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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du mardi 13 avril 1976
(Dix heures vingt-trois minutes)
M. Cornellier (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux ce matin pour
continuer l'étude des crédits du ministère des Affaires
sociales. Lors de l'ajournement de la dernière réunion, nous en
étions au programme 5, services en milieu scolaire,
élément 2.
L'honorable député de Saint-Jacques.
Services sociaux en milieu scolaire
M. Charron: M. le Président, à
l'élément 2, je n'ai que des questions d'information à
poser au ministre des Affaires sociales sur le développement de certains
services sociaux en milieu scolaire. Le terrain scolaire a été
reconnu, dans le rapport Batshaw en particulier, comme étant un terrain
à la fois important, mais négligé de la politique de
prévention sociale du gouvernement auprès des jeunes.
D'ailleurs, le ministre se souviendra que plusieurs groupes, qui sont
venus témoigner lors de nos auditions sur la Loi sur la protection de la
jeunesse, ont signalé cette quasi-obligation d'étendre le
réseau de protection de la jeunesse et de prévention de certains
malaises sociaux à l'école, d'intégrer l'école et
les enseignants, plus particulièrement, comme agents de
prévention sociale.
Ceci m'amène, souscrivant à cette analyse, à poser
les questions suivantes au ministre, quant à l'action du
ministère des Affaires sociales à l'intérieur de
l'école, sur des problèmes aussi importants que celui de l'alcool
et de la drogue ou celui d'une éducation sexuelle moderne dont cette
commission a déjà été saisie lors de l'étude
des crédits de l'année dernière. Madame le ministre
d'Etat, à l'époque, avait eu à défendre, et l'avait
fort bien fait, devant le député de Rouyn-Noranda, en
particulier, le diaporama d'éducation sexuelle qui avait fait couler
beaucoup d'encre, mais qui nous paraissait comme un élément
indispensable, et même je l'avais soutenu à
promouvoir à l'intérieur des écoles. Je voudrais savoir,
sur ces chapitres particuliers que j'ai mentionnés, quelle a
été l'action du ministère des Affaires sociales au cours
de l'année et si on prévoit de nouveaux programmes ou de nouveaux
agissements, sinon le maintien de ceux qui sont déjà en
place.
M. Forget: J'aimerais, en débutant, faire un peu le point
au moins sur les chiffres qui permet- tent de saisir un peu l'envergure des
ressources humaines qui sont octroyées pour les services sociaux en
milieux scolaire.
Nous nous retrouvons à la fin de mars 1976 avec un effectif total
de 341 personnes pour les services sociaux en milieu scolaire qui se
répartissent environ pour moitié au niveau secondaire et
élémentaire respectivement, c'est-à-dire environ moins de
150 personnes de chaque côté. Pour ce qui est des cadres et d'un
groupe particulier d'une cinquantaine de personnes au total, les cadres y
compris, nous avons donc un total de 341 personnes qui se subdivisent, quant
à ce qui est du niveau de formation de ces individus, en 223
travailleurs sociaux et en 88 conseillers sociaux et 30 autres personnes ayant
différentes formations, y compris dix-sept sexologues, criminologues,
sociologues, etc., qui travaillent dans le milieu scolaire.
Les ratios actuels sont les suivants: à
l'élémentaire, un professionnel pour 5512 élèves,
et au secondaire, un professionnel pour 3903 élèves. L'objectif
que nous nous sommes fixé il y a quelques années est d'un
professionnel pour 3000 élèves qui devrait être atteint en
1978/79 et que l'on doit rapprocher d'une situation qui était
décrite dans un document du ministère des Affaires sociales
publié en novembre 1973 mais qui a été
préparé évidemment durant la période
antérieure à ce moment-là et qui reflète le niveau
des ressources humaines en 1972/73 et où l'on comptait, à ce
moment-là, 168 postes comblés à la fin de 1973.
Donc, 168 postes comblés par comparaison à 341 à la
fin de l'année 1975/76; c'est-à-dire que sur une période
de trois ans, il y a eu une multiplication par deux des effectifs. Il demeure
que ces effectifs sont encore en deça de ce qui est souhaitable et que
le développement se continue, quoique assurément moins rapide
cette année, étant donné la conjoncture financière,
mais qui se maintient malgré tout, ne disparaît pas. On peut
espérer qu'on pourra, l'an prochain, y accorder des ressources encore
plus importantes.
Sur le plan régional, il y a une certaine convergence des ratios
en question, avec une disparité moins grande que dans le passé
entre la région de Montréal, qui a toujours été
historiquement la plus favorisée à cet égard, et les
autres régions du Québec, quoique cette disparité n'est
pas encore entièrement disparue. On retrouve des ratios qui vont
je cite les extrêmes d'un professionnel pour 3I47 étudiants
sur la Côte-Nord, qui est la région la plus favorisée, donc
qui est tout près d'atteindre l'objectif, et d'un professionnel pour
5796 étudiants dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, pour
laquelle il y a le plus grand rattrapage encore à effectuer.
J'aimerais également indiquer qu'un certain nombre de
priorités ont été dégagées. Un document
circule actuellement dans les milieux professionnels intéressés
aux services sociaux en milieu scolaire, qui est un programme-cadre pour les
services sociaux en milieu scolaire. Il circule depuis novembre dernier, de
manière à recueillir de tous les intéressés des
commentaires avant de compléter ce
document. On y retrouve des orientations prioritaires, bien sûr,
qui n'excluent pas toute autre activité en milieu scolaire, mais des
orientations prioritaires vis-à-vis des groupes d'étudiants qui
éprouvent ou qui sont susceptibles d'éprouver des
problèmes particuliers d'adaptation.
Je cite ces quatre groupes cibles prioritaires: Les milieux
défavorisés; la population d'âge préscolaire; les
étudiants inscrits à un régime d'éducation
spécial au sein des commissions scolaires et les programmes
d'information préventive. C'est dans ce dernier chapitre que l'on
retrouve un certain nombre des activités auxquelles on vient de faire
allusion, c'est-à-dire l'information préventive touchant
différents aspects de la vie des jeunes où des problèmes
peuvent être évités par une meilleure information.
M. Charron: Le ministre aurait-il objection à
déposer ce document?
M. Forget: Non, je n'ai pas d'objection à le
déposer. C'est un document de consultation; je ne sais pas si nous en
avons des copies, mais nous pourrons, dès la séance de cet
après-midi en obtenir des copies additionnelles. Donc, dans ce document,
l'on peut retrouver certaines indications, encore une fois, quant à
l'information préventive, y compris les problèmes de la
sécurité des jeunes. C'est un programme qui se continue sur la
même base volontaire que dans le passé, mais en mettant l'accent
sur le développement d'une multiplicité d'approches et de moyens
d'aborder les problèmes, y compris une multiplicité de documents
qui ne traitent pas seulement de la sexualité, mais également,
éventuellement, et même déjà, d'autres
problèmes tels que la toximanie, l'alcoolisme, les droits individuels et
sociaux, les problèmes de délinquance, de criminalité,
enfin tout l'ensemble des problèmes au sujet desquels des adolescents se
posent des questions et qui peuvent être pour eux l'occasion de
problèmes personnels.
Problème de l'alcoolisme
M. Charron: M. le Président, je pose une question
immédiatement au ministre sur ces problèmes; peut-être que
le document en fait état de façon claire. Je voudrais demander au
ministre s'il a constaté, dans le groupe de travail dont il parle et
surtout dans l'orientation annoncée pour les mois à venir, ce que
j'appellerais une plus grande concentration de l'attention des travailleurs
sociaux en milieu scolaire sur le problème de l'alcoolisme. Je veux dire
qu'au cours des dernières années, on a assisté à
une intervention régulière et soutenue sur les problèmes
de la toximanie à l'intérieur des écoles, la
prévention de l'usage des drogues allant des plus légères
aux plus nocives, phénomène qui, à mon avis, du
côté du ministère des Affaires sociales, ne faisait que
répondre à une véritable situation.
Je pense que les années 1970, 1971, 1972 ont vraiment
été marquées par une grande période de consommation
incontrôlée, sans information, de différentes drogues
offertes qui nécessairement obligeaient à une intervention,
à tout le moins préventive, ne serait-ce que pour informer les
jeunes sur la qualité et la quantité des drogues auxquelles ils
pouvaient se soumettre à l'occasion.
Je ne sais pas si mon analyse est biaisée, M. le
Président, mais je pense qu'elle part de plusieurs constatations qu'il
m'a été donné de faire et de lire: c'est que cette
consommation de drogues est à la baisse, effectivement, dans plusieurs
des milieux. Plusieurs analyses le prouvent.
Par contre, ce qui reprend considérablement du poil de la
bête, qui avait peut-être été perdu au début
de la décennie dont nous parlons, c'est la consommation d'alcool pure et
simple. On dirait que l'espèce de campagne menée de toutes parts,
avec toutes sortes d'arguments d'ailleurs, contre la consommation de drogues a
eu pour résultat de diminuer la consommation de drogues, mais et
cela, il y a plusieurs analyses qui le disent d'augmenter dangereusement la
consommation d'alcool, laquelle peut être tout aussi nocive, sinon plus,
qu'une consommation de drogues légères, quand on enlève
les préjugés traditionnels.
Alors, je voudrais demander si, dans l'orientation annoncée, on
tient compte de ce changement social qui se produit chez les jeunes
Québécois actuellement et si on s'ajustera, comme on l'avait fait
au début de la décennie, afin d'intervenir de façon plus
catégorique pour prévenir la consommation abusive d'alcool et
pour indiquer aux jeunes le danger que cela comporte. Il y a des jeunes qui,
à 18 ou 19 ans les brasseries en sont pleines quotidiennement
ont déjà une consommation d'alcool...
M. Marchand: 17 ans.
M. Charron: ... inquiétante. Ceci nous laisse voir
qu'à 25 ou 30 ans, s'il n'y a pas d'information, le tableau peut
être peu joli a voir. Je voudrais savoir s'il y aura rajustement dans ce
sens.
M. Forget: On dirait que vous avez travaillé dans le
même comité de travail, parce que ce sont les conclusions qui,
présentement, prennent le dessus; l'accent est mis sur l'acoolisme par
rapport aux autres drogues qui, il y a quelques années, mobilisaient
plus les énergies.
Actuellement, à la CECM, il y a une étude qui est à
la veille d'être publiée sur un inventaire statistique assez
poussé à partir d'un échantillonnage assez nombreux. La
CECM avait entrepris cette étude pour guider des actions; elle avait
fait certaines tentatives au moment de la montée de la drogue et
c'était difficile d'avoir un impact réel. Alors, à partir
de cette étude, la CECM a un programme en vue.
Au ministère, depuis l'intégration de l'OPTAT, le
personnel qui a été intégré a été
affecté spécifiquement à élaborer un programme
d'intervention en milieu scolaire. Dans ce document-ci, il est an-
noncé seulement; le détail ne figure pas parce qu'il
n'était pas au point au moment de la rédaction du document. Mais
cette année, n'eût été la réduction du
budget, nous escomptions avoir au moins un poste par région
administrative pour coordonner les actions de prévention au point de vue
de l'alcoolisme dans le milieu scolaire. Cela a été un peu
retardé. Cela demande aussi une concertation avec les services sociaux
scolaires déjà implantés pour coordonner ce programme avec
les actions déjà existantes dans le milieu, pour ne pas en faire
une espèce de problème mis en relief ou en faire une vedette.
Mais c'est une priorité actuellement, sûrement.
M. Charron: Lorsque vous parlez de coordonner les
activités déjà en branle dans le milieu, est-ce que vous
avez noté, dans le milieu, une attitude favorable à ce changement
de cap, je dirais? Est-ce que, dans le milieu, on s'est aperçu et on
constate effectivement que l'alcoolisme, chez les jeunes, est un
problème grandissant, donc que vous pouvez compter sur une collaboration
du milieu dans lequel vous intervenez?
M. Forget: Quand je parle de coordination, je veux dire que je
pense que c'est une meilleure stratégie que d'impliquer tous les
praticiens je parle des praticiens du service social scolaire
dans les actions qui vont être entreprises plutôt que
d'entreprendre un programme parallèle qui va provoquer des
résistances.
La résistance, ce n'est pas au niveau du contenu qui s'en vient
parce que tout le monde trouve que c'est un problème grandissant. La
résistance serait au niveau des stratégies ou de la façon
d'en faire un problème découpé, finalement, qui en fait
une incitation plutôt qu'une éducation. Les discussions sont au
niveau des stratégies d'implantation.
M. Charron: J'aimerais bien qu'on s'attarde une minute sur le
contenu de ce programme d'intervention sociale. Est-ce que les moyens
d'intervention se limitent uniquement, en termes préventifs, à
l'information par feuillets, disons, qu'on distribuerait en milieu scolaire ou
si on va jusqu'à je ne l'appellerai pas le curatif mais presque
l'intervention de traitements, de thérapies auprès de
jeunes dont on a véritablement constaté que l'alcoolisme peut
être présent dans leur vie?
M. Forget: Dans la plupart des régions, les praticiens qui
s'intéressent à cette question sont toujours reliés au CSS
mais, généralement, ils sont impliqués dans une
équipe qui s'occupe aussi du traitement des adultes: les cliniques de
traitement, les services hospitaliers qui s'intéressent à des
questions de désintoxication. Après la phase d'éducation,
de prévention qui se fait, pas seulement par des feuillets mais beaucoup
par des discussions en petits groupes intéressés, au niveau
d'activités parascolaires, en utilisant différents moyens
audiovisuels, si des cas individuels demandent une thérapie, à ce
moment-là c'est plu- tôt par référence au CSS
qu'à l'intérieur du milieu scolaire parce que le personnel ne
pourrait pas suffire.
Le personnel essaie de garder suffisamment d'énergie disponible
pour les aspects prévention et éducation et fait
référence à des spécialistes parce qu'à ce
moment-là cela demande souvent, pour une période courte,
d'être intégré dans un autre milieu. Cela peut être
de brefs séjours dans des groupes spécialisés. Alors c'est
de la référence à ce moment-là.
M. Charron: Est-ce que cela est fréquent?
M. Forget: Disons que cet élément de programme,
l'alcoolisme, n'est pas ma spécialité. Si vous aimez le pousser,
ce serait peut-être bon d'avoir quelqu'un. Je pourrais trouver
quelqu'un.
J'aurais peur de parler un peu à travers mon chapeau sur le
détail de la thérapie. Il y a des documents qui existent, il y a
des personnes qui sont spécialisées. Il n'y a pas de
spécialistes en milieu scolaire, ce sont des spécialistes en
alcoolisme qui mettent au point des méthodes d'approche pour le milieu
scolaire. On a réalisé, en faisant l'inventaire, qu'il ne
s'était pas fait encore beaucoup d'expérimentation un peu
systématique pour l'approche des jeunes. C'est tout à fait
nouveau.
M. Charron: Ce problème de la drogue, vous avez fait
quelles constatations, au bout de quelques années de programme
implanté? Est-ce qu'on peut croire, par exemple, que l'action
préventive a eu des résultats sur la consommation?
M. Forget: Je pense qu'il n'y a pas encore assez de temps
écoulé pour mesurer l'impact, mesurer une certaine
efficacité. C'est tout neuf, le programme d'intervention à ce
niveau; alors, on n'a sûrement pas d'éléments pour analyser
le passé.
M. Charron: Comment intervient-on quant à la
prévention contre la sommation abusive de drogue? De quelle façon
le fait-on?
M. Forget: Comme je vous le dis, en présentant un document
choc; cela peut être un petit film, cela peut être un diaporama qui
implique des jeunes; à ce moment, cela déclenche une discussion.
C'est beaucoup par la relation qui s'établit au niveau de cette
discussion que les jeunes sont invités à livrer et à
discuter de leurs préoccupations, partager leur attitude face à
cela, leur point de vue. On essaie d'éviter l'approche moralisante qui
était implicite dans presque tous les documents existants jusqu'à
présent.
M. Charron: En effet.
M. Forget: Ils rebutaient beaucoup les jeunes. On met, je pense,
beaucoup plus l'accent sur l'information scientifique qui permet aux jeunes
ensuite de prendre leurs décisions par rapport à cela.
M. Charron: Est-ce que pour faire cette information scientifique
vous puisez dans les documents que la commission Le Dain, à Ottawa, par
exemple, a produits?
M. Forget: Moi, je ne le sais pas, je n'ai pas
préparé ces documents, mais je sais que l'équipe de
travail qui conçoit les programmes a beaucoup de documentation.
J'imagine que cela doit être parmi les documents qui sont
utilisés. Je pense que c'est une équipe où on se
méfie énormément des approches moralisantes; alors, tout
ce qui est information vérifiable, mesurable et transmissible devient
sûrement important.
M. Charron: Vous faites fort bien. Je me contenterai d'ajouter
cette note, M. le Président. Je ne suis pas membre du comité de
travail, mais vous faites fort bien de tenter de vous départir le plus
possible d'une approche moralisante. La question de morale est toujours
discutable, d'où qu'elle vienne, d'une part. Entre parenthèses
et là je me réfère au rapport de la commission Le
Dain j'ai eu l'occasion de le lire, je ne l'avais pas lu, pendant les
vacances des Fêtes. Je suis tombé là-dessus et je me suis
dit: Comment se fait-il que je n'avais pas encore lu cela?
Je me suis aperçu que, scientifiquement, les enquêteurs du
rapport Le Dain, par exemple, disent que toute intervention visant à
décourager un citoyen de commettre un acte quel qu'il soit est toujours
difficile à faire si au départ on indique que la chose est mal.
Si le citoyen le commet, c'est qu'il a d'abord la conviction que cela ne lui
nuit pas. Aucun humain ne fait un geste dont il a d'abord la conviction que
cela lui nuit.
Particulièrement dans le cas de la drogue je parle des
drogues légères aucun consommateur n'aura comme
préjugé à toute discussion là-dessus que la
consommation de drogues légères à laquelle il se soumet
est nocive. Je dirais que c'est plus vrai dans ce domaine que dans n'importe
quel autre. J'en ai vu des documents moralisateurs, comme vous dites. A leur
seule lecture, j'étais convaincu que, dès qu'il en avait lu une
page, le jeune en question refermait le bouquin et le mettait de
côté. Même si le reste pouvait contenir une information
très scientifique qui pouvait lui être très valable sur les
dangers, les contenus, la nature exacte de ce à quoi il se livrait, je
suis convaincu qu'il ne se rendait même pas à l'information
objective, du fait qu'on avait abordé la question sur le plan subjectif
et que cela coupait toute espèce de discussion.
Par contre, j'ai vu d'autres documents dont le rapport Le Dain qui est
doté d'informations très objectives qui me semblent essentielles
à tous les jeunes Québécois, les plus susceptibles
d'être consommateurs si on regarde les catégories d'âges.
Parmi les consommateurs, ils sont les plus susceptibles d'être
informés à partir même des contenus très objectifs
qu'il y a dans le rapport. Le Dain.
M. Bonnier: M. le Président, est-ce que je peux faire une
remarque? J'ai l'impression que, lorsqu'on traite de cette question, on ne
traite que des effets dans une société et qu'on ne traite pas
vraiment du problème qui est derrière cela. Je me demande si
à l'intérieur du réseau scolaire on avait
soulevé la question l'année dernière l'organisation
des services sociaux et l'ensemble de l'organisation scolaire, jusqu'à
un certain point, est à point pour aider les jeunes, justement, à
faire face à certaines difficultés. Je pense bien qu'il n'y a
personne d'entre nous qui va admettre que des étudiants s'adonnent
à la drogue ou à l'alcool simplement comme cela, un moment, sans
qu'il y ait des causes profondes, soit dans leur milieu familial, soit
même dans le milieu scolaire. Est-ce que vous avez, dans votre
réseau de services sociaux, suffisamment de ressources pour être
capables d'analyser ces problèmes et de les élucider?
M. Forget: Quand on parlait tout à l'heure des cas de
référence, cela dépasse le niveau de l'information, parce
que beaucoup de jeunes font usage de drogues légères ou
fréquentent les brasseries et ce n'est pas nécessairement parce
qu'ils ont des problèmes; c'est parce qu'actuellement c'est la
façon de vivre pour tout le monde. Alors, cela, ce n'est pas un
problème.
M. Bonnier: Fréquenter les brasseries, ce n'est pas
nécessairement de l'alcoolisme!
M. Forget: Oui, mais c'est comme cela que ça commence. Je
veux dire que, lorsqu'on parle de la consommation, la recherche qui est faite
à Montréal inclut la bière dans les consommations. Pour un
jeune de 18 ans, c'est très fréquemment comme cela que ça
commence. Il va passer la soirée à la brasserie et il sort de
là un peu éméché.
Une Voix: II prend ce qu'il est capable de payer.
M. Forget: C'est un point de vue.
M. Marchand: Le champagne du pauvre.
M. Forget: De toute façon, dans le cas de ceux qui
semblent boire parce qu'ils ont des problèmes personnels, cela peut
arriver chez des jeunes comme chez des adultes. C'est ce qui fait l'objet des
références au CSS où des gens sont
spécialisés pour de l'intervention, pour de la thérapie
personnelle. A ce moment-là, l'usage d'alcool devient tout simplement un
symptôme.
M. Bonnier: Est-ce que le CSS s'en occupe, est-ce qu'il a le
temps de s'en occuper?
M. Forget: Quantitativement, je ne sais pas si on peut dire qu'il
a suffisamment de ressources pour répondre à ces besoins. Cela
dépasse ma compétence de répondre à cette
question.
M. Bonnier: C'est la question que je pose.
M. Forget: J'aimerais, M. le Président, indiquer que
malgré tout il y a, dans les services sociaux scolaires, un rôle
important de plaque tournante en quelque sorte. Il est clair qu'avec les
effectifs disponibles et même ceux qui sont projetés, il est un
peu illusoire de croire qu'ils pourront faire à la fois l'information,
l'éducation sanitaire, si l'on veut, dans un sens large, la
référence et, en plus de cela, des interventions intensives
auprès de certains jeunes ou même auprès de leur famille,
puisque, évidemment, les effectifs sont malgré tout relativement
modestes. Il s'agit de 350 personnes environ pour s'occuper de tous ces aspects
pour toute la clientèle scolaire au Québec.
Si on devait se reposer sur eux seulement pour l'ensemble des services
sociaux en milieu scolaire, il est clair qu'ils ne suffiraient pas à la
tâche et qu'ils doivent faire des références sous peine
d'ailleurs de constituer une espèce de service parallèle
divorcé de tout le reste. Depuis deux ans, un an en particulier, nous
avons assumé des responsabilités croissantes auprès
d'organismes spécialisés pour l'intervention,
particulièrement du côté de l'usage non médical des
drogues. Par exemple, le ministère des Affaires sociales a
désormais assumé la responsabilité ultime et totale, dans
un sens au moins, de l'évolution, pour la prochaine année, de
l'initiative du Portage qui est un centre de traitement non médical des
jeunes qui ont des problèmes de toxicomanie.
La même chose est vraie pour un certain nombre, un nombre modeste,
mais un nombre de projets de la même nature qui n'impliquent pas des
services résidentiels comme, par exemple, le projet Alternative à
Montréal où, bien sûr, la plupart de ces problèmes
de drogue se posent au Québec. Il s'agit donc de ressources auxquelles
on peut référer des jeunes qui ont des problèmes aigus au
niveau des intoxications par la drogue.
Du côté de l'alcoolisme, il y a toujours les ressources,
premièrement, des centres hospitaliers pour la désintoxication
et, deuxièment, des centres d'acceuil Domrémy; enfin, l'ancien
réseau Domrémy qui est désormais un réseau de
centres d'accueil et qui particulièrement à Montréal,
comporte des ressources importantes pour la réadaptation.
Evidemment, il s'agit là de tâches extrêmement
difficiles, que la réadaptation soit de l'alcoolique ou du toxicomane.
Ce sont des processus au sujet desquels on a encore beaucoup de choses à
apprendre pour vraiment avoir des solutions satisfaisantes. Malgré tout,
il existe des ressources spécialisées. Là où il
faut malheureusement noter, peut-être, une plus grande carence, c'est
dans l'accessibilité à des ressources de consultations
spécialisées qui permettraient d'intervenir auprès des
familles, par exemple.
Le député de Taschereau mentionne que ce n'est pas souvent
sans raison que cela arrive chez certains jeunes, plutôt que chez
d'autres, c'est parce qu'il est question de mode, de style de vie et cela
s'applique indifféremment à tous les jeunes. Malgré tout,
on remarque qu'il y a seulement certains jeunes pour qui cela devient un
problème et c'est parfois attribuable à leur milieu familial, pas
entièrement, et même si ce n'est pas le cas, on peut trouver une
partie de la solution dans le milieu familial.
Or, l'intervention auprès du milieu familial se heurte à
deux difficultés; d'une part, c'est une intervention de caractère
très spécialisé, c'est-à-dire qu'il faut un
personnel qui a reçu une formation vraiment très
spécifique pour se permettre de faire une intervention comme
celle-là. Ce qu'il faut faire auprès de la famille c'est qu'il
faut l'intégrer, la famille, dans un plan de traitement et de
réadaptation. Il faut en quelque sorte donner à la famille une
aide et des indications ou une formation presque, ou un début de
formation, une amorce de formation qui lui permettra de compléter
l'intervention des services de santé ou des services sociaux. Ce genre
de personnel bien entraîné est en très petit nombre au
Québec; on compte quelques poignées d'individus qui peuvent faire
ce travail avec succès.
Deuxièmement, c'est un travail très intense. Il ne s'agit
pas d'avoir une entrevue avec la famille tous les trois mois. Ce sont des
séances de thérapie, en quelque sorte, qui peuvent être
hebdomadaires et qui peuvent s'étendre sur six mois, sur un an. Alors,
on se rend compte, si on ne veut pas se raconter des histoires et en
dépit des ressources importantes qui sont attribuées aux centres
de services sociaux, quelque 65 millions dans l'ensemble du Québec
et on traite là d'un problème de toxicomanie ou
d'alcoolisme; il y a d'autres problèmes, évidemment, pour
lesquels le même type d'intervention pourrait être souhaitable
on se rend compte qu'on parle là d'un ordre de grandeur de
ressources qu'il n'est tout simplement pas réaliste d'envisager pour
l'immédiat.
Je crois qu'il faut quand même le dire, parce qu'on remarque un
sentiment assez général de désillusion dans beaucoup de
milieux, et même parfois au sein du ministère et chez celui qui
vous parle, relativement à la capacité des services sociaux de,
si on me passe l'expression, de livrer la marchandise. Je pense qu'il faut,
évidemment, conserver une attitude très critique vis-à-vis
de n'importe quelle activité professionnelle pour s'assurer quelle
répond aux objectifs, mais il ne faut pas être injuste non plus et
chercher des résultats que le système actuel est tout simplement
incapable de fournir. Etant donné la disponibilité de
professionnels formés, la disponibilité des ressources, on va au
plus pressé, malheureusement.
Je crois qu'il faut être très candide vis-à-vis
cette carence qui existe encore. Ce n'est pas l'addition de 5% ou de 10% de
plus de ressources qui nous amènera des solutions, c'est
véritablement une modification et un développement très
considérable sur le plan de la formation professionnelle comme sur le
plan des budgets.
Je crois que, même si nous sommes en passe de trouver des
solutions à peu près satisfaisantes, quant à certains
aspects des services sociaux touchant des clientèles bien
délimitées à l'intérieur des centres d'accueil, ou
par des services à domicile, etc., tout ce domaine de l'aide
professionnelle
aux individus et aux familles demeure un "pays" sous
développé, une région sous-développée de
l'ensemble des services sociaux.
D'ailleurs, c'est un sujet auquel les centres de services sociaux
travaillent, c'est-à-dire sur lequel une réflexion se fait, des
documents se préparent. Nous aurons durant les prochaines années,
à de nombreuses reprises, à évaluer si les efforts que
nous consentons sont suffisants. Mais il est clair que la déception et
le fait que nos appétits sur ce sujet demeurent insatisfaits sont
attribuables non à l'incapacité des gens de faire ce qu'ils
doivent faire, mais tout simplement à une absence encore
considérable de ressources tant sur le plan humain que sur le plan
matériel.
L'éducation sexuelle
M. Charron: M. le Président, j'aurais une dernière
question sur ces services sociaux en milieu scolaire. J'aimerais
connaître le développement qu'a connu, au cours de l'année
dernière, et qu'on entend lui faire connaître à nouveau, le
programme d'éducation sexuelle dont on avait commencé à
parler l'année dernière. Que s'est-il produit de nouveau cette
année à ce chapitre?
M. Forget: Ce qui s'est produit de nouveau, c'est qu'au niveau de
l'instrumentation on a convenu de mettre la pédale douce sur le
diaporama qui avait provoqué tant de discussions.
M. Charron: En quoi?
M. Forget: Parce que les commissions scolaires ont reçu la
directive de ne pas prolonger l'utilisation de ces documents, il fallait qu'il
y ait une acceptation des milieux scolaires, des comités de parents. Il
y a eu de l'inquiétude à cause des discussions publiques;
certains comités de parents étaient craintifs. Il semblait, en
tout cas, que l'insistance sur ce document devenait une pierre d'achoppement
qui paralysait toute la programmation.
M. Charron: Je pose la question bien claire: Voulez-vous dire que
les craintes exprimées par certains groupes de parents l'ont
emporté sur la satisfaction que d'autres groupes de parents avaient
exprimée en voyant le ministère intervenir dans ce dossier?
M. Forget: II faut préciser ici qu'on ne doit pas
transformer un programme d'éducation qui porte sur un sujet quelconque,
et sur ce sujet en particulier, en une bataille pour un instrument
d'information. Il est clair que le diaporama avait ses défenseurs et ses
adversaires. Je crois que c'était un débat qui était
largement faux, en ce sens que l'objectif visé n'est pas que tout le
monde voit le diaporama, mais c'est que l'éducation dans le domaine de
la sexualité se fasse à un âge où elle peut
être indispensable pour éviter des problèmes importants. Et
très certainement cette éducation est nécessaire. Mais le
débat auquel nous avons assisté l'an dernier ne portait pas sur
l'essence du problème, l'objectif même que l'on visait; on
prétendait être d'accord avec l'objectif et on faisait tourner le
débat sur un instrument d'information. L'instrument est très
secondaire par rapport à l'objectif et nous avons jugé qu'il
était possible et souhaité que l'objectif continue d'être
poursuivi de la même façon, sans nécessairement polariser
tout le débat sur l'utilisation de cet instrument pédagogique
parmi d'autres.
Donc, des efforts sont faits pour...
M. Charron: Par quels instruments a-t-on remplacé
celui-là?
M. Forget: II n'est pas éliminé, il continue de
demeurer un instrument parmi la liste des documents utilisables. Dans certaines
régions, il continue d'être utilisé. Il y a une plus grande
autonomie régionale pour la planification des stratégies, disons,
qui a été admise cette année. Selon l'approche, les
commissions scolaires acceptaient, ou le personnel qu'elles avaient
déjà impliqué là-dedans acceptait ou n'acceptait
pas ce document; il utilisait, par exemple, le document "Judith et Pierre" qui
est un autre petit film qui met peut-être plus l'accent sur
l'éducation sentimentale. Donc, l'éducation sexuelle devient un
élément parmi tout le reste de l'approche de l'éducation
des adolescents. Ce document semble moins menaçant dans certaines
régions. Alors, des régions vont l'utiliser...
M. Charron: Parce qu'il est un peu plus à l'eau de
rose.
NI. Forget: C'est cela, c'est peut-être moins
menaçant pour une première approche. De toute façon, le
diaporama n'est pas retiré officiellement mais il est moins
imposé; au début, l'insistance était assez forte de partir
de cela pour avoir une action commune dans toutes les régions.
Actuellement, c'est varié mais une évaluation se continue. J'ai
vu, cette semaine, un gros document où chaque région avait
évalué, pour elle-même, le type d'intervention qu'il y
avait eu durant l'année, l'impact. C'est une analyse à partir de
l'évaluation faite par les étudiants approchés et par les
parents, parce que, dans certaines régions, les parents sont
invités à l'école, aussi, pour des activités
conjointes avec leurs grands enfants. L'évaluation avait
été faite et par les parents et par les enfants, compilée
régionalement et adressée au ministère.
M. Charron: Cette compilation est favorable à la poursuite
du programme?
M. Forget: Elle est favorable à la poursuite du programme.
Les corrections qui sont proposées sont des corrections de
détail: des corrections sur la forme de l'approche. Sur le principe, il
n'y a aucune remise en question; la formation de personnel se continue. Je sais
qu'à chaque été il y a une session de formation; cet
été, il y aura encore une
session où des praticiens de chaque région peuvent aller
compléter leur habileté dans l'approche pour dispenser cette
formation.
M. Charron: En plus de cette session de formation, qu'est-ce
qu'on prévoit au cours de l'année financière pour laquelle
nous nous apprêtons à voter les crédits, à ce
chapitre en particulier? Est-ce qu'il y a d'autres développements,
d'autres moyens d'intervention, d'autres techniques d'intervention?
M. Forget: En termes d'instrumentation, il y a des instruments
qui s'additionnent. Il y a eu, par exemple, un document fabriqué sur les
maladies vénériennes, un document qui est aussi distribué
à l'occasion de ces programmes.
M. Charron: Prenons celui-là parce qu'il est effectivement
très important.
M. Forget: Oui.
M. Charron: Est-ce que l'utilisation d'un document sur les
maladies vénériennes, par exemple, est laissée libre
à chaque commission scolaire et à chaque directeur d'école
à la suite de la commission scolaire?
M. Forget: Ce n'est pas le directeur d'école. Pour le
document sur les maladies vénériennes, les services de
santé sont encore plus impliqués que les services sociaux comme
tels. Disons que c'est conjointement, mais le document est confié
à la garde des DSC, les services de santé, via les
infirmières qui sont en milieu scolaire. Alors, c'est une approche de
santé, surtout, qui soulève d'autres discussions.
M. Charron: Mais pour que la décision se prenne, par
exemple, de convoquer tous les étudiants et étudiantes de
secondaire IV et secondaire V d'une école à visionner ce film
dans l'auditorium et avoir ensuite une discussion sur ce qu'ils viennent
d'apprendre la plupart du temps, véritablement d'apprendre
cette décision relève des autorités scolaires. Ce n'est
pas le département de santé communautaire, ce ne sont pas les
infirmières du service de santé qui vont décider que le
film se projette dans telle école ou ne se projette pas dans telle
autre.
M. Forget: Pour l'application des programmes, ce sont des
comités conjoints dans les deux cas. Le comité conjoint, c'est un
comité qui, à la suite des contrats de services qui sont
passés officiellement chaque année, réunit paritairement
des représentants de l'école cela peut être le
principal adjoint si c'est lui qui s'occupe des services aux étudiants,
en tout cas, les personnes désignées par la commission scolaire
et des représentants du CSS ou du DSC, dans le cas de la
santé. C'est ce comité conjoint paritaire qui accepte ou qui
refuse le programme d'action de l'année. C'est un peu, disons, le juge
final là-dessus.
Généralement, pour ces approches éducatives, on
demande l'appui des comités de parents dans les écoles. Le
programme spécifique d'éducation sexuelle est toujours soumis au
comité de parents pour commentaires et pour appui. Je pense bien que si
une direction d'école s'objectait, ce serait au niveau du comité
conjoint qu'elle aurait à se défendre; c'est là que la
négociation aurait lieu.
M. Charron: Est-ce que, de façon générale,
le comité paritaire a à élaborer le programme pour
l'année, c'est-à-dire conjointement les écoles et les
services sociaux? Est-ce que, de façon générale, on
assiste à une bonne participation, à un acquiescement du
côté scolaire aux programmes sociaux
prédéterminés?
M. Forget: A ce jour, le seul problème c'est toujours
l'insuffisance de ressources. Les commissions scolaires, de plus en plus,
réalisent l'utilité des approches préventives. Il y a
quelques années, elles jouaient plutôt le rôle, disons, de
s'occuper des enfants qui dérangent les autres, de les mettre à
côté et, bon...
M. Charron: De les amuser.
M. Forget: C'est cela. Actuellement, c'est assez
dépassé, je pense. Il y a eu des négociations annuelles
qui ont refusé ce type d'assignation pour les professionnels et qui ont
présenté des programmes de prévention.
Alors, l'idée fait son chemin et il n'y a pas de poches de
résistance significatives. Par contre, il y a toujours le tiraillement
entre les différentes priorités, que tout le monde admet, mais
pour lesquelles on manque de ressources. Alors, il faut établir des
priorités parmi les priorités.
M. Charron: Bien. Je vous remercie beaucoup d'avoir
répondu à mes questions. Je suis prêt à adopter
l'élément 2 de ce programme 5.
Le Président (M. Cornellier): Elément 2,
adopté.
Programme 6, Soutien aux organismes volontaires, élément
1.
Soutien aux organismes volontaires
M. Charron: Est-ce que le ministre peut déposer une liste
des organismes de santé et des organismes sociaux qui sont ainsi
soutenus par ce programme?
M. Forget: M. le Président, on pourra en déposer
une liste. On va en faire faire des copies pour les membres de la commission,
à moins qu'on puisse le faire faire tout de suite. Dans le fond, c'est,
à peu de chose près, la liste de l'an dernier. C'est toujours
à peu près la même chose. Je peux d'ailleurs donner une
énumération.
Pour ce qui est des organismes de santé, il y a eu, en 1975/76 un
point un peu spécial, l'Année
internationale de la femme, $25 000. Cet élément ne
reparaîtra pas durant l'année courante. Les autres organismes sont
ceux qu'on retrouve d'une année à l'autre: l'Association
canadienne-française des aveugles, l'Association canadienne
d'hygiène publique, l'Association canadienne des paraplégiques,
l'Association canadienne pour la santé mentale, l'Association de la
paralysie cérébrale, l'Association des soins à domicile,
l'Association du Québec pour enfants avec problèmes auditifs,
l'Association du Québec pour les déficients mentaux, Carrefour
Adaptation, Centre de la Croix-Blanche de Montréal, Centre de la
Croix-Blanche de Québec, Conseil Saint-Jean, Ambulance Saint-Jean du
Québec, Fédération des organismes bénévoles,
Forward House, Institut national canadien des aveugles, International Grenfell
Association, les organismes bénévoles il s'agit là
des popotes roulantes le Salon de la femme, la Société
pour les enfants infirmes et un certain nombre de congrès ayant un
intérêt particulier sur le plan international ou sur le plan
scientifique: Congrès des praticiens en intervention clinique,
Conférence nationale du cancer du sein, etc. Je vous donnerai la liste.
Donc, cela épuise les crédits.
Ce sont des crédits modestes, je tiens à le signaler,
puisque cela résume le total des fonds qui sont disponibles pour des
organismes communautaires que l'on désigne, à défaut d'un
autre terme, comme privés, quoique ce sont tous, comme on le voit, des
organismes à but non lucratif, qui poursuivent des objectifs
extrêmement valables et qui, justement, parce qu'ils sont en dehors des
cadres officiels, réussissent à mobiliser des ressources
volontaires, des ressources bénévoles, des ressources
communautaires importantes. Ce que nous faisons est certainement le minimum que
nous devrions faire pour eux. Nous tentons de faire majorer ces
éléments parce que je crois que nous pouvons voir, dans tous ces
organismes, des partenaires extrêmement significatifs de l'action
gouvernementale.
Depuis plusieurs années, nous avons adopté
vis-à-vis de ces organismes une politique beaucoup plus claire qui leur
permet de répondre beaucoup mieux qu'avant à la réaction
presque instinctive du public; Si vous n'étiez pas là, le
gouvernement le ferait de toute façon. Nous avons une formule de
financement qui est liée précisément, dans la plupart des
cas, au financement qu'ils peuvent obtenir de façon volontaire des
citoyens, d'autres groupes privés, qui est d'autant plus important que
ce soutien public, ce soutien communautaire qu'ils reçoivent est
important lui-même.
Donc, c'est un argument de plus à l'appui de leurs propres
efforts. Plutôt que de décourager leurs efforts, cette formule de
financement est destinée à leur donner des raisons de plus de
conserver leurs sources de financement traditionnelles et de conserver leur
autonomie, leur indépendance vis-à-vis du ministère des
Affaires sociales.
C'est une question de crédits, M. le Président, de faire
plus ou moins, nous essayons de faire davantage. J'ai annoncé,
d'ailleurs, en février, à une période où il
n'était pas possible de faire refléter cette orientation dans le
budget mais nous croyons bien pouvoir, malgré tout, y donner
suite certainement dans le budget de l'an prochain et même dès
cette année, par des virements ou autrement j'ai annoncé
que nous ouvrons la porte de façon beaucoup plus large à des
organismes communautaires, en particulier dans le secteur des services à
l'enfance, interventions communautaires qui ont pour but, soit de
prévenir la délinquance ou des difficultés propres
à l'enfance et à l'adolescence, par l'organisation de toutes
sortes de programmes ou d'activités qui encadrent ces jeunes et qui
dirigent leurs énergies vers des buts productifs et des buts
certainement non nocifs pour la société ou des interventions qui
ont pour but de favoriser la réintégration sociale des
jeunes.
Nous avons indiqué qu'il y avait $200 000, c'est plutôt du
côté des services sociaux. Cela s'inspire du même esprit
d'appui aux organismes communautaires. Durant l'année en cours, nous
allons très certainement réviser, examiner nos politiques
à ce sujet, de manière à donner un nouvel essor à
l'appui gouvernemental aux organismes bénévoles, aux organismes
volontaires, communautaires, enfin tous ces mots sont plus ou moins
interchangeables. Nous croyons que nous sommes arrivés à une
période où, une certaine rationalisation des efforts ayant
été menée à bien du côté des
activités gouvernementales, l'application de la Loi sur les services de
santé et des services sociaux a amené une certaine
rationalisation des efforts, et que le temps est venu d'avoir une attitude un
peu plus relaxée, si l'on peut dire, un peu plus généreuse
certainement, pour permettre des activités qui ne se situent pas
précisément dans les cadres officiels et dans les cadres publics.
' II y a eu, dans le passé, une certaine réserve, du
côté gouvernemental, à ce sujet. Encore une fois,
c'était une réserve qui était dictée par le souci
de ne pas favoriser indistinctement la prolifération de toutes sortes
d'organismes qui fassent double emploi les uns avec les autres. Je crois que
nous avons dépassé cette phase et qu'il nous sera possible
d'envisager un certain développement, un certain assouplissement de
notre attitude et, encore une fois, nous en avons donné une indication,
en février, relativement aux services pour l'enfance.
M. Charron: M. le Président, je souscris très
volontiers aux objectifs énoncés par le ministre et contenus dans
le programme dont nous discutons actuellement, cette obligation morale, en fin
de compte, que quelque gouvernement que ce soit peut contracter à
l'égard de ces personnes, de façon indépendante, de
façon autonome, qui ont décidé d'intervenir sur le terrain
social. Ils occupaient parfois le terrain bien avant que l'Etat ne
découvre le besoin. Un certain nombre des orga-
nismes qu'a mentionnés le ministre sont à l'oeuvre dans le
domaine de l'action sociale depuis très longtemps. Il n'est que normal
que, tout en respectant leur indépendance et leur autonomie, il y ait un
appui, à partir des crédits publics, à l'action de ce
gouvernement puisque cette action est reconnue d'intérêt
public.
Sauf que vous remarquerez, à la lecture du programme que nous
avons devant nous, que les sommes de 1976/77 sont exactement les mêmes
que celles prévues au budget de l'année dernière et que,
donc, les organismes apprennent par le fait même, pour la plupart,
j'imagine, que la contribution de l'Etat à leur fonctionnement est
gelée à l'étape actuelle. Or, tous ces organismes
connaissent, comme n'importe quel autre organisme, une hausse de coût qui
peut être à la fois simplement due au fait qu'ils se trouvent en
1976 et qu'ils ne sont plus en 1975, les coûts ont augmenté.
D'autre part aussi, parfois on leur fait payer la note de leur propre
succès. Je veux dire que certains de ces organismes développent
des services qui correspondent tellement à un besoin de la population
que la population s'y joint très volontiers et en nombre de plus en plus
grand. Et lorsqu'ils apprennent que les crédits qu'ils reçoivent
de l'Etat sont gelés, cela veut dire que s'ils veulent offrir plus de
services, pour répondre à un plus grand nombre de gens, de la
façon dont ils veulent le faire, ils ne doivent compter que sur leurs
propres moyens.
Je souscris encore à l'idée que ces organismes, s'ils
veulent conserver leur autonomie, doivent compter sur un financement personnel,
qui leur soit propre. Ils ont chacun, par campagnes de souscription ou autres,
un moyen d'aller chercher un appui financier leur permettant de faire leur
action sociale. En 1976, ils font cace, comme n'importe quel autre citoyen ou
n'importe quel autre groupe de la société à une hausse des
coûts. Surtout, ils doivent répondre à un plus grand nombre
de gens intéressés à leur service. Et c'est uniquement sur
eux qu'ils devront compter puisque la contribution de l'Etat demeure la
même, à moins qu'il y ait eu des transferts entre les groupes. On
peut dire que chacun des organismes va recevoir, en 1976/77, la même
chose.
M. le Président, il aurait peut-être été bon
d'inclure d'autres organismes au cours de cette année.
J'hésiterais à me lancer dans une nomenclature d'organismes qui
devraient être aidés par la collectivité dans l'action
sociale qu'ils font. J'hésiterais à le faire si je n'avais pas
à l'esprit au moins un organisme qui, à mon avis, réclame
un soutien à partir de ce programme depuis quelque temps. Je sais que le
ministre d'Etat aux Affaires sociales en a été saisi
personnellement. Il s'agit de la Fédération de l'âge d'or.
La Fédération de l'âge d'or compte 92 000 membres sur le
territoire du Québec, 802 différents clubs de l'âge d'or;
16 conseil régionaux existent. C'est donc un organisme qui, dans 5 ans,
a réussi à s'implanter de façon merveilleuse, pour un
organisme volontaire comme celui-là, dans la vie collective des
Québécois. La preuve même de son succès tient au
fait, je pense, que la fédération répond à un
besoin réel d'une catégorie de Québécois que nous
ne pouvons pas ignorer.
Je sais également je le dis tout de suite avant d'entendre
la réponse du ministre d'Etat qui a été saisi du
problème lorsqu'il l'a rencontrée à son congrès
l'année dernière que la fédération
reçoit du haut-commissariat une subvention annuelle de $60 000. Ceci est
fait à cause de la vocation de loisirs que se donne la
Fédération de l'âge d'or à l'égard des
personnes âgées. Donc, le haut-commissariat répond à
un besoin. Si j'interviens ce matin au programme Soutien aux organismes
volontaires des Affaires sociales, ce n'est pas parce que j'estime que l'action
du haut-commissariat est insuffisante dans le domaine des loisirs, mais parce
que la Fédération de l'âge d'or veut elle-même se
donner son congrès a été clair l'année
dernière une vocation sociale qui dépasse celle
d'organiser des loisirs pour les personnes âgées. Autrement dit,
ces gens fédérés, ces clubs de l'âge d'or
fédérés travaillent non seulement à organiser des
loisirs pour les personnes âgées, mais ont aussi un rôle
social immense du fait qu'ils brisent l'isolement des personnes
âgées. Si cette fédération recevait un soutien du
gouvernement au chapitre des organismes volontaires dans le domaine des
Affaires sociales, elle dépasserait largement le rôle auquel elle
est cantonnée actuellement, faute de moyens, celui d'organiser les
loisirs pour une catégorie de citoyens presque abandonnés par la
collectivité. D'autre part, cela lui permettrait d'intervenir dans la
vie sociale et quotidienne des Québécois, non pas comme des
citoyens de seconde zone qu'on invite à l'occasion à
émettre leur opinion, mais comme participants à part
entière à la collectivité québécoise.
Je pense, par exemple, que la fédération, qui veut obtenir
un degré d'efficacité sociale qui lui est propre, aimerait
pouvoir intervenir sur des questions quotidiennes dans la vie des
Québécois, au nom de ses membres, au nom de ces 92 000 personnes
de 65 ans et plus, dans la plupart des cas, qui se sont regroupés pour
intervenir dans la vie sociale des Québécois.
Actuellement, leur budget, qui vient essentiellement du
haut-commissariat, ne leur permet que d'intervenir au chapitre des loisirs,
mais fort peu comme ils le voudraient je pense que cette demande
mérite d'être considérée par la commission
dans le domaine de l'engagement social et de la vie sociale des
Québécois. Ils ont demandé un appui du ministère
des Affaires sociales, je pense qu'on leur a fait entendre que celui du
haut-commissariat était l'appui gouvernemental total, mais cela les a
laissés sur leur faim et je les comprends fort bien. Et quand je lis le
budget 1976/77, j'apprends que la réponse à leur demande est
encore une fois négative.
M. Forget: M. le Président, je ne peux pas commenter plus
qu'il se doit sur une demande particulière parce que, évidemment,
cela nous entraînerait peut-être assez loin. Il demeure qu'on
comprend que quand un organisme peut s'adres-
ser à plus d'un ministère, il y a normalement une certaine
entente entre les ministères pour que les subventions viennent autant
que possible d'une seule source. Il n'y a pas de doute que la
Fédération de l'âge d'or joue un rôle
extrêmement significatif, mais je crois que l'on peut reconnaître
que ce rôle se situe très largement et de façon
prépondérante dans le secteur qui tombe sous la
responsabilité du haut-commissariat, d'où la raison, d'où
le fait que cette subvention lui vient de cette source plutôt que du
ministère des Affaires sociales.
Nous avons, dans le Soutien aux organismes sociaux, qui est
l'élément suivant, un certain nombre d'activités qui
bénéficient directement aux personnes âgées et qui
complètent sur d'autres plans les activités de l'âge d'or.
Je ne peux pas indiquer par là qu'il est absolument irrecevable de
considérer une demande venant des fédérations de
l'âge d'or. Il y a une question de disponibilités
financières et de priorités relativement à des organismes
qui bénéficient de façon traditionnelle d'un soutien de la
part du ministère des Affaires sociales.
Pour ce qui est du caractère fixe des sommes en question, je dois
attirer l'attention sur le fait qu'il y a malgré tout, à chaque
année, en plus des dépenses récurrentes qui se
répètent d'année en année, un certain nombre
d'éléments qui ne reviennent pas d'une année à
l'autre. Il y a un certain imprévu pour lequel des réserves
modestes, mais des réserves malgré tout sont ordinairement
faites, qui se chiffraient dans l'exercice précédent, par
près de $100 000. Dans la conjoncture actuelle, il a été
décidé d'utiliser en quelque sorte à la fois les
éléments non récurrents et la réserve de
l'année précédente pour permettre, dans les cas où
cela s'avérerait nécessaire, certaines majorations des
subventions individuelles.
Donc, ce n'est pas véritablement le cas que d'affirmer que chaque
groupe se verra limité par un plafond absolu égal au niveau de sa
subvention de l'année précédente. Nous avons quelques
possibilités de majoration. Encore une fois, la conjoncture est telle
que dans un domaine où nos engagements sont moins directement
contrôlables, sauf sur le plan strictement financier, il y a
effectivement un taux d'accroissement qui n'est pas celui que nous
souhaiterions trouver, mais, encore une fois, cette question fera l'objet
durant l'année d'une réévaluation. Nous avons d'ailleurs
donné des indications, comme je l'ai mentionné plus tôt,
que quant aux services sociaux, quant au soutien des organismes sociaux, des
sommes additionnelles seraient mises à la disposition des groupes qui
nous présenteraient des projets valables.
Donc nous avons carrément, publiquement, l'intention de majorer
ces sommes en utilisant tous les moyens à notre disposition.
M. Charron: Bien, M. le Président, sur le programme 6, je
n'ai pas d'autre...
Le Président (M. Cornellier): Le député
d'Outremont.
M. Choquette: M. le Président, je note, avec le
député de Saint-Jacques, qu'il y a une constante dans les
ressources mises à la disposition de ces organismes à
caractère social ou encore qui contribuent à la santé
publique par l'apport volontaire ou bénévole de certaines
personnes qui veulent se consacrer à ces oeuvres. Je me demande, M. le
Président, en dépit des observations que le ministre vient de
faire et qui indiquent certains changements dans l'attitude du ministère
à l'égard de ces organismes.
Je me demande si vraiment ces intentions de favoriser
financièrement ou autrement ces organismes à caractère
communautaire se reflètent dans la politique réelle du
ministère ou si ce n'est pas seulement, à ce moment-ci, au niveau
des intentions ultérieures du ministre. En effet, j'ai
été mis au fait que certains organismes, par exemple ceux qui
s'occupent des personnes qui souffrent de paralysie cérébrale ou
d'autres types de handicaps physiques, ont vu un certain nombre des avantages
financiers qui leur étaient autrefois consentis leur être
retirés.
On m'a fait part, par exemple, que l'Association de la paralysie
cérébrale avait un camp d'été pour les personnes
qui souffrent de cette maladie incurable et que, par suite du retrait de
certaines subventions, elle est obligée de discontinuer ses
activités.
M. Forget: Du côté des camps, je suis content que le
député d'Outremont mentionne cela, parce que cela m'amène
à commenter le régime de collaboration qui s'est établi,
depuis environ trois ou quatre ans, entre le ministère des Affaires
sociales et les organismes Centraide. Ces organismes, comme on le sait,
résultent d'un regroupement de toutes sortes de campagnes, de toutes
sortes d'organismes communautaires qui ont pour objet, soit des services de
santé ou des services sociaux ou des services d'organisation
communautaire. Depuis trois ou quatre ans, il y a, entre le ministère et
ces organismes, des réunions régulières,
périodiques où un effort est fait pour décider d'une
orientation commune, c'est-à-dire d'une orientation qui soit
complémentaire, l'une par rapport à l'autre, de chacun des
organismes impliqués, soit, d'une part, le ministère, d'autre
part, les organismes privés.
A la lumière de ces discussions, depuis environ trois ans, le
ministère a décidé de confier de façon exclusive
aux organismes privés la responsabilité d'une coordination ou
d'une organisation des loisirs, soit des enfants, soit des personnes
âgées, soit des familles. En effet, le ministère des
Affaires sociales, traditionnellement, versait aux agences sociales ou, si l'on
veut, aux centres de services sociaux des sommes représentant le
paiement de la pension, dans des colonies de vacances, d'enfants venant de
milieux défavorisés.
De son côté, Centraide de la région de
Montréal, pour ne mentionner que cet organisme, attribuait presque $1
million, à même ses propres ressources, pour les mêmes fins.
Il nous est apparu qu'il y avait un avantage certain à ce que
l'organisme Centraide soit identifié, aux yeux du public
et aux yeux de tous les intéressés, comme étant
celui qui est le chef de file de l'organisation et du financement des
activités de loisirs des colonies de vacances, pour toutes sortes de
catégories de citoyens qui peuvent en bénéficier parce
qu'ils sont à des niveaux de revenus très bas, soit parce qu'il
s'agit d'enfants qui n'ont pas de famille, qui sont dans des centres
d'accueil.
A cause de cela, les sommes que nous versions à un certain nombre
d'organismes, non seulement les centres de services sociaux, mais certains
organismes comme ceux qu'a mentionnée le député, sont
désormais données en bloc à Cen-traide qui les ajoute
à ses propres fonds et qui est en mesure, de cette façon,
d'entretenir un dialogue avec les organisateurs des colonies de vacances, de
manière à planifier un peu mieux l'organisation et la
distribution, si on peut dire, de la clientèle parmi les
différentes colonies de vacances. Cela lui permet de planifier un peu
mieux l'organisation de ces services et de s'identifier, aux yeux du public,
avec l'organisation des loisirs pour les secteurs défavorisés,
avec, bien sûr, l'assistance gouvernementale, mais sans que les
organismes publics y jouent un rôle de premier plan, mais un rôle
d'appoint.
Alors, c'est à la lumière de ce développement qui
se continue et qui sera appelé à se développer dans
l'avenir que nous avons conduit nos relations avec Centraide. Certains autres
organismes, par exemple la Société des enfants infirmes,
bénéficiaient, dans le passé, de subventions qui
étaient égales à la moitié du coût de
certaines prothèses orthopédiques, de certains équipements
orthopédiques. Après l'entrée en vigueur du régime
de prothèses et d'orthèses gratuites, administré par
l'assurance-maladie, il est évident qu'il fallait réajuster
à la baisse les subventions qui étaient destinées à
combler ce type de besoins.
Mais c'est, dans le fond, de la substitution de fonds publics pour des
fonds privés ou vice versa dans les deux cas. Il n'y a pas eu, du moins
autant que je puisse m'en souvenir, puisque je prends connaissance de chacun de
ces cas, de diminutions pour d'autres motifs dans le niveau des
subventions.
Durant la prochaine année, il va y avoir, dans nos discussions
avec les organismes Centraide, un cap important à franchir. J'ai
reçu, il y a quelques semaines, le résultat d'un effort de
planification au niveau de Centraide et où des questions fondamentales
sont posées sur l'avenir et l'organisation future des campagnes de
souscription et des organismes volontaires dans le secteur des Affaires
sociales. Les orientations qui semblent prises par Centraide sont de nature
à poser plusieurs questions fondamentales sur le rôle respectif
des secteurs "privé et public" et je n'ai pas la réponse à
ces questions. Bien sûr, je ne veux pas les trancher
unilatéralement. J'ai pris connaissance du rapport et je ne peux,
à ce moment, que noter que c'est un rapport plein d'implications pour le
rôle du ministère des Affaires sociales vis-à-vis d'un
certain nombre d'organismes que nous ne finançons pas encore
aujourd'hui, et qu'il semble que le secteur privé voudrait nous voir
assumer en totalité pour, lui, se consacrer à d'autres
priorités.
C'est lourd d'implications et cela devra être évalué
durant l'année dans le même souffle que nous
réévaluerons également l'ensemble de notre programme de
soutien aux organismes volontaires.
M. Choquette: M. le Président, les observations du
ministre des Affaires sociales m'incitent à faire les observations
suivantes à mon tour. C'est qu'il semble qu'on soit toujours devant le
même scénario un peu classique dans ce domaine.
A un moment donné, le gouvernement, par le ministère des
Affaires sociales, intervient en donnant des subventions à des
organismes. Ces organismes sont spécialisés, sont
dispersés. On cherche à rationaliser l'octroi de subventions dans
une phase ultérieure, on le donne à un organisme plus gros. Cet
organisme plus gros, qui réunit toutes sortes de vocations parfois
différentes sinon contradictoires, à un moment donné se
trouve devant une situation de goulot d'étranglement parce qu'en fait il
a de multiples fonctions à remplir à la fois. Finalement, il
s'acquitte mal de ses fonctions.
On appelle le gouvernement à la rescousse pour venir vraiment se
substituer à l'initiative individuelle ou communautaire et le
gouvernement prend en charge l'ensemble de ce qui, autrefois, incombait
à des initiatives privées ou communautaires.
Je voudrais simplement mettre le ministre en garde contre des politiques
qui l'amènent peu à peu, une fois qu'il s'est mis le doigt dans
l'engrenage, à voir tout le corps y passer, parce qu'à un moment
donné, tout incombe à l'Etat et finalement tout le monde se
retourne vers le ministère des Affaires sociales qui, lui-même,
par ses politiques, s'est fait, d'une certaine façon, l'instrument de ce
résultat ultime.
Tout le monde fait appel à l'Etat pour venir remplir pleinement,
totalement, autant sur le plan financier que sur le plan de la
réalité, des tâches qui pouvaient, si on s'était
dirigé d'une façon plus perspicace, plus sélective, plus
intelligente, plus soucieuse de reconnaître l'individualité des
initiatives qui sont prises dans différents secteurs...
Quand on regarde toute la liste des organismes que subventionne le
ministère des Affaires sociales, il faut bien admettre qu'il y a
beaucoup de gens qui s'impliquent dans une ou l'autre de ces activités
parce qu'ils ont un enfant, parce qu'ils ont un parent qui est affecté,
soit de paralysie cérébrale ou d'un autre mal. Ceci est une
motivation pour ces gens de s'impliquer, mais cela ne voudrait pas dire que ces
gens ont nécessairement la même motivation de s'impliquer dans une
affaire plus grande, plus vaste, qui prend des caractéristiques
technocratiques très prononcées.
C'est pour cela, M. le Président, que je voudrais, à ce
moment-ci, vraiment demander au ministre des Affaires sociales s'il a les
mêmes préoccupations que moi devant cette espèce d'Etat qui
devient de plus en plus considérable, qui assume de plus en plus de
responsabilités, qui se substi-
tue peu à peu aux initiatives individuelles et qui, au fond,
à la fin, finit par empêcher les initiatives individuelles ou
communautaire qui, par ailleurs, pourraient être
bénéfiques. Je sais que la solution à ces problèmes
n'est pas facile parce que, de plus en plus, dans une société qui
est nettement plus compliquée, il y a de plus en plus de groupes qui ont
de la difficulté à surmonter les exigences de la vie moderne, et
ceci pour toutes sortes de raisons, qu'elles soient de nature sociale,
physique, économique, etc. Est-ce que le ministère des Affaires
sociales n'a pas vraiment des "second thoughts", si je peux m'exprimer ainsi,
sur son espèce de propension à prendre la place d'une foule
d'autres initiatives qu'il doit laisser subsister, qu'il doit encourager, qu'il
doit favoriser sans aucun doute, financièrement et autrement?
M. Forget: M. le Président, je suis content qu'on
mentionne cela parce que c'est effectivement une source de
préoccupation. J'observe depuis quatre ans l'évolution du
succès des campagnes de souscription de Centraide, à
Montréal. Je parle de ce groupe puisqu'il s'agit du plus important au
point de vue des ressources. Il y a quatre ans, il allait chercher dans le
public environ $10 millions. On sait combien l'inflation a fait de ravages
depuis quatre ans et on remarque encore aujourd'hui que, non seulement le
résultat des campagnes mais l'objectif parce que je crois qu'ils
sont forcés à un certain réalisme se situent en
dollars à peu près au même niveau. Donc, il y a une
stagnation presque complète quant au niveau de la
générosité publique. C'est une situation qui est
préoccupante et on peut se poser des questions, comme le fait le
député d'Outremont, à savoir qu'il est sage, finalement,
pour des organismes privés, d'abandonner leur individualité,
d'abandonner ce qui fait leur attrait quand ils s'adressent au public.
Le citoyen qui se voit solliciter par Centraide ne sait plus trop bien
à quoi il donne, à quoi il contribue. Ce regroupement, que
beaucoup de gens souhaitaient comme étant une façon d'apporter
plus d'ordre, de rationalité, etc., a peut-être été,
dans le fond, un désastre pour les organismes en question puisque,
encore une fois, il est difficile de suggérer l'enthousiasme pour une
cause qui est aussi variée, qui est aussi multiforme, parfois
contradictoire dans une certaine mesure au moins. Je ne veux pas critiquer les
dirigeants de Centraide, qui ont vraiment été ceux qui ont pris
cette orientation; on sait bien que ce n'est pas une politique gouvernementale.
Il faut aussi prendre un peu de recul et regarder ce qui se fait un peu partout
en Amérique du Nord.
Or, en Amérique du Nord, les campagnes de charité, les
campagnes de souscription publiques, dans toutes les villes
nord-américaines d'importance, ont subi le même genre
d'évolution que l'on observe au Québec, à Montréal
en particulier, cette espèce de fusion de tous les organismes
volontaires au niveau des campagnes de souscription. Il y a quand même
des coûts d'organisation qui sont extrêmement lourds à
porter pour un or- ganisme pris individuellement; cela a été un
des facteurs. Est-il juste ou pas? je ne veux pas m'exprimer là-dessus,
mais cela a été quand même une force motivante. Ce que l'on
observe cependant dans la plupart des grandes villes d'Amérique du Nord,
c'est un niveau de générosité publique, et je parle aussi
des villes canadiennes parce qu'on peut dire: Aux Etats-Unis, les gens sont
généreux par suite du défaut des organismes publics de
jouer pleinement leur rôle.
Mais que l'on regarde l'Ontario, que l'on regarde les autres provinces
et on trouve un niveau de générosité publique qui
dépasse de loin celui qu'on observe au Québec. Ce n'est pas avec
beaucoup de fierté qu'on peut le dire, mais il reste que, quel que soit
le niveau de richesse d'un pays, quel que soit le développement des
politiques sociales, s'il y a une telle absence d'intérêt de la
part de la population pour compléter, enrichir ce qui est obligatoire,
universel et généralisé par des initiatives
privées, des initiatives communautaires, on peut se poser de
sérieuses questions sur la qualité de la vie sociale, de la vie
communautaire dans cette collectivité.
On n'a aucun motif de fierté quand on voit l'absence
d'intérêt qui se manifeste au moins par un niveau très bas
des contributions. Jusqu'à tout récemment, on pouvait même
faire ce reproche beaucoup plus près de chez nous quant au
niveau de la contribution moyenne des fonctionnaires de la fonction publique
provinciale et de la fonction publique fédérale à
l'intérieur même du Québec. Heureusement, je puis dire que,
cette année, un effort particulier a été fait. Au niveau
des fonctionnaires, au niveau de la fonction publique, on semble de plus en
plus sensibilisé à l'intérêt de compléter
l'action gouvernementale par des initiatives privées.
Mais on ne peut qu'être les spectateurs, en quelque sorte, si l'on
se place du point de vue gouvernemental, du point de vue de la commission des
affaires sociales. On ne peut qu'observer ce qui se passe, le déplorer,
se poser des questions sur les causes, il y a quatre ans, quand les
responsables de Centraide ont demandé au ministère des Affairs
sociales de prévoir des rencontres périodiques pour qu'on
s'ajuste, qu'on ne se contredise pas et que tout se fasse de façon
coordonnée, cela a été accepté. J'ai
participé moi-même, pendant plusieurs mois, à des
rencontres de ce genre, qui se continuent encore de nos jours. Cela
été fait dans l'esprit d'aider, dans toute la mesure du possible,
à ce que le secteur privé se choisisse des orientations qui
soient les plus susceptibles de l'aider à se valoriser auprès de
la collectivité. Malgré ces efforts, on se retrouve dans des
situations, parfois, où des organismes parfaitement valables vont
être privés d'appui. Ce n'est pas merveilleux. Si les
contributions du public sont à un niveau identique, avec l'inflation,
d'année en année, il y a de plus en plus d'organismes
privés qui ne peuvent pas vivre.
On est confronté avec des organismes je ne veux pas faire
de particularités mais je pourrais en citer quelques-uns sur la liste,
devant moi qui se
sont dit: Nous, on ne peut plus se faire financer par Centraide, on ne
peut plus se faire financer privément; si vous ne nous financez pas, on
disparaît. C'est l'engrenage inévitable où on les
gouver-nementalise, on les bureaucratise, et on n'a vraiment aucun choix. Je
pense que, dans certains cas, cela peut être une période de
transition. Peut-être qu'effectivement, le secteur privé a
assumé des responsabilités qui ne sont pas les siennes dans le
contexte actuel. Si, de toute façon, c'est le sentiment majoritaire de
l'ensemble des Québécois qu'il en soit ainsi, il faut bien en
prendre acte. Mais il ne faut pas que ce mécanisme se joue
jusqu'à la disparition totale de toute espèce d'effort
communautaire, d'effort privé, d'effort volontaire.
C'est un sujet qui me préoccupe beaucoup. Encore une fois,
l'effort de planification qui a été fait par Centraide, cette
année, pose le problème fondamental, je pense, de son
orientation. Son orientation, telle qu'elle se dessine dans ce document, va
nous amener à identifier le secteur privé à certain type
d'intervention. Est-ce que ce type d'intervention sera tel que le public va
tout à coup se découvrir un nouvel intérêt pour le
secteur privé et augmenter ses contributions et sa participation? Je le
souhaite. Je ne peux, malheureusement, en faire état ici parce que je
crois que ce document n'a pas encore été rendu public par
Centraide. On me l'a communiqué de façon confidentielle pour que
j'en prenne connaissance afin que je ne sois pas trop surpris par le
développement qui sera annoncé bientôt, mais cela demeure
aux responsables de Centraide d'en faire état.
Je crois qu'il va y avoir un certain débat public il
devrait y en avoir un cette année sur ce sujet. On devrait,
à la fin de l'année, déboucher sur des réponses,
espérons-le.
M. Choquette: M. le Président, je suis assez heureux de la
réaction du ministre des Affaires sociales à mes propres
préoccupations. Je dis, assez heureux, parce que le ministre des
Affaires sociales, par ce qu'il nous a dit, nous indique qu'il se refuse
à entrevoir que l'Etat deviendrait en quelque sorte le seul et unique
fournisseur de services sociaux ou de services de santé et que l'Etat
deviendrait le seul et unique élément qui contribuerait aux
finances de ces services sociaux et services de santé, même si ces
services gardent une certaine identité propre, une originalité
propre aussi. Mais il me semble que je décèle dans la
façon d'aborder le problème par le ministre un certain pessimisme
quant à l'avenir de cette conception. Il me semble qu'il est comme
submergé par une espèce de vague de défaitisme autant, en
somme, dans son entourage au ministère que celle qu'il constate dans le
public en général et dans certains organismes comme Centraide.
Moi, je voudrais simplement lui dire que c'est lui qui doit se faire le leader
d'une conception communautaire, d'une conception de la participation des
citoyens à leur société et qu'il doit réagir,
à mon sens, contre les tendances extrêmement bureaucratiques et
technocratiques dans l'organisation de ces services.
Pour ma part, j'aimerais beaucoup voir le ministre, autant dans son
intérêt personnel que pour la société en
général, vraiment prendre des positions publiques et affirmer que
la société n'est pas exclusivement ce que le gouvernement ou le
ministère des Affaires sociales en fait. Elle est ce que chacun en fait
et elle dépend de la participation que chacun est prêt à
faire dans une société. Si on voit parfois une situation
déplorable se développer sous nos yeux dans le domaine social ou
le domaine de la santé au Québec, on aurait bien tort, je pense,
de chercher exclusivement à faire porter les responsabilités
toujours et constamment sur l'Etat, sur le gouvernement quel qu'il soit. Je ne
dis pas cela à la décharge du gouvernement actuel dont je me
suis, d'ailleurs, désolidarisé justement parce qu'il n'a pas su,
au moment opportun, prendre ses responsabilités et affirmer des
principes fondamentaux comme celui dont je parle ce matin.
C'est la raison pour laquelle je dis au ministre actuel, pour qui j'ai
d'ailleurs de l'amitié et de la considération, que, s'il veut
échapper à son image de technocrate froid et d'administrateur
éloigné des problèmes sociaux et des problèmes de
la santé du Québec, il devrait, le plus rapidement possible,
justement prendre des positions publiques pour alerter ses concitoyens et pour
vraiment affirmer que le gouvernement ne peut pas tout faire, que le
gouvernement ne doit pas tout faire. Il devrait aussi instaurer dans son
ministère des attitudes, de la part de ses fonctionnaires, qui
éviteraient cette propension, qu'on constate à tous les niveaux,
à s'emparer peu à peu des secteurs d'activité de sorte
que, finalement, tout cela est extrêmement bureaucratisé,
entraîne des gaspillages formidables, des gaspillages, en somme, qui
n'ont jamais été estimés, mais que, je pense, on peut
mesurer facilement, même par un examen cursif des activités du
ministère des Affaires sociales. Ce n'est pas que je fasse des reproches
particuliers à des niveaux ou à des individus en particulier dans
ce ministère. C'est simplement qu'à force de bureaucratiser,
à force de technocratiser l'ensemble de l'administration de tous ces
services et à force de s'emparer de différents secteurs qui
visent à remédier à des besoins très particuliers,
on finit par avoir une espèce de magma administratif informe qui ne
donne aucun résultat pour la société.
Je veux donc, par mon intervention, encourager le ministre dans les
dispositions d'esprit qui semblent les siennes, en lui disant qu'il doit,
à mon sens, à ce moment-ci, prendre des positions vraiment de
chef, de leader de l'opinion publique pour tenter d'éviter peu à
peu cette espèce de dégringolade sur laquelle on semble
être et qui fait que de plus en plus d'organismes à
caractère spécialisé, qui remplissaient et qui remplissent
une fonction utile, sont paralysés, neutralisés, deviennent
totalement inefficaces et n'existent, en fait, que sur le papier pour
recueillir quelques subventions gouvernementales.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Taschereau.
M. Bonnier: M. le Président, quand je regarde
la typologie des organismes qui sont aidés par le
ministère des Affaires sociales, je ne vois rien de
spécifiquement relatif à la famille comme telle. Peut-être
que si on faisait la ventilation des $88 000 versés aux organismes
bénévoles y trouverions-nous des montants pour les organismes
familiaux. Ce qui me frappe, c'est que, tout à l'heure, nous avons
discuté des problèmes du milieu scolaire, et avec raison on a dit
qu'il faut absolument aider les familles à se retrouver, à faire
face à certaines de leurs difficultés. Si on le fait, c'est
certain qu'à ce moment on va aider un bon nombre d'individus à
mieux se situer dans la société. Je me demandais quels
étaient les efforts faits par le ministère des Affaires sociales
en vue d'aider certains organismes familiaux à faire un travail dans ce
sens.
M. Forget: Je référerais le député de
Taschereau au deuxième élément du programme. Il a
peut-être regardé le premier élément qui regroupe
des organismes de santé, effectivement, dans ce secteur. Ce n'est
pas...
M. Bonnier: Je n'ai pas le document.
M. Forget: ... spécifiquement la famille. L'autre
programme, l'élément 2 qui a dû être distribué
également. Je m'excuse s'il n'a pas été distribué
au député de Taschereau.
On trouvera, de ce côté, les subventions suivantes: La
Fédération du Québec pour la planification des naissances,
SOS grossesse, la Fédération des unions de familles, la
Fédération du Québec pour la planification des naissances,
les Organismes familiaux associés du Québec, le Service
d'orientation des foyers, SERENA, l'Union internationale des organismes
familiaux, et le Carrefour des familles monoparentales.
M. Bonnier: Je m'excuse.
M. Forget: Sur la deuxième page, il y a la
Fédération des familles d'accueil du Québec, où il
y a eu un congrès, une réunion d'organisation, à qui on a
donné également une subvention. Sans compter une subvention
à l'Année internationale de la femme qui, je pense, peut
être rattachée aux considérations de famille et qui a
bénéficié, en vertu de chacun des programmes, d'une
subvention de $50 000 qui a été été répartie
entre les deux éléments du programme. Donc, la plupart des
subventions à des organismes sociaux, des organismes volontaires, dans
le domaine des organismes sociaux, sont pour des organismes dits familiaux. Il
y en a très peu qui n'appartiennent pas à cette
catégorie.
J'aimerais peut-être préciser, pour donner suite aux propos
du député d'Outremont, que pour ce qui est des
déclarations sur ce sujet, il y en a plusieurs que j'ai faites dans ce
domaine. Je le réfère, en particulier, non seulement aux
publications périodiques du ministère, mais également
à une revue où l'ensemble de l'orientation que je viens de
définir a été encore plus développé il y a
un an ou un an et demi. Il s'agit de la revue Notre-Dame je crois qu'on
sait qu'elle est distribuée par les caisses populaires où
le député d'Outremont retrouvera l'essence de ma pensée
sur le sujet.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 6,
élément 1, adopté?
M. Choquette: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): Elément 2?
M. Choquette: J'aurais tout simplement une question avant
l'adoption. Je voudrais demander au ministre des Affaires sociales s'il existe,
soit au sein des organismes subventionnés par le ministère des
Affaires sociales ou autres organismes privés, ou au niveau
gouvernemental, des institutions pour recevoir des adultes handicapés
physiquement, par exemple, des adultes souffrant de paralysie
cérébrale ou d'autre maladie extrêmement grave comme
celle-là, qui en font des malades chroniques. Est-ce qu'il existe des
institutions hospitalières ou enfin à caractère social
pour recevoir ce type d'individus?
M. Forget: Oui, certainement, mais cela n'apparaît pas dans
le même programme. Nous allons voir, dans un programme subséquent,
dans les activités de réadaptation, ce qu'il y a
effectivement.
Comme exemple, le centre Lucie-Bruneau à Montréal qui est
un des organismes les plus importants de ce genre et qui assure le
fonctionnement non seulement d'un centre d'accueil, mais de centre de jour,
foyer de groupe, etc. Donc il existe des organismes comme ceux-là soit
pour les adultes, soit pour les enfants. Nous aurons l'occasion d'y revenir
ultérieurement.
Consultation psycho-sociale
Le Président (M. Cornellier): Elément 2,
adopté. Le programme 6 est donc adopté. Programme 7, Consultation
psycho-sociale. Le député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, il s'agit des budgets des
conseils de services sociaux du Québec, des 42 CSS, des quatorze...
Parce que j'ai un autre chiffre en tête, je voudrais avoir de la part du
ministre, simple formalité administrative, l'explication du transfert de
$10,4 millions.
Les catégories Traitements, Communications et Services ne
changent à peu près pas. Cette augmentation de $10,4 millions se
fait uniquement au chapitre de ce qui sera remis...
M. Forget: Est-ce que vous pourriez m'indiquer où vous
prenez ce chiffre de $10,4 millions?
M. Charron: C'est la différence.
M. Forget: L'augmentation des crédits, d'accord.
M. Charron: Oui, on la retrouve essentiellement si vous regardez
de l'autre côté, dans ce qui était appelé transferts
statutaires. 69 à 80, parce que l'augmentation ailleurs est... il y a
même une déduction au fonctionnement.
M. Forget: Ce qui se passe essentiellement, c'est que, dans le
fonctionnement, qui est la première rubrique, vous avez le coût de
certains services sociaux qui jusqu'à l'année courante
étaient assumés directement par le ministère des Affaires
sociales. Les officiers de probation, par exemple, dont les postes sont
transférés aux centres de services sociaux et qui, donc,
produisent une diminution du budget du ministère car il ne s'agit
pas de paiement de transfert et une augmentation correspondante, enfin
plus que correspondante à cause d'autres facteurs, mais certainement au
moins une augmentation correspondante dans les budgets des centres de services
sociaux.
M. Charron: D'accord.
M. Forget: Et les employés permanents, faut-il l'ajouter,
qui sont mentionnés dans ce programme... Cela porte un peu à
confusion cette présentation de 224 en 1975/76 et de 174 en 1976/77,
mais ce sont les employés permanents du ministère des Affaires
sociales imputés à ce programme. Il ne s'agit pas du nombre
d'employés permanents des centres de services sociaux, parce que de ce
côté on a beaucoup plus de monde que 174. Un des centres de
services sociaux compte plus de 1300 employés, un seul de ces centres,
c'est le plus gros, bien sûr, celui du Montréal
métropolitain. Il y a celui de Ville-Marie qui compte quelque 700
employés je crois. Ce sont les deux plus gros, mais il y a aussi celui
de Québec, celui de la rive sud de Montréal qui sont
extrêmement importants.
M. Charron: Quand vous parlez des officiers de probation, ils
sont au nombre de 80, c'est exact?
M. Forget: II y a 205 personnes dans les services de probation
dont près de 160...
M. Charron: Ceux dont on parle, qui sont l'objet du changement
ici, ceux qui...
M. Forget: L'objet du transfert? M. Charron: Oui.
M. Forget: II y en a eu 174, mais depuis que la décision
est prise, tous les postes devenus vacants à la probation ont
été remplacés par les centres de services sociaux au fur
et à mesure de l'année, ce qui fait que le service de probation
comme tel compte 175 personnes, officiers de probation, plus personnel de
soutien. Le total est 205.
M. Choquette: Est-ce que la question des officiers de probation a
été tranchée de façon définitive?
M. Forget: Elle est tranchée sur le plan administratif et
professionnel de façon satisfaisante, semble-t-il, pour tous les
intéressés.
Des discussions ont eu lieu entre les officiers de probation et les gens
des centres de services sociaux et cette activité de transfert a
été acceptée dès que les officiers de probation ont
été saisis des garanties que nous avions l'intention de leur
donner et que les centres de services sociaux acceptaient de leur donner, pour
qui est de leur travail, de leur statut professionnel, etc.
Donc, c'est en voie de règlement et c'est effectivement
réglé.
Officiers de probation
M. Choquette: Des discussions ont-elles eu lieu avec le
ministère de la Justice sur la question de savoir si les officiers de
probation pour les jeunes devaient relever du ministère de la Justice ou
demeurer au ministère des Affaires sociales ou être
affectés dans les CSS?
M. Forget: Ces discussions se sont surtout
déroulées dans le cadre de la Loi de la protection de la jeunesse
pour souligner la nécessité de distinguer une fonction de
probation. C'est-à-dire que la Loi de la protection de la jeunesse
puisse préciser une obligation pour, dans certains cas, lorsque cette
mesure est décidée par le juge, qu'il y ait un suivi et des
rapports périodiques au juge. Il faut que ces obligations soient bien
décrites, soient bien prévues et qu'elles puissent être
exécutées, comme toutes les autres mesures, par les
mécanismes des centres de services sociaux de manière à ne
pas éparpiller les responsabilités.
M. Choquette: A mon sens c'est une erreur, M. le
Président; je le dis avec beaucoup de conviction. Je pense que les
officiers de probation qui sont spécialisés auprès des
jeunes devraient plutôt relever des services du ministère de la
Justice. Je pense que le travail fondamental de ces officiers de probation les
rapproche beaucoup plus des fonctions exercées par les juges qui doivent
suivre ces cas, suivant leur évolution individuelle. Je considère
pour ma part que, encore une fois, le ministère des Affaires sociales a
versé dans le genre d'erreur qui est devenue classique chez lui et qui
fait qu'aujourd'hui le ministère des Affaires sociales passe pour un des
plus mal administrés du gouvernement. Il cherche à tout faire
à la fois, il cherche à remplir toutes les fonctions à la
fois, et ceci se solde par une inefficacité constante.
Je déplore, M. le Président, qu'on se soit enferré
dans cette erreur de maintenir la fonction des officiers de probation au sein
du ministère des Affaires sociales. Je pense, pour ma part, qu'il aurait
été beaucoup plus normal de rattacher cette fonction à
celles qui sont avant tout des fonctions judiciaires. En les mettant dans
l'ambiance des CSS, on va, encore une fois, créer de la confusion dans
des fonctions qui sont très différentes, celles des officiers de
probation et d'autres travailleurs sociaux, qui ont, évidemment, leurs
fonctions à remplir auprès de la jeunesse ou auprès
d'autres
secteurs de la société qui ont besoin de l'assistance et
de l'aide de travailleurs sociaux.
M. le Président, je dis donc que, à mon sens, le
débat n'a pas été suffisant sur cette question.
D'ailleurs, la Loi de la protection de la jeunesse est loin d'être
adoptée a ce moment-ci, elle n'est encore qu'au stade d'avant-projet de
loi; en fait, elle est encore devant la commission parlementaire conjointe de
la justice et des affaires sociales et on constate que le ministère des
Affaires sociales a précédé la loi, qui est encore
à l'étude. C'est un autre indice du caractère envahissant
que veut jouer ce ministère qui veut exercer toutes les fonctions
à la fois et d'une façon qu'on ne peut pas approuver dans
beaucoup des sphères d'activités qu'il a entreprises.
M. Forget: M. le Président, je pense que la critique du
député d'Outremont est un peu contradictoire, parce que la
pratique, dans le domaine de la probation pour les jeunes, depuis 20 ans ou
depuis qu'il s'en fait, a été d'attribuer cette activité
au ministère des Affaires sociales.
Loin de vouloir tout accaparer, le ministère des Affaires
sociales suivant en cela une attitude qui est la sienne dans tous les secteurs
d'activité, s'est départi des services, s'est départi de
la responsabilité immédiate de donner des services à la
population. Il nous apparaît qu'un ministère de l'importance
quantitative au moins du ministère des Affaires sociales ne peut pas
décemment, ne peut pas efficacement donner des services au public de
manière directe.
Il doit le faire indirectement en mettant en place des organismes qui,
eux, sont plus près des besoins, plus près de la population
qu'ils doivent desservir, et se contenter, sur le plan du ministère,
d'activités de contrôle, de surveillance, de financement et de
planification. C'est pourquoi les services de probation, qui étaient
assumés par un service à l'intérieur du ministère,
qui dépendaient d'une ligne hiérarchique extrêmement longue
entre les gens sur le terrain et le ministre lui-même, peut-être
cinq ou six niveaux hiérarchiques superposés, ne pouvaient pas
fonctionner de façon efficace. Il y avait trop de décisions qui
devaient être prises à Québec; il y avait trop de
centralisation dans une telle attitude et, effectivement, il y a eu dans le
passé beaucoup d'insatisfaction exprimée à l'endroit de
ces services.
Les individus impliqués, leurs syndicats ont accepté le
bien-fondé de ce transfert. Tout ceci a été
agréé et est effectif depuis le 1er avril de l'année
courante, 1976. Après de nombreuses discussions, de nombreuses
réserves exprimées par les officiers de probation
eux-mêmes, ils ont admis finalement que c'était effectivement la
meilleure solution.
En faisant une telle décentralisation, le ministère a
aussi pu résoudre, enfin, un problème qui était
demeuré insoluble pendant des années et des années,
c'est-à-dire l'accessibilité à des services de probation
dans des régions comme la Côte-Nord où, à cause des
échelles utilisées dans la fonction publique, des
mécanismes de recrute- ment, des lignes hiérarchiques
extrêmement longues, il n'avait jamais été possible de
recruter des officiers de probation. La Côte-Nord a actuellement des
officiers de probation, ce qu'elle n'a jamais eu dans le passé et ce qui
n'aurait pas pu être possible à moins de faire ce transfert et
cette décentralisation.
Encore une fois, lorsque le député d'Outremont affirme
qu'il s'agit d'une fonction judiciaire, il joue un peu sur les mots. Les
fonctions judiciaires sont exercées par des juges; elle ne sont pas
exercées par d'autres qu'eux. Ce serait contraire au bon sens de faire
assumer des fonctions judiciaires par du personnel autre que celui qui a la
fonction judiciaire.
Bien sûr, les juges peuvent émettre des ordonnances, rendre
des décisions. Ces décisions doivent être respectées
non seulement quand il s'agit de probation, mais dans quelque mesure que ce
soit. Ce que la loi actuelle ne prévoit pas et que la loi à la
préparation de laquelle nous nous sommes consacrés doit
prévoir, c'est que, quelle que soit la mesure choisie et
décidée par le tribunal, cette mesure doit faire l'objet d'une
application rigoureuse, d'un contrôle, d'un retour au juge, si, pour une
raison ou pour une autre, elle n'est pas respectée.
C'est dans cet esprit que nous attribuons des responsabilités aux
centres de services socieux. Nous avons bien l'intention de voir à ce
que les décisions judiciaires, lorsqu'elles doivent intervenir, soient
respectées.
L'intégration des officiers de probation permet aussi d'autres
développements qui sont susceptibles d'aider à améliorer
la qualité des services, puisque nous pouvons, dans ce contexte, plus
facilement recruter des personnes qui ont un niveau de formation plus
approprié aux tâches qui doivent être assumées.
Ce n'est pas un reproche à leur faire d'ailleurs, beaucoup
compensent ce manque de formation par une expérience fort
précieuse mais c'est un fait qu'il y a dix ou quinze ans,
même cinq ans, le recrutement des officiers de probation se faisait
parfois au petit bonheur. On ne cherchait pas particulièrement des gens
formés pour la tâche qu'on allait leur confier. Encore une fois,
pour la plupart, ils ont compensé, par une expérience
vécue, l'absence initiale de formation. C'est, d'ailleurs, pourquoi nous
pouvons les intégrer dans un cadre professionnel avec beaucoup de
confiance et que nous avons pu leur offrir des garanties du maintien de leurs
responsabilités dans le domaine de la probation. Mais il demeure que,
pour l'avenir, pour les nouveaux recrutements, le contexte professionnel dans
lequel ils vont oeuvrer est plus susceptible de favoriser l'engagement de
personnes qui ont une formation et qui sont disponibles, mais qui ne sont
peut-être pas également disponibles pour venir travailler dans un
service gouvernemental qui est un peu divorcé de tout le reste de la
réalité avec laquelle ils doivent compter, qui est
contrôlé à partir de Québec, un peu de façon
anonyme, dans une structure gouvernementale qui a la lourdeur qu'on
connaît.
Dans un contexte de décentralisation, malgré les
difficultés que je ne cherche pas à minimiser, dans le
fonctionnement des centres de services sociaux, je crois qu'il y a lieu
d'espérer, et même plus que cela, de compter sur un fonctionnement
beaucoup plus satisfaisant, beaucoup plus professionnel, beaucoup plus
sérieux et beaucoup plus près des gens.
M. Choquette: M. le Président, je ne peux pas partager
l'opinion du ministre des Affaires sociales. Je pense que les justifications
qu'il a données pour appuyer la décision qui a été
prise par son ministère sont des justifications d'ordre administratif et
syndical. Encore une fois, nous avons là vraiment un exemple des courtes
vues qui président aux décisions dans ce ministère parce
que, en fait, ce qu'on s'est demandé, c'est: Est-ce qu'il était
possible de négocier avec le groupe des travailleurs sociaux, officiers
de probation pour la jeunesse, qu'ils acceptent de s'en aller dans les CSS sans
rouspéter. C'est la question que le ministère des Affaires
sociales s'est posée.
Ce n'est pas à ce niveau que je pose le problème. Pour
moi, la question c'est une question de principe. Ce n'est pas à cause de
leurs exigences ou de leurs demandes qu'on doive s'y plier comme si
c'était là la partie importante du problème. La partie
importante du problème c'est bien plus: Est-ce que ces officiers de
probation, qui exécutent, qui vérifient les sentences ou les
ordonnances rendues par le juge, devraient être dans le prolongement de
la fonction judiciaire? A mon sens, poser la question c'est y répondre,
c'est aussi élémentaire que cela. Ce n'est pas parce que cela
s'est passé différemment au Québec depuis 20 ans qu'on
doive persister dans les erreurs qui ont existé dans le
passé.
A mon sens, le Service de probation du ministère de la Justice
était beaucoup plus apte et habile à regrouper les officiers de
probation spécialisés pour la jeunesse. On n'aurait pas dû
les envoyer dans des organismes divers et épars sur le territoire que
sont les CSS. A ce point de vue, je pense que l'avenir dira que la
décision prise par le ministère des Affaires sociales a
été une décision erronée, car c'est l'officier de
probation qui oeuvre dans les différentes régions du
Québec, dans les CSS et hors de l'orbite du ministère, et hors de
la ligne hiérarchique du ministère. On va constater, dans
quelques années, que ces officiers de probation, qui ne seront plus
groupés à l'intérieur d'un même service, vont
prendre toutes sortes de tangentes individuelles, suivant les régions
dans lesquelles ils travaillent, et là, on va se trouver devant un
fouillis d'attitudes prises par ces officiers de probation en rapport avec les
ordonnances judiciaires et l'exécution des sentences.
A ce moment-là, on s'apercevra bien qu'il est de nouveau
nécessaire de regrouper ces gens dans un service, car leur fonction fait
qu'ils doivent être groupés d'une façon homogène et
que le seul endroit où l'on puisse, d'une façon raisonnable, les
grouper d'une façon homogène, c'est au sein d'un service de
probation appartenant au ministère de la Justice.
M. le Président, je ne pense pas que le ministre, même s'il
a répondu aux exigences syndicales ou aux exigences sur le plan des
conditions de travail qui étaient posées par les officiers de
probation individuellement, ait vraiment résolu le problème sur
le plan des principes. Je déplore qu'on ait pris cette décision
prématurément avant que la Loi de la protection de la jeunesse
soit finalement adoptée, qu'on ait sauté les étapes, qu'on
nous mette devant un fait accompli, que les décisions soient prises au
moment où l'avant-projet de loi est encore sujet de discussions devant
l'Assemblée nationale. Il me semble que des députés
avaient des choses à dire sur cette question.
Mais, évidemment, l'administration, comme toujours, aura pris le
pas sur les besoins réels des gens, sur les besoins réels des
jeunes, des enfants, sur les besoins réels d'une administration de la
justice qu'il faut évidemment concevoir comme tout à fait
tempérée et compréhensive dans le domaine de la jeunesse.
En somme, on aura je pense fait des erreurs avant d'arriver aux
solutions et avant d'avoir eu un véritable débat sur la
question.
Le Président (M. Cornellier): Programme 7,
adopté?
Contribution des personnes
hébergées
M. Charron: Non, M. le Président, parce que j'aimerais
faire une proposition ici au ministre. Nous discutons des centres de services
sociaux et, d'autre part, les programmes 8, 9 et 12 que nous serons
appelés éventuellement à étudier traitent de
services sociaux qui exigent des bénéficiaires une contribution,
laquelle est administrée par les centres de services sociaux. Ce serait
peut-être ici que je pourrais avoir un certain nombre d'informations du
ministre des Affaires sociales.
M. le Président, un règlement qui date de fin
décembre 1974 oblige les bénéficiaires de certains
services sociaux à contribuer eux-mêmes financièrement, en
partie, pour le service qu'ils reçoivent. Malheureusement, nous n'avons
jamais reçu de données très précises sur la valeur
de ces contributions, la nature exacte de ces contributions, que ce soient
celles des personnes âgées, des personnes hébergées
ou des enfants en foyer d'accueil. Ce serait peut-être l'occasion de
donner, si le ministre dispose de ces statistiques et de ces chiffres, la
valeur réelle de revenu que cela peut apporter à la
collectivité.
M. Forget: II serait sûrement possible de disposer de ces
données à la séance de cet après-midi. Nous
essaierons de les faire les plus complètes possible, portant à la
fois sur les enfants et les adultes. Je prends note de la demande du
député.
M. Charron: Je voudrais savoir si le règlement qui a
finalement été émis en vertu de la loi 65, la contribution
des bénéficiaires, s'applique également aux institutions
privées.
M. Forget: Cela s'applique de la même façon aux
établissements privés effectivement, c'est-à-dire aux
établissements privés qui ont un contrat ou qui ont une relation
avec le ministère. Ce sont des établissements entièrement
privés dans le sens où le gouvernement, le ministère ne
fait aucune contribution à leur financement; ils sont autonomes sur tous
les plans et fonctionnent comme bon leur semble.
M. Charron: Mais les centres d'accueil privés au sens de
la loi?
M. Forget: Ils sont soumis exactement aux mêmes
règles.
M. Charron: Donc, l'exigence d'une directive du ministère
à l'effet que, par exemple, une personne âgée
hébergée doit disposer de $55 par mois pour subvenir à ses
besoins personnels s'impose également pour les centres d'accueil.
Quels sont les recours possibles?
M. Forget: Les recours possibles, d'abord, si c'est une question
qui peut être réglée à ce niveau, cela peut
être mais ce n'est pas une étape requise ou un
prérequis, à une autre étape une plainte qui serait
adressée à un conseil de santé et de services sociaux. Ils
ont, dans chaque région, de ces conseils, des services qui se consacrent
à examiner les plaintes et à tenter, par la voie de conciliation,
de démarches, de persuasion, d'apporter des remèdes.
L'autre recours, qui est celui prévu dans la loi et dans le
règlement, c'est une demande de révision adressée à
la Commission des affaires sociales, qui agit à titre de tribunal et qui
peut rendre une décision qui est exécutoire et qui se substitue
à la décision du centre d'accueil ou du centre de services
sociaux.
Un certain nombre de ces demandes, de ces requêtes en
révision ont été présentées
déjà à la Commission des affaires sociales. Leur nombre
est encore en croissance, c'est-à-dire que c'est un recours dont on
apprend l'existence de plus en plus largement.
M. Charron: Savez-vous si parmi ces recours dont vous parlez,
déjà déposés devant la Commission des affaires
sociales, il s'en trouve sur le sujet même dont je vous parlais,
c'est-à-dire des personnes hébergées dans un centre
d'accueil privé, au sens de la loi 65, qui porteraient plainte du fait
qu'on ne leur laisse pas les $55 par mois pour subvenir à leurs besoins
personnels? Savez-vous si la commission a été appelée
à trancher ce problème?
M. Forget: Je ne saurais pas vous dire s'il y a eu des plaintes
portant sur ce sujet. On m'a indiqué, de façon
générale, que la plupart des plaintes portent sur des
problèmes de fait quant à la détermination des revenus,
des exonérations, etc.
La plupart du temps, on dit: On veut exempter les économies ou
des choses de ce genre, ou la valeur d'une maison qui appartient à la
personne, etc. Donc, ce sont des questions de fait, mais je ne pourrais pas
vous dire si cela a porté également sur les allocations de
dépenses personnelles.
M. Charron: Effectivement, le calcul compliqué auquel il
faut se livrer pour arriver à la racine carrée X puissance Z de
ce que le bénéficiaire peut conserver dans ses poches pour vivre
pendant un mois doit amener un certain nombre de problèmes devant la
commission. J'avoue qu'il est très difficile également de
travailler pour que justice se fasse si, comme on me le dit, le
règlement s'applique à toutes les institutions, à cause
d'un autre facteur, qui n'est absolument pas dû à la technocratie
du ministère ni aux calculs difficiles des contributions des
bénéficiaires, mais bel et bien dû au climat qui peut
exister dans certains centres d'accueil, un facteur très humain.
J'ai été personnellement saisi d'un cas je ne veux
pas soulever ici de questions personnelles, même pas de mon comté
qui j'en ai la conviction, peut être à l'occasion
généralisé. Le centre d'accueil privé dont je parle
n'est pas situé dans mon comté, c'est quelqu'un de mon
comté qui m'a souligné ce problème parce qu'une personne
de sa famille s'y trouvait. Il est très difficile d'obtenir des
informations ou même un engagement de la personne à se
prévaloir, par exemple, du recours dont vous parlez, parce qu'elle
craint un climat très difficile ou, sachant très bien qu'il y a
une liste d'attente invraisemblable, elle peut se faire dire, presque sans
gêne le lendemain, de quitter l'établissement surtout s'il
est privé parce que le directeur de la maison aurait
été dénoncé. Il existe même, dans certains de
ces centres d'accueil, un climat de peur ou d'insécurité pour ces
personnes âgées.
J'ai même eu l'occasion de contacter la personne en question qui
m'a dit: Oui, c'est vrai, je dispose d'une somme vraiment inférieure
à $55 par mois, à cause du règlement de la maison en
question, un règlement interne qui n'est peut-être pas toujours
affiché et qui n'est peut-être pas vérifiable, mais je
prends la parole de cette personne âgée de 82 ans avec laquelle
j'ai parlé...
M. Choquette: On ne peut pas mentir à 82 ans.
M. Charron: Je ne pense pas. Surtout dans cette situation,
j'imagine. Du même souffle où elle me confirmait l'existence de ce
phénomène injuste à son endroit, elle me suppliait de n'en
parler à personne, parce qu'elle veut finir ses jours dans ce centre
d'accueil. Elle a dit: Si vous connaissiez le directeur de la maison ici, si
jamais il apprend que vous êtes sur ce dossier et que vous le
présentez à la commission des affaires sociale, je suis finie, je
m'en vais. C'est un peu difficile pour nous d'intervenir.
Je demande donc seulement, M. le Président, au ministre et au
fonctionnaire qui l'accompagne et qui est touché par ce problème
d'effectivement vérifier je ne veux pas faire un débat que
nous
avons eu sur ce sujet l'année dernière quant à la
somme insuffisante et au fait que je soutiens encore que c'est le ministre des
Affaires sociales qui empoche l'indexation des pensions de vieillesse des
personnes hébergées dans les centres d'accueil; cette somme
laissée aux personnes en centre d'accueil, est insuffisante, elle est
fixée par le règlement je leur demande à tout le
moins d'être vigilants pour que cette somme, aussi insuffisante
soit-elle, leur soit effectivement laissée.
Alors sans nommer de nom, parce que je dois respecter la demande de
confidentialité de la citoyenne dont je parle et du citoyen de
Saint-Jacques qui m'en avait parlé, j'invite quand même les
officiers du ministère à être vigilants. Il se trouve
et je l'affirme des centres d'accueil privés au sens de la
loi 65 où cette disposition n'est pas respectée.
M. Forget: M. le Président, je suis conscient de cette
possibilité pour des personnes âgées d'être
intimidées ou d'être simplement timides...
M. Charron: Intimidées.
M. Forget: ...devant des problèmes comme celui-là.
Il y a un certain nombre de mesures qui peuvent être prises et qui sont
effectivement prises pour éviter que des circonstances comme
celle-là se généralisent ou soient répandues. Il y
a d'abord la création des comités de bénéficiaires.
Non seulement les règlements prévoient-ils l'existence de
comités de bénéficiaires, mais des fonctionnaires du
ministère des Affaires sociales, depuis un an et demi, se sont
affairés à susciter la création et le fonctionnement des
comités de bénéficiaires que les règlements ne
peuvent que permettre. Evidemment, il ne s'agit pas de s'imposer mais de
s'assurer que des comités de bénéficiaires existent.
Ces comités de bénéficiaires permettent
d'acheminer, en respectant l'anonymat des personnes, des plaintes ou de
demander à la direction des centres d'accueil les corrections qui
s'imposent. Ceci pour un centre.
D'autre part, dans certains cas, lorsque la personne est totalement
confuse, incapable d'administrer ses biens, incapable de prendre connaissance
d'une reddition de compte, il est possible, et cela a été fait
sur une très grande échelle, de confier la gestion de cette
allocation de menues dépenses, non pas la gestion au jour le jour, mais
au moins la surveillance de sa gestion, au curateur public. Des milliers de
dossiers ont effectivement été confiés au curateur public
qui s'occupe des biens des interdits et des gens qui ne sont pas en état
de le faire eux-mêmes. De ce côté, il y a d'ailleurs eu une
accumulation. Pendant un certain temps, on aura un rattrapage à faire
pour mettre à jour un très grand nombre de dossiers qui leur ont
été confiés.
Troisièmement, il faut attirer l'attention sur le fait que la
responsabilité pour la détermination de l'allocation de menues
dépenses, de la pension ou du paiement de l'allocation de menues
dépenses, dans le cas des adultes de moins de 65 ans, repose sur le
centre de services sociaux, ne repose pas sur l'administration du centre
d'accueil lui-même.
Aussi, par un amendement que j'ai eu l'occasion de présenter,
à la fin de 1974, à la Loi sur les services de santé et
les services sociaux, l'Assemblée nationale a approuvé le
principe d'une interdiction, pour tous les membres du personnel, le
propriétaire, la direction, etc., d'accepter un don, un legs en
provenance d'un bénéficiaire d'un centre d'accueil ou d'un
établissement quelconque. Il n'y a donc pas la possibilité,
indépendamment de l'allocation de menues dépenses, qu'on puisse
laisser s'accumuler un compte avec la promesse qu'on sera sur le testament du
bénéficiaire; cela est interdit. Si on travaille dans un centre
d'accueil, si on est propriétaire d'un centre ou si on le dirige, il
n'est pas possible de recevoir des dons et des legs de la part des
bénéficiaires.
On a essayé de boucher des portes, de boucher des
possibilités. Il reste qu'il y a également des
possibilités d'appel devant la Commission des Affaires sociales. Nous
avons encouragé des groupes sociaux à s'intéresser au
fonctionnement des centres d'accueil en tout premier lieu, puisqu'il y avait
une organisation qui était disponible et désireuse d'assumer une
responsabilité de ce genre, les Chevaliers de Colomb. Ce ne sont pas les
seuls, il y a certains clubs de l'âge d'or, certains clubs sociaux qui
participent à la vie sociale à l'intérieur d'un centre
d'accueil et qui sont susceptibles de prendre connaissance de toutes sortes de
phénomènes ou de comportements qui pourraient requérir un
redressement.
Je crois que nous avons, malgré tout, une situation où les
risques sont minimisés; ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas user
d'une vigilance constante pour dépister et corriger des situations
aberrantes. Je pense, cependant, que si on fait le bilan de cette
opération de normalisation de la contribution des
bénéficiaires des allocations de menues dépenses, on peut
tirer des conclusions largement positives. Pour la première fois,
où que ce soit en Amérique du Nord, au moins, nous avons un
régime dans les centres d'accueil où la contribution du
bénéficiaire est déterminée par des règles
publiques, connues et uniformément appliquées, sujettes à
appel, qui ne constituent pas une expropriation radicale de tous les avoirs, de
tout le pécule des personnes âgées ou d'autres
bénéficiaires qui sont confiées à des centres
d'accueil.
C'était une situation extrêmement pénible qui
prévalait jusqu'à ce moment, où certaines personnes
étaient considérées soit comme de l'assistance publique,
soit considérées comme privées. Il n'y avait aucune
gradation entre les deux et celles qui étaient considérées
comme privées se voyaient littéralement, en quelques mois,
expropriées de tout leurs avoirs, pour retomber à un niveau de
dépendance absolue. D'autres, qui étaient
considérées comme publiques, souvent parce qu'on leur avait
appliqué des normes un peu arbitraires et qui étaient
peut-être dans des situations parfois
aussi avantageuses ou plus avantageuses que celles qui étaient
considérées comme privées, pouvaient se payer des voyages
en Floride, tout en étant bénéficiaires sans contribution
d'un centre d'accueil.
Je crois qu'on a là des règles qui s'appliquent maintenant
et qui sont connues, qui sont raisonnables et tellement intéressantes,
d'ailleurs, dans leur application que la province de l'Ontario a fait des
visites, durant la dernière année, ici au Québec, de
manière à examiner sur place le fonctionnement de ces
règles-là, dans le but de les adopter pour l'Ontario. D'ailleurs,
comme j'ai eu l'occasion de le signaler, la nouvelle loi fédérale
sur les services sociaux envisage, comme condition à la participation
financière fédérale, un régime analogue dans toutes
les provinces du Canada. L'inspiration de cette orientation
fédérale se retrouve dans les politiques définies au
Québec, durant les deux ou trois dernières années,
relativement à la contribution des bénéficiaires,
relativement aux allocations de menues dépenses.
Du côté de la complexité évidente de ces
règles, il y a bien peu qu'on puisse dire, si ce n'est que
nécessairement nous avons des situations qui doivent être
réglées avec minutie. On ne peut rien laisser au hasard. Si on
veut vraiment être juste, avoir les mêmes règles pour tout
le monde, compte tenu de leur condition respective, il faut être
extrêmement précis. Il est bien clair que cette partie de nos
règlements a plutôt l'apparence d'une législation de type
fiscal par la minutie avec laquelle les calculs sont décrits et cela
prend un peu d'expertise pour s'y retrouver. Encore une fois, c'est fait par
des gens qui sont spécialisés là-dedans au niveau des
centres de services sociaux et il y a une possibilité d'appel.
Les sommes qui sont fournies par les bénéficiaires sont
extrêmement importantes. J'essaierai, comme je l'ai indiqué
tantôt, de donner des chiffres pertinents là-dessus cet
après-midi. Pour ce qui est des centres d'accueil pour personnes
âgées, j'attire l'attention des membres de la commission sur le
fait que ce que nous avons ici, ce sont les crédits nets, la
contribution nette du ministère, mais que le coût de ces services
est beaucoup plus élevé. Du côté des adultes en
particulier, leur contribution aux services d'héberge- ment est entre
$50 millions et $60 millions par année.
C'est donc un élément extrêmement important non
seulement pour son impact financier, mais également pour établir
une certaine équité entre ceux qui sont admis dans les centres
d'accueil et ceux qui n'y sont pas admis. En effet, il s'agit d'une
minorité qui est admise et nous ne voulons pas, par des règles
financières trop différentes, étant donné les
politiques de prestations sociales aux personnes âgées, augmenter
l'incitation à l'institutionnalisation et au phénomène de
dépendance qui s'accompagne nécessairement de
l'institutionnalisation.
M. Charron: M. le Président, puis-je demander, avant la
suspension de la séance, que, cet après-midi, on nous fournisse,
en plus de ce qui a été fourni là, un tableau des
"affections", si c'est le bon mot à dire? A quoi sont affecté les
différents travailleurs des centres de services sociaux? Est-ce qu'on a
le tableau général, la distribution des tâches, par exemple
du CSSMM, du CSS de chacune des régions du Québec, à
savoir combien de leurs employés sont affectés à telle
tâche, combien à telle autre tâche, auprès des
personnes âgées, auprès des enfants, etc?
Enfin, qu'on nous fournisse le plus de renseignements possible, parce
que nous n'en disposions pas lorsqu'il nous fallait préparer cette
rencontre.
M. Forget: Prévoir un niveau de détails. M.
Charron: Non, non je ne demande pas... M. Forget: De façon
générale. M. Charron: Oui.
M. Forget: On suspend jusqu'à deux heures trente? Ah
non.
Le Président (M. Cornellier): Suspension de la
séance jusqu'à seize heures, soit après la période
des questions.
(Suspension de la séance à 12 h 34)
Reprise de la séance à 16 h 41
M. Cornellier (président de la commission des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux. Nous en sommes
toujours au programme 7: Consultation psycho-sociale. Le député
de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, nous nous étions
entendus, ce matin, à la fin de la séance, pour le
dépôt d'un certain nombre de documents. Si ces documents sont
maintenant... Non. C'est le programme des services en milieu scolaire.
Ça va? ...sur un tableau général du personnel des CSS,
d'une part, semblable à ceux dont le ministre disposait aux autres
programmes et l'autre document que j'avais demandé était un
tableau des contributions des bénéficiaires dans les
différents foyers d'accueil.
M. Forget: D'abord, j'aimerais distribuer un document qui est
dressé, une fois par année, pour le mois de mars, me dit-on. Le
tableau pour mars 1976 n'est pas complété, n'est pas
terminé.
On peut distribuer celui qui donne la situation en mars 1975. M. Malo
qui est ici, le responsable de ce service, de cette direction au sein du
ministère, peut donner des indications verbales, au moins, pour donner
dans quel ordre de grandeur, là où il y a eu des
modifications.
Alors, je peux assurer la distribution de ce document.
Quant aux contributions, on n'a pas comme tel un tableau. On a trois
feuilles qui donnent un certain nombre de chiffres pertinents à ces
contributions et tout cela n'est pas entièrement détaillé,
ni entièrement complet, mais cela donne une assez bonne idée, je
crois, de l'ensemble de la question.
Et on peut peut-être aussi distribuer les trois documents en
question.
M. Charron: C'est ce que j'attendais comme information. J'en
remercie le ministre. Je suis disposé à adopter le programme
7.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 7 est
adopté.
M. Charron: Avant que vous appeliez le programme 8, M. le
Président, je voudrais informer tout de suite le ministre des Affaires
sociales qu'il n'y a rien d'assuré quant à une séance
éventuelle, ce soir. Rien n'est pas assuré non plus. Le temps est
à l'orage de l'autre côté.
M. Forget: Oui, on a vu cela.
M. Charron: Et semble-t-il qu'il va falloir attendre que nos deux
Irlandais de leaders s'entendent, ce qui n'est pas chose facile entre deux
Irlandais.
Réadaptation de l'enfance et des
adultes
Service aux enfants mésadaptés
sociaux
M. le Président, sur le programme 8, le service aux enfants
mésadaptés sociaux, je n'apprendrai rien au ministre des Affaires
sociales si je dis qu'une des caractéristiques essentielles contenues
dans le rapport Batshaw était de proposer une diversification des moyens
d'intervention dans le milieu, qu'on estimait une condition essentielle
à l'implantation d'une politique de réadaptation des jeunes qui
ont des problèmes d'adaptation. Un assez grand nombre de moyens ont
été énumérés. Le ministre lui-même en
a retenu quelques-uns dans la conférence de presse qu'il a faite en
présentant le rapport. Le mémoire de programmes du
ministère des Affaires sociales de 1972 insistait lui-même sur
l'urgence de développer un certain nombre d'autres moyens d'intervention
que les plus traditionnels: centres d'accueil, centres d'internement.
J'aimerais demander au ministre des Affaires sociales, ses intentions au cours
de la prochaine année et si les crédits de $109 284 200 que nous
nous apprêtons à voter à cet élément
prévoient la mise sur pied de telles ressources diversifiées,
dans quelle mesure et de quelle façon.
Foyers de groupe
M. Forget: Oui, la façon la plus courte de répondre
à cette question serait d'assurer la commission qu'effectivement, les
crédits qui sont envisagés pour l'année 1976/77 nous
apparaissent, à ce moment-ci, satisfaisants pour permettre une
transformation de certains établissements, un changement de certaines
vocations, la mise sur pied d'un certain nombre de foyers de groupe au nombre
de 27 au cours de l'année 1976/77, un programme de formation ou de
perfectionnement des éducateurs dans un certain nombre de centres
d'accueil pilotes dans les différentes régions, sur un plan qui
n'appartient pas strictement à ce programme, mais, comme je l'ai
indiqué ce matin, un certain nombre de subventions des organismes
communautaires susceptibles d'aider les centres d'accueil et les centres de
services sociaux dans leur tâche de réintégration sociale
des jeunes mésadaptés sociaux. Donc, dans l'ensemble, les
ressources financières dont nous disposons seront suffisantes, non
seulement à cause de l'augmentation qui est prévue au budget,
mais aussi à cause des changements qui vont intervenir et qui ont
déjà commencé d'ailleurs à être mis en
application et qui nous permettent de dégager des ressources de secteurs
relativement moins prioritaires et de les attribuer à des
activités qui nous apparaissent plus prioritaires.
M. Charron: J'aimerais une précision sur le
développement des foyers de groupe. Le ministre a précisé
27; il y a donc un plan, j'imagine, avec une indication précise dans
quelle région et dans
quel quartier des villes du Québec ces foyers de groupes seront
implantés pour qu'on en ait une idée aussi précise.
J'aimerais demander au ministre si les foyers de groupe se verront dans
l'esprit du rapport Batshaw, c'est-à-dire rattachés à des
centre d'accueil déjà existants au Québec.
M. Forget: On a déterminé déjà la
répartition par région des 27 foyers de groupe que nous
souhaitons voir créer, mais j'aimerais attirer l'attention sur le fait
que nous avons voulu nous associer dans ces décisions aux équipes
des centres d'accueil, aux centres d'accueil eux-mêmes qui assurent les
services aux mésadaptés sociaux dans les tables de concertation
qui ont été créées et pour lesquelles j'ai
désigné des présidents au cours du dernier mois.
Ces tables ont commencé à fonctionner et doivent nous
faire part de leurs recommandations, de presque leurs décisions, puisque
nous leur avons demandé de prendre toutes les responsabilités
possibles, nous avons d'ailleurs détaché, auprès de ces
tables, des représentants du ministère, de la direction
générale de programmation et du financement, de manière
que les recommandations qu'on nous fasse, émanant de ces
différentes régions, soient plus que des voeux pieux, soient
effectivement un programme d'action pour l'année en cours. D'ici le 15
juin, j'aurai ces recommandations et c'est à ce moment-là qu'on
déterminera quels sont les centres d'accueil qui, pour cette
première année, serviront en quelque sorte de plaque tournante ou
de projet pilote selon l'aspect sur lequel on veut insister.
Mais déjà dans chacune des régions, je ne sais pas
si on a ici la distribution par région des nouveaux foyers de groupe.
Effectivement, il y en a dans chacune des régions du Québec. Nous
avons, d'ailleurs, dans l'année qui vient de se terminer c'est un
fait qui n'est peut-être pas assez bien connu instauré,
durant la dernière année, une cinquantaine de foyers de groupe
dont peut-être un peu plus de la moitié étaient
destinés à des enfants déficients mentaux. Une
minorité était destinée aux mésadaptés
sociaux. Pour ce qui est des 27 dont je viens de parler, pour l'année en
cours, il s'agira tous de foyers pour mésadaptés sociaux.
M. Charron: Est-ce que la maison Saint-Jacques, sur la rue
Saint-Hubert à Montréal, est considérée comme un
foyer de groupe?
M. Forget: C'est un centre d'accueil.
M. Charron: Les foyers de groupe dont on parle, ceux qui sont
créés, vont avoir quelle ligne directrice dans leur constitution?
On peut avoir plusieurs sortes de foyers de groupes, j'ai l'impression. J'ai
déjà vu une façon de définir un foyer de groupe qui
pouvait s'étendre jusqu'à inclure la maison Saint-Jacques dont je
viens de parler. Si tel n'est pas le cas, est-ce que le ministre a
déjà une idée en tête par exemple, du nombre maximal
de jeunes qu'on devrait trouver pour que l'esprit de foyer soit...
M. Forget: II faudrait peut-être que le Dr Blan-chet, qui
m'accompagne, expose un peu les préoccupations et nos orientations de ce
côté.
En fait, le nombre maximal d'enfants ou d'adolescents, par foyer de
groupe, ne peut pas dépasser neuf comme tel. Cela peut varier entre cinq
et neuf enfants en foyer de groupe.
De plus, il y a deux types de foyers de groupe. Il y a des foyers de
groupe de transition-dépannage, pour des séjours très
courts, pour des enfants qui ont besoin d'être éloignés de
leur famille, pour des raisons diverses, et il y a des foyers de groupe,
carrément de réadaptation, qui deviennent, à ce
moment-là, une formule de rechange par rapport au centre d'accueil
traditionnel.
M. Charron: Dans ces deux catégories, est-ce qu'on se
prépare avec plus d'effort, dans le groupe de ceux qui se substituent
à l'occasion aux centres d'accueil?
M. Forget: Dans les estimations pour l'an prochain, sur les 27
foyers de groupe prévus, environ la moitié seront des ressources
de remplacement de centres d'accueil. Déjà, si vous prenez un
exemple dans la région de Québec, il y avait un centre au
Lac-Sergent, à l'institut Saint-Jean-Baptiste du Lac-Sergent, qui est
maintenant transformé en foyer de groupe. Deux foyers de groupe dans la
région de Québec sont déjà en marche et trois
autres sont prévus dans les mois qui viennent actuellement, pour
effectuer la fermeture complète de l'institut Saint-Jean-Baptiste vers
la mi-juin.
C'est donc dire qu'en septembre, il n'y aura plus d'enfants qui seront
hébergés à l'institut Saint-Jean-Baptiste. Ils seront tous
dans des foyers de groupe, dans la région métropolitaine de
Québec.
M. Charron: Où prévoit-on recruter le personnel
nécessaire à l'existence de ces foyers?
M. Forget: Evidemment, dans les solutions où c'est une
rechange aux établissements, il y a deux possibilités. Si le
personnel des établissements est déjà prêt à
travailler en foyer de groupe, à ce moment-là, il va
effectivement travailler en foyer de groupe. Si le personnel n'est pas
prêt, il est prévu un programme de formation pour ce personnel,
pour qu'il puisse éventuellement travailler en foyer de groupe.
M. Charron: Ce personnel est donc la plupart du temps
puisé à même les établissements déjà
existants. Ce sont des individus prêts à ce genre d'adaptation
à un nouveau rôle, à être responsables d'un foyer de
groupe, à travailler avec des jeunes dans le cadre d'un foyer de groupe
plutôt que dans le cadre d'un centre d'accueil.
Est-ce qu'ils demeureront des employés de centres d'accueil?
M. Forget: Oui. En fait le personnel, au fond, c'est une
corporation qui, à la place de gérer une institution, fera partie
de cette corporation qui gé-
rera des unités qui remplacent les pavillons traditionnels, ces
unités étant des foyers de groupe.
M. Charron: Est-ce qu'il en est de prévu dans le bas de la
ville de Montréal?
M. Forget: Oui, au niveau du centre d'accueil de l'avenir; la
proposition qui a été faite par le comité Batshaw, la
plaque tournante du centre d'accueil de l'avenir et le Centre
Hochelaga-Maisonneuve. De là, devrait s'établir... Il est
prévu quatre foyers de groupe qui sont proposés à la table
régionale, de concertation en mésadaptation sociale pour la
région francophone, la table francophone à Montréal.
S'il y a approbation par la table régionale, à ce moment,
nous allons procéder et l'implanter.
M. Charron: Prévoyez-vous des difficultés à
trouver les locaux devant être convertis en foyers de groupe?
M. Forget: Non, il s'agit de résidences existantes dans
des quartiers que le ministère, par les corporations, achète ou
loue. Jusqu'à maintenant, la formule locative a été celle
qui a été privilégiée. Les seuls problèmes
que nous avons donc, il s'agit de résidences existantes
existent au niveau de permis qu'émettent ou n'émettent pas des
villes. Il y a actuellement tout près d'une centaine de foyers de groupe
en opération ou tout près d'être opérés, au
Québec, c'est-à-dire qui ont passé l'étape des
permis. Nous avons eu des difficultés dans sept à huit cas qui ne
sont pas réglés encore, les municipalités n'autorisant pas
les permis pour ce type d'opération.
M. Charron: Est-ce à dire qu'on rencontre, dans certaines
municipalités, des objections semblables à celles, par exemple,
que les prisonniers dans la ville de Granby, je crois, avaient connues comme
difficultés que de pouvoir s'installer à l'extérieur?
Est-ce un problème social, la nature du foyer qui fait craindre
certaines autorités municipales à octroyer le permis?
M. Forget: Permettez-moi une impression sur cela. J'ai toujours
eu l'impression, jusqu'à maintenant, qu'il s'agissait plutôt de
problèmes administratifs liés à la nouveauté de la
formule. D'autre part, il y a un projet d'amendement à la
réglementation qui va permettre de bien situer ce qu'est le foyer de
groupe à l'intérieur de la réglementation existante des
Affaires sociales.
Il reste, sur ce point, si on me permet d'ajouter, qu'il y a, dans
certaines municipalités du Québec, une certaine concentration et
même une concentration certaine et très élevée de
familles d'accueil, de foyers affiliés et de foyers de groupe, enfin
beaucoup moins ceux-là, parce qu'ils n'existent pas en nombre comparable
et que certaines municipalités ont exprimé de l'inquiétude
vis-à-vis de la prolifération de ce genre d'arrangement qui
transforme évidemment, si elles sont présentes dans une trop
grande densité, progressivement le climat, l'environnement social d'une
municipalité.
Jusqu'à quel point ces craintes sont-elles justifiées?
C'est une question d'évaluation. C'est une question un peu
d'appréciation subjective. Il ne fait pas de doute que, dans certains
cas, une meilleure planification est souhaitable pour disperser un peu ces
installations de différentes sortes, qu'il s'agisse de familles
d'accueil et de toutes les catégories de familles d'accueil et
d'éviter que, sur une même rue, à chaque maison ou à
chaque deux maisons, ce soit une famille d'accueil. Ce n'est évidemment
pas non plus, à ce moment, le milieu normal que nous souhaitons
retrouver sur le plan de nos politiques sociales. Dans certains cas, il y a eu,
comme on vient de le signaler, des obstacles de nature un peu tatillonne, un
peu administrative. C'est à se demander si on ne cherche pas à
pénaliser, en quelque sorte, ces opérations ou à leur
imposer un régime de permis municipaux un peu trop onéreux. De
cette façon, on aboutit parfois à les confiner à des
secteurs commerciaux des municipalités. C'est une chose que nous ne
pouvons pas admettre.
Si nous observons, au cours des prochains mois, une absence de
collaboration marquée de la part de certaines municipalités,
alors, il nous faudra nécessairement intervenir auprès de notre
collègue, le ministre des Affaires municipales, et voir si la
législation, le Code municipal, le droit municipal ne doit pas
être réexaminé, parce qu'il m'apparaît que les
considérations de zonage municipal, tout en étant très
importantes, bien sûr, ne doivent pas avoir une importance telle qu'il
soit impossible d'appliquer une politique sociale qui implique, malgré
tout, des enfants, des personnes âgées, des jeunes, pour qu'ils
puissent retrouver des ressources communautaires qui sont
appropriées.
M. Charron: M. le Président, je ne peux que souscrire
à cette façon de voir les choses du ministre des Affaires
sociales.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Taschereau.
M. Bonnier: Sur la question des foyers de groupe, je ne sais pas
si on a terminé, je voudrais savoir si les personnes qui sont
envoyées là sont simplement des mésadaptés sociaux
qui sont envoyés par la cour, ou bien si les autres, par exemple un
certain nombre de "dropout" des écoles, ou même de "dropout" de
leurs familles... Il y a un certain nombre de jeunes qui existent et qui ne
savent pas où aller. Est-ce que les foyers de groupe pourraient
être accessibles à ces jeunes? Ma deuxième question: II y a
combien de foyers de groupe de prévus dans la région de
Québec?
M. Forget: Pour ce qui est de la première question, il est
clair que l'admission dans un foyer de groupe suit exactement les mêmes
règles que l'admission dans les centres d'accueil et c'est dire en
même temps que ce n'est pas seulement en passant devant la Cour de
bien-être social qu'il est possible d'être admis dans un centre
d'accueil, non plus que dans un foyer de groupe, mais on
peut l'être pour toutes sortes de raisons. Ces raisons sont celles
dont on a fait l'inventaire, en quelque sorte, lorsque cette commission-ci a
étudié la loi sur la protection de la jeunesse, ou enfin, un
projet de modification.
Ce sont donc toutes ces raisons. Le placement peut être fait sur
une base volontaire ou sur une base judiciaire, selon que la mesure est
acceptée par l'enfant, par sa famille ou non.
Donc, c'est la même règle. C'est essentiellement une
conception nouvelle du centre d'accueil, administré par un conseil
d'administration de la même façon qu'un centre d'accueil, mais
dont l'installation physique a un caractère particulier de
déconcentration.
M. Charron: M. le Président...
M. Bonnier: Je m'excuse. Ma deuxième question: Combien y
en a-t-il dans la région de Québec?
M. Forget: Cette année en 1975/76, il y a eu dix foyers de
groupe implantés dans la région de Québec sur un total de
47 et c'est environ le même nombre qui est prévu l'an
prochain.
M. Bonnier: Merci.
M. Charron: J'ai devant moi un tableau de la répartition
des places dans les centres de réadaptation pour
mésadaptés sociaux par région socio-sanitaire du
Québec. Puis-je demander au ministre s'il dispose de nouveaux tableaux
de ce genre pour l'année qui vient de se terminer au 31 mars?
M. Forget: Non. Je n'ai pas devant moi un tableau analogue
à celui qui a probablement été fourni l'an dernier, lors
de l'étude des crédits. Il faut noter, cependant, que j'ai un
total ici de 4448 places.
Il faut noter qu'un des objectifs de la réorganisation actuelle,
suite au rapport Batshaw, vise à réaménager un certain
nombre de ces places, les transformer et on se retrouvera en fin d'année
avec une situation sensiblement différente, même de celle qu'on a
actuellement.
Comme on le sait, j'ai annoncé à la mi-février
qu'un certain nombre de centres d'accueil seraient fermés. D'autres
seront fusionnés avec les centres existants.
Il y a, par ailleurs, de nouveaux centres d'accueil qui ont
été ouverts durant l'année. Je pense, en particulier, au
Pavillon du Parc, à Hull, où trois unités ont
été construites, une étant en fonctionnement, les deux
autres le seront sous peu.
Il y a eu différents autres travaux qui sont venus ajouter
également des places. Le Pavillon La Forest à Drummondville s'est
ajouté durant l'année, avec un total de 36 places.
A Berthelet, des travaux se réalisent. Ils permettent, au fur et
à mesure que les unités sont rénovées, de disposer
de places qui ne sont peut-être pas dans un nombre différent,
quoiqu'on sait que les unités ont une capacité réduite par
rapport au passé, mais certainement d'une qualité très
différente.
Enfin, il y a eu plusieurs développements; mais, la raison pour
laquelle je mentionne l'étape de concertation est pour souligner que le
tableau actuel est beaucoup moins significatif que celui que nous aurons dans
quelques mois, à cause de toutes ces transformations.
M. Charron: Au chapitre de la formation et du perfectionnement de
ceux qui travaillent ou dans les centres ou éventuellement dans les
foyers de groupe, quel est l'effort financier prévu sur les $109 000
000, qui selon le ministre, irait directement à ce qu'on appelle le
perfectionnement et la formation du personnel?
M. Forget: Le budget prévu pour le perfectionnement et
dans le cadre des efforts de réorientation est de l'ordre de $500 000.
Cette somme pourrait paraître modeste, s'il s'agissait de recycler tout
le monde en même temps, mais notre objectif n'est pas
nécessairement d'offrir un stage de perfectionnement la même
année à tout le monde. Il s'agit plutôt de concentrer cet
effort, dans un certain nombre de centres d'accueil où, en même
temps que l'effort de perfectionnement, on fera un certain effort pour
réorienter les activités de manière à augmenter les
responsabilités de ce centre d'accueil désigné,
vis-à-vis de la réintégration sociale des jeunes. Dans ce
cadre, il nous apparaît que les sommes qui ont pu être
dégagées pour le perfectionnement sont largement suffisantes pour
assurer les possibilités de recyclage envisagées.
M. Charron: Qui aura l'administration de ces sommes? Est-ce que
ce sont des sommes que le ministre s'apprête à remettre selon un
prorata aux différents centres d'accueil pour laisser aux centres
d'accueil le soin de choisir le personnel à perfectionner ou si le
ministère assumera lui-même cette fonction?
M. Forget: C'est une autre question qui fera l'objet d'une
détermination aux tables régionales de concertation, justement,
à cause de notre intention d'utiliser le perfectionnement comme un des
instruments de changement dans des centres d'accueil, sur lesquels un effort
majeur va porter durant l'année. Les tables auront donc à
déterminer l'utilisation de ces sommes en collaboration avec un CEGEP,
par exemple, où la formation pourra être donnée.
Il y a trois priorités qui ont été retenues pour le
perfectionnement des éducateurs. Il y a le travail en milieu
sécuritaire, les situations particulières auxquelles il faudra
préparer l'éducateur; il faut le former ou lui donner un
supplément de formation. Il y a le travail en foyer de groupe, qui
représente un milieu de travail nouveau, dont les exigences sont
différentes du travail beaucoup plus encadré d'un centre
d'accueil, et il y a les interventions qui sont nécessaires,
également d'un type nouveau, pour aider l'éducateur à
dépasser ces frontières traditionnelles et être un agent
de
réintégration sociale pour le jeune. Ce sont trois
domaines qui, dans la formation traditionnelle de l'éducateur au niveau,
par exemple, du technicien en éducation spécialisée, n'ont
pas été suffisamment développés pour
l'équiper adéquatement.
M. Charron: M. le Président, je rappellerai sur ce seul
sujet la remarque très pertinente contenue dans le rapport Batshaw,
quant au partage des responsabilités pour assurer le perfectionnement du
personnel. S'il est un endroit du rapport où il ne faut pas lire entre
les lignes, mais où tout est écrit noir sur blanc, c'est bien sur
la faiblesse que rapporte le comité de la façon
dont les centres d'accueil se sont acquittés de leur tâche.
Lorsque nous les avons entendus sur l'avant-projet de loi sur la protection de
la jeunesse, ils avaient, bien sûr, des excuses qui, dans plusieurs cas,
peuvent être raisonnables et valables, compte tenu du peu de temps, du
peu d'énergie ou du peu d'argent qu'ils ont pu, à un endroit ou
à un autre, consacrer à cette fonction essentielle, lorsqu'on
parle de réadaptation sociale.
Mais j'imagine que le comité Batshaw avait eu l'occasion
d'entendre le même genre de plaidoyer, mais il ne l'a pas obtenu. C'est
assez clair, précis, que le perfectionnement... Je ne dis pas qu'il ne
faut pas collaborer avec les centres d'accueil, mais il ne faut pas compter
uniquement sur les centres d'accueil pour devoir l'assurer. J'espère, me
fiant aussi aux résultats de la table de concertation régionale
qui se penche sur le sujet et en attendant son propre jugement, je me permets
tout de suite d'exprimer l'avis qu'on accordera à ce sujet du
perfectionnement du personnel la première priorité devant
conduire effectivement à toute la modification de la réadaptation
sociale au Québec. C'est évidemment beaucoup plus par ce moyen
que par le béton ou l'élargissement des fenêtres dans les
centres d'accueil que nous arriverons à un nouvel esprit, que nous
connaîtrons de nouveaux résultats.
J'ai une dernière question, M. le Président, sur cet
élément 1 du programme 8. Les prévisions que je tire d'une
monographie du ministère faisaient valoir qu'entre l'année
1973/74 et l'année 1978/79, la population des 5 ans à 17 ans dans
le Québec passerait de 1 648 193 jeunes à 1 498 223, soit une
baisse de 9%. Par contre, on prévoyait, dans le nombre total de places
dans les centre d'accueil à vocation suprarégionale ou
régionale, qu'on passerait de 7123 places en 1973/74 à 4950 en
1978/79, c'est-à-dire une diminution de 30% des places, ceci
s'expliquant, pour une part, par la baisse du nombre de jeunes à
desservir et, deuxièmement, par le fait qu'on ne veut plus continuer
à augmenter le nombre de places dans les centres d'accueil, la politique
se dirigeant beaucoup plus vers un traitement en milieu ouvert dans les foyers
de groupe que vers ce qui était, dans certains cas, M. le
Président, des prisons pour enfants. Je ne peux donc que souscrire
à cette orientation nouvelle, mais je veux demander au ministre des
Affaires sociales qui, tout à l'heure, parlait de réajustement de
places, de création de nouvelles places à d'autres endroits, si
tout cela va bien dans la ligne qui était celle énoncée en
1973/74. Je sais que les différentes régions du Québec
c'est pourquoi je demandais le tableau tout à l'heure
font, à ce chapitre particulier des places en centres d'accueil, l'objet
d'une inégalité pour ne pas dire d'une inéquité
fondamentale. Certaines régions sont surdotées et comptent un
grand nombre de places libres et d'autres régions ont des centres
d'accueil surchargés. S'il est un endroit où le Québec ne
s'est pas développé harmonieusement, c'est bien dans le nombre de
places en centres d'accueil. Donc, il se peut que, dans certaines
régions, on en soit encore, obligatoirement, à construire de
nouvelles places pour centres d'accueil et qu'à d'autres endroits, les
tables de concertation indiqueront plutôt le chemin vers le
rétrécissement ou la transformation de certains centres d'accueil
en centres de jour ouverts ou autres.
Est-ce que les prévisions d'une diminution de 30% des places au
cours des années 1973/74 jusqu'à 1978/79 nous serions
donc, M. le Président, à moitié chemin dans l'année
financière dont nous parlons sont encore celles du
ministère des Affaires sociales?
M. Forget: II est un peu tôt pour le dire puisque nous
avons demandé aux différentes autorités régionales
de se pencher sur ce problème, de consulter les groupes
intéressés dans leur milieu pour réfléchir sur ce
problème et nous communiquer le résultat de leurs
réflexions; ce travail n'est pas terminé. On peut noter
cependant, et c'est un fait qui semble venir en contradiction avec les
indications fournies dans ce rapport du ministère qui date maintenant de
quelques années, un total de places disponibles, pour toutes les
clientèles: mésadaptés sociaux, handicapés
physiques, handicapés mentaux, qui s'élève à
environ 11 500. Il n'y a donc pas eu de diminution par rapport aux chiffres
initiaux qui sont donnés. Mais, plutôt que d'affirmer, dans le
même souffle, qu'il y a eu au contraire une augmentation, je crois qu'il
serait plus approprié de s'interroger sur la fiabilité ou
l'exactitude du chiffre initial fourni dans ce document pour savoir si vraiment
nous parlons de la même chose.
Je n'ai pas demandé qu'on fasse une étude de ce genre,
encore une fois, parce que notre préoccupation actuelle n'est pas de
dresser un bilan à long terme ou des objectifs à long terme, mais
d'améliorer le fonctionnement, par exemple en particulier cette
année, des services aux mésadaptés sociaux. Dans ce
contexte, ce sont des actions à court terme que nous cherchons à
réaliser pour réorienter les ressources qui doivent être
réorientées à court terme. Pour ce qui est de la
suffisance, de la surabondance ou de l'insuffisance des ressources, je crois
que lorsque nous aurons fait ce réaménagement, lorsque nous
aurons testé certaines solutions comme le foyer de groupe, comme la
famille d'accueil, comme les programmes de réinsertion sociale, nous
serons mieux en mesure de juger ce qui est suffisant ou ce qui n'est pas
suffisant.
Par exemple, il est clair que si nous avions le succès
espéré dans la réinsertion sociale et qu'à la suite
de ça, on s'aperçoive que le séjour moyen qui peut
être, dans bien des établissements, de l'ordre de deux ans pour
des mésadaptés sociaux, peut être diminué à
un an en établissement et suivi d'une année pendant laquelle on
suit le jeune et on lui donne un certain nombre de services, mais dans son
milieu familial, dans son milieu scolaire, le nombre de places en
établissement serait immédiatement, pour cette clientèle,
au moins réduit de moitié. Tout ceci repose trop sur des
hypothèses à ce moment-ci pour qu'on puisse faire une
planification certaine. Le comité Batshaw, qui a étudié la
question relativement aux mésadaptés sociaux, a observé
une situation un peu paradoxale où un très grand nombre de places
sont disponibles, selon l'étude qu'il a effectuée. En effet,
à l'époque où il a fait son relevé, soit au mois de
mai 1975, il n'a découvert sur les 6500 places, disonsje cite des
chiffres de mémoire qui apparaissent au permis des
différents centres d'accueil pour mésadaptés sociaux, au
mois de mai l'an dernier, dis-je, donc pas durant la période
d'été, pendant la période normale d'activités
scolaires, que quelque chose comme un peu plus de 4000 jeunes. Nous nous
retrouvons effectivement dans certains cas avec un chiffre analogue.
Il semble donc y avoir des places disponibles dans les centres d'accueil
pour mésadaptés sociaux et plusieurs hypothèses peuvent
être suggérées pour expliquer cette différence entre
les chiffres qui apparaissent au permis et le nombre de places effectivement
occupées à une date donnée. Mais quelles que soient les
hypothèses qu'on formule, elles ne peuvent pas ne pas impliquer ou
comprendre la possibilité qu'il n'y ait pas une carence de places. Il
peut y avoir des difficultés de fonctionnement, des délais
d'attente, des procédures d'admission ou de sortie qui sont
inadéquates, mais quand on constate un écart de cette importance,
on peut certainement se demander s'il y a un manque de places.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, puisqu'il en est souvent
question, j'ai toujours exprimé beaucoup de réserve, beaucoup de
scepticisme vis-à-vis de la thèse que beaucoup défendent,
qu'il manque de la place dans les centres d'accueil pour
mésadaptés sociaux. Devant des constatations comme
celles-là, qui ont été faites par un groupe distinct du
ministère, qui n'avait approuvé quelque thèse que ce soit,
il est évident qu'on est justifié d'être extrêmement
prudent quand on parle d'une carence de places, quand on parle de
procédures inadéquates d'admission, de références
mal faites, de délais d'attente pour l'évaluation des cas, je
suis bien prêt à accepter ces hypothèses comme expliquant
les déséquilibres actuels.
Il n'est pas impossible aussi que certaines places qui apparaissent aux
permis et qui représentent une capacité théorique de
l'établissement aient été, dans le fond, fermées
effectivement par l'établissement qui, par ce moyen, pouvait, dans
certains cas, affecter une partie de son budget à d'autres fins comme
l'organisation, par exemple, d'un camp de vacances durant l'été.
Un certain nombre de ces développements se sont faits dans un cadre de
décentralisation qui est celui des établissements d'affaires
sociales. Il y a un certain délai entre le moment où ces gestes
sont posés et le moment où les statistiques officielles en
tiennent compte.
M. Charron: Bien, M. le Président, pour
l'élément 1.
Service aux enfants déficients mentaux
Le Président (M. Cornellier): Elément 1,
adopté. Elément 2: Service aux enfants déficients
mentaux.
M. Charron: A combien évalue-t-on le nombre d'enfants
déficients mentaux au Québec actuellement?
M. Forget: J'ai ici un chiffre global de 7013
bénéficiaires, des centres d'accueil pour déficients
mentaux et handicapés physiques et sensoriels. La ventilation, la
division entre les deux est 5500 déficients mentaux et environ 1500
handicapés sensoriels, c'est-à-dire aveugles ou sourds.
M. Charron: Vous parlez d'enfants en institution?
M. Forget: Oui, en institution.
M. Charron: Ce qui nous amènera tout à l'heure
à parler de ce qui s'appelle les services internes et de ce qui
s'appelle les services externes. J'ai été frappé, en
lisant certains papiers, avant cette rencontre de la commission, de voir qu'en
1973, encore une fois dans un document qui peut dater, mais, parmi la
population de 5 à 17 ans, on évaluait à environ 74 000 le
nombre d'enfants frappés d'une déficience légère et
de 32 738 le nombre d'enfants frappés d'une déficience moyenne
avec troubles associés ou sans troubles associés et d'une
déficience profonde.
Si tel est le cas, il est évident que le développement des
services externes au sein de l'appareil scolaire habituel, par exemple, ou
à partir des centres hospitaliers ou de centres de santé pouvant
s'ouvrir à des services externes, il me semble essentiel... C'est la
question que je vais poser au ministre: Est-ce que, sur les sommes que nous
avons là, une grande partie de ces sommes iront au développement
de services externes?
M. Forget: II y a, depuis quelque temps, un développement
de services externes qui est fortement encouragé par le
ministère. Effectivement, durant l'année qui vient de
s'écouler, il y a eu dix nouveaux centres de jour, comportant un total
de 200 places externes, qui ont été inaugurés.
Il y a aussi un certain nombre de foyers de groupe qui ont
été inaugurés, mais, pour se limiter aux centres externes,
il y a un développement marqué de services externes chez
plusieurs cen-
très d'accueil pour les déficients mentaux, de
manière à desservir une population d'enfants plus large et de
manière aussi à permettre le retour dans leur famille d'un
certain nombre d'enfants, quitte à ce qu'ils viennent au centre de jour
pour recevoir l'entraînement qui leur est nécessaire.
Il ne faut pas oublier cependant que les services donnés dans les
établissements d'affaires sociales, pour les enfants déficients
mentaux, n'ont pas pour but de couvrir ou de desservir l'ensemble de cette
clientèle de façon complète.
Les chiffres que le député de Saint-Jacques vient de citer
tout à l'heure, qui sont établis sur la base de taux de
prévalence généralement observés dans la plupart
des pays occidentaux... On sait que les quotients intellectuels ont une
distribution normale, statistiquement parlant, et qu'on peut estimer, sur la
base de cette loi de distribution statistique, le nombre probable de
déficients mentaux de différentes catégories.
Pour ce qui est des plus légers, ceux dont le quotient
intellectuel se situe en-dessous de la normale, mais de façon modeste,
si on peut dire, il ne faut pas oublier le développement
extrêmement rapide, depuis quatre ou cinq ans, peut-être un peu
plus mais particulièrement depuis quatre ou cinq ans des
classes spéciales, où non seulement les problèmes de
déficience mentale caractérisée, mais les problèmes
d'apprentissage ont été diagnostiqués et ont fait l'objet
d'une attention particulière.
Pour ce qui est de notre politique aux Affaires sociales, il nous
apparaît qu'il est immensément préférable, dans tous
les cas où c'est possible, que les services spécialisés
aux enfants handicapés mentalement soient donnés dans le cadre
d'une école, dans les classes spéciales.
Cela se fait largement, puisque quelque 70 000 enfants, dont seulement
une minorité appartient à la catégorie la plus
touchée, se retrouvent dans ces classes, à l'heure actuelle.
Donc, nous avons affaire à la clientèle la plus gravement
atteinte qui est forcément une infime minorité de l'ensemble des
enfants atteints de déficience mentale.
Sur ce plan, encore une fois, même tenant compte de la lourdeur
relative de ces cas, il apparaît souhaitable de favoriser les centres de
jour et de favoriser, en ce faisant, le maintien à domicile de ces
enfants. Les familles constituent encore c'est un point sur lequel j'ai
eu l'occasion de revenir toutes les fois que nous avons débattu cette
question à l'étude des crédits des Affaires sociales
représentent encore pour ces enfants, savoir le maintien dans
leur famille, la meilleure chance. Pourvu qu'il y ait un certain appui qui leur
soit donné, la probabilité d'un développement et d'une vie
autonome sont quand même meilleurs si l'enfant reste dans sa famille,
pourvu bien sûr que la famille bénéficie d'une certaine
assistance, d'une certaine aide pour donner à ces enfants les
apprentissages de base et donner aussi à la famille, en quelque sorte,
la patience nécessaire pour tenir le coup pendant plusieurs
années.
Il y a ce développement qui va se continuer, d'ailleurs. Le Dr
Blanchet peut peut-être...
Oui, il est prévu, en 1976/77, de quinze à vingt nouveaux
centres de jour et il est prévu 32 foyers de groupe en déficience
mentale.
M. Charron: Actuellement, combien y a-t-il de foyers de groupe en
déficience mentale?
M. Forget: II y en a entre 50 et 55, actuellement ouverts, dont
28 ont été développés cette année.
M. Charron: Est-ce qu'il arrive que des jeunes ou des mineurs,
déficients mentaux, sont dans des foyers avec des adultes frappés
de la même maladie ou de la même déficience?
M. Forget: Non par au niveau des foyers de groupe.
M. Charron: Jamais.
M. Forget: Au niveau des centres d'accueil, oui. Il y a environ,
sur les 5500 enfants, près de 800 à 1000 qui sont des adultes, de
jeunes adultes; ce sont des ex-enfants qui ont vieilli dans les centres
d'accueil. Comme il n'y avait pas de politique de réintégration
de ces enfants dans leur milieu naturel, ils sont demeurés dans les
centres d'accueil. La majorité d'entre eux ont entre 18 et 25 ans.
M. Charron: Quel est le contrôle, si on peut parler de
contrôle, que le ministère peut exercer sur.les traitements que
reçoivent ces enfants dans les foyers?
M. Forget: Sur le plan de la qualité des services, je
crois qu'il y a plusieurs précisions qu'il est possible d'apporter. Bien
sûr, les services mêmes du ministère, ceux responsables de
l'implantation et de l'organisation des services, à la programmation, ou
ceux qui sont responsables de l'inspection des établissements en vue de
la délivrance des permis, peuvent effectuer un certain contrôle et
s'assurer, sur le plan des programmes, que des programmes existent qui sont en
mesure d'être appliqués par du personnel raisonnablement
compétent.
Sur le plan de l'hygiène, de la salubrité, de la
sécurité, les services d'agrément du ministère
peuvent également faire les vérifications qui s'imposent. Il
demeure que l'intervention et l'évaluation de la qualité
professionnelle de l'intervention auprès des jeunes, lorsqu'il s'agit
d'évaluer la performance, en quelque sorte, du personnel, non seulement
sa motivation, mais, de façon plus pertinente, sa capacité sur un
plan professionnel à appliquer un programme d'éducation, un
programme d'entraînement ou de réadaptation, cela pose une
question beaucoup plus délicate.
Il y a ici une analogie évidente entre ce qu'il est possible de
faire à partir d'un organisme gouvernemental, relativement aux services
sociaux, avec ce qu'il nous est possible de faire relativement aux services de
santé, de la même façon sur un plan professionnel.
L'analogie est utile parce
qu'il s'agit, du côté de la santé, d'une situation
beaucoup plus familière, dont on connaît beaucoup plus les
limites, les contours, mais qui se pose essentiellement, de la même
façon, dans le domaine des services sociaux. Il ne nous apparaît
pas possible, à long terme, ni même souhaitable qu'un
ministère intervienne de façon autoritaire dans
l'évaluation professionnelle comme telle.
C'est la raison qui nous a poussés à accepter, sous une
forme légèrement modifiée, mais dans son essence, la
recommandation du comité d'études sur les enfants placés
en centres d'accueil pour créer un organisme paragouvernemental,
privé si l'on veut, auquel le ministère des Affaires sociales
participe, bien sûr, mais auquel, essentiellement, les différents
organismes professionnels, les corporations professionnelles, sont les
principaux contributeurs.
De la même façon que du côté de la
santé se sont développés les conseils
d'accréditation d'hôpitaux sur le plan canadien qui ont
joué un rôle significatif dans le passé pour assurer un
progrès de la qualité des interventions professionnelles. Ceci
n'a pas été fait d'abord par les gouvernements, cela a
été fait d'abord par une collaboration, une concertation des
organismes professionnels. C'est donc une invitation à cet effet que
nous avons cru opportun de lancer aux différents organismes
professionnels, aux associations d'établissements
intéressés, pour, avec eux, mais principalement sous leur
initiative ou sous leur direction, au moins, mettre sur pied un organisme qui
viserait à faire cette inspection, à développer des
standards d'intervention, à développer des moyens d'intervention,
des moyens de contrôle des interventions tels que, par exemple, un
dossier standardisé, si l'on veut, qui permettra à l'intervention
professionnelle auprès des jeunes de laisser des traces
contrôlables et vérifiables.
Alors, on a là toutes sortes de questions qui s'approchent de
très près de l'éthique professionnelle, des standards de
pratique, des normes générales qui doivent être
observées par tout professionnel comme conditions de son exercice. Je
crois que l'initiative que nous avons prise de lancer cette invitation,
j'attends encore la réponse de la plupart des organismes qui ont
été invités, mais je crois que cette initiative est celle
qui peut, à moyen terme, nous faire déboucher sur un
véritable contrôle satisfaisant. Je me suis personnellement
convaincu, à l'expérience, qu'encore une fois, il n'est pas
possible de s'attendre que des services gouvernementaux fassent ce travail. Je
suis également persuadé qu'il n'est pas désirable que les
services gouvernementaux le fassent, pour deux raisons: la première
raison est peut-être la plus naïvement plausible, quoiqu'il faudrait
beaucoup de réserves, est un peu la situation de conflits
d'intérêts, dans le sens élevé du mot, mais,
malgré tout, non moins réelle, d'un ministère qui est
appelé à s'évaluer, à se justifier lui-même,
puisque, par l'évaluation des établissements, c'est finalement
les politiques, y compris les politiques budgétaires du
ministère, qui peuvent être sujettes à des questions. Si
c'est un organisme autre que le ministère, il y a des chances que ce
soit fait dans un climat de plus grande sérénité quant aux
jugements négatifs qui doivent parfois être portés.
L'autre raison qui est peut-être plus profonde et peut-être
plus sérieuse en définitive, c'est la nécessité,
pour faire une véritable évaluation, de mettre son nez dans les
affaires personnelles de bien du monde, dans des dossiers qui doivent
être de nature confidentielle, et de le faire de façon très
profonde, très sérieuse. Je crois qu'on a éprouvé
dans le passé, dans le domaine de la santé, mais c'est
également vrai dans le domaine des services sociaux... Les
problèmes de l'enfance inadaptée, etc. sont au moins aussi
délicats que les problèmes de santé.
Je crois qu'on a toujours éprouvé, à juste titre,
une certaine réticence à ce que les inspecteurs gouvernementaux
puissent prendre copie de dossiers, connaissance de dossiers, en disposer
à leur gré et tout cela au nom du ministre, c'est-à-dire
au nom d'un grand organisme, parce que le ministre veut dire, essentiellement,
le ministère, un ministère quelconque, qu'ils puissent en
disposer assez librement pour faire des évaluations, que tout cela
circule un peu partout dans différents services.
Je crois que ce ne sont pas là des conditions propices à
maintenir le caractère confidentiel de ces données et qu'un
organisme plus petit, qui a une vocation beaucoup plus limitée à
ce genre d'intervention, ce genre d'objectif, peut respecter plus la vie
privée des citoyens qui, malgré tout, font l'objet de tout ce
contrôle.
Il faudra y mettre un peu de temps, mais je crois que nous aurons
là, dès qu'il sera possible de le faire fonctionner, un
instrument qui révélera sa valeur au cours des années de
la même façon que le Conseil canadien d'agrément des
hôpitaux a joué un rôle inestimable pour faire sortir nos
hôpitaux de l'âge de pierre, il y a déjà de cela
peut-être, dans certains cas, dix ans, vingt ans ou davantage. Je crois
que nous avons aussi, dans certaines situations, l'âge de pierre dans le
domaine des services sociaux et qu'on peut, par ce moyen, graduellement, s'en
sortir. Mais cela sera long, cela sera difficile, parce qu'il y a des
problèmes qui ne sont pas résolus. D'ailleurs, le comité
Bat-shaw, qui aurait pu envisager d'inclure dans son mandat le
développement de certains instruments, comme, par exemple, un dossier
standardisé, s'est ravisé en cours de route et en
considérant la complexité et la difficulté d'un tel
travail et le danger de le faire sous le prestige d'un comité
d'étude gouvernemental, d'imposer à la suite de cela,
pratiquement, une formule trop rigide qui doit évoluer avec le temps et
qui doit refléter toutes sortes de considérations
professionnelles.
M. Charron: Sans avoir un contrôle qui pourrait conduire
jusqu'à une évaluation des dossiers qui doivent demeurer
privés, le ministère doit certainement et peut certainement, sans
brimer la liberté de quiconque, avoir contrôle sur la
qualité professionnelle des gens opérant dans ces centres ou dans
ces foyers auprès de jeunes déficients mentaux.
Ma question est générale, mais elle peut s'exemplifier
avec le cas de l'institut Ambar de
Chambly dont le ministre a entendu parler et qui, par deux fois, en deux
années successives, revient sur le tapis.
Je sais qu'il s'agit, à l'occasion, d'un problème de
relations de travail, mais qui, d'après les informations dont je
dispose, n'est pas sans avoir d'effet sur les enfants.
C'est d'ailleurs au nom de la protection des enfants que l'un et l'autre
camp dans cet institut invoquent leurs privilèges et invoquent leurs
droits.
Je ne sais pas si la discrétion des efforts vers une
qualification professionnelle dans chacun des instituts, que cela soit Ambar ou
d'autres, dans chacun de ces foyers, dans chacun de ces centres, est
laissée à la discrétion des centres eux-mêmes et, en
particulier, de ceux qui fonctionnent à but lucratif, mais il est
évident qu'il peut devenir intéressant pour un foyer, à
l'occasion, ou pour un centre, de mettre la pédale douce sur la
formation professionnelle de ses employés pour augmenter ainsi sa
capacité de revenu à même les contributions des parents et
des fonds publics qui peuvent être, à l'occasion, engagés
dans ces centres.
J'aimerais savoir du ministre qui pourra me parler de l'institut Ambar,
tel qu'il l'a vu lui, tel qu'il l'a vécu au bout de deux ans, quel est
le contrôle et la capacité d'intervention du ministère sur
la qualification professionnelle des gens oeuvrant dans ces centres?
M. Forget: Ni plus étendu, ni moins étendu que dans
l'ensemble des centres d'accueil où effectivement la sélection,
l'embauche du personnel sont, dans tous les cas, laissés à la
discrétion de la direction, sous la réserve cependant que des
postes peuvent être approuvés ou des modifications dans les
programmes peuvent être approuvés, qui trouvent finalement leur
écho, leur prolongement dans des modifications budgétaires et
où le niveau de qualification peut être précisé
à l'occasion de telles modifications. Mais, les individus
eux-mêmes, leurs qualifications sont jugés par la direction des
établissements, dans tous les cas.
Lorsqu'il y a des raisons de croire que dans un établissement en
particulier, la direction n'a pas exercé cette discrétion de
façon convenable, on peut toujours faire des enquêtes, des
analyses de la situation, d'ailleurs on en fait continuellement sur une grande
variété d'établissements. C'est le cas, en particulier,
pour Ambar, qui a fait l'objet d'une étude, d'une analyse qui porte sur
trois aspects: la clientèle, les programmes, qui sont appliqués
dans ces établissements et le personnel, qualification du personnel,
etc. On me dit que ce rapport sera terminé vers le début de juin
et, à ce moment-là, il sera possible de tirer des
conclusions.
Evidemment, c'est un établissement dans le sens juridique du mot,
mais c'est dans le fond cinq ou six installations physiques différentes
qui regroupent 1200 enfants. C'est donc un établissement dont il n'est
pas facile de faire le tour en une semaine ou même en un mois. Cette
étude a été amorcée l'automne dernier et à
cause du fait qu'elle est compliquée et longue, étant
donné la nature de cet établissement et l'importance
numérique de sa clientèle, étant donné aussi qu'il
y a passablement d'urgence et d'autres besoins pour le personnel
impliqué, ce n'est qu'en juin que nous serons en mesure d'en tirer des
conclusions.
M. Charron: Le ministre sait par exemple qu'à la fin de
mars dernier, la direction de l'institut Ambar de Chambly a
procédé pour des raisons qui restent à expliquer à
un congédiement massif de plusieurs de ses employés. L'institut
est aux prises avec des relations de travail difficiles, comme tout le
réseau des Affaires sociales ou à peu près par le temps
qui court, mais étant donné son statut privé et à
but lucratif, il peut procéder à des modifications de son
personnel que jamais un institut public, par exemple, n'oserait faire, sans
immédiatement soumettre à l'opinion publique la question de la
qualité des services que ce centre peut offrir. Je pense que si, demain
matin, par exemple, un centre d'accueil comme Berthelet décidait de
procéder massivement, en représailles à l'égard de
ses employés, à la mise à pied de 40 ou de 45 de ses
éducateurs qui travaillent auprès des jeunes, nul doute que la
question aboutirait ici à l'Assemblée nationale.
Cette décision du conseil d'administration qui n'est
d'ailleurs par constitué comme un conseil d'administration d'un institut
privé mais, je le répète, si ce conseil
d'administration avait pris cette décision, nul doute que la question
aurait été soulevée ici parce que la disparition soudaine
de 40 ou 50 employés, qui effectuent un travail quotidien et qui
étaient donc là parce qu'ils avaient une tâche à
remplir, peut laisser perplexe sur la qualité des soins, la
qualité des services qui demeurent dans l'institut, une fois l'institut
privé de tous ces employés et d'un seul coup.
M. le Président, quand j'ai appris qu'à Chambly, le 25
mars dernier, je crois, on avait procédé ainsi à une mise
à pied massive, congédiement de plusieurs cadres,
éducateurs à l'intérieur de l'entreprise et que le nombre
d'enfants demeurant dans cet institut était le même, le
raisonnement était facile à tenir sur la qualité des
services qui pouvaient s'en venir. Ou alors ces gens étaient là
à ne rien faire ou, s'ils faisaient quelque chose auprès des
enfants, il n'y a plus personne qui le fait maintenant que l'institut, pour des
raisons "privées" ait décidé de procéder à
ce genre de... Mais voilà, parce que c'est un institut privé,
à but lucratif, il nous est impossible d'intervenir pour la santé
des jeunes qui sont à l'intérieur ou pour même exiger, de
ceux qui sont les propriétaires de cet institut, de nous garantir que
les jeunes à l'intérieur ne subissent pas les contrecoups
difficiles des relations patronales-syndicales. Je le soutiens encore. Si cela
était arrivé dans une institution publique, il y aurait eu un
tollé. Cela arrive dans une institution privée où se
trouvent des jeunes, nous sommes incapables et nous avons les mains
liées pour pouvoir intervenir. Il reste une chose aux parents, c'est
aller retirer leurs enfants de cet endroit s'ils estiment que les enfants ne
reçoivent plus les soins. Mais si ces enfants sont en institut,
c'est qu'ils ne peuvent pas recevoir les soins adéquats à
la maison, sinon ils y seraient. Quelle est la capacité d'intervention
du ministre là-dedans? Je sais qu'il a été saisi d'une
demande d'enquête publique sur cet institut, qu'il l'a refusée. Il
peut répéter ses arguments s'il le veut, mais la question se pose
toujours; celle des capacités de s'occuper de la qualité des
soins qui sont offerts à l'intérieur de ces instituts ou de ces
centres privés.
M. Forget: II y a plusieurs étapes pour plusieurs
éléments dans le raisonnement du député de
Saint-Jacques que j'aimerais relever. Premièrement, sur la question des
faits, il s'agit d'un congédiement d'un certain nombre de cadres et,
comme tel, lorsqu'il s'agit des cadres, il n'y a aucune différence dans
la capacité d'un conseil d'administration, qu'il s'agisse d'un
établissement public ou d'un établissement privé, à
faire procéder à la mise à pied des cadres.
Les cadres ne bénéficient pas de sécurité
d'emploi. Je pense qu'il est d'ailleurs impossible de concevoir un
régime où les cadres bénéficient d'une
sécurité d'emploi, si l'on veut que la responsabilité qui
est d'abord celle du conseil d'administration puisse être assumée
convenablement. C'est le conseil d'administration qui est le patron dans tous
les cas et nous allons juger de la performance du centre d'accueil non pas sur
des décisions isolées de renvoyer ou d'engager M. Untel ou M. Y,
mais en tentant de savoir de quelle façon il traite les enfants, de
quelle façon il assure l'application des programmes, et si les
programmes sont valables.
Le conseil a la liberté des moyens pour assurer ce
résultat et je serais le dernier à vouloir créer des
commissions d'enquête chaque fois que des cadres sont mis à pied.
Si les motifs apparaissent à leur face même comme étant des
motifs inappropriés, injustifiés, on peut se poser des questions
et on peut faire des enquêtes, mais je n'ai certainement aucune
intention, de manière générale, de protéger la
sécurité des cadres lorsque ceux qui ont la responsabilité
des services le conseil d'administration jugent que des cadres en
particulier ne sont plus en mesure de les aider à assumer ces
responsabilités.
Personne n'est irremplaçable et je pense bien que la direction de
ce centre d'accueil réussira à remplacer ceux qui ont
quitté par des cadres qu'il jugeront plus appropriés. Il demeure
que, depuis un an, on me signale qu'à Chambly en particulier, puisqu'on
a posé la question des enfants, sur 240 enfants, 135 fréquentent
maintenant les écoles publiques. Ceci veut dire que, pour ce qui est des
responsabilités des éducateurs de l'établissement, depuis
un an, leur fardeau et le niveau de leurs responsabilités se sont
considérablement amenuisés. Cette fréquentation de
l'école publique s'accorde parfaitement, évidemment, avec
l'orientation des politiques de scolarisation optimale des enfants qui sont
confiés aux centres d'accueil. C'est là un facteur dont il faut
tenir compte dans l'appréciation de la situation.
Mais je suis loin, sur un plan plus général, de voir dans
tout congédiement un problème a priori autre que syndical, si on
veut. Je crois que si on s'intéresse à la qualité des
services, c'est un jugement que peut fort bien porter un conseil
d'administration, décidant que tel ou tel individu n'est plus
approprié aux exigences propres à l'établissement et qu'il
souhaite le voir ailleurs.
J'ai eu à déplorer, au cours des dernières
années, des situations où des personnes, dans des centres
d'accueil ou des centres hospitaliers publics, étaient même
accusées, devant les tribunaux, de voies de fait, d'avoir battu soit des
adultes, soit des enfants, soit des déficients mentaux et où ces
gens demeuraient, légalement et syndicalement parlant, des
employés du même établissement où ils avaient commis
leur crime.
Dans des cas comme ceux-là, ce n'est que lorsqu'un jugement final
est prononcé... On a beau avoir tous les doutes, tous les
soupçons et même toutes les preuves que l'on voudra, il reste que
c'est seulement le jugement d'un tribunal criminel qui finalement peut
permettre au conseil d'administration et même au ministère
d'interdire que les contacts se continuent entre ces gens-là et la
clientèle, les bénéficiaires.
Il me semble que, du côté des congédiements, au nom
même de la qualité des services, nous avons une situation qui ne
pèche certainement pas par excès de congédiement, mais
plutôt par excès de sécurité. J ai eu plus souvent
l'occasion, encore une fois, de le déplorer sur ce plan-là que
sur l'autre.
M. Charron: M. le Président, j'ai terminé ce
programme, l'élément 2.
Service aux enfants handicapés moteurs ou
sensoriels
Le Président (M. Cornellier): Elément 2,
adopté. Elément 3: Services aux enfants handicapés moteurs
ou sensoriels.
M. Charron: M. le Président, je n'ai pas de question
à ces deux éléments pour une seule raison, c'est que le
discours inaugural nous annonce une loi, au cours de cette session, à
l'intention des gens visés habituellement par ces deux
éléments. Comme j'ai à peu près l'assurance morale
que nous aurons, non seulement l'occasion de débattre, mais aussi
d'entendre des gens directement visés par cette loi, en commission
parlementaire, au cours de la session, comme je l'ai fait pour l'aide sociale,
je préfère attendre d'avoir cette discussion avec les gens
eux-mêmes lorsqu'ils seront ici.
J'ai une seule question, toutefois, que je m'en voudrais de ne pas poser
à l'élément 4. J'aimerais connaître l'attitude du
ministre des Affaires sociales concernant certaines réclamations
émanant de l'Association des foyers affiliés, qu'il
connaît, et qui a fait un certain nombre de demandes précises de
modification de la réglementation concernant la sécurité
des gens qui opèrent ces foyers affiliés auprès de
personnes déficientes mentales ou, à l'occasion, qui peuvent
devenir dangereuses.
Ces gens m'ont exprimé, lorsque je les ai rencontrés, une
inquiétude, quant à l'insécurité où ils se
trouvent à l'occasion, d'être débordés par une, deux
ou plusieurs personnes vivant dans ces foyers affiliés à des
centres hospitaliers pour malades mentaux et qui réclament du
ministère le droit d'obtenir, dans les cas où un malade devient
particulièrement inquiétant pour la sécurité du
personnel et des gens qui opèrent dans ces foyers affiliés, le
droit de réclamer d'un centre hospitalier la mise en observation,
pendant un délai raisonnable, de certaines des personnes dont ils ont la
charge.
Ce n'est pas la première fois, disent-ils, qu'ils ont cette
inquiétude, mais, étant donné certains
événements tragiques des dernières semaines qui ont
même abouti a la mort de certaines personnes dans des foyers
affiliés, causée par un excès d'un malade dont ils avaient
la responsabilité, j'ai cru voir, dans leurs propos, une
véritable inquiétude qui, cette fois, mérite certainement
une réponse un peu plus rapide qu'auparavant.
Ces personnes ont aussi des inquiétudes, quant à la
transformation dont on les prévient, de foyers affiliés qu'on
appellerait familles d'accueil pour déficients mentaux adultes, dans la
plupart des cas. Ils s'inquiètent aussi des obligations que la
transformation en familles d'accueil leur amènera. Quant à la
gestion des foyers, qu'arrivera-t-il des foyers avec dix places et plus?
Qu'arrivera-t-il aussi du taux avec lequel ces foyers sont payés
actuellement, de $6.10 par jour?
M. Forget: Je peux répondre brièvement, M. le
Président. De façon générale, le genre de
problème que soulève le député de Saint-Jacques n'a
pas lieu de se poser. Je ne peux cependant nier que, dans certains cas, il a pu
se poser de façon isolée. Les foyers affiliés à des
hôpitaux psychiatriques peuvent obtenir les services, l'appui
professionnel de ces hôpitaux psychiatriques.
A ce moment, s'il y a une situation violente, un risque d'une certaine
dangerosité qui se manifeste chez un de leurs
bénéficiaires, ils peuvent le référer au centre
hospitalier. La plupart de ces gens sont sous médication...
M. Charron: Le problème, c'est que ce n'est pas si facile
que cela, semble-t-il. On m'a raconté des cas où les
hôpitaux ont refusé de reprendre des gens qui étaient en
foyer affilié, même en période très turbulente.
M. Forget: Encore une fois, je crois qu'il s'agit là de
cas particuliers qui ne devraient pas se produire, parce qu'il y a cette
relation professionnelle qui doit exister dans bien des cas, au moins dans tous
les cas où la nature des problèmes du bénéficiaire,
du malade mental est telle qu'il peut être nécessaire de faire une
référence. Il y a des contrats de services professionnels qui
sont prévus. On me dit que même dans le cas où les foyers
affiliés dépendent désormais du centre de services sociaux
plutôt que du centre hospitalier, il y a un contrat, en quelque sorte
tripartite, qui implique une fourniture de services par le centre hospitalier
vis-à-vis de la famille d'accueil. Mais il peut y avoir des
problèmes. Il y a eu effectivement de l'inquiétude
exprimée par les foyers affiliés face à des perspectives
de changement, de rattachement aux centres de services sociaux plutôt
qu'aux centres hospitaliers. C'est peut-être dans ce contexte que le
moindre incident prend valeur d'exemple et alimente, en quelque sorte, les
craintes qui dépassent de loin les incidents particuliers qui l'ont
suscité.
Le Président (M. Cornellier): Messieurs, nous sommes
invités à un vote en Chambre. La commission ajournera ses travaux
sine die et nous recevrons les instructions de la Chambre, pour savoir si nous
devons siéger ce soir.
M. Charron: Après le vote probablement. (Fin de la
séance à 17 h 56)
Reprise de la séance à 20 h 17
M. Cornellier (président de la commission des affaires
sociales): A l'ordre, messieurs!
Nous en étions au programme 8, les éléments 1 et 2
avaient été adoptés. L'élément 3 dont il a
été question avant la suspension de 18 h. Adopté?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): Adopté.
Elément 4?
M. Charron: Adopté également, M. le
Président.
Le Président (M. Cornellier): Adopté. Nous passons
maintenant au programme 9: Protection et hébergement. Elément 1:
Protection de l'enfance.
Protection de l'enfance Les garderies
M. Charron: C'est à cet élément de ce
programme qu'il nous est permis d'aborder la question des garderies et de la
politique du gouvernement en cette matière.
J'ai tout de suite une question d'information à poser au
ministre. Je voudrais savoir, de la somme de $41 573 200 qui nous est
demandée d'accepter, quelle proportion va, effectivement, au service de
garderie?
M. Forget: Je vais vous donner cela tout de suite, si je peux
trouver la bonne page! Il y a un montant de $4 365 000 qui est inclus dans le
total du programme 9, dans les $41 millions.
Le solde des $41 millions représente $36 millions. Je vais
essayer de faire la conciliation. $36 millions qui se décompose
lui-même en un montant de $32 millions, qui représente la part
gouvernementale, dans les paiements faits aux familles d'accueil...
M. Charron: $36 millions, vous dites? M. Forget: $32
millions. M. Charron: $32 millions.
M. Forget: Alors, il faut ajouter à $32 millions la
contribution parentale, pour faire un total de $40 millions pour les familles
d'accueil, pour faire une grande parenthèse. Ces $40 millions de revenu,
si l'on veut, se subdivisent en $36 millions pour les paiements aux familles
d'accueil et une somme de $3 millions pour les besoins spéciaux des
enfants en famille d'accueil, c'est le fonds spécial administré
par les centres de services sociaux et $1 100 000 pour les enfants
placés en pensionnat privé. Donc, mise à part cette somme,
on a donc un autre montant de $4 365 000 pour les garderies.
M. Charron: Est-ce que cela représente une augmentation
sur la somme de l'année dernière?
M. Forget: C'est la même chose que la somme de
l'année dernière, mais il y a eu des crédits
périmés l'année dernière, puisque les subventions
se chiffraient, l'an dernier, par un peu moins que ce montant. Je crois que
c'était $3 500 000. Le budget dépensé cette année,
c'était $3 250 000 environ, qui a été effectivement
dépensé en 1975/76. Il faut ajouter à la fois aux $4 365
000 et au montant que je viens de mentionner une somme d'environ $500 000, $400
000 prévus pour l'année en cours, environ $500 000 ou un peu plus
l'an dernier, pour les subventions de démarrage. Le $5000 et le $3000
pour l'installation et l'équipement.
M. Charron: Le fait qu'on prévoit à peu près
la même somme que l'année dernière, est-ce qu'on
prévoit également qu'on aboutira avec la même somme de
crédits périmés à la fin de l'année ou si la
somme prévue fait face à une augmentation de la
clientèle?
M. Forget: II y a une révision de la politique qui est en
cours, au ministère. Elle est à peu près terminée.
Des décisions vont être prises incessamment qui vont amener
éventuellement un élargissement des programmes qu'on
connaît.
Je pense que notre problème ne sera plus des crédits
périmés pour l'année en cours, cela va plutôt
être de vivre à l'intérieur d'un budget qu'on nous... en
tenant compte de la politique actuelle. Les projections indiquent qu'on devrait
pouvoir, à l'intérieur de ce budget, maintenir les politiques
actuelles.
M. Charron: M. le Président, je ne veux pas
immédiatement aborder la question des changements à la politique
éventuelle, ce qui fera l'objet d'un deuxième temps de notre
discussion, si vous le permettez, mais j'en suis à l'étape de
l'information pure et simple et le document que j'ai là maintenant
suffit. J'ai lu une étude démontrant qu'au Québec, en 1974
on est à deux ans maintenant de ce chiffre il y avait 129
000 enfants québécois âgés de moins de six ans et
dont la mère était au travail. Ceci veut dire, M. le
Président, aux fins de nos discussions, des candidats éventuels
au service des garderies. C'est la majorité des cas, et de loin, je
pense, en tout cas, cela a été le cas pour les dossiers que j'ai
été appelé à vérifier, où la plupart
des enfants placés en garderie le sont du fait que les deux parents
travaillent ou qu'il s'agit d'une famille monoparentale et que la mère
est obligée de travailler. Or, M. le Président, si, en 1974
c'est le chiffre que j'ai il y avait 129 000 enfants âgés de
moins de six ans dont la mère était au travail,
déjà, à ce moment-là, cela était une
augmentation d'environ 8000 à 9000 sur l'année auparavant. Je
pense que cette augmentation ne peut s'expliquer que par l'augmentation
parallèle du nombre de femmes sur le marché du travail, puisque
le nombre de naissances est, depuis
quelques années, à son plus bas niveau. De 1967 à
1973, le taux d'activité des mères ayant uniquement des enfants
d'âge préscolaire est passé de 14% à 27% et celui
des mères ayant des enfants d'âge scolaire et d'âge
préscolaire est passé de 11% à 23%.
Mais s'il s'agit des clientèles les plus nombreuses des
garderies, c'est-à-dire les familles monoparentales dont l'unique parent
est de sexe féminin et les familles où les deux conjoints
travaillent. Il reste aussi qu'une société peut se permettre
d'envisager une troisième catégorie de citoyens pouvant
requérir des services de garderie, les mères qui sont au foyer,
mais qui ont besoin de services de garde à l'occasion, que ce soit au
moment où elles se remettent d'une maladie ou d'un autre accouchement ou
simplement pour vaquer à des activités professionnelles ou
à du travail à temps partiel. Je n'exagère pas la source
de revenu qui peut provenir du travail, mais qui peut être occasionnelle
et qui peut nécessiter, à l'occasion, un service de garde.
Or, nous avons critiqué l'année dernière,
longuement, le programme gouvernemental actuel qui n'existe qu'en fonction
d'une aide aux familles en fonction du revenu de ces familles. Le chiffre dont
je dispose était de 2400 familles actuellement aidées par le
service du ministère et qui toucherait environ 2600 enfants
québécois. Le programme gouvernemental actuel, aussi, ne
prévoyait pas au départ, mais a prévu par la suite des
subventions de démarrage aux garderies à but non lucratif,
celles-là même que signalait le ministre au début, et exige
des permis d'opération pour toutes les garderies, ce qui fait que, selon
mes informations je les donne à la commission pour qu'elles
soient immédiatement démenties si elles ne sont pas
véridiques, on est ici pour s'informer il y aurait 360 garderies
dont 165 à but lucratif, totalisant 13 000 places.
M. le Président, évidemment, quand je vous donnais le
chiffre de 129 000 enfants d'âge préscolaire dont la mère
est au travail, quand je disais des candidats éventuels à des
services de garderie, cela ne veut pas dire automatiquement qu'il y a
effectivement 129 000 demandes sur place. Bien des parents réussissent
soit à faire travailler les deux conjoints, soit à permettre
à la mère seule au foyer de travailler, sans recourir à un
service public de garderie. Un autre membre de la famille, un ami ou une
voisine peut, à l'occasion, effectuer le même service.
Mais la proportion de 13 000 places en garderie sur une capacité
là, je m'en tiens aux enfants en bas de six ans de
demandes pouvant s'élever jusqu'à 29 000, n'apparaît,
à la première vue que comme une réponse très
imparfaite et très incomplète à un besoin qui va aller
vraisemblablement en augmentant. Non pas à cause du nombre de
naissances, non pas tellement à cause du nombre de naissances nouvelles,
mais parce la situation féminine se modifie considérablement et
à son avantage très net dans le Québec actuel, parce qu'un
grand nombre de femmes, que ce soit pour des raisons financières, pour
boucler le budget familial, ou pour des raisons strictement profes- sionnelles:
parce qu'un grand nombre d'entre elles sont désormais qualifiées
et le fait d'accéder au mariage ou à la maternité ne
signifie aucunement pour elles une obligation d'abandonner une profession ou un
métier qu'elles ont parfaitement le droit d'exercer comme tout autre
citoyen mâle du Québec.
Le développement sociologique du Québec,
éventuellement, va conduire à une demande encore plus grande du
service de garderie qui, aux yeux de bien des gens et je pense aux yeux du
gouvernement, encore, apparaît comme un service de luxe, un service
occasionnel qu'on peut mettre à la disposition d'un certain nombre de
familles, mais n'apparaît pas encore comme un service d'appoint à
une politique de revenu familial que deux conjoints peuvent décider
d'aller chercher, et aucunement comme un service public.
Je pense que la philosophie empreignant le service actuel de garderie du
ministère en est un qui sent et qui démontre le forcé,
l'obligation et non pas la décision ferme et nette de reconnaître
un besoin, et non seulement d'y subvenir, mais de même préparer sa
demande éventuelle.
On dirait que le gouvernement intervient dans ce domaine comme si
c'était une obligation à laquelle il se rend de fort mauvaise
grâce, en étant le plus parcimonieux possible, le plus
"tatillon-neux" possible et souhaitant le moins possible que le
développement se fasse.
Par exemple, M. le Président, 90% des familles qui participent au
réseau gouvernemental actuel j'appelle cela réseau
gouvernemental, il ne s'agit aucunement de réseau gouvernemental,
puisque rien de cela n'est public aux garderies touchées par la
politique gouvernementale actuelle, se situent ou à Montréal ou
à Québec.
Quand on parle de politique de garderie dans toute autre ville, dans
toute autre région du Québec, on est vraiment à
l'âge de pierre, comme le disait le ministre des Affaires sociales avant
la suspension des travaux pour le dîner.
De même le niveau de l'aide, qui est basé sur le revenu
familial, est si bas, au fond, qu'il disqualifie systématiquement
à peu près tous les couples qui travaillent.
En fait, je pense que seules les femmes seules, les familles
monoparentales dont l'unique parent, encore une fois, est de sexe
féminin, la mère, on peut dire, dans le programme actuel du
gouvernement, que seules les familles monoparentales qui ont des charges
familiales et qui ne travaillent pas peuvent être dites aptes à
recevoir une aide adéquate.
Par exemple, M. le Président je donne cette information
à l'attention de la commission un couple qui travaille au salaire
minimum, actuellement, et qui a un enfant en garderie se retrouve dans une
situation désavantageuse par rapport à un programme qui se
voudrait public. Mais, avant d'aller plus loin dans cette critique du programme
gouvernemental, j'aimerais permettre aux hauts fonctionnaires qui accompagnent
le ministre de préciser les données statistiques qui sont les
miennes actuellement, de les corriger ou de les modifier quant à la
clientèle actuelle du réseau.
M. Forget: J'ai une première remarque. Quant au nombre de
garderies possédant un permis du ministère, il est de 308; le
nombre de places, c'est à peu près celui que vous avez
indiqué.
M. Charron: Vous me dites 308? M. Forget: Oui.
M. Charron: Combien d'entres elles sont à but
lucratif?
M. Forget: C'est 40%, c'est-à-dire qu'environ 130 sont
à but lucratif. Les 160 autres sont sans but lucratif. Un certain
nombre, je pense, une quinzaine, sont de type coopératif, enfin qui
peuvent être assimilées aux garderies sans but lucratif.
M. Charron: Je vous pose tout de suite une question sur ce sujet.
Y a-t-il moins de garderies, cette année, dans le Québec, qu'il y
en avait l'année dernière?
M. Forget: Je crois qu'on peut dire que le réseau s'est
développé. En fait, à un moment donné, on entend
parler de certaines fermetures qui, pour le ministère, si on veut, n'en
sont pas, puisque la garderie dont il est question n'a jamais
régularisé son statut par rapport à nous, de sorte que si
on prend le strict point de vue des statistiques administratives, ce n'est pas
une disparition. Mais, je crois que le réseau de garderies se
développe continuellement. Il y a des fermetures, c'est évident.
Elles se situent surtout dans les petites municipalités, là
où les bassins de population sont assez faibles. Ce sont toujours des
projets qui sont périlleux, lorsque la population est de moins de 10 000
habitants.
M. Charron: Quand vous dites que des garderies qui ont
fermé, n'existaient pas aux yeux du ministère, sur le plan
statistiques administratives, voulez-vous dire que dans ces garderies, aucun
des parents, qui plaçaient les enfants, ne bénéficit du
programme d'aide actuel?
M. Forget: Cela ne veut pas dire qu'il ne s'est pas
présenté de cas de fermeture où une garderie aurait eu un
permis. Je ne sais pas si vous faites allusion à celles qui, à un
moment donné, ont été mises sur pied dans le cadre du
programme fédéral d'initiatives locales et qui ont essayé,
par la suite, de continuer. Entre le moment où elles ont
présenté une requête au ministère et le moment
où les choses ont été acceptées, elles ont pu
disparaître. Je vous dis qu'à ce moment, elle n'était pas
comptée comme une garderie qui fermait, puisqu'elle n'avait
jamais...
M. Charron: Mais quand même, pendant le temps qu'elle
végétait, entre l'abandon des projets d'initiatives locales et sa
fermeture pure et simple, pendant cette période, les parents qui y
plaçaient des enfants et qui étaient bénéficiaires
éventuels ou éligibles à l'aide aux services de garderie
ac- tuelle du programme du ministère, ils s'en prévalaient, quel
qu'ait été le statut d'ancien projet d'initiatives locales qui se
cherchait une façon de survivre, il reste que les parents
bénéficiaires, je ne parle pas de la garderie, je parle des
parents bénéficiaires qui, le matin, allaient déposer
leurs enfants dans cette garderie et qui les reprenaient le soir, s'ils
étaient éligibles en fonction de leurs revenus, ils touchaient
l'aide, le ministère les payait.
M. Forget: Le seul critère, ce n'est pas de savoir si la
garderie a été mise sur pied dans tel ou tel cadre, c'est de
savoir si elle répond aux normes du ministère, et possède
son permis. A partir du moment où elle possède son permis, elle
est eligible à tous les programmes qu'on a mis sur pied. Si
évidemment, elle ne répond pas aux normes, ce serait se comporter
de façon un peu curieuse que de subventionner les parents qui vont
à une garderie qu'on ne reconnaît pas selon les normes qu'on
applique partout.
M. Charron: Est-ce que cela ne s'est pas produit, effectivement,
que l'on subventionnait les parents, alors que la garderie, elle, ne
répondait que très imparfaitement aux normes du
ministère?
M. Forget: II peut arriver des erreurs administratives, mais en
théorie, si elles n'ont pas le permis, elles ne font pas partie de la
liste des garderies qu'on reconnaît.
M. Charron: Bon. Prenons les garderies qui ont fermé au
cours de l'année, prenons ces exemples. Ces garderies qui ont
fermé au cours de l'année avaient-elles un permis du
ministère des Affaires sociales, anciens projets initiatives locales ou
pas? Au moment où elles ont fermé leurs portes, avaient-elles un
permis?
M. Forget: Ecoutez. J'ai essayé d'avoir ces données
statistiques sur les fermetures, les capacités en cause, et je n'ai pu
identifier vraiment clairement le nombre de garderies qui auraient pu fermer et
qui, comme je vous le disais, avaient un statut pour le ministère,
c'est-à-dire possédait déjà le permis.
Il y a des garderies qui, éventuellement, sont en cours de
relocalisation, à un certain moment, qui peuvent être entre deux
places, si on veut, entre un local qu'elles abandonnent et un autre qu'elles
occuperont.
M. Charron: Je vous pose la question d'une façon
différente. Le Québec a-t-il déjà eu plus de 308
garderies ayant un permis du ministère des Affaires sociales?
M. Forget: Pas à ma connaissance. Non. Les données
que nous avons, à l'heure actuelle, tiennent compte de celles qui ont un
permis. On sait, par contre, qu'il y en a un certain nombre qui sont en voie de
projet plus d'une soixantaine, à l'heure actuelle et qui
n'apparaissent pas dans ces données. Je vous parle simplement de celles
qui ont le permis du ministère.
M. Charron: Combien de garderies, ayant déjà eu un
permis, ont fermé leurs portes par la suite?
M. Forget: Voulez-vous reprendre votre question, s'il vous
plaît?
M. Charron: Avez-vous eu connaissance de garderies, qui ont eu,
à un moment de leur existence, un permis du ministère des
Affaires sociales, soit au lendemain de leur aventure fédérale
avec les initiatives locales, soit qu'elles soient nées
d'elles-mêmes, aient obtenu un permis du ministère des Affaires
sociales et qui ont dû fermer leurs portes?
M. Forget: Oui. Mais je vous dis que je ne suis pas capable d'en
préciser le nombre. Mais je dis oui. J'en connais des cas.
M. Charron: Etaient-ce des garderies à but lucratif ou
étaient-ce des coopératives?
M. Forget: Je crois qu'il y en a un certain nombre qui
étaient sans but lucratif. Je ne peux le préciser. Il y en a
aussi, à but lucratif, qui ferment leurs portes, également.
Souvent, il y a peu de différence financière entre la garderie
à but lucratif et la garderie sans but lucratif parce qu'elles
doivent...
M. Charron: Parce que ce n'est pas tellement lucratif.
M. Forget: ...faire face aux mêmes obligations
financières, peu importe le statut juridique. Finalement, les comptes
sont les mêmes à la fin de la semaine.
M. Charron: Sur les 308 garderies que compte le Québec,
actuellement, avez-vous l'impression qu'un grand nombre d'entre elles ne sont
que des garderies en implantation, mais n'offrent pas la plénitude de
services qu'une garderie peut offrir normalement?
M. Forget: Je pense qu'il y a de la place pour
l'amélioration du réseau. On travaille, d'ailleurs, à des
programmes qui vont amener les garderies à aller dans ce sens, d'une
amélioration de leurs services. C'est très inégal d'une
place à l'autre, d'un endroit à l'autre. Cela dépend du
personnel surtout.
La garderie est quand même un établissement d'une dimension
restreinte. Ce n'est pas une boîte qui fonctionne avec des centaines
d'employés de sorte que la qualité des services peut s'en
ressentir dans le changement de personnel, à un moment ou à un
autre, mais je pense qu'en général, avec l'investissement tant
humain qu'on y met de plus en plus par la création de services de
garderie, par les contrôles habituels que la direction de
l'agrément chez nous continue d'appliquer, on essaie de travailler dans
ce sens.
Je ne vous dis pas qu'on obtient partout les résultats qu'on
souhaiterait, mais on essaie d'améliorer les choses.
Il reste que, si les conditions nécessaires pour l'obtention du
permis n'étaient pas rencontrées, la garderie demeurerait en
implantation plutôt que d'être une garderie avec un permis.
M. Charron: II y a quinze garderies sous la formule
coopérative, m'avez-vous dit tout à l'heure, une quinzaine?
M. Forget: II y en a quand même une trentaine ici, 33
précisément, je m'excuse, c'est 33.
M. Charron: II y en a 33 qui sont à but... M. Forget:
... sont coopératives.
M. Charron: ... qui sont coopératives. Le Québec
a-t-il déjà eu plus de garderies basées sur la formule
coopérative?
M. Forget: Je crois que non. Pas à ma connaissance, en
tout cas. Il est possible qu'à un moment donné... C'est
très trompeur, les garderies peuvent, dans leur nom usuel, se donner le
qualificatif de coopérative et ne pas être instituées en
vertu de la Loi des associations coopératives. Dans ce chiffre, on ne
tient compte que de celles qui ont un statut reconnu selon la Loi des
associations coopératives, mais, dans ce domaine, il est assez facile de
se donner une charte ou un nom usuel qui inclut le mot de coopérative,
sans que, pour autant, cela en soit une strictement parlant.
M. Charron: J'ai une autre question d'information. Sur la
clientèle des garderies, existantes, combien de parents y remettent
leurs enfants quotidiennement ou presque, sans avoir droit à l'aide
gouvernementale, c'est-à-dire, qu'ils ont un revenu supérieur
à ce qui les rend admissibles à un appoint gouvernemental? Je
disais tantôt qu'un père et une mère travaillant tous les
deux à salaire minimum, même si c'est un salaire minimum, se
trouvent déjà avoir un salaire qui les rend inadmissibles
à quelque apport gouvernemental que ce soit, pour utiliser le service de
garderie. Avez-vous idée des proportions que peut prendre, par exemple,
sur une clientèle, je dirais, d'une trentaine d'enfants, dans une
garderie, le nombre de ces enfants qui ont des parents
bénéficiant du programme et de ceux qui y sont uniquement et
totalement aux frais de leurs parents?
M. Forget: Je pense que le calcul est assez facile à
faire. On a dit tout à l'heure qu'il y avait environ 26 000 enfants dont
les parents recevaient l'aide du ministère. Le réseau dans son
entier est de 13 800 places.
M. Charron: Pardon? M. Forget: 13 800 places. M.
Charron: 13 800.
M. Forget: Si on prend un taux d'occupation de 85% dans les
garderies, on arrive au chiffre
d'environ 25% à 30% des enfants en garderie qui reçoivent
l'aide du ministère.
M. Charron: Actuellement, dans quelle proportion ceux qui
bénéficient de l'aide du gouvernement proviennent-ils de familles
monoparentales? Avez-vous une statistique là-dessus?
M. Forget: Non, je ne l'ai pas ici dans le moment, je sais que
c'est un renseignement que les personnes, je crois, donnent lorsqu'elles font
la demande d'aide au ministère, mais ce n'est pas une donnée qui
a été compilée.
M. Charron: Je voudrais aborder la question du budget de
fonctionnement d'une garderie, indépendamment de la clientèle.
Plusieurs études qu'il nous a été donné de voir au
cours de l'année, en plus de certaines visites dans des garderies,
concernant l'entretien des garderies, nous ont laissé percevoir que le
coût réel de fonctionnement d'une garderie, est estimé
à $8 par jour pour chaque enfant que la garderie est prête
à accueillir.
Le maximum de l'aide gouvernementale qui puisse arriver à cette
occasion est de $5. Est-ce que le ministre estime encore que le budget de
départ de $3000 dont il parlait tout à l'heure est suffisant
à l'implantation de garderies et au développement du
réseau?
M. Forget: Ecoutez. Pour ce qui est de la suffisance ou de
l'insuffisance des barèmes de subvention, comme on vient de l'indiquer,
comme il est normal qu'il en soit ainsi, ceci fait l'objet d'une
révision périodique comme tous les barèmes
déterminés en dollars de nos jours; il faut malheureusement les
réviser au moins une fois par année. La question des garderies,
dans cette optique de révision des barèmes d'aide, fait l'objet
d'une étude. Je n'ai pas encore eu le loisir, puisqu'elle m'est parvenue
durant les derniers jours, d'en prendre connaissance et c'est donc dire que je
ne suis pas en mesure, à plus forte raison, d'exprimer une opinion autre
que celle que je viens d'exprimer, c'est-à-dire qu'il est normal et on
peut s'attendre que, de temps à autre, probablement tous les ans, si le
taux d'inflation que nous connaissons depuis quelques années ne diminue
pas sensiblement, nous aurons à faire quelques ajustements. Cependant,
je remarque que le montant maximum de la subvention permise était,
durant la dernière année, de $8000 et que le montant moyen de la
subvention accordée s'établit à un chiffre
inférieur à celui-là. Il faut voir que le remboursement
s'effectue sur pièces justificatives, en établissant les
dépenses effectivement réalisées, et si ces
dépenses se sont élevées à sensiblement moins que
le maximum, je crois que c'est quelque chose comme $5000 ou $5500 de subvention
moyenne pour l'établissement alors que $8000 est possible, je ne pense
pas que ce soit de ce côté que la pression est la plus forte.
Effectivement, pour ce qui est des frais de fonctionnement, il y a
toujours eu une controverse, à savoir quel était le niveau normal
ou optimum du prix de journée pour la garderie. Il est fa- cile de
produire des exemples sans beaucoup d'effort où on obtient un prix de
journée qui atteint même $10. Il s'agit d'être suffisamment
généreux quant au ratio du personnel par rapport au nombre
d'enfants pour produire ce résultat ou il s'agit d'être
particulièrement généreux également quant aux
qualifications professionnelles exigées du personnel. Il demeure qu'il
doit s'établir un certain équilibre entre ce qui est permis dans
ce secteur et ce qui est permis dans d'autres secteurs. Il ne faut pas oublier
un certain équilibre qui doit exister entre ce qui est accordé
aux familles d'accueil et ce qui est payé aux garderies. Les familles
d'accueil jouent auprès des enfants un rôle vingt-quatre heures
par jour, sept jours par semaine, pourvoient à tous les besoins des
enfants. Il y a un problème d'un certain équilibre à
maintenir entre ce qui est possible et raisonnable d'accorder aux familles
d'accueil et ce qu'il est permis d'envisager pour un système de
garderie. Alors, ce sont différentes considérations; d'autant
plus qu'on a pu observer, et ceci a été une certaine cause
d'inquiétude pour le ministère, que, dans certaines garderies,
les règles étaient parfois différentes pour les familles
qui recevaient l'aide gouvernementale et pour les familles qui n'en recevaient
pas.
En ce sens que le prix demandé aux familles qui ne recevaient
aucune aide pouvait se trouver inférieur au prix supposément
demandé aux familles qui en recevaient. On a vu là une
façon, je ne dirais certainement pas élégante, de faire
absorber par le gouvernement une part plus grande des services de garde que la
politique officiellement établie le permettait. C'est-à-dire
qu'on payait non seulement pour les familles qui étaient
autorisées à bénéficier de l'aide gouvernementale,
mais on payait dans le fond une partie des coûts associés à
la garde des enfants de familles qui étaient non éligibles.
Alors tenant compte de cette possibilité pour les garderies de
faire des rabais, on doit évidemment en tenir compte également
lorsqu'on détermine quel est le niveau optimal ou le niveau cible du
prix de journée. Parce que dans tous les cas, les parents ont dû
accepter les services qu'ils recevaient en contrepartie de leurs paiements
comme des services acceptables et comme il n'y a pas de règle absolue
pour déterminer ce qui est service acceptable et ce qui ne l'est pas,
au-delà d'un certain minimum, c'est également une source
indirecte au moins d'information sur les préférences sociales des
parents à ce moment-ci, relativement au service de garde d'enfants.
M. Charron: L'ancien ministre d'Etat des Affaires sociales, le
député de Bourassa, nous avait dit en juillet dernier que le
ministère était à procéder à une
évaluation du programme qui allait conduire à une
éventuelle modification, pour l'automne. Nous sommes à huit ou
dix mois de ce temps et les résultats de l'étude n'ont pas encore
été rendus publics. Est-ce parce que le ministre n'a pas encore
pris de décision ou est-ce parce que le ministre a peur des comparaisons
avec les programmes des autres provinces? Est-ce parce que les budgets ne sont
pas suffisants pour apporter
les améliorations que nous devions attendre à ce
programme?
M. Forget: Ni l'un, ni l'autre, comme je viens de le dire. Je
n'ai reçu que durant les derniers jours ce qui est
présumément le résultat de cette évaluation. Ce
n'est pas un manque de crédits, puisqu'à cause peut-être en
grande partie de difficultés administratives que nous croyons avoir
résolues par 4a création du service de garderie au
ministère, il s'est écoulé un temps excessif parfois pour
l'autorisation et le paiement de certaines subventions. Donc, dans l'exercice
qui vient de s'écouler, la contrainte financière n'a pas
été opérante, n'a pas été effectivement
présente, comme considération principale.
Pour ce qui est des comparaisons avec d'autres provinces, ou avec
d'autres pays, je vous avoue que c'est avec beaucoup de
sérénité que j'envisage ces comparaisons. Il ne semble pas
qu'on soit en face, dans la plupart des autres provinces et cela, je le dis
pour en avoir causé avec mes collègues, ministres des services
sociaux, ministres du bien-être ou quel que soit le nom qu'ils portent
dans d'autres provinces...
M. Charron: Social welfare.
M. Forget: Précisément. Pour en avoir causé
avec chacun d'entre eux lors de rencontres qui nous réunissent à
l'occasion, je sais que non seulement leur programme, à quelques
détails près bien sûr, mais leurs orientations et leurs
préoccupations sont identiques aux nôtres dans toutes les
provinces du Canada.
Je sais également, pour avoir été sur place
l'automne dernier, et en avoir parlé à l'occasion, parce que
ça n'était pas l'objet du voyage, que même dans les pays
Scandinaves, même en Suède dont on parle souvent, il y a, sur
papier, des politiques beaucoup plus généreuses que celles que
nous avons ici. Mais il y a, par ailleurs, un contingentement qui a à
peu près les mêmes effets. On a une accessibilité
financière qui semble beaucoup plus large, mais qui n'est pas non plus
sans limite. Malgré tout, il y a un nombre de places limitées qui
vient qualifier assez fortement la générosité
théorique du programme.
Donc, dans tous les pays, nous sommes devant à peu près le
même genre de situation, à quelques détails près.
C'est le même genre de questions qui se posent et c'est une question dans
le fond assez importante, peut-être unique parmi les programmes de
services sociaux. On est en face d'implications qui dépassent de loin
l'envergure des programmes et qui, peut-être, sont la source principale
d'une prudence indéniable qui est démontrée partout dans
le développement de cette activité.
M. Charron: M. le Président, est-ce que, parmi les
recommandations de l'étude dont a été saisi le ministre
sur le service actuel des garderies je ne veux pas entrer dans les
détails, parce que, évidemment, je vais me heurter à un
mur du temps que je dois laisser au ministre ou prendre connaissance et faire
connaître ses décisions puisque cela nous avait
été promis pour l'automne dernier et que cela n'a pas eu lieu, je
peux au moins m'informer si l'étude en cause recommande ou non des
subventions directes de fonctionnement aux garderies?
M. Forget: Je vous avoue franchement que je ne le sais pas, je
n'ai pas pris connaissance du document. Cette question, je sais qu'elle a
été discutée pour en avoir entendu parler. Je vous avoue
très sincèrement que je n'en sais rien.
Disons que je suis dans une mauvaise position pour vous répondre
affirmativement ou négativement et je ne voudrais pas, dans ma
réponse, préjuger de la décision à intervenir,
même si je le savais. Très franchement, je n'ai pas pris
connaissance du rapport. Je sais qu'il en a été question au
niveau des responsables du programme, des hauts fonctionnaires, mais je ne sais
pas de quelle façon cela a été tranché en
définitive.
M. Charron: M. le Président, je me permets de dire, sans
avoir fait, sans aucun doute, une étude exhaustive du dossier comme les
gens responsables de l'étude à l'intérieur du
ministère ont dû, de par leur mandat, s'occuper à faire,
que, si l'étude devait passer à côté de ce
problème, pour essayer d'améliorer l'échelle, le
barème d'aide aux familles selon le revenu, de modifier une virgule ici
ou de modifier $0.25 là, on aurait contribué que fort peu au
développement d'un réseau public ou d'un réseau convenable
de garderies, pour faire face à la demande québécoise.
J'attends et j'attendrai. J'espère que les résultats de
cette étude seront rendus publics pour que nous puissions nous faire une
opinion à partir d'experts ou de gens consciencieux qui ont
accordé toute l'attention que cela mérite. Il est évident,
pour qui fait le tour du problème des garderies existantes, que le
problème fondamental pour ces garderies n'est pas de savoir si le parent
qui gagne $5800 par année va recevoir $2.25 ou $2.35. Ce n'est
même pas de savoir si l'enfant vient d'une famille monoparentale ou d'un
couple qui travaille.
Lorsque vous discutez un tant soit peu avec des officiers de garderies
j'appellerais cela comme ça des responsables de garderies,
ceux qui ont pris il y a beaucoup de bénévolat encore,
là-dedans, je le souligne très volontiers la
responsabilité d'organiser dans un quartier, dans une ville, une
garderie, le problème majeur pour eux est l'insécurité qui
porte non seulement sur le développement futur, mais sur le
fonctionnement quotidien de la garderie.
Si on n'allait pas modifier le programme actuel au minimum en ce
sens-là, d'accorder un budget de fonctionnement selon le nombre
d'enfants, les critères seraient bienvenus et discutables. Quel montant
fixerait-on, au juste? Mais la nécessité et je le dis
très clairement d'établir une sécurité
financière à partir de laquelle on établirait une
sécurité de fonctionnement d'une garderie apparaît
aujourd'hui essentielle.
Tout autre apport à l'aide gouvernementale en
fonction du revenu des familles sera bienvenu sans doute, parce que,
encore une fois, M. le Président, un homme et une femme, travaillant
tous les deux au salaire minimum, ne sont même pas éligibles dans
le cadre actuel d'une aide gouvernementale.
Donc, il y a nettement place à l'amélioration. Mais s'il
est un endroit où il faut modifier la politique gouvernementale
actuelle, c'est dans l'espèce de sécurité qu'il faut
apporter au fonctionnement d'une garderie.
Je dis qu'une fois qu'une garderie a fait ses preuves, dans son
démarrage, qu'elle a obtenu un permis du ministère des Affaires
sociales et qu'elle répond à un besoin, dans un quartier d'une
ville, dans une ville donnée ou dans une région donnée, il
faut lui donner cette sécurité de fonctionnement.
S'il est une intervention budgétaire gouvernementale qui doit se
faire dans le domaine des garderies, c'est là, je dirais, avant toute
modification ultérieure, mais, encore une fois, bienvenue dans l'aide
aux familles mêmes bénéficiaires du service de garderie.
Nous verrons les décisions que le ministre fera connaître. Est-ce
que le ministre a l'intention de modifier avant l'été la
politique actuelle des garderies, à partir des recommandations qui lui
sont faites dans cette étude?
M. Forget: Avant l'été? Si des modifications
doivent intervenir, je crois que nous essaierons de les faire le plus
rapidement possible.
Montants payés aux familles d'accueil
M. Charron: M. le Président, sur ce chapitre des
garderies, puisque l'élément 1 de la protection de l'enfance
comporte les familles d'accueil, je m'en voudrais de ne pas souligner ici
l'inquiétude très grande des familles d'accueil à l'heure
actuelle sur les tarifs qu'elles peuvent recevoir du ministère des
Affaires sociales.
Je poserais une question très directe. Est-ce que le ministre
peut informer la commission sur une révision éventuelle du tarif
payé aux familles d'accueil?
M. Forget: II y a eu, en février cette année une
révision du tarif payé aux familles d'accueil. Je ne sais pas si
ce fait a été porté à la connaissance du
député de Saint-Jacques. Je dois avouer qu'il n'est pas coutumier
de faire plusieurs modifications la même année. Il nous a
semblé que la nature de l'ajustement fait, assujetti à un certain
arrondissement, à l'indexation nécessaire, pour tenir compte du
coût de la vie, était appropriée pour l'année en
cours, que c'était le seul qu'il nous était possible de
considérer, de toute manière, à court terme.
M. Charron: Estimez-vous que la somme que vous payez
quotidiennement à une famille d'accueil, pour un enfant qu'elle a
accepté ou dont elle a pris charge, correspond au coût réel
qui incombe à la famille pour la charge de cet enfant?
M. Forget: Nous avons, dans le passé,
déterminé le montant à verser aux familles d'accueil,
c'est en 1974, je crois, de façon systématique, après
plusieurs années de stabilité dans les taux versés aux
familles d'accueil, effectivement. A ce moment, après sept ans de
fixité absolue des taux, la méthode de détermination des
taux a été basée sur l'enquête qui est
publiée tous les deux ou trois ans par Statistique Canada, sur les
dépenses des familles au Canada, les dépenses des ménages
qui permettent de déterminer par une analyse statistique le coût
que représente, dans le budget d'une famille moyenne, la présence
d'un enfant supplémentaire et d'ajuster ceci pour l'âge des
enfants. Des données comme celles-là peuvent d'ailleurs
être recoupées par d'autres enquêtes sur les budgets des
familles, tels qu'on les retrouve dans certains organismes dont c'est la
vocation principale.
En s'aidant de ces statistiques sur les budgets des familles, on peut
établir une équivalence parfaite entre le coût moyen
découlant de la présence d'un enfant dans une famille et les taux
quotidiens ou les taux mensuels que nous payons aux familles d'accueil
actuellement.
Je dois cependant tout de suite signaler que ces taux excluent tout
élément de rémunération. C'est le remboursement de
dépenses et c'est le remboursement des dépenses moyennes.
Il est facile également, bien sûr, pour quelqu'un dont
c'est le but, de démontrer que, dans une famille en particulier et pour
un enfant en particulier, il est possible de dépenser davantage. Cela,
on l'admet sans peine. Il s'agit de l'impact moyen sur le budget des familles
au Canada, encore une fois, de la présence de quatre enfants
plutôt que de trois enfants ou de six enfants plutôt que de cinq.
On voit de façon différentielle le coût découlant de
la présence d'un enfant sur le budget familial moyen. En outre,
cependant, des sommes qui sont versées à la famille d'accueil
mensuellement, il existe un fonds commun qui est administré par les
centres de services sociaux et qui permet de payer pour certains coûts
non récurrents, des lunettes, le trousseau initial. Un enfant qui arrive
complètement dépouillé ou dénué de tout
vêtement, de tout bagage, a besoin d'être équipé,
d'être habillé, d'avoir un certain nombre de vêtements de
rechange, etc. C'est payé, non pas par la famille d'accueil, mais par le
centre de services sociaux. Certaines évaluations spéciales,
certaines choses qui débordent les dépenses normales
récurrentes mois après mois sont donc assumées à
même un fonds qui se chiffre, d'ailleurs, je l'ai mentionné tout
à l'heure, par $3 millions par année et qui est distribué
parmi les différents centres de services sociaux.
Je dois ajouter, d'ailleurs, qu'il existe une liste limitative de
complications, qu'il s'agisse de certaines maladies ou de certains
problèmes de comportements aigus, qui peuvent entraîner le
versement d'un supplément mensuel qui se chiffre par un maximum de $50
par enfant, donc de $600 par année. Ceci a été fait dans
le but de répondre à l'argument assez normal qui consiste
à dire: Le coût moyen d'un enfant moyen, ce n'est pas
né-
cessairement le coût anormal d'un enfant qui n'est pas dans la
moyenne parce qu'il a des problèmes de santé, il est
diabétique, il a quelque chose qui demande une attention
particulière. Evidemment, c'est un argument bien fondé et auquel
on peut faire face par le versement d'une somme qui n'est pas
nécessairement de $50, mais qui peut aller jusqu'à $50 par mois.
En outre, le coût des transports pour des soins médicaux, des
visites régulières chez le médecin, etc., ce sont
également des sommes qui sont défrayées à
même le fonds commun à l'enfance.
M. Charron: M. le Président, je m'en tiens uniquement
à l'aspect budgétaire pour le moment. Le ministre nous dit que
ces tarifs sont calculés à partir de la charge moyenne qu'un
enfant rajouté à une famille impose au budget familial. La
Fédération des familles d'accueil a quand même fixé
à l'occasion jusqu'à 66% de différence entre son
évaluation du coût moyen sur le budget d'une famille d'un enfant
et celui qui a prévalu au calcul du ministère des Affaires
sociales. La différence m'apparaît considérable. On n'est
pas là à quelques sous près. La Fédération
des familles d'accueil a sans doute procédé à son
évaluation quant au coût moyen d'un enfant à partir
d'expériences concrètes également de certaines familles.
On n'a pas dû se baser sur rien pour pouvoir affirmer qu'il existe une
différence notoire entre le coût réel d'un enfant dans une
famille et ce qu'offre le gouvernement pour le faire. Comment le ministre
explique-t-il cette disproportion entre la demande et l'offre du
ministère?
M. Forget: Que voulez-vous? Vous pouvez produire toutes sortes de
chiffres à partir d'une hypothèse donnée. Il
m'apparaît que le calcul auquel se sont livrées les familles
d'accueil est, dans une certaine mesure, un calcul hypothétique ou
exemplaire, si vous voulez. Il est évidemment facile pour tous ceux qui
ont une famille et une certaine expérience d'un budget familial de
s'asseoir autour d'une table et de dire: Voici, on va faire la liste de ce que
cela doit coûter pour s'occuper d'un enfant. Il n'est pas difficile de
produire un budget comme cela, qui est un budget qui a un certain
caractère hypothétique.
C'est un budget que l'on souhaite ou que l'on imagine. Cela n'a pas le
même caractère de réalité qu'une enquête qui
porte sur 2000, 3000 ou 4000 familles dans tout le Canada à qui on
demande de tenir compte de toutes leurs dépenses, et de produire des
pièces justificatives. Cela se fait. Ce sont des budgets assez bien
contrôlés. Tout cela est compilé et on observe, tout
simplement, ce que ces familles ont effectivement déboursé durant
une période soumise à l'échantillonnage et qui est
attribuable à la présence des enfants. Alors, c'est du
réel. C'est de l'observé.
L'autre, dans une certaine mesure, est un calcul qui n'est pas faux,
mais qui est basé sur une hypothèse, sur une vue de ce que cela
devrait être, alors que la dernière donnée est basée
sur ce que l'on a pu constater.
Il ne faut pas oublier que même sur la base des constatations
faites des dépenses des familles, il y a quand même un certain
élément un peu irréel aussi, mais qui est à
l'avantage des familles d'accueil, dans le sens suivant. Si on observe des
familles de différentes tailles, et si on tient compte de toutes leurs
dépenses pour le loyer, pour le chauffage, pour les taxes, pour
l'alimentation, pour le vêtement, on aura un certain
élément de dépense qui variera en fonction de la taille
des familles, même pour le logement.
Il est évident que si vous avez une famille de quatre ou cinq
enfants, vous aurez une maison plus grande et donc, vous paierez plus de loyer,
par exemple. Cela se réflètera dans les statistiques sur les
dépenses observées.
Or, qu'arrive-t-il lorsqu'on s'adresse à une famille d'accueil?
La famille d'accueil est probablement une famille qui dispose d'une maison trop
grande pour ses besoins actuels, à un certain moment.
Je peux difficilement m'imaginer des gens qui vont louer une maison avec
à l'esprit l'idée qu'ils vont la prendre deux fois trop grande
parce qu'ils pourront prendre des enfants, comme familles d'accueil. Il s'agit
plutôt d'une famille dont certains enfants plus âgés ont
quitté le domicile familial et qui se retrouve avec des espaces pour
lesquels elle paie de toute façon.
Or, dans les taux tels que nous les avons calculés, nous incluons
un élément de remboursement pour des dépenses attribuables
au loyer. On sait quelle part occupe le loyer dans les budgets familiaux.
Or, pour ces familles, c'est un remboursement pour une dépense
qu'elles feraient de toute façon. Dans cette mesure, c'est un gain net
qu'elles peuvent imputer à d'autres éléments de
dépense.
Bien sûr, on peut faire dire aux chiffres tout ce qu'on veut,
pourvu qu'on s'y prenne suffisamment longtemps c'est bien connu
mais je crois que lorsqu'on explique comment les chiffres sont établis,
on se rend compte qu'il n'y a, bien sûr, aucun élément de
rétribution de revenu pour le temps passé avec ces enfants qui
n'est pas négligeable.
Par contre, on voit se refléter dans ces barèmes des
éléments de dépense qui sont des coûts fixes pour la
famille et qu'on leur rembourse, malgré tout, ce qui leur permet,
vraisemblablement, à l'intérieur du budget familial de compenser
pour d'autres choses qui n'y sont pas explicitement contenues.
Dans l'ensemble, nous avons le sentiment que les paiements que nous
faisons ne sont pas injustes, qu'ils sont très explicables et on
pourrait souhaiter y inclure un élément d'incitation, bien
sûr.
On pourrait dire: II faut payer 150% ou 125% des dépenses
moyennes et on pourrait trouver pour cela toutes sortes de philosophies avec
lesquelles je ne serais pas nécessairement en désaccord. C'est
peut-être une question budgétaire, en définitive. C'est
aussi une question de savoir quelle est la meilleure incitation pour le
recrutement des familles d'accueil. J'ai beaucoup d'hésitation à
croire que l'incitation peut ou devrait même être de nature
financière.
Je crois que si nous avons des ressources ad-
ditionnelles à consacrer aux familles d'accueil, il faut
plutôt les consacrer à des ressources professionnelles qui, dans
les centres de services sociaux ou dans les centres d'accueil, pourront donner
un appui aux familles d'accueil. Car il me semble, pour avoir discuté
avec des familles d'accueil, avec leurs associations, que leur plus grand
problème n'est pas vraiment, malgré tout, un problème
financier, mais c'est un problème, par exemple, d'avoir une
responsabilité assez lourde à assumer de façon continue et
de ne pas toujours avoir le sentiment d'être appuyé dans
l'exercice de ces responsabilités, de n'avoir pas toujours suffisamment
le sentiment que si un des parents nourriciers, si on peut employer cette
expression, tombe malade, etc, on va suffisamment, rapidement, avec
suffisamment de flexibilité venir à leur secours et les
dépanner.
Je crois qu'il serait beaucoup plus motivant, pour le recrutement de
foyers d'accueil de qualité, de développer ce type d'approche.
C'est ce que nous essayons de faire, d'ailleurs, durant l'année, puisque
cela fait partie du concept du centre d'accueil de l'avenir, pour la jeunesse,
que d'appuyer, par les ressources professionnelles d'un centre d'accueil,
l'effort de réintégration sociale qui est faite. Lorsqu'on fait
sortir un jeune d'un centre d'accueil, on le confie à une famille
d'accueil pour ne pas laisser la famille d'accueil livrée à ses
propres forces, ses propres ressources, sans aide, afin de permettre à
l'éducateur de prolonger son rôle et d'appuyer la famille
d'accueil. Pour les personnes âgées, je faisais part et on
y reviendra peut-être de la même orientation, d'aider, de
dépanner les familles d'accueil de leur donner un certain sentiment de
sécurité psychologique qui va faire beaucoup plus pour recruter
des familles de qualité que simplement une majoration des
barèmes. La majoration des barèmes est à double tranchant,
puisqu'elle peut nous amener aussi des familles d'accueil de qualité
douteuse, qui vont rechercher la pitance de rémunération qu'on
pourrait injecter dans les taux. Cela peut paraître dérisoire a
nos yeux, mais, à certains niveaux de revenus, dans certaines
circonstances, cela pourrait être une motivation. Je ne crois pas que ce
soit cette motivation qu'il faille encourager.
M. Charron: M. le Président, il y a un versant à la
philosophie que vient d'énoncer le ministre. Dans l'hypothèse
contraire, celle où le barème apparaît, que ce soit dans
les faits, statistiques ou non, du revenu moyen d'une famille canadienne, mais
qu'apparaisse dans les faits, dans le ressentiment d'une famille d'accueil,
comme nettement insuffisant, et comme en fin de compte, comme si on avait
abandonné, que l'Etat avait abandonné l'enfant à la
mère, en accordant une espèce de remboursement, qui à
l'occasion et c'est discutable ne parvient même pas
à combler les frais réels financiers encourus par la charge de
l'enfant dans la famille, peut donner l'impression à la famille
d'accueil que l'Etat s'est débarrassé du problème, en
disant: On vous donnera une pitance qui vous permettra d'arrondir les coins, en
tout cas, de subvenir un tant soit peu aux besoins de l'enfant. Si vous voulez
lui donner plus, pour l'amour, pour la chaleur, pour l'éducation que
vous leur donnez, c'est votre acte de charité sociale, vous l'avez
voulu. Nous, on défraie les frais de vêtements, de nourriture et
que le reste soit votre charge. Ceci peut conduire, exactement à
l'inverse. J'ai eu le déplaisir de le constater à l'occasion.
Autant une famille comme vous disiez, tout à l'heure, peut être
intéressée à l'occasion à l'appât du gain,
par le fait d'accueillir un enfant, si les barèmes étaient trop
élevés, autant cela peut conduire que l'enfant, au bout d'une
année ou de deux années apparaisse sur le budget familial
à tort ou à raison, comme étant une charge de plus, sur un
budget déjà grevé par la présence d'autres enfants
ou par des besoins normaux du couple ou de la famille, ce qui peut faire que
l'enfant placé en famille d'accueil ne reçoive pas l'attention,
ne reçoive pas la chaleur, la tendresse normale qu'un enfant doit
recevoir, mais apparaisse tôt ou tard comme une charge de plus à
la famille. Le ministre sait très bien que je n'exagère pas. Une
famille décide de se convertir en famille d'accueil, sur un choix
très personnel du couple, à l'occasion. On ne peut dire que, dans
les barèmes payés actuellement, l'appât du gain soit
tellement considérable. J'admets que, si vous donniez $25 par jour pour
chaque enfant, plusieurs auraient tendance à se porter famille
d'accueil. Je ne pense pas que les familles d'accueil du Québec, au
barème actuel, par exemple, un enfant de 0 à 4 ans à $3.35
par jour, décident de se porter familles d'accueil, pour faire de
l'argent. Il y a toujours, à l'origine, un geste social, un geste de
générosité. Exactement comme ceux que vous
défendiez ce matin, dans votre discussion avec le député
d'Outremont, au début des travaux de la séance d'aujourd'hui.
C'est à encourager. Je ne dis pas que c'est à
rémunérer. Je dis que c'est à encourager.
Or, il y a des couples, des familles d'accueil, qui en viennent à
un moment à regretter leur décision, parce qu'ils
s'aperçoivent que le barème est insuffisant à
répondre aux besoins réels de l'enfant. Le premier à
recevoir le feedback de ce regret, de cette décision, c'est l'enfant
lui-même en famille d'accueil. Il devient, je ne dis pas de façon
très marquée, mais ressentie, comme ostracisé dans la
famille. Il est la charge qu'on a eu le malheur de prendre à un moment,
mais un sujet auquel on n'ose plus renoncer parce que quand même on s'est
attaché à l'enfant, qu'on ne sait pas très bien, si on
l'envoie, où il va aboutir, ni aux mains de qui, etc. On le garde un peu
en réserve. La description que je fais peut être
exagérée. Je ne dis pas qu'il devient l'enfant noir ou le mouton
noir de la famille, mais, chose certaine, le barème de l'aide sociale,
le barème social actuel de la famille d'accueil n'est rien pour conduire
dans un autre chemin, c'est-à-dire soutenir une famille qui a eu un
geste de générosité, qui a fait le geste social d'aller
prendre un enfant qui, autrement, aurait été dans une tout autre
condition pour faire son éducation et atteindre l'âge adulte.
Il ne faut pas payer de gens pour l'amour qu'ils donnent à des
enfants, mais il ne faut pas non plus être mesquin au point de faire
qu'ils
soient les seuls à payer pour cet amour et qu'ils en viennent
normalement à un moment ou à un autre, pour des causes
financières, à regretter cet acte. Or, je crois que le tarif
actuel du barème d'aide aux familles d'accueil peut conduire, tôt
ou tard, s'il n'est pas modifié, au développement de ce sentiment
dans des familles d'accueil.
M. Forget: M. le Président, je ne peux certainement pas
être en désaccord avec les sentiments que vient d'exprimer le
député de Saint-Jacques. Je me ferais le reproche à
moi-même de tolérer des taux que je pourrais juger insuffisants
dans le sens où il a défini ce terme. Je crois que l'approche
utilisée de prendre les budgets des familles et d'établir notre
contribution au niveau moyen en ajoutant pour les cas particuliers des
possibilités de paiement additionnel reflète exactement les
mêmes sentiments. Evidemment, c'est une question d'opinion à
savoir si cette façon de rendre opérationnel l'objectif est
adéquate ou non. Il me semble, pour y avoir réfléchi
depuis quelques années, que c'est certainement une approximation aussi
bonne qu'il est possible d'imaginer. Bien sûr, encore une fois, il serait
anormal de chercher à rémunérer la
générosité et je crois qu'il serait déplorable de
ne pas pouvoir compter sur cette générosité des familles
d'accueil et sur l'affection, etc., qu'elles peuvent donner aux enfants qui
leur sont confiés. D'ailleurs, c'est une réalité, puisque
je peux me souvenir de plusieurs cas particuliers qui ont été
portés à mon attention par des familles d'accueil durant
l'année, et il est frappant de constater que tous les cas où des
gens se sont suffisamment angoissés, irrités ou
désemparés par des problèmes ont été des cas
où des familles d'accueil se voyaient privées de l'enfant qui
leur avait été confié. Cela illustre assez bien la force
des liens qui existent entre la vraie famille d'accueil et l'enfant qui leur
est confié. C'est quand même une source d'assez grand
réconfort. J'ai encore à l'esprit et il y en avait encore
un sur mon bureau la semaine dernière le cas de familles qui
disent: On nous a enlevé notre enfant. On nous a enlevé l'enfant
qu'on nous avait confié. Là, on accuse toutes sortes de
procédures bureaucratiques et autres de s'être mêlées
de la question de façon intempestive.
Evidemment, il y a des enquêtes, il y a des questions qu'il nous
faut poser pour nous assurer que des erreurs sont corrigées, car il s'en
produit. Mais je pense que c'est une force extraordinaire de la famille
d'accueil; les centres de services sociaux ont actuellement 25 000 enfants
placés en famille d'accueil. Cela montre donc que c'est une forme
d'organisation sociale, si on peut dire, qui est tout à fait en
santé au point de vue de sa disponibilité, au point de vue de sa
force également. Les témoignages dont je viens de parler le
démontrent amplement. D'ailleurs, certains ont été
portés à la connaissance du public dans les journaux. Ce qui nous
amène à réfléchir à la possibilité de
donner un certain caractère de permanence à ce lien, de le
protéger juridiquement, peut-être mieux qu'il ne l'est
actuellement. Il semble en effet qu'il y a, à l'heure actuelle, dans nos
lois, une très grande di- chotomie entre le statut de famille d'accueil
qui n'a aucune dimension légale, qui n'assure aucune protection, ni
à la famille d'accueil, ni à l'enfant, et le statut d'enfant
adopté qui est massivement important sur le plan légal, mais qui
est très compliqué à obtenir dans certains cas, qui est
impossible à obtenir dans certains cas, parce que les parents naturels
sont connus et n'ont pas décidé de libérer un enfant pour
son adoption, même si tout le monde sait, eux les premiers, qu'ils ne
s'occuperont jamais de cet enfant.
Il apparaît nécessaire, dans ces cas, dans un certain
nombre de ces cas au moins, qu'on puisse protéger, en quelque sorte, le
lien qui s'établit entre une famille d'accueil et l'enfant qui lui est
confié. Les modalités, ce sont des choses qui sont à
l'étude dans l'optique d'une nouvelle législation sur laquelle
nous travaillons au sujet de l'adoption. Mais je pense qu'il est possible
d'éviter que ces liens soient brisés sans un minimum de
formalisme, sans un minimum de prérequis, pour qu'on puisse...
Evidemment, ce n'est pas un enfant adopté, ce n'est pas un lien qui est
absolument irréfragable, mais c'est un lien qu'on ne devrait pas pouvoir
briser à partir d'un certain temps, à moins qu'on ait de
très bonnes raisons pour le faire et des raisons qu'il faudrait
justifier peut-être devant un tribunal, de manière à
s'assurer qu'il n'y a pas de fantaisie administrative, qu'il n'y a pas de
pouvoir discrétionnaire, peut-être fantaisiste, auquel on donne
libre cours, parce que ça peut être plus commode, à cause
de questions d'adresse, de questions de déplacement, de questions de
chargés de cas qui, tout à coup, s'imaginent que ça va
être mieux dans un autre foyer, sans vraiment avoir regardé toutes
les implications de leur geste. Je pense que c'est une des choses que nous
allons vouloir regarder au cours des prochains mois pour protéger ce
lien.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Personnellement, M. le Président, je
crois bien que discuter de cette question n'est pas toujours facile parce qu'il
y a tellement de sentiments humains mêlés à ces relations
qui s'établissent entre les enfants et les foyers adoptifs.
C'est entendu que, si on motive l'acceptation d'un enfant dans un foyer
pour des raisons financières, je crois que ça peut être un
inconvénient assez sérieux pour l'enfant. C'est tellement
difficile de déterminer jusqu'à quel point les revenus financiers
et le sentiment humain qui veut que certains couples aient besoin d'une
présence d'enfants dans leur foyer... C'est assez difficile parce que,
si on paye des sommes trop considérables... Même avec les sommes
existantes, je suis assuré qu'il y a des enfants qui sont en foyer
adoptif, qui pourraient légalement être adoptés, mais qui
ne le sont pas. Parce que les parents adoptifs ne veulent pas se priver des
sommes qu'ils reçoivent en adoptant des enfants légalement.
D'ailleurs, il y a une demande pour l'adoption des enfants, aujourd'hui,
je crois bien, qui dépasse
l'offre, si je peux me servir de ce terme. C'est donc dire qu'il y a
beaucoup de familles qui sont prêtes à adopter des enfants sans
rémunération de l'Etat. Elles le font d'ailleurs, en fait. Si le
gouvernement paye des sommes qui peuvent permettre à ces familles de
défrayer les coûts d'hébergement, je pense bien que les
familles qui se plaignent que la somme n'est pas assez considérable...
Surtout si ces familles allaient jusqu'à faire ressentir à
l'enfant qu'il devient une charge, je pense que ce serait une preuve bien
concrète qu'on a surestimé la capacité et la
responsabilité de cette famille vis-à-vis des enfants qu'elle
protège.
C'est un domaine dans lequel il n'est pas facile de démarquer le
sentiment humain, les besoins humains et les besoins financiers. Ce qui
m'inquiète beaucoup plus, à ce sujet, c'est le fait de ces
enfants qui changent de foyer souvent. Cela l'était dans le
passé, je ne sais pas si on a pu remédier à cet
inconvénient. C'est là le problème de fond pour un enfant
qui demeure six mois, un an ou deux ans dans un foyer donné et qui se
voit détaché de ce foyer.
M. Charron: Sept familles d'accueil pour le même
enfant.
M. Saint-Germain: Alors, je demande si on a réellement, au
niveau du ministère, des personnes qualifiées, des travailleurs
sociaux qualifiés pour réellement estimer la valeur des familles
qu'ils choisissent. J'avoue que ce n'est pas facile pour quelqu'un de juger les
qualités morales et le sens des responsabilités d'une famille,
déterminer si un enfant, dans une famille donnée, sera à
l'aise et pourra avoir un développement normal. Je me demande
réellement si on a trouvé la compétence chez ces
gens-là. Je ne sais pas si le ministre pourrait...
M. Forget: Je suis d'accord avec le député de
Jacques-Cartier. Il a mentionné le problème des parents, des
familles d'accueil qui pourraient adopter l'enfant et qui résistent
à le faire, dans certains cas, à cause du paiement. C'est un
problème qui existe dans certains cas, sans aucun doute et qui a
même amené certaines associations à recommander l'adoption
subventionnée.
Mais cela pose évidemment d'autres problèmes, des
problèmes d'un autre ordre, tel que différencier entre enfant
adoptif et enfant naturel au sein d'une même famille en maintenant le
paiement pour enfant adopté, ce qui semble contraire aux objectifs
poursuivis dans le domaine de l'adoption depuis plusieurs années.
C'est ce qui nous a amenés à envisager, dans certains cas,
de protéger au moins la relation qui s'établit entre un enfant
qui a séjourné plusieurs années dans une même
famille d'accueil, de le déplacer seulement si on a trouvé pour
lui un foyer adoptif, ou seulement si on a véritablement de bonnes
raisons, dans l'intérêt de l'enfant, de préférer une
autre solution.
Quant aux placements successifs dans plusieurs familles d'accueil, il
serait téméraire de dire que c'est terminé. On nous
indique cependant que cela a peut-être une incidence moins
élevée que cela pouvait avoir dans le passé, à
cause de l'amélioration graduelle, la qualité professionnelle,
les services de placement qui, graduellement, vont nous aider à
surmonter ces problèmes, mais pas sans d'autres mesures telles que des
foyers de groupe qui sont presque les seuls capables d'accepter, de
tolérer certains jeunes, particulièrement des jeunes
garçons de plus de quatorze ans qui ont un passé de
démêlés avec la justice, des épisodes de violence
difficile à contrôler. Il est clair qu'on n'a pas beaucoup de
succès, dans le placement en famille d'accueil, de jeunes comme
ceux-là. Il y a bien peu de familles qui encaissent cela pendant
très longtemps. Le foyer de groupe, pour ces jeunes, est la seule
solution.
Plusieurs histoires de placements répétés, chez les
garçons et aussi, dans une certaine mesure, chez les filles,
au-delà d'un certain âge, appartiennent à cette
catégorie de jeunes un peu turbulents, avec lesquels aucune famille ne
réussit à se réconcilier; le développement de
foyers de groupe auxquels on a fait allusion plus tôt aujourd'hui, qui
est assez rapide, nous permettra de trouver une réponse plus
adéquate que la famille d'accueil.
La famille d'accueil est véritablement la solution pour le jeune
enfant en bas de douze ans et pour l'adolescent qui est un cas de protection
pure, c'est-à-dire le jeune qui n'a pas lui-même de
problème de mésadaptation sociale, mais qui doit trouver un
gîte, qui doit trouver une famille, parce que sa famille à lui est
disparue, ses parents sont morts, sont malades ou ne sont pas disponibles pour
s'en occuper.
Il y a largement un élément de solution dans les autres
programmes dont nous avons discuté avant. Peut-être qu'avec
l'amélioration de la qualité professionnelle des interventions,
on est plus sensibilisé aussi à la nécessité de
respecter une certaine continuité.
M. Saint-Germain: Avez-vous constaté aussi que, bien
souvent, des parents il faut bien l'admettre sont tout à
fait irresponsables vis-à-vis de leur famille, pour une raison ou pour
une autre, soit par le refus des responsabilités de l'épouse,
soit par le refus des responsabilités du père ou les deux. A un
moment donné, ils laissent aller leurs enfants, laissent l'Etat prendre
charge de leur progéniture. Il semble que parfois, pour une raison ou
pour une autre, sous l'impulsion du moment, ces parents se décident
à reprendre la vie commune, récupèrent leurs enfants pour,
bien souvent, simplement quelques mois. C'est fréquemment une
réconciliation tout à fait passagère qui devient un
traumatisme de plus chez les enfants. Avez-vous tout de même
constaté que ce sont des situations qui se présentent assez
fréquemment?
M. Forget: Ce sont des situations qui se présentent. Il
n'y a évidemment pas de solution miracle, de panacée. Deux types
de mesures peuvent être envisagés. Il y en a une qui est
déjà appliquée. L'autre, espérons-le, pourra
l'être dans un avenir rapproché.
La première mesure consiste à affirmer et à
s'assurer que ce n'est pas seulement une affirmation théorique, mais
à affirmer, de façon continue, la responsabilité au moins
financière des parents pour le soin des enfants, la subsistance des
enfants. Ceci fait partie d'une politique établie désormais par
le ministère des Affaires sociales. On remarque d'ailleurs, dans les
crédits relatifs à l'enfance, à la protection de
l'enfance, à l'élément 1, que, sur une masse de
crédits bruts de $40 millions, qui représente le total des sommes
versées aux familles d'accueil, du fonds commun à l'enfance et
des placements en pensionnats privés, sur un total brut de $40 millions,
$8 millions représentent la contribution, dans une année, faite
par les parents, pour ces enfants à placer.
Il y a, bien sûr, un certain nombre de parents qui sont redevables
d'une contribution minimale qui est tout juste équivalente à
leurs allocations familiales. D'autres, avec un revenu supérieur et
proportionnellement au revenu, sont appelés à contribuer
davantage. Mais c'est une contribution qui est réelle, qui n'est pas que
symbolique, qui permet de diminuer ce qui serait autrement l'attrait de
certaines familles de se libérer du fardeau financier qui est le leur
par des placements inconsidérés. Mais ce n'est qu'une mesure et
ce n'est pas en soi une mesure satisfaisante. Pour les cas extrêmes,
comme on le sait, l'Office de révision du Code civil a proposé
des mesures plus radicales et l'avant-projet qui a été
discuté ici même en commission parlementaire, l'avant-projet de
loi sur la protection de la jeunesse prévoit, dans certains cas, une
déchéance de l'autorité parentale, ce qui veut dire que,
dans certains cas, constatés par la cour, à la suite
d'enquêtes et d'évaluations, on peut décider que cet enfant
va être mieux adopté s'il est adopté par une autre famille,
ce serait mieux que de continuer dans une situation où,
carrément, la famille cherche à se défaire de ses
responsabilités par tous les moyens possibles.
C'est un remède ultime mais définitif. Pour ce qui est des
solutions intermédiaires, nous revenons au problème de la
consultation puisque, à défaut de prendre des mesures, des
sanctions judiciaires ou administratives, il n'y a que l'intervention
auprès de la famille pour les amener à changer leur comportement,
à assumer leurs responsabilités. Je ne répéterai
pas ce que j'ai dit cet après-midi au sujet des problèmes de la
consultation. C'est une autre illustration qui s'ajoute à celle que nous
avons discutée en commission cet après-midi et ce matin, celle de
l'immense défi qui est posé aux services de consultation. Comment
intervenir efficacement auprès d'une famille? Que faire exactement?
Combien de personnel qualifié avons-nous pour faire ce genre
d'intervention? Avec quel succès à anticiper? Ce sont toutes des
questions pour lesquelles nous n'avons pas actuellement de réponse
absolument cohérentes, absolument pertinentes.
Nous espérons en avoir bientôt, mais il n'est pas dit que
ce problème sera résolu dans un bref laps de temps. Je crois que
c'est largement le défi des services sociaux pour les prochaines
années.
M. Saint-Germain: Vous avez mentionné qu'il y avait 25 000
enfants comme cela sous la responsabilité du gouvernement, si je ne
m'abuse.
M. Forget: On me donne ici 19 000 enfants en familles
d'accueil...
M. Charron: J'ai un chiffre de 21 000...
M. Forget: Je crois que c'est aux environs de 20 000. Je
m'excuse, cela dépend des catégories que l'on fait...
M. Charron: On a un chiffre de l'année dernière en
date de mars 1974, qui remontait à un an, même l'année
dernière, et qui était le 21 800, vous-même m'aviez fourni
les données.
M. Forget: Oui, mais il y a eu un déclin progressif du
nombre d'enfants en familles d'accueil. Ceci a résulté d'une
orientation consciemment voulue et poursuivie par le ministère des
Affaires sociales depuis trois, quatre ou cinq ans. Nous avons constaté,
si l'on fait l'histoire des placements en familles d'accueil au Québec,
une accélération extrêmement rapide pendant les
années soixante. On est parti d'un niveau très bas au
début des années soixante. Le taux s'est accru à un rythme
alarmant pendant la dernière moitié des années soixante,
pour passer de 15 000 à 20 000, à 25 000, à 30 000, et,
à un moment donné, à presque 33 000. Il y avait là
une espèce de vague de fond dont il était difficile de saisir la
raison et qui semblait dépasser en importance tout ce qui peut
s'observer ailleurs en Amérique du Nord. Evidemment, les statistiques,
les chiffres relativement au placement d'enfants sont difficilement comparables
d'une province à l'autre, mais malgré tout, un enfant est
placé en famille d'accueil ou il ne l'est pas. Dans une large mesure, il
a été possible de comparer ces placements avec ceux qu'on observe
en Ontario, dans les autres provinces du Canada. Il y a trois ou quatre ans, on
a pu dire, avec toutes les justifications possibles, qu'il y avait plus
d'enfants placés au Québec, à ce moment, que dans
l'ensemble du Canada, à part le Québec.
Bien sûr, on parle là de provinces à la fois plus
riches et plus pauvres que le Québec, avec des situations urbaines,
rurales et tout ce qu'on voudra. Il y a toute une variété. Donc,
il n'y a pas d'explication facile à cela, sauf un mode ou une pratique
qui était adoptée de façon probablement
inconsidérée. Donc, il y a eu des directives, il y a eu des
rencontres, il y a eu des discussions avec les centres de services sociaux pour
les inviter à extrêmement plus de prudence, de réserve,
parce qu'il faut dire que chaque placement est un peu la consécration
d'une dislocation de la famille. C'est un jugement qu'on porte sur une famille,
elle ne peut plus fonctionner. C'est d'une certaine façon une solution
de faciliter, à la moindre raison, l'alcoolisme du père, fugue
quelconque. C'est le placement comme solution, une panacée universelle.
Il y a eu une rétrogression des placements qui sont passés, me
dit-on, après vérification, à
20 000. C'est de l'ordre de 20 000. De toute manière, cela varie
d'un mois à l'autre, je pense bien. Donc, en quatre ans, cela a
diminué de 33% ou quelque chose dans ce genre. C'est à un niveau
qui est beaucoup plus comparable à ce qu'on peut s'attendre d'une
population de 6 millions d'habitants.
M. Saint-Germain: Vous avez des familles plus fortunées
qui font elles-mêmes leurs placements et qui défraient les
coûts, bien que ces familles, bien souvent, s'occupent très peu de
leurs enfants, sinon de payer le déboursé, de payer les
coûts tout simplement.
M. Forget: Bien, c'est évident.
M. Saint-Germain: Vous n'avez pas de statistique là-dessus
non plus?
M. Forget: II n'y a aucune statistique là-dessus. Il n'y a
aucune autorisation, il n'y a rien qui est requis de quelque organisme
gouvernemental que ce soit, c'est un contrat privé, si l'on veut. On n'a
absolument aucune idée de l'ampleur du phénomène. Il
existe probablement, mais à quelle échelle? Nous n'en savons
rien.
Le Président (M. Cornellier): Est-ce que
l'élément 1 est adopté?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Hébergement des adultes et personnes
âgées
Le Président (M. Comellier): Adopté. Elément
2: Hébergement des adultes et personnes âgées.
M. Charron: Le ministre des Affaires sociales a fait
connaître, lors d'une conférence de presse, il y a quelques jours,
une modification, une précision importante de la politique du
ministère à l'égard des personnes âgées.
Je ne reprendrai pas ce que nous avons déjà discuté
à d'autres programmes à l'égard des personnes
âgées, le souci qu'elles ont de vouloir rester chez elles. Je
pense que cela a été reconnu dans le programme du
ministère et nous ne ferons pas ici une discussion de principe sur ce
qui semble maintenant reconnu de tous et pour tous, l'important à
réaliser.
J'ai des questions d'information au programme énoncé par
le ministre des Affaires sociales à l'égard des personnes
âgées et j'y procéderai immédiatement, si vous le
voulez.
Le ministre a annoncé que, d'ici 1981, 34 473 places seront
disponibles pour les personnes âgées dans des centres d'accueil.
De combien disposons-nous de places actuellement dans le réseau des
Affaires sociales? A quel rythme se fera la progression pour en arriver aux
chiffres de 34 000 en 1981?
M. Forget: Les chiffres sur les places sont les suivants et je
peux donner ici non seulement la situation actuelle, mais aussi la progression
depuis quelques années.
En 1969, nous comptions 14 553 places pour personnes âgées,
dans l'ensemble du Québec. En 1972, ce chiffre était de 22 455.
En 1975, il était devenu de 28 043 places. En 1978, nous
prévoyons qu'il sera à 30 108 places et en 1981 à 34 473
places. Ce qui veut dire qu'alors que, l'année initiale de cette
comparaison, en 1969, nous avions un ratio de places, par rapport au chiffre
total de la population âgée, de 3,8%, nous nous retrouvons en 1981
avec 6%, qui est l'objectif visé. Sur une période de douze ans,
alors que le nombre de personnes âgées est passé d'un peu
moins de 400 000 381 000 pour être exact à un peu
moins de 600 000, c'est-à-dire 571 000, pour une croissance de plus de
40% durant cette période, ceci veut dire un double rattrapage, un
rattrapage initial d'abord de 3,8% à 6% pour l'ensemble des personnes
âgées en 1969, et ceci impliquait déjà un certain
nombre de lits, et un deuxième rattrapage pour tenir compte de
l'accroissement extrêmement rapide, entre 40% et 50%, des personnes
âgées entre 1969 et 1981.
M. Charron: Je vous pose une question tout de suite. Est-ce que
cette direction vers la norme de 6% qui est déjà fixée par
la plupart des pays occidentaux se fera uniformément sur le territoire
québécois?
M. Forget: Non. La répartition régionale de ces
nouvelles ressources sera très inégale, parce que la
répartition actuelle est inégale.
Pour atteindre un objectif d'une accessibilité minimale de six
places pour cent personnes âgées en 1981, il faudra
privilégier des régions qui ont été
sous-privilégiées...
M. Charron: Comme, par exemple, la sous-région de la
région 04, la région de Drummondville, qui est, selon le rapport
du CRSSS de la région, équipée à environ 3,28
actuellement et qui apparaît comme une des moins bien dotées de
tout le réseau des Affaires sociales, en ce qui concerne les places pour
hébergement des personnes âgées.
M. Forget: M. le Président, dans cette question d'un
objectif basé sur le chiffre de la population, plus on subdivise le
territoire, plus il faut de places pour obtenir un minimum donné sur un
territoire donné. A la limite, si on le subdivisait suffisamment, il
faudrait probablement autant de places qu'il y a de personnes
âgées, puisque, dans le bout de rue où vit une personne
âgée, s'il n'y a pas une place, il manque une place. Evidemment,
je pousse le raisonnement à l'extrême, à l'absurde pour
illustrer que nous avons d'abord essayé d'obtenir au niveau
régional, au niveau des grandes régions socio-économiques
et administratives du Québec, la norme de 6%, et, dans la mesure du
possible, la même satisfaction de cet objectif, dans les
sous-régions. Dans la région 04, il y aura une certaine addition
qui sera faite. Il y a deux régions, je crois, au Québec, qui ne
se verront ajouter aucune ressource nouvelle durant la période du
programme quinquennal 1976 à 1981. Par contre, la région de
Montréal, qui a été largement défavorisée
avant 1964 je parle de la région de Montréal, à la
fois 6-A et la région au sud de Montréal verra 4500 places
additionnelles s'ajouter aux places existantes.
M. Charron: Pouvez-vous déposer le plan quinquennal de
développement?
M. Forget: Je ne peux déposer que ce qui a
été rendu public dans les communiqués je ne sais
pas s'il y a des copies additionnelles et qui constitue une ventilation,
pour la première et la deuxième année du programme
quinquennal. Pour ce qui est des années subséquentes,
c'est-à-dire de 1978 à 1981, il y a une liste des
localités, mais ce n'est pas distribué par année. Les
budgets comme tels, par lesquels on prend cette décision
définitive, ne sont pas déterminés si longtemps d'avance.
Le rythme annuel, cependant, pour répondre à une question
initiale, est établi à 1450 lits et, en particulier, c'est le
chiffre que l'on retrouve pour ce qui est des constructions prévues en
1977. Celles de 1976 totalisent effectivement plus que cela, puisque nous
assistons à la fin du programme annoncé en 1973, un programme de
trois ans de 1973 à 1976, et au début de la première
année de l'autre. Il y a là une cumulation de programmes.
M. Charron: M. le Président, je reviens pour un moment
à cette question de la région 04, et j'admets très
facilement le raisonnement du ministre des Affaires sociales, que si on
subdivise les sous-régions, évidemment on se rend la tâche
impossible d'atteindre la norme.
La région 04 est particulière parce qu'elle apparaît
beaucoup plus comme une région strictement d'une création
administrative le ministre en conviendra probablement avec moi
que n'importe quelle autre région. Lorsque le Québec a
procédé à cette division en régions
socio-économiques qui devaient devenir des régions
administratives à partir desquelles nous avons édifié
à peu près tous les programmes sociaux, économiques, etc.,
cette région 04 est la plus problématique, car elle n'est pas ce
qu'on appelle une région naturelle autant que le Bas Saint-Laurent, la
Gaspésie peuvent faire un bloc historique, je dirais, dans le
développement du Québec, la région de la capitale
nationale des Québécois ici, le Saguenay-Lac-Saint-Jean. La
région de la Mauri-cie a été quelque peu inventée.
Le fleuve a constitué une barrière de tous les temps entre la
rive nord et la rive sud de cette région. En fait, le pont de
Trois-Rivières, le pont Laviolette n'existe que depuis dix ans et,
très longtemps la région de la rive sud, dite de la Mauricie, 04,
était beaucoup plus axée vers Montréal, avait plus de
communication avec Saint-Hyacinthe, même avec Sher- brooke, était
plus tournée vers Sherbrooke que vers Trois-Riv ères où la
distance en milles n'était peut-être pas très
considérable, mais où le fleuve consistait une barrière
infranchissable.
Je ne veux pas faire la géographie du Québec avec les
députés qui viennent de toutes les régions, mais c'est une
région administrative plus que naturelle. Je rejoins le fil de nos
propos. C'est une volonté très nette dans les centres d'accueil
pour personnes âgées de ne pas déraciner les gens d'une
région, d'abord parce qu'ils ont, plus que tout autre des attachements
aux régions. C'est bien normal, il y ont vécu plus longtemps que
n'importe qui d'une part, et d'autre part, parce qu'ils veulent être
encore en contact avec leurs familles, avec leur milieu, recevoir des visites
et, à l'occasion, effectuer des sorties qui ne les obligent pas,
à leur âge, à se déplacer pendant des milles et des
milles.
Or, lorsqu'on procède à l'analyse de la région 04
et qu'on parle de foyer d'hébergement, pour une personne de
Drummondville à qui on va dire que le foyer d'hébergement de
Trois-Rivières ou de Grand-Mère, par exemple, est celui de la
région 04 qui permet à la région de correspondre à
la norme, c'est absolument fictif parce que pour cette personne, il n'est pas
de cette région, et cela n'a jamais été sa région.
Pour quelqu'un de Rimouski, si on l'invite à se rendre à
Rivière-du-Loup, malgré le fait de la distance, le
dépaysement est moins grand. C'est pour cela que je me permets
d'intervenir sur le fait que la sous-rétion des Bois Francs, la
sous-région de Drummondville est effectivement) sur le plan des places
d'hébergement... je véiifierai dans l'échéancier ou
le plan quinquennal de développement qu'on vient de me donner, l'allure.
Mais si j'ai fait cette remarque, c'est parce que j'ai passé dans cette
région un certain nombre de temps, j'y ai reçu un certain nombre
de communications et on m'a convaincu du bien-fondé d'un certain nombre
de positions. Je ne veux pas prendre plus de temps de la commission
là-dessus, mais ce problème m'apparaît important.
M. le Président, ce qui est important aussi dans l'annonce faite
par le ministre des Affaires sociales au début de la semaine
dernière, c'est le développement de familles d'accueil, cette
fois à l'égard des personnes âgées.
Je ne peux que souscrire à cet objectif aussi, mais j'aimerais
connaître du ministre des Affaires sociales la façon dont il
entend développer, durant l'exercice financier 1976/77, le réseau
de familles d'accueil pour personnes âgées. Est-ce que l'on
procédera aux mêmes critères, tout cela sera
évidemment la responsabilité des CSS? Est-ce que les CSS peuvent
d'ores et déjà lancer quasi un concours public ou une soumission
publique dans leur région pour recevoir des demandes de familles
d'accueil se disant prêtes à recevoir des personnes
âgées? Comment cela se réalisera-t-il aux yeux du
ministre?
M. Forget: Cela se réalisera dans le court terme, et, bien
sûr, un peu comme vous le suggérez, par l'appel qui sera
lancé aux familles d'ac-
cueil. Il est clair que les familles d'accueil sont sous la surveillance
des centres de services sociaux quant à ce qui est du respect de
certaines normes, de certains critères d'hygiène, de
salubrité, de sécurité, de responsabilité, pour ce
qui est des procédures d'admission et pour ce qui est du statut de
bénéficiaire auquel s'attache la garantie, par exemple, d'une
allocation de dépenses personnelles, etc., conformément à
ce qui a été discuté ce matin en commission
parlementaire.
Mais nous envisageons également que les centres d'accueil
participeront de façon importante au recrutement de ces familles
d'accueil puisqu'elles connaissent le milieu dans lequel ils oeuvrent, ces
centres d'accueil connaissent bien leur milieu. Non seulement devront-ils
participer au recrutement, mais il est nécessaire, pour la même
raison que j'indiquais tout à l'heure vis-à-vis des familles
d'accueil pour enfants, que ces centres d'accueil puissent offrir un certain
appui, une certaine possibilité de dépannage aux familles
d'accueil de manière que, premièrement, le recrutement soit
favorisé et deuxièmement, que s'il y a des imprévus ou une
détérioration rapide de l'état de santé de certains
bénéficiaires en familles d'accueil, on ne soit pas dans des
situations, des culs-de-sac, littéralement, qui pourraient autrement en
résulter, si les familles d'accueil étaient laissées
à elles-mêmes.
Donc, dans les prochaines semaines, les centres de services sociaux et
un certain nombre de centres d'accueil seront invités à faire des
efforts pour le recrutement. Dès que le recrutement pourra s'effectuer,
il sera possible d'appliquer très rapidement les barèmes d'appui
financier et d'effectuer des placements.
Il y a un minimum de formalités dans tout cela, puisque, le
recrutement étant fait, l'inspection peut se faire également
assez rapidement s'il y a un premier tri fait par le centre d'accueil. Les
budgets du ministère prévoient la possibilité d'accorder
des ressources d'appoint aux organismes impliqués, tant centres
d'accueil que centres de services sociaux, pour accélérer ce
processus.
M. Charron: A combien évaluez-vous les besoins en familles
d'accueil pour personnes âgées en 1976/77?
M. Forget: II est impossible de répondre
véritablement adéquatement à cette question. Ce que l'on
observe en effet, c'est que, selon l'information disponible, les centres de
services sociaux ne procèdent pas nécessairement à une
évaluation rigoureuse de la situation de santé, de la situation
sociale des personnes qui cherchent un hébergement.
Etant donné la longueur de l'attente, actuellement, et encore
pour quelques années dans certaines régions, pour
l'hébergement, ils laissent simplement les noms en attente et
procèdent à une évaluation systématique, au moment
où il y a des chances qu'une place soit disponible, par ordre
d'arrivée.
Donc, il n'est pas possible de savoir, parmi ceux qui ont demandé
un placement, quels sont ceux qui l'ont fait en prévision d'un besoin
futur, sachant eux aussi que l'attente est longue. Il y a ce genre de tradition
de s'acheter de l'assurance, en quelque sorte, en plaçant son nom sur la
liste bien avant qu'on en ait véritablement un besoin urgent.
Donc, il est impossible pour nous de dire, à ce moment-ci, si
toutes les personnes qui sont en hébergement sont effectivement des
personnes qui pourraient être référées à des
familles d'accueil. C'est l'expérience de cette opération qui va
nous apporter une réponse à la question puisque cela fera partie
inhérente d'un programme comme celui-là que de faire
l'évaluation par anticipation plutôt qu'au moment même
où le placement est requis, de manière à établir un
certain ordre de priorité basé sur l'intensité des besoins
et de pouvoir loger, placer en familles d'accueil ceux pour lesquels un
placement immédiat n'est pas requis, mais qui, malgré tout, ne
peuvent pas demeurer en attente chez eux.
Il peut s'écouler plusieurs mois avant qu'on puisse avoir un
tableau d'ensemble de la situation. C'est à ce moment-là qu'on
pourra évaluer également la capacité de cette solution
d'apporter la réponse qu'il nous semble possible d'apporter par ce
moyen-là, basé sur l'expérience de certains centres
d'accueil, y compris le centre d'accueil Hochelaga-Maisonneuve. Je parle de
celui pour les personnes âgées qui a un réseau de familles
d'accueil affilié de ce genre-là et qui semble avoir
trouvé là une solution fort intéressante à
plusieurs situations de personnes qui ne peuvent plus vivre de façon
autonome.
M. Charron: Vous avez parlé également d'un
rattachement d'un certain nombre de foyers qui vivent encore aujourd'hui de
façon clandestine, qui sont des foyers d'hébergement clandestins.
La formule dont vous avez parlé était celle d'un rattachement
également aux centres d'accueil.
M. Forget: Oui.
M. Charron: Vous avez mentionné que peut-être 2000
personnes, aujourd'hui, vieilles personnes et vieux citoyens
québécois vivent dans ces foyers. Comment, après tant
d'années où le problème des foyers clandestins a fait
couler tellement d'encre et a souvent connu des injustices tellement grandes,
comment prévoyez-vous réaliser le rattachement d'un certain
nombre de ces foyers, ceux qui se qualifieront pour maintenir le permis, pour
obtenir le permis, parce que la plupart n'en n'ont pas, comment obtenir le
permis du ministère des Affaires sociales? De quelle façon
administrative cela s'opérera-t-il, quant à leur rattachement
à un centre d'accueil de la région?
M. Forget: Ce qui est envisagé, c'est de faire appel, dans
une région, à un centre d'accueil public qui représente
les meilleures garanties d'une bonne gestion. Il s'agit là d'une
équipe qui est capable, qui a démontré qu'elle est capable
d'assumer des responsabilités plus larges.
Sans vouloir passer des jugements sur toutes les administrations des
centres d'accueil, je crois
qu'il est normal que l'on trouve des établissements où il
y a une certaine force, une force relativement plus grande qu'ailleurs. De
demander à ces centres d'accueil et ce, en collaboration avec les
centres de services sociaux qui, dans un grand nombre de cas, ont fait un
certain inventaire des ressources ou qui ont des moyens de connaître les
ressources du genre des foyers clandestins dans leur région, de
collaborer avec eux et de se mettre en communication avec ces foyers, de
procéder à leur évaluation.
La responsabilité du centre de services sociaux est
particulièrement grande, de même que la responsabilité du
ministère, si les conditions de certaines de ces installations sont
telles qu'elles sont acceptables, non pas de recommander l'émission d'un
permis à ces établissements par le ministère, mais de
demander pour eux-mêmes, pour ces centres publics d'accueil, une
extension à leur permis qui leur permettra d'assumer la
responsabilité du fonctionnement de ces centres d'accueil, de ces
pavillons qui leur sont affiliés, mais sous leur responsabilité
et comme partie intégrante de leurs installations, en vertu d'un contrat
de location de l'équipement.
M. Charron: C'est le centre d'accueil qui demanderait le permis
d'ouvrir tel ou tel pavillon?
M. Forget: Qui demanderait d'amender son permis pour inclure ces
places dans la capacité autorisée.
M. Charron: Et c'est le centre d'accueil qui devra faire preuve
de l'efficacité et de la légalité de...
M. Forget: Exactement, et c'est le centre d'accueil qui
disposera...
M. Bonnier: C'est le CSS qui va faire la découverte quand
même, c'est cela?
M. Forget: C'est le CSS qui va faire la découverte, car,
effectivement, il est beaucoup plus en mesure de connaître l'existence de
ces...
M. Charron: ... ces foyers clandestins sont connus.
M. Forget: C'est cela, puisque ces gens du CSS font des
références officieuses à ces ressources, malheureusement,
assez souvent.
M. Bonnier: Je ne parle pas seulement des foyers clandestins, je
parle aussi des nouveaux. Comme procédure, est-ce que ce sera à
peu près la même chose?
M. Forget: On a parlé tantôt des familles
d'accueil.
M. Bonnier: Oui.
M. Forget: La procédure est sensiblement
différente. Quand on parle des pavillons, quand on parle des foyers
clandestins ou des foyers illicites, peu importe la désignation, on
parle d'installations qui reçoivent plus de dix
bénéficiaires et qui, en vertu de la loi, ne peuvent pas
être considérées comme des familles d'accueil. Certaines de
ces installations sont acceptables. Elles l'ont toujours été,
mais n'ont jamais eu de permis, malgré qu'on en connaissait l'existence,
à cause d'une décision du ministère de ne pas attribuer de
permis, pour éviter une extension indéfinie, une absence de tout
contrôle sur le développement de ces centres.
Donc, ils ne sont pas nécessairement clandestins à cause
de la qualité des services, mais parfois à cause d'une
décision de ne pas attribuer de permis. La décision de ne pas
attribuer de permis demeure. Cependant, ils seront légalisés par
leur incorporation, en quelque sorte, à un centre d'accueil public qui
assumera la responsabilité des services professionnels, mais qui
s'adressera à eux pour louer d'eux des services d'hébergement
proprement dits, c'est-à-dire le gîte et le couvert, assurant par
ailleurs que, sur le plan du "nursing", des soins infirmiers, du contrôle
de la médication, de l'admission, du statut de
bénéficiaire et tout ce qui s'y rattache sur le plan financier,
c'est-à-dire le plafonnement de la contribution du
bénéficiaire et sa graduation en fonction de son revenu, la
possibilité de garder, au minimum $45 ou $55, selon l'âge, en
vertu des garanties qui s'appliquent dans les foyers publics.
Tout cela fait partie d'un "package deal" en quelque sorte qui est
offert au foyer illicite pour le légitimer et assurer que ses
activités s'intègrent dans un cadre bien contrôlé.
Ceux qui ne sont pas acceptables, parce que l'édifice est dangereux sur
le plan de la sécurité, parce que l'hygiène n'est
absolument pas respectée et parce qu'on ne donne aucun signe de vouloir
mettre de l'ordre, ceux-là devront fermer. Nous espérons qu'avec
le développement des familles d'accueil, nous pourrons très
rapidement trouver les places nécessaires pour fermer ces centres
illicites et reloger les bénéficiaires, sans attendre les
constructions qui, dans certains cas, même si la décision est
prise, vont se faire attendre encore pendant deux, trois, quatre et même
cinq ans.
M. Charron: M. le Président...
M. Bonnier: Je m'excuse, est-ce que je peux seulement poser une
question? Est-ce que cela veut dire que vous seriez d'accord que de nouveaux
foyers puissent exister, de nouveau comment les appelez-vous
pavillons d'accueil, c'est-à-dire qu'il y ait plus de dix personnes,
à des endroits qui seraient acceptés?
M. Forget: Quant à cette question, la réponse est
négative. Parce que nous avons observé que même sur le plan
de l'hébergement, des foyers ou des installations où l'on
reçoit des personnes qui ont plus que dix lits et moins de 70 lits, ne
peuvent pas fonctionner de façon rentable, pour toutes sortes de
raisons, surveillance la nuit, par exemple, des bénéficiaires.
Lorsqu'il faut payer du monde pour surveiller trois ou quatre, enfin une
douzaine de personnes, on paie le même prix que pour en surveiller
60. Toutes sortes d'activités qui sont nécessaires et qui
requièrent du personnel à temps plein et qui, à cause des
classifications de postes, ne peuvent pas être utilisées pour
d'autres choses lorsqu'ils sont oisifs... Il n'est vraiment pas souhaitable que
des installations de petites tailles comme celles-là prolifèrent,
puisqu'autrement, on va créer pour des années et des
années, parce qu'il ne sera jamais possible de les fermer, et pour
toutes sortes de raisons qu'on comprend facilement un réseau qui va
devenir extrêmement coûteux, presque incontrôlable et qui ne
favorisera pas des services de qualité.
Nous voulons bien prendre acte malgré tout, parce qu'on n'a pas
le choix, si on veut se retourner rapidement et offrir des solutions de ce
qu'il existe actuellement, au 1er avril 1976, et qui est, soit licite, soit
illicite. Dans le cas des foyers licites, c'est-à-dire ceux qui ont des
permis effectivement, nous envisageons progressivement, selon les
catégories, parce que cela appartient à plusieurs
catégories, de les intégrer dans un cadre où la
qualité des services c'est une chose qui est assurée par
le mécanisme du centre d'accueil public d'hébergement
proprement dit, le gîte, le couvert peuvent être offerts selon des
modalités beaucoup plus légères, des modalités
différentes.
Ce n'est pas une option de développement. L'option de
développement à court terme, c'est la famille d'accueil. C'est
là que l'on croit que la personne âgée va trouver
l'ambiance familiale qu'elle cherche à conserver, alors que le foyer de
15 ou 22 places, c'est déjà une institution. C'est une
institution qui est vouée à une situation de pauvre
qualité. Si on essaie de lui donner de la qualité, elle est
vouée à devenir horriblement dispendieuse. Donc, c'est un mauvais
compromis. Nous aimerions voir se multiplier les familles d'accueil, mais nous
aimerions voir se réduire en nombre progressivement ces pavillons,
même s'il faut bien en accepter la réalité, puisqu'il y a
4000 adultes actuellement dans des installations de ce genre. Il est
inconcevable, à court terme, d'y changer grand-chose.
M. Charron: M. le Président, le ministre a aussi
annoncé au cours de cette conférence de presse que là
où le revenu actuellement offert aux citoyens âgés par le
programme fédéral de sécurité de la vieillesse
n'était pas suffisant à couvrir la somme qu'ils auront à
défrayer pour demeurer en familles d'accueil et ce qui leur est
alloué pour dépenses personnelles, le gouvernement entendait
combler ou prendre à sa charge ce supplément qu'on chiffrait par
environ $20. Comment ce programme se réalisera-t-il?
M. Forget: II se réalisera comment? Sur le plan
administratif, il se réalisera par le versement d'un supplément
selon des modalités dont les détails n'ont pas encore
été entièrement arrêtés. Il se peut que cela
soit fait par le ministère, par le centre d'accueil et il se peut
également que cela soit fait par l'administration de l'aide sociale qui
est chargée en même temps d'établir la contribution des
adultes par l'intermédiaire du centre d'accueil. Donc, ces
modalités seront à déterminer, mais c'est une question de
détails relativement...
M. Charron: Quand cela pourrait-il entrer en fonction?
M. Forget: L'objectif est le 1er mai. M. Charron:
L'objectif est le 1er mai. M. Forget: Oui.
M. Charron: Et vous allez fixer les modalités de versement
aux personnes âgées en famille d'accueil d'ici le 1er mai?
M. Forget: Oui. C'est pas mal fixé dans le sens qu'il
reste des détails, à savoir... Par exemple, les montants sont
fixés. Ces gens sont éligibles à l'aide sociale. Il y a un
barème de X pour une personne seule. Il reste la différence entre
ce taux d'aide sociale et le montant maximal qui reste à couvrir. Si
c'est une famille d'accueil, la décision doit se prendre pour savoir si
cela sera versé par le CSS ou par le ministère et, pour les
foyers satellites ou les autres, est-ce versé directement par le
ministère ou par le centre d'accueil? Mais les montants sont connus. Il
s'agit simplement de prendre la décision à l'intérieur...
des consultations des autres partenaires sur la façon de le faire.
M. Charron: Vous allez varier le montant à tous les trois
mois selon l'indexation que le régime fédéral
connaît. A tous les trois mois?
M. Forget: Ce qu'on prévoit, pour les gens qui sont dans
des centres d'accueil, c'est de fixer les montants, dans le fond, qui sont
alloués à la personne, les montants qui seront versés. Il
y a les $45 ou les $55, dépendant que les gens... Et dans le fond, les
gens verseront la différence entre les $45 ou les $55 au centre
d'accueil parce qu'ils vont payer leur chambre et pension. Alors, ils vont
payer au centre d'accueil. Ils vont garder les $45 pour eux. Cela sera une
partie du versement et...
M. Charron: Si je comprends bien le fonctionnement, la personne
de 65 ans et plus parlons d'elle reçoit sa pension de
vieillesse. Elle assume elle-même, auprès de la famille d'accueil,
les $195. Elle garde la différence, mais comme cela ne l'autorise pas
aux $55, c'est de Québec qu'elle recevra le reste.
M. Forget: Elle garde ses $55.
M. Charron: Elle garde ses $55 et vous versez la
différence à la famille d'accueil.
M. Forget: C'est cela ou le centre d'accueil.
Dans le cas des familles d'accueil, la décision a
été prise que cela serait versé par le centre des services
sociaux, grâce auquel le placement sera fait et l'évaluation sera
faite...
M. Charron: Quand la personne recevra une pension
indexée...
M. Forget: Elle gardera ses $55 et elle versera la
différence.
M. Charron: Vous verserez donc moins à la famille
d'accueil.
M. Forget: Comme on fait pour les centres d'accueil.
M. Charron: Autrement dit, la personne en question ne verra pas
l'indexation. Pour elle, son revenu sera de $55. Ce que j'appelle l'injustice
des centres d'accueil, sera maintenue, encore une fois, pour les familles
d'accueil.
M. Forget: C'est cela.
M. Charron: Je voudrais savoir si... Je n'ai pas cherché
le débat. J'ai voulu préciser les choses.
M. Forget: II reste que pour ces personnes, il serait injuste de
ne pas le préciser pour les personnes qui actuellement vivent dans des
installations clandestines, la différence pour elles sera que, alors que
maintenant le propriétaire de la chambre et pension, que l'on appelle un
foyer clandestin, leur demande la totalité de leurs allocations de
vieillesse ou la quasi-totalité, à compter de l'introduction de
ce régime, les pensionnaires pourront garder $55, alors qu'ils ne
gardaient rien plus tôt.
M. Bonnier: Vont-ils être bien informés de cela, M.
le ministre?
M. Forget: Oui, il va y avoir une visite de chaque foyer et, dans
le cas des installations qui sont satellisées, il est évident que
le centre d'accueil va donner cette information, parce que c'est tout le
régime...
M. Bonnier: Aux personnes âgées?
M. Forget: Aux personnes âgées
elles-mêmes.
M. Charron: II reste que, M. le Président, je ne veux pas
reprendre le débat que nous avons déjà eu. Mais puisqu'on
me répète que la même situation se maintiendra, les membres
de la commission comprendront mon intervention. Les personnes dont nous parlons
et qui seront en famille d'accueil, seront beaucoup plus disponibles et
beaucoup plus en contact avec la société que même celles
qui vivent à l'intérieur d'un centre d'accueil. L'argument
maintenu à l'occasion, sur le refus de remettre l'indexation aux
personnes, du fait que même si la pension de vieillesse est
indexée, elles ont perpétuellement, douze mois par année,
$55, celles qui vivent en centre d'accueil ont souvent été
défendues en disant que, dans un centre d'accueil, les gens ont à
peu près tout de fourni: les loisirs sont organisés, il y a une
salle pour le piano, il y a la salle de télévision, etc. $55 par
mois, c'est amplement. On ne dit pas amplement, mais on dit que c'est suffisant
pour vivre. Les personnes dont nous parlons sont des personnes qui, par
exemple, sont dans une famille d'accueil sur la rue Moreau, sur la rue Hogan,
sur la rue Panet, elles sont tout à fait en contact encore avec les
autres citoyens. Le bon petit vieux du bas de ta ville de Montréal, par
exemple, va encore avoir tout à fait envie d'aller prendre une petite
bière à la taverne avec ses "chums", dans l'après-midi,
d'aller jouer aux dames au parc Lafontaine, l'été, d'aller se
promener au centre de jour quelque part, qui est ouvert... Comment s'appelle
celui qui est sur la rue Panet? Celui qui est sur la rue Panet qui
m'échappe.
M. Malépart: Place Vermeille.
M. Charron: La Place Vermeille, etc. Mais, lui n'est aucunement
prisonnier d'un centre d'accueil, il est en famille. Là le $55 par mois
qui lui est resté pour couvrir ses dépenses va lui être
vraiment insuffisant. Parce que ses loisirs ne sont pas organisés. Il
n'est pas en centre d'accueil où un film peut être
occasionnellement présenté où des activités ont
lieu. Il a lui-même la charge d'organiser ses propres loisirs. Quand on
dit qu'il n'aura que $55 par mois, cette personne va vivre. Même si on
dit que la famille d'accueil le nourrit et le loge, personne d'entre nous peut
dire que $12 ou $13 par semaine est une somme suffisante pour un citoyen adulte
et normal pour se déplacer dans une ville. Il a encore à faire
face, par exemple... chez nous, on n'a pas encore la gratuité des
transports en commun. Il a un certain nombre de frais auxquels il doit
s'astreindre. Je m'en voudrais de ne pas signaler cela, parce que, puisqu'on me
dit que le même système qui prévaut en centre d'accueil
sera maintenu pour les gens en famille d'accueil, je dis que l'injustice est
encore plus grande pour eux.
M. Forget: M. le Président, je pense que si j'étais
à la place du député de Saint-Jacques, je ferais
exactement ce qu'il fait, c'est de bonne guerre.
C'est un argument, en principe, contre lequel je ne peux rien avoir
à dire. Je souhaite, comme lui, qu'on puisse laisser une part de plus en
plus considérable des allocations de vieillesse aux personnes qui en
bénéficient. Il demeure qu'on doit compter avec ce qui est
possible et pas seulement avec ce qui est souhaitable.
L'automne dernier, nous avons eu l'occasion de comparer nos notes entre
provinces et ce qu'on appelle, dans les autres provinces, les "comfort
allowances", ce qui est l'allocation de menues dépenses, qui existe
comme concept dans toutes les provinces; nous avons pu constater que le
Québec, à cet égard, est très en avance sur toutes
les provinces. Le "comfort allowance" de la plupart des autres provinces se
situe aux environs de $30 par mois, ou se situait à ce niveau durant
l'année 1975, parfois plus bas. Je dois dire que, même si je suis
en sympathie avec tout ce qu'on vient d'avancer, il reste qu'il faut
également
ne pas perdre de vue le fait que ceux qui vivent dans leur propre logis,
ceux qui ont une somme de $222 et quelques cents pour vivre chaque mois et qui
doivent payer leur loyer, qui doivent se nourrir, etc., je me demande s'ils
disposent même de $40 par mois pour leurs menues dépenses. Il y a
cela aussi qu'il faut considérer.
Il y a, malgré tout, des situations qui ne peuvent pas être
trop dissemblables et le loyer et l'alimentation représentent, à
ce niveau de revenu, des éléments tellement importants à
des dépenses qu'il reste que le placement et l'hébergement ne
peuvent pas, de façon réaliste, produire une situation qui soit,
je pense, trop loin, trop différente de la situation que l'on observe
normalement pour les 90% des personnes âgées qui continuent
à vivre chez elles de façon autonome.
C'est une des considérations que l'on ne peut pas perdre de vue
et je crois que, lorsqu'on regarde les pratiques des autres provinces, on
trouve des niveaux qui portent à réfléchir. Je ne regrette
pas que le gouvernement du Québec ait été relativement
plus généreux que les autres dans cette question, mais je ne peux
pas faire autrement que de me poser la question, à savoir si
effectivement un accroissement de l'allocation de dépenses personnelles,
étant donné qu'elle s'applique à quelque 30 000 personnes
à tous les mois... Qu'on pense à $5 ou à $10 de plus par
mois, sur un total d'une année; ce sont des sommes importantes. Est-ce
qu'il vaut pas mieux consacrer ces sommes à des auxiliaires familiales,
à des popotes roulantes ou à d'autres activités de ce
genre? Il me semble que la réponse est évidente et que ce n'est
pas là une priorité, même si on ne peut pas dire que tout
va pour le mieux dans le meilleur des mondes pour les personnes
âgées. Je crois que le niveau d'allocation de dépenses
personnelles est très défendable à l'heure actuelle et
qu'on a d'ailleurs plutôt des félicitations à se faire
là-dessus, si on se compare à d'autres au moins, que des
reproches.
Encore une fois, je comprends le député de Saint-Jacques
de faire valoir un autre point de vue et je pense que, sur le plan des
principes, sur le plan de ce qui est désirable, je suis
évidemment d'accord avec lui.
M. Charron: M. le Président, je suis disposé
à adopter le programme 9.
Le Président (M. Cornellier): Elément 2,
adopté. Programme 9, adopté. Programme 10: Equipement des
services sociaux. Elément 1, acquisition, location, amélioration
et conservation de l'équipement.
Equipement des services sociaux
M. Charron: Est-ce que ce total de $24 millions constitue de
nouveaux investissements immobiliers du ministère ou s'il s'agit
simplement, approximativement parlant, d'entretien du réseau actuel?
M. Forget: II s'agit, je pense, traditionnellement, dans cet
élément du programme, du budget de certaines sommes qui sont
consacrées à de menus travaux de réaménagement, aux
dépenses d'acquisition de mobilier. Dans un certain nombre de cas, nous
sommes à la veille de l'ouverture ou même au moment de l'ouverture
de certains centres d'accueil rénovés entièrement ou
complètement nouveaux et les dépenses initiales de mobilier sont
élevées. Il y a certains projets d'un montant inférieur
à $1 million qui font l'objet de subventions directes et non pas
d'emprunts. Il y a finalement, également, des dépenses
d'immobilisation et ceci vise évidemment l'ensemble des centres de
services sociaux, les CLSC également, et tous les centres d'accueil pour
les enfants et les personnes âgées, et ça inclut les
locations d'espace. Par exemple, lorsqu'on parle de l'acquisition, de la
création de foyers de groupe, les locations, l'acquisition des
édifices, selon le cas, sont comprises là-dedans, le service de
la dette. Je pense que ça n'a pas besoin de plus d'explication.
M. Charron: Est-ce qu'il s'agit de dettes d'institutions du
ministère autres que les hôpitaux qui ont leur propre service de
la dette?
M. Forget: Oui, ce sont les centres d'accueil pour enfants et
pour adultes qui sont financés par voie d'émission d'obligations
amorties sur 50 ans consenties par la Société d'habitation du
Québec et qui font l'objet de ces paiements. Il y a d'autres
prêteurs que ceux-là, il y a des sociétés de
fiducie, il y a des institutions financières, mais la principale source
de financement, c'est la Société d'habitation du
Québec.
M. Charron: Programme 10, adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Cornellier): Programme 10,
élément 1, adopté, élément 2,
adopté.
M. Charron: Est-ce que je peux proposer à la commission,
comme je l'ai fait au ministre avant le début de la séance,
puisque nous n'avons pas le temps d'achever, d'aller au profond des trois
prochains programmes qui concernent le réseau hospitalier du
Québec, de passer immédiatement au programme 14.
M. Forget: Sans objection de ma part.
Le Président (M. Cornellier): Avec le consentement de la
commission, il n'y a aucune objection.
Recherche
M. Charron: Le programme 14 est le programme de la recherche
à l'intérieur du ministère des Affaires sociales. Je
voudrais demander au ministre les principaux objets de recherche qui seront
financés à partir de ce programme.
II est bien entendu, je vous le signale tout de suite, que la discussion
sur les hôpitaux aura lieu à une autre séance.
Le Président (M. Cornellier): On considère ces
trois programmes comme étant des programmes suspendus.
M. Forget: A l'automne 1974, nous avons créé le
Conseil de la recherche en santé du Québec, qui a remplacé
le Conseil de la rechercne médicale du Québec, avec un mandat
élargi et avec également des budgets sensiblement élargis,
puisque, à la source de fonds propre au Conseil de la recherche en
santé, qui est constitué par une dotation qui a accompagné
la création de l'assurance-maladie, alors que des primes avaient
été perçues pour des services qui étaient
désormais assurés, une somme de $1 million a été
placée en fiducie, dont le produit et même le capital seront
utilisés sur une période donnée par le Conseil de
recherche en santé.
A cette ressource propre, ce sont toujours ajoutées les
ressources budgétaires que le ministère consacrait à des
fins et, en 1975, se sont ajoutées des bourses de recherche qui sont
financées par une masse budgétaire qui est
déterminée dans la loi du régime d'assurance-maladie, en
vertu d'un amendement, le bill 93, adopté à l'automne 1974.
Donc, il y a eu, du côté de la recherche, un
développement assez important de ressources budgétaires,
principalement à cause de cette dernière cause et ceci a
coïncidé, fort heureusement, avec l'élargissement du mandat
qui faisait suite au changement de statut. Encore une fois, le Conseil de
recherche en santé a succédé au Conseil de la recherche
médicale et a assumé, à cette occasion, la
responsabilité de conseiller le ministère sur les matières
relatives à la recherche dans le secteur de la santé, a vu
s'élargir son mandat d'une autre manière, en recevant
l'invitation de faire porter son effort, non seulement sur la recherche
biomédicale, ce qui était le domaine traditionnel de ses
préoccupations, mais également sur la recherche
épidémiologique et sur la recherche opérationnelle en
santé.
C'est donc à la réalisation de ces nouveaux objectifs que
le conseil s'est consacré durant la dernière année. Les
bourses de recherche ont été attribuées. Il s'est
dégagé également certaines réflexions sur des
thèmes de recherche, des termes prioritaires de recherche, puisqu'il est
apparu souhaitable, à la suite de tout l'effort de consultations
entrepris il y a plusieurs années par M. Bon-neau de l'Université
Laval, qui a préparé un rapport, la nécessité, ou
l'intérêt au moins de dégager certaines orientations
maîtresses, non pas pour l'ensemble du budget de la recherche en
santé, mais au moins pour une certaine partie de cette recherche. Les
thèmes prioritaires qui ont été retenus sont en
particulier ceux de la médecine du travail, du vieillissement ou de la
gérontologie et quelques autres qui peuvent s'y ajouter.
C'est un effort de réflexion qui se poursuit, puisqu'il s'agit de
préciser de mieux en mieux ce que ces thèmes pourraient
comporter, de manière que l'effort de recherche entrepris sous les
auspices du Conseil de recherche en santé puisse devenir un instrument
et un moyen de perfectionnement et de raffinement des programmes de service
poursuivis par le ministère. Il y a une jonction à faire entre
les deux qui n'est pas facile et pour laquelle on ne peut pas faire
état, même à ce moment-ci, de conclusions finales. Il y a
un dialogue entre les services du ministère et le Conseil de recherche
en santé qui n'a pas abouti encore à des conclusions finales,
parce qu'il y a un effort intellectuel important à faire pour
préciser opérationnellement ce en quoi ces thèmes
pourraient consister.
Peut-être qu'il serait mieux, plutôt que de traiter
davantage des orientations générales, de répondre aux
questions qui pourraient être posées. Il y a un aspect de cet
offre qui mérite peut-être d'être souligné, je vais
le faire très brièvement. C'est l'effort qui est fait depuis
quelques années par le ministère pour extraire des budgets de
fonctionnement des établissements hospitaliers en particulier des sommes
qui, sans le dire en quelque sorte, un peu en catimini, pour ne pas être
trop visibles et ne pas être la cible trop facile de coupures
budgétaires, ont traditionnellement servi parfois pendant plusieurs
années, à fournir un budget de base à des organismes, des
instituts de recherche et des programmes de recherche à
l'intérieur de certains centres hospitaliers.
Nous nous sommes préoccupés de cette question, parce que,
très souvent, ces budgets étaient figés, correspondaient
à la présence peut-être, plusieurs années
auparavant, d'une personnalité scientifique significative susceptible
d'apporter de véritables contributions mais qui avait peut-être
quitté l'établissement. Le budget se perpétuait et
était plus ou moins utilisé à des fins productives,
même sur le plan de la recherche scientifique.
Nous avons donc cherché à dégager ces sommes,
à les identifier et à leur donner une reconnaissance, lorsque
cela pouvait être fait, par exemple, les universités auxquelles
les centres hospitaliers en question sont affiliés donnaient une
certaine reconnaissance officielle à ces instituts de recherche en
santé en milieu hospitalier, ce qui se trouve dans certains cas garantir
une qualité minimale. Nous avons aussi exigé de ces instituts ou
de ces centres de recherche en milieu hospitalier que les projets de recherche
individuelle fassent l'objet d'une demande de fonds, soit au Conseil de
recherche en santé, soit au Conseil de la recherche médicale du
Canada, soit à des fondations privées, de manière à
nous assurer qu'il y ait un certain jugement scientifique extérieur au
milieu même où la recherche se fait qui soit posé et pour
garantir que ce ne soient pas des fonds qui servent tout simplement à
rendre la vie un peu plus attrayante ou intéressante à des gens
qui aiment bien faire de la recherche comme cela, en passant, mais qui, dans le
fond, n'ont pas véritablement la capacité de faire un travail
valable.
C'est un effort qui se poursuit, qui est extrêmement difficile,
pour toutes sortes de raisons qu'on devine sans peine. C'est un peu, dans
certains cas, des chasses gardées. On fait aussi un procès
d'intention au ministère des Affaires sociales. On redoute qu'on cherche
là, non pas une façon d'améliorer la recherche, encore une
fois, mais des victimes faciles pour le couteau des comptables. Ce n'est
vraiment pas notre objectif. Malgré tout, ces réticences se font
sentir et rendent le travail difficile. Nous voudrions progressivement que le
Conseil de la recherche en santé, en plus de l'attribution de projets
spécifiques, puisse nous aider dans ce travail et puisse faire une
certaine épuration pour que les sommes probablement très
significatives que l'on retrouve à l'intérieur du réseau
hospitalier soient véritablement canalisées vers les individus
qui ont un statut de chercheur et qui peuvent justifier que l'on consente
malgré tout des sommes importantes.
C'est une responsabilité que le conseil va assumer durant
l'année courante, progressivement. On compte qu'à la
lumière de cela, il y aura peut-être que le budget apparent de
recherche en santé passera de la somme de quelque $7,5 millions qu'il
affiche actuellement à une somme qui sera peut-être le triple de
ce montant lorsque l'exercice sera terminé. Enfin, tout cela est encore
un peu hypothétique. Ce qui compte, c'est beaucoup plus peut-être
l'effort qui est fait pour apporter une plus grande qualité, un plus
grand contrôle par les pairs, que l'objectif lui-même sur le plan
comptable qui n'a que peu de signification.
M. Bonnier: J'aimerais seulement savoir, M. le ministre. Ce
montant, qui sera probablement de $21 millions, comprendra-t-il l'effort de
recherche que vous faites en ce qui regarde tout le domaine du travail? Il me
semble que vous avez eu une équipe qui s'est préoccupée de
ce domaine en particulier. Je sais qu'il y a eu de la recherche sur la
surdité et des choses comme cela. Est-ce que vous avez l'intention de
continuer cela?
M. Forget: Oui, bien sûr. C'est tout le domaine de la
médecine et du travail...
M. Bonnier: Même si ce sont des accidents du travail?
M. Forget: Non, de ce côté, nous avons des
activités qui ne sont pas nécessairement comme telles des
activités de recherche, mais des activités de dépistage de
problèmes de santé industrielle. Ceci se fait par les
départements de santé communautaire qui ont la
responsabilité de s'assurer du maintien de l'état de santé
en milieu de travail.
M. Bonnier: En dehors de ce budget?
M. Forget: Oui, c'est dans le programme no 4, services
communautaires, que ceci se retrouve. Encore une fois, ce n'est pas tellement
la recherche fondamentale, par exemple, sur le phénomène qui fait
que l'exposition aux poussières d'amiante produit un durcissement, une
calcification des poumons, mais c'est véritablement de découvrir
ceux qui sont affectés par cette maladie. S'il y a des recherches
fondamentales dans ce secteur, comme c'est le cas d'ailleurs, ce serait un
projet de recherche présenté dans un centre hospitalier ou dans
une université qui aurait pour but d'explorer le phénomène
en lui-même, indépendamment de sa répercussion en
général.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 14,
élément 1 et élément 2, adopté?
M. Charron: Adopté.
Le Président (M. Cornellier): Programme 15:
Développement de moyens d'intervention. Elément 1 :
Démonstration.
M. Charron: M. le Président, pouvons-nous suspendre ce
programme? Je le demande parce qu'il y a un dossier que je n'ai pas avec moi.
J'aimerais le garder pour une prochaine rencontre. Il s'agit seulement d'une ou
deux questions.
M. Forget: Sur l'élément ou sur tout le
programme?
M. Charron: Sur le programme en entier. M. Forget:
D'accord.
Le Président (M. Cornellier): Programme 15. Suspendu.
Conseil des affaires sociales
M. Charron: Au programme 16, j'ai deux questions sur deux
éléments différents. Le budget du Conseil des affaires
sociales a été augmenté. Je voudrais savoir du ministre
s'il attend, de la part du conseil, au cours de l'année
financière qui débute, des avis ou des études devant
porter sur quelques sujets particuliers.
M. Forget: Oui, sans doute. On se souviendra que le conseil
avait, depuis quelques années, des mandats relatifs aux comités
de citoyens et aux organismes de participation populaire. Cet avis est à
l'impression dans le moment. Donc, le travail est terminé sur cette
question.
M. Charron: II vous a été remis?
M. Forget: Oui. Il m'a été remis et j'ai
autorisé la publication. Alors, tout cela est chez l'imprimeur officiel.
Je ne sais pas quand cela en sortira, mais dès que cela sortira, ce sera
dans le domaine public, savoir l'avis sur les organismes familiaux. J'ai
autorisé la publication des études puisque le conseil
s'apprête à terminer son étude et qu'il m'a demandé
d'autoriser, séparément, la publication des études.
On sait que ces études, dans certains cas, ont
été faites, entre autres, par l'Institut canadien de
l'éducation des adultes il y a un an ou un an et demi je ne me
souviens plus très bien des dateset qu'il y avait une certaine
impatience dans certains milieux puisque l'on jugeait que pour cette
étude et pour une autre au moins, à mesure que le temps
s'écoulait, leur pertinence et leur utilité, pour tous ceux qui
pourraient les utiliser, diminuaient.
Donc, à la demande du conseil, j'ai accepté que soient
rendues disponibles ces études sous forme miméographiée
ce n'est pas imprimé, mais cela sera public et l'avis
devra être lui-même rendu public au cours des prochains mois.
Je suis entre les mains du conseil à ce sujet. J'attends son
avis. Je sais que les responsables ont eu certaines difficultés à
terminer ce travail et cependant, il n'y a rien qui me permet de douter que
durant l'année en cours, cela va se terminer, probablement durant
l'année de calendrier en cours.
Mais je ne voudrais pas aller plus loin que cela, après plusieurs
déceptions de ce côté, alors...
M. Charron: Prévoyez-vous des modifications à la
composition du conseil au cours de l'année?
M. Forget: Non.
M. Charron: II n'y a pas eu de démissions?
M. Forget: Ah! dans ce sens... Je croyais que vous parliez de la
loi constitutive.
M. Charron: Non.
M. Forget: Bien oui. Il y a eu des modifications l'an dernier,
alors que des personnes qui étaient là depuis le début ont
cédé leur place à d'autres, à des nouveaux, en
somme, ce qui est un roulement sain, normal au sein du conseil.
Il est fort possible qu'il y en ait d'autres qui doivent être
remplacés cette année, de mémoire je vous avoue ne pas
m'en souvenir, mais je pense que les nominations sont faites de telle
façon qu'à tous les ans, il y a trois ou quatre personnes qui
doivent être remplacées ou nommées à nouveau. La
question n'est pas posée dans le moment. Ordinairement je suis saisi de
cela par le président du conseil qui m'informe, par une lettre, de
l'expiration des mandats. Il ne m'a transmis aucune information de ce genre
depuis l'été dernier.
M. Charron: Quant à l'élément 3, M. le
Président, qui constitue une progression considérable du budget
de la commission des Affaires sociales, est-ce simplement dû au fait que
nous en étions, pour prendre le vocabulaire des CLSC, à
l'implantation et que nous en sommes maintenant au démarrage réel
de la commission des Affaires sociales?
M. Forget: Oui, c'est essentiellement cela. Vous savez, l'ancien
poste budgétaire reflétait beaucoup plus la situation de la
commission d'ap- pel de l'aide et des allocations sociales qui n'est qu'une des
quatre divisions de la nouvelle commission. Il y avait également la
Commission de la protection du malade mental, donc il y a les deux budgets qui
ont été fusionnés et il y a un accroissement qui est
attribuable, ne serait-ce qu'à cela, à la nouvelle juridiction
qui était anciennement une juridiction de la Commission
fédérale d'appel des pensions, qui est déjà
même une juridiction de la commission des Affaires sociales et qui
s'annonce comme une des divisions qui sera la plus occupée. Le
président de la commission me disait récemment que les demandes
de révision des décisions de la Régie des rentes
s'accumulent au rythme de 25 par mois, 25 à 30 par mois, non, je
m'excuse, 35 par mois. On sait d'ailleurs cela a été une
des raisons pour le transfert de juridiction, le rapatriement de cette
juridiction que la Commission fédérale d'appel des
pensions avait accumulé un arrérage de causes non entendues, qui
se chiffraient entre 300 et 400. Alors, 300 et 400 causes, plus 35 par mois,
là il y a vraiment un problème. Il y a un problème tel
que, même avec les ressources actuelles, les membres sont
sérieusement taxés et il va falloir probablement réviser
cette situation.
Je le mentionne parce qu'il n'est pas impossible que plus tard, durant
l'année, on remette en cause le nombre de membres et l'assesseur dans
cette commission, d'autant plus que la publicité qui est faite
normalement autour de son existence et on peut plus normalement faire cette
publicité maintenant qu'elle est installée et qu'elle fonctionne
normalement, est susceptible d'amener encore plus d'appels et le volume est
véritablement très considérable, beaucoup plus qu'on ne
s'y attendait, même.
M. Charron: Bien, M. le Président, le programme 16 est
adopté.
Le Président (M. Cornellier): Le programme 16, qui
comporte neuf éléments, est donc adopté.
M. Charron: M. le Président, il nous restera à
discuter, lors d'une prochaine séance, probablement après
Pâques, des trois programmes qui traitent des centres hospitaliers et du
programme 2 qui traite du régime d'assurance-maladie, qui a
été aussi remis, lorsque nous avons commencé les travaux
de la commission. Je ne prévois pas même si j'entends
m'acquitter de ma fonction le mieux possible de longs débats
autres que, peut-être, une journée de séance semblable
à celle que nous venons de passer en tout ou en partie... Le programme 3
a été adopté sans discussion. Je pense que la commission a
encore une journée de travail avant l'adoption finale des
crédits.
M. Forget: Je vous remercie. Je remercie les membres de la
commission de leur collaboration.
Le Président (M. Cornellier): La commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 22 h 51)