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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mercredi 14 février 2007 - Vol. 39 N° 40

Consultation générale sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Brodeur): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture ouverte et, comme à l'habituel, je demande aux gens dans l'assistance, si jamais vous avez des téléphones cellulaires, de bien vouloir éteindre vos sonneries, s'il vous plaît.

Donc, je vous rappelle le mandat de la commission, qui est de procéder aux auditions publiques dans le cadre de consultations générales sur le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés 1999-2004, conformément à l'article 21 de la Loi sur le Conseil des aînés.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Paquin (Saint-Jean) remplace Mme James (Nelligan) et Mme Champagne (Champlain) remplace Mme Caron (Terrebonne).

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Donc, ce matin, nous recevrons trois groupes, en commençant dans quelques instants par l'Association québécoise des retraité-e-s des secteurs public et parapublic ? ils sont déjà installés, bienvenue en commission parlementaire; nous recevrons par la suite la Coalition pour le maintien dans la communauté, la COMACO, et finalement le groupe Gai Écoute et la Fondation Émergence, ce qui sera suivi naturellement de remarques finales de part et d'autre.

Auditions (suite)

Donc, sans plus tarder, on va débuter avec notre premier groupe, l'Association québécoise des retraité-e-s des secteurs public et parapublic. Bienvenue en commission parlementaire. Donc, je vous explique brièvement les règles de la commission. Vous avez un temps maximal, je dis bien maximal, de 20 minutes pour présenter votre mémoire de la façon dont vous jugez à propos. Donc, si vous commencez à approcher du 20 minutes, vous allez voir le président gesticuler pour passer à la période d'échange qui suivra avec les membres de la commission. Donc, au point de départ, j'aimerais peut-être que vous pourriez vous identifier, pour le bénéfice du Journal des débats, et présenter immédiatement votre mémoire. La parole est à vous.

Association québécoise des retraité-e-s
des secteurs public et parapublic (AQRP)

M. Bellavance (Roger): M. le Président, Mme et MM. les députés, chers amis, je vous présente tout de suite les gens qui m'accompagnent: je suis Roger Bellavance, président de l'AQRP provinciale; à ma droite, vous avez Madelaine Michaud, notre première vice-présidente, et, à ma gauche, M. Luc Vallerand, notre directeur général. Alors, nous sommes...

Une voix: M. Santerre?

M. Bellavance (Roger): Et, à l'extrême gauche, M. Mathieu Santerre, notre directeur des communications.

D'abord, merci de nous accueillir. C'est, aujourd'hui, un sujet de grande importance pour nous, parce que nous sommes une association de retraités. Donc, tout ce qui concerne le Conseil des aînés nous intéresse. Et puis c'est un sujet important parce que vous avez eu, depuis quelques jours, probablement une abondance de statistiques vous indiquant l'importance que prennent les groupes d'aînés au Québec, et la population aînée au Québec qui va devenir de plus en plus importante dans les prochaines années.

Qui sommes-nous, comme association? Nous sommes la principale association indépendante représentant l'ensemble des retraités des secteurs public et parapublic du Québec. Nous sommes les descendants de l'AGR, autrefois l'Association gouvernementale des retraités, qui a pris naissance en 1968. Les fonctionnaires avaient commencé à se regrouper en association de retraités dès 1968. Au cours des années, on a changé de nom quelques fois, on a ouvert le nom en quelque sorte, de façon à permettre la venue de nouveaux membres et de nous permettre de toucher à des secteurs nouveaux. Actuellement, nous dépassons 22 000 membres, nous nous en allons allégrement vers les 23 000.

Nous sommes actifs dans toutes les régions du Québec, de Gatineau à Gaspésie?Îles-de-la-Madeleine, on est partout. Nous avons un conseil d'administration composé de 17 présidents régionaux, donc nous couvrons les 17 régions. Nous accueillons des membres retraités du gouvernement du Québec, et du Canada quelques-uns depuis quelques années, des sociétés d'État, des municipalités du Québec, ainsi que des réseaux québécois de la santé et de l'éducation, donc c'est très diversifié. Selon un sondage interne, 25 % de nos membres sont d'anciens cadres du gouvernement, ou des commissions scolaires, ou des divers ministères, ainsi qu'une proportion significative de professionnels du gouvernement autrefois, d'enseignants, de techniciens, d'agents correctionnels, d'agents de bureau et d'ouvriers. Donc, c'est une association qui regroupe vraiment tous les fonctionnaires, tous les gens qui ont travaillé dans le secteur public et puis qui sont... C'est une grande diversité de membres. C'est peut-être plus difficile à satisfaire, mais c'est aussi ce qui fait notre richesse. La diversité nous donne une richesse, ça nous apporte des idées nombreuses. Plus de 40 % de nos membres sont des femmes, et vous savez que, dans tous les problèmes que nous étudions présentement, c'est bien certain que ce sont souvent les femmes qui sont les plus affectées par ces problèmes.

Nous sommes donc une association très active, particulièrement depuis quelques années. Depuis quelques années, pendant un certain nombre d'années, on a été une association centrée sur les régions, donc les gens avaient beaucoup d'activités au niveau des régions, mais on ne s'attaquait pas nécessairement aux grands problèmes que vivent les aînés. Mais, suite à des sondages et à des rencontres, nous avons décidé d'assumer notre fonction de défense des droits des retraités, et c'est ainsi que nous sommes embarqués dans des dossiers complètement nouveaux et puis que nous avons développé un bureau central un peu mieux équipé, mieux organisé, qui est capable de travailler des dossiers, de monter des dossiers et de défendre vraiment les droits. Ça ne veut pas dire qu'on néglige nos régions, nos régions continuent à être ce qu'elles étaient, mais aussi, en plus, elles nous appuient fortement dans tous les dossiers, comme... j'en prends un, par exemple: indexation, le dossier des foyers de personnes âgées, etc. Donc, nous touchons... depuis quelques semaines, vous entendez parler du dossier du suicide. On touche à peu près à tous les dossiers où nos membres ont des besoins particuliers.

n (9 h 40) n

Maintenant, nos principales préoccupations actuellement, c'est le maintien du niveau de vie et du pouvoir d'achat de nos membres. Ça, ça nous inquiète beaucoup. Il y a tellement de mythes, de fausses idées qui circulent, dans la population et dans la presse en général, sur la belle situation des retraités du gouvernement ou des retraités des secteurs publics, mais en fait, nous, nous savons qu'il y a beaucoup de gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté dans nos membres. Et ça, nous avons les moyens de vous fournir des informations, si vous voulez. Et, ceux-là, nous voulons les défendre, nous voulons les aider aussi. Ce sont des gens qui ont donné toute leur vie à la fonction publique et qui souvent se retrouvent très pauvres, ils ne peuvent plus maintenir un rythme de vie ou bien un niveau de vie qu'ils avaient au moment de leur travail et qu'ils avaient espéré par leur participation à un fonds de pension.

Déjà 10 minutes que je parle. J'ai quelqu'un qui me surveille.

La santé et l'hébergement des personnes âgées nous préoccupent aussi beaucoup. Nous avons fait des travaux là-dessus. Et on a établi, depuis quelques mois, des liens avec les autres générations. Nous les avons établis de deux façons: d'abord, en les convoquant à un colloque, à l'automne dernier, et puis aussi en établissant des programmes où nous voulons faire participer les jeunes, les jeunes générations, avec nos retraités, par exemple dans la formation à l'informatique. On a des programmes qui fonctionnent à Rimouski, bientôt à Rivière-du-Loup. On a un autre programme qui fonctionne à Montréal, actuellement, qui est très intéressant, où des étudiants de l'université, de l'UQAM, participent à des projets pour soutenir les personnes âgées.

Les grandes lignes de notre attitude face au sujet qui est sur la table aujourd'hui, c'est ceci: on appuie sans condition le mandat et le travail du Conseil des aînés. Nous aurons l'occasion de revenir là-dessus tout à l'heure. On a une préoccupation particulière à l'endroit de la situation économique des retraités, c'est certain, puis on invite le gouvernement à ne pas se satisfaire de tout ce qu'il a fait, du bilan des gouvernements à l'endroit des retraités. Nous sommes très satisfaits qu'ils aient passé la loi n° 30 et la loi n° 27, mais ce n'est pas suffisant. Il faut aller plus loin que ça, puis il faut maintenir le rythme.

Maintenant, je vais m'arrêter parce qu'on me fait des... on va me donner des coups de coude bientôt. Alors... Un ancien professeur, ça parle tout le temps trop. Mais Mme Michaud vous fera maintenant le détail de nos recommandations.

Mme Michaud (Madelaine): Alors, merci, M. Bellavance. Pour ma part, comme il vient de vous l'indiquer, je vais maintenant faire avec vous un bref survol de nos commentaires et de nos recommandations.

Pour l'AQRP, le Conseil des aînés a un rôle essentiel de promotion des enjeux liés au vieillissement, de conseil auprès du gouvernement et de consultation des organisations qui représentent les aînés et les retraités au Québec. L'AQRP est impressionnée par la quantité d'avis, de mémoires et d'autres documents qui ont été publiés par le conseil. Le conseil joue par ailleurs un rôle essentiel justement de conseil auprès du gouvernement. Son pouvoir de recommandation est cependant limité. L'AQRP estime donc que le gouvernement devrait appuyer davantage le conseil dans ses recommandations.

Plus précisément, nous aimerions... ou plutôt l'AQRP estime que le plan d'action découlant du rapport de l'Équipe de travail sur une pleine participation des aînés au développement du Québec devrait être dévoilé au plus tôt, en concertation avec les principales associations d'aînés et de retraités. L'AQRP estime aussi, par ailleurs, que le rôle de consultation du Conseil des aînés devrait être renforcé autant auprès des associations que des tables régionales.

En conséquence, nous recommandons que le rôle de promotion des enjeux liés au vieillissement du Conseil des aînés soit maintenu, que le rôle de conseil auprès du gouvernement, de consultation des associations d'aînés et de retraités et d'animateur principal des tables régionales du Conseil des aînés soit renforcé et que le gouvernement accorde un meilleur appui au Conseil des aînés dans le suivi donné au rapport de l'équipe de travail sur Une pleine participation des aînés au développement du Québec, notamment en dévoilant au plus tôt son plan d'action pour les aînés, en appuyant l'organisation d'états généraux sur le vieillissement et en favorisant la retraite progressive dans les secteurs public et parapublic.

Le second enjeu sur lequel l'AQRP s'est penchée est le niveau et la qualité des ressources dont dispose le Conseil des aînés pour atteindre sa mission. Selon l'AQRP, il est essentiel que le budget du conseil soit augmenté pour lui permettre de bien remplir le mandat qui lui a été confié. Afin de mieux refléter la réalité des aînés et des retraités du Québec, l'AQRP est par ailleurs d'avis que les principales associations de retraités et d'aînés devraient être consultées au cours du processus de nomination des membres du Conseil des aînés. Ainsi, nous recommandons que le gouvernement accorde au Conseil des aînés davantage de ressources financières afin de lui permettre de jouer plus efficacement son rôle, que le gouvernement consulte les associations de retraités et d'aînés et tienne compte de leurs recommandations au cours du processus de nomination des membres du Conseil des aînés.

La situation économique des personnes qui ont 65 ans aujourd'hui est certes meilleure que celle des personnes qui avaient 65 ans, il y a 20 ou 30 ans. Par contre, l'insuffisance démontrée des régimes de retraite dans leur ensemble fait en sorte que malgré tout les personnes retraitées prises individuellement s'appauvrissent d'année en année. Rappelons que la grande majorité des régimes complémentaires de retraite au Québec ne sont que partiellement indexés au coût de la vie. En conséquence, l'AQRP recommande que le Conseil des aînés intensifie ses actions démontrant que la situation économique des aînés en général et des retraités des secteurs public et parapublic est une problématique importante malgré les progrès accomplis dans le passé, que le gouvernement envisage des solutions spécifiques pour corriger la désindexation des régimes de retraite des secteurs public et parapublic.

Voilà. Maintenant, je vais passer la parole à notre directeur, M. Vallerand.

M. Vallerand (Luc): Alors, bonjour à tous et à toutes. Moi, je vais insister sur certains éléments de notre mémoire et réagir évidemment à des questions qu'il pourrait y avoir sur notre mémoire.

Alors, nous, on pense que le gouvernement doit nettement accorder un meilleur appui politique et financier aux avis et recommandations formulés par le conseil. On souhaite que, lorsque le Conseil des aînés rédige des avis, ceux-ci aient un meilleur suivi auprès des différents ministères et organismes.

Le milieu des aînés attend toujours le dévoilement du plan d'action des aînés, qui est suite à la consultation, et ça fait plus d'un an et demi. On souhaite d'ailleurs que le plan d'action se fasse en concertation avec les principales associations de retraités et d'aînés, tel que la directrice de cabinet de l'époque s'y était engagée en son nom, au nom de la ministre, le 9 août dernier. On rappelle que le plan avait été promis pour l'année 2007 par le premier ministre lors de son bilan de la dernière session parlementaire, alors on souhaite que ça se concrétise. Et on souhaite évidemment que ce rapport-là ne devienne pas un rapport sur une tablette et qu'il y ait des suites concrètes à ce rapport.

Comme le conseil l'évoque lui-même, en introduction sur le rapport, sur son application, en fait sur la loi qui a constitué le Conseil des aînés, on souhaite évidemment qu'il y ait une préoccupation particulière sur la situation économique ? on l'a répété plusieurs fois ? et on souhaite que le conseil intensifie ses actions en montrant vraiment la préoccupation importante qu'on a par rapport à la situation économique, et on pense que les personnes aînées devraient devenir une cible prioritaire en matière de prévention de suicide. On l'a annoncé il y a environ 10 jours. La situation du suicide chez les baby-boomers va aller en augmentant dans les prochaines années, et tout laisse à croire qu'il y aura davantage de décès par suicide dans ce groupe-là.

Donc, on appuie également cinq recommandations formulées par le conseil, à savoir d'abandonner la clause crépusculaire, de ramener le délai de publication des avis à 30 jours, d'introduire le sous-ministre des Affaires municipales au conseil, évidemment réviser les ressources budgétaires du conseil en les majorant, et on est d'accord avec la nouvelle dénomination, là, Conseil des aînés et du vieillissement.

On partage également avec l'AREQ la demande de consultation des associations pour la nomination au conseil, et nous appuyons vigoureusement la tenue des états généraux sur le vieillissement. Je pense que la problématique du vieillissement au Québec est rendue suffisamment importante pour que le Québec, en soi, fasse un arrêt complet et qu'on puisse, là, de façon intergénérationnelle, discuter des multiples aspects et facettes liés au vieillissement au Québec. Alors, voilà.

M. Bellavance (Roger): Sur ce, nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Donc, M. le député de Saint-Jean, pour une première question.

M. Paquin: Oui, M. le Président, avec plaisir. Merci beaucoup, M. le Président. Madame, messieurs, bienvenue, merci de votre présence ici, ce matin. On vous a écoutés avec beaucoup, beaucoup d'attention, vous avez beaucoup de recommandations. Ce n'est pas un grief que je vous formule, au contraire, je pense que c'est important que vous preniez les choses en main, puis vous faites valoir vos idées, puis on est là pour vous écouter puis tout faire pour essayer de vous accompagner dans ça et de poser des gestes qui vont aider les aînés au Québec.

n (9 h 50) n

Vous avez parlé d'une chose importante qui est un peu, comment dirais-je, même inquiétante ? on est tous au courant, mais vous en avez parlé, puis c'est le premier groupe qui en parle, à moins que j'aie échappé quelque chose hier, mais je ne crois pas ? vous avez parlé de suicide sur les aînés. Et je crois que c'est... il y en a de plus en plus.

Est-ce que vous avez, de un, des statistiques là-dessus puis un peu un plan de match, de quelle façon qu'on peut accompagner tout ça? J'imagine que vous avez un peu un horizon vis-à-vis ça. J'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

M. Vallerand (Luc): En fait, on a dévoilé, il y a environ 10 jours, des données publiées par l'Institut national de santé publique en 2004. Et son étude a été faite pour regarder l'effet, je dirais, des taux de suicide par génération. Et ce que les chercheurs ont découvert, c'est que, chez les 55 ans et plus, il y a vraiment un taux de décès par suicide par 100 000 habitants plus élevé que chez les autres groupes d'âge et que la venue de plus en plus de personnes à la retraite fait en sorte que les décès par suicide vont augmenter chez ces groupes-là, comparativement à d'autres groupes plus jeunes où on assiste à un recul des taux de décès par suicide.

Ce qui explique ça à notre sens, c'est notamment la rupture, je dirais, avec les années soixante-dix. Vous le saviez, dans les années soixante-dix, c'était très mal vu moralement de se suicider. Même que vous ne pouviez pas vous faire enterrer dans un cimetière, vous étiez presque excommunié. C'était même judiciarisé à l'époque. Et on a assisté à un vent de libéralisme par rapport à ça, et le suicide est devenu une option plus acceptable pour les personnes retraitées comme moyen pour faire face à ces difficultés, entre autres difficultés économiques, entre autres veuvage, entre autres l'apparition de plusieurs problèmes médicaux ou de maladie incapacitante.

Alors, nous, ça nous préoccupe particulièrement. Et on souhaite que, dans un futur plan, au niveau de la prévention du suicide, il y ait des mesures prioritaires par rapport à ce groupe d'âge là de la part du ministère de la Santé.

M. Paquin: Ce phénomène-là est amplifié depuis quelques années ou... Beaucoup? Oui?

M. Vallerand (Luc): Oui. C'est un effet vraiment de génération. Les décès par suicide sont plus élevés chez les 55 ans et plus, et ce taux-là se maintient dans le temps. Et on appréhende donc de plus en plus de décès par suicide chez ce groupe d'âge là dans les années à venir.

M. Paquin: Donc, un accommodement, accompagner ces gens-là le plus proche possible serait peut-être la solution?

M. Vallerand (Luc): Bien, la priorité, je pense, c'est d'en faire une priorité de santé publique, premièrement, et de faire une véritable campagne de prévention autant auprès des médecins, auprès des personnes qui travaillent en milieu d'hébergement, parce que près de 75 % des gens qui ont posé un geste suicidaire dans les six mois précédant le geste avaient manifesté des comportements ou des idées suicidaires dans leur entourage et plus de la moitié avaient consulté un médecin dans le mois qui a suivi une tentative de suicide.

M. Paquin: Est-ce que vous savez si c'est plus d'hommes ou plus de femmes?

M. Vallerand (Luc): C'est nettement plus d'hommes, évidemment, là.

M. Paquin: Plus d'hommes, oui?

M. Vallerand (Luc): À 80 %.

M. Paquin: À 80 %. Un autre sujet: le Conseil des aînés, je crois que vous trouvez, et je suis d'accord avec vous, qu'ils font un travail extraordinaire, qu'ils travaillent pour faire avancer les dossiers. Il y a un plan, là, de 17 représentations ou 17 demandes qui ont été soulignées dans le rapport, là, qu'on appelle communément le rapport Lalande. Et vous en avez cinq qui vous attirent ou qui vous intéressent plus particulièrement. Il y a eu beaucoup de discussions, hier, beaucoup de groupes qui parlaient du Conseil des aînés puis qui voulaient avoir certains amendements ou rajouts à leurs fonctions. Entre autres, vous autres aussi, vous avez parlé d'ajout. Exemple, de rajouter des gens qui viendraient des tables de concertation, etc. Et la FADOQ nous a parlé, elle, de fusion possible ou de l'intérêt qu'ils avaient pour fusionner avec le Conseil des aînés, que pensez-vous de ça?

M. Vallerand (Luc): Nous, on pense que la recommandation de la FADOQ, c'est mal comprendre, je dirais, le fonctionnement de l'administration publique. Je pense que la volonté de la FADOQ, c'est essentiellement de renforcer les moyens du conseil. La solution à mon sens n'est pas appropriée. C'est comme si on demandait au Conseil du médicament de fusionner avec une direction médicale du ministère de la Santé. Je pense que ce qu'il faut entendre comme message puis le résultat qui est visé, c'est que, pour renforcer la présence du Conseil des aînés, il faut augmenter ses ressources budgétaires pour qu'il puisse jouer mieux son rôle et mieux animer également son rôle auprès des tables de concertation. Donc, si on avait à renforcer le rôle du conseil, c'est augmenter ses ressources pour mieux jouer son rôle tant auprès des tables de concertation qu'auprès du ministère et du gouvernement, dans un rôle d'aviseur. Donc, ça augmenterait véritablement ses ressources.

Et ce que, nous, on a constaté, c'est que, sur huit organismes-conseils à peu près de même taille ou de même mission, le Conseil des aînés arrive septième sur huit, donc celui qui a le moins d'argent par rapport à sa mission, c'est-à-dire à donner des conseils et des avis auprès du gouvernement et de la ministre. Et c'est une problématique en émergence. Donc, on y va dans le paradoxe. Ça devient... La problématique des aînés et du vieillissement devient très présente, mais on ne donne pas les moyens au conseil de jouer un vrai rôle très présent, très pointu d'aviseur sur toutes les questions qui préoccupent les aînés et les retraités au Québec.

M. Bellavance (Roger): J'aimerais ajouter que le Conseil des aînés est chargé en quelque sorte de la coordination des tables, mais il n'a pas les moyens de le faire. Les tables régionales de concertation, il n'a pas assez de moyens pour le faire. Alors, il faudrait peut-être ajuster des choses. C'est dans ce sens-là qu'on veut qu'il y ait des ajustements du côté du Conseil des aînés.

M. Paquin: Avec les tables.

M. Bellavance (Roger): Avec les tables. Que ce soit clair, et ci et ça.

Le Président (M. Brodeur): Merci. M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: Merci, M. le Président. C'est à mon tour de vous souhaiter la bienvenue, madame, messieurs, et c'est un plaisir de vous entendre ce matin. Honnêtement, j'ai apprécié lire votre document et également entendre vos recommandations. Et, comme le disait tout à l'heure mon collègue, vous n'êtes pas ici à un tribunal; au contraire, on est ici pour vous entendre et écouter vos doléances.

J'aimerais revenir peut-être, et, moi aussi, tel mon collègue, il y a quelque chose qui m'a surpris tout à l'heure, lors de votre présentation, c'est le suicide, du moins le sujet, ce sujet-là, puis c'est quelque chose dont on n'entend pas parler souvent. On entend parler souvent du suicide chez les jeunes, chez les jeunes garçons notamment, mais, chez nos aînés, à peu près jamais. Moi, ce que je voudrais savoir de vous, et en relation avec la question de mon collègue, c'est: Par rapport aux régions, la capitale et la métropole, compte tenu évidemment que je représente la capitale ou du moins je suis d'un comté de la Capitale-Nationale, y a-t-il des différences justement ? je ne sais pas si vous avez les taux, mais ? par rapport aux régions?

Et, ma question, vous la comprendrez davantage lorsque... Vous parliez des mythes, parce que, dans la Capitale-Nationale, la capitale évidemment est réputée pour avoir un bon nombre de gens de la fonction publique qui y travaillent, de gens qui peuplent la banlieue même, la couronne de la capitale, ici, et, sur ces mythes, on dit souvent qu'ils ont un bon pouvoir d'achat ? et vous parliez de ces mythes, et je veux que vous les brisiez, s'il y en a, de ces mythes, et que vous nous expliquiez quels sont ces mythes, et; qu'ils ont un bon pouvoir d'achat ? que ce sont eux qui remplissent les Wal-Mart, les Costco, etc., et qu'ils sont financièrement à l'aise. Alors, ma question porte sur ce. Y a-t-il justement ce mythe ici, pour la Capitale-Nationale ou même pour la métropole, et, s'il y a effectivement ce mythe, est-ce que, dans les régions, il y a plus de suicides ou moins de suicides, ou dans la capitale, ou dans la métropole, dans les grandes villes? Alors, vous voyez un peu mon raisonnement à ce sujet.

Je veux d'abord que vous nous expliquiez quel est ce mythe et s'il doit être brisé, parce qu'on dit que, dans la capitale, le taux d'emploi est très bon, puis effectivement il est très bon, le niveau d'emploi est très bon. On dit que, bon, l'économie va bien, etc., et que même les personnes aînées retournent au travail ici, dans la capitale. Alors, moi, je veux vous entendre là-dessus, le mythe et également ce qui y succède, c'est-à-dire le taux de suicide dans les régions par rapport aux grandes villes.

M. Vallerand (Luc): Alors, on n'est pas des spécialistes non plus, là. Par contre, la préoccupation que vous manifestez, c'est que, de façon générale, les taux de suicide sont plus élevés en milieu semi-rural qu'en milieu urbain. C'est pareil pour les autres groupes d'âge. Ce qui explique ça, c'est l'accessibilité des moyens, je dirais, où, en région, c'est plus disponible en termes de moyens, et il y a plus de services en milieu urbain qu'en milieu semi-rural ou rural. Le mythe principal, je dirais, lié à la retraite, pour les 65 ans et plus, c'est de croire que la majorité des retraités bénéficient d'un énorme revenu à la retraite et qu'on fait un voyage ou deux par année en Floride. C'est le lot d'une minorité. Il y a 44 % de gens de 65 ans et plus qui ont un revenu annuel moyen de 15 000 $ et moins. C'est près de la moitié, ça, des 900 000 retraités de 65 ans et plus au Québec. Donc, c'est vraiment un mythe de croire que les gens sont pourvus de beaucoup de moyens et de revenus. Et la tendance qu'on observe, nous, c'est que près du tiers des personnes retraitées doivent retourner au travail faute de revenus suffisants pour la retraite.

n (10 heures) n

L'autre élément, au niveau de la problématique du suicide évidemment, ce n'est pas juste un événement ou une situation qui fait en sorte qu'une personne pense au suicide. C'est un phénomène beaucoup plus complexe. C'est souvent lié à la dépression également, des problèmes de santé physique, solitude. Et c'est beaucoup plus présent aussi chez les hommes. Perdre sa conjointe, ça a beaucoup plus d'impact auprès des hommes, et les hommes sont beaucoup plus impulsifs dans leurs moyens d'adresser leurs difficultés ou leur souffrance et souvent posent plus de gestes que de parler de leur souffrance ou de leurs difficultés. Donc, ils sont en situation où ils demandent moins d'aide que les femmes puis souvent ont un réseau social plus limité que les femmes. Puis on a affaire également à un groupe d'hommes où parler de soi, ça ne faisait pas partie de leur éducation, là. Il fallait être fier, puis assumer, puis régler ses problèmes tout seul, puis souvent, bien, la personne, au lieu de parler de ses difficultés, bien elle finit par poser le geste, là. Par contre, il y a des signes, il y a moyen de le dépister puis, à notre sens, il faudrait intensifier énormément l'action, puis évidemment adresser des mesures pour réduire l'appauvrissement, puis offrir davantage de mesures spécifiques pour cette catégorie de personnes.

M. Mercier: Mais avez-vous évalué par rapport... Vous le disiez un petit peu tout à l'heure, mais par rapport ici, la capitale nationale ou la métropole, le niveau, le taux de suicide... Vous le disiez, bon, dans le semi-rural, là, mais y a-t-il vraiment une différenciation entre la capitale, qui a au moins de 40 % de gens qui ont travaillé ou travaillent présentement dans la fonction publique, par rapport à d'autres régions?

M. Vallerand (Luc): On n'a pas de données spécifiques que vous demandez, mais, de façon générale, sur la problématique du suicide, les taux de suicide sont plus élevés en région qu'en milieu urbain comme Montréal ou Québec. Ça, c'est clair. M. Bellavance.

M. Bellavance (Roger): À propos du mythe, moi, je vous dirais que, tout à l'heure, je disais: Nous avons une clientèle très diversifiée. C'est vrai qu'il y a des retraités qui ont un bon revenu puis qui.... peut-être aussi parce qu'ils ont épargné au cours de leur vie puis qu'ils se sont bâti une retraite. Mais on en a beaucoup... Parce que des employés du gouvernement, ce n'est pas tout du monde riche, là. Les employés de certains ministères, que je ne nommerai pas, ont des salaires pas très élevés, puis souvent c'est à temps partiel. Donc, quand ils arrivent à la retraite, ils ont une retraite très, très faible. Et puis c'est quand même des employés du gouvernement, et puis...

Alors, c'est ça, là, qui crée... Ça crée une espèce de dichotomie dans la population. Ils voient ceux qui ont eu de grosses retraites, des anciens cadres, des anciens professionnels, etc., mais ils ne voient pas l'ouvrier, ils ne voient pas le technicien souvent qui ont eu des petits emplois toute leur vie puis qui, à la retraite, quand le mari meurt, par exemple, la femme reste avec presque rien. Et c'est ça, les effets de la désindexation. Mais la désindexation nous a beaucoup affectés là-dedans, a surtout affecté la partie, je dirais, un peu moins bien fournie ou un peu moins bien payée des employés, puis surtout on s'aperçoit que la désindexation a beaucoup affecté le personnel féminin. Le secrétariat, par exemple, ils n'ont jamais eu des salaires fabuleux, et puis c'est eux autres qui sont affectés, là, beaucoup plus que ceux qui ont été cadres, que ceux qui ont eu des salaires convenables.

M. Mercier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brodeur): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Merci, M. le Président. Alors, vous allez avoir droit à ma voix la plus profonde, hein? Mais je lisais, lundi dernier, le communiqué que vous avez envoyé justement: «L'AQRP réclame que la prévention du suicide chez les aînés devienne une priorité au Québec.» Je l'ai bel et bien lu, là, j'en ai pris connaissance parce qu'en plus cette année, dans ma région, j'ai accepté la présidence d'honneur pour une levée de fonds pour une maison qui s'appelle L'Accalmie, qui est une maison pour personnes suicidaires. Et je me posais beaucoup de questions. À partir du moment où tu acceptes ce genre de mission là, tu te dis: Pourquoi faire une maison? Habituellement, ils ne téléphonent pas avant, hein? Et effectivement ils ne téléphonent pas avant, mais la maison, elle est là si tu en as besoin. Elle existe, elle est là. Elle est supportée par l'agence de santé et des services sociaux et touche beaucoup, beaucoup les jeunes, touche beaucoup, beaucoup la clientèle, je dirais, 18-30 ans. C'est eux autres qui sont plus touchés, et on me disait que ? c'est depuis deux ans ? c'est eux qui fréquentent la maison. Ils sont souvent référés. Parfois, c'est des problèmes de santé mentale et parfois c'est des problèmes tout simplement de découragement, dépression profonde.

Mais ce que je remarque, pendant cette fameuse semaine de prévention au suicide, beaucoup de personnes en parlent. Vous en parlez pour les aînés, vous avez raison. Les agriculteurs en parlent également. Il y a beaucoup de suicides chez les agriculteurs. Il y a beaucoup de suicides également chez des personnes retraitées. Ils ne sont pas tous en profonde dépression, il y a un deuil, quelque chose qui arrive dans leur vie, ils se sentent complètement démunis. Et je pense qu'on en tire tous une même conclusion, c'est que les gens sont isolés, il n'y a plus de familles unies. Tu n'es plus sept, huit enfants pour voir qu'est-ce qui arrive à ton frère et à ta soeur, ils sont seuls. Les personnes aînées, leurs enfants sont à l'extérieur, ils sont loin. Donc, on vit ce que j'appelle un taux de suicide plus grand, du moins plus déclaré, plus déclaré, puis je pense qu'on va le vivre davantage parce que les gens sont de plus en plus seuls. Ils ne sont pas tous dans des associations de retraités.

Je voyais ce qui était écrit dans le communiqué ? d'ailleurs, c'est M. Santerre qui nous a fait parvenir le communiqué au nom de l'AQRP ? c'est effectivement le fait que, s'il y a 75 % des personnes décédées par suicide qui ont exprimé une idée de mort quelques mois avant, si quelqu'un avait allumé, bien peut-être qu'ils l'auraient encadré puis qu'ils l'auraient... Alors, ce que je souhaite aujourd'hui ? puis je le dis, je partage ça avec vous, là ? c'est qu'on n'en parle pas uniquement pendant la Semaine de prévention au suicide. Là, les journaux sont pleins. On a tous dans nos familles, de près ou de loin, des gens qui malheureusement ont posé ce geste de s'enlever la vie. Et, pour moi, la vie, c'est ce qu'il y a de plus beau. Et, si tu te l'enlèves, comment tu peux aider quelqu'un?

Et j'étais, pour votre information, dans une école, une école où les élèves sont... j'appelle ça un peu poqués, entre guillemets, en bon québécois, des élèves qui ont fait sauter, là, les murs puis qui en veulent à leur père, à leur mère, à leurs frères, à leurs soeurs, à la société entière. Puis on m'a demandé d'aller leur parler, et je leur ai parlé de suicide, parce qu'il y avait eu, depuis septembre dernier, cinq tentatives de suicide dans cette classe-là. Donc, ça atteint les jeunes, oui, mais ça atteint aussi les personnes âgées, et, moi aussi, je souhaite que, dans le plan d'action que vous souhaitez tous, le plan d'action suite à la grande tournée, là, des aînés à travers le Québec, c'est qu'on mette une note là-dessus. Et on ne peut pas encadrer de force quelqu'un, mais plus on va en parler, plus on va dire qu'il peut appeler, plus on va faire des campagnes de sensibilisation, plus la personne qui est justement toute seule chez elle devant son téléviseur... C'est souvent le seul ami qu'ils ont, la télévision, le soir. Bien, ils vont peut-être dire: Regarde, je pourrais peut-être appeler à ce numéro-là, là, 1 866 appelle, là. Alors, ça pourrait être ça, bon, une campagne de sensibilisation, je crois.

Puis bravo, parce que je pense que c'est des organismes comme vous qui nous permettent, à nous, parlementaires, d'allumer davantage. Mais il ne faut pas que ça reste là, il faut que ce soit consigné dans un plan où, année après année, on le répète, parce que d'en parler une fois par année, une semaine, c'est zéro, comme dirait mon chef, zéro plus une barre. Bon, voilà.

Autre question maintenant que j'aurais à vous poser: Est-ce que votre association ? si vous voulez commenter là-dessus, soyez bien à l'aise; est-ce que votre association ? fait partie des tables de concertation des aînés?

M. Bellavance (Roger): Sans nous vanter, là, je crois que nous faisons partie très intégrante... Moi, je connais au moins cinq ou six sur les 17 tables qui sont présidées par des membres de notre association un peu partout. Au Lac-Saint-Jean, à Saguenay, que je connais un peu mieux, là, et puis en Gaspésie, ce sont des gens de notre association qui prennent le leadership très souvent dans les tables. Et nous en sommes fiers, et nous les encourageons, parce que ces tables-là travaillent beaucoup au niveau des régions. Puis j'ai assisté à quelques-unes de leurs rencontres, et je suis toujours surpris par le climat de collaboration qu'il y a entre les villes, entre les municipalités et même avec les entreprises privées dans ces tables de concertation, et c'est pour ça que nous tenons à ce qu'elles soient coordonnées au niveau du Québec. Et, comme il n'y a pas d'éléments de coordination très forts présentement, ils s'en sont donné. Mais je crois que ça, c'est une fausse... ce n'est pas... Comment je dirais ça, donc? Je vous dirais que le fait qu'ils se donnent, eux autres mêmes, un instrument de coordination au niveau du Québec, c'est parce qu'il y a un manque, là. Et c'est le Conseil des aînés qui devrait avoir les moyens de les coordonner présentement.

Mme Champagne: ...l'importance dans vos recommandations, là, que vous donnez à cet élément-là, là.

M. Bellavance (Roger): Oui, oui, d'ajouter cet élément-là et de le préciser auprès du Conseil des aînés, parce que c'est important aussi qu'ils se parlent, ces gens-là, mais pas dans un autre organisme parallèle si vous voulez.

Mme Champagne: Le Conseil des aînés fait à mon avis, d'après ce que vous dites ? puis tous les groupes depuis hier ont dit la même chose ? son travail, manque de moyens, a besoin davantage d'aide pour concerter les tables de concertation. Bon, voilà. Concerter les tables de concertation, ça dit tout, hein? Bon. Donc, à partir du moment donné où on a ça, est-ce que vous portez toujours le flambeau au niveau des tables avec votre dossier de la situation économique des aînés? Est-ce que vous le portez là, votre dossier également, aux tables de concertation?

M. Bellavance (Roger): Oui, nous le portons là.

Mme Champagne: Puis c'est quoi, les actions que vous entendez prendre bientôt pour ça?

M. Bellavance (Roger): Je vais laisser...

Mme Champagne: On est sensibilisés, là, on l'est.

n (10 h 10) n

M. Bellavance (Roger): Oui, oui, oui. Nous avons beaucoup d'actions d'entreprises déjà, d'ailleurs pas seuls. Nous avons travaillé seuls pendant quelques mois, nous autres, plusieurs mois même, mais, depuis cinq ou six mois, depuis le mois d'août l'année dernière, nous avons une association avec l'AREQ, avec les infirmières, avec les directeurs d'école, avec les professionnels du gouvernement, qui sont tous des associations de retraités. Et puis nous nous réunissons régulièrement, nous avons même une rencontre cet après-midi, pour former un front commun, parce que, tant que les retraités seront dispersés, les décideurs auront beau jeu. Le jour où nous réussirons à nous donner des cibles communes puis à travailler ensemble tout en gardant notre personnalité, la personnalité de notre association, nous pourrons influencer le gouvernement, influencer les décideurs.

Mme Champagne: ...fait partie de votre...

M. Bellavance (Roger): Non, parce que nous sommes des associations, je dirais, plus représentatives du secteur public et parapublic, donc ceux que je vous ai nommés tout à l'heure. Et puis les petits groupes en bas de 1 000 personnes, pour le moment, ils font plutôt partie de l'alliance qui, elle, fait partie de notre association, de notre groupement, l'Alliance des associations de retraités. On leur conseille d'aller dans l'alliance et, via l'alliance, d'être à nos tables.

M. Vallerand (Luc): En complément, sur la question de suicide, on a fait part de nos préoccupations à Mme Margaret Delisle, ministre déléguée, d'en faire une priorité spéciale, parce que le phénomène n'ira pas en diminuant. La problématique majeure chez les personnes de 65 ans et plus, c'est que les moyens utilisés sont radicaux. Donc, en général, lorsqu'il y a une tentative, il y a un décès par suicide, ce qui est très différent chez les gens de moins de 35 ans. Et c'est d'où, je dirais, la gravité du problème, c'est qu'on a sous-estimé le phénomène auprès des baby-boomers. Et, si on ne fait rien de spécifique par rapport à ce groupe-là, on va assister à un accroissement du suicide chez les personnes retraitées.

Et je dirais que c'est un phénomène qui est connu. Même le sociologue Durkheim, dans les années 1900, l'avait déjà nommé, c'est le phénomène de l'anomie. C'est-à-dire que, quand votre vie n'a pas de sens à la retraite puis qu'en plus vous vivez un veuvage, vous perdez de l'argent, vous avez des problèmes financiers, bien tout ça concourt à l'idée que votre vie n'a plus de sens puis qu'elle n'a plus de valeur. Et souvent on n'associe pas le suicide ou des idées dépressives à des personnes qui parlent de mourir pour des gens âgés, on dirait qu'on trouve ça normal puis on banalise ça, l'idée de mort, chez les plus vieux, alors que, chez les plus jeunes, tout de suite le signal d'alarme s'allume, et on intervient.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Merci de votre intervention. Et je vais suspendre quelques instants, le temps que le prochain groupe puisse s'installer.

(Suspension de la séance à 10 h 13)

 

(Reprise à 10 h 18)

Le Président (M. Brodeur): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons continuer nos travaux en recevant la Coalition pour le maintien dans la communauté, le COMACO. Donc, nous recevons M. Serge Emond. Bienvenue en commission parlementaire. J'espère que vous avez fait un bon voyage ce matin à partir de Montréal. La route était belle?

Coalition pour le maintien
dans la communauté (COMACO)

M. Emond (Serge): Hier soir, finalement.

Le Président (M. Brodeur): Hier soir.

M. Emond (Serge): Pas pris de chance.

Le Président (M. Brodeur): Bienvenue en commission parlementaire. Je vous explique brièvement les règles de la commission: vous avez un temps maximal de 15 minutes pour présenter votre mémoire. Et je vous cède la parole immédiatement. La parole est à vous.

M. Emond (Serge): O.K. Dans un premier temps, je ne ferai pas la lecture du rapport, que je suis sûr que vous avez tous lu, je vais peut-être mettre des choses plus en contexte. D'abord, présenter COMACO. COMACO, bien c'est un regroupement régional montréalais de 75 organismes. À l'époque, on parlait de 65, on est rendus à 75, et des organismes qui sont subventionnés en santé et services sociaux à l'intérieur du Programme de soutien aux organismes communautaires, le fameux programme qu'on appelle PSOC, dans le secteur personnes aînées, personnes âgées en perte d'autonomie. Qu'est-ce que les organismes font? Ils rendent des services essentiellement par des bénévoles. C'est des petits organismes, généralement. La coalition, bien vous avez entièrement... le personnel, c'est tout, là, il y a juste moi. Ça fait que c'est pour dire que ce n'est pas des gros organismes. On a une personne à COMACO. Et les membres, quand il y a quatre employés, c'est beau. Pourtant, on fait énormément de choses, mais grâce au bénévolat.

n (10 h 20) n

La situation de Montréal est un peu différente des régions extérieures à Montréal. À Montréal, nous sommes un regroupement qui regroupe... Comme je vous dis, il y a 75 organismes. À l'extérieur, ce sont plus les centres d'action bénévole et l'AQCCA, les centres communautaires pour aînés qui oeuvrent davantage à ce niveau-là. Montréal a une forme différente. On touche environ, minimalement, là ? le décompte, je l'avais fait il y a trois ans ? 50 000 aînés par les 75 organismes membres. Et, nous, on parle beaucoup du maintien dans la communauté parce que justement on n'est pas des services à domicile, on n'est pas du maintien à domicile, mais on vise à garder les aînés en contact avec leur communauté. D'ailleurs, ce terme-là, «maintien dans la communauté», moi, quand je suis arrivé à la coalition, il y a sept ans, ce n'était pas utilisé. Il faut croire qu'on en a parlé un peu parce que ça commence à paraître dans les documents gouvernementaux; maintenant, on commence à parler de ça.

Pourquoi dire «dans la communauté»? Parce qu'on dit qu'une personne isolée, si elle ne reste pas en contact avec sa communauté, elle risque beaucoup de choses: la perte d'autonomie, malnutrition, dénutrition, les abus de toutes sortes. Puis le maintien dans la communauté ? on avait déjà fait d'ailleurs un colloque là-dessus ? c'est plus que des soins, c'est vraiment autour de personnes qui... La plupart des membres qui sont membres dans nos organismes membres, là, sont des aînés, on pourrait dire, un peu plus du grand âge, et les bénévoles, bien c'est... L'intergénérationnel, là, il ne faut pas se le cacher, chez les personnes âgées, c'est... La plupart du temps, c'est le troisième âge qui s'occupe du quatrième âge. Tu sais, ça existe, là, les très jeunes qui s'occupent des plus vieux, mais c'est l'exception. Donc, tout ce travail-là se fait, comme je vous dis, par 75 organismes et une multitude de bénévoles. Ça, je n'ai pas fait le décompte, c'est dans un projet futur.

Qu'est-ce qu'ils font, nos organismes? Bien, ils font toutes sortes de services que le gouvernement ne rend pas: l'accompagnement-transport, surtout pour les rendez-vous médicaux dans les hôpitaux, les visites et téléphones d'amitié, les dîners communautaires, les popotes roulantes, l'aide aux formulaires, des activités sociales. On vise beaucoup, beaucoup la participation sociale même de ces personnes qu'on peut appeler du grand âge. Ils ont encore des choses à dire, ils ont encore des choses à faire.

Pourquoi prendre quelques minutes, comme je viens de faire, pour expliquer? Bien, c'est parce qu'on pense que ces personnes-là, c'est les grands oubliés, qu'ils sont oubliés dans le système. Ils ne sont souvent pas des personnes encore malades, qui nécessitent souvent des soins à domicile; certains commencent à en avoir besoin. Ils ne sont pas des personnes qui font partie des clubs de l'âge d'or, la FADOQ, elles ne font pas partie de l'AQCCA, elles ne font pas partie des AQDR. Ce sont vraiment des personnes qui vivent dans leur appartement, à Montréal, seules la plupart du temps. Et ça, c'est ce qui m'amène à parler davantage justement du Conseil des aînés.

La raison pour laquelle on supporte le Conseil des aînés, parce que c'est, pour nous autres, le seul organisme québécois qui a une vision large de tout ce qui se fait comme pour aînés au Québec. Oui, il y a plusieurs autres associations nationales. Parce que, nous, dans notre secteur, il n'y en a pas. On est un regroupement régional où il n'y a pas de pendant national au Québec. Les pendants nationaux sont l'AQCCA, FADOQ, AQDR, mais, nous, on n'en a pas puis pourtant on représente, comme je dis, beaucoup, beaucoup d'aînés.

Le Conseil des aînés est le seul, selon nous, qui peut vraiment représenter cet ensemble des aînés qui n'ont peut-être pas de voix, justement. Ça en fait un organisme-conseil qui a un rôle, je pense, assez unique, un rôle de représentation par aussi l'animation des fameuses 17 tables régionales. À Montréal, on a une table quand même pas mal active, comparativement à ce que j'entends ailleurs, grâce à du financement autre. Parce que c'est sûr que le financement de base, là, qui est offert présentement, c'est assez anémique, hein? Les gens ne peuvent pas engager personne. Ça fait qu'on a mis une belle structure dont le Conseil des aînés fait ce qu'il peut, mais une belle structure sans ressources financières ou à peu près. Ça fait que c'est plus une structure souvent, que je dirais, sur papier. Moi, je me demande des fois si ce n'est pas pour se donner bonne conscience qu'on a fait une structure comme ça, mais qu'en fin de compte on leur donne peu de moyens, qu'il y aurait besoin d'investir. Et là-dessus, justement, je pense que le rôle du Conseil des aînés pourrait être important. Mais, pour avoir aussi ce rôle-là, bien ça va prendre aussi des moyens au Conseil des aînés, ça, c'est sûr.

Un rôle aussi du Conseil des aînés de revendication, revendication au sens large, non politique partisane du tout, juste de la revendication... ce que peut-être plus en anglais on appelle l'«advocacy», là, ce qui est peut-être plus global, de la revendication pour justement comprendre ce qui passe avec le vieillissement de la population du Québec, revendication pour documenter aussi tout ce vieillissement-là. Il y a beaucoup de choses qui paraissent ici et là, mais ça semble toujours des choses dispersées. Ça prend un conseil des aînés pour revendiquer, oui, mais pour consulter aussi les aînés ? le conseil l'a fait, je pense, pas mal bien à venir à date avec les moyens qu'ils ont ? documenter les implications réelles de ce vieillissement face à l'âgisme, aux stéréotypes qui sont véhiculés par les médias, certains économistes, je dirais même certains politiciens malheureusement et l'appareil gouvernemental. C'est un peu étrange que... Je me rappelle, il y a un certain temps, quand on avait... un document du ministère de la Santé et Services sociaux disait que le vieillissement n'était pas le principal facteur. Le lendemain, dans La Presse, à la une, à Montréal, ce que le ministre disait, c'est le vieillissement, puis ça a fait le grand titre, alors que les propres documents du ministère ne disaient pas ça. Ça fait que c'est pour ça qu'il faut documenter vraiment tout ça pour combattre ces choses qui se disent, ces faussetés.

C'est sûr que le vieillissement a des effets sur la retraite ? je pense que les groupes de retraités, syndicaux, etc., s'occupent assez bien de cette tâche-là ? des effets sur l'habitation. À Montréal, présentement, on parle de fermer 3 000 lits en CHSLD alors qu'il y a des listes d'attente. On essaie présentement de remettre ça dans des organismes d'économie sociale, communautaires, etc., on se cherche d'autres façons d'hébergement. Je comprends que c'est pour économiser, mais à quel prix? C'est ça, il faudrait... J'aurais beaucoup de choses à dire là-dessus.

Des effets sur l'emploi. Il y a eu un colloque à l'UQAM, l'automne passé, là-dessus justement, hein, tous les changements, parce qu'avec tout ce qui se dit sur le vieillissement... C'était étrange, au colloque, on disait: On est jeune... on commence à être adulte à 30 ans puis, à 45 ans, on est déjà vieux, les compagnies ne veulent plus investir dans notre formation. Pourtant, il reste peut-être 20 ans de vie active, parce que la liberté 55, hein, je pense, dans mon cas, c'est rendu à 65 puis ça s'en vient à 75 sous peu. Ça fait que c'est fini. Donc, après 45 ans, il faut combattre ça, et c'est des organismes comme le Conseil des aînés qui peuvent apporter des choses.

Des effets sur le système de santé, sûrement il y en a, c'est sûr, mais on oublie de dire que 70 % des personnes de plus de 70 ans ne nécessitent à peu près pas de soins de santé. Des effets aussi sur le bénévolat et toute l'implication bénévole, le vieillissement. C'est sûr qu'il va y avoir de plus en plus de gens disponibles pour aider, pour faire des choses pour la société dans le bénévolat, mais il faut encadrer tout ça, il faut y réfléchir. Il y a une mutation présentement là-dedans qui se passe beaucoup.

Des effets aussi du vieillissement sur le transport. Le virage ambulatoire, il y a quelques années, a fait que, oui, c'est beau, les petites opérations d'un jour, etc., mais, comme l'agence de santé m'avait dit, moi, à un moment donné, lors d'une suite nombreuse de réunions sur l'accompagnement-transport: Nous, on est responsables de la prestation des soins, mais pas comment s'y rendre. Là, c'est les bénévoles qui font ça, mais ce bénévolat, en tout cas à Montréal, sur le territoire de Montréal, est en train de s'éteindre graduellement. Ça fait qu'il y a des gros problèmes qui s'en viennent.

n (10 h 30) n

Donc, le Conseil des aînés, selon nous, doit faire une recherche au sens large dans tous les domaines concernant le vieillissement, lutter contre les faussetés et les stéréotypes, faire l'éducation de la population, des élus et de l'appareil gouvernemental également, parce que malheureusement les faussetés, les stéréotypes ont la vie dure, hein? Il ne s'agit pas de dire: C'est faux. Le message qu'on dit que c'est faux ne passe pas, mais, quand on dit: Oui, c'est à cause du vieillissement, ça, ça passe, faire de l'éducation populaire, être l'agent de liaison de tous ces intervenants-là.

C'est sûr que les recommandations... il y en avait huit, puis je peux les dire rapidement. C'est sûr que, pour nous, il faut reconduire la Loi du Conseil des aînés; interpréter une mission large... la mission du conseil; le mandat d'animation des tables est, pour nous, aussi très, très important. On a mis, au Québec, la plus belle structure, je pense, sur papier, mais il faut maintenant la rendre vivante, cette structure-là.

Il faut naturellement aussi une stabilité, là, au niveau des ministères, là. Ça n'a pas de bon sens qu'à un moment donné, à travers les années, on a changé de ministre responsable à tout bout de champ. Et, encore, même aujourd'hui, on ne sait pas, là, ça a pris deux ans avant d'arriver, on s'était dépêchés, en janvier 2005, à pondre ce rapport-là; deux ans plus tard, on est convoqués. Ça donne peut-être un peu la mesure de l'importance qu'on donne à ce dossier-là. Et là en plus les élections s'en venant, est-ce que même cette commission-là aura le temps d'aller au bout de sa mission avant que les élections soient déclarées puis est-ce que ça donnera quelque chose? Je l'espère fortement.

Naturellement, bien on dit: Les ressources financières, etc., ça en prend, là, puis ce n'est pas avec le maigre budget du Conseil des aînés qu'on va aller bien, bien loin.

Moi, je poserais peut-être, en terminant, un petit peu une question très, très terre à terre, là: Est-ce qu'au Québec on veut véritablement prendre en compte le vieillissement de la population et, par le fait même, investir dans la compréhension de ce phénomène afin d'y apporter les changements et les correctifs nécessaires?

Oui, le vieillissement a des impacts négatifs. Il y en a, des impacts négatifs, il ne faut pas penser que c'est toujours très rose, vieillir ? ce n'est pas toujours très rose, ça dépend dans quelle couche de la société où on est, là ? mais il y a aussi des impacts aussi positifs. Comment concilier ces deux sortes d'impacts positifs et négatifs? Comment ne pas tomber dans une simple approche toujours comptable et apocalyptique? Tu sais, c'est souvent une approche comptable. Oui, on pense vieillissement, parce que ça va coûter cher, parce qu'il va y en avoir trop, parce que les CHSLD sont pleins.

C'est comique, quand il y a eu les choses sur les CHSLD, dernièrement, là, c'est rien que de ça qu'on parlait sur les lignes ouvertes. Pourtant, il n'y a rien que 4 % des aînés qui se rendent là. Puis, à écouter les gens dans les lignes ouvertes, là, tout le monde qui parlait, disait... comme s'ils étaient pour aller là. Ce n'est pas vrai que tout le monde va là, c'est 4 %. Mais c'est ça qu'il faut changer.

J'aimerais rappeler qu'il y a eu un bel article dans L'Actualité, l'automne dernier, une petite affaire sur ce qui se passe au Japon.

Le Président (M. Brodeur): ...

M. Emond (Serge): J'arrive, quatre lignes. Au Japon, bien il y a une loi sur les aînés, cette loi-là relève directement du premier ministre; on fait un rapport au premier ministre pour voir les progrès, etc., dans la société. Mais, ici, on est bien souvent à des ministres très secondaires, hein, des ministres aussi sans budget.

En fin de compte, on souhaite que le Conseil des aînés soit pleinement reconnu et qu'on lui donne les moyens de réaliser sa mission et ses ambitions. Merci.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Oui, M. le Président, merci. M. Emond, bienvenue, merci de votre présence. C'est très intéressant, vous apportez des idées, des choses qu'on a entendues hier, là, puis d'autres choses qu'on n'avait pas entendues. Donc, c'est passionnant, c'est très intéressant.

Je voudrais vous amener sur deux ou trois sujets. Vous avez dit que, je crois, combien vous... je comprends bien, les organismes, les 60 organismes, là, vous...

M. Emond (Serge): 75.

M. Paquin: ...travaillez un peu avec 60 organismes et, eux, leur but principal ou leur mission, c'est d'accompagner les personnes seules, principalement. Est-ce que j'ai bien saisi? Et, si oui, voulez-vous me donner des exemples d'organismes, s'il vous plaît?

M. Emond (Serge): Oui, c'est des personnes vivant à domicile, souvent, là, plutôt seules, là ? le vieillissement est féminin, on le sait ? souvent des femmes. Des exemples d'organismes: Projet Changement, qui est un gros organisme, le plus vieux centre communautaire pour aînés au Québec; il y a projet Almage, chez les anglophones; le CRAIC, chez les Italiens; l'Entraide Ukrainienne; ACHIM, qui est en habitation; Action Centre-Ville. Il y en a 75.

M. Paquin: D'accord.

M. Emond (Serge): Et ce qu'on fait, c'est ça, c'est de ramener ces gens-là, qu'ils restent en contact, parce que, si les gens restent à domicile, on aurait bien beau leur donner les meilleurs services à domicile... Prends une personne qui reste dans sa maison, là, constamment; elle dépérit, elle se nourrit mal, dénutrition, malnutrition. Elle vient, aussi, souvent, très à risque, hein? Il y a eu des études en masse là-dessus, d'abus ? abus financiers, abus psychologiques, etc. ? et ce qui fait qu'on reste vivant... Je l'ai entendu tantôt, c'est ça, c'est le contact, c'est rester en contact avec son environnement, et ce n'est pas facile. Je ne connais pas le milieu rural, mais, à Montréal, même si on est collés les uns sur les autres, on peut être dans un gros édifice et être très seuls. Et c'est ça qu'on essaie.

Je prends Action Centre-Ville, ils sont en face justement du fameux... ce qu'on avait appelé Plan Dozois, là, en arrière de la Place des Arts; c'est des tours, ça, remplies de personnes âgées isolées. Pourtant, c'est plein, mais ils sont tous isolés. Comment les rendre vivants, en contact avec la... Un des gros dossiers, c'est justement toute la participation sociale présentement; on va faire une déclaration de principes, on a produit une vidéo qui a eu le lancement, en novembre dernier, sur tous les genres de participation et d'engagement social des aînés dans la société. Ils ne sont pas tous malades, mais ils peuvent faire des choses, même si souvent, nous, on s'adresse à des personnes qui commencent à être en perte d'autonomie.

M. Paquin: Vous parlez de personnes seules, puis on parlait tantôt de taux de suicide sur les 55 ans et plus, on a tous été surpris parce que, comme mon collègue l'a bien mentionné, on était portés à croire, nous, que c'est plutôt les jeunes qui avaient un taux de suicide assez élevé, et on constate, selon l'intervention qu'il y a eu tantôt, qu'il y a beaucoup de taux de suicide... le taux de suicide est très élevé chez les 55 ans et plus. J'imagine que, vis-à-vis les personnes seules, c'est problématique.

M. Emond (Serge): Oui, mais, généralement, les personnes seules qui se suicident, justement, c'est parce qu'ils sont seules. Les gens qui participent justement, qui rentrent en contact avec des organismes d'aînés comme on a, le risque est beaucoup moins grand. Moi, je n'ai jamais entendu, depuis sept ans que je suis là, de suicide parmi les membres de nos groupes. Je n'en ai jamais entendu parler; je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu, mais je n'en ai pas entendu parler.

M. Paquin: Non? Bien, tant mieux, tant mieux. Vous avez parlé du Conseil des aînés, vous avez dit que vous avez participé à élaborer certaines choses qu'on nous suggère, là, dans les 17 recommandations, et vous êtes favorable au Conseil des aînés, vous êtes satisfaits de ce qu'ils font puis vous souhaitez qu'ils en fassent encore plus puis qu'ils aient des moyens plus larges dans tout ça.

Mais on a parlé du Conseil des aînés, hier, et tout le monde est unanime à dire qu'ils font un travail extraordinaire, mais on a parlé aussi d'états généraux sur le vieillissement de la population, sur les aînés. Quel est votre avis là-dessus, vous? Pensez-vous qu'on devrait tenir des états généraux pour aller plus loin puis avoir encore plus de données qu'on a avec le Conseil des aînés?

M. Emond (Serge): Oui. Quand j'appelle à plus un développement, oui, ça pourrait aller jusque-là; oui, sûrement. Il faut qu'il y ait un organisme qui, pour moi, est le Conseil des aînés, qui centralise un peu toute l'information, etc., parce que, là, le ministère de la Santé fait des choses, en habitation on fait d'autres choses. Il n'y a personne qui, je dirais, peut-être monopolise toute cette problématique du vieillissement afin de comprendre. Tu sais, on regarde juste Santé et Services sociaux, ils ne font rien pour les gens qui sont seuls en HLM, parce qu'ils disent: C'est de l'habitation.

L'habitation, ils disent: Ah non, non! nous autres, on ne donne pas de services parce que c'est Santé et Services sociaux que ça regarde. Tu sais, je pense que le Conseil des aînés pourrait avoir un rôle pour faire asseoir tous ces gens-là ensemble parce que tout le monde fonctionne par petites cases, maintenant. En tout cas, l'habitation, le logement à Montréal, ça fait juste commencer, le problème. Il y a un sérieux problème qui s'en vient, là, et c'est comme si... on ne regarde jamais le vieillissement, on le regarde, là, quand ça commence à toucher les budgets gouvernementaux, simplement. Mais peut-être qu'il faudrait avoir un peu de vue, là, de regarder un peu plus loin qu'après-demain. Puis il y en a encore... Le vieillissement, on parle de jusqu'à quoi? Ça monte jusqu'en 2030, là, à peu près; 2031, je pense, le «peak», là, ça redescend. Il reste encore 25 ans, hein, ça fait que...

n (10 h 40) n

M. Paquin: Vous avez mentionné tantôt que vous vous interrogez des fois... vous êtes un peu déçu, si j'ai bien saisi, du fait que vous vous demandez: Est-ce que vraiment les gens ont de l'intérêt, la population ou en tout cas peu importe, certaines personnes, pour s'occuper du vieillissement de la population? Puis vous souhaitiez qu'il y ait plus de motivation et plus d'intérêt parce que le problème est là, vous venez de le mentionner encore il y a quelques instants. Mais, si vous aviez à décider puis il y aura un geste à poser ou qu'il y aurait des gestes à poser, mais quel est le premier geste que vous poseriez en fonction pour améliorer le sort des aînés au Québec?

M. Emond (Serge): Il y a sûrement qu'il y a toutes les personnes aînées qui nécessitent des besoins en services à domicile présentement. On sait qu'il y a des millions de retard en argent par rapport à ça. On est la dernière province au Canada qui offre le moins de services, et, quand on ne donne pas ces services-là, bien, ça engendre ensuite un transfert en CHSLD, etc. Ça coûte bien moins cher, mais il y a quelqu'un à domicile, si on lui donne des bons services... Mais, présentement, malheureusement, ce qu'on semble vouloir faire, c'est sûr qu'on semble vouloir faire payer les gens de plus en plus. On l'a vu avec le ménage à domicile, qui était gratuit il y a plusieurs années, ça a passé à l'économie sociale, c'est devenu payant. Et on sait que, dans certains coins du Québec, maintenant, les soins d'hygiène personnelle, etc., commencent à passer... donc redeviennent payants, tous des services publics. Et, si on regarde dans les documents du ministère de la Santé aussi, on donne aux CSS le rôle de s'occuper, dans les trois premiers mois, des soins, quand quelqu'un a besoin de quelque chose, et après de voir à ce que les soins soient donnés. «Voir à», ça, ça veut dire donner ça à quelqu'un d'autre et bien souvent devenir payant. Et il y a une grosse, grosse réflexion à se faire. Je vous encouragerai d'aller voir le site de la Coalition Solidarité Santé, qui a des bonnes choses à dire là-dessus.

M. Paquin: Merci.

Le Président (M. Brodeur): M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: Merci, M. le Président. C'est à mon tour de vous souhaiter la bienvenue.

M. Emond (Serge): Merci.

M. Mercier: Merci pour votre exposé plus qu'intéressant. Vous avez mentionné, on l'a mentionné abondamment également, le problème de la solitude, hein, un problème de logement même, compte tenu du niveau de pauvreté de plusieurs de nos aînés, de nos sages même, que j'aime les appeler.

Vous savez, il y a une tendance ? et telle est ma question; il y a une tendance ? notamment ici, dans la capitale et dans la métropole, à la construction de résidences ou de maisons bigénérationnelles, et c'est de plus en plus populaire, sauf qu'il y a plusieurs contraintes qui sont rencontrées, notamment au niveau des municipalités qui souvent appliquent une réglementation municipale... et c'est tout à fait leur droit, c'est le Code du bâtiment qui l'exige. Et, moi, je vous parle d'expérience, des fois ça peut être même très onéreux de construire une maison bigénérationnelle, parce que, bon, il y a la mise aux normes pour le feu, etc., et ça, c'est très dispendieux.

Est-ce que, selon vous, le gouvernement et notamment les municipalités devraient avoir des incitatifs ou devraient avoir une espèce d'assouplissement quant à la réglementation municipale ou est-ce que c'est utopique ou marginal de penser que le bigénérationnel ou le multigénérationnel peut être une solution pour briser la solitude et donner espoir à nos aînés afin qu'ils puissent vivre dans leurs familles et non pas être isolés en quelque part à des kilomètres et des kilomètres souvent de leurs enfants? Est-ce que, pour vous, c'est utopique, marginal, de penser que ce type de solution pourrait remédier, d'une façon à moyen et court terme, le problème de la solitude ou est-ce que c'est une solution intéressante qui mérite d'être examinée de plus près?

M. Emond (Serge): Bien, c'est sûr que ça peut être une avenue mais parmi d'autres. Je ferais bien attention quand vous parlez de réduire la réglementation, là: il ne faudrait pas que les aînés fassent les frais d'une réglementation qui augmentera les dangers, là.

M. Mercier: C'est pour ça que je vous pose la question, là, oui.

M. Emond (Serge): Ça, il faut combattre ça. C'est sûr qu'il y a peut-être des réglementations tatillonnes des fois, là, mais c'est autre chose.

Mais, pour répondre un petit peu, je vais y répondre indirectement, à votre question. Il y a eu aussi un colloque à l'UQAM, je pense que c'est l'automne dernier ou le printemps dernier, où on parlait justement de toute la solitude, et il y a eu une grande enquête qui a été faite. Ce sont les plus jeunes qui disent: Oui, il faut s'occuper des aînés, etc., oui, ah! on va en prendre soin. Et, plus on vieillit, plus ça change, moins on se sent aptes à s'en occuper, de ses vieux parents, etc. Puis ça, c'est la réalité. Et, dans l'enquête, on démontrait que les aînés eux-mêmes, ce n'est pas ça qu'ils désirent. Ils veulent davantage de services publics, puis que leur parenté autour, pas qu'elle leur donne les services que l'État devrait leur donner, qu'elle coordonne ces services-là. Parce que, quand ils commencent à avoir besoin de services à la maison, hein, il faut ramer dur, là, pour aller au CLSC, etc., appeler un puis appeler l'autre, puis il y a les listes d'attente.

Et, dans le fond, ce que les personnes aînées disent: On a besoin de notre famille, d'amis, de proches aidants pour nous aider, là, mais pas pour rendre les services eux-mêmes. On sait que les proches aidants rendent au-delà de 80 % des soins aux gens, je veux dire, il n'en reste pas beaucoup pour l'État, là. Peut-être qu'il faudrait en faire plus, hein? Puis on parle de plus en plus qu'il faut aider les proches aidants aussi. On en parle, mais ça ne bouge pas bien, bien, hein? On a beaucoup de parlotte présentement concernant le vieillissement mais très peu d'action.

M. Mercier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brodeur): Merci. Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: M. Emond, bonjour.

M. Emond (Serge): Bonjour.

Mme Champagne: Alors, je vais essayer d'avoir une voix qui a de l'allure, là. M. Emond, votre propos s'adresse spécifiquement aux gens aînés qui restent chez eux, les gens qui ont des besoins chez eux. Ce ne sont pas des gens qui sont hébergés, ce sont des gens qui sont à la maison. Puis vous couvrez beaucoup le Grand Montréal, hein, c'est ça?

M. Emond (Serge): L'île de Montréal.

Mme Champagne: Oui. Est-ce qu'il existe des organismes semblables en région?

M. Emond (Serge): Comme j'ai dit un petit peu plus tôt, en région, c'est un petit peu un fonctionnement différent. En région, ce sont souvent les centres d'action bénévole qui ont une section Aînés qui s'occupe un peu plus, qui vont faire de la popote, des repas, etc. Et il y a aussi l'autre association des centres communautaires pour aînés. Et, souvent, aussi, le centre communautaire pour aînés est aussi le centre d'action bénévole. C'est un peu plus à cause du nombre, hein? C'est bien sûr que, dans une petite ville ou même un village, il n'y a pas assez de place pour faire bien des groupes, ça fait que c'est souvent le même groupe qui fait tout. À Montréal, oui, il y a des groupes... des centres d'action bénévole, il y en a cinq, six, mais pourtant il y a 75 groupes autres. Ça fait que c'est un autre mode de fonctionnement, complètement.

Mme Champagne: C'est ce que je vois dans la liste des membres de COMACO...

M. Emond (Serge): Oui, vous l'avez, c'est vrai.

Mme Champagne: ...vous avez effectivement les centres de bénévolat qui sont là, O.K., mais vous avez senti le besoin de vous regrouper. Vous êtes un peu la référence, exemple: supposons que le centre d'action bénévole a une référence de quelqu'un qui a besoin d'aide, d'accompagnement, vous êtes là. C'est ça que je comprends?

M. Emond (Serge): Oui. Souvent, les gens sont référés dans les organismes membres, par les CLSC, CSS maintenant, là. C'est souvent comme ça. Et aussi c'est des centres qui sont établis dans le quartier. Ça fait que, par le journal local, c'est de plus en plus connu. Et souvent il y a comme une espèce de cheminement. Les gens arrivent quelquefois comme bénévoles, ils sont dans le troisième âge ? jeune troisième âge ? ils commencent à faire du bénévolat, deviennent membres de l'organisme pour participer à des activités, etc., puis le vieillissement étant ce qu'il est, souvent ils deviennent plus des bénéficiaires de l'organisme par la popote roulante, quand ils ne peuvent plus sortir. Ça fait que souvent ils ont un cheminement de plusieurs années rattaché au même organisme.

Mme Champagne: O.K. Et, M. Emond, vous êtes financés comment, vous autres?

M. Emond (Serge): Nous autres, c'est le programme PSOC, un gros 60 quelque mille dollars, là...

Mme Champagne: O.K., seulement ce programme-là?

M. Emond (Serge): ...à peu près pour tout faire.

Mme Champagne: Donc, vous avez combien de personnes? Il y a vous comme coordonnateur...

M. Emond (Serge): Il y a moi.

Mme Champagne: Puis le conseil d'administration mais évidemment qui n'est pas payé.

M. Emond (Serge): Puis il y a un conseil d'administration qui est très actif, heureusement. Présentement, il y a une stagiaire de l'UQAM, là, qui nous donne un coup de main.

Mme Champagne: Vous siégez également à votre table de concertation, à Montréal?

M. Emond (Serge): Oui, on est très près de la table de concertation.

Mme Champagne: Et vous souhaitez que les tables de concertation, ce soient elles, à l'exemple de d'autres organismes, qui délèguent ou qui nomment des personnes pour siéger au Conseil des aînés? Est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir un conflit d'intérêts, à un moment donné, à savoir que ? je pense à ça, là ? les tables de concertation des aînés délèguent quelqu'un, et cette enveloppe-là, qui serait déléguée au Conseil des aînés pour les tables de concertation, serait gérée par les mêmes personnes?

M. Emond (Serge): Bien, ils ne seront pas majoritaires, là. Lorsqu'on dit qu'il devrait y en avoir certains...

Mme Champagne: Mais il n'y a pas de chiffre pour vous, comme tel, là.

n (10 h 50) n

M. Emond (Serge): Non, non. On ne s'est pas mis de chiffre, là, mais qu'il y ait une bonne représentation des tables. C'est parce qu'aussi, à Montréal, la table... Montréal, c'est une grande ville, hein? Ça fait qu'il y a aussi beaucoup de tables de quartier d'aînés. C'est sûr que la table de Montréal va peut-être être appelée à jouer peut-être... parce qu'elle n'a pas tellement joué, à venir à date, sur les tables... Il y a plusieurs tables de quartier aînés aussi. Il y a des tables de quartier générales, tout ce qui est communautaire, puis des sous-tables souvent aînés. Ça fait qu'il y a une espèce de regroupement à faire pour qu'aussi, justement... Parce que les aînés, présentement, au Québec, il n'y a pas bien, bien de voix, on est loin du «Grey Power» américain, là, tu sais, le grand lobby. Ici, c'est à peu près inexistant.

Mme Champagne: Le pouvoir gris n'existe pas, là, non?

M. Emond (Serge): Ah! très peu, moi, je pense.

Mme Champagne: Il existe dans les écrits?

M. Emond (Serge): Puis il n'y a pas de revendication vraiment majeure qui se passe. Parce que c'est sûr qu'au nombre de personnes âgées qu'il y a actuellement au Québec, si elles se mettaient toutes ensemble, ça pourrait faire trembler, je pense, des gouvernements, là, mais... Puis, ce n'est pas ça...

Puis, l'intention, ce n'est pas de faire trembler les gouvernements. C'est toujours ça aussi, le danger, que... je pense que... Pourquoi on ne finance pas les tables? Moi, je pense qu'honnêtement il y a peut-être une peur de différents ministères que les aînés deviennent trop revendicateurs, etc. Mais on peut se servir de toute cette belle structure là pour construire aussi. C'est là-dessus qu'il faut miser, c'est construire. Ce n'est pas revendiquer pour revendiquer. Si on revendique, c'est parce qu'il y a des besoins, tu sais.

Mme Champagne: M. Emond, demain matin, vous êtes ministre des Aînés. Vous faites quoi, votre premier geste?

M. Emond (Serge): D'abord, je vais demander au Conseil du trésor qu'il me donne un bon budget, parce qu'un ministre...

Mme Champagne: C'est très brillant.

M. Emond (Serge): ...un ministre sans portefeuille...

Mme Champagne: Très brillant. C'est ça.

M. Emond (Serge): ...ça ne sert pas à grand, grand-chose tout le temps. Et, oui, bien, moi, je pense qu'un des premiers gestes, c'est ça, c'est d'organiser toute cette structure-là, Conseil des aînés, tables, et redonner... Pour prendre vraiment le pouvoir, de voir ce qui se fait, puis essayer justement qu'il y ait une cohésion entre tout ce qui se fait. Il n'y en a pas, de cohésion, présentement.

Mme Champagne: Et ce que vous nous dites, c'est que le Conseil des aînés n'a pas les moyens d'arrimer tout ça et de...

M. Emond (Serge): Ah! présentement, non. Je ne sais plus, là, c'est combien. C'était 500 000, 600 000, là, le budget, là.

Mme Champagne: C'est ça.

M. Emond (Serge): Avec 500 000, je veux dire, avec le personnel qu'ils ont, je veux dire, on paie les salaires puis on fait quelques tournées dans la province, puis c'est dépensé, là.

Mais, quand j'ai parlé tantôt, moi... C'est toute la recherche aussi. Il se fait énormément de recherche. Il n'y a pas aucun organisme qui parle... On prend les économistes, il y en a qui disent ? les pires apocalyptiques, là ? par rapport au vieillissement... mais par contre il y a M. Lesemann, qui est peut-être un peu plus connu, que, lui, il dit: Non, ce n'est pas ça. Mais comment on fait parler tout ce monde-là, comment on fait parler l'économie ou... à la santé, puis à l'habitation, etc.? Tu sais, là, tout ce qui se passe en habitation, comme je vous dis, il y a eu une déréglementation, là... une réglementation, puis... qui fait bien des choses qui découlent, mais en tout cas qui va amener... On sait qu'on veut passer en habitation beaucoup... on veut que des organismes communautaires commencent à prendre des cas en hébergement de 2 heures-soins-jour, au lieu de les envoyer en CHSLD. J'ai bien hâte de voir si on va leur donner le budget, hein, parce que 2 heures-soins-jour, là, je ne sais pas si vous savez c'est quoi, mais c'est beaucoup d'argent.

Mme Champagne: ...c'est à peu près tout ça, là. Vous dites, en page 6 de votre mémoire, votre dernier petit paragraphe, il parle des études du Conseil des aînés, où vous dites que: «La réalisation de la mission du Conseil des aînés est loin d'être accomplie puisque la société et les responsables politiques, dont les ministres responsables des Aînés, ont peu progressé dans leur vision du vieillissement.» Et j'entends par là le discours, là, tant qu'on va tenir un discours alarmiste, que toutes les personnes qui vieillissent c'est un poids pour la société, effectivement on n'ira pas loin. Et vous dites: «Cette vision est toujours située comme une problématique, surtout financière.» C'est un poids. «L'apport des aînés à la société civile est malheureusement passé sous silence et ignoré.»

Or, je suppose que, si vous étiez ministre des Aînés, vous, demain matin, vous vous organiseriez probablement, et je le souhaite, là, qu'il y ait une bonne pub ? il y en a tellement, de pub ? qu'on dise que les aînés sont un apport pour la société. Peut-être que, dans des états généraux, M. Emond, on pourra prendre une place publique devant les médias qui, comme quelqu'un disait hier, pourraient, de temps en temps ? un monsieur qui avait beaucoup d'humour d'ailleurs; pourraient, de temps en temps ? dire les belles choses qui se font également, alors que là, dès qu'on parle des aînés, on les voit comme une gang, là, qui va, comme on dit, «succionner», hein, qui sont attachés après le gouvernement pour arracher de l'argent, alors qu'il y en a, vous l'avez dit tantôt, 4 % qui sont en grand besoin. Les autres personnes apportent à la société, en termes de dépenses également.

Alors, je me réjouis, vous avez un beau mémoire, merci beaucoup, un bon mémoire.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup pour votre intervention. Merci pour vous être déplacé jusqu'ici.

Donc, je vais suspendre quelques instants, le temps que le prochain groupe puisse s'installer.

(Suspension de la séance à 10 h 55)

(Reprise à 10 h 58)

Le Président (M. Brodeur): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons continuer nos travaux en recevant le groupe Gai Écoute et la Fondation Émergence. Donc, bienvenue en commission parlementaire.

Des voix: Bonjour.

Le Président (M. Brodeur): Bonjour. Donc, je vous explique brièvement les règles de la commission. Vous avez un temps maximal ? et je dis bien maximal ? de 15 minutes pour présenter votre mémoire de la façon dont vous jugez à propos. Et, comme vous l'avez vu auparavant, ce sera suivi d'une période d'échange avec les membres de la commission.

Donc, immédiatement, la parole est à vous, en vous demandant tout d'abord de vous identifier pour le bénéfice du Journal des débats.

Gai Écoute et Fondation Émergence

M. McCutcheon (Laurent): Bonjour. Je suis Laurent McCutcheon. Je suis président de Gai Écoute et président de la Fondation Émergence. Je suis accompagné de M. Pierre Blain, qui est chargé de projet à la Fondation Émergence.

Je veux d'abord vous dire quelques mots sur Gai Écoute. Gai Écoute est un organisme qui a été mis sur pied en 1980. Donc, la mission principale de Gai Écoute, c'est d'offrir des services d'écoute téléphonique, de renseignements aux personnes en difficulté en rapport avec l'orientation sexuelle: ça peut être autant les parents qui s'interrogent sur l'orientation sexuelle des enfants que les personnes elles-mêmes ou des enseignants ou des professionnels. Nous offrons aussi les services par courrier électronique, Internet, etc.

Et, en 2000, à l'initiative de Gai Écoute, on a mis sur pied la Fondation Émergence dont la mission est de faire de l'éducation, de la sensibilisation sur les réalités homosexuelles, et de faire la lutte aux préjugés. La Fondation Émergence a initié la Journée de lutte contre l'homophobie, qui est devenue un événement international. Maintenant, on célèbre, le 17 mai, la Journée internationale contre l'homophobie dans plein de pays au monde, et tout cela à l'initiative de la Fondation Émergence, avec très peu de moyens et beaucoup de volonté surtout.

n(11 heures)n

Nous comparaissons ici, aujourd'hui. Pour nous, c'est une première sortie dans ce monde des aînés qu'on commence à découvrir en raison de notre âge, et la Fondation Émergence s'intéresse particulièrement au phénomène du vieillissement chez les personnes homosexuelles.

C'est une question d'évolution de la société. Vous savez, à l'âge que j'ai, lorsque j'étais jeune adulte, j'étais légalement considéré comme un criminel, puisque l'homosexualité était interdite en vertu du Code criminel canadien. Par la suite, on a été considérés comme des malades mentaux, on a cherché à nous traiter, nous amener dans les hôpitaux pour nous traiter, pour arriver en peu de temps finalement... Peu de groupes ont réussi à avoir une évolution aussi rapide: on est passés de ce statut de criminels, entre guillemets, à celui d'une égalité juridique. Maintenant, nous avons l'égalité juridique, même le droit d'accès au mariage pour les couples de même sexe. Nous sommes maintenant à la recherche d'une égalité sociale, et cette égalité sociale évidemment comprendra aussi les réalités sur la question des aînés. Je suis... Et mon collègue me suit de quelques années, nous sommes de la première génération de personnes homosexuelles qui auront vécu une bonne partie de leur vie de façon publique, ouvertement homosexuelles, et qui arrivons au vieillissement, et nous avons beaucoup d'inquiétudes. Si on a mis tant d'efforts pour sortir, pour faire ces luttes, on ne voudrait pas retourner dans un placard au moment de vieillir, se retrouver dans des institutions où nous serions mal acceptés et très peu intégrés.

Les personnes homosexuelles souffrent d'une double et même triple discrimination. Vous savez que, dans la société... Je ne vous apprends pas que déjà le vieillissement, il y a une certaine forme de discrimination exercée envers les aînés. Mais lorsqu'on est homosexuel et qu'on est également victime de discrimination... Et nous n'avons pas pu, aujourd'hui, avoir de collègues féminines, de lesbiennes, mais, chez les femmes, souvent c'est triple discrimination: femme, lesbienne et aînée. Donc, on voit tout de suite, là, qu'il y a une problématique importante.

Est-ce que nous sommes différents, nous qui arrivons au vieillissement? On n'est pas différents des autres personnes sur le plan physique et biologique, sauf que ce qui est différent, c'est notre vécu, notre expérience de vie est différente. Il y a toute la question de l'acceptation de l'orientation sexuelle, qui est très différente d'une personne à l'autre. Certaines personnes la vivent bien, et, pour la très grande majorité, encore aujourd'hui, c'est une réalité difficile à vivre. Les personnes homosexuelles, pour la très grande majorité, n'auront pas d'enfants, de descendants pour prendre soin... J'entendais parler tout à l'heure de maisons où les enfants accueillent les parents. Ce ne sera pas notre réalité, puisque la plupart n'avons pas d'enfants. On est confrontés toujours à une homophobie, et cette homophobie, elle est partout, elle va être dans le réseau des aînés comme elle est ailleurs.

Il n'y a pas de réseau d'entraide encore pour les personnes homosexuelles. Ça commence, il y a des organismes qui se mettent sur pied. La question des aînés ? nous sommes des pionniers dans le secteur ? cette question n'est abordée par personne actuellement. Il y a eu quelques petites recherches, des gens qui ont levé un petit peu le voile, mais quelle est la réalité des personnes homosexuelles vieillissantes? Donc, c'est une question pratiquement inconnue, et absence de réseau d'entraide.

Les lieux de rencontre? Les personnes homosexuelles ont été habituées à se rencontrer autour des bars; c'était la seule réalité possible à l'époque. Mais, en vieillissant, les bars, ça n'a plus d'intérêt pour les aînés, et il faut penser aussi d'avoir des lieux de rencontre, des lieux de socialisation.

S'ajoute à ça une nouvelle dynamique de vie de couple, hein? On commence à reconnaître la réalité des couples homosexuels. Si, au Québec, il y a 1,1 million de personnes de plus de 65 ans, on peut facilement estimer qu'il y a au-delà de 100 000 personnes qui sont des gais, des lesbiennes, des bisexuels ou transgenres, puisque c'est 10 % de la population.

Dans les années soixante et soixante-dix, au moment de la mise en place des services ? le Québec s'est doté de toutes ses infrastructures dans les années soixante, soixante-dix ? nous, comme personnes homosexuelles, nous étions tous dans le placard, donc il n'y a personne qui était à la table pour revendiquer des droits, revendiquer des besoins, le développement de services. Donc, tous les services se sont développés sans aucune considération de la dimension de l'orientation sexuelle.

Cette commission parlementaire est l'occasion, pour nous, de venir vous faire part de cette réalité qui est celle des personnes homosexuelles vieillissantes.

Je me suis livré à un rapide exercice pour voir un peu l'organisation du réseau d'entraide et de services pour les aînés au Québec, et, quand on regarde l'ensemble du portrait, il y a énormément de services. Il y a un ministère, il y a un conseil des aînés, il y a un secrétariat, il y a des alliances de retraités, l'association de défense des droits, de gérontologie, des tables régionales. Il y a une fondation sur le vieillir, il y a des réseaux d'information. Il y a des universités du troisième âge à Sherbrooke, à Québec. À Laval, il y a un institut de gériatrie. Il y a des clubs d'âge d'or, il y a la FADOQ. Et, dans tout cela, il n'y a jamais personne, au Québec, qui a parlé d'orientation sexuelle, d'homosexualité, de lesbiennes. Dans tout ce réseau où on a investi des centaines de millions de dollars, avec toute cette organisation, on n'a jamais osé.

Est-ce que c'est de notre faute, à nous, comme personnes homosexuelles, de ne pas avoir revendiqué? Peut-être, sauf qu'on ne pouvait pas le faire à l'époque. Il fallait commencer par d'abord obtenir une égalité juridique, avoir le droit d'exister avant de revendiquer nos services. Nous sommes rendus à cette étape. Il faut que le Conseil des aînés, il faut que le ministère et il faut que l'ensemble des politiques gouvernementales prennent en compte cette réalité des personnes homosexuelles.

Nous n'avons pas comme objectif de vouloir développer un réseau parallèle de services pour les gais et les lesbiennes. Moi, je pense que ce serait une très mauvaise idée. Mais ce que nous voulons, c'est que l'ensemble des services, des structures fassent une place aux personnes homosexuelles, ouvrent la porte, qu'on invite, qu'on accueille de façon positive les personnes homosexuelles, que, dans les tables régionales, il y ait des groupes d'homosexuels qui soient là. Le Conseil des aînés devrait s'y intéresser, et le ministère devrait s'y intéresser ? j'accélère parce que le temps passe. Donc, on souhaite amorcer une réflexion sur cette problématique, et je pense que le Conseil des aînés devrait être un instrument devant nous faciliter cette réflexion.

On veut aussi sensibiliser les personnes homosexuelles, parce que, quand on vous parle de cette réalité-là aujourd'hui, ici, les personnes homosexuelles elles-mêmes n'ont pas réfléchi sur la question, ne sont pas sensibilisées. Il faut travailler au développement de l'action communautaire. Il faut prévenir les maladies mentales, la question du suicide, la solitude. S'il y a tant de solitude chez les aînés, est-ce qu'on peut facilement imaginer que des personnes homosexuelles seules qui n'ont pas de famille, qui n'ont pas développé vraiment de milieu d'appartenance, qui ont vécu le rejet et l'homophobie arrivent au vieillissement? Bien, je pense qu'on peut mettre solitude plus, plus, plus dans ces situations-là, et il faudrait s'en préoccuper. Le développement d'une expertise, faire des recherches. On est très peu documentés dans le domaine. Développer des outils d'information, dispenser une information, etc.

Et, en conclusion, quelques recommandations. On aimerait que le Conseil des aînés intègre l'orientation sexuelle dans ses politiques, dans ses recherches, dans ses documents, qu'il mette des mécanismes de consultation. On n'a pas les moyens, nous, d'organiser des consultations. Vous savez, en termes d'investissement, on a eu dans notre vie, notre carrière... on a organisé un petit colloque de réflexion, on avait eu 10 000 $ du gouvernement. C'est, à ma connaissance, le seul financement qui a été donné sur cette question au Québec. Que le Conseil des aînés soutienne les projets qui initient les recherches, qu'il soutienne... On a une journée de lutte à l'homophobie, j'en ai parlé tout à l'heure. Le Conseil des aînés devrait soutenir les initiatives de cette journée.

Je pense, le Conseil des aînés a 18 membres qui forment le Conseil des aînés. Ce ne serait peut-être pas une mauvaise idée que, sur les 18, il y ait une personne homosexuelle, que ce soit un gai ou une lesbienne. Ce serait même en bas du 18 %. Donc, on recommande qu'il y ait une personne au conseil.

Que le Conseil des aînés s'intéresse... Le 6 mars prochain, la Commission des droits de la personne va rendre public un rapport d'une vaste consultation qui dure depuis quelques années sur l'homophobie au Québec. Il y aura un volet sur le vieillissement. Le Conseil des aînés devrait prendre charge de cette question et de voir à l'application des recommandations qui seront faites par la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.

n(11 h 10)n

Le soutien au réseau d'entraide, j'en ai parlé tout à l'heure, c'est une recommandation concrète qu'on fait au Conseil des aînés de soutenir le réseau d'entraide.

Enfin, on souhaite évidemment la continuité du Conseil des aînés. On souhaite son renforcement et que le Conseil des aînés prenne en compte l'orientation sexuelle.

Et, en terminant, on encourage la tenue des états généraux, on en a parlé tout à l'heure. Je pense que des états généraux sur le vieillissement, la condition des aînés au Québec devraient avoir lieu, mais évidemment nous souhaitons que, dans cette vaste consultation des états généraux, que l'on prenne en compte toute la question de l'orientation sexuelle et le vieillissement. Je ne sais pas si... Mon collègue a peut-être quelques mots à ajouter.

M. Blain (Pierre): J'aimerais peut-être rajouter deux dimensions. La première, celle du mythe qui dit que normalement les gais et les lesbiennes sont plus riches que les autres, ce qui est complètement faux. De par mon travail et, entre autres, avec certains comités sur lesquels je siège avec la ville de Montréal au niveau de la sécurité publique, on se rend compte que, dans les quartiers où se retrouvent normalement les gais et lesbiennes, ce sont les quartiers où sont les plus pauvres: 30 % de moins de revenus que la population en général dans la ville de Montréal, entre autres. Donc, par conséquent, ce sont des gens qui sont souvent plus démunis, même au niveau monétaire, et qui ont besoin d'un apport encore plus grand.

Le deuxième point, le président l'a abordé un peu, c'est le fait que, nous, à cause de la façon que nos organisations sont faites, on n'entre nulle part. On a essayé d'entrer à la fédération ou à la table de concertation, à Montréal, mais, comme nous sommes supposément un organisme national et comme on n'a pas une mission locale, tout ça, on ne pouvait pas être consultés. Donc, souvent, on est exclus parce qu'à cause de la façon que les organisations sont faites on ne peut pas y entrer. Voilà, c'était ce que je voulais rajouter.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. M. le député de Saint-Jean, pour une première question.

M. Paquin: Merci. Messieurs, bienvenue. Merci de votre présentation. Et j'imagine que... je n'imagine pas, je pense que c'est très clair, sur le plan humain, déjà, parce qu'on sait qu'il y a beaucoup de préjugés, d'accepter une orientation sexuelle qui n'est pas la majorité des citoyens, ce n'est déjà pas facile, puis en plus le vieillissement, bien... ou de devenir un aîné, c'est tout un changement dans la vie d'un être humain, et on doit s'adapter à ça. Et il n'y a personne, je pense, qui souhaite que ça arrive rapidement, mais malheureusement ça arrive à tout le monde et ça va nous arriver à tous.

Et je veux bien être compris, là, je vais essayer de bien m'expliquer. Je reçois, moi, très, très, très bien ce que vous dites, dans le sens que, bien, il y a des endroits où est-ce qu'on devrait être puis que nous ne sommes pas là, etc. Et, si je vous saisis bien, vous dites: Bien, parce qu'on a une orientation différente, c'est peut-être pour ça. Je crois même que vous affirmez que c'est pour ça.

Et là j'ai un petit peu de misère. On se parle franchement, on est ici pour ça. Je ne suis pas défavorable à qu'est-ce que vous dites, que ce soit très, très clair, mais, moi, j'ai besoin d'être convaincu de façon plus ferme ou d'avoir des explications plus profondes, parce que j'ai un peu de misère à comprendre. Que vous ayez une orientation différente de la majorité des gens, c'est une chose ? puis, moi, je n'ai pas de préjugé là-dessus et je pense que les gens en ont de moins en moins, mais il y en a encore trop ? mais, si vous êtes un aîné, que vous soyez un aîné avec une orientation dans un sens ou dans l'autre, j'ai de la misère à saisir qu'est-ce que ça peut changer si vous allez dans des groupes, par exemple, vous faites partie de la FADOQ ou vous faites des représentations au Conseil des aînés ou aux tables de concertation, etc.

Qu'est-ce que ça vient changer? Ou est-ce que vraiment ils mettent ça de côté parce que vous arrivez là avec une étiquette comme quoi que vous avez une orientation différente? Moi, je pense que non, là. C'est dans ce sens-là que j'ai un petit peu de la misère à vous saisir, et je vous demande de me donner des explications puis de me convaincre.

M. McCutcheon (Laurent): La réponse, il y a un mot, ça s'appelle «homophobie». Vous savez, dans la société québécoise, les études, les sondages nous ont démontré que l'orientation sexuelle, au Québec, elle est tolérée. «Tolérée», ça, ça veut dire: Ne me dérangez pas. Moi, je ne veux pas avoir une famille qui me tolère; je serais très malheureux que ma famille me tolère, je serais très malheureux que mes amis me tolèrent. Je veux que ma famille, mes amis, la société m'acceptent. O.K.? Et, dans l'ensemble de la population, on n'est pas encore rendu là.

Puis on ne vient pas ici vous dire que le Québec est une société homophobe et mauvaise, le meilleur endroit au monde, pour les personnes homosexuelles, pour vivre, c'est au Québec. Sur le plan social, sur le plan juridique, nous sommes en avance de tous les pays du monde. C'est ce qui nous permet probablement de venir vous parler ici, aujourd'hui. Dans plein de pays, on ne pourrait pas faire l'exercice démocratique qu'on fait ici. Mais ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés. La société québécoise a encore beaucoup de difficultés avec l'orientation sexuelle. Il y a 50 % des gens qui nous disent que, selon eux, c'est encore une maladie et que c'est anormal. 50 % des Québécois considèrent qu'on est des êtres anormaux.

Quand on va arriver dans les établissements pour les aînés... Et cette réticence est encore plus accentuée au fur et à mesure où on monte dans l'échelle d'âge. Parce que les jeunes ont été habitués à côtoyer, à entendre parler d'homosexualité. Chez les aînés, ce n'est pas une réalité avec laquelle on est familier. Moi, si je rentre dans un centre, par exemple, d'hébergement pour aînés, croyez-vous que je vais pouvoir tenir la main de mon conjoint dans la salle de télévision ou à la cafétéria, que je vais pouvoir mettre la photo de mon conjoint... Ça fait 35 ans que je vis avec mon conjoint. Ce n'est pas une relation temporaire, là, c'est durable. Est-ce que je pourrais, moi, comme vous allez mettre la photo de votre épouse sur la table de chevet, dans votre centre, est-ce que, moi, je vais pouvoir le faire, vous pensez? Si je le fais, ça va être un geste héroïque qui va demander un courage immense parce que c'est loin d'être évident que de faire ça. Tenir la main de son conjoint, se manifester la moindre affection, notre société n'est pas encore rendue là. On ne reproche à personne, on ne veut pas blâmer personne, on est dans une société en évolution, et on veut que les pouvoirs publics nous aident à continuer cette évolution-là.

Je ne sais pas si vous comprenez mieux, là...

M. Paquin: Oui, oui. Je comprends beaucoup, beaucoup mieux. Absolument, là. J'avais perdu cet aspect-là peut-être ou pas bien capté cet aspect-là, donc...

M. McCutcheon (Laurent): C'est parce que vous n'êtes pas... probablement pas homophobe que vous n'avez pas vu ça.

M. Paquin: Donc, qu'est-ce que vous souhaitez, je saisis plus que vous souhaitez, c'est d'avoir des possibilités, parce que vous le dites fort bien, vous dites: Bon, dans quelques années, la nouvelle génération a un esprit d'ouverture, c'est différent, ils pensent ça différemment au niveau de la sexualité, il y a beaucoup de... c'est beaucoup plus ouvert puis beaucoup plus compréhensible, si on veut. Et, entre-temps, vous avez un problème dans le sens que, lorsque vous et les gens comme vous vont atteindre l'âge aîné, vous allez avoir un problème à ce niveau-là si vous avez besoin de rester dans des endroits. Ça fait que donc vous souhaitez que le Conseil des aînés, que le gouvernement essaient de vous accompagner dans ça pour que vous ayez des endroits qui soient plus favorables à qu'est-ce que vous vivez. C'est bien ça?

M. McCutcheon (Laurent): Participer à l'éducation, la sensibilisation principalement, nous aider à développer un réseau d'entraide et de soutien. Moi, je ne suis pas un partisan de développer des services spécifiques pour les personnes homosexuelles, je pense que, sur le plan économique, ce ne serait pas réaliste que de penser à ça. Il y a des expériences, aux États-Unis, semblables, mais je pense que le Québec est une société plus ouverte, et on voudrait être accueillis dans l'ensemble plutôt que de se bâtir un réseau en parallèle. Mais, pour réussir ça, il va falloir qu'on nous aide à développer ce réseau d'entraide.

Nous, chez nous, à la fondation, on n'a pas de ressources, là, hein? Bon, on voudrait, comme objectif premier, on voudrait développer un réseau d'entraide. Bon. Ça, ça va nécessiter de réunir du monde, travailler avec tout l'ensemble des tables de concertation, tout le réseau existant des aînés. Il faut travailler avec ces gens-là pour qu'on prenne en compte cette dimension-là.

Quand le Conseil des aînés a rendu publique récemment une étude sur la sexualité des aînés au Québec, il n'y a personne qui a pensé qu'il pouvait avoir 10 % de la population qui était des homosexuels puis que leur sexualité pouvait peut-être être différente, se manifester autrement. Est-ce qu'on a pensé à ça? Non.

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a fait une vaste étude sur le vieillissement il y a quelques années. Est-ce qu'on a pensé qu'il y avait 10 % des aînés qui étaient des homosexuels? Non. Tout ce monde est de très bonne foi, je ne les accuse pas d'être homophobes. On a oublié, on a oublié parce qu'on est absents. Ce que l'on veut, on veut être présents un peu partout. Et, si on est présents, on va penser à nous, on va penser à cette réalité. C'est ça qu'on souhaite, on ne veut pas développer d'autres services, là. Mais, pour réussir ça, on a besoin de soutien de l'État.

On a fait une petite demande de subvention l'an dernier, là, pour essayer de faire un réseau d'entraide et on n'a pas d'argent. Il y a beaucoup d'argent d'investi dans le réseau des aînés, nous, on n'en a pas, il n'y en a pas pour nous. Bon. Et je pense qu'éventuellement qu'on puisse accorder de l'aide à un organisme qui pourrait travailler à mettre un réseau d'entraide, ouvrir les tables de concertation à ces réalités-là, je ne pense pas que ce serait abusif.

M. Paquin: On a très bien compris votre message.

M. McCutcheon (Laurent): Merci.

M. Paquin: Merci, M. le Président.

n(11 h 20)n

Le Président (M. Brodeur): Merci. Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Messieurs, bonjour. Je constate que vous ne voulez pas avoir un organisme parallèle, ce n'est pas ça que vous voulez, absolument pas. Est-ce que je comprends bien quand vous dites: Au Conseil des aînés, il y aurait peut-être lieu, là, d'établir... quand vous parlez, exemple, de la sexualité des aînés, de reconnaître qu'il existe un état de situation puis que c'est là? Est-ce que ça irait aussi loin que vous faites partie d'une table de concertation, mettons, dans votre milieu, ça s'appelle Gai Écoute ou Fondation Émergence comme tel? L'avez-vous essayé, d'abord?

M. Blain (Pierre): Oui, on l'a essayé, mais on ne répondait pas parce que notre charte n'a pas une vocation locale, on est un organisme de défense. Et, quand on a voulu le faire à la table, à Montréal, on nous a dit: Non, vous ne pouvez pas parce que vous n'avez pas une vocation locale, nous ne faisons qu'avec les vocations locales. Et c'est ça qui est le problème présentement, c'est que des organismes comme le nôtre qui regroupent... Parce qu'on n'a pas beaucoup de ressources à travers tout le Québec, en regroupant plus haut, on ne peut pas rentrer plus bas, c'est ça qui est notre problème.

Mme Champagne: Vous êtes combien de membres, Fondation Émergence ou Gai Écoute, là?

M. McCutcheon (Laurent): Gai Écoute, c'est un organisme de services. Il y a une cinquante de bénévoles qui sont des professionnels et il y a une quinzaine d'employés professionnels qui offrent des services. La Fondation Émergence, une assemblée des gouverneurs qui comprend 35 à 40 personnes actuellement sur invitation. Gai Écoute, on reçoit au-delà de 20 000 appels par année de service. Et je pense qu'on pourrait mettre sur pied une organisation pour aller travailler avec toutes les tables de concertation, avec tous les organismes des aînés, mais il va nous falloir des ressources et il va falloir aussi faire beaucoup d'éducation, de sensibilisation. Il faut que les gens comprennent.

On a de la difficulté à faire comprendre notre message. Ce n'est pas toujours facile pour les gens de comprendre qu'est-ce que ça signifie, qu'est-ce que veulent les homosexuels. Ce qu'ils veulent au fond... Moi, si je vais voir un médecin, je ne veux pas voir un médecin gai, hein, quand je suis un aîné, j'ai mon médecin, mais je veux, par exemple, que mon médecin n'ait pas de préjugés envers les homosexuels, parce qu'il va devoir m'examiner, il va devoir me toucher. Quand on va être dans des établissements éventuellement, bien ça va être la même situation.

Puis ça commence quand on est jeune. À l'école, hein, les jeunes gais n'aiment pas faire du sport à l'école parce qu'il faut qu'ils passent au vestiaire, puis, après le vestiaire, il y a les douches après. O.K.? Et déjà ça commence à l'école, et ça se poursuit toute la vie, ça, ce phénomène de sexualité, de difficulté par rapport à l'autre, et il faut que les gens comprennent que, même en vieillissant, ça va être comme ça. Quand les infirmiers vont devoir faire la toilette des homosexuels, bien il ne faut pas qu'ils soient trop mal à l'aise avec le fait que c'est un homosexuel. C'est des petits détails, mais ça se passe entre les deux oreilles.

Il y a eu une campagne sur le racisme il y a deux ans, je ne sais pas si vous vous souvenez, c'était un âne avec deux grandes oreilles, ça disait: Ça se passe entre les deux oreilles. J'étais jaloux de cette campagne-là parce que j'aurais aimé la faire pour l'homophobie. Parce que l'homophobie, ça se passe entre les deux oreilles, hein, on n'a pas de geste... Au Québec, là, la violence contre les homosexuels, il y a des gestes isolés, évidemment occasionnels, mais ce n'est pas une société violente envers les homosexuels. Mais l'homophobie, c'est une question d'attitude, puis quand on arrive comme aîné... Moi, aujourd'hui et depuis 30 ans que je suis un militant, là, si on vient m'attaquer sur mon orientation sexuelle, ne soyez pas inquiets, je vais me défendre. Mais je suis convaincu que, quand j'aurai 75, 80 ans, que je serai à la merci de d'autres personnes, que j'aurai perdu mon autonomie, toutes mes facultés de me défendre... Et, si je suis à transiger et que je reçois des soins d'une personne qui est homophobe, je pense que je vais être malheureux. Et ce que je ferai par intérêt comme personne âgée dans un centre, mon intérêt me dictera de dire que je ne suis pas homosexuel, et c'est... Les petites études qu'on a, les aînés qui sont dans des établissements cachent leur orientation sexuelle parce qu'ils ont peur d'être discriminés.

Comment on va faire pour régler ça? Il va falloir faire de l'éducation, de la sensibilisation. Il faut le faire auprès du personnel, des intervenants, hein, dans les centres puis il faut qu'à partir des médecins, des infirmières... et les préposés aux bénéficiaires soient sensibilisés aux réalités homosexuelles pour être à l'aise avec la question. Et si tout le monde s'ouvre... On en a à peu près tous autour de soi, dans sa famille plus ou moins éloignée, tout le monde, à peu près, connaît des personnes homosexuelles, et il faut arriver à faire émerger... Puis il faut que les personnes homosexuelles sortent de leur placard aussi, hein? Parce que, s'ils sont dans le placard, là, ce n'est pas ça qui va faire évoluer la question.

On a de la difficulté aussi avec cette réalité-là parce que les personnes n'osent pas dire qu'elles sont... C'est une infime minorité de gais qui dit ouvertement son orientation sexuelle. Chez les lesbiennes, c'est très rare, les lesbiennes. Gai Écoute, on n'a jamais réussi à trouver une personnalité publique, une femme lesbienne pour venir comme porte-parole chez nous. Il n'y a aucune femme publique lesbienne au Québec, hein? On connaît une députée, mais, en dehors de ça, on ne connaît aucune personnalité publique lesbienne au Québec. Chez les gais, la très, très grande majorité ne sont pas sortis du placard. Moi, j'estime à peu près à 2 % des... Dans le 10 % des homosexuels, il y a peut-être 2 % qui sont capables de le dire ouvertement. Les gens, ils rentrent travailler le matin avec leur cravate puis, le soir, ils sont gais dans un bar. Puis, le lendemain matin, ils remettent la cravate, ils ne sont plus gais.

Mais ce n'est pas ça, la vie d'homosexuel. On est homosexuel 24 heures par jour. On ne peut pas, je veux dire, toujours être obligé de transiger, cacher son orientation sexuelle. Donc, c'est une problématique qui est très, très complexe. Je fais peut-être un peu du coq-à-l'âne, là, je vais dans différentes directions. C'est complexe comme problématique, puis la clé, la solution, c'est de l'éducation, de la sensibilisation puis des développements de réseaux d'entraide et de l'adaptation des services.

Mme Champagne: Vous dites: S'il y avait, entre autres, des états généraux, c'est de... En arrivant à faire une politique gouvernementale une fois pour toutes pour lutter contre l'homophobie, il faut que tu le fasses une fois pour toutes, parce que, si tu ne le fais pas, je me rends compte qu'on est très loin, là, hein? Autant il y a de l'éducation qui se fait chez les jeunes, parce qu'il s'en fait dans les écoles, il s'en fait, autant vous avez des appels de jeunes, autant, chez les aînés, on n'est pas rendu là.

M. McCutcheon (Laurent): Pas tout à fait encore.

Mme Champagne: On n'est pas rendu là. Je comprends bien.

M. McCutcheon (Laurent): On va y arriver. On va y arriver. On est optimistes, on est...

Mme Champagne: Avec de la ténacité.

M. McCutcheon (Laurent): On a un message, je pense, positif, hein? On veut continuer d'évoluer.

M. Blain (Pierre): Si je peux me permettre, il y a d'autres... Ce n'est pas juste au Québec, bien sûr. Ailleurs, il y a des organisations qui, à l'intérieur de grandes organisations... Je prends l'exemple The American Society on Aging qui a à l'intérieur un volet justement pour les LGBT. C'est-à-dire que c'est la grande organisation sur le vieillissement bien sûr américaine, mais on prend en compte cette dimension-là. Il y a le congrès à Chicago, le 3 mars prochain, et il y a tout un volet qui s'adresse principalement là. Vancouver est un peu la même chose. Les services sociaux en Ontario, la même chose. Donc, je pense...

Moi, ce que je dis: Ce qui n'est pas nommé n'existe pas. Si on prend justement la loi sur les aînés et le rapport, quand on a vu, on parle de diversité. Mais, si on est diversité, bien disons-le. La même chose pour les femmes, la même chose pour les groupes ethniques. À mon point de vue, quand on parle de diversité, il faut justement ouvrir le plus large possible, et je pense que la même chose peut exister au niveau du Conseil des aînés et de toutes les organisations.

Mme Champagne: ...ce n'est pas parce que la loi vous a donné des droits que ça donne nécessairement une reconnaissance. C'est ça que je comprends?

Une voix: C'est ça.

Mme Champagne: La loi, c'est une chose...

M. McCutcheon (Laurent): C'est pour ça qu'on dit: De l'égalité juridique à l'égalité sociale dans notre slogan, parce que la loi nous a donné l'égalité juridique, mais l'égalité de fait, les reconnaissances de l'égalité sociale, bien on n'est pas encore rendus là. Puis je pense qu'on n'a qu'à regarder l'évolution de la condition féminine, parce que les droits des personnes homosexuelles s'inscrivent en parallèle, le chemin est tracé. On sait à peu près comment faire, les femmes l'ont fait devant nous. C'est les mêmes étapes dans la reconnaissance sociale, et les femmes ont encore besoin, hein... Il y a encore des établissements comme le Conseil du statut de la femme et il y a tout un réseau de condition féminine, des programmes d'égalité en emploi. On n'a rien de ça, nous, hein? On n'est pas à demander des programmes semblables, mais je pense qu'on est rendus, en termes d'égalité sociale... Et ce que l'on demande à la Commission des droits de la personne, c'est de proposer au gouvernement d'adopter une politique nationale de lutte contre l'homophobie. Comme on l'a fait pour toutes les autres problématiques, pour le racisme et les communautés culturelles, le Québec devrait se doter d'une politique nationale de lutte contre l'homophobie dans laquelle il y aurait un volet sur les personnes...

Mme Champagne: Les personnes aînées.

M. McCutcheon (Laurent): ...les personnes âgées.

Mme Champagne: Merci.

M. Blain (Pierre): Justement, ce n'est pas que le rapport n'existe pas. Il y a un rapport ici de mai 1994, Commission des droits de la personne, De l'illégalité à l'égalité. Janvier 1996, suivi des recommandations du rapport de la Commission des droits de la personne ? donc, ça s'adresse principalement au gouvernement ? l'adaptation des services sociaux et de santé aux réalités homosexuelles qui a été faite aussi par le ministère de la Santé. Donc, il existe des choses. Maintenant, il s'agit qu'elles soient appliquées tout simplement en prenant cette dimension, tout simplement.

Mme Champagne: Qui est une bonne politique claire.

n(11 h 30)n

M. Blain (Pierre): Qui est une politique tout simplement d'intégration et à tous les niveaux. Ce n'est pas seulement pour les personnes homosexuelles, mais c'est également pour les autres groupes en demande.

Mme Champagne: Merci.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Merci pour votre présentation fort intéressante.

M. McCutcheon (Laurent): Merci de nous avoir accueillis.

Le Président (M. Brodeur): Ça fait plaisir.

M. McCutcheon (Laurent): Et je vais juste souligner... le président du Conseil des aînés, M. Lalande... Cet été, il y avait une conférence internationale sur les droits humains des personnes gaies et lesbiennes, bisexuelles, transgenres, etc., et M. Lalande est venu à cette conférence faire une présentation. On avait beaucoup apprécié. C'était un premier pas, si vous voulez, une première manifestation d'ouverture. J'avais oublié de le dire, je tenais à le souligner. Merci.

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Donc, je vais suspendre quelques instants pour revenir avec les remarques finales.

(Suspension de la séance à 11 h 31)

 

(Reprise à 11 h 32)

Le Président (M. Brodeur): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons continuer nos travaux avec les remarques finales.

Mémoires déposés

Mais, avant de passer aux remarques finales, j'aimerais rendre publics, c'est-à-dire déposer les mémoires des personnes et des organismes suivants qui n'auront pas été entendus, soit de M.  Harold Geltman, de Mme Gaétane Grenier, de la Table de concertation des aînés de l'île de Montréal, de la Table régionale des personnes aînées de l'Abitibi-Témiscamingue, de l'Association pour la défense des personnes et biens sous curatelle publique, de l'Association québécoise de la défense des droits des personnes retraitées et préretraitées, et de M. Roger Roussel. Donc, ces mémoires sont déposés également à la commission.

Remarques finales

Nous sommes à la rubrique des remarques finales. Donc, je suis prêt à entendre la députée de Champlain pour ses remarques finales.

Mme Noëlla Champagne

Mme Champagne: Merci, M. le Président. Alors, je vais essayer d'aller dans des remarques finales et courtes, sinon je risque d'écourter ma voix jusqu'à la fin.

Que ce soit le Conseil des aînés qui ait parti le bal, là, avec énormément, je dirais, de rigueur, les documents déposés par le Conseil des aînés, ce sont toujours des documents bien faits, fondés sur des éléments de fond, et je pense que c'est tout à leur honneur. Et tous les groupes, que ce soit la FADOQ, que ce soit la Conférence des tables régionales, que ce soit les Aînés solidaires ? rappelons-nous, messieurs, que les Aînés solidaires sont venus nous dire que les politiciens étaient quand même du bon monde, là, hein ? l'Association québécoise des centres communautaires pour aînés et Centre Berthiaume-Du Tremblay, que ce soit l'Association des retraitées et retraités de l'enseignement, qu'on appelle l'AREQ, l'AQRP ce matin, COMACO, la Coalition pour le maintien dans la communauté et Gai Écoute, ces gens-là sont venus nous dire, tous, qu'ils tenaient à ce que le Conseil des aînés soit maintenu et qu'on donne plus de force à ce conseil-là parce qu'il y a un manque criant de ressources.

Alors, je pense que c'est un constat unanime. Personne n'est allé à l'encontre de ça. Tout le monde souhaite que les tables de concertation continuent à être animées par le Conseil des aînés, que le Conseil des aînés devienne également le Conseil des aînés et du vieillissement parce que ça touche beaucoup plus large que... ce n'est pas une problématique, c'est un constat. Ça, je pense qu'on l'a retenu également. Et on a surtout retenu que la place des aînés dans la société va prendre de plus en plus d'importance. Et ça fait déjà 10 ans qu'on est au courant, 10, 15 ans, qu'on voit venir, là, l'importance de ce groupe d'âge là.

Et, si on se cache ou qu'on n'en parle pas ouvertement, bien, on va continuer à véhiculer quelque chose qui est mauvais, à savoir que vieillir, c'est quelque chose de dérangeant, vieillir, c'est un poids, quand tu vieillis, tu es un poids pour la société, ce qui n'est pas le cas. Ce qui n'est pas le cas. Les aînés de demain sont des gens de plus en plus instruits, pas nécessairement beaucoup plus riches, mais des gens qui peuvent apporter énormément à la société. Et je pense que tous les mémoires déposés dans cette courte commission, pour donner bien sûr suite au rapport de la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés, ils sont venus dire la même chose.

Donc, ce qu'on souhaite également, à part les ressources financières meilleures, à part les moyens pour que les tables de concertation continuent à être animées, on a surtout souhaité également que la belle tournée qui a eu lieu à travers le Québec, qui était la pleine participation des aînés au développement du Québec... tous les gens qui sont venus nous voir souhaitent que ce rapport-là accouche dans le plan d'action. Et je le dis pour l'adjoint parlementaire de la ministre, pour la ministre elle-même, ce document-là a amené, a donné lieu à énormément d'heures d'échange, de discussion à travers tout le Québec. Même au Nunavik, ils ont fait le constat qu'il faut qu'il y ait trois pans, là, étudiés de façon formelle: on parle d'états généraux, on parle d'une politique sur le vieillissement, on parle également de retraites progressives.

C'est important qu'on y pense, qu'on donne des facilitants. C'est tellement rigide dans le monde actuel, que, si tu veux prendre une retraite progressive, tu ne peux vraiment pas. C'est: Tu n'es plus là ou tu es là. Et ça, c'est très mauvais. Et j'ai des exemples, comme nous tous ici, dans nos bureaux de comté, de gens qui aimeraient continuer à mi-temps, mais le système n'est pas fait de même. Donc, tu t'en vas ou tu restes; tu n'as pas le choix entre les deux. Alors, c'est dommage que ce soit comme ça.

Puis bien sûr que, si on fait une politique sur le vieillissement, on va, j'espère, inclure les différences telles que viennent de nous le mentionner, là, les deux messieurs qui étaient de Gai Écoute et de Fondation Émergence, donner une place à des gens qui sont probablement différents de nous mais qui ont droit au chapitre, là, comme n'importe qui, comme les femmes ont droit au chapitre, sans catégoriser aucunement, parce que faire des catégories, c'est toujours dangereux également.

Alors, moi, ce que je souhaite, en terminant, c'est que la ministre et son adjoint parlementaire tiennent compte des recommandations qui ont été faites. Ce ne sont pas des recommandations exagérées, ce sont des recommandations basées sur des preuves, après tant d'années, du besoin de maintenir en vie les tables de concertation des aînés. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brodeur): Merci, Mme la députée de Champlain. M. le député de Saint-Jean.

M. Jean-Pierre Paquin

M. Paquin: M. le Président, merci beaucoup. Chers collègues, chers amis, ça me fait plaisir d'intervenir pour les remarques finales sur la commission parlementaire, les deux merveilleuses journées que nous venons de vivre ensemble, et j'ai trouvé ça très, très agréable. C'est un dossier des aînés qui est passionnant, et je suis... Vous savez, les députés ministériels et les députés de l'opposition ne sont pas toujours, toujours en accord, et ils ont des philosophies, à certains points de vue, différentes; mais j'ai constaté, dans les deux journées que nous avons vécues ensemble, qu'on s'entend très, très bien à ce niveau-là, et ça, c'est très favorable et très positif pour le bien de nos aînés, au Québec, qui méritent toute la recommandation et tout notre appui.

Je veux tout de suite, d'entrée de jeu, vous dire que la ministre de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine a à coeur énormément le dossier des aînés. Il y a beaucoup de travail qui a été fait, je vais en parler un peu plus tard, il y a beaucoup de travail qui est en train de se faire, et je pense qu'assez rapidement on va arriver avec des propositions puis des choses concrètes qui vont faire avancer le dossier des aînés au Québec. Mme Théberge me prie de vous faire part de tout son intérêt dans ce dossier-là, et elle a bien hâte de pouvoir poser des gestes importants, et ça devrait être fait assez rapidement.

Oui, deux journées formidables. Je vous dis, moi, le dossier des aînés, c'est un grand défi, hein? C'est un très, très grand défi au Québec; ça a été mentionné par les groupes que nous avons rencontrés ici. Puis c'est clair, les statistiques ne mentent pas: la population aînée, dans 10 ans, va redoubler au Québec, ça va être au-delà de 2,6 millions, 2,7 millions de personnes. Ce n'est pas rien, c'est le double. Imaginons-nous que, si jamais la population ne grandit pas en population ? nous sommes, quoi, 7,5 millions présentement ou environ, on fait moins d'enfants au Québec, le taux de natalité est à la baisse ? si jamais on ne réussit pas à faire plus d'enfants dans les prochaines années, dans 20 ans, la société québécoise va être très, très, très différente, et il va y avoir des problèmes majeurs. On doit donc poser des gestes rapidement là-dessus.

n(11 h 40)n

Malgré que, bien, le taux de natalité, cette année, je pense qu'on doit tous s'en réjouir, a été peut-être pas un record, mais un succès. C'est une des bonnes années. Je pense que... je ne pense pas... Nous avons posé des gestes dans ce sens-là, et je crois que ce n'est pas une coïncidence que le taux de natalité a augmenté cette année parce qu'on a posé des gestes importants au niveau des garderies, au niveau de l'assurance parentale, etc., au niveau de l'aide aux familles, l'aide aux enfants qu'on a instaurée en 2004 et qui est un franc succès. Mais, au-delà de tout ça, même si jamais on réussit à avoir un taux de natalité qui... On est encore loin de la coupe aux lèvres dans ça. Même si on réussit à le remonter énormément, il reste que, dans 20 ans d'ici, il va y avoir, au Québec, le double d'aînés. On doit poser des gestes majeurs.

Et tous les gens qu'on a rencontrés ici, tous les groupes qui ont été, je pense ? je suis d'accord avec vous, Mme la députée de Champlain, c'est unanime, c'est unanime ? pour maintenir le Conseil des aînés en place avec plus de façons de faire. Ils sont tous satisfaits sans exception du travail que le Conseil des aînés a fait. Et c'est bien, c'est bien, c'est un consensus dans la société. Et, dans des projets aussi importants, lorsqu'on réussit à avoir un consensus des gens qui viennent d'un peu partout au Québec ? ils sont des organismes différents ? je trouve que c'est un plus extraordinaire. Donc, c'est un consensus qui fait que le Conseil des aînés doit être maintenu.

Et aussi il semble y avoir un consensus presque à 100 % dans les besoins que les aînés ou que les groupes qui représentent les aînés nous demandent ? puis vous en avez parlé, Mme la députée de l'opposition. On parle d'accompagnement, on parle de respect, on parle de sécurité vis-à-vis des aînés, on parle de besoins, on parle de reconnaissance. C'est toutes des choses qu'on doit s'attaquer, je crois, très, très rapidement pour améliorer ces choses-là. Et c'est des choses qui... C'est sûr qu'il n'y a jamais rien de facile, mais c'est des choses qui peuvent être accomplies quant à moi, et je peux vous garantir que la ministre et que le gouvernement vont aller dans ce sens-là le plus rapidement possible.

On parle aussi bien sûr d'états généraux là-dessus. Il y a beaucoup de discussions qui se font. Je ne sais pas comment tout ça va tourner, mais ça semble être unanime qu'on souhaite qu'il y ait des états généraux sur le vieillissement de la population. Et quant à moi, personnellement, je pense que ce serait bien de pouvoir écouter nos citoyens et nos citoyennes, puis pas juste les aînés, de toutes générations à ce niveau-là parce que tout le monde doit participer à ce défi extraordinaire. Et c'est un défi extraordinaire qu'on doit tous ensemble relever parce que, dans 20 ans, ce n'est pas juste les aînés qui auront à vivre des problèmes qui seront plus importants, plus gros, si on ne pose pas de gestes, mais c'est la génération qui pousse, c'est nos jeunes d'aujourd'hui, là. Les enfants qui sont nés il y a deux ans, trois ans, quatre ans, vont avoir des défis importants dû au fait qu'il va y avoir... ça va être différent, il va y avoir moins de monde sur le marché du travail, moins de monde qui va travailler, pénurie d'emplois sûrement... manque de travailleurs, c'est-à-dire, énormément. Et il va falloir que tout ça s'associe ensemble pour justement ? vous avez raison là aussi ? qu'on puisse penser à non pas une retraite, mais une retraite progressive, puis qu'on trouve les moyens de faire ça, sinon on aura énormément de problèmes à donner des services à la population.

D'ailleurs, on le constate, et je me permets de faire un peu de politique là-dessus, mais légèrement, dû peut-être à notre bonne performance comme gouvernement, on s'aperçoit que déjà, dans certains secteurs, il y a des pénuries d'emplois, il y a plus de monde qui travaille, le taux de chômage est le plus bas qu'il n'a jamais été depuis 30 ans. Il y a moins de gens comme assistés sociaux sur la sécurité du revenu. Donc, ça s'en va vraiment dans ce sens-là, c'est important de poser des gestes rapidement. Et, chers amis, on va tout faire pour que ces gestes-là se posent, et je souhaite que ça se fasse en collaboration avec l'opposition officielle et tout le monde. Et, dans ce sens-là, on va pouvoir donner à nos aînés ce qu'ils méritent.

En terminant, je veux vous remercier et remercier mes collègues qui m'ont accompagné dans ces deux dernières journées, avec qui j'ai travaillé avec beaucoup, beaucoup de plaisir, remercier les représentants aussi du bureau de la ministre, vous remercier, Mme la députée de Champlain, et vous dire que c'était très agréable, ces deux jours-là en votre compagnie. On n'est pas toujours en désaccord, et ça fait du bien. Des fois, il faut l'être, la démocratie étant ce qu'elle est. Mais, quand on s'entend à presque 100 % sur certaines choses, je pense que c'est un plus.

M. le Président, avec nos hommages et nos salutations, vous avez fait fonctionner ça de main de maître ? comme toujours, d'ailleurs. Votre charmante secrétaire et toute l'équipe, merci beaucoup, merci aux membres... aux travailleurs de l'Assemblée nationale, et à la prochaine. J'espère avoir à vivre une expérience aussi extraordinaire. Je vous dis très, très honnêtement: dans les quatre ans ou presque que je suis député et le représentant du comté de Saint-Jean, c'est probablement la plus belle expérience que j'aie vécue depuis deux jours avec vous. Merci beaucoup.

Le président, M. Bernard Brodeur

Le Président (M. Brodeur): Merci beaucoup. Donc, ça me laisse le mot de la fin pour ce qui est probablement, selon les rumeurs qui courent, peut-être la dernière commission parlementaire qui se tient dans cette législature. Donc, je voudrais remercier spécialement les membres de la commission, M. le député de Saint-Jean, Mme la députée de Champlain. Mais, considérant que c'est peut-être la dernière commission de cette législature, je tiens à remercier tous les membres permanents de la commission parlementaire avec qui j'ai eu le bonheur de participer à plusieurs travaux depuis plusieurs années. Il y a le député de Charlesbourg qui est présent, mais je tiens également à souligner le travail de la députée de Nelligan, du député de Robert-Baldwin, du député de Marguerite-D'Youville et de la députée de Bellechasse, également Mme la députée de Terrebonne, M. le député de Saint-Hyacinthe, Mme la députée de Prévost et le vice-président de la commission, M. le député de Mercier. Sait-on jamais, peut-être nous retrouverons-nous dans la même commission parlementaire, mais il est souvent de pratique courante qu'après une élection les gens changent de poste, changent de commission parlementaire. Mais le message, c'est que ça a été un plaisir énorme de travailler avec ces membres de la commission.

Je tiens également à remercier Anik, Anik Laplante, qui est nouvelle ici, comme secrétaire de commission, mais qui fait déjà un travail comme si elle avait une expérience de plusieurs années. Je tiens à la féliciter. Je veux également souligner le travail de ceux qui l'ont précédée, M. Cardinal, M. Painchaud, Mme Grenon, qui, tout au cours de cette législature, ont fait un travail remarquable, également tous les gens qui nous ont côtoyés à la commission parlementaire, tous ceux qui occupent des postes à différents niveaux. Je ne peux pas tous les nommer parce qu'il y en a plusieurs qui ont passé, mais je vous remercie du fond du coeur.

Et puis, avant de se revoir, je déclare les travaux... j'ajourne les travaux de la commission sine die.

(Fin de la séance à 11 h 47)


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