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Commission permanente des affaires sociales
Etude des crédits du ministère des
Affaires sociales
Séance du mercredi 5 mai 1976 (Seize heures vingt-deux
minutes)
M. Cornellier (président de la commission permanente des
affaires sociales): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires sociales reprend ses travaux pour
l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales.
Comme le mentionnait le leader du gouvernement lors de sa motion pour que cette
commission siège, le mandat de la commission est de compléter ou
du moins de tenter de compléter l'étude des crédits
aujourd'hui. A la séance d'hier, les programmes qui avaient
été suspendus à l'ajournement de Pâques, soit les
programmes 11,12, 13 et 15 ont été adoptés. Il ne reste
donc que le programme 3 à étudier et à adopter, soit
l'assistance-maladie. L'honorable député de Saint-Jacques.
Assistance-maladie Régime
d'assurance-maladie
M. Charron: M. le Président, je m'efforcerai de
répondre aux voeux du leader de l'Opposition du leader du
gouvernement pardon, c'est aussi le voeu du leader de l'Opposition de
terminer aujourd'hui l'étude de ces crédits. Ce sera la
première année que nous aurons réussi à voir tous
les programmes avant que tombe la guillotine des 45 jours prévus
à l'étude des crédits. Ce programme est celui qui nous est
réservé pour faire le tour d'horizon de la situation du
régime d'assurance-maladie créé au Québec depuis
maintenant six ans. Ma première question portera sur l'état de la
santé financière du régime, sur la nature du surplus
accumulé actuellement et sur les possibilités de pouvoir obtenir
des renseignements supérieurs.
M. Forget: Sous réserve, M. le Président, des
documents qui peuvent me permettre de donner des réponses
précises aux dollars et aux cents près relativement à la
santé financière de la régie dont, de toute
manière, les états financiers et le rapport annuel seront rendus
publics dans environ un mois et demi ou à peu près, soit à
l'époque habituelle; je peux rassurer les membres de la commission quant
à la santé financière du régime
d'assurance-maladie. Il y a eu, au cours des années, comme on sait, une
progression dans les revenus tirés de la régie du
prélèvement sur la masse salariale, le 0,8% qui est
demeuré inchangé depuis 1971, mais qui, à cause de
l'inflation, à cause de l'augmentation du nombre de travailleurs, de
l'augmentation de la masse salariale, a connu une augmentation assez sensible
au cours des années.
Par ailleurs, du côté des déboursés, on a
deux phénomènes. Il y a le phénomène de
stabilité dans les tarifs selon lesquels les actes médicaux sont
remboursés aux médecins. D'une part, ceci représente la
plus grande masse des déboursés, un peu plus de $500 millions
durant l'année en cours, $400 millions, mais enfin, pour ce qui est des
chiffres précis, je me réfère aux données qu'on
pourra produire tout à l'heure.
Par ailleurs, le deuxième élément a
été l'in-droduction progressive de régimes
complémentaires à celui des soins médicaux proprement dits
au cours des années qui, malgré leur développement, ont
permis de dégager un surplus accumulé qui se chiffre par environ
$120 millions durant l'année en cours.
Les programmes qui ont été introduits, je le mentionne
pour référence, comprennent d'abord le programme
d'assistance-médicaments, en deux étapes, pour les personnes
âgées en 1974 et en 1975, d'abord pour le premier tiers des
personnes âgées qui sont bénéficiaires du maximum du
supplément de revenu garanti en vertu du régime de pension de
vieillesse et le 1er janvier 1975, un autre tiers de la population
âgée de 65 ans et plus qui bénéficie d'une partie du
supplément de revenu garanti, au total, quelque 300 000
bénéficiaires.
Il y a eu également l'inauguration en 1974 du régime de
soins dentaires pour les enfants de 0 à 8 ans qui a été
étendu d'une année l'an dernier pour le rendre applicable aux
enfants de 0 à 9 ans. Il y a eu, en juillet de l'an dernier,
l'introduction du régime de remboursement des prothèses et
orthèses orthopédiques. Ce sont tous là des
bénéfices qui ont été rendus possibles. Je devrais
ajouter d'ailleurs des programmes comme ceux de la chirurgie buccale, des soins
optométriques qui dépassent la couverture originale du
régime.
Ce sont là tous des prolongements de couvertures qui ont
été rendus possibles par la santé financière du
régime et qui, malgré qu'ils se soient produits, ont rendu
possible l'accumulation d'un surplus qui permet d'envisager l'avenir
immédiat avec une certaine confiance.
Maintenant, ce surplus accumulé n'est pas entièrement une
somme liquidable en totalité puisqu'il est essentiel à la
stabilité financière du régime, de disposer d'environ
l'équivalent, selon les experts de la régie, d'un mois de
déboursés, ce qui veut dire approximativement $50 millions,
maintenant, ce qui veut dire qu'il y a un surplus d'environ $70 millions, ce
qui est rassurant.
Ce surplus ne s'accroîtra plus sensiblement ou même pas du
tout durant l'année qui a commencé le 1er avril 1976, puisque la
croissance des dépenses a désormais rattrapé le rythme de
croisière des revenus. C'est donc dire qu'il faut entrevoir un
plafonnement de ce surplus pour l'avenir immédiat et, sans aucun doute,
un épuisement progressif du surplus dans la mesure, au moins, où
l'augmentation inévitable des tarifs auxquels sont
rémunérés les médecins interviendra.
M. Charron: Quand interviendra-t-elle? Au cours de cette
année?
M. Forget: II est difficile de préciser quand elle
interviendra puisque son introduction dépend essentiellement d'une
entente. Je ne sais pas si c'est l'intention du député de
Saint-Jacques, mais il serait peut-être bon de faire le point
brièvement, au cours de cette séance, sur l'état de cette
négociation. Mais comme on parle maintenant de l'aspect financier, si
elle s'appliquait immédiatement si elle était de l'ordre
envisagé, soit de 10% à 15% comme elle s'applique à
une masse d'un peu plus de $500 millions, il s'agit d'un déboursé
annuel additionnel de l'ordre de $50 millions.
On se rend compte immédiatement que le surplus accumulé
serait beaucoup plus modeste à la fin de l'année. Si
l'augmentation du tarif intervient plus tard, c'est une variable qu'il n'est
pas possible de contrôler unilatéralement ou
administrativement.
Pour ce qui est des dépenses administratives de la régie,
il y a eu, bien sûr, une progression en termes absolus, comme dans tous
les secteurs. Les salaires, les dépenses administratives augmentent,
mais il y a eu, en termes relatifs, une assez remarquable stabilité des
dépenses administratives de la régie qui se situent aux alentours
de 6%, à quelques fractions au-dessus de 6%.
Particulièrement durant la dernière année, des
efforts ont été faits, avec un très grand succès
d'ailleurs, pour en venir à contrôler, de façon plus
rigoureuse, les dépenses administratives et on a pu voir, durant
l'année, par rapport aux prévisions initiales formulées il
y a un peu plus d'un an, une situation fort intéressante où les
dépenses réelles au niveau de l'administration se sont
avérées de beaucoup inférieures aux dépenses
anticipées.
Il s'agit d'une somme d'environ $5 millions, je crois, par rapport aux
estimations originales. Ceci a été fait par toutes sortes de
moyens, par certaines compressions des postes, par une meilleure utilisation
des effectifs, par une analyse très rigoureuse des autres
dépenses administratives à différents titres qui ont pu
s'effectuer sans diminuer, au contraire, l'efficacité
générale de la régie.
Ces 6% de frais d'administration pour un régime d'assurance se
comparent avantageusement à tout ce qu'on peut constater dans quelque
secteur d'activité que ce soit. Si l'on compare à l'industrie
privée de l'assurance, je pense qu'il serait impossible, dans le monde
entier, de trouver une compagnie d'assurance dont les frais d'administration
sont aussi faibles que cela. On voit plutôt des pourcentages
d'au-delà de 20%. Cela veut dire en pratique que les quelques centaines
de millions auxquels contribuent les Québécois par leurs
impôts, pour le financement du régime, servent à 93%
à payer des bénéfices plutôt qu'à 75% ou
à 78%. Je pense qu'on ne peut pas évaluer le régime dans
son ensemble sans tenir compte de cette économie très
substantielle qui se chiffre par près de $100 millions par année
sur le plan de l'ensemble de la société, parce qu'il est clair
que si les gens les payaient par des primes à des assureurs, ils les
paieraient dans un sens tout aussi réel que s'ils les paient à
l'Etat sous forme de contributions parafiscales.
Je peux citer, si on le désire c'est peut-être un
peu oiseux de le faire, parce que cela se trouve dans des publications qui
seront bientôt dans les mains de tout le monde un rapport
périodique que la régie présente. Ce ne sont pas les
chiffres nécessairement complets pour l'ensemble d'un exercice, mais je
peux le faire s'il y a des questions précises.
M. Charron: M. le Président, j'aimerais enchaîner
plutôt sur un certain nombre d'éléments, de
précisions que vient d'apporter le ministre des Affaires sociales sur
l'état de santé financière de la régie par une
question assez précise. S'il est vrai qu'il est toujours possible que
nous fassions face à une augmentation des tarifs au cours de
l'année financière en cours, que, d'autre part, l'extension des
couvertures amène nécessairement une augmentation des
contributions du régime en remboursement, est-ce que les
Québécois peuvent maintenant s'attendre à une hausse de la
cotisation qu'ils versent actuellement au régime
d'assurance-maladie?
M. Forget: Bien, comme je viens de l'indiquer, il y a des
éléments hypothétiques qui sont difficiles à
évaluer actuellement, c'est-à-dire l'importance et le moment de
l'augmentation des tarifs versés aux professsionnels de la santé.
C'est une variable importante, parce qu'elle influe très directement sur
le niveau des déboursés mensuels de la régie et aussi,
possiblement, sur le niveau, enfin le rythme d'épuisement de son surplus
accumulé. Cependant, étant donné le caractère des
offres faites par le gouvernement aux fédérations
médicales, entre autres, étant donné le surplus
accumulé jusqu'à maintenant, au titre de l'assurance-maladie, il
semble possible, et c'est d'ailleurs un objectif du gouvernement dans ses
négociations, qu'il n'y ait pas d'augmentation nécessaire pour la
prochaine année sur un strict plan des entrées et des sorties de
fonds. Maintenant, je ne veux pas exclure a priori par une telle
déclaration la possibilité qu'on veuille modifier le
régime ou en étendre la portée. A ce moment, il sera
évidemment nécessaire de réviser les méthodes de
financement. Tel que le régime existe, étant donné la
situation financière du régime et de la régie, on peut
envisager une année sans augmentation des disponibilités
financières du régime.
Il y a aussi un autre facteur sur lequel sont basées ces
estimations, c'est le taux d'accroissement de la masse salariale, le taux
d'inflation, le taux de chômage, l'expansion économique; enfin
tout cela, ce sont des hypothèses qui doivent être faites quand on
projette l'accroissement des revenus de la régie. Si on devait
être fortement surpris de ce côté, des réalignements
pourraient s'avérer nécessaires plus tôt que prévu,
encore qu'il y a quand même une certaine marge de
sécurité.
M. Charron: Si nous devons demeurer sensiblement au même
taux actuel de cotisation, quels sont les revenus prévus pour l'exercice
financier qui débute pour la régie?
M. Forget: Alors' pour les niveaux de revenu, j'ai ici
l'état, je pense que c'est le chiffre à utiliser. C'est la
section suivante. C'est plus détaillé.
Pour ce qui est de 1976/77, donc, le budget, c'est-à-diré
tes prévisions, la contribution des particuliers et employeurs, $403 140
000; la participation du gouvernement du Canada, dont la contribution est
basée sur 50% du percapita national, dans le cas de ce
programme-là c'est différent dans
l'assurance-hospitalisation $258 899 000. Les intérêts sur
les placements, puisque le fonds en surplus est placé de façon
avantageuse, pour ce qui est des placements à moyen terme auprès
de la Caisse de dépôt et placement et pour ce qui est des fonds
à court terme auprès des institutions financières, $11 285
000 de revenus de placement; autres revenus, c'est $100 000, c'est,
relativement parlant, une bagatelle, pour un total de $673 424 000, à
comparer à une estimation pour l'année en cours, puisque les
chiffres ne sont pas absolument définitifs l'année
financière se termine le 31 mars de $596 500 000,
c'est-à-dire un accroissement de $317 millions d'un exercice financier
à l'autre.
M. Charron: M. le Président, j'aimerais maintenant aborder
une autre question, qui, je sais, a déjà attiré
l'attention de la commission et sans aucun doute du ministre des Affaires
sociales aussi, celle de la répartition des médecins sur le
territoire du Québec. Cette Assemblée a voté, en
décembre 1974, un amendement à la Loi de l'assurance-maladie qui
essayait, non pas de régler le problème, mais au moins de
contribuer à sa solution en instituant un système de bourses et
en incluant la possibilité de conclure des ententes pour limiter le
nombre de médecins exerçant sur un territoire.
Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des ententes conclues en
vertu de cette loi? Où en est, en fin de compte, l'application de cette
loi? Deuxièmement, pour compléter cette réponse, puisque
j'ai dit que, de l'avis même de ceux qui avaient participé
à l'adoption de cette loi, M. le Président, en commission, nous
n'avions aucunement l'impression de régler totalement le
problème, mais de contribuer, en partie, à le résoudre,
est-ce que d'autres mesures, au-delà de cette loi
précédemment votée, ont été prises ou sont
sur le point de l'être pour faire face à ce problème? Je
pourrais citer, à l'attention des membres de cette commission, des
statistiques sur la répartition des médecins, mais je pense que
chacun des députés, si on regarde autour de la table, provenant
de toutes les régions du Québec ou à peu près, est
en mesure de témoigner du fait qu'il y a effectivement une
répartition inégale et qui, à l'occasion, peut
créer une injustice à l'égard d'une certaine population du
Québec.
M. Forget: Trois choses sont intervenues dans ce domaine depuis
la loi 93 adoptée en décembre 1974. Dès le début de
janvier, donc tout de suite après le retour des vacances de Noël
qui ont suivi la fin de la session, j'ai adressé une lettre à la
Cor- poration professionnelle des médecins de même qu'aux
différents conseils régionaux de la santé pour leur
demander d'étudier le problème de la répartition, de
l'accessiblité géographique, physique aux services
médicaux sur leur territoire et, dans le cas de la corporation
professionnelle, de façon générale puisque la
corporation a fait, périodiquement, dans son bulletin, état de
cette question, de ses préoccupations à cet
égard.
Je leur ai demandé, non seulement de faire des recommandations
sur des endroits, des localités qui étaient dépourvues de
services médicaux, mais aussi sur des critères qui les avaient
inspirés pour la désignation de ces endroits puisque l'effort
étant le premier du genre au Québec, il fallait, non pas
seulement désigner des endroits, mais essayer de savoir en fonction de
quoi on définit une pénurie de services médicaux.
J'ai reçu des réponses au cours de l'année 1975 et
les dernières recommandations des différents conseils
régionaux me sont effectivement parvenues en novembre ou décembre
dernier.
J'ai confié, à la suite de cela, à la direction de
la planification du ministère, le soin de colliger toutes ces
recommandations, d'essayer d'en tirer un tableau d'ensemble. Ce travail se
poursuit puisque, évidemment, il y a aussi des travaux qui se faisaient
au ministère, mais on trace déjà, à l'aide des
recommandations spécifiques plutôt que des recommandations de
caractère méthodologique ou général, un assez bon
tableau régional des endroits où les médecins ne sont pas
présents. Et il s'agit, de façon assez paradoxale, parfois,
d'endroits qui peuvent se trouver à 65 milles de Québec ou de
Montréal et des endroits où il y a une espèce de poche de
population isolée des centres même semi-urbains où,
effectivement, il n'y a aucun médecin, ce qui constitue donc un
problème.
Ceci pour la première démarche qui était une
démarche de recherche de consultation qui a débouché sur
une série de recommandations. La deuxième démarche a
consisté à rechercher une entente avec, en tout premier lieu, de
façon prioritaire, la Fédération des médecins
omnipraticiens, avec laquelle nous étions alors en négociation
fort active durant l'année 1975. Nous avons eu d'ailleurs la
satisfaction de découvrir, auprès de la Fédération
des médecins omnipraticiens, une préoccupation de ce
côté qui les a conduits à se mettre d'accord sur une
entente de principe quant à la constitution d'un comité paritaire
du ministère et de la fédération qui, dans un premier
temps, s'entendrait sur les règles du jeu, c'est-à-dire
s'alimenterait de cette consultation déjà faite au moins de notre
côté et des points de vue de la fédération
elle-même sur le sujet et recommanderait des critères, des
méthodes d'intervention, etc. Dans un deuxième temps,
appliquerait ces méthodes, ces critères pour désigner des
médecins individuels afin de pratiquer dans des régions comme
celles qui seraient désignées dans un premier temps. Cette
entente de principe a été conclue vers le mois d'août 1975
et nous avons tenté, depuis quelques mois, de l'activer, de la mettre en
opéra-
tion. Cependant, pour des raisons sur lesquelles je pourrai revenir tout
à l'heure, la fédération semble ne pas être
particulièrement intéressée à activer cette partie
de l'entente de principe tant et aussi longtemps que l'entente,
généralement parlant, ne sera pas terminée. C'est dommage
puisqu'on pourrait faire du travail utile entre temps. Je comprends un peu, pas
complètement malgré tout, mais je comprends un peu son point de
vue de vouloir ne faire aucune concession quant à l'application
partielle d'une convention qui n'est pas finale et qui n'est pas
complète sous tous ses aspects et, principalement et quasiment,
seulement sur l'aspect financier.
Troisièmement, la régie, dans la loi adoptée en
1974, se voyait confier un mandat qui était d'attribuer des bourses
à des étudiants qui acceptaient une obligation de pratiquer dans
des endroits désignés, les mêmes, dans le fond, dont je
parlais tantôt, et ceci pour une période de temps égale
à la période pendant laquelle ils recevraient une bourse
inconditionnelle, c'est-à-dire non liée au revenu, donc
différente en cela des bourses du ministère de l'Education. A la
suite de l'adoption de la loi, une équipe de la Régie de
l'assurance-maladie, avec, je crois, mais je ne suis pas certain, la
participation du ministère des Affaires sociales, a fait la
tournée des facultés de médecine pour sensibiliser les
étudiants à l'existence de ces bourses. Nous avons
été fort déçus des résultats de cette
opération. Il y a deux bourses qui ont été
demandées et obtenues à la suite de cette tournée. Il y a
un phénomène qui s'est produit, qui était peut-être
inévitable à l'époque, c'est que, pour une raison que
j'ignore, les étudiants en médecine ont prétendu, du moins
ceux qui ont cherché à expliquer ce refus, dans le fond, que
l'impression qu'ils avaient tirée de tout cela, c'est qu'on leur
demandait d'aller pratiquer à Fort-Chimo ou dans des endroits où
il faut absolument être un missionnaire ou un aventurier ou un
mélange des deux.
Ils ne se doutaient pas qu'il s'agissait parfois d'aller à 45
milles de Québec dans un petit coin perdu, mais quand même pas en
dehors de la civilisation. Alors, ils ont été un peu
effrayés par ça. D'autre part, ils n'ont pas compris qu'ils
pouvaient, pour ceux qui étaient en quatrième année au
moins, cumuler leur rémunération d'externe, qui est de l'ordre de
$3000, avec cette bourse; il n'y avait aucune incompatibilité, ce qui
leur faisait un revenu de $6000 comme étudiant, ce qui n'était
pas mal et très compétitif à ce qu'ils pourraient obtenir
l'année suivante au titre d'interne.
Ceci, apparemment, je ne sais pas pourquoi, n'a pas été
compris et serait à l'origine de ce refus. Donc, confronté par
une situation comme celle-là, je m'en suis entretenu avec le
président de la régie et j'ai convenu de présenter au
conseil des ministres, ce qui a d'ailleurs été approuvé,
une proposition visant à majorer le montant des bourses et nous l'avons
doublé, de façon à ne pas rater notre coup une
deuxième fois en lésinant sur le montant; nous l'avons
porté de $3000 à $6000. Ceci pour les étudiants de
deuxième, troisième et quatrième années. Donc,
seuls les étudiants de première année ne sont pas inclus
dans ce plan et, à nouveau, cette année, une équipe a fait
le tour également des facultés de médecine pour faire
l'offre à nouveau de ce programme de bourses.
On y a ajouté une autre disposition permettant d'offrir une
bourse forfaitaire de $15 000 pour un étudiant qui était en
année terminale et qui acceptait de prendre un engagement non pas pour
un an, mais pour un certain nombre d'années, pour trois ans, comme s'il
avait accepté la bourse pendant les trois années
antérieures, même si un tel programme n'existait pas à
l'époque. C'était donc là une incitation assez
intéressante. Je n'ai pas le rapport final de l'opération. On me
dit que la tournée n'est pas terminée et qu'il y a
déjà 20 demandes de bourses. Donc, il semble qu'on va, cette
année au moins, déboucher sur des solutions, au moins partielles,
à ce problème.
Il n'y a pas de doute que l'entente avec les omnipraticiens va se signer
un jour et qu'il sera possible d'activer le comité paritaire qui a
été prévu et qui a été accepté en
principe des deux côtés. Donc, je crois que, du côté
de la répartition géographique des médecins, on est
à pied d'oeuvre. J'avais averti tout le monde et cette commission-ci, en
particulier que la solution ne serait pas instantanée, mais je ne
croyais pas si bien dire à ce moment-là. J'ai été
fort étonné du refus qu'on a essuyé l'an dernier. Je suis
prêt à admettre qu'il y a peut-être eu de la confusion,
c'était inévitable, la première année, mais si
c'est un succès cette année, on pourra très rapidement,
dans le fond, combler les trous constatés parce qu'il n'y en a pas tant
que ça, et, avec une cinquantaine de médecins par année,
ça ne prendra pas 20 ans pour résoudre le problème,
ça va aller assez vite.
M. Charron: Le problème de répartition
inégale des médecins est plus sérieux quand on parle de la
médecine spécialisée plutôt que de la
médecine de pratique générale. Effectivement, il est
possible que, le programme se développant et devenant plus
alléchant au chapitre de la médecine générale, on
puisse couvrir plus rapidement' enfin de façon plus adéquate, le
territoire du Québec.
Mais la disproportion entre les régions, au chapitre de la
médecine spécialisée, devra compter plus sur la
première mesure contenue dans la loi, celle dont on a parléjes
ententes avec la fédération que le chapitre des bourses ou...
Vous aviez parlé et je conviens qu'on n'avait jamais
parlé de solution miracle à ce moment-là, d'une
autre méthode qui, elle, ne pourrait être incluse dans la loi,
mais dans la pratique du ministère, qui était de favoriser la
pratique de la médecine par groupe comme étant un moyen d'attirer
plusieurs médecins. Ce serait, au fond, presque paradoxalement plus
facile d'en attirer plusieurs qu'un seul, dans une région.
Je sais que les fédérations d'omnipraticiens et de
spécialistes ont leur propre système de démarches en
faveur de la pratique par groupe. Quelle a été la participation
du ministère à ce chapitre, au cours de la dernière
année?
M. Forget: Je suis heureux que vous mentionniez cela, parce que
c'est une participation qui n'a pas eu la chance de s'actualiser à cause
de l'absence, de l'impossibilité de faire fonctionner ce sur quoi on
s'était entendu en principe, c'est-à-dire un comité
paritaire.
Il est clair qu'une des positions que nous adopterions sur le
comité paritaire, s'il était question de favoriser ou
d'encourager la pratique dans des endroits désignés, après
s'être entendus sur les critères de désignation, serait de
favoriser la pratique de groupe, en ce faisant. C'est-à-dire
d'encourager une pratique de groupe comme solution au problème de
pénurie de services médicaux dans certains endroits
désignés, parce qu'il ne semble pas raisonnable de condamner
à l'isolement un professionnel, un médecin, et lui demander
d'être de garde 24 heures par jour, 7 jours par semaine, 365 jours par
année, dans ces régions.
La continuité des soins, dans les endroits
désignés, ne peut être assurée par un individu. Elle
ne peut être assurée que par deux ou trois, selon la population.
C'est un point de vue qu'on se prépare à défendre au
comité paritaire et à proposer des formules, mais encore, faut-il
se réunir. Evidemment, tout cela est prêt dans nos papiers, mais
nous n'avons pas encore été capable d'en parler et de
l'actualiser.
Assurance-médicaments
M. Charron: M. le Président, j'aimerais aborder maintenant
la question de l'assurance-médicaments qui s'adresse, en vertu du
régime, aux bénéficiaires de l'aide sociale et aux
personnes âgées qui reçoivent un supplément de
revenu garanti, soit environ les deux tiers de la population âgée
du Québec, au-delà de 65 ans.
La commission sait que la régie ne négocie pas les prix,
elle n'achète pas les médicaments, elle n'est qu'un tiers payeur
au pharmacien auquel elle joint un montant forfaitaire pour les honoraires
professionnels.
J'aimerais poser une question que j'ai posée l'année
dernière, et vérifier si la position du ministère des
Affaires sociales s'est modifiée au cours de l'année. Est-ce
qu'on a l'intention d'étendre la couverture de
l'assurance-médicaments à d'autres catégories de citoyens,
prioritairement, comme nous l'avions souligné l'année
dernière, à l'ensemble des citoyens de 65 ans et plus,
plutôt qu'à la proportion que j'ai mentionnée tout à
l'heure?
M. Forget: Le programme de médicaments, tel qu'il est
conçu, est beaucoup plus un programme de soutien au revenu qu'un
programme, dans une certaine mesure, de santé comme tel, dans le sens
suivant. Pour les groupes que nous avons identifiés, l'achat de
médicaments peut véritablement constituer un problème
d'argent, un problème financier important.
Pour l'ensemble de la population, le problème des
médicaments se pose sous un jour différent. Le coût moyen
d'une ordonnance étant ce qu'il est, l'utilisation normale dans la
plupart des cas ne représente pas, dans un budget familial, un article
très important, si on excepte ceux qui sont actuellement couverts et si
on excepte également ceux qui bénéficient d'un
régime d'exception via les cliniques externes des centres hospitaliers,
puisqu'il y a une catégorie de médicaments qui sont
distribués gratuitement, sous réserve d'une charge, d'un frais
modérateur de $2 par ordonnance, aux malades qui sont atteints de
certaines affections chroniques. Les victimes du cancer, les victimes de la
fibrose kystique, les victimes de maladies psychiatriques qui doivent
évidemment recevoir une médication assez intense, assez forte,
les victimes de la tuberculose, les victimes du glaucome sont couvertes de
cette façon, et les médicaments leur sont distribués via
les cliniques externes de centres hospitaliers.
Dans le cas de la tuberculose, c'est une pratique qui remonte à
bien des années, dans le cas des maladies psychiatriques, à un
peu moins de temps, mais quand même à plusieurs années et,
dans le cas de la fibrose kystique et du cancer, il s'agit de
développements plus récents, dans la phase actuelle, mais,
malgré tout, de choses qui datent de quatre ou cinq ans au moins.
Il y a eu des extensions récentes, mais très mineures. Il
reste que nous avons cherché à faire face aux problèmes
financiers là encore exceptionnels qu'affrontent certaines
catégories d'usagers ou de consommateurs de médicaments. Mais,
parler de consommateurs de médicaments, c'est tout de suite parler de
consommation de médicaments et d'abus possibles de consommation de
médicaments.
Etant donné les structures actuelles de contrôle sur la
consommation, d'évaluation de la consommation, je me poserais de
sérieuses questions avant de généraliser un programme de
médicaments sans frais contributoires et même avec frais
contributoires, puisqu'il ne s'agit pas simplement d'une mesure
financière. Il faut certaines garanties professionnelles. Je pense qu'on
a encore passablement de chemin à faire pour vraiment pouvoir proposer
un programme comme celui-là avec une certaine assurance qu'on ne
contribuera pas à un problème beaucoup plus qu'à le
résoudre.
Je pense qu'on a constaté, d'après certaines études
qui peuvent être contestées, puisque des choses vraiment
scientifiques ne sont pas très nombreuses dans ce domaine, qu'au
Québec on consomme beaucoup de médicaments. Nous avons fait un
effort vis-à-vis des bénéficiaires de nos programmes
publics de médicaments pour instaurer l'usage d'un formulaire qui
restreigne un peu les excès des efforts des vendeurs et des producteurs
pharmaceutiques en exigeant que, pour qu'un médicament soit inscrit sur
la liste, il fasse l'objet d'un certain "screening" sur le plan de la preuve de
l'efficacité thérapeutique.
Il y a un effort nouveau qui doit être fait dans ce sens, non
seulement pour les bénéficiaires du régime public, mais
pour généraliser et vulgariser l'utilisation d'un formulaire qui
est une garantie
pour l'usager, mais aussi pour le professionnel, à la fois celui
qui prescrit et celui qui dispense l'ordonnance.
C'est dans cet esprit que nous avons cherché un nouveau
président au conseil consultatif de pharmacologie, un président
qui serait susceptible non plus seulement de voir à la perfection
technique que de l'outil que constitue la liste de médicaments, mais
d'en promouvoir l'utilisation. Nous avons cherché une personne qui ait
une crédibilité professionnelle très élevée,
de manière à pouvoir faire ce travail de promotion,
d'éducation, dans le fond, auprès de tous les professionnels de
la santé qui s'ont impliqués.
Cela explique peut-être que le poste de président du
conseil est demeuré vacant depuis le mois d'octobre, alors que Mme
Chevalier, qui l'occupait jusqu'à ce moment, a quitté pour
devenir directrice du programme fédéral de la qualité des
médicaments, le programme QUAD.
Je pense que c'est là une indication de la qualité que
l'on a reconnue dans les milieux professionnels, en général,
milieux pharmacologiques, sur l'excellence de son travail, puisqu'elle a
désormais cette tâche à accomplir, non seulement pour le
Québec, mais pour toutes les provinces. Nous avons donc
été à la recherche de quelqu'un qui puisse faire franchir
un nouveau pas à l'utilisation de la liste. Nous avons aussi
rencontré au cours des années passées les corporations
professionnelles impliquées pour les sensibiliser au problème et
chercher leur collaboration dans ce problème de surconsommation. Nous
avons eu plus particulièrement des discussions avec l'Ordre des
pharmaciens, de manière que ceux-ci mettent en place des
mécanismes qui puissent supporter le poids des responsabilités
qu'on aimerait voir l'Ordre des pharmaciens assumer dans le domaine du
contrôle de la médication.
Mais tant que ces développements ne seront pas mûris un peu
plus, je pense qu'il serait imprudent et, pour ma part, je ne souhaite pas
faire des recommandations à mes collègues du conseil des
ministres pour une extension du régime tant que nous n'aurons pas fait
quelques progrès sur le plan qualitatif, si vous voulez.
M. Charron: M. le Président, j'apprécie que le
ministre définisse ce programme d'assurance-médicaments comme
étant beaucoup plus une politique de soutien aux revenus qu'un programme
de santé proprement dit. Effectivement, il faut le percevoir comme cela,
d'autant plus que nous n'avons qu'à regarder le revenu moyen de
bénéficiaires dudit programme pour effectivement constater qu'il
s'agit de leur permettre d'affecter les sommes minces et minimes qu'ils ont
déjà pour vivre chaque mois à autre chose qu'à
entretenir une santé défaillante ou à tenter de corriger
une santé défaillante et de la guérir.
J'ai vu quelque part qu'une statistique de
l'assurance-médicaments provenant probablement de la régie disait
que, d'après une analyse, quelque 40% des médicaments
utilisés par les bénéficiaires de ce régime, les
deux catégories de popu- lation dont nous avons parlé tout
à l'heure, personnes âgées et assistés sociaux,
étaient des médicaments s'adressant directement au système
nerveux central. Comparaison faite avec d'autres provinces dont la voisine ,
cela nous pousse effectivement à réclamer, comme dans le
chômage d'ailleurs, le championnat québécois pour
l'ensemble des provinces canadiennes dans la consommation de tranquillisants et
autres drogues semblables, parce qu'il faut bien les appeler par leur nom
à l'occasion. Il n'y a pas à s'étonner, même si,
comme le ministre, je soutiendrai toute politique visant à
réduire la consommation abusive de médicaments, il n'y a pas
à s'étonner outre mesure non plus, de l'aveu même du
ministre, vu qu'il s'agit là d'une politique de soutien de revenus,
à ce que ce soit le médicament le plus requis en vertu du
programme, parce qu'il s'agit des personnes les plus pauvres de la
société québécoise et chez qui, effectivement,
l'insécurité financière peut produire des angoisses, des
difficultés nombreuses au niveau cérébral, ce qui,
à l'occasion, par définition même, les incite a recourir
à des médicaments. Quand on a $195 par mois pour vivre, qu'on vit
dans un grand centre urbain ou qu'on vit dans une région
éloignée, qu'on est seul, qu'on est malade et qu'on ne voit pas
le jour où en sortir, et que le faible revenu nous cantonne
effectivement, comme j'en vois tellement de cas chez mes propres citoyens de
Saint-Jacques, à vivre dans une maison de chambres de cinq pieds sur
sept pieds, il est bien normal qu'à un moment ou à un autre, le
moteur central se ressente de l'angoisse que tous les humains ont à
connaître un jour ou l'autre en vivant, bien sûr, mais ce qui, pour
eux, est presque une condition inévitable. Ils n'ont pas d'argent pour
sortir, ils n'ont pas d'argent pour manger à leur guise, ils n'ont pas
d'argent pour faire une vie normale de citoyens. Ils ont $50 par semaine,
même pas, pour vivre. Ils font face à une hausse du coût de
la vie semblable à celle de tous ceux qui assistent à la
séance cet après-midi. Il est donc normal que, comme on dit dans
le langage familier, cela trotte là-dedans et que cela trotte de plus en
plus.
Effectivement, plusieurs des personnes chaque
député peut en témoigner qui viennent à nos
bureaux, à l'occasion, essentiellement pour nous demander secours afin
de combattre la pauvreté qui est la leur, nous donnent je pense
que tout le monde ...quant à moi, en six ans de pratique, M. le
Président, j'ai eu l'occasion de le vérifier des signes de
nervosité très évidents, en plus, évidemment, de la
peur qui accompagne souvent la rencontre d'un homme politique, mais,
très percevable, même si on n'a aucune formation médicale,
on peut s'apercevoir que ces gens-là, sont effectivement aux prises avec
une angoisse qui affecte leur santé, qui s'accompagne parfois d'une
difficulté à s'exprimer, de sueurs qui accompagnent la livraison
qu'ils ont à faire des difficultés qui sont les leurs.
Quand je me trouve, moi, devant ce problème, qu'est-ce que vous
voulez qu'ils me donnent? Une femme me raconte toute sa situation
financière;
elle est seule pour élever deux ou trois enfants. Elle me dit,
après avoir raconté la difficulté à arriver avec
son revenu: Vous savez, M. le député, si je n'avais pas mes
pilules le soir, je me demande comment je pourrais dormir. Si je n'avais pas
tel médicament qui m'est effectivement donné par le programme
assurance-médicaments, je pense que je ne "tofferais pas la run", que je
ne serais pas capable d'élever mes enfants normalement.
J'ai, moi-même, le problème de lui dire, parce que j'ai
vraiment l'impression que cette personne se drogue ou abuse des
médicaments: Est-ce que je peux même... Je ne suis pas
médecin, M. le Président, mais sur le simple plan humain je peux
lui dire: Madame, n'abusez pas de cela, parce que vous nuisez à votre
santé, une surconsommation de médicaments fait plus de tort que
de bien. Mais, lui disant de ne pas abuser, enfin, de ne pas en prendre autant
qu'elle me dit en prendre, c'est que je lui dis: Livrez-vous à
l'angoisse qui est la vôtre et, autrement dit, ne dormez pas toutes vos
nuits.
Si, moi, j'ai le problème, j'imagine que les médecins qui
ont à recommander l'utilisation de ces médicaments en vertu du
programme, ont le même. Ils ne doivent pas recommander une consommation
qui peut devenir abusive et nocive, mais ne doivent pas non plus
l'écarter totalement, parce qu'effectivement, la personne en question ne
dormira pas, deviendra hypernerveuse et peut, par la suite, affecter
considérablement sa santé mentale, pour ne pas dire la
santé des êtres qui l'entourent et dont elle a la charge à
l'occasion.
Je n'ai pas de solution, M. le Président, parce que chaque fois
que le problème s'est présenté, j'ai essayé de
juger encore une fois, je ne suis pas médecin le meilleur
conseil à donner à cette personne. Je ne puis qu'encourager les
responsables de l'application de ce programme d'assurance-médicaments,
tout en évitant, parce que j'en suis convaincu, de conduire sur le
chemin d'une consommation abusive, à faire extrêmement attention
quant à la restriction d'usage de médicaments, car cela peut
effectivement nuire considérablement à la santé de ces
personnes.
Il s'agit, effectivement, d'une politique de soutien au revenu. Le
problème fondamental, nous en avons discuté à d'autres
programmes et nous aurons l'occasion d'en discuter lorsque cette commission se
réunira à nouveau, dans quelques semaines, pour entendre les
assistés sociaux que nous avons invités, afin de constater,
chacun d'entre nous, qu'effectivement, l'absence de revenu normal conduit, par
toutes sortes de dédales, mais facilement percevable par n'importe quel
esprit, à l'occasion, à une consommation abusive de
médicaments.
Soins dentaires
M. Charron: M. le Président, j'aimerais aborder un autre
sujet, à l'intérieur du programme d'assurance-maladie. Il s'agit
de l'application du programme des soins dentaires, de la gratuité de
certains soins dentaires. Les soins dentaires aux- quels ont droit les
bénéficiaires de la Loi de l'aide sociale ne sont pas
assurés depuis l'entrée en vigueur du nouveau
règlement.
Ce qu'on a appelé un chantage fait sur le dos des assistés
sociaux, cette querelle qui a accompagné la mise en vigueur de la
nouvelle réglementation de l'aide sociale, le ministre a tenté de
la réduire, je pense, à un simple malentendu. J'aimerais
aujourd'hui, peut-être, que l'on refasse brièvement le tour de la
question, parce qu'il m'est apparu, en tout cas, pour les cas des
assistés sociaux, qu'il s'agissait plus d'un malentendu; il pouvait
s'agir d'une disparition de droits, à l'occasion, qui leur avaient
été précédemment reconnus, et j'aimerais demander
au ministre, en faisant le tour de la question, s'il a posé des gestes
concrets, pour que les assistés sociaux puissent
bénéficier de soins dentaires adéquats. Quel est l'avenir
de cette situation?
M. Forget: J'aimerais d'abord préciser que je ne me
souviens pas d'avoir employé l'expression "malentendu" dans les
premières déclarations faites par le porte-parole de
l'Association des chirurgiens-dentistes.
Il est possible que j'aie avancé, par hypothèse, que la
position de l'association, à ce sujet, devait être basée
sur un malentendu, mais encore que je ne m'en souvienne pas. Il demeure qu'il
m'est apparu très évident et très tôt que
l'association, sur ce point, voulait tirer profit d'une prolongation, d'une
seconde prolongation faite selon les mêmes formes et les mêmes
modalités, la deuxième fois que la première, d'un
régime pour lequel il n'y a pas de négociation. Il n'y en a
jamais eu.
Le régime de l'aide sociale prévoit, en effet, que
certains besoins spéciaux seront remboursés aux assistés
sociaux, qu'il s'agisse des lunettes, qu'il s'agisse des dentiers, qu'il
s'agisse de certaines dépenses de transport, qu'il s'agisse aussi des
soins dentaires.
A l'été 1974, j'avais déjà
décrété il n'y a pas d'autres mots applicables
en vertu de la Loi de l'aide sociale, une prolongation des
bénéfices auxquels les assistés sociaux avaient droit au
titre des soins dentaires, une prolongation, d'ailleurs, qui portait de quatre
actes à plus d'une dizaine la liste des actes qui pouvaient faire
l'objet d'un remboursement.
Il n'avait pas été question, à ce moment, d'aucune
espèce de négociation et d'ailleurs, quand nous changeons les
règlements d'aide sociale, et que nous accordons, comme nous l'avons
fait en janvier, un montant supérieur aux thanatologues pour les frais
d'embaumement et d'enterrement, nous n'avons jamais négocié ces
montants.
Nous avons déterminé, évidemment, d'après
des informations que nous nous sommes procurées auprès d'un
certain nombre de fournisseurs, le coût des services fournis et nous nous
basons sur cette information pour décréter,
unilatéralement, ces prix. On comprend bien pourquoi puisque, dans un
régime de sécurité du revenu, il faut rembourser un tas de
dépenses et, s'il fallait négocier tous ces taux, on verrait,
soudainement, le gou-
vernement être dans la position de déterminer, par
négociation, les taux qui seraient, par la suite, invoqués par
ces fournisseurs de toutes sortes, envers leur clientèle pour dire:
Voici ce que nous devons vous charger, maintenant, puisque ce sont les taux
négociés avec le gouvernement.
Alors, on susciterait des conflits fantastiques pour des choses qui
n'ont pas du tout l'importance qu'on veut leur donner.
Donc, c'est une pratique qui est arbitraire, qui est unilatérale,
mais qui est bien justifiée dans son caractère
d'unilatéralité et qui est bien connue. Elle existe depuis des
années. Elle a été utilisée en 1974, encore une
fois, pour étendre la couverture des soins dentaires et modifier les
tarifs de remboursement, si bien que lorsqu'à l'automne dernier, nous
avons, à la suite de discussions avec la régie,
considéré qu'il était opportun que la régie, qui
paie les professionnels de la santé, paie également les dentistes
pour les soins qu'ils donnent aux assistés sociaux, nous ne pouvions pas
nous imaginer que quiconque aurait à s'en plaindre.
D'une part, les assistés sociaux se voyaient épargner la
visite au bureau d'aide sociale pour demander la permission de visiter le
dentiste. D'autre part, le dentiste se voyait assurer d'un paiement prompt avec
un minimum de formalités en utilisant les formules et les
procédures qu'il connaît déjà quand il donne des
soins aux enfants et on lui évitait aussi toute espèce de
mauvaise créance puisque la régie paie tous ses comptes.
En plus de cela, nous majorions les taux. Nous rendions la couverture
plus vaste. Quel ne fut pas mon étonnement de voir que l'Association des
chirurgiens-dentistes se prévalait de cette
générosité plus grande et je ne veux pas faire de
sentiment, bien sûr, on pourrait être encore plus
généreux, mais on l'était plus qu'avant et c'était
cela qui était important se prévaloir de cette
générosité plus grande du règlement d'aide sociale
et d'un changement dans les mécanismes de paiement qui faisait l'affaire
de tout le monde, y compris de ses propres membres pour nous livrer une
espèce de guerre de propagande et de harcèlement tout simplement
scandaleux, à mon point de vue.
On essaie de tirer profit d'une situation d'exception que l'on fait aux
défavorisés dans la société en simplifiant les
procédures, en éliminant le "red tape" en rendant les choses plus
faciles pour les dentistes eux-mêmes. Et voici qu'on nous fait un
chantage sur le dos des assistés sociaux, pour nous amener de force
à négocier avec eux des taux pour une partie des services et une
couverture pour une partie de nos lois pour laquelle on ne le fait pas et pour
les raisons que je viens d'indiquer, qui me paraissent acceptables et
valables.
Mon attitude, quand on me pousse au pied du mur comme cela, n'est pas
d'adopter une attitude repentante. Au contraire, je pense qu'on s'y est mal
pris du côté de l'association si on pense m'inspirer des doutes
quant à l'orientation qui a été prise. J'ai
rencontré à quelques reprises le porte-parole de l'Association
des chirurgiens dentistes. Je l'ai assuré que les problèmes de
type profes- sionnel et de couverture et de santé publique qu'il
soulevait seraient examinés par un comité consultatif sur la
santé dentaire, que le conseil des ministres, à ma suggestion, a
d'ailleurs créé dans les semaines qui ont suivi et où
l'association est représentée, devant lequel l'association peut,
de sa propre initiative, soulever toutes les questions possibles pour que, dans
ce forum qui regroupe les facultés de chirurgie dentaire, l'ordre
professionnel, le ministère, le ministère de l'Education, enfin
tout ce que vous voudrez, on me fasse des recommandations, mais je n'ai pas
accepté de négocier quoique ce soit pour ce qui est de l'aide
sociale avec l'association. J'ai demandé, en retour de cet engagement,
de créer un comité consultatif, qu'il m'assure, d'autre part, la
collaboration de ses membres pour donner des services aux assistés
sociaux. Or, je prends connaissance de temps à autre d'un bilan de la
situation, et c'est un bilan qui est mixte. Je dois dire à leur honneur
qu'un très grand nombre de chirurgiens dentistes, après quelques
moments d'hésitation, ont accepté de fournir les services et de
présenter leurs réclamations à la régie. D'autres,
peut-être plus travaillés par les représentants de
l'association sur ce sujet, ont retourné, dans un geste symbolique, les
formules de réclamation que la régie leur avait fait parvenir et
s'abstiennent de donner des services autres que des services d'urgence pour les
assistés sociaux. J'ai lu également les circulaires incendiaires
de l'ACDQ sur le sujet.
J'espère que l'association va revenir au bon sens. Encore une
fois, j'ai essayé, par des conversations privées avec
l'Association des chirurgiens dentistes, de la faire revenir à de
meilleurs sentiments mais je trouve inacceptable qu'un organisme qui est
voué à la défense d'intérêts
pécuniaires d'une profession qui n'est pas si mal traitée au
Québec, fasse un chantage comme celui-là sur le dos des
assistés sociaux. Je n'encouragerai certainement pas de telles pratiques
en me précipitant pour changer quoi que ce soit, parce qu'il est
très clair que la responsabilité pour les refus de services
actuels repose entièrement sur l'Association des chirurgiens dentistes
et non pas sur le ministre des Affaires sociales. Revenir sur la position
antérieure, dans un faux esprit de compromis, à mon avis, ne
serait qu'encourager la notion que nous avons fait quelque chose de mal au
départ. Or, nous n'avons rien fait de mal au départ, nous avons
cherché à aider tout le monde et on crée une espèce
d'écran de fumée pour, encore une fois, des motifs qui ne sont
pas dignes du groupe qu'on essaie de défendre. Je pense que cela, les
assistés sociaux l'ont compris parce que c'est vers l'association qu'on
a fait porter à juste titre les pressions et les plaintes. Cela, je peux
en rendre hommage aux regroupements, aux associations qui se vouent à la
défense des assistés sociaux d'avoir bien compris où
étaient leurs alliés et où étaient leurs
adversaires de ce côté.
Je sais que c'est une question pénible pour un certain nombre
d'entre eux sur le plan régional; les problèmes sont
concentrés sur la rive sud de Montréal, dans la ville de
Joliette, à Sherbrooke,
mais, dans d'autres régions, tout va bien. Là, je ne
prétends pas vous donner un tableau complet de mémoire, mais je
sais que ces endroits en particulier font l'objet d'une résistance.
Peut-être que ce débat en commission parlementaire, s'il
est rapporté dans les média d'information, permettra de
sensibiliser par un autre canal les membres de l'association à leurs
responsabilités sociales. Je ne suis pas parti en guerre contre leur
association. J'espère entretenir d'excellentes relations de
négociation dans les choses qui sont négociables, mais c'est
là une attitude qui m'apparaît irrecavable et sur laquelle je ne
peux malheureusement qu'adopter une position assez inflexible sous peine de
créer de la confusion dans l'esprit des gens et de dire: Bien oui,
c'était vraiment là qu'était le blâme et je ne crois
vraiment pas que l'association soit justifiée de faire ça.
M. Charron: M. le Président, je ne peux qu'appuyer cette
position et encourager le ministre à tenir son bout sur cette question.
Lorsque la commission se réunira dans quelques semaines pour entendre
les assistés sociaux eux-mêmes, nul doute qu'à cette
occasion, comme vous dites, les associations d'assistés sociaux ont
été particulièrement vigilants et à fort bon droit
sur cette question, nous aurons l'occasion de refaire le débat.
D'ailleurs, profitant de cette séance, j'aimerais dire que, lorsque nous
siégerons dans quelques semaines, lorsque nous entendrons les
assistés sociaux, j'aimerais beaucoup que l'association dont on parle
ait le courage de venir et elle sera fort bienvenue lorsque nous discuterons de
la situation des assistés sociaux. Qu'elle vienne parmi les
assistés sociaux et nous l'accueillerons à son tour à la
table pour défendre sa position sur cette question.
Plutôt que de procéder par ultimatum, qu'elle ait le
courage de venir devant les députés de l'Assemblée,
lorsque les assistés sociaux seront entendus à notre commission,
pour venir dire pourquoi elle s'est opposée à cette modification
de la réglementation. Personnellement, et nul doute du côté
gouvernemental, si tout le monde épouse la même fermeté que
celle dont le ministre vient de faire preuve, nous aurions quelques bonnes
questions à lui poser. Puisse l'invitation lui être transmise.
Puisque nous parlons des soins dentaires en vertu du régime
d'assurance-maladie, M. le Président, le ministre l'a rappelé
tantôt, le régime couvre maintenant tous les enfants de 0 à
9 ans, je reviens chaque année avec la même question: Est-ce que
le régime suivra la progression des âges et continuera au cours de
l'année à suivre les enfants qui ont
bénéficié de ce régime...
M. Forget: M. le Président, cette commission parlementaire
se situe à une date qui est toujours tellement bien choisie qu'on peut
toujours faire la primeur de l'annonce du prolongement du régime, ou
presque, lors de l'étude des crédits.
M. Charron: Vous avez l'occasion deux fois, vous pouvez le faire
à l'étude des crédits et un peu plus tard par un
communiqué de presse.
M. Forget: C'est ça. Alors, nous allons probablement
récidiver. Mais c'est effectivement une chose qui est prévue, en
principe, et qui va se réaliser, qu'on annoncera officiellement
bientôt.
M. Charron: M. le Président, on a remarqué,
l'année dernière je me souviens de la discussion on
avait dit que, sur les 742 870 jeunes citoyens québécois qui, en
vertu du régime actuel, ont droit à une gratuité de soins
dentaires, seuls 129 000 d'entre eux auraient bénéficié de
ces soins. Evidemment, cela ne veut pas dire que tous les enfants ont
nécessairement besoin de soins dentaires, quoiqu'à cet âge,
où ils sont dans un changement de dentition, la règle puisse se
généraliser. Si, effectivement, ils n'en ont pas besoin par cause
de souffrance, il serait peut-être bon quand même qu'ils visitent
un dentiste. On avait dit que seulement 129 000 dans les premiers six mois en
avaient bénéficié.
Est-ce que le recours à ce droit a été plus attendu
au cours de l'année, est-ce qu'il y a eu une différence
notoire?
M. Forget: Je demanderais à M. Fortier de nous donner un
exposé des statistiques sur l'utilisation du régime.
Pour l'année en cours, 1975/76, on observe environ 2 660 000
services, ce qui fait environ 6,5 services par participant.
M. Charron: Qu'est-ce que vous appelez service? Est-ce que c'est
une visite?
M. Forget: C'est une visite. Un acte posé.
M. Charron: Dans une visite, il y a plusieurs actes qui peuvent
être rémunérés. Ce qui ne veut pas dire que les
bénéficiaires sont allés 6,5 fois pendant l'année,
en moyenne, chez le dentiste?
M. Forget: Le nombre de services par participant, cela pourrait
être un taux de participation de 6,5 également. Quand je dis le
nombre de services par participant, cela peut comprendre plusieurs visites,
comme cela peut comprendre plusieurs services dans une même visite.
M. Charron: Dans une même visite.
M. Forget: Je n'ai pas la distinction exacte.
Si vous me le permettez, si on regarde la nomenclature des dates, on
voit la radiographie et l'examen buccal; cela peut se faire dans la même
séance.
M. Charron: D'accord. Ma question est: Combien de jeunes, quand
vous dites 6,5... Il faudrait diviser 2 660 000 par 6,5; vous l'avez
probablement fait.
M. Forget: II y a un taux de participation qu'on avait
observé, d'environ 40%, pour cette année.
M. Charron: 40% des enfants éligibles?
M. Forget: 40% de la population éligible avait
participé, ni plus ni moins, à ce programme.
M. Charron: C'est une augmentation, par rapport à
l'année dernière?
M. Forget: Si c'est une augmentation? Je vais vous le dire
exactement. Il y a eu une légère augmentation.
Je crois qu'au cours de la première année, le niveau de
participation était de l'ordre d'un peu moins de 30%.
La population assurée de 0 à 8 ans, cette année, en
1975/76, est de 823 700 personnes, comparativement au chiffre de 743 560 que
vous avez mentionné pour l'an passé.
M. Charron: On était à quelques dizaines
près.
M. Forget: A quelques dizaines près, oui. Le taux de
participation, j'apporte une correction. J'ai dit que c'était dans les
40%; effectivement, c'est 49% qu'on observe.
M. Charron: Alors, c'est presque la moitié?
M. Forget: Pratiquement la moitié. Le nombre de
participants, ce qui veut dire que 409 000 personnes auraient participé
au régime, qui auraient obtenu des soins. Le coût moyen par
participant s'établit à $39.39.
M. Charron: D'accord. Je me réjouis de voir que la
participation au régime est plus élevée d'année en
année. Il y a deux moyens de l'augmenter, je pense. Par la
publicité à laquelle le régime peut se livrer pour
rappeler inlassablement que ce service est maintenant offert à tous les
jeunes Québécois. C'est donc aux parents parce qu'il ne
faut pas compter sur la responsabilité des enfants pour le faire
eux-mêmes de l'utiliser.
Est-ce qu'on a modifié, parce qu'on en avait discuté
l'année dernière, la publicité du régime
auprès des parents de ces enfants, pour s'assurer que la participation
soit encore plus élevée?
M. Forget: Je pourrais peut-être inviter M. La-rochelle
à nous faire part... Si vous voulez venir à la table, s'il vous
plaît?
En ce qui touche la publicité, M. le Président, pour les
soins dentaires, nous avons le jeu de la prévention qui, chaque
année, est distribuée à environ 100 000 enfants, de
même qu'à leurs parents.
M. Charron: A l'école élémentaire?
M. Forget: A l'école élémentaire. Et nous
allons bientôt publier un dépliant d'information qui va être
distribué chez les professionnels de la santé.
M. Charron: Est-ce qu'on a fait de la publicité à
la télévision, également?
M. Forget: Au début, au lancement du régime. M.
Charron: Plus maintenant?
M. Forget: Plus maintenant. A cause des coûts.
M. Charron: A cause des coûts. On a parlé
tantôt des dentistes. Est-ce que, chez les professionnels, on rencontre
encore des réticences à l'application de ce régime, qui
pourraient être une des causes d'une participation
améliorée d'année en année, mais qui n'est quand
même pas à sa pleine capacité?
M. Forget: Le taux de participation des dentistes au programme,
si c'est ce sur quoi vous vous interrogez, est passablement
élevé. Il faut tenir compte qu'il s'agit d'un régime
partiel, contrairement au régime d'assurance médicale, si l'on
veut, et que certains dentistes n'ont jamais fait de soins dentaires pour les
enfants.
D'ailleurs, il y a une certaine tendance chez les dentistes à se
spécialiser, à avoir des dentistes pour enfants, des dentistes
pour telle, telle et telle opération. Le taux de participation est moins
significatif qu'ailleurs. Il y a effectivement, pour l'année courante,
1694 dentistes engagés, 4 désengagés, 86 non-participants,
ce qui fait donc des chiffres très modestes. Le nombre des
engagés a essentiellement diminué de 9 dans une année, et
le nombre des non-participants a également diminué, mais de
beaucoup plus. Il est passé de 131 à 86. Il y a des variations
statistiques, mais ce n'est pas... Enfin, nous n'avons aucune raison de croire
que la participation des dentistes n'est pas aussi complète qu'elle
pourrait être. Nous n'avons aucune inquiétude de ce
côté. Du moins, jusqu'à maintenant, je n'ai pas
été mis au courant qu'on doive entretenir à ce sujet
quelque inquiétude que ce soit.
M. Charron: M. le Président, je signalais tantôt
que, dans le cas des bénéficiaires de cette partie du
régime d'assurance-maladie, puisqu'il s'agit d'enfants, il faut
évidemment compter autant sur la collaboration de tiers que du
bénéficiaire éligible, donc des parents. Il se peut aussi,
parfois à cause d'une négligence de la part des parents par qui
ils ont été élevés à une autre
époque, que les soins dentaires n'aient pas d'importance; s'ils n'en ont
pas eu pour eux, ils devraient à tout le moins les accorder à
leurs enfants, puisque c'est gratuit.
Il faudrait donc, je pense on l'a sans doute
réalisé au niveau de la régie compter sur une
collaboration des autorités scolaires également des milieux,
puisqu'il est peut-être plus facile de prendre les enfants à
l'école que de passer par les parents pour les rejoindre aux foyers, un
peu sur le modèle de l'ancienne école où on nous amenait
toute la "gang" au confessionnal, le premier vendredi du mois, pour être
certain que nous faisions notre devoir de chrétien.
Est-ce que, à l'occasion, on va prendre les enfants à
l'école pour ne serait-ce qu'une inspection
dentaire? Par la suite, selon ce qui aurait été vu, on
pourrait avertir les parents que, suite à un examen fait à
l'école, on a découvert telle et telle situation dentaire pour
l'enfant et qu'il serait alors préférable que les parents
bénéficient du programme. Quel est le rapport de collaboration
avec les autorités scolaires?
M. Forget: On peut dire deux sortes de choses relativement
à cela. Premièrement, ce qui se fait déjà qui est
effectivement modeste, mais est moins modeste déjà que
c'était il y a encore peu de temps; il se situe dans les cliniques
dentaires qui existent dans quatre ou cinq centres hospitaliers et qui sont
intensivement utilisées auprès des populations d'âge
scolaire, pour la formation des hygiénistes dentaires. On procède
de la façon qu'on vient de décrire en s'adressant à des
écoles et en amenant par autobus scolaire des classes complètes
pour non seulement des examens, mais des séances d'entraînement
dans le brossage des dents, mais aussi pour le détartrage et le
nettoyage systématique des dents.
On peut dépister un certain nombre de pathologies buccales qui
peuvent être l'objet d'une référence et on donne des
billets aux parents pour les avertir qu'on a décelé quelque chose
qui demanderait une attention, que le service est gratuit et donc, qu'il n'y a
pas d'obstacle.
Il y a quatre de ces cliniques qui ont été
inaugurées durant la dernière année. D'ailleurs, je les ai
inaugurées personnellement, parce que j'ai voulu souligner, dans la
mesure de mes moyens, l'importance que j'attache au développement des
services dentaires. Il y en a une à l'hôpital Sainte-Marie de
Trois-Rivières, une autre à l'hôpital
Honoré-Mercier, à Sainte-Hyacinthe, il y en a une au Centre
hospitalier universitaire Laval, une autre à Sainte-Justine, à
Montréal et une autre, je crois, au Montreal Children's.
Ces cliniques, qui comptent une trentaine de chaisses chacune,
fonctionnent à longueur d'année pour la formation clinique des
hygiénistes dentaires, mais réussissent à avoir
passablement d'enfants grâce à cette activité. En plus,
dans les départements de santé communautaire, il existe un
certain nombre de dentistes et d'hygiénistes dentaires qui utilisent les
équipements hospitaliers en place pour prolonger cette action
préventive auprès de la population des jeunes. Ce sont les
activités qui existent à l'heure actuelle. Je ne veux pas en
exagérer l'importance, mais c'est malgré tout une étape
nouvelle. Pour ce qui est de l'avenir et ce qui est du développement,
lors de l'inauguration du programme de soins dentaires en 1974, j'avais
indiqué que le conseil des ministres avait retenu à ma suggestion
le principe d'un programme de soins dentaires en milieu scolaire, qui
supposait, cependant, pour sa mise en route, que l'on résolve un
très grand nombre de questions de programmation, d'organisation, de
formation professionnelle. Je dois dire que le développement de ce
côté n'a pas été aussi rapide et aussi harmonieux
que je l'eus souhaité à l'époque. J'attends encore un
rapport final contenant des recomman- dations sur le plan financier, sur le
plan professionnel, sur les plans de distribution des services, et ceci, pour
la fin de la présente année. Il y a donc des problèmes qui
ne sont pas résolus et qu'il va falloir résoudre, en effet, si
l'on veut avoir une accessibilité et des soins dentaires vraiment mieux
accessibles à la population d'âge scolaire, puisque, lorsqu'on
cite le pourcentage de 40% de participation, cela peut sembler bas, mais si
l'on compare ce pourcentage à des pourcentages analogues dans d'autres
programmes où les soins dentaires sont couverts, qu'il s'agisse de plans
privés dans certains Etats américains ou certains programmes
publics à l'étranger, en Europe en particulier, on
découvre qu'à l'exception peut-être de la Suède, je
crois, un taux de participation en haut de 25% est déjà un motif
de satisfaction. Assez curieusement, les taux de participation sont
relativement bas.
Donc, on ne peut pas s'attendre qu'un régime qui est purement
facultatif, qui s'adresse à des enfants, dans un contexte social
où les soins dentaires n'ont jamais été vraiment une
priorité au Québec, il faut bien se l'avouer... Qu'on atteigne
déjà 40% après deux ans, je trouve cela assez
exceptionnel. J'ai même vu des chiffres au début de l'année
qui m'ont amené à poser des questions, à savoir si on
n'avait pas compté les réclamations plutôt que les enfants,
puisqu'il semblait qu'on avait beaucoup de monde dans le régime en peu
de temps. Cela indique, malgré tout, les limites de cette façon
purement facultative d'aborder le problème. J'aimerais bien qu'on ait
une façon plus dynamique de se rendre auprès de l'enfant. Encore
une fois, il y a des bribes, les cliniques dentaires de formation des
hygiénistes dentaires, ce plan auquel nous travaillons et dont,
malheureusement, nous n'avons pas encore les éléments essentiels
dont je pourrais faire état.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Taschereau.
M. Bonnier: M. le Président, je ne sais pas si le
député de Saint-Jacques voudrait enchaîner sur un autre
sujet.
M. Charron: Oui.
M. Bonnier: Ah bon! C'est parce que j'avais deux courtes
questions sur les soins médicaux, mais, après cela, on a
passé aux médicaments et tout cela. Vous m'indiquerez quand je
pourrai les poser avant la fin.
M. Charron: Allez-y immédiatement.
M. Bonnier: Je voudrais savoir du ministre, dans le domaine de la
médecine industrielle, quels ont été les efforts qui ont
été faits dans la recherche dans ce domaine et également
en ce qui regarde la formation de médecins pour la médecine
industrielle. C'est une question que je pose tous les ans, mais j'aimerais
savoir où on en est rendu. La deuxième, M. le ministre, si vous
permettez.
Vous avez souligné que nos contributions au régime
d'assurance-maladie lors de la première question, vous avez
répondu au député de Saint-Jacques pourraient
être influencées par l'état des négociations avec
les médecins, omnipraticiens ou autres, mais sans souligner où
cela en était rendu.
Est-ce qu'on pourrait savoir quel est l'état actuel des
négociations avec les médecins?
M. Forget: Premièrement, pour ce qui est de la
médecine industrielle, je vais vous faire une réponse
brève, puisque c'est un sujet qui est d'actualité, mais où
précisément il y a des discussions, il y a une politique en
gestation, mais, où on ne trouve pas beaucoup d'impact direct sur le
fonctionnement de la régie à l'heure actuelle et certainement pas
sur le niveau de ses déboursés.
Il y a un principe qui existe dans le domaine de la médecine du
travail, de la médecine industrielle, qui est un principe qui doit
être conservé, c'est que les problèmes spécifiques
de médecine du travail, c'est-à-dire les traitements ou les
activités d'examen médical, de dépistage des
problèmes de médecine qui sont spécifiques au milieu du
travail, qui résultent soit d'une intoxication, qui trouvent son origine
dans le milieu du travail ou dans un risque de maladie industrielle, comme il y
en a un certain nombre, ces services-là doivent être
assumés par l'entreprise. Le coût des services doit être
assumé par l'entreprise, donc, ne figure pas et ne devrait pas figurer
au budget d'un programme public d'assurance-maladie, mais être à
la charge des employeurs, puisque ce sont des coûts spécifiques
qui diffèrent d'une industrie à l'autre et qui sont inexistants
dans certaines industries. Donc, il y aurait une certaine injustice à
répartir tous ces coûts, de façon
générale.
M. Bonnier: Peut-il y avoir une pression de la part du
ministère, par exemple, pour qu'ils...
M. Forget: Justement, au plan législatif, mon
collègue, le ministre du Travail, a fait un discours le 4 novembre,
où il a annoncé les grandes orientations qui étaient les
siennes, dans le domaine de la santé et la sécurité des
travailleurs. Le comité ministériel des ressources humaines, sur
lequel nous siégeons tous les deux avec quelques collègues, se
penche sur le problème de la santé et de la
sécurité des travailleurs et cherche à produire une
politique qui intègre tous les éléments à toutes
les dimensions, à la fois les dimensions d'ingénierie,
d'ergonomie, de médecine d'environnement, dont il faut tenir compte pour
assurer un milieu de travail sain et pour dépister les risques et y
remédier dans les cas où ils se manifestent.
Donc, de ce côté-là, il va y avoir sûrement
une politique gouvernementale, d'ailleurs, cela a été
annoncé dans le discours inaugural et, d'ici la fin de l'année,
nous aurons les éléments d'une législation de programmes
et d'organisation qui permettront d'apporter des réponses et d'exercer
là où c'est nécessaire c'est malheureusement
nécessaire dans un grand nombre de domai- nes la pression, comme
vient de le dire le député de Taschereau, nécessaire pour
que les choses s'améliorent.
C'est au plan de l'organisation du financement de la médecine
industrielle, de façon très générale; je ne peux
évidemment pas aller beaucoup plus loin pour le moment. Au plan de la
formation, il y a une amorce de formation de spécialistes en
médecine du travail, si l'on peut dire. Il y a des cours en
médecine du travail qui se donnent depuis peu à la faculté
de médecine de Laval et il y en a aussi à l'Université
McGill. Il y a des efforts qui se font ailleurs à Sherbrooke et
à l'Université de Montréal pour exposer
l'étudiant en médecine à cette dimension relativement
nouvelle de la pratique médicale, parce qu'il y a quand même des
problèmes auxquels les médecins de formation traditionnelle, si
l'on veut, n'ont pas été exposés, dans leur cours de
médecine, en particulier.
Les problèmes d'intoxication qui sont très
spécialisés, dans le fond, nécessitent de former le sens
clinique, la capacité de diagnostic. Or, c'est un aspect qui a jusqu'ici
fait défaut, de l'aveu même des doyens des facultés de
médecine et de ceux qui connaissent ce domaine et on cherche à
enrichir le programme des facultés de médecine pour en tenir
compte.
Donc, il y a du mouvement de ce côté, et je suis sûr
qu'on y reviendra au cours de la présente session probablement beaucoup
plus longuement.
Pour ce qui est de l'état des négociations, j'ai fait
allusion, tout à l'heure, à l'état de suspension, dans le
fond, des discussions avec la Fédération des médecins
omnipraticiens.
De ce côté, nous avons conclu une entente de principe
dès l'automne dernier, dès le mois de septembre ou, au plus tard,
octobre dernier, sur la plupart des clauses normatives qui avaient
été discutées depuis fort longtemps avec la
fédération. Nous avons eu par la suite, quelques contacts entre
leurs négociateurs et les nôtres, mais je crois qu'il y a un peu
un phénomène d'attentisme du côté de la
fédération puisque, sur le plan pécuniaire, qui est le
seul en jeu, il y aurait des discussions extrêmement fréquentes et
intenses avec l'autre fédération, la Fédération des
médecins spécialistes.
De ce côté également, et ceci a été
confirmé par le président de la Fédération des
médecins spécialistes dans une circulaire qu'il faisait parvenir
à ses membres il y a moins de trois semaines, peut-être moins de
quinze jours, il y a une entente de principe également entre la
fédération des spécialistes et le gouvernement, qui porte
sur tous les aspects normatifs, le préambule et le tarif lui-même.
Donc, il y a une entente générale au niveau des principes.
Pourquoi tout ceci ne s'est-il pas complété pour ainsi
permettre le déblocage avec les médecins omnipraticiens? C'est le
résultat d'un vote pris chez les médecins spécialistes le
31 mars dernier, un vote qui a été négatif et qui a
porté sur un seul élément, c'est-à-dire sur
l'existence, dans l'entente envisagée, d'un mécanisme de
contrôle impliquant la participation de la Fédération
des
médecins spécialistes, contrôle qui a pour but de
s'assurer que le taux d'accroissement qui a été accepté
par nos négociateurs ne soit pas dépassé dans les
faits.
En effet, nous sommes convenus d'une majoration du tarif qui aurait pour
effet d'augmenter le revenu moyen des médecins spécialistes de
15% en 1976 par rapport à 1974, c'est-à-dire que la moyenne du
revenu des médecins qui pratiquent à temps plein, ceux dont le
revenu dépasse donc $20 000 dans une année, soit de 15% plus
élevé en moyenne en 1976 que cela n'a été le cas,
effectivement, en 1974.
Cette condition nous est apparue essentielle, puisque, contrairement
à des négociations avec d'autres groupes, nous avons
l'expérience, après cinq ans de fonctionnement du régime,
qu'un groupe en particulier peut s'auto-indexer en quelque sorte. Nous
pourrions citer plusieurs exemples d'une percée que fait un groupe. Cela
peut être un groupe relativement limité dans le tarif, ou les
règles d'application du tarif, qui permet tout à coup à ce
groupe de majorer son revenu par un facteur très considérable. On
peut le doubler même, si tout à coup on découvre un truc ou
une façon d'utiliser le tarif qui n'avait pas été
envisagée. Le doubler, c'est beaucoup; mais, ce n'est pas sans
précédent; toutefois, l'augmenter de 30%, 40%, ou 50%, c'est
déjà plus répandu chez certains groupes. Etant
donné cette possibilité, il nous apparaît un peu futile de
négocier des taux d'accroissement si, dans le fond, le taux
d'accroissement en question n'est qu'une espèce de plancher, n'est qu'un
minimum qui peut être dépassé et pour lequel l'entente ne
prévoirait pas autrement de mécanisme de correction.
Donc, nous avons consenti à hausser notre offre à 15%.
C'est une augmentation sur deux ans, de 1974 à 1976, de la moyenne des
rémunérations en contrepartie de l'existence d'un
mécanisme de ce genre-là. Le mécanisme lui-même, il
n'importe peut-être pas beaucoup de le décrire, mais seulement
pour dire qu'il repose principalement sur l'intervention de la
Fédération des médecins spécialistes
elle-même qui, à la constatation d'un dépassement
significatif, vérifiable dans un trimestre donné, dans le niveau
des paiements moyens faits à un groupe de médecins, doit prendre
les mesures pour modifier les règles d'interprétation, comme il
lui semble approprié, de manière à respecter cette entente
entre le gouvernement et elle, savoir que ce sera une augmentation de 15% et
non pas une augmentation de 18%, et de le faire de manière que cela
retourne à ce qui était prévu; à défaut de
quoi, évidemment, il y a une possibilité d'une intervention de la
part du ministre. Mais cela est mis là comme sauvegarde.
Nous anticipons que la fédération serait toujours en
mesure de préciser les règles d'interprétation de
manière à vivre à l'intérieur d'un taux
d'accroissement donné, puisque la fédération dispose de
toute l'expertise nécessaire pour connaître le problème, en
connaître les causes et suggérer des moyens d'y remédier.
D'ailleurs, les problèmes sont d'autant moins graves qu'on y
remé- die rapidement. Si nous avions bénéficié d'un
mécanisme comme celui-là, les bouleversements provoqués
par le phénomène de la physiothérapie en cabinet
privé ne se seraient pas développés.
Donc, ce mécanisme est important. Nous avons insisté pour
l'inclure comme condition essentielle à notre capacité à
offrir 15% d'augmentation sur la moyenne. C'est ce qui a fait l'objet d'un vote
qui a été rejeté le 31 mars.
M. Charron: Pourquoi a-t-il été rejeté?
M. Forget: II a été rejeté, je pense, parce
qu'on y voit là des implications qui n'y sont pas. C'est, je pense,
malheureux que l'on ait adopté une telle attitude et je pense qu'il est
encore possible, c'est la raison d'ailleurs pour laquelle les contacts ne sont
pas rompus avec la fédération.
Je crois qu'on a voulu voir dans cette mesure une contradiction avec le
principe de la rémunération à l'acte, c'est-à-dire
au principe selon lequel chaque individu est rémunéré pour
ce qu'il fait en fonction de sa productivité, si vous voulez.
C'est-à-dire que c'est un certain principe d'équité ou de
justice naturel, un médecin qui travaille plus doit être
payé plus qu'un autre qui travaille moins. C'est, dans le fond,
l'argument de base en faveur d'une rémunération à l'acte
puisque que ce qui se fait dans les cabinets privés, évidemment,
personne ne le contrôle sauf le professionnel lui-même. On juge
qu'il faut rémunérer les professionnels pour ce qu'ils font et
non pas pour ce qu'ils sont censés faire. Il y a une certaine justice
là-dedans.
Maintenant, le mécanisme en question est loin de contredire
l'objectif d'équité entre médecins; parce que le
contrôle que nous envisageons' un contrôle qui est un
autocontrôle de la fédération sur l'activité de ses
membres quant à leur impact économique, ne vise pas à
empêcher quelqu'un de faire deux fois plus en revenu en une année
qu'il faisait en 1976, qu'il faisait en 1974, pourvu qu'il pose deux fois plus
d'actes, mais vise à empêcher que la moyenne de tout un groupe
subisse une majoration. Il est clair que pour les individus, le principe de la
rémunération à l'acte, donc du paiement selon la
productivité, pourrait jouer complètement.
Ce qu'il est plus difficile d'imaginer, cependant, c'est que l'ensemble
de tous les médecins, au nombre de plusieurs milliers, produisent
davantage tous au point de dépasser les 15% qui résultent d'une
augmentation du tarif pour un volume donné. Pourquoi? Parce que la
population du Québec ne s'accroît pas à un rythme
très élevé. C'est à peu près de 1/2 à
2/3 de 1% par année et que, annuellement, on a une augmentation de
l'ordre de 7,5% dans le nombre de médecins. Et le nombre de
médecins ne vient pas diminuer la moyenne, mais vient augmenter la masse
de toute manière et permet de donner plus d'actes, de faire plus
d'actes; donc, non seulement de maintenir la qualité, mais de
l'accroître, même si personne ne travaille plus fort en une
année qu'il ne travaillait l'année précédente'
parce qu'il y a de plus en plus
de médecins par rapport à une population relativement
stable.
Donc, on ne peut pas concevoir que les 15% seraient
dépassés pour la totalité des médecins, parce
qu'ils travailleraient plus, parce qu'il y a, malgré tout, une
population donnée et on augmente la quantité disponible de
services de 7,5% par année et ceci, sans pénaliser quelque
médecin que ce soit. Le seul problème qui se pose est un
problème de justice et d'équité entre médecins
à l'intérieur d'une masse donnée et il est possible de
respecter ce principe d'équité avec une limite globale sur des
moyennes de tous les spécialistes, de toute une
spécialité.
Ceci n'a pas été suffisamment bien compris dans une
réunion où il est peut-être difficile d'expliquer des
choses techniques, la passion peut s'en mêler un peu aussi. Je pense
qu'il n'est pas exclu d'envisager qu'on pourra faire passer ce message. Un
contrôle global sur les masses, c'est une condition de confiance mutuelle
dans une négociation. Nous aimerions bien pouvoir accorder un
accroissement de revenus aux médecins, les tarifs sont les mêmes
depuis 1970. Il y a eu une certaine auto-indexation; donc, ce n'est pas la
fixité absolue des revenus.
Malgré tout, nous aimerions bien donner 15%, mais nous ne voulons
pas nous réveiller avec 17% ou 21%, et, à voir les profils dans
certaines spécialités, on connaît d'expérience la
possibilité d'une explosion. On voulait avoir une garantie et ne pas
l'imposer, ne pas imposer de diktats, ne pas demander à la régie
de faire ces coupures elle-même, mais demander à la
fédération de prendre les mesures nécessaires pour
corriger un dépassement lorsqu'il se produit, de manière à
vivre à l'intérieur de la masse convenue.
C'est là-dessus que nous sommes dans le moment et nous
espérons que nous pourrons déboucher d'ici quelques semaines, si
la fédération le veut bien.
M. Charron: M. le Président, il ne reste que quelques
minutes. Sur ce sujet, est-ce que le gouvernement, suite au refus du 31 mars
dernier, va modifier, à la demande de la fédération, cette
partie de l'entente qui a été le point d'achoppement?
M. Forget: Suite à ce vote, il n'y a pas eu une
véritable reprise des négociations. Du côté de la
fédération, je crois qu'on est dans une période, comme on
le dit en anglais, de "sole searching", dans une période avant un
congrès général où on élira un nouvel
exécutif, etc. Je pense qu'on veut laisser passer cette période
de l'autre côté avant de reprendre le dialogue.
Il est bien clair qu'on ne peut pas faire des miracles dans une
année où, de toute manière, tout le monde est soumis
à un contrôle, en fonction de critères de lutte à
l'inflation. Nous sommes allés à la limite de ce qui était
permis d'envisager de rendre acceptable, en vertu des règles
antiinflationnistes, et même, en forçant un peu, mais nous croyons
qu'il était important d'établir ce régime de confiance
entre le gouvernement et la profession en disant à la profession: On va
vous accorder une augmentation, mais, de votre côté, vous allez
nous assurer qu'on vit à l'intérieur d'un monde
prévisible.
C'est un élément qui est très important, je pense
et auquel nous tenons beaucoup. Nous ne sommes pas prêts à
l'abandonner comme cela. Je pense qu'il a été surtout mal compris
et qu'il nous sera possible de persuader le représentant de la
fédération du bien-fondé de notre proposition.
Le Président (M. Cornellier): Le député de
Frontenac.
M. Lecours: M. le Président, je pense que le
problème chez les spécialistes c'est surtout un problème
interne. Je pense qu'ils sont en faveur des offres du gouvernement, mais quand
les pédiatres se comparent aux chirurgiens, les psychiatres se comparent
aux chirurgiens, c'est là que ces gens sont mécontents. Ils ne
semblent pas s'entendre entre eux pour partager la masse pécuniaire. Je
ne pense pas que ce soit contre les offres du gouvernement. Ils sont d'accord
sur les offres du gouvernement.
M. Forget: Je prends note des remarques du député
de Frontenac. Je ne veux pas faire trop de commentaires sur les affaires
internes de la fédération. Je sais qu'il y a eu des
difficultés de cette nature et d'autre nature, j'espère qu'on
pourra en venir à conclure ce dialogue, parce que, encore une fois, tout
est réglé, sauf cela.
Dès que ce sera réglé avec les spécialistes,
ce sera rapidement réglé, en suivant à peu près le
même patron, avec les omnipraticiens. Je pense qu'ils ont attendu depuis
quelques mois, sachant l'intensité de nos négociations depuis
Noël en particulier, même depuis le début de novembre. Ils
savaient qu'il n'était pas nécessaire de poursuivre en
parallèle deux négociations qui auraient le même
résultat ou à peu près.
Donc, c'est une période décisive et j'espère que,
du côté de la fédération, on comprendra que notre
but n'est pas de remettre en question des principes de justice auxquels ils
tiennent, je pense, tout à fait normalement, mais qu'on veut un
régime prévisible, parce que, nous aussi, il nous faut faire des
prévisions. On a eu des surprises dans le passé et on n'essaie
pas de leur imposer quoi que ce soit. On essaie de les faire participer
pleinement à la détermination des caractéristiques du
régime et de son mode d'application.
Le Président (M. Comellier): Je constate qu'il passe
maintenant 18 heures. La commission devra ajourner ses travaux sine die,
à moins que vous ayez le consentement unanime pour les poursuivre.
M. Forget: Je n'ai pas d'objection à les poursuivre, s'il
y a d'autres questions, si l'on peut terminer.
M. Bonnier: C'est aussi bien de les terminer.
M. Charron: Avez-vous une heure?
M. Forget: Vous en avez pour une heure?
M. Charron: Oui.
M. Forget: Je n'ai pas d'objection à les terminer.
M. Charron: J'aime mieux garder en suspens ce qui reste. Nous
verrons, au cours des travaux du mois de mai, s'il est important de
revenir.
M. Forget: C'est comme vous préférez. Moi, je peux
rester jusqu'à 19 heures, il n'y a pas de problème.
M. Charron: Jusqu'à 19 heures.
M. Forget: Enfin 19 heures ou 19 h 30, comme vous voulez. Avec le
consentement unanime, je suis entre les mains de la commission moi aussi.
M. Charron: On peut continuer, M. le Président.
Le Président (M. Cornellier): Consentement unanime. Nous
allons poursuivre. Le député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Seulement une observation. Si vous aimez donner
vos statistiques pour enfants relativement aux soins dentaires, en donnant 49%,
il faut tout de même tenir compte qu'un enfant naissant, ou
âgé de un an ou deux ans, n'a pas besoin beaucoup de soins
dentaires, je suppose bien, ce qui augmente énormément ce
pourcentage, relativement au potentiel de soins à donner.
M. Forget: C'est exact. Un pourcentage, c'est un pourcentage
global des enfants de zéro à huit ans.
M. Saint-Germain: Vous n'avez pas fait de pourcentage?
M. Forget: On peut soit continuer quelques minutes ou ajourner la
séance tout de suite.
M. Charron: Nous ajournons la séance, M. le
Président.
Le Président (M. Corneilier): Bon, étant
donné un empêchement qui vient d'arriver, la commission ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 2)