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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le jeudi 15 décembre 1983 - Vol. 27 N° 209

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 55 - Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives concernant l'adoption


Journal des débats

 

(Onze heures neuf minutes)

Le Président (M. Rancourt): À l'ordre! Nous allons ouvrir la séance de la commission des affaires sociales qui a pour mandat d'étudier, article par article, le projet de loi 55, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives concernant l'adoption.

Les membres de cette commission sont: M. Boucher (Rivière-du-Loup), Mmes Lachapelle (Dorion), Dougherty (Jacques-Cartier), Harel (Maisonneuve), MM. Johnson (Anjou), Juneau (Johnson), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Leduc (Fabre), Picotte (Maskinongé), Rochefort (Gouin), Sirros (Laurier).

Les intervenants: MM. Beauséjour (Iberville), Bisaillon (Sainte-Marie), Blais (Terrebonne), French (Westmount), Gravel (Limoilou), Hains (Saint-Henri), Lafrenière (Ungava), Laplante (Bourassa), Marx (D'Arcy McGee).

Puisque nous débutons, nous allons désigner un rapporteur, si vous voulez me l'indiquer.

M. Johnson (Anjou): Le député de Gouin, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: Je pense bien que ce sera lui ou moi.

Le Président (M. Rancourt): Donc M. le député de Gouin est désigné comme rapporteur de cette commission.

Mme Lavoie-Roux: Cela va être lui ou moi.

Une voix: À moins que ce soit vous.

Le Président (M. Rancourt): Nous allons poursuivre justement en donnant la parole au ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, on pourrait peut-être commencer l'étude du projet de loi article par article immédiatement, à moins que la députée de L'Acadie veuille faire quelques commentaires.

Le Président (M. Rancourt): Quelques commentaires?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Discussion générale L'adoption internationale

Mme Lavoie-Roux: Juste quelques questions. En tout cas, si je les pose maintenant, je ne les poserai pas au moment de l'étude des articles. J'aimerais d'abord qu'on nous dise exactement, dans les cas que l'on veut régulariser, de combien de cas s'agit-il. De quels pays originent les enfants, à quoi sont dus les retards, les complications qui sont créées dans le cas de ces enfants-là. Est-ce que c'est parce que le gouvernement du Québec ou enfin les organismes, peu importe, ont été accusés de se traîner les pieds, d'être pris dans de la bureaucratie qui, finalement, empêchait les choses d'aboutir?

Je ne sais pas jusqu'à quel point ces accusations sont fondées, pour l'ensemble de ce groupe d'enfants qui, il faut bien le reconnaître, a poussé le gouvernement à agir plus rapidement à ce moment-ci parce que vous vouliez justement régulariser des cas. Alors j'aimerais savoir de quel ordre de grandeur il s'agit. C'est bien beau de dire qu'on va donner une amnistie à 100 ou 150 cas, mais, est-ce que des évaluations ont été faites dans chacun de ces cas? Par qui ont-elles été faites? Cela est ma première question.

L'autre question, qui serait peut-être préalable en fait à celle-ci, c'est: Quelle est la politique du gouvernement en matière d'adoption internationale? C'est que, petit à petit, on s'est mis à faire de l'adoption internationale qui a été très répandue, il y a peut-être une dizaine d'années, sur une base privée, à ce moment-là. Avec la loi 13, en 1979, on avait tenté de donner un certain cadre à l'adoption internationale, mais on ne sait vraiment pas où le gouvernement se situe vis-à-vis de l'ensemble de l'adoption internationale. Est-ce qu'on agit un peu au jour le jour en assurant des mécanismes qui fonctionnent le mieux possible, ou est-ce qu'il y a, du point de vue démographique, du point de vue des ressources humaines, une politique que le gouvernement entend privilégier?

Est-ce qu'on va répondre uniquement aux demandes des gens ou le gouvernement veut-il aller au-delà de cela? Enfin, quelle

est la politique générale du gouvernement en matière d'adoption internationale? Je pense que c'est la première question; l'autre vient ensuite.

M. Johnson: D'accord.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Johnson: Sur la politique du gouvernement en matière d'adoption internationale, je dois vous dire d'emblée que nous considérons, à partir de certains principes que j'évoquerai par la suite, que l'adoption internationale est une chose souhaitable et souhaitable au Québec, mais à des conditions très précises.

La première, c'est que nous présumons malgré tout que le milieu idéal et naturel d'un enfant est son milieu d'origine biologique, où qu'il soit situé, n'importe où dans le monde. On sait cependant que dans beaucoup de pays, notamment dans des pays qui ont connu différentes difficultés ou qui en connaissent, des enfants néanmoins restent abandonnés. En d'autres termes, si ce ne sont pas des familles québécoises qui les accueillent, c'en sera d'autres ou ce seront des enfants qui vivront plus ou moins dans un état de marginalité sociale et plus ou moins assumés par des services étatiques dans certains de ces pays.

À partir du moment où l'on constate cela, ce qui n'est pas une situation que l'on souhaite, et dans la mesure où le Québec pourrait modestement apporter sa contribution à une politique de développement international, cela va dans le sens de ce que tente de faire l'UNICEF, l'Organisation mondiale de la santé ou d'autres, la situation idéale serait un monde dans lequel il n'y aurait pas d'adoption internationale. Donc, il y en aura. Les principes sont, encore une fois, le respect, l'intérêt de l'enfant qui est probablement le principe central.

Deuxièmement, des règles qu'on retrouve dans ce projet de loi que nous avions tenté d'appliquer jusqu'à maintenant, mais avec des trous juridiques considérables. C'est pour cela qu'on intervient par ce projet de loi, c'est-à-dire la notion d'adoptabilité de l'enfant et de capacité d'évaluation de la famille à savoir que c'est un milieu adéquat pour l'enfant, aux fins de lui fournir un milieu d'affection où il pourra se développer le plus normalement possible et où il aura les plus grandes chances de bonheur possible.

Cette politique, d'une part, s'inscrit dans une préoccupation plus générale, bien que son effet sur les solutions à l'égard de ce problème soit marginal; il est celui de la politique de la population du Québec, et on aura le temps de l'évoquer en termes plus généraux et plus larges d'ici le printemps prochain. Des études considérables là-dessus ont été faites au gouvernement et sont en ce moment au secrétariat du développement social; on en rendra certaines publiques bientôt.

Deuxièmement, nous constatons la volonté de centaines de familles québécoises d'accueillir un enfant. Il faut se rappeler qu'au Québec, très peu d'enfants sont en adoption. On se rappellera de la politique extrêmement dynamique qui avait été mise sur pied en 1967 au Québec, où, littéralement, en trois ans, on a, pour utiliser l'expression de l'époque - vidé les crèches. Il y avait des milliers d'enfants qui étaient en milieu institutionnel et, en l'espace de deux ou trois ans, si je ne me trompe, la plupart de ces enfants avaient été adoptés.

Donc, les listes d'attente en matière d'adoption domestique sont très longues et c'est probablement comme cela que des parents se sont retournés vers l'idée de procéder à une adoption internationale. Par ailleurs, il y a des groupes très spécialisés dans ce domaine, qui sont essentiellement des groupes bénévoles, qui sont amenés dans différents pays et, à travers certains organismes internationaux qui s'intéressent à ces questions, à partager ces principes généraux d'intérêt de l'enfant, du milieu adéquat de la famille d'accueil, et d'un contexte juridique le plus sécure possible pour que ce soit fait adéquatement. Le secrétariat à l'adoption, depuis sa création il y a à peine un an et demi maintenant, a réussi à tisser un réseau de communications extrêmement intéressant avec ces organismes, tant sur le plan québécois et canadien qu'international, encore une fois, dans un univers de préoccupations qui est celui que j'ai décrit un petit peu avant.

Quant à la deuxième question ou celle qui avait été formulée en premier, je laisserai peut-être Mme Gervais le préciser, mais je dirai tout de suite qu'il y a deux catégories de personnes qui seront soumises à une espèce de clause éponge. Il y a ces personnes qui récemment ont adopté des enfants dans un contexte que Mme Gervais pourra vous décrire très précisément, à travers des individus beaucoup plus que des organismes.

Deuxièmement, les personnes qui, depuis 20 ou 30 ans au Québec, ont procédé à de l'adoption internationale et qui, en l'absence d'une régularisation du statut de leur enfant sur le plan de la filiation, pourraient théoriquement se voir opposer dans certains milieux des problèmes juridiques importants, notamment en matière de succession. L'effet de la clause n'est pas seulement de passer l'éponge sur les cas récents dont on a entendu parler, mais c'est également de s'assurer des règles de filiation de telle sorte

qu'elles soient applicables à tous les enfants qui ont été adoptés internationalement, même par les voies les plus formelles, les plus encadrées, etc., dans le passé. Mme Gervais, peut-être?

Le Président (M. Rancourt): Mme

Gervais.

Mme Gervais (Lisette): Je pourrais peut-être répondre à des questions qui soient plus précises. On pourrait peut-être les choisir vu que nous, on a vu des cas difficiles où des gens, par exemple, n'avaient ni évaluation, ni intermédiaire. Le fait de ne pas avoir d'intermédiaire nous inquiétait beaucoup sur la provenance de l'enfant, sur l'adoptabilité de l'enfant.

Dans le cas d'évaluation des foyers, bien sûr, la loi prévoit que ce soit le directeur de la protection de la jeunesse qui les fasse, donc les CSS. À ce moment, c'est ce que nous exigeons et l'intermédiaire est, par exemple, un organisme - si on parle des cas qui ont été les plus chauds, donc on va parler d'Haïti; peut-être certains autres cas, mais surtout Haïti. Pour Haïti, le seul mécanisme qu'on trouvait valable, c'était d'avoir un seul organisme, qui est l'organisme appelé "Accueillons un enfant", qui est reconnu par le ministère des Affaires sociales pour son expertise et sa compétence et ses rapports quotidiens avec Haïti.

Ce qu'un certain nombre de parents contestaient, c'était le fait qu'ils aient adopté un enfant à Haïti et qu'à toutes fins utiles je ne demande pas à Immigration Québec et à Immigration Canada d'émettre les visas d'entrée ici. Dans ces cas, parfois les parents n'avaient aucune évaluation, parfois, ils en avaient une d'un travailleur social privé, parfois, ils en avaient aussi une d'un centre de services sociaux. Parfois -dans deux cas, à ma connaissance - ils avaient une évaluation négative d'un centre de services sociaux. La plupart du temps, ils n'avaient pas d'intermédiaire reconnu, et c'est là-dessus que se situait notre inquiétude face à la provenance de l'enfant. Dans bien des cas, ce que nous racontaient les parents sur les circonstances de l'adoption de leur enfant, c'est qu'ils étaient allés eux-mêmes dans les familles, dans la montagne, par exemple, à Cap-Haïtien, négocier eux-mêmes l'enfant, si l'on peut dire, et le ramener, après avoir eu ces contacts par un intermédiaire privé québécois qui avait un correspondant à Haïti.

Si je peux me permettre cette expression, on les appelle les "adoptions à hauts risques", un peu comme les grossesses à hauts risques. Pour nous rassurer là-dessus, on a prévu de faire part de chaque dossier au DPJ de la région où il y a cette famille. Je pense que le DPJ peut apporter à la fois un soutien et un contrôle. Je pense qu'il est plus important d'apporter un soutien à cet enfant. Ces enfants-là à Haïti sont dans des crèches; ils sont ou bien sortis d'une autre crèche ou d'une famille, mais ils sont un peu comme nulle part. C'est pour cela qu'on veut s'assurer que l'enfant, quand il sera ici, sera suivi. C'est ce qu'on est convenu de faire avec quelques directeurs de la protection de la jeunesse parce que cela s'est concentré dans une même région où était, bien sûr, l'intermédiaire qui était le plus actif.

C'est important pour nous que cela soit adopté très tôt, surtout pour l'avenir, moins pour le passé que pour l'avenir. Cela nous permettra dans l'avenir d'amener au tribunal ces causes-là. L'intermédiaire ne sera pas l'intermédiaire reconnu; les gens seraient obligés de dire que l'intermédiaire est une personne. Je ne sais pas si cela répond à votre question. En termes de nombre, quand il est question d'Haïti, évidemment que c'est...

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée Lavoie-Roux.

Mme Lavoie-Roux: Ceux qui attendent que la situation soit régularisée...

Mme Gervais: Je vous dirai qu'à ma connaissance il y en aurait neuf, dix ou peut-être douze parce que tous ne se sont pas nécessairement manifestés au gouvernement. Il peut y en avoir qui attendent de voir. Ce ne serait pas plus que cela, parce que c'est un réseau qu'on connaît bien, le réseau en provenance d'Haïti et quelques-uns en provenance du Guatemala.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée Lavoie-Roux.

Mme Lavoie-Roux: Je suis encore la députée de L'Acadie.

Le Président (M. Rancourt): Je sais.

Mme Lavoie-Roux: C'est la deuxième fois que vous me le dites.

Le Président (M. Rancourt): Vous avez toujours votre nom. Je m'excuse.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas grave. En fait, cela se limite à une dizaine de cas.

Mme Gervais: À une dizaine de cas, puisque ces enfants-là on les connaît bien. Ils sont là-bas.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils sont tous de la Mauricie?

M. Johnson (Anjou): De la Mauricie?

Mme Lavoie-Roux: Enfin, de Trois-Rivières. Trois-Rivières, c'est la Mauricie?

M. Johnson (Anjou): Je vous dirais Trois-Rivières, Shawinigan, Contrecoeur, Tracy et Nord-Ouest québécois.

Une voix: Compton.

M. Johnson (Anjou): Lac-Mégantic, pas Compton.

Mme Lavoie-Roux: Alors, il y en a une dizaine.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Gervais: II y en aurait une dizaine, oui.

Mme Lavoie-Roux: Dans les cas où vous avez eu deux évaluations négatives, que faites-vous?

Mme Gervais: Dans le cas où on a eu une évaluation négative...

Mme Lavoie-Roux: Vous avez dit que dans deux cas vous aviez eu des évaluations négatives.

Mme Gervais: C'est dans ce sens-là que je dis que c'est encore à plus haut risque et qu'on demande au DPJ de... On lui présente le dossier au complet. On lui demande de surveiller cette famille-là et de voir ensuite s'il y aurait lieu de faire un signalement.

Mme Lavoie-Roux: C'est parce qu'ils seront adoptés ces enfants-là.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Sauf que dans le fond ils seraient traités comme des enfants d'un milieu naturel, normal. Pour ces deux cas-là, il aurait fallu faire une exception tellement odieuse et tellement complexe qu'on n'aurait pas pu la faire dans la loi.

Mme Lavoie-Roux: Mais il n'y avait pas d'objection majeure...

M. Johnson (Anjou): A priori... Mme Lavoie-Roux: ...à l'adoption.

M. Johnson (Anjou): Par exemple...

Mme Lavoie-Roux: On peut trouver que des personnes sont plus aptes à être parents que d'autres, mais il ne s'agit pas d'une chose fondamentale. Je ne sais pas à quoi je penserais; à des gens irresponsables ou à un milieu criminel, je ne sais pas.

M. Johnson (Anjou): II ne s'agit pas, donc - on nous rassure quant à cela - de milieux criminels, comme exemple, mais...

Mme Lavoie-Roux: Je vous donnais cela comme exemple, parce que je n'avais pas d'autre idée.

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Néanmoins, ce que je comprends du processus, c'est de faire en sorte que le DPJ étant alerté, comme pour n'importe quelle famille où un enfant dont le développement ou la sécurité physique ou mentale sont susceptibles d'être menacés, il pourrait y avoir un signalement. Il est bien évident que certains cas seront, je ne dirais pas surveillés, mais si le DPJ obtient un signalement à l'égard de ces familles, il comprendra très bien ce dont il s'agit. Je pense qu'il fallait malgré tout régulariser la situation d'adoption, compte tenu de l'état d'avancement de tout ce dossier.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Dans les autres contrats dont il est question, est-ce plus, pour l'ensemble des enfants qui ont été adoptés au plan international, d'assurer la filiation ou s'il s'agit d'autres cas qui ont été adoptés par l'entremise d'agents privés? Et là, il s'agit de combien de cas?

Mme Gervais: Je pense que ce que M. le ministre disait, c'est pour les années passées, ce qui peut remonter à dix, quinze, seize ou dix-sept ans, même, à ma connaissance.

Mme Lavoie-Roux: Mais ce sont tous des cas privés?

Mme Gervais: Non, non.

Mme Lavoie-Roux: Tous des cas qui ont été faits au plan international?

Mme Gervais: Oui, parce que... Mme Lavoie-Roux: Ah! D'accord.

Mme Gervais: Voici peut-être un petit exemple. Beaucoup d'adoptions ont été homologuées, mais en reconnaissant, donc, la valeur du jugement du pays d'origine de l'enfant, ce qui n'avait pas exactement les mêmes effets que l'adoption ici. C'était très courant.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Bon. Comment pensez-vous, à l'avenir, prévenir les adoptions privées, et d'une façon plus précise, y a-t-il des dispositions qui sont prises par les ministères de l'Immigration du Québec et du Canada? Quelle sorte d'arrangements avez-vous? C'est la seule façon pour vous, je pense, de contrôler les adoptions, appelons-les... Elles sont peut-être légitimes, mais...

Mme Gervais: Transfrontières.

Mme Lavoie-Roux: ...qui ne se font pas selon les normes reconnues.

Mme Gervais: On travaille déjà, on travaille depuis presque le début de mon mandat avec le ministère de l'Immigration du Québec et donc, avec le ministère de l'Immigration du Canada et je pense que ce qui s'est passé à Haïti est vraiment la preuve que ce mécanisme fonctionne. Le ministère de l'Immigration du Québec n'a pas émis un certificat de sélection. Immigration Canada n'a pas laissé partir les enfants d'Haïti. C'est ce qui était difficile au début. Il valait mieux, je pense, ne pas laisser les enfants quitter leur pays plutôt que de les retrouver ici à Mirabel ou à Dorval. On a une collaboration de ces deux ministères absolument sans problèmes et des contacts hebdomadaires, à tout le moins.

Le Président (M. Ranoourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Mais comment, alors, a pu se développer le problème des enfants de la république Dominicaine? Ce que j'ai cru comprendre, c'est qu'il y en avait une dizaine qui étaient entrés au pays. Comment se fait-il que... On peut bien adopter une loi ici, mais...

Mme Gervais: Oui. J'allais vous dire que c'est en 1982 que ces problèmes se sont posés avant qu'on puisse mettre ces mécanismes en place et aussi avant la mise en vigueur des articles de loi du 1er décembre 1982.

Mme Lavoie-Roux: Bon. D'accord. Ah oui!

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: La dernière question que je voulais poser avant de toucher à l'étude article par article, c'est: Dans quelle mesure veut-on aussi favoriser l'adoption d'enfants québécois qui sont un peu plus vieux, qui peuvent même avoir trois ou quatre ans? Je ne parle pas nécessairement de ceux qui ont quatorze ans. Est-ce qu'il y a encore suffisamment de demandes pour eux? On est un peu pris dans un conflit -conflit est un grand mot, en l'occurrence -entre la nécessité aussi de donner un milieu stable à des enfants du Québec et peut-être le désir des parents, parce qu'on peut avoir un enfant plus jeune si on va sur le marché... Je m'excuse, pas sur le marché.

Mme Gervais: Cela a été comme cela longtemps. (11 h 30)

Mme Lavoie-Roux: Au plan international, si on va dans l'adoption internationale, comment conciliez-vous les deux, parce que cela peut être plus tentant de dire... En général, les gens veulent adopter...

Une voix: Un bébé.

Mme Lavoie-Roux: ...un bébé. Ils ont plus l'impression que ce bébé est le leur, que s'il avait trois ans.

Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je laisserai Mme Gervais et j'aurai quelque chose à ajouter après. Il est bien évident que les difficultés... Il reste des enfants, au Québec qui sont techniquement adoptables; ce sont souvent des enfants handicapés. Nous avons, malgré tout, comme vous le savez, depuis maintenant quatre ans, je pense, une politique d'aide à l'adoption d'enfants qui ont vécu longtemps en familles d'accueil. Souvent, ces enfants ont un handicap mental ou physique ou ont, parfois, des problèmes de comportement, et se retrouvent dans des familles d'accueil. Mais je dirais que, tous les ans, je signe une cinquantaine de reconnaissances de demandes d'aide financière à des familles d'accueil qui ont décidé de procéder à l'adoption de l'enfant qui a vécu, dans ce foyer thérapeutique. Il reste que c'est un problème, c'est évident. Je pense qu'on ne peut pas empêcher, non plus, les parents québécois qui souhaitent avoir de jeunes enfants d'entreprendre des démarches dans le sens de l'adoption internationale si, au départ, c'est ce qu'ils veulent.

Le Président (M. Rancourt): Mme

Gervais.

Mme Gervais: J'allais ajouter que, de toute façon, il y a quand même très peu d'enfants, et même des enfants plus âgés, qui sont disponibles pour l'adoption. Maintenant, compte tenu des articles du Code civil en vigueur depuis décembre 1982, il y aura quand même possibilité de déclaration d'adoptabilité. Donc, il y a un certain nombre d'enfants, qui sont déjà en

familles d'accueil qui, à ce moment - c'est le cas, avec l'aide financière à l'adoption -deviennent adoptables par ces dispositions du Code civil. C'est même le cas pour les enfants mongoliens. On en est à cette gravité de handicap, si l'on veut, et des enfants plus âgés. D'autre part, ce sont parfois des gens différents, parfois "une autre clientèle" entre guillemets qui désire adopter à l'étranger, mais c'est aussi, parfois, les mêmes familles. Quand on parle de familles qui adoptent leur premier enfant, c'est différent, mais, pour des familles qui en ont déjà adopté, trois ou quatre ou cinq ou six - ou, dans un cas exceptionnel, 21 -ces gens ont à la fois intégré des enfants de différentes nationalités, mais aussi des enfants québécois qui étaient ou plus âgés ou handicapés. Cela se retrouve souvent parce que la notion même d'adoption se trouve être une notion qui est beaucoup plus large.

Le Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Dans le cas où il y a 21 enfants. Est-ce que la loi va régulariser leur...

Mme Gervais: Oui, plusieurs d'entre eux.

Mme Lavoie-Roux: Je trouve bien heureux les gens qui, en 1983, peuvent s'occuper de 21 enfants. C'est un peu un orphelinat.

Mme Gervais: C'est à cause de leur âge. Il y a des plus vieux qui sont sortis. Il faut aussi dire que personne d'autre ne voulait de ces enfants.

Le Président (M. Marcoux): Ce qui termine les remarques préliminaires. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Une dernière question.

Le Président (M. Marcoux): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez fait un suivi, par exemple, de la persévérance des parents qui ont adopté au plan international. Je ne sais pas combien il y en a eu sur le plan international jusqu'à maintenant. Si on prend depuis 17 ou 18 ans. Est-ce que le plan de la persévérance ou le succès est équivalent aux adoptions qui se sont faites avec les enfants québécois?

Mme Gervais: D'abord, la première adoption qu'on appelle internationale, a eu lieu au Vietnam il y a maintenant seize ans. On a depuis l'automne, entrepris une enquête sur le vécu de ces enfants, sur l'intégration des enfants dans les milieux. C'est une préoccupation presque mondiale à la fois des pays qui nous confient leurs enfants et aussi ceux qui reçoivent les enfants, mais davantage des pays qui nous confient leurs enfants. On a quand même très bien structuré, avec de très bons dossiers, des dossiers qui sont à jour depuis à peu près dix ans. On prend 1200 de ces dossiers d'adoption. Une enquête est en cours dont les résultats seront disponibles au début de février. À ce jour, 500 questionnaires assez volumineux, d'une cinquantaine de pages, ont été remplis avec la collaboration des parents dans 98% des cas. Je pense que ce sera extrêmement intéressant de savoir cela, ce qu'on n'avait pas vraiment.

Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas d'information précise pour le moment.

Mme Gervais: Sauf, bien sûr, par les centres de services sociaux, par les organismes avec lesquels on travaille.

Mme Lavoie-Roux: En général, j'imagine que ce doit être comparable...

Mme Gervais: Comparable à l'adoption régulière.

Mme Lavoie-Roux: L'adoption au Québec. Oui.

Mme Gervais: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que vous seriez prêt à passer à l'article 1?

Mme Lavoie-Roux: Oui, on peut passer à l'article 1.

Étude article par article

Le Président (M. Brouillet): J'appelle l'article 1.

Modification au Code civil du Bas-Canada

M. Johnson (Anjou): M. le Président, par l'article 1, il s'agit dans le fond d'établir une règle pour faire preuve de la loi étrangère plutôt que procéder par preuve par expert qui est très complexe, coûteuse et longue. On introduit la notion qu'une fois que le juge a une copie certifiée de la loi, cela fait preuve prima facie du droit du pays d'où vient l'enfant.

Mme Lavoie-Roux: Cela va.

Le Président (M. Brouillet): L'article 1

est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Modifications au Code civil du Québec

Le Président (M. Brouillet): J'appelle l'article 2.

M. Johnson (Anjou): II s'agit ici d'établir la règle de droit international privé qui s'applique, c'est-à-dire établir le principe qui permet aux États réciproquement de savoir comment s'harmonisent leurs lois. Ce que nous affirmons, c'est que dans le cas de l'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec, ce sont les règles relatives au consentement et à l'adoption de son pays d'origine qui s'appliquent aux fins de juger de son adoptabilité.

Mme Lavoie-Roux: Pour la première partie, "dans le cas de l'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec, les règles relatives au consentement à l'adoption et à l'adoptabilité de l'enfant sont celles que prévoit la loi de son domicile." Quels sont les rapports que vous entretenez avec ces pays pour assurer que l'adoptabilité de l'enfant se fait selon des règles qui sont un peu similaires au plan des principes humains? Il y a sûrement des différences culturelles. Même si n'importe quel gouvernement nous donne une attestation d'adoptabilité de l'enfant et qu'on dit: Parfait, peu importe ce qui se passe de l'autre côté de notre frontière... Même involontairement, je pense qu'on ne voudrait pas être complice de certains régimes. L'exemple qui me vient en tête, quoique je ne pense pas que la situation se soit présentée, je prends les enfants de l'Argentine qu'on a envoyés pour adoption, probablement pas ici mais un peu partout en Amérique du Sud. Ce n'est pas facile pour un gouvernement de dire: Écoutez, il est adoptable. Il y a quand même des espèces de garde-fous qu'il faudrait mettre pour s'assurer qu'on n'est pas involontairement complice d'actions qui, au plan humain, sont inacceptables.

M. Johnson (Anjou): Vous parlez des mères et des grand-mères.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Mme Gervais: On a des contacts avec elles. J'espère bien que cela ne se représentera pas en Argentine, je pense que la situation est différente. On a eu ce problème avec le Salvador. J'ai demandé à M. Johnson si on pouvait se permettre de ne pas permettre l'entrée d'enfants salvadoriens, parce qu'il y avait peut-être des possibilités d'avoir des enfants qui venaient du Salvador, sauf qu'au Salvador, on savait pertinemment - j'ai pu vérifier pour ma part - que tous les mouvements rattachés à l'Église et l'archevêque même de San Salvador étaient opposés à l'adoption d'enfants parce que ces enfants pouvaient peut-être être des orphelins mais les parents pouvaient être des parents disparus. J'ai rencontré aussi deux mères et épouses salvadoriennes qui étaient de passage, qui sont réfugiées à Mexico, qui nous ont dit que ce qu'elles souhaitaient, c'était de l'aide là-bas pour avoir des types de garderies pour les enfants et permettre aux enfants de demeurer dans leur famille même si ce n'était pas la famille immédiate. À ce moment-là, on s'est opposé à l'entrée de ces enfants. Je pense qu'on est très vigilant par nos contacts avec les pays, avec les organismes internationaux, avec les organismes bénévoles ici.

D'autre part, si on pense à un pays comme la Corée, par exemple, c'est un pays qui nous confie des enfants par le biais d'une agence, le Social Welfare Services, et cette agence est reconnue par l'État. Les enfants sont de passage dans ce qu'on pourrait appeler un orphelinat, mais ils sont tout de suite replacés dans des familles d'accueil en attendant d'être adoptés par des Québécois. On a entre 50 et 60 enfants qui, cette année, vont arriver de la Corée avec un dossier extrêmement bien fait sur leur histoire médicale, leur histoire sociale, par exemple, l'histoire des parents, dans la mesure où elle est connue.

C'est ce genre d'entente que l'on fait par des contacts. Par exemple, j'ai rencontré le responsable de Social Welfare Services quand il était de passage aux États-Unis, à New York; il y a des gens de chez nous qui y vont comme escortes et qui peuvent, en ramenant les enfants, vérifier sur place. J'ai dit "chez nous", ils ne sont pas du ministère, mais de l'organisme bénévole avec lequel on travaille. Ils vont sur place voir dans quelles conditions les choses sont faites et c'est vraiment le type de relations que l'on veut entretenir avec les pays, que l'on veut maintenir. Tout ce temps, nous demandons à nos organismes bénévoles qu'ils s'occupent d'aider les enfants chez eux, soit par des formes de parrainage d'enfants qui ne pourront jamais être adoptés, soit par un support aux familles pour qu'elles puissent les garder, etc.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais...

Mme Gervais: Est-ce que cela répond à votre question?

Mme Lavoie-Roux: Oui, cela répond à ma question, mais il reste un élément de...

Mme Gervais: Je pourrais peut-être ajouter qu'on est absolument contre - et on

en a fait une politique qu'on a transmise à tous les directeurs de la protection de la jeunesse, à tous les praticiens aussi, aux organismes bénévoles - l'adoption, à défaut d'un meilleur mot, qu'on appelle privée directe, c'est-à-dire de famille adoptive à famille biologique. Je trouvais, personnellement, que cela posait des problèmes d'éthique. Ce sont des problèmes qui préoccupent tous les organismes sur le plan international qui s'occupent d'adoption qu'on dit transfrontières.

Mme Lavoie-Roux: Vous ne pouvez pas procéder par entente - enfin, je ne sais pas quel caractère juridique elle pourrait avoir -entre le Québec et un autre pays en ce qui touche l'adoption? Quand on fait une entente, on connaît les conditions du contrat d'un côté comme de l'autre et je me demande s'il n'y aurait pas là un élément un peu plus sécuritaire. Je comprends ce que vous dites, le ministre expliquait hier que ce sont des enfants qui sont en institution. On doit s'assurer qu'ils sont adoptables, etc., mais dans quelle mesure peut-on s'en assurer? Dans le fond, ils arrivent avec leur certificat d'adoptabilité qui est donné par leur pays d'origine.

Pour assurer le maximum de sécurité dans ce type de relations qu'on a avec d'autres pays eu égard à l'adoption, est-ce qu'on pourrait envisager une possibilité d'entente? Je ne sais pas quel caractère on pourrait lui donner, peut-être pas nécessairement un caractère juridique, mais, si on prend la Corée...

Mme Gervais: On a ce type d'entente.

Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de l'étendre à tous les pays où on adopte?

Mme Gervais: C'est très difficile. Sur le plan international, c'est très difficile. Cela existe, mais...

Mme Lavoie-Roux: On pourrait peut-être essayer de la développer.

M. Johnson (Anjou): Oui, on a déjà un comité - c'est ce que j'allais dire - qui travaille à une entente. Ce qui est important, c'est d'arriver à signer une première entente. Comme le Québec a une juridiction exclusive dans le domaine de l'adoption...

Mme Lavoie-Roux: Pour une fois que vous pouvez exercer une juridiction, servez-vous en.

Mme Gervais: Une entente est amorcée avec les Philippines. Si vous me demandez pourquoi avec ce pays plus qu'un autre, c'est parce qu'il y avait déjà des traditions, il y avait déjà des amorces et ils ont offert de signer une entente. En ce moment, c'est en négociation et cela devrait se signer assez tôt.

M. Johnson (Anjou): II faut comprendre qu'en général, à part cela, c'est un peu compliqué pour les gouvernements, dans quelque pays que ce soit, d'admettre, dans le cadre d'une entente internationale, qu'il prend de ses enfants pour les envoyer à l'étranger. (11 h 45)

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'il ne faudrait peut-être pas lui donner un caractère juridique sur le plan international, mais au moins qu'on n'entre pas en relation avec eux à moins qu'on sache un peu quelles sont les conditions de l'autre côté de la clôture. Cela peut être une entente qui, à un moment donné... justement si elle est moins juridique on peut l'abandonner ou y faire les modifications au fur et à mesure peut-être qu'un pays devient plus sensibilisé. Je suis sûre qu'ils n'ont pas nécessairement la même philosophie que nous quant à ce que cela représente pour les parents qui laissent aller leur enfant pour adoption.

Mme Gervais: C'est aussi une préoccupation des juristes, par exemple, sur le plan international, des organismes de développement social. De nouveau il en est question à des comités auxquels on participe sans y être mais en y étant par les organismes bénévoles ou par correspondance beaucoup. C'est d'avoir un code d'éthique international sur l'adoption. Il y a aussi l'importance pour nous que l'on puisse...

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, il n'y en pas de code international?

Mme Gervais: Non, il n'y en a pas en ce moment. C'est une demande qui a été faite aux conférences en développement social par exemple, qui ont lieu tous les deux ans. C'est la quatrième fois que cela sera ramené pour présenter aux Nations Unies. Les principes sont là, mais qu'on en arrive à avoir ce code d'éthique sur le plan international, un code avec lequel les pays qui confient des enfants et les pays qui les reçoivent sont d'accord, cela a été discuté à La Haye l'été dernier, cela a été discuté à Quito en Équateur. C'est une grande préoccupation surtout des pays d'Amérique latine qui, très souvent, à cause de leur pauvreté assistent peu à ces conférences. Ils ne peuvent pas se déplacer, ils ne peuvent pas y aller, ils ne peuvent pas envoyer de délégués. Dès qu'il y a de plus petits comités, par exemple, ou par nos contacts qui sont assez fréquents avec...

Mme Lavoie-Roux: Dans le moment le seul pays avec lequel vous auriez une entente c'est la Corée.

Mme Gervais: La Corée, un accord.

Mme Lavoie-Roux: ...un accord ou entente, je ne veux pas...

Mme Gervais: Oui. Sauf qu'on en a aussi avec d'autres répondants dans des pays mais qui ne sont pas une entente aussi formelle que la Corée, cela c'est sûr. Le modèle Corée est celui qu'on veut arriver à établir avec plusieurs pays dans la mesure -j'allais ajouter aussi - où une adoption qui est faite par exemple dans un pays. C'est le cas de l'Amérique latine où il peut y avoir deux types d'adoption. Mais on veut faire des ententes avec des pays où l'adoption est vraiment une rupture de liens de filiation biologique pour devenir une filiation de l'enfant avec ses parents adoptifs, ce qui n'est pas toujours le cas avec l'Amérique latine. Mais dans la mesure où par exemple, la notion même d'adoption ne rompt pas le lien de filiation on ne pourra pas accepter l'enfant. C'est prévu dans un des articles.

Mme Lavoie-Roux: Comme Haïti par exemple, que ce soit un peu plus formalisé cela ne serait pas mauvais.

Mme Gervais: On y travaille, j'allais dire, jour et nuit d'arrache-pied.

Mme Lavoie-Roux: Je suis mieux de ne pas faire de commentaire, parce que c'est au journal des Débats. Même si j'ai l'immunité...

Le Président (M. Brouillet): L'article 2 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: À la condition qu'il y ait un engagement de la part du ministère d'essayer, peut-être avec certaines variantes, d'établir avec chacun des pays où on va chercher des enfants, un type d'entente qui soit un peu plus formelle que juste la bonne volonté - que je ne mets pas en doute - de gens dans le pays d'origine ou autres ou d'organismes ou de points de repère qu'on a ici et là qui, à un moment donné, de toute façon peuvent disparaître pour...

M. Johnson (Anjou): Je pense qu'on peut sûrement donner cet engagement à deux chapitres rapidement. Premièrement, c'est qu'on essaie d'encadrer cela le plus formellement possible, mais quand on sait les difficultés que cela pose... Deuxièmement, il ne faut pas oublier que nos règles d'ordre public interne s'appliqueraient si jamais le secrétariat s'adonnait à des transactions avec un quelconque endroit que je ne nommerai pas, mais où littéralement l'État se livre au commerce des enfants; je pense que ce serait contre l'ordre public du droit québécois que le secrétariat le fasse.

Donc, il y a une espèce de garantie dans les personnes qui vont chercher ces enfants, qui ont la responsabilité d'accréditer des intermédiaires, etc. Ils sont soumis à des principes généraux au niveau de l'ordre public qui font qu'à toutes fins utiles on ne pourrait pas transiger avec une quelconque fraction du continent latino-américain ou africain ou ailleurs qui déciderait de se faire un îlot de 100 milles carrés où il y a du trafic d'enfants. Je pense que ce serait contre l'ordre public. Le tribunal ici chez nous ne sanctionnerait pas cela. Je pense qu'il y a toutes sortes de mécanismes qui font que même s'il n'y a pas une contrainte juridique absolue qui est, à toutes fins utiles, impossible à établir parce qu'on parle du droit et du fonctionnement du droit dans d'autres États, il y a ici, je pense, des mécanismes qui garantissent que l'action des organismes que nous accréditons comme secrétariat est balisée par ces principes au coeur desquels on retrouve la notion d'intérêt de l'enfant.

Le Président (M. Desbiens): L'article 2 est adopté. L'article 3?

M. Johnson (Anjou): Le premier paragraphe de l'article 3 vise à confirmer dans la loi qu'il faut absolument agir par intermédiaire accrédité. Deuxièmement, à mettre le juge dans une position où également il s'assure que la DPJ a fait l'évaluation de la famille. Ce sont les deux principes de base. On dit dans le fond ià-dedans que le tribunal avant de rendre sa décision doit s'assurer que les dispositions de la Loi sur la santé et les services sociaux qui touche l'accréditation de l'intermédiaire, comme l'évaluation par le DPJ, sont respectés.

Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire quels sont vos critères d'accréditation d'un organisme?

Mme Gervais: Avec les organismes, on signe un protocole d'entente qui est quand même assez volumineux, mais qui demande aux organismes d'abord de s'engager à aider les enfants sur place, ce que je vous ai dit tantôt, dans leur famille d'origine et dans leur milieu. Ensuite, ils ont un rôle extrêmement important, un rôle majeur dans ce qu'on appelle le jumelage - à défaut d'un autre mot - de l'enfant, c'est-à-dire l'enfant dans son pays d'origine avec la famille ici; mais c'est quand même le Directeur de la protection de la jeunesse qui a le rôle déterminant dans ce jumelage. Les positions vont être faites là. Mais ce sont les organismes qui doivent nous faire la preuve,

qui sont supports aux parents, qui font ce parrainage et qui apportent des mesures d'aide dans le pays. Ce sont des organismes qui ont déjà un passé certain, ont dix ans d'existence et d'autres peut-être deux ans, mais c'est ce type d'organisme qui a déjà un fonctionnement et qui parfois commence d'abord en travaillant comme support aux parents avant l'adoption et qui apporte un suivi aux parents après et qui, aussi, sont ressources pour les escortes. Par exemple, pour la Corée, on a ce type d'organisme.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez un prototype de...

Mme Gervais: Protocole? Mme Lavoie-Roux: Oui. Mme Gervais: On peut l'obtenir. Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): L'article 3 est adopté. Article 4?

M. Johnson (Anjou): II s'agit ici de s'assurer que le lien de filiation, c'est-à-dire tous les droits qui découlent du fait qu'on devient un enfant adopté, donc, on dit un enfant à part entière, à toutes fins que de droit, de s'assurer que le juge en prend acte et la loi du pays où l'adoption a été faite qui est le lieu du domicile de l'enfant le prévoit ou bien le juge ici doit y pourvoir. On réaffirme encore cette question que dans le processus, le juge doit tenir compte que si les dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse ont été respectées, c'est-à-dire l'intermédiaire, c'est passé par un intermédiaire en deuxième lieu, une évaluation de la DPJ, il ne reprend pas la décision au fond, il constate que le processus a été respecté.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): L'article 4 est-il adopté? Adopté. Article 5?

M. Johnson (Anjou): C'est le décès prématuré d'un adoptant.

Ah oui, quand l'adoptant décède prématurément, s'assurer que l'enfant peut malgré tout réaliser ses... Je présume que la situation pratique, c'est qu'on est en cours d'adoption. Le jugement d'adoption a été prononcé à l'étranger. L'enfant, au moment où il arrive dans sa famille ici, n'a pas de filiation au sens du jugement étranger. C'est de s'assurer qu'on donne ce lien de filiation pour être sûr que l'enfant a droit à tout ce à quoi il aurait droit s'il était un enfant du Québec.

Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: C'est conforme aux lois qui existent pour les mouvements d'adoption?

M. Johnson (Anjou): Voilà! En matière domestique. C'est cela.

Le Président (M. Brouillet): Adopté.

Mme Lavoie-Roux: Seulement une question...

Le Président (M. Brouillet): Oui, excusez-moi.

Mme Lavoie-Roux: ...plus ou moins reliée à ceci. Y a-t-il eu des cas relevés où des enfants étaient décédés et pour lesquels des familles avaient assumé des frais à l'étranger?

Mme Gervais: Qui pouvaient avoir été adoptés à l'étranger?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Johnson (Anjou): Des enfants décédés avant d'arriver au pays?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Mme Gervais: À ma connaissance, il y a un cas à Haïti où les requérants étaient allés chercher un enfant dans la montagne. Cet enfant avait 22 ou 26 jours. Ils ont ramené l'enfant à Port-au-Prince. L'enfant a été placé dans une pension ou une crèche. J'ai parlé à plusieurs reprises à ces gens-là. Ils étaient extrêmement malheureux. Je leur ai dit aussi que l'enfant était bien jeune pour quitter sa mère biologique. Ces gens-là ont fait une autre demande et leur demande...

Mme Lavoie-Roux: Étaient-ils passés par une des agences reconnues?

Mme Gervais: Non, non.

Mme Lavoie-Roux: Ils l'avaient fait privément.

Mme Gervais: Oui. Ils étaient passés par le groupe dont on a beaucoup parlé dans les médias.

Mme Lavoie-Roux: Et qu'en est-il dans le cas des enfants atteints d'un handicap? On a parlé aussi de certains cas d'enfants qui avaient finalement été adoptés et étaient des enfants handicapés. Ce n'est pas que j'en aie contre cela, mais...

Mme Gervais: Non.

Mme Lavoie-Roux: ...l'enfant était arrivé et ils ne savaient pas qu'il était handicapé. Vous n'avez pas eu de...

Mme Gervais: Je ne l'ai pas à la mémoire, mais, en fait, je peux vous dire que ce qui est prévu avec les organismes, c'est que les parents ou les requérants sont conscients du dossier médical. Le dossier médical n'est pas selon nos critères d'ici, mais, dans la mesure où on peut obtenir des données sur un dossier médical de l'enfant, c'est ce qui est proposé aux parents en même temps que la proposition d'un enfant leur est faite, comme on le fait ici. C'est important que les gens en soient très conscients. Il y a plusieurs enfants qui ont été adoptés et qui avaient un handicap, mais les parents le savaient. Ils savaient aussi quel type de handicap, à moins que vous parliez d'un enfant aveugle. C'est peut-être cela.

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, c'est un enfant qui avait un handicap. Ce que je me demandais, dans quelle mesure.... D'abord, vers quel âge, en général, sont-ils adoptés?

Mme Gervais: La plupart des enfants...

Mme Lavoie-Roux: En bas d'un an?

Mme Gervais Non, non. Ils peuvent avoir plus d'un an. C'est pour la demande, moins d'un an...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Mme Gervais: ...mais il y a des enfants qui ont entre un an et trois ans, pour la plupart. Il y a des enfants qui sont plus âgés, qui ont cinq ans et...

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais, pour la majorité, ils ont moins de trois ans.

Mme Gervais: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Et de moins d'un an?

Mme Gervais: À leur adoption, ils peuvent avoir moins d'un an, mais il reste qu'il peut quand même y avoir, avant que les procédures ne soient complétées, cinq ou six mois de délai. Ils arrivent ici et ils peuvent avoir...

Mme Lavoie-Roux: C'est rare qu'un enfant arrive avant six mois.

Mme Gervais: Oui, avant six mois. Il y a quelques cas qui ont été faits sur le plan privé, mais il y a eu des problèmes sérieux. Il y a un enfant qui est décédé ici récemment, un enfant qui avait une maladie très rare, qui pouvait se diagnostiquer après trois mois, mais, habituellement, les enfants qui vont arriver de Corée, par exemple, auront entre cinq mois et cinq ans.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Dans le cas de l'adoption internationale - ici, c'est plus facile - les parents sont-ils mis au fait que, par exemple, un enfant - surtout s'il vient d'un pays où il n'y a pas beaucoup d'expertise médicale, par exemple, sur la déficience mentale ou, même si ce n'est peut-être pas considéré selon les mêmes critères que nous...

Mme Gervais: Ou les effets de la sous-alimentation.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela, les parents sont-ils mis au courant? Y a-t-il des retours d'enfant après que des parents se soient aperçus que leur enfant était handicapé? (12 heures)

Mme Gervais: Dans la mesure où les parents ont procédé par les voies normales et à notre connaissance, il n'y a pas eu ce type de rejet, il faut bien le dire, ou de second abandon.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article 6?

M. Johnson (Anjou): II s'agit d'affirmer le principe que la reconnaissance du jugement d'adoption produit les mêmes effets que si le jugement d'adoption avait été rendu au Québec, à compter du prononcé du jugement d'adoption rendu hors du Québec. En d'autres termes, le lien de filiation est créé de fait par le jugement québécois, mais ce jugement est rétroactif au jugement d'adoption du pays de l'enfant adopté. Il faut s'assurer qu'il n'y a pas de vide juridique entre le moment où l'enfant perd ses liens, puisqu'il devient adopté en vertu de la loi étrangère, et le moment où il arrive ici.

Le Président (M. Brouillet): L'article 6 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Modifications au Code de procédure civile

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article 7?

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): L'article 7 est adopté? Adopté. L'article 8.

M. Johnson (Anjou): II s'agissait de l'obligation par l'intermédiaire de l'article 72.3, en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, c'est-à-dire les organismes bénévoles, d'être des corequérants des adoptions internationales qui se réalisaient devant les tribunaux québécois. L'obligation aurait de nouveau imposer à ces organismes de débourser des frais inutilement. Dans la mesure où on les accrédite, dans la mesure où nos règles de droit sont maintenant précises, il n'est pas nécessaire qu'ils soient des corequérants ayant recours à ces frais inutilement. C'est le Directeur de la protection de la jeunesse qui va faire cela.

Le Président (M. Brouillet): L'article 8 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 9?

M. Johnson (Anjou): II s'agit d'éviter d'avoir à signifier aux parents biologiques étrangers la copie de la demande de placement. On comprendra qu'il est difficile ou, à toutes fins utiles, impossible de signifier une telle copie dans les plaines de la Corée du Sud ou dans les montagnes du Pérou.

Mme Lavoie-Roux: À cet article-là, il y a quelqu'un qui me faisait un commentaire. Est-ce que M. Bergeron est ici? On vous a fait également ce commentaire sur l'article 9. On désirait que soit ajouté - c'est très technique et je sais que vous êtes au courant - à 825.1: Dans le cas où le consentement à l'adoption est spécial, l'avis de la demande de placement est signifié par le demandeur.

Il semble qu'à certains endroits on fait une différence entre le consentement spécial et le consentement ordinaire, par opposition. Par rapport au Code civil, ce n'est pas très clair. Il est à un endroit et il ne se retrouve pas à l'autre. C'est très technique. Je ne sais pas si c'est justifié ou pas, c'est à vous de décider cela.

M. Johnson (Anjou): C'est une proposition qui effectivement m'a été faite un peu à la dernière minute.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas de mon cru, alors je vous la donne.

M. Johnson (Anjou): La demande, c'est quelque chose d'abord qui ne concerne pas l'adoption internationale proprement dite. C'est quelque chose qui concerne l'ensemble des problèmes de l'adoption. Il s'agit des adoptions dites spéciales, c'est-à-dire celles qui se font entre parents jusqu'au troisième degré et qui ne nécessitent pas l'intervention du Directeur de la protection de la jeunesse parce que justement il y a un lien de parenté. Dans ces adoptions, comme le Directeur de la protection de la jeunesse n'intervient pas en vertu de la loi, il est absent du dossier. Or, il y a un article, qui est le 825.1, qui prévoit que toute demande doit être signifiée au Directeur de la protection de la jeunesse et que l'avis de la demande est signifié par le Directeur de la protection de la jeunesse aux parents. Donc, l'article 825.1 prévoit que, lorsqu'il y a une adoption, un avis de cette adoption doit être signifié aux parents biologiques par le Directeur de la protection de la jeunesse.

Cela concerne les adoptions en général. Or, dans les adoptions spéciales, le Directeur de la protection de la jeunesse n'intervient pas. Donc, la suggestion qui m'a été faite -mais, comme je vous dis, c'était un peu à la dernière minute, c'est pour cela que cela ne se retrouve pas dans le projet de loi - est celle-ci: Est-ce qu'on ne pourrait pas clarifier ce qui est actuellement une opinion juridique en disant que, comme ce sont des adoptions spéciales et que le Directeur de la protection de la jeunesse n'intervient pas, donc, ce ne devrait pas être à lui de faire la signification? Comme cette suggestion m'a été faite - je ne vous le cache pas - hier soir en fin de journée, cela a été...

Mme Lavoie-Roux: Je pensais que c'était hier matin.

M. Johnson (Anjou): Ou hier matin, peut-être. Mon souvenir était que c'était hier soir, mais c'est possible. Je n'ai donc pas eu le temps - c'est une suggestion par téléphone d'un avocat qui travaille, qui est compétent, évidemment - de vérifier la pertinence de cela.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela ne vaudrait pas la peine, de toute façon, que vous en examiniez la pertinence? Et, si cela peut éclairer et simplifier les choses, qu'on l'inclue, c'est tout.

M. Johnson (Anjou): On peut même aller plus loin que cela. Comme le comité de législation siège cet après-midi, je vais demander à mon collègue de la Justice et également au secrétariat du comité de législation, de voir cette proposition. Si

j'obtiens l'aval du comité de législation cet après-midi, on pourrait le faire au moment du rapport.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'on adopte quand même l'article 9, quitte à le modifier plus tard?

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): On tient pour acquis qu'en troisième lecture ou au moment du rapport, si on fait un amendement...

Le Président (M. Brouillet): L'article 9 est adopté. J'appelle l'article 10.

M. Johnson (Anjou): II s'agit de la section V, sur la reconnaissance des jugements qui sont rendus hors du Québec. Il s'agit de préciser à l'article 825.6 ceux qui peuvent faire la requête et les documents à produire au soutien de la requête et, à l'article 825.7, les demandes dites accessoires.

Mme Lavoie-Roux: On va finir cela et je reviendrai sur autre chose. On est aux articles 825.6 et 825.7, n'est-ce pas?

Une autre suggestion m'a été faite très rapidement par le même avocat. Je l'apporte strictement dans l'esprit que, si on peut enlever des petits problèmes techniques, c'est aussi bien de le faire.

M. Johnson (Anjou): La modification des registres de l'état civil?

Mme Lavoie-Roux: Oui, des registres de l'état civil. Cela est en lien avec l'acte de naissance dans les pays étrangers.

M. Johnson (Anjou): On a discuté cette proposition avant, ce n'est pas une proposition de dernière minute, même si je ne blâme personne. Dans l'article 825.7, on dit que le requérant peut joindre à sa demande des demandes accessoires, comme le changement de nom ou de prénom de l'adopté et la modification des registres de l'état civil. C'est pour qu'il y ait un suivi, pour que cela soit inscrit dans les registres, etc.

Ce qui inquiète la personne avec qui vous avez discuté, c'est que le mot "modification" n'inclut pas la création de toutes pièces d'un nouveau dossier pour un enfant qui est né à l'étranger et qui n'a pas ici d'acte d'état civil.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Johnson (Anjou): Ce n'est donc pas, au sens propre du terme, la modification, selon cette façon de voir les choses, sauf que, l'expression "la modification des registres de l'état civil" ici, c'est une expression qui est utilisée ailleurs dans le Code civil. Quand on dit qu'on modifie le registre de l'état civil, cela inclut ou bien la création d'un nouvel acte ou la modification proprement dite, mais, de toute façon, dès que l'on touche à un acte d'état civil...

Mme Lavoie-Roux: Cela peut être l'un ou l'autre.

M. Johnson (Anjou): ...on modifie l'ensemble des registres. Alors, cela inclut cette chose et c'est d'ailleurs exactement le même esprit qui se traduit dans les autres articles du Code civil sur les actes d'état civil concernant le mariage, etc., les actes de sépulture et c'est le même état d'esprit qu'on va retrouver dans d'autres amendements...

Mme Lavoie-Roux: Alors, c'est inutile d'ajouter...

M. Johnson (Anjou): ...qui peuvent venir sur le Code civil. Pour ma part, après en avoir discuté avec les gens du ministère de la Justice, on a conclu que cette crainte n'était pas justifiée.

Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord. Il n'y aura pas de plaidoyer. J'aimerais...

Le Président (M. Brouillet): Oui.

Mme Lavoie-Roux: ...excusez-moi, M. le Président, je me rends compte qu'on est rendu à l'article 825.5 du Code civil. On a passé, parce qu'on s'en est tenu strictement à ce projet de loi qui est devant nous... Aux articles 631 et 632, il y a toute la question du caractère confidentiel des dossiers d'adoption, ce à quoi j'ai touché un peu, hier. Je me rends compte, d'abord, que cela n'est pas dans le projet de loi, M. le Président, et que, par rapport à ce qu'on discute, on retourne en arrière...

Le Président (M. Brouillet): Excusez-moi, est-ce que c'est nécessaire avant d'adopter le...

Mme Lavoie-Roux: Ah oui! Je pensais qu'on l'avait adopté, c'est pour cette raison.

Le Président (M. Brouillet): Non.

Mme Lavoie-Roux: Alors, on va l'adopter.

Le Président (M. Brouillet): Alors, adoptons l'article 10 et...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Brouillet): L'article 10 est adopté.

M. Johnson (Anjou): Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Allez-y.

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord. Aux articles 631 et 632, le recours au tribunal pour permettre la consultation du dossier d'adoption uniquement à des fins de renseignement, de recherche ou d'enquête publique, et surtout la restriction contenue dans l'article 632, "ces consentements ne doivent faire l'objet d'aucune sollicitation". Est-ce qu'on n'attend pas de jugement, en ce moment, pour voir quelle interprétation on va lui donner? Dans un premier jugement, cela a été interprété d'une façon restrictive...

M. Johnson (Anjou): C'est en appel.

Mme Lavoie-Roux: ...je pense qu'on est en appel, c'est cela.

M. Johnson (Anjou): II n'y a pas encore de jugement rendu...

Mme Lavoie-Roux: Il n'y a pas de jugement encore...

M. Johnson (Anjou): ...pas à ma connaissance récemment.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Vous êtes à établir des règles - vous m'avez répondu, hier, à l'Assemblée nationale - sur certaines choses que vous êtes prêt à faire pour les enfants qui seront adoptés à l'avenir ou qui sont adoptés à partir d'aujourd'hui. Par contre, sur la rétroactivité, si je puis m'exprimer ainsi, on a des réticences dans une certaine mesure. Je pense que les réticences doivent certainement comprendre la nécessité d'avoir le consentement des deux parties. C'est mon point de vue et je pense que c'est celui de la majorité des gens.

Il reste que vous avez, d'un côté, Mme X, qui est consentante, et M. Y, qui est consentant, mais il n'y a aucun moyen pratique de pouvoir les solliciter dans le sens d'une rencontre avec l'autre. L'interprétation qu'on fait est due à la restriction du dernier paragraphe de l'article 632. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, à ce moment-ci, étant donné qu'on est dans l'adoption... D'abord, je ne sais pas pourquoi on l'a mis et je dois dire que je pense que j'y étais quand cela s'est passé... Je n'en suis pas sûre, mais en tout cas, peu importe; je vais dire que je n'y étais pas, mais je n'en suis pas certaine non plus. Est-ce que ce ne serait pas le moment de le modifier, aujourd'hui?

M. Johnson (Anjou): Non.

Mme Lavoie-Roux: Bon. Mais pourquoi y tenez-vous tant que cela?

M. Johnson (Anjou): C'est-à-dire que, la cause étant en appel, je pense que la valeur de notre système d'interprétation des lois et surtout avec le niveau... d'après, cela permet une évolution très graduelle, finalement, de l'interprétation des lois en fonction de ce que les juges considèrent être comme l'évolution de la société. Le législateur peut faire la même chose en changeant les lois. Je pense que je n'oserais pas parler de l'esprit du législateur sur la notion de sollicitation. On voulait laisser le débat ouvert. On est conscient que l'interprétation restrictive est venue d'une inquiétude de la part du tribunal. En cela, je pense que cela véhiculait probablement l'opinion de la moitié des gens du côté des parents naturels, que des organismes comme les CSS ou d'autres qui sollicitent non seulement les gens dans un contexte où ils troublent leur quiétude... Quelqu'un, par exemple, qui a donné un enfant en adoption il y a quinze ou vingt ans, ou enfin dix-huit ou vingt ans, peut considérer qu'elle a droit - et il s'agit de femmes, essentiellement - à ce qu'on ne lui en parle pas. Et je pense qu'on a invoqué, pour l'interprétation restrictive, le fait que des personnes avaient été contactées à plusieurs reprises par un travailleur social, et que, à leurs yeux, cela consistait une sorte de harcèlement. (12 h 15)

Encore une fois, je ne veux pas me prononcer sur le bien-fondé de ce qu'a décidé le savant juge ou ce que décidera la Cour d'appel. Je pense que ce n'est pas le temps; je pense qu'il n'y a pas de consensus autour de cette question. On a affaire à deux conceptions des droits des personnes. Aux États-Unis d'ailleurs, ce phénomène prend une ampleur assez extraordinaire. On l'a vu par la notion qui commence à être interprétée dans la jurisprudence américaine: The right to one's own biological origins. J'ai vu, récemment, une émission américaine d'affaires publiques très populaire aux États-Unis, qui en traitait pendant une heure et demie, et où vous aviez, à une extrémité, la mère qui avait donné son enfant en adoption il y a 20 ans qui expliquait que ce serait un drame absolument épouvantable qu'on lui rappelle ces événements, dans un contexte où la loi lui permettait de le faire il y a 20 ans, de donner son enfant en adoption, alors qu'elle s'était rebâti une vie; et à l'autre extrémité, une jeune fille - je me souviens -qui considérait que, comme être humain, ne pas connaître ses origines biologiques, cela en faisait quelqu'un qui ne pouvait pas se

développer d'une façon humaine normale.

Alors, je pense qu'on a affaire à une opposition fondamentale sur le plan des conceptions. C'est pour cela qu'on pourrait dire que, pour l'avenir, il faut que cela évolue, je pense. On peut dire que, pour l'avenir, il s'agit de mettre en branle ce qu'il faut pour que, dorénavant, quand une mère confie son enfant en adoption, elle accepte 18 ans avant le fait que son enfant pourra exiger de communiquer avec elle. Et, deuxièmement, de faire en sorte que toutes celles et ceux qui sont dans ce contexte-là aujourd'hui puissent, s'ils expriment leur consentement, avoir une chance qu'il y ait un croisement des consentements donnés et qu'on puisse faire en sorte qu'ils se rejoignent.

Encore une fois, pour le passé, dans le cas du Québec, il y a une dimension qui m'inquiète énormément: c'est la valeur des registres d'état civil de l'époque. Pour l'avenir, c'est très simple; l'encadrement qu'on a pour cela, pour l'avenir, est très clair. Et nos lois, depuis une dizaine d'années, ont entouré le registre d'état civil d'une série de précautions qui, il faut bien dire, n'existaient pas il y a 20 ans. J'ai eu des échos très précis venant de deux personnes qui m'ont expliqué comment un abbé - je ne nommerai pas le nom - se promenait avec son carnet noir.

Mme Lavoie-Roux: Ah oui, je le connais.

M. Johnson (Anjou): Bon.

Mme Lavoie-Roux: C'est-à-dire que j'en ai entendu parler.

M. Johnson (Anjou): Bon. Et je pense que ce certain abbé avait décidé qu'au moment de sa mort, son carnet noir devait être détruit.

Mme Lavoie-Roux: Ah, c'est cela! Je me suis dit: II doit être mort.

M. Johnson (Anjou): Bon. Je ne sais pas si c'est le testament qui a annoncé qu'il l'avait fait ou s'il est décédé et qu'on l'a trouvé dans son testament. Alors on voit bien le genre de drame que cela peut poser. Si les registres de l'état civil ne sont pas clairs, cela peut placer des gens dans une situation, sur le plan humain, qui est absolument absurde, pour ne pas dire carrément odieuse, pour les uns comme pour les autres, et, en ce sens, je pense que cela va prendre des années littéralement - je vous dis comme je le pense - avant que les modifications dans notre société nous amènent à considérer qu'il y a dorénavant une règle générale pour le passé. Je pense que, pour l'avenir, c'est une chose qui peut aller plus vite. Pour le passé, cela va prendre encore beaucoup de temps.

Mme Lavoie-Roux: Je partage en grande partie l'opinion du ministre là-dessus et on peut attendre le jugement de la Cour d'appel. Si on donne au mot "sollicitation" un sens moins restrictif que celui qui a été donné la première fois, cela réglerait le problème. J'admets qu'on puisse attendre le jugement de la Cour d'appel. Dans l'hypothèse où il maintiendrait le jugement de première instance, outre les dispositions qu'on ne peut faire rétroactivement et qui pourraient causer une foule de problèmes parmi ceux dont vous parlez, ne pourrait-il y avoir ce qu'on appellerait de la sollicitation? Je suis d'accord avec vous que le harcèlement se termine une fois que la personne a dit non. On a simplement à lui dire: Écoutez, si jamais vous changez d'avis c'est à vous d'entrer en contact avec nous.

Ne pourrait-il y avoir entre les deux une possibilité de demander une fois à la personne? Elle refuse, c'est fini, il n'y a plus d'autres initiatives qui sont prises. Il y aurait quand même moyen de mettre cela à l'intérieur de balises très précises pour éviter le harcèlement. J'imagine que celui qui veut retrouver l'origine de l'autre peut revenir à la charge plusieurs fois contre le gré de l'autre partie. Qu'au moins une fois on puisse dire à l'autre: Écoutez, on a des dossiers. Là où il n'y a pas de dossiers, je ne vois pas comment on peut le faire parce que c'est quand même à partir de dossiers qui, en général, dans les CSS, ont dû être conservés depuis dix ans, quinze ans, peut-être vingt ans. Mais au moins qu'on permette qu'on pose la question à d'autres personnes.

J'ai eu deux cas à mon bureau, cet automne, de personnes qui fonctionnent très bien dans la vie. Il y en a une qui était... Je ne donnerai pas leur occupation, cela n'a aucune espèce d'importance. Ces personnes sont mariées, ont leurs enfants, sont rendues à un certain âge. Je ne me suis pas interrogée sur la motivation profonde pour laquelle elles veulent retrouver leur mère ou savoir qui elle est. Elles ont fini par identifier qu'elle était quelque part en Abitibi. L'autre peut dire: Oui, on est d'accord, ou non, et cela finit là. Mais elle a dit que jamais personne ne lui a demandé si elle était d'accord ou non.

Entre cela et le harcèlement dont vous parlez, il me semble qu'il y a une marge. Il y a aussi le consentement de la troisième personne, mais cela ce sont les parents adoptifs. Il ne faut pas oublier qu'on a quand même affaire, à ce moment-là, à trois adultes. En bas de 18 ans, le problème ne se pose pas.

Je pense qu'on peut attendre le jugement de la Cour d'appel mais est-ce que le ministre pourrait, au niveau des modalités,

permettre un mécanisme qui soit bien balisé pour éviter ce dont vous parlez ou même que ce soit confié dans chacun des CSS à une personne en particulier qui développera l'expertise dans ce genre de choses et non pas que chaque travailleur social devienne intermédiaire mais que cela devienne vraiment le boulot de quelqu'un en particulier qui en prendra la responsabilité?

Il me semble qu'entre les deux il y aurait une petite ouverture possible parce que ce n'est pas toujours rapide de faire évoluer les mentalités. Je comprends qu'il faut attendre de les faire évoluer. Je suis d'accord avec cela aussi mais il y a quand même eu une évolution depuis dix ans.

Il y a des pays qui le font. Par exemple, en Écosse, je ne sais pas quelle sorte de problèmes cela leur a créés. Je pense que l'Angleterre le permet aussi. Il y a certains États aux États-Unis. Enfin, je ne connais pas les modalités de fonctionnement de chacun mais cela vaudrait peut-être la peine de...

M. Johnson (Anjou): Disons deux choses. D'abord, on attend le jugement de la Cour d'appel, qui pourrait changer toute la situation.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord.

M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, le secrétariat doit... Même avant de créer le secrétariat, j'ai confié à Mme Gervais deux mandats spécifiques: un qui était d'essayer de revoir toute cette question de l'adoption internationale et qui, j'en suis très heureux, a abouti, en l'espace de même pas 18 mois, à d'excellentes relations avec les pays, les organismes, l'assurance du respect des principes, ce projet de loi, etc., et, deuxièmement, au mois de juin, le secrétariat doit me faire des recommandations sur la question que vous évoquez. Mais, selon les recommandations qui me seront faites, je pense que le principe que nous devrons conserver, si jamais on bougeait dans ce sens, c'est de s'assurer que la modalité administrative retenue ne puisse pas donner cours à quelque forme d'abus, de harcèlement ou d'approche répétitive.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Maintenant, les dispositions que vous mettrez pour l'avenir - parce que vous êtes bien disposé pour l'avenir, cela semble être un peu plus concret - feraient-elles l'objet uniquement de règles administratives ou si cela ferait l'objet de dispositions dans la loi?

M. Johnson (Anjou): C'est dans le cas où une mère donne son enfant...

Mme Lavoie-Roux: On parle pour l'avenir.

M. Johnson (Anjou): Pour l'avenir. Je ne pense pas qu'il faille modifier la loi. C'est une procédure administrative. Au moment où la mère remet son enfant à un établissement du réseau pour des fins d'adoption, on lui fait remplir une série de papiers. Depuis combien de temps cela se fait-il comme cela? Depuis un an, depuis la mise en vigueur... Depuis décembre 1982.

Mme Lavoie-Roux: Si elle change d'avis, parce qu'elle ne connaît pas les circonstances de sa vie, quand elle donne l'enfant pour adoption et 20 ans après... D'abord elle a vieilli, elle se sent plus en sécurité. Quelles dispositions sont prévues pour qu'elle puisse modifier ce consentement?

M. Johnson (Anjou): Est-ce que vous voulez savoir ce qui se passe aujourd'hui?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Johnson (Anjou): Ce qui se passe aujourd'hui c'est qu'une mère donne un consentement à l'adoption, durant les rencontres avec les travailleuses sociales. Si elle ne sait pas que cela est possible, on l'informe de la possibilité pour elle d'être disponible à son enfant...

Une voix: À sa majorité.

M. Johnson (Anjou): ...à sa majorité. En ce moment, si on parle du centre de services sociaux du Montréal métropolitain où il s'en fait le plus, il est difficile pour une mère, dans les mois qui entourent la naissance de son enfant, le consentement à l'adoption, de prendre aussi cette décision-là. Certaines la prennent; je pense que récemment il y a eu un relevé. Sur quinze personnes, trois avaient donné ce consentement. Les services sociaux demeurent disponibles pour prendre ce consentement plus tard. La mère peut aussi revenir sur sa décision. Elle le sait; l'information est faite de mieux en mieux. Je ne pense pas qu'on puisse faire davantage. Je pense que c'est dans l'ensemble du support qui est donné à la mère à ce moment-là, que cela fait partie de toute la notion de culpabilisation ou de déculpabilisation du geste qu'elle pose.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Rancourt): Nous sommes prêts à aborder l'article 11?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Modifications à la Loi sur la protection de la jeunesse

M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article

11 est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Rancourt): Non.

M. Johnson (Anjou): L'article 10 est adopté. À l'article 11, il s'agit d'une technicité pour les fins de la notion de signature d'un protocole... Asseoir l'entente qui existe entre le ministre et...

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Rancourt): Est-ce que l'article 11 est adopté? Adopté. Article 12?

M. Johnson (Anjou): C'est la modification à la Loi sur la protection de la jeunesse, qui prévoit la nécessité de passer par un intermédiaire. Pour faire une longue histoire courte, d'une part la concordance avec les principes qu'on a édictés. À toutes fins utiles, on a interdit l'adoption dite privée.

Le Président (M. Rancourt): L'article 12 est adopté. Article 13?

M. Johnson (Anjou): II s'agit, M. le Président, d'augmenter les amendes. Les infractions à une loi comme celle-là nous apparaissent mériter des amendes importantes.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais mieux... Je n'en ferai pas un "filibuster", mais je trouve que 1000 $ c'est très bas.

M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas beaucoup.

Mme Lavoie-Roux: Non. Quand vous voyez que des gens sont prêts à payer 10 000 $ pour obtenir un enfant, on en ajoute 1000 $ et... Généralement, je pense qu'on donne toujours les amendes les plus basses, entre 1000 $ et 3000 $. Surtout que vous avez enlevé l'emprisonnement. Je me demande s'il n'y aurait pas moyen ou mettre le chiffre lui-même... Évidemment, il faut peut-être une marge pour tenir compte des capacités des gens, c'est peut-être pour cela qu'on laisse une marge, mais 1000 $ je trouve cela très bas.

M. Johnson (Anjou): Écoutez, je suis prêt à demander à mes collègues du comité de législation, pour assurer une certaine cohérence avec les autres, je suis prêt à envisager cette possibilité sous réserve que... (12 h 30)

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas de...

M. Johnson (Anjou): Avez-vous un chiffre?

Mme Lavoie-Roux: J'aurais mis au moins 2000 $.

M. Johnson (Anjou): Oui, cela fait mal.

Mme Lavoie-Roux: D'un autre côté c'est tout un processus quand on entre dans celui de l'adoption et tous les intermédiaires.

M. Johnson (Anjou): On peut mettre cinq à dix pour les intermédiaires.

Mme Lavoie-Roux: Je ne m'opposerais pas.

M. Johnson (Anjou): Cinq à dix pour les intermédiaires, les corporations.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Johnson (Anjou): Je retiens la suggestion. J'en ferai part. En attendant, M. le Président, est-ce qu'on peut considérer que l'article 13 est adopté?

Dispositions finales

Le Président (M. Brouillet): L'article 13 est adopté. L'article 14?

M. Johnson (Anjou): C'est la clause amnistie.

Mme Lavoie-Roux: Évidemment, la clause amnistie cela va de soi que cela rencontre les normes relatives aux conditions d'adoption qu'on a traitées au début.

M. Johnson (Anjou): Oui, c'est cela.

Mme Lavoie-Roux: II y a seulement un point d'interrogation. Je pense que Mme Gervais l'a mentionné tout à l'heure en disant: - ce n'est peut-être pas au texte mais je pense que c'était l'esprit de votre affirmation - de ceux qui ont été portés à notre attention et qu'on connaît, laissant sous-entendre qu'il y en avait peut-être que vous ne connaissiez pas. Qu'est-ce qui arrive à ce moment-là?

Mme Gervais: S'il y en a qu'on ne connaît pas et dont on prend connaissance ce serait la même chose on demanderait des dossiers. On demande au DPJ d'apporter le même support, d'exercer la même surveillance pour que ces enfants s'intègrent le mieux possible ou soient replacés ailleurs finalement.

M. Johnson (Anjou): Donc, les enfants, par l'effet de l'article 14, si on en découvrait par la suite, ceux pour qui cela a été fait avant l'adoption du projet de loi verront les droits qui leurs sont conférés en vertu de l'article 14 s'appliquer à eux. Cependant la procédure est de nature

administrative et elle vise à appliquer la Loi sur la protection de la jeunesse à l'égard du milieu qui touche ces enfants et non pas à remettre en cause le processus d'adoption.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais...

M. Johnson (Anjou): Les enfants par exemple pourraient, théoriquement, ensuite être retirés à une famille pour les mêmes raisons qu'on va retirer à une famille la garde et la responsabilité d'un enfant qu'elle maltraite parce que c'est un milieu malsain. Ce sont les mêmes critères qui vont s'appliquer.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces cas-là seraient maintenant devant le tribunal pour se faire reconnaître, ces cas que vous ne connaissez pas? Ou si automatiquement... Au plan juridique qu'est-ce qui se produit? Ceux dont on n'entend pas parler.

M. Johnson (Anjou): S'ils ont un jugement d'adoption étranger, l'effet de l'article 14 est de faire en sorte que ce soit exactement comme si le jugement avait été prononcé au Québec.

Mme Lavoie-Roux: Ils restent dans l'anonymat et ils sont reconnus au même titre que ceux dont on veut régulariser la situation.

M. Johnson (Anjou): Ce que me disent M. Bergeron et Mme Gervais là-dessus, c'est qu'il ne doit pas y en avoir tant que cela. Si on parle d'Haïti, les enfants ne peuvent pas sortir d'Haïti. Les parents ont tout entrepris cela. Ils sont allés à Haïti. Ils sont allés dans les montagnes rencontrer les parents. Ils ont pris le bébé dans leurs bras. Ils reviennent au Québec et ils disent je veux avoir mon enfant et le problème est qu'ils ne sortent pas d'Haïti. On les connaît. Cela se pourrait qu'il y en ait quelques-uns qui nous aient échappé. Est-ce qu'un enfant est entré dans un sac à dos à Mirabel, un jour, sans que le douanier l'ait vu. Théoriquement, cela se pourrait mais j'ai l'impression qu'il ne doit pas y avoir beaucoup de cas de cette nature. S'il y en avait, éventuellement ils pourraient nous être signalés d'une façon ou d'une autre. Par exemple, le jour où les parents demanderaient d'obtenir un service de l'État qui exige la production d'un certificat de baptême, d'un certificat de citoyenneté, à ce moment, pour avoir le certificat il va y avoir une démarche, donc, cela va être connu. Toutefois, selon l'évaluation du secrétariat, il n'y en a sûrement pas.

Mme Lavoie-Roux: Ce serait très infime comme nombre?

M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): L'article 14 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article 15?

Mme Lavoie-Roux: Ah oui, on ne refera pas de discours.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 15 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Sur division. Avant d'arriver à l'article 16...

Le Président (M. Brouillet): L'article 15 est adopté sur division. Avant l'article 16, oui?

Mme Lavoie-Roux: Avant l'article 16, il y a une question que j'avais posée à Mme Gervais, enfin, que j'avais posée au ministre au début. Quel est le bien-fondé des accusations de lenteur, des accusations que les procédures sont trop longues? On dit que l'enfant qu'on voulait adopter à six mois arrive presque à cinq ans. C'est en caricaturant un peu, si on veut, mais on a parlé de quatre ans, alors, ce n'est pas...

M. Johnson (Anjou): II y a des listes d'attente...

Mme Lavoie-Roux: C'est toute la question des listes d'attente. Je trouve qu'il y a beaucoup de frustration qui s'est exprimée à l'endroit des gens qui ont la responsabilité de la protection de la jeunesse, qui font les adoptions et à qui, en fait, tout contrôle échappe, parce qu'il n'y a pas d'enfants ou... Peut-être est-ce dû à une bureaucratie trop compliquée? Je ne le sais pas. Comme tout le monde se plaint de celui-ci ou de celui-là, il faudrait quand même que, publiquement, on...

Mme Gervais: Au départ, il faut dire qu'il n'y a pas d'enfants, de bébés québécois et les parents, ou les requérants, doivent attendre six, sept ou huit ans. Même s'il y a une très grande misère dans le monde, il n'y a pas tant d'enfants dont on est absolument assuré de l'adoptabilité. D'autre part, les critiques sont venues du fait que, dans certains centres de services sociaux, les gens ont dû attendre longtemps. Cela est dû au fait que, tout à coup, il s'est fait beaucoup plus d'adoptions sur le plan international, et donc, beaucoup plus de demandes dans certaines régions.

Comme nous considérons que les citoyens ont droit aux mêmes services, qu'ils habitent la Gaspésie, Montréal ou Québec, en collaboration avec les DPJ, il y a eu un rattrapage dans ce qu'on peut appeler la liste d'attente, dans les évaluations qui ont été faites, et dans les centres où cela prenait jusqu'à cinq ans... Là, on ne parle pas d'un enfant qui a été adopté; quand il est question de ...

Mme Lavoie-Roux: Des gens qui désirent adopter un enfant.

Mme Gervais: ...trois, quatre ou cinq ans, on parle de gens qui désirent adopter un enfant et qui veulent avoir une proposition d'enfant. À toutes fins utiles, c'est la durée d'attente. Maintenant, à travers le Québec, c'est la même durée d'attente, on s'est rattrapé.

Mme Lavoie-Roux: Quelle est-elle?

Mme Gervais: Selon la disponibilité des enfants, en termes de durée, c'était environ trois ans et on a diminué cette attente à deux ans, en ce moment, selon les pays, bien sûr.

Mme Lavoie-Roux: Et ce, à la condition qu'on veuille un enfant étranger?

Mme Gervais: Oui, on ne parle pas du tout d'adoption locale; ici, l'attente est de six, sept ou huit ans pour un bébé.

Mme Lavoie-Roux: II serait peut-être important que les gens le sachent. Il y a des choses qu'on peut critiquer, mais il y en a d'autres qui sont indépendantes même de la meilleure volonté du monde. Je pense que les gens ne sont vraiment pas au courant de cela.

Une autre question là-dessus, puisque vous êtes ici. Je me souviens que, dans le temps, il ne fallait pas avoir plus que tel âge, etc. Quant à l'âge des parents adoptifs, quelles sont les règles?

Mme Gervais: II n'y a pas de loi là-dessus, c'est régi par un article du Code civil, je pense que c'est toute personne qui peut, seule ou conjointement...

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais, quant aux critères en vigueur dans les CSS?

Mme Gervais: II y a eu des critères, des espèces de balises ont été proposées par les CSS, mais nous leur avons demandé de les abandonner et c'est maintenant respecté, les CSS n'utilisent plus ces critères.

Mme Lavoie-Roux: Bon, c'est parce qu'un cas a été porté à mon attention, celui de personnes à qui on aurait refusé...

Mme Gervais: Pour une question d'âge?

Mme Lavoie-Roux: ...pour une question d'âge. Parfois, on nous dit qu'il peut y avoir autre chose aussi, mais je me posais la question. Je trouve que c'est discriminatoire. Si on demandait des parents de moins de 30 ans, ce ne seraient pas nécessairement de bons parents, pas plus que si on exigeait des parents de plus de 40 ans. Vous pouvez être de bons ou de mauvais parents à 30 ans ou à 40 ans. Je trouve que c'est un peu... Surtout aujourd'hui, compte tenu de l'instabilité des familles, ce qui autrefois était la garantie d'une longue relation avec les parents qui nous adoptaient, aujourd'hui, c'est loin de...

Mme Gervais: Au secrétariat, on s'est opposé vraiment, rigoureusement à cela et, de fait, il y a un mois, on a autorisé quelqu'un qui, selon les anciennes balises, aurait dépassé l'âge, à adopter.

Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, je vous remercie.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 16 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le titre du projet de loi est-il adopté?

Une voix: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Adopté, et le projet de loi dans son ensemble est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je voudrais remettre à la députée de L'Acadie un exemplaire d'un projet de convention signé avec le ministre...

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Merci bien. Bon, on n'en a jamais fait un aussi rapidement que cela, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Tout le monde est content et heureux? Est-ce que vous avez des remarques pour terminer, M. le ministre?

M. Johnson (Anjou): Bon appétit! Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie et j'en souhaite autant à tout le monde. Le rapporteur devra...

Mme Lavoie-Roux: Devra rapporter.

Le Président (M. Brouillet): ...faire son travail le plus tôt possible.

Une voix: J'ai déjà commencé, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): La commission ayant accompli le mandat qui lui avait été confié, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 41)

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