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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mercredi 17 mai 1972 - Vol. 12 N° 30

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits


Journal des débats

 

Commission permanente des Affaires sociales

Etude des crédits

Séance du mercredi 17 mai 1972

(Quinze heures cinquante-quatre minutes)

M. GIASSON (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

M. HARVEY (Chauveau): Si vous me permettez, M. le Président, je vais commencer à rapporter...

M. LE PRESIDENT: Les membres attitrés de la commission accepteraient-ils le principe de laisser le droit de parole à tous les députés qui siègent autour de la table? Selon les règlements, a priori, seuls les membres de la commission ont droit de parole mais cependant, avec la permission de tous les membres, tous les députés peuvent participer au débat. Est-ce qu'on accepte comme principe général...

M. BOIVIN: J'accepte mais à la condition qu'ils ne recommencent pas le débat.

M. LE PRESIDENT: Vous voulez dire un député qui a été absent un bout de temps et qui revient...

M. BOIVIN: ... qui revient discuter les sujets adoptés.

M. LE PRESIDENT: C'est une recommandation très acceptable.

M. GUAY: M. le Président, nous en avons déjà discuté lors de l'étude de crédits des autres ministères. Notre parti politique a pris l'habitude de souligner à la commission quand cela nous est demandé pour autant qu'un député ne voie pas son droit de parole brimé, qu'il n'y ait pas de problème. Evidemment, si un député intervient sur un sujet qui a déjà été discuté, qu'on le lui rappelle tout simplement. Cela s'est fait lors de l'étude des crédits du ministère des Affaires municipales lorsqu'on m'a dit: La question que tu poses maintenant a déjà été discutée. A partir de là, il n'y a pas de problème.

M. LE PRESIDENT: Je pense bien que tout le monde accepte les opinions qui viennent d'être émises.

En débutant, il va de soi que nous cédions la parole au ministre des Affaires sociales.

Remarques préliminaires

M. CASTONGUAY: M. le Président, l'an dernier et il y a deux ans, on avait insisté sur le fait que l'étude des crédits du ministère pouvait être une occasion extrêmement utile pour un bon nombre de fonctionnaires du ministère d'assister à la commission afin de mieux saisir les interrelations entre les différentes questions, afin d'être plus sensibilisés aux représentations faites par les critiques des partis de l'Opposition, par les députés du gouvernement. C'est la pratique que nous avons suivie au cours des deux dernières années. Je partage ce point de vue. C'est pourquoi j'ai invité encore cette année un bon nombre de fonctionnaires du ministère à assister à l'étude de ces crédits. Malheureusement, cet après-midi, le début de l'étude des crédits s'est fait un peu plus rapidement que prévu. On m'avait parlé de jeudi, soit demain, au cours de l'après-midi.

Puis, le leader m'a parlé de demain matin, jeudi matin; finalement, ce matin, il m'a dit: Nous allons commencer cet après-midi. Certains fonctionnaires, tels le sous-ministre qui, aujourd'hui, allait prononcer une conférence, je crois, à l'université Western en Ontario et, M. Gilles Gaudreault, entre autres, sous-ministre adjoint en relations professionnelles, qui était à Montréal pour des problèmes bien particuliers reliés au conflit que nous connaissons, sont absents. Quelques autres, par exemple M. Després, président de la Régie d'assurance-maladie, qui m'avait assuré qu'il serait ici, mais qui comptait devoir être ici demain après-midi, n'est pas encore arrivé. Alors, je suggérerais que, demain matin, au début de la séance, nous leur demandions, comme l'an dernier, de s'identifier, mais d'attendre à demain matin, de telle sorte qu'ils soient tous ici et que nous ne nous répétions pas.

En second lieu, M. le Président, j'ai pensé qu'il serait utile pour les membres de la commission d'avoir une copie de l'organigramme du ministère, un organigramme schématique, de telle sorte que vous puissiez mieux situer, au besoin, ces personnes et aussi que la structure du ministère apparaisse plus clairement, ou encore qu'on voie mieux quels sont les responsables lorsque nous touchons a certaines questions qui seront sûrement posées lors de l'étude détaillée des crédits. Je vais demander à M. Quinty, mon attaché de presse, de vous remettre une copie de cet organigramme.

Quant à l'exposé général que j'aimerais faire, j'espère qu'il ne sera pas trop long. Compte tenu du fait que nous sommes présentement dans une réforme qui dure depuis deux ans et qu'il est important de suivre ou de situer les gestes que nous posons, non pas seulement pour bien les comprendre en eux-mêmes, mais aussi pour en voir la continuité, il m'a semblé qu'il pourrait être utile, d'abord, de faire un bref rappel de certains aspects de l'exposé que j'ai fait l'an dernier, au début de l'étude des crédits du ministère.

En second lieu, par rapport à cet exposé de l'an dernier qui avait été fait en juin, reprendre certains aspects du bilan que j'ai tracé des activités du ministère à la fin de l'année 1971,

et enfin vous donner les objectifs que nous nous étions tracés au début de l'année 1972, de telle sorte que les gestes posés, les orientations prises et aussi l'échelonnement de tout ça puissent apparaître aussi clairement que possible.

Je voudrais par la suite, dans un quatrième temps, donner quelques faits saillants du budget ou des crédits pour l'année 72/73 de telle sorte qu'on voie mieux les grandes lignes de ces crédits. Enfin, il y a quelques questions particulières qu'il m'apparaîtrait important d'aborder au besoin — ce sera à vous de juger — avant l'analyse détaillée des crédits du ministère. Je vous en donnerai la liste à la fin de cet exposé.

Quant au rappel de l'exposé général de l'an dernier, lors de l'étude des crédits pour l'année 71/72, j'avais en premier lieu, à l'aide de certaines données statistiques, mis en relief l'augmentation rapide des dépenses publiques dans les secteurs de la santé, des services sociaux et de la sécurité du revenu au cours des dix ou douze dernières années. Pour la période 1960-1970 entre autres, j'avais mentionné, à l'aide de données provenant entre autres du Conseil économique du Canada que, dans le domaine de la santé, par exemple, les dépenses publiques avaient augmenté à un rythme annuel de 14 p.c. ou 15 p.c. par année. D'autres sources ou d'autres études viennent confirmer ces données. En ce qui a trait aux autres secteurs, soit la sécurité du revenu, les services sociaux, j'avais donné des chiffres démontrant l'augmentation des dépenses publiques dans ces secteurs à des rythmes analogues. J'avais aussi insisté sur le fait que ces dépenses augmentaient plus rapidement que l'augmentation du produit national brut et même que l'augmentation des ressources fiscales du gouvernement.

En contrepartie, j'avais également voulu attirer l'attention sur un certain nombre de facteurs qui font en sorte qu'une pression considérable s'exerce au niveau de l'identification des besoins dans chacun de ces trois secteurs et ceci, non pas seulement et nécessairement par la voie d'études, mais aussi au sein de la population et par la dynamique même du type de service ou de programme dont il est question, le vieillissement de la population, les nouvelles disciplines que nous retrouvons dans ces secteurs, l'approche multidisciplinaire, l'équipement toujours plus perfectionné, les problèmes de transformation de l'économie, etc. J'avais conclu, à la suite de cet exposé, qu'il nous apparaissait nécessaire de rechercher par divers moyens une planification plus rigoureuse de nos actions, de nos politiques, de nos programmes, une plus grande recherche de l'efficacité, de telle sorte qu'à même des budgets qui ne pouvaient croître au même rythme qu'au cours des dix, douze dernières années, — années pendant lesquelles, je l'admets, il y avait eu du rattrapage, mais compte tenu du fait que nous ne pouvions escompter soutenir une telle augmentation, de même que c'est le cas dans bien d'autres juridictions — il nous fallait donc re- chercher aussi une plus grande efficacité, modifier les systèmes de distribution des services de santé et de services sociaux, de telle sorte que ces services soient plus adaptés pour répondre aux besoins et qu'aussi on réponde aux divers types de besoin par les moyens à la fois les plus adaptés mais, dans toute la mesure du possible, les moins dispendieux également.

En ce qui a trait à la sécurité du revenu, j'avais insisté sur la nécessité d'une politique en fonction d'objectifs bien définis, d'une politique intégrée et cohérente, étant donné le fait que, dans ce secteur particulier, malgré les sommes très grandes dépensées, l'augmentation de ces sommes, nous continuions d'être témoins d'une population toujours aux prises avec des problèmes de pauvreté qui s'expriment au premier titre par un manque ou une insuffisance de ressources financières.

A partir de ces conclusions générales, j'ai rappelé, toujours pendant l'étude des crédits l'an dernier, les trois grands objectifs que nous nous étions fixés pour 1971.

C'étaient la formulation d'une politique de sécurité de revenu, l'intégration des deux ministères de la Santé, de la Famille et du Bien-Etre social et également la rationalisation et le contrôle du fonctionnement des établissements.

Mon exposé avait couvert, avec beaucoup plus de détails, chacun de ces trois objectifs que nous considérions comme prioritaires en 1971. En ce qui a trait à la rationalisation et au contrôle du fonctionnement des établissements, nous avions discuté, pour la première fois, je crois, d'une façon un peu plus approfondie, la notion de centre local de services communautaires, du premier programme que nous avions ébauché à cet effet. En ce qui a trait à la sécurité du revenu, étant donné que l'étude des crédits s'était située quelques jours après la conférence de Victoria, nous avions également abordé les aspects touchant la constitution de cette question.

Enfin, l'an dernier, j'avais donné, comme cette année, les faits saillants du budget ou des crédits pour l'exercice 71/72.

Au terme de l'année 1971, j'ai voulu tracer un bilan de ce qui avait été accompli. Même si, pour les fins des crédits budgétaires, l'exercice financier va du 1er avril au 31 mars, depuis mon arrivée au ministère, il m'a paru utile de fixer des objectifs sur une base d'année de calendrier, quant à notre action. A ce jour, ceci a donné de bons résultats, compte tenu du fait que, lorsque nous arrivons à la fin de l'année, il y a généralement une certaine pause à l'occasion des Fêtes, un moment de réflexion qui nous est alloué. Ceci nous permet de faire le point plus facilement que ce n'est le cas au mois de mars, alors que l'Assemblée siège, que nous sommes en pleine activité. C'est la raison pour laquelle j'avais tracé, au cours des deux dernières années, au terme des années de calendrier, un bilan.

Si vous me permettez, j'aimerais rappeler

certains aspects de ce bilan, toujours dans l'idée de situer, autant que possible dans une certaine continuité, l'action du ministère.

Dans ce bilan, je disais donc que l'un des trois objectifs, comme je viens de le rappeler, la rationalisation et le contrôle du fonctionnement des établissements de santé et de bien-être, aux plans législatif, administratif et financier, était celui qui avait retenu le plus l'attention, de la façon la plus constante, de la population au cours de l'année 1971.

Au plan législatif, le projet de loi 65 portant sur l'organisation des services de santé et des services sociaux a été déposé, comme on s'en souvient, au cours de l'été dernier. Le projet de loi avait fait l'objet d'une tournée de ma part et aussi de nombreuses séances de la commission des affaires sociales.

Au plan administratif, des efforts ont été consacrés au cours de l'année 1971 à l'amélioration du fonctionnement de la Loi de l'aide sociale, à la fermeture, à la transformation et à la réaffectation quant à leur vocation, d'une vingtaine d'établissements à vocation sociale, à la suite des études conduites par la direction de l'agrément du ministère.

Au plan financier, l'expérience du budget global, en collaboration avec 23 hôpitaux, a également, au cours de l'année 1971, retenu l'attention et particulièrement celle des responsables des établissements concernés. J'avais mentionné que ce concept du budget global vise à donner, aux établissements financés par le ministère, une plus grande latitude sur le plan de la gestion à l'intérieur de certaines normes générales.

Nous aurons l'occasion, si vous le désirez, de dégager déjà certaines données qui ressortent de cette expérience. Quant au deuxième objectif, l'intégration des anciens ministères de la Santé, de la Famille et du Bien-être, à la fin de l'année 1971, je disais que l'opération était, au plan de l'intégration, à toutes fins pratiques, terminée. Evidemment, il nous restait bien du recrutement à effectuer. Depuis, nous avons continué, et ce travail se poursuit.

En ce qui a trait au troisième objectif, l'élaboration et l'affirmation d'une politique de sécurité du revenu, en coordination avec une politique de main-d'oeuvre, nous avons déployé des efforts tout au cours de l'année 1971 et, compte tenu des récents événements, je crois bien que la reprise de toutes ces étapes que nous avons traversées au cours de l'année 1971, ou l'exposé de ces étapes, à tout le moins, serait un peu superflu pour le moment.

Quant aux autres objectifs que nous nous étions fixés, toujours pour l'année 1971, j'ai rappelé à ce moment-là que les lois touchant les corporations professionnelles ont été déposées vers la fin de la session, soit au cours des mois de novembre et décembre. J'ai également rappelé que, au plan d'une élaboration, d'une politique de recherche dans le domaine des Affaires sociales, plusieurs gestes avaient été posés au cours de l'année 1971, entre autres, la création du comité de la recherche socio-économique, du comité de la recherche épidémiologique et opérationnelle.

Egalement, au cours de l'année, le Conseil de la recherche médicale du Québec avait vu son rôle à la fois maintenu et précisé. Et, dans chacun des cas, les critères d'approbation des projets de recherche, l'attribution des subventions aux fins de la recherche, avaient été précisés au cours de l'année.

Au terme de l'année, j'ai également fait un certain bilan quant au progrès accompli dans l'implantation des premiers centres locaux de services communautaires. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette question évidemment. J'ai également fait état des négociations avec le gouvernement fédéral, compte tenu du fait que quelques jours plus tôt, soit les 16 et 17 décembre, nous avions eu une conférence fédérale-provinciale qui portait notamment sur la recherche d'une nouvelle formule de financement des services de santé.

Enfin, nous avions fait le point à ce moment sur les négociations en ce qui a trait à la mise en application du bill 69. J'avais rappelé d'autres actions entreprises au cours de l'année 1971, telles la révision, la reformulation du programme des services de santé et des services sociaux en milieu scolaire, l'introduction d'un carnet de santé et sa distribution, l'élaboration d'un programme visant à lutter contre le cancer du col utérin, programme qui a vu sa concrétisation dans la création de quelques services de cyto-diagnostic.

J'ai également mentionné que nous avions fait des efforts tout au cours de l'année 1971 pour associer davantage dans toute la mesure du possible par la voie de consultations, de tournées, d'auditions publiques, de la Commission des affaires sociales, du Conseil des affaires sociales et de la famille, toutes les personnes intéressées et les groupements intéressés par les politiques et programmes de notre ministère.

J'ai également mentionné au terme de ce bilan que les membres du Conseil des affaires sociales et de la famille avaient été désignés au cours de l'année et que le conseil s'était mis au travail. Il en était de même quant à la Commission d'appel de l'aide et des allocations sociales.

Egalement, j'avais rappelé la création d'un comité de la santé mentale au cours de l'année, comité destiné à faire le point dans ce secteur particulier de nos activités et créé dans le but non seulement de réviser nos politiques, mais de mieux adapter le réseau de distribution de services. Et aussi, j'avais rappelé la publication d'un document de travail sur l'enfance inadaptée qui fait l'objet de consultations et de travaux, en plus de guider notre action depuis sa publication. Voilà pour le bilan qui avait été tracé au terme de l'année 1971.

Quant aux objectifs pour l'année 1972, compte tenu des progrès effectués, nous avions tracé des objectifs qui prenaient une forme

quelque peu différente, de telle sorte que notre action se rapproche toujours davantage des mécanismes de distribution, soit de soins, soit de services, à la population. Alors, les trois grands objectifs que nous nous étions fixés pour l'année 1972, tel qu'en fait foi le document que j'ai ici, étaient la formulation de politiques législatives et ministérielles visant à assurer une plus grande protection aux personnes, notamment aux enfants. Deuxièmement, le développement de conditions et de mécanismes visant à favoriser une plus grande participation de la population à la définition de ses propres besoins dans le domaine des affaires sociales ainsi qu'à l'instauration, à l'administration et au fonctionnement des établissements qui dispensent ces services.

Troisièmement, l'adoption de mesures visant à améliorer la nature des services rendus à la population, leur qualité, l'aspect humain de leur distribution, ainsi qu'à favoriser toujours une meilleure allocation, une meilleure utilisation des ressources. Quant aux gestes et mesures plus précises pour faire en sorte que ces trois objectifs soient concrétisés: d'abord, en ce qui a trait à la protection de la personne, j'avais annoncé, à cette époque, notre intention de présenter un projet de loi sur la santé mentale, projet de loi qui a été déposé et qui fera l'objet d'étude par les membres de l'Assemblée nationale incessamment. Ensuite, une Loi sur la protection de la santé publique, loi qui reprend diverses dispositions législatives, entre autres, la Loi de l'hygiène publique. La préparation de ce projet de loi est fort avancée et j'espère, sans pouvoir prendre, évidemment, d'engagement, être en mesure de le déposer avant la fin des travaux de la présente partie de la session, de telle sorte qu'on puisse en faire un examen et passer à l'étude définitive de ce projet de loi au cours de l'automne. Egalement, une Loi sur la protection de l'enfance. Le travail de préparation de ce projet de loi progresse. Nous aurons l'occasion d'en reparler, au besoin, au cours de l'étude des crédits. Egalement, j'avais mentionné notre intention de procéder à l'adoption du Régime d'allocations familiales du Québec. Dans le même ordre de mesures, une Loi modifiant le régime de rentes, dans le but de hausser, entre autres choses, les prestations aux veuves et aux invalides. Egalement, nous pourrons reparler de ce projet de loi dont la préparation est fort avancée.

Enfin, une Loi sur la fluoration de l'eau. De façon plus particulière, sur un autre plan que le plan législatif maintenant, au sujet de l'enfance inadaptée, nous voulons davantage mettre l'accent sur une politique axée sur la prévention. Ceci, je crois, pourra au besoin être lié à nos discussions, si tel est votre désir, nos discussions portant sur les mesures que nous entendons prendre quant à la protection de la jeunesse.

Quant à l'enfance délinquante, nous nous étions fixé comme objectif la révision des politiques qui la concernent et l'établissement d'un nouveau partage des responsabilités avec le ministère de la Justice, dans le sens recommandé par le rapport Prévost. Egalement, en ce qui a trait à cette question, des progrès ont été effectués. Dans la mesure où il m'est possible de le faire à ce moment-ci, il me fera évidemment plaisir d'en parler.

Au sujet des personnes âgées, j'annonçais aussi l'élaboration ou la précision de l'orientation générale que j'avais indiquée en décembre 1970 quant aux problèmes que pose la distribution de services à cette partie de la population, aux problèmes que pose leur hébergement et aussi à d'autres problèmes tels que leurs loisirs, etc.

J'avais également, quant à la participation de la population, annoncé — et on se souviendra que la formulation de ces objectifs qui sont pour 1972 suivait de quelques jours l'adoption de la loi 65 — la mise en place, au cours de l'année, des conseils régionaux prévus par la loi 65, des mécanismes et des conditions nécessaires à l'implantation de personnel administratif régional au sein du ministère des Affaires sociales. Egalement, le développement de mécanismes d'information et de communication au sein du ministère, de sorte que la population soit à même de participer d'une façon plus concrète et plus efficace à l'élaboration des politiques et au fonctionnement de nos programmes.

Sur un troisième plan, en ce qui a trait à l'amélioration des services et à l'allocation et. l'utilisation des ressources, j'avais annoncé, à ce moment-là, notre intention de procéder à l'adoption des mesures administratives et financières requises pour la mise en application de la loi 65. La poursuite de la mise en place des mécanismes nécessaires à l'implantation des centres locaux de services communautaires. La reconnaissance de nouvelles professions dispensant des services de santé, telles les chiroprati-ciens, les podiatres, les acousticiens en prothèses auditives etc. L'élaboration d'une politique de transport permettant une plus grande accessibilité, à l'ensemble de la population, aux établissements spécialisés. Egalement, la mise en vigueur des systèmes de financement par voie de budget global dans tous les centres hospitaliers; l'adoption de mesures visant à favoriser la présence des conditions requises à une recherche et à un enseignement de qualité dans le domaine de la santé et des services sociaux.

La recherche, grâce au mécanisme de participation et de consultation déjà mentionné, d'un meilleur équilibre entre les ressources et les besoins. La recherche d'un accord avec le gouvernement fédéral sur une formule de financement des coûts des services de santé et également un accent plus grand sur les mesures visant à favoriser la prévention et la réadaptation dans le domaine des services de santé et des services sociaux.

Dans les grandes lignes, voici les objectifs que nous nous étions fixés pour l'année 1972. Il

s'agit évidemment d'objectifs ambitieux. Même si nous ne sommes qu'au milieu du mois de mai, il est possible de dire qu'en ce qui a trait aux gestes qui sont sous notre juridiction, nous avons, dans la plupart des cas, accompli ou accusé des progrès qui m'apparaissent extrêmement satisfaisants. Dans d'autres cas, nous accusons des retards. J'aurai l'occasion d'en parler au besoin, de vous en donner les causes. Evidemment, lorsque nous sommes dans d'autres secteurs, comme dans celui de la sécurité du revenu, la situation est bien différente.

En ce qui a trait aux faits saillants, relatifs aux crédits du ministère, pour l'exercice 72/73, je voudrais rappeler que, l'an dernier, les crédits, tels qu'ils apparaissent au livre des crédits pour 71/72, les crédits demandés s'élevaient à $1,492,360,000. Au cours de l'exercice, un budget supplémentaire, en décembre 1971, de $89, 500,000 a été approuvé et deux mandats spéciaux, les mandats no 4 et no 5, aux montants respectifs de $7 millions et de $1,400,000, ont été approuvés, ce qui fait des crédits totaux de $1,590,280,000. Dans le montant de $97,900,000, compris dans le budget supplémentaire et les mandats spéciaux, nous retrouvons $5 millions qui furent requis pour les soins aux malades mentaux et $4 millions pour les services aux adultes.

A l'époque, j'avais mentionné qu'en ce qui a trait aux soins aux malades mentaux, la préparation des crédits pour l'année avait ignoré la nécessité d'une provision à ce titre. Il ne s'agissait pas vraiment d'une dépense nouvelle et imprévue, mais plutôt d'une erreur commise lors de la préparation des crédits l'an dernier. Ceci signifie donc que, de ce montant de $97,900,000, si nous excluons ces $5 millions, les $90 autres millions furent consacrés, soit à l'administration, soit au paiement de prestations additionnelles en vertu de la Loi d'aide sociale. En ce qui a trait aux services de santé et aux services sociaux, si on se réfère à l'annexe du discours du budget, au tableau 2-4, présenté par le ministre des Finances, il est indiqué que la prévision des dépenses pour l'exercice 71/72 du ministère s'établit à $1,571 millions, donc des crédits non utilisés de $18 millions, alors que nous avons demandé pour les services de santé, les services sociaux, des crédits additionnels s'élevant à $ 9 millions.

Nous nous sommes donc maintenus en cours d'exercice à l'intérieur des crédits demandés pour les services de santé et les services sociaux. Nous avions même, au terme de l'exercice, $18 millions non utilisés et, si nous déduisons de ces $18 millions les $9 millions demandés en cours d'exercice, nous voyons que nous n'avons pas utilisé totalement les crédits demandés l'an dernier. Par contre, au titre de l'aide sociale, évidemment, il y a eu un dépassement substantiel.

En ce qui a trait aux crédits 72/73, la demande s'élève à $1,696,200,000, ce qui représente par rapport au niveau réel des dépenses, soit $1,571,000,000, une augmentation de 8 p.c. Maintenant, tel qu'indiqué dans l'annexe du discours du budget, présenté par le ministre des Finances, l'on voit que les dépenses de fonctionnement des services de santé, soit les articles 8, 9, 10 et 11 augmenteront normalement en 72/73 au rythme de 11 p.c. Je mentionne ceci parce que ce peut être un chiffre utile si nous rediscutons des ententes que nous recherchons aux fins du financement des programmes des services de santé avec le gouvernement du Canada et aussi ce chiffre, il m'apparaît utile de le mentionner, en regard des pourcentages d'augmentation que j'ai cités l'an dernier et sur lesquels nous pourrons revenir, pourcentages de l'augmentation au cours des années antérieures.

En ce qui a trait aux services sociaux, soit les articles 12, 13, 14, 15 et 16 du budget, si vous me le permettez, il y aurait peut-être lieu de reprendre très brièvement ce qu'en disait le ministre des Finances dans cette annexe. Il disait que le développement des services de bien-être pour l'enfance et les adultes comportent une importante hausse de crédits par suite notamment de l'entrée en service d'institutions dont la construction s'est terminée en 71/72 ou se terminera en cours d'année 72/73. Quant aux services aux adultes, ils connaîtront la hausse la plus élevée, les crédits passant à ce titre de $28,900,000 à $47,800,000. Pour leur part, les crédits pour les services à l'enfance passent de $108,100,000 à $122,800,000.

Egalement, dans ses commentaires, le ministre des Finances traitait... Oui?

M. LAURIN: Pouvez-vous nous dire le pourcentage d'augmentation pour les services sociaux, 11 p.c. pourles services de santé?

M. CASTONGUAY: Malheureusement, je n'ai pas fait de calculs pour celui-là. Je voulais seulement citer, à ce moment-là, les chiffres du discours du budget et, si j'ai insisté sur les 11 p.c, c'était par rapport aux références que j'ai faites. Maintenant, il est possible de les calculer, si vous le désirez.

Si vous me le permettez, j'aimerais maintenant reprendre ce que le ministre des Finances disait en ce qui a trait au programme de sécurité du revenu.

L'année 71/72 fut la première année complète d'application du nouveau régime d'aide sociale et pour l'ensemble de l'exercice financier, la dépense totale sera d'environ $360 millions, comparativement à $268 millions pour l'année précédente. Cette hausse est due, d'une part, à un accroissement des bénéfices, $50 millions, et d'autre part, à un accroissement de clientèle, $42 millions reliés pour une bonne part aux dispositions plus larges de la nouvelle loi, notamment pour les jeunes.

Les résultats de 71/72 suggéreraient des crédits plus élevés pour 72/73. On présente un budget d'aide sociale de l'ordre de $340 millions pour les raisons suivantes:

Premièrement, puisque le programme dans sa nouvelle orientation n'est en vigueur que depuis un an et demi, on doit tenir compte des effets non récurrents de l'année mise en vigueur.

Deuxièmement, les effets du nouveau régime d'assurance-chômage devraient se faire sentir, de façon complète, au cours de 72/73, de même de façon plus partielle que ceux de l'introduction, au cours de l'année, d'un nouveau programme d'allocations familiales.

Enfin, le ministère continue les efforts de contrôle et de mise à jour des dossiers, tout en améliorant l'administration elle-même du système.

J'aurai l'occasion de revenir sur ces points, mais je voudrais aussi ajouter que la courbe des versements mensuels, au cours des derniers mois, s'est stabilisée, dans une certaine mesure. Nous entrevoyons, comme je l'ai mentionné tantôt, apporter des amendements au Régime de rentes du Québec, amendements qui devraient avoir un certain effet sur les budgets réservés ou consacrés à l'aide sociale.

Sans dire tellement plus pour le moment, je voulais reprendre cet exposé du ministre des Finances, tout en me souvenant du conseil judicieux que me faisait, l'an dernier, le député de Montmagny, de ne pas trop affirmer que ce crédit de $340 millions puisse s'avérer suffisant pour l'exercice en cours.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aimerais noter que ça fait trois fois que le ministre sourit depuis le commencement de la séance, cet après-midi. Deux fois à l'occasion des allocations familiales et, la troisième fois, à l'occasion d'un conseil que nous lui avons donné et qui s'est avéré juste. Nous aurons peut-être l'occasion de donner des conseils, au cours de ces deux heures que va durer l'étude de ces crédits. Alors, nous espérons qu'il continuera de les écouter avec grande attention. Nous sommes ici pour l'aider parce que nous savons qu'il traverse une période extrêmement, peut-être, difficile.

M. CASTONGUAY: Merci.

Le ministre des Finances indiquait également que les crédits pour les allocations scolaires et les allocations familiales correspondaient à la législation actuellement en vigueur.

Un petit détail, M. Jean-Guy Houde me souligne que l'augmentation, pour répondre à votre question, est de 22.8 p.c.

Pour continuer toujours dans les faits saillants touchant aux crédits budgétaires demandés, il y a lieu de rappeler deux mesures qui, même si elles n'apparaissent pas dans ces crédits, ont une incidence — c'est-à-dire des mesures à caractère fiscal — celles annoncées par le ministre des Finances, soit l'augmentation aux fins de l'impôt sur le revenu des particuliers des exemptions de $1,000 à $1,500 pour une personne seule et de $2,000 à $2,850 pour un couple.

Selon l'expression du ministre des Finances, compte tenu de la courbe des points d'impôt, ces exemptions sont destinées à alléger la charge fiscale des contribuables à revenus modestes.

Il y a également, l'annonce par le ministre des Finances de la déduction des frais de garde des enfants. Même si ces mesures à caractère fiscal n'apparaissent évidemment pas dans les crédits de notre ministère, ne faisant pas l'objet de cette discussion, il m'apparaissait assez important de le souligner.

Toujours pour poursuivre dans ces principaux aspects des crédits — si vous me permettez, j'aurai bientôt terminé — j'aimerais vous en souligner certains autres qui m'apparaissent assez importants. D'abord, dans le dernier discours du budget, deux autres mesures ont été annoncées. La première a trait à l'abolition de la contribution des municipalités au financement des unités sanitaires, ce qui représente pour ces municipalités une dépense, qu'elles n'auront plus à assumer, de l'ordre de $2 millions par année.

Cette question avait été discutée au mois de juin dernier, lors de la conférence provinciale-municipale. Le seconde mesure annoncée permettra aux municipalités de soumettre les centres hospitaliers, les centres d'accueil présentement exempts de l'impôt foncier, à un impôt foncier, à raison de $35 par lit pour les centres hospitaliers et de $20 par lit pour les centres d'accueil. Cela devrait normalement rapporter aux municipalités environ $3 millions par année.

Dans les crédits qui vous sont présentés, nous avons pour leur ensemble $70 millions qui ont été prévus au moment où ils ont été préparés, pour le renouvellement des conventions collectives. Cette réserve, évidemment, s'appuyait à l'époque sur la première offre formulée par le gouvernement, c'est-à-dire une offre d'augmentation générale de l'ordre de 4. 8 p.c, centrée dans tous les autres détails de la question.

En ce qui a trait maintenant aux soins généraux actifs, étant donné que souvent l'accent porte sur le développement des ressources dans ce secteur, je dois dire qu'on prévoit l'addition, au cours de l'année, d'environ 1,390 nouveaux lits et en parallèle, la fermeture de 1,183 lits, dont un assez bon nombre seront transformés en lits pour malades chroniques.

On souligne, et nous reviendrons sur cette question, que ces modifications, soit l'addition de nouveaux lits, leur fermeture ou leur réaffectation, entrafneront des frais additionnels de l'ordre de $6 millions par année. En ce qui a trait à la formation professionnelle, il est aussi important de souligner que, le 1er septembre 1972, les écoles d'infirmières au sein des institutions hospitalières auront cessé d'exister. Il s'agit là de la fin d'un changement de politique échelonnée sur un certain nombre d'années.

Quant aux services à l'enfance, nous prévoyons, au cours de l'année, l'addition de 1,226

lits de diverses catégories. Quant aux services aux adultes, c'est-à-dire principalement les foyers pour personnes âgées, nous prévoyons l'addition de 3,135 lits. Dans ce cas, le coût de fonctionnement de ces lits est évalué à environ $3 millions, si l'on tient compte des ressources perçues de certaines de ces personnes hébergées.

En même temps, au cours de l'année, le fait va se faire sentir de façon beaucoup plus marquée pour l'année 72/73, le ministère a pris à sa charge le coût des services cliniques dans les foyers, c'est-à-dire de tous les services qui, normalement, ne sont pas de la nature de service strict d'hébergement.

Le coût de la prise en charge de ces services est de l'ordre, pour l'exercice 72/73, de $5,200,000.

Je le mentionne parce que nous aurons possiblement l'occasion de discuter des orientations, comme je l'ai mentionné plus tôt, ou de la précision des orientations que nous sommes en voie de prendre en ce qui a trait à l'hébergement des personnes âgées et d'autres personnes, telles les malades chroniques, etc.

En ce qui a trait à l'équipement, nous prévoyons des crédits de l'ordre de $10 millions pour les services de santé et de $2.4 millions en ce qui a trait aux services sociaux. Enfin, à l'article 20, je le mentionne, une augmentation de crédits apparaît sous le titre de projets de démonstration et recherche, de l'ordre de $3,225,000. Ces crédits seront presque entièrement, sinon totalement, affectés au développement en cours d'année de centres locaux de services communautaires.

Enfin, pour terminer, si, après vos commentaires, la chose vous paraissait acceptable, cet après-midi, avant que nous commencions l'étude détaillée des articles budgétaires, je pourrais vous distribuer quelques documents et vous faire peut-être un exposé sur deux de ces documents. Il s'agit, à mon sens, de documents relativements importants.

Le premier n'est pas tout à fait de la même nature. C'est un rapport de la direction générale du financement qui révise les recommandations qui nous ont été faites au cours des derniers mois par le vérificateur général et les actions que nous avons prises. Je vais demander à M. Quinty de vous distribuer ce rapport. Cela peut vous permettre de voir plus clairement certains des problèmes que nous rencontrons, certaines des actions que nous avons prises. Ce document n'était pas de la même nature. Ce n'est pas mon intention d'en discuter cet après-midi. C'est plutôt pour votre information, pour jeter plus de lumière sur l'évolution des crédits, sur la façon dont nous administrons au plan financier les budgets qui nous sont confiés.

En second lieu, un document sur la politique de planification des naissances. Vous savez que cette question revient périodiquement à la surface. Elle a été de façon plus particulière dans l'actualité au cours des dernières semaines, suite aux problèmes qu'a connus le centre de "planning" familial du Québec, à Montréal.

L'an dernier nous avions discuté la nécessité de programmes soit quinquennaux ou triennaux pour le développement de l'équipement. Nous avons effectué passablement de progrès à ce sujet. Je pourrais vous remettre, si tel était votre désir, — cet après-midi nous pourrions en dire quelques mots en plus du document sur la planification des naissances — notre programmation, pour les cinq prochaines années, du développement des ressources d'enseignement et de recherche dans le secteur de la santé et ceci dans le cadre de la caisse d'aide à la santé.

Il s'agit d'un programme fort important qui, sur une période de cinq ans, comporte des crédits de plus de $100 millions. Pour l'exercice 72/73, il comporte des crédits de l'ordre de $28 millions, si ma mémoire est bonne. Enfin, compte tenu du fait qu'au cours de l'année nos concepts, notre travail sur le développement des centres locaux de services communautaires se sont à la fois précisés et que notre travail a progressé, j'ai un document beaucoup plus à point que l'an dernier sur les centres locaux de services communautaires.

Si vous vous souvenez, l'an dernier, je vous avais remis un premier document. Aujourd'hui, je suis en mesure de vous en remettre un qui précise à la fois le concept des centres locaux de services communautaires, les programmes que nous devrions retrouver dans ces centres, à la fois les programmes de base et les autres programmes qui peuvent s'ajouter selon les besoins de la population, le type de personnel que nous devrions y retrouver, les modes de financement ou de rémunération de ce personnel et certaines autres données quant aux structures de ces centres. J'aimerais vous distribuer ce document cet après-midi, non pas en faire la lecture ou en traiter, mais plutôt, vous permettre de le lire, de telle sorte qu'au cours des prochains jours nous puissions, si vous le désirez, discuter de ce programme qui nous apparaît un programme clé.

J'aurais voulu cet après-midi, possiblement, vous remettre certains documents mais, par suite de la grève, de l'occupation ou de l'impossibilité d'avoir accès aux bureaux du ministère pendant une couple de semaines, ces documents n'ont pu être préparés à temps. J'aurais aimé vous présenter une certaine analyse des coûts de l'hospitalisation, de l'expérience, du budget global, de l'évolution de la situation financière des hôpitaux. De toute façon, j'ai certains documents. Je veux les réviser. Soit demain, soit au cours des prochains jours, nous aurons l'occasion de revenir à cette question, de toute façon, lorsque nous arriverons aux articles appropriés des crédits.

Cet après-midi, après vos commentaires ou même si vous voulez, avant vos commentaires généraux, je pourrais donc vous faire un bref exposé de la politique de planification des naissances que nous entendons poursuivre, vous remettre un document pour que vous puissiez l'étudier et que nous puissions en discuter et de même pour la caisse d'aide à la santé. Pour les

CLSC, je demande à M. Quinty de vous distribuer immédiatement le document. Ce n'est pas nécessairement mon intention de l'étudier cet après-midi. Je vais plutôt attendre que vous en ayez pris connaissance.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, avant de faire des commentaires, je préférerais que le ministre nous fasse un exposé sur les deux autres documents — le document sur la planification familiale et celui de la caisse d'aide à la santé — et que nous ayons aussi le document sur les CLSC. Même si, après cela, le ministre pense qu'il a oublié d'autres exposés, qu'il veut nous faire, nous l'écouterons avec une grande attention.

M. GUAY: Cela nous va.

M. CASTONGUAY: Cela vous va?

M. GUAY: D'accord.

M. CASTONGUAY; Vous trouvez que je ne parle pas assez.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne dis pas que le ministre ne parle pas assez. Le ministre est très prudent dans ses exposés, même qu'il a repris généreusement les exposés de l'an dernier, celui de la fin de l'année 1971, celui des objectifs de l'année 1972. Mais il y a une question importante. Je pense bien que le ministre le fera un peu plus tard durant l'étude des prévisions budgétaires. Ce sont les questions d'actualité, les endroits où le ministre a souri particulièrement. Je pense bien qu'il aimera y revenir à un certain moment pour préciser davantage sa pensée.

M. CASTONGUAY: En ce qui a trait à une question qui est d'actualité, la planification des naissances, si vous me permettez, c'est la première fois à ma connaissance qu'un document aussi précis émane du ministère. Vu qu'il oriente présentement et orientera notre action au cours des prochaines semaines, des prochains mois, j'aimerais vous en faire la lecture.

Il est relativement bref. Après avoir reçu vos commentaires, s'il y en a, c'était mon intention de demander au Conseil des affaires sociales et de la famille — même si pour nous il va constituer notre document d'orientation de politique — d'insérer ce document ou cette politique dans ses travaux touchant à la famille et, au besoin, de nous faire des représentations au sujet de cette politique.

Dans le contexte de la politique sociale, l'objectif premier est de créer des conditions favorables à la satisfaction des besoins des hommes et à leur épanouissement. Parmi les conditions qui apparaissent favorables, la possi- bilité de déterminer quand, combien et dans quelles conditions avoir des enfants est essentielle. Une politique ayant pour objectif la mise en place des conditions propres à amener la possibilité pour le couple ou l'individu d'avoir le nombre d'enfants qu'il désire, au moment souhaité par lui, est-ce à quoi nous nous référons par la politique de planification des naissances.

Pour réaliser cet objectif, il nous faut nous pencher tant sur les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de chacun en ce domaine que sur la capacité propre de chacun d'exercer cette liberté de façon responsable. Une action préventive favorisant l'éducation en matière de vie conjugale, parentale et sexuelle apparaît primordiale afin d'améliorer la qualité de vie du couple ainsi que, par conséquent, la qualité du milieu dans lequel les enfants font leur apprentissage de la vie. Sur ce point, la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme a recommandé que l'éducation à la vie familiale soit enseignée aux garçons et aux filles à partir de l'école primaire jusqu'à la fin de l'école secondaire. Les cours devraient porter non seulement sur le fait biologique de la reproduction, mais aussi sur les rapports entre époux et épouse et aussi entre les parents et les enfants. Le ministère, en collaboration avec le ministère de l'Education, entend implanter de tels programmes d'éducation à la vie familiale.

Cette action préventive doit également s'exercer au niveau des adultes, notamment en mettant à leur disposition des services de formation et de consultation, et pour les personnes qui font face à des difficultés plus sérieuses, que ce soit d'ordre conjugal, parental ou sexuel, des services de consultation et de traitement médical ou psycho-social, selon les besoins. En situant la planification des naissances au niveau du couple, celle-ci apparaît essentiellement personnelle et volontaire et la liberté et les convictions de chacun en ce domaine se doivent d'être respectées. Il faut noter cependant que, pour être capable d'exercer cette liberté de façon responsable, il est essentiel de posséder une connaissance des moyens de contrôle disponibles et des conséquences de l'utilisation de ces moyens. Dans ce contexte, concurremment avec l'action préventive décrite ci-dessus, la nécessité d'une action au niveau de la diffusion de la connaissance apparaît propre à permettre des choix individuels, libres et responsables. Ces moyens de contrôle ne se réfèrent pas uniquement à des contrôles de la fécondité dans le sens de la limitation des naissances, mais au contraire se réfèrent tant aux moyens de favoriser la fécondité, utilisation des cliniques de fertilité, par exemple, qu'aux moyens de retarder, d'espacer ou même d'arrêter définitivement celle-ci. L'implantation de services d'information au sein des centres locaux de services communautaires permettra de rendre accessible à tous l'information nécessaire à l'exercice d'une parenté responsable.

L'implantation de services d'information et de consultation dans les centres hospitaliers ou les centres de services sociaux permettra, par ailleurs, de répondre aux besoins des personnes qui font face à des difficultés plus sérieuses telles que celles mentionnées ci-dessus. Cette orientation n'exclut pas la possibilité de créer des cliniques spécialisées en milieu hospitalier ou dans les centres des services sociaux. Dès septembre, dans le cadre de son programme de services de santé et de services sociaux en milieu scolaire, le ministère mettra sur pied des services d'information sur la planification des naissances dans les écoles secondaires, les CEGEP et les universités de façon à rejoindre le plus rapidement possible les adolescents et les jeunes adultes.

Ces grandes orientations impliquent, par ailleurs, un certain nombre d'actions en matière de formation des professionnels impliqués dans la distribution de ces services. En collaboration avec le ministère de l'Education et des différents centres d'enseignement concernés, la mise sur pied de programmes de formation s'adressant au personnel médical et paramédical ainsi qu'aux spécialistes des services sociaux et de disciplines connexes est considérée comme prioritaire.

Il ne faut cependant pas considérer que tout est à faire dans le domaine de la planification des naissances. En effet, le Québec est parmi les plus avancés en la matière. Dans le passé, l'action du ministère a principalement consisté en des subventions à des organismes oeuvrant dans le domaine, les montants consacrés à ces subventions ayant dépassé, sur une base annuelle,. $200,000 au cours de chacune des deux dernières années.

Depuis janvier 1971, tous les actes posés dans un but de planification des naissances sont reconnus comme services assurés en vertu du régime d'assurance-maladie. Notons également que la direction des bourses et subventions à la recherche a approuvé pour plus de $110,000 de subventions reliées au domaine de la planification des naissances dans le cadre des programmes actuels de subventions à la recherche.

Voici la politique que nous avons formulée et je demande à M. Quinty qu'il vous en remette une copie. Nous pourrons au besoin discuter la façon dont nous entendons accorder des subventions pour donner suite à cette politique. Nous pourrons, si vous le désirez, discuter ce qui arrive du Centre de planning famillial du Québec. Comme je l'ai mentionné, je demande à M. Marier d'insérer dans son travail touchant à la famille, ce document, au besoin, de faire des commentaires; nous en expédierons aussi des exemplaires par la voie de la direction de la planification et de la recherche du ministère aux organismes concernés.

On pourrait peut-être passer à la dernière question, soit la caisse d'aide à la santé. Notre programme de développement des ressources pour la période du 1er avril 1972 au 31 mars...

Si vous le permettez, en ce qui a trait au programme quinquennal de développement des ressources au plan de l'enseignement et de la recherche dans le secteur de la santé, en premier lieu, je voudrais vous rappeler les objectifs que nous poursuivons de même que la façon, à partir de ces objectifs, dont nous avons formulé les critères pour le développement de ce programme. Dans le domaine de la santé, nos objectifs sont les suivants: améliorer l'état de santé de la population par une médecine globale axée sur la personne: améliorer l'état du milieu dans lequel cette population vit; enfin établir un régime de santé d'accès universel acceptable par la population, qui permette la distribution de soins de qualité sur les plans à la fois scienfitique, humain et social, et enfin un régime efficace, c'est-à-dire fondé sur le recours aux méthodes modernes d'organisation et de distribution des soins.

Les investissements en vue de la formation des professionnels de la santé ont donc été planifiés en vue d'assurer la réalisation de ces objectifs. Les programmes de formation des professionnels de la santé s'efforcent de préparer l'étudiant à répondre aux besoins de la population, ce qui signifie le développement des ressources humaines et physiques suffisantes. Qu'il suffise de mentionner que la notion d'une médecine communautaire exige des ressources physiques différentes des hôpitaux traditionnels, ceci en plus du fait que, dans nombre de nos établissements, lorsqu'ils ont été construits, la dimension de l'enseignement ou la nécessité de dispenser de l'enseignement était soit non identifiée encore ou non suffisamment reconnue lors du développement de ces ressources.

C'est pourquoi le plan quinquennal que nous présentons est axé sur le développement, premièrement, des centres locaux de services communautaires affiliés aux hôpitaux d'enseignement et aux facultés de médecine en vue d'assurer le contact des étudiants des séances de la santé avec les problèmes courants de la population. Il est axé, deuxièmement, sur le développement des services de consultation externes et des services d'urgence en vue de répondre aux besoins de la population et également de permettre la formation des professionnels de la santé dans ce type de soins.

Troisièmement, il est axé sur le développement de locaux adéquats pour l'enseignement aux étudiants des diverses disciplines en milieu hospitalier et également dans les centres locaux, et quatrièmement, d'un hôpital à caractère communautaire dans la ville de Laval. Ici, il est mentionné que c'est vraiment, dans ce programme, la seule addition de lits pour traitement actif de malades, ceci en vue de favoriser la formation de professionnels de la santé orientés vers la médecine générale et les soins communautaires. Cinquièmement, développement de centres de recherche dans les hôpitaux d'enseignement en vue de maintenir la qualité de la formation. Ici, nous rappelons, comme j'en ai

déjà fait état, que nous voulons favoriser tout autant la recherche biologique, épidémiologique qu'opérationnelle. Le plan quinquennal, tel que présenté, désire favoriser, par tous les moyens possibles, les objectifs poursuivis par notre ministère dans le domaine de la santé et, sans rompre avec la tradition, nous croyons qu'il permet de mettre l'accent sur les aspects de la formation qui apparaissent prioritaires. Il s'agit d'un programme de $101 millions sur cinq ans, qui prévoit des crédits de $28,500,000 pour l'exercice 72/73. Vous verrez, dans les tableaux qui vous seront distribués, comment ces crédits sont répartis, d'abord dans le temps, comment ils sont répartis par université, comment ils sont répartis par type d'institutions ou d'établissements ou encore, lorsqu'il s'agit de centres locaux de services communautaires, ils sont évidemment identifiés.

Je crois que c'est un progrès énorme que nous avons effectué, d'autant plus que la préparation de ce programme s'est faite en consultation étroite avec les facultés de médecine. Nous avions demandé aux doyens des facultés de consulter à leur tour les établissements affiliés à ces universités, établissements dans lesquels s'effectue de l'enseignement ou des activités de recherche. Voici pour ce programme et ceci termine pour tout de bon mon exposé.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, nous sommes restés sur notre appétit. J'ai dit tantôt que l'étude des prévisions budgétaires du ministère des Affaires sociales pourrait prendre deux heures. Je pense bien que le ministre a compris que, c'était une manière de signaler l'importance du budget des affaires sociales, $1,700,000,000. Le ministre est tout près de $1,700,000,000, mais je pense bien qu'il n'y aura pas de surprise dans le courant de l'année si on franchit le cap de $1,700,000,000, avec les budgets supplémentaires qui vont venir s'ajouter, les mandats spéciaux. Cela pourra aller au-delà de cela, comme d'ailleurs l'expérience des années précédentes l'indique. Cela représente tout près de 40 p.c. du budget total du Québec. Si on veut le traduire en chiffres, on voit tout de suite l'importance. Mais l'importance du ministère, M. le Président, ne fait pas que se traduire en chiffres. Je pense bien que tout le monde est conscient, surtout cette année, de l'importance de l'étude que nous allons entreprendre et de cette période de réflexion additionnelle que nous allons faire avec le ministre durant ces quelques jours. Il est heureux que nous puissions réfléchir ensemble et c'est le sens de ma remarque de tantôt, quand j'ai dit que nous étions ici pour aider le ministre parce qu'il traversait une période difficile. Ce n'est pas l'intention d'aider le ministre comme homme, comme faisant partie d'un groupement politique, mais le ministre des Affaires sociales qui représente tout de même un des rouages les plus importants du gouvernement provincial, du gouvernement du Québec, et le titulaire d'un ministère qui a un "leadership" important. Bien entendu, le ministère subit les conséquences et les déficiences du manque de vitalité ou de dynamisme dans le secteur économique, du manque de santé et du manque de travail, du manque d'institutions.

C'est le ministre des Affaires sociales qui en écope, à ce moment-là, qui est obligé, par des politiques ou par des programmes, de remédier à ce que j'appellerais, la plupart du temps, des situations difficiles ou des situations délicates. D a un contrôle total sur certaines politiques — elles sont plutôt rares — et il a un contrôle partagé sur d'autres politiques. Enfin, sur le troisième ordre de politiques et de programmes, le ministre n'a pas le contrôle qu'il devrait avoir, qu'il réclame, que tous les gouvernements ont réclamé, dossiers à l'appui. Maintenant que le ministre des Affaires sociales réclame avec un dossier plus complet, parce qu'il y a eu des études importantes depuis 1966 dans ce secteur... Ces études sont maintenant rendues à terme et indiquent clairement que non seulement il doit y avoir, de ce côté-là, un effort de réflexion et de dialogue, mais que cela doit déboucher aussi sur quelque chose de concret.

Alors, l'étude des crédits de cette année, M. le Président, se fait dans un contexte particulièrement délicat et important; délicat, parce que nous traversons une période assez troublée au Québec. Le ministère des Affaires sociales y est impliqué directement, parce que tout le secteur des institutions, le secteur des hôpitaux et des institutions d'hébergement et même, d'autres catégories de personnel, tous ceux qui sont impliqués dans la vaste négociation et le renouvellement, des conventions collectives... Directement, le ministère des Affaires sociales est impliqué dans le contexte actuel. Il ne doit pas se désintéresser du déroulement des négociations, parce que ces négociations vont avoir un effet direct sur les budgets du ministère. Selon le contenu de la négociation de la convention collective au chapitre de la rémunération et des bénéfices marginaux, les taux d'accroissement que nous a indiqués le ministre pourront être ou ne pas être respectés, à savoir le taux d'accroissement de 11 p.c. des soins de santé. Il restera aussi le côté social à calculer, le côté des institutions. Quelle sera la conséquence des ententes qui seront signées dans le secteur des conventions collectives?

M. le Président, le contexte est plus important, parce que le ministre a fait, dans le passé, certaines déclarations très explicites sur les objectifs qu'il poursuivait et qu'il poursuit encore. Il en a fait, l'an dernier, à l'occasion de l'étude des prévisions budgétaires. Je me souviens qu'au début de l'étude des crédits, le ministre nous a distribué un document très important sur une politique de sécurité du

revenu, une politique d'allocations familiales et une politique plus vaste de sécurité sociale. C'était le document de base, l'année dernière; c'était un objectif important que le ministre poursuivait et qu'il poursuit encore. Il nous le dira au cours de ces jours que nous passerons à étudier les crédits. Il a réalisé certains autres objectifs — comme je le disais tantôt — sur lesquels il a un contrôle entier, comme l'intégration des deux ministères. Il n'y a personne qui puisse empêcher le gouvernement et le ministre des Affaires sociales, à condition que le conseil des ministres l'approuve, de réaliser cette politique d'intégration, comme il n'y a personne non plus qui puisse empêcher le gouvernement et le ministre de réaliser une politique de réforme des structures, dans le domaine des services sociaux et dans le domaine de la santé, parce que nous l'avons fait avec le bill 65. Le ministre peut aussi augmenter les services, mettre à la disposition du public les services qu'il veut, que le gouvernement est capable d'assumer. Et nous l'avons fait par le projet de loi no 69.

Il y a d'autres lois que le ministre a indiquées, qui viendront également, mais il y a une partie du programme du ministre des Affaires sociales qu'il lui est possible de réaliser, compte tenu de ces contraintes que nous avons énumérées, soit des contraintes à l'intérieur du Québec, contraintes financières qui lui sont imposées par le contexte économique, par le budget préparé en collaboration avec ses collègues sous l'autorité du ministre des Finances. Ce sont des contraintes qu'il doit respecter.

Il y a aussi d'autres contraintes qui sont les lois conjointes avec le fédéral. Il vient de nous parler de la caisse d'aide à la santé; c'en est une c'est un programme. Mais il y a aussi des critères, des contraintes; il y a les programmes à frais partagés; il y a les discussions qui se poursuivent avec le gouvernement central pour se retirer de certains programmes; il y a des programmes conjoints, comme le Régime canadien d'assistance publique, qui permet à la province de Québec de retirer certains montants d'argent à l'intérieur de ces programmes, comme le programme d'aide sociale, mais toujours en respectant, non seulement la philosophie, mais aussi le régime lui-même, la législation elle-même.

Mais il y a une partie importante du programme du ministre dont nous avons discuté longuement avec lui, les années dernières, dont nous avons discuté à l'occasion de certaines législations. Et, comme lui, nous sommes conscients qu'actuellement, dans ce domaine-là — le programme de sécurité du revenu, le programme d'allocations familiales; si je prends le livre des crédits à la page 44, ça représente les articles 17,18, S19 et je pourrais ajouter l'article de la Régie des rentes— ça représente environ $350 millions, sans compter les autres répercussions dans d'autres programmes sociaux. Il s'agit donc réellement d'une partie importante du ministère et le ministre l'a dit lui-même, il y en a un des deux — je ne sais pas si c'est l'expression exacte qu'il a employée, mais je pourrais traduire ça comme ceci — une des deux sections importantes du ministère qui ne peut pas fonctionner.

Si du côté de la santé, ça peut fonctionner; du côté des services sociaux, ça fonctionne, malgré les autres remarques qu'a faites le ministre, les autres objections qu'a apportées le ministre, surtout en se référant au programme de Perspectives-Jeunesse et d'initiatives locales. On est entré dans les programmes des services sociaux. Le ministre a indiqué carrément qu'il y a une section importante de son ministère qui ne peut pas fonctionner. C'est la section de la sécurité du revenu.

M. le Président, nous sommes conscients, et je pense que tous les membres autour de cette table sont conscients de l'importance des événements qui se sont déroulés durant ces derniers jours. Importance, non pas pour la personne du ministre, parce que j'en fais toujours abstraction. Je ne veux aucunement entrer dans ses décisions personnelles quant à son attitude face à telle ou telle politique. C'est son problème personnel, je ne veux pas y entrer.

Mais je veux parler du ministre des Affaires sociales en tant que solidaire d'un gouvernement, en tant que membre du conseil des ministres et en tant que responsable d'un ministère qui veut mettre de l'avant certaines politiques et qui en est empêché par, je ne dirai pas les circonstances, parce que les circonstances changeront peut-être, mais par d'autres points de vue qui sont exprimés à un autre niveau du gouvernement et malgré, à mon sens, la clarté du dossier qui a été soumis; malgré, je dirais, l'incompréhension qu'on a de la façon que l'on reçoit ce dossier.

Parce que, à mon sens, il est tellement clair, il est tellement évident. Je le conçois pour avoir travaillé à ce dossier. Le cheminement du dossier ne nous a aucunement surpris; le cheminement est tel qu'il devait être. Et les implications des gestes qui ont été posés à l'échelle du gouvernement central lors du dernier budget et leurs conséquences, le ministre en a fait un tour d'horizon assez détaillé dans sa conférence de presse. Il a donné toutes les dimensions, toutes les conséquences de ces politiques qui ont été annoncées par différents programmes depuis deux ans.

M. le Président, nous ne comprenons pas comment il se fait que l'on ne puisse pas accepter le dossier soumis par le gouvernement du Québec, qui n'est que le cheminement logique de toutes les positions, de toutes les attitudes qui ont été prises depuis plusieurs années par les gouvernements successifs. Je pense bien que je m'engage là dans un sujet extrêmement important. Il est 5 h 15; il ne nous reste que trois quarts d'heure de discussions. Probablement que les autres participants autour de la table veulent, à un moment ou l'autre, aussi traiter de ce sujet. Il est important

que le ministre nous dise maintenant quelle est la possibilité pour lui de poursuivre la politique dans ce secteur important de son ministère, le secteur de la sécurité du revenu. Quelle est la possibilité pour lui de poursuivre, quelle est maintenant sa façon de voir le débat, qui se continuera ou ne se continuera pas? S'il se continue, quels sont les moyens, quels sont les mécanismes qu'il va employer pour pouvoir faire avancer le débat? S'il ne se continue pas, de quelle façon le ministre va-t-il essayer de mettre en place la politique qui a été proposée à la suite des différentes études qui ont été faites ces dernières années, politique qui est cohérente? On ne peut pas continuer dans l'incohérence actuelle. S'il y en a qui le savent, ce sont les députés qui sont aux prises, dans leur comté, avec ces problèmes qui sont soumis quotidiennement, que ce soient des problèmes causés par les lois du côté de l'assurance-chômage, problèmes causés par les lois du côté de la sécurité de la vieillesse, problèmes causés par les taux de rémunération quand il s'agit de formation professionnelle, problèmes causés par ces disparités de taux prévues par nos différentes lois.

M. le Président, la situation est intenable pour tout le monde et je pense bien que le ministre voudra peut-être nous faire une déclaration, même si elle ne couvre pas tout le sujet. Nous aurons probablement l'occasion d'y revenir à différents articles, mais je pense que c'est le moment tout désigné, avant d'entrer dans l'étude des crédits article par article de faire le point sur ce problème qui m'apparaît prioritaire.

M. CASTONGUAY: Est-ce qu'on pourrait entendre d'abord chacun des représentants, pour ne pas répéter...

M. LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires sociales suggère qu'on entende au moins un représentant de chacun des partis d'Opposition avant qu'il fasse des commentaires additionnels sur les propos venant du côté de la représentation des partis.

Donc, le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, depuis déjà plusieurs minutes que nous sommes à la commission parlementaire pour l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales. Le ministre nous a donné les objectifs qui avaient été fixés pour l'année 1970, pour l'année 1971 et maintenant pour l'année 1972. Cela me porte à poser une question très importante et je ne demande pas au ministre d'y répondre tout de suite parce que, peut-être, la réponse est-elle encore loin.

Tout cela est bien beau, ces belles grandes politiques que le ministre vient d'annoncer mais nous nous rendons compte que le ministère est toujours limité à des contraintes budgétaires. Nous sommes à l'étude des crédits de ce ministère qui prend une part très importante du budget total, soit tout près de 40 p.c. C'est le ministère, en termes de chiffres, le plus important. Et comme le disait tantôt le député de Montmagny, ce ministère est non seulement important à cause du volume des chiffres mais à cause de son état. Ce ministère a constamment à donner des services et je pense que c'est le ministère qui a distribué en quantité le plus grand nombre de services à la population, quand nous parlons des services de santé. C'est également à ce ministère que retentissent les cris les plus aigus de la population, soit les cris de la pauvreté.

Et je me demande réellement, après avoir entendu le ministre, où sont les premières priorités. Parce que j'ai l'impression que, parmi les priorités, il faudra choisir des priorités au ministère des Affaires sociales. Et j'étais pour soulever, évidemment, le problème de l'aide sociale. C'est probablement un cauchemar, même pour le ministre des Finances, le budget du ministère des Affaires sociales. Mais il faudra, quand même, à un certain moment, s'asseoir bien tranquillement, bien calmement et analyser cette situation qui devient de plus en plus alarmante. Ce n'est pas étonnant de voir l'augmentation des budgets qui sont affectés au ministère des Affaires sociales. Il y a eu des études qui ont été faites, et je fais allusion à la commission d'enquête qui a été dirigée, en partie, par l'actuel ministre des Affaires sociales, où il y a eu des recommandations bien concrètes qui ont été faites et c'est encore impossible, dans le moment, d'appliquer ces recommandations.

Quand on parle de revenu minimum garanti, il est plus temps que jamais, non seulement d'y penser, mais de faire en sorte que cela devienne une chose faite. Il serait très facile de prendre des heures et des heures pour cette intervention mais je pense qu'au fur et à mesure que nous allons étudier les crédits du ministère, il sera plus approprié de faire les remarques à chacun des articles à mesure que nous les étudierons.

Il y a des priorités à respecter à l'intérieur de chaque ministère et j'ai l'intention de suggérer au ministre, selon un humble député — qu'il soit de milieu rural ou autre, cela a peu d'importance — les priorités qu'il devrait respecter à l'intérieur du ministère. La pauvreté devient de plus en plus alarmante. Et je me demande si ce n'est pas justement là que le ministère devra concrétiser le plus de choses pendant l'année 72/73.

J'attire l'attention du ministre sur les grandes politiques qui ont été énoncées. J'espère que nous aurons quand même l'occasion d'y revenir en étudiant chacun des articles.

M. LAURIN: M. le Président, nous voyons que le ministre a un nouveau sens de la cohérence aussi bien dans le temps que dans l'espace. Dans l'espace, nous l'avons vu par l'exposé magistral de nos défaites. Il l'a fait il y a quelque temps. Dans le temps, parce que,

dans le bilan qu'il vient de nous tracer de son ministère, il prend bien soin d'articuler les politiques actuelles avec les politiques anciennes. Il a pris le soin de nous rappeler les objectifs qu'il s'était fixés à son entrée au ministère, les objectifs qu'il se fixait en 1971, les objectifs qu'il se fixait en 1972. L'an dernier, il nous avait fait un bilan de son activité jusqu'au moment de la présentation des crédits. Cette année, il nous fait le bilan de l'année 1971. Il nous rappelle ses objectifs de 1972 et la partie de ses objectifs qu'il a pu réaliser. Nous saisissons très bien le sens de son action. C'est très clair, comme l'a dit le député de Montmagny.

On peut suivre le fil directeur de son action qui correspond exactement au fil de sa pensée avant qu'il n'entre dans le cabinet et depuis qu'il est dans le cabinet. Il a donc préparé ses crédits avec toute l'attention, la minutie et ce sens de la cohérence dont il avait toujours fait preuve jusqu'ici. C'est ce qui me fait dire que nous nous ennuierons beaucoup de lui car je doute que le prochain ministre puisse faire montre des mêmes qualités. Je le déplore d'avance.

Dans son exposé, il a fait mention des responsabilités de son ministère, responsabilités qui croissent avec les années, non seulement en raison d'une meilleure définition, d'une définition plus exacte de la nature du mandat confié au ministère mais aussi en raison de l'évolution de notre population qui, malgré le marasme qu'on se plaît à souligner parfois, continue quand même son petit bonhomme de chemin, continue d'évoluer au point de vue économique, continue d'évoluer surtout au point de vue de ses moeurs, de ses habitudes de vie, de ses habitudes de pensée, continue d'évoluer dans la conscience de ses droits, dans l'organisation de sa vie démocratique. Je pense que tous ces facteurs d'évolution contribuent à nous faire reconnaître avec plus de précision, plus de clarté, le mandat, l'essence du mandat du ministère des Affaires sociales.

D'ailleurs, c'est un signe des temps qu'on ait senti, à un moment donné, le besoin de fondre les deux ministères de la Santé et du Bien-Etre social. Je pense qu'en fusionnant ces deux ministères, on ne faisait que traduire au niveau des structures un changement qui s'était déjà manifesté au niveau collectif, à ce niveau de l'évolution des moeurs, des mentalités et des structures sociales. C'est ce mandat, ce rôle le plus ample, le plus précis du ministère des Affaires sociales, je le vois comme reprenant le rôle traditionnel évidemment du ministère de la Santé et du ministère des Affaires sociales mais également en y ajoutant des dimensions nouvelles; rôle traditionnel qui était celui que tout le monde connaît bien, le rôle du ministère des Affaires sociales est de réparer les avatars que subit la machine humaine, avatars qui peuvent être de plusieurs sortes, qui peuvent menacer son équilibre biologique, et alors on a les maladies physiques que les médecins sont obligés, sont amenés, sont appelés à traiter et encore plus à prévenir, également, avatars sociaux, entendus à tous les sens du terme, avatars, par exemple, dans le développement de l'individu, développement au point de vue de l'éducation, développement au point de vue de la participation à la vie sociale, développement au point de vue également de l'insertion de l'individu dans les groupes dont il fait partie, et ici je pense, par exemple, à la famille, aux groupes intermédiaires, aux classes sociales, aux secteurs d'activité. Et, il peut, en effet, survenir des avatars de développement à l'individu au seul point de vue de son développement en tant que personne de même qu'au développement de son appartenance au groupe dont il fait partie.

A ce point-là, M. le Président, nous sommes presque obligés de passer de la dimension réparatrice du ministère des Affaires sociales à la dimension de développement qu'il est de plus en plus obligé d'assumer, développement de la personne. D'ailleurs, un des plus beaux mémoires de la commission d'enquête porte précisément sur cette société de développement qui doit devenir de plus en plus notre préoccupation. Donc, société de développement.

En même temps, elle porte, je crois, de plus en plus, sur une dimension que l'on pourrait appeler la promotion de l'individu à tous les sens du terme. Et là, on est presque obligé de se préoccuper, même au ministère des Affaires sociales, de la dimension économique du développement c'est-à-dire de l'insertion de l'individu, de l'homo économicus dans la société dont il fait partie, parce qu'il n'y a pas que l'homo rationalis.

Encore une fois, il est fatal que le ministère des Affaires sociales soit appelé à se préoccuper de la dimension de soutien du revenu, de maintien du revenu, de coordination de toutes les mesures sociales qui peuvent assurer ce maintien et cette sécurité du revenu. Au fond, ils ne sont qu'une autre façon d'appeler, de dire que l'individu n'est pas statique, qu'il est appelé à se développer. Pour se développer il a besoin de toutes les ressources de la collectivité et en même temps, il doit lui-même apporter sa contribution à la société. En ce sens, le ministère des Affaires sociales a d'une part un rôle primaire à jouer, un rôle de moteur, d'agent, d'avant-garde, de fer de lance dans l'évolution d'une société. Négativement, malheureusement, c'est lui qui hérite de toutes les carences, de toutes les incuries qui se manifestent dans d'autres ministères, à vocation proprement économique. Si le cabinet, si tel ou tel ministère ne font pas leur devoir ou ne sont pas capables d'assumer leurs responsabilités, de procurer à une société le développement économique dont elle a besoin, d'assurer à l'individu les matériaux techniques, économiques dont il a besoin pour assurer son développement, ces ratés de développement, ces avatars dont on parlait tout à l'heure, à ce moment-ci, se manifestent au

niveau de la collectivité. Le ministre des Affaires sociales est quand même obligé de les reprendre à son compte et est obligé de réparer. C'est la raison, par exemple, pour laquelle le chapitre de l'aide sociale devient un chapitre de plus en plus sombre au Québec. Cette Loi de l'aide sociale constitue en elle-même un aveu d'échec de cette société. Les montants de plus en plus élevés qu'elle conscrit, qu'elle exige, manifestent également l'échec de notre société politique à assurer le développement des individus.

Au fur et à mesure que nous voyons le budget de cette Loi de l'aide sociale augmenter, nous voyons également se produire une détérioration de la fibre morale de l'individu, une augmentation de ses besoins de dépendance, de ses appétits de revendication, de sa paresse vitale, de son manque de participation à l'essor, à la vie, à la santé collective. Cette Loi de l'aide sociale constitue pour moi un symptôme toujours plus grave de cette maladie qui affecte nos sociétés. C'est la raison pour laquelle autant le ministre actuel que certains membres de l'Opposition ont préconisé deux séries de mesures. D'abord, une politique sociale cohérente, intégrée, globale, axée sur une culture spécifique et propre. Deuxièmement, d'une façon plus particulière, le remplacement de la Loi de l'aide sociale par un régime de revenu minimum garanti. Même s'il n'est pas parfait, il peut au moins constituer un cran d'arrêt à cette détérioration de la fibre morale de l'individu, une invite à la responsabilisation, à l'insertion de l'individu à titre de membre productif dans la société dont il fait partie.

Donc c'est à tous ces titres que le ministre et que le ministère des Affaires sociales sont appelés à jouer un rôle de plus en plus grand dans notre société. Je ne parle pas d'un autre rôle que le ministère des Affaires sociales est forcément aussi appeler à jouer soit celui de producteur, d'investisseur. Lorsqu'on est obligé de réparer, de promouvoir, de prévenir, d'assurer le développement des individus aussi bien que des groupes, il faut évidemment mettre en place une multiplicité de services très variés. Il peut mettre au travail un très grand nombre de spécialistes, de fonctionnaires, d'individus qui, de près ou de loin, participent à la marche de ces services. Cela constitue une injection constante dans l'économie d'une nation. A ce moment-là, même si c'est un résultat, même si c'est un bénéfice secondaire, il reste que la valeur proprement économique du ministère prend une importance de plus en plus grande. C'est donc la raison pour laquelle le ministère des Affaires sociales nous apparaît, sinon la clé maîtresse, du moins une des principales clés d'un gouvernement.

C'est aussi la raison, M. le Président, pour laquelle nous portons une telle attention aux activités de ce ministère, aux objectifs, aux avatars qui peuvent marquer l'essor de son action. C'est la raison aussi pour laquelle nous déplorons avec tellement de tristesse toutes les causes majeures qui peuvent affecter, non seulement son développement futur, mais même ses activités courantes et quotidiennes.

C'est peut-être la raison également pour laquelle, pour se rapprocher de l'actualité, nous avons appris avec une telle tristesse, sans qu'il soit de la faute du ministre, l'échec d'un volet à ce point important de sa politique, échec dont il nous a fait part récemment.

Donc, M. le Président, l'étude des crédits du ministère de la Santé nous donne l'occasion de revoir les grands objectifs de ce ministère et son insertion dans notre société contemporaine. Elle nous amène aussi à nous poser des questions sur le genre de politique que nous voulons dans ce secteur. La constitution du Canada a toujours donné une priorité exclusive au gouvernement local, si l'on peut s'exprimer ainsi, en cette matière. En ce qui concerne en particulier les services sociaux, cela allait de soit. C'était tellement lié à la personne, tellement lié à la culture que ceci tombait sous le sens que la priorité et l'exclusivité devaient en être réservées aux autorités qui sont les plus proches du peuple, aussi bien par la langue, par la culture que par le niveau d'administration, que par la connaissance exacte qu'ils ont des priorités et des besoins. Cette exclusivité demeure, même lorsqu'il s'agit de l'extension du rôle dont je viens de parler.

Nous réalisons, par exemple, que pour assurer des meilleurs services sociaux, que pour assurer la réparation aussi bien que la prévention, que la promotion du développement, il faut passer par des mesures qui prennent une allure économique, soutien du revenu, formation professionnelle, assurance-chômage, assurance-salaire. Il faut en tirer la déduction absolument essentielle que cette extension demande, exige que le ministère des Affaires sociales garde, sinon son exclusivité, à tout le moins une très haute priorité dans l'établissement des politiques. Autrement, comme le ministre l'a d'ailleurs constaté, a été obligé de le constater, non seulement on est dans l'impossibilité de faire cette politique cohérente, planifiée, globale et surtout proche des individus, on se rend compte également que l'exclusivité qu'on nous avait en apparence attribuée devient souvent lettre morte dans plusieurs secteurs.

Ceci est tellement vrai, M. le Président, que dans la nouvelle Loi de l'assurance-chômage on a vu que le gouvernement central commençait à envahir le champ des services sociaux en se réservant le champ des allocations pour maternité et pour grossesse. Il faut presque se battre constitutionnellement pour aller chercher quelque chose qui nous appartient en propre. Nous l'avons vu également avec le programme Perspectives-Jeunesse et initiatives locales où par un autre moyen, le gouvernement central est en train de s'approprier une action, à cause de son pouvoir de dépenser, qui touche directement des services qui, au point de vue constitutionnel, sont exclusifs au pouvoir québécois.

Ceci est d'autant plus grave que nous sommes au Québec. Nous ne sommes pas dans n'importe quelle province canadienne que lie ensemble une uniformité de langue et de culture. Elles peuvent, elles, parfaitement déléguer à un pouvoir central le soin de défendre leurs intérêts collectifs. Nous sommes en effet au Québec où la langue, la culture, la tradition sont différentes, d'une part; où depuis très longtemps, depuis 400 ans, les citoyens ont pris l'habitude de se référer, surtout en ces matières qui touchent leur vie au plus près, au seul gouvernement en qui ils se reconnaissent, qui parle leur langue, qui défend leur culture, c'est-à-dire, le gouvernement québécois.

Par suite de cette intrusion, de cet envahissement, par suite de cette invasion qui équivaut presque à une occupation, on se rend compte que ce gouvernement québécois est en passe de devenir un gouvernement de canton, un gouvernement de municipalité à qui on ne confie plus que des pouvoirs d'exécution, chez qui on encourage la démission, la dépendance, l'abdication de leurs responsabilités propres.

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je comprends parfaitement et je m'associe, du plus profond de mon coeur, à toutes les protestations que le ministre des Affaires sociales a élevées à l'encontre du gouvernement central. C'est la raison pour laquelle je me reconnais dans ces protestations, en tant que Québécois, fils de Québécois, d'ancêtres québécois, bien avant qu'un parti indépendantiste n'existe au Québec.

Le ministre a parlé le langage de la nation québécoise, il a fait entendre un cri qui est celui de tous les Québécois authentiques. C'est la raison pour laquelle je comprends un peu plus difficilement que le gouvernement, à la suite de cet appel extrêmement éloquent, de cette démonstration absolument convaincante, irréfragable, à laquelle on ne peut rien opposer, ne change pas immédiatement son fusil d'épaule et ne place l'autre gouvernement devant des faits accomplis.

Que pourrait être ce fait accompli? On le verra bien dans les semaines qui viennent, mais je poserai sûrement la question au ministre à ce moment-ci. Si tout ce qu'il a dit est vrai, si ce que nous disons, si ce que les Québécois disent est vrai, comment pouvons-nous remonter le courant?

Après toutes ces défaites successives qui s'inscrivent dans le temps, qui s'accumulent et qui s'accélèrent depuis quelque temps, comment pouvons-nous véritablement faire machine arrière? Comment pouvons-nous vraiment renverser la vapeur? Comment pouvons-nous reconquérir les terrains, les territoires que nous avons perdus, quand nous savons que ces territoires sont tellement nombreux? Quand nous savons, par exemple, qu'ils touchent aussi bien le domaine des allocations familiales que celui des pensions de vieillesse, celui de l'assurance-chômage que celui de l'assurance salaire, que celui de l'éducation postsecondaire, que celui des centres de main-d'oeuvre, que celui de l'habitation, que celui du loisir? Avec la lenteur des mécanismes que nous connaissons, avec cette intransigeance, cette arrogance — M. Bourassa lui-même le disait — que nous constatons depuis quelque temps à Ottawa, comment pouvons-nous espérer, en un si court laps de temps, reconquérir, refaire cette robe sans couture que devrait constituer notre politique de sécurité sociale?

Je pense qu'il faut faire montre d'un optimisme absolument idéaliste, utopique, pour penser que, d'ici quelque temps, nous pouvons renverser la vapeur. A moins que des magiciens ne cachent dans leurs manches des recettes magiques que je ne connais pas pour ma part, je pense qu'on doit s'attendre à ce que le glissement, l'érosion que nous avons connus, sinon s'accentuent du moins se maintiennent dans l'état que nous connaissons, que nous déplorons actuellement et que les difficultés que laisse présager cette érosion s'accentuent.

C'est là une autre dimension du problème, M. le Président. D y a la dimension temporelle. Qui n'avance pas recule — quelqu'un a dit ça, il y a très longtemps et je pense que c'est très vrai — qui n'avance pas recule. C'est vrai d'une façon éternelle mais c'est encore plus vrai dans la conjoncture où se trouve placé actuellement le Québec. Qui n'avance pas recule, parce que les Québécois avancent. Les Québécois avancent dans la nature, la complexité, l'intensité des problèmes qu'ils connaissent. Par exemple, M. le Président, vous savez que 32 p.c. des familles pauvres habitent au Québec, alors que nous ne formons plus que 26 p.c. de la population.

Or, 55 p.c. des familles qui se situent en deça du seuil de la pauvreté comptent trois ou quatre enfants et nous en avons encore notre très grande part.

Nous savons que, dans plusieurs régions du Québec, le chômage sévit; ce chômage qu'on ne réussit pas à abaisser, qui, même au mois d'avril, au moment où je vous parle, en 1972, s'élève à 9. 2 p.c, 216,000 travailleurs; la province où nous comptons le plus de chômeurs, le taux désaisonnalisé y est encore très élevé, ce qui témoigne des vices de structure d'une économie vieillissante et chancelante.

Tous ces problèmes, M. le Président, dont les uns sont économiques, dont les autres sont sociaux, laissent présager, comme ils l'ont manifesté au cours des dernières années, encore davantage des tensions sociales, des crises sociales qui explosent ici et là, qui donnent lieu à des manifestations que tout le monde déplore mais dont il importe quand même de reconnaître les causes.

Donc, non seulement qui n'avance pas recule, mais, en 1972, qui n'avance pas recule bien davantage au Québec que dans les autres provinces du Canada. Et ceci est très dangereux car les Québécois ont pris conscience de leurs droits. On parle sans cesse du droit à l'éducation, du

droit à la santé, du droit à l'habitation, du droit aux loisirs; une fois qu'un citoyen est conscient de ses droits, il ne les oublie pas volontiers et la pression qu'il met sur tous ses gouvernements, qu'ils soient municipaux, scolaires, québécois ou qu'ils soient centraux, est très forte et il faut qu'il y ait une réponse à ces demandes.

On le voit tellement bien que M. Trudeau disait il y a quelques jours: Je ne comprends pas pourquoi le ministre des Affaires sociales s'oppose à l'augmentation des pensions de vieillesse, je ne vois pas pourquoi; nous donnons quelque chose aux vieux et tout le monde sait que les vieux en ont besoin.

Cependant, nous savons que les vieux, dans les autres provinces du Canada, demandent bien davantage qu'au Québec parce que les caractéristiques de notre société ne sont pas les mêmes que celles de la société ontarienne ou que celles de la Colombie-Britannique. Et c'est ça qui est dangereux. Si notre gouvernement, celui que nous avons toujours considéré comme notre gouvernement, à cause de sa marge de manoeuvre extrêmement mince au point de vue économique, à cause des pouvoirs, des compétences constitutionnelles qu'il ne possède pas, ne peut pas répondre à ces exigences, c'est un autre gouvernement qui va y répondre. Or, parce qu'on a encouragé dans notre pays la dépendance, l'appétit de revendication, même nos citoyens vont s'aliéner, vont oublier leurs véritables intérêts, leurs intérêts profonds, leurs intérêts à long terme, vont prendre l'immédiat et vont même participer à leur démission, à leur abdication, à leur vieillissement moral et psychologique, vont participer à leur écrasement, à leur étoufferaient collectif.

C'est un danger qu'on ne voit pas assez dans la population et c'est pour ça que je suis reconnaissant à M. le ministre de l'avoir signalé, à M. Cournoyer de l'avoir signalé, à M. Toupin de l'avoir signalé, de même que je suis reconnaissant à tous ceux qui le signalent, parce que c'est là un danger qui menace très profondément notre société. Si on ne le reconnaît pas, ce n'est pas le gouvernement du Québec qui sera menacé, ce n'est pas l'équipe libérale qui sera menacée, c'est notre peuple en tant que peuple, c'est notre nation en tant que nation.

Et cette action demanderait un rassemblement, un sursaut de dernière heure de toute notre collectivité afin qu'on mette définitivement un cran d'arrêt à cette tentative d'assimilation plus insidieuse que toutes les autres et qu'on remette la marche en avant afin que ce peuple, qui a quand même besoin de son gouvernement, puisse enfin trouver dans ceux qu'il a élus une réponse véritable à des aspirations aussi bien actuelles que futures.

Cette dimension temporelle, M. le Président, m'apparait donc extrêmement importante, à cause des situations de crise qui se répètent épisodiquement au Québec et qui risquent de se répéter, si les causes profondes du mal ne sont pas analysées et si l'on n'arrive pas, d'une façon énergique, presque comme celle de Churchill lorsque l'Angleterre a été attaquée, à souder de nouveau les énergies de ce peuple, à lui faire voir sa vérité et à mettre en place les mécanismes, les stratégies, les politiques qui nous aideront véritablement à nous sauver. Même si l'on dit que l'époque de la survivance est révolue, je dis "à nous sauver", je crains peut-être encore davantage cette érosion subtile et insidieuse de notre volonté de vivre, de notre vouloir-vivre collectif, que les défaites fracassantes.

Je pense que c'est tout cela qui est posé par la présentation que nous a faite aujourd'hui le ministre et par le bilan qu'il a fait en un autre lieu, il n'y a pas longtemps. Je lui poserai la question suivante: Qu'entend-il faire, face à ce bilan, à cette situation, face à sa conscience? Il nous l'a dit. Qu'entend-il faire pour que, de façon opportune, il assure ce salut de notre collectivité?

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui désirent apporter des commentaires, avant que le ministre n'y donne suite?

M. MASSE (Montcalm): Je pense que le député de Bourget a fort bien résumé et le dossier des Affaires sociales et les préoccupations des membres de cette assemblée. Je laisserais le ministre des Affaires sociales répondre aux interrogations qui ont été posées.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre.

M. CASTONGUAY: M. le Président, on a fait allusion à la conférence de presse que j'ai donnée la semaine dernière. Je pense bien que ce ne serait pas le moment, pour moi, de reprendre ce que j'ai dit à ce moment-là. C'était clair, de l'aveu de tous ici.

Parce qu'on a bien mentionné — le député de Montmagny et celui de Bourget l'ont fait — qu'il faut distinguer l'individu qui occupe le poste de la fonction de ministre des Affaires sociales, je ne crois pas que ce soit l'endroit pour discuter de mon avenir personnel.

Il y aurait peut-être une remarque, toutefois, que je voudrais faire à la suite de cette conférence de presse, compte tenu du danger ou du risque que je cours, que le geste que j'ai posé soit mal interprété. A mon sens, la semaine dernière, nous avons, en fait, été confrontés avec des urgences qui se situaient à des niveaux très différents. Je le comprends.

Premièrement, si l'on reprend les événements dans le temps, lundi nous avons appris — quant à moi, je l'ai appris par la voie des nouvelles, tard en soirée — le contenu du budget Turner. Nous avons aussi appris, au cours de la même journée, les sentences prononcées à l'endroit des trois chefs des grandes centrales du front commun.

Et mardi, en Chambre, à des questions qui m'ont été posées, j'ai fait un premier bref commentaire qui indiquait clairement ce que je pensais de ce qui arrivait à la suite de l'annonce de ce budget, quant à la poursuite d'une politique de sécurité du revenu intégrée, cohérente et qui permettait une allocation des ressources aussi équitable que possible, et, par voie de conséquence, ce qui arrivait quant à la possibilité de poursuivre dans l'implantation d'une politique sociale, dont une politique de sécurité du revenu constitue un des éléments majeurs et essentiels...

Mardi, au même moment, les chefs des centrales syndicales décidaient de ne pas se prévaloir, pour le moment tout au moins, de leur droit d'appel. Et je pense qu'il était encore imprévisible, à ce moment-là, de connaître quelle serait l'évolution de la situation, suite à cette décision de leur part. Et il est évident que nous vivons une période où les gestes posés ont bien souvent des effets imprévisibles. C'est une des conséquences, je pense bien, de la situation de crise que nous traversons. Si donc, j'ai poursuivi à la suite de ma réponse de mardi en Chambre, c'est qu'il m'apparaissait extrêmement important avant d'être, encore une fois, mis devant un fait accompli, d'attirer l'attention sur ce qui était en voie de se produire. Et, au moment où je l'ai fait, je n'étais pas conscient de la rapidité avec laquelle la situation était en voie d'évoluer sur l'autre plan. J'ai espéré, à ce moment-là, que ce geste pourrait mettre en relief l'action précipitée du gouvernement du Canada et peut-être, aussi, alerter la vigilance des députés du Québec à la Chambre des communes.

Compte tenu de la situation du conflit des relations de travail que nous vivions à ce moment-là et que nous vivons dans une certaine mesure encore, si je n'avais posé aucun geste, évidemment, une fois cette crise passée, le budget ayant été, en ce qui a trait aux pensions de vieilesse, traduit en une loi, on aurait pu facilement me reprocher par la suite de ne pas avoir attiré l'attention sur cette question, de ne pas avoir fait les représentations appropriées. Alors, j'ai couru le risque et j'en étais conscient, même si je ne savais pas à quelle vitesse la situation évoluerait, de soulever le problème de la façon qui m'apparaissait la plus énergique possible. Je savais fort bien que je prenais un risque personnellement et je crois que, par la suite, le geste que j'ai posé était tout à fait justifié et j'ai donné les raisons pour lesquelles je l'ai posé.

Pour le moment, avec votre permission, je voudrais changer de sujet pour les raisons que j'ai mentionnées.

En ce qui a trait maintenant aux commentaires qui ont été faits, quoiqu'il soit important de faire quelques commentaires sur ceci, je suis bien conscient du fait d'abord — pour repartir au premier niveau, le niveau le plus important, soulevé par le Dr Laurin — des conséquences ou encore des incidences que le type de société et particulièrement le fonctionnement au plan économique de notre société ont sur les citoyens, que ce soit au Québec ou à l'extérieur, et particulièrement au Québec compte tenu des caractéristiques de notre économie. Je partage ce point de vue voulant que le ministère des Affaires sociales doit graduellement s'intéresser davantage à des dimensions plus larges que celles strictes de ses politiques et programmes. Trop souvent, par leur nature même au plan de la prévention, ou au plan des conclusions qui peuvent être tirées de leur application, ces programmes, et ces politiques pourraient faire en sorte que, dans d'autres secteurs de l'activité économique et sociale, l'on prévoie mieux les conséquences. Donc, je suis bien conscient du rôle que nous devons jouer à ce sujet.

Justement, c'est une des raisons pour lesquelles, dans les nouvelles structures du ministère, en plus de la direction, de la planification et de la recherche, une direction des affaires extraministérielles a été mise sur pied. Par la voie de cette direction, en association avec la direction de la planification, de la recherche, des autres directions, nous tentons de plus en plus, à la fois, de nous aboucher au courant des travaux qui se font à l'extérieur, de participer à l'évolution dans ces secteurs, également de façon plus immédiate, au sein du gouvernement du Québec, et d'apporter le type de contribution auquel on se réfère. Par exemple, récemment, ou au cours des derniers mois, le ministère s'est associé de façon très étroite aux travaux qui s'effectuent présentement à l'Office de planification et de développement, de la même façon, nous avons voulu nous associer de diverses façons au ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre, nous le faisons dans les domaines politique et scientifique que nous sommes en voie d'élaborer, de concrétiser et, sur ce plan, j'en suis bien conscient, nous devons poursuivre dans cette voie.

En ce qui a trait aux questions que l'on m'a posées concernant notre politique de sécurité du revenu, certains commentaires ont été faits. Nous avions discuté longuement au mois de décembre de ce que signifiait l'augmentation du budget au titre de l'aide sociale. Le seul commentaire que je vais refaire à ce moment-ci, parce que j'en avais fait une analyse assez longue de ce que signifiait l'augmentation de ce budget, c'est simplement d'apporter une précision. C'est que, malgré tout ce qu'on peut dégager de négatif de l'augmentation de ce budget, on ne doit pas, malgré tout, juger uniquement par les chiffres absolus au titre des prestations qui sont versées parce qu'une partie assez substantielle de l'augmentation provient de la hausse des prestations.

On ne peut donc pas dire que, parce que le budget a augmenté de près d'un tiers ou un quart au cours de la dernière année, le nombre de bénéficiaires a augmenté dans la même proportion. C'est le seul point que je voudrais faire ressortir,

la seule précision que je voudrais indiquer quant à cet aspect des questions qui ont été soulevées face à l'augmentation du budget de l'aide sociale.

Deuxièmement, on a parlé de nos priorités. Il est clair qu'au ministère des Affaires sociales, en ce qui a trait à la politique de sécurité du revenu, nous avions mis l'accent sur l'élimination ou la diminution de la pauvreté. Je dis bien en ce qui a trait aux politiques de sécurité du revenu. Ceci nous apparaissait bien important, compte tenu du fait que, dans bien des programmes d'assurance-sociale ou des programmes de prestations à caractère universel établis dans le passé, l'impact au plan de la redistribution des revenus vers la partie de la population qui vit dans la pauvreté n'était pas suffisant.

En ce qui a trait aux services toutefois, étant donné la nature des services qui sont en cause, services de santé, services sociaux, il nous apparaît extrêmement important qu'au premier titre ces services soient universels quant à leur accès et qu'ils soient adaptés, organisés de telle sorte que, compte tenu des caractéristiques des populations, ils soient aussi accessibles, non pas seulement au plan financier, géographique, mais au plan — je ne sais pas si c'est la meilleure expression— des attitudes des individus qui dispensent ces services, de telle sorte que la population qui les requiert n'ait pas à franchir une barrière psychologique.

En plus de modifications aux réseaux de services pour les rendre aussi accessibles, pour leur donner les caractéristiques que je viens de décrire, nous devons avoir certains programmes particuliers qui s'adressent aux populations défavorisées. Nous avons des initiatives qui ont été prises dans ce sens et nous comptons les poursuivre. Il y a, par exemple, un programme spécial en collaboration avec la Commission des écoles catholiques de Montréal pour les enfants de milieux défavorisés, pour améliorer leur alimentation.

M. CASTONGUAY: ... Il y a, cet été, un programme avec la Faculté d'art dentaire de l'Université de Montréal et celle de McGill, précisément encore pour des populations, des enfants de secteurs, de zones défavorisés. Je pourrais en énumérer certains autres. C'est, dans les grandes lignes, les approches que nous prenons, au plan de la sécurité et du revenu axant sur la pauvreté et au plan des services, facilité d'accès avec certains programmes particuliers, spéciaux, pour faire en sorte que les écarts entre les populations défavorisées, à divers plans, puissent être résorbés, ce qui ne pourrait probablement pas être le cas dans un avenir prévisible, si nous ne comptions que sur l'implantation ou le développement d'un réseau de services universels.

En ce qui a trait, maintenant, à la possibilité de poursuivre la politique de sécurité de revenu, que j'ai déjà exposée la semaine dernière, je crois que les derniers gestes posés en ce qui a trait à la pension de vieillesse, constituaient la démonstration finale que la poursuite de cet objectif m'apparaissait irréalisable.

A court terme, qu'est-ce qu'il nous reste à faire? Il m'apparaît nécessaire, malgré tout, de poser au moins certains gestes dans le contexte actuel. Ces gestes sont des amendements qui m'apparaissent assez pressants au plan du Régime de rentes du Québec, d'une part, dans le même sens toutefois que la politique que nous avions exposée, des modifications à la Loi de l'aide sociale, modifications qui auraient pu venir plus tôt, mais que nous devons reporter, parce que nous devons, encore une fois, rechercher un certain équilibre, compte tenu des modifications à apporter à la pension de vieillesse. Quant aux allocations familiales, vraiment, dans le moment, je ne suis pas en mesure de dire quels gestes nous pourrons poser. Comme vous le voyez, il s'agit de gestes dont la portée est relativement restreinte, mais qu'il nous faut de toute façon poser, je crois, compte tenu du fait que, à mon avis, la population ne doit pas faire les frais â court terme de ces luttes que nous avons au plan constitutionnel.

J'ai examiné les documents qui ont été produits au cours des derniers mois, compte tenu des difficultés que nous éprouvions dans ce secteur. Je serais disposé, au besoin, si vous le désirez, â en discuter. De la sorte, si des suggestions intéressantes ne nous viennent pas à l'esprit en ce moment et si des suggestions intéressantes pouvaient être dégagées de nos discussions, j'en serais évidemment heureux.

Je dois dire que j'ai examiné ces documents; je pense en particulier au document que le Parti Québécois a publié, je ne me souviens pas précisément quel mois, au cours de l'hiver ou tard dans l'automne; de toute façon, je suis tout à fait disposé à poursuivre la discussion de telle sorte que, si des suggestions intéressantes se présentent, nous les envisagerons évidemment avec le plus grand intérêt.

Enfin, pour terminer, étant donné l'heure, et compte tenu du fait qu'un certain nombre des fonctionnaires ici présents n'y étaient pas au début de la séance, je voudrais simplement, étant donné que le début de nos travaux est venu un peu plus rapidement que prévu, contrairement à l'an dernier, leur demander de se présenter au début de la séance que nous aurons demain matin et qui, me dit-on aura lieu à dix heures, à la même salle, 81 A.

Quant au programme de travail, je ne sais pas, désirez-vous que nous procédions dès demain article par article, quitte à ce que les questions qui ont fait l'objet d'exposés ou de documents, soient abordées au moment qui apparaîtra le plus approprié?

M. LAURIN: On pourrait décider ça demain matin.

M. CASTONGUAY: Certainement.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Seulement un mot, M. le Président. Le ministre demande si nous allons en décider demain matin. Le député de Bourget a fait une remarque, il aimerait mieux reporter à demain matin la décision sur l'ordre des travaux; je pense que c'est exact. Nous allons prendre connaissance ce soir des documents que le ministre nous a transmis; je pense bien qu'il y aura lieu de continuer la discussion générale.

De toute façon, les sujets que nous abordons d'une façon générale à l'article 1 ne reviennent pas par la suite. Nous les avons traités, donc le travail est fait. Soit que l'on décide, demain matin, de les traiter d'une façon générale ou de les traiter un par un, je pense que tous les sujets que nous pouvons traiter se rattachent à l'un ou l'autre des articles.

Si nous voulons parler de la sécurité du Régime de rentes du Québec, le ministre en a parlé à la fin, nous pouvons le faire à un article en particulier, la même chose pour l'aide sociale.

M. CASTONGUAY: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Donc, messieurs, la commission ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures, même local.

(Fin de la séance à 18 h 11)

Séance du jeudi 18 mai 1972

(Dix heures treize minutes)

M. GIASSON (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

Au moment de suspendre les travaux de la commission hier, le ministre était à faire des commentaires sur les remarques formulées par les représentants des trois partis de l'autre côté de la table. Je pense qu'il va de soi que nous redonnions la parole au ministre ce matin.

M. CASTONGUAY: M. le Président, j'avais mentionné hier que, contrairement à l'an dernier, au début de la séance, les officiers du ministère, les présidents des régies ne s'étaient pas présentés, étant donné que nous avions commencé un peu plus tôt que prévu. Ce matin, avant de commencer, je leur demanderais de se présenter.

Je présenterai les présidents des régies. Le sous-ministre, le Dr Brunet, je pense que tout le monde le connaît. Il y a M. Gill Fortier, le président de la Régie des rentes; M. Robert Després, le président de la Régie de l'assurance-maladie; M. Roger Marier, le président du Conseil des affaires sociales et de la famille. Peut-être que je pourrais demander à chacun de se présenter, en donnant son titre, de façon que vous puissiez identifier chacun des fonctionnaires. J'en profite pour signaler qu'il s'agit là d'une équipe vraiment dynamique, extrêmement dévouée et qui fait un travail assez extraordinaire, si nous en jugeons par toutes les réalisations effectuées; de fait, c'est par eux que tout cela a été effectué.

Peut-être pourrions-nous commencer par M. Savard ou M. Turgeon, pour venir comme cela?

M. TURGEON: Claude Turgeon, directeur, services communs à la programmation.

M. SAVARD: André Savard, directeur du service de l'aide sociale à la direction de l'attribution.

M. DIONNE: Pierre Dionne, directeur, systèmes et méthodes.

M. GIROUARD: Albini Girouard, directeur des services sociaux publics à la direction des programmes spéciaux.

M. OUELLET: Aubert Ouellet, sous-ministre adjoint, direction générale de la planification.

M. LABERGE : Martin Laberge, direction de l'agrément des établissements.

M. HOUDE: Jean-Guy Houde, sous-ministre adjoint, administration.

M. FORGET: Claude-E. Forget, sous-ministre adjoint, financement.

M. BEAUSOLEIL: Gilles Beausoleil, sous-ministre adjoint, affaires pro ministérielles.

M. GAUDREAULT: Gilles Gaudreault, relations professionnelles.

M. CHAMARD: Charles Chamard, directeur des budgets.

M. LALIBERTE: Hector Laliberté, chef, analyse et contrôle budgétaire.

M. CANTIN: Réjean Cantin, directeur des immobilisations et de l'équipement.

M. REGIMBALD: Gilles Regimbald, directeur de la gestion des fonds au financement.

M. BERGERON: André Bergeron, chef des données financières et opérationnelles, financement.

MME WELLS: Amélie Wells, adjoint administratif du sous-ministre adjoint, bureau de M. Forget.

M. CASTONGUAY: Mme Wells, qui est avec M. Forget.

M. MORISSETTE: Robert Morissette, administration.

M. ROBERT: Roger Robert, directeur de l'aide sociale.

M. ROY: André Roy, chef, service administratif à l'aide sociale.

M. BERGERON: R.-P. Bergeron, sous-ministre adjoint, programmation.

M. PIGEON: Jacques Pigeon, chef des relations régionales, programmation.

M. PERIARD: Paul Périard, direction générale de la planification.

M. ESCOJIDO: André Escojido, secrétaire du Conseil des affaires sociales et de la famille.

M. DUBOIS: Jean-Claude Dubois, chef du service du contrôle, administration.

M. BOUCHER: Marc Boucher, planification financière et placement.

M. PLAMONDON: Roland Plamondon, directeur, coordination des programmes, affaires extraministérielles.

M. CASTONGUAY: Merci. Hier, lorsque nous avons terminé, nous avions dit que nous nous fixerions un programme de travail ce matin. Je voudrais mentionner que j'ai un certain nombre de documents qui peuvent jeter plus de lumière dans le domaine de l'hospitalisation en particulier. L'évolution des coûts, les gestes que nous avons posés face à cette évolution des coûts, c'est-à-dire la révision des programmes de construction, l'introduction du budget global en passant par les propositions que nous avons faites dans les conventions collectives au sujet des postes et la loi 65. Au mois de décembre, à l'occasion du budget supplémentaire qui portait principalement sur l'aide sociale, nous avions fait une analyse assez détaillée de cette question. Or, vraiment, depuis décembre, il ne me semble pas qu'il y ait tellement de faits nouveaux en ce qui a trait à l'évolution des coûts de l'aide sociale. Comme d'autre part, les coûts de l'hospitalisation constituent une part très importante du budget des affaires sociales et que nous avons posé plusieurs gestes, je suis maintenant prêt à faire une analyse de cette question pour situer les diverses actions que nous avons prises et aussi dégager certaines données qui indiquent, à mon avis, que nous sommes dans la bonne voie. Je peux aussi attendre sur cette question, si vous le préférez, le moment où nous arriverons à l'article budgétaire approprié ou je peux le faire immédiatement — ce sera à vous de le déterminer — de telle sorte qu'on ait passé les quatre ou cinq dossiers d'analyse que je vous ai remis ou que je vous ai exposés.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je n'ai pas d'objection à ce que l'on fasse l'étude du sujet que nous propose le ministre. Avant cela, je voudrais faire quelques remarques au sujet de ce que nous a dit le ministre hier, en réponse à nos remarques préliminaires.

Au tout début, je voudrais, moi aussi, saluer d'une façon toute spéciale les fonctionnaires du ministère des Affaires sociales, les présidents des régies qui se sont identifiés, il y a quelques instants. Comme le ministre actuel, j'aurais pu mettre des noms sur chacun des visages, puisque j'ai travaillé avec la plupart de ces fonctionnaires. Je partage l'opinion du ministre quand il dit que c'est une équipe qui a été recrutée au ministère des Affaires sociales depuis plusieurs années; c'est une équipe du ministère de la Santé, du ministère du Bien-Etre, deux ministères qui ont été fusionnés. Il y a eu des additions, c'est évident. C'est important qu'ils assistent aux discussions de la commission parlementaire des affaires sociales afin, comme on l'a dit l'an dernier — et plus le temps passe, plus c'est important — qu'ils voient la dimension du ministère des Affaires sociales dans tout l'appareil gouvernemental et qu'ils voient la dimension de leur propre section, leur propre champ d'activité, dans le secteur des affaires sociales. Ils auront à suivre les débats et à fournir, comme ils le font d'habitude, leur collaboration au ministre, dans les questions que nous poserons.

M. le Président, sur l'intervention du ministre hier, je voudrais faire certains commentaires. Le ministre nous a invités à faire des suggestions; il en a fait lui-même et il a indiqué de quel côté il se dirigerait. Quelles actions, qu'il juge pressantes devra-t-il prendre, non pour corriger la situation, mais pour régler le problème jusqu'au fond? Car, je pense que ce n'est pas le ministère des Affaires sociales qui va régler le problème; ce sera tout le gouvernement en négociant avec le gouvernement central, en négociant peut-être d'une autre façon, en faisant une autre approche. De toute manière, je pense que ce n'est pas le moment de faire ce débat-là; c'est une remarque que je fais en passant.

Ce n'est pas une pieuse intention que nous avons exprimée hier quand j'ai dit au ministre qu'il pouvait compter sur notre collaboration. Je parle pour ce qui est de notre groupe, je n'ai pas l'intention de parler pour les autres. Et ce pour toute mesure qui contribuera, pour tout geste qui va contribuer à continuer la juste revendication du Québec en matière de sécurité, en matière de partage des compétences dans le domaine de la sécurité sociale et particulièrement en matière de rapatriement, ce qui a été réclamé par tous les gouvernements successifs. En ce moment il y a des difficultés. Ce n'est pas avec les négociations qui se poursuivent actuellement... A toutes fins pratiques le ministre a annoncé que des négociations, même dans le champ des allocations familiales, il n'était pas prêt à en faire. Alors, il faut dire que depuis quelque temps les négociations sont au point mort. En attendant, c'est le rôle du ministre des Affaires sociales, pour ne pas dire de son gouvernement, de prendre l'offensive dans certains secteurs. Cela a été fait et chaque fois que cela a été fait par le Québec, je pense que cela a bien réussi. Il y a des exemples que l'on pourrait citer: en 1954 l'impôt sur le revenu provincial, en 1965 le Régime de rentes. Le ministre actuel a été associé à ces travaux comme technocrate, comme expert. Il y a eu en 1967 le Régime d'allocations familiales. C'est donc signe qu'il y a des possibilités à prendre des initiatives qui vont faire prendre conscience à l'autre niveau de gouvernement que le Québec est sérieux dans sa revendication et dans sa poursuite de la lutte pour le partage des compétences dans le domaine de la sécurité sociale.

Du côté du Régime de rentes, le ministre a indiqué qu'il était prêt à faire quelque chose. Je pense qu'il devrait aller plus loin. Il ne nous l'a pas indiqué exactement mais, si je me base sur ses déclarations antérieures, il pourrait aller plus loin que là où il a indiqué qu'il voulait aller. Ce n'est pas tout d'ouvrir la loi du Régime de rentes. On en parlera avec le Président de la Régie des rentes qui est ici, à un autre moment, quand viendra cet article particulier du budget. Si on regarde un peu l'analyse actuarielle du Régime de rentes avec les trois possibilités qui ont été mentionnées, on voit qu'il y a un coût bas, un coût intermédiaire et un coût élevé du Régime de rentes.

On voit que dans l'hypothèse du coût intermédiaire, ça nous laisse tout de même une marge de manoeuvre assez considérable. Je pense que le Régime de rentes devrait peut-être être revu en profondeur, étant donné que c'est un outil qui nous appartient maintenant. S'il y a un domaine où on peut prendre l'offensive, je pense que c'est celui-là. Alors si le fédéral actuellement oeuvre à l'aise dans le domaine de la sécurité de la vieillesse et prend des initiatives sans consultation, je pense bien que du côté du Régime des rentes qui nous est particulier ici, avec son instrument qui est la Caisse de dépôt et placement, le ministre peut prendre certaines initiatives. Même s'il fallait, au pis aller, pour poursuivre ces initiatives-là, retoucher, réviser le taux de contribution. Le taux de contribution est de 3.6 p.c. déjà depuis 1966, en 1976, ça va faire dix ans. Il faut admettre que, dans dix ans, il y a beaucoup de choses de changées quant au niveau de revenu. Il ne faudrait pas se scandaliser, si à un moment donné, après dix ans peut-être que le taux de contribution pourrait être révisé pour renforcer encore le Régime de rentes, la réserve, les possibilités.

A ce moment-là, il faudrait que les techniciens, les experts analysent toutes les implications, toutes les possibilités. Mais, qu'est-ce qu'il y aurait de non acceptable à ce que le Québec étudie la possibilité d'un régime de sécurité de la vieillesse, mais de 60 à 65 ans, et qu'il en prendrait l'initiative? Je comprends que cela a créé des problèmes, du côté des régimes privés, parce que tous les régimes privés, actuellement, sont conçus en fonction du 65 ans, l'âge de la retraite. Il n'y a rien qui empêche le ministre, de concert avec la Régie des rentes, son président et ses experts, d'étudier déjà cette possibilité, afin que, si on ne peut jamais avoir de mot à dire dans la sécurité de la vieillesse de 65 ans et plus, peut-être que de 60 à 65 ans, on pourrait peut-être prendre l'initiative. Parce qu'on sait qu'un bon jour, la retraite à 60 ans sera une réalité, ça peut peut-être venir plus vite qu'on ne pense, parce qu'il y a de la pression de ce côté-là.

Je pense que, du côté du Régime de rentes, il y a quelque chose à faire, puis pas mal peut-être plus loin que les indications qui ont été données, à venir jusqu'à présent. Cela est un point.

Du côté de l'aide sociale, j'en ai déjà causé avec le ministre, à plusieurs reprises, il y a quelques mois d'abord, au plus fort des négociations des allocations familiales.

Nous étions d'accord pour dire que ce n'était pas le temps de rouvrir la loi au moment où il ne restait peut-être que quelques mois ou quelques semaines avant que les ententes soient conclues dans le domaine des allocations fami-

liales. A ce moment-là, il est entendu que ça amenait la révision de la Loi de l'aide sociale, particulièrement pour les familles qui auraient bénéficié des nouveaux régimes d'allocations familiales, tant sur le plan fédéral que sur le plan provincial.

Il est évident que, du côté de l'aide sociale, compte tenu de l'état du dossier des négociations, il faudrait faire quelque chose. Les assistés sociaux ne peuvent pas continuer au taux actuel de prestation, la table qu'on appelle NVPD, nourriture, vêtements, besoins domestiques et personnels. Il va certainement falloir un rajustement.

Je ne sais pas, le ministre ne nous a pas indiqué le contenu de sa loi ou de la modification à la loi actuelle. Je pense que, dans son idée, il s'agit de créer deux classes de bénéficiaires d'aide sociale, ceux qui sont aptes au travail et ceux qui sont définitivement hors du marché du travail.

Parmi ceux qui sont hors du marché du travail, vous avez les malades, les aveugles, les invalides, les handicapés physiques ou ceux qui sont rendus à un âge trop avancé pour continuer à pratiquer le métier qu'ils pratiquaient, parce que c'est un métier qui demande un certain effort physique, qu'ils aient été des pêcheurs, des cultivateurs, des bûcherons ou des gens de métiers assez exigeants au point de vue physique.

Cela pourrait être une catégorie de gens qui, étant définitivement hors du marché du travail, pourraient recevoir un niveau de prestation. Je voudrais aussi inclure là-dedans les gens de 60 à 65 ans. Déjà, ce serait une indication que ça pourrait se marier avec la révision du Régime de rentes. Ces gens pourraient recevoir un taux de prestation qui se rapprocherait sensiblement, si c'est financièrement possible, du taux décrété par le gouvernement d'Ottawa quant aux bénéficiaires de la sécurité de la vieillesse, soit $285 par mois pour un couple.

Même si cela n'atteignait pas $285, cela pourrait tout de même réduire l'écart de $100 qui existe actuellement et qui est franchement inaceptable. L'autre catégorie d'aide sociale grouperait ceux qui seraient aptes au travail. Ils pourraient bénéficier d'une allocation moindre, pour ne pas les inciter à demeurer sous le coût de la dépendance sociale et à ne pas faire d'effort de réintégration dans le marché du travail. Cela pourrait être appuyé par des mesures très dynamiques d'incitation et de retour au travail.

Le ministre devra avoir la collaboration de tous ses collègues, particulièrement de ceux des ministères à vocation économique, pour trouver des programmes comme il y en a déjà en place.

Il y aura d'autres programmes. On peut faire appel à l'initiative et, dans le domaine de Perspectives-Jeunesse et initiatives locales, on a des programmes qui auraient dû être mis de l'avant par le gouvernement provincial, s'il avait eu les fonds pour le faire, s'il y avait eu un meilleur partage des ressources. On aurait eu de ces sortes de programmes qui auraient pu dégager beaucoup de listes d'aide sociale et qui auraient pu permettre à des gens d'avoir du travail, notamment, des jeunes gens. Vous savez que nos listes d'assistés sociaux débordent de noms de jeunes de quatorze à seize ans et jusqu'à 25 ans; on sait, dans les statistiques qui nous ont été remises, quelle augmentation il y a eue chez ces jeunes. C'est entendu, beaucoup parmi eux ont fini des études de niveau secondaire, de niveau collégial et n'ont pas de débouché sur le marché du travail; c'est entendu aussi que l'Etat doit leur donner une aide quelconque. Mais cette aide-là ne devra pas les inciter à rester sous la dépendance de l'aide sociale mais plutôt les forcer ou les inciter à retourner le plus tôt possible sur le marché du travail ou à y entrer s'ils n'y sont jamais allés.

Cela serait du côté de l'aide sociale. Du côté des allocations familiales, le ministre nous a dit hier qu'il ne voyait pas de solution actuellement de ce côté, qu'il n'avait pas l'intention de pousser plus loin. Est-ce exact?

M. CASTONGUAY: Pour le moment, je n'ai pas pu étudier la question de façon suffisamment approfondie pour donner une orientation susceptible d'être prise.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, je voudrais préciser, M. le Président, que la discussion étant engagée comme elle l'est et tenant compte des propositions du gouvernement fédéral, tenant compte de la loi actuellement devant la Chambre à Ottawa, je ne ferai certainement pas de guerre au ministre s'il n'accepte pas le régime proposé par le fédéral. J'ai beaucoup de réticence à accepter certaines qualités du régime fédéral, j'ai beaucoup de réticence à éliminer le critère d'universalité, M. le Président. Je pense que le ministre devra prendre le temps de repenser à cet aspect. Ce serait important qu'un régime d'allocations familiales garde cette caractéristique, garde ce critère d'universalité parce qu'il s'agit d'un programme — le mot le dit — d'allocations familiales. Cela doit aussi favoriser une politique familiale. S'il faut atteindre la sélectivité, on peut l'atteindre autrement et, du point de vue administratif, c'est bien moins compliqué; on peut l'atteindre par l'impôt sur le revenu. C'est aussi beaucoup plus rapide, plus efficace, beaucoup moins encombrant du point de vue administratif, et beaucoup moins odieux aussi pour les personnes qui n'ont pas à subir de "means test" parce que l'impôt est accepté d'une façon générale.

Même si c'est désagréable de produire une déclaration d'impôt, il reste que, maintenant, cela est entré dans nos moeurs et personne ne peut subir de discrimination. Tout le monde est censé produire une déclaration d'impôt. Mais,

ce n'est pas tout le monde qui subit un "means'test" ou une enquête pour savoir si son niveau de revenu lui permet d'avoir des allocations familiales.

Alors, je pense que, par l'impôt sur le revenu, avec une table spéciale d'imposition, cela rejoint ce qui avait été proposé dans le livre blanc des allocations familiales en 1969. Je souhaiterais que le ministre revoie cette proposition. Et s'il n'y a pas d'entente avec le gouvernement central, je pense que nous devrions plutôt améliorer notre régime d'allocations familiales, en tenant compte des modifications que l'on apporte aux deux autres régimes, mais continuer d'avoir un régime qui est bien à nous. Parce que, pour les deux régimes réunis, les allocations familiales et les allocations scolaires, le montant se chiffre par $95 millions. Ce n'est pas un régime qui est négligeable. Cela fait $100 millions et il y a peut-être moyen encore de l'améliorer et de faire une redistribution autrement. J'aurais beaucoup de réticences que l'on transfère ainsi au gouvernement central, même à l'intérieur d'un arrangement administratif, un programme qui a été monté de toutes pièces au Québec. Nous avons fait de grosses dépenses pour l'organisation, l'organisation mécanique, l'émission des chèques, le contrôle, pour dresser les listes, etc. Je pense que le système des allocations familiales et des allocations scolaires fonctionne bien. Ces deux systèmes sont bien québécois. S'il y avait une entente de conclue, il faudrait que ce soit beaucoup plus large que les allocations familiales.

Il faudrait que ça aille chercher, dans le contexte actuel, en tout cas, d'autres choses. Il faudrait que, dans la révision des allocations familiales, le ministre examine également la fiscalité. Nous l'avions fait en 1967. Nous avions associé la création du régime d'allocations familiales à la révision de la fiscalité. A ce moment-là, les exemptions de base avaient été élevées; elles avaient été mises à $2,000 pour les célibataires et à $4,000 pour les gens mariés. Il y aurait peut-être lieu, tout en travaillant avec le ministre du Revenu et le ministre des Finances — le ministre du Revenu, surtout, qui actuellement prépare la législation — qu'il y ait un comité qui travaille très étroitement, pour voir s'il n'y aurait pas possibilité de faire aussi, dans le domaine de la fiscalité, une oeuvre un peu plus originale que celle de copier la réforme fiscale fédérale et de l'associer à ces mesures, à cette législation que le ministre veut apporter dans le domaine social. Je pense qu'il faudrait se rendre compte que l'on peut corriger passablement de choses avec la fiscalité. Si l'on ne peut pas atteindre un objectif directement, avec les lois, dans le domaine de la sécurité sociale, on peut, par le biais de la fiscalité, corriger des choses qui sont inacceptables.

Comme dernière suggestion, il reste, évidemment, que c'est le dynamisme du côté économique, que c'est l'offensive économique qui est importante. Parce que, si le ministre des Affaires sociales et le gouvernement veulent poursuivre une offensive qui soit significative, qui veuille dire quelque chose, il faudra, évidemment, que le gouvernement et les contribuables aient les moyens de la supporter, cette offensive. Pour cela, il faut que l'économie soit dans le meilleur état possible.

Ce sont les suggestions que nous faisons. Nous aurons l'occasion d'y revenir peut-être à d'autres moments, mais je voulais déjà montrer au ministre que nous avons, nous aussi, nos périodes de réflexion. Ce ne sont pas des suggestions qui ont été étudiées techniquement, mais je ne crois pas que ce soit ma fonction d'étudier techniquement, avec les moyens dont je dispose actuellement. Je pense que le ministre a autour de lui toute cette équipe, tous les fonctionnaires, les experts qui peuvent étudier de quelle façon, selon quelles modalités, cela peut être réalisé.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, j'ai écouté attentivement le leader du Parti québécois, hier, nous expliquer sa façon de voir, relativement aux politiques sociales du Québec, soit au niveau du gouvernement provincial, soit au niveau du gouvernement canadien. Le leader du Parti québécois, à mon avis, a réellement accentué les problèmes qui existent actuellement dans les relations entre les deux gouvernements. Je crois que, même dans le domaine de la sécurité sociale, le gouvernement du Québec est loin d'être simplement un gouvernement de canton ou un gouvernement de municipalité.

Le gouvernement du Québec a été très lent à s'occuper d'une façon positive et rationnelle de la politique sociale. C'est une politique qui, au cours des ans, a été établie sans philosophie, sans unité de pensée, avec des lois qui ont été étudiées au fur et à mesure des campagnes électorales. Cette politique, à la longue, si elle a rendu service à certains citoyens, a accusé aussi des inconvénients extrêmement sérieux.

Nous avions, dans le passé, une population très travailleuse, très débrouillarde, très active. Cette inefficacité gouvernementale à établir une politique sociale rationnelle a fait perdre à des tranches considérables de notre population cette motivation au travail. Elle a fait perdre, aussi, relativement à ce qu'un citoyen pouvait recevoir du système social, le bénéfice qu'un travail bien fait et bien accompli doit apporter à un travailleur. C'est dire que, bien souvent, la différence entre le père de famille qui travaillait à longueur d'année et celui qui vivait de notre système d'allocations sociales était, à certains points de vue, si minime que la motivation au travail s'en est ressentie.

Que le budget des Affaires sociales reflète non seulement des faiblesses des politiques passées, mais aussi la faiblesse de toutes les

activités de la population du Québec, j'en suis. Mais, dire que ce budget reflète exclusivement les faiblesses des politiques passées des gouvernements est, à mon avis, exagérer, dans notre société, l'influence des activités gouvernementales.

Par notre système démocratique, par nos structures, le gouvernement du Québec ou celui du Canada est loin d'avoir le monopole des décisions et de ces décisions qui, bien des fois, marquent profondément la vie de la province.

Nous avons eu dans le passé un système scolaire qui, à mon avis, a été très peu démocratique, a été très peu adapté aux besoins d'un groupe qui vit dans ces années modernes, dans ces années où la finance, la technique, la science administrative, les sciences pures jouent un rôle extrêmement important. Je dis que dans le passé nous avons eu un système d'éducation très mal adapté à cette situation. Nous subissons aujourd'hui de plein fouet les résultats de ce système scolaire mal organisé et je vois une des causes profondes de ces augmentations budgétaires considérables, accentuées et difficiles à contrôler. D'autant plus que nos gouvernements provinciaux, dans le passé, malheureusement, par un manque d'initiative, un manque d'agressivité ont trop souvent permis au gouvernement fédéral d'établir, au point de vue social, des politiques qu'ils avaient négligé eux-mêmes d'établir.

Aujourd'hui, nous avons des problèmes sérieux de relations entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Ces problèmes sont loin d'être les seuls qui existent au Québec. J'avoue cependant que c'est un problème qui mérite d'être étudié. C'est un vieux problème d'ailleurs, mais c'est loin d'être le seul. Si c'était le seul problème que la nation québécoise avait à résoudre, les choses seraient extrêmement simples.

A mon avis, une des façons les plus pratiques de résoudre ce problème est d'établir, dans les champs d'activités qui nous restent, une efficacité administrative qui donnerait au citoyen cette confiance dans son gouvernement et qui donnerait à chaque citoyen la preuve que le gouvernement du Québec reste capable d'administrer efficacement l'argent public. C'est un secret de polichinelle, M. le Président, que le ministère des Affaires sociales au Québec comprend plusieurs employés; c'est une machine lourde, extrêmement difficile à administrer et qu'il se coule des millions de dollars par année au niveau de ce ministère, des millions perdus, sans résultats positifs et que le citoyen est obligé de rembourser. Je le dis, M. le Président, d'une façon très positive, je n'accuse personne. Je puis même vous dire que nous avons eu au cours des dernières années des ministres, à la tête de ce ministère, extrêmement efficaces, extrêmement compétents.

Nous avons aussi de hauts fonctionnaires que je sais compétents, efficaces, travailleurs et tout à fait responsables. De ce fait, j'en ai la preuve toutes les semaines. Mais entre le ministre, ses hauts fonctionnaires et le citoyen, il y a toute une distance qui est occupée par des milliers d'employés et cette efficacité administrative ne se reflète pas au niveau de l'humble citoyen qui est obligé de faire appel au gouvernement pour résoudre ses propres problèmes.

J'ai l'impression qu'actuellement, les ministres qui occupent ce ministère, sont surchargés de responsabilités. Ils ont à administrer un budget extrêmement considérable et ils n'ont pas la liberté d'action voulue pour ce faire.

Cette liberté d'action ne leur est pas exclusivement enlevée à cause de la situation entre Québec et Ottawa mais elle est bien souvent la cause des lois et des règlements à l'intérieur même du gouvernement du Québec. C'est un secret de polichinelle, M. le Président, qu'avec des contrats de travail de plus en plus complexes, avec les lois qui existent à la fonction publique, l'autorité à l'intérieur d'un tel ministère est très diffuse et les responsabilités sont aussi tellement partagées qu'il est difficile de maîtriser un tel organisme et de s'assurer que chaque dollar est dépensé efficacement.

Il faut être citoyen et député et voir les choses par en bas, il faut essayer de chausser les bottines de l'humble citoyen pour s'apercevoir vite qu'à ce niveau toutes ces grosses structures sont très peu efficaces et que le citoyen a énormément de difficultés à être traité selon nos lois, selon nos règlements et selon les philosophies et les façons de voir du ministre ou des hauts administrateurs.

Dans mon comté, je reçois tous les jours, toutes les semaines, des critiques relatives à la façon dont les gens sont accueillis aux bureaux locaux. On a même de la difficulté à être poli et courtois avec eux. Tout le monde sait qu'il y a une minorité de gens qui reçoivent de l'aide du gouvernement et qui n'ont pas le droit de la recevoir. Tout le monde comprend cela, tout le monde sait qu'au niveau des hôpitaux les coûts sont absolument astronomiques, au niveau de l'assurance-maladie c'est la même chose, au sujet de l'hébergement des vieillards les coûts sont aussi astronomiques. Notre appareil gouvernemental, au point de vue de ce ministère, est regardé par le citoyen comme étant non rodé et comme étant non efficace. Et je crois que, dans ces débats entre Québec et Ottawa, cette inefficacité pour le citoyen est un facteur décisif dans le fait qu'il verra dans le gouvernement d'Ottawa ou le gouvernement du Québec celui qui devra administrer ses deniers en vue d'établir nos politiques sociales.

Je le dis, M. le Président, sans amertume, parce que, à titre d'humain, je comprends très bien que dans un ministère qui a grossi avec une telle rapidité, qui a vu doubler et tripler le nombre de ses employés dans la dernière décade, qui a vu ses budgets et ses responsabilités augmenter d'une façon si considérable, il aurait été extrêmement surprenant que l'on

puisse, en si peu de temps, avoir un appareil bien rodé, un appareil efficace. Il y a des choses qu'on ne peut pas faire sans le temps, sans les années. Je suis assuré que, si nous continuons à avoir des ministres aussi responsables et aussi compétents que ceux que nous avons eus dans le passé, un jour, nous en arriverons là. Si nous ne pouvons en arriver là, le citoyen ne sera pas prêt à admettre que nos politiques sociales doivent être exclusivement remises à la province de Québec.

On a parlé d'études qui avaient été faites dans le passé, prouvant que cette autorité à deux paliers était un grave inconvénient, en vue de faire la synthèse de toutes nos politiques et d'établir un ensemble de politiques cohérentes, au niveau de la province. Le résultat de ces études reste entre les mains des autorités, entre les mains des spécialistes. IL va sans dire que l'humble citoyen n'est absolument pas au courant du résultat de ces études. Il peut difficilement comprendre ces batailles continuelles entre le gouvernement de la province et le gouvernement d'Ottawa, même si ces querelles peuvent avoir, chez lui, des effets extrêmement importants.

Il y a peut-être aussi, M. le Président, un autre facteur. La province de Québec est loin d'être la province la plus riche. Elle est loin d'être la province qui a les structures financières ou les structures industrielles les plus avancées au Canada. A mon avis, toujours, il faut constater que si ces 80 p.c. de la population, pour des raisons historiques, pour des raisons d'éducation, comme je l'ai dit dans le passé, n'ont pas su s'adapter au monde nouveau, au monde moderne et prendre sur eux la responsabilité de développer les richesses naturelles de notre province, ou jouer un rôle passif dans le développement industriel et économique du groupe, il va sans dire que dans cette situation on ne peut pas s'attendre que la province de Québec soit à Pavant-garde du développement économique du pays. n en reste tout de même que les sommes que nous dépensons sont considérables. Un changement de constitution ne pourra pas nécessairement les augmenter indéfiniment. Nous sommes la sixième province, au point de vue des richesses au Canada. Cet argent que nous dépensons, bien souvent, a été payé par les contribuables des autres provinces canadiennes qui acceptent, à l'intérieur de la constitution actuelle, de bien vouloir séparer les richesses, de façon que le Québec puisse avoir sa part comme les provinces maritimes et les autres provinces qui sont moins développées.

En économie, soit pour un groupe, pour une nation ou pour un individu, c'est toujours le même phénomène. Des hommes qui, pour vivre et pour faire face à leurs obligations, sont obligés d'emprunter, sont toujours des hommes qui voient leur liberté d'action diminuée. Quel que soit le revenu d'un citoyen, si ce revenu lui permet de vivre sans emprunter, il jouit tout de même d'une liberté d'action que le citoyen a revenu plus élevé ne peut avoir s'il est obligé, pour faire face à ses obligations, d'emprunter.

La province de Québec est continuellement obligée, pour voir à son économie, à son développement, d'emprunter. Nous n'avons malheureusement pas l'économie voulue pour faire face aux nécessités du développement économique. Et le fait d'être continuellement obligé d'emprunter limite excessivement notre liberté d'action vis-à-vis du Canada, vis-à-vis des autres provinces comme vis-à-vis des autres nations.

Il faut en tenir compte. Malgré nos difficultés, au Québec, chaque citoyen conserve une liberté qui fait l'envie de pratiquement toutes les nations. Tant que notre constitution, soit canadienne ou soit au niveau du gouvernement du Québec, tant que la liberté d'action de chaque citoyen sera conservée, il n'y a pas lieu de s'alarmer outre mesure et d'être pessimiste pour les années à venir.

Les Québécois ont connu bien d'autres problèmes constitutionnels que ceux qui caractérisent l'application d'une politique sociale que nous voudrions nôtre. Nous avons vécu, dans le passé, sous des régimes beaucoup plus durs. Nous avons su améliorer constamment notre façon de vivre; nous l'améliorons encore. Il y a certainement de l'espoir pour l'avenir.

La seule solution à long terme, à mon avis, pour diminuer ce budget des affaires sociales, c'est l'éducation. Tant que nous n'aurons pas un système d'éducation efficace, tant que nous n'aurons pas un système d'éducation bien adapté aux nécessités du moment, nous verrons le budget des affaires sociales augmenter constamment. Il augmentera encore davantage chaque fois que nous traverserons une période économique difficile, comme celle que nous passons dans le moment.

Si j'étais pessimiste, M. le Président, relativement à l'avenir de la province de Québec, la cause profonde de ce pessimisme ne serait pas le budget des affaires sociales qui augmente continuellement. Ce seraient beaucoup plus les troubles et les difficultés que nous vivons dans le moment, pour donner à chaque citoyen une éducation valable qui lui permettra dans l'avenir de faire face à ses obligations et de prendre part entièrement à la vie du groupe.

Il est temps qu'on dise à nos jeunes que personne ne peut mieux prendre soin d'eux, qu'eux-mêmes. Tant qu'ils se fieront au gouvernement, tant qu'ils se fieront au ministère des Affaires sociales pour faire face à leurs obligations, ils seront toujours grandement handicapés. Il reste tout de même, M. le Président, que dans cette province, n'importe quel jeune homme qui veut étudier, qui veut travailler, qui conserve une qualité morale et un sens des responsabilités, a devant lui, quelles que soient sa race ou sa religion, un avenir merveilleux.

L'avenir lui est ouvert. Il lui appartiendra de prendre sa place dans notre société, indépen-

damment des gouvernements et des politiques que nous établirons.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Sud.

M. FORTIER: M. le Président, à cette période de l'énoncé général de la politique des affaires sociales, j'ai écouté avec plaisir et enthousiasme le programme défini par M. Cas-tonguay, en ce qui a trait aux programmes généraux de santé relativement aux malades qui souffrent de maladies aiguës et surtout de maladies chroniques et relativement aussi à l'enfance exceptionnelle et à la délinquance juvénile. Je me réjouis aussi qu'il ait dit qu'une attention serait portée à nos vieillards, non seulement dans la construction de foyers d'hébergement mais aussi grâce à une politique générale pour les gens plus âgés.

Nous avons parlé des différents programmes qui regardent les affaires sociales. Je puis vous assurer pour ma part, parce que je connais très bien le ministre, qu'il est un homme dévoué entièrement à sa tâche, très honnête et qui donne certainement au ministère une orientation particulière avec l'aide de tous ses sous-ministres, ses directeurs et tous ses officiers du ministère, qui réellement sont un exemple de bon fonctionnement dans un ministère.

Il y a un point sur lequel je voudrais insister, c'est ce qu'on appelle le problème de la sécurité du revenu. Que ce soit par un système d'allocations sociales, d'assurance sociale ou encore la question des allocations familiales à caractère sélectif ou universel, il y a une chose certaine, c'est que le citoyen du Québec a le droit d'avoir le minimum vital de ressources et de revenus pour être assuré de subsister sans craindre d'être en état de pauvreté. C'est un point sur lequel je suis entièrement d'accord, comme représentant d'un comté parfois aux prises avec des problèmes économiques. Si nous parlons de santé, il y a là une chose primordiale. C'est que, pour être en bonne santé, il faut être assuré que, le lendemain, nous aurons ce qu'il nous faut pour donner à une famille les soins essentiels mais aussi les moyens de financement dont une famille a besoin, soit pour permettre aux enfants de s'instruire ou encore pour leur donner le bien-être essentiel.

Je connais bien M. Castonguay. Je sais, je comprends qu'il éprouve peut-être une certaine déception de ce que le gouvernement fédéral a fait dans son budget. En parlant des plans de sécurité de la vieillesse et ainsi de suite, je partage évidemment sa déception. Quand on veut faire quelque chose de très bien et qu'on ne peut pas trouver tous les moyens de le faire on a droit d'être déçu.

Cependant, je ne partage pas l'enthousiasme du député de Bourget qui voit là peut-être une occasion de dire qu'il n'y a plus de possibilité de dire qu'on a un système de fédéralisme rentable, même si, à un moment donné, notre chef a parlé d'une certaine arrogance en ce qui concerne les relations entre le fédéral et le Québec.

Je suis encore confiant — je le dis en toute sincérité — et je demande à M. Castonguay s'il y a possibilité de faire encore une fois d'autres efforts pour obtenir du gouvernement central les sommes nécessaires à bien établir ce projet de sécurité de revenu. Je suis encore prêt à admettre qu'il faut faire l'effort nécessaire.

Quant à moi, je suis prêt à faire l'impossible, à aider. Et, si un jour, nous voyons que cette chose semble impossible, à ce moment-là, nous pourrons encore discuter des moyens à prendre pour donner au Québec les ressources financières nécessaires pour établir ce régime de sécurité du revenu.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.

M. GUAY: M. le Président, je suis très heureux, ce matin, que le ministre nous ait présenté sa volumineuse équipe. Cela prouve, je pense, qu'au ministère des Affaires sociales, s'il y a des problèmes, ce ne sont pas les compétences qui manquent. J'ai été en mesure de le constater, puisque j'ai eu à soumettre, comme plusieurs députés, plusieurs problèmes à ce ministère.

Bien sûr, nous pourrons discuter plus adéquatement de chaque article au fur et à mesure que nous les étudierons. Le ministre a déposé hier un document concernant la planification des naissances; éventuellement, parce que ce n'est pas encore chose faite. Je me demande s'il n'y a pas quelque chose de plus urgent. J'y ai touché un peu hier. De toute façon, nous aurons probablement à y revenir lors de l'étude de chaque article des crédits.

Au début, je voudrais assurer le ministre de notre collaboration à l'effort qu'il fait pour tenter d'améliorer le sort des Québécois.

M. HARVEY (Chauveau): Est-ce que le député de Dorchester me permettrait seulement une question? Lorsqu'il fait allusion à la déclaration du ministre hier, est-ce que cela se rapproche un peu de votre résolution du dernier congrès sur le droit à l'amour et ces choses-là?

M. GUAY: Nous pourrons y revenir de façon plus approfondie, si vous le voulez bien.

M. HARVEY (Chauveau): Cela m'intéresse grandement.

M. GUAY: Est-ce que le député se sentirait frustré de façon quelconque?

M. HARVEY (Chauveau): Absolument pas. Je suis un exemple; j'ai quatre enfants.

M. LESSARD: Cela ne signifie rien.

M. GUAY: Après avoir entendu les membres de la commission ce matin, nous nous rendons compte que le problème est beaucoup plus profond que l'on ne semble le laisser entendre. Et à mon humble avis, on essaie, actuellement, d'apporter des correctifs par des moyens détournés; on semble oublier qu'au fond de tout cela il y a un problème d'ordre financier et purement financier. Et j'ai été très heureux d'entendre le député de Jacques-Cartier dans son intervention. Il faut de plus en plus concentrer des politiques qui viendront en aide aux personnes de 60 à 65 ans. Il y a énormément de problèmes de ce côté-là. Le ministre nous apprend qu'il a l'intention d'apporter des amendements à la Loi du Régime des rentes. Cela est souhaitable. Quand nous savons qu'un couple doit vivre avec un revenu de $116 par mois, je pense qu'il est grand temps que nous réagissions. Ces couvertures qui apportent un revenu —je ne dirais pas un revenu, je dirais plutôt une maigre pitance pour faire vivre plusieurs personnes — ont également des répercussions graves. Ces personnes ont l'impression de ne pas vivre dans la même société que celles qui gagnent adéquatement leur vie, que celles qui travaillent. Et cela a pour conséquence que les citoyens refusent même de se prendre en charge. L'initiative personnelle est mise de côté. Ces personnes dépendent de l'Etat; elles ne semblent plus être des citoyens à part entière. Nous nous en rendons compte par la faible participation qui existe. Je suis en mesure d'en parler, surtout en milieu rural.

Ces personnes ont l'impression que, pour elles, la vie se limite à bien peu. Elles nous disent et répètent que c'est anormal — et je suis d'accord avec elles — que, dans une province où il y a tant de spécialistes, de professionnels qui sont en mesure d'offrir des services, par exemple, dans le domaine de la santé, des citoyens manquent de soins. Et cela se produit en 1972. Il est anormal que, dans une province où il y a tant de travail à faire, il y ait tant de chômeurs.

On peut ajouter tout de suite que le ministère des Affaires sociales récolte une clientèle de plus en plus grande en ce qui concerne l'aide sociale, à cause de mauvaises politiques qui sont établies dans d'autres ministères. Il y a un proverbe qui dit: Si tu veux nourrir un homme pendant une journée, donne-lui un poisson; si tu veux le nourrir pendant toute sa vie, tu es mieux de lui montrer à pêcher. Je pense que c'est un peu ce que l'on vit actuellement. Au fur et à mesure que des personnes deviennent dépendantes directement de l'Etat, je pense qu'elles deviennent des gens qui refusent même de s'aider. Pour elles, ça devient impossible, ça semble insurmontable. Là où c'est malheureux, c'est que des personnes qui sont assistées temporairement doivent se départir de leurs biens, en grande partie, et si, un jour, elles reviennent à la santé, elles sont capables de travailler, il leur est impossible, financièrement en premier lieu, d'être ce qu'elles étaient auparavant.

On est en train d'essayer d'ajuster la société à des cadres. Je pense que c'est là en même temps que l'on fait erreur. Au lieu de chercher à réduire l'homme à la dimension des cadres, je pense qu'il va falloir ajuster les cadres à la dimension de l'homme. Ce semble être une soumission forcée pour l'individu, que de vivre aujourd'hui, quand on parle de politique sociale. Il est anormal qu'avec autant de main-d'oeuvre disponible, avec autant de bras capables de travailler, avec autant de matériel, des gens soient limités à vivre dans des taudis, ce que l'on appelle des sans-logis. Bien sûr qu'il y a des efforts de concentrés dans ce sens-là. Il est anormal dans une province aussi bien organisée, aussi riche que la nôtre, que la pauvreté règne; et le problème est de plus en plus aigu. Il y a eu des énoncés de principe de faits l'an dernier à l'étude de ces mêmes crédits et j'ai rudement l'impression que, dans le domaine de la pauvreté, il n'y a pas grand-chose qui a été concrétisé. Cela demeure, encore cette année, à la page des choses à faire.

M. le Président, je pense bien qu'il va falloir, en 1972, concentrer l'effort là où c'est le plus pressant. Les membres de cette commission seront en mesure, je pense bien, de regarder, avec toute l'attention nécessaire, ce point-là. Plus on va augmenter les budgets au chapitre de l'aide sociale, plus ça signifie que la crise s'accentue. Et moi, je serais très heureux, au lieu de voir $340 millions à l'article de l'aide sociale, d'y voir $1 million. Ce serait un signe évident que la situation se redresse actuellement. Mais, tant que l'on verra ce chiffre augmenter, M. le Président, on va devoir faire en sorte que les politiques s'améliorent. Je ne voudrais pas entrer dans le conflit qui existe avec le gouvernement central, quoique ce soit très important. Je répète au ministre que nous allons lui apporter toute la collaboration nécessaire, s'il démontre autant d'énergie sur ce point.

M. le Président, ce sont les quelques recommandations, observations, devrais-je dire, que je voulais faire ce matin.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: Alors, M. le Président, je voudrais prendre quelques minutes pour répondre au député de Jacques-Cartier concernant l'intervention qu'il a faite tout à l'heure. Nous avons eu, depuis au moins deux ans, un ministre des Affaires sociales qui a élaboré un certain nombre d'objectifs basés sur des principes très précis. On constate actuellement que tout ça a été un échec. On constate actuellement que toutes ces luttes que nous avons faites depuis quelque temps et que d'autres avaient faites avant le ministre des Affaires sociales nous ont conduits à un cul-de-sac. Et ce ministre, le ministre des Affaires sociales, pendant un certain temps, s'est battu avec force. Là, on semble vouloir atténuer cette bataille, on semble vou-

loir atténuer la valeur de ces grands principes.

Après avoir constaté que cette lutte qui nous permettrait de mettre de l'ordre dans le ministère des Affaires sociales, dans ce secteur en particulier et qui nous permettrait aussi en même temps, comme le disait le député de Bourget hier, d'avoir véritablement de l'influence sur d'autres secteurs de la vie économique, après avoir constaté cet échec, il faut se diminuer. Nos objectifs ont été trop grands. On a vu beaucoup trop grand. Il faut, devant l'échec, le cul-de-sac, voir exactement ce qu'est le Québec. Le Québec devient tout simplement l'exécutant de politiques sociales décidées à Ottawa. Le Québec a des problèmes d'administration comme le gouvernement d'Ottawa d'ailleurs. Le Québec doit s'assurer d'une certaine efficacité dans les politiques qui lui restent, comme le député de Jacques-Cartier l'a si bien dit. Mais il lui reste quoi, M. le Président? Il ne lui reste pas grand-chose, en fait. Graduellement, nous assistons à l'érosion de nos pouvoirs dans ce secteur.

Comment développer une efficacité si on n'a pas les instruments nécessaires? Comment développer une efficacité lorsque le gouvernement fédéral détermine toutes les priorités dans l'assurance-chômage? Comment déterminer une efficacité dans les allocations familiales lorsque le gouvernement fédéral a la priorité législative dans ce domaine? Le Québec peut établir des politiques, mais ces politiques peuvent être continuellement brisées par le gouvernement d'Ottawa comme on vient de le voir dernièrement par le budget de M. Turner. Comment établir une efficacité administrative dans la formation professionnelle lorsque les deux gouvernements agissent dans ce domaine et qu'il n'y a absolument aucune planification et aucune collaboration entre les deux gouvernements? Comment établir une efficacité dans nos centres de main-d'oeuvre du Québec lorsque nous n'avons même pas les revenus nécessaires pour faire que ces centres de main-d'oeuvre du Québec puissent être efficaces et avoir le personnel nécessaire pour faire le véritable travail qu'on devrait leur donner? On constate que les priorités du centre de main-d'oeuvre du Québec et du centre de main-d'oeuvre d'Ottawa sont complètement différentes.

M. le Président, du côté de l'efficacité administrative, nous avons certaines choses à corriger. Le député disait qu'au niveau des bureaux régionaux du ministère des Affaires sociales, ces gens-là y étaient bien souvent mal reçus. D'accord, c'est vrai, il y a certaines choses à corriger dans ce domaine. Cependant, cela n'enlève pas les problèmes fondamentaux qui se soulèvent actuellement. Ceux-ci vont nous permettre d'établir une véritable politique de bien-être social. Ils vont permettre aux gouvernements en même temps d'arrêter de dépenser chacun de leur côté. Ce qui nous amène à dépenser des milliards et des milliards de dollars et nous n'avons pas encore de politique de sécurité de revenu. Quand j'entendais ce que le député de Jacques-Cartier disait, cela représentait vraiment, à part le ministère des Affaires sociales, les petits objectifs du gouvernement québécois dans des secteurs particuliers si on exclut le ministère du Travail et depuis quelque temps le ministère de l'Agriculture, mais en particulier le ministère des Affaires sociales.

Il ne faudrait quand même pas minimiser les grandes batailles qui ont été faites depuis une dizaine d'années au Québec par certains ministres des Affaires sociales, que ce soit M. Cloutier ou d'autres ministres, mais en particulier depuis deux ans par le ministre actuel des Affaires sociales. Il s'aperçoit et le dit bien honnêtement qu'on fait face à un cul-de-sac dans ce domaine et qu'il faut absolument réviser nos positions. Quand on contaste que le gouvernement en est arrivé, dans cette négociation, à un arrêt ou un cul-de-sac, on se retourne pour empêcher que la population en prenne véritablement conscience. On dit que c'est peut-être la faute du gouvernement du Québec et qu'il faudrait d'abord régler nos problèmes chez nous, c'est vrai. Cela n'empêche pas qu'il y ait de grandes politiques sur lesquelles il faut d'abord avoir un certain contrôle. Cela nous permettra de régler nos problèmes d'efficacité. Cela nous permettra de les régler de façon beaucoup plus efficace et non pas à la petite semaine, temporairement.

Nous allons arriver continuellement, si nous n'avons pas ces instruments nécessaires pour le ministère des Affaires sociales du Québec, à un point tel qu'il ne pourra établir des politiques importantes, des politiques qui seront rationnelles au point de vue de la sécurité du revenu. Ses politiques seront continuellement déboîtées —si je peux utiliser ce terme — par d'autres politiques qui seront établies par le gouvernement d'Ottawa, sans aucune consultation, comme cela a été le cas lors du budget Turner, avec le gouvernement du Québec.

C'est une bataille qu'il ne faudrait pas minimiser actuellement. Je ne sais pas comment on va la continuer mais nous attendons énormément des précisions que va nous donner en ce sens le ministre des Affaires sociales. Je demande au moins aux collègues du ministre de l'appuyer dans ce sens-là et de ne pas minimiser les luttes que ce ministre a faites depuis quelque temps. Les conflits Québec-Ottawa, dans ce secteur-là, sont un facteur extrêmement important, comme dans d'autres secteurs, qui nous empêchent d'avoir une véritable politique rationnelle, efficace, dans tous les domaines qu'a précisés le ministre des Affaires sociales dans sa conférence, il y a quelques jours. Pour ma part, je dis au ministre: C'est malheureux, c'est malheureux parce que j'ai pu constater, hier —pour la première fois que j'avais l'occasion d'assister, à cause de certaines circonstances, à l'étude des crédits du ministères des Affaires sociales, comparativement aux ministères, où je

suis critique du parti — que pour la première fois on avait une vue générale sur une certaine planification à l'intérieur d'un ministère.

Lorsque j'entendais hier le ministre des Affaires sociales déterminer ses objectifs pour l'année 1972, qui avaient été fixés en 1971, lorsque je l'entendais affirmer bien honnêtement que certains objectifs avaient été atteints mais que, dans d'autres, en particulier tout ce qui relevait de la négociation fédérale-provinciale, il avait eu des échecs, je constatais que ce ministre-là agissait vraiment, pour une fois, dans une vue globale d'une société et qu'il ne fonctionnait pas à la petite semaine. Ce ministre a prouvé qu'il voyait véritablement même sur une période de cinq ans. Je constatais qu'il nous remettait des rapports démontrant qu'il y avait une certaine planification quinquennale. C'est le seul ministère où j'ai pu voir la présentation d'une politique générale de la part du ministre qui nous faisait constater qu'il prenait vraiment conscience qu'il était important de savoir où on allait non pas par année et à courte vue, mais sur une période échelonnée, sur une période plus grande, une vue globale des problèmes sociaux.

Comme le disait le député de Bourget, franchement on va le regretter. J'espère que dans les autres ministères on écoutera, on retiendra un peu la présentation qui a été faite et telle qu'elle l'a été par le ministre, hier, de ce bilan et des prévisions de ce ministère, de telle façon que, dans les autres ministères, comme au ministère des Affaires sociales, on sache vraiment où on va et qu'on puisse avoir des politiques intégrées dans ce gouvernement, que ce ne soit pas strictement un ministère qui ait des vues générales sur les problèmes globaux du Québec. Qu'on cesse un peu, c'est ce qui me fait énormément peur, comme le disait le député de Jacques-Cartier, d'avoir des politiques de courte vue, des politiques à la petite semaine, des politiques qui sont vraiment selon les vues d'un certain nombre de personnes qui considèrent le Québec comme une petite paroisse, un petit canton, un gouvernement d'exécution du gouvernement fédéral, parce que ces gens-là sont soumis à certaines pressions de leurs électeurs et ont peur d'une politique de transformation. Et on revient au Québec bien tranquille, même pas comme avant la révolution tranquille, bien assis, ne contestant plus parce que cela peut être dangereux, parce que les électeurs vont se fâcher, parce qu'il faut quand même conserver le pouvoir dans ces régions-là. Alors, un Québec assis, un Québec, peut-être, de la politique braillarde à laquelle on a assisté depuis quelques années.

On a essayé de lancer des ultimatums, ça n'a pas fonctionné; on a essayé de faire, depuis deux ans, une négociation tranquille, ça n'a pas fonctionné. Et que va-t-on faire? On voudrait faire ce que le député de Jacques-Cartier nous dit. On va prendre les pouvoirs qui nous restent, et on va essayer. On va peut-être même perdre, si on n'agit pas, tout ce qui reste. Le petit Québec bien tranquille, on va s'asseoir dessus. On ne fera pas grand-chose, on va attendre, parce qu'il ne faut pas mécontenter une certaine partie de nos électeurs.

En tout cas, dans le gouvernement libéral actuel, il y a encore certains hommes qui croient véritablement à la politique telle qu'elle a été établie par le ministre actuel des Affaires sociales. Si ce ministre s'en va, il ne sera pas facile dans ce gouvernement actuel de lui trouver un remplaçant qui puisse au moins continuer d'avoir des problèmes sociaux du Québec une vision globale comme celle du ministre des Affaires sociales actuel.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. le Président, étant donné qu'on a touché à ce sujet, j'aimerais ajouter quelques mots. L'arrogance de M. Trudeau, à l'égard du Québec, sa politique de centralisation, à certains moments, allant jusqu'à l'inconscience sociale, et même parfois son cynisme, par exemple, lorsqu'il choisit le moment où le Québec est aux prises avec une crise d'une ampleur jamais vue, pour saboter les projets québécois de politique sociale, toutes ces décisions unilatérales touchant directement plusieurs ministères, à mes yeux, ne peuvent que mener le Canada à la dislocation. Je dis qu'il réussit à décourager un bon nombre d'ardents défenseurs de la Confédération. Il est en train de galvaniser de plus en plus d'énergie autour de l'idée d'autonomie québécoise. Il réussit à lui seul, plus que plusieurs premiers ministres canadiens, à donner presque la preuve à la population que le Québec peut difficilement s'épanouir à l'intérieur du cadre fédéral, que son maintien se fait au prix de démissions, de tensions et d'agacements perpétuels. S'il joue ainsi le tout pour le tout, s'il tente de provoquer l'affrontement, s'il essaie de réaliser un possible engagement pour mettre le Québec au pas, il se dirige vers un échec. S'il croit encore à son destin, c'est qu'il ne sait plus ce qui se passe au Québec, qu'il est coupé de la réalité québécoise, peut-être parce qu'il a été absent trop longtemps. On trouvera peut-être mes propos violents. Ils le sont parce que le moment l'exige. Et avant de les qualifier d'exagérés, on ferait bien d'analyser sérieusement la situation et le dossier.

Ce matin, dans le Devoir dans ses dernières déclarations, M. Trudeau dit: Si vous voulez un gouvernement fort, c'est nous autres. Il laisse sous-entendre qu'au Québec il n'y en a pas, indiquant ainsi son mépris pour le Québec et son gouvernement. Il va être abasourdi de voir que la crise est en voie de règlement sans lui. Je pense personnellement que c'est un dur coup pour son humilité.

M. LE PRESIDENT: Avant d'appeler les ar-

tides et les sous-articles, sans doute le ministre aurait-il quelques commentaires à ajouter, je pense, aux propos que viennent de tenir les députés, les membres de la commission.

M. CASTONGUAY: Je pense que chacun est en mesure de tirer ses conclusions, comme on vient de le voir. Peut-être le moment serait-il venu de passer plus précisément aux crédits mêmes du ministère. Lorsque nous arriverons à l'article de l'aide sociale ou des allocations familiales, des allocations scolaires, sur le problème plus particulier de la sécurité du revenu, nous pourrons poursuivre la discussion sur certaines des suggestions qui ont été faites ou des questions qui ont été adressées. On a le choix de passer aux articles particuliers ou d'aborder la question des documents que je vous ai remis hier. Comme je vous le mentionnais, j'ai une analyse qui porte sur un aspect ou une partie importante de notre budget, soit celle de l'hospitalisation en général et qui peut aussi dégager ou placer certaines questions particulières dans leur contexte propre.

Au moment où vous le désirerez, soit à ce moment-ci, soit lorsque nous arriverons à l'article des soins généraux je pourrai faire cette analyse.

M. LAURIN: M. le Président, est-ce qu'on pourrait demander au ministre, avant de passer à l'étude des articles, de nous renseigner d'une façon un peu plus complète sur ce qu'il a décidé ou sur ce qui est actuellement mis en oeuvre pour l'implantation de la loi 65? Les journaux nous ont appris qu'un comité avait été formé, que des fonctionnaires étaient déjà à l'oeuvre. Est-ce que le ministre pourrait nous dire les étapes prévues et le point où il en est rendu dans cette implantation?

M. CASTONGUAY: Est-ce que cette suggestion est acceptée par les membres de la commission?

M. LE PRESIDENT: Tous les membres de la commission y agréent.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, c'était justement la question que je voulais aborder.

M. LAURIN: Je fais cette demande, M. le Président, parce que dans les crédits, il n'y a pas d'article précis où cet...

M. CLOUTIER (Montmagny): Cela touche à plusieurs articles. Nous sommes aussi bien d'en parler tout de suite. Cela touche à l'équipement, aux soins généraux, aux soins préventifs.

M. CASTONGUAY: Alors, je vais vous donner brièvement les grandes lignes. Par la suite, je demanderai au Dr Brunet de répondre à vos questions plus spécifiques. Malheureusement,

M. Nepveu n'est pas ici ce matin. La loi 65 a été approuvée le 23 ou 24 décembre dernier, en troisième lecture. Nous avons, par la suite, envisagé à quel moment cette loi pourrait être mise en vigueur.

Diverses questions se posaient. D'abord au plan de l'information il fallait faire en sorte que tous les organismes touchés par la loi soient informés de son contenu, des gestes qu'ils auront à poser, de façon que la population soit aussi au courant de son contenu et de quelle façon elle pourrait s'y intéresser pour participer au niveau des structures, voir comment elle sera appliquée, etc.

Il y avait également, au niveau du ministère, une autre préoccupation. Quelle sorte d'organisation mettrions-nous sur pied pour nous assurer que l'application de la loi se ferait de façon ordonnée? Problème qui se pose, comme on vient de le mentionner, au niveau de la création des conseils régionaux de services sociaux. De plus ce problème touche à l'émission des permis, au financement, aux révisions de chartes s'il y a lieu, au changement des structures internes, préparation des règlements, etc.

Quant à cet ensemble de problèmes, un travail a été amorcé sur la préparation des règlements. Nous ne croyions pas qu'il aurait été sage de mettre la loi en vigueur et de laisser un long délai entre l'application de la loi, sa mise en vigueur, l'adoption, la publication des règlements. Un travail intensif s'est fait à ce niveau. Un projet de règlement a maintenant été mis au point.

C'est à partir de ces travaux que nous avons pu déterminer la date d'entrée en vigueur de la loi, soit le 1er juin 1972. Au niveau de l'information, nous avons formé un groupe de travail qui s'est mis le premier à la tâche.

En plus de celui qui travaillait aux règlements dès le début, il s'est mis à la tâche et M. Roger Cyr en a pris la responsabilité. Déjà, du matériel a été préparé, du matériel audio-visuel; de nombreuses séances d'information ont été tenues. Ce programme se poursuit et devra se poursuivre au cours des prochains mois. Entre autres, il est prévu qu'un petit périodique soit publié au cours des prochaines semaines, de telle sorte que bien des questions nouvelles qui surgissent, qui n'avaient pas pu être traitées dans des séances d'information générale, puissent trouver une réponse.

Egalement, un autre groupe de travail a été mis sur pied sous la responsabilité de M. Gérard Nepveu qui, en même temps, a été nommé sous-ministre adjoint. Ce groupe de travail regroupe des personnes affectées aux communications, au financement, à la programmation, à l'agrément, etc., de telle sorte que nous ayons là un groupe dont la préoccupation première est la bonne mise en oeuvre de la loi 65.

La première tâche de ce groupe va être, évidemment, la mise sur pied des conseils régionaux dont la création est prévue dans la

loi. D'autres mandats spécifiques ont été donnés à ce groupe comme, par exemple, l'étude de l'avenir des services de soins à domicile, dans le contexte du futur réseau d'organisation des soins.

En parallèle, pour soutenir l'action de ce groupe, la direction de la planification et de la recherche a fait de nombreux travaux portant, par exemple, sur le choix des régions pour les fins des conseils, la délimitation de zones pour l'implantation future des centres locaux de services communautaires, l'analyse des fonctions des agences de service social —de telle sorte que l'implantation des centres de service social puisse être envisagée de façon ordonnée — le rôle des conseils actuels de développement social par rapport aux conseils régionaux futurs ou leur intégration. En tout cas, une foule de questions de cette nature.

Donc, ce second groupe est au travail, celui de M. Nepveu, et il est appuyé, évidemment, par le travail technique de ses membres et, également, des directions générales. La publication des règlements devra se faire à la fin du mois de mai ou au tout début du mois de juin. Il est prévu dans la loi qu'une période de 90 jours est accordée pour la consultation ou que les personnes ou organismes intéressés peuvent faire parvenir leurs commentaires, leurs remarques.

Etant donné l'importance de ces règlements et notre désir qu'ils soient aussi adaptés que possible, d'abord à l'esprit de la loi et aussi aux exigences d'un bon fonctionnement, dans le cadre de cette loi, des établissements, nous avons demandé à M. Edgar Guay de prendre la charge d'un autre groupe de travail. Il sera assisté de personnes du contentieux de mon cabinet et du bureau du secrétariat du ministère. Ce groupe de travail aura la mission, au cours des trois prochains moins, de recevoir tous les avis qui seront formulés sur les règlements, d'écouter les groupes — il y en a qui devaient être entendus — compte tenu de la nature des représentations qui seront faites. Nous avions également convenu ici, à la commission des affaires sociales, lors de l'adoption de la loi 65, que nous aurions une, deux ou trois séances — nous verrons en temps et lieu — selon les désirs des membres ou l'analyse qui devra être faite de ces règlements. Nous avions, de toute façon, convenu d'étudier ces règlements au cours de la période comprise entre leur publication et leur adoption définitive. C'est évident que j'ai bien l'intention de tenir ces séances tel que prévu.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que le ministre pourrait répéter à quel moment?

M. CASTONGUAY: Les règlements seront normalement publiés dans la Gazette officielle du Québec le 27 mai.

M. CLOUTIER (Montmagny): Mais pour les séances?

M. CASTONGUAY: II y a une période de trois mois, donc juin, juillet et août. Il faudra donc tenir ces séances, si possible, au mois d'août lorsque nous aurons reçu les avis et que nous les aurons étudiés, et aussi après que les travaux de l'Assemblée nationale seront terminés. J'envisageais peut-être d'avoir ces séances de la commission parlementaire au cours du mois d'août.

M. CLOUTIER (Montmagny): Qui dirige le groupe de travail qui prépare les règlements?

M. CASTONGUAY: Les règlements sont terminés présentement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Qui est en charge de leur préparation?

M. CASTONGUAY: Je ne sais pas s'il y a eu quelqu'un. C'est le Dr Brunet qui a finalement coordonné le travail et l'a dirigé. Il y a eu de nombreuses séances. Vous connaissez un peu l'ampleur du travail qu'exige la préparation de tels règlements. C'est le Dr Brunet et vraiment un travail énorme a été effectué à ce plan.

Nous avons dit que la loi prévoit les changements dans les conseils d'administration au cours du treizième mois après sa mise en vigueur, donc au cours du mois de juin 1973. Rien n'empêche, par contre, de commencer les changements de son conseil avant cette date. Cela pourrait être très bénéfique dans certains cas. Pour en arriver à ceci, comme les conseils régionaux ont un rôle important à jouer, il nous fallait établir à partir de' cette date la date où les conseils régionaux devront être en fonction. Nous avons fixé une date au cours de l'automne 1972, soit vers octobre ou novembre; nous espérons que les conseils régionaux seront alors en activité. Sur ce point plus spécifique, comment entendons-nous procéder? Au besoin, le Dr Brunet pourra répondre à vos questions, parce que la mise en place de ces conseils est quelque chose qui nous apparaît extrêmement important. On se rappelle que ce sont ces conseils qui auront un rôle particulier à jouer dans l'élaboration ou le bon fonctionnement des mécanismes électifs en vertu desquels les représentants de la population seront élus ou seront désignés selon la catégorie de représentants dont il s'agit aux conseils d'administration des établissements. Dans les très grandes lignes, disons que c'est le bilan que nous pouvons faire des travaux sur l'implantation de la loi 65. Maintenant, il y a une foule de détails. Si vous désirez obtenir d'autres renseignements. Le Dr Brunet, M. Cyr, M. Ouellet ou les officiers du ministère se feront un plaisir d'y répondre.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, nous aurions des questions.

M. LAURIN: Pendant que le Dr Brunet s'assied, est-ce que nous pouvons lui demander de compléter l'exposé du ministre en nous

parlant de l'implantation des CLSC, qui est une section particulière?

M. CLOUTIER (Montmagny): Je pense que cela compliquerait un peu la discussion, parce qu'il y a différents types d'institution. Je voudrais savoir ce que les centres hospitaliers actuels deviennent, parce que j'imagine qu'il y aura probablement des CLSC dans les hôpitaux actuels, soit par l'utilisation des cliniques externes ou des services qui existent déjà. Il y a d'autres types d'institution aussi. Le ministre nous a indiqué un échéancier, certaines dates. Il y a des groupes de travail qui ont été mis en place. Je voudrais savoir du sous-ministre quel type de région a été choisi. Est-ce qu'il peut préciser un peu les régions, les critères? Cela est important. Il y a dix régions actuellement dans le Québec. Le gouvernement fonctionne en vertu de la division administrative imposée par le ministère de l'Industrie et du Commerce. Depuis plusieurs années, il y a l'étude de la carte électorale, la redistribution. Il y aura des changements. Des comtés iront dans d'autres régions, des parties de comté iront ailleurs. Avec tout cela, il y a des pôles d'attraction qui sont changés, qui évoluent.

Je voudrais que le Dr Brunet nous donne un peu plus de détails sur la division administrative.

M. CASTONGUAY: Pour ce qui est de la division administrative, nous avons adopté la division selon les régions administratives telle qu'acceptée par le gouvernement du Québec, en l'ajustant aux amendements, aux arrêtés en conseil qui ont été faits, ce qui implique dix régions pour le Québec. La province, au point de vue des conseils, sera donc divisée en dix régions. De plus, en raison du problème particulier posé par Montréal, de la dimension de la ville de Montréal, et aussi de la diversité des problèmes par rapport à la rive sud, à l'île de Montréal et au côté nord, nous avons adopté pour Montréal les trois sous-régions qui sont acceptées et reconnues par le gouvernement du Québec actuellement comme étant des sous-régions. Ceci veut dire que nous envisageons douze régions. Les neuf régions administratives, plus les trois sous-régions de Montréal, la région de la rive sud, la région de l'île de Montréal et la région du nord, qui seront considérées comme des régions et non comme des sous-régions, c'est-à-dire des conseils autonomes. Le conseil de la rive sud est un conseil en soi, autonome. Il n'y a pas un superconseil et trois conseils. Il y aura douze régions, à toutes fins pratiques, et douze conseils.

M. CLOUTIER (Montmagny): Dans la plupart des régions,* il y a des conseils de développement social qui travaillent ou des conseils de bien-être. A Montréal, en particulier, et à Québec, il y a d'autres organismes qui occupent déjà une place dans ce secteur qui font déjà de la consultation ou qui s'occupent d'animation ou de participation. Est-ce que le sous-ministre pourrait nous dire quel succès ont actuellement les discussions avec ces différents organismes pour les intégrer peut-être dans ces conseils régionaux afin qu'il n'y ait pas dédoublement?

M. CASTONGUAY: Nous étions très conscients de ce problème. M. Ouellet a eu l'occasion, il y a déjà plusieurs mois, d'y travailler. Les discussions sont commencées au point de vue de leur orientation ainsi qu'au point de vue de leur financement au cours de l'année qui vient. La réponse a été je dirais à 95 p.c. excellente. Dans la loi, nous avons le principe de la participation que nous nous efforçons d'appliquer le mieux possible. Dans le travail de M. Nepveu, par exemple, dans l'implantation des conseils régionaux, comme première étape, nous allons former des missions qui sont en voie de formation. Ces missions vont se composer presque exclusivement de gens de la région et comprendre des gens des conseils régionaux, des gens de l'Association des hôpitaux, des gens des divers organismes existants et qui y jouent un rôle, afin que l'implantation des conseils régionaux soit représentative des régions avec simplement quelqu'un du ministère qui va assurer les liens et la coordination. Les conseils de développement sont, sauf un, à toutes fins pratiques, tous d'accord pour se transformer, c'est-à-dire être remplacés par les conseils des services de santé et des services sociaux. Quant à celui de Montréal, nous continuons à discuter avec lui et à le rencontrer pour l'implantation des conseils régionaux.

M. CLOUTIER (Montmagny): Des organismes aussi importants que le Conseil de développement social de Montréal — l'ancien Conseil des oeuvres — ont aussi des budgets importants qu'ils affectaient dans le secteur social à différentes oeuvres ou à différents secteurs particuliers. Je pense bien qu'ils devront se chercher une autre vocation ou se trouver d'autres tâches parce que, si je comprends bien, les budgets de ces conseils régionaux vont être établis suivant des normes qui vont se ressembler d'une région à une autre; on va tenir compte de l'ampleur de la région à desservir. Est-ce que, dans cette définition, dans cette recherche de nouvelles vocations, le dialogue est bien engagé avec le ministère?

M. CASTONGUAY: La plupart des conseils ont accepté que le rôle actuel qu'ils jouaient soit joué par les conseils des services sociaux et des services de santé qui seront établis. A Montréal les discussions se poursuivent, elles ont été amorcées.

Il est possible que le conseil se définisse un rôle particulier différent. Réciproquement, nous n'avons pas pris d'options définitives à ce sujet. Je ne sais pas si M. Ouellet a des détails à ce sujet.

Je pourrais peut-être ajouter que ces conseils de développement social ont des sources de financement passablement diversifiées. Ils reçoivent du ministère des Affaires sociales, pour la plupart, un budget de fonctionnement qui, dans la plupart des cas, est limité. Celui de Montréal a évidemment un plus gros budget de fonctionnement. De plus, ils reçoivent aussi de différentes sources, dont le ministère des Affaires sociales, des sommes à titre de subventions à la recherche. Ces subventions à la recherche continueront d'être disponibles aussi pour les conseils qui choisiront de demeurer parallèlement ou en complémentarité avec les conseils régionaux au même titre que n'importe quel autre organisme ou groupe d'individus qui peut faire des demandes au ministère des Affaires sociales pour obtenir des subventions à la recherche, eux aussi pourront continuer de le faire. Si on regarde en particulier le budget de fonctionnement que le conseil de Montréal recevait du ministère des Affaires sociales, il était de l'ordre de $65,000 par année sur un budget total qui dépasse les $200,000.

M. CLOUTIER (Montmagny): Cela va quant aux régions et aux conseils. Quant à l'information, est-ce que...

M. CASTONGUAY: Est-ce que vous aimeriez qu'on vous parle de l'information?

M. CLOUTIER (Montamgny): Etant donné que l'information sera une partie extrêmement importante, l'information dans les deux sens aussi, c'est-à-dire non seulement que le gouvernement informe la population et les agents, ceux qui auront à vivre et à appliquer le bill 65, mais aussi la population qui va en avoir soit le bénéfice ou les difficultés à certains endroits. Je voudrais que M. Cyr nous dise un peu comment il a conçu son programme, quels sont les points délicats auxquels il a porté plus particulièrement son attention.

M. CASTONGUAY: Ce sont tous des points délicats, au fond. Un travail est déjà commencé. Il a consisté essentiellement à informer les fonctionnaires du ministère et les fonctionnaires d'organismes paraministériels intéressés à la loi 65, comme par exemple les gens du Conseil du trésor ou des choses comme ça. Cela a été une première étape. Dans un deuxième temps, nous avons amorcé l'information à l'aide de deux documents audio-visuels auprès des établissements qui sont touchés par la loi 65. Pour l'instant, nous nous contentons — et quand je dis se contenter c'est un euphémisme, parce qu'il y a tellement de demandes qu'on arrive à peine à suffir — de répondre aux demandes des établissements qui nous demandent d'utiliser ce matériel et les animateurs que nous fournissons pour répondre à des questions ou animer des tables rondes. Systématiquement, nous tenons actuellement dans les établissements 25 à 30 réunions par semaine. Au cours de ces réunions, nous montrons deux documents audio-visuels sur la loi 65 elle-même. Cela consiste également à la situer à l'intérieur d'une politique, la politique sociale. Ces deux documents sont ensuite commentés par un animateur qui répond aux questions de l'auditoire et ces questions varient selon les régions et selon les préoccupations de chacun.

A l'heure actuelle, nous préparons également du matériel concernant l'implantation des conseils régionaux selon la stratégie d'implantation qui a été établie. Nous préparons du matériel qui sera remis entre les mains des types qui seront chargés de faire l'implantation des conseils régionaux. C'est actuellement en préparation. Eventuellement, après que les règlements auront été adoptés par l'Assemblée nationale, nous pourrons commencer à aborder la phase plus complète d'information du public en général.

M. CLOUTIER (Montmagny): Sur quoi mettez-vous davantage l'accent, ou quel est le leitmotiv de toute l'information que vous préparez? Est-ce la participation des gens?

Un effort de participation spécial a été fait dans la loi, soit au sein des conseils d'administration des différentes institutions. Les citoyens pourront également se plaindre des mauvais services ou faire des représentations pour des services dont ils ne sont pas satisfaits. De savoir que le conseil d'administration untel est relié techniquement à l'autre conseil d'administration, cela a moins d'intérêt pour les gens. De savoir à quel endroit ils pourront s'adresser, quels sont les services que les institutions sont en mesure de leur donner, quels sont les endroits où ils peuvent loger des plaintes, c'est ce qui les intéresse davantage.

M. CASTONGUAY: II faut se rappeler du contenu de la loi et aussi de ce qui a été prévu dans les dispositions pour les règlements. Dans un premier temps, c'est l'objet de la deuxième partie de votre question tantôt, en ce qui a trait aux règlements, j'ai mentionné de quelle façon nous entendions procéder, Dès la publication des règlements, il y aura demande d'avis. Un groupe de travail va les recevoir et les étudier jusqu'au moment où les règlements seront adoptés. Une fois les conseils régionaux établis, ces conseils étant issus justement de tout le réseau des affaires sociales, ils vont constituer, en quelque sorte, un mécanisme d'acheminement de l'information qui doit nous parvenir. En même temps pour les gens qui ont des plaintes à formuler, par rapport à leur droit de recevoir des services, compte tenu des ressources, ces conseils sont désignés à cet effet. Egalement, il est prévu dans la loi, en plus de la participation par voie d'élection de personnes au niveau des conseils, la nécessité d'une séance publique d'information. Elle prévoit aussi la publication de rapports de telle sorte que la

population soit informée. Alors, par la tenue de ces séances, il y a de l'information qui va revenir d'abord au bon niveau, celui de l'établissement, et par le truchement de ces établissements au conseil, etc. Après cette phase d'information qui doit venir du ministère vers le milieu pour les saisir du contenu de la loi, la loi elle-même contient des mécanismes qui, nous l'espérons, vont permettre que l'information revienne dans l'autre sens. Vous aviez une question pour M. Cyr. Je ne voulais pas la court-circuiter, mais je voulais au moins faire cette précision.

Comme je l'ai mentionné, on a distingué deux catégories de public ou de clientèle en ce qui concerne l'information. D'abord une clientèle plus spécialisée de gens sont touchés directement par la gestion de la loi. Ce sont des fonctionnaires du ministère ou le personnel des établissements ou les conseils régionaux eux-mêmes. C'est un travail surtout d'information, soit d'expliquer comment la loi va fonctionner au fur et à mesure que les directives arrivent. En ce qui concerne le public en général, qui est notre deuxième clientèle, à mon avis, deux grands thèmes le touchent. C'est la participation comme vous le mentionniez, soit comment communiquer avec chacun des niveaux impliqués dans la loi, comme par exemple le ministère, les conseils régionaux et les établissements. Egalement c'est un programme spécifique d'information sur une nouvelle catégorie d'établissements qui s'appellent les CLSC. Ce sont les deux thèmes majeurs à mon avis, participation et CLSC.

En fait on est à la première phase. Actuellement nos efforts portent à informer soit les gens du ministère, soit les gens des établissements ou les professionnels, touchés sur le contenu de la loi. On leur dit comment cela fonctionne, parce que cela reste assez complexe. Les lois ne sont jamais faciles à lire. C'est vraiment cette phase-là qui est en cours actuellement. Je pense qu'on a le nombre de visites et tout cela. Il y a eu un grand nombre de séances d'information. La phase pour atteindre le public va se faire surtout après l'adoption des règlements, c'est-à-dire à l'automne.

M. CLOUTIER (Montmagny): Allez-vous avoir assez de budget pour poursuivre toute cette activité?

M. CASTONGUAY: Je n'ai pas eu le temps de me poser cette question.

Voici une suggestion spontanée, je ne sais pas si ça vous intéresse. Je sais que vous avez un programme de travail chargé pendant que l'Assemblée nationale siège, mais il y a du matériel extrêmement intéressant: films, diapositives avec textes. La présentation de ce matériel dure une heure ou à peu près.

M. LAURIN: Avec plaisir.

M. CASTONGUAY: Le film dure trente et une minutes et l'audio-visuel, dix-huit minutes; donc au total 49 minutes.

UNE VOIX: Cela nous intéresserait.

M. LESSARD: Ce serait extrêmement important, parce que nous sommes continuellement interrogés, en particulier dans nos régions où, peut-être, la phase d'information joue moins, parce que l'on concentre peut-être ailleurs actuellement. Nous sommes continuellement appelés à donner des explications sur le bill 65, sur la manière dont on l'appliquera. Comment ça va s'intégrer? Comment les organismes vont être directement...

M. CASTONGUAY: Ce n'est pas mon rôle de poser des questions, mais est-ce que vous prévoyez seulement une projection de ces deux documents ou que l'on y ajoute une période de questions et réponses — pour votre information — avec les techniciens du ministère?

M. LESSARD: Certainement.

M. CASTONGUAY: Voici ce que, peut-être, je pourrais suggérer. Il est fort probable que le même type d'intérêt se manifeste chez d'autres députés que les membres de la commission ici. Je pourrais demander au leader, M. Lévesque, de communiquer avec chacun des partis pour fixer une date, un moment, pour tenir une telle séance d'information pour tous les députés. La loi est en vigueur; le moment des discussions sur son contenu est passé. Il s'agit d'informer la population le plus adéquatement possible.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que, par la même occasion, le ministre pourrait nous faire entendre sa conversation avec les directeurs des bureaux régionaux?

M. CASTONGUAY: Cela n'a pas été enregistré. Cela l'a été, mais pour reproduction écrite seulement.

M. GUAY: Je voudrais souligner que j'ai déjà reçu l'invitation —je pense qu'une de ces séances d'information va se tenir à Lévis le 24 — et que j'ai accepté avec plaisir de m'y rendre. C'est peut-être ça que l'on présentera. Je pense que ça va être enrichissant pour ceux qui vont accepter d'y aller.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.

M. LESSARD: Je voulais demander s'il y avait un échéancier précis concernant l'implantation de ces structures-là.

M. CASTONGUAY: L'échéancier est en partie prévu dans la loi, c'est-à-dire qu'on prévoit,

qu'on pense qu'il faudrait que les conseils régionaux soient à peu près tous établis avant le mois de décembre de l'année 1972.

M. LESSARD : Quand vous parlez des conseils régionaux, selon la loi, ils ne seront pas établis — vous avez parlé tout à l'heure de dix régions administratives— nécessairement dans ces dix régions administratives. C'est au choix du ministre, je crois.

M. CASTONGUAY: C'est au choix du ministre. C'est notre intention d'en établir à chaque endroit, à moins de raisons majeures, d'impossibilité ou de difficultés majeures. L'intention, c'est d'établir un conseil par région. L'idéal serait de le faire d'ici octobre, si c'est possible.

M. LESSARD: Octobre 1972?

M. CASTONGUAY: Octobre 1972. De façon que ça nous donne le plus de temps possible. Après ça, il y a la préparation. Les conseils ont du travail à faire. Dans la loi, il est prévu que les conseils ont des responsabilités. Une fois que les conseils seront formés, ils doivent choisir eux-mêmes leur directeur général. Ce n'est pas le ministre ou le ministère qui le choisit, ce sont eux. Ce sont eux qui préparent les élections ou qui déterminent de quelle façon se tiendront les élections.

M. LESSARD: Comment, à ce moment-là, la nomination des membres du conseil régional sera-t-elle faite, étant donné qu'il y a quand même des représentants venant du centre local?

M. CASTONGUAY: C'est prévu dans la loi. Ce sont les missions qui vont faire le travail d'animation.

M. LESSARD: C'est prévu dans la loi, mais dans la loi il est dit qu'il y a des représentants des conseils locaux, des CLSC au conseil régional. Si ces CLSC ne sont pas nommés, à ce moment-là...

M. CASTONGUAY: La loi prévoit cela. Il y a des représentants des universités, des centres hospitaliers, des maires ou des municipalités. Il va falloir, justement, que le conseil régional adopte, selon des dimensions du territoire, le nombre d'institutions etc., certaines règles de procédure pour faire en sorte que ces mécanismes-là fonctionnent. Lorsqu'il n'y a pas, par exemple, de CLSC, le poste reste vacant pour le moment.

M. LESSARD: D'accord.

M. CASTONGUAY: Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit que le conseil régional a des responsabilités et on ne voulait pas lui définir des procédures uniformes, étant donné les disparités dans l'étendue des territoires, le nombre d'institutions, les types de préoccupation des divers milieux.

M. GUAY: Cela voudrait dire, en quelque sorte, que c'est lui qui est le plus en mesure de tenir compte du milieu.

M. CASTONGUAY: On le veut vraiment. Je pense que c'était tout l'esprit de la discussion de la loi 65 et des représentations qui nous ont été faites, à savoir que la participation s'effectue d'abord à partir des grandes lignes tracées dans la loi, mais elle s'effectue à partir des milieux et que ce ne soit pas, dans l'autre sens, à partir du ministère en descendant. C'est l'esprit que nous voulons respecter.

M. GUAY: Participation véritable.

M. CASTONGUAY: Nous l'espérons. Une fois que la loi est là, ça dépendra de l'intérêt qu'ont les gens, ça dépendra d'eux. Si je mentionne ceci — je ne veux pas être pessimiste, au contraire — mais il y a eu d'autres expériences de participation qui ont été quelque peu décevantes parfois. En France, par exemple, on me dit que trop souvent, dans le domaine de l'éducation, la participation des parents dans les structures donne des résultats très différents de ceux escomptés. Bien souvent les parents ne s'intéressent, dans leur travail de représentation, qu'aux problèmes particuliers qu'ils ont perçus; par exemple, s'ils ont un enfant inadapté, ou des problèmes semblables.

Ils ont énormément de difficulté à faire en sorte qu'ils adoptent des attitudes un peu plus générales. C'est pourquoi je dis que cette participation sera valable, pour autant que les gens apporteront ce qu'ils doivent apporter. Une fois les mécanismes mis en place, une fois la loi adoptée, notre tâche, dans l'esprit de la loi, en définitive, est presque terminée. C'est plutôt à la population de prendre la relève à partir de ce moment-là.

M. LAURIN: M. le Président, je voudrais revenir quelques instants au domaine de l'information. Au ministère de l'Education au Québec, comme en France, il y a des publications régulières qui ont pour but d'informer les établissements sur les progrès dans l'élaboration et l'exécution des politiques.

Je pense que ces publications rendent un grand service aux établissements concernés en ce qui concerne la collaboration avec le ministère, l'articulation des efforts au niveau local et au niveau central. Le ministère de la Santé a commencé, un peu dans cette direction-là avec la Régie de l'assurance-maladie où il y a un bulletin mensuel qui nous fournit, tous les mois, de précieuses indications sur le fonctionnement de la régie, les difficultés que l'on éprouve, les façons qu'on prend pour les régler.

Je me demande si, avec l'implantation, la

mise en vigueur d'une loi aussi importante que la loi 65 qui amène un bouleversement radical des mentalités, des structures, des attitudes, il ne serait pas important de songer à la mise en place d'un organe régulier du ministère, un bulletin ou une revue régulière du ministère qui constituerait une sorte de trait d'union, de liaison, en même temps qu'un lien essentiel d'information.

M. CASTONGUAY: Je vais laisser la parole à M. Cyr sur cette question parce qu'il y a justement des choses de prévues. Mais en plus, et nous en avons discuté à un peu plus long terme, il faut faire les choses une à une, nous croyons qu'il serait extrêmement important que le ministère soit plus actif au plan de l'information sur d'autres problèmes. Je pourrais en citer un certain nombre.

Aujourd'hui, les moyens sont tels que certaines des méthodes d'éducation sanitaire traditionnelles peuvent être fortement améliorées si on y ajoute les nouveaux moyens de communication. Il y a aussi énormément de renseignements transmis à la population et la population n'est pas toujours en mesure de juger des habitudes qui ne nous apparaissent pas nécessairement pour le plus grand bien de la population.

Je pense particulièrement à toute l'information touchant les médicaments.

On en vient à croire, dans bien des milieux, que, peu importe le problème, on peut, si on a un peu de perspicacité, venir à trouver le bon médicament pour toujours être en bon état. Les gens, à cause de cette publicité, en viennent par eux-mêmes à une consommation de médicaments qui m'apparait exagérée. Ce n'est pas simplement à moi que cela le semble. Si ce n'était que moi, je serais peut-être plus prudent dans mes observations.

Je crois que le ministère a aussi un rôle d'information positive sur ce plan et il y a un certain nombre d'autres questions. Disons que ce n'est pas le moment de faire cette énumération mais nous sommes bien conscients qu'il nous faut aller au-delà de ce qui s'est fait présentement et que nous devons jouer un rôle de concert avec des organismes pour la meilleure information de la population.

J'en profite pour dire, par exemple, que nous avons mis sur pied, avec la Ligue d'hygiène dentaire du Québec, un programme spécifique d'information qui doit commencer incessamment. Nous sommes bien conscients que nous devons aller bien au-delà de ce que nous avons fait dans le passé dans ce domaine.

Maintenant, M. Cyr, plus particulièrement dans ce domaine-là.

Pour ce qui est de la publication en question, nous nous étions rendu compte nous-mêmes, en préparant nos séances d'information à l'intention des fonctionnaires, que nous étions conscients qu'il s'agissait là d'un premier coup de marteau sur le clou et qu'il fallait par la suite continuer à alimenter les fonctionnaires et également les gens des établissements.

Nous avons prévu cette publication dont vous parlez; effectivement, le journaliste qui dirigera cette publication a été engagé, l'engagement est passé au Conseil du trésor il y a une semaine, et il doit entrer en fonction mardi prochain. Nous nous réservons à peu près deux mois pour établir le devis technique, c'est-à-dire décider du format. Est-ce qu'il s'agira d'une revue, d'un journal quelle périodicité va-t-on lui donner? Quel volume va-t-on lui donner? On se se donne deux mois pour faire ça, pour préparer le premier numéro.

Ceci veut dire qu'une première livraison devrait partir, à mon avis, vers la fin de juillet. C'est peut-être une mauvaise période pour l'ancienne publication, mais il faut commencer quelque part dans le temps, et comme ça se présente à ce moment-ci, je pense que ce n'est pas mauvais, l'été, que nous puissions faire nos premières armes.

Pour revenir à ce que le ministre vient de mentionner, en dehors des questions strictement d'information, il y aussi des problèmes d'éducation populaire, en ce qui concerne un tas de malaises, de maladies ou d'inadaptation psycho-sociale. Actuellement, nous commençons à faire un inventaire des principaux thèmes qui pourraient se prêter à un traitement audiovisuel, pour essayer de sortir de petites plaquettes, de petits documents, des petits dépliants qui sont publiés sur la prévention de l'hygiène alimentaire, prévention des maladies cardiaques, des choses comme ça. On songe actuellement à utiliser l'audio-vision pour attaquer ces problèmes.

Il reste à déterminer quelle forme cela prendra mais l'inventaire est amorcé là-dessus. Si vous permettez, je vais revenir à une question posée tout à l'heure par le député de Saguenay au sujet de l'implantation des conseils régionaux, en l'absence du sous-ministre qui dirige le groupe de travail sur l'implantation. Disons que la réponse que je vais vous donner va peut-être vous indiquer comment on entend procéder.

Le groupe de travail lui-même fonctionne à un niveau provincial. Une décision est prise de former, au niveau de chacune des douze régions délimitées, une mission régionale. Elle est composée d'un délégué du ministère qui ferait office d'agent de liaison. Cette mission sera composée de cinq ou six personnes, disons un représentant du conseil de développement social, un représentant pour l'association des foyers pour adultes, un représentant de l'association de l'enfance inadaptée. Nous en prévoyons cinq ou six. Ce groupe est chargé de contacter les maires de la région, de faire désigner par les établissements les deux ou trois personnes qui devront siéger au conseil régional. Ce sont des personnes de centres hospitaliers, de centres de service social, et de centre locaux de services communautaires. Ce groupe sera même chargé de dresser un espèce d'inventaire

des organismes socio-économiques qui devraient être consultés au moment de la nomination des deux représentants désignés par le lieutenant-gouverneur en conseil, etc. Cette mission régionale sera chargée d'établir tous les contacts pour s'assurer que le conseil régional de la santé et des services sociaux sera mis en place dans un délai de six mois.

M. GUAY: Est-ce que ces douze missions régionales sont actuellement formées?

M. CASTONGUAY: Elles sont formées à 75 p.c. Nous avons contacté les fédérations provinciales de ces groupes. J'ai oublié un représentant, celui de l'association des hôpitaux. Nous avons contacté les associations provinciales et elles nous ont délégué une personne par région. Les fédérations provinciales n'ont pas encore complété leur travail. Pour être précis, il y a une région où c'est extrêmement difficile. C'est celle du Nouveau-Québec. Je pense bien que tout le monde le prévoyait.

M. CLOUTIER (Montmagny): Formerez-vous une région avec la 'baie James, M. le ministre?

M. CASTONGUAY: Non, nous étudions par contre le problème des services dans cette région.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je reviens aux périodiques. Est-ce que le journaliste que vous engagerez sera un journaliste aussi chevronné que les trois journalistes qui sont ici ce matin? Mlle Dutrisac, M. Michel Roy et M. Bellefeuille. Ou s'il fera ses armes avec la brochure que vous mettrez sur pied au ministère?

M. CASTONGUAY: Nous avons parfois l'impression que Mlle Dutrisac, M. Bellefeuille, en particulier, sont déjà dans le ministère. Nous ne pouvons pas les engager deux fois.

M. CLOUTIER (Montmagny): Ils ne sont pas soumis aux contraintes de la fonction publique quand même. Actuellement, des organismes publient des revues dans le domaine du bien-être, dans le domaine de la santé. Il y a des revues médicales, des revues spécialisées dans le domaine du bien-être. Certaines traitent de l'enfance. Certaines traitent des personnes âgées. Certaines traitent des services sociaux. Il y aurait peut-être lieu, pour la brochure du ministère, à l'occasion, de reproduire, si possi- ble, les meilleurs articles publiés et de les mettre à la portée du plus de monde possible. Ces revues n'ont peut-être pas tout le tirage qu'elles devraient ou voudraient avoir. C'est une suggestion que vous pourriez peut-être examiner en temps opportun.

M. LE PRESIDENT: Messieurs...

M. CASTONGUAY: M. le Président, avant de terminer on pourrait essayer de fixer un ordre de travail pour la prochaine séance.

M. CLOUTIER (Montmagny): Voici ce que j'aurais à suggérer. Le député de Bourget voulait, à l'intérieur du bill 65, qu'on parle des institutions, surtout les CLSC. Pour ma part cela m'intéresserait aussi, étant donné que ce sont de nouvelles institutions, d'en traiter à part à l'occasion du bill 65 parce que cela touche passablement de choses. Mais après ça, pour ma part, je serais prêt à commencer article par article. Sur chacun des articles, s'il y a des discussions de portée plus générale, on les fera sur la catégorie 1 de chacun des articles.

M. CASTONGUAY: Très bien. Alors voulez-vous que nous abordions immédiatement les centres locaux de services.

M. CLOUTIER (Montmagny): II reste dix minutes, je pense que ça va prendre un peu de temps.

M. CASTONGUAY: Très bien. Alors, on commencera mardi matin. La suggestion que j'ai faite, docteur, ce serait par le bureau de M. Gérard Lévesque. Qu'il communique avec chacun des leaders et qu'une séance soit organisée pour l'ensemble des députés. S'ils trouvent la chose intéressante, ils viendront sinon ce seront les membres de la commission ici.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, la commission suspend ses travaux sine die parce qu'il m'apparaît préférable d'attendre l'ordre de la Chambre pour déterminer le jour et l'heure de la prochaine séance.

M. CASTONGUAY: Bien, il est fort possible que ce soit mardi matin.

M. LE PRESIDENT: Le leader parlementaire l'annoncera à la Chambre.

(Fin de la séance à 12 h 20)

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