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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 31 mai 2001 - Vol. 37 N° 14

Consultations particulières sur le projet de loi n° 28 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures quarante-trois minutes)

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je vous souhaite la bienvenue. La commission, ce matin, se rencontre... la commission des affaires sociales est réunie pour procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 28, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant certaines dispositions législatives.

Est-ce que, Mme la secrétaire, il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vous donne l'ordre du jour. Après les remarques préliminaires, que nous écourterons, d'une quinzaine de minutes, afin de permettre à l'Association... c'est-à-dire, au Collège des médecins, qu'on entendra par la suite, du Québec... le Collège des médecins du Québec de se faire entendre, nous écourterons nos remarques préliminaires, du consentement des deux parties, d'une quinzaine de minutes, et par la suite, nous suspendrons à 13 heures pour reprendre nos travaux à 15 heures avec la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux du Québec, de même qu'à 16 heures avec la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec et, à 17 heures, l'Association des hôpitaux du Québec.

Remarques préliminaires

Donc, sans plus tarder, je vous rappelle que nous avons une quinzaine de minutes de remarques préliminaires. Donc, M. le ministre, vous avez 7 min 30 s et, par la suite, le porte-parole de l'opposition officielle aura également 7 min 30 s. Je vous cède la parole.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente, je vais donc tenter de m'exécuter prestement. J'aurai l'occasion de présenter les collaboratrices et les collaborateurs qui vont travailler avec nous pendant tout le temps de cette commission parlementaire sur le projet de loi n° 28, avec, bien sûr, le notaire, M. Pierre Gabrièle, le sous-ministre en titre du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Mme la Présidente, le projet de loi n° 28 s'inscrit dans la continuité des orientations qui ont déjà été prises pour la gouverne du système de santé et des services sociaux, continuité. Il faut maintenant apporter des ajustements requis ? des ajustements, Mme la Présidente ? des ajustements requis pour contrer certains problèmes qui se sont installés au fil des ans dans notre système. Des ambiguïtés doivent être levées, des rôles doivent être clarifiés, et nous devons renforcer la gestion et l'imputabilité de chacune des instances de notre réseau. Il ne s'agit pas, Mme la Présidente, d'effectuer de rupture avec le passé mais d'opérer des changements requis par la modernisation ? un mot-clé, la modernisation ? de la gestion d'ensemble de notre système. Et nous le faisons en tenant compte des acquis des dernières années en matière de régionalisation et de participation des usagers et de la population et des différents groupes actifs dans la communauté, pour employer une expression maintenant qui de plus en plus circule, appuyés sur les groupes constitués de la société civile.

La première intention du gouvernement avec le projet de loi n° 28, c'est de renforcer la régionalisation. Le projet renforce en effet le rôle des régies régionales et accroît leurs responsabilités. L'intention est aussi de conserver et développer davantage l'implication des administrateurs issus des différents milieux, au niveau économique, au niveau social, au niveau culturel, au niveau communautaire, qui se sont engagés au sein des conseils d'administration. Cette implication demeure essentielle et constitue une forme incontournable de participation à la prise de décision et un moyen de rester centré sur les préoccupations des personnes, des citoyens.

La consultation de la communauté demeure enfin aussi l'une des préoccupations les plus fondamentales véhiculées par ce projet de loi. Nous en tiendrons compte rigoureusement quand viendra le temps de former les différents conseils d'administration qui vont gérer le réseau des services de santé et des services sociaux aux niveaux local, régional et national.

Avant toute question de structure, nous poursuivons inlassablement un objectif d'amélioration de l'accès, améliorer l'accès aux services. Nous avons en conséquence besoin d'une modernisation de la gouverne, particulièrement au niveau local, là où les services sont offerts à proximité de la population. Nous devons nous donner les moyens de mettre en place une organisation de services locaux bien intégrés dans chaque territoire de CLSC, chaque municipalité régionale de comté, chaque arrondissement en milieu urbain.

M. le Président, c'est parce que nous sommes fiers de notre organisation de services de première ligne que nous voulons en renforcer la gestion. Nous voulons nous assurer que le regroupement des établissements qui offrent des services généraux à la population d'un territoire local se fasse avec l'objectif de faciliter l'accès à la population, faciliter l'accès à la population, accroître la disponibilité des ressources et améliorer l'intégration des services.

Mme la Présidente, les défis sont nombreux pour le réseau de la santé et des services sociaux. Au cours des prochaines années, nous devons résolument être centrés sur la préoccupation de rendre nos services médicaux et sociaux plus accessibles, là où ils sont requis, c'est-à-dire à proximité des lieux où vivent les personnes malades et en détresse qui ont besoin de nous. Dans cette démarche, nous ne pourrons atteindre des résultats tangibles sans la participation du plus grand nombre d'acteurs possible et la disponibilité d'outils de gestion plus adéquats.

Le projet de loi n° 28 constitue à cet égard donc un pas supplémentaire vers l'atteinte de nos objectifs de système en mettant en place des conditions de gestion qui vont faciliter la mise en oeuvre des orientations gouvernementales. La Commission d'étude sur les services de santé et les services sociaux, présidée par M. Michel Clair, a radiographié notre système, et ses conclusions sont limpides sur ce sujet. Ils ont remarqué certaines confusions dans les rôles et les responsabilités exercés par le ministère, la régie régionale et les établissements. Ils ont noté des ambiguïtés dans l'imputabilité des conseils d'administration, en particulier ceux des régies régionales pris entre, souvent, des orientations ministérielles à actualiser et l'organisation des services particulière à leur territoire. Ils ont constaté, ces commissaires, des différences dans les rapports entre les régies régionales et les établissements. Et, compte tenu de la complexité grandissante des tâches à réaliser, des lacunes ont été observées dans les capacités de gestion au sein des différents conseils d'administration et les améliorations populationnelles, sur une base populationnelle, qui peuvent être apportées avec... et qui sont inclus dans le projet de loi n° 28.

n (11 h 50) n

Devant ces problèmes, nous retenons la plupart des propositions de la commission Clair pour améliorer la gouverne du réseau de la santé et des services sociaux tant au niveau de la gestion de nos services qu'au niveau de la représentativité, mais aussi de l'imputabilité. Nous misons sur les acquis. Nous voulons solutionner davantage de difficultés. Nous prenons appui sur les recommandations de la commission Clair et nous agissons en gouvernement qui écoute et responsable dans le sens d'une modernisation, une modernisation de nos outils de gestion. Simultanément, nous allons renforcer l'imputabilité de la gestion à tous les niveaux du système et nous allons aussi développer une nouvelle voie pour assurer la contribution de la population des territoires locaux et régionaux.

Mme la Présidente, davantage de pouvoirs pour les régies régionales pour assurer davantage de possibilités au niveau de la forme de dispensation des services au niveau local, avec l'établissement qui est proche de la population, de nouveaux canaux pour s'assurer davantage de présence de la population dans les conseils d'administration des établissements locaux de santé et de services sociaux partout sur le territoire, davantage de responsabilités, davantage de pouvoirs, davantage de confiance.

Et nous allons aborder, Mme la Présidente, en conclusion, nous allons aborder cette commission avec une attitude d'ouverture à nos partenaires qui vont venir ici, pendant les prochaines heures, nous indiquer, suivant leur expérience, suivant leur relation avec les malades et les personnes en détresse, quels sont les éléments de notre système non pas centré sur les groupes d'intérêts, mais sur les malades et les personnes en détresse, qu'il est souhaitable d'améliorer.

Des auditions particulières et des consultations, ça ne vise pas à défendre à tous crins les propositions que nous estimons être les meilleures pour la modernisation de notre réseau de santé et des services sociaux. L'attitude du ministre, l'attitude gouvernementale en sera une d'écoute attentive et aussi de prise en considération des arguments qui nous seront soumis et, éventuellement, suivant le processus parlementaire, y introduire, si cela est l'objet d'une démonstration suffisante, des modifications qui pourraient être apportées. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Je prends les mots du ministre, ses mots de la fin, à l'effet que c'est dans un contexte, un climat d'ouverture qu'il va participer à ces travaux. Je dois cependant mentionner que, malheureusement, dès le début, cette ouverture est plutôt limitée; nous avions demandé des auditions générales, ça nous a été refusé, enfin ça a été refusé à la population québécoise. Il y a de nombreux groupes qui se sont adressés à la présidence pour être entendus; je ne ferai pas la nomenclature ici parce que, comme le temps file et qu'on veut entendre les groupes, le groupe qui est prévu à midi... je m'y arrêterai pas trop longtemps. Ne serait-ce que pour dire qu'il y a, dans la population québécoise, de nombreux insatisfaits par rapport à cette ouverture qui n'en est pas une, finalement, du ministre, qui a choisi de restreindre l'écoute des gens qui avaient des points de vue.

Quand on regarde le projet de loi n° 28, on l'a dit à plusieurs reprises, et puis c'est pas nous... nous ne sommes pas les seuls... La question... le ministre a dit un peu: Le projet de loi n° 28, c'est pour améliorer l'accès aux soins. Il a raison, le problème, c'est l'accès aux soins. Le problème, c'est que le projet de loi n° 28 ne fait absolument rien tant qu'à l'accès aux soins. Vous savez, ce n'est pas les bénévoles élus des conseils d'administration des établissements qui ont décrété les bonus de mise à la retraite pour les infirmières et les médecins, c'est pas les bénévoles élus des conseils d'administration qui ont décidé qu'on sous-financerait le réseau de la santé.

Les gens pensent, au Québec, maintenant, parce que ça fait un bon bout de temps que le Parti québécois martèle cette idée, qu'on dépense trop d'argent au Québec par rapport aux autres sociétés dans la santé. Or, en termes de financement per capita dans la santé, en 1994, on était au troisième rang au Canada; on est maintenant au neuvième; l'an passé, on était au dixième rang. Certains voudraient contester ces chiffres; les chiffres pour l'année 1999 sont les chiffres du ministère de la Santé lui-même, qui disaient qu'on était en dixième position.

Alors, moi, la compréhension que j'en ai, c'est qu'il y a de nombreux problèmes qui existent dans la gestion. Oui, il y a plusieurs choses à corriger, notamment, lorsqu'on parle des infirmières, il faut essayer de les dégager pour qu'elles puissent faire leur travail d'infirmière. Et puis, quand on nous promet, le 5 mars, qu'il y aura des employés de soutien qui vont être engagés par le gouvernement pour leur permettre de faire leur travail et qu'on s'aperçoit avec les crédits qu'il y a pas une cenne qui est prévue pour engager du personnel, on s'aperçoit que ce sont des vagues promesses qu'on nous fait. Le problème, c'est pas donc les bénévoles élus des conseils d'administration qui sont pourtant la cible choisie par le gouvernement présentement.

Le ministre a bien fait d'apporter avec lui le rapport Clair, il va sûrement nous dire que tous ses gestes sont posés en fonction du rapport Clair. Je vais quand même me permettre, je le ferai pas trop souvent, si le ministre utilise pas son volume trop souvent, mais de lui rappeler les propos de Michel Clair lui-même, qui disait ceci: «La participation des citoyens est un des piliers de nos recommandations. Nous suggérions que dans les... nous suggérions que, dans les grands hôpitaux, seulement deux des 13 membres du conseil d'administration soient nommés et les autres choisis par mode électoral. Nous n'avons jamais recommandé qu'ils soient tous nommés», s'exclamait M. Clair, hier, devant un auditoire plus que captif. Il aurait été intéressant que le ministre fasse partie de cet auditoire.

On entend souvent le ministre nous dire: Bien oui, mais c'est parce que les gens participent pas à ce processus électoral, un processus où la population peut s'approprier de ses établissements, s'approprier de ses milieux de vie en services sociaux et en santé. Oui, il y en a 1 % qui participait, oui, c'est un mode démocratique jeune, oui, on peut faire plus de publicité et plus d'information, oui, on peut amener la population à plus s'approprier encore ce réseau-là. Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Ce n'est pas en se disant: Il y en a 1 %, donc je peux faire zéro. Il faut dire: Il y en a 1 %, on peut faire mieux, et on va amener les gens à y aller. D'ailleurs, la démocratie dans la santé, c'est pas seulement le jour des élections, c'est tous les jours où, devant les conseils d'administration, il y a des gens qui se déplacent pour dire: Je suis pas d'accord avec ça, j'aimerais qu'on ait ce service-là; savez-vous que telle façon d'offrir le service est déficiente et ne correspond pas à mes besoins? La démocratie, c'est aussi offrir un forum permanent, officiel où il y a des représentants de la population, pas du ministre, qui écoutent cela.

Alors, le ministre nous dit que, nous, le Parti libéral, Michel Clair, l'Association des hôpitaux, tous ceux qui sont intervenus, parce qu'il y en a peu quand même qui ont dit que le ministre avait raison, tous ceux qui sont intervenus... nous, on voulait cadenasser la démocratie à 1 %. Il n'y a jamais personne qui a dit qu'il fallait qu'il y en ait juste 1 %. On a dit, au contraire: De 1, passons à 5, puis à 10, puis à 20; amenons les gens à s'y intéresser, montrons-leur qu'ils ont un pouvoir, revoyons le partage des responsabilités. C'était d'ailleurs ce que le rapport Deschênes proposait en 1996. Le rapport Clair demande de le mettre en vigueur. Pourtant, ça fait cinq ans que le gouvernement ne l'a pas fait et ne le fait pas encore.

La question finalement, c'est la suivante, elle se pose en termes assez simples: Est-ce que nous avons le choix entre une démocratie à 1 % qui fait une place pour chaque citoyen ou si on va plutôt préférer une partisanerie à 100 % qui remet chaque citoyen à sa place? C'est ça, la question du projet de loi n° 28: Une démocratie qui offre une place à chaque citoyen ou une partisanerie qui remet chaque citoyen à sa place? C'est l'enjeu qui est devant nous par ce projet de loi. Bien sûr, il y a d'autres dimensions, il y a des dimensions concernant la répartition des médecins, des dimensions concernant la santé publique, mais cette dimension fondamentale qui est au coeur d'une vision de société, qui dépasse même l'aspect santé...

Qu'est-ce qu'on a à offrir aux Québécois comme parti politique quand on veut faire oeuvre utile pour une société? Moi, je pense que le mandat premier qu'on a, c'est de donner de l'air au monde, de donner de l'espace au monde, de leur offrir une chance de participer, de parler, d'influencer, de participer à l'espoir qui naît. Pas juste une place pour payer, une place pour influencer. Ça existait. On me dira: Oui, mais ça peut exister de plus ample envergure. La réponse, c'est oui. Que faisons-nous avec ce projet de loi pour assurer une plus grande participation de la population? Rien. Rien. Le ministre dit qu'il y aura plus de représentants de la population qui seront sur les conseils d'administration. Pour y arriver, il dit que les gens qui vont être là seront des citoyens membres de la population. Bien oui, évidemment, ce sont des membres de la population, mais sont-ils des représentants de la population ou des représentants du ministre? Qui a le pouvoir de nommer? C'est le ministre. Et, quand tu as le pouvoir de nommer en vertu d'une loi du Québec, qui est la Loi d'interprétation, tu as aussi le pouvoir de destituer. Donc, tu as tous les pouvoirs. Le ministre a tous les pouvoirs. Quel est le pouvoir de la population? Avant, il y avait le pouvoir d'élire. Maintenant, il reste quoi? Le pouvoir de regarder les choix que le ministre va faire: Nommer un jour, destituer le lendemain. Est-ce que c'est comme ça qu'on bâtit une société? On le regarde sous l'angle de la santé aujourd'hui, mais posons-nous la question pour l'ensemble des gestes que le gouvernement du Parti québécois fait: Est-ce que c'est ce qu'on veut pour le Québec: un État, un gouvernement qui demande à ses citoyens de prendre son trou parce que lui sait mieux qu'eux ce qui est bon? Moi, je pense pas. Je pense que les Québécois aspirent à un gouvernement qui lui fait de l'espace, qui lui donne de l'air, qui lui permet de participer.

Le ministre nous a ouvert une toute petite porte, il a dit qu'il était pour écouter les gens qui viendraient. Nous allons l'accompagner dans cette écoute et nous verrons, au fil d'arrivée, s'il a été et s'il sera conséquent avec la promesse qu'il nous fait aujourd'hui. J'espère pour le Québec que ce sera de permettre à la population de continuer d'avoir le droit de parler, d'influencer, le droit d'espérer et pas juste le droit de payer. Merci, Mme la Présidente.

Auditions

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. le député de Châteauguay. Alors, je demanderais aux représentants du Collège des médecins du Québec de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît, et entre-temps, j'inviterais tous ceux et celles qui ont des cellulaires à bien vouloir les fermer pour le bon déroulement de cette Assemblée. Merci.

n (12 heures) n

Alors, Dr Lamontagne, président du Collège des médecins du Québec, nous vous souhaitons la bienvenue, de même qu'aux gens qui vous accompagnent. Vous aurez l'occasion de nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Et je vous avise que vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et, par la suite, nous aurons une quarantaine de minutes pour échanger entre les membres de la commission. Alors, je vous cède la parole sans plus tarder.

Collège des médecins du Québec (CMQ)

M. Lamontagne (Yves): Merci, madame. Mme la Présidente, M. le ministre, MM. et Mmes les parlementaires, je voudrais d'abord vous présenter, à ma droite, le Dr André Garon, qui est le secrétaire général adjoint aux Affaires externes au Collège des médecins du Québec, de même que le Dr Charles Bernard, qui est administrateur pour la région de Québec et qui est également membre du comité de direction au Collège.

Et je vous dirais d'entrée de jeu que, au nom du Collège, je vous remercie de nous donner l'occasion de faire valoir notre point de vue sur un certain nombre d'éléments qui sont abordés par ce projet, mais je vous dirais que, compte tenu du temps minime que nous avons eu pour nous préparer, nous avons choisi de nous exprimer principalement sur trois questions. La première, c'est la composition des conseils d'administration des régies régionales et des établissements. La deuxième, c'est l'octroi des privilèges accordés aux médecins, son approbation par la régie régionale et le lien avec la Régie de l'assurance maladie du Québec. Et finalement, le troisième point, les dispositions qui touchent les directeurs régionaux et le directeur national de santé publique.

Mais avant tout, nous tenons à vous rappeler l'une des principales recommandations que nous avions soumises il y a quelques mois à la Commission d'étude sur les services de santé et les services sociaux, la commission Clair, et il s'agit évidemment de la création d'une société d'État, un genre de régie d'assurances de santé, à qui nous souhaitions que soient confiés tous les mandats qui sont reliés aux opérations de l'assurance maladie du Québec. Il nous semblait alors, par ce moyen, que le ministre de la Santé pourrait donc se consacrer plus entièrement à ses fonctions essentielles qui sont la planification, la protection et l'évaluation, et ainsi donc il aurait été soulagé des pressions relatives aux opérations courantes. Bref, si vous voulez, de rameur, nous croyions et nous croyons encore que le ministre devrait être le capitaine du bateau. Il nous semblait également que, par ce moyen, le ministre poserait les conditions qui permettraient à la fois un peu plus de cohésion dans l'offre de services entre les régions et un peu plus d'espace à des initiatives tant publiques que privées visant à produire des services de santé beaucoup plus efficaces et plus efficients.

Finalement, nous avons bien noté que la commission Clair, dans le chapitre 5 de la partie I de son rapport sur la gouverne, était allée plus loin que nous en décrivant un modèle d'agence nationale à considérer. Aujourd'hui, nous notons que le ministre de la Santé et ses collègues du gouvernement ont choisi d'y réfléchir plutôt que de passer à l'action, un peu comme l'avait fait le gouvernement Lesage à l'endroit d'Hydro-Québec au début des années soixante. Et je vous avoue que, sur cet aspect du projet de loi, nous sommes un peu déçus. Et, à volonté, j'ai cité un peu Hydro-Québec parce que, pour nous, on appelait ça l'Hydro-Québec de la santé, si vous voulez, que ça soit quand même un peu plus petit que la structure d'Hydro-Québec quand même, mais je pense que c'était une image.

Une voix: Une Hydro-santé.

M. Lamontagne (Yves): Oui, c'est ça, une Hydro-santé, voilà.

Au niveau des conseils d'administration des établissements et des régies régionales. Évidemment, le projet de loi réorganise les conseils d'administration tant au niveau de leur composition que du mode de désignation de leurs membres. Malgré certains risques inhérents à l'étroitesse du lien entre les administrations régionales et le palier central, nous y voyons quand même des aspects très positifs. Commençons par ces derniers.

Manifestement, le ministre de la Santé et des Services sociaux reconnaît que l'efficacité des établissements et des régies régionales repose en grande partie sur celle de leur conseil d'administration. À la lumière de l'expérience, il propose que la composition de ces conseils soit revue notamment de manière à diminuer le nombre de membres et à augmenter l'expertise, et dans ce sens-là, on dit: Bravo! Je pense qu'on sait tous que, dans le management du nouveau millénaire, des grosses structures avec des gros conseils d'administration, c'est inefficace. On le savait avant, je pense, mais on l'appliquait pas beaucoup. Et dans ce sens-là: Bravo! Et également, je pense qu'il est bien connu, je dirais autant dans le public que dans le privé, que, si vous avez vraiment des gens compétents sur un conseil d'administration, c'est beaucoup plus efficace. Donc, bravo! dans ce sens-là, et nous sommes bien d'accord. Notamment, nous remarquons que la présence des professionnels de la santé, particulièrement celle des médecins ? dans notre cas, c'est évident ? au sein desdits conseils, sera plus significative, toutes proportions gardées, quant à leur nombre. En cela, le projet de loi rejoint certains aspects encore de notre mémoire à la commission Clair.

Ce sont à nouveau les modes de désignation des membres, par contre, qui nous inquiètent un peu. Au niveau des établissements, le projet de loi propose que la régie régionale désigne le médecin qui siégera au conseil d'administration de l'établissement. Au niveau du conseil de la Régie, le gouvernement y nommerait tous les membres, incluant le médecin membre de la commission médicale régionale. Nous tenons à vous souligner ce qui nous semble être un manque de confiance dans la capacité des groupes constituant chaque collège électoral de procéder eux-mêmes à un choix intelligent. Cette manière de procéder conduirait le ministre à avoir une certaine mainmise directe fort importante, je crois, sur l'ensemble du système de services. Ce choix comporte le risque de faire évoluer tout le système de soins en fonction, à mon avis, à notre avis, d'agendas de court terme essentiellement compatibles, bien sûr, avec des cycles électoraux. En outre, le risque de déresponsabiliser les administrations locales et régionales, d'identifier le ministre non pas comme l'ultime responsable, mais comme le premier responsable, surtout de ce qui va mal évidemment, parce qu'il nomme ou fait nommer par le gouvernement... et tout cela nous semble devoir être réévalué. C'est là une manière bien particulière de donner forme à l'imputabilité dont on parle beaucoup de ce temps-ci, surtout celle des élus.

Le lien avec le préambule que nous avions dit à la commission Clair, qu'il était souhaitable que le ministre conserve donc une certaine distance envers les fonctions plus exécutives d'achat et de production de services, d'où l'intérêt d'une société d'État... Et tel que présenté, le projet de loi finalement propose 16 sociétés d'État régionales directement branchées auprès du ministère. Pour le Collège, le pas dans la bonne direction, c'est celui d'avoir revu la composition des conseils d'administration; l'ennui, c'est de poursuivre la réflexion sur l'agence nationale. Bref, si vous voulez, il y a des filiales, mais le «head office» n'est pas à la bonne place. Et donc le risque évidemment, c'est de se tourner toujours vers le ministre pour tous les ratés du système, et ça, je pense que vous connaissez déjà bien ça, M. Trudel.

L'octroi de privilèges, maintenant, à un médecin et le lien avec la RAMQ. Donc, concernant ce point-là, c'est que personne ne met en doute le bien-fondé de cette procédure qui fait le lien entre les besoins de la population, les qualifications du médecin ainsi que l'organisation scientifique et technique de l'établissement. Les médecins sont également conscients que l'attribution des privilèges de pratique à leur endroit comporte en contrepartie un certain nombre d'obligations professionnelles relatives à la qualité des services, dont leur couverture, ainsi qu'à l'emploi des ressources. Leur niveau de conscience quant à l'importance d'une bonne planification des effectifs médicaux s'est d'ailleurs très accentué au cours des dernières années, et ça, évidemment, surtout depuis les mises à la retraite massives de médecins. Ils sont donc généralement d'accord à ce que des mesures efficaces soient prises pour faire respecter une planification lorsque celle-ci évidemment s'avère rigoureuse. Évidemment, le lien entre la planification des effectifs médicaux et le tiers payant représente à première vue un levier efficace pour faire respecter la planification.

Par contre, je vous dirais que trois catégories s'opposent principalement à ce sujet. D'abord, qu'en est-il de la justesse de cette planification? Dans une région considérée en surplus d'effectifs médicaux, évidemment tout étant relatif, un établissement en déficit d'effectifs comptera-t-il sur un plan d'effectifs approuvé qui lui permet un certain recrutement ou pas? Le médecin qui, en toute bonne foi ? un autre exemple ? a fait une demande de privilèges qui a été bien reçue par un établissement fautif, est-ce qu'il va être pénalisé? Est-ce que les autorités de l'établissement seront pénalisées pour avoir octroyé des privilèges à un médecin en deçà des effectifs qui étaient autorisés? Et enfin, si le médecin détenteur de privilèges en contravention du plan d'effectifs n'était plus remboursé pour des services médicaux qu'il rend, est-ce qu'il deviendrait en quelque sorte désengagé du système ou non participant, et ce, bien sûr contre son gré? Ses patients devraient-ils le rémunérer? Est-ce une forme de désassurance de services médicalement requis? On ne le sait pas. Le patient serait finalement, en bout de ligne, je pense, davantage pénalisé que le médecin lui-même.

n (12 h 10) n

Donc, par ces questions, le Collège ne désire évidemment aucunement signaler qu'il faille prendre à la légère les décisions relatives à la planification des effectifs médicaux. Bien au contraire, le Collège et la grande majorité des médecins sont conscients, encore une fois, de l'importance d'une planification judicieuse et respectée, et ce, par toutes les parties. Le Collège veut simplement signifier au ministre combien le sujet est aussi délicat qu'important. Il faudrait au moins avoir réponse claire à ces quelques questions pour aller de l'avant.

Et finalement, le directeur régional et le directeur national de santé publique. À cet effet, le projet de loi contient de nouvelles dispositions concernant la nomination, le mandat et la reddition de comptes du directeur régional de santé publique et la création par la loi d'un poste de directeur national de santé publique. L'image que j'en ai, c'est un peu comme le Surgeon General aux États-Unis. Le Collège des médecins, globalement, est d'accord avec ces précisions. Toutefois, il s'interroge sur l'article 147 visant à ajouter un article 372.1 concernant le pouvoir du ministre de confier à un autre médecin les fonctions et pouvoirs dévolus à un directeur de santé publique si celui-ci est empêché d'agir, s'il commet une faute grave ou s'il tolère une situation susceptible de mettre en danger la santé de la population.

Évidemment, nous comprenons bien l'esprit de cette disposition. Par contre, le directeur de santé publique, évidemment, peut commettre une faute, soit concernant la dimension professionnelle et médicale de son travail, une faute qui serait soit en rapport avec ses responsabilités de cadre, qui représente l'employeur, ou encore une faute qui serait reliée à un officier de santé publique qui agit au nom du ministère, ultime responsable de protéger la santé publique. Évidemment, une faute grave peut rejoindre plus d'une de ces dimensions à la fois, et le Collège vous soumet que, s'il s'agit évidemment d'une faute professionnelle, elle doit avoir été ainsi qualifiée par un système d'évaluation de pairs, tel que le prévoit le Code des professions. Le médecin de santé publique, qu'il soit omnipraticien ou spécialiste en santé communautaire, est tenu aussi de respecter le Code de déontologie qui est applicable à tout médecin membre du Collège. La régulation professionnelle côtoie d'autres formes de régulation sociale, dont celles qui relèvent du ministre ou du conseil d'administration de la régie régionale. Non seulement le Collège en est-il convaincu, du bien-fondé de ces différentes formes de régulation sociale, mais il tient à ce que la loi reflète bien cette situation.

Enfin, le Collège croit aussi qu'en matière de protection de santé publique le ministre doit s'appuyer sur l'expertise médicale pour prendre les meilleures décisions possible, et ce, dans l'intérêt du public. Ce n'est pas pour rien que la loi prévoit que le directeur de santé publique soit médecin. Outre sa formation médicale, ce directeur est nécessairement membre de son association professionnelle pour porter le titre de médecin. Donc, cette situation lui crée des obligations déontologiques et légales dont l'une est de répondre à son activité professionnelle à son ordre. C'est donc au Collège des médecins du Québec seulement, si vous voulez, de régler un problème s'il y a faute professionnelle.

En conséquence, si le ministre considère qu'un médecin directeur de santé publique a pu commettre une faute grave et que cette cause pourrait, en partie ou en totalité, constituer un accroc à des règles de bonne pratique de la médecine, bien, la loi devrait prévoir qu'il saisisse immédiatement le Collège des médecins à cet effet. Pour le Collège, les médecins de santé publique ne sauraient échapper, absolument pas, à la régulation professionnelle de tous les médecins en raison de leur domaine d'exercice.

Voilà donc, en conclusion, pour l'essentiel, si vous voulez, les commentaires que le Collège souhaitait présenter aux parlementaires relativement au contenu du projet de loi n° 28.

Avant de terminer, nous voulons profiter de l'occasion pour saisir les parlementaires d'une disposition existante de la Loi sur les services de santé et les services sociaux qui, nous semble-t-il, devrait être reconsidérée dans le but de se demander si elle peut servir à soutenir l'implantation des projets expérimentaux de groupes de médecins de famille. Il s'agit de l'article 434 de la loi. Dans la mesure où le législateur ne parle pas pour rien dire, nous considérons que cette disposition ne devrait pas sombrer dans l'oubli, mais plutôt être bonifiée s'il y a lieu pour faciliter la mise en oeuvre des groupes de médecins de famille.

Sur ce, évidemment, je vous remercie, au nom de tous mes collègues, à nouveau de nous avoir reçus et je souhaite que le point de vue du Collège vous soit utile. Merci, madame.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vous remercie, Dr Lamontagne, pour la présentation de votre mémoire. Nous abordons maintenant la période d'échanges. Donc, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Trudel: Merci, Dr Lamontagne, de votre présentation. Bienvenue, Dr Garon, Dr Bernard également. Je dirais tout de suite, des acteurs importants dans tout notre système de santé et de services sociaux au Québec, l'ordre professionnel des médecins du Québec, le Collège. Et puis, on peut prolonger notre regard un peu, Dr Lamontagne, et voir que, dans cette salle, il y a une continuité historique. Il y a le Dr Augustin Roy qui a longuement occupé le siège que vous occupez aujourd'hui et qui a suivi aussi, je dirais, toutes les mutations de notre système de santé et services sociaux, en commençant par le début de sa pratique, savez-vous où, docteur? Il a commencé sa pratique à Notre-Dame-du-Nord, au Témiscamingue, et voyez, il a été jusqu'au Collège et, aujourd'hui, d'autres personnes occupent cette responsabilité. Bienvenue, je trouve votre présentation, Dr Lamontagne, stimulante. Je la trouve stimulante, et je vais glisser aussi en même temps... je vais profiter de l'occasion pour présenter les collaborateurs et collaboratrices qui seront avec nous pendant toutes ces audiences.

Donc, en plus du sous-ministre en titre, M. Gabrièle, M. Pierre Gabrièle, il y a aussi Mme Mireille Fillion, qui est sous-ministre adjointe, également, à la planification. M. Marc-André Maranda, Mme Andrée Quenneville, M. Marc Gaudreau, ça, c'est l'équipe juridique qui écoute tous ces mots et dont les intentions pourraient prendre la forme de la plume juridique et, pour que l'intention soit portée par le mot, ils vont également ouvrir les écoutilles à cet égard, tout comme Marie-Josée Cantin, Dr Richard Massé, sous-ministre à la Santé publique, parce que vous avez dit des choses qui sont extrêmement importantes à l'égard de la santé publique, et les attachés politiques qui sont également avec nous, Pascale Fréchette, qui va être non moins attentive, et Sylvie Tremblay, qui est avec nous également, et les autres parlementaires.

Dr Lamontagne, je disais donc stimulante, votre présentation, quant à l'illustration de la place centrale du médecin dans notre système de santé et de services sociaux. J'y reçois là, donc, un reflet de l'importance que l'on doit non seulement reconnaître, mais montrer du professionnel de la santé au premier niveau, le médecin, dans l'initiation de la chaîne du «prévenir, soigner, guérir», et je me réjouis des mots que vous avez employés.

Une question sur cet élément que vous avez soulevé en relation avec la commission Clair, la création possible ou l'évocation d'une idée d'une agence nationale de la santé, appelons-la comme ça, notre «Hydro-santé». Assez fascinant, faut le dire, comme concept évoqué. Vous avez pas l'impression, Dr Lamontagne, que la création de ces agences, de ces grandes administrations élèverait le risque de nous éloigner de la préoccupation terrain, en confiant à ce que certains considèrent être des organismes moins directement imputables ? et je ne fais qu'une remarque... à l'usage au quotidien, c'est vrai. Comme disait l'un de mes prédécesseurs qui avait occupé ce siège-là, ici, et que le Dr Roy connaît bien aussi: Avant 11 heures, il faut éteindre quatre feux dans la santé et services sociaux. Sauf que, à l'inverse, est-ce qu'on s'éloignerait pas trop de ce contact nécessaire avec le terrain et la population si nous allions vers cette idée de l'agence nationale de la santé? Quelle est votre réflexion quand je pose la question sous cet angle-là?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Dr Lamontagne.

M. Lamontagne (Yves): Oui, merci, madame. Bien, moi, je vous dirais, M. Trudel... vous savez, j'aime beaucoup parler par slogans aussi, puis j'ai un langage parfois folklorique, vous le savez. Alors, je me gênerai pas parce que je suis ici... de changer de discours. Je vous dirais, je dis tout le temps qu'il faut sortir la politique de la santé pour faire des politiques de la santé parce que je pense que ça aiderait l'un et l'autre. Il faut donner à des gens... et c'est pour ça que, quand je parle de l'Hydro de la santé, il faut pas prendre une autre structure. J'haïs ça, les structures. Il faut pas faire une autre structure par-dessus une structure, mais il faut donner des mandats à des gens pour conduire une industrie, appelons ça comme ça. Mais il faut s'arranger pour mettre du monde qui sont compétents, qu'on les paye, mais qu'ils fassent que la job est faite. Et le ministère, lui, c'est qu'il devrait donner des orientations, hein. J'ai dit tantôt que de passer de rameur... le ministère, il devrait être le capitaine. Les grandes orientations, puis, après ça, vous mettez des gens.

n (12 h 20) n

Je vais vous prendre quelques images là-dessus. Je vous dirais, vous savez, quand il manque d'électricité dans le West Island ? je prends ça exprès, le West Island, je répète ? le ministre, il dort tranquille le soir parce qu'il y a un organisme qui s'appelle Hydro-Québec, puis il y a un gars qui s'appelle André Caillé, puis, lui, il a des gars en bas, puis ça se grouille, puis ça replogue à quelque part. Le ministre dort en paix. Moi, je trouve ça toujours plus... Puis je voyais encore il n'y a pas longtemps, en regardant la télévision, au fameux débat... moi, je veux dire, je trouve ça... je me demande pourquoi c'est le ministre qui doit répondre devant la population qu'il y a un bain qui a pas été posé dans un hôpital de Québec, puis je me demande pourquoi c'est le ministre qui doit répondre quand c'est les chirurgiens cardiaques à matin qui doivent négocier avec quelqu'un. Moi, je pense que le ministre, il aurait d'autres choses à faire que de s'occuper de la plomberie d'un hôpital puis de savoir ces affaires-là, et je pense que, s'il y avait un organisme qui était bien créé pour la gestion, pour gérer ça... Je veux dire, on les paie, eux autres, puis il faut que ça marche. À ce moment-là, les préoccupations sociales seraient bien différentes, puis ça serait pas réglé comme ça d'en haut, d'éteindre les feux. Moi, je pense pas, en tout cas dans ma tête là, qu'un ministre, ça doit faire ça. Les gens qui sont dans le milieu, par contre, il faut qu'ils aient le pouvoir de le faire et s'arranger pour que ça marche. Ça, c'est une autre paire de manches aussi. Donc, il y a des structures à changer. Il ne s'agit pas non plus de monter un supersystème et de prendre une bureaucratie qui est à gauche puis d'aller la remettre à droite, on va changer une piastre pour quatre trente-sous.

Mais vous savez, je vais vous donner deux autres exemples puis je nommerai pas des régions, mais des choses que j'entends dire puis que j'ai vues de mes yeux. Quand on est obligé de gérer ça au niveau politique, on est tenté aussi d'en faire, de la politique, avec ça. On ouvre une unité de traumatologie dans un comté; on donne un scanner dans l'autre comté. Avez-vous déjà vu ça un gars qui arrive, c'est un accidenté de la route, puis on va le mettre sur une van pour aller passer un scanner 60 km en bas? Politiquement, c'est super. Pratiquement, au niveau de la médecine, ç'a pas d'allure. Il y a une unité de psychiatrie qui a été bâtie dans un hôpital, ç'a été décidé, l'argent a été mis, ç'a été bâti. Tout ça, c'est avant vous, ça. Ç'a été bâti, tout ça. Quand l'unité est bâtie, y a pas de psychiatre dans la place, ils n'en attendent pas un avant un an et demi, puis les omnipraticiens qui sont là: Nous autres ? ils disent ? on peut pas prendre ça sur notre dos parce qu'il y a pas de psychiatre qui est là, et, en plus, ça, ç'a été bâti puis ? ils disent ? vous savez, elle répond pas aux normes, c'est au quatrième étage puis les vitres sont même pas incassables, on veut pas faire ça. Il y a comme quelque chose qui marche pas.

Mais, si c'étaient les gens du terrain justement, qui sont là pour faire que les choses marchent en fonction du malade... et c'est là que je vous rejoins dans le sens de représentativité des médecins, les gens de la base, pour dire: C'est de même que ça marche en bas. Un scanner, on peut pas mettre ça à 60 milles d'une unité de traumatologie. Quand tu le sais pas, tu peux le faire, mais, quand tu es en bas, tu le sais que ça se fait pas. Alors, c'est un peu dans ce sens-là, si vous voulez, de créer une espèce de nouvelle dynamique beaucoup plus active et d'enlever le ministère d'être toujours pris pour jouer, quoi? au négociateur, qui? un pourvoyeur d'équipement, qui? au plombier une journée, puis à l'électricien le lendemain, puis c'est qui qui crie le plus fort qui va avoir quelque chose en bout de ligne, parce qu'on sait toujours que ça remonte en haut puis que, finalement, si on branle la boîte un peu au Parlement, là il y a quelque chose qui va se passer. Mais ç'a pas d'allure, gérer un système de même. Alors, c'est ça, je pense, que ça éviterait. Je veux pas m'étendre là-dessus plus qu'il faut là, mais vous avez ma réponse.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci. M. le ministre.

M. Trudel: C'est tellement intéressant qu'on a envie de vous donner la permission de vous étendre, docteur.

M. Lamontagne (Yves): Mais, comme psychiatre, remarquez que j'oserais pas m'étendre, quand même, là. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Dr Lamontagne, d'ailleurs, je pense qu'il faut dire cela au passage, quant à moi, vous faites tellement bien d'utiliser des mots que le monde peuvent comprendre, d'utiliser des mots et des images qui nous amènent aux véritables réalités des soins aux personnes. Moi aussi, je vais vous raconter la mienne, de mon côté. J'ai fait un test auprès de 600 personnes en fin de semaine, juste leur demander ce que ça voulait dire, ça, CHSLD, hein. 1 %, 1 % des initiés savaient ce que des... et des malades dans un foyer pour personnes âgées, ça existe, hein, et puis des soins aux personnes, ça existe. Alors ...par démystification du langage, quant à moi.

Je dois vous dire cependant, docteur, dans cette intéressante analyse que vous nous faites, que ce système a déjà des fonctions qui lui permettent cela et qu'à notre avis il faut renforcer. Quand il arrive un problème grave à l'hôpital Sacré-Coeur, à l'urgence, c'est Pierre Villeneuve, de Montréal, qui, le premier, en termes de services régionaux, en est saisi... Marcel... pardon, Marcel. Pierre est un autre. Marcel Villeneuve, et, au premier niveau, Michel Larivière, le directeur général de Sacré-Coeur, et tout de suite se met en branle la réponse aux besoins des malades de Cartierville-Bordeaux, et aussi, plus large ? puisque vous l'avez très bien souligné ? parce qu'ils sont un centre de traumatologie tertiaire, doivent répondre à d'autres besoins au niveau régional et au niveau national. Et je reconnais avec vous que les mieux placés ? et je pense pas qu'il puisse y en avoir d'autres ? pour définir comment ça doit s'organiser, le service, la réponse médicale, c'est les médecins, c'est les médecins, avec les gens du territoire. Mais, lorsqu'on arrive dans la pratique professionnelle et la façon de faire... Quand je suis allé le dimanche matin... je suis allé, le dimanche matin, à 6 h 45, à l'urgence à Sacré-Coeur, puis que je me suis assis sur la première chaise, bien, l'infirmière, elle a diagnostiqué d'abord que j'avais rien, et, deuxièmement...

Une voix: Vous n'auriez pas dû rentrer là.

M. Trudel: Non, je n'aurais pas dû rentrer. Deuxièmement, le Dr Slythe m'a expliqué ça comme il faut: alors, comment ça doit fonctionner et, par exemple, la communication avec les étages au niveau des spécialistes. Et ça, il faut que les médecins soient présents davantage, comme les infirmières, comme le personnel clinique, dans nos conseils d'administration. C'est ça qu'on veut renforcer également au niveau de la modernisation.

Alors, j'ai deux, trois éléments de question, puis le temps file rapidement, ça fait que je ne veux pas rater mon coup. La désignation des médecins au conseil d'administration des établissements locaux, il est indiqué ici que le médecin ? dans le projet de loi actuel ? serait nommé par la régie régionale à partir d'une liste qui lui serait fournie par le département de médecine générale de la région concernée. Ce que j'ai bien compris en disant... ça, c'est un détour qui est trop grand là, c'est un détour qui est trop grand là. Vous avez l'air à dire: Simplifiez-nous donc ça là et demandez à la communauté médicale régionale concernée de désigner une personne. Est-ce que c'est ça que vous nous dites là?

M. Lamontagne (Yves): Je vais laisser répondre le Dr Bernard qui, lui, est encore plus dans le champ là-dedans.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, Dr Bernard.

M. Bernard (Charles): Dans le champ, effectivement, sur le terrain. Alors, effectivement, vous avez bien lu, je pense que le détour... pourquoi ne pas faire confiance au département de médecine générale, qui sont des élus puis qui se sont joint des experts dans la région, pour désigner les membres pour les CLSC et les CHSLD, alors, à ce moment-là, ça fait une imputabilité des médecins. On veut les responsabiliser, on veut qu'ils participent aux activités régionales ou du territoire, alors, de cette façon-là, on pourrait s'assurer d'une façon plus, je dirais, directe de leur participation et de leur intérêt pour l'organisation des soins. C'est l'objectif, je pense, ultime qui est fixé par ce projet de loi là.

Si je peux me permettre, aux autres niveaux, à la régie régionale, la même chose. Pourquoi ne pas laisser la CMR désigner un membre, qui n'est pas nécessairement le président de la CMR, mais qui pourrait être désigné par eux au conseil d'administration de la régie régionale. Et, si je fais un pas de plus, je pourrais vous dire que, dans les établissements, c'est-à-dire les CH, le problème est un peu différent, parce qu'un CH n'a pas nécessairement une vocation sur un territoire ou dans une région, souvent a des vocations suprarégionales et souvent a une culture et une expertise très particulières et des fois très pointues. Or, nous, on favoriserait que le Conseil des médecins et dentistes d'un établissement puisse désigner un médecin au conseil d'administration de cet établissement-là. Alors, on aurait trois façons de désigner des médecins, qui pourraient être plus représentatives et responsabiliser les gens qui travaillent soit sur le territoire, soit dans la région ou soit dans l'établissement en particulier. Je ne sais pas si j'ai été assez clair dans notre description.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, merci, Dr Bernard.

M. Trudel: Oui, vous avez été assez clair, quant à moi, là. Je fais le constat général suivant. L'élévation de l'implication, davantage d'implication de la partie clinique dans notre système de santé et services sociaux au niveau local, il faut absolument continuer sur cette ligne de force. Deuxièmement, je dirais, quant aux détails importants sur la désignation, ce que vous nous dites, c'est: Fignoler donc ça un peu, là, pour simplifier ça davantage, puisque c'est un médecin qui est soit dans le département de médecine générale du territoire concerné ou, quand on est dans l'établissement, par exemple l'établissement universitaire, on n'est pas qu'en présence, on n'est pas qu'en présence d'un médecin qui va offrir des services de nature, disons, locale. Il y a plus grande responsabilité. Ça fait que regardez donc ça que ça puisse être le CMDP, le Conseil des médecins, des dentistes et des pharmaciens, qui puisse être l'instance d'appui pour identifier la meilleure personne au niveau du corps médical. Cela nous donne une réflexion sur les petits fils à attacher, et nous sommes là pour ça, et vous voyez bien que la pente de notre esprit n'est pas dans une direction différente, comme dirait le Marseillais.

n(12 h 30)n

L'autre question, c'est à l'égard de la santé publique. Je vais à la fois poser une question et je veux être rassurant dans la question. Vous avez parfaitement raison d'indiquer que nous devons rendre étanche, à l'égard du directeur de la santé publique dans les 18 territoires québécois, l'étanchéité entre la responsabilité professionnelle, son exercice et ce qui est le pendant parfois des fautes. Il n'est pas question, jamais, ni dans l'esprit... et si la lettre disait cela il faudra corriger, que les fautes professionnelles ou que l'exercice de l'acte, la réalisation de l'acte professionnel, soit réalisé par d'autres que par le Collège des médecins du Québec, les pairs de ce médecin. L'indication donnée par ce projet de loi, c'est que ce médecin occupe deux fonctions: il est un administrateur d'une partie publique de la santé ou de la santé publique, et, par ailleurs, il exerce ses responsabilités professionnelles dans ce secteur d'activité.

Je vous indique donc qu'il n'y a aucune intention de faire en sorte que l'évaluation de l'acte professionnel en termes de continuité de l'exercice de la responsabilité de la Direction de la santé publique dans un territoire donné, tel qu'on le prévoit ici pour une situation particulière, n'impliquera jamais l'évaluation au niveau de l'acte professionnel réalisé. Et là-dessus nos gens, au plan ministériel et au plan de vos responsabilités, pourront avoir les conversations utiles et nécessaires pour s'assurer de cette étanchéité, j'en suis... il faut qu'on arrive à ce résultat-là.

Au niveau maintenant des médecins, les médecins et les privilèges qui sont reconnus au niveau de l'établissement. Vous dites: C'est au niveau de l'établissement que s'exerce d'abord la responsabilité du médecin, et on se pose des questions sur le rôle de la régie régionale dont l'un des pouvoirs supplémentaires sera de gérer le plan d'effectifs, des effectifs médicaux du territoire donné en termes d'approbation. En termes d'approbation.

Est-ce que, Dr Lamontagne, vous ne trouvez pas normal... Est-ce que vous ne trouvez pas normal qu'en termes d'articulation de la réponse aux besoins de la population en termes de soins, d'accès aux soins médicaux, il est normal de confier à une instance régionale la gestion du nombre et du plan d'affectation convenu entre les médecins et l'État, le soin donc de la gestion de ces ententes? Est-ce que vous trouvez ça... Vous trouvez pas ça normal que l'on implique la régie régionale en termes de nouveaux pouvoirs pour gérer le plan? Pas le faire, pas le déterminer, pour gérer le plan convenu au niveau des effectifs médicaux, et que la conséquence, c'est que si ce plan n'atteint pas les objectifs, que la régie d'État, l'Hydro-Québec de l'assurance maladie, l'Hydro-assurance maladie puisse, au bout de la ligne, être saisie de la... du respect ou du non-respect de ce plan, de cette planification des effectifs médicaux.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci. M. Lamontagne.

M. Lamontagne (Yves): Peut-être que le Dr Garon pourra ajouter quelque chose là-dessus. Je vous dirais: Je pense qu'il faut certains contrôles, je suis d'accord avec vous. Le problème des effectifs médicaux, vous savez, pour avoir été pendant des années sur la table de concertation... Déjà, on s'entendait pas là, ça fait qu'imaginez quand on va arriver de façon plus précise. Je pense quand même qu'il faut effectivement un certain contrôle là-dessus.

Si vous dites, par contre, qu'à ce moment-là, bien, s'il y a quelqu'un qui dévie ou qui défie la loi en dehors, bien, s'il y a un problème administratif qui a pas été réglé à cause... dans les effectifs, je pense pas que ça devrait être le médecin qui, lui, en bout de ligne, devrait être pénalisé financièrement ou dire: T'as pas d'affaire à travailler ici. T'es venu travailler ici puis t'aurais pas dû, puis... Y a quelqu'un en haut qui devrait dire: Tu peux venir ou tu peux pas venir, avant de partir, et non pas après coup, qu'il est rentré puis que là il devient fautif, puis on dit: Bien, comme c'est là, là, tu deviens, je sais pas, moi, hein, «freelance». Trouve-toi une autre job ailleurs. Va voir, va cogner aux portes des places où il manque des effectifs. Je veux dire, c'est pas une agence de voyage, là. À un moment donné, il faudrait peut-être que ça soit mieux articulé et de dire: Ou bien donc, d'avance on te dit que c'est plein, mais si tu rentres, c'est parce que c'est pas plein. Et vous savez comme moi que, même à venir jusqu'ici, l'homme étant ce qu'il est, l'humain étant ce qu'il est, qu'il y avait des gens qui étaient au-dessus de leur quota puis ça rentrait pareil, puis il y a sûrement encore des gens qui, même s'ils sont en dessus de leur quota, ça va rentrer pareil. Alors, faut essayer de refignoler ça le mieux possible pour que tout le monde soit satisfait là-dedans puis qu'il y ait quand même, peut-être, si vous voulez, un peu de crocs de temps en temps. Mais, même dans le passé, les mailles dans la chaîne étaient assez larges parfois, hein!

M. Trudel: ...refuser quelqu'un à table qui y a été invité par un établissement.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Dr Garon.

M. Garon (André): Oui. Bien, écoutez, comme vous l'avez remarqué, le mémoire vous propose d'examiner trois ordres de questions, trois catégories de questions. La première catégorie concerne la planification elle-même, où, le Dr Lamontagne l'a dit, on a une expérience qui est plus ou moins concluante en termes de justesse de cette planification-là. On aimerait être plus sûrs que toute action qui sera prise en fonction d'une planification puisse avoir des bases solides pour légitimer ces actions-là par la suite, les bases solides étant la qualité de la planification.

Le deuxième point, c'est de dire, c'est de vous dire: Écoutez, le médecin qui a fait une demande de privilège puis qui a été bien reçu, lui, il pourrait éventuellement être pénalisé s'il est par-dessus le plan, mais au niveau de l'établissement, il semble pas y avoir de contrepartie. C'est comme si on avait deux coupables puis un pendu, là. Il faudrait voir à... Est-ce que finalement, c'est bien comme ça que ça va fonctionner? Est-ce que, dans la mécanique, on va s'assurer ? puis est-ce qu'il y aura des dispositions légales à cet effet ? que le médecin soit bien conscient que la demande qu'il fait là, elle se situe en dehors du plan qui est déjà autorisé puis...

Le troisième ordre de questions est encore plus fondamental, je vous dirais, c'est: À partir du moment où il y a un lien étroit qui sert de levier pour faire respecter la planification entre une régie régionale et la Régie de l'assurance maladie, ça va conduire à quoi, ce lien-là, si le médecin ne peut plus, à terme, être rémunéré parce qu'on le considère par-dessus le plan? S'il est désengagé, y es-tu désengagé juste pour les actes posés à l'hôpital? Les patients qui pourraient être servis par ce médecin-là vont-ils devoir le rémunérer? Peut-être qu'il pourrait à ce moment-là continuer d'être dans l'hôpital et est payé par le patient. C'est-u ça qu'on veut? Probablement pas.

Au bout de la ligne, est-ce que c'est les patients qui vont être plus pénalisés, si eux-autres payent de leur poche? Au fond, on a toujours la logique, au Québec ? puis je vous dirais dans les autres provinces aussi ? c'est la loi du tout ou rien. C'est: Ou bien on paye le docteur à 100 %, on bien on le paye pas. On le paye pas parce que c'est désassuré, on le paye pas parce qu'il est désengagé. Ou bien on le paye plein tarif. Entre deux, il y a probablement de l'espace pour développer des leviers qui seraient efficaces puis qui nous permettraient de pas pénaliser les gens. Enfin, on vous le soumet, que si vous répondez pas aux questions qu'on vous propose, probablement qu'il y a des gens qui vont vous la reposer trois mois plus tard, là, tu sais.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vous permets une petite question très courte, parce que vous avez écoulé votre temps, M. le ministre, mais j'irai peut-être à la fin... j'allouerai un peu plus de temps à la fin.

M. Trudel: Et vous donnerez le même temps à l'opposition si...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, très courte.

M. Trudel: Il y a une phrase à l'égard du directeur de la santé publique, qui évoque autre chose, Dr Lamontagne: «Outre sa formation médicale, ce directeur est nécessairement membre de son ordre professionnel pour être médecin, pour porter le titre de médecin. Cette situation lui crée des obligations déontologiques et légales, dont l'une est de répondre à son activité professionnelle, à son ordre...» Et j'imagine que vous aviez envie de continuer la phrase: Et aux besoins des malades et du public.n(12 h 40)n

Dr Lamontagne, je peux pas passer à côté. Parce que vous êtes ici. Vous et moi, nous sommes des représentants du public. Il y a des chirurgiens cardiaques actuellement au Québec, qui sont des médecins, qui sont des médecins responsables de la santé de la population. L'Ordre des médecins... Je vous invite pas, Dr Lamontagne, à distribuer les blâmes, mais est-ce que vous considérez, comme plusieurs dans notre société, que ces choses-là sont difficiles à entendre en termes de responsabilité professionnelle lorsqu'on pense qu'il y a des personnes qui sont sur leur lit d'hôpital puis qui attendent des interventions, qu'on puisse évoquer ça dans nos relations professionnelles?

M. Lamontagne (Yves): Bien, écoutez, en terminant, là-dessus, je voudrais tout simplement que... Deux choses. Je pense que mon ami le Dr Doyle est un personnage flamboyant et qu'il est égal à lui-même. Je suis sûr qu'il a utilisé un mauvais terme quand il a parlé d'otages. Je sûr que le Dr Doyle veut le bien de ses malades et qu'en aucun lien les malades n'auront à payer pour les discussions que l'Association des chirurgiens cardiaques sont en train de faire.

Il est évident que s'il y a des erreurs ou que s'il y a des fautes professionnelles, bien évidemment, c'est évident que le Collège des médecins, qui est là d'abord et avant tout pour la protection du public et la qualité de la médecine, bien, il y a des instances qui s'appellent le syndic, qui est l'inspection professionnelle, qui sont là pour répondre si ça va mal.

Mais je vous dirais quand même: Ne devenons pas... Ne dramatisons pas plus qu'il ne faut. J'ai confiance que les chirurgiens cardiaques vont continuer de donner un bon service à la population. Néanmoins, je vous réitère justement que je trouve malheureux qu'une association ? parce qu'il y en a 34 associations de médecins spécialistes ? soit obligée de se servir des médias et des élus pour essayer de faire grouiller un peu le bateau. Ça va dans le sens que je vous disais tantôt: s'il y avait un autre système, bien, c'est pas de même que ça se passerait.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, Dr Lamontagne.

M. Trudel: ...Dr Garon, Dr Bernard.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Bien, écoutez, j'ai quelques questions sur le mémoire, mais comme vous parlez beaucoup de l'Hydro-santé, je me demande comment chacun d'entre nous réagirions si, alors que nous payons Hydro-Québec, de 8 heures à 11 heures le matin on nous coupait l'électricité, puis qu'elle revenait, mais qu'à 3 heures on la reperdait, puis, le soir, on ne saurait pas trop si elle était pour être là. Parce que, c'est facile de faire la comparaison avec Hydro-Québec: On paie pour, selon la consommation, et le produit est fourni.

Dans le cas des patients qui attendent sur des listes d'attente en chirurgie cardiaque, ils ont pas beaucoup de place pour critiquer. Je comprends que ? le rapport Clair en faisait beaucoup mention, d'ailleurs ? que c'est dommage que les patients, les dirigeants d'établissement ou des chirurgiens cardiaques pour qui, vous, comme le ministre, comme moi, comme tout le monde, on a beaucoup de respect puis qui font du très bon travail, soient obligés d'aller dans les médias, comme vous dites. Mais si c'est là où on en est rendu, si c'est la seule façon de faire changer des choses, pourquoi ne le feraient-ils pas?

La comparaison avec Hydro-Québec, dans un cadre de sous-financement... Et on peut toujours dire, puis c'est à juste titre, qu'il n'y a pas que l'argent, parce qu'il y a pas que l'argent effectivement, mais il y a aussi une question d'argent dans tout ça, et tout le monde souligne le sous-financement; ça donne des effets sur le terrain. Alors, il y a des gens qui viennent voir le responsable du sous-financement, et ça s'adonne que ce sera jamais l'Hydro-santé, ça; ça va être le gouvernement qui décide combien de fonds il attribue là-dedans. Je veux pas lancer une discussion sur comment le gouvernement a fait ses choix, on a la période de questions pour faire ça puis on a eu la possibilité de faire le débat aujourd'hui, mais simplement, dans le contexte actuel, dans un contexte où il y a pénurie par des décisions qui n'ont pas été prises par un Hydro-santé ni par des régies, ni par les établissements, ni par un gouvernement, il doit bien y avoir quelqu'un qui doit être redevable de ça. Ça ne doit pas être en catimini.

Moi, je pense que, peu importe la structure qui doit être faite, là où je vous suis, c'est qu'il devrait y avoir... on devrait revoir le partage des responsabilités. Vous parliez du bain thérapeutique tantôt, n'empêche que, voyons les faits: le bain a été acheté par un établissement parce qu'il avait un budget pour. Puis, c'était clair, c'est lui qui avait le budget, puis il n'a pas été installé pendant un an parce qu'ils se sont obstinés, les trois groupes ? l'établissement, la régie puis le ministère ? parce qu'ils avaient tous les trois un budget pour. Puis, c'est quand c'est devenu public qu'ils l'ont installé. Alors, ma réponse à ça, c'est que je suis pas sûr que c'est le projet de loi n° 28 qui va régler ça, parce que le projet de loi n° 28, c'est qui nomme qui, pas qui fait quoi. Et si on était plus clair dans le partage des responsabilités, peut-être qu'on se rapprocherait de votre idée où l'État doit être le garant, et pas en tout temps le gérant, et qu'il doit y avoir du monde qui sont sur le terrain pour prendre leurs responsabilités.

Ceci étant, je voulais juste vous dire que je trouvais qu'il était tout à fait normal et raisonnable à quiconque dans la société, qu'il soit un simple citoyen qui nécessite des soins pour lesquels il paie, qu'il soit médecin, qu'il soit infirmier, infirmière, qu'il soit député, qu'il ait le droit d'en saisir le gouvernement qui, en ce moment, dans le système actuel, a tous ces pouvoirs-là. On en reparlera lorsqu'il y aura un autre système et on verra s'il y a lieu d'en débattre à l'Assemblée nationale. Mais dans le cadre actuel, les décisions qui ont été prises à l'égard du financement, les décisions qui ont été prises à l'égard des pénuries qui se perpétuent... Encore l'an passé, la table des effectifs dont vous parliez souhaitait, demandait, recommandait 55 nouvelles admissions en médecine, le gouvernement en a choisi seulement 30. On ne peut pas en parler? Faut pas le dire? Faut pas que les citoyens sachent cette situation-là? Moi, je pense, au contraire, que la transparence, l'information ne fait jamais mal à personne si un gouvernement prend ses responsabilités, délègue les responsabilités et dit: Écoute, moi, j'ai pris ma décision; maintenant, c'est à lui de faire son travail, le mandat est là. Quand ça sera plus clair, peut-être que ça ira mieux.

Je reviens sur l'essence de votre mémoire. Vous nous parlez... Vous faites la différence entre la composition et la désignation des conseils d'administration; je pense que c'est à juste titre. Je veux m'attarder sur l'aspect de la désignation. Tant qu'à vous, si j'ai bien compris, vous faites confiance, notamment, pour le Collège, l'aspect médical, vous faites confiance aux gens du terrain, qui sont capables de se choisir entre eux par un mode électif, un mode de réunion, qu'ils font déjà, qui sont capables de se choisir quelqu'un et vous considérez que, dans le fond, c'est plus approprié comme ça. Ça crée une distance avec le gouvernement, avec le ministre. Vous trouvez ça plus approprié, vous êtes les premiers intervenants là-dedans: On est peut-être les meilleurs pour choisir qui d'entre nous va y aller. C'est ce que j'ai compris. Est-ce que vous considérez que cette logique doit être appliquée à d'autres groupes qui sont aussi représentés dans les conseils d'administration, soient-ils d'établissement ou de régie?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Lamontagne.

M. Lamontagne (Yves): Oui. Je vous dirais... Je peux pas parler pour les autres évidemment, mais, entre autres, je pense aux infirmières, infirmiers et infirmières. Et, d'ailleurs, c'est heureux qu'il y ait eu, aussi, là-dessus, comme des commissions régionales des infirmières, aussi. Je pense que les deux partenaires-clés, au départ, avec le patient, il faut pas se leurrer, c'est le docteur puis l'infirmière. Ça, c'était de même il y a 100 ans puis c'est encore de même. Et je pense que c'est là qu'il faut investir principalement.

Moi, je vous avouerai que je pense que ce qu'il faut chercher d'abord et avant tout dans tout conseil d'administration, c'est d'abord et avant tout la compétence. Ça, des fois, c'est dur à trouver, là. Pas que c'est dur à trouver, c'est dur d'aller chercher le bon monde pour mettre là. Puis il y a deux façons de le faire: c'est de s'arranger pour le faire élire ou on lui casse les bras puis on le met là. Il y en a pas 56 façons, hein? Alors, dans ce sens-là, je vous dirais, là, quand on peut regarder ça de deux façons... Leurrons-nous pas là, regardons la réalité comme c'est. Actuellement, il y a des bons d'élus mais c'est arrangé, ça avec, M. Fournier: il y a des groupes de pression qui font rentrer leur monde; il y a des associations qui font rentrer leur monde; il y a du syndicat qui font rentrer leur monde. Alors, que ce soit vous qui nommiez ou l'autre bord, c'est «framé» de toute façon. Mais comment on peut arriver à «framer» ça mais de la meilleure façon possible? C'est ça le problème.

Alors, vous savez, quand on dit qu'on traite... que vous allez tout mettre du monde, ça va tous être des pions qui sont là, bien, leurrons-nous pas, c'est déjà arrangé de même, là. Il y a bien du monde que c'est comme ça que ça marche.

M. Fournier: Est-ce que vous partagez pas le point de vue que, en ce moment, il y a quand même plusieurs groupes différents ou regroupements différents qui se trouvent à faire les nominations, tandis que... ou les élections, alors que, dans le mode qui est proposé actuellement, celui qui va placer le monde, c'est le gouvernement. Il va en rester juste un qui va être le grand dispensateur des...

M. Lamontagne (Yves): Bien, c'est pour ça que je vous dis que, entre autres, il y a nous autres; je pense, les docteurs vont être capables de vous dire: On pense que cette personne-là, comme docteur, est compétente puis qu'elle devrait être assise là. Puis on va lui demander si elle veut y aller. Puis, ensemble... On va jaser ensemble puis on va dire: Pensez-vous qu'il est assez compétent pour aller s'asseoir là? Je pense que les infirmières peuvent faire la même chose. Je pense qu'il y en a d'autres qui peuvent faire la même chose. Bon.

Et, sur un conseil d'administration, bien souvent, quand vous regardez dans l'industrie, ils sont nommés également. Je pense qu'il y a du monde qui peuvent être nommés s'ils ont une expertise tellement extraordinaire qu'on a besoin de ces gens-là. On noyaute-tu un conseil d'administration de même? Bien là, c'est une autre affaire. Mais je pense qu'il y a de la place pour les deux sortes de monde. Je vois pas pourquoi on ne pourrait pas nommer quelqu'un sur un conseil d'administration, qui a un nom extraordinaire, qui a un know-how extraordinaire, qu'il faut lui flatter un petit peu ? passez-moi l'expression ? la bedaine pour qu'il vienne là puis qu'on lui donne un mandat de quatre ans pour dire: Tu nous mets ça sur les tracks, ou quelque chose de même, qu'on va dire à cette personne-là: Bien, écoute, va donc faire du porte-à-porte pour te faire élire par les groupes sociaux. Moi, je pense qu'il faut être efficace puis il faut viser vers l'efficacité. Donc, je suis un peu ambivalent en disant: Ça peut pas être tout d'un côté puis ça peut pas être tout de l'autre côté. Comment on peut arriver à une espèce d'heureux partage pour retrouver, surtout en bout de ligne, la compétence puis que ça drive un peu dans le système? C'est ça.

M. Fournier: Je vous entends là, vous sentez vraiment que le pendule est passé d'un côté à l'autre et qu'il doit retrouver un équilibre. Je partage votre point de vue que le projet de loi n° 28 est passé d'un côté et est allé complètement de l'autre côté. Mais, quand on regarde tout cet aspect-là, vous parlez de ceux qu'on tente d'amener puis de dire: Venez sur le conseil d'administration. Est-ce qu'il n'y a pas un aspect aussi de rétention, qu'ils y trouvent un plaisir et que leur expertise soit utile? C'est l'aspect de la responsabilité de ces conseils d'administration. Auront-ils et ont-ils quelque chose à faire?

Je reviens au partage des responsabilités. Je vous en parle parce que, dans le fond, le rapport Clair nous rappelait le rapport Deschênes. Puis, dans le fond, la question est peut-être un peu plus: Mais qu'est-ce qu'ils font donc? Qu'est-ce que fait... Quel est le mandat, quel est le pouvoir du conseil d'administration? Quelle est l'étendue des décisions qui peuvent être prises à l'établissement? Quelle est l'étendue des décisions qui peuvent être prises à la régie et quelle est l'étendue des décisions qui peuvent être prises au central? Et, à cet égard-là, est-ce que vous trouvez que le projet de loi n° 28 donne une meilleure définition des partages de responsabilités, qui va amener des gens compétents à avoir le goût d'y aller parce qu'ils vont sentir qu'ils sont influents?

n(12 h 50)n

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Dr Lamontagne.

M. Lamontagne (Yves): Dr Garon.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui. Dr Garon.

M. Garon (André): Bien, on est conscients que la nature des responsabilités va créer ou non un certain attrait pour être nommé sur un conseil d'administration puis y participer pleinement. Cette question de responsabilité là est peu abordée, on file avec la loi de 1990 beaucoup. Toutefois, le lien, en vertu du mode de désignation, qu'on crée du local vers le régional et vers le palier central, fait qu'on pourrait, on risquerait, de notre point de vue, de déresponsabiliser un petit peu. C'est pas ce qu'on veut, c'est bien certain. Et il y a pas de contradiction, je vous dirais, avec la société nationale dont on parlait tantôt, dans la mesure où on était conscients, quand on a fait nos représentations à la commission Clair, d'une situation qui prévaut toujours, qui est l'incohérence entre la gestion des différents régimes d'assurance qu'on a au Québec: régime d'assurance maladie, régime d'assurance hospitalisation et autres régimes d'assurance: SAAQ, CSST, tout ça. Chacun a sa propre logique interne. Et quand on gère au niveau régional, on est conscient que, si on prend une direction donnée pour, au niveau de l'assurance hospitalisation, que la dépense aille dans une direction, dans un sens donné, et que, au niveau de l'assurance maladie, ça se traite ailleurs, à un autre niveau, et ça peut aller dans une autre direction, on voit tout de suite l'incohérence s'installer.

Nous, ce qu'on pensait et ce qu'on pense encore, c'est que, si on est capable de trouver un mécanisme unificateur qui va faire que cette cohérence-là, on va la retrouver certainement au niveau central ? en tout cas à tout le moins ? on va être gagnant, tout le monde. Et ça ne vise pas à déresponsabiliser les autres paliers, d'aucune manière.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Lamontagne (Yves): Je peux ajouter quelque chose, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, M. le docteur Lamontagne, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Lamontagne (Yves): M. Fournier, je vous dirais juste que ? puis je pense qu'il faut pas trop sortir du débat qui est ici ce matin ? mais ce qui est important... Vous avez parlé de sous-financement tantôt, hein? Ça fait des années qu'on parle de finances. Mais moi, je suis un peu tanné d'entendre parler de ça parce que, à mon avis, le problème, dans la santé, c'est pas juste ça, c'est un problème de gestion, puis il va falloir faire du ménage là-dedans, dans ces affaires-là. Puis, à un moment donné, je me dis: Il faudrait qu'on lâche de tout le temps parler des piastres, puis qu'on se regarde le nombril, puis qu'on décide de se mouiller là-dedans.

Il y a à peu près 2 000 lettres d'entente particulières qui sont reliées avec les médecins; il y a du ménage à faire là-dedans. Il y a 42 conventions collectives différentes dans le CHUM à Montréal, il y a de quoi devenir fou juste à regarder ça; il va falloir qu'on fasse du ménage là-dedans. Ça prend trois personnes pour la description des tâches pour ramasser un verre cassé sur un étage; va falloir faire du ménage là-dedans. Qui c'est qui va avoir le guts de le faire, ce ménage-là?

M. Fournier: Pensez-vous que le projet de loi...

M. Lamontagne (Yves): Deuxième des choses. Aïe, je suis en train de me pomper, là, ça va bien. Deuxième des choses...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lamontagne (Yves): ...quand vous parlez de l'Hydro-Québec, la ressemblance, Hydro-Québec, c'est comme la santé: Tu es obligé de rendre de l'électricité 24 heures par jour à tout le monde, pareil comme nous autres. Quand il y a du verglas puis qu'il y a une panne en quelque part, ils sont obligés de shooter fort, comme quand les urgences sont engorgées. La grosse différence, c'est qu'Hydro-Québec gère des revenus et des dépenses; puis nous autres, en santé, on ne gère que des dépenses. Vous voulez upgrader votre affaire dans votre hôpital? T'as un seul choix: coupe ailleurs! Tu veux acheter une bebelle? T'as un seul choix: coupe quelque chose. Mais les administrateurs d'hôpitaux, il y a du monde brillant là-dedans, là. Il doit y avoir quelques smarts là-dedans, là, hein? On en a même perdu un pour aller à Ottawa. Il était plus smart que les autres, lui, il est allé: 300 000 à Ottawa, hein!

Une voix: C'est pas une question d'argent?

M. Lamontagne (Yves): Mais c'est une question qu'il faut lâcher ce monde-là lousse un peu de temps en temps puis leur laisser de l'initiative. Bien, c'est ça, ce qu'une société peut permettre de faire davantage que quand il faut que tu checkes tes arrières puis demander 52 000 questions. Quand les gens sont allés à Plattsburgh, je suis allé voir ça. Le scanner, à Plattsburgh, ç'a pris 15 jours avant qu'ils l'achètent puis il était rentré dans l'hôpital. Essayez d'acheter un scanner au Québec en 15 jours puis de rentrer ça à quelque part. Même si vous avez le cash dans vos poches, vous êtes fait. Bien, c'est ça qu'il faut...

M. Fournier: Pensez-vous que le projet de loi n° 28 va régler ça?

M. Lamontagne (Yves): Bien, c'est pas... Je pense que c'est pas tout à fait là, là, mais ça me tentait de vous le passer; ça fait que je l'ai fait, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Je trouve ça plaisant. Le gars qui est parti à Ottawa, lui, il est parti parce qu'il avait une meilleure paye là-bas, puis...

M. Lamontagne (Yves): C'est pas juste une question de paye, M. Fournier, pas du tout.

M. Fournier: Dans l'être humain ? parlez-en ? avec ce qui se passe actuellement, là, tout le monde cherche à avoir des meilleurs outils. Ça concerne entre autres la qualité de vie, de la rémunération, de l'encadrement, d'avoir du monde autour. Ils demandent qu'il n'y ait pas de décisions qui sont prises pour mettre les gens à la retraite. On peut faire, quand on regarde les sommes qui sont investies dans la santé, on peut faire des comparables, Regardez avec les autres autour de nous. Quand on passe de troisième position à la neuvième, on peut dire peut-être qu'il y a un petit correctif qui peut être apporté là. Je vous demande pas qu'on soit les meilleurs dans le monde; juste arriver dans la moyenne, ce serait déjà pas pire, d'arriver dans la moyenne canadienne. Je pense que les Québécois aimeraient ça.

Ça veut pas dire, je l'ai dit tantôt, ça veut pas dire qu'il faut pas regarder la gestion, les décisions qui ont été prises de mettre les gens à retraite puis de fermer des hôpitaux pendant que maintenant les administrateurs d'hôpitaux, dont vous avez bien raison de souligner le professionnalisme, disent, à Maisonneuve-Rosemont: S'ils n'avaient pas fermé les hôpitaux autour de chez nous, on serait pas pris avec ces affaires-là. Je veux bien vous entendre, mais j'entends d'autres monde aussi, puis ç'a de l'air qu'il y a des décisions qui ont été prises, qui nous amènent à un niveau où on est par rapport aux autres. Alors, sous-financement.

Écoutez, je sais pas si vous avez vu ça, l'Association des hôpitaux du Québec ? ça doit pas être des gens qui sont complètement déconnectés de la réalité ? ils disent que, «cette année, les budgets ne leur permettent pas de rencontrer les coûts de système». Y auront pas beaucoup de facilité pour offrir les services. Vous, vous dites: Ben, oui. c'est correct de même, c'est une question de gestion. Je partage pas votre point de vue. Moi, je pense qu'il y a entre autres un problème de gestion et qu'il y a aussi un problème de financement, et je pense qu'on doit ? je pense pas que c'est votre position ? je pense qu'on a le droit de le soulever, qu'on a le droit de dire au gouvernement qu'il doit travailler sur les deux. Je pense que le 28 règle pas ça.

Je vais vous amener sur une autre question, si vous me permettez, parce que le temps est court. Vous avez parlé du directeur national de santé publique et vous l'avez comparé au Surgeon General aux États-Unis, quelque chose comme ça. Je regarde l'article 105 du projet de loi qui nous amène un nouvel article qui dit: «Le gouvernement nomme, pour conseiller et assister le ministre et le sous-ministre dans l'exercice de leurs responsabilités en santé publique, un directeur national de santé publique qui occupe un poste de sous-ministre adjoint.» Parlez-moi un petit peu du Surgeon General aux États-Unis. Est-ce qu'il n'est pas à une certaine distance de celui qui le nomme, qu'il a une certaine indépendance et que, au contraire de celui qui est là...

M. Lamontagne (Yves): ...mais effectivement le Surgeon General est complètement indépendant de tout ce qui était...

M. Fournier: Est-ce que vous croyez qu'il serait utile...

M. Lamontagne (Yves): Moi, j'aime ben ça, l'indépendance, remarquez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Oui. Est-ce que vous croyez que ce serait utile que le directeur national de santé publique soit à une certaine distance, ait une certaine indépendance par rapport au ministre? C'est ça la question.

M. Lamontagne (Yves): Ben, je trouve... Vous savez, quand c'est en médecine, aussitôt que vous êtes rattaché à un cadre administratif puis que vous avez un boss qui est un administrateur, ben là, la couverte peut tirer de temps en temps, puis surtout quand on arrive dans les systèmes de santé publique qui peuvent être parfois compliqués. J'entrerai pas dans les détails, mais qu'on pense juste à la méningite récemment. Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Ben, là, il est supposé y avoir du monde en santé publique qui sont supposés d'avoir appris le know-how, comment ça marche, puis qui se disent: Bah! Ou bien non: Ah! c'est dangereux, on vaccine tout le monde. Ou non, on va attendre, faire attention à ça, à ça, à ça. Ces gens-là sont supposés avoir le know-how pour faire ça. Puis je pense que c'est à eux autres... qu'ils devraient prendre la décision en bout de ligne de faire ça ou de décider de faire ça. S'ils se mettent les deux pieds dans les plats après, bien, ça, ça revient à revenir comme un peu à l'imputabilité. Si t'as pas pris la bonne décision, bien, là, c'est toi qui te feras taper sur les doigts. Tu perdras ta job, on te mettra dehors ou quelque chose comme ça. Mais je pense qu'il faut... La médecine, c'est une affaire en dehors des cadres, si vous voulez, et je peux pas décider comme médecin de dire: Bien, là, pousse pas trop, là ? faut pas charrier, là ? mais pousse pas trop sur la vaccination parce que ça va me coûter 10 millions, tu sais. Ou encore: Donnes-y la claque parce que ça va être bon électoralement. Je pense qu'il faut pas qu'on embarque là-dedans, les docteurs.

M. Fournier: En vous entendant, puis en vous écoutant, puis en voyant votre mémoire, puis en regardant l'article qui est là... Parce que, nous, notre travail voyez-vous, c'est d'écouter les gens puis essayer de voir, quand on va le voter, si c'est correct ou pas correct. Le projet de loi dit clairement que le directeur national de santé publique va occuper un poste de sous-ministre adjoint, sous le sous-ministre, sous le ministre. Est-ce que vous trouverez que c'est suffisamment à distance du ministre?

Une voix: Un de mes commentaires...

M. Lamontagne (Yves): Bien, ça, je saurais pas vous répondre très clairement. Je vous dirais: La seule affaire là-dedans, c'est que c'est quasiment la première fois depuis des années que j'aurai pas vu un docteur nommé sous-ministre adjoint. Hein? Je veux dire, ça fait assez longtemps que vous nous avez sacrés dehors. Je veux dire, aïe! c'est au bout, ça! Moi, tant qu'à moi, trois ou quatre sous-ministres adjoints. Gênez-vous pas pour nommer des docteurs, mais laissez-leur faire la vraie médecine. Dans ce sens-là, je trouve ça super pété.

M. Fournier: Je vous repose la question. Il est sous-ministre adjoint... Je veux qu'on s'attarde au projet de loi même si ça vous tente peut-être pas de répondre à la question...

M. Lamontagne (Yves): Bien, vas-y, André.

M. Fournier: Il est sous-ministre adjoint. Donc, il est sous le sous-ministre qui, lui, est sous le ministre. Je vous pose la question. Vous recherchez l'indépendance, vous trouvez que c'est bon. Je vous pose une question qui est assez correcte, je pense, là.

M. Lamontagne (Yves): Il a un peu plus de pouvoir que les docteurs en ont actuellement. Ha, ha, ha!

M. Fournier: Je veux juste savoir si vous trouvez qu'il est suffisamment indépendant?

Une voix: Une chance que Doyle, c'est flamboyant, parce que...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Dr Lamontagne, est-ce qu'on peut laisser poser la question, s'il vous plaît, et par la suite vous pourrez répondre? On va laisser poser la question et vous pourrez répondre.

M. Fournier: Je pense que la question a été posée, peut-être que...

n(13 heures)n

M. Garon (André): Bien, c'est déjà, je dirais, ce que le projet de loi propose, une amélioration par rapport à la situation actuelle. C'est plus comparable à ce qu'on appelle dans le jargon ontarien un «chief medical officer» qu'un «surgeon general», et qu'on puisse avoir, de manière statutaire, la nomination d'un médecin dans ce poste avec tel genre de qualification puis qui, dans une autre loi par la suite, la Loi sur la protection de la santé publique, aura des responsabilités claires sur sa tête, nous, on trouve que c'est une amélioration substantielle par rapport à la situation présente. Est-ce qu'on devrait aller beaucoup plus loin pour se rendre vers le Surgeon General, ce qu'on connaît aux États-Unis? En tout cas, peut-être qu'il y a une étape à franchir, là, essayons-la.

M. Fournier: La question a été posée: Est-ce qu'on devrait? C'est ça, ma question. Vous semblez parler qu'il faut une grande indépendance. Alors, je vous pose la question: Souhaitez-vous une plus grande indépendance pour le directeur national que ce qui est ici? Vous m'avez pas répondu, là.

M. Garon (André): À partir du moment où on vous dit: Si, au plan professionnel, on s'assure qu'il est imputable à l'endroit du Collège des médecins, l'indépendance qu'on recherche, nous, au plan scientifique et professionnel, on va la garantir par là. Alors, si on n'a pas ça, ben là, on se pose des questions.

M. Fournier: C'est juste malheureux, le temps est écoulé, mais j'aurais aimé une meilleure analyse. Peut-être, si vous avez le temps, au cours des prochaines semaines... Ça m'intéresse beaucoup de savoir votre point de vue, du Collège des médecins, sur le libellé de l'article. Parce que, dans le fond, notre travail c'est sur les articles de loi, hein. Alors, ici, on va en faire un sous-ministre adjoint. J'ai cru comprendre que vous souhaitiez qu'il y ait une distance. Je suis pas sûr, avec les autres réponses. Si vous y repensez puis si vous pouvez nous communiquer une réponse là-dessus, ça m'intéresse beaucoup. Je pense qu'on pourrait peut-être profiter de votre collaboration pour bonifier le système de santé, la façon dont on gère. Merci.

M. Lamontagne (Yves): Y a toujours moyen d'en parler au Parlementaire, vous savez, M. Fournier.

M. Fournier: Écrivez-nous, si vous ne pouvez pas revenir, là, y a pas de problème, on va vous lire.

M. Lamontagne (Yves): Des fois, le téléphone, c'est encore meilleur.

M. Fournier: Les écrits restent!

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, Dr Lamontagne, Dr Garon et Dr Bernard, nous vous remercions, tous les membres de la commission vous remercient pour la présentation de votre mémoire et...

M. Trudel: Merci, docteurs. Vous entendre, cela nous réconcilie avec un certain corporatisme.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vous remercie et j'ajourne les travaux de la commission à 15 heures, cet après-midi, au même endroit.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

 

(Reprise à 15 h 9)

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): S'il vous plaît, je vous demanderais de prendre place. Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Alors, la commission des affaires sociales reprend ses travaux afin de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 28, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

n(15 h 10)n

Cet après-midi, comme premiers intervenants, nous rencontrons les représentants de la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux du Québec. Alors, M. Gilbert Barrette, président du conseil d'administration, je vous cède la parole et j'apprécierais si vous pouviez nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Et, par la suite, vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire.

Conférence des régies régionales de la santé
et des services sociaux du Québec

M. Barrette (Gilbert): Merci, madame. C'est avec plaisir que nous sommes ici cet après-midi. Mmes et MM. les députés membres de la commission, j'aimerais vous indiquer les gens qui sont avec moi, vous les présenter: à mon immédiate gauche, M. Jean-Marie Bouchard, de la Régie régionale de Québec; suivent Mme Kathleen Weil, présidente de la Régie régionale de Montréal-Centre, ainsi qu'à l'extrémité Mme Lili Simard, présidente du conseil d'administration de la Régie régionale du Saguenay?Lac-Saint-Jean; à ma droite immédiate, M. Paulin Dumas, vice-président exécutif à la Conférence des régies santé et services sociaux, ainsi que Me Pierre Larrivée, conseiller juridique à la Conférence des régies santé et services sociaux. Aussi m'accompagnent... il y a d'autre monde, mais je vais en nommer deux, si vous me permettez, particulièrement: M. Dan Mauger, président du conseil d'administration de la Régie de la Côte-Nord, ainsi que M. Yvon Blanchet, vice-président de la Régie de Lanaudière. Donc, ces gens-là ont pu se rendre disponibles. Il y en a d'autres qui sont au congrès de l'Association des régions, dans les Laurentides, donc c'est un partage d'activités.

Donc, je tiens d'abord à vous remercier, à remercier la commission parlementaire des affaires sociales de nous avoir invités à venir vous faire part de notre position face au projet de loi n° 28. D'entrée de jeu, qu'il me soit permis de vous signaler que les messages que nous portons aujourd'hui sont le fruit d'un large consensus, une presque unanimité, des instances régionales et que plusieurs citoyens et groupes sont d'accord avec nos propos. Je vous souligne toutefois que la Régie régionale de la Montérégie n'a pas participé aux travaux de la Conférence. Aujourd'hui, c'est à titre d'élus redevables à leur population respective et à l'Assemblée nationale, par cette commission, que nous nous présentons devant vous.

Je dois vous avouer que nous avons été fort surpris et profondément déçus lorsque nous avons lu le projet de loi n° 28, d'autant plus que le rapport de la commission Clair énonçait à quel point les personnes et les groupes aux quatre coins du Québec tiennent à la régionalisation, à la décentralisation et à la démocratisation de l'administration des services de santé et des services sociaux. À l'opposé, le projet de loi, tel que présenté, transformera l'entité régionale représentative et responsable en une direction régionale du ministère. Dans sa facture actuelle, le projet de loi n° 28 propose tout simplement un modèle de déconcentration administrative sous le couvert d'un discours de promotion de la régionalisation. Si le gouvernement a choisi de créer des sociétés d'État en région, nous aurions préféré qu'il l'affirme clairement, sans aucune ambiguïté, même si, pour les régions, cette orientation est inacceptable. Nous devons nous inscrire en faux contre un projet de loi qui propose un modèle de décentralisation administrative.

Nous ne faisons pas le même constat d'échec que le gouvernement. À notre avis, les années de régionalisation décentralisée ont permis d'apporter des solutions plus concrètes et plus adaptées aux problématiques des populations et des individus. Le mode actuel de composition des conseils d'administration, bien qu'imparfait, a tout de même le mérite d'avoir permis l'expression des citoyens et la participation de l'ensemble des partenaires à l'accomplissement des lourdes responsabilités des institutions. Ces mécanismes de formation des choix sociaux ont contribué substantiellement à améliorer la capacité gouvernementale de l'État québécois à réduire les possibilités de conflits, à garantir la considération de l'intérêt public et du bien commun et à réduire substantiellement les écarts interrégionaux. C'est d'ailleurs l'appréciation que nous recevons à chaque fois que nous nous présentons devant cette commission depuis une dizaine d'années.

Convaincues des gains significatifs qu'une instance responsable et représentative de son milieu apporte à l'administration du régime, les régies régionales recommandent au gouvernement de poursuivre le projet de décentralisation commencé en 1991. Les dispositions du projet de loi mettent en péril, en bonne partie, des acquis obtenus depuis l'instauration du régime en 1972. Elles évacuent la représentativité et la responsabilité de l'instance régionale. Le projet de loi devrait plutôt apporter des mesures qui permettraient de consolider les principes des commissions Castonguay-Nepveu et Rochon en matière d'implication des citoyens dans l'administration et l'organisation des services de santé et des services sociaux.

Nous croyons que l'objectif gouvernemental de clarifier la ligne de gouverne ne trouve pas son sens dans la désignation des membres des conseils d'administration, ni dans la nomination des directeurs généraux, ni dans la constitution d'une nouvelle instance comme le Forum de la population. En proposant ce projet de loi, le gouvernement priorise des changements surtout structurels qui sont, à notre avis, pas urgents. Nous nous serions attendus à un projet de loi qui clarifie les responsabilités de chacun des niveaux décisionnels et qui insiste, entre autres, sur les systèmes d'information, la reddition des comptes, les mécanismes de consultation de la population et les mesures permettant d'évaluer la satisfaction de la clientèle. Voilà ce qu'il faut, selon nous, clarifier prioritairement.

Les régies régionales sont convaincues des avantages de la décentralisation et souhaitent voir le législateur poursuivre dans cette voie. C'est pour sauvegarder la présence et la participation du citoyen à la constitution de ces instances démocratiques que nous intervenons devant la présente commission. Même si cela ne constitue pas notre premier choix, nous proposons des modifications majeures à votre projet de loi. Elles visent à préserver une cohérence de l'administration, permettant ainsi aux citoyens et aux décideurs de se retrouver à l'intérieur d'un système gouvernemental. Les propositions que nous vous déposons constituent les conditions minimales acceptables qui permettront de conserver la vision de la régionalisation.

Au regard de la composition des conseils d'administration des régies régionales, nous aurions voulu collaborer avec le gouvernement pour améliorer le processus électoral. Mais, devant cette impossibilité, nous ne pouvons pas laisser le gouvernement sanctionner la disparition des élections.

Pour les régies régionales, en considérant les réserves que nous exprimions dès le départ, trois conditions incontournables doivent se retrouver dans le projet de loi: la participation des groupes du milieu et de la population à la constitution des instances décisionnelles, une cohérence à toute épreuve dans le mode de désignation et un véritable conseil d'administration responsable investi des pouvoirs inhérents à sa mission. En ce sens, sans la partager mais en tenant compte de la logique gouvernementale, nous recommandons les ajustements suivants.

Les milieux régionaux doivent contribuer de façon significative à la constitution du conseil d'administration. Ainsi, il faut que le gouvernement choisisse parmi des candidats qui apparaissent sur des listes issues de consultations auprès des organismes de la région. Nous demandons donc que le libellé de la loi soit explicite à ce titre.

La participation des différents collèges électoraux actuels doit être conservée et le facteur de compétence de gestion doit être un des critères que le gouvernement considère lorsqu'il désigne les administrateurs. Les autres critères sont: la représentation de toutes les parties de territoire, la représentation équitable des femmes et des hommes, les caractéristiques linguistiques, ethnoculturelles, socioéconomiques et démographiques.

La cooptation par les membres désignés doit être conservée afin de pouvoir maintenir un équilibre que le mode de désignation n'aurait pas permis d'assurer.

Nous adhérons à la proposition de réduire le nombre de membres au conseil et proposons la répartition suivante: quatre personnes choisies à partir d'une liste fournie par les conseils d'administration des établissements représentant les quatre grands secteurs de mission, soit les centres hospitaliers, les CLSC et les centres d'hébergement et de soins de longue durée, des centres jeunesse et des centres de réadaptation ? j'aimerais faire remarquer, en passant, que Montréal-Centre n'a pas d'établissements fusionnés CLSC-CHSLD, donc ce serait à ne pas négliger; deux personnes choisies à partir d'une liste fournie par la ou les municipalités de la région; une personne choisie à partir d'une liste fournie par les établissements publics du milieu de l'enseignement; une personne choisie à partir d'une liste fournie par les organismes représentatifs du milieu communautaire de la région; une personne choisie à partir d'une liste fournie par les organismes représentatifs du milieu syndical; une personne choisie à partir d'une liste fournie par les groupes représentatifs des organismes socioéconomiques et des groupes intéressés aux services de santé et aux services sociaux de la région dont les conseils régionaux de développement.

n(15 h 20)n

De plus, dans les régions où il y a une faculté de médecine, s'ajoute une personne choisie par le gouvernement à partir d'une liste fournie par l'université. Dans le cas de la région de Montréal, une personne est choisie à partir d'une liste fournie par l'Université de Montréal et une autre personne est choisie à partir d'une liste fournie par l'Université McGill.

Enfin, s'ajoutent à ce conseil le président de la commission médicale régionale, le président de la commission infirmière régionale, deux personnes cooptées et le directeur général de la régie régionale.

Au regard du Forum de la population, nous présumons que l'objectif poursuivi par le gouvernement consiste à laisser une place d'influence aux citoyens dans l'élaboration des décisions. Évidemment, nous partageons d'emblée cette préoccupation d'impliquer les citoyens dans l'administration. C'est pourquoi nous nous expliquons mal que le mode de désignation proposé retire le citoyen de la table des décideurs qu'est le conseil d'administration de la régie régionale. Nous voulons toutefois attirer l'attention des parlementaires sur le fait que, dans la facture actuelle du projet de loi, nous croyons que ce Forum risque de briser la logique invoquée par le gouvernement et pourrait provoquer de la distorsion au niveau de l'imputabilité du conseil d'administration.

Le Forum prévu dans le projet de loi pourrait avoir pour effet de dépouiller le conseil d'administration de la régie régionale de l'une de ses responsabilités... de l'un de ses rôles fondamentaux qu'est la consultation de la population. Ceci risque de diminuer la légitimité et la crédibilité de l'instance régionale dans son milieu et sa sensibilité à la prise en compte des opinions des citoyens et des partenaires.

Considérant ces éléments, nous comprenons mal la valeur ajoutée de ce Forum. Nous proposons plutôt que la régie régionale ait l'obligation d'adopter une politique de participation et d'évaluation de la satisfaction et de l'évolution des besoins. Cette politique devra préciser les mécanismes de consultation, lesquels devraient aussi être utilisés lors de l'élaboration et de l'évaluation des plans stratégiques triennaux.

Au regard de la direction générale de la régie régionale, les régies régionales s'opposent à l'inscription dans la loi de la nomination du P.D.G. par le gouvernement, car, si tel était le cas, le conseil d'administration de la régie régionale devient une instance purement consultative au P.D.G. et non plus une instance décisionnelle. De plus, cette proposition du projet de loi n'est pas cohérente avec la séparation des fonctions qui demeure pour les établissements du réseau.

Le projet de loi doit plutôt porter sur une clarification des responsabilités, devoirs et pouvoirs du conseil d'administration et du directeur général ainsi que sur les processus de reddition de comptes. La littérature est riche d'enseignement en ce domaine et le projet de loi devrait s'en inspirer pour faire les distinctions nécessaires à un fonctionnement harmonieux, efficace et cohérent du régime décisionnel.

Si le gouvernement persiste dans son intention de vouloir nommer le directeur général, alors il enverra un message clair que le conseil d'administration n'est plus qu'une instance consultative. Toutes les autres modifications que nous avons proposées jusqu'ici ne serviraient en rien si le projet de loi n'est pas modifié pour confirmer au conseil d'administration d'une régie régionale ses principales responsabilités dont celle de nommer un directeur général, de l'évaluer ou de le démettre de ses fonctions, le cas échéant. Un conseil d'administration exerce sa première responsabilité dans l'engagement de son chef de direction et, ensuite, dans l'adoption des politiques de gouverne et de leur évaluation périodique.

Enfin, vous constaterez à la lecture de notre mémoire que nous voulons que la logique que nous proposons s'applique aux établissements. Nous le disons encore, si le gouvernement opte pour une gestion déconcentrée par régie d'État, qu'il le dise clairement. Nous saurons alors que le gouvernement a décidé de mettre fin... de mettre au rancart la décentralisation de l'administration du système de santé démarrée en 1991.

Nous tenons également à vous faire connaître notre position face aux articles du projet de loi sur les effectifs médicaux. Selon nous, les mesures proposées peuvent améliorer le régime d'application des plans d'effectifs médicaux, mais nous croyons qu'elles ne sont pas suffisantes. Il faut aller au-delà des règles de coercition et développer un plan stratégique qui établit des mesures incitatives, des meilleures conditions de pratiques et des mesures de rétention des ressources médicales. Nous croyons qu'en l'absence d'un tel plan l'application de nouvelles mesures pourrait avoir un effet pervers qui amènerait les médecins à quitter le territoire québécois plutôt que de se diriger vers les régions en pénurie.

Au regard de la santé publique, nous désirons que le projet de loi soit modifié afin de bien camper les responsabilités et l'imputabilité de la régie régionale pour les activités de prévention et de promotion ainsi que pour les interventions intersectorielles. En ce sens, nous désirons également que soient confirmées les capacités de notre directeur de la santé publique d'intervenir en ces matières.

Vous lirez également nos positions au regard de quelques autres éléments contenus dans le projet de loi, tels le plan stratégique triennal d'organisation de services, l'entente de gestion et les considérations particulières qui doivent prévaloir pour nos collègues de la région du Nord-du-Québec.

En conclusion, je tiens à vous redire qu'à notre avis il n'y a pas d'urgence pour procéder à la modification des modes de désignation des membres de conseil d'administration. Le mode électif actuel, quoique perfectible, n'est pas la seule source de nos problèmes, de nos difficultés. Pour nous, la priorité de travail porte sur la clarification des rôles et responsabilités du palier local, régional et national ainsi que sur l'enchâssement dans la loi d'un partage clair entre les fonctions des conseils d'administration et des directeurs généraux... et les directeurs généraux. Nous voulons dire aux membres de cette commission que nous n'arrivons pas à comprendre les motifs qui justifient le refus du gouvernement de s'engager dans cette voie. Il a entre les mains deux outils précieux pour le guider dans cette démarche, soit le rapport Clair et le rapport Deschênes. Je le répète, ce n'est pas un problème d'élus, c'est un problème de nécessaire clarification des paliers de gouverne, l'abolition des duplications, la fin de la microgestion du ministère et une reddition de comptes transparente, accessible aux officiers du ministère et à la population. Nous sommes toujours disposés à travailler sur ces sujets pour assurer une gouverne efficace et répondant aux besoins des citoyens de toutes les régions du Québec.

Merci, mesdames et messieurs, et M. le ministre, de nous avoir écoutés. Nous sommes maintenant disponibles à essayer de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, merci, M. Barrette, pour la présentation de votre mémoire. Alors, jusqu'à 16 heures, nous pourrons échanger. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Trudel: Merci, M. Barrette et les femmes et les hommes qui vous accompagnent aujourd'hui, pour la présentation à l'aube, au premier moment de la discussion sur le projet de loi n° 28.

Reconnaissons d'emblée, parce que les minutes sont courtes et précieuses, tout ce qui a été fait depuis les années 1970 par les hommes et les femmes en région pour la gestion des services de santé dans chacune des régions du Québec.

n(15 h 30)n

Après différentes vagues qui ont suivi des examens, des examens du système, oui, et la commission Clair là-dessus est très transparente, cristalline, elle nous indique qu'il y a des ajustements, et non pas de modifications, de rupture, de discontinuité, qui doivent s'installer. À cet égard-là, la volonté gouvernementale exprimée jusqu'à maintenant, c'est celle d'en faire davantage au plan de la régionalisation et de la responsabilité des établissements locaux de dispenser et d'organiser la dispensation des services sur leur territoire, là où vit leur population, en s'assurant, avec le maximum d'efficacité, que les populations qui sont desservies vont pouvoir se retrouver en toute limpidité et simplicité au conseil d'administration de l'établissement, en impliquant les professionnels et les catégories de personnel qui dispensent les soins aux malades ou aux personnes en détresse au conseil d'administration. C'est l'objectif général du projet de loi, des ajustements nécessaires pour renforcer les capacités de gestion, pour renforcer les capacités d'administration et d'emprise des populations locales sur leur établissement et faire en sorte qu'on ait des résultats pour la population.

Je m'aperçois aujourd'hui, à vous entendre, M. Barrette, que s'il y avait distance entre la proposition et gouvernementale reflétée publiquement et votre reflet public de vos commentaires, c'est pas tout à fait ce que viens d'entendre autour de la table. Quand j'examine un certain nombre de vos pensées, de vos indications... et je pourrais l'illustrer à l'aide de deux ou trois exemples: «Les milieux régionaux doivent contribuer de façon significative à la constitution du conseil d'administration. Il faut que le gouvernement choisisse parmi les candidats qui apparaissent sur des listes de consultation auprès des organismes de la région. Nous demandons que le libellé de la loi soit explicite à ce titre.» Nous ne sommes séparés par rien à cet égard ? par rien à cet égard ? c'est ce qu'indique le projet de loi. Vous demandez des précisions pour qu'il en soit ainsi.

Je l'ai affirmé à l'Assemblée nationale et je le réaffirme, les hommes et les femmes qui seront à la régie régionale seront des hommes et des femmes de la région, issus de listes où tous les groupes sociaux, économiques, culturels, communautaires auront la chance de présenter leurs suggestions. La représentation équitable des hommes et des femmes, ça aussi c'est inscrit au projet de loi, et je pourrais continuer sur une dizaine de remarques que vous faites et qui ne sont pas éloignées de la réalité du projet de loi n° 28.

Je voudrais en savoir plus sur une chose. M. Barrette, on vient de la même région, on s'est... on a presque marché côte à côte depuis 10... quinzaine d'années. Parfois, je ne reconnais pas certains propos. Qu'à cela ne tienne, il y en a plus qui nous unissent qu'il y en a qui nous divisent. Quand vous dites que vous êtes des élus redevables à la population, pour prendre un langage simple comme le Dr Lamontagne ce matin, du Collège des médecins, là, vous êtes conscients que le mécanisme, le mécanisme dit d'élection que nous avions mis en place en 1991, avec le précédent gouvernement, vous êtes conscients qu'il a pas donné tous les résultats escomptés? Est-ce que vous êtes conscients de ça? Et, quand vous employez le terme «nous sommes des élus redevables à la population» ? on peut pas avoir 10 définitions de l'imputabilité ? et qu'on cherche à avoir davantage de représentation de la population, c'est pas souhaitable ça?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Barrette. C'était une question, M. le ministre, oui?

M. Barrette (Gilbert): Oui.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Barrette.

M. Barrette (Gilbert): Je mentionne dans le document, M. le ministre, effectivement que ce... l'organisation est perfectible. Quand on dit «perfectible», ça veut dire que ? je n'ai pas besoin de vous faire un dessin ? il y a de la place à amélioration. Et ça, nous en convenons. Nous en convenons puis nous sommes d'accord là-dessus. Sauf que, entre le mode que nous avons connu, perfectible encore une fois, et des nominations... Et je dois vous rappeler, M. le ministre, que dans le projet de loi qui a été déposé il y avait au moins, si je ne fais pas erreur, six ou huit personnes qui étaient nommées et on mentionnait pas de liste. Je comprends que, suite à vos déclarations que vous avez faites après le dépôt, vous vous rapprochez énormément de ce qu'on préconise dans le document, c'est vrai. Mais, si on prend le mode actuel, oui, il y a de la place à amélioration, et on suggère dans le mémoire qu'il y ait une table de travail de formée avec le président des élections pour regarder comment on pourrait faire participer le citoyen de façon intéressante, parce qu'on peut pas dire ? et ça, c'est pas un blâme qu'on fait au gouvernement, là, peu importe qui a passé là ? on peut pas dire qu'on a mis des efforts terribles pour intéresser les gens aux élections lors des élections qu'on connues il y a à peu près trois ou quatre ans. Ça, c'est des constats qu'on doit... qu'on est obligé de faire. Et la participation, c'est sûr, a pas été forte et vous l'avez énoncé à quelques reprises, et ça, c'est vrai, ça. Sauf que quand on a autour de la table des élus d'un conseil municipal, lorsqu'on a autour de la table des gens de commissions scolaires, lorsqu'on a autour de la table des gens du communautaire qui ont reçu peut-être ? je sais pas ? l'assentiment de 25 ou 30 groupes qui ont... pour les proposer au niveau du collège électoral communautaire, lorsqu'on a au niveau de la table des gens du socioéconomique qui ont dû aussi être ballottés autour de, je sais pas, 50 ou une trentaine de groupes socioéconomiques, ils commencent à représenter du monde. Mais, si on parle élection au niveau des établissements locaux, qu'on parle des hôpitaux, exemple, ou des CLSC, c'est vrai que la participation a pas été élevée. Ça, on le constate. Mais on dit qu'il y aura sûrement une marge à l'amélioration là-dessus.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: Une autre chose dont nous convenons. Une autre chose dont nous convenons, et en particulier ? en particulier ? cette évocation qu'il ne faut jamais arrêter la démarche de recherche pour s'en aller, quant à nous, vers l'universalité, une véritable universalité au niveau de la désignation des personnes. Et cela m'amène sur l'autre dimension. Vous allez certainement me pardonner de vous trouver pas mal sévère sur la régionalisation. Est-ce que de donner... Est-ce que de n'enlever aucun pouvoir aux régies régionales actuelles et d'en ajouter, c'est faire moins de régionalisation? Est-ce que d'ajouter maintenant une responsabilité au niveau de la gestion des plans d'effectifs, est-ce que d'ajouter des pouvoirs légaux d'intervention avec les établissements pour s'assurer que l'administration des sous publics donne les services pour lesquels les services ont été organisés pour la population, il y a comme une dichotomie entre l'évaluation que vous en faites et l'ajout de pouvoirs dans chacune des régions du Québec pour encore faire davantage de gestes qui tiennent compte des besoins de la population régionale et locale. J'ai de la misère un peu. Vous allez me sortir de la misère là, vous?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Barrette.

M. Barrette (Gilbert): Je comprends que vous ayez un peu de difficulté. Effectivement, dans le projet de loi, tout n'est pas poison, tout n'est pas méchant. Et, quand on parle de pouvoir sur un suivi plus adéquat des effectifs médicaux, s'il y a quelqu'un qui est drôlement intéressé à voir plus clair là-dedans, c'est celui qui vous parle, provenant d'une région, de l'Abitibi-Témiscamingue. Avoir les pouvoirs pour mieux suivre ce qui se passe dans l'établissement parce qu'à l'occasion on a à répondre de, ça, on peut pas être contre ça. Nous ne sommes pas contre ça et on est capables de le dire aussi, et on l'a déjà mentionné. Mais, ce qui nous préoccupe... Et là on revient directement au niveau de la nomination de la direction générale. À un moment donné, vous avez eu publiquement un discours... On comprenait la question d'un sous-ministre. Pas parce que j'ai de quoi contre les sous-ministres ni les ministres, c'est du ben bon monde qui font leur possible, sauf que ça nous dit à nos oreilles ? sauf que, oui ? ça nous dit à nos oreilles: Si c'est un statut de sous-ministre, donc il y a un lien qui est assez direct avec le sous-ministre ou le ministre, donc il va chercher des orientations, il va chercher des... je ne dirai pas des commandes parce que c'est peut-être un peu dur là, mais il va chercher des orientations, admettons. Et il arrive dans la région et qu'elle est la disponibilité, qu'elle est la marge au conseil d'administration pour agir après? Et c'est ce bout-là qui nous agace. Je pense qu'on a eu l'occasion de vous le dire à quelques reprises, mais c'est ce bout-là entre autres, sur la question des pouvoirs et des responsabilités, qui nous...

M. Trudel: Je comprends à cet égard donc...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, M. le ministre.

M. Trudel: Pardon.

M. Barrette (Gilbert): Je m'excuse, monsieur, peut-être M. Bouchard a un petit complément d'information.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Bouchard, vous voulez compléter?

M. Bouchard (Jean-Marie): Pour compléter, M. le ministre. oui.

M. Trudel: Surtout que, vous, vous avez été sous-ministre.

M. Bouchard (Jean-Marie): Oui, exactement.

M. Trudel: C'est très bien.

n(15 h 40)n

M. Bouchard (Jean-Marie): Mais je pourrais peut-être compléter, M. le ministre. la réponse qui est apportée. Les pouvoirs que vous concédez par le projet de loi, la question, vous les concédez à qui? C'est là la question, On nie pas que vous augmentez les pouvoirs, puis notre préoccupation fondamentale, ce n'est pas qu'il n'y ait pas de régionalisation, il peut y avoir une régionalisation qui est une déconcentration administrative. La question n'est pas là. On ne parle pas sur le mot «régionalisation», on parle sur la décentralisation administrative. C'est pas la même chose. Et la réforme qui a été amorcée depuis 1971 était à l'effet que c'était une décentralisation. Un des principes qui est à la base de la commission Clair, c'était la subsidiarité, c'est-à-dire ramener la décision des problèmes le plus près possible des besoins de la population pour y répondre. pas par des gens qui ont des compétences en administration nécessairement, mais des hommes et des femmes qui seraient capables de comprendre les problèmes humains qui leur sont posés. Et ce qui fait problème dans le projet de loi, et ce qu'on dit dans le mémoire, c'est que la régionalisation qui se perpétue avec des pouvoirs accrus, bien, ne se fait pas sur une forme de décentralisation due au fait que le directeur général est nommé par le gouvernement. Et l'interprétation que je fais, ce n'est pas une interprétation abusive d'ancien avocat, je la prends dans le mémoire que vous avez déposé, qui est public, au Conseil des ministres, lorsque vous avez déposé le projet de loi.

Et c'est très clair: «La nomination du président-directeur général ? qui s'appelait comme ça dans le texte ? directement imputable au gouvernement resserre le lien d'autorité et assure les relations privilégiées et systématiques avec le ministère ? c'est du ministère qu'il parle. D'autre part, du fait de son statut, du fait qu'il est nommé et que les membres sont nommés par le gouvernement, les relations entre le président-directeur général et son conseil d'administration devraient entraîner plus de cohérence dans les positions du conseil d'administration. La ligne d'autorité ministérielle est clairement établie du haut en bas de l'échelle du gouvernement, puisque le gouvernement nomme les administrateurs de la Régie et que cette dernière nomme les membres du conseil d'administration dans les établissements.»

Le problème est là. Le problème est tout là. Et, si, par exemple, nous avions encore un système décentralisé, la première nomination, tous les volumes ? ou enfin, pour le droit administratif, là ? tous les volumes élémentaires vont vous dire qu'il y a pas de conseil responsable si la première décision que ce conseil peut prendre n'est pas la nomination de son D.G., qui a son officier exécutif. C'est élémentaire. Dès que vous retirez ça, il vous reste un conseil qui est un conseil consultatif.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, votre temps est écoulé, M. le ministre, malheureusement.

M. Trudel: Bien, j'avais trois minutes, là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, mais, le trois minutes, on l'a pris en la réponse. On l'a pris avec la réponse.

M. Trudel: Vous additionnez toujours du temps supplémentaire à l'opposition si j'en prends plus.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Bien, écoutez, si vous voulez retarder, si vous voulez qu'on termine à 16 heures...

M. Trudel: ...Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Pardon?

M. Trudel: ...on est en désaccord avec la recommandation 32 de la commission Clair...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, M. le ministre, malheureusement...

M. Trudel: ...qui dit que le ministère confirme, que le ministère de la Santé et des Services sociaux confirme la nécessité des régies régionales responsables et imputables envers lui. Je comprends votre interprétation, mais vous êtes en désaccord profond avec la commission Clair là-dessus.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, c'est terminé, M. le ministre. Vous aurez l'occasion de répondre tout à l'heure avec la question que posera le député de Châteauguay.

M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Je suppose que le ministre va nous remercier de lui avoir donné encore un peu de temps, mais je suis sûr que vous pourrez lui rappeler les propres propos de M. Clair dans les journaux dernièrement, qu'il semblait pas tellement digérer la façon dont il interprétait lui-même le rapport de la commission Clair. Ceci étant, je veux pas partir de débat là-dessus, je veux juste qu'on soit assez clair. J'ai lu le discours et j'ai lu le mémoire rapidement pendant votre présentation. Je m'excuse, on l'a reçu en même temps, j'ai essayé de faire le plus vite possible. Néanmoins, j'ai trouvé certains passage qui, me semble-t-il, n'ont pas été suffisamment mis en éclairage, et je voudrais les soulever.

La page 8 de votre mémoire. Pas de la présentation d'aujourd'hui, mais du mémoire. Vous dites: «Nous croyons que l'objectif gouvernemental de clarifier la ligne de gouverne ne trouvera pas son sens dans la désignation de la totalité des administrateurs, mais davantage en clarifiant la responsabilité de chacun des niveaux de décisions. [...] Faut-il rappeler à cette commission que le gouvernement a en main deux rapports pour le guider dans cette voie qu'il semble ne pas vouloir emprunter, soit le rapport Examen des responsabilités respectives du ministère de la Santé et des Services sociaux des régies régionales et des établissements, de décembre 1996, du comité présidé par Jean-Claude Deschênes, et celui de 2001 [...] de Michel Clair.»

Je tiens à souligner ce passage-là parce que, depuis le début, ce que nous prétendons ? et me semble-t-il que là-dessus on peut dire que nous sommes en accord de ce côté-ci avec votre présentation, tout au moins votre mémoire ? que la grande question n'est pas de savoir qui nomme qui, mais qui fait quoi. Et, d'ailleurs, le rapport Clair en fait état, de ce rapport de 1996, sur lequel le ministère est assis, ne bouge pas et décide de ne rien faire; ça réglera pas le problème. C'est pas en... Même si le ministre veut être capable d'avoir plus de pouvoirs, ça règle pas le problème qu'il y a dans la cohérence des différentes institutions.

Bon. Ceci étant dit, aux pages 10 et 11, vous nous faites une description un peu de ce que vous vivez vous-mêmes. Vous savez, nous, on est un peu loin de ça, mais, vous, c'est un peu votre domaine; c'est beaucoup votre domaine. Vous nous dites comment ça marche et vous nous dites ceci: «...lorsqu'il est question du mode électoral pour les conseils d'administration des régies [...] nous désirons rappeler au législateur qu'il s'agit d'une procédure par laquelle des collèges électoraux, représentant tous les intervenants et partenaires du réseau [...] procèdent à l'élection des vingt premiers membres du conseil [...]. D'une région à l'autre, le taux de participation des organismes éligibles à s'inscrire dans les collèges électoraux varie de 40 % à 80 %.» J'étais à ce moment-là loin du 1 % du ministre. Peut-être que vous pourriez m'en parler un peu.

Par ailleurs, vous soulevez aussi la difficulté pour le processus électoral par la population, parce que la plupart de ceux qui sont les premiers intéressés par le domaine de la santé sont exclus du processus d'élection par la population. Alors forcément, ça fausse un peu les données. Ça peut permettre de dire: Y a pas beaucoup de monde qui y va, mais quand t'as éliminé déjà ceux qui étaient les premiers intéressés, ça fausse le jeu. Vous ajoutez: Comme y a pas de pouvoir de taxation, y faudrait se comparer avec des comparables, et là, y a pas de comparables dans ce milieu-là. Et là, vous terminez ensuite sur un petit bout que je trouve particulièrement intéressant:

«Par exemple, sans ajout d'argent, nous avons déjà recommandé un processus électoral se tenant au même moment que les élections municipales et scolaires et se tenant également par la poste [...] pour faciliter l'expression du vote par le citoyen, et ainsi, contribuer à augmenter davantage l'intérêt de la population à participer à ces élections.»

Je vous dis tout ça, ces bouts-là, parce que je trouvais que ça avait de l'allure. Honnêtement, je trouvais que ça avait de l'allure. Parce que tout le monde sait que... Enfin, tout le monde, tous ceux qui souhaitent que les citoyens aient une prise sur ce qui se passe dans les services de santé ? j'exclus certaines personnes en ce moment ? pour ceux qui pensent qui sont de cette idéologie-là, ils se disent: Bon, le processus est peut-être en ce moment pour certains, pour la population à 1 %. Je comprends maintenant que, pour d'autres collèges, c'est plus de 40 à 80 %. La solution n'est pas d'abolir, la solution est de trouver des moyens pour maximiser la participation au vote, et vous nous offrez quelques solutions. En même temps, j'ai entendu le ministre dire que vous étiez tous les deux d'accord sur les nominations, hein.

Je suis un peu perdu, parce que, en vous lisant... Puis ailleurs dans votre mémoire, vous nous dites: Tu sais, c'est bien important que la population soit partie prenante puis, du même souffle, vous faites une virgule puis vous dites: Bon, bien, en tout cas, on oublie ce qu'on pense profondément puis on joue le jeu du ministre, puis on dit: Donnez deux, trois petites modifications puis on va être d'accord avec vous, votre projet de loi va être ben bon. Expliquez-moi ça.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Barrette.

M. Barrette (Gilbert): Vous allez sûrement comprendre rapidement. Quand on dit: Nous sommes d'accord dans la façon de nommer, c'est notre deuxième choix. Notre premier choix, c'est le vote... en fait, un suffrage universel ou un vote de participation ou collaboration modifiée en termes d'amélioration du système. Ça, c'est notre premier choix. Notre deuxième choix, s'il faut en... Et là, c'était, je pense, notre devoir de regarder comment on peut tirer au maximum de ce qui est sur la table actuellement, ça fait partie de notre deuxième choix, la question de la nomination à partir de listes.

Et quand vous parlez des... le texte, à la page 10: «D'une région à l'autre, le taux de participation des organismes éligibles à s'inscrire dans les collèges électoraux...», d'abord, si on prend, par exemple, les organismes communautaires devaient s'inscrire pour pouvoir déléguer quelqu'un au niveau de ce collège électoral. Ce sont ces organismes-là qui se sont inscrits à un taux de... entre 40 et 80 %. Donc, c'est de l'intérêt que ça manifestait au niveau de ces organismes-là, aussi bien les groupes socioéconomiques que les groupes communautaires en particuliers.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Weil, vous voulez ajouter quelque chose?

Mme Weil (Kathleen): Juste rajouter sur toute cette question d'élections et essentiellement les choix qu'on a pris dans ce mémoire. Ce qu'on a trouvé désolant avec l'abandon des élections, premièrement, y a jamais eu réellement de débat. On n'a jamais fouillé collectivement est-ce qu'il y a des façons d'aller améliorer. Il y a toujours... on a toujours souligné le faible taux de participation, sans aller regarder derrière ce faible taux de participation. On sait qu'actuellement, l'Alberta, depuis plusieurs années, regarde le modèle québécois comme étant un modèle très avant-garde. Moi, j'ai souvent eu l'occasion d'échanger avec les «regional attorneys» en Alberta, en Saskatchewan. Ils disent: Votre modèle québécois, on voudrait s'en inspirer, parce que nous, nominations pures, on a toujours un peu de problème, ils nous disent, parce que c'est perçu un peu comme, des fois, bon, c'est le gouvernement qui nomme, et ils ont... Des fois, ils cherchent des modèles mixtes d'élections-nominations, et souvent, les nommés, ils ont peut-être un peu moins de crédibilité.

Donc, tout ça pour dire qu'avant d'abandonner ce modèle, on trouve triste que peut-être que nous, au Québec, on a trouvé quelque chose d'intéressant, les autres veulent s'en inspirer, et on n'a pas pris le temps de bien examiner la question. Parce que le mode d'élections, essentiellement la grande faiblesse qu'on nous a soulignée, c'est le taux faible de participation, mais notre expérience, elle est variée. Moi, mon expérience ? je suis au conseil d'administration de Montréal depuis 1992 ? je pourrais pas demander un meilleur conseil d'administration. Je veux dire, ça a tellement bien marché, et c'est le mode d'élections qui a produit ce résultat. Peut-être que c'est pas toujours pareil dans toutes les régions. Ça, je suis consciente de ça.

n(15 h 50)n

Et solution de rechange ? parce que c'est ça, l'important ? c'est que cette instance soit bien régionale, représente sa communauté régionale. Donc, on dit au gouvernement: D'accord, vous abandonnez, on voit bien votre intention, il faut qu'on se plie à ça, on constate qu'ils veulent abandonner, mais, à tout le moins, assurez-vous que ça sera réellement une instance qui va avoir crédibilité dans son milieu.

On revient à ce P.D.G. C'est l'article qui fait douter tout le monde de l'intention réelle de garder une instance régionale. Si vraiment il fallait dire c'est quoi, le «bottom line» là-dedans, c'est ce P.D.G. qui fait dire à tout le monde: Ah, oups! Et tout le monde, c'est vraiment un consensus avec toutes les institutions. Ils se disent: C'est pas normal qu'un conseil d'administration... Si on a confiance ? on les a nommés, on a fait une vérification, le gouvernement s'assure de leur compétence, leur représentativité ? on doit avoir assez de confiance dans ce conseil d'administration de choisir son directeur général. Donc...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Merci. Merci beaucoup. Je dois vous dire que c'est pas toujours facile, la politique, vous savez. Quand vous avez un premier choix que vous abandonnez dès le début de la course, il est difficile de convaincre le gouvernement de rester à ce premier choix-là. Alors, le problème, c'est qu'on est donc déjà rendu au deuxième choix. Je dois vous dire que j'aimais beaucoup votre premier choix. Je dois vous dire que je considérais que d'envisager l'avenir en bonifiant un système plutôt qu'en jetant le bébé avec l'eau du bain me semblait une meilleure solution. Mais, bon, on en est rendu là et on n'y peut rien, le gouvernement a ça maintenant avec lui.

Je voudrais revenir sur la page 24, je prends un bout de la page 24 de votre mémoire où vous parlez ni plus ni moins des pouvoirs dont le ministre dit qu'il vous donne... J'ai trouvé, M. Bouchard, intéressant que vous posiez la question si c'est beau, mais à qui le donnez-vous? À lui-même. Il se le donne à lui-même en se le déléguant à la personne qu'il a lui-même nommée. Donc, c'est un pouvoir qu'il se donne à lui-même en région, puisqu'il s'est amené lui-même en région.

Parlons de la répartition des ressources et des effectifs médicaux en région. J'ai compris ? je peux me tromper, là ? dans le projet de loi que, dans le fond, on parlait surtout des endroits où il y a des surplus par rapport aux plans d'effectifs, et pas beaucoup ? je pense, pas du tout ? pour là où il y a des déficits en ressources. J'ai une première question là-dessus, parce que je suis capable de me dire: Dans le fond, s'il y a beaucoup de surplus à certaines places puis l'équivalent à des déficits à d'autres places, on va arriver à un équilibre. Mais si, d'aventure, il n'y avait pas beaucoup de surplus par rapport aux plans dans l'ensemble du territoire québécois, dans le fond, qu'est-ce que ça donne, cet article-là?

Alors, ma question, c'est un peu la suivante. Vous êtes la Conférence des régies. Les régies soumettent des plans, je pense que c'est dans le processus. D'ailleurs, Mme la Présidente, si vous me permettez, je demanderais à la Conférence si elle a la bonté de nous faire parvenir ces plans d'effectifs. Ça nous permettrait, la commission, de pouvoir justement juger du bien-fondé de cette disposition-là, comment est-ce qu'elle va fonctionner. On pourrait voir, par région, comment ça va s'établir. Alors, premièrement, est-ce que vous pouvez nous envoyer ces plans de l'ensemble de chacune des régies de manière à ce qu'on puisse les regarder? Et, deuxièmement, avant de les obtenir, vu que vous en avez néanmoins une connaissance, comment ça se répartit en ce moment en région? Est-ce qu'il y a beaucoup d'endroits où il y a des surplus parmi les effectifs, les ressources humaines, les effectifs médicaux? Parce que, dans le fond, c'est le coeur du pouvoir que les régions se sont donné ou que le ministre s'est donné lui-même en région, de quoi on parle dans le fond. C'est ça, ma question.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Barrette.

M. Barrette (Gilbert): Les plans d'effectifs actuellement existants sont peut-être déjà rendus à votre bureau actuellement.

M. Fournier: Non.

M. Barrette (Gilbert): Non. Bien, si vous le demandez, ça va être rendu dans la prochaine minute.

M. Fournier: Ah! C'est dans la prochaine minute? Excellent.

M. Barrette (Gilbert): Ha, ha, ha! Non. Sérieusement, les plans d'effectifs, on est en train de les élaborer. D'abord, ça veut dire, ça, les besoins du milieu, et c'est sûr qu'il va y avoir une période d'échanges avec le ministère versus la capacité de répondre à ces besoins-là. Est-ce que ça sera égal? Ça va être à voir.

M. Fournier: Je peux vous interrompre?

M. Barrette (Gilbert): Oui.

M. Fournier: Il y a les besoins du milieu versus la capacité de répondre aux besoins. J'avais cru que le PREM, c'était dans le fond les besoins, et on dit: Quelles sont les réponses? Et, après ça, bien il y a le déficit ou le surplus. Ce que je vous pose comme question: En ce moment, au-delà de la négo ou de la conciliation ? parlons de conciliation ? qu'il y a...

M. Trudel: ...

M. Fournier: J'étais sûr de faire plaisir au ministre.

M. Trudel: Ah!

M. Fournier: Je veux lui donner un sourire. ...la conciliation à faire avec le ministère, dans les régies, vous êtes déjà, je pense, pour certaines, déjà vous avez envoyé votre proposition. C'est ce document-là dont je parle pour les régies que vous avez. Si vous pouvez nous les envoyer, ce serait bien, on en a déjà une idée. Et je vous renvoie la balle maintenant, je m'excuse de vous avoir interrompu. Ce qui m'intéresse, quant à moi, c'est par rapport aux besoins, et là je saurai par la suite s'il y a surplus ou déficit. Mais je veux pas que vous arbitriez vous-même vos besoins.

M. Barrette (Gilbert): Non. Et, une fois que sera connu justement l'inventaire ? parce que ça, c'est une chose qu'on doit reconnaître, c'est qu'au niveau du Québec on connaît mal la main-d'oeuvre disponible, aussi bien spécialisée qu'en médecine générale ? donc, il faudra faire le joint entre ces besoins et la main-d'oeuvre disponible. Et nous sommes convaincus et persuadés qu'il y a une pratique médicale qui est en train de se développer ? d'ailleurs, je l'ai déjà signalé au ministre ? une pratique médicale qui est en train de se développer dans certains coins du Québec, plutôt urbains, ce qu'on appelle une médecine de cafétéria. Et si on ne peut modifier ou si on ne peut améliorer ce style de pratique, en tout cas, j'ai des inquiétudes ? je vous l'exprime tout bonnement ? j'ai des inquiétudes sur la capacité d'être capable de combler les besoins qui sont criants dans les extrêmes ou encore dans les régions du Québec.

Ce qui est permis ou ce qui est donné dans la loi actuellement, ça va nous permettre à tout le moins, avec le plan d'effectifs déposé, reconnu et accepté, versus ce qui est au travail actuellement, les gens qui sont à la besogne, s'il y a un dépassement, bien, c'est clair que... À un moment donné, on parle de 60 jours; on trouve ça beaucoup trop long. Nous, on mettrait pas de délai tout simplement parce que, dès l'instant que c'est connu, que les gens connaissent leur plan d'effectifs, donc on devrait pas engager en dessus du plan d'effectifs bien connu. Et ça, ce qu'on avait jusqu'à maintenant, on n'avait pas cette poignée-là. Et aussi, jusqu'à maintenant, malheureusement ? et ça, on doit l'admettre, tout le monde le reconnaît ? les plans d'effectifs ont été des plans théoriques, c'est-à-dire on en faisait, mais personne ne pouvait dire... se baser là-dessus pour être capable d'opérer, de faire une opération, de dire: Bien là, vous autres, vous en avez assez et, de façon coercitive, être capable de diriger de la main-d'oeuvre ailleurs que là où il y a déjà des surplus. Ça, pour nous, pour les régions à tout le moins, c'est un point très positif.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Il vous reste une minute, M. le député de Châteauguay.

M. Bouchard (Jean-Marie): Effectivement, M. le député, oui, un plan d'effectifs, c'est la grosse question. Et je dois vous dire là-dessus qu'il faut faire la distinction entre la médecine générale et la spécialité, et, comme le ministre... on est d'accord avec le ministre là-dessus, on est d'accord avec... Au fond, la plus intéressante des trouvailles de la commission Clair, ç'a été le groupe des médecins de famille. Je pense qu'il faut fonder tous les espoirs là-dessus. Le gouvernement a mis beaucoup d'emphase là-dessus, ils ont dit qu'ils voulaient consacrer beaucoup d'argent sur cet aspect-là. Là-dessus, on les encourage à le faire et les régies sont déjà engagées dans le processus de mise en place de ce réseau-là, même sans argent, ce qui veut dire que c'est pas par régimentation d'un régime militaire qu'on est capable d'embrigader... Ce sont des professionnels. Il faut donc qu'on puisse avoir une incitation pour faire en sorte que la pratique soit modifiée et modifiée de l'intérieur par consensus.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, malheureusement, c'est tout le temps qu'on avait à notre disposition. J'ai compris, M. Barrette, que vous allez faire parvenir au Secrétariat de la commission le document dont il a été mention par le député de Châteauguay?

M. Barrette (Gilbert): Oui. On va vérifier d'abord ce qu'on a comme document. Tantôt, je faisais une farce en disant que c'était déjà rendu, là, mais, ce qu'on a comme document là-dessus, on va vous le faire parvenir, c'est sûr.

M. Fournier: Même s'il y a encore de la perfection à y apporter, ce que vous avez présentement, c'est déjà un élément que la commission pourra regarder pour travailler.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, M. Barrette, je vous remercie, je remercie également toutes les personnes qui vous accompagnent et je suspends les travaux pour quelques minutes, le temps de permettre aux représentants de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 59)

 

(Reprise à 16 heures)

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, s'il vous plaît! Je vous demanderais de prendre place, s'il vous plaît. Alors, je demanderais... S'il vous plaît! C'est notre collègue, là. Alors, le député de Châteauguay... M. le député de Châteauguay, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! À l'ordre!

Alors, la commission poursuit ses travaux afin d'entendre la Fédération des infirmières et des infirmiers du Québec. Alors, c'est madame... il s'agit de Mme Sylvie Boulanger qui est la première vice-présidente, responsable du secteur santé. Mme Boulanger, je vous demanderais de nous présenter la personne qui vous accompagne, et vous avez une vingtaine de minutes pour la présentation de votre mémoire. Je vous cède la parole.

Fédération des infirmières
et infirmiers du Québec (FIIQ)

Mme Boulanger (Sylvie): Parfait. Alors, bonjour. Je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui. Je vous présente... je vous présente Mme Marie-Andrée Comtois qui est conseillère au secteur santé à la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec.

Vous n'avez pas en main de mémoire ? c'est difficile ? vous n'avez pas...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Un peu d'ordre! Si vous avez des conversations, voulez-vous les poursuivre à l'extérieur, s'il vous plaît! Et je demanderais aussi à tous ceux et celles qui ont des cellulaires, des téléphones cellulaires, de bien vouloir les fermer. Oui, vous avez la parole, madame.

Mme Boulanger (Sylvie): Je vous remercie. Alors, vous n'avez pas en main de mémoire. Les délais très courts, je vous dirais, entre d'une part le dépôt du projet de loi ? bonjour ? et le moment de la présente commission, doublés à ça des agendas personnels de l'organisation ? on est en préparation de congrès ? on n'a pas eu le temps de travailler à la préparation d'un écrit. Toutefois, on veut quand même pouvoir se faire entendre sur la question du processus démocratique, sur la question des commissions infirmières régionales, notamment. Vous comprendrez par ailleurs qu'à cause des délais très courts notre analyse n'est pas très approfondie. On va tenter de couvrir le maximum de sujets et de répondre de façon correcte à vos questions, mais ça demeure quand même une analyse, je vous dirais, préliminaire.

Alors, en ce qui concerne le processus démocratique, tant des conseils d'administration des établissements que des conseils d'administration des régies régionales, il nous apparaît que la désignation des représentantes plutôt que leur élection élimine complètement le processus démocratique qui avait été voulu à l'origine de la mise en place du... ce qu'on avait appelé le projet de loi n° 120, la réforme de la santé et des services sociaux. Et depuis, dans le fond, février 1998, où on avait déposé un mémoire sur le projet de loi n° 404, on dénonçait déjà à ce moment-là le déclin du processus démocratique qui avait été amorcé avec l'adoption du projet de loi n° 116, qui visait notamment à abolir l'assemblée régionale responsable d'élire le conseil d'administration des régies régionales. Le projet de loi n° 404 a poursuivi... poursuivait cette tendance-là à l'effritement des lieux de débats publics.

Aujourd'hui, les conseils d'administration vont être composés de personnes désignées. Il n'y a donc définitivement plus de processus démocratique, et cela entache, selon nous, la crédibilité de la structure même. On pourrait penser ? puis j'imagine qu'on n'est pas les premières à le dire ? on pourrait penser que se retrouveront sur les conseils d'administration des établissements, et particulièrement sur celui des conseils d'administration des régies régionales, avec ces six personnes désignées par le gouvernement... ça pourrait être des amis du parti qui s'y retrouvent. Là, on vient d'entacher, à plus forte raison, la crédibilité de la structure démocratique. On pourrait aussi y retrouver des gens qui partagent une même vision de l'avenir du réseau, ce qui nous inquiète grandement à l'heure actuelle où le secteur de la santé est l'objet d'une grande convoitise de la part des grandes multinationales qui voient dans le marché de la santé de très belles perspectives de profits. Les tenants du néolibéralisme, de la libéralisation des marchés, de la déréglementation, comme par hasard, se retrouvent beaucoup dans ces lieux de décision. Actuellement, ce qu'on avait connu avec les processus d'élection, par collèges électoraux, à tout le moins dans les régies régionales, permettait d'avoir une représentation plus large de la société, des différents groupes d'intérêt de la société, et il nous apparaît que, plutôt que d'éliminer d'emblée ces structures-là, on aurait dû effectivement s'organiser pour les revamper, faire en sorte qu'on puisse donner, dans les différents conseils d'administration et d'établissements et de régies régionales, les moyens pour faire en sorte que et la population et les différents représentants qui sont appelés à y siéger y soient davantage sollicités et invités à le faire.

On a quelques questionnements à l'égard de la liste fournie par la commission infirmière régionale, la liste qu'elle fournirait pour des infirmières qui siégeraient au conseil d'administration des établissements. Il n'y a rien qui est prévu, en tout cas, à la présente loi par la commission infirmière régionale sur la façon de constituer cette liste-là. Bien sûr, il y a les règlements internes que la commission pourra se donner, mais ça nous inquiète quand même, à cet égard-là.

Concernant la mise sur pied du Forum de la population, 15 à 20 personnes, on choisit encore ici qui on veut, dans le fond. Et ça m'apparaît une pauvre représentation d'une participation de la population à un processus qu'on voulait initialement démocratique et au caractère public qu'on voulait donner aux structures administratives du réseau. L'article 343.2, le deuxième alinéa, où le Forum de la population aura comme mandat «de formuler des recommandations sur les moyens à mettre en place pour améliorer la satisfaction de la population à l'égard des services de santé et des services sociaux disponibles et pour mieux répondre aux besoins en matière d'organisation de tels services», ça nous surprend qu'il n'y ait rien là-dedans qui concerne la qualité des services, qui concerne également l'augmentation ou même le maintien de l'accessibilité à un certain nombre de services.

Ce Forum-là, qu'on a voulu remplacer, faire une sorte de participation de la population dans les structures régionales, n'a pas à intervenir. Par ailleurs, il va falloir que, dans les propositions qu'il fera aux conseils d'administration et à la régie régionale, ils devront tenir compte et des services qui sont rendus dans la population et des disponibilités budgétaires qui sont également envoyées à la région. Donc, on demande en même temps quelque chose à un Forum auquel on ne donne pas non plus nécessairement les moyens pour rendre son mandat, dans le fond.

On est d'accord sur le fond avec la mise en place d'ententes de gestion et d'imputabilité, mais les mesures qui sont prévues à ces ententes-là à l'égard des gestionnaires ne doivent pas cacher, surtout pas cacher un sous-financement chronique du réseau des établissements de santé. Je pense que ça, ça doit être très clair. Actuellement, les gestionnaires des établissements ont à fonctionner avec des enveloppes budgétaires qui sont beaucoup, beaucoup trop petites à l'égard des besoins de services de la population. On est également d'accord sur le fait que la régie régionale doive approuver les demandes de privilège qu'un conseil d'administration accorde à un médecin ou à un dentiste. Ceci devrait permettre, selon nous, un meilleur contrôle sur la répartition des effectifs médicaux. Je pense particulièrement... Il y a des régions où c'est particulièrement criant. Je pense que, à ce moment-là, on pourrait par là se donner un outil pour mieux contrôler la répartition des effectifs dans les différentes régions.

Concernant finalement la commission infirmière régionale, on se réjouit, bien sûr, de l'introduction dans la loi de la commission infirmière régionale. Cette commission a été réclamée et mise sur pied déjà dans un certain nombre de régies et on croit que cette commission-là va pouvoir faire oeuvre utile auprès des régies régionales pour un certain nombre de raisons. D'une manière générale, les préoccupations des infirmières sont basées sur les principes de l'organisation mondiale de la santé qui met de l'avant les soins de santé primaires avec une orientation qui accorde la primauté à l'individu et à son potentiel. Cette orientation-là a pour effet de centrer les interventions des infirmières sur la globalité de la personne, sur les différents aspects de celle-ci, et ce qui peut également être désigné comme l'approche biopsychosociale.

n(16 h 10)n

De plus, la présence des infirmières dans tous les milieux de vie, de soins, et qui de surcroît assurent une disponibilité sur toutes les plages horaires, font de l'intervenante en soins infirmiers une personne devant être considérée comme proche des citoyens et, en conséquence, au fait de ses besoins et de ses attentes. Plus concrètement donc, dans tous les milieux où elles exercent leur profession, les infirmières représentent des artisanes actives de la transformation du réseau de la santé et des services sociaux. Alors, on peut citer en exemple leur implication à la mise sur pied d'outils inédits qui ont permis... qui ont fait leur preuve jusqu'à maintenant: la participation à Info-Santé, le suivi systématique des clientèles, les ententes interétablissements pour s'assurer de la continuité des soins, et c'est en étant aussi près des milieux que les infirmières sont en mesure d'évaluer les impacts de la transformation du réseau.

La mise sur pied d'une commission infirmière régionale s'appuie sur des considérations exclusivement liées à l'organisation et à la dispensation des soins infirmiers à la population, quel que soit le milieu de vie ou le milieu de soins. Il ne saurait donc ici être question d'y ajouter d'autres sujets d'intérêts économiques, nos conventions, nos conditions de travail, nos conditions de salaire étant discutés en d'autres lieux, et nous tenons, ici, à ce que ce soit, sur ce point, très clair.

Par ailleurs, nous nous questionnons sur le fait que ne soit pas expressément prévu dans la loi que des infirmières syndiquées soient de la composition de la commission. La composition de la commission, telle que proposée, nous fait craindre qu'elle soit passablement sous l'influence hiérarchique de la profession et des corporations professionnelles. C'est pourquoi nous souhaitons la présence d'infirmières syndiquées sans qu'elles ne soient obligées de jouer du coude pour y accéder. En fait, c'est l'essence de ce que nous avions à vous transmettre aujourd'hui, le principal objet de notre intervention étant bien sûr le fait que nous déplorons effectivement qu'on ait enlevé dans les structures, les conseils d'administration, tout le processus électoral qui se voulait un garant dans le fond du processus démocratique, et de même les spécifications quant à la mise sur pied et à la présence d'infirmières syndiquées dans les commissions infirmières régionales. Merci.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vous remercie, Mme Boulanger, de la présentation de votre mémoire. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Trudel: Merci, Mme Boulanger et votre compagne, de la présentation, d'avoir pris le temps. Parce que je sais effectivement que vous êtes dans l'intense préparation de votre...

Mme Boulanger (Sylvie): De notre congrès.

M. Trudel: ...congrès. Puis vous allez avoir des petits choix à faire, je pense, dans ce congrès-là? On a su ça.

Mme Boulanger (Sylvie): ...de grandes orientations, disons, à décider pour les prochains mois.

M. Trudel: Oui, et on vous souhaite bonne chance là-dessus, parce que ce sont effectivement des choix qui impliquent beaucoup pour l'avenir et on sent que c'est surtout de ça que vous êtes préoccupées, l'avenir. L'avenir de la profession.

Mme Boulanger (Sylvie): ...de l'avenir de la profession, l'avenir de l'organisation, effectivement.

M. Trudel: Quelques éléments de précision pour être sûr que je saisis bien votre pensée. Et rien ne vaut de partir d'un exemple concret. Prenons au niveau de n'importe quel territoire québécois, un hôpital ou un CLSC. Bon. Si je vous dis qu'au conseil d'administration il va y avoir une personne qui représente les malades, qui provient de ce groupe-là, vous êtes pas en désaccord avec ça? Parfait. On continue. Vous êtes pas en désaccord à ce que ? parce que je veux être sûr, là ? à ce qu'il y ait une personne qui soit... deux personnes, pardon, qui soient reconnues pour leurs compétences en gestion et dont la résidence principale est bien sûr dans le territoire concerné, pour s'assurer qu'on aille chercher deux personnes... Et là j'évite deux mots, je vais y revenir; j'évite deux mots: nommées par la «régie régionale», parce que je vais faire une question avec ça, par après. Vous êtes pas en désaccord à ce que le conseil d'administration soit composé de deux personnes, on va dire, nommées par la régie régionale, en provenance du territoire concerné, pour l'administration de l'hôpital ou du CLSC?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger. Peut-être une question?

Mme Boulanger (Sylvie): Non, je réserve ma réponse à l'issue de votre question.

M. Trudel: O.K. Parfait. D'accord.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui, d'accord, parfait.

M. Trudel: Vous êtes pas... Est-ce que vous êtes en désaccord à ce qu'il y ait un médecin en provenance du département de médecine générale du territoire de l'hôpital ou du CLSC? Est-ce que vous êtes en désaccord à ce qu'il y ait une infirmière? Est-ce que vous êtes en désaccord avec le fait qu'il y ait cinq autres personnes en provenance de la population, suggérées par les groupes sociaux, économiques, culturels, communautaires du territoire concerné pour composer le conseil d'administration de l'établissement local? Oui, je vais résumer ma question: Est-ce que vous êtes d'accord à ce que toutes les personnes qui seront autour de la table du conseil d'administration de l'hôpital ou du CLSC soient des personnes qui soient en provenance du territoire et rassemblant et des professionnels et des hommes et des femmes de la population issus de ce territoire pour administrer l'hôpital ou le CLSC?

Mme Boulanger (Sylvie): La nuance que je voudrais qu'on...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Merci. Excusez. La nuance que je voudrais qu'on apporte ici, c'est que, d'abord, partout, il s'agit de désignées, de personnes désignées, ce que vous faites pas mention là. D'autre part, les personnes qui représentent la population, elles sont cinq personnes de la population, du territoire concerné, désignées par les membres déjà désignés. Alors là on est dans un petit groupe d'amis, là, hein; c'est à ça qu'on veut pas que ça se résume.

Je suis pas contre le fait qu'il y ait une infirmière, je suis pas contre le fait qu'il y ait un médecin, loin de là; je veux que ce soit démocratique comme processus. Je dis «je veux», c'est pas juste «je», là, notre organisation veut que ce soit démocratique comme processus. Et, quant à l'infirmière ? l'infirmière, j'en ai pas fait état tantôt ? l'infirmière, elle est issue, désignée, provenant d'une liste que la commission infirmière régionale va avoir mise, je ne sais pas comment, on ne sait pas... on ne sait pas comment ça va s'élaborer, cette liste-là, mais cette infirmière-là, ça dit pas qu'elle est de l'établissement, hein.

Et même plus loin ? là, j'ai pas les articles en tête par coeur, là ? plus loin, on dit que les gens qui sont salariés de l'établissement ne peuvent pas être sur le conseil d'administration de leur établissement; ils peuvent être sur un autre, par exemple. Mais c'est sûr que quelqu'une qui connaît l'établissement d'en dedans, c'est pas mal plus dérangeant sur un conseil d'administration. Voyez-vous, il y a des affaires qui posent des questions importantes dans le processus démocratique, et, en ce sens-là, je pense que ça prend... il vaut la peine qu'on le regarde.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: Si nous ajoutons, Mme Boulanger, que tous les membres autour de la table, sans aucune exception, si tous les membres, sans aucune exception, étaient désignés, nommés par les membres du conseil d'administration en place, qui auraient la responsabilité de former les nouveaux conseils, est-ce que cela répondrait à votre interrogation quand vous dites: C'est les premières désignées qui seraient chargées de nommer les cinq derniers de la population? Est-ce que, si les actuels membres des conseils d'administration, on leur confiait la totale responsabilité de former les nouveaux conseils d'administration avec, par exemple, le respect des indications au niveau des professionnels, est-ce que cela répondrait à plusieurs de vos inquiétudes?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Voyez-vous, M. le ministre, on peut déplorer une participation des gens, d'un certain nombre de groupes et de la population, des conseils d'administration, mais je comprends pas pourquoi tellement ne pas essayer de revamper ? je le disais tantôt ? de revamper le processus démocratique, c'est la base. L'élection est la base d'un processus démocratique, hein. Pourquoi ne pas essayer de travailler à partir de ce qu'on a déjà plutôt que d'essayer de le tasser tout de suite du revers de la main en ne lui donnant pas toutes les chances de faire ses preuves? C'est jeune, quand même, cette application-là, hein.

n(16 h 20)n

M. Trudel: Tout en disant... Je vais faire un commentaire. Vous savez, ceux et celles qui sont là, ils ont et elles ont essayé, avec toute l'énergie dont ils étaient capables, pour faire en sorte que le processus donne les fruits escomptés par le législateur. Il s'est fait du travail, là, c'est incroyable, mais notre mécanique n'était pas, semble-t-il, suffisamment ajustée pour qu'elle donne les fruits espérés en termes d'universalité. Et, dans ce sens-là, ce que le législateur ? et ça va se transformer en une question ? le législateur dit: Aujourd'hui, on va ouvrir en simplifiant à tous les groupes sociaux et économiques du territoire concerné la possibilité de présenter des noms, et ce sont les membres autour de la table qui vont faire en sorte que c'est eux qui vont désigner, pas la régie, pas le gouvernement, qui désigneraient les membres du conseil d'administration de l'établissement. Et, en ce sens-là, est-ce que vous pensez que nous pourrions aussi faire en sorte qu'on poursuive le processus de recherche d'une solution qui nous amènerait donc davantage? Parce qu'on ne peut pas avoir de vide entre les deux, là, on ne peut pas arrêter toute la machine puis se mettre à songer pendant cinq ans, il faut que ce soit administré. Si cela était accompagné d'un mécanisme de réflexion pour davantage d'universalité au niveau des représentants de la population, est-ce que nous répondrions à votre objection... pas à votre objection, mais à votre question de pourquoi pas aller plus loin?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Moi, je vous dirais... Ma réponse va être très claire, M. le ministre, c'est non. J'ai pas le goût, puis notre organisation n'a pas le goût non plus qu'on transforme les affaires pour essayer de se retrouver toujours en petits groupes d'amis, d'un groupe à l'autre, d'un conseil d'administration à l'autre. Si vous pensez qu'on a besoin d'une période de réflexion pour asseoir, mieux asseoir le processus démocratique, la participation et de la population et des différentes catégories de personnels aux conseils d'administration et des établissements et des régies, on va continuer avec le processus qu'on a là, on va prendre le temps de s'asseoir et d'y réfléchir, et après ça on modifiera la loi en conséquence avec quelque chose qui pourra marcher. Puis, à la limite, on pourra même faire peut-être des projets-pilotes pour voir qu'est-ce qui en est dans certaines régions. C'est des hypothèses. Mais, moi, de petits groupes d'amis... Parce que, c'est à ça que ça ressemble là, c'est plus...

M. Trudel: ...c'est ça, hein?

Mme Boulanger (Sylvie): Bien, si c'est ça maintenant, ça sera pas moins pire demain. Ça sera pas moins pire avec ça.

M. Trudel: Mais tous les groupes auraient la possibilité de présenter des personnes. Tous les groupes ? sociaux, économiques, culturels, communautaires ? auraient la possibilité de présenter des personnes. Dans le fond, on simplifie quelque chose dont vous avez l'air à convenir que ça n'a pas donné les fruits escomptés. Simplifions ces choses-là pour s'assurer que la population soit autour de la table et ne limitons plus ça à ce que vous décrivez comme processus et qui a donné un système à 1 %. En tout cas, je retiens de vos commentaires et de vos observations que nous devons nous appuyer sur les établissements locaux pour s'assurer du processus et du résultat en termes de représentation autour de la table du conseil d'administration de l'hôpital ou du CLSC, pour prendre un exemple très concret.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Plus on est proche du lieu de l'action, plus on peut faciliter l'implication des gens dans les processus décisionnels, c'est certain. Quand on se sent rattaché à un établissement, c'est sûr qu'on l'a plus à coeur et on tient à ce qu'il nous donne les services et qu'il ait les moyens pour le faire. En ce sens-là, oui, plus on est proche de la structure... de la population également.

M. Trudel: Est-ce que je dépasserais votre pensée si je disais que celle du ministre... Si la pente de son esprit inclinait vers confier la responsabilité de la constitution des conseils d'administration aux établissements locaux, vous seriez en conséquence davantage portées dans cette direction-là?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Je vais vous demander de répéter.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Autrement.

Mme Boulanger (Sylvie): Oui, c'est ça. Ha, ha, ha!

M. Trudel: Si on disait: Le conseil d'administration là, sa formation, on va en confier la responsabilité, de le constituer, à l'établissement local et à son conseil d'administration.

Mme Boulanger (Sylvie): Non plus. Non, non! Non, non! Je pense qu'il faut asseoir quelque part... De la même façon que les élections sur le plan provincial, sur le plan fédéral ou au municipal se font, il faut que ce soit assis quelque part, ces processus-là, ces méthodes de faire, là. O.K.? Alors, dans la loi, c'est le lieu, c'est l'endroit pour le faire, mais laissons pas aux assemblées de cuisine de décider comment ça va se faire.

M. Trudel: C'est pas ça que je dis, je dis: Toutes les personnes...

Mme Boulanger (Sylvie): On se comprend mal, d'abord.

M. Trudel: Oui, on se comprend mal, mais on va essayer, on a encore une minute pour s'expliquer. Toutes les personnes, toutes les personnes qui seraient suggérées par les groupes de la communauté... est-ce qu'on ne devrait pas faire confiance à l'établissement, au conseil d'administration qui est en place pour assurer la désignation et la nomination des personnes qui vont assurer la continuité de l'administration de l'hôpital ou du CLSC?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Mais... En tout cas, je suis vraiment pas certaine de comprendre où vous vous en allez, là, mais il me semble qu'actuellement on a des collèges électoraux. Hein? Ça ressemble à ce que vous dites, sauf que vous les appelez pas «collèges électoraux».

M. Trudel: Tout à fait. Ce sont les groupes sociaux, économiques, et communautaires, et culturels.

Mme Boulanger (Sylvie): Mais pourquoi?

M. Trudel: Parce qu'on veut faire en sorte que tout le monde ait la chance de dire: Dans ma communauté, je peux servir mon hôpital, mon CLSC, et que les hommes et les femmes qui sont là puissent avoir à prendre la décision et d'appeler les personnes de la communauté qui, à leur évaluation, à leur jugement, sont les meilleures personnes pour servir l'administration de l'hôpital ou du CLSC. Donc, pas une nomination par le gouvernement, mais c'est le conseil d'administration et les autorités locales qui seraient responsables de la constitution de leur conseil d'administration en vertu d'un certain nombre de règles.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Bien, je vous dirais, là, que ça, cette approche-là, M. le ministre, là, sauf tout le respect que je vous dois, si je présentais ça à mon instance, là, je me ferais lyncher. Je me ferais lyncher complètement.

M. Trudel: C'est vos membres qui décident suite à vos suggestions régionales.

Mme Boulanger (Sylvie): Oui, mais ce que vous nous proposez, ça ressemble... comme si, à l'exécutif de la FIIQ ? on est neuf ? si, à l'exécutif de la FIIQ, on décidait qui va être là pour le prochain coup. Ça se peut pas!

M. Trudel: Si... et que vos instances régionales vous suggèrent des noms?

Mme Boulanger (Sylvie): Écoutez, y a rien de plus simple qu'un processus électoral. Je comprends pas pourquoi tant se torturer l'esprit. Ha, ha, ha!

M. Trudel: Là-dessus, on tombe d'accord. Là-dessus, on tombe d'accord, qu'il y a rien de plus simple que le processus électoral à l'élection, au suffrage universel de tout le monde. Ça, vous avez raison là-dessus, puis on en convient parfaitement. Sauf que la mécanique, la mécanique pour y arriver... On a procédé par une étape intermédiaire de collèges électoraux, ç'a pas donné les résultats escomptés, et là il faut se poser la question: Allons-nous directement au suffrage universel?

Mme Boulanger (Sylvie): Mais là je pense...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Excusez, j'attends.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Non, non, je vous en prie. Vous n'êtes pas la seule.

Mme Boulanger (Sylvie): Je pense, M. le ministre, que, à ce stade-ci, si vous voulez garder la crédibilité, et des structures décisionnelles du réseau, de l'ensemble des établissements dans le réseau, puis que, en même temps, vous voulez donner un peu plus de souplesse à comment se forme tout ça, laissons les choses comme elles sont mais donnons-nous le temps de s'asseoir, de réfléchir, de consulter de façon très spécifique là-dessus et les différents groupes qui sont impliqués, tant au niveau local, plus proche des établissements, qu'au niveau régional, pour savoir ce qu'ils souhaitent vraiment. Moi, je pense qu'il faut s'organiser pour redonner des moyens au processus démocratique, lui redonner sa capacité d'être crédible, O.K.? Et, en ce sens-là, prenons un temps de réflexion, mais défaisons pas déjà tout ce qui a été défait et qui n'a pas encore, il faut l'admettre, complètement fait ses preuves. Mais je ne pense pas qu'on ait non plus donné toutes les chances à ça de faire ses preuves.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: L'infirmière à la commission infirmière régionale. D'abord, est-ce que vous êtes d'accord avec la création de la commission infirmière régionale?

Mme Boulanger (Sylvie): Oui, avec la création de la commission infirmière régionale on est d'accord. On l'a réclamée d'ailleurs dans quelques mémoires qu'on a déposés. Par ailleurs, on souhaiterait y voir inscrites, nommément dans sa composition, des infirmières syndiquées. Ça n'apparaît pas là et ça nous questionne grandement. On craint que, dans le fond, la commission infirmière régionale soit beaucoup plus occupée par des infirmières-cadres, des infirmières-professeurs à l'université ou dans des milieux d'enseignement, et peu d'infirmières du terrain. Alors...

M. Trudel: Réserver des places pour l'infirmière syndiquée à la commission infirmière régionale? C'est ça, là?

Mme Boulanger (Sylvie): Il n'y en a pas actuellement, là.

M. Trudel: Non, non.

n(16 h 30)n

Mme Boulanger (Sylvie): Il n'y en a pas. Évidemment, une infirmière pourrait toujours passer par le CII, O.K. Une infirmière syndiquée peut être membre du conseil et se faire élire au conseil des infirmières et infirmiers, mais c'est beaucoup, beaucoup de jouage de coudes souvent, là aussi. Alors, avant d'accéder à la commission infirmière régionale, il nous apparaît que ça risque d'être compliqué. Et je pense qu'en ce sens-là aussi on gagnerait à avoir des infirmières qui proviennent du terrain, qui sont dans les établissements, qui donnent directement les soins, pour être capables, elles aussi, de parler de la façon dont les soins se distribuent et s'organisent concrètement sur le terrain.

M. Trudel: Le Forum des citoyens? Oh!, est-ce que c'est... Ça va?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre. Non, non, vous avez la parole. La seule chose, c'est que, non, en vous adressant à la présidence, y a pas de problème.

M. Trudel: Oh! je m'excuse, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Non, il n'y a pas de problème, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Trudel: Le Forum des citoyens. Vous dites «pour l'amélioration des services et pour l'expression ? j'essaie de le trouver ? pour l'expression des besoins». Ça vous semble... Vous avez l'air à douter que la population puisse se retrouver dans cette espèce de Forum avec un minimum de règles, là. «Pour l'expression des... pour l'expression des besoins» et aussi, ce qui est indiqué, «l'expression de la... du degré de satisfaction de la réponse donnée». Pourquoi on douterait de l'opinion de la population, là?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Non, je ne doute pas de l'opinion de la population à cet effet-là, mais ils se prononcent, dans ce qui est écrit, là, c'est, sur la satisfaction: «...pour mieux répondre aux besoins en matière d'organisation de tels services...», mais on n'y demande pas non plus de se prononcer sur la quantité, sur l'accessibilité des services, est-ce qu'on a besoin de plus de services ou pas? Et, d'autre part, quand je le vois, le Forum des citoyens, il m'a l'air ni là... Évidemment, c'est de la population, c'est 15 à 20 personnes. Selon le territoire, 15 à 20, c'est pas beaucoup. Ça peut peut-être en représenter beaucoup mais c'est quand même pas beaucoup, 15 à 20 personnes, et ça m'a l'air mis là pour pallier au fait qu'on enlève le processus démocratique ailleurs et la participation, disons, publique, là, aux instances décisionnelles. Il y a quelque chose là qui me semble pas...

M. Trudel: Bien, là-dessus, je vais juste vous renvoyer à l'économie générale, pour ne pas la répéter ici, là, de la commission Clair: lieu de gestion, lieu d'expression des besoins et interconnexion entre les deux éléments. Davantage une ligne de gestion et des lieux d'expression de la population qui soient extrêmement clairs et qui soient simples aussi pour l'expression des besoins et la mesure de la satisfaction quant à la réponse organisée. Il est vrai de dire aussi cependant que se pose toujours la question de la qualité, comme vous l'avez souligné, et de la quantité des services aussi. Parce que la quantité des services évidemment, elle procède de choix de société, de public... du public.

Dernière question. Vous dites: Ça en prend davantage, des moyens. Davantage au niveau de moyens financiers pour répondre à la demande. Notre société consacre 40 % de toutes, toutes, toutes, toutes les recettes publiques: taxes, impôt particulier, entreprise et de toute nature. Est-ce que, pour vous ? puis on n'est pas obligé de répondre en termes comptables précis ? est-ce qu'il y a un niveau où on pourrait se rendre dans notre société en disant: Pour les services de santé, illustration, on peut se rendre à 65, 70 % des revenus collectifs pour le secteur de la santé, en incluant bien sûr la capacité de payer de tout le monde, là, en rapport avec les sociétés qui nous environnent?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Écoutez, je veux pas répondre à cette question-là de façon directe parce que je pense pas que ce soit en disant qu'un tel chiffre: 50, 60, 65, 70 %, ce sera le chiffre magique, je le sais pas. C'est un choix de société que de décider de s'offrir des services de santé, des services de santé publics, des services d'éducation. L'ensemble des services publics sont des choix de société. Et, en ce sens-là, c'est à la société de pouvoir se pencher, y réfléchir et y répondre, à cette question-là.

Je pense que jusqu'à maintenant on a fait beaucoup plus de choix budgétaires qui ont limité beaucoup, beaucoup, beaucoup nos choix de société, qui ont eu des impacts et qui ont encore des impacts sur la santé de la population du Québec. Et puis, en plus, avec la loi antidéficit des établissements, on est, de fait, extrêmement limité quant à la capacité de dire, là: Y a-tu un pourcentage limite pour donner le budget du gouvernement, le budget qui sera octroyé à la santé? Par ailleurs, ça demeure un choix de société et, en ce sens-là, la société civile au complet a à se prononcer à cet égard-là. C'est pas seulement un choix financier.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, il vous reste une minute et demie, monsieur...

M. Trudel: Merci, ça va.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Ça va? Alors, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Oui, merci. Bienvenue, ça fait plaisir de vous avoir avec nous. Écoutez, y a plusieurs sujets qui ont été traités, alors je reviendrai peut-être tantôt sur les dernières considérations concernant le financement. Vous avez dit que vous aviez un petit peu de difficulté à suivre le ministre tantôt pour voir qu'est-ce que ça voulait dire lorsque le conseil nommait le conseil. C'est pas facile effectivement quand on dit que le ministre prône le suffrage universel mais enlève tous les mots «élu» et les remplacent par le mot «désigné» ou «nomme». Effectivement, c'est assez compliqué à suivre comme pensée lorsque les mots n'ont plus le sens que l'on donne d'habitude à ces mots-là. Ceci étant, ça reste, pour moi comme pour vous, ça va rester une énigme jusqu'à temps qu'on voit les amendements du ministre, parce que la consultation, en ce moment, est, pour lui, un processus de négociation sur ce qu'il a déposé et ce qu'on verra plus tard. On le sais pas encore. On sait qu'il va y avoir un recul sur ce qui est présentement mais on sait pas jusqu'où.

Mais, ceci étant, ce qui m'a... et je veux faire quelques commentaires là-dessus. J'ai compris que le ministre proposait de jeter le bébé avec l'eau du bain concernant les élections. Il dit: Ça, pour l'instant, on va jeter ça, mais en même temps, on va vérifier où le bébé s'en va, puis un jour peut-être qu'on va aller le chercher. Alors que votre position à vous, c'est un peu plus de dire: Écoutez, le processus est là... D'ailleurs, juste avant vous, je sais pas si vous étiez là, il y avait la Conférence des régies qui a fait une présentation et qui ont dit que leur premier choix, c'était d'abord de considérer que les élections étaient pas un si mauvais système que ça, si on le comparait avec des comparables. D'abord, pour ce qui était des organismes qui... des collèges électoraux, ça été une participation de 40 à 80 %; pour ce qui est de la population, on est obligé de considérer une population, mais où les premiers intéressés, qui sont les acteurs de la santé, ont pas le droit de vote. Alors, évidemment, ça colore l'affaire.

C'est naissant, y a des méthodes qui peuvent être choisies pour favoriser la participation des citoyens, notamment si l'élection avait lieu en même temps qu'une élection municipale ou qu'une élection scolaire, quoique, dans le cas du scolaire, peut-être qu'un jour on va nous dire que, là non plus, ça participe pas beaucoup. Mais peut-être qu'en cumulant les deux, peut-être que ça ferait... peut-être que ça ferait de l'effet.

Mais, ceci étant, j'aimerais ça que vous me parliez un petit peu de l'aspect démocratique. Pour vous, c'est important; pour moi, c'est important; mais j'aimerais ça qu'on établisse devant la commission, pour vous, selon vous, qu'est-ce que ça donne d'avoir des élections, qu'est-ce que ça donne que ce soit les gens eux-mêmes qui choisissent leurs représentants, que ce soit l'aspect des collèges électoraux, que ce soit l'aspect des sièges qui sont réservés à la population. Qu'est-ce que ça donne? Parce que, dans le fond, ma prémisse est comme la vôtre, je pense que c'est bon, je pense que ça peut être bonifié, mais j'aimerais ça savoir de votre part qu'est-ce que ça donne de plus à la santé, dans le fond, là, aux soins de santé. On parle de ce système-là, qu'est-ce que ça donne au citoyen par rapport à ses soins de santé, que ça devienne... que ça vienne de la base plutôt que d'en haut?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Écoutez, sur qu'est-ce que ça donne, un processus démocratique, d'abord, c'est une participation citoyenne, c'est une implication des citoyens et citoyennes, localement, régionalement, à déterminer, à choisir qui vont les représenter sur différents... On fait la même chose aux élections provinciales, aux élections municipales, on décide qui, pendant un certain nombre d'années, vont nous représenter et vont être légitimés pour faire les choix en notre nom, bon. Les choix à l'égard de la santé ont pas toujours été ceux qu'on voulait mais, quand même, les gens avaient été légitimement élus.

n(16 h 40)n

Mais je pense que c'est, dans le fond, cette prise de conscience là, de la même façon que c'est un devoir pour chaque citoyen d'aller exprimer son droit de vote, c'est aussi un devoir et une façon de participer lors des élections, dans des... pour les conseils d'administration des établissements dans les différents collèges électoraux. Et, en ce sens-là, je pense qu'il y a pas eu suffisamment d'efforts de faits. Bien oui, on voit les publicités, là, dans les journaux, les régies régionales affichent le temps des élections, les établissements affichent aussi «c'est le temps des élections aux différents postes au conseil d'administration», mais on travaille pas ça comme on travaille les élections ailleurs, hein. On les travaille, les élections, ailleurs. Alors, pourquoi, là... Puis c'est, il me semble, éminemment important. Qui n'est pas passé par un établissement de santé ou n'aura pas à passer par un établissement de santé au cours de sa vie? C'est impossible. Tout le monde y passe. Alors, il me semble que c'est éminemment important de sensibiliser les gens, de conscientiser les gens à la nécessité de s'impliquer à ce niveau-là, de s'impliquer d'abord en élisant du monde puis peut-être éventuellement de s'y impliquer personnellement pour siéger au conseil d'administration. Si on ne nourrit pas l'intérêt, il ne se développera pas.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Je pense que la philosophie, l'idée derrière la tête du gouvernement est à l'effet que, lorsqu'il y a des représentants élus par la population ou les personnes directement intéressées dans l'institution, il y voit un risque qu'il y ait opposition de légitimité. Ça nous ramène à qui fait quoi? Parce que, effectivement, si l'établissement a les mêmes pouvoirs que la régie et la régie a les mêmes pouvoirs que le ministère, à un moment donné, il peut y avoir conflit de légitimités. Mais la réponse à ce problème de gouverne ne réside pas dans le qui nomme qui, mais dans le qui fait quoi. J'entends vos propos et j'y participe, mais dans la mesure où les gens peuvent s'approprier leurs institutions, avec les pouvoirs que cette institution a, qui doivent être complémentaires à ceux des autres institutions dans le réseau, et, de là, on ne verra pas... À la marge, il va y en avoir. À la marge, il y en a toujours, il ne faut pas s'en faire avec ça non plus. On ne doit pas être non plus omniprésent, à la marge, il reste quelques conflits, mais, pour l'essentiel, ce sera complémentaire parce que les pouvoirs auront été partagés.

D'ailleurs, la Conférence des régies est passée avant vous, la commission Clair disait la même chose. Il y a un rapport qui dort au ministère depuis 1996 sur les responsabilités à être revues, c'est toujours pas fait. J'en profite... Je vais faire un aparté. Je m'excuse, mais le ministre, tantôt, vous a dit qu'il s'inspirait directement de Clair pour le Forum, puis qu'il trouvait ça bien bon. Mais vous avez bien fait de lui dire: Bien, là, le Forum puis t'enlèves les élections, on y perd au change. Et il est toujours important, à chaque fois que le ministre va souligner ce que Clair dit, de rappeler que Clair a dit le 12 mai dernier: «La participation des citoyens est un des piliers de nos recommandations. Nous suggérerions que, dans les grands hôpitaux, seulement deux des 13 membres du conseil d'administration soient nommés et les autres choisis par mode électoral. Nous n'avons jamais recommandé qu'ils soient tous nommés», s'exclamait M. Clair.

Alors, juste pour remettre dans le contexte, je pense que vous n'êtes pas en opposition avec le rapport Clair, parce que personne n'est en opposition avec le choix que ce soit plutôt près des gens. D'ailleurs, Clair aussi parlait de revoir, comme je le disais tantôt, de revoir les responsabilités. J'ai posé des questions sur la pertinence que les gens s'approprient et participent à leurs instances. L'autre question, qui vous concerne beaucoup plus directement, qui est une bonne différence entre la loi actuelle et le projet, c'est celui d'avoir... Dans le projet actuel, c'est d'avoir des membres du personnel ? forcément de l'établissement ? sur le conseil, alors que là on choisit ? je pense que c'est pas dit clairement mais on comprend que c'est ça ? que ce sera, par exemple pour les infirmières, quelqu'un du territoire. Je ne pense pas que ce soit dit aussi clairement: à l'exclusion de quelqu'un de l'établissement. Je ne sais pas si c'est dit aussi clairement, mais je pense que la volonté, c'est que ce soit quelqu'un qui vienne du territoire mais pas de l'établissement sur lequel il siégeait au conseil d'administration. Alors, j'aimerais vous entendre de façon très précise sur cet aspect. Est-ce que vous considérez que c'est mieux qu'il y ait un établissement? Et surtout pourquoi? Quels sont les avantages et les désavantages d'une et l'autre formule?

Mme Boulanger (Sylvie): Voyez-vous...

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Oui, merci.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Allez-y. Non, ça va.

Mme Boulanger (Sylvie): Actuellement, dans la façon dont ça fonctionne, c'est une infirmière qui est au conseil d'administration de l'établissement, elle provient de l'établissement. O.K. Ce qui est prévu dans la loi ? puis là je suis pas capable de vous ressortir les articles de mémoire comme ça, là ? ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est qu'il va y avoir des infirmières aussi, mais une infirmière qui est du territoire, O.K.? Elle n'est pas de l'établissement. Il est prévu dans la loi que les gens qui sont des travailleurs de l'établissement ne peuvent pas siéger sur le conseil d'administration de l'établissement, ce qui veut donc dire... puis c'est là... d'où la liste des infirmières qui constitueraient la commission infirmière régionale: L'infirmière qui serait élue sur un conseil d'administration d'établissement serait choisie parmi les infirmières désignées dans cette liste-là, évidemment dans le territoire concerné, O.K.? Là, la désignation de la liste, on ne sait pas trop comment ça se ferait. Mais, en plus, quand t'es pas de l'établissement, t'as un regard critique, bien sûr, sur les soins et les besoins de la population, etc., mais tu l'as encore plus, le regard critique, quand t'es en dedans, quand tu les vois, les choses qui se passent, quand tu le vis, le terrain, quand tu les vis, les compressions, quand tu vis les situations de désorganisation des services dans l'établissement. C'est là que t'es plus critique, c'est là que ton apport comme ressource de la santé est beaucoup plus important, il me semble. En tout cas, chez nous, c'est ce qu'on souhaite, hein!

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Je vous ai parlé tantôt des ententes de gestion ? je pense que c'était ça ? qui ne doivent pas cacher le sous-financement. Vous en avez parlé un petit peu, des aspects financiers. Comment, à partir de la situation d'aujourd'hui... Parce qu'on peut s'imaginer qu'on est dans une situation... financement, admettons, et là on peut faire tous les scénarios, mais comment vous voyez la possibilité que ces ententes de gestion soient vraiment fonctionnelles, utiles? Je parle en termes de services pour le citoyen, là, je parle pas d'une entente de gestion qui permet de rencontrer les paramètres financiers décidés en début d'année. Ça, c'est une entente de gestion qui dit: Je veux arriver à un équilibre à la fin, et tu vas y arriver. Ça, c'est assez simple d'arriver à l'entente de gestion qui dit: Je te promets que t'as pas de déficit. C'est assez facile. Mais, lorsqu'elle est basée sur le service aux citoyens, cette entente de gestion, notamment s'il y a des indicateurs ? on verra quels sont les indicateurs là ? s'il y avait des indicateurs qui font l'affaire des citoyens, genre des urgences à 100 %, mettons, comment on peut y arriver dans le cadre du financement actuel?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Sylvie): Le financement actuel pose problème. Les établissements sont financés... Ça va peut-être changer maintenant, mais les établissement historiquement étaient financés sur la base historique, O.K., de distribution de soins, etc. Mais je veux juste... Puis je vais prendre à titre d'exemple... Il faudrait pas que le sous-financement chronique du réseau vienne dans le fond taxer un directeur, alors que dans le fond il n'était pas capable d'en faire plus, il n'était pas capable de réduire plus. L'établissement ? c'est Saint-Jean... c'est-u... Saint-Jean-sur-Richelieu ? qu'on a mis sous tutelle, qui a été pris en charge dans le fond par le gouvernement et à qui on a donné des budgets parce qu'il était sous-financé... Et c'était ça que le directeur disait: Il est sous-financé.

Bon, ceci étant dit, y a pas que ça, il y a des problèmes, il y a d'autres problèmes d'autre nature qu'on doit gérer et dont les gestionnaires doivent aussi être imputables, mais ça ne doit pas servir de cachette au sous-financement.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Pour prendre l'exemple de Saint-Jean, le plus cocasse là-dedans, c'est que le conseil d'administration avait refusé d'adopter un budget en équilibre parce qu'ils étaient forcés de couper les services et ils ne voulaient pas le faire. Le gouvernement les a mis en tutelle et, après ça, le gouvernement a reconnu que l'hôpital était très performant et il lui a donné un budget de la performance. Mais ce n'était pas pour revoir le sous-financement, parce qu'il était néanmoins sous-financé, mais c'était simplement pour dire: Vous étiez très bons, je vous donne un bonus, mais vous avez pas fait ce que je voulais, alors je vous mets sous tutelle. D'ailleurs, à mon avis, ça colore pas mal ce qu'est le projet de loi n° 28.

Si, avant, le pouvoir... ...venait de la base... Incidemment, les régies, pour voir leur constitution, il fallait d'abord voir les établissements parce que c'est les établissements qui fournissaient certains membres à la régie. Et là, c'est complètement inversé dans le projet actuel, c'est maintenant les régies qui sont les premiers éléments qui fournissent des effectifs au conseil d'administration des établissements. On voit bien qu'on est passé de la base vers le haut, du haut vers la base, et forcément, ça permet d'éviter les cas comme le conseil d'administration à Saint-Jean, qui a fait sa sortie. Et je pense que le projet de loi, c'est ça que ça touche là essentiellement pour permettre que la commande du ministre puisse se rendre jusqu'en bas sans qu'il y ait trop d'anicroches puis trop de personnes qui prennent la parole. Ça, c'est mon opinion.

Mais permettez-moi une question. Vous êtes des intervenants de premier ordre dans le système de santé. Si on se met à rêver et que vous étiez, vous, au gouvernement, puis qu'il y a les problèmes actuels ? on peut parler même de sous-financement, il y a des problèmes de pénurie... Le 5 mars dernier ? je me souviens toujours de la date, le 5 mars dernier ? l'ancien ministre de la Santé disait: On va engager du personnel de soutien pour permettre aux infirmières de se consacrer à 100 % à leurs tâches. J'ai demandé deux fois au ministre depuis ce temps-là: Combien est-ce qu'il y a d'argent puis combien de personnels de soutien vous avez engagés? La réponse est zéro, zéro. Admettons que vous êtes au gouvernement, ministre de la Santé, quel est le premier geste que vous posez considérant l'ensemble des problèmes qui peuvent exister dans la santé actuellement? Est-ce que c'est le projet de loi n° 28 ou c'est d'autre chose? Et, si c'est d'autre chose, c'est quoi?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Mme Boulanger.

n(16 h 50)n

Mme Boulanger (Sylvie): À mon avis, probablement pas ce projet de loi-là. Je pense qu'on a à travailler à reconstruire un réseau. Malheureusement, le réseau de la santé, sous la férule du déficit zéro, a subi d'incroyables transformations et s'est détérioré à un point tel que ? puis on l'a dit à plusieurs reprises ? c'est devenu critique non seulement d'y travailler, c'est même... Des fois, on est en déficientes par rapport aux services à donner parce qu'on a plus les ressources, on n'a pas ce qu'il faut pour le faire. Je pense que c'est important de redonner au citoyen la confiance en son réseau de santé, puis c'est dangereusement en train de se perdre maintenant, cette confiance qu'avaient les citoyens dans leur réseau de santé. On a d'abord à travailler là-dessus, mettre les ressources, donner les moyens aux ressources humaines qui sont dans le réseau d'être capables de donner leur prestation de services dans des conditions qui vont satisfaire la population et les satisfaire eux-mêmes, faire en sorte que, quand ils vont sortir du travail, ils vont être heureux d'avoir accompli leur journée, puis avoir eu le sentiment de bien travailler.

Je pense que c'est là-dessus que, comme organisation, on prioriserait, Nécessairement, ça voudrait dire d'y investir de l'argent parce que ? et on l'a dit aussi ? tout le Forum sur la planification de la main-d'oeuvre, les résultats qui en sont sortis, on y a participé de façon très intensive, à ce Forum-là, et une des solutions au problème est en effet d'y ajouter du personnel, du personnel de soutien ou du personnel qui permet dans le fond aux infirmières de faire leurs tâches et d'enseignement et de techniques de soins, du personnel qui pourra répondre... des réceptionnistes, des préposés, ces différentes catégories de personnes qui sont toutes autant utiles les unes que les autres dans le réseau, qui ont toutes leur place. Et je pense qu'il faut redonner les moyens à ce réseau-là de rétablir sa crédibilité.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: La réponse que vous me donnez à la question que je vous ai posée, c'est notamment de mettre en place le plan qui a été élaboré avec votre collaboration et le ministère. Et vous vous êtes assis un bon nombre de temps ensemble et vous avez dit: Bon, bien voilà, il y a une pénurie, là, comment est-ce qu'on la colmate, comment est-ce qu'on se concentre sur nos tâches, comment est-ce qu'on peut se donner de l'aide? Quand vous vous êtes assis ensemble, est-ce que vous vous êtes dit: C'est ça les chiffres précis, il y a tant de personnes qui coûtent plus, comme ça on va colmater la brèche, il y a tant d'argent que ça va coûter? Est-ce que vous avez envisagé des moyens d'action ou si c'était simplement un répertoire de mesures théoriques à adopter?

Mme Boulanger (Sylvie): Dans chaque... Évidemment, j'ai pas le plan avec moi puis je ne l'ai pas non plus... J'ai tellement beaucoup de choses en tête que je l'ai pas par coeur dans ma tête. Le plan prévoit des stratégies d'action, O.K.? Il y a différentes étapes à faire. Chaque établissement doit prendre sa responsabilité à l'égard de ce plan-là, chaque régie régionale aussi sur son territoire de régie doit prendre ses responsabilités à l'égard de ce plan-là. Dans le fond, ça appartient ? je veux pas dire à tout le monde puis à personne ? mais ça appartient vraiment à tout le monde d'y travailler et de faire en sorte qu'on puisse avoir des résultats. Vous savez la situation de pénurie dans le réseau, c'est pas pour rien qu'on vit ça maintenant, avec toutes les coupures qu'on a connues depuis 1995 et même avant puis les contingentements dans les lieux d'enseignement, on n'était pas en train de créer de la relève, on était en train de raréfier le personnel qui allait arriver dans le réseau maintenant. On était en train de couper, couper les valves, fermer les valves complètement.

Alors, c'est tout ça qu'il faut rétablir maintenant. Alors, on a beaucoup, beaucoup de travail à faire et, en ce sens-là, je pense qu'il faut le faire la main dans la main avec les instances, les différentes instances appropriées, nos vis-à-vis dans les établissements, dans les régies, au ministère. Et on doit travailler fort là-dessus. Mais vraiment, il faut mettre de l'argent.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Merci, Mme le Présidente. Je constate et j'ai compris que, si la Fédération avait la possibilité de proposer des choix à la société québécoise, ce serait pas le projet de loi n° 28 qui serait la première chose sur la table, probablement que ce serait peut-être la priorité 3, et que ce serait pas dans le sens du 28 mais dans le sens d'une amélioration de l'appropriation par la communauté de ses instances, une clarification des responsabilités entre le niveau local, régional et national, et l'aspect de financement qui permettrait, en tout cas pour ce qui est de la pénurie infirmières ? puisque c'est de ça dont on parle ? le temps que ça va prendre pour régler notre déficit qu'on s'est donné, de main-d'oeuvre depuis les dernières années, essayer d'avoir de plus en plus de collaboration pour des tâches qui sont pas des tâches spécifiquement infirmières et vous libérer pour faire du travail à 100 % dans la livraison des soins. En ce moment, je pense bien que c'est pas... Comme vous faites le travail des autres en plus du vôtre, vous êtes pas à 100 % dans votre...

Mme Boulanger (Sylvie): ...

M. Fournier: C'est très difficile puis je pense que, par comparaison même avec les autres provinces au Québec, je pense que c'est là où on retrouve le niveau où les infirmières consacrent le plus... le moins de leurs tâches à des premiers soins parce qu'ils sont obligés de donner de l'administratif plus qu'ailleurs, en tout cas, et je pense que c'est pour ça que le rapport souhaitait d'avoir des gens qui l'entourent.

Alors, je comprends, Mme la Présidente, suite à l'intervention de la Fédération, qu'il nous faudra continuer d'éveiller le gouvernement sur l'importance de soutenir le travail que font des acteurs du réseau, si on veut avoir des résultats à l'égard des soins. Pas à l'égard de qui est nommé par qui mais à l'égard des soins qui sont donnés à la population. Ça, c'est la première priorité que, nous, nous avons quand on regarde un projet de loi et on pense que ce projet de loi là ne répond pas à la préoccupation des Québécois en ce moment.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Alors, Mme Boulanger, je vous remercie pour votre participation à cette commission. Je remercie Mme Comtois également et, bien sûr, je suspends les travaux pour quelques minutes, mais j'inviterais l'Association des hôpitaux et les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec à bien vouloir prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 57)

 

(Reprise à 17 h 1)

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux afin d'entendre les représentants de l'Association des hôpitaux du Québec. Alors, je cède la parole à M. Jean-Paul Cadieux, qui est président du conseil d'administration de l'hôpital Jean-Talon et président du conseil d'administration de l'AHQ. M. Cadieux, je vous demanderais de bien vouloir nous présenter les personnes qui vous accompagnent et, par la suite, vous aurez une vingtaine de minutes pour la présentation de votre mémoire. Alors, je vous cède la parole.

Association des hôpitaux du Québec (AHQ)

M. Cadieux (Jean-Paul): Je vous remercie, Mme la Présidente. Alors, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, ça nous fait plaisir d'être reçus par cette commission et, effectivement, permettez-moi de vous présenter les membres qui m'accompagnent: à ma droite immédiate, M. Serge Vermette, qui est membre du conseil d'administration du Centre hospitalier affilié universitaire de Québec, ici, et qui est aussi premier vice-président du conseil de l'Association; et, à sa droite, Dr Laurent Boisvert, qui est adjoint au vice-président exécutif de l'Association, responsable des affaires clinico-administratives; et, à ma gauche, Me Sylvain Poirier, du cabinet Heenan, Blaikie, qui est responsable des affaires juridiques de l'Association.

Le 15 mai dernier, a été déposé devant l'Assemblée nationale un projet de loi qui, s'il était adopté dans sa version actuelle, viendrait bouleverser plus de 30 années d'histoire de notre système de santé. En fait, ce projet viendrait rompre avec une tradition, bien plus longue encore, de prise en charge par les communautés des questions qui concernent leur bien-être, leur éducation et leur développement. L'Assemblée nationale se retrouve donc en présence d'un projet de loi qui, bien qu'il ait été annoncé lors de l'ouverture de la session il y a à peine quelques semaines, va bien au-delà de ce qui pouvait être anticipé, même par les observateurs les mieux informés. Elle se trouve au surplus invitée à en débattre suivant un échéancier beaucoup plus court que ce qui serait normalement requis. Le projet de loi n° 28, malgré le caractère technique de ses dispositions, n'a rien d'anodin, et il est éminemment dommage qu'il faille en débattre avec précipitation, comme si son adoption immédiate était essentielle au bon fonctionnement de tout le réseau de la santé et des services sociaux. Il faut bien le dire, nous sommes devant un projet de loi qui est prématuré, fondé sur des choix politiques ambigus.

L'Association des hôpitaux regrette vivement que les mécanismes habituels de consultation préalable n'aient pas été sollicités. Certes, on pourra répondre que bon nombre des mesures introduites par le projet de loi s'inspirent directement des observations de la commission Clair et que cette commission a procédé à de vastes consultations qui peuvent fort bien remplacer les mécanismes plus traditionnels, mais ces réponses seraient pas satisfaisantes. Il faut en effet rappeler que la commission écrivait, à la page 201 de son rapport, et je cite: «Toute décision visant à modifier les structures et les mécanismes de gouverne doit soutenir les changements souhaités.» Fin de la citation.

Nous arrivons donc à la conclusion que ou bien le projet de loi n° 28, sous couvert de modifications de la gouverne des établissements et des régies régionales, constitue l'expression des choix politiques de clarification de ces responsabilités, auquel cas il constitue une démarche implicite de centralisation, ou alors le projet de loi est tout simplement prématuré. C'est cette seconde hypothèse que nous allons retenir, tant il serait inélégant de penser que le projet cache en fait des choix qui n'auraient pas été débattus selon les principes traditionnels de notre société démocratique. Il reste que toutes les ambiguïtés ne sont pas dissipées, loin de là, et que les enjeux soulevés par le projet de loi n° 28 vont bien au-delà de la seule négociation de compromis de dernière heure qui pourraient le rendre tout juste acceptable.

C'est pourquoi, comme première et principale recommandation, nous demandons fermement que le projet de loi n° 28 soit retiré de l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. À défaut, il conviendrait à tout le moins que son débat soit reporté pour toute la période requise pour en clarifier les finalités et en préciser les objectifs et les moyens. Si telle n'était pas la décision de la majorité parlementaire et si l'empressement de procéder à l'adoption du projet de loi n° 28 devait persister, il faudrait encore que la version déposée de ce projet soit considérablement modifiée pour que ce projet devenu loi soit reçu avec un minimum d'adhésion dans les milieux où il devra s'appliquer.

Conformément au rôle qu'elle joue depuis plusieurs décennies, notre Association entend maintenant proposer ces amendements et modifications essentiels. Mais, avant de les énoncer, il faut rappeler certains choix fondamentaux qui ont marqué l'évolution du système québécois de santé depuis sa mise en place il y a près de 30 ans. Ces choix reposent sur deux principes cardinaux: d'abord, la gestion communautaire des établissements et le principe de l'autonomie structurelle et fonctionnelle de ces établissements.

Le principe de la gestion communautaire constitue un véritable leitmotiv qui a été repris dans tous les travaux d'étude et d'analyse de notre système de santé qui ont eu cours depuis sa mise en place en 1971. La gestion communautaire est devenue une caractéristique, un trait distinctif de la gouverne de nos établissements de santé. Ce principe de gouverne de la gestion communautaire repose sur l'équilibre entre l'apport de la communauté interne de l'établissement et celui de la communauté externe. S'agissant de la communauté interne, le principe est fondé sur la reconnaissance que les personnes qui oeuvrent au quotidien dans un établissement doivent jouer un rôle dans son orientation et dans la réalisation de ses missions. S'agissant de la communauté externe, le principe reconnaît la nécessité de donner aux clientèles desservies et aux citoyens un rôle effectif pour maintenir l'adéquation entre l'offre de services et les besoins. Le projet de loi n° 28 rompt brutalement avec le principe de la gestion communautaire, alors que, de manière générale, les communautés, autant internes qu'externes, sont dépossédées de leur rôle de désigner leurs représentants.

La version actuelle du projet de loi n° 28 vient aussi marquer un autre coup de sape dans le principe de l'autonomie des établissements. En venant bouleverser la gouverne des centres hospitaliers et en transformant les régies régionales en véritables mandataires du gouvernement, le projet de loi n° 28 vient ajouter aux mesures qui ont consisté à limiter la portée fonctionnelle de l'autonomie structurelle des établissements hospitaliers et, à la vérité, de tous les établissements du réseau. Pourtant, depuis les toutes premières interventions de l'État dans l'organisation et le fonctionnement des établissements de santé, tout particulièrement dans ceux des hôpitaux, le principe juridique de l'autonomie de ces établissements a toujours été reconnu et réitéré. Les établissements sont des personnes morales distinctes de l'État. Ce statut leur est reconnu par la loi actuelle, quelle que soit l'époque où ils ont été constitués.

Toutefois, les mesures contenues dans le projet de loi ajoutent un maillon de plus à une longue chaîne qui encercle désormais les établissements de santé et en particulièrement les centres hospitaliers. Puisque, au demeurant, les régies régionales deviendront, autant en droit qu'en fait, des mandataires du gouvernement, la dynamique des rapports locaux, régionaux et nationaux placera désormais en vis-à-vis l'État et les établissements. Ces derniers se trouveront privés de toute possibilité d'orienter leur devenir et en seront réduits à exécuter fidèlement des décisions qu'ils n'auront pas prises et dont ils ne pourront discuter librement.

n(17 h 10)n

L'Association des hôpitaux du Québec ne peut cautionner une telle approche. L'évacuation des deux principes qui ont été la clef de voûte de la distribution des soins et des services de santé met en péril le réseau lui-même. Les soins de santé sont des soins de proximité qui doivent être dispensés dans des lieux gérés par des décideurs de proximité et qui disposent d'une marge d'autonomie suffisante pour faire les choix requis par cette relation de proximité. Il nous reste maintenant à préciser comment ces principes pourraient être rétablis dans le cadre du projet de loi n° 28 si celui-ci devait être adopté.

Alors, nous allons d'abord aborder la description détaillée des modifications qui doivent être apportées au texte tel que proposé. Celles-ci, on les regroupe en trois volets. Le premier concerne la composition des conseils d'administration. Le second concerne les rapports entre les établissements et les régies régionales. Et enfin, un troisième volet est relatif à certaines questions spécifiques.

Le projet de loi n° 28 rompt avec les années de continuité en ne préservant pas la participation au conseil d'administration de l'établissement des professionnels et des employés qui travaillent ou exercent leur profession dans l'établissement. Dès 1962, la Loi des hôpitaux assurait aux médecins une représentation formelle au sein du conseil d'administration de l'hôpital où ils exerçaient leur profession. Par la suite, se sont ajoutés les infirmières, les autres professionnels et enfin les employés généraux. Nos établissements, qui sont devenus de véritables entreprises de soins, doivent pouvoir compter sur l'expertise de celles et de ceux qui, rendant au quotidien les soins et les services, sont déjà imputables de leur qualité. L'Association est d'avis que la participation de ces personnes à la gestion des établissements doit être maintenue pour que leur implication dans une organisation efficace et efficiente des soins de santé continue à être reconnue. Nous demandons donc que les professionnels de la santé et les membres du personnel continuent à jouer leur rôle dans la gestion et l'orientation des établissements dans lesquels ils oeuvrent et puissent y désigner un représentant au conseil d'administration.

D'autre part, dès 1970, la participation de la population à la gestion directe des établissements de santé et de services sociaux apparaissait aux membres de la commission Castonguay-Nepveu comme une condition importante qui permettrait l'amélioration de la qualité des services. Par opposition à la simple consultation, la participation de la population au processus décisionnel d'un établissement public permet aux citoyens d'influencer les administrateurs et les gestionnaires ainsi que d'exprimer leurs priorités sur la nature et la qualité des soins de santé. En d'autres mots, il est souhaitable que les citoyens bénéficiaires de soins de santé puissent, par leur participation directe au sein des conseils d'administration des centres hospitaliers, s'assurer du respect de l'adéquation entre les services dispensés ou offerts et les besoins perçus et exprimés par la population. Les représentants de la population sont des personnes engagées et reconnues par leur milieu. Ils ont développé un généreux sentiment d'appartenance à l'égard des centres hospitaliers qui desservent leur communauté. L'Association estime donc que l'engagement et la participation de la population auprès des établissements doivent être maintenus et encouragés, et, de ce fait, demande que les membres des conseils d'administration de chaque centre du Québec puissent procéder à la cooptation de cinq personnes issues de la population de leur territoire.

En ce qui concerne les personnes morales maintenant, l'histoire du Québec démontre que les fondateurs des hôpitaux, issus non seulement des communautés religieuses, mais aussi de la société laïque, ont joué un rôle de premier plan dans le maintien et l'amélioration de la santé des Québécois. Plus particulièrement, ces fondateurs, généralement constitués en personnes morales sans but lucratif, sont à l'origine de la mise en place des établissements hospitaliers qui, en 1971, ont constitué l'assise du réseau. Les personnes morales d'aujourd'hui sont encore composées de membres dont la contribution est historique. Toutes ces personnes ont largement participé, dans leur communauté respective ? et ici, je parle de toute forme de communauté ? par leur générosité et engagement, au développement d'établissements de soins de santé performants. Constituant le tiers du total des membres des conseils d'administration en 1971, le projet de loi n° 28 ne prévoit plus qu'un seul siège pour la représentation des personnes morales. C'est à juste titre que les membres fondateurs et leurs représentants éprouvent un vif sentiment de dépossession et d'exclusion. Reconnaissant le rôle historique essentiel des membres des personnes morales dans l'évolution du régime de santé du Québec, nous demandons que leur représentation actuelle aux conseils d'administration des établissements hospitaliers soit maintenue et que trois personnes soient nommées par les membres d'une personne morale désignée.

Par ailleurs, le choix politique de confier aux régies régionales ainsi qu'au gouvernement le pouvoir discrétionnaire de désigner un nombre important d'administrateurs des établissements de santé constitue un revirement significatif des politiques antérieures. À défaut d'être explicitement motivé, il ne peut exprimer qu'une réprobation du travail accompli par ceux qui, jusqu'à ce jour, étaient autrement nommés ou élus. Il constitue une immixtion directe dans la gestion des établissements. Ce choix est remarquablement perturbateur et peut emporter le désengagement immédiatement de nombreuses personnes qui croyaient encore pouvoir contribuer au développement des établissements. L'approche est carrément tutélaire pour les membres des communautés, qu'elles soient culturelles ou linguistiques, qui jugeaient essentiel de maintenir un lien direct avec leurs établissements de santé. Une vision beaucoup plus nuancée s'impose. Disposée à reconnaître le souhait du gouvernement de participer à la nomination de certains administrateurs d'établissements, l'Association propose que, dans le cas des centres hospitaliers, deux personnes soient désignées membres des conseils d'administration par les régies régionales.

Et pour mieux illustrer l'ensemble de nos recommandations en ce qui a trait à la formation des conseils d'administration, nous proposons que le conseil d'administration d'un établissement soit composé de 14 à 17 membres, à savoir: d'abord, une personne désignée par le comité des usagers de l'établissement; puis deux personnes désignées par la régie régionale dont, le cas échéant, lorsque l'établissement a une vocation suprarégionale, une personne choisie parmi celles désignées par les conseils d'administration des régies régionales concernées par cette vocation suprarégionale; puis une personne choisie parmi les médecins, dentistes et pharmaciens qui exercent leur profession dans l'établissement; puis une personne choisie par les infirmières et infirmiers qui travaillent pour l'établissement; puis une personne choisie parmi les personnes membres du conseil multidisciplinaire de l'établissement; puis une personne désignée par et parmi les autres personnes qui travaillent pour l'établissement; le cas échéant, une personne désignée par le conseil d'administration de la ou des fondations de l'établissement; le cas échéant aussi, trois personnes nommées par les membres de la personne morale ? et ici, il faut rappeler que le tiers des établissements membres de l'Association, à savoir à peu près 40 sur 120, ont encore une corporation; puis cinq personnes de la population du territoire dont une personne choisie parmi celles désignées par et parmi les conseils d'administration des établissements de la région à l'exception, dans tous les cas, d'une personne qui travaille pour l'établissement ou qui y exerce sa profession; et enfin, le directeur général de l'établissement.

Nous avons parlé ici principalement pour l'ensemble des établissements. Par contre, on va faire une petite distinction quant aux centres hospitaliers à vocation universitaire. À ce moment-ci, l'Association fait siennes des représentations, conclusions et recommandations qui sont contenues au mémoire du Regroupement des centres hospitaliers universitaires qui vous sera présenté demain, à savoir: d'abord, eux aussi avisent du retrait du projet de loi n° 28 ou, à défaut, de son report jusqu'à ce que la réflexion du comité Carignan et ses instances ministérielles soit achevée. Dans le cas contraire, l'Association propose que le conseil d'administration des centres hospitaliers à vocation universitaire soit composé de personnes à partir de quatre catégories, à savoir la vocation universitaire, le gouvernement ? et ici, on implique soit régies régionales aussi bien sûr ? la communauté externe et enfin la communauté interne.

En ce qui a trait à la composition du conseil d'administration des régies régionales. Considérant que l'ensemble de leurs fonctions concernent directement les établissements et justifient pleinement leur participation aux délibérations, nous recommandons que six personnes désignées par les établissements et choisies parmi l'ensemble des membres des conseils d'administration des diverses catégories d'établissements de la région fassent partie du conseil d'administration de la régie régionale.

Le projet de loi n° 28 entend conférer explicitement aux régies des pouvoirs d'enquête et de surveillance des établissements qui sont déjà dévolus au ministre en vertu des articles 489 et suivants de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Le procédé est au moins inutile, puisque déjà prévu à l'article 489.1 de la loi qui a été introduit en juin 1998. Le procédé est aussi tout à fait inquiétant au regard des pouvoirs extraordinaires qui sont confiés aux régies régionales en matière d'enquête.

n(17 h 20)n

Pour aller à l'essentiel, le projet de loi n° 28 traite le gouvernement et les régies régionales sur le même pied lorsqu'il s'agit d'enclencher des mesures exorbitantes des pratiques administratives usuelles. Au surplus, certains des motifs sur lesquels la discrétion de la régie peut se fonder sont tellement vagues et imprécis qu'il serait à toutes fins utiles impossible de contester la légalité des gestes entrepris par celle-ci. Pour ces raisons, l'Association des hôpitaux du Québec demande instamment que l'article 76 du projet de loi n° 28 soit retiré purement et simplement.

Avant de terminer, je désire attirer l'attention de la commission sur d'autres enjeux que nous avons mis en évidence dans notre mémoire que vous avez en main. Le temps manquant, je devrai les traiter rapidement, mais ils ne sont pas moins importants pour autant.

Nous insistons dans notre mémoire pour que la notion d'entente de gestion soit appliquée au sens premier du mot «entente» qui suppose une convention librement consentie et qui comporte des devoirs et des obligations auxquelles souscrivent réciproquement toutes les parties. Nous n'obtenons pas cette assurance à la lecture de la section sur la gestion et la reddition de comptes.

Par ailleurs, nous demandons fermement le retrait du premier alinéa de l'article 182.6 introduit par l'article 34 du projet de loi, article qui énonce un ensemble de mesures punitives à l'intention du directeur général et qui, à notre avis, véhicule des préjugés négatifs.

Nous rejetons tout autant l'article 7 du projet de loi qui prévoit que le ministre peut, de sa propre initiative et après consultation, appliquer des mesures pour l'unification des conseils d'administration de certaines catégories d'établissements. Nous proposons plutôt que, conformément à la loi actuelle, cette initiative relève des régies régionales qui, après consultation des établissements concernés, peuvent proposer au ministre que ces établissements soient administrés par le même conseil d'administration.

Enfin, nous demandons le maintien d'une disposition de la loi actuelle qui exclut les territoires de la Communauté urbaine de Montréal et de Québec pour les regroupements des établissements locaux sur la base des territoires de CLSC, quitte à faire les adaptations requises par la récente loi sur les fusions municipales, et ici je me réfère au premier alinéa de l'article 126.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et l'article 5 du projet de loi n° 28.

Et pour conclure, nous réitérons avec force le souhait que l'Association des hôpitaux... le souhait de l'Association, que ce projet de loi soit mis à l'écart et que s'engagent de véritables discussions de partenaires entre les instances concernées pour trouver des solutions durables aux difficultés autant d'aujourd'hui que de demain. S'il fallait, pour des raisons obscures, renoncer à cette idée, l'Association souhaitera que la sagesse de l'Assemblée nationale lui fera retenir l'essentiel des amendements et des modifications suggérés dans ce mémoire.

Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, de votre attention, et nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): C'est moi qui vous remercie, M. Cadieux, pour la présentation de ce mémoire, et je cède la parole sans plus tarder au ministre.

M. Trudel: M. le président et les gens qui vous accompagnent, bienvenue. Un mémoire bien documenté sur des sujets sur lesquels nous avons eu déjà des discussions et des échanges, qui reflète bien, oui, les échanges que nous avons eus et les suggestions que vous formalisez davantage maintenant dans ce document.

Une des recommandations, je pense, les plus centrales en termes de... ? et vous me direz si c'est juste de le percevoir comme ça ? en termes de processus, en particulier en ce qui concerne la participation de la population, c'est que les membres du conseil d'administration puissent être cooptés par les membres du conseil d'administration qui sont en place. C'est ça?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): C'est pas tout à fait ça, parce qu'il faut pas penser seulement qu'en fonction de ce qui peut se faire maintenant...

M. Trudel: Plus tard.

M. Cadieux (Jean-Paul): ...il faut penser en fonction de ce qui se fera au-delà des personnes qui présentement sont en place. D'accord? Alors, c'est pourquoi ce qu'on demande, c'est que ça soit intégré dans le texte de la loi. On vous fait confiance, vous, tant et aussi longtemps que vous allez être là, mais, au-delà de ça... Alors, ce qu'on demande là, c'est que ça soit inclus. Ce qui fait que ce que nous proposons, comme on le voit, il y a d'abord une dimension de communautés internes et il y a une dimension de communautés externes, et grosso modo, c'est que la communauté interne qui soit ici de l'établissement participe à la cooptation des membres ou de la communauté externe, si je puis dire. Fondamentalement, c'est ça qui est notre présentation. Alors, dépendant du comment la transition pourrait se faire, on va comprendre que, si ce sont les membres actuels qui se retrouvent dans le nouveau contexte, ils vont automatiquement participer. Mais ce qu'il faut retenir, c'est les personnes qui vont représenter la communauté interne qui vont participer à la cooptation des membres de la communauté externe.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: Ça m'apparaît, au moment où on se parle, une suggestion pour laquelle il va falloir accorder une très grande attention, parce que, pour assurer la continuité historique, coopter par ? on va prendre vos mots ? la communauté interne et la communauté externe... ça m'apparaît être comme une nécessité historique que, dans les règles transitoires, d'abord, pour le premier conseil d'administration renouvelé, ce soit formellement indiqué et qu'on puisse, oui, l'indiquer pour la suite, à long terme, dans la loi. C'est une suggestion, une précision qui retient mon attention, je vous le dis très ouvertement, qui retient mon attention, c'est une précision qui m'apparaît à ce moment-ci nécessaire pour assurer et atteindre l'objectif de la cooptation par la communauté des membres, de la communauté à l'interne et à l'externe, des membres qui vont composer, de la communauté au total, l'administration de l'hôpital ou du CLSC, mais de l'hôpital en particulier ici, pour assurer la continuité historique. En somme, je fais un petit crochet et je dis oui.

Deuxièmement, maintenant, sur la représentation ? je vais prendre votre langage, là ? de la communauté interne, il y a une représentation clinique: infirmières, médecins, qui est déjà prévue là, au projet de loi qui a été déposé. Vous suggérez que nous reprenions la représentation au conseil d'administration de l'hôpital d'autres groupes, par exemple les employés généraux de l'hôpital et d'autres groupes aussi, là, le multidisciplinaire que vous avez évoqué. Beaucoup de personnes ont observé qu'il y avait là une zone... Le meilleur mot qui a été employé, mais je ne pense pas que ce soit le meilleur de notre langue, est «conflit d'intérêts», puisque ces gens-là étaient représentants à titre d'autres intérêts et que, pour l'administration générale de l'hôpital, ça pouvait présenter un grand nombre de problèmes. Comment vous en êtes arrivés à la résolution de cela en disant: Non ? parce que c'est votre suggestion ? retenez que les groupes d'employés devraient avoir leurs représentants au conseil d'administration?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Je vais répondre en deux dimensions à votre question. D'abord, établissons une chose aussi, c'est que les propositions qui sont faites ici sont faites en supposant que vous allez de l'avant avec le projet de loi. Notre première recommandation était de dire: C'est pas ça qui est la priorité, il y a bien d'autres choses sur lesquelles on pourrait travailler. Mais, si on est confrontés à ceci, nos recommandations s'inscrivent à ce niveau-là.

On a fait une consultation rapide, étant donné les délais assez courts, on a fait une consultation rapide, et l'ensemble, autant le comité de travail... une consultation auprès de l'ensemble de nos membres qui a été faite et, ensuite, deux conférences téléphoniques du conseil d'administration nous ont amenés à ces conclusions-là en disant que, quand on regarde les avantages et les inconvénients de la participation de la communauté interne, identifiés par les différentes catégories d'employés, lorsqu'on regarde les avantages et les inconvénients, il nous apparaît que les avantages sont supérieurs aux inconvénients, d'une part. Et, pour appuyer ça, si je regarde mon expérience personnelle, puis mon collègue, ici, qui est au CHA de Québec, ici, quand je regarde mon expérience personnelle, je peux vous dire que, plus d'une fois, les représentants de la communauté interne, qu'ils soient les infirmières, comme les conseils multi, ou quoi que ce soit, ont fait des interventions qui ont amené les administrateurs dits externes à réfléchir et à pousser beaucoup plus loin, et donc à enrichir une réflexion puis finalement à enrichir une décision. Alors, pour ces raisons, on avance ce qui est avancé dans le mémoire ici.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

n(17 h 30)n

M. Trudel: Ça laisse réflexion, votre réponse. Allons-y

aussi, parce que le temps file rapidement, sur ce qu'on pourrait appeler, je pense, les relations avec l'instance régionale. Au niveau des pouvoirs supplémentaires qui sont accordés aux régies régionales, j'ai cru donc y voir que, pour vous, c'est pas souhaitable qu'on ajoute ces pouvoirs, par exemple en termes d'enquête et de surveillance, ces pouvoirs qui appartiennent déjà au national, au niveau du ministère, qu'on les applique également en région. Vous avez pas l'impression que, lorsque ces principes doivent s'appliquer, et c'est jamais dans des circonstances heureuses, c'est toujours dans des circonstances malheureuses... vous n'avez pas l'impression qu'on élève les chances que la lecture qui soit faite, en termes d'enquête et de surveillance, par la région même, par des gens de la région ou par le mandat donné par les régions, ou par la région ? une région incluant Montréal ou le territoire donné ? qu'on élève la chance d'une meilleure compréhension de la situation et des réorganisations, des redressements ou des actions qu'il y a à prendre? Au lieu que ce soit au niveau national, toujours quelqu'un comme Dieu le Père qui arriverait au-dessus.

M. Cadieux (Jean-Paul): Oui, mais on part du projet de loi tel qu'il est libellé. On sait que le ministère nomme l'essentiel des membres de la régie régionale, dans le projet de loi. Au niveau de la régie régionale, la régie, avec les établissements dans le territoire, ça doit fonctionner en partenariat. Or, comment est-ce que, une journée, la régie peut discuter avec un établissement comme partenaire puis, à un moment donné, la régie arriver comme juge parce que: Bien, voici, il y a quelque chose qui se passe, et là la régie doit s'imposer avec les pouvoirs d'enquête qu'on lui confère? Ça, ça nous apparaît assez difficile à être vu. Et c'est ce sur quoi on se prononce principalement ici.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Cadieux (Jean-Paul): Dans le meilleur contexte, dans le meilleur contexte idéal qu'on pourrait souhaiter, oui, effectivement, ce que vous dites, je ne peux pas, dans le contexte idéal... mais, dans la réalité, en somme, c'est qu'à un moment donné la régie va devoir être juge et partie, si je peux dire, juge devant les établissements avec lesquels elle doit travailler en partenariat. On essaye de s'imaginer comment ça peut être, comment ça peut se vivre, ça.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: Mais c'est la même chose au niveau national, je veux dire, comme l'allocation des ressources prend son origine dans les taxes et impôts, on finit par se retrouver en termes de juge et partie.

M. Cadieux (Jean-Paul): Voyez-vous, c'est que, dans le contexte actuel, les régies... Étant dans un contexte qui favorise ce travail de partenariat, les régies et les établissements arrivent à surmonter un paquet de problèmes, on peut les surmonter dans le contexte actuel. Si on donne aux régies des pouvoirs de commission d'enquête ni plus ni moins, on s'interroge à savoir: Est-ce que ce contexte-là va continuer de prévaloir, et un contexte qui est éminemment positif à nos yeux?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: Je retiens les explications, là, pour la réflexion lorsqu'il s'agira de tirer les conclusions, mais je renote quand même que ce pouvoir donné aux régions, à la régie régionale, ce n'est retenu, ce ne serait retenu, par exemple, que lorsqu'un établissement ne respecte pas la loi. C'est pas un pouvoir que tu exerces comme cela, là; il est balisé. Lorsque je lis ici, à l'article 414, là, sauf erreur, c'est lorsqu'il ne respecte pas la loi...

«Enquête et surveillance.

«La régie régionale peut exercer un pouvoir de surveillance de la façon prévue à l'article 489, faire enquête ou charger une personne qu'elle désigne pour faire enquête dans les cas suivants:

«lorsqu'un établissement ne respecte pas la loi;

«lorsqu'un établissement tolère une situation susceptible de compromettre la santé ou le bien-être...»

Etc., il y en a quatre, alinéas à l'article.

M. Cadieux (Jean-Paul): Mais, si, M. le ministre, c'est pour être d'intervention si exceptionnelle, comme vous dites, lorsque seulement... Ce pouvoir-là vous appartient déjà. Pourquoi le déléguer d'une façon courante aux régies régionales, d'une part?

M. Trudel: On est trop régionalistes, puis c'est pour ça.

M. Cadieux (Jean-Paul): Mais peut-être que mon collègue, M. Vermette, aurait quelque chose à rajouter là-dessus, si vous permettez, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui. Monsieur?

M. Cadieux (Jean-Paul): Vermette.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Vermette? Oui, à vous la parole, M. Vermette.

M. Vermette (Serge): Si vous me permettez. Peut-être que nous avons mal compris le projet de loi, mais, nous, ce qu'on a compris, c'est que le ministre a un pouvoir d'enquête, mais pas n'importe quel pouvoir d'enquête, un pouvoir d'enquête d'une commission d'enquête, donc tu es moins contraignable. Ça, ça va... Le ministre a la responsabilité d'administrer la loi. Qu'on confère aux régies, qu'on délègue aux régies ce même pouvoir en vertu, en plus, de critères plus ou moins flous fait en sorte que les établissements vont être assis à signer des ententes de service avec des régies, à discuter en partenariat avec des régies pour mettre en place des programmes dans leur région et, un jour, ils vont se retrouver assis devant leur juge, le commissaire-enquêteur, qui va dire: Aujourd'hui, je mets mon chapeau de commissaire-enquêteur, je peux contraindre tous les témoins à venir enquêter sur votre établissement sur des choses dont j'ai eu témoin... j'ai eu connaissance dans le cadre de nos échanges. C'est un gros, gros, gros pouvoir judiciaire conféré aux régies régionales et ça sabote la relation qu'on veut établir entre les régies régionales et les établissements. Laissons ça au ministre qui est à l'extérieur et qui, dans des cas extrêmes, vient enquêter, arbitrer, comme ça se fait, comme ça s'est fait déjà quand le ministre délègue un enquêteur dans une institution, mais pas aux régies régionales, là. Ce qu'on vous soumet, c'est que ça tient pas la route, cette histoire-là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le ministre.

M. Trudel: C'est en plein le sens de la décentralisation, et la question se pose, oui, la question se pose, vous avez raison, la question se pose: Est-ce qu'on a... est-ce que ça va dans la bonne direction de confier autant de pouvoir, parce que c'est pas... c'est pas un pouvoir mince, et vous avez raison, c'est pas un pouvoir mince, on le disait tantôt avec les régies régionales: Il y a aucun pouvoir qui est retiré aux régies régionales de la santé et des services sociaux, puis on en ajoute de nouveaux, et ce sont des pouvoirs significatifs, significatifs, par exemple, au sens où vous venez d'en faire l'interprétation comme illustration.

Sur le plan du droit, en tout cas, nous allons... c'est pas parce qu'on a peu de minutes, comme vous disiez tantôt, avec votre mémoire... on va relire ça avec une très, très, très, très grande attention, parce qu'il faut quand même que tous les principes de l'équité, de la justice et de l'exercice de ces pouvoirs soient dans un cadre qui puisse permettre d'atteindre l'objectif et pas le dépasser. Alors, ça, on va relire ça avec très, très grande attention. Mais, je dirais, je conviens qu'il s'agit d'un pouvoir énorme qui est délégué aux régies régionales de la santé et des services sociaux à l'égard de la gestion et des résultats.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Trois minutes.

M. Trudel: Trois minutes. Fondation, personne morale. Dans la mesure où on se retrouverait maintenant, de la communauté interne et de la communauté externe, à 15 ou à 17 personnes suivant si on est à statut universitaire ou pas, qu'il y ait toujours un représentant au conseil d'administration de la part de la fondation, des fondations, et de la personne morale, ça vous apparaît pas être suffisant pour assurer la continuité historique, étant entendu qu'il y aurait moins de personnes autour de la table, et que là nous sommes dans quelque chose comme 35 à 40 établissements, une quarantaine d'établissements... ça vous apparaît pas suffisant de garantir la présence des fondations et des personnes morales au conseil d'administration sur, on va dire, 14 personnes, et qui deviendra 15 lorsqu'on y additionnera le directeur général que vous allez engager? C'est pas suffisant, ça?

n(17 h 40)n

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Je voudrais faire une distinction, si vous permettez, entre les fondations puis la personne morale. Vous permettez? D'accord?

Une voix: Oui.

M. Cadieux (Jean-Paul): Parce que, en somme, ça s'applique pas au niveau de la fondation, parce que, dans le projet, il y a déjà une personne, puis nous parlons d'une personne. Alors, on s'entend là-dessus. C'est plus au niveau des personnes morales, d'accord? On parle de trois... nous parlons de trois, vous parlez de une, je crois, et là je pense que là est votre question, n'est-ce pas? O.K. Lorsqu'il y a encore une personne morale dans un établissement, il y a une question... on parle de l'histoire, on parle de la culture, on parle de véhiculer quelque chose qui contribue à maintenir une unité de pensée, et on se dit: Puisque ça a été reconnu dans le passé jusqu'à maintenant, pourquoi ne pas maintenir cette reconnaissance-là au niveau où ça nous apparaît être justifié? Je comprends que vous avez la préoccupation du nombre optimal, mais on dépasse le nombre optimal dont nous avions discuté, on dépasse le nombre optimal dans le cas seulement où il y a des établissements de personne morale et que c'est non pas sur l'ensemble, quoi. Mais ça nous apparaît important, ça, pour les raisons que je vous donne. Et remarquez que je pourrais en donner d'autres, je pourrais élaborer davantage, mais ça nous apparaît important là où il y en a.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, votre temps est écoulé, M. le ministre.

M. Trudel: Ça va. Merci.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, je vais céder maintenant la parole au député de Châteauguay.

M. Trudel: On va lire ça en détail aussi.

M. Fournier: Oui, merci, Mme la Présidente. Bienvenue à vous tous. Juste pour reprendre, peut-être certains d'entre vous n'étiez pas là lorsque la Conférence des régies était là et lorsque le ministre a parlé de son grand intérêt pour la décentralisation et la régionalisation, les gens lui ont dit que, dans le fond, il s'était délégué à lui-même en région le pouvoir qu'il avait déjà, puisque la régie lui appartenait à l'avenir. Alors, c'était une décentralisation un peu fictive, pour dire le moins.

Je comprends de votre mémoire que vous proposez la mise à l'écart; autrement dit, vous êtes pas d'accord avec l'ensemble du projet de loi. Votre premier choix, je comprends, je vous ai entendus, votre premier choix, c'est: Je veux pas ce projet de loi là; parlons-en, s'il faut, avant; on verra plus tard; mais ce projet de loi, tel qu'il est amené, c'est pas le choix de l'Association des hôpitaux.

Je dois dire, Mme la Présidente, je pense qu'il faut le dire, parmi les établissements qui sont visés, les hôpitaux sont pas mal concernés, et il me semble que ça va de soi qu'ils devraient être participants à la loi qui va être adoptée, à la solution qui va être adoptée. Il me semble qu'on devrait être... un des premiers groupes à écouter, ce serait vous; c'est vous qui avez l'expertise de ce qui se passe en ce moment. Je suis un peu étonné que le gouvernement décide d'aller de l'avant en bulldozant, ce qui vous amène à être obligés d'oublier votre premier choix puis de dire: Bon, bien, on est obligés de jouer le jeu là-dedans.

Je comprends que les rencontres que vous avez eues en privé n'ont pas permis d'aménager un espace pour que vous puissiez vous entendre avec le gouvernement. Je regardais les... j'écoutais les échanges, surtout le dernier, je m'excuse, on était rendu dans le 1, ou le 3, ou le 2, ou le 4. Je me souvenais de la lettre que l'Association des hôpitaux a envoyée le 8 avril au gouvernement sur les budgets qui sont envoyés aux hôpitaux et je me disais: Mon Dieu! j'espère que, quand ils se rencontrent pour parler des coûts de système puis des sommes qui sont dévolues, ils seront pas en train de s'obstiner sur un puis trois sièges au conseil d'administration puis qu'ils parlent vraiment des réalités que vivent les hôpitaux. On en faisait aujourd'hui mention dans les...

Une voix: ...

M. Fournier: On en faisait mention aujourd'hui à la période de questions, je veux dire, la plupart des hôpitaux sont en ce moment en train d'adopter des budgets déficitaires, ce qui veut dire qu'avec le projet de loi n° 28 en vigueur, ça va partir d'en haut puis ça va dire: Regarde, puis le sortez pas dans les journaux là, la règle, c'est la suivante: vous avez ça comme argent puis vous coupez les services; coupez celui que vous voulez, mais coupez-le; moi, je veux que vous arriviez à zéro de déficit. Et il n'y aura plus cette possibilité pour la population de dire: Bien, je m'excuse, mais il y a aussi une importance à livrer le service.

Et je dois vous avouer que ça me perturbe passablement qu'on soit aujourd'hui en train de parler d'un sujet qui peut-être peut être d'un certain intérêt mais certainement pas du premier intérêt pour le service à la population. En tout cas, ça, c'est mon point de vue.

Des voix: ...

M. Fournier: J'espère que c'est pas des cloches pour un vote, Mme la Présidente.

Une voix: C'est un quorum.

M. Fournier: À la page 8 de votre mémoire, vous y allez d'ailleurs de certains éléments en parlant du projet de loi n° 28: «Toutefois, ces mesures ajoutent un maillon de plus à la longue chaîne qui encercle désormais les établissements de santé et en particulier les centres hospitaliers. Déjà aux prises avec les conséquences de mesures qui leur sont imposées, généralement sans consultation préalable, et devant en rendre compte tout autant auprès des usagers qui sont en attente de traitement qu'auprès d'instances supérieures qui sont en attente de résultats budgétaires...» En fait, vous, vous êtes le tampon: vous devez donner le soin à la population puis, en même temps, les moyens viennent d'en haut. À Québec, faites-vous-en pas, les patients puis la population, ils débarquent pas ici à la période de questions pour poser des questions au ministre, là. Ils vont dans vos réunions de conseil d'administration puis ils vont aussi à la Régie, puis c'est vous qui devez rendre des comptes. Et là vous êtes... Et je pense, pour avoir déjà parlé avec un certain nombre de D.G. d'hôpitaux, que vous avez pas mal de besoin de la population pour que la chaleur soit pas juste sur le D.G. mais qu'elle soit répartie avec un certain nombre de membres de la communauté qui comprennent que la réalité avec quoi ils doivent vivre et l'importance donc que des gens de la communauté participent à la direction de l'hôpital pour faire en sorte qu'il y ait de l'output puis de l'input, que l'établissement soit capable de dire: Bien, voilà ce qu'on fait, parce que, avec les moyens qu'on a, c'est ce qu'on doit faire, et puis qu'en même temps il y ait une espèce de couleur locale qui est donnée aux services qui sont dispensés. C'est de l'output puis de l'input qu'on ne retrouvera sûrement pas. Donc, vous êtes passablement pris en ce moment avec les règles qui existent.

Mais vous soulevez à la page 4 une espèce de demande, c'est comme ça que je le prends, parce que vous dites, vous rappelez que le rapport Clair proposait, disait qu'«il est urgent de clarifier les rôles, les responsabilités et l'imputabilité des trois niveaux d'autorité: le ministère, les régies régionales [...] et les établissements.» Et là vous dites: Bien, le 28, là-dedans, il ne fait pas grand-chose. Dites-moi, avant de procéder à se demander qui nomme qui, est-ce qu'on n'aurait pas dû, dans un premier temps, regarder le qui fait quoi pour, après ça, passer à l'autre étape?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Écoutez, on a commencé par dire que ce projet de loi là nous apparaît prématuré. On l'a dit tantôt, il y avait deux hypothèses possibles, on a retenu la deuxième. Pourquoi? Parce qu'il y avait des éléments, des problèmes importants qu'il nous fallait régler et qui auraient dû être regardés en préalable. Alors, on a souscrit au rapport Clair d'une façon générale, bien sûr, parce qu'il y avait des bons éléments. Mais, dans le rapport Clair, il y a plein de choses qui nécessiteraient d'être mises en application rapidement et, au nombre de ces choses, voilà, il y a des aspects qui auraient dû venir avant le contenu de l'actuel projet de loi n° 28 ici.

M. Fournier: À la page 8, vous dites qu'«il était préférable de maintenir une certaine étanchéité entre chacun des niveaux d'intervention dans le domaine de la santé et des services sociaux.» Pouvez-vous me dire pourquoi?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Vous êtes à quelle page ici?

M. Fournier: À la page 8, où vous nous parlez, au troisième paragraphe: «La volonté politique de maintenir les établissements en place et de consacrer leur autonomie se fondait sur la reconnaissance...» On parle depuis l'adoption de 1971, là, depuis la Loi sur les services de santé et les services sociaux en 1971: La volonté politique était de maintenir en place et de donner une autonomie aux établissements parce qu'«il était préférable de maintenir une certaine étanchéité entre chacun des niveaux d'intervention dans le domaine de la santé et des services sociaux», principe qui a été consacré et conservé par la suite. Je voudrais savoir: Selon vous, ça donne quoi aux patients du Québec, à la population du Québec ? parce que, dans le fond, on peut bien parler de structures, mais parlons des gens qui bénéficient des services offerts par les structures ? ça leur donne quoi qu'il y ait une étanchéité entre les niveaux: établissement, région et ministère, plutôt que d'avoir une mainmise du ministère jusqu'à l'établissement? Ça donne quoi, concrètement, de préserver cette étanchéité?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux... M. Vermette.

M. Vermette (Serge): Notre idée là-dessus, c'est que ça fait plusieurs années au Québec qu'on jongle avec l'idée de décentraliser le ministère de la Santé. On avait établi, à partir de la commission Rochon, que le ministère était là pour planifier, les régies pour coordonner et les établissements pour desservir. Voilà trois missions très clairement définies à partir desquelles, nous, on dit: Les établissements sont là pour desservir leur population; laissons-les faire leurs plans de match, aller chercher les ressources dont ils ont besoin au point de vue de leur conseil pour s'entourer, pour atteindre leur mission. Pour les régies, c'est autre chose. Ça, c'était le mouvement de décentralisation, d'où rattachée l'idée des élections, à l'époque; on rêvait d'une décentralisation.

Tout ça, c'est arrêté. Actuellement, je pense qu'on peut regarder ça, et on est après recentraliser la santé au Québec vers le ministère, parce qu'on dit: Les régies, vous n'avez pas tenu le phare assez fort, et les établissements, vous dépassez vos budgets; nous, on va aller voir comment c'est mal géré puis on va régler ça, le problème des déficits dans les hôpitaux. C'est un peu, je pense, une approche qui sous-tend possiblement cette législation. C'est une recentration vers le ministère de certains pouvoirs, et je pense qu'un ministère, dans le quotidien, dans le local, ça n'a pas d'affaire là. Alors, nous, on pense que les missions de chaque niveau doivent être redéfinies clairement, ce qui n'est pas fait encore, et doivent être assez étanches.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Ce qui revient à l'idée initiale que vous mentionniez sur... Se poser la question: Qui fait quoi, donner suite au rapport Deschênes, s'assurer qu'il y ait une complémentarité entre les instances plutôt qu'une confrontation qui se vit par une duplication des responsabilités.

À la page 18, je ne citerai pas tout le paragraphe, mais le dernier paragraphe de la page 18, et j'appellerais ça le bulletin que vous décernez au projet de loi n° 28: «Le choix politique de confier aux régies régionales ainsi qu'au gouvernement le pouvoir discrétionnaire de désigner un nombre important d'administrateurs des établissements de santé constitue un revirement significatif des politiques antérieures. À défaut d'être explicitement motivé, il ne peut exprimer qu'une réprobation du travail accompli par ceux qui, jusqu'à ce jour, étaient autrement nommés ou élus. Il constitue une immixtion directe dans la gestion des établissements. Ce choix est remarquablement perturbateur ? vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère ? et peut emporter le désengagement immédiat de nombreuses personnes qui croyaient encore pouvoir contribuer au développement des établissements. L'approche est carrément tutélaire pour les membres des communautés, culturelles ou linguistiques, qui jugeaient essentiel de maintenir un lien direct avec leurs établissements de santé. Une vision beaucoup plus nuancée s'impose.» Je veux dire, quand j'ai lu ça, j'ai trouvé que le bulletin que vous donniez au projet de loi n° 28, c'était pas un A, c'était pas mal plus Échec.

n(17 h 50)n

Ça vous a quand même amenés à faire une conclusion à la page 15, un petit peu avant, mais qui est inspirée de cette réflexion-là, où vous nous dites: Il faudrait qu'il y ait la cooptation de cinq personnes issues de la population. Depuis un bon bout de temps, le ministre est dans ces eaux-là, il en parle beaucoup. Ce qui n'est pas clair, c'est: Qui les choisit, ces cinq membres? Ce n'est pas évident... On le voyait tantôt avec la Fédération des infirmières, là, sur le conseil actuel en vigueur sous l'ancienne loi qui va coopter les cinq du prochain et que eux vont... n'existeront plus par la suite... C'est pas clair, c'est-u transitoire? Ou si c'est le conseil d'administration avec les gens nommés qui proviennent de la régie? Parce que, comme on disait un petit peu plus tôt, avant c'était établissement vers régie et, aujourd'hui, avec le projet de loi, c'est régie vers établissement? Ou bien si c'est... si la cooptation se fait par les gens qui ont été choisis par la régie dans les établissements et que, eux, ensuite, donc des désignés de ceux qui étaient nommés par le ministre, une nomination indirecte, qui vont se donner le mandat de choisir les gens de la population? Ce n'est pas clair dans ce que le ministre dit. Dans votre tête à vous, c'est qui qui choisit ces cinq personnes-là qui sont issues de la population?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Il m'apparaît que, dans cette transition, il faut arriver à un moment donné puis on tire la ligne, quoi. Je me vois mal ? je vais prendre mon cas, là ? je me vois mal, après 23 ans au conseil d'administration de l'hôpital Jean-Talon à Montréal, de choisir ou de... choisir, oui, quelqu'un qui pourrait peut-être venir me remplacer. J'essaie de m'imaginer ça un petit peu. Alors, ce qu'on souhaitait, nous, et ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est que les gens qui représentent la communauté interne participent... D'abord, ils sont déterminés par les différents groupements de l'interne, d'accord? Ça, c'est une première démarche. Ces gens-là participent à la cooptation de gens de l'externe. Mais les gens qui sont à l'interne, on pourrait ajouter à ces personnes-là les gens de la fondation, de la personne morale, le cas échéant, et puis... c'est ça, et les deux personnes, qu'on suggère, qui puissent être nommées par la régie régionale. Ce sont ces personnes-là qui participeraient à la cooptation des cinq autres personnes. Est-ce que je réponds à votre question?

M. Fournier: Oui, sous cet angle-là, ceux qui font le choix des membres de la communauté, c'est une minorité qui vient de la régie, là. Il y en a seulement deux parmi l'ensemble qui font ce choix.

M. Cadieux (Jean-Paul): Deux personnes, c'est ça.

M. Fournier: Il y a mon collègue de NDG qui veut vous poser une question. Je vais vous en poser une dernière juste avant, je pense qu'on a le temps. Ça concerne particulièrement l'article 43 qui dit ceci: «Sauf dans les cas prévus [...] ? bon, deux articles qui sont des remplacements, puis des remplacements temporaires ? le conseil d'administration doit, avant d'accepter la demande de privilèges d'un médecin ou d'un dentiste, obtenir l'approbation de la régie régionale.» Bon. Alors, l'établissement, avant de donner un privilège de pratique, doit consulter la régie régionale, auquel cas, bon, c'est donné ou c'est pas donné. Si je comprends bien parce que, par la suite, il y a un article qui dit que, lorsqu'il y a une contravention à cette règle-là... j'imagine que c'est une contravention au PREM, puis ça ne correspond pas au personnel que vous devriez avoir, puis vous en avez en surplus dans l'hôpital, c'est le médecin qui est arrivé en surplus qui est pénalisé et pas l'établissement. On nous présente que le médecin, dans le fond, c'est un contractuel avec l'établissement, l'établissement fait partie du réseau ? avec le projet de loi n° 28, il est même pas mal lié avec le reste du réseau ? alors que l'obligation finalement est donnée à l'établissement, au C.A., et c'est le médecin qui paie le prix. Comment vous réagissez à ça? Parce que, évidemment, il y a des gens qui disent: Bien, c'est au C.A. de vivre avec son obligation et d'avoir à payer pour le prix de la chose.

Alors, je vous pose cette question-là en même temps que je vous demande une autre question sur le même sujet: Est-ce que vous considérez que ces pouvoirs qui sont donnés à l'égard de la répartition des effectifs médicaux seront valables et utiles, puisqu'ils ne s'attaquent qu'au surplus? Hein, on ne s'attaque pas à la répartition entre des hôpitaux en déficit un plus que l'autre, mais simplement à dire: On va éviter les surplus pour... les donner à ceux en déficit. Ma compréhension à moi, c'est qu'il faudrait qu'il y ait beaucoup d'hôpitaux en surplus pour pouvoir répondre à tous ceux qu'on connaît qui sont en déficit. Votre connaissance du terrain vous amène-t-elle à croire qu'il y a beaucoup d'hôpitaux en surplus d'effectifs par rapport à leurs besoins, ce qui amènerait cette disposition à avoir une certaine utilité? Mais, si c'est pas le cas, c'est de la parlote qu'on est en train de faire, là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Vous permettez que le Dr Laurent Boisvert réponde à la question?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Oui. Dr Boisvert.

M. Boisvert (Laurent): À la dernière question, je pense qu'effectivement il n'y a pas beaucoup d'établissements qui soient en surplus d'effectifs médicaux comme en surplus de plusieurs professionnels de la santé. Cela dit, à l'Association des hôpitaux, concernant les effectifs médicaux, dans la mesure où tous les acteurs: fédérations, établissements, régies régionales, ministère, seront parties prenantes à l'établissement de plans d'effectifs régionaux pour tous les établissements et pour toutes les régies régionales, et qu'on se sera entendu, compte tenu de la situation des effectifs médicaux de façon générale au Québec, sur la situation de chacun des établissements et des régies régionales, et que tous les partenaires en question vont axer lesdits plans d'effectifs médicaux, on n'est pas nécessairement en désaccord avec le fait qu'il y ait des pénalités ou des sanctions de prévues pour les médecins qui iraient s'établir à l'encontre desdits plans d'effectifs médicaux, qui, au préalable, ont fait l'objet d'ententes entre tous les acteurs.

M. Fournier: Pourquoi pas les pénalités à ceux... celui qui contracte l'établissement? Parce que l'obligation est donnée à l'hôpital, au C.A., en fait, de vérifier avec la régie s'il peut donner le privilège d'exercice, et puis c'est celui qui fait l'exercice qui est pénalisé, alors que l'obligation est donnée au C.A. Pourquoi c'est l'autre qui paie le prix?

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Dr Boisvert.

M. Boisvert (Laurent): Sous le régime de la loi actuelle, c'est ce qui est prévu, c'est-à-dire que c'est l'établissement qui est pénalisé si un médecin s'établit à l'encontre des plans d'effectifs. Le problème de la loi actuelle, c'est que, dans les faits, des plans d'effectifs médicaux, y en a à peu près pas nulle part en vigueur. Donc, ce pourquoi le préalable, dans la mesure où tous les partenaires se seront entendus sur des plans d'effectifs médicaux, et ça, ça rejoint les fédérations, le ministère, les régies régionales et les établissements... Il faudra qu'il y ait une entente préalable de tous ces acteurs-là sur la validité, la fiabilité desdits plans d'effectifs médicaux.

Alors, lorsque cet exercice-là sera fait, il est normalement surprenant de convenir qu'un médecin irait s'établir à l'encontre desdits plans d'effectifs médicaux. Si c'était le cas échéant, l'Association des hôpitaux n'est pas contre l'article qui est introduit à l'effet qu'il y ait des sanctions qui s'appliquent aux médecins qui s'établiraient à l'encontre desdits plans d'effectifs.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Alors, il reste une demi-minute. Je vais vous la laisser, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais vous amener, M. Cadieux, sur la question du principe de la gestion communautaire et le lien particulier que certains de vos établissements peuvent avoir avec soit des communautés linguistiques ? je pense à la communauté anglophone ? ou soit des communautés culturelles, l'Hôpital chinois, l'Hôpital général juif Sir Mortimer B. Davis. Il va de soi que j'aurais aimé poser ce genre de question directement peut-être au Jewish General Hospital, un représentant du Centre de santé universitaire de McGill. C'est pas un reflet sur ni votre capacité de les représenter ni une marque de manque de respect, mais on nous informe évidemment que le gouvernement a refusé que le Centre de santé universitaire de McGill et l'Hôpital général juif Sir Mortimer B. Davis se présentent devant la commission.

Ce lien dont on peut parler, je pense à juste titre, entre certaines communautés linguistiques et certaines communautés culturelles est un lien qui existe, comme vous l'avez indiqué ici, de façon historique et qui est toujours réel aujourd'hui. On sait fort bien que ces établissements ne desservent pas que la communauté anglophone, ils desservent la population en général, mais un hôpital comme l'Hôpital général juif Sir Mortimer B. Davis a quand même une composante culturelle tout à fait importante et même, je dirais, primordiale pour la communauté juive. On peut penser la même chose avec l'Hôpital chinois de Montréal.

n(18 heures)n

Est-ce que vous pensez que ce lien, que, moi, je vais qualifier comme essentiel, est assez bien maintenu via les mécanismes de composition des conseils d'administration prévus dans le projet de loi n° 28 ou est-ce qu'il y a un risque que ce lien subisse une rupture importante, compte tenu du processus de nomination et du nombre de personnes nommées directement ou indirectement par le ministre auquel vous faites une certaine confiance, et les régies régionales versus la cooptation et la présence, entre autres, des représentants des personnes morales ou de leur population en général qui représentent ces types de clientèle là.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): M. Cadieux.

M. Cadieux (Jean-Paul): Oui, je vais vous donner une réponse très courte. Au début, on vous dit: On pense que le projet de loi devrait être retiré, il y a plein de choses là-dedans... Une chose qui nous inquiète bien sûr, c'est l'impact que ça va avoir au niveau des communautés locales, quelles qu'elles soient, où que ce soit au Québec. Mais on a dit aussi dans le mémoire qu'on s'inquiétait particulièrement sur l'impact au niveau de certaines communautés ? on l'a bien dit, hein ? culturelles, linguistiques, nous l'avons dit dans le mémoire. Alors, nous croyons que, oui, la réponse doit être donnée à votre question, quand vous nous demandez: Croyez-vous qu'il va y avoir un impact? C'est ce que nous croyons. Nous avons rencontré des représentants de ces différents établissements à Montréal et ils nous ont manifesté leur grande inquiétude à ce propos. Et personnellement, je partage cette inquiétude-là aussi.

La Présidente (Mme Gagnon-Tremblay): Merci, M. Cadieux. Alors, ceci met fin à notre discussion. MM. Cadieux, Vermette, Poirier et Boisvert, merci infiniment pour votre participation à cette commission. Alors, je remercie tous les membres de la commission, les gens qui accompagnent. Et j'ajourne les travaux de la commission sine die.

(Fin de la séance à 18 h 1)



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