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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le mardi 14 mai 1974 - Vol. 15 N° 45

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Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

Commission permanente des affaires sociales

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales

Séance du mardi 14 mai 1974

(Dix heures quarante et une minutes)

M. LAFRANCE (Président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs !

Nous reprenons ce matin l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales au programme 3, Assistance-maladie.

L'honorable député de Saint-Jacques.

Assistance-maladie (suite)

M. CHARRON: Nous avions déjà entamé la discussion là-dessus. Des collègues du parti ministériel avaient surtout, à l'instar du député de Frontenac, souligné quelques points qu'ils avaient à faire entendre. J'aime autant garder le même sujet. On avait commencé d'aborder la question des médicaments, et le député de Frontenac nous avait exprimé une opinion qui semble partagée par plusieurs de ses collègues — je veux dire dans sa profession — à l'extérieur de l'Assemblée, à l'effet que l'Etat québécois paie de façon considérable pour des médicaments qu'il pourrait se procurer à un prix relativement moins élevé. L'excuse passepartout vient du fait qu'on peut affirmer qu'il existe une commission qui fait une révision permanente. On a effectivement, au cours de la dernière année, modifié certains prix de médicaments, mais je ne crois pas que la commission, surtout devant certains chiffres que nous a fournis le député de Frontenac, puisse se satisfaire aussi rapidement de cette explication.

Même si cette commission de révision des prix agit, même si on travaille au niveau de la Régie de l'assurance-maladie à adapter un peu plus normalement le coût défrayé par l'Etat québécois pour ces médicaments, il reste que nous devons avoir une explication plus solide, il me semble, de la situation actuelle. J'admets qu'on travaille à la corriger. Cela semble se faire lentement, puisque les chiffres donnés par le député de Frontenac sont ceux en cours; donc aucune modification n'est à espérer pour les prochaines semaines ou pour les prochains mois sur ces prix. J'aimerais bien savoir, avant même qu'on ait apporté une correction, comment il se fait que ces prix ont été fixés de cette façon. Je veux retourner au processus original, c'est-à-dire savoir quel genre de consultation le ministère ou la régie ont eue avec les compagnies de produits pharmaceutiques? Comment a-t-on procédé? A-t-on procédé par soumission? A-t-on procédé par une évaluation différente? Je ne sais pas, mais comment en est-on arrivé à cette situation aujourd'hui, au point qu'on puisse se permettre de souligner des exemples abracadabrants qu'il faudrait certainement modifier pour l'avenir?

M. FORGET: M. le Président, je crois qu'un certain nombre d'éléments doivent être expliqués pour comprendre le contexte dans lequel le régime d'assistance-médicaments est administré.

En premier lieu, ce qu'il faut souligner, c'est que le ministère ou la régie dans ce régime d'assistance-médicaments n'est pas un acheteur. Il est essentiellement un tiers payant. Il rembourse aux pharmaciens le coût des ordonnances médicales qui sont distribuées à la population. Cette situation implique que les processus normaux de négociation, dans le sens traditionnel du mot, qui sont envisagés lors d'achats en masse par le gouvernement, ne sont pas applicables puisque, essentiellement, il ne s'agit pas d'un achat massif, mais de spécifier des conditions très diverses en vertu desquelles un fabricant va assurer la distribution de produits pharmaceutiques à des grossistes, dans certains cas, et, dans d'autres cas, à des détaillants dont l'importance, au point de vue de l'écoulement de certains médicaments, varie énormément et dont la situation géographique aussi varie énormément.

Il est clair que les prix, qui peuvent être faits à un pharmacien qui, dans le centre d'une ville, a un achalandage très important, vont être sensiblement différents du prix qui doit être fait à un pharmacien qui est dans une région éloignée où l'achalandage est très faible.

Or, il est apparu au début de ce régime d'assistance-médicaments qu'une des conditions qui devaient être respectées par le régime, c'était de permettre au pharmacien de faire ses frais quant aux coûts qui lui sont remboursés, quelle que soit la situation d'éloignement géographique et la faiblesse de son volume, de manière à assurer une accessibilité générale sans taxer les pharmaciens pour financer la distribution des médicaments.

Etant donné la très grande difficulté, au début du régime, de prévoir des zones ou un zonage, de sorte qu'il y ait des prix différents ou des dispositions de ce genre, il est inévitable que, dans certains cas, les prix faits par les fabriquants à certains pharmaciens à haut volume soient plus avantageux que ceux faits ailleurs.

Cette politique quant aux prix, c'est-à-dire la non-négociation, il ne s'agit pas d'un achat fait par le gouvernement, mais d'un prix qui est essentiellement le prix de liste du fabricant au grossiste, majoré d'une marge qui permet d'absorber les coûts de distribution. Elle a été mise en vigueur sans interruption du début du régime, en août 1972, jusqu'en décembre dernier et sans exception.

Pendant cette période de temps, on a quand même pu remarquer, alors que l'inflation, comme on le sait, se faisait sentir aussi dans le

secteur des médicaments, une stabilité et même un léger déclin dans le niveau moyen des prix fournis par le régime.

En janvier 1974 est intervenue une modification aux prix énumérés dans la liste pour les médicaments, pour refléter le plus précisément possible non seulement les prix annoncés par les fabricants, leurs prix de liste, mais les pratiques effectivement suivies, au point de vue des prix.

Un relevé fut effectué chez les distributeurs, de manière à examiner le prix effectivement payé pour les médicaments et particulièrement les médicaments de consommation à volume élevé. Comme résultat de cette analyse, les prix d'un certain nombre de produits de consommation élevée furent unilatéralement réduits. Le prix qui apparaît à la liste actuellement en vigueur depuis janvier 1974 est le prix moyen pondéré qui a été observé comme prévalant, l'an dernier, au niveau de la distribution de ces médicaments.

Tous les médicaments où une économie annuelle, pour le régime, de $3,000 ou plus était possible, en vertu d'une réduction de ce genre, ont effectivement vu leurs prix diminués. L'observation de l'expérience en cours montre une économie annuelle, par rapport aux prix en vigueur en 1973, d'environ $500,000, qui sera réalisée à la suite de cette réduction unilatérale dans le niveau des prix remboursés.

Maintenant, c'est un processus de révision qui se poursuit et les effets de la concurrence se font sentir dans le secteur des médicaments comme dans d'autres secteurs.

Je pourrais d'ailleurs citer un exemple, celui qui nous a été souligné vendredi dernier, dans le cas d'un produit de la compagnie Pfizer, tétra-cyne. Le prix pour l'édition du mois de juillet 1974, c'est-à-dire la cinquième édition de la liste, passera de $1.68 pour seize capsules à $0.55 pour seize capsules. Donc, on a là un exemple des réductions envisagées lors des révisions périodiques qui sont effectuées.

Pour résumer, le gouvernement n'achète pas ces médicaments, donc ne peut pas négocier — s'il le pourra éventuellement, c'est un sujet, comme je l'ai dit, qui est à l'étude — via le service central des achats et demander des soumissions, puisqu'il n'est pas l'acheteur; il ne peut qu'annoncer les prix auxquels il rembourse. Il est tenu, dans cette politique de remboursement, d'assurer des conditions de remboursement équitables, même pour les pharmacies de faible volume dans des régions éloignées. Il a effectivement fait des réductions unilatérales que les fabriquants auraient pu qualifier d'arbitraires mais qu'ils ont acceptées, qui résultent, cette année, en une économie de $500,000 en dessous des prix de liste qui sont normalement utilisés.

Tous les médicaments n'ont pas la même importance, et ceci on doit le souligner, en terminant, dans la liste des médicaments. Par exemple, le médicament que je viens de citer, c'est un antibiotique de la compagnie Pfizer qui a une réduction substantielle de $1.68 à $0.55 pour seize capsules. Il représente moins de $2,000 d'achat annuel ou de remboursement annuel dans l'ensemble du réseau des pharmacies.

Donc, si nous devons changer ou modifier notre stratégie, étant donné qu'il s'agit de plus de 4,000 médicaments maintenant qui sont sur la liste, on envisage mal d'amorcer des négociations sur 4,000 produits à la fois. Il faudra, sans aucun doute, définir une approche sélective et s'intéresser, en premier lieu, aux produits à haute consommation. A ce sujet, j'ai quelques statistiques qui sont intéressantes: Sur les 4,000 médicaments de la liste, il n'y en a que 170 pour lesquels nous remboursons une somme qui est de plus de $10,000 par année, c'est-à-dire, plus exactement, $5,000 sur six mois.

Il y a 357 produits pour lesquels nous faisons un remboursement qui se situe entre $2,000 et $10,000 par année, c'est-à-dire 11.8 p.c. Tous les autres produits, c'est-à-dire essentiellement plus de 85 p.c, représentent des achats annuels de moins de $2,000. On peut citer des cas individuels dans cet immense nombre de produits qui ne représentent presque rien au total.

Mais, pour ce qui est des produits à haute consommation, nous avons déjà agi cette année et, comme je l'ai indiqué, nous étudions les possibilités de poursuivre cette action sur le plan des prix. C'est une question qui est fort complexe, qui nécessite de considérer également la manière dont les fabricants réagiraient à des pressions accrues du gouvernement sur une partie de leur marché. Nous sommes conscients du danger de voir les marges bénéficiaires, qui seraient diminuées pour la vente de médicaments en vertu du régime, être compensées par des hausses correspondantes pour les médicaments que nous ne remboursons pas à l'ensemble de la population. Cette possibilité qu'ont les fabricants d'utiliser en quelque sorte des clientèles qui sont séparées par des compartiments étanches fait qu'il faut être prudent dans cette politique, de manière qu'on n'obtienne pas des résultats contraires à ceux qu'on recherche.

M. CHARRON: M. le Président, à la suite de la réponse que vient de me donner le ministre, j'ai quelques brèves questions à partir même de la réponse qui, je dois l'admettre, était sensiblement complète. D'abord, en les prenant l'une après l'autre, comme elles me viennent à l'esprit, vous avez parlé d'une approche sélective maintenant pour vérifier le prix payé par l'Etat dans le remboursement. Cette approche sélective sera-t-elle celle que vous avez esquissée, c'est-à-dire qu'on choisira j'imagine, parmi les 170 produits qui coûtent plus de $10,000 par année l'unité, en commençant par les plus consommés en descendant?

M. FORGET: Oui.

M. CHARRON: C'est comme ça que vous allez procéder au cours de l'année?

M. FORGET: Bien, c'est tout probable. Comme je l'ai dit, il est difficile d'imaginer qu'on puisse négocier 4,000 produits en commençant une journée déterminée. Il faut être sélectif. Maintenant, est-ce que la base de sélectivité sera celle-là ou sera une autre base par fabricant? Ce sont des genres de considérations stratégiques, si vous voulez, auxquelles nous nous livrons dans le moment et pour lesquelles je n'ai pas de conclusion, je ne suis pas en mesure d'annoncer des conclusions. Je ne suis pas sûr, de toute façon, si nous avions à tirer des conclusions de cette analyse, qu'il serait nécessairement dans l'intérêt public d'en parler ici. En effet, s'il s'agit d'une négociation, il va falloir aussi garder nos cartes autant que possible, comme vous le comprenez. Mais c'est au moins possible d'envisager qu'on va aborder le problème de cette façon.

M. CHARRON: Au moment où vous allez vous lancer dans des négociations de ce genre — enfin, il y en a déjà qui sont conduites, mais que vous allez les poursuivre — vous avez vous-même fait mention du danger que le détaillant et même le fabricant se reprennent sur d'autres produits pharmaceutiques qui, eux, sont d'usage courant pour l'ensemble du public qui n'est pas couvert par le régime actuel.

Est-ce qu'actuellement, au ministère, on détient un tableau d'ensemble de cette situation des produits pharmaceutiques, je veux dire de la hausse des prix au cours des dernières années, particulièrement depuis l'entrée en vigueur du régime d'assistance-médicaments, pour vérifier à quels endroits en particulier, l'appât du gain s'est porté et quels domaines en sont le plus touchés? Est-ce qu'on peut dire qu'au moment où vous allez entreprendre cette nouvelle correction des prix, vous avez un tableau d'ensemble de la situation des abus qui sont souvent faits dans le domaine des médicaments?

M. FORGET: Pour confiner mes remarques au secteur des prix, puisqu'on a souvent dans le passé fait allusion à l'abus de consommation des médicaments, c'est un sujet sur lequel la conférence fédérale-provinciale des ministres de la Santé a, à plusieurs reprises, indiqué qu'il y avait un consensus parmi les ministres de la Santé au Canada pour agir et susciter soit une orientation nouvelle de l'effort publicitaire des entreprises de production de médicaments, ou autrement de susciter des corrections sur ce plan.

Mais si l'on parle strictement de la situation des prix, ça fait partie de la réponse à la question que vous avez posée, de l'ensemble des questions que nous essayons justement de rassembler, l'ensemble des faits que nous essayons de rassembler. Avant de prendre une orientation très ferme à ce sujet, il faut aussi songer à une autre dimension de ce problème des médicaments. C'est que non seulement remboursons-nous le coût des médicaments payés aux assistés sociaux et maintenant aux bénéficiaires du maximum du supplément du revenu garanti, mais nous remboursons aussi, d'une certaine manière, aux hôpitaux le coût d'acquisition de médicaments.

Cela représente une masse monétaire annuelle d'environ $55 millions d'achat de médicaments. C'est donc un pouvoir d'achat très considérable, mais qui est malgré tout dilué en étant distribué sur un nombre incalculable de produits individuels et un nombre très subtan-tiel de fabricants. Lorsque nous parlons des achats faits par les pharmaciens pour le compte des assistés sociaux, nous soulevons une difficulté, mais lorsque nous parlons également des achats faits par les hôpitaux pour le compte des malades hospitalisés et de la difficulté qu'il peut y avoir à concerter une action, étant donné l'autonomie de ces centres hospitaliers et la très grande importance qu'ils attachent à leur capacité continue de pouvoir orienter eux-mêmes leurs achats dans ce secteur, alors on soulève un autre ordre de difficultés et cela aussi fait partie du tableau que nous examinons.

M. CHARRON: M. le Président, le ministre vient de faire mention de ce régime. Je crois que nous avions, d'ailleurs, abandonné la discussion, vendredi, sur ce sujet qui avait été soulevé par un autre collègue, des personnes âgées qui jouissent du maximum de revenu mensuel garanti et peuvent se prévaloir de l'assistance-médicaments. On a soulevé — je pense que plusieurs députés pourraient déposer des copies de plaintes sur la table — le fait qu'aussitôt qu'une personne voit son revenu dépasser, ne serait-ce que de $1, le maximum de revenus permis pour bénéficier de l'assistance-médicaments, elle perd ce droit.

Entres autres, des gens se trouvent disqualifiés à cause de revenus minimums qu'ils ont. Je peux donner un cas, M. le Président, pour ensuite entendre les commentaires du ministre. Ainsi, on rencontre des cas comme celui d'une personne qui, parce qu'elle reçoit $8 par mois de la Régie des rentes, voit sa pension fédérale réduite de $4 et perd son droit d'obtenir gratuitement les médicaments dont elle a besoin. C'est un cas réel qui m'a été soumis. Quand on sait ce que coûtent par mois les médicaments à de nombreuses personnes âgées, je pense qu'on peut se scandaliser d'une telle situation.

Je ne sais pas combien de personnes au Québec se trouvent privées de ce droit du fait qu'elles ont un revenu minimum qui leur vient de quelque source que ce soit, y compris de la Régie des rentes du Québec. Je me demande s'il n'y a pas possibilité d'imaginer ou d'entrevoir, dans les premières étapes où on va nécessairement étendre le programme, de l'étendre d'abord à ces gens-là au revenu très minime

qu'elles ne peuvent refuser, en fin de compte, puisque ça leur vient de la Régie des rentes, mais qu'elles doivent accepter au prix de la perte d'un droit essentiel, Surtout pour des personnes âgées, celui aux médicaments.

Cette situation, je n'ai pas la prétention de la soumettre pour la première fois au ministre; je suis convaincu que ceux qui administrent ce programme ont déjà considéré cette lacune comme étant la première, peut-être, du régime. J'aimerais savoir ce qu'on a fait face à ce problème et ce qu'on entend faire au cours de la prochaine année financière, surtout pour cette catégorie de personnes les plus directement touchées.

M. FORGET: M. le Président, je suis heureux qu'on revienne à cette question qui avait été posée, je crois, par le député de Shefford, vendredi dernier. Malheureusement, il n'est pas ici pour entendre la réponse.

Il y a plusieurs façons d'aborder ce problème. Malheureusement, chacune d'elles nous fait toucher du doigt certaines difficultés qui, sans atteindre l'essence des régimes impliqués, montrent malgré tout les difficultés de relier les uns aux autres des régimes comme ceux de la sécurité de la vieillesse, de la Régie des rentes et maintenant de l'assistance-médicaments.

Nos premiers efforts ont porté du côté du régime de rentes pour examiner s'il était possible de permettre aux bénéficiaires de renoncer à leur rente, dans les cas où ils reçoivent une rente d'une valeur minime, de manière à pouvoir bénéficier du plein supplément du revenu garanti. Des difficultés qui semblent insurmontables se sont fait jour de ce côté, qu'il serait assez long d'expliquer dans tous leurs détails, pour lesquels je me bornerai à donner au moins une illustration. Une personne qui atteint l'âge de 70 ans et qui reçoit sa rente en vertu du régime de rentes du Québec pourrait dans certaines circonstances renoncer à sa rente de retraite. Mais une des caractéristiques du régime de rentes est de permettre à un bénéficiaire de plus de 70 ans de réclamer, à une date quelconque, après 70 ans, la rétroactivité, à partir de la date où il a atteint 70 ans. On voit une certaine difficulté à permettre à une personne qui a effectivement 70 ans de ne pas réclamer une rente de retraite, pendant la période où elle encourt des dépenses de médicaments élevées, de manière à se qualifier au plein supplément de la sécurité de vieillesse et, subséquemment à un épisode qui peut durer quelques mois, alors que le besoin de médicaments disparaît, de demander rétroactivement, pour la même période, le versement du régime de rentes. On voit là une certaine difficulté, non seulement administrative, mais une certaine cause de se préoccuper de la justice distributive d'un tel arrangement administratif.

Il y a aussi d'autres réserves que l'on peut formuler, d'un caractère technique, telles que, par exemple, la difficulté qu'il y a à prolonger la période pendant laquelle une personne peut effectivement renoncer à ou suspendre, pendant un certain temps, les avantages qui découlent pour elle d'un régime de rentes. Il y a un changement de statut qui intervient durant cette période, comme par exemple l'allongement de la période pendant laquelle on calcule son admissibilité au régime et la diminution que cela entrafne sur le niveau de sa rente dans les années subséquentes, puisque la période pendant laquelle elle n'a pas bénéficié d'un régime de rentes, mais qu'elle était admissible au régime, se trouve augmentée.

Donc, le revenu moyen, qui n'est pas augmenté pour autant, diminue pendant la période, ce qui diminue la rente qu'elle recevra éventuellement lorsqu'elle décidera de se joindre au régime.

Bien sûr, on peut faire, devant toutes ces difficultés — j'en passe, il y en a plusieurs de ce genre — des propositions ad hoc. Le danger de faire des propositions ad hoc pour résoudre un problème comme celui-là, c'est de changer la configuration générale du régime de rentes ou de le rendre tellement complexe qu'il devienne un peu comme la Loi de l'impôt, si vous voulez, très difficile à assimiler, très difficile à expliquer, et met à peu près tous les bénéficiaires dans la position où ils ne savent pas exactement à quoi ils ont droit et quelle est la conséquence de leurs actions.

Donc, après avoir examiné ces difficultés, nous nous sommes tournés d'un autre côté pour voir s'il serait possible de modifier le régime lui-même d'assistance-médicaments. De ce côté, essentiellement, la question que l'on pose c'est de savoir si, en plus de ceux qui bénéficient du supplément du revenu garanti, on devrait étendre les bénéfices à d'autres catégories de bénéficiaires.

Premièrement, la réponse est très courte à ça. C'est qu'à un moment précis, il est impossible de le faire sans une modification à la loi puisque c'est la loi elle-même qui précise que ce régime n'est destiné qu'à ceux qui ont le maximum du revenu garanti en vertu de la Loi de la sécurité de la vieillesse. Mais cela pose également un autre problème qui est de tracer une autre ligne de démarcation. Il est clair que dans toute ligne de démarcation, que l'on s'arrête à ceux qui reçoivent la moitié du maximum ou à un chiffre quelconque, il va toujours rester des cas frontières où, avec $1 en moins, on aurait droit à la prestation d'assistance-médicaments, et avec $1 en plus, on n'y a plus droit. Pour pallier cette difficulté, il y a encore des complications techniques que l'on peut imaginer pour tenir compte du montant de médicaments, etc. Mais là aussi on débouche rapidement sur des complications techniques très considérables.

Maintenant tout ceci est pour dire que le problème est compliqué. Mais nous n'avons pas nécessairement abandonné nos efforts pour y apporter des solutions, au prix peut-être de

quelques complications et au prix peut-être d'un élargissement ou d'une libéralisation du régime. Il y a d'autres problèmes qui sont posés, tels que les délais qui s'écoulent entre les modifications aux prestations de rente, qui sont reçues par les bénéficiaires, et la période où le paiement en vertu du régime de sécurité de la vieillesse se trouve modifié. Il y a des délais dans la transmission des données entre les deux régimes qui font que nous aurons aussi des difficultés de ce côté.

Encore une fois, j'ai voulu donner un peu une description de la nature du problème parce qu'on en a vu des descriptions très sommaires qui tendent à faire croire qu'il s'agit tout simplement de décréter que ceux qui reçoivent $8 ou moins de la Régie des rentes pourraient tout simplement y renoncer et automatiquement obtenir des bénéfices auxquels ils n'ont pas droit, ce qui semble tomber sous le sens commun.

Le sens des travaux qu'on a faits depuis ce temps — il faut se rappeler qu'on est à quelques mois, seulement, du début du régime et que ces difficultés avaient été seulement imparfaitement anticipées — a consisté à nous faire voir que le problème était beaucoup plus compliqué et que sans modifier profondément le régime des rentes, dans le fond, il n'y avait pas de solution à rechercher de ce côté. M. Martin, qui est ici et qui pourrait donner des renseignements supplémentaires, a examiné la question du point de vue du régime d'assistance-médicaments lui-même, de manière à déterminer s'il n'y a pas des possibilités, à l'intérieur de ce régime, de l'assouplir ou de l'étendre un peu.

Mais, encore une fois, je pense qu'il confirme le fait qu'on débouche sur un amendement à la Loi de l'assurance-maladie si on veut véritablement résoudre ce problème.

M. CHARRON: Je suis d'accord. Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. FORGET: Non, je pense que c'est complet comme exposé.

M. CHARRON: Je suis également convaincu de cela. Toute modification devrait mener à une modification à la loi. Je suis aussi d'avis que ce n'est pas le régime des rentes qu'il faut essayer de forcer et d'étendre pour permettre une gratuité de médicaments à un plus grand nombre de citoyens, mais plutôt ce régime lui-même.

Actuellement, il y a 150,000 personnes. Est-ce le chiffre exact?

M. FORGET: 155,000.

M. CHARRON: II y a 155,000 personnes dont le revenu mensuel est de $170 au total et qui, ici, peuvent se prévaloir de l'assistance-médicaments, plus les assistés sociaux, qui totalisent quelque chose comme...

M. FORGET: A peu près 400,000, ou 440,000, mais d'après les derniers chiffres, il y a une diminution assez régulière.

M. CHARRON: 400,000 à 440,000, disons. Dans les projets et dans les études, si, par exemple, on envisageait d'étendre le régime à des personnes qui outre les $170 déjà alloués, comme ils le sont aux assistés sociaux pour une personne seule, ont un revenu supplémentaire mais qui provient de l'Etat, comme par exemple du régime des rentes ou d'une autre source, d'une pension quelconque datant d'une toute autre époque, avant même l'existence du régime des rentes ou quoi que ce soit, est-ce que cela grossirait énormément le nombre de bénéficiaires, en plus des 155,000 dont nous parlons? Je parle des personnes âgées.

M. FORGET: Essentiellement, vous visez toutes les personnes âgées de 65 ans et plus qui n'ont pas le maximum.

M. CHARRON: Oui, ou celles qui reçoivent un supplément en provenance de l'Etat.

M. FORGET: Parlez-vous du supplément en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse?

M. CHARRON: C'est ça.

M. FORGET: Cela représenterait environ 150,000 personnes de plus.

M. CHARRON: De plus. Et le coût serait évalué à combien?

M. FORGET: Environ $8.3 millions, si on prend le même chiffre que pour les 155,000 personnes déjà couvertes.

M. CHARRON: M. Martin, vous savez sans doute que vous êtes à la tête d'une régie qui annonce un surplus pour la deuxième année. Vous ne serez pas surpris de voir que ce surplus fait de vous une cible très appréciée, parce que quand on parle de programme qui signifierait, par exemple, $8 millions de plus et qu'on sait que le surplus accumulé, à la fin de 1973/74, est aux alentours de $65 millions... Non?

M. FORGET: Fin de 1973/74.

M. CHARRON: Oui. A la fin de 1972/73, le surplus est de $53 millions?

M. FORGET: Plus que cela.

M. CHARRON: Plus que cela. Vous voyez, vous mettez juste un peu plus d'eau dans mon moulin.

M. FORGET: Les faits m'obligent à dire que c'est plus que ça.

M. CHARRON: II est évident que face à un

régime qui annonce un surplus quand, en même temps, on examine la possibilité d'étendre des soins aussi essentiels, je pense, dans une société moderne — j'allais dire sociale-démocrate — que la gratuité des médicaments, il y a certainement là un endroit où on peut poser un point d'interrogation, terminer la phrase et attendre la réponse du ministre.

M. FORGET: Le surplus qui s'accumule au régime d'assurance-maladie ne doit pas être considéré globalement comme disponible. Depuis quelques années, en fait depuis le début du régime, effectivement, le conseil d'administration de la régie a recommandé et le ministre a accepté l'idée selon laquelle une réserve devait exister — de manière à prévoir toute variation subite et imprévue dans le niveau des entrées fiscales — qui soit équivalente à environ un mois de prestations au point de vue des revenus.

Ceci correspond à une somme que M. Martin pourrait préciser, mais qui diminue sensiblement le surplus apparent. Je pense que c'est de l'ordre maintenant de $40 millions à $45 millions, qui doivent être considérés comme une réserve nécessaire pour assurer un paiement ininterrompu des services prévus par le régime. Remarquez que ces surplus sont d'ailleurs confiés à la Caisse de dépôt et sont investis avec le même succès que la plupart des autres actifs confiés à la Caisse de dépôt.

Pour ce qui est de l'excédent, il y a un surplus d'accumulé, mais le chiffre qui doit véritablement être utilisé, ce n'est pas le surplus accumulé qui représente un certain nombre de décisions passées, aussi de circonstances passées qui n'étaient pas nécessairement entièrement prévisibles. Mais on doit s'interroger sur le surplus annuel à prévoir pour l'avenir. Si l'on considère la situation pour l'année qui vient, avec l'introduction non seulement de ce régime de médicaments pour personnes âgées, mais du régime de soins dentaires et l'introduction prochaine d'un régime de gratuité des prothèses orthopédiques, le surplus annuel que l'on peut anticiper va rapidement s'amenuiser au point même de ne pas être, dans le fond, supérieur peut-être à la marge d'erreur qui existe toujours dans des estimations ou, du moins, d'être si minime que toute augmentation substantielle de la couverture du régime risquerait de causer, à très court terme, la probabilité d'une augmentation des prestations.

Donc, c'est un argument qui a, sans aucun doute, son poids et qui, d'ailleurs, a fait sentir son effet par l'accroissement progressif de la couverture non seulement pour l'assurance-maladie, mais pour les soins dentaires et pour les prothèses qui est un développement qui est prévisible pour un avenir encore incertain au point de vue de la date, mais certain quant à son éventualité prochaine. Alors, c'est un argument qui a joué, mais qui nous met dans une situation où, étant donné, d'autre part, que des négociations sont amorcées dans une large mesure et que les résultats de cette négociation devraient être connus avant que l'on se prononce sur l'importance future du surplus ou même sur son existence, il nous paraît sage, pour le moment, d'observer un moment d'arrêt dans l'utilisation de ces surplus.

M. CHARRON: M. le Président, sans attendre que cette année même nous arrivions à l'objectif que je posais tout à l'heure d'une gratuité totale des médicaments pour les personnes âgées, il me semble qu'au cours de l'année nous pourrions procéder à une modification de la loi pour étendre cette gratuité à un plus grand nombre de bénéficiaires. Encore une fois sans atteindre le plein objectif en une seule année, ça demeurera à examiner, mais en admettant cette hypothèse que nous ne pouvons pas l'obtenir en une seule année, est-ce que l'on peut s'attendre, au cours de l'année qui vient, à une modification de la loi? A cet égard, je peux vous assurer de la collaboration de l'Opposition pour que nous ayons, à la fin de l'année, un plus grand nombre de bénéficiaires, c'est probable, mais de catégories différentes de celle qui est déjà là, c'est-à-dire ceux qui ne bénéficient que du revenu mensuel garanti, et que des modifications soient donc apportées dans ce sens-là, en particulier pour les personnes qui ont un très faible revenu supplémentaire, mais qui les prive, comme je le rappelais tout à l'heure, de ce droit à l'assistance-médicaments. Parmi les modifications à l'étendue de la couverture du régime auquel on doit s'attendre d'année en année, puisque c'est un engagement que nous avons pris, est-ce qu'il est possible d'attendre, cette année, dans ce domaine précis de l'assistance-médicaments, des modifications?

M. FORGET: II est trop tôt, M. le Président, pour donner des précisions à cet égard. J'ai indiqué que le problème, qui a été souligné à deux reprises, des difficultés de couverture à la marge pour certains bénéficiaires faisait l'objet d'une attention de notre part, que des études avaient été faites sur lesquelles les conclusions finales n'ont pas été tirées.

D'autre part, il y a en dehors de ce régime, qu'il s'agisse des assistés sociaux ou des personnes âgées, d'autres régimes de gratuité de médicaments distribués dans le réseau, même aux malades sur pied, et il y aura lieu, au cours de l'année, d'évaluer les mécanismes qui ont été utilisés jusqu'à présent pour assurer cette distribution de manière à voir si on doit effectuer des modifications au régime et incorporer ou non ces autres régimes à celui de l'assurance-maladie. Toutefois, aucune décision n'a encore été prise; ce sont encore des sujets qui font l'objet d'études de notre part.

M. CHARRON: M. le Président, pour ce qui est des médicaments, à moins que d'autres collègues aient des questions...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Frontenac.

M. LECOURS: M. le Président, la semaine dernière j'ai soulevé la question de la tétracycline; je disais que seize capsules étaient remboursées à $1.68. J'ai vérifié mes factures, j'en ai apporté ici que j'ai achetées moi-même le 24 janvier 1974 alors que j'ai payé $10.29 pour 1,000 capsules de tétracycline. Je ne crois pas que la distance ait quelque chose à voir avec le prix des médicaments. Le prix des médicaments est uniforme partout dans la province et les compagnies paient pour le transport des médicaments.

Maintenant, il y aurait peut-être d'autres questions qu'il faudrait se poser à propos de la tétracycline qui est un exemple parmi beaucoup d'autres médicaments. Il y a 26 groupes différents de tétracycline qu'on présente dans le formulaire. Le premier, disons, pour seize capsules, coûte $0.24; le 26e, pour seize capsules, est coté à $2.43. Je trouve cela pas mal exorbitant comme marge entre $0.24 pour seize capsules et $2.43 pour seize capsules. Il faudrait se poser une question: Est-ce qu'on peut nous garantir la qualité de la tétracycline à $0.24 pour seize capsules? Est-ce la même qualité de médicament, la même sécurité pour nos patients que le médicament à $2.43 pour seize capsules? Je crois que nos fonctionnaires devraient pouvoir répondre à cette question, c'est très facile; je pense qu'on devrait avoir une réponse.

Il arrive une autre chose aussi, quand vous nous dites que maintenant vous avez décidé que seize capsules de tétracycline de la compagnie Pfizer coûtera $0.55, ça veut dire que le prix au pharmacien est d'environ $0.17 pour seize capsules. Il va recevoir deux fois et demie le prix que lui coûtent seize capsules. Déjà il reçoit $2.15 pour compter les seize capsules. Je pense que ces honoraires sont déjà valables, $2.15 pour compter seize capsules; ça ne prend tout de même pas plus d'une minute pour compter seize capsules. Je pense qu'à l'heure actuelle, le grand principe de base qu'il faudrait changer dans votre formulaire, c'est celui-ci: Vous calculez toujours des formats de seize capsules, 25 comprimés, 50 comprimés, alors que le pharmacien ou le médecin qui vend des médicaments achète toujours ces médicaments-là à 1,000 capsules du coup et peut-être 10,000 du coup. Il faudrait se demander s'il ne serait pas plus logique de rembourser les pharmaciens au prix de la quantité de 1,000 capsules de tétracycline et non au prix de seize? Moi-même, si j'avais acheté seize capsules de tétracycline chez un grossiste, probablement que je paierais environ $1. Mais je pense que c'est là le principe. A l'avenir, je pense qu'il faudrait demander à nos fonctionnaires de faire les calculs plutôt en vertu de celui qui achète des produits pharmaceutiques non pas au petit format de seize mais à des formats de 1,000 ou des quantités de 10,000.

M. FORGET: M. le Président, le député de Frontenac fait allusion à un des problèmes que nous considérons évidemment dans cette évaluation d'une nouvelle approche relativement au prix des médicaments. Faudrait-il privilégier un format ou un format très considérable? Je pense que, dans certains cas de médicaments très peu consommés, c'est présumer que tous les pharmaciens au Québec, alors que le régime rembourse moins de $2,000 par année pour l'ensemble des bénéficiaires, pour 750,000 bénéficiaires, je pense que c'est présumer plus que la réalité que de croire que tous les pharmaciens au Québec vont se procurer tous ces médicaments en format de 1,000 au moins.

Je pense que, si l'on faisait une telle présomption, nous aurions de la part de l'Association des pharmaciens propriétaires de très nombreuses protestations puisqu'ils nous ont affirmé, ces choses n'ont pas été faites sans consultation avec eux, qu'ils n'étaient pas tous en mesure d'acheter les médicaments en grand volume. Maintenant, il se peut qu'on veuille leur faire absorber le coût de certaines pratiques de distribution, mais encore une fois il faut s'arrêter sur les implications d'une telle approche relativement à l'accessibilité à ce programme de médicaments à travers le Québec.

D'autre part, il faut aussi se préoccuper d'un aspect dans la préparation des listes et essentiellement de ne pas faire plus de choix qu'il est absolument nécessaire pour la saine administration du régime. La liste elle-même est déjà l'objet, à l'occasion, de certaines critiques auxquelles, je pense, il est possible d'apporter des réponses puisqu'il y a là aussi des consultations avec les organismes professionnels, critiques qui sont basées sur l'exclusion de certaines marques ou de certains médicaments de la liste.

Il serait possible évidemment d'avoir une liste de 40,000 médicaments au lieu de 4,000, mais encore une fois il s'agit de savoir où s'arrêter. Si l'on devait non seulement exclure certains médicaments, mais n'inclure que certains formats, même des médicaments acceptés, l'on interviendrait peut-être davantage dans certaines habitudes presque professionnelles des pharmaciens, qui peuvent avoir à déterminer en fonction de la fréquence de consommation des quantités qu'ils veulent acheter.

Encore une fois je ne ferme pas la porte à une possibilité d'évolution de ce côté puisqu'il est évident que, si l'on développe une autre approche, il pourra sembler opportun d'utiliser dans tous les cas les formats les plus considérables qui donnent ouverture à des escomptes ou à des réductions pour le volume. C'est d'ailleurs en se servant de cette approche que nous avons diminué unilatéralement le prix affiché pour un certain nombre de médicaments et que nous avons réalisé des économies.

Mais, étant donné que toute restriction entraîne certaines frictions et dérange certaines habitudes dans la distribution des médicaments, ces restrictions ne devraient intervenir que

lorsqu'il existe des économies potentielles de quelque substance à réaliser pour le régime. Lorsque le coût total d'achat de certains médicaments est inférieur à $10,000 pour l'ensemble du réseau pour toute une année, l'économie qu'on peut réaliser en choisissant un seul format, par rapport à deux ou trois qui offrent beaucoup plus de flexibilité pour le pharmacien et peut-être des possibilités de services meilleurs, ne semble pas en valoir la chandelle.

Mais, très certainement, du côté des médicaments à fort volume, il y a un effort à faire. La suggestion du député de Frontenac à l'effet d'utiliser à ce moment-là, ce serait très raisonnable, les plus forts volumes serait sans doute retenu. D'ailleurs je pense qu'implicitement c'est ce qui a été fait par les prix pondérés. On a pris acte des réductions obtenues par les pharmaciens pour les achats en grande quantité.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Frontenac.

M. LECOURS: M. le Président, j'aimerais savoir si les compagnies canadiennes-françaises ou du moins celles qui produisent ici dans la province de Québec sont favorisées sur votre liste. Beaucoup de compagnies ou de représentants de compagnies qui passent chez moi se plaignent souvent que de petites compagnies de l'Ontario ont la préférence parfois vu qu'elles vendent à des prix beaucoup plus bas que chez nous.

M. FORGET: II n'y a aucune préférence implicite ou explicite au niveau des prix, puisque la liste se borne à énumérer des médicaments qui satisfont à un certain nombre de critères professionnels ou techniques et à énumérer les prix que les fabricants affichent, pour la distribution de ces médicaments. Donc, s'il y a une discrimination au niveau des prix, elle est faite par les fabricants eux-mêmes qui ont des pratiques de prix différentes de ceux de leurs concurrents.

Depuis l'introduction, dans les éditions successives de la liste, on a vu une proportion croissante de produits fabriqués au Québec. On a vu également un élargissement de la concurrence pour toutes les catégories de produits.

M. FORGET: ... Le nombre de dénominations — je pourrais avoir ce chiffre-là cet après-midi si on le juge suffisamment important — pour lesquelles il n'y a qu'un seul fabricant a diminué de façon très sensible entre les différentes éditions de la liste. Il y a une concurrence accrue, il y a une fabrication accrue au Québec, encore que, pour ce qui est de la fabrication au Québec, comme on le sait, les substances de base sont, en totalité, importées. Il s'agit essentiellement d'un conditionnement des produits qui se fait à différents niveaux au Québec, mais il s'agit toujours de conditionnement et parfois seulement de réemballage, comme on le sait. Plus l'entreprise est petite, plus la proportion de valeurs ajoutées au Québec est faible.

J'aimerais faire un commentaire sur l'élément qualitatif et les considérations qualitatives. Le Québec, contrairement à une autre province qui est l'Ontario, n'a pas opté pour un régime ou pour un service d'évaluation qualitative des médicaments inscrits sur la liste. Pour le faire, il aurait fallu installer des laboratoires d'expertise extrêmement coûteux dont la fonction aurait largement fait double emploi avec d'autres laboratoires du même genre qui pourraient exister, si la même attitude était prise par chaque province, dans chacune des dix autres provinces et au niveau fédéral également.

Nous avons pris, au contraire, l'attitude d'utiliser au maximum les évaluations qui sont faites sur le plan canadien et nous nous sommes intéressés à discuter, avec les responsables du programme d'inspection de la qualité des médicaments, de l'établissement d'un échéancier ou d'une liste de médicaments qui devait faire l'objet d'une évaluation qualitative en priorité. Là encore, ce qui nous a inspirés, c'est d'inscrire en priorité sur cette liste, dont le principe a d'ailleurs été accepté par les responsables fédéraux du programme, les médicaments à haut volume. Actuellement, il y a une référence qui est contenue au manuel des médicaments à la norme GP-4 qui est une norme de fabrication, qui s'applique aux fabricants comme tels et qui est basée sur une inspection des installations matérielles qui servent à la fabrication.

Il y a un programme qui est très ambitieux, soit le programme QUAD dont on a entendu parler. C'est un véritable programme d'évaluation des médicaments, non seulement du médicament une fois pour toutes, mais même de chaque lot de médicaments sur une base d'échantillonnage. Ce programme QUAD est à ses débuts, mais tout nous permet d'espérer que, d'ici à la fin de l'année prochaine, suffisamment de médicaments auront fait l'objet d'une évaluation qualitative de ce genre-là qui comporte à la fois un test chimique et un test de bio-disponibilité, c'est-à-dire l'évaluation de la capacité de l'organisme, du métabolisme d'accepter et d'utiliser les éléments actifs avec une certaine efficacité.

Ces tests seront donc très complets et ils seront utilisés dès qu'ils seront disponibles pour permettre l'inclusion ou l'exclusion d'un produit de la liste. Pour le moment, nous en sommes à des normes de fabrication et essentiellement à une consultation avec les milieux professionnels sur l'inclusion ou l'exclusion possible d'un médicament.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Frontenac.

M. LECOURS: M. le Président, nous les médecins, souvent, sommes inquiets de voir un produit comme le nitropurantoïne, à 50 milli-

grammes disons, coté à $0.09 pour 25 comprimés alors qu'une autre compagnie, disons celle qui le vend le plus cher, le cote à $2.58 pour 25 comprimés. Vu que c'est un produit qu'on emploie dans l'infection urinaire, pour des maladies assez sérieuses, est-ce qu'on peut se fier au premier médicament vendu à 25 comprimés pour $0.09?

M. FORGET: C'est la question à laquelle on est impatient d'apporter une réponse. Encore faut-il, pour le faire, que des tests soient faits. Ces tests, comme on le sait, sont effectués par le programme QUAD qui est à ses débuts. Nous avons pris la décision de ne pas doubler un tel programme. L'Ontario avait pris, au début, la décision de faire elle-même ses tests; elle vient de renverser la vapeur de ce côté-là, puisqu'ils s'en allaient dans la direction d'un programme extrêmement coûteux qui ferait double emploi avec le programme fédéral. Il y a eu une rencontre des principaux responsables des programmes d'assurance-médicaments récemment, groupant le fédéral et les provinces qui se sont mis d'accord sur un programme d'évaluation qualitative des médicaments et sur la nécessité d'établir une liste des priorités.

Ce sont ces résultats que nous devons attendre, à moins de mettre sur pied tout un mécanisme, tout un laboratoire d'expertise dont on ne voit pas la nécessité tant et aussi longtemps que ces mécanismes prévus nous donneront satisfaction.

L'écart que l'on cite quant aux médicaments est un écart communément observé. J'ai ici la publication de l'Ontario du programme "par cost" qui a eu principablement pour but de sensibiliser les professionnels impliqués, les médecins, les pharmaciens et aussi le public sur les écarts très considérables des médicaments que l'on retrouve dans à peu près toutes les catégories. Cela va d'un rapport de un à dix pour certains médicaments, très peu nombreux, mais le rapport est assez important pour plusieurs autres. Tout ce que l'on peut faire, dans le moment, c'est souligner l'existence de ces écarts et attirer l'attention des professionnels sur la nécessité pour eux de bien comprendre que s'ils prescrivent le médicament le plus cher, alors qu'ils font encourir un coût additionnel et évitable aux patients, ils doivent avoir pour cela une raison professionnelle assez bien fondée, puisqu'autrement, ils risquent de prescrire simplement en se faisant l'écho d'un effort publicitaire plus intensif qui est fait pour certaines marques et qui correspond d'ailleurs parfois aux coûts les plus élevés dans certaines catégories de médicaments.

Pour le moment, tant que nous n'avons pas un barème ou un critère objectif basé sur une évaluation scientifique, on ne peut faire autre chose que d'attirer l'attention des professionnels en donnant tous les prix, en remboursant tous ces médicaments, qu'ils soient chers ou pas chers, et en faisant porter sur eux la responsabi- lité de s'assurer que s'ils prescrivent un médicament qui est plus cher que celui dont le coût est plus modique dans une liste déterminée, ils ont pour ça des raisons professionnelles dont ils sont raisonnablement certains. Autrement, c'est un coût additionnel qui est évitable. Depuis le 1er février, cette décision se prend effectivement en deux paliers puisque non seulement le médecin jouit-il d'une discrétion quant aux produits qu'il prescrit, mais le pharmacien est autorisé à faire une substitution. Les mêmes conseils de prudence s'adressent aux pharmaciens de ne pas utiliser le droit de substituer au détriment du patient, mais afin de le diriger vers une marque qui semble également efficace et qui est de coût plus modeste.

M. LECOURS: Est-ce que le pharmacien peut, pour revenir à notre fameux produit tétracycline, donner un médicament qui coûterait plus cher au gouvernement, même si on prescrit la tétracycline? Ou est-ce qu'il doit en choisir un qui coûte moins cher, qui est moins dispendieux?

M. FORGET: La substitution comme telle n'a pas été adoptée pour des raisons d'économie, mais pour une raison de liberté dans l'exercice professionnel.

Maintenant, nous sommes conscients du fait que maintenant qu'elle existe, elle crée une situation nouvelle sur le plan des coûts, qui fait partie du contexte dont je discutais tantôt et qui nous amènera peut-être à redéfinir les conditions de remboursement des médicaments selon la liste. Cela fait partie de nos préoccupations. Maintenant, l'introduction de cette loi est un événement trop récent pour avoir déjà changé les habitudes. Nous avons le sentiment qu'il faut — suivant d'ailleurs l'expérience de certaines autres provinces, comme la Saskatchewan, où la substitution est en vigueur depuis plus longtemps — plusieurs années avant que la substitution effectuée par le pharmacien devienne véritablement significative.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Vanier.

M. DUFOUR: M. le Président, j'aimerais demander au ministère si les pharmacologues étudient la possibilité, présentement, de réintégrer dans le formulaire certains médicaments combinés qui nous rendraient énormément service lorsqu'il nous arrive de soigner des malades. Il y a des gens qui, parfois, vont jusqu'à absorber 40 à 60 pilules par jour, alors il ne reste pas grand place pour le steak et les légumes. Un malade peut avoir plusieurs maladies concomitantes et à ce moment, on est pris, avec le médicament non combiné, à lui prescrire parfois des quantités astronomiques de médicaments qu'il doit absorber par la bouche.

C'est malheureux mais je crois qu'il y a des médicaments combinés qui sont excellents, qui

nous ont rendu d'excellents services. Une fois qu'ils sont combinés, ils ne reviennent pas plus cher que les médicaments uniques. Ce serait peut-être une économie pour le ministère et, en plus, cela rendrait énormément service. Au lieu de prendre trois pilules, si vous en prenez seulement une vous avez l'air beaucoup moins malade et vous vous croyez beaucoup moins malade que si vous prenez trois pilules du coup. Alors, si vous en prenez trois, plus trois autres, plus trois autres, finalement vous pouvez prendre jusqu'à douze pilules de suite, admettons qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre chaque pilule. Mais je crois qu'il faudrait étudier certainement, dans un avenir rapproché, la possibilité de réintégrer certains médicaments combinés.

M. FORGET: M. le Président, en effet, la première ou peut-être la seconde même édition de la liste ne contenait, je crois, aucun médicament combiné. L'édition de janvier dernier inclut entre 70 et 80 médicaments combinés. Il n'est pas du tout exclu que la liste de médicaments combinés s'allonge. L'inscription d'un médicament, en plus de s'assurer qu'elle satisfait à différentes normes de fabrication et qu'elle correspond à un besoin dépend, dans une large mesure, des demandes spécifiques qui sont faites et des discussions qui ont lieu avec les groupes professionnels.

Maintenant, il est clair que le très grand nombre de médicaments qui existent sur le marché s'explique, en grande partie, par la combinaison presque infinie de différents ingrédients actifs ou de différents éléments actifs que l'on retrouve dans des proportions diverses dans plusieurs marques de commerce. L'effort publicitaire et l'effort concurrentiel de certains fabricants ont parfois comme résultat la production d'une combinaison légèrement différente de ses concurrents. Si l'on devait accepter en principe, en bloc, toutes les combinaisons, on ouvre le régime à une situation presque incontrôlable, situation qui serait aussi peut-être — c'est certainement le sens des préoccupations dont s'est fait l'écho le comité consultatif de pharmacologie — préjudiciable à la santé du public étant donné que la multiplication des combinaisons rend plus difficile la médication étant donné les interactions possibles de plusieurs substances que l'on trouve présentes dans le même médicament.

C'est la crainte de ces interactions qui explique, pour une large part, la prudence avec laquelle on introduit les médicaments combinés surr la liste. Ils ne sont pas exclus. La liste s'est rapidement développée sous cet aspect, récemment. Il n'y a aucune exclusion de principe, sauf une indication générale de prudence que les médicaments combinés, qui sont inscrits sur la liste, doivent correspondre à un besoin bien connu et bien caractérisé par les professionnels, dans le secteur.

M. DUFOUR: Une autre question, M. le Président. Certains hôpitaux ont la possibilité de donner des médicaments aux cancéreux, de fournir les médicaments aux cancéreux. Certains autres hôpitaux ne le peuvent pas, même s'ils soignent des cancéreux. Il y a certains cancéreux, qui sont soignés dans mon hôpital, où on ne fournit pas les médicaments et on les astreint à payer des médicaments extrêmement dispendieux, qui vont parfois jusqu'à $75 par mois, alors que s'ils se font soigner dans un autre hôpital, ils ont droit à ces médicaments. Est-ce que c'est possible et est-ce que l'on peut remédier à cet inconvénient?

M. FORGET: La situation, à laquelle vous faites allusion, tire son origine d'un épisode durant lequel un certain programme conjoint fédéral-provincial a permis d'offrir certains médicaments gratuits pour le traitement de certaines affections comme le cancer, comme également le glaucome ainsi que la fibrose kystique. Ces subventions spéciales ont été données, à l'origine, à un nombre limité de centres hospitaliers qui disposaient, dans ces secteurs, d'un centre de spécialisation, soit pour le traitement du cancer, du glaucome ou de la fibrose kystique.

Lorsque ces subventions ont été interrompues, le problème de continuité s'est posé puisque des pratiques avaient été établies pendant plusieurs années et la gratuité a été continuée dans un régime partiel. C'est à cela que je faisais allusion tantôt, lorsqu'en réponse à une question j'ai indiqué qu'il y a ces régimes partiels de gratuité de médicaments, qui, d'ailleurs, ne sont pas limités à ces trois cas mais qui s'étendent également aux malades souffrant de tuberculose, dans les anciens sanatoriums, ainsi qu'aux malades psychiatriques qui sont suivis en externe dans certains centres hospitaliers.

Ces cinq catégories de bénéficiaires constituent en quelque sorte des malades chroniques, qui doivent encourir des coûts de médication assez élevés. Cette situation en vertu de laquelle seulement certains centres hospitaliers sont habilités à distribuer ces médicaments fera l'objet d'un examen de notre part, de façon à voir de quelle manière on peut en faire un régime plus généralement accessible, encore que la médication ne doit pas être divorcée des autres services professionnels. Il est important de ne pas avoir à utiliser un régime de médicaments gratuits pour certaines maladies spécifiques comme substitut à l'existence de ressources spécialisées pour le traitement suivi de ces cas. Donc, je pense qu'il sera probablement nécessaire de maintenir un lien entre certaines ressources, certaines cliniques spécialisées dans le traitement de certaines maladies et la possibilité, pour ces cliniques, de distribuer des médicaments lorsque cela s'impose, dans certains cas bien définis.

Mais les deux ne devraient pas être divorcés. Je pense qu'il n'est pas possible d'envisager une distribution gratuite par n'importe quel hôpital de toute une catégorie de médicaments sans

qu'il y ait là les ressources spécialisées nécessaires pour assurer que cette accessibilité ne donne pas lieu à des abus ou alors à une médication qui se continue au-delà du besoin qui lui a donné naissance.

M. DUFOUR: Mais si le centre peut fournir un spécialiste qui soigne le cancer par la chimiothérapie, qui est habilité et reconnu, je crois qu'on doit lui donner tous les moyens pour rendre service à une population donnée. Autrement, vous n'avez pas de centre, à Québec, assez grand, même à Montréal, pour prendre tous les cancéreux. Alors, il faut diversifier. Il faut soigner les cancéreux à tous les hôpitaux.

Comme vous le savez, la chimiothérapie prend beaucoup de vogue présentement. On en fait beaucoup. A l'hôpital, supposons que c'est payé mais, dès que le malade sort de l'hôpital, cela lui prend une médication per os, par la bouche, et on ne paie pas ces médicaments. Je crois que le cancéreux, c'est un être qui doit attirer notre sympathie plus que les autres et je crois qu'on devrait payer les médicaments.

C'est une idée personnelle que j'ai.

M. FORGET: Je suis d'accord avec le député. C'est un problème important que ce problème d'accessibilité à des médicaments gratuits pour certaines affections chroniques qui entraînent des coûts, en médicaments, extrêmement élevés. Les quelques cas qu'on a mentionnés sont des bonnes illustrations de cela. Nous sommes conscients de la nécessité de nous assurer que l'accessibilité est aussi générale que possible, compte tenu des remarques qu'on a faites sur la nécessité que ce soit contrôlé par un spécialiste dans le domaine de la maladie en question.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Frontenac.

M. LECOURS: M. le Président, je vais renchérir sur les avancés de mon confrère, le député de Vanier. Chez moi, très souvent, j'ai l'occasion de référer des patients, à Sherbrooke ou à l'Hôtel-Dieu de Québec, à des spécialistes qui traitent plus spécialement les maladies cancéreuses. On nous les retourne, chez nous, avec souvent des médicaments et des ordonnances mais ces personnes doivent se déplacer régulièrement pour revenir à Québec ou à Sherbrooke chercher leurs médicaments. Ce ne sont pas tous des millionnaires, ces patients. Ils ne peuvent même pas travailler, ils sont trop malades pour travailler.

Je pense que c'est une injustice envers les patients qui demeurent loin des grands centres, qui ne peuvent pas recevoir gratuitement leurs pansements, leurs médicaments, tel que mentionné par le Dr Dufour.

M. FORGET: M. le Président, c'est un problème réel, mais nous avons aussi expérimenté cette situation dans le cas des malades psychiatriques, il y a quelques années, et nous avons constaté une situation aberrante à cet égard: la distribution, par certains centres hospitaliers, de médicaments par la poste, pour des durées indéfinies sans qu'il y ait, périodiquement, un contrôle sur l'effet de la médication, le besoin de continuer une médication. Il est clair qu'il peut y avoir des aménagements pour des périodes de temps limitées, pour faciliter la distribution des médicaments, et l'accessibilité dans des cas où certains régimes particuliers de gratuité existent. Mais il serait très dangereux de généraliser la pratique de la distribution, par le courrier, de médicaments sans la supervision professionnelle qui s'impose. C'est la raison pour laquelle, s'il n'existait pas de ressources spécialisées adéquates dans un milieu, c'est la seule solution, qui est, malgré tout, peut-être préférable à l'autre, soit que le patient assume lui-même le coût total de sa médication, dans certains cas comme la fibrose kistique, par exemple, qui peut être une dépense absolument incontrôlable pour une famille de revenus moyens.

Alors, un moindre mal, c'est peut-être une visite périodique de contrôle pour vérifier l'effet de la médication et renouveler les prescriptions.

C'est probablement la seule ressource que l'on a, de toute façon, si on ne peut pas multiplier les ressources spécialisées dans tous les milieux.

M. DUFOUR: J'admets votre point de vue, il est excellent, à moins qu'il y ait un contrôle. Mais si le spécialiste qui a traité le cancéreux à l'Hôtel-Dieu de Québec retourne son malade disons à Thetford-Mines, le médecin sur place a le dossier en main et contrôle la médication. Il est là, c'est lui qui contrôle la médication et qui peut dire: On continue ce mois-ci. Je ne suis pas pour qu'on envoie des médicaments par la poste. C'est aberrant cette chose, mais que le médecin sur place vérifie, voie son malade au moins une fois par mois pour dire: on répète encore ce mois-ci, ou on communique avec le spécialiste, on vous retourne dans le centre spécialisé. Je crois que le problème est à étudier, il y a quelque chose à faire. Je ne sais pas ce qu'on peut faire mais il faudra se pencher sur ce problème.

LE PRESIDENT: L'honorable député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, je ne veux pas prolonger le débat, je voudrais simplement poser une question au ministre. Il me semble que, dans ce cas-ci — et personnellement des gens sont venus me voir au bureau avec les mêmes problèmes que celui que soulève le docteur Dufour, qui étaient non pas des assistés sociaux mais des gens à faible revenu — c'est une question qui se rattache à celle que l'on discutait tout à l'heure par rapport aux médica-

merits aux personnes âgées, qui sont des cas frontières. Peut-il exister, à l'intérieur du ministère, un endroit où on étudie des mesures pilotes d'aide avant qu'un certain régime ou un règlement soit établi d'une façon universelle de façon à tenir compte de ces cas marginaux? Je prends comme exemple ces cancéreux. Moi j'en ai eu, en tout cas, qui ne recevaient pas encore l'assistance sociale, et dont l'épouse devait recevoir ces médicaments aussi dispendieux que le soulignait le député de Vanier ou le député de Frontenac tout à l'heure. Elle était vraiment dans l'impossibilité de les prendre ailleurs et elle tenait à se faire soigner par tel type de médecins qui soignait à tel hôpital.

Est-ce qu'il y a un endroit quelconque, à l'intérieur du ministère, où on pourrait s'adresser pour certains cas marginaux, de façon que le ministère monte des dossiers, que ce soient des expériences pilotes, avec toute la relativité nécessaire, et qui pourraient aider éventuellement à l'établissement d'une politique?

M. FORGET: M. le Président, l'établissement de régimes pilotes pour la gratuité de n'importe quel service — il est à peu près sûr que les gens aiment mieux la gratuité que l'absence de gratuité — n'est pas susceptible de nous apprendre rien qu'on ne peut pas soupçonner au départ. La difficulté étant, bien sûr, d'étendre à plus de catégories de bénéficiaires à la fois qu'il n'est financièrement possible de le faire des programmes qui ne sont pas encore universels. Lorsque nous considérons le problème des médicaments, il existe des catégories assez facilement identifiables dont une partie est couverte actuellement, c'est-à-dire les assistés sociaux, pour une part, les personnes âgées qui n'ont pour seul moyen de subsistance que les pensions qu'elles reçoivent de l'Etat et, en troisième lieu, c'est ce sur quoi nous discutions juste avant la deuxième question, ce sont certaines maladies chroniques qui font que le coût de médication devient véritablement un fardeau financier considérable.

Pour la personne qui, durant l'année, va avoir à remplir une ordonnance, de façon très occasionnelle — il faut peut-être se souvenir que, même si le prix des médicaments est élevé, le prix moyen d'une ordonnance médicale est de l'ordre de $3.50, je crois — même si elle a des revenus modestes, à condition qu'il s'agisse d'une expérience qui ne se renouvelle pas fréquemment, il ne s'agit pas d'un problème aussi considérable que certains autres frais que l'on pourrait considérer comme des candidats à des régimes universels. Mais, lorsque la maladie devient chronique, lorsque les dépenses deviennent régulières à tous les mois, et ça indéfiniment, là on a la possibilité de problèmes sérieux sur le plan d'une insuffisance de revenus. Mais c'est un peu l'effort qui est esquissé et c'est peut-être dans cette mesure un effort expérimental que ces régimes partiels de gratuité de médicaments aux malades psychiatriques, qui sont souvent évidemment marginaux quant aux revenus dont ils peuvent disposer et pour qui la médication peut être très lourde, en termes financiers, à supporter s'ils ont à le faire entièrement. Il y a aussi la fibrose kystique qui affecte des enfants et qui engendre des frais de médicaments de $600, $700 ou $800 par année, sans difficulté, et les maladies pour lesquelles toutes sortes de considérations humanitaires, le cancer par exemple, indiquent qu'une aide peut être appropriée et même nécessaire, où le coût des médicaments peut être élevé, d'ailleurs, lorsqu'une chimiothérapie se révèle opportune.

Ce sont peut-être là des projets, si vous voulez, expérimentaux qui ne sont pas encore tout à fait généralisés, comme le député de Frontenac l'a souligné et également le député de Taschereau, mais qui nous permettront d'évaluer l'expérience qui a été faite depuis quelques années et puis d'assouplir ou d'améliorer les mécanismes de distribution. Si l'on a vraiment des réponses pour les maladies prolongées, à caractère chronique, qui requièrent une médication soutenue, on aura fait beaucoup, je pense, pour diminuer le problème auquel on vient de faire allusion.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Elément 1, programme 3?

M. CHARRON: Pour autant que ça ne termine pas la discussion sur l'assurance-maladie, je veux bien adopter n'importe quel élément.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Sur l'assistance-maladie? Cela dépend, si vous avez encore d'autres questions à poser là-dessus.

M. CHARRON: C'est parce qu'on s'est entendu pour faire le débat sur l'assurance-mala-die ici; c'est d'ailleurs pourquoi on a la présence de M. Martin. Nous n'avons discuté jusqu'ici que d'un aspect, celui des médicaments et il y en a d'autres. Le ministre lui-même a fait remarquer que l'entrée en vigueur du régime d'assurance-maladie nous mettait sur la voie où, d'année en année, nous allions évaluer la possibilité d'étendre la couverture de ce régime. Au cours de la dernière année, un pas considérable et fort appréciable a été fait dans le domaine des soins dentaires pour les enfants de 0 à 8 ans. Est-ce que, en tout premier lieu, je peux demander au ministre s'il est possible de déposer une copie de l'entente avec les dentistes, qui est survenue sur cet article?

M. FORGET: Oui, cela a été distribué aux media d'information le jour où cela a été annoncé. C'est un document public, on peut en obtenir des copies; j'en aurai probablement cet après-midi, suivant le nombre; c'est un document de plusieurs pages.

M. CHARRON: D'accord. M. le Président, l'année dernière, nous avions eu une longue discussion —je n'ai pas l'intention d'y revenir — sur l'étendue, le choix, comme le dit le ministre lui-même, ou les frontières que l'on a mises à ce régime. Le choix de 0 à 8 ans avait été largement explicité par le prédécesseur du ministre actuel et avait fait, je pense, le consensus de la commission à l'époque. Il nous avait également expliqué pourquoi, entre le choix de 0 à 8 ans et le choix de 7 à 15 ans, on avait plutôt choisi le premier groupe d'âge qui, à l'époque, totalisait environ 540,000 enfants, si les chiffres sont exacts.

On nous avait dit que, si le programme couvrait plutôt les enfants de 7 à 14 ans, le nombre aurait été de 942,000. Cela veut dire que, si on étendait de 0 à 14 ans les deux groupes à la fois, c'est 1,482,000 personnes au lieu de 540,000, et les coûts auraient été de l'ordre d'à peu près $15 millions.

Est-ce que c'est toujours la même estimation que l'on a cette année, quant à l'étendue générale du programme de 0 à 14 ans? Est-ce que l'évaluation, si on prend comme guide l'entente survenue avec les dentistes, totaliserait encore le même montant de $15 millions?

M. FORGET: C'est sensiblement les mêmes chiffres, mais peut-être M. Martin peut-il donner des précisions là-dessus.

Ce sont les mêmes chiffres puisque l'expérience, qui n'a pas été faite encore avec le programme de 0 à 8 ans, n'a pas démontré que les estimations sont excellentes ou doivent être modifiées. Pour l'instant, disons que ce sont les données qu'on conserve comme estimation préliminaire.

M. CHARRON: En fait, M. le Président, je vous l'ai dit, je ne veux pas reprendre tout ce débat, le choix a été fait et le programme est en vigueur. Il reste que pour une catégorie d'enfants, si vous me permettez l'expression, il s'agit maintenant de droits acquis. Ces enfants, tous les jeunes Québécois entre 0 et 8 ans, ont maintenant le droit d'avoir ces soins de façon totalement gratuite.

Pour le groupe pour qui le programme arrive alors qu'il est dans la dernière année, c'est-à-dire le groupe qui bientôt atteindra l'âge ou le programme ne le couvrira plus, est-ce qu'il est possible de prévoir que ce programme prendra une extension annuelle? Le groupe qui normalement devrait disparaître du groupe qualifiable sera-t-il couvert d'année en année et le programme connaîtra-t-il une extension en suivant l'enfant jusqu'à l'âge de 14 ans, l'âge avec lequel nous avions travaillé l'année dernière? Avant que le ministre me réponde non, je veux savoir s'il en a fait une estimation mathématique, financière, en même temps que politique? Parce que j'ai entendu déjà un dentiste, je ne sais plus lequel en particulier de cette profession, mais un homme que les dentistes avaient choisi pour être leur représentant, qui exprimait le danger que les soins soient interrompus en fin de compte pour des raisons financières, à un moment où l'enfant en est à sa deuxième dentition.

Il est toujours plus important, et on en avait convenu l'année dernière, que ce soit la première dentition, pour un nombre considérable de raisons, qui soit couverte par l'Etat; donc, le choix de 0 à 7 ans était à cet égard justifié. Mais il serait extrêmement malheureux qu'un enfant, qui à l'âge de 6, 7 ou 8 ans, se trouverait à bénéficier des soins, ait à abandonner ces soins pour des raisons financières au moment où il en est à sa deuxième dentition et où il peut avoir plus largement besoin de ce service qu'en tout autre temps.

De 0 à un an ou de un an à deux ans, il est très difficilement pensable qu'un enfant, à moins de circonstances vraiment pénibles, ait à bénéficier de cette gratuité de services. Est-il pensable qu'un enfant qui actuellement bénéficie des services verra ce service le suivre quand il aura 9, 10 ans, graduellement?

M. FORGET: Tout est pensable lorsqu'il s'agit de savoir de quelle manière les frontières, pour reprendre l'expression que vous m'avez attribuée, probablement avec raison — je ne me souviens plus du mot que j'ai utilisé — les frontières d'un régime de gratuité de services et de soins peuvent être repoussées. On peut imaginer, si l'on adopte l'hypothèse que vous avez faite, que le régime se développe de la manière que vous indiquez, en ajoutant un groupe d'âge, année par année. Mais il est aussi possible de considérer d'autres façons de faire évoluer le régime et ceci peut-être à la lumière de l'expérience qui sera faite durant la première année.

Il demeure vrai, de toute manière, qu'à moins d'envisager — ce qui n'a jamais été le cas — que le régime s'appliquerait dans un avenir prévisible et immédiat à l'ensemble de la population, rendu à 18 ans, si c'est là que l'on fait se terminer l'enfance, une partie des arguments que vient de présenter le député de Saint-Jacques pourrait également s'appliquer. On dira ou on pourrait dire à ce moment-là: Une personne qui, depuis sa naissance, a reçu des soins devrait-elle être mise dans la situation de devoir les interrompre ou les faire cesser alors qu'elle parvient à la maturité, à sa majorité? C'est une question qu'on peut sans doute poser.

On peut sans doute souhaiter aussi — c'est un souhait que je fais en même temps que le député de Saint-Jacques et tous les membres de la commission, sûrement — que l'on puisse étendre le régime de manière à en faire bénéficier tout le monde. Cependant, c'est peut-être une approche un peu individualiste au problème de la santé dentaire. Il faudra aussi se poser la question: Est-ce qu'il est plus important de prolonger dans la même lignée ou de s'assurer

qu'effectivement l'ensemble du groupe d'âge déjà couvert reçoit les services prévus dans le régime? Il y a un aspect d'éducation à la santé dentaire dans ce régime qui est important, quelle que soit la limite d'âge qui le définit, qui permet de dire qu'indépendamment des services qui sont fournis, il y a aussi une certaine habitude à la fréquentation du cabinet du dentiste qui est acquise durant cette période, indépendamment de toute considération de revenu parce que tous les dentistes, ou du moins un certain nombre de ceux avec qui j'en ai parlé, sont persuadés qu'une certaine partie de leur clientèle, même de revenu moyen ou supérieur à la moyenne, considère tout simplement comme superflue la consultation du dentiste alors que la dentition permanente n'est pas encore apparue.

Il y a donc un élément d'éducation à faire et il faudra s'assurer que cette base d'éducation à la santé dentaire soit véritablement générale. C'est peut-être là une dimension moins individualiste des objectifs du programme, mais qui me paraît tout aussi importante, de s'assurer que ce régime se réalise pleinement pour un groupe d'âge quelconque; c'est aussi une dimension concevable de l'expansion du programme. Il n'y a pas encore de décision qu'il soit nécessaire de prendre quant à l'expansion du programme puisqu'on vient tout juste de le mettre en vigueur. Encore une fois, c'est un peu l'expérience qui s'accumulera au cours des prochains mois qui nous permettra de voir où sont véritablement les priorités dans le développement. Est-ce tout simplement plus de la même chose ou si c'est un peu autre chose, mais peut-être pour un peu la même clientèle?

M. BEDARD (Chicoutimi): Je ne vois pas en quoi, M. le ministre, vous trouvez que l'approche dont vous parlez, l'éducation dentaire, le fait d'amener les jeunes à la fréquentation des bureaux de dentistes, indépendamment des coûts dentaires, puisse être une approche moins individualiste que celle mise de l'avant par le député du comté de Saint-Jacques à l'effet d'augmenter d'un an à chaque année, par règlement ou autrement, d'une façon très stricte la couverture de manière que les enfants de 8 ans qui, aujourd'hui, bénéficient de la gratuité des services et reçoivent même certains soins ne soient pas en dehors du service tout de suite à partir de l'année prochaine mais, au contraire, puissent continuer la fréquentation, comme vous dites, des bureaux des dentistes avec la différence que ce serait d'une façon tout à fait gratuite.

C'est drôle mais je suis porté à croire que notre approche est beaucoup moins individualiste que la vôtre, à moins qu'on nous dise qu'il y a des sommes énormes à mettre sur l'éducation dentaire dont parle M. le ministre.

M. FORGET: M. le Président, il me fait plaisir de saluer le député de Chicoutimi. Je pense qu'il arrive à point nommé puisqu'on est sur le point d'aborder la santé. Je souhaite qu'il soit parfaitement rétabli.

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai eu l'occasion de visiter l'hôpital de Chicoutimi...

M. FORGET: Cela vous a permis de voir par l'intérieur...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... de voir ses laboratoires, sa clinique d'urgence et sa clinique externe. Les recommandations qu'on fait et les plaintes sont justifiées en grande partie, M. le ministre.

M. FORGET: Je suis désolé de voir que, pour se documenter sur l'état du réseau, il lui ait fallu traverser l'expérience personnellement.

J'espère qu'il n'en fait pas de reproche au service d'information.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je ne suis pas allé aux soins dentaires; je suis allé à l'hôpital.

M. FORGET: La distinction que j'ai faite est basée sur la façon dont la question m'a été posée, peut-être, par le député de Saint-Jacques, en parlant de droits acquis. Si l'on considère le problème sous cet angle, c'est-à-dire d'un droit acquis à l'individu qui a bénéficié de soins gratuitement jusqu'à l'âge de huit ans de recevoir une continuation du régime, c'est un peu en pensant à ça que j'ai songé à une approche individualiste. Il demeure que, même s'il ne continuait pas à recevoir des soins gratuits, comme je l'ai indiqué, arrivé à 18 ans — au moins, le programme actuel ne dépasserait pas l'âge de 18 ans dans l'avenir prévisible — le même problème pourrait se poser, la même question pourrait être formulée. Mais je pense qu'au-delà des services qu'il a reçus il a aussi contracté une habitude de fréquentation, il a été sensibilisé à l'importance de la santé dentaire. La santé dentaire qu'on lui aura permis de conserver ou même d'améliorer jusqu'à l'âge de huit ans aura préparé sa dentition permanente de manière plus satisfaisante que ce ne serait le cas autrement. Même s'il y avait interruption du régime, il y aurait déjà un acquis qui est une sensibilisation, une éducation, une préparation, simplement sur le plan de la dentition permanente qu'il a au moment où il a atteint huit ans.

M. CHARRON: Justement, M. le ministre, peut-être que cette éducation, cette sensibilisation à l'importance des soins dentaires qu'il aura eues parallèlement à la gratuité des soins, de zéro à huit ans — encore une fois, je fais référence au porte-parole des dentistes qui exprimait la grande intention qu'avait cette profession d'accorder autant de soin au côté préventif et à l'éducation qu'aux services au cabinet— importance qui deviendra quotidienne maintenant, justifient que la personne en

question, une fois intéressée à la protection de ses dents, veuille bénéficier de services adéquats par la suite. Ce qui serait dommage, c'est qu'une fois rendus à neuf ans, alors qu'ils sont sensibilisés à l'importance de visiter leur dentiste, de suivre tous les traitements nécessaires, aussi bien préventifs que curatifs, ces gens ne puissent pas pour des raisons financières le faire. En fin de compte, cela ressemble à certaines initiatives locales où on crée littéralement un besoin, où on répond de façon parfois inadéquate à un besoin pour le retirer par la suite, une fois que la clientèle s'y est habituée. C'est le cas des garderies, c'est le cas de l'aide aux personnes âgées et on est dans un cas, là. Je pense que votre approche justifie exactement notre position également et qu'elle justifie l'étendue progressive du régime, d'année en année, pour suivre cette clientèle.

M. FORGET: Votre exemple est peut-être mal choisi, puisque, si on comparaît vraiment aux garderies, c'est plutôt la situation où l'enfant n'a plus recours aux garderies, parce qu'il est trop vieux, que l'interruption de la subvention elle-même. Le programme va continuer.

M. CHARRON: Vous ne voulez pas revenir là-dessus.

M. FORGET: Mais je n'ai pas indiqué qu'il ne se développerait pas dans la direction d'une limite d'âge supérieure. Vous m'avez posé la question: Est-ce concevable? J'ai dit: Oui, c'est concevable. Il est également concevable de voir se développer le régime d'une autre manière, si son développement dans une autre dimension parait prioritaire par rapport à celle-là. Il n'est pas question, je pense, de droits acquis. C'est un concept qui ne semble pas s'appliquer dans ce cas.

M. CHARRON: Non, non, d'accord.

M. FORGET: Mais il me semble qu'il s'agit, en plus des services reçus, de la préparation d'un enfant, de son éducation à certaines dimensions de son état de santé. Il sera important de savoir et de s'assurer que des mesures soient prises aussi, par hypothèse, si ce n'était pas le cas, pour assurer une accessibilité générale et aussi uniforme que possible au moins à ces services de zéro à huit ans. Je pense que, de ce côté, il aura des efforts qui paraîtront aussi concevables.

M. CHARRON: Puis-je demander au ministre, M. le Président, ou à M. Martin, qui possède peut-être ces chiffres, dans le nombre d'enfants, combien d'enfants, actuellement, sont couverts par le régime 0 à 8 ans?

M. FORGET: Environ 600,000.

M. CHARRON: Vous l'évaluez à 600,000.

Dans le groupe frontière des huit ans, ceux qui, l'année prochaine, s'il n'y avait pas étendue du régime, le quitteraient, de ce groupe, combien...

M. FORGET: De mémoire, ce sont des enfants qui sont nés — nous sommes en 1974...

M. CHARRON: 1966.

M. FORGET: ...huit ans avant en 1966. Il me semble que la génération, cette année-là, était autour de 95,000 naissances. En gros, ce serait le chiffre qui me viendrait à l'esprit mais il faudrait vérifier.

M. CHARRON: Donc, aux alentours de... M. FORGET: Autour de 95,000.

M. CHARRON: ...90,000 à 95,000 jeunes de huit ans. Est-ce que l'on peut faire une projection financière, pour ces 90,000 jeunes qui auront neuf ans l'année prochaine, si on devait leur assurer également les soins comme ils les ont actuellement?

M. FORGET: On pourrait le faire assez grossièrement parce qu'on connaît mal l'effet du programme...

M. CHARRON: Le coût.

M. FORGET: ...sur le plan financier. On a fait une estimation. Elle a été publiée d'ailleurs. On dit que le programme pourrait coûter, pour une année complète, environ $9,500,000, tel qu'il est conçu actuellement. Mais, personnellement, j'ai des réserves sur cette estimation, tant qu'on n'aura pas fait l'expérience au moins de quelques mois de programme. Mais, si l'on fait ça grossièrement, on pourrait dire qu'une tranche d'âge pourrait représenter peut-être $1 million, comme première estimation.

M. CHARRON: C'est $1 million à peu près.

M. FORGET: A peu près, j'imagine. Cela est fondé vraiment sur des données très estimatives dans le sens qu'on n'a pas l'expérience de la fréquentation du dentiste...

M. CHARRON: C'est dix fois le prix d'un ascenseur qu'on n'utilise pas, à peu près.

M. FORGET: Je ne suis pas au courant du prix des ascenseurs.

M. CHARRON: Je vous ferai parvenir un document, M. Martin.

M. FORGET: Je l'ai lu.

M. CHARRON: Autre aspect, M. le Président, de l'assurance-maladie. Le ministre y a fait allusion. Peut-être pourrais-je l'inviter à élaborer plus longuement sur ce qu'il a men-

tionné tout à l'heure, les prothèses, ce qui peut-être éviterait des questions que, de toute façon, j'ai l'intention de lui poser.

Quelles sont les intentions? Quel est le programme à venir dans l'étendue de la couverture du régime d'assurance-maladie au chapitre, en particulier, des prothèses?

M. FORGET: L'intention est manifeste depuis près d'un an puisque lors de l'adoption du projet de loi 21, en juillet dernier, l'inclusion dans la couverture du régime des prothèses a été spécifiquement prévue. Un comité a été formé en septembre, je crois. Il m'a remis son rapport il y a environ deux ou trois semaines. Ce comité était présidé par un physiatre de Québec, le Dr Denis Jobin. Nous sommes actuellement à considérer les implications de ce rapport pour une mise en application d'un régime de gratuité des prothèses orthopédiques.

La couverture exacte du régime a fait l'objet de certains travaux du comité qui a été créé à cette fin. Les recommandations du comité font, à leur tour, l'objet d'une analyse pour ce qui est de l'application finale, définitive, formelle de ce projet. Un certain nombre de questions administratives demeurent à être réglées. Il faudra aussi, comme dans le cas de l'assistance-médicaments, déterminer les prix. C'est une responsabilité qui incombe au ministre de déterminer les prix. Cette détermination ne peut pas être faite indépendamment des mécanismes de distribution qui sont retenus. Enfin, la couverture elle-même doit être précisée, comme je l'ai indiqué tantôt.

De toute manière, ce sujet demeure à l'étude. Je rencontrerai prochainement l'ensemble du comité pour discuter d'un certain nombre de questions et d'interrogations que je me pose à la suite de la lecture que j'ai faite de son rapport et d'une analyse sommaire qui en a été faite.

M. CHARRON: Est-ce qu'il est possible que vous demandiez à ce comité de reprendre son travail?

M. FORGET: Non. Je n'anticipe pas de lui demander de reprendre son travail. Il a fait un travail excellent.

M. CHARRON: Mais sur certains points, je dis.

M. FORGET: Les interrogations que nous nous posons sont basées sur la nécessité pratique d'administrer un régime alors que le comité avait surtout pour but d'en définir la configuration générale en allant simplement au-delà de la prescription qui se trouve dans la loi: que le gouvernement peut rembourser des prothèses.

Mais quelles prothèses, comment, distribuées de quelle façon, jusqu'où, etc.? Alors on a apporté un certain nombre de réponses, mais qui ne sont pas nécessairement administrables comme telles sans un certain nombre d'autres décisions sur les prix, sur certains mécanismes de distribution.

Mais le rapport — et je ne voudrais pas, par les interversions qui demeurent et que j'exprime, indiquer que le rapport est insatisfaisant, loin de là — est un rapport très bien fait, qui nous apporte un très grand nombre d'éléments de réponses.

M. CHARRON: M. le Président, ces questions sont importantes parce que depuis que la loi a été modifiée et qu'elle laisse donc entrevoir l'entrée en vigueur toujours prochaine et éventuelle de cette gratuité, plusieurs handicapés, qui ont à attendre ce service, en connaissant la gratuité prochaine, attendent. Selon certains rapports médicaux, dans certains cas cela peut être dangereux pour certaines personnes.

La question que j'ai à poser est claire: Maintenant que l'Assemblée nationale s'est prononcée — si ma mémoire est fidèle — unanimement pour que ce service fasse partie du régime d'assurance-maladie du Québec, maintenant que le comité a fini son travail, est-ce qu'on peut s'attendre que le ministre, dans la suite logique qu'il doit donner au rapport du comité, fasse diligence? Et quand pouvons-nous prévoir — est-ce au début de l'automne ou à une autre date? — l'application de la loi déjà votée il y a presque un an?

M. FORGET: Malheureusement, M. le Président, étant donné encore une fois ces interrogations qui demeurent, je ne suis pas en mesure d'annoncer une date. Malheureusement, encore une fois, c'est un sujet qui demeure à l'étude.

Bien sûr, nous faisons diligence. Nous sommes conscients que lors de l'annonce théorique de l'introduction d'un régime, il y a beaucoup d'attente et d'expectative qui sont engendrées et, donc, des retards qui sont volontaires, dans certains cas, et qui peuvent porter préjudice dans une certaine mesure.

Cependant, nous avons la responsabilité d'avoir un régime qui soit justifié. Il s'agit d'achat d'équipement assez coûteux. Il faut un régime qui soit responsable au point de vue de l'implication de professionnels qualifiés dans un réseau de distribution. On part de zéro, en quelque sorte, dans ce secteur.

Donc, nous ferons diligence et je peux indiquer que la date qui sera éventuellement annoncée se situera certainement à l'intérieur de l'exercice financier pour lequel nous étudions les crédits.

M. CHARRON: Je l'espère. Par une conférence de presse, j'imagine, ou une déclaration ministérielle, sans que nous ayons copie du texte avant la déclaration, pour continuer les bonnes façons de procéder que le ministre a employées?

M. FORGET: Pourvu que vous l'ayez pendant, c'est déjà... Cela me donne le plaisir de...

M. BEDARD (Chicoutimi): ......... vous allez l'annoncer.

M. CHARRON: M. le Président, il y a d'autres domaines prévisibles où l'assurance-maladie pourrait être étendue. Je ne sais pas si c'est dans l'immédiat ou dans un avenir plus lointain mais, enfin, on en a déjà fait une question: la chiropratique, d'une part, c'est un sujet qui est sur la table depuis suffisamment longtemps, la physiothérapie, les services d'ambulance, n'est possible d'envisager qu'un jour ou l'autre cela se greffe au régime d'assurance-maladie du Québec?

Dans les trois domaines que je viens de mentionner, quelle que soit la date où les possibilités financières et les décisions politiques concorderont, est-ce que le ministre a encore l'intention de procéder à peu près de la même façon que pour le domaine que nous venons de quitter, soit celui des prothèses, c'est-à-dire modifier la loi d'abord, et inclure, ensuite, une disposition dans la loi qui ferait que l'entrée en vigueur de telle et telle disposition de la loi est à la discrétion du lieutenant-gouverneur en conseil, faire faire les recherches, les travaux, attendre les rapports de comités et, ainsi — j'emploie l'expression, même si elle est un peu forte — faire languir les gens qui, plus nécessairement que d'autres, attendent l'entrée en vigueur de ces dispositions, ou s'il attendra d'être parfaitement assuré, jusqu'au niveau du Conseil du trésor, qu'il peut promouvoir l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions de l'assurance-maladie avant de les annoncer publiquement?

M. FORGET: M. le Président, pour ce qui est des développements immédiats, il faut dire que l'amendement de l'été dernier permet d'aller plus loin que nous irons effectivement sur le simple plan des prothèses orthopédiques. D'ailleurs, un autre comité a été mis sur pied pour étudier le problème des prothèses visuelles, des aides aux personnes aveugles ou partiellement aveugles. Certains équipements électroniques nouveaux permettent des développements fort intéressants dans ce secteur, mais il y a aussi présumément d'autres éléments qui peuvent être inclus.

Ce sujet est à l'étude de façon concurrente. Nous n'avons pas encore de rapport dont nous puissions faire état à ce sujet. La question générale ou la question de principe soulevée par le député de Saint-Jacques me semble mener à une seule réponse, qui est la suivante: Lorsque l'on considère le développement des régimes universels, lorsque l'on considère, en particulier, l'acceptation d'un principe d'élargissement de la couverture d'un régime, on prend une décision d'une telle importance qu'il me semble approprié de la faire débuter par un projet de loi qui permet de signifier à tous une intention sur un sujet capital. C'est toujours une dimension nouvelle que l'on ajoute puisqu'à l'intérieur même d'un contexte où les services sont déjà assurés, les modifications de détail ne requièrent pas des mesures législatives. Mais lorsqu'on veut déboucher sur un champ entièrement nouveau, il me parait assez normal d'avoir recours d'abord à une loi qui autorise le gouvernement à entreprendre ces études et ces travaux.

Si l'on veut faire précéder les lois de travaux, on anticipe une décision de principe fort importante. On ne résoud pas pour autant les expectatives puisqu'elles peuvent toujours se nourrir d'autre chose que des projets de loi, et l'on place peut-être l'Assemblée nationale presque devant un fait accompli. Il me semble qu'il est plus normal, dans la plupart des cas, quand on envisage une nouvelle couverture, de le faire par un amendement à la loi.

M. CHARRON: Si tous les ministères, ou même le vôtre — tenons-nous en à celui des Affaires sociales — avait nécessairement besoin d'un nihil obstat de l'Assemblée nationale avant d'entreprendre des études dans les différents domaines qu'il a à couvrir, on n'en finirait pas. Je pense que le ministère des Affaires sociales, dès 1971, se penchait sur la question des garderies; un rapport a été fait à ce sujet, ç'a été repris, rediscuté, aussi bien à l'intérieur du ministère qu'avec le public, et, que je sache, il n'y a jamais eu de loi adoptée, enfin depuis que je suis ici, en tout cas, qui établisse un réseau de garderies par la loi avant même qu'on ne sache si on a les possibilités matérielles ou politiques de le faire. C'était la même chose, je pense: on n'a pas attendu la Loi de l'assurance-maladie...

M. FORGET: Est-ce qu'on suggérerait que l'on présente un projet de loi sur le sujet?

M. CHARRON: Sur les garderies? Gardez ça pour plus tard. C'est une discussion intéressante, ne mélangez pas ce qui s'en vient.

Je n'aime pas la distinction que vient de faire le ministre parce qu'elle me paraît ne pas résister à l'analyse bien longtemps. Dans nos traditions, la façon de procéder des gouvernements lorsqu'un principe est soumis à l'Assemblée nationale et adopté, c'est que toutes les études en cours, son évaluation et tout ça... Sinon, c'est la responsabilité d'un gouvernement que de soumettre à l'attention des élus du peuple un projet quelconque en disant qu'il en a lui-même assumé la portée politique, la portée financière et qu'il juge apte autant son conseil des ministres que la population en général à connaître ce projet de loi. Je ne voudrais pas que ça se reproduise parce que dans le cas des gens qui attendent pour les prothèses, c'est depuis le 7 juin 1973, si je ne m'abuse, que cette loi a été adoptée, il y aura bientôt presque un an, et on ignore encore la date où cela entrera en fonction.

J'ai posé cette question d'ordre général, avec des exemples particuliers sur lesquels j'aimerais

revenir maintenant. D y a, par exemple, le service ambulancier; je sais que nous en reparlerons lorsque nous parlerons également des systèmes d'urgence dans les hôpitaux. Mais la possibilité de greffer le service ambulancier à la gratuité du régime d'assurance-maladie, est-ce que, actuellement, au sein du ministère, cela fait l'objet d'études? Est-ce qu'il y a, avant même que la loi soit adoptée, un comité qui s'est penché sur la question pour voir s'il est bon ou non de la soumettre à l'Assemblée nationale à un moment ou l'autre? Par exemple, j'imagine que les CRSSS ont partie liée un peu dans la consultation qui doit être menée à cet égard. Que se fait-il du côté du service ambulancier au point de vue de la gratuité? Je ne parle pas au point de vue du fonctionnement, nous en parlerons plus tard; je parle de la possibilité de joindre la gratuité des services ambulanciers aux autres services déjà couverts par F assurance-maladie.

M. FORGET: J'aimerais, malgré tout, préciser — puisqu'on y est revenu — la réponse générale que je faisais tantôt. Il est exact que le projet de loi 21 de l'an dernier a précédé les études du comité Jobin sur les prothèses. D'autre part, il serait inexact de prétendre que la loi a été présentée à l'Assemblée nationale sans le bénéfice d'une évaluation préalable de la possibilité d'un tel régime ou d'une telle extension du régime et de ses avantages. Le Dr Gustave Gingras a remis à mon prédécesseur, avant l'étude de ce projet de loi, même avant sa rédaction, une étude préliminaire, qui était une étude de "faisabilité" — pour employer probablement une mauvaise traduction — d'une telle extension. Mais c'était une étude qui démontrait les avantages de l'extension, ses possibilités, sans dire comment elle se ferait. Le comment suit l'adoption du principe; je pense que cela, c'est assez logique.

Pourquoi sommes-nous, à cette date-ci, presque un an après l'adoption du projet de loi, encore à pied d'oeuvre? Pour toutes sortes de raisons qui tiennent, d'une part, à ce que le comité a été créé en septembre; il a eu douze séances de travail; son mandat original était très bref. Mais, comme souvent il arrive à des comités où les gens qui y fonctionnent siègent à temps partiel, parce qu'ils ont d'autres occupations, il n'a pas pu remettre son rapport avant, disons, la fin d'avril — je pense que c'est à peu près ça — ou la mi-avril. Donc, il n'était pas question d'une mise en vigueur au 1er janvier, puisque nous attendions dans l'intérim. Il est difficile de bousculer les gens dont on sollicite l'expertise dans de tels cas où ils ont d'autres occupations dont ils acceptent de se dégager de façon limitée.

Ce sont des aléas qui sont inévitables dans la mesure où un ministère essaie de faire appel à une expertise qui est extérieure à ses propres ressources. Et dans tous les cas, malgré la meilleure volonté du monde, on encourt de tels délais. Maintenant, pour ce qui est des autres projets, j'imagine, ou des autres questions auxquelles a fait allusion le député de Saint-Jacques, il est évident que nous procéderions de la même façon, par une étude de "faisabilité" qui précéderait le projet de loi. Après, probablement un comité serait formé en collaboration avec la Régie de l'assurance-maladie, si c'était la Régie de l'assurance-maladie qui administrait un régime particulier, de manière que ça s'applique et que ce soit administrativement faisable. C'est la démarche que nous avons poursuivie dans le cas des prothèses.

Pour ce qui est des ambulances, la distinction que le député de Saint-Jacques fait entre les problèmes de fonctionnement et les problèmes de financement est appropriée. Nous avons considéré que la priorité dans ce secteur, c'était d'améliorer le fonctionnement de ces services et c'est là-dessus que nous aurons bientôt des mesures à annoncer. Pour ce qui est du financement, il s'agit d'une autre question à laquelle nous n'avons pas attaché le même caractère de priorité. Il existe, dans la plupart des régions du Québec, non seulement des ambulances, mais parfois trop d'ambulances.

Le problème essentiel, c'est d'assurer leur coordination, entre elles, et leur coordination avec les services d'urgence hospitaliers et évidemment leur expédition rapide sur les lieux d'un accident. Tout ce problème de coordination ou de fonctionnement revêt un très haut niveau de priorité quant à nous. Les problèmes de financement qui peuvent exister seront étudiés subséquemment.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Taschereau.

M. BONNIER: Est-ce que je pourrais poser une question d'ordre très général à ce moment-ci? Au début de l'étude de ces crédits — vous le direz si je suis hors d'ordre — j'ai demandé au ministre s'il pouvait nous donner une idée des priorités de son ministère, et on nous a distribué un texte, nous donnant les idées générales. Ce que je trouve difficile dans la discussion des crédits de ce ministère-ci, c'est que, quand on aborde la question des affaires sociales et qu'on relie ça aux humains qui existent, tout semble être prioritaire.

Evidemment, on peut toujours donner des services sous forme de plus en plus gratuite et, à mesure qu'on passe programme par programme, on voudrait pousser plus loin les crédits qui sont affectés à tel ou tel type de services. Moi, j'aimerais bien, pour mon intelligence et pour la bonne disoussion de ces différents crédits, qu'en tant que membre de la commission on puisse aussi établir une espèce de pondération entre les différents services nécessaires aux besoins humains.

Il semble bien que la première priorité d'un ministère comme le ministère des Affaires

sociales, ce serait de fournir des services que j'appellerais de survie d'abord, comme premier palier. Que ce soit dans le domaine des besoins sociaux, que ce soit dans le domaine des besoins médicaux, que ce soit pour les enfants, que ce soit pour les vieillards, j'aimerais que dans nos discussions, si c'était possible, on ait toujours une espèce de lumière qui s'allume, puis qui nous dise: N'oubliez pas les autres domaines. C'est une remarque qui m'est revenue à la suite de la suggestion du député de Saint-Jacques, par rapport à l'extension à donner au programme dentaire.

C'est bien sûr que c'est très valable en soi, mais si on donne de l'extension à tel service, dans la globalité des crédits qui sont disponibles au ministère des Affaires sociales, ça peut vouloir dire que dans d'autres domaines on en aurait moins. C'est peut-être plus particulier à ce ministère-ci, peut-être qu'aussi le ministère de l'Education est concerné là-dedans par rapport à des besoins humains fondamentaux auxquels le ministère doit d'abord correspondre.

Après ça je trouve qu'il y a des besoins du développement des individus auxquels on pourrait aussi accédérer si des crédits existent. J'aimerais, moi, que cette idée d'ensemble existe dans l'étude des crédits et que si nécessaire, à un moment donné, le ministre nous dise: Je suis bien d'accord là-dessus, mais cependant, étant donné tel autre aspect que vous allez aborder ou que vous avez abordé, on ne peut pas. Je veux dire il y a une espèce d'équilibre dans tout ça, que j'aimerais qu'on ait constamment en vue. Autrement, on peut pousser le ministère à intensifier tel programme mais, dans l'allure générale du ministère, on peut aboutir à un manque d'équilibre par rapport aux besoins fondamentaux des gens.

Je donne un exemple. On va parler de vieillards, et je suis préoccupé de la question des vieillards, comme je suis préoccupé de la question des garderies, si on voulait regarder les deux extrêmes. Mais où est-ce que je vais mettre de l'importance, est-ce que c'est ça, est-ce que ce sont les soins dentaires? Cela me préoccupe constamment, je n'ai pas de réponse, mais j'aimerais bien que le ministre à un moment donné dise aux membres de la commission: Ecoutez, on pourrait pousser un peu plus loin, mais on ne peut pas à cause de telle chose. C'est quand même lui et les officiers de son ministère qui sont responsables de cet équilibre, puis il faudrait qu'en tant que membre de la commission on le garde aussi. Je ne sais pas si les autres seraient d'accord.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président l'intervention du député de Taschereau est loin d'être hors du sujet, je pense, elle est même très importante, à mon avis. Quand nous étudions — je ne veux pas donner de leçon au député de Taschereau en me basant sur ma longue expérience parlementaire, mais je veux simplement expliquer comment nous fonctionnons depuis le début — le budget du ministère, pour l'Opposition ou pour n'importe quel membre de la commission, peu importe l'allégeance politique, il y a deux choses à retenir, à mon avis: d'abord, un budget, en soi, porte des choix. Ce qu'il faut trouver, nous, lorsque nous posons des questions, c'est quels ont été les choix du ministère.

Vous avez parfaitement raison, il y a les garderies, il y a les soins aux vieillards, il y a les soins dentaires aux enfants, il y a le service ambulancier et quoi encore? Tout à l'heure, on parlera d'autres domaines, de consultation psychosociale. Tous ces domaines, à la fois, sont à couvrir et ne peuvent pas être tous couverts en même temps de façon totale; de cela, tout le monde en conviendra. Ressources humaines, ressources financières, etc., tout contribue à imposer une limite. Ce qu'a fait le ministre actuel, pour nous proposer un budget de cette envergure, c'est qu'il a fait en notre nom, au nom des Québécois, puisque c'est sa fonction, des choix. Il a dit: Dans tel domaine, ce sera cela pour cette année; dans tel autre, nous mettons plus; dans tel autre domaine, c'est à l'étude, on verra avant d'agir. Ici, nous soutirons cette information, nous allons rechercher quels ont été ces choix et, par la suite, nous pouvons les critiquer, dire qu'à tel endroit, dans le respect de la fonction qu'il occupe et en même temps pour la responsabilité du poste que nous occupons, nous croyons qu'il a fait un mauvais choix; ou, comme je l'ai signalé tantôt, lorsque l'année dernière on a décidé que, parmi toutes les priorités qu'il pouvait y avoir, vraiment les priorités de tous les domaines, il fallait donner aux enfants jusqu'à 7 ans la gratuité des soins dentaires, nous l'avons fait à ce moment-là, cela a été un excellent choix, l'année dernière.

Il y a d'autres endroits, par exemple les garderies, où le choix a été moins bon à notre avis, où on a mis moins de disponibilités — et humaines et financières — où, politiquement, il nous semble qu'on s'oriente mal. On aura l'occasion de le signaler, mais l'étude des crédits est faite pour cela. Soyez convaincus — je le dis aussi bien à l'intention du député de Taschereau que du ministre lui-même que de n'importe quel autre membre de la commission — que même si j'assume pour la première fois ce rôle aux Affaires sociales, je me base sur mon expérience pour dire que je ne veux pas perdre de vue le fait que la tâche est immense à couvrir. Mais quand je pose des questions comme, par exemple, sur l'extension du service des soins dentaires, une évaluation, M. Martin me répond et je prends sa parole que, grosso modo, l'extension, que nous soumettions et que nous proposions parce qu'elle nous semblait bonne, en fait, c'était notre choix à nous, nous

le suggérions au ministre, est de l'ordre de $1 million à peu près, elle signifierait $1 million par la suite.

C'est une information qu'il est bon de déposer sur la table parce que ce sera au ministre, au cours de l'année qui vient, à faire le choix. Evidemment, si nous proposions quelque chose qui signifierait un déboursé de $500 millions pour la première année, je vois mal le réalisme de notre proposition et vous feriez bien de nous rentrer dedans à corps perdu et le ministre ferait bien de la rejeter de la main. Mais là, nous avons une proposition sur la table et nous laissons au ministre le soin de nous dire que la proposition que nous avons faite n'est pas irréaliste. Politiquement, elle me semble bien se tenir, aussi bien dans la qualité des soins que dans la réalisation du but, de l'objectif de la gratuité des soins partout.

On laisse au ministre le soin de vérifier si, dans le budget qu'il nous présentera l'année prochaine, il n'est pas possible de trouver, dans les deux milliards quelque cent millions de dollars, $1 million pour le faire.

Enfin, c'est cela et soyez convaincus que, pour le reste, nous allons encore en sortir, des priorités. On va encore sortir du terrain à couvrir, mais toujours...

M. BONNIER: II faut voir à un équilibre aussi.

M. CHARRON: ... en vue de voir ce qui a été fait, quels choix ont été faits et quels autres choix pourraient être faits. C'est la discussion, il me semble, que nous avons depuis le début et qui est profitable. Je ne pense pas qu'on ait fait perdre le temps de quiconque depuis le début.

M. BONIER: Ce n'est pas ça que je veux dire.

M. CHARRON: Non, non, j'en conviens.

M. BONNIER: Cela ne s'adresse pas juste à vous autres.

M. CHARRON: M. le Président, puisque nous achevons, j'espère terminer le programme 3 par quelques questions plus particulièrement sur l'administration de la régie pendant que nous avons son porte-parole.

L'année dernière, nous avions discuté des abus qui avaient déjà lieu, disait-on, dans l'utilisation du régime par des médecins. On avait mentionné, à l'époque, l'existence du comité de révision. Mêmes certaines enquêtes ont eu lieu sur certaines situations anormales qui avaient été portées ou à l'attention du directeur de la régie ou du ministre des Affaires sociales lui-même. Je voudrais savoir ce que la régie, dans son administration, a fait au cours de l'année à ce chapitre précis des abus qui lui étaient signalés et en vue d'éviter ceux qui pourraient se produire.

M. FORGET: Les mêmes procédures essentiellement se sont poursuivies. Enfin, vous connaissez le système, je pense, de vérification de services auprès des bénéficiaires. Selon ce système, tous les professionnels sont échantillonnés et font l'objet d'une vérification — sur une période de deux ans, on les passe tous — à partir de questions posées aux bénéficiaires, à savoir s'ils ont bien reçu les services pour lesquels le professionnel a réclamé de la régie. Il y a, par ailleurs, des plaintes qui viennent directement à la régie. Au cours de l'année — je n'ai pas le chiffre précis — des plaintes qui ont été déposées ou encore d'enquêtes qui ont été amorcées, mais le processus se poursuit. Les enquêtes interviennent dans les cas où on détecte des irrégularités de la part des professionnels. Au total, depuis le début de la régie, quelque 600 plaintes ont été examinées, parmi lesquelles un certain nombre ont donné lieu à des enquêtes, parce qu'elles paraissaient motivées. Il y a eu des poursuites intentées dans environ 50 cas. Actuellement, la décision des tribunaux a été rendue dans 33 cas, dont 30 touchaient les professionnels eux-mêmes, puisque trois bénéficiaires ont été condamnés pour avoir fraudé la régie effectivement.

M. CHARRON: Et les 30 professionnels ont-ils été condamnés?

M. FORGET: II y a eu deux acquittements sur les 30.

M. CHARRON: II y a deux acquittements sur les 30.

Une fois que ces professionnels ont été condamnés par les tribunaux suite aux démarches de la régie, est-ce que le cas revient ensuite devant l'Office des professions ou le corps professionnel lui-même?

M. FORGET: Tous ces cas sont signalés au collège en question, à l'Ordre des dentistes ou à la Corporation professionnelle des médecins.

M. CHARRON: Est-ce qu'il s'agit surtout de médecins, dans les 28 cas?

M. FORGET: Ils sont plus nombreux. M. CHARRON: Oui.

M. FORGET: Surtout; médecins omnipraticiens ou spécialistes.

M. CHARRON: Savez-vous si l'ancien Collège des médecins, je ne sais plus comment l'appeler maintenant...

M. FORGET: La Corporation professionnelle des médecins.

M. CHARRON: La Corporation professionnelle des médecins. Je suis de la vieille époque; j'ai du mal à me recycler.

Savez-vous si des dispositions ont été prises par l'Association professionnelle des médecins à l'égard de ces médecins depuis le temps où les tribunaux ont rendu leurs sentences?

M. FORGET: Des dossiers ont été soumis au collège par la régie. Mais le collège, à cause des dispositions de son ancienne loi, avait assez peu de moyens, je pense, d'agir, et dans beaucoup de cas il n'a pu agir. C'est la raison pour laquelle les comités de révision ont été établis l'an dernier par la même loi 21, au mois de juillet, pour que des profils de pratique puissent être soumis à ces comités pour analyse et pour recommandations à la régie quant au montant à payer.

Auparavant, ces dossiers étaient envoyés au collège. Les profils étaient soumis aux différents collèges. Mais les mécanismes dont ils disposaient à ce moment ne leur permettaient pas d'agir comme, je pense, les nouvelles loi vont leur permettre de le faire par l'intermédiaire de leur comité de discipline.

M. CHARRON: Je voudrais revenir tout à l'heure sur les comités de révision qui sont inclus dans la loi 21. Mais, encore une fois, sur les sentences, si vous voulez, la régie n'a aucun moyen de pression ou quoi que ce soit auprès des associations professionnelles pour que des mesures disciplinaires soient prises à l'égard de ceux qui ont été en faute?

M. FORGET: Non. Le seul moyen qu'on a est de leur transmettre l'information. Quant aux actions à prendre, c'est le collège qui les détermine lui-même par sa procédure interne et par sa réglementation.

M. CHARRON: Maintenant, quand ces professionnels ont été trouvés coupables, il s'agissait, j'imagine, d'avoir fraudé la régie en demandant le remboursement d'actes médicaux non commis ou...

M. FORGET: Pour services non rendus. M. CHARRON: Services non rendus. M. FORGET: C'est le cas le plus général.

M. CHARRON: Est-ce que dans les sentences des honorables juges se trouvait l'obligation de rembourser la régie pour les montants en cause?

M. FORGET: Non. La loi prévoit des amendes jusqu'à un maximum de $1,000 par chef d'accusation. C'est tout ce que la loi prévoit.

M. CHARRON: Est-ce qu'il y a eu, effectivement, remboursement de la part de certains professionnels?

M. FORGET: Dans certains cas, oui.

M. CHARRON: Pouvons-nous dire dans la majorité des cas de fraude?

M. FORGET: Je pense que oui, on pourrait dire dans la majorité?

M. CHARRON: Et pour les bénéficiaires du régime...

M. FORGET: Pour eux, il y a eu seulement la condamnation à une amende.

M. CHARRON: Versée...

M. FORGET: Evidemment, c'était pour de petits montants, en général. Quand même, c'étaient des fraudes.

M. CHARRON: Les comités de révision sont au nombre de cinq, comme la loi le prévoit?

M. FORGET: C'est exact.

M. CHARRON: Comment fonctionnent-ils?

M. FORGET: II y en a quatre de formés, actuellement.

M. CHARRON: Oui.

M. FORGET: Celui des optométristes ne l'est pas encore. La loi prévoit leur établissement, leur composition...

M.,CHARR0N: Oui.

M. FORGET: ... et donne aux comités de révision la possibilité d'établir eux-mêmes leurs règles de régie interne. Les quatre comités qui ont été formés se sont réunis et ont établi des règles de régie interne pour la conduite de leurs affaires. Ils ont commencé, récemment, à étudier les dossiers qu'on leur a préparés, les profils de pratique de certains professionnels de la santé. C'est un peu tôt pour dire qu'il y a un seul modèle de fonctionnement. Les comités s'interrogent actuellement non seulement sur les dossiers, mais sur la façon d'étudier ces dossiers parce que c'est nouveau comme mécanisme. Ce sont des comités de pairs qui veulent très sérieusement commencer le travail qui leur est confié. Pour l'instant, il n'y a pas de méthode précise de déterminée par eux — ils sont en train de le faire actuellement — devant des dossiers précis.

M. CHARRON: Quand le cinquième comité sera-t-il formé, celui des optométristes?

M. FORGET: La Corporation professionnelle des optométristes avait négligé, contrairement aux corporations professionnelles des médecins et des dentistes, de nous faire parvenir les noms des personnes qu'elle doit désigner et à partir desquelles la nomination du comité de révision est faite.

J'ai donc communiqué par écrit avec la corporation professionnelle pour lui indiquer les obligations que la loi lui impose à cet égard. Tout récemment, la corporation me faisait parvenir la liste de six optométristes à titre de candidats pour la formation de ce comité.

Donc, il sera possible de donner suite, dans un assez bref délai, maintenant, à la formation de ce cinquième comité.

M. CHARRON : Dans les quatre comités déjà existants, n'est-il par réapparu ce conflit à propos duquel même l'ancien ministre des Affaires sociales avait cru devoir intervenir, l'année dernière? Certaines professions verraient, dans l'existence de ces comités et dans ces pouvoirs de la régie, nouveaux depuis la loi 21, l'année passée, une intervention possible de l'Etat dans la pratique de leur profession. Ceci se transposerait, je dirais, par un manque de collaboration assez évident.

J'ai ici des titres: "Les médecins spécialistes prêts à contester les allégations de Castonguay". "Le Dr Robillard déclare: Nous ne tolérerons jamais que la régie contrôle la pratique médicale". Enfin, on sait que là-dessus — fondée parfois, non fondée dans d'autres cas — il existe une espèce de sensibilité à outrance chez des professions au sujet de tout contrôle, et non seulement dans la pratique médicale. Je crois que la régie ne va pas jusqu'à ce point. Il reste que le public, les citoyens, les contribuables sont sceptiques quant à l'application véritable du régime. Bien des gens, enfin, ont l'impression — les quelques cas que M. Martin nous a signalés le laissent voir, même si cela ne doit pas entacher toutes les professions et la réputation de tous les professionnels de la santé, je ne crois pas — que l'entrée en vigueur du régime a signifié, pour la plupart de ces professionnels, une augmentation de revenus, une possibilité assez aisée de passer à la "castonguette", comme on l'a appelée, comme l'a signalé le député de Rouyn-Noranda, qui participait à nos débats la semaine dernière.

En même temps, dit-on, pour les citoyens, une diminution de la qualité des soins, c'est-à-dire maintenant qu'ils fonctionnent à la "castonguette" il est beaucoup plus difficile de les avoir, etc.

En fait, tout ce climat qui entoure l'exercice des professions de la santé est parfois fondé sur le fait que les professions, médicales ou paramédicales, sont très réservées quant à l'ouverture de leur dossier au public et à l'Etat.

Alors, est-ce que, quant au travail de ces comités de révision, on a senti une résistance, de la part des professions, quant au rôle, essentiel à mon avis, que doivent jouer ces comités de révision?

M. FORGET: Comme M. Martin l'a indiqué, l'expérience est trop courte pour l'évaluer. Ces comités ont été formés à la fin de 1973. Ils ont eu leur première réunion au tout début de l'année 1974. Ils se sont mis à l'étude des dossiers en premier lieu pour déterminer les modes d'action, une méthode de travail. Il n'est donc pas possible de savoir si la création de ces comités aura l'effet recherché.

Je crois qu'il faut leur donner le temps de faire leurs preuves. Ce sont des comités qui vont de pair, mais cela garantit au moins que les standards qu'ils vont appliquer ou les jugements qu'ils vont porter vont refléter des préoccupations professionnelles et non pas simplement des préoccupations de contrôle financier.

D'autre part, ils ont, d'après la loi, une fonction assez claire qui est justement d'être saisis des cas qui, à première vue, apparaissent irréguliers et effectivement voir s'il y a irrégularité ou pas. S'ils devaient constater que, dans tous les cas, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, on serait en droit de se poser la question à nouveau. Je pense qu'il faut leur donner le bénéfice du doute et croire que ceux qui ont été désignés par leur corporation professionnelle pour siéger à ces comités vont s'acquitter de leur devoir consciencieusement. Il n'y a pas de raison d'en douter, pour le moment, et il n'y a pas, je pense bien, en général de raison d'en douter. C'est une hypothèse qui est à la base de la création de ces comités à savoir qu'on peut avoir cette séparation des rôles entre, d'une part, la corporation professionnelle qui se préoccupe strictement des dimensions professionnelles, sans se préoccuper directement des implications financières des modes de pratique et une structure ad hoc qui s'intéresse, avec la participation de professionnels, à ces dimensions, mais de façon presque exclusive.

C'est une façon de faire les choses; il faut voir à l'expérience si ça va être une façon heureuse de faire les choses. Pour le moment, nous n'avons aucune raison d'en douter. Encore une fois, il faut leur donner le temps de faire leurs preuves.

M. CHARRON: M. le Président, pour ce qui est du programme 3, j'ai terminé. Je veux remercier M. Martin que j'ai eu le plaisir de retrouver après avoir travaillé avec lui aux crédits de l'Education. J'espère que l'année prochaine vous ne serez pas au ministère de l'Agriculture, parce que, là, je ne vous suivrai pas.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, éléments 1, 2 et 3 du programme 3, adoptés. La commission suspend ses travaux jusqu'à 16 heures cet après-midi, pour le programme 4.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

Reprise de la séance à 16 h 16

M. LAFRANCE (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs! De retour à l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales, programme 4: Services communautaires. Elément 1: Soins généraux. Adopté.

M. CHARRON: Vous essayez de passer entre les deux joueurs de défense, si j'ai bien compris.

M. FORGET: M. le Président, avant que nous commencions les délibérations j'aimerais faire distribuer le texte de l'entente relative à l'assurance-maladie intervenue entre le ministre des Affaires sociales et l'Association des Chirurgiens-dentistes du Québec, conformément à la demande qui a été exprimée ce matin. Je vous souhaite de lire ça dans les premières heures de la journée, c'est une lecture qui est plus facile avant neuf heures le soir.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Cela endort bien.

M. SAMSON: M. le Président, le ministre m'a souligné en Chambre que je n'avais pas été des vôtres ce matin. J'ai l'impression que ça ne vous a pas permis d'avancer plus, vous êtes...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Nous autres, on l'a constaté.

M. CHARRON: On était complètement désorienté.

M. LECOURS: Vous auriez appris des choses, par exemple.

M. SAMSON: Oui?

M. LECOURS: Vous auriez appris d'autres choses.

M. SAMSON: J'espère que vous avez délégué quelqu'un pour m'en parler.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Oui, le journal des Débats.

M. SAMSON: Le journal des Débats? Je ne suis pas "liseux".

M. FORGET: Vous trouverez bien quelqu'un pour vous faire la lecture à haute voix.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le programme 4. Vous savez que nous avons 17 programmes à étudier et nous en sommes au quatrième. Le député de Chicoutimi a demandé la parole.

Services communautaires M. BEDARD (Chicoutimi): Au niveau du programme 4, concernant les CLSC, je comprends qu'il est très tôt pour faire un bilan de cette expérience. L'honorable ministre a eu l'occasion de faire une tournée, bien des contacts et bien des déclarations. Il est peut-être en mesure de nous donner des renseignements au moins sur ses impressions concernant les rencontres, en fait, concernant la mise en marche des CLSC jusqu'à maintenant non seulement quant à leur utilité mais quant à leur efficacité.

On sent déjà que la mise sur pied du réseau est peut-être plus difficile que prévu en ce sens qu'une des principales raisons de cette difficulté serait peut-être la résistance que cela rencontre au niveau du milieu même, en particulier, en tout cas en ce qui regarde notre manière de voir les choses, une résistance tout à fait particulière, des professionnels de la santé. Cependant, nous aimerions attirer l'attention du ministère sur certains dangers qui guettent l'implantation du réseau.

Si l'on se réfère au texte de base où étaient exposés les objectifs que le ministère pousuivait en créant les CLSC, on se rappellera qu'il devait y avoir trois types d'activités à l'intérieur du CLSC, à savoir: l'accueil, des services intégrés de santé et de services sociaux et l'action communautaire. De l'extérieur, il semble que la médecine traditionnelle soit vraiment très privilégiée par rapport à une approche intégrée. Je crois normale dans un sens cette résistance tout à fait particulière de la part de la médecine traditionnelle, mais je crois qu'il faudrait essayer de trouver des solutions afin de rectifier cette tendance.

Est-ce que le ministère, ou le ministre dans ses tournées a fait son propre bilan de l'expérience et pourrait nous en faire part, quitte à revenir avec d'autres sous-questions? Je comprends que c'est une question très générale.

M. FORGET: M. le Président, c'est en effet une question très générale et c'est une question qui est, dans une certaine mesure, prématurée, puisque l'on nous invite à tracer un bilan d'une expérience qui, malgré le temps qui s'est écoulé depuis le début des discussions sur ce concept, est encore à ses débuts. Donc il y a un bilan qui ne pourrait être qu'extrêmement provisoire et qui ne pourrait être qu'un bilan d'étape. Il serait peut-être intéressant — et je vais peut-être le demander à M. Nepveu — de tracer un tableau des efforts faits durant l'année pour l'implantation de ces services et des difficultés rencontrées. Ce n'est un secret pour personne qu'une approche innovatrice dans ce secteur est susceptible de créer et de soulever un grand nombre de problèmes qui pourront être résolus en temps et lieu, et sans aucun doute des difficultés dans la transition d'un régime de prise en charge, en premier lieu, de la santé publique qui était très traditionnelle vers une prise en charge différente, et, aussi, d'une intégration de plusieurs éléments de service qui, jusqu'à maintenant, ont toujours été considérés un peu comme en vase clos.

Donc, il y a à la fois le changement des orientations pour certains programmes spécifiques et une mise en commun de certaines activités qui, auparavant, je ne dirais pas s'ignoraient les unes les autres, mais fonctionnaient largement en parallèle.

Malgré tout, on est au début de cette expérience. Le député de Chicoutimi a raison de souligner les trois activités ou les trois éléments de programme — enfin, ce n'est certainement pas la bonne désignation à leur donner si on ne veut pas introduire de confusion dans nos débats — les trois facettes, si vous voulez, du fonctionnement des CLSC. Il s'est montré inquiet de la prédominance qu'il décèle ou qu'il croit déceler des services médicaux dans les CLSC.

Je pense que ce serait être trop optimiste quant aux difficultés mêmes d'implantation que de parler d'une prédominance des services médicaux, puisqu'il y a des difficulés à ce niveau, que l'on n'ignore pas. Il y a, malgré tout, dans l'évaluation des besoins qui est faite, une certaine prépondérance qui est souvent exprimée pour des services médicaux qui représentent parfois la facette la plus connue de l'éventail des activités que supporte le ministère des Affaires sociales et, donc, peut-être, la direction où se porte, en premier lieu au moins, la préférence des populations, des clientèles intéressées.

A tout événement, peut-être que le plus utile, c'est de passer à une description sommaire de l'expérience et de l'étape où nous en sommes dans cette expérience.

M. BEDARD (Chicoutimi): Disons, quand même, que j'avais dirigé mon intervention surtout dans le sens de la résistance qui pouvait être décelée de la part des professionnels de la santé. Je comprends que je ne voulais pas demander un rapport à l'honorable ministre sur l'ensemble de tout ça. Le fonctionnaire pourra nous le donner tout à l'heure. Mais sur le point précis de la question que je vous ai posée, de la préoccupation, en fait, qu'on a pu remarquer de l'extérieur concernant la résistance au niveau du milieu des professionnels de la santé, suite à ses contacts, suite à ses rencontres avec les CLSC, quelle est l'opinion du ministre sur ce point particulier? Je crois qu'il est plus en mesure de nous le dire que...

M. FORGET: M. le Président, je ne veux pas indiquer un ordre pour procéder. Mais je me demande si cela n'aiderait pas l'intelligence de la discussion de procéder d'abord par une description sommaire de ce qui a été fait...

M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord.

M. FORGET: ... quitte à faire des commentaires d'ordre général ou particulier subséquemment.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous me répondrez par la suite. D'accord.

M. FORGET: Depuis que la Loi sur les services de santé et les services sociaux a été adoptée, loi dans laquelle on retrouve la définition de ce qu'est le centre local de services communautaires, il y a eu 69 projets d'annoncés et 69 projets pour lesquels il y a eu un peu ou beaucoup de travail de fait, parce que certains projets sont quand même très récents.

Jusqu'ici, nous avons onze CLSC en activité. Nous en avons en activité presque complète mais il me faut nuancer parce que vous avez fait allusion, tantôt, aux grands ensembles d'activités dans les centres locaux, à savoir les services d'accueil, les services de santé, les services sociaux et l'action communautaire.

Nous ne retrouvons pas, généralement, les quatre ensembles d'activités bien équilibrés. Dans certains milieux où la demande pour les services de santé étaient très pressante, notamment dans des milieux ruraux éloignés des centres hospitaliers, ce sont des services de santé qui se sont implantés en premier. Dans ces centres locaux en milieu rural où les services de santé ont été implantés en premier, dans certains cas les médecins du milieu ont participé très activement à la mise en place d'au moins une partie de l'établissement du secteur qui les concernait, donc de la distribution des soins. Dans d'autres, c'est un fait que les médecins du milieu ont suivi l'expérience et, dans ces cas, ils ont observé de jeunes confrères qui ont, pour reprendre une expression du président de la Fédération des omnipraticiens, tenté l'expérience pour le milieu rural.

Ainsi, graduellement et assez lentement, sont venues se greffer des activités de services sociaux et, dans certains cas aussi, des activités d'accueil. Je ne saurais dire, toutefois, que dans le milieu rural les activités d'action communautaire soient en ce moment très actives. Dans les milieux urbains, c'est différent. D'ailleurs, l'approche d'implantation a été différente parce que certains centres locaux de services communautaires étaient presque enracinés dans la population, en ce sens que les milieux avaient été informés, animés, les citoyens avaient été invités et motivés à prendre en charge leurs propres problèmes, tant et si bien que c'est probablement les activités d'action communautaire ou d'organisation communautaire qui ont prévalu. Ces mêmes citoyens ont fait appel aux ressources professionnels du monde de la santé et du monde des services sociaux.

Il y a eu des expériences heureuses et il y a eu des expériences moins heureuses. Pour ne citer qu'un cas, le cas d'Hochelaga-Maisonneu-ve, j'ai quand même pris connaissance, à un moment donné, du rapport d'un médecin qui s'est retiré de l'entreprise, mais qui nous conseillait fortement de la reprendre et de la poursuivre parce qu'il avait foi en cette entre-

prise. Où il nous parait, quand même, dans l'ensemble des expériences que nous tentons, le plus facile de procéder, c'est encore quand on prend vraiment le temps de suivre le processus que nous avions défini au départ, à savoir qu'on prenne le temps de bien informer la population, de telle sorte qu'après et rapidement la population puisse prendre en charge cette expérience d'implantation, tout en s'adjoignant, par exemple, ce qu'on a appelé, nous, des animateurs-analystes qui ne sont pas du ministère. Il reste que le ministère, en fait, ne fait que désigner un chargé de projet qui est fort utile lors de la période d'information.

Il est utile non pas pour influencer la population, non pas pour prendre des décisions à la place de la population, mais plutôt pour permettre quand même aux gens de communiquer plus facilement avec notre grosse boîte administrative qui est quand même assez complexe. Alors, le chargé de projet aide beaucoup les gens à entrer en contact, à se mettre en rapport avec les divers services de notre ministère.

M. CHARRON: Je ne veux pas vous interrompre...

M. FORGET: Non, non, allez-y.

M. CHARRON: Ce chargé de projet, justement, c'est un des premiers articles à point d'interrogation dans la réalisation de la mise sur pied des CLSC. Est-il exact de dire que, dans certains cas — vous avez mentionné 69 et, en passant, je voudrais demander si on peut avoir la liste complète des projets d'implantation des CLSC, de ces 69 cas — la personne même ou le choix même du chargé de projet nuit — certains groupes l'ont maintenu — à l'implantation du CLSC ou peut causer des difficultés à l'implantation du CSLC, du fait qu'il paraissait, à certains groupes, dans certaines régions du Québec et dans Montréal également, être imposé?

M. FORGET: II est bien sûr que, lorsque nous avons, dans un service, une quinzaine d'employés appelés chargés de projets, nous n'obtenons pas de chacun tout ce que nous pourrions souhaiter obtenir. D'abord, il me faut dire, à la décharge de ces chargés de projets, qu'en général ils sont très jeunes. Ce n'est pas un défaut...

M. CHARRON: Non.

M. FORGET: ... mais ce que je veux dire, c'est que quand ils ont commencé, ils n'avaient même pas l'expérience d'un processus complet; également, certains chargés de projets étaient des gens qui avaient vécu en milieu urbain et, pendant les années précédant leur entrée au travail, en milieu universitaire, qu'ils ne connaissaient peut-être pas toujours très bien les réalités du monde rural, du milieu rural.

Je pense que la société québécoise est formée d'un certain nombre de sociétés. Alors, nos chargés de projet font leur propre expérience et peut-être, malheureusement, sur le dos de certaines populations. D'autre part, je dois vous dire que les autorités au ministère étaient très conscientes de ce problème. Notre ministre, très tôt après avoir pris charge de son ministère, a demandé à rencontrer le groupe de l'action communautaire, avant je crois tous les autres chargés de programme et on en a beaucoup chez nous.

Egalement le sous-ministre, le chef du service de l'action communautaire et moi-même, depuis trois mois, rencontrons régulièrement nos chargés de projet. Je pense qu'il y a eu chez eux une évolution non seulement à cause de ces rencontres — ces rencontres ont certainement été bénéfiques — mais également à cause de l'expérience graduelle que ces gens prennent dans les divers milieux. En plus, nos chargés de projet, qui n'étaient pas nombreux au départ, actuellement ils sont en nombre suffisant...

M. CHARRON: Quinze?

M. FORGET: ... ils sont une quinzaine. On me dit douze, alors il y en a trois à venir. Douze ce n'est quand même pas beaucoup pour ce nombre de projets. Ils étaient moins nombreux il y a quelque temps, puisque j'ai appris le nom, moi, ce matin, d'un nouveau chargé de projet. Alors ces chargés de projet ont été appelés à pied d'oeuvre à se présenter tantôt dans un milieu rural, tantôt dans un milieu urbain et encore là les milieux urbains différent les uns des autres.

M. CHARRON: Ces jeunes fonctionnaires, moi je crois au mérite de leur âge, pour ce type de travail particulier qu'ils ont. Je crois que c'est un avantage, je ne dirais pas dans tous les domaines, mais dans celui-là en particulier de mise sur pied. C'est un projet qui à mon avis appartient à cette génération en particulier, le type d'action qui a été menée par cette génération. Le choix de l'âge de ces jeunes fonctionnaires n'était certainement pas mauvais.

Ce qui m'inquiète, et c'est pourquoi je vous ai posé la première question, c'est que les différents échos qu'on en a eus de tous les côtés étaient que, d'une part, ils étaient affreusement universitaires comme on nous l'a dit dans quelques cas, c'est-à-dire que la formation théorique et technique l'emportait sur beaucoup de choses. Je crois que vous l'avez partiellement reconnu vous-même dans ce que vous venez d'affirmer.

D'autre part, à ce désavantage de sortir directement de la serre chaude de Roger Gau-dry ou d'un autre, il y a le fait qu'ils ne provenaient pas du milieu où souvent ils avaient à travailler. Mon collègue de Chicoutimi peut peut-être le mentionner; je ne sais même pas si c'est sa région mais je prends la sienne comme exemple. Pour l'implantation d'un CLSC dans

la région du Saguenay-Lac Saint-Jean, d'un ou de deux CLSC, n'aurait-il pas mieux valu, tout en faisant confiance à la jeunesse et au dynamisme de ses fonctionnaires, que cette personne soit du milieu, qu'elle connaisse la mentalité du Saguenay-Lac Saint-Jean?

Vous avez dit vous-même que la société québécoise est constituée d'un grand nombre de petites sociétés. On en est au tout début, mais je crois que la première maladresse — je ne veux pas leur faire porter le blâme non plus — la première erreur de tactique dans l'établissement de CLSC a commencé là. Je ne suis pas obligé de croire tout ce qu'on me donne comme informations sur les CLSC, j'en prends et j'en laisse, je vous prie de me croire; je ne prends pas comme parole donnée tout ce qui me parvient, mais on me dit que cela a été, dans certains cas, parmi les difficultés d'implantation de CLSC, vraiment un facteur important. Pour d'autres, cela a été un agacement; les groupes, aussi bien les professionnels que la population du milieu, ont fini par passer par-dessus ou alors l'évolution dudit chargé de projet s'est faite en conséquence, et, après une période d'hésitation, s'est très bien adapté au milieu, travaillent avec le milieu à la réalisation du projet. Mais dans d'autres cas, cela a été plus difficile et cela a fait mal de faire démarrer le projet.

M. FORGET: D'accord, mais je dois tout de même dire que dans tous les cas l'animateur analyste n'est pas imposé par le ministère, n'est pas désigné par le ministère. L'animateur analyste, c'est le groupe promoteur, le groupe qui s'intéresse et qui prend l'affaire en main qui le recrute. A ce moment-là, le chargé de projet n'est pas en cause, ce n'est pas lui qui impose un animateur analyste dans le milieu, c'est le milieu qui choisit son propre animateur analyste.

M. BEDARD (Chicoutimi): II est toujours en relation, quand même, avec le chargé de projet qui, lui, va à une école unique plutôt que d'avoir la formation du milieu.

M. FORGET: Evidemment, notre chargé de projet — et il n'a probablement pas tort dans les circonstances — se perçoit un peu comme un agent de changement, un agent de développement, si vous voulez, dans un milieu donné. Tout tient à ses qualités humaines, après cela. Je me souviens de Fridolin qui disait un jour, dans une revue, en parlant des colonisateurs: On s'en vient vous fonder. Si notre chargé de projet se présente en disant : On s'en vient vous changer, je pense bien que cela ne marchera pas.

M. CHARRON : D'accord.

M. BEDARD (Chicoutimi): Mais à partir du moment où ce chargé de projet est un agent de changement, tel que vous le dites, ou un agent de développement, comment peut-il changer efficacement sans avoir, au préalable, une connaissance pratique du milieu lui-même? Avant de changer le milieu, la meilleure formation pour le changer c'est la formation qu'on a de la connaissance de ce milieu.

M. FORGET: D'accord, mais il reste, je l'ai dit, que le chargé de projet est un type qui joue un rôle à fond au niveau de l'information, au départ, et après cela au niveau des relations entre le comité provisoire ou le groupe promoteur et le ministère.

Mais cette action de changement, c'est quand même la communauté locale qui l'assume, ou le groupe qui a accepté de travailler à l'implantation du centre local.

M. CHARRON: M. le Président, nous ne pouvons pas demeurer longtemps sur cette question des chargés de projet, je veux juste avoir une dernière information. Est-ce que ces 12 ou éventuellement 15 personnes dont vous avez parlé travaillent par région ou s'il y a une autre détermination quant à leur travail?

M. FORGET: Par région, oui, mais je sais que j'ai des chargés de projet de Montréal qui vont dans d'autres régions à proximité de Montréal. D'ailleurs, la grande région administrative est divisée en trois régions de services de santé et de services sociaux.

M. CHARRON: Etant donné que les services dans les CLSC sont définis par les conseils d'administration de ces CLSC, comment détermine-t-on les budgets de fonctionnement?

M. FORGET: Les besoins d'abord sont identifiés par le groupe promoteur; les programmes qu'on dit provisoires sont élaborés par le groupe promoteur en collaboration avec le chargé de projet, qui peut fournir des indications, et le programme est présenté à notre direction du financement. Notre direction du financement utilise un certain nombre de critères pour déterminer le budget. Comme je l'ai dit tantôt, dans certains secteurs, on a mis l'accent sur les services de santé parce que les besoins les plus ressentis par la population, qu'il fallait satisfaire, étaient les besoins de santé. Dans d'autres secteurs, cela a été l'action communautaire. Alors, il appartient au représentant de la direction du financement d'en arriver à un certain équilibre. Evidemment, là il se fait de la négociation entre le groupe promoteur, le chargé de projet qui, généralement, appuie le groupe promoteur puis la direction du financement qui a quand même des budgets puis des limites à ces budgets.

M. CHARRON: Tant que le CLSC en est à la phase d'implantation — je pense à chez nous dans le centre-sud de Montréal — c'est encore provisoire. Est-ce que les dirigeants provisoires

participent à l'établissement du budget de fonctionnement, comme vous venez de me le décrire, de la même façon que si la structure était véritablement établie?

M. FORGET: II arrive assez tôt qu'il y a un budget de démarrage pour aider le bureau provisoire à poursuivre son travail. De ce budget de démarrage, on passe à un budget de fonctionnement initital et ce budget de fonctionnement est sujet à révision au fur et à mesure du développement des activités.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez parlé tout à l'heure de 69 projets dont 11 en activité vraiment...

M. FORGET: Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez parlé également dans certains cas d'expériences heureuses; dans d'autres cas d'expériences moins heureuses.

Concernant, d'une façon pratique, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

M. FORGET: Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): Où la classeriez-vous?

M. FORGET: Concernant la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, d'abord, nous n'avons que trois projets dans la région no 2 et le troisième vient tout juste d'être annoncé. Pour ma part, je ne parlerais pas d'expériences malheureuses parce que je ne pense pas qu'il soit monté à mon bureau un problème en provenance de la région no 2. Donc, cela veut dire que les gens se tirent d'affaire. Qu'ils rencontrent des difficultés là-bas, je n'en doute pas, mais probablement pas de problèmes insolubles.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ou encore ils ne sont pas dans les onze vraiment en activité.

M. FORGET: Non, non, d'accord.

M. CHARRON: Je pense que, s'il n'en est pas monté de la région no 2, il en est peut-être arrivé sur votre bureau en provenance du centre-sud de Montréal. Vous comprendrez bien que je m'en voudrais de ne pas en parler cet après-midi. Je ne veux pas faire un cas particulier du CLSC qui couvre la région que je représente ici, mais on m'a signalé qu'une des difficultés était la présence de la ville de Montréal, dans le sens administratif du mot. C'est-à-dire que les ententes avec la ville de Montréal pour l'administration des affaires sociales ont encore un effet lorsqu'il s'agit de l'implantation du CLSC.

Là, je ne crois pas parler uniquement pour le CLSC du centre-sud, mais j'imagine que tous ceux — Hochelaga-Maisonneuve, par exemple — qui se trouvent sur le territoire de la ville de Montréal sont soumis à la même difficulté d'implantation. C'est quelque chose de supplémentaire que n'ont pas d'autres CLSC dans d'autres régions, le fait que la ville de Montréal est partie. Par exemple —je ne parle pas sans exemple — le conseil d'administration provisoire du CLSC centre-sud a été, pendant un long moment, à la recherche d'un dentiste pouvant travailler pour les services de santé. Si je dis que cela a probablement été sur votre bureau, c'est parce qu'on a écrit à un nombre considérable de personnes, d'abord au ministre lui-même, aux sous-ministres, au directeur de la planification, à M. Séguin des affaires sociales à Montréal. On s'est aperçu que, pour l'entrée en fonction d'un dentiste dans le centre-sud de Montréal, tout était bloqué pour la nomination de cette personne à l'exécutif de la ville de Montréal. Pour des raisons, comme d'autres, qui restent à expliquer, Montréal tardait à faire connaître sa réponse.

A mon avis, aux dernières nouvelles que j'en ai, Montréal n'a pas encore fait connaître sa réponse. Est-ce qu'il y a moyen dans l'implantation, et surtout dans le fonctionnement ultérieur du CLSC lorsqu'il sera bien implanté, d'éliminer ou de réduire au minimum les difficultés administratives causées par la présence de la ville de Montréal dans le domaine des affaires sociales pour les CLSC?

M. FORGET: C'est un problème assez étendu dans la ville de Montréal et assez complexe. C'est un problème, dans le fond, auquel on commence uniquement, au cours de cette année, à s'attaquer. Cela touche à la fois les soins à domicile et les services de santé de la ville de Montréal.

L'objectif qui a été poursuivi jusqu'à présent, c'est d'éviter, dans toute la mesure du possible, que les modifications qui sont en cours n'entraînent une diminution des services pour la population — cela a été un des objectifs principaux que le personnel continue à fonctionner dans toute la mesure du possible dans cette période de transition — et d'éviter aussi un dédoublement des services qui va coûter de l'argent inutilement et qui pourrait être difficile à faire disparaître par la suite.

Alors, la seule chose dont on peut vous assurer, c'est qu'au cours de cette année, d'ici à la fin de l'année, des efforts particuliers vont être faits. Il y a eu déjà des rencontres et il y en aura d'autres pour arriver à des ententes avec la ville de Montréal. Il y a des problèmes syndicaux qui sont liés à cela, il y a des problèmes d'intégration de personnel, il y a des problèmes de financement. Nous sommes en train de faire face directement à ce problème au cours de cette année. La décision a été prise, en fait, il y a quelques mois seulement, que l'intégration devrait se faire au cours des douze prochains mois.

M. CHARRON: Si je signale ça, c'est que je crains que l'objectif que l'Assemblée nationale a voté et les principes qui ont été rappelés tout à l'heure, qui entourent la philosophie, si vous voulez, de l'implantation de CLSC soient en danger. Il serait dommage que ce soit une administration municipale stérile qui paralyse la réalisation de cet objectif.

Est-ce que les efforts qui sont faits — je prends votre parole — dans les discussions avec la ville de Montréal vont dans le sens que je signalais tantôt, c'est-à-dire la réduction au minimum de la présence administrative de Montréal et une autonomie des CLSC qui soit équivalente à celle de toutes les autres régions du Québec où il n'y a pas cette présence municipale dans le domaine social?

M. FORGET: Je ne voudrais pas laisser l'impression qu'il y a eu, de la part de la ville de Montréal, des résistances ou des empêchements.

M. CHARRON: Non, non.

M. FORGET: On a eu le même problème, si vous prenez la région de Sherbrooke, d'intégration des unités sanitaires au niveau de certains CLSC et aussi la distinction, à savoir quelles sont les activités qui vont au département de santé communautaire par rapport au centre local.

Ce que vous dites, il y a des problèmes qui sont reliés avec la ville de Montréal, mais on frappe aussi des problèmes dans le sens contraire. Le CLSC, à un moment donné, voit arriver deux ou trois infirmières qui viennent des unités sanitaires et là, ils ne veulent plus les voir arriver parce que ce n'est pas le même groupe, ce n'est pas le même esprit et ce n'est pas la même dynamique. Par contre, ces infirmières doivent s'intégrer quelque part. A l'occasion, c'est au niveau du CLSC qu'elles doivent s'intégrer. Là, les CLSC nous disent: Vous nous les imposez. Tout à fait d'accord qu'on les leur impose d'une certaine façon. Il faut respecter les objectifs du CLSC mais il faut aussi respecter les individus qui travaillent à l'intérieur du réseau et leur assurer d'être capables de fonctionner et de maintenir leur travail dans l'avenir.

C'est un problème assez complexe. Je ne vous dirais pas qu'il n'y aura pas des incidents de parcours mais on en est très conscients et très sensibles.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Frontenac a demandé la parole.

M. LECOURS: M. le Président, j'aimerais connaître le budget glogal pour l'année 1973/74 affecté aux CLSC et celui prévu pour 1974/75.

J'aurais peut-être une autre remarque à faire à propos du chargé de projet. Je suis toujours surpris de voir une ville comme Thetford-Mines, où on envoie un chargé de projet pour lancer un

CLSC, alors que déjà on a des services adéquats dans cette ville.

J'ai remarqué la même chose pour Sherbrooke, alors qu'on a quatre hôpitaux bien organisés, on a même un surplus de lits là-bas, on a un surplus de tout, au point de vue médical, à Sherbrooke. Pourquoi un CLSC dans une place où ils n'en ont pas besoin? Pourquoi, dans mon comté, ne pas penser plutôt à Saint-Méthode, qui est un petit village où il n'y a pas de médecin du tout présentement, où il y a un foyer avec des malades chroniques et seulement une infirmière licenciée pour tout ça?

Il faut se poser de sérieuses questions, à l'heure actuelle. Pourquoi ce gaspillage d'énergie et d'argent, dans les villes où il y a déjà des services médicaux très bien organisés? Pourquoi choisir ces endroits avant de choisir les places éloignées où, réellement, il y a des manques sérieux au point de vue de la santé?

M. FORGET: Relativement à la question des budgets, M. le Président, le crédit que nous examinons comporte plusieurs éléments à plusieurs composantes.

Pour ce qui est des CLSC, la question portait, je pense, sur l'exercice qui vient de se terminer. Relativement aux dépenses pour les centres locaux de services communautaires, il s'agit effectivement d'une somme de $3,800,000. Il faut rapprocher ce chiffre d'une somme de près de $8 millions qui apparaît au même crédit et qui émarge au programme des unités sanitaires. Il faut le rapprocher également d'une somme assez substantielle qui a été, au moment du discours du budget, annoncée comme une charge nouvelle que le gouvernement provincial prenait à ses frais et qui correspond aux dépenses du Service de santé de la ville de Montréal et de certaines autres municipalités, une somme d'environ $7.5 millions. Ceci veut dire, pour ne parler que de l'aspect de la santé des CLSC, que nous dépensons actuellement — ou nous dépenserons, pour le prochain exercice financier — une somme qui atteindra près de $16 millions pour la santé communautaire, ce qu'on peut comparer à une somme qui est inférieure à $7 millions pour les CLSC.

Il s'agit cependant, sur le plan de la santé, en partie des mêmes objectifs. L'organisation remarquable de certains soins spécialisés, dans certaines régions, ne diminue en rien le besoin qui existe.

Il a été reconnu depuis longtemps, témoin le programme des unités sanitaires, témoin, dans certaines villes du Québec, des programmes de santé publique fort bien organisés à certains égards, comme celui de la ville de Montréal et de certaines autres municipalités qui totaliseront, l'an prochain, plus de $16 millions.

Dans ces milieux, les services de santé spécialisés qui sont organisés ont montré qu'il était nécessaire d'organiser des services autres que les services hospitaliers pour prendre en

charge effectivement des mesures de santé publique sur le plan préventif, la vaccination, les cliniques maternelles et infantiles. Je fais malgré tout une brève allusion aux services de soins à domicile qui, dans une large mesure, représenteront l'an prochain — ils sont aussi dans ces crédits-là — une dépense de plus de $9 millions. Ce sont là des éléments épars d'un ensemble de mesures qui ont toujours existé, mais, encore une fois, de façon éparse, et que le centre local de services communautaires, ne s'en tenant qu'au simple aspect de la santé, veut regrouper et réaménager sur un plan local et aussi, ce qui est important, assurer de façon générale, à l'ensemble du territoire du Québec, puisque dans le moment il y a une disparité flagrante entre les centres urbains comme ceux de Montréal et de certaines municipalités de la région de Montréal et Québec, qui bénéficient de cliniques, par exemple, pour les enfants et les mères, les soins dentaires, etc., et les endroits où ces services ne sont pas accessibles de la même façon ailleurs au Québec.

Plusieurs possibilités sont imaginables pour fournir de telles sortes de services. Il a été concevable de prolonger l'implication des municipalités dans la distribution des soins. Cependant on sait que dès 1971, je crois, le gouvernement provincial a accepté, à la demande des municipalités, d'assumer de façon progressive le fardeau financier qui autrefois était assumé par les municipalités. Les municipalités ont clairement démontré leur désir de se départir de cette responsabilité, faisant écho en cela probablement, pour une part au moins, aux recommandations de la Commission d'enquête sur la santé et le bien-être qui recommandait de créer des centres locaux sous l'autorité de corporations autonomes, comme celles qui administrent les hôpitaux eux-mêmes.

On sait également que dans plusieurs pays les services d'unités sanitaires qui sont dotés en personnel par la fonction publique ont été l'objet d'une réévaluation de leur rôle, justement parce que ce statut, la centralisation de ces services, pose des problèmes évidents pour tout le monde, étant donné qu'il s'agit de services qui ne peuvent se donner seulement à Québec, à Montréal ou dans certains centres régionaux, mais qui doivent être disponibles de façon très déconcentrée sur l'ensemble du territoire. Il a paru à la commission qu'il était préférable de placer ces services sous l'autorité de corporations locales. Comme on le sait, la commission d'enquête s'adressait à ce moment-là strictement à l'aspect santé de ces services et elle a suggéré de regrouper sous un même toit, en quelque sorte, les mesures de santé publique, les mesures de santé préventive et de soins primaires qui pouvaient trouver énormément de complémentarité les unes avec les autres.

Lors de l'adoption de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le ministère, qui avait fusionné les activités et les préoccupations propres à la santé et aux services sociaux, a jugé bon d'étendre la couverture de ces services à des services généraux selon la même conception dans le secteur des services sociaux, de manière à rendre accessibles ces services sur une base décentralisée et ne pas intégrer dans les cadres de la fonction publique cet aspect de ses responsabilités, de manière à avoir plus de souplesse, à obtenir des services qui ne soient pas nécessairement uniformes, qui soient mieux ajustés aux besoins des différentes régions.

C'est le but que ces différents services veulent réaliser, veulent concrétiser. C'est un but à la fois d'accessibilité plus uniforme à des services qui existent déjà et qui sont, à partir de cette année, financés entièrement par la province.

Mais ces services n'existent de cette façon, dans une certaine mesure, que dans les centres urbains, plus évidemment, l'addition de nouvelles dimensions sur le plan des services sociaux ou d'actions communautaires où il a été assez souvent démontré qu'un très grand nombre de problèmes au niveau au moins de certains quartiers ne peuvent être résolus de façon satisfaisante, à moins de chercher à impliquer plus activement la population à la prise en charge de certains de ces problèmes. Voilà à la fois les implications budgétaires et la raison pour laquelle ces efforts sont faits, même s'il existe des services de santé spécialisés fort bien organisés.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, ma question fait suite à la question du député de Frontenac et peut-être des députés de l'Opposition quant à l'implantation même ou les décisions qui sont prises lors de l'implantation d'un CLSC. Je pense qu'il ne se pose pas tellement de questions quant à l'objectif général qui est poursuivi. Je pense qu'il y a pas mal de gens qui sont d'accord sur cette décentralisation des services de santé ou des services sociaux. Cependant, je pense que ce qu'on entend dire d'une façon générale c'est qu'il y a peut-être un danger cependant que cette décentralisation ou cette implantation de décentralisation se réfère à certains schèmes acquis d'avance et qui ne correspondent pas à des réalités. Je me demande si — on sait que le principe de base d'organisation communautaire comme un CLSC c'est d'abord d'identifier les besoins du milieu, identifier à un point tel qu'il faut que les gens eux-mêmes soient d'accord pour l'implantation de tel et tel service — dans tous les cas, les onze cas où on a vu des CLSC, cette première étape a été très bien suivie. Tout à l'heure, on a dit que la première étape — et peut-être que j'ai mal saisi — c'est d'informer les gens. Je pense que la première étape c'est beaucoup plus de savoir ce que les gens attendent de la part de ce CLSC en puissance et, après ça, une fois qu'on sait ce qu'ils en attendent, quels devraient être les

services qui pourraient être rendus pourvu qu'il n'y ait pas double emploi avec les services existants et qui correspondent à une volonté réelle.

Si ces différentes attitudes et étapes étaient suivies, M. le Président, je me demande si ce ne serait pas conciliable avec beaucoup de souplesse, de façon qu'on n'aboutisse pas exactement comme ça s'est fait un peu dans le domaine de l'éducation, où on est parti avec un certain nombre de schèmes qui ne répondaient pas tout à fait à la réalité, aux problèmes, comme on le sait. Et on essaie de les ajuster, à l'heure actuelle. Je me demande, moi, si cette première découverte des besoins et l'association — comme M. le ministre disait tout à l'heure — des gens, dans tout ce cheminement, ne devraient pas être très rigoureux comme directives, de façon également qu'une autre directive aussi rigoureuse soit une très grande souplesse quant aux services qui sont nécessaires et offerts dans chacun des milieux.

M. FORGET: M. le Président, il y a une difficulté très considérable lorsqu'un gouvernement, quel qu'il soit, essaie de présenter une formule nouvelle, un projet nouveau qui soit à la fois nouveau et qui soit suffisamment directeur pour effectivement réaliser les objectifs qu'on lui trace qui sont d'effectuer un certain réaménagement, un certain changement, et à la fois assez souple pour s'accommoder de toutes les circonstances particulières. Probablement que si l'on faisait une histoire très détaillée du cheminement de cette implantation des CLSC, on découvrirait que, dans un effort de ne pas diriger, le ministère peut-être, initialement au moins, s'est abstenu, de façon extrême, de préciser les contenus et de préciser les orientations minimums qui devaient se trouver réunis, justement dans le but de permettre un ajustement aux réalités et aux besoins, tels qu'ils sont exprimés au moins par les groupes qui assument la promotion ou le développement de ces ressources.

En effet, il est difficile de dire aux gens: Faites ceci c'est nouveau, c'est un développement et, en même temps, faites ce que vous voulez. On engendre alors une confusion inévitable et on risque de se retrouver avec quelque chose qui est complètement différent de ce qui avait été anticipé. Cela peut être bon ou cela peut être mauvais, mais cela peut aussi être quelque chose qui rende impossible la réalisation d'objectifs qui ont été tracés assez précisément par les recommandations d'une commission d'enquête et aussi par les orientations inscrites dans la loi et dans la vocation même du ministère.

Il est clair que nous devons restreindre notre action à notre champ de compétence dans une large mesure. Donc, il y a certains choix qu'il ne nous est pas possible d'envisager, quitte à devenir un peu toute chose pour toute personne. Mais nous sommes conscients du besoin d'ajuster ces structures nouvelles à des besoins régionaux. Donc, c'est un équilibre difficile à réaliser entre une souplesse et, en même temps, un changement véritable dans une direction qui doit quand même correspondre à des objectifs assez bien déterminés; sinon, on n'aura rien réussi en fin de compte. On n'aura pas réussi à créer cette alternative à des soins spécialisés, cette nouvelle façon, qui, par hypothèse, sous-tend cet effort, de rendre accessibles des soins primaires, des soins généraux à l'ensemble de la population.

Or, c'est cet équilibre qui n'est jamais réalisé parfaitement, que l'on essaie de réaliser et cela par l'intermédiaire d'un très grand nombre de personnes qui ne sont pas également nécessairement informées de tout ce processus et ne partagent pas les mêmes perceptions dans tous les détails, ce qui engendre évidemment des risques de confusion, des risques de difficultés. Cependant, l'expérience s'accumule et elle ajoute aux connaissances de tous ceux qui y participent. Il est possible que l'on puisse entrevoir une période où il y aura beaucoup moins de flottement dans les idées, où un certain nombre de modèles se dégageront, modèles différents, ajustés à des types de circonstances différentes et qui, tout en permettant à la formule d'être assez souple, permettent, malgré tout, d'orienter concrètement l'action dans différents milieux.

On a cité tantôt la distinction qui semble de plus en plus claire entre certains milieux urbains et certains milieux non urbains ou ruraux. Ce sont peut-être deux modèles qui vont se détacher avec plus de clarté. Il va peut-être en apparaître d'autres au cours de l'expérience, ce qui permettra d'être à la fois souple dans l'idée d'un CLSC, mais aussi assez concret et assez précis quant à sa signification dans des circonstances particulières.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Rosemont et, après, le député de Chicoutimi.

M. BELLEMARE: M. le Président, avant de poser ma question, je voudrais spécifier que ça ne s'adresse pas aux individus, mais plutôt au système.

Avant de rêver aux CLSC dans la région de Montréal, ne serait-il pas possible de trouver, au moyen de ces sommes gaspillées pour rien, un système pour décongestionner les cliniques d'urgence dans les hôpitaux de la région de Montréal?

M. FORGET: C'est précisément presque faire une pétition de principe que de supposer que l'on puisse décongestionner les hôpitaux sans présenter une alternative préférable à celle-ci puisqu'en soi elle n'a pas d'autre but que de décongestionner les hôpitaux. Il faudrait donc qu'on nous en suggère une autre qui soit préférable à celle-ci parce qu'elle est plus près

de la population, qu'elle correspond mieux à ses besoins, qu'elle a une approche plus personnalisée envers l'individu qui a besoin de services et qu'elle est moins coûteuse ou une combinaison de toutes ces caractéristiques. C'est précisément pour essayer de trouver cette alternative, essayer de lui donner corps, que l'idée de centres locaux de santé et, subséquemment, de services communautaires a été développée.

Il n'y a pas beaucoup d'alternatives imaginables, du moins, personne ne nous a suggéré un schéma d'organisation de services primaires, sauf un schéma peut-être purement étatique, purement gouvernemental, dont nous avons fait l'expérience C'est une expérience qui est assez longue pour nous permettre de l'évaluer, puisque c'est l'expérience des unités sanitaires dans une certaine mesure. Est-elle tellement favorable, sur le plan professionnel, sur le plan de son efficacité pratique dans le milieu, pour qu'on veuille y ajouter de nouveaux éléments ou, alors, tirer une leçon de cette expérience qui était totalement à l'intérieur des cadres de la Fonction publique.

Est-ce tellement favorable que l'on doive utiliser cette méthode pour la développer et croire qu'on a véritablement une solution de rechange au service hospitalier? Je pense que non. C'est une opinion qui semble partagée par un certain nombre d'observateurs du fonctionnement de ces unités sanitaires ou de ces services de santé publique gouvernementaux.

Il y a toutes sortes de problèmes que cela pose. Cela pose des problèmes, comme on sait, de disparité dans les échelles salariales — encore là, ce n'est peut-être pas impossible d'y remédire mais il semble qu'en pratique ça constitue une difficulté majeure — de disparité dans les statuts, le statut professionnel entre autres. Ainsi le recrutement, l'animation de ces milieux, la motivation de ces milieux risquent de demeurer toujours inférieurs et, donc, être un moins bon substitut à ceux que l'on trouve dans un milieu plus autonome, comme un hôpital ou comme n'importe quel autre type d'établissement qui peut, sans référence toujours aux autorités hiérarchiques gouvernementales, prendre localement un certain nombre de décisions, rapprocher, autrement dit, les décisions sur un très grand nombre d'aspects qui affectent la population, dans l'intérêt de qui ces décisions sont prises.

On pourrait vouloir réformer toute la fonction publique et dire: Les ministères pourront un jour fonctionner aussi bien que les entreprises décentralisées ou l'entreprise privée. Dieu sait qu'on l'a souvent exprimé dans bien des milieux et pour bien des raisons. Si on prend la réalité telle qu'elle est, on ne semble pas avoir d'autre choix que de faire, sur un plan local, une espèce d'organisme décentralisé qui a une certaine mesure d'autonomie, la plus large possible, et qui va développer, ene santé publique, certaines activités de prest plus des services traditionnellement assumés dation de services non spécialisés et développer, donc, une solution de rechange aux hôpitaux. On a recours parfois à ceux-ci sans besoin, simplement parce qu'ils sont là et qu'ils sont très coûteux. Ils ont tendance, on le disait encore récemment, à traiter les gens un peu comme des numéros, un peu comme dans la vieille tradition de l'assistance publique, si l'on veut, puisque essentiellement, à l'origine, les cliniques externes étaient des dispensaires. Il semble que les mentalités qui prévalaient à l'époque se perpétuent malgré que le système, au moins de financement, soit complètement changé.

C'est au moins l'hypothèse de travail qui est faite mais si elle ne répondait pas aux buts, je pense qu'on aurait au moins un problème, à défaut des autres qu'on peut passer sous silence; on aurait au moins le problème d'un défaut de choix valables et également expérimentés dans d'autres régimes ou sous d'autres juridictions.

M. BELLEMARE: Pensez-vous, M. le ministre, qu'avec les CLSC de Montréal vous allez aider à décongestionner les hôpitaux et les cliniques d'urgence? Est-ce que vous trouverez le personnel nécessaire dans les CLSC qui pourrait aider à les décongestionner? Ferez-vous une espèce de pratique de clinique d'urgence?

M. FORGET: Un des buts d'un CLSC, c'est de développer une capacité de réponse, sur le plan médical comme sur le plan social, à des besoins de soins primaires. Ce sont des services de premier contact sur le plan médical, puisqu'il y a un certain nombre d'urgences ou de personnes qui se présentent dans les urgences. Certains ont évalué ce pourcentage à 80 p.c. des gens qui se présentent à l'urgence ou à l'externe puisqu'il y a une certaine confusion dans l'utilisation de ces deux mots. Dans les centres hospitaliers, on peut, avec un simple et un unique contact avec un professionnel de la santé ou un médecin, obtenir une réponse satisfaisante à ses besoins.

De la même façon, on a discuté de certaines urgences sociales dans un autre contexte, lors d'un crédit précédent; il y a du dépannage à faire pour toutes sortes de besoins, des enfants, des adolescents qui sont en fugue, des problèmes d'expulsion de logis, etc. Il y a des besoins, sur un plan local, auxquels il faut faire face et auxquels des organismes comme ceux-là peuvent faire face en plus de l'action d'éducation et de l'action de prévention qui, encore une fois, se déroulent dans le moment et pour lesquelles on a toutes les peines du monde à conserver le personnel qu'on a et, parfois même, à plus forte raison à en engager du nouveau simplement pour remplacer les départs naturels.

On a fait allusion au problème des dentistes. Il peut y avoir des difficultés administratives, il y a aussi des problèmes de recrutement qui se font sentir pour les infirmières également, etc., dans tout ce réseau.

M. BELLEMARE: Merci.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): On reviendra à la philosophie de base peut-être plus tard. M. Nepveu nous a laissé entendre qu'il semblait l'avoir en main, il pourrait nous fournir la liste des projets engagés et l'étape à laquelle ils sont rendus présentement?

M. FORGET: On va vous la remettre ce soir ou demain.

M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord. Est-ce que je pourrais savoir comment se fait le choix des projets, à partir de quels critères? Est-ce que c'est à partir des recommandations de CRSSS ou à partir de projets d'initiatives locales ou autrement, en tout cas, les critères de choix des projets? Je voudrais savoir également si le critère de population qui était déjà défini continue d'être maintenu au niveau des CLSC.

M. FORGET: Je vais répondre. Au niveau de la planification, c'est surtout chez M. Ouellet que se fait le choix à partir des critères. Les critères de population et des districts ont été maintenus au ministère actuellement. L'on tient compte de divers facteurs dans le choix ou la détermination des choix. L'absence de ressources humaines ou physiques est un facteur, la distance des facilités les plus proches sur le plan hospitalier ou autres.

Il y a eu des facteurs de gestion ou d'administration courante, enfin des décisions ont été prises sur des facteurs autres, comme, par exemple, le remplacement d'un type d'institution d'établissement par un autre. On a tenu compte aussi du facteur de l'existence dans le milieu d'une demande de la population qui a été prise en considération, c'est-à-dire qu'il y a eu des endroits où les populations ont été animées préalablement à la loi ou dès le départ de la loi et où il y a eu une demande très précoce de groupes de citoyens qui étaient convaincus du besoin de CLSC, et on en a tenu compte dans la location des premiers CLSC et des listes subséquentes.

Alors on considère les besoins. On considère aussi la demande de la population dans toute la mesure du possible, la distance des centres hospitaliers et, en plus, nos capacités financières ou budgétaires pour l'implantation. Il y a eu certaines erreurs de parcours. Actuellement, la liste est dressée et une liste de priorités a été établie. La liste des derniers projets date d'à peu près huit mois, je pense, et selon nos demandes budgétaires au Conseil du Trésor, il y aura une réévaluation des projets prioritaires pour l'avenir, pour l'année 1975/76, 1976/77. De toute façon, l'impression qu'on a, au niveau de la gestion où est situé M. Nepveu, c'est que, dans le moment, il y aurait un besoin de stabilisation et de mise en place qui ne nous rend pas trop désireux de nous multiplier. Je pense qu'on a besoin d'une période de stabilisation pour mettre en place et faire fonctionner ceux qui existent, leur permettre de s'établir de façon satisfaisante.

M. FORGET: Si je peux ajouter un mot là-dessus, il y a aussi, durant l'évolution du programme, des critères différents qui se sont appliqués à différents moments. Il y a eu initialement des dossiers, antérieurs même à l'endossement public, qu'ils recevaient par la loi, qui reconnaissaient ce mode d'organisation, et aussi des facteurs d'absence presque totale de ressources ou de très grand éloignement.

Il y a eu, dans un deuxième temps, un certain effort pour promouvoir l'établissement de ces centres sur une base régionale, de manière, au moins dans un ou deux cas, à avoir une certaine saturation pour permettre d'en évaluer l'impact, puisqu'il est extrêmement difficile de mesurer l'impact d'une ressource nouvelle sur l'ensemble des autres institutions de santé ou des autres établissements de santé, si l'on n'a, dans une région, qu'un ou deux établissements qui ne couvrent pas l'ensemble du territoire et qui ne permettent pas d'évaluer globalement, lorsque le système ou le réseau sera complet, quel en serait l'impact sur l'utilisation des autres ressources.

Donc, il y a eu une tentative de faire une telle saturation dans certaines régions. Il y a aussi eu une préoccupation de créer des occasions de formation du personnel qui doit travailler dans ces centres locaux de services communautaires, particulièrement du personnel médical. Comme on le sait, nos facultés de médecine se sont traditionnellement plus attachées au développement de spécialistes que d'omnipraticiens et de médecins de famille. Il paraissait nécessaire de provoquer ou d'appuyer les propositions qui ont été faites par certaines facultés de médecine de provoquer ou de susciter le développement de centres où les omnipraticiens pourraient avoir un entraînement approprié pour une pratique de ce genre. Il y a donc eu successivement des critères qui sont intervenus de différentes façons de cette manière-là.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Bourget.

M. BOUDREAULT: M. le Président, pour faire suite à ce que les députés ont dit sur les CLSC et le dégagement dans les hôpitaux, est-ce que les médecins sont consultés par le Collège des médecins, qui est censé être responsable, pour voir si réellement tout est bien appliqué dans les CLSC, les consultations, etc.? Je me réfère toujours à une clinique qui est dirigée spécialement par des médecins. Cela ne coûte pas un sou à la province. Elle se trouve sur la rue Bélanger à Montréal et s'appelle Domus

Medica. Nécessairement, ce sont des médecins qui ont pris en main leur clinique. Ils offrent un service de 24 heures par jour avec des médecins en place et même un service de dentiste en plus. Cela ne coûte pas un sou à la province. Si...

M. CHARRON: Cela tombe bien! Vous avez choisi votre journée pour en parler !

M. BELLEMARE: II ne faut pas généraliser, je connais à peu près tous les médecins qui sont là.

M. CHARRON: Moi, j'en connais quatre.

M. BOUDREAULT: Ecoutez, le service du médecin, qu'on l'ait à la clinique ou à l'hôpital, évidemment, il faut payer le médecin.

M. CHARRON: J'en connais seulement quatre.

M. BOUDREAULT: Je parle de services au niveau des CLSC. On est obligés de construire les bâtisses, les administrer et le médecin est payé de toute façon avec la petite patente.

Ce que je veux dire, par là, c'est que c'est peut-être une clinique qu'il faudrait analyser davantage. Si cela devenait rentable pour la province de Québec d'aider même les médecins à en bâtir d'autres, cela coûterait nécessairement meilleur marché à la province de Québec. Les médecins ne semblent pas d'accord avec moi, mais enfin je sais, par expérience, que ces gars administrent très bien; ils rendent de grands services à la population. Parce qu'ils sont dans un secteur hospitalier, qu'il y a de grands hôpitaux autour d'eux, nécessairement, ils font un grand travail de dégagement des services d'urgence. Ils diagnostiquent et cela évite, à beaucoup de gens, de se rendre à l'hôpital pour rien.

M. DUFOUR: Je crois bien que les médecins n'ont pas besoin de l'aide du gouvernement pour construire. Pour ce qui est, de se servir du CLSC pour débloquer les cliniques d'urgence et les cliniques externes, je m'inscris en faux parce que ce n'est pas le nombre de patients vus de neuf heures à cinq heures dans un CLSC qui va certainement dépanner. Ils en voient à peine dix par jour, pour deux médecins.

Cela vous donne un peu l'idée. Je ne vois pas comment on pourrait débloquer les hôpitaux par des CLSC, du point de vue médical, j'entends.

M. BOUDREAULT: Je ne parle pas des CLSC, je parle d'une clinique médicale exploitée par des médecins.

M. DUFOUR: D'ailleurs, c'est ce qui s'en vient.

M. BOUDREAULT: Bien, je pense que c'est une formule qui...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, je ne veux pas parler de la clinique médicale dont vient de faire état le député de Bourget. Je pense que les journaux se sont chargés eux-mêmes d'en faire la publicité, ce matin. Ils le feront encore.

Je veux plutôt aborder maintenant un sujet qui est propre aux CLSC et qui est directement lié aux dernières interventions des députés ministériels. Ce sont les relations entre les CLSC et les organismes populaires. Je crois qu'une des raisons qui a fait dire à notre aimable collègue de Rosemont que le projet des CLSC était un rêve et qu'on devait plutôt penser à autre chose tient compte d'un état d'esprit très répandu qui fait qu'on aborde toujours avec méfiance les relations avec les organismes populaires.

On a toujours extraordinairement peur de perdre le contrôle, la gestion des citoyens.

Je me souviens très bien du débat sur les CLSC, où nous nous battions pour un nombre accru de sièges au conseil d'administration, pour la participation des citoyens. Les arguments qui nous étaient opposés par le ministre étaient sensiblement rationnels. Mais, à d'autres occasions, les arguments fusant des députés ministériels faisaient preuve d'une crainte énorme pour tout ce qui bouge, tout ce qui progresse, tout ce qui s'unit et tout ce qui se défend dans le Québec.

Parmi les difficultés d'implantation des CLSC — le ministre a passé rapidement là-dessus et je le suivais attentivement — il aurait certainement pu mentionner la résistance du milieu à un regroupement. Des gens qui n'avaient pas l'habitude de parler, qui n'avaient pas l'habitude de se défendre, qui devaient fonctionner parfois à l'encontre du gouvernement sont maintenant appelés à prendre part à la décision.

Si cette décision a emporté l'unanimité de l'Assemblée nationale — si ma mémoire est fidèle — enfin des deux partis qui restent, ce n'était probablement pas aussi unanime dans le coeur de chacun, j'ai l'impression. Si, dans certaines régions du Québec, on connaît aujourd'hui des difficultés d'implantation, c'est parce qu'il existe des organismes qui font des difficultés, qui font obstacle à ces implantations et pour qui la philosophie des CLSC, non seulement n'est pas acceptable, mais est à combattre dans certains cas.

Le ministère lui-même a eu ses démêlés avec les organismes populaires. J'ai moi-même soulevé la question en Chambre à propos du CLSC de la basse-ville de Québec. Le refus d'autoriser le CLSC de la basse-ville de Québec à conclure des ententes avec les avocats populaires a remis en cause l'assurance que l'ancien ministre des Affaires sociales avait donnée à l'effet qu'il n'était pas question de les intégrer au CLSC. Le système devait être souple.

Ce refus a été perçu, par ces groupes, comme une tentative de récupération par certains CLSC de la basse-ville de Québec. Sherbrooke aussi, si

je ne m'abuse, a eu le même genre de réaction.

Je demande encore au ministre de m'expli-quer, encore mieux qu'il ne l'avait fait en Chambre, puisque le climat n'est pas le même ici, ce refus, cette décision. Pourquoi donner une telle interprétation restrictive de l'article 87? Et ma question est encore plus précise, à partir de cet exemple précis où le ministre a refusé une souplesse aux CLSC et, à mon avis, comme je le lui ai signalé à ce moment-là, a pratiqué une interprétation très limitée de la disponibilité que laisse l'article 87 de la loi 65. Est-ce que le ministre ne s'est pas lui-même, à ce moment-là, trouvé à apporter de l'eau au moulin à tous les détracteurs de CLSC, ceux qui disent que ce pourquoi il ne faut pas appuyer les CLSC, c'est que c'est une porte ouverte à la participation populaire? On dit: On se sait pas où cela va nous conduire, on ne connaît pas leurs orientations, on ne sait jamais ce qu'un citoyen va sortir, on ne sait jamais ce que le regroupement de gens qui ne se sont jamais regroupés peut créer. Pour tous les petits potentats locaux qui ont occupé des postes de décision, dans notre société traditionnelle, le moindre regroupement de citoyens, à la base, est une attaque au pouvoir et à la place qu'ils ont toujours occupée dans la société.

Tous tirent profit de la lutte que le ministre mène à l'encontre du CLSC de la basse-ville en disant: Vous voyez, aussitôt qu'on entre les organismes populaires ou qu'on fait appel à la participation des citoyens, ce sont les troubles qui commencent, ce sont les problèmes. On va jusqu'à dire que ce sont des gens d'une option politique différente et que, par conséquent, c'est immédiatement une série de problèmes, qu'on n'aura pas le contrôle sur l'appareil qu'on est en train de mettre en place.

Le ministre ne participera pas à l'étroitesse d'esprit que certains députés ministériels manifestent à l'occasion, il n'est pas lui-même victime de cette étroitesse d'esprit, parce que je crois qu'il défend l'implantation des CLSC et qu'il veille à leur implantation dans la philosophie originale que nous leur avons votée.

Mais le ministre lui-même, par ce genre de comportement à l'égard du CLSC de la basse-ville de Québec, se trouve à ajouter de l'huile sur le feu, à ajouter des arguments aux détracteurs des CLSC et à rendre encore plus difficile leur implantation.

M. BELLEMARE: M. le Président, avant que ne réponde le ministre, je pense que le député de Saint-Jacques a très mal compris ma question. J'ai demandé s'il était possible de décongestionner les cliniques d'urgence. Vous m'avez très bien répondu et, j'ai posé la question: Est-ce que les CLSC pourraient aider à décongestionner les cliniques d'urgence? Alors, je ne vois pas où j'ai dit que j'étais contre les CLSC. S'il veut préjuger, c'est tout ce qu'il sait faire.

M. CHARRON: N'avez-vous pas dit...

M. BELLEMARE: Je vais le laisser aller tant et aussi longtemps...

M. CHARRON: Je n'ai pas l'intention d'amorcer un débat de procédure avec le député de Rosemont.

M. BELLEMARE: Moi non plus.

M. CHARRON: Mais n'avez-vous pas dit ou, alors, je vous ai mal compris...

M. BELLEMARE: Vous avez mal interprété, peut-être.

M. CHARRON: De la façon dont vous articulez peut-être, peut-être avez-vous mal articulé, mais ce qui est parvenu jusqu'à mes oreilles était que vous aviez dit, d'une part...

M. BELLEMARE: Si vous aviez les cheveux coupés...

M. CHARRON: ..."au lieu de rêver aux CLSC". N'est-ce pas ce que vous avez dit?

M. BELLEMARE: C'est ce que j'ai dit.

M. CHARRON: Et n'avez-vous pas dit que c'était de l'argent tiré par les fenêtres?

M. BELLEMARE: Je n'ai pas dit que j'étais contre; j'ai posé des questions.

M. CHARRON: D'accord, en fin de compte, M. le ministre.

M. FORGET: M. le Président, j'aimerais essayer d'apporter un éclaircissement relativement à la question qu'a posée le député de Bourget et à une question sur un sujet différent, mais malgré tout reliée à cela puisqu'il s'agit toujours de CLSC, du député de Saint-Jacques.

Pour ce qui est des cliniques médicales, j'ai indiqué à plusieurs reprises que non seulement nous n'avons pas d'objection à ce qu'il se forme des cliniques médicales, mais qu'on peut même se demander pourquoi il n'y en a pas eu avant aujourd'hui. Certainement, la profession médicale n'a pas à attendre une invitation du ministère des Affaires sociales pour prendre une responsabilité comme celle-là qui consiste essentiellement à assurer, à des conditions raisonnables d'existence et de vie professionnelle pour ses membres, une continuité des services, une permanence des services dans toutes les régions du Québec où un certain nombre de médecins peuvent le faire. Cette évolution n'est pas propre au Québec, d'autres pays l'ont amorcée bien avant nous, la pratique de groupe. Il n'est pas nécessaire, dans le cadre de la profession médicale, d'une pratique autonome et libre, d'avoir aucune indication ou directive gouvernementale à cet effet.

Il est évident que, si un tel développement

s'était produit il y a vingt, dix ou cinq ans, un certain nombre de problèmes auraient été évités, tels que la congestion considérable que l'on retrouve dans les centres hospitaliers et qui est due, dans une part non négligeable, à la sécurité qu'offrent les hôpitaux à cause de leur disponibilité constante, 24 heures par jour et 7 jours par semaine. C'est un développement que j'ai toujours accueilli avec beaucoup de plaisir. C'est évident que ça ne nous coûte rien en sus de ce qui est déjà payé pour l'assurance-maladie. C'est bien normal, de toute façon, puisque ça n'entrafne aucuns frais supplémentaires pour ces médecins; il s'agit simplement d'un regroupement de leurs activités, d'une organisation peut-être plus rationnelle de leur vie professionnelle dont ils sont les premiers à bénéficier par un mode de vie plus raisonnable, qui n'implique pas une présence continuelle et une garde latente perpétuelle.

D'un autre côté, l'organisation des cliniques n'est pas de nature à résoudre tous les problèmes de santé et, en particulier, n'a jamais été suggérée comme une solution à des problèmes de médecine préventive et de santé publique qui sont importants. Ces cliniques offrent un cadre qui n'est peut-être pas entièrement approprié ou certainement pas utilisable sans modification pour l'emploi d'un personnel auxiliaire sans autre qualification. Maintenant, des développements sont toujours possibles pour permettre de donner des meilleurs services puisqu'encore une fois, même si l'ensemble du territoire devait être couvert, dans un certain sens, par les CLSC, il ne s'agirait, en somme, que d'une fraction de la profession médicale et même d'une fraction des généralistes qui serait regroupés dans ce cadre-là; une fraction peut-être importante, mais, malgré tout, une fraction seulement. Il est important que les services médicaux, avec ou en parallèle avec l'organisation de CLSC, soient organisés le mieux possible.

Faire une équation entre la pratique de groupe et le CLSC est, à mon avis, se baser sur une fausse perception, sur une perception im-complète de ce à quoi doivent servir les CLSC. Il n'y a pas double emploi, comme on semble parfois le suggérer; il y a une complémentarité entre les deux qui doit être développée, dont on ne connaît pas encore nécessairement tous les aspects a priori, mais qui fait l'objet de discussions avec la Fédération des omnipraticiens, de manière à voir à quel point ces aspects de complémentarité peuvent être développés ou exploités davantage. Donc, c'est un domaine où il est susceptible — et je suis le premier à l'espérer — d'avoir des développements. Encore une fois, des développements analogues, indépendamment de la création de CLSC, se sont produits dans d'autres pays où j'ai eu l'occasion d'aller et même de bénéficier de ces services. Encore une fois, si, au Québec, l'idée d'un CLSC a servi de stimulant dans l'organisation de tels services, je pense qu'il faut la mettre au crédit de cette initiative en grande partie puisque ç'a sûrement aidé à suggérer l'idée d'une continuité des services personnalisés. Et l'insistance que le gouvernement du Québec, depuis 1970, apporte aux soins généraux par rapport aux soins spécialisés a sans doute aidé aussi et aide sans doute encore à accréditer une telle idée.

Pour ce qui est des remarques relativement aux groupes populaires, j'aimerais peut-être préfacer mes remarques à ce sujet en indiquant qu'il est assez remarquable de voir — et c'est bien là l'essence du problème — que l'implantation des CLSC suscite des doutes dans plusieurs secteurs de l'opinion et de la population. Il s'agit de mettre en présence des groupes qui peut-être se sont peu connus jusqu'à maintenant, qui peut-être ont inévitablement et naturellement certains sentiments de méfiance les uns vis-à-vis des autres, justement parce qu'ils appartiennent peut-être à des couches sociales différentes et qu'ils ont eu peu souvent l'occasion de collaborer. C'est ce que nous les invitons à faire dans une entreprise où ils sont associés à des titres divers. Il est tout à fait normal que les membres de cette commission, dans leur ensemble, se fassent l'écho des différents aspects de ces préoccupations, puisque si ce genre de problèmes n'existait pas l'intérêt même de la formule serait nul, puisque le problème serait résolu ou la question ne se poserait tout simplement pas au départ.

C'est donc l'essentiel et très utile d'avoir des contributions qui illustrent différents aspects des difficultés d'implantation, ce qui permet de mieux comprendre les problèmes que nous traversons et auxquels nous essayons d'apporter des solutions.

Relativement aux groupes populaires, l'attitude qui a été la nôtre relativement — pour être très spécifique — à ces contrats de services d'avocats populaires à Québec a été la suivante, elle se résume très simplement: Nous accueillons avec une ouverture d'esprit totale la collaboration qui peut s'instaurer entre les CLSC et les groupes populaires. Dans le même état de totale ouverture d'esprit nous accueillons les perspectives de collaboration entre les pratiques de groupes, des médecins pratiquant en groupe et les CLSC. Il y a des complémentarités entre tous ceux qui s'occupent des affaires sociales et les CLSC qui sont des éléments du système. Il n'y a aucune réserve de principe quant à ces collaborations.

Cependant, nous avons voulu tracer une distinction très claire entre une collaboration entre des organismes qui ont une existence, qui ont une vie, une autonomie propre, et une décision de créer ou d'établir, décision qui serait prise par le CLSC, en parallèle avec lui-même, des groupes et leur prêter l'essentiel ou la totalité des ressources qui sont nécessaires à leur financement, parce que c'est développer ou pousser l'idée de collaboration jusqu'à la création d'autres organismes. Il me semble que c'est pousser l'idée de collaboration beaucoup

plus loin qu'elle ne s'applique normalement. Il s'agit de collaborer, d'accord nous en sommes, mais s'il s'agit de susciter la création d'autres organismes, de leur donner la totalité de leur financement, nous avons tout simplement rappelé que c'est une chose que le ministère lui-même s'interdit de faire en dehors des cadres de la loi qu'il applique.

La loi sur les services de santé et les services sociaux prévoit certains modes d'organisation, de gestion des services de santé et des services sociaux; elle prévoit qu'il y a des types d'établissements qui sont régis par des corporations et des conseils d'administration ayant une composition bien déterminée.

En dehors de ça, nous n'apportons pas d'aide à des organismes divers qui peuvent être parfois très méritants, mais nous leur demandons de bien vouloir se plier aux exigences générales de la loi. La même exigence — si vous me permettez de continuer, je vais juste terminer sur ces conditions — ... et pour illustrer ce que je dis, quand nous donnons une aide financière à des organismes bénévoles, nous avons adopté la règle de ne pas financer plus de 20 p.c. du budget de tels organismes, de manière qu'il soit très clair que pour 80 p.c. de leur budget, ils dépendent d'autres appuis et répondent véritablement à d'autres attentes et d'autres préoccupations qui trouvent un écho à l'extérieur du gouvernement dans un appui concret.

Il nous semblerait donc un peu paradoxal que des établissements aient une liberté plus grande à cet égard de mettre de côté en quelque sorte l'application des lois qui régissent les services pour financer des organismes qu'ils créeraient en même temps. D'autre part, s'il doit y avoir, même dans ce cadre plus restreint, des contrats de services, il nous semble qu'ils ne doivent pas être des abdications pures et simples du contrôle normal et démocratique que ces conseils d'administration peuvent exercer sur les services.

Après tout, il y a une loi qui prévoit une participation de la population aux conseils d'administration. On peut être en désaccord avec la composition précise qui est prévue dans la loi. On peut, comme le député de Saint-Jacques le rappelait, vouloir augmenter cette participation. On peut, aussi — et c'est une suggestion qui évidemment a été faite lors de l'étude de la loi et qui probablement continue d'exister dans certains esprits — vouloir réduire cette participation ou souhaiter qu'elle soit moindre.

Cependant, notre responsabilité, à nous, c'est de faire vivre cette participation en conformité avec les lois qui ont été adoptées. Prendre un élément des activités qui doivent être régies par un tel conseil d'administration, le situer en dehors de ce cadre et permettre qu'on renonce à tout élément de contrôle sur le lieu et le moment où les services sont donnés, sur les informations qui sont demandées au bénéficiaire et l'usage qu'on en fait, sur la façon dont les services sont donnés, le contenu de ces services, c'est à mon sens une abdication qui n'est pas dans l'intérêt... qu'il n'est même pas possible à notre ministère d'envisager, quoique, encore une fois, dans la mesure où il y a des organismes autonomes on envisage avec beaucoup de sympathie le fait qu'il y ait des liens de coopération et de complémentarité.

M. CHARRON: M. le Président, dans la réponse du ministre — je ne sais pas s'il répondait directement à ma question qui avait trait au CLSC de la basse ville de Québec — quand il disait qu'il ne s'agit pas de susciter de nouveaux organismes et de les soutenir financièrement, je ne crois pas que ses propos allaient au cas précis que j'avais soulevé comme exemple dans la question de portée générale que j'avais énoncée. Il ne s'agissait pas, pour le CLSC de la basse ville, de susciter un nouvel organisme; c'était un organisme qui existait déjà, qui répondait déjà depuis longtemps à des demandes de services de dépannage sociaux, d'informations quant aux droits des citoyens, et il s'agissait, pour ces gens, de choisir entre une association indépendante, si vous voulez, un contrat de services avec le CLSC et une intégration.

Est-il exact de dire que financièrement, pour le ministère, une intégration de ces avocats populaires au CLSC de la basse-ville aurait signifié à peu près le même montant que le contrat de services que le CLSC de la basse-ville voulait signer avec ces avocats, mais dans un statut d'indépendance relativement au CLSC?

M. FORGET: Théoriquement, tout est possible. Tout dépend des services que le CLSC lui-même aurait choisi de donner, et c'est bien là une partie du problème. Le CLSC, s'il concluait un contrat de services, renonçait à toute décision ou à tout pouvoir de décision relativement à ces services et probablement à leur envergure. Si le service existait, si cet organisme existait, alors, tant mieux, il n'y aurait pas de problème et il s'agissait de conclure un simple accord de coopération avec lui. Il s'agissait, en fait, d'aller beaucoup plus loin que cela; il s'agissait non seulement de coopérer avec un organisme préexistant, mais de lui fournir tous les moyens de subsistance essentiels à sa survie, à son maintien.

Il ne s'agit pas là d'une relation avec une tierce partie qui est autonome et qui veut conserver son autonomie. Il s'agit de savoir si, au lieu — ce qui était également possible et ce qui continue de l'être — d'assumer ce service au titre des fonctions d'accueil et d'information du centre, en prenant le même personnel et en faisant cela à même ses propres ressources, il utilisait ces ressources pour donner à un autre groupe une autonomie complète relativement à ses activités, qui d'ailleurs, auraient pu devenir totalement différentes, ce qui n'aurait diminué en rien l'obligation au moins morale du CLSC de continuer son financement pour une activité qui aurait pu changer totalement de caractère,

puisqu'il n'y avait rien qui restreignait le CLSC ou les avocats populaires à une fonction précise.

M. BONNIER: Oui.

M. CHARRON: J'aurais une autre question, si le député de Taschereau me le permet. On faisait état, dans cette discussion, d'une rencontre qui aurait eu lieu entre le sous-ministre des Affaires sociales et les directeurs des CLSC où on avait évoqué la possibilité, pour les CLSC, de ce genre de contrats de services avec des organismes populaires. On disait — je pense que c'est le sous-ministre qui va répondre — que c'était à partir de cette permission ou de cette façon d'interpréter la loi qu'on avait procédé. Est-ce exact?

M. FORGET: II est exact qu'il y a eu une rencontre où ce problème a été discuté, plusieurs mois avant, de façon très générale. D'ailleurs, il demeure que, dans la loi et les règlements, la possibilité de contrats de services est évoquée. J'ai eu aussi l'occasion de rencontrer les gens de la basse-ville pour discuter avec eux du problème concret des avocats populaires dont on parle.

Autant il est possible pour les CLSC — dans le sens que le ministre l'a indiqué — d'envisager des contrats pour certains services très précis, autant il nous paraît important, en fonction de la philosophie de la loi et de la loi elle-même, d'éviter que le CLSC ne devienne un agent de distribution de subventions, à toutes fins pratiques. C'est vraiment cela le danger. Cela s'applique aux avocats populaires, mais il y a eu des demandes pour toute une série d'autres contrats de même nature qui sont parties essentielles de la fonction des CLSC. Il nous parait aberrant que ces services soient donnés par contrat.

On peut même aller jusqu'à l'absurde et dire que le CLSC sera simplement un établissement où il y aura un conseil d'administration qui va se réunir pour donner des subventions à des organismes avec lesquels il aura passé des contrats de services pour l'ensemble de ses services.

M. CHARRON: Comme le ministère des Affaires culturelles.

M. FORGET: II nous paraît que l'esprit de la Loi sur les services de santé et les services sociaux n'est pas cela. Cela a été justement pour éviter ce morcellement, ce manque dintégration des activités, ce manque de poursuite d'objectifs communs à l'intérieur des CLSC. Les contrats de services sont possibles, par exemple, avec un centre hospitalier ou avec les départements de santé communautaires ou avec le centre de service social pour certains services spécialisés. Il y a toute une série de types de contrats de services qui nous paraît devoir exister. Mais on pense que ces services doivent avoir une fonction complémentaire aux fonc- tions primaires ou de base que le CLSC lui-même doit assumer.

M. CHARRON: C'est la dernière question que je vais poser; après ça, c'est le député de la basse-ville qui posera les questions.

Si tout ce démêlé avec le CLSC de la basse-ville, je sais que vous avez eu une rencontre par la suite à nouveau avec cet organisme, tenait à l'interprétation de ces contrats de services et de l'étendue qu'on peut donner à cette possibilité du CLSC des contrats de services, est-ce qu'on peut dire que depuis ce temps, non seulement ce CLSC en particulier, mais les autres, y compris ceux en implantation, avant qu'on se retrouve dans la même situation, ont été mis au courant de ces critères pour l'acceptation des contrats de services? Est-ce qu'on sait maintenant de façon précise là où le contrat de service va dans la philosophie du CLSC et là où il y aura objection?

M. FORGET: Je répondrai qu'on a essayé dans toute la mesure du possible à l'intérieur du ministère de préciser ce qu'on voyait et ce qu'on entendait, sans pour autant être capables de prévoir toutes les circonstances. On a eu des échanges, par exemple, avec les chargés de projets pour discuter du problème, le préciser. J'ai eu des rencontres avec un bon nombre — le ministre aussi a rencontré des gens sur ce sujet. C'est sûr que le problème nous a fait préciser ce qu'on entendait par contrat de services et qu'on essaiera à l'avenir d'éviter que le problème surgisse de la façon qu'il a surgi à la basse-ville, où il y a eu un affrontement qui nous paraît un peu malheureux. Dans les rencontres qu'on a eues par la suite, l'entente a été assez cordiale et les gens étaient assez d'accord. Mon exemple privilégié, si vous voulez, je leur ai demandé: Est-ce que vous seriez prêts à faire la même chose, par exemple, pour un contrat de services avec les médecins qui vont être situés dans la clinique l'autre côté de la rue? Là, cela a fait saisir, apparemment, que ce n'était peut-être pas une bonne affaire que le CLSC commence à distribuer des services par des contrats de services. Cela nous paraît assez fondamental.

M. CHARRON: D'accord.

M. BONNIER: M. le Président, est-ce que je dois comprendre que les discussions se poursuivent sur cette définition plus précise des contrats de services? D'autre part, est-ce que, dans cette philosophie de complémentarité, il est nécessaire que les organismes, non seulement de santé, mais de type social aussi, soient logés à l'intérieur de l'édifice central du CLSC ou bien s'ils peuvent être un des services du CLSC mais situés ailleurs?

M. FORGET: II n'y a pas d'exigences aussi formelles que celle-là sur la situation physique des services.

Ce sur quoi nous formulerions des réserves, c'est si une telle forme de collaboration prenait l'allure, en somme, de confier la décision sur la façon, ou la manière, ou le lieu où les services sont distribués à un groupe entièrement extérieur au CLSC, qui n'aurait de compte à rendre à personne, même pas à l'administration du CLSC.

M. BONNIER: Là-dessus, M. le Président, j'aurais une petite question à poser au ministre. Je suis passablement d'accord avec son optique et je n'ai jamais recommandé, personnellement en tout cas, que le CLSC verse des fonds sans avoir droit de regard sur l'orientation de ces fonds.

Je pense que c'est très important et j'ai discuté avec les gens depuis, avec les gens concernés, pour ne pas les nommer. Mais je pense qu'il y aurait lieu de s'entendre là-dessus. Cela me paraît assez essentiel. C'est pour cela le sens de ma question. D'une part, vous me dites qu'il n'est pas nécessaire que les services offerts se fassent à partir d'un endroit physique central, cela peut être ailleurs. J'admettrais. Est-ce que le dialogue peut être poursuivi un peu plus loin si l'organisme en question — là on parle des avocats populaires mais cela peut être un organisme une autre fois — accepte que l'orientation de ses objectifs ainsi que la qualité de ses services soient très bien spécifiées dans un accord, dans un protocole d'entente entre cet organisme et le CLSC et soient soumis de plus à l'inspection ou du moins au contrôle du conseil d'administration du CLSC en question?

M. FORGET: Oui, je pense que c'est possible, en effet. Mais, à la limite, n'est-ce pas, on peut s'interroger sur la raison d'être d'une structure comme celle-là qui ne fait que reproduire, mais par des contrats, ce que les règlements prévoient comme pouvoir de décision des autorités d'un CLSC sur l'ensemble des services donnés. Il y a, à ce moment-là, un aspect d'apparence plutôt psychologique que réel. Il n'y aurait évidemment aucune objection à ce que les gens s'écrivent des contrats à l'intérieur d'un établissement s'ils préfèrent fonctionner comme ça. Cela semble un peu lourd comme fonctionnement.

J'insisterais à nouveau sur la nécessité qu'il y ait une véritable autonomie des groupes avec lesquels on veut faire des ententes. Autrement, c'est une coopération factice avec des organismes qu'on a créés pour les besoins de la cause parce que l'on veut collaborer avec eux. Je pense que l'idée de collaboration s'entend avec un organisme qui a une substance propre, qui a un appui distinct et des racines autres que l'organisme qui cherche à collaborer avec lui.

C'est un peu dans ce sens que je dis oui mais, évidemment, il y a d'autres conditions qui nous paraissent...

M. BONNIER: Toute la question de la nécessité, à ce moment-là.

M. FORGET: Cela me paraît devoir être regardé plus globalement que simplement dans les seuls termes du contrat.

M. BONNIER: Je ne voudrais pas discuter plus longuement là-dessus, M. le ministre, parce que cela correspond véritablement à toute l'insertion dans une communauté x d'un certain nombre de services qui sont mieux perçus, qui sont perçus comme étant davantage du milieu s'ils sont distraits du milieu physique et s'ils sont sous la responsabilité de gens du quartier et tout ça.

Vous avez raison de dire que ce sont des raisons d'ordre psychologique mais je pense que cela fait vraiment partie de la psychologie sociale que de respecter cette espèce de fonctionnement. De ce point de vue, je trouve que vos réponses me satisfont passablement.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Comme vous le disiez tout à l'heure avec raison, M. le ministre, ce n'est pas facile d'implantation, quand même, un CLSC. Tout le monde peut être d'accord avec la philosophie de base et peut être en désaccord — et c'est normal — avec certains moyens d'application pour y arriver.

Concernant, par exemple, certains CLSC qui n'étaient pas tout à fait conformes à la loi 65, est-ce qu'il y a quelque chose de prévu pour, si on peut employer l'expression, non pas les mettre à la raison, mais est-ce qu'il y a des rencontres de prévues ou déjà faites avec certains CLSC qui ont refusé de se conformer tout à fait aux structures déterminées par la loi 65? Est-ce que vous avez l'intention d'apporter certains amendements à la loi 65?

M. FORGET: Là-dessus, je dirais que les problèmes n'ont pas été tellement considérables. D'abord, on a utilisé tolérance et temps. On a pensé qu'il était important de ne pas brusquer les choses. Je pense qu'il y a le CLSC d'Hochelaga-Maisonneuve qui était dans cette situation et qui s'est transformé au cours de l'année courante, conformément au chapitre 48 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Il existe, je pense, deux CLSC qui fonctionnent actuellement et qui n'ont pas les conseils d'administration et les strucutres prévus dans la loi. Il existe par ailleurs d'autres établissements aux prises avec des problèmes identiques d'intégration, de philosophie, où l'intégration n'a pas été faite en fonction de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Malgré certaines difficultés que nous avons pu avoir à l'intérieur du gouvernement, nous avons pris le côté de la tolérance et des discussions. Par exemple, ceux, à Montréal, qui ne sont pas intégrés, il y a des gens du conseil régional qui s'en occupent activement, qui les

rencontrent, qui discutent avec eux, et aux dernières nouvelles que j'ai eues, il y a à peu près trois semaines, les discussions se poursuivaient de façon assez amicale et assez franche et je pense que le temps va régler ces problèmes-là.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je comprends que le dialogue a réglé déjà une bonne partie des difficultés d'adaptation qu'il pouvait y avoir.

M. FORGET: Une bonne partie des problèmes.

Il semble qu'ils vont s'intégrer progressivement sans vraiment de problèmes très sérieux. Je ne veux pas présumer de leur décision, il pourra y en avoir à prendre dans le temps. Mais on a fait avec eux comme on a fait pour d'autres types d'établissements qui présentaient des problèmes analogues, à toutes fins pratiques.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission suspend ses travaux jusqu'à vingt heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

Reprise de la séance à 20 h 8

M. LAFRANCE (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs !

Après quelques minutes de repos, nous reprenons l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales, au programme 4. Le député de Frontenac m'avait demandé la parole avant la suspension.

M. LECOURS: M. le Président, je crois que nous devons l'admettre, le bilan des CLSC dans notre province est plutôt négatif. Cette grande découverte contenue dans le rapport Caston-guay-Nepveu prouve, hors de tout doute, qu'il ne suffit pas d'avoir de bonnes idées. Il faut aussi que cette réalité colle aux besoins des usagers concernés par ces CLSC. Il ne faut pas minimiser ici les dépenses encourues dans les CLSC jusqu'à présent. Il vaudrait mieux se demander si les sommes d'argent ici dépensées peuvent se justifier si l'on considère les graves problèmes que nous rencontrons. Ici je me pose la question: La priorité majeure dans notre province ne serait-elle pas le manque de lits d'hôpitaux pour des malades chroniques?

Je suis très surpris de me faire dire que les déboires des CLSC sont dus en grande partie au manque de compétence de certains chargés de projet. Ma petite enquête personnelle m'a permis de constater que plusieurs projets de CLSC en voie de création le sont sur l'initiative de petits groupes qui pensent plus à se créer un emploi qu'à répondre aux besoins bien légitimes d'obtenir une médecine plus humaine en leur milieu. Je pourrais citer ici plusieurs exemples où la formation de CLSC s'est faite sans consultation aucune avec les médecins, avec les autres groupes intéressés aux problèmes sociaux de leur milieu.

Peut-on se surprendre du peu d'enthousiasme de la population en général et des médecins? Peut-on blâmer ces derniers d'être inquiets à la pensée qu'ils ne furent même pas consultés pour la formation d'un tel centre communautaire de santé? Peut-on les blâmer de protester du fait que le ministère a signé des contrats individuels avec certains médecins de ces centres, alors que l'ex-ministre des Affaires sociales avait reconnu à la FMOQ le droit exclusif de négocier avec le gouvernement pour tous les médecins généralistes de cette province? Peut-on les blâmer de protester du fait que l'implantation de certains CLSC s'est faite à des endroits peu appropriés, tel à proximité d'hôpitaux qui donnaient ces mêmes services?

Devant un départ hésitant, devant cette réforme hasardeuse des CLSC, je crois de mon devoir de demander à cette commission un temps d'arrêt nous permettant de consolider les onze CLSC déjà fonctionnels...

Je crois que cette expérience pourra être valable en autant qu'on aura la patience d'attendre pour constater si, réellement, le CLSC est

une aventure à éviter ou si, réellement, le mieux-être de notre population l'exige.

M. FORGET: M. le Président, l'intervention du député de Frontenac sur ce sujet n'appelle pas spécifiquement de réponse de ma part, puisqu'elle n'est pas faite sous la forme d'une question. Elle reflète malgré tout...

M. CHARRON: On s'en sort bien.

M. FORGET: ... une préoccupation que j'ai décrite, au moins en termes généraux, cet après-midi, en indiquant que les difficultés très réelles d'implantation d'un nouveau programme comme celui-là créent dans différents groupes sociaux des interrogations, des inquiétudes, des anxiétés, même des antagonismes qui sont normaux, dans une certaine mesure, étant donné que tout changement s'accompagne de sentiments partagés, de problèmes qui sont, pour autant, réels. J'ai essayé d'indiquer que nous en étions conscients et que nous apportions à la solution de ces problèmes au moins certains efforts qu'on est toujours libre, évidemment, de considérer comme insuffisants mais des efforts réels, au point de vue d'une meilleure adaptation de notre intervention tant auprès des groupes populaires, de manière à être mieux compris et à voir comment notre action et la leur peuvent se compléter, qu'auprès des corporations professionnelles, et au tout premier rang de celles-ci, évidemment, la profession médicale. Les media d'information se sont fait l'écho des discussions qui se sont engagées avec la FMOQ relativement à leur implication ou leur intervention dans les CLSC, comme groupe.

Ces discussions, dont on ne peut rien présumer pour le moment, puisqu'elles se déroulent encore et elles vont continuer à se dérouler, j'imagine, pendant un certain temps, se font dans un climat qui me paraît de bon augure. Je ne voudrais pas pécher par excès d'optimisme en disant davantage, mais il me semble que la Fédération des omnipraticiens qui, dans le passé s'est montrée très ouverte à une coopération avec le gouvernement dans l'introduction d'un certain nombre de mesures telles que l'assistance-médicale, il y a quelques années et l'assurance-maladie subséquemment, a toujours su défendre les intérêts de ses membres.

Mais, qui, après quelques difficultés de parcours, qui sont normales puisqu'il y a des intérêts à défendre, a su également apporter sa contribution dans le passé. On n'a pas du tout perdu espoir de l'obtenir pour l'avenir.

Relativement à ce programme — comme je l'ai indiqué d'ailleurs, c'est un programme qui se définit au fur et à mesure qu'il progresse — il y a un aspect qui me semble très important. On a fait état tantôt de difficultés, évidemment, dans la mise en route de certains projets, de l'inexpérience relative de tous et chacun d'entre nous, et pas seulement des fonctionnaires ju- niors, principalement affectés au démarrage de ces projets; à tous les niveaux, à tous les paliers gouvernementaux, c'est une expérience nouvelle. On a fait état de l'expérience qui se gagnait, de la précision qui était acquise progressivement dans l'orientation de ces efforts; ce qui fait qu'avec cette expérience, avec ces discussions en cours on est loin de pouvoir prononcer un constat d'échec relativement à la possibilité d'obtenir le concours de ceux dont la collaboration est nécessaire. Je pense qu'on a encore pas mal de chemin à parcourir avant de le faire et il me paraît très important de souligner que le ministère des Affaires sociales est très conscient des préoccupations professionnelles des groupes avec lesquels il vient en contact.

Ce n'est pas la première fois que nous avons affaire à des groupes de professionnels. Au contraire, notre secteur est peut-être celui où il y a le plus grand nombre de groupes professionnels. Nous sommes très conscients de la nécessité de faire en sorte que pour les activités professionnelles qui se déroulent, par exemple, à l'intérieur des établissements — quels que soient les désirs légitimes du gouvernement de contrôler les dépenses et d'orienter l'action générale de ces organismes dans une direction prévisible et voulue quant à ses objectifs généraux— malgré tout, dans leur fonctionnement ceux-ci respectent l'autonomie professionnelle des différents groupes. La nouvelle législation sur les professions consacre, je pense, de façon non ambigiie le principe de l'autonomie professionnelle de chaque profession, de l'autodiscipline, des responsabilités de cette profession vis-à-vis du public. Il serait incohérent de notre part d'avoir contribué, comme ministère, à l'édification de toute une législation professionnelle et après, vouloir mettre sur pied des services ou vouloir faire fonctionner des établissement sans se préoccuper de cette dimension.

En termes concrets, s'il s'agit toujours de difficultés concrètes, il est évident qu'un nouveau modus vivendi doit être élaboré. Encore une fois, ce modus vivendi, on essaie de l'élaborer en collaboration avec le groupe qui s'est senti le plus concerné, et avec raison, le groupe des omnipraticiens.

M. LECOURS: M. le ministre, peut-on espérer que le président de la FMOQ pourra négocier au nom de tous les médecins, même ceux qui travaillent dans les CLSC?

M. FORGET: Je vous renverrais à l'allocution que je prononçais, il y a environ quinze jours ou trois semaines, lors du congrès annuel de la fédération, où j'annonçais une chose qui ne devrait plus être une nouvelle, mais qui, apparemment, en était une, à l'effet que nous discutions avec la fédération et que nous la considérions comme un porte-parole autorisé. Cela a toujours été le cas, quoique la façon dont cela se concrétise, dans des situations particulières, a été assez modifiée. Il est évident — ce

n'est peut-être pas nécessaire de revenir sur tout l'historique — que dans la préparation d'un nouveau contrat, d'une nouvelle relation ou d'un nouveau lien avec des établissements qui sont eux-mêmes nouveaux un certain délai d'exploration était nécessaire. Mais, en tous les cas, les médecins impliqués ont été invités à se faire représenter et à faire défendre leurs intérêts par leur fédération, qui l'a fait d'ailleurs. Cela s'est fait, non pas à leur insu, mais en leur présence. On reprend ces discussions sur un autre palier maintenant, mais le même principe est affirmé, peut-être de façon un peu différente. Mais essentiellement nous avons toujours reconnu la fédération comme étant un organisme qui avait le droit de défendre l'intérêt de ses membres.

Encore une fois, les contextes varient d'une situation à l'autre. Lorsqu'on négocie les tarifs à l'acte dans un régime qui est déjà très connu, très bien rodé, on a moins ces explorations à faire que lorsqu'on explore les possibilités d'une situation nouvelle.

M. LECOURS: Personnellement, M. le Président, je crois que les salaires offerts aux médecins qui pratiquent dans les CLSC sont justes et je crois qu'ils sont rémunérés d'une façon tout à fait normale. Je suis persuadé qu'il y a moyen d'arriver à une entente entre les médecins et le ministère dans ce domaine, assez facilement.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, la réponse du ministre, si elle était complète, manquait certainement de vigueur, à mon avis, vigueur qu'il aura à démontrer en particulier au cours des prochains mois.

Les expressions d'opinions qui viennent des membres du parti ministériel, depuis que nous sommes à ce programme, s'ils en viennent à dépasser la traditionnelle ligne de parti qui, dans plusieurs cas, équivaut au mutisme, sont certainement symboliques de quelque chose.

Si les députés ministériels n'hésitent pas, à la table de la commission, à exprimer leur désaccord et à émettre un constat d'échec aussi radical que vient de le faire le député de Frontenac sur une législation qu'il y a à peine deux ans leur propre parti et ce même gouvernement, à quelques exceptions près, soumettaient à l'Assemblée nationale, que faut-il s'imaginer qui se grenouille dans le cabinet du ministre et dans les régions, quand tout cela transparaît jusqu'à la table de la commission parlementaire? Ce n'est pas une habitude très fréquente de voir des députés ministériels s'ériger contre une politique de leur propre parti, qui en est encore à l'implantation qui a fait l'unanimité de la Chambre et l'unanimité, je crois bien, de tous ceux qui oeuvrent dans ce secteur.

C'est donc dire qu'au sujet de l'implantation des CLSC et de la philosophie que les CLSC amènent dans la vie sociale du Québec, on a peut-être crié victoire trop rapidement. L'adoption à l'unanimité de l'Assemblée nationale, ne doit pas être considérée comme une victoire totale. Ceci nous ramène encore à de justes proportions pour nous dire que ce n'est peut-être pas nécessairement cette Assemblée, en haut, qui est la plus représentative du Québec, une fois de plus. J'ai dit que le ministre aurait peut-être dû démontrer plus de vigueur, peut-être pas ici. J'espère, en tout cas, qu'il en manifestera plus quand il s'agira d'implanter ce réseau de centres locaux de services communautaires, malgré les pressions qu'il aura à subir à l'intérieur de son propre parti ou même à l'extérieur des lignes partisanes sur le simple front social. Il admettra avec moi — il l'a déjà admis depuis le début de cette discussion — que les résistances du milieu, en particulier des groupes qui ont le plus largement dominé le secteur des services sociaux et de santé au Québec, se font vives à certains endroits. Le ministre aura besoin de prouver qu'il a une poigne de fer à certaines occasions.

M. le Président, le député de Frontenac, depuis que nous avons commencé à travailler à l'étude de ces crédits, à plusieurs reprises, sur plusieurs programmes, nous a apporté l'éclairage de son expérience de médecin.

Je dois même dire que j'ai plus souvent entendu, je crois, le médecin que le député de Frontenac à cette table.

A certaines occasions, ses remarques portaient toute la valeur et toute la qualité d'un homme dont la profession est d'oeuvrer dans ce secteur. Les remarques qu'il nous a faites, par exemple, sur les médicaments ou sur l'usage des médicaments dans sa région comme dans tout le Québec ont certainement été utiles à la commission. Les remarques qu'il nous a faites, également, quant à la situation sociale de certains de ses commettants ont été un apport positif à la commission.

Mais voilà maintenant que transparaissent les défauts de cette profession, surtout lorsqu'elle est ancrée, je dirais, dans le traditionalisme, dont le député de Frontenac n'est qu'un symbole parmi tant d'autres, de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je pense, par exemple, que je n'exagérerai pas en disant qu'au fond, de toutes les résistances de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec à l'implantation des CLSC... Je ne parle même pas de la démagogie outrancière dont le Dr Gérard Hamel s'est fait le porte-étendard, alors que, malheureusement, il se trouvait à parle au nom de tous les médecins dans un langage à la Yvon Dupuis, si je puis le qualifier.

M. LECOURS: C'était au mois de mai, il y a deux ans.

M. CHARRON: Je ne parle même pas de cet

épisode. Oh non! c'est encore plus récent que cela. J'ai une citation du lundi 29 avril 1974. Cela fait à peine trois semaines. Il charrie toujours de la même façon.

Les réticences de la Fédération des omnipra-ticiens du Québec, au fond, quand on les scrute et quand on en enlève toute la fausse émotion et la fausse protection professionnelle qu'on essaie de mettre comme paravent devant toute défense d'intérêt strictement matériel à l'arrière, quand on scrute véritablement quels sont les intérêts que défend le président de la fédération, ce sont des intérêts pécuniaires, dans bien des cas, des intérêts strictement financiers d'une classe sociale qui se défend contre l'arrivée d'une concurrence et qui protège ses intérêts devant le libre marché et la totale emprise sur le domaine de la santé qu'elle a toujours eue.

Au fond, j'ai bien des sympathies pour des professionnels qui défendent l'intégrité de leur profession. Nous avons participé du mieux que nous avons pu, comme parti, à l'élaboration du Code des professions, auquel nous avons été appelés à travailler l'année dernière. J'en suis.

Mais, quand cette défense de l'intégrité d'une profession sert de paravent, de maquillage pour défendre des intérêts réactionnaires vraiment rétrogrades qui n'ont jamais servi les Québécois, on ne doit pas le passer sous silence. C'est à ce moment-là qu'on doit montrer une certaine vigueur. Le médecin Hamel, président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, déclarait que les médecins ne devraient même pas participer au conseil d'administration des CLSC, devraient s'en retirer tellement c'est abject que de partager la direction d'un instrument social avec les groupes populaires, dont on ne sait d'où ils viennent, qui n'ont pas la formation, qui n'ont pas la qualité, on sous-entendait presque la classe que les médecins ont toujours eue dans ce domaine; c'était un charlatan qui parlait. A ce moment-là le ministre des Affaires sociales aurait dû lui répondre avec la même vigueur, ainsi que l'Assemblée nationale, à l'unanimité, l'avait mandaté de répondre, pour lui faire prendre sa place.

Il avait déjà qualifié la participation des citoyens d'irresponsable. Il a immédiatement dit, à peine après l'implantation, que les CLSC faisaient patate. Il a immédiatement aussi invité les médecins à s'en retirer. Ce genre de désobéissance civile dont on a si souvent accusé n'importe quel leader syndical ou n'importe quel agent qui regroupait des citoyens devant une loi ou un règlement qui lui paraissait outrancier, on ne l'a guère rappelé à ce médecin. Mais pourtant l'Assemblée a décidé que maintenant cette caste qu'ont toujours été les médecins dans la vie politique du Québec devait partager l'existence du pouvoir et l'existence, surtout, d'un réseau de santé publique, universel et approprié aux besoins des Québécois avec tous les autres Québécois.

Qu'aujourd'hui un médecin s'en fasse le porte-étendard, je ne m'en surprends pas. Mais je me surprends d'entendre cela du parti ministériel et surtout de députés comme le député de Frontenac. Celui-ci représente des citoyens dont la situation — il nous a fait état de plusieurs cas — frise la pauvreté et la misère. Il les a vaillamment défendus lors de l'étude de programmes précédents. Mais, lorsque vient le temps de défendre l'installation de services qui offrent une même qualité à tous ses citoyens quelle que soit la classe sociale à laquelle ils appartiennent, je m'étonne que le député de Frontenac perde la vigueur qu'il nous a démontrée lors des autres programmes. Est-ce que parce que professionnellement il se sent menacé par l'existence des CLSC? Est-ce que le député de Frontenac craint lui aussi, comme le docteur Hamel, la participation des organismes populaires? Est-ce que le député de Frontenac, s'il avait été en Chambre au moment où nous avons voté la loi 65, aurait manifesté la même opinion et aurait voté à l'encontre de son parti?

A mon humble avis, de tous les organismes que la loi 65 mettait sur pied, de toute la réforme en quoi cela consistait la plus importante, la plus humaine, celle que le Parti québécois a appuyée avec le plus de vigueur et qu'il prie le ministre des Affaires sociales de continuer à implanter, quelles que soient les objections du milieu, même si elles doivent venir de l'intérieur de son parti, même si, au prochain congrès du Parti libéral, il devra subir, pendant toute une journée, les bêtises que les délégués lui rapporteront de chacun des comtés. Malgré cela, le député de Saint-Laurent, ministre des Affaires sociales, doit continuer à veiller à cette implantation, et ce n'est pas à moi à lui suggérer ce qu'il doit attendre de ses collègues de son même parti. Ce que j'espère pour lui, c'est que, dans l'immense réalisation, la tâche qu'il a à faire et qui lui a été confiée par l'ensemble des représentants du Québec à un moment donné, il puisse avoir un meilleur appui de ses députés qui sont innombrables, de ses députés alentour de lui pour réaliser cette tâche immense.

Pour ma part, je représente depuis quatre ans les citoyens probablement les plus défavorisés de l'île de Montréal. La réalisation du CLSC centre-sud de Montréal constitue indubitablement — et je la défendrai jusqu'au bout— un acquis pour la population que je représente ici et qui, par deux fois, m'a demandé de la représenter; et je suis convaincu que je vais la défendre jusqu'à la réalisation complète non seulement de la mise sur pied théorique et pratique du CLSC mais la réalisation également, jusque dans ses moindres gestes, des objectifs que nous lui avons signalés. Je suis convaincu en même temps que la réalisation de ces objectifs ne pourra se faire que si le ministre se sent appuyé par tous les groupes pour qui la réalisation va certainement poser des problèmes mais qui, à long terme comme l'ensemble des Québécois, vont y prendre des profits indubita-

bles. C'est ce que nous avions décidé lorsque nous avons appuyé le projet de loi; c'est ce que nous décidons encore lorsque nous prions le ministre de veiller à une application intégrale des programmes que nous lui avons votés et de la philosophie que nous l'avons prié d'appliquer.

LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je vais, peut-être plus tard, répondre au député de Frontenac; mon confrère l'a fait déjà mais en des termes plus clairs. Maintenant, je pourrais peut-être continuer, à moins qu'il y ait d'autres interventions.

M. CHARRON: M. le Président, j'ai une question...

M. BEDARD (Chicoutimi): Je me demande...

M. CHARRON: Je n'avais pas fini les questions que je me suis partagées avec mon collègue. Nous venons de parler de la Fédération des médecins omnipraticiens. Un des gestes que j'avais oublié de mentionner, en plus du discours du Dr Hamel qui prend aussi des décisions à certains moments, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec — peut-être ma question doit-elle s'adresser plus spécifiquement à M. Nepveu — a décidé d'implanter des cliniques où sont dispensés des services de santé de type conventionnel et qui sont ouvertes 24 heures par jour. Un de ces projets, c'est sur la rive sud de Montréal. Est-ce qu'on est en mesure d'évaluer l'impact de ces réseaux parallèles? J'emploie l'expression que Mme Dutrisac a déjà employée à l'égard de ces services. Est-ce que l'établissement de ces réseaux ont, en quelque sorte, nui à l'implantation de CLSC dans des régions du Québec?

M. FORGET: Je pense que, jusqu'à présent, nous ne pouvons pas évaluer l'impact de l'implantation des polycliniques sur notre programme d'implantation de centres locaux de services communautaires parce qu'il est évident que notre processus d'implantation est beaucoup plus lent. Les polycliniques vont surgir avant nos centres locaux de services communautaires, comment allons-nous nous en accommoder?

Nous essaierons autant que possible d'éviter les dédoublements et peut-être de rechercher la collaboration, la complémentarité entre les deux établissements. Je n'ai pas de réponse immédiate, mais c'est l'esprit dans lequel, je pense, nous travaillerons.

M. CHARRON: Est-ce que le ministre conviendrait avec moi de qualifier ce soir cette initiative des omnipraticiens comme allant à l'encontre des intérêts de la population et en particulier de l'établissement des CLSC?

M. FORGET: M. le Président, j'ai déjà fait un commentaire assez détaillé sur cette initiative de la FMOQ. Je ne peux qu'y renvoyer le député de Saint-Jacques. Il le retrouvera aux Débats, si jamais sa mémoire lui fait défaut sur ce point précis, mais pour faire l'économie des détails, pour ce qui est de l'essentiel, je tiens à affirmer que toute amélioration dans les méthodes de distribution des services, quels qu'ils soient, nous paraît comme valable et comme souhaitable. Sans aucun doute, le regroupement de médecins de manière à assurer la continuité des services est un développement que l'on ne peut qu'applaudir, qui va contribuer à résoudre un certain nombre de problèmes.

Encore une fois, il ne s'agit pas de concurrence, sauf d'une concurrence de bon aloi, et ce n'est pas l'intention du ministère, ce n'est pas possible ni même concevable, dans un avenir prévisible, que l'on évolue de façon que toute la profession médicale s'inscrive au sein des CLSC. Donc, pour l'immense majorité — dans un avenir prévisible — de la profession médicale, qui doit continuer à fonctionner en dehors des établissements, il nous paraît absolument souhaitable qu'elle organise sa pratique de manière à donner de meilleurs services, des services plus continus, plus personnalisés aussi, si c'est possible, de manière à répondre à des besoins qui sont là et qui vont continuer d'y être, même si nous avons l'ensemble du réseau de CLSC complètement développé.

Pour reprendre un peu la métaphore de Madame Dutrisac que vous avez soulignée, il s'agit peut-être de réseaux parallèles, mais ce sont des lignes, même si elles sont parallèles, qui sont d'inégale longueur. Donc, la comparaison ne vaut pas pour sa totalité.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Rosemont.

M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce qu'il serait possible, de la part des fonctionnaires, de connaître le nombre de personnes qui travaillent au CLSC dans le comté de Saint-Jacques, leur âge, leurs fonctions, leur curriculum vitae, et aussi de savoir s'ils ont été placés là parce qu'ils sont membres du Parti libéral ou d'un autre parti? Est-ce que ce serait possible de le savoir? Est-ce qu'on pourrait vérifier les documents demain ou après-demain?

M. BEDARD (Chicoutimi): A six on n'a pas le temps de s'occuper d'en placer, nous.

M. BELLEMARE: Est-ce que c'est possible de connaître leur nom, leur âge, leurs fonctions et leur curriculum vitae, comme je l'ai demandé tout à l'heure?

M. FORGET: II est sûrement possible, à partir de l'information budgétaire, d'obtenir le nombre, et ça...

M. BELLEMARE: J'entends dans le comté de Saint-Jacques.

M. FORGET: II est possible, à partir des budgets approuvés par un établissement en particulier, d'établir le nombre de postes et la classification de ces postes. Normalement, c'est le cas pour tous les établissements. Est-il souhaitable ou possible que des dossiers personnels, que sont les dossiers de l'employeur, ce que nous ne sommes pas — nous sommes là comme un organisme de contrôle et non pas comme un employeur — soient livrés au domaine public ainsi que des curriculum vitae et des documents transmis à l'employeur éventuel au moment de la demande d'emploi à titre confidentiel?

Je pense que ce serait un précédent susceptible de créer énormément d'anxiété dans tout le réseau si on envahissait ainsi la vie privée des gens, mais on peut donner les classifications, on peut donner la ventilation des postes et le nombre de postes sans difficulté.

M. BELLEMARE : Alors, est-ce qu'on peut avoir ce que vous pensez qu'on peut avoir?

M. FORGET: Oui, c'est une question de temps. Ce n'est peut-être pas possible de l'avoir sur-le-champ, je ne sais pas. Est-ce possible de donner l'indication?

UNE VOIX: Deux postes.

M. FORGET: Disons deux postes essentiellement, il y a deux personnes. Est-ce que vous connaissez la classification?

UNE VOIX: Un animateur-analyste et une secrétaire, pour un budget de $34,000.

M. FORGET: C'est un budget de démarrage, comme on l'a expliqué tantôt; c'est un budget de base.

M. CHARRON: Est-ce que le député de Rosemont voudrait savoir le nom de la présidente du comité provisoire du CLSC?

M. BELLEMARE: Quand je voudrai savoir quelque chose, je m'adresserai à une personne intelligente, je m'adresserai au ministre.

M. CHARRON: Je peux vous le dire quand même.

M. BELLEMARE: Cela ne m'intéresse pas. M. CHARRON: Mme Saint-Pierre. M. BELLEMARE: Je la connaissais.

M. CHARRON: Elle est membre de l'Association libérale de Saint-Jacques.

M. BELLEMARE : Je la connaissais.

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela ne l'empêche pas d'être une bonne personne.

M. CHARRON: Alors, charriez tant que vous voudrez.

M. BELLEMARE: Charriez.

M. CHARRON: Peu importe, je trouve qu'elle fait un excellent travail.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Chicoutimi avait une question à poser.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est au niveau des expériences qui ont été faites concernant, par exemple, la région de l'Outaouais. Je crois que cela a été vraiment une région pilote où tout le réseau a été établi et où il y a eu saturation de tout le marché. Est-ce qu'on pourrait savoir la nature de cette expérience et les conclusions que vous en tirez?

M. FORGET: On est un peu mal pris pour vous donner des conclusions définitives.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est peut-être un peu tôt.

M. FORGET: En fait, ce qu'on connaît le mieux, ce sont les problèmes; ce ne sont pas les résultats concrets.

M. CHARRON: Ce ne sont pas des solutions.

M. FORGET: On a mis pas mal de temps à identifier les problèmes du fonctionnement des CLSC, etc.

M. BEDARD (Chicoutimi): La participation du milieu, etc.

M. FORGET: Je pense que, dans l'Outaouais, c'est une expérience extrêmement intéressante de saturation. Si on prend le nombre de districts prévus dans la région, il y a un CLSC prévu pour chacun des districts et les processus d'implantation, je dirais, quitte à laisser M. Nepveu ou M. Lord préciser, progressent de façon satisfaisante. Les comités de promotion, la mise en place, la mise en marche des CLSC, tout se fait selon les échéances prévues et selon le temps prévu. Cela prend toujours plus de temps que le ministre ou moi n'aimerions à l'occasion, mais, comme M. Nepveu l'a dit tantôt, cela fait un peu partie de la nature même de l'expérience et de la mise en place des CLSC.

C'est une région où il y a eu aussi des problèmes de recrutement de professionnels, particulièrement des médecins; je pense qu'il y a eu des problèmes particuliers à cet endroit. Les négociations avec la Fédération des médecins omnipraticiens se poursuivent; il y a une

rencontre, prévue pour demain, qui va porter spécifiquement sur le problème des centres locaux. M. Larouche, qui était ici tout à l'heure, me disait que cela augure de façon très optimiste du résultat de ces discussions.

Deuxièmement, nous avons eu des échanges avec le service de santé communautaire qui prend naissance à Hull.

Un directeur a été nommé, qui est un médecin omnipraticien, extrêmement dynamique, extrêmement bien intentionné et qui a donné une collaboration très étroite à la mise en place du département de santé communautaire, avec lequel nous avons eu des rencontres. Les fonctionnaires, M. Mercier, M. Lord, et le groupe des chargés de projet dans la région ont dû se rencontrer au cours de la semaine dernière pour discuter des modalités d'assurer des services et les échanges qui pourraient se faire entre le département de santé communautaire et les CLSC, le partage des responsabilités des unités sanitaires, des services de soins à domicile. Je pense que c'est un dossier où on a connu les mêmes difficultés que la plupart des places ou que de nombreuses places, mais où je dirais que le dossier évolue de façon positive et dynamique.

M. BEDARD (Chicoutimi): Merci.

M. CHARRON: Est-ce que le problème de...

M. FORGET: M. Nepveu me dit que deux sur neuf sont déjà en activité.

M. CHARRON: Vous avez fait allusion, en parlant du projet pilote de l'Outaouais, au problème du recrutement de professionnels. Est-ce que c'est pire là qu'ailleurs, ou y a-t-il d'autres endroits où le problème a été plus aigu? Est-ce qu'il est encore un problème auquel les CLSC ont à faire face en priorité?

M. FORGET: Je n'oserais pas le dire. Il y a eu des problèmes du côté des services de santé, il y a eu aussi des problèmes au niveau des services sociaux, à l'occasion du transfert de personnel des centres de services sociaux au niveau des centres locaux. Il faut bien réaliser ce qu'est cette expérience et ce que la mise en place des CLSC exige du ministère. Une des choses qui ont été évitées, c'est d'avoir tout décidé avant, d'avoir pris toutes les décisions à l'intérieur du ministère pour dire comment ça marchait partout, puisque c'était comme ça que cela fonctionnerait. Comme on a voulu assurer une participation, on n'a pas pris toutes ces décisions. Il y a toute une série de problèmes qui se posent, qu'on règle en cours de route avec les gens impliqués. Cela nous permet de trouver des solutions qui, souvent, s'appliquent ailleurs. C'est un problème très complexe, à cause de la résistance à certains endroits, à cause de changements, à cause aussi d'intégration du personnel d'unités sanitaires, d'intégra- tion du personnel de certaines agences, à l'occasion, pour des services de première ligne, et la présence de la population. Tous ces gens doivent apprendre à travailler ensemble et ce n'est pas facile. Ce n'est pas difficile uniquement par rapport aux médecins, je pense qu'il ne faudrait pas dire: C'est purement ça le problème. Il y a des endroits où les problèmes ont été reliés au directeur général, par exemple. Je peux vous en nommer un dans la région de Montréal, que vous connaissez bien, où il semble que les problèmes véritables ont été des difficultés de relations entre le directeur général et les professionnels, non seulement les médecins. Il y a d'autres types de problèmes ailleurs. Il ne faut pas oublier que ces types de problèmes, on les rencontre dans d'autres établissements aussi. C'est d'autant plus différent dans les CLSC que c'est nouveau, que les règles du jeu ne sont pas établies, que c'est du travail d'équipe, qu'il n'y a pas souvent la préparation des professionnels pour faire ça. On a d'excellentes relations avec les facultés de médecine. On a une collaboration très étroite avec chacune des facultés de médecine, ici à Laval, à Montréal, à McGill et à Sherbrooke; elles collaborent avec nous pour nous aider dans l'implantation, dans le fonctionnement et dans la recherche de solutions à certains types de problèmes. Je pense que les problèmes se résolvent lentement, mais progressivement et aussi selon les besoins et selon les régions.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Frontenac.

M. LECOURS: M. le Président, je n'avais pas l'intention de répondre au député de Saint-Jacques, malgré le dégoût qu'il a semblé avoir pour moi et ma profession.

Il avait les pupilles tellement dilatées que j'avais quasiment peur. Je me pensais à une clinique d'urgence, un samedi soir.

Tout de même, disons que je voulais défendre l'intérêt de ma population qui pense qu'un CLSC à Thetford-Mines n'est pas utile parce qu'on a des services. Mais il y a d'autres villes dans ma région où on aurait besoin d'un CLSC, et j'approuverais qu'on en organise dans ces places.

Le président du Parti québécois dans mon comté, qui est médecin aussi, a la même idée que moi. J'aimerais parler peut-être des salaires parce que, pour le député de Saint-Jacques, c'est toujours la question des salaires qui est importante. Il pense seulement à l'argent et pas à autre chose. Savez-vous que, dans ma région, les praticiens généraux gagnent en moyenne $32,500 par année? C'est peut-être le salaire le plus bas de toute la province de Québec. Savez-vous qu'on nous offre, après cinq années de pratique, dans les CLSC, $30,000 par année, avec un mois de vacances payées, un mois de recyclage, un fonds de pension de $4,000, qu'on nous paie des frais de bureau, des infirmières,

qu'on pourrait bénéficier aussi d'infirmières pour aller à domicile afin de porter secours à nos malades, aux grands malades et aux chroniques? C'est cela qui m'intéresse en tant que médecin. Je veux trouver des solutions. Quand, ici, je prends la parole, ce n'est pas dans mon intérêt personnel. Je voudrais trouver des solutions. Je suis très sincère quand je le dis. C'est pour cela parfois que je me permets de critiquer mon propre parti politique. Il n'y a pas d'autre raison à ça.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 4? Le député de Chicoutimi... Vous avez encore d'autres questions.

M. CHARRON: M. le Président, j'ai quelques questions qui vont demander des réponses assez brèves puisqu'elles sont précises. Le 24 septembre 1973, l'ancien ministre — quelques jours avant le déclenchement des élections d'ailleurs — donnait son accord au comité de citoyens de Montmagny-Sud pour l'implantation d'un CLSC dans leur district.

Le 15 janvier, le ministère change d'idée. Ce n'est plus le district de Montmagny-Sud qui est retenu mais plutôt le Grand-Montmagny, comme on l'a appelé. Alors, quelle est la distinction et pourquoi ce changement malgré un accord formel qui semblait avoir été donné le 24 septembre 1973?

M. FORGET: J'ai été saisi, à un moment donné, du fait qu'un groupe de la population de Montmagny-Nord s'était cru mandaté pour mettre en place un CLSC. Alors, personnellement, j'en ai été surpris. J'ai consulté mon chef de service et mon chargé de projet, et ils m'ont dit: Non, notre CLSC, c'est dans Montmagny-Nord qu'il faut l'implanter parce que dans Montmagny-Sud, actuellement, les services sont raisonnablement distribués. Alors, nous sommes tout simplement revenus à Montmagny-Sud sans jamais avoir voulu passer à Montmagny-Nord.

En fait, c'est un problème très technique. Montmagny est un district, et la planification avait identifié Montmagny. Le CLSC devait être établi à Montmagny-Sud. A un certain moment, il y a un groupe, comme le dit M. Nepveu, de Montmagny-Nord qui s'est dit: Nous, on fait un CLSC. Il y a eu une confusion de langage. Mais, de fait, le CLSC, tel que prévu, sera situé à l'endroit prévu originalement.

M. CHARRON: C'est-à-dire...

M. FORGET: Dans le district de Montmagny-Sud. Quant au chef-lieu... Il y a une paroisse de l'autre côté, dans le comté voisin et qui appartient...

M. CHARRON: Saint-Juste?

M. FORGET: Alors, dans Montmagny-Sud, quelle est la paroisse de l'autre comté qui se joint au groupe? En tout cas, il y a une paroisse d'un comté voisin qui s'est jointe au groupe de promotion. Il appartiendra à ce groupe de promotion de déterminer le chef-lieu.

M. CHARRON: Ce n'est pas encore fait.

M. FORGET: Non, parce qu'on n'impose pas ça.

M. CHARRON: Non, non. Ils ne l'ont pas encore.

M. FORGET: Pas encore.

M. CHARRON: Alors, on est vraiment à l'étape première de l'implantation.

Quand vous dites "un groupe de Montmagny-Nord s'était cru mandaté pour implanter", à partir de quoi...

M. FORGET: A partir d'une confusion dans l'établissement des districts où au lieu de spécifier Montmagny-Sud, il a été spécifié, dans un document, simplement Montmagny.

On a appris, apparemment, là-bas, qu'il s'agissait de Montmagny. Alors, on s'est dit: Prenons-le, Montmagny. Mais on a rectifié le plus rapidement possible.

M. CHARRON: Ce groupe de Montmagny-Nord sera desservi par quel CLSC, éventuellement?

M. FORGET: Pour le moment, il n'y a pas de CLSC prévu pour Montmagny-Nord, étant donné qu'il y a, à Montmagny, une filiale du centre de services sociaux et un centre hospitalier également, l'Hôtel-Dieu de Montmagny.

M. CHARRON: Dans un autre cas particulier, le CLSC de Saint-Pamphile, près de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, les porte-parole de la population avaient demandé qu'une campagne d'animation et de consultation de la population se fasse avant l'implantation. Je crois que cela s'était même fait par lettre formelle au ministère.

Est-ce qu'on a donné une réponse à cette demande et est-ce que cela s'est produit? Où en est-on?

M. FORGET: Je vous avoue que, n'ayant pas le dossier devant moi...

UNE VOIX: Pourriez-vous vous approcher?

M. CHARRON: Moi, je vous comprends, mais c'est pour passer à l'histoire.

M. FORGET: De fait, il y a eu une étape qui avait été sautée au départ, cette étape d'information et de consultation de la population. Effectivement, à la suite de la demande du milieu, il y a eu des animateurs-analystes

d'engagés qui ont entrepris de faire cette étape. C'est une demoiselle Bourgault qui a été choisie.

M. CHARRON: A Hochelaga-Maisonneuve, est-ce qu'on a remplacé les médecins?

M. FORGET: Oui. Il y a un contrat de signé. Il y a même eu des offres d'emploi. Si mes souvenirs sont bons, sous réserve de l'exactitude des chiffres, je pense qu'ils en voulaient quatre et qu'il y a eu onze demandes. Il y en a quatre ou cinq qui sont engagés à partir du 1er juin ou du 1er juillet de cette année.

M. CHARRON: Dans ce CLSC, est-ce qu'on va intégrer les services pour personnes âgées ASTA, comme on les connaît?

M. FORGET: Je suis absolument incapable de vous répondre.

M. CHARRON: C'est parce qu'on avait demandé au ministère, je crois, de... Peut-être que cela va dans le même genre de discussions que nous avons eues avant l'ajournement. Ce sont des contrats de service avec des groupes qui travaillent déjà à l'extérieur.

M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant le CLSC de Saint-Donat, un groupe de citoyens de la région de Saint-Donat présentait, en décembre dernier, je crois, un dossier qui demandait l'implantation d'un CLSC dans la région. Est-ce que le ministère leur a donné une réponse?

M. FORGET: Je présume que M. Ouellet a dû leur donner une réponse. Saint-Donat n'est pas inclus dans les listes approuvées, à ce jour. A ce moment-là, on leur répond que leur demande va être prise en considération lors de la révision de la prochaine liste des CLSC.

M. CHARRON: Pendant qu'on est en train de faire le tour, le haut du comté de Kamouras-ka-Témistouata avait aussi fait une demande pour obtenir un CLSC. Je crois qu'il y avait même eu une lettre de M. Castonguay, à l'époque, pour donner l'accord au projet. Où en est-on dans ce cas précis?

M. FORGET: Est-ce que c'est le fameux Saint-Eleuthère?

M. CHARRON: Oui, probablement. M. FORGET: C'est en cours.

M. CHARRON: L'accord est donné et le projet est en implantation?

M. FORGET: C'est ça.

M. CHARRON: Est-ce qu'un budget de démarrage a déjà été donné à ce CLSC?

M. FORGET: C'est à partir de l'hôpital. Il y a un budget, il y a un animateur-analyste qui a été engagé.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, programme 4?

M. BEDARD (Chicoutimi): Avant de terminer, j'aurais peut-être quelques mots à dire, parce que j'ai été quand même surpris de certaines des interventions des députés libéraux concernant leur opposition à l'implantation de CLSC.

Nous avions dit, au début de la première intervention que j'avais faite à cette commission, qu'il était trop tôt — et je crois que c'est encore vrai — pour faire le bilan de l'expérience des CLSC.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je m'excuse.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est du sabotage!

M. CHARRON: Cela doit être les organismes...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... C'était plutôt surprenant de voir certains députés libéraux qui semblaient avoir fait leur bilan, à l'heure actuelle et vouloir même enterrer le projet. Cela me ramenait quand même à un projet de loi qui a été voté, comme l'a rappelé le député de Saint-Jacques — et c'est important — à l'unanimité de l'Assemblée nationale.

Cela me rappelait l'intention de la loi, elle-même. Je pense que l'intention du législateur concernant —je lis textuellement, c'est bon de se remémorer l'intention du législateur de temps à autre concernant certains textes de loi — la réorganisation des services de santé et des services sociaux était clairement inscrite dans la loi, particulièrement à l'article 3 qui disait ceci: "Le ministre exerce les pouvoirs que la présente loi lui confère de façon, premièrement: à améliorer l'état de santé de la population, l'état du milieu social dans lequel elle vit et les conditions sociales des individus, des familles et des groupes; deuxièmement, à encourager la population — c'est ça qu'on a voté, en fait à l'unanimité de l'Assemblée nationale — et les groupes qui s'y forment à participer à l'instauration, à l'administration et au développement des établissements de façon à assurer leur dynamisme et leur renouvellement; troisièmement, à mieux adapter les services de santé et les services sociaux aux besoins de la population en tenant compte des particularités régionales".

Ce qui rejoignait, en fait, les textes de base où étaient exposés les objectifs dont nous avons parlé au début de cette commission, les objectifs que poursuivait le ministère en créant les CLSC et qui représentaient, en fait, trois types

d'activités à l'intérieur du CLSC: l'accueil, des services intégrés de santé et des services sociaux et l'action communautaire.

Je trouve justement que par l'implantation des CLSC, quand on se réfère à l'intention du législateur, autrement dit quand on se réfère à ce que l'Assemblée nationale a mandaté son ministre de la santé d'exercer, en termes de préoccupation, on rejoignait et on continue de rejoindre les préoccupations non seulement au niveau de la santé, mais les préoccupations sociales qui étaient contenues à l'intérieur du texte de loi parce que l'implantation du CLSC assurément se fait — c'est difficile, d'accord, mais il aurait été surprenant qu'il en soit autrement — selon des bases très solides, si on se réfère toujours encore une fois à l'esprit de la loi, dans le sens qu'elle se fait selon un processus démocratique très louable. Ceci constitue, à mon sens, une sorte de pouvoir humain — je ne dirai pas de pouvoir dans le sens trop large du mot — très proche du milieu, des gens du quartier; c'est cela l'esprit de la loi, quand on revient aux trois intentions que j'ai énumérées tout à l'heure. Cette implantation constitue également une sorte de pouvoir où on essaie de vivre différemment les relations humaines en faisant un travail d'équipe, à certaines occasions, en prenant des prises de positions collectives. Autrement dit, c'est un commencement. Je trouve très humain ce pouvoir de participation collective qui à mon sens ne représente pas seulement une expérience humaine — j'en suis quand même convaincu — mais une expérience qui ne sera pas seulement louable mais qui sera également très efficace.

D'accord, on rencontre des difficultés, c'est normal encore une fois. On nous dit qu'à l'heure actuelle il y a 69 projets qui sont en marche, dont 11 sont vraiment beaucoup plus avancés que les autres.

On s'aperçoit que, parmi ces onze, déjà on a des résultats qui sont très positifs. Ceci me fait dire que mathématiquement parlant, même pas humainement parlant, si on se fie à cette expérience des onze qui, à l'heure actuelle, fonctionnent à plein, à ce moment-là on ne doit pas, comme l'ont suggéré certains députés, arrêter mais, au contraire, continuer en tenant compte de deux choses; je crois que c'est nécessaire. Premièrement, que la philosophie de base reste toujours la même —celle que j'ai énumérée tout à l'heure — tout en faisant les applications, les accommodations, des adaptations qui sont nécessaires concernant le milieu, que ce soit le milieu rural, le milieu urbain ou tout simplement le milieu régional. Je pense que ça fait tout à fait partie de l'état normal d'une loi qui commence, en fait, à s'animer et qui va chercher une grande partie de sa vitalité dans la population. Elle oblige à collaborer bien des groupes qui ne marchaient pas ensemble avant, qui fonctionnaient différemment, sans pour cela mettre en doute leur manière de fonctionner ou d'être utiles à la société. Ils fonctionnaient différemment et là sont obligés de fonctionner ensemble, ce qui amène une certaine difficulté.

Je considère que c'est un très bel effort de décentralisation; c'est un bel effort aussi de démocratisation de la santé vu qu'on l'applique au niveau de ceux qui en ont besoin. Egalement, je crois que les CLSC constituent pour la population par les résultats des onze projets dont on a parlé, une accessibilité accrue aux soins de même qu'une participation du milieu, qui à mon sens ne peut être que positive. Si on veut être réaliste, cette loi a été adoptée à l'unanimité. Je le dis très sincèrement, chacun des députés libéraux qui ont fait une intervention a pris le soin par après, comme le député de Frontenac, de dire qu'il le faisait pour son comté, qu'il le faisait en toute honnêteté. Mais, en toute honnêteté, également, je me pose une question. Il reste que ce projet de loi a été voté à l'unanimité. Je me demande jusqu'à quel point, à ce moment-là, certains ne votaient pas pour des phrases ronflantes qui font image, qui encore une fois semblent essayer de donner un visage humain à un parti qui a toujours l'air de vouloir fonctionner avec une image qui se rapproche de plus en plus de la population. Ils votaient plutôt pour l'image que pour la réalité. C'est évident que la réalité, n'importe quelle personne réaliste pouvait s'y attendre, serait qu'il y aurait certaines difficultés d'application d'un tel projet d'implantation de CLSC. Je trouve que les efforts — en terminant — qui ont été déployés jusqu'à maintenant sont très grands, sont louables et, à mon sens, ne doivent pas s'arrêter mais, au contraire, se déployer davantage pour avoir des résultats qui apporteront des services de santé qui sont de plus en plus près de la population et la desservent de mieux en mieux.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si les membres de la commission n'ont pas de questions à poser, est-ce qu'on peut considérer le programme 4 comme adopté?

M. CHARRON: Elément 1, oui.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Elément 2.

Soins à domicile

M. CHARRON: Elément 2, M. le Président, quelques explications. Cette somme de $11,214,000 aux soins à domicile couvre quel type de soins? Ils sont fournis par qui et à qui s'adressent-ils en particulier?

M. FORGET: Ce sont des services de soins à domicile qui s'adressent de façon spécifique à des malades hospitalités, soit pour prévenir l'hospitalisation, ou encore, de façon plus traditionnelle, pour permettre plus rapidement le retour des gens hospitalisés à domicile, Et ces

soins à domicile sont administrés actuellement par des conseils d'administration, en fait selon la troisième partie de la Loi des compagnies. Et ça prend un certificat médical pour que la personne puisse avoir accès aux soins à domicile, de nature médicale; et ces soins sont assurés par des infirmières qui vont à domicile et qui suivent la prescription médicale. C'est presque entièrement basé sur les soins posthospitaliers, pour faciliter le retour à domicile plus rapidement de ces personnes-là.

M. CHARRON: Ces soins sont offerts dans tout le Québec?

M. FORGET: Essentiellement oui, quoiqu'il y a des régions où les services sont moins développés que dans d'autres, où c'est moins organisé, et l'objectif pour l'avenir, c'est de les intégrer aux activités des départements de santé communautaires en milieu hospitalier.

M. CHARRON: Qu'est-ce qui explique l'augmentation d'à peu près $2 millions uniquement pour cette année?

M. FORGET: Essentiellement des hausses de salaire dues aux conventions collectives.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Frontenac.

M. LECOURS: Tout à l'heure j'entendais dire, par le sous-ministre, que les soins à domicile étaient possibles partout dans la province de Québec. Je ne suis pas d'accord une minute. Chez nous, on paye des taxes, puis on ne l'a pas encore, ce système. J'aimerais bien que le ministre me garantisse qu'il va donner ordre à l'hôpital général de Thetford-Mines, de commencer des préparatifs en vue d'instituer chez moi, dans mon comté, les soins à domicile, parce qu'on ne peut pas attendre un CLSC à Thetfort-Mines, on n'en a pas besoin de CLSC.

M. FORGET: M. le Président, la question soulevée illustre justement la difficulté. On a parlé plus tôt ce matin de la nécessité de faire des choix, c'est une illustration de la nécessité de faire des choix. On a prévu l'expansion de plusieurs programmes, de divers services à d'autres articles, et on peut à ce moment-ci, dans le temps, se poser des questions sur l'opportunité d'une expansion rapide des services de soins à domicile.

Des discussions ont eu lieu, échelonnées sur plusieurs mois et même sur plusieurs années, avec l'Association des services de soins à domicile, de manière à établir avec eux une évaluation du travail fait depuis maintenant presque dix ans, et peut-être une réorientation de certaines parties de leurs activités. Je dois dire que je ne sais pas si tout cela a été entièrement satisfaisant.

Pour ce qui est de l'accessibilité géographique uniforme ou plus uniforme des ser- vices de soins à domicile, nous comptons sur leur prise en charge par les départements de santé communautaires qui sont responsables de l'ensemble d'un territoire, pour rendre accessibles, sur une base aussi égale que possible, les ressources quand même assez substantielles — il s'agit de $11 millions — qui sont disponibles dans ce secteur, et peut-être, dans l'optique d'une évaluation qui n'a pas été, encore une fois, entièrement satisfaisante, une nouvelle évaluation de l'orientation passée de ces services, de diriger leur action, encore mieux, dans les secteurs de plus haute priorité.

Donc, pour le moment et tant que cette intégration et prise en charge par les départements de santé communautaires n'est pas faite, il a semblé plus sage de ne pas augmenter, plus que l'augmentation inévitable qui découle de l'application des conventions collectives, les services de soins à domicile, pour les prochaines années.

M. LECOURS: M. le ministre, est-ce qu'il y a une raison particulière à ce qu'un hôpital comme l'hôpital général de Thetford-Mines ne soit pas autorisé à instituer un tel système pour mes électeurs, surtout pour mes grands malades qui souffrent d'amiantose?

Il y en a à peu près 50 qui doivent passer jusqu'à un mois ou deux par hiver à l'hôpital. Je pense que ce serait un moyen de m'aider, si on n'est pas capable d'avoir les 22 lits.

M. CHARRON: Je pense que le député de Frontenac confond tellement bien ses électeurs et ses patients qu'il va finir par faire des discours en disant : Bien chers patients !

M. LECOURS: Mes patients, ce sont mes électeurs. Même les péquistes votent libéral; ils votent Lecours, chez nous. Ils se font traiter par moi, ils me font confiance.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous leur demandez de quelle couleur ils sont avant de les soigner?

M. LECOURS: Non, je les connais.

M. FORGET: M. le Président, je m'excuse du retard, du silence. Pour ce qui est de l'augmentation de ces services, évidemment, nous sommes conscients que toutes les régions, toutes les localités n'ont pas un accès égal actuellement aux services de soins à domicile. Les structures actuelles ont des imperfections qui nous paraissent évidentes et qui sont telles qu'il nous paraît nécessaire de réorganiser et de déplacer la responsabilité pour ces services avant de songer à une expansion. Cette intégration dans les services de santé communautaire va permettre de répartir les ressources disponibles de façon plus équitable peut-être, sans nécessairement, dans tous les cas, augmenter les ressources disponibles.

Le cas auquel on fait allusion n'est pas isolé

et il y a plusieurs autres localités, présumément, qui n'ont pas un accès égal. Même dans les centres urbains où ces services existent, nous sommes persuadés que tous les centres hospitaliers n'ont pas un accès uniforme, non plus, à ces services de soins à domicile. C'est afin de changer, encore une fois, l'organisation, de placer la responsabilité sur un plan sous-régional auprès des services de santé communautaire que nous avons différé toute expansion dans les soins de "nursing" à domicile. Cependant, dans les mêmes crédits, il y a aussi une autre dimension de ces services qui est constituée par les auxiliaires familiales. Dans ces crédits — ceci pour corriger ma remarque de tantôt; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je cherchais à être éclairé — il y a une augmentation de $500,000 pour les auxiliaires familiales pour l'année qui vient, ce qui effectivement, étant donné l'utilisation réelle des crédits de l'année passée, constituera une masse monétaire de $1 million pour l'expansion des auxiliaires familiales à domicile. C'est une augmentation assez importante si on considère le point de départ qui est d'environ $2 millions; c'est une augmentation d'environ 50 p.c. dans la disponibilité d'auxiliaires familiales.

M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce que je pourrais savoir si ces auxiliaires familiales dépendent des services sociaux?

M. FORGET: C'est cela, elles dépendent des centres de services sociaux et des centres locaux dans la mesure, évidemment, où ils sont en état de fonctionnement.

M. CHARRON: Programme 4.

Services en milieu scolaire

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 4, élément 2, adopté. Le programme 4 est adopté dans son entier. Nous passons, avec plaisir, au programme 5.

M. CHARRON: Vous voyez, deux programmes depuis ce matin, ça va bien! On va trop vite! Je pense qu'on va ralentir; le député de Rosemont ne pourra plus nous suivre.

Le programme 5 traite d'un sujet que je n'aborde pas, pour la première fois.

En effet depuis cinq ans que je fais les crédits du ministère de l'Education, j'ai eu l'occasion à chaque année, puisque le sujet revient à chaque année au ministère de l'Education, de parler des services en milieu scolaire. Effectivement, il y a une dizaine de jours, au moment où nous procédions à l'étude des crédits du ministère de l'Education, j'ai eu avec le ministre de l'Education — j'ai photocopie ici de nos transcriptions — une discussion sur la situation des cafétérias dans les écoles secondaires et au niveau collégial également. Je ne veux pas reprendre l'aspect de la discussion qui concernait proprement l'administration du système scolaire qui est celle du ministre de l'Education actuellement, mais le ministre de l'Education me renvoyait de lui-même, à plusieurs reprises, à un comité où il y a participation égale, si je ne m'abuse, à tout le moins conjointe, des deux ministères, celui de l'Education et celui dont nous sommes à étudier les crédits.

Le ministre de l'Education avait été alerté, au cours de l'année dernière, par un groupe de la Commission scolaire régionale de Chambly — Alerte-Alimentation était le nom que le groupe s'était donné — qui joignait des parents d'étudiants, le directeur de la régionale, certains directeurs d'écoles secondaires polyvalentes. Le groupe avait apporté un cahier qui faisait état d'une situation assez sombre, à tout le moins fortement améliorable, la qualité de la nutrition dans les polyvalentes et dans les collèges. Je crois qu'on s'en tenait plutôt, dans ce texte précis, aux polyvalentes. Il signalait en même temps — et c'est vers là que je dirige mes questions — certains exemples puisés à l'étranger où certaines collectivités assument d'elles-mêmes la nourriture donnée aux étudiants dans les polyvalentes. Aux Etats-Unis, par exemple, selon certains programmes dans certains Etats, la nourriture est distribuée gratuitement aux étudiants à l'heure du midi. A d'autres endroits c'est à un taux très minime. Je sais que la CECM à Montréal a un programme d'alimentation des étudiants — c'est un domaine que je connais un peu mieux — de $0.65 par repas où on peut leur offrir une nourriture chaude et un repas complet.

Je veux demander au ministre quelle a été l'étendue du rôle de son ministère ou de son délégué à ce comité et quelles études ont été faites, cette année, en particulier sur cette question de la nourriture dans les écoles, de la part du ministère des Affaires sociales.

M. FORGET: Nous nous sommes engagés dans un processus de consultation en collaboration avec le ministère de l'Education sur un assez grand nombre de sujets. Je ne pourrais pas vous affirmer dans tous les détails quels ont été tous les sujets de discussion. Il est clair qu'il y a des préoccupations prédominantes. Pour nous au moins, c'est une coopération entre les institutions d'enseignement et les centres d'accueil pour enfants pour ce qui est de la prise en charge de l'éducation des enfants qui sont dans les centres d'accueil. Elle a donné lieu à plusieurs rencontres et à beaucoup d'efforts de manière à bien définir les responsabilités respectives des deux ministères. Ces efforts ont sans doute occupé une large part des discussions. Il n'est pas exclu qu'ils aient porté également sur d'autres domaines; en particulier, j'ai distribué, au début de cette commission parlementaire, les normes alimentaires qui ont été élaborées par le ministère des Affaires sociales mais qui ont

donné lieu à des consultations. Ce sont probablement les consultations auxquelles faisait allusion mon collègue de l'Education. Un cahier de normes sera ou a été distribué par le réseau de l'éducation lui-même. Il y a eu une discussion qui a donné lieu à l'élaboration de ce cahier de normes.

Une fois cela fait, le rôle de notre ministère relativement à la distribution des aliments ou aux repas pris dans les cafétérias des écoles, évidemment, se termine là, puisqu'il s'agit clairement d'une responsabilité qui n'est pas de notre ressort. Cependant, pour ce qui est de la nutrition, généralement, il n'est pas du tout exclu, au contraire, il est prévu des programmes d'information sur toutes les mesures à prendre. La population étudiante doit en être informée; elle doit recevoir non seulement de l'information, mais aussi faire l'objet d'un certain effort de persuasion de la part de personnes qui oeuvrent dans les services sociaux ou dans les services de santé en milieu scolaire. Cette information va porter, entre autres, sur l'alimentation, en plus de porter sur un tas d'autres questions comme les dangers résultant de la consommation de drogues ou d'alcool, les problèmes d'éducation sexuelle, d'autres problèmes sur l'hygiène dentaire, etc.

M. CHARRON: M. le Président, est-ce que les repas servis dans les écoles sont contrôlés ou vérifiés par des diététiciens du ministère des Affaires sociales? Je veux joindre cela à la première question et surtout à la réponse du ministre. Vous mentionnez que ce cahier, effectivement, fait état de normes qui ont été établies par le ministère. S'agit-il véritablement de normes dans le sens où nous l'entendons dans le domaine de l'éducation, c'est-à-dire que sont obligées de suivre les commissions scolaires en fonction des budgets qui leur sont alloués, ou s'il s'agit plutôt de conseils pratiques quant à l'alimentation qu'on doit offrir, dans les genres d'aménagement de repas, viande, fruits, lait, etc., mais que les commissions scolaires sont libres d'appliquer selon les moyens financiers qu'elles ont?

Je dois vous dire que le repas modèle, qui est à peu près donné dans ce document, n'est pas appliqué dans bien des commissions scolaires. Un tas de mémoires venant de comités de parents ou même de commissaires, à certains endroits, en font mention. Alors, s'agit-il vraiment de normes? Est-ce que le ministre a vraiment appelé cela des normes comme nous l'entendons dans le domaine de l'éducation ou s'il s'agit plutôt d'une étude devant conduire à des décisions par les autorités concernées?

M. FORGET: M. le Président, il ne s'agit pas de normes dans le sens utilisé par le ministère de l'Education, pas dans le sens où le financement d'une commission scolaire va être menacé si la diète n'est pas suivie, tel que prévu par ce document. Il s'agit plus que des conseils ou des voeux pieux à l'intention des responsables de l'alimentation en milieu scolaire. Cependant, une étude a été faite sur l'alimentation de la population étudiante au Québec. Il y a, comme on le sait, une étude sur l'alimentation de l'ensemble de la population au Québec, qui donnera lieu à la publication d'un rapport et à des recommandations spécifiques. Ce cahier s'adresse non pas à des profanes, mais aux responsables des services alimentaires. Les diététiciens et les diététiciennes, qui oeuvrent dans ce milieu, ne sont pas à l'emploi du ministère des Affaires sociales, mais à l'emploi des commissions scolaires. Il y a tout lieu de croire qu'ils vont vouloir s'inspirer de ces normes et même les considérer comme des choses qui s'imposent, étant donné leur caractère et étant donné le travail qui a été fait pour les préparer.

Maintenant, encore une fois, il n'y a pas de sanction directe visant les commissions scolaires. Il est important, malgré tout, de donner un instrument de travail. Les comités de parents, qui existent, connaissant l'existence d'un document comme celui-là, pourront l'utiliser pour évaluer les services alimentaires qui sont fournis et aussi mesurer peut-être — c'est une dimension importante — l'importance qu'il faut attacher à l'alimentation des enfants. Il y a plus que simplement la disponibilité de ces repas.

Il y a aussi l'influence que la famille peut exercer pour éviter que les repas, qui peuvent être excellents quant à leur composition, à leur équilibre sur le plan diététique, soient effectivement ce que les enfants consomment, parce que l'on sait très bien qu'il y a plus, là-dedans, que la disponibilité. Tous ceux qui ont des enfants connaissent très bien les attractions que peuvent constituer des diètes pas du tout réglementaires.

Je pense qu'il faut habituer les enfants, dans le milieu scolaire, à utiliser leur liberté; non pas les forcer à manger ce qui est bon pour eux mais les éduquer à utiliser leur liberté, dans le domaine de l'alimentation comme ailleurs, de manière responsable et, dans le fond, dans leur intérêt.

D'où l'importance des programmes d'information qui porteront sur ces éléments aussi. La direction des communications du ministère des Affaires sociales accordera une attention toute particulière cette année au développement de moyens audio-visuels qui seront mis à la disposition du personnel affecté à ces services en milieu scolaire, pour aider les familles et aider les écoles elles-mêmes à sensibiliser les enfants aux avantages, sur le plan de la santé, du maintien de la santé, d'une alimentation saine et équilibrée.

M. CHARRON: Dans les secteurs qualifiés de défavorisés, pour employer l'expression souvent utilisée, dans ce qu'on appelle aussi les zones grises, comme le centre-sud de Montréal, est-ce que le ministère conduit des opérations spéciales pour améliorer la nutrition — qui a

souvent été qualifiée d'alarmante dans sa qualité — des enfants de 0 à 14 ans en âge de croissance en particulier? Est-ce que dans ce milieu précis, en faisant également état du fait que la nourriture scolaire n'est qu'un aspect de la nutrition en général qu'un enfant va recevoir dans sa famille... Là-dessus, les études sont déjà complètes. Le Conseil supérieur de l'éducation a déjà donné lui-même un avis particulièrement sévère au ministre de l'Education dans ce domaine. Est-ce que le ministère des Affaires sociales a partie liée à quelque opération que ce soit dans ces milieux?

M. FORGET: En effet, sur deux plans, depuis quelques années, une aide spéciale — qui est substantielle mais qui n'est, sans aucun doute, qu'un palliatif — est apportée par le ministère à certaines grandes commissions scolaires des milieux urbains où se retrouvent évidemment un certain nombre d'enfants défavorisés, pour apporter un supplément à la diète de ces enfants.

Mais, encore une fois, il ne s'agit là que d'une mesure intérimaire, cependant assez substantielle. Nous sommes, sur un autre plan, engagés avec le ministère de l'Education dans une opération de concertation qui a été lancée cet hiver pour découvrir les moyens d'apporter de meilleures réponses ou des réponses plus générales aux problèmes des enfants venant de milieux défavorisés. Cette concertation entre les deux ministères ne vise pas seulement, bien sûr, les problèmes alimentaires — c'est un aspect qui sera touché — mais vise l'ensemble de la sous-alimentation — qui est physique mais qui est aussi culturelle — de certains milieux qui constitue un handicap au succès scolaire de ces enfants et, donc, à leur promotion sociale.

C'est une opération qui a été lancée cet hiver, à laquelle nous attachons évidemment beaucoup d'importance et qui intéresse en tout premier chef le ministère de l'Education. Nous sommes associés au ministère de l'Education mais c'est le ministère de l'Education qui assume comme il se doit, puisqu'il s'agit d'une population scolaire et scolarisée, le leadership de cet effort dirigé vers la scolarisation et toutes les mesures qui entourent la scolarisation d'enfants venant de milieux défavorisés.

M. BONNIER: M. le Président, est-ce qu'on peut savoir, à ce niveau, si c'est spécifiquement dans des milieux urbains que se fait cette étude ou si c'est également dans des milieux ruraux?

M. FORGET: Ce sera une mesure d'application générale. Le mandat est en termes très généraux et vise tous les enfants venant de milieux défavorisés.

M. BONNIER: A travers la province? M. FORGET: A travers la province, oui. M. BONNIER: Sur tout le territoire.

M. BEDARD (Chicoutimi): A l'heure actuelle, est-ce qu'il se fait des expériences plutôt en milieux urbains que ruraux?

M. FORGET: Pour ce qui est de cette initiative, comme je l'ai dit, le leadership est vraiment assumé par le ministère de l'Education.

Puisqu'il y a plusieurs aspects, l'aspect alimentaire est un aspect mineur quoi-qu'important de toute cette question, et je pense que c'est plutôt à mon collègue qu'il faudrait poser cette question. Je pense qu'ils sont déjà engagés, dans une certaine mesure, dans des actions concrètes, comme nous le sommes nous-même; mais quant à nous, et c'est peut-être vrai de leur côté aussi, nous ne considérons pas que ce que nous faisons actuellement est la réponse, mais c'est, malgré tout, mieux que rien pour le moment.

M. CHARRON: Mais ce que vous dites-là, je l'ai posée, la question, au ministre de l'Education en présumant que c'était son ministère qui assumait le leadership de cette opération qui se fait en collaboration avec les instances, comme il les appelle, décentralisées du ministère, c'est-à-dire les commissions scolaires en plusieurs cas. Je sais qu'à Montréal, c'est le Conseil scolaire de l'île de Montréal, à qui d'ailleurs la loi-même qui l'a créé confère la fonction d'oeuvrer en premier lieu dans les milieux défavorisés, qui doit conduire cette opération.

Mais, puisque nous sommes à adopter les services de santé en milieu scolaire, est-ce que ces services, dont, je suppose, nous avons le directeur avec nous, couvrent l'ensemble du territoire québécois, ceux dont nous avons à adopter les crédits?

M. FORGET: Pour les services de santé et de services sociaux en milieu scolaire?

M. CHARRON: Les deux oui.

M. FORGET: Ils couvrent l'ensemble de la province, cependant nous sommes à poursuivre la réalisation d'un objectif: une certaine proportion entre le nombre de postes et le nombre d'étudiants. Les crédits de cette année d'ailleurs comportent des développements de ressources pour atteindre progressivement cet objectif. Il y a un développement de ressources d'un peu plus de $400,000 pour ce qui est des services de santé en milieu scolaire, et d'environ $850,000 pour ce qui est des services sociaux en milieu scolaire.

M. CHARRON: C'est plus que $400,000.

M. FORGET: C'est-à-dire que je ne parle pas de l'augmentation brute, je ne parle que des nouveaux postes, le développement, la composante de pur développement. Il y a évidemment l'indexation des salaires, l'augmentation des échelles, le coût additionnel, l'augmentation de l'indice des prix.

M. CHARRON: Où sont ces nouveaux postes que vous mentionnez?

M. FORGET: Au sujet des nouveaux postes d'infirmières en milieu scolaire ou de services sociaux en milieu scolaire, voici c'est qu'au...

M. BONNIER: II serait bon de parler des services sociaux tout à l'heure, j'aimerais bien qu'on se centre sur la santé.

M. FORGET: Au point de vue des infirmières en milieu scolaire, au tout début, il y avait des écarts considérables entre le nombre d'infirmières dans une région par rapport au nombre d'infirmières dans d'autres régions et, graduellement, d'année en année, un budget supplémentaire a été accordé de telle sorte qu'on établisse une sorte d'égalisation.

De plus, comme l'a signalé tantôt le ministre, au début, le ministère des Affaires sociales s'était engagé à atteindre un objectif qui était, je crois, d'une infirmière pour 2,000 élèves, et cette année, je crois que nous sommes à, je le donne sous toute réserve, une infirmière pour un peu plus de 2,600 élèves.

C'est 1 / 2,300. 1 / 2,300, c'est mieux, alors, 1 / 2,300.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Pourriez-vous répéter pour le journal des Débats.

M. FORGET: Alors, avec un montant de $400,000, M. le Président, il sera possible cette année de parvenir à une norme d'une infirmière par 2,000 étudiants.

Dans l'ensemble des régions du Québec.

Et la répartition sera faite en fonction de la situation actuelle dans chacune des commissions scolaires.

M. CHARRON: Quand on parle de services de santé en milieu scolaire, est-ce que ce sont uniquement des infirmières postées dans les polyvalentes, par exemple...

M. FORGET: C'est cela.

M. CHARRON: ... il n'y a pas de personnel itinérant?

M. FORGET: Aucun.

M. CHARRON: Est-ce que ces fonctions...

M. BONNIER: Cela veut peut-être dire que le travail est essentiellement du type éducation, hygiène alimentaire, et ces choses-là.

M. CHARRON: Prévention.

M. FORGET: II y a aussi une certaine quantité de dépistage qui se fait, et maintenant que ces infirmières sont rattachées au département de santé communautaire, les liens peuvent s'établir beaucoup plus facilement entre le travail qu'elles font dans les écoles et les références qu'elles sentent le besoin de faire dans certains cas.

Les cas où ils décèlent des problèmes particuliers qui méritent une visite en clinique externe pour une évaluation plus poussée, soit des problèmes d'audiologie ou des problèmes connexes qui sont décelés lors du travail avec les maîtres à l'école. Cette relation qui y est établie maintenant avec les centres hospitaliers permet une référence beaucoup plus facile que ce ne pouvait être le cas dans le passé.

Maintenant, tout ceci ne couvre pour l'instant que les services scolaires du niveau secondaire. Les infirmières des unités sanitaires ont traditionnellement assumé un rôle analogue relativement aux étudiants ou aux élèves du niveau primaire. Durant le cours de l'année, et c'est déjà fait dans certains cas, les infirmières scolaires en quelque sorte travaillant au niveau primaire seront intégrées également aux services de santé communautaire. Ainsi, ces services — 31 services au Québec — assumeront vis-à-vis de la santé de la population d'âge scolaire, jusqu'au niveau du CEGEP exclusivement, une responsabilité d'ensemble et pourront assumer aussi ces rôles de référence pour des problèmes qui requièrent des ressources plus spécialisées dans le centre hospitalier où ils sont basés.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Frontenac.

M. LECQURS: M. le Président, j'aimerais attirer l'attention sur un problème que plusieurs médecins vivent dans ma région, à cause des infirmières qui visitent les écoles. Elles ont peut-être raison mais je pense qu'il y aurait lieu d'améliorer le système. Par exemple, dans le village où je demeure, au printemps on a eu une épidémie d'oreillons, de varicelle. Chaque fois l'infirmière passait et elle envoyait tous les enfants à mon bureau. Mais ça coûte cher, cela. Les oreillons et la varicelle, ça ne demande pas toujours un examen médical. Parfois, elles vont dans d'autres écoles, elles regardent dans les yeux et disent: Tu fais de l'anémie, va voir ton médecin. Cela veut dire toujours des frais pour les contribuables.

Je me demande, à l'heure actuelle, si réellement c'est le rôle de l'infirmière que de diriger, pour de tels cas, chaque fois l'élève chez le médecin.

M. FORGET: Ce sont évidemment des problèmes particuliers qui peuvent être sujets à des améliorations. Il est clair que, si la référence était systématique de toute une population d'âge scolaire, il y aurait peut-être lieu de se poser des questions. D'un autre côté, il faut peut-être donner le bénéfice du doute aux enfants que l'on veut protéger, dont on veut maintenir la santé, et faire une ou des références parfois inutiles puisque le but même de ces

visites est de déceler des problèmes avant qu'ils ne deviennent trop considérables et graves et retardent le progrès scolaire de l'enfant. S'il y a des possibilités d'épidémie, il faut une action évidemment assez énergique. Il y a peut-être une formation dans ce domaine comme dans d'autres domaines.

M. LECOURS: Une fois que l'épidémie est déclarée, qu'elle est connue, je pense qu'il ne faudrait pas s'alarmer outre mesure. Mais, en plus, on demande à ces mêmes patients de revenir au bureau du médecin, se faire donner un certificat médical comme quoi ils sont guéris avant de réintégrer la classe. Cela fait deux visites souvent presque inutiles alors qu'on connaît qu'il y a une épidémie dans la région, que ce n'est pas quelque chose de bien grave.

M. FORGET: La désignation des chefs de service de santé communautaire avec un entraînement en santé publique...

M. BEDARD (Chicoutimi): Une épidémie de plus ou de moins.

M. FORGET: ... et peut-être...

M. LECOURS: On n'est pas attaché à l'argent, nous autres, on va essayer d'améliorer cela.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Rosemont.

M. BELLEMARE: M. le Président, quelle est la politique du MAS pour la nutrition en milieu scolaire?

M. FORGET: Bien, il y a eu une distribution dans...

M. BELLEMARE: Vous en avez parlé, d'accord. Je lirai le journal des Débats. D'accord, je m'excuse.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est parce que...

M. CHARRON: En plus de m'entendre, vous aurez le plaisir de me lire.

M. BELLEMARE: Cela me fera plaisir.

M. CHARRON: M. le Président, services de santé en milieu scolaire, élément 1, ça va.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Adopté? M. CHARRON: Oui, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Elément 1, adopté. Elément 2.

M. CHARRON: Les services sociaux offerts en milieu scolaire sont de quelle nature?

M. FORGET: Ces services sont offerts généralement par des travailleuses sociales et des conseillères sociales. Il s'agit, dans certains cas, d'aide psychosociale, disons, simple; il s'agit également de relations entre l'école et la famille. On sait que c'est surtout la travailleuse sociale qui va dans les familles, quand il y a des problèmes de tous ordres; par exemple s'il y a des problèmes d'absentéisme, on fera appel également à la travailleuse sociale.

De plus, la travailleuse sociale est chargée de participer à certains cours de formation, d'éducation des jeunes, en collaboration avec l'équipe du service personnel aux étudiants.

M. CHARRON: J'imagine que ces services s'adressent plus à une clientèle du secondaire qu'à l'élémentaire.

M. FORGET: C'est ça.

M. CHARRON: Mais il doit quand même y en avoir, en particulier pour les problèmes d'absentéisme, qui travaillent également avec les jeunes de l'élémentaire.

M. FORGET: Ce n'est pas impossible, mais ce n'est pas organisé de façon systématique au niveau primaire.

M. CHARRON: C'est surtout au secondaire. M. FORGET: C'est au niveau secondaire. M. CHARRON: Et cette dépense...

M. BONNIER: Quand vous dites secondaire, vous n'incluez pas les CEGEP?

M. FORGET: Non.

M. BONNIER: C'est parce que je remarque que, dans le domaine de la santé et dans le domaine des services sociaux, les CEGEP, c'est laissé de côté volontairement ou...?

M. FORGET: Non, je crois que les CEGEP ont également un budget pour les services personnels aux étudiants.

M. BONNIER: Ici.

M. FORGET: Ici, nous parlons du secondaire, dans le moment.

M. BONNIER: Du secondaire.

M. CHARRON: Mais ici ce dont nous parlons, ce sont des transferts aux commissions scolaires. En fait la travailleuse sociale dont vous parlez est à l'emploi de la commission scolaire?

M. FORGET: La travailleuse sociale fait partie du personnel d'un centre de services sociaux et elle part du centre de services

sociaux pour travailler en milieu scolaire. Alors, généralement, elle va dans une polyvalente; elles peuvent être deux également.

M. CHARRON: Quand, dans le budget on retrouve $8 milliards, je m'excuse, $8 millions.

M. BONNIER: Oui?

A cette heure-ci, les chiffres se déplacent. $8,997,000, c'est l'argent que le ministère verse aux commissions scolaires ou aux centres de services sociaux?

M. FORGET: Aux centres de services sociaux pour les services sociaux en milieu scolaire et aux services de santé communautaire pour les services de santé en milieu scolaire.

M. BONNIER: M. le Président, est-ce qu'on pourrait savoir, pour ces services-là aussi, quelles sont les normes? C'est un travailleur social par combien d'élèves? Deuxièmement, jusqu'à quel point sont-ils préoccupés par ce phénomène qu'on qualifie de "dropout" dans nos polyvalentes modèles?

M. FORGET: Là, M. le Président, je ne me fierai plus à ma mémoire, parce que tantôt je me suis aperçu que je donnais le chiffre de 1973, au lieu de donner celui de 1974. Alors, je vous avoue là que je ne saurais vous donner la norme sur-le-champ, mais ce serait facile de l'obtenir et je vous la communiquerai.

M. BONNIER: Jusqu'à quel point donne-ton de l'importance à ce phénomène de "dropout"?

M. FORGET: Cela fait partie, en général, des problèmes d'absentéisme et de comportement difficile qui sont notés dans les écoles et qui nécessitent d'établir un contact entre la direction de l'école, les maîtres et la famille, pour essayer de déceler s'il n'y a pas un problème qui est susceptible d'une solution.

Alerter les parents sur la nature du problème dont ils peuvent être insuffisamment conscients et essayer d'obtenir la collaboration de la famille avec le milieu scolaire pour résoudre ces difficultés. Cela fait partie éventuellement d'un problème de comportement, de consommation de drogue ou d'absentéisme, d'un phénomène de délinquance ou de pré-délinquance. C'est l'ensemble, c'est l'éventail de ces questions qui fait l'objet du travail du travailleur social en milieu scolaire et qui donne aussi à ce personnel l'occasion de faire des références à des ressources plus spécialisées et peut-être même de mettre en branle des mécanismes tels que ceux qui sont prévus pour la protection de la jeunesse lorsqu'il semble qu'un enfant est dans une situation telle qu'il ne peut plus être laissé dans son milieu de vie habituel, qu'il a besoin d'un recyclage quelconque, en quelque sorte, pour l'aider à franchir une étape difficile.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Rosemont.

M. BELLEMARE: Au sujet de ces services sociaux, M. le Président, est-ce qu'il y a une coordination de ces programmes avec le ministère de l'Education?

M. FORGET: II y a une coordination sur un plan local avec les commissions scolaires puisque ces personnes, comme on l'a expliqué tantôt, travaillent en collaboration avec le personnel qui fait partie du service personnel aux étudiants, qui est une des composantes du budget et des normes budgétaires reconnues par le ministère de l'Education. Il y a un effectif qui est là et le travailleur social intervient avec cette équipe. Donc, il y a une coordination qui se fait sur un plan personnel, en quelque sorte, avec les membres de cette équipe de services personnels aux étudiants.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Moi, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Elément 2, adopté?

M. CHARRON: ... j'ai terminé l'élément 2. Si mon collègue n'a pas d'objection, j'adopterais le programm 5.

M. BONNIER: Est-ce que je peux juste faire une petite intervention, M. le Président? J'ai l'impression que la fatigue commence à gagner mon ami de Saint-Jacques. Je ne veux pas allonger le débat, je veux simplement faire remarquer au ministre ce qu'il sait sans doute qu'avec les problèmes que nous rencontrons au niveau des polyvalentes, les problèmes de comportement, c'est pour cela que je posais la question de la norme... Ce que j'en sais, c'est que les travailleurs sociaux ne sont pas suffisamment nombreux, sans doute, pour faire face au défi assez important qu'ils ont à relever.

M. FORGET: Je vous suis reconnaissant de le signaler. Comme l'augmentation très rapide des budgets du ministère à ce chapitre depuis quelques années le démontre, il s'agit d'une des priorités du ministère des Affaires sociales, et cela continuera d'être une priorité pour les prochaines années, particulièrement dans le domaine des services sociaux en milieu scolaire. On vient d'indiquer que nous atteignons la norme, ou l'objectif que nous nous étions fixé cette année pour les services de santé en.milieu scolaire, mais ce n'est pas le cas pour ce qui est des services sociaux.

Encore une fois, comme on vous l'a dit tantôt, les chiffres précis me font défaut sur ce point, mais je sais de mémoire que les normes que nous envisageons comme réalistes pour les

prochaines années sont même en-deça de ce qui serait idéalement souhaitable. Nous allons, malgré tout, essayer d'atteindre ces normes le plus rapidement possible, quitte à voir si nous pourrons, dans les années subséquentes, les dépasser.

Il est clair qu'il y a un besoin de ce côté et cela peut rendre d'immenses services. J'ai eu connaissance personnellement du travail fait dans certains secteurs par les travailleurs sociaux en milieu scolaire et je suis sûr qu'on peut leur rendre un très grand hommage, parce qu'ils abattent un travail extraordinaire et extrêmement important. Alors, on considère que c'est une priorité, on va continuer à le considérer. Voyez seulement cette année, nous ajoutons $850,000 pour la création de nouveaux postes, étant donné les choix qu'il faut faire et qu'on ne peut pas mettre toutes les ressources et les nouvelles ressources dans le même secteur. Il reste que c'est malgré tout, en termes de pourcentage, une très grosse augmentation, peut-être en termes de pourcentage, la plus grosse augmentation de tous les programmes du ministère.

Soutien aux organismes volontaires

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 5 adopté? Programme 6, soutien aux organismes volontaires.

M. BEDARD (Chicoutimi): Comme "ce programme vise à favoriser la participation de groupes volontaires dont les services contribuent à la réalisation des programmes de santé et des services sociaux", à l'élément 1, à savoir, soutien aux organismes de santé, est-ce qu'il serait possible de connaître la liste des subventions? Et également de savoir sur quels critères on se base pour accorder ces subventions?

M. FORGET: On pourra vous remettre à la prochaine séance une liste des projets. Ils ne sont pas tellement nombreux, parce que ce crédit n'est pas tellement considérable. Pour ce qui est des critères, les critères sont de deux sortes. Il s'agit essentiellement de favoriser l'action d'organismes bénévoles qui font montre d'une action autonome significative, qui bénéficient d'un appui manifeste, concret et assez large. C'est la raison pour laquelle le financement du ministère est très limité, mais il s'agit aussi de soutenir non pas de façon discriminatoire, toutes espèces d'organismes, mais ceux qui peuvent, par leur action, contribuer à la solution de problèmes concrets plutôt que simplement soutenir des campagnes d'information ou de publicité ou de recherches, puisque la recherche est soutenue par un autre programme au ministère des Affaires sociales, en vertu d'une évaluation spécifique de projets qui sont soumis à des comités de pair. Donc il s'agit essentiellement d'aider des organismes qui don- nent des services concrets qu'ils font avec un appui substantiel et également concrets d'un secteur important de la population, et de limiter notre participation à une participation très minoritaire, effectivement 20 p.c. des budgets.

M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce qu'il y en a plusieurs, organismes...

M. FORGET: Je peux vous donner une liste assez sommaire. Vous avez l'Association de paralysie cérébrale, la Société pour les enfants infirmes, l'Association des paraplégiques, l'Ordre de Saint-Jean, l'Association des aveugles; du côté de la santé mentale, l'Association canadienne de la santé mentale, les centres de croix blanche de Montréal et de Québec, l'Institut d'études sur l'alcoolisme et un certain nombre de congrès et de symposiums à caractère scientifique et avec une dimension internationale, c'est-à-dire extérieure au Québec proprement dit, de manière à donner un certain rayonnement aux activités qui se font ici ou alors à permettre à certains milieux professionnels une ouverture sur ce qui se fait ailleurs, sur un plan scientifique. Nous n'accordons aucun appui à des congrès qui ne sont que des réunions sociales ou à des réunions de type purement et étroitement professionnel.

Il faut qu'il y ait une dimension scientifique qui contribue soit au rayonnement du Québec, soit à l'ouverture du Québec sur de nouvelles idées, des expériences étrangères.

M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, je n'ai pas de question sur l'élément 2, ce qui veut dire qu'en ce qui nous concerne...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 6, adopté?

M. BONNIER: Je m'excuse encore une fois. LE PRESIDENT (M. Lafrance): Non, non.

M. BONNIER: Est-ce à l'intérieur de cet élément 2 qu'on pourrait trouver l'aide à certains organismes de type familial?

M. FORGET: Effectivement, c'est à l'élément 2 que l'on trouve les subventions aux organismes familiaux. Effectivement, plus de la moitié des sommes prévues pour cet élément sont consacrées à des organismes familiaux. Il y a une somme importante qui est donnée à l'OFAQ, Organismes familiaux associés du Québec, à SERENA, à la Fédération des unions de familles, au Service d'orientation des foyers, à la Fédération du Québec pour la planification des naissances. Donc, on a là toute une série d'organismes qui reçoivent ensemble près de $300,000, sur un total de $420,000. Le reste est donné à différents organismes, comme des popotes roulantes dans un certain nombre de

régions, au Conseil canadien de développement social; c'est la contribution du Québec aux travaux de ce conseil.

M. CHARRON: De toute façon, vous allez nous en donner la liste.

M. FORGET: Je vais vous donner la liste à la prochaine séance.

M. BELLEMARE: M. le Président, juste une seconde. Peut-être que vous avez omis de dire que les sourds-muets ont aussi une subvention. Vous ne les avez pas nommés dans les organismes que vous avez cités. C'est peut-être une omission que vous avez faite.

M. FORGET: Je n'ai pas nécessairement fait une liste exhaustive. J'ai énuméré les noms qui me sautaient aux yeux. Vous allez avoir la liste totale à la prochaine séance.

M. BELLEMARE: Merci.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, programme 6, adopté. Programme 7, Consultation psycho-sociale.

M. CHARRON: Consultation psycho-sociale, si je comprends bien, c'est ce que verse le ministère aux...

M. FORGET: Aux centres de services sociaux.

M. CHARRON: ... centres de services sociaux. Exactement. Bon, j'ai très peu de questions, sauf peut-être une remarque. Le ministère a déjà publié, en annexe à son rapport annuel 1972/73, un dossier régional qui donnait des données statistiques par région. Malheureusement, c'est le seul document que l'on ait, le plus récent que l'on ait quand on veut vérifier l'étendue des centres de services sociaux et, en particulier, les services qu'ils couvrent et qu'ils offrent région par région : je dirais même qu'en certains endroits, c'est presque ville par ville.

Est-ce que le ministère a un document plus récent que celui-là ou est-ce qu'à son rapport annuel, qu'il déposera incessamment, il y aura également une annexe régionale, un dossier régional?

M. FORGET: II y a une révision de ce document qui est en préparation. Je crois pouvoir affirmer qu'en effet il sera produit comme annexe au rapport annuel. Mais c'est une publication qui risque de devenir désuète à moins d'être révisée et que nous avons l'intention de réviser selon une périodicité qui n'est pas totalement arrêtée actuellement.

M. CHARRON: Dans ces services, j'ai une seule question. Dans les services qu'offriront les centres de services sociaux, avec ce budget que nous nous apprêtons à leur voter, le ministre a déjà fait état des services à domicile pour les personnes âgées que ces centres de services sociaux auront à couvrir. Est-ce qu'il peut donner plus d'explications, ce soir, sur ce genre de services aux personnes âgées?

M. FORGET: II a été question de ça dans un autre contexte également et je ne sais pas s'il n'y a pas peut-être un peu confusion. Nous avons parlé de l'ouverture des centres d'accueil pour personnes âgées dans les projets qui sont actuellement à l'étude sur une base externe, en quelque sorte, des centres de jour, mais cela ne paraîtrait pas, effectivement, dans ce programme.

M. CHARRON: Cela va être au programme 8?

M. FORGET: Ce serait au programme 8.

M. CHARRON: Au programme 8 ou au programme 9. Au programme 9.

M. FORGET: II y a évidemment des services de consultation et de placement qui sont assumés par les centres de services sociaux mais ce ne sont pas, comme tels, des centres de jour.

M. CHARRON: D'accord. Programme 7, adopté, M. le Président, quant à moi.

M. BELLEMARE: Un instant, un instant!

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Rosemont.

M. BELLEMARE: Quel est le nombre de personnes touchées par ce programme et quels en sont les résultats?

M. FORGET: Excusez-moi, je n'ai pas compris.

M. BELLEMARE: Quel est le nombre de personnes touchées par ce programme et quels en sont les résultats?

M. FORGET: Le programme 7? M. BELLEMARE: Oui.

M. FORGET: II est assez difficile d'évaluer la clientèle des centres de services sociaux puisqu'essentiellement toute la population, à un titre ou à un autre, peut être appelée à y faire appel.

Il faut se souvenir que les centres de services sociaux ont des responsabilités, entre autres pour le placement, l'évaluation des problèmes des familles et des enfants en difficulté et les placements qui peuvent être recommandables dans des cas comme ceux-là.

Alors cela s'adresse, en théorie, à toute la

population. Dans une année particulière, cela ne s'adresse qu'aux enfants qui y ont fait appel. Malheureusement, je n'ai pas ce chiffre.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas obligatoire. C'est juste grosso modo.

M. FORGET: Pour ce qui est des personnes âgées, c'est la même chose. Tout le monde peut avoir besoin de ce service ou toute famille peut avoir une personne âgée qui requiert un placement et l'évaluation du besoin de ce placement, se fait sous les auspices du centre de services sociaux.

Par exemple, les services d'adoption, les procédures d'adoption sont sous la responsabilité des centres de services sociaux, de même que l'évaluation d'un certain nombre de situations qui peuvent requérir une assistance, comme les auxiliaires familiales ou d'autres services de placement en foyer nourricier sur une base temporaire pour des raisons de santé et autres.

M. BELLEMARE: Suivant l'expérience que vous avez eue à ce jour, M. le Président, pour une conclusion rapide, est-ce que cela a donné de bons résultats?

M. FORGET: Sans aucune doute, je pense que les centres de services sociaux répondent à un besoin. Maintenant comme on le sait, les centres de services sociaux sont l'objet d'une réorganisation très profonde. Nous espérons pouvoir les placer dans une situation encore plus favorable pour rendre des services à la population.

Ils pourront, ayant désormais une vocation régionale, dans la plupart des cas, mieux coordonner l'utilisation des ressources institutionnelles, des ressources des établissements en fonction des véritables besoins de l'ensemble de la région plutôt qu'en fonction d'une évaluation qui se fait sur une base de localités particulières ou sur une base d'accessibilité des ressources. La coordination qui était faite anciennement entre les centres hospitaliers et les ressources de placement pour soins prolongés sera désormais assumée par les centres de services sociaux de manière encore une fois à rendre optimale l'utilisation des ressources de placement pour soins prolongés.

Nous avons le sentiment que ces mesures vont aider à améliorer les services qui sont donnés à la population. Du côté de l'adoption, il y a aussi des efforts pour développer et stimuler l'adoption des enfants qui sont susceptibles d'être adoptés. Une partie des ressources additionnelles qui sont mises à leur disposition leur permet de développer leurs services dans ces directions.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): II y a quand même une augmentation de $10 millions qui est assez représentative, presque 20 p.c, qui est consacrée à de nouveaux services. Pourriez-vous nous dire les priorités?

M. FORGET: Ce montant de $10 millions est en partie apparent puisqu'il résulte d'un transfert interprogrammes des sommes qui étaient autrefois versées aux centres hospitaliers pour les services sociaux en milieu hospitalier et qui sont désormais pris en charge par les centres de services sociaux. C'est la contrepartie budgétaire de l'effort de réorganisation qui est en cours, pour une part. Il y a aussi un développement véritable. Il y a comme dans tous les autres programmes — et ça commence à faire une masse importante — l'augmentation des salaires et l'indexation qui représente une somme de $3,500,000 sur les $10,600,000; il y a l'indice des prix, un autre montant de $400,000 d'augmentation, ce qui laisse une somme de $4 millions pour le développement des ressources durant l'année en cours, et un coût additionnel, pour le prochain exercice financier, des développements intervenus l'an dernier, pour un total de presque $3 millions.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 7, adopté. La commission ajourne ses travaux jusqu'à jeudi matin, dix heures.

(Fin de la séance à 22 h 1 )

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