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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mardi 8 juin 1976 - Vol. 17 N° 80

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude des crédits du ministère

des Consommateurs, Coopératives

et Institutions financières

Séance du mardi 8 juin 1976 (Dix heures trente-neuf minutes)

M. Pilote (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

La commission des consommateurs, coopératives et institutions financières se réunit ce matin pour procéder à l'étude des crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Les membres de la commission sont: Mme Bacon (Bourassa), M. Bellemare (Johnson), M. Bonnier (Taschereau); M. Boutin (Abitibi-Ouest) est remplacé par M. Brown (Brome-Missisquoi); M. Burns (Maisonneuve), M. Chagnon (Lévis), M. Harvey (Charlesbourg), M. Harvey (Dubuc), M. Léger (Lafontaine), M. Marchand (Laurier), M. Massé (Arthabaska), M. Picotte (Maskinongé), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Tremblay (Iberville).

Si les membres n'ont pas d'objection, M. Picotte (Maskinongé) sera le rapporteur de cette commission. Agréé?

M. Léger: Agréable, M. le Président.

Le Président (M. Pilote): Je voudrais que madame le ministre nous indique de quelle façon elle entend procéder à l'étude de ses crédits.

Mme Bacon: J'ai des remarques générales à faire.

Le Président (M. Pilote): Vous avez des remarques générales au début?

Mme Bacon: Oui, pour l'ensemble du ministère.

Le Président (M. Pilote): Réponse de l'Opposition par la suite et on procédera article par article, élément par élément.

Alors, la parole est à madame le ministre.

Exposé préliminaire du ministre

Mme Bacon: M. le Président, avant que la commission procède à l'étude en détail des crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, j'aimerais vous livrer quelques remarques générales sur les divers programmes du ministère et sur leur évolution au cours du dernier exercice.

En situant dans un contexte plus généra! l'orientation du ministère et de ses principaux services ou organismes, vous pourrez mieux évaluer et juger les crédits particuliers que vous serez appelés à discuter ce matin. Il semble d'abord essentiel de rappeler dans quelles conditions économiques se situe le budget de 1976/77. Il intervient dans une période de resserrement budgétaire, voire même d'austérité. L'économie a connu, en 1974/75, un ralentissement accompagné d'une inflation inhabituelle. Les signes d'une reprise commencent à peine à se manifester et plusieurs économistes s'interrogent sur l'accélération du rythme de progression de l'économie dans une période où le pouvoir d'achat des citoyens continue de décroître. Il en est de même des gouvernements comme des citoyens qui n'ont pas d'autre choix que de contenir leurs dépenses, tout en cherchant à accroître les investissements.

D'ailleurs, les spécialistes font presque l'unanimité sur la nécessité de mettre un frein à l'accroissement des dépenses des gouvernements, en regard de l'ensemble des dépenses dans l'économie.

L'un des programmes les plus importants du ministère porte sur la protection du public où l'on retrouve les éléments de la protection du consommateur, du contrôle et de la surveillance du courtage immobilier.

Il est assez paradoxal, et je le concède, que dans les moments où les besoins de protection sont les plus élevés, notamment alors que sévit l'inflation, il faille aussi voir à contenir la progression des dépenses dans ce domaine. Vous verrez, cependant, que les crédits qui vous sont soumis tentent quand même de privilégier le secteur de la protection du consommateur dans les limites cependant qu'imposent les conditions économiques actuelles.

Comme vous l'avez remarqué, le ministère que je dirige participe à trois programmes: celui de la protection du public, celui du contrôle, de la surveillance et du développement des entreprises, et enfin, le contrôle, la surveillance, le développement des institutions financières.

J'aurai l'occasion, par la suite, de faire quelques brèves remarques sur chacun des éléments de ces programmes. J'aimerais, cependant, m'arrêter quelques instants sur un point qui a été soulevé à plusieurs reprises, soit le conflit apparent entre ces divers programmes qui semble inquiéter certains critiques.

Ainsi, il peut apparaître contradictoire à plusieurs que la surveillance des entreprises, de même que la protection du consommateur, puissent dépendre du même ministère. Etant titulaire de ce poste depuis moins d'un an, j'ai forcément été appelée à aborder cette question d'un regard neuf et, évidemment, d'aller au-delà des apparences. Je me suis ainsi rendu compte que cette contradiction était plus théorique que réelle. Dans les faits, l'appartenance de l'Office de la protection du consommateur au ministère comporte plus d'avantages que d'inconvénients. Je crois même que cette situation peut contribuer à un meilleur équilibre dans l'action gouvernementale, tant à l'égard des consommateurs que des entreprises.

En effet, !es conflits théoriques sont prati-

quement écartés, pour plusieurs raisons: par exemple, la direction de l'Office de la protection du consommateur est complètement indépendante de toute autre unité administrative ayant pour objet la surveillance des entreprises.

De plus, cet office relève directement du ministre et de son sous-chef. C'est justement en vue d'assurer cette ligne d'autorité directe que le directeur de l'office agit aussi comme sous-ministre adjoint.

Il est aussi à remarquer que les décisions du directeur sont assujetties à la révision des tribunaux et non à celle des autorités du ministère. Ceci est sûrement de nature à rassurer ceux qui craindraient les révisions politiques des décisions administratives. D'ailleurs, en vertu même de la loi, le directeur de l'office jouit d'une discrétion personnelle, particulièrement en matière de suspension et d'annulation de permis.

Loin de restreindre ses pouvoirs, une nouvelle loi que l'Assemblée nationale a adoptée en première lecture étend la discrétion du directeur, notamment, quant à l'émission des permis et aux engagements volontaires, en cas de pratiques interdites. Je viens d'énumérer quelques sauvegardes qui réduisent ou même éliminent les conflits possibles.

Dans une perspective plus positive, on se rendra compte que le public peut retirer de grands avantages du rattachement du programme de la protection du public au ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

En effet, il ne faudrait pas oublier que, par son intégration au ministère, l'office bénéficie de services-conseils mieux structurés et d'instruments plus efficaces dont, notamment, le service général d'inspection et d'enquête du ministère.

Il me semble aussi qu'en faisant partie des circuits réguliers de l'administration l'office est moins isolé et a plus de possibilités d'informer et d'influencer les instances gouvernementales. En d'autres mots, sa voix peut être mieux entendue.

A mon avis, un autre élément qui ne doit pas être écarté, c'est que, par son influence au ministère, l'office est mieux en mesure de sensibiliser les unités de surveillance sur les besoins et sur les intérêts des consommateurs. En certains cas, les unités de surveillance peuvent même devenir un précieux collaborateur dans la protection du public.

J'en suis donc venue à la conclusion qu'il n'existe aucune raison sérieuse, pour le moment, d'apporter des changements à la formule actuelle. Il nous faut donc, d'ailleurs, reconnaître que l'Office de la protection du consommateur n'a pas encore eu tout le temps nécessaire pour roder ses instruments d'intervention et qu'il a tout avantage à évoluer dans un ministère moins considérable où il pourra recevoir plus d'attention. Ces quelques remarques introductives, qui, je l'espère, apporteront certains apaisements aux inquiétudes de mes collègues de l'Opposition, m'introduisent directement au premier programme du ministère, la protection du public, dont le premier élément est la protection du consommateur.

Les chiffres qui apparaissent au cahier des crédits démontrent une augmentation budgétaire d'environ $800 000. Si on y ajoute l'augmentation du budget du ministère de la Justice pour augmenter le personnel juridique de l'office, de même que les frais additionnels encourus par le ministère des Travaux publics pour les nouveaux aménagements, l'accroissement total du budget est d'au moins $1 million.

Ce budget prévoit essentiellement de rendre plus accessible l'office aux citoyens, soit physiquement par ses bureaux, soit intellectuellement par l'information, l'éducation et le traitement des plaintes. Je tiens à attirer votre attention sur le fait que les activités additionnelles que pourrait entraîner la nouvelle loi ne seront pas financées à même ces crédits et que j'ai l'intention d'obtenir, en vertu même des dispositions de cette loi, les crédits additionnels qui seront nécessaires.

Les chiffres qui vous sont fournis ne donnent vraiment pas la mesure des efforts qui ont été consacrés, au cours des derniers mois, à l'amélioration de la protection du consommateur.

Je signale qu'un nouveau directeur a été nommé à l'office et qu'il fait des efforts considérables pour consolider et améliorer son administration par l'établissement d'un nouveau plan d'organisation et par l'engagement de nouveaux employés.

L'office compte aussi, au cours de la présente année, augmenter sa présence régionale par l'ouverture de nouveaux bureaux. Les programmes d'information et d'éducation prendront plus d ampleur pour faire des citoyens des consommateurs plus avertis.

Au cours des six derniers mois, un effort collectif considérable a été fourni tant par les principaux responsables de l'office que par les autres ressources du ministère pour mettre au point un nouveau projet de loi qui est à la fois la consolidation et l'extension de la loi actuelle. Dès ma nomination comme titulaire du ministère, j'avais pris un engagement, tant envers moi-même qu'envers la population, qu'un projet de loi serait déposé devant l'Assemblée nationale au mois de mars de cette année. Je me félicite d'avoir pris cet engagement qui. à certains moments, a pu me paraître téméraire. La protection du consommateur touche aux actes quotidiens de toute une population, soit comme consommateur, soit comme commerçant.

Une législation efficace entraîne forcément des changements importants dans les relations juridiques des particuliers. Le souci d'insérer des innovations législatives qui seraient cohérentes avec le système juridique existant exige des travaux considérables que, malheureusement, les profanes ne peuvent pas toujours apprécier.

Evidemment, mon propos n'est pas aujourd'hui d'expliquer ou de défendre ce projet de loi. La commission parlementaire aura d ailleurs tout le loisir d'entendre des groupes de citoyens et de commerçants. Ses membres pourront d'ailleurs faire valoir leur point de vue sur les diverses dispositions de cette loi.

Il me paraît essentiel cependant que cette

commission y voie une volonté ferme de progrès et de ma détermination et celle du gouvernement de rendre la société plus conforme aux aspirations des citoyens.

Le second élément de ce programme est le contrôle et la surveillance du courtage immobilier. Au cours de la dernière année, certains problèmes particuliers se sont présentés que nous ne manquerons pas de discuter au cours des séances de cette commission. Le courtage immobilier a été particulièrement affecté par la hausse des coûts de construction, un des éléments de l'inflation qui a provoqué une augmentation dans la valeur des immeubles. A ceci s'ajoutaient de nouveaux niveaux d'intérêt inconnus jusqu'ici qui rendaient extrêmement onéreux le financement des achats immobiliers. Ces conditions surexcitent la concurrence et, forcément, exposent davantage les consommateurs.

A l'occasion de l'arrivée d'un nouveau directeur à ce service, une réforme a été mise en oeuvre dont nous ne pouvons que nous féliciter. Un effort particulier porte sur la compétence des nouveaux candidats pour l'obtention des permis. La collaboration des chambres d'immeuble est aussi recherchée afin de fournir une meilleure protection de public, notamment en cas de faillites d'intermédiaires.

Un contrôle beaucoup plus strict est maintenant exercé sur les comptes en fiducie et plus de rigueur est exigée des courtiers en cette matière.

Ce processus d'amélioration aboutira sans doute, au cours des prochains exercices, à certains amendements à la Loi sur le courtage immobilier.

Le second programme, dans le cadre duquel agit le ministère, porte sur le rôle et la surveillance du développement des entreprises. Le premier élément de ce programme est le fichier central des entreprises. Comme vous le savez, il s'agit avant tout d'un fichier d'identification des entreprises dans la province de Québec. Ce fichier est vraiment opérationnel aujourd'hui, et il est en mesure d'apporter à sa clientèle gouvernementale tous les services qu'elle peut attendre de lui.

Le fichier central regroupe certains éléments d'identification d'entreprises de près d'une centaine de fichiers associés appartenant à divers ministères ou organismes. Le rôle du ministère est d'administrer ce fichier sous la directive d'un comité interministériel qui regroupe les principaux fournisseurs et utilisateurs gouvernementaux des renseignements. Il s'agit d'un instrument moderne d'une grande efficacité qui pourrait cependant prêter à certains abus en matière de diffusion.

Au cours des dernières années, une politique s'est graduellement constituée et elle devrait être consacrée bientôt par le gouvernement. En pratique, les fournisseurs d'information gardent tout le contrôle de la diffusion des informations qu'ils auront eux-mêmes fournies au fichier. Ces informations ne sont donc pas accessibles au public ou elles ne le sont que dans le cadre des lois et règlements appliqués par chacun de ces ministères ou organismes et sous leur contrôle exclusif.

Le second élément du contrôle et de la surveillance du développement des entreprises est la création et la modification des personnes morales. Le service qui a ce contrôle est le service des compagnies qui est rattaché à notre ministère. L'objectif immédiat du service est de fournir à sa clientèle qui est, généralement, juridique du service prompt et efficace. Le but est donc d'émettre les lettres patentes, les lettres supplémentaires dans les délais les plus brefs. Il est aussi de contribuer par l'expertise juridique à mettre au point les documents constitutifs qui répondront aux besoins réels des corporations.

Jusqu'à l'an dernier, les efforts du ministère ont surtout porté sur l'amélioration du support technique du service qui était indispensable à une émission de près de 13 000 chartes et lettres patentes supplémentaires par année. Cette opération qui exigeait l'augmentation de volume n'a pas été sans créer certaines difficultés, puisqu'il devenait assez difficile vis-à-vis des procureurs de toujours concilier parfaitement les exigences techniques et les exigences juridiques. Notre but est maintenant de roder davantage ce service en faisant une meilleure jonction entre ses activités de système et procédure et ses activités proprement dites, proprement juridiques.

Des améliorations sont déjà en cours et devraient donner des résultats très satisfaisants. L'efficacité d'un service comme celui des compagnies repose pour beaucoup sur la loi qu'il administre. Notre Loi des compagnies souffre sûrement de certains retards par rapport aux lois du fédéral et de l'Ontario. Un schéma de révision de plusieurs centaines de pages a déjà été mis au point au cours de la dernière année et les travaux se poursuivront pendant le présent exercice. Voilà un projet majeur qui, je l'espère, viendra à terme en 1978/79. Je souhaite donc que cette entreprise permette de clarifier les obscurités ou ambiguïtés qui peuvent exister dans les relations entre le droit civil, le Common Law et le droit administratif des corporations.

Le troisième élément du contrôle et de la surveillance du développement des entreprises a trait aux associations coopératives. Sous certains aspects, cet élément touche à la protection du consommateur puisque souvent les coopératives sont des associations de consommateurs qui veulent se donner certains services par l'intermédiaire d'une entreprise coopérative. Mon prédécesseur vous avait fait part de l'orientation de ce service qui visait davantage au développement des coopératives qu'à leur contrôle ou à la vérification de leurs activités par rapport à leur loi organique. Il vous avait aussi appris que le secteur des associations coopératives de notre service de l'inspection s'était transformé en de véritables conseillers techniques pour les jeunes coopératives et pour celles qui rencontraient des difficultés inhabituelles.

C'est dans le même sens que le service des associations coopératives a poursuivi ses activités. Il a été présent dans tous les dossiers coopératifs importants dans la province de Québec. Il a fourni

support et conseil souvent même il est cet élément catalyseur qui peut rendre possible la solution de certains problèmes. Cela a été particulièrement le cas dans le secteur des forêts dont vous avez pu avoir des échos dans les journaux. Il reste que. malgré le dévouement du chef de ce service et de ses collaborateurs, des questions se posaient sur la forme et même sur la nécessité de l'aide gouvernementale aux coopératives. Des besoins nouveaux sont apparus dans les secteurs non organisés. C'est à ces interrogations qu'a tenté de répondre le gouvernement en mandatant M. Rolland Parenteau, économiste bien connu, d'étudier le problème et de faire certaines recommandations. Ce rapport a été reçu et comportait des commentaires favorables sinon élogieux sur les services coopératifs du ministère.

L'une de ces recommandations les plus significatives portait sur une formule mixte d'aide à l'administration et au financement corporatif par la création d'une société de développement mixte. Cette recommandation, fortement appuyée par certains éléments du mouvement, a donné lieu, au cours des derniers mois, à des travaux réguliers d'un comité de fonctionnaires, de représentants du mouvement coopératif et du conseil de la coopération.

Je dois recevoir très bientôt le rapport du comité et je me propose de faire les consultations les plus larges sur les conclusions de ce comité.

Il est possible que même l'activité de notre service des associations coopératives soit ainsi remis en cause. J'accueillerai toute recommandation avec la plus grande ouverture d'esprit. Mais je persiste à croire, cependant, que le service des associations coopératives aura toujours un rôle indispensable auprès de l'appareil gouvernemental. Par son intégration au ministère, ce service fait en quelque sorte fonction d'antenne du gouvernement à l'égard des besoins et des orientations des associations coopératives.

Aussi je n'hésite pas à conclure que, quelles que soient les formules de développement retenues et l'intervention gouvernementale qu'elles supposent, il est essentiel que ce service demeure, sans quoi le gouvernement perdra un contact très précis auprès d'un secteur aussi représentatif de la population. Il serait malheureux qu'en institutionnalisant et en formalisant les relations avec les coopératives le gouvernement s'isole d une réalité aussi proche de la population. Il est évident, cependant, que le rôle de ce service peut subir des modifications importantes.

J'aborde maintenant le troisième programme du ministère, le contrôle, la surveillance et le développement des institutions financières. Comme tous les autres domaines, les institutions financières n'ont pas échappé au problème de la conjoncture économique. Pour les caisses d'épargne et de crédit, les compagnies de fiducie, les hausses rapides d'intérêt des années 1974/75 ont forcément affecté leur rentabilité. On comprendra que leurs passifs sont beaucoup plus sensibles au taux courant d'intérêt, alors que leurs actifs, comportant pour une grande partie des prêts hypothécaires. subissent toujours un certain retard avant de s'ajuster au coût des fonds.

Au cours de la dernière année, la situation s'est cependant considérablement améliorée. Je suis heureuse de constater que la grande majorité des caisses d'épargne et de crédit ont démontré la flexibilité d'adaptation qu'exigeaient ces conditions inhabituelles. Il est vrai que certains secteurs plus récents connaissent encore certains problèmes de croissance qui, j'en suis sûre, trouveront leurs solutions. Les compagnies de fiducie à charte québécoise, qui sont d'ailleurs parmi les plus importantes au pays, ont aussi passé cette période difficile sans présenter des signes de faiblesse dignes de mention.

Parmi les institutions financières, les compagnies d'assurance générales sont sûrement celles qui sont le plus durement frappées par l'inflation. J'aurai l'occasion d'apporter quelques précisions à ce sujet quand je traiterai des activités des assurances. L'élément suivant de ce programme est le contrôle et la surveillance des compagnies d assurance. Une loi nouvelle a été adoptée l'an dernier et nous comptons la mettre en vigueur d'ici quelques mois avec la réglementation qui l'accompagne.

Le texte de cette réglementation a d'ailleurs fait l'objet d'une prépublication dans la Gazette officielle.

Suite à ces remarques générales, revenons à chacun des éléments de ce programme. Le premier concerne les caisses d'épargne et de crédit qui ne peuvent être dissociées de lassurance-dépôts, dont elles constituent en nombre la clientèle principale. L'une des priorités, au cours du dernier exercice, a porté sur le financement de la Régie de l'assurance-dépôts. Je reconnais que l'imposition d'une prime peut susciter certains problèmes et mettre en cause le rôle de la régie, des fédérations et, notamment, des avoirs libres, tant au niveau de la caisse individuelle que de sa fédération. Le régime fiscal invite, de plus, à créer des fonds de sécurité en vue d'alléger le fardeau des impôts.

Il est sûrement facile de dégager les objectifs à poursuivre. Notre but est de maintenir, dans les divers mouvements coopératifs de crédit, le dynamisme et la solidarité qui en ont fait le succès. Par ailleurs, il faut atteindre une intégration des ressources financières au niveau de la régie, des fédérations, des fonds de sécurité et des caisses individuelles. C'est une condition essentielle de l'efficacité du système coopératif de crédit dont fait partie la plus grande partie de ia population. Il faut aussi tenir compte du rôle ultime de la Régie de I assurance-dépôts qui est d'assurer les conditions maximales de sécurité à tous les déposants.

A la lumière de ces principes, le ministère s'est appliqué, au cours de ia dernière année, à étudier certains mécanismes qui répondraient aux attentes et aux impératifs de tous les intéressés. Nous comptons déboucher bientôt sur une période de consultation qui ne fera que confirmer une longue tradition de collaboration entre le gouvernement et les mouvements coopératifs. Je

souhaite que ces études et discussions amènent, d'ici la fin de l'année, des propositions qui feront l'objet de lois. Il s'agirait d'une étape majeure dans l'évolution du secteur coopératif de crédit.

Ces préoccupations immédiates du gouvernement prennent forcément le pas sur un travail de plus longue haleine, amorcé depuis plus d'un an, soit la refonte de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Que l'aspect financier de cette loi l'emporte actuellement sur sa partie coopérative n'a rien de surprenant dans la conjoncture actuelle. Il reste que, si la loi n'est pas bientôt refondue en entier, je compte bien proposer certaines modifications, dès que possible, tout au moins pour apporter des solutions aux problèmes les plus immédiats et, notamment, quant aux formalités relatives auprès des caisses.

Quant aux compagnies de fiducie, les travaux se poursuivent depuis plus d'un an, en vue de refondre leur loi organique. Certains projets, beaucoup plus urgents, comme la révision de la Loi de la protection du consommateur, ont forcé le ministère à mettre en veilleuse les travaux sur la Loi des compagnies de fiducie. Néanmoins, les premières consultations ont déjà été faites sur un premier avant-projet. Nous espérons, d'ici un an, mettre au point un texte définitif. Cette loi est un des éléments du programme législatif du ministère qui se répartira sur plusieurs années.

Le Service des assurances, je ne puis aborder cet élément de programme sans, évidemment, que ne surgissent deux problèmes d'actualité qui touchent la plupart des citoyens: les marchés d'assurance et l'assurance-automobile. L'un et l'autre ne peuvent être dissociés et il serait imprudent de les traiter séparément comme s'il s'agissait de réalités complètement indépendantes. Notons, d'abord, que parmi les institutions financières, les compagnies d'assurance générale sont celles qui ont été les plus durement frappées par l'inflation.

Les coûts des sinistres ont connu un accroissement considérable, alors que, par la force des choses, l'augmentation de la tarification subissait un retard appréciable. L'augmentation des primes ajoute déjà un fardeau important aux consommateurs et d'autres facteurs entrent en jeu qui ont pour effet de resserrer la disponibilité des assurances. Quoique la situation ne soit pas inquiétante, elle est une source d'irritation tant pour les courtiers que pour les assurés.

Parmi les causes de cet état de choses, la plus importante vient des règles appliquées par les autorités de surveillance gouvernementales. Elles exigent que le passif des assurances soit couvert par un actif supérieur de 15%. Il faut donc maintenir un certain niveau de capital et de réserves par rapport au volume d'affaires. Le volume de primes affecte le niveau des primes non acquises et les coûts des sinistres non réglés qui sont les principaux passifs de ces assureurs. Les pertes des compagnies d'assurances générales, au cours des dernières années, n'ont pas été sans limiter leur capacité d'assurer; l'augmentation des primes et des coûts de sinistres ajoute de nouveaux freins à l'expansion de leurs affaires.

Ce problème est loin d'être exclusif au Québec. On le retrouve partout au Canada et il est particulièrement aigu aux Etats-Unis. Dans ce pays, la forte participation de certains assureurs au marché des actions a eu des conséquences sérieuses. La baisse des marchés boursiers a réduit considérablement leurs réserves et même leur capital, diminuant ainsi leur capacité d'assureurs. Il ne faut donc pas se surprendre si certains assureurs américains se sont retirés du Canada. Il s'agit heureusement d'une part marginale du marché, qui ne semble pas créer de problèmes insurmontables pour le très grand nombre des courtiers. D'ailleurs, notre service des assurances auquel le public est invité à s'adresser n'a eu aucune peine à trouver où diriger ces affaires.

Nous traversons donc une période d'adaptation difficile où le sang-froid est de rigueur; les positions extrêmes dictées par l'irréflexion ou la panique ne peuvent qu'accentuer les déséquilibres et entraîner des maux plus grands. C'est pourquoi le ministère surveille l'évolution de la situation avec la plus grande attention et, pour le moment, se borne à intervenir pour les assurés dont les courtiers n'ont pas de facilités d'assurance suffisantes.

Toutefois, si les difficultés actuelles atteignaient un point critique, le gouvernement verrait à mettre au point les mécanismes nécessaires pour distribuer obligatoirement les risques entre assureurs enregistrés.

Les remarques qui précèdent sur les marchés d'assurances peuvent aussi servir de toile de fond aux problèmes de l'assurance-automobile. Les circonstances ont considérablement changé depuis que le gouvernement a reçu les conclusions du rapport Gauvin. Les problèmes organiques des assureurs, la croissance excessive du coût des sinistres, les incertitudes économiques, voilà autant de conséquences de l'inflation que le comité d'étude ne soupçonnait même pas.

Je doute que ses membres recommanderaient aujourd'hui avec la même certitude sereine une réforme radicale du régime de l'assurance-automobile, de l'administration de ce régime et du système entier de mise en marché. Sûrement qu'ils auraient des hésitations à prôner des changements aussi difficiles, alors que la réduction des primes devient un objectif de plus en plus éloigné et même incertain.

Je n'ai pas l'intention aujourd'hui d'analyser en détail ce problème et de proposer des solutions. En temps et lieu, l'Assemblée nationale sera appelée à prendre connaissance et à discuter d'un projet sur la question. Vous comprendrez certainement de ce bref exposé que le problème de l'assurance-automobile doit être abordé avec beaucoup de réflexion et de prudence.

Des décisions superficielles et doctrinaires pourraient entraîner des effets désastreux non seulement pour l'assurance-automobile, mais pour toutes les autres classes d'assurance personnelle. Il demeure, cependant, que des réformes sont nécessaires et j'ai bien l'intention de les amorcer dans les délais les plus brefs.

Avant de passer à l'élément du programme suivant, je crois devoir faire quelques considérations sur une question qui suscite un grand intérêt, soit les investissements des compagnies d'assurance. Il m'apparaît que ce problème est généralement abordé avec beaucoup d'émotion sans qu'il soit placé dans ses véritables perspectives. La nature technique de cette question est malheureusement ignorée et les jugements qui sont portés souffrent souvent d'une simplification extrême. Il me semble donc essentiel de circonscrire à ses dimensions réelles la question du réinvestissement, au Québec, des épargnes qui y sont recueillies par les compagnies d'assurance. Il faut d'abord rappeler que nous ne sommes pas en présence d'un siphonage systématique de ces épargnes pour réinvestissement à l'extérieur du Québec ou du Canada. Malgré les difficultés techniques d'analyse que j'exposerai rapidement, les données connues permettent d'établir qu'une portion substantielle de ces épargnes sont réinvesties au Québec. Il s'agit donc d'une question de degré et particulièrement du comportement relatif des assureurs faisant affaires au Québec par rapport à celui qu'ils adoptent à l'égard des autres provinces.

Deux problèmes techniques majeurs doivent être résolus avant qu'il puisse être possible de porter des jugements plus valables. Le premier porte sur la mesure du passif des assureurs qui correspond à des épargnes accumulées par les Québécois. Le volume des revenus courants de primes n'est sûrement pas un facteur exclusif. Il faut aller au-delà pour déterminer à quels engagements à long terme correspondent ces primes et dans quelle mesure elles génèrent des réserves. Il reste beaucoup de travail à faire avant que les instruments d'analyse nécessaires aient été mis au point dans ce domaine.

Nous pouvons cependant conclure dès maintenant que ce sont véritablement les compagnies d'assurance-vie dont le volume d'investissement peut avoir des incidences économiques importantes dans la province.

Le deuxième élément technique porte sur la localisation des placements. Tous les placements ne sont pas constitués par des hypothèques dont le site physique est facile à vérifier. Il y a aussi des investissements dans des compagnies nationales et dans le gouvernement central dont une partie au moins peut revenir directement dans la province. La mise au point d'instruments d'analyse et d'évaluation pour les valeurs autres que les hypothèques, les obligations provinciales, municipales et d'autres corps parapublics du Québec est forcément basée sur certaines approximations.

Il ne s'agit pas d'instruments souples et certains. Ils peuvent donner lieu à des distorsions selon les hypothèses qui ont été adoptées, qu'il s'agisse, d'une part, du revenu national brut, de certains investissements physiques ou de la proportion des habitants du Québec par rapport aux autres provinces et au reste du pays. Face à ces problèmes, le ministère a adopté une politique de persuasion et d'intervention par exception. Le ministère met donc en application une politique d'incitation à l'investissement au Québec par des rencontres avec les assureurs. En cela, il est secondé de façon efficace par le ministère des Finances, qui a aussi à coeur le financement de la province et des organismes sous sa juridiction.

L'objectif est d'obtenir un comportement équilibré dans le total des placements au Québec par rapport aux placements dans les autres juridictions. Nous recherchons donc une répartition dans ces placements entre le Québec et le reste du Canada qui reflète l'importance des épargnes recueillies au Québec, relativement à celles qui ont leur origine dans les autres provinces canadiennes.

Dans la recherche de cet objectif, c'est volontairement que le ministère ne veut pas appliquer de réglementation trop rigide qui serait basée sur des interprétations hypothétiques plutôt que sur une analyse intensive et indiscutable. Il est d'ailleurs reconnu de tous les experts — le comité d'étude sur les institutions financières, dit le comité Parizeau, le reconnaissait — que les capitaux recherchent sécurité et rendement sans égard aux frontières, qu'elles soient politiques ou réglementaires. Nous nous refusons donc, par des règles artificielles, à imposer et à uniformiser les politiques de placement. Nous craindrions, en effet, de tarir les autres sources d'investissement provenant des autres provinces ou de l'étranger, ce qui ne serait qu'une forme méritée de représailles.

Je n'ai pas à vous rappeler que, globalement, les grands projets du Québec, dont ceux qui se rapportent aux richesses naturelles, peuvent difficilement être financés par l'épargne intérieure dont l'investissement à certains mobiles de liquidité et de rendement propres aux épargnants individuels.

D'ailleurs, les législations impératives et rigides sur la localisation des placements n'ont jamais eu la faveur des juridictions nord-américaines. Dans le contexte dans lequel nous vivons, toute innovation restrictive et superficielle risque de diminuer globalement les investissements au Québec.

De plus, mon ministère garde à l'esprit la rentabilité et la sécurité des fonds confiés aux assureurs en vue de ne pas pénaliser impunément les assurés et respecter leurs objectifs individuels.

Tout ceci ne veut pas dire que mon ministère ignore cette question. Au contraire, depuis quelques années, il a exprimé clairement sa position face aux institutions financières. Il le fait pour toutes les institutions et notamment les compagnies de fiducie et certaines compagnies d'investissement qui viennent faire affaires au Québec. Il obtient un assentiment formel à une politique d'équilibre entre les économies recueillies au Québec et les placements qui y sont effectués.

Il lui est aussi arrivé, à l'occasion, de revoir avec certaines corporations leur politique d'investissement et d'obtenir, par la persuasion, les correctifs nécessaires. Il lui arrive aussi de discuter de ces questions avec les officiers des associations d'institutions financières.

Cette volonté reconnue d'atteindre l'équilibre

désirable constitue une incitation qui n'est pas sans résultat. Par ailleurs, un effort constant est fait en vue d'obtenir des statistiques plus significatives par une analyse qui, je le rappelais, n'est cependant pas sans difficulté et ne peut donner de résultats immédiats.

La commission des valeurs mobilières est un des éléments importants du programme des institutions financières et cet élément important est certainement le contrôle exercé par la Commission des valeurs mobilières. Depuis quatre ans, un effort considérable a été fourni pour réorganiser cette commission, pour augmenter et pour améliorer son personnel. Elle s'est dotée de politiques qui en font, dans les milieux financiers, l'un des interlocuteurs gouvernementaux parmi les plus sérieux et les plus respectés. Un témoignage unanime a été rendu en ce sens à l'occasion du départ de Me Robert Demers, président de cette commission jusqu'au dernier mois, qui a été remplacé par Me Gérald Lacoste.

Le domaine des valeurs mobilières est en pleine évolution. Le système des commissions fixes est remis en question. L'avènement des moyens électroniques de communication et d'enregistrement des données risque, d'ici quelques années, de révolutionner les mécanismes opérationnels des marchés. Notre commission met tout en oeuvre pour faire face à ces défis.

Elle s'applique à dépasser les problèmes immédiats en poussant l'étude des problèmes et en analysant de plus près les caractéristiques du marché.

Après une période d'assainissement des marchés, elle veut mettre l'accent sur une action encore plus positive et ainsi contribuer à renforcer la place financière de Montréal. C'est dans cette perspective qu'une refonte de la Loi des valeurs mobilières est actuellement en préparation. Cette loi ne sera efficace que dans la mesure où elle sera adaptée aux réalités nord-américaines et même internationales. Elle doit donc être le fruit d'une certaine concertation avec les autres juridictions et surtout avec l'Ontario. Notre commission est donc en rapport constant avec les autres autorités de contrôle, elle sera certainement en mesure, d'ici un an, de faire ses recommandations au gouvernement sur la révision de la Loi des valeurs mobilières.

Au cours de cette introduction, j'ai tenté de situer rapidement l'action du ministère et de ses divers services et organismes face aux problèmes de l'actualité. En conclusion, j'aimerais m'arrêter un moment sur son évolution à plus long terme. Vous aurez noté que les responsabilités du ministère sont à la fois variées et spécialisées.

Autre caractéristique, elles touchent de très près l'ensemble des citoyens, que ce soit à titre de consommateurs, d'épargnants, d'investisseurs, d'assurés, de commerçants ou de corporations. Au cours des dernières années, le ministère s'est donné comme priorité de mettre au point les instruments législatifs indispensables à son rôle. Vous avez constaté que ce travail continue de se poursuivre et devrait faire l'objet d'efforts soutenus pour encore plusieurs années.

Un comité permanent de législateurs a été mis sur pied en vue de mieux coordonner les aspects techniques et juridiques de la législation et de la réglementation. La législation étant un instrument, elle doit être utilisée avec compétence et discernement, selon ses objectifs et toujours dans les limites d'une interprétation juridiquement valable. Ceci exige des fonctionnaires une connaissance intime des situations et des institutions. Autrement leur intervention trop formaliste les priverait, de même que le gouvernement, de tout rôle dynamique dans l'évolution des événements.

C'est dans ces perspectives que je me suis fixé comme second objectif de base une amélioration constante de la qualité du personnel de mon ministère. Je suis heureuse de pouvoir compter sur les mêmes préoccupations au sein des cadres supérieurs du ministère. Cet effort commun et le partage d'objectifs fondamentaux est, à mon avis, un facteur de motivation essentiel et permet d'envisager l'avenir avec optimisme.

Et en terminant, M. le Président, vous me permettrez de présenter à la commission les fonctionnaires qui m'accompagnent, mon sous-ministre, M. Albert Jessop, le président de la Commission des valeurs mobilières, M. Gérald Lacoste, M. Pierre Meunier, directeur de l'office et sous-ministre adjoint, mon sous-ministre associé, M. Marc Carrier...

M. Léger: Est-ce que je peux demander au ministre de le faire plus lentement pour qu'on puisse...

M. Harvey (Charlesbourg): A l'ordre! Ce sera consigné au journal des Débats.

Mme Bacon: Pour prendre les noms, d'accord.

M. Léger: Oui.

Mme Bacon: Est-ce que je dois recommencer?

M. Léger: S'il vous plaît, oui.

Mme Bacon: Alors M. Jessop, mon sous-ministre. M. Gérald Lacoste, président de la Commission des valeurs mobilières, M. Pierre Meunier, qui est directeur de l'Office de la protection du consommateur et sous-ministre adjoint, M. Marc Carrier, mon sous-ministre associé au ministère, M. Fortier, directeur de la gestion, M. Beau-lieu, responsable du budget, M. Poulin, directeur du personnel, M. Pierre Desjardins, directeur du service des compagnies, M. Boucher, directeur du service du fichier central; M. Freddy Henderson, de l'Office de la protection du consommateur, section des plaintes, et M. Réal Martel, surintendant au courtage immobilier.

Je pense que tout le monde est là.

Commentaires de l'Opposition

Le Président (M. Pilote): L'honorable député de Lafontaine.

M. Léger: Je remercie le ministre de son exposé. Je dois dire que le ministre a agi d'une façon très consciencieuse en intervenant au début de cette commission parlementaire qui étudie les crédits du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Plus il y a de questions aux crédits de l'année précédente, plus longue est l'entrée en matière du ministre; chaque année, c'est la même chose. Je dois dire que le ministre a bien appris, au cours des derniers mois, les différentes responsabilités de son ministère. Cependant, je pense qu'on a apporté dans cette entrée en matière beaucoup de réponses qui ne sont pas nécessairement des solutions. Je pense que le ministre agit un peu à l'image du premier ministre du Québec qui a pris le tour, depuis plusieurs années, de dire son incapacité d'agir dans bien des domaines en donnant des explications très détaillées, mais qui n'amènent pas nécessairement des solutions aux problèmes.

Je dois dire que l'étude des crédits d'un ministère, quel qu'il soit, est habituellement l'occasion pour l'Opposition de passer à la loupe les politiques d'un ministère, à la lumière de leur coût pour le trésor public. Ainsi, on peut normalement critiquer le travail de l'année précédente, en espérant que les points soulevés vont être l'objet d'une attention toute spéciale par la suite et que la situation va s'améliorer. Cette année, la situation est bien différente, car les secteurs qui laissent le plus à désirer feront l'objet de projets de loi dans les mois qui vont suivre. Aussi, entamer une discussion à ce stade risquerait, pour l'Opposition, de faire double emploi. C'est pour cette raison que nous allons passer très vite, en ce qui nous concerne, sur les sujets qui vont faire l'objet d'une loi en espérant que, d'ici à l'an prochain, le nouveau ministre des Consommateurs pourra faire l'unanimité avec ses collègues sur l'opportunité d'adapter les lois à l'avantage du consommateur, ne fût-ce que pour justifier le nouveau nom du ministère.

C'est justement ce nouveau nom qui met le plus en relief l'inefficacité du ministère dans son domaine propre. Comment, en effet, peut-on concilier le nouveau nom du ministère avec, à l'élément 1 du programme 1, la faillite du Cercle d'économie de la future ménagère et, en même temps, à l'élément 2 du même programme, la faillite de Westgate Realties? Comment, encore, peut-on concilier le nom, ministère des Consommateurs, avec la situation déplorable que l'on connaît dans le domaine de l'assurance-automobile où c'est encore le consommateur qui fait les frais de l'inaction du gouvernement? Pour toutes ces raisons, nous ne comptons pas perdre de temps avec l'étude des crédits pour des programmes périmés et mal adaptés aux besoins nouveaux de notre société.

Dossier de l'assurance-automobile

Au cours de ces crédits, nous allons donc exiger du ministre qu'elle réponde une fois pour toutes à la série de questions qu'elle évite systémati- quement depuis qu'elle a été nommée à ce poste. Je commencerai par une question bien simple, au départ, concernant l'engagement que le ministre avait pris, il y a à peu près trois semaines ou un mois, de déposer à l'Assemblée nationale, au début ou au milieu de juin, la Loi sur l'assurance-automobile.

J'aimerais demander au ministre si, aujourd'hui, elle est en mesure de nous dire, au moment où on se parle, qu'avant l'ajournement d'été qui, selon nos prévisions pourrait arriver très tôt, — puisque le menu législatif est très très maigre et que l'étude des crédits a pris une bonne partie de la période habituellement allouée aux crédits et à la législation, nous approchons de la fin de cette session — c'est une question bien directe que je lui pose, est-ce que le ministre a l'intention de déposer avant l'ajournement d'été, le projet de loi sur l'assurance-automobile?

Le Président (M. Pilote): Est-ce que le député de Lafontaine a terminé sa réponse au ministre? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, avant de procéder aux questions de continuer votre réponse, quitte ensuite à poser des questions? C'est une suggestion que je vous fais...

M. Léger: M. le Président, je...

Le Président (M. Pilote): ...pour éviter qu'on se promène de l'un à l'autre...

M. Léger: Je remercie le président, de sa suggestion, mais de la réponse du ministre va dépendre ce que j'ai à dire en continuant le tour d'horizon du ministère. Est-ce que le ministre peut me répondre au moins à cette question? Par la suite, on aura des questions programme par programme, mais comme c'est la pièce de résistance, je pense, qui va déterminer l'allure que prendra le débat sur les différents programmes, j'aimerais savoir du ministre, à ce stade-ci, s'il y aura, avant l'ajournement d'été, le dépôt de la loi sur l'assurance-automobile.

Mme Bacon: M. le Président, j'aurais préféré que le député de Lafontaine puisse faire totalement son exposé ce matin avant de poser ses questions. Quand on parle du problème comme la pièce de résistance, on minimise drôlement les différents services de mon ministère, et je m'inscris en faux contre ce que vient de prétendre, en tout cas, le député de Lafontaine.

Le député de Lafontaine a parlé d'engagement de ma part et j'aimerais qu'il me réfère à un journal des Débats. J'ai pris un engagement formel, à mon arrivée au ministère, de déposer la Loi de la protection du consommateur au mois de mars, ce qui a été fait. Je n'ai jamais pris l'engagement formel de déposer la loi de l'assurance-automobile. Je me suis toujours bien gardée de prendre cet engagement formel, compte tenu du fait que ce dossier est un dossier complexe, technique, émotif aussi. D'ailleurs, on le voit par l'attitude du député

de Lafontaine qui fait appel à l'émotivité des gens. J'ai toujours dit: Autant que possible, si c'est possible, je le déposerai avant la fin de la présente session. Je n'ai jamais pris un engagement formel pour le début, le milieu ou la fin de juin, comme le prétend le député de Lafontaine. J'ai toujours dit que si c'était possible je le déposerais.

Ce matin je dois dire, et à mon grand regret, que je ne peux pas déposer le projet de loi avant la fin de la présente session, mais qu'il sera déposé à la reprise à l'automne.

M. Léger: M. le Président, je remercie le ministre de sa franchise. Dans mon début d'exposé, j'ai bien dit qu'il y avait plusieurs lois que le ministre a l'intention de proposer à l'Assemblée nationale au cours de la session. Je ne pense pas que j'aurai, à ce stade-ci, des prises de position sur ces lois. Quand elles vont venir en Chambre, nous aurons l'occasion de donner notre point de vue sur ces lois. C'est la raison pour laquelle je lui ai posé la question, et non pas sur la Loi de la protection du consommateur qui a déjà été déposée. Nous aurons l'occasion, au cours des commissions parlementaires, d'entendre les personnes qui ont des choses à dire là-dessus. J'ai l'intention de les écouter d'abord et, par la suite, en deuxième lecture, de donner notre point de vue sur le projet de loi ainsi que sur d'autres projets.

Le ministre a parlé tantôt de la refonte d'une loi sur les valeurs mobilières. C'est encore une occasion que nous aurons de discuter de ce projet de loi quand il sera déposé. Cela limite pas mal les questions que nous aurons à poser sur ces aspects à l'intérieur des différents programmes. Cependant, comme le ministre vient de nous dire qu'elle ne déposera pas, à son regret je le sais, la Loi sur l'assurance-automobile avant l'ajournement de la session, je voudrais lui faire remarquer que le Québec vit des heures très sombres au niveau de l'assurance-automobile.

Je voudrais, au départ, lui communiquer, lui lire même une lettre, qui pourrait être multipliée par peut-être dix, provenant d'autres compagnies, lettre que le président de la Société d'assurance des caisses populaires Desjardins adressait à ses courtiers. Cette lettre est signée par M. François Adam et datée du 27 avril 1976. Elle démontre l'état, non pas d'émotivité, mais de panique qui existe dans le milieu et l'industrie de l'assurance.

Je cite cette lettre: "A tous nos courtiers. A compter du 1er mai 1976, la Société d'assurance des caisses populaires doit, pour une période temporaire, limiter la souscription de nouvelles polices, dans les classes incendie et automobile, aux personnes déjà détentrices d'un contrat d'assurance avec notre institution, ainsi qu'au risque d'incendie où les pertes éventuelles devront être payées aux caisses populaires et aux institutions du mouvement des caisses populaires Desjardins. La décision de certaines sociétés d'assurance générale de cesser leurs opérations au Québec, ainsi que les mesures restrictives appliquées par d'autres ont pour conséquence un accroissement considérable de nouvelles demandes entraînant une pression excessive sur le volume de nos opérations, compte tenu de nos ressources financières et humaines disponibles. Nous sommes conscients qu'une telle décision est susceptible de causer certains ennuis aux personnes et aux entreprises à la recherche de protection contre certains risques. Mais, en somme, elle nous est imposée par les circonstances. Aussi, nous serons en mesure de modifier cette nouvelle politique concernant les classes ci-dessus mentionnées. Nous vous en informerons. Signé: le président, François Adam. " Cette lettre était adressée à tous les courtiers.

Plusieurs compagnies ont fait de même, soit par lettre, soit par avis direct ou par l'attitude qu'on a adoptée envers les courtiers. Le rapport Gauvin, d'ailleurs, disait que 86% des polices d'assurance-automobile étaient vendues par des courtiers indépendants. Or, depuis que les compagnies d'assurance ont commencé à se retirer du milieu ou à plafonner leur clientèle, les courtiers d'assurance ne sont plus en mesure d'offrir à leur clientèle le service pour lequel elles existent. A tel point que certains courtiers, ayant vu la majorité, sinon la totalité des compagnies d'assurance avec lesquelles ils faisaient affaires se retirer du marché, n'ont d'autre choix que de partir en vacances, de se consacrer exclusivement à d'autres types d'assurance, abandonnant une clientèle acquise après plusieurs années d'efforts.

Ceci amène, comme conséquence, une attitude, un état de panique, dans le milieu des consommateurs, dans le milieu des compagnies, qui fait que les assurés ont de la difficulté à se réassurer. Ceux qui peuvent trouver de l'assurance se voient facturés des primes de plus en plus prohibitives. On a même affirmé que près de 20% n'étaient pas réassurés, et ces chiffres n'ont pas encore été démentis; je doute que le ministère puisse avoir les chiffres en main, puisque les questions que j'ai posées en Chambre n'ont jamais obtenu de réponses. D'ailleurs, le Service des assurances du ministère et le surintendant des assurances n'ont pas en main les chiffres pour répondre à cela; j'aimerais bien qu'on puisse faire les recherches pour me donner des réponses là-dessus.

M. le Président, cette conséquence provient de deux causes majeures: la première, le ministre en a parlé tantôt, la hausse du coût de réparation des automobiles, à travers le Québec, hausse causée en partie par l'inflation, en partie par un non-contrôle de la situation et aussi par le fait que, dans chaque région, on a sa propre perception des besoins ou des coûts qu'on doit facturer pour réparer les automobiles. Les compagnies d'assurance, a cause de cela, sont devant une hausse de primes à facturer. Elles sont aussi dans l'incertitude car le gouvernement ne dévoile par le style de régime d'assurance qu'on aura. Il y a les affirmations, d'une part, du ministre qui a prédécé le ministre actuel et même les affirmations du ministre actuel responsable de ce ministère, et les affirmations provenant de différents groupes, aussi bien les gens du Barreau que les gens du BAC,

des compagnies d'assurance, des courtiers, des ajusteurs et de tous ceux qui sont directement impliqués dans l'industrie de l'assurance.

Devant cela, les compagnies ne savent pas comment s'organiser pour répondre aux besoins de la clientèle. A ce moment, il y a, d'une part, des hausses effrénées, des hausses de réparations. Les compagnies se voient dans l'obligation de ne pas prévoir à long terme, ne pouvant pas planifier. Certaines s'en vont du Québec et ceci amène une autre conséquence; c'est un peu comme l'exemple de la Société d'assurance des caisses populaires. Ceci amène une demande accrue de nouveaux clients qui désirent s'assurer et ces compagnies ne veulent pas risquer d'accepter des possibilités de payer des sommes imprévisibles. Elles n'osent pas assurer davantage, n'ayant pas les reins assez solides, ne prévoyant pas leurs possibilités de ce côté.

Ceci amène comme conséquence un phénomène social grave, c'est qu'il existe de plus en plus de gens non assurés. Je donne l'exemple d'un bon père de famille avec trois ou quatre enfants, avec des responsabilités majeures qui, ne pouvant pas s'assurer ou ayant une prime d'assurance tellement élevée qu'il ne peut pas donner la protection voulue à sa famille et à lui-même au niveau de l'assurance-automobile et aussi dans d'autres domaines, se voit dans une situation où il n'est pas assuré selon ses besoins. A ce moment, s'il avait un accident pour lequel il était trouvé responsable, il mettrait toute sa famille en danger, n'étant couvert que pour des sommes minimes.

D'un autre côté, un autre père de famille pourrait aussi être frappé par une personne qui n'est pas assurée et, à ce moment, le fonds d'indemnisation ne couvrant qu'un maximum de $30 000 et $5000 pour les biens, fait que la famille subirait des conséquences désastreuses parce qu'elle ne serait pas couverte selon les besoins du moment.

Alors, M. le Président, je pense que l'incertitude dans laquelle vit le milieu aurait dû obliger le gouvernement à prendre une position, quelle qu'elle soit. Je ne parle pas du contenu de cette loi, mais il faut qu'il y ait une prise de position. Le 5 mai 1971, il y a maintenant plus de cinq ans, le gouvernement, étant sensible aux problèmes de l'assurance, avait nommé un comité d'étude pour rechercher les causes de ces hausses constantes des primes d'assurance-automobile et avait proposé à M. Gauvin et à son comité des moyens pour compenser les victimes d'assurance aux meilleurs coûts possibles pour la collectivité. Ce comité, présidé par M. Jean-Louis Gauvin, devait faire rapport dans les douze mois et recommander des mesures susceptibles de réduire le coût découlant d'accidents d'automobile.

Le mandat du comité Gauvin a été prolongé deux fois, pour finalement se terminer le 9 janvier 1974. Dans les mois qui suivirent, le rapport fut imprimé et déposé en Chambre par le ministre Tetley, qui a précédé le ministre actuel à ce ministère. Comme on le sait, une commission parlementaire a étudié les recommandations, et cela d'une façon assez irrégulière, puisqu'une commission parlementaire devrait se pencher non pas sur des rapports d'experts, mais sur des décisions gouvernementales basées sur des rapports d'experts, mais basées aussi sur une décision que le gouvernement prend et sur laquelle l'Opposition et l'opinion publique doivent se pencher.

Au contraire, on s'est penché sur un rapport d'experts permettant à tous les loups de venir ronger et gruger à même des recommandations d'experts parce qu'elles ne faisaient pas nécessairement l'affaire ou ne correspondaient pas aux intérêts immédiats de ces groupes qui sont directement impliqués dans le domaine de l'assurance-automobile, contrairement à une attitude qui aurait dû être celle du comportement de la collectivité qui aurait à subir les interventions de l'Etat, heureusement ou malheureusement, mais qui permettraient aux citoyens de savoir à quelle enseigne se loge ce gouvernement qui voulait régler ce problème.

On a déchiqueté le rapport Gauvin, on en a fait une bataille à travers tous les groupes directement impliqués dans l'assurance-automobile qui avait des choses à protéger, c'est normal. Mais, il n'est pas normal que le gouvernement ne prenne pas position là-dessus. Les propositions du comité Gauvin furent ensuite soumises à l'étude d'un comité de fonctionnaires, sous la direction du juge André Desjardins, afin d'éclairer le gouvernement sur les solutions à adopter.

Le comité Desjardins a remis son rapport au printemps de 1975, mais jamais, depuis, le gouvernement ne s'est prononcé sur la question d'une façon claire. Au contraire, il a laissé persister toutes sortes d'équivoques. Je ne parle pas des congrès régionaux ou congrès nationaux du Parti libéral où on a évoqué les opinions provenant d'ateliers noyautés par des groupes directement impliqués dans l'assurance-automobile, mais pas directement impliqués dans les besoins de la collectivité québécoise.

Le résultat de ces hésitations est le même pour les compagnies d'assurance que pour les assurés. Personne ne sait ce que l'avenir réserve au monde de l'assurance-automobile. Devant cette incertitude, et compte tenu des augmentations galopantes dans le coût des règlements des accidents, la grande majorité des assureurs faisant affaires au Québec refusent toute nouvelle police d'assurance-automobile. Ces refus prennent diverses formes qui vont de l'augmentation prohibitive d'une soumission de taux au refus pur et simple d'émettre une nouvelle police, en passant par l'acceptation d'un risque par une compagnie à condition expresse que le client souscrive au même assureur tous ses contrats d'assurance générale. Je pense que c'est inacceptable. La collectivité québécoise au moins durant la période d'été, tous les gens concernés par l'assurance-automobile doivent savoir quel sera ce projet de loi. Le gouvernement est-il tellement divisé qu'il n'ose pas présenter une proposition qui permettrait à tous les citoyens de venir s'exprimer là-dessus? Je pense que c'est inacceptable. Cette indécision doit être bien qualifiée par la population

comme une absence de politique du gouvernement actuel dans le domaine de l'automobile. C'est la raison pour laquelle nous croyons que le gouvernement ne peut plus se cacher derrière des affirmations comme: II ne faut pas semer la panique, il ne faut pas laisser aller l'irréflexion.

Il faut nécessairement que le ministère surveille et, aussi, il ne faut pas qu'il s'endorme sur ces problèmes parce que la population ne s'endort pas, elle se demande quoi faire et c'est une des questions majeures que les Québécois se posent actuellement.

Je termine en disant que le gouvernement ne peut plus, après cinq années de tergiversations, laisser les appétits de certains groupes primer une responsabilité gouvernementale qui doit être prise, quelle qu'elle soit. La population jugera par la suite le rôle qu'a joué le gouvernement dans ce domaine. C'est son rôle de prendre les décisions et non pas celui de remettre aux calendes grecques un problème aussi grave, aussi crucial que celui-là.

J'ai terminé ma présentation, et je dois commencer, malheureusement, l'étude de certains programmes.

Le Président (M. Pilote): Y en a-t-il d'autres qui voudraient intervenir tant sur le discours du ministre que sur celui du député de Lafontaine?

Nous allons procéder programme par programme.

Mme Bacon: M. le Président...

Le Président (M. Pilote): Madame le ministre.

Mme Bacon: Si vous me le permettez, je vais essayer d'être le plus bref possible.

Le Président (M. Pilote): Avant de vous le permettre, je me donne la permission de saluer les gens du comté du Lac-Saint-Jean qui sont ici.

M. Léger: M. le Président, je trouve absolument aberrant qu'un président qui est là pour faire respecter les règles...

M. Harvey (Charlesbourg): Arrêtez-donc.

M. Léger: ... on ne permet à aucun député de l'Opposition de se lever en Chambre, de saluer son monde dans les galeries.

M. Harvey (Charlesbourg): II salue son monde, il sait vivre.

M. Léger: Je sais fort bien que les députés du gouvernement essaient de le faire, mais le président doit être impartial et il est là pour faire respecter les règles. Je ne comprends pas cela.

Le Président (M. Pilote): Vous nous donnez du mérite. L'honorable ministre.

Mme Bacon: Je voudrais presque vous félici- ter de l'avoir fait, compte tenu du ton émotif que le député de Lafontaine a employé au cours de son intervention. Je disais tantôt que le dossier de l'assurance-automobile est un dossier technique, mais il est un dossier émotif et politique. L'intervention du député de Lafontaine en est.la preuve vivante, parce que, tout au long de son intervention, il a fait de la politique empreinte d'émotivité. Je n'ai pas l'intention de tomber dans le même piège et de faire la même chose. Je vais tenter autant que possible de donner les informations ou les réponses auxquelles ont droit mes collègues de la commission parlementaire. Je ne ferai pas de cette émotivité et je ne créerai pas cette panique, encore une fois, en faisant de la petite politique avec le dossier de l'assurance-automobile. Je suis consciente que c'est un dossier important au niveau du gouvernement comme je suis consciente que c'est un dossier important pour l'ensemble des contribuables québécois et l'ensemble des citoyens du Québec.

Je crois avoir déjà pris une décision très importante — quand on dit qu'on n'a pris aucune décision — en annonçant à la Chambre que le régime qui serait mis de l'avant ne serait pas étatique. Je pense que déjà, pour l'ensemble de la population, c'était une décision importante de la part du gouvernement.

Nous avons, nous aussi, de fréquentes communications avec les assureurs, les courtiers. Notre service des assurances est en communication constante avec les gens du milieu des assurances afin de faire en sorte de minimiser les problèmes auxquels ont à faire face les citoyens du Québec. Nous avons, en préparation, une autre rencontre avec les assureurs et les courtiers pour diriger certains risques qui ne peuvent trouver d'assureur, comme nous le faisons déjà. Tous les cas qui nous sont référés au service des assurances trouvent une couverture adéquate de certaines responsabilités. Nous allons continuer à discuter avec les assureurs, dans les semaines qui viennent, sur des mécanismes à mettre en place afin de diriger obligatoirement les risques qui nous sont référés par les courtiers ou par la population en général.

Ce n'est pas, évidemment, la meilleure solution. Je ne ferai pas de politique; j'essaierai d'être le plus honnête possible avec mon collègue de Lafontaine, en disant que, même si nous déposions un projet de loi au mois de juin, ce projet de loi ne pourrait être adopté au mois de juin, donc ne changerait aucunement la situation présente. Il la changera quand on le déposera et qu'on pourra en faire l'étude.

Je crois que tous ceux qui se sont adressés à mon service des assurances ont reçu, évidemment, la meilleure collaboration possible de la part du service des assurances. Ces gens ont vu aussi la possibilité d'être couverts par les compagnies d'assurance. Comme je le disais tantôt — je le répète — nous établirons des mécanismes avec les assureurs et les courtiers afin de nous permettre de diriger, s'il le faut, obligatoirement des risques. Cette répartition des risques se fera avec les diverses compagnies qui seront consultées.

M. Léger: M. le Président, le ministre parle d'émotivité dans le dossier de l'assurance-automobile. Si c'est le fait, pour un député de l'Opposition, d'être en maudit parce que le gouvernement ne s'occupe pas des consommateurs, je dis: Oui, c'est un dossier émotif. Je dis que c'est une réaction émotive de tous ceux qui vivent actuellement dans l'incertitude devant l'absence de décision gouvernementale qui touche tous les citoyens du Québec.

Aujourd'hui, l'assurance-automobile n'est pas un luxe; c'est une obligation. On dit même que l'assurance devrait être obligatoire. Si l'assurance devait être obligatoire, cela touche tous les citoyens qui ont un véhicule.

M. le Président, je pense que ce n'est pas une question simplement technique. C'est une question économique pour tous les citoyens. Le ministre dit que, si elle avait déposé son projet de loi avant l'été, il n'aurait quand même pas été adopté. Cela aurait quand même permis de franchir une étape importante, soit de connaître les orientations du gouvernement; le gouvernement craint qu'on connaisse ses orientations là-dessus.

Deuxièmement, il aurait certainement fallu, à la suite du dépôt du projet de loi sur l'assurance-automobile, avoir une commission parlementaire pour entendre ceux qui sont concernés et non pas, comme cela a été fait il y a un an ou deux ans, une commission parlementaire sur des suggestions ou des recommandations de comités d'experts.

M. le Président, je pense qu'il est normal, lorsqu'on présente un projet de loi qui touche tous les citoyens du Québec qui possèdent une automobile, incluant ceux qui sont à l'intérieur de l'industrie, qu'on ait une commission parlementaire. Je pense que l'attitude logique, normale, rationnelle du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières et du ministre qui est devant moi aurait été non pas émotivement, mais logiquement de déposer son projet de loi, de convoquer une commission parlementaire de façon que les personnes impliquées, ainsi que les consommateurs puissent venir dire ce qu'ils acceptent, ce qu'ils aiment, ce qu'ils n'aiment pas, ce qu'ils veulent amender dans ce projet de loi. On aurait avancé au moins de quelques pas.

Actuellement, l'absence de dépôt de ce projet de loi recule et même rend la situation de plus en plus "paniquante" pour les Québécois, parce qu'on ne sait pas où on s'en va là-dedans.

Une des deux causes majeures du problème de l'assurance-automobile, c'est le fait que les compagnies ne savent pas s'organiser. C'est pour cela que j'ai proposé, dernièrement, pour que le ministre en prenne note avant, trois solutions pour l'immédiat. D'abord celle d'avoir peut-être une étude avec le Bureau d'assurance du Canada, le BAC, qui a proposé de remettre en vigueur le régime de la facilité. Et cela peut être fait avec des compagnies d'assurance et avec le gouvernement, pour permettre de diriger toute personne dont la demande d'assurance est refusée par une compagnie dans un régime qu'on appelle la facilité ou l'assignation, mais un régime à une prime nor- male. Actuellement, une personne qui n'est pas acceptée par une compagnie, si on la dirige ailleurs, la prime est très élevée, même est trop élevée. Et il n'y a aucune possibilité de contrôle. Le ministre disait qu'elle a même installé à son ministère une mini-organisation pour permettre aux gens qui ne sont pas capables de s'assurer avec une compagnie de s'adresser à son ministère.

Mais ce n' est quand même pas ie rôle primordial de son ministère. C'est une solution temporaire. De plus en plus de gens ne sont pas assurés, se voient refusés, se voient proposer des primes exorbitantes. S'il fallait que tous les citoyens qui ne sont pas assurés appellent au ministère, vous n'auriez pas assez de téléphones et de personnel pour répondre à ces demandes. C'est pour cela que le régime proposé par le Bureau d'assurance du Canada, qui demandait l'appui du gouvernement dans un régime de facilité, devrait au moins avoir retenu l'attention du ministère pour voir s'il n'y a pas possibilité de ce côté d'apporter une solution temporaire à ce problème.

Le deuxième point que j'ai suggéré, c'était celui d'avoir un fonds. Les compagnies d'assurance ont prévu, pour l'année courante, accepter un certain nombre de risques, mais tout à coup, à cause du départ de compagnies d assurance, elles ne peuvent accepter beaucoup plus de risques que ceux qu'elles avaient prévus. A ce moment, elles refusent des personnes. M. le Président, il y aurait peut-être possibilité pour le gouvernement d avoir un fonds disponible, mais non pas pour subventionner les compagnies d'assurance. Pour donner un exemple, il y aurait un fonds permettant aux caisses populaires Desjardins d'accepter plus de risques qu'elles n'étaient capables d'en prendre avant, sachant que, si elles ont une année malheureuse, ou une expérience malheureuse, ou plus de sinistres qu'elles ne s'attendaient, elles pourront avoir un appui financier de ce fonds. Cela permettrait de trouver, du moins temporairement, pendant la période de cogitation et de tergiversation du gouvernement, une solution temporaire au problème qu'on vit actuellement.

Et finalement, M. le Président, la troisième solution temporaire que j'ai suggérée au ministre, c'était d'avoir l'installation graduelle, mais ie plus rapidement possible, de centres d'évaluation pour les réparations d'automobiles à travers le Québec, selon des critères gouvernementaux, selon des normes fiables et homogènes et, aussi, selon les lieux où ces installations pourraient être acceptées, soit des garages qui auraient le permis du gouvernement pour faire ces évaluations. Cela permettrait de limiter les dégâts ou limiter les sommes exorbitantes qui sont réclamées dans le milieu des réparations des automobiles. Les estimateurs et les garagistes soufflent les montants parfois, dans le but d'obtenir plus que la valeur réelle de la réparation. Ceci fait monter les primes.

M. le Président, je suggère ces trois recommandations. D'abord, une renaissance de la facilité qui a déjà existé, il y a quelque temps, avec un appui gouvernemental. Cela est une solution temporaire qui pourrait aider à corriger la situation désastreuse dans laquelle vivent les consomma-

teurs dans le secteur automobile. Deuxièmement, un fonds pour aider les compagnies qui n'ont pas les reins assez solides, mais qui pourraient avoir une responsabilité sociale, c'est-à-dire d'assurer tous ceux qui veulent s'assurer. Elles auraient la possibilité de ne pas faire faillite parce qu'il y aurait peut-être trop de sinistres qu'elles n'auraient pas prévus. Finalement, des centres d'évaluation dans le Québec.

Est-ce que le ministre a réfléchi à ces solutions? Est-ce qu'il y a des choses qui peuvent être mises de l'avant, soit à court ternie ou à long terme, ou au moins commencer quelque chose dans ce sens pour pallier les difficultés immédiates avant même que la loi ne soit déposée?

Mme Bacon: Une réunion exploratoire a lieu cette semaine.

Je parlais, tout à l'heure, des rencontres au niveau des différentes compagnies d'assurance, des courtiers du ministère, qui auront lieu pour mettre certains mécanismes en place, pour diriger les risques. Il y a aussi une autre réunion qui aura lieu au niveau du gouvernement fédéral et au niveau du gouvernement provincial; le gouvernement du Québec, évidemment, par notre service de l'assurance y sera représenté. Ce sera une réunion exploratoire afin de voir ce qui peut être fait. Quand je mentionnais, dans mes remarques d'introduction, que nous exigeons que le passif des assureurs soit couvert par un actif supérieur de 15%, il est évident que cette exigence cause d'énormes pressions sur les compagnies d'assurance. Cette réunion, qui aura lieu cette semaine, étudiera la possibilité soit de réduire ou de trouver une autre formule qui créerait moins de pressions sur les compagnies d'assurance.

Différentes solutions sont envisagées. Je ne peux pas révéler ici quei serait le contenu d'un projet de loi. J'ai fait énormément de consultations depuis mon arrivée au ministère. Nous gardons une communication constante avec les compagnies d'assurance afin de trouver les meilleurs mécanismes nécessaires pour eux et pour nous pour résoudre certains problèmes auxquels ont à faire face les citoyens. Je pense que le résultat des prochaines rencontres sera sûrement très positif et pourra nous permettre de continuer à apporter une protection adéquate aux citoyens et la meilleure protection possible au meilleur taux possible, mais en attendant de déposer la loi au mois d'octobre ou à la reprise de la session.

M. Léger: Au sujet de cette réunion, avez-vous l'intention de proposer certaines garanties à des compagnies pour qu'elles puissent accepter des risques supplémentaires?

Mme Bacon: Quand je parle de mécanismes à mettre en place pour diriger des risques, à ce moment-là, il est évident que les compagnies qui en refusent dans le moment, si nous les obligions à accepter ces risques, devraient les accepter.

M. Léger: Concernant les centres d'évaluation des dommages à travers le Québec, qui étaient quand même l'une des recommandations du rapport Gauvin, est-ce que, là-dessus, le ministère se penche? Est-ce qu'il a des relations, peut-être, avec le ministère des Transports ou avec d'autres ministères pour faire ce travail?

Mme Bacon: Je dis souvent que la réforme ou le nouveau régime qui sera proposé est global. Cela va plus loin que l'assurance comme telle. Il est évident que certains accessoires, comme les centres d'évaluation, sont considérés dans cette réforme globale. Evidemment, je ne pourrais révéler immédiatement la politique du ministère, mais ces centres d'évaluation, pour les mettre en place, demandent... On ne pourra pas le faire comme palliatif dans les semaines qui viennent, c'est plus compliqué que cela, plus complexe que cela. C'est un des problèmes auxquels on a à faire face et sur lequel on doit se pencher le plus rapidement possible.

M. Léger: Etant donné que les centres d'évaluation des dommages ne demandent pas nécessairement l'adoption de la loi comme telle, je pense que cela pourrait être mis en branle avant. Je pense que dans les recommandations du rapport Gauvin on avait parlé, entre autres, d'améliorer la sécurité routière. On n'a pas attendu la loi parce que cela ne touchait pas directement la loi et on a commencé à amener les mécanismes de ce côté. La mise en branle de cela, je pense, pourrait être commencée assez rapidement. Au moins, on pourrait les mettre en branle de façon qu'il y ait un commencement de structure à travers le Québec.

Mme Bacon: J'en ai d'ailleurs visité en Colombie-Britannique — ils en ont déjà, eux, sur place — pour en voir le fonctionnement, voir si c'est valable et si, à la longue, les prix sont augmentés ou non. Au cours des premières années, on se contente de prix raisonnables et il est évident que cela amène certains problèmes par la suite, après quelques années.

M. Léger: Est-ce que le ministre a rencontré M. Barrett ou M. Bennett en Colombie-Britannique?

Mme Bacon: Ni l'un ni l'autre. Je n'ai pas fait de politique, j'ai surtout fait attention de ne pas m'immiscer dans les affaires de l'Etat en Colombie-Britannique. J'ai surtout visité des centres d'évaluation. J'ai visité ICBC; je pense que c'était déjà suffisant.

M. Léger: De toute façon, je voudrais quand même dire au ministre que ce n'est pas péjoratif de faire de la politique avec un grand P parce que tout geste qu'elle pose est un geste politique.

Mme Bacon: II ne faudrait pas en faire avec un petit p à la commission parlementaire.

M. Léger: Non, on ne fait que de grandes choses, ici.

Le Président (M. Pilote): On pourrait toujours commencer par un petit p: Programme 1.

M. Léger: Oui, on est rendu là, M. le Président. Nos questions...

Protection du consommateur

Le Président (M. Pilote): Protection du public. Elément 1, protection du consommateur.

M. Léger: ... au programme 1, élément 1, la protection du consommateur, au point de vue de l'administration. Nos questions, à ces éléments, ne seront pas très nombreuses étant donné que le ministre a déposé un projet de refonte de la loi.

Cependant, au point de vue administratif, est-ce que le ministre pourrait nous brosser un tableau des réformes qui justifient l'augmentation quand même assez considérable des budgets, notamment les additions en locaux, les bureaux régionaux, le personnel de soutien, le personnel juridique, ainsi que les sommes allouées à la publicité?

Mme Bacon: II est évident que la loi qui a été déposée est d'envergure et nécessitera une augmentation, d'abord, du personnel de l'office, mais, déjà, on avait commencé à restructurer l'office, depuis mon arrivée au ministère et l'arrivée du nouveau directeur. Nous voulons nous donner les outils nécessaires, avec un nouvel organigramme, avec certaines dispositions qui nous permettront de répondre, avec la loi actuelle, aux demandes de la population. Ce que nous voulons, c'est intensifier cette accessibilité physique des consommateurs par l'ouverture de nouveaux bureaux, ce qui demande des sommes assez énormes. En même temps aussi, compte tenu de ces ouvertures de bureaux, il y a une augmentation des effectifs.

Il y a aussi cette accessibilité intellectuelle à l'information, à l'éducation des consommateurs; nous voulons faire davantage pour informer la population par les moyens qui sont mis à notre disposition, comme la communication. Je pense qu'à ce moment-là il faudra sûrement aux différentes divisions de l'office — il y a la division des plaintes et permis, la division des opérations et des relations publiques — et dans les différents bureaux locaux, augmenter, si c'est possible, le personnel pour répondre à la demande des consommateurs et faire en sorte que nous soyons accessibles, que ce soit sur le plan physique par nos bureaux ou intellectuellement par l'information qu'on peut donner à l'ensemble de la population.

M. Léger: M. le Président, la faillite du Cercle d'économie de la future ménagère a entraîné bien des plaintes de la part de consommateurs lésés par cette compagnie. Ces plaintes qui, à première vue, peuvent ressembler à toutes les autres plaintes, le créancier ayant perdu de l'argent dans une faillite, prennent un éclairage particulier et même une inondation particulière dans ce cas-ci. En effet, la responsabilité du gouvernement dans cette histoire est assez importante, car le nombre des consommateurs est très considérable. Si je ne m'abuse, je pense que c'est près de 19 000 consommateurs qui ont subi la faillite pour au-delà de $689 000 pour une fois, puis un autre montant plus loin que je n'ai pas ici. Alors, l'an dernier, à l'époque où cette faillite faisait encore la manchette des journaux, le ministre des Consommateurs du temps avait proposé que le ministère du Revenu renonce à son privilège de créancier en faveur des petits créanciers vu, justement, cette responsabilité indirecte du gouvernement.

Cette suggestion est, cependant, restée lettre morte et, actuellement, les deux ministres de l'époque, soit celui des consommateurs et celui du Revenu, ont changé de responsabilités. J'aimerais savoir du ministre s'il a suivi ce dossier et quelles mesures il envisage prendre à l'endroit des personnes lésées. Est-ce oublié ou si vous avez quelque chose à faire de ce côté?

Mme Bacon: Evidemment, à propos du problème que soulève le député de Lafontaine, cela nous a été demandé par plusieurs que le gouvernement paye les frais de la faillite. Si cette demande était agréée, elle ne saurait profiter aux créanciers ordinaires à la faillite, les pétitionnaires que les gens représentent. En vertu de la loi de la faillite, les montants qui représentent les frais de faillite, lesquels demeurent inconnus jusqu'au règlement de la faillite, seraient distribués non pas aux créanciers ordinaires, mais aux créanciers privilégiés. Cette somme profiterait donc, sinon entièrement, tout au moins en très grande partie, uniquement aux créanciers privilégiés et non à l'ensemble des pétitionnaires.

Une fois que ces derniers auraient payé les créanciers ordinaires, les consommateurs se partageraient le peu qui pourrait subsister. Dans ce contexte, le gouvernement a donc décidé de ne pas assumer les frais de la faillite. En effet, quand on dit: On va les assumer pour protéger davantage le consommateur, ce n'est pas le petit consommateur qu'on aurait privilégié à ce moment-là, mais bien les créanciers privilégiés.

M. Léger: Quand vous parlez de créanciers privilégiés, vous excluez les 19 000 personnes?

Mme Bacon: Parce qu'il y en avait d'autres.

M. Léger: Je pense bien qu'on est conscient que légalement le gouvernement n'a pas d'obligations envers ces personnes, mais notre droit civil prévoit quand même que, dans de tels cas, on peut faire un paiement en vertu d'une obligation naturelle comme c'est ici le cas.

Je pense que, n'ayant pas surveillé l'agissement de cette compagnie, cela a amené ces consommateurs à subir une perte énorme. Et bien qu'il n'existe pas d'obligation légale de le faire, il y a quand même une très forte responsabilité morale du gouvernement dans cette histoire. Je me demande si le ministre, ou le cabinet, en a envisagé la possibilité. Sinon, est-ce que le ministre aurait objection à saisir ses collègues de ce cas particulier?

Je peux vous dire une chose, c'est que l'Opposition ne s'opposerait certainement pas à ce type de paiement.

Mme Bacon: Si on se réfère à ce que l'ombudsman a rendu comme décision, à la suite de la révision de ce dossier, quand nous avions, comme ministère ou comme office, donné le permis au Cercle d'économie de la future ménagère, le Cercle d'économie de la future ménagère remplissait toutes les conditions pour obtenir un permis. Donc, ceci avait été vérifié avant d'émettre un permis.

Par la suite, il y a toutes sortes de moyens de révision, de pression de la part de l'office qui ont fait que, constamment, l'office se rendait vérifier les livres ou vérifier la bonne marche des affaires du Cercle d'économie de la future ménagère. L'office a quand même fait son travail dans ce suivi du dossier. En plus, il est évident que la loi 45 n'obligeait pas, à ce moment-là, les gens du Cercle d'économie de la future ménagère à déposer en fiducie l'argent qu'ils recevaient. Nous avons— évidemment, cela ne règle pas le problème— pallier ce problème par l'insertion de cet article dans la loi, celle qui a été déposée, afin que ces problèmes ne se répètent plus.

Alors, je pense que l'office a fait quand même le travail qu'il devait faire, compte tenu de la loi 45 actuelle, et a pris ses responsabilités dans ce dossier. D'ailleurs, le Protecteur du citoyen l'a confirmé en novembre dernier.

M. Léger: Est-ce que le ministre a terminé? M. le Président, c'est sûr que la loi est du côté du gouvernement. On peut trouver toutes les technicités de la loi comme prétexte pour ne pas aller plus loin. Ma question est non pas légaliste, mais vise beaucoup plus une certaine obligation naturelle que le gouvernement pourrait avoir envers tous ces petits épargnants qui se sont fait jouer. Pour quelle raison le gouvernement, utilisant son critère de créancier privilégié, ne pourrait-il pas faire des paiements directs, divisés entre les petits épargnants, qui se préparaient à se marier et qui avaient mis de côté des sommes d'argent? Tout le monde en a perdu beaucoup là-dedans et le gouvernement en a retiré, grâce à la loi et à la responsabilité du fisc là-dessus.

Mais ce n'est pas à cela que j'en ai; je sais que légalement le gouvernement peut faire cela. Mais, le droit est une chose et une obligation naturelle est une autre chose.

C'est pour cela que je vous dis que l'Opposition appuierait le gouvernement là-dessus. Les quelque $600 000 qui seront versés au gouvernement, de cette faillite, je ne vois pas pourquoi le gouvernement en jouirait, alors que des petits épargnants se sont fait jouer littéralement là-dedans et que le gouvernement a une partie de responsabilité et devrait faire sa part. C'est pour cela que je demande au ministre s'il n'y a pas moyen de... Il aurait l'appui inconditionnel de l'Opposition sur cette question.

Mme Bacon: Le gouvernement n'a pas l'obligation...

M. Léger: Je le sais.

Mme Bacon: ... de rembourser les pertes subies par les différents consommateurs. Dans ce cas, ce serait créer un précédent qui ferait en sorte qu'à chaque fois qu'un consommateur se sent lésé par une faillite pareille, le gouvernement serait obligé, à ce moment-là, de défrayer le coût énorme et le fardeau que cela peut lui imposer.

Alors, même dans ce cas, malgré que nous soyons, nous aussi, très sympathiques aux gens qui ont perdu de l'argent dans le Cercle d'économie de la future ménagère, le gouvernement ne peut pas rembourser chacun de ces individus.

M. Léger: M. le Président, je ne veux pas en faire un long débat. Je voulais tout simplement dire que c'est prévu dans le Code civil que le gouvernement, qui n'est pas obligé de payer, peut quand même payer s'il juge que c'est une aide qu'il peut apporter à une population. Ce n'est pas avec un argument juridique que je parlais de cela, c'est simplement la possibilité...

Lorsque je parle d'obligation naturelle, c'est parce que c'est prévu dans le Code civil que le gouvernement peut le faire. Autrement dit, vous avez les pouvoirs légaux de le faire et vous avez les pouvoirs légaux de ne pas le faire. C'est un choix politique que le gouvernement prend et c'est pour cette raison que je dis que l'Opposition l'aurait appuyé là-dessus.

Mme Bacon: Le meilleur des choix c'est toujours de donner aux gens ce qu'ils demandent. Mais je pense que ce serait donner un fardeau au gouvernement qu'il devrait assumer dans tous les cas, au niveau de chacun des individus qui se sentent lésés dans une transaction; le gouvernement ne peut pas supporter ce fardeau.

M. Léger: M. le Président, je dois prendre bonne note de l'attitude du gouvernement, qui avait une chance de faire quelque chose de bien; il ne le fait pas.

M. Harvey (Charlesbourg): Prenez avis.

Vente de terrains aux étrangers

M. Léger: M. le Président, je voudrais maintenant parler d'un autre domaine, la vente de terrains situés au Québec à des étrangers et par des étrangers. En février dernier, le magazine américain Esquire publiait une réclame de la compagnie Dupont Estate Limited qui offrait de vendre à des clients américains des terrains situés au Québec. Cette réclame abusive décrivait des terrains dont les avantages et les qualités ne reflétaient pas la réalité. Le ministre a-t-elle fait enquête sur cette compagnie? Il y a une copie d'annonces où on mentionnait la possibilité de pêcher du saumon de l'Atlantique dans le parc du Mont-Tremblant. Cela attirait les gens pour acheter des terrains.

Mme Bacon: L'enquête a été conduite au ministère; maintenant, on n'a pas les dernières

conclusions. Elles ne mont pas été remises et je les attends d'ici peu.

M. Léger: Vous allez les avoir d'ici la prochaine séance des crédits, cet après-midi, par exemple?

Mme Bacon: Non, cela n'ira pas à cet après-midi, je pense qu'il faudra me poser une question en Chambre, mais je m'engage à les donner en Chambre au député de Lafontaine.

M. Léger: Formellement?

Mme Bacon: Formellement. Je peux le faire pour cela.

M. Léger: Le ministre peut-elle nous dire quels moyens elle va prendre pour contrôler cette situation? Vous allez faire enquête, c'est-à-dire que vous allez continuer votre enquête commencée l'année dernière; mais quels moyens entendez-vous prendre pour contrôler des situations comme celle-là?

Mme Bacon: II s'agit du problème du lotissement; un projet de loi avait été préparé au sujet du lotissement prévoyant des prospectus et diverses formalités en matière de lotissement pour protéger le public. A la suite de consultations entre les divers ministères, les juridictions ont été mieux établies et aujourd'hui c'est un problème qui est au niveau des affaires municipales, par le truchement des pouvoirs des municipalités.

Il y a aussi un problème en ce qui concerne les terres arables, qui relèvent du ministère de l'Agriculture. Alors, dans cette perspective, le ministère s'est retiré directement du règlement de ces problèmes pour laisser les autres ministères exercer leur juridiction. Le ministère, dans ces domaines, intervient surtout supplétivement pour protéger le consommateur. Dans ce qui s'appelait à l'origine la Loi de protection des acheteurs de maisons neuves, on trouvait des dispositions sur le lotissement. Cela se retrouve dans certaines parties de la nouvelle Loi de la protection du consommateur, notamment les dispositions sur l'achat de maisons, selon des maisons témoins, alors que les autres domaines...

M. Léger: Sur l'achat de?

Mme Bacon: Selon des maisons témoins, certaines dispositions pour que l'acheteur ait une maison équivalente à celle qu'il a visitée et qui constitue la maison modèle ou la maison témoin. Donc, dans ce domaine du lotissement, nous n'avons pas l'initiative; ce que nous faisons cependant c'est par le biais de notre service du courtage immobilier. Notre service du courtage immobilier, évidemment, a une loi dont les limites sont assez déterminées; il s'agit de contrôler les intermédiaires en matière de transactions immobilières.

L'enquête qui s'effectue actuellement est pour déterminer si, en vertu de la Loi du courtage immobilier ou en vertu des lois corporatives, Loi des compagnies, Loi des compagnies étrangères, les ventes auxquelles vous vous référiez sont dans la légalité. Ceci ne peut régler le problème évidemment de la vente des terres arables à des étrangers. Il y aurait peut-être un élément de solution qui n'est pas, non plus, de la juridiction de notre ministère; il s'agit de l'aspect fiscal de ces ventes de terrains à des étrangers.

Achat de maisons neuves

M. Léger: Concernant la Loi sur la protection des acheteurs de maisons neuves et de terrains, le projet de loi no 6 qui avait été déposé l'année dernière, l'Assemblée nationale avait été saisie de ce projet de loi qui avait pour but de protéger les acheteurs de maisons neuves et de terrains. Ce projet de loi avait franchi presque toutes les étapes législatives, mais il a été retiré du feuilleton. On retrouve très peu de dispositions en ce sens dans le projet de refonte de la Loi de la protection du consommateur que le ministre nous a présenté. Quelles sont les intentions du ministère dans ce domaine?

Mme Bacon: Nous avons retiré le projet de loi no 6, justement parce qu'il n'est pas dans notre ressort de protéger... Nous protégeons, pour les maisons neuves, ce que nous avons inclus dans la loi? Il y a des ministères qui devront déposer, s ils ne I'ont déjà fait, certaines lois qui protégeront le consommateur de façon adéquate, mais suivant les responsabilités de chacun de ces ministères.

Notre responsabilité était de protéger le consommateur qui achetait une maison suivant la maison témoin, lorsqu'on offre certains articles ou certains équipements pour que ceux-ci soient bien compris là-dedans et qu'il y ait une liste complète comme on le retrouve dans le nouveau projet de loi. Le ministère des Affaires municipales, le ministère du Travail, le ministère des Terres et Forêts sont concernés par ce projet. Ce que nous ne voulions pas, c'est qu'il y ait répétition dans les lois, afin que le citoyen s'y retrouve, afin qu'il ne retrouve pas une partie dans la loi no 6, une autre partie dans la loi qui sera déposée par le ministère des Affaires municipales ou par le ministère du Travail ou celui des Terres et Forêts, mais que ce soit dans une seule et même loi. C'est pour cela que nous avons voulu donner une protection uniquement pour les achats de maisons qui se font d'après une maison témoin.

M. Léger: Le ministre n'était pas titulaire de ce ministère quand cette loi a été adoptée. C'est son prédécesseur qui était là. J'étais moi-même le critique de l'Opposition là-dessus. A ma grande surprise, pendant l'étude article par article — j'avais appuyé, d'une part, le ministre — ce sont des ministres du gouvernement qui étaient venus saboter cette loi. Je pense que c'est

malheureux qu'on n'ait pas pu faire l'unanimité. L'Opposition était d'accord avec le projet de loi, moyennant quelques amendements ici et là. Cela amenait quand même une correction à une protection qui était absolument inexistante au niveau de groupes de personnes qui achètent d'un entrepreneur des maisons neuves.

J'attirerais l'attention du ministre sur un point bien précis: la disparition d'un entrepreneur avant même qu'il ait terminé sa responsabilité envers les acheteurs de ces maisons neuves. Il y en a qui laissent en plan des quantités énormes de citoyens qui sont pris avec une maison qui n'est pas complètement terminée, qui a des failles. Ils ont des problèmes avec cette maison, qui font qu'ils sont obligés de mettre $1000, $2000 ou $3000 de réparations pour terminer la maison. Je donnais justement l'exemple, dans le comté de Lafontaine, des Habitations Roncen où l'entrepreneur avait bâti une quarantaine de maisons. Il était disparu; on ne savait pas s'il avait fait faillite ou non. La Société centrale d'hypothèques et de logement avait prêté l'argent, mais son seul souci était de protéger l'investissement de l'hypothèque. Vis-à-vis de l'entrepreneur à qui elle avait donné le permis de construire et qu'elle avait aussi surveillé durant la construction de ces maisons — elle avait fait une mauvaise surveillance — elle ne se sentait absolument pas liée pour autre chose que pour le montant qu'elle avait mis, dans cela, soit en prêt, soit en garantie bancaire pour l'entrepreneur. Les citoyens se sont vus privés d'une réclamation qui dépassait $75 000 à $80 000 pour les 40 maisons et ils n'ont eu, pour se le diviser entre eux, que le prêt hypothécaire qui restait, je pense que c'était $9000 à diviser entre 40 propriétaires.

A ce moment-là, M. le Président, le ministre qui précédait le ministre actuel, avait présenté ce projet de loi. Nous l'avions appuyé. Ce sont des ministres et des députés du parti ministériel qui étaient venus boycotter le projet de loi.

Je pense qu'il n'y a aucune autre loi actuelle, dans d'autres ministères, que ce soit dans le domaine du ministère du Travail ou dans d'autres ministères, qui tienne compte de cette situation. Entre autres, on avait proposé au ministre — je pense que c'était son intention — d'obliger les entrepreneurs, pour construire des maisons, d'avoir un permis du Québec avec aussi un dépôt de garantie. Cette garantie ne serait remise à l'entrepreneur qu'après qu'il aurait nettement terminé la maison à la satisfaction du contrat. A ce moment-là, il y avait une garantie supplémentaire pour le propriétaire de pouvoir recueillir, à même cette somme de garantie, une partie des réparations qui lui était due.

Je pense que le ministre devrait repenser cette situation et nous ramener un projet de loi dans ce sens. Sinon, on ne protège pas les acheteurs éventuels de maisons neuves.

Mme Bacon: Au moment du dépôt de ce projet de loi, ou même de son étude, l'Office de la construction n'existait pas. Quand on pense au cautionnement, au système d'indemnisation, dans le moment, il y a des négociations en cours entre l'Association des constructeurs et l'Office de la construction. C'est ce qui a amené le retrait de ce projet de loi. Ce sont les différentes lois qui ont été adoptées au niveau du ministère du Travail, la création de l'Office de la construction qui exerce quand même une certaine surveillance. Nous n'avions pas, nous, à faire un dédoublement de cette loi ou de cet office qui existe. On n'a pas à recommencer dans une loi. C'est ce qui a amené le retrait du projet de loi en ayant prévu d'intercaler, dans la loi 7, la protection des acheteurs de maisons neuves. Ils ont cette protection au niveau des maisons neuves d'après les maisons témoins, mais le ministère du Travail, par le biais de l'Office de la construction, continue ses négociations avec l'Association des constructeurs.

M. Léger: Je dois quand même dire au ministre que l'Office de la construction n'a pas, dans ses règlements et dans les lois actuelles, le gouvernement n'a pas de protection contre l'entrepreneur qui disparaît ou qui fait faillite et qui laisse des propriétaires de maisons dans l'obligation de payer une hypothèque très élevée sur une maison qui n'a pas été librée tel que convenu. Même si l'entrepreneur doit vendre une maison qui correspond à la maison modèle, si ce n'est pas le cas, vous n'avez rien dans vos lois, actuellement, dans aucun des ministères, qui permette de protéger l'acheteur de la maison neuve en cas de disparition, de fuite ou de faillite de la part de l'entrepreneur.

Mme Bacon: M. le Président, au même moment où était déposé le bill no 6, l'Assemblée nationale a voté la loi no 33, Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs en construction, qui prévoit un régime de licence pour tout entrepreneur de construction.

La Régie des entreprises de construction du Québec est chargée de l'administration de cette loi. Cette loi est sanctionnée. Elle relève du ministère du Travail. Depuis le 31 mars, tout entrepreneur de construction, au Québec, doit détenir une licence émise par la nouvelle Régie des entreprises de construction.

A l'article 34 de la loi no 33 de 1975, il est prévu que, par voie de règlement, la régie peut exiger des cautionnements pour protéger les propriétaires consommateurs concernant les fraudes, malversations et aussi, jusqu'à un certain point, au niveau de l'exécution des travaux. Le ministère des Consommateur, Coopératives et Institutions financières est toujours en relation avec le ministère du Travail et de la nouvelle Régie des entreprises de construction, à cet effet. Le ministère du Travail a été saisi, par l'Association des entrepreneurs de construction du Québec, d'un projet de plan de garantie pour les acheteurs de maisons neuves, laquelle protection répondrait aux exigences de la nouvelle Régie des entreprises de construction qui exigera, d'ici quelques mois, un double cautionnement pour protéger les consommateurs, donc protection des dépôts lors des offres d'achat, protection pour exécution des travaux ou protection contre les détournements, malversations, etc.

Alors je sais que c'est à l'état de projet. La loi 33 donne ouverture et la Régie des entreprises de construction sera en mesure, via le ministre du Travail, de donner de plus amples informations concernant le type de protection que nous allons trouver au Québec et qui a déjà commencé, d'après le modèle des provinces d'Ontario, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta.

M. Léger: M. le Président, de toute façon, en ce qui nous concerne, nous allons attendre cette réglementation qui n'existe pas actuellement, qui va venir, comme on l'affirme. Mais le cautionnement devrait être quand même asse2 élevé parce que la personne qui ne perd que $5000 et fait quelque $100 000 de profit et disparaît, les propriétaires de maisons ne peuvent pas faire autre chose que réclamer, mais de qui, si la personne est en faillite? Le cautionnement, il faudrait quand même qu'il soit assez élevé.

Mme Bacon: L'information que le ministère des Consommateurs possède est à l'effet que chaque unité d'habitation, lors de la mise en chantier, sera protégée. Comme je l'ai dit, les dépôts seront jusqu'à concurrence de $20 000.

M. Léger: Par maison?

Mme Bacon: Par maison. Je parle juste du dépôt. Disons que le système qui a été présenté au ministère du Travail est que pour chaque mise en chantier, dès le début, comme je l'ai dit, il revient au ministre du Travail... Notre ministère agit comme consultant pour voir les implications en matière d'assurance et autres implications du côté des lois corporatives.

M. Léger: M. le Président, est-ce que le ministre peut me dire — on m'a dit que cela existe dans quatre ministères — ce qui existait au niveau des Affaires municipales et au niveau des Terres et Forêts?

Mme Bacon: Le livre blanc sur l'urbanisme, l'aménagement du territoire, en fait, ce sont les préoccupations du ministère des Affaires municipales, pour faire les contrôles qui seront éventuellement exercés sur les vendeurs de lots. Cela met fin aux abus visés par le projet de loi no 6. On peut voir cela au niveau des Affaires municipales.

Terres et Forêts, cela touche aux lotissements aussi, ce qui pourrait être protégé par les Terres et Forêts. On vient d'expliquer pour le ministère du Travail.

Faillite de Westgate

M. Léger: Est-ce que je peux faire une confidence au ministre? Si, au ministère des Affaires municipales, on n'en est rendu qu'au livre blanc, connaissant la célérité du ministre des Affaires municipales, où la réglementation sur l'environnement a pris quatre ans et elle n'est même pas encore déposée, je ne pense pas qu'on règle les problèmes des maisons neuves très bientôt. On est uniquement rendu au livre blanc, aux Affaires municipales. Je fais cela en confidence, je pense que personne ne nous écoute actuellement.

M. le Président, concernant la faillite de Westgate Realties, la faillite des Immeubles Westgate pose certaines questions quant à la surveillance qu'exerce le ministère sur les agences de courtage immobilier. Quelles ont été les actions du service de courtage immobilier du ministère avant et aussi après la faillite de Westgate?

Mme Bacon: Après une première requête en date du 19 août 1975, pour un montant de $1000, contre les Immeubles Westgate, à titre de débitrice, le courtier en valeurs mobilières le plus important dans la province de Québec confessait son état d'insolvabilité devant la Cour Supérieure du district de Montréal. Et lors de la première assemblée des créanciers à la faillite, le président de la firme Westgate expliquait que les causes de la faillite tenaient principalement à la mauvaise gestion de son entreprise, à une insuffisance de capitaux et à une expansion exagérée.

A titre d'exemple, au cours de la dernière année, la firme avait ouvert seize nouvelles succursales et avait investi près de $1 million dans une nouvelle entreprise qui se spécialisait dans le prêt hypothécaire, soit le Westgage Mortgage Company. A la fin du mois de juin 1975, la firme Westgate nous a présenté ses états financiers pour son année financière se terminant le 30 avril précédent. Ces états financiers nous montraient qu'à cette date le fonds de roulement de la compagnie était déjà déficitaire; alors que les revenus avaient doublé par rapport à l'année précédente, les dépenses de cette compagnie avaient triplé.

De plus, après une vérification faite par mon ministère, nous avons constaté que ces états financiers, bien que vérifiés et portant la signature d'un comptable agréé, ne révélaient pas la situation réelle de l'entreprise. Il était devenu évident, pour mon ministère, qu'au strict point de vue financier cette entreprise devait poser les gestes nécessaires afin de pouvoir survivre. La Loi du courtage immobilier prévoit que tout courtier en immeuble qui, dans l'exercice de ses fonctions, reçoit pour autrui des dépôts est tenu de déposer ces dépôts dans un compte en fiducie spécial et ne peut débourser cet argent que selon les conditions de la fiducie. Dans la pratique courante, la fiducie d'un courtier est déterminée à l'offre d'achat acceptée par les parties où l'on stipule que les dépôts que doivent conserver les courtiers sont destinés à être imputés au total des prix de vente à titre de réduction.

La position de mon ministère est formelle sur cette question: les dépôts ne constituent pas la commission des courtiers, n'appartiennent pas aux courtiers et ne peuvent être utilisés par ces derniers pour des fins personnelles. Dès sa nomination, au mois de mars 1975, le nouveau surintendant du service du courtage immobilier du Québec...

M. Léger: Est-ce que je peux demander au ministre, pour comprendre ce qu'elle vient de dire...

Mme Bacon: C'est parce qu'il faut faire tout l'historique. Si le député de Lafontaine veut vraiment suivre le dossier, il faut partir du début. Cela peut être long, je m'excuse, mais il faut que ça soit long pour qu'on comprenne bien.

M. Léger: Allez!

Mme Bacon: Le nouveau surintendant, à sa nomination au mois de mars 1975, constata que la firme Westgage utilisait une partie importante des fonds qui devaient être maintenus en fiducie pour le financement de ses opérations courantes. Je pense qu'il faut aussi être le plus spécifique possible parce qu'il s'est écrit tellement de choses sur ce problème de Westgate.

Le 17 mars 1975, le surintendant somma la firme Westgate de mettre fin à cette pratique et de prendre les dispositions nécessaires pour rétablir le solde de son compte en fiducie comme il se devait. Les données que mon ministère avait en sa possession à cette date indiquaient que la firme Westgate pouvait se conformer aux dispositions de la loi. Les derniers états financiers qui nous ont été présentés, à la fin du mois de juin, nous démontraient clairement que cette firme de courtage connaissait une situation financière des plus précaires et ce malgré le recours systématique au compte en fiducie pour le financement de ses opérations. Dès que mon ministère constata la situation financière précaire de cette firme de courtage en immeuble, qui était la plus importante au Québec tant par son volume d'opérations immobilières que par le nombre de ses employés, il était devenu évident qu'il fallait prendre des dispositions particulières pour éviter que le public, qui transigeait des opérations immobilières par l'intermédiaire des Immeubles Westgate Inc., subisse de fortes pertes financières.

Si le surintendant du courtage immobilier avait suspendu le permis du courtier de la firme Westgate au début du mois de juillet, la situation aurait été des plus désastreuse pour le public. De plus, le président de la firme Westgate informa officiellement mon ministère au début de juillet qu'il était à la recherche de capitaux afin d'effectuer la réorganisation financière de la compagnie. Toutefois, le surintendant considéra à cette époque qu'il ne fallait pas que le délai accordé à cette firme, pour rétablir sa situation financière, joue au détriment du public, qui continuait à transiger ses opérations immobilières par cette firme. Le surintendant obligea donc cette firme à ne plus utiliser son compte en fiducie pour le financement de ses opérations et mon ministère prit les dispositions nécessaires pour s'assurer du respect des dispositions de la loi.

Grâce à l'intervention du service du courtage immobilier et de mon ministère tous les nouveaux dépôts confiés à la firme Westgate jusqu'à sa faillite, se totalisant à près de $600 000, ont pu être protégés. Considérant que la Loi du courtage immobilier est une loi qui a pour objectif de protéger le public, que l'intérêt public est en cause, à la demande de mon ministère le procureur général intervient dans toutes les causes en cours présen- tement devant les tribunaux pour faire valoir les droits des personnes qui ont effectué des dépôts. Mon ministère est des plus optimiste et croit fortement que le public ne subira aucune perte financière due à la faillite de cette firme de courtage en immeuble. C'est pour cela qu'il a fallu y mettre le temps pour suivre de très près ce problème occasionné par la firme Westgate.

M. Léger: Par la suite, est-ce que les sommes déposées pour leurs clients doivent être maintenant placées pour n'importe quel courtier en fidéi-commis? C'est donc dire qu'une personne qui veut acheter une maison, donne un dépôt de $500 $1000 ou $5000 à un courtier. Quand ce courtier va faire signer l'acceptation par le vendeur, est-ce que le chèque doit être fait au nom du vendeur et du courtier ou s'il est fait au nom du courtier qui va le mettre dans un compte en fidéicommis?

Mme Bacon: II n'y a pas de loi qui précise que cela doit être fait au nom des deux, au nom du vendeur, ou au nom du courtier, ou au nom de la compagnie, mais ces sommes doivent être placées en fidéicommis. C'est pour protéger davantage le consommateur.

M. Léger: Je pense que là-dedans il faut quand même admettre que le ministère a fait un bon travail concernant la surveillance de Westgate et je le félicite pour les autres fois où je ne peux pas féliciter le ministère.

Mme Bacon: J'accepte avec plaisir.

Indemnisation des victimes de courtage immobilier

M. Léger: Par la même occasion, je pense que le surintendant des assurances avait annoncé la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de courtage immobilier. Est-ce que le ministre peut nous donner des détails sur ces projets-là?

Mme Bacon: Disons que c'est à l'état de discussion avec l'Association de l'immeuble. Comme le ministre l'a annoncé, il est possible que la Loi du courtage immobilier et ses règlements d'application fassent l'objet d'amendements. La loi date de 1962 et, tant par le volume ou la valeur des opérations immobilières, on s'aperçoit que les dispositions actuelles de la loi qui exigent des cautionnements de $5000 pour le courtier et de $1000 par vendeur ne semblent pas donner toute la protection désirée. Telle protection était nécessairement efficace en 1962, alors c'est à l'état de discussion présentement. Il y a différents Etats américains qui ont des fonds d'indemnisation. Ce qui avait été annoncé ou plutôt discuté publiquement par le surintendant, c'est suite à une question lors du congrès de l'Association de l'immeuble où on semblait privilégier l'approche de la Chambre des notaires, lesquels notaires ont des dépôts aussi qu'ils doivent détenir en fidéicommis et les notaires renoncent aux intérêts générés par ces dépôts et ces intérêts vont alimenter un fonds

de recherche. Alors c'est à l'état d'étude présentement.

Il y a peut-être une gamme, un éventail de protection financière, cela peut être un système mixte d'indemnisation. Ce que nous savons c'est que par les contrôles très sévères qui ont été établis au cours des derniers mois, les dépôts détenus par les courtiers en immeuble en tout temps totalisent près de $8 millions, et ceci préoccupe notre ministère. Les associations, les chambres d'immeuble sont très bien informées et elles incitent aussi leurs membres au respect intégral de la loi sur cette question.

M. Léger: Je vous remercie. M. le Président, en ce qui nous concerne, le programme 1 c'est adopté.

Le Président (M. Pilote): Programme 1 adopté, éléments 1 et 2. Programme 2.

Fichier central des entreprises

M. Léger: M. le Président, concernant le fichier central des entreprises, alors que le fichier central des entreprises permettait, il y a tout au plus deux ans, une consultation rapide des renseignements accessibles sur les diverses compagnies, on a assisté depuis plus d'un an à un alourdissement des procédures, de telle sorte qu'il faut maintenant de 24 à 72 heures pour obtenir une copie des feuilles de renseignement lorsqu'on se présente directement au comptoir et même un délai passablement plus long lorsqu'on procède par la poste.

Est-ce que le ministre peut nous expliquer les raisons administratives de ces délais qui deviennent chaque mois de plus en plus longs?

Mme Bacon: Je crois qu'il faudrait préciser que ce n'est pas le fichier central qui répond directement aux individus, mais bien le service des compagnies. C'est ce que voulait dire le député de Lafontaine. Ce n'est pas le fichier central comme tel, mais le service des compagnies.

M. Léger: Le service des renseignements au public.

Mme Bacon: M. le Président, les retards qui ont lieu actuellement auraient une cause technique tout à fait particulière. Actuellement, notre service des compagnies procède à appareiller et à fusionner les dossiers des archives et les dossiers du service des renseignements des compagnies. Alors, ceci occasionnerait certains délais, justement parce que ce sont des dossiers en transit qui sont souvent l'objet de certains travaux, en vue d'en faire un dossier unique.

M. Léger: Mais, dans son introduction, le ministre a parlé d'une politique plus serrée, car on avait vu des abus prévisibles de ces informations. Qu'est-ce que le ministre entendait par abus de ces informations? En quel sens peut-il y avoir des abus pour des informations publiques au sujet de personnes qui, souvent, se cachent derrière des noms légaux alors qu'elles sont propriétaires ou actionnaires de compagnies? Quels abus peut-on avoir dans cela?

Mme Bacon: L'abus est en matière de diffusion des renseignements contenus au fichier. Voici un appareil mécanographique qui permet des regroupements, qui permet de donner à l'information une valeur qu'elle n'aurait pas individuellement.

Alors, au point de vue administratif, le problème est le suivant. Est-ce que la direction d'un fichier, composée de techniciens très compétents, devrait être juge de l'information qu'elle va fournir au public en général? La politique qui n'est pas encore sanctionnée, mais qui est déjà formulée, c est que cela devrait être à l'intérieur des lois adoptées par la Chambre et de la réglementation que devraient être fournis les renseignements.

Le fichier est un instrument qui n'est pas exclusif au ministère; plusieurs ministères y participent. Il y a plus d'une centaine de fichiers particuliers qui sont affiliés au fichier central. Alors, la politique qui est formulée actuellement est que ceux qui ont juridiction en matière de lois et de réglementations sont ceux qui vont fournir l'information. Evidemment, si nous prenons un ministère comme le ministère du Revenu, il n'y a pas de doute qu'il y a énormément d'informations qui ne peuvent pas être fournies. Nous ne pouvons pas prendre le risque que les fonctionnaires du fichier central fournissent indirectement cette information.

S'il y a des informations à fournir à d'autres gouvernements, par exemple, qui ont à négocier, disons avec le gouvernement central, il ne faudrait pas laisser un fonctionnaire du ministère des Institutions financières, qui s'occupe du fichier central, déterminer quels renseignements il fournira.

Alors, il faut une certaine unité, un certain intérêt et une certaine juridiction pour ceux qui fournissent les renseignements. C'est dans ce sens, je crois, que le discours du ministre faisait état d'abus possibles. Donc, le contrôle s'effectue selon les lois et les réglementations qui ont été adoptées par le gouvernement.

M. Léger: Le ministre peut-elle nous dire maintenant s'il va y avoir un allégement concernant les informations au bureau central? Présentement, même s'il y a un problème de transit, même si ce problème n'est pas permanent, cela sera-t-il aussi rapide que ce l'était auparavant?

Mme Bacon: On m'informe que les retards étaient aussi occasionnés par des changements dans l'informatique. Le support informatique du fichier central est au ministère du Revenu, aux ordinateurs du ministère du Revenu, et apparemment on aurait changé le système récemment et cela a occasionné aussi certains problèmes, ce qui expliquerait ces retards dont vous parlez.

M. Léger: M. le Président, si vous n'avez pas

d'objection, je proposerais l'ajournement ou la suspension de la séance.

Le Président (M. Pilote): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 45)

Reprise de la séance à 16 h 19

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières reprend l'étude des crédits du ministères des Consommateurs, Coopératives et Institutions Financières. Nous en étions, je crois, au programme 2.

M. Léger: Elément 1, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Elément 1. Le député de Lafontaine.

M. Léger: M. le Président, je n'ai pas tellement de questions au programme 2. On m'avait demandé de passer tantôt au programme 3, élément 4; je n'ai pas d'objection.

Mme Bacon: C'est que M. Lacoste doit nous quitter.

M. Léger: Je n'ai qu'une question générale. D'ailleurs, comme je le disais au ministre au début de l'étude' étant donné qu'il y a plusieurs projets de loi qui s'en viennent, nous ne voyons pas l'importance de poser des questions sur des sujets qui vont probablement être couverts par ces projets de loi. C'est la raison pour laquelle nous avons limité nos questions à des choses qui sont en dehors des projets de loi. C'est pour cela qu'à l'élément 3, programme 4, pour libérer le fonctionnaire qui doit retourner, je pense, à Montréal...

Mme Bacon: Programme 3, élément 4?

M. Léger: Qu'est-ce que j'ai dit?

Mme Bacon: Le contraire.

Commerce des valeurs mobilières

M. Léger: Programme 3, élément 4. Je voudrais simplement demander au ministre, du fait que, dans ses remarques préliminaires, lors de l'ouverture des crédits, le ministre nous avait annoncé une refonte prochaine de la Loi des valeurs mobilières, si le ministre peut nous brosser un tableau des modifications envisagées et nous dire si le projet est imputable à une modification permanente du marché des valeurs mobilières ou aux mauvaises conditions économiques qui prévalent depuis quelques années. Quelles sont les raisons de cette modification?

Mme Bacon: M. le Président, mon nom est Gérald Lacoste, président de la Commission des valeurs mobilières. La refonte de la Loi des valeurs mobilières qui est actuellement en cours n'est aucunement imputable aux conditions actuelles du marché. Il s'agit tout simplement de moderniser une loi qui régie un marché qui est lui-même constamment en mouvement et en évolution. No-

tre marché des capitaux est intimement lié à celui de nos voisins de l'Ontario et encore plus étroitement, du moins quant aux effets, avec celui de nos voisins du sud. Les Américains ont eux-mêmes, depuis juin 1975, apporté des amendements majeurs à leur loi des valeurs mobilières, afin de simplifier, dans la mesure du possible, la réglementation et assurer un marché qui est beaucoup plus concurrentiel.

Ces mêmes principes président à une refonte qui est actuellement en cours. Il y a même un projet de loi déposé en Ontario et, ici au Québec, nous avons déjà, à la commission, un travail assez avancé de rédaction, afin de s'assurer qu'il y a quand même une uniformité dans la loi pour que les utilisateurs de capitaux à travers le pays — et non seulement au Québec — puissent jouir d'un système assez uniforme.

C'est le contexte dans lequel s'insère la révision de la Loi des valeurs mobilières.

M. Léger: Est-ce que cela va être un peu une copie du projet de loi ontarien ou s'il va y avoir des échanges entre les deux provinces?

Mme Bacon: Je dirais qu'il y a déjà eu au moins trois réunions non seulement avec la commission des valeurs mobilières de l'Ontario mais avec tous nos homologues à travers le Canada où on a étudié, point par point, le projet de l'Ontario. Chacune des commissions, et particulièrement le Québec, a pu avoir un "input" dans ce que serait le projet des valeurs mobilières de l'Ontario.

Quant à la commission du Québec, nous essayons, dans tous les domaines où il doit y avoir uniformité pour que le marché des capitaux soit efficace, de garder une uniformité. Mais en ce qui concerne les domaines qui nous sont propres, comme, par exemple, le rôle de la commission, l'appel des décisions de la commission, les réglementations, les enregistrements de courtiers, les recommandations particulières que la commission peut faire au ministre, tous ces domaines qui nous sont déjà propres, nous les reformulerons, mais avec notre propre philosophie, parce qu'il ne s'agit pas là de domaines qui touchent ou qui affectent nos voisins au Canada.

M. Léger: M. le Président, en ce qui nous concerne, sur ce programme, nous n'avions pas plus de questions pour cette année.

Le Président (M. Lafrance): Le programme 3. M. Léger: A l'élément 4, du programme 3.

Le Président (M. Lafrance): L'élément 4 du programme 3 est adopté.

M. Léger: Je vous remercie. Si vous le permettez, M. le Président, nous allons revenir au programme 2, élément 1, concernant la remise des rapports annuels des compagnies. Le ministre peut-il nous dire quelles sont les pénalités impo- sées aux compagnies qui font défaut de remettre leur rapport annuel à la date prévue?

Mme Bacon: II n'y a pas de montant spécifique de pénalité. La compagnie est dissoute si le rapport n'est pas soumis dans l'année, mais il n'y a pas un montant de pénalité comme tel.

M. Léger: Mais la pénalité, c'est de dissoudre la compagnie. Alors, comment se fait-il qu'il peut y avoir des compagnies, dont la charte existe depuis au moins trois ou quatre ans, qui n'ont pas fait de rapport depuis trois ou quatre ans, qui ont même des contrats avec le gouvernement et qui ne sont pas dissoutes, puisque les contrats existent encore?

Mme Bacon: II se pourrait que, par exception, certaines compagnies subsistent même si elles n'ont pas fait de rapport annuel. Je peux dire qu'il s'est fait une opération de nettoyage justement au sujet de ces compagnies qui ne faisaient pas de rapport, qui a représenté un travail considérable. Cela a impliqué l'annulation de 22 968 chartes. Certaines ont fait revivre la compagnie, parce que c'est prévu à la loi, et il y en a 695 dont la dissolution a été révoquée, en plus des 22 000. En fait, ce seraient 28 000 ou 29 000 qui ont été annulées. Maintenant, à cause des grands nombres — je crois qu'il y a 140 000 dossiers dans ces services — il est fort possible qu'il y ait quelques cas isolés.

M. Léger: 140 000 dossiers.

Mme Bacon: Oui, je crois. 70 000 compagnies actives actuellement. Le chiffre que je citais comprendrait les raisons sociales et d'autres dossiers.

M. Léger: Combien de compagnies soit, en pourcentage ou en nombre, font ainsi défaut de produire leur rapport à temps?

Mme Bacon: Je pourrais difficilement vous donner des chiffres précis. La concentration des rapports annuels des compagnies, généralement, c'est en août, septembre. L'année dernière, c'était un peu plus tard à cause de la grève des postes; à ce qu'on me dit, cela a été décalé de quelques mois.

Il y a quelques milliers de rapports qui se font au cours de l'année, hors ces périodes de pointe. Ce qui veut dire qu'il y a sûrement des gens en retard, au cours de l'année, même si cela ne représente pas la grande partie des compagnies qui doivent faire rapport.

M. Léger: Le ministre me disait tantôt qu'une compagnie qui ne fait pas son rapport peut être dissoute dans l'année qui suit?

Mme Bacon: II y a toujours un avis qui est envoyé à nouveau. Normalement, la compagnie, si elle n'a pas fait son rapport, reçoit un autre avis du

service pour soumettre son rapport. Après, il y a possibilité de dissoudre.

M. Léger: L'avis est envoyé l'année suivante? Mme Bacon: Oui, normalement dans l'année...

M. Léger: S'il n'y a pas de réponse après l'avis, la compagnie est dissoute.

Mme Bacon: C'est cela. Oui, alors cela fait comme un deuxième avis, ni plus ni moins.

M. Léger: Alors, cela veut dire qu'une compagnie qui n'aurait pas fait de rapport, selon les critères du ministère, après deux ans ne devrait pas exister ou automatiquement devrait être dissoute?

Mme Bacon: En fait, quand le fichier sera mis à jour et que, ce qu'on disait tantôt, l'opération nettoyage sera terminée, il sera possible de les suivre d'aussi près. Pour le moment, c'est un peu difficile d'exercer un tel contrôle, mais dès que les dossiers seront mis à jour, on pourra le faire.

M. Léger: Est-ce que c'est sur ordinateur? Mme Bacon: Oui.

M. Léger: Autrement dit, au moment où on se parle, le ministre ne peut pas m'affirmer que des compagnies qui n'auraient pas fait de rapport depuis, supposons, deux ou trois ans ont été dissoutes. Il se peut qu'il y ait des compagnies qui sont là, sans rapport depuis trois ou quatre ans, même, et qui n'ont pas encore été dissoutes, même s'il n'y a pas eu de rapport depuis tant d'années?

Mme Bacon: A cause de cette opération nettoyage, justement, qui a causé des délais, mais cette opération achève et, par la suite, nous pourrons suivre de plus près.

Le programme, pour être terminé, impliquerait probablement l'annulation de 15 000 à 20 000 chartes qui subsistent toujours. Alors, ceci va se compléter. Nous avons parlé ce matin de la fusion du dossier de la Loi des renseignements sur les compagnies dont il est question actuellement et le dossier d'archives, les documents constitutifs de la corporation qui, jusqu'ici, étaient séparés, ce qui pouvait être aussi une source d'erreurs ou d'incertitudes.

M. Léger: D'accord, M. le Président. Maintenant, à l'élément 3, concernant les associations coopératives, quel est le montant des subventions versées par le ministère au conseil de la coopération, pour l'année écoulée et aussi pour l'année qui commence? Combien prévoyez-vous verser?

Mme Bacon: J'ai distribué les tableaux ce matin. Dans les dossiers qui ont été remis, vous avez les montants qui sont versés à chacune des associations.

Nous avons peut-être une autre copie si...

M. Léger: Alors bon, je n'en ai pas encore une copie.

Mme Bacon: Tous les montants sont mentionnés. Vous les retrouverez peut-être là-dedans.

M. Léger: Je ne sais pas si le ministre m'a répondu dans son intervention ce matin mais, lors de l'étude des crédits de l'an dernier, le ministre de l'époque a fait état d'une étude portant sur le coopératisme et ses applications par les différents ministères. Cette étude était commandée à M. Roland Parenteau. Je sais que le ministre en a parlé ce matin. Le ministre peut-elle nous dire ce qu'il est advenu de cette étude ou pourriez-vous compléter ce que vous avez donné ce matin? Vous en avez un peu parlé ce matin.

Mme Bacon: En fait, je ne peux que répéter ce que j'ai dit ce matin. M. Parenteau nous a remis son rapport et j'ai demandé qu'on forme un comité mixte des représentants du milieu coopératif et du ministère qui ont étudié les recommandations du rapport Parenteau. D'ici quelques semaines, les conclusions de cette étude me seront remises et on pourra ensuite passer à l'action suivante. Cela amènera peut-être, comme je le mentionnais ce matin, quelques petits changements au niveau du service, mais je maintiens encore, comme je l'ai d'ailleurs fait ce matin, que ce service doit exister. Ce sont des antennes privilégiées que nous avons dans le milieu coopératif et le gouvernement ne peut s'en passer. Il y aurait peut-être quelques changements mineurs au service, mais nous devons maintenir un tel service au niveau du ministère.

M. Léger: Le ministre pourrait-elle déposer bientôt ce rapport Parenteau?

Mme Bacon: Le rapport Parenteau a été rendu public dès qu'il a été remis aux autorités. Je peux en faire parvenir des copies au député de Lafontaine, mais il a été rendu public à ce moment et commenté largement par les media d'information.

M. Léger: D'accord. Alors, M. le Président, le programme 2, en ce qui me concerne, est adopté.

Le Président (M. Lafrance): Le programme 2, éléments 1, 2 et 3, est adopté. Le programme 3, élément 1.

M. Léger: M. le Président, concernant ce programme, le ministre pourrait-elle nous dire d'une façon générale comment, par quels moyens, le ministère exerce sa surveillance des caisses d'épargne et de crédit? Autrement dit, quel est le processus de surveillance des caisses d'épargne et de crédit?

Mme Bacon: La surveillance des caisses d'épargne et de crédit s'effectue à la fois par le service des caisses d'épargne et de crédit du ministère et par la Régie de l'assurance-dépôts. La

Régie de l'assurance-dépôts comportant un conseil d'administration qui est surtout un conseil d'adjudication, le travail technique d'analyse et de recommandations revient au ministère.

Les relations continuent entre les fédérations et les caisses. Elles s'établissent donc au niveau du service des caisses d'épargne et de crédit, généralement, avec les fédérations et les caisses.

Comment s'exerce cette surveillance? Elle s'exerce par certains instruments. Le premier instrument, ce sont évidemment les rapports financiers annuels; dans certains cas, lorsqu'il s'agit de jeunes fédérations où l'évolution est plus rapide, même de rapports mensuels. Une analyse a lieu de ces rapports sur une base individuelle et sur une base globale. Le second moyen, qui est plutôt un moyen d'exception, et on comprendra pourquoi, c'est évidemment l'inspection. La politique du ministère et de la régie, jusqu'ici, a été d'utiliser, dans la mesure du possible, les services d'inspection des fédérations et, là aussi, de procéder par exception lorsqu'il y a des cas qui présentent des problèmes. Sur une population d'au-delà de 1700 caisses, évidemment, il faut s'attendre qu'il y ait un certain pourcentage, 3% ou 4%, où il peut y avoir des problèmes particuliers qui peuvent attirer l'attention de la Régie de l'assurance-dépôts ou du Service des caisses d'épargne et de crédit.

La technique qui est employée, c'est que les services d'inspection des fédérations sont agréés par la régie. On étudie la composition des services, à savoir la compétence des membres du service d'inspection, aussi l'indépendance du service d'inspection par rapport à la direction de la fédération ou des caisses. On peut donc dire qu'à 99% ce deuxième instrument de surveillance est entre les mains des coopératives ou de leur groupement avec la participation du service des associations coopératives et de la Régie de l'assurance-dépôts. Ce sont en général les moyens de surveillance. Evidemment, cela exige des réunions assez fréquentes, ayant été instauré depuis quelques années. Il n'y a pas seulement la surveillance de la caisse au point de vue de la protection du public, pour protéger les épargnes du public, mais il y a aussi l'évolution du système coopératif de crédit et la nécessité d'assurer les conditions pour que ce développement se fasse dans les conditions les plus favorables. Cela touche à certains problèmes très généraux, que ce soient des problèmes de réserves ou des problèmes de financement, et donne lieu à des réunions assez régulières avec les fédérations.

M. Léger: Le ministère prévoit-il des modifications administratives ou législatives au cours de l'année dans ce domaine?

Mme Bacon: On l'a dit ce matin.

M. Léger: Je sais que vous en avez parlé ce matin, mais, chaque année, on parlait d'une refonte de la loi là-dessus et il y avait aussi des demandes des caisses populaires qui voulaient avoir leur propre loi pour être capables de s'administrer dans une loi spécifique au lieu de dépendre d'une loi qui englobe tout le domaine des caisses d'épargne et de crédit, des caisses d'établissement, etc.

Mme Bacon: II y a au-delà d'un an, un travail avait été amorcé en vue de refondre la Loi des caisses d'épargne et de crédit. La philosophie qui avait présidé à cette refonte était la suivante. Nous avons aujourd'hui six types de caisses et certains se distinguent nettement des autres. Pour en citer deux types: la caisse populaire par rapport à la caisse d'entraide économique, la caisse d'établissement, la caisse d'économie. Alors, nous avions adopté comme hypothèse de travail que cette nouvelle refonte contiendrait des règles organiques coopératives générales applicables à toutes les caisses et qu'il y aurait des dispositions particulières s'appliquant exclusivement à certains types de caisses qui avaient une physionmomie financière différente, donc qui n'avaient pas les mêmes problèmes.

Depuis, il est survenu deux événements: d'abord, le discours du budget de l'an dernier, je crois, où on annonçait le financement de ia Régie de l'assurance-dépôts, ce qui impliquait l'imposition d'une prime ou certaines modalités pour constituer des superréserves en cas de problèmes dans les caisses d'épargne et de crédit. Le second événement qui avait une certaine importance, cela a été les changements aux lois fiscales. On a changé le régime d'imposition des réserves des caisses d'épargne et de crédit. En vertu des lois fiscales, actuellement, il est nécessaire de former des fonds de réserve, au niveau des fédérations, qui soient distincts des actifs et passifs de la fédération qui constitue une corporation.

Alors, depuis six ou huit mois, des études sont faites en vue d'en arriver à une formule pour constituer — il faudra nécessairement une législation — ces corporations de fonds de réserve, pour intégrer le rôle de ces corporations de fonds de réserve avec le rôle de la régie qui, elle aussi, doit se financer et, enfin, dans une troisième partie, pour déterminer des règles de constitution de réserves au niveau de la caisse individuelle. En fin de compte, il faut un certain équilibre.

Le problème, actuellement, même si ce n'est pas un problème grave, c'est qu'il existe des réserves au niveau des caisses locales, mais ces réserves varient beaucoup selon l'âge de la caisse, selon sa situation. Alors, il faut avoir certains fonds communs qui puissent venir à la rescousse de certaines caisses qui pourraient avoir des difficultés.

C'est l'arrière-fond du problème tel qu'il se pose à la lumière de ces deux événements qui se sont produits.

M. Léger: Maintenant...

Mme Bacon: Excusez-moi, il y a donc eu une insistance au cours de la dernière année sur les aspects financiers de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Ceci a eu préséance sur la refonte générale de la Loi des caisses d'épargne et de crédit, ce qui expliquerait le retard qui est apporté là-dedans. On pourrait espérer des projets de loi

assez tôt sur le financement de la régie, sur les fonds de sécurité et aussi certaines modifications à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, non pas peut-être une refonte absolument générale, mais au moins une réponse aux problèmes immédiats qui se présentent à cause de la croissance extraordinaire des caisses.

M. Léger: Est-ce que vous pourriez me donner le même processus concernant votre surveillance des compagnies de fiducie et prévoyez-vous aussi des changements administratifs ou législatifs cette année?

Mme Bacon: Les compagnies de fiducie, il s'agit d'une surveillance unilatérale de la part de l'Etat. En d'autres mots, ce sont les mêmes moyens de surveillance, mais ces moyens sont appliqués directement par le service de fiducie et de finance.

M. Léger: Du ministère?

Mme Bacon: Du ministère. Alors les rapports sont reçus directement par notre service, selon les exigences du service, et l'inspection est faite directement par le service d'inspection du ministère. La surveillance et l'inspection sont remboursées au prorata des affaires par les compagnies de fiducie. Alors, ce sont les modes de surveillance qui sont, dans ce cas, directs. On ne peut pas dire qu'il y a une jonction ou une collaboration entre des organismes centraux ou des associations de compagnies de fiducie.

En ce qui concerne la législation, la Loi des compagnies de fiducie est une loi très ancienne. Des travaux ont été effectués, un premier avant-projet a été préparé, il a même été étudié avec certaines consultations avec l'Association des compagnies de fiducie. Ce projet n'est pas tenu pour prioritaire, du moins cette année, pour de multiples raisons. Comme l'on sait, nous nous approchons de la date de la révision de la Loi des banques et c'est là un certain problème quant à la juridiction et quant à la spécialisation de chacune des institutions financières. Alors il n'est peut-être pas opportun de faire des options immédiatement, parce qu'évidemment il y aura une certaine négociation dans cette matière. Il reste encore beaucoup de travaux à faire au niveau des compagnies de fiducie. Pourquoi? Parce que certaines compagnies de fiducie sont sous juridiction fédérale quant à leur charte, même si elles doivent avoir un permis de la province. Il serait très important que nos compagnies de fiducie provinciales, qui sont d'ailleurs les plus importantes, ne soient pas assujetties à certains désavantages par rapport aux compagnies des autres juridictions.

M. Léger: Est-ce que le ministre ou son sous-ministre pourrait nous donner le même processus, au niveau des compagnies de finance? Au niveau de la surveillance et de la viabilité, elles vivent très bien, mais au niveau de l'avenir des compagnies de finance?

Mme Bacon: Les compagnies de finance, comme vous le savez, se sont beaucoup modifiées au cours des dernières années, en grande partie; elles ont diversifié leurs opérations, elles se sont lancées dans le "leasing", dans le financement industriel. Nous n'avons actuellement aucune loi organique sur les compagnies de finance. Nous avons quelques employés au ministère qui reçoivent par persuasion les rapports financiers de tous les intermédiaires financiers qui ne sont pas des compagnies assujetties à une loi organique particulière.

M. Léger: Vous parlez de persuasion, c'est parce que vous n'avez pas...

Mme Bacon: Nous n'avons pas de loi. Effectivement, si nous devions avoir une loi, ce serait sans doute une loi sur les sociétés d'investissement, les sociétés qui empruntent et qui reprêtent. Evidemment, nous contrôlons les sociétés qui reçoivent des dépôts, mais pour celles qui emprunteraient, par exemple, par des débentures ou par des obligations, qui reprêteraient et qui feraient du financement, il n'y a pas de loi organique. Nous les suivons en recevant les états financiers, en recevant les rapports qui sont faits à ceux qui leur fournissent du crédit, ceux qui achètent leurs obligations ou leurs débentures.

Dans une perspective de loi à plus long terme, il est sûr qu'il sera proposé, d'ici quelques années, une loi sur les sociétés d'investissement, sur ces intermédiaires financiers. Vu qu'ils sont très différents les uns des autres, il est impossible d'avoir dans la loi des règles sur les activités de chaque type de ces sociétés, que ce soient des compagnies de "factoring", qui achètent des comptes recevables, ou d'autres, elles sont toutes dans le même sac. Ce que nous viserions, éventuellement, par une loi, c'est d'empêcher les conflits d'intérêts et d'obtenir tous les renseignements nécessaires pour surveiller leurs activités.

Dans un programme législatif qui est quand même assez chargé, nous avons noté que chaque fois qu'il y avait une loi majeure, le ministère n'étant pas tellement considérable, nous sommes pratiquement obligés de mobiliser presque toutes les ressources du ministère, que ce soit pour la Loi des assurances, l'an dernier, la Loi de la protection du consommateur, cette année. Or, comme il n'y a pas tellement de ces intermédiaires financiers— des compagnies de finance à charte provinciale, il y en a très peu — cela a été repoussé en bas de la liste dans le programme législatif, même si cela demeure inscrit et qu'éventuellement il devrait y avoir une loi.

M. Léger: Ne pensez-vous pas que les compagnies de finance devraient aussi avoir des responsabilités vis-à-vis du gouvernement du Québec, ou l'inverse, que le gouvernement du Québec devrait avoir un certain contrôle sur les compagnies de finance, même si elles sont régies par des lois fédérales?

Mme Bacon: Oui, je crois que ce serait le complément naturel de la juridiction de la province. Cependant, là, nous parlons au point de vue financier et au point de vue organique. Lorsque nous parlons de compagnies de finance au point de vue du droit civil, il y a des incursions législatives assez importantes au niveau de la Loi de la protection du consommateur, surtout dans la loi telle que révisée et présentée en première lecture où on touche à des points majeurs en ce qui concerne le financement du consommateur, au point de vue des contrats, au point de vue des ristournes, etc.

M. Léger: Au point de vue des contrats, vous les touchez, je pense, par la loi 45, mais au niveau de tout le comportement des compagnies de finance vous n'avez pas, à ce jour, suffisamment de lois vous permettant de surveiller de très près les agissements des compagnies de finance qui touchent directement les consommateurs.

Mme Bacon: Au point de vue organique, non; au point de vue financier, non.

M. Léger: En êtes-vous empêchée par les lois fédérales ou si c'est tout simplement une question de choix politique du gouvernement de dire: On va légiférer là-dedans? Qu'est-ce qui vous en empêche?

Mme Bacon: Ce qui nous en empêche, réellement, je crois que c'est une question de fardeau de travail et de priorités. Les compagnies de finance sont assez rares aujourd'hui, sauf les compagnies de finance à charte fédérale. On a très peu de petites compagnies de finance. Je crois que cela se résume peut-être à trois ou quatre.

M. Léger: Elles ne sont pas obligées d'avoir une charte provinciale.

Mme Bacon: Actuellement, non.

M. Léger: Est-ce que, dans les objectifs à court ou à long terme du ministère, vous croyez que vous allez arriver avec une obligation d'avoir une charte provinciale?

Mme Bacon: II faudrait légiférer pour essayer de régler ces différents problèmes, mais, comme on vient de dire, il y a tellement de priorités au niveau de la législation au gouvernement que, pour nous, cela ne nous a pas paru une priorité, compte tenu du nombre restreint des compagnies, mais c'est dans les possibilités pour les années à venir.

M. Léger: Vous n'en faites pas une promesse formelle?

Mme Bacon: Non, comme je n'en ai pas fait pour d'autres.

M. Léger: On va voir cela tantôt. Je reviens sur la question des compagnies de fiducie. Je vois dans le budget que vous avez huit employés affectés à l'élément qui touche les compagnies de fiducie. Combien sont affectés à la surveillance des compagnies de fiducie parmi ces huit employés, combien au travail de secrétariat et combien à la surveillance des compagnies de finance?

Mme Bacon: Huit employés.

M. Léger: Ils ne sont pas sur les tablettes actuellement; ils travaillent?

Mme Bacon: Ils sont utilisés habituellement. A la section fiducie et finance, ils sont au nombre de cinq. Il y a sept personnes dont deux secrétaires; cinq affectées directement à la surveillance, deux au personnel de soutien. Cela veut dire au total, avec l'inspection, dix personnes affectées directement à la surveillance; deux au personnel de soutien. Les gens du personnel de soutien pour l'inspection font partie de pools généraux; alors, ils ne sont pas rapportés comme tels. Je crois que c'est à l'administration que c'est rapporté.

M. Léger: Quel est le volume d'affaires faites par les compagnies qui sont contrôlées par des lois ou des législations du gouvernement du Québec?

Mme Bacon: Je ne crois pas que nous l'ayons.

M. Léger: En matière de compagnies de finance.

Mme Bacon: Je ne crois pas que nous l'ayons compilé.

M. Léger: Autrement dit, c'est ce que le gouvernement contrôle au niveau législatif ou administratif. Si ces compagnies ne font que des transactions de quelques millions de dollars par année, c'est peut-être suffisant, mais, si c'est un chiffre d'affaires qui dépasse les $100 millions ou des chiffres très importants, il y aurait quand même une évaluation à faire pour le nombre d'employés qui s'occupent de la surveillance de ces compagnies.

Mme Bacon: On peut le faire, peut-être, d'une façon très générale dans les compagnies de fiducie. C'est que les plus anciennes compagnies de fiducie sont nées au Québec; là, nous avons des compagnies comme le Royal Trust, le Montréal Trust, à charte provinciale. Donc, je crois que cela représente certainement la majorité des affaires qui sont faites ici au Québec par des compagnies à charte provinciale. Dans les compagnies de finance, si mon souvenir est bon, c'est vraiment marginal.

Compagnies d'assurance-automobile

M. Léger: M. le Président, je reviendrais peut-être en détail à l'aspect de l'assurance-

automobile. Je ne reposerai pas la question que j'ai posée au ministre ce matin, mais on pourrait peut-être aller dans des détails...

Mme Bacon: ...la même réponse.

M. Léger: J'aurai peut-être la même réponse! Le ministre pourrait-il nous dire, en détail, en quoi consiste les contrôles du ministère dans le domaine de l'assurance-automobile? Quelle sorte de pouvoir avez-vous? Jusqu'à quel point êtes-vous capables d'intervenir dans le domaine de l'assurance-automobile?

J'espère que les automobiles de tout le personnel des institutions financières sont assurées et qu'il n'y a pas eu de problème à trouver une compagnie!

Mme Bacon: Roger Camaraire, surintendant des assurances. Si je comprends bien, vous voulez avoir l'information relativement aux contrôles qui sont exercés en matière de tarification...

M. Léger: Quelle sorte de pouvoir?

Mme Bacon: La Loi des assurances, malheureusement, ne nous donne aucun contrôle sur la tarification. Nous pouvons chercher et obtenir des statistiques, mais la tarification c'est uniquement... Nous en sommes informés, par complaisance de la part des compagnies, par bonne entente, mais dans la loi actuelle des assurances, il n'y a absolument aucun article qui force les compagnies à soumettre leur tarification.

M. Léger: Avez-vous des statistiques personnelles, c'est-à-dire des statistiques émanant du ministère, ou si actuellement vous n'avez, comme statistiques, que des expériences des compagnies qui ne proviennent que du Bureau d'assurance du Canada qui est un service pour l'ensemble des compagnies?

Mme Bacon: II faut comprendre que, lorsque vous parlez de statistiques provenant du Bureau d'assurance du Canada, vous vous référez probablement à ce qu'on appelle communément le livre vert. Ce livre vert est une production du Bureau d'assurance du Canada, mais sous l'autorité de l'Association des surintendants des assurances des provinces du Canada. En somme, nous demandons l'information; elle est produite par le Bureau d'assurance du Canada qui est l'agent de statistiques de chacun des surintendants.

M. Léger: Vous voulez dire les surintendants de chacune des provinces.

Mme Bacon: C'est cela, mais maintenant il faut faire exception, parce que vous avez la Colombie-Britannique, le Manitoba et la Saskatchewan qui ne se réfèrent pas à cet organisme pour leurs statistiques, puisque ce sont des provinces où il y a des régies d'Etat.

M. Léger: Avez-vous été en mesure de compa- rer les statistiques de ces trois provinces, au niveau des expériences, comparativement aux statistiques que vous avez des sept autres provinces?

Mme Bacon: Oui, nous obtenons des informations des organismes régissant l'assurance-automobile dans chacune de ces provinces. Disons qu'il est très difficile de faire des comparaisons. Il y a tellement, d'abord, d'aspects différents; vous avez la concentration des véhicules; vous avez le climat; le système routier. Il y a tellement de facteurs qui empêchent une comparaison. Le Québec peut peut-être se comparer à l'Ontario, avec l'exception, par exemple, de la concentration et du système routier. Parce que vous avez des agglomérations dans l'Ontario qui n'existe pas au Québec.

M. Léger: Comme surintendant des assurances — ma question pourrait être posée au ministre — dans la situation très difficile dans laquelle nous vivons dans le domaine de l'assurance-automobile, est-ce que vous évaluez qu'il faudrait donner plus de pouvoir au surintendant des assurances et en des endroits particuliers du contrôle que vous pensez que vous devriez avoir?

Y aurait-il des améliorations à apporter aux pouvoirs que le surintendant des assurances devait avoir face aux difficultés qu'on remarque depuis plusieurs années? Je pense que c'est plutôt une question politique qu'une question technique.

Mme Bacon: II est évident qu'il faudrait donner plus de pouvoirs au surintendant qu'il n'en a déjà. On vient de déplorer le fait que sur le problème de la tarification on n'a pas le pouvoir de le changer et je pense que c'est à considérer dans des réformes futures. C'est pour cela que ces réformes doivent se faire globalement et non par étapes ou par secteur d'activité.

M. Léger: Je pense que le surintendant des assurances qui reçoit d'une façon gracieuse les expériences et les tarifications des compagnies d'assurance devrait avoir un pouvoir de contrôle de ce côté-là, en ce sens que vous devriez être capable de vérifier le bien-fondé des hausses. Actuellement, vous n'avez pas le pouvoir, mais avez-vous au moins les moyens de vérifier si les hausses que les compagnies demandent sont bien fondées? Avez-vous, au moins, les moyens statistiques de vérifier si elles ont raison ou pas de faire des hausses?

Mme Bacon: Précisément par la statistique obtenue du livre vert, nos actuaires font des études régulièrement sur l'évolution du marché de l'assurance. La tarification est un facteur très important et ce sont nos actuaires qui, par mon truchement, conseillent le ministre dans l'évolution de la tarification.

M. Léger: Voici ce que je trouve aberrant, et je ne blâme pas le ministre, elle est nouvelle dans cette galère, elle est obligée de ramer pas mal, à contre-courant parfois. Quand même, devant ce

problème, je pose une question et je dis au ministre qu'on s'attend à une augmentation de 17%, de 11% ou de 12% annoncée par soit le BAC ou par des compagnies d'assurance comme telles ou par des groupes de compagnies d'assurance. Le ministre me répond: Nous n'avons pas de pouvoir pour empêcher cela. J'affirme que le gouvernement devrait être capable d'arrêter cela, comme on peut arrêter des hausses abusives dans des domaines beaucoup plus restreints; il devrait avoir le pouvoir, s'il est capable d'évaluer si une hausse est acceptable ou non, de la refuser quand c'est le cas. Actuellement, vous n'avez pas ce pouvoir.

Mme Bacon: Dans le contexte dans lequel on vit, la Régie des mesures anti-inflationnistes a quand même des pouvoirs et se réfère de plus en plus aux compagnies d'assurance, j'ai d'ailleurs déjà répondu, à une question en Chambre, que s'il le fallait on demanderait les pouvoirs au lieutenant-gouverneur en conseil d'exercer un contrôle. Si ces compagnies exagèrent dans la hausse des primes, n'étant pas assujetties à la régie fédérale, nous le ferons au niveau de la province.

M. Léger: Le ministre me dit que la Lci concernant les mesures anti-inflationnistes retient un maximum de 10% d'augmentation. Il y a eu une augmentation de 17% en février 1975, il y a eu une augmentation de 11% en juillet 1975 et on annonce pour juillet 1976 une augmentation de 10%. ce qui ferait à peu près 38% dans la dernière année ou année et quart. Cela dépasse 10%. Vous n'avez pas à ce jour les pouvoirs de retenir la hausse des primes d'assurance.

Est-ce que ce n'est pas répondre à la préoccupation que vous aviez tantôt de dire qu'il faut que vous vous donniez les pouvoirs de faire cela?

Mme Bacon: Oui...

M. Léger: Malgré la loi anti-inflation, on augmente quand même les coûts de l'assurance. Je ne dis pas que cela n'est pas justifié.

Mme Bacon: On n'a pas le pouvoir légal d'agir. Il y a quand même un pouvoir moral qui peut être exercé par...

M. Léger: II y en a qui ont le moral bas.

Mme Bacon: II y a moyen d'aller chercher un certain pouvoir moral, même si légalement on n'a pas ces pouvoirs.

M. Léger: Etes-vous capable de vérifier l'opportunité d'une classification des conducteurs et d'une classification des véhicules?

Mme Bacon: En somme, la statistique qui nous est fournie est assez détaillée pour nous permettre d'établir les territoires, les catégories de conducteurs. Dans notre étude, c'est pris en considération. Vous parliez tout à l'heure d'une hausse possible, d'une façon générale, mais cela peut se traduire par une baisse pour certains individus et par une hausse peut-être accrue pour d'autres; tout dépend du dossier de l'individu, de l'usage de son véhicule, de l'âge et de l'expérience des gens qui conduisent le véhicule, du territoire où le véhicule circule. Il y a une multitude de possibilités. Tout de même, si cela peut se traduire par une hausse générale, certaines personnes peuvent bénéficier d'une réduction.

M. Léger: Cela doit être très rare, parce que jusqu'à maintenant, la plupart des polices d'assurance ont été augmentées. Je voudrais quand même souligner un exemple qui m'est arrivé la semaine dernière pour vous montrer un peu l'attitude parfois tellement technocratique d'un ministère.

Une dame, en sortant d'une entrée, a frappé une automobile qui était stationnée. Elle a frappé la porte et fait des dommages pour $183. Dans son énervement, la dame s'est en allée et cela est devenu un "hit and run". Elle a été pénalisée en ce sens qu'on l'a rejointe, on lui a donné une infraction, elle a eu une hausse de prime. Elle payait $400 de prime par année et la compagnie d'assurance a augmenté sa prime à $583. Elle a par la suite été traduite en cour où elle a eu l'amende minimale de $100 et, par la suite, on lui a envoyé la fameuse formule V-2-C qui, pour moi, est réellement outrageante, en ce sens que cette formule V-2-C envoyée par le ministère des Transports oblige la personne à s'assurer et à prouver au ministère, qu'elle l'est pour garder son permis. On l'oblige daller voir la compagnie d'assurance pour que la compagnie remplisse la formule et assure le ministère, pour qu'on lui retourne son permis de conducteur, qu'elle est bien assurée. La compagnie en a profité à ce moment, et ce n'est pas le seul cas. Il y a des centaines et des centaines de cas comme cela. Cette personne a vu sa prime augmenter à $1271 par année, tout simplement parce que l'objectif du ministère des Transports était de s'assurer qu'une personne qui a fait un "hit and run", qui est quand même une chose inacceptable mais peut-être compréhensible dans ce cas... C'est une petite infraction, mais que cela en soit une petite ou une grosse, c'est un "hit and run". Cela a été une permission officielle du ministère des Transports à telle compagnie d'assurance disant: Vous pouvez exiger le prix que vous voulez à cette personne, parce qu'elle va avoir de la difficulté à s'assurer, elle a fait un "hit and run".

On a triplé sa prime. Je pense que le ministère des Transports devrait s'assurer que la personne est assurée, mais de là à obliger cette personne à aller voir sa compagnie d'assurance pour permettre à cette compagnie qui, dans le climat actuel se dit: Plus je vais aller chercher de primes, tant mieux, parce qu'on a un marché tellement peu sûr... On exige des primes exorbitantes et absolument extravagantes.

Dans votre ministère, n'y aurait-il pas une étude qui aurait été faite ou une préoccupation d'atteindre votre objectif, qui est de voir à ce qu'une personne qui a peut-être fait un acte illégal et qui est déjà punie par son amende en passant

en cours, qui est déjà punie par ses neuf points de démérite, qui a déjà vu sa prime augmenter d'avance, soit assurée sans, en plus de cela, donner un billet ouvert à la compagnie d'assurance permettant d'exiger trois fois la prime? Trouvez-vous que c'est juste? Avez-vous étudié ces cas? Je pense que c'est une aberration mentale.

Mme Bacon: C'est l'application de la Loi des transports avec le Code de la route. Ce n'est pas à nous de diriger le ministère des Transports, d'indiquer ce qui doit être fait avec le Code de la route. On n'a pas d'étude précise sur ces différents cas. Il faudrait étudier les cas un à un, suivant leur mérite. Un "hit and run" sérieux ou un "hit and run" non sérieux, je pense que ce serait assez compliqué pour notre service des assurances que d'étudier chacun des cas.

M. Léger: Mais c'est parce qu'on applique aveuglément, comme dans bien des ministères, un règlement interne aveugle. L'objectif, est-ce que cela ne serait pas qu'on sache que la personne qui a fait un "hit and run" soit assurée? Ne devrait-on pas plutôt demander une photocopie de la police d'assurance— point— de façon qu'on n'ouvre pas la porte à la compagnie d'assurance que est là pour faire des profits— point— pour qu'elle se serve de cette situation pour étrangler les assurés?

Mme Bacon: Souvent, des cas comme celui que vous soulevez sont déférés aussi au service des assurances et ils sont étudiés chacun à leur mérite. Il peut nous arriver de pouvoir faire faire les ajustements nécessaires, compte tenu du sérieux ou du non sérieux des gestes qui ont été posés, mais, évidemment, c'est chaque cas qui est étudié à son mérite, quand il nous est référé, par le service des assurances.

Dans un cas comme cela, on pourrait le référer au service.

M. Léger: Alors, pour la dame qui est venue à mon bureau, je peux écrire une lettre au ministre et lui dire: Voici ce cas. Y a-t-il moyen d'organiser quelque chose pour que cette personne n'ait pas une prime absolument exorbitante?

Mme Bacon: On peut en faire l'étude.

M. Léger: Alors, il y a des possibilités de ce côté. D'accord.

M. le Président, je voudrais simplement rappeler au ministre, avant de terminer le dossier des assurances — comme il n'y a pas de projet de loi cette année — que c'est sûr que ce n'est pas...

Mme Bacon: L'année se termine au mois de décembre!

M. Léger: Le ministre peut-il me faire une promesse formelle qu'elle va déposer sa loi sur les assurances d'ici la fin de l'année 1976?

Mme Bacon: Je ne ferai pas de promesse formelle. J'ai dit que j'espérais la déposer à la reprise de la session, mais comme je le rappelais au député de Lafontaine, l'année se termine le 31 décembre.

M. Léger: M. le Président, je voudrais relire ici, à la page 315 du journal des Débats du jeudi 1er avril 1976, la réponse du ministre présent ici qui m'a dit: "J'avais promis la Loi sur la protection du consommateur pour le mois de mars. Je l'ai déposée au mois de mars. Je dis que nous ferons l'impossible pour déposer la Loi de l'assurance-automobile d'ici le mois de juin".

C'est sûr que ce n'est pas une promesse formelle, la main sur l'évangile, mais je sais quand même que, dans le discours inaugural, il a été dit — je cite la page 2 du mardi 16 mars 1976: "Le gouvernement complète, par ailleurs, l'élaboration d'une importante politique en matière d'assurance-automobile — compléter, cela veut dire qu'on termine, je pense— en vue d'améliorer la situation de l'automobiliste sans avoir à recourir à un régime étatique d'assurance-automobile". On critiquera dans le temps, quand cela arrivera. Ensuite, on parle de sécurité routière.

Dans les deux cas, on laisse sous-entendre aux citoyens du Québec que cela va venir, l'assurance, que c'est important, qu'on s'en préoccupe. M. le Président, je ne puis faire autrement que m'exprimer au nom de tous les assurés du Québec, au nom des jeunes qui sont en bas de 25 ans, qui sont classifiés déjà avant même d'avoir eu une seule mauvaise expérience dans l'assurance-automobile, qui sont obligés de s'assurer à des primes exorbitantes, au nom des mototocyclistes qui ont des problèmes majeurs pour s'assurer auprès des compagnies d'assurance, au nom même des courtiers d'assurance qui vivent des heures tragiques, au nom même du Barreau, qui sait très bien se défendre, quand même, parce qu'il l'a prouvé, à ce jour, avec un bon porte-parole, parmi les...

Mme Bacon: Est-ce que le député de Lafontaine veut représenter le Barreau?

M. Léger: Non, je n'oserais pas parce que, comme je le disais, ils ont un bon représentant au nom du ministre des Communications.

Au nom des estimateurs, qui se demandent ce qui va advenir de leur avenir, au nom des évalua-teurs, etc., pour dire au ministre qu'un gouvernement qui est au pouvoir depuis 1970, qui est au courant de cette situation, a formé un comité d'étude qui a donné le rapport Gauvin, a formé un deuxième comité d'étude, le comité de M. Desjardins et qui sait la situation dans laquelle on vit, je me dis qu'il est impensable — je ne veux pas blâmer le ministre actuel parce qu'elle est prise dans une conjoncture difficile, elle a pris un héritage qui était plus ou moins joli — mais pour son gouvernement, que la situation est inacceptable.

Moi de l'Opposition, je ne puis faire autrement que dire qu'on aurait dû présenter un projet de loi sur l'assurance-automobile avant l'ajournement d'été, ce qui aurait permis à ces gens de voir au

moins la direction vers laquelle se dirige le gouvernement en matière d'assurance-automobile. Moi je dis que c'est une marque d'impuissance de ce gouvernement à réellement régler les problèmes majeurs de tous les Québécois, une incompétence à trouver des solutions à ce problème majeur. Que le ministre me dise que c'est de l'émotivité, je parle au nom de l'émotivité de tous les gens qui sont pris dans ce domaine. Moi, je pense que cela frise l'irresponsabilité et l'inconscience de ne pas présenter un projet de loi alors que tout a été dis là-dessus. On a même payé des voyages à deux ministres des Institutions financières pour aller voir dans l'Ouest ce qui se faisait là-dedans, pour même aller voir les poux des problèmes et les poux mêmes des régimes d'assurance étatique de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan et du Manitoba. Si jamais un autre ministre du Québec se présente là-bas, on ne voudra plus le recevoir, parce qu'on essaie de trouver ce qui n'est pas bon dans le système étatique pour pouvoir venir dire au Québec: II n'y en aura pas de système étatique.

Moi, je pense que c'est de l'inconscience et qu'il est impensable, dans la situation catastrophique dans laquelle on se trouve au niveau de l'assurance-automobile, qu'on remette cela. Moi, je pense que le ministre actuel est réellement mal parti dans son ministère. Elle devrait au moins faire face à ceux de son cabinet qui défendent des intérêts de groupes directement impliqués dans l'assurance-automobile. Elle ne prend pas position et devrait convaincre le conseil des ministres, le premier ministre que les citoyens du Québec sont tous, ceux qui ont une automobile, touchés par cela. Les compagnies elles-mêmes ne peuvent pas s'organiser parce qu'elles ne savent pas où on s'en va. Cela amène des hausses de primes, cela amène une incertitude et cela amène une conséquence sociale grave.

M. le Président, je ne suis pas pour déchirer mon linge devant tout le monde ici, mais c'est ce que je devrais faire comme les bonzes font au Viêt-Nam. C'est impensable que les citoyens du Québec soient, après cinq ans de tergiversations, dans la même incertitude qu'ils étaient il y a cinq ans.

M. le Président, je dis que la caractéristique de ce gouvernement se voit précisément dans le dossier de l'assurance-automobile, un gouvernement qui est inconscient, irresponsable, impuissant à régler les problèmes du Québec et incompétent en matière d'assurance-automobile, qui est un point crucial.

Le ministre me dit: On va étudier cela encore, on va y aller calmement. Ce n'est plus le temps d'être calme, c'est le temps d'agir. M. le Président, je ne puis faire autrement que me rallier à tous ceux qui sont dans le milieu de l'assurance-automobile ainsi qu'aux assurés pour dire: II est temps que ça bouge. Et le gouvernement ne peut pas rester indifférent à cela.

Qu'est-ce qu'il faut faire de plus? Je ne sais pas, moi, je ne sais plus quoi faire, devant un gouvernement qui ne veut pas bouger; c'est une masse amorphe, inerte qui dit: Bien oui, c'est vrai, il y a des problèmes, on y pense, on va faire des études encore. Quel est le prochain geste que le gouvernement va faire et quand? C'est impensable qu'on reste là. Moi, je ne pense pas qu'on puisse sortir de la commission, ici, en disant: On va y repenser encore. Cela fait cinq ans que vous y pensez. Je pense — et je n'attaque pas le ministre personnellement, il arrive dans le dossier — qu'il est mal parti puisqu'il remet encore aux calendes grecques un problème aussi urgent et brûlant que cela. Je demande au ministre: Quelle est la prochaine étape dans cette décision à prendre pour un régime quel qu'il soit, un régime de responsabilité sans égard à la faute ou pas? Quelle est la prochaine étape, pour que les citoyens sachent à quelle enseigne se loge le ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, actuellement?

Mme Bacon: M. le Président, j'ai écouté avec le plus d'attention possible les remarques du député de Lafontaine. Je crois qu'il est bien prétentieux de se qualifier le représentant de tous ceux qu'il a mentionnés; c'est à croire qu'il a reçu un mandat avant...

M. Léger: ... la voix...

Mme Bacon: La voix. C'est à croire qu'il a un mandat dans ses poches, de la part de l'ensemble de la population du Québec. Il a semblé mêler l'impuissance et la sagesse. Pour moi, je crois que cela est plus sage, sûrement peut-être moins populaire, puisque j'ai l'impression que le député de Lafontaine continue ce qu'il a fait ce matin, à faire de la petite politique; c'est l'endroit idéal pour le faire.

M. Léger: C'est de la grande politique que je veux.

Mme Bacon: Le sujet s'y prête bien puisqu'il fait appel à l'émotivité des gens, ce qu'il fait d'une façon qui lui vient très facilement, je pense en tout cas, par ses remarques de ce matin et de cet après-midi. Je dis qu'il mêle l'impuissance et la sagesse, puisque je crois que même si ce n'est pas populaire, il est plus sage pour un gouvernement de présenter à la population un régime d'assurance-automobile qui soit adéquat pour cette population, qui réponde vraiment aux besoins de la population, qui fera en sorte de pallier tous les problèmes auxquels on a à faire face.

Il faut tenir compte aussi du fait que depuis les derniers mois il y a un élément nouveau dans le dossier. Après avoir fait des études comparatives des différents systèmes que nous pourrions mettre de l'avant ou de ce qui existe déjà, nous remarquons que depuis quelques mois le marché des assurances est différent. Il y a des problèmes fort complexes auxquels on a à faire face et qui changent un peu le tableau même de ce que l'on a à présenter à la population. Je crois que dans le contexte actuel, dans lequel on a à évoluer ou à travailler, il est beaucoup plus sage d'attendre. Moins populaire, sûrement, mais plus sage d'at-

tendre et de présenter, dans une prochaine étape, le régime approprié à la population et qui répondra, encore une fois, à ses besoins.

On demande toujours: Quels gestes entend poser le gouvernement? Pour ma part, en tout cas, je crois que le bon geste à poser sera de déposer cette loi qui répondra à cette attente de la population et qui apportera aussi la meilleure protection possible aux automobilistes du Québec.

M. Léger: Dans le discours inaugural, on dit qu'on va compléter... Je pourrai peut-être admettre avec le ministre que ce n'est pas tout à fait prêt, que dans les semaines à venir... Et on veut ajourner tôt. Que le ministre ne puisse pas, aujourd'hui, me dire qu'il va déposer d'ici la fin de la session, donc conformément au discours inaugural, un projet de loi...

Mme Bacon: J'ai dit d'ici la fin de l'année. M. Léger: D'une façon formelle?

Mme Bacon: Oui, oui. Je l'ai dit ce matin. Je l'ai dit ce matin, je ne peux le déposer avant la fin de juin, mais il sera déposé à l'automne.

M. Léger: D'une façon formelle, le projet de loi va être déposé à l'automne?

Mme Bacon: Oui.

M. Léger: S'il n'y a pas d'élection avant.

Mme Bacon: C'est ce que j'ai dit ce matin. Je répète ce que j'ai dit ce matin. Nous sommes en train de rédiger ce projet de loi, il n'est pas terminé. Compte tenu de ce que je viens d'expliquer, du nouveau contexte actuel, du marché des assurances auquel on a à faire face, des problèmes que nous cause le marché des assurances, la loi pourra être déposée à l'automne.

M. Léger: Si le ministre, qui a promis ce projet de loi — comme d'autres ministres ont promis d'autres projets, entre autres un ministère des sports, depuis plusieurs années — me dit qu'elle va le déposer d'ici la fin de l'année, j'espère qu'on dira en gros, dans les journaux, que le ministre, d'une façon formelle, a promis le dépôt de ce projet de loi cette année, de façon qu'il n'y ait pas de revenez-y, et qu'on va réellement, cette année, discuter ce problème et adopter quelque chose. Je puis vous assurer qu'il y aura une contribution très intense de l'Opposition à la qualité du projet de loi sur la protection des automobilistes et sur l'assurance-automobile.

Mme Bacon: Je mets en garde le député de Lafontaine de faire du dirigisme avec les journalistes mais pas devant les journalistes du Jour. Qu'il fasse attention! Je pense que les journalistes n'accepteraient pas.

M. Léger: D'ailleurs...

Mme Bacon: Ce n'est pas à nous de faire les manchettes, c'est à eux de les écrire.

M. Léger: Ce que je veux dire par là, c'est que je voudrais bien que l'opinion publique dirige le ministre dans la décision qu'elle a affirmé prendre de déposer ce projet de loi. Je veux que l'opinion publique soit derrière le ministre pour la surveiller, de façon qu'on soit certain qu'il n'y aura pas de tergiversation, qu'il n'y aura pas le ministre des Communications qui va venir défendre l'intérêt de certains groupes et qu'il y aura réellement un projet de loi.

La qualité de ce projet, on aura l'occasion d'en discuter.

Mme Bacon: Comme ministre des Consommateurs, je suis suffisamment à l'écoute de la population pour savoir ce que désire cette population et pour pouvoir lui présenter un régime d'assurance-automobile dans la sagesse. J'espère être assez sage pour présenter un projet de loi qui répondra aux aspirations de la population.

M. Léger: En ce qui nous concerne, étant donné qu'il n'y a pas de projet de loi sur l'assurance-automobile, étant donné qu'il y a des projets de loi sur les consommateurs et qu'il va y avoir un projet de loi pour les courtiers en valeurs immobilières, je n'ai plus d'autres questions à poser.

En ce qui me concerne, j'adopterais le programme 3, je pense.

Le Président (M. Lafrance): Le programme 3, éléments 1, 2, 3 et 5, adopté. Programme 4.

M. Léger: Au programme 4, c'est une question tout simplement d'administration. En ce qui me concerne, ce serait adopté, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Alors, programme 4, éléments 1, 2 et 3, adopté.

M. Léger: Je veux tout simplement dire au ministre qu'aux prochains crédits, si nous sommes encore au même endroit, parce qu'il se peut qu'aux prochains crédits il y ait eu des élections et qu'on soit de l'autre côté, il y aura pas mal plus de questions concernant les solutions qu'on nous a promises. Les crédits vont être beaucoup plus longs, si nous sommes de ce côté-ci de la Chambre. Si nous sommes de l'autre côté, peut-être qu'on aura réglé beaucoup de choses dans ce temps-là.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie les membres de la commission pour leur bonne collaboration. La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières a adopté les crédits de ce ministère en entier. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 21)

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