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Commission permanente des Affaires sociales
Etude des crédits
Séance du mercredi 17 mai 1972
(Quinze heures cinquante-quatre minutes)
M. GIASSON (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
M. HARVEY (Chauveau): Si vous me permettez, M. le Président, je
vais commencer à rapporter...
M. LE PRESIDENT: Les membres attitrés de la commission
accepteraient-ils le principe de laisser le droit de parole à tous les
députés qui siègent autour de la table? Selon les
règlements, a priori, seuls les membres de la commission ont droit de
parole mais cependant, avec la permission de tous les membres, tous les
députés peuvent participer au débat. Est-ce qu'on accepte
comme principe général...
M. BOIVIN: J'accepte mais à la condition qu'ils ne recommencent
pas le débat.
M. LE PRESIDENT: Vous voulez dire un député qui a
été absent un bout de temps et qui revient...
M. BOIVIN: ... qui revient discuter les sujets adoptés.
M. LE PRESIDENT: C'est une recommandation très acceptable.
M. GUAY: M. le Président, nous en avons déjà
discuté lors de l'étude de crédits des autres
ministères. Notre parti politique a pris l'habitude de souligner
à la commission quand cela nous est demandé pour autant qu'un
député ne voie pas son droit de parole brimé, qu'il n'y
ait pas de problème. Evidemment, si un député intervient
sur un sujet qui a déjà été discuté, qu'on
le lui rappelle tout simplement. Cela s'est fait lors de l'étude des
crédits du ministère des Affaires municipales lorsqu'on m'a dit:
La question que tu poses maintenant a déjà été
discutée. A partir de là, il n'y a pas de problème.
M. LE PRESIDENT: Je pense bien que tout le monde accepte les opinions
qui viennent d'être émises.
En débutant, il va de soi que nous cédions la parole au
ministre des Affaires sociales.
Remarques préliminaires
M. CASTONGUAY: M. le Président, l'an dernier et il y a deux ans,
on avait insisté sur le fait que l'étude des crédits du
ministère pouvait être une occasion extrêmement utile pour
un bon nombre de fonctionnaires du ministère d'assister à la
commission afin de mieux saisir les interrelations entre les différentes
questions, afin d'être plus sensibilisés aux
représentations faites par les critiques des partis de l'Opposition, par
les députés du gouvernement. C'est la pratique que nous avons
suivie au cours des deux dernières années. Je partage ce point de
vue. C'est pourquoi j'ai invité encore cette année un bon nombre
de fonctionnaires du ministère à assister à l'étude
de ces crédits. Malheureusement, cet après-midi, le début
de l'étude des crédits s'est fait un peu plus rapidement que
prévu. On m'avait parlé de jeudi, soit demain, au cours de
l'après-midi.
Puis, le leader m'a parlé de demain matin, jeudi matin;
finalement, ce matin, il m'a dit: Nous allons commencer cet après-midi.
Certains fonctionnaires, tels le sous-ministre qui, aujourd'hui, allait
prononcer une conférence, je crois, à l'université Western
en Ontario et, M. Gilles Gaudreault, entre autres, sous-ministre adjoint en
relations professionnelles, qui était à Montréal pour des
problèmes bien particuliers reliés au conflit que nous
connaissons, sont absents. Quelques autres, par exemple M. Després,
président de la Régie d'assurance-maladie, qui m'avait
assuré qu'il serait ici, mais qui comptait devoir être ici demain
après-midi, n'est pas encore arrivé. Alors, je suggérerais
que, demain matin, au début de la séance, nous leur demandions,
comme l'an dernier, de s'identifier, mais d'attendre à demain matin, de
telle sorte qu'ils soient tous ici et que nous ne nous répétions
pas.
En second lieu, M. le Président, j'ai pensé qu'il serait
utile pour les membres de la commission d'avoir une copie de l'organigramme du
ministère, un organigramme schématique, de telle sorte que vous
puissiez mieux situer, au besoin, ces personnes et aussi que la structure du
ministère apparaisse plus clairement, ou encore qu'on voie mieux quels
sont les responsables lorsque nous touchons a certaines questions qui seront
sûrement posées lors de l'étude détaillée des
crédits. Je vais demander à M. Quinty, mon attaché de
presse, de vous remettre une copie de cet organigramme.
Quant à l'exposé général que j'aimerais
faire, j'espère qu'il ne sera pas trop long. Compte tenu du fait que
nous sommes présentement dans une réforme qui dure depuis deux
ans et qu'il est important de suivre ou de situer les gestes que nous posons,
non pas seulement pour bien les comprendre en eux-mêmes, mais aussi pour
en voir la continuité, il m'a semblé qu'il pourrait être
utile, d'abord, de faire un bref rappel de certains aspects de l'exposé
que j'ai fait l'an dernier, au début de l'étude des
crédits du ministère.
En second lieu, par rapport à cet exposé de l'an dernier
qui avait été fait en juin, reprendre certains aspects du bilan
que j'ai tracé des activités du ministère à la fin
de l'année 1971,
et enfin vous donner les objectifs que nous nous étions
tracés au début de l'année 1972, de telle sorte que les
gestes posés, les orientations prises et aussi l'échelonnement de
tout ça puissent apparaître aussi clairement que possible.
Je voudrais par la suite, dans un quatrième temps, donner
quelques faits saillants du budget ou des crédits pour l'année
72/73 de telle sorte qu'on voie mieux les grandes lignes de ces crédits.
Enfin, il y a quelques questions particulières qu'il
m'apparaîtrait important d'aborder au besoin ce sera à vous
de juger avant l'analyse détaillée des crédits du
ministère. Je vous en donnerai la liste à la fin de cet
exposé.
Quant au rappel de l'exposé général de l'an
dernier, lors de l'étude des crédits pour l'année 71/72,
j'avais en premier lieu, à l'aide de certaines données
statistiques, mis en relief l'augmentation rapide des dépenses publiques
dans les secteurs de la santé, des services sociaux et de la
sécurité du revenu au cours des dix ou douze dernières
années. Pour la période 1960-1970 entre autres, j'avais
mentionné, à l'aide de données provenant entre autres du
Conseil économique du Canada que, dans le domaine de la santé,
par exemple, les dépenses publiques avaient augmenté à un
rythme annuel de 14 p.c. ou 15 p.c. par année. D'autres sources ou
d'autres études viennent confirmer ces données. En ce qui a trait
aux autres secteurs, soit la sécurité du revenu, les services
sociaux, j'avais donné des chiffres démontrant l'augmentation des
dépenses publiques dans ces secteurs à des rythmes analogues.
J'avais aussi insisté sur le fait que ces dépenses augmentaient
plus rapidement que l'augmentation du produit national brut et même que
l'augmentation des ressources fiscales du gouvernement.
En contrepartie, j'avais également voulu attirer l'attention sur
un certain nombre de facteurs qui font en sorte qu'une pression
considérable s'exerce au niveau de l'identification des besoins dans
chacun de ces trois secteurs et ceci, non pas seulement et
nécessairement par la voie d'études, mais aussi au sein de la
population et par la dynamique même du type de service ou de programme
dont il est question, le vieillissement de la population, les nouvelles
disciplines que nous retrouvons dans ces secteurs, l'approche
multidisciplinaire, l'équipement toujours plus perfectionné, les
problèmes de transformation de l'économie, etc. J'avais conclu,
à la suite de cet exposé, qu'il nous apparaissait
nécessaire de rechercher par divers moyens une planification plus
rigoureuse de nos actions, de nos politiques, de nos programmes, une plus
grande recherche de l'efficacité, de telle sorte qu'à même
des budgets qui ne pouvaient croître au même rythme qu'au cours des
dix, douze dernières années, années pendant
lesquelles, je l'admets, il y avait eu du rattrapage, mais compte tenu du fait
que nous ne pouvions escompter soutenir une telle augmentation, de même
que c'est le cas dans bien d'autres juridictions il nous fallait donc
re- chercher aussi une plus grande efficacité, modifier les
systèmes de distribution des services de santé et de services
sociaux, de telle sorte que ces services soient plus adaptés pour
répondre aux besoins et qu'aussi on réponde aux divers types de
besoin par les moyens à la fois les plus adaptés mais, dans toute
la mesure du possible, les moins dispendieux également.
En ce qui a trait à la sécurité du revenu, j'avais
insisté sur la nécessité d'une politique en fonction
d'objectifs bien définis, d'une politique intégrée et
cohérente, étant donné le fait que, dans ce secteur
particulier, malgré les sommes très grandes
dépensées, l'augmentation de ces sommes, nous continuions
d'être témoins d'une population toujours aux prises avec des
problèmes de pauvreté qui s'expriment au premier titre par un
manque ou une insuffisance de ressources financières.
A partir de ces conclusions générales, j'ai
rappelé, toujours pendant l'étude des crédits l'an
dernier, les trois grands objectifs que nous nous étions fixés
pour 1971.
C'étaient la formulation d'une politique de
sécurité de revenu, l'intégration des deux
ministères de la Santé, de la Famille et du Bien-Etre social et
également la rationalisation et le contrôle du fonctionnement des
établissements.
Mon exposé avait couvert, avec beaucoup plus de détails,
chacun de ces trois objectifs que nous considérions comme prioritaires
en 1971. En ce qui a trait à la rationalisation et au contrôle du
fonctionnement des établissements, nous avions discuté, pour la
première fois, je crois, d'une façon un peu plus approfondie, la
notion de centre local de services communautaires, du premier programme que
nous avions ébauché à cet effet. En ce qui a trait
à la sécurité du revenu, étant donné que
l'étude des crédits s'était située quelques jours
après la conférence de Victoria, nous avions également
abordé les aspects touchant la constitution de cette question.
Enfin, l'an dernier, j'avais donné, comme cette année, les
faits saillants du budget ou des crédits pour l'exercice 71/72.
Au terme de l'année 1971, j'ai voulu tracer un bilan de ce qui
avait été accompli. Même si, pour les fins des
crédits budgétaires, l'exercice financier va du 1er avril au 31
mars, depuis mon arrivée au ministère, il m'a paru utile de fixer
des objectifs sur une base d'année de calendrier, quant à notre
action. A ce jour, ceci a donné de bons résultats, compte tenu du
fait que, lorsque nous arrivons à la fin de l'année, il y a
généralement une certaine pause à l'occasion des
Fêtes, un moment de réflexion qui nous est alloué. Ceci
nous permet de faire le point plus facilement que ce n'est le cas au mois de
mars, alors que l'Assemblée siège, que nous sommes en pleine
activité. C'est la raison pour laquelle j'avais tracé, au cours
des deux dernières années, au terme des années de
calendrier, un bilan.
Si vous me permettez, j'aimerais rappeler
certains aspects de ce bilan, toujours dans l'idée de situer,
autant que possible dans une certaine continuité, l'action du
ministère.
Dans ce bilan, je disais donc que l'un des trois objectifs, comme je
viens de le rappeler, la rationalisation et le contrôle du fonctionnement
des établissements de santé et de bien-être, aux plans
législatif, administratif et financier, était celui qui avait
retenu le plus l'attention, de la façon la plus constante, de la
population au cours de l'année 1971.
Au plan législatif, le projet de loi 65 portant sur
l'organisation des services de santé et des services sociaux a
été déposé, comme on s'en souvient, au cours de
l'été dernier. Le projet de loi avait fait l'objet d'une
tournée de ma part et aussi de nombreuses séances de la
commission des affaires sociales.
Au plan administratif, des efforts ont été
consacrés au cours de l'année 1971 à l'amélioration
du fonctionnement de la Loi de l'aide sociale, à la fermeture, à
la transformation et à la réaffectation quant à leur
vocation, d'une vingtaine d'établissements à vocation sociale,
à la suite des études conduites par la direction de
l'agrément du ministère.
Au plan financier, l'expérience du budget global, en
collaboration avec 23 hôpitaux, a également, au cours de
l'année 1971, retenu l'attention et particulièrement celle des
responsables des établissements concernés. J'avais
mentionné que ce concept du budget global vise à donner, aux
établissements financés par le ministère, une plus grande
latitude sur le plan de la gestion à l'intérieur de certaines
normes générales.
Nous aurons l'occasion, si vous le désirez, de dégager
déjà certaines données qui ressortent de cette
expérience. Quant au deuxième objectif, l'intégration des
anciens ministères de la Santé, de la Famille et du
Bien-être, à la fin de l'année 1971, je disais que
l'opération était, au plan de l'intégration, à
toutes fins pratiques, terminée. Evidemment, il nous restait bien du
recrutement à effectuer. Depuis, nous avons continué, et ce
travail se poursuit.
En ce qui a trait au troisième objectif, l'élaboration et
l'affirmation d'une politique de sécurité du revenu, en
coordination avec une politique de main-d'oeuvre, nous avons
déployé des efforts tout au cours de l'année 1971 et,
compte tenu des récents événements, je crois bien que la
reprise de toutes ces étapes que nous avons traversées au cours
de l'année 1971, ou l'exposé de ces étapes, à tout
le moins, serait un peu superflu pour le moment.
Quant aux autres objectifs que nous nous étions fixés,
toujours pour l'année 1971, j'ai rappelé à ce
moment-là que les lois touchant les corporations professionnelles ont
été déposées vers la fin de la session, soit au
cours des mois de novembre et décembre. J'ai également
rappelé que, au plan d'une élaboration, d'une politique de
recherche dans le domaine des Affaires sociales, plusieurs gestes avaient
été posés au cours de l'année 1971, entre autres,
la création du comité de la recherche socio-économique, du
comité de la recherche épidémiologique et
opérationnelle.
Egalement, au cours de l'année, le Conseil de la recherche
médicale du Québec avait vu son rôle à la fois
maintenu et précisé. Et, dans chacun des cas, les critères
d'approbation des projets de recherche, l'attribution des subventions aux fins
de la recherche, avaient été précisés au cours de
l'année.
Au terme de l'année, j'ai également fait un certain bilan
quant au progrès accompli dans l'implantation des premiers centres
locaux de services communautaires. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette
question évidemment. J'ai également fait état des
négociations avec le gouvernement fédéral, compte tenu du
fait que quelques jours plus tôt, soit les 16 et 17 décembre, nous
avions eu une conférence fédérale-provinciale qui portait
notamment sur la recherche d'une nouvelle formule de financement des services
de santé.
Enfin, nous avions fait le point à ce moment sur les
négociations en ce qui a trait à la mise en application du bill
69. J'avais rappelé d'autres actions entreprises au cours de
l'année 1971, telles la révision, la reformulation du programme
des services de santé et des services sociaux en milieu scolaire,
l'introduction d'un carnet de santé et sa distribution,
l'élaboration d'un programme visant à lutter contre le cancer du
col utérin, programme qui a vu sa concrétisation dans la
création de quelques services de cyto-diagnostic.
J'ai également mentionné que nous avions fait des efforts
tout au cours de l'année 1971 pour associer davantage dans toute la
mesure du possible par la voie de consultations, de tournées,
d'auditions publiques, de la Commission des affaires sociales, du Conseil des
affaires sociales et de la famille, toutes les personnes
intéressées et les groupements intéressés par les
politiques et programmes de notre ministère.
J'ai également mentionné au terme de ce bilan que les
membres du Conseil des affaires sociales et de la famille avaient
été désignés au cours de l'année et que le
conseil s'était mis au travail. Il en était de même quant
à la Commission d'appel de l'aide et des allocations sociales.
Egalement, j'avais rappelé la création d'un comité
de la santé mentale au cours de l'année, comité
destiné à faire le point dans ce secteur particulier de nos
activités et créé dans le but non seulement de
réviser nos politiques, mais de mieux adapter le réseau de
distribution de services. Et aussi, j'avais rappelé la publication d'un
document de travail sur l'enfance inadaptée qui fait l'objet de
consultations et de travaux, en plus de guider notre action depuis sa
publication. Voilà pour le bilan qui avait été
tracé au terme de l'année 1971.
Quant aux objectifs pour l'année 1972, compte tenu des
progrès effectués, nous avions tracé des objectifs qui
prenaient une forme
quelque peu différente, de telle sorte que notre action se
rapproche toujours davantage des mécanismes de distribution, soit de
soins, soit de services, à la population. Alors, les trois grands
objectifs que nous nous étions fixés pour l'année 1972,
tel qu'en fait foi le document que j'ai ici, étaient la formulation de
politiques législatives et ministérielles visant à assurer
une plus grande protection aux personnes, notamment aux enfants.
Deuxièmement, le développement de conditions et de
mécanismes visant à favoriser une plus grande participation de la
population à la définition de ses propres besoins dans le domaine
des affaires sociales ainsi qu'à l'instauration, à
l'administration et au fonctionnement des établissements qui dispensent
ces services.
Troisièmement, l'adoption de mesures visant à
améliorer la nature des services rendus à la population, leur
qualité, l'aspect humain de leur distribution, ainsi qu'à
favoriser toujours une meilleure allocation, une meilleure utilisation des
ressources. Quant aux gestes et mesures plus précises pour faire en
sorte que ces trois objectifs soient concrétisés: d'abord, en ce
qui a trait à la protection de la personne, j'avais annoncé,
à cette époque, notre intention de présenter un projet de
loi sur la santé mentale, projet de loi qui a été
déposé et qui fera l'objet d'étude par les membres de
l'Assemblée nationale incessamment. Ensuite, une Loi sur la protection
de la santé publique, loi qui reprend diverses dispositions
législatives, entre autres, la Loi de l'hygiène publique. La
préparation de ce projet de loi est fort avancée et
j'espère, sans pouvoir prendre, évidemment, d'engagement,
être en mesure de le déposer avant la fin des travaux de la
présente partie de la session, de telle sorte qu'on puisse en faire un
examen et passer à l'étude définitive de ce projet de loi
au cours de l'automne. Egalement, une Loi sur la protection de l'enfance. Le
travail de préparation de ce projet de loi progresse. Nous aurons
l'occasion d'en reparler, au besoin, au cours de l'étude des
crédits. Egalement, j'avais mentionné notre intention de
procéder à l'adoption du Régime d'allocations familiales
du Québec. Dans le même ordre de mesures, une Loi modifiant le
régime de rentes, dans le but de hausser, entre autres choses, les
prestations aux veuves et aux invalides. Egalement, nous pourrons reparler de
ce projet de loi dont la préparation est fort avancée.
Enfin, une Loi sur la fluoration de l'eau. De façon plus
particulière, sur un autre plan que le plan législatif
maintenant, au sujet de l'enfance inadaptée, nous voulons davantage
mettre l'accent sur une politique axée sur la prévention. Ceci,
je crois, pourra au besoin être lié à nos discussions, si
tel est votre désir, nos discussions portant sur les mesures que nous
entendons prendre quant à la protection de la jeunesse.
Quant à l'enfance délinquante, nous nous étions
fixé comme objectif la révision des politiques qui la concernent
et l'établissement d'un nouveau partage des responsabilités avec
le ministère de la Justice, dans le sens recommandé par le
rapport Prévost. Egalement, en ce qui a trait à cette question,
des progrès ont été effectués. Dans la mesure
où il m'est possible de le faire à ce moment-ci, il me fera
évidemment plaisir d'en parler.
Au sujet des personnes âgées, j'annonçais aussi
l'élaboration ou la précision de l'orientation
générale que j'avais indiquée en décembre 1970
quant aux problèmes que pose la distribution de services à cette
partie de la population, aux problèmes que pose leur hébergement
et aussi à d'autres problèmes tels que leurs loisirs, etc.
J'avais également, quant à la participation de la
population, annoncé et on se souviendra que la formulation de ces
objectifs qui sont pour 1972 suivait de quelques jours l'adoption de la loi 65
la mise en place, au cours de l'année, des conseils
régionaux prévus par la loi 65, des mécanismes et des
conditions nécessaires à l'implantation de personnel
administratif régional au sein du ministère des Affaires
sociales. Egalement, le développement de mécanismes d'information
et de communication au sein du ministère, de sorte que la population
soit à même de participer d'une façon plus concrète
et plus efficace à l'élaboration des politiques et au
fonctionnement de nos programmes.
Sur un troisième plan, en ce qui a trait à
l'amélioration des services et à l'allocation et. l'utilisation
des ressources, j'avais annoncé, à ce moment-là, notre
intention de procéder à l'adoption des mesures administratives et
financières requises pour la mise en application de la loi 65. La
poursuite de la mise en place des mécanismes nécessaires à
l'implantation des centres locaux de services communautaires. La reconnaissance
de nouvelles professions dispensant des services de santé, telles les
chiroprati-ciens, les podiatres, les acousticiens en prothèses auditives
etc. L'élaboration d'une politique de transport permettant une plus
grande accessibilité, à l'ensemble de la population, aux
établissements spécialisés. Egalement, la mise en vigueur
des systèmes de financement par voie de budget global dans tous les
centres hospitaliers; l'adoption de mesures visant à favoriser la
présence des conditions requises à une recherche et à un
enseignement de qualité dans le domaine de la santé et des
services sociaux.
La recherche, grâce au mécanisme de participation et de
consultation déjà mentionné, d'un meilleur
équilibre entre les ressources et les besoins. La recherche d'un accord
avec le gouvernement fédéral sur une formule de financement des
coûts des services de santé et également un accent plus
grand sur les mesures visant à favoriser la prévention et la
réadaptation dans le domaine des services de santé et des
services sociaux.
Dans les grandes lignes, voici les objectifs que nous nous étions
fixés pour l'année 1972. Il
s'agit évidemment d'objectifs ambitieux. Même si nous ne
sommes qu'au milieu du mois de mai, il est possible de dire qu'en ce qui a
trait aux gestes qui sont sous notre juridiction, nous avons, dans la plupart
des cas, accompli ou accusé des progrès qui m'apparaissent
extrêmement satisfaisants. Dans d'autres cas, nous accusons des retards.
J'aurai l'occasion d'en parler au besoin, de vous en donner les causes.
Evidemment, lorsque nous sommes dans d'autres secteurs, comme dans celui de la
sécurité du revenu, la situation est bien différente.
En ce qui a trait aux faits saillants, relatifs aux crédits du
ministère, pour l'exercice 72/73, je voudrais rappeler que, l'an
dernier, les crédits, tels qu'ils apparaissent au livre des
crédits pour 71/72, les crédits demandés
s'élevaient à $1,492,360,000. Au cours de l'exercice, un budget
supplémentaire, en décembre 1971, de $89, 500,000 a
été approuvé et deux mandats spéciaux, les mandats
no 4 et no 5, aux montants respectifs de $7 millions et de $1,400,000, ont
été approuvés, ce qui fait des crédits totaux de
$1,590,280,000. Dans le montant de $97,900,000, compris dans le budget
supplémentaire et les mandats spéciaux, nous retrouvons $5
millions qui furent requis pour les soins aux malades mentaux et $4 millions
pour les services aux adultes.
A l'époque, j'avais mentionné qu'en ce qui a trait aux
soins aux malades mentaux, la préparation des crédits pour
l'année avait ignoré la nécessité d'une provision
à ce titre. Il ne s'agissait pas vraiment d'une dépense nouvelle
et imprévue, mais plutôt d'une erreur commise lors de la
préparation des crédits l'an dernier. Ceci signifie donc que, de
ce montant de $97,900,000, si nous excluons ces $5 millions, les $90 autres
millions furent consacrés, soit à l'administration, soit au
paiement de prestations additionnelles en vertu de la Loi d'aide sociale. En ce
qui a trait aux services de santé et aux services sociaux, si on se
réfère à l'annexe du discours du budget, au tableau 2-4,
présenté par le ministre des Finances, il est indiqué que
la prévision des dépenses pour l'exercice 71/72 du
ministère s'établit à $1,571 millions, donc des
crédits non utilisés de $18 millions, alors que nous avons
demandé pour les services de santé, les services sociaux, des
crédits additionnels s'élevant à $ 9 millions.
Nous nous sommes donc maintenus en cours d'exercice à
l'intérieur des crédits demandés pour les services de
santé et les services sociaux. Nous avions même, au terme de
l'exercice, $18 millions non utilisés et, si nous déduisons de
ces $18 millions les $9 millions demandés en cours d'exercice, nous
voyons que nous n'avons pas utilisé totalement les crédits
demandés l'an dernier. Par contre, au titre de l'aide sociale,
évidemment, il y a eu un dépassement substantiel.
En ce qui a trait aux crédits 72/73, la demande
s'élève à $1,696,200,000, ce qui représente par
rapport au niveau réel des dépenses, soit $1,571,000,000, une
augmentation de 8 p.c. Maintenant, tel qu'indiqué dans l'annexe du
discours du budget, présenté par le ministre des Finances, l'on
voit que les dépenses de fonctionnement des services de santé,
soit les articles 8, 9, 10 et 11 augmenteront normalement en 72/73 au rythme de
11 p.c. Je mentionne ceci parce que ce peut être un chiffre utile si nous
rediscutons des ententes que nous recherchons aux fins du financement des
programmes des services de santé avec le gouvernement du Canada et aussi
ce chiffre, il m'apparaît utile de le mentionner, en regard des
pourcentages d'augmentation que j'ai cités l'an dernier et sur lesquels
nous pourrons revenir, pourcentages de l'augmentation au cours des
années antérieures.
En ce qui a trait aux services sociaux, soit les articles 12, 13, 14, 15
et 16 du budget, si vous me le permettez, il y aurait peut-être lieu de
reprendre très brièvement ce qu'en disait le ministre des
Finances dans cette annexe. Il disait que le développement des services
de bien-être pour l'enfance et les adultes comportent une importante
hausse de crédits par suite notamment de l'entrée en service
d'institutions dont la construction s'est terminée en 71/72 ou se
terminera en cours d'année 72/73. Quant aux services aux adultes, ils
connaîtront la hausse la plus élevée, les crédits
passant à ce titre de $28,900,000 à $47,800,000. Pour leur part,
les crédits pour les services à l'enfance passent de $108,100,000
à $122,800,000.
Egalement, dans ses commentaires, le ministre des Finances traitait...
Oui?
M. LAURIN: Pouvez-vous nous dire le pourcentage d'augmentation pour les
services sociaux, 11 p.c. pourles services de santé?
M. CASTONGUAY: Malheureusement, je n'ai pas fait de calculs pour
celui-là. Je voulais seulement citer, à ce moment-là, les
chiffres du discours du budget et, si j'ai insisté sur les 11 p.c,
c'était par rapport aux références que j'ai faites.
Maintenant, il est possible de les calculer, si vous le désirez.
Si vous me le permettez, j'aimerais maintenant reprendre ce que le
ministre des Finances disait en ce qui a trait au programme de
sécurité du revenu.
L'année 71/72 fut la première année complète
d'application du nouveau régime d'aide sociale et pour l'ensemble de
l'exercice financier, la dépense totale sera d'environ $360 millions,
comparativement à $268 millions pour l'année
précédente. Cette hausse est due, d'une part, à un
accroissement des bénéfices, $50 millions, et d'autre part,
à un accroissement de clientèle, $42 millions reliés pour
une bonne part aux dispositions plus larges de la nouvelle loi, notamment pour
les jeunes.
Les résultats de 71/72 suggéreraient des crédits
plus élevés pour 72/73. On présente un budget d'aide
sociale de l'ordre de $340 millions pour les raisons suivantes:
Premièrement, puisque le programme dans sa nouvelle orientation
n'est en vigueur que depuis un an et demi, on doit tenir compte des effets non
récurrents de l'année mise en vigueur.
Deuxièmement, les effets du nouveau régime
d'assurance-chômage devraient se faire sentir, de façon
complète, au cours de 72/73, de même de façon plus
partielle que ceux de l'introduction, au cours de l'année, d'un nouveau
programme d'allocations familiales.
Enfin, le ministère continue les efforts de contrôle et de
mise à jour des dossiers, tout en améliorant l'administration
elle-même du système.
J'aurai l'occasion de revenir sur ces points, mais je voudrais aussi
ajouter que la courbe des versements mensuels, au cours des derniers mois,
s'est stabilisée, dans une certaine mesure. Nous entrevoyons, comme je
l'ai mentionné tantôt, apporter des amendements au Régime
de rentes du Québec, amendements qui devraient avoir un certain effet
sur les budgets réservés ou consacrés à l'aide
sociale.
Sans dire tellement plus pour le moment, je voulais reprendre cet
exposé du ministre des Finances, tout en me souvenant du conseil
judicieux que me faisait, l'an dernier, le député de Montmagny,
de ne pas trop affirmer que ce crédit de $340 millions puisse
s'avérer suffisant pour l'exercice en cours.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aimerais noter que
ça fait trois fois que le ministre sourit depuis le commencement de la
séance, cet après-midi. Deux fois à l'occasion des
allocations familiales et, la troisième fois, à l'occasion d'un
conseil que nous lui avons donné et qui s'est avéré juste.
Nous aurons peut-être l'occasion de donner des conseils, au cours de ces
deux heures que va durer l'étude de ces crédits. Alors, nous
espérons qu'il continuera de les écouter avec grande attention.
Nous sommes ici pour l'aider parce que nous savons qu'il traverse une
période extrêmement, peut-être, difficile.
M. CASTONGUAY: Merci.
Le ministre des Finances indiquait également que les
crédits pour les allocations scolaires et les allocations familiales
correspondaient à la législation actuellement en vigueur.
Un petit détail, M. Jean-Guy Houde me souligne que
l'augmentation, pour répondre à votre question, est de 22.8
p.c.
Pour continuer toujours dans les faits saillants touchant aux
crédits budgétaires demandés, il y a lieu de rappeler deux
mesures qui, même si elles n'apparaissent pas dans ces crédits,
ont une incidence c'est-à-dire des mesures à
caractère fiscal celles annoncées par le ministre des
Finances, soit l'augmentation aux fins de l'impôt sur le revenu des
particuliers des exemptions de $1,000 à $1,500 pour une personne seule
et de $2,000 à $2,850 pour un couple.
Selon l'expression du ministre des Finances, compte tenu de la courbe
des points d'impôt, ces exemptions sont destinées à
alléger la charge fiscale des contribuables à revenus
modestes.
Il y a également, l'annonce par le ministre des Finances de la
déduction des frais de garde des enfants. Même si ces mesures
à caractère fiscal n'apparaissent évidemment pas dans les
crédits de notre ministère, ne faisant pas l'objet de cette
discussion, il m'apparaissait assez important de le souligner.
Toujours pour poursuivre dans ces principaux aspects des crédits
si vous me permettez, j'aurai bientôt terminé
j'aimerais vous en souligner certains autres qui m'apparaissent assez
importants. D'abord, dans le dernier discours du budget, deux autres mesures
ont été annoncées. La première a trait à
l'abolition de la contribution des municipalités au financement des
unités sanitaires, ce qui représente pour ces
municipalités une dépense, qu'elles n'auront plus à
assumer, de l'ordre de $2 millions par année.
Cette question avait été discutée au mois de juin
dernier, lors de la conférence provinciale-municipale. Le seconde mesure
annoncée permettra aux municipalités de soumettre les centres
hospitaliers, les centres d'accueil présentement exempts de
l'impôt foncier, à un impôt foncier, à raison de $35
par lit pour les centres hospitaliers et de $20 par lit pour les centres
d'accueil. Cela devrait normalement rapporter aux municipalités environ
$3 millions par année.
Dans les crédits qui vous sont présentés, nous
avons pour leur ensemble $70 millions qui ont été prévus
au moment où ils ont été préparés, pour le
renouvellement des conventions collectives. Cette réserve,
évidemment, s'appuyait à l'époque sur la première
offre formulée par le gouvernement, c'est-à-dire une offre
d'augmentation générale de l'ordre de 4. 8 p.c, centrée
dans tous les autres détails de la question.
En ce qui a trait maintenant aux soins généraux actifs,
étant donné que souvent l'accent porte sur le
développement des ressources dans ce secteur, je dois dire qu'on
prévoit l'addition, au cours de l'année, d'environ 1,390 nouveaux
lits et en parallèle, la fermeture de 1,183 lits, dont un assez bon
nombre seront transformés en lits pour malades chroniques.
On souligne, et nous reviendrons sur cette question, que ces
modifications, soit l'addition de nouveaux lits, leur fermeture ou leur
réaffectation, entrafneront des frais additionnels de l'ordre de $6
millions par année. En ce qui a trait à la formation
professionnelle, il est aussi important de souligner que, le 1er septembre
1972, les écoles d'infirmières au sein des institutions
hospitalières auront cessé d'exister. Il s'agit là de la
fin d'un changement de politique échelonnée sur un certain nombre
d'années.
Quant aux services à l'enfance, nous prévoyons, au cours
de l'année, l'addition de 1,226
lits de diverses catégories. Quant aux services aux adultes,
c'est-à-dire principalement les foyers pour personnes
âgées, nous prévoyons l'addition de 3,135 lits. Dans ce
cas, le coût de fonctionnement de ces lits est évalué
à environ $3 millions, si l'on tient compte des ressources
perçues de certaines de ces personnes hébergées.
En même temps, au cours de l'année, le fait va se faire
sentir de façon beaucoup plus marquée pour l'année 72/73,
le ministère a pris à sa charge le coût des services
cliniques dans les foyers, c'est-à-dire de tous les services qui,
normalement, ne sont pas de la nature de service strict
d'hébergement.
Le coût de la prise en charge de ces services est de l'ordre, pour
l'exercice 72/73, de $5,200,000.
Je le mentionne parce que nous aurons possiblement l'occasion de
discuter des orientations, comme je l'ai mentionné plus tôt, ou de
la précision des orientations que nous sommes en voie de prendre en ce
qui a trait à l'hébergement des personnes âgées et
d'autres personnes, telles les malades chroniques, etc.
En ce qui a trait à l'équipement, nous prévoyons
des crédits de l'ordre de $10 millions pour les services de santé
et de $2.4 millions en ce qui a trait aux services sociaux. Enfin, à
l'article 20, je le mentionne, une augmentation de crédits
apparaît sous le titre de projets de démonstration et recherche,
de l'ordre de $3,225,000. Ces crédits seront presque entièrement,
sinon totalement, affectés au développement en cours
d'année de centres locaux de services communautaires.
Enfin, pour terminer, si, après vos commentaires, la chose vous
paraissait acceptable, cet après-midi, avant que nous commencions
l'étude détaillée des articles budgétaires, je
pourrais vous distribuer quelques documents et vous faire peut-être un
exposé sur deux de ces documents. Il s'agit, à mon sens, de
documents relativements importants.
Le premier n'est pas tout à fait de la même nature. C'est
un rapport de la direction générale du financement qui
révise les recommandations qui nous ont été faites au
cours des derniers mois par le vérificateur général et les
actions que nous avons prises. Je vais demander à M. Quinty de vous
distribuer ce rapport. Cela peut vous permettre de voir plus clairement
certains des problèmes que nous rencontrons, certaines des actions que
nous avons prises. Ce document n'était pas de la même nature. Ce
n'est pas mon intention d'en discuter cet après-midi. C'est plutôt
pour votre information, pour jeter plus de lumière sur
l'évolution des crédits, sur la façon dont nous
administrons au plan financier les budgets qui nous sont confiés.
En second lieu, un document sur la politique de planification des
naissances. Vous savez que cette question revient périodiquement
à la surface. Elle a été de façon plus
particulière dans l'actualité au cours des dernières
semaines, suite aux problèmes qu'a connus le centre de "planning"
familial du Québec, à Montréal.
L'an dernier nous avions discuté la nécessité de
programmes soit quinquennaux ou triennaux pour le développement de
l'équipement. Nous avons effectué passablement de progrès
à ce sujet. Je pourrais vous remettre, si tel était votre
désir, cet après-midi nous pourrions en dire quelques mots
en plus du document sur la planification des naissances notre
programmation, pour les cinq prochaines années, du développement
des ressources d'enseignement et de recherche dans le secteur de la
santé et ceci dans le cadre de la caisse d'aide à la
santé.
Il s'agit d'un programme fort important qui, sur une période de
cinq ans, comporte des crédits de plus de $100 millions. Pour l'exercice
72/73, il comporte des crédits de l'ordre de $28 millions, si ma
mémoire est bonne. Enfin, compte tenu du fait qu'au cours de
l'année nos concepts, notre travail sur le développement des
centres locaux de services communautaires se sont à la fois
précisés et que notre travail a progressé, j'ai un
document beaucoup plus à point que l'an dernier sur les centres locaux
de services communautaires.
Si vous vous souvenez, l'an dernier, je vous avais remis un premier
document. Aujourd'hui, je suis en mesure de vous en remettre un qui
précise à la fois le concept des centres locaux de services
communautaires, les programmes que nous devrions retrouver dans ces centres,
à la fois les programmes de base et les autres programmes qui peuvent
s'ajouter selon les besoins de la population, le type de personnel que nous
devrions y retrouver, les modes de financement ou de rémunération
de ce personnel et certaines autres données quant aux structures de ces
centres. J'aimerais vous distribuer ce document cet après-midi, non pas
en faire la lecture ou en traiter, mais plutôt, vous permettre de le
lire, de telle sorte qu'au cours des prochains jours nous puissions, si vous le
désirez, discuter de ce programme qui nous apparaît un programme
clé.
J'aurais voulu cet après-midi, possiblement, vous remettre
certains documents mais, par suite de la grève, de l'occupation ou de
l'impossibilité d'avoir accès aux bureaux du ministère
pendant une couple de semaines, ces documents n'ont pu être
préparés à temps. J'aurais aimé vous
présenter une certaine analyse des coûts de l'hospitalisation, de
l'expérience, du budget global, de l'évolution de la situation
financière des hôpitaux. De toute façon, j'ai certains
documents. Je veux les réviser. Soit demain, soit au cours des prochains
jours, nous aurons l'occasion de revenir à cette question, de toute
façon, lorsque nous arriverons aux articles appropriés des
crédits.
Cet après-midi, après vos commentaires ou même si
vous voulez, avant vos commentaires généraux, je pourrais donc
vous faire un bref exposé de la politique de planification des
naissances que nous entendons poursuivre, vous remettre un document pour que
vous puissiez l'étudier et que nous puissions en discuter et de
même pour la caisse d'aide à la santé. Pour les
CLSC, je demande à M. Quinty de vous distribuer
immédiatement le document. Ce n'est pas nécessairement mon
intention de l'étudier cet après-midi. Je vais plutôt
attendre que vous en ayez pris connaissance.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, avant de faire des
commentaires, je préférerais que le ministre nous fasse un
exposé sur les deux autres documents le document sur la
planification familiale et celui de la caisse d'aide à la santé
et que nous ayons aussi le document sur les CLSC. Même si,
après cela, le ministre pense qu'il a oublié d'autres
exposés, qu'il veut nous faire, nous l'écouterons avec une grande
attention.
M. GUAY: Cela nous va.
M. CASTONGUAY: Cela vous va?
M. GUAY: D'accord.
M. CASTONGUAY; Vous trouvez que je ne parle pas assez.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne dis pas que le ministre ne parle pas
assez. Le ministre est très prudent dans ses exposés, même
qu'il a repris généreusement les exposés de l'an dernier,
celui de la fin de l'année 1971, celui des objectifs de l'année
1972. Mais il y a une question importante. Je pense bien que le ministre le
fera un peu plus tard durant l'étude des prévisions
budgétaires. Ce sont les questions d'actualité, les endroits
où le ministre a souri particulièrement. Je pense bien qu'il
aimera y revenir à un certain moment pour préciser davantage sa
pensée.
M. CASTONGUAY: En ce qui a trait à une question qui est
d'actualité, la planification des naissances, si vous me permettez,
c'est la première fois à ma connaissance qu'un document aussi
précis émane du ministère. Vu qu'il oriente
présentement et orientera notre action au cours des prochaines semaines,
des prochains mois, j'aimerais vous en faire la lecture.
Il est relativement bref. Après avoir reçu vos
commentaires, s'il y en a, c'était mon intention de demander au Conseil
des affaires sociales et de la famille même si pour nous il va
constituer notre document d'orientation de politique d'insérer ce
document ou cette politique dans ses travaux touchant à la famille et,
au besoin, de nous faire des représentations au sujet de cette
politique.
Dans le contexte de la politique sociale, l'objectif premier est de
créer des conditions favorables à la satisfaction des besoins des
hommes et à leur épanouissement. Parmi les conditions qui
apparaissent favorables, la possi- bilité de déterminer quand,
combien et dans quelles conditions avoir des enfants est essentielle. Une
politique ayant pour objectif la mise en place des conditions propres à
amener la possibilité pour le couple ou l'individu d'avoir le nombre
d'enfants qu'il désire, au moment souhaité par lui, est-ce
à quoi nous nous référons par la politique de
planification des naissances.
Pour réaliser cet objectif, il nous faut nous pencher tant sur
les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de chacun en ce
domaine que sur la capacité propre de chacun d'exercer cette
liberté de façon responsable. Une action préventive
favorisant l'éducation en matière de vie conjugale, parentale et
sexuelle apparaît primordiale afin d'améliorer la qualité
de vie du couple ainsi que, par conséquent, la qualité du milieu
dans lequel les enfants font leur apprentissage de la vie. Sur ce point, la
Commission royale d'enquête sur la situation de la femme a
recommandé que l'éducation à la vie familiale soit
enseignée aux garçons et aux filles à partir de
l'école primaire jusqu'à la fin de l'école secondaire. Les
cours devraient porter non seulement sur le fait biologique de la reproduction,
mais aussi sur les rapports entre époux et épouse et aussi entre
les parents et les enfants. Le ministère, en collaboration avec le
ministère de l'Education, entend implanter de tels programmes
d'éducation à la vie familiale.
Cette action préventive doit également s'exercer au niveau
des adultes, notamment en mettant à leur disposition des services de
formation et de consultation, et pour les personnes qui font face à des
difficultés plus sérieuses, que ce soit d'ordre conjugal,
parental ou sexuel, des services de consultation et de traitement
médical ou psycho-social, selon les besoins. En situant la planification
des naissances au niveau du couple, celle-ci apparaît essentiellement
personnelle et volontaire et la liberté et les convictions de chacun en
ce domaine se doivent d'être respectées. Il faut noter cependant
que, pour être capable d'exercer cette liberté de façon
responsable, il est essentiel de posséder une connaissance des moyens de
contrôle disponibles et des conséquences de l'utilisation de ces
moyens. Dans ce contexte, concurremment avec l'action préventive
décrite ci-dessus, la nécessité d'une action au niveau de
la diffusion de la connaissance apparaît propre à permettre des
choix individuels, libres et responsables. Ces moyens de contrôle ne se
réfèrent pas uniquement à des contrôles de la
fécondité dans le sens de la limitation des naissances, mais au
contraire se réfèrent tant aux moyens de favoriser la
fécondité, utilisation des cliniques de fertilité, par
exemple, qu'aux moyens de retarder, d'espacer ou même d'arrêter
définitivement celle-ci. L'implantation de services d'information au
sein des centres locaux de services communautaires permettra de rendre
accessible à tous l'information nécessaire à l'exercice
d'une parenté responsable.
L'implantation de services d'information et de consultation dans les
centres hospitaliers ou les centres de services sociaux permettra, par
ailleurs, de répondre aux besoins des personnes qui font face à
des difficultés plus sérieuses telles que celles
mentionnées ci-dessus. Cette orientation n'exclut pas la
possibilité de créer des cliniques spécialisées en
milieu hospitalier ou dans les centres des services sociaux. Dès
septembre, dans le cadre de son programme de services de santé et de
services sociaux en milieu scolaire, le ministère mettra sur pied des
services d'information sur la planification des naissances dans les
écoles secondaires, les CEGEP et les universités de façon
à rejoindre le plus rapidement possible les adolescents et les jeunes
adultes.
Ces grandes orientations impliquent, par ailleurs, un certain nombre
d'actions en matière de formation des professionnels impliqués
dans la distribution de ces services. En collaboration avec le ministère
de l'Education et des différents centres d'enseignement
concernés, la mise sur pied de programmes de formation s'adressant au
personnel médical et paramédical ainsi qu'aux spécialistes
des services sociaux et de disciplines connexes est considérée
comme prioritaire.
Il ne faut cependant pas considérer que tout est à faire
dans le domaine de la planification des naissances. En effet, le Québec
est parmi les plus avancés en la matière. Dans le passé,
l'action du ministère a principalement consisté en des
subventions à des organismes oeuvrant dans le domaine, les montants
consacrés à ces subventions ayant dépassé, sur une
base annuelle,. $200,000 au cours de chacune des deux dernières
années.
Depuis janvier 1971, tous les actes posés dans un but de
planification des naissances sont reconnus comme services assurés en
vertu du régime d'assurance-maladie. Notons également que la
direction des bourses et subventions à la recherche a approuvé
pour plus de $110,000 de subventions reliées au domaine de la
planification des naissances dans le cadre des programmes actuels de
subventions à la recherche.
Voici la politique que nous avons formulée et je demande à
M. Quinty qu'il vous en remette une copie. Nous pourrons au besoin discuter la
façon dont nous entendons accorder des subventions pour donner suite
à cette politique. Nous pourrons, si vous le désirez, discuter ce
qui arrive du Centre de planning famillial du Québec. Comme je l'ai
mentionné, je demande à M. Marier d'insérer dans son
travail touchant à la famille, ce document, au besoin, de faire des
commentaires; nous en expédierons aussi des exemplaires par la voie de
la direction de la planification et de la recherche du ministère aux
organismes concernés.
On pourrait peut-être passer à la dernière question,
soit la caisse d'aide à la santé. Notre programme de
développement des ressources pour la période du 1er avril 1972 au
31 mars...
Si vous le permettez, en ce qui a trait au programme quinquennal de
développement des ressources au plan de l'enseignement et de la
recherche dans le secteur de la santé, en premier lieu, je voudrais vous
rappeler les objectifs que nous poursuivons de même que la façon,
à partir de ces objectifs, dont nous avons formulé les
critères pour le développement de ce programme. Dans le domaine
de la santé, nos objectifs sont les suivants: améliorer
l'état de santé de la population par une médecine globale
axée sur la personne: améliorer l'état du milieu dans
lequel cette population vit; enfin établir un régime de
santé d'accès universel acceptable par la population, qui
permette la distribution de soins de qualité sur les plans à la
fois scienfitique, humain et social, et enfin un régime efficace,
c'est-à-dire fondé sur le recours aux méthodes modernes
d'organisation et de distribution des soins.
Les investissements en vue de la formation des professionnels de la
santé ont donc été planifiés en vue d'assurer la
réalisation de ces objectifs. Les programmes de formation des
professionnels de la santé s'efforcent de préparer
l'étudiant à répondre aux besoins de la population, ce qui
signifie le développement des ressources humaines et physiques
suffisantes. Qu'il suffise de mentionner que la notion d'une médecine
communautaire exige des ressources physiques différentes des
hôpitaux traditionnels, ceci en plus du fait que, dans nombre de nos
établissements, lorsqu'ils ont été construits, la
dimension de l'enseignement ou la nécessité de dispenser de
l'enseignement était soit non identifiée encore ou non
suffisamment reconnue lors du développement de ces ressources.
C'est pourquoi le plan quinquennal que nous présentons est
axé sur le développement, premièrement, des centres locaux
de services communautaires affiliés aux hôpitaux d'enseignement et
aux facultés de médecine en vue d'assurer le contact des
étudiants des séances de la santé avec les
problèmes courants de la population. Il est axé,
deuxièmement, sur le développement des services de consultation
externes et des services d'urgence en vue de répondre aux besoins de la
population et également de permettre la formation des professionnels de
la santé dans ce type de soins.
Troisièmement, il est axé sur le développement de
locaux adéquats pour l'enseignement aux étudiants des diverses
disciplines en milieu hospitalier et également dans les centres locaux,
et quatrièmement, d'un hôpital à caractère
communautaire dans la ville de Laval. Ici, il est mentionné que c'est
vraiment, dans ce programme, la seule addition de lits pour traitement actif de
malades, ceci en vue de favoriser la formation de professionnels de la
santé orientés vers la médecine générale et
les soins communautaires. Cinquièmement, développement de centres
de recherche dans les hôpitaux d'enseignement en vue de maintenir la
qualité de la formation. Ici, nous rappelons, comme j'en ai
déjà fait état, que nous voulons favoriser tout
autant la recherche biologique, épidémiologique
qu'opérationnelle. Le plan quinquennal, tel que présenté,
désire favoriser, par tous les moyens possibles, les objectifs
poursuivis par notre ministère dans le domaine de la santé et,
sans rompre avec la tradition, nous croyons qu'il permet de mettre l'accent sur
les aspects de la formation qui apparaissent prioritaires. Il s'agit d'un
programme de $101 millions sur cinq ans, qui prévoit des crédits
de $28,500,000 pour l'exercice 72/73. Vous verrez, dans les tableaux qui vous
seront distribués, comment ces crédits sont répartis,
d'abord dans le temps, comment ils sont répartis par université,
comment ils sont répartis par type d'institutions ou
d'établissements ou encore, lorsqu'il s'agit de centres locaux de
services communautaires, ils sont évidemment identifiés.
Je crois que c'est un progrès énorme que nous avons
effectué, d'autant plus que la préparation de ce programme s'est
faite en consultation étroite avec les facultés de
médecine. Nous avions demandé aux doyens des facultés de
consulter à leur tour les établissements affiliés à
ces universités, établissements dans lesquels s'effectue de
l'enseignement ou des activités de recherche. Voici pour ce programme et
ceci termine pour tout de bon mon exposé.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, nous sommes
restés sur notre appétit. J'ai dit tantôt que
l'étude des prévisions budgétaires du ministère des
Affaires sociales pourrait prendre deux heures. Je pense bien que le ministre a
compris que, c'était une manière de signaler l'importance du
budget des affaires sociales, $1,700,000,000. Le ministre est tout près
de $1,700,000,000, mais je pense bien qu'il n'y aura pas de surprise dans le
courant de l'année si on franchit le cap de $1,700,000,000, avec les
budgets supplémentaires qui vont venir s'ajouter, les mandats
spéciaux. Cela pourra aller au-delà de cela, comme d'ailleurs
l'expérience des années précédentes l'indique. Cela
représente tout près de 40 p.c. du budget total du Québec.
Si on veut le traduire en chiffres, on voit tout de suite l'importance. Mais
l'importance du ministère, M. le Président, ne fait pas que se
traduire en chiffres. Je pense bien que tout le monde est conscient, surtout
cette année, de l'importance de l'étude que nous allons
entreprendre et de cette période de réflexion additionnelle que
nous allons faire avec le ministre durant ces quelques jours. Il est heureux
que nous puissions réfléchir ensemble et c'est le sens de ma
remarque de tantôt, quand j'ai dit que nous étions ici pour aider
le ministre parce qu'il traversait une période difficile. Ce n'est pas
l'intention d'aider le ministre comme homme, comme faisant partie d'un
groupement politique, mais le ministre des Affaires sociales qui
représente tout de même un des rouages les plus importants du
gouvernement provincial, du gouvernement du Québec, et le titulaire d'un
ministère qui a un "leadership" important. Bien entendu, le
ministère subit les conséquences et les déficiences du
manque de vitalité ou de dynamisme dans le secteur économique, du
manque de santé et du manque de travail, du manque d'institutions.
C'est le ministre des Affaires sociales qui en écope, à ce
moment-là, qui est obligé, par des politiques ou par des
programmes, de remédier à ce que j'appellerais, la plupart du
temps, des situations difficiles ou des situations délicates. D a un
contrôle total sur certaines politiques elles sont plutôt
rares et il a un contrôle partagé sur d'autres politiques.
Enfin, sur le troisième ordre de politiques et de programmes, le
ministre n'a pas le contrôle qu'il devrait avoir, qu'il réclame,
que tous les gouvernements ont réclamé, dossiers à
l'appui. Maintenant que le ministre des Affaires sociales réclame avec
un dossier plus complet, parce qu'il y a eu des études importantes
depuis 1966 dans ce secteur... Ces études sont maintenant rendues
à terme et indiquent clairement que non seulement il doit y avoir, de ce
côté-là, un effort de réflexion et de dialogue, mais
que cela doit déboucher aussi sur quelque chose de concret.
Alors, l'étude des crédits de cette année, M. le
Président, se fait dans un contexte particulièrement
délicat et important; délicat, parce que nous traversons une
période assez troublée au Québec. Le ministère des
Affaires sociales y est impliqué directement, parce que tout le secteur
des institutions, le secteur des hôpitaux et des institutions
d'hébergement et même, d'autres catégories de personnel,
tous ceux qui sont impliqués dans la vaste négociation et le
renouvellement, des conventions collectives... Directement, le ministère
des Affaires sociales est impliqué dans le contexte actuel. Il ne doit
pas se désintéresser du déroulement des
négociations, parce que ces négociations vont avoir un effet
direct sur les budgets du ministère. Selon le contenu de la
négociation de la convention collective au chapitre de la
rémunération et des bénéfices marginaux, les taux
d'accroissement que nous a indiqués le ministre pourront être ou
ne pas être respectés, à savoir le taux d'accroissement de
11 p.c. des soins de santé. Il restera aussi le côté social
à calculer, le côté des institutions. Quelle sera la
conséquence des ententes qui seront signées dans le secteur des
conventions collectives?
M. le Président, le contexte est plus important, parce que le
ministre a fait, dans le passé, certaines déclarations
très explicites sur les objectifs qu'il poursuivait et qu'il poursuit
encore. Il en a fait, l'an dernier, à l'occasion de l'étude des
prévisions budgétaires. Je me souviens qu'au début de
l'étude des crédits, le ministre nous a distribué un
document très important sur une politique de sécurité
du
revenu, une politique d'allocations familiales et une politique plus
vaste de sécurité sociale. C'était le document de base,
l'année dernière; c'était un objectif important que le
ministre poursuivait et qu'il poursuit encore. Il nous le dira au cours de ces
jours que nous passerons à étudier les crédits. Il a
réalisé certains autres objectifs comme je le disais
tantôt sur lesquels il a un contrôle entier, comme
l'intégration des deux ministères. Il n'y a personne qui puisse
empêcher le gouvernement et le ministre des Affaires sociales, à
condition que le conseil des ministres l'approuve, de réaliser cette
politique d'intégration, comme il n'y a personne non plus qui puisse
empêcher le gouvernement et le ministre de réaliser une politique
de réforme des structures, dans le domaine des services sociaux et dans
le domaine de la santé, parce que nous l'avons fait avec le bill 65. Le
ministre peut aussi augmenter les services, mettre à la disposition du
public les services qu'il veut, que le gouvernement est capable d'assumer. Et
nous l'avons fait par le projet de loi no 69.
Il y a d'autres lois que le ministre a indiquées, qui viendront
également, mais il y a une partie du programme du ministre des Affaires
sociales qu'il lui est possible de réaliser, compte tenu de ces
contraintes que nous avons énumérées, soit des contraintes
à l'intérieur du Québec, contraintes financières
qui lui sont imposées par le contexte économique, par le budget
préparé en collaboration avec ses collègues sous
l'autorité du ministre des Finances. Ce sont des contraintes qu'il doit
respecter.
Il y a aussi d'autres contraintes qui sont les lois conjointes avec le
fédéral. Il vient de nous parler de la caisse d'aide à la
santé; c'en est une c'est un programme. Mais il y a aussi des
critères, des contraintes; il y a les programmes à frais
partagés; il y a les discussions qui se poursuivent avec le gouvernement
central pour se retirer de certains programmes; il y a des programmes
conjoints, comme le Régime canadien d'assistance publique, qui permet
à la province de Québec de retirer certains montants d'argent
à l'intérieur de ces programmes, comme le programme d'aide
sociale, mais toujours en respectant, non seulement la philosophie, mais aussi
le régime lui-même, la législation elle-même.
Mais il y a une partie importante du programme du ministre dont nous
avons discuté longuement avec lui, les années dernières,
dont nous avons discuté à l'occasion de certaines
législations. Et, comme lui, nous sommes conscients qu'actuellement,
dans ce domaine-là le programme de sécurité du
revenu, le programme d'allocations familiales; si je prends le livre des
crédits à la page 44, ça représente les articles
17,18, S19 et je pourrais ajouter l'article de la Régie des rentes
ça représente environ $350 millions, sans compter les autres
répercussions dans d'autres programmes sociaux. Il s'agit donc
réellement d'une partie importante du ministère et le ministre
l'a dit lui-même, il y en a un des deux je ne sais pas si c'est
l'expression exacte qu'il a employée, mais je pourrais traduire
ça comme ceci une des deux sections importantes du
ministère qui ne peut pas fonctionner.
Si du côté de la santé, ça peut fonctionner;
du côté des services sociaux, ça fonctionne, malgré
les autres remarques qu'a faites le ministre, les autres objections qu'a
apportées le ministre, surtout en se référant au programme
de Perspectives-Jeunesse et d'initiatives locales. On est entré dans les
programmes des services sociaux. Le ministre a indiqué carrément
qu'il y a une section importante de son ministère qui ne peut pas
fonctionner. C'est la section de la sécurité du revenu.
M. le Président, nous sommes conscients, et je pense que tous les
membres autour de cette table sont conscients de l'importance des
événements qui se sont déroulés durant ces derniers
jours. Importance, non pas pour la personne du ministre, parce que j'en fais
toujours abstraction. Je ne veux aucunement entrer dans ses décisions
personnelles quant à son attitude face à telle ou telle
politique. C'est son problème personnel, je ne veux pas y entrer.
Mais je veux parler du ministre des Affaires sociales en tant que
solidaire d'un gouvernement, en tant que membre du conseil des ministres et en
tant que responsable d'un ministère qui veut mettre de l'avant certaines
politiques et qui en est empêché par, je ne dirai pas les
circonstances, parce que les circonstances changeront peut-être, mais par
d'autres points de vue qui sont exprimés à un autre niveau du
gouvernement et malgré, à mon sens, la clarté du dossier
qui a été soumis; malgré, je dirais,
l'incompréhension qu'on a de la façon que l'on reçoit ce
dossier.
Parce que, à mon sens, il est tellement clair, il est tellement
évident. Je le conçois pour avoir travaillé à ce
dossier. Le cheminement du dossier ne nous a aucunement surpris; le cheminement
est tel qu'il devait être. Et les implications des gestes qui ont
été posés à l'échelle du gouvernement
central lors du dernier budget et leurs conséquences, le ministre en a
fait un tour d'horizon assez détaillé dans sa conférence
de presse. Il a donné toutes les dimensions, toutes les
conséquences de ces politiques qui ont été
annoncées par différents programmes depuis deux ans.
M. le Président, nous ne comprenons pas comment il se fait que
l'on ne puisse pas accepter le dossier soumis par le gouvernement du
Québec, qui n'est que le cheminement logique de toutes les positions, de
toutes les attitudes qui ont été prises depuis plusieurs
années par les gouvernements successifs. Je pense bien que je m'engage
là dans un sujet extrêmement important. Il est 5 h 15; il ne nous
reste que trois quarts d'heure de discussions. Probablement que les autres
participants autour de la table veulent, à un moment ou l'autre, aussi
traiter de ce sujet. Il est important
que le ministre nous dise maintenant quelle est la possibilité
pour lui de poursuivre la politique dans ce secteur important de son
ministère, le secteur de la sécurité du revenu. Quelle est
la possibilité pour lui de poursuivre, quelle est maintenant sa
façon de voir le débat, qui se continuera ou ne se continuera
pas? S'il se continue, quels sont les moyens, quels sont les mécanismes
qu'il va employer pour pouvoir faire avancer le débat? S'il ne se
continue pas, de quelle façon le ministre va-t-il essayer de mettre en
place la politique qui a été proposée à la suite
des différentes études qui ont été faites ces
dernières années, politique qui est cohérente? On ne peut
pas continuer dans l'incohérence actuelle. S'il y en a qui le savent, ce
sont les députés qui sont aux prises, dans leur comté,
avec ces problèmes qui sont soumis quotidiennement, que ce soient des
problèmes causés par les lois du côté de
l'assurance-chômage, problèmes causés par les lois du
côté de la sécurité de la vieillesse,
problèmes causés par les taux de rémunération quand
il s'agit de formation professionnelle, problèmes causés par ces
disparités de taux prévues par nos différentes lois.
M. le Président, la situation est intenable pour tout le monde et
je pense bien que le ministre voudra peut-être nous faire une
déclaration, même si elle ne couvre pas tout le sujet. Nous aurons
probablement l'occasion d'y revenir à différents articles, mais
je pense que c'est le moment tout désigné, avant d'entrer dans
l'étude des crédits article par article de faire le point sur ce
problème qui m'apparaît prioritaire.
M. CASTONGUAY: Est-ce qu'on pourrait entendre d'abord chacun des
représentants, pour ne pas répéter...
M. LE PRESIDENT: Le ministre des Affaires sociales suggère qu'on
entende au moins un représentant de chacun des partis d'Opposition avant
qu'il fasse des commentaires additionnels sur les propos venant du
côté de la représentation des partis.
Donc, le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, depuis déjà plusieurs
minutes que nous sommes à la commission parlementaire pour
l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales. Le
ministre nous a donné les objectifs qui avaient été
fixés pour l'année 1970, pour l'année 1971 et maintenant
pour l'année 1972. Cela me porte à poser une question très
importante et je ne demande pas au ministre d'y répondre tout de suite
parce que, peut-être, la réponse est-elle encore loin.
Tout cela est bien beau, ces belles grandes politiques que le ministre
vient d'annoncer mais nous nous rendons compte que le ministère est
toujours limité à des contraintes budgétaires. Nous sommes
à l'étude des crédits de ce ministère qui prend une
part très importante du budget total, soit tout près de 40 p.c.
C'est le ministère, en termes de chiffres, le plus important. Et comme
le disait tantôt le député de Montmagny, ce
ministère est non seulement important à cause du volume des
chiffres mais à cause de son état. Ce ministère a
constamment à donner des services et je pense que c'est le
ministère qui a distribué en quantité le plus grand nombre
de services à la population, quand nous parlons des services de
santé. C'est également à ce ministère que
retentissent les cris les plus aigus de la population, soit les cris de la
pauvreté.
Et je me demande réellement, après avoir entendu le
ministre, où sont les premières priorités. Parce que j'ai
l'impression que, parmi les priorités, il faudra choisir des
priorités au ministère des Affaires sociales. Et j'étais
pour soulever, évidemment, le problème de l'aide sociale. C'est
probablement un cauchemar, même pour le ministre des Finances, le budget
du ministère des Affaires sociales. Mais il faudra, quand même,
à un certain moment, s'asseoir bien tranquillement, bien calmement et
analyser cette situation qui devient de plus en plus alarmante. Ce n'est pas
étonnant de voir l'augmentation des budgets qui sont affectés au
ministère des Affaires sociales. Il y a eu des études qui ont
été faites, et je fais allusion à la commission
d'enquête qui a été dirigée, en partie, par l'actuel
ministre des Affaires sociales, où il y a eu des recommandations bien
concrètes qui ont été faites et c'est encore impossible,
dans le moment, d'appliquer ces recommandations.
Quand on parle de revenu minimum garanti, il est plus temps que jamais,
non seulement d'y penser, mais de faire en sorte que cela devienne une chose
faite. Il serait très facile de prendre des heures et des heures pour
cette intervention mais je pense qu'au fur et à mesure que nous allons
étudier les crédits du ministère, il sera plus
approprié de faire les remarques à chacun des articles à
mesure que nous les étudierons.
Il y a des priorités à respecter à
l'intérieur de chaque ministère et j'ai l'intention de
suggérer au ministre, selon un humble député qu'il
soit de milieu rural ou autre, cela a peu d'importance les
priorités qu'il devrait respecter à l'intérieur du
ministère. La pauvreté devient de plus en plus alarmante. Et je
me demande si ce n'est pas justement là que le ministère devra
concrétiser le plus de choses pendant l'année 72/73.
J'attire l'attention du ministre sur les grandes politiques qui ont
été énoncées. J'espère que nous aurons quand
même l'occasion d'y revenir en étudiant chacun des articles.
M. LAURIN: M. le Président, nous voyons que le ministre a un
nouveau sens de la cohérence aussi bien dans le temps que dans l'espace.
Dans l'espace, nous l'avons vu par l'exposé magistral de nos
défaites. Il l'a fait il y a quelque temps. Dans le temps, parce
que,
dans le bilan qu'il vient de nous tracer de son ministère, il
prend bien soin d'articuler les politiques actuelles avec les politiques
anciennes. Il a pris le soin de nous rappeler les objectifs qu'il
s'était fixés à son entrée au ministère, les
objectifs qu'il se fixait en 1971, les objectifs qu'il se fixait en 1972. L'an
dernier, il nous avait fait un bilan de son activité jusqu'au moment de
la présentation des crédits. Cette année, il nous fait le
bilan de l'année 1971. Il nous rappelle ses objectifs de 1972 et la
partie de ses objectifs qu'il a pu réaliser. Nous saisissons très
bien le sens de son action. C'est très clair, comme l'a dit le
député de Montmagny.
On peut suivre le fil directeur de son action qui correspond exactement
au fil de sa pensée avant qu'il n'entre dans le cabinet et depuis qu'il
est dans le cabinet. Il a donc préparé ses crédits avec
toute l'attention, la minutie et ce sens de la cohérence dont il avait
toujours fait preuve jusqu'ici. C'est ce qui me fait dire que nous nous
ennuierons beaucoup de lui car je doute que le prochain ministre puisse faire
montre des mêmes qualités. Je le déplore d'avance.
Dans son exposé, il a fait mention des responsabilités de
son ministère, responsabilités qui croissent avec les
années, non seulement en raison d'une meilleure définition, d'une
définition plus exacte de la nature du mandat confié au
ministère mais aussi en raison de l'évolution de notre population
qui, malgré le marasme qu'on se plaît à souligner parfois,
continue quand même son petit bonhomme de chemin, continue
d'évoluer au point de vue économique, continue d'évoluer
surtout au point de vue de ses moeurs, de ses habitudes de vie, de ses
habitudes de pensée, continue d'évoluer dans la conscience de ses
droits, dans l'organisation de sa vie démocratique. Je pense que tous
ces facteurs d'évolution contribuent à nous faire
reconnaître avec plus de précision, plus de clarté, le
mandat, l'essence du mandat du ministère des Affaires sociales.
D'ailleurs, c'est un signe des temps qu'on ait senti, à un moment
donné, le besoin de fondre les deux ministères de la Santé
et du Bien-Etre social. Je pense qu'en fusionnant ces deux ministères,
on ne faisait que traduire au niveau des structures un changement qui
s'était déjà manifesté au niveau collectif,
à ce niveau de l'évolution des moeurs, des mentalités et
des structures sociales. C'est ce mandat, ce rôle le plus ample, le plus
précis du ministère des Affaires sociales, je le vois comme
reprenant le rôle traditionnel évidemment du ministère de
la Santé et du ministère des Affaires sociales mais
également en y ajoutant des dimensions nouvelles; rôle
traditionnel qui était celui que tout le monde connaît bien, le
rôle du ministère des Affaires sociales est de réparer les
avatars que subit la machine humaine, avatars qui peuvent être de
plusieurs sortes, qui peuvent menacer son équilibre biologique, et alors
on a les maladies physiques que les médecins sont obligés, sont
amenés, sont appelés à traiter et encore plus à
prévenir, également, avatars sociaux, entendus à tous les
sens du terme, avatars, par exemple, dans le développement de
l'individu, développement au point de vue de l'éducation,
développement au point de vue de la participation à la vie
sociale, développement au point de vue également de l'insertion
de l'individu dans les groupes dont il fait partie, et ici je pense, par
exemple, à la famille, aux groupes intermédiaires, aux classes
sociales, aux secteurs d'activité. Et, il peut, en effet, survenir des
avatars de développement à l'individu au seul point de vue de son
développement en tant que personne de même qu'au
développement de son appartenance au groupe dont il fait partie.
A ce point-là, M. le Président, nous sommes presque
obligés de passer de la dimension réparatrice du ministère
des Affaires sociales à la dimension de développement qu'il est
de plus en plus obligé d'assumer, développement de la personne.
D'ailleurs, un des plus beaux mémoires de la commission d'enquête
porte précisément sur cette société de
développement qui doit devenir de plus en plus notre
préoccupation. Donc, société de développement.
En même temps, elle porte, je crois, de plus en plus, sur une
dimension que l'on pourrait appeler la promotion de l'individu à tous
les sens du terme. Et là, on est presque obligé de se
préoccuper, même au ministère des Affaires sociales, de la
dimension économique du développement c'est-à-dire de
l'insertion de l'individu, de l'homo économicus dans la
société dont il fait partie, parce qu'il n'y a pas que l'homo
rationalis.
Encore une fois, il est fatal que le ministère des Affaires
sociales soit appelé à se préoccuper de la dimension de
soutien du revenu, de maintien du revenu, de coordination de toutes les mesures
sociales qui peuvent assurer ce maintien et cette sécurité du
revenu. Au fond, ils ne sont qu'une autre façon d'appeler, de dire que
l'individu n'est pas statique, qu'il est appelé à se
développer. Pour se développer il a besoin de toutes les
ressources de la collectivité et en même temps, il doit
lui-même apporter sa contribution à la société. En
ce sens, le ministère des Affaires sociales a d'une part un rôle
primaire à jouer, un rôle de moteur, d'agent, d'avant-garde, de
fer de lance dans l'évolution d'une société.
Négativement, malheureusement, c'est lui qui hérite de toutes les
carences, de toutes les incuries qui se manifestent dans d'autres
ministères, à vocation proprement économique. Si le
cabinet, si tel ou tel ministère ne font pas leur devoir ou ne sont pas
capables d'assumer leurs responsabilités, de procurer à une
société le développement économique dont elle a
besoin, d'assurer à l'individu les matériaux techniques,
économiques dont il a besoin pour assurer son développement, ces
ratés de développement, ces avatars dont on parlait tout à
l'heure, à ce moment-ci, se manifestent au
niveau de la collectivité. Le ministre des Affaires sociales est
quand même obligé de les reprendre à son compte et est
obligé de réparer. C'est la raison, par exemple, pour laquelle le
chapitre de l'aide sociale devient un chapitre de plus en plus sombre au
Québec. Cette Loi de l'aide sociale constitue en elle-même un aveu
d'échec de cette société. Les montants de plus en plus
élevés qu'elle conscrit, qu'elle exige, manifestent
également l'échec de notre société politique
à assurer le développement des individus.
Au fur et à mesure que nous voyons le budget de cette Loi de
l'aide sociale augmenter, nous voyons également se produire une
détérioration de la fibre morale de l'individu, une augmentation
de ses besoins de dépendance, de ses appétits de revendication,
de sa paresse vitale, de son manque de participation à l'essor, à
la vie, à la santé collective. Cette Loi de l'aide sociale
constitue pour moi un symptôme toujours plus grave de cette maladie qui
affecte nos sociétés. C'est la raison pour laquelle autant le
ministre actuel que certains membres de l'Opposition ont
préconisé deux séries de mesures. D'abord, une politique
sociale cohérente, intégrée, globale, axée sur une
culture spécifique et propre. Deuxièmement, d'une façon
plus particulière, le remplacement de la Loi de l'aide sociale par un
régime de revenu minimum garanti. Même s'il n'est pas parfait, il
peut au moins constituer un cran d'arrêt à cette
détérioration de la fibre morale de l'individu, une invite
à la responsabilisation, à l'insertion de l'individu à
titre de membre productif dans la société dont il fait
partie.
Donc c'est à tous ces titres que le ministre et que le
ministère des Affaires sociales sont appelés à jouer un
rôle de plus en plus grand dans notre société. Je ne parle
pas d'un autre rôle que le ministère des Affaires sociales est
forcément aussi appeler à jouer soit celui de producteur,
d'investisseur. Lorsqu'on est obligé de réparer, de promouvoir,
de prévenir, d'assurer le développement des individus aussi bien
que des groupes, il faut évidemment mettre en place une
multiplicité de services très variés. Il peut mettre au
travail un très grand nombre de spécialistes, de fonctionnaires,
d'individus qui, de près ou de loin, participent à la marche de
ces services. Cela constitue une injection constante dans l'économie
d'une nation. A ce moment-là, même si c'est un résultat,
même si c'est un bénéfice secondaire, il reste que la
valeur proprement économique du ministère prend une importance de
plus en plus grande. C'est donc la raison pour laquelle le ministère des
Affaires sociales nous apparaît, sinon la clé maîtresse, du
moins une des principales clés d'un gouvernement.
C'est aussi la raison, M. le Président, pour laquelle nous
portons une telle attention aux activités de ce ministère, aux
objectifs, aux avatars qui peuvent marquer l'essor de son action. C'est la
raison aussi pour laquelle nous déplorons avec tellement de tristesse
toutes les causes majeures qui peuvent affecter, non seulement son
développement futur, mais même ses activités courantes et
quotidiennes.
C'est peut-être la raison également pour laquelle, pour se
rapprocher de l'actualité, nous avons appris avec une telle tristesse,
sans qu'il soit de la faute du ministre, l'échec d'un volet à ce
point important de sa politique, échec dont il nous a fait part
récemment.
Donc, M. le Président, l'étude des crédits du
ministère de la Santé nous donne l'occasion de revoir les grands
objectifs de ce ministère et son insertion dans notre
société contemporaine. Elle nous amène aussi à nous
poser des questions sur le genre de politique que nous voulons dans ce secteur.
La constitution du Canada a toujours donné une priorité exclusive
au gouvernement local, si l'on peut s'exprimer ainsi, en cette matière.
En ce qui concerne en particulier les services sociaux, cela allait de soit.
C'était tellement lié à la personne, tellement lié
à la culture que ceci tombait sous le sens que la priorité et
l'exclusivité devaient en être réservées aux
autorités qui sont les plus proches du peuple, aussi bien par la langue,
par la culture que par le niveau d'administration, que par la connaissance
exacte qu'ils ont des priorités et des besoins. Cette exclusivité
demeure, même lorsqu'il s'agit de l'extension du rôle dont je viens
de parler.
Nous réalisons, par exemple, que pour assurer des meilleurs
services sociaux, que pour assurer la réparation aussi bien que la
prévention, que la promotion du développement, il faut passer par
des mesures qui prennent une allure économique, soutien du revenu,
formation professionnelle, assurance-chômage, assurance-salaire. Il faut
en tirer la déduction absolument essentielle que cette extension
demande, exige que le ministère des Affaires sociales garde, sinon son
exclusivité, à tout le moins une très haute
priorité dans l'établissement des politiques. Autrement, comme le
ministre l'a d'ailleurs constaté, a été obligé de
le constater, non seulement on est dans l'impossibilité de faire cette
politique cohérente, planifiée, globale et surtout proche des
individus, on se rend compte également que l'exclusivité qu'on
nous avait en apparence attribuée devient souvent lettre morte dans
plusieurs secteurs.
Ceci est tellement vrai, M. le Président, que dans la nouvelle
Loi de l'assurance-chômage on a vu que le gouvernement central
commençait à envahir le champ des services sociaux en se
réservant le champ des allocations pour maternité et pour
grossesse. Il faut presque se battre constitutionnellement pour aller chercher
quelque chose qui nous appartient en propre. Nous l'avons vu également
avec le programme Perspectives-Jeunesse et initiatives locales où par un
autre moyen, le gouvernement central est en train de s'approprier une action,
à cause de son pouvoir de dépenser, qui touche directement des
services qui, au point de vue constitutionnel, sont exclusifs au pouvoir
québécois.
Ceci est d'autant plus grave que nous sommes au Québec. Nous ne
sommes pas dans n'importe quelle province canadienne que lie ensemble une
uniformité de langue et de culture. Elles peuvent, elles, parfaitement
déléguer à un pouvoir central le soin de défendre
leurs intérêts collectifs. Nous sommes en effet au Québec
où la langue, la culture, la tradition sont différentes, d'une
part; où depuis très longtemps, depuis 400 ans, les citoyens ont
pris l'habitude de se référer, surtout en ces matières qui
touchent leur vie au plus près, au seul gouvernement en qui ils se
reconnaissent, qui parle leur langue, qui défend leur culture,
c'est-à-dire, le gouvernement québécois.
Par suite de cette intrusion, de cet envahissement, par suite de cette
invasion qui équivaut presque à une occupation, on se rend compte
que ce gouvernement québécois est en passe de devenir un
gouvernement de canton, un gouvernement de municipalité à qui on
ne confie plus que des pouvoirs d'exécution, chez qui on encourage la
démission, la dépendance, l'abdication de leurs
responsabilités propres.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je comprends
parfaitement et je m'associe, du plus profond de mon coeur, à toutes les
protestations que le ministre des Affaires sociales a élevées
à l'encontre du gouvernement central. C'est la raison pour laquelle je
me reconnais dans ces protestations, en tant que Québécois, fils
de Québécois, d'ancêtres québécois, bien
avant qu'un parti indépendantiste n'existe au Québec.
Le ministre a parlé le langage de la nation
québécoise, il a fait entendre un cri qui est celui de tous les
Québécois authentiques. C'est la raison pour laquelle je
comprends un peu plus difficilement que le gouvernement, à la suite de
cet appel extrêmement éloquent, de cette démonstration
absolument convaincante, irréfragable, à laquelle on ne peut rien
opposer, ne change pas immédiatement son fusil d'épaule et ne
place l'autre gouvernement devant des faits accomplis.
Que pourrait être ce fait accompli? On le verra bien dans les
semaines qui viennent, mais je poserai sûrement la question au ministre
à ce moment-ci. Si tout ce qu'il a dit est vrai, si ce que nous disons,
si ce que les Québécois disent est vrai, comment pouvons-nous
remonter le courant?
Après toutes ces défaites successives qui s'inscrivent
dans le temps, qui s'accumulent et qui s'accélèrent depuis
quelque temps, comment pouvons-nous véritablement faire machine
arrière? Comment pouvons-nous vraiment renverser la vapeur? Comment
pouvons-nous reconquérir les terrains, les territoires que nous avons
perdus, quand nous savons que ces territoires sont tellement nombreux? Quand
nous savons, par exemple, qu'ils touchent aussi bien le domaine des allocations
familiales que celui des pensions de vieillesse, celui de
l'assurance-chômage que celui de l'assurance salaire, que celui de
l'éducation postsecondaire, que celui des centres de main-d'oeuvre, que
celui de l'habitation, que celui du loisir? Avec la lenteur des
mécanismes que nous connaissons, avec cette intransigeance, cette
arrogance M. Bourassa lui-même le disait que nous
constatons depuis quelque temps à Ottawa, comment pouvons-nous
espérer, en un si court laps de temps, reconquérir, refaire cette
robe sans couture que devrait constituer notre politique de
sécurité sociale?
Je pense qu'il faut faire montre d'un optimisme absolument
idéaliste, utopique, pour penser que, d'ici quelque temps, nous pouvons
renverser la vapeur. A moins que des magiciens ne cachent dans leurs manches
des recettes magiques que je ne connais pas pour ma part, je pense qu'on doit
s'attendre à ce que le glissement, l'érosion que nous avons
connus, sinon s'accentuent du moins se maintiennent dans l'état que nous
connaissons, que nous déplorons actuellement et que les
difficultés que laisse présager cette érosion
s'accentuent.
C'est là une autre dimension du problème, M. le
Président. D y a la dimension temporelle. Qui n'avance pas recule
quelqu'un a dit ça, il y a très longtemps et je pense que c'est
très vrai qui n'avance pas recule. C'est vrai d'une façon
éternelle mais c'est encore plus vrai dans la conjoncture où se
trouve placé actuellement le Québec. Qui n'avance pas recule,
parce que les Québécois avancent. Les Québécois
avancent dans la nature, la complexité, l'intensité des
problèmes qu'ils connaissent. Par exemple, M. le Président, vous
savez que 32 p.c. des familles pauvres habitent au Québec, alors que
nous ne formons plus que 26 p.c. de la population.
Or, 55 p.c. des familles qui se situent en deça du seuil de la
pauvreté comptent trois ou quatre enfants et nous en avons encore notre
très grande part.
Nous savons que, dans plusieurs régions du Québec, le
chômage sévit; ce chômage qu'on ne réussit pas
à abaisser, qui, même au mois d'avril, au moment où je vous
parle, en 1972, s'élève à 9. 2 p.c, 216,000 travailleurs;
la province où nous comptons le plus de chômeurs, le taux
désaisonnalisé y est encore très élevé, ce
qui témoigne des vices de structure d'une économie vieillissante
et chancelante.
Tous ces problèmes, M. le Président, dont les uns sont
économiques, dont les autres sont sociaux, laissent présager,
comme ils l'ont manifesté au cours des dernières années,
encore davantage des tensions sociales, des crises sociales qui explosent ici
et là, qui donnent lieu à des manifestations que tout le monde
déplore mais dont il importe quand même de reconnaître les
causes.
Donc, non seulement qui n'avance pas recule, mais, en 1972, qui n'avance
pas recule bien davantage au Québec que dans les autres provinces du
Canada. Et ceci est très dangereux car les Québécois ont
pris conscience de leurs droits. On parle sans cesse du droit à
l'éducation, du
droit à la santé, du droit à l'habitation, du droit
aux loisirs; une fois qu'un citoyen est conscient de ses droits, il ne les
oublie pas volontiers et la pression qu'il met sur tous ses gouvernements,
qu'ils soient municipaux, scolaires, québécois ou qu'ils soient
centraux, est très forte et il faut qu'il y ait une réponse
à ces demandes.
On le voit tellement bien que M. Trudeau disait il y a quelques jours:
Je ne comprends pas pourquoi le ministre des Affaires sociales s'oppose
à l'augmentation des pensions de vieillesse, je ne vois pas pourquoi;
nous donnons quelque chose aux vieux et tout le monde sait que les vieux en ont
besoin.
Cependant, nous savons que les vieux, dans les autres provinces du
Canada, demandent bien davantage qu'au Québec parce que les
caractéristiques de notre société ne sont pas les
mêmes que celles de la société ontarienne ou que celles de
la Colombie-Britannique. Et c'est ça qui est dangereux. Si notre
gouvernement, celui que nous avons toujours considéré comme notre
gouvernement, à cause de sa marge de manoeuvre extrêmement mince
au point de vue économique, à cause des pouvoirs, des
compétences constitutionnelles qu'il ne possède pas, ne peut pas
répondre à ces exigences, c'est un autre gouvernement qui va y
répondre. Or, parce qu'on a encouragé dans notre pays la
dépendance, l'appétit de revendication, même nos citoyens
vont s'aliéner, vont oublier leurs véritables
intérêts, leurs intérêts profonds, leurs
intérêts à long terme, vont prendre l'immédiat et
vont même participer à leur démission, à leur
abdication, à leur vieillissement moral et psychologique, vont
participer à leur écrasement, à leur étoufferaient
collectif.
C'est un danger qu'on ne voit pas assez dans la population et c'est pour
ça que je suis reconnaissant à M. le ministre de l'avoir
signalé, à M. Cournoyer de l'avoir signalé, à M.
Toupin de l'avoir signalé, de même que je suis reconnaissant
à tous ceux qui le signalent, parce que c'est là un danger qui
menace très profondément notre société. Si on ne le
reconnaît pas, ce n'est pas le gouvernement du Québec qui sera
menacé, ce n'est pas l'équipe libérale qui sera
menacée, c'est notre peuple en tant que peuple, c'est notre nation en
tant que nation.
Et cette action demanderait un rassemblement, un sursaut de
dernière heure de toute notre collectivité afin qu'on mette
définitivement un cran d'arrêt à cette tentative
d'assimilation plus insidieuse que toutes les autres et qu'on remette la marche
en avant afin que ce peuple, qui a quand même besoin de son gouvernement,
puisse enfin trouver dans ceux qu'il a élus une réponse
véritable à des aspirations aussi bien actuelles que futures.
Cette dimension temporelle, M. le Président, m'apparait donc
extrêmement importante, à cause des situations de crise qui se
répètent épisodiquement au Québec et qui risquent
de se répéter, si les causes profondes du mal ne sont pas
analysées et si l'on n'arrive pas, d'une façon énergique,
presque comme celle de Churchill lorsque l'Angleterre a été
attaquée, à souder de nouveau les énergies de ce peuple,
à lui faire voir sa vérité et à mettre en place les
mécanismes, les stratégies, les politiques qui nous aideront
véritablement à nous sauver. Même si l'on dit que
l'époque de la survivance est révolue, je dis "à nous
sauver", je crains peut-être encore davantage cette érosion
subtile et insidieuse de notre volonté de vivre, de notre vouloir-vivre
collectif, que les défaites fracassantes.
Je pense que c'est tout cela qui est posé par la
présentation que nous a faite aujourd'hui le ministre et par le bilan
qu'il a fait en un autre lieu, il n'y a pas longtemps. Je lui poserai la
question suivante: Qu'entend-il faire, face à ce bilan, à cette
situation, face à sa conscience? Il nous l'a dit. Qu'entend-il faire
pour que, de façon opportune, il assure ce salut de notre
collectivité?
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui
désirent apporter des commentaires, avant que le ministre n'y donne
suite?
M. MASSE (Montcalm): Je pense que le député de Bourget a
fort bien résumé et le dossier des Affaires sociales et les
préoccupations des membres de cette assemblée. Je laisserais le
ministre des Affaires sociales répondre aux interrogations qui ont
été posées.
M. LE PRESIDENT: M. le ministre.
M. CASTONGUAY: M. le Président, on a fait allusion à la
conférence de presse que j'ai donnée la semaine dernière.
Je pense bien que ce ne serait pas le moment, pour moi, de reprendre ce que
j'ai dit à ce moment-là. C'était clair, de l'aveu de tous
ici.
Parce qu'on a bien mentionné le député de
Montmagny et celui de Bourget l'ont fait qu'il faut distinguer
l'individu qui occupe le poste de la fonction de ministre des Affaires
sociales, je ne crois pas que ce soit l'endroit pour discuter de mon avenir
personnel.
Il y aurait peut-être une remarque, toutefois, que je voudrais
faire à la suite de cette conférence de presse, compte tenu du
danger ou du risque que je cours, que le geste que j'ai posé soit mal
interprété. A mon sens, la semaine dernière, nous avons,
en fait, été confrontés avec des urgences qui se situaient
à des niveaux très différents. Je le comprends.
Premièrement, si l'on reprend les événements dans
le temps, lundi nous avons appris quant à moi, je l'ai appris par
la voie des nouvelles, tard en soirée le contenu du budget
Turner. Nous avons aussi appris, au cours de la même journée, les
sentences prononcées à l'endroit des trois chefs des grandes
centrales du front commun.
Et mardi, en Chambre, à des questions qui m'ont été
posées, j'ai fait un premier bref commentaire qui indiquait clairement
ce que je pensais de ce qui arrivait à la suite de l'annonce de ce
budget, quant à la poursuite d'une politique de sécurité
du revenu intégrée, cohérente et qui permettait une
allocation des ressources aussi équitable que possible, et, par voie de
conséquence, ce qui arrivait quant à la possibilité de
poursuivre dans l'implantation d'une politique sociale, dont une politique de
sécurité du revenu constitue un des éléments
majeurs et essentiels...
Mardi, au même moment, les chefs des centrales syndicales
décidaient de ne pas se prévaloir, pour le moment tout au moins,
de leur droit d'appel. Et je pense qu'il était encore
imprévisible, à ce moment-là, de connaître quelle
serait l'évolution de la situation, suite à cette décision
de leur part. Et il est évident que nous vivons une période
où les gestes posés ont bien souvent des effets
imprévisibles. C'est une des conséquences, je pense bien, de la
situation de crise que nous traversons. Si donc, j'ai poursuivi à la
suite de ma réponse de mardi en Chambre, c'est qu'il m'apparaissait
extrêmement important avant d'être, encore une fois, mis devant un
fait accompli, d'attirer l'attention sur ce qui était en voie de se
produire. Et, au moment où je l'ai fait, je n'étais pas conscient
de la rapidité avec laquelle la situation était en voie
d'évoluer sur l'autre plan. J'ai espéré, à ce
moment-là, que ce geste pourrait mettre en relief l'action
précipitée du gouvernement du Canada et peut-être, aussi,
alerter la vigilance des députés du Québec à la
Chambre des communes.
Compte tenu de la situation du conflit des relations de travail que nous
vivions à ce moment-là et que nous vivons dans une certaine
mesure encore, si je n'avais posé aucun geste, évidemment, une
fois cette crise passée, le budget ayant été, en ce qui a
trait aux pensions de vieilesse, traduit en une loi, on aurait pu facilement me
reprocher par la suite de ne pas avoir attiré l'attention sur cette
question, de ne pas avoir fait les représentations appropriées.
Alors, j'ai couru le risque et j'en étais conscient, même si je ne
savais pas à quelle vitesse la situation évoluerait, de soulever
le problème de la façon qui m'apparaissait la plus
énergique possible. Je savais fort bien que je prenais un risque
personnellement et je crois que, par la suite, le geste que j'ai posé
était tout à fait justifié et j'ai donné les
raisons pour lesquelles je l'ai posé.
Pour le moment, avec votre permission, je voudrais changer de sujet pour
les raisons que j'ai mentionnées.
En ce qui a trait maintenant aux commentaires qui ont été
faits, quoiqu'il soit important de faire quelques commentaires sur ceci, je
suis bien conscient du fait d'abord pour repartir au premier niveau, le
niveau le plus important, soulevé par le Dr Laurin des
conséquences ou encore des incidences que le type de
société et particulièrement le fonctionnement au plan
économique de notre société ont sur les citoyens, que ce
soit au Québec ou à l'extérieur, et
particulièrement au Québec compte tenu des
caractéristiques de notre économie. Je partage ce point de vue
voulant que le ministère des Affaires sociales doit graduellement
s'intéresser davantage à des dimensions plus larges que celles
strictes de ses politiques et programmes. Trop souvent, par leur nature
même au plan de la prévention, ou au plan des conclusions qui
peuvent être tirées de leur application, ces programmes, et ces
politiques pourraient faire en sorte que, dans d'autres secteurs de
l'activité économique et sociale, l'on prévoie mieux les
conséquences. Donc, je suis bien conscient du rôle que nous devons
jouer à ce sujet.
Justement, c'est une des raisons pour lesquelles, dans les nouvelles
structures du ministère, en plus de la direction, de la planification et
de la recherche, une direction des affaires extraministérielles a
été mise sur pied. Par la voie de cette direction, en association
avec la direction de la planification, de la recherche, des autres directions,
nous tentons de plus en plus, à la fois, de nous aboucher au courant des
travaux qui se font à l'extérieur, de participer à
l'évolution dans ces secteurs, également de façon plus
immédiate, au sein du gouvernement du Québec, et d'apporter le
type de contribution auquel on se réfère. Par exemple,
récemment, ou au cours des derniers mois, le ministère s'est
associé de façon très étroite aux travaux qui
s'effectuent présentement à l'Office de planification et de
développement, de la même façon, nous avons voulu nous
associer de diverses façons au ministère du Travail et de la
Main-d'oeuvre, nous le faisons dans les domaines politique et scientifique que
nous sommes en voie d'élaborer, de concrétiser et, sur ce plan,
j'en suis bien conscient, nous devons poursuivre dans cette voie.
En ce qui a trait aux questions que l'on m'a posées concernant
notre politique de sécurité du revenu, certains commentaires ont
été faits. Nous avions discuté longuement au mois de
décembre de ce que signifiait l'augmentation du budget au titre de
l'aide sociale. Le seul commentaire que je vais refaire à ce moment-ci,
parce que j'en avais fait une analyse assez longue de ce que signifiait
l'augmentation de ce budget, c'est simplement d'apporter une précision.
C'est que, malgré tout ce qu'on peut dégager de négatif de
l'augmentation de ce budget, on ne doit pas, malgré tout, juger
uniquement par les chiffres absolus au titre des prestations qui sont
versées parce qu'une partie assez substantielle de l'augmentation
provient de la hausse des prestations.
On ne peut donc pas dire que, parce que le budget a augmenté de
près d'un tiers ou un quart au cours de la dernière année,
le nombre de bénéficiaires a augmenté dans la même
proportion. C'est le seul point que je voudrais faire ressortir,
la seule précision que je voudrais indiquer quant à cet
aspect des questions qui ont été soulevées face à
l'augmentation du budget de l'aide sociale.
Deuxièmement, on a parlé de nos priorités. Il est
clair qu'au ministère des Affaires sociales, en ce qui a trait à
la politique de sécurité du revenu, nous avions mis l'accent sur
l'élimination ou la diminution de la pauvreté. Je dis bien en ce
qui a trait aux politiques de sécurité du revenu. Ceci nous
apparaissait bien important, compte tenu du fait que, dans bien des programmes
d'assurance-sociale ou des programmes de prestations à caractère
universel établis dans le passé, l'impact au plan de la
redistribution des revenus vers la partie de la population qui vit dans la
pauvreté n'était pas suffisant.
En ce qui a trait aux services toutefois, étant donné la
nature des services qui sont en cause, services de santé, services
sociaux, il nous apparaît extrêmement important qu'au premier titre
ces services soient universels quant à leur accès et qu'ils
soient adaptés, organisés de telle sorte que, compte tenu des
caractéristiques des populations, ils soient aussi accessibles, non pas
seulement au plan financier, géographique, mais au plan je ne
sais pas si c'est la meilleure expression des attitudes des individus qui
dispensent ces services, de telle sorte que la population qui les requiert
n'ait pas à franchir une barrière psychologique.
En plus de modifications aux réseaux de services pour les rendre
aussi accessibles, pour leur donner les caractéristiques que je viens de
décrire, nous devons avoir certains programmes particuliers qui
s'adressent aux populations défavorisées. Nous avons des
initiatives qui ont été prises dans ce sens et nous comptons les
poursuivre. Il y a, par exemple, un programme spécial en collaboration
avec la Commission des écoles catholiques de Montréal pour les
enfants de milieux défavorisés, pour améliorer leur
alimentation.
M. CASTONGUAY: ... Il y a, cet été, un programme avec la
Faculté d'art dentaire de l'Université de Montréal et
celle de McGill, précisément encore pour des populations, des
enfants de secteurs, de zones défavorisés. Je pourrais en
énumérer certains autres. C'est, dans les grandes lignes, les
approches que nous prenons, au plan de la sécurité et du revenu
axant sur la pauvreté et au plan des services, facilité
d'accès avec certains programmes particuliers, spéciaux, pour
faire en sorte que les écarts entre les populations
défavorisées, à divers plans, puissent être
résorbés, ce qui ne pourrait probablement pas être le cas
dans un avenir prévisible, si nous ne comptions que sur l'implantation
ou le développement d'un réseau de services universels.
En ce qui a trait, maintenant, à la possibilité de
poursuivre la politique de sécurité de revenu, que j'ai
déjà exposée la semaine dernière, je crois que les
derniers gestes posés en ce qui a trait à la pension de
vieillesse, constituaient la démonstration finale que la poursuite de
cet objectif m'apparaissait irréalisable.
A court terme, qu'est-ce qu'il nous reste à faire? Il
m'apparaît nécessaire, malgré tout, de poser au moins
certains gestes dans le contexte actuel. Ces gestes sont des amendements qui
m'apparaissent assez pressants au plan du Régime de rentes du
Québec, d'une part, dans le même sens toutefois que la politique
que nous avions exposée, des modifications à la Loi de l'aide
sociale, modifications qui auraient pu venir plus tôt, mais que nous
devons reporter, parce que nous devons, encore une fois, rechercher un certain
équilibre, compte tenu des modifications à apporter à la
pension de vieillesse. Quant aux allocations familiales, vraiment, dans le
moment, je ne suis pas en mesure de dire quels gestes nous pourrons poser.
Comme vous le voyez, il s'agit de gestes dont la portée est relativement
restreinte, mais qu'il nous faut de toute façon poser, je crois, compte
tenu du fait que, à mon avis, la population ne doit pas faire les frais
â court terme de ces luttes que nous avons au plan constitutionnel.
J'ai examiné les documents qui ont été produits au
cours des derniers mois, compte tenu des difficultés que nous
éprouvions dans ce secteur. Je serais disposé, au besoin, si vous
le désirez, â en discuter. De la sorte, si des suggestions
intéressantes ne nous viennent pas à l'esprit en ce moment et si
des suggestions intéressantes pouvaient être
dégagées de nos discussions, j'en serais évidemment
heureux.
Je dois dire que j'ai examiné ces documents; je pense en
particulier au document que le Parti Québécois a publié,
je ne me souviens pas précisément quel mois, au cours de l'hiver
ou tard dans l'automne; de toute façon, je suis tout à fait
disposé à poursuivre la discussion de telle sorte que, si des
suggestions intéressantes se présentent, nous les envisagerons
évidemment avec le plus grand intérêt.
Enfin, pour terminer, étant donné l'heure, et compte tenu
du fait qu'un certain nombre des fonctionnaires ici présents n'y
étaient pas au début de la séance, je voudrais simplement,
étant donné que le début de nos travaux est venu un peu
plus rapidement que prévu, contrairement à l'an dernier, leur
demander de se présenter au début de la séance que nous
aurons demain matin et qui, me dit-on aura lieu à dix heures, à
la même salle, 81 A.
Quant au programme de travail, je ne sais pas, désirez-vous que
nous procédions dès demain article par article, quitte à
ce que les questions qui ont fait l'objet d'exposés ou de documents,
soient abordées au moment qui apparaîtra le plus
approprié?
M. LAURIN: On pourrait décider ça demain matin.
M. CASTONGUAY: Certainement.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): Seulement un mot, M. le Président. Le
ministre demande si nous allons en décider demain matin. Le
député de Bourget a fait une remarque, il aimerait mieux reporter
à demain matin la décision sur l'ordre des travaux; je pense que
c'est exact. Nous allons prendre connaissance ce soir des documents que le
ministre nous a transmis; je pense bien qu'il y aura lieu de continuer la
discussion générale.
De toute façon, les sujets que nous abordons d'une façon
générale à l'article 1 ne reviennent pas par la suite.
Nous les avons traités, donc le travail est fait. Soit que l'on
décide, demain matin, de les traiter d'une façon
générale ou de les traiter un par un, je pense que tous les
sujets que nous pouvons traiter se rattachent à l'un ou l'autre des
articles.
Si nous voulons parler de la sécurité du Régime de
rentes du Québec, le ministre en a parlé à la fin, nous
pouvons le faire à un article en particulier, la même chose pour
l'aide sociale.
M. CASTONGUAY: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Donc, messieurs, la commission ajourne ses travaux
à demain matin, 10 heures, même local.
(Fin de la séance à 18 h 11)
Séance du jeudi 18 mai 1972
(Dix heures treize minutes)
M. GIASSON (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
Au moment de suspendre les travaux de la commission hier, le ministre
était à faire des commentaires sur les remarques formulées
par les représentants des trois partis de l'autre côté de
la table. Je pense qu'il va de soi que nous redonnions la parole au ministre ce
matin.
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'avais mentionné hier
que, contrairement à l'an dernier, au début de la séance,
les officiers du ministère, les présidents des régies ne
s'étaient pas présentés, étant donné que
nous avions commencé un peu plus tôt que prévu. Ce matin,
avant de commencer, je leur demanderais de se présenter.
Je présenterai les présidents des régies. Le
sous-ministre, le Dr Brunet, je pense que tout le monde le connaît. Il y
a M. Gill Fortier, le président de la Régie des rentes; M. Robert
Després, le président de la Régie de l'assurance-maladie;
M. Roger Marier, le président du Conseil des affaires sociales et de la
famille. Peut-être que je pourrais demander à chacun de se
présenter, en donnant son titre, de façon que vous puissiez
identifier chacun des fonctionnaires. J'en profite pour signaler qu'il s'agit
là d'une équipe vraiment dynamique, extrêmement
dévouée et qui fait un travail assez extraordinaire, si nous en
jugeons par toutes les réalisations effectuées; de fait, c'est
par eux que tout cela a été effectué.
Peut-être pourrions-nous commencer par M. Savard ou M. Turgeon,
pour venir comme cela?
M. TURGEON: Claude Turgeon, directeur, services communs à la
programmation.
M. SAVARD: André Savard, directeur du service de l'aide sociale
à la direction de l'attribution.
M. DIONNE: Pierre Dionne, directeur, systèmes et
méthodes.
M. GIROUARD: Albini Girouard, directeur des services sociaux publics
à la direction des programmes spéciaux.
M. OUELLET: Aubert Ouellet, sous-ministre adjoint, direction
générale de la planification.
M. LABERGE : Martin Laberge, direction de l'agrément des
établissements.
M. HOUDE: Jean-Guy Houde, sous-ministre adjoint, administration.
M. FORGET: Claude-E. Forget, sous-ministre adjoint, financement.
M. BEAUSOLEIL: Gilles Beausoleil, sous-ministre adjoint, affaires pro
ministérielles.
M. GAUDREAULT: Gilles Gaudreault, relations professionnelles.
M. CHAMARD: Charles Chamard, directeur des budgets.
M. LALIBERTE: Hector Laliberté, chef, analyse et contrôle
budgétaire.
M. CANTIN: Réjean Cantin, directeur des immobilisations et de
l'équipement.
M. REGIMBALD: Gilles Regimbald, directeur de la gestion des fonds au
financement.
M. BERGERON: André Bergeron, chef des données
financières et opérationnelles, financement.
MME WELLS: Amélie Wells, adjoint administratif du sous-ministre
adjoint, bureau de M. Forget.
M. CASTONGUAY: Mme Wells, qui est avec M. Forget.
M. MORISSETTE: Robert Morissette, administration.
M. ROBERT: Roger Robert, directeur de l'aide sociale.
M. ROY: André Roy, chef, service administratif à l'aide
sociale.
M. BERGERON: R.-P. Bergeron, sous-ministre adjoint, programmation.
M. PIGEON: Jacques Pigeon, chef des relations régionales,
programmation.
M. PERIARD: Paul Périard, direction générale de la
planification.
M. ESCOJIDO: André Escojido, secrétaire du Conseil des
affaires sociales et de la famille.
M. DUBOIS: Jean-Claude Dubois, chef du service du contrôle,
administration.
M. BOUCHER: Marc Boucher, planification financière et
placement.
M. PLAMONDON: Roland Plamondon, directeur, coordination des programmes,
affaires extraministérielles.
M. CASTONGUAY: Merci. Hier, lorsque nous avons terminé, nous
avions dit que nous nous fixerions un programme de travail ce matin. Je
voudrais mentionner que j'ai un certain nombre de documents qui peuvent jeter
plus de lumière dans le domaine de l'hospitalisation en particulier.
L'évolution des coûts, les gestes que nous avons posés face
à cette évolution des coûts, c'est-à-dire la
révision des programmes de construction, l'introduction du budget global
en passant par les propositions que nous avons faites dans les conventions
collectives au sujet des postes et la loi 65. Au mois de décembre,
à l'occasion du budget supplémentaire qui portait principalement
sur l'aide sociale, nous avions fait une analyse assez détaillée
de cette question. Or, vraiment, depuis décembre, il ne me semble pas
qu'il y ait tellement de faits nouveaux en ce qui a trait à
l'évolution des coûts de l'aide sociale. Comme d'autre part, les
coûts de l'hospitalisation constituent une part très importante du
budget des affaires sociales et que nous avons posé plusieurs gestes, je
suis maintenant prêt à faire une analyse de cette question pour
situer les diverses actions que nous avons prises et aussi dégager
certaines données qui indiquent, à mon avis, que nous sommes dans
la bonne voie. Je peux aussi attendre sur cette question, si vous le
préférez, le moment où nous arriverons à l'article
budgétaire approprié ou je peux le faire immédiatement
ce sera à vous de le déterminer de telle sorte
qu'on ait passé les quatre ou cinq dossiers d'analyse que je vous ai
remis ou que je vous ai exposés.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je n'ai pas d'objection à ce que l'on
fasse l'étude du sujet que nous propose le ministre. Avant cela, je
voudrais faire quelques remarques au sujet de ce que nous a dit le ministre
hier, en réponse à nos remarques préliminaires.
Au tout début, je voudrais, moi aussi, saluer d'une façon
toute spéciale les fonctionnaires du ministère des Affaires
sociales, les présidents des régies qui se sont
identifiés, il y a quelques instants. Comme le ministre actuel, j'aurais
pu mettre des noms sur chacun des visages, puisque j'ai travaillé avec
la plupart de ces fonctionnaires. Je partage l'opinion du ministre quand il dit
que c'est une équipe qui a été recrutée au
ministère des Affaires sociales depuis plusieurs années; c'est
une équipe du ministère de la Santé, du ministère
du Bien-Etre, deux ministères qui ont été
fusionnés. Il y a eu des additions, c'est évident. C'est
important qu'ils assistent aux discussions de la commission parlementaire des
affaires sociales afin, comme on l'a dit l'an dernier et plus le temps
passe, plus c'est important qu'ils voient la dimension du
ministère des Affaires sociales dans tout l'appareil gouvernemental et
qu'ils voient la dimension de leur propre section, leur propre champ
d'activité, dans le secteur des affaires sociales. Ils auront à
suivre les débats et à fournir, comme ils le font d'habitude,
leur collaboration au ministre, dans les questions que nous poserons.
M. le Président, sur l'intervention du ministre hier, je voudrais
faire certains commentaires. Le ministre nous a invités à faire
des suggestions; il en a fait lui-même et il a indiqué de quel
côté il se dirigerait. Quelles actions, qu'il juge pressantes
devra-t-il prendre, non pour corriger la situation, mais pour régler le
problème jusqu'au fond? Car, je pense que ce n'est pas le
ministère des Affaires sociales qui va régler le problème;
ce sera tout le gouvernement en négociant avec le gouvernement central,
en négociant peut-être d'une autre façon, en faisant une
autre approche. De toute manière, je pense que ce n'est pas le moment de
faire ce débat-là; c'est une remarque que je fais en passant.
Ce n'est pas une pieuse intention que nous avons exprimée hier
quand j'ai dit au ministre qu'il pouvait compter sur notre collaboration. Je
parle pour ce qui est de notre groupe, je n'ai pas l'intention de parler pour
les autres. Et ce pour toute mesure qui contribuera, pour tout geste qui va
contribuer à continuer la juste revendication du Québec en
matière de sécurité, en matière de partage des
compétences dans le domaine de la sécurité sociale et
particulièrement en matière de rapatriement, ce qui a
été réclamé par tous les gouvernements successifs.
En ce moment il y a des difficultés. Ce n'est pas avec les
négociations qui se poursuivent actuellement... A toutes fins pratiques
le ministre a annoncé que des négociations, même dans le
champ des allocations familiales, il n'était pas prêt à en
faire. Alors, il faut dire que depuis quelque temps les négociations
sont au point mort. En attendant, c'est le rôle du ministre des Affaires
sociales, pour ne pas dire de son gouvernement, de prendre l'offensive dans
certains secteurs. Cela a été fait et chaque fois que cela a
été fait par le Québec, je pense que cela a bien
réussi. Il y a des exemples que l'on pourrait citer: en 1954
l'impôt sur le revenu provincial, en 1965 le Régime de rentes. Le
ministre actuel a été associé à ces travaux comme
technocrate, comme expert. Il y a eu en 1967 le Régime d'allocations
familiales. C'est donc signe qu'il y a des possibilités à prendre
des initiatives qui vont faire prendre conscience à l'autre niveau de
gouvernement que le Québec est sérieux dans sa revendication et
dans sa poursuite de la lutte pour le partage des compétences dans le
domaine de la sécurité sociale.
Du côté du Régime de rentes, le ministre a
indiqué qu'il était prêt à faire quelque chose. Je
pense qu'il devrait aller plus loin. Il ne nous l'a pas indiqué
exactement mais, si je me base sur ses déclarations antérieures,
il pourrait aller plus loin que là où il a indiqué qu'il
voulait aller. Ce n'est pas tout d'ouvrir la loi du Régime de rentes. On
en parlera avec le Président de la Régie des rentes qui est ici,
à un autre moment, quand viendra cet article particulier du budget. Si
on regarde un peu l'analyse actuarielle du Régime de rentes avec les
trois possibilités qui ont été mentionnées, on voit
qu'il y a un coût bas, un coût intermédiaire et un
coût élevé du Régime de rentes.
On voit que dans l'hypothèse du coût intermédiaire,
ça nous laisse tout de même une marge de manoeuvre assez
considérable. Je pense que le Régime de rentes devrait
peut-être être revu en profondeur, étant donné que
c'est un outil qui nous appartient maintenant. S'il y a un domaine où on
peut prendre l'offensive, je pense que c'est celui-là. Alors si le
fédéral actuellement oeuvre à l'aise dans le domaine de la
sécurité de la vieillesse et prend des initiatives sans
consultation, je pense bien que du côté du Régime des
rentes qui nous est particulier ici, avec son instrument qui est la Caisse de
dépôt et placement, le ministre peut prendre certaines
initiatives. Même s'il fallait, au pis aller, pour poursuivre ces
initiatives-là, retoucher, réviser le taux de contribution. Le
taux de contribution est de 3.6 p.c. déjà depuis 1966, en 1976,
ça va faire dix ans. Il faut admettre que, dans dix ans, il y a beaucoup
de choses de changées quant au niveau de revenu. Il ne faudrait pas se
scandaliser, si à un moment donné, après dix ans
peut-être que le taux de contribution pourrait être
révisé pour renforcer encore le Régime de rentes, la
réserve, les possibilités.
A ce moment-là, il faudrait que les techniciens, les experts
analysent toutes les implications, toutes les possibilités. Mais,
qu'est-ce qu'il y aurait de non acceptable à ce que le Québec
étudie la possibilité d'un régime de
sécurité de la vieillesse, mais de 60 à 65 ans, et qu'il
en prendrait l'initiative? Je comprends que cela a créé des
problèmes, du côté des régimes privés, parce
que tous les régimes privés, actuellement, sont conçus en
fonction du 65 ans, l'âge de la retraite. Il n'y a rien qui empêche
le ministre, de concert avec la Régie des rentes, son président
et ses experts, d'étudier déjà cette possibilité,
afin que, si on ne peut jamais avoir de mot à dire dans la
sécurité de la vieillesse de 65 ans et plus, peut-être que
de 60 à 65 ans, on pourrait peut-être prendre l'initiative. Parce
qu'on sait qu'un bon jour, la retraite à 60 ans sera une
réalité, ça peut peut-être venir plus vite qu'on ne
pense, parce qu'il y a de la pression de ce côté-là.
Je pense que, du côté du Régime de rentes, il y a
quelque chose à faire, puis pas mal peut-être plus loin que les
indications qui ont été données, à venir
jusqu'à présent. Cela est un point.
Du côté de l'aide sociale, j'en ai déjà
causé avec le ministre, à plusieurs reprises, il y a quelques
mois d'abord, au plus fort des négociations des allocations
familiales.
Nous étions d'accord pour dire que ce n'était pas le temps
de rouvrir la loi au moment où il ne restait peut-être que
quelques mois ou quelques semaines avant que les ententes soient conclues dans
le domaine des allocations fami-
liales. A ce moment-là, il est entendu que ça amenait la
révision de la Loi de l'aide sociale, particulièrement pour les
familles qui auraient bénéficié des nouveaux
régimes d'allocations familiales, tant sur le plan fédéral
que sur le plan provincial.
Il est évident que, du côté de l'aide sociale,
compte tenu de l'état du dossier des négociations, il faudrait
faire quelque chose. Les assistés sociaux ne peuvent pas continuer au
taux actuel de prestation, la table qu'on appelle NVPD, nourriture,
vêtements, besoins domestiques et personnels. Il va certainement falloir
un rajustement.
Je ne sais pas, le ministre ne nous a pas indiqué le contenu de
sa loi ou de la modification à la loi actuelle. Je pense que, dans son
idée, il s'agit de créer deux classes de
bénéficiaires d'aide sociale, ceux qui sont aptes au travail et
ceux qui sont définitivement hors du marché du travail.
Parmi ceux qui sont hors du marché du travail, vous avez les
malades, les aveugles, les invalides, les handicapés physiques ou ceux
qui sont rendus à un âge trop avancé pour continuer
à pratiquer le métier qu'ils pratiquaient, parce que c'est un
métier qui demande un certain effort physique, qu'ils aient
été des pêcheurs, des cultivateurs, des bûcherons ou
des gens de métiers assez exigeants au point de vue physique.
Cela pourrait être une catégorie de gens qui, étant
définitivement hors du marché du travail, pourraient recevoir un
niveau de prestation. Je voudrais aussi inclure là-dedans les gens de 60
à 65 ans. Déjà, ce serait une indication que ça
pourrait se marier avec la révision du Régime de rentes. Ces gens
pourraient recevoir un taux de prestation qui se rapprocherait sensiblement, si
c'est financièrement possible, du taux décrété par
le gouvernement d'Ottawa quant aux bénéficiaires de la
sécurité de la vieillesse, soit $285 par mois pour un couple.
Même si cela n'atteignait pas $285, cela pourrait tout de
même réduire l'écart de $100 qui existe actuellement et qui
est franchement inaceptable. L'autre catégorie d'aide sociale grouperait
ceux qui seraient aptes au travail. Ils pourraient bénéficier
d'une allocation moindre, pour ne pas les inciter à demeurer sous le
coût de la dépendance sociale et à ne pas faire d'effort de
réintégration dans le marché du travail. Cela pourrait
être appuyé par des mesures très dynamiques d'incitation et
de retour au travail.
Le ministre devra avoir la collaboration de tous ses collègues,
particulièrement de ceux des ministères à vocation
économique, pour trouver des programmes comme il y en a
déjà en place.
Il y aura d'autres programmes. On peut faire appel à l'initiative
et, dans le domaine de Perspectives-Jeunesse et initiatives locales, on a des
programmes qui auraient dû être mis de l'avant par le gouvernement
provincial, s'il avait eu les fonds pour le faire, s'il y avait eu un meilleur
partage des ressources. On aurait eu de ces sortes de programmes qui auraient
pu dégager beaucoup de listes d'aide sociale et qui auraient pu
permettre à des gens d'avoir du travail, notamment, des jeunes gens.
Vous savez que nos listes d'assistés sociaux débordent de noms de
jeunes de quatorze à seize ans et jusqu'à 25 ans; on sait, dans
les statistiques qui nous ont été remises, quelle augmentation il
y a eue chez ces jeunes. C'est entendu, beaucoup parmi eux ont fini des
études de niveau secondaire, de niveau collégial et n'ont pas de
débouché sur le marché du travail; c'est entendu aussi que
l'Etat doit leur donner une aide quelconque. Mais cette aide-là ne devra
pas les inciter à rester sous la dépendance de l'aide sociale
mais plutôt les forcer ou les inciter à retourner le plus
tôt possible sur le marché du travail ou à y entrer s'ils
n'y sont jamais allés.
Cela serait du côté de l'aide sociale. Du côté
des allocations familiales, le ministre nous a dit hier qu'il ne voyait pas de
solution actuellement de ce côté, qu'il n'avait pas l'intention de
pousser plus loin. Est-ce exact?
M. CASTONGUAY: Pour le moment, je n'ai pas pu étudier la question
de façon suffisamment approfondie pour donner une orientation
susceptible d'être prise.
M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, je voudrais
préciser, M. le Président, que la discussion étant
engagée comme elle l'est et tenant compte des propositions du
gouvernement fédéral, tenant compte de la loi actuellement devant
la Chambre à Ottawa, je ne ferai certainement pas de guerre au ministre
s'il n'accepte pas le régime proposé par le
fédéral. J'ai beaucoup de réticence à accepter
certaines qualités du régime fédéral, j'ai beaucoup
de réticence à éliminer le critère
d'universalité, M. le Président. Je pense que le ministre devra
prendre le temps de repenser à cet aspect. Ce serait important qu'un
régime d'allocations familiales garde cette caractéristique,
garde ce critère d'universalité parce qu'il s'agit d'un programme
le mot le dit d'allocations familiales. Cela doit aussi favoriser
une politique familiale. S'il faut atteindre la sélectivité, on
peut l'atteindre autrement et, du point de vue administratif, c'est bien moins
compliqué; on peut l'atteindre par l'impôt sur le revenu. C'est
aussi beaucoup plus rapide, plus efficace, beaucoup moins encombrant du point
de vue administratif, et beaucoup moins odieux aussi pour les personnes qui
n'ont pas à subir de "means test" parce que l'impôt est
accepté d'une façon générale.
Même si c'est désagréable de produire une
déclaration d'impôt, il reste que, maintenant, cela est
entré dans nos moeurs et personne ne peut subir de discrimination. Tout
le monde est censé produire une déclaration d'impôt.
Mais,
ce n'est pas tout le monde qui subit un "means'test" ou une
enquête pour savoir si son niveau de revenu lui permet d'avoir des
allocations familiales.
Alors, je pense que, par l'impôt sur le revenu, avec une table
spéciale d'imposition, cela rejoint ce qui avait été
proposé dans le livre blanc des allocations familiales en 1969. Je
souhaiterais que le ministre revoie cette proposition. Et s'il n'y a pas
d'entente avec le gouvernement central, je pense que nous devrions plutôt
améliorer notre régime d'allocations familiales, en tenant compte
des modifications que l'on apporte aux deux autres régimes, mais
continuer d'avoir un régime qui est bien à nous. Parce que, pour
les deux régimes réunis, les allocations familiales et les
allocations scolaires, le montant se chiffre par $95 millions. Ce n'est pas un
régime qui est négligeable. Cela fait $100 millions et il y a
peut-être moyen encore de l'améliorer et de faire une
redistribution autrement. J'aurais beaucoup de réticences que l'on
transfère ainsi au gouvernement central, même à
l'intérieur d'un arrangement administratif, un programme qui a
été monté de toutes pièces au Québec. Nous
avons fait de grosses dépenses pour l'organisation, l'organisation
mécanique, l'émission des chèques, le contrôle, pour
dresser les listes, etc. Je pense que le système des allocations
familiales et des allocations scolaires fonctionne bien. Ces deux
systèmes sont bien québécois. S'il y avait une entente de
conclue, il faudrait que ce soit beaucoup plus large que les allocations
familiales.
Il faudrait que ça aille chercher, dans le contexte actuel, en
tout cas, d'autres choses. Il faudrait que, dans la révision des
allocations familiales, le ministre examine également la
fiscalité. Nous l'avions fait en 1967. Nous avions associé la
création du régime d'allocations familiales à la
révision de la fiscalité. A ce moment-là, les exemptions
de base avaient été élevées; elles avaient
été mises à $2,000 pour les célibataires et
à $4,000 pour les gens mariés. Il y aurait peut-être lieu,
tout en travaillant avec le ministre du Revenu et le ministre des Finances
le ministre du Revenu, surtout, qui actuellement prépare la
législation qu'il y ait un comité qui travaille
très étroitement, pour voir s'il n'y aurait pas
possibilité de faire aussi, dans le domaine de la fiscalité, une
oeuvre un peu plus originale que celle de copier la réforme fiscale
fédérale et de l'associer à ces mesures, à cette
législation que le ministre veut apporter dans le domaine social. Je
pense qu'il faudrait se rendre compte que l'on peut corriger passablement de
choses avec la fiscalité. Si l'on ne peut pas atteindre un objectif
directement, avec les lois, dans le domaine de la sécurité
sociale, on peut, par le biais de la fiscalité, corriger des choses qui
sont inacceptables.
Comme dernière suggestion, il reste, évidemment, que c'est
le dynamisme du côté économique, que c'est l'offensive
économique qui est importante. Parce que, si le ministre des Affaires
sociales et le gouvernement veulent poursuivre une offensive qui soit
significative, qui veuille dire quelque chose, il faudra, évidemment,
que le gouvernement et les contribuables aient les moyens de la supporter,
cette offensive. Pour cela, il faut que l'économie soit dans le meilleur
état possible.
Ce sont les suggestions que nous faisons. Nous aurons l'occasion d'y
revenir peut-être à d'autres moments, mais je voulais
déjà montrer au ministre que nous avons, nous aussi, nos
périodes de réflexion. Ce ne sont pas des suggestions qui ont
été étudiées techniquement, mais je ne crois pas
que ce soit ma fonction d'étudier techniquement, avec les moyens dont je
dispose actuellement. Je pense que le ministre a autour de lui toute cette
équipe, tous les fonctionnaires, les experts qui peuvent étudier
de quelle façon, selon quelles modalités, cela peut être
réalisé.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, j'ai écouté
attentivement le leader du Parti québécois, hier, nous expliquer
sa façon de voir, relativement aux politiques sociales du Québec,
soit au niveau du gouvernement provincial, soit au niveau du gouvernement
canadien. Le leader du Parti québécois, à mon avis, a
réellement accentué les problèmes qui existent
actuellement dans les relations entre les deux gouvernements. Je crois que,
même dans le domaine de la sécurité sociale, le
gouvernement du Québec est loin d'être simplement un gouvernement
de canton ou un gouvernement de municipalité.
Le gouvernement du Québec a été très lent
à s'occuper d'une façon positive et rationnelle de la politique
sociale. C'est une politique qui, au cours des ans, a été
établie sans philosophie, sans unité de pensée, avec des
lois qui ont été étudiées au fur et à mesure
des campagnes électorales. Cette politique, à la longue, si elle
a rendu service à certains citoyens, a accusé aussi des
inconvénients extrêmement sérieux.
Nous avions, dans le passé, une population très
travailleuse, très débrouillarde, très active. Cette
inefficacité gouvernementale à établir une politique
sociale rationnelle a fait perdre à des tranches considérables de
notre population cette motivation au travail. Elle a fait perdre, aussi,
relativement à ce qu'un citoyen pouvait recevoir du système
social, le bénéfice qu'un travail bien fait et bien accompli doit
apporter à un travailleur. C'est dire que, bien souvent, la
différence entre le père de famille qui travaillait à
longueur d'année et celui qui vivait de notre système
d'allocations sociales était, à certains points de vue, si minime
que la motivation au travail s'en est ressentie.
Que le budget des Affaires sociales reflète non seulement des
faiblesses des politiques passées, mais aussi la faiblesse de toutes
les
activités de la population du Québec, j'en suis. Mais,
dire que ce budget reflète exclusivement les faiblesses des politiques
passées des gouvernements est, à mon avis, exagérer, dans
notre société, l'influence des activités
gouvernementales.
Par notre système démocratique, par nos structures, le
gouvernement du Québec ou celui du Canada est loin d'avoir le monopole
des décisions et de ces décisions qui, bien des fois, marquent
profondément la vie de la province.
Nous avons eu dans le passé un système scolaire qui,
à mon avis, a été très peu démocratique, a
été très peu adapté aux besoins d'un groupe qui vit
dans ces années modernes, dans ces années où la finance,
la technique, la science administrative, les sciences pures jouent un
rôle extrêmement important. Je dis que dans le passé nous
avons eu un système d'éducation très mal adapté
à cette situation. Nous subissons aujourd'hui de plein fouet les
résultats de ce système scolaire mal organisé et je vois
une des causes profondes de ces augmentations budgétaires
considérables, accentuées et difficiles à contrôler.
D'autant plus que nos gouvernements provinciaux, dans le passé,
malheureusement, par un manque d'initiative, un manque d'agressivité ont
trop souvent permis au gouvernement fédéral d'établir, au
point de vue social, des politiques qu'ils avaient négligé
eux-mêmes d'établir.
Aujourd'hui, nous avons des problèmes sérieux de relations
entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Ces
problèmes sont loin d'être les seuls qui existent au
Québec. J'avoue cependant que c'est un problème qui mérite
d'être étudié. C'est un vieux problème d'ailleurs,
mais c'est loin d'être le seul. Si c'était le seul problème
que la nation québécoise avait à résoudre, les
choses seraient extrêmement simples.
A mon avis, une des façons les plus pratiques de résoudre
ce problème est d'établir, dans les champs d'activités qui
nous restent, une efficacité administrative qui donnerait au citoyen
cette confiance dans son gouvernement et qui donnerait à chaque citoyen
la preuve que le gouvernement du Québec reste capable d'administrer
efficacement l'argent public. C'est un secret de polichinelle, M. le
Président, que le ministère des Affaires sociales au
Québec comprend plusieurs employés; c'est une machine lourde,
extrêmement difficile à administrer et qu'il se coule des millions
de dollars par année au niveau de ce ministère, des millions
perdus, sans résultats positifs et que le citoyen est obligé de
rembourser. Je le dis, M. le Président, d'une façon très
positive, je n'accuse personne. Je puis même vous dire que nous avons eu
au cours des dernières années des ministres, à la
tête de ce ministère, extrêmement efficaces,
extrêmement compétents.
Nous avons aussi de hauts fonctionnaires que je sais compétents,
efficaces, travailleurs et tout à fait responsables. De ce fait, j'en ai
la preuve toutes les semaines. Mais entre le ministre, ses hauts fonctionnaires
et le citoyen, il y a toute une distance qui est occupée par des
milliers d'employés et cette efficacité administrative ne se
reflète pas au niveau de l'humble citoyen qui est obligé de faire
appel au gouvernement pour résoudre ses propres problèmes.
J'ai l'impression qu'actuellement, les ministres qui occupent ce
ministère, sont surchargés de responsabilités. Ils ont
à administrer un budget extrêmement considérable et ils
n'ont pas la liberté d'action voulue pour ce faire.
Cette liberté d'action ne leur est pas exclusivement
enlevée à cause de la situation entre Québec et Ottawa
mais elle est bien souvent la cause des lois et des règlements à
l'intérieur même du gouvernement du Québec. C'est un secret
de polichinelle, M. le Président, qu'avec des contrats de travail de
plus en plus complexes, avec les lois qui existent à la fonction
publique, l'autorité à l'intérieur d'un tel
ministère est très diffuse et les responsabilités sont
aussi tellement partagées qu'il est difficile de maîtriser un tel
organisme et de s'assurer que chaque dollar est dépensé
efficacement.
Il faut être citoyen et député et voir les choses
par en bas, il faut essayer de chausser les bottines de l'humble citoyen pour
s'apercevoir vite qu'à ce niveau toutes ces grosses structures sont
très peu efficaces et que le citoyen a énormément de
difficultés à être traité selon nos lois, selon nos
règlements et selon les philosophies et les façons de voir du
ministre ou des hauts administrateurs.
Dans mon comté, je reçois tous les jours, toutes les
semaines, des critiques relatives à la façon dont les gens sont
accueillis aux bureaux locaux. On a même de la difficulté à
être poli et courtois avec eux. Tout le monde sait qu'il y a une
minorité de gens qui reçoivent de l'aide du gouvernement et qui
n'ont pas le droit de la recevoir. Tout le monde comprend cela, tout le monde
sait qu'au niveau des hôpitaux les coûts sont absolument
astronomiques, au niveau de l'assurance-maladie c'est la même chose, au
sujet de l'hébergement des vieillards les coûts sont aussi
astronomiques. Notre appareil gouvernemental, au point de vue de ce
ministère, est regardé par le citoyen comme étant non
rodé et comme étant non efficace. Et je crois que, dans ces
débats entre Québec et Ottawa, cette inefficacité pour le
citoyen est un facteur décisif dans le fait qu'il verra dans le
gouvernement d'Ottawa ou le gouvernement du Québec celui qui devra
administrer ses deniers en vue d'établir nos politiques sociales.
Je le dis, M. le Président, sans amertume, parce que, à
titre d'humain, je comprends très bien que dans un ministère qui
a grossi avec une telle rapidité, qui a vu doubler et tripler le nombre
de ses employés dans la dernière décade, qui a vu ses
budgets et ses responsabilités augmenter d'une façon si
considérable, il aurait été extrêmement surprenant
que l'on
puisse, en si peu de temps, avoir un appareil bien rodé, un
appareil efficace. Il y a des choses qu'on ne peut pas faire sans le temps,
sans les années. Je suis assuré que, si nous continuons à
avoir des ministres aussi responsables et aussi compétents que ceux que
nous avons eus dans le passé, un jour, nous en arriverons là. Si
nous ne pouvons en arriver là, le citoyen ne sera pas prêt
à admettre que nos politiques sociales doivent être exclusivement
remises à la province de Québec.
On a parlé d'études qui avaient été faites
dans le passé, prouvant que cette autorité à deux paliers
était un grave inconvénient, en vue de faire la synthèse
de toutes nos politiques et d'établir un ensemble de politiques
cohérentes, au niveau de la province. Le résultat de ces
études reste entre les mains des autorités, entre les mains des
spécialistes. IL va sans dire que l'humble citoyen n'est absolument pas
au courant du résultat de ces études. Il peut difficilement
comprendre ces batailles continuelles entre le gouvernement de la province et
le gouvernement d'Ottawa, même si ces querelles peuvent avoir, chez lui,
des effets extrêmement importants.
Il y a peut-être aussi, M. le Président, un autre facteur.
La province de Québec est loin d'être la province la plus riche.
Elle est loin d'être la province qui a les structures financières
ou les structures industrielles les plus avancées au Canada. A mon avis,
toujours, il faut constater que si ces 80 p.c. de la population, pour des
raisons historiques, pour des raisons d'éducation, comme je l'ai dit
dans le passé, n'ont pas su s'adapter au monde nouveau, au monde moderne
et prendre sur eux la responsabilité de développer les richesses
naturelles de notre province, ou jouer un rôle passif dans le
développement industriel et économique du groupe, il va sans dire
que dans cette situation on ne peut pas s'attendre que la province de
Québec soit à Pavant-garde du développement
économique du pays. n en reste tout de même que les sommes que
nous dépensons sont considérables. Un changement de constitution
ne pourra pas nécessairement les augmenter indéfiniment. Nous
sommes la sixième province, au point de vue des richesses au Canada. Cet
argent que nous dépensons, bien souvent, a été payé
par les contribuables des autres provinces canadiennes qui acceptent, à
l'intérieur de la constitution actuelle, de bien vouloir séparer
les richesses, de façon que le Québec puisse avoir sa part comme
les provinces maritimes et les autres provinces qui sont moins
développées.
En économie, soit pour un groupe, pour une nation ou pour un
individu, c'est toujours le même phénomène. Des hommes qui,
pour vivre et pour faire face à leurs obligations, sont obligés
d'emprunter, sont toujours des hommes qui voient leur liberté d'action
diminuée. Quel que soit le revenu d'un citoyen, si ce revenu lui permet
de vivre sans emprunter, il jouit tout de même d'une liberté
d'action que le citoyen a revenu plus élevé ne peut avoir s'il
est obligé, pour faire face à ses obligations, d'emprunter.
La province de Québec est continuellement obligée, pour
voir à son économie, à son développement,
d'emprunter. Nous n'avons malheureusement pas l'économie voulue pour
faire face aux nécessités du développement
économique. Et le fait d'être continuellement obligé
d'emprunter limite excessivement notre liberté d'action vis-à-vis
du Canada, vis-à-vis des autres provinces comme vis-à-vis des
autres nations.
Il faut en tenir compte. Malgré nos difficultés, au
Québec, chaque citoyen conserve une liberté qui fait l'envie de
pratiquement toutes les nations. Tant que notre constitution, soit canadienne
ou soit au niveau du gouvernement du Québec, tant que la liberté
d'action de chaque citoyen sera conservée, il n'y a pas lieu de
s'alarmer outre mesure et d'être pessimiste pour les années
à venir.
Les Québécois ont connu bien d'autres problèmes
constitutionnels que ceux qui caractérisent l'application d'une
politique sociale que nous voudrions nôtre. Nous avons vécu, dans
le passé, sous des régimes beaucoup plus durs. Nous avons su
améliorer constamment notre façon de vivre; nous
l'améliorons encore. Il y a certainement de l'espoir pour l'avenir.
La seule solution à long terme, à mon avis, pour diminuer
ce budget des affaires sociales, c'est l'éducation. Tant que nous
n'aurons pas un système d'éducation efficace, tant que nous
n'aurons pas un système d'éducation bien adapté aux
nécessités du moment, nous verrons le budget des affaires
sociales augmenter constamment. Il augmentera encore davantage chaque fois que
nous traverserons une période économique difficile, comme celle
que nous passons dans le moment.
Si j'étais pessimiste, M. le Président, relativement
à l'avenir de la province de Québec, la cause profonde de ce
pessimisme ne serait pas le budget des affaires sociales qui augmente
continuellement. Ce seraient beaucoup plus les troubles et les
difficultés que nous vivons dans le moment, pour donner à chaque
citoyen une éducation valable qui lui permettra dans l'avenir de faire
face à ses obligations et de prendre part entièrement à la
vie du groupe.
Il est temps qu'on dise à nos jeunes que personne ne peut mieux
prendre soin d'eux, qu'eux-mêmes. Tant qu'ils se fieront au gouvernement,
tant qu'ils se fieront au ministère des Affaires sociales pour faire
face à leurs obligations, ils seront toujours grandement
handicapés. Il reste tout de même, M. le Président, que
dans cette province, n'importe quel jeune homme qui veut étudier, qui
veut travailler, qui conserve une qualité morale et un sens des
responsabilités, a devant lui, quelles que soient sa race ou sa
religion, un avenir merveilleux.
L'avenir lui est ouvert. Il lui appartiendra de prendre sa place dans
notre société, indépen-
damment des gouvernements et des politiques que nous
établirons.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Sud.
M. FORTIER: M. le Président, à cette période de
l'énoncé général de la politique des affaires
sociales, j'ai écouté avec plaisir et enthousiasme le programme
défini par M. Cas-tonguay, en ce qui a trait aux programmes
généraux de santé relativement aux malades qui souffrent
de maladies aiguës et surtout de maladies chroniques et relativement aussi
à l'enfance exceptionnelle et à la délinquance
juvénile. Je me réjouis aussi qu'il ait dit qu'une attention
serait portée à nos vieillards, non seulement dans la
construction de foyers d'hébergement mais aussi grâce à une
politique générale pour les gens plus âgés.
Nous avons parlé des différents programmes qui regardent
les affaires sociales. Je puis vous assurer pour ma part, parce que je connais
très bien le ministre, qu'il est un homme dévoué
entièrement à sa tâche, très honnête et qui
donne certainement au ministère une orientation particulière avec
l'aide de tous ses sous-ministres, ses directeurs et tous ses officiers du
ministère, qui réellement sont un exemple de bon fonctionnement
dans un ministère.
Il y a un point sur lequel je voudrais insister, c'est ce qu'on appelle
le problème de la sécurité du revenu. Que ce soit par un
système d'allocations sociales, d'assurance sociale ou encore la
question des allocations familiales à caractère sélectif
ou universel, il y a une chose certaine, c'est que le citoyen du Québec
a le droit d'avoir le minimum vital de ressources et de revenus pour être
assuré de subsister sans craindre d'être en état de
pauvreté. C'est un point sur lequel je suis entièrement d'accord,
comme représentant d'un comté parfois aux prises avec des
problèmes économiques. Si nous parlons de santé, il y a
là une chose primordiale. C'est que, pour être en bonne
santé, il faut être assuré que, le lendemain, nous aurons
ce qu'il nous faut pour donner à une famille les soins essentiels mais
aussi les moyens de financement dont une famille a besoin, soit pour permettre
aux enfants de s'instruire ou encore pour leur donner le bien-être
essentiel.
Je connais bien M. Castonguay. Je sais, je comprends qu'il
éprouve peut-être une certaine déception de ce que le
gouvernement fédéral a fait dans son budget. En parlant des plans
de sécurité de la vieillesse et ainsi de suite, je partage
évidemment sa déception. Quand on veut faire quelque chose de
très bien et qu'on ne peut pas trouver tous les moyens de le faire on a
droit d'être déçu.
Cependant, je ne partage pas l'enthousiasme du député de
Bourget qui voit là peut-être une occasion de dire qu'il n'y a
plus de possibilité de dire qu'on a un système de
fédéralisme rentable, même si, à un moment
donné, notre chef a parlé d'une certaine arrogance en ce qui
concerne les relations entre le fédéral et le Québec.
Je suis encore confiant je le dis en toute
sincérité et je demande à M. Castonguay s'il y a
possibilité de faire encore une fois d'autres efforts pour obtenir du
gouvernement central les sommes nécessaires à bien établir
ce projet de sécurité de revenu. Je suis encore prêt
à admettre qu'il faut faire l'effort nécessaire.
Quant à moi, je suis prêt à faire l'impossible,
à aider. Et, si un jour, nous voyons que cette chose semble impossible,
à ce moment-là, nous pourrons encore discuter des moyens à
prendre pour donner au Québec les ressources financières
nécessaires pour établir ce régime de
sécurité du revenu.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, je suis très heureux, ce matin,
que le ministre nous ait présenté sa volumineuse équipe.
Cela prouve, je pense, qu'au ministère des Affaires sociales, s'il y a
des problèmes, ce ne sont pas les compétences qui manquent. J'ai
été en mesure de le constater, puisque j'ai eu à
soumettre, comme plusieurs députés, plusieurs problèmes
à ce ministère.
Bien sûr, nous pourrons discuter plus adéquatement de
chaque article au fur et à mesure que nous les étudierons. Le
ministre a déposé hier un document concernant la planification
des naissances; éventuellement, parce que ce n'est pas encore chose
faite. Je me demande s'il n'y a pas quelque chose de plus urgent. J'y ai
touché un peu hier. De toute façon, nous aurons probablement
à y revenir lors de l'étude de chaque article des
crédits.
Au début, je voudrais assurer le ministre de notre collaboration
à l'effort qu'il fait pour tenter d'améliorer le sort des
Québécois.
M. HARVEY (Chauveau): Est-ce que le député de Dorchester
me permettrait seulement une question? Lorsqu'il fait allusion à la
déclaration du ministre hier, est-ce que cela se rapproche un peu de
votre résolution du dernier congrès sur le droit à l'amour
et ces choses-là?
M. GUAY: Nous pourrons y revenir de façon plus approfondie, si
vous le voulez bien.
M. HARVEY (Chauveau): Cela m'intéresse grandement.
M. GUAY: Est-ce que le député se sentirait frustré
de façon quelconque?
M. HARVEY (Chauveau): Absolument pas. Je suis un exemple; j'ai quatre
enfants.
M. LESSARD: Cela ne signifie rien.
M. GUAY: Après avoir entendu les membres de la commission ce
matin, nous nous rendons compte que le problème est beaucoup plus
profond que l'on ne semble le laisser entendre. Et à mon humble avis, on
essaie, actuellement, d'apporter des correctifs par des moyens
détournés; on semble oublier qu'au fond de tout cela il y a un
problème d'ordre financier et purement financier. Et j'ai
été très heureux d'entendre le député de
Jacques-Cartier dans son intervention. Il faut de plus en plus concentrer des
politiques qui viendront en aide aux personnes de 60 à 65 ans. Il y a
énormément de problèmes de ce côté-là.
Le ministre nous apprend qu'il a l'intention d'apporter des amendements
à la Loi du Régime des rentes. Cela est souhaitable. Quand nous
savons qu'un couple doit vivre avec un revenu de $116 par mois, je pense qu'il
est grand temps que nous réagissions. Ces couvertures qui apportent un
revenu je ne dirais pas un revenu, je dirais plutôt une maigre
pitance pour faire vivre plusieurs personnes ont également des
répercussions graves. Ces personnes ont l'impression de ne pas vivre
dans la même société que celles qui gagnent
adéquatement leur vie, que celles qui travaillent. Et cela a pour
conséquence que les citoyens refusent même de se prendre en
charge. L'initiative personnelle est mise de côté. Ces personnes
dépendent de l'Etat; elles ne semblent plus être des citoyens
à part entière. Nous nous en rendons compte par la faible
participation qui existe. Je suis en mesure d'en parler, surtout en milieu
rural.
Ces personnes ont l'impression que, pour elles, la vie se limite
à bien peu. Elles nous disent et répètent que c'est
anormal et je suis d'accord avec elles que, dans une province
où il y a tant de spécialistes, de professionnels qui sont en
mesure d'offrir des services, par exemple, dans le domaine de la santé,
des citoyens manquent de soins. Et cela se produit en 1972. Il est anormal que,
dans une province où il y a tant de travail à faire, il y ait
tant de chômeurs.
On peut ajouter tout de suite que le ministère des Affaires
sociales récolte une clientèle de plus en plus grande en ce qui
concerne l'aide sociale, à cause de mauvaises politiques qui sont
établies dans d'autres ministères. Il y a un proverbe qui dit: Si
tu veux nourrir un homme pendant une journée, donne-lui un poisson; si
tu veux le nourrir pendant toute sa vie, tu es mieux de lui montrer à
pêcher. Je pense que c'est un peu ce que l'on vit actuellement. Au fur et
à mesure que des personnes deviennent dépendantes directement de
l'Etat, je pense qu'elles deviennent des gens qui refusent même de
s'aider. Pour elles, ça devient impossible, ça semble
insurmontable. Là où c'est malheureux, c'est que des personnes
qui sont assistées temporairement doivent se départir de leurs
biens, en grande partie, et si, un jour, elles reviennent à la
santé, elles sont capables de travailler, il leur est impossible,
financièrement en premier lieu, d'être ce qu'elles étaient
auparavant.
On est en train d'essayer d'ajuster la société à
des cadres. Je pense que c'est là en même temps que l'on fait
erreur. Au lieu de chercher à réduire l'homme à la
dimension des cadres, je pense qu'il va falloir ajuster les cadres à la
dimension de l'homme. Ce semble être une soumission forcée pour
l'individu, que de vivre aujourd'hui, quand on parle de politique sociale. Il
est anormal qu'avec autant de main-d'oeuvre disponible, avec autant de bras
capables de travailler, avec autant de matériel, des gens soient
limités à vivre dans des taudis, ce que l'on appelle des
sans-logis. Bien sûr qu'il y a des efforts de concentrés dans ce
sens-là. Il est anormal dans une province aussi bien organisée,
aussi riche que la nôtre, que la pauvreté règne; et le
problème est de plus en plus aigu. Il y a eu des énoncés
de principe de faits l'an dernier à l'étude de ces mêmes
crédits et j'ai rudement l'impression que, dans le domaine de la
pauvreté, il n'y a pas grand-chose qui a été
concrétisé. Cela demeure, encore cette année, à la
page des choses à faire.
M. le Président, je pense bien qu'il va falloir, en 1972,
concentrer l'effort là où c'est le plus pressant. Les membres de
cette commission seront en mesure, je pense bien, de regarder, avec toute
l'attention nécessaire, ce point-là. Plus on va augmenter les
budgets au chapitre de l'aide sociale, plus ça signifie que la crise
s'accentue. Et moi, je serais très heureux, au lieu de voir $340
millions à l'article de l'aide sociale, d'y voir $1 million. Ce serait
un signe évident que la situation se redresse actuellement. Mais, tant
que l'on verra ce chiffre augmenter, M. le Président, on va devoir faire
en sorte que les politiques s'améliorent. Je ne voudrais pas entrer dans
le conflit qui existe avec le gouvernement central, quoique ce soit très
important. Je répète au ministre que nous allons lui apporter
toute la collaboration nécessaire, s'il démontre autant
d'énergie sur ce point.
M. le Président, ce sont les quelques recommandations,
observations, devrais-je dire, que je voulais faire ce matin.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. LESSARD: Alors, M. le Président, je voudrais prendre quelques
minutes pour répondre au député de Jacques-Cartier
concernant l'intervention qu'il a faite tout à l'heure. Nous avons eu,
depuis au moins deux ans, un ministre des Affaires sociales qui a
élaboré un certain nombre d'objectifs basés sur des
principes très précis. On constate actuellement que tout
ça a été un échec. On constate actuellement que
toutes ces luttes que nous avons faites depuis quelque temps et que d'autres
avaient faites avant le ministre des Affaires sociales nous ont conduits
à un cul-de-sac. Et ce ministre, le ministre des Affaires sociales,
pendant un certain temps, s'est battu avec force. Là, on semble vouloir
atténuer cette bataille, on semble vou-
loir atténuer la valeur de ces grands principes.
Après avoir constaté que cette lutte qui nous permettrait
de mettre de l'ordre dans le ministère des Affaires sociales, dans ce
secteur en particulier et qui nous permettrait aussi en même temps, comme
le disait le député de Bourget hier, d'avoir véritablement
de l'influence sur d'autres secteurs de la vie économique, après
avoir constaté cet échec, il faut se diminuer. Nos objectifs ont
été trop grands. On a vu beaucoup trop grand. Il faut, devant
l'échec, le cul-de-sac, voir exactement ce qu'est le Québec. Le
Québec devient tout simplement l'exécutant de politiques sociales
décidées à Ottawa. Le Québec a des problèmes
d'administration comme le gouvernement d'Ottawa d'ailleurs. Le Québec
doit s'assurer d'une certaine efficacité dans les politiques qui lui
restent, comme le député de Jacques-Cartier l'a si bien dit. Mais
il lui reste quoi, M. le Président? Il ne lui reste pas grand-chose, en
fait. Graduellement, nous assistons à l'érosion de nos pouvoirs
dans ce secteur.
Comment développer une efficacité si on n'a pas les
instruments nécessaires? Comment développer une efficacité
lorsque le gouvernement fédéral détermine toutes les
priorités dans l'assurance-chômage? Comment déterminer une
efficacité dans les allocations familiales lorsque le gouvernement
fédéral a la priorité législative dans ce domaine?
Le Québec peut établir des politiques, mais ces politiques
peuvent être continuellement brisées par le gouvernement d'Ottawa
comme on vient de le voir dernièrement par le budget de M. Turner.
Comment établir une efficacité administrative dans la formation
professionnelle lorsque les deux gouvernements agissent dans ce domaine et
qu'il n'y a absolument aucune planification et aucune collaboration entre les
deux gouvernements? Comment établir une efficacité dans nos
centres de main-d'oeuvre du Québec lorsque nous n'avons même pas
les revenus nécessaires pour faire que ces centres de main-d'oeuvre du
Québec puissent être efficaces et avoir le personnel
nécessaire pour faire le véritable travail qu'on devrait leur
donner? On constate que les priorités du centre de main-d'oeuvre du
Québec et du centre de main-d'oeuvre d'Ottawa sont complètement
différentes.
M. le Président, du côté de l'efficacité
administrative, nous avons certaines choses à corriger. Le
député disait qu'au niveau des bureaux régionaux du
ministère des Affaires sociales, ces gens-là y étaient
bien souvent mal reçus. D'accord, c'est vrai, il y a certaines choses
à corriger dans ce domaine. Cependant, cela n'enlève pas les
problèmes fondamentaux qui se soulèvent actuellement. Ceux-ci
vont nous permettre d'établir une véritable politique de
bien-être social. Ils vont permettre aux gouvernements en même
temps d'arrêter de dépenser chacun de leur côté. Ce
qui nous amène à dépenser des milliards et des milliards
de dollars et nous n'avons pas encore de politique de sécurité de
revenu. Quand j'entendais ce que le député de Jacques-Cartier
disait, cela représentait vraiment, à part le ministère
des Affaires sociales, les petits objectifs du gouvernement
québécois dans des secteurs particuliers si on exclut le
ministère du Travail et depuis quelque temps le ministère de
l'Agriculture, mais en particulier le ministère des Affaires
sociales.
Il ne faudrait quand même pas minimiser les grandes batailles qui
ont été faites depuis une dizaine d'années au
Québec par certains ministres des Affaires sociales, que ce soit M.
Cloutier ou d'autres ministres, mais en particulier depuis deux ans par le
ministre actuel des Affaires sociales. Il s'aperçoit et le dit bien
honnêtement qu'on fait face à un cul-de-sac dans ce domaine et
qu'il faut absolument réviser nos positions. Quand on contaste que le
gouvernement en est arrivé, dans cette négociation, à un
arrêt ou un cul-de-sac, on se retourne pour empêcher que la
population en prenne véritablement conscience. On dit que c'est
peut-être la faute du gouvernement du Québec et qu'il faudrait
d'abord régler nos problèmes chez nous, c'est vrai. Cela
n'empêche pas qu'il y ait de grandes politiques sur lesquelles il faut
d'abord avoir un certain contrôle. Cela nous permettra de régler
nos problèmes d'efficacité. Cela nous permettra de les
régler de façon beaucoup plus efficace et non pas à la
petite semaine, temporairement.
Nous allons arriver continuellement, si nous n'avons pas ces instruments
nécessaires pour le ministère des Affaires sociales du
Québec, à un point tel qu'il ne pourra établir des
politiques importantes, des politiques qui seront rationnelles au point de vue
de la sécurité du revenu. Ses politiques seront continuellement
déboîtées si je peux utiliser ce terme par
d'autres politiques qui seront établies par le gouvernement d'Ottawa,
sans aucune consultation, comme cela a été le cas lors du budget
Turner, avec le gouvernement du Québec.
C'est une bataille qu'il ne faudrait pas minimiser actuellement. Je ne
sais pas comment on va la continuer mais nous attendons
énormément des précisions que va nous donner en ce sens le
ministre des Affaires sociales. Je demande au moins aux collègues du
ministre de l'appuyer dans ce sens-là et de ne pas minimiser les luttes
que ce ministre a faites depuis quelque temps. Les conflits
Québec-Ottawa, dans ce secteur-là, sont un facteur
extrêmement important, comme dans d'autres secteurs, qui nous
empêchent d'avoir une véritable politique rationnelle, efficace,
dans tous les domaines qu'a précisés le ministre des Affaires
sociales dans sa conférence, il y a quelques jours. Pour ma part, je dis
au ministre: C'est malheureux, c'est malheureux parce que j'ai pu constater,
hier pour la première fois que j'avais l'occasion d'assister,
à cause de certaines circonstances, à l'étude des
crédits du ministères des Affaires sociales, comparativement aux
ministères, où je
suis critique du parti que pour la première fois on avait
une vue générale sur une certaine planification à
l'intérieur d'un ministère.
Lorsque j'entendais hier le ministre des Affaires sociales
déterminer ses objectifs pour l'année 1972, qui avaient
été fixés en 1971, lorsque je l'entendais affirmer bien
honnêtement que certains objectifs avaient été atteints
mais que, dans d'autres, en particulier tout ce qui relevait de la
négociation fédérale-provinciale, il avait eu des
échecs, je constatais que ce ministre-là agissait vraiment, pour
une fois, dans une vue globale d'une société et qu'il ne
fonctionnait pas à la petite semaine. Ce ministre a prouvé qu'il
voyait véritablement même sur une période de cinq ans. Je
constatais qu'il nous remettait des rapports démontrant qu'il y avait
une certaine planification quinquennale. C'est le seul ministère
où j'ai pu voir la présentation d'une politique
générale de la part du ministre qui nous faisait constater qu'il
prenait vraiment conscience qu'il était important de savoir où on
allait non pas par année et à courte vue, mais sur une
période échelonnée, sur une période plus grande,
une vue globale des problèmes sociaux.
Comme le disait le député de Bourget, franchement on va le
regretter. J'espère que dans les autres ministères on
écoutera, on retiendra un peu la présentation qui a
été faite et telle qu'elle l'a été par le ministre,
hier, de ce bilan et des prévisions de ce ministère, de telle
façon que, dans les autres ministères, comme au ministère
des Affaires sociales, on sache vraiment où on va et qu'on puisse avoir
des politiques intégrées dans ce gouvernement, que ce ne soit pas
strictement un ministère qui ait des vues générales sur
les problèmes globaux du Québec. Qu'on cesse un peu, c'est ce qui
me fait énormément peur, comme le disait le député
de Jacques-Cartier, d'avoir des politiques de courte vue, des politiques
à la petite semaine, des politiques qui sont vraiment selon les vues
d'un certain nombre de personnes qui considèrent le Québec comme
une petite paroisse, un petit canton, un gouvernement d'exécution du
gouvernement fédéral, parce que ces gens-là sont soumis
à certaines pressions de leurs électeurs et ont peur d'une
politique de transformation. Et on revient au Québec bien tranquille,
même pas comme avant la révolution tranquille, bien assis, ne
contestant plus parce que cela peut être dangereux, parce que les
électeurs vont se fâcher, parce qu'il faut quand même
conserver le pouvoir dans ces régions-là. Alors, un Québec
assis, un Québec, peut-être, de la politique braillarde à
laquelle on a assisté depuis quelques années.
On a essayé de lancer des ultimatums, ça n'a pas
fonctionné; on a essayé de faire, depuis deux ans, une
négociation tranquille, ça n'a pas fonctionné. Et que
va-t-on faire? On voudrait faire ce que le député de
Jacques-Cartier nous dit. On va prendre les pouvoirs qui nous restent, et on va
essayer. On va peut-être même perdre, si on n'agit pas, tout ce qui
reste. Le petit Québec bien tranquille, on va s'asseoir dessus. On ne
fera pas grand-chose, on va attendre, parce qu'il ne faut pas
mécontenter une certaine partie de nos électeurs.
En tout cas, dans le gouvernement libéral actuel, il y a encore
certains hommes qui croient véritablement à la politique telle
qu'elle a été établie par le ministre actuel des Affaires
sociales. Si ce ministre s'en va, il ne sera pas facile dans ce gouvernement
actuel de lui trouver un remplaçant qui puisse au moins continuer
d'avoir des problèmes sociaux du Québec une vision globale comme
celle du ministre des Affaires sociales actuel.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. le Président, étant donné qu'on a
touché à ce sujet, j'aimerais ajouter quelques mots. L'arrogance
de M. Trudeau, à l'égard du Québec, sa politique de
centralisation, à certains moments, allant jusqu'à l'inconscience
sociale, et même parfois son cynisme, par exemple, lorsqu'il choisit le
moment où le Québec est aux prises avec une crise d'une ampleur
jamais vue, pour saboter les projets québécois de politique
sociale, toutes ces décisions unilatérales touchant directement
plusieurs ministères, à mes yeux, ne peuvent que mener le Canada
à la dislocation. Je dis qu'il réussit à décourager
un bon nombre d'ardents défenseurs de la Confédération. Il
est en train de galvaniser de plus en plus d'énergie autour de
l'idée d'autonomie québécoise. Il réussit à
lui seul, plus que plusieurs premiers ministres canadiens, à donner
presque la preuve à la population que le Québec peut
difficilement s'épanouir à l'intérieur du cadre
fédéral, que son maintien se fait au prix de démissions,
de tensions et d'agacements perpétuels. S'il joue ainsi le tout pour le
tout, s'il tente de provoquer l'affrontement, s'il essaie de réaliser un
possible engagement pour mettre le Québec au pas, il se dirige vers un
échec. S'il croit encore à son destin, c'est qu'il ne sait plus
ce qui se passe au Québec, qu'il est coupé de la
réalité québécoise, peut-être parce qu'il a
été absent trop longtemps. On trouvera peut-être mes propos
violents. Ils le sont parce que le moment l'exige. Et avant de les qualifier
d'exagérés, on ferait bien d'analyser sérieusement la
situation et le dossier.
Ce matin, dans le Devoir dans ses dernières déclarations,
M. Trudeau dit: Si vous voulez un gouvernement fort, c'est nous autres. Il
laisse sous-entendre qu'au Québec il n'y en a pas, indiquant ainsi son
mépris pour le Québec et son gouvernement. Il va être
abasourdi de voir que la crise est en voie de règlement sans lui. Je
pense personnellement que c'est un dur coup pour son humilité.
M. LE PRESIDENT: Avant d'appeler les ar-
tides et les sous-articles, sans doute le ministre aurait-il quelques
commentaires à ajouter, je pense, aux propos que viennent de tenir les
députés, les membres de la commission.
M. CASTONGUAY: Je pense que chacun est en mesure de tirer ses
conclusions, comme on vient de le voir. Peut-être le moment serait-il
venu de passer plus précisément aux crédits mêmes du
ministère. Lorsque nous arriverons à l'article de l'aide sociale
ou des allocations familiales, des allocations scolaires, sur le
problème plus particulier de la sécurité du revenu, nous
pourrons poursuivre la discussion sur certaines des suggestions qui ont
été faites ou des questions qui ont été
adressées. On a le choix de passer aux articles particuliers ou
d'aborder la question des documents que je vous ai remis hier. Comme je vous le
mentionnais, j'ai une analyse qui porte sur un aspect ou une partie importante
de notre budget, soit celle de l'hospitalisation en général et
qui peut aussi dégager ou placer certaines questions
particulières dans leur contexte propre.
Au moment où vous le désirerez, soit à ce
moment-ci, soit lorsque nous arriverons à l'article des soins
généraux je pourrai faire cette analyse.
M. LAURIN: M. le Président, est-ce qu'on pourrait demander au
ministre, avant de passer à l'étude des articles, de nous
renseigner d'une façon un peu plus complète sur ce qu'il a
décidé ou sur ce qui est actuellement mis en oeuvre pour
l'implantation de la loi 65? Les journaux nous ont appris qu'un comité
avait été formé, que des fonctionnaires étaient
déjà à l'oeuvre. Est-ce que le ministre pourrait nous dire
les étapes prévues et le point où il en est rendu dans
cette implantation?
M. CASTONGUAY: Est-ce que cette suggestion est acceptée par les
membres de la commission?
M. LE PRESIDENT: Tous les membres de la commission y agréent.
M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, c'était justement la question que
je voulais aborder.
M. LAURIN: Je fais cette demande, M. le Président, parce que dans
les crédits, il n'y a pas d'article précis où cet...
M. CLOUTIER (Montmagny): Cela touche à plusieurs articles. Nous
sommes aussi bien d'en parler tout de suite. Cela touche à
l'équipement, aux soins généraux, aux soins
préventifs.
M. CASTONGUAY: Alors, je vais vous donner brièvement les grandes
lignes. Par la suite, je demanderai au Dr Brunet de répondre à
vos questions plus spécifiques. Malheureusement,
M. Nepveu n'est pas ici ce matin. La loi 65 a été
approuvée le 23 ou 24 décembre dernier, en troisième
lecture. Nous avons, par la suite, envisagé à quel moment cette
loi pourrait être mise en vigueur.
Diverses questions se posaient. D'abord au plan de l'information il
fallait faire en sorte que tous les organismes touchés par la loi soient
informés de son contenu, des gestes qu'ils auront à poser, de
façon que la population soit aussi au courant de son contenu et de
quelle façon elle pourrait s'y intéresser pour participer au
niveau des structures, voir comment elle sera appliquée, etc.
Il y avait également, au niveau du ministère, une autre
préoccupation. Quelle sorte d'organisation mettrions-nous sur pied pour
nous assurer que l'application de la loi se ferait de façon
ordonnée? Problème qui se pose, comme on vient de le mentionner,
au niveau de la création des conseils régionaux de services
sociaux. De plus ce problème touche à l'émission des
permis, au financement, aux révisions de chartes s'il y a lieu, au
changement des structures internes, préparation des règlements,
etc.
Quant à cet ensemble de problèmes, un travail a
été amorcé sur la préparation des
règlements. Nous ne croyions pas qu'il aurait été sage de
mettre la loi en vigueur et de laisser un long délai entre l'application
de la loi, sa mise en vigueur, l'adoption, la publication des
règlements. Un travail intensif s'est fait à ce niveau. Un projet
de règlement a maintenant été mis au point.
C'est à partir de ces travaux que nous avons pu déterminer
la date d'entrée en vigueur de la loi, soit le 1er juin 1972. Au niveau
de l'information, nous avons formé un groupe de travail qui s'est mis le
premier à la tâche.
En plus de celui qui travaillait aux règlements dès le
début, il s'est mis à la tâche et M. Roger Cyr en a pris la
responsabilité. Déjà, du matériel a
été préparé, du matériel audio-visuel; de
nombreuses séances d'information ont été tenues. Ce
programme se poursuit et devra se poursuivre au cours des prochains mois. Entre
autres, il est prévu qu'un petit périodique soit publié au
cours des prochaines semaines, de telle sorte que bien des questions nouvelles
qui surgissent, qui n'avaient pas pu être traitées dans des
séances d'information générale, puissent trouver une
réponse.
Egalement, un autre groupe de travail a été mis sur pied
sous la responsabilité de M. Gérard Nepveu qui, en même
temps, a été nommé sous-ministre adjoint. Ce groupe de
travail regroupe des personnes affectées aux communications, au
financement, à la programmation, à l'agrément, etc., de
telle sorte que nous ayons là un groupe dont la préoccupation
première est la bonne mise en oeuvre de la loi 65.
La première tâche de ce groupe va être,
évidemment, la mise sur pied des conseils régionaux dont la
création est prévue dans la
loi. D'autres mandats spécifiques ont été
donnés à ce groupe comme, par exemple, l'étude de l'avenir
des services de soins à domicile, dans le contexte du futur
réseau d'organisation des soins.
En parallèle, pour soutenir l'action de ce groupe, la direction
de la planification et de la recherche a fait de nombreux travaux portant, par
exemple, sur le choix des régions pour les fins des conseils, la
délimitation de zones pour l'implantation future des centres locaux de
services communautaires, l'analyse des fonctions des agences de service social
de telle sorte que l'implantation des centres de service social puisse
être envisagée de façon ordonnée le
rôle des conseils actuels de développement social par rapport aux
conseils régionaux futurs ou leur intégration. En tout cas, une
foule de questions de cette nature.
Donc, ce second groupe est au travail, celui de M. Nepveu, et il est
appuyé, évidemment, par le travail technique de ses membres et,
également, des directions générales. La publication des
règlements devra se faire à la fin du mois de mai ou au tout
début du mois de juin. Il est prévu dans la loi qu'une
période de 90 jours est accordée pour la consultation ou que les
personnes ou organismes intéressés peuvent faire parvenir leurs
commentaires, leurs remarques.
Etant donné l'importance de ces règlements et notre
désir qu'ils soient aussi adaptés que possible, d'abord à
l'esprit de la loi et aussi aux exigences d'un bon fonctionnement, dans le
cadre de cette loi, des établissements, nous avons demandé
à M. Edgar Guay de prendre la charge d'un autre groupe de travail. Il
sera assisté de personnes du contentieux de mon cabinet et du bureau du
secrétariat du ministère. Ce groupe de travail aura la mission,
au cours des trois prochains moins, de recevoir tous les avis qui seront
formulés sur les règlements, d'écouter les groupes
il y en a qui devaient être entendus compte tenu de la nature des
représentations qui seront faites. Nous avions également convenu
ici, à la commission des affaires sociales, lors de l'adoption de la loi
65, que nous aurions une, deux ou trois séances nous verrons en
temps et lieu selon les désirs des membres ou l'analyse qui devra
être faite de ces règlements. Nous avions, de toute façon,
convenu d'étudier ces règlements au cours de la période
comprise entre leur publication et leur adoption définitive. C'est
évident que j'ai bien l'intention de tenir ces séances tel que
prévu.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que le ministre pourrait
répéter à quel moment?
M. CASTONGUAY: Les règlements seront normalement publiés
dans la Gazette officielle du Québec le 27 mai.
M. CLOUTIER (Montmagny): Mais pour les séances?
M. CASTONGUAY: II y a une période de trois mois, donc juin,
juillet et août. Il faudra donc tenir ces séances, si possible, au
mois d'août lorsque nous aurons reçu les avis et que nous les
aurons étudiés, et aussi après que les travaux de
l'Assemblée nationale seront terminés. J'envisageais
peut-être d'avoir ces séances de la commission parlementaire au
cours du mois d'août.
M. CLOUTIER (Montmagny): Qui dirige le groupe de travail qui
prépare les règlements?
M. CASTONGUAY: Les règlements sont terminés
présentement.
M. CLOUTIER (Montmagny): Qui est en charge de leur
préparation?
M. CASTONGUAY: Je ne sais pas s'il y a eu quelqu'un. C'est le Dr Brunet
qui a finalement coordonné le travail et l'a dirigé. Il y a eu de
nombreuses séances. Vous connaissez un peu l'ampleur du travail qu'exige
la préparation de tels règlements. C'est le Dr Brunet et vraiment
un travail énorme a été effectué à ce
plan.
Nous avons dit que la loi prévoit les changements dans les
conseils d'administration au cours du treizième mois après sa
mise en vigueur, donc au cours du mois de juin 1973. Rien n'empêche, par
contre, de commencer les changements de son conseil avant cette date. Cela
pourrait être très bénéfique dans certains cas. Pour
en arriver à ceci, comme les conseils régionaux ont un rôle
important à jouer, il nous fallait établir à partir de'
cette date la date où les conseils régionaux devront être
en fonction. Nous avons fixé une date au cours de l'automne 1972, soit
vers octobre ou novembre; nous espérons que les conseils
régionaux seront alors en activité. Sur ce point plus
spécifique, comment entendons-nous procéder? Au besoin, le Dr
Brunet pourra répondre à vos questions, parce que la mise en
place de ces conseils est quelque chose qui nous apparaît
extrêmement important. On se rappelle que ce sont ces conseils qui auront
un rôle particulier à jouer dans l'élaboration ou le bon
fonctionnement des mécanismes électifs en vertu desquels les
représentants de la population seront élus ou seront
désignés selon la catégorie de représentants dont
il s'agit aux conseils d'administration des établissements. Dans les
très grandes lignes, disons que c'est le bilan que nous pouvons faire
des travaux sur l'implantation de la loi 65. Maintenant, il y a une foule de
détails. Si vous désirez obtenir d'autres renseignements. Le Dr
Brunet, M. Cyr, M. Ouellet ou les officiers du ministère se feront un
plaisir d'y répondre.
M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, nous aurions des questions.
M. LAURIN: Pendant que le Dr Brunet s'assied, est-ce que nous pouvons
lui demander de compléter l'exposé du ministre en nous
parlant de l'implantation des CLSC, qui est une section
particulière?
M. CLOUTIER (Montmagny): Je pense que cela compliquerait un peu la
discussion, parce qu'il y a différents types d'institution. Je voudrais
savoir ce que les centres hospitaliers actuels deviennent, parce que j'imagine
qu'il y aura probablement des CLSC dans les hôpitaux actuels, soit par
l'utilisation des cliniques externes ou des services qui existent
déjà. Il y a d'autres types d'institution aussi. Le ministre nous
a indiqué un échéancier, certaines dates. Il y a des
groupes de travail qui ont été mis en place. Je voudrais savoir
du sous-ministre quel type de région a été choisi. Est-ce
qu'il peut préciser un peu les régions, les critères? Cela
est important. Il y a dix régions actuellement dans le Québec. Le
gouvernement fonctionne en vertu de la division administrative imposée
par le ministère de l'Industrie et du Commerce. Depuis plusieurs
années, il y a l'étude de la carte électorale, la
redistribution. Il y aura des changements. Des comtés iront dans
d'autres régions, des parties de comté iront ailleurs. Avec tout
cela, il y a des pôles d'attraction qui sont changés, qui
évoluent.
Je voudrais que le Dr Brunet nous donne un peu plus de détails
sur la division administrative.
M. CASTONGUAY: Pour ce qui est de la division administrative, nous avons
adopté la division selon les régions administratives telle
qu'acceptée par le gouvernement du Québec, en l'ajustant aux
amendements, aux arrêtés en conseil qui ont été
faits, ce qui implique dix régions pour le Québec. La province,
au point de vue des conseils, sera donc divisée en dix régions.
De plus, en raison du problème particulier posé par
Montréal, de la dimension de la ville de Montréal, et aussi de la
diversité des problèmes par rapport à la rive sud,
à l'île de Montréal et au côté nord, nous
avons adopté pour Montréal les trois sous-régions qui sont
acceptées et reconnues par le gouvernement du Québec actuellement
comme étant des sous-régions. Ceci veut dire que nous envisageons
douze régions. Les neuf régions administratives, plus les trois
sous-régions de Montréal, la région de la rive sud, la
région de l'île de Montréal et la région du nord,
qui seront considérées comme des régions et non comme des
sous-régions, c'est-à-dire des conseils autonomes. Le conseil de
la rive sud est un conseil en soi, autonome. Il n'y a pas un superconseil et
trois conseils. Il y aura douze régions, à toutes fins pratiques,
et douze conseils.
M. CLOUTIER (Montmagny): Dans la plupart des régions,* il y a des
conseils de développement social qui travaillent ou des conseils de
bien-être. A Montréal, en particulier, et à Québec,
il y a d'autres organismes qui occupent déjà une place dans ce
secteur qui font déjà de la consultation ou qui s'occupent
d'animation ou de participation. Est-ce que le sous-ministre pourrait nous dire
quel succès ont actuellement les discussions avec ces différents
organismes pour les intégrer peut-être dans ces conseils
régionaux afin qu'il n'y ait pas dédoublement?
M. CASTONGUAY: Nous étions très conscients de ce
problème. M. Ouellet a eu l'occasion, il y a déjà
plusieurs mois, d'y travailler. Les discussions sont commencées au point
de vue de leur orientation ainsi qu'au point de vue de leur financement au
cours de l'année qui vient. La réponse a été je
dirais à 95 p.c. excellente. Dans la loi, nous avons le principe de la
participation que nous nous efforçons d'appliquer le mieux possible.
Dans le travail de M. Nepveu, par exemple, dans l'implantation des conseils
régionaux, comme première étape, nous allons former des
missions qui sont en voie de formation. Ces missions vont se composer presque
exclusivement de gens de la région et comprendre des gens des conseils
régionaux, des gens de l'Association des hôpitaux, des gens des
divers organismes existants et qui y jouent un rôle, afin que
l'implantation des conseils régionaux soit représentative des
régions avec simplement quelqu'un du ministère qui va assurer les
liens et la coordination. Les conseils de développement sont, sauf un,
à toutes fins pratiques, tous d'accord pour se transformer,
c'est-à-dire être remplacés par les conseils des services
de santé et des services sociaux. Quant à celui de
Montréal, nous continuons à discuter avec lui et à le
rencontrer pour l'implantation des conseils régionaux.
M. CLOUTIER (Montmagny): Des organismes aussi importants que le Conseil
de développement social de Montréal l'ancien Conseil des
oeuvres ont aussi des budgets importants qu'ils affectaient dans le
secteur social à différentes oeuvres ou à
différents secteurs particuliers. Je pense bien qu'ils devront se
chercher une autre vocation ou se trouver d'autres tâches parce que, si
je comprends bien, les budgets de ces conseils régionaux vont être
établis suivant des normes qui vont se ressembler d'une région
à une autre; on va tenir compte de l'ampleur de la région
à desservir. Est-ce que, dans cette définition, dans cette
recherche de nouvelles vocations, le dialogue est bien engagé avec le
ministère?
M. CASTONGUAY: La plupart des conseils ont accepté que le
rôle actuel qu'ils jouaient soit joué par les conseils des
services sociaux et des services de santé qui seront établis. A
Montréal les discussions se poursuivent, elles ont été
amorcées.
Il est possible que le conseil se définisse un rôle
particulier différent. Réciproquement, nous n'avons pas pris
d'options définitives à ce sujet. Je ne sais pas si M. Ouellet a
des détails à ce sujet.
Je pourrais peut-être ajouter que ces conseils de
développement social ont des sources de financement passablement
diversifiées. Ils reçoivent du ministère des Affaires
sociales, pour la plupart, un budget de fonctionnement qui, dans la plupart des
cas, est limité. Celui de Montréal a évidemment un plus
gros budget de fonctionnement. De plus, ils reçoivent aussi de
différentes sources, dont le ministère des Affaires sociales, des
sommes à titre de subventions à la recherche. Ces subventions
à la recherche continueront d'être disponibles aussi pour les
conseils qui choisiront de demeurer parallèlement ou en
complémentarité avec les conseils régionaux au même
titre que n'importe quel autre organisme ou groupe d'individus qui peut faire
des demandes au ministère des Affaires sociales pour obtenir des
subventions à la recherche, eux aussi pourront continuer de le faire. Si
on regarde en particulier le budget de fonctionnement que le conseil de
Montréal recevait du ministère des Affaires sociales, il
était de l'ordre de $65,000 par année sur un budget total qui
dépasse les $200,000.
M. CLOUTIER (Montmagny): Cela va quant aux régions et aux
conseils. Quant à l'information, est-ce que...
M. CASTONGUAY: Est-ce que vous aimeriez qu'on vous parle de
l'information?
M. CLOUTIER (Montamgny): Etant donné que l'information sera une
partie extrêmement importante, l'information dans les deux sens aussi,
c'est-à-dire non seulement que le gouvernement informe la population et
les agents, ceux qui auront à vivre et à appliquer le bill 65,
mais aussi la population qui va en avoir soit le bénéfice ou les
difficultés à certains endroits. Je voudrais que M. Cyr nous dise
un peu comment il a conçu son programme, quels sont les points
délicats auxquels il a porté plus particulièrement son
attention.
M. CASTONGUAY: Ce sont tous des points délicats, au fond. Un
travail est déjà commencé. Il a consisté
essentiellement à informer les fonctionnaires du ministère et les
fonctionnaires d'organismes paraministériels intéressés
à la loi 65, comme par exemple les gens du Conseil du trésor ou
des choses comme ça. Cela a été une première
étape. Dans un deuxième temps, nous avons amorcé
l'information à l'aide de deux documents audio-visuels auprès des
établissements qui sont touchés par la loi 65. Pour l'instant,
nous nous contentons et quand je dis se contenter c'est un
euphémisme, parce qu'il y a tellement de demandes qu'on arrive à
peine à suffir de répondre aux demandes des
établissements qui nous demandent d'utiliser ce matériel et les
animateurs que nous fournissons pour répondre à des questions ou
animer des tables rondes. Systématiquement, nous tenons actuellement
dans les établissements 25 à 30 réunions par semaine. Au
cours de ces réunions, nous montrons deux documents audio-visuels sur la
loi 65 elle-même. Cela consiste également à la situer
à l'intérieur d'une politique, la politique sociale. Ces deux
documents sont ensuite commentés par un animateur qui répond aux
questions de l'auditoire et ces questions varient selon les régions et
selon les préoccupations de chacun.
A l'heure actuelle, nous préparons également du
matériel concernant l'implantation des conseils régionaux selon
la stratégie d'implantation qui a été établie. Nous
préparons du matériel qui sera remis entre les mains des types
qui seront chargés de faire l'implantation des conseils
régionaux. C'est actuellement en préparation. Eventuellement,
après que les règlements auront été adoptés
par l'Assemblée nationale, nous pourrons commencer à aborder la
phase plus complète d'information du public en
général.
M. CLOUTIER (Montmagny): Sur quoi mettez-vous davantage l'accent, ou
quel est le leitmotiv de toute l'information que vous préparez? Est-ce
la participation des gens?
Un effort de participation spécial a été fait dans
la loi, soit au sein des conseils d'administration des différentes
institutions. Les citoyens pourront également se plaindre des mauvais
services ou faire des représentations pour des services dont ils ne sont
pas satisfaits. De savoir que le conseil d'administration untel est
relié techniquement à l'autre conseil d'administration, cela a
moins d'intérêt pour les gens. De savoir à quel endroit ils
pourront s'adresser, quels sont les services que les institutions sont en
mesure de leur donner, quels sont les endroits où ils peuvent loger des
plaintes, c'est ce qui les intéresse davantage.
M. CASTONGUAY: II faut se rappeler du contenu de la loi et aussi de ce
qui a été prévu dans les dispositions pour les
règlements. Dans un premier temps, c'est l'objet de la deuxième
partie de votre question tantôt, en ce qui a trait aux règlements,
j'ai mentionné de quelle façon nous entendions procéder,
Dès la publication des règlements, il y aura demande d'avis. Un
groupe de travail va les recevoir et les étudier jusqu'au moment
où les règlements seront adoptés. Une fois les conseils
régionaux établis, ces conseils étant issus justement de
tout le réseau des affaires sociales, ils vont constituer, en quelque
sorte, un mécanisme d'acheminement de l'information qui doit nous
parvenir. En même temps pour les gens qui ont des plaintes à
formuler, par rapport à leur droit de recevoir des services, compte tenu
des ressources, ces conseils sont désignés à cet effet.
Egalement, il est prévu dans la loi, en plus de la participation par
voie d'élection de personnes au niveau des conseils, la
nécessité d'une séance publique d'information. Elle
prévoit aussi la publication de rapports de telle sorte que la
population soit informée. Alors, par la tenue de ces
séances, il y a de l'information qui va revenir d'abord au bon niveau,
celui de l'établissement, et par le truchement de ces
établissements au conseil, etc. Après cette phase d'information
qui doit venir du ministère vers le milieu pour les saisir du contenu de
la loi, la loi elle-même contient des mécanismes qui, nous
l'espérons, vont permettre que l'information revienne dans l'autre sens.
Vous aviez une question pour M. Cyr. Je ne voulais pas la court-circuiter, mais
je voulais au moins faire cette précision.
Comme je l'ai mentionné, on a distingué deux
catégories de public ou de clientèle en ce qui concerne
l'information. D'abord une clientèle plus spécialisée de
gens sont touchés directement par la gestion de la loi. Ce sont des
fonctionnaires du ministère ou le personnel des établissements ou
les conseils régionaux eux-mêmes. C'est un travail surtout
d'information, soit d'expliquer comment la loi va fonctionner au fur et
à mesure que les directives arrivent. En ce qui concerne le public en
général, qui est notre deuxième clientèle, à
mon avis, deux grands thèmes le touchent. C'est la participation comme
vous le mentionniez, soit comment communiquer avec chacun des niveaux
impliqués dans la loi, comme par exemple le ministère, les
conseils régionaux et les établissements. Egalement c'est un
programme spécifique d'information sur une nouvelle catégorie
d'établissements qui s'appellent les CLSC. Ce sont les deux
thèmes majeurs à mon avis, participation et CLSC.
En fait on est à la première phase. Actuellement nos
efforts portent à informer soit les gens du ministère, soit les
gens des établissements ou les professionnels, touchés sur le
contenu de la loi. On leur dit comment cela fonctionne, parce que cela reste
assez complexe. Les lois ne sont jamais faciles à lire. C'est vraiment
cette phase-là qui est en cours actuellement. Je pense qu'on a le nombre
de visites et tout cela. Il y a eu un grand nombre de séances
d'information. La phase pour atteindre le public va se faire surtout
après l'adoption des règlements, c'est-à-dire à
l'automne.
M. CLOUTIER (Montmagny): Allez-vous avoir assez de budget pour
poursuivre toute cette activité?
M. CASTONGUAY: Je n'ai pas eu le temps de me poser cette question.
Voici une suggestion spontanée, je ne sais pas si ça vous
intéresse. Je sais que vous avez un programme de travail chargé
pendant que l'Assemblée nationale siège, mais il y a du
matériel extrêmement intéressant: films, diapositives avec
textes. La présentation de ce matériel dure une heure ou à
peu près.
M. LAURIN: Avec plaisir.
M. CASTONGUAY: Le film dure trente et une minutes et l'audio-visuel,
dix-huit minutes; donc au total 49 minutes.
UNE VOIX: Cela nous intéresserait.
M. LESSARD: Ce serait extrêmement important, parce que nous sommes
continuellement interrogés, en particulier dans nos régions
où, peut-être, la phase d'information joue moins, parce que l'on
concentre peut-être ailleurs actuellement. Nous sommes continuellement
appelés à donner des explications sur le bill 65, sur la
manière dont on l'appliquera. Comment ça va s'intégrer?
Comment les organismes vont être directement...
M. CASTONGUAY: Ce n'est pas mon rôle de poser des questions, mais
est-ce que vous prévoyez seulement une projection de ces deux documents
ou que l'on y ajoute une période de questions et réponses
pour votre information avec les techniciens du ministère?
M. LESSARD: Certainement.
M. CASTONGUAY: Voici ce que, peut-être, je pourrais
suggérer. Il est fort probable que le même type
d'intérêt se manifeste chez d'autres députés que les
membres de la commission ici. Je pourrais demander au leader, M.
Lévesque, de communiquer avec chacun des partis pour fixer une date, un
moment, pour tenir une telle séance d'information pour tous les
députés. La loi est en vigueur; le moment des discussions sur son
contenu est passé. Il s'agit d'informer la population le plus
adéquatement possible.
M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que, par la même occasion, le
ministre pourrait nous faire entendre sa conversation avec les directeurs des
bureaux régionaux?
M. CASTONGUAY: Cela n'a pas été enregistré. Cela
l'a été, mais pour reproduction écrite seulement.
M. GUAY: Je voudrais souligner que j'ai déjà reçu
l'invitation je pense qu'une de ces séances d'information va se
tenir à Lévis le 24 et que j'ai accepté avec
plaisir de m'y rendre. C'est peut-être ça que l'on
présentera. Je pense que ça va être enrichissant pour ceux
qui vont accepter d'y aller.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.
M. LESSARD: Je voulais demander s'il y avait un échéancier
précis concernant l'implantation de ces structures-là.
M. CASTONGUAY: L'échéancier est en partie prévu
dans la loi, c'est-à-dire qu'on prévoit,
qu'on pense qu'il faudrait que les conseils régionaux soient
à peu près tous établis avant le mois de décembre
de l'année 1972.
M. LESSARD : Quand vous parlez des conseils régionaux, selon la
loi, ils ne seront pas établis vous avez parlé tout
à l'heure de dix régions administratives
nécessairement dans ces dix régions administratives. C'est au
choix du ministre, je crois.
M. CASTONGUAY: C'est au choix du ministre. C'est notre intention d'en
établir à chaque endroit, à moins de raisons majeures,
d'impossibilité ou de difficultés majeures. L'intention, c'est
d'établir un conseil par région. L'idéal serait de le
faire d'ici octobre, si c'est possible.
M. LESSARD: Octobre 1972?
M. CASTONGUAY: Octobre 1972. De façon que ça nous donne le
plus de temps possible. Après ça, il y a la préparation.
Les conseils ont du travail à faire. Dans la loi, il est prévu
que les conseils ont des responsabilités. Une fois que les conseils
seront formés, ils doivent choisir eux-mêmes leur directeur
général. Ce n'est pas le ministre ou le ministère qui le
choisit, ce sont eux. Ce sont eux qui préparent les élections ou
qui déterminent de quelle façon se tiendront les
élections.
M. LESSARD: Comment, à ce moment-là, la nomination des
membres du conseil régional sera-t-elle faite, étant donné
qu'il y a quand même des représentants venant du centre local?
M. CASTONGUAY: C'est prévu dans la loi. Ce sont les missions qui
vont faire le travail d'animation.
M. LESSARD: C'est prévu dans la loi, mais dans la loi il est dit
qu'il y a des représentants des conseils locaux, des CLSC au conseil
régional. Si ces CLSC ne sont pas nommés, à ce
moment-là...
M. CASTONGUAY: La loi prévoit cela. Il y a des
représentants des universités, des centres hospitaliers, des
maires ou des municipalités. Il va falloir, justement, que le conseil
régional adopte, selon des dimensions du territoire, le nombre
d'institutions etc., certaines règles de procédure pour faire en
sorte que ces mécanismes-là fonctionnent. Lorsqu'il n'y a pas,
par exemple, de CLSC, le poste reste vacant pour le moment.
M. LESSARD: D'accord.
M. CASTONGUAY: Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit que le
conseil régional a des responsabilités et on ne voulait pas lui
définir des procédures uniformes, étant donné les
disparités dans l'étendue des territoires, le nombre
d'institutions, les types de préoccupation des divers milieux.
M. GUAY: Cela voudrait dire, en quelque sorte, que c'est lui qui est le
plus en mesure de tenir compte du milieu.
M. CASTONGUAY: On le veut vraiment. Je pense que c'était tout
l'esprit de la discussion de la loi 65 et des représentations qui nous
ont été faites, à savoir que la participation s'effectue
d'abord à partir des grandes lignes tracées dans la loi, mais
elle s'effectue à partir des milieux et que ce ne soit pas, dans l'autre
sens, à partir du ministère en descendant. C'est l'esprit que
nous voulons respecter.
M. GUAY: Participation véritable.
M. CASTONGUAY: Nous l'espérons. Une fois que la loi est
là, ça dépendra de l'intérêt qu'ont les gens,
ça dépendra d'eux. Si je mentionne ceci je ne veux pas
être pessimiste, au contraire mais il y a eu d'autres
expériences de participation qui ont été quelque peu
décevantes parfois. En France, par exemple, on me dit que trop souvent,
dans le domaine de l'éducation, la participation des parents dans les
structures donne des résultats très différents de ceux
escomptés. Bien souvent les parents ne s'intéressent, dans leur
travail de représentation, qu'aux problèmes particuliers qu'ils
ont perçus; par exemple, s'ils ont un enfant inadapté, ou des
problèmes semblables.
Ils ont énormément de difficulté à faire en
sorte qu'ils adoptent des attitudes un peu plus générales. C'est
pourquoi je dis que cette participation sera valable, pour autant que les gens
apporteront ce qu'ils doivent apporter. Une fois les mécanismes mis en
place, une fois la loi adoptée, notre tâche, dans l'esprit de la
loi, en définitive, est presque terminée. C'est plutôt
à la population de prendre la relève à partir de ce
moment-là.
M. LAURIN: M. le Président, je voudrais revenir quelques instants
au domaine de l'information. Au ministère de l'Education au
Québec, comme en France, il y a des publications
régulières qui ont pour but d'informer les établissements
sur les progrès dans l'élaboration et l'exécution des
politiques.
Je pense que ces publications rendent un grand service aux
établissements concernés en ce qui concerne la collaboration avec
le ministère, l'articulation des efforts au niveau local et au niveau
central. Le ministère de la Santé a commencé, un peu dans
cette direction-là avec la Régie de l'assurance-maladie où
il y a un bulletin mensuel qui nous fournit, tous les mois, de
précieuses indications sur le fonctionnement de la régie, les
difficultés que l'on éprouve, les façons qu'on prend pour
les régler.
Je me demande si, avec l'implantation, la
mise en vigueur d'une loi aussi importante que la loi 65 qui
amène un bouleversement radical des mentalités, des structures,
des attitudes, il ne serait pas important de songer à la mise en place
d'un organe régulier du ministère, un bulletin ou une revue
régulière du ministère qui constituerait une sorte de
trait d'union, de liaison, en même temps qu'un lien essentiel
d'information.
M. CASTONGUAY: Je vais laisser la parole à M. Cyr sur cette
question parce qu'il y a justement des choses de prévues. Mais en plus,
et nous en avons discuté à un peu plus long terme, il faut faire
les choses une à une, nous croyons qu'il serait extrêmement
important que le ministère soit plus actif au plan de l'information sur
d'autres problèmes. Je pourrais en citer un certain nombre.
Aujourd'hui, les moyens sont tels que certaines des méthodes
d'éducation sanitaire traditionnelles peuvent être fortement
améliorées si on y ajoute les nouveaux moyens de communication.
Il y a aussi énormément de renseignements transmis à la
population et la population n'est pas toujours en mesure de juger des habitudes
qui ne nous apparaissent pas nécessairement pour le plus grand bien de
la population.
Je pense particulièrement à toute l'information touchant
les médicaments.
On en vient à croire, dans bien des milieux, que, peu importe le
problème, on peut, si on a un peu de perspicacité, venir à
trouver le bon médicament pour toujours être en bon état.
Les gens, à cause de cette publicité, en viennent par
eux-mêmes à une consommation de médicaments qui m'apparait
exagérée. Ce n'est pas simplement à moi que cela le
semble. Si ce n'était que moi, je serais peut-être plus prudent
dans mes observations.
Je crois que le ministère a aussi un rôle d'information
positive sur ce plan et il y a un certain nombre d'autres questions. Disons que
ce n'est pas le moment de faire cette énumération mais nous
sommes bien conscients qu'il nous faut aller au-delà de ce qui s'est
fait présentement et que nous devons jouer un rôle de concert avec
des organismes pour la meilleure information de la population.
J'en profite pour dire, par exemple, que nous avons mis sur pied, avec
la Ligue d'hygiène dentaire du Québec, un programme
spécifique d'information qui doit commencer incessamment. Nous sommes
bien conscients que nous devons aller bien au-delà de ce que nous avons
fait dans le passé dans ce domaine.
Maintenant, M. Cyr, plus particulièrement dans ce
domaine-là.
Pour ce qui est de la publication en question, nous nous étions
rendu compte nous-mêmes, en préparant nos séances
d'information à l'intention des fonctionnaires, que nous étions
conscients qu'il s'agissait là d'un premier coup de marteau sur le clou
et qu'il fallait par la suite continuer à alimenter les fonctionnaires
et également les gens des établissements.
Nous avons prévu cette publication dont vous parlez;
effectivement, le journaliste qui dirigera cette publication a
été engagé, l'engagement est passé au Conseil du
trésor il y a une semaine, et il doit entrer en fonction mardi prochain.
Nous nous réservons à peu près deux mois pour
établir le devis technique, c'est-à-dire décider du
format. Est-ce qu'il s'agira d'une revue, d'un journal quelle
périodicité va-t-on lui donner? Quel volume va-t-on lui donner?
On se se donne deux mois pour faire ça, pour préparer le premier
numéro.
Ceci veut dire qu'une première livraison devrait partir, à
mon avis, vers la fin de juillet. C'est peut-être une mauvaise
période pour l'ancienne publication, mais il faut commencer quelque part
dans le temps, et comme ça se présente à ce moment-ci, je
pense que ce n'est pas mauvais, l'été, que nous puissions faire
nos premières armes.
Pour revenir à ce que le ministre vient de mentionner, en dehors
des questions strictement d'information, il y aussi des problèmes
d'éducation populaire, en ce qui concerne un tas de malaises, de
maladies ou d'inadaptation psycho-sociale. Actuellement, nous commençons
à faire un inventaire des principaux thèmes qui pourraient se
prêter à un traitement audiovisuel, pour essayer de sortir de
petites plaquettes, de petits documents, des petits dépliants qui sont
publiés sur la prévention de l'hygiène alimentaire,
prévention des maladies cardiaques, des choses comme ça. On songe
actuellement à utiliser l'audio-vision pour attaquer ces
problèmes.
Il reste à déterminer quelle forme cela prendra mais
l'inventaire est amorcé là-dessus. Si vous permettez, je vais
revenir à une question posée tout à l'heure par le
député de Saguenay au sujet de l'implantation des conseils
régionaux, en l'absence du sous-ministre qui dirige le groupe de travail
sur l'implantation. Disons que la réponse que je vais vous donner va
peut-être vous indiquer comment on entend procéder.
Le groupe de travail lui-même fonctionne à un niveau
provincial. Une décision est prise de former, au niveau de chacune des
douze régions délimitées, une mission régionale.
Elle est composée d'un délégué du ministère
qui ferait office d'agent de liaison. Cette mission sera composée de
cinq ou six personnes, disons un représentant du conseil de
développement social, un représentant pour l'association des
foyers pour adultes, un représentant de l'association de l'enfance
inadaptée. Nous en prévoyons cinq ou six. Ce groupe est
chargé de contacter les maires de la région, de faire
désigner par les établissements les deux ou trois personnes qui
devront siéger au conseil régional. Ce sont des personnes de
centres hospitaliers, de centres de service social, et de centre locaux de
services communautaires. Ce groupe sera même chargé de dresser un
espèce d'inventaire
des organismes socio-économiques qui devraient être
consultés au moment de la nomination des deux représentants
désignés par le lieutenant-gouverneur en conseil, etc. Cette
mission régionale sera chargée d'établir tous les contacts
pour s'assurer que le conseil régional de la santé et des
services sociaux sera mis en place dans un délai de six mois.
M. GUAY: Est-ce que ces douze missions régionales sont
actuellement formées?
M. CASTONGUAY: Elles sont formées à 75 p.c. Nous avons
contacté les fédérations provinciales de ces groupes. J'ai
oublié un représentant, celui de l'association des
hôpitaux. Nous avons contacté les associations provinciales et
elles nous ont délégué une personne par région. Les
fédérations provinciales n'ont pas encore complété
leur travail. Pour être précis, il y a une région où
c'est extrêmement difficile. C'est celle du Nouveau-Québec. Je
pense bien que tout le monde le prévoyait.
M. CLOUTIER (Montmagny): Formerez-vous une région avec la 'baie
James, M. le ministre?
M. CASTONGUAY: Non, nous étudions par contre le problème
des services dans cette région.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je reviens aux périodiques. Est-ce que
le journaliste que vous engagerez sera un journaliste aussi chevronné
que les trois journalistes qui sont ici ce matin? Mlle Dutrisac, M. Michel Roy
et M. Bellefeuille. Ou s'il fera ses armes avec la brochure que vous mettrez
sur pied au ministère?
M. CASTONGUAY: Nous avons parfois l'impression que Mlle Dutrisac, M.
Bellefeuille, en particulier, sont déjà dans le ministère.
Nous ne pouvons pas les engager deux fois.
M. CLOUTIER (Montmagny): Ils ne sont pas soumis aux contraintes de la
fonction publique quand même. Actuellement, des organismes publient des
revues dans le domaine du bien-être, dans le domaine de la santé.
Il y a des revues médicales, des revues spécialisées dans
le domaine du bien-être. Certaines traitent de l'enfance. Certaines
traitent des personnes âgées. Certaines traitent des services
sociaux. Il y aurait peut-être lieu, pour la brochure du
ministère, à l'occasion, de reproduire, si possi- ble, les
meilleurs articles publiés et de les mettre à la portée du
plus de monde possible. Ces revues n'ont peut-être pas tout le tirage
qu'elles devraient ou voudraient avoir. C'est une suggestion que vous pourriez
peut-être examiner en temps opportun.
M. LE PRESIDENT: Messieurs...
M. CASTONGUAY: M. le Président, avant de terminer on pourrait
essayer de fixer un ordre de travail pour la prochaine séance.
M. CLOUTIER (Montmagny): Voici ce que j'aurais à suggérer.
Le député de Bourget voulait, à l'intérieur du bill
65, qu'on parle des institutions, surtout les CLSC. Pour ma part cela
m'intéresserait aussi, étant donné que ce sont de
nouvelles institutions, d'en traiter à part à l'occasion du bill
65 parce que cela touche passablement de choses. Mais après ça,
pour ma part, je serais prêt à commencer article par article. Sur
chacun des articles, s'il y a des discussions de portée plus
générale, on les fera sur la catégorie 1 de chacun des
articles.
M. CASTONGUAY: Très bien. Alors voulez-vous que nous abordions
immédiatement les centres locaux de services.
M. CLOUTIER (Montmagny): II reste dix minutes, je pense que ça va
prendre un peu de temps.
M. CASTONGUAY: Très bien. Alors, on commencera mardi matin. La
suggestion que j'ai faite, docteur, ce serait par le bureau de M. Gérard
Lévesque. Qu'il communique avec chacun des leaders et qu'une
séance soit organisée pour l'ensemble des députés.
S'ils trouvent la chose intéressante, ils viendront sinon ce seront les
membres de la commission ici.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, la commission suspend ses travaux sine die
parce qu'il m'apparaît préférable d'attendre l'ordre de la
Chambre pour déterminer le jour et l'heure de la prochaine
séance.
M. CASTONGUAY: Bien, il est fort possible que ce soit mardi matin.
M. LE PRESIDENT: Le leader parlementaire l'annoncera à la
Chambre.
(Fin de la séance à 12 h 20)