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(Douze heures onze minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire des affaires sociales est réunie pour
étudier le projet de loi no 11, Loi modifiant la Loi sur la Commission
des affaires sociales et la Loi sur les services de santé et les
services sociaux.
Les membres de la commission sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M.
Gosselin (Sherbrooke), M. Gravel (Limoilou), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M.
Lazure (Chambly), M. Marcoux (Rimouski), M. Martel (Richelieu), M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier), M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Dussault
(Châteauguay), M. Guay (Taschereau), M. Mathieu (Beauce-Sud), M. Paquette
(Rosemont), M. O'Gallagher (Robert Baldwin).
Est-ce qu'il y a un rapporteur?
M. Forget: II faudrait faire un changement, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): M. Gosselin (Sherbrooke) sera
le rapporteur. Il y a un changement, M. le député?
M. Forget: Oui. Quels sont les membres de l'Opposition
officielle?
Le Président (M. Boucher): II y a M. Samson, Mme
Lavoie-Roux.
M. Forget: Je remplace temporairement Mme Lavoie-Roux.
Le Président (M. Boucher): M. Forget (Saint-Laurent)
remplace Mme Lavoie-Roux.
M. le ministre, pour les commentaires préliminaires.
Remarques préliminaires M. Denis Lazure
M. Lazure: Oui, très brièvement, M. le
Président. Essentiellement, ce projet de loi no 11, très modeste,
veut faire deux choses. Il veut modifier certains articles de la Loi sur la
Commission des affaires sociales, principalement dans le but
d'accélérer le traitement des dossiers, dans le but
d'accélérer les services de cette commission à la
clientèle venant surtout de ceux qui vont en appel à la suite de
décisions de la Commission des accidents du travail, qui s'appelle
maintenant la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, mais aussi dans le cas d'appelants de décisions émises
par la Régie de l'assurance automobile du Québec et l'aide
sociale. On en profite pour faire certaines modifications administratives
à notre Loi sur la Commission des affaires sociales.
Le deuxième objectif du projet de loi est de modifier un article
de notre Loi sur les services de santé et les services sociaux. Cette
modification aura pour effet de permettre au ministre des Affaires sociales
d'intervenir beaucoup plus rapidement pour la fermeture de foyers dits
clandestins. Dans la procédure actuelle, l'article 182 de notre Loi sur
les services de santé, nous oblige à procéder par
poursuites auprès des tribunaux. On doit faire la preuve que
l'établissement en question n'est pas apte à recevoir un permis.
Comme je l'expliquais hier soir lors du discours de deuxième lecture,
nous avons des données très récentes. Le délai
minimal...
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse.
M. Lazure: C'est nous qui nous nous excusons, cela a
été convenu un peu au dernier moment. J'en profite pour remercier
l'Opposition officielle de sa collaboration, autant hier soir qu'aujourd'hui,
pour l'étude de ce projet de loi.
J'étais en train de dire que le deuxième objectif est donc
de donner au ministre des Affaires sociales le pouvoir d'intervenir pour la
fermeture de certains établissements privés où on retrouve
des personnes âgées, des personnes handicapées qui se font
exploiter, qui sont hébergées dans des conditions tout à
fait inacceptables. Je disais que la procédure présente nous
force à aller devant le tribunal et le délai minimal... Hier
soir, j'ai dit délai moyen, un an, mais, en réalité, c'est
le délai minimal. Nous avons vérifié ce matin à la
Cour des sessions de la paix à Montréal. Il y a un délai
minimal de onze mois entre la comparution et l'audition. Alors, ça nous
paralysait, à toutes fins pratiques, et nous avons tenté à
plusieurs reprises, dans le passé, de mettre fin à des situations
inacceptables pour les bénéficiaires. Presque toujours, nous
avons été paralysés à la fois par ces délais
considérables, mais aussi par le fait que, même si nous avions
gain de cause en première instance, le propriétaire du foyer
clandestin allait en appel et ça continuait la paralysie. (12 h 15)
La loi nous donnerait maintenant le pouvoir d'intervenir. Nous aurions
à donner un avis au propriétaire et le propriétaire aura,
non pas cinq jours - c'est un amendement que nous apportons aujourd'hui, un
papillon - mais dix jours pour décider s'il doit porter la cause en
appel à la Commission des affaires sociales.
Bien entendu, le ministre ne peut pas procéder à la
fermeture et à la relocalisation des bénéficiaires aussi
longtemps que la Commission des affaires sociales n'a pas rendu sa
décision. Mais là, on se trouve... Et on peut aussi ajouter comme
information que la Commission des affaires sociales nous certifie que le
délai maximum sera de trois semaines pour que l'appel soit entendu. En
d'autres termes, sur la foi des rapports de nos inspecteurs, des renseignements
reçus, nous décidons, après étude du cas, qu'il y a
lieu de reloger les bénéficiaires. J'envoie un avis comme
ministre des Affaires sociales. Le propriétaire a dix jours pour
décider s'il conteste ou pas. S'il conteste, il envoie une contestation
par écrit à la commission, le ministre reçoit une copie de
la contestation et nous devons attendre la décision de la commission. Le
tout prendrait, à ce moment, dix jours plus trois semaines, cela fait
une trentaine de jours. Cela ferait en somme un mois plutôt qu'un an de
délai minimal. Voilà le but principal. Donc, une
accélération assez remarquable de la procédure et, d'autre
part, une sauvegarde des droits du propriétaire de loger un appel devant
le tribunal administratif qui s'appelle la Commission des affaires sociales. M.
le Président, je n'ai pas d'autres remarques
générales.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
L'Acadie, est-ce que vous reprenez la place de M. le député de
Saint-Laurent?
Discussion générale
Mme Lavoie-Roux: Oui, il semble. Il avait pris ma place, je vais
prendre la sienne. Écoutez, je n'ai pas de remarques très
spécifiques à faire. J'ai fait les principales hier soir, lors du
discours en deuxième lecture. Il y a des questions que j'aimerais poser.
Si je les pose maintenant, je n'aurai pas à les poser quand on arrivera
à l'article 682. J'ai indiqué mon accord sur le premier objectif
ou les modifications apportées à la Commission des affaires
sociales. Si on peut la rendre plus, quoique je ne veuille rien lui
reprocher... C'est qu'on lui a donné, dans les dernières
années, depuis sa création, on lui a ajouté des
juridictions multiples qui font que, quand il y a engorgement, je pense qu'il
ne faut pas la tenir responsable, au contraire. Là-dessus, si on peut
ajouter à la diligence des décisions, c'est-à-dire faire
que les décisions soient rendues plus vite, particulièrement dans
le cas des accidents de travail, ce qui est une situation même... Je
n'aime pas dire le mot "scandaleuse", parce que c'est un peu
exagéré, mais c'est une situation pénible, en tout cas,
pour bien des gens qui sont en attente d'une décision.
Dans le cas du deuxième objectif de la loi, qui est celui d'avoir
de meilleurs outils pour contrôler, si on peut dire, les foyers
clandestins, il y a peut-être quelques questions particulières.
L'objection de principe que j'ai faite, c'est qu'on passe d'un pouvoir
judiciaire à un pouvoir de l'exécutif par le truchement d'une
décision du ministre.
J'ai posé une question hier, à savoir si, lorsqu'il y
avait des difficultés, le ministre, en fonction de ses pouvoirs
d'enquête, de ses responsabilités ou de sa compétence dans
le domaine de la santé, pouvait intervenir par une injonction. C'est
qu'à chaque fois qu'on fait passer un recours du pouvoir judiciaire au
pouvoir exécutif, ou par la voie de son ministre, c'est, qu'on le
veuille ou pas, une certaine atteinte, je dirais... Enfin, il y a toujours
risque qu'on touche à des droits des citoyens.
Évidemment, ici, il faut mettre en équilibre les droits
des citoyens à un recours devant les tribunaux en relation avec le droit
d'autres citoyens qui peuvent être ou qui sont lésés dans
des droits encore probablement plus fondamentaux. J'avais demandé au
ministre, hier, s'il n'y avait pas possibilité pour lui d'intervenir par
injonction, si vraiment la situation le justifie.
M. Lazure: J'ai répondu, mais je vais
répéter. Une première réponse, c'est que même
si le ministre a le pouvoir d'enquêter et qu'il a reçu un rapport
indiquant qu'il faut fermer l'établissement, à ce moment,
à cause de l'article 182 de notre loi, qui dit qu'on doit d'abord, avant
de fermer, s'assurer que la personne a été condamnée -
l'article est clair...
Mme Lavoie-Roux: ... dans un cas...
M. Lazure: Un instant, je vais consulter.
Théoriquement, on peut le faire. Mais il reste qu'on a la
même guérilla judiciaire. Même si on obtient une injonction,
l'autre partie peut aller en appel de l'injonction. Il s'ensuit des
procédures judiciaires où on est paralysé et il
s'écoule des semaines et des mois avant qu'on puisse agir.
On pourrait recourir théoriquement à ce mécanisme.
Il ne nous paraît pas efficace, sur la base des expériences,
depuis plusieurs années, à cause du fait que les gens, à
ce moment-là, s'embarquent dans une lutte judiciaire qui est
interminable.
Mme Lavoie-Roux: Le ministre se rappellera peut-être une
situation qui était survenue dans un foyer il y a deux ans. J'ai
oublié le nom du foyer, mais je me souviens que c'était un foyer
anglophone.
M. Lazure: Je m'en souviens très bien, c'était dans
mon comté. À Chambly, exactement.
Mme Lavoie-Roux: J'oublie le nom. Cela n'a pas d'importance. A ce
moment-là, est-ce que ce n'était pas par injonction que vous
étiez intervenu?
M. Lazure: C'était l'inverse. On avait pris une injonction
contre la fermeture et on avait gagné l'injonction. C'était le
Cambridge Home, situé dans Chambly. Ce foyer, quelques mois plus tard, a
déclaré faillite. La dame est partie en Ontario et est
introuvable depuis.
C'était l'inverse. C'est elle qui, sentant qu'on allait poser un
geste, a pris une injonction. Cela fait trois ans de cela. C'était en
décembre il y a trois ans. De mémoire, nous avions, devant les
rapports qui nous avaient été soumis, en particulier par des
médecins de Chambly qui allaient là, qui avaient constaté
l'état déplorable des soins, commencé à
déménager quelques bénéficiaires dans d'autres
centres, d'autres pavillons. C'est à ce moment-là que la
propriétaire, la dame en question, avait pris une
injonction qui nous avait forcés de cesser les
déménagements.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre, plus
précisément, pourrait nous dire dans combien de cas il y a eu
problème? Il peut y avoir eu problème, si on prend en
considération uniquement les délais. J'aimerais qu'il nous dise:
II y a x nombre de cas où on voudrait que ce soit fermé, mais la
procédure nous empêche de le faire. Il reste...
M. Lazure: À titre d'illustration, on me dit que, sur une
période de six mois, il y en a eu une dizaine de ces cas où nous
avons la conviction que les bénéficiaires reçoivent de
mauvais soins et qu'il y a lieu de les transférer pour leur assurer de
bons soins. On procède, comme on est forcé de le faire, par la
préparation d'une preuve. On s'adresse à la Cour des sessions de
la paix; en général, c'est dans la région de
Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que dans les six cas, les gens ont
refusé...
M. Lazure: Une dizaine de cas en six mois.
Mme Lavoie-Roux: Enfin, une dizaine de cas. Dans cette dizaine de
cas, quand les personnes se sont senties poursuivies ou ont été
poursuivies, est-ce qu'elles ont persisté ou ont-elles fermé?
M. Lazure: Oui, parce que c'est devenu un secret de polichinelle
dans ce milieu, les gens se parlent. La grande majorité a
continué de fonctionner.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Lazure: II y a eu assez d'articles de Claire Dutrisac dans la
Presse, depuis quelques années là-dessus. C'est devenu un secret
de polichinelle que nos outils législatifs actuels ne sont pas
adéquats et ne sont pas efficaces. On a beau donner des avertissements
ou faire quoi que ce soit, les gens savent qu'en dernier recours ils peuvent
nous traîner devant les tribunaux longtemps avant qu'on ne puisse agir.
On me dit qu'il y a un procureur qui est devenu spécialiste de ces
causes et qui connaît bien des façons de s'en sortir. Ils
utilisent le même avocat très souvent.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils n'avaient pas déjà
un recours devant la Commission des affaires sociales, de toute façon,
si à la toute fin... Non?
M. Lazure: Non, il n'y a pas de recours actuellement. On
l'introduit aujourd'hui. Aujourd'hui, dans une des modifications à la
commission, on introduit ce recours.
Mme Lavoie-Roux: Bon! Il s'agit évidemment des foyers
clandestins que l'on découvre?
M. Lazure: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: II y a aussi les foyers clandestins qu'on ne
découvre pas.
M. Lazure: Bien sûr.
Mme Lavoie-Roux: Quelles sont les mesures que le ministère
des Affaires sociales met en oeuvre pour ce dépistage de foyers
clandestins? J'en ai découvert un en campagne électorale dans le
comté de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Lazure: Oui, c'est juste.
Mme Lavoie-Roux: Cela porte à toutes sortes de bons
côtés.
M. Chevrette: La liste électorale!
M. Lazure: Je dois dire que j'en ai découvert un sur la
rive sud moi aussi, pas dans mon comté mais pas loin de mon comté
récemment encore. Il y a nos propres fonctionnaires dans le service
d'agrément. Connaissant et inspectant le réseau de ce qu'on
appelle les pavillons, qui sont de petits foyers, de fil en aiguille, nos
inspecteurs finissent par entendre parler de telle ou telle place où on
garde des personnes âgées ou des handicapés. Là, on
leur dit: On ne pense pas qu'il y ait de permis. Nos inspecteurs sont donc
à l'affût, si vous voulez, et ils en découvrent un bon
nombre. Hier soir, dans mon allocution, j'ai fait état des 1500 places
qui, tout en étant clandestines dans le sens qu'ils n'ont pas de permis,
sont connues. On a des rapports sur chacune de ces places. On sera en mesure
d'agir une fois les amendements à la loi apportés.
Deuxième instrument de dépistage: les centres de services
sociaux. Les 14 centres de services sociaux du Québec ont
été sollicités par nous à maintes reprises, d'une
part, de ne pas encourager par des placements la multiplication de ces foyers
clandestins, d'autre part, de surveiller dans leur région respective,
d'être à l'affût et de nous avertir s'ils découvrent
des entreprises, des établissements qui gardent sans permis des
personnes âgées ou handicapées. Je dirais que ce sont les
deux principaux outils.
Un troisième outil: le CRSSS, le Conseil régional des
services de santé et des services sociaux. Étant donné
qu'il est responsable de recevoir les plaintes de toute la population, de
n'importe qui, sur la qualité des soins de santé ou des services
sociaux, il arrive souvent qu'un CRSSS va recevoir des plaintes. À ce
moment, il nous avise s'il constate que l'endroit où on garde des
personnes âgées n'a pas de permis. (12 h 30)
Finalement, il y a même des personnes âgées -
l'adjoint parlementaire, le député de Rimouski, en parlait hier -
il y a des clubs de l'âge d'or, des personnes âgées qui
attirent souvent notre attention sur tel ou tel endroit où on garde des
personnes âgées et où il ne semble pas qu'il y ait un
permis. On envoie nos gens et c'est ainsi qu'on en a dépisté
environ 1500 qui nous sont connus maintenant, mais qui n'ont pas de permis et a
qui - la grande majorité, au moins 80% - on pourra en donner. On est en
train de donner des permis moyennant telle ou telle amélioration et on
pense que ces améliorations pourront être apportées.
Là où on veut intervenir, c'est pour 15% ou 20% des autres, qui
ne seront pas en mesure de se conformer aux normes.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre faisait
allusion tout à l'heure aux articles de Mme Dutrisac; on peut y lire
ceci, et je voulais savoir s'il y avait un fondement: Les hôpitaux ont
aussi des listes de ces maisons où ils envoient prestement leurs cas
d'hébergement pour libérer un lit destiné à des cas
aigus, des malades plus jeunes susceptibles de profiter des services d'un
hôpital général... Elle parlait toujours des foyers
clandestins. Est-ce qu'on doit interpréter cela comme signifiant que les
hôpitaux connaissant des foyers clandestins? Est-ce qu'ils s'en servent
ou que le ministère n'en serait pas au courant? C'est peut-être
une interprétation un peu large de Mme Dutrisac.
M. Lazure: D'une part, les hôpitaux ne sont pas
censés placer. Le placement de personnes âgées ou de
personnes handicapées, quelque placement que ce soit, relève des
centres de services sociaux. Remarquez que les Centres de services sociaux ont
souvent du personnel social en milieu hospitalier. Quand on dit que les
hôpitaux placent, il y a deux situations qui peuvent être
possibles. Ou l'hôpital le fait sous la table, pour ainsi dire, sans
passer par le personnel social d'un CSS et, à ce moment, l'action de
l'hôpital n'est pas correcte, et ils ne se vanteront pas de faire une
action qui n'est pas correcte, qui n'est pas permise. Dans d'autres cas, cela
peut être fait à ciel ouvert, selon les règlements. Une
travailleuse sociale oeuvrant dans un hôpital décide que cet
endroit est apte à recevoir une personne âgée, disons. On
peut convenir là que l'endroit n'a pas de permis. Donc,
théoriquement, c'est un foyer clandestin. Mais là je vous fais
remarquer qu'il y a deux autres situations possibles.
Cela peut être un foyer, parmi les 1500 places qu'on
connaît, qui se classe parmi les 80% qui ont de l'allure. Autrement dit,
cela ne veut pas dire que, parce qu'un hôpital a placé une
personne dans un foyer clandestin, un foyer sans permis, cela a
été un mauvais placement, en pratique, si cela a
été dans un des 80% de foyers clandestins qui vont recevoir un
permis avec certaines améliorations. Si c'est dans un autre...
Évidemment là, il faudra tout simplement dire que le service
social de cet hôpital n'a pas exercé un bon jugement. Mais, je
dirais que, la plupart du temps, c'est fait par le centre de services sociaux
et que c'est fait dans la majorité de ces foyers clandestins qui
deviendront des foyers légitimes.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voulais faire
remarquer cela au ministre parce que moi, cela me semble presque incroyable.
Les hôpitaux, les médecins dans les hôpitaux ou le service
social des hôpitaux qui vont placer des gens dans des foyers qui n'ont
même pas de permis de fonctionner, cela me dépasse. Ce sont quand
même des institutions publiques du réseau des affaires sociales.
Est-ce que vous avez eu vent de tels hôpitaux ou de tels services
à l'intérieur des hôpitaux et quelle sorte de
pénalité, quelle action le gouvernement prend-il à leur
endroit? Écoutez, si les hôpitaux font cela, il ne faut pas se
surprendre que la femme du coin ou le couple du coin décident un bon
jour d'ouvrir des foyers pour des raisons humanitaires, remarquez bien, pas
nécessairement pour des raisons de profit, ou ils peuvent combiner les
deux.
M. Lazure: Oui. Écoutez, les hôpitaux aussi bien que
les centres de services sociaux, je le répète, ont
été avertis à maintes et maintes reprises qu'ils ne
doivent pas placer des gens dans des foyers sans permis même si c'est un
"bon foyer clandestin". Ils ne doivent pas le faire. Maintenant, c'est
difficile d'aller les surveiller au jour le jour. Les chiffres le
démontrent, j'ai cité hier l'augmentation assez impressionnante
du nombre de places pavillonnées, le nombre de places en pavillon qui
est passé, fin 1976, de 1169 à 3700 maintenant, et nous avons des
crédits prévus pour aller jusqu'à 4200 dans les mois qui
viennent.
Autrement dit, avec la conversion de foyers clandestins corrects qui
deviennent des pavillons -c'est cela l'opération pavillonnement - cela
devient des foyers avec permis et il est de moins en moins nécessaire
que le service social d'un hôpital envoie une personne âgée
dans un foyer sans permis.
M. Lavoie-Roux: M. le Président, évidemment, le
chiffre du ministre est assez impressionnant. À part cela, il prend bien
soin de nous dire qu'alors qu'il y en avait 1169 à la fin de 1976. Au
moment où il nous parle, il y en a 3700, si j'ai bien compris?
M. Lazure: C'est cela, 3700 places dans les pavillons.
M. Lavoie-Roux: Boni Avec toujours le petit coin partisan que le
ministre aime y mettre, je lui ferai remarquer... Ceci est un communiqué
qui vient de son ministère, qui est en date du 9 mars 1977 et qui est
intitulé: "Une première partie de l'opération
pavillonnement est terminée". Ce n'est pas sur le fait que ce soit
l'ancien gouvernement qui l'ait fait ou pas, la question précise que je
veux lui poser concerne l'augmentation de l'opération pavillonnement.
Elle n'a pas marqué de progrès très impressionnants. Je ne
veux pas dire que c'est la formule qu'on doive favoriser; la formule qu'on veut
favoriser si les gens ont besoin d'hébergement c'est dans des centres
d'accueil. Dans ce communiqué du 9 mars 1977 qui est intitulé
"Une première partie de l'opération pavillonnement est
terminée", on dit: Depuis juin dernier... Je ne relirai pas ce que j'ai
lu hier. J'ai dit: Les comités ont visité, évalué
quelque 350 ressources privées. Cette première partie de
l'opération vise 91 foyers affiliés, 79 foyers clandestins, 8
établissements financés à taux fixe hébergeant 2691
personnes qui pourront être pavillonnées à 73 centres
d'accueil et 6 centres hospitaliers. Cela semble bien découler de
l'opération de juin 1976.
Déjà, au début de 1977 - je ne voudrais même
pas faire état que ce soit avant ou après votre arrivée au
pouvoir - on parlait de 2691 personnes qui avaient été
identifiées comme pouvant être reliées par
l'opération pavillon à des centres d'accueil ou à des
centres hospitaliers. De 2691, on arrive à 3700, ce qui voudrait dire
que pour une période de près de trois ans, 1978, 1979, 1980 - on
arrive au mois de mars - cela aurait été une augmentation de 1100
exactement. C'est peut-être qu'il n'y a plus beaucoup de foyers
clandestins ou qu'il n'y a plus beaucoup de besoins de pavillonnement,
mais le chiffre, quand on le regarde, si on marche toujours au même
rythme que celui qui existait en 1976-1977, ne semble pas être
très considérable.
M. Lazure: II y a la un malentendu. M. Lavoie-Roux:
Oui.
M. Lazure: Le chiffre que vous citez de 2691...
M. Lavoie-Roux: 2691, oui.
M. Lazure: ... c'était l'objectif poursuivi. On disait: II
y a 2691 personnes dont l'endroit d'hébergement sera transformé
en pavillon.
M. Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Lazure: C'est un objectif. Il y avait seulement le chiffre que
j'ai donné tantôt, 1169.
M. Lavoie-Roux: Je retiens votre chiffre de 1169.
M. Lazure: En 1976-1977, on avait 1169. On dit à ce
moment-là: Si on pavillonne tout ce qu'on connaît, on peut aller
jusqu'à environ 2680, ce qui a été fait, puisque,
là, on est rendu à 3700. Voyez-vous?
M. Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: On en a découvert d'autres. La
différence entre 2600 et 3700, c'est justement qu'il y a un bon nombre
de soi-disant foyers clandestins qui n'étaient pas connus en 1977, qui
ont été connus au fur et à mesure et qui se sont
ajoutés aux 2600, ce qui était l'objectif. Là, on est
rendu à 3700. L'objectif est 4200. C'est une partie de la
réponse.
Une autre partie, il y a d'autres foyers clandestins qui ont
été reconnus et qui sont acceptés officiellement comme des
familles d'accueil. Je l'ai dit hier dans mon discours. Quand on parle de
foyers clandestins, cela peut être un tout petit foyer de moins de neuf
bénéficiaires qui s'appelle dans ce temps-là famille
d'accueil, lorsqu'il y a permis. Ou cela peut être de neuf à
trente, dans ce qu'on appelle un pavillon, ou de trente et plus en centre
d'accueil. Il y a donc trois catégories de foyers clandestins.
Je vous ferai remarquer qu'il y a eu une augmentation. Fin 1977, on
avait 5800 personnes hébergées en familles d'accueil. Juillet
1980, donc un peu moins de trois ans plus tard, on en a 7557. Là
aussi...
Mme Lavoie-Roux: En familles d'accueil?
M. Lazure: En familles d'accueil, moins de neuf. Une partie de
cette augmentation de quasiment 2000, dans l'espace de moins de trois ans,
venait de petits foyers clandestins qui étaient reconnus, qui
étaient améliorés et qui devenaient des familles d'accueil
officielles.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que je tombe peut-être en dehors
du sujet. Mais est-ce que vous avez un tableau officiel? Est-ce qu'on pourrait
l'avoir?
M. Lazure: Je vais le faire refaire au propre, parce qu'il y a du
griffonnage dessus.
Mme Lavoie-Roux: Comme vous dites, on souhaite que ce soit une
correction de familles clandestines qui soient devenues des familles d'accueil
officielles.
M. Lazure: En partie, c'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il faut s'en réjouir.
Mais la qualité, même si elles sont reconnues - quand elles
sont reconnues, les familles d'accueil, on peut éviter le pire des faits
dont vous avez fait la description, etc. - est-ce que cela s'avère,
selon votre expérience, d'une façon générale, des
endroits qui assurent une qualité de vie aux personnes
âgées?
M. Lazure: Je répète, à peu près
à 80% des cas. La plupart sont l'équivalent de familles
d'accueil, finalement. C'est à la frontière de pavillon et de
famille. Autrement dit, laissons les termes, le jargon. Mais la plupart ont en
moyenne dix ou douze bénéficiaires, autour de dix. Quand on voit
des foyers clandestins qui se classent parmi les 80% qui sont potables et qu'on
voit à côté une autre famille d'accueil de neuf ou un tout
petit pavillon de douze, qui ont des permis, qui sont reconnus, il n'y a pas
tellement de différence. Il faut bien comprendre que le genre de
bénéficiaire qui va dans ces petites installations, c'est une
personne âgée ou handicapée dont l'état est assez
stationnaire, qui n'a pas besoin de trop de soins médicaux, de soins
infirmiers, dont le besoin essentiel est un besoin d'hébergement. Il a
besoin périodiquement, une fois par semaine ou une fois par mois, d'une
visite au médecin ou d'une visite en clinique externe. D'accord? Cela se
fait. Mais son besoin principal est un hébergement qui a de l'allure, il
peut être bien logé, bien nourri, bien habillé, avoir un
minimum de vie sociale, quelque chose qui a de l'allure.
Mme Lavoie-Roux: Et ce minimum de vie sociale, d'après
vous, il est assuré dans des familles?
M. Lazure: Dans la plupart des cas.
Mme Lavoie-Roux: Maintenant - ce sera ma dernière
questieon sur ce point - on pourra passer aux articles par la suite, parce
qu'on n'a pas besoin de prendre deux jours sur ce projet de loi, quelle est la
philosophie générale ou l'orientation générale du
ministère relativement au développement de familles d'accueil par
rapport aux centres d'accueil?
M. Lazure: Pour les personnes âgées qui n'ont pas
besoin de soins infirmiers 24 heures par jour, 7 jours par semaine, nous
préconisons l'hébergement en famille d'accueil. Autrement dit,
tout dépend de l'état de santé physique ou mentale de
l'individu. Les centres d'accueil, depuis quelques années, ont une
politique d'admission qui fait que les places y sont
réservées à des personnes âgées dont
l'état mental ou physique requiert constamment des soins d'une
infirmière ou d'un infirmier et souvent des soins médicaux. Ils
ne sont pas tout à fait assez malades pour être à
l'hôpital, un hôpital pour malades chroniques et ils sont trop
malades pour être à la maison. Cela se situe entre les deux, alors
que, pour les autres personnes âgées qui souffrent, au fond,
d'abandon social, dans bien des cas ou d'indigence extrême au plan
économique, mais qui n'ont pas besoin de soins d'infirmier ou
d'infirmière tous les jours, on préfère la famille
d'accueil. Il y a plus de chance de retrouver l'atmosphère normale,
régulière d'un foyer dans une famille d'accueil que dans un
centre d'accueil. (12 h 45)
Mme Lavoie-Roux: C'est une opinion. Je ne veux pas prendre parti
pour une formule plutôt que pour l'autre, il ne faut peut-être pas
être catégorique dans un sens ou l'autre. On a aussi
remarqué qu'il y a bien des gens qui ont eu une vie de famille
régulière et qui s'adaptent mal dans une famille
étrangère. Pour eux, c'est comme si cela stigmatisait davantage
le fait qu'ils sont sortis de leur famille ou qu'ils sont plus ou moins
abandonnés par leur famille.
La dernière question - je pensais que c'était la
dernière, mais j'en ai une autre - touche l'utilisation des
médicaments. Il reste que ce n'est pas souvent qu'on a le temps de
prendre une heure pour discuter des personnes âgées, sauf a se
lancer des flèches de part et d'autre de l'Assemblée
nationale.
M. Lazure: Aucune plainte, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est parce que je vous voyais regarder
l'horloge.
M. Lazure: C'était pour me situer dans le temps.
Mme Lavoie-Roux: On est encore dans la journée de
mercredi.
Passons à l'utilisation des médicaments. Je pourrais
parler du centre d'accueil, mais je voudrais faire porter ma question davantage
sur les familles d'accueil et les foyers d'accueil où, je à
plusieurs reprises, l'utilisation trop grande des médicaments chez des
personnes âgées a été rapportée et non sans
fondement. Quels sont les gestes - je ne sais pas si on peut parler de
surveillance - du ministère à cet égard?
M. Lazure: Là encore, distinguons. Le pavillon où
il y a plus de neuf bénéficiaires, de 9 à 29, est
automatiquement rattaché a un centre d'accueil ou parfois,
exceptionnellement, à un centre hospitalier, s'il n'y a pas de centre
d'accueil dans la région. Ce sont les professionnels,
infirmières, pharmaciens du centre d'accueil ou du centre hospitalier
qui assurent la surveillance de la distribution des médicaments dans le
pavillon. C'est clair. Cela se fait bien.
Je dois dire que, depuis quelques années, on a
amélioré la situation. II n'y avait pas de crédits pour
des pharmaciens à temps partiel dans les centres d'accueil. Avec
l'augmentation, depuis une couple d'années, qu'on donne, compte tenu que
les bénéficiaires sont plus malades dans les centres d'accueil
existants, une des conséquences a été l'embauche de
pharmaciens à temps partiel, cela peut être un jour par semaine
pour un petit centre d'accueil ou une demi-journée par semaine, mais,
à l'intérieur du temps pour lequel il est payé, le
pharmacien va surveiller aussi les quelques pavillons qui sont rattachés
au centre d'accueil.
Dans les familles d'accueil, la surveillance est exercée par le
centre de services sociaux, parce que la famille d'accueil est sous la
juridiction du CSS. C'est toujours le centre de services sociaux qui
accrédite, qui reconnaît une famille d'accueil, qui la choisit,
qui, ensuite, décide de lui confier des personnes en hébergement.
Par la suite, c'est le praticien du centre de services sociaux qui surveille,
non seulement la distribution des médicaments, mais aussi, de
façon générale, la qualité des soins et des
services dans la famille d'accueil.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y aurait un moyen pour le
ministère de faire une étude sur cette consommation des
médicaments, compte tenu des bénéficiaires - parce que
j'imagine que c'est toujours à la solde des bénéficiaires,
directement ou indirectement, que ce soit l'assurance-maladie, la carte - dans
les foyers et dans les familles d'accueil, par rapport aux centres d'accueil?
C'est une étude qui pourrait être assez longue, mais qui n'est pas
impossible. On aurait peut-être là une image exacte; on verrait
si, vraiment, il y a surconsommation dans un endroit plutôt que dans
l'autre parce que, vous savez, quand on parle de la qualité d'une
famille ou d'un foyer d'accueil, on dit: Ils doivent assurer au plan physique
et au plan matériel des conditions décentes. Vous ajoutiez tout
à l'heure qu'au plan social il y a une vie relativement satisfaisante,
mais il faudrait quand même s'assurer qu'on ne substitue pas à la
vie sociale relativement satisfaisante la médication. Je ne fais pas
d'accusation à travers mon chapeau au moins en posant la question.
M. Lazure: La question est pertinente et je suis même
prêt à dire qu'il se consomme trop de médicaments chez les
personnes âgées, surtout dans les familles d'accueil, mais aussi
dans les centres d'accueil. On peut en faire le relevé.
Mme Lavoie-Roux: J'ai voulu être indulgente.
M. Lazure: Oui. Pour moi, il n'y a pas tellement de
différence. Ce sont des milieux que je connais assez bien, que je visite
très souvent et on peut faire le relevé, on va faire le
relevé comparatif de la consommation des médicaments dans les
familles d'accueil, pavillons, d'une part, et dans les centres d'accueil,
d'autre part. C'est possible de faire cette étude, mais, à
l'oeil, je ne pense pas qu'il y ait tellement de différence,
malheureusement. Par contre, il faut faire attention parce que quand on est
rendu à 75 ans ou 84 ans, on a trois fois plus de chances d'avoir besoin
de médicaments, sur un plan objectif, sur un plan factuel.
Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être le type de
médicaments qu'on leur donne aussi.
M. Lazure: D'accord. Le type de
médicaments, les doses parfois sont trop massives. Je
déplore aussi le fait que souvent, dans les familles d'accueil,
pavillons, centres d'accueil, on a l'impression que certains
bénéficiaires sont drogués tellement ils reçoivent
des doses majeures de médicaments. Là on a un problème.
Même si on découvrait par ce relevé qu'il semble y avoir un
abus, qu'est-ce qu'on peut y faire? On touche à la pratique
professionnelle, on touche à la pratique du médecin. Un
ministère, un gouvernement ne peut pas dire arbitrairement: Docteur,
vous prescrivez trop de librium ou trop de valium. On peut avoir une
impression, mais je pense que là on est un peu sujet au bon jugement de
tel ou tel médecin.
Une deuxième remarque, pour atténuer ce que vous disiez
tantôt et même ce que je dis moi aussi, cette constatation qu'on a
l'air d'en consommer trop, Une deuxième c'est que, dans les familles
d'accueil et les pavillons, surtout, et de plus en plus dans les centres
d'accueil maintenant, on retrouve d'anciens malades psychiatriques. À
tort ou à raison, ils sont en institution, et souvent ce sont des
malades qui ont passé plusieurs années dans un hôpital
psychiatrique, de grands malades, mais qui sont rendus stationnaires, si vous
voulez. Ils ont pendant plusieurs années reçu des
médicaments, des tranquillisants, la plupart du temps, ou des
antidépressifs et, une fois placés au pavillon, dans la famille
d'accueil, au centre d'accueil, les médecins sont portés à
continuer le même régime médicamenteux. En d'autres termes,
on constate de plus en plus, quand on va à ces endroits, qu'il y a pas
mal de gens qui paraissent affaissés, trop médicamentés.
Il faut dire que, bien souvent, il s'agit de patients qui ont souffert et qui
souffrent encore de troubles psychiatriques importants et il y a
peut-être un côté positif à cette médication
qui nous paraît excessive à première vue.
Mme Lavoie-Roux: Écoutez, le ministre sait fort bien que
les anciens patients psychiatriques ou même les personnes
âgées qui souffrent de sénilité précoce
causant des troubles de comportement ne sont pas encore à la douzaine
dans les centres d'accueil, parce que c'est assez difficile de les y faire
entrer, Dieu merci.
M. Lazure: Oui, mais je disais surtout dans les familles
d'accueil et les pavillons.
Mme Lavoie-Roux: Familles d'accueil.
M. Lazure: Pavillons. Surtout dans les pavillons et dans les
familles d'accueil. Je disais: Cela commence un peu dans les centres
d'accueil.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela. Il reste que, vous savez, on
pourra tous faire des grands discours, que ce soit d'un côté ou de
l'autre de la Chambre, sur les personnes âgées et sur toutes leurs
souffrances, tomber dans les descriptions dramatiques et tout cela, moi, cela
me semble fondamental. Je ne dis pas au gouvernement d'intervenir pour dire
à tel médecin: Vous devriez prescrire ceci plutôt que cela,
mais je pense qu'il y a un travail de sensibilisation, même d'action plus
énergique qu'uniquement de la sensibilisation, que des comptes soient
demandés d'une certaine façon; vous pourrez décider des
modalités.
M. Lazure: C'est une suggestion, madame. Je suis
sérieux.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez 3000 fonctionnaires au
ministère des Affaires sociales. En commençant par une
étude, vous allez voir quelle est vraiment la consommation qu'on fait.
Il y a un travail de sensibilisation auprès du personnel infirmier,
parce que ce ne sont pas toujours les médecins qui... Évidemment,
ils font une ordonnance et, après cela, on sait fort bien que, dans les
centres d'accueil, cela se répète automatiquement,
peut-être même sans que les médecins aient revu
nécessairement l'ordonnance. Les médecins peuvent être
coupables; tout le monde peut être coupable, même nous autres.
Mais je me dis que c'est très grave, parce que le respect des
personnes, cela commence par essayer de respecter leur lucidité...
M. Lazure: J'endosse pleinement votre inquiétude et vos
commentaires, je les partage.
Mme Lavoie-Roux: Je trouvais que vous aviez une attitude un peu
défaitiste, M. le ministre, en disant qu'il ne faut pas intervenir. Je
me dis qu'il devrait quand même y avoir une "action ferme" du
ministère, que ce soit au plan de la sensibilisation du personnel, que
ce soit au plan... Par exemple, si vous trouvez que, dans tel centre d'accueil,
la consommation des médicaments est beaucoup plus élevée
que dans le centre d'accueil voisin, il y a certainement des moyens...
M. Lazure: II y en a des moyens. Et on en prend de plus en plus,
des moyens. Je voudrais simplement vous faire remarquer qu'en dernière
analyse, c'est la Corporation des médecins...
Mme Lavoie-Roux: Qu'ils prennent leurs responsabilités eux
aussi.
M. Lazure: ... qui a le devoir - et on a souvent demandé
à la corporation de faire des pressions auprès de ses membres
pour essayer de diminuer cette consommation médicamenteuse. Je veux
simplement dire au député de L'Acadie que nous sommes mal
placés parfois pour intervenir comme ministère directement
auprès des médecins, parce qu'on se fait répondre, et avec
raison parfois, par le président de la corporation, que ce n'est pas
notre affaire, que cela relève de la pratique médicale.
Je voulais simplement mettre en relief un obstacle majeur qu'on a devant
nous pour agir.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que, publiquement, quand je parle de
sensibilisation, cela va aussi pour les médecins.
M. Lazure: Tout le personnel qui entoure le médecin
aussi.
Mme Lavoie-Roux: Dans un centre d'accueil, les gens aiment bien
mieux avoir la paix qu'avoir un....
M. Lazure: C'est sûr.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rimouski.
M. Marcoux: Durant la tournée de consultation
auprès des gens du troisième âge, j'ai vu, et je vais le
donner, un exemple frappant. Le directeur d'un centre d'accueil nous l'a
cité à Maniwaki. Je ne sais pas si le centre d'accueil
était à Maniwaki même, mais c'est à Maniwaki que le
témoignage nous a été donné: les personnes
âgées avaient fait un voyage de deux jours ou deux jours et demi
à Terre des Hommes et, durant ce voyage, la consommation de
médicaments avait diminué de moitié.
Mme Lavoie-Roux: C'est un fait. Cela dit ce que je dis, il ne
faut pas remplacer le social par les médicaments.
M. Marcoux: Cela veut dire une chose, que c'est d'abord un
problème d'isolement, de solitude, d'occupation, d'activités ou
de sorties. Cela veut dire qu'il y a sûrement une action à
envisager auprès des professionnels qui travaillent auprès de ces
personnes, mais il y a toute une conception à savoir quel est le type
d'occupation ou d'activité qu'on doit permettre ou faciliter par les
personnes âgées elles-mêmes.
M. Lazure: Des crédits additionnels qu'on a depuis
quelques années pour les centres d'accueil existants, qui servent
à embaucher du personnel, j'ai dit tantôt qu'une partie en va
à l'embauche de pharmaciens à temps partiel, justement pour mieux
contrôler la consommation et ils servent aussi à l'embauche, de
façon préférentielle, je dirais, de personnel de loisir.
Vous allez voir de plus en plus, dans les centres d'accueil, un animateur ou
une animatrice de loisir, ce que vous ne voyiez pas, il y a quelques
années. On en voit de plus en plus. On a un technicien en
physiothérapie, un technicien en ergothérapie, il y a du
personnel de réadaptation et il y a aussi la présence des centres
de jour où vous retrouvez ce même type de personnel.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas d'autres remarques
préliminaires. Ce sont des questions qui seraient revenues à
l'article 182. Je ne sais pas si mon collègue a quelque chose.
M. Samson: Très rapidement, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: Je m'excuse auprès du ministre, je n'ai pas eu
l'occasion d'entendre son discours hier, j'étais retenu à
l'étude d'autres projets de loi. J'y ai même passé la nuit,
comme plusieurs.
Dans ce projet de loi, la modification en ce qui concerne la Commission
des affaires sociales, si je comprends bien, vise à permettre de
réduire les délais pour donner un meilleur service, soit aux
personnes qui font appel à l'aide sociale ou encore à la
Régie de l'assurance-automobile ou à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail.
Est-ce que le ministre peut me dire, avec les modifications qui sont
apportées dans le projet de loi, approximativement dans quelle
proportion on pourra réduire ces délais qu'on connaît
maintenant et (13 heures)
M. Lazure: II y a un point précis. Vous allez voir, quand
on arrêtera à l'article 7 du projet de loi, qu'une des
modifications vise une clientèle assez particulière. Je
m'explique. J'en ai parlé un peu hier. Il y a un article dans la loi
actuelle de l'ancienne CAT - la loi est toujours en vigueur -qui dit que
l'accidenté du travail doit être compensé à la fois
pour sa lésion, son déficit anatomo-physiologique, et pour son
incapacité qui résulte de cette lésion. La Commission des
accidents du travail avait pris l'habitude de ne pas statuer sur la
deuxième partie, elle statuait seulement sur la lésion. La
compensation, aux yeux de l'accidenté, était trop basse,
n'était pas juste d'après plusieurs accidentés. Ces
accidentés se sont adressés à la Commission des affaires
sociales, qui a statué favorablement pour la plupart des
accidentés. Quand d'autres accidentés ont vu les décisions
de la Commission des affaires sociales, ils sont allés en masse, c'est
le cas de le dire, par centaines à la commission et il y a un
embouteillage actuellement de plusieurs centaines de cas à la commission
.
Par contre, il y a eu la création de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. Cette nouvelle
commission est d'accord pour statuer sur les deux volets. Autrement dit, elle
partage plus la philosophie de la Commission des affaires sociales que la
philosophie de l'ancienne CAT, ce qui fait que, là, on a l'assurance de
la CSST que si on renvoie la plupart de ces cas-là qui sont actuellement
en appel et en attente à la Commission des affaires sociales, elle va
statuer beaucoup plus rapidement par ses bureaux de révision - il y en a
une dizaine - sans recourir à la procédure compliquée de
la Commission des affaires sociales. Ce groupe est le principal groupe en
attente. On va réduire l'attente de façon considérable si
on les élimine. Une fois ces plusieurs centaines de cas
éliminés, on nous dit que le délai moyen sera autour de
trois mois, deux, trois ou quatre mois, mais disons trois mois, alors
qu'actuellement il est de plusieurs mois, un an environ, à cause de
cette avalanche de cas qui sont venus parmi les accidentés du travail.
Dans les autres clientèles, il n'y a pas d'attente particulière.
Je pense qu'à la commission, qu'il s'agisse des cas d'aide sociale, des
cas de la Régie des rentes ou d'accidentés de la route, l'attente
est entre un mois et un mois et demi.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, on sera
probablement obligé de suspendre les travaux jusqu'à 15
heures...
M. Lazure: Consentement?
Le Président (M. Laplante): ... à moins que vous ne
décidiez de continuer pour adoption du projet de loi d'ici une
demi-heure. Mais plus qu'une demi-heure...
M. Lazure: Tout dépend du nombre d'interventions que vous
prévoyez.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais mieux revenir.
Le Président (M. Laplante): Vous préféreriez
revenir.
M. Lazure: À quelle heure?
Mme Lavoie-Roux: Je préférerais revenir.
Le Président (M. Laplante): À 15 heures, est-ce que
cela ferait votre affaire?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: À 15 heures, est-ce que cela vous va?
M. Samson: À 15 heures, il y a un ordre de la Chambre pour
d'autres commissions et à 20 heures aussi.
Mme Lavoie-Roux: À 15 heures?
M. Samson: C'est cela.
M. Lazure: Pour trois commissions?
M. Samson: Pour deux commissions: la constitution, le Code civil,
plus la Chambre. Vous ne pouvez pas en avoir plus que deux en même temps
que la Chambre. Cela dépend du travail qu'on a.
M. Marcoux: Avez-vous beaucoup d'amendements?
M. Lazure: Sur les amendements...
Le Président (M. Laplante): Je suis prêt à
aller jusqu'à deux heures, si c'est le voeu de la commission.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, mais, ce matin...
Le Président (M. Laplante): On peut aller jusqu'à
14 heures.
M. Lazure: Moi, je ne veux pas vous bousculer.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas la question. Je regrette mon retard
de ce matin. Je n'ai pas eu l'occasion de m'en excuser.
Le Président (M. Laplante): Mais ce fut
intéressant.
Mme Lavoie-Roux: II fut absolument involontaire, parce qu'on ne
s'y attendait pas. Je pense que le ministre l'a dit lui-même. C'est un
travail, je pense, pour passer à travers les articles, d'au plus trois
quarts d'heure, une heure, mais, à ce moment-ci, j'ai un autre
engagement. Je m'excuse de ne pas pouvoir rester. Ce n'est vraiment pas pour
retarder les travaux. Si je n'étais pas à la révision du
Code civil, je vous dirais: Exceptionnellement, je vais aller demander au whip
qu'on en fasse trois au lieu de deux pour une question de trois quarts d'heure,
mais je ne puis pas à ce moment-ci.
M. Lazure: Cela irait à demain. M. le Président,
cela pourrait être demain.
Le Président (M. Laplante): Me donneriez-vous le mandat de
parler, pour autant qu'il y ait unanimité, avec le leader du
gouvernement pour obtenir une entente des leaders pour que la commission des
affaires sociales puisse se réunir dans une autre salle cet
après-midi et qu'il y ait trois commissions?
Mme Lavoie-Roux: Je suis à la révision du Code
civil.
Le Président (M. Laplante): Ah, vous êtes à
la révision du Code civil!
M. Samson: Si ce n'est pas possible, je suis...
Mme Lavoie-Roux: Je ne prends surtout pas d'engagement pour mon
leader.
Le Président (M. Laplante): On va ajourner sine die les
travaux de la commission et je ferai rapport au leader du gouvernement.
Merci.
(Fin de la séance à 13 h 5)