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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 12 décembre 1978 - Vol. 20 N° 227

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 117 - Loi modifiant le Régime des allocations familiales du Québec, du projet de loi no 118 - Loi modifiant la Loi de l'aide sociale et du projet de loi no 103 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives


Etude du projet de loi no 103 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

Etude des projets de loi nos 117, 118 et 103

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, messieurs!

La commission des affaires sociales est réunie pour étudier les projets de loi 117, 118 et 103.

Sont membres de cette commission, M. Goldbloom (D'Arcy McGee) qui est remplacé par M. Forget (Saint-Laurent); M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Alfred (Papineau); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Shaw (Pointe-Claire).

Comme intervenants, les changements apportés sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Le Moignan (Gaspé) et M. Forget (Saint-Laurent) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee).

Comme rapporteur on pourrait proposer M. Gosselin. Toujours le même? M. Gravel. Donc, M. Gravel (Limoilou).

Une Voix: Cela finit à midi.

Le Président (M. Jolivet): Oui. Nous terminons à midi, ce matin, tel que prévu.

M. le ministre sur le projet de loi 117.

Projet de loi 117

M. Lazure: M. le Président, je n'ai pas de commentaires particuliers. C'est un projet de loi qui devient nécessaire chaque année pour permettre au gouvernement du Québec de fixer les montants des allocations familiales fédérales dans le cadre d'une loi québécoise, étant donné que les arrangements entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec permettent au gouvernement du Québec, comme aux autres gouvernements des provinces, de moduler, à l'intérieur d'une masse globale d'argent qui émane d'Ottawa, les allocations aux enfants selon le rang dans la famille d'une part, et selon l'âge, d'autre part.

Suite à la décision du gouvernement fédéral de réduire de 22% les allocations familiales, il nous fallait prendre une décision, à savoir si nous allions maintenir ce qui avait été développé depuis quelques années ici, sous l'ancien gouvernement et sous le nôtre, une modulation favorisant les familles nombreuses. C'est ce que nous avons décidé de faire; nous maintenons la modulation en faveur des familles nombreuses, c'est-à-dire qu'un peu plus de 22% de réduction affecte les enfants de premier rang et de deuxième rang. Par ailleurs, une réduction de moins de 22% touche les enfants de troisième rang et plus.

Voilà essentiellement le but de ce projet de loi. Nous avons un seul amendement à proposer, c'est à l'article 3. Puisque le projet de loi fédéral a été adopté ce soir ou sera sanctionné ce soir, nous proposons, à l'article 3, de dire plutôt: "La présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction.

M. Forget: Adopté. M. Lazure: C'est tout.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. Est-ce que l'article 3 avec l'amendement est adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. Le projet de loi 117 est adopté au complet. Le projet de loi 118. M. le ministre.

Projet de loi no 118

M. Lazure: Est-ce que vous avez copie de l'amendement?

Le projet de loi 118, qui modifie la Loi de l'aide sociale, vise essentiellement à reformuler, de façon plus claire et plus simple, les conditions d'admissibilité pour les bénéficiaires de l'aide sociale. Cela vise aussi, je vous le rappelle, à étendre de 30 à 60 jours, le délai accordé au plaignant pour demander la révision d'une décision. Troisièmement, cela permet aussi l'appel de la décision du ministre concernant la permission de se pourvoir en révision, à l'expiration du délai.

Enfin, il y a aussi deux points importants dans le projet de loi — nous en avons discuté lors du projet de loi en deuxième lecture — deux articles qui donnent un fondement légal à des règlements qui existaient depuis quelques années.

Le premier règlement établissait un barème inférieur pour les jeunes de 18 à 30 ans, barème qui est actuellement de $92 par rapport à $250 pour un plus de 30 ans.

Le deuxième fondement légal est donné à un règlement qui exclut les grévistes, comme n'étant pas admissibles à l'aide sociale.

Nous nous sommes rendu compte, depuis quelques années, avec certaines contestations en cour, que ces règlements n'avaient pas un fondement légal aussi solide que souhaité. C'est ce que nous faisons par cette loi, nous bonifions ce règlement, si vous voulez, nous lui donnons une structure plus solide.

Nous avons un seul amendement à proposer ici aussi. Je pense que ce serait peut-être mieux d'attendre lorsque nous arriverons à l'article 7.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je me bornerai à présenter quelques amendements à certains articles, mais je n'ai pas l'intention de reprendre ici ce qui a été dit en deuxième lecture. Je suggérerais qu'on passe à l'étude article par article.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je pense qu'on a dit le fond de l'objectif que poursuivait notre formation, je n'ai rien à ajouter à cela.

Le Président (M. Jolivet): L'article 1. M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires particuliers. M. Forget: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Assez adulte, pouvez-vous m'expliquer "adulte"? Pourquoi choisissez-vous "adulte" plutôt que "chef de famille"?

M. Lazure: C'est une notion qui, au plan sociologique, semble plus acceptable; elle n'a pas la connotation traditionnelle de "chef de famille", la connotation un peu sexiste, un peu trop favorable à l'homme plutôt qu'à la femme. C'est une expression qui est plus neutre, si vous voulez. On ne l'a pas inventée. J'imagine que le Conseil du statut de la femme se fait un peu le promoteur de cette nouvelle expression, mais on la retrouve dans d'autres projets de loi récents.

M. Grenier: D'accord.

M. Forget: Est-ce que le ministre me permettrait une question? La Commission des droits de la personne a dit récemment — je ne me souviens plus si je l'ai vu dans son dernier rapport annuel ou ailleurs — qu'elle avait préparé, tel que son mandat l'oblige à le faire, une analyse des lois des affaires sociales. Elle doit ainsi passer en revue l'ensemble des statuts, des lois du Québec. Elle a commencé par les lois du ministère des Affaires sociales, pour y découvrir tous les accrocs possibles au concept des droits fondamentaux et des libertés fondamentales. Le ministre a-t-il reçu ce rapport? J'imagine que, dans ce rapport, il y a un chapitre sur l'aide sociale. L'amendement qui nous est soumis reflète-t-il les recommandations de la commission?

M. Lazure: M. le Président, non. Je viens de vérifier auprès de Me Boudreault et on n'a pas reçu le rapport. Je sais qu'il s'en vient, mais on ne l'a pas encore reçu. Quant à cette expression, je sais qu'elle est bien acceptable auprès du Conseil du statut, et on s'attend de le recevoir bientôt.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: ... adulte en le comparant à chef de famille. Le "chef de famille" implique une personne responsable dans une famille. "Adulte" peut représenter trois, quatre ou même cinq personnes dans la même famille. Cela enlève totalement l'effet de cet article du projet de loi. Pourquoi? Parce qu'on a au moins besoin de valoriser le système familial.

M. Lazure: M. le Président, je vais illustrer par un exemple. Cela nous paraît plus équitable pour les deux, pour la femme et pour l'homme, d'avoir une expression neutre comme celle-là. Depuis quelque temps aussi, on a changé notre procédure. Les chèques ne vont pas au chef de famille seulement. Quand il y a deux adultes responsables, deux parents, quant à nous, c'est aux deux parents à s'entendre pour désigner lequel va toucher le chèque, le père ou la mère, lequel des deux adultes responsables. D'habitude, il y en a deux. Vous dites qu'il peut y en avoir beaucoup. Je ne pense pas que ce soit plus de deux, d'habitude.

M. Lavigne: Les communes.

M. Shaw: Pas seulement les communes...

M. Lazure: Dans certaines communes de Pointe-Claire peut-être!

M. Shaw: On a des familles dans lesquelles vous avez des adultes qui sont les enfants d'une famille. "Adulte'' représente quelqu'un qui a plus de 18 ans.

M. Lazure: Oui, mais on dit bien "adulte", une personne seule, ou dans le cas d'une famille, le ou les membres de cette famille autre qu'un enfant à charge. On exclut les enfants à charge.

M. Shaw: Mais si vous...

M. Lazure: Je comprends qu'il peut y avoir des adultes de plus de 18 ans qui sont encore dans la famille.

M. Shaw: C'est pour cette raison que c'est tout mélangé. Vous dites que vous voulez envoyer un chèque à une famille. A qui allez-vous envoyer ce chèque? Normalement, c'est au chef de famille. On dit que le chef de famille peut être un homme ou...

M. Lazure: Oui, mais d'un autre côté, s'il s'agit d'adulte, l'enfant de 19 ans va recevoir son chèque directement. C'est un adulte. Comprenez-vous?

M. Shaw: Peut-être qu'il n'aura pas de chèque.

M. Lazure: Ce que je veux dire, c'est que le cas que vous soulevez est hypothétique, parce

qu'il s'agit de plus d'un adulte faisant partie de la famille, habitant avec les parents, ces adultes recevront leur chèque directement à leur nom, tandis que s'il s'agit...

M. Shaw: Oui, mais c'est séparément du montant qui va être envoyé à une famille, une famille qui implique les conjoints et les enfants. Alors, ce chèque va être envoyé, soit à la mère ou au père, mais on doit démontrer que quelqu'un est le chef de famille ou est responsable de la famille, même que le mot "chef" est sexiste. Vous dites "sexiste ", mais je ne le vois pas.

M. Lazure: On leur demande de nous désigner à qui ils veulent qu'on adresse le chèque. M. Roy, responsable de l'aide sociale, peut vous donner des explications additionnelles.

Actuellement, le texte de loi nous oblige à verser de façon quasi automatique le chèque à l'homme. Dorénavant, nous allons laisser le choix au père ou à la mère de s'entendre entre eux pour désigner le bénéficiaire du chèque. Maintenant, votre exemple, s'il y a un enfant de 19 ans, s'il n'est pas aux études, il est considéré comme une personne seule et il a droit à son chèque à lui.

M. Shaw: Je le sais mais dans l'article 1, on parle des mots descriptifs. On parle ici d'adultes, nous avons changé "adulte" pour "chef de famille" qui a une raison d'être. Vous êtes en train de substituer un mot important, parce que "chef de famille" est totalement différent d'"adulte". "Chef de famille" implique une personne dans une famille alors qu'"adulte" en implique peut-être deux ou plus.

M. Lazure: M. le Président, si les deux adultes qui sont les parents s'entendent pour décider que le chef, si on veut conserver son nom — pourtant, vous ne faites plus partie de l'UN — est le père pour les besoins du chèque, ce sera le père et on va libeller le chèque au nom du père. S'ils décident que c'est la mère, ce sera la mère. S'ils décident que ce sont les deux conjointement, ce sera les deux conjointement. Il n'y a vraiment pas de quoi fouetter un chat!

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Seulement une précision supplémentaire, je pense que cette disposition est à l'effet de permettre dorénavant à la mère aussi de se prévaloir de la possibilité d'encaisser son chèque, de négocier avec son mari. On sait que dans certaines familles, il pouvait arriver que le mari reçoive le chèque et prenne une brosse et il ne restait plus d'argent pour la famille. Ce sont des cas isolés mais il y avait quand même des malaises qui pouvaient survenir par le fait que seul le mari, habituellement, était récipiendaire du chèque.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Forget: Je suis tout à fait d'accord avec la possibilité de verser le chèque à l'épouse plutôt qu'à l'époux, selon les circonstances. Il y a une autre implication possible des définitions que j'aimerais éclaircir. Dans l'ancienne définition, il était possible que la situation suivante soit couverte par la définition de famille, c'est-à-dire une veuve avec deux enfants, un de 16 ans et l'autre de 19 ans, celui de 19 ans travaillant et subvenant habituellement aux besoins de cette famille. Si je comprends bien, en vertu de l'ancienne définition, cela était traité comme une famille. Je ne sais pas à qui le chèque était payé mais peu importe, j'imagine que c'était un chèque global à la famille. Avec la nouvelle définition, l'enfant de 19 ans qui travaille n'est plus considéré comme membre de la famille. Il est considéré comme un adulte indépendant. J'aimerais savoir si, étant donné les tarifs en vigueur — je devrais savoir cela de mémoire mais je dois avouer que ma mémoire me fait défaut là-dessus — s'il y a un changement dans le montant auquel les trois personnes en question ont droit en vertu des changements dans la définition.

M. Lazure: Je vais demander à M. Roy.

A ma connaissance, une telle disposition n'a jamais été appliquée à l'aide sociale. Prenez la mère avec un enfant de quatorze ans, par exemple, et un autre de 19 ans qui travaille. La mère, avec son enfant, a toujours été jugée admissible à l'aide sociale comme famille d'un adulte, un enfant et, en aucun cas, on n'a considéré cette mère et cet enfant à la charge de celui de 19 ans qui pouvait travailler.

M. Forget: C'est curieux, parce que la définition suggérerait que la pratique était le contraire. C'était illégal de les considérer comme indépendants.

M. Lazure: C'est possible, mais cela n'a jamais été interprété de cette façon en termes de travail dans le réseau de l'aide sociale.

M. Forget: Admettons que cela se soit toujours fait comme cela illégalement et que, maintenant, cela sera fait légalement. Effectivement, y a-t-il une différence dans le montant auquel les trois personnes ont droit selon l'une ou l'autre de ces interprétations? Par exemple, une femme avec un enfant de seize ans a droit à combien? Un adulte avec un enfant?

M. Lazure: Nous supposons que celui de 19 ans ne travaille pas?

M. Forget: Non. Toujours que l'enfant de 19 ans travaille.

M. Lazure: La mère et son jeune de 14 ans auraient un montant de $357 par mois actuellement pour les besoins ordinaires.

M. Forget: Un jeune qui vit chez sa mère et qui travaille, cependant, a droit à combien?

M. Lazure: S'il travaille, il n'a droit à rien.

M. Forget: D'accord. Il faut qu'il soit chômeur. Ce que je veux dire, je pense que cela se devine, c'est qu'il ne soit pas à temps plein dans une institution d'enseignement. Il est admissible à l'aide sociale. (10 h 30)

M. Lazure: A ce moment, il peut être admissible à $253 par mois à titre de personne seule, s'il est inapte au travail, ou $92 par mois s'il est déclaré apte au travail.

M. Forget: C'est $92 ou $253, et, dans le cas où il reçoit le chèque directement, il est considéré en chambre et pension chez un membre de sa famille, il reçoit combien?

M. Lazure: Encore là, c'est $92, s'il est apte au travail ou $253, moins $85, s'il est inapte au travail.

M. Forget: Je vois. Et une famille de deux adultes et un enfant reçoit combien?

M. Lazure: C'est $147 par mois.

M. Forget: $147. Il y a clairement avantage à les considérer comme des groupes indépendants, comme ne constituant pas une famille. Il y a un avantage pour eux.

M. Lazure: C'est à l'avantage de la famille. M. Forget: Oui.

M. Grenier: Le désavantage, je pense, c'est que l'unité familiale y perd là-dedans.

M. Lazure: Pas vraiment.

M. Grenier: C'est-à-dire que vous allez me répondre que, quand on donne le droit de vote à un jeune de 18 ans, tout doit s'ensuivre. Il doit avoir droit à son chèque, il doit avoir droit d'entrer dans les banques et tout ce que vous voudrez, mais, à partir de là, le fait de ce changement va certainement donner plus d'indépendance au jeune qui est sous le toit familial, jusqu'à ce qu'il ait le droit d'épuiser son temps.

M. Lazure: Je pense que vous opposez deux concepts qui ne sont pas nécessairement contradictoires. L'indépendance d'un adulte dans une famille ne va pas nécessairement à l'encontre de l'unité de la famille.

M. Grenier: Est-ce que le jeune qui avait 18 ans et qui vivait en dehors de sa famille recevait son chèque sur demande? Est-ce qu'il l'avait à son nom ou s'il était considéré comme faisant partie de la famille? Est-ce qu'il venait récupérer son chèque dans sa famille quand il vivait en dehors? Qu'est-ce qui se produit dans ces cas-là?

M. Lazure: Tout enfant ou tout jeune de plus de 18 ans qui n'est pas aux études est traité comme une personne seule et son chèque lui est transmis à l'endroit de sa résidence. Il n'a pas à se présenter dans sa famille pour récupérer son chèque d'aide sociale. C'est une personne seule et autonome pour nous.

M. Grenier: II est considéré comme seul dès qu'il a atteint l'âge de 18 ans.

M. Lazure: Sauf s'il est aux études, bien entendu.

M. Grenier: D'accord.

M. Shaw: Un dernier mot sur le terme "adulte" au lieu d'un autre mot. Maintenant, la responsabilité de déterminer qui est vraiment le responsable dans une famille appartient aux familles et c'est une faiblesse. Parce qu'on voit souvent que, dans une famille, le père de famille est à la maison deux ou trois jours par mois. Il reçoit les bénéfices. Vous savez bien, comme le curé le sait bien, comme tout le monde le sait bien, qu'on enlève la responsabilité au ministère des Affaires sociales de déterminer qui est véritablement le responsable dans une famille.

M. Lazure: Justement, M. le Président, on laisse aux deux adultes, on laisse aux deux parents le soin de le décider entre eux.

M. Shaw: Mais est-ce qu'ils sont capables de faire cela?

M. Lazure: On pense que oui.

M. Shaw: Pourquoi reçoivent-ils des allocations du bien-être social?

M. Lazure: Oh! Ecoutez un peu!

M. Shaw: C'est une des raisons pour lesquelles ils sont...

M. Lazure: Le fait de recevoir de l'aide sociale ne dit pas que la personne est interdite à cause d'incapacité mentale ou autre.

M. Shaw: Je n'ai jamais dit cela. Mais pourquoi avons-nous besoin de donner une subvention, sans avoir le contrôle sur celui qui reçoit ces bénéfices. Il est responsable. Si on fait la comparaison avec l'ancienne description qui était véritablement une description du responsable, celui qui est habituellement le "provider" de la famille. C'est différent, le mot adulte n'est pas seulement non sexiste, mais il est non descriptif. Je crois qu'on a fait un changement de nom pour éviter des responsabilités. Si on dit, chef de famille, je crois que c'est au ministère de déterminer qui est vraiment responsable. C'est pour cette raison que la description est dans les définitions.

M. Lazure: M. le Président, souvent, le député de Pointe-Claire accuse le gouvernement d'être

trop centralisateur, de se substituer aux individus, aux entreprises. C'est un bel exemple de contradiction, parce que vous nous demandez, au gouvernement, de décider qui va être le chef de famille, le vrai "provider", celui qui pourvoit aux besoins. C'est au couple à déterminer ça, ce n'est pas au gouvernement.

M. Shaw: Vous n'avez jamais vu des situations comme celles que je viens de décrire, où le père de famille vient à la maison deux ou trois jours par mois pour venir chercher les chèques. Cela n'arrive jamais.

M. Forget: On ne pourrait pas nous donner une indication de ce qui va arriver s'il y a une plainte qui est faite à l'aide sociale, par l'épouse, par exemple, abandonnée. Est-ce qu'il n'y a pas un pouvoir du ministre, administrativement, d'envoyer le chèque à l'épouse?

M. Lazure: II existe déjà un pouvoir, je ne sais pas si c'est dans la loi ou dans la réglementation, qui permet au ministre, à la suite d'une plainte d'un des deux conjoints, de désigner un nouveau bénéficiaire au chèque.

M. Shaw: Mais vous avez un moyen de changer ça...

M. Lazure: Sur plainte seulement.

M. Shaw: Alors pourquoi... Sur plainte seulement, ce n'est pas le travailleur social qui peut décider.

M. Grenier: Sur recommandation d'un travailleur social, s'il n'y a pas entente, ce qui doit être plus fréquent, entre les deux parents. Le ministre a quand même autorité, sur recommandation, de déterminer qui des deux est le bénéficiaire.

M. Lazure: Oui, oui.

M. Shaw: Mais là, vous n'envoyez pas le chèque à un adulte dans la famille, vous envoyez le chèque à quelqu'un qui doit être décrit comme chef de famille. C'est pour cette raison qu'on a une définition dans la loi.

M. Gosselin: M. le député de Pointe-Claire, traditionnellement le chef de famille est l'homme?

M. Shaw: Pourquoi?

M. Gosselin: C'est-à-dire que dans...

M. Shaw: Non. Voilà du sexisme.

M. Gosselin: Ce que je veux dire, c'est que traditionnellement, dans l'émission des chèques, au Québec, pour l'aide sociale, quand on a un couple qui vit ensemble, habituellement, le chèque est adressé à l'homme. C'est ce que je veux dire. Actuellement, avec les nouvelles dispositions de la loi, le chèque pourrait être fait à la femme, ou pourrait être fait conjointement.

M. Shaw: Mais on sait fort bien que 50% de ceux qui reçoivent des chèques maintenant sont des familles monoparentales. C'est vrai ou non?

M. Lazure: Bien oui.

M. Alfred: M. le Président, une seule phrase.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Pointe-Claire n'a pas terminé, je pense.

M. Shaw: Je veux seulement dire que l'expression "chef de famille" est maintenant à 50% au féminin. "Head of family", en anglais, c'est facile.

M. Gosselin: Mais dans le cas des couples qui vivent ensemble.

M. Shaw: C'est seulement la moitié maintenant. C'est rendu pire que cela.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, j'aimerais mettre les membres de la commission en garde, parce que le député de Pointe-Claire veut nous faire dire des choses que nous ne voulons pas dire. Il traduit nos phrases en anglais et la traduction est une trahison pour nous. Parfois, il nous fait dire des choses que nous ne voulons pas dire.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a autre chose à ajouter à l'article 1 ou si on peut le considérer comme étant adopté?

M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: J'aurais une petite question, M. le Président. Vous allez peut-être me dire que cela revient à l'article 6 ou 7. Mais ce qui me tracasse, dans le dernier paragraphe, c'est qu'on parle d'enfants de moins de 18 ans. Si c'est un enfant qui fréquente une institution d'enseignement et qu'il a 18 ans en décembre, normalement, il serait éligible, s'il a 18 ans, à des allocations familiales. S'il a 18 ans le 1er décembre ou le 1er janvier?

M. Lazure: Quelle est la question exactement?

M. Le Moignan: Un enfant, membre d'une famille, qui fréquente la polyvalente. Il a eu 18 ans le 1er décembre.

M. Lazure: Oui.

M. Le Moignan: Maintenant, le père est gréviste, donc, il ne retire pas d'aide sociale. La famille est dans un très grand besoin. Cet enfant, du fait qu'il fréquente la polyvalente, qu'il doit se déplacer, à quel titre est-il considéré en fonction

de ce que vous dites ici, au troisième paragraphe de l'article 1?

M. Lazure: II est à charge.

M. Le Moignan: II est à charge. Mais comme la famille est débordée, avec $34 par semaine, avec quatre ou cinq enfants, il est à la charge de qui? De l'Etat ou de la famille?

M. Lazure: De la famille.

M. Le Moignan: Si la famille ne peut pas normalement le garder à l'école, puisqu'il doit se déplacer pour aller à une polyvalente tous les jours, payer son repas, etc.?

M. Lazure: Vous touchez vraiment l'article de tantôt.

M. Le Moignan: C'est que j'ai pris mes précautions. Est-ce que cela revient plus tard dans un autre article?

M. Lazure: Oui.

Le Président (M. Jolivet): L'article 1 est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

M. Shaw: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): L'article 1 est adopté sur division. Article 2. M. le ministre.

M. Lazure: Je n'ai pas de commentaire particulier.

M. Forget: J'aurais une motion d'amendement à faire pour solutionner le problème qui vient d'être soulevé par le député de Gaspé. Le problème est celui que j'ai soumis à l'attention du ministre lors de la deuxième lecture. C'est le problème de l'enfant de plus de 18 ans, qui n'est pas sur le marché du travail, qui ne travaille pas, qui est aux études, mais qui n'est pas encore parvenu au niveau collégial. Il n'est donc pas admissible au régime des prêts et bourses. Si on laisse le texte comme cela, il se trouve dans une position où il n'y a aucun programme public qui peut lui venir en aide sur le plan financier, à moins qu'il soit à la charge d'une famille et que la famille soit elle-même admissible à l'aide sociale, mais le député de Gaspé vient de souligner qu'effectivement ce n'était pas toujours le cas. Si c'est un enfant seul, par contre, un orphelin, etc., le problème demeure entier. Il me semble qu'il devrait y avoir un adoucissement dans l'article 6. Je comprends que l'objectif de l'article 6 est d'éviter qu'un enfant de plus de 18 ans qui est au niveau collégial ou universitaire puisse être admissible à la fois aux prêts et bourses et à l'aide sociale. Je pense que c'est tout à fait légitime d'empêcher ce double emploi.

Il y a un petit nombre d'enfants, enfin ce ne sont plus des enfants, de jeunes adultes qui, pour toutes sortes de raisons, soit parce qu'ils ont eu des problèmes d'apprentissage à l'école, qu'ils ont redoublé un certain nombre d'années, arrivent à 18 ans et n'ont pas encore fini leur secondaire. Ou bien ont été hospitalisés; ils ont eu un accident d'automobile très grave, et peut-être que leurs parents sont morts à cette occasion, qu'ils ont été hospitalisés pendant un an et demi, qu'ils ont perdu un an et demi, deux ans de classe, et ils arrivent à 18 ans et n'ont pas fini leur secondaire.

Si on met cela ainsi, l'article 6, on n'aura aucune solution à leur offrir. Il semble qu'il faudrait faire un amendement. C'est pour cela qu'on en a formulé un. Je pense qu'il tient compte de cette préoccupation adéquatement. Il ne faut pas se battre sur les mots. Si les conseillers juridiques y décelaient une faille quelconque, on serait fort heureux de le modifier en conséquence. Cela se lit comme suit, "Que le paragraphe 6 de l'article 2 soit modifié en ajoutant dans les deuxième et troisième ligne après le mot "fréquente" les mots de jour"; et en ajoutant dans les deuxième et troisième lignes après les mots "enseignement", les mots "collégial et universitaire".

Il y a un deuxième problème là-dedans qu on essaie de résoudre. Je vais vous l'expliquer tout à l'heure.

Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "6. L'aide sociale ne peut être accordée à une personne seule qui fréquente de jour une institution d'enseignement collégial ou universitaire ou à une famille dont un adulte fréquente de jour une institution d'enseignement collégial ou universitaire, sauf lorsque cette aide est nécessaire pour éviter que cette personne seule ou cette famille ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour la santé ou risque de la conduire au dénuement total".

Il y a un premier aspect, qui est une personne seule qui fréquente de jour une institution d'enseignement collégial ou universitaire. C est pour exclure, bien sûr, ceux qui sont admissibles aux prêts et bourses mais permettre de rendre admissibles à l'aide sociale ceux qui fréquentent une école secondaire.

Pour ce qui est des mots "de jour" qui reviennent là-dedans, c'est pour permettre d'accomoder des personnes qui sont des adultes qui fréquentent des cours du soir. Souvent, pour ces adultes, c'est la seule forme qui soit véritablement acceptable. Ils sont un peu embêtés daller dans des écoles, des institutions d'enseignement a d'autres moments que ceux-là à cause de la disparité des âges, à cause peut-être de certaines activités qu'ils peuvent avoir le jour. Il peut s agir de personnes handicapées qui sont dans un programme de réadaptation physique ou autre qui leur interdit la fréquentation de jour. (10 h 45)

Donc, on va avoir des gens qui sont dans des cours du soir, des adultes qui sont dans des cours

du soir. Je pense que les statistiques sur l'obtention des prêts et bourses pour les adultes à des cours du soir, cela ne doit pas être trop impressionnant. Cela doit être assez difficile. Cela ne vise peut-être pas beaucoup de gens, mais j'ai l'impression qu'il peut y avoir des cas très difficiles, très embarrassants. Il ne faudrait peut-être pas refermer la porte aussi juste que cela. Cela se justifie sans autre discours. Il me semble que c'est un adoucissement à la règle que le ministre propose.

Le Président (M. Jolivet): Pour les besoins de la cause, j'accepte l'amendement comme étant recevable.

M. Lazure: M. le Président, je pense que c'est une bonne suggestion. Les cas qui seraient couverts par cet amendement sont plutôt rares, mais il y en a sûrement. Souvent, effectivement, cela pourrait toucher des personnes handicapées, dans le sens large du terme, que ce soit physiquement ou mentalement. Il faut dire qu'elles pourront dorénavant être aidées par l'Office des personnes handicapées qui a le pouvoir, de par la loi, non seulement d'offrir des plans de service, mais d'offrir une aide financière. Quoi qu'il en soit, je suis favorable à cet amendement. Cela l'améliore.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: II ne faudrait pas oublier d'ajouter aussi ceux qui sont aux cours du soir... Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'ajouter aussi à cet amendement ou d'insérer à cet amendement que ceux qui fréquentent les cours du soir et qui sont inscrits à plus de trois cours deviennent des étudiants à temps plein?

M. Lazure: On peut poser la question au proposeur.

M. Forget: Excusez-moi.

Le Président (M. Jolivet): On posait la question à savoir si on ne devrait pas ajouter les gens qui suivent des cours du soir, compte tenu que, quand ils suivent plus de trois cours, ils sont considérés comme étudiants à temps plein.

M. Forget: C'est implicitement inclus, parce qu'on dit: "ne peuvent recevoir l'aide sociale ceux qui — à moins que je comprenne mal la question — sont au collège ou à l'université de jour". Ce qui veut dire que peuvent recevoir l'aide sociale ceux qui ne sont pas au collège et à l'université, mais qui sont des étudiants à temps plein, donc ceux qui sont au niveau secondaire — je pense qu'il n'y a pas d'autres possibilités — et ceux qui sont des étudiants le soir.

M. Grenier: A temps plein?

M. Forget: Oui. S'ils sont étudiants le soir à temps partiel, de toute façon, l'exclusion ne s'applique pas, parce qu'on dit que ce sont ceux qui sont des étudiants à temps plein qui ne peuvent pas recevoir l'aide sociale. S'ils ne sont pas des étudiants à temps plein, ils peuvent recevoir l'aide sociale. S'ils sont des étudiants à temps plein le soir, alors l'exclusion ne s'applique pas non plus.

M. Grenier: Oui, c'est d'accord.

M. Forget: Je pense que cela tient compte de votre objection.

M. Lazure: S'ils ne sont pas admissibles aux prêts et bourses, ils tomberaient dans cela, ils seraient couverts par cela, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Jolivet): D'autres questions sur l'amendement? L'amendement est adopté. Y a-t-il des questions sur l'article 2 de la part du député de Mégantic-Compton? On était rendu au député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Non, cela va.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: J'ai un amendement qui est très important, je crois. J'appuie la motion d'amendement du député de Saint-Laurent, mais je crois que la base de ce projet de loi et même le projet de loi sur l'aide sociale au complet retombe sur l'article 6. C'est l'obligation du gouvernement et c'est clair et net. Je ne vois pas pourquoi on enlève cet alinéa. L'alinéa dit: L'aide sociale comble les besoins ordinaires et spéciaux d'une famille ou personne seule qui est privée de moyens de subsistance. Cela est la base du projet de loi. Si on l'enlève, on enlève l'obligation du gouvernement d'agir dans les cas spéciaux. A mon avis, on a besoin de garder cet alinéa et le faire suivre des autres alinéas du même article. Je propose comme amendement qu'on garde l'ancien alinéa 1 qui était: L'aide sociale comble, etc., et le faire suivre des nouveaux articles 2, 3 et 4. Est-ce que le ministre peut m'indiquer pourquoi vous avez besoin d'enlever cet article, comme principe?

M. Lazure: La forme de l'aide est déjà prévue dans les articles 2 à 5 de la loi existante voulant que les besoins sont...

M. Shaw: Cela est la forme de l'aide mais ce n'est pas l'obligation de l'aide. Cela est totalement différent. Cela est une obligation de l'Etat envers l'individu.

M. Lazure: II me semble bien clair par l'article 6 actuel que l'aide sociale continue à couvrir les besoins ordinaires et spéciaux.

M. Shaw: Oui, mais cela n'est pas dans la loi. La loi indique ici que si vous pouvez démontrer comme individu que vous avez un besoin spécial, le gouvernement doit agir, mais si on enlève cet article, on enlève cette obligation du gouvernement. C'est à la base de ce projet de loi. Cela est un gouvernement qui prétend avoir une conscience sociale et si on enlève cela, on enlève l'obligation d'agir du gouvernement. Cela est une vérité. Cela ne change pas beaucoup le sens du projet de loi et cela garde un principe, parce qu'avec cet alinéa, les cas dans lesquels il y a des circonstances différentes qui ne sont pas incluses dans les autres règlements peuvent être au moins pris en considération.

M. Lazure: M. le Président, l'article 3 actuel n'est pas supprimé. Il va demeurer dans I'aide sociale et il dit: L'aide est accordée sur la base du déficit qui existe entre les besoins d'une famille ou d'une personne seule et les revenus dont elle dispose.

M. Shaw: Je ne vous comprends pas avec votre main sur le... Est-ce que vous pouvez...

M. Lazure: D'accord. L'aide sociale est accordée sur la base du déficit qui existe entre les besoins d'une famille ou d'une personne seule et les revenus dont elle dispose. C'est ce principe qui établit le droit à l'aide sociale. L'aide est accordée et le ministre est obligé de l'accorder; ce n'est pas une discrétion administrative.

M. Shaw: Mais pourquoi enlevez-vous ce premier alinéa?

M. Lazure: On ne change pas l'article 3 de la Loi de l'aide sociale qui demeure tel quel.

M. Shaw: Est-ce que vous en avez une copie? M. Lazure: Malheureusement non. L'article 3?

M. Shaw: Non, l'article que vous venez de citer.

M. Lazure: C'est l'article 3 de la Loi de l'aide sociale.

M. Shaw: Mais "est accordé" — "shall be" — cela est un gros mot en anglais. Je ne sais pas si c'est différent en français: L'aide sociale est accordée sur la base. Il n'y a pas d obligation.

M. Lazure: Dans la version française: L'aide sociale est accordée, c'est vraiment impératif. Le ministre n'a aucune discrétion. C'est aussi fort que "shall be".

M. Shaw: "Shall be" n'est pas fort. "Must be", cela est différent.

M. Lazure: "Shall be" est assez fort.

M. Shaw: Mon conseiller juridique m'a avisé que l'obligation de donner des prestations dans les cas d'urgence est impliquée dans le premier alinéa de l'article 6 de la loi actuelle: "L'aide sociale comble les besoins..."

M. Lazure: Ce n'est certainement pas notre intention d'enlever cette obligation, cette règle et, sans se chicaner sur les mots, ce n'est pas mon conseiller, ce sont mes conseillers juridiques qui nous affirment que c'est maintenu. La règle est maintenue. On ne laisse pas tomber cette règle.

M. Forget: II faut dire que, sans vouloir faire de la technicité juridique, on pourrait plaider la cause du député de Pointe-Claire un peu malgré tout. Il reste que l'article 3 donne un aperçu des critères qui seront utilisés pour déterminer le montant de l'aide.

Tous les articles que l'on substitue aux articles 6 à 12 sont formulés de façon dans le fond, assez restrictive. Ce sont des façons de restreindre la portée de l'obligation générale, mais l'article 6, tel qu'il existait antérieurement, était quand même impératif. Il avait un principe général: "L'aide sociale comble les besoins ordinaires et spéciaux d'une famille ou personne seule qui est privée de moyens de subsistance."

Il y avait là un principe qui est perdu. On pourra dire: Quelle est l'implication pratique de cela? Il est peut-être difficile pour nous de l'envisager. Il faudrait peut-être, évidemment, être en face d'une décision d'un tribunal pour vraiment en saisir l'implication. Il y a quand même quelque chose dans cet article 6 qui disparaît.

Je ne suis pas persuadé que cela soit contenu dans l'article 3 parce que les deux articles coexistaient avant et ils vont cesser de coexister. Il y avait quelque chose. Il y avait un sens dans cet article 6. Je suis sûr qu'il n'était pas vide de sens. Peut-être qu'une recherche nous permettrait de voir dans les décisions de la Commission des affaires sociales quel sens on lui a donné, mais c'était l'article le plus impératif et le plus généreux, dans le fond, de la loi. C'était cela. C'était l'ordre donné par le législateur à l'administration de l'aide sociale de faire quelque chose lorsqu'il y avait un déficit dans les moyens de subsistance.

Je ne sais pas. Notre conseiller juridique nous a aussi alertés de cette disparition. Maintenant, personne n'est capable de mettre exactement le doigt sur la conséquence, mais on est un peu mal à l'aise de le voir disparaître. Comme il n'y avait pas plus d'argumentation que cela, je l'aurais laissé passer, mais comme le député de Pointe-Claire l'a mentionné, je crois qu'il faut le souligner aussi.

M. Lazure: Encore une fois, ce n'est pas dans l'esprit de ce projet de loi, de ces modifications, de changer les règles du jeu.

M. Shaw: ... de garder le...

M. Lazure: Si vous permettez... On nous a dit que cela n'était pas nécessaire de le garder

comme cela, que l'article 3 qui est maintenu, qui a été lu tantôt: "L'aide sociale est accordée sur la base du déficit qui existe entre les besoins d'une famille ou d'une personne et les revenus, etc.." était suffisant.

Il n'y a peut-être pas d'inconvénient non plus, même si c'est répétitif, à garder cet énoncé. Au fond, c'est un énoncé de principe en même temps qu'une obligation plus formelle.

M. Boudreault.

On considère le concept reproduit à l'article 6 comme étant contenu dans l'article 3, dans la formulation de l'article 3 et, comme tel, inutile à retenir.

M. Shaw: On a l'évidence maintenant que les conseillers juridiques du Parti libéral et mes conseillers juridiques, qui sont beaucoup impliqués dans l'aide sociale, ont pris connaissance de ce changement. Alos, s'il y a ce point de vue, le gouvernement n'est-il pas prêt à garder une phrase d'une vingtaine de mots qui va nous rassurer qu'on enlève pas le principe du projet de loi. (11 heures)

M. Lazure: Pour essayer d'arriver à une entente là-dessus. Encore une fois, il n'y a pas de motif mystérieux. C'était simplement au plan technique. On disait que c'était superflu, que ce n'était pas nécessaire. On va vérifier s'il y a inconvénient, il n'y a probablement pas d'inconvénient à laisser, même si c'est déjà couvert par l'article 3 de la loi actuelle, je ne vois pas d'inconvénient, personnellement, à laisser le libellé de l'article 6.

Une Voix: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): Pour les besoins de la cause, à ce moment, est-ce qu'on accepterait que le ministre revienne au moment de la troisième lecture avec un amendement sur la question, si c'est nécessaire?

M. Forget: Comme le libellé est déjà connu, on peut peut-être l'insérer à la place et renuméroter tout de suite.

M. Lazure: Le libellé de la loi actuelle.

Le Président (M. Jolivet): Donc, on pourrait le faire immédiatement en disant que le libellé actuel de l'article 6, qui se lit, dans la loi actuelle: L'aide sociale comble les besoins ordinaires et spéciaux d'une famille ou personne seule qui est privée d'un moyen de subsistance". Il reviendrait dans le texte du projet de loi no 118 comme étant l'alinéa 6a.

M. Forget: Non, il ne serait pas nécessaire de le faire comme cela, M. le Président. Il s'agirait de dire qu'on ne remplace pas l'article 6. Au lieu que l'article 2 se lise: Les articles 6 à de ladite loi sont remplacés par les suivants, il faut dire: Les articles 7 à 11 de ladite loi sont remplacés par les suivants.

Le Président (M. Jolivet): Cela prendrait une nouvelle numérotation des articles.

M. Forget: C'est cela: 6 deviendrait 7 et 7 deviendrait 8.

M. Lazure: C'est-à-dire qu'il faut quand même laisser ce sur quoi on s'est entendu tantôt, la modification à 6: L'aide sociale ne peut être accordée à une personne...

Le Président (M. Jolivet): Cela deviendrait 7. M. Lazure: C'est cela.

M. Forget: Cela deviendrait 7. Ils seraient tous décalés d'un rang.

Le Président (M. Jolivet): L'amendement, si on l'accepte, serait le suivant: A l'article 2, on lirait ce qui suit: Les articles 7 à 11 de ladite loi sont remplacés par les suivants et les numéros 6, 7, 8, 9, 10 redeviendraient 7, 8, 9, 10, et 11. Cela va?

On avait 6 à 11. Le 11 est disparu, puisqu'il n'est pas là. On reviendrait donc à l'ancienne numérotation. Les articles 7 à 11 sont remplacés par les suivants et là, la renumérotation se ferait en conséquence.

M. Shaw: C'est cela.

Le Président (M. Jolivet): Cela va?

M. Lazure: Avez-vous une remarque à ajouter?

Le Président (M. Jolivet): Cela va?

M. Lazure: II semble que oui, dans la mécanique...

Le Président (M. Jolivet): L'amendement du député de Pointe-Claire par le fait même, tel que présenté, serait donc — je le relis pour les besoins — : L'article 2 se lirait maintenant comme suit: Les articles 7 à 11 de ladite loi sont remplacés par les suivants: et, avec la renumérotation des articles qu'on a dans notre projet de loi, 6 deviendrait 7; 7 deviendrait 8; 8 deviendrait 9; 9 deviendrait 10; et 10 deviendrait 11. Cela va?

Sur l'article 7 qui est maintenant 8, M. le ministre avait un amendement.

M. Lazure: Oui, l'amendement a été distribué. Essentiellement, cela vise à nuancer quelque peu l'article 7 actuel. Il y a de rares cas où le chef de famille, pour revenir à l'expression du député de Pointe-Claire, tout en travaillant, étant donné que ses revenus sont très, très bas, et compte tenu de ses besoins, peut être admissible à l'aide sociale. Il y a eu de rares cas où... On veut que, même en temps de grève, cet individu et sa famille continuent à être admissibles à l'aide sociale. C'est pour cela qu'on apporte cette nuance et cet amendement, oui, au taux qu'il recevait avant le début de la grève. Vous comprenez? L'amendement se lirait comme suit: L'aide sociale ne peut être accordée à une personne seule qui, au sens de la loi 71 sur l'assurance-chômage, a perdu son

emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif ou à une famille dont un adulte a perdu son emploi dans les mêmes circonstances. Et considéré avoir perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif, l'adulte qui, pour ce motif, ne pourrait être ou n'a pas été déclaré admissible par la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada" — je souligne ici une petite modification; l'appellation de la commission de l'assurance-chômage a été modifiée récemment pour la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada — "à des prestations en vertu de la loi 71 sur l'assurance-chômage. "Toutefois — c'est là la nuance — l'aide qui était déjà versée à cette personne seule ou à cette famille et qui se serait poursuivie, même si l'adulte avait conservé son emploi, peut continuer de lui être versée dans la même mesure et aux mêmes conditions. "

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, on arrive ici à un problème qui a fait couler déjà passablement d encre puisqu'il s'agit là de l'insertion dans la loi d'une disposition qui apparaît déjà au règlement, mais dont la légalité stricte, le légalisme, devrais-je dire, a été mis en doute par des décisions récentes. Sur le fond, je crois qu'il ne peut pas y avoir de désaccord, c'est-à-dire sur le fait que l'aide sociale ne peut servir de fonds de grève, ce serait une situation absolument aberrante que d'utiliser laide sociale à titre de fonds de grève, ça modifierait profondément les rapports de force et ce serait susceptible de prolonger d'ailleurs considérablement les conflits de travail.

Donc, la pratique immémoriale de I aide sociale, les règlements adoptés depuis 1976, tout comme cet amendement, sont la seule voie qu'il est possible d'adopter, je crois. Cependant, on peut se poser la question, à savoir si la rigueur avec laquelle on fait intervenir cette règle n'est pas telle que des adoucissements ne pourraient être envisagés. En effet, même lorsque la pratique administrative s'est établie, des exceptions demeuraient possibles, parce qu'on se trouvait en face d'une famille dans une situation de dénuement total. Comme il n'y avait pas d'interdiction législative, il était possible aux agents d'aide sociale d'user d'une certaine discrétion dans ces questions.

Je n'ai pas de renseignements précis, à savoir jusqu'à quel point cela a été fait, mais je suis sûr que cela a été fait à certaines occasions. Si on introduit une interdiction rigoureuse dans la loi de faire quelque paiement que ce soit à des grévistes, quelle que soit leur situation, quels que soient les dangers que ça peut constituer pour leur famille, sur le plan du simple maintien de la vie, je crois qu'à ce moment-là, on adopte, dans l'administration de l'aide sociale, une attitude peut-être indûment rigoureuse et, à proprement parler, excessive.

Dans cet esprit, nous avons préparé un amen- dement, que j'ai d'ailleurs annoncé lors de mon intervention en deuxième lecture, qui permet de donner quelque marge de manoeuvre à I administration de l'aide sociale pour évaluer des cas pénibles de grévistes qui sont dans des circonstances telles que cela constitue un danger pour la santé ou que ça risque de les conduire au dénuement total.

La formulation de l'amendement que nous avons dû modifier à la toute dernière minute, puisque c'est un texte que !e ministre vient tout juste d'amender lui-même, se lirait comme suit: "Que le premier alinéa du paragraphe 7 de l'article 2 soit modifié en ajoutant, dans la cinquième ligne, après le mot "circonstances", les mots sauf lorsque cette aide est nécessaire pour éviter que cette personne seule ou cette famille ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour la santé ou risque de la conduire au dénuement total". L'alinéa amendé se lirait comme suit: "7. L'aide sociale ne peut être accordée à une personne qui a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif ou à une famille dont un adulte a perdu son emploi dans les mêmes circonstances, sauf lorsque cette aide est nécessaire pour éviter que cette personne seule ou cette famille ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour la santé ou risque de la conduire au dénuement total ".

Je pense qu'il y a une référence à la loi "Statuts du Canada" que je n'ai pas incluse en lisant mon amendement, mais qui devrait être là.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lazure: Je dois dire que depuis le 1er janvier 1976, on m'informe qu'il n'y a eu aucun cas discrétionnaire, aucun.

Ce que le député de Saint-Laurent propose, effectivement, c'est de revenir au statu quo ante, revenir à I ancienne formule, qui a été changée, à sa demande, si je comprends bien, vers la fin de 1975, pour nous amener au règlement actuel de 1976.

Là, je me réfère au règlement actuel 2,11. "L aide n'est pas accordée ' — c est très catégorique — "à un ménage qui comprend un adulte visé par le paragraphe b) de l'article 1,04. Si on va à l'article 1,04b: "est considéré — pour les cas où on n'accorde pas l'aide — abandonner un emploi, au sens du même article, l'adulte qui, pour avoir perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif, au sens de la loi de 1971 sur l'assurance-chômage, n'est pas admissible à des prestations en vertu de cette loi. "

Si je comprends bien, le député de Saint-Laurent qui avait des raisons valables en 1975, de modifier le règlement — depuis le 1er janvier 1976, aucun cas d exception n'a été fait — il faudrait vraiment que vous nous expliquiez, M. le député, pourquoi ce revirement important dans votre position.

M. Forget: Je ne me référais pas au règlement, bien sûr. Le règlement, je l'ai dit au début de mes

remarques, énonce le même principe général, depuis le 1er janvier 1976. C'est tout à fait exact. Maintenant, on veut l'incorporer dans la loi.

Quant au principe général, je n'ai absolument aucune hésitation à l'appuyer à nouveau. Comme principe général, il serait invraisemblable ou inimaginable que l'aide sociale serve de fonds de grève.

Maintenant, il faut savoir si c'est une règle qui devrait s'appliquer de façon absolue, dans tous les cas, sans exception, quelles que soient les circonstances, ou si ce devrait être une règle qui souffrirait, à l'occasion, des exceptions.

Le ministre me dit que depuis janvier 1976, il n'y a jamais eu d'exception. C'est possible. Je dois vous avouer que là-dessus, je n'en sais rien. Mais si on se réfère à la période antérieure au 1er janvier 1976, selon les anciens règlements, l'impression que j'ai — on pourra me dire que je suis mal informé — et que j'ai toujours eue, c'est qu'il n'y avait pas une telle règle générale. Il y avait une pratique administrative à l'aide sociale, à l'effet que de manière générale et systématique, l'aide sociale n'était pas accordée aux grévistes.

Mais, comme il n'y avait, à ce moment-là, ni disposition légale, ni disposition réglementaire pour l'interdire, il y a eu des circonstances, avant le 1er janvier 1976, où le problème s'est posé et où il y a eu une réponse positive.

Je me dis que ce degré de flexibilité, mais avec la protection d'un principe clairement affirmé dans le règlement ou dans la loi, devrait peut-être être retenu. A la lumière de l'expérience, à la lumière d'un certain nombre de décisions de la Commission des affaires sociales qui sont intervenues depuis le 1er janvier 1976 dans des cas similaires, il est fort possible que j'en serais venu à cette conclusion à l'expérience du règlement. Il est possible qu'on ait réagi, de façon excessive en voulant fermer la porte, par ce règlement, mais la fermer de façon hermétique. Question qui se pose: Doit-elle être fermée hermétiquement? Le ministre là-dessus peut nous donner des indications de son expérience à lui depuis deux ans. Ce serait sans aucun doute valable. (11 h 15)

M. Lazure: Seulement un autre commentaire. C'est une question sur le fond. Je serais très sympathique et très favorable, de prime abord, à l'amendement proposé par le député de Saint-Laurent.

Cependant, on en a discuté longuement. Si on se reporte à avant 1976, l'exception devenait la règle en cas de conflit prolongé. Ce qui arrive c'est qu'en cas de conflit le moindrement prolongé, un conflit de travail, disons une grève de plus de deux mois, à peu près tout le monde, tous les grévistes et leur famille pourraient être admissibles, selon ce concept d'une menace de dénuement total, pour n'importe quelle grève qui se prolongerait le moindrement. Cela forcerait nos fonctionnaires, nos agents de l'aide sociale à devenir passablement arbitraires. On aurait à interpréter dans des cas particuliers. Dieu sait dans quelles conditions pénibles ce serait interprété, surtout dans une petite localité où vous avez un conflit de travail qui dure depuis longtemps. Si on acceptait un amendement comme celui-là, vous mettriez une responsabilité énorme sur les épaules d'un agent d'aide sociale. Il aurait à juger si, effectivement, le dénuement total est en cause ou encore la santé, la santé mentale ou la santé physique, parce que cela ne dit pas quelle santé. Tout en étant bien sympathique à l'objectif de l'amendement, dans son application, cet amendement devient inacceptable, parce qu'il donnerait si vous voulez, un caractère arbitraire aux décisions de l'aide sociale. D'autre part, nous continuons à croire que ce que vous reportiez tantôt comme ayant été des exceptions possibles, avant 1976, dans l'ancien règlement, ce n'étaient pas vraiment des exceptions. Dans le cadre d'un conflit de travail prolongé, cela devenait la règle générale. C'est dans l'application qu'on voit des problèmes presque insurmontables.

M. Forget: Oui, il ne faut pas minimiser les problèmes que n'importe quel pouvoir discrétionnaire cause. J'ai l'impression que vous avez raison de dire que cela devenait la règle générale. Il faut bien voir aussi le contexte dans lequel toute cette évolution s'est faite. Vous aviez, au début des années soixante-dix, un mouvement de plus en plus articulé des ADDS et d'autres groupes, des avocats populaires, l'aide juridique elle-même qui a sensibilisé les bénéficiaires potentiels de l'aide sociale à des droits qu'ils pouvaient exiger en vertu de l'article sociale. C'est un processus qui a été graduel, qui allait en s'amplifiant. Tout à coup, on découvrait, quelqu'un découvrait dans l'aide sociale une nouvelle avenue possible de revendications et d'appui financier. Avec les statistiques mensuelles; on voyait presque grossir à vue d'oeil tout à coup un genre de besoin ou un genre de phénomène qui, jusqu'à ce moment-là, était resté inconnu ou non articulé. Devant des phénomènes comme cela, on est porté à dire: II faut mettre un frein à cela, cela devient incontrôlable. Bien sûr, c'est comme cela qu'on peut expliquer des choses comme le règlement de 1976. Cela n'a pas de bon sens, on est en train de financer tous les grévistes. C'est presque émotif comme réaction.

Il faut bien voir qu'à la fois les bénéficiaires et les administrateurs de l'aide sociale étaient dans un vacuum juridique, c'est-à-dire qu'il n'y a rien qui l'interdisait. Les pressions étaient là de plus en plus fortes et on n'avait pas de raison concrète de dire non. Je pense que cette expérience-là, si on la revivait maintenant, dans le contexte d'une affirmation de principe claire, que, de façon générale, lors d'une grève, il ne faut pas regarder du côté de l'aide sociale comme fonds de grève. C'est la règle générale qui a, de façon circonscrite, dans des cas de misère humaine indéniable... Je ne sais pas comment on la définirait. Peut-être que la définition qu'on suggère là, qui s'inspire d'une définition traditionnelle de l'aide sociale, n'est pas celle qui est appropriée. Il faudrait peut-être y réfléchir.

Il est difficile d'imaginer un système d'aide sociale qui mérite vraiment ce nom et qui refuse

de regarder les circonstances individuelles, même si on souscrit tous à la notion que l'aide sociale n'est pas le fonds de grève de tous les travailleurs du Québec. Bien sûr, ce n'est pas cela. Si quelqu'un le prétendait, je pense qu'il aurait un drôle de fardeau de preuve à relever pour le démontrer. Je ne sais pas comment on peut dire qu'on a un système d'aide sociale quand même humain et raisonnable, et dire: Dans telle circonstance, pas tous les travailleurs d'une entreprise, mais un certain nombre d'entre eux, peut-être parce qu'ils sont à une phase de l'évolution de leur famille où ils n'ont pas pu accumuler d'économie, etc..

Cela ne viserait pas nécessairement tous les travailleurs dans une même grève pour une même entreprise, mais, dans certains cas, il va y avoir des causes pénibles, plus pénibles que d'autres et il s'agirait de trouver des critères. Je suis d'accord avec le ministre qu'il ne faudrait pas que ce soit trop arbitraire, parce qu'à ce moment, on ne saurait plus ce que cela veut dire. J'aimerais mieux, dans la réglementation, essayer de cerner, au moins expérimentalement, certaines dimensions de ces cas particuliers, et dire: On va se guider là-dessus. Ce seront les critères qui vont vous guider.

Ceci donnerait un signal aussi que tous les grévistes, après deux mois, ne peuvent pas automatiquement obtenir l'aide sociale, mais que, dans certaines circonstances, on va regarder leur cas particulier et on va leur aider.

Peut-être que la présence des enfants pourrait être une condition sine qua non. Peut-être que, dans le fond, de jeunes adultes sans enfant qui sont en grève, vont se dépanner d'une façon ou d'une autre. Je ne sais pas. Il y a toutes sortes de circonstances auxquelles on peut penser.

Il semble que, justement, parce qu'il y a dans la loi maintenant un principe général, on peut être plus relaxé dans son application, alors que la réaction inverse existait. Si on n'avait pas de principe général, il fallait être très sévère, étant donné le phénomène grossissant des réclamations.

Maintenant qu'on a un principe qui n'est pas contesté — je n'ai pas entendu de contestation systématique du principe — il faudrait que cela demeure de l'aide sociale. Dans le fond, c'est un peu cela, le problème. Je comprends que c'est difficile.

M. Lazure: Un autre critère pourrait être utilisé, la longueur du conflit, prenons une hypothèse. Si on disait que cela s'appliquerait seulement dans des cas de conflits d'au-delà de deux mois, d'au-delà de trois mois, peu importe, mais, dans un sens — c'est là où on a vraiment des menaces de dénuement — ce serait une incitation, dans certains cas douteux, peut-être à prolonger le conflit pour arriver à la limite des deux mois ou des trois mois. Il y a une autre hypothèse, on a envisagé plusieurs hypothèses. Ce n'est vraiment pas à coeur joie et facilement qu'on est arrivé à cette conclusion. L'autre hypothèse, c'était de rendre admissibles les autres membres de la famille, mais cela devenait une division artificielle, de dire que l'adulte lui-même qui est impliqué dans le conflit de travail ne serait pas admissible, mais sa famille, s'il y a menace de dénuement... Là aussi, il devient très difficile d'arbitrer des cas comme cela.

Encore une fois, on ne voit malheureusement pas de quelle façon on pourrait ouvrir une petite porte pour des cas pathétiques sans qu'elle soit automatiquement poussée bien grande ouverte par l'ensemble de ceux qui revendiquent, parce qu'il y en a qui revendiquent l'admissibilité complète et totale des grévistes à l'aide sociale.

Je dirais aussi, en finissant, que, dans les rares cas de dénuement très total, je comprends qu'il y a quelque chose d'un peu odieux et qui peut paraître paternaliste, mais il y a quand même dans la plupart des localités des organismes bénévoles, que ce soient des sociétés d'entraide, du genre Saint-Vincent-de-Paul ou autres, il y a plusieurs organismes bénévoles qui sont intervenus constamment, indépendamment des lois, des règlements que les gouvernements adoptent, dans des situations comme celles-là. Il faut quand même, sans leur en faire un obligation, garder cela en ligne de compte. Cela peut adoucir un peu cette menace de dénuement total. Les organismes communautaires sont là, des organismes financés par Centraide, par de grandes souscriptions publiques, sont là pour aider dans des cas qui ne sont pas prévus dans les règlements et dans les lois.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je reviens à ma première question. Sans en faire le procès, M. le ministre comprendra bien la grève de Murdochville. J'abonde dans le sens des paroles du député de Saint-Laurent parce que, si l'aide sociale doit servir de fonds de grève, je pense bien qu'on ne verra jamais, dans bien des cas... Le cas que je vous pose est une lettre que j'ai reçue hier. Je pourrais en recevoir d'autres. Le père est en grève, que ce soit sa volonté ou non. Il a trois enfants aux études. Une jeune fille aura 18 ans le premier janvier. A ce moment-là, la jeune fille qui a 18 ans et qui va à la polyvalente est considérée comme adulte. Si elle quittait sa famille, elle serait admissible à une aide du bien-être social, je crois. Mais elle demeure dans sa famille, elle va à la polyvalente, elle n'est pas en grève, c'est son père, mais elle devient adulte; à ce moment-là, parce qu'il a trois enfants aux études à l'extérieur et que celle-là voyage à une polyvalente assez éloignée, je pense qu'elle doit rester sur place en pension à Sainte-Anne-des-Monts, est-ce qu'elle est admissible, dans un cas spécial? Je ne fais pas le cas de toutes les familles, je cite un cas spécial où elle devient adulte après le début de la grève où elle n'est pas en cause.

M. Lazure: Vous avez là le principe de tout enfant qui est toujours aux études à temps plein, qui n'est pas considéré comme étant un adulte aux fins de l'aide sociale. Cet enfant, même s'il atteint 18 ans, continue à être considéré comme étant un enfant à charge de la famille.

M. Le Moignan: Si elle cessait ses études au premier janvier, elle devient à la charge de l'Etat; elle a droit de recevoir un chèque de $92.

M. Lazure: Exact.

M. Forget: Avec l'amendement qu'on vient d'accepter, il n'y a pas de problème. Elle peut continuer ses études et recevoir de l'aide sociale à la polyvalente.

M. Le Moignan: C'est cela qui n'est pas clair. Au secondaire, elle pourrait recevoir de l'aide.

M. Shaw: Sur la même compréhension...

M. Le Moignan: J'aimerais répondre à cette famille clairement.

M. Shaw: Sur le même sujet...

Le Président (M. Jolivet): Seulement une minute. C'est sur l'amendement de l'article 6 sur le jour; c'est le nouvel article 7 maintenant.

M. Lazure: Oui, c'était bien ma compréhension.

M. Forget: On peut se remettre au travail. M. Shaw: On va recommencer.

Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant. M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Si le ministre est d'accord, s'il a compris qu'un enfant qui a 18 ans ou qui l'aura d'ici quelques jours pourrait recevoir de l'aide; je ne parle pas de la famille, mais nommément de cette enfant; elle est aux études secondaires, mais elle a 18 ans, il ne s'agit pas de CEGEP; elle pourra faire une demande.

M. Lazure: Oui.

M. Le Moignan: Elle a fait une demande déjà et j'ai reçu la réponse. On lui dit qu'elle n'est pas admissible parce qu'elle est à la charge de ses parents.

M. Lazure: En vertu de la loi et de la réglementation existantes aujourd'hui, cette personne n'est pas admissible à l'aide sociale.

M. Le Moignan: Mais, en vertu des décisions qui sont prises ce matin, je peux lui dire d'y aller en toute confiance.

M. Lazure: Elle devient admissible.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, l'amendement amené par le député de Saint-Laurent ne peut pas me laisser indifférent, même si j'ai compris l'argumentation du ministre que je partage. Je suis dans un dilemne. Un fonctionnaire est aux prises avec un article de loi selon lequel il ne peut pas arriver avec cette double interprétation, une interprétation littérale suivant la lettre — c'est ce que font nos fonctionnaires — et une interprétation spirituelle d'après l'esprit. Parfois, nous nous trouvons devant des cas frontières. Je me refuse à dire, par exemple, qu'il y a d'autres organismes comme la Saint-Vincent-de-Paul ou un CLSC qui vont donner, qui vont agir en fonction de ce monde. Comme je me refuse aussi à accepter l'argumentation de notre ami, parce que, si l'on tombe dans le discrétionnaire, où allons-nous arrêter? Je me demande si devant un tel dilemme le ministre des Affaires sociales avec le ministre d'Etat au développement social ne devraient pas travailler d'ar-rache-pied pour arriver — ce qui résoudrait certains problèmes — au revenu minimum garanti. Je ne sais pas. (11 h 30)

Le revenu minimum garanti n'est-il pas peut-être une solution à ces problèmes pour éviter tout paternalisme, toute cette affaire, parce que même en grève, la personne recevrait cela? Moi aussi, à mon bureau, je reçois ces cas qui sont pathétiques. Je ne sais pas, parce que les termes que vous avez décrits, M. le député de Saint-Laurent, lorsque vous dites dénuement total, danger de..., cela existe. D'une part, une loi carcan doit-elle fermer la porte à ces gens ou, d'autre part, peut-on établir des critères — je ne dirai pas trois ou quatre mois, parce qu'après une semaine, la personne est mal prise — pour sortir de l'embarras quelqu'un qui est au prise avec ces problèmes?

Je suis partagé dans cette affaire, parce que ce sont des faits que j'ai vécus. Les agents d'aide sociale, je regrette, sont obligés d'appliquer mathématiquement, numériquement la loi.

M. Shaw: Voilà une situation qui est à la base de problèmes spécifiquement dans le cas de grèves et ce n'est pas seulement dans ce domaine, parce que cela arrive dans d'autres situations, mais on va parler premièrement de deux solutions. La première, c'est qu'aucun gréviste a accès aux prestations du gouvernement, à l'aide sociale. C'est une définition concrète, finie, point. Mais cela ne règle pas le problème du tout.

Nous avons, d'un autre côté, un formulaire qui dit qu'à un certain moment, vous pouvez obtenir des prestations du gouvernement sur un formulaire qui est le résultat d'un changement de règlement. Cela est un autre moyen pour les grévistes d'employer ce changement par le gouvernement. Ils vont jouer avec cela pour être en règle avec les changements, mais si on laisse à l'arbitraire, parce que nous avons des travailleurs sociaux, c'est leur devoir de travailler dans ces cas pour arriver à des situations. C'est pour cela que j'appuie la motion du député de Saint-Laurent, parce que nous avons vécu une situation dernièrement qui a toujours agi dans des cas spécifiques sur les recommandations des travailleurs sociaux. Et à mon avis, oui, c'est

arbitraire. Oui, c'est de l'ouvrage pour les travailleurs sociaux, mais à la fin, cela va régler des problèmes qui sont en demande dans les situations actuelles. Au lieu de fermer la porte au complet, au lieu d'ouvrir la porte au complet, on laisse la porte partiellement ouverte pour les cas qui sont impliqués, qui sont justifiables. A mon avis, c'est la fonction du travailleur social de voir tous ces cas, d'examiner les situations actuelles et, comme cela, avec une ouverture de principe, que ceux qui peuvent démontrer que leur situation actuelle demande une subvention gouvernementale, ces cas peuvent être subventionnés. Ceux qui ne peuvent pas démontrer les mêmes faits n'ont pas accès au fonds public ou à l'aide sociale.

Autrement, nous devons totalement fermer la porte ou totalement ouvrir la porte avec une situation...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lazure: En réponse au député de Pointe-Claire, je rappelle encore une fois, qu'avant 1976, avant que le ministre des Affaires sociales antérieur fasse cette modification aux règlements. Ce qui avait commencé par être des exceptions est devenu la règle générale en cas de grève grâce au bon travail de l'aide juridique. C'est vrai que l'aide juridique est peut-être moins à l'affût, je n'en suis pas sûr, mais de toute façon, je pense qu'il suffirait de la réouvrir, ne serait-ce qu'un tout petit peu, cette porte, pour qu'encore une fois les cas d'exception, par de la jurisprudence qui s'établirait très rapidement, deviennent plus ou moins la règle générale. Cela nous paraît impossible de confier ce rôle discrétionnaire que ce soit aux travailleurs sociaux ou aux agents d'aide sociale.

Le Président (M. Jolivet): Donc, pour le besoin du vote, je vais expliquer puisqu'il y a un amendement du député de Saint-Laurent, un amendement du ministre et l'article tel qu'il est écrit. Je vais commencer par l'amendement du député de Saint-Laurent, en faisant la correction qu'il m'a demandé de faire et que je vous lirai en cours de route: Que le premier alinéa du paragraphe 8 de l'article 2 soit modifié en ajoutant dans la cinquième ligne après le mot "circonstance", les mots "sauf lorsque cette aide est nécessaire pour éviter que cette personne seule ou cette famille ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour la santé ou risque de la conduire au dénuement total".

Avant, je voudrais avoir une information. Quand on va relire l'alinéa à la première ligne, est-ce que je dois comprendre que le mot "seule" a été oublié: L'aide sociale ne peut être accordée à une personne seule... Ou si vous l'enlevez.

M. Forget: C'est un oubli. Il faut le mettre.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Donc, le nouvel alinéa se lirait comme suit: "L'aide sociale ne peut être accordée à une personne seule qui — et là je dois ajouter ce qui serait l'amendement du ministre — au sens de la loi de 1971 sur l'assu-rance-chômage, (statuts du Canada 1970, 1971, 1972, chapitre 48) a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif ou à une famille dont un adulte a perdu son emploi dans les mêmes circonstances, sauf lorsque cette aide est nécessaire pour éviter que cette personne seule ou cette famille ne se trouve dans une situation qui constitue un danger pour la santé ou risque de la conduire au dénuement total." Quels sont ceux qui sont pour cet amendement ou contre. Je vais vous nommer.

M. Lazure: M. le Président, pour être bien clair, le vote que vous appelez, c'est sur l'amendement du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Jolivet): C'est cela. M. Forget?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Gosselin.

M. Gosselin: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Gravel?

M. Gravel: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Grenier?

M. Grenier: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Lavigne?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lazure?

M. Lazure: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Martel?

M. Martel: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Alfred?

M. Alfred: Contre, même si le problème demeure.

Le Président (M. Jolivet): M. Shaw? M. Shaw: Pour.

Le Président (M. Jolivet): Donc, l'amendement est rejeté. Pour: 3 Contre: 6. L'amendement du ministre.

M. Forget: L'amendement fait partie de la loi, M. le Président. On peut l'adopter, mais, enfin, c'est automatiquement...

Le Président (M. Jolivet): Le nouvel article 7 devenu 8, édicté par l'article 2 de la Loi modifiant

la Loi de l'aide sociale, est remplacé par le suivant: L'aide sociale ne peut être accordée à une personne seule qui, au sens de la Loi de 1971 sur I'assurance-chômage, (statuts du Canada 1970, 1971, 1972, chapitre 48) a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif ou à une famille dont un adulte a perdu son emploi dans les mêmes circonstances.

Deuxième alinéa. Est considéré avoir perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif l'adulte qui, pour ce motif, ne pourrait être ou n'a pas été déclaré admissible par la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada à des prestations en vertu de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage.

Troisième alinéa. Toutefois, l'aide qui était déjà versée à cette personne seule ou à cette famille et qui se serait poursuivie même si l'adulte avait conservé son emploi peut continuer de lui être versée dans la même mesure et aux mêmes conditions.

Est-ce que cet amendement est adopté? Adopté.

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Jolivet): Sur division. Il n'y a plus d'autre amendement à l'article 2. A moins qu'il y en ait d'autres députés?

M. Forget: Cela va.

Le Président (M. Jolivet): Donc l'article 2 est-il adopté avec les amendements?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Article 3, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires particuliers.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Non, pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Pas de commentaires particuliers, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y en a d'autres qui ont des commentaires?

M. Shaw: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): L'article 3 est-il adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): L'article 4, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires.

Le Président (M. Joliveti): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je n'ai pas de commentaires, sauf celui-ci, que j'ai fait également en deuxième lecture, mais j'aimerais voir comment on peut obtenir un certain éclaircissement. On se réfère au règlement, légalement, c'est évidemment possible, tout est possible, mais, dans le fond, c'est pratiquement une définition de la séparation de facto. Je pense que c'est le problème qu'on a à l'esprit, un mari qui déserte sa famille, qui abandonne sa femme, qui se trouve peut-être un emploi, mais dont la famille se retrouve sans moyens de subsistance, il n'y a pas de séparation légale, il n'y a pas de divorce, l'opinion pourrait être émise que, légalement, il n'y a pas de droit à l'aide sociale. Sauf si on se donne le pouvoir administratif de dire qu'effectivement, il y a droit à l'aide sociale, parce que, même si le mari vit toujours, il ne vit plus avec sa famille; même s'il a des moyens de subsistance, la famille est privée de moyens de subsistance.

Donc, on prononce administrativement une séparation de facto. C'est quand même sérieux, une séparation, et on pourrait se poser la question, se demander si ce n'est pas suffisamment sérieux pour que les critères soient dans la loi, plutôt que dans une réglementation. Par analogie, je prends l'exemple de la Loi du régime de rentes. Elle dit qu'après sept ans de cohabitation, des concubins sont considérés comme des époux légalement mariés, et cela entraîne pour le conjoint survivant les mêmes droits que s'il y avait eu un mariage en bonne et due forme.

Dans la Loi du régime de rentes, on déclare au fond quelles sont les conditions auxquelles un mariage de fait est considéré comme équivalent à un mariage de droit. C'est mis dans la loi, ce n'est pas mis dans une réglementation du régime de rentes. Je pense que des règles qui sont presque des amendements au Code civil, le fait de les mettre dans des règlements, je ne sais pas si c'est parce que j'ai eu déjà, jadis, une formation juridique, mais ça me gêne un peu. Je me dis que si, de la même façon, on veut, administrativement, faire comme si les gens étaient séparés légalement ou divorcés, on devrait peut-être avoir le souci de mettre ces critères dans la loi. C'est la seule façon dont ils pourront être débattus. Si c'est réglementaire, ça va paraître, un jour, Dieu sait quand, dans la Gazette officielle et, à moins d'avoir un bon ami qui lit la Gazette officielle tous les jours pour nous dire ce qui passe dedans, ça va passer inaperçu.

Il me semble que c'est le genre de débat pour lequel l'Assemblée nationale est faite et c'est la raison pour laquelle j'aurais été rassuré de retrouver dans la loi les critères qu'on veut mettre dans les règlements. C'est un premier aspect de la question. Le deuxième aspect, c'est d'essayer de comprendre quels sont les critères qu'on va mettre dans les règlements. On a probablement

une idée assez précise dès maintenant de ce que c'est.

M. Lazure: M. le Président, une des situations qu'on veut couvrir dans ce cas-là, c'est en particulier le cas d'une personne qui travaille à l'extérieur, pour une période plus ou moins longue, qui continue d'être le "provider", compte tenu de l'expression qui a été utilisée tout à l'heure, de cette famille.

C'est aussi le cas d'un étudiant, du niveau collégial ou universitaire, par exemple, qui, pendant l'année scolaire, quitte sa famille et revient seulement pour les périodes de vacances. Il continue de faire partie de la famille au sens de la loi, tout en étant résident à l'extérieur.

On vise aussi le cas de personnes qui sont hospitalisées, par exemple, pour une plus ou moins longue période, qui continuent de faire partie des besoins de la famille, bien qu'elles ne résident pas. (11 h 45)

Ce sont ces circonstances exceptionnelles et on veut donner la possibilité de les prévoir dans le règlement.

M. Forget: Mais non pas la désertion du foyer familial?

M. Lazure: La désertion est traitée dans d'autres dispositions de la loi. Actuellement, la loi et le règlement permettent d'aider rapidement, dans le mois de la séparation, lorsqu'on a lieu de croire à une séparation définitive, permettent d'aider immédiatement la femme — puisque c'est généralement d'elle qu'il s'agit — qui reste avec les enfants.

Dans la désertion du foyer, c'est une autre disposition de la loi qui permet d'intervenir, la femme ayant des recours alimentaires contre son mari ou son ex-mari, le cas échéant.

M. Forget: Oui, sauf que la façon dont c'est rédigé, il y a au moins un risque de conflit d'interprétation. Est-ce que vous pouvez nous référer à l'autre disposition qui est utilisée dans les cas de désertion du foyer conjugal?

M. Lazure: On utilise, pour aider immédiatement la personne qui a été désertée, l'article 204 qui dit que l'aide peut être accordée avant que l'époux qui la demande n'ait fait valoir son droit à une pension alimentaire, s'il s'engage à faire valoir ce droit avec diligence.

Autrement dit, dès qu'on conclut à une séparation qui semble avoir un caractère de permanence, on aide immédiatement, sous réserve que la personne exerce, dans un délai raisonnable, tel qu'indiqué à 204, sa créance alimentaire.

M. Forget: Et le pouvoir réglementaire de l'article 48, paragraphe k), serait remplacé par le pouvoir que vous insérez dans la loi?

M. Lazure: Oui.

M. Forget: C'est exactement le même libellé? M. Lazure: Oui.

M. Forget: Ceci veut dire que les cas de désertion ne sont traités que par l'article 204. Est-ce qu'il n'y a pas le danger qu'une interprétation stricte de l'article 204 permette une espèce d'aide d'urgence, pourvu que l'époux abandonné, le conjoint abandonné, s'engage à faire valoir ce droit avec diligence?

Le libellé même suggère qu'on va le faire, en attendant certaines mesures pour exiger que les pensions alimentaires soient prises.

Comme d'un autre côté, vous n'avez pas I intention, dans l'article 14, de préciser des circonstances dans lesquelles une personne, un adulte cesse d'être membre d'une famille, n'y a-t-il pas risque, comme situation permanente il y a un vide réglementaire ou législatif dont on se prévale pour refuser l'aide au-delà d'une période de transition...

M. Lazure: Jusqu'ici, cela ne s'est jamais produit. Il se peut qu'il y ait un vide effectivement, que l'article ne soit pas parfaitement étanche, mais je n'ai pas eu connaissance de cas où des agents de l'aide sociale auraient utilisé cette discrétion.

M. Forget: Non, mais, évidemment, le problème des séparations, c'est un peu comme le problème des grévistes. Cela s'accroît. Il y a quand même un risque, vu de ce côté-ci de la table au moins, que, devant les demandes de plus en plus nombreuses, on adopte une ligne de plus en plus dure vis-à-vis justement des poursuites qui devraient être intentées en Cour supérieure pour les pensions alimentaires, pour les obligations alimentaires et qu'à défaut, pour les bénéficiaires, les épouses abandonnées, de se prévaloir de leurs droits en vertu du Code civil, l'on dise: II n'y a rien pour vous. On vous dépanne. Il y a un dépannage pendant quelques mois. Si vous refusez de vous prévaloir de vos droits, c'est bien dommage, mais on ne considère pas que votre mari a cessé de faire partie du foyer familial. Comme on présume qu'il a un emploi, jusqu'à preuve du contraire, il devrait vous faire vivre et on ne vous donne rien. Il y a quand même cette possibilité que le ministère, à défaut d'autre chose, à défaut d'indication positive, prenne cette attitude.

Comme c'est un problème croissant avec des besoins, dans un contexte de restriction budgétaire, le problème se pose.

M. Lazure: M. le Président, je pense que, à la lumière des remarques du député de Saint-Laurent, quand on procédera à la rédaction des règlements, il faudra en tenir compte. Il faudra bien s'assurer justement qu'il n'y ait pas de cas qui tombent entre deux chaises. Vous dites que cela ne s'est jamais présenté, M. Ruel. Non. Il faudrait faire en sorte dans les règlements que cela ne se présente pas.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Mes remarques étaient les mêmes. J'avais dit, en deuxième lecture, que ces cas déterminés par règlement, c'était une confiance un peu grande donnée au pouvoir de réglementation. C'était là la réglementation nouvelle qu'on nous donnait. On nous a expliqué différents cas auxquels on faisait allusion ici. Ils nous seront précisés par la réglementation. Cela répond, en tout cas, aux questions que je me posais, en deuxième lecture.

Cela aurait peut-être été prudent — le ministre s'engage à cela, je pense — que les personnes qui désertent le foyer, les personnes qui ont déserté soient peut-être réadaptées pour que ce soit plus clair afin qu'on ne se serve pas par exemple de cet article pour traiter la personne désertée du foyer. Cela va.

Le Président (M. Jolivet): Cela va. M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Exactement sur le même sujet, je crois que tous les députés ont parlé sur le même sujet, je veux demander au ministre... Je suis convaincu qu'il accepte que le fardeau de la preuve ne doit pas incomber à la femme qui est en train d'avoir une désertion dans sa situation... On retourne encore à la question des paiements d'urgence, mais en même temps à la définition de "chef de famille" dans une situation comme telle. Cela arrive souvent qu'un jeune couple ait une dispute et que le mari quitte la maison et laisse sa femme seule dans cette situation. Elle n'a jamais eu d'aide sociale. Cela traîne deux ou trois semaines, et elle a besoin de quelque chose pour survivre. Cela n'arrive pas dans une situation ou deux par année, mais dans mon comté, cela arrive deux ou trois fois par mois. Peut-être que c'est différent à Pointe-Claire. Cela arrive aussi souvent que cela. Qu'est-ce que vous faites présentement avec ces cas-là?

J'ai eu connaissance d'une situation, il y a deux ou trois mois, où la jeune femme était allée au Bien-Etre social, et on lui avait dit que, puisque son mari était encore au travail, c'était à elle de chercher de l'aide financière de son mari en faisant appel aux avocats. Mais, il était à Vancouver. Il n'avait pas de moyens financiers personnels. L'accès à l'aide juridique était difficile dans une pareille situation. Avec cette définition, à savoir qu'une personne ne cesse pas d'être membre d'une famille du seul fait qu'elle se trouve temporairement hors du foyer, c'était appliqué dans cette situation. Alors, vous dites que c'est seulement une question de définition des membres de la famille qui travaillent à l'extérieur ou qui sont étudiants, etc., mais vos agents exigent cette disposition pour définir leur obligation de faire des paiements. Je voudrais des explications.

M. Lazure: II arrive, dans plusieurs cas, surtout dans des cas de séparation, que madame se présente au bureau d'aide sociale le lendemain, en demandant du secours. Maintenant, l'expérience passée à démontré que trois cas sur quatre se réconcilient dans la semaine qui suit. Alors, il y a unehabitude administrative: avant d'intervenir, au moins d'essayer de comprendre la situation familiale. Par contre, suivant l'exemple que vous me donnez, si le mari est rendu à Vancouver, le bureau d'aide sociale se doit d'intervenir immédiatement.

M. Shaw: Sans demander premièrement qu'elle essaie d'obtenir de l'argent de son mari?

M. Lazure: Non. Le bureau de l'aide sociale se devrait d'intervenir financièrement tout en conseillant à madame de tenter de faire valoir ses droits pour une créance alimentaire. C'est deux choses que d'aider et de demander également à la personne de tenter d'obtenir ce qui peut lui revenir de par les lois existantes.

M. Shaw: Mais c'est cet article qui a été appliqué dans des cas que j'ai vus personnellement. Vous dites ici que ce n'est pas là la volonté de votre service, mais c'est cela qui est pratiqué. Pour cette raison, nous sommes ici pour essayer de reformuler cet article pour que vos agents ne puissent pas agir avec le sens des mots de cet article.

M. Lazure: M. le Président, il serait utile, dans des cas comme cela, que le député de Pointe-Claire nous fasse part par écrit de cas comme celui-là. Comme M. Roy vient de le dire, l'application de la loi ou des règlements varie un peu selon les individus, les agents de l'aide sociale. Mais, règle générale, l'agent aurait dû fournir une assistance financière.

Le Président (M. Jolivet): D'autres questions sur l'article 4? Il n'y en a pas d'autre. L'article 4 est-il adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): L'article 5, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton?

M. Grenier: Non plus.

M. Forget: C'est la disposition anti-communes pour les mineurs?

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il est adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): L'article 6, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Adopté.

M. Grenier: Adopté également.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. L'article 7, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton ?

M. Grenier: Egalement.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. L'article 8, M. le ministre.

M. Lazure: Pas de commentaires.

M. Forget: J'aurais un amendement, M. le Président. Celui-là aussi, je l'ai mentionné au moment de la deuxième lecture. Il s'agit de la question de la discrimination en fonction de l'aptitude au travail. C'est une vieille question qui a un air de familiarité, j'en suis sûr, pour les fonctionnaires de la direction générale de l'aide sociale, mais il y a eu tellement de débats là-dessus, M. le Président. Le Québec, en particulier, c'est si souvent opposé à l'utilisation de ce concept, dans la conception des programmes de sécurité du revenu, que je ne peux faire autrement que de m'étonner que l'on veuille y faire explicitement référence dans un texte de loi du Québec. Cela a une utilité statistique, mais cela ne devrait pas avoir autre chose qu'une utilité statistique. C'est d'ailleurs une utilité toute relative et je pense que l'on devrait, conformément à la position que le Québec a souvent défendue dans les conférences fédérales-provinciales... Entre autres, il a adopté la notion de disponibilité d'un emploi plutôt que la question de l'aptitude au travail. Dans cet esprit, nous suggérons l'amendement qui se lirait comme suit: "Que le paragraphe a) de l'article 8 soit modifié en remplaçant, dans les troisième, quatrième et cinquième lignes, les mots "... de l'aptitude au travail d'une personne ou des membres d'une famille sans enfant à charge ou n'en ayant pas eu qui soit décédé..." par les mots "... de la disponibilité d'un emploi approprié. "

Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "a) par l'addition, à la fin du paragraphe e) du premier alinéa, de ce qui suit: dans la détermina- tion de l'aide, il peut être tenu compte de l'âge, de la disponibilité d'un emploi approprié ainsi que du fait qu'une famille ou une personne seule vit chez un parent ou un enfant."

Le Président (M. Jolivet): Avant d'aller plus loin, il est reçu. Maintenant, compte tenu de l'heure, je me pose la question: Doit-on ajouner sine die en attendant que la Chambre nous donne un ordre ou acceptez-vous de continuer plus longtemps? Mais, comme nous recommençons à 14 heures cet après-midi...

M. Forget: C'est le dernier amendement que nous avons. Cela ne durera probablement pas plus que cinq ou dix minutes.

M. Grenier: C'est moi qui m'étais opposé à ce qu'on continue cet après-midi parce que je devrai m'absenter, mais le député de Gaspé continuera sur l'amendement.

Le Président (M. Jolivet): Alors, M. le député de Saint-Laurent, vous continuez.

M. Forget: Je pense que cela s'explique assez facilement. (12 heures)

M. Lazure: Le sens de l'amendement proposé est clair et, là aussi, à prime abord, c'est raisonnable comme amendement, mais c'est dans la faisabilité, dans l'application d'une telle disposition, parce que tous les jeunes — il y en a environ 25 000 de moins de 30 ans — qui sont aptes actuellement — Comment définirait-on disponible et comment définirait-on emploi approprié?

Cet amendement part de bons motifs, mais l'application nous paraît strictement impossible. Je ne sais pas si M. Roy veut ajouter quelque chose là-dessus.

Non. Encore une fois, je considère que l'agent d'aide sociale sera pris avec un pouvoir discrétionnaire, à définir la disponibilité d'un emploi approprié, qu'est-ce que c'est pour un individu en particulier.

M. Forget: Vous avez raison, mais dans le fond, la discrétion existe dans la qualification d'apte au travail, parce que c'est un concept très très subjectif. C'est évident que quelqu'un qui arrive avec un appareil auditif en chaise roulante et le bras dans le plâtre, on peut se dire: Peut-être qu'il n'est pas prêt à travailler tout de suite, mais c'est un cas extrême. Il y a toutes sortes de gradations dans l'aptitude au travail. Le but même des efforts du ministère avec l'Office pour la protection des personnes handicapées est précisément d'accréditer la notion qu'un sourd, un aveugle, un hémiplégique, tous ces gens-là peuvent travailler, s'insérer dans la société et devenir des citoyens à part entière. C'est vrai, cela se fait dans d'autres pays. C'est une vérité constatée. Donc, la notion d'aptitude, c'est un jugement porté en fonction d'un contexte, en fonction de certaines hypothèses voulant qu'il n'y a pas dem-

ploi approprié pour un hémiplégique dans le moment, ou qu'on n'a pas un programme pour l'entrainer à travailler étant donné son handicap. Mais c'est de l'arbitraire, c'est du discrétionnaire.

Je comprends très bien la nature de la difficulté que vous avez. Vous avez une discrimination basée sur l'aptitude au travail pour les jeunes de moins de 30 ans et vous avez des taux discriminatoires en fonction de ce critère. C'est une chose. Mais remarquez que dans la loi vous avez quelque chose encore plus large. Vous permettez pour ce motif-là, mais pour tout autre motif également, si je comprends bien, la discrimination en vertu du concept d'aptitude au travail. Cela dépasse de loin la préoccupation administrative et fiscale qui pousse et qui a toujours poussé l'aide sociale à faire une discrimination pour les moins de 30 ans dits aptes au travail, dits administrativement déclarés aptes au travail. Mais dès qu'on met dans la Loi d'aide sociale qu'il serait désormais possible de faire une discrimination à tous autres égards avec ce concept-là, on dépasse l'objectif strictement visé, et probablement nécessaire, d'avoir un taux de $92 plutôt que de $247 pour les jeunes adultes.

Je suis conscient de cela. Evidemment, cela aurait été beaucoup plus compliqué de présenter un amendement pour vous permettre de tout faire — disons que ce n'est pas mon rôle — mais il m'apparaît important de souligner que la justification que vous avez pour obtenir ce texte de loi n'est pas suffisante pour aller aussi loin que le texte de loi. Vous avez un objectif précis, les moins de 30 ans à qui vous payez $92 et vous ne devriez pas, demain, être obligés de faire la preuve dans chacun des cas qu'il n'y a pas d'emploi disponible. Je suis tout à fait d'accord. Mais cela, c'est un but limité.

D'un autre côté, vous permettez, dans l'article 48 qui concerne le pouvoir de réglementation, pour toutes fins que de droit, de faire une discrimination quant à ce critère, qui est très arbitraire. Il n'y a pas de correspondance stricte entre le besoin et la réponse. Je crois qu'étant donné que c'est un concept auquel le Québec s'est si souvent opposé, que c'est un concept vicieux en quelque sorte, qui est vicié sur le plan des objectifs d'une loi d'aide sociale, des objectifs sociaux, je ne pouvais pas faire autrement que de le souligner et de dire: On s'en va très, très loin.

On va être placé dans une situation embarrassante quand on va vouloir, à l'avenir, dire qu'on n'aime pas le concept d'aptitudes au travail, parce qu'on l'a mis dans notre loi. Il y a un dilemme, je ne sais pas comment on peut le résoudre, mais j'ai l'impression qu'il pourrait être résolu en l'accordant, peut-être de façon explicite, pour les moins de 30 ans, en disant ce qu'on veut clairement plutôt que de le faire indirectement. Dans le moment, vous faites un libellé qui a cet effet, mais qui pourrait en avoir d'autres. Une autre façon, c'est de dire clairement: Ecoutez, pour ceux qui ont moins de 30 ans, qui n'ont pas un handicap grave et démontré, dans un sens quelconque, le taux est différent. Mais pas un pouvoir général de discrimination.

C'est tout ce que je dirai sur cet amendement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de... Gaspé, avez-vous quelque chose à ajouter? M. le député de Papineau.

M. Alfred: C'est-à-dire que je pense que l'amendement du député de Saint-Laurent part d'un bon naturel. Malheureusement, il faudrait le rejeter. Le problème posé par le député de Saint-Laurent est plutôt un problème d'éducation. Premièrement, il n'y a pas de sot métier. Malheureusement, l'éducation qu'on a reçue, surtout pour les moins de 30 ans, c'est l'éducation à former des gens adaptés et non pas des gens adaptables. Le jeune garçon qui a reçu une formation en électricité, il ne peut pas faire autre chose. Cela le paralyse, donc, il faut tenir compte de ça aussi.

Je pense qu'à partir de cet amendement, ça nous permet aussi d'insister, dans un autre ministère, de façon à ce que nos enseignants aient une éducation de manière à former des gens adaptables, c'est-à-dire des gens capables de se débrouiller, de faire n'importe quel métier au lieu de former des gens adaptés. Cela nous permettrait de poser le problème. Comment pouvons-nous décider d'un emploi approprié, propre à? Ça ne marche pas.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement?

M. Forget: J'aurais une question. On essaie de comprendre, de ce côté-ci, le sens de l'expression "les membres d'une famille sans enfant à charge ou n'en ayant pas qui soient décédés". Je ne puis situer cela dans aucun contexte connu.

M. Lazure: Si vous avez un couple formé de deux jeunes adultes de moins de trente ans aptes au travail, s'il y a un enfant dans la taille de la famille, il n'y a aucune discrimination.

Mais si le couple n'a jamais eu d'enfant, ils sont considérés comme deux personnes seules.

M. Forget: Comme deux personnes seules. M. Lazure: C'est cela.

M. Forget: Et s'ils n'en ont jamais eu, soit qu'ils n'en ont pas, ou qu'ils en ont eu qui soient décédés, qu'est-ce que cela veut dire?

M. Lazure: Si un ménage a un enfant à charge...

M. Forget: Oui.

M. Lazure: Aujourd'hui, c'est considéré, comme dans la taille régulière: deux adultes et un enfant, avec un taux d'environ $300. Mais si, par malheur, ils perdent un enfant, on trouvait que c'était aller loin que de les diminuer jusque...

M. Forget: Et de les remettre au taux... Je comprends. D'accord.

M. Lazure: C'était pour éviter cette discrimination.

M. Forget: Oui.

Le Président (M. Jolivet): L'amendement est-il adopté?

M. Alfred: Rejeté.

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Jolivet): L'article 8 est adopté sur division. L'article 9 sera-t-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. Article 10?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté. Le projet de loi 118 est adopté avec amendements. Nous ajournons sine die, en tenant compte que, possiblement, il y aura un ordre de la Chambre pour siéger après la période des questions concernant le projet de loi 103.

Fin de la séance à 12 h 9

Reprise de la séance à 15 h 53

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, madame, messieurs!

La commission des affaires sociales est réunie pour étudier le projet de loi no 103.

Les membres de la commission sont: M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplacé par M. Forget (Saint-Laurent); M. Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), M. Grenier (Mégantic-Compton) remplacé par M. Le Moignan (Gaspé); M. Lavigne (Beauharnois), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Lazure (Chambly), M. Martel (Richelieu), M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Shaw (Pointe-Claire).

M. Forget (Saint-Laurent) est remplacé, au niveau des intervenants, par M. Goldbloom (D'Arcy McGee).

Projet de loi no 103

Le projet de loi no 103, article premier, M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, le rapporteur sera toujours M. Gravel (Limoilou), tel que prévu par la commission de ce matin. C'est bien cela.

Mme Lavoie-Roux: A l'article 1, avant qu'on fasse l'étude de...

Le Président (M. Jolivet): J'appelle l'article 1 pour les besoins, mais vous faites des commentaires généraux.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, étant donné qu'on n'a pas beaucoup de temps, je ne veux pas faire de commentaires. On peut passer tout de suite, quant à moi, à l'étude article par article.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais bien avoir la quiétude d'esprit du ministre.

M. Lazure: Je n'ai pas parlé de quiétude, j'ai dit qu'on n'avait pas beaucoup de temps.

Mme Lavoie-Roux: Ah! J'ai averti le leader du gouvernement que, de bonne foi, on ne pourrait pas terminer à 18 heures.

M. Lazure: Par économie de temps. J'étais là. Je suis d'accord, mais, enfin!

Mme Lavoie-Roux: C'est cela. On va commencer par parler et, après cela...

M. Lazure: C'est cela, c'est pour cela que je vous laisse parler.

M. Forget: On conclura à la fin.

Débat préliminaire

Mme Lavoie-Roux: Je disais, M. le Président, que je souhaiterais, d'une certaine façon, procéder avec autant de célérité que le ministre souhaite le faire, mais vous vous rappellerez qu'au moment du débat en deuxième lecture, à l'Assemblée nationale, mes collègues et moi-même avons soulevé des problèmes extrêmement importants que suscite ce projet de loi. Il y a des principes qui sont mis en jeu touchant entre autres le problème de contingentement des médecins et des dentistes dans l'ensemble des hôpitaux de la province, le problème de la fusion obligatoire et forcée des établissements contre le gré des corporations. Il y a également l'abolition, de par la volonté du ministre, des conseils régionaux de services sociaux.

M. Lazure: Je ne comprends pas.

Mme Lavoie-Roux: A l'article 1, le conseil régional...

M. Lazure: C'est parce que vous dites l'abolition des conseils de services.

Mme Lavoie-Roux: D'un conseil régional, possiblement. Vous vous réservez ce droit à l'article 1.

M. Lazure: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Vous aimez mieux la dissolution?

M. Lazure: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Ah, si vous aimez mieux la dissolution...

M. Lazure: La tutelle, des choses qui s'appliquent aux autres établissements actuellement.

Mme Lavoie-Roux: Enfin, je ne continuerai pas cette énumération. Il y a également l'approche autoritaire du ministre, dans le cas des plans d'organisation des hôpitaux. La liste est assez longue. Vous vous souviendrez que j'avais fait motion à l'Assemblée nationale pour qu'une commission parlementaire soit tenue pour entendre des personnes ou des groupes qui pourraient avoir des représentations à faire. Ce débat, qui a duré fort longtemps, n'a pas réussi à convaincre le ministre, puisque, le lendemain ou le surlendemain — il faudrait vraiment que je fasse une vérification exacte — par la suite, il nous a répondu que l'Opposition demandait une commission parlementaire qui n'était réclamée par personne, dans le cas de la loi 103, alors que le ministre avait reçu des télégrammes selon lesquels des groupes désiraient se faire entendre. Le ministre avait affirmé de plus qu'il avait largement consulté et il a énuméré une liste d'organismes qui avaient été consultés.

D'après les renseignements que j'ai eus et que je peux d'ailleurs confirmer par les télégrammes dont le ministre a certainement copie... Vous avez un télégramme de l'Association des étudiants en médecine de l'Université McGill qui dit: Mardi soir, le 5 décembre, nous avons fait parvenir un télégramme demandant d'être entendus en commission parlementaire sur le projet de loi 103. M. le ministre, vous affirmez en Chambre n'avoir reçu aucune demande pour présenter un mémoire et être entendu à cette commission. Nous demandons que la lumière soit faite en Chambre, à savoir que trois associations d'étudiants en médecine du Québec vous ont demandé cette commission. Il y avait également les étudiants de la faculté de médecine de l'Université Laval, de l'Université de Montréal et de Sherbrooke, si je ne m'abuse.

Quant à la consultation, le ministre avait également affirmé en Chambre qu'il avait consulté la Fédération des médecins résidents et internes. Là encore, il y a un télégramme selon lequel la Fédération des médecins résidents et internes s'étonne de la précipitation avec laquelle le gouvernement québécois procède à l'adoption du projet de loi 103. Je cite: "A notre connaissance, ce projet de loi n'a pas fait l'objet de consultations sérieuses auprès des médecins; au cours d'une réunion en information sur le projet d'assainissement financier des hôpitaux le ministre nous a informés de son intention de soumettre le contin- gentement des médecins à l'enveloppe budgétaire des établissements; je vous fais grâce du reste. (16 heures)

J'ai également eu l'information... je n'ai pas de télégramme ou de ce que je pourrais appeler pièce justificative à cet égard, mais je pense que je n'ai pas de raison, bien au contraire, de douter de l'affirmation verbale qui m'a été faite par la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec qui avait été avertie qu'elle serait consultée, lors d'une rencontre qui portait sur un autre objet, sur cette question de contingentement éventuel des effectifs des établissements de santé et des centres hospitaliers en particulier. Or, cette consultation n'a jamais eu lieu.

Je comprends mal la position du ministre qui prétend que tout le monde est satisfait, que tout le monde est heureux et que personne ne veut se faire entendre. Vous avez là quatre et même cinq témoignages dans le sens contraire. Je me dis également que si le ministre ou son ministère avait fait un peu plus de publicité sur la loi 103 à savoir, par exemple, qu'on y retrouve ce droit extrêmement autoritaire que le ministre s'arroge, indiquant qu'il pourra, contre le gré des corporations concernées, fusionner des établissements, on aurait également pu avoir des représentations qui auraient pu être faites par d'autres établissements de santé ou d'affaires sociales.

De toute façon, je ne veux quand même pas... j'entends dire au ministre immédiatement qu'il n'est pas dans l'intention de l'Opposition officielle, surtout si le ministre peut nous annoncer que déjà il a des amendements qu'il est prêt à déposer, parce qu'on sait — j'accepterai une correction du ministre si je me trompe — qu'il est parvenu avec son groupe privilégié de médecins spécialistes à faire certaines ententes, peut-être a-t-il déjà des amendements dans sa poche ou dans sa manche...

M. Lazure: Plein, oui.

Mme Lavoie-Roux: Plein d'amendements. Donc, si déjà il les a et qu'il veut les déposer, son geste raccourcira les débats. Ce n'est pas dans notre intention de prolonger cette discussion de la loi 103. Nous tenons quand même à discuter en profondeur des principes fondamentaux qui sont mis en question dans ce projet de loi.

Motion pour convoquer des organismes

Je voudrais, à ce moment-ci, faire une motion, compte tenu des incidents que j'ai rapportés touchant les soi-disant non-requêtes des groupes à se faire entendre et la soi-disant consultation auprès de groupes qui ne jugent pas avoir été suffisamment consultés. J'aimerais faire la motion suivante: "Que cette commission invite les représentants de l'Association des étudiants en médecine de l'Université McGill, les représentants de l'Association des étudiants en médecine de l'Université de Montréal, les représentants du Regrou-

pement des étudiants en médecine de l'Université Laval, les représentants de la Fédération des médecins résidents et internes du Québec et de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec à se faire entendre le 18 décembre 1978, à 10 heures, en commission parlementaire."

Le Président (M. Jolivet): Dois-je comprendre, Mme le député, que vous demandez l'ajournement des travaux de cette commission; Si vous le demandez, vous exprimez un voeu que l'Assemblée nationale donne un ordre de la Chambre à l'effet d'entendre ces groupes.

J'aimerais savoir quelle est l'intention que vous avez.

Mme Lavoie-Roux: C'est évidemment une motion pour convoquer ces groupements pour que nous les entendions en commission parlementaire, pour que nous puissions, à moins — je le répète encore — que le ministre nous dise qu'il a des amendements sérieux à présenter, être éclairés avec le plus de justesse possible sur les modifications qui devraient être apportées à ce projet de loi.

Le Président (M. Jolivet): Je suis embêté sur la question pour la raison suivante: J'ai bien voulu savoir si c'était un voeu qu'exprimait la commission parlementaire pour qu'un ordre de la Chambre vienne parce qu'actuellement, comme la commission parlementaire est réunie ici pour étudier, article par article, le projet de loi 103, une telle motion devient irrecevable actuellement.

Je comprends toute cette question, mais ce que je dis, c'est qu'au niveau de la commission parlementaire, à moins que la commission parlementaire ne fasse un voeu qu'elle exprime au leader de la Chambre, ce n'est pas la même chose que si vous demandiez que la commission ordonne à l'Assemblée nationale.

Donc, il n'est pas question, en aucune façon, d'ordonner à l'Assemblée nationale simplement de faire un voeu.

Mme Lavoie-Roux: C'est une invitation que la commission ferait aux représentants de ces différentes associations à venir se faire entendre et je pense que c'est un peu différent d'un ordre qui les obligerait à venir se faire entendre. Je pense que c'est vraiment une invitation qui leur ouvre la porte pour faire les représentations qu'ils jugent opportunes.

Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas-là, ce que vous exprimez, c'est que la commission demande que ces gens soient convoqués en commission parlementaire et qu'en conséquence la commission exprime, au niveau de l'Assemblée nationale, le voeu qu'on les invite en conséquence.

M. Forget: M. le Président, sur une question de règlement, je ne voudrais pas pécher par excès de formalisme. Il reste que, selon nos règlements, chaque commission parlementaire est maîtresse de l'organisation de ses travaux. Je suis sûr que, s'il y avait consentement de la part du ministre, il serait possible, sans recourir à tout un tas de procédures, d'inviter les gens qui en ont manifesté le désir à se faire entendre pendant quelques minutes par la commission, au moment où on va étudier ce projet de loi article par article. Bien sûr, on pourrait penser à toutes sortes d'enchevêtrements de procédure, mais est-ce qu'il n'est pas possible pour la commission, d'organiser ses travaux en ce sens? C'est ordinairement quelque chose qui est fait au début des séances d'une commission parlementaire, et il me semble que c'est une demande d'autant plus naturelle, comme mon collègue de L'Acadie l'a souligné, que cela ferait passer au moins une certaine confusion, à savoir si les groupes voulaient ou non être entendus. Depuis, je pense que la situation est plus claire. Il y en a qui voudraient être entendus et je pense qu'il y en a qui sont sur place dans l'expectative d'une invitation possible par la commission parlementaire. C'est qu'on voit des figures connues...

M. Lazure: Des figures bien connues, oui.

M. Forget: Donc, il ne serait pas difficile, on n'a même pas besoin de donner d'avis dans l'espace de quelques secondes, d'avoir les participations recherchées.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, au départ, je veux tout de suite dire à nos amis de la Fédération des omnipraticiens, je vois que l'Association des dentistes est présente aussi, que mes remarques ne veulent en rien minimiser l'importance de leur témoignage ou de leur contribution. Mais il me paraît difficile, M. le Président, qu'une commission puisse décider, à l'encontre d'une décision qui est encore toute fraîche, une décision de l'Assemblée nationale, il y a à peine quelques jours. Après un débat de quelques heures, l'Assemblée, à tort ou à raison, a décidé qu'il n'y aurait pas d'audition en commission parlementaire. Au fond, on veut prendre le biais de cette motion pas trop trop formelle, comme vous dites, de cette approche qui veut éviter le formalisme — et j'en suis — mais par ce biais, on veut, autrement dit, faire changer l'avis de la Chambre, à toutes fins utiles. Si, au moins, on avait la certitude qu'il s'agit seulement de deux groupes et qu'ils sont ici, je vous dis honnêtement que je n'aurais pas d'objection. On pourrait le faire par consentement, séance tenante. Mais, vous le savez d'ailleurs, depuis la fameuse séance du mardi soir, qui a fait un certain bruit, effectivement, il y a des appétits qui ont été aiguisés et il y a des groupements qui demanderaient à être entendus.

Je reviens sur le fond de la question. Sur la forme, M. le Président, je ne peux pas faire autrement que de m'opposer à la motion du député de L'Acadie. Pour revenir au contenu de

l'intervention du député de L'Acadie, il y a eu effectivement une certaine confusion. Mardi soir, à l'Assemblée, j'ai évoqué la consultation avec un certain nombre d'organismes sur le point précis de la répartition des effectifs médicaux, ce que vous appelez le contingentement, qui n'est pas véritablement du contingentement, et j'expliquerai tantôt pourquoi. J'ai dit qu'en juin dernier — d'ailleurs, il y a un groupement qui l'admet — il y a eu rencontre, moi-même et des fonctionnaires, avec des représentants des deux fédérations, spécialistes, omnipraticiens, résidents, internes, plus les représentants des grandes centrales syndicales, plus les représentants de l'Association des hôpitaux, sur ce qui nous paraissait être l'élément important de ce projet et qui se trouvait, non pas par hasard, mais par une décision du Conseil des ministres, non pas du ministre, accroché à un plan plus global de redressement financier des hôpitaux.

Donc, il y a eu consultation au mois de juin. On a eu des réactions des gens. Je dis que ces groupements savaient fort bien que le projet de loi s'en venait. Ils auraient pu nous faire parvenir, par écrit, depuis le mois de juin, des représentations sur ce plan précis des effectifs. D'accord, on peut alléguer qu'on aurait dû les consulter de nouveau, une fois le projet fait. Effectivement, il y a eu des rencontres avec la Fédération des médecins spécialistes, avec l'Association des conseils de médecins et aussi avec la Fédération des médecins résidents et internes.

Il y a quelques amendements, que je déposerai tantôt, qui découlent de ces discussions et qui... En tout cas, ce qui intéresse le plus nos confrères dentistes et médecins actuellement, c'est cette nouvelle disposition qui exige l'approbation, par le ministre, d'un plan des effectifs médicaux. Il y a quelques modifications qui satisfont. D'ailleurs, la Fédération des médecins spécialistes ainsi que l'Association des conseils de médecins dentistes, c'était dans tous les journaux ce matin, l'ont dit en conférence de presse, hier. Ces derniers ne sentent pas le besoin de rencontrer le ministre, ou ne sentent pas le besoin d'avoir une commission parlementaire, à la suite des conversations que nous avons eues.

Je pense que ces amendements vont satisfaire aussi nos amis de la Fédération des omnipraticiens ainsi que les dentistes et les étudiants. Quant aux étudiants, je fais ici une parenthèse, le député de L'Acadie insinue presque, au moment où j'ai parlé à l'Assemblée nationale, que je savais qu'il y avait déjà des demandes de commission parlementaire. Il n'y en avait pas.

J'ai expliqué mardi soir dernier — on se le rappellera et on peut le lire au journal des Débats — après l'ajournement, quand on est revenu en Chambre à 20 heures, jusqu'à ce moment-là, j'avais parlé auparavant, qu'il n'y avait eu aucune demande de quelque groupe que ce soit, pour la tenue d'une commission parlementaire. Le projet de loi était quand même déposé depuis le 26 novembre.

A 20 heures, en arrivant en Chambre, sur mon pupitre, j'ai vu cette lettre des deux représentants des groupes d'étudiants en médecine. Là, vous évoquez un télégramme des étudiants de McGill qui a été envoyé aussi le mardi soir. Mais il n'y a pas de contradiction dans ma position. Au moment où je parlais, je ne savais même pas que les étudiants de McGill avaient adressé un télégramme.

Je veux dissiper toute ambiguïté et préciser qu'il n'y a certainement pas eu de mauvaise foi de ma part. Il n'y avait pas, jusqu'à mardi, à 20 heures le soir, de demande d'une commission parlementaire.

Dernière remarque sur ce que vous appelez le contingentement. On en parlera plus longuement quand on arrivera à l'article. Je veux quand même indiquer dès l'abord — parce que cela va revenir souvent dans la discussion — que ce que nous demandons, c'est que les hôpitaux fournissent un plan d'organisation des services médicaux et chirurgicaux, des services cliniques, si vous voulez, et que le ministère, le ministre plus spécialement autorise ce plan, ainsi que les effectifs qui seront rattachés à chacun.

Une fois l'autorisation donnée — on verra les modalités tantôt — il n'est pas question que le ministre, comme on l'a dit en certains endroits, s'arroge le droit de dire quel médecin pourra aller travailler dans tel ou tel hôpital. Il s'agit de l'approbation sur un nombre de médecins ou de dentistes.

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai jamais insinué une telle chose, M. le ministre.

M. Lazure: D'autres l'ont fait, pas vous. Ce n'est pas un contingentement dans le sens qu'on ne force pas un médecin à aller travailler dans une région ou un hôpital donné. Cela, c'est du contingentement véritable. Mais ce qu'on fait, c'est qu'on rationalise; on veut, là aussi, mettre fin à certains abus. Ce ne sont pas des hypothèses, ce sont des faits. Quand je vous dis, par exemple, qu'il y a l'équivalent de 40 psychiatres à temps complet, dans un hôpital général de Montréal, où il y a un service de psychiatrie de 80 lits. Ce sont des choses qui existent. Cela n'a pas d'allure, alors que, dans d'autres régions, il n'y en a pas. Il faut donc exercer un certain contrôle et, par des méthodes incitatives, depuis des années, on a tenté de le faire et sans succès. On veut non pas régimenter, si vous voulez, la carrière de chaque médecin au Québec, mais on veut qu'il y ait une meilleure répartition géographique.

Le Président (M. Jolivet): Simplement — M. le député de Gaspé vous l'a demandé — sur la question qui est la motion; j'ai une décision à prendre sur cette question et je voudrais bien la rendre avant qu'on embarque dans une discussion de fond. M. le député de Gaspé. ( 17 heures)

M. Le Moignan: La motion, c'est de faire entendre des groupes, c'est le seul but.

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Le Moignan: Je me dis: Si on continue de discuter et si, dans la salle, en ce moment, nous avons déjà des groupes qui aimeraient se faire entendre, je me demande si, en leur accordant quinze ou vingt minutes par groupe, on ne sauverait pas du temps en cours de route pour étudier article par article. Je pense que c'est un point fondamental, si on veut avancer, étant donné qu'on ne connaît pas encore les amendements que le ministre va nous proposer.

Le Président (M. Jolivet): Sur la question de la motion, normalement, la demande de faire comparaître des groupes devant une commission parlementaire, c'est un ordre qui vient de la Chambre. En commission parlementaire, on peut faire les motions en conséquence, sauf que, s'il n'y a pas unanimité, quant à moi comme président — ce n'est pas la première fois que cela nous arrive d'avoir cette motion — cela ne sert à rien de continuer de discuter sur la question quand on sait que la formule de demande de comparution devant la commission parlementaire entre, normalement, la première et la deuxième lecture ou, à certaines occasions, entre la deuxième et la troisième lecture, avant l'étude article par article en deuxième lecture, se fait toujours dans une annonce où on invite, de façon publique, l'ensemble des groupes à s'y présenter.

Comme cette annonce a été clairement exprimée lors de la discussion à l'Assemblée nationale, quant à moi, comme président, compte tenu qu'il n'y a pas unanimité ici pour entendre des groupes, je juge que l'on doit maintenant passer à l'étude du projet de loi article par article, sinon on risque de s'enferrer dans une motion sur laquelle on n'a pas, quant à moi, l'unanimité ici autour de la table.

M. Forget: M. le Président, je respecte bien votre décision. Il reste qu'il y a de nombreux précédents où une telle motion à été reçue en commission parlementaire exprimant le voeu de la part de membres d'une commission parlementaire d'entendre des gens qui n'avaient pas été convoqués par une décision de l'Assemblée nationale. J'ai participé moi-même à de nombreuses commissions parlementaires où cette question a été débattue. Elle a été débattue après avoir été jugée recevable. Il y a peut-être une question de formulation. Je pense que si la motion est exprimée d'une certaine manière, vous allez sûrement la juger recevable, comme elle a été jugée recevable en d'autres occasions similaires.

Je voulais simplement faire cette mise au point qu'on peut présenter une motion dans une forme recevable et, évidemment, argumenter sur cette motion dans les limites du droit de parole que le règlement nous donne.

Avant, cependant, d'en venir à cette extrémité, j'aimerais faire appel une dernière fois au ministre qui dit que l'Assemblée nationale a écarté une commission parlementaire. Oui, avant la deuxième lecture, cela a été écarté, mais une commission parlementaire qui est convoquée de toute manière, qui pourrait entendre des gens qui demandent à l'être et qui sont présents, ce n'est certainement pas une décision qu'a écartée l'Assemblée nationale. De toute façon, encore une fois, si on insiste on peut plaider une motion à cet effet, mais à quoi bon perdre le temps de la commission. Il reste qu'on n'est pas sûr que le texte sur lequel ont eu lieu des consultations en avril de cette année soit le texte sur lequel, finalement, on soit appelé à voter en troisième lecture, et que, pour apprécier le texte final qui va être amendé d'ici quelques minutes par le ministre, les lumières des groupes professionnels impliqués ne sont pas superflues. C'est ce qu'on veut dire. On ne veut pas faire de procès au ministre. Il y a des problèmes réels qu'il veut résoudre, on veut bien l'aider à les résoudre. On veut aussi lui dire que les lumières que les groupes impliqués peuvent nous apporter, peuvent apporter aux membres de la commission ne sont pas superflues, parce qu'on est persuadé que tous les amendements qu'il apporte en dernière minute n'ont pas précisément fait l'objet de consultations. Or, cela touche un sujet extrêmement important pour ces groupes, c'est très important. C'est leur contexte de travail. C'est leur milieu de travail, ce sont presque leurs conditions de travail. Je pense qu'on devrait considérer cela et considéreraussi la possibilité que, si on le veut bien, on peut absorber presque tout le restant de l'après-midi à plaider une motion qui va être recevable, parce qu'il y a une forme connue de motion recevable sur le sujet.

Le Président (M. Jolivet): C'est pour cela que j'ai bien essayé de distinguer tout à l'heure la forme de la motion. Quant à moi, actuellement, au niveau de la demande de motion telle qu'elle est faite, il faut avoir l'unanimité de la commission parlementaire. Comme on n'a pas l'unanimité de la commission parlementaire, j'ai l'obligation de vous dire que la motion telle que présentée actuellement, de demander d'entendre les groupes qui sont ici présents, ne peut pas être recevable.

M. Lazure: M. le Président, puisque le député de Saint-Laurent a fait un dernier appel au ministre, je répète que, s'il s'agissait de deux groupes seulement, je vous jure que je serais prêt à ce qu'on s'entende tout de suite, séance tenante, on les entendrait, on s'entendrait sur une chronologie, etc., et la durée des interventions. Mais comme vous le savez aussi bien que moi, il y a les étudiants en médecine des universités qui ont été les premiers à demander la commission parlementaire; il y a aussi la Fédération des médecins résidents qui l'a demandée; de plus, il y a aussi l'Association des hôpitaux qui l'a demandée. Je trouve embêtant, sinon inéquitable, pour les trois autres groupes d'entendre un ou deux groupes qui sont ici., parce qu'ils sont ici. Pour les autres, cela nous pose des problèmes, réels de calendrier de travail. Je ne suis pas le leader de la Chambre. Il est évident que nous avons peu de temps cet après-midi. Nous devrons continuer les travaux de cette commission. Quand allons-nous continuer

ces travaux? Je l'ignore. C'est le leader qui décidera. Je ne peux pas prendre de décision pour le leader.

J'ajouterai, comme dernier commentaire, que nous avons des rendez-vous, comme j'avais pris l'engagement de le faire mardi soir dernier, nous avons déjà un rendez-vous de pris avec les étudiants. Je les rencontre demain, avec les fonctionnaires. On va avoir une séance de travail. Il y a un autre rendez-vous de pris avec l'Association des hôpitaux. Il y en a un autre de pris avec la Fédération des médecins résidents, internes, tous ces rendez-vous sont pour les 24 ou 48 heures qui s'en viennent. Il n'y a rien de fantastique. Ecoutez...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je... M. Lazure: J'ai la parole?

Mme Lavoie-Roux: Oui, je vous la laisse, M. le ministre, je reviendrai.

M. Lazure: Bon! Encore une fois, Mme le député de L'Acadie et M. le député de Saint-Laurent vont dire: Ce n'est pas de la transparence. Je répète qu'un gouvernement, que ce soit l'actuel, le précédent ou le futur, ne peut pas avoir une commission parlementaire chaque fois que les partis de l'Opposition le demandent. C'est de bonne guerre de le demander. L'Assemblée nationale s'est prononcée mardi soir. Je répète que ce n'est pas le seul mode de consultation valable. Il y a d'autres modes valables de consultation. Nous nous servons de ces modes de consultation.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je trouve vraiment surprenante l'attitude du ministre. Il dit: Des appétits ont été éveillés. Le point que je lui ai fait valoir mardi soir est que, justement — et là, je ne veux pas accuser le ministre, il y a eu la hâte de la fin de session où une foule de projets de loi sont déposés en même temps et je ne veux impliquer de mauvaises intentions à qui que ce soit — je lui ai indiqué mardi soir dernier que les gens avaient été peu avertis ou même peu sensibilisés au fait que ce projet de loi était déposé et qu'il avait des implications quand même importantes. La preuve, c'est que, même là, vous venez d'en ajouter une, M. le ministre, l'Association des hôpitaux du Québec, qui voudrait aussi être entendue. C'étaient tous des gens qui, normalement, selon ce que vous nous avez dit, avaient été consultés, mais, évidemment, je pense qu'il peut y avoir un entendement différent sur ce qu'on appelle la consultation, si cela a eu lieu il y a plusieurs mois à l'occasion d'autre chose, si ceci a été mentionné accidentellement. Je pense que ma motion de mardi soir dernier, de toute évidence, était loin d'être superflue.

Je veux dire au ministre, comme d'ailleurs au gouvernement, de ne pas compter sur moi pour faire des motions pour faire passer le temps ou des motions pour des commissions parlementaires. Si je n'avais pas jugé que c'était important, compte tenu des principes contenus dans cette loi, je n'aurais pas fait une motion. On aurait bien pu en faire une sur la loi 118, M. le ministre, c'était une loi d'aide sociale; on aurait peut-être pu faire venir tous ceux que cela touchait; vous avez changé des catégories de gens qui sont admissibles à l'aide sociale...

M. Gosselin: Pertinence!

Mme Lavoie-Roux: Qui est-ce? C'est le député de Sherbrooke.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je ne voudrais pas qu'on engage le débat.

Mme Lavoie-Roux: Non, M. le Président, c'est qu'il est évident qu'il y avait la nécessité d'une commission parlementaire et le raisonnement du ministre selon lequel si, chaque fois qu'il y a un projet de loi, on a une commission parlementaire... Je suis tout à fait d'accord avec lui. On demande une commission parlementaire, on aurait pu en demander une sur la loi 118 si on avait voulu s'amuser, mais je pense qu'ici, il y avait des principes suffisamment importants, que cela touchait suffisamment d'établissements, de professionnels et la population pour justifier cette commission parlementaire. Je pense qu'il y a même une admission du ministre, à ce moment-ci, selon laquelle il y a beaucoup de gens qui voudraient être entendus à cette commission parlementaire. Tout ce que je lui demande, c'est que, s'il est prêt à entendre les deux groupes qui sont ici, je suis prête à modifier ma motion. Je comprends que le ministre va avoir un problème vis-à-vis des autres groupes, mais ce problème n'est quand même pas le mien. Vous avez ici des gens qui sont intéressés à être entendus; on va prendre des décisions qui vont déterminer leurs conditions de travail ou le mode de fonctionnement dans les hôpitaux et on refuse de les entendre. J'ai non seulement des preuves verbales, mais des preuves vivantes qu'il y a des gens qui veulent être entendus, M. le ministre. Encore là, le ministre se récuse en disant: Je vais avoir des petites séances de travail. Apparemment, il y avait eu des petites séances de travail auparavant, mais elles n'ont pas été satisfaisantes puisque tout le monde veut revenir. Il dit non à ceux qui veulent se faire entendre.

M. Lazure: M. le Président, on revient sur le fond. Encore une fois, je suis bien prêt à admettre que c'est une question d'appréciation, à savoir si c'est nécessaire ou non d'avoir une commission parlementaire sur tel ou tel projet de loi. Je pense que, par définition, c'est une question de jugement; c'est discutable. Votre jugement est discutable; le mien est discutable là-dessus. Ce que je dis, c'est qu'en plus de la commission parlementaire, il y a des consultations véritables qui peuvent être tenues; le plus bel exempte est la consultation que nous avons eue avec la Fédération des médecins spécialistes il y a quelques jours. Je répète encore

une fois — vous n'en parlez pas, évidemment, ce n'est pas de bonne guerre pour vous d'en parler...

Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez, je peux vous en parler des spécialistes; ce sont vos alliés.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lazure: Et l'Association des conseils des médecins dentistes, ces deux groupements hier, l'Association...

Mme Lavoie-Roux: Et tant mieux pour vous!

M. Lazure: Ce n'est pas une question d'alliés ou d'ennemis. Ce sont des groupements responsables, tous aussi responsables que n'importe quel autre qui est ici. Ces groupements ont dit: Nous sommes satisfaits des amendements que vous voulez apporter. Aujourd'hui, on ne se donne même pas la peine d'écouter les amendements qu'on veut apporter et on veut refaire la guerre encore comme mardi dernier sur cette fameuse motion dans le but de convoquer une commission parlementaire. Je trouve qu'il serait injuste d'entendre les deux groupements qui, entre parenthèses, n'ont pas demandé, officiellement, la tenue d'une commission parlementaire, que je sache; alors que les trois autres qui sont ici, que j'ai nommés tantôt, l'ont demandée.

Alors, je pense que cela serait tout à fait inéquitable. Je ne veux pas prolonger le débat là-dessus. Nous serons obligés de voter contre la motion, s'il y a un vote.

M. Forget: Avant que vous ne rendiez une décision finale sur la recevabilité, comme je crois que vous êtes disposé à le faire, M. le Président, je proposerais que nous suspendions pendant quelques minutes nos travaux de manière que des consultations soient permises ou soient possibles avec la présidence. A cet égard, il n'est pas simplement question du projet de loi 103.

Il est important qu'avant de créer des précédents, quant à la recevabilité, on s'entende bien sur la signification de la motion que nous avons présentée. Nous serions peinés qu'un précédent fâcheux soit créé à l'occasion de ce cas d'espèce.

Le Président (M. Jolivet): II faut dire ceci. J'ai eu à présider une autre commission parlementaire où une question semblable s'est présentée sur les hommes à chevaux, si je me souviens bien, au niveau du ministère du Revenu.

Sur cette question, on demandait d'entendre les gens qui se trouvaient dans la salle. Suite à une décision que j'avais rendue — c'est moi qui présidais cette commission — d'entendre ce groupe sans avoir fait l'annonce publique, puisque l'ordre de la Chambre que nous avons est d'étudier, article par article, le projet de loi tel quel...

Que la commission parlementaire fasse une invitation à des groupes de personnes à être entendus à une date ultérieure, comme la motion telle que présentée, c'est au niveau du leader de la

Chambre à décider si la commission parlementaire, qui actuellement étudie article par article le projet de loi en deuxième lecture, peut convoquer à nouveau la commission parlementaire. Ce que la commission peut faire, c'est d'exprimer le voeu d'inviter les gens, tel que vous l'avez fait dans votre motion, en demandant au leader de les convoquer à la commission parlementaire puisque si jamais la commission parlementaire ne l'acceptait pas, jamais la proposition n'aurait un vote positif.

A ce moment, on pourrait continuer la discussion. Ce que j'ai devant moi, c'est qu'actuellement, semblerait-il, à moins que je ne me trompe, on ne veuille pas accepter cette motion d'invitation de gens pour le 18 décembre prochain.

On pourrait continuer la discussion, vous donner vos droits de parole à chacun, passer par la suite au vote qui sera pris. Comme j'ai la certitude, jusqu'à maintenant, que le vote sera négatif, c'était simplement dans le but de vous éviter de perdre du temps sur une motion qui, d'une façon ou d'une autre, actuellement, n'a pas l'assentiment unanime de l'Assemblée. (16 h 30)

Dans ce contexte, si vous voulez utiliser tous vos droits de parole, vous avez le droit de le faire. Je ne vous refuserai pas vos droits de parole. On passera au vote ensuite, mais on va utiliser les droits prévus, c'est-à-dire 20 minutes chacun. C'est à vous maintenant d'essayer de convaincre l'autre partie. Vos droits de parole sont de 20 minutes chacun. Quand on aura épuisé cela, on passera au vote.

M. Forget: M. le Président, je suis vraiment renversé de voir que nous en sommes réduits à plaider des motions pour simplement demander que des gens soient entendus alors qu'ils sont déjà présents et qu'ils ont manifesté leur désir de se faire entendre. Le ministre n'a à nous offrir que la faible excuse, pour expliquer son refus, que ce sera injuste envers d'autres groupes avec lesquels, par ailleurs, il nous annonce qu'il a des rendez-vous demain. Il me semble qu'on est devant une situation déplorable où, sous prétexte de sauver du temps de façon délibérée, on se dirige dans un cul-de-sac procédurier où on accepte délibérément d'en perdre.

Cela doit donc être si important d'empêcher que les gens qui sont ici s'expriment! Cela ne peut pas s'expliquer autrement. Il doit y avoir un impératif quelconque qui fait que, par-dessus tout, même si on doit y passer l'après-midi, les gens qui sont ici, qui ont décidé qu'ils avaient quelque chose à dire, ne se feront pas entendre et on va avoir utilisé tous les moyens pour les en empêcher. C'est un geste sans précédent dans la révision de la loi qui est devant nous.

La loi sur les services de santé et les services sociaux a été modifiée à deux reprises jusqu'à maintenant. Elle l'a été alors que j'occupais le poste de ministre des Affaires sociales. Il y a eu, à l'automne 1974, des commissions parlementaires qui ont siégé pendant dix jours, pas pour l'adop-

tion originale de la loi, pour une modification. Pendant dix jours, dans cette salle-ci, nous avons siégé pour entendre les mémoires d'une quarantaine d'organismes. Ce fut la dernière fois qu'on a eu des auditions publiques de mémoires au sujet d'une modification à cette loi.

En 1977, le ministre, s'inpirant largement d'un travail amorcé avant mon départ du ministère, a introduit une série de modifications qui, je dois l'avouer, étaient plus techniques que celles qui nous sont soumises, dans le sens qu'elles donnaient suite à des engagements strictement administratifs, sauf une partie nouvelle qui avait trait à la mise en application des accords de la baie James pour la création de conseils régionaux dans le Grand-Nord. De toute manière, quelles qu'aient été les raisons — et même sur cette question des conseils régionaux du Grand-Nord, je pense qu'on n'a fait aucun effort particulier pour entendre les groupes autochtones relativement à l'organisation des services de santé et des services sociaux dans ces régions-là. De toute façon, il n'y a pas eu d'audience publique. Cela s'est expédié en l'espace de quelques heures.

Je n'avais bien sûr pas d'objection formelle à y formuler à l'époque, ayant élaboré 95% de ce premier projet.

Cette fois-ci, pour la première fois, on est devant un projet qui provient entièrement, non pas de la plume du ministre littéralement parlant, mais au moins de son inspiration, l'inspiration de ses collaborateurs de A et Z. Il n'y a rien là-dedans que je puisse reconnaître comme étant un héritage de l'administration précédente. C'est entièrement de son cru. Il y a trois ou quatre modifications majeures qui affectent d'une part toute l'organisation médicale et clinique à l'intérieur des centres hospitaliers. C'est un sujet qui, dans n'importe quel pays, sous n'importe quel régime, ferait les manchettes pendant plusieurs semaines, même pendant des mois. C'est un coup de barre pour ne pas dire un tour de vis que l'on donne pour la première fois. Je ne dis pas que ce soit entièrement inapproprié ou inadéquat, je crois qu'il y avait un besoin, je serais le premier à être d'accord avec le ministre là-dessus. Il reste que c'est un geste important. C'est un nouveau départ, en quelque sorte, relativement à l'organisation médicale dans les centres hospitaliers. Ce n'est pas un sujet mineur, ce n'est pas un aménagement administratif, c'est quelque chose d'important. Et même si on est 100% d'accord, par hypothèse, avec la notion d'une planification des services hospitaliers et des services cliniques à l'intérieur des centres hospitaliers, je suis d'accord avec une planification, dans une large mesure. Il reste que les modalités selon lesquelles ce sera fait sont déterminantes. Or, il y a des groupes que cela implique, cela les implique profondément. Cela modifie leur droit, parce que ce sont des droits que la loi leur donne; l'article 192, c'est un droit, que tout médecin a, d'avoir accès à un centre hospitalier. C'est un droit qui ne date pas d'Adam et Eve, c'est un droit qui date d'une dizaine d'années, mais il est réel, il est exercé, il a fait l'objet de litiges devant les tribunaux, on a dépensé des dizaines de milliers de dollars de part et d'autre pour débattre ses implications.

Voici qu'à la fin d'une session, avec toutes sortes de difficultés d'en discuter, avec aucun débat dans la population, le grand public qui subira éventuellement les conséquences bonnes ou mauvaises de cette loi ne sait absolument pas ce qu'on est en train de faire, à la Loi sur les services de santé et les services sociaux, il n'a aucune idée de ce qui se passe. Cela se fait comme si c'était dans un secret voulu, délibérément, pour qu'il n'y ait pas de discussion. Je ne sais pas si c'est délibéré ou non, mais, en tout les cas, le secret est là, l'effet est tout à fait analogue, parce qu'on n'a aucune délibération, pas un éditorial, alors qu'on voit des éditoriaux presque sur la pluie et le beau temps dans certains journaux, il n'y a pas une personne qui se dit informée au Québec, qui a pensé qu'il y aurait peut-être là quelque chose d'important.

Il faut quand même se poser des questions. Voilà qu'on est en train de débattre une motion peut-être pour entendre des gens, peut-être pas tous ceux qui voudraient être entendus, mais ceux qui, par bonheur, se trouvent présents ici. On est en train de se demander si ça ne pourrait pas s'empêcher, d'une façon ou d'une autre, du côté ministériel.

Je n'y comprends plus rien. Bon, d'accord, il y a toujours une partie d'exagération quand on dit: On veut être un gouvernement transparent, ouvert, etc. On sait bien qu'on ne peut pas gouverner sur la place publique, continuellement, et on est bien prêt à faire certaines concessions avec la nécessité de faire les affaires publiques, de mener le gouvernement avec un minimum d'efficacité et ne pas prendre trois ans pour chaque décision. D'accord, il ne faut pas exagérer de ce côté. Mais, Bon Dieu! quand on discute d'une question comme celle-là, quand on discute d'un changement de règles du jeu, dont il est difficile pour nous — et pourtant, je connais un peu ce secteur — d'évaluer les implications de certaines autres dispositions relativement à la conversion de certains établissements, sans leur concours, sans leur volonté, de fusion obligée, il est difficile de mesurer exactement où on s'en va de ce côté-là, quelles sont les véritables intentions et les véritables implications. Bien sûr, on peut faire un tas d'hypothèses, dans notre bureau, au deuxième étage, dire: Oui, ça peut vouloir dire çi ou ça peut vouloir dire ça. Mais ce sont quand même des choses importantes et il n'y a personne qui va être impliquée et qui va dire: Selon nous, le conseil régional du Bas-du-Fleuve ou le conseil régional de te) autre endroit, on pense que c'est une bonne mesure, parce que... cela nous rassurerait, ou c'est une mauvaise mesure, pour telle ou telle raison, c'est une mesure qui va trop loin.

C'est une loi importante, cette loi, la loi 65, parce que c'est ça, la loi 65 de 1971, cela a rempli les journaux. J'ai, chez moi, une caisse complète de coupures des journaux de l'époque. Cela a fait l'objet de toutes les conversations et de tous les

débats. Mais c'est cette loi qu'on amende actuellement dans un vacuum politique, dans un vide d'opinion absolument complet. Je n'y comprends plus rien. Si on faisant des plats au sujet d'un changement... J'ai vu, après les amendements de 1974, des émissions spéciales pendant une semaine, à la télévision et à la radio, pour expliquer tel ou tel article obscur qu'on a oublié depuis d'ailleurs, sur un amendement que j'avais introduit en 1974, comme si c'était la loi déterminante pour l'avenir collectif du Québec.

Voici qu'on en change plus dans cette loi et sur des points plus fondamentaux. Il n'y a pas un chat qui en parle. Il y a quand même quelque chose de valable. Est-ce que ce sont les journalistes qui ne font pas leur travail? Est-ce tout le monde, autrement dit, qui est fou ou qui est tombé sur la tête, mais que le gouvernement là-dedans a agi complètement naturellement? Il y a au moins un point d'interrogation que j'aimerais poser. J'ai l'impression qu'il y a quand même une absence de conscience de la part du ministre, de l'importance de ce qu'il fait, un désir de le faire rapidement et vite, en décembre, alors que, parfois, le hasard voudra qu'on discute de ces questions entre minuit et 2 heures du matin, qu'on sait, un moment très propice, pour une discussion rationnelle et informée et qui a un grand retentissement dans le public. On sait combien c'est facile de discuter à ce moment-là, alors qu'on a aussi la loi du zonage agricole et un tas d'autres choses qui captivent l'attention du public.

M. le Président, je regrette d'avoir à parler 20 minutes, mais je vais parler 20 minutes.

Le Président (M. Jolivet): Je vous en sais capable.

M. Forget: Les 20 minutes que j'utilise pour parler, on aurait pu les utiliser pour entendre le Dr Hamel, M. Chicoine, etc. Voir un dentiste ici me soulève une question. On parle des départements cliniques. On va sûrement parler du rôle du conseil des médecins et dentistes. On va sûrement avoir des débats là-dessus. On parle également des départements cliniques en supposant que tous les médecins sont sur un même pied. Ce n'est pas pour rien que le Dr Hamel est ici. Le Dr Hamel est ici pour souligner le fait que, dans les hôpitaux, il y a une majorité, dans bien des cas, de spécialistes. On va probablement faire des références au conseil des médecins et dentistes où les spécialistes sont majoritaires.

Quel est le rôle des omnipraticiens dans cela? Est-ce qu'ils vont constamment avoir à se plier à la volonté ou aux avis exprimés par la majorité des spécialistes sur la facture ou la disposition ou l'organisation ou le nombre de médecins de différentes catégories?

On sait très bien ce qui va arriver si c'est cela. Il va arriver ce qui était souvent le cas dans le passé, c'est qu'il n'y aura pas de place dans nos hôpitaux pour les omnipraticiens. Est-ce que c'est une bonne chose ou une mauvaise chose? Est-ce que c'est dans cette direction qu'on veut aller ou non?

On peut improviser là-dessus, bien sûr. On peut se dire que tout est entre bonnes mains et puis à la grâce de Dieu! On verra bien ce qui va en résulter avec le temps. Mais ce n'est pas comme cela qu'on peut légiférer intelligemment. Il n'y a pas de rapport qui a été déposé par le ministre à l'Assemblée nationale pour dire: Après mûre considération, voici ce qu'on veut faire avec cela. On invoque des raisons budgétaires. Ce matin, on lit, dans le Devoir, selon apparemment des rumeurs généralement bien informées et selon le voeu, semble-t-il, des médecins spécialistes, que la référence au budget va être passée sous silence, qu'on va moins insister sur les contraintes budgétaires. Si ce n'est pas cela la raison, c'est quoi l'objectif? Est-ce que c'est une autre raison? Est-ce qu'il y a quelque chose qui justifie une autre approche que la contrainte budgétaire pour édic-ter des règles comme celles-là? Cela non plus, on ne le sait pas.

M. le Président, que dire devant une attitude comme celle-là, de la part du ministère des Affaires sociales, sinon la qualifier de peu sérieuse? Il y a, malgré tout, dans le réseau des établissements, des gens qui ont une expérience valable à communiquer, qui l'ont fait à d'autres occasions dans le passé et qui pourraient le faire à cette occasion-ci également.

Ce n'est pas seulement... Et c'est important de le dire, parce qu'il y a quand même des implications dans certaines remarques que le ministre fait à l'occasion: On sait bien ce qu'ils vont nous dire, eux autres. Ils viennent défendre leurs intérêts. Et on sait très bien ce que vient nous dire un autre groupe. De toute manière, ce seraient quinze mémoires sur quinze lois différentes, et ils viennent toujours dire la même chose.

C'est ce genre de remarque qui sous-tend souvent, implicitement ou explicitement parfois, le genre de réponse qu'on fait: Des commissions parlementaires, maintenant, on n'en a plus besoin. On les connaît par coeur. On connaît le disque, la cassette de chacun.

C'est assez méprisant. Bien sûr, il y a une grande partie des préoccupations des gens, parce qu'ils restent toujours les mêmes gens, avec les mêmes occupations et les mêmes préoccupations. On n'y peut rien. Mais de là, d'avance, à dire qu'ils n'ont rien de nouveau à dire, qu'ils ne font que défendre de vulgaires intérêts personnels, ou donner à comprendre que c'est du "special pleading" selon l'expression anglaise, c'est-à-dire que chacun plaide sa cause, mais que, parce que c'est sa cause, parce qu'il est personnellement impliqué, cela ne mérite pas d'être regardé avec plus d'intérêt que cela...

C'est vrai, cela a toujours été le cas. Dans les commissions parlementaires, on a vu ce genre de plaidoyer pro domo que chaque groupe fait pour lui-même. Mais c'est légitime, M. le Président. C'est tout à fait légitime. Le ministre, comme les membres de l'Assemblée nationale de ce côté-ci de la table, sont tout à fait capables de faire la différence entre un plaidoyer "self serving", purement égoïste, et ce qui peut avoir une répercus-

sion sociale plus importante. On est tous capables de faire cette distinction.

Cela ne veut pas dire, parce que la distinction doit être faite, qu'il ne faut pas écouter les propos en question. Je suis convaincu qu'il y a ce genre de préoccupation; je suis bien convaincu que les dentistes vont dire: II faut qu'on s'occupe des dentistes. Et les omnipraticiens vont dire: II faut qu'on s'occupe des omnipraticiens. Les étudiants vont dire au ministre demain: Ne nous oubliez pas là-dedans, on ne veut pas être le dindon de la farce si vous voulez faire de la rationalisation dans le secteur hospitalier. On trouve que cela est une bonne idée, mais on n'aime pas être ceux qui en paient tous les coûts. Et les résidents et internes vont dire la même chose, ils vont dire: Dans les hôpitaux d'enseignement, nous, on a droit à un enseignement de qualité et, si vos plans de rationalisation budgétaire, dans le milieu de l'enseignement, sont trop sévères, on n'aura plus de professeurs, on n'aura plus personne pour superviser nos stages cliniques, notre internat, notre résidence. (16 h 15)

Les programmes d'enseignement, cela a des préoccupations. Si le ministre voyait les doyens des facultés de médecine, eux aussi auraient des choses de ce genre à lui dire. C'est bien sûr que chacun plaide sa cause dans un certain sens, mais ce n'est pas seulement le plaidoyer qui sert les intérêts des gens, il y a aussi, derrière cela, les véritables intérêts d'éducation médicale, les véritables intérêts d'un accès raisonnable pour les omnipraticiens à la pratique hospitalière. Je crois que cela fait partie d'un fonctionnement normal de notre réseau hospitalier. Il s'agit de lui définir une place appropriée. D'ailleurs, ils seraient d'accord avec cela. Il n'y a rien là qui puisse les étonner.

Du côté des dentistes, bien sûr, ils sont minoritaires dans le milieu hospitalier et ils ont besoin de nous le rappeler constamment. Autrement, ils risquent probablement d'avoir le mauvais bout du bâton. C'est important que la population ait, en milieu hospitalier, pour certains besoins bien précis, l'accès à des services dentaires, selon une méthode qui ne subordonne pas une catégorie de professionnels à une autre.

Il y a dans tout cela, M. le Président, des choses tout à fait légitimes, enrichies de beaucoup de détails, d'applications concrètes qui méritent toujours d'être entendues. C'est la raison qui nous pousse à faire une motion comme celle-là. On est désolé d'être obligé de la faire. Ce n'est pas du tout de gaieté de coeur qu'on met à exécution l'intention qu'on avait annoncée au ministre en disant: Ecoutez-les donc, ce sera bien plus utile que de nous écouter. Malheureusement, le ministre préfère nous écouter. J'espère qu'il en tire son profit, un peu, malgré tout. On essaie d'être le plus utile et constructif possible, mais cela ne se compare pas, sans aucun doute, au bénéfice qu'il aurait pu retirer, avec les autres membres de la commmission, d'une audition raisonnable, brève, concise. Je suis sûr que les groupes impliqués auraient pu le faire. Ils auraient pu être concis; ils auraient pu être brefs. Ils auraient pu être utiles surtout aux membres de la commission. Ils auraient pu aider à ce processus d'éducation également de l'opinion publique.

Il y a des journalistes ici. Ils nous font l'honneur de leur présence. Ce n'est pas toujours qu'on peut signaler leur présence en commission parlementaire, mais ils se sont rendu compte, eux aussi, que la question de la loi 103, ce n'est pas indifférent à l'intérêt public, ce n'est pas simplement un débat de procédure. Il y a quelque chose dans la loi 103. On commence à le réaliser. Je parie qu'il va y avoir plus d'articles dans la loi 103, en janvier et en février, qu'il y en a eu en novembre et en décembre; mais il sera trop tard. C'est bien dommage, il sera trop tard. On va dire: Dans la loi nouvellement adoptée et sanctionnée le 24 décembre par le lieutenant-gouverneur, il y a un certain nombre de choses qui évoquent les réactions négatives dans le milieu hospitalier. Cela n'aidera pas au climat de l'année 1979 qui promet d'être intéressant, c'est le moins qu'on puisse dire, dans le milieu hospitalier. On va y contribuer dès le 1er janvier. C'est probablement une intention du Nouvel An du ministre de contribuer, à sa façon, à l'amélioration du climat.

M. le Président, je termine là-dessus, en déplorant le négativisme du ministre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé, sur la motion.

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas employer les vingt minutes à ma disposition, par respect pour les médecins et les dentistes ou les groupes qui sont dans la salle. En ce moment, je me demande ce qu'ils pensent de nous. Je me demande s'ils nous aiment beaucoup, parce qu'on peut s'employer à discuter de cette motion jusqu'à 18 heures, si on veut. Nous aurions eu amplement le temps, de 16 heures à 18 heures, d'entendre ceux qui sont ici.

Je constate ici, par une série de télégrammes en date du 7 décembre dernier, que certains groupes auraient aimé se faire entendre, présenter leurs doléances, présenter leurs revendications devant une commission parlementaire. Le point qui m'étonne, puisque nous vivons en démocratie, quand je pense à ceux qui sont là, qui nous regardent, qui nous écoutent et qui vont certainement se dire tout à l'heure, si le débat se prolonge: Pendant tout ce temps, on aurait pu simplement aller s'asseoir à la table et, à quinze ou vingt minutes pour chaque groupement, on aurait pu faire entendre notre point de vue et le ministre aurait été éclairé ainsi que les membres de la commission. Le malheur dans tout cela, c'est qu'ils vont nous voir perdre du temps à accomplir une mission qui, je pense, est très honnête. Il y a d'autres groupes également qui se sont plaints. Nous en avons eu des échos, du moins, dans notre parti — de ne pas avoir reçu le projet de loi. La Fédération des services de santé du Québec, l'Association des centres d'accueil, les centres sociaux, la Fédération des CLSC...

Mme Lavoie-Roux: C'est nouveau cela!

M. Le Moignan: Ce sont des appels téléphoniques de gens qui s'inquiétaient, qui n'avaient pas reçu le projet de loi et, à la toute dernière minute, il y a l'Association des hôpitaux du Québec, l'AHPQ, qui nous disait qu'elle avait reçu le projet de loi, mais un peu trop tard pour solliciter ici sa présence et inviter la commission à l'entendre. Pour toutes ces raisons — je ne veux pas expliciter davantage — le temps que l'on perd actuellement... Je pense que les groupes qui sont dans la salle doivent se dire: Si les députés fermaient leur poste de radio et s'ils nous invitaient à aller à la table, on serait beaucoup plus éloquents qu'eux et ils sauraient pourquoi, en somme, nous sommes venus ici aujourd'hui. J'ai terminé.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: M. le Président, je suis descendu de la Chambre, parce que j'ai su qu'il y avait des personnes impliquées dans le projet de loi 103 qui voulaient présenter leur mémoire devant cette commission, à l'avantage, pas seulement des députés qui sont responsables de présenter convenablement leur projet de loi et faire des amendements, mais peut-être pour donner des éclaircissements sur le fond de ce projet de loi. Nous avons vu hier que nous avons eu l'avantage d'entendre les responsables des syndicats des professionnels de la santé et même des corporations professionnelles de la santé qui, véritablement, ont fait certaines recommandations que même le ministre a acceptées comme valables, comme une amélioration à son projet de loi.

Est-ce que cela arrive toujours en fin de session que le processus d'évaluer un projet de loi est mis de côté? Est-ce que le gouvernement essaie d'agir avec une forme de bulldozer pour forcer l'adoption de certains projets de loi qui sont vraiment une inquiétude pour la population? Je n'ai jamais vu, parmi ceux qui sont responsables dans les milieux des affaires sociales, l'inquiétude qu'on voit présentement concernant le projet de loi 103. Il y a certaines prises de position sur ce projet de loi qui sont véritablement un changement profond dans le domaine de la santé, des centres d'accueil, des centres hospitaliers et qui peuvent affecter la qualité des services, la qualité de la gestion. Ceux qui sont impliqués, l'Association des hôpitaux du Québec, l'Association des chirurgiens-dentistes du Québec, l'Association des omnipraticiens du Québec, qui sont impliqués de très près dans ce dossier, veulent au moins donner leur point de vue. Est-ce que les changements prévus dans ce projet de loi sont aussi importants, ont autant de valeur qu'on doive faire adopter le projet de loi avant les Fêtes? Est-ce que ce projet de loi apporte un si grand changement dans la gestion des affaires sociales qu'un délai pour entendre des témoins qui sont des experts en ce domaine est aussi important? Je ne crois pas.

Je m'étonne qu'on ait besoin de forcer l'adoption de projets de loi qui sont aussi importants que les centres d'accueil. Par exemple, sur la question des lettres patentes, cela implique une chose très importante pour la Législature concernant l'habilité même du ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, Mme Payette . Est-ce que cela lui donne le pouvoir d'enlever maintenant des lettres patentes à un organisme qui est peut-être responsable de la gestion d'une propriété depuis cent ans souvent? Le gouvernement croit-il que si des fonds publics ont subventionné les activités de tel centre d'accueil ou de tel centre hospitalier, croit-il que s'il y a eu des fonds qui provenaient de dons privés, parce qu'il y a certains centres qui sont là à cause de personnes privées qui ont fait des dons pour faire fonctionner un centre d'accueil comme Saint-Patricks Society, Weredale Society, maintenant, parce que ce gouvernement est impliqué depuis le projet de loi 65, parce que le gouvernement a commencé à s'impliquer dans les affaires sociales plus directement, croit-il que cela enlève de la valeur à la gestion originale de ces parties impliquées? Est-ce qu'on peut dire qu'un groupe comme le Weredale House n'a pas l'entraînement, la formation adéquate pour faire fonctionner ce centre d'accueil parce que ce centre a été financé au début par des dons de personnes privées, par certains dons du gouvernement et que. maintenant, il est la propriété du gouvernement? Est-ce que ce pouvoir de prendre le contrôle de ces centres est réaliste avec tout ce que nous savons sur la qualité même de la gestion du ministre des Affaires sociales?

Nous avons entendu aussi exposer ce fameux plan d'administration des hôpitaux. Je crois que cela va changer beaucoup de choses parce que, maintenant, quelqu'un qui a les qualifications ne peut plus, avec ce projet de loi, aller dans un centre hospitalier pour pratiquer sa profession, parce que cette nouvelle formulation va contrôler le nombre de spécialistes dans chaque établissement. Est-ce que cela va fonctionner pour la population ou est-ce que cela va fonctionner contre la population? C'est évident que ceux qui sont en place vont avoir plus de patients. Pourront-ils agir peut-être avec moins de pression? Peut-être n'auront-ils plus besoin de montrer leur efficacité. Leur concept de la concurrence va leur être enlevé au complet. Je ne trouve aucunement que cela puisse faire mieux fonctionner un centre hospitalier. De plus, la question que, pour n'importe quelle raison, choisit une raison unilatérale, le ministère des Affaires sociales peut dépasser la gestion régionale pour faire changer la vocation d'un centre hospitalier, sans consulter la population qui, pour le moment, emploie ce centre pour les soins médicaux, comme, par exemple, le Sherbrooke Hospital qui est là depuis 75 ans, donnant des services aux personnes de la région. Maintenant, le gouvernement décide qu'il est plus opportun de considérer ce centre hospitalier comme un centre pour les maladies mentales de longue durée, malgré tous les avantages que les

personnes de la région ont eus, tous les bénéfices de l'expertise médicale dans cette région, et même si les gens croient que c'était mieux pour les patients d'être soignés dans ce centre hospitalier, ce centre de soins généraux en médecine. (17 heures)

Nous savons fort bien que les représentants de la Fédération des omnipraticiens et de l'Association des chirurgiens dentistes sont prêts maintenant. Nous avons une heure pour les entendre. Ils ont un petit mémoire à vous présenter. Le ministre est-il prêt à les entendre?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. Vous avez droit de réplique à ce moment.

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas encore parlé sur la motion.

Le Président (M. Jolivet): Je ne sais pas si vous jugez que vous n'avez pas parlé sur l'ensemble depuis le début. C'est vous qui l'avez présentée. Vous avez parlé au moins 40 minutes au début. C'est au niveau, c'est la motion que vous avez présentée...

Mme Lavoie-Roux: 40 minutes, vous y allez un peu fort. On est arrivé à 4 heures.

M. Lazure: Mettons 20. Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, vous allez avoir votre droit de parole quand même.

Mme Lavoie-Roux: Ah! Je vais avoir le droit de parole.

Le Président (M. Jolivet): Vous aurez vos 20 minutes. Ne vous inquiétez pas.

M. Shaw: Je n'ai que posé un question au ministre. Je n'ai pas fini mon intervention. Je n'ai que posé une question. Il est sûr que je vais prendre mes 20 minutes.

Le Président (M. Jolivet): N'oubliez pas que...

M. Lazure: M. le Président, je réponds à la question.

Le Président (M. Jolivet): Seulement une minute pour clarifier, M. le ministre. C'est que, d'une façon ou d'une autre, indépendamment de cela, la réponse du ministre est contenue dans vos 20 minutes.

M. Lazure: Je réponds à la question. Encore une fois, je voudrais être bien compris. Je ne refuse pas d'entendre les représentants de la Fédération des omnipraticiens qui sont ici dans la salle, ni les représentants de l'Association des chirurgiens dentistes.

Je répète encore une fois que, s'ils ne s'agissait que de ces deux groupements, je serais d'accord, tout de suite, séance tenante — et on n'aurait pas eu ce débat — pour les entendre, mais il y a d'autres groupements et je trouve que c'est injuste. Mais, plus important que cela, M. le Président, je pense que l'Opposition, en particulier l'Opposition officielle, essaie, et c'est peut-être de bonne guerre, pour des motifs politiques dans le sens noble du terme, de reprendre un débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale mardi soir dernier et qui a duré deux heures; elle essaie de reprendre le même débat et je pense que c'est antiparlementaire et inapproprié.

Je suis prêt à rencontrer les gens qui sont ici immédiatement au moment de l'ajournement de nos travaux à 18 heures, s'ils le veulent, comme j'ai rencontré les autres groupements qui ont demandé à me rencontrer et je souligne, pour revenir à la question du député de Pointe-Claire, que les deux groupements qui sont représentés ici ne m'ont pas demandé de tenir une commission parlementaire pour être entendus, et c'est pour cela que je parle du rôle politique que l'Opposition joue. C'est normal qu'elle joue ce rôle. C'est de bonne guerre de se faire les porte-parole d'un groupement, mais je pense que c'est charrier un peu fort quand les groupements en question n'ont même pas eux-mêmes fait la demande d'une commission parlementaire. C'est un peu être plus catholique que le pape. Je pense que nous n'avons pas à recevoir de leçon de qui que ce soit. Si on fait le bilan des commissions parlementaires qui ont été tenues depuis deux ans, depuis novembre 1976 — et je mets quiconque au défi de prouver le contraire — nous avons tenu un plus grand nombre de commissions parlementaires... les commissions parlementaires ont duré plus longtemps que durant les deux années précédentes.

M. Shaw: M. le Président, pour continuer, je peux...

Mme Lavoie-Roux; Je ne peux pas contester cela, M. le ministre, je ne suis pas au courant.

M. Shaw: Les raisons, la dernière fois que nous avons gaspillé... C'est vrai que c'est un gaspillage de temps de parler de motion, de retard, mais la motion qui a été proposée par Mme le député de L'Acadie est à cause du fait que nous avons besoin d'entendre ces témoins. Leur témoignage est important pour le sujet. Si ce gouvernement est responsable, je crois qu'il essaie de l'être, et si les fonctionnaires du ministère des Affaires sociales sont aussi responsables, ils vont vouloir entendre tous les témoins impliqués dans un projet de loi avec autant de changements de fond de directions que nous avons vécus depuis un bout de temps. On parle de changement de politique du contrôle des institutions. C'est un changement de fond. Ce n'est pas un petit changement. On dit maintenant que le gouvernement n'est pas seulement une forme de contrôle, mais

c'est la gestion directe de certains centres hospitaliers et de centres d'accueil dans la province. On sait fort bien que le ministère fait les budgets et les envoie aux hôpitaux maintenant. Est-ce que cela représente une gestion régionale ou une gestion centralisée? Vous avez toujours parlé, dans la politique du Parti québécois, que vous étiez pour une politique de décentralisation des pouvoirs, mais on voit chaque jour, dans chaque projet de loi, une autre étape vers la centralisation des pouvoirs à la bureaucratie centrale du gouvernement...

M. Lazure: Est-ce que le député de Pointe-Claire me permet une question?

M. Shaw: Certainement.

M. Lazure: Est-ce que le député de Pointe-Claire sait que dans ce projet de loi qu'on tarde à discuter, il y a justement un article qui va donner des pouvoirs accrus aux conseils régionaux des services de santé et des services sociaux et que cette discussion retarde cette transmission des pouvoirs.

Mme Lavoie-Roux: Mais quand viendra le temps, vous allez pouvoir les dissoudre, M. le ministre.

M. Lazure: C'est une disposition tout à fait normale qui avait été oubliée par le gouvernement libéral en 1970. Chaque fois qu'on...

Mme Lavoie-Roux: C'était un heureux oubli.

M. Lazure: Voyons donc. C'est du droit ordinaire.

M. Shaw: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): N'enlevez pas le droit de parole au député de Pointe-Claire. Il lui reste encore trois minutes.

M. Shaw: On sait fort bien, M. le Président, que l'on mette un autre membre à un comité régional, s'il n'a pas le pouvoir de gestion ou de prendre des décisions sans demander la permission aux fonctionnaires du gouvernement dans la ville de Québec, cela ne donne rien. On peut mettre 50 autres personnes à un comité régional, si ce comité n'a pas de pouvoir de faire des choses, c'est une mascarade, parce que véritablement on a besoin de donner des pouvoirs de gestion au comité régional.

Mme Lavoie-Roux: C'est de la transparence. Suspension du débat, M.le Président?

Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez toujours la demander, mais il n'est pas sûr que j'accorde la suspension. M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: M. le Président, on peut peut-être attendre quelques minutes le ministre, parce que c'est à lui que j'essaie de parler et, s'il n'est pas ici, j'espère que vous allez suspendre quelques minutes...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je suis dans l'obligation de vous demander de venir vous rasseoir à mes côtés.

M. Shaw: II est allé prendre sa décision. M. Lazure: Vous aviez le quorum.

Le Président (M. Jolivet): M.le député de Pointe-Claire manifeste le désir de vous parler.

M. Lazure: Encore une question?

M. Shaw: Oui, j'ai une question à poser au ministre. Même si vous démontrez que vous voulez nommer plus de personnes au comité régional, est-ce que vous allez leur donner des pouvoirs de décision? Quelle sorte de pouvoirs de décision vont-elles avoir?

M. Lazure: C'est l'article 2, M. le député de Pointe-Claire, première page: "D'exercer, à l'intérieur de son territoire, toute autre fonction ou d'assumer le coût de tout programme reliés à l'administration des services de santé et des services sociaux et qui lui sont confiés par le lieutenant-gouverneur en conseil." A titre d'exemple, depuis un an et demi, on a donné des mandats de ce genre. On veut asseoir cette pratique dans la loi. C'est une pratique administrative qu'on avait commencé à prendre, par exemple, les crédits additionnels qu'on donne depuis deux ans pour l'aide à domicile: il y a deux ans, $3 500 000; cette année, $7 millions de plus. On a partagé, per capita, cette somme d'argent dans les dix régions du Québec. On a envoyé un chèque à chaque CRSSS. On a dit: Voulez-vous, s'il vous plaît, distribuer et vous décidez, vous avez le pouvoir de décision...

M. Shaw: Oui, quelle sorte de décision?

M. Lazure: ... comment distribuer cet argent, selon quelques critères. Oui. Les personnes âgées, les malades chroniques, les personnes handicapées. Vous êtes contre les critères, vous?

M. Shaw: Non.

M. Lazure: Vous êtes contre ça?

M. Shaw: Je suis totalement pour les critères.

M. Lazure: Alors, à l'intérieur de ces critères, vous décidez et vous nous informez, vous nous envoyez un rapport dans trois mois. C'est ce qu'on a fait. On a fait la même chose pour une somme de $23 millions, il y a un an aussi, de l'argent qui

venait de la relance économique, la création d'emplois temporaires. Chacun des dix CRSSS a décidé de l'attribution de ces $23 millions. On a été seulement informés, nous. C'est la même chose pour les équipements des établissements, dans les hôpitaux et centres d'accueil.

Il y a beaucoup de pouvoirs de décision qui appartiennent déjà aux CRSSS et on veut les augmenter, si vous nous laisser adopter cette loi.

Le Président (M. Jolivet): Votre droit de parole étant écoulé et compte tenu que nous entrons dans la discussion, je vais laisser au ministre son droit de parole, s'il veut l'exercer sur la motion.

M. Lazure: Oui. Mme Lavoie-Roux: ...

M. Lazure: Je ne prendrai pas vingt minutes, je ne suis pas bavard. Bon.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Pointe-Claire, vous n'écoutez pas le ministre?

M. Shaw: Je vais l'écouter.

M. Lazure: Même en l'absence du député de Pointe-Claire et en l'absence du député de Saint-Laurent, je vais faire quelques remarques qui touchent surtout aux commentaires du député de Saint-Laurent. Toujours dans ce contexte un peu politique de reprendre un débat qui a occupé le temps de l'Assemblée pendant au-delà de deux heures mardi soir, le député de Saint-Laurent est coupable d'un certain abus de langage quand il dit qu'on veut réorganiser complètement le système hospitalier. Ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas.

Je pense que c'est le même abus de langage qu'on a entendu hier en commission parlementaire sur le projet de loi 84. Et cet abus de langage, pour ceux qui ne l'auraient pas lu, est bien souligné dans un éditorial du Soleil aujourd'hui, signé Monique Payeur, qui démontre bien qu'il y a eu des abus de langage et que ce projet de loi, finalement, est un projet qui vise à un resserrement administratif nécessaire, c'est le titre de l'éditorial.

Cela n'est pas une réorganisation majeure. Le grand public, le député de Saint-Laurent nous le dit, n'est pas au courant. Je fais remarquer au député de Saint-Laurent que, dès le mois de juin, il y a eu des articles dans les journaux, au moment où on a annoncé la décision du Conseil des ministres de procéder à un plan de redressement budgétaire dans chaque hôpital qui avait accumulé un déficit. On le dit clairement. Cela a été dit dans les journaux, à l'époque, que ce plan de redressement devait toucher l'ensemble du personnel dans les hôpitaux, autant que le personnel médical, clinique, que le personnel syndiqué et le personnel cadre. On l'a dit ça. Il n'y a jamais eu de cachette.

M. le Président, je pense que le député de Saint-Laurent nous induit en erreur, essaie d'in- duire la commission en erreur quand il dit que le gouvernement veut procéder en cachette, ce n'est pas le cas. Il y a eu cette grande consultation, je le répète, en juin et les gens savaient fort bien où on s'en allait. La preuve, c'est que la Fédération des médecins spécialistes et l'Association des conseils de médecins dentistes n'ont pas été surpris et, avec quelques légères modifications que nous allons apporter, ils se disent satisfaits. (17 h 15)

Pour le journal des Débats, M. le Président, toujours dans le Soleil d'aujourd'hui, mardi, 12 décembre, je cite un article signé Roger Bellefeuil-le, qui est ici dans la salle et qui dit, en parlant de l'Association des conseils de médecins dentistes qui donnait une conférence de presse, hier, à Montréal, sur les deux projets de loi, donc 84 et 103 — c'est pertinent puisqu'il s'agit de 103, son président, le Dr Jacques Lambert, faisait en effet savoir que, somme toute, la plupart des dispositions des deux projets de lois, 103 et 84, sont conformes aux demandes et aux besoins des médecins d'hôpitaux.

Je pense qu'il faut arrêter d'essayer d'induire la population en erreur et de faire peur à la population, quand on dit qu'on veut faire une grande réorganisation des services hospitaliers et qu'on fait cela en cachette.

Bien honnêtement, tel n'est pas le cas, et plusieurs l'ont reconnu. Je pense qu'il faut prendre en très sérieuse considération l'opinion du Dr Lambert, qui représente tous les médecins, plusieurs milliers de médecins et dentistes qui oeuvrent en milieu hospitalier.

Je n'ai jamais prétendu — et le gouvernement n'a jamais prétendu non plus — que nous n'avions pas besoin de commission parlementaire. Je le répète encore une fois. Les consultations, que ce soit un groupe ou individuellement, elles se font tout au cours de l'année. Je pense qu'il ne faut pas perdre de vue que ce n'est pas pour rien qu'à l'occasion d'un projet de loi qu'un ministre ou un ministère consulte, dans notre cas, les personnes qui oeuvrent dans le réseau des affaires sociales, que ce soit dans les hôpitaux, dans les CLSC ou dans les centres de services sociaux.

Nous ne sommes pas étonnés de la réaction de certains groupements. Encore une fois, si le député de L'Acadie et le député de Saint-Laurent veulent vraiment que, comme résultat, ces deux groupes soient entendus, je vous dis tout de suite, M. le Président, que, dès six heures, je suis prêt, avec nos fonctionnaires, à les rencontrer et à mettre le temps qu'il faut pour les entendre. C'est vraiment l'essentiel. L'essentiel, ce n'est pas de prendre deux heures, comme on l'a fait mardi dernier, à l'Assemblée nationale, pour que cela apparaisse dans le journal des Débats.

L'essentiel, c'est d'entendre le Dr Hamel, porte-parole de la FMOQ, et le Dr Chicoine, porte-parole des dentistes, et je suis prêt à le faire dès six heures. M. le Président, je pense que nous devons au plus vite disposer de cette motion et passer à l'étude article par article de ce projet de loi qui a des conséquences nécessaires impor-

tantes, je l'admets, mais relativement modestes quand même par rapport à l'organisation.

Quant à l'organisation — et c'est ma dernière remarque pour madame le député de L'Acadie, qui est peut-être un peu moins familière avec cela que le député de Saint-Laurent — le député de Saint-Laurent exagère grossièrement quand il dit qu'on veut affecter toute l'organisation, l'organisation des services cliniques, des départements cliniques, cela n'est même pas dans la loi, c'est dans les règlements. Or, on n'y touche pas, aux règlements, on n'y touche pas.

En clair, pour que le public comprenne bien — et on n'a jamais caché notre jeu dans cela — on ne veut pas mettre notre nez dans l'organisation clinique. On veut effectivement que, dans les départements cliniques, médecine, chirurgie ou autres, il n'y ait pas un nombre excessif de médecins dans certains hôpitaux des grandes villes, Montréal et Québec en particulier, puisque ceci se fait au détriment des hôpitaux de petites villes et de régions éloignées.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: C'est ma réplique. Je ne sais pas si le député de Mégantic-Compton veut parler.

Le Président (M. Jolivet): Vous n'avez pas le droit de parole, à moins que l'assemblée vous l'accorde, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Lazure: Est-ce que je peux poser une question au député de Mégantic-Compton?

Le Président (M. Jolivet): Juste une minute. Moi, je n'ai aucune objection. C'est l'assemblée qui doit le déterminer. Vous avez été remplacé, comme membre de la commission, par le député de Gaspé. A partir de ce moment, on ne m'a pas averti qu'il y avait un intervenant à la place de M. Fontaine. Je dois considérer qu'à moins qu'il y ait consentement unanime...

M. Grenier: Je n'ai même pas le droit de vous dire cela, mais je le dis en dehors du micro. J'avais cru que vous aviez saisi qu'il prenait cela et que je prenais le rôle d'intervenant.

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas ce qu'on me dit. Moi, je n'ai pas d'objection.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, M. le Président.

M. Lazure: Avant de me prononcer là-dessus, je veux juste demander au député de Mégantic-Compton d'éclairer ma lanterne et lui demander si, à la fin du débat, je me souviens que le vote a été reporté au lendemain, mais il y a quand même eu vote sur la motion du député de L'Acadie, qui réclamait une commission parlementaire, si, à titre de membre de l'Union Nationale, il a voté pour ou contre la motion du député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Ils se sont abstenus M le Président.

M. Lazure: J'aimerais l'entendre de la bouche du député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je n'ai pas le droit d'intervenir tant qu'on ne m'a pas donné le droit de parole.

M. Lazure: Je vais poser la question au député de Gaspé, dans ce cas-là. M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: J'étais absent, M. le ministre. J'étais absent.

M. Lazure: Mais il y a le consentement de notre part pour donner la parole au député pour répondre à la question, en tout cas.

Mme Lavoie-Roux: Pour tout.

Le Président (M. Jolivet): II pourrait répondre à la question; cependant, dans ce contexte-là, le député de Rosemont avait demandé la parole avant.

M. Paquette: Je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Jolivet): Allez-y, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Pour répondre à la question, il faut dire une chose, c'est que, quand on a été saisi de la motion proposée par le Parti libéral — je me demande si c'était celle de Mme Lavoie-Roux ou de M. Forget, député de Saint-Laurent, à ce moment-là — vous vous souvenez qu'on avait eu vent que deux étudiants — je me rappelle fort bien cette nuit-là — qui étaient dans l'arrondissement ici auraient voulu être entendus par le ministre. Depuis ce temps, on a reçu des demandes, ce qui est une coutume assez régulière, par télégrammes, de la part d'associations qui demandent à être entendues, ce qui change passablement l'aspect des choses. J'aurais voulu, à la suite de cela, demander au ministre de me faire entendre.

M. Lazure: Avez-vous voté pour ou contre ou est-ce que vous vous êtes abstenu? Je suis sérieux, je veux...

M. Grenier: Sur la motion libérale, je pense que j'ai voté contre, à ce moment-là.

M. Lazure: Vous avez voté plutôt contre, n est-ce pas?

M. Grenier: Je m'excuse, sur division.

M. Lazure: Plutôt contre, quand même? Je me rappelle que vous avez parlé contre la motion du député de L'Acadie.

M. Grenier: Vous avez raison de le dire, avec I'explication que j'ai fournie.

M. Lazure: II était même fâché contre le député de L'Acadie.

M. Grenier: Non, pas contre le député de L'Acadie.

M. Le Moignan: ... la date du 27 décembre. M. Martel: 26.

M. Grenier: Le 26 décembre, qui était la fête des saints Innocents.

M. Lazure: II était opposé à la motion du député de L'Acadie. Il ne trouvait pas justifié... Le député de Mégantic-Compton ne trouvait pas justifiée la tenue d'une commission parlementaire.

M. Grenier: Je veux répondre, M. le Président, c'est qu'à ce moment-là — je reprends un peu ce que j'ai dit tout à l'heure — dans l'après-midi, on n'avait aucune information et personne ne voulait être entendu.

M. Lazure: C'est cela.

M. Grenier: On pensait réellement qu'il n'y avait personne, mais, au train où vont les choses, la sorte de courrier qu'on peut avoir, on est parti d'un télégramme qui est daté du 7 décembre ici. C'est bien clair qu'à ce moment-là, on ne l'avait pas, mais on l'a en main à partir de maintenant. C'est la même chose pour les autres que nous avons: 2 h 45, 3 h 19, 2 h 46 et 11 h 15, le 7...

M. Lazure: Ils se suivent de près à part cela.

M. Grenier: Le projet de loi a été déposé à toute vitesse, à toute vapeur.

M. Lazure: Non, il a été déposé le 27 novembre et nous lavons annoncé en juin dernier... Tous les groupes concernés savaient, en juin dernier...

M. Grenier: M. le Président, pour compléter ma réponse...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Mme le député de L'Acadie aurait, je pense, une question à vous poser ou une intervention.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, c'est simplement une petite rectification que je voudrais faire. On demande au député de Mégantic-Compton s'il s'est prononcé pour ou contre la tenue d'une commission parlementaire. J'aimerais simplement rappeler que ce que j'avais demandé, c'était un report. C'était une motion de report que j'avais faite. C'était ce sur quoi le député de Mégantic-Compton avait à se prononcer.

M. Lazure: Mais le but d'une motion de report, c'était de tenir une commission parlementaire. Quand même, ne faisons pas des avocasseries.

Le Président (M. Jolivet): Pour gagner du temps, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je vous remercie d'abord d'un consentement si unanime à me donner un droit de parole si facile à obtenir. Je voudrais vous rappeler que, à la suite de ces débats qu'il y a eu en Chambre sur cette motion de report, concernant cette motion d'aujourd'hui, à ce moment-là, nous n'avions pas l'éclairage que nous avons ce soir devant les demandes qui sont faites. Dans les demandes qui sont faites, on a comme information que l'AHPQ ne désire pas être entendue, tout au moins...

Mme Lavoie-Roux: Le ministre vient de nous informer du contraire.

M. Grenier: Ah bon! D'accord. En plus de cela s'ajoute...

M. Lazure: M. le député de Mégantic-Compton, en tout cas, ce que j'ai reçu... Dieu sait ce que je vais avoir sur mon bureau en arrivant tantôt. Si je me fie à mardi dernier, il y avait des messagers spéciaux qui venaient porter une lettre sur mon pupitre, mais, jusqu'ici, c'est l'Association des hôpitaux, les résidents internes et les étudiants. Il y a quand même... Quand même, pour l'information du député de Mégantic-Compton, je n'ai pas reçu de demande des deux groupes qui sont ici et qui veulent être entendus. C'est cela qui est étrange. La Fédération des omnipraticiens et l'Association des chirurgiens dentistes ne m'ont pas fait parvenir de demande. Les spécialistes, pour votre information, n'en ont pas fait parvenir, ils se disent satisfaits. L'Association des conseils de médecins est satisfaite aussi.

M. Grenier: ... qu'il y avait une fédération qui semblait satisfaite et qu'il y en avait huit autres à côté qui n'avaient pas l'air de l'être. Ce serait peut-être intéressant. Je pense qu'on ne devrait pas se battre sur des termes comme cela, quand arrive un moment comme celui-là, surtout quand on a afffaire à un gouvernement comme celui qu'on a en face de nous, avec un programme comme celui qu'il a présenté en campagne électorale. Je le sors de temps en temps, parce que c'est de plus en plus vrai que ce programme devrait être appliqué. J'aimerais qu'il soit appliqué. C'était un bon programme que vous aviez. Si on veut l'appliquer, entre la réalisation et ce qu'on a promis dans la campagne électorale, il y a toute une marge.

Quand on voit ici, au secteur de la santé, à la page 31... Cela a été retouché. C'est la toute dernière édition. Cela a été retouché. On dit: rationaliser, démocratiser et améliorer la distribution régionale d'établissements de santé et de services sociaux. C'est replacé, cela a été remis au programme. Ensuite, par l'affectation de ressources suffisantes pour assurer le traitement approprié des maladies mentales, notamment, la création de foyers... Article 4, humaniser et améliorer la qualité des services de

santé et des services sociaux. Ensuite, on dit, par l'amélioration des cliniques externes, les détails dont on a besoin pour un programme comme celui-là. On dit ensuite: Par l'adoption de mesures visant à augmenter le nombre de médecins, des employés spécialisés et en favorisant une meilleure distribution régionale. Si on veut traiter... On est favorable à cela, ici. On dit qu'on veut aller à la base. Le Parti québécois veut aller à la base, vérifier auprès des gens, du petit peuple qui a amené le gouvernement au pouvoir; parce que dans ce temps-là, le "gros monde" se défend tout seul. Vous étiez en faveur du petit monde, du petit peuple. C'est ce que vous nous disiez pendant la campagne électorale. Si c'était vrai, ce n'est pas moins vrai quand c'est le temps de l'appliquer. Lesgensqui sont ici connaissent le petit monde, ils connaissent le petit peuple et ils aimeraient vous en parler. Ils sont disponibles. On peut bien chicoter sur le fait que leur demande est sur votre bureau ou ne l'est pas. Je voudrais bien... vous êtes plus au courant que nous, les ministres du gouvernement, pour savoir qu'il ne faut pas trop se fier au système de transport par courrier, avec le temps que cela prend. Après avoir écrit et envoyé à la même date une lettre dans mon comté à la même adresse, il y a une personne qui l'a reçue trois semaines après l'autre, dans le même building.

M. Lazure: Cela relève du fédéral.

M. Grenier: Oui, mais raison de plus pour vous autres.

M. Lazure: Le député de Mégantic-Compton n'était pas ici, mais j'ai dit tantôt, et je suis sérieux, que je suis prêt avec les fonctionnaires du ministère, dès 18 heures, à l'ajournement, quand on aura fini ce débat un peu stérile, à rencontrer les représentants qui sont ici, des omnipraticiens et des dentistes.

M. Grenier: J'aime bien qu'il y ait des rencontres avec le ministre. Il y a une fédération qui a eu une rencontre avec le ministre. Le ministre nous a dit pas mal de choses dans la journée, on n'est pas en mesure de vérifier, mais on s'est rendu compte que pendant toute la journée d'hier, et les corporations et les fédérations qui étaient là n'avaient pas la même réponse à nos questions, que celles que le ministre nous donnait de l'autre fédération que lui, le ministre, avait rencontrée. J'aimerais mieux qu'on soit présent à la rencontre. La façon d'être présent, c'est qu'on les appelle à la barre. On a cette habitude. Les intéressés viennent ici, et généralement, ils répondent assez bien à nos questions. Hier, je pense qu'on n'a pas perdu notre temps. On a demandé cette commission depuis assez longtemps, à plusieurs reprises, en Chambre, vous l'avez accordée. J'ai l'impression que la journée d'hier a été longue et pénible, en ce sens qu'on commence à être fatigué à l'approche des fêtes, mais on a appris des choses. Cela a été valorisant pour tout le monde. Cela nous a permis et cela vous a permis à vous aussi... Si cela avait été en vase clos... une rencontre dans le cabinet du ministre, ou avec des représen- tants à un diner avec le ministre dans quelques minutes, on ne saura pas ce qui s'est passé. Il faudrait bien aller les voir et leur demander, mais ils aiment parler devant les gens. Je les ai entendus hier. Ces gens disent des choses fort éloquentes et fort intelligentes. On n'a pas de raison de cacher cela. J'aimerais même que les media d'information rapportent leurs propos. Ce qu'ils nous ont dit hier, vous savez, cela ne faisait pas honte aux Québécois. J'aimais les entendre. Ce sont des gens équilibrés. Quand ils nous ont parlé comme ils l'ont fait hier une partie de la journée, en tout cas, j'ai appris des choses. On a tous conclu, à la fin de la soirée, hier, vers minuit trente, que cette discussion avait été profitable, qu'elle avait été pour tout le monde une source d'information.

Le ministre lui-même a fait beaucoup de concessions dans la journée, au point que cela change tout mon discours en deuxième lecture sur la loi 84. J'étais pour être beaucoup plus agressif, mais là, je vais être modéré. Comme je le disais hier, ce ministre, ce n'est pas le meilleur des ministres, mais je vais vous dire que c'est le moins pire du cabinet. Il fait des concessions à l'occasion. Hier, face à la commission que nous avions, il a accepté des choses. Cela a fait plaisir à pas mal de monde, à I Opposition principalement, parce que nous autres aussi, on n'est pas loin du monde. On contacte des gens, on contacte des personnes qui aiment être entendues. Les gens nous donnent des nouvelles de temps en temps. Ils appellent au cabinet du ministre, mais ils appellent les députés de l'Opposition aussi. Les nouvelles se rendent quasiment aussi vite que chez vous, comme vous voyez, parce que des fois, on est obligé de vous informer des messages qu'on a.

Je pense qu'il est dans la coutume établie, on insiste là-dessus, et je pense qu'on ne perd pas notre temps . Si le ministre décidait qu'on prendrait quelque temps pour recevoir au moins les personnes qui sont ici, qui nous ont rendu d'énormes services durant la journée d'hier, qui sont encore disponibles, qui sont là pour cela, et des personnes capables de nous renseigner... Oui?

M. Lazure: Seulement une minute sur votre temps. Vous n'étiez pas ici. Le problème, sérieusement, c'est qu'il y a d'autres groupes depuis 24 ou 48 heures, pour toutes sortes de raisons... Non, mais le député n'était pas ici. S'ils étaient les seuls qui le demandaient verbalement, puisqu'ils ne l'ont pas demandé par écrit, je serais prêt à les entendre, et on les aurait déjà entendus à l'heure qu'il est. J'ai expliqué tantôt qu'il y avait trois autres groupes depuis hier qui demandent des rencontres, et ce ne serait pas juste et équitable vis-à-vis de ces groupes d'entendre ceux-ci en commission parlementaire et de ne pas entendre les autres. (17 h 30)

M. Grenier: M. le Président, j'espère que si jamais un jour on forme le gouvernement, on ne procédera pas de la façon que procèdent les gouvernements que j'ai connus. Disons que cette mesure de passer en commission les projets de loi a été instaurée vers les années 1967-1968 et j'ai par-

ticipé, en tant que président, à la commission de l'éducation et à la commission de l'énergie et cela s'est fait à ce moment-là. Mais, je

Vous ne me ferez jamais accepter comme député de l'Opposition et si jamais on devient le gouvernement, je vous supplie de me le rappeler, si vous n'y êtes pas en tant que ministre, si vous êtes invité, à ce moment-là, de l'autre côté comme ancien ministre ou personne ayant collaboré avec ce ministère, je veux que vous me le rappeliez comme intervenant alors que vous serez peut-être un représentant d'institution et qu'on continuera encore de recevoir des gens, même si c'est nous qui sommes là. Je voudrais que vous me le rappeliez à ce moment pour me dire que ce n'était pas à cela qu'on s'était engagé. Je m'engage, M. le Président, à ce que, si jamais on forme le gouvernement, les personnes sachent plusieurs journées à l'avance que les projets de loi qui chambardent des choses aussi importantes, de base — j'aurai l'occasion d'y revenir en Chambre parce qu'il y a encore des choses à dire là-dessus — je pense qu'il faut les faire connaître plus longtemps d'avance que cela aux gens.

Avec la journée d'hier principalement, vous reconnaissez que ce n'est pas stimulé à un moment donné. Non, ils viennent d'apprendre qu'il y a une loi qui s'en vient, qu'elle est importante et ils se sont donné quelques heures pour l'étudier, c'est tout ce qu'ils ont eu comme temps. Je pense qu'il faut être plus honnête que cela envers la population, envers ses représentants. Vous avez voulu les diminuer hier en disant qu'ils étaient moins que 10 000; en tout cas, cela frise les 9000, cela commence à être du monde et ils veulent être entendus. Ces personnes sont des multiplicateurs, ce sont des services qu'ils dispensent à une bonne partie de la population. Je pense qu'ils ont des raisons d'être entendus. Ce qu'on amène là-dedans... Personnellement, on va faire des propositions et on va vous en suggérer plusieurs mais eux seraient en mesure de nous aider, aussi, à rendre votre loi plus acceptable. On l'a vu dans trop de secteurs, hélas, un ministre qui voulait faire de grosses lois et qui nous arrivait un mois après en disant: On se rend compte qu'on a adopté cela un peu trop vite et on va changer aujourd'hui l'article 21, l'article 23, l'article 69. On arrivait avec une série d'articles de fond qu'il fallait changer. Je devrais vous donner comme exemple le ministre des Affaires municipales qui en sait quelque chose. Il a été le premier à nous présenter une loi. Cela ne faisait pas trois mois que vous formiez le gouvernement qu'il était prêt à présenter une loi et nous rappeler des articles importants quelques semaines après la passation de la loi, parce qu'il s'était rendu compte qu'il n'avait pas assez consulté.

Cela pourrait être accepté que nous ne consultions pas, le Parti libéral, l'Union Nationale. On n'est pas supposé, d'après le gouvernement, être des gens qui consultent. Vous nous avez tellement dit — pas vous, heureusement, vous n'étiez pas dans l'Opposition, il y en avait six autres à ce moment-là — que vous consulteriez la base, que vous consulteriez tout le monde que je ne vois pas pourquoi on se bute à cela. Ce n'est pas de toute urgence de régler cela, vous savez. On va continuer d'exister; les institutions vont continuer à fonctionner. Je pense bien que nos associations et nos fédérations, qui sont ici, vont continuer de s'administrer assez bien pour le temps des Fêtes. On pourra reprendre cela après les Fêtes à tête reposée au début de la session au mois de mars; on aura du temps.

On nous arrive avec une série de projets de loi et on veut tous les passer dans la même semaine.

M. Lazure: ... l'autre soir et vous êtes maintenant en train d'en faire une.

M. Grenier: Justement parce que les gens ne l'avaient pas su. Regardez tous les gens qui veulent intervenir sur le projet de loi. Cela change un peu la couleur des choses. Le raisonnement que vous faites me fait un peu penser au cultivateur chez-nous qui décide: Ce matin, je laboure ma terre. A un moment donné, il commence à pleuvoir et il ne laboure pas. Oui, mais la température a changé dans une heure; la pluie a commencé. Il arrête de labourer quand la pluie prend. C'est la même chose qui nous arrive. On ne savait pas qu'il y avait du monde qui voulait se faire entendre. Honnêtement, il n'y avait pas de gens. On apprend qu'il y a des gens qui veulent se faire entendre. Ce n'est pas Jos Bleau. Ce sont des fédérations. Ce sont des gens qui représentent plusieurs personnes. On a avantage et vous avez avantage... M. le Président, le ministre a avantage à entendre ces gens. On les a entendus hier et ils nous ont dit des choses fort pertinentes. Cela a changé mon jugement au cours de la journée d'hier. Je pense que cela peut aussi changer le jugement d'autres personnes. Je ne veux pas utiliser tout mon temps mais je voudrais vous rappeler, M. le Président, que le ministre devrait accéder à la demande des gens qui sont ici présents et si on n'a pas le temps de recevoir tout le monde, au moins qu'on reçoive les gens qui sont jugés, comme vous l'avez fait, à un moment donné, en faisant un tri dans les autres qui ont été des personnes importantes. Je pense qu'hier, on a eu les véritables sons de cloche des huit organismes que nous avons rencontrés en deux groupes et de quatre et cela nous a permis d'avoir l'éclairage dont on avait besoin.

Je vous demanderais d'avoir de la condescendance pour ces gens et d'être respectueux de votre programme parce que, bientôt, ce seront vos députés qui vont vous reprocher de ne pas vouloir respecter votre programme. Si vous voulez l'appliquer intégralement-Une Voix: Pour passer des lois, des fois.

M. Grenier: ... vous pourriez appliquer votre programme, ce serait peut-être bon de consulter les gens de la base qui sont ici aujourd'hui et qui le demandent. M. le Président, je termine là-dessus en suppliant le ministre d'entendre ces

personnes, au moins celles qui sont ici, qui sont disponibles, pour nous aider, nous de l'Opposition, et le gouvernement aussi.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Le député de Rosemont...

Le Président (M. Jolivet): Non.

M. Paquette: Cela ne vaut pas la peine.

Mme Lavoie-Roux: Tout à l'heure, le député de Gaspé disait, avec raison, que probablement, le public et, en particulier, les médecins dentistes et autres professionnels qui se trouvent dans le public ici à nous écouter seraient fort étonnés de voir que nous perdons notre temps alors qu'eux pourraient se faire entendre, si nous étions un peu moins rigides.

Je pense, par contre, qu'ils ne seront pas surpris. Ils sont à une dure école depuis une semaine. Une partie d'entre eux ont entendu le débat sur la motion de report qui avait justement comme objectif de convoquer une commission parlementaire sur la loi 103. Ce débat a été, à mon point de vue, fort ardu et assez pénible à l'Assemblée nationale, mardi soir, mais il a eu comme résultat qu'au moins une commission parlementaire a été convoquée pour la loi 84. D'ailleurs, c'est l'interprétation que les journaux en ont donnée, d'autant plus que le ministre avait déjà indiqué, par télégramme, antérieurement, au groupe ou au front commun, comme on l'appelait hier, qui voulait se faire entendre, qu'il n'était pas question d une commission parlementaire et que ce sont les efforts que nous avions déployés le mardi soir pour, à ce moment, convoquer une commission parlementaire sur la loi 103 qui ont agi comme pression pour, finalement, que la commission parlementaire soit appelée sur la loi 84.

Je pense qu'ils commencent à se familiariser avec les règles du jeu et ils doivent s'apercevoir qu'ils ne seront peut-être pas prêts à changer de métier avec nous demain matin. Une chose est certaine, c'est le seul moyen que nous avons à notre disposition pour sensibiliser la population aux implications plus sérieuses que certains projets de loi peuvent avoir. La motion de l'autre soir était, évidemment, pour se faire éclairer par les principaux groupes concernés. Cette commission parlementaire a été refusée. Si, ce soir, je refais une motion pour que nous invitions des groupes à se faire entendre en commission parlementaire, c'est un ultime effort, parce que c'est le dernier que nous utiliserons et je peux rassurer les honorables membres du gouvernement que, désormais, après qu'on aura réglé cette motion, on s'attaquera à chacun des articles, comme je le disais tout à l'heure, en faisant voir ce qui est bon, ce qui n'est pas bon, ce qui devrait être corrigé le mieux possible pour essayer d'améliorer le projet de loi. Mais cela demeure quand même la seule arme que nous ayons pour sensibiliser le public aux implica- tions de ce projet de loi et il y a des principes qui sont en jeu dans ce projet de loi.

La loi 84 — et je pense que le député de Mégantic-Compton l'a fort bien dit hier — a été fort utile. Le ministre, sans doute, peut nous rassurer en disant: J'ai entendu le groupe de médecins spécialistes et l'Association des chirurgiens dentistes qui sont d'accord, mais il laissait de côté quand même un grand nombre d'associations, fédérations ou autres groupes qui voulaient être entendus. J'ai beaucoup appris et je pense que cela a fait avancer des choses, ils n'ont pas perdu leur temps, ils ont pu se sentir frustrés à certains moments hier en commission parlementaire, mais je pense que si des modifications sont apportées a la loi 84 en deuxième lecture, article par article, et éventuellement, quand elle aura été adoptée, ce sera dû aux efforts qu'ils ont déployés en commission parlementaire hier. Il ne faut pas se leurrer là-dessus.

C'était un projet de loi ou c'est encore un projet de loi très technique, avec des considérations administratives d'une grand portée. Je pense que le rôle qu'ils ont joué ici hier était extrêmement important et c'est dans ce sens qu'une commission parlementaire sur la loi 103 aurait aussi été également utile.

Le ministre s'entête — il n'y a pas d'autre expression — à vouloir dire: Je les rencontre dans mon bureau. Je les rencontre ici et là, au hasard de mes visites, et c'est ce qu'il appelle de la consultation. Je pense que, au moment où un projet de loi est déposé, celui-ci normalement devrait suivre le processus régulier de la discussion à l'Assemblée nationale, des commissions parlementaires où il peut avoir lieu ou non de faire entendre des gens, mais je pense que le ministre, par ses petits tête-à-tête privés court-circuite le processus normal qui devrait être utilisé quand on étudie un projet de loi. Ce processus normal, c'est... Puisque, pour lui, il y a lieu de les entendre en catimini, il y a évidemment lieu, pour l'ensemble des législateurs qui sont ici, de pouvoir entendre les personnes intéressées qui font valoir leur point de vue. Je trouve cela une façon vraiment — je ne veux pas dire irresponsable — pour le moins pas correcte de procéder quand on en est rendu à l'étude d'un projet de loi qui est déposé et qui sera adopté d'ici une ou deux semaines.

En haut, tout à l'heure, on me disait qu'il y a de grands discours, très éloquents sans aucun doute — et cela doit sûrement venir du côté ministériel — sur la nécessité de valoriser le rôle des députés. On est à discuter du salaire des députés. Alors, si on augmente leur salaire, il faudrait aussi les valoriser un peu. Cela doit être cela, j'imagine, le lien qu'on fait entre les deux, mais, quoi qu'il en soit et sérieusement, on perd du temps en haut à vouloir valoriser le rôle des députés et, pendant ce temps-là, le rôle que nous devons jouer ici, dans le processus législatif, c est-à-dire celui d'étudier les projets de loi article par article, avec le meilleur éclairage possible de la part de ceux qui sont concernés, qui sont touchés par un projet de loi, le ministre le court-circuite.

Avant-hier, il nous disait: Ecoutez, on ne peut pas tenir de commission parlementaire, personne n'en a fait la demande. Je suis prête à admettre que le ministre, à 20 heures, a dit: De bonne foi, je ne savais pas qu'il y avait des gens qui en faisaient la demande. Alors, il ne pouvait pas les entendre. Il a pris connaissance, après cela, d'un certain nombre de télégrammes et il semble bien qu'il y avait des gens intéressés à se faire entendre. Aujourd'hui, il nous sert de nouveau le même argument. Ces gens-là ne m'ont pas fait une demande officielle. Evidemment, ils ont oublié le fameux télégramme, parce que, là au moins, on aurait le télégramme sur la table et on pourrait discuter, et c'est encore le même argument. On ne peut pas les entendre, même s'ils sont là, même s'ils ont des choses à nous dire, parce qu'ils ne l'ont pas officiellement demandé. Mais on sait fort bien qu'à côté de ceux-là, vous en avez plusieurs qui l'ont demandé et j'ai été fort surprise d'entendre ajouter à cette liste l'AHPQ, parce que, dans sa réponse ou sa réplique au discours de deuxième lecture, tous se souviendront, et je peux le rappeler, que le ministre a fait passablement étant de la position de l'AHPQ qui, selon lui, était d'accord sur le problème de contingentement, le problème de la fusion... C'est parce que je ne veux pas le citer. Mais j'ai bien compris qu'à ce moment-là, l'AHPQ était hors de doute, ces gens étaient satisfaits, mais le ministre vient de nous dire tout à l'heure qu'ils auraient été aussi intéressés à se faire entendre en commission parlementaire. Quand j'ai entendu cela, j'ai dit: C'est l'argument massue que l'Association des hôpitaux est satisfaite. Vous nous dites, au début de cette commission, qu'ils auraient aussi aimé cela, s'ils en avaient eu la possibilité, se faire entendre en commission parlementaire. Je regrette, mais il y a quelque chose dans les communications qui ne fonctionne pas quelque part.

Je voudrais simplement rappeler que, lors de mon discours de deuxième lecture, j'avais dit et je le répète ici, vous m'en excuserez: II faut bien dire, et c'est à regret, que, dans le cadre de la loi 101, encore jusqu'à aujourd'hui, les gens n'en avaient pan entendu parler.

Evidemment, le ministre fait toujours référence au fait qu'au mois d'août, de juillet, peut-être au mois de septembre, j'ignore quand — dans le cas de l'APHQ, c'est au mois d'août, c'est consigné au journal des Débats — il avait rencontré ces gens, leur avait parlé de cela, peut-être d'autre chose. Dans certains cas, il les avait avertis qu'il les consulterait sur autre chose. On a su maintenant qu'ils n'avaient pas été consultés ultérieurement et qu'on leur avait dit qu'il y avait quelque chose qui s'en venait. Le ministre a dit: Ecoutez, puisqu'on leur avait fait signe, ils auraient dû préparer des mémoires et nous les envoyer, faire connaître leur point de vue. (17 h 45)

Mais la façon de faire connaître les points de vue sur un projet de loi, c'est quand la loi est déposée, c'est de convoquer une commission parlementaire et, à ce moment-là, les gens qui sont intéressés se font entendre. Mon collègue de Gaspé a nommé un certain nombre d'organismes qui, apparemment, n'avaient jamais vu le projet de loi. Il a parlé des centres de services sociaux, de l'Association des CLSC, les centres d'accueil, eux aussi peuvent être touchés et assez considérablement par ce projet de loi.

Finalement, on se demande qui était vraiment au courant du projet de loi. Le ministre persiste, il va encore tenir ses petites réunions privées. Peut-être qu'à la fin, au lieu de toujours nous citer des médecins spécialistes, il va peut-être se trouver, deux, trois ou quatre autres groupes qui vont dire: Ecoutez, la commission parlementaire, c'est impossible. A défaut, on va dans le bureau du ministre et là, on fait des petits arrangements qui nous satisfont ou qui nous satisferont davantage que ce qu'il y a dans le projet de loi. Je le répète, M. le ministre, ce n'est pas la façon de procéder.

Je dois vous dire que si vous avez, par cette façon d'agir, une façon de contourner le processus législatif ordinaire, il faudra aussi étendre le blâme à l'ensemble du gouvernement qui, par sa façon de procéder, dans sa consultation, "at large", à l'extérieur du parlement, est en train de transporter des commissions parlementaires à l'extérieur du parlement, en l'absence des partis d'Opposition. C'est ce qui se produit dans le processus législatif, dans la façon de procéder du gouvernement, actuellement. C'est peut-être le temps qu'on le dise.

Mais là, c'est trop évident, quand les gens sont sur place, quand on a des gens qui font des demandes, le ministre dit: "Qu'ils viennent me voir à mon bureau. '

M. Lavigne: Ils n'ont pas fait la demande...

M. Lazure: Les deux groupes en question n'ont pas fait la demande.

M. Lavigne: Ils n'ont pas fait la demande.

Mme Lavoie-Roux: ... ce n'est pas tout le monde. Je vous ai demandé d'entendre les groupes. Ce que je vous ai dit sur ma motion... vous n'étiez pas ici, le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Ils n'ont pas fait la demande, j'étais ici, Mme Lavoie-Roux.

Mme Lavoie-Roux: J'ai dit: Invite les représentants de l'Association des étudiants en médecine de l'Université McGill, les représentants des étudiants en médecine de... Ils ont fait la demande, j'ai cité les télégrammes tout à l'heure. Ce n'est pas nécessaire de...

M. Lazure: Vous avez demandé à plusieurs reprises que les deux groupes soient entendus immédiatement, d'où la confusion.

Mme Lavoie-Roux: On le faisait... oui, c'est exact, M. le ministre. Je pense que c'était, de notre part, une concession devant le fait que vous ne vouliez pas de commission parlementaire. On s'est

dit qu'il y avait quand même des groupes qui sont intéressés, ils sont sur place, cela les touche, alors, c'était vraiment une concession à la motion originale qui prévoyait de faire entendre les gens qui l'avaient demandé plus officiellement par télégramme ou autrement.

Tout cela pour vous dire que c'est à grand regret que nous allons aborder l'étude du projet de loi 103, sans que les principaux intéressés se soient fait entendre. J'aimerais jeter, une fois de plus... c'est ce qu'il y a de plus significatif dans tout ce que le ministre nous a dit ce soir. Evidemment, les appétits se sont éveillés. Mais ce que je pense que le ministre ne veut surtout pas, c'est d'en éveiller d'autres. Et s'il avait mis, comme on le fait ordinairement dans le cas d'un projet de loi, un avis dans les journaux, à savoir que des groupes pourraient être entendus à cette commission parlementaire comme il l'a toujours été fait dans le cas des modifications à apporter à la Loi des services de santé et des services sociaux, vous auriez eu des appétits qui, sans doute, auraient été éveillés. Ces appétits, si on y avait répondu, auraient contribué à améliorer le projet de loi qui, éventuellement, sera adopté et, surtout, cela aurait aidé chacun des parlementaires qui sont ici, qu'il soient du côté ministériel ou du côté de l'Opposition, à faire leur travail avec beaucoup plus de précision, avec beaucoup plus de sagesse. Et je pense qu'en fin de compte, cela aurait été dans l'intérêt de la population. Je vous remercie, M. le Président.

Vote sur la motion

Le Président (M. Jolivet): Vote sur la motion. M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Gosselin (Sherbrooke)?

M. Gosselin: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Gravel (Limoilou)?

M. Gravel: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Le Moignan (Gaspé)?

M. Le Moignan: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Lavigne (Beauharnois)?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Jolivet): Mme Lavoie-Roux (L'Acadie)?

Mme Lavoie-Roux: Pour.

Le Président (M. Jolivet): M. Lazure (Chambly)?

M. Lazure: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Martel (Richelieu)?

M. Martel: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Paquette (Rosemont)?

M. Paquette: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Shaw (Pointe-Claire)?

M. Shaw: Pour.

Le Président (M. Jolivet): Pour: 4 — Contre: 6

La motion est rejetée.

Nous en étions rendus au droit de parole du député de Gaspé, sur l'article 1, sur l'ensemble du projet. Vous n'avez pas autre chose?

Mme Lavoie-Roux: On peut ajourner.

Le Président (M. Jolivet): Donc, compte tenu qu'il est 18 heures, nous ajournons sine die.

M. Paquette: M. le Président, est-ce qu'on doit conclure qu'on doit commencer le débat sur l'article 1 à la prochaine séance?

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Paquette: Les motions préliminaires sont terminées?

Mme Lavoie-Roux: Ah! On ne fait pas de promesses pour rien, nous!

M. Paquette: A ce moment-là, on peut continuer encore dix minutes.

Le Président (M. Jolivet): Pour le moment, la seule chose que je sais, c'est que nous sommes rendus à l'article 1. A ce niveau, nous discuterons à partir de l'article 1.

Fin de la séance à 17 h 50

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