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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 5 mai 1976 - Vol. 17 N° 35

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Etude des crédits du ministère des Affaires sociales


Journal des débats

 

Commission permanente des affaires sociales

Etude des crédits du ministère des Affaires sociales

Séance du mercredi 5 mai 1976 (Seize heures vingt-deux minutes)

M. Cornellier (président de la commission permanente des affaires sociales): A l'ordre, messieurs!

La commission des affaires sociales reprend ses travaux pour l'étude des crédits du ministère des Affaires sociales. Comme le mentionnait le leader du gouvernement lors de sa motion pour que cette commission siège, le mandat de la commission est de compléter ou du moins de tenter de compléter l'étude des crédits aujourd'hui. A la séance d'hier, les programmes qui avaient été suspendus à l'ajournement de Pâques, soit les programmes 11,12, 13 et 15 ont été adoptés. Il ne reste donc que le programme 3 à étudier et à adopter, soit l'assistance-maladie. L'honorable député de Saint-Jacques.

Assistance-maladie Régime d'assurance-maladie

M. Charron: M. le Président, je m'efforcerai de répondre aux voeux du leader de l'Opposition — du leader du gouvernement pardon, c'est aussi le voeu du leader de l'Opposition — de terminer aujourd'hui l'étude de ces crédits. Ce sera la première année que nous aurons réussi à voir tous les programmes avant que tombe la guillotine des 45 jours prévus à l'étude des crédits. Ce programme est celui qui nous est réservé pour faire le tour d'horizon de la situation du régime d'assurance-maladie créé au Québec depuis maintenant six ans. Ma première question portera sur l'état de la santé financière du régime, sur la nature du surplus accumulé actuellement et sur les possibilités de pouvoir obtenir des renseignements supérieurs.

M. Forget: Sous réserve, M. le Président, des documents qui peuvent me permettre de donner des réponses précises aux dollars et aux cents près relativement à la santé financière de la régie dont, de toute manière, les états financiers et le rapport annuel seront rendus publics dans environ un mois et demi ou à peu près, soit à l'époque habituelle; je peux rassurer les membres de la commission quant à la santé financière du régime d'assurance-maladie. Il y a eu, au cours des années, comme on sait, une progression dans les revenus tirés de la régie du prélèvement sur la masse salariale, le 0,8% qui est demeuré inchangé depuis 1971, mais qui, à cause de l'inflation, à cause de l'augmentation du nombre de travailleurs, de l'augmentation de la masse salariale, a connu une augmentation assez sensible au cours des années.

Par ailleurs, du côté des déboursés, on a deux phénomènes. Il y a le phénomène de stabilité dans les tarifs selon lesquels les actes médicaux sont remboursés aux médecins. D'une part, ceci représente la plus grande masse des déboursés, un peu plus de $500 millions durant l'année en cours, $400 millions, mais enfin, pour ce qui est des chiffres précis, je me réfère aux données qu'on pourra produire tout à l'heure.

Par ailleurs, le deuxième élément a été l'in-droduction progressive de régimes complémentaires à celui des soins médicaux proprement dits au cours des années qui, malgré leur développement, ont permis de dégager un surplus accumulé qui se chiffre par environ $120 millions durant l'année en cours.

Les programmes qui ont été introduits, je le mentionne pour référence, comprennent d'abord le programme d'assistance-médicaments, en deux étapes, pour les personnes âgées en 1974 et en 1975, d'abord pour le premier tiers des personnes âgées qui sont bénéficiaires du maximum du supplément de revenu garanti en vertu du régime de pension de vieillesse et le 1er janvier 1975, un autre tiers de la population âgée de 65 ans et plus qui bénéficie d'une partie du supplément de revenu garanti, au total, quelque 300 000 bénéficiaires.

Il y a eu également l'inauguration en 1974 du régime de soins dentaires pour les enfants de 0 à 8 ans qui a été étendu d'une année l'an dernier pour le rendre applicable aux enfants de 0 à 9 ans. Il y a eu, en juillet de l'an dernier, l'introduction du régime de remboursement des prothèses et orthèses orthopédiques. Ce sont tous là des bénéfices qui ont été rendus possibles. Je devrais ajouter d'ailleurs des programmes comme ceux de la chirurgie buccale, des soins optométriques qui dépassent la couverture originale du régime.

Ce sont là tous des prolongements de couvertures qui ont été rendus possibles par la santé financière du régime et qui, malgré qu'ils se soient produits, ont rendu possible l'accumulation d'un surplus qui permet d'envisager l'avenir immédiat avec une certaine confiance.

Maintenant, ce surplus accumulé n'est pas entièrement une somme liquidable en totalité puisqu'il est essentiel à la stabilité financière du régime, de disposer d'environ l'équivalent, selon les experts de la régie, d'un mois de déboursés, ce qui veut dire approximativement $50 millions, maintenant, ce qui veut dire qu'il y a un surplus d'environ $70 millions, ce qui est rassurant.

Ce surplus ne s'accroîtra plus sensiblement ou même pas du tout durant l'année qui a commencé le 1er avril 1976, puisque la croissance des dépenses a désormais rattrapé le rythme de croisière des revenus. C'est donc dire qu'il faut entrevoir un plafonnement de ce surplus pour l'avenir immédiat et, sans aucun doute, un épuisement progressif du surplus dans la mesure, au moins, où l'augmentation inévitable des tarifs auxquels sont rémunérés les médecins interviendra.

M. Charron: Quand interviendra-t-elle? Au cours de cette année?

M. Forget: II est difficile de préciser quand elle interviendra puisque son introduction dépend essentiellement d'une entente. Je ne sais pas si c'est l'intention du député de Saint-Jacques, mais il serait peut-être bon de faire le point brièvement, au cours de cette séance, sur l'état de cette négociation. Mais comme on parle maintenant de l'aspect financier, si elle s'appliquait immédiatement — si elle était de l'ordre envisagé, soit de 10% à 15% — comme elle s'applique à une masse d'un peu plus de $500 millions, il s'agit d'un déboursé annuel additionnel de l'ordre de $50 millions.

On se rend compte immédiatement que le surplus accumulé serait beaucoup plus modeste à la fin de l'année. Si l'augmentation du tarif intervient plus tard, c'est une variable qu'il n'est pas possible de contrôler unilatéralement ou administrativement.

Pour ce qui est des dépenses administratives de la régie, il y a eu, bien sûr, une progression en termes absolus, comme dans tous les secteurs. Les salaires, les dépenses administratives augmentent, mais il y a eu, en termes relatifs, une assez remarquable stabilité des dépenses administratives de la régie qui se situent aux alentours de 6%, à quelques fractions au-dessus de 6%.

Particulièrement durant la dernière année, des efforts ont été faits, avec un très grand succès d'ailleurs, pour en venir à contrôler, de façon plus rigoureuse, les dépenses administratives et on a pu voir, durant l'année, par rapport aux prévisions initiales formulées il y a un peu plus d'un an, une situation fort intéressante où les dépenses réelles au niveau de l'administration se sont avérées de beaucoup inférieures aux dépenses anticipées.

Il s'agit d'une somme d'environ $5 millions, je crois, par rapport aux estimations originales. Ceci a été fait par toutes sortes de moyens, par certaines compressions des postes, par une meilleure utilisation des effectifs, par une analyse très rigoureuse des autres dépenses administratives à différents titres qui ont pu s'effectuer sans diminuer, au contraire, l'efficacité générale de la régie.

Ces 6% de frais d'administration pour un régime d'assurance se comparent avantageusement à tout ce qu'on peut constater dans quelque secteur d'activité que ce soit. Si l'on compare à l'industrie privée de l'assurance, je pense qu'il serait impossible, dans le monde entier, de trouver une compagnie d'assurance dont les frais d'administration sont aussi faibles que cela. On voit plutôt des pourcentages d'au-delà de 20%. Cela veut dire en pratique que les quelques centaines de millions auxquels contribuent les Québécois par leurs impôts, pour le financement du régime, servent à 93% à payer des bénéfices plutôt qu'à 75% ou à 78%. Je pense qu'on ne peut pas évaluer le régime dans son ensemble sans tenir compte de cette économie très substantielle qui se chiffre par près de $100 millions par année sur le plan de l'ensemble de la société, parce qu'il est clair que si les gens les payaient par des primes à des assureurs, ils les paieraient dans un sens tout aussi réel que s'ils les paient à l'Etat sous forme de contributions parafiscales.

Je peux citer, si on le désire — c'est peut-être un peu oiseux de le faire, parce que cela se trouve dans des publications qui seront bientôt dans les mains de tout le monde — un rapport périodique que la régie présente. Ce ne sont pas les chiffres nécessairement complets pour l'ensemble d'un exercice, mais je peux le faire s'il y a des questions précises.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais enchaîner plutôt sur un certain nombre d'éléments, de précisions que vient d'apporter le ministre des Affaires sociales sur l'état de santé financière de la régie par une question assez précise. S'il est vrai qu'il est toujours possible que nous fassions face à une augmentation des tarifs au cours de l'année financière en cours, que, d'autre part, l'extension des couvertures amène nécessairement une augmentation des contributions du régime en remboursement, est-ce que les Québécois peuvent maintenant s'attendre à une hausse de la cotisation qu'ils versent actuellement au régime d'assurance-maladie?

M. Forget: Bien, comme je viens de l'indiquer, il y a des éléments hypothétiques qui sont difficiles à évaluer actuellement, c'est-à-dire l'importance et le moment de l'augmentation des tarifs versés aux professsionnels de la santé. C'est une variable importante, parce qu'elle influe très directement sur le niveau des déboursés mensuels de la régie et aussi, possiblement, sur le niveau, enfin le rythme d'épuisement de son surplus accumulé. Cependant, étant donné le caractère des offres faites par le gouvernement aux fédérations médicales, entre autres, étant donné le surplus accumulé jusqu'à maintenant, au titre de l'assurance-maladie, il semble possible, et c'est d'ailleurs un objectif du gouvernement dans ses négociations, qu'il n'y ait pas d'augmentation nécessaire pour la prochaine année sur un strict plan des entrées et des sorties de fonds. Maintenant, je ne veux pas exclure a priori par une telle déclaration la possibilité qu'on veuille modifier le régime ou en étendre la portée. A ce moment, il sera évidemment nécessaire de réviser les méthodes de financement. Tel que le régime existe, étant donné la situation financière du régime et de la régie, on peut envisager une année sans augmentation des disponibilités financières du régime.

Il y a aussi un autre facteur sur lequel sont basées ces estimations, c'est le taux d'accroissement de la masse salariale, le taux d'inflation, le taux de chômage, l'expansion économique; enfin tout cela, ce sont des hypothèses qui doivent être faites quand on projette l'accroissement des revenus de la régie. Si on devait être fortement surpris de ce côté, des réalignements pourraient s'avérer nécessaires plus tôt que prévu, encore qu'il y a quand même une certaine marge de sécurité.

M. Charron: Si nous devons demeurer sensiblement au même taux actuel de cotisation, quels sont les revenus prévus pour l'exercice financier qui débute pour la régie?

M. Forget: Alors' pour les niveaux de revenu, j'ai ici l'état, je pense que c'est le chiffre à utiliser. C'est la section suivante. C'est plus détaillé.

Pour ce qui est de 1976/77, donc, le budget, c'est-à-diré tes prévisions, la contribution des particuliers et employeurs, $403 140 000; la participation du gouvernement du Canada, dont la contribution est basée sur 50% du percapita national, dans le cas de ce programme-là — c'est différent dans l'assurance-hospitalisation — $258 899 000. Les intérêts sur les placements, puisque le fonds en surplus est placé de façon avantageuse, pour ce qui est des placements à moyen terme auprès de la Caisse de dépôt et placement et pour ce qui est des fonds à court terme auprès des institutions financières, $11 285 000 de revenus de placement; autres revenus, c'est $100 000, c'est, relativement parlant, une bagatelle, pour un total de $673 424 000, à comparer à une estimation pour l'année en cours, puisque les chiffres ne sont pas absolument définitifs — l'année financière se termine le 31 mars — de $596 500 000, c'est-à-dire un accroissement de $317 millions d'un exercice financier à l'autre.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais maintenant aborder une autre question, qui, je sais, a déjà attiré l'attention de la commission et sans aucun doute du ministre des Affaires sociales aussi, celle de la répartition des médecins sur le territoire du Québec. Cette Assemblée a voté, en décembre 1974, un amendement à la Loi de l'assurance-maladie qui essayait, non pas de régler le problème, mais au moins de contribuer à sa solution en instituant un système de bourses et en incluant la possibilité de conclure des ententes pour limiter le nombre de médecins exerçant sur un territoire.

Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des ententes conclues en vertu de cette loi? Où en est, en fin de compte, l'application de cette loi? Deuxièmement, pour compléter cette réponse, puisque j'ai dit que, de l'avis même de ceux qui avaient participé à l'adoption de cette loi, M. le Président, en commission, nous n'avions aucunement l'impression de régler totalement le problème, mais de contribuer, en partie, à le résoudre, est-ce que d'autres mesures, au-delà de cette loi précédemment votée, ont été prises ou sont sur le point de l'être pour faire face à ce problème? Je pourrais citer, à l'attention des membres de cette commission, des statistiques sur la répartition des médecins, mais je pense que chacun des députés, si on regarde autour de la table, provenant de toutes les régions du Québec ou à peu près, est en mesure de témoigner du fait qu'il y a effectivement une répartition inégale et qui, à l'occasion, peut créer une injustice à l'égard d'une certaine population du Québec.

M. Forget: Trois choses sont intervenues dans ce domaine depuis la loi 93 adoptée en décembre 1974. Dès le début de janvier, donc tout de suite après le retour des vacances de Noël qui ont suivi la fin de la session, j'ai adressé une lettre à la Cor- poration professionnelle des médecins de même qu'aux différents conseils régionaux de la santé pour leur demander d'étudier le problème de la répartition, de l'accessiblité géographique, physique aux services médicaux sur leur territoire et, dans le cas de la corporation professionnelle, de façon générale — puisque la corporation a fait, périodiquement, dans son bulletin, état de cette question, — de ses préoccupations à cet égard.

Je leur ai demandé, non seulement de faire des recommandations sur des endroits, des localités qui étaient dépourvues de services médicaux, mais aussi sur des critères qui les avaient inspirés pour la désignation de ces endroits puisque l'effort étant le premier du genre au Québec, il fallait, non pas seulement désigner des endroits, mais essayer de savoir en fonction de quoi on définit une pénurie de services médicaux.

J'ai reçu des réponses au cours de l'année 1975 et les dernières recommandations des différents conseils régionaux me sont effectivement parvenues en novembre ou décembre dernier.

J'ai confié, à la suite de cela, à la direction de la planification du ministère, le soin de colliger toutes ces recommandations, d'essayer d'en tirer un tableau d'ensemble. Ce travail se poursuit puisque, évidemment, il y a aussi des travaux qui se faisaient au ministère, mais on trace déjà, à l'aide des recommandations spécifiques plutôt que des recommandations de caractère méthodologique ou général, un assez bon tableau régional des endroits où les médecins ne sont pas présents. Et il s'agit, de façon assez paradoxale, parfois, d'endroits qui peuvent se trouver à 65 milles de Québec ou de Montréal et des endroits où il y a une espèce de poche de population isolée des centres même semi-urbains où, effectivement, il n'y a aucun médecin, ce qui constitue donc un problème.

Ceci pour la première démarche qui était une démarche de recherche de consultation qui a débouché sur une série de recommandations. La deuxième démarche a consisté à rechercher une entente avec, en tout premier lieu, de façon prioritaire, la Fédération des médecins omnipraticiens, avec laquelle nous étions alors en négociation fort active durant l'année 1975. Nous avons eu d'ailleurs la satisfaction de découvrir, auprès de la Fédération des médecins omnipraticiens, une préoccupation de ce côté qui les a conduits à se mettre d'accord sur une entente de principe quant à la constitution d'un comité paritaire du ministère et de la fédération qui, dans un premier temps, s'entendrait sur les règles du jeu, c'est-à-dire s'alimenterait de cette consultation déjà faite au moins de notre côté et des points de vue de la fédération elle-même sur le sujet et recommanderait des critères, des méthodes d'intervention, etc. Dans un deuxième temps, appliquerait ces méthodes, ces critères pour désigner des médecins individuels afin de pratiquer dans des régions comme celles qui seraient désignées dans un premier temps. Cette entente de principe a été conclue vers le mois d'août 1975 et nous avons tenté, depuis quelques mois, de l'activer, de la mettre en opéra-

tion. Cependant, pour des raisons sur lesquelles je pourrai revenir tout à l'heure, la fédération semble ne pas être particulièrement intéressée à activer cette partie de l'entente de principe tant et aussi longtemps que l'entente, généralement parlant, ne sera pas terminée. C'est dommage puisqu'on pourrait faire du travail utile entre temps. Je comprends un peu, pas complètement malgré tout, mais je comprends un peu son point de vue de vouloir ne faire aucune concession quant à l'application partielle d'une convention qui n'est pas finale et qui n'est pas complète sous tous ses aspects et, principalement et quasiment, seulement sur l'aspect financier.

Troisièmement, la régie, dans la loi adoptée en 1974, se voyait confier un mandat qui était d'attribuer des bourses à des étudiants qui acceptaient une obligation de pratiquer dans des endroits désignés, les mêmes, dans le fond, dont je parlais tantôt, et ceci pour une période de temps égale à la période pendant laquelle ils recevraient une bourse inconditionnelle, c'est-à-dire non liée au revenu, donc différente en cela des bourses du ministère de l'Education. A la suite de l'adoption de la loi, une équipe de la Régie de l'assurance-maladie, avec, je crois, mais je ne suis pas certain, la participation du ministère des Affaires sociales, a fait la tournée des facultés de médecine pour sensibiliser les étudiants à l'existence de ces bourses. Nous avons été fort déçus des résultats de cette opération. Il y a deux bourses qui ont été demandées et obtenues à la suite de cette tournée. Il y a un phénomène qui s'est produit, qui était peut-être inévitable à l'époque, c'est que, pour une raison que j'ignore, les étudiants en médecine ont prétendu, du moins ceux qui ont cherché à expliquer ce refus, dans le fond, que l'impression qu'ils avaient tirée de tout cela, c'est qu'on leur demandait d'aller pratiquer à Fort-Chimo ou dans des endroits où il faut absolument être un missionnaire ou un aventurier ou un mélange des deux.

Ils ne se doutaient pas qu'il s'agissait parfois d'aller à 45 milles de Québec dans un petit coin perdu, mais quand même pas en dehors de la civilisation. Alors, ils ont été un peu effrayés par ça. D'autre part, ils n'ont pas compris qu'ils pouvaient, pour ceux qui étaient en quatrième année au moins, cumuler leur rémunération d'externe, qui est de l'ordre de $3000, avec cette bourse; il n'y avait aucune incompatibilité, ce qui leur faisait un revenu de $6000 comme étudiant, ce qui n'était pas mal et très compétitif à ce qu'ils pourraient obtenir l'année suivante au titre d'interne.

Ceci, apparemment, je ne sais pas pourquoi, n'a pas été compris et serait à l'origine de ce refus. Donc, confronté par une situation comme celle-là, je m'en suis entretenu avec le président de la régie et j'ai convenu de présenter au conseil des ministres, ce qui a d'ailleurs été approuvé, une proposition visant à majorer le montant des bourses et nous l'avons doublé, de façon à ne pas rater notre coup une deuxième fois en lésinant sur le montant; nous l'avons porté de $3000 à $6000. Ceci pour les étudiants de deuxième, troisième et quatrième années. Donc, seuls les étudiants de première année ne sont pas inclus dans ce plan et, à nouveau, cette année, une équipe a fait le tour également des facultés de médecine pour faire l'offre à nouveau de ce programme de bourses.

On y a ajouté une autre disposition permettant d'offrir une bourse forfaitaire de $15 000 pour un étudiant qui était en année terminale et qui acceptait de prendre un engagement non pas pour un an, mais pour un certain nombre d'années, pour trois ans, comme s'il avait accepté la bourse pendant les trois années antérieures, même si un tel programme n'existait pas à l'époque. C'était donc là une incitation assez intéressante. Je n'ai pas le rapport final de l'opération. On me dit que la tournée n'est pas terminée et qu'il y a déjà 20 demandes de bourses. Donc, il semble qu'on va, cette année au moins, déboucher sur des solutions, au moins partielles, à ce problème.

Il n'y a pas de doute que l'entente avec les omnipraticiens va se signer un jour et qu'il sera possible d'activer le comité paritaire qui a été prévu et qui a été accepté en principe des deux côtés. Donc, je crois que, du côté de la répartition géographique des médecins, on est à pied d'oeuvre. J'avais averti tout le monde et cette commission-ci, en particulier que la solution ne serait pas instantanée, mais je ne croyais pas si bien dire à ce moment-là. J'ai été fort étonné du refus qu'on a essuyé l'an dernier. Je suis prêt à admettre qu'il y a peut-être eu de la confusion, c'était inévitable, la première année, mais si c'est un succès cette année, on pourra très rapidement, dans le fond, combler les trous constatés parce qu'il n'y en a pas tant que ça, et, avec une cinquantaine de médecins par année, ça ne prendra pas 20 ans pour résoudre le problème, ça va aller assez vite.

M. Charron: Le problème de répartition inégale des médecins est plus sérieux quand on parle de la médecine spécialisée plutôt que de la médecine de pratique générale. Effectivement, il est possible que, le programme se développant et devenant plus alléchant au chapitre de la médecine générale, on puisse couvrir plus rapidement' enfin de façon plus adéquate, le territoire du Québec.

Mais la disproportion entre les régions, au chapitre de la médecine spécialisée, devra compter plus sur la première mesure contenue dans la loi, celle dont on a parléjes ententes avec la fédération que le chapitre des bourses ou...

Vous aviez parlé — et je conviens qu'on n'avait jamais parlé de solution miracle — à ce moment-là, d'une autre méthode qui, elle, ne pourrait être incluse dans la loi, mais dans la pratique du ministère, qui était de favoriser la pratique de la médecine par groupe comme étant un moyen d'attirer plusieurs médecins. Ce serait, au fond, presque paradoxalement plus facile d'en attirer plusieurs qu'un seul, dans une région.

Je sais que les fédérations d'omnipraticiens et de spécialistes ont leur propre système de démarches en faveur de la pratique par groupe. Quelle a été la participation du ministère à ce chapitre, au cours de la dernière année?

M. Forget: Je suis heureux que vous mentionniez cela, parce que c'est une participation qui n'a pas eu la chance de s'actualiser à cause de l'absence, de l'impossibilité de faire fonctionner ce sur quoi on s'était entendu en principe, c'est-à-dire un comité paritaire.

Il est clair qu'une des positions que nous adopterions sur le comité paritaire, s'il était question de favoriser ou d'encourager la pratique dans des endroits désignés, après s'être entendus sur les critères de désignation, serait de favoriser la pratique de groupe, en ce faisant. C'est-à-dire d'encourager une pratique de groupe comme solution au problème de pénurie de services médicaux dans certains endroits désignés, parce qu'il ne semble pas raisonnable de condamner à l'isolement un professionnel, un médecin, et lui demander d'être de garde 24 heures par jour, 7 jours par semaine, 365 jours par année, dans ces régions.

La continuité des soins, dans les endroits désignés, ne peut être assurée par un individu. Elle ne peut être assurée que par deux ou trois, selon la population. C'est un point de vue qu'on se prépare à défendre au comité paritaire et à proposer des formules, mais encore, faut-il se réunir. Evidemment, tout cela est prêt dans nos papiers, mais nous n'avons pas encore été capable d'en parler et de l'actualiser.

Assurance-médicaments

M. Charron: M. le Président, j'aimerais aborder maintenant la question de l'assurance-médicaments qui s'adresse, en vertu du régime, aux bénéficiaires de l'aide sociale et aux personnes âgées qui reçoivent un supplément de revenu garanti, soit environ les deux tiers de la population âgée du Québec, au-delà de 65 ans.

La commission sait que la régie ne négocie pas les prix, elle n'achète pas les médicaments, elle n'est qu'un tiers payeur au pharmacien auquel elle joint un montant forfaitaire pour les honoraires professionnels.

J'aimerais poser une question que j'ai posée l'année dernière, et vérifier si la position du ministère des Affaires sociales s'est modifiée au cours de l'année. Est-ce qu'on a l'intention d'étendre la couverture de l'assurance-médicaments à d'autres catégories de citoyens, prioritairement, comme nous l'avions souligné l'année dernière, à l'ensemble des citoyens de 65 ans et plus, plutôt qu'à la proportion que j'ai mentionnée tout à l'heure?

M. Forget: Le programme de médicaments, tel qu'il est conçu, est beaucoup plus un programme de soutien au revenu qu'un programme, dans une certaine mesure, de santé comme tel, dans le sens suivant. Pour les groupes que nous avons identifiés, l'achat de médicaments peut véritablement constituer un problème d'argent, un problème financier important.

Pour l'ensemble de la population, le problème des médicaments se pose sous un jour différent. Le coût moyen d'une ordonnance étant ce qu'il est, l'utilisation normale dans la plupart des cas ne représente pas, dans un budget familial, un article très important, si on excepte ceux qui sont actuellement couverts et si on excepte également ceux qui bénéficient d'un régime d'exception via les cliniques externes des centres hospitaliers, puisqu'il y a une catégorie de médicaments qui sont distribués gratuitement, sous réserve d'une charge, d'un frais modérateur de $2 par ordonnance, aux malades qui sont atteints de certaines affections chroniques. Les victimes du cancer, les victimes de la fibrose kystique, les victimes de maladies psychiatriques qui doivent évidemment recevoir une médication assez intense, assez forte, les victimes de la tuberculose, les victimes du glaucome sont couvertes de cette façon, et les médicaments leur sont distribués via les cliniques externes de centres hospitaliers.

Dans le cas de la tuberculose, c'est une pratique qui remonte à bien des années, dans le cas des maladies psychiatriques, à un peu moins de temps, mais quand même à plusieurs années et, dans le cas de la fibrose kystique et du cancer, il s'agit de développements plus récents, dans la phase actuelle, mais, malgré tout, de choses qui datent de quatre ou cinq ans au moins.

Il y a eu des extensions récentes, mais très mineures. Il reste que nous avons cherché à faire face aux problèmes financiers là encore exceptionnels qu'affrontent certaines catégories d'usagers ou de consommateurs de médicaments. Mais, parler de consommateurs de médicaments, c'est tout de suite parler de consommation de médicaments et d'abus possibles de consommation de médicaments.

Etant donné les structures actuelles de contrôle sur la consommation, d'évaluation de la consommation, je me poserais de sérieuses questions avant de généraliser un programme de médicaments sans frais contributoires et même avec frais contributoires, puisqu'il ne s'agit pas simplement d'une mesure financière. Il faut certaines garanties professionnelles. Je pense qu'on a encore passablement de chemin à faire pour vraiment pouvoir proposer un programme comme celui-là avec une certaine assurance qu'on ne contribuera pas à un problème beaucoup plus qu'à le résoudre.

Je pense qu'on a constaté, d'après certaines études qui peuvent être contestées, puisque des choses vraiment scientifiques ne sont pas très nombreuses dans ce domaine, qu'au Québec on consomme beaucoup de médicaments. Nous avons fait un effort vis-à-vis des bénéficiaires de nos programmes publics de médicaments pour instaurer l'usage d'un formulaire qui restreigne un peu les excès des efforts des vendeurs et des producteurs pharmaceutiques en exigeant que, pour qu'un médicament soit inscrit sur la liste, il fasse l'objet d'un certain "screening" sur le plan de la preuve de l'efficacité thérapeutique.

Il y a un effort nouveau qui doit être fait dans ce sens, non seulement pour les bénéficiaires du régime public, mais pour généraliser et vulgariser l'utilisation d'un formulaire qui est une garantie

pour l'usager, mais aussi pour le professionnel, à la fois celui qui prescrit et celui qui dispense l'ordonnance.

C'est dans cet esprit que nous avons cherché un nouveau président au conseil consultatif de pharmacologie, un président qui serait susceptible non plus seulement de voir à la perfection technique que de l'outil que constitue la liste de médicaments, mais d'en promouvoir l'utilisation. Nous avons cherché une personne qui ait une crédibilité professionnelle très élevée, de manière à pouvoir faire ce travail de promotion, d'éducation, dans le fond, auprès de tous les professionnels de la santé qui s'ont impliqués.

Cela explique peut-être que le poste de président du conseil est demeuré vacant depuis le mois d'octobre, alors que Mme Chevalier, qui l'occupait jusqu'à ce moment, a quitté pour devenir directrice du programme fédéral de la qualité des médicaments, le programme QUAD.

Je pense que c'est là une indication de la qualité que l'on a reconnue dans les milieux professionnels, en général, milieux pharmacologiques, sur l'excellence de son travail, puisqu'elle a désormais cette tâche à accomplir, non seulement pour le Québec, mais pour toutes les provinces. Nous avons donc été à la recherche de quelqu'un qui puisse faire franchir un nouveau pas à l'utilisation de la liste. Nous avons aussi rencontré au cours des années passées les corporations professionnelles impliquées pour les sensibiliser au problème et chercher leur collaboration dans ce problème de surconsommation. Nous avons eu plus particulièrement des discussions avec l'Ordre des pharmaciens, de manière que ceux-ci mettent en place des mécanismes qui puissent supporter le poids des responsabilités qu'on aimerait voir l'Ordre des pharmaciens assumer dans le domaine du contrôle de la médication.

Mais tant que ces développements ne seront pas mûris un peu plus, je pense qu'il serait imprudent et, pour ma part, je ne souhaite pas faire des recommandations à mes collègues du conseil des ministres pour une extension du régime tant que nous n'aurons pas fait quelques progrès sur le plan qualitatif, si vous voulez.

M. Charron: M. le Président, j'apprécie que le ministre définisse ce programme d'assurance-médicaments comme étant beaucoup plus une politique de soutien aux revenus qu'un programme de santé proprement dit. Effectivement, il faut le percevoir comme cela, d'autant plus que nous n'avons qu'à regarder le revenu moyen de bénéficiaires dudit programme pour effectivement constater qu'il s'agit de leur permettre d'affecter les sommes minces et minimes qu'ils ont déjà pour vivre chaque mois à autre chose qu'à entretenir une santé défaillante ou à tenter de corriger une santé défaillante et de la guérir.

J'ai vu quelque part qu'une statistique de l'assurance-médicaments provenant probablement de la régie disait que, d'après une analyse, quelque 40% des médicaments utilisés par les bénéficiaires de ce régime, les deux catégories de popu- lation dont nous avons parlé tout à l'heure, personnes âgées et assistés sociaux, étaient des médicaments s'adressant directement au système nerveux central. Comparaison faite avec d'autres provinces dont la voisine , cela nous pousse effectivement à réclamer, comme dans le chômage d'ailleurs, le championnat québécois pour l'ensemble des provinces canadiennes dans la consommation de tranquillisants et autres drogues semblables, parce qu'il faut bien les appeler par leur nom à l'occasion. Il n'y a pas à s'étonner, même si, comme le ministre, je soutiendrai toute politique visant à réduire la consommation abusive de médicaments, il n'y a pas à s'étonner outre mesure non plus, de l'aveu même du ministre, vu qu'il s'agit là d'une politique de soutien de revenus, à ce que ce soit le médicament le plus requis en vertu du programme, parce qu'il s'agit des personnes les plus pauvres de la société québécoise et chez qui, effectivement, l'insécurité financière peut produire des angoisses, des difficultés nombreuses au niveau cérébral, ce qui, à l'occasion, par définition même, les incite a recourir à des médicaments. Quand on a $195 par mois pour vivre, qu'on vit dans un grand centre urbain ou qu'on vit dans une région éloignée, qu'on est seul, qu'on est malade et qu'on ne voit pas le jour où en sortir, et que le faible revenu nous cantonne effectivement, comme j'en vois tellement de cas chez mes propres citoyens de Saint-Jacques, à vivre dans une maison de chambres de cinq pieds sur sept pieds, il est bien normal qu'à un moment ou à un autre, le moteur central se ressente de l'angoisse que tous les humains ont à connaître un jour ou l'autre en vivant, bien sûr, mais ce qui, pour eux, est presque une condition inévitable. Ils n'ont pas d'argent pour sortir, ils n'ont pas d'argent pour manger à leur guise, ils n'ont pas d'argent pour faire une vie normale de citoyens. Ils ont $50 par semaine, même pas, pour vivre. Ils font face à une hausse du coût de la vie semblable à celle de tous ceux qui assistent à la séance cet après-midi. Il est donc normal que, comme on dit dans le langage familier, cela trotte là-dedans et que cela trotte de plus en plus.

Effectivement, plusieurs des personnes — chaque député peut en témoigner — qui viennent à nos bureaux, à l'occasion, essentiellement pour nous demander secours afin de combattre la pauvreté qui est la leur, nous donnent — je pense que tout le monde ...quant à moi, en six ans de pratique, M. le Président, j'ai eu l'occasion de le vérifier — des signes de nervosité très évidents, en plus, évidemment, de la peur qui accompagne souvent la rencontre d'un homme politique, mais, très percevable, même si on n'a aucune formation médicale, on peut s'apercevoir que ces gens-là, sont effectivement aux prises avec une angoisse qui affecte leur santé, qui s'accompagne parfois d'une difficulté à s'exprimer, de sueurs qui accompagnent la livraison qu'ils ont à faire des difficultés qui sont les leurs.

Quand je me trouve, moi, devant ce problème, qu'est-ce que vous voulez qu'ils me donnent? Une femme me raconte toute sa situation financière;

elle est seule pour élever deux ou trois enfants. Elle me dit, après avoir raconté la difficulté à arriver avec son revenu: Vous savez, M. le député, si je n'avais pas mes pilules le soir, je me demande comment je pourrais dormir. Si je n'avais pas tel médicament qui m'est effectivement donné par le programme assurance-médicaments, je pense que je ne "tofferais pas la run", que je ne serais pas capable d'élever mes enfants normalement.

J'ai, moi-même, le problème de lui dire, parce que j'ai vraiment l'impression que cette personne se drogue ou abuse des médicaments: Est-ce que je peux même... Je ne suis pas médecin, M. le Président, mais sur le simple plan humain je peux lui dire: Madame, n'abusez pas de cela, parce que vous nuisez à votre santé, une surconsommation de médicaments fait plus de tort que de bien. Mais, lui disant de ne pas abuser, enfin, de ne pas en prendre autant qu'elle me dit en prendre, c'est que je lui dis: Livrez-vous à l'angoisse qui est la vôtre et, autrement dit, ne dormez pas toutes vos nuits.

Si, moi, j'ai le problème, j'imagine que les médecins qui ont à recommander l'utilisation de ces médicaments en vertu du programme, ont le même. Ils ne doivent pas recommander une consommation qui peut devenir abusive et nocive, mais ne doivent pas non plus l'écarter totalement, parce qu'effectivement, la personne en question ne dormira pas, deviendra hypernerveuse et peut, par la suite, affecter considérablement sa santé mentale, pour ne pas dire la santé des êtres qui l'entourent et dont elle a la charge à l'occasion.

Je n'ai pas de solution, M. le Président, parce que chaque fois que le problème s'est présenté, j'ai essayé de juger — encore une fois, je ne suis pas médecin — le meilleur conseil à donner à cette personne. Je ne puis qu'encourager les responsables de l'application de ce programme d'assurance-médicaments, tout en évitant, parce que j'en suis convaincu, de conduire sur le chemin d'une consommation abusive, à faire extrêmement attention quant à la restriction d'usage de médicaments, car cela peut effectivement nuire considérablement à la santé de ces personnes.

Il s'agit, effectivement, d'une politique de soutien au revenu. Le problème fondamental, nous en avons discuté à d'autres programmes et nous aurons l'occasion d'en discuter lorsque cette commission se réunira à nouveau, dans quelques semaines, pour entendre les assistés sociaux que nous avons invités, afin de constater, chacun d'entre nous, qu'effectivement, l'absence de revenu normal conduit, par toutes sortes de dédales, mais facilement percevable par n'importe quel esprit, à l'occasion, à une consommation abusive de médicaments.

Soins dentaires

M. Charron: M. le Président, j'aimerais aborder un autre sujet, à l'intérieur du programme d'assurance-maladie. Il s'agit de l'application du programme des soins dentaires, de la gratuité de certains soins dentaires. Les soins dentaires aux- quels ont droit les bénéficiaires de la Loi de l'aide sociale ne sont pas assurés depuis l'entrée en vigueur du nouveau règlement.

Ce qu'on a appelé un chantage fait sur le dos des assistés sociaux, cette querelle qui a accompagné la mise en vigueur de la nouvelle réglementation de l'aide sociale, le ministre a tenté de la réduire, je pense, à un simple malentendu. J'aimerais aujourd'hui, peut-être, que l'on refasse brièvement le tour de la question, parce qu'il m'est apparu, en tout cas, pour les cas des assistés sociaux, qu'il s'agissait plus d'un malentendu; il pouvait s'agir d'une disparition de droits, à l'occasion, qui leur avaient été précédemment reconnus, et j'aimerais demander au ministre, en faisant le tour de la question, s'il a posé des gestes concrets, pour que les assistés sociaux puissent bénéficier de soins dentaires adéquats. Quel est l'avenir de cette situation?

M. Forget: J'aimerais d'abord préciser que je ne me souviens pas d'avoir employé l'expression "malentendu" dans les premières déclarations faites par le porte-parole de l'Association des chirurgiens-dentistes.

Il est possible que j'aie avancé, par hypothèse, que la position de l'association, à ce sujet, devait être basée sur un malentendu, mais encore que je ne m'en souvienne pas. Il demeure qu'il m'est apparu très évident et très tôt que l'association, sur ce point, voulait tirer profit d'une prolongation, d'une seconde prolongation faite selon les mêmes formes et les mêmes modalités, la deuxième fois que la première, d'un régime pour lequel il n'y a pas de négociation. Il n'y en a jamais eu.

Le régime de l'aide sociale prévoit, en effet, que certains besoins spéciaux seront remboursés aux assistés sociaux, qu'il s'agisse des lunettes, qu'il s'agisse des dentiers, qu'il s'agisse de certaines dépenses de transport, qu'il s'agisse aussi des soins dentaires.

A l'été 1974, j'avais déjà décrété — il n'y a pas d'autres mots applicables — en vertu de la Loi de l'aide sociale, une prolongation des bénéfices auxquels les assistés sociaux avaient droit au titre des soins dentaires, une prolongation, d'ailleurs, qui portait de quatre actes à plus d'une dizaine la liste des actes qui pouvaient faire l'objet d'un remboursement.

Il n'avait pas été question, à ce moment, d'aucune espèce de négociation et d'ailleurs, quand nous changeons les règlements d'aide sociale, et que nous accordons, comme nous l'avons fait en janvier, un montant supérieur aux thanatologues pour les frais d'embaumement et d'enterrement, nous n'avons jamais négocié ces montants.

Nous avons déterminé, évidemment, d'après des informations que nous nous sommes procurées auprès d'un certain nombre de fournisseurs, le coût des services fournis et nous nous basons sur cette information pour décréter, unilatéralement, ces prix. On comprend bien pourquoi puisque, dans un régime de sécurité du revenu, il faut rembourser un tas de dépenses et, s'il fallait négocier tous ces taux, on verrait, soudainement, le gou-

vernement être dans la position de déterminer, par négociation, les taux qui seraient, par la suite, invoqués par ces fournisseurs de toutes sortes, envers leur clientèle pour dire: Voici ce que nous devons vous charger, maintenant, puisque ce sont les taux négociés avec le gouvernement.

Alors, on susciterait des conflits fantastiques pour des choses qui n'ont pas du tout l'importance qu'on veut leur donner.

Donc, c'est une pratique qui est arbitraire, qui est unilatérale, mais qui est bien justifiée dans son caractère d'unilatéralité et qui est bien connue. Elle existe depuis des années. Elle a été utilisée en 1974, encore une fois, pour étendre la couverture des soins dentaires et modifier les tarifs de remboursement, si bien que lorsqu'à l'automne dernier, nous avons, à la suite de discussions avec la régie, considéré qu'il était opportun que la régie, qui paie les professionnels de la santé, paie également les dentistes pour les soins qu'ils donnent aux assistés sociaux, nous ne pouvions pas nous imaginer que quiconque aurait à s'en plaindre.

D'une part, les assistés sociaux se voyaient épargner la visite au bureau d'aide sociale pour demander la permission de visiter le dentiste. D'autre part, le dentiste se voyait assurer d'un paiement prompt avec un minimum de formalités en utilisant les formules et les procédures qu'il connaît déjà quand il donne des soins aux enfants et on lui évitait aussi toute espèce de mauvaise créance puisque la régie paie tous ses comptes.

En plus de cela, nous majorions les taux. Nous rendions la couverture plus vaste. Quel ne fut pas mon étonnement de voir que l'Association des chirurgiens-dentistes se prévalait de cette générosité plus grande — et je ne veux pas faire de sentiment, bien sûr, on pourrait être encore plus généreux, mais on l'était plus qu'avant et c'était cela qui était important — se prévaloir de cette générosité plus grande du règlement d'aide sociale et d'un changement dans les mécanismes de paiement qui faisait l'affaire de tout le monde, y compris de ses propres membres pour nous livrer une espèce de guerre de propagande et de harcèlement tout simplement scandaleux, à mon point de vue.

On essaie de tirer profit d'une situation d'exception que l'on fait aux défavorisés dans la société en simplifiant les procédures, en éliminant le "red tape" en rendant les choses plus faciles pour les dentistes eux-mêmes. Et voici qu'on nous fait un chantage sur le dos des assistés sociaux, pour nous amener de force à négocier avec eux des taux pour une partie des services et une couverture pour une partie de nos lois pour laquelle on ne le fait pas et pour les raisons que je viens d'indiquer, qui me paraissent acceptables et valables.

Mon attitude, quand on me pousse au pied du mur comme cela, n'est pas d'adopter une attitude repentante. Au contraire, je pense qu'on s'y est mal pris du côté de l'association si on pense m'inspirer des doutes quant à l'orientation qui a été prise. J'ai rencontré à quelques reprises le porte-parole de l'Association des chirurgiens dentistes. Je l'ai assuré que les problèmes de type profes- sionnel et de couverture et de santé publique qu'il soulevait seraient examinés par un comité consultatif sur la santé dentaire, que le conseil des ministres, à ma suggestion, a d'ailleurs créé dans les semaines qui ont suivi et où l'association est représentée, devant lequel l'association peut, de sa propre initiative, soulever toutes les questions possibles pour que, dans ce forum qui regroupe les facultés de chirurgie dentaire, l'ordre professionnel, le ministère, le ministère de l'Education, enfin tout ce que vous voudrez, on me fasse des recommandations, mais je n'ai pas accepté de négocier quoique ce soit pour ce qui est de l'aide sociale avec l'association. J'ai demandé, en retour de cet engagement, de créer un comité consultatif, qu'il m'assure, d'autre part, la collaboration de ses membres pour donner des services aux assistés sociaux. Or, je prends connaissance de temps à autre d'un bilan de la situation, et c'est un bilan qui est mixte. Je dois dire à leur honneur qu'un très grand nombre de chirurgiens dentistes, après quelques moments d'hésitation, ont accepté de fournir les services et de présenter leurs réclamations à la régie. D'autres, peut-être plus travaillés par les représentants de l'association sur ce sujet, ont retourné, dans un geste symbolique, les formules de réclamation que la régie leur avait fait parvenir et s'abstiennent de donner des services autres que des services d'urgence pour les assistés sociaux. J'ai lu également les circulaires incendiaires de l'ACDQ sur le sujet.

J'espère que l'association va revenir au bon sens. Encore une fois, j'ai essayé, par des conversations privées avec l'Association des chirurgiens dentistes, de la faire revenir à de meilleurs sentiments mais je trouve inacceptable qu'un organisme qui est voué à la défense d'intérêts pécuniaires d'une profession qui n'est pas si mal traitée au Québec, fasse un chantage comme celui-là sur le dos des assistés sociaux. Je n'encouragerai certainement pas de telles pratiques en me précipitant pour changer quoi que ce soit, parce qu'il est très clair que la responsabilité pour les refus de services actuels repose entièrement sur l'Association des chirurgiens dentistes et non pas sur le ministre des Affaires sociales. Revenir sur la position antérieure, dans un faux esprit de compromis, à mon avis, ne serait qu'encourager la notion que nous avons fait quelque chose de mal au départ. Or, nous n'avons rien fait de mal au départ, nous avons cherché à aider tout le monde et on crée une espèce d'écran de fumée pour, encore une fois, des motifs qui ne sont pas dignes du groupe qu'on essaie de défendre. Je pense que cela, les assistés sociaux l'ont compris parce que c'est vers l'association qu'on a fait porter à juste titre les pressions et les plaintes. Cela, je peux en rendre hommage aux regroupements, aux associations qui se vouent à la défense des assistés sociaux d'avoir bien compris où étaient leurs alliés et où étaient leurs adversaires de ce côté.

Je sais que c'est une question pénible pour un certain nombre d'entre eux sur le plan régional; les problèmes sont concentrés sur la rive sud de Montréal, dans la ville de Joliette, à Sherbrooke,

mais, dans d'autres régions, tout va bien. Là, je ne prétends pas vous donner un tableau complet de mémoire, mais je sais que ces endroits en particulier font l'objet d'une résistance.

Peut-être que ce débat en commission parlementaire, s'il est rapporté dans les média d'information, permettra de sensibiliser par un autre canal les membres de l'association à leurs responsabilités sociales. Je ne suis pas parti en guerre contre leur association. J'espère entretenir d'excellentes relations de négociation dans les choses qui sont négociables, mais c'est là une attitude qui m'apparaît irrecavable et sur laquelle je ne peux malheureusement qu'adopter une position assez inflexible sous peine de créer de la confusion dans l'esprit des gens et de dire: Bien oui, c'était vraiment là qu'était le blâme et je ne crois vraiment pas que l'association soit justifiée de faire ça.

M. Charron: M. le Président, je ne peux qu'appuyer cette position et encourager le ministre à tenir son bout sur cette question. Lorsque la commission se réunira dans quelques semaines pour entendre les assistés sociaux eux-mêmes, nul doute qu'à cette occasion, comme vous dites, les associations d'assistés sociaux ont été particulièrement vigilants et à fort bon droit sur cette question, nous aurons l'occasion de refaire le débat. D'ailleurs, profitant de cette séance, j'aimerais dire que, lorsque nous siégerons dans quelques semaines, lorsque nous entendrons les assistés sociaux, j'aimerais beaucoup que l'association dont on parle ait le courage de venir et elle sera fort bienvenue lorsque nous discuterons de la situation des assistés sociaux. Qu'elle vienne parmi les assistés sociaux et nous l'accueillerons à son tour à la table pour défendre sa position sur cette question.

Plutôt que de procéder par ultimatum, qu'elle ait le courage de venir devant les députés de l'Assemblée, lorsque les assistés sociaux seront entendus à notre commission, pour venir dire pourquoi elle s'est opposée à cette modification de la réglementation. Personnellement, et nul doute du côté gouvernemental, si tout le monde épouse la même fermeté que celle dont le ministre vient de faire preuve, nous aurions quelques bonnes questions à lui poser. Puisse l'invitation lui être transmise.

Puisque nous parlons des soins dentaires en vertu du régime d'assurance-maladie, M. le Président, le ministre l'a rappelé tantôt, le régime couvre maintenant tous les enfants de 0 à 9 ans, je reviens chaque année avec la même question: Est-ce que le régime suivra la progression des âges et continuera au cours de l'année à suivre les enfants qui ont bénéficié de ce régime...

M. Forget: M. le Président, cette commission parlementaire se situe à une date qui est toujours tellement bien choisie qu'on peut toujours faire la primeur de l'annonce du prolongement du régime, ou presque, lors de l'étude des crédits.

M. Charron: Vous avez l'occasion deux fois, vous pouvez le faire à l'étude des crédits et un peu plus tard par un communiqué de presse.

M. Forget: C'est ça. Alors, nous allons probablement récidiver. Mais c'est effectivement une chose qui est prévue, en principe, et qui va se réaliser, qu'on annoncera officiellement bientôt.

M. Charron: M. le Président, on a remarqué, l'année dernière — je me souviens de la discussion — on avait dit que, sur les 742 870 jeunes citoyens québécois qui, en vertu du régime actuel, ont droit à une gratuité de soins dentaires, seuls 129 000 d'entre eux auraient bénéficié de ces soins. Evidemment, cela ne veut pas dire que tous les enfants ont nécessairement besoin de soins dentaires, quoiqu'à cet âge, où ils sont dans un changement de dentition, la règle puisse se généraliser. Si, effectivement, ils n'en ont pas besoin par cause de souffrance, il serait peut-être bon quand même qu'ils visitent un dentiste. On avait dit que seulement 129 000 dans les premiers six mois en avaient bénéficié.

Est-ce que le recours à ce droit a été plus attendu au cours de l'année, est-ce qu'il y a eu une différence notoire?

M. Forget: Je demanderais à M. Fortier de nous donner un exposé des statistiques sur l'utilisation du régime.

Pour l'année en cours, 1975/76, on observe environ 2 660 000 services, ce qui fait environ 6,5 services par participant.

M. Charron: Qu'est-ce que vous appelez service? Est-ce que c'est une visite?

M. Forget: C'est une visite. Un acte posé.

M. Charron: Dans une visite, il y a plusieurs actes qui peuvent être rémunérés. Ce qui ne veut pas dire que les bénéficiaires sont allés 6,5 fois pendant l'année, en moyenne, chez le dentiste?

M. Forget: Le nombre de services par participant, cela pourrait être un taux de participation de 6,5 également. Quand je dis le nombre de services par participant, cela peut comprendre plusieurs visites, comme cela peut comprendre plusieurs services dans une même visite.

M. Charron: Dans une même visite.

M. Forget: Je n'ai pas la distinction exacte.

Si vous me le permettez, si on regarde la nomenclature des dates, on voit la radiographie et l'examen buccal; cela peut se faire dans la même séance.

M. Charron: D'accord. Ma question est: Combien de jeunes, quand vous dites 6,5... Il faudrait diviser 2 660 000 par 6,5; vous l'avez probablement fait.

M. Forget: II y a un taux de participation qu'on avait observé, d'environ 40%, pour cette année.

M. Charron: 40% des enfants éligibles?

M. Forget: 40% de la population éligible avait participé, ni plus ni moins, à ce programme.

M. Charron: C'est une augmentation, par rapport à l'année dernière?

M. Forget: Si c'est une augmentation? Je vais vous le dire exactement. Il y a eu une légère augmentation.

Je crois qu'au cours de la première année, le niveau de participation était de l'ordre d'un peu moins de 30%.

La population assurée de 0 à 8 ans, cette année, en 1975/76, est de 823 700 personnes, comparativement au chiffre de 743 560 que vous avez mentionné pour l'an passé.

M. Charron: On était à quelques dizaines près.

M. Forget: A quelques dizaines près, oui. Le taux de participation, j'apporte une correction. J'ai dit que c'était dans les 40%; effectivement, c'est 49% qu'on observe.

M. Charron: Alors, c'est presque la moitié?

M. Forget: Pratiquement la moitié. Le nombre de participants, ce qui veut dire que 409 000 personnes auraient participé au régime, qui auraient obtenu des soins. Le coût moyen par participant s'établit à $39.39.

M. Charron: D'accord. Je me réjouis de voir que la participation au régime est plus élevée d'année en année. Il y a deux moyens de l'augmenter, je pense. Par la publicité à laquelle le régime peut se livrer pour rappeler inlassablement que ce service est maintenant offert à tous les jeunes Québécois. C'est donc aux parents — parce qu'il ne faut pas compter sur la responsabilité des enfants pour le faire eux-mêmes — de l'utiliser.

Est-ce qu'on a modifié, parce qu'on en avait discuté l'année dernière, la publicité du régime auprès des parents de ces enfants, pour s'assurer que la participation soit encore plus élevée?

M. Forget: Je pourrais peut-être inviter M. La-rochelle à nous faire part... Si vous voulez venir à la table, s'il vous plaît?

En ce qui touche la publicité, M. le Président, pour les soins dentaires, nous avons le jeu de la prévention qui, chaque année, est distribuée à environ 100 000 enfants, de même qu'à leurs parents.

M. Charron: A l'école élémentaire?

M. Forget: A l'école élémentaire. Et nous allons bientôt publier un dépliant d'information qui va être distribué chez les professionnels de la santé.

M. Charron: Est-ce qu'on a fait de la publicité à la télévision, également?

M. Forget: Au début, au lancement du régime. M. Charron: Plus maintenant?

M. Forget: Plus maintenant. A cause des coûts.

M. Charron: A cause des coûts. On a parlé tantôt des dentistes. Est-ce que, chez les professionnels, on rencontre encore des réticences à l'application de ce régime, qui pourraient être une des causes d'une participation améliorée d'année en année, mais qui n'est quand même pas à sa pleine capacité?

M. Forget: Le taux de participation des dentistes au programme, si c'est ce sur quoi vous vous interrogez, est passablement élevé. Il faut tenir compte qu'il s'agit d'un régime partiel, contrairement au régime d'assurance médicale, si l'on veut, et que certains dentistes n'ont jamais fait de soins dentaires pour les enfants.

D'ailleurs, il y a une certaine tendance chez les dentistes à se spécialiser, à avoir des dentistes pour enfants, des dentistes pour telle, telle et telle opération. Le taux de participation est moins significatif qu'ailleurs. Il y a effectivement, pour l'année courante, 1694 dentistes engagés, 4 désengagés, 86 non-participants, ce qui fait donc des chiffres très modestes. Le nombre des engagés a essentiellement diminué de 9 dans une année, et le nombre des non-participants a également diminué, mais de beaucoup plus. Il est passé de 131 à 86. Il y a des variations statistiques, mais ce n'est pas... Enfin, nous n'avons aucune raison de croire que la participation des dentistes n'est pas aussi complète qu'elle pourrait être. Nous n'avons aucune inquiétude de ce côté. Du moins, jusqu'à maintenant, je n'ai pas été mis au courant qu'on doive entretenir à ce sujet quelque inquiétude que ce soit.

M. Charron: M. le Président, je signalais tantôt que, dans le cas des bénéficiaires de cette partie du régime d'assurance-maladie, puisqu'il s'agit d'enfants, il faut évidemment compter autant sur la collaboration de tiers que du bénéficiaire éligible, donc des parents. Il se peut aussi, parfois à cause d'une négligence de la part des parents par qui ils ont été élevés à une autre époque, que les soins dentaires n'aient pas d'importance; s'ils n'en ont pas eu pour eux, ils devraient à tout le moins les accorder à leurs enfants, puisque c'est gratuit.

Il faudrait donc, je pense — on l'a sans doute réalisé au niveau de la régie — compter sur une collaboration des autorités scolaires également des milieux, puisqu'il est peut-être plus facile de prendre les enfants à l'école que de passer par les parents pour les rejoindre aux foyers, un peu sur le modèle de l'ancienne école où on nous amenait toute la "gang" au confessionnal, le premier vendredi du mois, pour être certain que nous faisions notre devoir de chrétien.

Est-ce que, à l'occasion, on va prendre les enfants à l'école pour ne serait-ce qu'une inspection

dentaire? Par la suite, selon ce qui aurait été vu, on pourrait avertir les parents que, suite à un examen fait à l'école, on a découvert telle et telle situation dentaire pour l'enfant et qu'il serait alors préférable que les parents bénéficient du programme. Quel est le rapport de collaboration avec les autorités scolaires?

M. Forget: On peut dire deux sortes de choses relativement à cela. Premièrement, ce qui se fait déjà qui est effectivement modeste, mais est moins modeste déjà que c'était il y a encore peu de temps; il se situe dans les cliniques dentaires qui existent dans quatre ou cinq centres hospitaliers et qui sont intensivement utilisées auprès des populations d'âge scolaire, pour la formation des hygiénistes dentaires. On procède de la façon qu'on vient de décrire en s'adressant à des écoles et en amenant par autobus scolaire des classes complètes pour non seulement des examens, mais des séances d'entraînement dans le brossage des dents, mais aussi pour le détartrage et le nettoyage systématique des dents.

On peut dépister un certain nombre de pathologies buccales qui peuvent être l'objet d'une référence et on donne des billets aux parents pour les avertir qu'on a décelé quelque chose qui demanderait une attention, que le service est gratuit et donc, qu'il n'y a pas d'obstacle.

Il y a quatre de ces cliniques qui ont été inaugurées durant la dernière année. D'ailleurs, je les ai inaugurées personnellement, parce que j'ai voulu souligner, dans la mesure de mes moyens, l'importance que j'attache au développement des services dentaires. Il y en a une à l'hôpital Sainte-Marie de Trois-Rivières, une autre à l'hôpital Honoré-Mercier, à Sainte-Hyacinthe, il y en a une au Centre hospitalier universitaire Laval, une autre à Sainte-Justine, à Montréal et une autre, je crois, au Montreal Children's.

Ces cliniques, qui comptent une trentaine de chaisses chacune, fonctionnent à longueur d'année pour la formation clinique des hygiénistes dentaires, mais réussissent à avoir passablement d'enfants grâce à cette activité. En plus, dans les départements de santé communautaire, il existe un certain nombre de dentistes et d'hygiénistes dentaires qui utilisent les équipements hospitaliers en place pour prolonger cette action préventive auprès de la population des jeunes. Ce sont les activités qui existent à l'heure actuelle. Je ne veux pas en exagérer l'importance, mais c'est malgré tout une étape nouvelle. Pour ce qui est de l'avenir et ce qui est du développement, lors de l'inauguration du programme de soins dentaires en 1974, j'avais indiqué que le conseil des ministres avait retenu à ma suggestion le principe d'un programme de soins dentaires en milieu scolaire, qui supposait, cependant, pour sa mise en route, que l'on résolve un très grand nombre de questions de programmation, d'organisation, de formation professionnelle. Je dois dire que le développement de ce côté n'a pas été aussi rapide et aussi harmonieux que je l'eus souhaité à l'époque. J'attends encore un rapport final contenant des recomman- dations sur le plan financier, sur le plan professionnel, sur les plans de distribution des services, et ceci, pour la fin de la présente année. Il y a donc des problèmes qui ne sont pas résolus et qu'il va falloir résoudre, en effet, si l'on veut avoir une accessibilité et des soins dentaires vraiment mieux accessibles à la population d'âge scolaire, puisque, lorsqu'on cite le pourcentage de 40% de participation, cela peut sembler bas, mais si l'on compare ce pourcentage à des pourcentages analogues dans d'autres programmes où les soins dentaires sont couverts, qu'il s'agisse de plans privés dans certains Etats américains ou certains programmes publics à l'étranger, en Europe en particulier, on découvre qu'à l'exception peut-être de la Suède, je crois, un taux de participation en haut de 25% est déjà un motif de satisfaction. Assez curieusement, les taux de participation sont relativement bas.

Donc, on ne peut pas s'attendre qu'un régime qui est purement facultatif, qui s'adresse à des enfants, dans un contexte social où les soins dentaires n'ont jamais été vraiment une priorité au Québec, il faut bien se l'avouer... Qu'on atteigne déjà 40% après deux ans, je trouve cela assez exceptionnel. J'ai même vu des chiffres au début de l'année qui m'ont amené à poser des questions, à savoir si on n'avait pas compté les réclamations plutôt que les enfants, puisqu'il semblait qu'on avait beaucoup de monde dans le régime en peu de temps. Cela indique, malgré tout, les limites de cette façon purement facultative d'aborder le problème. J'aimerais bien qu'on ait une façon plus dynamique de se rendre auprès de l'enfant. Encore une fois, il y a des bribes, les cliniques dentaires de formation des hygiénistes dentaires, ce plan auquel nous travaillons et dont, malheureusement, nous n'avons pas encore les éléments essentiels dont je pourrais faire état.

Le Président (M. Cornellier): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: M. le Président, je ne sais pas si le député de Saint-Jacques voudrait enchaîner sur un autre sujet.

M. Charron: Oui.

M. Bonnier: Ah bon! C'est parce que j'avais deux courtes questions sur les soins médicaux, mais, après cela, on a passé aux médicaments et tout cela. Vous m'indiquerez quand je pourrai les poser avant la fin.

M. Charron: Allez-y immédiatement.

M. Bonnier: Je voudrais savoir du ministre, dans le domaine de la médecine industrielle, quels ont été les efforts qui ont été faits dans la recherche dans ce domaine et également en ce qui regarde la formation de médecins pour la médecine industrielle. C'est une question que je pose tous les ans, mais j'aimerais savoir où on en est rendu. La deuxième, M. le ministre, si vous permettez.

Vous avez souligné que nos contributions au régime d'assurance-maladie — lors de la première question, vous avez répondu au député de Saint-Jacques — pourraient être influencées par l'état des négociations avec les médecins, omnipraticiens ou autres, mais sans souligner où cela en était rendu.

Est-ce qu'on pourrait savoir quel est l'état actuel des négociations avec les médecins?

M. Forget: Premièrement, pour ce qui est de la médecine industrielle, je vais vous faire une réponse brève, puisque c'est un sujet qui est d'actualité, mais où précisément il y a des discussions, il y a une politique en gestation, mais, où on ne trouve pas beaucoup d'impact direct sur le fonctionnement de la régie à l'heure actuelle et certainement pas sur le niveau de ses déboursés.

Il y a un principe qui existe dans le domaine de la médecine du travail, de la médecine industrielle, qui est un principe qui doit être conservé, c'est que les problèmes spécifiques de médecine du travail, c'est-à-dire les traitements ou les activités d'examen médical, de dépistage des problèmes de médecine qui sont spécifiques au milieu du travail, qui résultent soit d'une intoxication, qui trouvent son origine dans le milieu du travail ou dans un risque de maladie industrielle, comme il y en a un certain nombre, ces services-là doivent être assumés par l'entreprise. Le coût des services doit être assumé par l'entreprise, donc, ne figure pas et ne devrait pas figurer au budget d'un programme public d'assurance-maladie, mais être à la charge des employeurs, puisque ce sont des coûts spécifiques qui diffèrent d'une industrie à l'autre et qui sont inexistants dans certaines industries. Donc, il y aurait une certaine injustice à répartir tous ces coûts, de façon générale.

M. Bonnier: Peut-il y avoir une pression de la part du ministère, par exemple, pour qu'ils...

M. Forget: Justement, au plan législatif, mon collègue, le ministre du Travail, a fait un discours le 4 novembre, où il a annoncé les grandes orientations qui étaient les siennes, dans le domaine de la santé et la sécurité des travailleurs. Le comité ministériel des ressources humaines, sur lequel nous siégeons tous les deux avec quelques collègues, se penche sur le problème de la santé et de la sécurité des travailleurs et cherche à produire une politique qui intègre tous les éléments à toutes les dimensions, à la fois les dimensions d'ingénierie, d'ergonomie, de médecine d'environnement, dont il faut tenir compte pour assurer un milieu de travail sain et pour dépister les risques et y remédier dans les cas où ils se manifestent.

Donc, de ce côté-là, il va y avoir sûrement une politique gouvernementale, d'ailleurs, cela a été annoncé dans le discours inaugural et, d'ici la fin de l'année, nous aurons les éléments d'une législation de programmes et d'organisation qui permettront d'apporter des réponses et d'exercer là où c'est nécessaire — c'est malheureusement nécessaire dans un grand nombre de domai- nes — la pression, comme vient de le dire le député de Taschereau, nécessaire pour que les choses s'améliorent.

C'est au plan de l'organisation du financement de la médecine industrielle, de façon très générale; je ne peux évidemment pas aller beaucoup plus loin pour le moment. Au plan de la formation, il y a une amorce de formation de spécialistes en médecine du travail, si l'on peut dire. Il y a des cours en médecine du travail qui se donnent depuis peu à la faculté de médecine de Laval et il y en a aussi à l'Université McGill. Il y a des efforts qui se font ailleurs — à Sherbrooke et à l'Université de Montréal — pour exposer l'étudiant en médecine à cette dimension relativement nouvelle de la pratique médicale, parce qu'il y a quand même des problèmes auxquels les médecins de formation traditionnelle, si l'on veut, n'ont pas été exposés, dans leur cours de médecine, en particulier.

Les problèmes d'intoxication qui sont très spécialisés, dans le fond, nécessitent de former le sens clinique, la capacité de diagnostic. Or, c'est un aspect qui a jusqu'ici fait défaut, de l'aveu même des doyens des facultés de médecine et de ceux qui connaissent ce domaine et on cherche à enrichir le programme des facultés de médecine pour en tenir compte.

Donc, il y a du mouvement de ce côté, et je suis sûr qu'on y reviendra au cours de la présente session probablement beaucoup plus longuement.

Pour ce qui est de l'état des négociations, j'ai fait allusion, tout à l'heure, à l'état de suspension, dans le fond, des discussions avec la Fédération des médecins omnipraticiens.

De ce côté, nous avons conclu une entente de principe dès l'automne dernier, dès le mois de septembre ou, au plus tard, octobre dernier, sur la plupart des clauses normatives qui avaient été discutées depuis fort longtemps avec la fédération. Nous avons eu par la suite, quelques contacts entre leurs négociateurs et les nôtres, mais je crois qu'il y a un peu un phénomène d'attentisme du côté de la fédération puisque, sur le plan pécuniaire, qui est le seul en jeu, il y aurait des discussions extrêmement fréquentes et intenses avec l'autre fédération, la Fédération des médecins spécialistes.

De ce côté également, et ceci a été confirmé par le président de la Fédération des médecins spécialistes dans une circulaire qu'il faisait parvenir à ses membres il y a moins de trois semaines, peut-être moins de quinze jours, il y a une entente de principe également entre la fédération des spécialistes et le gouvernement, qui porte sur tous les aspects normatifs, le préambule et le tarif lui-même. Donc, il y a une entente générale au niveau des principes.

Pourquoi tout ceci ne s'est-il pas complété pour ainsi permettre le déblocage avec les médecins omnipraticiens? C'est le résultat d'un vote pris chez les médecins spécialistes le 31 mars dernier, un vote qui a été négatif et qui a porté sur un seul élément, c'est-à-dire sur l'existence, dans l'entente envisagée, d'un mécanisme de contrôle impliquant la participation de la Fédération des

médecins spécialistes, contrôle qui a pour but de s'assurer que le taux d'accroissement qui a été accepté par nos négociateurs ne soit pas dépassé dans les faits.

En effet, nous sommes convenus d'une majoration du tarif qui aurait pour effet d'augmenter le revenu moyen des médecins spécialistes de 15% en 1976 par rapport à 1974, c'est-à-dire que la moyenne du revenu des médecins qui pratiquent à temps plein, ceux dont le revenu dépasse donc $20 000 dans une année, soit de 15% plus élevé en moyenne en 1976 que cela n'a été le cas, effectivement, en 1974.

Cette condition nous est apparue essentielle, puisque, contrairement à des négociations avec d'autres groupes, nous avons l'expérience, après cinq ans de fonctionnement du régime, qu'un groupe en particulier peut s'auto-indexer en quelque sorte. Nous pourrions citer plusieurs exemples d'une percée que fait un groupe. Cela peut être un groupe relativement limité dans le tarif, ou les règles d'application du tarif, qui permet tout à coup à ce groupe de majorer son revenu par un facteur très considérable. On peut le doubler même, si tout à coup on découvre un truc ou une façon d'utiliser le tarif qui n'avait pas été envisagée. Le doubler, c'est beaucoup; mais, ce n'est pas sans précédent; toutefois, l'augmenter de 30%, 40%, ou 50%, c'est déjà plus répandu chez certains groupes. Etant donné cette possibilité, il nous apparaît un peu futile de négocier des taux d'accroissement si, dans le fond, le taux d'accroissement en question n'est qu'une espèce de plancher, n'est qu'un minimum qui peut être dépassé et pour lequel l'entente ne prévoirait pas autrement de mécanisme de correction.

Donc, nous avons consenti à hausser notre offre à 15%. C'est une augmentation sur deux ans, de 1974 à 1976, de la moyenne des rémunérations en contrepartie de l'existence d'un mécanisme de ce genre-là. Le mécanisme lui-même, il n'importe peut-être pas beaucoup de le décrire, mais seulement pour dire qu'il repose principalement sur l'intervention de la Fédération des médecins spécialistes elle-même qui, à la constatation d'un dépassement significatif, vérifiable dans un trimestre donné, dans le niveau des paiements moyens faits à un groupe de médecins, doit prendre les mesures pour modifier les règles d'interprétation, comme il lui semble approprié, de manière à respecter cette entente entre le gouvernement et elle, savoir que ce sera une augmentation de 15% et non pas une augmentation de 18%, et de le faire de manière que cela retourne à ce qui était prévu; à défaut de quoi, évidemment, il y a une possibilité d'une intervention de la part du ministre. Mais cela est mis là comme sauvegarde.

Nous anticipons que la fédération serait toujours en mesure de préciser les règles d'interprétation de manière à vivre à l'intérieur d'un taux d'accroissement donné, puisque la fédération dispose de toute l'expertise nécessaire pour connaître le problème, en connaître les causes et suggérer des moyens d'y remédier. D'ailleurs, les problèmes sont d'autant moins graves qu'on y remé- die rapidement. Si nous avions bénéficié d'un mécanisme comme celui-là, les bouleversements provoqués par le phénomène de la physiothérapie en cabinet privé ne se seraient pas développés.

Donc, ce mécanisme est important. Nous avons insisté pour l'inclure comme condition essentielle à notre capacité à offrir 15% d'augmentation sur la moyenne. C'est ce qui a fait l'objet d'un vote qui a été rejeté le 31 mars.

M. Charron: Pourquoi a-t-il été rejeté?

M. Forget: II a été rejeté, je pense, parce qu'on y voit là des implications qui n'y sont pas. C'est, je pense, malheureux que l'on ait adopté une telle attitude et je pense qu'il est encore possible, c'est la raison d'ailleurs pour laquelle les contacts ne sont pas rompus avec la fédération.

Je crois qu'on a voulu voir dans cette mesure une contradiction avec le principe de la rémunération à l'acte, c'est-à-dire au principe selon lequel chaque individu est rémunéré pour ce qu'il fait en fonction de sa productivité, si vous voulez. C'est-à-dire que c'est un certain principe d'équité ou de justice naturel, un médecin qui travaille plus doit être payé plus qu'un autre qui travaille moins. C'est, dans le fond, l'argument de base en faveur d'une rémunération à l'acte puisque que ce qui se fait dans les cabinets privés, évidemment, personne ne le contrôle sauf le professionnel lui-même. On juge qu'il faut rémunérer les professionnels pour ce qu'ils font et non pas pour ce qu'ils sont censés faire. Il y a une certaine justice là-dedans.

Maintenant, le mécanisme en question est loin de contredire l'objectif d'équité entre médecins; parce que le contrôle que nous envisageons' un contrôle qui est un autocontrôle de la fédération sur l'activité de ses membres quant à leur impact économique, ne vise pas à empêcher quelqu'un de faire deux fois plus en revenu en une année qu'il faisait en 1976, qu'il faisait en 1974, pourvu qu'il pose deux fois plus d'actes, mais vise à empêcher que la moyenne de tout un groupe subisse une majoration. Il est clair que pour les individus, le principe de la rémunération à l'acte, donc du paiement selon la productivité, pourrait jouer complètement.

Ce qu'il est plus difficile d'imaginer, cependant, c'est que l'ensemble de tous les médecins, au nombre de plusieurs milliers, produisent davantage tous au point de dépasser les 15% qui résultent d'une augmentation du tarif pour un volume donné. Pourquoi? Parce que la population du Québec ne s'accroît pas à un rythme très élevé. C'est à peu près de 1/2 à 2/3 de 1% par année et que, annuellement, on a une augmentation de l'ordre de 7,5% dans le nombre de médecins. Et le nombre de médecins ne vient pas diminuer la moyenne, mais vient augmenter la masse de toute manière et permet de donner plus d'actes, de faire plus d'actes; donc, non seulement de maintenir la qualité, mais de l'accroître, même si personne ne travaille plus fort en une année qu'il ne travaillait l'année précédente' parce qu'il y a de plus en plus

de médecins par rapport à une population relativement stable.

Donc, on ne peut pas concevoir que les 15% seraient dépassés pour la totalité des médecins, parce qu'ils travailleraient plus, parce qu'il y a, malgré tout, une population donnée et on augmente la quantité disponible de services de 7,5% par année et ceci, sans pénaliser quelque médecin que ce soit. Le seul problème qui se pose est un problème de justice et d'équité entre médecins à l'intérieur d'une masse donnée et il est possible de respecter ce principe d'équité avec une limite globale sur des moyennes de tous les spécialistes, de toute une spécialité.

Ceci n'a pas été suffisamment bien compris dans une réunion où il est peut-être difficile d'expliquer des choses techniques, la passion peut s'en mêler un peu aussi. Je pense qu'il n'est pas exclu d'envisager qu'on pourra faire passer ce message. Un contrôle global sur les masses, c'est une condition de confiance mutuelle dans une négociation. Nous aimerions bien pouvoir accorder un accroissement de revenus aux médecins, les tarifs sont les mêmes depuis 1970. Il y a eu une certaine auto-indexation; donc, ce n'est pas la fixité absolue des revenus.

Malgré tout, nous aimerions bien donner 15%, mais nous ne voulons pas nous réveiller avec 17% ou 21%, et, à voir les profils dans certaines spécialités, on connaît d'expérience la possibilité d'une explosion. On voulait avoir une garantie et ne pas l'imposer, ne pas imposer de diktats, ne pas demander à la régie de faire ces coupures elle-même, mais demander à la fédération de prendre les mesures nécessaires pour corriger un dépassement lorsqu'il se produit, de manière à vivre à l'intérieur de la masse convenue.

C'est là-dessus que nous sommes dans le moment et nous espérons que nous pourrons déboucher d'ici quelques semaines, si la fédération le veut bien.

M. Charron: M. le Président, il ne reste que quelques minutes. Sur ce sujet, est-ce que le gouvernement, suite au refus du 31 mars dernier, va modifier, à la demande de la fédération, cette partie de l'entente qui a été le point d'achoppement?

M. Forget: Suite à ce vote, il n'y a pas eu une véritable reprise des négociations. Du côté de la fédération, je crois qu'on est dans une période, comme on le dit en anglais, de "sole searching", dans une période avant un congrès général où on élira un nouvel exécutif, etc. Je pense qu'on veut laisser passer cette période de l'autre côté avant de reprendre le dialogue.

Il est bien clair qu'on ne peut pas faire des miracles dans une année où, de toute manière, tout le monde est soumis à un contrôle, en fonction de critères de lutte à l'inflation. Nous sommes allés à la limite de ce qui était permis d'envisager de rendre acceptable, en vertu des règles antiinflationnistes, et même, en forçant un peu, mais nous croyons qu'il était important d'établir ce régime de confiance entre le gouvernement et la profession en disant à la profession: On va vous accorder une augmentation, mais, de votre côté, vous allez nous assurer qu'on vit à l'intérieur d'un monde prévisible.

C'est un élément qui est très important, je pense et auquel nous tenons beaucoup. Nous ne sommes pas prêts à l'abandonner comme cela. Je pense qu'il a été surtout mal compris et qu'il nous sera possible de persuader le représentant de la fédération du bien-fondé de notre proposition.

Le Président (M. Cornellier): Le député de Frontenac.

M. Lecours: M. le Président, je pense que le problème chez les spécialistes c'est surtout un problème interne. Je pense qu'ils sont en faveur des offres du gouvernement, mais quand les pédiatres se comparent aux chirurgiens, les psychiatres se comparent aux chirurgiens, c'est là que ces gens sont mécontents. Ils ne semblent pas s'entendre entre eux pour partager la masse pécuniaire. Je ne pense pas que ce soit contre les offres du gouvernement. Ils sont d'accord sur les offres du gouvernement.

M. Forget: Je prends note des remarques du député de Frontenac. Je ne veux pas faire trop de commentaires sur les affaires internes de la fédération. Je sais qu'il y a eu des difficultés de cette nature et d'autre nature, j'espère qu'on pourra en venir à conclure ce dialogue, parce que, encore une fois, tout est réglé, sauf cela.

Dès que ce sera réglé avec les spécialistes, ce sera rapidement réglé, en suivant à peu près le même patron, avec les omnipraticiens. Je pense qu'ils ont attendu depuis quelques mois, sachant l'intensité de nos négociations depuis Noël en particulier, même depuis le début de novembre. Ils savaient qu'il n'était pas nécessaire de poursuivre en parallèle deux négociations qui auraient le même résultat ou à peu près.

Donc, c'est une période décisive et j'espère que, du côté de la fédération, on comprendra que notre but n'est pas de remettre en question des principes de justice auxquels ils tiennent, je pense, tout à fait normalement, mais qu'on veut un régime prévisible, parce que, nous aussi, il nous faut faire des prévisions. On a eu des surprises dans le passé et on n'essaie pas de leur imposer quoi que ce soit. On essaie de les faire participer pleinement à la détermination des caractéristiques du régime et de son mode d'application.

Le Président (M. Comellier): Je constate qu'il passe maintenant 18 heures. La commission devra ajourner ses travaux sine die, à moins que vous ayez le consentement unanime pour les poursuivre.

M. Forget: Je n'ai pas d'objection à les poursuivre, s'il y a d'autres questions, si l'on peut terminer.

M. Bonnier: C'est aussi bien de les terminer.

M. Charron: Avez-vous une heure?

M. Forget: Vous en avez pour une heure?

M. Charron: Oui.

M. Forget: Je n'ai pas d'objection à les terminer.

M. Charron: J'aime mieux garder en suspens ce qui reste. Nous verrons, au cours des travaux du mois de mai, s'il est important de revenir.

M. Forget: C'est comme vous préférez. Moi, je peux rester jusqu'à 19 heures, il n'y a pas de problème.

M. Charron: Jusqu'à 19 heures.

M. Forget: Enfin 19 heures ou 19 h 30, comme vous voulez. Avec le consentement unanime, je suis entre les mains de la commission moi aussi.

M. Charron: On peut continuer, M. le Président.

Le Président (M. Cornellier): Consentement unanime. Nous allons poursuivre. Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Seulement une observation. Si vous aimez donner vos statistiques pour enfants relativement aux soins dentaires, en donnant 49%, il faut tout de même tenir compte qu'un enfant naissant, ou âgé de un an ou deux ans, n'a pas besoin beaucoup de soins dentaires, je suppose bien, ce qui augmente énormément ce pourcentage, relativement au potentiel de soins à donner.

M. Forget: C'est exact. Un pourcentage, c'est un pourcentage global des enfants de zéro à huit ans.

M. Saint-Germain: Vous n'avez pas fait de pourcentage?

M. Forget: On peut soit continuer quelques minutes ou ajourner la séance tout de suite.

M. Charron: Nous ajournons la séance, M. le Président.

Le Président (M. Corneilier): Bon, étant donné un empêchement qui vient d'arriver, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 2)

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