues.


Auditions


Organisation des retraité-e-s de la CSN (ORCSN) et Coalition des aîné-e-s de la région de Québec (CARQ)

M. Boucher (Maurice): À ma droite, M. Roger Fraser, président de la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec, dont l'ORCSN est membre comme organisation de retraités; et, à ma droite aussi, Jos Caron, qui est un des officiers, responsable régional de l'ORCSN.

La Présidente (Mme Leduc): Merci.

M. Boucher (Maurice): Je vais demander à M. Fraser de décrire ce qu'est la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec, puisqu'il y a aussi la Coalition des aînées et aînés du Québec, pour qu'on sache de quoi il s'agit exactement. Et puis, bien, nous ferons lecture d'un mémoire qui est aussi celui de l'Organisation des retraité-e-s de la CSN.

L'Organisation des retraité-e-s de la CSN regroupe les ex-salariés à plein temps et élus à plein temps de la CSN qui sont maintenant retraités. Alors, on est d'ordre provincial et, par notre regroupement régional à Québec, ici, nous sommes membres de la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec, que je vais demander à M. Fraser de présenter.

La Présidente (Mme Leduc): M. Fraser.

M. Fraser (Roger): Alors, Mme la ministre, mesdames, messieurs, c'est avec plaisir que je vous parle au nom de la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec. C'est une coalition qui est formée depuis peu longtemps, le 29 février cette année, 1996, et incorporée selon la troisième partie de la Loi sur les compagnies.

Nous avons fait une investigation. Nous avons découvert que, dans la région de Québec, croyez-le ou non, il y avait au moins 23 regroupements de personnes aînées allant de l'ORCSN, dont on vient de vous parler, des retraités de l'enseignement, des retraités du gouvernement et... enfin il y en avait 23. On a formé cette Coalition, maintenant c'est sûr qu'elle est peu connue. Elle est peu connue; elle n'a que quelques mois. Elle n'est pas vieille, mais elle est très active.

(10 h 30)

J'avais le goût, à la suite de l'intervention de monsieur, de vous dire que des fois c'est bon d'être connu, puis que des fois c'est bon de ne pas trop être connu. Ça me fait penser à ce type qui est allé changer un chèque de 1000 $ à la Banque Nationale, et on lui a dit: Monsieur, on ne peut pas vous changer un chèque de 1000 $, on ne vous connaît pas. Alors, il dit: Vous faites dur pas mal. Il dit: J'arrive de la Caisse populaire; on a refusé de le changer aussi et on a dit: Monsieur, on vous connaît trop. Ha, ha, ha! Alors, on ne l'a pas changé parce qu'on vous connaît trop. Donc, pour ce qui est de la Coalition des aîné-e-s, vous comprenez avec moi qu'il va falloir qu'un jour cette Coalition régionale soit davantage connue et particulièrement par le gouvernement. Donc, il y a déjà une douzaine d'associations qui sont membres de la Coalition.

Puisqu'on doit parler du Régime de rentes du Québec, j'aimerais quand même vous dire, parce qu'il y en a plusieurs qui se posent la question des fois, c'est quoi les objectifs d'une coalition. Nous autres, on s'en est donné quatre. Et j'ai le goût de vous les donner pour vous montrer pourquoi on a tant d'intérêt dans le dossier de la Régie des rentes du Québec.

Alors, les quatre objectifs qu'on a à la Coalition, c'est de regrouper – et ça se fait présentement – le plus grand nombre possible de groupes, d'associations. Donc, la Coalition ne regroupe pas des personnes; elle regroupe des associations de personnes aînées de la région de Québec. Le deuxième objectif, c'est de faire des représentations communes auprès des instances décisionnelles. Et, le troisième, mobiliser les personnes aînées autour des questions qui les concernent directement ou qui concernent d'autres groupes sociaux. Retenez bien, mesdames et messieurs de la commission, qui concernent non seulement les retraités, mais aussi d'autres groupes sociaux. Alors, on n'est pas fermés uniquement aux aînés. Et, enfin, convaincre l'opinion publique de l'apport essentiel des personnes aînées dans ce monde-ci.

Alors, ceci étant dit, vous connaissez déjà mieux la Coalition. Et, comme le disait M. Boucher tout à l'heure, M. Boucher a travaillé aux deux mémoires, à celui de la Coalition puis à celui de l'ORCSN, c'est-à-dire l'Organisation des retraité-e-s de la CSN. C'est pour ça que vous pouvez vous arrêter à l'un ou à l'autre. Il vous les présente, et on va certainement vous faire sauver un peu de temps sur le temps que vous avez perdu pour l'alerte à Malibu et... j'allais dire l'alerte de feu ce matin et la reprise qui devait se faire normalement à 10 heures. Alors, je laisse la parole à M. Boucher pour la présentation du mémoire.

M. Boucher (Maurice): Vous aurez donc l'avantage de recevoir deux mémoires à la fois. Dans une période de compressions, ce n'est pas si mal.

Une voix: Deux pour un.

M. Boucher (Maurice): Oui, un deux pour un. Comme nous sommes de jeunes organisations malgré les apparences, nous n'avons pas encore les ressources qui nous auraient permis de faire une recherche exhaustive sur ce dossier, sur cette question. Alors, nous nous sommes inspirés, dans nos allégations, du livre vert, qui est publié pour consultation, des hypothèses qu'on y retrouvait, et nous avons essayé au mieux de modestement vous présenter notre contribution à cette démarche en vue de la réforme du Régime de rentes.

Nous commencerons au troisième paragraphe, puisque M. Fraser vient de résumer les deux premiers. Comme l'indique le document de consultation, notre Organisation considère que les personnes retraitées actuelles sont concernées par cette réforme éventuelle et nécessaire, à deux titres: leurs revenus personnels qui peuvent en être affectés à divers degrés dans un grand nombre de cas et, en termes d'équité, l'héritage que nous nous apprêtons collectivement à laisser à nos enfants. En dépit du fait qu'il est prétendu qu'en moyenne la situation des personnes âgées s'est améliorée, nous ne pouvons aborder cette question sans rappeler les tristes constatations de l'étude faite par le Conseil des aînés, à l'effet qu'en 1992 c'est au Québec qu'un plus grand pourcentage de personnes âgées de 65 ans et plus au Canada étaient en situation de pauvreté. En effet, en 1992, le tiers des personnes de 50 ans et plus et 23 % des 65 ans et plus avaient un revenu inférieur à 10 000 $, un revenu annuel, dis-je.

D'autre part, c'est au niveau de la population vieillissante que la situation est la plus dramatique et susceptible de venir gonfler le nombre de personnes âgées vivant en dessous du seuil de la pauvreté. Selon les statistiques confirmées par les analyses actuarielles faites sur le financement du Régime de rentes, en 2021 une personne sur cinq sera âgée de 65 ans et plus, et cette proportion atteindra 27 % en 2041. Il n'est donc pas étonnant que le Régime de rentes du Québec ait besoin d'être révisé.

Pour ce qui est des prestations, nous souscrivons entièrement aux principes qui caractérisent ce Régime, un régime d'assurance basé sur la responsabilité, la solidarité et l'équité: la responsabilité par la participation, la solidarité par l'effort de tous et de toutes proportionné aux moyens de chacun et l'équité entre les générations, principe qui est principalement en cause et qui constitue l'objectif premier de la réforme éventuelle. Nous nous opposons donc à toute réduction des prestations et nous sommes en accord avec le maintien des quatre principaux acquis du Régime: le remplacement du revenu à 25 % des gains moyens des cotisants, l'âge de la retraite à 65 ans, l'indexation des prestations et le maintien de la mesure de retranchement des années de gains nuls et faibles.

Au nom de l'équité, il est raisonnable que la rente d'invalidité ne soit pas supérieure à la rente normale. Le remplacement du revenu doit revêtir la même importance et la même valeur pour quelque travailleuse ou travailleur que ce soit. L'indexation selon l'indice des prix à la consommation a également le même effet pour toutes et tous, en termes de protection du pouvoir d'achat. Comme il appert que 60 % des rentes d'invalidité sont versées à compter de l'âge de 60 ans, ces bénéficiaires sont largement favorisés par rapport à l'ensemble des bénéficiaires du Régime. Une correction s'impose donc à ce chapitre.

Toujours pour une question de solidarité et d'équité, nous croyons que la prestation au décès pourrait être reliée à la capacité de payer du bénéficiaire, jusqu'à l'élimination complète à un certain niveau que de savants calculs sauront déterminer en même temps que l'apport d'une telle mesure au financement du Régime.

La cotisation. D'autre part, nous croyons que les personnes qui reçoivent une rente et qui occupent un emploi rémunéré devraient être cotisées au même titre que tous les autres travailleurs. Cette cotisation et celle de l'employeur devraient servir en premier lieu à bonifier les prestations de ceux et celles de ces travailleurs et travailleuses qui n'ont pas atteint le maximum de prestations et ensuite au financement du Régime. Ainsi, les principes de la responsabilité et de la solidarité prendraient tous leur sens.

L'exemption générale de 3 500 $ devrait être gelée puis réduite graduellement et proportionnellement jusqu'à l'abolition complète pour revenu égal ou supérieur au maximum des gains admissibles. Cette mesure devrait être étalée pour atteindre l'objectif en l'an 2006. Il nous apparaît juste et raisonnable de porter le niveau de réserve à quatre fois les sorties de fonds annuelles du Régime; ce juste milieu permettra une meilleure stabilité du taux de cotisation pour une longue période. La situation économique étant ce qu'elle est, une longue période de progression des cotisations pour atteindre 10,2 % est plus appropriée dans la conjoncture.

En conclusion, nous constatons comme plusieurs, chez la génération actuelle des travailleurs et travailleuses actifs, particulièrement au sein de la moitié des plus jeunes d'entre eux, une vive inquiétude quant à l'avenir des mesures d'assistance et d'assurance dont bénéficie la génération qui les précède. D'autre part, chez les membres d'une certaine couche de la population actuelle des personnes retraitées, mis à part les moins bien nantis dont nous avons traité au début de ce mémoire, face à la conjoncture économique et sociale et aux inquiétantes perspectives pour l'avenir, un sentiment leur fait dire entre eux qu'ils sont nés et ont vécu à la bonne époque. Il est donc important, pour éviter tout conflit générationnel et pour assurer un meilleur héritage à nos enfants, que toutes les couches de la société participent solidairement et en toute équité au redressement qui s'impose pour garantir l'avenir du Régime de rentes. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Leduc): Merci, M. Boucher. Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, bienvenue, M. Boucher, M. Fraser et M. Caron. Je comprends que le mémoire que vous nous présentez a été rédigé sous le signe du raisonnable. Moi, je dois vous dire que, quand j'en ai pris connaissance, j'ai trouvé que c'était raisonnable, que l'équilibre intergénérationnel et puis aussi l'équilibre dans la perspective de garantir la santé financière du Régime de rentes... que c'était en fait un mémoire qui recherchait l'équilibre.

(10 h 40)

Je dois vous dire que ça n'a pas été nécessairement le cas de tous les autres mémoires présentés par des personnes que l'on dit «aînées». Notamment, vous suggérez, vous recommandez fermement plutôt de ne pas toucher à ce qu'on appelle les acquis du Régime qu'on connaît – je ne vous les rappelle pas, vous les connaissez – mais en même temps vous êtes prêts à faire, si vous voulez, des accommodements, n'est-ce pas, notamment le gel de l'exemption générale, la réduction proportionnelle de l'exemption générale. On pourrait toujours dire: Oui, mais ils ne sont plus cotisants. Mais, en même temps, vous êtes prêts à faire des accommodements sur les prestations. Je pense en particulier à la rente d'invalidité. Vous nous dites que, au nom de l'équité, il est raisonnable que la rente d'invalidité ne soit pas supérieure à la rente dite normale, la rente normale étant la rente de retraite, j'imagine, dans notre compréhension.

Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Je crois que cette question de rente d'invalidité, bon, a fait l'objet d'un échange important durant tous nos travaux puis j'aimerais entendre votre point de vue. Peut-être juste un mot pour vous remercier de la perspective que vous adoptez dans votre mémoire, à savoir que, si vous n'appartenez pas à la génération la plus favorisée... Et on sait que, parmi – vous le dites bien d'ailleurs – la génération des aînés, il y a des personnes pauvres. On aurait pu ajouter qu'en général ce sont des femmes, mais en fait je crois que vous n'êtes peut-être pas de la génération qui distinguait selon les sexes, mais en fait... C'est-à-dire que vous distinguiez selon les sexes mais pour autre chose que pour les programmes sociaux. Ceci dit, si tant est que vous êtes une génération qui... C'est parce que habituellement j'en profite pour parler du fait qu'il y a justement pauvreté des femmes à la retraite à cause de la sous-rémunération des femmes au travail et que cette sous-rémunération ne peut être corrigée que par un grand virage qu'on appelle l'équité. Mais je ne le répéterai pas parce qu'ils sont habitués. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: Vous ne le répéterez pas parce que je vais le faire.

Mme Harel: Mais en fait, plus sérieusement, vous dites une chose importante: vous dites avoir le sentiment... Parce que c'est toujours une question de perception. Là, on a la perception que les aînés sont riches; là, vous nous rappelez que non, qu'il y en a des pauvres, pas mal. Mais, en même temps, vous avez quand même la perception d'appartenir à une génération qui est née puis qui a vécu à la bonne époque. C'est quand même une question de perception. À l'inverse, vous nous dites: Les jeunes ont une vive inquiétude quant à l'avenir des mesures d'assistance et d'assurance. C'est une perception aussi parce qu'il y a malgré tout, en fait, chez la jeune génération, des gens qui sont plus scolarisés, qui vraisemblablement, si ce n'est pas maintenant, vont pouvoir vraiment mettre à profit... puis ils vont avoir une rémunération aussi.

Mais j'ai beaucoup moins aimé que vous acceptiez de reconnaître ce sentiment que vous éprouvez d'être, dans le fond, de la bonne génération. Je pense que, quand on fait ce genre d'admission... on apaise le ressentiment des jeunes puis on met sur la table les vrais problèmes, qui sont des problèmes que rencontrent des personnes indépendamment de leur génération. C'est plus en fonction de leur situation sociale, économique, c'est plus de leur situation de santé. Alors, ceci étant dit, j'aimerais vous entendre sur la question de l'invalidité en particulier.

M. Boucher (Maurice): Avant de vous parler de cette question de l'invalidité, je dois vous dire que nous avions bien vu que, dans la proportion des personnes qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté, des 65 ans et plus, 19 % sont des hommes et 33 % sont des femmes.

M. Fraser (Roger): Je pense qu'on ne pouvait pas tout dire.

M. Boucher (Maurice): Pour ce qui est de la question de l'invalidité, ce que nous en connaissons, à moins qu'on soit dans l'erreur, c'est que les rentes d'invalidité sont versées en proportion du salaire, des gains salariaux reçus au moment de l'invalidité. Et c'est ces gains-là qui sont indexés, ce qui fait que ces prestations-là d'invalidité augmentent plus rapidement que les prestations qui originent du Régime normalement, ce qui fait que les prestataires de primes d'invalidité se retrouvent à un moment donné, après 65 ans, avec une rente plus élevée que les prestataires du régime normal des travailleurs et des travailleuses.

Mme Harel: Si vous permettez, Mme la Présidente, je vais demander à M. Legault, le président de la Régie des rentes du Québec, pour les fins de notre enregistrement, de faire valoir un peu la problématique et les diverses hypothèses, les divers scénarios de solution.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, M. Legault.

M. Legault (Claude): Claude Legault.

La Présidente (Mme Leduc): Oui, vous permettez?

M. Legault (Claude): La rente de retraite à 65 ans pour un travailleur qui a été reconnu invalide lui donne droit à une rente qui est le reflet de la carrière qu'il avait cotisée avant l'invalidité. Alors, cette retraite-là ne pourra jamais être plus élevée que le maximum de la rente de retraite. Donc, il n'aura pas droit à une rente de retraite plus élevée qu'un travailleur qui aurait toujours cotisé au maximum. Donc, avant la retraite, l'invalide a une rente plus élevée qu'un travailleur qui se serait retiré à 60 ans, c'est évident, mais à 65 ans il revient dans une position comparable à celle d'un travailleur. La proposition qu'il y a au livre vert vient dire que, lorsqu'il atteint 65 ans... la proposition qui est faite est de faire un calcul comme s'il avait pris sa retraite à 60 ans. Donc, on le replace dans la même situation qu'un travailleur qui aurait été usé et qui aurait dû prendre sa retraite à 60 ans, sans pour autant être reconnu invalide.

Ce qu'il faut retenir par ailleurs – parce qu'il y en a aussi qui sont contre cette mesure-là – c'est que ce travailleur-là qui devient invalide et qui voyait jusqu'à aujourd'hui sa rente lui être accordée pleinement à 65 ans, quand on y ajoutait la pension de la sécurité de vieillesse, la prestation qu'il recevait n'était pas comme dans le passé de 880 $ au maximum, elle devenait une rente de retraite de 727 $. Et, quand on ajoutait à ça la pension de la sécurité de vieillesse, ça lui donnait quelque chose comme 1 200 $ par mois.

Avec la proposition qui est au livre vert, l'invalide qui a actuellement le maximum de 880 $, lorsqu'il atteindra 65 ans, verrait la rente de retraite qu'il recevrait comparable à celle de quelqu'un qui l'a prise à 60 ans, donc environ 500 $ par mois. Mais, quand vous ajoutez son droit à la sécurité du revenu pleine par le supplément de revenu garanti, la diminution de son total ne serait que d'environ 100 $ par mois. Donc, la diminution de son revenu net n'est pas tellement grande, et ça le compare davantage avec le travailleur qui a dû se retirer par un manque de capacité de travailler jusqu'à 65 ans sans pour autant être invalide. Donc, c'est la proposition qui est là et dans le but de rétablir à peu près au même niveau le travailleur qui était usé et qui a dû se retirer et celui qui a malheureusement, parce qu'il était très hypothéqué, été un peu mieux traité par le fait de la rente d'invalidité qu'il a reçue. Donc, ça les replace à peu près dans la même situation. C'est le but qui était recherché.

Mme Harel: Cependant, là, je dois vous dire que ça a été beaucoup questionné du fait qu'on ne choisit pas d'être invalide, qu'on n'opte pas pour l'invalidité, alors qu'à 60 ans, compte tenu de l'élargissement du test d'invalidité après 60 ans ou compte tenu de la rente de retraite anticipée à 60 ans, là on choisit la rente de retraite à 60 ans. On la choisit délibérément, volontairement, vraisemblablement après avoir fait des calculs qui démontrent qu'on a mis de côté ce qu'il fallait. Alors, on a dit: Avec la proposition du livre vert, vous mettez dans la balance des options qui ne le sont pas, étant donné qu'on ne choisit pas d'être invalide, alors qu'on choisit la rente de retraite anticipée. Donc, il y a vraiment un examen qui se fera parce que, en même temps, si vous voulez, on avait mis de côté le réexamen de la rente de conjoint survivant.

Et je crois que, suite à tous ces échanges, il faut peut-être regarder si la rente de conjoint survivant, telle que conçue au moment où elle a été introduite dans notre Régime, ne l'a pas été dans un contexte où justement les femmes n'étaient pas sur le marché du travail. Je ne vous dis pas d'abolir la rente de conjoint survivant, là, hein, la question ne se pose pas comme ça, mais de la reconfigurer autrement pour qu'au moment où, vraisemblablement, hommes et femmes partagent, si vous voulez, l'activité de rémunération sur le marché du travail, ce qui est quand même pas mal le cas actuellement pour les mères d'enfants de moins de six ans... Leur taux d'activité est autour de 70 %. On dit que, dans quelques années, ça atteindra celui des hommes, qui est à 75 %.

(10 h 50)

Alors, à ce moment-là est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux introduire une sorte de reconfiguration de la rente de conjoint survivant pour tenir compte de l'aspect, si vous voulez, du revenu? Elle pourrait être versée mais selon un certain test de revenu et non pas de manière universelle dans la portion qui est distribuée par tout le monde, ce qu'on va, d'ici à peu près 50 ans, comme tripler. Actuellement, c'est 222 000 conjoints survivants, et il y en aurait 662 000 dans à peu près 30 ans. Alors, ça devient très, très important en fait. La rente de conjoint survivant, c'était en partie pour compenser la femme au foyer.

La Présidente (Mme Leduc): Je vous remercie. Est-ce que vous avez un commentaire sur l'intervention? Ensuite, nous allons passer aux questions du côté de l'opposition.

M. Boucher (Maurice): Non. Sur la question de l'invalidité, ça éclaire nos lanternes. Nous avions tort de croire que la rente d'invalidité était plus élevée après 65 ans que la rente d'un prestataire normal.

La Présidente (Mme Leduc): D'accord. Alors, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Merci, Mme la Présidente. D'une part, je souhaite la bienvenue à la Coalition des aîné-e-s de la région de Québec. J'imagine qu'on va vous revoir souvent, parce que, vous savez, les commissions parlementaires, ça écoute. Et vous allez probablement être une voix qui va venir régulièrement témoigner devant nous. Alors, j'imagine qu'on vous souhaite la bienvenue pour la première fois, mais ce ne sera certainement pas la dernière.

J'ai lu avec intérêt aussi votre mémoire. Je trouve qu'il présente les choses d'une manière sage. C'est un peu le même point de vue que je pourrais avoir quant à ce que vous mettez de l'avant. Je vais essayer de tester avec vous des idées qui ont été soumises par d'autres personnes pour voir comment vous réagissez à certaines questions. Vous comprenez bien que le travail des parlementaires, c'est qu'on écoute beaucoup, et on voudrait savoir comment les gens peuvent réagir à des idées qui nous ont été soumises par d'autres personnes qui ont témoigné devant nous.

Le déplafonnement du maximum des gains admissibles. Il y a des personnes qui sont venues nous dire: Bien, déplafonnez le maximum des gains admissibles pour faire entrer plus d'argent dans la caisse et peut-être que vous n'aurez pas, pour les gens qui auraient des revenus supérieurs, l'obligation de maintenir le taux de remplacement à 25 %. Ça pourrait aller à 20 % si on déplafonnait considérablement. Est-ce que vous avez réfléchi sur ces questions-là?

M. Boucher (Maurice): Nous, on n'a pas regardé cette question-là, mais je pense que ça vaut la peine...

M. Gautrin: D'être vu aussi.

M. Boucher (Maurice): ...de l'explorer, cette avenue-là, parce qu'il y a sûrement des argents là qui pourraient aider au financement du Régime.

M. Gautrin: Alors, deux autres points que je voudrais voir avec vous. La question de la retraite progressive, je ne sais pas si, parmi vos membres, vous avez des gens qui ont pris des retraites progressives. Vous savez, ce qu'on appelle dans notre jargon des retraites progressives, c'est une personne qui continue à être sur le marché du travail et qui après s'absente, travaillera quatre jours, trois jours, deux jours pour petit à petit atteindre l'âge de la retraite. Le Régime de rentes, actuellement, n'est pas adapté à cette réalité-là. Est-ce que parmi vos membres, parce que vous représentez des retraités, vous avez des gens qui ont vécu des retraites progressives ou qui ont des problèmes avec cette question?

M. Boucher (Maurice): M. Fraser.

M. Fraser (Roger): Bon, sur la retraite progressive, on n'a pas non plus de position de prise comme Coalition. Il y a peut-être des groupements qui ont des positions de prises là-dessus. Ce que l'on connaît, c'est surtout des retraites anticipées, mais les retraites anticipées ne sont pas avantageuses parce que la majorité des personnes qui prennent une retraite anticipée sont pénalisées.

Moi, personnellement, je vous dirai que, si c'était proposé, une retraite progressive, je pense que je travaillerais à regarder vraiment les avantages et je pense qu'il y aurait des avantages à ce dossier-là. Évidemment, il faudrait que ce soit administré, et l'administration pourrait être beaucoup plus difficile dans le cas des retraites progressives.

M. Gautrin: Non, mais, vous comprenez, la demande qui nous est faite par les gens qui envisageaient la question de la retraite progressive et qui est faite à la Régie des rentes...

M. Fraser (Roger): À la Régie des rentes.

M. Gautrin: ...c'est de ne pas être pénalisés...

M. Fraser (Roger): C'est ça.

M. Gautrin: ...sur leur rente, c'est-à-dire qu'ils puissent contribuer comme s'ils étaient à leur plein salaire...

M. Fraser (Roger): C'est ça.

M. Gautrin: ...pendant la période où ils prennent leur retraite, de manière à ne pas être pénalisés sur la retraite qu'ils prendront dans quelques années. Simplement si vous pouvez y penser de votre côté; c'est le genre de questionnement qu'on aura peut-être à se poser dans le futur.

M. Boucher (Maurice): Oui. Nous favorisons les modes de retraite progressive pour deux raisons, pas seulement sur le plan financier mais, d'autre part, sur le plan psychologique aussi. C'est très intéressant d'envisager d'habituer un travailleur ou une travailleuse à vivre à la retraite, non seulement financièrement mais psychologiquement avec tout ce que ça entraîne comme choc.

M. Gautrin: Je partage votre point de vue là-dessus. Je crois, Mme la Présidente... Je pourrai y revenir après s'il nous reste du temps, mais mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, sur la dimension des invalides ou peut-être sur d'autres...

La Présidente (Mme Leduc): Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, Mme la Présidente. Messieurs, je ne veux surtout pas vous faire un sermon, loin de là, mais j'aimerais soulever quand même quelques préoccupations que j'ai avec vous au niveau de la rente d'invalidité. Quand vous dites que, au nom de l'équité, ce serait plus équitable que la rente d'invalidité soit au même niveau que la rente de retraite, que tous les travailleurs soient traités de la même façon, la crainte que j'ai, c'est que deux choses sont très clairement démontrables: les personnes handicapées sont parmi les plus pauvres de notre société, et les femmes handicapées sont parmi les plus pauvres des plus pauvres. Ça, c'est clair. Quelque chose qui est également très démontrable, c'est que les personnes handicapées ont des dépenses supérieures aux dépenses des personnes qui ne sont pas handicapées. Et, très souvent, ces dépenses ne sont pas compensées par quelque régime ou quoi que ce soit au Québec. Il y en a des dépenses supplémentaires qui sont couvertes par la RAMQ, par d'autres régimes d'assistance publique, mais il y a quand même des dépenses quasi quotidiennes qui ne sont couvertes d'aucune façon par des régimes.

Alors, la suggestion que je vous fais, compte tenu de tout cela, au plan de l'égalité purement mathématique... C'est peut-être vrai qu'au niveau de l'égalité traiter les personnes handicapées et invalides différemment des travailleurs qui ne le sont pas est inégal, mais, moi, je vous suggère qu'il est plus équitable même d'assurer une rente supérieure aux personnes invalides, à cause principalement des choses que je viens de vous exprimer. Je pense qu'on a tendance, depuis récemment, à utiliser le mot «équité» dans le sens de traiter tout le monde égal. Quant à moi, il faut ajouter à cette notion de traiter tout le monde égal la notion d'une justice sociale. Et, pour moi, quelqu'un qui au début est plus pauvre et deuxièmement a des dépenses beaucoup supérieures à une personne qui ne l'est pas, c'est démontrable, et on devrait comme société avoir la possibilité de compenser tout cela. Je ne sais pas si...

M. Fraser (Roger): Je ferais juste un petit commentaire si M. Boucher me le permet. C'est sûr qu'à mon avis les mots «égalité» et «équité» ne sont pas égaux. Je fais juste mentionner ça, mais on n'a pas à se prouver entre nous que c'est bien sûr que les personnes handicapées et, comme vous l'avez dit, les femmes qui, en plus d'être femmes... vous avez ajouté les femmes handicapées, elles ont des dépenses supérieures. Ça, c'est bien clair. Donc, il faut trouver, à l'intérieur même de cette recherche d'équité et pas nécessairement en pensant à égalité, il faut rechercher des moyens d'aider davantage ces personnes-là. C'est tout ce que j'aurais à dire, pour le moment, là-dessus.

La Présidente (Mme Leduc): M. Boucher.

M. Boucher (Maurice): Et, puisque le Régime de rentes est une mesure de remplacement de revenu, je n'ai pas d'objection à ce qu'on regarde ça de près, mais il me semble que les dépenses additionnelles occasionnées par un handicap devraient être protégées par une autre mesure sociale, que ce n'est probablement pas dans la fonction du Régime de rentes de viser cette partie-là des difficultés des personnes handicapées.

(11 heures)

M. Copeman: En principe, je suis d'accord avec vous. La difficulté qu'on a ou la question qui se pose est... Parce qu'on a eu des commentaires des groupes patronaux et autres qui ont dit qu'il y a certaines choses qui sont propres à un régime d'assurance puis certaines choses qui sont propres peut-être à un régime d'assistance publique. La suggestion a été faite par d'autres intervenants que la rente d'invalidité, de façon très technique, n'est pas propre à un régime d'assurance nécessairement. On peut être d'accord avec cette analyse. La crainte que j'ai, c'est que, dès qu'on commence à jouer avec tout cela, est-ce qu'on peut être certain que le régime public d'assistance va vraiment remplacer ce qu'on tente de ménager avec le système d'assurance. Ça, c'est la crainte que j'ai, c'est la crainte d'énormément de groupes qui travaillent dans le milieu associatif.

On connaît la pression sur les finances publiques au Québec aujourd'hui; tout le monde la connaît. Et la crainte qu'ils ont, les groupes qui représentent des personnes handicapées, est que, si on commence à toucher au régime d'assurance-invalidité tel qu'on le connaît présentement, est-ce qu'il va y avoir ce support additionnel requis par le biais d'autres programmes présentement? Ça, c'est une grosse question, une question importante. Et quand, avec beaucoup de respect, M. Legault nous dit que peut-être les changements dans le livre vert peuvent occasionner une diminution de seulement 100 $ par mois, moi, je fais objection au mot «seulement». Quand on a un revenu de 10 000 $, 12 000 $ ça représente à peu près 10 % du revenu annuel. Pour des personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, c'est beaucoup. C'est ça, ma préoccupation.

M. Fraser (Roger): Moi, ça m'a frappé énormément tout à l'heure aussi quand M. Legault a parlé du 100 $ par mois. Je n'ai pas réagi, mais je vous avouerai honnêtement que – puis je ne vous en veux pas, là – quand on dit: Seulement 100 $ par mois, quand c'est des personnes qui auraient une pension intéressante, il n'y a rien là. Mais vous savez que 100 $ par mois, c'est 12 000 $ par année. Et pour des personnes aînées, à mon avis, et surtout la catégorie dont on a parlé tantôt, ça peut être intéressant négativement.

La Présidente (Mme Leduc): M. le député de Verdun, en conclusion. Vous avez...

M. Gautrin: Non, non. Écoutez, moi, j'ai terminé. Messieurs, je voudrais seulement vous remercier pour votre présentation et au plaisir de vous revoir, probablement dans une commission parlementaire.

La Présidente (Mme Leduc): Oui, M. Fraser.

M. Fraser (Roger): Oui. Je voudrais attirer l'attention à la suite de l'intervention de M. Gautrin tout à l'heure. J'ai commencé avec une petite histoire, mais je ne veux vraiment pas finir avec une boutade. Mais quand on a mis sur pied la Coalition des aîné-e-s... Vous savez qu'elle existe au niveau provincial; la preuve, ils sont venus vous présenter un mémoire. Mais j'aimerais vous dire, et pour l'avenir, que quand on a mis sur pied la Coalition des aîné-e-s puis qu'on savait qu'il y avait 23 groupements dans la région de Québec,

moi, je suis allé au dictionnaire chercher la définition du mot «coalition». Alors, quand vous dites: On va vous revoir souvent, souvent, souvent, je tiens à vous dire que peut-être pas si souvent que ça, mais au bon moment.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fraser (Roger): Parce que, si vous me suivez bien, la définition du dictionnaire, je vais vous dire, au niveau historique, on disait: c'est une ligue formée par les puissances européennes – au niveau historique, là – contre la France révolutionnaire et impériale. Ça, on a dit: Ça, ce n'est pas nous autres.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fraser (Roger): Le point 2 du dictionnaire disait: c'est un accord réalisé entre des ouvriers pour obtenir une augmentation de salaire entre patrons ou commerçants pour faire fixer les prix artificiellement. Alors, on a dit: Ça commençait un peu à être nous autres, mais ce n'est pas encore ça.

Mais la première, par exemple, c'est une... Et c'est ça qu'il est important de retenir parce qu'il y a des associations qui vont continuer de venir vous voir: FADOQ, région Québec–Chaudière-Appalaches, l'ORCSN pourra un jour venir vous voir. La Coalition viendra peut-être dans des moments qui couvrent l'ensemble, parce qu'on représente pas loin d'une centaine de mille, vous savez, dans la région de Québec– Chaudière-Appalaches.

Alors, la première – parce que vous voulez la savoir, je suis sûr – c'est une réunion, et tenez-vous bien, de plusieurs puissances, partis ou ligues contre un adversaire commun. Ha, ha, ha! Ça, c'est le dictionnaire. C'est le dictionnaire qui dit ça.

Alors, tout ça pour vous dire que l'adversaire commun, on ne vous prend pas...

Mme Harel: Est-ce qu'on pourrait souhaiter une prochaine définition qui dirait: ligue de puissances pour un projet commun? Ha, ha, ha!

M. Fraser (Roger): Et j'y tiens. D'ailleurs, si j'avais eu à prendre la parole après votre intervenant tout à l'heure, Mme Harel... J'ai bien aimé la reconnaissance que vous avez donnée à ce court mémoire en faisant le parallèle entre des revendications, et je tiens à vous le mentionner, des revendications et tout l'aspect humanitaire qu'il y avait dans nos trois pages, tout l'aspect humanitaire pour démontrer qu'on ne vient pas uniquement dire: Changez ci, changez ça, mais qu'on a touché vraiment, surtout quand on disait, à la fin tout à fait dans la conclusion, et je termine avec ça, le dernier paragraphe: «...que toutes les couches de la société participent solidairement et en toute équité aux redressements qui s'imposent pour garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec.» Merci.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, je vous remercie, M. Boucher, M. Fraser et M. Caron.

Et j'inviterais l'Association des travailleurs grecs du Québec à prendre place. M. Fournaris, si vous voulez prendre place. Bon, alors, ça me fait plaisir d'accueillir l'Association des travailleurs grecs du Québec. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour présenter votre exposé et qu'ensuite le temps est partagé également entre le côté ministériel, pour des échanges, et le côté de l'opposition. Alors, M. Fournaris, si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne.


Association des travailleurs grecs du Québec

M. Fournaris (Theoharis): Merci. On n'est pas très habitué avec la procédure. À côté de moi, c'est M. Charalambos Xenos, qui est le président fondateur de l'Association des travailleurs grecs du Québec. Tous les deux, on n'est pas spécialistes, on est des travailleurs bénévoles avec l'Association des travailleurs grecs et très intéressés par le sujet. D'ailleurs, M. Xenos est déjà retraité, et moi j'achève.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, comme le disait mon collègue, M. Gautrin: Sentez-vous très à l'aise. Nous sommes aussi des travailleurs, nous avons été des travailleurs et travailleuses dans d'autres lieux, alors, nous aussi, on a fait une première expérience des commissions parlementaires, alors on peut comprendre vos sentiments ce matin.

M. Fournaris (Theoharis): Merci bien. Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour, encore, bien sûr.

L'Association des travailleurs grecs, d'abord, veut exprimer sa satisfaction à la commission parlementaire des affaires sociales pour la possibilité qui lui a été donnée de participer à cette consultation sur la réforme du Régime de rentes du Québec. C'est depuis 25 ans que notre Association offre ses services aux travailleurs et aux personnes démunies de notre communauté, et ainsi nous avons acquis une expérience en matière de régime de sécurité sociale et nous offrons beaucoup de services et de conseils aux travailleurs de notre communauté sur le Régime de rentes.

(11 h 10)

L'intérêt porté par notre organisme pour ce sujet vient du fait que les pensions publiques constituent, pour les travailleurs de notre communauté, leur revenu principal et, bien souvent, leur seul revenu quand ils arrivent à la retraite. Donc, l'annonce d'une réforme éventuelle du Régime de pensions et la publication d'abord par le gouvernement fédéral du document de formation pour les consultations sur le Régime de pensions du Canada et celle du livre vert du gouvernement du Québec ont suscité, je vous dis, beaucoup, beaucoup d'intérêt dans notre communauté.

Et, malgré l'approche différente que le gouvernement du Québec semble privilégier par rapport aux hypothèses de réduction de pensions avancées par le gouvernement fédéral, le fait même d'y faire référence dans le livre vert a semé, je dirais, la panique parmi les travailleurs et les retraités de la communauté. Pourquoi ça? Parce que notre communauté, elle est bien vulnérable sur cette question. Et je vous donne quelques données seulement pour vous situer un peu par rapport à la communauté grecque. D'abord, il s'agit d'une communauté à bas niveau de scolarité. Et, d'après les données du recensement de 1991, 36 % des résidents du Québec d'origine hellénique avaient six ans de scolarité et moins. Et ce taux devient encore plus élevé si on se limite aux immigrants, aux gens qui sont nés à l'extérieur.

Et, aussi, les travailleurs de la communauté font un travail d'habitude manuel dans les petites et moyennes entreprises. Plus de 44 % de la main-d'oeuvre de la communauté fait un travail manuel dans les petites usines, l'entretien ménager et la restauration. Un autre 26 % des travailleurs de la communauté travaille dans les bureaux et comme vendeurs dans des petites entreprises.

Aussi, d'après les statistiques de l'Office des ressources humaines du Québec, les travailleurs d'origine hellénique sont de loin les moins représentés dans la fonction publique fédérale, provinciale et municipale, à tous les niveaux. Il est d'ailleurs à noter que, malgré ces statistiques, notre communauté ne fait pas partie des populations cibles des programmes existants pour l'égalité en emploi.

D'après les dernières données à notre disposition – ça vient du recensement de 1986 – le salaire moyen des travailleurs d'origine hellénique qui ont travaillé toute l'année, temps complet c'est-à-dire, était 24 000 $ à peu près pour les hommes et à peu près 16 800 $ pour les femmes, ce qui est nettement inférieur à la moyenne de salaire de l'ensemble des travailleurs du Québec. Le taux de chômage dans notre communauté était de 16,6 % en 1991 et dépasse certainement les 20 %, d'après les estimations d'aujourd'hui.

En conséquence de tout ce qui précède, les prestations versées par le Régime de rentes aux travailleurs d'origine hellénique, vous comprenez qu'elles sont très faibles. À ce niveau, d'ailleurs, il faut ajouter aussi l'incidence du travail au noir ou la couverture partielle des travailleurs dans la restauration, etc.

La Régie ne publie pas de statistiques par communauté ethnoculturelle. Cependant, d'après les données des services de notre Association, le montant de la pension moyenne des travailleurs de notre communauté est très inférieur à la moyenne des rentes payées par la Régie, qui était 400 $ à peu près en janvier 1996. À titre indicatif seulement, nous mentionnons que le montant moyen des rentes payées par le Régime de rentes aux retraités qui sont retournés vivre en Grèce est de l'ordre de 180 $ par mois. Finalement, nous mentionnons que, compte tenu du fait que nos compatriotes travaillent ici tous dans des petites et moyennes entreprises, très peu, vraiment très peu d'entre eux sont couverts par des programmes complémentaires de pensions.

Le système de la sécurité du revenu à la retraite du Québec et au Canada est construit sur trois niveaux et a deux objectifs principaux, comme nous dit le livre vert. Le premier niveau contient des mesures d'assistance telles que la pension de la sécurité de la vieillesse et les autres allocations du gouvernement fédéral et a comme objectif principal d'assurer un revenu de base à toutes les personnes âgées et de lutter ainsi contre la pauvreté.

Le deuxième et le troisième niveau contiennent des mesures d'assurance telles que le Régime de rentes du Québec ou de pensions du Canada, pour le reste du Canada, et les régimes complémentaires de retraite, et ont comme objectif principal d'assurer une continuité du revenu d'emploi du travailleur et de sa famille au moment de la retraite ou lorsqu'il arrive une invalidité ou un décès. Sans compter les régimes complémentaires de retraite qui couvrent seulement un nombre restreint de travailleurs du secteur privé – le livre vert nous dit: 5 % seulement de ceux qui travaillent dans des petites et moyennes entreprises – nous voyons que les programmes publics de pensions, tant du Canada et du Québec, sont très loin d'atteindre leurs objectifs, tel que démontré par les tableaux qui suivent à la page 3 qui nous disent vraiment, si vous prenez le tableau 2, que le revenu de retraite d'une personne qui reçoit le maximum de la rente de retraite du Québec, c'est-à-dire qui était un salarié bien payé, même dans ces cas-ci, les revenus que va avoir cette personne à la retraite vont être de la sécurité de la vieillesse, si c'est une personne seule: 4 690 $; de la Régie des rentes, le maximum serait 8 558 $; et le supplément du revenu garanti serait de l'ordre de 1 410 $, c'est-à-dire un total de 14 658 $. Ce qui est encore 1 161 $ au-dessous du seuil de la pauvreté, et ça, dans le cas d'un salarié qui va recevoir le maximum de la rente du Québec.

Et si vous prenez la moyenne de notre communauté grecque, le tableau 3, par exemple, qui a une moyenne des rentes du Québec de l'ordre de 180 $, dans ce cas-ci la différence est encore plus importante, c'est 3 600 $ au-dessous du seuil de la pauvreté, l'ensemble des revenus qu'il va avoir de ces pensions publiques.

Nous ne voulons certainement pas contester les données du livre vert, d'après lesquelles la moyenne des revenus des personnes âgées a augmenté plus vite que pour les autres groupes d'âges de la population québécoise entre 1981 et 1993. Ce tableau montre que, même dans les meilleurs cas, comme on l'a dit tantôt, de la personne qui reçoit le maximum de la rente du Québec, le total de ses revenus à la retraite provenant des pensions publiques reste au-dessous du seuil de la pauvreté.

Cette réalité et aussi le fait que les revenus provenant des mesures d'assistance du gouvernement fédéral dépendent de l'état des finances publiques et des priorités budgétaires de chaque gouvernement, comme le dit très bien le livre vert, et deviendront ainsi de plus en plus incertains font encore plus grand pour nous autres le besoin de maintenir et d'améliorer le Régime de rentes du Québec comme principal revenu du travailleur qui arrive à sa retraite.

L'Association des travailleurs grecs du Québec considère que le Régime de rentes du Québec constitue la pierre angulaire de notre système de sécurité du revenu à la retraite. Ce Régime possède en effet des caractéristiques très positives qu'aucun régime complémentaire ne saurait égaler, notamment l'universalité, la transférabilité, l'indexation au coût de la vie, les prestations de survivant et d'invalidité.

Le Régime de rentes du Québec est aussi très efficace, équitable et économique à administrer. La persistance du chômage élevé, le changement du régime d'emploi, la précarité des emplois et la mobilité de plus en plus exigée des travailleurs soulignent justement l'importance de ces qualités qui le caractérisent. D'ailleurs, la place du Régime de rentes du Québec dans le système de sécurité du revenu à la retraite deviendra encore plus importante avec le projet du gouvernement fédéral de remplacer le programme de sécurité de la vieillesse par une prestation aux aînés, changement qui, inévitablement, va niveler vers le bas les revenus des travailleurs après leur retraite.

Si nous parlons donc aujourd'hui de la réforme du Régime de rentes du Québec, cela devrait être principalement pour l'améliorer, pour assurer une meilleure assurance des personnes âgées, parce que la principale critique à l'égard de ce Régime est que les prestations versées sont trop faibles. Nous constatons cependant que ceci n'est pas le cas. Du côté du gouvernement fédéral, les budgets des dernières années et le document d'information sur le Régime de pensions du Canada expriment très clairement l'orientation du changement projeté: rendre le Régime durable, abordable, comme on dit. Objectifs qui ne sont, pour nous autres, que des arguments pour justifier la réduction des prestations.

(11 h 20)

Ainsi, sans aucune indication de ce qu'ils considèrent comme critères de durabilité, sans aucune preuve sérieuse sur les affirmations contenues dans le document d'information, le gouvernement fédéral prétend que la façon de rendre le Régime de pensions du Canada viable et équitable pour les générations futures est une série de propositions de réductions des prestations qui se caractérisent par leur, je dirais, perversité.

Dans les faits, cette orientation est en ligne avec la politique du gouvernement fédéral visant le désengagement du gouvernement, la compression du système public de sécurité sociale et son remplacement par des programmes d'assistance pour les plus démunis, et, finalement, la promotion des programmes privés d'assurance pour ceux qui en ont les moyens.

Ce qui est cependant surprenant, c'est que le gouvernement fédéral – qui ne participe pas, il faut dire, au financement du Régime de pensions, qui est financé exclusivement par les cotisations des travailleurs et des employeurs – n'évalue pas le coût additionnel des paiements en supplément du revenu garanti qui résulterait d'une réduction éventuelle des pensions.

Du côté du gouvernement du Québec, on se réjouit du fait que le livre vert se dissocie de l'orientation fédérale, au moins en ce qui concerne les mesures de coupures les plus sauvages. Nous sommes cependant très déçus de ne pas voir, comme objectif principal de la réforme, l'amélioration du Régime actuel. Et ceci, malgré la critique faite sur les programmes d'assistance du gouvernement fédéral et la constatation que ceux-ci deviendront de plus en plus incertains.

Par contre, le livre vert du Québec, tout comme les documents d'information, d'ailleurs, du fédéral, mise sur les régimes complémentaires et les régimes d'épargne-retraite, programmes qui ne peuvent pas être comparés avec le Régime de rentes du Québec et qui sont inaccessibles à la grande majorité des travailleurs du secteur privé et des travailleurs à faibles revenus.

Donc, nos positions concernant les hypothèses du livre vert. D'abord, concernant la hausse du taux des cotisations, les scénarios démographiques et économiques présentés dans le livre vert amènent à la conclusion que, malgré l'existence d'une réserve importante, le maintien du taux actuel des cotisations ne serait pas suffisant pour les besoins à moyen et à long terme du Régime.

Nous n'avons pas les moyens pour faire une évaluation adéquate des projections démographiques et économiques sur lesquelles sont basées les hypothèses du livre vert. Il est cependant généralement reconnu qu'une hausse graduelle des cotisations est nécessaire pour permettre au Régime de satisfaire ses besoins futurs. De plus, une hausse du taux de cotisation est requise pour financer les améliorations du Régime que nous considérons urgentes et nécessaires.

À ce niveau, il faut remarquer que le Québec et le Canada sont en retard sur d'autres pays quant aux efforts fournis pour assurer une retraite décente à leurs personnes âgées. Le taux de cotisation du régime de pensions dans notre pays d'origine, en Grèce, est 14,25 % actuellement. Il est, vous le savez, encore plus élevé dans d'autres pays européens. Et, même aux États-Unis, il est de l'ordre de 15 % à peu près.

En ce qui concerne le niveau de l'augmentation à adopter, le livre vert reprend les deux hypothèses avancées par le gouvernement fédéral pour le Régime de pensions du Canada. La séquence la plus rapide prévoit un taux permanent à 12,3 % en 2003, et la moins rapide, un taux permanent à 12,6 % en 2006. Une telle augmentation, d'après les calculs, créera une réserve égale à six fois les dépenses annuelles du Régime, ce qui serait suffisant pour maintenir par la suite un taux permanent de cotisation. Si ces séquences étaient appliquées au Régime de rentes du Québec, on nous dit que le taux de cotisation plafonnerait à 11,8 % et à 12,3 %, respectivement. Le livre vert, sans se positionner très clairement, laisse comprendre une préférence pour une hausse rapide.

De notre côté, nous avons beaucoup de questions sur la nécessité de maintenir une si grande réserve, hypothèse du gouvernement fédéral qui est d'ailleurs questionnée par le livre vert. Aussi, nous aimerions rappeler que, d'après la dernière analyse actuarielle de la Régie des rentes du Québec, une augmentation moins rapide, qui amènerait le taux de cotisation à 13 % en 2023, serait suffisante pour les besoins à long terme du Régime.

La dernière analyse, d'ailleurs, pour le Régime de pensions du Canada, qui a été faite en 1993, suggérait aussi une augmentation graduelle modeste. Le principe d'une augmentation graduelle modeste des cotisations a été adopté, jusqu'à maintenant, comme étant le plus juste et avec le moins de répercussions sur l'économie. Le livre vert ne nous explique pas pourquoi ces arguments ne sont plus valables aujourd'hui. En effet, la seule raison pour laquelle le choix d'une séquence rapide est privilégié dans le livre vert est pour fins d'équité entre générations. Cependant, les transferts entre les générations dans le cadre du Régime de rentes sont une optique trop étroite pour juger de l'équité entre générations. Il faut considérer, en effet, les répercussions possibles d'une hausse rapide sur le pouvoir d'achat de la population, la création d'emplois pour les jeunes, etc., pour juger ce qui est plus juste pour la nouvelle génération. D'ailleurs, vous allez voir avec nous autres que pour la jeunesse d'aujourd'hui il est très peu convaincant, l'argument qu'il est plus juste pour eux de commencer dès maintenant à payer plus de cotisations que l'arrangement prévu pour le Régime de rentes.

Maintenant, aussi, nous proposons un changement de la formule de cotisation. Même si nous sommes d'accord sur le besoin d'une hausse graduelle du taux de cotisation, le gouvernement du Québec doit prendre en considération que les travailleurs québécois sont déjà lourdement taxés et qu'une déduction additionnelle sur leur salaire pourrait avoir des répercussions néfastes pour l'ensemble de l'économie québécoise. Nous croyons donc qu'une hausse du taux de cotisation du Régime de rentes du Québec doit être compensée par un allégement fiscal pour les salariés. Finalement, nous recommandons une modification de la formule de cotisation, de sorte que les salariés paient le tiers de la cotisation, les deux autres tiers étant payés par l'employeur. Ce n'est pas quelque chose de révolutionnaire: c'est la formule retenue par le régime de pensions de la Grèce et d'autres pays européens. D'ailleurs, ce principe existe déjà dans les programmes d'assurance-emploi du gouvernement fédéral où, comme vous le savez, l'employeur paie 1,40 $ pour chaque dollar de cotisation du salarié.

L'élargissement de la base de cotisation. Le livre vert envisage trois mesures d'élargissement de la base de cotisation: geler l'exemption générale, geler et réduire proportionnellement l'exemption générale et faire cotiser les bénéficiaires d'une rente de retraite qui travaillent. Ces mesures, même si elles sont plus modérées par rapport à la coupure pure et simple envisagée par le fédéral, ne sont guère recommandables à cause des répercussions importantes sur les travailleurs à faibles revenus et de la lourdeur administrative de son application. Par contre, nous appuyons la recommandation du Conseil national du bien-être social de doubler le maximum des gains soumis à la cotisation. D'ailleurs, aux États-Unis, ce maximum est 62 000 $US, c'est-à-dire 85 000 $CAN. Une telle mesure permettrait de maintenir plus bas le taux de cotisation et d'apporter plus facilement des améliorations au Régime. Le fardeau additionnel de cette mesure pour le travailleur à revenus élevés serait compensé, en partie, par les améliorations proposées.

Nous parlons d'amélioration des prestations. Depuis sa mise en place, en 1966, le Régime de rentes a connu quelques réformes dont le but était toujours son amélioration. Aujourd'hui, son importance est généralement reconnue dans le système de sécurité du revenu. Il est quand même aussi reconnu que le Régime est encore loin de son but d'assurer une continuité du revenu du travailleur qui arrive à sa retraite. Encore moins, tel que nous l'avons vu, les prestations combinées de nos régimes publics sont insuffisantes pour assurer un revenu décent au-dessus du seuil de la pauvreté.

Du côté du gouvernement fédéral, la réforme envisagée, cette fois-ci, ne vise pas l'amélioration mais la réduction des maigres prestations. Du côté du gouvernement du Québec, la ministre responsable, avec son livre vert, s'est dissociée des propositions du fédéral. Cependant, on emprunte dans le livre vert son argumentation autour de la durabilité, l'équité du Régime et on limite la problématique autour de son financement. Dans le meilleur cas, on garantit les rentes actuelles, quoiqu'on envisage des réaménagements pour rendre le Régime plus équitable et abaisser les coûts à long terme. Il est décevant que, malgré une lecture correcte de la situation problématique des personnes âgées, on laisse les solutions aux régimes privés.

(11 h 30)

L'Association des travailleurs grecs considère que la consolidation du Régime de rentes du Québec est la façon la plus efficace et la plus réaliste d'assurer un revenu décent et une continuité du niveau de vie aux travailleurs qui arrivent à leur retraite. L'augmentation des prestations versées par le Régime de rentes contribuerait aussi à la relance de l'économie québécoise et réduirait les coûts des programmes d'assistance du gouvernement fédéral, et nous pensons que le gouvernement du Québec pourrait négocier un transfert de cette épargne.

Pour toutes ces raisons, nous appuyons la position du livre vert d'écarter toute réduction des rentes et nous demandons en plus de faire de l'augmentation des prestations la priorité de la réforme. Dans ce but, nous proposons les mesures suivantes. Est-ce qu'il me reste quelque temps encore?

La Présidente (Mme Leduc): Bien, il vous reste... Il a été convenu de vous laisser terminer, mais, si vous pouvez aller à l'essentiel...

M. Fournaris (Theoharis): O.K.

La Présidente (Mme Leduc): ...pour qu'il puisse y avoir des échanges avec les personnes.

M. Gautrin: Parce qu'on arrive aux recommandations importantes que vous allez nous faire, alors on voudrait quand même les entendre avant.

La Présidente (Mme Leduc): Oui. Alors, peut-être faire les recommandations et couper un peu sur l'argumentation puis on va s'entendre, d'accord?

M. Fournaris (Theoharis): Merci bien. Donc, une façon d'améliorer les prestations, pour nous, c'est l'augmentation du taux de remplacement du salaire antérieur. On privilégie ici la formule Cofirentes, qui est une vieille formule proposée il y a quelques années et qui dit dans l'essentiel que la façon de calculer la rente du Québec devrait être comme suit: 50 % du revenu antérieur pour la partie du revenu qui est plus faible que la moitié de la moyenne des gains admissibles et 25 % sur la deuxième moitié, ce qui ferait en tout une rente équivalente au 37,5 % du salaire antérieur. Et, pour fins de comparaison, on peut dire que le programme de sécurité sociale des États-Unis remplace le 42 % du revenu moyen antérieur.

On dit aussi d'augmenter le niveau des gains admissibles. Aujourd'hui, le maximum est situé au niveau du salaire industriel moyen, c'est-à-dire 35 400 $. On note que, dans le cas des accidents du travail comme aussi de l'assurance automobile, le salaire maximum assurable est de 48 500 $. Nous croyons donc qu'une modeste augmentation des gains admissibles jusqu'à 120 % du salaire industriel moyen est due pour assurer une meilleure protection de cette catégorie de travailleurs et aussi compenser partiellement pour le doublement de la base de cotisation que nous avons proposé tantôt.

Aussi, nous recommandons de réduire le nombre d'années sur lesquelles la rente est calculée. Au fédéral, on dit: diminuer de 15 % à 10 % le nombre de mois qu'on peut exclure. Nous autres, au contraire, on dit qu'il faut augmenter ça à 20 % pour prendre en considération la réalité actuelle. Et cette mesure-là, c'est quelque chose qui va privilégier les femmes et les travailleurs immigrants qui se sont établis ici après 1966. Celui qui est venu en 1980, par exemple, il a, toutes ses années d'avant, zéro comme... On dit aussi de faciliter la retraite anticipée entre 60 et 65 ans. Et, là-dessus, une façon – il y a plusieurs façons qu'on pourrait envisager – ça serait de réduire la pénalité de 0,5 % à 0,25 % pour chaque mois qu'il reste jusqu'au 65e anniversaire.

Et quelque chose qui, nous pensons, est aussi important, c'est l'amélioration de la protection des enfants orphelins. Par le Régime de rentes du Québec, on verse une rente au conjoint survivant d'un cotisant même s'il s'agit d'un conjoint de fait, mais on oublie les orphelins. La rente d'orphelin devrait d'après nous être versée aux enfants qui sont aux études, comme elle l'était avant le 1er janvier 1994. Et, en plus, nous pensons que, dans le cas où les deux parents sont décédés, les orphelins devraient toucher la rente entière du survivant, et ce, jusqu'à la majoration du plus jeune enfant. D'ailleurs, nous pensons qu'il n'y a pas beaucoup d'enfants qui sont dans ces catégories, donc ça ne serait pas quelque chose, comme coût, d'important.

En conclusion, bien que le taux de pauvreté des personnes âgées au Québec ait diminué les dernières années, il demeure inacceptablement élevé, et le vieillissement de la population signifie que, dans l'avenir, encore plus de personnes auront à vivre dans la pauvreté. Le système de sécurité sociale du Québec est loin de ses objectifs d'assurer un revenu décent et une continuité du niveau de vie. Il est peu développé, d'ailleurs, par rapport aux systèmes de sécurité sociale d'autres pays.

Le secteur financier prétend que les régimes publics n'ont pas d'avenir et que la seule alternative viable est les régimes privés. Ce n'est pas vrai pour nous. Les régimes complémentaires n'ont pas les avantages du Régime de rentes du Québec et sont accessibles seulement aux travailleurs du secteur public et à quelques travaileurs de grandes, grandes entreprises. Le gouvernement du Canada, en faisant fi de cette réalité, prépare la mise en place de la prestation aux aînés, à partir de 2001, et remet en cause la sécurité financière des retraités. En même temps, il projette des coupures dans le Régime de pensions du Canada et exerce des pressions sur les provinces pour les accepter.

Du côté du gouvernement du Québec, la ministre responsable du dossier, avec son livre vert, se dissocie du choix du fédéral. Elle propose une augmentation rapide du taux de cotisation et garantit le maintien des grands acquis du Régime. L'Association des travailleurs grecs du Québec considère inévitable une augmentation graduelle des cotisations pour maintenir et développer le Régime. Une augmentation doit être accompagnée de mesures d'amélioration des prestations actuelles.

Les gouvernements du Québec et du Canada ne participent pas – il faut prendre ça en considération – au financement du Régime. L'augmentation des prestations n'est pas un fardeau, c'est-à-dire pour nos finances publiques. Au contraire, l'amélioration de l'économie, de la situation économique des personnes âgées contribuera à la relance de l'économie. Elle fera épargner au budget des sommes importantes qui sont présentement allouées aux prestations d'assistance, et c'est ça, le but de notre intervention. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, je vous remercie, M. Fournaris. C'était un mémoire très bien étoffé, et je laisse la parole à Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. Fournaris, M. Xenos, bienvenue à l'Association des travailleurs grecs du Québec et à ses représentants. Je comprends, pour l'avoir vérifié avant le début de nos travaux, qu'il s'agit d'une première, puisque c'est, je crois, la première fois que l'Association des travailleurs grecs du Québec, par votre intermédiaire, dépose un mémoire. C'est un mémoire dont vous pouvez être fiers. Il est non seulement étoffé, comme l'a dit la présidente, il est très bien rédigé, et vraiment je vous en félicite. Vous devez avoir, je ne sais pas si c'est vous-mêmes ou des experts de l'Association... mais c'est un des mémoires très fouillés que nous avons reçus, et nous terminerons le 5 novembre cette consultation. En même temps, je vais certainement échanger avec vous sur des aspects où nos routes convergent et d'autres où nos routes divergent.

Alors, d'abord sur, disons, la convergence. Avec raison vous plaidez en faveur, à la page 4 de votre mémoire, d'un régime public, et vous nous en donnez de façon très synthétisée les grandes caractéristiques positives, à savoir l'universalité, la transférabilité – dans une époque économique où il y a la précarisation des emplois, c'est vraiment important – l'indexation sur les coûts de la vie – ce qui n'est pas du tout le cas des autres régimes privés, comme on le sait – les prestations de survivant et d'invalidité. Alors, ça, c'est possible à l'intérieur d'un régime public. Là-dessus, je crois qu'on s'entend.

(11 h 40)

À la page 5, vous êtes le premier de tous les organismes qui nous posez justement la question, au premier paragraphe, en haut de la page 5, à savoir que c'est surprenant que le gouvernement fédéral, qui ne participe pas au financement du Régime de pensions, financé exclusivement par les cotisations des travailleurs et des employeurs, n'évalue pas le coût additionnel des paiements en sécurité du revenu garanti, donc en programme d'assistance, qui résulterait d'une réduction éventuelle des pensions, donc d'un programme d'assurance. Mais vous touchez du doigt, là, le bobo de la prestation des aînés, entre autres, et des recommandations qui sont faites par M. Martin. Mais ce qu'il faut savoir pour avoir explication et comprendre le rationnel de cela, c'est qu'avec le Transfert social canadien annoncé en février 1995 par le ministre des Finances Martin il n'y a plus de contribution à 50 % du financement fédéral au titre de l'aide sociale ou de l'assistance sociale. C'est dorénavant un montant forfaitaire, plafonné au niveau de l'année 1994-1995. Donc, les nouveaux arrivants ne sont plus, si vous voulez, couverts par un partage à 50-50 comme auparavant, entre le fédéral et les provinces.

Donc, il y a un effet pervers, puisque ce que le fédéral peut adopter comme politique qui a un effet de vases communicants sur l'aide sociale, ça n'est plus de toute façon... ça ne relève plus comme avant à 50 % de sa contribution. Ça, c'est vraiment l'explication, parce que, sinon, on ne comprend pas pourquoi ils veulent tant réduire, par exemple, les programmes d'assurance et... Pensons juste au prolongement à 67 ans de l'âge de la retraite, en sachant très bien que, si cette proposition-là était retenue, ça ne ferait peut-être qu'amener plus d'aînés à l'aide sociale, mais ça n'est plus partagé à 50 % comme avant.

L'autre explication aussi, à la page 6, de votre étonnement du fait qu'il y ait une réserve de six ans suggérée dans le livre vert du fédéral, c'est évidemment pour bâtir l'équivalent d'une caisse de dépôt et placement qui n'a pas été mise en place au niveau fédéral il y a 30 ans. Et, comme ils veulent la bâtir rapidement, ça suppose un niveau de réserve et puis ça suppose un niveau de cotisation. Et c'est ce qui explique que le niveau de cotisation soit si élevé, alors qu'ils veulent baisser le niveau de prestations. C'est pour se constituer cette caisse, qu'ils souhaitent en fait mettre sur pied.

Une fois ça dit, donc une fois qu'on a pu comprendre quels sont finalement les arrimages entre les choses qui sont sur la table, il y a aussi un élément incontournable qui est que, depuis 1983, au Québec, si on revient chez nous, on utilise les intérêts de la réserve pour financer les retraites et que, depuis 1992, on décaisse pour financer la retraite. Et, dans vos propositions, dans le fond, je vous le dis là en toute amitié, vous connaissant depuis longtemps, vous faites comme si on était il y a 30 ans et comme si on pouvait reporter sur les générations futures le coût des bonifications. C'est ça qu'on a fait il y a 30 ans, et ça se comprenait. On avait un taux de natalité de 3 %. On prévoyait 240 000 naissances cette année... Excusez-moi, un indice de fécondité, un indice de fécondité de 3 %. Il est de 1,75%. On prévoyait 240 000 naissances; il y en aura 87 000. On prévoyait une population de 10 000 000; il y en a 7 300 000.

Je voudrais bien connaître l'indice de fécondité en Grèce. Je voudrais bien connaître la démographie grecque. Tout ça n'est pas indifférent. On ne peut pas prendre un régime de retraite dans un pays puis l'appliquer dans un autre si les conditions d'exercice ne sont pas les mêmes, parce que, vous, vous bonifiez. Alors, je pense que vraiment vous êtes, de tous les mémoires qui nous ont été présentés, celui qui bonifie le plus. Je ne vous dis pas que ce n'est pas souhaitable, mais est-ce que c'est réalisable? Ça coûterait vraiment, évalué par les actuaires de la Régie des rentes, entre 22 % et 23 % de taux de cotisation, si vous voulez, vers les années 2020, autour des années 2020.

M. Gautrin: ...un pourcentage de la masse salariale?

Mme Harel: Oui, parce qu'il faut comprendre aussi là. C'est en quelle année qu'il y aura, attendez, un retraité pour deux travailleurs? Un retraité pour deux travailleurs, ce serait en 2030...

Une voix: En 2030, oui.

Mme Harel: ...alors qu'on était un retraité pour huit travailleurs en 1966. Alors, il y a un contexte démographique dont il faut tenir compte. Et puis l'autre contexte qui est vraiment important, c'est le fait que, si on pouvait compenser, si on disait: Oui, programme d'assurance et vraiment orientation de société, on investit avec la possibilité d'améliorer dans les programmes d'assurance, mais encore faudrait-il qu'on ne soit pas perdant. Si c'est le Québec qui fait ça seulement, alors ça signifie qu'on va payer des impôts pour payer des programmes d'assistance ailleurs et puis que nous-mêmes allons, dans le fond, avoir à cotiser en double pour se payer un programme d'assurance. Alors, c'est d'autant plus embêtant que l'augmentation des cotisations ne serait pas compensée par une baisse des impôts. On pourrait aménager, dans un système intégré, une augmentation de cotisation substantielle mais s'il y avait une baisse d'impôt en prévision. Mais là on serait, si vous voulez, obligé de payer des deux côtés.

Et puis, dernière chose, c'est le fait que, si ça s'accompagnait... Je voyais encore ce matin la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui demandait une réduction des cotisations à l'assurance-chômage en plaidant que ces cotisations sont de véritables taxes, que ce n'est plus de l'assurance étant donné que c'est utilisé pour diminuer le surplus, réduire le déficit du gouvernement fédéral directement. Si ça s'accompagnait... Si, en même temps, si vous voulez, qu'une hausse des cotisations, il y avait une réduction des cotisations, là on pourrait... des cotisations qui ne servent pas à l'assurance-chômage, qui servent à autre chose. Mais vous voyez que, dans l'état où on est, nous, ce qu'on peut faire, c'est au moins mettre à l'abri notre Régime de rentes, le mettre à l'abri d'un décaissement continuel quand la génération du baby-boom va arriver à la retraite, dans 15 ans. Cette génération-là, si tant est qu'elle ne commence pas maintenant à cotiser pour plus que le 5,6 %, pour à peu près une valeur de 10 %, c'est ses enfants qui vont payer la différence.

Alors, ceci étant dit, c'est beaucoup, mais je sais que vous avez présenté un mémoire qui fait le tour de tout, alors je souhaiterais avoir cet échange.

La Présidente (Mme Leduc): M. Fournaris, est-ce que vous avez un commentaire?

M. Fournaris (Theoharis): Bien sûr. Si la ministre a effectivement dit que c'est nous autres qui avons demandé le plus, peut-être que c'est à cause du fait... Comme je l'ai dit au début, c'est que les travailleurs de notre communauté ont grandement besoin d'une amélioration de ce Régime-là. Je vous ai donné tantôt la moyenne de ce que ça veut dire «payé par la Régie des rentes» pour la communauté hellénique, et donc ce n'est pas très, très étrange, par exemple, que des travailleurs immigrants – je ne sais pas d'ailleurs s'il y a eu d'autres travailleurs immigrants qui se sont présentés à la commission – des travailleurs d'origine ethnoculturelle ou autre fassent des demandes dans ce sens. C'est que les besoins sont encore plus urgents; c'est ça, la situation. Les travailleurs dans la communauté ne peuvent pas se fier ni au programme d'épargne ni au programme complémentaire de retraite. Et, quand je dis la communauté, c'est la grande partie, la communauté hellénique comme les autres, d'ailleurs. Ce n'est pas une élite qui fait ces interventions dans les médias, c'est une grande majorité qui est bien, bien méconnue, je dirais, et qui a des besoins très, très, très particuliers, et qui vit dans la pauvreté.

(11 h 50)

J'ai parlé tantôt du taux de chômage, du taux de pauvreté dans la communauté qui sont même comparables aux nouveaux arrivants d'aujourd'hui. Donc, c'est à cause de ça peut-être que nous pensons qu'il est absolument nécessaire d'avoir une amélioration des rentes aujourd'hui. D'ailleurs, vous nous dites qu'effectivement il faut prendre en considération le contexte actuel. Nous autres, on n'est pas des spécialistes pour faire... On a fait tout de suite la constatation que ça prend une augmentation du taux de cotisation. Ça, c'est évident. D'ailleurs, pour nous autres, c'est encore plus naturel. En Grèce, je vous le disais, ils paient 14,20 % aujourd'hui, pas en 2030. Et, dans d'autres pays européens, ils paient encore plus aujourd'hui et pas dans 30 ans. Ils trouvent ça normal.

Ici, on dit que ce n'est pas quelque chose qu'on peut aborder. Je pense que c'est très bien envisageable. Il s'agit quand même d'aller d'une façon modérée et de donner le temps à l'économie d'absorber ça. Et, dans ce sens, on privilégie plutôt les études et les projections qui ont été faites par la Régie des rentes du Québec et aussi les projections actuarielles qui ont été faites pour le Régime de pensions du Canada, qui y vont avec une augmentation moins rapide pour arriver quand même à un pourcentage... Mais, quand vous nous dites que ça, ce qu'on demande, par exemple, c'est comme si on était 30 années en avant, je dirais que ce n'est pas parce que aujourd'hui on change pour le pire dans ce sens qu'il faut que comme société on accepte, que comme travailleur on accepte.

Et on a donné une façon quand même... Parce que c'est réaliste, nous pensons, assez réaliste, les revendications que nous faisons. Quand nous disons que vous avez évalué à 22 %, à 23 % à peu près le taux qui serait requis pour assurer les améliorations proposées... Nous autres, on n'est pas des spécialistes. On a pris quand même la façon qui était utilisée par le Conseil du bien-être pour voir si on double la base de cotisation. Au lieu de la maintenir à 35 400 $ aujourd'hui, on la double, ce qui est très réaliste – aux États-Unis, c'est encore plus élevé. Si on double ça à 70 000 $, ça ne serait plus 22 % qui seraient requis pour assurer ces améliorations, ça serait peut-être 14 %, 15 %. Et ça, c'est comparable avec ce que les autres pays ont aujourd'hui.

Mme Harel: C'est vrai. Mme Leduc, je vois que M. Fournaris est très bien documenté. Oui, mais dans la mesure où le maximum des gains admissibles qui seraient doublés ne donnerait plus lieu à un remplacement de revenu.

M. Fournaris (Theoharis): C'est certain.

Mme Harel: Mais vous comprenez qu'à ce moment-là on n'est plus du tout dans un régime d'assurance, parce qu'un régime d'assurance, c'est qu'on contribue avec une cotisation et qu'on a une épargne-retraite contributoire. Et elle est contributoire à 25 % de remplacement de son revenu. Mais, si vous dites: On va doubler le maximum des gains admissibles pour évaluer les cotisations mais pas les prestations...

M. Fournaris (Theoharis): C'est ça.

Mme Harel: ...à ce moment-là, ce que vous faites, c'est un choix, là, mais c'est une taxe que vous levez. C'est une taxe. C'est une véritable taxe, si vous voulez, sur l'impôt des personnes, et vous le faites par le biais... Ce que vous pourriez faire autrement, disons, par l'impôt sur le revenu, c'est une redistribution du revenu qui se fait par la taxation. Ça s'apparente à un impôt, en fait, sur les travailleurs à revenu supérieur à 35 400 $. Bien, là, derrière ça, il faut comprendre qu'on le quitte, le système d'assurance, puis qu'on s'en va dans un système d'assistance, parce que les travailleurs, eux, vont avoir environ 27 000 $ sur lesquels, à ce moment-là, ils vont cotiser sans avoir de retraite.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, sur cet échange, peut-être que vous pourrez profiter des échanges avec l'opposition.

M. Fournaris (Theoharis): Oui, mais c'est ça, parce que je dirais quand même que ça, ça serait en partie compensé par des améliorations qui sont prévues, qui vont aussi en fait être offertes aux salariés à plus haut revenu. En partie, ça sera compensé par les améliorations qu'ils vont avoir, qui vont leur assurer, à eux autres aussi, une meilleure continuité de leur revenu.

Mme Harel: C'est-à-dire que ça serait toujours 25 % de remplacement de revenu pour les premiers 35 000 $.

M. Fournaris (Theoharis): Nous autres, d'ailleurs, sur ça on pense que la Cofirentes allait pour l'autre formule même. Ça pourrait même aller jusqu'à 37 %.

M. Gautrin: ...il remplace à 25 %.

Mme Harel: Ah oui!

La Présidente (Mme Leduc): D'accord. Alors, peut-être qu'on pourra continuer dans cette veine avec...

M. Fournaris (Theoharis): D'ailleurs, je vous rappelle que le premier gouvernement du Parti québécois avait justement proposé, avec un comité qu'il avait formé en 1977, cette formule-là qui, je ne sais pas pour quelle raison, je ne me souviens pas, n'a pas finalement été adoptée.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. Je ne sais pas ce qu'avait fait le Parti québécois en 1977. Je vais revenir avec vous, si vous me permettez, sur un point dans votre mémoire qu'il m'a l'air important de signaler. Vous avez comparé les prestations moyennes de quelqu'un qui touche le revenu de retraite et vous arrivez pour une personne seule, puis on va comparer pour une personne seule, hein, qui a contribué au maximum à un niveau de retraite de 15 000 $ par année, je pense que c'est 15 819 $. Vous dites par contre: Les personnes qui sont de notre communauté ont peu contribué au Régime de rentes, ce qui fait qu'elles ne retirent du Régime de rentes du Québec que 2 160 $ à peu près en moyenne par année, ce qui fait qu'elles ont un revenu plus faible de 11 454 $. J'imagine que c'est une moyenne que vous faites parmi vos représentants.

Je comprends et je veux savoir si vous me le confirmez. Ce montant relativement faible est dû principalement parce que vous êtes arrivés plus tardivement. Souvent, les gens de votre communauté sont des gens qui ont immigré au Canada, et donc on commençait à contribuer non pas à 18, à 20 ans mais à un âge plus avancé. Est-ce que c'est ça?

M. Fournaris (Theoharis): Peut-être qu'en partie ce serait effectivement une raison.

M. Gautrin: C'est la raison pour laquelle on a un niveau de revenu plus bas ici, c'est ça?

M. Fournaris (Theoharis): En partie, effectivement.

M. Gautrin: Et c'est pour cette raison-là... En partie, mais est-ce qu'il y a d'autres raisons que ça?

M. Fournaris (Theoharis): Bien sûr, les autres raisons étant les données que je donnais au début: leur salaire est inférieur au salaire moyen au Québec, le taux de chômage dont il y a des périodes qui sont plus longues. Il y a d'autres raisons à part. Effectivement, moi, je suis arrivé en 1972, par exemple, entre 1966 et 1972, j'ai zéro bien sûr comme...

M. Gautrin: Je comprends.

M. Fournaris (Theoharis): Ils ont ça comme exemple seulement.

M. Gautrin: Mais je comprends que vous êtes quand même soumis aux mêmes conditions du marché du travail que les autres Québécois. Donc, pour moi, je n'entrerai pas dans ces variables-là. Je vais donc d'emblée sur ce qui touche particulièrement les travailleurs immigrés, c'est là-dessus que je veux continuer les échanges avec vous.

Il est clair que vous demandez donc une augmentation des années de retranchement. Vous demandez qu'elles passent de 15 % à 20 % ou 25 %, de manière à combler en partie cet effet-là. Vous comprenez facilement que le Régime est en difficulté financière, et je comprends que vous avez dit: On pourrait augmenter les cotisations. Je ne reprendrai pas le débat que vous avez eu avec ma collègue de Hochelaga-Maisonneuve, mais je voudrais revenir sur les travailleurs qui arrivent.

Est-ce que ce serait concevable – ça répondrait en partie à votre problème – si on permettait aux travailleurs arrivants de pouvoir racheter les années de cotisation et qu'on incluait dans la loi éventuellement ou dans le Régime la possibilité de rachat d'années, avec les coûts actuariels que ça aurait au moment où vous arrivez? Parce que j'imagine que, lorsque vous avez quitté la Grèce, dans votre cas – vous venez de dire que vous êtes arrivé en 1972 – vous aviez déjà accumulé une pension en Grèce que vous avez, j'imagine, peut-être pu reprendre avec vous et que vous pourriez racheter à ce moment-là comme années dans un nouveau régime du Régime de rentes du Québec. Est-ce que c'est une chose à laquelle vous aviez pensé?

M. Fournaris (Theoharis): La question de rachat est comprise dans quelques régimes privés. Donc, ce n'est pas quelque chose d'étrange, ça pourrait effectivement être appliqué. Mais, pour nous autres, si vous permettez... Parce qu'on ne voulait pas d'ailleurs le limiter à la question des travailleurs immigrants, toute la question...

M. Gautrin: Ça, j'ai compris ça. Je comprends que votre mémoire est beaucoup plus large.

M. Fournaris (Theoharis): Oui, beaucoup plus large que les autres.

M. Gautrin: Écoutez, j'ai bien compris que votre mémoire était beaucoup plus large; j'ai bien compris tout ça que vous n'avez pas voulu strictement le limiter à cela. Mais néanmoins vous nous ouvrez une porte, et je me permets d'insister là-dessus, parce que vous êtes peut-être les seuls représentants de ce qu'on pourrait appeler de nouveaux arrivants, de nouveaux Québécois qui viendront témoigner devant cette commission. Donc, c'est pour ça que j'insiste sur cette partie de votre mémoire. J'ai bien compris que vous êtes beaucoup plus larges dans votre mémoire.

(12 heures)

Cette question de rachat, est-ce que c'est quelque chose qui résoudrait en partie vos...

M. Fournaris (Theoharis): Ça pourrait effectivement...

M. Gautrin: Ça pourrait...

M. Fournaris (Theoharis): ...être quelque chose qui pourrait être envisagé. Ce qui est plus important, si vous permettez quand même, avec les travailleurs immigrants, qu'on retrouve dans des secteurs tels que le vêtement, la restauration, où il y a aussi le travail... une couverture partielle, vous savez de quoi je parle.

M. Gautrin: On sait, on sait tout ça et on sait...

M. Fournaris (Theoharis): Donc, il y a tout ça qui fait que ces travailleurs-là, ils arrivent à la retraite et ils ne sont pas... Ils ne peuvent pas avoir une rente qui leur permet de vivre d'une façon décente. Mais la question du chômage aussi.

M. Gautrin: Et, vous ne le dites pas, mais j'imagine que vous le pensez, il existe aussi des employeurs qui ne déclarent pas tous leurs employés. Et la personne travaille; par contre, comme elle n'est pas déclarée, ses années ne sont pas compatabilisées au régime de retraite.

M. Fournaris (Theoharis): C'est-à-dire que ce n'est jamais un choix.

M. Gautrin: Je sais que, de part et d'autre, c'est une possibilité qui peut exister.

Vous proposez l'augmentation des cotisations, mais vous dites: La partie patronale paierait deux fois plus que les individus. On a eu des représentations ici, de la part des groupes dits patronaux, entre guillemets, qui sont venus nous dire: Cette taxe, c'est l'équivalent d'une taxe sur la masse salariale et ça a un effet extrêmement perturbatif sur l'emploi. Est-ce que vous ne pensez pas qu'en augmentant deux fois plus on ne risque pas d'être créateur de chômage?

M. Fournaris (Theoharis): O.K. Je ne m'attends pas à ce que les représentants patronaux disent autre chose que ça, sauf que la réalité, je pense, si on parle d'une façon un peu plus objective, c'est qu'ici, au Québec, à ce niveau-là, je dirais, si je peux utiliser l'expression, peu développé par rapport à d'autres... Je pense que le système fiscal du Québec est pas mal avantageux pour les entreprises québécoises par rapport, toujours, à ce qui se passe dans les autres pays...

M. Gautrin: Dans d'autres pays, oui.

M. Fournaris (Theoharis): ...de l'OCDE, par exemple, où les entreprises paient une partie beaucoup plus importante que ce qui est payé ici. Et, si on dit: C'est par rapport à l'Amérique du Nord... Mais, moi, j'aimerais quand même que le Québec, qui est une société distincte, disent quelques-uns, il soit vraiment distingué à ce niveau-là aussi, qu'on soit différent et qu'on soit, si vous permettez, une société qui prend beaucoup plus en considération les besoins du vrai monde.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, je vous remercie. Est-ce que vous avez terminé, M. le député?

M. Gautrin: J'aurais un dernier point...

La Présidente (Mme Leduc): Sans ça, il faudrait avoir le consentement pour prolonger de quelques minutes. Ça va.

M. Gautrin: ...à aborder avec vous parce c'est encore un point qui est nouveau dans les suggestions que vous nous faites. Vous suggérez que la rente de conjoint survivant soit versée, en cas de décès des deux parents, à l'orphelin, j'imagine, jusqu'à l'âge où il atteint sa...

M. Fournaris (Theoharis): Majorité.

M. Gautrin: ...majorité. Vous connaissez des cas où ça a posé des problèmes?

M. Fournaris (Theoharis): Je sais qu'en Grèce c'est comme ça. En Grèce, même c'est...

M. Gautrin: C'est comme ça en Grèce.

M. Fournaris (Theoharis): Même, pour les filles, c'est jusqu'à l'âge de leur mariage. Il y a des filles de 60, de 70 ans qui reçoivent toujours... Mais, pour les garçons, c'est jusqu'à l'âge de la majorité.

M. Gautrin: Alors, c'est une incitation à ne pas...

M. Fournaris (Theoharis): Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...se marier pour les filles, si je comprends bien. Je vous remercie, mais c'est un point intéressant. Donc, vous me dites que ça existe, ça, en Grèce à l'heure actuelle?

M. Fournaris (Theoharis): Ah oui.

M. Gautrin: C'est un point qu'on pourrait essayer de regarder, comment ça fonctionne.

Mme Harel: J'imagine que l'activité des femmes sur le marché du travail est différente et qu'il n'y a pas autant de conjoints de fait. Ici, la difficulté, ce serait le test de la vie maritale, qui est marié, qui est conjoint de fait et combien il y a de conjoints de fait qui se succèdent. C'est un autre...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: On est rendu dans un débat.

M. Fournaris (Theoharis): Seulement, j'ai vu un peu les statistiques de la Régie des rentes, et il n'y a pas beaucoup d'enfants qui sont dans ces catégories.

Une voix: Le cumul des conjoints de fait.

M. Gautrin: Mais, indépendamment de cela, l'idée, et je ne sais pas s'il y en a beaucoup, mais, moi, j'aimerais peut-être demander à la... J'ai des réticences sur la rente de conjoint survivant, dans le fond. Mais l'idée de pouvoir, dans le cas du décès des deux parents... Je pense que c'est bien ça que vous nous dites, c'est dans le cas du décès des deux parents que, peut-être, il y a une rente qui soit non pas la rente d'orphelin, mais la rente d'équivalent d'une rente de conjoint survivant versée aux... Est-ce que la Régie pourrait, et je m'adresse à ce moment-là... nous dire ça couvre combien de personnes, par exemple, actuellement parmi nos orphelins? Pas maintenant, je comprends, mais on pourrait nous le dire...

Mme Harel: On pourrait peut-être cet après-midi...

M. Gautrin: ...cet après-midi parce que je comprends...

Mme Harel: ...ou à notre prochaine séance, le 5 novembre.

La Présidente (Mme Leduc): D'accord.

M. Gautrin: Non, non. De père et de mère. Je pense que les deux qui sont... Mais ça pourrait être quelque chose qui soit peu coûteux mais peut-être utile sur le plan social dans certains cas. Je vous remercie beaucoup de ces suggestions.

M. Fournaris (Theoharis): C'est nous autres qui vous remercions.

La Présidente (Mme Leduc): Alors, je vous remercie, M. Fournaris, M. Xenos, et la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 6)

(Reprise à 15 h 25)

La Présidente (Mme Leduc): Cet après-midi, la commission des affaires sociales recevra la Fédération des services communautaires juifs de Montréal et la Fédération de l'âge d'or du Québec. Alors, les représentants de la Fédération des services communautaires juifs sont présents. M. Assor, si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent.

Juste pour rappeler, avant: vous avez 20 minutes pour faire votre présentation et un temps d'échanges égal avec le parti ministériel et le parti d'opposition suite à cette présentation-là. Alors, M. Assor. Non?


Fédération des services communautaires juifs de Montréal

M. Schlesinger (Frank): Avec votre permission, c'est moi qui vais présenter. Je m'appelle Frank Schlesinger. Je suis le président du comité de politiques sociales de la Fédération des services communautaires juifs de Montréal et je suis également secrétaire national du Congrès juif canadien. Et c'est un projet conjoint de ces deux organismes en collaboration aussi avec les autres organismes que vous allez voir ici, à la fin de notre mémoire: les Services juifs de soutien aux aînés de Montréal, le Projet Genèse, l'Association du Golden Age, la Communauté sépharade du Québec, les Services sociaux juifs à la famille et l'institut Baron de Hirsh. À ma droite est M. Raphaël Assor, qui est le directeur des relations gouvernementales de la Fédération des services communautaires, et aussi M. David Alper, qui est coordonnateur du programme des conseils à domicile pour aîné-e-s du Projet Genèse. Il y avait M. Sam Shernofsky qui était censé venir aujourd'hui, mais malheureusement, pour des raisons de santé, il a dû s'abstenir de venir.

Je tiens à vous remercier de nous avoir invités à vous présenter notre mémoire. Peut-être, avant de commencer, je pourrais vous dire brièvement ceci, pour ceux qui ne connaissent pas ces organismes. Les services communautaires juifs sont un organisme qui regroupe toutes les agences de la communauté juive qui fournissent des services, comme les hôpitaux, entre autres L'Hôpital général juif, les services de réhabilitation, les services de ce qu'on appelle «golden age», les services aux aînés, Baron de Hirsh et, en effet, tous les services qui sont au service de la communauté juive.

Évidemment, une de nos préoccupations, c'est le bien-être de ces citoyens parce que, quand le gouvernement ne peut pas subvenir à tous leurs besoins et quand ils ne peuvent pas subvenir à leurs propres besoins, c'est à nos portes qu'ils viennent. Le Congrès juif canadien, c'est un organisme qui a été fondé en 1916, qui voit à la défense de la communauté juive du point de vue de l'antisémitisme et est également le porte-parole de la communauté juive en matière politique; petit p, politique.

Alors, ceci étant dit, normalement, on ne lit pas au long nos mémoires, mais, vu que c'est assez court, peut-être que ça serait une bonne idée, parce qu'un résumé serait presque la même chose que de lire, à moins que vous vouliez que je ne le fasse pas.

La Présidente (Mme Leduc): C'est très bien, vous pouvez nous faire lecture du mémoire.

M. Schlesinger (Frank): Bon. Alors, nous avons consulté le document sur l'avenir du Régime de rentes du Québec, qui témoigne de la volonté du gouvernement d'agir pour assurer la sécurité financière des retraités actuels et futurs. Les propositions qui sont exposées dans le document de consultation visent à garantir le financement du Régime de rentes du Québec et à établir l'équité entre les générations de cotisants et de cotisantes. Les coûts associés au vieillissement de la population exigent que des mesures soient prises rapidement. Nous saluons cette initiative du gouvernement du Québec.

La communauté juive de Montréal se sent interpellée par ce sujet, car une très large proportion de ses membres sont des personnes âgées. En effet, alors que le taux de personnes âgées de 65 ans et plus atteint dans la province de Québec 10,8 %, il atteint un sommet de 22 % dans la communauté juive. Sur les 101 000 membres de la communauté juive, 22 000 personnes font partie des 60 ans et plus. Une inquiétude particulière entoure le fait que c'est la tranche démographique des 75 ans et plus qui connaît actuellement la croissance la plus rapide. Il s'agit évidemment des personnes les plus vulnérables, pour lesquelles les services et les diverses formes de soutien doivent être les plus élaborés. Le problème du vieillissement dans la communauté juive est majeur et exceptionnel et constitue un fardeau extrêmement lourd sur les établissements publics et sur les ressources communautaires privées.

(15 h 30)

C'est avec cette préoccupation à l'esprit que nous avons accueilli avec beaucoup d'intérêt la démarche du gouvernement du Québec qui vise à garantir la sécurité financière des retraités. Nous sommes conscients qu'il faudra envisager le scénario de hausse des taux de cotisation, accroître le nombre de travailleurs couverts par le Régime et établir une plus grande équité entre les bénéficiaires de certaines de ces prestations.

Voici nos commentaires sur les propositions mises sur la table. Nous appuyons les objectifs du gouvernement en ce qui concerne la proposition de réforme du Régime de rentes, qui vise à assurer l'équité entre les générations de cotisants et cotisantes en établissant un taux de cotisation constant sur une très longue période et garantir qu'au cours de la même période les personnes âgées et les générations futures pourront bénéficier hors de tout doute de leur rente de retraite. Il semble inévitable que l'on doive accroître substantiellement les revenus de la caisse de retraite. On retrouve à cet effet deux propositions: un, la hausse des taux de cotisation, qui pourrait cependant être davantage modulée en fonction des revenus, et, deux, le gel de l'exemption à 3 500 $ et son élimination progressive en fonction des revenus est une proposition qui a le mérite de reposer sur le principe de la progressivité.

Ceci dit, nous avons de la difficulté à croire qu'une augmentation aussi substantielle des cotisations soit réaliste. Nous ne croyons pas que les travailleurs à faibles revenus pourront faire face à de telles augmentations. Il y a tout lieu de croire que certaines entreprises ne le pourront pas. En fait, une telle augmentation incite à baisser les salaires ou alors à garder moins de personnel, mais du personnel dont les revenus sont supérieurs au plafond cotisable. Bref, on n'a pas là une proposition très cohérente avec l'objectif de maintenir et de créer des emplois.

En ce qui concerne la proposition du gel et la réduction proportionnelle de l'exemption générale, si nous réexaminons le tableau 4, page 23, et que nous y intégrons une comparaison entre l'impact de l'exemption actuelle et celui de l'exemption proposée, nous obtenons la table que vous allez voir ici sur la page 5 de notre mémoire.

En effet, c'est une table que j'ai faite moi-même, et ce qui est important, c'est de voir que, au niveau de 3 500 $ par année, il n'y a pas de changement. À 5 000 $ par année, il y a une différence de 3 %. Mais à 10 000 $, qui est quand même un niveau assez bas, il y a une différence de 7 % dans le système proposé. Nous trouvons que c'est un peu trop à avaler. Bien que nous soyons d'accord avec la mesure de réduction proportionnelle de l'exemption générale, nous pensons que les salariés qui gagnent 10 000 $ et moins devraient continuer à bénéficier de l'exemption de 3 500 $, car ces salariés sont les plus défavorisés du système. Ils sont déjà pénalisés à deux niveaux: par l'augmentation du taux de cotisation qui est proposée dans le document de consultation et par la proportionnalité de la réduction. Le document de consultation laisse cependant une porte ouverte en déclarant à la page 24: «Il serait possible d'appliquer la réduction proportionnelle de l'exemption générale dès 1997. Toutefois, pour diminuer l'effort financier résultant de cette mesure, il pourrait être opportun de l'appliquer plus tard, à tout le moins, après que le taux de cotisation aurait atteint son niveau permanent.» Fin de la citation.

Nous sommes d'accord avec cette orientation qui prévoit de faire jouer le taux de cotisation au niveau qui est suggéré pour réévaluer ultérieurement la proportionnalité des exemptions jusqu'à 3 500 $. Cependant, même dans cette hypothèse, dépendamment de l'effet sur le système global, nous pensons que les salariés de moins de 10 000 $ devraient continuer à bénéficier de l'exemption de 3 500 $. La solution pourrait être de considérer les pensions de retraite comme un programme social, et qu'en ce sens une partie en soit financée par les revenus propres du gouvernement par le biais des taxes et impôts. Un tel fonctionnement aurait l'avantage de répartir le fardeau financier sur l'ensemble de la population d'une façon plus progressive. Il va sans dire qu'une telle proposition doit être liée à une révision en profondeur de la fiscalité.

L'hypothèse de ne pas augmenter les cotisations et de réduire les pensions doit être écartée, d'autant plus que les modifications imposées par le dernier budget fédéral risquent de défavoriser complètement les futurs retraités de la classe moyenne. Peut-être devrait-on même réévaluer à la hausse le taux de remplacement de revenu, qui est actuellement fixé à 25 %.

Le gouvernement entend maintenir le taux de remplacement à 25 % du revenu, l'âge normal de retraite à 65 ans, la pleine indexation des pensions et la possibilité de soustraire du calcul de la pension un certain nombre d'années aux revenus moindres. Ce sont là des acquis intéressants de notre système de pensions qu'il convient de maintenir.

Voici d'autres recommandations ou commentaires que nous formulons. Un, informer le public pour garantir une meilleure qualité de l'information et de la compréhension des bases qui régissent le QPP, le fonds de pension du Québec, car ni le grand public ni les cotisants au Régime ne sont informés adéquatement. Deux, examiner le plan tous les cinq ou 10 ans afin de pouvoir analyser les tendances économiques et démographiques et apporter les corrections qui s'imposent au moment opportun, c'est-à-dire ne pas laisser trop d'années traîner avant qu'on réalise qu'on est dans le trouble ou qu'on a des problèmes. Trois, augmenter le taux de contribution aura des répercussions immédiates à court terme sur la population active de la communauté qui a besoin de mettre en oeuvre sur une base quotidienne toutes les ressources financières dont elle dispose. C'est cette catégorie qui subira le contrecoup du moindre changement opéré sur le taux de participation. Si cette stratégie est retenue, les programmes d'assistance communautaire auront sur les bras un fardeau plus lourd à porter. Les sciences sociales et biomédicales ont toujours abordé la vieillesse comme un problème. Le message transmis, quand les prestations aux aînés sont réduites, est que la société a été appauvrie et non enrichie par les aînés, dont l'apport à la collectivité est illimité. Le filet de sécurité autrefois assurait une vie de dignité. Les prestations gagnées par la population des 65 ans et plus sont menacées.

D'autre part, l'équité salariale reste encore à concrétiser. Comme le revenu et le temps d'emploi des femmes sont généralement inférieurs, leurs économies et revenus de retraite sont moindres. Il faut reconnaître matériellement les femmes qui choisissent de rester à la maison pour élever leur famille. Une société saine repose sur la conception et la prestation humaine des avantages de sécurité. Ces avantages doivent tenir compte de l'état de santé et des supports familiaux.

Enfin, au sujet du gouvernement fédéral, le Régime de pensions du Canada, CPP, est lui aussi à l'étude, et les hypothèses de travail qui ont été publiées sont loin d'être encourageantes. Nous sommes vivement préoccupés de ce qui restera des engagements ci-dessus mentionnés quand viendra le temps d'harmoniser à nouveau le Régime de rentes du Québec et le fonds de pensions canadien. Le débat fédéral-provincial se trouve enchâssé dans cette réforme, étant donné la complémentarité des deux fonds de pensions. Si nous n'avons aucune recommandation particulière à faire à cet égard, nous pensons cependant qu'il est très important de s'attarder sur l'interaction existant entre les deux programmes. Nous savons que les modifications du fonds de pensions du gouvernement fédéral auront tôt fait d'éroder l'universalité du Régime. Ces changements renforceront l'importance du fonds de pensions du Québec et de tous les autres plans de retraite du secteur privé ou des affaires basés sur les taux de contribution.

Tout débat en rapport avec la réforme du Régime de pensions devrait se fonder sur l'analyse en profondeur de tous les aspects incluant tous les programmes et tous les bénéfices. Le tout respectueusement soumis par la Fédération CJA et le Congrès juif canadien, région de Québec. Je vous remercie de votre attention, et on est à votre disposition.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. J'invite maintenant Mme la ministre à commencer l'échange.

Mme Harel: Alors, bienvenue. Bienvenue, M. Schlesinger, ainsi que M. Alper. Je crois que c'est votre première contribution à une commission parlementaire à l'Assemblée nationale.

M. Alper (David): Oui.

Mme Harel: Et M. Assor. Alors, vous faites valoir une réalité de vieillissement dans la communauté juive du Québec, réalité que le Québec tout entier connaîtra dans quelques années seulement et qui se traduit par un pourcentage de 22 % des personnes âgées de 65 ans et plus. Alors, en fait, ce que vous venez nous dire aujourd'hui, c'est que le vieillissement, votre communauté connaît ça, et la Fédération des services communautaires juifs de Montréal y a fait face il y a déjà longtemps et que le Projet Genèse est en fait une réponse au vieillissement. En fait, le projet qui est celui de – comment dit-on – services à domicile ou de conseils à domicile? En fait, c'est assez large, je pense. Peut-être pourriez-vous juste nous en tracer un peu le portrait pour le bénéfice des membres de la commission.

(15 h 40)

M. Alper (David): D'accord. J'aimerais préciser d'abord que le Projet Genèse est une des agences de la Fédération des services communautaires juifs. On est un organisme de défense des droits sociaux. On travaille non seulement avec la population juive, mais avec toute la population du quartier Côte-des-Neiges–Snowdon à Montréal et on offre des services qui visent toute la population, dont certains services qui sont ciblés envers les personnes âgées du quartier. On a un programme de conseils à domicile pour aînés qui offre des services d'information, de référence et de défense des droits pour des aînés à mobilité réduite du quartier Côte-des-Neiges– Snowdon, en particulier, et on offre évidemment ces mêmes services là dans notre local à Montréal. Mais le service de conseils à domicile pour aînés est un service assez original, on trouve, parce qu'on a des bénévoles qui vont aller essayer de défendre les droits des aînés qui ne peuvent sortir de chez eux. Ce qu'on voit dans notre travail quotidien au Projet Genèse, c'est un reflet de la réalité de notre quartier et de la société. On voit un appauvrissement des gens, surtout des personnes âgées, qui, pour toutes sortes de raisons, n'ont pas pu contribuer au régime public ni privé de retraite. Alors, il y a énormément de gens dans notre quartier qui dépendent de l'aide sociale, de l'assistance publique, du supplément de revenu garanti. Et on voit que, même avec le régime actuel, même un travailleur, une travailleuse à la retraite qui reçoit le maximum de rentes de la Régie des rentes du Québec et qui n'a pas d'autres sources de revenus à part sa pension de la sécurité de la vieillesse et le supplément de revenu garanti reste toujours en bas du seuil de pauvreté. C'est pour ça qu'on dit qu'il faut, pour les travailleurs à faibles revenus, envisager même une hausse des cotisations et des bénéfices de la RRQ pour ces gens-là pour dépasser le taux de 25 %.

Mme Harel: Alors, ça, c'est une recommandation, là, du mémoire que vous nous présentez: une hausse du taux de remplacement qui est à 25 %. Alors, vous savez que le débat public était plus une diminution de 25 % à 22,5 % qu'une hausse. Déjà, l'impression qui s'accrédite, c'est que c'est beaucoup de ne pas diminuer les prestations, compte tenu du fait que les cotisations, qui totalisent 5,6 %... Déjà, la semaine passée, un projet de loi a été déposé ici, à l'Assemblée nationale, pour faire porter le taux de cotisation au 1er janvier prochain à 6 %. Mais, encore là, on est loin du taux de cotisation qui compenserait le coût des bénéfices. Même si c'est relativement peu, 25 % de remplacement de revenu à 60 ans, il y a, évidemment, toute la question de l'universalité, de la transférabilité, de l'indexation au coût de la vie, de la prestation d'invalidité, de la prestation de conjoint survivant, de la rente de décès et, également, de la bonification avec le retranchement soit de 15 % des années de gains faibles ou le retranchement des années de garde d'enfants de moins de sept ans sans revenu. Alors, tout cela constitue le dispositif du Régime, et ce dispositif équivaut à environ 10 %, en fait, de bénéfices pour lesquels on paie 5,6 % de cotisation. Alors, d'où, finalement, l'urgence d'agir, étant donné que, depuis 1983, la Régie doit utiliser les intérêts de la réserve et que, depuis 1992, il y a décaissement. Alors, c'est évident que ne pas agir maintenant, au moment où la génération du baby-boom est encore sur le marché du travail, c'est aggraver le problème dans 15 ans, au moment où la génération du baby-boom va, en bloc, dans les années qui suivront, immédiates, prendre sa retraite. D'autant plus que juste maintenir les bénéfices, si tant est qu'on ne réagisse pas rapidement, obligerait nos enfants et nos petits-enfants à cotiser, cette fois, beaucoup plus que ce qu'ils recevront, tandis que nous, on cotise à peu près moitié moins que ce qu'on en attend. Alors, dans ce contexte-là, autant ça a l'air souhaitable d'augmenter le pourcentage de remplacement de revenu, étant donné qu'il faut augmenter la cotisation de façon assez sévère, je pense que... Vous-même, quelle est votre opinion sur la hausse de cotisation? Sur les prestations, vous êtes très clair, vous ne voulez pas qu'on touche aux acquis dont j'ai parlé tantôt. Je reviendrai sur l'exemption générale et puis sur la réduction proportionnelle. Je pense que c'est un bon échange que nous pourrions faire là-dessus. Mais vous ne voulez pas toucher aux prestations... Mais quelle est votre opinion sur le taux de cotisation?

M. Alper (David): Pour ce qui est du taux de cotisation, on reconnaît la réalité. C'est évident qu'il faut hausser les cotisations. On pense qu'il faut les hausser de manière immédiate mais de manière graduelle. Vous avez commencé votre question en parlant d'un débat politique. Une de nos premières recommandations c'est, justement: On trouve que le gouvernement devrait faire un plus grand travail de sensibilisation à la population pour que les gens de ma génération, la génération des baby-boomers, croient vraiment que cette pension, ce régime de pensions va être là quand nous autres on va prendre notre retraite, parce qu'il y a beaucoup d'insécurité et de crainte de la part des jeunes, aujourd'hui, qui pensent qu'ils payent pour une chose pour laquelle ils ne vont pas recevoir des prestations quand ils vont prendre leur retraite. On suggère aussi des solutions créatives, peut-être regarder un système de contribution progressive dépendant des revenus, et peut-être aussi augmenter le montant maximal de cotisation, qui est de 35 400 $ par année, de regarder de ce côté-là.

On sait que, si on regarde du côté des États-Unis, le taux de cotisation est beaucoup plus élevé, des pays de l'OCDE aussi. Au Portugal, il est de 34 %, je crois, et en France... Dans la plupart des pays de l'Europe de l'Ouest, vous connaissez les chiffres; ils sont beaucoup plus élevés. Je crois que ce sont des faits qui ne sont pas nécessairement très bien connus du grand public.

Mme Harel: D'accord. Oui. En fait, vous avez tout à fait raison. Ce n'est pas du tout connu. Ça a même surpris bon nombre des personnes qui ont présenté des mémoires d'apprendre que, autant au Japon qu'aux États-Unis qu'en Allemagne que dans tous les pays du G 7, dans les pays industrialisés, c'est déjà un taux de cotisation, là, cette année, beaucoup, beaucoup plus élevé. Mais c'est un choix d'aller du côté des programmes d'assurance, donc d'épargne-retraite.

Ce choix de programmes d'assurance a comme conséquence, aussi, une réduction proportionnelle des impôts. Il faut comme choisir soit un programme d'assurance avec des cotisations contributoires de remplacement de revenus et une garantie qu'on est dans un programme d'assurance, c'est-à-dire que ce qu'on cotise, on va le retrouver à la retraite parce que c'est de l'épargne. Puis ça, c'est différent d'un programme d'assistance où on paie de l'impôt, puis c'est un programme – je pense qu'on appelle ça en jargon savant – de répartition.

Une voix: De répartition.

Mme Harel: De répartition plutôt que de capitalisation. N'est-ce pas? Mais c'est...

M. Gautrin: ...en répartition.

Une voix: Et dans les deux, là.

Mme Harel: Et dans les deux.

M. Gautrin: Bien...

Mme Harel: On fait, on nage dans les deux, si vous voulez, d'une certaine façon sur les deux tableaux et, vous, vous dites: Accentuez ça, d'une certaine façon, parce que vous proposez que la cotisation et la prestation soient plus intimement liées. Elles ne le sont pas, remarquez, complètement, là. Présentement, l'exemption de 3 500 $, ça a un effet régressif parce qu'au plafond de 35 400 $ la personne va cotiser simplement sur 31 000 $.

M. Assor (Raphaël): 31 000 $. C'est ça. Absolument.

Mme Harel: Voilà. C'est ça, 31 900 $, puis va avoir une prestation sur 35 400 $. Donc, il y a un projet qui consiste petit à petit à en arriver à une véritable adéquation, mais je pense que l'exemption générale, il y a deux manières de l'examiner. Vous dites: Faites attention, ça va pénaliser les travailleurs à faibles revenus. Puis en même temps on peut penser que ça va avantager parce que l'employeur va devoir aussi contribuer – c'est quand même 50 %-50 % – puis parce que, le travailleur à faibles revenus, ça lui ouvre un droit à une rente d'invalidité; ça lui ouvre un droit à une rente de conjoint survivant; et puis, ça lui ouvre le droit au retranchement des 15 % d'années de gains faibles.

(15 h 50)

Alors, quand on combine, on se dit: Peut-être que les jeunes... Parce que, dans les chiffres qu'on m'a fournis, je dois vous dire qu'il y a un grand paradoxe. Depuis 20 ans, les très jeunes, 18-24 ans, n'ont jamais autant travaillé puis ont si peu cotisé. C'est qu'ils sont en deçà du 3 500 $. Alors, ils mettent beaucoup d'années avant de devenir cotisants au Régime. Et je ne pense pas que ce soit bénéfique pour eux.

M. Assor (Raphaël): Si vous me permettez d'intervenir. Est-ce qu'il y aurait moyen d'imaginer, pour ceux qui gagnent moins de 10 000 $, avoir un taux différent? On n'en a pas discuté entre nous, mais puisqu'on est dans une collaboration...

Mme Harel: Bien, vous êtes un peu sur cette idée-là dans votre mémoire.

M. Assor (Raphaël): Parce que l'idée, c'est quand même de tenir compte... Je comprends, je suis d'accord avec vous sur les assujettir pour qu'ils en bénéficient, mais à un taux moindre, puisque, déjà, ils sont les gens les plus défavorisés.

Donc, ça serait peut-être, si je peux me permettre... Avec mes collègues, on n'en a pas discuté, mais je trouve intéressante cette ouverture, si c'était un taux différent de la catégorie supérieure. Donc, ça reste dans la philosophie de nos recommandations, où on parle d'une progressivité.

Mme Harel: Absolument.

M. Assor (Raphaël): Mais, fondamentalement, on est en accord avec – quand même, il faut que ça soit dit clairement – les orientations du gouvernement. On pense que c'est une démarche mature et responsable pas seulement parce qu'on va en profiter plus tard, mais pour l'ensemble de la population. En regard des données statistiques qu'on a consultées, il était inévitable qu'on en arrive là.

Mais, nous, on est préoccupés par la tranche des moins de 10 000 $, qui sont les gens les plus vulnérables. Et on ne voudrait pas que, même s'ils étaient assujettis, ils le soient avec les mêmes taux de cotisation. Et probablement que, avec les actuaires – on n'est pas des spécialistes – vous pourriez trouver des échelles de cotisation qui corrigeraient et donneraient une orientation sociale à la démarche.

Mme Harel: Moi, j'aime beaucoup votre mémoire parce qu'il est vraiment écrit sous l'angle de la progressivité, de l'équité. Vous parlez même de l'équité salariale à la page 8.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: J'ai beaucoup, beaucoup apprécié parce que, dans le fond, votre expérience vous amène à savoir que, parmi le pourcentage dans votre communauté aussi de personnes âgées pauvres, ce sont des femmes principalement. Alors, ceci dit, j'aimerais bien que le président de la Régie des rentes, qui a regardé et qui a fait analyser votre proposition concernant le 10 000 $, puisse peut-être l'aborder avec vous. Alors, je demanderais à M. Claude Legault.

M. Legault (Claude): M. le Président, merci. C'est que, à la page 5 de votre mémoire, votre grille d'exemption, les calculs qui y sont présentés sont exacts. Par contre, j'aimerais attirer votre attention, parce que dans votre mémoire vous parlez justement de la possibilité, s'il doit y avoir une réduction proportionnelle, qu'elle soit reportée dans le temps.

D'abord vous dire que ça a été discuté en commission et qu'il y a des possibilités que ça ne s'applique qu'après avoir atteint le taux permanent. Également vous dire que votre dernière colonne, qui est la colonne H, qui fait la démonstration de la différence entre le système proposé et le système actuel d'un montant de gains soumis à cotisation... Par contre, dans une façon différente de faire le calcul qui démontre une linéarité plus grande, il faut donc comprendre que chaque cotisant, s'il y a une réduction proportionnelle, verra ses cotisations augmenter de 11 %. Qu'il soit à 5 000 $ ou à 34 500 $, c'est 11 % de cotisation de plus qui sera versé. Donc, en le faisant de cette façon-là, ça démontre une linéarité plus facile à exprimer que la progressivité que l'on semble voir dans votre colonne de chiffres. Puis ça n'enlève rien à l'exactitude, quand même, de votre tableau. S'il y avait eu une colonne additionnelle à côté, on aurait pu voir que l'augmentation était de 11 % pour chacun. Merci.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue, ici, parmi nous. Je me dois quand même de faire une petite remarque suite à la remarque de la ministre: le RRQ est essentiellement un régime de répartition. S'il a été capitalisé, c'est parce qu'il est en voie d'instauration. Donc, évidemment, il a capitalisé au début. Mais, normalement, lorsqu'il sera – et souhaitons qu'il va arriver – un régime à maturité, il sera un régime par répartition ayant une réserve pour couvrir les aléas d'un ou deux ans des sorties du fonds. Mais, alors, le fait qu'il soit capitalisé, c'est réellement parce qu'on a un régime qui est en création et qui n'a pas encore atteint sa maturité. On pourra débattre s'il faut le capitaliser plus, c'est-à-dire une des propositions, qui a été faite d'ailleurs par – je m'excuse, vous posez la question à monsieur, je vais répondre ici – l'Institut des actuaires, ça a été justement d'augmenter éventuellement sa capitalisation lorsqu'il y avait des taux d'intérêt réels importants. Je ne suis pas sûr qu'avec la chute des taux d'intérêt – qui au demeurant est une chose qui est extrêmement intéressante sur le plan économique – ça soit aussi intéressant de revenir à un élément de capitalisation. C'est un débat... Mais je voulais le faire parce que vous aviez fait cette remarque-là au départ.

Je vous remercie de votre mémoire et je demande, M. le Président, le consentement de la commission pour permettre au député de D'Arcy-McGee de poser, lui aussi, des questions si... Il n'est pas membre de la commission, mais il aurait envie de pouvoir poser...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Consentement accordé. Ce sera après vous, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Pour l'exemption annuelle de base – vous, si je comprends bien, vous êtes très préoccupé par les petits salariés – vous souhaitez qu'elle suive l'évolution de l'inflation. C'est bien ce que je comprends?

M. Assor (Raphaël): Bien, on voudrait la maintenir. On voudrait que les...

M. Gautrin: Mais vous voulez la maintenir? Vous savez que...

M. Assor (Raphaël): Pour les...

M. Gautrin: ...l'exemption annuelle... il y a un lien direct – permettez – entre l'exemption annuelle de base et la moyenne canadienne des salaires, qui est le maximum des gains admissibles. Ça va? Évidemment, avec la poussée inflationniste, le maximum des gains admissibles s'en va en croissant, et, jusqu'à maintenant, l'exemption annuelle de base a suivi la poussée inflationniste. La proposition qui est dans le livre vert est de geler l'exemption annuelle de base, parce qu'ils ont un objectif de la faire disparaître, mais ils vont la faire disparaître progressivement en laissant l'inflation récupérer, rattraper l'exemption annuelle de base. Je ne dis pas nécessairement que je partage ce point de vue là, mais c'est celui qui est dans le livre vert. Vous, dans votre document, vous souhaitez que l'exemption annuelle de base continue à progresser avec l'inflation, c'est bien ce que j'ai compris.

M. Assor (Raphaël): On n'a pas été aussi subtils que ça. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Ah, bon.

M. Assor (Raphaël): Si vous me permettez, à la page 6, ce qu'on dit: «...nous pensons que les salariés de moins de 10 000 $ devraient continuer à bénéficier de l'exemption de 3 500 $.» Et tout à l'heure, on a entrouvert...

M. Gautrin: Et donc, vous le gelez, alors, vous aussi?

M. Assor (Raphaël): Oui, oui, parce que ce qu'on pense, c'est que les personnes qui gagnent 10 000 $ et moins ont cet avantage. L'autre argument que Mme Harel a mis sur la table, qui n'est pas négligeable, c'est de dire: Quand même, 3 500 $, ça ouvre la porte à toute une catégorie de travailleurs qui bénéficieront plus tard de ce type de retraite. Alors, l'idée, c'est de trouver un taux réduit pour cette catégorie-là, s'il fallait se résoudre à éliminer l'exemption suivant les critères qui ont été mis sur la table progressivement.

M. Gautrin: Mais vous comprenez que c'est, dans mon livre à moi, défavorable pour les personnes qui ont des petits salaires de contribuer au RRQ parce que souvent les personnes qui ont des petits revenus vont, peut-être une fois dans leur vie, pouvoir avoir des revenus plus importants et vont pouvoir retirer ces années-là en utilisant les années de retranchement pour ces années-là.

Alors, est-ce qu'une solution à la problématique tout à fait réelle que vous soulevez ne serait pas d'augmenter le nombre d'années de retranchement, c'est-à-dire le pourcentage des années de retranchement?

Mme Harel: Est-ce que vous me permettez de répondre à la question? Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Harel: Parce que...

M. Assor (Raphaël): C'est de la connivence. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Mais on pourra...

Mme Harel: Parce que le député de Verdun pose une question intéressante; elle a vraiment circulé durant toute la commission. Mais, pour qu'il y ait, justement, ce retranchement des années de gains faibles, encore faut-il que ces années-là aient été soumises à des cotisations y donnant droit. S'il n'y a pas eu, si vous voulez, au moins 100 $ ou 150 $ de gagnés au-delà du 3 500 $ pour donner droit à l'ouverture, ces années-là ne sont pas...

M. Gautrin: Vous...

Mme Harel: ...susceptibles de pouvoir...

(16 heures)

M. Gautrin: J'avais cru comprendre, quand les travailleurs immigrés étaient venus ici, qu'ils utilisaient leurs années de retranchement, justement, pour retirer sur les années qu'ils ne cotisaient pas. Enfin, j'imagine qu'on a un point qu'on aura à clarifier à ce sujet-là à un moment ou à un autre entre nous.

Je veux quand même poursuivre sur un autre élément de votre document. Vous savez que le Régime de rentes est évidemment un régime de pensions, mais aussi, dans ma terminologie, un régime d'assurance, c'est-à-dire qui donne des prestations au décès, que ce soit la rente de conjoint survivant, que ce soit les prestations des rentes d'orphelin, et c'est aussi un régime d'assurance-invalidité à l'intérieur.

Dans votre document, vous envisagez même la possibilité que les cotisations au Régime de rentes soient données sous forme d'une taxe sur la masse salariale, mais aussi par le biais de l'impôt. C'est en page 7: «La solution pourrait être de considérer les pensions de retraite comme un programme social et qu'en ce sens une partie en soit financée par les revenus propres du gouvernement...»

Est-ce que vous seriez prêt à faire un pas de plus dans cette direction-là, c'est-à-dire de dire que la partie strictement régime de rentes soit financée par une taxe ou par une cotisation sur la masse salariale et que la partie proprement assurance soit financée par le biais des taxes et des impôts? Je fais référence entre la dernière phrase à la page 6 et la première phrase à la page 7.

M. Schlesinger (Frank): Si vous permettez, je crois qu'on a penché un peu sur la façon dont le système d'impôt pourrait être impliqué dans le système d'assurance, le système de retraite, mais sans un examen en profondeur de tout le système d'impôt, ce serait difficile de vous donner une réponse stricte, parce qu'il y a tellement de différents facteurs en jeu que je crois que ce serait difficile de répondre à cette question.

M. Gautrin: Alors, si vous me permettez, je vais vous donner quand même un élément de solution d'une commission qui a déposé un rapport hier, qui est la Commission sur la fiscalité qui, d'ailleurs, lorsqu'elle s'adresse aux entreprises, a suggéré que l'on diminue de 1 % ce qu'on appelle les taxes sur la masse salariale et, par contre, qu'on augmente, éventuellement, l'imposition des corporations, la grande différence étant la suivante pour une corporation: la partie impôt est sur les profits, tandis que la taxe sur les masses salariales est indépendamment des profits mais strictement sur votre nombre de personnes.

Alors, il y avait une réflexion qui a été faite par le comité sur la fiscalité, préférant transférer une partie diminuant les taxes sur la masse salariale au profit d'une augmentation de l'impôt sur les profits. C'était – pas pour le Régime de rentes, bien sûr – une analyse qui avait été faite à l'intérieur des documents sur la fiscalité qui ont été déposés hier. Ça ne vous éclairerait pas d'aller dans cette direction-là?

M. Schlesinger (Frank): Je peux vous dire qu'on n'a pas trop discuté de ça, mais une façon dont je vois l'affaire, c'est que, si on impose trop de dépenses sur des compagnies, sur les employeurs, on risque de réduire le nombre d'emplois. On a touché sur cet aspect du programme au niveau du problème dans notre...

M. Gautrin: Je partage. Je comprends ce point de vue là.

M. Schlesinger (Frank): Alors, si c'est un impôt, comme vous dites, qui est imposé sur les profits, c'est une chose, mais si on impose trop de dépenses sur les employeurs, sans égard à leurs profits, on risque de réduire le nombre d'emplois.

M. Gautrin: D'avoir un cercle vicieux, c'est-à-dire que vous diminuez le nombre de travailleurs et vous diminuez donc le nombre de cotisations pour le Régime de rentes.

M. le Président, dans le temps qui m'est imparti, je veux absolument laisser une chance au député de D'Arcy-McGee de poser quelques questions.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de D'Arcy-McGee, c'est avec plaisir que nous vous permettons de poser des questions.

M. Bergman: Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour le privilège pour poser des questions.

M. Schlesinger, M. Assor, M. Alper, j'ai lu votre rapport avec intérêt. Je représente la circonscription de D'Arcy-McGee, où on a une grande proportion des personnes aînées des communautés juives qui demeurent dans mon comté. Et je sais l'importance concernant tout le respect des contributions que les aînés ont faites à notre société et qui ont, en fait, bâti la société qu'on a aujourd'hui, et qu'on doit les remercier pour tout ce qu'ils ont fait pour nous. Je pense qu'à ce moment, comme société, c'est notre responsabilité de trouver une solution pour eux et je vois mal comment, en parlant de ces personnes – les gens les plus vulnérables et les aînés qui doivent avoir tout notre respect – on peut penser à augmenter leurs contributions, d'aucune manière. Je vois un paragraphe dans votre rapport de tout à l'heure, à la fin de la page 6, que je trouve fort intéressant et qu'on doit débattre dans notre société, où vous dites: «La solution pourrait être de considérer les pensions de retraite comme un programme social et qu'en ce sens une partie en soit financée par les revenus propres du gouvernement...» Je pense que nous sommes à un moment où, comme société, on doit donner beaucoup d'attention à vos propositions. C'est facile, quand le gouvernement a besoin d'argent, de le trouver chez les aînés, et je ne veux pas aller à d'autres programmes, d'autres taxes qui ont été imposées aux aînés dans les mois précédents. Je trouve qu'il y a beaucoup de difficultés sociales à cause de ces augmentations et, moi, je sens que, comme société, on a une responsabilité d'agir pour eux. Et j'aimerais vos commentaires sur les changements sociaux, les changements de philosophie de notre population qu'on doit enseigner pour subir ce changement. Cette proportion d'aînés va augmenter à travers toute la population du Québec, et c'est une responsabilité que nous avons envers les aînés à travers le Québec pour trouver la solution.

M. Assor (Raphaël): Je pense qu'avec l'expérience que j'ai de la connaissance des services communautaires juifs et non juifs et aussi de mon implication à la régie régionale dans le réseau de la santé, je dirais que la communauté juive a fait énormément de choses du point de vue communautaire pour compléter les programmes sociaux et même le réseau de la santé et des services sociaux du gouvernement du Québec. Je crois que, dans ce sens, on est un modèle d'intégration du secteur communautaire avec le secteur public. Et ce qu'on amène ici, c'est plus une réflexion générale sur les limites du bénévolat que nous avons atteintes, indépendamment de l'expérience historique du vieillissement qu'on vit. On a aussi dû développer des services, par exemple, tout à l'heure on passait en revue Genesis, mais nous avons d'autres programmes... Ça aurait pris du temps pour élaborer là-dessus. Par exemple, on a créé une agence qui est unique dans toute la province de Québec, qui s'appelle JESSE, le Jewish Support Service for the Elderly, qui est un programme pour les personnes âgées – en anglais on appelle ça les «frail elderlies», les personnes en perte d'autonomie – avec une concentration sur les programmes de maintien à domicile et le suivi dans le «case management» de personnes qui sont en attente d'une place dans un centre d'accueil, parce que nous avons un manque de lits qui a été documenté à la régie régionale.

Donc, avec l'histoire que nous avons vécue au niveau du vieillissement, on a développé des programmes sociaux et communautaires propres à la communauté qui viennent pallier et empêchent qu'il y ait une petite révolution vis-à-vis du système public. Et je pense que, dans ce sens, on vient amener aussi un signal d'alarme sur les limites de l'implication communautaire et un petit message commercial aussi qu'il faut nous aider du point de vue des organismes communautaires, quand on viendra dans d'autres commissions parlementaires au niveau de la santé, par exemple, pour appuyer des projets pilotes que M. Rochon, j'espère, va entendre, et dire qu'au niveau des personnes âgées on a atteint la limite et qu'on a même un signal d'alarme de là où on ne devrait pas aller. C'est-à-dire qu'on a l'expérience du plus loin qu'on peut aller au niveau communautaire. Et, quand on dit que les personnes de moins de 10 000 $ devraient être aidées d'une autre façon, on pense que, du point de vue communautaire, on a fait le plein des voies de ce qu'on pouvait faire pour aider dans ce sens. Donc, si vous me demandez la philosophie sociale qu'on a, c'est celle-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci.

(16 h 10)

M. Alper (David): J'aimerais rajouter, si vous me permettez, quelques commentaires. On n'a pas de problème avec l'idée, par exemple, que les personnes qui travaillent, de 65 ans et plus, continuent à cotiser à la Régie des rentes. Ça, il me semble, c'est un élément intéressant que le gouvernement pourrait regarder. Je pense que l'élément le plus important qu'on apporte, c'est l'élément de progressivité parce qu'on reconnaît que, comme on doit le faire selon le scénario actuel, doubler les cotisations à la RRQ pour les petits salariés, pour les petites et moyennes entreprises va représenter un fardeau très important pour beaucoup de gens. Et c'est pour ça qu'on suggère de réviser en profondeur la fiscalité, de regarder le système de rentes pour qu'il soit plus progressif en tenant compte que l'élément fondamental d'un régime de retraite devrait être de sortir les aînés de la pauvreté, d'assurer un revenu de remplacement suffisant. Depuis une trentaine d'années, les différents programmes pour les aînés ont permis à énormément d'aînés de ne plus vivre dans la pauvreté dans la société québécoise et canadienne. Mais on voit qu'on a encore un grand bout de chemin à faire et même qu'on est en train de reculer, d'une certaine manière. Et, nous, ça, on le voit dans notre travail quotidien avec les aînés avec lesquels on travaille, avec les sacrifices supplémentaires qu'on est en train de leur demander, toujours à cause du déficit: il y a l'assurance-médicaments, il y a différentes coupures comme ça qui représentent un fardeau énorme pour les aînés. C'est dans cette optique-là qu'on trouve qu'il faut regarder la réforme de la Régie des rentes du Québec.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Au nom de tous les membres de la commission, je vous remercie beaucoup pour la préparation et la présentation de votre mémoire. Merci.

M. Schlesinger (Frank): Merci de nous avoir invités.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mais ça nous a fait plaisir. Je reçois maintenant les représentants de la Fédération de l'âge d'or du Québec.

À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous recevons maintenant les représentants de la Fédération de l'âge d'or du Québec. Et M. Marcotte, je vous invite à présenter la personne qui vous accompagne et les titres, pour fins d'enregistrement, et à commencer votre présentation.


Fédération de l'âge d'or du Québec (FADOQ)

M. Marcotte (Jean-Marie): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM., Mmes les députés. Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de nous avoir reçus. Et j'aimerais tout de suite présenter... À ma droite, c'est Nicole Moir, qui est directrice générale de la Fédération de l'âge d'or du Québec.

La Fédération de l'âge d'or du Québec est un regroupement de volontaires, de personnes âgées de 50 ans et plus dont l'objectif principal est de maintenir et d'améliorer la qualité de vie de ses membres et, par voie de connaissance, de l'ensemble des aînés du Québec. Aujourd'hui, la FADOQ est présente dans 17 régions au Québec, rassemble près de 1 000 clubs qui offrent particulièrement des activités de loisir aux 170 000 membres qui s'y retrouvent. Et, aujourd'hui, on pourrait dire qu'avec le recrutement notre nombre s'approche de 200 000. Fondée en 1970, à peine quelques années après la mise en place du Régime de rentes du Québec, nous pouvons dire que les membres actuels de la FADOQ ont pleinement contribué au Régime de rentes dont ils sont maintenant, pour la plupart, bénéficiaires. Nous tenons à relever cet aspect, car nous voudrions éviter que le débat sur la réforme du Régime tourne au procès d'une large partie de la population à qui, pendant 20 ans, les gouvernements successifs ont garanti un faible taux de cotisation, 1,8 %, ce qui était aussi également avantageux pour les employeurs. Les faibles salaires et l'absence de régimes privés de retraite caractérisaient, pour une large part des retraités actuels, le marché du travail dans lequel ils ont évolué. Grâce à la création du Régime de rentes, ils ont pu regarder l'avenir avec moins d'appréhension.

Cette assurance qu'a garantie le Régime de rentes du Québec demeure tout aussi essentielle aujourd'hui, car, malgré une nette amélioration du salaire moyen et une augmentation importante des régimes privés de retraite, l'environnement économique demeure inquiétant pour de nombreux travailleurs: perte et précarité de l'emploi, difficile adaptation technologique, charges sociales croissantes, etc.

La réforme du Régime de rentes ne peut, à notre avis, être dissociée de ce contexte. Et, s'il est vrai qu'il nous faille augmenter de manière draconienne le taux de cotisation des travailleurs actuels pour garantir l'avenir du Régime, le gouvernement devrait également chercher à rassurer la population quant à la façon dont il gérera ce Régime.

Tous les Québécois et les Québécoises ont encore en mémoire l'utilisation faite par le gouvernement d'une partie des fonds de la Société de l'assurance automobile du Québec. Et la crainte demeure qu'une situation semblable se répète. Des sociétés ou des régimes d'État auxquels contribuent les travailleurs devraient être à l'abri de telles manipulations, quel que soit le parti au pouvoir, et d'autant plus dans ce cas-ci lorsqu'il s'agit du revenu des futurs retraités.

Par ailleurs, étant donné qu'on envisage une plus large contribution des travailleurs, il ne serait que légitime que ceux-ci soient plus largement informés des politiques de placement du régime auquel ils contribuent. La Régie des rentes, ou tout au moins la Caisse de dépôt et placement, devrait en ce sens se faire un devoir de véhiculer régulièrement cette information.

À cet égard, nous regrettons que le débat actuel s'engage sur un ton catastrophique: il n'y aura plus de réserve, alors que depuis de nombreuses années il est prévisible que le nombre de cotisants et le taux de cotisation ne suffisent plus à garantir l'avenir du Régime. Cette surenchère alarmiste n'entraîne aucune retombée positive pour les retraités ni pour les travailleurs actuels dont le pessimisme à l'égard de la capacité du gouvernement d'assurer la viabilité d'un régime de retraite ne fait que croître.

De plus, le discours voulant que les aînés fassent leur part est tout aussi inutile que démobilisateur et provoque un clivage entre des générations qui auraient pourtant avantage à se serrer les coudes. Ne serait-ce qu'au Québec, la dernière année a largement démontré que les aînés assument déjà de nombreuses charges: hausse des loyers dans les centres d'accueil et les habitations à loyer modique, implantation du régime d'assurance-médicaments, récupération des crédits d'impôt en raison de l'âge et pour les revenus de retraite, etc., et ce, avec un revenu qui est loin de se bonifier.

Nous espérons que la réforme du Régime de rentes du Québec sera l'occasion d'avoir une vision plus claire de l'état de retraité et qu'elle en fera comprendre les nombreuses facettes économiques; qu'elle encouragera les générations plus jeunes à prendre une part active à la confection de leurs revenus de retraite; et, surtout, qu'elle rétablira la réputation d'un régime qui devrait contribuer de manière importante à stabiliser la situation financière des futurs et actuels retraités.

La Fédération de l'âge d'or du Québec accueille à la fois des personnes qui sont encore sur le marché du travail ou en phase de pré-retraite, soit de 50 à 65 ans, et des retraités de 65 ans et plus. C'est pourquoi le regard qu'elle pose sur le document de consultation «Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec» s'est arrêté tout autant sur les propositions qui concernaient les travailleurs cotisables que les bénéficiaires du Régime.

Le Régime de rentes du Québec est une assurance pour chaque travailleur de maintenir à la retraite un niveau de revenu décent, et ce, indépendamment des aléas qu'il rencontrera au cours de ses années de travail. Voilà ce que devraient se rappeler constamment les responsables du Régime pour faire comprendre aux contribuables la nécessaire hausse de cotisation. Toutefois, celle-ci devrait faire partie d'un plan à long terme qui garantirait, après huit ou 10 ans, l'atteinte d'un taux de cotisation de régime permanent pour tous les travailleurs.

(16 h 20)

Si l'objectif acceptable oscille, comme le présume le document de consultation, autour d'un taux de cotisation de 10 %, il n'en demeurerait pas moins que les jeunes générations auraient encore l'odieux de payer plus pour obtenir une prestation équivalant à celle que reçoivent les bénéficiaires actuels. À cet égard, la proposition du Conseil canadien de développement social, dans le cadre des consultations entourant le Régime de pensions du Canada, nous semble tout à fait pertinente. Le Conseil propose que les gouvernements reformulent le crédit d'impôt au Régime de pensions du Canada – au Québec, ce serait le Régime de rentes du Québec – pour refléter le principe de l'équité entre les générations. Le crédit d'impôt, poursuit-il, devrait être plus élevé pour les travailleurs plus jeunes que pour les travailleurs plus âgés. Le changement n'interviendrait que dans le système fiscal et n'influerait pas sur la taille du fonds du Régime de pensions du Canada ou des projections actuelles des recettes futures. Nous croyons que la commission devrait explorer cette avenue.

Par ailleurs, les administrateurs de la Fédération de l'âge d'or du Québec se sont entendus pour que les bénéficiaires d'une rente de retraite qui travaillent continuent ou recommencent à cotiser. En contrepartie, comme l'indique le document de consultation, il faudrait que leur rente soit revalorisée en fonction des nouvelles cotisations versées, dans la mesure où ils ne touchent pas déjà la rente maximale.

Nous restons toutefois interrogateurs quant aux autres options présentées en regard de l'élargissement de l'assiette de contribution. Nous remarquons, en effet, que la réduction proportionnelle de l'exemption générale sur la base des gains annuels demanderait de la part des bas salariés, 20 000 $ et moins, un effort qui, associé aux nombreuses autres charges sociales, l'assurance-médicaments par exemple, qu'ils ont déjà assumées, ne ferait qu'empirer leur condition économique.

Bien que nous soyons favorables à tout exercice qui puisse garantir un revenu décent à la retraite et une responsabilisation des travailleurs à cet égard, nous sommes convaincus que de nombreuses personnes ne peuvent tout simplement pas le faire, faute d'avoir les moyens nécessaires pour subvenir à leurs besoins essentiels quotidiens. Tous les travailleurs n'ont pas la possibilité de construire leurs revenus de retraite. Il n'y a qu'à regarder les statistiques annuelles concernant les régimes enregistrés d'épargne-retraite pour s'en convaincre.

Bien que le document de consultation réitère la volonté du gouvernement du Québec de maintenir le taux de remplacement de 25 % du salaire cotisable, nous avons remarqué qu'il n'a pu s'empêcher de faire l'évaluation de l'incidence d'un réaménagement à la baisse des prestations sur le taux de cotisation. La Fédération s'oppose à toute mesure en ce sens. Déjà, une grande majorité des bénéficiaires reçoivent beaucoup moins que la rente maximale de retraite, qui est de 727,08 $ par mois. Par exemple, nous dit le rapport annuel de la Régie des rentes du Québec, en 1995, le pourcentage des nouveaux bénéficiaires de la rente de retraite qui recevaient la rente maximale, en excluant les personnes qui bénéficiaient uniquement d'une rente divisée, était de 3,1 % chez les femmes et de 20,2 % chez les hommes, la moyenne mensuelle des rentes de retraite s'établissant à 320,34 $. Ces données suffisent à illustrer qu'un grand nombre de bénéficiaires actuels ont eu pendant leur vie active des gains inférieurs à la moyenne ou qu'ils n'ont pas eu les années requises de plein-emploi. Ces personnes doivent, par conséquent, se tourner vers le supplément de revenu garanti pour assumer leurs revenus de retraite, d'autant plus que se trouvent parmi elles plusieurs qui n'ont, d'aucune façon, pu avoir accès à un régime privé de retraite: les REER ou les régimes enregistrés.

Dans les conditions actuelles, comme le souligne le Conseil national du bien-être social, cela ne leur suffisait même pas, en 1995, pour atteindre le seuil de pauvreté dans une grande ville. Il serait, à notre avis, insensé de vouloir réduire de quelques points de pourcentage que ce soit le taux de remplacement de 25 %, même si certains verraient là une mesure rapide d'économie et donc d'amélioration du fonds de réserve. Les données précédemment citées alimentent également notre conviction de maintenir l'indexation des prestations selon l'indice des prix à la consommation et de conserver la déduction de 15 % des années de gains faibles ou nuls calculée sur la période de cotisation. Ces deux acquis sont essentiels pour l'ensemble des bénéficiaires, mais particulièrement pour les femmes qui, nous l'avons vu, sont encore, malgré le fait qu'elles soient en majorité, les grandes perdantes à la retraite.

Un autre acquis indispensable à maintenir est le droit à la pleine rente à 65 ans. Nous ne le répéterons jamais assez: les travailleurs âgés sont de plus en plus poussés à prendre leur retraite à des âges beaucoup moins élevés. Hausser d'une seule année l'âge d'admissibilité à la rente de retraite signifierait pour beaucoup d'aller piger dans leur épargne et, pour la majorité d'entre eux, les 60-65 ans, d'entamer des revenus – la rente de retraite du Québec – qui devraient normalement leur garantir un revenu de retraite décent, et ce, jusqu'à la mort.

Or, les prestations versées au décès constituent le dernier volet dont la Fédération de l'âge d'or du Québec tient à rappeler la nécessité. Pour de nombreuses personnes retraitées, le versement de cette prestation s'avère une protection essentielle qui leur assure très souvent des obsèques décentes et, pour leur famille, un apport financier non négligeable dans les frais encourus au décès de leurs parents. S'assurer contre le feu et le vol est une pratique courante volontaire. Quand on a 20 ou 30 ans, penser à la retraite ou à un accident qui nous rendrait invalide l'est beaucoup moins, d'où la nécessité de maintenir intégralement le Régime de rentes du Québec. Même avec une hausse du taux de cotisation, illustrait le Conseil canadien du développement social, cela correspond à ce que bien des Canadiens paient chaque année pour assurer leur voiture. Cela est tout aussi vrai pour la retraite des Québécois.

Et on vous soumet humblement ce mémoire. N'étant pas des actuaires, des spécialistes au niveau des finances, du calcul, je crois que c'est le principe qu'on veut défendre à l'effet que nos aînés... Contrairement aux données qui sont véhiculées à l'effet qu'ils sont riches, c'est complètement faux. Merci de votre attention.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. J'invite maintenant Mme la ministre à commencer l'échange.

Mme Harel: Alors, merci. Bienvenue, donc, M. Marcotte, Mme Moir. M. Marcotte, ce n'est pas votre première commission parlementaire.

M. Marcotte (Jean-Marie): Non, la deuxième.

Mme Harel: La deuxième? La première, c'était sur l'assurance-médicaments, je gage.

M. Marcotte (Jean-Marie): Non, c'était les grands-parents.

Mme Harel: Les grands-parents. Ah, très bien.

Mme Moir (Nicole T.): Non, ça a été... Alors, c'est la troisième.

M. Marcotte (Jean-Marie): C'est ça, troisième.

Mme Harel: La troisième? Alors, troisième, voyez!

M. Marcotte (Jean-Marie): C'est assez naturel qu'on ne se rappelle plus du nombre.

Mme Harel: C'est vrai. Bon, bien tant mieux, tant mieux.

M. Marcotte (Jean-Marie): Est-ce parce que les besoins sont plus grands qu'on doit venir?

Mme Harel: Peut-être aussi parce que les réformes sont engagées. Celle devant...

M. Marcotte (Jean-Marie): Exact.

Mme Harel: ...laquelle nous sommes ce matin s'est fait attendre longtemps. Comme vous le savez, nous en sommes à maintenant 13 ans où la Régie a dû commencer à utiliser les intérêts de la caisse, et puis quatre ans où il y a eu décaissement. Alors, il y a comme urgence d'agir, bien évidemment, étant donné que, si on ne bouge pas, on se paie pour 10 % des bénéfices – je ne veux pas reprendre l'échange qu'on avait, je sais que vous étiez dans la salle tantôt...

M. Marcotte (Jean-Marie): Exact.

Mme Harel: ...mais, finalement, on ne cotise pas pour ce qu'on reçoit. Alors, il arrivera, avec la démographie, dont les prévisions sont différentes de celles qu'elles étaient il y a 30 ans, que nos enfants et nos petits-enfants, eux, devront payer des cotisations supérieures à ce qu'ils recevront, alors que, nous, on en paie moins que ce qu'on recevra.

Ceci dit, votre mémoire, à bon droit, fait état de la pauvreté chez les aînés, et il y a un danger de penser que, par le relèvement général d'une situation d'appauvrissement qui était plus grave auparavant, le problème est réglé. Vous faites bien de nous rappeler qu'il ne l'est pas, particulièrement avec la longévité, où les femmes pauvres, finalement, le sont plus longtemps qu'avant.

(16 h 30)

D'autre part, dans votre mémoire, vous faites état du fait que le Régime de rentes est une assurance pour chaque travailleur de maintenir à la retraite un niveau de revenu décent. Je pense que c'est même au-delà de ce que c'est, la Régie des rentes. En fait, c'est l'assurance pour chaque travailleur de maintenir à la retraite 25 % de son revenu, un remplacement de 25 % du revenu. Est-il ou pas décent? Alors, là, ça, c'est une question qui, à l'évidence, suppose qu'on regarde chaque situation, parce que, pour un travailleur, par exemple, qui aurait eu un revenu de 20 000 $, le remplacement de revenu sera environ de 5 000 $ par année. C'est bien le cas? C'est ça, hein? Alors, c'est donc dire que c'est le 25 % de remplacement de revenu... Puis je pense qu'il va falloir le dire pour que les gens comprennent à quel point compter juste là-dessus ce n'est pas assez. Ça, je pense qu'il faut que ce soit un élément qui se sache.

D'autre part, vous êtes certainement parmi ceux et celles qui souhaitent qu'on revoie de manière plus obligée l'état de situation. Alors, on a déjà discuté de ça puis comme on clôture quasiment aujourd'hui avec vous – en fait, on va reporter notre clôture au mardi 5 novembre, mais, enfin, on est un peu sur la fin – je dois vous dire que c'est entendu qu'on va s'obliger, par une clause qu'on appelle crépusculaire, dans la loi à revoir à tous les six ans, c'est-à-dire à toutes les deux analyses actuarielles – il y a une analyse actuarielle à tous les trois ans – l'horizon de cotisations et de prestations pour bien vérifier que les prévisions sont toujours justes et adéquates.

Il y a une assurance cependant que je veux vous donner immédiatement, c'est la suivante: le gouvernement ne peut pas s'approprier les fonds du Régime de rentes. Il ne le peut pas en vertu de sa loi, en vertu de la loi de la Régie, l'article 34, et à cet article, depuis donc que la Régie existe, elle est obligée de déposer auprès de la Caisse de dépôt et placement du Québec tout l'argent en sa possession, sauf ce qui est nécessaire à son administration puis au paiement des prestations. Et je dois vous dire que l'administration, à la Régie des rentes, c'est vraiment exceptionnel, c'est 1 %. C'est bien ça, hein? C'est 1 % du total, 50 000 000 $ sur 5 000 000 000 $. Et quand on compare avec les régimes privés qui, même les plus performants, vont chercher 4 % à 5 % de frais d'administration...

Alors, je ne vous en fais pas grief parce que ce n'est pas vraiment connu, mais je compte sur vous pour que ce le soit dorénavant mais ce n'est pas... Vous pouvez vous rassurer, il ne peut pas se produire la même chose qui s'était produite avec la Société de l'assurance automobile du Québec. La Société des alcools, elle, tous ses profits, heureusement, servent au fonds consolidé pour financer les dépenses de santé, éducation et autres. Alors, c'étaient donc les principaux aspects.

Je sais que mon collègue veut également échanger avec vous. Peut-être juste une dernière chose. Si on peut comprendre qu'il ne faille pas un débat catastrophique, en même temps il faut faire entendre la nécessité d'agir rapidement parce que c'est... Je ne pense pas que ce soit le discours qui soit catastrophique, c'est le fait de ne pas agir qui le devient. Alors, en agissant, je pense qu'à partir de ce moment-là on rassure et les retraités actuels et les cotisants et les futurs cotisants aussi. Les retraités actuels, vous savez que c'est toujours dans l'air, la désindexation. Au niveau du Régime de pensions du Canada, s'ils ont écarté l'âge de 67 ans, s'ils ont écarté la diminution du taux de remplacement à 22,5 % plutôt qu'à 25 %, s'ils ont reporté la question de la rente de conjoint survivant, ils ont quand même toujours sur la table la question de la désindexation, et ça, je dois vous dire que j'espère compter sur l'appui de l'opposition pour qu'il soit clairement entendu au Québec que ce serait un grand bris, un bris de confiance terrible. Pourquoi les jeunes générations ou même la génération du baby-boom qui agirait maintenant pour... rétroactivement d'une certaine façon, briser le contrat. Je sais bien que la désindexation ne serait pas rétroactive et qu'elle débuterait à partir de maintenant. D'abord, elle serait pas mal lourde de conséquences pour les femmes, qui vivent plus longtemps et qui auraient à subir finalement une addition d'années désindexées, même si c'était 1 %. Mais, au-delà de ça, c'est bien évident que, à ce moment-là, après, tout est possible. Si la génération du baby-boom l'a fait pour les retraités actuels, pourquoi est-ce qu'elle ne le laisserait pas faire à... Voyez, après, c'est comme si on nous ouvrait des scénarios dans lesquels il n'y a plus de garantie de rien. Alors, j'espère, en tout cas, qu'on va le fermer rapidement, ce scénario-là, à l'unanimité, en tout cas, du Parlement. Alors, là-dessus, je vous laisse la parole pour vos commentaires.

M. Marcotte (Jean-Marie): Je compléterai. Un ou l'autre.

Mme Moir (Nicole T.): Moi, je pense que... Bon, ce que vous avez soulevé concernant le questionnement qu'on fait qu'il ne faudrait pas que le Régime de rentes du Québec fasse la même chose que la SAAQ finalement, c'est de dire... La population, du moins les aînés, on l'entend dire par les aînés... Vous dites: Bon, on espère que vous allez rétablir les choses. On le dit que le gouvernement n'a pas le droit de faire ça, sauf que la population ne le croit pas. Puis je pense qu'on dit à plusieurs endroits qu'il va falloir que la Régie des rentes du Québec, ou la Caisse de dépôt, informe la population ou aussi essaie de rassurer la population. On ne dit pas que le gouvernement va le faire, mais la population pense que le gouvernement va le faire. Puis, bon, on entend plus les aînés parce que c'est notre clientèle, mais c'est plus ça qu'on a voulu dire. Puis l'autre chose, quand vous dites: le débat catastrophique, c'est parce qu'on y a goûté, les aînés, dernièrement, que ça soit pour l'assurance-médicaments, que ça soit pour tout ce qui se passe. Et c'est toujours: il n'y a plus d'argent puis les aînés coûtent cher. C'est un peu ça, là, qui est l'équation, et ça dégénère en bataille entre les générations, puis ce n'est surtout pas ce qu'on veut. Ce qu'on dit, c'est: Oui, c'est vrai, il y a une situation qui est alarmante, mais elle touche tout le monde, pas juste les aînés, puis ce n'est pas juste les aînés qui coûtent cher dans la société. C'est...

Mme Harel: Je suis contente de vous l'entendre dire. Parce que, en même temps, si tant est qu'elle touche tout le monde, il faut qu'il y ait un principe de justice sociale et d'équité qui fasse que le traitement le soit en fonction du revenu et non pas du statut ou de la catégorie...

Mme Moir (Nicole T.): De l'âge.

Mme Harel: ...d'âge.

Mme Moir (Nicole T.): Voilà.

Mme Harel: Parce que, si on réorganise, dans le fond, notre solidarité, on va la réorganiser en fonction des revenus et non pas en fonction de l'âge. Je peux donc avoir 20 ans et être dans une situation de dénuement qui ressemble à celle d'une personne de 80, mais je peux en avoir 75 et être dans une situation de fortune supérieure. Alors, auparavant, on avait un traitement qui stigmatisait, si vous voulez, certaines catégories d'âge. Moi, je suis très, très, très favorable à ce qu'on revienne à une égalité de traitement selon les revenus et non pas selon le statut, qu'on soit assisté social, ou selon l'âge, qu'on soit aîné. Et je pense que ça va être, à moyen terme, un facteur de cohésion sociale.

Mme Moir (Nicole T.): Ça devrait l'être.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Deslières: Oui, merci, M. le Président. Madame, monsieur, bonjour. Juste pour revenir un peu sur le dernier élément de ma collègue, là. C'est parce que c'est la première fois que je vois au cours de cette commission une référence au ton alarmiste, catastrophique – je vous le dis – et on parle d'un débat qui s'engage sur un ton catastrophique. Tout au long de cette commission et même avant le début de la commission, de part et d'autre, je pense, du gouvernement et de l'opposition, on a mis les cartes sur la table, on a mis les pendules à l'heure juste. À l'heure, oui. Parce que je suis vraiment surpris de voir ça. C'est la première fois que, dans un des mémoires – on en a vu plusieurs, on va en voir d'autres – on voit cette référence à un ton catastrophique. Pas du tout. Et je pense qu'il fallait dire les choses telles qu'elles sont. C'est sûr qu'il faut agir. Alors, je suis un peu surpris. Je ne sais pas si vous avez encore un commentaire, là. Première référence, hein...

Mme Moir (Nicole T.): C'est parce que...

(16 h 40)

M. Deslières: Je m'excuse, madame, monsieur... Parce que toutes les discussions se sont faites, des échanges extraordinaires, des suggestions fort intéressantes qu'on a eues tout au long des dernières semaines pour corriger la situation. Il faut agir; on est d'accord sur ça.

M. Moir (Nicole T.): Pas de problème.

M. Deslières: Oui?

Mme Moir (Nicole T.): C'est parce qu'on l'a mis entre parenthèses. C'est cité textuellement du texte: il n'y a plus de réserve. La réserve baisse, mais de là à dire qu'il n'y en a plus, de réserve, que... Bon, on le sait, il y a un manque de ressources. Puis ça, on l'avoue, on est d'accord. D'ailleurs, ce que Mme Harel vient de dire, aussi, dans le cadre de l'assurance-médicaments, on l'a bien dit. On avait 60 % de nos membres qui étaient contre l'assurance-médicaments; il y en avait 40 % qui étaient en faveur. On n'est pas allés dire au ministre: On est contre. On a voulu faire valoir qu'on voulait une équité entre les générations, et ceux-là qui étaient en faveur, c'étaient ceux-là, souvent, qui disaient, bien: Enfin, peut-être que nos enfants auront quelque chose. Parce que les enfants sont à contrat ou...

Mais, pour revenir au ton catastrophique, c'est... Bon. Il n'y a plus de réserve, il y a un manque de ressources partout. Il faut faire de quoi puis là, vu de notre point de vue à nous... Et les aînés coûtent cher à la société. Et c'est tout ça mis ensemble qui nous faire dire ça.

M. Deslières: Question de perception...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Votre question, M. le député.

M. Deslières: Une courte question. Quand vous faites référence aux informations que vous voulez que la Caisse de dépôt et placement soumette à l'ensemble des travailleurs via leur stratégie de placement, les résultats... Je voudrais vous entendre d'une façon plus claire. Vous attendez quoi, et quelle sorte de communication que vous voulez voir de la Caisse de dépôt et placement? Vous faites référence...

M. Marcotte (Jean-Marie): Moi, je pense que les gens sont informés seulement...

M. Deslières: Vous ne faites pas référence au...

M. Marcotte (Jean-Marie): ...mais, par contre, sur l'autre côté... Non, non. On ne veut pas conseiller pour dire: Va placer dans telle compagnie. Mais, effectivement, on a vu certaines compagnies faire des placements puis de mauvais placements ou, du moins, qui n'ont pas rapporté plus que d'autres. Et on s'est posé la question: Au niveau du privé, quand tu fais une erreur, tu paies pour. Qu'est-ce que ça veut dire que, dans les autres, on ne sent pas ça, cette idée de vouloir toujours s'améliorer? Et je vous livre simplement ce que les gens pensent, ce à quoi ils réfléchissent. Et pourquoi nos revenus sont à ce niveau-là? Est-ce parce que nos placements ont été moins profitables que d'autres?

M. Deslières: Mais est-ce que vous allez jusqu'à dire que la Caisse de dépôt et placement, dans ses informations, il y a un manque de transparence? Pour être clair, mettre les cartes sur la table. Il y a un manque de transparence et, dans le fond, ce manque de transparence, vous doutez de l'efficacité de la Caisse de dépôt. C'est ça que vous nous dites, c'est ça? Ça va jusque-là?

Mme Moir (Nicole T.): Oui, oui. Puis je vous le dis, le manque d'information fait que les gens ont une perception que c'est mal géré...

M. Deslières: Donc, vous dites à la Caisse de dépôt et placement: Vous manquez d'une stratégie de communication pour nous...

Mme Moir (Nicole T.): Oui.

M. Marcotte (Jean-Marie): Oui. Ça, effectivement, de communication, oui. Et, effectivement, si on réfère à quelques items, je pense au dernier: c'est les médicaments. On nous annonce ça, clouc! puis c'est les aînés qui passent au bâton les premiers. Et comment voulez-vous que ça inspire la confiance? On passe au cash les premiers. Excusez l'expression le «cash», mais c'est tout de suite, ça. Et il n'y a pas de pardon. On invoque... une injustice, une équité qu'on veut avoir, mais il n'y a pas de pardon, c'est passé. Et quelle référence que ça peut nous donner vis-à-vis des autres? Qu'est-ce qu'il faut dire à nos gens... de pouvoir dire: Non, il faut que vous ayez encore confiance. Non, on vous défait. Mais, souvent, nos paroles n'ont pas le même impact que d'autre chose.

Le Président ( M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de Verdun.

M. Deslières: Une courte, s'il vous plaît?

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Courte, courte, courte.

M. Deslières: On pourra revenir sur cette discussion-là. Une très courte. À la page 4, vous faites référence à la réduction proportionnelle de l'exemption générale et vous nous dites: Ça n'a pas de bon sens en bas de 20 000 $. Dans le fond, ce qu'on doit comprendre, c'est que vous souhaitez que la réduction proportionnelle s'établisse à compter de 20 000 $. Oui? Non?

M. Marcotte (Jean-Marie): Oui. Parce que, effectivement, en bas, tu n'as plus rien, tu es dans la mendicité.

M. Deslières: Vous n'avez pas de proposition concrète? Vous faites le constat, mais vous faites... Est-ce que c'est le corollaire par rapport à votre affirmation qu'on doit prendre comme position?

Mme Moir (Nicole T.): Ce qu'on dit, c'est que les gens plus fortunés, dans le fond, ce n'est pas nécessairement eux autres qu'on veut, en ce moment, protéger; on veut protéger les plus démunis. Puis si on regarde les tableaux qu'on avait dans le livre – comment vous l'appelez – vert pâle, vert, que, finalement, on réalisait que le 3 500 $, à 20 000 $ et plus, avait moins d'impact qu'à 20 000 $ et moins. O.K.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je voudrais avec vous essayer de remettre en quelque sorte le discours parce que je pense qu'il est important. Et la manière dont je reçois votre message, c'est de nous dire: Il y a une perception, actuellement, particulièrement chez les aînés, de grande inquiétude face au Régime de rentes.

M. Marcotte (Jean-Marie): Oui.

M. Gautrin: Je dois vous dire que, certes, il y a une situation préoccupante, mais la situation n'est pas si dramatique qu'on pourrait le voir, puis je vais essayer d'échanger avec vous là-dessus parce que c'est important, et vous avez, à mon sens... Parce que vous êtes une fédération extrêmement importante, vous représentez plus de 100 000 membres, si je comprends bien, et vous venez nous dire: Nos membres sont inquiets.

La première chose que je pense qu'il est important de réaliser, c'est que la Caisse de dépôt dans ses performances – et on pourrait vous sortir ça, les performances de la Caisse de dépôt par rapport au taux de rendement moyen des régimes de retraite – a eu une performance supérieure à la moyenne des caisses de retraite dites privées. Ça, c'est un élément qu'il est important de bien comprendre. Elle gère, bien sûr, le Régime de rentes, mais elle gère aussi le RREGOP, elle gère le RRE, elle gère d'autres régimes de rentes et elle a assez bien fonctionné. Et, sans vouloir faire de petite politique, je n'ai pas de raison de croire que le changement de gouvernement devrait amener un changement quant au taux de rentabilité de la Caisse, quoiqu'on ne sait pas, mais enfin...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Ha, ha, ha! Je ne ferai pas de petite politique. Ça serait vraiment de...

M. Deslières: Il ne le fera pas mais il l'a fait. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non, bien, ça serait...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non. Je dis que je ne le ferai pas mais, vous savez, on pourrait s'amuser à ce genre de boutades. Donc, ça, c'est le premier élément, et je pense que c'est important que vous le sachiez. Ce que vous nous dites: Ce n'est pas clair, ce n'est pas véhiculé et il faudrait qu'il y ait un véhicule qui soit mieux précisé aux membres.

Moi, je pense que la Régie des rentes devrait faire circuler à l'ensemble des membres qui bénéficient d'une retraite ce type d'information et je pense qu'elle pourrait le faire sans grande difficulté. Ce serait un feuillet explicatif qui serait mis dans l'envoi du chèque. Ça ne serait pas tellement difficile d'entrer là-dedans. Deuxième élément. Vous vous inquiétez. Vous dites... Et c'est vrai que ça a circulé énormément dans la population en disant: La Caisse va être vide. Vous savez, ça a circulé et vous avez dit avec raison... Non, non. Je sais que ce n'est pas vous, mais ça a circulé dans la population. Moi...

M. Marcotte (Jean-Marie): Ce n'est pas nous autres qui l'avons dit.

M. Gautrin: Non, non. Un instant. Moi, je vais vous dire que ça a circulé beaucoup, puis le nombre de gens que je rencontre disent: Bon, il n'y aura plus d'argent dans la Caisse pour payer nos retraites.

M. Marcotte (Jean-Marie): Exact.

M. Gautrin: La structure du Régime de rentes, du RRQ, c'est une structure où – je ne veux pas utiliser les termes par répartition, etc. – les personnes qui travaillent payent les rentes de ceux qui en bénéficient. Si on a accumulé une grosse réserve pendant un certain temps, c'était parce que le Régime se mettait en place. Ça va? On se comprend là-dessus? Et il faut maintenir... Il y a un problème démographique, c'est certain, il y a un problème de taux de cotisation, c'est certain, mais il ne faut pas – et je comprends que vous ne le faites pas, là, mais je comprends qu'il y a un élément à sécuriser les gens aussi – il ne faut pas non plus en paniquer.

Maintenant, je vais revenir un peu plus dans votre mémoire. Si je comprends bien, vous nous dites: Attention, nous avons contribué à la constitution du Régime de rentes. Vous nous dites: Ce n'est pas de notre faute parce qu'on a été les gens qui ont été à la construction du Régime de rentes, parce qu'il y a des calculs qui ont été faits en disant que vous en bénéficiez plus que ce que vous avez contribué.

(16 h 50)

C'est évident que, quand on met sur place un régime de rentes, les premiers qui y entrent sont les premiers qui en bénéficient, et ce n'est pas anormal. C'est parce qu'on a créé le régime de cette manière-là. Ce que vous nous dites: Ça ne serait pas juste, aujourd'hui, de nous retirer les bénéfices dans lesquels, de bonne foi, on est rentrés à l'intérieur dans ce régime et pour des raisons de calcul complexe de nous retirer les bénéfices auxquels nous avons droit. Et le plaidoyer que vous nous faites ici, devant nous, c'est nous dire: Ne retirez aucun des bénéfices auxquels on a droit. Est-ce que je comprends bien le sens de votre mémoire?

Mme Moir (Nicole T.): C'est ça.

M. Marcotte (Jean-Marie): Peut-être ajouter, effectivement, c'est peut-être plus que ça. Parce qu'on ôte le pain de la bouche.

M. Gautrin: Oui.

M. Marcotte (Jean-Marie): Parce qu'on a habitué cette génération-là à dire: Vous travaillez, vous contribuez. À 65 ans, lorsque vous allez vous retirer, vous allez avoir une pension qui va vous assurer d'avoir au moins le minimum. Pour ceux qui prenaient la pension avant, à 55 ou 60, bien, il y avait des pénalités qui étaient payées. Mais ces gens-là, aujourd'hui, comme la règle du jeu change, bien, se trouvent défavorisés dans cet aspect-là.

M. Gautrin: Je comprends. Il y a peut-être un élément – et je vais vous poser la question parce que ça peut toucher certains de vos membres – il y a des gens qui bénéficient de la pension et qui retournent sur le marché du travail. Actuellement, ils ne cotisent pas. Mais il semblerait qu'il y ait un consensus qui semble s'établir chez tout le monde que ces personnes-là devraient cotiser. Vous êtes en accord avec cette...

Mme Moir (Nicole T.): Oui, oui, on l'a mis dans notre...

M. Gautrin: Et vous l'avez mis dans votre mémoire.

M. Marcotte (Jean-Marie): Ça, on concède ça. C'est bien.

Mme Moir (Nicole T.): Oui, oui, c'est dans le mémoire.

M. Gautrin: Excusez-moi de ne pas l'avoir...

M. Marcotte (Jean-Marie): Oui, on est d'accord.

Mme Moir (Nicole T.): Oui, tout à fait d'accord.

M. Gautrin: Sur la question qui touche la retraite progressive, vous savez qu'il existe, particulièrement au sein du gouvernement du Québec, une tendance où les gens vont progressivement prendre la retraite, c'est-à-dire travailler quatre jours, trois jours, etc. Là, est-ce que vous êtes en faveur... Le Régime de rentes, le RRQ, n'est pas adapté à ce genre de chose là, parce que, à ce moment-là, vous n'avez pas contribué au plein montant du salaire. Est-ce que vous avez réfléchi à cette question? Et est-ce que vous seriez en faveur, à ce moment-là, que dans un cas de mécanisme de retraite progressive les gens puissent racheter leur pleine contribution? Vous comprenez ce que je veux dire?

Mme Moir (Nicole T.): Oui. Il n'y a pas eu de discussion à cet effet-là, chez nous. Comme...

M. Gautrin: Si jamais vous vous réunissez, moi, je serais intéressé à connaître votre...

Mme Moir (Nicole T.): Opinion.

M. Gautrin: ...avis sur cette question-là.

Mme Moir (Nicole T.): D'accord.

M. Gautrin: M. le Président, ma collègue de Chapleau...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Ah, oui?

M. Gautrin: ...avait un certain nombre de questions à poser à nos amis de la FADOQ...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Mme la députée de Chapleau.

M. Gautrin: ...et, s'il nous reste du temps, je pourrais revenir ultérieurement.

Mme Vaive: Merci, M. le Président. C'est vrai que je ne pose pas des questions souvent.

Madame, monsieur, à la page 4, vous mentionnez le taux de cotisation de 10 %. Et vous dites: «...il n'en demeurerait pas moins que les jeunes générations auraient encore l'odieux de payer plus pour obtenir une prestation équivalant à celle que reçoivent les bénéficiaires actuels.»

Nous avons rencontré le Conseil de la jeunesse du Québec. Et les jeunes, si j'ai bien compris, étaient d'accord à ce qu'ils cotisent. Et, pour eux, c'était une garantie d'avoir quelque chose au bout de la ligne.

Mais, même moi, j'ai toujours cotisé depuis 1970; avant ça, je ne cotisais pas. Et ça ne me fait pas peur qu'on m'exige dans le moment – parce que je n'ai pas fini de travailler, j'en ai encore des années à payer – de payer plus pour mes fils qui me suivront quant, eux, auront la chance de retirer. J'aimerais vous entendre là-dessus. Qu'est-ce que vous voulez dire exactement?

Mme Moir (Nicole T.): Bien, c'est bien sûr que les...

Mme Vaive: C'est comme je le perçois, moi, là.

Mme Moir (Nicole T.): C'est bien sûr que les jeunes auront à... Si on augmente les taux de cotisation, ceux-là qui vont avoir l'augmentation paieront plus que ceux-là qui ont cotisé à venir jusqu'à maintenant. Maintenant, nous autres, on fait le constat que, bon, bien, ils auront l'odieux de payer plus pour avoir la même chose, si les 65 ans et moins, ou ceux-là qui cotisent encore, là – je vais le mettre comme ça, sans mettre d'âge – sont d'accord à le faire, bon, chapeau!

M. Marcotte (Jean-Marie): Je pense aussi que... C'est parce que, malheureusement, on a effectivement des jeunes qui sortent de l'université, puis il n'y a pas de travail. Il n'y a pas de travail stable. Puis la personne rentre dans une usine... Personnellement, j'ai travaillé 38 ans et demi dans la même usine, et je ne sais pas s'il va y en avoir beaucoup de jeunes qui vont pouvoir faire la même chose que moi. Et, effectivement, quand on pense au niveau de pension, comme tu n'en as plus, tu ne peux plus te bâtir une pension. Quand tu es obligé de changer de travail, ta pension ne se bâtit pas. Et c'est ça qu'on dit: Ils vont avoir l'odieux... Et avec le principe: Il n'en reste plus dans la caisse, ils vont avoir ça à supporter.

Mme Vaive: Ce qui est malheureux, M. Marcotte, c'est que, nous autres, on a vécu dans une autre génération, et la mentalité des jeunes aujourd'hui... Ils ont vieilli avec la mentalité d'aller placer de l'argent encore plus que nous autres. Moi, je suis née durant la Deuxième Guerre. Il faut dire que les temps étaient maigres, et puis... Les jeunes aujourd'hui, ce n'est plus ça. Je sais bien que j'ai deux adolescents; bien, pas deux adolescents, mais deux fils...

M. Marcotte (Jean-Marie): Deux jeunes.

Mme Vaive: ...dans la trentaine, et, en fait, ils s'organisent assez bien puis...

M. Marcotte (Jean-Marie): Oui.

Mme Vaive: ...je suis contente.

M. Marcotte (Jean-Marie): Entièrement d'accord. Par contre, on a une génération boomerang. Les jeunes partent, ils vont à un travail et ils reviennent à la maison, et il y a beaucoup de parents qui vivent cette situation-là. Qui peut dire que son enfant est parti à 18 ans pour s'établir et travailler? Très peu, aujourd'hui. Souvent, à 20 ans, 21 ans, 22 ans et même 28 ans, il revient avec un enfant puis une séparation puis ainsi de suite, et c'est ça qui est malheureux.

Mme Vaive: Monsieur, j'aurais une petite question encore.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Oui, allez-y, Mme la députée.

Mme Vaive: Vous n'avez pas mentionné beaucoup – je l'ai lu, là – au sujet de la rente d'invalidité et de la rente du conjoint survivant. Est-ce que vous êtes d'accord que ces deux régimes de rentes là continuent?

Mme Moir (Nicole T.): On est d'accord qu'ils continuent, effectivement.

Mme Vaive: Oui.

Mme Moir (Nicole T.): Mais on ne l'a pas mentionné.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous remercie beaucoup. Madame, monsieur, merci pour la présentation et la préparation de votre mémoire. La commission ajourne ses travaux au mardi 5 novembre, à 15 heures. Merci beaucoup.

(Fin de la séance à 16 h 57)


Document(s) associé(s) à la séance