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Commission permanente des affaires sociales
Projet de loi no 93
Loi modifiant la loi de l'assurance-maladie
et la loi de la Régie de
l'assurance-maladie
du Québec
Séance du jeudi 19 décembre 1974
(Douze heures trente minutes)
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales étudie le projet de loi no
93, après la deuxième lecture, c'est-à-dire article par
article.
Le ministre des Affaires sociales.
Remarques préliminaires
M. FORGET: Je n'ai pas de commentaires généraux, M. le
Président. Simplement, je voudrais signaler la distribution d'une
série d'amendements, y compris sur l'article 8 du projet, mais pour le
moment je n'ai aucun autre commentaire à formuler que ceux que j'ai
faits lors de la deuxième lecture.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, de la même
manière, concernant l'Opposition, nous avons eu l'occasion de faire
valoir les considérations que nous avions concernant ce projet de loi.
Nous avons formulé les appréhensions que nous avions concernant
le danger d'un commencement de mise en tutelle de la régie par le
ministre des Affaires sociales, à la lecture des articles 19 et
suivants, et j'espère que le ministre nous donnera des explications
générales et précises sur ce sujet. Egalement, nous avions
parlé d'un autre sujet, à savoir celui du contingentement au
niveau de l'étude de ce projet de loi. Nous nous bornerons à
demander des explications qui, je l'espère, seront les plus
précises possible concernant les différents aspects que peut
comporter, dans l'esprit du ministre, cette politique de contingentement ou ce
qu'il fait de nos recommandations concernant les négociations ou les
ententes qu'il doit avoir avec la fédération des médecins
et des dentistes, bien que, également, cette consultation ou cette
entente se fasse également avec le Collège des
médecins.
C'étaient les points sur lesquels nous avions soumis des
réticences. J'espère que le ministre nous donnera les
explications au fur et à mesure que nous arriverons aux articles
concernés.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Article 1. Adopté. Article 2.
M. BEDARD (Chicoutimi): A l'article 1, simplement une question. Je
voudrais savoir... Vous avez annoncé un programme concernant le paiement
des prothèses. Quand va-t-il être effectivement en vigueur? Depuis
près de deux ans, cette mesure doit être mise en vigueur.
Maintenant, il y a même des gens qui attendent et qui ont
peut-être attendu en fonction de la mise en vigueur de la loi.
Prothèses et orthèses
M. FORGET: C'est un domaine entièrement nouveau que ce paiement
des prothèses et orthèses. La Régie de
l'assurance-maladie, qui est celle qui met en oeuvre le programme, a
expérimenté un certain nombre de difficultés, à
cause de la nouveauté du programme.
En particulier, parmi toutes les difficultés qu'il a fallu
résoudre, on peut mentionner la nécessité, en
conformité avec les dispositions de la Loi sur la protection de la
santé publique, d'édicter des règlements pour les
laboratoires de prothèses et d'orthèses, puisque c'est un domaine
qui n'avait jamais été réglementé dans le
passé.
Le projet de règlement a été publié en
novembre de cette année, je crois, et il y a un délai de 90 jours
qui doit être respecté avant que nous puissions le proclamer.
C'est un délai minimum puisque, si nous recevons quelques
représentations que ce soit d'ici la fin de mars, il faudra les
considérer et éventuellement apporter certaines retouches au
projet de règlement. Ce qui veut dire que ce ne sera pas avant le mois
d'avril ou mai que nous pourrions avoir une réglementation
adéquate des laboratoires d'or-thèses et de prothèses.
Ceci est un des prérequis pour la mise en vigueur du programme.
Il y a eu aussi des difficultés à surmonter pour ce qui est de
l'élaboration d'une classification, d'une liste de prothèses et
d'orthèses puisque, encore une fois, c'était un domaine nouveau.
Il a fallu choisir le mode de classification des orthèses et
prothèses, déterminer les prix et, en général
également, mettre sur pied des mécanismes de coordination et de
contrôle du programme lui-même au sein de la régie,
étant donné le caractère assez particulier de ce
programme, puisqu'il ne s'agit pas de prestations de service seulement, mais de
fourniture de biens qui peuvent être sujets à des
réparations, à des remplacements, etc.
Il y a eu des problèmes à surmonter qui sont actuellement
surmontés, en principe, et les principes pourront s'appliquer dès
que les règlements pourront être achevés en avril,
disons.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Avant d'aller plus loin, si vous me
permettez de faire un changement parmi les membres de la commission. M. Houde
(Abitibi-Est) remplace M. Belle-mare (Rosemont).
L'article 1 est adopté. Article 2?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Adopté. Article 3?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté. LE PRESIDENT (M. Lafrance):
Adopté.
M. BONNIER: Est-ce qu'on pourrait quand même avoir un mot
d'explication du ministre, là-dessus? Il s'agit des règlements,
je pense. Il s'agit de règlements ou de...
M. FORGET: L'article 3 a) prévoit la publication de la liste sur
l'autorité du ministre, plutôt qu'après l'approbation par
le lieutenant-gouverneur en conseil. Le but de ceci n'est pas vraiment de
donner plus de pouvoir au ministre, soit que cela se traduise par cela, si vous
voulez, mais c'est d'abréger d'un mois ou un mois et demi la
procédure d'approbation de la liste, puisque cette liste comporte des
prix. Plus le délai antérieur à sa publication s'allonge,
plus il est difficile de faire respecter les prix par les fournisseurs,
puisqu'ils doivent, à ce moment, prévoir presque un an à
l'avance les prix qu'ils exigeront. C'est à l'effet d'améliorer
l'efficacité du système et de protéger, dans toute la
mesure du possible, les pharmaciens qui collaborent à ce programme de
manière que les prix que nous annoncions et que nous leur remboursons
soient les plus près possible de la réalité.
M. BONNIER: Merci.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Article 4, adopté?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Article 5?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Adopté. Article 6?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté. LE PRESIDENT (M. Lafrance):
Adopté.
M. BEDARD (Chicoutimi): Article 7, adopté?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Article 7, adopté.
A l'article 8, il y a une modification.
M. FORGET: L'article 8 est remplacé par...
M. BEDARD (Chicoutimi): ... le contingentement, les ententes.
Professionnels de la santé
M. FORGET: Oui, ce sont les ententes qui peuvent porter sur la
détermination du nombre des professionnels admissibles à
participer au régime et, en deuxième partie, les ententes qui
peuvent avoir pour effet de lier les établissements quant à
certains aspects de leur application.
Le ministre doit toutefois consulter les établissement ou groupes
d'établissements susceptibles d'être liés par une telle
entente et, à la suite de cette consultation, déterminer les
modalités de leur participation à ces ententes ou parties
d'ententes. Ceci, comme je l'ai indiqué lors du discours de
deuxième lecture, vise, entre autres, à permettre de faire
avancer la discussion de la participation, par exemple, des omnipraticiens au
CLSC. C'est un des aspects qui pourraient être couverts par une telle
entente.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je vais vous poser la question, avant que vous
soyez en négociation ou en discussion avec eux: Quel est l'esprit des
relations, du travail que le ministre peut entreprendre avec ces divers
organismes?
M. FORGET: L'esprit de ces discussions avec la Fédération
des omnipraticiens sur ce sujet est excellent. C'est un esprit de collaboration
de part et d'autre. Nous avons étudié non seulement le
problème en général, mais également des
applications concrètes ou des cas particuliers qui semblaient susciter
des problèmes précis.
Nous avons pu, même à défaut d'une entente finale
sur ces aspects, obtenir la collaboration de la FMOQ à la
résolution d'un certain nombre de problèmes de fonctionnement
dans certains cas. Donc, l'esprit est excellent. Maintenant, une des
réserves qui a peut-être été présente dans
l'esprit de la Fédération des médecins omnipratriciens
visait justement ce point qui est couvert par le deuxième alinéa,
c'est-à-dire la possibilité d'en venir à des ententes qui
puissent effectivement avoir une valeur relativement aux établissements
où elles s'appliqueront.
M. BEDARD (Chicoutimi): Quand le ministre nous dit que l'esprit est
très bon et qu'on peut appréhender un règlement dans un
avenir très rapproché, ce doit être cela?
M. FORGET: Vous savez, lorsqu'il est question de négociations et
de discussions, il est imprudent de préciser des délais puisque
bien des choses peuvent intervenir et bien des discussions sont liées
sur ce sujet et sur d'autres sujets. Je ne m'aventurerai pas à ce moment
à dire à quel moment on anticipe de régler tous les
problèmes. De toute manière, il est un fait que l'on peut
retenir. Depuis l'introduction du régime d'assurance-maladie, il existe
des rencon-
très presque continuelles pour ne pas dire continuelles, entre
les resprésentants du ministre des Affaires sociales et les
représentants des fédérations médicales, sur
l'application des ententes en vigueur ou sur la négociation de nouvelles
ententes. Mais ces rencontres sont presque continuelles, ce qui fait que nous
avons pu déjà, dans le cadre de ces discussions, régler un
certain nombre de problèmes particuliers qui découlent de
l'application des ententes de 1971, ce qui a préparé le terrain
de façon assez, heureuse pour aborder le renouvellement des ententes
échues.
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Pardon, le député de Vanier a
demandé la parole. Le député de Gaspé, par la
suite.
M. DUFOUR: M. le Président, dans l'article 8 au deuxième
alinéa, on dit, au début: Pour assurer une répartition
adéquate des professionnels de la santé. Un peu plus loin:
Etablir une procédure ayant pour effet de déterminer le nombre de
professionnels admissibles à participer.
Alors, ce ne seraient pas de nouveaux professionnels ou, à ce
moment, on touche aussi aux anciens professionnels, ceux qui sont
professionnels depuis de nombreuses années. Dans la copie initiale,
à la page 4, on lit: Etablir la procédure relative à la
détermination du nombre de nouveaux professionnels qui peuvent fournir
des services assurés dans un même territoire. A ce moment, on ne
va pas un peu loin? Il y a certains professionnels anciens, comme moi, qui
auraient certaines craintes.
M. FORGET: Je suis sensible, M. le Président, à cette
remarque, parce qu'elle met en relief un point qui est présent à
l'esprit de tous quand nous lisons cette disposition. Cependant, le mot
"nouveau", nous suggérons de l'omettre, parce qu'il pose, quant à
son interprétation, un problème. On nous a interrogés sur
sa signification. Qu'est-ce qu'un nouveau professionnel? Est-ce qu'un
professionnel qui déplace son lieu de pratique, qui
déménage ou qui change d'établissement est un nouveau
professionnel? Est-ce que ceci est discriminatoire parmi plusieurs
catégories de professionnels? Je pense que le plus sage, étant
donné qu'il s'agit d'une entente qui est envisagée, est de
laisser à l'entente le soin de déterminer qui est nouveau, qui ne
l'est pas et quelles sont les différences qui doivent être
observées entre les nouveaux et les anciens.
Il est clair, dans mon esprit, que lorsque nous envisageons des mesures
comme celle-là, par entente avec non seulement les
fédérations médicales, mais en consultation avec la
corporation professionnelle, il y a des distinctions à faire entre ceux
qui ont une pratique établie et qui ont, en quelque sorte, non pas des
droits acquis dans le sens du code du travail ou dans le sens étroit du
mot, mais qui ont quand même une situation établie, et qui
n'envisagent pas d'en changer. Il y a des distinctions à faire entre eux
d'une part, et d'autres pour qui ce n'est pas vrai ou c'est moins vrai. Mais
j'aimerais plutôt que l'entente envisagée nous permette justement
de faire ces distinctions avec les associations, les fédérations
représentatives, plutôt que d'essayer, dans la loi, d'inscrire un
mot que nous serons, après, obligés d'interpréter, et qui,
peut-être donnera lieu à des ambiguïtés. Mais il est
clair qu'il y a des distinctions à établir, et nous ne
chercherons pas à créer un remue-ménage aussi profond que
les mots qui sont là pourraient l'indiquer si on ne faisait pas ces
précisions. Encore une fois, les précisions, il vaut mieux les
discuter et s'entendre sur elles, plutôt que d'essayer, dans la loi, de
les décréter. Comme je ne suis pas en mesure de vous dire ce que
"nouveau" veut dire dans toutes les circonstances, je pense qu'il est plus
prudent de laisser à l'entente le soin de le dire.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Gaspé.
M. FORTIER: M. le Président, est-ce que je pourrais, ici, faire
remarquer au ministre que, dans certains territoires, comme l'Abitibi, la
Gaspésie et d'autres territoires de la Côte-Nord, le
problème de pouvoir avoir des médecins et des spécialistes
n'est pas, évidemment, la question du salaire payé, mais souvent,
ce sont les avantages sociaux. Par exemple, prenez un couple, un médecin
et son épouse qui vont s'installer en Abitibi. S'il n'y a pas de place
pour les recevoir, de logement convenable, très souvent, c'est là
qu'est le problème. Dans le fond, les médecins reçoivent
le même salaire dans toute la province. N'y aurait-il pas lieu
d'envisager des possibilités de donner à ces médecins, qui
iraient s'installer dans des régions éloignées, des
facilités de logement? C'est là que semble être le gros
problème. Pour quelqu'un qui part de Montréal ou de Québec
et va s'installer en Gaspésie, en Abitibi ou dans le Nord-Ouest, la
question du logement devient parfois un problème.
M. FORGET: Je suis très sensible à cela. D'ailleurs, c'est
la raison pour laquelle, alors même que j'ai présenté ce
projet de loi en deuxième lecture, j'ai indiqué qu'il y avait
deux mesures dans la loi. Il y en avait deux autres qui ne figuraient pas dans
ce projet de loi et qui sont, à nos yeux, également importantes
et, peut-être même, dans le temps au moins, prioritaires.
C'est-à-dire, d'aménager, dans les ententes, des incitations
à une pratique en groupe dans des endroits désignés,
comportant une garantie quant au revenu net qu'ils peuvent en tirer,
étant donné la faible densité de la population et la
nécessité de prévoir une pratique de groupe pour fournir
des soins médicaux
dans ces régions. Autrement, cela devient trop peu attirant et
trop lourd. Cela peut entraîner, au moins dans l'esprit de ceux qui ont
à prendre cette décision pour eux-mêmes, un certain doute,
quant à leur possibilité de trouver assez de clientèle,
à trois, quatre ou cinq, pour rendre la proposition attrayante.
Donc, dans les négociations avec les fédérations,
nous avons l'intention nous l'avons déclaré
d'offrir cette garantie pour une pratique de groupe dans des endroits
désignés.
En plus de cela, nous rencontrons aujourd'hui même
d'ailleurs, il y a un certain conflit dans les horaires les conseils
régionaux de toutes les régions administratives du Québec
et nous discuterons avec eux, les CRSSS, des facilités à
prévoir pour aplanir les problèmes d'aménagement dans ces
régions où quelqu'un doit soit habiter à loyer, dans une
maison qui ne convient pas, ou se construire et prendre des engagements
financiers à long terme alors qu'il ne sait pas s'il pourra vendre
à un autre ou à un successeur, la même maison. Je pense
qu'il y a des moyens à mettre en oeuvre. Je pense que les cbnseils
régionaux étant près de ces problèmes, ils nous
aideront de toute manière à déterminer les endroits
où il y a des pénuries évidentes de médecins, et
pourraient, avec certaines ressources locales peut-être un certain
appui du ministère qui reste à déterminer trouver
des moyens de résoudre ce problème, problème de
facilité matérielle, de manière que cela ne devienne pas
un obstacle séparé de l'éloignement, mais de tout le reste
qui s'y ajoute. Cela va se faire durant les prochains mois en collaboration
avec les conseils régionaux. Au niveau des négociations avec les
fédérations, nous allons proposer cette garantie et si le
problème de la distribution géographique des médecins peut
se résoudre par ces deux moyens, il est évident que cette
possibilité d'une entente sera d'autant moins urgente au moins dans ce
contexte.
Cependant, sur le premier paragraphe de l'article 8, il ne faut pas
nécessairement y voir des contraintes nouvelles ou des façons de
réglementer une activité que nous sommes très satisfaits
de laisser se dérouler librement dans toute la mesure où elle ne
suscite pas, pour ceux mêmes qui pratiquent, des problèmes. Mais
il devient évident, à un moment où environ 800
médecins sortent des facultés de médecine tous les ans,
qu'il va falloir, avec les fédérations et avec le Collège,
faire un peu de planification à moyen terme pour recevoir ces
médecins dans les diffétentes régions et dans les
différents établissements. En effet, il devient de plus en plus
difficile d'absorber un si grand nombre de médecins à
l'improviste et sans savoir où ils vont, sans savoir comment ils vont
pratiquer, et dans quel contexte, ne serait-ce que parce que notre propre
planification des ressources physiques et des autres ressources humaines avec
lesquelles ils doivent collaborer doit quand même être faite non
pas seulement sur la base des faits accomplis, mais avec une espèce
d'effort de concertation pour qu'il n'y ait pas de gens qui arrivent, qui n'ont
pas de ressources et qui sont dans des situations impossibles. On a vécu
certaines de ces difficultés dans le passé avec une sortie de
nouveaux médecins qui était la moitié de celle que nous
connaîtrons dans un avenir très rapproché.
Je pense qu'il y a, avec les groupes médicaux, la
nécessité de se concerter là-dessus, pas dans le but de
restreindre puisqu'on accepte déjà, par le financement des
facultés de médecine, qu'il y ait 800 médecins qui
accroissent les effectifs existants je pense qu'il va être
nécessaire de savoir un peu comment on les absorbe dans le réseau
et comment on aménage l'ensemble des autres ressources pour rendre leur
insertion dans le réseau des établissements, par exemple, la
meilleure possible et la plus satisfaisante possible à tout point de
vue.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Est-ce que le député de
Gaspé a terminé?
M. FORTIER: Je voudrais juste ajouter une chose, actuellement, dans
toutes les régions, je crois, 200 nouveaux médecins pourraient
probablement suffire pour établir l'équilibre là où
il manque de personnel médical. Je crois que 200 nouveaux
médecins seraient suffisants. Avec ce que le ministre vient de nous
affirmer, je crois que pour ma question, je suis très content de la
réponse.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Taschereau.
M. BONNIER: M. le Président, je pense que l'objet poursuivi par
l'article 8 au niveau social est extrêmement louable parce que je pense
qu'il ne s'agit pas tout simplement d'assurer un certain revenu qui est
nécessaire aux professionnels de la santé mais, en plus, faut-il
s'assurer que ces services seront distribués équitablement sur
l'ensemble du territoire. C'est probablement ce que je comprends par l'objet de
l'article 8. Cependant, je me pose quand même des questions, est-ce que
cette espèce de contingentement auquel on se référera,
qu'on va vouloir appliquer à la suite d'ententes... Je pense qu'il est
heureux qu'on s'entende d'abord avec les fédérations
concernées.
M. FORGET: Excusez-moi, M. le Président.
M. BONNIER: Parfois, j'ai l'impression de parler tout seul.
M. FORGET: Excusez-moi, monsieur.
M. BONNIER: J'allais dire que, malgré le fait que socialement on
doit être d'accord sur les objets de l'article 8, ça pose quand
même des questions quant à son application. Parce qu'il me semble
qu'on ne définit pas suffisam-
ment, d'une façon stricte, quel saurait être le
contingentement. Est-ce qu'il peut, sur le plan de l'ensemble du territoire,
être de portée régionale ou s'il va être de
portée de certaines communautés ou si on va même aller au
niveau de certains établissements? A partir de ce moment-là, un
centre hospitalier qui voudrait développer tel et tel service ne
pourrait pas, évidemment, les développer, si on adopte tel quel
l'article 8, si je comprends bien.
Ma deuxième question est de savoir ce qui va arriver du surplus
des professionnels de la santé qui vont se trouver dans telles
régions, alors qu'on aura dit: On en a suffisamment qui doivent
être reliés au régime. Est-ce que le surplus ne pourrait
pas être relié? Est-ce que je comprends mal l'article?
M. FORGET: Comme je l'ai indiqué à une question
précédente, il n'est pas question d'avoir un surplus global.
Puisque le gouvernement serait incohérent si, d'une part, il
finançait par les budgets des universités la formation de
personnel spécialisé et qui, d'autre part...
M. BONNIER: Au niveau d'une région, M. le ministre, au niveau
d'une région seulement et non pas globalement.
M. FORGET: Au niveau d'une région, comme je vous l'ai
indiqué, il s'agit d'ententes. Nous n'avons pas d'idée
préconçue sur toutes les implications possibles d'une telle
entente. Il est clair, au moins au début, qu'il faudra aller très
prudemment et d'une façon très modeste pour résoudre les
problèmes qui peuvent être résolus dans le cas d'une telle
entente.
Mais j'aimerais malgré tout signaler que le problème que
le député de Taschereau souligne au sujet de la
possibilité d'un nouveau service ou son impossibilité ne
découle pas de l'entente ou pour employer l'expression qu'il
emploie d'un contingentement. C'est la situation actuelle.
Par exemple, quelqu'un qui a fait des études et s'est
spécialisé en médecine nucléaire, rien ne lui
garantit, s'il décide d'aller dans un hôpital du bas du fleuve ou
d'une région éloignée, de bénéficier de tous
les équipements, de toutes les installations et du personnel d'appoint
nécessaires pour qu'il puisse exercer là sa
spécialisation.
Mais cela fait ressortir justement la nécessité que nous
nous concertions avec les organismes professionnels pour que ce genre de
décision, sur l'implantation de services ultraspécialisés
ou spécialisés, se développe de façon que les gens
n'aillent pas dans des endroits alors qu'ils n'ont pas l'équipement pour
y travailler et que, d'autre part, nous sachions, dans nos plans de
développement, quelle est l'envergure du développement de
services qui sera nécessaire dans certaines régions, et que nous
ayons une certaine assurance que ces projections ne sont pas simplement de la
spéculation gratuite de notre part, mais correspondent également
à des possibilités réelles et à des choses qui sont
prévisibles et sur lesquelles on peut s'entendre.
Je pense que, de toute manière, si de telles ententes sont
conclues, il faudra qu'elles soient dans un cadre très souple permettant
une mise à jour annuelle et une concertation permanente puisque la
situation est susceptible d'évoluer continuellement.
Les médecins qui accepteront de bénéficier de
certaines mesures incitatives pourront très bien se retrouver,
après une période d'années, dans la situation où
ils ne souhaitent plus être dans ces endroits éloignés.
Ce sont des facteurs qu'on ne peut pas contrôler et que l'entente
ne contrôlera pas. Elle n'obligera aucun individu comme tel à
être à demeure dans tel établissement ou dans telle
région. Elle doit créer un cadre où les décisions
individuelles pourront s'insérer et où il lui sera aussi possible
de réagir aux décisions individuelles de façon
concertée et de façon intelligente.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Avant d'adopter cet article...
M. BEDARD (Chicoutimi): Trois heures.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Oui, parce qu'il y a encore des
députés qui veulent intervenir sur l'article 8.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est cela. J'ai des questions à poser
sur les autres articles.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Nous reviendrons. La commission suspend ses
travaux jusqu'à trois heures.
M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord. (Suspension de la séance
à 12 h 58)
Reprise de la séance à 15 h 10
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs !
Nous reprenons l'étude du projet de loi no 93, Loi modifiant la
Loi de l'assurance-maladie et la Loi de la Régie de l'assurance-maladie
du Québec. Nous en étions à l'article 8. Avant d'aller
plus loin, il faudrait nommer un rapporteur à la commission. On vous
suggérerait le député de Taschereau comme rapporteur de la
commission, si les membres sont d'accord.
M. DUFOUR: Très bien. Tout le monde est d'accord.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, à l'unanimité, le
député de Taschereau est nommé rapporteur de la
commission. Nous en étions à l'article 8. Il y avait une
modification par rapport au texte de la page 2. Si vous voulez, avant de donner
la parole au député d'Abitibi-Est, je voudrais tout simplement
mentionner l'amendement qui est proposé par le ministre. L'article 15 de
ladite loi, modifié par l'article 6 du chapitre 30 des lois de 1973, est
de nouveau modifié en insérant, après le premier
alinéa, les mots suivants: "Une telle entente peut, pour assurer une
répartition adéquate des professionnels de la santé sur le
territoire du Québec, établir une procédure ayant pour
effet de déterminer le nombre de professionnels admissibles à
participer au régime d'assurance-maladie ou au régime
d'assurance-hospitalisation dans un même territoire ou
établissement, en tenant compte de la catégorie ou
spécialité à laquelle ils appartiennent. "Toute entente ou
partie d'entente peut, s'il y est pourvu expressément, lier tout
établissement. Toutefois, le ministre doit consulter les
établissements ou groupes d'établissements susceptibles
d'être reliés par une entente ou partie d'entente et ceux-ci
peuvent transmettre au ministre des recommandations quant aux modalités
de leur participation à la conclusion de cette entente ou partie
d'entente".
Avant l'ajournement pour le "lunch", le ministre avait-il terminé
son intervention?
M. FORGET: II semble que oui, M. le Président, mais je ne sais
plus exactement où j'en étais.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): De toute façon, on en était
là-dessus.
Le député d'Abitibi-Est avait demandé la
parole.
M. HOUDE (Abitibi-Est): M. le ministre, vous avez parlé tout
à l'heure, dans votre intervention sur l'article 8, de la
possibilité de construire des résidences ou de fournir des
logements aux médecins des régions éloignées pour
pouvoir s'assurer que les spécialistes ne se sentent pas trop
dépaysés et qu'ils trouvent les conditions de logement
favorables. Il y a une autre chose aussi, il ne faudrait pas qu'ils soient
dépourvus d'équipement dans les centres hospitaliers pour pouvoir
exercer leur profession. Est-ce que vous pouvez nous donner certaines garanties
à ce sujet, parce qu'il semble parfois je ne parle pas de vous,
parce que vous nous avez toujours offert une excellente collaboration
qu'à la division de l'équipement, on éprouve parfois
certaines difficultés à obtenir l'équipement pour les
professionnels.
Deuxièmement, j'aimerais que vous me disiez, de façon
pratique, comment cet article amènera dans la région du
Nord-Ouest, parce que c'est celle qui me concerne le plus, où la
proportion en pourcentage de spécialistes est de 0.7 p.c,
comparée à celle au Saguenay-Lac-Saint-Jean où elle est de
2.6 p.c, Bas-Saint-Laurent-Gaspésie où elle est de 1.6 p.c, en
quoi cet article va-t-il amener plus de spécialistes à
s'intéresser à une région éloignée comme le
Nord-Ouest ou la Côte-Nord qui est encore plus défavorisée
à ce chapitre que le Nord-Ouest?
M. FORGET: Excusez-moi. Pourriez-vous répéter la
dernière partie, parce qu'il y a un conseiller juridique qui est
arrivé et je suis en train...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Oui. En quoi l'article 8 va-t-il amener, de
façon plus concrète, plus de spécialistes dans le
Nord-Ouest, qui est complètement... En fait, au Nouveau-Québec,
il y a 0.0 p.c; la Côte-Nord, 0.2 p.c; le Nord-Ouest vient après
cela à 0.7 p.c. Nous sommes nettement plus défavorisés de
ce côté que l'Outaouais ou le Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Québec, c'est un cas un peu spécial, Montréal aussi. Mais
en quoi cela va-t-il amener... Quelle démarche allez-vous suivre?
M. FORGET: Vous parlez de l'application de l'article 8...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Hum! Hum! M. FORGET: ... essentiellement.
M. HOUDE (Abitibi-Est): D'abord la première chose,
l'équipement. Après cela...
M. FORGET: Oui. Pour ce qui est de la première remarque que vous
avez faite relativement à fournir des logements et des choses du genre,
je voudrais être bien compris. Nous n'envisageons pas de fournir des
logements et de fournir des facilités matérielles, mais de voir
de quelle manière ils peuvent être fournis et peuvent être
disponibles. Le mot "fournir", évidemment, peut prêter à
confusion. Nous n'avons pas l'intention, pour le moment du moins, et nous ne
croyons pas que ce soit une considération significative que de fournir,
disons à titre gracieux, des maisons ou des
cabinets, etc., mais de s'assurer que ces installations existent,
qu'elles peuvent être louées et qu'elles n'impliquent pas des
obligations à long terme qui doivent être contractées par
des gens qui sont rien moins que sûrs de vouloir être là
à long terme. Donc, on ne veut certainement pas décourager,
à première vue, l'établissement ne serait-ce qu'à
titre intérimaire, en attendant qu'ils se décident de
façon permanente.
Ces discussions vont avoir lieu dans les semaines qui suivent, avec les
conseils régionaux. D'abord, il faut désigner les endroits. Les
conseils régionaux, de même que le Collège des
médecins, ont déjà été invités
à nous faire part de leurs préoccupations et à nous
désigner des endroits spécifiques.
Lorsque ces endroits auront été désignés,
les conseils régionaux devront s'assurer de l'existence ou de
l'inexistence de ces facilités et voir de quelle manière les
ressources du milieu pourraient être disponibles. Je pense qu'on ne peut
pas présumer de leurs constatations, mais ce n'est pas la fin du monde
que de prévoir la mise en oeuvre de ces moyens.
Il y a les bourses qui vont pouvoir être offertes à partir
de 1975, pour les étudiants qui vont terminer leurs études
à la fin de l'année suivante; évidemment, ce n'est pas
immédiat, mais à moyen terme, du moins, ils seront
individuellement, en vertu d'un engagement qu'ils prendront à cet effet,
tenus de respecter leur engagement, donc d'aller pratiquer dans les endroits
ainsi désignés, tels que précédemment
décrits.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Les modalités font-elles partie de la
réglementation?
M. FORGET: Le contenu de l'engagement des boursiers va être
approuvé par arrêté en conseil. Evidemment, ces contrats ne
sont pas rédigés. On peut imaginer, de façon très
générale, qu'ils comporteront un engagement de la part de
l'étudiant, de pratiquer, pour un nombre d'années
équivalent à la période pendant laquelle il recevra une
bourse, dans une région désignée, et d'être
rémunéré pour cela, conformément aux ententes, de
façon habituelle, et de le faire dans un endroit qui sera
désigné, mais qui ne pourra pas, je pense, être
désigné au moment où chaque étudiant va signer son
engagement, au début de ses études, parce que cela supposerait
qu'on connaisse d'avance trop de choses. Mais, au moment où les
étudiants termineront leurs études, ils auront
présumément le choix, selon une procédure qu'il reste
à déterminer, parmi un certain nombre d'endroits
désignés.
Il n'y a pas de raison d'être plus coercitif qu'il le faut, mais
ce sont des obligations, d'aller sur une liste, qui s'appliquent à des
individus. Il y en aura peut-être vingt, trente, quarante endroits
désignés de cette manière, à la suite de la
consultation à laquelle je viens de faire allusion.
De ce côté, ce sera concret, ce sera pratique. On saura
d'avance le nombre d'étudiants qui terminent telle année et qui
seront disponibles pour aller dans des endroits qui seront connus d'avance
également.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Est-ce que cela s'applique aussi aux
spécialistes et aux omnipra-ticiens, à tous les professionnels de
la santé?
M. FORGET: C'est-à-dire que cela s'applique bien sûr
à des gens qui sont destinés à se spécialiser, mais
de ce côté, il faut voir que l'invitation dans la loi s'applique
à n'importe qui, essentiellement. Dans notre esprit, elle s'applique en
premier lieu aux étudiants de deuxième, troisième et
quatrième année de médecine, mais a priori rien
n'empêche qu'elle s'applique plus largement aussi.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Autrement dit, on ne commencera pas normalement
à avoir les effets véritables avant trois ans, avant 1978.
M. FORGET: Dans la mesure des bourses elles-mêmes, pas avant deux
ans. Ce n'est pas possible. Il faut que les gens soient boursiers d'abord et,
ensuite, respectent l'engagement qui résulte de leur bourse.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Mais si vous preniez un étudiant qui est
en quatrième et que vous lui offriez de façon rétroactive
le montant qu'il aura reçu, si ce plan avait été en
vigueur lorsqu'il était en deuxième et en troisième
année, à condition qu'il s'engage à signer pour trois ans
ou un nombre X d'années, ne pensez-vous pas qu'on pourrait avoir le plan
de façon beaucoup plus efficace dès les premières
années?
M. FORGET: Cela répugne peut-être un peu de donner des
bourses rétroactivement. Je ne sais pas, mais ma première
réaction en est une un peu d'interrogation là-dessus. J'aimerais
mieux qu'on voie aussi l'autre mesure, l'application de l'autre mesure. L'autre
mesure peut s'insérer dans les ententes de garantie d'un revenu moyen
comparable à ce qui est gagné dans un centre urbain comme
Québec, mais dans le cadre d'une pratique de groupe. Cela peut, sujet
à la conclusion d'une entente et on n'a pas besoin de prendre des
années pour cela s'appliquer très bientôt et cela
donne des chances de succès avant deux, trois ans. L'Ontario a fait
l'expérience de cette formule. Elle l'a fait sans obliger au
départ à la pratique de groupe. Or, des conversations que j'ai
eues avec mon collègue de l'Ontario là-dessus montrent que leur
expérience n'est positive que dans un cas, dans le cas de pratique de
groupe dans les endroits éloignés.
La pratique solitaire dans des endroits éloignés, c'est
l'échec en ce sens que la personne y va pour un an ou six mois et
après, tout ce
qu'elle songe à faire, c'est s'en aller. Le fardeau, d'ailleurs
on en a quelques-uns, je pense que même les media d'information ont
attiré l'attention du public là-dessus. Dans le moment, le
fardeau est psychologiquement intenable, même physiquement intenable pour
une personne isolée. Alors, dès qu'une entente sera conclue
une chose à laquelle nous allons nous consacrer dès
janvier ce qui ne suppose pas nécessairement qu'une entente
globale soit conclue, cela peut être un amendement aux ententes
existantes, aux ententes qui continuent d'être appliquées
même si elles sont formellement expirées.
Il serait concevable du moins qu'on puisse offrir cela dès
l'année prochaine, dès 1975, et cela s'applique à des
spécialistes comme à des omnipraticiens. Encore que dans des
endroits éloignés, sur une base de pratique de groupe, ce ne sont
pas véritablement les spécialistes comme tels qui sont requis, ce
sont vraiment des omnipraticiens, je pense, à moins d'envisager les
pratiques de groupe beaucoup plus substantielles. Mais la clientèle
étant aussi clairsemée dans ces régions, je pense que ce
sont surtout les soins généraux qui sont requis, du moins comme
première mesure. Cela devrait s'appliquer assez rapidement.
Les bourses, par leur nature, évidemment, c'est une solution
à moyen terme. Je pense qu'on va essayer de l'accélérer en
l'offrant à ceux qui terminent en 1976, cela s'appliquera pour un an;
après, ça s'appliquera pour deux ans et finalement, ça
s'appliquera pour trois ans. J'hésite beaucoup à m'engager sur la
voie de bourses rétroactives. Cela aurait plutôt l'air d'une
espèce de loterie, j'ai l'impression, plutôt que d'une bourse
véritable.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Ce serait une forme de prime à
l'éloignement.
M. FORGET: Oui, si l'on veut.
M. HOUDE (Abitibi-Est): C'est un test véritable, aller tout de
suite dans les régions éloignées.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Vanier avait
demandé la parole avant le lunch.
M. DUFOUR: Deux petites questions, M. le Président, qu'est-ce
qu'on entend exactement quand on parle d'une telle entente, c'est une entente
avec qui et pour qui? Parce que ce n'est pas défini, une telle entente,
tout à l'heure, on discute avec les établissements mais est-ce
qu'il y aura des ententes avec les fédérations ou le
collège à ce moment-là, quelle sorte d'entente
exactement?
M. BEDARD (Chicoutimi): Surtout que ces ententes vont lier des
établissements...
M. DUFOUR: C'est ça. C'est très important.
M. BEDARD (Chicoutimi): On leur donne une valeur légale
très forte.
M. FORGET: M. le Président, je vous réfère à
l'article 6 du chapitre 30 des lois de 1973. J'ai une codification
administrative et je n'ai pas la loi de 1973. C'est l'article 15.
L'article 8 de ce projet amende l'article 15 de la Loi de
l'assurance-maladie qui dit que "le ministre de la Santé
c'était l'expression à l'époque peut, avec
l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil, conclure avec les organismes
représentatifs de toute catégorie de professionnels de la
santé toute entente aux fins de l'application de la présente loi.
L'entente visée au présent article lie la régie."
On ajoute à cela qu'une telle entente peut remplir les fins du
premier alinéa de cet amendement et il peut aussi lier des
établissements dans la mesure où l'entente le prévoit
expressément et dans la mesure où, dans ces cas-là, il y a
eu aussi une consultation avec les catégories d'établissements
visés pour voir s'ils y participent, dans le cas où leur
participation est indiquée ou ils souhaitent y participer.
M. DUFOUR: Ma deuxième question. Le ministre nous a dit tout
à l'heure qu'il avait rencontré son homologue ontarien. Est-ce
que vous n'avez pas retenu, M. le ministre, qu'en Ontario on a essayé de
donner un salaire net, avant de parler de bourse, un salaire de $32,000 net par
année, pour inciter les médecins à aller dans ces
endroits, qu'on appelait zones désignées?
M. FORGET: Oui, je suis conscient de cela. C'est d'ailleurs une des
quatre mesures auxquelles j'ai fait allusion. C'est dans les endroits
éloignés une incitation pour la pratique de groupe qui comporte
une garantie d'un revenu net ou brut, peu importe, équivalant à
ce qu'il serait dans les régions plus normalement peuplées. C'est
vague, mais cela dit bien ce que cela veut dire. Quelqu'un qui pourrait faire
un revenu de $32,000 à Québec, on lui dit: Si vous allez
pratiquer en groupe, avec d'autres médecins, dans tel endroit
désigné où il n'y a pas de médecin et qu'il y a une
population à desservir, on vous garantit que vous ne ferez pas moins que
cela.
M. DUFOUR: En faisant moins, vous payez la différence?
M. FORGET: C'est cela.
M. DUFOUR: S'ils gagnent $50,000, ils gardent leurs $50,000.
M. FORGET: Oui, c'est un minimum qui est garanti. Si la clientèle
se multiplie ou est plus grande qu'anticipée, c'est...
M. DUFOUR: II n'y a pas d'indexation.
M. FORGET: Non, il n'y a pas d'indexation pour cela. C'est comme le
salaire des députés.
M. BEDARD (Chicoutimi): Comme le ministre le sait, à l'occasion
de la deuxième lecture, on avait souligné notre approbation
concernant le programme de bourses qui était mis de l'avant par le
ministère, tout en soulignant également ce qui a
été fait tout à l'heure par d'autres membres de la
commission qu'il fallait se rendre compte de la réalité
qui fait que des médecins, selon ce régime-là, ne seront
disponibles pour les régions que dans deux ans et ce, en nombre
très restreint, mais que le programme n'aura de valeur pleine et
entière que d'ici cinq ou six ans.
Entre-temps, est-ce que le ministre prévoit d'autres moyens de
subvenir à ce besoin des régions éloignées qui,
effectivement, ont besoin de médecins? On sait que c'est un droit
fondamental de ce côté. Il n'y a jamais eu de politique vraiment
établie pour aider ces régions qui, constamment, font appel au
ministère des Affaires sociales dans le but d'avoir des
spécialistes ou des médecins pour s'occuper de la population.
Dans ce sens, est-ce que, entretemps je ne dis pas que je suis d'accord
sur ce que je vais avancer le ministère a étudié la
possibilité de contingenter les milieux urbains?
Je sais que ce sera au départ, peut-être, je pense, une
atteinte à la liberté à laquelle a droit chaque individu
à l'intérieur de la société, celle de pouvoir
travailler là où il veut. J'aimerais quand même
connaître les impressions du ministère sur ce sujet.
M. FORGET: Pour ce qui est des bourses, il est évident je
l'ai indiqué que, d'ici deux ans, cela n'aura pas un effet
spectaculaire, puisque c'est seulement au printemps de 1976 que des gens vont
terminer, ceux qui auraient pu recevoir des bourses dans l'année
précédente.
Cependant, l'idée d'avoir des bourses conditionnelles a
été avancée par bien des groupes, bien des individus, et
il faut commencer un jour. Il est évident que, quand on commence, on ne
peut pas faire autrement que d'avoir cette réserve sur le moment
où cela va devenir vraiment effectif. Des étudiants en
médecine nous ont même dit que, dans le moment, ils se font offrir
par les forces armées canadiennes un régime à peu
près analogue pour les fins des forces armées et qu'il leur
plairait davantage, étant donné qu'ils y voient des avantages
financiers évidents, de souscrire à un engagement comme celui que
nous leur offrirons que de souscrire à l'engagement des forces
armées.
Je pense que cela peut se comprendre. C'est la raison qui nous fait
essayer et ajouter ce moyen à d'autres. Ce n'est pas le seul.
J'ai mentionné à deux ou trois reprises les mesures
incitatives pour la pratique de groupe dans les régions
éloignées. Tout dépend de la rapidité et du
succès que nous avons à conclure rapidement une entente ou un
amendement aux ententes actuelles pour prévoir cette disposition qui ne
met en question rien de fondamental du point de vue du régime et qui
devrait être assez facilement acceptable par les
fédérations. Cela aurait un effet immédiat, du moins dans
l'hypothèse où l'incitatif soit perçu comme suffisamment
attrayant par un nombre substantiel de médecins.
Pour ce qui est des autres mesures qui pourraient dépasser
celles-là, j'ai indiqué que c'étaient là les
mesures qui, dans l'ordre de leur réalisation, dans le temps,
étaient prioritaires, c'est-à-dire, c'étaient les mesures
qui se réaliseraient probablement avant toutes les autres et qui avaient
des chances d'apporter des solutions. La loi, en vertu de cet amendement,
permettrait une entente qui pourrait avoir des effets encore indéfinis
dans leur détail, puisque justement le but de l'amendement est de
permettre qu'ils se fassent par entente.
Il reste qu'on peut imaginer toutes sortes de formules qui pourraient
nous amener à résoudre, autrement encore et par des moyens qui
s'ajoutent aux autres que j'ai mentionnés, les problèmes des
régions éloignées. Ce serait présumer que de dire
sur quoi les ententes porteront exactement. Il est clair que ce que nous
voulons faire par l'ensemble de ces mesures, c'est d'épuiser toutes les
possibilités qui ont pu être suggérées
jusqu'à maintenant, de manière à résoudre ce
problème. Seulement l'expérience nous permettra de dire laquelle
est vraiment susceptible de nous donner une solution. Je ne pense pas
nécessairement que les bourses seules pourront faire une solution. Je ne
pense pas que les mesures incitatives dans les endroits désignés
seront suffisantes. Encore une fois, l'avenir le dira.
La possibilité des ententes, en plus des objectifs auxquels j'ai
fait allusion ce matin, d'une certaine concertation entre les groupes
professionnels et le ministère sur la néceessité dans
laquelle on est d'absorber dans les régimes d'assurance-hospitalisation,
d'assurance-maladie, dans quelques années, soit presque 800
médecins nouveaux par année. Il faut le voir venir d'avance, il
faut avoir un peu des occasions de se parler de cela et de s'entendre sur les
implications. On a entendu parler tantôt des équipements. Les
équipements et d'autres considérations comme celles-là, il
faut qu'on les voie venir. On ne peut pas toujours être dans la position
de réagir après coup. Je pense que, même s'il n'y avait pas
de problème de disparité géographique, il faudrait en
venir à s'en parler et à le voir venir d'avance. Dans le moment,
on apprend à la fin de l'année que 10, 15 ou 20 médecins
ont été admis dans un centre hospitalier et que cela ne va pas du
tout dans ce centre hospitalier. Il y a des problèmes
considérables de fonctionnement. Il n'y a personne qui est en mesure de
nous en avertir d'avance. Je pense que c'est une situation dont tout le monde
paie les conséquences. Il y a des
nécessités de s'entendre. On verra comment et
jusqu'où il est opportun et nécessaire de s'entendre au fur et
à mesure du déroulement de ces discussions.
M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant les bourses, peut-être
aimez-vous mieux qu'on en discute. A l'article 16... D'accord, je reviendrai
à l'article 16.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Frontenac.
M. LECOURS: M. le Président, disons que j'ai beaucoup de
réserve quant à savoir s'il y a un article du projet de loi 93,
qui va pouvoir déterminer, dans une région donnée, le
nombre de professionnels admissibles à participer au Régime
d'assurance-maladie. Je pense, entre autres, aux régions comme dans mon
comté où il y a déjà quatre praticiens
généraux dans une petite ville. Si jamais on venait à
construire un CLSC là-bas et qu'il arriverait trois nouveaux
médecins, de quelle façon les médecins en pratique
privée pourront être garantis de participer encore au
Régime d'assurance-maladie?
M. FORGER: Oui, justement, je pense que l'énoncé
même du problème illustre le genre de choses qu'on peut
résoudre par des ententes. Quand le député de Frontenac
dit: S'il arrive quatre médecins, c'est justement peut-être que
ces...
M. LECOURS: II y en a quatre de résidents, il en arrive trois
nouveaux.
M. FORGET: ... il en arrive trois nouveaux.
M. LECOURS: II n'y en a pas besoin au départ, mais on a
parlé d'en mettre un...
M. FORGET: Oui.
M. LECOURS: ... au CLSC à Disraeli. Tout de même...
M. FORGET: Alors, s'il en arrive trois, ce que cet article
prévoit, c'est qu'on puisse s'entendre à savoir s'il en faut
trois nouveaux justement ou s'il n'en faut pas. Je pense que le problème
auquel on vient de faire allusion illustre qu'à moins de trouver un
moyen pour s'en parler et de s'entendre sur ces questions, il n'y a rien qui
empêche, à l'heure actuelle, ce phénomène de se
reproduire dans n'importe quel comté ou dans n'importe quelle ville au
Québec. Ce n'est pas seulement une préoccupation du
ministère, c'est une préoccupation aussi des médecins qui
sont là, et de ceux qui peuvent y arriver, de manière à
s'assurer que cela se fait dans un cadre où il y a une certaine
concertation. Dans le moment, il n'y en n'a pas. Je pense même que le
problème que vous évoquez est différent de celui de la
répartition géographique mais illustre qu'on a, de toutes parts,
avantage à ce qu'il y ait des discussions et certaines ententes
là-dessus. C'est l'esprit dans lequel ce genre d'ententes peut se
faire.
Il y a peut-être des problèmes qu'on n'a pas vus et qui
vont émerger comme étant des choses qui peuvent être
résolues par des ententes. Enfin, tout ce qu'on dit, c'est que, si on
peut s'entendre, il sera souhaitable qu'on puisse s'entendre pour discuter de
problèmes communs. C'est à peu près cela, alors que dans
le moment, même si on s'entendait, le cadre juridique ne permet pas de
leur donner de l'efficacité.
M. LECOURS: Mais je pense, M. le ministre, que le fait de pouvoir
déterminer, dans une institution, le nombre de médecins qui vont
pouvoir pratiquer là, va à l'encontre des lois qu'on retrouve
dans le code des professions. Je pense que n'importe qui peut faire une demande
pour faire partie du personnel de tel ou tel autre hôpital. Ce n'est pas
tellement le nombre de médecins déjà présent dans
l'hôpital qui détermine le nombre... Que lui, ce monsieur, n'ait
pas droit de devenir membre du personnel de l'hôpital...
M. FORGET: Ce n'est pas en vertu de la législation du code des
professions, mais c'est en vertu de la Loi sur les services de santé et
les services sociaux selon laquelle, depuis 1971, tout médecin qui veut
être admis dans un centre hospitalier peut faire la demande et doit
recevoir à sa demande, une réponse motivée s'il est
refusé. S'il est refusé, il peut aller en appel et
démontrer que les motifs qu'on a invoqués pour le refuser ne sont
pas valables.
Alors, cet article-là, qui est l'article 92 et suivants de la Loi
sur les services de santé et les services sociaux donne, à
première vue et en réalité c'est comme cela que
cela a fonctionné jusqu'à maintenant effectivement, un
droit pour tout médecin de pratiquer dans chacun des centres
hospitaliers du Québec. Or, il est bien évident que, si on pousse
ce droit à la limite c'est un droit nouveau, dans le fond, il
n'existait pas comme tel avant 1971 je pense que tout le monde pourra
voir que les hôpitaux, comme les autres lieux de pratique, ne sont pas
tous également attrayants. Il y en a qui le sont beaucoup, ils sont
prestigieux, ils sont bien organisés, ils ont été
reconstruits à neuf ou ils sont rénovés. Ils sont dans des
villes où il est agréable de vivre. Enfin, il y a toutes sortes
de caractéristiques qui ne sont pas uniformément réparties
dans tous les centres hospitaliers. Il est clair qu'à la limite tous les
9,000 médecins du Québec pourraient pratiquer dans quatre ou cinq
centres hospitaliers qui sont les plus attrayants. Evidemment, c'est un peu une
caricature, mais cela illustre que ce droit, s'il n'est pas assorti d'un
mécanisme de concertation, peut avoir comme conséquence de priver
certains centres hospitaliers des services médicaux qui
sont essentiels à leur fonctionnement, et qui peut aussi mettre
en péril certaines activités traditionnelles.
Certains centres hospitaliers, dans les milieux où on a
traditionnellement fait de l'enseignement et où, au moment de
l'admission dans le centre hospitalier je parle d'un médecin
on acceptait, implicitement ou explicitement, certaines obligations
d'enseignement.
Il est clair que le droit, sans restriction, à l'admission de
tout médecin, même celui qui n'a aucune intention d'adhérer
aux traditions de l'établissement, ni de se plier à certaines
exigences comme celles-là, qui sont des exigences légitimes... Il
faut bien qu'il y ait un enseignement clinique, si on veut avoir des
médecins dans vingt et quarante ans. Cela pose des problèmes
très considérables. Cela illustre assez bien qu'on a
créé, dans la loi, un droit. C'est un droit qui est presque
absolu, puisque les restrictions qui existent sont peu nombreuses et doivent
être interprétées assez restrictive-ment. C'est un droit
absolu, mais le monde n'est pas en noir et blanc comme cela. Un droit absolu ne
peut pas toujours être exercé absolument et jusqu'à sa
limite.
Ce que nous cherchons, c'est peut-être un peu de
tempérament qui serait découvert par la voie d'une entente entre
le ministère et les associations professionnelles, qui sont là,
après tout, pour défendre les droits des individus et qui ne se
mettront pas d'accord avec le ministère pour faire des choses qui vont
à rencontre de l'intérêt de leurs membres.
Je pense que c'est un équilibre qu'il faut essayer de rechercher,
parce que, autrement, on se heurte à des problèmes qui,
déjà, apparaissent dans certains centres hospitaliers qui perdent
de très bons médecins, parce qu'ils ont maintenant la
possibilité d'être admis dans des endroits fort
intéressants pour eux, mais avec des difficultés de
fonctionnement très considérables, à la fois pour les
endroits où ils vont, parce qu'il y a un encombrement relatif, et pour
les endroits qu'ils quittent, parce qu'il y a une désertion, si vous
voulez.
Je pense que c'est un peu ce genre de problème auquel il faudra
s'attaquer. Remarquez qu'il ne s'agit pas de le faire par la loi, par les
règlements ou par des directives. Il s'agit d'en discuter avec les
groupes concernés et de dire : Tout en respectant ce droit qui vaut pour
l'individu, il reste que c'est un droit individuel. Il y a aussi l'expression
de droit individuel par l'accumulation d'individus qui s'expriment comme cela,
ce qui produit une situation au niveau du groupe et peut même si,
individuellement, c'est tout à fait acceptable, tout à fait
légal produire des situations complètement inacceptables,
même pour le groupe lui-même. On ne regarde pas toujours les choses
de la même façon, selon qu'on regarde un problème à
titre individuel, ou qu'on le regarde à titre de membre d'un groupe.
Il me semble que c'est la seule solution, dans le fond, qui puisse
être envisagée, à la situation nouvelle qui a
été créée par l'affirmation si claire dans la loi
du droit de pratique dans chaque établissement. A la limite nous ne
pourrons pas assurer le fonctionnement des centres hospitaliers comme cela.
M. LECOURS: M. le ministre, j'aurais un autre cas très
particulier, à l'heure actuelle. De plus en plus, on parle de fermer ou
de regrouper des services obstétriques à Sherbrooke. Nos
praticiens généraux auront-ils le droit de pratiquer leurs
accouchements au CHU de Sherbrooke? En vertu de votre article no 8, vous
limitez le nombre de médecins d'une institution.
M. FORGET: Je ne voudrais pas faire déborder cette discussion sur
les problèmes de la région de Sherbrooke.
M. LECOURS: Je pense que c'est assez important, parce que l'article 8
est assez sérieux.
M. FORGET: Oui, mais encore une fois, j'aimerais bien dissocier les deux
problèmes. Il est clair que l'article 8...
M. LECOURS: Pouvez-vous nous donner la garantie que les praticiens
généraux auront le droit de pratiquer des accouchements, alors
que, précisément, ils ne sont pas admis à pratiquer au CHU
de Sherbrooke?
M. FORGET: II est clair que, dans l'hypothèse où il y a un
regroupement dans un seul centre hospitalier de toutes les activités
d'obstétrique, dans une région ou une sous-région, il y a
là beaucoup plus qu'une question de nombre. S'il y avait une entente,
comme vous le suggérez, qui aurait pour effet de limiter le nombre comme
cela, ce serait beaucoup plus qu'une limitation de nombre, ce serait enlever le
droit de pratique à tous les praticiens généraux
relativement à l'obstétrique dans cette région. Ce serait
une portée beaucoup plus grande que ce qui est envisagé par
l'article en question. Il ne s'agit pas de limiter le droit de pratique
d'aucune façon. Il s'agit de l'aménager de manière que
tout puisse fonctionner. Dans un cas comme celui-là, il est clair
qu'à moins de dire: Une chose qui serait équivalente à
l'affirmation que les praticiens généraux ne peuvent plus faire
d'accouchements dans cette région. On ne pourrait pas se servir de cette
clause pour limiter le nombre de la façon dont vous l'indiquez.
M. LECOURS: Tant qu'on a la garantie du ministre qu'on ne peut pas se
servir de l'article, c'est très bien.
M. FORGET: Comme il faudrait signer une telle entente du point de vue du
gouvernement, ce ne serait certainement pas une chose qu'on ferait dans ce
cas.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Relativement à cet article, cette entente en
limitant ou en établissant des normes qui vont faire que les
professionnels pourront être attachés à une région
donnée, pratiquer dans une région donnée ou du moins dans
un centre donné, peut aller jusqu'à enlever, en pratique, le
droit pour un professionnel de pratiquer, en ce sens que si dans une
région donnée il ne peut plus pratiquer, il va bien être
obligé de s'expatrier.
M. FORGET: Je pense que ce qu'il faut essayer de regarder, c'est le
côté positif de tout cela. Il est clair qu'il n'y a pas de loi, ou
d'entente, qui ne peut pas être interprétée
négativement. Mais ce qui est important, c'est de considérer les
objectifs poursuivis et aussi la façon positive quant au moyen qui est
suggéré pour atteindre ces objectifs. L'objectif, c'est d'assurer
le meilleur fonctionnement possible des services de santé, à la
fois des services médicaux et des services hospitaliers. Il faut bien
qu'il y ait un certain ajustement entre les deux puisque l'un n'est pas
divorcé de l'autre. Les services médicaux sont essentiels aux
centres hospitaliers et les centres hospitaliers sont essentiels pour les
médecins. Alors, il est important, je pense, qu'il y ait une certaine
coordination. Il est sans doute important que les droits des individus soient
respectés le plus pleinement possible dans toute leur acceptation. Il
reste que l'ensemble des services de san- té implique maintenant des
nombres considérables de professionnels, des nombres
considérables d'établissements et une évolution
considérable des nombres. Quand on parle de 800 nouveaux médecins
par année, c'est quand même quelque chose d'assez formidable comme
impact sur l'ensemble du réseau hospitalier. Ce ne sont pas des choses
qui peuvent être improvisées et on ne peut pas toujours se fier
que la main invisible, en quelque sorte, et les décisions individuelles
vont toutes se prendre de manière que tout va aller pour le mieux dans
le meilleur des mondes, tout le temps. Cela, c'est pour les objectifs. Il faut
que tout cela se complète, les soins médicaux, les services
hospitaliers et il faut, étant donné les développements
considérables, que cela se développe de façon aussi
harmonieuse que possible. Donc, il faut le faire. Il faut le faire et sur le
plan des moyens il faut le faire par une entente. Donc, il n'y a pas
d'imposition, il n'y a pas de diktat, il n'y a rien d'autoritaire. On va se
rencontrer, on va s'en parler et va essayer de voir de quelle manière
cette concertation peut se faire.
Il faut dire que dans n'importe quel autre secteur il y a des
caractéristiques... Il faut que je m'interrompe là, je pense
bien.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): On recommencera tout à l'heure parce
qu'on est appelé pour un vote présentement. La commission suspend
ses travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 15 h 48)
Reprise de la séance à 21 h 35
M. BRISSON (président de la commission permanente des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
M. Morin (Sauvé) remplace M. Charron (Saint-Jacques) et M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplace M. Bellemare (Rosemont).
Nous étions à l'article 8 et il y avait un amendement qui
était en discussion. La discussion est-elle terminée?
M. FORGET: Je n'ai qu'à compléter. Au moment où la
séance fut levée, un peu avant 4 heures, j'avais la parole, je
crois. Je voudrais simplement, relativement à l'article 8,
compléter ce que je disais à ce moment, quant à la
modalité d'application de l'entente prévue au deuxième
alinéa de l'amendement de l'article 8.
Au sujet de ces modalités, et de manière à bien
préciser dans quel esprit elles s'appliquent, j'en étais à
souligner qu'il s'agit d'une entente entre, d'une part, le ministère des
Affaires sociales et, d'autre part, les fédérations
représentatives des groupes de professionnels et, en particulier pour
les médecins, la Fédération des médecins
spécialistes du Québec et la Fédération des
médecins omnipraticiens. Il n'est donc pas question que le ministre, de
façon unilatérale, impose, non seulement sans consultation, mais
sans entente, des idées préconçues quant à la
distribution des professionnels sur le territoire, mais que, même
au-delà de cela, il serait normal d'envisager et c'est un point
sur lequel nous insisterons, dans la conclusion de telles ententes que
ces ententes ne s'appliquent pas sans que tout individu qui pourrait être
affecté dans sa vie professionnelle par de telles ententes, ne puisse
disposer d'un droit à un arbitrage, relativement à l'application,
quant à lui, d'une telle entente.
Pour ce qui est de la désignation d'un arbitre, je crois qu'il
serait tout à fait approprié de consulter les corporations
professionnelles impliquées dans le cas des médecins,
évidemment, la Corporation professionnelle des médecins. Dans un
tel contexte, toutes les ententes sont l'objet d'une négociation avec
les fédérations représentatives, ou les organismes
représentatifs des professionnels et où nous insisterions sur un
droit à l'arbitrage, dans le cas d'individus qui, pour une raison ou une
autre se sentiraient lésés dans l'application de ces ententes,
pour eux particulièrement, qu'il y ait ce pouvoir d'en appeler d'une
telle application.
Je crois que, dans un tel contexte, l'on ne peut pas s'alarmer de cette
possibilité, mais qu'au contraire, il faut y voir une façon de
faire évoluer cette concertation à laquelle j'ai fait allusion
plus tôt dans mes remarques, entre le ministre des Affaires sociales et
les organismes professionnels en cause.
D'ailleurs, non seulement jugeons-nous approprié de consulter les
corporations professionnelles, quant à la désignation d'arbitres
dans le cas de conflits, mais plus généralement, j'ai
déjà eu l'occasion de demander à la Corporation
professionnelle des médecins, de leur indiquer, du moins
puisqu'il serait anticipé de leur faire une demande avant l'adoption du
projet de loi que nous nous attendions de leur part à recevoir
des avis ou des consultations sur ce problème de distribution des
professionnels et sur les moyens qu'ils nous recommanderaient de mettre en
oeuvre, par ces ententes qui seraient conclues, bien sûr, non pas avec
eux, mais avec les syndicats professionnels.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Sauvé.
M. MORIN: M. le Président, si je comprends bien, l'arbitrage
auquel le ministre a fait allusion s'appliquerait à ceux qui sont
déjà membres de ces fédérations de groupes
professionnels et, une fois les ententes conclues, elles s'appliqueraient
automatiquement à tous les nouveaux venus.
M. FORGET: Je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question.
Il est clair que cette entente n'aurait pas pour effet de décider de
leur admission dans la corporation professionnelle, ni même de leur
admission dans les syndicats.
M. MORIN: J'ai bien compris cela.
M. FORGET: Elle aurait pour effet de déterminer certaines
dispositions quant à la distribution des postes de professionnels sur le
territoire. Ce que j'ai indiqué, c'est que, dans l'application de telles
conditions des ententes à des individus en particulier qui auraient pour
effet de restreindre leur accès à un établissement ou
à une région, il faudra envisager nécessairement que
l'application individuelle comme dans le cas de la plupart des ententes
négociées soit assortie d'un pouvoir, d'un droit à
l'arbitrage dans des cas particuliers. C'est dans cet esprit que j'ai
donné cette indication.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, je m'excuse d'abord auprès du
ministre. C'est la première apparition que je fais, en ce qui concerne
le projet de loi 93. Je n'ai pas eu l'occasion de suivre les autres travaux,
mais cela me saute aux yeux. J'arrive au moment où on parle de l'article
8 et, si mon interprétation est bonne le ministre me dira si elle
est bonne ou non j'ai l'impression que c'est par ce moyen qu'on tente de
favoriser la venue de médecins dans des régions plus
éloignées, qui sont aux prises avec de graves problèmes
d'ordre médical. Est-ce que je comprends bien?
M. FORGET: C'est un moyen parmi d'autres.
M. SAMSON: Parmi d'autres.
M. FORGET: Je le mentionne avec réticence, mais,
évidemment, c'est une discussion qui a eu lieu au début de
l'après-midi où j'ai indiqué qu'en plus de ce moyen, il y
en avait trois autres que nous mettions en oeuvre également par cet
amendement, relativement à des bourses comportant un engagement de
pratique dans des régions éloignées, mais les deux autres
émargeant à d'autres considérations et n'exigeant pas
d'être consacrés dans un texte de loi.
Pour votre bénéfice, je peux mentionner brièvement
qu'il s'agit, d'une part, d'un mécanisme d'incitations à la
pratique de groupe, dans des endroits désignés, comportant une
garantie de rémunération équivalente ou égale, si
vous voulez, à celle qui est susceptible d'être gagnée dans
des régions urbaines.
Le quatrième moyen n'est pas une incitation, mais il s'agit de
chercher, en collaboration avec les organismes régionaux des Affaires
sociales, à aplanir les difficultés d'établissement dans
des régions éloignées, alors qu'une personne, qui y va
initialement pour une période de temps limitée, est parfois
forcée de s'installer comme si elle devait y rester jusqu'à la
fin de ses jours et d'assumer des obligations, soit l'achat d'une maison, par
exemple, ce qui crée une certaine insécurité.
M. SAMSON: Je vois que le ministre a eu des consultations avec le
Collège des médecins.
M. FORGET: Nous en avons eu, en effet. Nous en avons continuellement
avec les organismes qui sont actifs dans le secteur.
M. SAMSON: M. le Président, c'est évident que je ne serai
pas contre des mesures qui inciteront davantage les professionnels de la
santé à se rendre dans des régions
défavorisées. Mais le ministre ne trouve-t-il pas que l'article 8
apporte quand même un certain risque? Je n'ai pas l'impression que cela
va tellement aider. Quand on parle de mesures incitatives pour amener des
médecins dans les régions éloignées, je pense que
c'est positif. Mais une mesure coercitive, dans le genre de celle qui est
préconisée à l'article 8, n'amènerait-elle pas des
chasses gardées dans des régions plus favorisées, dans le
sens qu'on assisterait peut-être à une espèce de
création de clubs privés, dans le genre des clubs privés
de chasse et pêche, où il faut avoir passé le
troisième degré avant de pouvoir être admis.
Je me demande si cet article n'arrivera pas, à un moment
donné, à créer une espèce de chasse gardée,
ou un club fermé; ce serait une mesure qui obligerait tous les nouveaux
à aller ailleurs, parce qu'il n'y aurait pas de place dans des
régions qui sont peut-être plus favorisées. Je me demande
si ce genre de mesure n'est pas un peu sévère. C'est
évident que cela entrave la liberté de pratique. On me dira que,
du côté médical, il y a peut-être eu certaines
exagérations aussi. Je suis bien prêt à en convenir. Mais
je pense que, de ce côté, il y a quand même le fait que la
majorité du corps médical est de bonne foi. Ce sont des gens qui
ont quand même fait leurs preuves. Mon impression est que nous n'avons
pas besoin de mesures aussi sévères que celles-là pour
fermer des territoires, parce que, en quelque sorte, ce serait fermer un
territoire où la population aurait peut-être besoin
même une région centralisée de plus de
professionnels de la santé que ceux qui seraient autorisés, en
vertu des ententes.
Je pense que c'est subordonner le service médical à la
population à des décisions administratives. J'ai un peu
l'impression que cela pourrait peut-être se faire dans d'autres domaines,
mais, dans le domaine de la santé, cela me fait peur. Je vous avoue bien
franchement... J'avertis le ministre immédiatement. Mon intention n'est
pas de lui faire un "chiard", ce n'est pas de faire du "filibuster", non. Ce
serait le deuxième ce soir, il y en a un autre ailleurs. Là n'est
pas mon intention. J'ai l'impression que c'est un peu trop
sévère. J'aimerais l'entendre dire qu'il y a peut-être un
moyen d'avoir un amortisseur.
M. FORGET: Je vais malgré tout préfacer ma réponse
en renvoyant le député de Rouyn-Noranda à notre discussion
de cet après-midi, où nous avons déjà,
malgré tout, largement abordé cette question.
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais tout de suite rassurer le
ministre. Je ne voudrais pas exiger de lui qu'il reprenne toute la discussion
de cet après-midi. Au contraire. Je suis satisfait de voir qu'il y aura
des mesures incitatives pour tenter de régler ce problème. Quant
à cette partie, il n'y a pas de problème, quant à moi,
mais c'est seulement en ce qui concerne l'article 8, que je considère
comme une mesure restrictive et qui obligerait des professionnels de la
santé à aller pratiquer ailleurs, parce qu'il n'y a pas de place
pour eux. Une fois que les ententes seront prises et que les rangs seront
remplis, il n'y aura pas de place. A ce moment, c'est une entrave directe
à la liberté d'un individu. C'est ce que je n'accepte pas. C'est
pourquoi je demande au ministre s'il n'y aurait pas un moyen, quitte à
suspendre l'article et à passer plus loin, de regarder cela pour amortir
ce coup, parce que, en bon "Canayen", je le trouve raide!
M. MORIN: Evidemment, M. le Président, il s'agit d'ententes. Ces
ententes ne sont pas encore conclues.
M. FORGET: Non.
M. MORIN: Elles vont même, si mon intuition est juste, être
passablement difficiles à conclure dans les villes. Elle ne sont pas
encore
conclues. Je ne sais pas si c'est de nature à rassurer ce
n'est pas à moi à faire la besogne du ministre mais je me
demande si le député de Rouyn-Noranda ne serait pas
rassuré à l'idée qu'il s'agit d'ententes à
conclure, donc à débattre, donc à négocier avec les
fédérations.
M. SAMSON: M. le Président, cela ne me rassure pas. Quand on
constate qu'il est nécessaire d'inclure dans un projet de loi qu'il
faudra faire des ententes, cela ne me rassure pas du tout. Je me rappelle le
bill 8, vous savez, où on parlait d'ententes, à un certain
moment, on s'est ramassé avec une grève de médecins au
Québec. C'est parce que les ententes étaient difficiles, mais les
ententes étaient obligatoires en vertu de la loi. Ce qu'on fait
présentement, on dit: II y a des ententes, mais on vous oblige à
les faire.
On a quand même l'expérience que, quand c'est entré
dans la loi, vous savez que c'est dur à ressortir.
M. FORGET: M. le Président, ceci est une clause permissive. Elle
n'est pas du tout impérative, elle n'oblige personne à faire quoi
que ce soit contre son gré et il ne faut pas en exagérer la
portée. J'ai indiqué, cet après-midi que nos
facultés de médecine du Québec mise à part
l'immigration de médecins qui a toujours constitué au
Québec une source d'approvisionnement fort importante, si l'on peut
employer cette expression produiront bientôt, si l'on peut aussi
employer cette expression, quelque 800 médecins par année. Il est
clair que l'effet, de quelque entente que ce soit, ne peut pas être de
bloquer l'accès des médecins à quelque région que
ce soit, si bien pourvue soit-elle en médecins maintenant, puisque cela
consisterait à inonder littéralement de médecins, dans
l'espace d'un an ou deux, des régions qui sont actuellement moins bien
pourvues. Ce n'est donc pas le statu quo ou la rigidité qu'on a
allégués, mais c'est une mesure qui deviendra de plus en plus
nécessaire que de se concerter sur la venue, dans un réseau de
distribution de services où il y a une complémentarité que
tout le monde connaît, mais qui n'est cependant pas tellement reconnue
dans la loi ou dans nos institutions entre les services médicaux et les
services hospitaliers.
Or, la venue de 800 médecins, pour qui les hôpitaux sont
indispensables et qui sont indispensables aux hôpitaux, mais qui peuvent
se diriger n'importe où, actuellement, sans aucune espèce de
concertation possible, même par entente, et à plus forte raison
par directives ou par réglementation, pose des problèmes de
coordination très importants puisqu'ils peuvent et cela se
produit c'est une réalité que nous vivons maintenant
arriver en très grand nombre dans un endroit et dans un centre
hospitalier qui n'est pas du tout préparé pour en recevoir un si
grand nombre et qu'ils ont à faire face en conséquence, à
des difficultés de pratiquer, de façon convenable et dans des
condi- tions convenables. Il y a donc des problèmes d'abondance, il y a
des problèmes de pénurie. C'est essentiellement dans le but de
trouver par des ententes et par des ententes qui ne visent pas les individus,
qui n'embrigadent pas des individus, mais qui s'adressent à créer
un cadre dans lequel les individus pourront faire des choix, continueront
à faire des choix, continueront à prendre des orientations en
fonction de leurs inclinations individuelles, mais qui auront, malgré
tout, un cadre, peut-être moins largement ouvert que celui qui existait
en l'absence de telles ententes, mais qui ne sera, malgré tout, pas
coercitif au point d'obliger tel individu à aller à tel endroit,
sous peine de crever de faim. Ce n'est pas du tout ce qui est envisagé,
ce n'est pas du tout ce que nous chercherions à réaliser par les
ententes. Je suis persuadé que ce n'est pas du tout le genre d'ententes
que les fédérations médicales ou quelque groupe que ce
soit, d'ailleurs, dans l'ordre professionnel, pourraient consentir à
accepter comme...
Mais c'est une concertation qui devient nécessaire, étant
donné les grands nombres impliqués et l'incidence
inévitable de l'accès aux hôpitaux pour la pratique
médicale et de la disponibilité des médecins pour le
fonctionnement des hôpitaux.
Nous avons maintenant une situation où nous devons réagir
après coup à des décisions qui n'ont donné lieu
à aucune consultation préalable, qui se font dans une
liberté totale, sans aucun doute, mais qui n'est pas sans coût,
cette liberté. Nous voulons chercher par une concertation à
limiter les coûts inhérents au maintien d'un régime qui
soit aussi libéral que possible, c'est-à-dire qui permette autant
que possible et dans une très large mesure, un exercice de choix
autonome de la part des médecins impliqués.
Mais cela n'implique pas non plus cette liberté, qu'ils le font,
totalement, sans cadre. On peut convenir d'un cadre qui permettra de
remédier, d'une part, aux pénuries et, d'autre part, à des
crises d'abondance subites que certaines régions ou certains
établissements peuvent connaître et qui causent en soi des
problèmes de fonctionnement et des problèmes de pratique
professionnelle.
Je pourrais donner des exemples particuliers, mais je m'en abstiendrai
parce que ce serait peut-être cité hors contexte et pourrait
être mal interprété. Mais, il y a de ces problèmes
qui existent. Je pense bien que tout le monde dans ce secteur est à peu
près familier avec leur nature, et comme je l'ai indiqué, dans
ces ententes, qui seront librement consenties, qu'il n'est pas question
d'imposer, il n'y a pas de pouvoir réglementaire rattaché
à cette disposition de la loi. Nous prévoyons aussi qu'il y aura
des possibilités pour un individu qui se croirait indûment
contraint par l'application de ces ententes, de faire un appel à un
arbitre, de manière qu'il puisse exposer les raisons pour lesquelles les
règles ainsi consenties, par son association représentative, ne
devraient pas dans
un cas particulier s'appliquer avec toute leur force ou ne pas
s'appliquer du tout, dans son cas particulier. Mais je pense que cette mesure
est susceptible de donner la flexibilité nécessaire dans des cas
individuels, tout en permettant de s'entendre et de se concerter sur des
développements extrêmement importants, au niveau de
l'accessibilité accrue des services médicaux.
C'est le Collège des médecins lui-même, d'ailleurs,
qui l'a démontré que, durant les trois ou quatre prochaines
années, le nombre de médecins au Québec s'accroîtra
de quelque 20 p.c. alors que la population ne s'accroît que de 3 p.c. ou
5 p.c. Enfin, c'est un multiple très considérable de
l'accroissement de la population générale. Ce qui fait que le
rapport entre les médecins et la population va se modifier très
substantiellement et qu'il n'est que sage que les organismes qui
représentent ces professionnels et le gouvernement qui contrôle
par ses budgets où vont les ressources dans le secteur hospitalier,
puissent s'entendre un peu à l'avance sur la direction et le sens qui
doit être donné à ces développements
extrêmement rapides.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Gaspé.
M. FORTIER: M. le Président, je comprends que le principe de la
loi, c'est que tous les citoyens aient accès aux services de
santé. Maintenant, je voudrais bien qu'on précise, comme
député, comme médecin, comme d'autres de mes
confrères ici, la situation du médecin qui, après une
entente, doit aller pratiquer dans un territoire éloigné, parce
qu'il y manque de médecins. J'ai bien compris que, s'il refuse, il a
droit à un arbitrage qui sera soumis à la corporation
professionnelle des médecins. Est-ce que c'est cela que le ministre a
dit?
M. FORGET: C'est l'indication que j'ai donnée de façon
assez claire tantôt. Je pense que nous ferons en sorte qu'il y ait une
possibilité d'arbitrage, devant un arbitre qui pourrait être
désigné par la corporation professionnelle et qui pourrait
être désigné à même une liste fournie par la
corporation professionnelle ou en consultation avec la corporation
professionnelle. Il faudra évidemment les consulter sur la formule
à préférer là-dessus, mais il pourrait justement
être entendu et voir l'application de cette entente qualifiée ou
interprétée en fonction de faits qu'il peut alléguer.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Je crois que ce que vous venez
d'énumérer, ce serait déjà ce pouvoir d'appel d'une
décision rendue pour l'individu qui serait obligé de s'expatrier.
C'est certainement une garantie. Je comprends très bien que le
ministère a certainement conclu à cette date, une entente avec
les représentants syndicaux des diverses corporations professionnelles,
mais puisqu'on s'entend en principe pour que chaque individu ait un droit
d'appel, pour quelle raison ne le met-on pas dans la loi, puisqu'on semble,
à ce stade-ci, en faire une condition sine qua non d'une entente
future?
M. FORGET: Je pense, M. le Président, que sur un point comme
celui-là, il y a une question peut-être de forme qui est assez
importante, c'est que, lorsque la loi prévoit une entente, il est
peut-être inélégant pour dire le moins, et peut-être
davantage, de dire à quelles conditions l'entente sera conclue.
Je crois que l'affirmation qui en est faite en commission parlementaire
indique clairement l'intention et une des modalités importantes qui sera
retenue par le gouvernement dans la conclusion de telles ententes. Je crois
préférable au déroulement des discussions qui peuvent
précéder une telle entente, de ne pas contraindre dans la loi,
mais indiquer simplement l'intention d'une des parties, de la façon que
je l'ai fait, plutôt que de préjuger dans la loi, puisqu'à
ce moment-ci, nous tomberions peut-être dans ce qui est parfois
reproché au gouvernement, savoir, d'envisager des ententes et de
préciser dans la loi qui les permet ou qui les autorise, leurs
conclusions. C'est peut-être seulement, une question de forme, mais c'est
une question de forme qui a son importance, de prévoir, d'une part, dans
la loi des ententes, mais d'indiquer dans un cadre qui n'est pas strictement
légal, mais qui est suffisamment solennel pour mériter
créance que... voici l'intention avec laquelle, dans le cadre
prévu par la loi, nous allons aborder cette discussion et
l'élaboration de ces ententes.
Je pense qu'agir autrement serait faire un précédent qui
pourrait être dangereux, que dans tous les cas où une loi parle
d'une entente, nous serions amenés pour des considérations
parfois extrêmement justifiables et valables à dire: Oui, mais
quand nous concluerons cette entente, il devra y avoir comme clause 1, 2 et 3.
Je pense que ce serait un précédent peut-être regrettable
à créer. Mais je n'ai pas hésité à indiquer
que c'était là une chose qui était, non seulement tout
à fait possible de considérer, mais qui allait de soi, à
notre avis, qu'une entente prévoie un arbitrage. D'ailleurs, toutes les
ententes normalement, prévoient des possibilités d'arbitrage.
C'est la règle générale.
Comme c'est la règle générale, et comme il y a une
affirmation assez claire que nous avons l'intention de respecter la
règle générale là-dessus, je pense que c'est une
précaution suffisante.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, je suis encore moins rassuré
que je ne l'étais au début. Plus
cela va, moins je suis rassuré. Tout d'abord, j'ai bien saisi que
le ministre a tenté de nous faire comprendre que ce genre d'entente,
selon lui, ne viserait pas à obliger un professionnel de la santé
à aller pratiquer dans un tel endroit particulier. J'ai bien compris
cela. Mais, par contre, il demeure que, si cela n'oblige pas un professionnel
de la santé à aller pratiquer dans un endroit particulier, cela
peut l'empêcher de pratiquer dans un endroit particulier, ce qui,
à toutes fins pratiques, peut revenir à peu près au
même. Autrement dit, vous vous limitez par l'article 8. Vous limitez le
choix par un genre d'entente qui établirait un maximum sur un territoire
donné. Cela ne veut pas dire qu'on va pousser quelqu'un quelque part.
Mais si on l'empêche d'aller là où c'est normalement plus
populaire de pratiquer, c'est bien sûr que cela va le pousser
peut-être pas là où il ne veut pas aller, directement, mais
peut-être que vous allez limiter par ce fait, le choix, la liberté
de choix du professionnel pratiquant. C'est pourquoi je suis allergique
à cela.
Au pis aller, si on dit qu'il n'y a pas moyen de faire autrement parce
qu'il y a d'autres considérants, je suis bien prêt à les
considérer ces considérants, mais à ce moment je le
dis encore une fois, c'est au pis aller il faudrait tout au moins que le
droit d'appel dont il est question paraisse quelque part.
Parce que, bien sûr, il ne s'agit que d'une possibilité
d'entente, mais c'est une loi, M. le Président, qu'on vote ici. C'est un
chèque en blanc qu'on donne, que l'Assemblée nationale va donner.
C'est un chèque en blanc pour conclure des ententes. Moi aussi, je
n'aime pas cela quand on dit qu'on pourrait conclure des ententes, donner des
conditions à l'avance, mais je ne trouve pas comme une condition, un
droit d'appel. Je trouve que c'est un droit. Alors si on considère que
c'est un droit, parce que ces ententes, il y a des gens qui y seront
assujettis, bien entendu, si l'entente est faite avec un établissement
quelconque, dans un territoire quelconque, les représentants de
l'établissement ne seront pas ceux qui seront directement assujettis
à l'entente. Ils n'ont pas besoin d'un droit d'appel,
ceux-là.
Mais les professionnels de la santé, qui seront quand même
les seuls à être assujettis à ces ententes, eux auront
sûrement besoin de ce droit d'appel un jour ou l'autre parce que, sur
quelles bases choisira-t-on les plus méritants pour aller dans les
territoires les plus populaires? Je pense qu'on doit penser à
ça.
Tout le monde est humain. Il s'agira d'arbitraire à ce
moment-là. Ce n'est quasiment pas possible que cela se fasse autrement.
Les normes, les barèmes... Dans des conditions comme ça, vous
faites affaires avec de l'humain, vous ne faites pas affaires avec des
chiffres.
Alors, il faudrait que quelqu'un prenne une décision un jour en
se basant sur un jugement quelconque. Cela va être extrêmement
difficile. Je pense qu'on peut le prévoir à l'avance. Il y aura
probablement plusieurs professionnels de la santé qui sentiront avoir
subi des préjudices par une décision qui découlera de
cette entente, un jour ou l'autre.
Alors, si on ne peut pas nous dire qu'il y a une possibilité de
réviser ça pour qu'on puisse agir sans cette entente, si ce n'est
pas possible je suis bien prêt à accepter que vous ayez des
contraintes tout au moins, qu'on ajoute quelque chose pour que le
professionnel de la santé sache qu'il y aura une protection minimale. Je
pense que, M. le Président, on reconnaît
généralement et universellement un droit d'appel partout. Le
ministre d'ailleurs l'a reconnu lui-même tantôt. Il l'a dit, c'est
courant, il n'y a pas de problème, on le dit à la commission
parlementaire. C'est monnaie courante. Oui. Si c'est monnaie courante, si on
n'a pas peur de le dire en commission parlementaire, je pense qu'il serait
utile que nous l'écrivions dans le projet de loi pour rassurer les gens,
d'abord qu'on sait que c'est monnaie courante et que c'est normal.
Alors, cela ne veut pas dire de donner des directives à ceux qui
prendront des ententes. Cela veut dire que tout professionnel de la
santé assujetti à toute entente sera protégé par un
droit d'appel. Quelle que soit la phraséologie, faites-la
autrement...
Mon point de vue, c'est qu'on devrait spécifier, à
l'article 8, peut-être en ajoutant que tout professionnel de la
santé, qui serait assujetti à ces ententes, sera
protégé, devra être protégé par un droit
d'appel. Ne spécifiez pas le droit d'appel. Je pense qu'il serait
raisonnable qu'on laisse quand même la latitude, à ceux qui auront
à faire les ententes, de placer le droit d'appel suivant les
circonstances. Mais qu'on dise au moins, pour rassurer ces gens, qu'il y aura
un droit d'appel. Il prendra la forme que cela voudra, mais ce sera un droit
d'appel. C'est un droit universellement reconnu.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Frontenac, sur le même sujet, je crois.
M. LECOURS: Sur le même sujet, disons que la FMOQ, la FMSQ, qui
ont le devoir de défendre l'intérêt des professionnels
concernés, sont d'accord sur l'article 8. Maintenant, je pense que
l'ordre des médecins a le devoir de protéger
l'intérêt de la population en général.
Le Collège des médecins, présentement, demande
seulement de changer un mot. Il demanderait de changer, dans la phrase:
"établir une procédure ayant pour effet de déterminer le
nombre de professionnels"... Il voudrait mettre, à la place de
"déterminer", le mot "distribuer". J'aimerais connaître les
commentaires du ministre.
UNE VOIX: Comment dites-vous ça?
M. LECOURS: Le Collège des médecins demanderait de changer
le mot "déterminer"
pour le mot "distribuer". Il serait prêt à accepter
l'amendement à l'article no 8, comme il est là.
M. FORGET: M. le Président, c'est une question que j'ai
discutée moi-même avec les représentants du Collège
et ils ont admis, après discussion, que, dans le fond, c'était la
même chose. Je pense qu'on peut changer des mots comme ça
éternellement mais que, finalement, cela ne change pas la substance de
la question.
Pour ce qui est du problème que soulève, après
d'autres, le député de Rouyn-Noranda, je pense que, malgré
ses protestations, il reste qu'il va nous obliger à reprendre le
débat de cet après-midi. Mais, malgré tout, je vais
essayer de me retenir de le faire, de le référer plutôt
à ce qui a été dit cet après-midi et de
réitérer que nous parlons d'une entente avec des associations qui
ont pour but de protéger leurs membres.
Nous parlons également, peut-être pas dans le projet de
loi, d'une possibilité d'appel, sur laquelle il est difficile de statuer
dans la loi, peut-être même sur un plan purement juridique, quoique
je ne veuille pas faire reposer mon argument sur un point juridique dont je ne
suis pas certain. Il me semble curieux de prévoir dans une loi un appel
d'une entente qui n'existe pas encore, puisque c'est une espèce de
disposition presque vide, tant qu'on n'a pas précisé ce dont on
veut en appeler. Quand l'entente sera négociée, il sera
très clair que l'entente prévoit telle ou telle chose qui peut
s'appliquer de telle ou telle manière. A ce moment, il est plus clair
qu'on peut en appeler de l'application de telle ou telle clause. Comme je l'ai
dit, il est normal de prévoir un arbitrage dans l'application de
n'importe quelle entente. Ce sera fait, mais c'est une certaine
déclaration qui, dans une loi, serait un peu vide de sens, puisqu'elle
ne porterait sur aucun contenu défini. Je pense que l'intention,
formellement exprimée de voir une entente qui soit une entente et donc
qui soit librement négociée et qui comporte une telle clause, est
largement suffisante pour assurer que son application ne sera pas
discriminatoire.
Il est évident que quand le député de Rouyn-Noranda
nous dit: S'il y a des ententes et qu'elles s'appliquent, évidemment
tout ne sera pas possible. C'est essentiellement ce qu'il nous dit. Je suis
d'accord avec lui que tout ne sera pas possible. C'est le rôle de
n'importe quelle loi ou de n'importe quelle entente de limiter le domaine du
possible. D'un autre côté, s'il convient avec moi qu'il y a des
régions qui souffrent d'une pénurie relative de services
médicaux, il conviendra aussi que les médecins ne peuvent pas
être partout en même temps. S'ils sont dans le Nord-Ouest du
Québec, ils ne pourront pas en même temps être dans les
Cantons de l'Est. S'il n'admet pas cette implication, je pense qu'il n'admet
pas éventuellement que l'on puisse envisager de solutions à ce
problème. Sans aucun doute, il a attiré notre attention sur des
mesures incitatives. Je lui ai indiqué que les mesures incitatives
faisaient partie de notre démarche, mais rien ne nous dit que les
mesures incitatives que nous envisageons et qui ne peuvent pas d'ailleurs
s'appliquer de façon indistincte à la solution de tous les
problèmes, mais qui peuvent s'appliquer dans des régions
véritablement assez spéciales, ne pourront pas
nécessairement résoudre tous les problèmes, et les
problèmes qu'une région dont celle dont il est originaire
pourrait éprouver relativement à cette question de
disponibilité des services médicaux.
A moins d'avoir une concertation plus large qui ne vise pas seulement
des situations d'exception, comme les villes minières isolées,
etc. qui peuvent très clairement être désignées dans
le cas de l'application d'un programme de bourses conditionnelles ou dans le
cas d'un régime d'incitation à la pratique de groupe dans des
régions éloignées, à l'exception de ces
régions, il va rester des problèmes et il va rester des
problèmes même dans les centres urbains, problèmes que j'ai
discutés plus longuement et sur lesquels je ne reviendrai pas, cet
après-midi. Pour résoudre ces problèmes, il va falloir que
les parties impliquées, le gouvernement, d'une part, et la profession
médicale, d'autre part, trouvent des moyens de s'en parler, trouvent des
moyens de se mettre d'accord sur leur solution, parce que, dans ce domaine
comme dans les autres, il n'y a pas de main invisible, si vous voulez, qui va
assurer une solution idéale sans une quelconque concertation. Si nous
voulons préserver les caractéristiques essentielles de la
distribution des soins médicaux, la liberté professionnelle, la
liberté du professionnel dans la plus large mesure possible, il faut
quand même assortir l'exercice de ces libertés d'un certain sens
des responsabilités de part et d'autre et d'une certaine volonté
de s'entendre sur la solution de problèmes concrets. C'est ce à
quoi cet article nous invite. Il ne nous invite pas à
décréter par arrêté en conseil les distributions de
professionnels, c'est un pouvoir dont nous ne voulons pas. Je crois que si nous
avons cette possibilité et si nous l'assortissons comme nous avons dit
que nous l'assortirions des garanties pour les individus de ne pas être
injustement traités, je crois que nous pourrons aborder la solution de
ces problèmes et voir à l'expérience si nous n'avons pas
là la clef de leur solution.
Je suis convaincu, pour ma part, qu'avec les mesures qui l'accompagnent,
et non pas isolément, nous avons là effectivement une solution ou
l'esquisse, la possibilité d'une solution. Ceci, sans abroger quelque
droit fondamental que ce soit.
D'ailleurs, je pense qu'à l'expérience dans ce domaine
comme dans d'autres domaines, on verra que ce n'est pas si malin que cela et
que cela ne va pas si loin que certains pourraient le craindre au
départ. Encore une fois, nous abordons une période d'abondance,
de croissance rapide des effectifs médicaux, et, au sein de
cette abondance, il est possible de satisfaire à peu près
tout le monde et de satisfaire en même temps la réalisation
d'objectifs sociaux extrêmement importants comme l'accessibilité
aussi égale que possible aux soins médicaux.
M. SAMSON: J'ai une question à poser au ministre, M. le
Président. Je suis d'accord que l'entente n'est pas conclue et qu'on est
un peu dans l'abstrait, je suis d'accord sur cela. Mais l'inquiétude que
j'ai voulu manifester, c'est un peu le fait de ne pas savoir quelle sera
l'entente qui m'a amené à m'inquiéter et à demander
quels seront les moyens à la disposition de ceux qui seront assujettis
aux ententes.
Est-ce que le ministre est en mesure ce soir de nous dire, tout en
voulant laisser libre cours à ces ententes à venir, si, advenant
qu'après entente, il y ait, de la part de la corporation professionnelle
médicale, une insatisfaction qui découlerait de ce manque de
droit d'appel, qu'il y aura à ce moment une possibilité qu'une
commission parlementaire soit convoquée pour discuter de nouveau de ce
cas du droit d'appel? Cela, ce n'est pas nécessaire de le mettre dans la
loi. Si le ministre nous donne sa parole, on va la prendre. Mais ce que je veux
dire c'est de laisser libre cours aux ententes, laissons la chance à
tout le monde de prendre les meilleures ententes possible. Si, une fois que
c'est fait, il y a insatisfaction de la part des médecins sur la demande
de la corporation professionnelle il ne faudrait pas que cela vienne de
tout le monde, des individus en particulier, mais à la demande formelle
de la corporation professionnelle qu'il y ait une commission
parlementaire qui nous permette de regarder le dossier ensemble.
Est-ce que le ministre serait en mesure de pouvoir nous
réconforter un peu dans ce sens?
M. FORGET: Je n'ai pas d'objection à une idée comme
celle-là, puisque je vous dis que ce seront des ententes qui seront
librement consenties, qu'elles comporteront des droits à un arbitrage
par des experts indépendants, si vous voulez, et je suis convaincu que
tout ceci devrait précéder l'expression d'une insatisfaction,
puisqu'il faudra bien voir les choses avant d'exprimer une insatisfaction. Je
n'ai absolument pas d'objection à ce que si jamais il y avait des
difficultés de parcours sérieuses, et que l'Assemblée
nationale juge, à ce moment, qu'il est opportun de convoquer une
commission parlementaire, personnellement, je n'ai certainement aucune
objection à ce qu'on fasse, à ce moment, la lumière sur
les sources et les raisons d'une telle insatisfaction.
M. SAMSON: M. le Président, c'est évident que ce n'est pas
l'Assemblée nationale qui devrait déterminer qu'il y a
insatisfaction et que cela prend une commission parlementaire. Je pense que
c'est le ministre qui est le mieux placé pour le savoir, advenant qu'il
y ait insatisfaction. Je présume qu'il n'y en aura pas, j'espère
qu'il n'y en aura pas. Mais advenant qu'il y en ait, je pense que celui qui est
le mieux placé pour demander la convocation de la commission
parlementaire, c'est le ministre.
Evidemment, par la voie normale de notre règlement, le
règlement de l'Assemblée nationale, sur demande du ministre, cela
se fait, il n'y a pas de problème. Mais ce que j'ai voulu faire
ressortir davantage, c'est qu'on devrait s'entendre au moins sur l'organisme
qui devrait être l'interlocuteur pour nous dire qu'il y a insatisfaction.
Je ne voudrais pas que ce soit un député, je ne voudrais pas que
ce soit un individu. Une fois que les ententes sont passées, si la
corporation professionnelle demande une commission parlementaire au ministre
parce qu'il y a insatisfaction, c'est dans ce sens que je dis: Est-ce que le
ministre est prêt à nous dire: Oui, sur telle demande, on le
fera?
M. FORGET: M. le Président, je pense que le député
de Rouyn-Noranda ne s'attend pas à ce que je fixe la date de la
convocation ce soir. Mais, pour être sérieux...
M. SAMSON: Non, écoutez. M. le Président, je pense que le
ministre veut commencer à me charrier. Il se retient et moi aussi, je me
retiens un peu.
M. FORGET: J'ai indiqué que je n'avais pas d'objection. Il est
normal, le député de Rouyn-Noranda et les autres membres de la
commission comprendront, que je ne peux pas me lier d'avance à une chose
aussi importante que la convocation d'une commission parlementaire à
moins d'assortir cette indication que je n'ai aucune objection de principe
à ce que, s'il y a une objection sérieuse, si il y a une
difficulté sérieuse, nous la convoquions. Mais l'affirmation que
je fais là-dessus aussi doit être prise à sa face
même que je n'ai véritablement aucune objection de la convoquer
moi-même le cas échéant, mais je voudrais me satisfaire que
le problème soumis est d'une importance commensurable avec le moyen pris
pour éclaircir la question. C'est une précaution minimale que je
dois prendre tout en réaffirmant qu'il est évident que s'il y a
une difficulté sérieuse qui est soulevée, par exemple, par
la corporation professionnelle, sans exclure nécessairement d'autres
sources, mais en donnant, bien sûr, l'importance qu'elle mérite
à la corporation là-dessus, pour nous signaler des
difficultés, alors que c'est une chose qui dans des circonstances comme
celles-là devrait aller de soi...
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Vanier.
M. DUFOUR: M. le Président, je voudrais que ce soit bien clair
dans mon esprit. Je veux demander au ministre si, quand il parle des
professionnels de la santé, cela touche tous les professionnels de la
santé, autant les pharma-
ciens que les techniciens de la santé, par exemple, les
techniciens en laboratoire, tous ceux qui sont dans une corporation.
Parce que quand on parle de professionnels, on les a identifiés
depuis le début avec les médecins, mais il n'y aura pas seulement
les médecins. Quand vous avez rédigé votre loi, vous avez
bien pensé, en disant professionnels, que c'étaient tous les
professionnels de la santé. Vous avez parlé des infirmiers, vous
avez parlé des techniciens en laboratoire, en radiologie, des dentistes,
optométristes, d'autres etc. Il faut bien que vous mettiez cela clair
dans la...
M. FORGET: C'est un amendement à la Loi de l'assurance-maladie et
non pas un amendement ou une disposition de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux. Donc, cela ne vaut que pour les
professionnels soumis à l'application de la loi. Bien sûr, les
pharmaciens, les optométristes et les dentistes, mais seulement dans la
mesure où ils sont impliqués dans le régime. Mais comme on
le sait, dans le cas de tous les professionnels autres que les médecins,
leur participation au régime n'est que partielle, étant
donné qu'ils n'ont pas une pratique qui est universellement couverte par
le régime d'assurance-maladie.
M. DUFOUR: A ma connaissance, il manque autant de dentistes dans la
région de l'Abitibi qu'il peut manquer de médecins. C'est pour
cela que je vous dis que nécessairement en parlant de professionnels, je
voudrais que ce soit clair que cela touche autant les dentistes, les
pharmaciens, ceux qui sont payés par l'assurance-maladie.
M. FORGET: Oui, c'est cela.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le nouvel article 8 est adopté. Donc,
l'ancien article 8 du bill 93 est retiré pour faire place à
l'article 8 qu'on vient d'adopter. Article 9, adopté?
M. MORIN: Un instant, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Sauvé.
Rémunération
M. MORIN: A l'article 9, je m'interroge sur les sanctions que vous vous
proposez d'appliquer à ceux qui contreviendront à cet article. On
ne propose ici pour toute sanction qu'une amende qui va croissant s'il y a
récidive et qui demeure tout de même une amende. Or, à
moins que je ne me trompe, l'article 9 peut s'appliquer à des fraudeurs
professionnels dont le revenu risque d'être très
élevé et pour qui l'amende pourrait bien n'être pas cet
empêchement complet.
Ces gens, semble-t-il, ne perdraient pas leur droit de pratique. C'est
une question qui relève de l'ordre des médecins du Québec.
Est-ce qu'on ne pourrait pas envisager d'autres types de sanctions? Je devrais
peut-être poser deux questions. La première serait la suivante:
Est-ce que le ministre a des données sur le nombre de ces cas de fraude?
Ce serait ma première question. Deuxièmement, est-ce qu'on ne
pourrait pas envisager des sanctions autres que l'amende comme, par exemple, la
perte de statut, la disqualification, la plainte à l'ordre?
M. FORGET: Oui. Ecoutez, je pense que je devrai préfacer ma
réponse pour expliquer pourquoi cet amendement est apporté.
L'amendement intervient, premièrement, pour compléter une
disposition actuelle de la loi, l'article 18, qui a été
éprouvée devant les tribunaux et qui a été
jugée déficiente. Elle a été jugée
déficiente puisque, dans sa rédaction actuelle, le tribunal a
estimé que demander une rémunération pour un service qui
n'est pas fourni ne constitue pas une infraction et, ne constituant pas une
infraction, aucune pénalité ne peut être imposée. Ce
jugement de la cour est basé sur le fait qu'une infraction d'ordre
pénal doit être indiquée comme telle dans l'article qui
décrète l'infraction. On doit dire: Ceci est une infraction. Or,
l'article ne disait pas que ceci était une infraction, donc le tribunal
a dit: C'est un fait malheureux, mais ce n'est pas une infraction.
M. MORIN: Le tribunal avait raison.
M. FORGET: Le tribunal avait raison, c'est la raison pour laquelle nous
introduisons cet amendement. Il ne s'agit pas de cas de fraude,
c'est-à-dire dans le sens au moins où les exigences de la preuve
pour la fraude sont beaucoup plus rigoureuses que les exigences de la preuve
pour une infraction pénale seulement. Ce qui ne veut pas dire que, dans
certains cas, bien sûr, il n'y ait pas quelque chose qui s'apparente
à la fraude, mais les exigences de la preuve de la fraude sont telles
et il s'agit d'une offense criminelle qu'il n'est pas toujours
possible de la faire et que, dans les cas où il n'est pas possible de
faire une telle preuve, on en serait réduit, à défaut de
cette disposition, à tout simplement exiger le remboursement. Ce serait
une espèce de poursuite civile demandant un remboursement des sommes
reçues.
Or, il existe des cas qui ne sont pas caractéri-sables comme des
cas de fraude, mais qui sont suffisamment sérieux pour indiquer
l'opportunité d'une amende. C'est le but de cet article. C'est
essentiellement ça. Maintenant, le problème du droit de pratique,
comme vous l'avez indiqué, dépend de la législation
professionnelle et des codes d'éthique. C'est une question qui ne
relève pas du tout de cette loi. Dans quelle mesure quelqu'un qui
est coupable de fraude ou qui est coupable, de façon
répétée, d'une
infraction de cette nature devrait être
considéré, en vertu des codes d'éthique, comme ne devant
plus pratiquer. C'est une question que je laisse aux corporations
professionnelles dont c'est la responsabilité. Il y a évidemment
des opinions personnelles qu'on peut exprimer là-dessus, mais ça
demeure une responsabilité très différente de celle de
l'application de la loi, comme telle. La Loi de l'assurance-maladie
édicte des infractions pécuniaires et je pense qu'il vaut mieux
ne pas confondre les deux lois et laisser cette responsabilité du code
d'éthique là où elle est, quitte à ce que chacun
pour soi juge la façon dont les corporations professionnelles s'en
acquittent. Mais comme on sait, ces corporations professionnelles sont
maintenant en vertu d'une nouvelle loi appelées à
redéfinir leur code d'éthique. Elles adopteront peut-être
des attitudes plus précises à cet égard qu'elles ne l'ont
fait dans le passé. Pour le moment, cela n'a jamais constitué au
Québec, une cause de disqualification.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 9, adopté?
UNE VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Je ne sais pas si je suis dans l'ordre, mais ce ne sera pas
long. C'est un renseignement que je veux demander au ministre. Des plaintes
nous sont parvenues voulant que des gens se seraient vu demander des sommes
d'argent, par des médecins inscrits à l'assurance-maladie, pour
émettre un certificat médical.
Est-ce que cela se fait dans l'ordre?
M. DUFOUR: C'est légal.
M. LECOURS: Ce n'est pas remboursé par l'assurance-maladie.
M. SAMSON: Je sais que ce n'est pas remboursé, mais c'est une
précision que je voulais. Ce n'est pas une accusation que je fais.
M. LECOURS: C'est d'ailleurs écrit sur toutes les formules
maintenant quand on remplit un certificat médical. C'est à la
charge du patient.
M. FORGET: Ce sont des services non assurés. Les services
assurés, dans la conception actuelle des services assurés, ce
sont les services qui sont médicalement nécessaires. Or, un
certificat médical pour fins d'assurance ou d'emploi n'est pas
médicalement nécessaire, donc n'est pas assuré.
Cependant, certaines lois du Québec peuvent exiger la production
d'un certificat médical et, dans certaines circonstances, la
délivrance de ces certificats devient un service assuré.
J'ai eu l'occasion il y a une semaine ou deux, dans le cadre de la
discussion des crédits supplémentaires, de demander à la
Régie d'assurance-maladie de faire l'inventaire des lois du
Québec et du Canada, je crois, qui impliquent des obligations de
certificat médical ou d'examen médical périodique. J'ai
cité comme exemple ceux qui manutentionnent les aliments qui doivent
subir des examens périodiques. Ce n'est qu'un exemple parmi
d'autres.
La régie est à faire un inventaire de ces lois pour nous
permettre d'étudier l'opportunité et les implications qui
pourraient découler d'une extension des services assurés à
ces certificats médicaux exigés en vertu d'une loi quelconque du
Québec.
M. SAMSON: Cela voudrait dire, si je vous comprends bien, que les
certificats demandés par la CAT, par le bien-être...
M. FORGET: Par la CAT, c'est couvert.
M. SAMSON: Par le bien-être social par exemple, c'est un
genre...
M. FORGET: Je crois que c'est couvert également.
M. DUFOUR: C'est couvert parce que, à ce moment-là...
M. LECOURS: On demande un examen.
M. DUFOUR: ... il faut passer un examen. Il faut donner un diagnostic. A
ce moment-là, on fait presque toujours un examen, dans 99.9 p.c. des
cas.
M. FORGET: Les examens préscolaires et les examens d'emploi ne
sont pas couverts. Mais les examens que vous avez cités le sont.
M. SAMSON: Dans ce cas, le cas que j'ai en tête, je vous
l'enverrai.
M. FORTIER: Les chauffeurs d'autobus scolaires.
M. FORGET: Les chauffeurs d'autobus scolaires, c'est actuellement...
non... Il y en a un tel nombre, que c'est un peu la raison pour laquelle on a
fait demander un inventaire, de manière à savoir exactement
où on en est. Il y en a qui sont couverts, il y en a qui ne le sont pas.
Je pense que cette question-là doit être clarifiée.
M. SAMSON: Les cas que j'ai en tête, c'est la Régie des
rentes.
M. FORGET: Non, ce n'est pas couvert.
M. SAMSON: A ce moment-là, lorsque la Régie des rentes
demande un certificat, il faut que le type paie de sa poche.
M. DUFOUR: Je voudrais bien que ce soit
couvert, parce que, si quelqu'un demande des rentes, c'est qu'il est
très pauvre ou il est très malade et, à ce
moment-là, on n'est presque jamais payé. Je dois vous dire que
les médicins font encore la charité.
M. SAMSON: Le cas que j'ai en main, il ne l'a pas fait.
M. DUFOUR: Non, mais il a droit. Je peux peut-être réclamer
2 p.c. ou 3 p.c. des certificats que je remplis.
M. SAMSON: Dans ce cas-là, je termine là-dessus en
suggérant au ministre de vérifier, afin de couvrir ces
cas-là.
M. FORGET: C'est une préoccupation que nous avons et c'est la
raison pour laquelle nous avons demandé l'inventaire et tous les cas
raisonnables, je pense que nous cherchons à étendre la
couverture.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 9, adopté?
M. MORIN: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 9 a).
M. FORGET: M. le Président, j'ai un amendement à l'article
9 a). L'article se lit comme suit: Ajouter après l'article 9, le
suivant: 9 a). L'article 24 a) de ladite loi, édicté par
l'article 10 du chapitre 38 des lois de 1970, est modifié en ajoutant
l'alinéa suivant: Quiconque contrevient au présent article commet
une infraction et est passible, sur poursuite sommaire, d'une amende d'au moins
$500 et d'au plus $2,000 et, pour toute récidive dans les deux ans,
d'une amende d'au moins $2,000 et d'au plus $5,000. Fin de l'amendement.
Il s'agit de la même disposition que l'on retrouve au dernier
alinéa de l'article 9, qui a le même but, celui de prévoir,
encore une fois, spécifiquement qu'il s'agit d'une infraction, et
d'édicter les mêmes pénalités.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Cet amendement est-il adopté?
M. MORIN: Adopté, en ce qui nous concerne.
Comité de révision
LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'article 10, il y avait un amendement:
Ajouter un paragraphe.
M. FORGET: C'est cela. Le paragraphe e) de l'article 10 dudit projet est
remplacé par le suivant: "e) en ajoutant à la fin l'alinéa
suivant: "A défaut par un organisme visé au présent
article de fournir sa liste de noms, le lieutenant-gouverneur en conseil peut
nommer, parmi les membres de cet organisme qui n'y occupent pas une charge
élective ou une charge à plein temps, le nombre de membres du
comité qui doivent être choisis parmi les membres de cet
organisme. Toutefois, le lieutenant-gouverneur en conseil ne peut exercer ce
pouvoir que trente jours après que le ministre a adressé à
l'organisme en cause un avis du défaut de fournir sa liste de noms; tel
avis peut être expédié jusqu'à deux mois avant la
date à laquelle un mandat deviendra expiré".
C'est pour permettre de ne pas faire intervenir ce pouvoir du
lieutenant-gouverneur en conseil sans, en quelque sorte, qu'une mise en demeure
préalable n'ait été adressée par le ministre
à l'organisme en question, puisque, autrement, il pourrait s'agir d'une
simple inadvertance.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'amendement est-il adopté?
Article 10, adopté, tel qu'amendé?
M. MORIN: Oui.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 11, adopté.
A l'article 12, il y a un amendement.
M. FORGET: II y a un amendement. L'amendement est le suivant: Remplacer
l'article 12 par le suivant: "12. L'article 37 de ladite loi est
remplacé par le suivant: "37. La Régie peut accepter la
recommandation du comité de révision et elle doit alors s'y
conformer.
De même, le médecin, chirurgien dentiste ou
optométriste visé par la recommandation peut l'accepter et il
doit alors s'y conformer.
Toutefois, si la Régie ou le professionnel visé ne sont
pas satisfaits de la recommandation, ils peuvent loger à la Commission
des affaires sociales un appel auquel il est donné suite
conformément à la Loi de la Commission des affaires sociales
(1974, chapitre... ici insérer le numéro de chapitre du projet de
loi no 40 qui est actuellement au feuilleton)".
LE PRESIDENT (M. Brisson): Cet amendement est-il adopté?
M. MORIN: Oui, adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 12, adopté, tel
qu'amendé.
M. FORGET: L'article 13 aussi, M. le Président, est
remplacé par le suviant: "L'article 51 de ladite loi est modifié
en ajoutant, à la fin, les alinéas suivants : "La Régie
est tenue de transmettre à toute personne qui réside au
Québec et pour qui elle a payé des services assurés un
relevé indiquant: a) le nom du professionnel de la santé qui les
lui a
fournis; b) les dates auxquelles ils ont été fournis; c)
le montant payé par le Régie pour chaque prestation de services;
et d) la somme totale ainsi payée pour ces services.
Le relevé visé au présent article doit être
adressé au moins une fois par année; toutefois, dans les cas ou
les circonstances déterminés par règlement, il doit
être adressé dans les délais ou aux périodes
fixés par ce règlement.
Le règlement peut en outre indiquer les circonstances dans
lesquelles le présent article ou certaines de ses dispositions ne
doivent pas être appliqués".
M. le Président, l'amendement a pour but de préciser le
sens à donner à cette obligation faite à la régie
et de préciser, en particulier, dans le dernier paragraphe, le dernier
alinéa de cet article, que certaines catégories de services, en
particulier les services dans les cas de gynécologie obstétrique,
par exemple, des services fournis à des mineurs de moins de 18 ans ou
des services et, d'autres cas envisagés, des services de psychiatrie
puissent, par règlement, être exclus de l'application de cette
mesure de manière que des circonstances pouvant gêner un
bénéficiaire particulier ne puissent pas lui être
révélées, même à lui-même, étant
donné les indiscrétions qui pourraient se glisser. C'est
d'ailleurs une restriction qui existe présentement dans les
contrôles qui sont exercés sur des échantillons par la
Régie de l'assurance-maladie où ces services ne font jamais
l'objet de contrôles comme tels sur la base d'un échantillon, du
moins.
M. SAMSON: Cela veut dire que, dans les services ordinaires, le
bénéficiaire recevra annuellement...
M. FORGET: ... adressé à lui personnellement chez
lui...
M. SAMSON: Une copie de...
M. FORGET: ... une copie de ce qu'il a reçu comme services, non
pas les services eux-mêmes, il ne sera pas fait mention des services ou
des actes qui ont été...
M. SAMSON: Des visites par exemple.
M. FORGET: ... la date, le nom du professionnel et le montant qui a
été versé au professionnel à son
bénéfice, seulement cette information; autrement dit, il s'agira
d'un relevé d'honoraires professionnels, un peu comme les patients en
recevaient avant l'introduction du régime.
M. SAMSON: Je pense que c'est une amélioration qui va
éviter certaines critiques que l'on entend parfois, comme: Je ne sais
pas combien il a chargé, des choses comme ça. Cela va couvrir
davantage le professionnel de la santé, ça va éviter ces
critiques, je pense que c'est une nette amélioration.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, pour les services
psychiatriques en particulier, la règle générale
s'applique, ce n'est qu'exceptionnellement qu'on n'enverra pas ce
relevé...
M. FORGET: C'est-à-dire qu'on envisage de façon
générale que les services psychiatriques ne soient pas couverts
par cette disposition. Mais il peut y avoir d'autres cas ou il peut y avoir des
raffinements qui impliquent que, par règlement, on puisse vouloir faire
des changements mais c'est l'esprit dans lequel ce dernier alinéa est
inscrit.
M. SAINT-GERMAIN: Merci.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Sauvé.
M. MORIN: Je crois que c'est aussi un progrès. J'imagine que tout
ça va être fait électroniquement?
M. FORGET: Oui, bien sûr.
M. MORIN: Autrement, ce serait une tâche absolument insurmontable.
Cela permettra à tout citoyen de savoir exactement le genre de services
qu'il reçoit, ça lui permettra de se rendre compte aussi qu'il
reçoit quelque chose pour ses taxes. C'est de nature, je pense, à
mieux informer sur les services de santé. Je me demandais même, M.
le ministre, si on ne pourrait pas apporter la même chose à
l'assuran-ce-hospitalisation.
M. FORGET: C'est-à-dire que c'est fait actuellement, mais ce
n'est pas fait de façon annuelle puisque, évidemment, c'est
beaucoup moins fréquent comme utilisation pour la plupart des gens du
moins, mais l'assurance-hospitalisation envoie une facture simulée et on
dit: Ceci n'est pas pour paiement, c'est écrit, imprimé sur la
formule, pour indiquer les services reçus et le coût des...
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 13. Adopté.
Le député de Vanier.
Confidentialité
M. DUFOUR: Je veux féliciter le ministre d'avoir apporté
certaines précisions à cet article qui réellement met en
branle tout le processus de la confidentialité. Il y a certaines
améliorations qui sont apportées, mais il reste tout de
même quelque chose, il y a aussi des cas particuliers. Il ne faudra pas
oublier qu'on ne parle pas du monsieur qui va venir me voir ou qui va aller
voir un autre médecin et qui ne veut pas que sa femme le sache parce
qu'il a fait une
petite escapade la veille au soir et qu'il se ramasse avec quelque chose
qui coule. A ce moment-là, s'il n'a pas dit à sa femme qu'il est
allé voir le médecin, à la fin, quand madame va ouvrir le
compte, même si on dit qu'on va adresser le compte directement à
l'assuré, parfois la femme, en toute quiétude, ouvre la lettre et
regarde le contenu, elle voit que son mari est allé chez le
médecin et que c'est tout simplement à son insu. Elle va
certainement lui poser des questions: Tu es allé voir le médecin
et tu ne me l'a pas dit. Pourquoi? Il y a certainement des oreilles qui vont
devenir rouges. Il y a toutes sortes de problèmes en médecine.
C'est un article sur lequel on veut peut-être glisser, je l'accepterai,
parce qu'il est amélioré beaucoup par rapport à l'article
initial, mais il reste encore toutes sortes de problèmes qui se posent,
journalièrement chez nous. Je comprends très bien que le
député de Sauvé l'accepte d'emblée, c'est une
grosse amélioration, moi aussi je trouve qu'il y a une
amélioration. Mais elle n'est pas parfaite parce qu'on rencontre de tout
en médecine, vous savez. On aura peut-être des explications
à donner, on va avoir des appels téléphoniques pour
demander si c'est bien vrai et pourquoi le monsieur est allé. On va
dire: Madame, demandez à votre mari. Il faudrait presque étendre
la confidentialité ou ne rien dire du tout...
Moi, je trouve qu'on ne devrait même pas mettre le nom du
professionnel sur le relevé d'honoraires. Si on voulait pousser assez
loin, j'enlèverais même le nom du professionnel, parce que, si la
personne est allée voir un dermatologue, si le monsieur est allé
voir un médecin en médecine générale, s'il est
allé voir quelqu'un qui ne soigne que la syphilis, il va se poser des
problèmes. C'est pour cela que...
LE PRESIDENT (M. Brisson): II peut avoir plusieurs adresses.
M. DUFOUR: De toute façon, je félicite le ministre des
amendements qui ont été apportés, mais je dois vous dire
que ce n'est pas parfait.
M. FORGET: J'en prends note, M. le Président. Comme je l'ai
indiqué, au niveau des règlements, il sera peut-être
possible de voir d'autres raffinements. Mais, d'autre part, ceux des
bénéficiaires qui mènent une double vie pourront
probablement trouver les moyens de parer à ces difficultés dans
une certaine mesure. Il est difficile de donner de l'information et de ne pas
la donner en même temps. Je pense que c'est un dilemme. Mais, encore une
fois, la réglementation pourra peut-être permettre d'inclure
certains autres raffinements.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le nouvel article 13 est adopté et
l'ancien article 13, évidemment, est retiré. L'article 14 est
également remplacé.
M. FORGET: Oui, M. le Président.
Pouvoirs réglementaires
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'article 14, tel que rédigé,
évidemment, est retiré pour être remplacé par le
nouveau.
M. FORGET: Le nouveau a été distribué, mais il vaut
peut-être mieux que je le lise. 14. L'article 56 de ladite loi,
modifié par l'article 19 du chapitre 38 des lois de 1970, par l'article
15 du chapitre 47 des lois de 1971 et par l'article 13 du chapitre 30 des lois
de 1973, est de nouveau modifié en ajoutant, après le paragraphe
i), les suivants: j) déterminer le nombre et les catégories de
bourses d'études ou de recherches, le montant et le mode de paiement des
bourses ainsi que les modalités selon lesquelles un territoire est
assigné à tout récipiendaire d'une bourse d'études;
k) prescrire la teneur de l'engagement que tout boursier doit remplir en sus
des conditions prévues par la présente loi; et 1) fixer certains
délais ou périodes dans lesquelles doit être adressé
le relevé visé à l'article 51, ainsi que les circonstances
dans lesquelles ledit article ou certaines de ses dispositions ne doivent pas
être appliqués.
Le but du remplacement de l'article par une nouvelle rédaction
est d'abord d'ajouter le dernier alinéa, en concordance avec celui que
nous venons d'approuver, et d'améliorer la rédaction des
paragraphes précédents, de manière à
éliminer la détermination d'un territoire dans le cas des bourses
de recherches, ce qui, évidemment, n'avait aucun sens et qui
résultait d'une inadvertance de rédaction.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le nouvel article 14 est adopté?
M. MORIN: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'ancien est retiré. Article 15,
adopté?
M. MORIN: Adopté également.
LE PRESIDENT (M. Brisson): II y a un article 15a).
M. FORGET: Article 15 a). L'article 62 de ladite loi est modifié
en remplaçant, à la fin, le mot "section" par le mot "loi". C'est
un amendement de concordance.
M. MORIN: Cela va.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 15a), adopté? Article 16?
Bourses d'études
M. FORGET: L'article 16, M. le Président, est modifié de
la manière suivante: Premièrement, en remplaçant le
deuxième alinéa de l'article 76a) par le suivant: Les
boursiers
fournissent ces services après l'obtention d'un permis d'exercice
dans une science de la santé, dans un territoire et pour une
période fixés par le ministre.
Je vais peut-être expliquer tout de suite la raison de cette
modification. Il n'est pas question de déterminer par ce projet de loi
la manière dont les personnes ont accès au droit de pratique. Il
ne s'agit pas de leur donner une nouvelle ouverture au droit de pratique,
indépendamment du permis qui est donné par la corporation
professionnelle. Il y avait une mauvaise rédaction à cet
égard.
La deuxième modification: en remplaçant, dans le
paragraphe d) de l'article 76 b) les mots "qu'un tel cours rend apte", par les
mots "qu'un tel permis d'exercice habilite à fournir". Encore une fois,
c'est le même genre de préoccupation, c) en remplaçant les
deuxième et troisième alinéas de l'article 76 d) par les
suivants:
Ce boursier perd aussi le droit de s'inscrire au régime
d'assurance-maladie jusqu'à ce qu'il ait fourni des services pour le
territoire et pour la période fixée par le ministre
conformément à l'article 76 a)". Il s'agit du territoire et de la
période déterminée par l'engagement initial du boursier,
bien évidemment. "L'obligation de rembourser s'éteint lors du
décès du boursier", et c'est ici qu'une modification intervient,
"ou si celui-ci devient de façon permanente incapable d'exercer sa
profession". C'est-à-dire qu'il peut devenir paraplégique ou
infirme et doit abandonner la pratique, il serait injuste de le grever d'une
dette. C'est donc plus que le décès qui peut éteindre
cette obligation, ce sont des circonstances qui rendent l'exercice de son art
impossible pour d'autres raisons. "d), en retranchant dans le deuxième
alinéa de l'article 76 e), les mots "à réussir le cours
auquel ils sont admis". Le but de cet amendement est d'éliminer
l'impression qui avait été créée par la
rédaction actuelle selon laquelle ces jurys détermineraient ou
feraient passer des examens qui s'ajouteraient à ceux qui sont
déjà passés relativement au succès dans les
études de médecine, par exemple. Il ne s'agit pas de cela du
tout, il s'agit d'une évaluation par un jury de l'aptitude ou de la
motivation d'un candidat à remplir les engagements auxquels il souscrit.
C'est dans les cas où un nombre limité de bourses sont offertes
et où il y a plus de candidats que de bourses, il faut donc
évaluer les chances qu'ils auront de pratiquer de façon
harmonieuse et heureuse et avec succès dans les régions
éloignées et de donner une liste, par odre de priorité,
des candidats au ministre qui procède à l'attribution des bourses
dans cet ordre.
M. MORIN: M. le Président, est-ce que le ministre a
terminé?
M. FORGET: Oui, excusez-moi. Par ordre de priorité, "en ajoutant
à la fin de l'article 76 f), les mots "par ordre de priorité",
c'est donc l'indication que je viens de fournir que le jury les donne par ordre
de priorité", et en remplaçant le paragraphe f), dans l'article
76 1), le mot "l'institution" par les mots "la création". C'est la
création et le maintien de bourses de chercheurs. Il ne s'agit pas
qu'ils doivent servir à une institution ou à un
établissement. Ceci n'était pas clair, c'est la création
et le maintien et non pas à un organisme que ces bourses doivent
servir.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Sauvé.
M. MORIN: M. le Président, cette idée de créer des
bourses d'étude qui entraînent une obligation, aux termes du
cours, de servir, en quelque sorte, dans un territoire qui est assigné
à l'ancien boursier par le ministre me paraît être une
excellente façon d'inciter les étudiants, les futurs
professionnels de la santé à se déplacer vers les
régions qui sont sous-équipées. Je n'ai pas de querelle
donc avec le fond, avec les principes qui sont en causes dans ces articles. Je
me pose une seule question, pourquoi ces bourses sont-elles payées par
la régie? Est-ce qu'elles ne devraient pas être payées par
l'Etat, est-ce qu'il y a une raison particulière pour cela? Normalement,
il me semble que ça devrait relever de l'Etat.
M. FORGET: La distinction que l'on peut faire entre le budget de l'Etat
et le budget de la régie est évidemment dans une certaine mesure
artificielle, mais cependant je veux bien admettre que la question se pose de
savoir si des recettes affectées à une destination
particulière doivent ou peuvent, dans un monde idéal, être
affectées à des fins qui n'avaient peut-être pas
été envisagées au départ comme faisant partie de ce
contexte. Je pense cependant qu'il faut considérer les fonds mis
à la disposition du régime d'assurance-maladie sur une base qui
ne soit pas trop restrictive. Le but est évidemment d'assurer une
couverture complète de services médicaux, mais il n'est pas du
tout incompatible avec une telle notion que l'on entende de services
médicaux dans leur sens complet, c'est-à-dire toutes les
conditions nécessaires pour que des services médicaux soient
accessibles de façon continue et en qualité adéquate
à l'ensemble de la population et pour une période de temps
indéfinie.
Donc, les charges qui sont faites au régime et qui
reflètent la nécessité de maintenir une qualité
élevée des soins médicaux, donc les activités de
recherche qui complètent et qui permettent justement le maintien de la
qualité des services de même que des incitations qui sont offertes
à des étudiants de manière à remédier
à des carences du régime sur le plan de la distribution
géographique m'apparaissent convenir très bien à
l'intention du législateur lorsqu'il affecte à des fins
particulières certaines
ressources fiscales. Il ne s'agit pas simplement de payer aujourd'hui
des prestations de service, mais de mettre sur pied un régime de
distribution de services médicaux avec tout ce que cela comporte au
niveau du maintien de la qualité, de l'accessibilité
géographique et du maintien d'une compétence professionnelle par
des activités de recherche et d'enseignement. Je pense que tout ceci
fait partie d'un régime de soins médicaux dans son sens
véritable. Il ne s'agit pas simplement du remboursement de prestations.
L'Etat n'est pas, dans ses activités, un simple assureur privé,
mais il joue véritablement un rôle beaucoup plus large et, encore
une fois, c'est une distinction qui est assez ténue, ce sont des
ressources fiscales dans les deux cas. Bien sûr, il y a dans un cas une
idée d'affecter ces ressources fiscales à une destination
particulière, mais si l'on songe qu'il y a déjà des
extensions qui ont été données par le législateur
au régime dans le domaine des médicaments, il y a
déjà de cela deux ans, dans le domaine des prothèses, nous
nous trouvons dans ces deux secteurs beaucoup plus loin de l'idée
originale, je pense, que nous pouvons l'être dans le domaine des bourses
d'étude pour favoriser l'accessibilité géographique ou que
dans le domaine des bourses de recherche pour favoriser le maintien d'une
qualité élevée des services médicaux et des soins
médicaux.
Je pense qu'il y a un argument de cohérence qui peut être
fait, mais je ne veux pas insister plus qu'il ne faut. Je pense qu'il y a aussi
des arguments, sans aucun doute, d'opportunité. Ces fonds
dépassent les besoins immédiats du financement des prestations de
services comme telles et, encore une fois, il n'y a aucune
incompatibilité, au contraire, dans l'extension qui est donnée
par cet amendement.
M. MORIN: Je ne veux pas en faire un plat non plus, M. le
Président, j'observais simplement, parce que, pour ce qui est des
bourses de recherche, je crois que c'est le ministre qui accorde ces bourses et
elles sont administrées et payées par la régie, si je ne
m'abuse. C'est bien cela? Est-ce que je me trompe?
M. FORGET: Oui. Je crois que c'est tout à fait cela.
M. MORIN: Ce sont les articles suivants, justement. Est-ce qu'il ne
serait pas plus normal, peut-être, que la régie soit
appelée à payer les bourses, mais que celles-ci soient
accordées par un service qui relève du ministre et qui,
j'imagine, devra coordonner son action avec celle du ministère de
l'Education?
M. FORGET: Pour ce qui est de la coordination, elle est prévue
dans la loi par la référence aux dispositions de la Loi des
prêts et bourses et la Loi des bourses pour le personnel enseignant
puisqu'il n'y a pas impossibilité de cumul. Pour ce qui est de la
procédure, je vous avoue qu'on pourrait l'envisager de bien des
façons.
M. MORIN: A première vue, en tout cas, ce n'est pas le rôle
de la régie de constituer des jurys.
M. FORGET: C'est le ministre qui nomme formellement les jurys en
consultation selon l'article 76. Non, pas l'article 76 f), l'article 76 e):
"Les membres de chaque jury sont nommés par le ministre et le ministre
décerne les bourses qui sont payées selon la mécanique du
paiement assurée par la Régie."
Cela rappelle un peu le mécanisme des ententes où le
ministre décide des ententes et où les ententes sont
administrées par la régie. Il y a une certaine analogie.
Evidemment, il n'y a pas d'entente dans le cas des bourses, c'est
discrétionnaire.
M. MORIN: Je vous parlais des bourses, des bourses d'étude, non
pas des bourses de recherche.
M. FORGET: C'est l'article 76 e), le dernier alinéa. La bourse de
recherche, c'est l'alinéa j). A ce moment, c'est le conseil de la
recherche en santé qui est un organisme consultatif au ministre et non
pas à la régie. C'est une référence, parce que, du
côté des bourses, il n'y a pas d'organisme semblable,
évidemment. Du côté de la recherche, le conseil de la
santé constitue le jury et recommande l'attribution de bourses.
M. MORIN: En ce qui me concerne, j'ai terminé.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Est-ce que tous ces amendements
proposés à l'article 16 sont adoptés?
M. MORIN: Oui, adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'article 16 est adopté, tel
qu'amendé. Article 17, adopté?
M. MORIN: Oui, article 17, adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 18?
M. MORIN: De même.
LE PRESIDENT (M. Brisson): II y a un amendement.
M. FORGET: II y a un amendement, M. le Président: a) en
remplaçant dans la troisième ligne du paragraphe a) de l'article
2 le mot "ministère" par le mot "ministre"; b) en remplaçant aux
cinquième et huitième lignes du paragraphe f) de l'article 2 le
mot "type" par le mot "prestation". Ceci est de concordance, eu égard
à un article précédent que nous avons déjà
adopté relativement aux relevés devant être produits
à l'intention des bénéficiaires par la
régie, c) en remplaçant le paragraphe g) de l'article 2
par le suivant: g) d'établir et tenir à jour, aux fins de la Loi
de l'assurance-maladie, un fichier des professionnels de la santé, et,
sous réserve de l'interdiction de révéler, visée
à l'article 50 de la Loi de l'assurance-maladie, lequel s'applique
mutatis mutandis, d'en faciliter l'accès au ministre des Affaires
sociales ou à son représentant autorisé pour les fins de
l'application de la loi de l'assurance-maladie, de la Loi de
l'assurance-hospitalisation et de toute autre loi dont l'application
relève du ministre.
Cette modification est faite afin de clarifier le sens de l'article de
manière que les règles de confidentialité s'appliquent
également à l'égard du ministre, alors que la
rédaction antérieure avait la même intention, mais elle
était susceptible d'une interprétation ambiguë, elle ouvrait
la porte à une interprétation contraire.
Ici, je crois que c'est clair que tout ceci se fait sous réserve
de l'interdiction de révéler, visée à l'article 50
de la Loi de l'assurance-maladie, lequel s'applique mutatis mutandis.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 18, adopté?
M. MORIN: Oui, adopté. A l'article 19, M. le Président,
à moins que le ministre n'ait une explication...
M. FORGET: II y a un article 18 a) qui a un amendement.
LE PRESIDENT (M. Brisson): II y a un amendement.
M. FORGET: II se lit comme suit: 18 a). L'article 23 a) de ladite loi,
édicté par l'article 17 du chapitre 30 des lois de 1973, est
modifié en remplaçant dans la quatrième ligne le mot
"sixième" par le mot "cinquième".
LE PRESIDENT (M. Brisson): Adopté.
M. SAMSON: Qu'est-ce que cela veut dire?
Directives
M. FORGET: C'est qu'on supprime deux alinéas et on les remplace
par un seul. La numérotation de tous les alinéas
subséquente est conséquemment modifiée. La
référence qui est faite au sixième alinéa devient
le cinquième alinéa.
L'article 19 dudit projet est modifié en remplaçant le
deuxième alinéa de l'article 26 par le suivant: Le ministre peut,
dans le cadre des responsabilités et pouvoirs qui lui sont
confiés à l'égard de l'utilisation des deniers publics, de
la santé du public, des droits des bénéficiaires des
services il y a une erreur ici, ce serait des droits des
bénéficiaires aux services assurés et du respect des
ententes auxquelles le ministre est partie, émettre des directives
portant sur les objectifs et l'orientation de la régie dans
l'exécution des fonctions qui lui sont confiées par la loi."
Ici, il s'agit, M. le Président, de préciser l'intention
véritable de cet article qui était rédigé de
façon déficiente. Il s'agit, dans ce premier alinéa, de
circonscrire ou de limiter le pouvoir du ministre d'émettre des
directives de manière à expliciter ce que la loi veut dire, en
lui attribuant la responsabilité de l'application de la loi, mais en
limitant son pouvoir d'émettre des directives aux fins qui sont
énumérées dans ce premier alinéa,
c'est-à-dire les directives doivent être rendues
nécessaires pour permettre une orientation importante au niveau de
l'utilisation des deniers publics pour éviter que la santé public
ne soit mise en danger, pour éviter que les droits des
bénéficiaires ne soient violés ou que les ententes,
auxquelles il est partie, ne soient pas respectées. Donc, les directives
n'ont pas pour but de modifier les ententes, puisque ceci était ambigu
dans la rédaction antérieure, mais les ententes doivent
circonscrire le pouvoir d'émettre des directives, de la même
façon que les autres considérations majeures doivent circonscrire
l'exercice de ce pouvoir.
M. MORIN: M. le Président, j'avoue que je saisis mal la
portée exacte de cet article, en particulier les raisons qui motivent ce
pouvoir d'émettre des directives s'adressant à la régie.
Je me demande aussi pourquoi il n'y a pas eu une consultation de la
régie, à moins que le ministre ne m'apprenne que, tout
récemment, il a consulté la régie sur la rédaction
de cet article, auquel cas le télégramme que j'ai reçu
perdrait toute sa portée. J'amagine que le ministre en a reçu un
aussi. Le mien est rédigé de cette façon: "Les membres de
la Régie de l'assurance-maladie du Québec, en réunion
régulière ce matin, manifestent unanimement leur insatisfaction
à l'égard du fait qu'ils n'ont pas été
consultés avant le dépôt, à l'Assemblée
nationale, du projet de loi 93 modifiant la Loi de l'assurance-maladie et la
Loi de la Régie de l'assurance-maladie du Québec". Bien
sûr, cela porte sur l'ensemble du projet de loi. J'en fais mention ici,
parce que j'ai l'impression que cet article 19 est peut-être l'un de ceux
qui leur causent le plus d'insatisfaction. J'aurais dû ajouter que
c'était un télégramme qui me parvenait de la part du
président de la Régie de l'assurance-maladie. Le ministre
pourrait-il me rassurer, m'ex-pliquer pourquoi il n'a pas procédé
à cette consultation et me dire dans quelle mesure cet article, que nous
sommes en train de débattre, ne va pas créer de la part de la
régie ou entre la régie et le ministère des tensions?
M. FORGET: Je suis heureux que le député de Sauvé
mentionne cette question parce qu'elle appelle, en effet, un commentaire
important. Il est clair que, depuis plusieurs années, le gouvernement
s'est donné des régies dans un
très grand nombre de domaines. Il est clair qu'en se dotant de
tels organismes, le gouvernement n'a présumément pas
créé des organismes privés. Ce qu'il a voulu faire, c'est
créer des organismes de droit public à qui il confie, pour un
exercice autonome d'un pouvoir de gestion, l'administration de certaines
lois.
Il n'en demeure pas moins que, dans chacun des cas, un ministre est
désigné comme responsable de l'administration de ces lois et
qu'il est important de préciser de quelle manière cette relation
doit s'établir entre la responsabilité ministérielle qui
s'est affirmée par la loi, et l'autonomie qui est présumée
être celle, et est effectivement celle de ces régies.
L'article en question a pour but d'apporter, dans une très
difficile question, qui n'est pas seulement soulevée au Québec,
mais qui a été soulevée dans un assez grand nombre de pays
qui ont de tels organismes; cet article est un effort pour apporter une
précision.
Mais avant d'aborder la discussion de l'article, j'aimerais faire un
commentaire sur la consultation dans la préparation des lois, et du
droit de consultation que le député de Sauvé semble
suggérer qu'il existe dans de tels cas. Il est clair, à mon avis,
que quelles que soient les relations qui peuvent exister entre le ministre
responsable de l'application d'une loi et la régie qui applique cette
loi, si autonome qu'elle puisse être dans son application quotidienne,
n'est pas une relation comparable de quelque manière que ce soit avec
celle qui peut exister entre le gouvernement et un groupe quelconque qui
existe, en vertu d'autres lois, une association, un syndicat, une corporation
professionnelle, un établissement ou quoi que ce soit du genre.
Je crois que, sur le plan de la législation, il doit être
très clair que si un ministre consultait une régie, dans une
certaine mesure, il se consulterait lui-même, puisque sur le plan de la
législation, les régies n'ont aucune existence autonome. Elles
existent pour appliquer des lois; elles n'existent pas pour les faire et elles
n'existent pas pour représenter au gouvernement des points de vue
différents de celui-ci.
Ce qui est essentiel dans l'existence et le fonctionnement des
régies, c'est leur autonomie de fait et de droit dans l'application des
lois et c'est la participation qu'elles rendent possible à des groupes
distincts du gouvernement dans l'application de certaines lois qui sont
particulièrement significatives pour ces groupes privés ou ces
groupes de personnes ou d'institutions.
Ainsi, lorsque nous appliquons le régime des rentes, la Loi du
régime des rentes, le gouvernement a voulu se donner des partenaires,
des partenaires qui sont les employés qui sont cotisés pour ce
régime, les employeurs qui sont également cotisés pour ce
régime, de manière à assurer que dans l'administration de
cette loi extrêmement importante, ceux qui sont appelés à y
contribuer puissent participer à son application. Mais il est clair que
ce n'est pas un organisme distinct du gouvernement dans la mesure où,
pour légiférer, on doive l'entendre de façon distincte et
autonome comme étant un groupe privé. Ce n'est pas un groupe
privé, c'est une partie de l'administration publique à laquelle
l'Etat a convié un certain groupe privé. Ceci ne leur donne pas
un accès privilégié à la législation,
puisque les groupes privés en question ont un accès autonome au
législateur comme tous les groupes privés et qu'ils peuvent faire
valoir leur représentation, soit en personne directement ou à
l'occasion, par des mémoires en commission parlementaire.
Donc, je crois qu'il n'est pas question de consulter des directions d'un
ministère et il n'est pas question, sur le plan de la
législation, de consulter quelque organisme gouvernemental que ce soit.
Il est question, au contraire, de consulter les groupes privés auxquels,
pour l'application de certaines lois, l'Etat a bien voulu s'associer pour
assurer que l'application de ces lois se fasse conformément à
leur esprit et conformément aux ententes ou à l'esprit de la
législation qui a été adoptée à
l'origine.
C'est dans cette mesure qu'il faut évaluer les inquiétudes
de la Régie de l'assurance-maladie qui, je pense, ne sont pas
fondées, puisque je peux citer d'autres exemples, d'autres
législations où une telle consultation ne se fait pas et ne doit
pas se faire, à mon avis.
Maintenant, il est évident que se développe, dans
n'importe quelle direction, dans n'importe quel ministère, dans
n'importe quel organisme administratif, une expertise technique. Sur les points
où une expertise technique peut être appréciée, peut
s'avérer une contribution valable, il est clair que ceux qui assument,
de façon quotidienne, la gestion de certains programmes sont
consultés. Ils ne sont pas consultés à titre corporatif,
à ce moment. Ils sont consultés comme individus possédant
une expertise et pouvant, à ce titre, apporter une contribution
d'experts à l'élaboration des projets de loi. Mais ils ne sont
pas consultés à la manière d'un groupe de pression ou d'un
groupe représentant des intérêts distincts de celui de
l'Etat. C'est donc, je pense, une distinction très claire qu'il faut
établir, et qui, dans les faits, a été établie dans
le passé vis-à-vis des régies et vis-à-vis des
organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le député de Sauvé.
M. MORIN: M. le Président, je vous confierai que la
réponse du ministre m'étonne tout de même un peu. Je veux
bien convenir avec lui que les régies n'ont peut-être pas un droit
strict d'être consultées. Je veux bien qu'elles soient sujettes
à l'autorité du ministre. Néanmoins, je ne sais pas si le
parallèle qu'il trace entre une régie et l'une des directions de
son ministère est un parallèle tout à fait
justifié. J'ai l'impression que la régie peut se situer tout de
même en périphérie de son ministère.
M. FORGET: Je ne voudrais pas, M. le
Président, que mes remarques soient mal
interprétées. J'ai dit qu'au plan de l'application, au plan de la
législation, de l'élaboration des lois, il n'y a pas de
distinction. Mais à ce plan-là seulement, puisque sur le plan de
l'élaboration des lois, il y a des consultations vis-à-vis des
individus qui déposent une expertise, mais la régie n'est pas un
organisme consultatif sur le plan de la législation.
M. MORIN: Oui, mais je me demande si ce point de vue un peu rigide, un
peu légaliste, correspond vraiment à ce qui devrait se faire dans
la pratique. Que la régie n'ait pas un droit strict d'être
consultée, qu'elle ne soit pas comme vous le dites, M. le
ministre un organisme consultatif, je veux bien en convenir. Mais vous
avez là un ensemble d'hommes qui ont une expérience
considérable dans l'application de la loi. Vous avez là des
hommes qui la vivent tous les jours et qui, peut-être dans certains cas,
portent les conséquences de la législation que vous faites
adopter par l'Assemblée. Il me semble que, sans y avoir un droit strict,
ils peuvent s'attendre, dans le cours normal des choses, à être
consultés. J'avoue que je ne saisis pas, il me semble que c'était
la chose pratique à faire. A moins que je ne sois en train de mettre mes
gros pieds dans la porcelaine et qu'il n'y ait des tensions terribles entre le
ministre et la régie, et que ce télégramme reflète
plus de malaise que je n'ai cru en percevoir à première lecture.
J'espère que ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Mais il me semble que
vous avez fait vous-même allusion à leur expertise.
Il me semble que l'une des choses intelligentes à faire dans le
cas d'un projet de loi qui modifie certaines des compétences et des
attributions de la régie, en tout cas, je ne veux pas donner de
conseils au ministre, mais si j'étais le ministre des Affaires sociales
ce qu'à Dieu ne plaise d'ailleurs je consulterais la
régie avant de lui imposer de nouvelles attributions ou de modifier ses
attributions.
M. FORGET: M. le Président, j'aimerais enchaîner sur ces
remarques pour souligner que cette expertise que possèdent les
responsables de la régie a été utilisée, non
seulement a-t-elle été utilisée, mais elle se trouve
à l'origine d'un certain nombre des amendements que nous venons
d'examiner et d'approuver. En effet, en plus de certaines dispositions qui ont
attiré particulièrement notre attention, il se trouve dans ce
projet de loi des améliorations, je rappelle l'attention des membres de
cette commission sur les problèmes relatifs à la mise en vigueur
de certaines dispositions, de certaines sanctions. Ce n'est qu'un exemple d'un
problème qui émane de la régie, qui m'a été
communiqué par son président et qui s'est vu incorporé
dans la loi conformément à ses recommandations. M. Martin, qui
est le président, et Me Lafrance, qui est, je crois, le conseiller
juridique ou le directeur des services juridiques de la régie, ont
participé à la rédaction du projet de loi. J'ai ici devant
moi deux lettres de M. Martin, me soulignant qu'il y a certaines données
qui pourront être utiles à l'occasion du projet de loi pour
illustrer l'application de certains articles ou certains alinéas. Donc,
il n'y a aucune difficulté et aucun malaise à cet égard.
Je tiens à souligner que nous recevons de la part de la régie et
de son président toute la collaboration souhaitable sur le plan de
l'expertise. Mes remarques n'étaient pas destinées à
minimiser cet aspect, mais à faire ressortir le problème, si vous
voulez, plus politique ou législatif qui se pose dans les relations
entre l'Etat ou le législateur et une régie qui est un organe
qu'il s'est donné, puisque c'est un être de droit public, pour
administrer ces lois dont un de ses ministres est responsable devant
l'Assemblée nationale et devant la population, et qui est tout à
fait une partie de lui-même. Il a voulu toutefois y associer, pour des
raisons tout à fait valables, certains groupes qui sont
particulièrement affectés par l'application de ces lois, de
manière à les assurer que l'application de ces lois à leur
égard serait irréprochable, qu'ils auraient un droit de regard
sur leur application et non pas seulement sur la phase législative qui
les a précédés, de la même façon qu'on fait
ceci dans bien des régies, certains groupes. J'ai cité l'exemple
du régime des rentes, qui donne un exemple analogue. Nous nous associons
les représentants des employés et des employeurs. Cependant, nous
avons à leur égard, exactement la même attitude. Ils n'ont
jamais vu un projet de loi avant son dépôt à
l'Assemblée nationale. C'est une question, je pense, assez importante
pour qu'on la souligne, ce qui ne veut pas dire que l'expertise de la
Régie des rentes ou l'expertise de la Régie de
l'assurance-maladie sont négligées, bien au contraire, ce sont
nos principales sources d'inspiration dans la législation affectant l'un
ou l'autre de ces régimes. Je crois qu'il est important sur le plan
législatif, sur le plan de l'autorité de l'Etat, sur le plan des
consultations, de bien préciser qu'il s'agit là de deux ordres de
considérations différentes. Il y a une expertise sur le plan
technique, sur le plan de l'application de la loi qui justifie d'ailleurs
l'existence de ces régies et qui justifie l'autonomie qui leur est
donnée, mais elles ne sont pas autonomes dans un autre sens que
celui-là.
M. MORIN: Vous parlez d'une autonomie administrative.
M. FORGET: C'est une autonomie administrative, bien sûr.
M. MORIN: Néanmoins, M. le ministre, je ne voudrais pas insister
outre mesure, mais ce télégramme traduit tout de même un
malaise qu'il faut reconnaître. Sans pour autant vous incliner devant
toutes les recommandations que pourrait vous faire un organisme comme
celui-là, sans pour autant vous rendre à tous leurs
arguments, sans pour autant même vous laisser entraîner dans
un débat avec la régie, est-ce qu'il ne serait pas tout de
même dans l'ordre qu'on leur communique le projet de loi, pour voir
quelles sont leurs réactions?
Peut-être pourraient-ils même vous apporter des suggestions
très valables. Je trouve le ministre bien ombrageux et j'essaie de
comprendre la raison de cette distance qu'il établit si je
l'interprète bien entre lui-même et cette régie
d'Etat.
M. FORGET: Encore une fois, M. le Président, ces consultations,
ces discussions et ces prises d'avis se déroulent de façon
coutumière, je dirais presque routinière, avec le
président de chacune des régies dont il a été
question et en particulier de celle dont il est question dans ce projet de loi.
Donc, à ce point de vue, aucun problème, cependant, pour ce qui
est d'une consultation à titre corporatif, en quelque sorte, avec les
régies, j'exprime des réserves puisque ce serait leur
reconnaître un droit à la consultation au même rang et
même à un rang privilégié par rapport aux organismes
privés qui sont représentés à ces conseils
d'administration. Je crois que ce serait une décision et une pratique
très lourdes de conséquences puisqu'il n'est pas coutumier de
déposer des textes de loi devant des groupes privés avant leur
dépôt à l'Assemblée nationale. Or,
précisément, le but même de la création de ces
régies a été de donner à ces groupes privés
un droit de regard sur l'administration des lois. Mais si, par ce biais, elles
débouchent sur un droit de regard sur la législation durant sa
phase évolutive, avant même qu'elle ne soit déposée
à l'Assemblée nationale, alors nous irions beaucoup plus loin que
cela en a l'air en apparence. Nous irions jusqu'à admettre une
consultation sur des textes de loi, durant leur phase préliminaire,
à des groupes privés qui, bien sûr, sont l'objet
également de rencontres et de discussions, mais non pas sur des textes
de loi qui seraient déposés devant eux avant même leur
dépôt à l'Assemblée nationale.
Cette distinction demeure importante et, encore une fois, cela explique
la rigidité que le député de Sauvé trouve dans mon
attitude. Je crois que ce serait une décision assez lourde de
conséquences que de prendre ces régies pour ce qu'elles ne sont
pas essentiellement, c'est-à-dire des groupes de droit privé qui
existent indépendamment du gouvernement et même
indépendamment des groupes qui se sont associés à l'Etat
dans l'administration de certaines lois.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de
Vanier.
M. DUFOUR: Pour ma part, M. le Président, je veux
féliciter le ministre des Affaires sociales de prendre ses
responsabilités.C'est le temps que le ministre administre, parce que,
depuis un certain temps, on s'aperçoit qu'on se fait mener par tout un
ensemble de régies. Je ne vois pas pourquoi la régie viendrait se
fourrer le nez. Elle peut bien suggérer certains amendements, mais je
crois qu'il appartient au législateur de légiférer.
Merci.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Est-ce que l'amendement est adopté?
Article 19? L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Seulement une remarque, M. le Président. Quant
à moi, je trouve absolument normal le processus qui veut qu'une loi soit
déposée devant l'Assemblée nationale avant d'être
publiée ou montrée à qui que ce soit. Là, je ne
parle pas spécifiquement de la question de la régie. C'est une
question de principe. J'accepterais très mal, en tant que membre de
l'Assemblée nationale, que des projets de loi soient discutés...
Ils peuvent être discutés, mais avant qu'ils ne deviennent des
projets de loi. On peut discuter de certains principes, on peut consulter avant
que cela ne devienne un projet de loi, mais, quand c'est devenu un projet de
loi, cela doit être déposé devant l'Assemblée
nationale. A l'appui de mes remarques, M. le Président, je voudrais
souligner le danger qu'il y aurait à faire en sorte qu'un projet de loi
soit présenté à une régie quelconque avant de venir
devant l'Assemblée nationale, avec tous les dangers que cela pourrait
comporter.
Je ne vise personne en particulier, mais le fond de ma pensée est
le suivant: Je n'aimerais pas voir dans les journaux l'essence d'un projet de
loi qui n'aurait pas été d'abord déposé devant
l'Assemblée nationale. Puisque je ne voudrais pas le voir, c'est
évident qu'il faut certaines précautions. Or la précaution
la plus élémentaire, je pense, c'est que le ministre le soumette
à l'Assemblée nationale avant de la présenter à
quiconque.
C'est un principe, purement et simplement. Quant aux relations qui
existent entre le ministre et la régie, je ne les connais pas, je les
espère harmonieuses, mais si elles ne sont pas harmonieuses, le patron,
c'est le ministre et c'est à lui de prendre des
responsabilités.
M. MORIN: M. le Président, je pourrais peut-être intervenir
sur cette question et dire au député de Saint-Laurent que je ne
partage peut-être pas tout à fait l'avis qui vient d'être
émis par le député de Rouyn-Noranda.
Si le député de Rouyn-Noranda veut dire que le projet de
loi définitif, avec les articles numérotés, ne doit pas
être publié dans la presse, ou à gauche et à droite,
avant que l'Assemblée en soit saisie, là, je suis parfaitement
d'accord avec lui. Mais bien des projets de loi touchent des groupes
particuliers et doivent être débattus dans leur principe,
quelquefois même, dans leur règle spécifique, avec les
groupes intéressés. Je pense que c'est pratique courante pour un
ministre. Je pourrais donner des exemples qui me viennent à l'esprit.
Je
pense, tout récemment encore, au ministre des Affaires
culturelles qui a eu l'occasion de débattre le projet de loi, non pas
avec des articles numérotés déjà, mais avec des
textes déjà rédigés qui ont fait l'objet de
rencontres entre des fonctionnaires et les milieux intéressés; je
pense au milieu des cinéastes, puisque c'est un exemple dont nous avons
parlé tout récemment en Chambre, ou quelquefois même, de
rencontres entre le ministre lui-même et les groupes
intéressés.
Cela me parait normal. Etant donné que nous ne sommes pas un Etat
autoritaire qui fabrique la législation dans des officines sombres et
écartées des lieux publics, je pense que ce n'est pas anormal que
l'on consulte.
Pour maintenant en revenir à la question de la Régie de
l'assurance-maladie, je ne peux pas m'empêcher de dire au
député de Saint-Laurent que le télégramme fait
état d'un malaise, que j'aimerais bien comprendre mieux; il me laisse un
peu sceptique. Je serais porté, d'emblée, à ne pas prendre
ombrage d'une régie qui aurait des choses à me faire savoir, qui,
à cause de son expertise, a certainement des vues sur un projet de loi
qui pourrait lui être communiqué sant être
numéroté, sans être dans la forme définitive, parce
que, collectivement ces gens-là ont peut-être quelque chose
à vous faire savoir. L'expertise d'un homme, c'est une chose:
l'expertise d'un corps qui débat entre eux, c'est beaucoup mieux
encore.
J'ai de la difficulté à m'expliquer que le ministre ne
donne pas suite à cette requête de consultation. Cela pourrait
exprimer beaucoup plus au désir de coopérer qu'un désir de
mettre des bâtons dans les roues. Et le ministre a toujours le loisir
d'affirmer son autorité, en dernier ressort. Je ne vois pas comment la
régie pourrait contester cette autorité. Le ministre tranche,
fait des choix, c'est son métier, c'est le métier de tout homme
politique.
Très franchement, je ne suis pas très satisfait des
explications qu'il a données, à moins que nous n'ayons pas tout
à fait la même philosophie du gouvernement. C'est peut-être
cela qui est le fond. C'est peut-être cela qui sépare le
député de Saint-Laurent du député de
Sauvé.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'amendement est-il adopté?
M. MORIN: L'amendement est adopté tout de même.
LE PRESIDENT (M. Brisson): L'article 19, adopté tel
qu'amendé. Article 20 est remplacé. L'article a été
présenté et retiré pour faire place au nouvel article
20.
Accords
M. FORGET: L'article 10 de la Loi du ministère des Affaires
sociales est remplacé par le suivant : "Nonobstant toute disposition
législative inconciliable, le ministre peut, avec l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil, conclure tout accord avec tout gouvernement
ou organisme conformément aux intérêts et aux droits du
Québec, pour l'exécution de la présente loi ou de toute
loi dont l'application relève de lui; il peut aussi conclure un accord
avec toute personne qui ne réside pas au Québec au sens d'une loi
applicable, permettant à celle-ci de bénéficier, aux
conditions déterminées par le ministre, des services
assurés en vertu de toute loi dont l'application relève de
lui".
Le but de cette modification est de supprimer, dans la première
partie de l'article, la référence à une possibilité
pour le ministre de conclure, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en
conseil, les accords avec des personnes pour l'exécution de la
présente loi. En effet, il ne s'agit pas, pour le ministre, par cette
disposition, d'acquérir un nouveau droit à conclure des ententes
avec des groupes de médecins ou avec qui que ce soit, mais,
essentiellement, de viser, par là, des ententes intergouvernementales,
par exemple, dans une première partie ou, dans la deuxième
partie, de permettre contre le versement d'une prime, par exemple, à des
individus d'être considérés comme des résidants du
Québec alors qu'ils ne le sont pas en vertu de nos lois et de nos
règlements.
De façon concrète, ceci vise les représentants de
pays étrangers auprès de l'Organisation de l'aviation civile
internationale envers lequel il est de tradition pour le Québec
d'assurer un statut équivalent à celui de résident alors
même qu'ils ne sont pas soumis à nos lois, qu'ils ne sont pas des
résidants et qu'ils ne paient pas d'impôt et ceci,
désormais, contre le paiement d'une prime annuelle.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Le nouvel article 20, adopté?
M. MORIN: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 21, adopté?
M. MORIN: Un instant! M. le Président. Il n'y a pas d'amendement
à celui-là?
M. FORGET: Non.
M. MORIN: J'ai manqué quelques bonnes blagues.
M. SAINT-GERMAIN: Vous en avez manqué une bonne. Mon
collègue dit qu'il est clair.
M. MORIN: Cela va.
LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'article 22, il y a un amendement. On
ajoute à l'article 2 a) un alinéa comme suit: "Toute entente ou
partie d'entente peut, s'il y est pourvu expressément,
lier tout établissement. Toutefois, le ministre..." Je me
dispenserai peut-être de lire ceci, puisque nous l'avons
déjà dans un autre article, ailleurs dans la loi. C'est
véritablement un amendement de concordance. C'est dans l'article 8 dont
nous avons discuté abondamment et qui reprend le même
libellé, mais ailleurs dans la loi.
M. SAMSON: Le ministre ne veut pas risquer qu'on recommence.
M. FORGET: Je préférerais m'en dispenser si possible.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 22, adopté, tel
qu'amendé. Article 23?
M. MORIN: C'est un article qui comporte la rétroactivité.
Est-ce que le ministre veut nous expliquer pourquoi?
LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'article 23, il n'y a pas
d'amendement.
M. FORGET: II n'y a pas d'amendement.
LE PRESIDENT (M. Brisson): A l'article 23, il n'y a aucun
amendement.
M. FORGET: C'est parce qu'il a été créé par
un conseil à compter du 11 septembre. Je trouve son importance
relative.
UNE VOIX: Donc, c'est pour légaliser?
M. FORGET: De toute façon, c'est permis de créer un
conseil de recherche par arrêté en conseil. On le consacre dans la
loi.
M. MORIN: Je comprends.
M. FORGET: Nous nous disons que son statut juridique va peut-être
être rétroactif à sa date de formation.
M. SAMSON: Une consécration rétroactive.
M. FORGET: Autrement, il faudrait peut-être refaire les
nominations qui ont été faites en septembre et qui sont non
contentieuses, de toute manière.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 23, adopté?
M. MORIN: Oui.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Amendement, article 23 a).
M. FORGET: L'article 23 a). "L'article 18 a) entrera en vigueur à
la date à laquelle entre en vigueur l'article 23 a) de la Loi de la
Régie de l'assurance-maladie du Québec".
C'est un article qui n'est pas encore en vigueur. Il faut que les deux
entrent en vigueur quand même.
M. MORIN: Oui, c'est bien.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 23 a), adopté.
A l'article 24, il y a un amendement.
M. FORGET: C'est pour tenir compte du précédent "Sous
réserve de l'article 23 a)", cette expression sera insérée
au début de l'article 24.
LE PRESIDENT (M. Brisson): Article 24, adopté.
M. MORIN: Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Brisson): La commission a adopté le projet de
loi no 93 avec amendement, la Loi modifiant La Loi de l'assurance-maladie et la
Loi de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.
M. FORGET: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais
remercier tous les membres de la commission pour leur excellente
collaboration.
M. DUFOUR: ... pour leur assiduité.
LE PRESIDENT (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 23 h 40)