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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du mercredi 22 mai 1974
(Dix heures vingt-cinq minutes)
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs! Nous reprenons l'étude des
crédits du ministère des Affaires sociales, au programme 8.
M. FORGET: J'aimerais, M. le Président, avant de commencer,
m'acquitter des promesses d'informations supplémentaires que j'ai faites
à d'autres réunions antérieures de la commission, en
particulier pour vous fournir la liste, telle que demandée, des CLSC en
opération ou en implantation. Alors, on va faire la distribution de
cette liste. Egalement, j'avais indiqué que nous distribuerions la liste
détaillée des subventions, au programme 6, à des
organismes volontaires. Il y a également l'information ici.
Alors, M. le Président, je n'ai pas de remarque
préliminaire à faire, au début de ce programme, je pense
que je vais...
UNE VOIX: Adopté.
M. FORGET: ...suggérer l'adoption.
Réadaptation de l'enfance et des
adultes
M. BEDARD (Chicoutimi): Poussez-nous pas dans le dos. Concernant ce
programme, comme M. le ministre le sait, concernant la législation
possible, que ce soit par voie de règlement ou autrement, en
matière de contribution, de parents bénéficiaires de
services sociaux ou de services de santé, on avait convoqué la
commission parlementaire, concernant les contributions pour les enfants
placés dans les centres d'accueil ou les familles d'accueil.
On sait quel a été le résultat de cette commission,
qui est ajournée, présentement, sine die. Je pense que M. le
ministre se rappelle les critiques qui avaient été
formulées par l'Opposition ainsi que les essais de critique qui avaient
été faits par certaines personnes qui n'avaient pas eu la
possibilité d'être entendues par cette commission pour faire
valoir leurs points de vue. Lors de cette commission, le ministre nous avait
annoncé certains amendements qui modifiaient, par exemple, le montant
des contributions. Il y a eu, d'une part, un texte légal,
l'arrêté en conseil 365-74 du 30 janvier 1974, qui était
passé, en tenant compte des pouvoirs discrétionnaires qui sont
conférés au lieutenant-gouverneur, en vertu de la loi de
l'assistance publique.
Je voudrais qu'on m'informe sur un point. Je crois que cet
arrêté en conseil, 365-74 a été abrogé ou
modifié par un autre arrêté en conseil.
M. FORGET: C'est exact.
M. BEDARD: Celui que j'ai, j'imagine, doit être le bon, ce serait
l'arrêté en conseil 1383-74, c'est cela?
M. FORGET: Je ne connais pas les numéros par coeur de
l'arrêté en conseil. Il date environ de la mi-avril, en vertu de
la loi de l'assistance publique.
M. BEDARD (Chicoutimi): Du 10 avril 1974, en vertu toujours de la Loi de
l'assistance publique, qui, à ce moment, abordait l'aspect des
contributions payables et qui faisait état des amendements des montants
qui avaient été changés, lors de la commission
parlementaire.
Je comprends que c'est un règlement provisoire, temporaire.
Est-ce que le ministre pourrait nous faire état de la situation?
Qu'est-ce que le ministre pense en fonction de l'aspect temporaire de ce
nouvel arrêté en conseil, face aux représentations qui ont
été faites tant par l'Opposition officielle que par des corps
publics et des associations de parents concernés?
M. FORGET: Pour essayer de résumer brièvement, autant que
possible, la situation depuis quelques mois à ce sujet, il y a eu, en
effet, comme on vient de le souligner, un arrêté en conseil,
adopté le 10 avril, dont l'effet est d'établir, pour la
période intérimaire jusqu'à l'adoption de
règlements en quelque sorte permanents sur le sujet, des taux de
contribution qui sont les taux minimaux prévus dans le projet tel qu'on
envisage de le présenter à nouveau éventuellement.
Ces taux minimaux sont équivalents aux allocations familiales
versées aux familles pour les enfants de deuxième rang et
l'avantage de ces taux, par rapport aux taux antérieurement plus
élevés qui ont servi comme base de facturation pour janvier et
février, l'avantage de ces nouveaux taux plus bas est donc donné
aux familles sous forme de crédit, et ces taux s'appliquent
désormais, encore une fois, jusqu'à ce qu'un règlement
plus définitif intervienne.
Pour ce qui est de ce règlement plus définitif, un certain
nombre de modifications ont été annoncées lors des travaux
de la commission parlementaire et ont servi de base à un document
d'information qui, lui-même, est utilisé pour les fins d'une assez
large consultation avec plusieurs groupes de parents que j'ai rencontrés
et que je continue de rencontrer durant les quelques semaines qui viennent de
passer et les quelques semaines qui viendront.
Il y a également eu des discussions qui se sont poursuivies avec
les centres de services
sociaux qui, depuis le 1er avril, ont effectivement assumé ces
responsabilités, telles que prévu dans le règlement.
Donc, c'est à peu près où nous en sommes. Nous
sommes encore à consulter des associations de parents, à discuter
avec elles de certaines modalités qui sont prévues dans le projet
et, à la lumière des observations qui nous sont faites, nous
polissons ce projet de manière à tenir compte d'un certain nombre
d'observations fondées, en particulier, sur la distinction qui doit
être établie ou qui peut être établie entre
différentes catégories d'enfants selon la cause ou le motif du
placement et des procédures qui peuvent être envisagées
pour diminuer ou éliminer complètement, dans certains cas, la
contribution parentale.
M. BEDARD (Chicoutimi): Le ministre nous dit qu'il tiendra compte des
représentations qui lui ont été faites et qui continuent
de lui être faites par les parents concernés afin de polir
pour employer votre expression correctement ces règlements.
Est-ce qu'on peut s'attendre que le ministre tienne compte également des
représentations que l'Opposition avait faites à ce moment,
concernant les contributions, par exemple, des familles monoparentales et qui
étaient nettement défavorisées par rapport aux familles
à deux conjoints et également d'une autre suggestion qui avait
été faite par l'Opposition à l'effet de laisser ce qui
existait autrefois concernant l'enfant, à savoir de laisser à
l'enfant la minime partie de l'allocation familiale qui lui était
réservée sous l'ancien système et qui permettait à
l'enfant d'amasser des fonds qui pouvaient l'aider par la suite à
s'assurer certains besoins qui n'étaient pas fournis, soit par le centre
d'accueil ou par la famille d'accueil.
Concernant ces deux suggestions, est-ce qu'on peut s'attendre que le
ministre en tiendra compte dans ses nouveaux règlements
définitifs?
M. FORGET: Pour ce qui est du dernier point, l'opposition que j'avais
indiquée lors des travaux de la commission parlementaire au début
d'avril est essentiellement celle qui est encore retenue. Les fins pour
lesquelles ces fonds étaient utilisés sont désormais
comblées d'une autre manière et n'impliquent aucune diminution
dans la possibilité d'aider les enfants ou les familles à
supporter certaines charges spéciales, à l'exclusion toutefois,
d'une accumulation, puisque les allocations familiales ne sont pas
considérées comme s'accumulant ou devant constituer un
pécule pour les enfants, mais comme destinées à aider les
familles à assumer, en partie, les frais de subsistance afférents
à la présence des enfants dans une famille. Donc, il n'y a pas
à ce point de vue une provision dans les allocations familiales pour
accumuler une espèce de dotation pour les enfants et la situation
à cet égard, pour les enfants placés, comme pour les
enfants non placés, devrait, à notre avis, être la
même.
Pour ce qui est des familles monoparentales, il y a dans les taux de
contribution qui sont envisagés, dans le moment, un aménagement
qui favorise, relativement parlant, la famille monoparentale puisque les taux
d'exemption qui sont envisagés et qui ont été d'ailleurs
décrits publiquement sont de $3,000 pour une famille avec un seul parent
et de $4,000 pour une famille qui compte deux adultes, donc contrairement aux
chiffres antérieurs qui étaient respectivement de $2,000 et de
$3,500.
M. BEDARD (Chicoutimi): II y avait également une autre critique
qui avait été faite par l'Opposition concernant le fait que le
gouvernement, en fait, surtout dans le cas des familles
bénéficiaires de l'aide sociale, leur faisait parvenir leurs
allocations familiales plutôt que de les retirer à la source, ce
qui, selon l'Opposition, créait une situation qui était
complètement aberrante dans le sens suivant: On demandait à ces
familles qui étaient déjà dans le besoin de faire
l'économie de leurs allocations familiales en fonction d'un compte
à payer. C'était demander un peu d'héroisme à une
famille qui est déjà dans le besoin de voir à garder,
à économiser, ou à mettre de côté les
allocations familiales qu'elle reçoit alors que souvent ces familles en
ont un pressant besoin. Est-ce que le ministère étudie la
possibilité que dans ces règlements définitifs, les
allocations familiales soient retenues à la source?
M. FORGET: J'ai indiqué au cours de ces discussions on
peut y revenir plus en détail si vous le souhaitez que dans le
cas en particulier des bénéficiaires de l'aide sociale, il y a un
avantage même financier pour ces familles à recevoir l'aide
sociale et les allocations familiales comme si l'enfant n'était pas
placé et à payer les taux qui sont prévus.
Dans un certain nombre de cas, on a même donné des exemples
chiffrés de cet avantage financier qui existe pour les familles à
considérer l'enfant comme étant à leur charge, même
si, effectivement, de facto, il ne l'est pas parce qu'il est placé. On a
cité un cas qui est assez simple et bien connu, celui de la famille
monoparentale où il y a un seul enfant et où la somme que l'aide
sociale seule prévoit est de $68 par mois, qui est la différence
entre l'allocation pour une personne seule et l'allocation pour un adulte avec
un enfant. On peut mettre en regard de cette allocation, les contributions
exigées qui sont, à ce moment-là, pour un assisté
social, la contribution minimale qui est égale à $22 par mois, si
l'enfant a moins de douze ans. Donc, il y a un avantage, dans un grand nombre
de cas, à procéder de cette façon et plus
généralement, au moins dans un certain nombre de cas, là
où cela a été discuté dans les consultations
auxquelles nous procédons. C'est un aspect qui fait l'objet même
de commentaires favorables de la part de cette association de parents,
là où il y a eu des discussions qui ont porté sur ce
point. Ces commentaires favorables
illustrent l'option prise par le ministère des Affaires sociales,
de faire essentiellement confiance aux parents, de croire qu'ils vont assumer
leurs responsabilités vis-à-vis des enfants placés. Sur le
plan financier comme sur d'autres plans, de la même façon que pour
tous les autres parents, est justifiée, comme on sait, une attitude que
nous avons adoptée relativement à l'aide sociale elle-même.
On nous a souvent demandé d'administrer le budget familial des
assistés sociaux, de retenir à la source le montant du loyer, de
l'électricité, du téléphone, de tout, de les
mettre, en quelque sorte, en tutelle. Ce n'est pas l'option que nous avons
retenue. C'est quand même possible, comme mesure ultime, dans certains
cas extrêmes, mais ce n'est pas la règle qui a été
retenue, c'est une attitude qui, en général, est bien
acceptée et bien reçue, et qui favorise la normalisation, si vous
voulez employer cette expression, de la situation des familles
bénéficiaires de l'assistance sociale.
M. BEDARD (Chicoutimi): Le ministre a fait état qu'il avait eu
à rencontrer, également, des travailleurs sociaux lors de la
commission parlementaire. Comme vous le savez, il avait été
question longuement de la politique du ministère qui était
à l'effet que la perception se fasse par les agences plutôt que
directement par le ministère. Lors de cette commission, on avait fait
état du danger de transformer, en fait, le travailleur social ou sinon
le travailleur social, du moins l'agence sociale en une agence de perception,
avec toutes les implications que ceci pourrait avoir sur la difficulté
d'approche de ces travailleurs sociaux vis-à-vis des gens qu'ils vont
aider, dont ils vont analyser la situation humaine et sociale. D'un autre
côté, ces mêmes personnes, via l'agence ou directement, sont
dans l'obligation, par après, de devenir des gens qui, après
s'être impliqués dans l'analyse du milieu social, sont dans
l'obligation, de par le ministère, de par les règlements, de
devenir des percepteurs, d'emprunter le visage d'un percepteur face à
ces mêmes personnes. Comme il en avait été question assez
longuement, quand même, est-ce que le ministère garde toujours la
même politique là-dessus, à savoir celle de faire percevoir
ces redevances par des travailleurs sociaux ou par l'agence sociale?
M. FORGET: Pour ce qui est du travail des travailleurs sociaux, la
situation envisagée par ces règlements ne change en rien leurs
relations avec les familles qui ont recours à leurs services, puisque,
de tout temps, c'est à ce niveau que l'information a été
assemblée sur non seulement la situation sociale et familiale de
l'individu ou de la famille en question, mais également sur sa situation
au point de vue revenu. C'est une dimension importante des
préoccupations professionnelles d'un travailleur social, puisque
l'état de revenu d'une famille donne une indication significative sur
ses capacités d'assumer certaines responsabilités ou de
résoudre certains problèmes avec plus ou moins d'aide de
l'extérieur. Cette information a toujours été
colligée par les travailleurs sociaux, et donc, même s'il n'y
avait aucune perception, il est assez évident qu'une information sur le
statut socio-économique des familles avec lesquelles ils viennent en
contact serait nécessaire et ferait partie de leur dossier
professionnel.
La question de savoir si, une fois cette information disponible, elle
est transmise au ministère ou elle est transmise à un agent
comptable qui est dans le réseau, et qui est plus prêt de cette
information et plus susceptible, peut-être, de réfléter des
variations et des changements dans le statut socio-économique des
personnes, c'est une question purement administrative que l'on peut
régler, qu'on a effectivement réglée en accordant des
postes de type administratif aux centres de services sociaux pour prendre en
charge certaines tâches administratives, dont celle-là.
Encore une fois, ce n'est pas une situation qui, sur le plan
professionnel, implique les travailleurs sociaux dans une relation
différente de ce qu'elle a toujours été, de ce qu'elle
devrait être, de toute manière, pour leur permettre de saisir,
dans sa globalité, les problèmes d'une famille qui sont, souvent,
pas seulement des problèmes sociaux dans le sens étroit du mot,
mais des problèmes économiques également, et des
problèmes de maintien de revenu ou d'insuffisance des revenus face
à des besoins spéciaux extraordinaires.
M. BEDARD (Chicoutimi): Face à ce problème de perception,
j'imagine que le ministère a quand même fait une évaluation
de ce que la mise en place de ce nouveau système de perception pourrait
lui coûter, par rapport à l'ancien système qui existait. Je
pense qu'il ne fait pas de doute, à première vue, que le
système que le ministère veut instaurer, le système de
perception, va certainement être beaucoup plus onéreux que celui
qui existait auparavant.
M. FORGET: II faut faire attention, dans ces discussions, de comparer
des choses comparables et pour cela, il est évident que l'objectif
initial de cette réglementation est d'instaurer, sur une base publique
et de manière équitable, des règles de contribution
applicables au placement des enfants, et quel que soit le lieu, puisque le
coût ne dépend pas de l'endroit physique ou cela se fait, ou des
structures juridiques, il est nécessaire, pour bien administrer un
règlement, pour bien administrer équita-blement un régime
de contributions, de consacrer des ressources suffisantes pour que cette
administration se fasse de manière juste, exacte, dans tous les cas, en
conformité avec une réglementation. C'est une critique que l'on
peut faire, à juste titre, au système précédent
où il y avait, évidemment, de très grandes
disparités
dans la façon dont on considérait, sur le plan des
contributions parentales, des familles à un même niveau de revenu
et dans les mêmes circonstances familiales. Pour améliorer ce
système, il y avait le choix de l'améliorer soit en accordant des
ressources additionnelles au service du ministère qui était
chargé de ces contributions, soit en accordant des ressources
additionnelles aux centres de services sociaux. La décision de le placer
à un niveau plutôt que l'autre n'influe pas directement, sauf dans
la mesure où des échelles de salaires ne sont pas les mêmes
dans le secteur parapublic ou dans le secteur public, mais c'est un ordre de
grandeur extrêmement minime par rapport au problème
lui-même.
Je fais d'ailleurs observer que le principe d'une contribution une fois
admis, il faut l'administrer d'une façon équitable, c'est
essentiel et il faut consentir les ressources nécessaires pourvu
qu'elles ne soient pas disproportionnées avec l'effet brut ou l'effet
net produit sur le plan du produit de cette contribution, en termes financiers.
Et ce n'est pas le cas, cela se maintient dans un ordre de grandeurs tout
à fait acceptable; je ne sais pas, en pourcentage, de quoi il s'agit,
mais c'est certainement inférieur à 20 p.c. des contributions
totales envisagées. Et il ne fait pas de doute à mon esprit,
quoique je ne puisse pas vous donner une description détaillée
des tâches de ce personnel nouveau qui ne sera pas affecté
entièrement à améliorer la gestion de cet aspect du
fonctionnement des centres de services sociaux, que sa présence
permettra également d'améliorer tout le mécanisme de
paiement au foyer substitut. Lui-même avait grandement besoin
d'être amélioré puisque, il y a un certain nombre de
données essentielles à la connaissance du
phénomène, au mouvement de la clientèle, qui
n'étaient pas disponibles et qui peuvent très bien être
disponibles par une meilleure gestion du programme à l'occasion des
paiements qui sont faits au foyer substitut et des contributions exigées
des familles.
Donc, cette production de données permettra à la
planification une évaluation plus scientifique de l'effet et des
dimensions du phénomène de placement au Québec. C'est un
phénomène dont on a déploré, jusqu'à
maintenant, les grandes dimensions, parce qu'on cite un chiffre global
d'enfants placés. Maintenant, il n'est malheureusement pas possible
justement à cause d'une gestion déficiente du programme
de dire quelle est la durée moyenne pendant laquelle un enfant a
été placé, combien de placements successifs ont
été effectués pour un même enfant dans plusieurs
foyers substituts etc., etc.
Cette information découlera également, sera un
sous-produit de la mise sur pied d'un système de contributions qui
permettra, incidemment, de produire des données plus fiables et plus
complètes.
M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce qu'on peut penser qu'à
l'intérieur de l'agence, les travailleurs sociaux auront plusieurs
emplois ou plusieurs genres de travaux à accomplir? Ou, concernant la
perception, dans l'esprit du ministre, est-ce qu'il y aura une personne
à l'intérieur de l'agence qui sera attitrée d'une
façon très claire à la perception et à ce
moment-là, les travailleurs sociaux qui sont sur le champ, n'auront pas
à faire cette perception?
M. FORGET: Effectivement...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ceci, auprès de familles de qui ils ont
acquis la confiance, en étudiant leurs problèmes et devant
lesquelles il serait très mauvais, à mon sens, psychologiquement,
que ces mêmes personnes reviennent sous le visage du percepteur.
M. FORGET: Effectivement, simultanément avec ce
développement de la réglementation sur la contribution, comme on
le sait, en vertu des règlements de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux, chaque établissement de
santé ou de services sociaux doit préparer, à
l'intérieur d'un certain délai, un plan d'organisation.
Les plans d'organisation des centres de services sociaux sont, pour une
large part, déjà complétés et font l'objet d'une
analyse au ministère des Affaires sociales, de manière à
déterminer quel type d'organisation, quel genre de structure, de
service... quelle est l'organisation, par exemple, au niveau des succursales,
également, qui demeurent. Malgré la fusion des agences, les
succursales demeurent.
En général, la division par service ou par programme des
activités avec la désignation de personnel-cadre responsable des
différents programmes, des différents services à
l'intérieur des centres de services sociaux... Donc, nous traversons une
période d'assez grandes transformations dans ce secteur.
Il est évident, aux yeux de tous les observateurs que
l'infrastructure administrative des centres de services sociaux doit être
amélioré et implique nécessairement l'injection, en
quelque sorte, d'un personnel de soutien, sur un plan administratif, sur le
plan de l'administration financière, en particulier, qui est
nécessaire, étant donné l'importance beaucoup plus
considérable des centres de services sociaux maintenant que, dans
plusieurs régions, ils ont été fusionnés.
Donc, il y aura une distinction des tâches et chacun accomplira
les tâches pour lesquelles il aura une formation. Il est évident
que, du côté des travailleurs sociaux, leur formation ne les
destine pas à la gestion financière ou à l'administration
comme telle, mais aux relations avec les familles et à l'intervention
auprès des familles et des enfants.
Cependant, comme je l'ai indiqué tantôt, traditionnellement
et cela va continuer d'être le cas des informations sur le
statut économi-
que de la famille sont essentielles pour leur propre travail de
professionnels. A ce niveau, ils ont à connaître ces
circonstances, puisqu'ils doivent s'en inspirer pour un tas d'interventions que
ce soit sur un plan spécifique des placements, où c'est un
élément ce n'est pas la raison principale du placement
comme sur d'autres plans également.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Dans le même ordre d'idées, si je
comprends bien, dans l'idée du ministre, il est fort possible et
ce n'est pas contraire à l'esprit du ministère que la
situation se présente, l'affectation des tâches ayant
été faite à l'intérieur de l'agence, que le
travailleur social puisse en même temps être, après la
distribution des tâches, celui qui s'occupe de la famille dont il a la
responsabilité. Ce n'est pas contraire...
M. FORGET: Je pense avoir exclu, de façon générale,
cette...
M. BEDARD (Chicoutimi): ...générale...
M. FORGET: Mais, écoutez, vous avez des centres de services
sociaux qui jouissent d'une certaine autonomie, qui présentent des plans
d'organisation, qui peuvent décider, pour des raisons qui leur
apparaissent importantes et professionnellement acceptables, d'effectuer une
certaine répartition des tâches. Je pense qu'en
général ce ne sera pas celle qui sera retenue pour les raisons
que je viens d'indiquer, puisqu'il y a une question de formation
professionnelle. Normalement, dans tous nos établissements, on n'utilise
pas les infirmières dans les cuisines et les cuisiniers dans les
unités de soins. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de
préciser cela, étant donné que les gens connaissent ces
distinctions et qu'ils les comprennent, cela va sans dire.
Si on le dit, cela n'ajoute rien et je pense que c'est largement une
question qui va de soi. Les centres de services sociaux ont assez de jugement,
je pense, pour qu'on leur permette de confier aux bonnes personnes des
tâches spécifiques comme celles-là. Il me semble, à
première vue, comme il semble au député de Chicoutimi, que
ce ne sont pas les travailleurs sociaux qui vont devenir des percepteurs ou des
agents de gestion financière pour les centres de services sociaux. Mais
je ne voudrais pas exclure la possibilité qu'un individu qui a rempli
ces tâches, malgré une formation différente, continue
à le faire, puisque c'est une question très personnelle et un cas
particulier. Ce n'est certainement pas interdit par aucune loi de changer de
métier ou de changer d'orientation en dépit de sa formation. Je
crois que tout cela va de soi.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Taschereau.
M. BONNIER: M. le Président, je veux justement faire un
commentaire là-dessus. Evidemment, on est à l'étude des
crédits, je suppose qu'en commission parlementaire cela va revenir,
quand on va étudier le projet de règlement, mais j'ai
l'impression...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ajournez sine die.
M. BONNIER: De toute façon, je pense que c'est important de le
mentionner au ministre.
Je voudrais simplement attirer l'attention de mon collègue de
Chicoutimi sur le fait que cette nouvelle orientation consiste en certaines
normes de base. C'est la base de la réglementation, à savoir
qu'on a recours maintenant à des normes plutôt qu'à des
adaptations individuelles qui portaient parfois, préjudice, à
certaines personnes.
A partir de ce moment-là, je pense que le ministère, si
j'ai bien saisi l'idée du ministre, veut décentraliser cette
opération. Je crois que c'est très bien qu'elle soit
décentralisée si c'est là le principe, puisqu'il n'y a
rien de plus artificiel et d'anonyme que des normes qui sont
édictées.
Si on veut décentraliser l'administration je pense que,
là-dessus, le ministre l'a souligné; je suis tout à fait
d'accord là-dessus je voudrais souligner que le rôle des
travailleurs sociaux n'est certainement pas, bien sûr, d'être des
percepteurs, mais je crois que ce sont les gens, parce qu'ils comprennent la
globalité du problème, soit dans le domaine des enfants
handicapés, par exemple, ou dans des cas semblables, ce sont eux qui
sont les plus susceptibles de bien interpréter les besoins de la famille
et les problèmes de cette famille, qui peuvent, d'ailleurs avoir une
incidence sur le comportement de l'enfant, parfois, ou sur les relations entre
l'enfant et les parents.
De ce point de vue, personnellement, j'insisterais, même si cela
ne l'était pas, pour que les travailleurs sociaux se préoccupent
de cet aspect monétaire, non pas qu'ils doivent envoyer eux-mêmes
le compte, mais qu'ils se préoccupent pour faire les
interprétations nécessaires, parce que ce sont eux qui sont le
mieux placés, ce n'est pas le comptable dans...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ils l'ont toujours fait sous l'ancien
régime.
M. BONNIER: Je pense qu'ils doivent le faire encore davantage
actuellement à cause des normes qui existent. Cela va prendre un
ajustement et une interprétation de ces normes, et c'est en connaissant
la globalité du problème et de la situation des gens qu'ils vont
être mieux placés pour le faire. Je ne les appellerais pas des
percepteurs à cause de cela, mais je les appele-rais des gens qui
sont sensibilisés au fait de la globalité du problème
lui-même et la situation socio-économique fait partie de la
globalité du problème. Je ne veux pas discuter, mais, si on a
l'occasion de le reprendre, ce serait mon point de vue.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Vanier, dans le
même ordre.
M. DUFOUR: Je me demande, M. le Président, si on n'est pas en
train de définir ici les tâches du travailleur social. Est-ce
qu'on est ici pour cela ou si on est ici pour discuter des crédits? Je
pense qu'on est en train d'aller un peu loin dans la définition des
tâches du travailleur social, de la maîtresse d'école,
etc.
Il reste que, selon ce qu'a dit le député de Chicoutimi,
je crois qu'il va falloir tout à l'heure engager des enquêteurs
financiers pour aider nos travailleurs sociaux. Ils n'auront plus le droit de
regarder le côté financier de la famille. Si on regarde juste le
point de vue social, je pense qu'on va un peu loin. On est en train de peser
des oeufs de mouches avec des toiles d'araignées.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quand on veut évaluer une structure, je
pense qu'il faut bien la connaître si on veut l'évaluer en
fonction de crédits, de dépenses d'argent. Je crois que les
précisions, qui ont été apportées par M. le
ministre, en fait, ou l'implantation comme telle, que ce soit au niveau de la
perception ou, autrement, de certaines structures, vont avoir certainement une
implication financière. C'est seulement lorsqu'on connaît cette
structure qu'on peut l'évaluer en termes d'implication
financière. On est justement au niveau des crédits. Je pense que
les crédits ne veulent pas dire de parler seulement d'argent. On a
à se comprendre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Frontenac.
M. LECOURS: M. le Président, j'aurais seulement un court
commentaire. Le travailleur social est un professionnel, comme l'avocat
peut-être un travailleur social. Quand l'avocat demande ses honoraires
à son client, est-ce qu'il y a quelque chose de déshonorant dans
cela? Absolument pas. Je pense que cela fait partie de son travail. Le
travailleur social fera son travail aussi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense qu'il y a une différence, en
termes de compréhension du public, entre la perception de l'avocat et la
perception du travailleur social.
M. LECOURS: C'est un professionnel comme le travailleur social, sauf que
le député de Chicoutimi trouve que le travailleur social n'est
pas un professionnel.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je crois être bien placé pour
croire à bon droit que le public ne perçoit pas l'avocat comme
travailleur social au même titre que le travailleur social.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'élément 1, avez-vous
d'autres questions?
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le ministre, lors de la commission
parlementaire et on entre dans les sommes d'argent vous aviez
affirmé que l'application de ces règlements et la perception qui
en serait faite représenteraient $8 millions à $9 millions.
Est-ce que, depuis la commission parlementaire, d'autres estimations ont
été faites?
M. FORGET: Oui, effectivement.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce montant concordait, une fois les amendements
annoncés par le ministre, lors du début de la commission
parlementaire. Un de ces amendements entre autres a été
consigné dans l'arrêté en conseil 1383-74.
M. FORGET: Effectivement, une évaluation subséquente a
été faite plus précisément. Le recouvrement total
envisagé est de l'ordre de $7.5 millions.
M. BEDARD (Chicoutimi): De $7.5 millions?
M. FORGET: Oui.
M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, ces millions, légalement parlant,
vous vous basez, pour le droit que vous avez de les réclamer, sur
l'arrêté en conseil 1374 qui a été adopté en
vertu de la Loi de l'assistance publique, n'est-ce pas?
M. FORGET: Oui. C'est-à-dire que, pour la période
intérimaire, il y a cette loi. On se souviendra sans doute que la Loi de
l'assistance publique existe depuis une trentaine d'années. Elle
représente une loi qui est sous bien des aspects désuète,
mais qui continue à être utilisée pour toutes sortes de
raisons pratiques, telles que sa reconnaissance au titre des ententes de
partage de coûts avec le gouvernement fédéral et aussi
certaines dispositions précises qui, comme telles, ne permettent pas de
faire certains versements en vertu d'une autre loi, comme la Loi sur les
services de santé et les services sociaux. Cette dernière loi
prévoyait cependant une abrogation par proclamation du
lieutenant-gouverneur en conseil, mais celle-ci n'est pas intervenue. Donc,
cette loi a continué d'exister et continue à servir de base
légale pour un certain nombre d'actions et de paiements. Nous ne
prévoyons pas, dans un avenir immédiat, être en mesure de
supprimer cette loi. Cependant, le projet de règlement dont on a
discuté depuis quelques mois est en vertu d'une
autre loi, la Loi sur les services de santé et les services
sociaux.
M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant la Loi de l'assistance publique,
est-ce que le ministre peut me dire sur quel article il se base pour faire
cette réclamation de $7.5 millions?
M. FORGET: Ecoutez, je n'ai pas le texte de loi devant moi, mais si vous
lisez...
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela pourrait être l'article 16, qui est
indiqué dans l'arrêté en conseil?
M. FORGET: Je crois devoir prendre avis. Je n'ai pas
spécifiquement les détails. Encore une fois, il y a une
référence à cela, je n'ai pas mémorisé le
numéro des articles de la loi.
M. BEDARD (Chicoutimi): En tout cas, je pourrais fournir peut-être
la réponse?
M. FORGET: Oui, si vous avez la réponse.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je voulais être bien sûr avant de
m'avancer dans une certaine argumentation qui pourrait être légale
et quand même pas moins importante. Si on lit bien l'arrêté
en conseil 1383-74 du 10 avril, on voit que ce serait sous l'autorité de
l'article 16 de la Loi de l'assistance publique que le règlement
indexé au présent arrêté en conseil est
adopté. Alors, ce serait sous l'empire de cet article...
M. FORGET: Je lis comme vous l'arrêté en conseil. Je prends
votre parole là-dessus.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quand vous regardez la Loi de l'assistance
publique, est-ce que l'esprit de cette loi ne consacre pas d'une façon
très claire, la gratuité complète au niveau je l'ai
ici sous les yeux de l'assistance publique, au niveau des personnes
nécessiteuses, des personnes à l'état d'indigence? Elle
parle également de certaines institutions d'assistance publique. Je
pense que c'est là l'esprit de cette loi...
M. FORGET: M. le Président, c'est faire un retour
considérable en arrière que de se reporter à l'esprit de
cette loi, mais s'il était vrai, comme l'affirme le député
de Chicoutimi, que la Loi de l'assistance publique prévoit la
gratuité des services, il faudrait conclure que le Parlement,
l'Assemblée nationale, quand a été adoptée la Loi
de l'assurance-hospitalisation, a adopté une loi complètement
inutile et redondante puisque la loi d'assistance publique prévoyait
déjà la gratuité de tous les services.
La même chose pourrait se dire du régime
d'assurance-maladie qui était complètement inutile puisqu'il y
avait une loi de l'assistance publique qui permettait au gouvernement de donner
la gratuité des services. Ce n'est pas du tout l'esprit de cette loi qui
reflète évidemment les mentalités qui prévalaient
entre les deux guerres, ou peut-être même avant la première
guerre mondiale, en vertu duquel le gouvernement recevait, par une loi comme
celle-là, une autorité de payer certains services ou une certaine
partie de services donnés à des personnes nécessiteuses.
C'était tout l'esprit de cette loi. Essentiellement, c'est un peu une
loi d'aide sociale avant le mot qui ne nous permettrait, à strictement
parler, de financer les services de garde d'enfants en foyers nourriciers que
pour des familles assistées sociales ou indigentes et non pas pour des
familles qui ont un revenu égal au revenu moyen ou même
supérieur au revenu moyen, puisqu'en vertu d'un programme de placements
en foyers substituts, il est concevable, et cela se retrouve dans les faits,
que des personnes qui ont un revenu fort supérieur à la moyenne
recevraient un service gratuit, ce que cette loi ne permet pas de faire. C'est
contraire à son esprit.
C'est d'ailleurs par référence à cette loi et
à l'esprit de cette loi que j'ai expliqué qu'essentiellement, ce
que le ministère fait, dans le fond, ce n'est pas tellement une
perception des parents que de graduer son aide aux familles, en fonction de
leur capacité de payer, pour des ressources de substitution au milieu
familial. Cette aide est totale dans les cas d'indigence totale. Elle est de
moins en moins considérable au fur et à mesure que les revenus de
la famille augmentent. C'est donc une espèce de contribution progressive
du gouvernement à la prise en charge de certaines charges familiales
spéciales qui ont la nature d'un besoin spécial.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quelles que soient les pratiques qui aient pu
avoir lieu dans le passé, je n'ai pas à discuter de leur
légalité, mais pour celle qui nous concerne présentement,
il faut toujours en revenir quand même à l'esprit de la loi. Il
reste quand même que c'est à partir de cette loi de l'assistance
publique que vous avez adopté les règlements
généraux, n'est-ce pas? Je crois qu'en fait, les montants de $7
millions à $8 millions, $7.5 millions ou $8 millions dont vous avez fait
état tout à l'heure, qui pourraient être perçus via
cette réglementation, à mon sens, ils pourraient l'être
difficilement, parce que je crois que le règlement lui-même est
illégal. Il est ultra vires. Si vous me permettez, je vais vous donner
l'argumentation. Je voudrais la faire la moins harassante possible, mais je
pense que, légalement parlant, je vais vous donner les motifs sur
lesquels je me base pour en arriver à cette conclusion. Vous avez, en
vertu de la loi de l'assistance publique, adopté les règlements
généraux dont on parle. Vous vous êtes basés sur
l'article 16 de cette loi de l'assistance publique, laquelle loi donne au
lieutenant-gouverneur en conseil le droit d'adopter des règlements. Une
chose qui est certaine, c'est que ce droit du lieutenant-gouverneur en con-
seil, cette discrétion du lieutenant-gouverneur en conseil ne
doit s'exercer que dans le cadre de la loi et ne doit pas dépasser le
cadre et l'esprit de cette loi. La loi de l'assistance publique, telle qu'on
l'a devant nous, en est une dont l'esprit consacre le principe de la
gratuité.
Si je me trompe, le ministre me trouvera un article dans sa loi de
l'assistance publique qui puisse permettre au lieutenant-gouverneur de demander
des contributions. Je suis convaincu...
M. FORGET: Ce n'est pas nécessaire.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... que ce n'est pas possible. Mon argumentation
est à l'effet que, justement, le lieutenant-gouverneur en conseil,
lorsqu'il a accepté les règlements généraux dont il
est fait état dans la discussion, a excédé, à mon
sens, les cadres de sa discrétion. A ce moment-là, le
règlement devient, à mon sens, ultra vires, et ceci a
nécessairement comme conséquence qu'à mon humble avis, le
gouvernement n'a pas les moyens légaux, à l'heure actuelle
si on se base seulement sur ce que nous avons en main de réclamer
ces montants aux personnes qui sont visées par ce règlement. Je
suis convaincu que, si des personnes concernées par ce règlement
s'avisaient de contester devant les tribunaux, l'assurance que semble vouloir
nous donner le ministre ne serait pas si grande face à quelqu'un qui
exercerait son droit pour vérifier la légalité de ce
règlement.
M. FORGET: M. le Président, j'ai indiqué tantôt que
l'esprit de la loi qui est invoquée pour demander ces contributions
était tel qu'il ne fallait pas et qu'il était absolument exclu
d'envisager que cette loi autorise la gratuité ou permette d'assurer la
gratuité des services donnés à qui que ce soit. D y a eu
subséquemment à cela, plusieurs autres lois dont l'effet,
précisément, était d'assurer la gratuité. On peut
au moins présumer, en interprétant les lois les unes avec les
autres, que cette loi ne donnait pas déjà ce qu'on a donné
par d'autres lois subséquentes, Indépendamment de cela, il est
clair que la loi d'assistance publique n'abroge en aucun de ses articles les
dispositions du code civil. Le code civil prévoit une obligation
alimentaire de toutes les familles à l'égard des enfants, et
aussi des enfants à l'égard de leurs parents dans d'autres
circonstances. Mais pour ce qui est des parents, il y a une obligation
alimentaire. Ce que nous faisons par cette réglementation, c'est
essentiellement de dire, par un autre moyen mais dont l'effet est
essentiellement le même, que nous accordons une aide aux familles qui ont
besoin d'une aide, après évaluation de leurs revenus, mais que
cette aide diminue justement, au fur et à mesure que les ressources de
la famille s'accroissent. C'est exactement ce que la loi d'assistance publique
prévoit. Elle prévoit de le faire d'une façon
peut-être plus directe, ou cela a été fait de façon
plus directe à l'occasion, mais pas toujours. Si l'on suivait les
indications qu'on vient d'entendre, cela tendrait à nous inciter
à verser directement aux familles, en fonction de l'insuffisance de
leurs ressources, une espèce de subvention d'appoint, pour leur
permettre d'effectuer, à leurs frais, le placement des enfants. Ceci
serait tout à fait conforme, non seulement à l'esprit, mais
à la lettre de la loi d'assistance publique, présumément,
selon l'interprétation que l'on semble dégager de la question de
tantôt. Mais il nous semble que, quant à l'esprit de ce que nous
faisons, nous aboutissons exactement aux mêmes résultats,
c'est-à-dire d'accorder une assistance. Si l'on veut mener la discussion
sur ce plan, c'est une loi d'assistance publique et nous accordons une
assistance aux familles, qui est d'autant plus grande que les revenus de cette
famille sont bas, et d'autant moins considérable que les revenus de la
famille sont élevés. Donc, c'est essentiellement ce qu'une loi
d'assistance publique prévoit, qui est une loi d'assistance
financière, reliée au statut socio-économique de la
famille ou de n'importe quelle autre catégorie de
bénéficiaires qui est prévue.
Quant aux modalités institutionnelles, que le paiement soit fait
directement ou indirectement ne change pas la nature du programme qui est
essentiellement un programme d'assistance et non pas de gratuité.
Pour ce qui est de la possibilité de contester légalement
l'application de cette réglementation et l'application même de
pratiques administratives qui ont précédé la
réglementation et qui étaient encore moins fermement assises sur
des articles spécifiques de la loi, il y a eu au moins un cas
d'espèce qui a été porté devant les tribunaux et
qui a résulté en un jugement favorable qui a soutenu
essentiellement la capacité du gouvernement d'exiger des parents une
telle contribution.
Donc, sur le plan légal, il n'y a pas de doute. Il n'y a pas,
effectivement eu de réfutation apportée par un tribunal
quelconque à la capacité juridique d'avoir une telle
exigence.
Et sur le plan philosophique, la question de gratuité je
vous ferai remarquer que nous en avons déjà discuté
ne se pose pas pour un programme qui est essentiellement pour la composante
d'hébergement, de n'importe quel programme qui comporte de
l'hébergement.
Ce que nous exigeons comme remboursement est relié non pas
à la prestation de services professionnels, mais à des frais de
subsistance qui découlent très clairement de l'obligation
alimentaire des parents qui demeure et qui existe en vertu du code civil et non
pas en vertu de la Loi de l'assistance publique. Cette loi ne prétend
pas supprimer l'obligation alimentaire, elle permet seulement au gouvernement
d'aider les familles à supporter cette responsabilité.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le ministre ne
veut pas entrer et cela paraît dans le vrai aspect
légal, même si parfois les arguments légaux peuvent
paraître fastidieux. Le ministre peut se permettre n'importe quoi, de
donner des exemples, d'essayer de tourner autour, mais il y a une chose qu'il
ne peut pas se permettre, lorsqu'une loi est édictée et qu'il y a
des dispositions interprétatives qui sont au début de cette loi,
il ne peut quand même pas sortir de ces dispositions
interprétatives. Dans le cas présent, vous vous êtes
basé sur l'article 16, paragraphe 2, le pouvoir de réglementation
du lieutenant-gouverneur, qui dit très bien: "Le lieutenant-gouverneur
peut également faire tous les règlements pour la mise à
exécution des dispositions de la présente loi..." et si vous
revenez au début de la loi où sont énoncées les
dispositions interprétatives, vous ne trouverez absolument rien dans les
dispositions interprétatives comme vous ne trouverez pas dans la loi, un
article précis qui puisse vous permettre légalement de cotiser
ces gens.
M. FORGET: Le but de la commission parlementaire n'est pas de trancher
un débat sur un plan de technique juridique.
M. BEDARD (Chicoutimi): Point d'ordre. Ces règlements ont comme
résultats que s'ils sont appliqués, ils représentent de
$7,500,000 à $8,000,000, ils ont une incidence financière selon
qu'ils sont appliqués ou non. Si discuter du bien-fondé de ce
règlement n'est pas discuter de crédits à ce moment-ci, je
me demande ce que c'est que de discuter de crédits. Parce que selon que
vous avez raison légalement parlant, selon que le ministère a
raison ou a tort, ce sont $7,500,000 ou $8,000,000 qu'il doit compter ou
retrancher dans son budget.
M. FORGET: Je n'interdis pas au député de Chicoutimi de
parler de technique juridique. Le seul but de ma remarque était de
souligner qu'il peut entretenir les doutes qu'il entretient sur la
capacité légale du ministère de mettre en application ce
règlement, mais qu'il n'est rien que l'on puisse faire en commission
pour lever ce doute. Nous affirmons, d'autre part, que nous avons toutes les
raisons de croire, y compris au moins un précédent qui a
été réglé par un tribunal, que ce règlement
s'applique et que les sommes effectivement prévues seront effectivement
récupérées.
Donc, je pense bien qu'on ne peut pas faire autrement que de
différer d'opinion là-dessus, puisqu'il appartient
éventuellement à un tribunal d'interpréter les lois, et
non pas à une commission parlementaire. Je pense que tout ce qu'on peut
faire, c'est noter que nous avons une très grande assurance du
côté de la capacité ou de la possibilité juridique
de faire appliquer ces règlements s'ils sont mis à
l'épreuve sur un plan juridique, comme ils l'ont été une
fois dans le passé, et il en a résulté un jugement qui,
encore une fois, confirmait les pratiques administratives suivies.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous me permettrez, sans doute, de ne pas
être d'accord avec vous quand vous dites: Comme cela a été
fait dans le passé, parce que ce n'est pas le même cas auquel je
me réfère ce matin. De ce côté,
l'expérience...
M. FORGET: C'est parce que c'est un nouveau règlement...
M. BEDARD (Chicoutimi): ...légale n'a pas encore
été faite concernant ces règlements.
Je voudrais savoir du ministre si, effectivement, il a eu... J'imagine
qu'avant de mettre cette législation en marche, il a dû avoir des
avis, je ne sais pas, du bureau de législation
déléguée comme... Il y a sûrement un bureau de
légistes concernant l'application, concernant la légalité
des règlements qu'on veut mettre en application. Est-ce que le ministre
a consulté ce bureau, ou a consulté quelque autre autorité
législative concernée?
M. FORGET: M. le Président, les textes des arrêtés
en conseil sont préparés par les services du contentieux du
ministère, ou du ministère de la Justice, plus exactement. Je
crois, sauf erreur, que tous les projets de règlements qui sont
envoyés ou soumis au conseil des ministres sont d'abord examinés
par le bureau de la législation déléguée. Le texte,
tel qu'on le voit, puisqu'il a été adopté, a subi cet
examen, présumément avec succès, puisque vous avez le
texte devant vous.
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, pas nécessairement, parce que je
comprends qu'il peut y avoir certains avis légaux. Le gouvernement, pour
des considérations, comme vous l'avez dit tout à l'heure, parce
que, pensant qu'il y avait des précédents qui avaient
été créés, il pouvait continuer sur cette voie des
précédents, peut facilement se faire une opinion qui puisse
être autre que celle-là. N'est-il pas exact qu'effectivement, on a
porté à l'attention du ministre le danger de mettre en oeuvre ce
régime de contributions, concernant ses assises sur le plan
légal?
M. FORGET: Non, M. le Président, je n'ai pas... C'est la
première nouvelle que j'ai à ce sujet. C'est la première
fois que la question m'est posée. Non, il n'y a aucune difficulté
particulière.
M. BEDARD (Chicoutimi): Personne n'a attiré l'attention du
ministre sur ce sujet, d'une façon spéciale?
M. FORGET: Avant le député de Chicoutimi, non.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'élément 1...
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez égale-
ment les règlements... Toujours pour légiférer en
matière de contributions de parents ou de bénéficiaires de
services sociaux ou de services de santé, vous vous êtes
basés, également, sur un arrêté en conseil qui a
été passé en vertu de la loi sur les services sociaux, de
la santé, les services sociaux, n'est-ce pas?
M. FORGET: Je m'excuse. Je n'ai pas compris le début de votre
question.
M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai dit, pour l'application de vos
règlements concernant les centres d'accueil, les familles d'accueil,
vous vous êtes basés, également, légalement sur
l'arrêté en conseil 365-74, du 30 janvier 1974. Il a
été passé... Pardon, pas celui-là. Vous vous basez,
également, sur le projet de règlement qui a été
passé en vertu de la loi sur les services de santé et sur les
services sociaux, n'est-ce pas?
M. FORGET: Oui. Il n'a pas été passé, il a
été publié.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quel est l'effet de la publication de ce projet
par rapport au bill 25 qui sera présenté?
M. FORGET: II n'y a aucun rapport.
M. BEDARD (Chicoutimi): II n'y a aucun rapport.
M. FORGET: Je ne sais pas ce à quoi le député veut
faire allusion, mais il s'agit, d'une part, d'un projet d'amendement à
la loi qui a été déposée en première lecture
à la précédente session et qui est restée au
feuilleton. D'autre part, il s'agit de la publication d'un projet de
règlements à la fin de décembre en vertu de la loi qui
existe et qui permet ce genre de publication et ce genre de règlements,
indépendamment du projet d'amendements à la loi
elle-même.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous vous basez également sur le
dépôt de ce projet de règlements pour réclamer des
familles d'accueil...
M. FORGET: C'est le format éventuel d'une réglementation
relative à la contribution des parents, en effet.
M. BEDARD (Chicoutimi): On nous dit que c'est en vertu de l'article
129.
M. FORGET: Oui, c'est cela. C'est l'article de la Loi sur les services
de santé et les services sociaux qui prévoit les pouvoirs
réglementaires ainsi que dans son dernier paragraphe, la
nécessité d'une publication pour une période de 90 jours
des projets de règlements.
M. BEDARD (Chicoutimi): Le bill 25 ne modifie-t-il pas en quelque
sorte...
M. FORGET: Dans le bill 25, il y a, en effet, certains
aménagements de cet article de manière à clarifier
certaines dispositions ou à faire des distinctions entre
différents pouvoirs réglementaires qui pourraient être
regroupés à l'intérieur d'un même sous-paragraphe.
C'est dans le but de clarifier. De mémoire, il y a peut-être aussi
des choses nouvelles qui sont ajoutées au niveau de ce projet, mais,
essentiellement, pour ce qui affecte ce projet de règlements, il n'y a
pas de modification de substance, il y a modification de forme.
M. BEDARD (Chicoutimi): Le bill 25 ne précise-t-il pas ce qu'il
entend, par exemple, d'une façon spéciale, centre d'accueil,
famille d'accueil?
M. FORGET: II y a plusieurs choses dans le bill 25, sauf des
aménagements à l'article qui prévoit des pouvoirs
réglementaires, bien sûr. Il y a des définitions nouvelles
qui sont introduites, des modifications dans le texte de certains articles.
M. BEDARD (Chicoutimi): A la lecture du bill 25, je crois que certaines
choses changent, pas seulement de visage, pas seulement des amendements
mineurs, il y a même des amendements majeurs.
M. FORGET: II y en a d'autres, sans aucun doute. Je n'ai pas dit que
c'étaient seulement des amendements de forme. Sur un point
spécifique, j'ai dit que c'était un amendement de forme. Il y a
des amendements de substance. Je ne veux pas trop presser le
député de Chicoutimi, mais son examen...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce que je voudrais savoir le ministre va
voir où je veux en arriver, cela ne sera pas long c'est ceci:
Est-ce que le ministre considère la définition des termes comme
un amendement mineur ou encore, à l'intérieur d'un projet de loi,
est-ce que la définition stricte des termes est un amendement mineur ou
un amendement majeur dans son esprit?
M. FORGET: C'est une question d'opinion, ce qui est mineur ou ce qui est
majeur. Cela dépend des problèmes que l'on trouve importants et
des problèmes que l'on ne trouve pas importants. Il y a autant
d'opinions là-dessus que d'observateurs.
M. BEDARD (Chicoutimi): Le ministre est sûrement au courant que
dans le projet de loi 25, on change la définition de centre d'accueil,
on y fait des amendements et également on définit ce qu'est une
famille d'accueil.
M. FORGET: Est-ce que cela n'est pas opportun de donner des
définitions claires pour l'application de la loi? C'est ce qui nous a
semblé quand nous avons préparé ce projet.
M. BEDARD (Chicoutimi): Justement sur l'aspect de ces
définitions, il reste quand même que vous avez adopté ce
projet pour les réclamations que vous allez avoir à faire
concernant les enfants placés en famille d'accueil, en centre d'accueil.
Je crois que le lieutenant-gouverneur, dans l'application de l'article 129, a
excédé ses pouvoirs en acceptant des règlements qui
auraient comme conséquence de demander des contributions pour les
enfants placés en famille d'accueil. Je m'explique: Quand on se
réfère à la loi, le lieutenant-gouverneur, ne peut faire
de réglementation que dans le cadre de la loi, il ne doit pas
dépasser le cadre de cette loi. Si on se réfère à
la loi qui existait, le centre d'accueil, tel que défini dans la loi
antérieure, est carrément identifié comme étant un
établissement physique. On voit l'esprit de la loi. C'est très
clair. On parle même de conseil d'administration, de constitution, de
pouvoirs, et des modes de fonctionnement interne. A ce moment-là,
tout...
M. FORGET: Tout cela n'est pas dans la définition.
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, mais on en parle dans la loi. On voit que
cela s'applique à des institutions qui ont des assises physiques
très claires. Le centre d'accueil, tel que défini dans la loi
préexistante ne permet pas, à mon sens, au gouvernement, de
réclamer des parents des sommes pour les enfants qui sont placés
dans les familles d'accueil, parce que, justement, la loi antérieure
n'abordait pas l'aspect des familles d'accueil.
C'est tellement vrai que, dans le projet de loi 25, ce n'est pas pour
rien qu'on a senti le besoin de le définir, et d'apporter des
amendements au centre d'accueil, ce qui veut dire une institution. C'est
l'ancienne loi. C'est tellement vrai que le projet de loi 25 sent le besoin,
pour donner ce droit de réclamer, de définir ce qu'est la famille
d'accueil, ce qui veut dire qu'effectivement votre règlement,
légalement parlant, ne vous permettrait pas de réclamer pour les
enfants placés en famille d'accueil, parce que la loi
préexistante ne légifère elle-même que sur les
centres d'accueil.
M. FORGET: M. le Président, puisqu'on fait allusion à ce
projet de loi qui, de toute façon, est au feuilleton, qui est mort
techniquement au feuilleton, pour en tirer un argument, je rappellerai au
député de Chicoutimi que s'il examine soigneusement la
définition qui continue de s'appliquer aux centres d'accueil, il va
découvrir que cette définition n'implique aucune limite
inférieure à la capacité dans l'établissement, dans
le cas d'un centre d'accueil, de sorte qu'il est techniquement possible
donc, ici, on parle de technicités juridiques ou autres d'avoir
un centre hospitalier d'un lit. Il est aussi possible d'avoir un centre
d'accueil pour une personne, pourvu qu'on reçoive cette personne pour
l'héberger et lui prodiguer les services dont elle a besoin,
étant donné son état, etc.
Donc, ce que le projet de loi 25 voulait, c'est d'établir une
distinction qui n'était pas faite entre deux catégories de
centres d'accueil, selon l'ancienne loi, c'est-à-dire ce qui deviendrait
véritablement des centres d'accueil dont la capacité serait
minimale.
Il y aurait une capacité minimale, un seuil et d'autres centres
d'accueil, selon l'ancienne loi, deviendraient maintenant des familles
d'accueil, c'est-à-dire des établissements de petite
capacité, un milieu familial, etc.
Donc, il n'y a aucune incapacité, dans la situation actuelle,
à traiter des foyers nourriciers comme des centres d'accueil. Cela
n'implique pas du tout qu'ils doivent constituer un conseil d'administration,
cela n'a aucune implication du genre. Cela implique seulement qu'ils doivent
recevoir un permis, qu'ils sont soumis aux normes d'hygiène et aux
autres normes qui peuvent s'appliquer à un centre d'accueil de petite
taille.
Comme, évidemment, on est dans des situations différentes,
lorsqu'on parle d'une famille d'accueil et qu'on parle d'un
établissement, d'une institution, il est apparu opportun, dans ce projet
de loi, de faire clairement la distinction. Mais, tant qu'elle n'est pas faite,
l'expression centre d'accueil est un terme qui a une acception
extrêmement large, qui désigne toute espèce d'installation,
si petite ou si grosse soit-elle, où des gens sont reçus pour
avoir des services qui sont exigés par la nature de leur état
physique, social, mental, etc.
Donc, cela couvre absolument tous les foyers. De fait, c'est une
couverture si large que le but de cet amendement était de la restreindre
un peu.
M. BEDARD (Chicoutimi): Justement, dans cette loi, en parlant de centres
d'accueil, qu'on parle, en fait, du mode de fonctionnement interne, de la
constitution des pouvoirs, de la formation d'un conseil d'administration...
M. FORGET: C'est dans le cas des établissements publics. Si on se
reporte aux articles 8, 9, 10 et 11, on se rend compte qu'un
établissement public va normalement être un établissement
sans but lucratif qui compte plus que 20 places. Donc, cette exigence d'un
conseil d'administration ne s'applique pas aux familles d'accueil.
Techniquement, cette difficulté n'a pas besoin d'être
soulevée.
M. BEDARD (Chicoutimi): Selon ce que nous dit le ministre, cela
s'applique aux établissements sans but lucratif.
M. FORGET: La constitution des conseils d'administration. Mais cela ne
s'applique pas à une famille qui n'est pas un établissement sans
but lucratif. Il faut être constitué par une loi spéciale,
pour s'appeler un établissement sans
but lucratif. Même si on a affaire à des gens charitables,
ce n'est pas pour autant un établissement sans but lucratif. C'est un
statut légal bien particulier, cette désignation. Il faut
être constitué en vertu de la Loi des évêques ou en
vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies ou en vertu d'une
loi analogue à celles-là. Je pense qu'il y en a un certain
nombre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Vanier.
M. DUFOUR: Non, mais si on s'arrête à discuter sur la
définition du centre d'accueil, est-ce que, financièrement, cela
va toucher la province?
M. FORGET: Non, cela n'a pas de répercussion, à mon avis,
mais la question qui était posée par le député de
Chicoutimi portait sur la question de savoir si le gouvernement avait le
pouvoir d'édicter des règles relativement à des foyers
nourriciers qui, selon lui, n'étaient pas des centres d'accueil.
L'argument qu'il tire d'une distinction qu'on veut apporter ne s'applique pas
à la situation actuelle, puisque la loi n'a pas été
modifiée et que les centres d'accueil, tels que définis dans la
loi, couvrent tout le monde. C'est tout juste si cela ne couvre pas les maisons
de chambres. Mais cela ne les couvre pas. Je ne veux pas introduire
d'élément trouble dans la discussion. Cela ne les couvre pas,
mais tout endroit où l'on reçoit des personnes pour... Je vais
citer l'article, parce que c'est la meilleure façon de ne pas faire
d'erreur: "Une installation où on accueille, pour les loger, entretenir,
garder sous observation, traiter ou réadapter des personnes qui, en
raison de leur âge ou de déficiences physiques,
caractérielles, psychosociales ou familiales, doivent être
soignées ou gardées en résidence protégée
ou, s'il y a lieu, en cure fermée, y compris une pouponnière ou
une garderie d'enfants, mais à l'exception d'une installation maintenue
par une institution religieuse pour recevoir ses membres adhérents".
Cette difficulté légale est enlevée. Il est
possible, dans l'état actuel de la loi, de faire des règlements
et de faire toutes sortes d'exigences, en vertu des règlements, qui
s'appliquent aux foyers nourriciers. Même s'il y a un seul
bénéficiaire d'hébergé, il n'y a aucune
difficulté sur le plan légal.
Nous avons trouvé souhaitable d'introduire éventuellement
une distinction de manière que les exigences réglementaires et
les exigences de la loi ne s'appliquent pas toutes aux foyers nourriciers ou
aux familles d'accueil de la même façon qu'elles s'appliquent aux
institutions.
J'emploie ces termes pour bien marquer la distinction. Dans le texte de
la loi actuelle, cette distinction n'est pas faite. Donc, il n'y a aucune
difficulté sur un plan légal là-dessus.
M. BEDARD (Chicoutimi): Comme vous le dites, pour une meilleure
compréhension, le projet de loi 25 a senti le besoin de définir,
d'une façon expresse, ce qu'il entendait par famille d'accueil. Est-ce
l'intention du ministère de représenter ce projet de loi 25
très prochainement?
M. FORGET: Oui. De la même façon que, sur certains points,
certaines précisions sont apparues nécessaires, il y a aussi
d'autres points dont on n'avait pas tenu compte dans la préparation de
ce projet de loi et dont il paraît opportun de tenir compte. Lorsque ce
travail qui est bien avancé sera fait, un autre projet de loi pourra
être présenté.
M. le Président, pendant que notre collègue de Chicoutimi
poursuit ses recherches, j'aimerais apporter une réponse à une
question qui a été formulée lors d'une séance
antérieure et qui a trait aux effectifs des services sociaux en milieu
scolaire. On avait exprimé l'intérêt de savoir... Je me
bornerai à lire une très brève note ici: "Suite à
la demande du député de Taschereau, il me fait plaisir de vous
dire qu'au 31 mars 1974, le rapport entre la population scolaire
élémentaire, et secondaire y comprise, et les praticiens de
service social était de un praticien par 6,269 élèves,
soit 248.5 praticiens pour 1,557,991 élèves. Dans les
prévisions de développement des services sociaux en milieu
scolaire, les objectifs fixés par le ministère sont
respectés, c'est-à-dire que, sur une période de trois ans,
avec l'addition de 48 postes annuellement, le rapport serait de 1 praticien
pour 4,000 élèves, si on prend la population de 1973/74. Sur une
période de cinq ans, l'objectif est d'atteindre la norme de 1 praticien
par 3,000 élèves en 1978/79 alors que 428 praticiens auront
été octroyés pour ce secteur sur la période
totale.
M. BONNIER: Merci.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je n'ai pas d'autres questions.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Elément 1. Sur le programme 8?
M. BEDARD (Chicoutimi): Sur le programme 8.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Programme 8. Adopté. Programme 9.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous commencez le débat... A dix
minutes?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Quinze minutes.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est parce que ça va être quand
même assez long, sur les garderies, on va couper le débat en deux.
Je pense que M. le ministre d'Etat n'a pas d'objec-
tion à ce qu'on reprenne le débat à quatre heures,
d'une façon globale, sur les garderies.
M. FORGET: Est-ce que c'est possible à quatre heures?
M. BONNIER: Au lieu de commencer immédiatement?
UNE VOIX: Allez-vous commencer?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): C'est la commission qui décide. Si
les membres de la commission sont d'accord pour qu'on suspende les travaux
jusqu'à quatre heures, c'est la commission qui doit décider.
M. BONNIER: M. le Président, j'aurais peut-être aimé
je ne sais pas, c'est un élément d'information de la part
du ministre savoir où en est rendu le projet de loi de la
protection de l'enfance? Je ne sais pas si c'est trop vaste.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est pour ça, c'est parce
qu'autrement...
M. BONNIER: Couper et recommencer, je comprends que c'est ennuyeux.
M. FORGET: Je peux dire quelques mots sur ce sujet et on pourra ajourner
après.
M. BONNIER: D'accord. Il me semble que, comme arrière-plan, ce
serait intéressant de le savoir.
M. FORGET: Pour répondre au député de Taschereau
à ce sujet, on se souviendra qu'un premier projet de loi pour amender ou
remplacer la Loi actuelle de protection de la jeunesse avait été
débattue en commission parlementaire lors de la dernière ou de
l'avant-dernière session du précédent Parlement. Plusieurs
représentations avaient été formulées, plusieurs
mémoires avaient été préparés par
différents groupes et des travaux de la commission s'étaient
échelonnés sur plusieurs semaines.
Nous avons pris connaissance de ces mémoi- res et il est
évident que, selon nous, un certain nombre de ces représentations
ou de ces obser- vations faites par différents groupes devaient
être prises en considération et devaient se refléter dans
une nouvelle rédaction du projet. Cependant, d'autres
développements se sont aussi produits, ou sont sur le point de se
produire, du moins, développements qui influencent de façon
considérable le contexte général dans lequel la Loi de
protection de la jeunesse s'applique. Je citerai seulement deux ou trois de ces
développements, qui sont d'une importance telle qu'ils
nécessitent également d'être reflétés dans
une nouvelle rédaction du projet de loi.
Donc, il y a, d'une part, les mémoires et les observations
faites, basées sur la situation ac- tuelle ou sur la situation qui
prévalait l'an dernier, dont il faudrait tenir compte dans une nouvelle
rédaction; d'autre part, un certain nombre de développements sont
survenus depuis, ou surviendront bientôt, qui devraient trouver une
répercussion dans une nouvelle rédaction. Ces
développements sont de plusieurs ordres, quelques-uns affectent
directement et centralement l'ensemble des lois qui s'appliquent à
l'enfance et à la famille puisque la Loi de protection de la jeunesse
s'insère dans un contexte juridique plus vaste, du droit des personnes,
du droit relatif à l'adoption, à l'affiliation, etc.
Sur ce point, nous avons eu des rencontres avec le président de
l'Office de révision du code civil qui nous a fait part de son intention
de publier, dans un avenir prochain, même bientôt, un projet
d'ensemble qui va effectuer tout un réaménagement du droit des
personnes, du droit de la famille. A l'intérieur de ce
réaménagement, les dispositions substantielles ou
matérielles de la Loi de l'adoption, de même que certaines
dispositions qui se retrouvent actuellement dans la Loi de protection de la
jeunesse seront incorporées dans un cadre plus vaste et plus global d'un
nouveau droit de la famille.
Ce sont des développements auxquels le ministère des
Affaires sociales, par son directeur de la planification des services sociaux a
été appelé à participer assez étroitement et
que nous avons suivi également pendant les derniers mois. C'est donc un
développement majeur qui va situer le problème de la protection
de la jeunesse dans un contexte légal, substantiellement
différent de celui que l'on trouve aujourd'hui. Avant que ce projet ne
soit publié, puisque même si nous y avons collaboré, ce
n'est pas un projet que nous avons élaboré, c'est un projet
élaboré par l'Office de révision du code civil, avant de
reprendre le texte de la Loi sur la protection de la jeunesse, il faudra
connaître, de façon détaillée, les propositions de
l'Office de révision du code civil et peut-être avoir aussi une
indication de la suite ou des conséquences législatives qui lui
seront données après qu'une certaine consultation aura eu lieu
sur ces points.
Plusieurs points de substance, seront affectés qu'il est
important, à notre avis, de voir se réaliser, se
concrétiser pour ne pas faire une loi de protection de la jeunesse, qui
est une loi importante, une loi qui devrait, immédiatement après,
être reprise sur des aspects fondamentaux.
D'autre part, mon collègue, le ministre de la Justice a
annoncé à quelques reprises même encore tout
récemment son intention de procéder à la nouvelle
évaluation du rôle des tribunaux judiciaires et ce
développement est de nature aussi, puisqu'il pose le problème
d'un tribunal de la famille, à modifier le contexte juridictionnel dans
lequel s'applique la Loi de la protection de la jeunesse. Déjà
sur le plan des tribunaux judiciaires il y a eu la mise sur pied
d'une chambre familiale à la cour Supérieure et une
collaboration s'est amorcée entre la cour Familiale et les centres de
services sociaux de manière à apporter un appui
multidisciplinaire au fonctionnement de ces chambres familiales. Nous
prévoyons d'ailleurs, sur le plan des crédits et sur le plan
d'une planification à moyen terme du développement
budgétaire au ministère des Affaires sociales, accorder un appui
substantiel, sur le plan du personnel et de services via les centres de service
sociaux à une chambre provinciale ou à un tribunal de la famille,
quelle que soit la forme que ce développement présentera.
Donc, il y a de ce côté aussi, du côté de la
juridiction du développement important, une expérience, qui
s'accumule, de collaboration entre les centres de services sociaux et la cour
Supérieure dont on pourra tirer, dans quelque temps, des indications et
des leçons utiles qu'on pourra, dans une certaine mesure, incorporer
à la législation. Il est encore trop tôt pour le dire.
Il y a enfin, sur un plan d'organisation et de restructuration des
services, la création des centres de services sociaux que nous avons
brièvement décrite tantôt et la préparation de plans
d'organisation, une définition nouvelle de la vocation des centres de
services sociaux qui nous amènent à entrevoir des
possibilités nouvelles pour le règlement de certains
problèmes dont la solution avait été esquissée dans
la Loi de la protection de la jeunesse y compris, entre autres, la question de
la probation qui, peut-être, de ce côté pourrait trouver une
solution satisfaisante, une solution qui soit orientée sur une approche
décentralisée et communautaire. C'est donc là un
développement qu'il est difficile d'anticiper puisque cette organisation
des centres de services sociaux implique des bouleversements
considérables qui doivent être absorbés en même temps
par les professionnels et les gestionnaires des centres de services sociaux. Il
est nécessaire, de manière à ne pas provoquer une
diminution de la qualité des services, de procéder sans doute
rapidement mais sans hâte exagérée ce qui menacerait, le
moral, la qualité des services et les chances de développement
futur de ces solutions.
Donc, ces trois éléments, le côté de la
législation matérielle sur le droit des personnes et le droit de
la famille, les développements prévisibles à court terme
du côté de l'organisation des tribunaux judiciaires et les
développements administratifs du côté des services sociaux,
des nouvelles formes de collaboration déjà amorcées entre
la chambre familiale de la cour Supérieure et les possibilités de
solution qui s'ouvrent du côté des services de proba- tion...
Toutes sortes d'éléments sont en voie de se concrétiser ou
seront bientôt publics dont il faudra tenir compte dans une future loi de
la protection de la jeunesse.
J'ai donc indiqué qu'il était peut-être souhaitable
de précéder la législation par des développements
concrets, particulièrement, dans les secteurs de notre juridiction,
l'organisation des services, le développement de certains services de
consultation familiale etc. en collaboration avec les cours et après,
à la lumière de ces expériences, d'incorporer dans les
lois, non seulement les leçons de l'expérience, mais aussi
ajuster la loi à tout ce nouveau contexte qui s'annonce. C'est à
peu près la situation dans laquelle nous sommes. Nous continuons sur
d'autres plans à travailler sur des problèmes de protection de la
jeunesse puisque aussi, sur le plan de la révision de la loi sur les
jeunes délinquants, nous avons participé encore une fois, par
l'intermédiaire du directeur à la planification des services
sociaux, aux réunions de groupes de travail
fédéraux-provinciaux qui ont été convoqués
par le Solliciteur général du Canada et qui a pour but de reviser
en profondeur la loi sur les jeunes délinquants.
Cette loi existe depuis plusieurs années. Un premier projet avait
été déposé à la Chambre des communes et a
été retiré devant un certain nombre de
représentations qui indiquaient que cette révision n'allait pas
assez loin, à la suite de quoi ce comité
fédéral-provincial a été formé, auquel nous
participons. Nous sommes satisfaits de l'occasion qui nous est ainsi
donnée d'influencer l'orientation qui est prise au niveau de cette loi.
C'est une loi importante puisqu'elle est appliquée par la cour du
Bien-Etre social et elle peut également, dans sa version
définitive, impliquer des conséquences dont on voudra tenir
compte dans la Loi de protection de la jeunesse.
Etant donné, le très grand nombre de développements
qui se font tous en parallèle, il nous semble que d'ici quelques mois,
d'ici un an peut-être ou légèrement plus, nous serons en
mesure de tirer les conclusions et de préparer un nouveau texte qui
tienne compte à la foisdes critiques justifiées qui
ont été faites au premier projet de loi et des
développements qui seront à ce moment-là beaucoup plus
certains beaucoup mieux connus dans toutes ces directions.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission suspend ses travaux à
16 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 2)