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Commission permanente des Affaires sociales
Projet de loi no 65
Loi de l'organisation des services
de santé et des services sociaux
Séance du mardi 19 octobre 1971
(Dix heures huit minutes)
M. FORTIER (président de la commission permanente des Affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
Je demanderais aux porte-parole des différents organismes de
présenter un résumé de leur mémoire car tous les
membres de la commission en ont une copie, ceci afin d'accélérer
les travaux. Vous avez tout le temps nécessaire pour exposer votre
résumé.
Le premier organisme, l'Association des hôpitaux de la province de
Québec. Je demanderais aux porte-parole de bien vouloir s'identifier
pour l'enregistrement de nos procès-verbaux.
Association des hôpitaux de la province de
Québec
M. LEMAY: Henri-Paul LeMay. M. le Président, M. le ministre et
MM. les députés, mes collègues qui ont participé
activement à la préparation du mémoire sont pour la
plupart présents ici, à l'exception du vice-président de
l'association qui, à cause de ses devoirs comme président de la
Société des alcools, siège présentement; il sera
peut-être plus tard avec nous au cours de la matinée. M.
René Houle, à ma droite, secrétaire trésorier de
l'association; M. Télesphore Tremblay, à ma gauche, membre de
l'exécutif; le Dr Stanley Knox, également membre de
l'exécutif; M. Guy Saint-Onge, directeur général de
l'AHPQ; M. Guy Demers, en charge de nos achats de groupe; M. Paul Bergeron,
conseiller; M. Pierre Provost, directeur des relations publiques; M.
André Chagnon, directeur des relations de travail; M. Pierre Ledoux, en
charge du service de l'éducation, et le conseiller juridique de
l'association, Me Gustave Monette, qui est ici à ma droite.
L'association, comme vous le suggériez, a préparé
un résumé de ce mémoire que nous vous avons soumis et
distribué et dont je, vais vous donner communication. Il ne couvre
qu'une quinzaine de pages. Tous les membres présents de
l'exécutif de l'association sont à votre disposition pour
suppléer, au besoin, à l'exposé et au résumé
que je ferai de notre mémoire.
C'est à deux titres que l'Association des hôpitaux de la
province de Québec soumet aujourd'hui à votre commission un
mémoire sur le projet de loi no 65. Nous sommes d'abord les porte-parole
de 215 hôpitaux, soit la quasi- totalité des hôpitaux
généraux chroniques et psychiatriques du Québec.
Plus précisément, nous représentons les
corporations et les conseils d'administration de ces hôpitaux.
En second lieu, l'AHPQ, comme le précise le projet de loi 46, est
le partenaire de l'Etat dans le domaine des négociations collectives
avec les groupements d'associations de salariés. Nous estimons qu'en
raison de la réorganisation fondamentale qu'on veut faire subir aux
services de santé cette collaboration doit être étendue
à tous les autres domaines où nous avons compétence.
Nous sommes très conscients de ce double devoir. Depuis
près de trois mois, en coopération avec les dirigeants de nos
hôpitaux membres, nous avons étudié en profondeur le projet
de loi 65 et nous en avons évalué les conséquences sur les
structures physiques et morales de ces institutions. Nous avons discuté,
nous avons consulté et nous avons longuement réfléchi.
Le mémoire dont nous vous avons fait la distribution et que nous
vous soumettons aujourd'hui est le résultat de tout ce travail
intellectuel de tous nos hôpitaux, de tous nos conseils d'administration
et de tous ceux qui ont oeuvré et participé à la
rédaction du texte que vous avez entre les mains.
Vous avez constaté que dans sa forme originale notre
mémoire comprend six chapitres, un appendice et une annexe. Le chapitre
2, intitulé "Considérations générales", est
lui-même divisé en six sections dont je vous communiquerai, dans
un instant, l'essentiel. Nos recommandations détaillées suivent
et demeurent subordonnées à notre position fondamentale et sont
formulées en fonction de certains articles du projet de loi. Le chapitre
4 contient quelques observations particulières que nous jugeons utile de
faire en marge de notre étude Enfin, le mémoire proprement dit se
termine par une conclusion très brève et la liste des 52
recommandations que formule l'Association des hôpitaux de la province de
Québec.
Dans notre deuxième chapitre, nous rappelons, en premier lieu,
trois des principales recommandations que l'Association des hôpitaux
avait faites à la commission Castonguay-Nepveu en 1967.
Elles avaient trait à la création d'une commission
provinciale des services de santé, à une décentralisation
véritable et pratique et à la mise sur pied de conseils de
santé.
Nous exprimons le regret que ces recommandations que l'association avait
formulées en 1967 n'aient pas été suivies par le
gouvernement dans la réalité des faits.
Nous soulignons ensuite les objectifs généraux et
particuliers que la commission Castonguay-Nepveu avait suggérés
au gouvernement en vue de l'établissement d'une politique de la
santé et nous nous étonnons du fait que le gouvernement n'ait pas
jugé bon, sinon d'accepter sans réserve les objectifs
suggérés, du moins
d'exposer sa politique générale et ses principes
directeurs dans ce domaine.
Je vous lis maintenant de larges extraits des cinq autres sections du
deuxième chapitre de notre mémoire.
Le projet de loi no 65, par son article 50, fait table rase du
passé. Il oublie les corporations hospitalières et les conseils
d'administration existants. Aucune disposition n'a été prise en
vue de respecter le principe de la continuité. Aucune
considération n'a été apportée à
l'énergie, à l'initiative et au dévouement
prodigués par les corporations et tous les membres qui les
constituent.
Le bill 65 porte bien le titre de Loi sur l'organisation des services de
santé et des services sociaux. Mais ce titre laisse croire que
jusqu'à maintenant rien n'a été organisé dans le
domaine de la santé et des services sociaux. Ce qui est totalement faux.
Les corporations hospitalières à participation
bénévole existent depuis de très nombreuses années.
Elles ont prouvé leur efficacité en contribuant à
l'amélioration de la santé et du bien-être de la
population.
Dans certains cas, elles l'ont fait sans aide de l'Etat et n'ont pu
compter que sur leur sens pratique, leur ingéniosité et leur
expérience administrative.
Il faut donc considérer le bill 65 comme un projet de loi portant
sur la réorganisation des services de santé et des services
sociaux. Mais les hôpitaux voient dans ce projet de loi une
réorganisation si radicale qu'elle équivaut à la mainmise
de l'Etat et à la disparition des corporations existantes.
En outre, cette réorganisation laisse présager une rupture
si brutale avec le passé qu'elle est de nature à provoquer de
profonds chambardements administratifs et même à créer, au
niveau de la participation volontaire si précieuse, un vide très
préjudiciable à la population tout entière.
En effet, qui acceptera dorénavant de siéger par seul
esprit de civisme et de dévouement, comme nous le connaissons
aujourd'hui, au conseil d'administration des hôpitaux si, pratiquement
toute autorité et tout pouvoir réel de décision sont
enlevés aux membres de ces conseils? Par ailleurs, la formule
proposée d"'institution publique", son assimilation aux organismes sans
but lucratif et sa structure juridique risquent fort d'avoir pour effet de
décourager ceux qui, par charité, philanthropie ou esprit de
civisme, ont choisi d'oeuvrer à l'intérieur des structures
propres des hôpitaux comme nous les connaissons aujourd'hui, de tarir
dans le domaine de la santé et des affaires sociales la source de
revenus que constituaient les capitaux privés.
La nouvelle formule de réorganisation des institutions
hospitalières proposée par le bill no 65 présente
plusieurs autres aspects négatifs. L'AHPQ y voit en effet, d'abord une
atteinte au principe de la continuité et de la compétence qui
risque de conduire à l'inefficacité administrative et à la
désorganisation des institutions existantes. Deuxièmement, une
menace de politisation des conseils d'administration à cause du mode de
nomination par le lieutenant-gouverneur en conseil, des représentants
des groupes dits socio-économiques au sein de ces conseils.
Même l'honorable ministre des Affaires sociales n'a pu, selon le
journal des Débats, définir, lors de la séance du 24
août 1971 de la commission permanente des Affaires sociales de
l'Assemblée nationale, cette expression même de groupes
socio-économiques, qui laisse présentement tout le monde dans les
ténèbres.
L'AHPQ, en qualité de représentante des hôpitaux,
affirme donc que la réorganisation envisagée dans le projet de
loi no 65, en ce qui a trait à la liquidation des corporations
hospitalières, est tout à fait inacceptable.
La formule proposée dans le projet de loi pour les offices
régionaux des affaires sociales, ceux qu'on appelle les ORAS, ne
correspond pas aux offices régionaux suggérés dans le
rapport Castonguay-Nepveu. Ces derniers visaient à une
décentralisation des pouvoirs alors que les ORAS prévus dans le
projet de loi tendent au contraire à la centralisation. Soulignons les
dispositions du projet de loi qui enlèvent tous pouvoirs réels
aux offices régionaux proposés et celles qui donnent au
gouvernement le contrôle de la nomination des membres des conseils
d'administration et également des fonctionnaires.
La question se pose donc de savoir si de tels organismes devraient
être maintenus puisque l'Etat ne veut pas leur conférer plus de
pouvoirs.
Auront-ils les capacités techniques et les ressources humaines
leur permettant de répondre aux besoins?
La formule sera-t-elle en vigueur dans toutes les régions de la
province, y compris Montréal et Québec?
Dans la réalité, la formule sera-t-elle applicable
à certaines régions, particulièrement celle de
Montréal?
N'y a-t-il pas lieu de repenser la philosophie des structures
proposées et de remettre à l'étude la création
d'une commission provinciale des services de santé,
représentative à la fois du gouvernement, du milieu hospitalier,
des associations, des professionnels et du personnel.
Une telle commission ou régie n'offrirait-elle pas plus de
garanties sur le plan de la technique, de l'unité, de la
stabilité et de l'impartialité? S'il est nécessaire de
créer des offices régionaux, une telle commission provinciale ne
pourrait-elle pas décharger le ministre d'une responsabilité
déjà très lourde et son existence ne donnerait-elle pas
plus d'objectivité et d'impartialité aux décisions
officielles?
C'est pourquoi l'Association des hôpitaux de la province de
Québec rappelle sa recommandation en vue de la création d'une
commission provinciale des services de santé pourvue de tous les
pouvoirs nécessaires à son bon fonctionnement.
L'Association des hôpitaux de la province de
Québec voit, sous le simulacre d'une démocratisation des
structures, une centralisation extrêmement poussée. On constate un
manque total de confiance vis-à-vis de ceux qui se dépensent
actuellement dans les institutions et qui oeuvrent et qui seront
appelés à oeuvrer dans le nouveau système. Les
pouvoirs sont concentrés et seront concentrés davantage entre les
mains du gouvernement et, par ricochet, la charge du ministre des Affaires
sociales n'en sera qu'augmentée. C'est l'opposé de la
décentralisation. C'est la centralisation.
Qu'on en juge par quelques-uns des exemples suivants. L'article 5 du
projet de loi no 65 ne donne à l'organisme régional que le
pouvoir de faire des recommandations au ministre sur les questions concernant :
- la répartition des ressources consacrées aux services de
santé et des services sociaux; - l'intégration des services de
santé et des services sociaux aux milieux qu'ils desservent; - la
meilleure utilisation possible des ressources disponibles et le meilleur
contrôle possible des coûts et de la qualité des
services.
Or, nous croyons que ces champs appartiennent en propre à un
organisme régional. Et si le principe de décentralisation
était respecté, cet organisme devrait avoir des pouvoirs de
fonctionnement réalistes et pratiques en collaboration avec les
hôpitaux.
L'article 7 ne réserve à l'office régional que la
responsabilité de transmettre au ministre, avec ses recommandations, les
projets de budget des institutions que celles-ci adresseront à l'office.
Ce qui est également contraire au principe de la
régionalisation.
Les deux derniers paragraphes de l'article 8 enlèvent, à
deux exceptions près, tous les pouvoirs conférés à
l'office régional dans les paragraphes précédents du
même article, en assujettissant l'office à une autorisation
préalable du ministre dans presque tous les actes.
Les articles 9, 24, 29, 50, 51 et 71 confèrent au gouvernement le
pouvoir exclusif, à peine dissimulé, de nommer tous les membres
des conseils d'administration et tout le personnel des offices régionaux
en plus de nommer la moitié des membres des conseils d'administration
des hôpitaux.
Le paragraphe qui suit le paragraphe b) de l'article 45 et le dernier
paragraphe de cet article réduisent, en pratique, à néant
les pouvoirs qui ont été conférés aux institutions
dans les paragraphes précédents du même article, car "tout
acte des institutions sera sujet à une autorisation préalable du
ministre."
L'article 133 donne au gouvernement tous les pouvoirs de
réglementation et va même jusqu'à réserver au
lieutenant-gouverneur en conseil certains pouvoirs normalement dévolus
aux institutions, comme le pouvoir d'édicter les règles
disciplinaires applicables aux personnes auxquelles des institutions dispensent
des services, ainsi qu'aux visiteurs.
L'Association des hôpitaux de la province de Québec
désapprouve cette politique de centralisation à l'extrême,
politique qui va à l'encontre des principes d'une saine administration
et qui ne tient aucun compte des principes de décentralisation, de
participation et d'autonomie énoncés dans le rapport de la
commission Castonguay-Nepveu.
L'honorable ministre des Affaires sociales a lui-même reconnu
cette nécessité de décentralisation des pouvoirs quand il
a insisté, lors de la séance du 24 août 1971 de la
commission permanente des Affaires sociales de l'Assemblée nationale,
sur les besoins d'une décentralisation des moyens d'intervention vers
les offices régionaux et sur la décentralisation des services, la
participation des citoyens à leur gestion et la clarification des
responsabilités du gouvernement, du ministre des Affaires sociales et
des institutions. Je vous réfère au journal des Débats de
ce 24 août 1971, aux pages B-3597 et B-3598.
Si cette formule de centralisation était adoptée, elle
provoquerait, en raison de l'alourdissement des structures, de très
fortes perturbations administratives et des tracasseries bureaucratiques
innombrables. Elle conduirait, en outre, à la disparition graduelle de
cette motivation individuelle et de l'initiative privée qui ont
joué et qui joueront encore un rôle si important en milieu
hospitalier.
L'Association des hôpitaux de la province de Québec
constate également, avec regret, que le projet de loi no 65 fait table
rase du droit de propriété. En effet, le processus de fusion et
de conversion décrit dans le bill ne fait aucune mention du consentement
des institutions concernées. Il s'agirait, ni plus ni moins, d'une
expropriation de leurs biens et de leurs oeuvres sans même qu'aucun
mécanisme d'indemnisation ne soit prévu. Ainsi, dans sa formule
actuelle, le projet de loi laisse planer un fort danger de spoliation des biens
et droits des institutions existantes et de leurs membres. En outre, la
structure envisagée risque, par voie de conséquence,
d'aliéner la participation des mécènes à la
fondation, au maintien et à l'amélioration des hôpitaux et
des services qui y sont dispensés.
En réforme aussi générale et radicale des services
de santé et des services sociaux que celle que veut mettre en oeuvre le
projet de loi no 65 pourrait provoquer de graves perturbations dans de nombreux
secteurs de notre société si elle était appliquée
à la vapeur, sans précaution et sans discernement.
C'est pourquoi le gouvernement devrait effectuer par étapes et
avec le temps nécessaire pour agir efficacement les changements
nécessaires après les avoir clairement expliqués à
la population et avoir fourni tous les renseignements et précisions
utiles aux institutions tou-
chées. L'AHPQ souligne, en outre, que toute réforme de ce
genre doit s'inspirer des réalisations du passé ainsi que d'une
claire vision de l'avenir. Elle doit également tenir compte des
ressources humaines disponibles ainsi que de l'expérience
irremplaçable des administrateurs actuels.
En ce qui concerne particulièrement les hôpitaux, l'AHPQ ne
saurait trop insister sur la nécessité de respecter le principe
de l'unité de direction. En dernier lieu, l'Association des
hôpitaux de la province de Québec croit utile d'attirer
l'attention du législateur sur le fait que le projet de loi 65 comporte
plusieurs éléments de nature à rendre trop rigide la loi
et qui seraient plus à leur place dans une réglementation future
à être développée au fur et à mesure des
besoins.
A titre d'exemple, la ligne hiérarchique et les
responsabilités des autorités administratives des hôpitaux
auraient plus de souplesse si elles tombaient sous l'empire de
règlements adoptés par le gouvernement après consultation
des associations et des institutions concernées. Ceci permettrait la
révision périodique de ces règlements selon les
circonstances et les besoins des institutions ainsi que des régions
auxquelles elles appartiennent.
Ces considérations générales que je viens de
résumer sont étayées de douze recommandations dont voici
le résumé : 1) - le gouvernement devrait exposer les principes de
sa politique de la santé et définir clairement les objectifs
qu'il vise dans ce domaine afin d'éclairer, d'une part, la population,
d'autre part, les associations et les institutions concernées sur la
voie qu'il entend suivre pour effectuer la réorganisation des services
de santé et des services sociaux ; 2)- le régime des corporations
hospitalières actuelles, avec leur mode de nomination des conseils
d'administration, devrait être maintenu tout en élargissant
cependant la participation de la population à l'intérieur de ces
corporations. 3)- les institutions hospitalières
considérées comme privées qui relèvent de ces
corporations devraient être définies comme des institutions
privées d'intérêt public. La loi est silencieuse et ne
donne pas d'alternative présentement. Il n'y a que des institutions
privées et des institutions publiques. 4)- cette nouvelle
catégorie d'institutions privées d'intérêt public
devrait faire partie du projet de loi no 65. 5)- le gouvernement devrait
remettre à l'étude la question de la création d'organismes
régionaux, d'une commission ou régie provinciale des services de
santé ou des deux à la fois. 6)- le projet de loi no 65 devrait
être modifié dans le sens d'une décentralisation
réelle des pouvoirs de décision au niveau des offices
régionaux et des hôpitaux. 7) - les responsables des offices
régionaux et des hôpitaux devraient avoir une autorité et
des pouvoirs à la mesure de leurs responsabilités envers la
société. 8) - le gouvernement ne devrait intervenir que dans le
cas où l'office et les hôpitaux violent la loi et les
règlements. 9)-le législateur ' devrait préciser ce qu'il
adviendra des biens et des investissements des corporations existantes et des
engagements qu'elles ont contractés. 10) - le gouvernement devrait
effectuer par étapes les changements nécessaires après les
avoir clairement expliqués à la population et avoir fourni tous
les renseignements et précisions utiles aux institutions
touchées. 11) -le projet de loi devrait reconnaître, dans un but
de saine administration et d'efficacité, une autorité
réelle au conseil d'administration de tout hôpital, tant sur le
plan de la gestion que sur le plan de la programmation à brève et
à longue échéance. 12) - afin d'éviter le rigorisme
et ses inconvénients, le gouvernement devrait élaguer du projet
de loi les dispositions trop particulières qui peuvent et doivent faire
l'objet d'une réglementation subséquente.
Je ne m'étendrai pas sur les recommandations
détaillées du mémoire qui vont de la page 25 à la
page 49 et s'attachent de près, comme je l'ai dit, aux sections,
sous-sections, paragraphes et articles du projet de loi.
De même, il n'y a pas lieu ici de résumer les observations
particulières de l'AHPQ qui sont déjà très
brèves, ne comptant que trois pages.
En conclusion, l'Association des hôpitaux de la province de
Québec croit que ce mémoire sera de nature à aider le
législateur dans l'élaboration d'une loi-cadre qui tienne compte
autant des principes de l'humanisme que de ceux de l'efficacité dans
l'instauration d'un régime global de santé au Québec.
Nous espérons nous le savons sûrement maintenant,
à la suite des déclarations récentes, publiques de M. le
ministre des Affaires sociales que le gouvernement tiendra compte de
cette optique dans l'examen de nos observations et de nos recommandations.
Ainsi, sera facilitée, dans le respect des valeurs que
représentent les hôpitaux du Québec, la mise en oeuvre de
la politique de santé recommandée par la commission
Castonguay-Nepveu.
M. le Président de la commission, M. le ministre, messieurs les
membres de l'Assemblée nationale, je vous remercie, au nom de
l'Association des hôpitaux et de tous mes collègues qui sont
présents, de votre bonne attention et je me tiens, avec tous mes
collègues, à votre disposition pour toute précision ou
tout éclaircissement que vous jugerez utile de nous demander. Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires sociales.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais, en premier lieu,
remercier le président et les membres de l'Association des
hôpitaux pour le mémoire qu'ils ont préparé
relativement au
projet de loi no 65. Bon nombre des questions soulevées dans le
mémoire ont été discutées déjà ici
à la commission. Je ne voudrais pas reprendre chacun des points et
donner certaines explications sur chacun de ces points, mais, en raison de
l'importance de l'Association des hôpitaux, du rôle qu'elle joue et
particulièrement du rôle que les hôpitaux membres de
l'association jouent, je crois, malgré le fait qu'il y a
déjà eu des commentaires d'apportés sur ces questions ou
des clarifications ou des expressions d'intentions, qu'il serait de mise de
revenir, quitte à ce qu'il y ait certaines répétitions,
sur certains des aspects du mémoire.
En premier lieu, l'Association des hôpitaux rappelle certaines des
recommandations qu'elle avait formulées auprès de la commission
d'enquête sur la santé et le bien-être. Il y en a une
première, la formation d'une commission provinciale des services de
santé, que l'on demande de réexaminer au besoin. Sur ce plan, je
voudrais simplement rappeler que la commission d'enquête n'avait pas
retenu cette recommandation et que la tendance, dans les autres provinces, est
dans le même sens. Même dans les provinces où il peut
exister une commission des hôpitaux, les gouvernements en cause remettent
ce type d'organisme en question. L'optique que nous avons prise, nous, et ce
qui donne lieu à cette remise en question, est
généralement la suivante: c'est qu'il est important de clarifier
les responsabilités respectives à la fois du gouvernement et des
institutions et de situer au bon endroit ces responsabilités.
Dans ce sens, nous avons affirmé, à plusieurs reprises,
que nous, comme gouvernement, devons avoir la responsabilité
dernière quant à l'allocation des ressources financières
dans le secteur de la santé, soit par région, par type de
besoins, selon les institutions, etc., ce qui implique que nous devons avoir
également la responsabilité dernière quant à la
planification des ressources. Au plan de la programmation, nous pensons
à une autre étape où, évidemment nous devons nous
associer aux institutions, étant donné que là nous entrons
au niveau du fonctionnement. Alors, nous avons là une
responsabilité qui nous apparaît devoir être
partagée. Au plan des relations de travail également, même
partage. Et au plan de l'évaluation des fonctionnements, de
l'établissement de normes, de l'agrément ou de
l'accréditation des hôpitaux, nous avons évidemment aussi
une responsabilité.
Alors, c'est dans cette optique que nous n'avons pas retenu, comme
commission et comme gouvernement, cette recommandation.
En ce qui a trait à la décentralisation, maintenant, je
voudrais simplement rappeler que la commission d'enquête, dans ses
recommandations, a proposé des objectifs, a été
très précise dans les recommandations qu'elle a formulées
quant à l'objectif de décentralisation qui doit être
visé. Toutefois, j'ai mentionné ici que pour deux raisons
majeures, il ne nous apparaît pas possible présentement de nous
rendre jusqu'au point recommandé par la commission d'enquête dans
une première étape. Et la première, c'est qu'au niveau
régional tout comme au niveau local, il n'existe pas, dans le domaine
des services de santé et dans celui des services sociaux, de taxation et
que, généralement, le pouvoir ou la responsabilité de
dépenser des deniers publics doit s'accompagner d'une double
responsabilité soit celle de taxer, d'une part, pour la totalité
ou partie de ces fonds et, deuxièmement, d'être comptable aussi
directement à la population ou aux contribuables quant à
l'utilisation des fonds qui a été faite. Ceci, nous ne l'avons
pas au niveau régional et nous ne croyons pas qu'il serait sage,
à ce stade-ci, à tout le moins, d'introduire un nouveau
système de taxation pour les services de santé et les services
sociaux au niveau régional.
C'est l'embûche majeure, en fait, sur ce plan. Et il faut rappeler
ici que les traditions, l'évolution historique est bien
différente du domaine de l'éducation, par exemple, encore du
domaine de la délégation des pouvoirs au niveau des
responsabilités municipales où le principe de la taxation a
toujours existé et continue d'exister.
Alors, les autres aspects, pour ne pas prolonger ces commentaires, quant
à ce qui a trait à la décentralisation telle que
proposée par la commission; mais j'insiste également sur le fait,
et je l'ai déjà mentionné, qu'il ne faut pas voir
uniquement le texte de la loi dans son sens étroit lorsqu'on analyse
cette question, qu'il faut voir aussi les processus de financement et que ces
processus ou le mode d'établissement des budgets, d'approbation, de
vérification etc., sont extrêmement importants également
quant au pouvoir de décision qui est laissé aux institutions et
que présentement nous sommes dans une opération dont la fin tend,
évidemment, à donner une plus grande liberté de gestion
quant aux opérations courantes des institutions par la voie d'une
nouvelle formule de budget.
De la même manière, le projet de loi ne fait pas
état, de façon détaillée, de ce que sont les
pouvoirs d'une corporation. Mais il est évident que les institutions
garderont les pouvoirs généraux, de façon
générale, des corporations et aussi les fonctions ou autres
pouvoirs qui pourraient leur être conférés dans leur
charte. Sur ce plan, nous ne faisons pas de bris avec le passé.
Maintenant, les conseils d'administration. On nous rappelle encore le
danger de politisation si les nominations sont faites après consultation
au niveau du gouvernement. Cela fait plusieurs fois que je le mentionne mais je
crois, pour ma part, que le gouvernement est aussi responsable que les
organismes ou les modes plus ou moins clairs de nomination qui existent
présentement et qu'il y a là, dans ce genre d'affirmation,
pratiquement un aveu de non-confiance ou un
genre d'affirmation de non-confiance dans les gouvernements quels qu'ils
soient.
Sur ce plan, c'est une affirmation que j'ai de la difficulté
à accepter.
Quant au principe de la continuité dans les conseils
d'administration, en proposant que les nominations soient faites à
partir d'une consultation auprès des organismes
socio-économiques, si je n'en ai pas fait une énumération
ou une définition précise, c'est que c'est une
réalité mouvante. J'ai mentionné ici, à la
commission, que, lorsque nous avons effectué la consultation pour la
formation du Conseil des affaires sociales et de la famille, nous avons
consulté quelques centaines d'organismes. Alors il est difficile d'en
faire une énumération ou encore de donner une définition
précise de ce que sont ces organismes.
Mais nous avons cru que, quant au principe de la continuité, ces
organismes, également, auraient intérêt à
recommander le maintien, aux conseils d'administration, des personnes qui ont
joué un rôle valable dans ces institutions et que, pour les autres
qui n'ont montré que peu d'intérêt ou encore qui ne
représentaient pas des intérêts qui devaient être
maintenus au niveau de ces conseils, ces organismes ou ces groupements
socio-économiques sauraient faire la part des choses. Nous croyions
qu'ainsi nous pouvions maintenir une continuité que nous
considérons nécessaire. Parce que, dans tout ce projet de loi,
nous ne faisons pas un jugement de valeur quant aux individus qui ont servi aux
conseils d'administration ou qui y servent encore. Nous voulons plutôt
faire une mise à jour de l'organisation des services de santé,
compte tenu des nouvelles exigences qui n'étaient pas perceptibles il
n'y a encore qu'une dizaine d'années.
Enfin, il est peut-être bon de mentionner que quant au droit de
propriété, pour les hôpitaux qui sont aujourd'hui, à
la suite de la Loi des hôpitaux, gérés ou sous le
contrôle d'une corporation hospitalière et d'un conseil
d'administration, il y a eu partage de patrimoine dans tous les cas où
il y avait, anciennement, une communauté religieuse qui était
propriétaire, en partie ou théoriquement, de l'hôpital.
Pour les cas où ce partage n'a pas été effectué,
nous poursuivons des discussions avec les communautés en cause.
Les compensations ont été versées aux
communautés religieuses. Les hôpitaux donc, à l'exception
de ceux pour lesquels ce partage ou cette négociation n'est pas
terminée, sont peut-être, théoriquement,
considérés comme étant la propriété des
corporations hospitalières. Toutefois, il faut maintenant se rendre
compte que les fonds qui ont servi au développement de ces corporations
sont des fonds publics et qu'en ce sens, malgré la présence de
corporations, on ne peut assimiler cette propriété, par les
corporations, à la propriété privée. C'est dans ce
sens que nous croyons nécessaire ou utile de prévoir un pouvoir
de fusion de corporations hospita- lières, qui vise des fins
complémentaires. Dans ce pouvoir de fusion, évidemment, nous ne
visons aucunement à spolier les droits ou la propriété de
qui que ce soit. S'il est nécessaire d'ajouter des dispositions au
projet de loi ou encore des dispositions analogues à celles de la Loi
des hôpitaux, pour bien réaffirmer ce désir ou cette
intention bien arrêtée du gouvernement de ne pas spolier les
droits ou la propriété privée par ce projet de loi, nous
le ferons évidemment.
C'étaient les quelques commentaires, M. le Président, que
je voulais faire à ce stade-ci. Je préférerais laisser aux
membres de la commission le soin d'adresser les questions quitte, au besoin, au
cours de la discussion, d'en adresser quelques-unes moi-même. Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'ai
écouté avec beaucoup d'attention l'exposé qu'a fait Me
Henri-Paul LeMay, au nom de l'Association des hôpitaux, et les
commentaires que vient de faire le ministre.
Evidemment, entre les questions soulevées par l'Association des
hôpitaux, les faiblesses qui lui apparaissent devoir être
soulignées dans la loi et les commentaires un peu plus rassurants que
vient de faire le ministre, il y a une marge à franchir.
Le ministre vient de préciser certains points qui avaient retenu
particulièrement l'attention de l'association, particulièrement
en ce qui concerne la continuité aux conseils d'administration, la
décentralisation, pourquoi il n'a pas retenu certaines propositions de
la commission Castonguay-Nepveu. Son attitude et l'attitude de son
ministère quant à la propriété privée, je
crois qu'il est important que les propos qu'a tenus le ministre se traduisent
par des modifications ou des précisions dans la loi.
On l'a dit à maintes reprises au cours des travaux de cette
commission, ce n'est pas tout d'essayer de deviner à l'arrière
d'un projet de loi l'intention du législateur. Mais il est
préférable que cette intention, le plus possible, se traduise
très explicitement et très précisément dans les
textes de loi.
Je ne sais pas si je devrais poser ma question à Me LeMay qui a
lu le mémoire de l'association ou maintenant à notre visiteur, M.
le juge Trahan, qui est un homme peut-être déchiré entre le
secteur de l'alcool et le secteur de la santé, de toute façon, on
peut dire que ce sont des secteurs complémentaires à certains
points de vue, l'un, peut-être, pour réparer les
dégâts... Au sujet de la propriété privée, je
voudrais aller un peu plus loin que les remarques qui ont été
faites sous forme de questions par l'association des hôpitaux et les
précisions que le ministre a apportées.
Dans le mémoire de l'association, on dit notamment à la
page 5: "que ça risque de tarir,
dans le domaine de la santé et des affaires sociales, la source
de revenus que constituent les capitaux privés." Sans faire d'inventaire
détaillé, je voudrais que nous poussions peut-être un peu
plus avant l'analyse, faire un peu d'histoire. Qu'est-ce qui s'est passé
jusqu'à maintenant lors de la création d'institutions
hospitalières?
Quelle est l'importance de ces capitaux privés qui auraient pu
être disponibles à un moment ou l'autre? Est-ce qu'ils le sont
encore et dans quelle proportion? Quel serait l'effet du projet de loi no 65 en
pratique, précisément dans certains cas précis que l'on
peut mentionner?
M. LEMAY: M. Cloutier, chacun sait que les institutions
hospitalières dans le passé et à l'origine ont
été créées par suite du dévouement d'un
groupe d'individus et de la participation monétaire d'un autre groupe
sympathique et imbu d'esprit de civisme et de philanthropie. Historiquement
c'est vrai, aujourd'hui ça demeure encore vrai.
Cependant, l'évolution du système hospitalier dans la
province de Québec au cours des dix dernières années a
pris des dimensions beaucoup plus considérables qu'on ne pouvait
l'imaginer dans les années 1950 et antérieures.
Mais il demeure vrai que dans un domaine des activité humaines,
où il est impossible de dissocier l'individu qui participe aux objectifs
que l'on poursuit, il faut que les individus et la société comme
telle demeurent intéressés. Et je ne m'imagine pas, dans un
domaine particulier comme celui de la santé et les mêmes
remarques pourraient s'appliquer à l'éducation, que l'on
puisse dire à ceux qui jusqu'à présent ont fait preuve de
philanthropie: Vous n'aiderez pas ce domaine particulier de la médecine;
vous ne vous intéresserez pas aux maladies cardiaques, aux maladies
rénales, aux maladies de la cage thoracique ou autre chose. Il faut que
l'individu en tant qu'entité continue à participer. Et si une
façon de participer c'est par sa philanthropie et une contribution
monétaire, il ne faut pas que le gouvernement, en somme, s'appropie ce
qui devient une contribution de mécène pour dire que ça
fait partie du budget, même global, à l'heure actuelle.
Il faut être certain que, dans les fondations qui peuvent
continuer à porter secours à l'humanité, la recherche et
les savants pourront trouver une source d'approvisionnement et que jamais nous
ne serons limités, même par un budget global, dans la recherche du
progrès. C'est une condition essentielle de la situation humanitaire
avec laquelle nous traitons; autrement, ce serait fermer la porte je le
dis au progrès.
M. CASTONGUAY: Est-ce que je pourrais faire un commentaire? J'ai de la
difficulté à comprendre exactement ce que le président de
l'association veut dire dans ses affirmations.
Nous maintenons le principe de la participation. Nous proposons des
mécanismes de nomination différents, une composition
différente au niveau des conseils, mais nous n'abolissons pas ces
conseils.
Quant au financement, il y a deux formes de participation. Il y a une
participation par l'apport de l'expérience, des connaissances, du
dévouement. Ceci peut se situer à des niveaux différents,
au niveau des conseils d'administration, au niveau des associations
bénévoles, etc. Il est évident qu'il nous faut garder
cette participation, nous la désirons. Je ne crois pas qu'en aucun
moment, ni dans le projet de loi, ni dans aucune affirmation, il ait
été dit que nous voulions faire un bris avec cette tradition; au
contraire, nous voulons la renforcer. A bien des endroits, la participation
est, à toutes fins pratiques, inexistante, sauf pour un petit groupe
d'individus, très minime, qui sont nominalement sur les conseils
d'administration ou encore, dans certains autres cas, sur les conseils
d'administration, mais non pas uniquement pour les fins de l'entreprise, mais
aussi parfois pour d'autres raisons. Nous voulons renforcer la participation
et, sur ce plan-là, je pense qu'il ne doit pas y avoir
d'équivoque.
Il y a un autre type de participation qui est la participation
financière. Si j'ai bien compris la question du député de
Montmagny, il serait peut-être bon, ici, de faire état de certains
chiffres. Présentement, le gouvernement est dans la situation suivante:
nous versons, pour le fonctionnement des hôpitaux au titre des soins
généraux, cette année, environ $800 millions; pour les
soins psychiatriques, environ $130 millions. Nous versons, en
intérêts et en remboursement de capital pour des subventions
accordées aux institutions pour fins d'immobilisation, cette
année, environ $90 millions et ce chiffre va en augmentant
constamment.
Nous en arrivons à peu près à un total de $1
milliard simplement pour les soins généraux, pour les soins
psychiatriques et pour les fins d'amortissement des dépenses
d'immobilisation. En regard de ces chiffres, je crois que l'apport au plan
financier, qui nous vient de diverses sources qu'il est évident
que nous ne devons pas tarir est minime. Le projet de loi ne doit pas
être axé sur cet apport minime au plan financier, mais
plutôt sur une allocation aussi juste que possible des deniers publics et
sur leur utilisation d'une façon aussi efficace que possible.
Je reviens à nouveau sur une autre dimension de la question.
Quant aux corporations hospitalières, qui étaient la
propriété de communautés religieuses, depuis la Loi des
hôpitaux, le gouvernement a fait le partage des patrimoines et a
accordé des compensations financières qui, pour autant que je
peux voir par le nombre de règlements qui ont été
effectués au cours des années, ont reconnu clairement l'apport
des communautés dans le passé. Je crois que ce sont des
données de la question qui doivent nuancer
certaines des appréhensions formulées par le
président de l'association.
M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre vient d'établir certaines
proportions entre les fonds qui viennent du secteur public et ceux qui
pourraient venir de l'initiative privée. Si j'ai bien compris
tantôt et d'après mon expérience personnelle, des fonds
seraient disponibles pour les entreprises et les institutions
hospitalières.
Ils seraient donnés particulièrement à l'occasion
de la construction d'hôpitaux et à l'occasion aussi de la
création de fonds de dotation particulièrement orientés
vers la recherche. J'ai à la mémoire, entre autres, ce don
très substantiel fait à une institution de Montréal,
l'Institut de cardiologie, pour la recherche sur les maladies du coeur.
Ce que vous avez voulu mentionner, Me LeMay, c'est que l'Association des
hôpitaux craint peut-être qu'il s'introduise à la suite du
projet de loi no 65 une certaine mentalité à l'effet que toute la
contribution, à 100 p.c, doive être gouvernementale. Cet apport de
capitaux privés, si on le compare spécifiquement au point de vue
des chiffres, je comprends qu'il peut être minime comparé aux
milliards gouvernementaux. Par contre, il traduit peut-être,
indépendamment du montant, un intérêt qui est de la
participation, mais un intérêt qui va bien au-delà du
montant qui peut être accordé. Il traduit, je pense, une
participation réelle de la population évidemment par les
organismes qui sont capables de le faire. Il est évident que dans le
milieu francophone, on a constaté que la participation à la
construction des hôpitaux sous forme d'apport de capitaux privés
est moins considérable qu'elle peut l'être du côté
anglophone. C'est évident. On n'a qu'à reprendre les exemples de
certains hôpitaux du côté anglophone de Montréal
où il y a eu des dons substantiels qui n'ont peut-être pas
d'équivalent du côté francophone.
Tout de même, il reste que c'est un apport qui ne doit pas
être négligé et qui traduit une participation. Vous
craignez, je crois, qu'il ne s'introduise une certaine mentalité qui
veuille dire que le gouvernement doive lui-même contribuer à 100
p.c. et dans la construction des hôpitaux et dans les fonds de dotation
et dans la recherche. Est-ce le point que vous voulez faire ressortir?
M. LEMAY: Comme législateur, vous savez que lorsqu'une loi est
muette et qu'on veut lui faire dire autre chose, à un moment
donné il est très difficile d'aller à l'encontre. Je ne
vois pas une institution, en particulier dans la province de Québec, qui
pourrait se permettre ou avoir les ressources financières de dire: Nous
contestons l'interprétation présente des fonctionnaires du
ministère. Je ne vois pas comment on peut intervenir. Je ne vois pas
comment, en fait, avec l'idée du budget global qui a certainement ses
mérites, que les gens ont mis à l'essai, qui au cours de
l'année passée a été examinée dans 23
hôpitaux, le gouvernement à l'heure actuelle espère voir
une amélioration. Nous désirons tous le progrès.
Mais, également, nous craignons tous ces endroits où, dans
la loi, l'on trouve un manque de clarté. Le ministre nous a bien dit que
des amendements seraient faits; vous-même, M. le député de
Montmagny, vous nous avez également mentionné qu'il faudrait que
des changements soient apportés. Nous sommes sensibles à cette
énonciation d'idées et nous participons tous ensemble
réellement à l'élaboration d'un meilleur texte de loi.
D'autre part, nous devons vous dire combien nous craignons les zones où
la loi n'est pas suffisamment claire et qui nous permettent, à nous,
d'avoir des craintes très sérieuses. Tous les gens que vous voyez
ici, qui m'entourent et qui sont dans le domaine médical ou hospitalier
se sont penchés depuis des mois sur ces questions et ce matin ils
apportent à la commission parlementaire le fruit de leurs études
et leur collaboration à l'établissement de la meilleure loi
possible dans les circonstances que nous connaissons.
Nous ne sommes pas contre. Nous sommes pour quelque chose qui peut
être le mieux. Et nous disons: Comment, dans le domaine médical,
pouvons-nous nous refuser à ce que la loi indique de la façon la
plus claire possible que s'il y a des fonds qui deviennent disponibles
peu importe la mesure de ces fonds pour de la recherche, qui est la
source du progrès, cette recherche ne doit pas être limitée
à un budget global où les ressources financières du
gouvernement nécessairement, à un moment donné, doivent
limiter cet apport de fonds?
Si l'on dit que le traitement des malades, les devoirs du gouvernement
et de la population envers ceux qui en ont besoin au point de vue social
seulement, cela prend toutes les ressouces disponibles; si l'on ne
prévoit pas clairement d'avance qu'il peut y avoir une autre source, une
autre forme de propriété qui contribue également à
ce progrès scientifique, comment alors tous ensemble pouvons-nous dire
que nous avons de la meilleure façon servi l'intérêt
général de la population? En somme, c'est l'offre que non
seulement l'Association des hôpitaux mais toutes les institutions font au
gouvernement, tâcher de clarifier ces zones que nous avons
indiquées dans le rapport de ce matin. Ceci ne comporte pas de
blâme, mais simplement des commentaires et des façons de
tâcher d'améliorer un projet de loi qui était sur la table
depuis déjà quelque temps et que nous voulons le meilleur
possible.
M. CASTONGUAY: Ici, M. le Président, en ce qui a trait à
la recherche, j'aimerais faire un commentaire. Comme le projet de loi
l'indique, il s'agit de l'organisation des services de santé et des
services sociaux et nous distinguons les activités de recherche.
D'ailleurs nous savons qu'au Québec les principaux instituts de
recher-
che fonctionnent en vertu de chartes différentes, l'institut de
microbiologie, l'institut de recherche clinique. Dans d'autres cas, des projets
que l'on nous a soumis récemment de création ou d'immobilisation
pour des fins de recherche, nous avons demandé que soient
dissociées les activités de recherche des activités
hospitalières, au plan de la structure juridique. Nous voulons
également faire de même en ce qui a trait au financement des
activités de recherche de telle sorte que nous sachions clairement ce
qui est versé aux fins des services de santé, ce qui est
versé ou dépensé aux fins de la recherche, comment aussi
ces fonds sont alloués dans le domaine de la recherche.
Vous avez sans doute pris connaissance, par la voie des journaux, des
intentions du gouvernement telles qu'exprimées samedi par le ministre de
l'Education quant à la mise sur pied d'un comité
ministériel des politiques scientifiques du gouvernement et la mise sur
pied, également, d'un conseil consultatif pour orienter le gouvernement
dans ce secteur. Là également il nous faut comme gouvernement
nous préoccuper d'une allocation plus rationnelle des fonds. Je voudrais
donner à titre d'exemple les distorsions que peuvent amener ou
introduire dans un système une absence d'identification des sources de
financement, des montants de financement alloués aux divers secteurs.
Dans le domaine de la recherche, une étude a été
effectuée pour la commission d'enquête sous la présidence
du Dr Claude Fortier; le Dr Jacques Genest y a participé, un
représentant de l'université McGill, un représentant de
l'Université de Sherbrooke, un représentant de
l'Université de Montréal. Nous avons constaté, par
exemple, que l'université Laval, dans le domaine de la recherche
fondamentale, avait au dessous de 0.1 p.c, je crois, des sommes
dépensées au Canada dans ce secteur alors que McGill en avait
environ 40 p.c, si ma mémoire est bonne.
Dans le domaine de la recherche clinique, on avait à peu
près la même répartition. Alors, il faut faire bien
attention dans ce secteur d'éviter qu'une contribution au plan d'une
immobilisation entrafne, par la suite, automatiquement une allocation des fonds
de recherche. Une contribution de $1 million pour la création d'un
centre de recherche, pour celui qui a le million, ça peut vouloir dire
qu'il a accès, par la suite, à toutes les subventions de
recherche; pour celui que ne l'a pas, il n'y a pas accès, par la suite,
à ces contributions. C'est un peu le phénomène, je crois,
qui a donné lieu aux distorsions dans les allocations que cette
étude a mis en lumière.
Alors, dans ce projet de loi, ici, nous ne traitons pas de la recherche;
nous croyons plutôt qu'il est extrêmement important de dissocier
les sources de financement aux fins de la recherche, de continuer d'encourager
toutes les sources de capitaux privés qui pourraient être
alloués à des fins de recherche. Mais nous croyons que ceci doit
être fait maintenant à partir de mécanismes plus clairs
d'allocation de ressources de financement, d'établissement de
politiques.
C'est pourquoi le projet de loi, sur ce plan-là, n'entre pas dans
cette question.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce qu'on a une idée, Me LeMay, des
sommes qui pourraient provenir du secteur privé et qui sont
versées aux institutions hospitalières dans une année,
soit au total ou en les disséquant, soit du côté
francophone ou du côté anglophone, pour fin de recherche,
d'immobilisation? Est-ce que l'association s'est déjà
penchée sur ce problème?
M. LEMAY: Non, M. Cloutier, nous ne disposons pas de ces chiffres. La
seule chose que nous constatons, c'est que dans diverses institutions, qu'elles
soient anglophones ou francophones, il y a des mécènes qui
subventionnent de la recherche et ils le font à titre privé. Cela
s'ajoute aux contributions que le gouvernement fait. C'est non seulement pour
la recherche, c'est également pour le maintien de certains services.
C'est pour l'oeuvre que le philantrope, en somme, décide bien de
subventionner, et philantrope qui, dans le passé, est
décédé en laissant des fondations, qui continue à
contribuer de façon indéterminée, pour un temps absolument
illimité et qui, par le fait même, aide toute la population et
contribue au mieux-être de chacun d'entre nous dans la province de
Québec.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, c'est un aspect
extrêmement important et je suis heureux qu'on l'ait touché ce
matin, parce que, le ministre le sait, la question sera posée par
d'autres associations du côté social aussi. On sait que du
côté du conseil des oeuvres, des conseils de bien-être, du
côté des institutions dans le domaine social, il y a aussi un
apport de capitaux privés qui est peut-être moins important si on
le compare à l'effort qui provient du secteur public, mais qui est quand
même non négligeable parce qu'il traduit un intérêt
évident de la population pour le secteur de la santé et le
secteur social.
Je suis heureux des précisions qu'a apportées le ministre
et particulièrement de ce désir d'introduire un meilleur
élément d'équilibre peut-être dans ce qui suit les
investissements, dans la conséquence des investissements et de ces fonds
de dotation pour ce qui vient par la suite.
Je pense que c'est un élément important dont il faut tenir
compte. Mais aussi, comme vous l'avez souligné dans votre mémoire
et dans vos observations, il est aussi important, même si le projet de
loi, comme dit le ministre, ne comporte pas de dangers particuliers parce que
ce n'est pas cet aspect, en particulier, qui va être touché, qu'il
ne s'introduise pas non plus une mentalité à l'effet que le
gouvernement
doit être omniprésent, omnipuissant et qu'il doit fournir,
la totalité de la participation financière dans des projets de
construction ou dans des projets de recherche.
Je ne sais pas s'il y a d'autres membres de la commission qui voudraient
toucher ce sujet avant d'aborder...
M. LE PRESIDENT: Le député de Taillon.
M. LEDUC: Me LeMay, il y a deux questions que je voudrais vous poser. La
première: Quels sont les articles de la loi qui vous ont porté
à venir à cette conclusion ou à cette remarque que vous
avez à la page 10 de votre mémoire, en bas, et qui vous font
craindre, si vous voulez, cet aspect possible de la loi suivant lequel les gens
ne contribueraient pas, soit à la recherche ou à d'autres
investissements? Deuxièmement, je m'excuse, j'ai dû m'absenter
pendant quelques instants pendant que vous présentiez votre
résumé du mémoire, est-ce que j'ai bien compris que vous
craignez un budget global?
M. LEMAY: Non, l'association...
M. LEDUC: Je voulais le souligner parce qu'à la page 14 de votre
deuxième mémoire, la recommandation no 8, je pense bien que
l'association recommande justement que le contrôle budgétaire soit
plus réaliste et plus souple et que l'on utilise la formule du budget
global. Etant donné les quelques remarques que vous avez faites, et
comme je vous ai dit tantôt, j'ai été absent quelques
minutes, c'est peut-être moi qui vous ai mal interprété, Me
LeMay. C'étaient les deux questions que je voulais vous poser.
M. LEMAY: Nous croyons au budget global. Vous avez ici à
côté de moi, le président d'un autre hôpital, M. le
juge Trahan, qui est vice-président également de l'association,
où la formule du budget global a été essayée au
cours de l'année dernière en collaboration avec le gouvernement.
Nous nous demandons, comme point d'inquiétude dans ce budget global, si,
effectivement, le budget global sera le résultat d'une série
d'additions qui constitueront, en somme, un corset très serré
duquel aucun des hôpitaux ne pourra pas sortir. Ce qui veut dire que si,
en fait, les officiers du ministère disent: Vos besoins font partie
d'une somme globale de..., une enveloppe de X millions de dollars, peu importe
l'hôpital particulier, en fait, si l'hôpital veut lui-même
améliorer une phase de son activité, il lui faudrait alors
transférer des fonds d'un poste qui fait déjà partie du
budget global à un autre poste.
Aux fins d'une saine administration il deviendrait utile ou même
avantageux pour la population de le faire.
Or, à moins que nous ne puissions avoir des ressources
extérieures dans lesquelles nous puissions puiser, le budget global,
comme tel, peut devenir une camisole de force. Cela n'a pas été
essayé assez pour que l'on puisse faire des remarques d'une façon
ou d'une autre. Tout ce que nous devons faire, c'est signaler au gouvernement
des points sur lesquels le ministre des Affaires sociales, se penchant avec ses
collègues et le cabinet, puisse décider: C'est vrai, on a
attiré notre attention sur un point qui mérite que nous adoptions
des dispositions peut-être plus souples, plus flexibles. Je calcule que
c'est le devoir de chacun d'entre nous d'indiquer au gouvernement toutes ces
sphères et toutes ces zones sur lesquelles nous croyons que le
gouvernement devrait agir davantage.
M. LEDUC: Je vous remercie pour cette réponse à ma
première question. Quels sont les articles de la loi qui vous font
justement craindre que les donations...
M. LEMAY: Comme nous avons essayé de nous partager un peu le
travail, je demanderais au juge Trahan, qui est vice-président de
l'association, de vous répondre.
M. LEDUC: Merci.
M. TRAHAN: Je ne suis pas habitué à discuter de droit
comme cela, surtout depuis que je suis rendu dans le liquide! Mais je voulais,
avant tout, parler de la question des mécènes.
Je me rappelle très bien que, lorsque j'étais
président d'un hôpital qui a changé de nom et qui s'appelle
maintenant l'hôpital de Rivière-des-Prairies, j'avais parlé
à la télévision de l'apport des religieuses dans nos
hôpitaux. On a trop oublié, de nos jours, ce que les religieuses
ont pu faire pour nos hôpitaux. J'avais dit, à ce
moment-là, que la communauté qui gérait l'hôpital ou
qui était propriétaire de l'hôpital dont j'étais le
président donnait à l'hôpital 20 p.c. du salaire des
religieuses. Bien, cela, c'est une chose qui va disparaître aujourd'hui
parce que les religieuses ne seront plus intéressées à
agir de la façon dont elles agissaient autrefois, puisque le
gouvernement a pris feu et lieu dans les hôpitaux.
Maintenant, vous avez des fondations. Parfois, une personne qui a un peu
d'argent décide, dans son testament, de donner un montant à une
oeuvre quelconque. Nous ne sommes pas pour dévoiler ici, devant tout ce
monde, ce que peut recevoir chacun des hôpitaux. Mais, à de
très nombreuses reprises, nous avons rencontré, dans
l'administration, des failles dans le budget du gouvernement. A certains
moments, nous avions besoin de choses absolument nécessaires et,
malgré nos demandes réitérées, le gouvernement ne
pouvait pas nous les accorder. Alors, nous avions, par des
à-côtés, des moyens d'aller chercher des fonds pour nous
aider à remplacer ce que le gouvernement ne nous donnait pas. Cela est
encore une source de revenus que nous n'aurons plus. Comme l'ancien ministre,
M.
Cloutier, le faisait remarquer tout à l'heure, ce n'est
peut-être pas aussi frappant que les gros montants du gouvernement, mais
je vous garantis que, comme administrateurs, cela nous aidait. Cela nous
sortait des impasses très souvent, ces montants d'argent que nous
pouvions recevoir. Alors, c'est dans cette position-là, je crois, qu'on
veut tuer l'initiative privée quand le gouvernement prend tout. Par le
fait même, cela n'aidera certainement pas à l'administration des
hôpitaux. Moi, cela fait presque dix ans que je suis dans les
hôpitaux et j'en apprends tous les jours. Je ne crois pas que ceux qui
viendront prendre notre place pourront, dans une année, avoir
l'expérience que nous avons acquise à force de travail et
d'abnégation. J'ai eu l'avantage de présider des enquêtes
dans les hôpitaux, à la demande des gouvernements. Là
encore, on a vu ce qui manquait dans nos budgets. Quand le gouvernement
administre, au point de vue je ne dirais pas électoral parce que
je n'ai pas le droit de parler de la politique avec ma fonction d'un
administrateur, je prends mon autre chapeau. Je laisse mon chapeau de juge et
je prends celui d'administrateur. Je vous garantis qu'à certains
moments, c'est décevant, pour des administrateurs d'hôpitaux, de
voir la façon avec laquelle on administre, on nous octroie des
budgets.
Il n'est pas nécessaire de faire une revue complète. Si
vous voulez que je fasse une confession générale, je peux en
faire une. Mais je pense que tout ce que je dirais, tout le monde le sait en
particulier, mais personne ne veut le dire en général.
Alors, pour le moment, c'est ce que j'avais à dire. Je crois que
si le gouvernement prend trop dans l'administration, on verra dans les services
des hôpitaux ce que l'on voit dans bien d'autres services du
gouvernement: A trop centraliser, on détruit.
M. LEDUC: Si vous me permettez, si ma mémoire est bonne
cela peut être erroné lorsqu'il y a eu la sanction de la
Loi des hôpitaux, je pense, en 1962 ce que je vous cite est de
mémoire il me semble qu'il y a eu à peu près les
mêmes revendications voulant que les donations, les fondations, etc.,
hésiteraient à souscrire aux hôpitaux. Je pense que de 1962
à 1971, vous avez quand même reçu quelque chose, dans les
hôpitaux, certains d'entre vous. Ce qui me chicote et je ne suis
pas associé de quelque manière que ce soit avec un hôpital,
alors j'apprends au moment où vous me répondez c'est: Quels
sont les articles de la loi qui vous font hésiter? Est-ce toute la
facture de la loi, est-ce le fond de la loi? Qu'est-ce qui vous a
amenés, dans ce projet de loi no 65, à dire qu'il y a une
barrière, un mur qui s'élève entre ceux qui peuvent
contribuer aux hôpitaux en dehors du budget qu'ils ont, ou qu'ils ne
pourront plus contribuer? Qu'est-ce qui vous fait dire cela?
M. TRAHAN: Il y a l'article 45 de la loi.
Mais comme il est toujours préférable de confier sa cause
à un avocat, Me Monette répondra d'une façon plus
adéquate à la question qui vient d'être posée par M.
le député.
M. MONETTE: M. le député, votre question ouvre la
nécessité, peut-être, d'exposer comment plusieurs juristes
voient la composition de certains articles et de préciser exactement ce
qui se passe dans le projet de loi.
Ici, je veux faire une distinction bien nette entre les paroles
réconfortantes du ministre et le texte d'une loi proposée.
Ceci a déjà été mentionné devant la
commission. Il y a des questions auxquelles l'association est appelée
à répondre, ici. Il y en a de toutes les couleurs. L'association
sans faire de politique en a vu de toutes les couleurs depuis
neuf ou dix ans. Ce qui compte actuellement et ce sur quoi nous faisons des
représentations, ce ne sont pas sur les projets du ministre mais sur un
texte de loi qui nous est proposé.
A partir de l'article 1 de la loi, on définit "institution
publique" comme "institution étant maintenue par une corporation sans
but lucratif". L'association et les avocats qui sont dans la pratique croient
que ceci est une méprise, au point de départ. Assimiler une
corporation publique à une corporation sans but lucratif, c'est
créer, pour l'avenir, un sophisme qui ne répond pas à la
conception populaire de ce qu'est une corporation sans but lucratif.
M. CASTONGUAY: Pourrais-je vous interrompre pour vous poser seulement
une question? Compte tenu du fait que la Loi actuelle des hôpitaux dit,
à l'article 1 a) qu'un hôpital public est un hôpital
maintenu par une corporation sans but lucratif, quel est le changement que vous
voyez, étant donné que c'est textuellement la même chose
dans le nouveau projet de loi par rapport à la loi actuelle?
M. MONETTE: C'est exact, M. le ministre. Je ne prétends pas que
l'ancien texte était bon non plus. Je crois, au contraire, qu'il a
amené des confusions bien inutiles, sur le plan juridique et sur le plan
pratique.
Ainsi plusieurs hôpitaux se sont demandé dans quels sens et
dans quelle portée ils étaient des hôpitaux publics. Et
dans ce sens-là est-ce qu'ils avaient une obligation vis-à-vis du
public? Est-ce qu'un hôpital de communauté religieuse perdait son
statut d'hôpital catholique? C'est un point.
Maintenant au point de vue juridique, la distinction, le sophisme est le
même, qu'il ait été créé en 1962 ou en 1971,
peu importe, la distinction est la même et aujourd'hui on
l'élargit non seulement aux hôpitaux mais à toutes les
institutions.
Une corporation sans but lucratif, déjà c'est une mauvaise
définition, les tribunaux d'appel l'ont reconnu. C'est en opposition
à une corporation à but lucratif. Une corporation à
but
lucratif, au point de départ, est une corporation dont les
membres veulent en retirer un profit. Et une corporation sans but lucratif est
une corporation dont les membres ne s'attendent pas à en retirer un
profit, bien que la corporation elle-même puisse faire un profit.
Une corporation sans but lucratif a été toujours reconnue
par les juristes et perçue dans les termes populaires comme une
corporation charitable altruiste; ça peut aller plus loin, ça
peut être un club de golf, n'importe quoi, qui n'est pas une association
pour en tirer un profit. Cela n'a aucun critère qui s'applique à
une corporation publique. Une corporation sans but lucratif a toujours
été reconnue comme pouvant être publique ou privée
ou d'intérêt public; elle peut être perçue comme
d'intérêt public. Mais, lorsqu'on dit corporation publique, on
perçoit généralement dans le public, et comme juriste, une
corporation qui est maintenue par l'Etat qui est directement dirigée par
l'Etat, une institution gouvernementale proprement dite.
En élargissant et en couvrant toutes les corporations sans but
lucratif et en les appelant des corporations publiques, on arrive à
ceci: Avec le jeu des autres articles de la loi et particulièrement les
articles 50 ainsi que 83 et 84 la fusion et 93, le dernier
paragraphe, ainsi que les pouvoirs disséminés entre les
différentes organisations, est qu'en pratique toutes les institutions
sans but lucratif, toutes les corporations existantes, vont disparaître
d'ici deux ans. On peut jouer sur les mots, mais ce sont les corporations qui
vont disparaître.
On fait également disparaître la notion de membre de la
corporation. Or, dans notre système juridique, ce sont, pour la
très grande majorité des cas, les membres de la corporation qui
élisent le conseil d'administration.
Dans la nouvelle structure, on remplace et on fusionne ces
corporations-là. Je crois, M. le ministre, que c'est un
euphémisme de dire qu'on les fusionne ou qu'on les convertit; on les
fait tout simplement disparaître. L'article 88 est clair
là-dessus, elles cessent d'exister. Elles sont remplacées par une
corporation contrôlée par l'Etat, dont sept membres sont
nommés directement par l'Etat, deux autres indirectement par
l'intermédiaire des ORAS et les autres par le personnel, par les
médecins ou par les gens de l'hôpital.
La notion de membre de corporation disparaît. Les membres de la
corporation n'ont plus rien à faire, n'ont plus rien à dire, ils
ne nomment plus personne au conseil d'administration. Vous noterez que dans le
mémoire de l'association, même pour les corporations publiques
c'est-à-dire que nous redéfinissons publiques comme
corporations gouvernementales ou celles qui ont été
acquises par l'Etat, il nous semble que, d'une part, le gouvernement devrait
être directement représenté, ce qui n'existe pas, et,
d'autre part, les anciens conseils d'administration et les anciennes
corporations devraient être représentés également,
devraient avoir voix au chapitre
On parle de groupes socio-économiques. Quel est le groupe
socio-économique qui s'est le plus intéressé aux
hôpitaux, si ce ne sont pas justement au départ les conseils
d'administration et les membres des corporations existantes? On les fait
disparaître, on n'en parle pas. On parle de groupes
socio-économiques.
Tous ces facteurs font que le projet de loi a deux effets. Il vise le
droit de propriété. Le ministre nous a réconfortés
en mentionnant qu'il reconnaissait le droit de propriété sur la
question des communautés religieuses. Nous aurons peut-être
l'occasion, lors du mémoire de la Conférence religieuse
canadienne, de revenir plus en détail sur les mises de fonds.
Il reste que cela ne s'applique pas uniquement aux communautés
religieuses. Il y a des institutions privées que la loi dit publiques,
ou des hôpitaux publics qui, en réalité, sont des
corporations privées sans but lucratif et qui ont des fondations. J'en
connais trois ou quatre, dont une a été mentionnée. En
plus de cela, il y a l'avenir. On se demande qui voudra, au point de vue du
bénévolat, participer à une organisation qui n'est pas
celle pour laquelle originairement on avait une motivation. La question que
nous nous posons est la suivante: Est-ce que les gens, ou certains individus en
particulier, auront la même motivation pour travailler dans un cadre dont
la structure, la motivation propre... Même dans les hôpitaux
généraux, M. le ministre, il y en a des motivations propres. Je
ne parle pas des institutions particulières qui s'occupent d'une maladie
en particulier ou d'un secteur en particulier. C'est l'avenir.
Deuxièmement, il y a les droits acquis dans le passé. Les
institutions, les individus, les conseils d'administration se trouvent
frustrés à l'heure actuelle; ils se demandent ce que l'on fait
d'eux. On ne les définit même pas, comme je le disais, comme pour
les groupes socio-économiques. Dans le passé, on a
mêlé l'idée et on a accepté le gouvernement
l'a accepté et les institutions et les individus ont oeuvré dans
ce sens là de ne pas faire la distinction entre une oeuvre ou une
institution et une fondation. Si bien que, jusqu'à ce jour, les deux
concepts ont été mêlés et les fondations sont
réellement, en fait, les institutions existantes dans bien des cas. Ceci
a été accepté comme tel des deux côtés, et
c'est dans ce sens que les gens ont accepté soit de faire des
fondations, soit d'oeuvrer bénévolement, de donner des services
pour plus que leur valeur à des institutions ou de prendre des
responsabilités qu'ils n'étaient pas obligés de
prendre.
Je pense qu'il faut tenir compte de ces droits acquis dans le
passé. Si le ministre, le gouvernement ou l'Etat veut restructurer le
domaine des institutions, prévoir des fondations pour l'avenir, je crois
que la loi peut le permettre, mais pour le passé, je pense qu'on ne peut
pas oublier que ceux qui ont oeuvré l'ont fait dans
un même sens: fondation égale institution. Cela n'a pas
été divisé dans la pensée du légiste ni dans
le concept populaire.
Ceci rejoint un autre point: la question de la liberté
illimitée de tester et de donner. Ceci est primordial dans notre droit.
Un testateur et ceci a toujours été reconnu par nos
tribunaux et par la cour Suprême a le droit de désigner
exactement le sens d'une donation ou le sens d'un legs testamentaire. Il a le
droit de spécifier à quel usage il sera donné. Ce principe
est tellement élémentaire et tellement important dans notre droit
qu'on ne peut l'écarter je crois qu'il faut le souligner ici
dans un domaine particulier. Si on veut l'écarter, qu'on le dise
carrément à l'échelle de la province et dans tous les
domaines.
Je rejoins la pensée du ministre sur la question du
fonctionnement. La part du gouvernement est assez importante pour
reconnaître son droit de parole là-dessus, mais de là
à effacer le droit de parole de ceux qui ont voulu faire des legs ou des
dons, je crois qu'il faut faire une distinction.
M. CASTONGUAY: Sur ce point, si vous me permettez une remarque, les
légistes qui ont rédigé ce projet de loi m'ont
assuré, lorsqu'il a été rédigé, qu'il
n'était pas nécessaire de revenir sur ce principe dans chaque
projet de loi, dans celui-ci en particulier, suivant lequel il faudrait
réaffirmer que les volontés de ceux qui ont donné par voie
de testament ou autrement soient respectées. Encore là, je ne
sais pas si je l'ai mentionné publiquement, sinon je le fais
présentement, s'il nous faut apporter une précision sur le projet
de loi, nous allons le faire. Mais je vous dis que les légistes, au
moment de la rédaction du projet de loi, m'ont donné ces
assurances. Ce n'est pas notre intention de revenir sur ce genre de
règle fondamentale, comme vous l'avez mentionné, qui veut que
l'on respecte les volontés d'une personne qui a donné,
cédé par voie de testament.
Sur ce point, lorsque le projet de loi sera révisé, si
ça peut rassurer les gens quant à nos intentions, nous allons
introduire, même si on me dit qu'il est mauvais de reprendre chaque
projet de loi, toutes les dispositions législatives qui ont
préséance sur de tels projets.
M. LEMAY: M. le Président, au sujet de la constitution des
conseils d'administration, je dois vous signaler, parmi les observations qui
m'ont été faites par un bon nombre d'hôpitaux, que la
province sera privée du talent, offert gratuitement et
généreusement, d'un très grand nombre d'administrateurs
qui servent bénévolement et qui tous, chacun dans leur domaine,
oeuvrent gratuitement dans les hôpitaux et qui, d'autre part, dans leurs
entreprises occupent des fonctions de présidents. Et le temps qu'ils
consacreraient aux hôpitaux, s'il n'y a plus de responsabilité, la
province sera privée d'autant de ces services compétents,
gratuits et à l'avantage de tout le monde.
Je vous signale, à titre d'exemple, le cas de l'hôpital
Notre-Dame, que je connais bien, qui fonctionne avec un grand nombre de
comités parce que toutes les fonctions ont été
réparties en un nombre de comités dont les présidents
concours de circonstances mais résultats de choix et
d'élections quant au choix des membres sont à peu
près tous, eux-mêmes, des présidents de conseils
d'administration d'entreprises et qui viennent assumer volontairement une
responsabilité à Notre-Dame. Je sais que dans les autres
hôpitaux on recherche les mêmes objectifs et que l'on a atteint
aussi ce perfectionnement dans l'administration. Comme exemples: au
comité du budget, c'est un président de compagnie; au
comité de planification, c'est un président de compagnie; au
comité de législation, c'est un président de compagnie, et
ainsi de suite. Alors, à tous ces talents, vous diriez avec la meilleure
intention possible: Merci, messieurs, on n'a plus besoin de vous, ce sera des
personnes désignées. Mais, comment ce choix sera-t-il fait, et
comment la province sera-t-elle assurée de cette collaboration
précieuse, généreuse et bénévole qui existe
présentement? C'est encore muet parce que la loi ne permet pas aux
membres des corporations, comme M. le juge Trahan le signalait, comme Me
Monette le signalait, justement, d'élire parmi les membres de la
corporation. Et à Notre-Dame, il y a au-delà de 1,500 membres de
la corporation qui paient une cotisation annuelle pour être membres et
c'est ouvert à tout le monde, n'importe quel représentant d'un
groupe socio-économique n'a qu'à payer sa cotisation, montrer son
intérêt à Notre-Dame, ça lui coûte $25 et il a
le droit de vote, il vient à l'assemblée annuelle. Pourquoi n'en
serait-il pas de même dans les autres institutions dont nous
étudions le statut ce matin?
Nous croyons que cette participation offerte généreusement
et bénévolement est essentielle pour assurer la meilleure
qualité des services et la meilleure condition d'administration dans une
institution hospitalière.
M. CLOUTIER (Montmagny): Me Lemay, je voulais justement aborder ce point
que vous venez de soulever, la continuité dont vous avez parlé
dans votre mémoire. Je voudrais savoir du ministre des Affaires
sociales, advenant que le projet de loi soit adopté comme tel avec les
dispositions qu'il contient actuellement, si ce critère de
continuité dans des institutions importantes comme Notre-Dame,
l'Hôtel-Dieu de Montréal, Maisonneuve et aussi du secteur anglais,
où il y a l'enseignement, la recherche, où ce sont des
hôpitaux de type universitaire.
Est-ce que le ministre, en pratique, tenant compte des dispositions
actuelles, va attacher une importance particulière à une certaine
continuité? Parce que j'imagine que renouveler, du jour au lendemain, le
conseil d'administration d'un hôpital qui a un budget de $20 millions,
qui est de type universitaire, où il y a ces sortes de
spécialisations que l'on vient de
décrire et des comités qui s'occupent à des
tâches particulières, ça pourrait occasionner des
problèmes, non seulement à l'institution mais aussi, par voie de
conséquence, au ministère des Affaires sociales.
M. CASTONGUAY: Le processus de nomination que nous proposons ne laisse
pas... C'est ce que j'ai de la difficulté à comprendre. Prenons
une ville où il y a un hôpital, où il y a des gens qui
servent bien dans le conseil d'administration. Il m'apparaît assez
évident que les groupements socio-économiques qui vont faire des
recommandations vont dire: M. Untel a acquis une expérience, une
connaissance, il est déjà en place; par contre, quant à M.
Untel, on a perçu qu'il n'apportait pas tellement
d'intérêt, on peut penser qu'il serait bon qu'il soit
remplacé. Qu'il y ait alors un mécanisme pour assurer une
rotation dans les conseils d'administration tout en maintenant une
continuité.
Alors, ce principe nous l'avons reconnu d'une façon sous-jacente
dans la proposition que nous avons faite.
Allons-nous la modifier et de quelle façon? J'aimerais entendre
les autres mémoires et terminer le processus d'audition des
mémoires. Mais je voudrais aussi rappeler que, d'après ce projet
de loi, rien n'empêche de former des comités et pour toutes les
fins jugées utiles par un conseil d'administration.
Je voudrais aussi faire une petite clarification, parce que M. LeMay
vient justement de faire deux affirmations qui méritent d'être
commentées. Il nous a dit: Presque tous les membres du conseil
d'administration sont des présidents de corporations. Mais, justement,
nous ne voulons pas que ce soient uniquement des présidents de
corporations à un endroit, et à un autre, que ce soient
uniquement des gens intéressés à un secteur; nous voulons
qu'il y ait une meilleure représentation.
J'ai visité certains quartiers à Montréal, j'ai
rencontré un grand nombre de gens lors de la commission et je viens
d'entendre peut-être une autre chose qui m'explique certaines affaires.
On me dit qu'il y a 1,500 membres à Notre-Dame qui versent $25 pour
être membre. Je serais surpris de connaître la répartition
géographique de ces membres et ça explique pourquoi
peut-être aussi, vis-à-vis de certains problèmes que l'on
m'exposait dans un certain comté lorsqu'on me disait que pour faire
admettre des patients, bien souvent, dans certains de nos grands
hôpitaux, il fallait avoir, dans des cas d'urgence, recours à la
police de Montréal, qu'il n'y avait pas moyen de les faire admettre
autrement. Quant à ces besoins, malgré toute la bonne
volonté des gens du conseil d'administration d'un hôpital comme
Notre-Dame, on n'était pas conscient de cet état de fait. Et il
et bon qu'il y ait d'autres gens qui vivent ces problèmes qui
siègent aux divers conseils d'administration.
Alors, nous voulons une représentation, nous voulons une
participation, mais nous la voulons d'une façon plus structurée,
de telle sorte que tous ceux qui utilisent les services puissent avoir un mot
à dire. Et c'est dans ce sens que les propositions ont été
faites dans le projet de loi.
M. LEMAY: Pour rassurer le ministre, il faudrait lui dire que la plupart
des membres du conseil d'administration des hôpitaux sont des gens qui
ayant connu la crise ont travaillé eux-mêmes à $5, $10 et
$15 par semaine et ont été obligés de se retrousser les
manches et, au point de vue humanitaire, ils sont certainement enclins au plus
grand dévouement qui puisse exister. Tout ce que nous recherchons avec
le ministère, c'est justement la formule la plus appropriée et la
plus désirable pour mieux servir la population.
M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, ce que nous pouvons
retenir de votre argumentation, c'est que vous voulez une certaine
continuité. Mais vous n'avez rien contre le fait d'ouvrir davantage vos
cadres par la participation et par la nomination de personnes qui viendraient
d'autres secteurs afin d'assurer un meilleur équilibre au sein de la
corporation.
M. LEMAY: Ce que nous craignons surtout, c'est qu'un hôpital
puisse être privé de la collaboration de personnes essentielles
parce que ces personnes n'habitent pas nécessairement dans le secteur
géographique qui n'est pas encore défini, qu'un hôpital
pourrait peut-être être désigné comme devant
servir...
Nous croyons que c'est peut-être priver la population de
l'avantage d'inviter quelqu'un d'une paroisse voisine à devenir membre
du conseil d'administration d'un hôpital si cette personne a
l'expérience nécessaire pour la meilleure administration d'une
institution genre hospitalier.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Sauveur.
M. BOIS: M. le Président, je remercie très
sincèrement l'Association des hôpitaux du Québec de nous
avoir présenté leur mémoire qui contient plusieurs
constatations que nous revoyons ailleurs et qui continuent les assertions des
autres mémoires.
J'admets fort bien la bonne foi du ministre. Même, tout à
l'heure, il nous a mentionné qu'en fait, les mémoires ne
devraient pas constituer une affirmation de non confiance dans les
gouvernements quels qu'ils soient. Je pense bien que le problème de tout
ceci, au fond, c'est que ceux qui soumettent des mémoires voient quand
même qu'ils auront, un de ces jours, par exemple, à voir à
l'application du projet de loi lui-même Je pense bien que les craintes,
je ne suis pas avocat, mais j'ai lu le mémoire de
l'Association des hôpitaux peuvent sans doute être
fondées en raison du tout petit dernier paragraphe de l'article 45 qui
dit:"Tout contrat fait par une institution sans l'autorisation requise du
lieutenant-gouverneur en conseil et du ministre est nul." Je me
réfère aux chiffres que le ministre nous fournissait tout
à l'heure, c'est-à-dire les quantités en millions pour ce
qui doit couvrir les soins généraux hospitaliers. Si on prend,
par exemple, la somme de $800 millions, il faut quand même en
déduire les taxes fédérales qui nous sont demandées
volontairement, s'il vous plaît, les taxes générales qui
peuvent être imposées ainsi que les cotisations que
défraient quand même les employeurs et les employés.
Je pense bien que dans la partie qui reste on peut quand même
constater que la province ou l'Etat se constitue le gérant ou le
directeur des faits en hospitalisation. Alors, en réalité, pour
régler un problème qui n'était pas tellement majeur, si
vous voulez, l'Etat s'ingère lui-même et, à la longue, sera
obligé de toucher aux services hospitaliers et à la
médecine. Alors, ce matin, ce que je trouve dans le mémoire qui
nous est présenté ainsi que dans les autres qui ont
précédé, c'est toujours la même crainte. Si, en
fait, on veut toucher à la santé à cause de l'argent,
parce que l'argent est quand même des cadres et des lois qui sont en
mesure, à l'heure actuelle, de nous conduire, et je prends le reproche
qu'on nous a fait, il y a quelque deux semaines, que nous ne voyons que de
l'étatisation partout. M. le Président, je crois que le projet de
loi et les points qui sont soumis par la situation des hôpitaux du
Québec sont une constatation flagrante.
J'avais une question à poser tout à l'heure, mais M.
l'avocat a répondu. J'allais simplement demander sur quoi on
s'était basé pour présenter le mémoire. C'est sur
le projet de loi et non sur les promesses de M. le ministre. Et c'est sur cela
que je demanderais vraiment à M. le ministre de la Santé de nous
apporter des amendements qui feront de cette loi un bill et non pas un
"bébill".
M. LE PRESIDENT: Est-ce que d'autres personnes ont des questions
à poser? M. le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, j'avais plusieurs questions et on y a
répondu. Mais tout de même, j'ai retenu dans le mémoire
certains passages qui sont très très importants et celui qui
m'apparait un des plus importants, faisant suite à ce qui a
été discuté, c'est le danger qui a été
soulevé par différentes personnes, par différentes
associations, le danger du progrès qu'on a connu dans le passé et
qu'on s'attend à connaf-tre dans l'avenir. Plusieurs associations ont
dénoncé ce danger dans le projet de loi. Est-ce que, le domaine
de la santé, advenant l'application du projet de loi no 65? J'aimerais
mentionner que cette garantie d'avancement pro- gressif est assurée,
peut-être qu'on ne doit pas dire le plus souvent mais à coup
sûr par l'initiative de certaines personnes, peu importe les
domaines.
J'aimerais avoir des précisions, enfin si vous croyez
réellement qu'il y a un danger de ralentissement ou de freinage de
progrès dans le domaine de la santé, actuellement.
M. LEMAY: Lors des diverses réunions auxquelles j'ai
assisté, qui groupaient le comité de travail composé des
délégués de différents hôpitaux, et ceci,
dans les locaux de l'AHPQ, les situations que vous venez d'exprimer
reflétaient une grande partie de nos craintes, c'est-à-dire cette
crainte devant l'inconnu à cause de l'imprécision d'une partie du
texte de loi.
Nous n'en sommes pas à contester les explications que le ministre
a pu donner. Nous sommes ici pour commenter un projet de loi et pour
tâcher de vous faire connaître nos vues et suggestions que la
commission parlementaire doit examiner avant de retourner devant
l'Assemblée nationale. C'est l'esprit qui a animé tout le monde
et qui anime tous ceux qui sont ici présents. Si l'on veut qu'une loi
fonctionne bien, qu'elle soit facile d'application, il faut que le dialogue qui
va demeurer et qui devra continuer à s'établir entre les
institutions qui vont exister et les grands fonctionnaires du ministère
qui assistent le gouvernement dans l'exécution de sa tâche puisse
être facile.
Or, une loi où il y a autant d'incertitudes que celles que nous
avons mentionnées ne peut pas nécessairement conduire à un
dialogue facile dans l'avenir. Il faut tâcher de diminuer et
d'éliminer, le plus possible, ces zones grises. Il faut les clarifier.
C'est l'esprit de notre mémoire, sans aucun autre but. Le but, c'est de
contribuer par le travail collectif de l'Association des hôpitaux
à ce que nous puissions avoir la meilleure loi possible, la plus facile
d'application, espérant qu'avec les explications que nous avons
données ce matin, les suggestions que nous avons faites, nous aurons
contribué ensemble, comme citoyens de cette province, à avoir une
loi qui améliorera la condition hospitalière dans notre province.
Il n'y a pas d'autre but.
M. le juge Trahan.
M. TRAHAN: J'aurais juste un mot à ajouter. Il y a des mythes
qu'il va falloir faire disparaître et je demande aux media d'information,
une fois pour toutes, de nous aider à faire disparaître ces
mythes-là. Quand on dit qu'il y a un surplus de personnel dans les
hôpitaux, c'est mentir à la population. Je pèse mes mots.
J'ai ici le rapport annuel de mon hôpital.
Dans cet hôpital-là, du 13 juin jusqu'à la semaine
du 5 septembre, nous avons dû faire abstraction de 10,310 jours patients
parce que nous n'avions pas de personnel pour s'occuper de nos malades.
N'oublions pas que l'hôpital n'est pas fait pour les médecins ou
pour le personnel qui y travaille, mais pour le malade.
Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas appliqué cette
théorie-là, on fera fausse route. Nous avons dans nos lois des
choses qui sont inconcevables. Par exemple, une garde-malade arrive et nous
donne un avis de dix jours. Après cela, elle peut prendre un
congé d'un mois sans solde. C'est bien beau quand on dit "sans solde",
mais l'administration de l'hôpital, qu'est-ce qu'elle est obligée
de faire? C'est nécessaire que la population le sache. Il y a trop de
monde qui parle des hôpitaux, à tort et à travers, sans y
avoir vécu. Moi, j'y ai donné assez de mon temps pour le savoir.
J'ai même accepté de présider des commissions
d'enquête sans être payé, comme tous les autres le
faisaient, parce que je croyais que chacun de nous, nous devions travailler
à l'amélioration de nos hôpitaux.
Cette personne part en vacances pour un mois. L'administration qui
travaille dans le cadre d'un budget doit donc lui trouver une
remplaçante. On a beau dire qu'il y a 1,000 gardes-malades qui n'ont pas
de travail; ce sont des gardes-malades qui veulent travailler à des
heures choisies. Essayez d'en trouver qui vont vouloir venir travailler dans
nos hôpitaux de quatre heures à minuit et de minuit à huit
heures. Chez nous, nous avions besoin de 120 personnes quand nous avons ouvert
l'urgence et nous n'étions même pas capables d'en trouver quinze
pour faire cet ouvrage-là. Seulement, on dit partout qu'on a du
personnel tant et plus dans les hôpitaux.
La personne qui part s'en va se reposer, c'est son droit. Par contre, le
directeur général qui demeure est obligé d'aller voir une
garde-malade qui vient de faire son quart. Il lui demande: Mademoiselle, est-ce
que vous n'accepteriez pas de faire un autre quart? Très bien. Cette
personne-là, elle le fait, son autre quart, mais à temps et demi.
Alors, essayez, en hommes d'affaires que vous êtes tous ici,
d'équilibrer votre budget comme cela! Nous, à la fin de
l'année, nous ne pouvons pas équilibrer notre budget parce que
nous avons trop d'inconnues durant l'année.
Nos lois de travail devraient être
réaménagées. Il y a des conventions; qu'on n'ait donc pas
peur, au cours des conventions, de la discussion, de la conciliation, de parler
de ces choses.
Prenez, par exemple, les trois jours de congé de maladie sans
être obligé de présenter un rapport. C'est encore une
source. Ici, chez nous, dans l'hôpital j'espère que les
députés, les ministres et tous ceux qui sont ici, au
gouvernement, lisent ces rapports une fois de temps en temps nous avons
234 absents, dans l'année, dans notre personnel, à cause des
congés de maladie, à cause des congés d'un mois, toutes
ces choses. C'est nécessaire d'étudier la loi en relation avec
ces faits. Nous, nous vivons ces faits dans nos hôpitaux. Je ne vis pas
ces faits dans mon bureau à la Commission de contrôle des permis
d'alcool. Je ne les vivais pas dans mon bureau au palais de justice. Je les
vivais à l'hôpital. Je vous demande, messieurs du gouvernement, de
venir les vivre avec nous. Vous verrez que vous changerez d'optique dans vos
lois.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais simplement mentionner
que les problèmes soulevés par M. Trahan, vice-président
de l'association, sont des problèmes de relations de travail et que,
justement, ces problèmes sont discutés lors du renouvellement des
conventions collectives. Nous reconnaissons le droit à la
négociation, au Québec, dans la législation du travail. Il
n'est pas possible de les régler par le biais d'un projet de loi comme
celui que nous discutons.
Justement, pour être conscient des éléments que
mentionne M. Trahan, nous nous associons étroitement à
l'Association des hôpitaux dans la négociation des conventions
collectives. D'après tous les rapports que je reçois,
présentement, les mécanismes mis en place du côté
des hôpitaux, de même que du côté du gouvernement,
semblent s'améliorer de négociation en négociation
à tel point que, récemment, une entente a été
formulée, à laquelle le gouvernement et les parties en cause,
dans les négociations, ont reconnu un rôle très clair
à l'Association des hôpitaux dans ce domaine. Alors je ne vois pas
exactement à quoi fait allusion M. le juge présentement, lorsque
nous discutons du projet de loi no 65.
Peut-être que j'aimerais avoir aussi, sur ce point, l'opinion de
quelqu'un d'autre de l'association, à savoir si vraiment, sur ce plan,
il y a un désaccord alors que nous venons d'en arriver à un
accord sur la façon de négocier avec les syndicats.
M. TRAHAN: M. le ministre, j'ai eu l'avantage de venir à
Québec, à un moment donné, rencontrer les gens de la
fonction publique. On devait avoir des informations. On nous appelait les
"partners". Nous sommes de drôles de "partners". Toutes les informations
que nous avons essayé d'obtenir, nous ne les avons pas encore obtenues.
C'était au mois de mars et nous sommes rendus au mois d'octobre. Comme
administrateur je parle comme administrateur c'est un bien
drôle de "partner". Je dois avoir de mon "partner" les informations
nécessaires à l'administration de l'hôpital. Parce que
votre loi sera une loi pour administrer les hôpitaux. Que ce soient les
groupes socio-économiques ou qui on voudra qui administrent
l'hôpital, ils seront obligés de vivre les problèmes que
nous vivons; ils seront obligés d'appliquer les conventions collectives
qui auront été adoptées. Ces conventions collectives,
malheureusement, ne nous aident pas à administrer les hôpitaux
pour que ce soit le malade qui en bénéficie.
C'est pour cela que j'attire l'attention de tout le monde ici
présent, pour que chacun
fasse sa part: le patron, le gouvernement, les syndicats. Je l'ai
déjà dit et je le répète: L'administration d'un
hôpital ne se fait pas seulement par le conseil d'administration. Elle se
fait avec tout le monde qui est dans l'hôpital. C'est une chaîne.
Quand un anneau de la chafne est brisé, malheureusement, qu'on ait les
plus belles lois ou qu'on ait les lois les plus floues, on se sera pas plus
avancé.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: Je vous remercie, M. le juge, parce que vous avez
répondu à une question que j'avais l'intention de vous poser. Je
pourrais ajouter comme sous-question: Serait-ce une partie de l'explication des
longues listes d'attente qu'on retrouve, actuellement, dans chaque
hôpital?
M. TRAHAN: Monsieur, quand on a 10,300 jours-patients de disparus dans
un hôpital, il n'est pas surprenant que les listes soient longues.
Je pense que je pourrais faire appel à tous les gens qui sont
ici, il n'y a pas un hôpital qui n'a pas des lits de fermés et on
dit: On a assez d'hôpitaux, mais il y a des lits qui ne sont pas... Je
comprends, M. le ministre, que vous pensiez peut-être que ça ne va
pas directement avec la loi, mais la loi qui va être faite va être
pour administrer les hôpitaux, et l'administrateur, lui, s'il n'a pas les
accessoires voulus pour faire marcher son hôpital, avec cette
loi-là, ça ne l'aidera pas.
Ce qu'il nous faut c'est le personnel, il nous faut une loi qui soit
souple, qui puisse nous aider à administrer. C'est comme ça que
je vois ça.
M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, c'est une question
ou plutôt une observation à M. LeMay. Lorsque vous disiez
tantôt que la plupart des membres du conseil d'administration
étaient des présidents de compagnie, de corporations, que tous
ces gens-là avaient commencé leur vie à travailler
à $5 par semaine moi aussi j'ai commencé comme ça
et je ne fais pas partie d'un conseil d'administration je m'excuse, mais
vous ne m'avez pas convaincu que tous ces gens-là font ça par
dévouement, par renoncement même, au risque de sacrifier leurs
intérêts personnels. Je dois vous dire que je suis convaincu qu'il
y en a beaucoup dans ça qui le font parce qu'ils ont des
intérêts personnels. C'est tout simplement une observation. Vous
ne m'avez pas convaincu du tout du renoncement de ces gens-là.
Les présidents de grosses corporations et de grosses compagnies
ne sont pas plus dévoués aux malades que les simples individus.
Souvent ils sont là parce qu'il y a de l'intérêt au bout.
C'est tout ce que j'avais à vous dire.
M. LEMAY: J'ai complété le portrait que j'avais
commencé à esquisser en voulant bien indiquer que, dans le cas de
l'hôpital que je mentionnais, ces gens-là avaient connu ce
qu'était la privation d'abord, qu'ils avaient une connaissance des
besoins du milieu dans lequel ils vivaient, que leur esprit de civisme
s'était développé au cours des années et
qu'à force de travail, à force d'énergie, à force
de ténacité au cours des années, ils avaient réussi
à atteindre des fonctions de direction et de responsabilité, et
que des gens de ce calibre ou d'un tel calibre peu importe qu'ils se
trouvent dans la province de Québec doivent être des gens
dont la présence est recherchée, parce qu'ils ont fait preuve
d'abord de compétence.
Deuxièmement, quant au dévouement, je peux vous assurer
qu'en ce qui concerne tout de même l'hôpital où je suis
président les autres représentants des divers
hôpitaux seront là pour expliquer ce que c'est que le
dévouement lorsque je sais qu'un membre de conseil
d'administration vient assister à une réunion, au conseil de
Notre-Dame, et qu'il se prive d'obtenir un jeton de présence ailleurs,
il fait un don direct équivalent à la privation financière
qu'il subit à la suite de cette chose-là. Et j'en connais.
Quant à un intérêt personnel, les gens ont atteint
un point de rémunération personnelle où ils peuvent
contribuer à la société tout simplement en étant
présents à l'hôpital où ils assistent à la
réunion du conseil d'administration et ça fait partie de leur
esprit philanthropique.
Pour d'autres intérêts personnels, je n'en connais pas
où il y aurait d'autres motivations en ce qui nous concerne tout de
même, à Notre-Dame. Cela me fait plaisir de le dire à
l'éloge de tous mes collègues du conseil d'administration de
notre hôpital.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais vous dire tout simplement qu'il
y a beaucoup de dévouement dans les hôpitaux. Il y en a eu
autrefois de la part des communautés religieuses. H y a beaucoup de
personnes qui se sont dévouées aux malades. Mais de là
à ne citer que les présidents de corporation qui font partie du
conseil d'administration, qu'il n'y a que ces gens-là qui se
dévouent, c'est là que je ne marche pas du tout dans la
patente.
M. LEMAY: Si vous me permettez, je vais vous donner...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Le gars ne sacrifie pas ses affaires
personnelles pour aller siéger à un conseil d'administration.
J'en connais quelques-uns. J'espère que vous ne me demanderez pas de
noms.
M. LEMAY: ... une description peut-être qui
vous permettra de mieux comprendre la situation.
Lorsque nous communiquons avec le ministre des Affaires sociales et que
nous transmettons un budget, c'est parce qu'à l'intérieur, tous
les services de l'hôpital ont d'abord décrit leurs besoins. Et le
conseil d'administration, ne voulant pas agir comme comité
plénier pour tout ce travail préliminaire, demande à l'un
de ses membres de conseil d'administration de présider le comité
du budget. Et ce membre de comité du budget qui est un
président de compagnie déjà, qui a l'expérience
pour examiner un budget, pour contrôler les dépenses, pour savoir
ce qu'un contrôleur des finances doit remplir, ce qu'un contrôleur
des achats doit remplir comme fonctions examine avec le directeur
général, les représentants du bureau médical et le
directeur des finances de l'hôpital, l'ensemble du budget.
Lorsqu'il est satisfait, qu'il a un document présentable qui
pourrait être accepté par les autorités gouvernementales
ici à Québec, il le soumet au comité exécutif de
l'hôpital; le comité exécutif, reprenant l'ensemble du
budget, pense et arrive à un point où il peut le soumettre au
conseil d'administration. Au conseil d'administration, il y a vingt de ces
personnes qui assistent, posent leurs questions et disent: Très bien, le
directeur général est satisfait, le bureau médical est
satisfait, l'administration générale a complété son
travail. C'est le rapport du président du comité du budget. Cela
prend du dévouement.
Depuis quelques années, nous examinons toute la
législation qui nous vient de Québec. Nous avons deux personnes,
en particulier, dont l'une est "chairman of the board" d'une compagnie de
fiducie et l'autre directeur général d'une autre compagnie de
fiducie, qui constituent le comité de législation et des
règlements. Chaque fois qu'il émane quelque chose d'un
ministère, que ce soit à Québec ou à Ottawa, elles
ont pour fonction d'examiner et de digérer cette législation et
cette réglementation, d'en faire rapport au comité
exécutif et finalement au conseil d'administration. Moi, j'appelle cela
de l'abnégation, des gens qui consacrent des heures de dévouement
à la chose publique et qui le font gratuitement, tout simplement pour
que l'hôpital soit le mieux administré possible. C'est une
description du milieu que je connais.
Evidemment, personne n'a la science universelle, et je ne connais pas
tous les cas que vous pouvez avoir à la mémoire. Tout ce que je
peux vous dire, c'est que les gens qui m'entourent, que ce soit M. Tremblay,
à ma gauche, le Dr Knox, aussi à ma gauche, M. le juge Trahan, M.
Houle, M. Saint-Onge, directeur de l'AHPQ et moi, nous parlons des faits que
nous connaissons. Soyez assurés que si vous avez des faits à nous
communiquer où nous pourrions améliorer l'administration des
hôpitaux, nous le ferons avec plaisir. Nous pourrions en parler, si le
coeur vous en dit.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aurais une question
à poser à Me LeMay et au juge Trahan qui sont, tous les deux,
présidents de corporation d'une institution hospitalière
importante à Montréal. Est-ce que vous croyez que la
région de Montréal serait une région toute
désignée pour faire l'implantation, en première
étape, d'un ORAS, d'un Office régional des affaires sociales?
Est-ce que vous y voyez, à ce moment-ci, des difficultés
particulières d'implantation? Cela veut dire: Est-ce qu'il y aurait des
étapes nécessaires avant l'implantation?
M. LEMAY: Le mémoire contient des commentaires qui indiquent que
le projet de loi, s'il était mis en application dans sa forme
présente, créerait beaucoup de difficultés. Nous avons
signalé ces points au gouvernement de façon qu'on se penche de
nouveau sur l'organisation et les structures.
Nous croyons, à la lecture du texte et dans l'ensemble, que les
ORAS, avec les structures projetées, vont conduire à une
augmentation de centralisation plutôt qu'à une
décentralisation qui peut aider le gouvernement en ce qui concerne le
fonctionnement hospitalier. A Montréal, c'est une situation
peut-être particulière avec les universités qui sont
présentes. Les centres hospitaliers universitaires qui seront
créés, qui seront développés et qui devront avoir
des représentations à l'ORAS ou en contact direct avec le
gouvernement devront certainement avoir un traitement plus défini parce
que, comme M. le ministre l'a mentionné, la question de la recherche est
un facteur important. La question de l'enseignement avec les plein-temps
géographiques qui oeuvrent à la fois à l'université
et à l'hôpital je sais qu'à Notre-Dame, comme
exemple, il y a cinq de nos directeurs de services qui sont également
directeurs de services dans l'enseignement à l'université de
Montréal cela crée peut-être une complexité
que l'on ne retrouve pas lorsqu'on est dans un centre local de santé
ailleurs qu'à Montréal. Il faut certainement prévoir
beaucoup de souplesse dans cette loi de façon qu'elle soit bonne et
demeure utile pour de nombreuses années.
Le Dr. Bois, est en arrière de moi, j'ai eu assez souvent
l'occasion de le rencontrer. Nous n'avons pas de formule miracle; tout ce que
nous espérons, c'est de contribuer à la mise au point d'une
formule vivable, progressive et qui demeure valable pour de bonnes
années à venir. Lorsque nous voyons qu'un corset de force existe,
nous craignons ces contraintes que nous voyons d'avance et qui nous laissent
l'impression que nous aurons des difficultés dans l'avenir parce que la
loi n'est peut-être pas assez souple pour prévoir ces mouvements.
L'expérience indiquera au gouvernement seulement
quel est le succès des ORAS, mais nous devons indiquer les
dangers de l'utilisation des structures telles que préconisées
actuellement.
M. LE PRESIDENT: Je remercie les porte-parole de l'Association des
hôpitaux de la province de Québec. Maintenant, à cause du
temps, je vais demander au Comité des doyens des facultés de
médecine de la province de Québec de faire sa
représentation.
Comité des doyens des facultés de
médecine de la province de Québec
M. BOIS (Pierre): Pierre Bois, Université de Montréal. M.
le Président, tout d'abord, à cause d'un concours de
circonstances imprévues, mes trois collègues doyens n'ont pu se
rendre ici ce matin. Toutefois, nous avons avec nous le Dr Richard
Béland, représentant du doyen de l'Université de
Sherbrooke, le Dr Yves Morin, représentant du doyen de
l'Université Laval, le Dr Pat Cronin, vice-doyen de l'Université
McGill, et le Dr Jean Mathieu comme secrétaire du comité.
Le Comité des doyens est heureux de pouvoir présenter ses
commentaires et vous remercie de cette occasion qui lui est donnée de se
faire entendre. Il a voulu plus spécialement se limiter à des
commentaires concernant l'implication du projet de loi 65 dans le domaine de
l'enseignement et de la recherche et aussi au sujet des relations entre les
centres hospitaliers qui participent à l'enseignement et les
universités ou leur faculté de médecine.
L'enseignement clinique, par définition, doit s'effectuer dans un
milieu où l'on dispense des services de santé. Au cours des
années, cet enseignement s'est développé progressivement
selon une structure universitaire dans certains centres hospitaliers dont l'une
des caractéristiques est la présence, entre autres, de
professeurs-cliniciens et d'étudiants.
Ceci a conduit à certaines ententes entre les hôpitaux et
les universités caractérisées, finalement, par la
signature de ce que l'on appelle les contrats d'affiliation.
Le Comité des doyens des facultés de médecine
aurait souhaité que le projet de loi montre plus clairement que certains
centres hospitaliers, ou de dispensation de soins ou de services, du fait de
leur mandat supplémentaire d'enseignement et de recherche, sont l'objet
de dispositions particulières qui font qu'ils se distinguent des
autres.
Ainsi, la loi de l'organisation des services de santé et des
services sociaux pourrait contribuer à promouvoir l'enseignement et la
recherche en même temps que la qualité des services de
santé et des services sociaux.
Nous avons subdivisé ce court mémoire sous quatre
en-têtes principaux. Le premier concerne la responsabilité de
l'office régional à l'égard de l'enseignement et de la
recherche. A ce sujet, nous recommandons que l'ORAS, à l'article 4, ait
également pour fonction de promouvoir l'enseignement et la recherche,
lesquels doivent être sous la responsabilité des institutions
d'enseignement et des organismes d'agrément, et qu'à l'article 36
il soit stipulé que cet ORAS puisse faire des règlements relatifs
à l'enseignement et à la recherche pour ces centres.
Notre deuxième point concerne la représentation des
universités au niveau du conseil d'administration des ORAS. Dans ce cas,
nous recommandons qu'à l'article 9 du projet un amendement puisse
être fait de sorte que le lieutenant-gouverneur en conseil nomme les
représentants de l'université à l'ORAS parmi les personnes
que celle-ci aura désignées.
Notre troisième point concerne les liens organiques entre
l'université et les centres qui participent à l'enseignement.
Nous croyons qu'il y aurait intérêt à
préciser dans la loi la représentation de l'université
dans ces institutions, de façon à maintenir les liens qui se sont
noués entre les hôpitaux d'enseignement actuels et les
universités. A ce sujet, nous avons deux recommandations. Dans la
première, en particulier, nous recommandons que lorsque des centres
participent à l'enseignement, l'université désigne ses
représentants au conseil d'administration d'un centre hospitalier, d'un
centre de services communautaires et, lorsqu'il y a lieu, d'un centre
d'accueil.
La quatrième recommandation dans le même sens serait que le
projet de loi soit amendé de telle sorte que le doyen ou son
délégué puisse siéger au comité
administratif du conseil des médecins et dentistes.
Le dernier point auquel nous aimerions ajouter quelques commentaires est
celui qui concerne les responsabilités pédagogiques des
facultés des sciences de la santé. Par l'article 78, l'actuel
projet de loi confie aux directeurs des services professionnels l'organisation
de l'enseignement. A ce sujet, les doyens des facultés de
médecine considèrent qu'avec la participation des professeurs et
des étudiants, l'élaboration des programmes relève de la
compétence des institutions d'enseignement et que l'exécution de
ces programmes dans les centres qui participent à l'enseignement doit
être confiée aux personnes mandatées à cette fin par
l'université, selon les modalités des contrats d'affiliation.
Par conséquent, notre dernière recommandation serait que
l'article 78 soit amendé pour que les affaires relatives à
l'enseignement et à la recherche soient sous l'autorité et la
responsabilité de l'université avec laquelle un centre qui
participe à l'enseignement est affilié selon les modalités
prévues.
En conclusion, le comité des doyens désire attirer
l'attention des membres de la commission sur l'existence dans le système
actuel de types de centres de santé où des mécanismes ont
été graduellement mis en place pour favoriser à la fois
l'enseignement, la recherche et la qualité des soins. Il souhaite que la
loi projetée
consolide les progrès réalisés tout en étant
assez souple pour permettre l'exploration de formules nouvelles.
En somme, le comité des doyens a voulu souligner l'extrême
importance de prévoir et de favoriser, dans le projet de loi soumis, la
mission d'enseignement et de formation universitaire de sorte que nous
puissions continuer dans la direction déjà indiquée depuis
plusieurs années.
Je vous remercie.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier M. le doyen
Bois pour le mémoire qu'il nous présente ce matin de la part du
Comité des doyens. Je voudrais aussi profiter de l'occasion pour
souligner le fait que nous avons reçu, au cours des derniers mois, une
excellente collaboration des doyens à divers titres, soit dans
l'étude des projets d'immobilisation, dans les hôpitaux
d'enseignement, soit dans des mandats spécifiques comme celui que nous
avons confié au Dr Bois et à certaines autres personnes dans
l'étude des problèmes de santé, par exemple, à la
ville de Laval. Alors, c'est dans un esprit extrêmement positif que nous
recevons ce mémoire, sachant le niveau des préoccupations qui
animent ceux qui l'ont rédigé.
Je voudrais aussi mentionner que les buts que nous recherchons sont
exactement les mêmes que ceux exprimés au bas de la page 5 du
mémoire lorsqu'on dit qu'il est important que "la loi projetée
consolide ce qui est acquis tout en étant assez souple pour permettre
l'exploration de nouvelles formules." Alors, lorsque le comité nous fait
des représentations quant au mode de désignation, par exemple,
des représentants des universités ou des institutions
d'enseignement, je ne vois pas de difficulté sur ce plan.
Lorsque, par contre, à la 5e recommandation, par exemple, l'on
nous dit que l'article 78 devrait être amendé pour que les
affaires relatives à l'enseignement et à la recherche soient sous
l'autorité et la responsabilité de l'université avec
laquelle un centre qui participe à l'enseignement est affilié,
selon les modalités prévues au contrat d'affiliation, et qu'au
paragraphe précédent l'on dit que l'exécution des
programmes dans les centres doit être confiée aux personnes
mandatées à cette fin par l'université, il y a là
un point qui est extrêmement délicat et qu'il nous faut, je crois,
explorer de façon très attentive.
D'une part, au niveau gouvernemental, le ministère de l'Education
est le ministère responsable du secteur de l'éducation ou de
l'enseignement. Il joue aussi un rôle prépondérant dans le
domaine de la recherche, par le fait que la recherche s'effectue, dans une
large mesure, particulièrement dans des secteurs comme celui de la
santé et des services sociaux, dans les universités ou les
institutions qui y sont affiliées.
D'autre part, les institutions hospitalières, présentement
nous en avons eu des manifestations au plan de leur structure
interne, représentent une réalité assez complexe. On
demande par exemple l'Association des hôpitaux, ce matin, et
l'Association des administrateurs d'hôpitaux l'unité de
direction. D'autre part, les conseils de médecins et dentistes ou les
bureaux médicaux nous demandent de maintenir dans les mains de ces
bureaux médicaux une responsabilité directe vis-à-vis du
conseil d'administration quant à l'organisation médicale et
scientifique d'un hôpital. Donc, nous avons là une double
autorité qui peut s'exercer ou une autorité qui peut s'exercer
par des canaux différents.
Maintenant, les doyens nous disent qu'en ce qui a trait aux institutions
d'enseignement, elles aimeraient que l'exécution des programmes soit
confiée aux personnes mandatées à cette fin par
l'université et que, de plus, l'université ait l'autorité
et la responsabilité quant aux affaires relatives à
l'enseignement et à la recherche dans les institutions. Le
problème réside au niveau des institutions hospitalières,
dans la nécessité d'avoir une structure qui permette de concilier
tous ces impératifs et qui fonctionne.
Au niveau des universités, nous connaissons et nous reconnaissons
le désir que les universités ont de garder le plus large
degré d'autonomie possible. C'est la raison pour laquelle, dans le
projet de loi, nous avons proposé les articles 78 et 82. Ils nous
apparaissaient consolider l'acquis, le processus par lequel les arrangements se
sont faits au cours des dernières années, soit des contrats
d'affiliation entre les universités et les hôpitaux, contrats
d'affiliation qui déterminaient les modalités selon lesquelles
l'enseignement devait être dispensé à l'intérieur
des institutions d'enseignement: la confection des programmes, les responsables
de la dispensation des cours.
Nous avons voulu faire une distinction et c'est la suivante:
l'organisation matérielle, l'administration des fonctions
d'enseignement, nous avons cru qu'il était nécessaire de la
donner de façon spécifique au directeur des services
professionnels, non pas pour que lui ait autorité sur le contenu des
programmes, non pas pour qu'il détermine les modes de pédagogie
devant être utilisés, etc., mais plutôt qu'il soit
responsable du bon fonctionnement des activités d'enseignement dans le
cadre des modalités du contrat d'affiliation entre l'université
et les institutions hospitalières.
Nous avons voulu être respectueux du désir d'autonomie des
universités, nous avons voulu consolider à partir de l'acquis ou
des relations qui se sont établies au cours des années, apporter
une précision au plan de l'organisation du fonctionnement beaucoup plus
au plan administratif à l'intérieur d'une institution. C'est dans
ce contexte que nous avons fait les propositions. Je me demande
sincèrement s'il nous est possible d'aller aussi loin que ce qui est
proposé par le comité de doyens sans introduire à
l'intérieur des institutions hospitalières aux fins de
l'enseignement une nouvelle dimension qui pourrait aller dans un trop grand
degré de précision, fixer peut-être un cadre un peu trop
rigide de fonctionnement et ne pas permettre que la fonction principale de
l'institution, qui est celle de rendre des soins, puisse être
effectuée adéquatement.
Ce sont les questions que nous nous posons. Ce sont les motifs qui nous
ont conduits à faire les propositions que nous retrouvons aux articles
78 et 82.
Peut-être que M. le doyen aimerait commenter.
M. BOIS (Pierre): Tout d'abord, M. le ministre, si nous avons fait des
commentaires au sujet de l'article 78, c'est que le terme au départ de
l'organisation de l'enseignement nous paraissait d'une extension difficile
à déterminer.
D'autre part, si nous retournons un peu en arrière, nous avons
déjà, avec plusieurs hôpitaux, des contrats d'affiliation
où nous retrouvons, au niveau du conseil d'administration, un
représentant de l'administration de l'université, du recteur; au
niveau de l'exécutif du bureau médical, un représentant de
la faculté. Au niveau de tous les départements hospitaliers, il y
a des professeurs qui sont à la fois professeurs et directeurs de
départements de médecine, de chirurgie, etc., qui constituent la
structure clinique et universitaire.
Donc, ce système, cette formule a évolué selon la
nécessité et selon l'expérience jusqu'à ce jour.
Bien sûr, il y a une sorte d'entente tripartite où
l'université, d'une part, et l'hôpital, d'autre part, sur des
aspects administratifs, se concertent en regard de l'enseignement et de la
recherche et où la faculté, ses professeurs et la
représentation du bureau médical ou de ses comités se
concertent de nouveau pour l'exécution, la réalisation du
programme ainsi que son ajustement. Comme l'évolution fait que de plus
en plus nous nous questionnons sur la pertinence des enseignements en regard de
l'exercice professionnel, nous évoluons progressivement vers des milieux
de dispensation de soins comme milieux de formation et d'enseignement. De sorte
que, comparé à il y a quinze ans, l'enseignement de la
médecine chez nous a évolué de plus en plus du campus
universitaire vers les milieux cliniques et, donc, se retrouve presqu'à
75 p.c. ou 80 p.c. dans le cadre des hôpitaux dits d'enseignement. Les
contrats d'affiliation sont une résultante des accommodements
nécessaires pour que ceci s'effectue.
Si nous avons exprimé le voeu que dans le projet de loi il y ait
une sorte de confirmation de ceci, c'est parce que justement, à
l'origine, la signature des contrats d'affiliation, selon la Loi des
hôpitaux actuelle, a donné lieu à beaucoup de discussions
à savoir s'il était ou n'était pas légal que ces
contrats soient signés entre l'université, d'une part, et
l'hôpital, d'autre part, qui a une autonomie presque complète.
Actuellement selon la loi des hôpitaux, on s'est dit: Puisqu'il y a une
nouvelle loi, il serait peut-être opportun qu'on dissipe ce petit
problème qui a donné lieu à beaucoup de travaux et de
spéculations de part et d'autre et qui, en somme, a été
contourné, selon certains conseillers d'une façon peut-être
pas tout à fait légale dans le cadre actuel.
M. CASTONGUAY: Est-ce que l'article 82, M. le doyen, ne règle pas
ce problème en mentionnant très clairement qu'un centre
hospitalier, un centre de services sociaux peut offrir des services
d'enseignement et de recherche et ceci à la condition qu'il soit
relié par contrat à une institution d'enseignement reconnue par
le ministre de l'Education, de telle sorte qu'au plan des engagements qui
peuvent en résulter étant donné le fait qu'il y a
toujours des implications financières les termes de ce contrat
doivent être approuvés par le ministre des Affaires sociales et le
ministre de l'Education? Est-ce que cet article ne règle pas, à
tout le moins, cette dernière difficulté que vous avez
mentionnée?
M. BOIS (Pierre): A nos yeux, le conflit à ce sujet se trouvait
en regard des deux articles qui concernent la composition des conseils
d'administration de l'office ou des centres qui, étant définie de
façon tellement précise en nombre et en origine, si je peux dire,
faisait que bien que l'article 82 permettait des contrats, d'autre part, ces
contrats ne pourraient pas impliquer une présence efficace de
l'université au niveau des conseils d'administration, étant
donné que ce sera en contradiction avec les articles
précédents.
C'est pour ça que nous avons senti le besoin d'apporter cette
question devant vous, ayant eu à en discuter maintes fois comme je l'ai
dit, dans le cadre de la loi actuelle des hôpitaux.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, pour appuyer ce que le
Dr Bois vient de dire ainsi que les commentaires du ministre, pour ma part, je
ne verrais pas d'objection à ce que, dans la composition des conseils
d'administration, de façon à bien établir la
représentation et les liens organiques, il y ait peut-être une
composition un peu différente et un peu plus souple pour les
institutions qui auront justement des contrats d'enseignement avec les
facultés universitaires. Cela pourrait prendre soin de cet
élément que vous voulez protéger même si on peut
être satisfait de l'article 82, vous vouliez qu'il y ait un prolongement
au sein des conseils d'administration afin que les contrats d'affiliation
puissent vraiment garder tout leur sens.
Personnellement, je ne verrais pas d'objection à ce qu'il y ait
une composition un peu plus souple pour les conseils d'administration de ces
institutions où l'enseignement et la recherche ont plus
d'importance.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: Le député de Montmagny vient tout juste de poser
ma question.
M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autre question, je remercie le Dr
Bois, porte-parole du Comité des doyens. La commission suspend ses
travaux jusqu'à trois heures moins le quart.
M. CASTONGUAY: Jusqu'à deux heures et demie.
M. LE PRESIDENT: Jusqu'à deux heures trente. Merci. Reprise de
la séance à 14 h 38
M. FORTIER (président de la commission des Affaires sociales): A
l'ordre, messieurs!
Pour l'information de tous, la commission a l'intention de suspendre ses
travaux à six heures, à moins que les membres de la commission
n'en décident autrement. Quant à la prochaine séance pour
la présentation de mémoires, le secrétaire des commissions
avisera les organismes par écrit ou encore par une annonce quelconque
pour les mettre au courant, à moins que nous puissions décider de
la date cet après-midi. La Conférence religieuse canadienne.
Je demande encore aux porte-parole, autant que possible, de faire un
résumé de leur mémoire, s'il vous plaît.
Conférence religieuse canadienne
M. ISABELLE: Je me nomme tout d'abord, père Yvon Isabelle,
président de la Conférence religieuse canadienne du
Québec. Je suis accompagné ici de Me Gustave Monette, de Me
Maurice Jacques, de soeur Marie-Paule Levaque, qui ont contribué ainsi
que certains autres, dont le père Ducharme, jésuite, notre
directeur régional, qui est absent pour cause de maladie, cet
après-midi, à la préparation de notre mémoire et
qui pourront répondre aux questions que vous auriez à nous
poser.
Ce mémoire a été préparé à la
suite de consultations écrites et de rencontres régionales
à l'intérieur de la CRC. Je vous rappelle que la CRC
représente 42,000 religieux dans le Québec, en plus de 5,000 qui
oeuvrent dans les pays du Tiers-Monde. On nous a demandé de
synthétiser. Je vous prierais de retenir l'énoncé que je
vais faire puisqu'il exprime notre appréhension majeure face au bill
65.
Nous trouvons que cette loi, si elle était adoptée dans sa
teneur actuelle, exclurait, et de façon définitive, les
communautés religieuses des oeuvres charitatives, que ce soit dans le
secteur hospitalier ou dans celui des foyers; elle exclurait ces
congrégations de ces oeuvres qui sont leur raison principale
d'exister.
Même si les objectifs du bill 65 n'ont pas été
explicités dans le texte de la loi, nous pouvons quand même les
deviner. D'une façon générale, nous les trouvons louables
et présentant plusieurs aspects positifs. La coordination que le bill se
propose d'effectuer en vue d'offrir d'une façon équitable toute
la gamme des services, la participation plus générale qu'il veut
promouvoir, la perspective de prévention et de "globalité" qui
l'anime, tout cela est heureux dans les principes. Par contre, nous nous
demandons, à la suite de plusieurs organismes qui ont
étudié le bill, si ce projet, dans sa forme actuelle, peut
atteindre les buts qu'il poursuit. J'ai constaté, en écoutant ce
matin, que le rapport de l'Association des hôpitaux arrive à des
conclusions assez souvent semblables aux nôtres,
parfois identiques. J'ai l'impression que ce fait exprime la convergence
du bon sens, je suppose, de tous ceux qui ont fait ces rapports.
Je mentionne seulement quelques points. Tout d'abord, le rapport
Castonguay-Nepveu propose la création d'offices régionaux pour
décentraliser l'administration des oeuvres de santé et de
bien-être. Le bill crée ces offices mais il en fait des organismes
consultatifs sans pouvoir de décision. De même, le bill accorde
bien peu de pouvoirs aux conseils d'administration des institutions.
L'efficacité de fonctionnement et la décentralisation demandent
que la prise de décision se fasse près du malade, du patient ou
du client. Une participation réelle exige la délégation de
pouvoirs, une autonomie suffisante des différents niveaux administratifs
et l'octroi de responsabilités réelles. Le projet centralisateur
que nous propose le bill s'oriente dans la direction contraire.
Le bill nous semble aussi bien rigide. Il manque de la souplesse
nécessaire à un fonctionnement réaliste. La division entre
"institution publique" et "institution privée", proposée tue
toute initiative privée et toute liberté. Elle décourage
le bénévolat, spécialement le bénévolat des
groupes tels que les communautés religieuses. La structure corporative
unique pour les divers instituts n'est pas réaliste au dire de personnes
engagées dans les organismes de bien-être et surtout dans les
foyers.
Les conversions et les fusions ouvrent la porte à l'arbitraire et
même à la spoliation. Il faut déterminer comment se feront
les conversions et admettre dans la loi le principe d'une reconnaissance
équitable de l'investissement des communautés dans l'oeuvre.
Nous savons que c'est là l'intention de M. le ministre, mais,
dans la reconnaissance de leurs droits, les citoyens ne doivent pas compter sur
la seule bienveillance d'un ministre. La loi elle-même doit
reconnaître ces droits.
Deux points essentiels pour qui croit encore à la liberté
d'association, aux droits des hommes et des sociétés, sont de
grandes conséquences pour les communautés religieuses. C'est la
suppression totale des corporations privées à but non lucratif et
l'oubli de reconnaître le droit à une compensation
équitable dans le cas de conversion ou de fusion de corporations.
Une communauté religieuse, c'est un groupe de personnes
animées d'une même foi, qui décident de mettre en commun
leurs efforts et leur travail pour servir le Christ et promouvoir les valeurs
évangéliques et les valeurs humaines. Leur activité
s'exerce soit dans le domaine spirituel surtout, comme le font les
contemplatifs, soit au niveau pastoral, soit aussi dans des oeuvres
hospitalières, éducatives ou de bien-être, soit enfin au
Tiers-Monde. Parfois, le religieux travaille dans une oeuvre de la
communauté. Souvent aussi, il s'engage individuellement dans une oeuvre
publique ou une activité qui lui permet de poursuivre ses objectifs.
Enlever à la communauté religieuse le droit de s'orienter
librement vers les oeuvres qu'elle choisit, selon ses objectifs et ses
constitutions, c'est mettre en doute l'essence même de ses buts. C'est en
quelque sorte priver des citoyens du droit d'association, dans un secteur
donné, alors que ce droit est capital pour eux. Or, le bill 65, dans sa
teneur actuellle, refuse aux citoyens le droit de former une corporation
à but non lucratif pour servir dans le secteur de la santé et du
bien-être. Cela empêche les communautés d'agir
conformément à leurs objectifs dans le secteur social.
De fait, les communautés doivent renoncer même à
leurs foyers d'adultes, pour lesquels le gouvernement ne débourse aucun
argent et n'a jamais rien déboursé. Un citoyen qui veut aider les
autres de ses deniers ne peut plus protéger, par une incorporation,
l'oeuvre qu'il établit. Je doute que les citoyens responsables des
fondations et des souscriptions, telle la Fédération des oeuvres
de charité, soient disposés à recueillir des fonds pour
les oeuvres du gouvernement.
Souvent, les religieux ne pourront plus travailler dans leurs oeuvres,
bien des portes aussi leur seront fermées quand ils voudront s'engager
comme individus. La fusion des hôpitaux chasse inévitablement les
religieuses qui ne sont pas syndiquées des postes de cadre. Ces
religieuses hospitalières libérées de leur emploi auront
de grandes difficultés à s'orienter dans l'oeuvre des foyers' ou
dans d'autres oeuvres, à moins de repartir à zéro, en
dépit de leur expérience.
Le principe d'une reconnaissance équitable des investissements
des communautés dans leurs oeuvres nous semble aussi important pour leur
survie. Une étude effectuée il y a cinq ans au Canada
révélait que 55 p.c. des religieux ne reçoivent aucun
revenu de l'extérieur de la communauté. C'est dire que le nombre
des religieux engagés dans le bénévolat est important.
Plusieurs diocèses sont d'ailleurs des centres de
bénévolat pour religieux.
Certaines communautés ont investi tout le patrimoine de la
congrégation dans des oeuvres hospitalières ou sociales. Elles
ont le droit, puisqu'elles perdent le contrôle de leurs hôpitaux et
de leurs oeuvres par le bill 65, d'orienter ailleurs dans des activités
conformes à leur idéal les sommes qu'elles y ont engagées.
En perdant ce contrôle, les communautés n'ont plus de caution
morale: l'institution peut permettre un fonctionnement peu compatible avec les
valeurs qui ont justifié leur engagement dans la société.
Elle peut prendre une orientation bien étrangère à
l'esprit chrétien. L'esprit de charité, entre autres, nous
semble-t-il, doit demeurer un fondement nécessaire pour certaines
oeuvres et particulièrement pour les foyers.
Une dernière question nous semble importante, c'est celle des
centres d'accueil pour adultes. Le monde hospitalier est évidemment
tributaire pour une large part de la technique et de la technologie. Il
dépend du monde scientifique. H doit tout de suite se soumettre à
la perspective de globalité qui inspire le bill 65.
Par contre, le monde des adultes âgés qui habitent en
foyers est un monde bien différent. Il peut toucher, bien sûr, au
milieu médical, mais il a d'abord ses exigences propres. Le vieillard ne
demande souvent qu'à vivre en paix dans le respect des valeurs humaines
et religieuses qui sont les siennes. Les valeurs humanitaires prennent pour lui
une importance capitale.
Pourquoi alors mettre ce secteur sur le même pied que les autres,
surtout quand son coût d'opération ne saurait être
comparable à celui des hôpitaux? Un conseil spécial
pourrait être responsable des foyers. Les institutions valables et
accréditées poursuivant des objectifs précis dans le
respect des valeurs humaines, de la nationalité et de la foi des
pensionnaires pourraient subsister.
Cette formule éviterait aussi la fermeture de nombreux foyers
installés au coeur de la maison d'une communauté et
propriété de celle-ci. Alors que la demande dans ce domaine des
foyers est si forte, pourquoi étouffer ce qui est valable? Et Soeur
Levaque ajoutera un commentaire à ce chapitre important lorsque j'aurai
fini de parler.
Les communautés religieuses sont conscientes du rôle de
plus en plus important de l'Etat dans le domaine de la santé et des
affaires sociales. Elles en sont d'ailleurs heureuses et elles souscrivent
entièrement aux objectifs à long terme d'une
responsabilité accrue de l'Etat et, par lui, d'une meilleure
coordination des oeuvres.
Elles ont eu trop longtemps une responsabilité exclusive dans ce
domaine à cause de déficiences du système. Dans un monde
qui veut s'organiser et promouvoir la justice sociale, elles ne pourraient
d'ailleurs plus, par leurs propres moyens, faire face aux
responsabilités accrues. Dans de nombreuses communautés le
recrutement se fait difficile, les mises de fonds pratiquement introuvables, de
sorte qu'elles sont disposées, dans de nombreux cas, à
céder à l'Etat une bonne partie des entreprises qu'elles ont
édifiées pour le bienfait de la population en
général.
Toutefois, elles n'en conservent pas moins des obligations
vis-à-vis du public, vis-à-vis de leurs membres et
vis-à-vis de l'Eglise.
Dans différents secteurs nous avons mentionné celui
des foyers dans différentes régions, leur présence
et leur contrôle sont instamment requis du public.
A l'égard de leurs membres et de leurs adhérents, les
communautés ont des obligations de plus en plus onéreuses. Par
suite de l'augmentation de l'âge moyen, de la diminution du recrutement,
les communautés ont une responsabilité accrue vis-à-vis de
leurs malades, des personnes retraitées et des vieillards, sans compter,
comme nous l'avons mentionné plus haut, qu'à cause du
phénomène du recyclage un grand nombre de religieux et de
religieuses, à un âge où ils pourraient encore subvenir
à leurs besoins, ne peuvent plus le faire dans les circonstances
actuelles.
Enfin, il est nécessaire de rappeler que les communautés
tiennent leur existence canonique de l'Eglise, dont elles sont tributaires, et
qu'elles ont encore vis-à-vis de celle-ci, en ce qui concerne le
fonctionnement de leur oeuvre et la disposition de leurs biens, une
responsabilité qu'elles ne peuvent négliger. A cause de ces
responsabilités, les communautés doivent effectuer des
changements par étapes et non d'un seul trait. Aussi, paraît-il
difficile et pratiquement impossible pour elles de concevoir une mainmise
totale et, disons-le, brutale, pure et simple de l'Etat sur leurs oeuvres.
Au plan individuel, il faut souligner la nécessité d'un
changement graduel chez les religieux et les religieuses. Effectivement, de
nombreux individus se sont engagés dans des oeuvres ou dans une oeuvre
en particulier pour leur vie, alors que cette perspective était non
seulement acceptée, mais requise de toute notre société.
Voici qu'aujourd'hui, au cours de leur vie et dans le développement de
leur vocation, on les forcerait à renoncer ni plus ni moins à
cette oeuvre et on les exposerait, à un âge où il n'y a
plus lieu de refaire sa vie, à un désoeuvrement quasi
complet.
Voici maintenant quelques-unes des recommandations auxquelles nous
tenons particulièrement. Tout d'abord, relativement à la double
définition proposée d'institution publique et d'institution
privée, nous recommandons: premièrement, de conserver aux
institutions existantes leur contrôle et d'assurer ainsi leur
continuité et leur stabilité; deuxièmement, de
reconnaître toutefois au gouvernement le pouvoir de
décréter que certaines de ces institutions sont
d'intérêt public ou social; troisièmement, de permettre
alors aux institutions décrétées d'intérêt
public ou social de fonctionner comme telles en gardant le contrôle de
leur activité, mais en admettant, au sein de leur conseil
d'administration, un représentant de l'Etat lorsqu'elles
reçoivent les subventions de celui-ci; quatrièmement, de
n'accoler le critère d'institution publique qu'aux institutions
antérieurement acquises par l'Etat.
A propos de cette distinction entre institution publique et institution
privée, je vous réfère à l'intervention de Me
Monette ce matin, laquelle il y aurait peut-être lieu de rappeler parce
que c'est un point extrêmement important que cette distinction au premier
article du bill. Devant les définitions ambiguës proposées
aux articles 1 f), 1 h), 1 i), qui permettent d'inclure même un foyer
pour personnes âgées , une résidence pour religieuses
âgées aux frais de la communauté ou comme locaux servant
à l'usage général de la communauté, nous
recommandons d'exclure les établissements dont le but principal est de
recevoir, de loger ou de traiter les ministres du culte, les religieux ou les
religieuses, de même que les établissements appartenant à
une communauté ou congrégation religieuse dont l'occupation est
axée, en tout ou en partie, sur la communauté ou la
congrégation elle-même, pour aider, recevoir,
diriger ou loger ses membres ou adhérents.
Evidemment, il conviendrait de fixer des normes plus précises
dans l'exercice du pouvoir d'enquête dont il est question aux articles 30
à 35. Non seulement l'article 48 crée une situation dangereuse
pour l'avenir, mais encore il lèse carrément les droits acquis.
C'est pourquoi nous recommandons que l'article 48 du projet de loi soit
retranché.
Les articles 49, 50 et 51 devraient être amendés pour
maintenir la notion de membre d'une corporation et des pouvoirs qui leur sont
généralement conférés. Pour assurer une certaine
continuité, les membres d'une corporation devraient être
recrutés en majeure partie parmi les membres des corporations
fusionnées ou converties et parmi les membres de leur conseil
d'administration.
Les articles 41, 49, 50, 51 et 93 combinés avec les articles 83
à 88 enlèvent à toutes fins pratiques aux institutions qui
sont maintenues par des corporations sans but lucratif le droit de
propriété et le droit de disposer. C'est pourquoi nous
recommandons que les cas de fusion ou de conversion en institution publique
tels que définis dans ce mémoire soient limités à
des cas d'exception, que ces fusions et conversions soient sujettes à
l'approbation de la commission provinciale si elle est créée et
qu'un mécanisme soit prévu pour fixer une indemnisation soit
à la corporation existante, soit à ses membres, tout en
reconnaissant qu'une telle indemnité ne doit pas être
versée sans le consentement de l'Etat et pour des raisons
particulières.
Dans les foyers, il faut tenir compte de la dénomination
religieuse des pensionnaires. En effet, les vieillards ne demandent souvent
qu'à vivre en paix dans le respect des valeurs humaines et religieuses
qui sont les leurs. L'importance des valeurs religieuses est grande aussi
auprès des jeunes. Le principe du respect de la dénomination
religieuse chez l'enfant est déjà reconnu à l'article 21
de la Loi de la protection de la jeunesse. Nous croyons que ce même
principe devrait exister pour tous les enfants et pour tous les veillards.
Voilà, messieurs, les recommandations que la Conférence
religieuse canadienne propose au nom des communautés religieuses du
Québec à votre bienveillante attention. Et je me permets de
répéter que soeur Levaque aurait un complément à
ajouter au résumé du mémoire que je viens de
présenter.
SOEUR LEVAQUE: M. le Président, M. le ministre, nous croyons
fermement qu'une section de bien-être devrait subsister au sein du
ministère des Affaires sociales pour s'occuper particulièrement
des foyers pour vieillards et des institutions pour enfants. Ces deux genres de
centres d'acceuil sont bien différents des hôpitaux tant au point
de vue de l'atmosphère, de l'ambiance ou des structures. Ceux-ci ne sont
pas des endroits spécialisés du point de vue médical ou
technique. Le vieillard qui consent à quitter son propre foyer pour
s'installer en institution est déjà suffisamment
traumatisé pour ne pas lui imposer une ambiance d'hôpital.
Il lui faut retrouver l'atmosphère de son foyer familial, un
entourage sympathique où il ne sera pas un cas entre tant d'autres. S'il
est malade, on l'enverra temporairement à l'hôpital en l'assurant
qu'il reviendra bientôt chez lui au foyer.
On peut dire la même chose des enfants qui sont confiés
à des foyers de protection. Si toutes ces institutions à
caractère familial sont chapeautées par un ORAS, à
prédominance technique, médicale ou hospitalière, le
centre d'accueil sera le parent pauvre délaissé, ou bien il
deviendra une structure apparentée au centre hospitalier où
technique et technologie médicales auront le pas; les foyers y perdront
leur atmosphère familiale et le gouvernement y verra les coûts
monter en flèche.
Nous reconnaissons la nécessité d'un certain
contrôle, mais nous voyons aussi le besoin d'une réelle autonomie
locale pour le mieux-être du vieillard ou de l'enfant
hébergé dans les centres d'accueil. C'est pourquoi nous
suggérons de nouveau qu'une section de bien-être subsiste au sein
du ministère des Affaires sociales ou que des organismes
régionaux spécifiquement orientés vers les foyers pour
adultes et pour enfants soient créés. Parce que nous croyons que
les ORAS, tels qu'ils sont préconisés dans le mémoire,
vont avoir beaucoup trop de choses à faire: ils auront tous les
hôpitaux, tous les foyers, toutes les institutions pour enfants de
même que tous les services sociaux.
Nous concevons mal qu'avec les représentations telles qu'elles
sont faites aux conseils d'administration les foyers pour enfants ou les foyers
pour vieillards aient la reconnaissance voulue. Je crois que je puis dire que
nos relations avec le gouvernement dans les foyers ont été
très bonnes jusqu'à présent et que nous avons pu obtenir
bien des changements pour le bien-être de nos vieillards. S'il fallait
tomber dans une structuration telle que celle que nous avons connue dans les
hôpitaux depuis dix ans et qui va continuer à se compliquer encore
davantage, je pense qu'il n'y aurait rien à gagner pour nos vieillards
ni pour les enfants.
Nous reconnaissons qu'il faut un contrôle de la part du
gouvernement surtout quand il donne des subventions pour payer la pension des
vieillards qui, de plus en plus, avec le coût élevé de la
vie, ont réellement besoin d'aide.
Mais je pense qu'il n'est pas nécessaire de compliquer la vie, ni
pour les vieillards, ni pour les enfants en foyer, ni pour les administrations
de ces foyers. Je pense qu'une vie beaucoup plus simple, plus familiale, telle
qu'on la connaît aujourd'hui dans les foyers, serait de beaucoup
préférable et serait beaucoup moins dispendieuse, moins
onéreuse pour le gouvernement et pour les contribuables.
Nous accepterions aussi également, avec les contrôles par
permis, l'idée de la présence d'un
membre du conseil désigné par le ministre. De même,
l'idée de conversion et de fusion pourrait être acceptée
dans les cas où le gouvernement veut créer des institutions
gouvernementales, pourvu qu'il soit clairement dit qu'en cas de
mésentente un tribunal fixera l'indemnité et les
modalités. Je tiens à vous dire que, dans la plupart des foyers
à direction religieuse, les foyers ont été construits
entièrement avec les fonds des communautés religieuses. Bien
souvent, en plus, accolée à cette institution, il y a la
résidence des religieuses où, comme le père Isabelle vous
l'a dit, les religieuses ont voué leur vie au soin des vieillards. Elles
y ont construit leur propre résidence et elles comptaient y vivre et y
mourir. Si nos institutions deviennent des institutions publiques la
première chose que nous verrons c'est qu'on nous mettra à la
porte et il nous faut, au moins, reloger nos religieuses. Les
communautés religieuses ont un devoir envers leurs membres et, si elles
ont investi leur patrimoine dans de la brique et du mortier pour y loger des
vieillards et pour y loger des religieuses, aujourd'hui, si le gouvernement
doit s'emparer des foyers ou des institutions pour enfants, il ne serait que
juste, il me semble, qu'il y ait une certaine rémunération, au
moins pour reloger les religieuses.
Je crois, pour les raisons qui ont été données tout
à l'heure par le père Isabelle, qu'on devrait conserver
l'idée d'institutions privées sans but lucratif, afin que les
communautés religieuses puissent continuer leur oeuvre, au moins dans ce
secteur qui peut paraître plus ou moins intéressant par moments,
mais qui est réellement le domaine des communautés religieuses
qui se dévouent pour le vieillard parfois délaissé.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les
représentants de la Conférence religieuse canadienne pour le
mémoire qu'ils nous présentent relativement au projet de loi no
65.
Brièvement, j'aimerais faire quelques commentaires. En premier
lieu, nous avons mentionné à plusieurs reprises que ce projet de
loi il est important de se souvenir qu'il est un projet de loi, à
cette étape de nos travaux se veut plutôt une mise à
jour de la législation dans ce secteur, une adaptation aux conditions et
exigences actuelles. Mais dans ce sens, dès les premiers
mémoires, nous avons perçu une certaine inquiétude quant
à la portée du projet de loi. Je peux réaffirmer ici que
pour les institutions qui, par exemple, n'ont qu'une fonction
d'hébergement, qui reposent en premier lieu sur le
bénévolat, que ce n'est pas notre intention dans ce projet de loi
de toucher ces institutions ou ces oeuvres.
Sur ce plan-là, s'il faut modifier ou préciser le projet
de loi, nous sommes disposés à le faire. Il y a deux aspects ici.
Si la fonction en est une d'hébergement, nous ne visons pas ici à
l'organisation de systèmes ou d'un programme d'habi- tation ou
d'hébergement pur et simple. Ce n'est pas le but du projet de loi no 65.
Alors, on peut dissiper, je l'espère, toute inquiétude à
ce sujet.
Il en est de même quant aux oeuvres qui reposent en premier lieu,
quant à leur fonctionnement, sur le bénévolat. J'ai
déjà dit que, par le bill 65, nous voulons établir un
cadre, une structure pour des services considérés comme
essentiels dans le domaine des services sociaux, des services de santé,
aussi des services dans lesquels l'Etat doit assurer le maintien de normes
à cause du caractère des services et aussi où il doit
participer de façon significative au plan du financement. Compte tenu de
la teneur du mémoire, je voulais réaffirmer cette clarification
que j'ai déjà faite ici.
Maintenant, pour bien comprendre certains aspects du mémoire, il
me semble qu'il serait important d'adresser quelques questions aux
représentants de la Conférence religieuse canadienne pour
clarifier quelques concepts, à tout le moins. Je crois que ce serait
extrêmement utile à ce stade de nos travaux.
Lorsqu'on parle des oeuvres des communautés, j'aimerais savoir,
simplement pour des fins de précision, si l'on considère que sur
l'hôpital public, tel qu'on le désigne en vertu de la loi actuelle
hôpital pour lequel il y a eu partage de patrimoine entre la
corporation hospitalière et la communauté, où il y a eu
compensation de versée à la communauté la
communauté a un lien de propriété immédiat ou un
lien de propriété étroit et si l'on introduit ou l'on
comprend, lorsque l'on dit les oeuvres des communautés, ce type
d'institutions.
Comme seconde question, il m'apparaît important aussi de
préciser, pour bien comprendre certains aspects du mémoire, ce
qui dans l'esprit des communautés apparaît le plus important
lorsqu'elles nous disent qu'elles veulent poursuivre leurs oeuvres. Encore
là, sur ce plan, ce n'est pas l'intention du gouvernement de vouloir
empêcher les communautés religieuses de poursuivre des oeuvres
utiles dans le domaine social au Québec. Mais à quel niveau
est-ce que ces exigences se situent? Au niveau de la propriété?
Au niveau du contrôle de la gestion quotidienne? Au niveau du
fonctionnement des services? Ou encore, est-ce que ce rôle peut
s'effectuer si, dans les modes d'engagement du personnel, on ouvre la porte de
telle sorte que les membres des communautés peuvent vraiment,
auprès des malades, auprès des personnes hébergées,
jouer leur rôle?
A quel niveau ce désir doit-il s'exprimer le plus
précisément?
Pour le moment, M. le Président, ce seraient les deux questions
qu'il m'apparaît assez important de poser, de clarifier pour bien
comprendre certains aspects du mémoire qui nous est
présenté.
SOEUR LEVAQUE: C'est la première fois que j'entends dire que les
foyers d'hébergement ne tombent pas sous le coup de la loi. Voulez-
vous dire, M. le ministre, que les foyers d'hébergement,
où il y a à peu près 50 p.c. des personnes
hébergées qui sont des cas d'assistance sociale et l'autre
moitié, des cas privés, ne tomberaient pas sous le coup de la
loi?
M. CASTONGUAY: Pourrai-je revenir tantôt sur ces questions
précises, pour comprendre l'esprit général du
mémoire? Après, au besoin, je pourrai répondre à
vos questions.
SOEUR LEVAQUE: Parce qu'il ne faut pas oublier qu'au commencement, quand
les vieillards entrent chez nous, ce sont des cas d'hébergement. Mais
ils vieillissent vite et deviennent vite des cas qui sont apparentés
à des cas chroniques. Nous continuons quand même d'en avoir soin,
tout comme on le ferait si les vieillards étaient dans leur propre
famille. Nous espérons les garder le plus longtemps possible sans
être obligés de les confiner dans un hôpital chronique
où, d'ailleurs, il y a si peu de place.
Quant au partage des biens, je connais très peu de
communautés qui, jusqu'à maintenant, ont fait le transfert des
biens mais qui ont été payées pour la part de leur
investissement dans l'hôpital. Je connais par ailleurs des cas où
les hôpitaux ont été incorporés en vertu d'un bill
qui donnait à la communauté la faculté d'incorporer
n'importe quelle institution, en vertu de lettres patentes. Dans ce cas, il
était mentionné au bill qu'advenant la dissolution, les biens
reviendraient à la corporation mère. Or, dans ces cas, puisque
c'était pour faire une structure à part en vue de pouvoir rendre
plus facilement des comptes des dépenses et des revenus de telle
institution, le transfert des biens a été fait à titre
gratuit, étant donné qu'advenant la dissolution, les biens
reviendraient à la communauté. C'était pratiquement
changer l'argent de la poche droite à la poche gauche. Or, le
remboursement de l'investissement n'a pas été fait à la
communauté par le gouvernement, ni par la nouvelle corporation. C'est le
cas de la plupart des hôpitaux, je crois.
Quant à la continuation des oeuvres, il est bien sûr que
nous voulons, même là où le gouvernement prendrait la
charge totale de l'hôpital ou des foyers, que nous espérons
pouvoir continuer à travailler, à oeuvrer auprès des
malades aussi longtemps que nous le pourrons, auprès des vieillards,
même dans l'administration, là où il y a des personnes qui
sont préparées en administration et qui sont actuellement dans
l'administration de certains de ces foyers ou de ces hôpitaux.
Mais il reste que pour nous, religieuses, lorsque nous n'aurons plus de
contrôle, que nous n'aurons plus rien à dire dans les politiques
de l'hôpital, nous nous verrons peut-être imposer des politiques
qui pourront aller à l'encontre de nos principes religieux.
Je veux parler, par exemple, d'avortement, de ligature de trompes,
d'euthanasie, etc. Et c'est ainsi que nous ne pourrons certainement pas
travailler dans des situations semblables. Et c'est une des craintes que nous
avons, si nous n'avons plus rien à dire dans le contrôle de nos
institutions.
Je dirais aussi que tant que nous, un certain nombre de religieuses,
serons dans ces institutions, il est sûr qu'aux yeux du public,
l'institution demeurera une institution catholique, les soeurs sont là.
Comment se fait-il que telle et telle chose se font et que les soeurs laissent
faire ça? Nous en porterons une certaine responsabilité, bien que
nous n'ayons rien à dire dans les politiques de l'hôpital.
M. MONETTE: Si je puis ajouter un mot, M. le ministre, sur la question
de propriété et de gestion, je crois qu'il faut dire ici qu'il
n'y a pas deux cas similaires. Il y a des communautés qui, à
moyenne échéance ou à longue échéance, sont
prêtes à collaborer avec le gouvernement pour des raisons
internes, souvent, à brève ou à longue
échéance, soit dans le domaine du bénévolat, ou du
personnel, ou de la gestion, ou de la finance. Il n'y a pas deux cas
analogues.
Dans l'ensemble, la plupart des communautés ont, à mesure
que les années avancent et que les difficultés d'administration
se prononcent, de plus en plus de difficultés à retrouver le
personnel j'appellerais ça du personnel au niveau d'une
communauté nécessaire à la gestion proprement dite.
Vous savez, avec les nouvelles structures et les nouvelles conventions
collectives, les communautés sont à la fois employeurs et
employés dans la même communauté et cela crée des
difficultés.
Il est difficile et parfois les communautés passent
à travers, tout dépend des situations locales souvent de
déterminer une ligne de conduite. Dans la plupart des cas, les
communautés qui ont encore des responsabilités dans plusieurs
hôpitaux ont à assumer ces responsabilités au point de vue
de la gestion. Si elles ont un investissement sous forme d'argent ou de mise de
fonds en salaires non payés pendant des années, qui a servi
à la construction, évidemment, elles ne se permettront pas,
autant que possible, de passer l'administration à d'autres qu'à
elles, elles ont tout de même des intérêts à
surveiller dans ces oeuvres-là. Ce sont leurs oeuvres.
C'est ce que le père Isabelle identifiait tantôt aux
oeuvres des communautés, ce sont leurs oeuvres. Tant qu'elles ont ces
oeuvres-là, évidemment, elles n'ont pas de personnel. A supposer,
théoriquement, qu'elles n'aient plus la responsabilité de ces
oeuvres-là ou que le gouvernement désire se les approprier et
payer une indemnité qui sera fixée suivant les circonstances,
évidemment, elles auront peut-être plus de personnel de gestion.
Chaque cas est un peu particulier.
M. CASTONGUAY: Vous dites, Me Monette, que les communautés ont vu
leur personnel oeuvrer pendant nombre d'années avec des
salaires non payés. Est-ce que vous incluez la période qui
a précédé l'assurance-hospitalisation, alors que les
hôpitaux ou les communautés religieuses ont voulu, pour des fins
qui s'apparentaient aux objectifs visés par elles, faire oeuvre dans ce
secteur-là? Est-ce que vous incluez la période avant
l'assurance-hospitalisation? Est-ce qu'on pourrait revenir et dire que le
gouvernement doit des montants de salaires pour des services rendus, alors que
jamais le gouvernement ne s'était engagé à payer des
salaires pour ces périodes?
J'aimerais aussi faire une petite nuance lorsqu'on dit que le
gouvernement veut s'approprier des corporations. J'ai dit, à plusieurs
reprises, qu'il n'était pas de l'intention du gouvernement de
s'approprier des biens qui appartiennent en propre à qui que ce soit et
que s'il y a vraiment des biens qui appartiennent à une corporation, peu
importe laquelle, et qu'il y a transfert à une autre corporation, il y
aurait compensation. Ce n'est pas le gouvernement qui veut s'en approprier. Les
réalités sont telles que, même depuis 1962, les
hôpitaux ont changé de caractère. Avec le financement
presque exclusif, bien souvent, de la part du gouvernement, leur
caractère a changé. Les hôpitaux, présentement,
revêtent un caractère public. Ce n'est pas pour des fins internes
au gouvernement; c'est plutôt pour reconnaître de nouvelles
réalités que les modalités de financement, que les
modalités d'investissement ont été modifiées, mais
ceci au profit, toujours, des utilisateurs des services dans ces
institutions.
En tant que ministre des Affaires sociales, je ne vois aucune
utilité à ce que le gouvernement devienne propriétaire de
béton ou de briques, comme vous le dites. Ce qui apparaît
important, par contre, c'est que des institutions fonctionnent pour rendre des
services à la population.
M. MONETTE: Sur la première question, M. le ministre, vous m'avez
demandé si les religieuses, en général, demandent une
compensation pour les salaires non payés. Voici comment le
problème se présente. Si j'avais à répondre en un
mot, M. le ministre, je dirais: Oui, elles ont l'intention de demander une
indemnité pour cela, parce que ce qu'elles ont donné, en
bénévolat, en temps, en argent pour construire des institutions,
elles l'ont donné dans le sens de leurs oeuvres, dans leur
communauté, dans leur institution et dans leur corporation. Elles ne
l'ont pas donné au gouvernement nécessairement. C'est la nuance
que je faisais ce matin justement entre institution publique et institution
sans but lucratif. Ce n'est pas parce qu'on a mis dans la Loi des
hôpitaux, en 1962, à mon humble avis, "hôpital public" comme
définition... Je proteste et je dis: Non, c'est encore une institution
sans but lucratif. Au point de vue corporatif, c'est une corporation
privée. Comme telle, toute l'économie de notre droit veut qu'elle
soit propriétaire de ses oeuvres et de ses fonds.
Si on veut changer ce principe, je pense qu'à ce moment-là
il faut le dire dans un texte extrêmement clair et dans tous les
domaines. En d'autres termes cela touche plusieurs questions qui ont
été posées ce matin, d'une façon assez
précise ce que l'on risque de tuer dans le projet de loi 65,
c'est justement cette possibilité d'investir avec quelque motivation que
ce soit qui peut être valable. Toutes les motivations ne sont pas
valables, mais je pense qu'au départ, dans les oeuvres de ce genre, les
motivations sont extrêmements importantes. Au niveau des
communautés religieuses, on les connaît.
Evidemment, dans plusieurs cas je ne dis pas dans la
totalité des cas elles ont oeuvré dans un système
depuis des décades et, aujourd'hui, on leur impose, en somme, un nouveau
système.
Ce qui se produit c'est mentionné au début, dans les
quelques pages de considérations générales du
mémoire à ce sujet, au point de vue de l'intérieur de la
communauté. Il y a des gens qui sont entrés en communauté,
M. le ministre, pour oeuvrer dans un hôpital pour leur vie. Ils ont
aujourd'hui 45, 48, 52, 56 ans et on les voit obligés de sortir de
l'hôpital, ni plus ni moins. Ce n'est pas que le gouvernement veut le
changer, ce sont les temps et, avec le projet de loi qui s'en vient, ils
devront sortir, ils n'ont plus de place. Or, c'est leur vie, ils avaient la
vocation dans ce sens et on admettait cette vocation. Aujourd'hui, la
communauté doit ils n'ont plus l'âge pour se recycler
s'en occuper.
Les communautés ont d'autres problèmes à envisager
au point de vue financier. Elles ont d'autres oeuvres qui ne
s'éteindront pas nécessairement par le fait du projet de loi 65.
Elles n'ont pas toutes leurs oeuvres dans la province de Québec,
certaines de ces communautés ont rayonné à travers le
monde entier. Il y en a encore qui ont des hôpitaux dans tout le Canada
et les Etats-Unis. Elles ont des responsabilités financières.
C'est pourquoi je dis que je ne peux pas, si j'avais un mot à
dire, mais j'ai qualifié ma réponse. Suivant les circonstances,
suivant leurs motivations propres, qui peuvent rejoindre celles du
gouvernement, celles de la population, elles ont donné leur temps
gratuitement, leurs fonds à des oeuvres qui ont profité à
la population. Mais elles ne sont pas prêtes aujourd'hui à se
faire forcer la main et M. le ministre le dit j'en suis bien heureux. Je
prétends encore, malgré les assurances que les conseillers
juridiques, le ministre ou ceux qui ont fait la loi ont pu donner, que la loi
est telle qu'actuellement il y a lieu de craindre de toutes nos forces, comme
juristes, à des abus.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Prési-
dent, tout le monde constate évidemment qu'il s'agit d'un sujet
assez délicat. J'ai vécu l'expérience, pendant quatre ans,
de ce genre de discussions avec plusieurs pour ne pas dire la plupart des
communautés religieuses. Evidemment, le problème se posait dans
les termes dans lesquels on vient de le poser.
A l'occasion de la discussion du projet de loi 65, on comprendra que le
sujet lui-même est plus important parce qu'il a des implications dans
l'immédiat. Autrefois, il s'agissait de discuter avec une
communauté en particulier, au sujet d'une institution en particulier,
d'un cas spécifique, d'une maison, d'une institution, d'un
hôpital, d'un foyer. Pour ma part, j'ai toujours constaté qu'en
discutant avec chacune des communautés religieuses, quand le
problème s'est posé au sujet du partage du patrimoine ou de la
vente d'une institution, il était possible d'en arriver à un
accord.
J'ai eu à approuver plusieurs transactions entre le gouvernement,
d'une part, et les communautés religieuses, d'autre part. Je crois que
ç'a été l'habitude, et pour le ministère des
Affaires sociales et le ministère de l'Education, les deux
ministères qui, évidemment, ont eu à considérer le
plus souvent cette sorte de problèmes, de transactions entre les
communautés religieuses et le gouvernement lui-même ou le
ministère impliqué. Sans faire de référence
à une communauté en particulier je ne voudrais pas ici
faire de précision qui n'aurait pas sa place je sais que
plusieurs représentantes de certaines communautés religieuses
étaient disposées, surtout dans le domaine hospitalier, à
traiter de chacun de ces cas spécifiques. C'est ainsi qu'il y a des noms
d'institutions qui ont été mentionnés ce matin qui ont
fait l'objet de ce genre de transaction.
Mais je ne crois pas, pour ma part, je parle par expérience
personnelle, qu'une fois fermé chacun de ces dossiers il y ait eu
malentendu d'un côté comme de l'autre. Je crois que les deux
parties en présence ont eu une discussion franche, qu'il y a eu
dialogue, et qu'on a tenu compte de certaines considérations.
Mais maintenant le bill 65, je crois et ce sera sans doute
l'opinion du ministre, même s'il nous a rassuré ce matin, il a
donné des garanties quant à ses intentions, aux intentions du
législateur va plus loin et que ses implications sont beaucoup
plus considérables, même si le texte de loi que nous avons
actuellement pourrait être modifié.
Soeur Levaque, vous avez dit il y a un instant qu'il fallait faire des
distinctions entre le secteur de la santé et le secteur du
bien-être. Vous avez exprimé une certaine crainte, que nous
pouvons partager, je crois, à l'effet que les institutions
hospitalières prennent trop de place dans le secteur des affaires
sociales. On le voit d'ailleurs par les budgets, le ministre nous a
donné des chiffres ce matin: il y a $800 millions pour
l'assurance-hospitalisation, il y a $130 millions pour la psychiatrie et nous
pourrions ajouter à ça les unités sanitaires, de sorte que
nous sommes rendus à presque $950 millions ou $1 milliard sur un budget
de $1,492,000,000 dont a parlé le ministre hier devant la chambre de
commerce.
Si nous ajoutons à ça l'assurance-maladie, enfin tous les
programmes dans le secteur de la santé, il y a véritablement ce
risque, et c'est un point de vue nouveau qui est apporté devant la
commission. Il y a évidemment ce risque, peut-être dans ce secteur
du bien-être ou des foyers d'hébergement, des institutions de
l'enfance qui n'ont pas tout à fait ce caractère de
spécialisation dont vous avez parlé tantôt, peut-être
dans toutes les structures du projet de loi numéro 65, même si
l'objet principal c'est d'y apporter plus de coordination dans tout le
système. Il y a peut-être ce danger. Je n'ai pas très bien
saisi la suggestion que vous faites de conserver un secteur de bien-être,
c'est-à-dire que j'ai saisi la suggestion mais je ne sais pas comment
traduire ça en structure ou je ne sais pas comment intégrer
ça dans tout le ministère des Affaires sociales ou dans
l'appareil un peu plus décentralisé que l'on veut installer par
le projet de loi numéro 65. De toute façon, nous pourrons en
parler un peu plus tard. Mais ce que je veux dire c'est que je n'ai pas
constaté, personnellement, au cours de ces quatre années,
d'objection majeure de la part des communautés religieuses quant
à la propriété quand il s'est agi d'un cas
spécifique ou devant une situation de fait pour toutes sortes de
raisons, que ce soit parce que la communauté voulait davantage orienter
son action vers d'autres oeuvres, que ce soit pour des difficultés de
recrutement, de contexte à échanger, je n'ai pas constaté,
pour ma part, de réticences sérieuses ou d'appréhension
à discuter avec les autorités gouvernementales d'une solution
possible dans ce domaine.
Il reste peut-être que certaines communautés ont
orienté leur action plutôt dans le secteur de la santé,
d'autres plutôt dans le secteur social des foyers d'hébergement.
Enfin il est possible de trouver dans quel secteur particulier veut à
l'avenir s'orienter chacune des communautés religieuses.
De toute façon, il est indéniable que vous avez
soulevé des problèmes, des appréhensions devant la
commission, comme l'a fait Me Monette, ce matin, et comme il vient de le faire,
il y a un instant, en rappelant la distinction qu'il a faite entre une
corporation privée sans but lucratif ce que ne contient pas la
loi en ce moment et la suggestion que Me Monette a apportée ce
matin. Je pense que ça pourrait être pris en sérieuse
considération par le législateur parce que le ministre a dit
lui-même, il y a un instant, que ce n'est pas l'intention du gouvernement
de se porter propriétaire à tout prix des institutions. Ce n'est
pas son intention de réclamer à tout prix la gestion
intégrale des institutions. Mais le souci du gouvernement et le souci,
je crois, de tous les gouvernements a été d'introduire dans tout
le système la meilleu-
re intégration possible et la meilleure coordination possible et
aussi le meilleur contrôle possible des fonds publics, étant
donné que même dans des institutions auxquelles vous avez
référé tantôt, soeur Levaque, il reste que, s'il y a
50 p.c. de cas publics, de cas qui relèvent de l'assistance publique
dans les foyers, il y a là aussi une proportion importante tout de
même de votre budget qui relève des fonds publics.
Je ne sais pas si les précisions qui ont été
apportées par le ministre des Affaires sociales donnent une
réponse complète. Il nous a rassurés, depuis le matin, au
cours de plusieurs interventions, sur les intentions du législateur.
Pour ma part, même si nous n'avons pas terminé les travaux de la
commission parlementaire, je crois qu'il y aura lieu de préciser dans
les textes de loi les intentions véritables du législateur, parce
que nous touchons à des secteurs tellement importants. On pourrait
argumenter longtemps, on pourrait discuter longtemps sur l'histoire des
communautés religieuses. Il y en a qui diront que les communautés
religieuses ont administré des biens qui sont plutôt publics.
Elles ont laissé, à l'intérieur de l'oeuvre, des salaires.
Il y en a qui porteront un jugement affirmatif. D'autres porteront un jugement
un peu interrogatif. Mais je pense, quelle que soit la discussion que l'on
fasse sur ce problème, qu'il reste une chose certaine, c'est que les
communautés religieuses ont, surtout à venir jusqu'au moment
où le gouvernement s'est véritablement introduit dans le secteur
des affaires sociales, dans le secteur de la santé, dans le secteur du
bien-être, porté presque seules tout le poids et toutes les
responsabilités de ce secteur, comme elles l'ont fait en
éducation.
Les communautés religieuses n'ont jamais refusé le fait
que l'Etat doive intervenir davantage. D'ailleurs, c'est mentionné en
toutes lettres dans leur mémoire. A partir du moment où le
gouvernement intervient, il s'agit maintenant d'établir un nouveau
système, une nouvelle façon, un nouvel accommodement avec ceux
qui sont déjà là, à qui on ne peut pas refuser non
plus les droits acquis, mais qui ne refusent pas non plus une certaine
évolution. Parfois, le gouvernement est obligé d'intervenir avec
des lois qui ont bouleversé des habitudes, qui ont bouleversé des
traditions dans le domaine de la santé. En 1962, il y a eu la Loi des
hôpitaux qui était une loi qui comportait des articles assez durs.
Les communautés et ceux qui oeuvraient dans ces secteurs se sont
habitués à vivre avec la Loi des hôpitaux. Il y a eu depuis
ces années, depuis onze ans maintenant, une évolution qui s'est
faite dans le bon sens. Il y a eu, d'un côté comme de l'autre,
acceptation de cette législation et de ses conséquences.
Maintenant, il y a le projet de loi no 65 qui, par certaines
dispositions, va bouleverser lui aussi pas mal de choses. Mais même si on
introduit dans une législation des articles de loi qui bouleversent un
état de fait, qui boulever- sent des droits, une situation de fait, je
crois qu'on doit quand même tenir compte de ce qui existe, tenir compte
je conserve le terme des droits acquis. Tout de même, il y
a une possibilité de faire une approche qui tienne compte de tous ces
critères et qui tiennent compte de tous ces facteurs.
Alors, je voudrais savoir, soit de soeur Levaque, du père
Isabelle ou de Me Monette, si les déclarations jusqu'à
présent, sur l'intention du législateur, sont suffisantes
à leur point de vue pour écarter toutes les appréhensions
des organismes qui sont venus devant nous ce matin.
M. MONETTE: M. le député de Montmagny, j'apprécie
la remarque que vous avez faite et je voudrais ajouter là-dessus que
votre pondération et la pondération du ministre actuel nous font
souhaiter des relations meilleures. Evidemment, les situations
créées par le bill 65 ne vont pas, dans l'immédiat,
créer un climat de confiance. Nous l'avons dit ce matin d'une
façon plus générale, et d'une façon plus
particulière tantôt.
Nous offrons, de notre côté, notre collaboration. Je crois
que le ministre désire également avoir un meilleur échange
avec les communautés. Nous savons qu'il a été
débordé de travail depuis qu'il est au ministère et qu'il
n'a peut-être pas eu le temps d'examiner de plus près ce
problème particulier.
Je voudrais ajouter qu'on a, comme on le dit souvent, les
députés ou les curés qu'on mérite. On a aussi les
communautés qu'on mérite. Ce que je veux dire par là,
c'est que je ne suis pas de ceux qui vont les défendre corps et
âme pour tous les actes et dire que tout ce qui est fait par une
communauté est bon. Je voudrais dire toutefois que leur motivation les
amène à certaines oeuvres en particulier qu'elles connaissent
peut-être mieux que les autres. Dans l'évolution très
grande qui s'est faite dans les dix dernières années, elles
évoluent à l'intérieur aussi. Elles évoluent comme
notre population.
Le bouleversement que nous avons dans le domaine de la santé, les
critiques que nous avons adressées aux gouvernements ne signifient pas
que les gouvernements sont responsables de tout. Nous voulons dire que les
institutions ramassent le paquet trop souvent parce qu'elles sont au bout de la
ligne. Elles ont le patient et la population sur le dos. Je veux dire que tous
ensemble nous réalisons des progrès. Le Dr Robillard l'a
mentionné à la dernière séance. Les progrès
sont tellement grands que dans tous les secteurs nous sommes un peu
débordés. Nous avons besoin de cette collaboration et, de notre
côté, nous l'offrons.
Les réponses que le ministre nous a données, M. le
député de Montmagny, ne sont peut-être pas
complètement satisfaisantes. Nous voulons, sur cela nous insistons, que
les processus de transfert ou de conversion soient nettement plus
définis dans la loi, que, s'il y a indemnité,
dans tous les cas elle soit fixée soit par un tribunal ou par une
commission. Libre aux communautés de décider ce qu'elles feront
après. C'est leur oeuvre, c'est leur bien. Ce n'est pas le bien du
gouvernement. C'est cela qu'il faut retenir. Ce ne sont pas des institutions
publiques. Ce sont des institutions sans but lucratif, d'intérêt
public. Mais elles n'ont pas encore accepté l'idée que tous leurs
biens passeraient comme cela au gouvernement. Cela me parait impossible.
M. CASTONGUAY: Ecoutez, M. Monette. Nous venons de discuter avec une
corporation, vous devez certainement savoir laquelle. A Thetford Mines dans le
cas de la fusion avec l'hôpital de l'Amiante. J'ai envoyé une
lettre vendredi dans laquelle nous mentionnons que nous donnerons, après
négociation avec la communauté, quelques centaines de mille
dollars. Alors, il ne faudrait pas non plus laisser sous-entendre que nous
voulons nous approprier, sans compensation, des biens qui ne nous appartiennent
pas. Je vous l'ai dit tantôt, nous en avons un cas précis et je
pense qu'il est malsain de laisser ce sous-entendu planer.
M. MONETTE: Oui, M. le ministre. Je reconnais que le ministère
est désireux de faire des offres. J'ai d'autres cas en tête. Ceci,
je le reconnais. Toutefois, M. le ministre, je ne crois pas que les
communautés doivent accepter de négocier selon une loi qui leur
enlève des droits, en arrière. Je veux bien croire en la bonne
foi du ministre et des fonctionnaires qui négocient. Je n'en doute pas
une minute. Mais il peut y avoir une loi, en arrière, qui ne
reconnaît pas ces droits-là. Ceci n'est pas vrai seulement pour
les communautés, c'est vrai pour tous les organismes; cela a
été abordé par l'Association des hôpitaux. Mais,
dans le cas des communautés, c'est une situation particulière
où des investissements considérables ont été faits
par la communauté souvent en mises de fonds, en travail. Des
hôpitaux, actuellement, je dirais peut-être la moitié de
ceux-ci, sont financés par les communautés, c'est-à-dire
dont la brique et le mortier ont été montés à
même l'argent des communautés, à raison de 20 p.c. et plus
et, dans certains cas, jusqu'à 100 p.c. La presque totalité des
foyers des communautés ont été financés à
raison de 100 p.c. par les communautés. Alors, si on veut continuer
cette oeuvre dans le même esprit, je ne voudrais pas que les
communautés se sentent frustrées dans une situation où
elles n'ont pas le pouvoir de négocier. Encore, je voudrais
établir ceci. Ce matin, j'ai fait une remarque en disant: Le ministre
nous assure de certaines choses. La loi dit autre chose.
Je suis peut-être, à certains moments, assez cassant, dans
ce sens que je prends un texte de loi ce n'est pas ma faute; je suis
avocat, c'est ma profession et peut-être que je fais trop de
légalisme, mais c'est mon rôle de le faire, M. le ministre.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Sauveur.
M. BOIS: J'aurais une question à vous poser, Me Monette. Suivant
ce que vous mentionnez à la page 13, aux articles 45, 46, 47 et 48,
croyez-vous que c'est surtout l'article 45, par exemple, qui, à la
longue, viendra à déposséder les communautés ou les
corporations sans but lucratif de leurs propres institutions, de celles qui
existent dans le moment? Est-ce surtout l'article 45 que vous visez dans votre
mémoire?
M. MONETTE: Je vais laisser Me Jacques, qui représente certaines
communautés de Québec, répondre à cette
question.
M. JACQUES: La dépossession que nous prévoyons ne vient
pas tellement de l'article 45 que de l'article 93. L'article 93 stipule que
"nul autre que le gouvernement ne peut exploiter une institution." Or, si vous
allez à la définition du mot "institution", vous y voyez...
M. CASTONGUAY: Excusez-moi un instant. Il faudrait lire l'article au
complet: "S'il ne détient un permis délivré à cette
fin par le ministre". Nous sommes dans la section des permis. Toute institution
qui donne des services de santé, des services sociaux devra avoir un
permis sauf si l'institution est administrée par le gouvernement. Alors,
il ne faut pas aller au plan de la propriété et de la
dépossession.
M. JACQUES: Je ne vais pas au plan de la propriété. Si
vous voulez me le permettre, M. le ministre, votre loi dit que "nul autre que
le gouvernement ne peut exploiter une institution." Or, qu'est-ce qu'une
institution? C'est un centre hospitalier, c'est un centre d'accueil et c'est
aussi un centre de service social. Il faut un permis. Pour obtenir un permis,
de deux choses l'une. Je suis une institution privée. Si vous
vérifiez la définition du terme "institution privée", vous
voyez que c'est une institution autre qu'une institution sans but lucratif. Si
je ne suis pas une institution privée, donc, si je ne suis pas une
institution à but lucratif, il faut que je sois formée en vertu
du bill 65 ou que j'existe corporativement par résultat d'une fusion. A
ce moment-là, les communautés étant toutes sans but
lucratif, elles doivent forcément, dans les deux ans, suivant la note,
s'incorporer en vertu de cette loi. Or, si vous êtes une institution
publique, du moment que vous êtes incorporée en vertu de cette
loi, vous n'avez plus le pouvoir de nommer votre propre conseil
d'administration. Il est nommé par le ministre. En conséquence,
vous vous trouvez dépouillé de vos biens.
C'est un cercle vicieux parce que, même si vous laissez vos biens
à la nouvelle corporation, vous ne pouvez pas en recommencer une autre,
sauf en recommançant une corporation à but lucratif. C'est le
mécanisme dans la loi.
M. BOIS: J'ai ici une autre question à vous poser: A quel
endroit, par exemple, si vous avez bien examiné le projet de loi,
voyez-vous qu'il y aurait compensation dans le cas de prise en charge des
institutions par le gouvernement?
M. JACQUES: Nous ne le trouvons pas. C'est le problème. Nous ne
le voyons pas.
M. BOIS: A l'heure actuelle, nous sommes pris entre vos affirmations
dans les mémoires et la parole de M. le ministre.
M. JACQUES: Je crois le ministre quand il dit qu'il nous compensera. Je
ne mets pas sa parole en doute. Je dis tout simplement que les
mécanismes de compensation, que le droit à la compensation n'est
pas prévu dans la loi. Je peux négocier de bonne foi avec le
ministre, avec ses adjoints, ses experts. Il peut rester une différence
de vues, mais je ne peux même pas me présenter devant les
tribunaux pour faire trancher cette différence de vues parce que la loi
ne m'accorde aucun droit.
La loi prévoit que les conseils d'administration, d'institutions
publiques sont nommés par le ministre. C'est tout ce que la loi
prévoit.
M. BOIS: M. le Président excusez-moi, ce ne sera pas long,
j'ai fini j'affirme que nous trouvons des lapsus extraordinaires dans le
projet de loi.
M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, dans le même
ordre d'idées.
M. LE PRESIDENT: Dans le même ordre d'idées.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous allez peut-être vous apercevoir
que je ne suis pas avocat, peut-être que ma question n'est pas
pertinente. Est-ce que le code civil ne vous protège pas dans ces
cas-là?
M. JACQUES: Absolument pas. C'est une loi spéciale. Et le code
civil se réfère à l'existence d'autres lois. Le code
civil, à l'article 403, je pense, dit "que nul ne peut être
dépossédé de ses biens sans juste et préalable
indemnité". Mais c'est uniquement...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela ne s'applique pas ici.
M. JACQUES: Cela ne s'applique pas ici.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): En supposant que vous seriez
dépossédé.
M. JACQUES: Absolument pas. C'est un voeu pieux qui ne s'applique pas.
Il a été appliqué, de mémoire, uniquement dans un
cas de la cité de Dorval vs Pétrofina où on avait
adopté des règlements de zonage de façon telle qu'on ne
pouvait pas utiliser une parcelle de terrain. La cour Suprême a
décidé alors que l'article 403 s'appliquait et qu'en
conséquence c'était une expropriation virtuelle. Et, dans la loi,
le ministre ne touche pas aux biens du tout. Il touche au conseil
d'administration.
Il dit: Dorénavant, vous allez être une corporation en
vertu de cette loi-là, si vous faites telle chose et c'est moi qui vais
nommer les administrateurs.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a autre chose? Me Monette.
M. MONETTE: Oui, je voulais ajouter encore un petit point, toujours sur
cette même question qui n'a pas été discutée encore
tellement jusqu'à maintenant.
Les articles 83 et 84 prévoient le mécanisme de conversion
des institutions existantes, et ne prévoient pas de mécanisme
d'indemnité. C'est pour les institutions publiques. Et nous croyons que
nous tombons dans les institutions publiques.
L'article 85, par contre, touche aux institutions privées et
prévoit en somme que, pour une institution privée, il n'y aurait
pas de telle fusion ou conversion, sans le consentement de l'institution et
l'accord des conditions autrement avec le ministre. Donc, il y a une situation
bien spécifique pour les institutions privées.
Il y a une règle en droit, une phrase latine "affirmatio unius,
negatio alterius". Si j'affirme l'un, je nie l'autre. Il y aura des juristes
pour prétendre que les articles 83 et 84 dans les cas d'institutions
privées vont aussi loin dans leur texte pour dire que les institutions
ainsi converties n'auront droit à aucune indemnité.
M. JACQUES: Il y a deux autres points que nous pourrions soulever. Si
vous lisez attentivement le texte de loi, vous allez constater qu'il n'y a
aucun article qui décrit quels seront les objets de ces
corporations-là, la seule façon de déterminer les objets
de la corporation, c'est en se référant aux définitions.
Si vous regardez attentivement les définitions, vous allez voir qu'on
dit que centre hospitalier ou centre d'accueil signifie telle chose, à
moins que le contexte n'exige une signification différente, avec le
résultat qu'on va avoir des objets de corporation qui vont possiblement
varier suivant le contexte de la loi.
Par ailleurs, si vous lisez attentivement l'article 45, on crée
des corporations au sens du code civil et on dit que ces corporations auront
tous les pouvoirs du code civil, mais on s'empresse d'ajouter: "Dans le cadre
du plan quinquennal prévu à l'article 6". Or, la question que les
avocats se posent: Celui qui va contracter avec une de ces
corporations-là va dire: Monsieur, vous n'avez pas le pouvoir de vous
engager, sauf
dans le cadre du plan quinquennal. Présentez-moi votre plan
quinquennal pour déterminer si vous avez ce pouvoir-là et ensuite
le pouvoir d'acquérir des immeubles dépend d'une permission
préalable; il va falloir la permission préalable.
La seule chose qu'une de ces corporations peut faire sans l'assentiment
du ministre, et toujours cependant dans le cadre du plan quinquennal, c'est
d'accepter des dons, des legs et d'acheter des biens meubles. Le
problème qui a été posé ce matin, dans les
fondations, c'est exactement celui-là: la fondation va vouloir acheter
de l'équipement pour un hôpital. S'il n'y a pas de poste pour
accepter la donation, dans le plan quinquennal, d'un équipement en
particulier, la corporation ne pourra pas l'accepter, elle n'en a pas le
pouvoir. Elle a des pouvoirs qui dépendent de l'existence d'un plan
quinquennal.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres ont d'autres questions à
poser?
M. CLOUTIER (Montmagny): Soeur Levaque, je voulais revenir à une
question. Vous avez proposé tantôt un secteur de bien-être.
Est-ce que vous pourriez préciser un petit peu de quelle façon
ça pourrait s'intégrer, soit au niveau gouvernemental ou dans les
régions?
SOEUR LEVAQUE: Oui, au niveau gouvernemental, au niveau du
ministère même, si les organismes régionaux doivent
être créés, je verrais un organisme régional
spécifiquement pour les foyers d'adultes et d'enfants. Par exemple, que
l'on ait un ORAS pour la ville de Montréal. Voyez-vous ce que cela veut
dire? C'est un petit ministère de la Santé que tous les
hôpitaux de Montréal, les hôpitaux généraux,
les hôpitaux psychiatriques, les hôpitaux de chroniques, plus tous
les foyers tant privés que publics, plus les institutions pour enfants,
plus les services sociaux. Quelle sera l'attention donnée aux petits
foyers, là-dedans, et aux foyers pour enfants?
C'est là que je trouve que les décisions seront beaucoup
trop loin du vieillard, de l'enfant. Il va falloir que cela aille à
l'office régional et l'office régional, quand il aura le temps de
penser aux foyers de peu d'importance, les enverra au ministre. Le ministre,
quand il aura le temps, lui, donnera des réponses. Cela veut dire que
ça va prendre encore un peu 'plus de temps.
Ce matin, une question a été posée à
laquelle j'aurais aimé à répondre. Quelqu'un a
demandé je crois que c'est monsieur si la loi telle qu'elle
était allait ralentir les progrès de la science médicale.
Si on s'en rapporte à ce que c'est actuellement, alors que cela prend
tant de temps pour avoir des réponses du ministère, quand il va
falloir passer par l'ORAS, qui va prendre le temps de faire une étude,
qui va faire ses recommandations au ministre, qui va lui- même faire ses
recommandations au lieutenant-gouverneur en conseil, cela va prendre encore
plus de temps. Sachant qu'aujourd'hui, en 1971, le budget global des
institutions pilotes n'a pas encore été approuvé et qu'on
est rendu à la fin d'octobre, vous pouvez vous imaginer ce que ce sera
quand il y aura un ORAS qui n'aura pas de pouvoir, qui va examiner les cas,
prendre le temps de les étudier, les envoyer au ministre qui les fera
approuver par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Je pense bien que les décisions seront encore plus
éloignées et que cela va ralentir les progrès même
de la science médicale. Quand il s'agit d'avoir de l'équipement
médical nouveau, par exemple, qu'il faut faire approuver
l'équipement technique, cela prend joliment de temps. On est parfois
rendu au mois d'octobre ou au mois de novembre avant que le budget de
l'équipement soit accepté dans les hôpitaux. Si on est pris
de la même façon dans les foyers et dans les institutions pour
enfants, on n'est pas sorti du bois. C'est pourquoi je mentionnais que, s'il y
avait un organisme régional spécifiquement pour les foyers et
pour les institutions pour enfants, le chapeau serait moins grand, le parapluie
serait un peu plus petit et peut-être que l'on se rejoindrait un peu plus
facilement.
Maintenant, M. le ministre avait dit tout à l'heure qu'il
reparlerait des projets d'hébergement. Avec ceci, j'aimerais demander...
On a mis, dans la définition du centre hospitalier, une exception pour
les infirmeries où une institution religieuse reçoit les membres
de son personnel. Je me demande s'il n'y aurait pas possibilité de
mettre pour le centre d'accueil la même exception pour les maisons
mères et les maisons provinciales qui logent à leurs frais les
religieuses âgées et retraitées, pour lesquelles le
gouvernement ne paie absolument rien. Puisqu'on a pris la peine de le mettre
pour les centres hospitaliers, je me demande pourquoi on ne l'a pas mis pour
les centres d'accueil. Nous craignons fort qu'il y ait mainmise sur nos maisons
mères et nos maisons provinciales, où il n'y a rien qui...
M. CASTONGUAY: Vous pouvez être rassurée, ma mère,
on n'ira pas mettre la main sur les maisons mères.
SOEUR LEVAQUE: Je veux bien, mais il faudrait peut-être mettre une
exception dans la loi.
M. GUAY: A la suite de la lecture du mémoire, j'aurais une
question qui s'adresserait au ministre. Est-ce que le ministre a
consulté le ministre du Travail à savoir s'il y aura la mise sur
pied de cours de recyclage pour les religieux qui seront mis à la porte
de leurs institutions?
M. LE PRESIDENT: Je remercie les porte-parole de la Conférence
religieuse canadienne. J'inviterais maintenant les porte-parole de l'As-
sociation provinciale des institutions pour enfants.
Association provinciale des institutions pour
enfants
M. TREMBLAY (Armand): M. le Président, M. le ministre, MM. les
membres de la commission, mon nom est Armand Tremblay, président de
l'Association provinciale des institutions pour enfants. A ma gauche, M.
Normand Houle, directeur général et Me Jacques Lévesque,
conseiller dans la préparation du mémoire.
Je vais résumer un mémoire qui n'est pas tellement long
déjà, au départ, pour essayer d'y mettre un peu de jus.
J'aimerais toutefois que, in extenso, on inclue dans le rapport l'ensemble des
recommandations qui y sont formulées. (Voir annexe A).
L'APIE, l'Association provinciale des institutions pour enfants, groupe
96 des 107 institutions pour enfants, qui sont à but non lucratif, et
exclusivement à but non lucratif. Cela comprend des écoles de
protection, des centres de dépannage, des crèches, des centres de
rééducation pour enfants caractériels; on s'occupe
d'handicapés physiques, de déficients mentaux, de l'ensemble des
gens qui ont des problèmes de la personnalité ou qui ont des
problèmes affectifs ou sociaux; ça rejoint environ 14,000 enfants
dans la province, dont la voix n'est pas nécessairement très
importante si on la compare à d'autres. C'est pour ça que nous
nous permettrons d'insister pour qu'on ne nous oublie pas.
Je dois mentionner ici, au point de départ, qu'il n'est pas
facile de connaître les intentions des membres du gouvernement sur les
politiques à l'enfance. Qu'on se souvienne du rapport Parent ou qu'on
parle du rapport Nepveu, on n'y trouve pas grand chose en ce qui a trait
à l'enfance exceptionnelle et, en particulier, à l'enfance qui a
besoin de soins très particuliers. Parce que, dans l'enfance
exceptionnelle, il y a un grand nombre de cas qui sont plus bénins que
ceux dont généralement on a à s'occuper; ce sont des cas
qui peuvent être soignés ou qu'on peut prendre en charge dans les
milieux familiaux, dans les milieux scolaires ou par des agents sociaux. Mais
il y a cette série d'enfants qui sont appelés pour
différentes raisons à vivre en institution. Ce sont
ceux-là dont on s'occupe en particulier.
On ne connaît pas beaucoup la politique là-dessus. On n'en
retrouve nulle part des échantillons véritables. L'Association
provinciale des institutions est d'accord sur les grands objectifs poursuivis
par le projet de loi 65: décentralisation, ça nous apparaît
très important; accessibilité des soins; continuité dans
les soins et participation du milieu. Nous sommes aussi d'accord sur les
structures d'ensemble qui sont proposées.
Parlant des ORAS, on les voit utiles comme des mécanismes
d'échange, des mécanismes de contrôle, des
mécanismes auxquels on doit rendre compte de ce qui se passe et auxquels
on a recours en tant que centres, par exemple, pour rejoindre les autres
organismes connexes. Ce qui veut dire pour assurer la continuité. On y
croit aussi comme en un mécanisme qui peut répartir les
ressources et les joindre entre elles.
Je dois préciser qu'on ne connaît pas le programme
d'application du projet de loi 65. Il ne sera pas facile de vouloir
apprécier certaines choses.
Par exemple, quant au nombre des ORAS. S'il y a décentralisation,
à notre avis, il y a un certain nombre d'ORAS. S'il y a un ORAS dans la
région métropolitaine, vous comprenez, comme on le mentionnait
tout à l'heure, qu'il y aura un minigouvernement. Mais ce ne sera pas un
véritable ORAS capable de décentraliser et de
départager.
La participation du milieu, nous la trouvons très importante.
Deux de nos recommandations sont à l'effet que nous souhaiterions, pour
que cette participation prenne un sens véritable, que les gens soient
engagés, qu'ils soient effectivement représentés, qu'ils
sentent que les gens qui sont là pour les représenter sont des
gens qui sont capables de parler en leur nom ou au nom du milieu qu'ils
représentent; nous souhaitons et c'est là l'objet des
recommandations 9 et 10 que dans le cas des groupes
socio-économiques, ce soient eux qui aient à soumettre une liste
de noms au ministre, et que ce dernier choisisse ces représentants
à travers la liste proposée.
Nous proposons la même chose en ce qui regarde les
représentants des centres d'accueil auprès de l'ORAS, que ce
soient les centres d'accueil qui, par un mécanisme quelconque, proposent
une série de personnes qui pourraient être membres de l'ORAS.
Ici bien entendu, parmi ces personnes proposées, le
ministre aurait à choisir celles qui lui conviennent il y a aussi
à mentionner un aspect important. Je disais tout à l'heure que
les enfants de l'enfance inadaptée sont 14,000 dans la province; il
faudrait aussi qu'ils aient une voix, une voix directe auprès des ORAS
en ce sens qu'un centre d'accueil, nous reviendrons sur cette question
tout à l'heure ça peut être pas mal de choses, et il
pourrait arriver qu'il n'y ait pas un seul représentant des milieux pour
enfants dans un ORAS.
Alors, nous demandons plus loin nous pouvons y venir tout de
suite que la définition du centre d'accueil soit
précisée et autant que possible de façon
énumérative. Déjà, tout à l'heure, on a vu
l'ambiguité causée par le fait qu'un centre dit
d'hébergement pour les vieillards pourrait ne pas être un centre
d'accueil. Par contre, on se dit: Est-ce qu'une colonie de vacances qui
reçoit des enfants d'un milieu défavorisé en
été et qui reçoit une subvention quelconque, est un centre
d'accueil? Nous croyons qu'il y aurait avantage, à ce stade-ci, soit
à catégoriser de façon très ferme les centres
d'accueil, soit à les inclure ou à les décrire
nommément comme centres d'accueil au moment de leur accréditation
corporative. Ceci afin de ne pas créer d'ambiguïté dans les
discussions là-dessus et non plus d'ambiguïté dans les
représentations.
Nous nous permettons de dire aussi que nous ne voudrions pas que les
ORAS, en dépit de la bonne volonté et de la confiance que nous
pouvons avoir en bien du monde ici, deviennent de petites sources de
nominations politiques. Ce n'est pas une surprise, vous vous l'êtes
déjà fait dire, mais c'est un petit danger, que nous nous
permettons de signaler.
Nous croyons aussi que les ORAS devraient avoir plus de pouvoirs en ce
sens que la planification doit être une des tâches importantes de
l'ORAS, que ce soit l'ORAS qui ait la charge de planifier ce qui doit se faire
dans le secteur donné. Par le fait même, nous rattachons à
l'ORAS aussi la partie de la loi qui a trait aux fusions et conversions. Nous
croyons qu'il est très important que les ORAS aient à recommander
les fusions et les conversions, ceci pour éviter que,
systématiquement, par des décisions gouvernementales,
ministérielles ou peut-être simplement technocratiques, on
décide de modifer dans la province tous les organismes actuels.
Cela créerait un impact absolument difficile à supporter,
cela créerait des malaises qui, dans certains types de maisons, en
particulier où on fait de la rééducation, deviendraient
insupportables. Alors, nous croyons que les fusions et conversions devraient
être des recommandations de l'ORAS. Cela suppose donc l'existence des
ORAS, préalablement. Dans le rythme d'installation ou
d'établissement des ORAS, le ministre a déjà dit que cela
se ferait lentement.
Ainsi, je me permets de mentionner que si les ORAS se font lentement, il
va être en même temps difficile, d'ici deux ans ou deux ans
après l'adoption de la loi, de modifier nos structures corporatives sans
compter sur des nominations qui viennent de l'ORAS. Par exemple, si les ORAS
n'existent pas encore, il y a le risque d'y avoir là une complication
d'ordre pratique causée par le fait qu'on veut que, deux ans
après l'adoption de la loi, il y ait les changements
proposés.
Nous proposons, en particulier, que soit créé un office
provincial qui aurait un pouvoir d'enquête. Nous trouvons embêtant
que les enquêtes relèvent des ORAS, en ce sens que l'ORAS est
appelé à être juge et partie. Nous recommandons un office
provincial, parce que la loi dit bien: "toute personne désignée
par l'ORAS". Alors, toute personne, cela nous apparaît beaucoup trop
vague. Nous aurions plus confiance à un organisme ou à un office
composé de personnes qui ont ces pouvoirs. A cela, on juxtaposerait un
mécanisme d'appel aux décisions que l'office pourrait
prendre.
La recommandation no 14: "que soient laissées au conseil
d'administration d'un centre d'accueil l'initiative et l'autorité
nécessaire à sa bonne administration". Là, on touche
à l'article qui permet aux ORAS de réglementer l'activité
des institutions. A notre avis, ce qu'il est important de définir, ce
sont les objectifs, les buts des institutions, et de laisser à chacune
des institutions le soin de réglementer son activité, la nature
de son action dans les centres d'accueil.
Ici, un petit point. On ne connaît pas naturellement la nature, le
contenu de la loi qui s'en vient sur les corporations professionnelles.
Toutefois, dans les maisons pour enfants, il y a beaucoup d'éducateurs,
dont la plupart et de plus en plus ont une formation ad hoc, soit au niveau du
CEGEP, soit au niveau de l'université. Alors, est-ce que la loi
déclarera ces gens des professionnels au sens de...? Nous savons,
toutefois, que c'est possible, puisque la loi dit "et tout autre groupement".
Nous voudrions bien qu'au point de vue de la composition du conseil
d'administration d'une institution d'un centre d'accueil il y ait place pour
les éducateurs comme représentants.
Nous croyons trop limitatif le fait qu'un directeur
général puisse exercer d'autres fonctions. Nous comprenons
très bien les objectifs visés. Nous touchons là un point
auquel peut-être peu de gens ont touché, mais nous croyons qu'il
est normal et moi, je ne pense pas qu'il ait jamais été
décrit dans mes fonctions que je sois ici aujourd'hui comme directeur
général d'une institution toutefois, cela me paraît
utile et c'est pour ça qu'on y est. Il semble qu'il serait bon que la
loi ne soit pas aussi stricte là-dessus, laissant au conseil
d'administration le soin d'apprécier si le directeur
général peut assumer certaines tâches connexes à sa
fonction.
Je prends comme exemple je sais qu'il y a eu des abus et je
comprends un peu le sens de la rigidité de la loi que si un
directeur est appelé à donner certains apports soit à la
recherche ou à l'enseignement, cela ne lui soit pas strictement
fermé comme possibilité. Cela se comprend peut-être mal en
termes du directeur administrateur, ce dont je viens de parler, mais l'article
20 de nos recommandations dit ceci: "Que le directeur général
agisse également à titre d'animateur du centre d'accueil."
Je voudrais bien qu'à ce stade-ci de la conversation on puisse
comprendre qu'un centre d'accueil pour enfants, qui est une maison de
rééducation, qui est une maison de soins affectifs, est une
organisation qui demande une qualité humaine extrêmement
particulière. Cette qualité humaine n'est pas totalement
indépendante des décisions d'ordre administratif qui peuvent s'y
prendre. Nous croyons donc que le directeur général d'un centre,
en tout cas pour enfants, particulièrement les centres de
rééducation, ait aussi dans ses fonctions un rôle
d'animateur du milieu. Ce n'est plus tellement nouveau depuis quelques
années de parler d'animateurs. Il ne s'agit pas simplement que ce
soit
quelqu'un capable de gérer, mais que ce soit quelqu'un capable
d'animer un milieu.
Ici, une parenthèse très importante. M. Cloutier parlait
tout à l'heure des maisons qui ne sont pas aussi
spécialisées qu'un hôpital. Je tiens à mentionner
qu'il y a eu une grande évolution dans le domaine de l'enfance depuis
quelques années; en particulier, beaucoup de maisons ont
spécialisé leur personnel, développé des moyens
d'action qui permettent de prendre réellement soin des enfants, dans
certains cas de les traiter systématiquement, de les réadapter de
façon systématisée et méthodique. Ceci suppose que
ces maisons-là ont besoin de l'apport de l'enseignement et de la
recherche. Ce ne sont pas toutes les maisons qui sont nécessairement des
centres de recherche ou d'enseignement. Mais déjà un certain
nombre le sont. Nous ne voyons pas pourquoi la loi limiterait
nécessairement la capacité de signer des ententes ou des contrats
sur la recherche et l'enseignement aux hôpitaux et aux centres de
services sociaux.
Effectivement, on connaît des maisons où
l'université a des ententes pour y envoyer au moins trois ou quatre
types de professions. Ils font des stages. Là, je rejoins ce que
mentionnait le représentant du comité des doyens, ce matin; la
tendance est de faire en sorte dans le cas des enfants difficiles c'est
plus vrai que dans tous les autres cas que les gens touchent au sujet,
connaissent l'objet de l'action sur laquelle ils sont appelés à
travailler. Apprendre cela dans des cours, cela va. Mais on sait qu'il y en a
qui arrivent avec de beaux diplômes et ils n'ont pas eu de formation
pratique. Ils ne peuvent rien faire. La formation pratique, quand il s'agit
d'enfants, quand il s'agit de rééducation ce serait la
même chose s'il s'agissait de prisonniers cela s'apprend
théoriquement et pratiquement. Alors, ce serait très regrettable
que nos maisons ne puissent pas avoir cette possibilité
d'établir, dans les modalités déjà proposées
par le bill, des contrats d'enseignement et de recherche.
Nous voudrions mentionner aussi le rôle, cela ne s'écrit
peut-être pas dans la loi, que l'Association provinciale des institutions
pour enfants peut jouer, par exemple, dans l'établissement des
règlements qui concernent les maisons de ce type-là. Nous
craignons et avec raison cela a déjà été
mentionné malgré que, jusqu'à présent, la loi,
quand même, nous convient assez bien d'être noyés
avec nos 14,000 cas par année. Je sais bien que les institutions pour
enfants ne comprennent pas tous les soins aux enfants dans la province. C'est
évident. Mais nous craignons que ces 14,000 cas qui sont parmi les plus
aigus, ceux qui ont besoin d'une attention plus particulière que les
autres, soient noyés dans un ensemble parce que ce ne sont pas ceux qui
vont se promener dans la rue pour contester et protester. Ils en sont capables
jusqu'à un certain point. Mais habituellement on ne les lâche pas
et pour cause, cela ne servirait pas à leur rééducation.
Ils sont peu nombreux. Il y en a un grand nombre qui ne sont pas capables de se
défendre. Il y en a qui ont peine à marcher. Mais, il est
très important qu'ils ne soient pas oubliés. Nous
suggérons que, dans l'établissement, par exemple, d'un certain
nombre de règlements, l'association soit contactée.
Nous souhaitons aussi que certains pouvoirs qui sont actuellement
dévolus au ministre en regard des règlements soient
révisés, en particulier les articles j), k) et r), en fonction
des maisons pour enfants et peut-être des maisons pour vieillards.
Je pense, par exemple, à l'article qui réfère aux
conditions d'admission, aux conditions de visite et tout cela; je vous garantis
qu'il ne serait pas facile d'appliquer cela systématiquement.
"Déterminer les conditions et modalités d'admission et de sortie
des personnes; édicter des règles disciplinaires applicables aux
personnes et aux institutions," il y a là quelque chose qui nous
embête un peu.
Il y a aussi cette caractéristique particulière d'un
certain nombre de maisons, messieurs, qui ont un caractère assez
provincial, par leur nature même, par exemple, les endroits où
l'on s'occupe des sourds et des aveugles. Nous ne croyons pas qu'il soit
raisonnable d'établir dans chacun des ORAS et dans chacune des
régions couvertes par les ORAS certaines formes de maisons
spécialisées. De plus en plus avec raison on prend
un enfant qui a un problème de surdité et on le place dans une
école ordinaire. On lui donne un traitement, près de sa famille.
C'est tout à fait normal. Mais il arrive ce sont ces cas qui sont
les cas-problèmes et ce sont eux qu'on couvre généralement
qu'un enfant, par exemple, parce qu'il est sourd ou parce qu'il est
aveugle, a besoin d'une formation bien particulière. Il a besoin, en
plus, de soins émotifs particuliers parce que, très souvent, un
handicap de cette nature engendre des troubles affectifs ou autres. Ce sont
ceux-là qu'on a besoin de placer en institution, à qui il faut
donner des soins particuliers pour un temps X.
Nous croyons qu'un certain nombre de ces maisons pourraient avoir un
caractère provincial et fonctionner passablement en vertu des
mêmes conseils d'administration qu'autrefois, sans que ce soit une
insistance à tout rompre.
Nous croyons aussi, sur un autre plan, que le sens du mot "privé"
devrait être élargi pour permettre à une institution
d'être privée et à but non lucratif. Actuellement, tel que
le définit la loi, si on est privé, on est à but lucratif.
Certaines maisons, qui sont associées dans le groupe de l'APIE,
appartiennent strictement aux communautés. Ce sont des maisons qui
pourraient fonctionner d'une façon privée, mais, selon la nature
même du sens de "sans but lucratif", qui est celui de leur corporation et
celui que normalement leur autorise leur communauté, par exemple, elles
n'auraient pas le
droit d'être privées du tout. Je ne sais pas si je
m'exprime clairement là-dessus, mais de toute façon, s'il y a des
questions à poser, mes collaborateurs et moi, nous y
répondrons.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier
l'association pour ce mémoire qui m'apparaït positif, qui apporte
des suggestions extrêmement intéressantes et qui est aussi
nuancé. J'aimerais faire trois commentaires, en fait, pour ne pas
revenir sur des commentaires que j'ai déjà faits à
certaines reprises.
Le président a mentionné que, dans le domaine de l'enfance
inadaptée, de façon générale, les politiques ne
sont pas encore tellement explicites, à certains aspects. J'en conviens
avec lui. Le domaine de l'enfance inadaptée est un domaine dont toute
l'ampleur n'a été saisie que graduellement au cours des
dernières années. Il nous apparaît, à certains
moments, extrêmement difficile et même dangereux de vouloir tracer
des lignes d'orientation trop précises ou qui pourraient faire fausse
route.
De toute façon, je voudrais mentionner que présentement,
au ministère, que ce soit, selon les cas, avec le ministère de
l'Education ou avec le ministère de la Justice, nous faisons un travail
très détaillé pour préciser des politiques qui
seront rendues publiques éventuellement soit pour discussion ou pour
projet de modification à des lois, telles que la Loi de la protection de
la jeunesse. Nous sommes bien conscients de cette nécessité d'une
mise à jour ou d'une clarification.
Dans ce secteur, évidemment, lorsque cette phase du travail que
nous avons entrepris sera suffisamment avancée, c'est notre intention,
selon les aspects, selon que nous touchons à un projet de loi ou encore
que nous en arrivons à des énoncés de politiques, de
consulter les organismes intéressés au secteur.
De façon plus particulière, je voudrais simplement
mentionner deux points. Quant au mémoire, j'ai dit tantôt qu'il
contient des suggestions intéressantes.
Il y a deux points, à mon avis, qui, pour le moment,
m'apparaissent devoir faire l'objet d'un commentaire. Lorsqu'on mentionne que
les centres d'accueil ou encore un certain nombre d'institutions pour enfants
devraient avoir la latitude de pouvoir passer des ententes aux fins de
l'enseignement et de la recherche, je crois qu'il s'agit là d'une
remarque extrêmement valable et que le projet de loi devrait donner cette
possibilité telle que suggérée ici.
Quant aux fonctions du directeur général, je ne crois pas
que l'on doive interpréter une loi d'une façon aussi stricte que
vous le faites. A mon avis, le type de tâches que vous assumez
présentement se concilie très bien avec la fonction qu'un
directeur général peut assumer dans une institution. Et si ceci
n'est pas mentionné dans le projet de loi, c'est que nos lois, de la
façon qu'elles sont rédigées, n'entrent pas dans ce
degré de détail. Ce qui est dit ici, c'est que la fonction de
directeur général est une fonction qui exige qu'il n'y ait pas de
partage des préoccupations ou poursuite d'objectifs non compatibles et,
au-delà, une fois ceci précisé, que le directeur
général, de concert avec son conseil d'administration, juge qu'il
doive assumer des fonctions qui sont connexes avec une institution, ce n'est
pas incompatible avec le projet de loi. Mais nos lois, telles qu'elles sont
rédigées, n'entrent pas dans ce degré de détail et
ne couvrent pas tout ce qui est permissif et compatible avec des articles de la
loi.
Sur ce plan-là, vu que c'est un point qui est mentionné
pour la première fois, je voudrais donner cette assurance. Dans la Loi
des hôpitaux actuelle, il n'est pas dit qu'un directeur
général d'un hôpital peut assumer des fonctions au sein de
l'association des hôpitaux, etc. Il va de soi, le sens commun indique, je
crois, que c'est possible.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. Tremblay, est-ce que vous avez entendu
tantôt la suggestion que soeur Levaque a faite quant au secteur du
bien-être qui devrait être mieux représenté ou moins
noyé dans toute cette vaste structure des ORAS?
Pour votre part, votre organisme suggère qu 'il y ait les
représentants délégués spécifiquement par
les institutions qui s'occupent des jeunes. Est-ce que vous croyez que cette
suggestion que vous faites serait suffisante pour assurer que les
intérêts de tout ce secteur de l'enfance inadaptée soit
véritablement couvert par les préoccupations de l'ORAS?
M. TREMBLAY (Armand): Ce qui nous importe, en tout cas, ce que nous
avons retenu comme suggestion, à l'association provinciale c'est que les
enfants soient représentés dans les ORAS par des gens qui sont du
milieu, qui sont réellement des participants. Donc, des gens qui ont le
pouvoir de représenter leur milieu et de le défendre. Qu'il y ait
une place pour parler et décider avec d'autres. La présence de
trois représentants d'un centre d'accueil à l'ORAS, quant
à nous, par rapport à l'ensemble des gens, ça donnait
trois voix.
Si ce sont trois voix qui sont vraiment des voix représentatives
du milieu, ça nous apparaît très bien. Il appartiendra
alors au milieu de se donner la qualité des voix qu'il voudra, ou du
moins de faire des suggestions au ministre, de telle sorte que, parmi le choix
qu'il aura à faire, on sera sûr qu'il y a des bons hommes.
A ce moment-là, on se trouve assis à une table où
il y a des décisions à prendre en tant que représentant
d'un secteur qui est forcément plus petit qu'un autre. Qu'est-ce que
vous voulez? Il y a 70,000 employés. Je me réfère à
la négociation dans les hôpitaux. Il y en a 2,500
dans les maisons pour enfants. Il est évident qu'on se met, en
contrepartie, un gros et un petit. La minorité crie toujours un peu plus
fort, c'est pratiquement normal. On veut se donner le pouvoir de dire ce qu'on
a à dire.
Si on l'a vraiment, par une participation et une représentation
réelle, il me semble que c'est convenable. La petite insistance est sur
ce point: On se dit que dans les centres d'accueil il peut y avoir des maisons
pour vieillards, des maisons pour enfants, des maisons pour garder, par
exemple, des impotents d'une autre nature, je ne sais pas. A ce
moment-là, il pourrait arriver que le secteur de l'enfance n'ait pas de
voix à l'ORAS. Par quel tour de passe-passe peut-on arriver à
s'affirmer à ce moment-là ou à faire en sorte que ce soit
réel? Cela rejoint la suggestion que l'on faisait antérieurement,
que soit bien défini ce qu'est un centre d'accueil pour que l'on puisse
se référer, dans une suggestion, à des choses très
claires.
Déjà, tout à l'heure, on a senti que ce
n'était pas très clair pour l'hébergement des vieillards,
par exemple. Il y a celui qui paie et celui qui ne paie pas dans une même
institution. Quant à nous, c'est notre proposition.
M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez demandé également une
meilleure définition des centres d'accueil. Dans votre recommandation no
7, vous dites: Cette nomenclature pourrait être précisée
par règlement, après consultation avec notre association. Est-ce
que vous possédez déjà tous les éléments qui
vous permettent de suggérer une définition assez précise
des centres d'accueil par le nombre d'institutions et la variété
des institutions?
M. TREMBLAY (Armand): Oui, pour le secteur de l'enfance. Vous trouvez,
au début du mémoire, une énumération très
précise, naturellement qui peut-être encore discutable, des
centres que nous touchons. Les centres pour vieillards, nous ne les touchons
pas. Si nous avons à discuter de centres d'accueil, nous parlerons de
secteurs pour enfants. Si on nous demande une définition de centre
d'accueil, nous donnerons des centres d'accueil pour enfants.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que vous croyez que le livre blanc sur
l'enfance inadaptée était un bon début
d'élaboration de politiques dans le secteur de l'enfance?
M. TREMBLAY (Armand): Excellent début, quant à nous, M.
Cloutier. Hommages!
M. CLOUTIER (Montmagny): Quelle est la suite?
M. TREMBLAY (Armand): Disons que la suite, au niveau des applications,
on l'attend toujours parce qu'on ne peut pas dire qu'après le livre
blanc il s'est tellement systématisé de politiques. Quant au
secteur de l'enfance, le ministre faisait allusion tout à l'heure au
ministère du Travail, au ministère de la Justice et il y a le
ministère de l'Education. Dites-vous bien que quelquefois on est
drôlement tiraillé.
M. CASTONGUAY: J'ai mentionné le ministère de l'Education
et non pas le ministère du Travail. Je m'excuse.
M. TREMBLAY (Armand): Dans certaines institutions, ils ont le
ministère du Travail. Quant à nous, la politique du livre blanc,
même les classifications, nous convenait.
M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai une autre question qui se rapporte
peut-être moins directement au projet de loi no 65. Dans le secteur
institutionnel pour l'enfance inadaptée, avec l'implantation des centres
d'entraînement à la vie, des centres de dépannage, des
centres de transition, les projets qui ont été
réalisés et ceux qui sont en voie de réalisation, le
nombre d'institutions et leur répartition sur le territoire du
Québec, leur décentralisation, résolvent-ils, du moins en
assez grande partie, le problème de l'hébergement de ces
enfants-là?
M. TREMBLAY (Armand): Je ne pourrais pas vous dire si la planification
qui a été élaborée déjà depuis un
certain nombre d'années répond à tous les
problèmes. Tout ce qu'on sait c'est que tout ce qui s'est fait depuis un
certain nombre d'années aide davantage par rapport à ce qu'il y
avait cela, on le sait les centres de transition, même
s'ils n'ont pas toujours trouvé leur nature, leur objectif
précis. Une des raisons pour lequelles on est très
intéressé à certaines structures proposées par le
bill 65, c'est qu'un être en transition est rattaché à une
famille et à un milieu. On ne rééduque pas un enfant
n'importe comment, sans s'occuper de sa famille, de son milieu. Nous sommes des
substituts et, forcément nous sommes appelés constamment à
être en contact. L'idée des centres de transition, telle qu'elle
existe présentement, et des centres d'entramement à la vie, qui
sont plus régionalisés qu'autrefois, nous apparaît bien
épatante. Bien souvent, même si cela doit encore arriver pour des
cas exceptionnels je pense à certaines maisons de
caractère plus provincial les enfants sont capables davantage de
trouver des soins dans l'entourage immédiat de leur milieu. Si ce n'est
pas dans le village, s'ils sont autour de Saint-Hyacinthe, c'est à
Saint-Hyacinthe. Cela se fait sans qu'ils soient nécessairement
déracinés complètement. Ce ne sera pas
nécessairement le cas des garçons qui vont actuellement à
Boscoville, au Mont-Saint-Antoine ou même à un centre
spécialisé comme Clair-Séjour, ce sont des enfants
caractériels profonds.
Il ne peut pas y en avoir des douzaines, dans la province de centres
pour caractériels profonds, ce n'est pas mon avis. Est-ce que cela
répond à votre question?
M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, merci.
M. TREMBLAY (Armand): Je peux demander au directeur
général, qui connaît encore mieux que moi toutes les
institutions de la province étant donné qu'il les parcourt, de se
prononcer là-dessus.
M. CLOUTIER (Montmagny): Non, c'était une question qui
s'éloignait un peu du sujet. Nous aurons l'occasion d'en parler en
d'autres circonstances. Je voulais profiter de votre passage ici pour que les
membres de la commission prennent connaissance de l'importance de ce secteur
que vous représentez.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. TREMBLAY (Armand): Tout simplement une remarque quant au livre blanc.
Nous aurions bien souhaité qu'il soit endossé par le
ministère de l'Education. Je ne sais pas si c'est la place pour le dire
mais ça fait assez de fois qu'on le leur dit.
M. CLOUTIER (Montmangy): Le message va se rendre.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, M. Tremblay, j'aimerais vous poser une
question. Etant donné qu'on ne voit nullement dans votre mémoire
la definition ou l'historique évidemment du tout début de tout ce
qui est mentionné, par exemple, comme catégories suivantes qui
sont mentionnées dans votre mémoire, quels ont été
dans ce secteur qui est tout de même assez important les
grands principes ou les grands objectifs qui ont animé les
créateurs d'autant de catégories de maisons de ce genre. En
quelques mots seulement, j'aimerais bien que ce soit précisé.
M. TREMBLAY (Armand): D faut dire qu'il y a beaucoup d'aspects
extrêmement pragmatiques là-dedans. La polyvalence des
institutions reste un sujet sur lequel on se penche assez
régulièrement et auquel on n'a pas encore trouvé de
réponse. Exemple, on ne peut pas réunir aisément des
enfants déficients même caractériels avec des enfants
intelligents caractériels; des enfants caractériels intelligents
avec des enfants infirmes, par exemple. Le type de soins, le type d'approche,
la sensibilisation qu'on a besoin d'avoir à chaque cas, tant au plan des
besoins physiques que des besoins affectifs de ces enfants, je n'entrevois pas
la possibilité d'une institution où on mettrait tout ça
ensemble.
Pour arriver à répondre, à spécialiser les
réponses dont ces enfants avaient besoin, forcément on a
formé des centres pour handicapés physiques ou
caractériels. Quant à ceux qui s'appellent centres de transition
et centres d'accueil, c'est vraiment .. Que voulez-vous, avant ça, si un
enfant était difficile, dans la province, ou en le gardait sur place, ou
on l'amenait à la cour Juvénile. Tandis que là, il y a au
moins un foyer d'accueil où, temporairement, on peut s'en occuper. C'est
un progrès immense sur la formule de la cour Juvénile. Je ne sais
pas si vous la connaissez, je peux vous en parler un jour si vous ne la
connaissez pas.
M. GUAY J'aimerais ajouter à cela. Si, par exemple, on prend des
définitions possibles à tous ces noms d'institutions, n'y a-t-il
pas un dédoublement de services qui peuvent être offerts dans
certaines institutions?
M. TREMBLAY (Armand): Je ne voudrais pas en faire l'analyse les uns
après les autres. Naturellement, il y a là-dedans des recoupages
qui sont, par exemple, ce qu'on appelle une école de protection et ce
qu'on appelle une maison pour caractériels. Il y a des structures
historiques qui nous amènent à cela, qui sont comme ça
parce que les uns dépendent de la Loi de la protection, et les autres,
de la Loi de l'assistance publique. Mais il y a des écoles de protection
qui sont strictement des centres de rééducation pour
délinquants, et un délinquant c'est généralement un
caractériel. Cela peut être un névrosé mais c'est
une structure caractérielle.
Si on entrait naturellement dans ces étapes, vous comprenez que
même dans l'école pour les caractériels ou dans
l'école de protection, il y a une question d'âge qui intervient.
Mais si vous demandez comment on pourrait définir un centre d'accueil,
nous croyons que tout ça entre dans un centre d'accueil, quant à
nous. C'est surtout par rapport aux autres groupements ou par rapport à
certaines formes d'organisation actuelle. Par exemple, je parlais tout à
l'heure de colonies de vacances en milieux défavorisés. C'est une
forme de résidence temporaire autant qu'un centre d'accueil: l'enfant
peut être là trois soirs comme il peut y être trois
semaines. Est-ce qu'à ce moment-là on va appeler une colonie de
vacances pour enfants défavorisés un centre d'accueil?
M. GUAY: A ce moment-là, évidemment, il s'agit de
conserver presque la totalité sinon toutes ces institutions qui donnent
actuellement des services qui répondent à un besoin.
M. TREMBLAY (Armand): Quant à nous, celles-là sont
là comme un fait historique et elles sont justifiables parce qu'on
considère qu'il y a pas mal d'enfants qui ne sont plus
institutionnalisés.
M. GUAY: J'aurais une autre question, à la page 11, relative
à l'article 98, dans un autre ordre d'idées. Vous aimeriez voir
un délai fixé
pour permettre au ministre d'accorder ou de refuser une demande de
permis. Est-ce que vous avez pensé quel délai serait valable?
M. TREMBLAY (Armand): Je laisse à Me Levesque l'occasion de
parler.
M. LEVESQUE (Jacques): M. le Président, MM. les membres de la
commission, quant au délai, nous voulons surtout indiquer qu'il serait
sage qu'un délai soit indiqué, quitte à laisser aux
membres de la commission de suggérer le temps lui-même. Le point
qui a milité en faveur de la suggestion d'un délai, c'est qu'une
question de permis représente beaucoup, que ce soit l'institution
privée au sens de la loi comme le veulent les initiateurs du projet ou
dans le sens de l'institution privée ou publique. A ce moment, cela
représente, pour les gens qui attendent des nouvelles, une situation qui
peut être très précaire et, que la réponse soit
intéressante ou pas, qu'elle soit affirmative ou négative, nous
croyons qu'il serait peut-être sage qu'un délai soit
suggéré. Nous pourrions bien vous dire immédiatement:
C'est un délai de deux semaines, un mois ou ainsi de suite, mais nous
préférons vous laisser cette partie de délai. Quant
à d'autres remarques, nous aimerions peut-être les particulariser
davantage plus tard.
M. GUAY: C'est, en fin de compte, un échéancier qui
permettra l'accélération des procédures.
M. LEVESQUE (Jacques): Je pense bien que le ministère est en
mesure d'évaluer lui-même quel délai suffirait, mais la
crainte existe surtout du côté de la personne qui attend le
permis. A ce moment-là, il faudrait que ce soit le plus bref possible,
mais en tenant compte de la réalité, des procédures
à suivre.
M. GUAY: Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, seulement une
question. M. Tremblay, dans votre mémoire, lorsque vous parlez de la
nomination des membres de l'ORAS, vous dites qu'il y a un danger
d'ingérence politique, de nominations politiques et votre organisme
recommande la formation d'un autre organisme intermédiaire qui serait
autonome et qui aurait des pouvoirs réels. Pourriez-vous m'expliquer un
peu comment cet organisme pourrait fonctionner sans devenir lui aussi
influencé par la politique ou...?
M. TREMBLAY (Armand): Là, nous supposons que cet organisme aurait
des pouvoirs quasi judiciaires et nous supposons que la nomination de ceux qui
sont juges de quelque chose soit quand même faite selon la
compéten- ce des personnes qui peuvent apprécier les situations.
Nous en avions contre toute personne désignée par un ORAS. Il
nous semble, à nous, que c'est un embêtement, que cela risque
d'être de l'ingérence et de servir n'importe comment.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je suis d'accord avec vous. Cela peut
arriver, de l'ingérence politique...
M. TREMBLAY (Armand): Mais disons que... Ce n'est pas un domaine dans
lequel je suis habitué d'embarquer, vous savez, les discussions sur
l'ingérence politique.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai dit que cela peut arriver.
M. TREMBLAY (Armand): Un office qui serait un organisme composé
de deux ou trois personnes nommées est-ce que ce serait ad hoc,
est-ce qu'il y aurait assez de situations dans une année pour entretenir
des personnes, espérons que non nous apparaissait plus... Mais
là, nous étions vraiment confiants que tous les pouvoirs
accordés à cet office quasi judiciaire le seraient selon les
meilleures normes de la justice et que cela comprendrait des personnes capables
d'apprécier aussi des situations précises. Il s'agit de savoir
s'il y a de la malversation ou de la mauvaise administration, s'il y a des gens
qui tirent profit d'une situation financière, mais il y a aussi qu'on
peut être appelé à analyser dans cet office des situations
d'éthique professionnelle, je suppose.
A ce moment-là toute situation qui relève de
l'éthique professionnelle cela touche les médecins autant
qu'un éducateur, un psycho-éducateur qui travaille dans une
institution et nous trouvons que ce n'est pas n'importe qui qui peut
arriver là-dedans et se mettre à apprécier. Cela veut dire
naturellement, si on fait la déduction, qu'on pense que l'ORAS va nommer
n'importe qui. Non. Mais s'il y a dix ou quinze ORAS dans la province, nous
croyons qu'il y a moins de chance de trouver des personnes compétentes
pour apprécier ces situations que s'il y a un organisme dont c'est la
fonction.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais, si vous me permettez, dans l'organisme
intermédiaire que vous recommandez, les gens seraient nommés par
qui?
M. TREMBLAY (Armand): Je les voyais nommés par le
gouvernement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, par le gouvernement encore, vous n'en
sortez pas quand même.
M. TREMBLAY (Armand): Je ne veux pas dire que nous sommes allés
jusque-là, vous me
posez la question, c'est très bien. Je vous réponds, moi,
comme je pense et je dois dire ce que bien des gens ont dit. Je ne suis pas un
avocat, mais je pense que, quand il s'agit d'un organisme à
caractère un peu judiciaire, on doit donner des pouvoirs à
quelqu'un et on suppose qu'il a la compétence. Et cela suppose aussi un
endroit où les gens peuvent aller exprimer leur point de vue, aller se
défendre, et si jamais ils ne sont pas contents ils peuvent avoir des
recours.
M. LEVESQUE (Jacques): Si vous le permettez, M. le Président, M.
le Ministre et MM. les membres de la commission, sur cette question des
pouvoirs d'enquête, peut-être pourrais-je compléter la
phrase qui a été dite quant au mode de nomination. Ce serait
peut-être un peu comme pour le directeur général de l'ORAS
dont on dit: Il est nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil qui
pige à même une liste qui lui a été fournie par les
membres du conseil d'administration. Alors, il serait concevable que ce soit
par le lieutenant-gouverneur en conseil à même les gens
représentatifs du secteur où s'étendraient les pouvoirs de
cet office provincial.
Maintenant, cet office provincial, tel qu'indiqué dans le court
mémoire que nous avons présenté et que M. le
président vous a soumis, c'est au niveau surtout des pouvoirs
d'enquête. Pour se situer vraiment et pour savoir ce qu'il en est, il
faut peut-être reculer à l'article 146 où l'on dit:
"Quiconque enfreint l'une des dispositions de la présente loi." Il y a
des pénalités prévues selon que vous êtes un
individu ou une institution; cela sera majoré, etc. C'est donc dire,
tout de suite, que ces pouvoirs d'enquête peuvent avoir des
conséquences sérieuses pour des individus, pour des
institutions.
D'avance, nous admettons qu'il doit y avoir un contrôle au point
de vue financier. Nous admettons qu'il y a des situations qui ne sont pas
normales et au détriment, disons, de l'enfant. Il faut qu'il y ait des
pouvoirs d'enquête, mais le problème est le suivant: Qui doit
exercer ces pouvoirs d'enquête? Est-ce qu'on n'aurait pas
intérêt à rechercher une solution c'est ce qu'on
veut vous suggérer bien humblement pour qu'il y ait le plus de
garanties possible quant à la valeur des gens qui effectueront les
enquêtes, qu'il y ait aussi cette impartialité vis-à-vis de
l'administration gouvernementale?
Indiquer cela, ce n'est pas du tout un vote de non-confiance. Regardons
ensemble les articles concernant les pouvoirs d'enquête, à partir
des articles 30, 31, etc. Toute personne nommée par l'ORAS peut exiger
des renseignements. La personne, au niveau de l'ORAS, peut être
obligée de donner des documents. Ensuite, s'il y a infraction, il peut y
avoir saisie de tout document pertinent. C'est logique qu'on ait prévu
ce mécanisme. De même, on va un peu plus loin, à l'article
34, où l'on dit: Si l'intérêt public l'exige, il pourra y
avoir une enquête.
Cette enquête, à quel niveau doit-elle être faite?
Par qui doit-elle être faite? Avec ce que nous suggérons comme
alternative, je ne pense pas que le ministre perde aucun des objectifs qu'il
s'est fixés, nous le supposons. Mais, étant donné que les
conséquences peuvent être lourdes pour les individus et les
corporations, il est essentiel, je pense, de rechercher, pour l'application de
ces pouvoirs, eh bien, un maximum de garanties possibles. Ceci se retrouve dans
la personnalité des gens qui pourront être nommés. Je crois
que, si c'est fait sur un plan provincial, il y a certainement plus de
garanties de retrouver chez les gens qui y seront nommés des
critères de compétence ces gens seront peut-être
spécialisés dans un secteur ou dans l'autre que de laisser
à un organisme strictement administratif ces pouvoirs, en somme, qui
sont quasi judiciaires.
Si vous voulez, c'est peut-être l'intermédiaire entre nos
cours Provinciales et nos cours Supérieures et le pouvoir d'un
fonctionnaire ou d'un membre de l'ORAS. Alors, si c'est au niveau
intermédiaire, on l'apparente à un appareil quasi judiciaire. Il
me semble que nous trouvons un moyen terme qui, dès qu'il y aura danger
on parle ici du secteur de l'enfance et qu'une enquête
s'imposera, permettra soit à un individu, soit à l'ORAS, soit
à une institution et soit au ministre de déclencher
peut-être le mécanisme qui amènerait une enquête.
Je ne pense pas qu'il faudrait avoir des enquêtes partout, mais,
si le besoin se fait sentir, ne laissons pas à un organisme strictement
administratif des pouvoirs qui peuvent avoir des conséquences aussi
lourdes chez des institutions, chez des individus, mais transférons-les
sur un plan provincial. Est-ce à dire que selon qu'on est au plan
régional ou provincial, il y a des critères qui feront en sorte
qu'on trouvera des gens qui auront plus de valeur ou non? Je vous laisserai
juger par votre expérience s'il n'est pas plus facile de trouver des
gens avec des critères égaux que si vous avez à
répéter les mêmes gestes au niveau de l'ORAS, suivant le
nombre que le ministre aura déterminé par règlement ou
autrement pour la province.
Alors, c'est le but, sur la question des pouvoirs d'enquête, que
cela devrait être un niveau provincial, qu'on l'appelle office ou
autrement, peu importe.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que je pourrais vous poser une
question très courte? Dans votre mémoire, vous demandez qu'on
retranche du projet de loi l'article 147? Pourquoi? Est-ce que l'article
prévoit les amendes en cas...
M. LEVESQUE (Jacques): Quant à l'article 147, dans la vie
quotidienne, il peut arriver qu'une dépense ait été faite
sans l'approbation, entre autres, du ministre. Oui, cela peut se produire, je
donne cet exemple-là. Or, dans la
réalité quotidienne, on se trouve un peu à
assimiler tous les gens qui sont là, qui vraiment n'auraient pas
contribué en connaissance de cause à une telle infraction. Alors
le mécanisme prévu à l'article 147 est peut-être
assez lourd parce qu'on dit: Lorsqu'une corporation commet une infraction
à la présente loi ou à un règlement, tout
fonctionnaire, administrateur, employé ou agent de cette corporation qui
a prescrit ou autorisé l'accomplissement de l'infraction se voit
passible d'une peine. Ce n'est pas dans le sens que les gens cherchent un moyen
de se retirer de leurs obligations. Mais dans la vie quotidienne, il peut
arriver des cas où c'est pratiquement impossible, je vais aussi loin que
cela, de ne pas commettre d'infraction. Prenez l'article 45, dernier paragraphe
où on dit je donne la substance que nul contrat ne peut
être fait sans l'autorisation du ministre. On comprend dans quel but cela
est fait. C'est dans un but de contrôle. Mais un contrat de $25 je
pense que M. le ministre peut nous dire que ce n'est pas le but
recherché qui n'est pas fait avec l'approbation, ou tel quel, ou
suivant les règlements qui le permettraient, serait peut-être une
infraction. C'est plutôt dans ce sens-là.
M. LE PRESIDENT: Un instant.
M. CASTONGUAY: Excusez, seulement pour clarifier l'article 45. Cela fait
quelquefois que cela revient. Il est dit: "...sans l'autorisation requise du
lieutenant-gouverneur en conseil". Alors, s'il s'agit d'un contrat de $25, il
est évident que le lieutenant-gouverneur en conseil ne demandera pas qu
'il soit soumis pour approbation. Quant aux infractions, encore là,
c'est la même chose que pour le directeur général, il ne
faut pas interpréter d'une façon stricte une loi. Si dans
l'accomplissement de sa fonction, un employé d'une corporation agit de
bonne foi et pose un geste, toujours de bonne foi, qui va à l'encontre
de la loi, c'est évident que l'esprit de la loi n'est pas d'être
constamment aux trousses de tout le monde et d'essayer de découvrir des
situations commises de bonne foi et qui ont été faites, bien
souvent, pour le bon fonctionnement des institutions.
C'est vraiment lorsqu'il y a une infraction qui est commise à
l'encontre de l'esprit de la loi sur quelque chose de significatif que cet
article de loi apparaît. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il faut
interpréter ces articles.
M. LEVESQUE (Jacques): Si vous me permettez, sur ce point-là,
nous ne voulons pas insister davantage. C'est une illustration. Mais dans
l'article 45, on poursuit plus loin et on dit: "...ou du ministre est nul".
Nous comprenons l'esprit. C'était peut-être un peu la
difficulté lorsque nous nous présentons devant le texte. Nous
sommes obligés de le redire sur un thème connu. Eh bien, ce n'est
pas, soit à l'ancien ministre ou au ministre actuel, mais simplement le
texte est là tel quel et nous sommes obligés de dire: Eh bien,
tout contrat. Il n'y a aucune distinction de faite. Evidemment...
M. CASTONGUAY: Bien non, je viens de dire: "l'autorisation requise du
lieutenant-gouverneur en conseil". Alors, pour les cas où c'est requis
du lieutenant-gouverneur en conseil, cela s'applique. Si l'autorisation n'est
pas requise par le lieutenant-gouverneur en conseil, le contrat peut être
fait. Il y a une distinction. Il faut lire le texte de façon
précise. Mais il ne faut pas l'interpréter d'une façon
rigide. C'est cela la distinction.
M. LEVESQUE (Jacques): Oui, nous comprenons. Nous sommes satisfaits du
point que vous apportez. Nous vous remercions. Seulement, il y a juste la
question où on dit: "...ou du ministre...". Mais nous ne voulons pas
élaborer davantage là-dessus. C'est dans l'hypothèse
où quelqu'un ne demanderait pas l'autorisation nécessaire.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On dit bien dans l'article: "...qui y a
consenti, acquiescé ou participé...". Enfin, cela laisse supposer
que cela a été fait en connaissance de cause.
M. LE PRESIDENT: Alors, monsieur, je vous remercie de votre
mémoire. J'invite maintenant l'Association des foyers pour adultes.
Association des foyers pour adultes
SOEUR COULOMBE: Soeur Cécile Coulombe, des Soeurs de la
Charité de Québec, présidente de l'Association des foyers
pour personnes âgées.
M. le Président de la commission, M. le ministre, messieurs les
membres de l'Assemblée nationale, notre association groupe 171 des 200
foyers sans but lucratif de la province. De ces 171 foyers membres, 63 sont
à corporation ou direction religieuse, 108 à corporation ou
direction laïque. Les 63 foyers à corporation religieuse comptent
6,375 lits, tandis que les 108 foyers à corporation laïque comptent
6,390 lits, ce qui fait un total de 12,765 lits.
Le mémoire de l'Association des foyers pour personnes
âgées sera présenté par M. Lorenzo Décarie,
directeur général de l'association. Il est accompagné de
Soeur Marie-Antoinette Morin, à l'extrême gauche, directrice
générale du Foyer Saint-Antoine, à Québec, de Soeur
Germaine Dupuis, directrice générale du Centre de formation en
gérontologie-gériatrie des Soeurs Grises de Montréal et
directrice du secteur éducation de notre association, de M. Claude
Desjardins, directeur général du Manoir de Verdun et de Me
Jacques Lévesque, conseiller dans la préparation du
mémoire.
M. Lorenzo Décarie.
M. DECARIE: M. le Président, M. le ministre des Affaires
sociales, messieurs les membres de
la commission parlementaire, nous avions déjà fait un
résumé. Nous serons maintenant obligés de faire un
résumé du résumé. A force de résumer, je ne
sais pas ce qu'il nous restera à dire.
Je vois que tout le monde, ici, semble avoir étudié le
même bill et apporte à peu près les mêmes
observations. Je vous dispenserai de beaucoup de lecture. Mais, comme nous
représentons des foyers de toutes catégories, à direction
religieuse et à direction laïque, je dois d'abord dire que nous
endossons ce que la CRC a avancé dans son mémoire. Je dois ici
rendre un témoignage aux membres des conseils d'administration
déjà en place qui ont apporté des heures sans nombre de
dévouement et qui sont déjà imprégnés d'une
motivation, d'une capacité de création, d'initiative et de sens
des responsabilités. Il faut leur permettre de continuer de jouer leur
rôle au niveau des foyers. Il ne faut pas oublier que nombre d'entre eux
ont apporté de fortes souscriptions en temps et en argent.
J'aimerais ici mentionner deux de nos foyers qui, naturellement, se
verront aidés, sans doute, parce que, là, il y a une question
territoriale; il s'agit de l'Aide aux infirmes et de l'Institut polonais. Ces
deux maisons couvrent la province. Elles craignent toujours d'être
limitées à un territoire en particulier.
Je crois que je laisserai maintenant notre conseiller, Me
Lévesque, donner un résumé de notre mémoire.
M. LEVESQUE (Jacques): MM. les membres de la commission, étant
donné que certaines propositions ont été
énoncées par d'autres organismes avant, nous allons tenter de ne
pas éprouver davantage votre patience et de résumer très
brièvement la situation.
Je pense que nous pourrions peut-être reprendre avec votre
permission la question des définitions. D'abord on a demandé si
nous étions préoccupés au niveau de la définition
d'un centre d'accueil, à savoir ce qui advenait des centres
d'hébergement. Et nous continuons sur la même question, à
savoir s'il serait possible d'avoir, sous le couvert de la même
définition de centre d'accueil, des vieillards qui ne sont pas
nécessairement malades. Et je pose la question en regard de la
définition qui dit bien ceci, en faisant la relation: "Etablissement qui
accueille pour les loger et entretenir et, s'il y a lieu, pour les garder sous
observation ou les réadapter", à la fin, on dit: Qui "doivent
être traités ou gardés en résidence
protégée".
Si nous soumettons à votre attention ce point-là, c'est
que nous nous interrogeons au sujet du vieillard que l'on retrouve dans nos
institutions actuellement, qui ne serait pas traité, gardé en
résidence protégée. Quel est le sens du terme? Disons que
c'est une interrogation qui nous laisse songeurs, à savoir si vraiment
ces gens-là sont couverts ou non. Faut-il qu'il y ait vraiment un aspect
de maladie ou de résidence protégée? Car, je pense que le
climat d'un foyer, cela doit être un peu une atmosphère familiale
et ce n'est pas facile à définir. Je suis convaincu que les gens
qui sont devant nous peuvent se figurer ce que ça représente et
quelle est l'atmosphère qu'on doit y rechercher. Des médecins ont
déjà dit avant nous que la prédominance était sur
l'aspect humain par rapport peut-être au caractère purement
scientifique, sans comparer l'un à l'autre.
Au niveau des institutions mêmes, nous sommes obligés de
revenir sur la notion très brièvement d'institution
publique et d'institution privée. Nous allons tenter de vous faire voir
les conséquences qui pourraient arriver. C'est à titre de
suggestion que bien humblement nous vous amenons les propositions suivantes,
mais, même pour des institutions publiques à but non lucratif, que
les membres de la commission et M. le ministre tentent de considérer
s'il ne serait pas possible de maintenir en place le système corporatif
par lequel ces maisons ont déjà vie. A ce moment-là,
ça veut dire maintenir la notion de membre d'une corporation et
peut-être maintenir la majorité à l'effet qu'il y ait
contrôle.
Si nous amenons cette proposition-là, c'est que nous croyons que
ça peut devenir, pour M. le ministre ou les gens
intéressés au secteur, je dirais un réservoir
d'énergie, un réservoir de gens motivés et qui ont
prouvé leur valeur, leur apport au secteur, mais non pas dans le sens
que nous négocions ici une clause de sécurité d'emploi. A
ce moment-là, dans le contexte actuel, pour autant que ça ne va
pas à l'encon-tre des objectifs que s'est fixés le ministre, si
on garde les formules corporatives actuelles, si on garde la notion de membre,
si on maintient la majorité ou autrement dit le contrôle, est-ce
que le gouvernement ne trouvera pas un réservoir d'énergie ? Les
gens pourraient continuer à faire comme ils l'ont fait, à oeuvrer
dans le plus beau sens du terme auprès des vieillards.
Quelle est la conséquence, si on regarde l'autre
mécanisme? Si les gens ne jugeaient pas à propos de retenir une
partie ou le tout en ce sens, qu'est-ce qui arriverait? Nous savons que les
membres de l'Association des foyers pour adultes sont tous des institutions
sans but lucratif. Donc quelle est la possibilité qui resterait, devenir
une institution à but lucratif? Eh bien! non, puisque pour la plupart,
par leur objectifs, par les vues qu'elles pourraient avoir, si c'est sur le
plan religieux, leurs oeuvres, c'est sans but lucratif.
Arrivons à la question des laïcs qui sont membres de
l'Association des foyers pour adultes. Qu'est-ce qui arriverait des laïcs
qui désireraient mettre sur pied un centre d'accueil sans but lucratif?
Est-ce qu'il n'y aurait pas une certaine réticence?
Nous croyons qu'en maintenant la possibilité d'avoir des centres
d'accueil non pas incorporés nécessairement en vertu du projet de
loi, il y a
un réservoir d'énergies, de valeurs pratiquement
indispensable au secteur. Sur l'aspect des fusions, brièvement, je crois
que les paroles du ministre Castonguay nous ont certainement rassurés.
S'il le permet, j'aimerais simplement ajouter ceci: Si le ministre Castonguay
indiquait dans son projet de loi, comme il a semblé le laisser entendre,
qu'il n'y a pas spoliation, pour réaffirmer, disons, le désir du
gouvernement, je pense qu'à ce moment-là beaucoup de gens
seraient rassurés.
Quel est le danger d'indiquer cela? Il y a peut-être l'aspect des
conseillers juridiques du ministre. A ce moment-là, je suis sûr
qu'ils pourront trouver une formule où ni le public, ni les bonnes
moeurs, ni l'éthique professionnelle ne seront en jeu. Il est sûr
qu'en ayant cette formule, cela dissipe certaines craintes. Lorsque cela
peut-être fait sans perdre les objectifs que l'on s'est fixés, je
soumets respectueusement qu'on a peut-être intérêt à
le faire, sachant que cela pourrait dissiper les craintes. Nous sommes
satisfaits de l'assurance que le ministre nous donne, mais si c'était
possible dans le texte, à ce moment-là, cela enlèverait
toute confusion. Le projet de loi, lorsqu'il sortira dans sa forme, est fait
pour demeurer. Je crois qu'il serait très sage, si c'était
possible, d'inclure cette notion.
Sur le plan de la participation, nous avons indiqué tantôt
qu'il y aurait possibilité de maintenir certaines corporations lorsqu'on
s'aperçoit que cela rend service au secteur. Les gens sont d'accord
qu'il y ait participation. Même le secteur des foyers pour adultes admet
qu'au niveau du conseil d'administration, une personne pourrait venir des
membres du foyer même, c'est-à-dire une personne âgée
du foyer ou encore une personne âgée venant du secteur desservi
par le foyer. Si le ministère croyait utile qu'il y ait à ce
moment-là un délégué venant du gouvernement; il
serait plus que le bienvenu. Ce sont simplement des formules de rechange que
nous tentons d'indiquer aux membres de la commission pour qu'ils tentent de
voir s'il n'y a pas moyen, tout en retenant les objectifs que le ministre ait
pu se fixer, de puiser dans un réservoir qui est déjà
prêt à servir et qui a fait ses preuves dans le passé.
Concernant l'office provincial, on y voit la même
possibilité qu'on a incluse tantôt au niveau des pouvoirs
d'enquête. Nous recommandons la possibilité de considérer
même un certain mécanisme d'accréditation auprès des
institutions de contrôle. Cela pourrait être fait à ce
niveau-là. Au sujet de la commission ou de l'office provincial, nous
soumettions comme alternative au ministre, à titre supplétif,
qu'il y ait un office provincial là où il n'y a pas d'ORAS. A ce
moment-là, nous croyons qu'il serait peut-être possible d'injecter
certaines formes encore plus prononcées de décentralisation. Cela
pourrait peut-être permettre au ministre, sans dédoublement, de
voir à l'oeuvre dans une région autre que la région
où il y a un ORAS, un office provincial. Peut-être pourrait- on
graduellement ajouter d'autres pouvoirs qui amèneraient une
décentralisation plus marquée.
Etant donné l'article 4e) qui spécifie que, lorsqu'il n'y
a pas d'ORAS les pouvoirs retombent encore sur les épaules du ministre,
nous disons qu'en même temps on se trouve à le soulager
d'autant.
Au niveau de la représentation, là où il y a un
ORAS, nous suggérons la même formule un peu qui a
été indiquée par l'APIE, à savoir, la
quatrième proposition, que pour trois d'entre elles, au moins une
personne soit nommée par le lieutenant-gouverneur en conseil à
même une liste de noms soumise par l'AFA. Nous croyons que ceci
amènerait une participation réelle et, alors, l'AFA pourrait
suggérer une liste de noms.
Sur un détail, au niveau de l'article 63, l'on indique qu'il doit
y avoir un comité administratif. Nous croyons que, suivant la
dixième proposition, le comité administratif pourrait être
facultatif. Autrement dit, suivant la taille de l'institution, il pourrait
être sage qu'il y ait ou non un conseil administratif. Ce serait alors
tout simplement laissé au conseil d'administration qui, en somme, doit
certainement être en mesure de pouvoir apprécier si, oui ou non,
il est utile. C'est là un détail d'ordre administratif.
Au sujet des onzième et douzième propositions, en
particulier la onzième, nous avons indiqué notre désir de
voir formulé, dans le projet de loi, si M. le ministre l'acceptait, ce
qui arriverait en cas de fusion.
L'Association des foyers pour adultes aimerait voir disparaître
l'article 92, troisièmement. En avançant cette proposition, ce
n'est pas que l'Association des foyers pour adultes veuille se soustraire
à ses obligations, mais l'article 92 indique ceci: "Tout professionnel
qui pose un acte professionnel dans une institution est réputé
être le préposé de cette institution en tout ce qui regarde
sa responsabilité professionnelle." Or, il peut arriver que dans un
foyer il n'y ait pas ce mécanisme de contrôle de l'acte
médical qui est structuré comme on peut le voir dans un centre
hospitalier. D'ailleurs, je pense qu'alors il reste toujours les recours de
l'article 1054 du code civil où, s'il y a effectivement la relation de
préposé à commettant, l'institution pourrait être
responsable. Mais nous suggérons que peut-être, au niveau d'un
foyer, d'un centre d'accueil, ce ne serait pas sage de l'indiquer pour le
moment.
Quant à l'article 120 d), concernant les sanctions, on indique
qu'on aimerait ajouter, tout simplement, dans le texte "... ou qui n'a pas
autrement été justifié." A savoir, qu'une personne puisse
se faire entendre et puisse justifier le geste qu'elle aurait fait rapidement
sans autorisation, si l'autorisation était nécessaire.
Voilà, très brièvement, certaines propositions
énoncées par l'Association des foyers pour adultes. Et comme l'a
indiqué M. Décarie, le directeur général, nous
aimerions, si M. le
président accepte, que toutes les propositions soient
versées au journal des Débats. (Voir annexe B).
Une courte parenthèse concernant un problème, je pense,
qui est très important sur le plan humain et des relations de travail.
Il faut vous dire qu'avec les questions de possibilité de la disparition
physique ou juridique d'institutions avec le problème des fusions,
ça peut présenter dans le domaine des relations de travail
d'énormes problèmes quant aux relations de personnel, il s'agit
de le dire. Au plan de l'intégration du personnel, des questions
d'unité d'accréditation, il y a des problèmes très
sérieux. Cependant l'association ne voudrait pas pousser davantage, sauf
souligner le point, étant donné que déjà vos
négociateurs sont à la table des négociations et c'est
l'endroit où doivent, je pense, se trouver les solutions. Ou par
législation.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les
représentants de l'Association des foyers pour adultes pour le
mémoire qu'ils viennent de nous soumettre qui contient des suggestions,
des propositions que nous allons étudier attentivement. Comme les
représentants de l'association l'ont mentionné, ce sont toutefois
dans la plupart des cas des questions qui ont été
déjà discutées et, pour le moment, je
préférerais ne pas poser de questions, laissant aux autres
membres de la commission le soin de le faire s'ils le jugent à
propos.
M. CLOUTIER (Montmagny): Le ministre ne veut pas poser de questions.
Alors je vais lui en poser une. Dans certains mémoires, ce
problème de la création des ORAS par étapes est
revenu.
Dans les régions où il n'y aura pas d'ORAS au
début, on a aussi souligné le problème que certains
membres des conseils d'administration qui devraient être nommés
par l'ORAS ne pourraient pas être nommés.
D'autre part, on y a fait référence dans le mémoire
ici. Alors je voudrais demander au ministre si on a suggéré la
création d'un office provincial qui pourrait agir dans les
régions où il n'y a pas d'ORAS, qui pourrait assumer certaines
responsabilités en plus des responsabilités qui ont
été mentionnées tantôt au sujet des pouvoirs
d'enquête, certaines autres responsabilités.
Dans l'esprit du ministre, advenant cette création des ORAS par
étapes, dans les régions où il n'y en aura pas, est-ce que
c'est le gouvernement, le ministère des Affaires sociales lui-même
qui fera office d'ORAS ou si le ministre a songé à un autre
mécanisme qui pourrait être l'une des suggestions qui ont
été faites par les organismes?
M. CASTONGUAY: Tel que le projet de loi est rédigé
présentement, il est dit que, dans une région où il
n'existe pas d'office régional ou qu'un office régional n'est pas
crée, c'est le ministre qui assume les fonctions de l'office
régional, ceci est la rédaction, alors ça s'appliquerait
pour les nominations, etc.
Par contre, j'ai mentionné je ne sais pas si c'est
à la commission ici ou à un autre endroit récemment, je
pense que c'est en faisant le bilan de la tournée que j'ai
effectuée que les offices régionaux, tels que
proposés, ne semblent pas recevoir l'assentiment de bien des groupes qui
ont présenté des mémoires à la commission, et que
des changements évidemment, devront être apportés, des
changements assez profonds quant aux offices régionaux, lorsque nous
aurons terminé l'audition des mémoires. Alors, cette question, je
crois, doit rester en suspens. Je pense bien que, lorsque nous
réintroduirons les dispositions modifiées touchant aux ORAS,
lorsque nous aurons entendu tous les organismes, il sera possible de
répondre plus précisément à cette question si elle
se pose toujours.
M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, il faudra que les autres organismes qui
viendront devant la commission continuent quand même à parler des
ORAS, à en souligner les déficiences, même si le ministre a
l'intention d'y apporter, d'après ce que j'ai compris, des modifications
importantes.
M. CASTONGUAY: Il n'est pas nécessaire de les inciter à le
faire, il me semble.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je pense que le ministre a raison, je pense
qu'en étudiant le projet de loi 65, ça devient de plus en plus
évident.
Une autre question que je voudrais poser à l'Association des
foyers pour adultes, qui, comme celui qui l'a précédé et
les autres qui sont venus depuis le matin, est un organisme extrêmement
important dans le secteur des affaires sociales, ne serait-ce que par la
clientèle qu'ils servent. Tantôt, l'APIE disait desservir une
clientèle de 14,000 enfants. Ici dans les foyers pour adultes, il y a
au-delà de 12,000 personnes, pour ne pas dire 12,012. A mon sens il y a
une suggestion qui devrait être retenue: on a suggéré
qu'une personne âgée du foyer siège au conseil
d'administration. Cela, je pense qu'étant donné le genre
d'activités qui se fait dans les centres d'accueil, dans les centres
d'hébergement, les foyers pour personnes âgées,
étant donné que ce sont des personnes actives, des personnes qui
ont eu chacune dans différents secteurs une vie active dans un
métier, dans une profession, dans une carrière, elles peuvent, je
pense bien, comme groupe, en ayant un délégué au conseil
d'administration, apporter certainement un point de vue intéressant au
conseil d'administration.
C'est une suggestion qui vaut pour ce groupe, les centres pour les
personnes âgées, mais qui vaudra peut-être aussi,
étant donné que
c'est la première fois que c'est mentionné, pour d'autres
institutions; ça mériterait, je pense, d'être
étudié.
Si dans les institutions hospitalières il y a des
représentants d'autres secteurs, je pense que le gouvernement, le
ministre et ses fonctionnaires pourraient étudier cette suggestion, que
je reçois pour ma part, d'une oreille extrêmement favorable.
M. CASTONGUAY: Sur ce plan, je crois qu'il s'agit, en effet, d'une
proposition extrêmement intéressante. Pour montrer jusqu'à
quel point je suis sensible à cette proposition je dirai que
récemment une famille et en même temps, cela corrige
peut-être certaines choses ou certaines impressions qui ont pu être
laissées très à l'aise a légué au
gouvernement une très grande propriété. Pour le moment, on
nous a demandé de ne pas faire de publicité autour de cette
donation qui a été faite justement pour l'hébergement de
personnes âgées. Nous sommes en train d'étudier comment
nous pourrions en arriver à mettre sur pied un conseil d'administration
qui grouperait non seulement une des personnes hébergées, mais
donnerait à titre d'expérience pilote la plus grande
possibilité ou la plus grande marge possible aux pensionnaires
mêmes du foyer d'administrer, de gérer le foyer
eux-mêmes.
M. LEVESQUE (Jacques): M. le Président, si vous me le permettez,
nous aimerions simplement signaler un point de vue indiqué dans le
mémoire à l'effet qu'au niveau du directeur
général, on aimerait retrouver la même stipulation qu'on
voit au niveau de l'article 24 où il est indiqué, en parlant du
directeur général: "Il ne peut être destitué que
conformément à l'article 61 de la Loi de la fonction
publique."
Au nom de l'association, nous désirons vous remercier. Vous
pouvez être assuré que ce qui a été dit l'a
été dans un esprit purement positif.
M. GUAY: J'aimerais peut-être ajouter un commentaire à la
suite des propos qu'ont tenus le député de Montmagny et le
ministre. J'ai pris connaissance que, dans le comté que je
représente, un foyer a accentué la direction des activités
par les personnes âgées, justement. Ce sont elles qui
décident des activités. Par exemple, dans un mois donné,
des activités intérieures et même parfois
extérieures du foyer. On a remarqué, à la suite de la
discussion avec l'administrateur de ce foyer et avec les personnes
âgées qui y habitent, que le climat, qui était au tout
début, semble-t-il, un climat de méfiance, est vite devenu un
climat de confiance. Tout règne à l'intérieur du foyer
à peu près comme à l'intérieur d'une famille
où les membres sont bien unis. Je pense que cette suggestion est
à retenir. Elle est bien à propos. On pourrait sans doute
corriger parfois un climat qui existe à l'intérieur de certains
foyers de personnes âgées et qui est malsain, actuellement.
Merci.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, je vous remercie. Je vais inviter maintenant
la Fédération des femmes du Québec. A l'ordre !
Fédération des femmes du
Québec
MME LABBE: La Fédération des femmes du Québec
groupe seize associations et compte 70,000 membres.
Pour atteindre les buts qu'elle s'est fixés dans sa charte, la...
Oui?
M. LE PRESIDENT: Quel est votre nom, s'il vous plaît?
MME LABBE: Gabrielle Labbé. Enfin, je peux dire tout de suite le
nom des deux personnes qui m'accompagnent, Mme Odette Dick et Mme Marie-Paule
Corriveau. Elles ont participé à l'élaboration du
mémoire.
Pour atteindre les buts qu'elle s'est fixés dans sa charte, elle
étudie les projets de loi afin d'en évaluer les incidences sur
ses membres en particulier et sur la population en général.
Notre mémoire n'est pas considérable. Nous ne sommes pas
non plus les acteurs principaux dans le domaine de la santé et dans le
domaine du service social, mais nous avons étudié la loi sous
certains aspects, et ces aspects-là, nous avons essayé de les
étudier en profondeur. Nous avons certaines recommandations qui ont
déjà peut-être été faites, mais elles auront
au moins une valeur d'appui et j'ai l'impression que ce n'est quand même
pas négligeable.
Dans le mémoire, je voudrais tout de suite qu'on nous pardonne
d'avoir fait une erreur à la première page, nous n'aurions pas
dû mettre "commission d'enquête" mais bien "commission
parlementaire des Affaires sociales".
L'article 9, paragraphe f ) du bill 65 mentionne le terme "groupes
sociologiques". Comment seront définis ces groupes? Peut-être que,
dans le mémoire, vous voyez les questions qu'on se pose à ce
sujet. D'abord, nous nous demandons si nous nous situons là-dedans, qui
en accepterait l'accréditation et sur quels critères ils seront
jugés. S'agira-t-il d'une répartition faite sur une base
géographique ou démographique?
Nous demandons que soit précisé le mode de consultation
dont il est question à l'article 9 pour la formation du conseil
d'administration de l'office régional de santé. Nous voyons trois
moyens pour le mode de consultation. A partir d'élections, à
partir de listes de noms, mais enfin, le mode que nous
préférerions serait un dossier qui donnerait tous les
renseignements sur trois noms, par exemple, et qui pourrait être
discuté. Enfin, on pourrait donner des raisons valables pour refuser les
trois personnes mentionnées. Ensuite, le groupe proposerait trois autres
personnes jusqu'à ce qu'il y ait entente pour que véritablement
on arrive à une représentation valable.
Nous apprécions la volonté du ministre d'intégrer
la population à l'administration des différents
établissements, mais nous soutenons
que seule la compétence en administration doit être retenue
comme critère de sélection des membres des comités
administratifs. Nous désirons que soient précisées la
formation et les fonctions des conseils d'administration et des comités
administratifs. Nous proposons ce qui suit:
Pour le conseil d'administration les fonctions seraient de
définir les besoins de la région dans les ORAS, de définir
les objectifs à court et à long termes, d'inventorier les
ressources existantes afin de les utiliser de la manière la plus
rationnelle, d'établir les priorités et de prévoir les
développements futurs afin d'assurer l'adéquation la plus
parfaite possible entre les besoins et les services.
Quant à la composition, elle serait identique à celle
proposée dans le bill 65 pourvu qu'on respecte la consultation.
Le comité administratif aurait pour fonction de remplir les
fonctions de gestion à l'intérieur des politiques établies
par le conseil d'administration régional, de conseiller le conseil
d'administration surtout sur les questions économiques, d'assumer les
fonctions de gérance de l'ORAS, d'exercer les pouvoirs d'enquête
à la demande du conseil d'administration. Mais, selon nous, le
comité administratif devrait être formé d'administrateurs
professionnels, que ce soit aux ORAS ou dans les institutions. Ces
administrateurs seraient rémunérés et exerceraient leurs
fonctions à temps complet.
Les services d'urgence, tels qu'ils existent actuellement, sont
appelés à disparaître, lit-on dans les notes explicatives
de la loi. Le centre communautaire peut résoudre d'une manière
positive les urgences mineures, mais, pour qu'il puisse assumer rapidement les
urgences graves, il faudrait y recréer des centres d'urgence avec
équipe médicale disponible 24 heures par jour et tout l'appareil
administratif que ce service suppose.
Nous trouvons plus simple et moins coûteux d'améliorer les
services actuels tout en favorisant l'établissement de nouvelles
cliniques d'urgence ou de premiers soins dans les centres communautaires pour
rendre les soins de santé plus accessibles à tous.
Le projet de loi annonce également la disparition des
unités sanitaires. Or, plus la médecine évoluera vers la
prévention, moins elle coûtera cher. Les services sanitaires et
sociaux devront donc assurer une formule de rechange.
Dans les centres locaux de services communautaires, des cliniques
d'hygiène maternelle, inîantile et postopératoire
permettraient à un personnel spécialisé d'expliquer
à chaque client les soins que son état exige.
A ces services de base peuvent se greffer des services d'hygiène
dentaire et alimentaire ou tout autre service.
Ainsi, nous considérons les centres-de-jour éducatifs
comme des organismes de prévention dans le domaine de la santé
mentale. En proposant qu'à l'article 1, paragraphe f), s'ajou- tent aux
services d'action sanitaire et sociale des services d'information sanitaire et
de prévention dans le domaine social, nous nous appuyons sur la
déclaration faite par M. le ministre Castonguay, au Salon de la femme,
à Montréal: "La réforme des services de santé et
des services sociaux doit avoir un effet bénéfique sur la vie
familiale en mettant l'accent sur les soins préventifs et en facilitant
l'accès à une gamme de services tels que garderies, consultations
maritales, planification familiale."
Quant à l'implantation des nouveaux services, nous jugeons
préférable qu'elle se fasse par étapes. La période
de transition permettrait de tenir compte des réactions du public et de
celles des professionnels, d'enregistrer les résultats bons ou mauvais
de la nouvelle gestion des biens et des services et, au fur et à mesure
des besoins, de modifier les politiques gouvernementales. Un comité ad
hoc serait chargé de la mise en place des nouvelles structures, de
l'évaluation des réactions qu'elles suscitent et de l'analyse de
leurs répercussions sur l'économie de la province.
Quelles seront, au Québec, les incidences économiques de
la centralisation de toutes les ressources institutionnelles dans les mains du
gouvernement? De quelle nature seront les obligations contractées? Par
quel montant se chiffreront-elles approximativement? Comment seront
distribués les instruments financiers? Par quels moyens les dettes
assumées seront-elles financées? Le pouvoir d'emprunt du
Québec pourrait-il se trouver compromis? Dans le nouveau contexte
économique pourrons-nous encore compter sur les donations ou legs
mentionnés dans les articles 8 et 45?
Enfin, tout en reconnaissant le pouvoir d'ultime décision du
ministre, nous nous opposons à une centralisation du pouvoir propre
à rendre illusoires la participation des groupes
socio-économiques et l'autonomie des directeurs professionnels dans
l'exercice de leurs fonctions.
Pour qu'un esprit démocratique habite les structures
proposées, chacun doit être compétent et responsable de sa
tâche vis-à-vis de son supérieur immédiat. Il faut
un point fort au sommet, mais il importe que tous les éléments
soient des forces composantes qui agissent sur l'ensemble.
Les nombreux "en assentiment avec le ministre," intercalés dans
les articles, et notamment les articles 8 et 45, nous ont inspiré cette
mise au point. M. le ministre disait ce matin qu'il était un peu
déconcerté par le manque de confiance qu'on peut avoir dans le
gouvernement. Il est évident que, dans le gouvernement, il y a des
individus et des groupes qui sont dignes de confiance et nous en sommes
heureux. Et c'est peut-être à ce moment-là que nous
recourons à eux pour obtenir un système plus démocratique,
parce que nous savons bien que le patronage, des nominations arbitraires, des
règlements de cas par traitement exception-
nel, ça existe. Quand on voit qu'une nouvelle loi est en train
d'être promulguée, on fait l'impossible pour que ce soit un
chef-d'oeuvre, que ce soit le plus démocratique possible.
Quand nous disons toutes ces choses qui sont peut-être
désagréables à entendre, c'est plutôt un hommage que
nous vous rendons, M. le ministre.
Le bill 65 est prometteur. Les cadres sont intéressants, ils
assurent la coordination des services à peu près inexistante
à l'heure actuelle, la clientèle serait mieux informée,
plus facilement et plus abondamment. Les services techniques seront
favorisés, et tout ce qui concerne la médecine de groupe a
été bien pensé.
Malgré tous ces avantages, nous croyons avoir
démontré que, dans l'ensemble, le projet doit subir de profondes
modifications avant d'être réalisé.
Devant l'ampleur des réformes proposées, et nonobstant
l'urgence d'un changement, nous jugeons indispensable de différer la
présentation du bill en deuxième et troisième lectures,
afin d'attendre que soient déposés tous les rapports de la
Commission d'enquête sur la santé et le bien-être.
Nous vous prions, M. le ministre, de prendre ces rapports en
considération avant de promulguer la loi.
Pour la Fédération des femmes du Québec.
On me dit que Mme Corriveau va répondre à vos questions et
je pense que nous aurons quelques commentaires à faire, si vous le
permettez, M. le Président.
MME CORRIVEAU: Si la fédération insiste sur la
prévention parce qu'on en parle dans le mémoire de
façon assez détaillée c'est à cause des
incidences économiques. Le droit à la santé restera
théorique si l'économie de la province ne peut le supporter,
parce que la consommation médicale augmente avec le niveau de vie et le
prix de la santé finit par dépasser les moyens des pays les plus
riches. C'est pour ça que je crois que les centres locaux de services
communautaires devraient avoir comme première vocation la
sensibilisation de la responsabilité des individus aux coûts ou
aux dépenses de la santé, parce que le droit à la
santé, il ne faudrait pas que ça devienne le droit de ruiner la
société.
La prévention ferait prendre conscience à la population de
sa responsabilité dans ces coûts-là, et cette
sensibilisation aiderait la population à définir ces besoins, en
termes nécessaires, plutôt que possibles.
M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres remarques?
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier la
Fédération des femmes du Québec pour l'excellent
mémoire qu'elle nous a présenté. J'aurais quelques
commentaires à faire. Je crois qu'ils sont plutôt de nature
à clarifier certains points, et à rassurer au besoin.
On parle des services d'urgence, tels qu'ils existent
présentement et qui vont disparaître. Au moment du
dépôt de la loi en Chambre, j'ai signalé qu'il y avait eu
une erreur malheureuse d'impression à ce titre-là par l'Editeur
officiel ou au moment où le texte a été transmis. Je ne
sais pas exactement à quel niveau, mais il y a eu une erreur qui laisse
une fausse impression.
En ce qui a trait à l'information sanitaire, à
l'importance de la prévention, je partage vos préoccupations et
je suis tout à fait d'accord avec vous quant à l'importance que
ces fonctions doivent revêtir dans l'avenir. Dans le projet de loi, nous
n'avons pas voulu définir des programmes soit d'information, soit de
services, etc., C'est la raison pour laquelle si on est
préoccupé, par exemple, par la prévention, on trouve que
le projet de loi n'en parle pas suffisamment. Si on est
préoccupé, au premier titre, de santé mentale, on dit que
le projet de loi ne parle pas suffisamment des programmes de santé
mentale, etc. Nous avons plutôt voulu proposer des grandes
catégories pour regrouper les services sans, par un tel projet de loi,
définir ce que devraient être les programmes, d'autant plus que
ces programmes doivent prendre des dimensions différentes, selon les
régions et les ressources. Les problèmes sont en constante
évolution et ne doivent pas nécessairement faire l'objet de
législations.
Je partage vos préoccupations et vous pouvez être
assurées que notre action, nous désirons l'orienter dans ce sens,
tel que je l'avais mentionné lorsque vous aviez eu l'amabilité de
me recevoir au mois de mai.
Les modes d'implantation des nouveaux services. Encore là, nous
avons mentionné, en ce qui a trait aux centres locaux de services
communautaires, que nous voulions procéder par étapes.
Récemment, nous avons rendue publique une première liste
d'endroits où il nous apparaît nécessaire d'implanter de
tels centres. Nous avons voulu limiter le nombre de ces centres pour assurer
justement qu'ils soient bien implantés. Dans les autres institutions, il
s'agit d'institutions existantes qui devront, à certains titres, subir
certains changements qui seront prévus dans le projet de loi
définif. Il y aura évidemment des périodes de transition
ou des délais accordés pour que ces changements puissent se faire
d'une façon ordonnée. Sur ce plan-là, je suis d'accord
quant à la mise en garde que vous nous faites.
Vous proposez la formation d'un comité ad hoc chargé de la
mise en place des nouvelles structures, de l'évaluation des
réactions qu'elles suscitent et l'analyse de leurs répercussions
sur l'économie de la province. Sur ce plan, il me semble que c'est
peut-être le gouvernement qui est encore le mieux placé,
étant toujours soumis à l'analyse de ses gestes par l'Opposition,
pour faire ce type d'évaluation le plus adéquatement possible.
Nous sommes très conscients de la nécessité de bien suivre
l'évolution dans le secteur et il me semble que le gouvernement
doit demeurer sensible aux réactions que suscite son action.
L'Opposition a comme fonction, justement, d'agir toujours comme stimulant,
critique des gestes posés par le gouvernement. Il me semble que c'est un
mécanisme qui est sain.
Quant aux incidences économiques, j'ai eu l'occasion, à
plusieurs reprises, de mentionner que ce n'est pas notre intention, comme vous
le dites au haut de la page 9, de centraliser toutes les ressources dans les
mains du gouvernement.
Nous allons maintenir des institutions avec l'autonomie
nécessaire à la gestion de leurs opérations. Nous posons
présentement des gestes, au plan des relations financières, qui
visent même à une plus grande souplesse, une plus grande
liberté d'action des institutions. Sur ce plan, il me semble que, si on
part de cette hypothèse telle que vous la formulez, il y a lieu de se
poser des questions. Mais on peut partir de l'hypothèse qui est non
seulement une hypothèse mais notre désir, c'est celui de faire en
sorte qu'il y ait une meilleure utilisation des dépenses publiques dans
le secteur de la santé par la voie, entre autres, de ce projet de
loi.
Ce sont les quelques commentaires que je voulais faire suite à la
lecture de ce mémoire. Je voudrais encore une fois vous en
remercier.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, un très court
commentaire, non pas parce que l'association qui est devant nous n'est pas
importante, mais pour permettre aux médecins résidents de
s'exprimer devant la commission et de retourner à leur savantes
études.
Un point intéressant que vous avez souligné: un
comité ad hoc d'évaluation et d'analyse. Je voudrais demander au
ministre, étant donné que c'est la première fois qu'un
organisme parle de ce sujet, s'il a déjà songé à
cette forme d'analyse critique et d'évaluation de la législation,
de façon à faire une évaluation assez juste et apporter
des modifications au fur et à mesure que ce sera nécessaire.
M. CASTONGUAY: J'ai mentionné lorsque nous avons
étudié les structures du ministère, au moment de
l'étude des crédits budgétaires pour l'année en
cours, que nous voulions, comme ministère, nous dissocier toujours
davantage des fonctions d'administration et d'application de programmes. On
souligne, par exemple, ici que les unités sanitaires sont, après
une période, sujettes à être intégrées dans
les centres locaux de services communautaires ou leurs fonctions.
Présentement, le fonctionnement des unités sanitaires est sous la
responsabilité du ministère. J'ai mentionné, par exemple,
que pour certains programmes, tels les allocations familiales, nous en avons
confié l'administration à la Régie des rentes.
Tout ceci pour permettre au ministère d'assumer plus pleinement
des fonctions de planification, de programmation, d'évaluation
également. Et c'est dans ce sens que je faisais le commentaire il y a
quelques minutes. Il m'appa- raît qu'il est important, comme
gouvernement, d'évaluer lui-même les réactions à ses
gestes et ceci sous l'aiguillonnement des partis d'Opposition.
M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai retenu la dernière remarque.
MME LABBE: Je voudrais tout simplement souligner, à ce sujet, que
ce qui nous a inspiré cette proposition est l'implantation du rapport
Parent, qui était extrêmement positif, qui avait de grandes
qualités. Mais il nous semble que cela a drôlement
traumatisé la province, alors qu'il y a eu énormément de
changements aussi. C'est de là que vient notre idée.
MME DICK: Nous suggérons un comité parce que disons que,
comme actuellement le plan d'assurance-maladie est en application, comme
consommateurs de ce plan d'assurance nous voyons certains abus qui sont quand
même légaux.
Alors, nous n'avons pas de place pour nous faire entendre. Nous
aimerions qu'il y ait un comité où, au fur et à mesure que
s'applique la loi, les personnes qui sont intéressées et qui
s'aperçoivent que la loi prête à des abus puissent faire
connaître leur opinion. Evidemment, le gouvernement peut s'en occuper,
mais on ne sent pas de possibilité de communiquer avec le gouvernement
au fur et à mesure qu'on en sent le besoin.
M. CASTONGUAY: Ici, je suis d'accord sur le fait qu'il y a lieu de
s'interroger. Pour le moment, je retiens les suggestions. Il y a
peut-être un rôle pour le Conseil des affaires sociales et de la
famille, et il y a également un rôle pour le protecteur du citoyen
dont on pourrait peut-être imaginer d'étendre la juridiction qui
est la sienne présentement.
Disons que, pour le moment, je retiens ces suggestions.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: Je suis très heureux, pour ma part, d'avoir entendu la
Fédération des femmes du Québec. J'aurais une question
à vous poser en conclusion de votre mémoire. Vous mentionnez que
vous aimeriez bien voir la publication de la dernière tranche du rapport
de la commission d'enquête sur la santé et le bien-être
social. Auriez-vous une raison bien particulière de mentionner ça
dans votre mémoire?
MME DICK: Disons que c'est surtout pour l'organisation des professions,
parce qu'il nous semble qu'ici il y aura tout un secteur de la population, qui
devient de plus en plus grand, qui sera sous le contrôle direct du
gouvernement.
Actuellement, évidemment, le Collège des
médecins, la Corporation des travailleurs sociaux, des
psychologues, etc., toutes les corporations professionnelles administrent une
certaine part de la loi. Alors tant que ce rapport sur les corporations
professionnelles ne dira pas quel sera le rôle exact que sont
appelées à jouer les corporations professionnelles, on peut se
demander si les trois quarts de la population du Québec ne deviendront
pas un jour des fonctionnaires. Je ne veux attaquer aucun fonctionnaire en
particulier mais je crois que l'on sait que, dans un régime de
fonctionnarisme très poussé, la motivation est beaucoup moins
grande. Et le coût d'opération ça me surprend qu'on
ne l'ait pas encore tellement souligné aujourd'hui du
fonctionnarisme, comparé à la gestion par une corporation ou une
industrie privée, est habituellement supérieur au coût.
Cela m'inquiète un peu.
M. CASTONGUAY: Est-ce que, ici, compte tenu de cette réponse, je
pourrais rappeler deux choses? Le Solliciteur général, M.
Fournier, a dit, au terme de la session, au mois de juillet, que c'était
l'intention du gouvernement de déposer des projets de loi relatifs aux
corporations professionnelles. Et il a bien affirmé que ce
n'était pas l'intention du gouvernement de faire des professionnels des
fonctionnaires de l'Etat, et que c'était l'intention du gouvernement de
continuer de confier aux corporations professionnelles, de façon
générale, les fonctions de contrôle sur leurs
activités. Alors, je voudrais vous rassurer et en même temps
dissiper toute équivoque qui pourrait subsister sur ce plan.
M. GUAY: Je voudrais poser une autre question au ministre qui a
d'ailleurs déjà été posée. Le ministre
a-t-il l'intention d'attendre la publication de la dernière tranche du
rapport avant l'adoption du projet de loi 65?
M. CASTONGUAY: J'ai déjà répondu à cette
question à quelques reprises, ici à la commission. J'ai
mentionné que j'ai rencontré le président de la commission
et que je lui ai bien réaffirmé qu'il peut se sentir
entièrement libre quant à la préparation de cette
dernière tranche. Quant à nous, comme gouvernement, nous croyons
qu'il est important que ce projet de loi soit approuvé et que, lors de
la publication du rapport, s'il y a des aspects qui nécessitent des
modifications au projet de loi, par la suite, une loi n'est jamais
définitive, nous pourrons en faire. Je rappelle ici que nous ne
proposons qu'une structure d'organisation des services de santé et des
services sociaux et nous ne touchons pas au programme, à la philosophie,
particulièrement dans le domaine des services sociaux, alors que le
rapport de la commission, dans ce secteur, la partie la plus importante, va
évidemment avoir trait à la philosophie générale ou
aux objectifs au type de programmes.
M. LE PRESIDENT: Mesdames, je vous remercie.
MME LABBE: Est-ce que je pourrais ajouter une toute petite chose?
M. LE PRESIDENT: Très bien.
MME LABBE: Les comités administratifs formés
d'administrateurs professionnels, on aurait donc voulu que cela vous plaise. En
tout cas, on le souligne.
M. LE PRESIDENT: Très bien. Nous vous remercions.
M. CASTONGUAY: J'allais dire qu'il y a bien des choses qui nous plaisent
mais nous ne pouvons pas les retenir toutes.
MME LABBE: Merci.
M. LE PRESIDENT: J'invite maintenant la Fédération des
médecins résidents du Québec.
Fédération des médecins
résidents du Québec
M. ARSENAULT (André): Je voudrais demander à M. le
Président, de combien de temps nous disposons. Est-ce qu'il est opportun
de commencer un exposé si, vraiment, le temps alloué se termine
à six heures?
M. LE PRESIDENT: Est-ce que je peux vous poser une question? De combien
de temps prévoyez-vous avoir besoin pour présenter votre
mémoire? De combien de temps avez-vous besoin?
M. ARSENAULT (André): Pour le présenter, environ quinze
minutes, pour la discussion...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres sont d'accord pour siéger
jusqu'à six heures quinze, six heures vingt? D'accord?
UNE VOIX: Pas d'objection.
M. LE PRESIDENT: Très bien. Disons que vous disposez de trente
minutes.
M. ARSENAULT (André): D'accord. M. LE PRESIDENT: Etes-vous
d'accord? M. CROISETIERE: D'accord.
M. ARSENAULT (André): J'ai avec moi, de la droite vers la gauche
il y a moins de gens à gauche qu'à droite, comme il se
doit le Dr Montambault de Sherbrooke, le Dr Emery Ferland de Sherbrooke,
le Dr Pierre Marier de Montréal, le Dr Pierre Duquette de
Montréal. Je suis le Dr Arsenault de Sherbrooke.
Disons que nous ne nous en tiendrons pas au texte exact de la
présentation qui est déjà entre les mains des
parlementaires depuis quelques jours. Nous allons essayer de synthétiser
le
problème, de le présenter le plus brièvement
possible, le plus clairement possible pour que le message passe, parce qu'on a
un message.
Disons qu'à la première page, on a versé à
notre mémoire ce qu'on appelle le dossier de la participation des
résidents à la réforme de l'éducation
médicale depuis un point de départ auquel tout le monde se
réfère la commission Castonguay qui a fait une
série de recommandations en 1967 concernant les internes et les
résidents et la réforme de l'éducation médicale.
Ces recommandations étaient, pour la plupart, des recommandations que
nous avions nous-mêmes faites auprès de la commission et qui ont
été retenues presque telles quelles.
Nous en retenons quatre à la page 3, que nous considérons
comme étant la charnière de la réforme de
l'éducation médicale. Disons, pour résumer
brièvement les deux premières pages, que la première
étape que nous avons franchie, les médecins résidents du
Québec, pour essayer de faire démarrer la réforme de
l'éducation médicale au Québec, a été
d'accepter l'inscription à l'université et d'accepter des frais
de scolarité. Cela a été fait en janvier 1970. Là,
il y a eu du brasse-camarades, il y a eu du réaménagement. Les
universités ont bougé; elles ont mis des programmes au point, des
structures en place, des comités et des sous-comités, enfin le
bla-bla habituel. Au mois d'avril, on nous a remis des programmes. Ces
programmes, nous les avons examinés et nous les avons critiqués.
Nous avons produit des rapports les concernant, que nous avons versés au
dossier en annexe 2A et 2B à titre d'information pour les membres de la
commission.
Disons que nous retenons une chose de ces deux rapports, et ceci
s'applique aux quatre secteurs universitaires. La réforme de
l'enseignement médical, pour les internes et les résidents, bute
sur un obstacle majeur actuellement, et cet obstacle est que les
facultés de médecine n'ont aucune autorité dans les
hôpitaux. Il est donc possible, pour les facultés de
médecine, d'établir des programmes, de créer des postes de
professeur, de réclamer des budgets du ministère de l'Education,
enfin de faire tout le "red tape", comme on dit. Mais quand on arrive dans les
hôpitaux, il n'y a rien qui débloque parce que les
universités sont incapables d'imposer des contraintes
pédagogiques au profil de services que les résidents rendent dans
les hôpitaux. C'est un obstacle majeur.
Donc, face à cette situation, nous avons cherché un
débouché et nous nous sommes tournés vers le Conseil des
universités. Nous avons fait des représentations auprès du
Conseil des universités et vous avez en annexe 3A un petit rapport que
nous avions envoyé au Conseil des universités résumant
notre inquiétude et notre position face à cette situation.
A partir de notre démarche, le Conseil des universités a
décidé d'inscrire la réforme de l'éducation
médicale en priorité dans ses programmes et on a
créé un comité des programmes chargé d'examiner les
programmes présen- tés par les quatre facultés de
médecine. Ce comité des programmes a créé trois
sous-groupes de travail, où nous avons siégé pendant six
mois.
Nous retenons un de ces groupes de travail, le groupe no 1. Nous avons
versé au dossier, pour les commissaires, le rapport final qui a
émané des travaux de ce groupe de travail et qui porte sur le
projet de définition et caractéristiques de l'hôpital
d'enseignement. C'est l'annexe 3b).
Disons que nous accordons énormément d'importance à
ce projet parce qu'il est sanctionné par une participation de plusieurs
niveaux. D'abord, les quatre universités étaient
représentées, sous la présidence du Conseil des
universités; les professeurs enseignants cliniciens y étaient
représentés et nous y étions
représentés.
Je pense que le document versé en annexe 3f) pose toute l'ampleur
du problème de la structure de l'hôpital d'enseignement. Nous
pensons que cette structure, telle que proposée et que nous
considérons comme essentielle à la réforme de
l'enseignement postuniversitaire, est inapplicable dans le cadre du bill 65
s'il n'est pas modifié à certains égards.
Au dossier de la participation, quand nous avons réalisé
que le rapport du Conseil des universités était pour dormir sur
les tablettes c'est pour éviter qu'il ne dorme trop longtemps sur
les tablettes que nous l'avons apporté ici nous sommes
allés au ministère des Affaires sociales et avons demandé
au sous-ministre de nous permettre d'ouvrir un comité consultatif
interministériel reliant des gens de la Santé, des gens du
ministère des Affaires sociales et nous-mêmes pour essayer de
régler toute la série de problèmes qui trament depuis
à peu près quinze ans, si ce n'est pas vingt ans, et qui
nécessitent que des décisions soient prises. En annexe, qui est
étiquetée 5, ici, mais qui aurait dû être
étiquetée 4, vous avez une liste des problèmes qui
reviennent périodiquement sur le tapis, aussitôt qu'on discute
d'internat, de résidence et de situation hospitalière
pédagogique.
Ce comité travaille encore, actuellement, en sourdine. Disons que
c'est plutôt à titre consultatif que nous cherchons à
échanger des informations, afin d'arriver éventuellement à
faire des recommandations, les plus pertinentes possible, aux autorités
compétentes.
Nous arrivons maintenant au mois d'octobre où les
universités disent: Maintenant, les garçons, les "boys" vous
allez payer des frais de scolarité. Nous, nous disons: Non. C'est
illogique de payer des frais de scolarité. C'est illogique dans la
mesure exacte où l'université n'est pas capable d'imposer quoi
que ce soit dans les hôpitaux où nous travaillons. Il est inutile
de demander au ministère de l'Education de verser des sommes
là-dedans si l'université est incapable d'appliquer des
politiques pédagogiques au sein des hôpitaux.
En ce qui concerne plus précisément le bill
65, on peut passer directement à la page 3, où on dit que
le bill 65 compromet la réforme de l'éducation médicale.
Au point de départ, nous avons repris les quatre recommandations que
nous considérons comme la charnière de la réforme qui sont
tirées directement de la commission Castonguay, volume 2, concernant les
internes et les résidents. Ces recommandations ont trait à quatre
têtes de chapitre, le concept de l'unité d'enseignement
clinique.
Je n'ai pas le temps d'entrer dans les détails. Vous avez en
annexe 1, un texte extrait du rapport Bonneau sur ce qu'est une unité
d'enseignement clinique. Qu'il suffise de dire que l'unité
d'enseignement clinique est inapplicable, encore une fois, si les
universités ne sont pas capables de faire quoi que ce soit dans les
hôpitaux. On tourne toujours autour du même problème.
Le deuxième chapitre, c'est la présence de professeurs,
tout le monde est d'accord là-dessus, dans les hôpitaux.
Le troisième chapitre, la recommandation 16: "que les conditions
régissant l'activité professionnelle des médecins
résidents en milieu hospitalier soient conformes aux objectifs de
l'enseignement de la médecine." C'est ça notre
problème.
Notre problème, c'est que nos activités dans
l'hôpital sont primordialement des activités de service. A tel
point que la charge de services devient, à toutes fins utiles,
incompatible à certains moments avec l'acquisition d'une
compétence étendue, normale, qu'on devrait attendre de quelqu'un
qui s'entrafne comme spécialiste ou comme futur omnipraticien. Ce n'est
un secret pour personne que l'instauration de l'assurance-maladie a
entraîné dans les salles d'urgence des hôpitaux de
Montréal en particulier, une surcharge considérable de services.
Et si vous allez dans les services d'urgence des hôpitaux, vous allez
voir qui assume cette charge accrue de services, ce sont les internes et les
résidents.
En soi, ce n'est pas un mal. Rien n'est un mal en soi. Mais en
réalité si on songe qu'un individu a besoin, pour acquérir
une formation professionnelle ou pour faire un apprentissage réel, d'une
surveillance adéquate, et que cette surveillance ne peut pas être
appliquée dans le contexte actuel des hôpitaux, encore parce que
les universités ne sont pas capables d'y faire quoi que ce soit, et que
nous sommes assujettis aux demandes de services de l'hôpital, c'est
catastrophique.
La dernière recommandation que nous avons retenue de la
commission Castonguay, c'est celle de la création d'un comité de
la formation médicale pour prendre la direction de l'enseignement. La
direction, pour nous, veut dire beaucoup. Elle veut dire, encore là,
qu'il y ait à l'intérieur des structures des mécanismes de
délégation d'autorité qui font qu'à un moment
donné quand dans un hôpital, dans un service, il n'est pas
possible d'avoir un rendement pédagogique, une rentabilité
pédagogique, il y ait quelqu'un qui soit capable à quelque part
de prendre la décision pour dire: Les boys, des internes et des
résidents, vous n'en n'aurez plus! Ou: Messieurs, vous allez nommer
quelqu'un que nous allons prendre ailleurs ou que nous allons prendre dans
votre hôpital, nous le prendrons où nous voudrons, mais qui va
surveiller le contenu pédagogique des activités des internes et
des résidents dans les hôpitaux.
Quand on met ces quatres recommandations en parallèle avec le
bill, ma première remarque est que l'hôpital d'enseignement n'est
ni défini ni caractérisé dans le bill. En soi, ce n'est
pas un mal, On pourrait toujours dire: On va le définir dans les
règlements. L'hôpital d'enseignement, tel qu'il devrait être
défini, nous pensons que c'est impossible de le définir dans des
règlements parce qu'il sort des cadres inscrits dans le bill.
Dans le document annexe 3-B) au paragraphe 2.22, il y a un poste, dans
tout hôpital d'enseignement, que nous considérons comme
primordial, c'est le poste de coordonnateur de l'enseignement. On a
discuté tout à l'heure de l'article 78 qui place l'enseignement
sous la responsabilité du directeur des services professionnels. Nous
pensons que c'est une erreur parce que la coordination de l'enseignement,
premièrement, c'est quelque chose d'important. Deuxièmement, un
individu peut consacrer tout son temps et toute son énergie à ne
faire que cela et ce n'est pas trop. Troisièmement, la
responsabilité de l'enseignement déborde d'emblée le cadre
d'une institution en particulier, c'est-à-dire que le problème de
l'entraînement d'un résident ne se pose pas dans un hôpital
en particulier parce que, pour recevoir son entraf-nement, ce résident
ou cet interne peut être appelé à changer d'hôpital,
à aller chercher, dans un autre secteur universitaire, à McGill,
par exemple, une compétence pédagogique, un apprentissage qui
n'est pas disponible dans son secteur universitaire à lui.
Par conséquent, il est impensable de faire de la coordination et
de la planification et d'utiliser au maximum les ressources pédagogiques
disponibles dans la province si la responsabilité de l'enseignement
retombe au niveau institutionnel sur un gars, le DSP, le directeur des services
professionnels, qui n'a rien à voir avec les autres institutions,
d'emblée et par définition.
A la page 4, on parle du concept de l'unité d'enseignement
clinique qui est inapplicable en l'absence d'une importante
représentation de la faculté dans un centre hospitalier. J'attire
votre attention sur ce à quoi nous sommes arrivés en conclusion,
dans l'annexe 3-B) encore, que dans tout hôpital d'enseignement, au
niveau du conseil des médecins comme au niveau du conseil
d'administration, pour que cela fonctionne convenablement, il faut que la
représentation de l'université soit majoritaire.
Nous pensons que la représentation des
universités, au niveau des conseils d'administration des diverses
institutions, dans le cas où ces institutions ont une vocation à
la fois d'enseignement et de service, n'est pas prévue dans le bill et
devrait l'être.
Finalement, à la fin de la page 5 et à la page 6, nous
reprenons la recommandation de la commission Castonguay et nous
réclamons la création d'un comité provincial de
l'éducation médicale. La création de ce comité est
essentielle. Nous pensons qu'il devrait regrouper les principaux
intéressés, c'est-à-dire le ministère des Affaires
sociales, qui représente pour nous la composante "services" dans les
hôpitaux; le ministère de l'Education, qui représente pour
nous la composante "éducation"; les quatre facultés de
médecine parce qu'il est essentiel d'utiliser, comme je le disais tout
à l'heure, les ressources pédagogiques des divers milieux et de
ne pas avoir de perte d'énergie inutile, de pouvoir transférer un
résident d'une université à une autre pour qu'il puisse
compléter sa formation convenablement; et les internes et
résidents, comme il se doit.
Je lis le paragraphe 2.4.2: "Nous croyons qu'un tel comité
devrait être créé sans tarder afin de régler dans
les plus brefs délais des questions aussi importantes et urgentes que la
coordination interuniversitaire pour nous, c'est capital la
régularisation et la reconnaissance provinciale de la promotion annuelle
dans chaque secteur universitaire parce qu'actuellement nous sommes
inscrits à une université; je suis inscrit à Sherbrooke,
un autre est inscrit à Laval; je finis mon entraînement, j'ai un
diplôme de l'université Laval, de l'Université de
Sherbrooke ou de l'université McGill; nous voulons que ce diplôme
soit reconnu par les quatre facultés, au niveau provincial la
normalisation et la reconnaissance canadienne c'est aussi un facteur
important; ça veut dire, en fait, que nous acceptons d'être
évalués par des gens en dehors du milieu et que, si nous
satisfaisons à ces normes, nous pouvons profiter des
bénéfices ou des avantages qui sont attachés à la
satisfaction de ces normes, qu'elles soient canadiennes ou
nord-américaines et, finalement, l'octroi du droit de pratique
sur la foi du diplôme universitaire.
Pour nous, il est impensable de nous inscrire à
l'université, de demander une évaluation régulière,
quotidienne, mensuelle, annuelle, et une promotion à la fin de chaque
année et, au bout de quatre ans, de ne pas déboucher sur le
marché du travail. Quand on passe quatre ans dans une institution, qu'on
paie des frais de scolarité, qu'on met en branle des mécanismes
d'évaluation, s'il y a une sanction qui arrive à un moment
donné et qui dit: Toi, mon gars, tu as passé ton diplôme
à l'université, mais tu ne pourras pas pratiquer, cela nous
semble illogique.
Evidemment, vous allez me dire: La création de ce comité
n'entre pas dans le cadre du projet de loi 65. Ce qui nous préoccupe
surtout, c'est que la création d'un tel comité ne soit pas
inapplicable, compte tenu du projet de loi.
En résumé, les articles du projet de loi qui nous
préoccupent sont les articles 49, 50 et 51 qui parlent de la composition
des conseils d'administration dans les diverses institutions qui dispensent des
services.
Notre attitude là-dessus c'est que nous croyons opportun que,
lorsqu'il y a des étudiants dans ces centres de dispensation de
services, l'université soit représentée.
L'article 77, la nomination du directeur des services professionnels.
S'il n'est pas possible, sans briser le concept de l'unité de gestion,
de soustraire à l'autorité du directeur des services
professionnels la responsabilité de l'enseignement, qu'au moins la
nomination du directeur des services professionnels soit faite après
consultation universitaire.
A l'article 78, nous pensons qu'il serait logique de soustraire,
toujours si c'est possible, la responsabilité de l'enseignement du
directeur des services professionnels.
Aux articles 80, la composition du conseil des médecins. Dans des
endroits où il y a des étudiants, des internes ou des
résidents, que les universités soient
représentées.
Aux articles 133 q) et r), où le lieutenant-gouverneur en conseil
peut décider des modalités d'admission des professionnels qui
veulent exercer leur profession dans un centre ou des modalités
d'admission des étudiants qui veulent aller dans un centre, que
ça relève d'un comité provincial qui va déterminer
ces normes, et qui sera responsable de les appliquer dans les
hôpitaux.
Je pense que ça résume le plus concrètement
possible, notre position.
M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les
représentants de la Fédération des médecins
résidents pour le mémoire qu'ils viennent de nous
présenter. Ils ont, j'imagine, assisté à la discussion du
mémoire du Comité des doyens ce matin, et certains des
commentaires que j'ai faits à ce moment-là demeurent, en ce qui a
trait aux motifs qui nous ont incités à présenter le
projet de loi dans sa forme actuelle. Je voudrais souligner, toutefois, que
l'on demande justement dans ce mémoire que les responsabilités,
les mécanismes, en ce qui touche l'enseignement, soient passablement
précisés et que bien souvent ils viennent couper à travers
les pouvoirs ou l'autonomie que désirent les conseils d'administration
des hôpitaux, que ce soit vis-à-vis de nous et d'autres
parties.
Il serait peut-être bon, dans ce contexte, de demander aux
représentants de la fédération de nous donner des
informations plus précises quant aux raisons qui empêchent les
universités d'agir dans les hôpitaux, comme ils nous le disent
dans le mémoire. Ce phénomène, si je comprends bien
on réfère à divers documents n'est pas nouveau ou
n'existe pas
uniquement depuis l'établissement de l'assurance-maladie.
Deuxièmement, il serait peut-être bon qu'ils nous disent
aussi s'ils sont d'accord sur les principales recommandations du mémoire
du Comité des doyens qui nous a été présenté
ce matin.
Je voudrais aussi faire un bref commentaire quant à une des
propositions... Je m'excuse, non, je vais le garder pour plus tard,
celui-là. Alors, j'aurais les deux questions que je viens de
formuler.
M. ARSENAULT (André): Qu'est-ce qui fait que les
universités sont incapables d'imposer des contraintes quelconques dans
les hôpitaux? A cette première question je dirai que je pense que
c'est un problème de rapport de forces. C'est un problème de
mandat, c'est un problème de structures. En fait, il y a un conflit
réel, au départ, dans un hôpital c'est flagrant,
c'est éclatant dans un CHU entre les impératifs de
services d'une part et les impératifs pédagogiques. C'est
toujours la petite guerre, parfois la grosse guerre, entre la directrice
générale ou le conseil d'administration de l'hôpital et les
autorités de la faculté. Quand la faculté commence
à dire: Bien, écoutez, tel résident, il faudrait qu'il
fasse trois mois quelque part, que l'administration de l'hôpital dit:
Oui, mais moi, je n'ai besoin de personne, j'ai besoin d'un gars pour trois
mois ailleurs, et que cet individu a déjà passé six mois
à la même place, c'est comme ça que les problèmes se
posent concrètement. Quels sont les mécanismes qui pourraient
permettre à l'université de dire au conseil d'administration ou
au directeur médical d'un hôpital: Ecoutez, ce n'est pas cela que
vous allez faire, c'est ça? Il n'y a rien. Enfin, s'il y a quelque
chose, je voudrais bien qu'on nous le dise. Disons que les doyens sont
impuissants devant cela.
En ce qui concerne la deuxième question: Est-ce qu'on appuie? Je
pense qu'on appuie d'une façon générale la position de nos
doyens là-dessus. Nous nous sommes rencontrés lorsque nous avons
décidé de ne pas payer les frais de scolarité d'une
façon inconditionnelle, en disant: On paie les frais de
scolarité, arrangez-vous avec et advienne que pourra!
Nous avons rencontré les doyens et nous avons discuté avec
eux. Nous sommes tombés d'accord là-dessus. Les doyens n'ont
aucun "bargaining power", c'est-à-dire pouvoir de négociation
dans les hôpitaux. Les grands manitous des hôpitaux, ce sont les
chefs de service. Chaque doyen est aussi fort que le plus faible de ces chefs
de service dans ces hôpitaux. C'est bien connu. Comme le chef de service
siège à la fois dans le service, à l'hôpital et
à l'université, nous avons toujours les mêmes bonshommes.
Nous parlions de chapeau ce matin, c'est le même gars qui change de
chapeau. C'est pour cela que nous croyons à la nécessité
d'avoir un organisme provincial qui, à un moment donné, va
pouvoir dire: C'est fini les folies ou "fuddle-duddle", en tout cas, on prendra
les formules qu'on voudra. Mais il faut que cela accouche, il y a trop
longtemps que cela trame.
Alors, nous croyons que, dans l'esprit du législateur, nous
verrions d'un bon oeil ce serait une libération en fait
qu'on donne aux doyens, au mécanisme académique, des pouvoirs
réels, concrets dans les hôpitaux. Les hôpitaux,
évidemment, n'aimeront pas cela. Cela, nous le savons d'avance. L'AHPQ
ne sera pas d'accord sur cela. Il y a bien du monde qui ne sera pas d'accord.
Mais nous autres, si nous demandons cela, c'est au nom des médecins de
demain, c'est au nom des omnipraticiens de demain, c'est au nom des
spécialistes de demain. Nous ne parlons pas des privilèges
acquis, nous n'en avons pas encore, nous autres. Moi, de toute façon,
dans six mois, je ne serai plus dans le système alors je m'en fous un
peu. Mais je pense qu'il faudrait que ce soit fait. C'est une décision
politique à prendre et ce n'est pas nous qui sommes habilités
à la prendre.
M. CASTONGUAY: Les contrats d'affiliation, selon vous, qui ont
été, dans un certain nombre de cas, signés avec des
hôpitaux d'enseignement, ont-ils eu pour effet d'améliorer la
situation où de telles affiliations ont été
effectuées, que ce soit ici dans le giron de l'université Laval
ou ailleurs?
M. ARSENAULT (André): Sur papier, oui. Mais le problème se
pose au niveau de l'application de ces contrats d'affiliation parce qu'ils sont
relativement larges. On parle de conditions pédagogiques, etc. Nous,
nous voulons être plus spécifiques. Nous voulons dire: Il y a un
contenu pédagogique pour qu'un gars devienne un bon cardiologue. Il faut
qu'il fasse telle affaire, qu'il apprenne à faire telle chose, qu'il
développe telle attitude et qu'il développe telle série de
concepts. Cela ne rentre pas dans le cadre de tout contrat d'affiliation. Le
contrat d'affiliation dit: Tel hôpital, on va vous envoyer tant de gars.
D'accord, on va vous envoyer tant de gars, on va s'en occuper. Mais au niveau
de l'application concrète, de la surveillance de l'application du
contenu pédagogique, dans les hôpitaux, dans les services, il n'y
a rien. Si un résident est insatisfait, par exemple, du contenu
pédagogique de ses activités, à qui va-t-il se plaindre? A
son chef de service.
En faisant cela, il supporte tout l'odieux de sa démarche, parce
que, lui, il se fait coincer dans son évaluation. Lui c'est un "mouron",
tout d'un coup. Le lendemain du jour où il a dit qu'il en avait à
ras de la frange, cela devenait un "mouron". C'est un gars qui fume ici et qui
ne devrait pas fumer, qui lit le journal pendant la visite, etc. C'est le genre
de mécanisme auquel nous sommes habitués actuellement. Nous
espérons c'est peut-être idéaliste qu'il y a
moyen d'en sortir avec l'affiliation universitaire, avec le paiement des frais
de scolarité, avec
l'élaboration des programmes, avec des ententes entre le ministre
des Affaires sociales et le ministre de l'Education. C'est peut-être
idéaliste de notre part, mais, vraiment, nous ne voyons pas d'autre
issue.
M. CASTONGUAY : Ne voyez-vous pas certains dangers que, pour corriger
une situation, on tombe dans un autre problème, qui est celui que l'on
vit dans certains pays où les hôpitaux d'enseignement deviennent
extrêmement axés sur la médecine hautement
spécialisée, sur les exigences de l'enseignement très
scientifique et ne portent pas suffisamment d'attention à la
médecine courante, d'une part, et aux aspects plus sociaux de la
médecine? Est-ce que, dans ce contexte, vous verriez
vis-à-vis de ce danger et aussi des coûts extrêmement
élevés, comme c'est le cas dans certains hôpitaux
d'enseignement au Québec la nécessité de certaines
sauvegardes aussi?
M. ARSENAULT (André): C'est sûr. Au niveau des institutions
ultra-spécialisées, où on a des cas
référés de troisième ou de quatrième
instance, où on donne des soins tertiaires, en fait, si on veut former
un pédiatre clinicien dans ce contexte, c'est inutile d'y penser. Il va
apprendre à voir des moutons à trois pattes, mais il ne sera pas
capable de soigner une grippe. Si on veut former un omnipraticien, il faut le
sortir des CHU. Où faut-il l'envoyer? Il faut l'envoyer là
où les soins de première zone se donnent. Comment l'enverra-t-on
là? Quelle sorte de surveillance aurons-nous? Nous revenons au
problème que nous soulevions au tout début et à
l'opportunité de l'intervention des doyens qui veulent non seulement au
niveau des centres hospitaliers, mais au niveau des ORAS, au niveau des centres
de services "at large", en général, être
représentés pour définir des conditions
pédagogiques d'entraînement.
Il est à prévoir que l'entraînement de
l'omnipraticien arrêtera de se faire dans les hôpitaux où il
n'y a que des spécialistes, Dieu merci! Il est temps que cela se
fasse.
M. CLOUTIER (Montmagny): Dr Arsenault, la situation que vous avez
décrite tantôt, les difficultés que l'on retrouve pour
l'enseignement dans les CHU sont-elles les mêmes partout, que ce soit
à Sherbrooke ou dans n'importe quel hôpital d'enseignement, que ce
soit ici, au CHU, à Québec ou dans les hôpitaux
d'enseignement universitaire de Montréal ou si, à Sherbrooke,
disons, étant donné le contexte, étant donné que
c'est un hôpital conçu spécialement pour des fins
d'enseignement et de recherche, et on a ajouté les services? C est
différent à Sherbrooke.
M. ARSENAULT (André): En fait, on ne peut pas porter un jugement
global, je pense que ce serait malhonnête de le faire. Des efforts
soutenus se font au Centre hospitalier de
Sherbrooke, où on cherche à affilier des facilités
hospitalières dans la ville, afin de pouvoir y envoyer des
étudiants en médecine pour qu'ils apprennent leur métier
là où ils devraient l'apprendre. Donc, la situation à
Sherbrooke n'est pas la même.
La situation à Laval, je ne pourrais pas me prononcer
là-dessus, mais en fait le problème se pose pour nous au niveau
de chaque département. Un hôpital, globalement, peut-être
très asymétrique dans sa performance pédagogique; on peut
avoir d'excellents services d'un côté et un service pourri de
l'autre. Si on enferme un gars pour tout son entrafnement dans un
hôpital, il va être très bon, par exemple, en cardiologie et
il va être un gros zéro en médecine interne, etc. Donc, il
faut que la planification et l'évaluation soient
interhospitalières, que la planification soit interuniversitaire et que
l'évaluation se fasse de service en service. La seule façon pour
nous d'arriver à ça, jusqu'à maintenant, c'est la
création d'un comité dans lequel siègent les doyens, les
internes et résidents, qui reçoivent l'enseignement, le
ministère des Affaires sociales et le ministère de
l'Education.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que, d'après vous, si on trouvait
une solution tel que vous le proposez définitive à
ce problème, savoir que les facultés d'enseignement aient une
représentation et au conseil des médecins et aux conseils
d'administration et qu'il y ait moins de contraintes du point de vue
pédagogique, cela aurait une influence assez considérable sur les
coûts de fonctionnement de ces institutions-là?
M. ARSENAULT (André): C'est une bonne question. A priori, c'est
difficile de répondre.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne vous demande pas de chiffres, mais est-ce
que vous pensez que ça peut avoir un impact sur les coûts? Disons
que les services dans ces centres hospitaliers prennent une place importante
Les réformes que vous proposez elles aussi modifieraient sensiblement le
fonctionnement de l'hôpital. J'imagine que l'impact sur les coûts,
quand on parle d'un hôpital à fonctions d'enseignement et de
recherche, comme le CHU à Laval, Notre-Dame, Maisonneuve,
l'Hôtel-Dieu de Québec, etc, si on s'arrête un instant au
budget de fonctionnement de ces hôpitaux qui peut aller chercher dans les
$20 millions ou les $25 millions, j'imagine qu'apporter des modifications
sensibles pourrait occasionner des coûts assez considérables,
disons sur une courte période.
Probablement qu'à long terme cela pourrait se stabiliser
moyennant ce à quoi le ministre a fait allusion tantôt: certains
mécanismes de contrôle, certaines précautions à
prendre. Vous admettrez tout de même qu'il y aurait une influence sur les
coûts de fonctionnement.
M. ARSENAULT: C'est à deux tranchants, ce truc-là. Le per
diem dans les hôpitaux ultra-spécialisés est très
élevé, c'est un fait. Le "turn over" des malades, le taux de
renouvellement des malades dans l'hôpital est très lent. Cela
aussi est un fait. Il n'est pas prouvé que si les internes, les
résidents qui ont charge de services dans ces hôpitaux
étaient convenablement surveillés, les décisions ne se
prendraient pas plus vite, le "turn over" ne s'accélérerait pas
et que finalement le per diem ne baisserait pas. Il est évident que le
jeune interne qui arrive dans un service et qui est placé devant un
malade devient anxieux. Il est porté à demander des analyses.
S'il y a quelqu'un derrière lui qui lui dit: Ecoute,
réfléchis sur la portée réelle, le pourquoi de
telle analyse. Pourquoi fais-tu telle démarche thérapeutique?
Pourquoi demandes-tu telle intervention? Considérant les coûts, la
validité de l'information que tu veux aller chercher, etc., est-ce
valable? S'il y a quelqu'un qui est là pour le dire, cela peut baisser
considérablement. La quantité d'analyses demandées par
malade, dans ces centres, est astronomique, c'est inconcevable!
Sur le point de vue du comportement opérationnel de ces
réformes, c'est difficile à prévoir, mais si vraiment on
en arrive à une formule où il y a une surveillance, une
collaboration étroite entre le responsable de l'unité
d'enseignement clinique et les résidents et internes qui travaillent
dans l'unité d'enseignement clinique, on aura un rendement meilleur.
C'est possible.
M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.
M. BOIVIN: Vous parlez du droit de pratique qui devrait relever de
l'université plutôt que de la corporation professionnelle.
M. ARSENAULT: Je n'ai pas dit cela, docteur. Je m'excuse.
M. BOIVIN: Ce n'est pas cela?
M. ARSENAULT: Non, j'ai dit... De qui doit relever le droit de pratique?
Maintenant, c'est le collège qui l'a; la Loi sur les corporations
professionnelles n'est pas adoptée. On ne sait pas ce qui adviendra de
ce droit. Est-ce que le collège va encore le garder? De toute
façon, pour nous, le problème n'est pas là. Pour nous, le
problème se situe à savoir si l'université, après
avoir évalué un individu pendant quatre ans et avoir
considéré qu'il a acquis la compétence voulue pour exercer
son métier sera contredite par un permis de pratique qui lui est
refusé à la fin de toute cette démarche. Cela peut rester
entre les mains du collège, mais que le collège sanctionne le
diplôme universitaire, je n'y ai aucune objection.
M. BOIVIN: Est-ce qu'il est arrivé souvent que certains
médecins aient leur diplôme et que le Collège des
médecins retienne le droit de pratique?
M. ARSENAULT: On n'a pas de diplôme jusqu'à présent;
il est donc difficile de le dire. On n'a pas de diplôme
universitaire.
M. DUQUETTE: Le fait est qu'on endure un résident dans un
programme pendant quatre ans pour lui apprendre à la fin que
peut-être il s'est mal orienté. Présentement, il n'y a pas
de diplôme...
M. BOIVIN: Vous voudriez sauver un an et pratiquer après la
quatrième année?
M. ARSENAULT: Je n'ai pas compris votre question.
M. BOIVIN: Vous voudriez pratiquer après la quatrième
année, c'est cela?
M. DUQUETTE: Non, non.
M. ARSENAULT: Après la quatrième année de
résidence, d'entraînement en spécialité.
Il faut bien distinguer les choses. Il y a une chose qui est certaine en
tout cas, c'est qu'il est absolument anormal qu'on ait des taux d'échec
aussi élevés que 50 p.c. c'est du monde à la messe
quand un gars a passé quatre ans dans les hôpitaux ou qu'un
groupe de gars ont passé quatre ans dans les hôpitaux et qu'au
bout de quatre ans, il y en a 50 p.c. qui flanchent sur la foi d'un examen.
Pour nous, c'est une catastrophe, il n'y a pas moyen d'en sortir. Tout l'argent
qui a été investi là-dedans et ces gens-là sont
obligés de retarder leurs activités professionnelles d'un an, de
reprendre leur examen. C'est incohérent.
Par contre, si on a des mécanismes universitaires
d'évaluation continue, de promotion par année et qu'au bout de
quatre ans le gars qui a satisfait aux exigences universitaires
débouche, comme il se doit, sur le marché du travail, cela nous
semble logique.
M. BOIVIN: Est-ce que ce ne sont pas les mêmes professeurs qui
enseignent dans les spécialités que les chefs de clinique dans
les hôpitaux? Est-ce que ça changerait quelque chose, vous pensez,
de donner ce droit aux universitaires plutôt qu'aux professeurs
cliniques?
M. ARSENAULT: Cela change quelque chose dans la mesure où on
déplace les lignes de force. Si on reste enfermé dans un seul
secteur universitaire, il est évident que, comme ce sont les mêmes
gars qui sont dans les hôpitaux et à l'université pour le
même secteur universitaire, ça ne nous avance pas. Et c'est pour
cela qu'on demande la création d'un comité des études
médicales provincial, afin de déplacer les systèmes de
pression d'une université à l'autre et les
mettre en compétition au même comité. Et dire:
Ecoutez, à McGill, ça marche et à Montréal,
ça ne marche pas. Il faut faire quelque chose, ou bien on envoie nos
gars là ou bien Montréal se grouille pour essayer de faire
quelque chose, pour réformer la situation.
M. BOIVIN: Sur les échecs, n'y a-t-il pas un comité de
révision auquel vous avez droit?
M. ARSENAULT: Un comité de révision des titres?
M. BOIVIN: Un comité de révision des examens?
M. ARSENAULT: Il yen a un.
M. BOIVIN: Vous avez un droit d'appel?
M. ARSENAULT: C'est exact. Mais le problème est que le gars qui
est un "mouron", qui n'est pas capable de faire un apprentissage convenable, il
ne le sait pas avant quatre ans. C'est là le problème. Il
faudrait qu'il le sache au bout de la première année. Il faudrait
qu'il soit exclu du circuit à partir du moment où on
considère que cet individu n'est pas capable de faire son apprentissage.
Et non pas qu'on le garde pendant quatre ans dans le système
hospitalier, qu'on lui paie un salaire de résident et qu'à partir
de cette année on va faire contribuer le ministère de l'Education
pour l'apprentissage de ce gars-là, et on va le garder quatre ans dans
le système avant de décider si on le garde ou s'il est "fit for
the job" ou s'il faut qu'il sorte.
M. GUAY: Vous notez la formation des médecins résidents,
je pense que vous avez soulevé un aspect du problème que, pour ma
part, j'avais vu très peu. Vous avez décelé des lacunes
fort évidentes et j'espère que le ministre fera tout en son
pouvoir pour régler certaines situations. Maintenant...
M. CASTONGUAY: Je vous crois sur parole et je vous rappellerai ce que
vous venez de dire lorsque nous parlerons des lois des corporations
professionnelles.
M. GUAY: J'aurais tout simplement une brève question à
poser à l'intervenant.
Est-ce que vous croyez que le projet de loi 65, dans sa rédaction
actuelle, va apporter quelque solution possible au problème que vous
avez mentionné?
M. ARSENAULT: C'est ça, notre message. Dans sa rédaction
actuelle, les réformes que nous proposons sont inapplicables. Les
modifications à apporter au bill ne sont pas majeures et le bill peut
être modifié de telle sorte que ces recommandations-là
deviennent applicables dans le cadre du bill.
M. LE PRESIDENT: Messieurs les médecins résidents, je vous
remercie.
M. ARSENAULT: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Un instant. La commission suspend ses travaux jusqu'aux
environs du 9 novembre. La date précise sera annoncée par le
secrétaire des commissions et les organismes seront avisés.
UNE VOIX: M. le Président, pourrais-je me permettre de faire une
suggestion, à savoir que les personnes qui n'ont pas été
entendues aujourd'hui, mais qui ont été convoquées par la
commission soient les premières à se faire entendre s'il y a une
nouvelle séance?
M. LE PRESIDENT: D'accord. (Fin de la séance: 18 h 34)
ANNEXE A
Liste des recommandations de l'Association provinciale des
institutions pour enfants 1- Que l'ORAS ait suffisamment de pouvoirs pour
opérer une réelle décentralisation. 2- Que le projet de
loi prévoie la possibilité pour des corporations existantes de
maintenir leur structure actuelle et leur mode d'incorporation. 3- Que les
fusions et conversions se fassent sur recommandation de l'organisme
régional. 4- Que dans un tel cas, un mécanisme soit prévu
en vue d'en fixer les modalités et l'indemnisation appropriée
avec pouvoirs d'appel adéquats. 5- Que dans un but de continuité,
certains administrateurs des anciennes corporations soient appelés
à siéger au nouveau conseil d'administration dans les cas de
fusion et de conversion. 6- Que soient repensées les définitions
d'institution publique et privée, au moins en ce qui a trait aux centres
d'accueil. 7- Que soient déterminées de façon plus
précise et si possible énumérative, les institutions pour
enfants couvertes par le terme centre d'accueil. Au besoin cette nomenclature
pourrait être précisée par règlement après
consultation avec l'APIE. 8- Que soient retranchés à l'article
4d) les mots "et réglementer". 9- Que les groupes
sociaux-économiques soient mieux définis et que le principe d'une
nomination par le lieutenant-gouverneur en conseil à même une
liste de noms soumise par lesdits groupes soit retenu. 10- Que trois d'entre
eux soient nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, à
même une liste de noms soumise par les centres d'accueil, dont au moins
une personne pour le secteur "enfants". 11- Que soit créé un
office provincial des affaires sociales, qui posséderait les pouvoirs
d'enquête dévolus à l'ORAS. 12- Qu'un mécanisme soit
prévu pour procéder à de telles enquêtes avec une
procédure adéquate. 13- Qu'un mode d'appel de toute
décision rendue par ladite commission à la suite de son
enquête soit prévu. 14- Que soient laissées au conseil
d'administration d'un centre d'accueil, l'initiative et l'autorité
nécessaires à sa bonne administration. 15- Que soit fixée
une norme monétaire au dessous de laquelle l'autorisation du ministre ne
sera pas nécessaire. 16- Qu'en plus de l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil, soit obtenue la recommandation de l'ORAS. 17-
Que l'article 48 ne s'applique pas aux institutions privées non
subventionnées. 18- Qu'une personne soit nommée annuellement
parmi les professionnels et les éducateurs exerçant dans les
centres. 19- Que le directeur général puisse exercer d'autres
fonctions ou activités avec l'autorisation expresse et préalable
du conseil d'administration. 20- Que le directeur général agisse
également à titre d'animateur du centre d'accueil dans la
poursuite des objectifs à atteindre. 21- Qu'une institution pour enfants
puisse offrir des services d'enseignement et de recherche. 22- Qu'un
délai soit fixé pour permettre au ministre d'accorder ou de
refuser une demande de permis.
23- Que l'APIE soit consultée pour tout règlement du
lieutenant-gouverneur en conseil touchant les institutions qu'elle
représente. 24- Que les pouvoirs prévus à l'article 133 j)
k) r) soient exercés par le conseil d'administration de l'institution
dans le cadre d'une planification établie par l'ORAS. 25- Que l'article
147 soit retranché du projet de loi.
ANNEXE B
Liste des propositions de l'Association des foyers pour adultes
1re proposition La création d'un office provincial dont les membres ne
seraient, ni en totalité, ni en majorité, nommés par le
gouvernement. Cet office provincial exercerait les pouvoirs dévolus
à un office sous l'empire du projet de loi 65 lorsqu'il n'existera pas
d'office dans une région donnée. 2e proposition Cet office
provincial pourrait exercer, au niveau de toute la province, les pouvoirs
d'enquête (quasi judiciaires) qui avaient été prévus
par l'ORAS (30 à 35) et qui seraient alors enlevés à
l'ORAS. Une procédure d'enquête pourrait être établie
dans le respect du secret professionnel et des droits des individus et des
institutions contre l'arbitraire. 3e proposition Cet office provincial serait
nanti de pouvoirs réels sur le plan administratif et quasi judiciaire.
4e proposition Que pour trois d'entre eux, au moins une personne soit
nommée par le lieutenant-gouverneur en conseil, à même une
liste de noms soumise par l'A.F.A. 5e proposition Qu'une plus grande latitude
soit reconnue au conseil d'administration d'un foyer pour adultes, sur le plan
administratif. 6e proposition Que le contrôle soit conservé aux
institutions existantes. 7e proposition Que soit retenue pour certaines
institutions existantes, la notion de "membre d'une corporation" avec pouvoir
de nommer une partie des membres du conseil d'administration. 8e proposition
Qu'un mécanisme soit prévu pour assurer la continuité au
sein du conseil d'administration dans le cas de fusion ou conversion. 9e
proposition Qu'un résident de foyer ou une personne âgée
choisie dans le milieu desservi par le foyer siège au conseil
d'administration. 10e proposition Que le comité administratif soit
facultatif. 1le proposition Que dans le cas de fusion ou conversion: - un
mécanisme soit prévu pour fixer l'indemnité à
être versée au propriétaire. - une procédure soit
établie. - un mécanisme d'appel soit considéré. 12e
proposition Qu'un office provincial soit chargé de
l'accréditation des institutions. 13e proposition Que le 3e paragraphe
de l'article 92 ne s'applique pas au centre d'accueil. 14e proposition Que le
délai prévu à l'article 93 soit extensionné pour
les institutions sans but lucratif. 15e proposition Qu'un délai soit
suggéré à monsieur le ministre à l'intérieur
duquel une demande de permis doit être accordée ou refusée.
16e proposition Que soient ajoutés les mots: "ou qui n'est pas autrement
justifiée". 17e proposition Qu'en cas de fusion, au niveau de cet
article, un délai soit indiqué.