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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 11 août 1976 - Vol. 17 N° 119

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Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection

du consommateur

Séance du mercredi 11 août 1976

(Dix heures vingt minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières commence l'étude du projet de loi no 7, après la première lecture, pour entendre les mémoires présentés à la commission parlementaire.

A l'unanimité des membres de la commission, le député de Maskinongé, M. Picotte, a été nommé rapporteur de la commission.

M. Samson: Pardon?

Le Président (M. Lafrance): M. Picotte, député de Maskinongé, a été nommé rapporteur de la commission.

M. Samson: A l'unanimité?

Le Président (M. Lafrance): Oui, parce que vous m'avez donné votre accord.

M. Picotte: Le député de Rouyn-Noranda veut-il prendre ma place?

M. Samson: Je n'ai pas d'objection; je suis absolument d'accord, mais demandez-le-nous au moins.

Le Président (M. Lafrance): On vous le demande.

M. Samson: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): D'accord? On répète à l'unanimité.

M. Léger: Si le député de Maskinongé est d'accord, on est d'accord.

Le Président (M. Lafrance): Aujourd'hui, trois mémoires seront présentés, parce qu'il y a trois organismes qui ont été convoqués, soit l'Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec, représentée par Me Louis Vaillancourt; la Chambre de commerce du Québec, représentée par M. Pierre Morin, son directeur général, et la Fédération du détail et des services du Québec, représentée par M. Denis Lemieux, président.

Comme premier organisme, nous entendrons l'Association provinciale des marchands d'automobiles et Me Louis Vaillancourt.

Mme Bacon: Un instant, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Si vous me le permettez, nous allons donner la parole au ministre avant de vous l'accorder. Maintenant, vous nous présenterez, si vous voulez, aussi, avant de débuter, vos collaborateurs.

M. Léger: Pourrais-je simplement dire que d'habitude, à l'ouverture des commissions parlementaires, avant d'entendre les mémoires, il est normal que le ministre et l'Opposition disent quelques mots avant d'entendre les personnes. J'aimerais bien, après que le ministre aura parlé, prendre la parole pour donner aussi rapidement certaines impressions avant d'entendre les personnes qui ont daigné nous présenter les mémoires.

Le Président (M. Lafrance): J'ai retenu que vous vouliez ajouter quelques mots.

M. Léger: Au pluriel.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Exposé préliminaire du ministre Mme Lise Bacon

Mme Bacon: J'aimerais, avec la permission de la commission et des groupements qui sont ici ce matin, avoir la possibilité de faire quelques remarques qui peuvent être nombreuses. Je pense que c'est normal, comme le disait le représentant de l'Opposition officielle, de faire des remarques préliminaires à l'ouverture de ces discussions qui prendront place aujourd'hui et dans les journées qui viennent.

Avant de débuter, j'aimerais quand même souhaiter la bienvenue aux nombreux groupements et corps intermédiaires qui, au cours des séances de cette commission, présenteront leur point de vue sur le projet de loi no 7 qui a été adopté en première lecture le 30 mars dernier.

La technicité de ce projet, ses effets sur le commerce et l'industrie et aussi sur l'ensemble des citoyens en font une loi majeure qui est un défi tant au point de vue de la technique législative que du droit substantif. Il serait présomptueux d'affirmer que le projet est à l'abri de toute critique et ne laisse place à aucune amélioration. Au contraire, les représentations que sollicite cette commission sont un élément essentiel du processus législatif et, je le souhaite, contribueront aussi à assurer plus de réalisme et d'efficacité à la loi proposée.

A l'occasion des représentations des intervenants, je pourrai définir les objectifs poursuivis par les diverses dispositions de la loi. Ces objectifs se sont dégagés au cours des dernières années alors que les plaintes des consommateurs et la pratique quotidienne de la loi actuelle ont révélé des déficiences véritables qui ne pouvaient être tolérées indéfiniment.

Si, au niveau des moyens, les mémoires et les commentaires qui les accompagneront proposent des modalités plus réalistes et plus équitables d'atteindre ces objectifs, je les accueillerai avec la plus grande ouverture d'esprit. Je ne voudrais pas

que les séances de cette commission soient un pur exercice intellectuel, mais qu'elles contribuent utilement à une meilleure protection des consommateurs tout en conciliant, dans la plus grande mesure possible, leur intérêt et celui des commerçants et des producteurs.

Je ne prendrai pas le temps précieux de cette commission pour résumer les caractéristiques principales du projet de loi. Ceci a déjà été fait à l'occasion de la première lecture de ce projet. Les intervenants ont d'ailleurs fait l'analyse des dispositions. Plusieurs représentations, il est vrai, semblent s'appuyer sur des interprétations que nous ne partageons pas. Nous aurons l'occasion de le souligner et au besoin de modifier les textes pour qu'ils correspondent exactement aux intentions des rédacteurs.

Il me semble opportun toutefois de souligner certaines déficiences de la loi actuelle que veut corriger le nouveau projet de loi. Au point de vue juridique, la première loi et surtout la réglementation qui en découlait constituaient, pour tous les praticiens du droit, pour les commerçants et les consommateurs, un instrument extrêmement complexe et difficile à manier. Ceci était déjà une justification suffisante de refondre cette loi. L'équipe de travail a donc tenté d'apporter un langage juridique beaucoup plus simple et dans la mesure du possible d'établir une meilleure liaison même par voie d'exception avec les principes généraux de notre droit privé. Un effort semblable sera tenté au niveau de la réglementation.

L'économie de la loi actuelle est presque exclusivement analytique ou fragmentaire. Cette caractéristique a, au cours des dernières années, mis en lumière certaines déficiences et notamment en matière de vente au comptant et de services.

La protection pour ainsi dire morcelée qui était accordée selon les caractéristiques de certains contrats rendait évidentes certaines déficiences et surtout le manque d'équilibre général dans la protection du consommateur. Le projet que nous soumettons tente de répondre à des critiques.

Par ailleurs, le volume de plaintes reçues à l'office a attiré l'attention sur certains champs d'activité commerciale qui sont une source constante de problèmes et d'irritation pour le citoyen. Il devenait même impératif d'établir des règles élémentaires dans ce domaine. Je citerai comme exemple la vente de voitures usagées, la réparation d'automobiles.

Nous reconnaissons qu'il s'agit de champs nouveaux et que les précédents sont rares. Toutefois, une volonté sincère de protéger le consommateur interdisait d'ignorer ces domaines où la preuve a été faite quotidiennement qu'une protection tout au moins minimale était devenue urgente.

Par ailleurs, nous n'étions pas insensibles aux risques que représentent les législations spécifiques dans des domaines particuliers. Nous craignons aussi la prolifération des réglementations qui alourdissent les transactions, créent l'incertitude et même exposent à des illégalités tout à fait involontaires et quelquefois inévitables. Il fallait donc viser à une législation plus générale susceptible d'améliorer les conditions mêmes dans lesquelles s'établissent les relations entre consommateurs et commerçants. C'est dans ces perspectives que les pratiques interdites se révèlent un instrument plus général qui, je l'espère, permettra de restreindre dans le futur les législations exten-sives et formalistes.

Les engagements volontaires peuvent aussi rendre l'action gouvernementale plus préventive que punitive. Par ces moyens, nous pourrons justement tendre à minimiser le formalisme qui, s'il est indispensable à rencontre des commerçants indésirables, peut devenir pour les autres une entrave indûment lourde et coûteuse.

Plusieurs mémoires débordent de la critique immédiate des dispositions particulières du nouveau projet de loi. Ils tentent de situer cette législation dans l'évolution de notre société et s'élèvent au niveau de la critique du rôle des agents économiques, des citoyens et du gouvernement. Les positions pour ainsi dire philosophiques qui sont alors exprimées ne manquent pas d'intérêt. Elles risquent cependant de fausser les débats et d'aboutir à de véritables querelles d'écoles de pensée. Elles m'obligent cependant à définir la position de mon ministère. J'aimerais ainsi contribuer à contenir les discussions à un niveau beaucoup plus pratique susceptible d'apporter des résultats plus concrets.

Remarquons tout d'abord que la protection du consommateur est encore un phénomène assez récent. Jusqu'ici, les interventions gouvernementales n'ont pas été inspirées par une philosophie politique mais par un souci très empirique de protéger contre certains abus et de rétablir un équilibre minimal qu'à lui seul le contexte économique et législatif ne pouvait assurer. Il s'agit donc de législations dynamiques qui n'ont aucune prétention de régler les problèmes de façon définitive. Au contraire, elles doivent s'adapter aux circonstances éventuelles qui peuvent se développer. D'ailleurs, la pratique des législations courantes amènera sûrement d'autres étapes où l'équilibre recherché et justement l'équation coût-bénéfice seront beaucoup mieux assurés. Les conclusions vraiment apocalyptiques de certains groupements ne me semblent pas tellement convaincantes. Les prophètes de catastrophes démontrent, à mon avis, un manque de confiance dans le dynamisme, la faculté d'adaptation et même le sens commun des agents économiques des citoyens et des gouvernements. Pour notre part, nous désirons que les études se poursuivent sans interruption, que des remises en questions s'effectuent périodiquement et que la législation demeure très sensible aux besoins prévalant et aux contraintes économiques du moment.

C'est donc avec des objectifs d'équilibre et dans des perspectives empiriques que nous abordons cette législation. D'une part, nous nous gardons bien de succomber à une certaine nostalgie presque romantique de la liberté absolue et même sauvage du commerçant telle qu'on la connaissait

au siècle dernier. Ceci amène à des simplifications qui peuvent avoir un certain attrait démagogique mais n'apportent rien de positif. A titre d'exemple, je citerai cette notion de relation adverse entre commerçants et consommateurs. Il ne s'agit pas d'un combat pour déterminer un vainqueur. Au contraire, et on l'a souligné à juste titre, il faut concilier des intérêts souvents divergents dans l'immédiat mais qui, ultimement, se rejoignent.

Il me fait plaisir de souligner que plusieurs mémoires de commerçants font preuve de beaucoup plus de maturité. Pour eux, la prise de conscience à la fois des consommateurs et des gouvernements est un fait acquis. Ils manifestent le désir d'engager le dialogue avec les autres parties et de contribuer positivement à formuler des solutions valables.

A l'occasion de la réorganisation de l'Office de la protection du consommateur, nous avons l'intention d'institutionnaliser les relations avec les divers groupes de commerçants par la mise en place du personnel nécessaire. Par ce moyen, nous souhaitons développer cette expertise immédiate qui est essentielle pour concilier les intérêts économiques du commerçant avec ceux du consommateur qui est toujours l'ultime payeur. Il va de soi que nous tenterons aussi de resserrer les liens avec les associations de consommateurs et les autres organismes gouvernementaux de protection du consommateur.

On peut comprendre que des groupements de commerçants s'inquiètent de certaines interventions publiques de représentants de groupements de consommateurs. Les hommes d'affaires sérieux sont appelés à effectuer des investissements importants, ils doivent maintenir sur leur personnel, souvent nombreux, une compétence et une continuité, une motivation qui constituent un de ces actifs intangibles des plus précieux de leur entreprise.

De plus, des impératifs de profits qui sont à la base même de notre système économique exigent une planification très prudente et éclairée. La sauvegarde des capitaux et du crédit, le maintien d'une organisation dynamique et la planification dans un contexte de perpétuelle innovation constituent des contraintes qui, parfois, échappent aux associations de consommateurs.

Par ailleurs, ces contraintes mêmes, qui sont les préoccupations majeures des commerçants, en font une source tout à fait improbable de réformes qui amélioreraient substantiellement la protection des consommateurs. Au contraire, le défi de la concurrence et les risques de l'évolution économique les incitent à maintenir le statu quo. C'est pourquoi les associations de consommateurs, tout autant que les gouvernements ont un rôle d'initiateurs qu'ils sont les seuls à pouvoir assumer.

Certains peuvent déplorer le culte de la vedette chez certains porte-parole de consommateurs. La représentativité des associations peut être mise en question dans certains cas, malgré un angélisme et le danger de récupérer des mouvements de consommateurs à des fins personnelles et même politiques, il reste que ces organismes ont un rôle essentiel à jouer. Le ministère veut donc maintenir et améliorer les conditions pour que leur rôle soit joué efficacement.

L'absence à cette commission parlementaire de l'Association coopérative d'économie familiale et de l'Institut de promotion des intérêts du consommateur est un exemple concret de certaines faiblesses au sein de mouvements voués à la protection du consommateur. Je déplore donc que ces associations ne fassent pas bénéficier cette commission de leur expérience extrêmement utile. Dans leurs contacts quotidiens avec les consommateurs lésés, ils recueillent certains faits et vivent des situations qui constituent des éléments extrêmement pertinents à la problématique de la protection du consommateur. Ils peuvent contribuer, non seulement par les solutions qu'ils pourraient proposer, mais en partageant leur expérience avec nous, à rendre la loi proposée encore plus efficace et mieux adaptée.

Je ne voudrais pas prolonger indûment ces remarques préliminaires, M. le Président, mais les mémoires que nous avons reçus couvrent substantiellement la plupart des sujets que réunit le projet de loi. L'audition de ces mémoires et les explications qui nous seront fournies donneront l'occasion de discuter de tous les points importants.

J'aimerais, cependant, terminer, en vous faisant part de la contribution que personnellement j'attends de divers intervenants, qu'il s'agisse de groupements de commerçants, d'industriels ou de publicitaires, de groupements de consommateurs, des hommes de loi ou des corps intermédiaires.

En ce qui concerne les commerçants, la contribution majeure qu'ils pourront nous apporter sera de nous éclairer sur les répercussions des dispositions législatives sur leurs opérations quotidiennes et sur les conditions économiques dans lesquelles évoluent leurs entreprises. L'expertise que regroupe le gouvernement ne peut nécessairement apporter des lumières complètes sur toutes les implications pratiques de certains changements. Il me semble donc essentiel que les commerçants nous apportent les informations et les précisions qui puissent rendre plus adaptés les textes législatifs sans pour autant sacrifier les objectifs poursuivis.

Nous sommes conscients que les impératifs de rentabilité du commerçant sont un puissant argument en faveur du statu quo. Aussi, nous nous attendons à ce qu'ils nous indiquent non seulement les inconvénients économiques à court terme que peut entraîner la législation, mais qu'ils s'attachent aussi aux résultats à moyen et à long termes qui souvent peuvent être très différents. Nous continuons de croire qu'ultimement la protection du consommateur constitue un élément de rentabilité pour l'entreprise.

Nous n'ignorons pas la multiplicité des agents dans un système moderne de distribution de biens et de services. Nous sommes aussi conscients de la complexité de certains biens et des relations extrêmement variées qui peuvent s'établir entre divers agents économiques. Dans certains cas, il

s'exerce une concurrence qui est le reflet d'une véritable économie de marchés, alors que souvent aussi l'existence de quelques agents dominants crée un marché beaucoup plus artificiel. L'intervention gouvernementale ne vise plus alors à débarrasser le marché des indésirables ou à les forcer à respecter certaines règles élémentaires. Elle vise plutôt à influer sur les règles du jeu qui souvent sont établies exclusivement par ces agents sans trop d'égards à la liberté de choix du consommateur et à l'utilisation rationnelle de son pouvoir d'achat.

Par avance, nous sommes donc très sensibles aux conséquences des diverses dispositions législatives à la fois sur les petits commerçants et sur les grandes entreprises nationales et multinationales. Nous serons donc intéressés à connaître les vues de ces divers groupes de commerçants dont les intérêts sont parfois loin d'être identiques. Il est malheureux que souvent les représentants ou les groupements de commerçants ne reflètent pas nécessairement les vues variées ou divergentes des diverses catégories de commerçants. Là aussi peut s'exercer une domination qui risque de nous cacher une partie de la réalité.

J'ai déjà dit la contribution importante que pouvaient apporter à cette commission les groupements de consommateurs. Ils sont un partenaire absolument indispensable dans la protection du consommateur. Ils constituent en quelque sorte l'aiguillon et, jusqu'à un certain point, la conscience des commerçants et même des gouvernements. Loin de nous l'idée de les dissocier de la protection du consommateur ou de les poser en relation d'adversaire avec les agences gouvernementales de protection des consommateurs.

Nous attendons aussi beaucoup des hommes de loi et des techniciens du droit qui n'ont pas manqué, à travers les divers mémoires, de soulever plusieurs points d'un grand intérêt. Nous avons déjà pris note de diverses difficultés d'interprétation et de plusieurs suggestions de forme et je me propose d'en discuter à l'occasion de l'étude des mémoires particuliers.

En terminant, je tiens à réaffirmer ma volonté ferme d'apporter une protection positive aux consommateurs et de le faire avec un souci de réalisme et d'équité pour tous les participants de notre vie économique. Cette volonté s'appuie sur des évidences que la vie politique de tous les jours ne cesse de me rappeler.

Il n'y a pas que la dimension des gouvernements et leurs interventions complexes et nombreuses qui créent chez le citoyen un sentiment d'isolement, d'impuissance et même d'aliénation. L'évolution des modes de distribution, la subtilité des moyens mis en oeuvre, la concentration des fabriquants sont aussi des facteurs qui contribuent tout autant sinon plus à l'insécurité du citoyen. L'appareil de production et de commercialisation n'est-il pas perçu comme une force aveugle et lointaine qui entrave la liberté du consommateur et dévalorise les personnes? Les problèmes d'environnement, qui sont devenus plus aigus ou mieux connus au cours des dernières années, amplifient ce sentiment chez le citoyen. Ultimement, que recherchons-nous dans la protection du consommateur, sinon de rendre notre système économique plus humain par la valorisation du consommateur et un respect plus grand de sa liberté? Les objectifs fondamentaux que nous partageons tous devraient faciliter les débats et rendre plus efficaces les travaux que poursuit cette commission.

Dans le domaine de la protection du consommateur, le progrès dépend fondamentalement de l'amélioration intellectuelle, sociale et morale des individus. A long terme, c'est avant tout par la formation et l'éducation tant du consommateur que du commerçant que se réaliseront les conditions où la législation aura moins d'importance. Elle n'aura justement plus le rôle de suppléer à des carences malheureusement trop évidentes. Aussi, au-delà des moyens législatifs, le ministère continuera à privilégier l'information et l'éducation qui dans des perspectives plus longues constituent encore la meilleure protection du consommateur.

Le Président (M. Lafrance): Merci. Le député de Lafontaine, avec ses quelques mots.

Remarques de M. Marcel Léger

M. Léger: M. le Président, au départ, je voudrais dire que l'actuelle Loi de la protection du consommateur, la loi 45, celle qui nous régit actuellement et qui sera amendée par la loi 7, qui n'est pas encore adoptée, cette loi 45, actuellement, est inefficace parce qu'elle laisse le consommateur démuni face aux commerçants et à des manufacturiers réunis et ne couvre pas d'importants secteurs où il y a des pratiques commerciales abusives, comme la vente de terrains, la vente au comptant. Cette loi, aussi, était mal rédigée. Elle laissait place à toutes sortes d'interprétations, et quand il y a beaucoup de trous dans une loi, ceux qui veulent la contourner peuvent plus facilement le faire. Elle laissait place à toutes sortes d'interprétations, ce qui la rendait, en pratique, inopérante.

Cette loi, aussi, était administrée par un gouvernement qui n'avait pas l'épine dorsale nécessaire et qui ne prenait pas carrément parti pour le consommateur. Je pense qu'en écoutant les propos du ministre, tantôt, cela reconfirme mon appréhension que la Loi de la protection du consommateur doit nécessairement être faite non pas pour détruire le système économique, mais pour, au départ, prendre conscience qu'elle doit défendre d'abord le consommateur qui, dans le système actuel, subit des préjudices et qui n'a pas les armes voulues pour se défendre d'une façon efficace.

Je pense que cette Loi du consommateur devient plutôt un arbitre neutre entre les commerçants et les consommateurs. Je pourrais dire avec un peu de fierté — et je le prouverai tantôt — que les amendements contenus dans la loi 7 sont dus beaucoup aux interventions que nous avions faites

en 1971, au moment où cette loi avait été discutée et étudiée. A cette occasion, le Parti québécois avait apporté une centaine d'amendements dont plusieurs, aujourd'hui, cinq ans après, sont inclus dans la loi 7. C'est la raison pour laquelle, au départ, je dirais que la loi 7 de 1976 est un peu ce qui aurait dû être adopté en 1971, et en 1971, nous adoptions en retard une loi qui correspondait à des besoins de 1960.

Cette loi 45 fut adoptée par l'Assemblée nationale en 1971, à la vapeur, en pleine nuit. Pour ceux qui ne le savent pas, cette loi a été adoptée à cinq heures du matin, après un débat qui a duré toute la nuit. Je m'en souviens fort bien, je suis arrivé chez moi en même temps que le laitier déposait la première pinte de lait, à la mi-juillet 1971.

Cette loi, après avoir tenu compte davantage de l'avis des commerçants que des groupes de consommateurs, démontrait le peu d'importance qu'accordait le gouvernement libéral, à ce moment, à la protection des consommateurs.

Lors de l'étude de cette loi, le Parti québécois avait présenté, comme je le disais tantôt, plus d'une centaine d'amendements réunis dans un véritable code. Le gouvernement a refusé alors d'inclure des dispositions concernant les voitures usagées, la vente de terrains, l'interdiction de la publicité pour enfants, l'abolition des primes, l'augmentation des pouvoirs de l'Office de la protection du consommateur et du Conseil. Ce fut non sur toute la ligne, sauf pour un amendement majeur concernant la non-suspension de l'ordre du directeur de l'Office pendant l'appel. Cette disposition demeure, mais elle est un petit peu corrigée aujourd'hui. Elle était, à ce moment, le seul moyen d'intervention efficace de l'Office.

Il était donc évident, pour tous ceux qui s'intéressent au problème de la consommation, qu'il faudrait légiférer à nouveau. Aujourd'hui, après cinq années d'attente, débute l'étude de la loi amendant la Loi de la protection du consommateur. Le projet de loi no 7 présente certaines améliorations par rapport à la loi de 1971. Cependant, il ne faut pas l'étudier par rapport à l'actuelle loi déficiente, mais par rapport aux problèmes réels et concrets des consommateurs des années à venir. Dans ce contexte, il est évident que le projet de loi doit être modifié en y incluant de nouveaux secteurs et en l'améliorant de façon à le rendre plus efficace.

L'évolution des pratiques commerciales vers la dépersonnalisation des rapports entre consommateurs et producteurs, sous l'influence de la concentration des entreprises, du perfectionnement de la technologie et de l'amélioration des techniques de vente et de procédés de marketing, fait en sorte que de plus en plus il y a des produits inutiles qui sont vendus sous pression aux consommateurs, des produits dangereux que les consommateurs ne connaissent pas et des produits défectueux qui sont mis sur le marché. L'on assiste aussi à une augmentation et surtout à un raffinement des pratiques commerciales douteuses. Cette diminution de la qualité des biens et services doit être compensée par une loi de la pro- tection du consommateur qui a des dents, de façon à rétablir réellement l'équilibre rompu entre le consommateur et le commerçant, équilibre qui existait au moment où les grands principes du Code civil, comme la liberté de contracter, furent établis.

Il est faux de prétendre qu'une législation protégeant véritablement le consommateur va entraver le commerce. Je pense que c'est un mythe de dire que si on protège trop le consommateur, on va entraver le commerce. En éliminant les abus, on ne fera qu'assainir le climat des relations entre le consommateur et le commerçant ou le manufacturier.

Au début de l'ère industrielle — je fais un parallèle avec la situation dans le domaine du travail — les conditions de travail étaient lamentables, mais, sous la pression des travailleurs et des syndicats, les patrons furent forcés d'y apporter des changements et le législateur a été forcé, sous la pression des travailleurs et des syndicats, d'adopter certaines conditions minimales de travail. Est-ce que la production a baissé à cause de cela? Je dirais: Non. Est-ce que les profits ont diminué à cause de cette législation pour améliorer les conditions de travail? Je dirais: Non. Est-ce que le développement industriel s'est arrêté? Je dirais: Non. D'une façon analogue, il faut réglementer la société de consommation. Une telle intervention ne diminuera pas la fréquence des rapports commerciaux ni ne brimera la liberté de commercer.

Nous sommes heureux de constater que près de 80 groupes, organismes ou compagnies ont manifesté le désir de se faire entendre par la commission. Nous entreprenons aujourd'hui l'étude de ce projet de loi avant son adoption en deuxième lecture, c'est-à-dire avant que l'Assemblée nationale en ait étudié les principes de base. Sans faire ici un discours que j'aurai l'occasion de refaire en deuxième lecture, après avoir entendu les groupes qui ont des revendications à apporter à cette loi, je vais quand même donner un point de vue et affirmer qu'il est surprenant de constater que la loi n'introduit pas le recours collectif qui permettrait à des groupes de consommateurs lésés de s'unir pour intenter des poursuites judiciaires. Je parle de la "class action". Une telle procédure permet actuellement, en Ontario, à 371 000 propriétaires d'automobiles de poursuivre en une seule action un des quatre grands de l'industrie plutôt que d'avoir à intenter 371 000 actions l'une derrière l'autre.

Nous croyons aussi que les ventes au comptant de plus de $300 devraient être constatées par un écrit et que les manufacturiers devraient fournir une garantie de base pour tous les biens durables. Enfin, les pouvoirs devraient être considérablement augmentés, notamment pour l'amélioration de l'information et de l'éducation des consommateurs.

Ce sont des points qui ont été soulignés dans l'intervention du ministre tantôt, mais qui sont encore des voeux pieux qui peuvent se réaliser si le ministre en a la volonté politique, mais qui au-

raient plus de poids si c'était indiqué dans la loi. Aussi, une volonté plus forte pour voir à améliorer l'éducation des consommateurs, pour l'augmentation de ses pouvoirs d'intervention et de contrôle. En d'autres mots, il serait important que cette loi soit carrément présentée avec l'intention première de défendre le consommateur en ne brimant pas nécessairement les droits normaux des manufacturiers et des commerçants. Cette loi doit d'abord être faite en fonction de l'intérêt de la société de consommation qui, non renseignée, divisée, mal préparée à se défendre, ne peut pas, dans cette société où nous vivons actuellement, avoir les moyens de se défendre devant des produits vendus qui sont inutiles à la consommation. Mais par la pression faite par les mécanismes modernes de publicité et de marketing on crée chez les citoyens des besoins qui seraient uniquement des besoins de luxe mais deviennent pour eux des besoins de première ligne et quotidiens.

De plus, il y a des produits dangereux mis de l'avant, sur lesquels l'information n'est pas suffisante. Les consommateurs ne peuvent les déceler, et aussi, ils sont incapables de se défendre devant ces produits. Finalement, des produits défectueux sont aussi mis sur le marché par des commerçants, souvent minoritaires, mais qui amènent des problèmes de consommation.

Je voulais simplement dire ces quelques mots sur le projet de loi. Avec ce que nous apporteront les groupes directement intéressés, soit par la vente de ces produits ou la production de ces produits, comme les groupes directement axés vers la défense des consommateurs, par la suite, nous pourrons juger davantage des correctifs à suggérer au gouvernement, qui les aura entendus comme nous, et nous pourrons apporter davantage au débat pour que la Loi sur la protection du consommateur soit nécessairement une loi conforme aux besoins de la société autant pour les producteurs que pour les consommateurs.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rouyn-Noranda.

Remarques de M. Camil Samson

M. Samson: M. le Président, à l'occasion de cette commission parlementaire qui nous permettra d'entendre des représentants de différents groupements qui nous présenteront également leur mémoire, je voudrais établir mes positions, celles du mouvement que je représente à l'endroit de ce projet de loi sur la protection du consommateur.

Je voudrais immédiatement que tout le monde comprenne bien qu'avec la meilleure des volontés, quelle que soit l'autorité compétente en la matière et voulant protéger le consommateur, nous ne devons pas perdre de vue que s'il y a consommateur, c'est que nous avons également, dans notre société, des organismes du monde des affaires qui, suite à la production, peuvent offrir un produit en vente.

Alors, M. le Président, je voudrais qu'il soit bien établi que j'entendrai de façon très objective ces mémoires et qu'à l'avance, contrairement à mon collègue qui vient de prendre la parole, je considère que le gouvernement doit jouer un rôle d'arbitre et que le gouvernement se doit également de maintenir en toute justice et équité, des dispositions visant à ce que notre société organisée puisse continuer à demeurer une société organisée.

Je n'ai pas de parti pris, bien que je sois favorable aussi, comme tout le monde, je pense, normalement et naturellement, à la protection du consommateur. Mais protection du consommateur veut aussi dire protection de l'homme d'affaires, parce que l'homme d'affaires est également un consommateur, à mon sens. Il est également un consommateur de biens de base, de matières premières de transformation et il a aussi des droits.

Les droits des uns ne doivent pas brimer ceux des autres. Bien sûr, je considère que nous devons maintenir un équilibre. Je ne veux pas dire par là que nous n'avons pas besoin d'une loi sur la protection du consommateur. Nous en avons besoin d'une, car il y a eu dans le passé, et c'est évident, certains abus.

Mais je dois également, en toute justice, dire qu'il y aurait peut-être lieu aussi de considérer une loi pour la protection des hommes d'affaires parce qu'il y a eu, dans certains cas aussi, abus de la part de certains consommateurs individuels ou organisés en groupe.

Or, devant ces faits, c'est plutôt en arbitres que nous devons regarder cette loi. Nous devons la regarder aussi dans son sens pratique, à savoir est-ce que la loi que nous étudions sera juste, équitable et bien applicable, sans mettre en danger l'économie, sans mettre en danger les droits des consommateurs et sans mettre en danger la nature même du monde des affaires?

Je pense que ce n'est un secret pour personne que, par les temps qui courent, nous assistons à de nombreuses faillites de petites entreprises. Ces faillites se multiplient, pas parce que les consommateurs n'ont pas été bien servis par ces entreprises, mais plutôt parce que, de plus en plus, notre société tend vers un mouvement où la petite et la moyenne entreprises doivent dépenser beaucoup d'argent, non pas pour donner des services aux consommateurs, mais pour fournir des rapports aux gouvernements. Elles perdent du temps avec des inspecteurs de tous genres qui sont régulièrement dans les jambes des hommes d'affaires, qui les empêchent souvent de produire ou de bien exploiter leur commerce.

M. le Président, devant ces faits que tout le monde connaît bien, je considère que nous devons ne pas mettre en doute la valeur extraordinaire qui est la libre entreprise et la libre concurrence. Je considère que la valve de sécurité ou le régulateur le meilleur qui puisse exister est encore la libre concurrence.

Si, bien sûr, nous optons pour la protection des consommateurs, comme c'est normal que nous le fassions, mais si nous exaqérons à un

point tel que nous mettrons en danger ce système de libre concurrence, nous nous retrouverons, comme dans certains pays, avec un système de non-concurrence et, à ce moment-là, vous irez voir s'il y a de la protection de consommateurs dans ces pays. Il n'y a pas de protection de consommateurs parce que c'est le gouvernement qui devrait protéger le consommateur, mais c'est lui qui en abuse dans ces cas-là.

M. le Président, nous avons encore la chance de vivre dans un pays où il y a de la libre entreprise, où il y a de la libre concurrence, où cela maintient un équilibre. Bien sûr, il y a des abus que nous pouvons considérer comme isolés. Ce n'est pas parce qu'il y a des abus isolés que nous devons punir l'ensemble de la société.

Dans les mémoires qui nous seront présentés — j'ai déjà eu l'occasion d'en parcourir quelques-uns — on ne nous demande pas, à ce que j'ai pu voir, d'aller à l'extrême, dans le sens de ne pas offrir de protection aux consommateurs. On nous demande d'amender cette loi pour qu'elle devienne applicable raisonnablement et valablement, pour que puissent se maintenir en affaires les gens qui ont des produits à offrir au public. En se maintenant en affaires, nous considérons en même temps l'esprit de créativité des nôtres, de nos hommes d'affaires, de nos industriels.

Mais, si on leur enlève toute espèce de motivation en leur rendant la vie tellement difficile qu'il deviendra impossible de faire des affaires sans être obligés de demander d'abord la permission au gouvernement partout et en tout temps, M. le Président, je dis que cette loi deviendrait, si elle était cela, un des instruments parmi quelques instruments qui sont déjà mis en place qui tendent vers une société socialiste carrément. Et moi, je n'ai pas peur des mots, c'est cela que je vois venir, c'est cela que je veux éviter. Je ne voudrais pas qu'on tombe dans ce piège. Je ne voudrais pas que notre société tende vers cette exagération.

Nous avons, au Québec, la chance de vivre dans un contexte nord-américain; nous avons également cette chance de pouvoir jouir des avantages qui en découlent. Bien sûr il y a des choses à changer, bien sûr il y a des choses à corriger, il y a des choses à améliorer. Mais il est valable d'améliorer en corrigeant plutôt qu'en détruisant. Tantôt on a dit qu'avec des lois de protection du consommateur dures, avec un syndicalisme dur envers le patronat, on n'a pas baissé la production, on n'a pas mis tellement de bois dans les roues. Contrairement à ceci, je vous souligne de mémoire — malheureusement je n'ai pas emporté les papiers avec moi — que notre société, le Canada en particulier, a gagné le championnat en 1974, je pense, de jours de travail perdus. C'est un bien triste championnat. Si nous avions eu une aussi bonne performance aux Olympiques, on aurait gagné toutes les médailles d'or. Mais nous avons eu cette bonne performance dans le monde du travail en 1974; selon l'organisation mondiale du travail, nous avons été en tête pour le nombre de jours perdus par les grèves. Je ne suis pas sûr que certains mouvements de contestation per- manents n'y soient pas pour quelque chose. Je suis enclin à être un peu d'accord sur une partie de l'allocution du ministre de ce matin quand elle a déploré le fait que certaines associations avaient refusé de se présenter devant cette commission. Je suis un peu d'accord; j'ai déjà eu l'occasion d'entendre les gens dont le ministre a parlé tantôt et je ne suis pas certain que ces gens sont tellement là pour protéger le consommateur, mais, au contraire, pour protéger leur association, protéger leurs intérêts particuliers, protéger leur prestige et protéger certaines idéologies.

M. le Président, pour autant que je suis concerné, je voudrais et j'émets le voeu que cette commission prenne en considération tous les mémoires, sans qu'à l'avance nous ayons trop de préjugés, pour tenter d'en arriver à ce que cette loi soit une loi qui donne justice et non pas une loi qui érige des barricades pour tenter d'écraser le commerce et le monde des affaires, pas plus que les consommateurs d'ailleurs.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Je demanderais à l'Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec de bien vouloir nous présenter son mémoire et, comme je l'ai demandé tout à l'heure, de présenter ses collaborateurs.

On vous demande d'être assez concis dans votre présentation afin que les membres de la commission puissent vous interroger sur votre mémoire par la suite.

Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec

M. Grondin: M. le Président, madame le ministre, messieurs les membres de la commission, messieurs les sous-ministres, mon nom est Henri Grondin. Mon associé, Me Louis Vaillancourt, qui est d'ailleurs ici le deuxième à ma droite, m'a laissé le soin de présenter le mémoire ce matin. C'est donc avec grand plaisir que je représente l'Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec et que je vous transmets les réactions de cet organisme.

Je suis accompagné, ce matin, du président de l'association provinciale, M. Pierre Brault, qui est assis à ma droite, et également des membres du comité exécutif, M. Frank Williams, le vice-président, M. Jean-Guy Cyr, de Trois-Rivières, et M. Marcel Castonguay, de Rimouski, ainsi que des autres membres du comité qui ont participé à la rédaction du mémoire. Est également présent le directeur général de l'organisme, M. Denys De-mers, le troisième à ma droite.

Alors l'Association des marchands d'automobiles du Québec regroupe les seuls marchands d'automobiles qui détiennent une franchise d'un manufacturier d'automobiles. L'association réunit la quasi-totalité de ces marchands puisqu'elle compte 850 membres à travers tout le Québec. L'Association provinciale des marchands d'automobiles a constitué un comité pour l'étude du projet de loi no 7.

Le mémoire déposé ne porte que sur certains aspects généraux du projet de loi, à savoir d'abord les définitions et les dispositions générales applicables au contrat; en second lieu, des dispositions relatives à certains contrats bien particuliers; en troisième lieu, les questions sur la preuve, les procédures, les recours, les sanctions; enfin, nos opinions sur le conseil et l'Office de la protection du consommateur.

D'autres chapitres du projet de loi auraient mérité que l'on en traite devant vous, mais des associations régionales des marchands d'autos de Montréal et de Québec avaient déjà préparé des mémoires séparés sur ces sujets, entre autres sur les articles 49 à 61 qui traitent de la vente de l'automobile usagée, les articles 68 à 78 qui traitent de la réparation des automobiles, l'article 172 qui interdit les ristournes des maisons de crédit, les articles 262 et 263 qui interdisent les conventions particulières pour mettre de côté certaines dispositions de la loi.

L'Association provinciale n'a pas jugé bon de reprendre dans son propre mémoire les argumentations déjà incluses dans les mémoires des associations régionales, mais je dois dire qu'elle y souscrit entièrement. Alors, l'Association provinciale, tout en étant d'accord avec la nécessité de protéger les consommateurs, veut quand même mettre l'accent sur certaines dispositions ou certaines lacunes du projet de loi qui n'aideront pas le consommateur, mais qui nuiront aux marchands d'automobiles. Il ne faut pas oublier que c'est toujours, finalement, le consommateur qui paiera, de toute façon, le prix de la protection, pas toujours utile, qu'on veut lui accorder.

De plus, nous devons vous faire part d'une certaine surprise de voir comment le législateur semble considérer tous les commerçants, et plus particulièrement les marchands d'automobiles. Au lieu de présumer de la bonne foi des deux parties à un contrat, on tient pour acquis que l'un est de bonne foi, toujours, le consommateur, et que l'autre est de mauvaise foi, le commerçant. C'est ainsi qu'on met de côté les principes directeurs de l'interprétation des contrats tels qu'ils apparaissent au code civil, de façon que les parties ne se retrouvent pas tout à fait de façon égale devant les cours de justice. Sous prétexte de protéger le consommateur de quelques commerçants peu scrupuleux, on met tous les commerçants dans le même bain et on les condamne souvent avant de les entendre. Les articles 6 et suivants du projet de loi devront, selon nous, être revus en conséquence.

Au chapitre 1 de notre mémoire, nous insistons d'abord sur la carence de définitions dans le projet de loi. Déjà, dans la loi actuelle, nous trouvons qu'il manque des définitions. Au lieu d'en ajouter, on en a enlevé. Ainsi, on ne trouve pas de définitions de termes aussi importants que "commerçant" — qu'est-ce que c'est qu'un commerçant? — d'administrateurs délégués, de rouages d'entraînement; pire encore, on emploie parfois deux ou trois expressions pour viser ce qui nous semble être les mêmes choses ou les mêmes personnes. Ainsi, on emploie les expressions "commerçant", "commerçant accrédité", "commerçant d'automobiles", "garagiste". Est-ce que ce sont toujours les mêmes personnes? Peut-être que oui, peut-être que non.

La définition de commerçant s'impose d'autant plus qu'on définit le consommateur comme étant une personne physique autre qu'un commerçant. Il faut donc savoir ce que c'est qu'un commerçant. Nous suggérons une définition en nous référant au traité commercial d'Antonio Per-reault: "celui qui exerce des actes de commerce et qui en fait sa profession habituelle". Il est également essentiel pour la bonne marche de nos commerces que l'on sache exactement ce que le législateur veut dire en employant des expressions qui ont, dans la réalité quotidienne du monde de l'automobile, un sens probablement différent de celui que le législateur avait en vue. C'est le cas, par exemple, de l'administrateur délégué, parce qu'on a, des fois, dans certains commerces, un administrateur délégué par le manufacturier, par des compagnies de finance. Qui est l'administrateur délégué au sens de la loi? La même chose aussi pour le cas du rouage d'entraînement. Qu'est-ce que cela veut dire exactement? Nous suggérons une définition qui voudrait dire que le rouage d'entraînement comprendrait le moteur, l'embrayage, l'engrenage différentiel. Encore là, ce n'est pas défini dans la loi.

En second lieu, on commente les articles 5 à 12 du projet de loi auquel j'ai fait allusion au début de mon exposé. On met de côté les principes fondamentaux de notre droit en matière d'interprétation de contrat, et on laisse au public l'impression qu'il est dangereux de contracter avec un commerçant, mais que, de toute façon, avec cette nouvelle loi, on pourra s'en sortir et faire mettre de côté le contrat. C'est peut-être créer des illusions chez le consommateur et risquer de le décevoir ensuite.

On emploie des expressions assez confuses: par exemple, à l'article 5,... "disproportion entre les prestations respectives des parties équivalant à exploitation, ou que l'engagement du consommateur est abusif." Pourquoi ne pas se coller à la rédaction des articles du Code civil?

A l'article 6, on nous dit que le tribunal tiendra compte "de la condition des parties, des circonstances et des avantages résultant du contrat pour le consommateur". Or, vous savez qu'un contrat n'a pas que des avantages pour chacune des parties. Il y a toujours avantages et inconvénients.

Les clients pourront-ils encore vendre des voitures à des assistés sociaux sans crainte que le contrat puisse être annulé plus tard? Sur quels critères se baseront-ils? Laissera-t-on cela à l'humeur du juge qui, un jour, aura à décider de la validité du contrat?

Il en est de même pour une vente de voiture à un étudiant universitaire qui aurait besoin d'une voiture durant l'été mais qui, l'automne venu, se sentirait incapable de faire ses paiements. Pourrait-il remettre la voiture?

Cela est d'autant plus dangereux que l'article

9de la loi stipule qu'en cas de doute, le contrat est interprété en faveur des consommateurs.

Nous passons ensuite, dans notre mémoire, aux commentaires sur les articles 23 à 36. Ici encore, aux articles 24 et 25, on emploie une expression ambiguë quand on parle de fins pour lesquelles un bien est normalement destiné. Pourquoi encore changer une expression qui est dans le bill 45? C'est d'ailleurs ce que nous disons à la page 10de notre mémoire.

Plus loin, les articles 28 et suivants traitent de la garantie du manufacturier qui doit être assumée par le commerçant. Nous croyons que ceci n'avantagerait pas toujours le consommateur. Il faudrait plutôt astreindre les manufacturiers à certaines normes de qualité. Nous pensons ici, entre autres, aux pneus qui sont sur les voitures neuves. Ces normes de qualité pourraient être implantées par le Code de la route. C'est une mesure urgente qui devrait être mise en place par le gouvernement le plus tôt possible pour assurer la sécurité des citoyens; nous en avons déjà fait part au directeur de l'Office de la protection du consommateur lors des entretiens préliminaires que nous avons eus avec lui.

Quant à la langue de garantie, nous voulons bien que ce soit le français, mais, encore là, lorsqu'un client insiste pour avoir le dernier modèle dès sa présentation et que le modèle nous est livré avec une garantie unilingue anglaise, le marchand d'autos peut-il voir le contrat annulé du seul fait qu'il a accepté de livrer la voiture au client avec une garantie de langue anglaise, quitte à la changer pour une garantie en langue française dans les jours suivants? C'est toute une question.

Au chapitre 2 de notre mémoire, à la page 12, on souligne d'abord ce qui nous semble être une contradiction entre l'article 196 de la loi, qui dit qu'un avis en vertu de la présente loi "doit être délivré en personne ou mis à la poste ou télégraphié..." et l'article 59, qui dit que l'avis peut être verbal dans le cas d'annulation de contrat fait par un vendeur itinérant.

Selon nous, tous les avis devraient être écrits. Chose certaine, il y a contradiction parce que délivrer en personne un avis verbal ou le mettre à la poste, c'est embêtant!

Ce qui nous semble le plus dangereux dans le titre I du livre V du projet de loi, soit les articles 189 et suivants, c'est le délai de trois ans pour permettre au consommateur d'annuler un contrat alors que, dans la loi actuelle, il est d'une année.

Dans le cas de la vente d'automobiles qui sont des biens qui se déprécient très rapidement, on croit qu'il y aura lieu de ramener la prescription à six mois. D'ailleurs, les causes d'annulation d'un contrat se découvrent très rapidement et c'est, à notre avis, abuser de la confiance faite au consommateur que de lui donner plus de six mois pour plaider irrégularité du contrat.

De plus, nous croyons qu'il y aura lieu de modifier l'article 197 pour empêcher que le consommateur puisse exiger l'annulation du contrat pour des peccadilles qui ne lui ont créé aucun inconvénient, par exemple, ne pas avoir signé à la bonne place.

Enfin, M. le Président, nous croyons qu'aux articles 200 et 201 du projet de loi il n'y a pas lieu de créer une distinction entre les amendes qui peuvent être imposées à des particuliers, à des individus et celles qui peuvent être imposées à des corporations.

Les marchands d'automobiles que je représente aujourd'hui sont, pour la plupart, incorporés dans des petites compagnies familiales. Pourquoi les menacer davantage que des particuliers? La prescription de l'article 203 qui incombe aux administrateurs nous paraît d'ailleurs injuste et même exorbitante.

Au chapitre 3 de notre mémoire, nous insistons pour que la loi assure la présence d'au moins deux commerçants d'automobiles au Conseil de la protection du consommateur. Nous ne croyons pas que cela doive être laissé au pouvoir discrétionnaire de quiconque. Nous voudrions y avoir des sièges d'une façon statutaire.

Enfin, nous nous interrogeons sur les pouvoirs exorbitants que le projet de loi veut donner au directeur de l'office. Il ne suffit, d'ailleurs, que de lire les articles 224 et suivants pour comprendre notre inquiétude.

Avant de terminer, je voudrais mentionner qu'il y aurait lieu d'ajouter à l'article 211 un paragraphe, peut-être le paragraphe t), qui permettrait au lieutenant-gouverneur en conseil de faire un règlement autorisant les marchands d'autos à fusionner les cautionnements exigés par la Loi de la protection du consommateur avec le cautionnement qui est imposé par le Code de la route. Ces deux cautionnements, d'ailleurs, visent à protéger le consommateur. Pourquoi en prendre deux, même trois?

La loi relative aux sous-entrepreneurs en construction contient une telle disposition. Une requête spécifique, d'ailleurs, est adressée au ministre responsable sous pli séparé.

M. le Président, Mme le ministre, je vous remercie, et les gens qui m'accompagnent aujourd'hui sont disposés à répondre à toutes les questions que pourront leur poser les membres de la commission.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. Grondin. Mme le ministre.

Mme Bacon: Vous avez mentionné votre inquiétude quant à la définition de quelques termes, au début de votre mémoire. Quant au terme commerçant, j'aimerais souligner ce matin que plusieurs des mémoires ont soulevé ce point. Il est évident que des formules différentes ou des possibilités différentes nous ont été soumises, mais j'aimerais tout de suite mentionner que cette question est à l'étude par les gens du ministère. Il en va de même pour l'expression d'administrateur délégué, par exemple.

Quant à la page cinq de votre mémoire, qui concerne l'article 53, les rouages de l'entraînement, l'association dit: II y aurait peut-être lieu de définir cette expression. Est-il vraiment nécessaire, d'après vous, de définir cette expression dans la loi? N'est-ce pas complet, quand on dit:

rouage d'entraînement? Vous avez donné la définition dans votre mémoire...

M. Grondin: Oui.

Mme Bacon: Ne trouvez-vous pas que rouage d'entraînement est suffisant?

M. Grondin: Comme je ne suis pas marchand d'automobiles moi-même mais avocat, je vais laisser au président de l'association ou à un de ses membres le soin d'y répondre. Pour ma part, je ne sais pas ce que c'est qu'un rouage d'entraînement, je vous l'avoue.

Mme Bacon: II faudrait peut-être que cette pensée qui a été émise dans le mémoire de l'association soit précisée ou qu'on définisse davantage.

M. Brault: M. le Président, avec votre permission, je demanderais à M. Deragon s'il veut bien répondre à cette question.

M. Deragon (André): Le rouage d'entraînement est certainement une chose assez ambiguë, parce qu'aujourd'hui, lorsqu'on touche à un tel point, elle peut entraîner beaucoup plus que ce qu'on a vraiment voulu dire. Si on veut vraiment protéger le consommateur contre trois points qui sont vraiment coûteux: le moteur, la transmission et le différentiel, je considère qu'il devrait y avoir une explication complète de rouage d'entraînement et spécifier ces trois points. A moins qu'on veuille en dire plus.

Selon la loi, si vous demandez à un juge d'interpréter rouage d'entraînement, lui-même a de la difficulté à concevoir ce que c'est; à ce moment-là, on est placé devant quoi? Je pense que ce n'est pas beaucoup de demander une explication aussi précise que celle-là.

Mme Bacon: Vous avez parlé aussi des pneus, vous soulevez la question, en parlant de la garantie; pourriez-vous fournir plus de détails sur la situation que les membres de l'association vivent présentement quant à cette garantie?

M. Brault: Au niveau de la garantie des pneus?

Mme Bacon: C'est quand même intéressant. C'est un secteur qui rv'est pas couvert par la loi.

M. Brault: Si je comprends bien l'intention du législateur. Voici le problème auquel nous devons faire face. Si vous regardez les garanties émises avec la livraison des voitures neuves, les pneus par exemple, c'est la seule chose qui est respectée par le manufacturier lui-même. Le garagiste n'a aucun pouvoir, n'a aucune possibilité de régler ce problème. Si vous vendez une voiture, comme marchand, il y a une garantie qui s'applique évidemment à tout, sauf les pneus d'automobile. Au moment où il y a un problème de pneus, une défectuosité quelconque, on doit le référer au manu- facturier. Alors, l'application du projet nous met dans une position intenable parce qu'il n'y a absolument rien que nous pouvons faire. C'est pour cela qu'on suggère que ce soit par d'autres moyens. Vous allez simplement — comment pourrais-je dire — nous mettre dans une position intenable. Recevoir des pneus d'un client, il n'y a rien qu'on puisse y faire, c'est-à-dire que cela vient de nos goussets simplement. Nous n'avons aucune solution. Je pense que c'est peut-être déplacer le problème que de mettre l'odieux sur le dos des marchands, pour les pneus, on ne peut rien y faire. C'est clairement indiqué. Plusieurs consommateurs, malheureusement, ne lisent jamais la documentation qu'on leur fournit. C'est clairement indiqué que le marchand ne peut rien faire pour les pneus. La garantie est respectée par le manufacturier du pneu.

Mme Bacon: Entre le marchand et le manufacturier, cela veut dire qu'il n'y a aucune entente parce que...

M. Brault: Dans la pratique, madame, nous suggérons au client d'aller voir le manufacturier qui a des bureaux dans tout le pays. Ce dernier va effectuer ses propres ajustements, il va remplacer gratuitement, il va faire tout le nécessaire. Mais le marchand ne peut absolument rien y faire.

Mme Bacon: Quant aux sanctions civiles, tout ce que je peux dire en ce moment, c'est que nous prenons bonne note des remarques que vous nous avez faites. Il est évident que toutes ces remarques et observations seront étudiées par les officiers du ministère.

M. Brault: M. le Président, si vous le permettez, il y a un point que j'aimerais apporter, qui nous inquiète sérieusement. Le bill est présenté en vue de la protection du consommateur. Or, on s'explique extrêmement mal qu'il va y avoir une partie des consommateurs qui ne seront pas protégés du tout parce que vous ne parlez d'aucune façon des ventes entre particuliers. Or, on sait actuellement qu'un nombre considérable de ventes se font entre consommateurs. Comment, comme marchand d'automobiles, dois-je interpréter cela? Les consommateurs entre eux, peuvent se faire des injustices à tour de bras, cela va. Mais si c'est un marchand d'automobiles, c'est différent. Pourquoi deux poids, deux mesures? Je ne comprends pas comment il se fait que la loi ne prévoit pas toutes les ventes. Dès que c'est au niveau de deux particuliers, il n'y a rien. Or, il s'en fait actuellement un nombre considérable. Si la loi reste telle quelle, j'ai l'impression qu'on ne vendra plus d'autos usagées. Il n'y aura plus de problème, parce que tous les particuliers vont les vendre entre eux. Celle-là, je ne me l'explique pas.

Mme Bacon: Je vais répondre très brièvement, si on peut appeler cela une réponse. On a toujours dit que nous voulions rétablir un équilibre entre consommateurs et commerçants. Il est évi-

dent que quand les ventes se font entre deux individus, il s'agit de deux consommateurs, au fond. Il y en a un qui n'est sûrement pas commerçant. Ce sont deux individus. Vous nous faites part de certaines inquiétudes, mais je ne sache pas que les gens se sentent mieux protégés, ou plus protégés en faisant des transactions entre deux individus que s'ils vont au commerce. Je ne pense pas que ces inquiétudes soient vraiment fondées de la part de l'Association des marchands d'automobiles ou de ceux qui font commerce des automobiles.

M. Brault: Mais l'esprit de justice, à ce moment-là? Ce sont des consommateurs.

M. Cyr (Jean-Guy): Mme le ministre, dans la pratique, un consommateur vient chez moi, veut offrir une voiture en échange et la voiture est dans un mauvais état, le moteur est très abîmé. Disons qu'il y a des problèmes. On fait une évaluation sur cette voiture. Evidemment, le client tombe sur le dos, apoplexie, cela n'a pas d'allure: Vous ne donnez pas assez cher pour mon auto. Le gars nous quitte, va la vendre à un de ses amis, un de ses copains de travail, à un prix qu'on trouve absolument astronomique, beaucoup plus élevé qu'on a offert.

Pour répondre à votre point, il existe un climat de confiance entre individus: Je le connais, c'est un de mes amis, son beau-frère est un de mes copains. Il revient chez nous et dit: Ma voiture, je l'ai vendue à Untel, qu'est-ce qu'on fait? On prend la voiture en échange, on la revend immédiatement à l'autre gars, au prix que le type l'a eue; c'est ça que ça fait. On n'a aucun rôle à jouer dans ça; c'est le consommateur qui a fait une transaction avec l'autre consommateur. Il agit dans un climat de confiance, parce que ce sont deux individus. Evidemment, pour nous, il y a un certain négatif psychologique qui existe et il n'a pas besoin de donner de garantie, tout est couvert, et c'est là le problème.

Ecoutez bien, nous avons des statistiques que nous vous présenterons un peu plus tard par un autre organisme régional; 45% des voitures qu'on vend usagées en ce moment — et ceci est prouvé scientifiquement; on s'est servi aussi des chiffres du ministère des Transports — sont vendues entre individus. C'est effarant. Il est impensable que la loi soit discriminatoire à l'endroit des gens qui ne font pas affaires avec nous, parce que votre loi est discriminatoire à ce moment. Elle dit: 55% sont couverts par une loi, mais les autres 45% — si ce n'est pas augmenté — ne sont couverts par aucune loi. On trouve que ce n'est pas correct pour protéger le consommateur.

M. Deragon: Plus que ça, que feriez-vous avec le cas de la personne dont, après qu'on a fait l'évaluation, on sait que le moteur de son auto est défectueux; ça demande $700 ou $800 de reconditionnement pour pouvoir la vendre selon la loi avec la garantie. La personne fait une annonce comme individu dans le journal pour vendre son auto et la vend le prix que la voiture vaudrait si elle était en bonne condition. Le pauvre innoncent qui l'a achetée parce qu'il avait confiance, qu'est-ce qui arrive? Il vient de se faire voler $700 ou $800. Qu'est-ce que vous faites avec ce cas?

Mme Bacon: C'est évident que le projet de loi ne traite que des relations contractuelles entre commerçants et consommateurs. On ne traite pas des relations entre les individus. Dans toute la loi, vous l'avez remarqué, non seulement pour les automobiles, ce ne sont que des relations contractuelles entre commerçants et comsommateurs, qui sont couvertes par la loi et non entre les individus. Je pense que, quand vous parlez de climat de confiance, s'il y a suffisamment de garanties ou de protections qui sont offertes aux consommateurs, on peut rétablir un certaine climat de confiance entre commerçants et consommateurs et non seulement au niveau des individus, au contraire. Si la loi exige certaines garanties, les individus, par le fait même, ne feront pas de commerce entre eux. Ils iront acheter des automobiles chez le commerçant qui offrira ces garanties. La compétition existera toujours.

M. Cyr: Oui, nous aussi, on pense ça. Mais c'est théorique, ça. bans la pratique, ce n'est pas ce qui se passe. Il faut aller plus loin. Nous faisons ce qu'on appelle des ventes d'accommodation, c'est-à-dire que, si la même personne dont on parlait il y a un instant a fait la vente, on prend la voiture en échange, on la revend automatiquement à un autre type et, là, le type bénéficie d'un montant de taxe de vente qu'il ne paye pas sur la différence.

Cela, c'est la motivation importante qui existe pour les consommateurs de vendre entre eux, à un prix plus cher qu'on offre. Là, ils ont une épargne de taxe de vente. Bon. Allons plus loin. Dans le projet de loi, il est dit que, lorsqu'il y aura vente de voitures usagées, nous devons vendre la voiture avec une garantie. Partant du principe que ces voitures sont au-delà de $1000, je vous avoue franchement que, lorsqu'il y aura une transaction entre individus qui devrait être transigée chez moi dans laquelle je n'aurai joué aucun rôle et qu'il faudra que je donne une garantie, je ne la donnerai pas. Je vais tout simplement refuser de faire passer la transaction chez moi.

Là, vous imaginez le tollé général à travers la province, parce que le consommateur va se sentir lésé. Il va penser que je suis indépendant, il va se servir de tous les mots et il n'y aura pas de transaction, parce qu'il n'aura pas pu épargner la taxe. Voyez-vous le problème et c'est un des phénomènes qui font que les ventes d'accommodation ont connu une hausse effarante. Alors qu'avant, nous — quand je dis nous, cela comprend aussi les marchands de voitures usagées — vendions la presque totalité des voitures usagées, c'était un rapport de deux voitures usagées pour une voiture neuve, maintenant, on en vend 1/2 par automobile neuve. C'est ce phénomène qui est arrivé, vous voyez la situation. Ce qui va arriver, dans les voitures usagées, pour autant que nous sommes

concernés dans la vente d'accommodation ou les ventes entre individus que nous transigeons chez nous, on n'en fera pas. Vous allez avoir un tollé épouvantable.

Le Président (M. Harvey, Charlesbourg): Le député de Lafontaine.

M. Léger: Je dois dire au départ, M. le Président, que je suis complètement d'accord avec les affirmations du groupe qui est devant nous concernant l'aspect particulier de la vente entre individus, entre personnes qui ne sont pas directement impliquées comme commerçants. J'irais même plus loin en disant que la vente qui se fait entre consommateurs est maintenant très souvent érigée en système. On a même vu à certains endroits, dans les journaux, des petites annonces classées, des gens qui annonçaient la vente d'une automobile, laissant l'impression que c'était une automobile privée, d'une seule personne et qu'il y avait une seule automobile à vendre. On s'est aperçu que la transaction se faisait parfois dans des appartements et que les annonces classées étaient une série de mêmes annonces, avec le même numéro de téléphone. C'était un commerce bien précis qui se faisait.

A ce moment-là, le climat de confiance se créait parce que le futur consommateur pensait qu'il faisait affaires avec une personne qui se débarrassait de son automobile. Très souvent, c'était tout un système où on vendait énormément d'automobiles. C'est peut-être la raison pour laquelle on arrive aux statistiques, que vous avez apportées tantôt, de 45% de gens qui vendent leur automobile entre consommateurs. C'est parce que c'est érigé en système. Si ce n'était pas en système, les pourcentages seraient peut-être beaucoup plus bas. Le pourcentage que vous mettez de l'avant, que vous avez certainement étudié, nous démontre qu'il y a tout un système à vérifier. Je pense qu'il faudrait se pencher là-dessus au niveau du ministère pour trouver une protection de ce côté-là.

Maintenant, sur un autre aspect, je pense que vous attaquiez pas mal l'article 5 qui concerne un peu ce qu'on pourrait appeler les lésions entre majeurs. Je pense qu'on ne peut pas admettre que les gens soient égaux, qu'il y ait une égalité des parties entre le vendeur professionnel d'automobiles et le consommateur.

Je retiens juste un exemple flagrant que nous a donné M. Grondin tout à l'heure, qui est un avocat qui semble connaître très bien son dossier, et qui, lui-même, avait de la difficulté à définir ce qu'était un rouage d'entraînement. Imaginez-vous qu'un avocat qui est habitué là-dedans — et je présume que pour la plupart des avocats, c'est la même chose, ce n'est pas le cas de M. Grondin seulement — a de la difficulté à définir des termes comme cela, quand on sait que dans la garantie offerte par le vendeur ou le manufacturier, on donne une garantie sur cela. Mais si ce n'est pas défini, non plus, pour celui qui donne la garantie, en disant: C'est le rouage d'entraînement et que cela ne dit pas ce que c'est, quand le consommateur vient pour réclamer, à cause d'une défectuosité, une compensation, on lui dit: Ce n'est pas dans le rouage d'entraînement.

Comment un simple consommateur est-il capable de définir ces termes, de définir toutes les interprétations juridiques qu'il y a dans un contrat et dans les pièces d'une automobile qui sont garanties? Comment peut-il se débattre lorsque les personnes qui sont encore plus habituées dans ce système et dans tout le jargon juridique... On ne peut pas admettre qu'il y a une égalité des parties.

C'est la raison pour laquelle je pense qu'il est important que l'article 5 demeure. Comme le disait le ministre tantôt, s'il y a réellement une surveillance dans le rôle que joue le vendeur, le commerçant et le manufacturier, à ce moment-là, il y aurait peut-être un plus grand climat de confiance, parce que le consommateur saurait qu'il y a une pénalité derrière une transaction — je ne dirais pas frauduleuse — qui pourrait amener des conséquences néfastes pour le consommateur. S'il sait qu'il y a une loi qui le protège, les relations vont être dans un climat de confiance et il y aura peut-être une meilleure égalité parce que celui qui est plus connaissant dans le domaine pour lequel il est spécialisé saura qu'il ne pourra pas transgresser la loi. Je pense que l'article 5 est absolument essentiel de ce côté-là. Plusieurs commerçants vont vouloir toucher à l'article 5. C'est peut-être achalant, mais c'est peut-être la solution pour avoir une meilleure protection du consommateur.

J'aimerais poser une question au président de l'association. Est-ce que vous avez, en pourcentage, le chiffre d'affaires des commerçants, dans le domaine automobile, qui touche les réparations des pièces et toute la réparation d'une automobile une fois qu'elle est vendue? Autrement dit, vous avez des revenus provenant de la vente, mais aussi des revenus provenant des réparations et de l'entretien. Quelle est la proportion, dans votre commerce, quant à l'aspect des pièces et celui de l'entretien?

M. Brault: Nous avons sûrement des chiffres à cet effet. En fait, tous les marchands les ont. La divergence que vous allez trouver, ou la variante, si vous voulez, va dépendre beaucoup de la nature du commerce dans un coin local. Il est bien évident que si vous vendez, par exemple, 100 voitures immédiatement à $4000 chacune, le chiffre d'affaires est astronomique comparé au service de réparation.

M. Léger: $4000, ce n'est pas la moyenne.

M. Brault: Non, mais ce n'est peut-être pas si loin aujourd'hui. Cela dépend de la sorte de marchand. Si vous vendez...

M. Léger: De toute façon, cela augmente votre argumentation.

M. Brault: Ce sont des chiffres qu'on pourrait vous fournir.

M. Léger: Mais en pourcentage, est-ce que vous avez une idée, est-ce que c'est 25%, 50%, 10%?

M. Deragon: C'est très difficile. M. Brault: C'est difficile.

M. Deragon: C'est difficile pour la simple raison que, dans des grands centres où un marchand fait un volume considérable de plusieurs milliers de voitures annuellement, ce marchand a un très faible pourcentage de réparations, comparé à des marchands dans des régions économiques plus petites où le volume est seulement de quelque 100 voitures. Proportionnellement, ses réparations sont beaucoup plus fortes. Des chiffres qu'on pourrait vous donner là-dessus ne seraient pas exacts, parce que dans les grands centres les disproportions sont assez fortes par rapport à ce qu'on appelle la campagne.

M. Léger: Prenons donc la question autrement; disons plutôt la proportion ou le pourcentage entre le taux de profit de la vente et le taux de profit des réparations qu'un commerçant peut faire. Quand il y a des profits à faire sur la vente, il y a des profits à faire sur les réparations et sur l'entretien. Quelle est la différence dans le pourcentage?

M. Brault: Est-ce que vous me permettez? Pour ce qui est de votre première question, je pense que je suis assez juste en vous disant que cela peut aller chercher entre 15% et 20% du chiffre d'affaires total.

M. Léger: D'accord.

M. Brault: Encore une fois, il n'est pas question de charrier, mais cela va varier quand même assez considérablement d'un marchand à un autre.

M. Léger: Maintenant, quand vous avez une garantie qui est remise à votre client, la garantie vient du manufacturier, je pense. Comment cela fonctionne-t-il? Est-ce que c'est le manufacturier qui, chaque fois, vous paie pour les réparations que vous faites à l'intérieur de la garantie ou si c'est une somme globale d'argent qui est donnée à un commerçant qui, lui, à l'intérieur de cette somme d'argent pour les réparations, doit donner les services de la garantie?

M. Brault: Non. Nous sommes payés à la pièce. Je pense que c'est le seul moyen que le manufacturier peut avoir. Si on doit remplacer une transmission, évidemment, nous serons payés pour cette réparation spécifiquement. Cela est tout fait à la pièce.

M. Léger: Maintenant, oui?

M. Deragon: II y a des inspecteurs qui, constamment, vérifient à toutes les trois ou quatre semaines, qui visitent les concessionnaires d'automobiles au sujet du programme de réparations ou d'entretien sur la garantie, pour bel et bien justifier ces réparations.

M. Léger: Entre autres, à cause de cette question, je pensais à l'exemple d'une automobile qui a une année de garantie sur les pièces et qui, par suite de la défectuosité de l'une de ces pièces, à l'intérieur de la garantie, peut prendre feu. C'est arrivé dans le cas de l'automobile d'une personne que je connais. A ce moment, il s'agissait de savoir si c'est l'assurance qui doit payer le feu ou si, à cause de la défectuosité de la pièce, c'est le manufacturier. Le jeu qui peut se faire entre le commerçant, c'est de faire payer par l'assurance plutôt que par le manufacturier, à cause de la pièce.

M. Brault: C'est le jeu normal. Etant commerçants, on n'est quand même pas des ingénieurs. Je pense qu'on peut assurer que le consommateur, à ce moment, n'est pas lésé, parce que la compagnie d'assurance — et, vous avez raison, c'est ce qui se fait normalement — n'est pas prête à débourser $1000 parce que M. X., le manufacturier, a fait une erreur. Elle va se charger d'aller les récupérer.

M. Léger: Oui.

M. Brault: C'est ce qu'elle fait dans la pratique; elle les récupère parce qu'elle va ensuite poursuivre le manufacturier.

M. Léger: J'ai vu un cas dernièrement...

M. Brault: C'est le moyen le plus rapide de remettre la voiture au client.

M. Léger: D'accord. Mais quand il y a un autre problème social, qui est celui du coût des assurances, si cela coûte trop cher de réparation, dans le domaine de l'assurance, c'est le consommateur qui, au bout de la ligne, verra ses primes augmenter parce que la compagnie d'assurance ne peut pas arriver.

Le problème que j'exposais, c'était que, quand le feu a détruit une bonne partie de l'automobile, c'est bien difficile de prouver que c'était telle pièce qui était sous la garantie et que c'est la compagnie qui avait créé une défectuosité alors. En réalité, vous n'êtes pas ingénieur pour prouver cela, mais, quand même, pour celui qui paie cela, cela augmente le prix de l'automobile plus tard, mais, si le manufacturier est responsable, c'est lui qui doit le payer, au lieu de voir, à ce moment, beaucoup de cas où les compagnies d'assurance-automobile ont à payer des dommages à plusieurs citoyens, ce qui augmente les primes, donc, au bout de la ligne, c'est le consommateur qui verra ses primes d'assurance augmenter.

M. Brault: Si je comprends bien, M. Léger, ce sera la compagnie d'assurance ou nous. De toute

façon, c'est toujours le consommateur qui va payer.

M. Léger: Pas nécessairement, si c'est le manufacturier.

M. Brault: Si je l'absorbe, il y a quelqu'un qui va le payer. Il ne faut pas se conter de peurs là-dessus.

M. Léger: Non, mais ce que je veux dire, c'est qu'un manufacturier se doit de donner un produit avec une garantie. Avec cette garantie, c'est lui qui verra à corriger cela. Ce n'est pas pour cela qu'il devra nécessairement augmenter le coût de son automobile. Son automobile doit être en bonne condition pour la garantie qu'il donne. C'est difficile à prouver par l'expert d'assurances que c'est telle pièce qui était défectueuse et que c'est elle qui est la cause de $2000 à $3000 de réparations et non pas...

M. Brault: Qu'est-ce qu'on fait dans les désastres aériens? Il y a quelqu'un qui le trouve après. Quand cela a tombé d'en haut, parfois, il ne reste pas grand-chose. C'est bien difficile pour nous autres d'essayer de faire cela sur place. D'ailleurs, ce que je vous soumets humblement, ce ne sont pas des cas d'exception. Je voudrais bien que le produit soit parfait. On serait heureux, parce que, pour la garantie, le manufacturier, quand même, nous tient dans un cadre qui est assez astreignant. Il y a un bon montant d'argent qui est payé de notre poche pour de bonnes relations, des choses qu'on ne peut pas récupérer.

M. Léger: D'accord. De toute façon, c'était plutôt un renseignement de votre part, mais je vois quand même que vous ne pouvez pas le donner complètement. Vous n'êtes pas les seuls impliqués là-dedans.

M. Brault: Non, assurément pas.

M. Grondin: M. Léger, si vous le permettez, vous m'avez dit tout à l'heure que vous trouviez peut-être un peu surprenant que je ne sache pas ce qu'est un rouage d'entraînement, mais, après vérification auprès de mes clients, on m'informe que, dans les garanties des divers manufacturiers, on le définit, le rouage d'entraînement, mais on le définit différemment, suivant que c'est Chrysler, Ford ou General Motors. Il serait peut-être bon que la loi le précise.

M. Léger: II faudrait prendre l'ensemble des définitions, si ce n'est pas la même chose.

M. Grondin: Ce n'est pas la même chose.

M. Léger: Non, ce que je voulais absolument soulever, c'est le fait que des personnes qui sont directement impliquées dans un domaine comme celui-là trouvent quand même assez difficile de donner une définition. C'était seulement un exem- ple pour montrer comment le consommateur, qui n'a pas toute cette formation derrière lui, peut avoir de la difficulté à se défendre. C'est là que je disais qu'il n'y a pas réellement une égalité entre les parties là-dedans, parce que le consommateur, c'est très rare qu'il est capable de savoir ce qui se passe avec son automobile, ce qui ne fonctionne pas, de qui cela dépend et si c'est compris dans la garantie. Je pense que c'est plutôt cet aspect que je voulais faire ressortir. Je ne voulais pas attaquer votre connaissance là-dedans.

M. Grondin: Notre principal grief sur l'article 5, c'est parce que ce sont des critères qu'on juge flous. Flous, qu'est-ce que c'est? C'est cela, les critères. Ce n'est pas autre chose.

M. Léger: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Sur la question...

M. Cyr: J'aimerais revenir, M. Léger, sur la question de la garantie. Il faut que vous réalisiez que nous, les marchands d'automobiles, les concessionnaires d'automobiles, nous sommes pris entre le manufacturier et le client et que nous devons appliquer la garantie que le manufacturier nous impose. On a tout avantage, évidemment, lorsqu'un article est couvert par la garantie, de dire au client: Va-t'en chez toi, c'est gratuit, c'est le manufacturier qui paie. Vous réalisez bien que, pour $100 du manufacturier ou $100 du client, égoïstement, simplement au point de vue de la bonne réputation de notre commerce et de bonnes relations avec nos clients, on va dire: Laisse faire, va-t'en. On va recevoir $100 de toute façon, c'est $100. Evidemment, quant à l'application de la garantie, on en entend de toutes sortes. Il ne faudrait pas qu'on mette l'odieux sur nous, parce qu'on est pris. On n'a pas le choix. On serait très peu intelligents de refuser d'appliquer une garantie qui s'applique. Les gens ont tendance à dire: On va le faire payer au client et on va le percevoir de la compagnie. Ce n'est pas vrai. Le concessionnaire qui est pris à faire cela perd automatiquement sa franchise. Si vous réalisez les montants énormes que nous avons investis dans nos bâtisses, dans nos équipements, dans notre personnel, enfin dans tout ce qu'on a, on ne peut pas se permettre de mettre en jeu, même une seule instance qui pourrait être prise par les inspecteurs, comme M. Deragon, qui viennent régulièrement chez nous et qui vérifient la véracité et l'exactitude de nos réclamations auprès du manufacturier.

M. Léger: D'accord.

M. Deragon: Vous me faites penser à un autre problème sur la garantie auquel vous n'avez jamais pensé. Il y a aussi le fait que le consommateur abuse d'une voiture. Est-ce qu'il y a un article qui se vend dans le monde entier qui est plus complexe qu'une voiture, qui est sujet à l'abus, à la mauvaise humeur du consommateur, à ses réac-

tions? On se venge sur sa voiture parce qu'on n'est pas de bonne humeur.

On doit la faire fonctionner dans des températures de 30 sous zéro. On doit la faire fonctionner dans le calcium. On doit la faire fonctionner dans toutes les conditions impossibles et, même si on en abuse, même si on en a abusé, on s'attend encore que la garantie s'appliquera.

Ce sont des problèmes auxquels vous n'avez jamais pensé, mais c'est une situation qu'on vit et à laquelle nos gérants de service doivent faire face. A un certain moment, il est beau de toujours donner l'avantage au consommateur, mais il faudrait penser qu'il y a le commerce moyen que l'on exploite et qui est tout de même ici, au Québec, important et ne pas toujours nous placer de telle sorte que nous sommes toujours désavantagés dans la loi. Je pense que vous n'avez jamais pensé à cet aspect.

M. Léger: D'accord. Vous disiez tout à l'heure qu'un commerçant pourrait perdre sa franchise et que pour lui, c'est important parce que c'est son gagne-pain. Voici une question hypothétique. Peut-être allez-vous sauter, mais je vous la pose. Le commerçant peut-il être, à un certain moment, sur la liste noire du groupe ou d'une compagnie d'automobiles parce que trop de voitures sont passées sur la garantie, même s'il y a des inspecteurs de la compagnie? Y a-t-il possibilité que vous gardiez même une certaine norme de réparations qui sont couvertes par la garantie? Si le manufacturier dit: Ecoutez, ce commerçant dépasse la moyenne qu'on juge acceptable et je pense qu'il abuse un peu. On va le surveiller davantage et il y a peut-être le danger qu'il perde sa franchise. Y aurait-il peut-être une liste noire des commerçants qui abuseraient de cette garantie qu'on fait payer par le manufacturier?

M. Brault: M. Léger...

M. Léger: La liste noire, c'est un peu fort, mais...

M. Brault: Oui un peu, beaucoup. Je vais tenter de vous répondre le plus honnêtement et le plus ouvertement. Il est évident que nos affaires sont vérifiées. C'est un peu comme l'impôt sur le revenu. Il faut le comprendre parce qu'il y a un réseau de distribution dans toute l'Amérique du Nord qui est quand même très étendu. Ce que le manufacturier surveillera et je n'aime pas appeler cela une liste noire... Il est possible qu'un marchand soit plutôt très lâche avec l'argent du manufacturier. Ce n'est pas le sien. C'est celui des autres. Il est plus facile de faire plaisir au client qui est assis à côté de vous qu'au manufacturier là-bas. Il faut quand même comprendre que pour le manufacturier, il y a une question de coût aussi, que cela n'est pas la Saint-Vincent-de-Paul. Alors, il est évident qu'on surveille le coût des réparations, le coût d'application de garantie dans tout le Canada, et il finit par s'établir une moyenne.

Les voitures livrées chez nous ne sont pas dif- férentes de celles qui ont été livrées à Vancouver. Si, à un certain moment, on s'aperçoit que chez moi, par exemple, le coût de la garantie est astronomique, il n'y a pas de liste noire, mais il est certain qu'on va me rendre une visite. Si j'ai des bonnes explications parce que cela peut arriver, à un certain moment, où je peux avoir des malchances... Par exemple, vous devez remplacer deux moteurs dans un mois. Vous parlez d'une réparation de $2000. Je vous assure que la moyenne en fiche un coup en l'air.

A ce moment, oui, on sera beaucoup plus sévère chez vous, mais ce n'est pas dans le but d'une liste noire. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas bien. Je pense que c'est bien plus dans le but d'aider et de se protéger. Les manufacturiers ne sont quand même pas pour donner de l'argent à Pierre, Jean, Jacques simplement pour le plaisir de le faire. Alors, il n'y a pas de liste noire comme telle, mais il est évident qu'on connaît le manufacturier. C'est le coût moyen de garantie dans tout le Canada. S'il y en a un qui sort à travers cela et qu'il est vingt fois les autres, c'est définitif qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Nos affaires sont vérifiées régulièrement pour s'assurer que tout est en ordre, mais ce n'est pas dans le but, je pense, de pénaliser ou de... C'est sur une base très logique et je pense que cela protège de plus le consommateur.

M. Léger: Y a-t-il un tarif qui est le même ou qui peut être différent pour la réparation de la même automobile qui se fait, soit sur la garantie et payée par le manufacturier ou une voiture qui pourrait ne pas être sur la garantie et payée par le consommateur?

M. Deragon: Le taux horaire est sensiblement le même parce que nos taux sont établis selon des critères du manufacturier. Ils varient parfois de quelques cents. Notre taux au détail sera de $16.50 ou de $18 l'heure dans d'autres cas. Peut-être qu'il sera de $16.80 et quelques cents, parce que tout est calculé sur un ordinateur et cela arrive au cent.

M. Cyr: La variante existe par le simple fait que le manufacturier ne considère pas tous nos coûts comme faisant partie de la composante du taux qu'il nous paie l'heure et je pense...

Mais je voudrais attirer votre attention sur une chose et je pense que je peux vous la dire. Le coût de la garantie — je représente un produit General Motors — dans la province de Québec, est de beaucoup plus élevé que la moyenne canadienne.

Une des raisons, évidemment, ce sont les conditions climatiques que nous subissons. Je vous donne un exemple pratique: en hiver. Je vous assure que le lendemain d'une bonne tempête, nous avons au moins dix transmissions à réparer. Théoriquement, ces transmissions ne devraient pas être réparées parce que la personne est restée prise dans la neige. Théoriquement, la personne qui est prise dans la neige devrait dire: Je vais appeler un remorqueur, ils vont me sortir de là. Que

fait-on tous? Je le fais. Vous le faites. On essaie de se déprendre et ça saute. Evidemment, nous, comme marchands d'automobiles, lorsqu'on présente ces réparations, qui ne sont pas toujours payées, parce qu'on est obligé de faire un genre d'enquête, on demande aux clients: Comment se fait-il que ce soit arrivé? Quand la transmission est brûlée et qu'il est encore dans le banc de neige, on le sait. Mais vous voyez les conditions dans lesquelles nous sommes obligés d'appliquer la garantie. Evidemment, avoir $300 de GM ou du client, je préfère GM, mais c'est encore M. GM qui signe le chèque. C'est lui qui dit oui ou non.

Au point que dans le cas d'une tempête, on ne fait aucune transmission sans demander la permission au représentant de la compagnie parce qu'on ne veut pas que la compagnie dise: On ne paie pas, et qu'elle aille chercher cela à nos clients et que le client nous dise: Je suis en-dedans de 12 000 milles, je ne veux rien savoir de toi. Vous voyez dans quelle position nous nous trouvons.

M. Brault: M. le Président, si vous me le permettez, je peux ajouter que le coût de garantie payé par le manufacturier n'est pas uniforme. Par exemple, simplement pour aller rapidement là-dessus, le coût d'opération à Chicoutimi est certainement bien différent du coût d'opération à Montréal. C'est pris en considération. Ce n'est pas un prix fixe à travers le Canada. Cela varie selon le coût d'opération, des salaires, des "fringe benefits", je m'excuse, j'oublie le mot français, il y a une certaine différence qui se présente.

M. Léger: D'accord. Je vous remercie. En ce qui me concerne, je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Pendant que nous sommes sur la question de la garantie, je voudrais demander aux représentants qui sont devant nous si les compagnies manufacturières offrent encore leur système de garantie, comme vous l'avez dit tantôt, sur une base de remboursement horaire qui peut varier. Quant au remboursement des heures faites ou à être faites pour remplacer tel ou tel morceau, opère-t-on toujours sur la même base, c'est-à-dire qu'on vous alloue une heure et demie pour tel morceau, trois heures pour tel morceau? Si c'est la même chose, pour la bonne compréhension du dossier, je voudrais signaler à l'attention de la commission que cela veut dire que le garagiste détaillant doit aussi absorber un coût dans cette garantie présentement. Pour employer un terme courant chez les garagistes, le "flat rate" n'est pas toujours conforme au travail qui doit être fait. Ce n'est pas facile de dire à un mécanicien: C'est une heure et demie, et tu vas le faire dans une heure et demie. Le garagiste doit aussi compter sur la convention collective qui protège également le mécanicien, et Dieu sait s'ils n'ont pas tous la même rapidité pour effectuer des réparations.

On a parlé, toujours dans le domaine de la ga- rantie, du fameux rouage d'entraînement et là, on est arrivé à en parler surtout avec la question des voitures usagées. Chez les détaillants d'automobiles, quand on fournit une garantie sur une voiture usagée où il est effectivement question de rouage d'entraînement, le garagiste n'émet-il pas un certificat de garantie dans lequel on spécifie clairement ce que veut dire le rouage d'entraînement aux fins de la garantie donnée? Cela se fait-il encore comme cela?

M. Deragon: Dans mon cas personnel, c'est bel et bien défini dans ma police de garantie de l'usager. Je pense que la plupart le font.

M. Williams (Frank H.): ... ce qu'ils veulent avoir, par exemple, de la garantie.

M. Samson: Pardon?

M. Williams: Dans le projet de loi qu'ils nous ont présenté, on ne sait pas ce qu'ils veulent avoir comme garantie.

M. Samson: Je dois donc en déduire que les garanties actuelles qui sont données, dans le cas de vente de voitures usagées, sont données généralement pour couvrir le rouage d'entraînement. Mais les explications qui sont données, suivant les détaillants concernés, peuvent varier dans les termes. Cela fait un peu le jeu de la libre concurrence suivant qu'un garagiste peut élaborer plus qu'un autre dans ses termes de garantie. Il peut y trouver là un mode de vente plus facile si sa garantie est meilleure que celle de son concurrent. Est-ce que je comprends bien si je comprends comme cela?

M. Deragon: Au sujet de la compétition? M. Samson: Au sujet de la compétition.

M. Deragon: La réputation de ceux qui affichent une place d'affaires, il faut penser que là aussi c'est important.

M. Samson: Alors, c'est dans ce contexte que, pour vous, la loi 7 vous apparaît comme pouvant être difficile d'application si l'on exige, par cette loi, que vous donniez une garantie couvrant le rouage d'entraînement, sans y donner les explications de la garantie. Autrement dit, pour la bonne compréhension des officiers du ministère et de Mme le ministre, ordinairement le rouage d'entraînement cela veut dire le moteur, la transmission et le différentiel, mais aussi le bloc et les parties internes. Cela ne veut pas dire les accessoires. Cela ne veut pas dire le distributeur, cela ne veut pas dire le générateur, cela ne veut pas dire le radiateur, cela ne veut pas dire les bougies, cela ne veut pas dire le système de "filage". Dans le cas d'une transmission, cela ne veut pas dire tout ce qu'il y a autour. Dans le cas d'un différentiel, cela ne veut pas dire les essieux et cela ne veut pas dire les "bearings" de roues non plus. Est-ce que je comprends bien?

M. Brault: Oui.

M. Samson: Je pense qu'à ce moment-là il devient plus important que cette commission tienne compte de la définition du terme rouage d'entraînement. Sinon, en tant que consommateur, je pourrais facilement, avec un bon avocat, jouer sur les termes et faire réparer des choses qui ne sont pas prévues de façon générale et qui ne font pas partie intégrante de la garantie selon les termes de la loi.

M. Brautt: M. le Président, notre crainte... Evidemment, nous ne sommes pas des législateurs. Nous les vivons tous les jours, nous appliquons les lois. Ce qui nous effare dans le bill 7, c'est le coût. Nous allons vous en donner des garanties si vous en voulez dans les usagées. Il n'y a pas de problème. On va en faire des autos neuves, mais à quel coût pour le client? Où est-ce qu'on arrête cela? Il n'y a pas de difficulté, parce qu'il y a quand même un droit, que je sache, que vous ne m'enlèverez jamais, c'est de faire un profit. Alors, si vous augmentez les coûts d'exploitation, augmentez-les tant que vous voudrez, il n'en reste pas moins que c'est encore le consommateur qui paiera. C'est là où nous sommes bien inquiets. On espère. On est peut-être dans une mauvaise position d'essayer de le faire le mieux possible. C'est évident qu'on peut donner des garanties à 100% sur toutes les voitures. A quel prix?

M. Samson: II y a peut-être à prendre en considération par les membres de la commission le fait qu'il ne faudrait peut-être pas trop porter atteinte à la bonne intelligence du client non plus. Je suis persuadé que tous les détaillants d'automobiles ont régulièrement des clients qui exigent d'acheter une voiture sans garantie aux fins de la payer un peu moins cher et de prendre eux-mêmes les risques que cela comporte. Cela veut dire que, si la voiture ne tient pas le coup, le client sera obligé de payer lui-même; mais, si la voiture tient le coup, il aura économisé $200, $300 ou $400. Parfois cela peut faire l'affaire et du client et du détaillant qui a un volume de voitures à vendre, peut-être supérieur à sa capacité de les reconditionner. Je ne dis pas supérieur à sa capacité d'entretenir les voitures neuves, mais supérieur à sa capacité de reconditionner les voitures usagées quand on pense à des modèles qui arrivent à cinq ans et plus, par exemple. Il y a beaucoup de vendeurs qui ont une clientèle telle qu'ils ne peuvent pas eux-mêmes foucnir à faire le reconditionnement. Donc, il y a des reconditionnements qui peuvent se faire par l'entremise de tierces parties, c'est-à-dire de petits garages qui ont moins d'ouvrage et qui font cela pour le détaillant.

Le garagiste, dans les conditions du bill 7, devient le seul responsable de tout ça. Il y a également le fait que les ventes entre particuliers qui, Madame le ministre, ont augmenté considérablement, même avec la garantie qui serait obligatoirement prévue par là loi, pourraient augmenter. Je m'explique...

C'est ce que je vois, vous me direz si vous ne voyez pas ça ainsi ou si vous le voyez autrement et vous pourrez ajouter quelque chose. C'est qu'il y a probablement plus de personnes dites consommateurs qui achèteront des voitures usagées directement du client, sachant qu'il est en voie d'échanger sa voiture, et qui la revendront elles-mêmes pour éviter de tomber sous l'empire de la loi. Il y a le danger du développement — je pense qu'il est assez important que nous le prenions en considération — d'un commerce parallèle de voitures usagées, lequel ne sera pas soumis à la loi.

Par contre, cela va peut-être aider à la bonne compréhension de l'étude de ce projet de loi si on tient compte de la loi 13. J'ai eu l'impression tantôt qu'on n'en avait pas tenu compte. La loi 13 et la réglementation qui doit s'ensuivre prévoient, pour les fins de la sécurité routière, que toute voiture automobile qui, à l'avenir, changera de main devra subir une inspection obligatoire de bonne mécanique.

Je me demande si, en quelque sorte, on n'est pas en train d'essayer de placer dans une loi ce qui apparaît déjà dans une autre loi pour une autre fin, mais qui protège quand même le consommateur, non seulement dans ses investissements, mais dans sa sécurité. La loi 13 prévoit ça. Il y aura, de par sa définition, des garagistes certifiés de l'entreprise privée qui pourront être autorisés à effectuer des inspections mécaniques, de bonne mécanique, et, bien sûr, la signature du mécanicien engagera la responsabilité de l'employé et du garagiste, si j'ai bien compris cette loi.

De toute façon, il y aura sûrement des détails qui suivront bientôt. Cela pourrait peut-être, d'une certaine façon, modérer le commerce extérieur au commerce actuel, c'est-à-dire le commerce entre consommateurs, non pas pour protéger le prix, mais pour protéger la sécurité de l'automobiliste.

Oui, monsieur?

M. Williams: M. le Président, qu'est-ce qu'on va faire avec les autos de la Sûreté du Québec et de l'Hydro-Québec si on ne peut pas les vendre sans garantie?

M. Samson: C'est une sacrée bonne question. On devrait les "scraper" toutes.

M. Castonguay (Marcel): M. le Président, je crois que le député d'Abitibi vient tout de même de toucher un point assez important qui est une partie...

Le Président (M. Lafrance): C'est le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: Rouyn-Noranda.

M. Castonguay: Je vous ai transféré, cela n'a pas été loin.

M. Samson: Cela ne fait rien, c'est dans une très bonne région.

M. Castonguay: Oisons qu'on parle de voitures "as is" et je crois que dans cette loi, justement, à cause des articles...

M. Samson: Je m'excuse, je vous arrête immédiatement. Peut-être que pour les membres de la commission, il est bon de dire ce que veut dire "as is": c'est tel quel, tel que vu.

M. Castonguay: Ce sont des voitures vendues telles quelles avec un moteur en mauvaise condition, etc., mais qui rendent service à l'occasion à certains consommateurs. Vous avez, par exemple, un propriétaire d'une voiture 1973 qui a malheureusement un accident avec sa voiture, mais n'a pas d'assurance pour lui personnellement. Il peut acheter quelquefois une voiture à un prix très bas, même si la mécanique n'est pas tellement en bonne condition, j'entends au niveau du moteur, et se rebâtir une voiture. Il faut dire que plusieurs consommateurs ont le don de la mécanique et peuvent fort bien prendre le moteur d'une voiture et le transférer dans une autre pour se refaire une bonne voiture à un prix assez abordable.

Lorsqu'on lit les articles 262 et 263 du projet de loi, on voit qu'on enlève tout droit au consommateur de se prévaloir d'une occasion semblable, parce qu'on lui dit qu'il ne peut contracter avec condition ou faire un contrat qui vient àl'rencontre de la loi. Cela veut dire qu'on ne peut pas vendre une voiture à un consommateur avec une inscription sur le contrat: Vendue telle quelle ou vendue telle que vue, ou prenez l'expression que vous voudrez. A ce moment-là, je pense qu'on brime le consommateur dans ses droits. Si on regarde le projet de loi, on décide d'avance de ce que le gars doit faire à 100%. On lui dit qu'il doit acheter une voiture, un appareil électrique ou toute autre chose, de telle et telle façon et on lui fait le portrait exactement de la façon dont il doit procéder pour acheter. On lui dit: C'est à telle page, à tel endroit, à tel paragraphe qu'il doit signer, etc.

Le type n'a plus aucune liberté personnelle de dire: Je la veux telle quelle, cette voiture ou je la veux de telle façon, etc. Je pense que c'est une chose, dans la loi, qui fait en sorte que dorénavant... Je parle peut-être plus au niveau du consommateur, parce que le marchand a toujours une porte de sortie. La voiture que nous sommes pris pour vendre $1350 avec garantie, si le moteur a quelque chose, le raisonnement qu'on va faire va être assez rapide. On va demander $400 de plus au type qui va la changer et on va pouvoir la revendre $950 sans garantie. A ce moment-là, nous sommes corrects.

Par contre, il y a encore un consommateur qui va payer, celui qui vient de la changer. Mais celui qui veut la racheter, à ce moment-là, a pas mal moins de facilités. On parle d'un cas semblable. Mais dans combien de cas... Je pense qu'il y a des consommateurs qui sont assez avertis pour avoir au moins la liberté de pouvoir faire un contrat à leur guise et d'y faire inclure une clause à un moment donné, chose qui est impossible avec les articles 262 et 263.

M. Samson: Dans le fond...

M. Grondin: Je m'excuse. Vous avez mentionné, au sujet du projet de loi no 13, le certificat de conformité et d'inspection; il ne faudrait pas que la commission soit mal informée. Ce certificat va se limiter uniquement à la sécurité routière au niveau des freins, au niveau de la conduite. Mais l'état du moteur, transmission, différentiel, ne sera pas inspecté. A ce moment-là, il ne faudra pas penser que cela va protéger le consommateur, loin de là.

M. Samson: C'est justement ce que j'ai mentionné, je pense, assez clairement tantôt. Du côté du bill 13, on s'occupe de la sécurité routière par ce moyen, alors qu'ici on s'occupe de la sécurité économique du consommateur.

Mais il y a un certain chevauchement qui peut se faire. Dans la sécurité économique du consommateur entre également sa sécurité personnelle, la sécurité routière. Cela veut dire qu'il y aura une obligation supplémentaire à celle qui apparaît ici, à l'avenir, par le bill 13. Supplémentaire à celle qui apparaît ici, parce que, si l'on parle d'inspection de freins, d'inspection de conduite et, en fait, de sécurité, cela veut dire peut-être — mais cela ne vous regarde pas tellement dans le cas des ventes de consommateur à consommateur — que cela va exiger certaines réparations par cette voie d'inspection où on a vu des voitures se vendre, dans le passé, de quelque façon que ce soit, avec des freins peut-être dangereux, mais une inspection pourrait peut-être prouver que le danger est proche; donc, il y aurait un changement de sabots de freins, un changement de disques, ou un changement de rotors.

Mais cela ne serait pas le cas s'il n'y avait pas cette nouvelle disposition dans la loi 13.

Je voudrais en revenir à la garantie de voiture usagée. C'est mon point de vue personnel, je considère que, selon l'article 263 de la loi, à moins qu'il n'en soit prévu autrement, le consommateur ne peut renoncer aux droits que lui confère la présente loi. Il faudrait peut-être, ou bien modifier cet article, ou bien en prévoir un autre ailleurs, pour le cas de l'automobile usagée. Lorsqu'on dit: A moins qu'il n'en soit prévu autrement, cela veut dire qu'il pourrait en être prévu autrement dans la loi, au chapitre de la vente de voitures usagées.

Je considère qu'un acheteur de voiture usagée, qui a, lui, les moyens d'effectuer les réparations lui-même qui ne veut pas payer plus d'un tel prix pourrait, en connaissance de cause — c'est ainsi que cela se fait généralement — par exemple, acheter une voiture qui vient de la Sûreté du Québec, acheter une voiture qui vient de la Sûreté municipale, acheter une voiture qui vient d'un taxi, acheter une voiture qui vient d'une compagnie de louage, sachant qu'elle a plus de millage que la moyenne, sait qu'il peut la réparer lui-même à un coût assez bas, parce qu'il effectuera lui-même les réparations, il achètera lui-même les pièces, peut-être à un prix moindre dans des magasins d'accessoires d'automobiles qualifiés et spéciali-

ses, de sorte qu'il pourra se rebâtir une voiture qui fera son affaire, mais il va la payer moins cher. A ce moment, c'est priver le consommateur qui veut utiliser ce moyen — cela se fait passablement — de pouvoir l'utiliser. Et évidemment, si les réparations se font à partir d'un marchand détaillant qui a une réputation à protéger en plus, parce que je pense que ce n'est pas la loi qui va vous dire que vous avez une réputation à vous faire, si vous voulez rester en affaires, vous devez protéger votre réputation, c'est-à-dire que vous devez donner satisfaction, à ce moment, je pense qu'il n'y a pas un garagiste, même en voulant dépenser $600, $700 ou $800 sur une voiture de police, qui aime à la vendre lui-même en dépensant tout cet argent et en en donnant la garantie, parce que cela coûte trop cher pour ce que cela vaut. Puis là, vous allez avoir un client qui va être psychologiquement insatisfait, même si la voiture est meilleure que plusieurs qui sont dans la cour du garagiste. Il va être psychologiquement insatisfait parce qu'il va toujours avoir dans la tête que c'est une voiture de police, que c'est une voiture de taxi qu'il a achetée alors que, généralement, ce genre de voiture est acheté par des gens qui sont capables de les réparer eux-mêmes et le garagiste n'est pas obligé de s'occuper de revendre ce genre de voiture, à cause de sa bonne réputation.

Je pense qu'on entre dans une sphère d'activité qui est importante et qui exige qu'il y ait des modifications à la loi.

La garantie du manufacturier. Je pense que, Mme le ministre, on doit prendre en considération que la garantie du manufacturier n'est pas provinciale, elle est nationale et internationale. C'est la même partout. Or, si nous faisons retomber les responsabifités de garantie de voitures neuves sur le détaillant, il n'est qu'un revendeur, lui, le détaillant dans ce cas, et celui qui agit pour réparer la voiture s'il y a lieu de le faire...mais, comme c'est le manufacturier qui paie, je pense qu'il faut prendre en considération le fait que les garanties de manufacturiers qui sont données ne le sont quand même pas à la légère, elles sont assujetties à des normes, dans le cas de voitures nord-américaines et américaines qui sont encore plus sévères que les nôtres, et sont généralement très valables, sauf exception. Quand je dis exception, ce sont des cas non prévus par la garantie, elles sont généralement très valables.

Mais s'il arrive que l'on tienne responsable, le garagiste, le détaillant pour cette garantie et qu'il effectue des réparations et qu'après inspection ou enquête la compagnie en vient à la conclusion — et ce n'est pas facile à faire, cela coûte de l'argent à une compagnie pour le faire, mais, dans certains cas, ils sont obligés de le faire — qu'il y a eu usage abusif, le garagiste aura réparé la voiture à ses frais. Ce n'est pas facile pour un garagiste de retourner faire une facture à quelqu'un, quand il a laissé sortir la voiture en prétendant que la compagnie devrait payer pour. Il y a toute la question du diagnostic, parce qu'avant de savoir si c'est la transmission qu'il faut réparer il y a parfois plusieurs heures de travail à faire qui tombent ac- tuellement sur le dos des garagistes. Cela fait partie de leurs bons services à donner à leurs clients. On doit absolument sortir la responsabilité du garagiste vis-à-vis de la garantie du manufacturier. On a posé une question tantôt dans le cas d'une automobile qui prend feu. Si cela dépend d'une défectuosité mécanique, cela devrait être la compagnie ou le garagiste qui paye les frais de réparations. Je pense qu'il faut se coller à la réalité. Je ne connais pas un client, avec une assurance-automobile qui couvre le feu, le vol, les vitres, etc., qui accepterait d'attendre trois mois que quelqu'un fasse enquête pour déterminer si cela dépend d'une défectuosité mécanique et attendre tout ce temps sa voiture. Il s'agit là, je pense, du bon service à être donné au client.

La première des choses, c'est le client lui-même qui va exiger sa voiture dans les jours qui vont suivre. Or, le moyen le plus rapide, c'est de faire appel à sa compagnie d'assurance qui l'assure pour cela, justement. On dira peut-être que cela peut occasionner des augmentations de tarifs d'assurance; mais, si la compagnie d'assurance a des doutes que cela peut provenir d'une défectuosité mécanique, cela fait partie aussi des responsabilités des compagnies d'assurance de défendre leurs dossiers. Ce n'est pas pire de défendre ce dossier que de défendre un dossier pour prouver la responsabilité d'un autre automobiliste en cas d'accident, etc. Donc, nous ne devons pas, dans ces cas non plus, exiger que ce soit payé immédiatement par une compagnie ou un garagiste, parce que la preuve est trop longue à faire. Le client ne voudra pas attendre tout ce temps. C'est une question pratique.

Il y a beaucoup d'autres questions qui peuvent se poser, mais je pense qu'elles réapparaîtront dans les mémoires que d'autres organismes représentant des garagistes nous présenteront bientôt.

En terminant, j'aimerais souligner au ministre que la fusion des deux cautionnements m'apparaît comme très valable, le cautionnement qui existe actuellement et celui qui pourrait être exigé par l'Office de la protection du consommateur; ils pourraient être fusionnés dans un même cautionnement. De toute façon, ce cautionnement est suffisamment élevé présentement pour protéger les consommateurs.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: M. le Président, j'aimerais bien avoir des commentaires de nos invités sur trois articles. Le premier, en ce qui regarde l'article 51, c'est-à-dire toute la question du contrat dans la question des voitures usagées. On en a parlé un peu. Est-ce que vous trouvez que les exigences sont trop difficiles à satisfaire?

Le président de votre association, tout à l'heure, a dit: On est capable de répondre à n'importe quelle exigence. Mais combien cela coûtera-t-il au bout de la ligne? Il est bien sûr qu'il faut être réaliste aussi, mais certaines personnes

ont semblé me dire qu'il était difficile de satisfaire à toutes les exigences de l'article 51, en particulier, en énumérant, par exemple, les réparations majeures qu'aurait subies telle voiture lorsqu'elle appartenait à l'ancien propriétaire et tout cela.

J'aimerais connaître vos commentaires là-dessus ainsi que vos commentaires sur l'article 69 relativement aux réparations. Je ne sais pas si cela vous concerne, mais on peut exiger du garagiste qu'il me donne par écrit les réparations à faire et le coût. Avez-vous des commentaires à faire? Vous avez également parlé dans votre présentation de l'article 172. J'aimerais également que vous expliquiez davantage quelles sont les difficultés véritables que vous procurerait dans vos opérations quotidiennes l'application de l'article 172.

M. Grondin: Au début de mon mémoire, j'ai spécifiquement mentionné à la commission que ces points étaient importants, mais qu'ils étaient touchés dans d'autres mémoires qui sont déjà déposés à la commission. Je pense que les représentants des associations régionales de Québec et de Montréal viendront et expliqueront avec beaucoup plus de détails les raisons pour lesquelles ils ont des commentaires à formuler sur chacun des articles qu'a mentionnés le député.

Toutefois, aujourd'hui, je pense que le président de l'association ou quelqu'un d'autre du comité peut répondre succinctement à vos questions. Et je pense que l'idée de l'association provinciale est contenue dans les deux autres mémoires qui sont déjà déposés, celui de l'Association des marchands d'autos de Québec et celle de Montréal, associations régionales. Particulièrement, le mémoire de l'association de Montréal a plusieurs pages sur l'article 172 qui est fondamental. Quant au mémoire de l'association de Québec, il traite spécifiquement aussi de l'article 51 et de l'article 69. Pour le moment, je vais laisser la parole à M. Brault.

M. Brault: Si vous le permettez, je vous disais, tout à l'heure, que nous sommes bien concernés avec la pratique de tous les jours. Je pense bien que ce n'est pas notre domaine, ce n'est pas nous qui sommes les législateurs. Alors, nos critiques ne se bornent pas nécessairement à dire: On n'en veut pas. On ne veut rien savoir. Mais il y a quand même une chose: Essayez de faire des lois qui sont applicables.

Si vous prenez l'article 51, c'est pratiquement aller à confesse, sans faire de farces avec cela. Ce que vous nous demandez de faire, c'est toute une confession générale que de prendre une auto. Qu'on donne des cas spécifiques, je veux bien. Qu'on mentionne les réparations que nous avons eues à faire du moment où on l'a eue en notre possession, ça va, mais quand vous regardez tout l'article, je ne sais pas comment on va faire dans la pratique pour s'en sortir.

Et je vous dis toujours cela avec, en arrière-pensée, le coût. Cela va prendre encore du personnel et on va le faire, mais à quel coût?

Prenez l'article 69. Encore une fois, je vais ra- pidement parce que cela vous sera présenté encore une fois: "Un garagiste ne peut exiger un prix pour faire une évaluation portant sur des réparations à effectuer à moins d'en avoir averti le consommateur..." Encore là, je suis bien d'accord. On va faire tout ce que vous voulez. Si on a le sens de l'humour un peu, le matin, quand ça entre à sept heures, il y a plusieurs clients qui sont pressés parce qu'ils s'en vont à leur travail. — j'espère que je ne charrie pas — et tu leur dis: Ceux qui veulent une évaluation, à gauche et ceux qui n'en veulent pas, placez-vous à droite. Ceux qui en veulent une, vous reviendrez demain à quatre heures parce que nous n'avons pas le temps de la faire aujourd'hui.

Est-ce que je charrie? Que ce soit le droit du consommateur, donnez-lui un droit de dire: J'exige d'avoir une évaluation, pas de problème, on va la lui donner. Le contraire commence à être compliqué. Non seulement ne peut-Il pas renoncer, il faut qu'il commence à l'écrire de sa main. Mettez-vous à la place d'un consommateur. Je ne vous demande pas de vous mettre à notre place. Les gars vont crier. Ils vont se sentir brimés à mort. C'est rendu que c'est un contrat de mariage, rentrer et faire changer l'huile de son auto. Je ne sais pas si cela vous satisfait comme début.

M. Deragon: Avez-vous pensé ce que représente défaire une transmission automatique pour faire une évaluation s'il faut s'en tenir exactement au coût? Cela va coûter $200 ou $150 pour l'estimation, pour défaire la transmission, la remonter et dire au client: La fais-tu réparer, oui ou non? C'est beau théoriquement, mais, en pratique, c'est inconcevable.

M. Brault: Je peux vous donner un exemple, si vous le permettez, qui est vécu et peut être vérifié. Un certain nombre d'entre nous faisons des réparations pour le gouvernement fédéral. La façon de procéder avec le gouvernement est vraiment heureuse pour le marchand. Nous, on ne s'en plaint pas, sauf que même si nous ne sommes que des marchands d'automobiles, on paie des taxes.

On vous rentre un véhicule et on dit: Cela nous prend une évaluation. On défait le véhicule, cela fait une réparation de moteur. On le défait au complet. Evidemment, ils paient pour. Nous avons toutes les pièces au complet de ce qu'il y a à faire. On dit: M. le gouvernement, cela va coûter $1696.32. On repart avec le véhicule. On l'a remonté, on ne l'a pas réparé. Il fallait être exact. Deux semaines après on va revenir et on va dire: D'accord, réparez-le pour $1696. La réparation, s'il y a la moitié de temps, ce n'est plus $1696, c'est $1696 plus $800 de temps qu'on a fait pour évaluer combien cela coûterait. Comme hommes d'affaires, on a peut-être un peu le sens pratique, ce n'est peut-être pas toujours mauvais. On dit: Ecoute, le pauvre gars va payer deux fois le prix. Il ne faudrait peut-être pas charrier. On a l'impression que pour tuer un maringouin on lâche un éléphant dessus. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Bonnier: II y a l'article 172. Est-ce que, par exemple, cet article 69 serait plus facilement applicable dans les petits garages, probablement, et non pas dans les grandes unités comme les vôtres?

M. Brault: Je pense que c'est du pareil au même. Le petit opérateur, cela va lui demander un personnel additionnel de toute façon. Je' me demande si...

M. Bonnier: II y a moins d'achanlandage.

M. Cyr: Non, nous avons les facilités qui sont en relation avec notre commerce. J'ai un plus petit commerce que M. Brault, mais j'ai les mêmes problèmes. J'ai moins d'espace, j'ai moins de mécaniciens, c'est exactement la même chose. Au lieu d'avoir trois mécaniciens qui tavaillent sur les transmissions, je n'en ai qu'un. Vous voyez que, dans la pratique, c'est proportionnel au volume.

M. Deragon: Le petit garagiste, à l'article 74 qui définit tout de même de quelle façon l'évaluation doit être faite. Vous allez vous apercevoir que ce n'est pas un cadeau. C'est un contrat de mariage qu'on fait là. Quand vous regardez tous les détails, pour le type qui n'a même pas les possibilités, vous lui imposez tout un fardeau.

M. Brault: II y a toute la question du client qui entre — encore une fois il ne faut pas charrier, parce que c'est sérieux — et va vous dire: Pierre, mon auto fait "gring, gring, gring", qu'est-ce qu'elle a? Je ne le sais pas. Il faut quand même essayer de le diagnostiquer. On serait les gars les plus heureux du monde si c'était coupé carré. Ce serait d'une simplicité à pleurer. On serait mort de rire, mais ce n'est pas toujours facile. Nous revenons toujours au coût, parce que c'est l'essence. Le coût au consommateur, est-ce qu'il va y avoir des bénéfices vraiment dans la majorité? On veut bien écouter, mais ce n'est pas encore prouvé.

M. Bonnier: 172.

M. Brault: Vous parlez de 172, les ristournes de finance. Le mot me plaît plus ou moins, ristourne, parce que c'est un revenu, oui et non. On confère quand même un service. Encore une fois, dans l'autre mémoire, cela va vous être donné en détail, parce qu'il y en avait tellement dans cette chose. On reçoit, appelez-la ristourne, appelez-la rémunération, mais quand même n'importe quel commerce a besoin de revenus. Je vous le disais, encore une fois, la partie la plus importante, c'est qu'on confère un service. Au moment où on vend une voiture à tempérament, cela nous prend quand même du personnel pour prendre l'application, pour faire les vérifications nécessaires. Cela prend du personnel pour préparer les contrats, pour le travail que nous faisons; en plus du fait que la plupart des contrats, je pense que c'est peut-être 95%, nous les endossons. Ils sont faits avec recours. Vous connaissez le terme. Ce qui veut dire qu'un marchand — dans mon cas un petit marchand — peut avoir $2 millions de signatures. J'espère bien qu'on ne les perdra pas toutes. C'est bien évident. J'aime à penser qu'on est des hommes d'affaires. Mais quand même, on ne nous fait pas signer pour rien. Pour tous les services que nous rendons, évidemment on reçoit une certaine rémunération. J'ai bien de la misère à voir ce qui est criminel là-dedans. Est-ce que cela vous suffit comme départ?

M. Léger: Si on veut me permettre une explication à ce que vous venez de dire. Je conçois qu'il peut y avoir des problèmes pratiques, quotidiens que vous avez à vivre. Je pense que le gros problème est le fait d'une personne qui va porter son auto chez vous, et, vous faites une évaluation sommaire, de bonne foi. Vous dites: Cela peut coûter à peu près $150 de réparation. Là, vous ouvrez l'automobile et vous vous apercevez qu'il y a un problème majeur, qui est plus cher. A ce moment-là il n'y a pas de processus d'information obligatoire. Peut-être qu'en pratique courante il y en a qui le font, mais ce n'est pas obligatoire.

Le type se réveille quand il va chercher son automobile avec une réparation non pas de $150, mais de $450 parce qu'il fallait réparer plus que ça. Y a-t-il un moyen terme que vous prévoyez et qui pourrait être une façon d'informer le client avant de procéder à la réparation qui coûte beaucoup plus cher qu'il ne le prévoyait?

M. Brault: M. Léger, je pense bien que vous réalisez la complexité. J'aurais le goût de faire une farce, elle est peut-être plate. Tu te rends pour une dent et il te les arrache toutes, parce qu'elles sont toutes malades, qu'est-ce que tu fais? Même si je te le dirais, il faut qu'il te les enlève quand même.

Ce qu'on fait, dans la pratique, je pense que c'est courant à peu près partout...

M. Léger: Même s'il ne faut pas enlever toutes les dents, il se peut qu'il y ait des morceaux qui peuvent durer six mois ou huit mois et que le type préfère ne pas les payer tout de suite ou il y a des morceaux qui doivent être réparés tout de suite. C'est une question d'information.

M. Brault: M. Léger, vous entrez dans un domaine majeur. D'abord, au moment où un client entre, on diagnostique, on dit: Voici, le problème que vous avez, c'est sur une tête de moteur, ça peut coûter $150. On ne l'a pas ouvert, c'est vrai. Le client dit: D'accord, allez-y, faites-le. On commence à ouvrir le moteur et on s'aperçoit qu'il est gravement malade; il y a un piston qui est en train de crever. La pratique générale, c'est qu'on va prendre le téléphone et qu'on va appeler le client. On va lui dire: Ecoutez, j'ai la tristesse de vous annoncer que ce n'est pas $150, ça peut aller à $500. Dans la pratique, M. Léger est au Parlement, je ne peux pas le rejoindre. J'essaie quand même de lui rendre service. Alors, je peux garer la voiture dans la cour et dire: Dans une semaine, quand il reviendra, on lui annoncera la bonne nouvelle.

M. Léger: La question est beaucoup plus complexe, je suis d'accord avec vous...

M. Brault: Non, non.

M. Léger: ...mais pensez à une automobile qui est maintenant usagée. La personne va faire réparer son automobile chez vous et vous lui donnez une évaluation approximative, de bonne foi, mais, une fois que vous avez ouvert le moteur, le moteur ou une autre pièce très importante, vous dites: Ecoutez, ça ne va pas coûter $150, mais peut-être $450 à cause de telle ou telle chose. S'il le sait, il va prendre une décision, mais il y a encore le problème suivant, c'est que son auto fonctionnait avant, peut-être pas aussi bien, et là vous dites: Cela va te coûter tant. Ecoute, ça coûte trop cher, laisse faire. Ecoute, je ne peux pas te la remettre comme ça, maintenant que je l'ai ouverte, c'est fini. Parce que je ne peux pas te la remettre comme elle était avant, ça va te coûter de l'argent. En réalité, il n'y a pas eu de réparations pour la personne et elle ne peut même pas ravoir son auto comme telle. Peut-être qu'il n'aurait pas fait la réparation, sachant que c'est peut-être préférable de l'échanger ou d'en acheter une autre, parce que ça n'en vaut pas la peine à cause du prix.

Mais, comme elle ne peut pas être remise dans la même condition qu'avant, parce qu'il y a parfois des morceaux qu'on est obligé de casser quand on ouvre, à ce moment-là, il ne peut pas la ravoir comme avant. Comment verriez-vous un moyen terme, si vous trouvez que c'est trop sévère, pour protéger le client de façon qu'il soit renseigné sur ce que ça coûte et que, d'un autre côté, il ne soit pas pris devant une décision qu'il ne peut pas changer? Sans ça, il n'a pas son auto, elle ne fonctionne plus. Cela arrive très souvent.

M. Brault: II reste encore un élément que, peut-être bien, vous n'acceptez pas, qui est la bonne foi. On dit que le consommateur n'a pas le choix. Je regrette infiniment, mais il y a 850 marchands franchisés où il peut acheter des autos. J'espère bien que c'est chez nous qu'il va acheter. J'aime à penser que cela me tient pas mal dans le bon chemin, sans moralité; je veux en vendre des autos.

Vous faites une réparation. Si le problème qu'on a diagnostiqué est véritable, il y a seulement une malchance, c'est moi qui l'ai constaté au lieu de X, Y ou Z. Que voulez-vous que le consommateur fasse? Il faut qu'il la fasse réparer.

M. Léger: II faut que vous admettiez — je parle comme un législateur qui essaie de trouver, dans la loi, une façon de protéger l'ensemble des clients — que, si vous avez placé le client dans une situation, de bonne foi, où il ne peut pas prendre d'autre décision et que vous avez une automobile à lui vendre, il y a quand même un conflit d'intérêts possible. Vous lui dites: Ton auto, je sais ce qu'elle a, cela ne marche pas, cela va te coûter tant, tu serais bien mieux d'en acheter une autre. Le consommateur est placé dans une situation dif- ficile. Vous savez ce qu'il y a dedans, lui ne le sait pas, il est obligé de croire à votre bonne foi, ce qui est normal. Mais il n'est pas nécessairement protégé des marchands qui ne seraient pas nécessairement de bonne foi, qui auraient intérêt à lui vendre une automobile. Le marchand connaît maintenant le problème, il ne peut pas lui donner beaucoup d'argent pour celle-ci. Le client est là devant le fait qu'il n'a presque rien pour; le marchand sait ce qu'elle vaut, il ne donnera jamais plus. Il ne peut pas la remettre en condition à moins de la réparer complètement à un prix pas mal fort. L'intérêt que j'aurais à en acheter une autre, c'est uniquement le marchand qui l'a. Il faut que je me fie à ce qu'il me dit. Le marchand va quand même avoir un certain profit à avoir réparé ou avoir dépensé de l'argent, le facturer au client et, par la suite, lui vendre une automobile. Je me place dans la peau du consommateur, en essayant de comprendre les problèmes que vous avez comme marchand. Il est obligé de se fier à ce que vous lui dites et il est obligé d'acheter une autre automobile, chez vous, probablement.

M. Brault: Mais, M. Léger...

M. Léger: La voiture n'a pas autant de valeur, puisque vous avez dit: II y a tel et tel problème et on ne peut pas la remettre en condition.

M. Brault: On n'a jamais refusé au consommateur qu'il aille chercher un expert de son choix et qu'il vienne constater.

M. Léger: Ce sont toutes des difficultés additionnelles pour le consommateur qui n'est pas armé pour cela. C'est cela que je veux faire comprendre.

M. Brault: Mais vous comprenez, d'un autre côté, de quelle façon vous nous mettez avec des difficultés qui, à un moment donné...

M. Léger: C'est pour cela que je vous demande un moyen terme, là-dedans, qui permettrait de protéger le consommateur qui a des droits, non pas uniquement parce que le marchand le sait. Le client aussi le sait. C'est cela le problème. Comment tenir compte de vos problèmes pour réaliser un bon travail, donner un bon service, et en même temps que le consommateur n'ait pas à se fier uniquement sur la bonne foi?

M. Brault: Vous parliez d'évaluation obligatoire. Nous sommes d'accord. Ce qu'on vous demande, c'est de le laisser à son choix. S'il le veut, la loi le protège. Il dit: Monsieur, j'exige une évaluation, c'est mon droit. On n'a pas d'objection.

Mais là, vous dites: Tu es obligé de l'avoir. Ecoutez, ce n'est plus tenable.

Mme Bacon: II faudrait peut-être ajouter tout de suite que le consommateur peut renoncer.

M. Brault: Oui, Madame, mais à quel...

Mme Bacon: Parce que vous ne l'avez pas ajouté, alors j'aimerais bien que...

M. Brault: Oui, mais Madame à quel prix? Le gars, il faut qu'il écrive tout ça. Quand on l'a lu on dit: II n'y a pas de problème, le client ne le veut pas, on va se faire préparer une...

Mme Bacon: II faudrait dire les deux versions.

M. Brault: ... extensive puis il le signe. On dit non, là il va falloir que vous l'écriviez de votre main. Essayez de penser au consommateur, oubliez-nous. Le gars va dire: Es-tu après venir fou? Il n'y a pas de problème si on dit: Je peux renoncer, signe ici, j'ai renoncé, on a une estampille, puis il en passe bien dans une journée. Mais là, ce n'est pas cela, il faut qu'il l'écrive: Je soussigné, Untel, je ne sais pas, selon l'article untel. Le gars va dire: Es-tu après venir fou?

Je ne suis pas un enfant, je veux être protégé. Si je veux l'avoir, la loi est là puis t'es obligé de me le donner, si j'en veux pas, il n'y a pas de problème.

Juste un exemple qui peut peut-être vous aider. Il y a une autre question de coût encore, on va prendre une pédale d'embrayage, même s'il n'y en a pas beaucoup, je la choisis parce qu'elle est simple. Vous avez trois éléments principaux là-dedans: il y a un disque, je voudrais bien avoir un français exact, il y a peut-être quelqu'un qui peut me corriger, il y a le "pressure plate", je ne connais pas le mot français, puis il y a le coussinet. Ecoutez, l'élément temps, c'est de l'enlever cette affaire, le coussinet, il coûte peut-être $7. Le disque lui-même, je vous mets au défi, est-il bon encore pour 4000 milles, 2000 milles ou 7000 milles? Sans charrier, il peut être complètement neuf, on n'est quand même pas fou. Alors nous on dit: Le client vient dépenser sept heures de temps pour enlever cela, combien de temps va-t-il durer? On n'a jamais raison, si on ne le fait pas, on ne connaît pas cela, et si on le fait, on est des voleurs. Alors là vous dites: Je pense que ce serait peut-être avantageux pour le client, cette pièce est encore bonne, c'est un fait, mais il va être obligé de revenir dans trois mois pour la changer, puis au coût horaire, cela n'a pas d'allure, on ne prendra pas de chance, on va la changer. Est-ce qu'on fait mal? Je vous le laisse à penser. C'est bien évident que ce n'est pas coupé carré. Encore une fois, ce serait tellement simple. Mais de toute façon on n'est pas correct. Si on ne le fait pas, le client dit: T'es un imbécile, tu avais les mains dedans, tu vas me faire payer deux fois. Si on le fait, il dit: Tu m'as volé, elle est encore bonne. Moi, je ne sais pas.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Ma question serait uniquement au niveau de la commercialisation. La plupart des lettres qui nous ont été envoyées sont des lettres d'opposition, en quelque sorte, à cer- tains modes de commercialisation qui sont régulièrement pratiqués. A cet égard, je voudrais savoir, comme première question, quel est le pourcentage des ventes qui sont représentées par un commerce tel que le vôtre, par exemple, un vendeur d'automobiles accrédité par une firme telle que Ford, Chrysler, ou GM? En termes de pourcentage de ventes, combien représentent les ventes d'automobiles neuves d'abord...

M. Brault: Par rapport à l'usagée?

M. Harvey (Charlesbourg): ... par rapport aux usagées?

M. Brault: Encore une fois, vous avez une certaine variante, parce que vous allez avoir des marchands qui ont décidé qu'ils ne veulent pas vendre de voitures usagées en détail. C'est l'extrême. Ou ils vont toutes les vendre à d'autres petits marchands. Ils vont s'en débarrasser.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui, mais généralement, c'est partagé quand même en deux secteurs. Tous les garages ont un secteur de vente d'automobiles usagées et un secteur de vente et de promotion d'automobiles neuves.

M. Brault: Oui, mais...

M. Harvey (Charlesbourg): Cela représente un tout, un chiffre d'affaires de X. On dit: l'usagé, chez nous, cela représente environ... Donnez-moi un exemple générique.

M. Brault: Si vous avez un marchand qui vend 800 voitures neuves — mes confrères peuvent me corriger — je pense que peut-être la moyenne, actuellement, à cause de toutes les ventes qui sont faites entre particuliers, c'est peut-être 500, 600, 450 par rapport à 800, là où, autrefois, c'était pratiquement deux à un... Encore une fois, il ne faut pas négliger cela; il y a un tas de voitures usagées qui sont vendues par des indépendants, des garagistes indépendants qui n'ont pas de franchise. On a l'impression parfois qu'on est tous mis dans le même bain. Ils n'ont pas d'investissement, les gars. Ils ont un petit terrain sur un coin de rue. Quand cela ne marche pas, ils ferment et ils s'en vont. Quand le consommateur se fait habiller, ce sont les marchands franchisés. On n'est pas là.

M. Harvey (Charlesbourg): Au sens de la Loi de la protection du consommateur, même le petit garagiste indépendant, dans l'esprit de la loi, est considéré comme devant lui aussi respecter la loi, parce qu'il y est assujetti. Il est garagiste accrédité quand même au sens de la Loi de la protection du consommateur. Vous sembliez tout à l'heure accorder peut-être beaucoup plus de volume de ventes aux individus entre eux. Par quelle formule voulez-vous remplacer cela, si ce n'est peut-être par... On sait que d'usage courant Jos Bleau décide de vendre lui-même sa voiture. Il l'annonce dans les annonces classées, à titre d'exemple. On

sait que les annonces classées, c'est réservé particulièrement à cela, marché aux puces, automobiles usagées, et le reste. Je vous dirais, et je ne vous apprends rien de nouveau, que la plupart des vendeurs d'automobiles neuves sont les plus gros annonceurs des annonces classées au Québec. Vous savez cela aussi. Je ne vous apprends rien de nouveau. D'accord? Donc, vous péchez par la même chose que vous reprochez aux autres. Cela doit s'équilibrer à un certain moment, cette affaire. Par quoi? Si on dit demain matin: C'est défendu. André Marchand, député de Laurier, n'aura plus le droit d'acheter ses automobiles usagées de son voisin d'à côté qui, antérieurement, lui fournissait toujours sa bonne voiture à tous les deux ans.

M. Deragon: On n'a jamais voulu le défendre. On veut tout simplement que ces personnes ne soient pas exclues de la loi, qu'elles soient assujetties à la loi comme nous. Si on exige de nous de garantir une voiture usagée à un consommateur, pourquoi, entre eux, deux consommateurs ne seraient pas aussi assujettis à la loi? Pourquoi le consommateur qui a refusé de nous laisser sa voiture parce qu'il savait qu'on savait que son moteur faisait défaut et que cela lui coûterait $800 de reconditionnement, va-t-il vendre sa voiture à l'autre consommateur qui est innocent et qui ne le sait pas, au même prix que si le moteur était bon. On ne veut pas l'empêcher de vendre. On veut tout simplement qu'il soit sur le même pied que nous autres.

M. Harvey (Charlesbourg): D'accord, je ne veux quand même pas engendrer de conflit là-dessus, mais je crois que ce sont, majoritairement, des garagistes de passage, comme vous le disiez tout à l'heure, qui sont le plus friands de cet abus du consommateur, à mon point de vue.

Quant aux garagistes accrédités, je dis qu'il y a une confiance qui règne. J'ai un garagiste, j'y vais, j'ai confiance et je suis en confiance. Qu'on oblige le garagiste à donner une liste de réparations à faire, personnellement, je n'y tiendrai pas parce que la confiance règne et, le jour où elle ne règnera plus, j'irai ailleurs. Je vous donne mon opinion personnelle. C'est admis.

Cependant, de là à éliminer une commercialisation qui m'apparaît quand même très minime en termes de pourcentage d'un ensemble d'un chiffre d'affaires d'une entreprise, soit la vente entre individus, et vouloir les assujettir à une loi, je dis que c'est absurde. Parce que c'est un commerce tellement marginal, tellement limité et si en plus, comme vous le disiez tout à l'heure, la confiance règne tellement entre deux individus de telle façon qu'ils n'ont pas besoin d'être assujettis à la loi, je me dis: Si un individu, parce que la confiance règne avec un autre de ses copains, il lui vend une automobile qui devient une "minoune", la confiance vient de finir de régner. Il vient de perdre un "chum".

C'est peut-être pour cela que je dis que ce pourcentage est tellement marginal qu'on ne devrait pas en tenir compte ou faire un drame avec cela.

M. Deragon: 45%. Vous trouvez cela marginal?

M. Cyr: 45%. Ne l'oubliez pas.

M. Harvey (Charlesbourg): 45% des unités.

M. Deragon: En automobiles?

M. Harvey (Charlesbourg): Non pas en termes de piastres et de cents.

M. Deragon: Oui, mais 45% des automobiles...

M. Harvey (Charlesbourg): Des unités d'automobiles...

M. Deragon: 45% des transactions — c'est l'ordinateur du ministère des Transports qui nous l'a fourni — entre individus.

M. Harvey (Charlesbourg): Bien oui.

M. Deragon: Cela veut dire que depuis ce temps, ce commerce est un commerce échappatoire à loi pour ceux qui disent, à un certain moment: Je ne veux pas payer les $800 parce que j'ai abusé de mon automobile pour ne... j'ai une porte de sortie pour la vendre à...

M. Harvey (Charlesbourg): Dans les 45%, incluez-vous celui qui vend son automobile à un individu, mais qui passe au garage dans le but d'épargner la taxe de vente? Vous l'incluez aussi celui-là? C'est inclus là-dedans.

M. Deragon: Oui.

M. Harvey (Charlesbourg): Alors, cela diminue encore de beaucoup.

M. Cyr: Non. Cela ne diminue pas parce que c'est de base, une transaction entre deux individus. N'oubliez pas cela.

M. Harvey (Charlesbourg): Je comprends bien.

M. Cyr: Le simple fait qu'elle passe chez nous et pour éviter de payer la taxe sur ce montant. N'oubliez pas cela.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui, mais le garagiste n'est pas tenu de donner une garantie quand même...

M. Cyr: Bien oui, selon le projet de loi, on va être obligé.

M. Brault: ...les prix. On a vendu l'auto légalement.

M. Cyr: Oui. Théoriquement, on est pris. On les vend toujours telles que vues.

M. Brault: C'est moi qui l'ai vendue au client. Légalement, je suis pris avec.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui. Au moment où l'individu passe par le garage...

M. Brault: Bien oui.

M. Harvey (Charlesbourg): ...à ce moment, cela devient une transaction du garage et non pas une transaction entre individus.

M. Brault: Je comprends donc et on est pris parce que...

M. Harvey (Charlesbourg): Mais votre meilleure façon de le faire serait...

M. Brault: ...de refuser de le faire.

M. Harvey (Charlesbourg): ...de refuser de le faire.

M. Deragon: On le refuse quand on sait que l'auto est défectueuse.

M. Cyr: Dans certains cas, on va le refuser. M. Deragon: II est clair que c'est pour cela.

M. Cyr: II faut quand même réaliser que le gars a fait une transaction; il faut le respecter comme individu, mais, avec le projet de loi qu'il y a là, on ne pourra plus faire cela parce que nous sommes obligés de donner une garantie. C'est évident qu'on va refuser de donner une garantie à une voiture dans une transaction dans laquelle on n'a pas joué du tout. On ne sert que d'intermédiaire. N'oubliez pas que 45%, c'est beaucoup; sur 1000 voitures vendues, il y en a 450. N'oubliez pas que c'est de la discrimination parce que ce consommateur, acheteur à ce niveau, n'est pas couvert par la loi, alors qu'il est couvert dans d'autre cas. Pourquoi 55% des consommateurs seraient couverts par une loi, par des gens qui sont responsables et qui ont à appliquer une garantie, alors que les autres 45% n'ont pas le droit à cette même protection?

M. Harvey (Charlesbourg): Que nous suggérez-vous alors comme formule?

M. Brault: Dans une société que tout le monde veut meilleure, plus juste et plus ferme, pourquoi — j'ai l'impression, corrigez-moi, je suis peut-être en dehors — qu'on enlève toujours de plus en plus l'élément responsabilité de l'individu? Dans la société, pour commencer, il y a bien plus d'individus que de corporations. N'y a-t-il pas une éducation à faire? On a l'impression...

M. Harvey (Charlesbourg): On ne l'enlève pas.

M. Brault: ... que le consommateur a tous les droits. Nous, ce n'est pas grave, nous ne sommes pas des humains; nous ne sommes que des marchands et ce n'est pas bon.

Mme Bacon: Je voudrais peut-être juste...

M. Brault: Celle-là est difficile à comprendre. Dans la pratique, cela arrive tous les jours qu'on va dire au consommateur, on l'a dit tantôt; On te donne $1000, écoute, mon vieux, cela n'a pas d'allure, il a 100 000 milles, le gars, es-tu fou? Il va aller la passer à quelqu'un d'autre, à son "chum". Je vous en donne une en riant qui est véritable, qui n'est pas une blague. Si un marchand veut vendre une voiture usagée facilement, il n'a qu'à dire à son client d'amener son mécanicien. Son mécanicien va dire: Me donnes-tu $25 pour la faire vendre? Je m'excuse, mais cela c'est un fait. Quand vous parlez de la confiance entre les gars, j'ai bien des restrictions dans la pratique de tous les jours.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui.

M. Brault: Tous ces gars sont exclus de la loi. Ils vont pouvoir bourrer tout le monde. Ce n'est pas grave, c'est un consommateur qui en bourre un autre. Je ne suis pas capable d'accepter cela comme conception. Qu'on protège tout le monde ou personne.

M. Léger: C'est pour cela que dans la loi il ne faut pas tenir compte uniquement de la bonne foi.

M. Brault: Pardon?

M. Léger: C'est pour cela que dans la loi il ne faut pas tenir compte uniquement de la bonne foi. Il faut que les lois soient là; sans cela, il n'y aurait pas de lois qui existeraient, si on ne se fiait qu'à la bonne foi.

M. Brault: Mais, respectueusement, on vous demande de couvrir tout le monde.

M. Léger: Oui, d'accord.

M. Brault: On aura peut-être une société meilleure, si les individus deviennent responsables. On semble toujours l'enlever, celle-là. L'individu n'a plus de responsabilités. Il peut signer un contrat, cela ne veut rien dire. Ce n'est pas grave, il peut le résilier quand il voudra.

Le Président (M. Lafrance): Sur le sujet, Mme le ministre.

Mme Bacon: Seulement une dernière question, parce que le temps passe rapidement. Je ne voudrais pas prendre plus de temps de l'assemblée. Votre association, qui semble drôlement préoccupée par ces ventes entre individus qui se chiffrent à 45%, comme statistique que vous venez de nous donner, S'est-elle penchée sur ce problème? Pourquoi les gens font-ils commerce entre eux et ne passent pas par des garages? Avez-vous fait des recherches, des études?

M. Deragon: On vient de vous le dire.

M. Cyr: Je pense que les deux points importants c'est qu'il existe naturellement un climat de confiance psychologique entre deux individus. C'est mon ami, c'est le frère d'un de mes compagnons de travail, etc. Je connais le gars. Deuxièmement, ils vendent la voiture à un prix maximal. S'il fallait qu'on vende nos voitures usagées au prix que ces gars-là vendent! Des fois je dis à des clients: Viens travailler pour moi, tu vas faire une fortune. C'est fantastique, mais on ne peut pas dire un mot. Il a fait la transaction. On a des histoires aberrantes. De toute façon, ils font cela pour pouvoir éviter de la taxe sur le montant qu'ils ont vendu.

Mme Bacon: C'est la raison majeure.

M. Cyr: C'est cela. Ce phénomène dure depuis trois ou quatre ans. Cela n'existait pas avant. Mais là il y a une poussée épouvantable. On est rendu à 45%. Le même phénomène commence à se produire aux Etats-Unis. On a des statistiques des Etats-Unis où la même chose se produit aussi.

M. Brault: II y a peut-être aussi qu'on a des frais et que la voiture qu'on va revendre, il est bien évident qu'on va l'acheter à un prix inférieur à celui auquel on va la revendre; on a des vendeurs, on a quand même de l'administration. Il y a la question du gain où le client dit: Je pense que je vais la vendre tout seul et je vais avoir $400 de plus.

M. Cyr: Mme le ministre, excusez moi. Un individu va vendre une voiture à un autre et il va l'accepter telle quelle. Mais, lorsqu'elle est vendue par le marchand, il est très exigeant au point de vue de l'apparence, du reconditionnement, etc. C'est une chose de tous les jours, c'est comme cela que cela se passe.

Le Président (M. Lafrance): Une dernière question. Le député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Je pense qu'effectivement vous posez la question: Quelle formule suggérer? Vous dites: De façon "at large" — excusez l'anglicisme — on n'exclut personne de la vente, que ce soit à l'intérieur d'un marché déjà reconnu ou encore chez un marchand accrédité ou entre individu. Je pense que le chiffre ou le pourcentage de 45% est inquiétant. On enlève des privilèges à quelqu'un qui vend sa maison pour une deuxième fois; il peut le faire une fois dans sa vie, pour bénéficier des privilèges que lui accorde la Société d'habitation, à titre d'exemple. Maintenant c'est le ministère du Revenu qui est entré dans ce secteur. Des gens se construisaient une maison, la vendaient ou en achetaient une autre et la revendaient et finalement c'étaient des revenus dans leur poche qui étaient non déclarés. Le ministère du Revenu a invoqué cette échappatoire qui, à mon point de vue, est peut-être une autre échappatoire qui se retrouve dans le monde de l'automobile; peut-être et certainement— on pourrait aller jusque-là— qui s'y retrouve certainement et pas nécessairement chez les gens honnêtes au fond.

M. Brault: Est-ce qu'il serait possible, en fait, d'assainir — je regrette si je tiens à cela — le climat? Si vous vendez une voiture à M. X et que vous n'avez peut-être pas été tout à fait honnête, que le monsieur ait un recours contre vous. Est-ce qu'il est possible qu'on assainisse le climat? Mais, actuellement, les gens se sont trouvé une autre tangente. Ils ont dit: Pas de problème, on est à l'abri de la loi entre nous. Pas de problème. C'est là où j'ai bien de la difficulté à comprendre la justice. Quand on décide d'un cas bien spécifique, je suis peut-être en retard, mais je ne comprends pas ce que cela fait que l'un soit possédant et l'autre pauvre. Je ne vois pas ce que cela a à faire avec le cas qu'on règle actuellement.

M. Harvey (Charlesbourg): S'ils étaient tenus par la loi de passer par un garage accrédité, à ce moment-là...

M. Deragon: On ne demande pas ça, on veut les laisser libres de transiger...

M. Brault: On n'essaie pas de monopoliser...

M. Oeragon: ...pour autant qu'ils soient responsables de leurs gestes.

M. Brault: On dit: Laissez le jeu jouer jusqu'à un certain moment. D'accord, protégez les gens, mais on peut tout mettre dans un carcan et ça ne sera pas tenable. Un autre exemple: les autos de la police provinciale qui sont vendues à l'encan. Le type en fait une spécialité, les repeinture, les annonce comme son auto personnelle. Le gars qui en achète une mange une claque, penses pas, toi?

M. Harvey (Charlesbourg): Ou une auto d'un ancien curé.

M. Deragon: II y en a de moins en moins. M. Brault: A ce moment-là...

M. Harvey (Charlesbourg): Elles se vendent trop vite.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie... Une Voix: Oui, je suis d'accord.

Le Président (M. Lafrance): Je vous demanderais de faire rapidement, parce qu'avant une heure on voudrait entendre l'autre association.

M. Samson: Avant 1 heure?

Le Président (M. Lafrance): Avant 1 heure.

M. Samson: Oh! attendez un peu.

M. le Président, quant à la question des ventes

entre consommateurs, la question des ventes par un marchand détaillant à un consommateur, la loi va exiger à l'avenir une garantie par le marchand détaillant, c'est vrai qu'elle n'exigera pas de garantie entre les consommateurs. On a semblé souligner tantôt qu'on voulait obtenir justice, c'est-à-dire assujettir les consommateurs entre eux aux mêmes règles que le marchand détaillant l'est vis-à-vis du consommateur. Cela voudrait dire exiger que le consommateur ait des responsabilités au même titre que la loi l'exige du marchand détaillant.

Par contre, on a mentionné à un autre moment qu'on voudrait permettre à un client de renoncer à une garantie dans certains cas, y renoncer volontairement en signant un papier s'il le faut. Entre consommateurs, il devient difficile, bien sûr, de donner une garantie et de pouvoir effectuer les réparations si nécessaire. Est-ce que, tout simplement, si on pense qu'il est valable qu'un consommateur puisse renoncer à sa garantie vis-à-vis d'un marchand détaillant, il ne pourrait pas aussi renoncer à sa garantie vis-à-vis d'un autre consommateur? Dans les faits, c'est ce qui se fait. Tacitement, on renonce à la garantie entre consommateurs.

Est-ce que ce ne serait pas là le point de vue qui rallierait vos demandes?

M. Deragon: C'est l'un ou l'autre.

M. Samson: C'est l'un ou l'autre. Mais est-ce qu'il ne serait pas préférable qu'il soit permis à tout consommateur de renoncer, s'il le désire, à une garantie, ou bien vis-à-vis d'un marchand détaillant, ou bien vis-à-vis d'un autre consommateur?

M. Grondin: C'est une chose qui a effectivement été demandée par une association régionale et à laquelle nous souscrivons.

M. Samson: Cela répond à cette question. Maintenant, la question des évaluations. Il est établi, vous l'avez fait, et c'est connu de tous ceux qui sont dans le métier, qu'il est possible, en carrosserie, de faire une évaluation à l'avance et de respecter l'évaluation. Cela se fait.

Mais en mécanique, c'est impossible, parce qu'on n'est pas dans le moteur, on n'est pas dans la transmission, on n'est pas dans le différentiel, on n'est pas dans les morceaux. Concernant la carrosserie, on voit ce qui est brisé, on voit ce qui fait défaut. C'est visible.

Comme c'est invisible dans le cas de la mécanique et que c'est, en pratique, impossible de donner une évaluation à moins de la faire assez haute pour ne pas se tromper, de sorte que le consommateur va être bien poigné...

M. Brault: C'est cela.

M. Samson: A l'article 69, on dit qu'"un garagiste ne peut exiger un prix pour faire une évaluation portant sur des réparations à effectuer à moins d'en avoir averti le consommateur et d'avoir divulgué le prix qu'il exige pour cette évaluation." Cela veut dire que vous pouvez aussi faire une évaluation en exigeant le prix qu'il faut pour le faire. Vous me direz si mon raisonnement est bon ou non. Je prétends que si ce n'est pas possible de voir à l'intérieur d'un moteur pour déterminer comment cela va coûter pour la réparation, ce n'est pas beaucoup plus possible de dire combien cela va coûter pour évaluer ce qu'on ne peut pas évaluer. Est-ce que je raisonne...

M. Cyr: On peut donner un taux horaire et dire: Cela va coûter tant l'heure.

M. Samson: A ce moment-là, vous êtes obligé de faire une évaluation à l'heure.

M. Deragon: Exactement.

M. Samson: Donc, vous ne respectez pas les exigences de la loi de cette façon. La loi dit que vous devez faire connaître l'évaluation d'avance. Vous devez faire connaître d'avance au consommateur combien cela va coûter pour l'évaluation et vous n'êtes pas capable, en pratique, de faire cela. Ce n'est pas possible.

C'est pourquoi je suggère à la commission de prendre en considération ce fait et que les garagistes ne soient pas tenus de faire des évaluations à l'avance, à moins de les faire d'après un tarif horaire. On va rendre justice. Il n'est pas possible pour personne de dire: Monsieur, votre évaluation, on va vous la faire demain, mais elle va vous coûter $100. Or, cela peut coûter $10 pour faire l'évaluation, comme cela peut en coûter $200 pour ouvrir tous les morceaux, comme vous le faites avec le gouvernement fédéral qui, dans ce domaine, pourrait s'améliorer. Dans d'autres domaines aussi, mais en tout cas, là, on parle de celui-là.

Il y a un autre problème qui se pose et peut-être qu'une autre association nous en parlera, mais puisque nous avons sous les yeux l'article 71, le garagiste doit, si le consommateur l'exige, remettre à ce dernier toutes les pièces. Est-ce que cela est bien réaliste? Si ce n'est pas le consommateur qui paie pour la réparation d'abord, si c'est une réparation sur garantie, je vous pose la question. Est-ce que, si c'est une réparation sur la garantie, il se peut que dans certains cas vous soyez obligés de conserver des morceaux pour faire la preuve à la compagnie du remplacement des morceaux?

M. Brault: Dans plusieurs cas. C'est le droit du manufacturier, il paie, il veut ravoir ses pièces.

M. Samson: Oui, je vous pose cette question parce que je sais que jadis il fallait remettre toutes les pièces, à un certain moment; on nous demandait certaines pièces après production de la réclamation, mais il fallait quand même en garder en main pendant une période de temps donnée.

M. Brault: Pour vérifier...

M. Samson: Alors, cela existe encore? Si cela

existe encore, je tiens à attirer l'attention du ministre que ce ne sera pas possible dans les cas de garantie de remettre les pièces au consommateur. Il faudrait donc peut-être insérer quelque chose qui dirait: Dans le cas où le consommateur paie lui-même les réparations, ce qui excluerait la question des garanties.

M. Brault: Maintenant, nous serions très heureux, parce que nous n'aurions pas à payer pour les faire sortir.

M. Samson: Je comprends.

M. Brault: Cela nous ferait un grand plaisir de les mettre...

M. Samson: Vous êtes obligés de payer pour les retourner à Windsor puis...

M. Brault: Avez-vous réalisé, par la loi, si on est obligé de remettre le vieux moteur dans la valise du consommateur puis dire: C'est par la loi t'es obligé, va-t'en avec, ce qui va se passer?

M. Samson: II va se penser en Volkswagon avec un moteur en arrière puis un moteur en avant.

M. Brault: C'est une chose impensable. Il y a aussi un problème, M. le Président, dans le cas de pièces réusinées où on est obligé de donner un échange...

M. Cyr: C'est cela.

M. Brault: Le radiateur, disons qu'on change...

M. Cyr: II y a un crédit qui est émis pour cela.

M. Brault: Un pare-chocs, par exemple, on a des prix moindres, si on donne un échange.

M. Samson: C'est parce que si vous êtes obligé de remettre la pièce au consommateur, la valeur de l'échange ne sera pas créditée, il devra payer en supplément, et aller lui-même revendre la pièce défectueuse par la suite, ce qui va lui occasionner des déboursés. Il va se louer un camion pour aller reporter un vieux moteur, dans certains cas.

M. Brault: C'est cela.

M. Marchand: ... parce qu'elle n'entre pas dans la valise, il faut être propre.

M. Samson: Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie les représentants de l'Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec de leur présentation et d'avoir bien voulu accepter de répondre aux questions. Je crois que vous avez éclairé les membres de la commission. On vous remercie au nom de la commission.

La commission suspend ses travaux jusqu'à trois heures pour entendre alors les deux autres organismes qui ont demandé à être entendus aujourd'hui.

La commission suspend ses travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

Reprise de la séance à 15 h 15

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

Nous reprenons l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 7, Loi sur la protection du consommateur. J'inviterais la Fédération du détail et des services du Québec à se présenter ici. C'est M. Denis Lemieux.

Fédération du détail et des services du Québec

M. Rivet (Gilles): M. Lemieux, m'a demandé de l'excuser. Il devait être ici et, à la dernière minute, il a eu des choses imprévues. D'ailleurs, je l'attendais d'une seconde à l'autre, mais il n'est pas là. Il m'a donné le mandat de le représenter. Je vous remercie...

Le Président (M. Lafrance): Comme il est dignement représenté, on va commencer.

M. Rivet: Mon nom est Gilles Rivet. Je suis l'administrateur et le directeur de la Fédération du détail et des services du Québec qui, vous me permettrez de vous le rappeler, existe depuis 22 ans. La Fédération du détail et des services du Québec a été fondée, à la recommandation d'économistes de l'Université Laval et de l'Université de Montréal, spécialement pour faciliter l'organisation d'associations professionnelles dans le détail et les services. Donc, nous sommes actifs simplement pour refléter le point de vue professionnel des associations du détail et des services. Certaines de nos associations membres peuvent regrouper des avocats, des médecins, des notaires; pour en citer quelques-unes, il y a le Carré des Forges, l'Association des hommes d'affaires de Trois-Rivières, qui groupe différents secteurs. En ce qui nous regarde, quand nous parlons de leur mode de penser, c'est simplement au point de vue du détail et des services, c'est tout.

Alors, nous sommes bien contents de ces réunions ici, parce que nous oeuvrons dans un domaine qui est assez ingrat. C'est très difficile de rejoindre nos détaillants et de les sensibiliser à la nécessité d'oeuvrer la main dans la main, ce qui veut dire que, dans cette brève lettre que nous vous avions adressée, Mme Bacon, nous espérions que ces manifestations seraient de nature à permettre au détail et aux services de se regrouper. Enfin, les membres de nos associations sont des individus, en général, des gens en affaire à leur compte ou en compagnie privée. Permettez-moi de dire ici que copie de cette lettre a été envoyée aux ministres et aux députés de l'Assemblée nationale et qu'à peu près tous ceux qui sont ici en ont accusé réception, souvent en nous donnant des notes personnelles exprimant leur point de vue. Cela nous a encouragés énormément, même si cela a l'air de peu de chose aujourd'hui.

Parcourir la province, réunir des associations et des bureaux de direction d'associations et discuter d'un projet de loi qui a 273 articles, je vais dire comme certaines stations de télévision: Ce n'est pas un cadeau. Mais, chose sûre, tous ceux que nous avons rencontrés ont été extrêmement intéressés, mais il faut y mettre le temps. C'est pour cela que nous espérons que nous aurons quelques mois pour continuer a rencontrer nos associations et arriver à vous soumettre un texte en ce qui concerne le détail et les services. Je pense que, d'après notre calendrier d'activités, cela nous mènerait au mois de mai 1977 puisque, le 10 avril 1977, nous aurons à Sherbrooke une réunion de toutes nos associations et que ce projet de loi sera certainement à l'ordre du jour de notre réunion.

Je vous remercie beaucoup de m'avoir écouté. Je pense bien que j'ai résumé la pensée de la Fédération du détail et des services du Québec. Si je pouvais répondre à vos questions, cela me fera plaisir de le faire.

Mme Bacon: M. Rivet, votre lettre date du 17 mai 1976. Depuis cette date, vous a-t-il été possible de faire des rencontres? Vous nous demandiez alors de retirer ni plus ni moins le projet de loi no 7 pour vous donner suffisamment de temps pour l'étudier. Mais vous comprendrez bien que si le législateur a voulu le déposer au mois de mars et que nous avons voulu tenir cette commission parlementaire, même s'il y a un nombre imposant de groupes, de groupements ou d'associations qui se feront entendre, c'est que nous espérons pouvoir procéder à l'adoption en deuxième lecture à l'automne et, par la suite, à la troisième lecture.

M. Rivet: On pense, madame...

Mme Bacon: Quand vous mentionnez le mois de mai, je ne voudrais pas vous décevoir, mais...

M. Rivet: C'est regrettable, mais permettez-moi de vous dire qu'on pense que c'est prématuré. Ce matin, tous les gens que vous avez eus ici sont venus à nos rencontres, à peu près tous.

Mme Bacon: Excusez. Pensez-vous en fonction de la possibilité de vos membres de se réunir ou si c'est à cause du contenu du projet de loi que c'est prématuré?

M. Rivet: Nous pensons que c'est prématuré parce qu'il est beau de voter des lois, mais il faut avoir l'accord de ceux qui vont vivre avec ces lois. Nos détaillants sont déjà aux prises avec un tas de problèmes et un tas de réglementations et ce n'est pas facile, vous savez, de mettre cela en application.

Cette semaine, je distribue le bill 22. J'en envoie 3000 copies de ce bill. Je vous demande pardon?

M. Harvey (Charlesbourg): C'est une loi. Elle est adoptée.

M. Rivet: Ce n'est pas la... Il faut la vivre. Dans la province de Québec, on en a des lois.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est de l'information.

M. Rivet: Oui. Vous savez, des lois, on en a dans tous les secteurs. On a un tas de lois, mais il faut les mettre en application. C'est toute une question d'éducation. Nous, on rencontre nos gens, on ne leur vend pas l'idée de la loi. Il faut tout de même savoir ce qu'ils en pensent. Demain, je vais vous revenir avec l'Association des garagistes spécialisés. Nous avons pas mal, à l'Association des garagistes spécialisés, le point de vue de l'Association provinciale des marchands d'automobiles. Tout de même, la situation n'est pas exactement la même pour les deux groupements. Il faut que nous nous rencontrions, entre association.

Même si le gouvernement faisait les plus belles lois sur papier, si cela n'est pas mis en application, qu'est-ce que cela donne? Les gens qui vont la mettre en application, cette loi, ce sont ceux qui la vivent. Je pense qu'il y a une question d'éducation à faire. Il faut rencontrer nos gens, il faut savoir ce qu'ils ont à dire. Nous, en ce qui regarde le détail et les services, ce n'est pas gros, quelques mois pour vous préparer un texte qui reflète vraiment l'esprit des associations régionales. Il y aura toujours des anicroches, mais cela ne sera pas grave. Actuellement...

Mme Bacon: Depuis le 30 mars, il y a eu quand même du temps...

M. Rivet: C'est récent, c'est très récent.

Mme Bacon: II y a au-delà de 80 groupements ou associations qui nous ont déjà fait parvenir des mémoires. Je pense qu'il y a eu quand même du temps pour votre fédération...

M. Rivet: C'est sûr.

Mme Bacon: ... soit se réunir ou faire des travaux.

M. Rivet: Ne comptons pas l'été. Ne comptons pas depuis les jeux olympiques. Oublions cela. Parce que nous avons eu notre bataille sur les heures de commerce avec l'ouverture qui a été faite...

Mme Bacon: Le législateur doit continuer à protéger davantage une partie de la population et, en même temps, écouter les gens qui ont des représentations à faire. Je pense que nous, comme vous voyez, même si c'est l'été, cela ne nous empêche pas de travailler. Ce que je voudrais essayer de savoir, est-ce en fonction de la limite de temps que vous avez que vous nous demandez de retarder...

M. Rivet: Oui.

Mme Bacon: ... ou est-ce parce que vos gens ne se sont pas exprimés? C'est en fonction de vos problèmes à vous que vous demandez à la commission de retarder.

M. Rivet: C'est cela. Il faut, madame, que nous organisions au moins une quarantaine de rencontres dans les principales villes de la province de Québec. Il faut que nous discutions dans ces assemblées, comme cela a été fait déjà. Cela a été fait déjà. A ce moment-là, c'était tout nouveau. Vous savez, quand on arrive avec un projet de loi comme cela, ce n'est pas très sympathique au premier abord. Mais là, on avance. La publicité qui se fait à la radio, dans les journaux, à la télévision, les lettres que nous envoyons, cela sensibilise les détaillants à cette idée qu'on va avoir une loi. Le bill 45, on s'y était opposé parce qu'il portait tout l'odieux sur le détaillant. On s'y était opposé tel qu'il était passé.

Et, aujourd'hui, sans aller dire que le détaillant a besoin de protection contre le consommateur, on pense que l'esprit de cette loi devrait être plus large, plus généreux à l'égard du détaillant.

Mme Bacon: Dans quel sens?

M. Rivet: Quand on lit ces textes, certains des textes, ceux que j'ai eu le temps d'approfondir, la preuve est toujours contre le détaillant.

Mme Bacon: C'est beau à dire, M. Rivet, mais est-ce que vous pouvez être plus explicite?

M. Rivet: C'est cela, madame. Mme Bacon: Dans quelle situation?

M. Rivet: II est même dit dans certains textes, je ne les ai pas avec moi ici ce matin, qu'en tout temps le consommateur aura raison, dans toute réclamation, contre le garagiste — en l'occurrence, c'est un garagiste à ce moment-là — qu'il a quinze jours ou trois semaines pour aller contre le détaillant ou le garagiste et qu'en tout temps la preuve sera contre le garagiste, contre le détaillant qui devra faire la preuve qu'il n'est pas coupable de cette mauvaise transaction. Je ne peux pas le citer de mémoire. D'ailleurs, je n'ai pas voulu arriver ici avec des points spécifiques. Ce que je vous dis résume pas mal ce qui a été dit ce matin ici. C'est pas mal cela qui a été dit ce matin. S'il faut que vous vous assoyiez et que vous discutiez 273 articles, un à un, avec 80 associations, on n'est pas sorti du bois. On ne sera pas prêt au mois de mai, c'est sûr. Je pense que c'est plus logique que nous nous chargions, sans aucun frais pour le gouvernement, de rencontrer nos associations, en ce qui regarde le détail et le service, de vous envoyer un texte en utilisant le vôtre, celui qui est là, comme texte de base, et vous utiliserez celui-là. Quelques mois, qu'est-ce que c'est dans la vie d'une province?

M. Masse: M. Rivet, vous avez combien d'associations?

M. Rivet: Une quinzaine.

M. Masse: Comment se fait-il que d'autres organismes qui ont aussi des membres dans toute la province aient pu, dans les délais de trois mois, soumettre des rapports? Je pense que vous mentionnez le mois de mai 1977. Madame le ministre vient de mentionner...

M. Rivet: Oui, c'est que nous allons avoir...

M. Masse: ... l'intention du gouvernement qui est justement de faire des modifications, s'il y a lieu, et de tenter, en deuxième lecture, de présenter cette loi à l'Assemblée nationale d'ici la fin de l'année.

M. Rivet: Enfin, c'est notre suggestion.

Mme Bacon: Je vais avoir beaucoup de sympathie pour votre demande, M. Rivet, mais je pourrais peut-être exiger... Vous dites: Qu'est-ce que c'est, quelques mois dans la vie d'un gouvernement? Ce n'est pas ce que l'ensemble de la population pense, parce qu'on nous reproche souvent d'attendre pour agir. Pour une fois qu'on veut agir... Même le député de Lafontaine disait ce matin: On aurait pu faire cela avant.

Je pense qu'il faudrait peut-être précipiter un peu les rencontres de votre organisme et demander qu'on commence à regarder certaines sections du projet de loi et, au moins, faire connaître vos opinions sur ces sections qui vous touchent peut-être de plus près.

M. Rivet: C'est ce qu'on a commencé à faire.

Mme Bacon: Sans vouloir négliger le reste du projet de loi, je pense qu'il y a quand même des sections...

M. Rivet: C'est ce qu'on a commencé à faire. Demain, ici, je vais vous donner quelques points qui concernent un secteur, mais ça ne réglera rien.

Mme Bacon: Au moins vous allez vous faire entendre et exprimer des opinions.

M. Rivet: Nous sommes d'avis qu'il faut une période de quelques mois pour permettre à toutes les associations, en ce qui nous regarde, nous, du détail et des services — je ne parle pas des autres — de se rencontrer et d'arriver à faire l'unanimité autour d'un texte qui soit acceptable à ces associations professionnelles, qui ne sont pas des associations d'affaires. Nous ne sommes pas des coopératives d'achat. Nous sommes strictement des associations professionnelles. Si nous arrivions à nous entendre avec les autres associations, à vous soumettre un projet, un texte, en s'inspirant du vôtre, de celui qui est là, vous ne pensez pas que ce serait la situation idéale? Je ne pense pas que ce soit possible avant le printemps prochain. C'est impossible.

Mme Bacon: On ne demande pas un nouveau texte, M. Rivet. Ce qu'on demande, c'est que vous nous fassiez connaître vos opinions, vos suggestions quant au texte que nous soumettons. Ce texte a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale; ce que nous voulons, c'est connaître les réactions d'une partie de la population qui s'exprime ici à la commission parlementaire sur ce texte que nous avons adopté en première lecture à l'Assemblée nationale.

M. Rivet: Mme Bacon, il n'y a pas de reproche personnel dans ce qu'on vous dit.

Mme Bacon: Non, non. S'il fallait que je les prenne comme ça, je ne pourrais pas résister ici.

M. Rivet: On arrive au mois de mai avec un projet de loi de 273 articles dont on n'a jamais entendu parler.

Mme Bacon: II est déposé depuis le 30 mars, monsieur.

M. Rivet: Oui, mais qu'est-ce que c'est que, cette histoire? Qu'est-ce que ça veut dire que cela a été préparé sans qu'on le sache?

Mme Bacon: II y a quand même eu des...

M. Marchand: M. le Président, comment se fait-il que certaines de vos associations membres ont eu le temps de préparer des mémoires, de venir ici discuter et que l'association maîtresse de 15 associations n'a pas eu le temps, avec ces mémoires même préparés, de venir nous présenter quelque chose?

M. Rivet: C'est parce que nous, de la fédération, nous sommes une reflet de la pensée de nos associations et ne vous attendez pas que les associations, qui sont membres en règle ou non, puisse venir ici. Elles ne peuvent pas le faire.

M. Marchand: Vous auriez peut-être été mieux d'attendre pour venir là d'avoir les résultats des autres mémoires, de les étudier avec eux et, après ça, de venir présenter quelque chose qui va répondre à tout ça.

M. Rivet: On peut revenir.

M. Marchand: Parce que là vous venez et vous ne présentez rien, malheureusement.

M. Rivet: Nous venons vous demander... M. Marchand: D'attendre. M. Rivet: ...d'attendre, oui.

M. Harvey (Charlesbourg): Au rythme où on va là, M. le Président, on va finir au mois de décembre; ils pourront peut-être revenir à la fin.

Mme Bacon: Oui. Il faut être sérieux. Comme

je disais tout à l'heure à M. Rivet, si c'était possible pour lui, il faudrait précipiter certaines rencontres. On parle du rythme des discussions.

Nous voulons quand même laisser à la population qui veut venir s'exprimer en commission parlementaire tout le temps voulu pour le faire. Mais vous aurez sûrement le temps, d'ici la fin des auditions de mémoires, de venir compléter ce que vous nous avez fait parvenir.

M. Rivet: Est-ce qu'on pourrait revenir?

Mme Bacon: Bien oui. Je ne pense pas que la commission juge inopportun de vous accepter une deuxième fois, puisque vous venez de nous dire que vous n'êtes pas prêt. Quand vous serez prêt, s'il y a certaines sections du projet de loi que vous avez pu couvrir ou étudier davantage, je pense bien que les membres de la commission ne s'opposeront pas à vous entendre à ce moment-là.

M. Rivet: Nous n'avons pas choisi d'être les deuxièmes ici. Voyez-vous, c'est arrivé comme cela.

Mme Bacon: C'est parce que vous avez envoyé votre mémoire au tout début.

M. Rivet: On l'a envoyé aussitôt que possible. Mme Bacon: D'accord.

M. Rivet: C'était le but de rencontrer les associations. Malgré que nous ne pensions pas que ce soit un délai assez long, on va continuer à faire notre travail, en espérant que ce soit retardé à l'année prochaine.

Mme Bacon: D'ici quelques semaines... Merci.

M. Léger: M. le Président, vous pourriez peut-être en profiter pour inscrire sur la liste des membres de la commission le nom du député de Saint-Jacques en remplacement du député de Maisonneuve.

Le Président (M. Lafrance): Pour la présente séance, l'honorable député de Saint-Jacques remplace le député de Maisonneuve.

Je vous remercie, M. Rivet.

M. Samson: J'aurais une question peut-être avant...

Le Président (M. Lafrance): Je m'excuse. Le député de Rouyn-Noranda. M. Rivet, si vous voulez revenir...

M. Samson: Ce n'est peut-être pas tellement à M. Rivet que j'ai une question à poser, mais cela va l'intéresser. On vient de comprendre qu'il sera possible à votre association de revenir avant la fin des auditions, une fois que vous serez préparé à comparaître.

Est-ce que je dois comprendre que le ministre acceptera de prendre les dispositions pour faire connaître à la Fédération du détail et des services du Québec, en temps et lieu, la date ultime? Même si nous avons 80 mémoires, s'il en arrive deux par jour qui ne sont pas longs, il se peut que cela aille plus vite. Il faudrait quand même lui donner la chance de revenir, en l'avertissant quelques jours d'avance.

J'aimerais que cette commission...

Mme Bacon: M. le Président, je pense qu'avec les responsables des commissions parlementaires il y a moyen d'établir un horaire assez...

M. Samson: Oui, du moment que cette commission le décide, il n'y a pas de problème.

Mme Bacon: ... flexible pour que ce soit possible de...

Le Président (M. Lafrance): II faudrait que ce soit avant le 29 septembre.

M. Samson: Attendez, ce n'est pas... Cette commission n'a pas décidé quand elle terminera ses travaux, mais...

Mme Bacon: Pour ne pas faire mentir le député de Lafontaine.

M. Harvey (Charlesbourg): ... allusion aux élections générales du député de Lafontaine. Cela va le faire mentir une fois de plus.

M. Rivet: Je comprends qu'on nous dira la date limite, n'est-ce pas?

Mme Bacon: C'est cela.

Le Président (M. Lafrance): Les officiers des commissions vous aviseront en conséquence.

M. Samson: C'est ce que je voulais faire établir clairement.

M. Rivet: Merci beaucoup.

Le Président (M. Lafrance): Merci, en attendant, M. Rivet.

Le troisième organisme à venir présenter son mémoire, la Chambre de commerce du Québec. M. Morin et ses collaborateurs.

La Chambre de commerce du Québec

M. Poitras (Jean-Marie): M. le Président, mon nom est Jean-Marie Poitras, vice-président de la Chambre de commerce de la province de Québec. Je suis accompagné, aujourd'hui, à ma droite, de M. Jean-Paul Létourneau, vice-président exécutif de la chambre, à mon extrême gauche, de M. Pierre Tremblay, secrétaire et membre du comité exécutif, de M. Charles Blais, vice-président de la Chambre de commerce provinciale, de Me Fran-cine Charbonneau, avocat attaché à la permanence de la chambre, et de M. Pierre Morin, directeur général des affaires publiques à la chambre.

M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la Commission, la chambre est désireuse de vous soumettre aujourd'hui son appréciation du projet de loi 7 sur la protection du consommateur. En effet, rarement un seul projet de loi aura-t-il eu autant d'impact sur un aussi grand nombre de nos membres. Notre organisme, la fédération de quelque 200 Chambres de commerce du Québec, regroupe ainsi plus de 30 000 membres, en presque totalité, je dirais, des hommes d'affaires.

De plus, nous avons des membres corporatifs au nombre de quelque 2600 entreprises commerciales et industrielles qui adhèrent, elles, directement à la Chambre de commerce du Québec.

Avant de procéder au mémoire proprement dit, je voudrais peut-être vous résumer son contenu. Nous rappelons d'abord les recommandations que nous avons soumises en février, alors que le projet de loi était en préparation.

En deuxième lieu, nous voulons examiner la problématique qui sous-tend le projet de loi pour la faire suivre de l'évaluation juridique. Nous enchaînerons ensuite avec une évaluation pratique du projet pour démontrer dans plusieurs secteurs la difficulté qu'il soit applicable proprement dit et aussi efficace. Nous terminerons enfin avec des propositions concrètes et positives face à un réaménagement possible du projet de loi. Avec votre permission, je demanderais à M. Jean-Paul Létourneau de procéder plus directement à la présentation de notre mémoire. M. Létourneau.

M. Létourneau: M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la commission, comme d'autres l'ont signalé avant nous, le temps pour préparer nos réactions à ce projet de loi a été relativement court. Nous avons réussi, cependant, à vous envoyer notre mémoire dans les délais prescrits. Depuis que nous avons déposé ce mémoire, se sont ajoutées certaines annotations qui peuvent le compléter sans le modifier. Nous avons fait distribuer aux membres de la commission une copie qui comprend ces annotations. J'espère que chacun en a une copie. Je les ai remises au secrétaire. C'est la copie avec la couverture grise. Cela ne change rien au texte original de notre mémoire. Cela ne fait que le compléter. Ceci étant dit, je commence à résumer à la page 2 de notre document en vous signalant qu'en février dernier la chambre, à l'invitation de l'Office de la protection du consommateur, lui soumettait un mémoire sur la refonte de la loi. Affirmant qu'il était opportun de refondre la loi, la chambre en profitait pour soumettre une série de recommandations, lesquelles, à son avis, devaient guider l'élaboration de la nouvelle législation.

Première recommandation alors soumise, concernant l'éducation. Tout comme le Conseil de la protection du consommateur, nous croyons que l'éducation à la consommation est un instrument fondamental auquel le consommateur a droit pour assurer sa protection. Cette éducation, qui devrait être obligatoire dans nos écoles, la chambre la considère un prérequis à toute intervention législative de l'Etat.

Problématique positive. L'action législative de l'Etat doit, par ailleurs, s'inspirer d'une problématique dans le sens de bâtir sur la communauté des intérêts existant entre le consommateur et le commerçant pour offrir une protection au consommateur. Il en résultera une volonté d'aider le commerçant à mieux servir le consommateur, plutôt que l'imposition d'un lourd fardeau de tracasseries administratives résultant de la considération du commerçant comme un ennemi du consommateur.

Analyse des besoins et du comportement. De façon générale, quels sont les besoins et les comportements du consommateur et du commerçant au Québec? La science de la mise en marché en modifie les techniques presque quotidiennement pour tenir compte de changements sociaux et des nouveaux besoins du consommateur. Nous croyons que l'Etat devrait, avant d'adopter un texte législatif qui, nécessairement, va influencer les comportements, bien les connaître et les comprendre, soit en obtenant les études déjà réalisées ou par la réalisation d'études spécifiques.

Analyse du rapport coûts-bénéfices. La chambre croit aussi à l'essentialité pour l'Etat de réaliser une analyse du rapport coûts-bénéfices de la nature et des modalités de son intervention législative. L'objectif de la loi étant de le protéger, le consommateur a le droit de savoir combien lui coûte cette protection par rapport à son efficacité prévue.

Recommandations particulières. Nous en avons cinq. Premièrement, concordance avec les lois des autres provinces; deuxièmement, introduction dans la loi de principes directeurs touchant le crédit, l'étiquetage, la garantie, la qualité du produit ou du service, auxquels viendrait s'ajouter, troisièmement, une liste très spécifique de pratiques prohibées conditionnées par l'intention coupable ou la connaissance de cause; quatrièmement, le maintien de la notion du contrat et, cinquièmement, l'élargissement de la portée du contrat pour inclure les ventes au comptant.

Nous commençons l'analyse du projet de loi par l'article 263 qui, à notre avis, traduit bien toute la philosophie qui sous-tend le projet de loi. Cet article prévoit qu': "A moins qu'il n'en soit prévu autrement dans la présente loi, le consommateur ne peut renoncer aux droits que lui confère la présente loi".

Entre parenthèses, une question qui pourrait peut-être être posée aux conseillers juridiques qui ont préparé cette loi et à laquelle nous n'avons pas trouvé de réponse est la suivante: Cet article 263 veut-il créer au consommateur l'obligation — je souligne bien le mot "l'obligation" — d'utiliser ses droits conférés dans le projet de loi subséquemment à un achat, même s'il ne le désire pas ou n'en a pas l'intention?

Cet article 263 consacre l'abandon effectif de l'éducation à la consommation, la volonté d'ériger en ennemis irréconciliables consommateurs et commerçants, l'ignorance des besoins et des comportements de chacun et l'incapacité d'établir un rapport coûts-bénéfices de la protection que l'on veut offrir.

Et au cas où le consommateur ne voudrait pas de cette protection, la loi le réduit à l'état d'un mineur ou d'un faible d'esprit devant s'en remettre à la curatelle des fonctionnaires à Québec.

Dans ce contexte, la Chambre ne peut appuyer ni le principe ni les modalités du projet de loi 7 sur la protection du consommateur tel qu'il se présente.

Entendons-nous bien, cependant. Nous n'en avons pas contre le principe d'une loi efficace de protection du consommateur. Au contraire, et notre mémoire du mois de février en est la preuve. Mais une loi, pour être efficace, doit s'inspirer de la réalité, de toute la réalité, même si c'est une réalité que l'on veut modifier.

Deux impressions se dégagent à la lecture du projet de loi 7. Ces impressions se renforcent à l'examen approfondi du projet. La première est que la rédaction de la loi a procédé à partir d'exceptions ou de problèmes spécifiques colligés à l'Office de la protection du consommateur. Ces problèmes existent, mais ils sont loin de constituer toute la réalité. La deuxième impression est que le projet de loi constitue un procès d'intention à l'endroit des commerçants où ils sont condamnés avant même de pouvoir intervenir. C'est trop facile.

Enfin, bien que le projet s'inspire de principes généreux et équitables, sa forme actuelle témoigne d'une telle ignorance des relations commerçants-consommateurs, dans le cours normal des choses, qu'en définitive il protège souvent moins bien ce dernier qu'il ne l'est actuellement.

L'appréciation qui précède peut sembler trop sévère ou excessive, c'est pourquoi nous nous proposons de l'appuyer de deux évaluations, l'une juridique, l'autre pratique, avant de vous formuler des recommandations précises.

Evaluation juridique. A prime abord, une loi visant à protéger le consommateur devrait avoir quelques chances d'être comprise d'elle-même sur un plan juridique. Or, ce projet, dès ses débuts, est loin de pécher par limpidité. Voici des exemples tirés des articles d'interprétation. a) "automobile": On en a discuté longuement ce matin. Je ne pense pas qu'il soit utile d'insister ici, sauf pour dire que nous recommandons que l'on retienne la définition de la Loi d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles ou du Code de la route. b) "bien": "un bien mobilier". Article 1b. C'est la définition qu'on donne de bien à cet article. Ici se pose un dilemme intéressant, soit de modifier l'expression pour se lire "bien mobilier faisant l'objet d'un commerce", ou'de laisser l'expression dans sa rédaction actuelle, sachant que les articles 395 et 397 du Code civil excluent expressément "les choses qui font l'objet d'un commerce." La portée de la loi pourrait en être fortement limitée puisqu'alors on ne considérerait plus que les services.

Notre recommandation est à l'effet qu'on retienne la définition de l'article 1486 du Code civil qui définirait "biens" comme choses qui font l'ob- jet d'un commerce. Définition, évidemment, a contraria. c) "contrat": "un contrat ayant pour objet un bien ou un service". Article 1d encore. Pourquoi ne pas dire ici que l'on introduit une nouvelle définition de contrat en faisant disparaître le bilatéralisme, soit la base intrinsèque du contrat. Dorénavant, le contrat ne lie plus qu'une seule partie, le commerçant, et à ce sujet, nous nous référons à l'article 14 et à l'article 16 et à d'autres articles.

Notre recommandation serait de maintenir la définition de contrat contenu dans le Code civil à l'article 984 et qui repose sur quatre principes fondamentaux.

Qu'est-ce qu'un commerçant? D'autres ont posé cette question avant nous, nous la posons aussi, nous sommes d'accord avec le fait que le mot devrait être défini. En France, le Code de commerce définit le commerçant de la façon suivante: Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle. Nous aimerions que cette définition soit retenue et inscrite dans la loi.

Il est un autre mot qui n'est pas défini, auquel nous n'avons pas fait allusion dans notre document, c'est le mot service. Nous croyons qu'il serait très important et utile que le mot service soit également défini, puisqu'il s'agit d'une loi pour protéger le consommateur dans l'acquisition de biens et de services.

Passant aux autres articles, à l'article 4, si l'on retient les définitions qui y sont mentionnées ci-dessus, il s'agirait là de contrats portant exclusivement sur les services, d'où la remarque, tantôt, du fait que la portée de la loi serait considérablement limitée.

Article 14, les promesses verbales ou testimoniales n'engagent pas le consommateur avant le constat par écrit. Engagent-elles le commerçant? Si, d'une part, l'engagement verbal du consommateur ne l'engage pas et si, d'autre part, il peut renverser un écrit par une preuve testimoniale, selon l'article 189, que vaut un contrat constaté par écrit?

Article 16, l'écrit dûment rempli constitue une offre de biens ou de services. De combien de temps le consommateur dispose-t-il pour y donner suite? On n'a pas prévu, à notre avis, de dimension de temps dans cet article.

L'article 22 fait de l'offre de service un contrat. Est-ce de la nature d'un contrat de n'engager, sous peine de nullité, qu'une seule des parties?

L'article 32. Qu'en est-il des frais de transport? Sont-ils exclus de la portée de l'article ou sont-ils à la charge du commerçant? Je rappelle que l'article 32 se lit comme suit: "Aucun frais ne peut être exigé par le commerçant pour l'exercice et l'exécution de la garantie". Cela signifie-t-il qu'aucun frais ne peut être indiqué dans la garantie pour son exécution et son service?

La chambre a soumis à cette commission un autre mémoire portant sur les commerçants itinérants. Nous nous sommes inscrits à la commission pour en traiter dans une séance subséquente.

Je passe donc à l'article 49. Si notre compré-

hension de cet article est bonne, une automobile neuve ayant servi à des fins de démonstration — participation au Salon de l'auto, exposition dans le cadre d'une loterie ou en montre dans un magasin — serait considérée usagée. Ou encore un consommateur fait un parcours d'essai d'une automobile neuve et ne l'achète pas; pour le consommateur suivant, l'automobile serait-elle usagée? Il semble que oui, si on s'en tient aux termes exacts du projet de loi.

Article 50. Pourquoi le consommateur serait-il moins bien protégé lorsqu'il achète une automobile d'un individu? On en a longuement parlé encore ce matin. Je pense que c'est inutile d'élaborer.

Article 51 d). Compte tenu du paragraphe précédent, le commerçant porte la responsabilité de la véracité du totalisateur. Quel recours a-t-il contre le propriétaire antérieur qui aurait faussé le totalisateur?

Article 56. Pourquoi placer le fardeau de la preuve sur le commerçant? Pourquoi, au contraire, ne pas demander au consommateur de démontrer qu'il n'a pas fait un usage abusif de l'automobile?

Article 59. Le consommateur aura beaucoup de peine à établir la preuve sur simple avis verbal. Pour mieux le protéger, pourquoi ne pas exiger un avis écrit?

Article 60. Quelle protection le commerçant a-t-il contre l'usage abusif par le premier propriétaire? Je rappelle que l'article 60 se lit comme suit: "Le commerçant répond de l'exécution de l'obligation prévue à l'article 53 à l'égard de tout acquéreur subséquent de l'automobile usagée."

Article 74. Comment évaluer des réparations à la transmission et au moteur? Quels délais accorder? On en a longuement discuté ce matin.

Article 76. Si vous étiez garagiste, offririez-vous une garantie plus avantageuse avec le fardeau de la preuve prévu à l'article 77 qui vous pend au bout du nez?

Même remarque pour l'article 78, similaire à celle que nous avons faite pour l'article 59.

Qu'en est-il, concernant l'article 80, des hypothèques combinées ou des deuxièmes hypothèques pour fins d'acquisition d'un immeuble? Je rappelle que l'article 80 se lit comme suit: "Nonobstant l'article 79, le présent chapitre ne s'applique pas aux contrats de crédit garantis par hypothèque de premier rang." Qu'arrive-t-il à ces hypothèques de second rang?

Articles 116 et 122. Un oubli de reproduire des mentions essentielles dans des contrats écrits entraîne la suppression des frais de crédit, la restitution de toute partie des frais de crédit déjà payés et, dans certains cas, l'annulation possible du contrat, selon l'article 105.

Cet article 124 réagit de façon très évidente à la grève des postes. Nous considérons qu'il s'agit d'un article qui constitue une redondance par rapport au code civil.

Article 128. Quels sont les autres contrats assortis d'un crédit? Ici, nous ne pouvons l'imaginer. D'après nous, ils sont tous couverts déjà. Je rappelle que l'article 128 se lit comme suit: La pré- sente section s'applique à la vente à tempérament et aux autres contrats assortis d'un crédit.

Article 151. Cette disposition, non seulement renverse le fardeau de la preuve, sur le commerçant, mais limite son droit à une défense pleine et entière. L'alternative que nous proposons est d'enlever, dans l'article 151, les mots "ou qui aurait dû en avoir." Pour fins de compréhension, je lis l'article 151: Aux fins de l'article 150, la pratique interdite du manufacturier ou du publicitaire est réputée être celle du commerçant qui en a eu ou qui aurait dû en avoir connaissance.

Article 163. Qu'est-ce que la publicité à but commercial? De plus, qu'arrive-t-il à la publicité favorisant une bonne nutrition chez les enfants? Notre recommandation, suite à cet article, est d'enlever cet article 163 et tout article corollaire.

Article 166. La Régie des rentes du Québec ne pourra donc plus inclure de publicité avec les chèques. Je lis l'article 170 qui dit: "Nul ne peut faire de la publicité s'adressant spécialement aux bénéficiaires des chèques ou autres ordres de paiement émis par le gouvernement du Canada ou du Québec." Alors, l'exemple que nous donnons est que la publicité pour indiquer, par exemple, en cas de grève des postes, où aller chercher son chèque, c'est de la publicité et spécifiquement, d'après la loi, cela ne devrait plus exister, d'où nous recommandons d'enlever cet article.

Article 168. Le permis d'un commerçant itinérant est assorti d'un cautionnement. Or, le cautionnement est précisément une preuve de solvabilité, laquelle est au bénéfice du consommateur, et il ne peut le lui dire parce que l'article 168 se lit: "Nul ne peut invoquer le fait qu'il détient un permis ou qu'il est le représentant d'une personne qui détient un permis pour prétendre que sa compétence, sa capacité, sa solvabilité, sa conduite ou ses opérations sont reconnues ou approuvées. Or, quand on a un cautionnement, il nous semble que la solvabilité est justement approuvée par le responsable de l'émission du permis. Notre recommandation est d'enlever ce qui a trait à la solvabilité et aux opérations, parce que les opérations également sont reconnues.

Article 173. De qui provient la déclaration prévue au paragraphe a) de cet article 173 qui se lit comme suit: "Lorsqu'une personne a utilisé, utilise ou est sur le point d'utiliser une pratique interdite visée par le présent livre, le directeur peut demander au tribunal, par une requête qui doit être instruite et jugée d'urgence: a) une déclaration à l'effet que la personne a utilisé, utilise ou est sur le point d'utiliser une telle pratique interdite." Cette déclaration, est-ce qu'elle doit provenir de l'inculpé? On ne peut forcer une personne à s'incriminer. Est-ce qu'on veut introduire ici ce qu'on appelle chez nos voisins du Sud le "seize and desist order", ou est-ce qu'on attend cette déclaration du tribunal? Alors, que fait-on du droit à un procès et à une défense pleine et entière?

Article 179. Les administrateurs sont présumés de mauvaise foi. Je lis l'article 179 qui dit: "Lorsque le commerçant est une corporation, les administrateurs sont conjointement et solidairement responsables, avec la corporation, à l'égard

des sommes devant être placées dans un compte en fiducie, conformément aux articles 175 et 176, à moins que les administrateurs n'établissent leur bonne foi." Alors, nous disons qu'ils sont présumés de mauvaise foi. Notre recommandation est de remplacer les mots: "bonne foi" par les mots "non connaissance de cause". La bonne foi se présume, selon l'article 2202 du code civil.

Article 189. Le commerçant lui, n'a donc pas droit d'administrer la preuve testimoniale. Nous avons maintenant deux classes de citoyens. L'article 189 dit: "Tout consommateur peut, s'il veut prouver que la présente loi n'a pas été respectée à l'occasion d'un contrat visé par la présente loi, administrer la preuve testimoniale, même pour contredire ou changer les termes d'un écrit." Si ces responsabilités doivent exister pour le commerçant, nous prétendons qu'elles devraient exister également pour le consommateur.

Article 196. Compte tenu de l'article 195, l'avis devrait être signifié ou expédié par poste recommandée ou certifiée. Articles 200 et 201. A priori, une corporation est plus riche qu'un commerçant non incorporé. Nous recommandons l'uniformité des limites de pénalité financière, laissant au tribunal le soin de juger, selon la gravité de l'offense et les personnes en cause, de l'importance de l'amende à imposer.

Article 202. Depuis quand le Code pénal prévoit-il des dommages punitifs? Je lis l'article 202 qui dit: "Dans la détermination du montant de l'amende, le tribunal tient compte, le cas échéant, du préjudice économique causé par l'infraction à un consommateur ou à un groupe de consommateurs." Il y a déjà un recours au civil pour le consommateur. Notre recommandation est donc d'éliminer l'article 202.

Article 207. Un simple déménagement exonère de la récidive. Pourquoi nous disons ceci? C'est parce que l'article 207 se lit comme suit: "La production d'un document antérieur condamnant un prévenu pour une infraction à la présente loi fait présumer que l'infraction reprochée est une deuxième infraction ou une infraction subséquente si le nom et l'adresse du prévenu sont ceux qui apparaissent au jugement antérieur." On n'a qu'à changer d'adresse et le tour est joué. Nous recommandons aussi d'éliminer cet article.

Articles 209 et 210. Depuis quand le criminel tient-il le civil en état et vice-versa? Ces articles contreviennent à un principe fondamental dans notre système de droit. Nous recommandons l'élimination de l'article 209.

Article 214. Le conseil ne peut aucunement agir de son propre chef concernant le Conseil de la protection du consommateur. Si on lit l'article 214, on s'aperçoit que ses fonctions sont très limitées. Notre recommandation est que le conseil ait au moins le pouvoir et les ressources financières pour répondre adéquatement aux questions prévues à l'article 214a, c'est-à-dire "donner son avis et faire des suggestions au ministre sur toute question que celui-ci juge à propos de lui soumettre", c'est-à-dire que le conseil puisse avoir les ressources pour faire les enquêtes nécessaires pour répondre adéquatement à ces questions.

Article 228. L'article 228 est assez long. Je vous dispense de la lecture, sauf peut-être du paragraphe d) qui dit: "A l'occasion d'une enquête, le directeur peut... d): s'il appert qu'une infraction a été commise, saisir et emporter tout registre, livre, compte, pièce justificative, lettre, télégramme, autre document..."

Au paragraphe a), on dit aussi: "pénétrer à toute heure raisonnable dans l'établissement..." Nous croyions que la demeure était inviolable et que c'était un principe consacré par la charte des droits et libertés de la personne, devenue en vigueur depuis le 1er juillet dernier, aux articles 7 et 8 de cette charte.

Notre recommandation est d'exclure de l'immunité prévue à l'article 226 l'application de l'article 228 d) parce que l'application de l'article 228 d) peut constituer un préjudice très considérable à un commerçant sans même qu'il n'y ait aucune preuve faite de sa culpabilité.

Articles 231 et 232. Comment l'Etat se propose-t-il de réparer le préjudice économique qu'il peut ainsi créer? Ou faut-il présumer que ni l'Etat ni le consommateur ne sont responsables? Drôle de société où seuls les commerçants sont responsables!

Les articles 231 et 232 sont assez courts, je vous les lis: "Le ministre, le directeur ou une personne autorisée par ces derniers peut divulguer ce dont il a pris connaissance à l'occasion d'une enquête et faire les mises en garde au public qu'il juge opportunes relativement aux activités de la personne ayant fait l'objet de cette enquête."

A l'article 232, "une divulgation faite de bonne foi conformément à l'article 231 par une personne autorisée à ce faire en vertu de cet article ne peut servir de base à une action en responsabilité civile."

Nous recommandons donc d'exclure de l'immunité les actes prévus par ces articles. Autrement, on présume que ces gens ne sont pas responsables devant la loi de leurs actes.

Article 233, procès d'intention, d'après nous. "Lorsque le directeur croit qu'une personne a enfreint — croit qu'une personne a enfreint — enfreint ou est sur le point d'enfreindre la présente loi ou les règlements, il peut accepter de cette personne un engagement volontaire de respecter la loi et les règlements. Le directeur détermine les conditions de l'engagement volontaire, etc. Si des poursuites ont été entreprises contre cette personne, le directeur peut les abandonner après la signature de l'engagement volontaire."

Il s'agit, en fait, d'une confession judiciaire non volontaire. Nous y voyons ici une arme à deux tranchants. C'est un processus nouveau sur le plan juridique, pour nous. Nous hésitons beaucoup à accepter l'introduction de cette mesure juridique dans nos coutumes légales.

Article 236. Encore une fois, qu'est-ce qu'un commerçant qui conclut des contrats de prêts d'argent? 1) Est-ce un commerçant qui conclut des contrats de prêts d'argent dans le cadre du cours de ses affaires ou 2) est-ce un commerçant de prêts d'argent? D'après nous, cela peut être l'un ou l'autre d'après l'article 236 c).

Si c'est une définition selon 1), c'est-à-dire un commerçant qui conclut des prêts d'argent dans le cadre du cours normal de ses affaires, ce qui implique la très large majorité des commerçants, sinon la totalité, nous nous opposons dans ce cas-là, parce que cela deviendra une tâche monstrueuse et une action déraisonnable d'émettre des permis à tous ces gens.

Articles 262 et 263. Fait de l'ensemble de la population des mineurs ou des faibles d'esprit. Notre recommandation est de remplacer les articles 262 et 263 par des dispositions semblables aux articles 1652 et 1653 du Code civil portant sur les baux et qui pourraient se lire comme suit: "Est nulle et sans effet toute stipulation incompatible avec les dispositions de la présente loi. L'inefficacité d'une telle stipulation n'emporte pas la nullité du contrat pour le surplus".

Une omission importante. A aucun endroit dans le projet de loi no 7 n'est-il fait mention que la Charte des droits et libertés de la personne est systématiquement bafouée, soit, par exemple, aux articles 231 et 232 du projet de loi qui contreviennent à l'article 4 de la charte, et aux articles 10, 179, 189, 200 et 201 qui contreviennent, eux, à l'article 23 de la charte. On dit bien dans la charte que, si une loi subséquente doit y contrevenir, il faudra l'indiquer dans cette loi subséquente.

Evaluation pratique. L'objet de cette partie du mémoire est de démontrer l'impraticabilité et l'inefficacité du projet de loi dans plusieurs secteurs, ainsi que certains coûts imposés aux consommateurs, soi-disant pour sa protection.

Combien coûtera aux consommateurs le droit d'exiger de modifier, avec pleine garantie, l'utilisation d'un bien? Encore une fois, on en a parlé longuement ce matin. Pour certains commerçants, un de leurs principaux avantages concurrentiels est la possibilité de faire exécuter la garantie par une personne autre qu'eux-mêmes. Cet avantage concurrentiel disparaît à l'article 29. Il en coûtera combien de plus au consommateur?

Qui, en définitive, assumera les frais de transport? Le consommateur? Combien de plus? C'est à l'article 32 qui dit: "Aucun frais ne peut être exigé par le commerçant pour l'exercice et l'exécution de la garantie". Or, on sait combien peuvent coûter aujourd'hui les frais de transport lorsqu'on fait exécuter une garantie. Où seront-ils inclus? Seront-ils inclus dans le prix de vente avant même l'exécution de la garantie?

Pour bien se protéger, de combien le vendeur d'automobiles usagées majorera-t-il ses prix pour ne pas avoir à faire la preuve quasi impossible prévue à l'article 56 qui dit: "Le consommateur assume seul le coût des réparations lorsque la défectuosité du moteur ou du rouage d'entraînement résulte d'un usage abusif; la preuve de cet usage excessif incombe au commerçant."

Si vous étiez vendeur d'automobiles usagées qui déjà offre une garantie plus avantageuse que celle prévue à l'article 53, la maintiendriez-vous? Il en coûtera combien de plus au consommateur?

Alors que les médecins déclarent l'obésité comme un des principaux fléaux de la société actuelle, de combien seront majorés les contrats prévus à la section III, pour tenir compte de l'article 65 qui dit: "Le consommateur peut, en tout temps, résilier le contrat à sa seule discrétion, au moyen d'un avis écrit au commerçant." Et l'article 66: "S'il résilie le contrat, l'obligation du consommateur ne peut consister que dans la somme des montants suivants: a) le prix des services qui lui ont été rendus, calculé au taux horaire ou quotidien stipulé au contrat, et b) 10% du prix des services qui ne lui ont pas été rendus, sauf si l'inexécution est due au commerçant, ou sauf si le contrat n'est pas conforme aux exigences de l'article 64".

Les pièces qui font l'objet d'une garantie doivent généralement être retournées au manufacturier. Comment le garagiste peut-il à la fois satisfaire le consommateur qui l'exige, selon l'article 71, et les conditions de la garantie? De cela aussi, vous avez été pleinement informés ce matin et d'autres y reviendront.

Etait-ce l'intention du législateur d'imposer au consommateur un minimum de $300 d'amende pour être en possession d'un totalisateur défectueux sur son automobile? C'est pourtant ce que disent les articles 149 et 200! Et le pauvre Code de la route fait figure de parent pauvre avec $20 d'amende.

Un individu annonçant dans les annonces classées d'un quotidien ne peut donc plus dire: Automobile à vendre, $1000 payables en trois versements, selon l'article 161, parce que l'article 161 dit: "Nul ne peut faire de la publicité informant les consommateurs sur les biens et services qu'ils peuvent se procurer au moyen du crédit qu'on leur offre."

On peut d'ores et déjà prévoir le genre de publicité que veut freiner la loi, s'adressant aux parents, à l'heure des programmes d'enfants, leur disant à quel point leurs enfants apprécieraient tel ou tel bien, selon les articles 163 et 164. Un des avantages qui ont toujours milité en faveur de la publicité aux enfants est l'encouragement à une saine nutrition, particulièrement au petit déjeuner. Permettez-nous deux exclamations dans la langue de Shakespeare: "We are cutting off our nose to spite our face", ou "Throwing out the baby with the bathwater". Encore une fois, pour tuer la mouche, on se sert du bélier mécanique. Ce matin, on parlait d'un éléphant pour un moustique.

Par l'article 179, l'Etat vient de créer un nouveau marché par l'assurance-responsabilité avec une forte limite par administrateur de corporation. Il en coûtera combien de plus au consommateur pour payer ces primes? De plus, les corporations devront aussi assurer tout dirigeant, administrateur et représentant, selon l'article 203.

Combien de fonctionnaires additionnels aux frais du contribuable et du consommateur seront requis pour l'application du projet de loi tel que rédigé?

La chambre ne voudrait cependant pas laisser à la commission l'impression que tout dans le projet de loi est inacceptable. Par exemple, sauf pour les réserves déjà exprimées, la section sur les pratiques interdites nous apparaît une forte amélioration sur la situation actuelle. Nous apprécions

aussi l'article 208 permettant au commerçant ou au publicitaire d'offrir une défense portant sur la connaissance de cause. C'était là une de nos recommandations spécifiques.

Ce projet de loi, s'il devait être adopté tel quel, offrirait l'occasion de produire une montagne de règlements. Les membres de cette commission et de l'Assemblée nationale se souviendront de nos propos sur la législation déléguée et sur l'exercice des pouvoirs discrétionnaires soumis dans un mémoire intitulé: "L'érosion du pouvoir législatif". Nous n'avons point changé d'avis à ce sujet.

En conclusion, à la lecture du projet de loi 7 sur la protection du consommateur, notre première réaction aurait été de demander son retrait. Cependant, l'examen attentif de ses dispositions nous porte vers une suggestion plus positive et plus efficace pour la protection du consommateur. Notre recommandation part de la constatation que le projet contient des éléments essentiels et beaucoup de superflu.

La Chambre de commerce du Québec recommande donc à cette commission parlementaire de réaménager le projet de loi à l'étude pour le faire porter sur l'interprétation, articles 1 à 3; les dispositions générales applicables aux contrats, articles 5 à 12; les dispositions générales portant sur la vente et le louage de biens ou de services, articles 23 à 36; les pratiques interdites, articles 146 à 174; le compte en fiducie, articles 175 à 180; la preuve et la procédure, articles 189 à 196; les recours civils, articles 197 et 198; les infractions et les sanctions pénales, articles 199 à 210; le Conseil de la protection du consommateur, articles 213 à 219; l'Office de la protection du consommateur, articles 220 à 235; les permis, articles 236 à 250; la révision des décisions du directeur, articles 251 à 261; les dispositions finales, 262 à 273; la mention de la dérogation à la Charte des droits et libertés de la personne, articles 52 et 54 de la charte.

Ce réaménagement devrait tenir compte des remarques déjà formulées par la Chambre à leur endroit. Toutes les autres dispositions seraient retirées du projet de loi. La Chambre croit qu'alors le consommateur disposerait d'un outil très efficace pour sa protection, prévoyant un maximum de protection avec un minimum de tracasseries. Surtout, cette protection aurait l'avantage de ne pas lui coûter plus cher que l'absence de protection et, tout en étant très dure à l'endroit du commerçant, ne serait pas inique. C'est le type de protection que nous aurions souhaité retrouver dans le projet de loi no 7 sur la protection du consommateur. Merci, M. le Président.

Mon collègue, M. Morin, pourra ajouter sur notre prétention à l'effet que ce projet de loi réaménagé selon la façon que nous proposons constitue quand même une protection tout aussi efficace pour le consommateur en évitant des tracasseries et des coûts que nous croyons excessifs pour le consommateur.

M. Morin (Pierre): Ce sera très court, M. le Président. C'est simplement pour vous dire que nous affirmons que, dans l'adoption de nos pro- positions, il y aurait trois effets principaux qui seraient atteints. D'abord, accroître la protection du consommateur. Deuxièmement, rendre cette protection plus efficace. Troisièmement, faire en sorte que tous les commerçants soient soumis aux mêmes règles. Un quatrième effet non négligeable serait de réduire considérablement les tracasseries administratives fort dispendieuses sans pour autant réduire la protection du consommateur.

Si vous permettez, je vais élaborer un tout petit peu sur ces recommandations. D'abord, accroître la protection du consommateur. Le réaménagement proposé offre au consommateur l'entière protection de la loi dans toutes ses transactions avec le commerçant, qu'elles soient au comptant ou constatées par un écrit. Cette protection viendrait en bonne partie de la limpidité du texte de loi plus facilement assimilable. Rendre cette protection plus efficace, notre deuxième point. Les tracasseries quotidiennes imposées à plusieurs secteurs d'activité risquent de coûter plus cher aux consommateurs que la protection apportée. L'élimination de ces articles réduirait ses coûts sans pour autant réduire la protection accordée par la loi aux consommateurs visés spécifiquement par les articles que nous nous proposons d'éliminer.

Enfin, troisièmement, faire en sorte que tous les commerçants soient soumis aux mêmes règles. Encore ici, la limpidité du texte faciliterait aux commerçants la prise de connaissance et, donc, le respect de la loi. Enfin, nous croyons comprendre que près de $1 million est prévu au budget 1976/77 aux fins d'application de ce projet de loi. Une bonne partie de cette somme pourrait alors être affectée à l'éducation du consommateur, rendant cette loi d'autant plus efficace. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'ai été à la fois surprise et déçue à la lecture du mémoire des membres de la Chambre de commerce sur le projet de loi de la protection du consommateur. Surprise et déçue de trouver une argumentation qui, malgré l'importance du sujet traité, fasse parfois preuve de légèreté dans l'analyse et d'une brièveté humoristique dans sa présentation. Je dois malheureusement déplorer une faiblesse évidente au niveau des recommandations et des conclusions de ce mémoire, faiblesse évidente qui s'oppose à la qualité de certains mémoires que nous a déjà présentés cet organisme. L'attitude catégorique démontrée par la Chambre de commerce m'incite à penser qu'elle met non seulement en cause les modalités du projet de loi, mais aussi les principes les plus fondamentaux. J'ai été particulièrement surprise et déçue de constater que, selon la Chambre de commerce, la voie législative doit être pratiquement écartée des moyens de protéger véritablement le consommateur. La Chambre de commerce nous suggère dans son mémoire d'opter plutôt pour l'éducation à la consommation comme prérequis à toute intervention législative de l'Etat.

Les représentants de la Chambre de

commerce rendraient un grand service, je pense, à cette commission en nous éclairant sur cette opinion qu'ils semblent les seuls à exprimer. J'ai été aussi surprise et déçue devant les propos de la Chambre de commerce qui nous mettent en garde contre le projet de loi qui, selon elle, érige en ennemis irréconciliables commerçants et consommateurs et qui porte aussi à croire que ces derniers sont des faibles d'esprit sous la tutelle de fonctionnaires à Québec.

Pour éviter ce que la Chambre de commerce qualifie, probablement par délicatesse, de tracasserie administrative, celle-ci nous propose assez paradoxalement une action législative qui, selon ses termes, doit s'inspirer d'une problématique positive, dans le sens de bâtir sur la communauté des intérêts existants entre le commerçant et le consommateur.

Nous aimerions aussi que les représentants de la Chambre de commerce nous apportent des explications à ce sujet.

De plus, sans préjuger de l'efficacité des moyens proposés par la Chambre de commerce, je me pose sérieusement des questions sur la sagesse de s'inspirer du libéralisme économique du siècle dernier.

La sophistication des techniques de vente, de mise en marché et de publicité, l'expertise technologique et les moyens électroniques dont bénéficient manufacturiers et commerçants ont, de l'avis de tous les juristes spécialisés en droit de la consommation, contribué à créer un déséquilibre croissant dans les rapports contractuels entre commerçants et consommateurs.

A l'instar de législations nord-américaines, c'est à ce déséquilibre que nous voulons remédier par notre présent projet de loi et nous nous étonnons qu'on puisse y voir un réquisitoire contre la malhonnêteté des commerçants.

Enfin, je ne sais trop comment interpréter les conclusions plus spécifiques du mémoire de la Chambre de commerce. Celle-ci recommande que l'on réaménage le projet de loi no 7 pour le faire porter sur quatorze points bien précis en tenant oompte des remarques déjà formulées à leur endroit et de retirer toutes les autres dispositions du projet de loi.

J'ai été surprise et déçue, je dois le redire, que, d'après ces recommandations, on retire du projet de loi des aspects aussi fondamentaux que ceux qui touchent les vendeurs itinérants, par exemple, la vente, la réparation d'automobiles et le crédit.

Je préférerais croire que l'absence de ces éléments n'est qu'un simple oubli de la part de ceux qui ont rédigé le mémoire de la Chambre de commerce. Dans le cas contraire, la commission aimerait connaître les raisons qui ont motivé la Chambre de commerce à suggérer le retrait de ces éléments qui sont, pour nous, essentiels à ce projet.

Le Président (M. Lafrance): Est-ce que les membres de la Chambre de commerce ont quelque chose à ajouter ou encore...?

M. Léger: Je voudrais seulement...

Le Président (M. Lafrance): Le député de Lafontaine.

M. Léger: ... formuler quelques réactions à la lecture et à l'audition du mémoire. Je voudrais d'abord dire qu'au départ, je vois que la Chambre de commerce a une perception bien personnelle de la société québécoise qui fait voir dans cette loi toute une série de contraintes qui ne devraient pas exister selon elle. J'ai remarqué à la page 4 du mémoire que vous en dégagez deux impressions majeures et que c'est à travers toutes les recommandations qu'on voit pourquoi vous avez cette préoccupation.

Vous semblez croire que cette loi est basée uniquement sur une préoccupation de légiférer à partir d'exceptions, et, d'autre part, vous avez l'impression que le projet de loi constitue un procès d'intentions à l'endroit des commerçants.

Il est sûr que vous voulez certainement défendre les intérêts des commerçants, mais dans une société comme la nôtre, surtout dans une société comme la nôtre, où il faut nécessairement rétablir l'équilibre des forces entre le consommateur qui est souvent démuni et impuissant et des commerçants qui peuvent être très honnêtes dans la majorité des cas et, dans certains cas particuliers, peuvent peut-être être malhonnêtes, je pense qu'il est normal que la Loi de la protection du consommateur présente des articles qui tiennent compte particulièrement de situations où le consommateur peut être lésé, même si c'est par une minorité. Vous parlez de procès d'intentions et d'exceptions. Or, les marchands qui, normalement, agiraient de bonne foi et ne léseraient pas le consommateur n'ont aucunement à craindre d'une loi qui est faite justement pour empêcher ceux qui ont des mauvaises intentions de le faire.

Je ne pense pas qu'au départ cela soit un procès d'intentions puisque, selon l'optique que nous pouvons avoir de l'ensemble des commerçants, c'est un groupe de gens honnêtes qui ont intérêt à faire du commerce, mais en même temps à ne pas léser le consommateur. Ils ne devraient pas se sentir lésés parce qu'il y a une loi qui va justement toucher la partie peut-être infime des commerçants ou de manufacturiers qui, eux, peuvent léser les consommateurs.

Cela m'a surpris de revoir, à travers toutes les recommandations, cette perception de la société qui est qu'on doit d'abord protéger le commerçant parce que le consommateur est une personne adulte qui peut se défendre facilement.

Je pense qu'on ne peut pas dire qu'actuellement les consommateurs sont réellement bien munis et ont ce qu'il faut pour se défendre aussi bien qu'un commerçant, un homme d'affaires, qui est beaucoup plus souvent devant des situations où il est obligé de se défendre. Ce qui n'est pas le cas pour le consommateur qui va acheter un objet, qui n'est pas au courant du contenu, du fonctionnement, des règles, de la loi et des mécanismes qui existent. Il est très démuni pour se défendre.

Vous dites au départ, dans votre page 3, que

la technique de mise en marché ou la science de la mise en marché en modifie les techniques presque quotidiennement pour tenir compte des changements sociaux et des nouveaux besoins du consommateur. Je pense qu'il faut aussi ajouter que la science des techniques de mise en marché ou de marketing influence énormément les choix et les besoins et crée souvent des besoins inutiles chez les citoyens. C'est pour cela qu'on voit tellement de gens s'endetter parce qu'on crée chez eux un besoin de produits ou d'objets qui ne sont absolument pas essentiels, qui sont de luxe. On crée chez eux un besoin de s'approprier ces produits. Pour eux, cela devient une chose absolument essentielle, parce que la publicité a créé chez eux ces besoins. Je pense qu'il faut de plus en plus protéger le consommateur là-dessus.

Vous admettrez, je pense bien, qu'il y a beaucoup de produits inutiles qui sont vendus sur le marché. Quand je dis inutile, c'est non seulement parce que l'objet comme tel ne peut pas être utilisé, mais parce que nous n'en avons pas besoin. Excepté que la mise en marché crée des gadgets qui font que les gens s'endettent pour des produits inutiles et parfois des produits défectueux ou des produits qui ne sont, a toutes fins pratiques, absolument pas des produits dont on a besoin.

Je voudrais simplement vous poser une question, sur une affirmation que vous faites à un endroit. A la page 10 de votre mémoire, vous parlez d'une omission importante. Voulez-vous m'expliquer ce que cela veut dire? Vous dites, à l'article 57 de votre propre mémoire: A aucun endroit, dans le projet de loi 7, n'est-il fait mention que la Charte des droits et liberté de la personne est systématiquement bafouée. Est-ce de l'ironie? Je ne comprends pas exactement ce que cela veut dire. Pourriez-vous m'expliquer ce que cela veut dire, et où, dans la loi, il aurait fallu y voir cela?

M. Morin: M. le député aimerait-il avoir l'explication immédiatement?

M. Léger: Oui, d'accord.

M. Morin: C'est bien simple. C'est que la disposition 52 et la disposition 54 de la Charte des droits de l'homme disent que dans toute loi subséquente qui contrevient à la charte, la mention doit être faite dans ce projet de loi — c'est une loi que l'Assemblée nationale a adoptée et qui est entrée en vigueur le 1er juillet — que la Charte des droits de l'homme est brimée ou enfin qu'on outrepasse la Charte des droits de l'homme.

M. Léger: A quel endroit, dans la loi, pouvez-vous affirmer que cela contrevient à la Charte des droits de l'homme?

M. Morin: Aux articles 231, 232. Aux articles 10... cela contrevient à l'article 4 de la Charte des droits de l'homme. Les articles 10, 179, 189, 200, 201 contreviennent à l'article 23 de la Charte des droits de l'homme.

Une Voix: M. le Président, est-ce que...

M. Poitras: M. le député, vous avez ce texte où on a en italique les références.

M. Léger: C'est le livre gris, ce n'est pas le livre vert. Mon collègue l'a sous la main. Est-ce celui-là?

M. Poitras: Le livre gris.

M. Léger: Non. Mon collègue l'a dit.

M. Poitras: Vous avez la réponse en notation.

M. Léger: De toute façon, je vais le relire quand j'en aurai l'occasion. Pour le moment, je n'ai pas d'autre question. Mon collègue de Saint-Jacques a des questions à vous poser sur un autre aspect de la loi.

M. Charron: Puis-je vous poser une question sur un article précis? Ce sera peut-être la seule occasion qu'on aura de le faire, mais j'espère que c'est sur un point qui va faire, qui doit déjà faire et qui fera l'unanimité des membres de la commission. J'ai trouvé votre recommandation absolument grossière, par rapport aux intentions manifestées dans le projet de loi. Il s'agit d'un point qui m'est très cher, mais qui l'est aussi, je suis convaincu, à Mme le ministre et aux autres députés de la commission, c'est l'article 163, qui vise à bannir une fois pour toutes, après toutes les promesses mentionnées en l'air et à contre-courant à l'occasion, la publicité à but commercial destinée à des enfants de moins de 13 ans. Nous avons eu d'autres occasions d'entendre des parents, chacun des députés a l'occasion d'entendre dans son comté des affirmations catégoriques émanant de consommateurs, parents.

Je suis député d'un comté où les citoyens sont démunis, mais où les enfants sont, comme n'importe quels autres enfants, victimes, et cette fois-là plus dangereusement, je dirais, d'une publicité qui leur est frauduleusement adressée à l'aide de tous les mécanismes que, par exemple, la télévision et les trucs de lentilles de caméras peuvent utiliser pour grossir démesurément un produit, le rendant démesurément tentant à une âme aussi innocente qu'un enfant de moins de treize ans. Quand j'ai parcouru la loi, il y a bien des aspects de la loi qui m'ont plu, d'autres qui m'ont inquiété. Nous aurons l'occasion, entre nous, de le signaler, mais je puis, dès à présent, affirmer à Mme le ministre que cet aspect de la loi doit absolument y demeurer jusqu'à sa lecture finale et dans son adoption finale et à sa sanction.

Quand je vois la Chambre de commerce nous apporter comme argument à l'encontre de cet article un commentaire aussi farfelu et aussi grossier que celui qui commence en disant: Qu'est-ce que de la publicité à but commercial, se poser la question... Vous accusiez tout à l'heure les fonctionnaires du ministère ou de l'Office de la protection du consommateur de considérer les gens comme des faibles d'esprit. Mais nous considérez-vous aussi comme des faibles d'esprit; au moment où M. Pierre Tremblay, par exemple,

fait partie de votre délégation, pour faire semblant de venir nous demander, comme si vous ne saviez pas ce que c'est: Qu'est-ce que de la publicité à but commercial? Il y a deux sortes de publicité. M. Tremblay peut très bien en parler lui-même. La publicité à but commercial et la publicité à but politique. M. Tremblay fait des deux et il le sait très bien.

La publicité à but commercial, c'est celle qui vise à aller chercher uniquement, par toutes sortes de moyens, un consommateur d'un produit mis en marché. Est-ce que ce sont des gens de la Chambre de commerce, qui se disent les porte-parole des commerçants, des hommes d'affaires, qui s'identifient comme l'élite industrielle et commerciale du Québec, qui ne savent pas répondre à cette question: Qu'est-ce que de la publicité à but commercial? Je pense qu'aucun membre de la commission ne doit perdre son temps à vous donner une réponse là-dessus, parce que c'est une question hypocrite. Vous le savez mieux que nous; vous l'utilisez plus souvent que nous, la publicité à but commercial. Vous l'avez inventée pour vous et pour vos commettants. Si vous ne le savez pas, nous, ici, nous le savons parce qu'on a vu ce que c'étaient des enfants victimes d'une publicité à but commercial quand ils ont six, sept ou huit ans, à l'approche des Fêtes. Ils deviennent ni plus ni moins que l'outil innocent, à l'intérieur d'un foyer, d'un propagandiste et d'un commerçant en passant par les parents, c'est-à-dire le porte-feuille du parent qui en est nécessairement la victime. Quand vous ajoutez, en plus de l'innocence hypocrite que vous apportez dans votre mention: Qu'arrive-t-il à la publicité favorisant une bonne nutrition chez les enfants, croyez-vous qu'un député autour de cette table va s'opposer à la publicité favorisant la bonne nutrition et pensez-vous que, si nous endossons l'article 163, c'est parce que nous voulons bannir de la télévision ou bannir des messages du ministère des Affaires sociales une publicité favorisant une bonne nutrition? C'est grossier comme intervention dans ce dossier, d'autant plus que l'article 164 vous apporte une réponse là-dessus. On détermine ce qu'est une publicité à but commercial s'adressant aux enfants. Il ne s'agit certainement pas d'une publicité devant favoriser une bonne nutrition.

J'ajoute ceci là-dessus, parce que je suis aussi impliqué émotivement dans ce genre d'intervention. Plus loin dans vos recommandations, à l'article 166, vous vous demandez si, à la suite de l'application de l'article 166, qui dit: Nul ne peut faire de la publicité s'adressant aux bénéficiaires de chèques ou ordres de paiement dans le genre bien-être social ou pension de vieillesse, la Régie des rentes ne pourra plus inclure de publicité avec les chèques. La Régie des rentes ne fait pas de la publicité comme K-Tel, comme K-Mart ou comme Mark Ten. La Régie des rentes informe les citoyens des droits qui leurs sont votés par cette Assemblée, adoptés par des règlements par le ministre des Affaires sociales à partir de lois votées par cette Assemblée. La Régie des rentes a le droit d'informer les citoyens. C'est faire l'innocent et je vous sais plus intelligents que cela pour distinguer entre ce que c'est qu'informer les citoyens des droits de la Régie des rentes et d'essayer de leur soutirer de l'argent pour des produits qu'un commerçant quelconque vient de mettre sur le marché pour se faire une piastre rapide et "flyer" le plus rapidement possible en Floride. Ce sont deux choses. Et j'espère que, dans la société québécoise, toutes les intelligences sont à ce point équipées pour faire le partage entre ces deux choses. Je vous ai vu trop souvent si finement à l'oeuvre lorsqu'il s'agit de plaider vos propres causes au point d'aller détecter la plus petite subtilité dans un projet de loi, pour ne pas vous savoir assez intelligents pour ne pas avoir compris le sens réel de ce que Mme le ministre et toute la commission espèrent de ces articles dans le projet de loi.

J'aimerais bien, si vous voulez vraiment que la publicité pour enfant en bas de 13 ans soit maintenue, que vous nous disiez vraiment qu'il s'agit de commerçants qui y trouvent une raison financière et que leur sécurité financière se trouve en jeu. Mettez les vraies raisons sur la table, identifiez-nous des producteurs de jouets, identifiez-nous des producteurs de dentifrice, identifiez-nous des producteurs qui sont membres de votre chambre de commerce et pour qui une telle abolition de publicité contreviendrait financièrement à la sécurité de leur entreprise.

Mais ne venez pas nous dire à nous que vous ne savez pas ce qu'est une publicité à but commercial et que vous vous inquiétez du fait que les enfants ne pourraient pas avoir de publicité pour une bonne nutrition. Le jeu est trop gros et je vous sais trop intelligents pour continuer à défendre ce genre d'intervention. Dites-nous quelles entreprises sont menacées, et nous jugerons. Mais je suis convaincu, si Mme le ministre l'a déjà déposé dans le texte de loi, que c'est l'intention gouvernementale, et c'est aussi l'intention de l'Opposition là-dessus. Nous sommes convaincus, au bout de plusieurs années, à entendre des réclamations là-dessus, que cet article doit être maintenu dans le projet de loi. Il ne met en péril aucun industriel ou alors, si industriels il y a, qu'ils s'adressent aux parents des enfants, qui sont les véritables consommateurs. Qu'ils identifient la qualité éducative de ces jouets. Tous les parents sont suffisamment intelligents, après, pour identifier le jouet et le donner à ces enfants s'il le faut. Mais n'utilisez pas l'âme innocente d'un petit bonhomme ou d'une petite fille de 5 ou 6 ans qui va devenir ni plus ni moins que le véritable acheteur d'un produit qu'on lui aura gonflé à la télévision.

M. Tremblay (Pierre): M. le Président, je voudrais dire que, tout en étant solidaire avec le fond du mémoire de l'organisme où j'ai l'honneur de siéger au comité exécutif, je n'ai pas participé à la rédaction du mot-à-mot. En ce qui regarde le domaine de la publicité, je suis par ailleurs au courant que des organismes dont c'est le rôle fondamental de représenter les professionnels de la publicité témoigneront devant votre commission. Il me fera plaisir de les accompagner à ce moment-là.

Je suis fort sympathique aux remarques de M.

le député de Saint-Jacques pour les entants qu'ilfaut protéger; je connais cela un peu comme lui, j'en ai sept. Donc, j'en ai élevé plusieurs.

M. Tremblay: Vous en avez sept de plus que lui.

M. Tremblay (Pierre): Je ne sais pas combien lui en a, mais moi j'en ai sept.

M. Charron: Moi non plus.

M. Tremblay (Pierre): Dé toute façon, je crois que certaines des questions soulevées s'adressent beaucoup plus à un groupe de professionnels de la publicité. Je n'avais pas particulièrement l'intention de revenir avec ces autres organismes, mais il me fera plaisir d'être présent à ce moment-là et nous pourrons apporter des éclaircissements. Je dégage à ce moment-ci ma responsabilité personnelle, ayant été cité personnellement; mais, si mes collègues veulent apporter des remarques à ce moment-ci, je n'ai aucune objection à ce qu'on tente de répondre à plusieurs des points qui ont été soulevés.

Le Président (M. Lafrance): M. Létourneau.

M. Létourneau: M. le Président, le député de Saint-Jacques, dans son exposé, a utilisé deux expressions, publicité et information. Evidemment, quand on parle des cas extrêmes, c'est très facile de dire: C'est de l'information, c'est de la publicité. Mais il y a une foule de situations mitoyennes où il devient extrêmement difficile de faire la différence entre ce qui est de la publicité pour fins commerciales et de l'information.

Des professionnels de la publicité vont vous dire que toute publicité est de l'information. Cela peut être débattable, discuté. Ce que nous voulions simplement souligner ici, c'est la difficulté extrême qu'il y a, et je pense que le législateur, s'il décide d'introduire et de conserver cet article 163, se rendra compte, dans la pratique, comment il est difficile de trancher ces questions et de déterminer, à un moment donné, ce qui, dans son esprit, sera acceptable.

Nous reconnaissons qu'il y a des choses qui sont faites qui ne sont pas acceptables et qui devraient être éliminées. Mais la difficulté de le faire, sur le plan pratique, quand on veut faire la différence entre ce qui est de la publicité non commerciale, commerciale, ou de l'information est très complexe.

Encore une fois, comme l'a dit M. Tremblay, des professionnels viendront vous le dire. Nous savons qu'ils ont à peu près la même réaction que nous, nous les avons consultés. C'est pourquoi nous avons fait allusion, dans notre mémoire, à cette question, où nous avons exposé des extrêmes, à toutes fins utiles, peut-être pour frapper l'imagination. Mais ce n'est pas dans ces extrêmes qu'il y aura un problème. Ce sera dans les situations mitoyennes qui sont la majorité des cas.

M. Charron: Juste une sous-question, M. Lé- tourneau. Vous m'avez répondu en évoquant la complexité étymologique, ou à peu près, entre information et publicité. Dans votre propre mémoire, à votre recommandation sur l'article 166, vous donnez comme exemple la publicité en parlant de ce que la Régie des rentes peut inclure comme information ou publicité — prenons encore l'ambiguïté — en émettant ses chèques aux citoyens.

Vous dites: Exemple, la publicité pour indiquer, en cas de grève des postes, où aller chercher son chèque. Je pense qu'on n'est pas nombreux, dans la salle, à croire que vous avez employé la bonne expression.

Dans le cas où un bénéficiaire d'un chèque de la Régie des rentes — c'est sa vie, c'est son revenu mensuel — ne peut pas recevoir son chèque à cause d'une grève des postes, le ministère doit l'informer de l'endroit où il pourra... Il ne s'agit pas de publicité, il s'agit vraiment d'information. L'ambiguïté ne se maintient pas.

M. Létourneau: Justement...

M. Charron: II faut informer les gens où ils pourront aller chercher leurs chèques en cas de grève.

M. Létourneau: Quand le ministère fait cette information, il achète des placards publicitaires dans les journaux pour transmettre cette information. C'est de la publicité en ce sens que...

M. Charron: Ce n'est pas de cela que vous parlez, parce que vous me parlez de la publicité incluse avec les chèques. C'est cela, l'article 166, ce ne sont pas les placards dans les journaux.

M. Létourneau: II peut y en avoir.

M. Charron: Ce qui est inclus avec les chèques ne peut pas être considéré comme publicité. Cela doit être considéré comme de l'information pure et simple. La Régie des rentes informe ses bénéficiaires que le mois prochain, à cause d'une grève prévue ou en cas de grève, ils sont avisés que ce sera au bureau du bien-être social qu'ils pourront les recevoir, par exemple.

M. Létourneau: Justement, nous n'avons aucune objection à ce que cela se fasse.

M. Charron: N'appelez pas cela de la publicité.

M. Létourneau: D'après notre interprétation du projet de loi, on pourrait l'interpréter comme de la publicité, parce que quand on achète des espaces publicitaires dans un media d'information, c'est de la publicité. A ce moment-là, on ne voudrait pas que ce soit exclu. Mais c'est par là qu'on veut démontrer la difficulté d'application de l'article tel que rédigé. C'est là notre point.

M. Charron: Dernière question. Est-ce que la difficulté d'application — en admettant votre argument temporairement — de l'article 163 et de

l'article 164 qui visent la publicité pour enfants justifie le fait que vous recommandiez de les retirer du projet de loi? C'est ce que vous recommandez.

M. Létourneau: Justement, pour ce qui est de la publicité pour enfants, encore là, il y a des difficultés extrêmes pour déterminer si la publicité s'adresse aux parents ou aux enfants. Il pourrait se faire qu'en disant: Pas de publicité pour les enfants en bas de 13 ans, des gens qui veulent contourner la loi préparent le message publicitaire de telle sorte qu'au lieu de s'adresser aux enfants, il s'adresse aux parents. Le message le dirait bien; textuellement, dans le message publicitaire, on parle maintenant aux parents, et, en ce faisant, on contourne le mot à mot de la loi et on continue de faire ce que vous regrettez et ce que nous regrettons, c'est-à-dire qu'on puisse parfois faire de la publicité mensongère ou qui fait appel aux enfants simplement en contournant le mot à mot de la loi et en s'adressant aux parents.

Nous n'avons pas encore trouvé de façon pratique et concrète de circonscrire et de bien définir cette publicité qu'on veut exclure. C'est là-dessus que nous butons.

Nous ne trouvons pas de réponse qui puisse être suffisamment articulée pour justement viser et atteindre les objectifs que vous voulez atteindre. De là notre hésitation et même notre refus à vouloir accepter tel que rédigé le projet de loi, non pas parce que nous en avons contre l'objectif visé; parce que nous disons: On ne réussira pas à l'atteindre de cette façon. Un autre exemple: les trains électriques, les vend-on à des enfants ou à leur père? Je veux dire l'utilisation même. A un moment donné, qu'est-ce qui est pour des enfants de moins de treize ans et de plus de treize ans? On a parlé de treize ans dans la loi. Qu'est-ce qui fait la différence entre un petit bonhomme de douze ans et demi et celui qui a treize ans et demi? Avec de telles limites aussi précises, encore une fois, on s'aperçoit qu'on va entrer dans des complexités dont on ne sortira pas. Il faudra certainement attaquer ce problème d'une autre façon.

M. Poitras: L'article 146 comprend bien des choses avec lesquelles nous sommes d'accord. Je pense que, dans l'interprétation de la chambre, nous sommes en faveur d'une éthique et d'un ordre dans la publicité. Je voudrais peut-être répondre à Mme Bacon.

Il est certain que nous avons déploré ce qui pour nous a semblé une période assez courte. Nous avons travaillé souvent dans des situations difficiles où nous avons dû, plutôt que de nous asseoir tous ensemble, avoir des relations ou des parties de mémoire de nos membres, etc. Ils se situent partout dans la province. L'effort que nous avons fait, par ce mémoire, par celui que nous avons déjà fait parvenir, témoigne, en tout cas, d'un intérêt certain. Je pense que la conclusion de notre mémoire n'est pas en sorte que nous fassions machine arrière, mais plutôt de nous poser, au meilleur de notre connaissance, des points d'interrogation de façon à améliorer le projet de loi avec les législateurs et à apporter une contribution. Nous voudrions vous assurer de cet esprit.

Pour ce qui concerne la pratique ou l'éducation, une de nos craintes, c'est que nous ne voyons pas que l'éducation, qui est pour nous une chose importante — et peut-être qu'un de nos membres voudrait commenter plus longuement — soit pour autant acquise.

Pour nous, ce travail d'éducation qu'on apporte est fondamental. Ce n'est pas nécessairement en changeant les lois qu'on va changer les hommes. Ce sont les hommes aussi qu'on a besoin de changer. C'était peut-être pour marquer notre appui davantage à l'éducation, en faisant des recommandations d'acceptation de la loi, d'une façon ou d'une autre, que l'éducation de notre milieu se continue. Je ne sais pas si sur ce point, M. Morin, vous vouliez...

Mme Bacon: Cela a été ma perception de votre mémoire, vous semblez opter pour l'éducation comme prérequis à toute action législative. Je n'ai rien contre l'éducation, mais je pense que cela ne remplace pas l'action législative.

M. Poitras: Idéalement, il faudrait peut-être opter pour l'éducation, quoique l'expérience nous prouve qu'à un moment donné il faut faire marcher les deux de front.

Mme Bacon: On ne corrige pas souvent les abus par l'éducation.

M. Poitras: Oui, aussi, mais il y a certains moments où les lois sont difficilement applicables si les gens n'ont pas cette volonté interne. En tout cas, je voudrais mettre l'accent sur cette nécessité, quelles que soient les lois, si bonnes soient-elles, de continuer et même de faire davantage en matière d'éducation.

M. Morin (Pierre): En fait, M. le Président, il faudrait considérer que le mémoire soumis aujourd'hui est complété par un mémoire soumis en février dernier à l'office, à la demande de l'office. Notre recommandation concernant l'éducation rejoint, en fait dans les mêmes mots, même pas dans une paraphrase, mais en les citant, la grande préoccupation du Conseil de la protection du consommateur qui en fait, lui aussi, sa première recommandation. Il faut, malheureusement, commencer quelque part. Il y a déjà, depuis 1971, une loi, la loi 45, sur la protection du consommateur.

Nous avons encore des jeunes qui peuvent terminer leur cours secondaire et même leur cours collégial sans avoir aucune notion de ce qu'est ou ce que devrait être son comportement comme consommateur. Alors, c'est une lacune réelle. Une loi pour protéger ceux qui sont sortis de notre système d'éducation? Oui mais, à un moment donné, il faut poser aussi le problème de fond. Le problème de fond, il est là. Depuis 1971, il y a une Loi de la protection du consommateur. Pourtant, on peut encore se rendre jusqu'à la fin d'un cours universitaire sans avoir aucune notion de ce que

doit être notre comportement comme consommateur. On fait des lois pour nous protéger. Il y en a eu 600 depuis 1970 qui touchent tous les individus, qui touchent toutes les entreprises. On sait, nous, parce qu'on est dedans quotidiennement, qu'il est très difficile de prendre connaissance de toutes ces lois. En voilà une autre avec 273 articles qui vient s'ajouter aux 599 autres.

Mme Bacon: Est-ce que cela veut dire que vous êtes contre le principe de la Loi sur la protection du consommateur?

M. Morin (Pierre): Non, M. le Président, nous l'avons réaffirmé et nous l'avions d'abord déclaré; même nous nous disions d'accord avec la refonte de la Loi de la protection du consommateur dans notre mémoire du mois de février. Nous avons repris dans ce texte-ci des recommandations du mois de février.

Mme Bacon: Ce qui n'est pas clair, c'est qu'il me semble que vous semblez favoriser une éducation — on n'a rien contre cela — pour remplacer toute mesure législative. C'est'un peu ce qui ressort.

M. Létourneau: Très honnêtement, nous croyons que la refonte que nous proposons à la page 16 de notre document est aussi efficace, même plus efficace. Elle n'enlève aucunement d'efficacité à la loi, sauf qu'on élimine des situations particulières que nous croyons, la plupart du temps, redondantes et coûteuses pour le consommateur. A notre avis, à moins que nous n'errions considérablement, nous croyons que ce qui reste dans la loi va avoir l'effet désiré par le législateur, en étant peut-être moins spécifique, mais en ayant tout autant de pouvoirs.

J'ai retenu, des observations de Mme le ministre, que nous avions fait preuve de légèreté et de faiblesse dans notre analyse. Il est possible que nous nous soyons trompés. Nous serions les premiers à l'accepter, si on voulait bien nous signaler où nous avons à ce point erré ou eu des faiblesses. Nous aimerions bien le savoir, pour ne pas continuer à propager ces idées, si nous nous trompons dans l'interprétation que nous avons faite des articles de la loi où nous leur avons donné une portée qu'ils n'avaient pas, où nous leur avons donné une interprétation qu'ils n'avaient pas. Si c'est le cas, nous apprécierions grandement qu'on nous le signale, de telle sorte que nous nous corrigions à la première occasion. Nous sommes bien prêts à le reconnaître si nous nous sommes trompés.

Mme Bacon: A l'article 11 de la page 4 de votre mémoire à couvert vert, vous indiquez en toutes lettres que "la chambre ne peut appuyer ni le principe ni les modalités du projet de loi 7 sur la protection du consommateur."

M. Létourneau: Encore une fois, c'est dans son entité. Nous nous reprenons tout de suite en disant: Voici comment nous le voyons. Et nous en reprenons la majorité des articles. C'est tels que conçus. Vous avez vu ce matin des gens qui se sont présentés devant vous, qui sont frappés par les articles qui les touchent particulièrement, cette section qui va dans tous les détails et qui cause des tracasseries considérables. C'est justement ce genre de choses que nous voulons éliminer. Nous croyons qu'en les éliminant nous n'enlevons pas de force à la loi. Nous lui enlevons des tracasseries administratives coûteuses pour le consommateur, mais nous maintenons les principes fondamentaux, surtout en ce qui a trait aux pratiques interdites qui sont, elles, assez spécifiques pour tenir compte de la majorité des cas qu'on veut couvrir, sans aller dans des détails d'application qui, à ce moment, rendent la loi lourde et coûteuse pour le consommateur. Nous disons qu'elle ne le protège pas bien, à cause des coûts additionnels. Si on élimine ces articles trop précis qui amènent ces coûts additionnels, nous croyons qu'on peut réussir à protéger adéquatement le consommateur.

Vous remarquerez que la refonte que nous proposons conserve la majorité de toutes les dispositions de la loi et principalement les dispositions de fond.

Mme Bacon: Pourtant, vous éliminez complètement la vente des voitures usagées ou la réparation d'automobiles, les garanties que nous inscrivons dans la loi ou même le crédit, par exemple. Vous éliminez complètement ces sections de la loi quand vous faites vos suggestions.

M. Morin (Pierre): M. le Président, nous éliminons la section qui apporte des détails. En fait, la reprise du projet s'axe dans ce que nous soumettons sur les grands principes. D'abord la notion de contrat. Nous retenons celle qui est inscrite aux articles 4 à 12 dans nos recommandations ainsi que la question de garantie.

Maintenant, c'est toujours articulé en fonction de l'article 146 ou du livre II vraiment qui, en somme, reprend, mais là, dans un sens générique, l'ensemble des détails qu'on a voulu donner, que ce soit la section des automobiles, des vendeurs itinérants ou du crédit. Les pratiques prohibées, interdites, ont une portée vraiment universelle. Alors, pourquoi — ce que nous voyons comme étant peut-être une redondance — spécifier qu'il y a une protection particulière, non pas additionnelle mais particulière, qui comporte des modalités d'exécution bien particulières par opposition à ce que la règle générale qui est fixée dans les pratiques interdites déclare elle-même?

En fait, tout est là. Si on prend simplement l'article 146 et les suivants, tout y est. Vous avez là l'essentiel du projet de loi. Et dans nos recommandations, nous retenons l'essentiel du projet de loi. C'est beaucoup plus facile pour le consommateur et le commerçant de saisir la portée de la loi. Cela leur est beaucoup plus facile. Il n'y a pas de formulaire particulier. La loi est là.

Mme Bacon: A certains moments, vous nous dites que nous surprotégeons le consommateur,

et à d'autres moments, que nous ne le protégeons pas du tout. C'est un peu cela qui ressort de votre mémoire.

M. Morin (Pierre): Que vous surprotégiez le consommateur... Par exemple, dans le cas du crédit, la plupart des institutions de crédit — les grandes institutions de crédit — font affaires dans tout le Canada, ont des formulaires qui ont été convenus, mais qui sont maintenant uniformisés à peu près dans tout le Canada, qui répondent déjà, en fait, aux pratiques ou à la question des pratiques interdites que vous avez là.

Et voilà qu'on arrive avec des annexes impliquant un nouveau formulaire. Mais qui paiera le coût de ce formulaire ou de ces formulaires? Qui paiera le coût de ce que, effectivement, vous imposez, spécifiquement dans le cas des automobiles usagées ou des commerçants itinérants? Qui paiera? En définitive, c'est le consommateur. Mais ce qu'on veut simplement vous souligner c'est qu'il n'a pas plus de protection, dans le fond, que ce que les pratiques interdites interdisent déjà. Qu'il y ait un contrat constaté par écrit, qu'il n'y en ait pas, il n'a pas plus de protection, mais il doit remplir des formules. Il doit signer, il doit faire toutes sortes de choses, mais il n'a pas plus de protection réelle.

M. Létourneau: M. le Président, je me permets de revenir sur ce point. Les remarques que nous a adressées le ministre nous touchent profondément et, évidemment, encore une fois, il se peut que nous ayons erré dans notre interprétation, que nous ayons fait preuve de légèreté ou de faiblesse, mais nous ne voudrions pas continuer de le faire.

Mme Bacon: Par opposition...

M. Létourneau: Nous aimerions qu'on nous signale si nous avons fait des interprétations fautives sur le plan juridique du projet de loi. Je pense que vous accompagnent des gens fort compétents pour pouvoir nous le dire, qui les ont déjà probablement décelées, si c'est le cas. Nous aimerions qu'on nous le dise parce que nous ne voudrions pas continuer de penser ainsi si c'est une erreur. Nous ne voulons pas le faire. Et j'aimerais bien qu'on puisse nous préciser sur quel point nous avons mal interprété soit la loi elle-même ou l'intention du législateur.

Mme Bacon: Je pense qu'il faudrait reprendre article par article, M. Létourneau, si on veut vraiment donner... A la première lecture...

M. Létourneau: Nous ne croyons pas avoir été abusifs en demandant des définitions qui nous apparaissent essentielles, par exemple, pour ce qui est du commerçant et des services. Nous croyons que d'autres vous ont dit comment la définition de l'automobile était trop large, peut-être, actuellement; comment il y avait une contradiction sur le plan de la définition du bien; comment la définition du contrat changeait des normes connues et déjà adoptées par le Code civil. Peut- être, encore une fois, que nous n'avons pas raison dans notre affaire, mais on voudrait bien qu'on nous le signale avant qu'on continue plus loin avec cela.

M. Poitras: Je pourrais peut-être ajouter un commentaire. Lors des différentes rencontres que nous avons eues à propos de ce mémoire, il y a des points, quand même, qui étaient pour nous fondamentaux. Je me souviens de cinq ici, qui seraient, d'une part, que nous voulons garder l'accent sur l'éducation. Je pense que vous partagez et que l'office partage ce point de vue. Nous sommes d'accord pour une loi efficace. Je pense que nous le disons textuellement. Lorsque, en dernière page, nous recommandons de garder la majorité des articles du projet, je pense que nous nous disons effectivement d'accord pour une loi efficace.

Nous posons un certain nombre de questions. Je pense que nous sommes d'accord également sur les pratiques interdites et nous vous disons: On pourrait être contre ces pratiques interdites et nous vous disons que dans votre projet il y a de fortes améliorations. Textuellement, à la page quinze. Enfin, vous avez parlé, le comité et M. le président différemment, d'un déséquilibre qui existait entre le commerçant et le consommateur. Peut-être que nous sommes allés trop loin en ne voulant pas, en le corrigeant, que se produise un autre déséquilibre. C'est peut-être ce qui a frappé et peut-être ce qui ressort du mémoire. Enfin, nous nous questionnons avec la commission sur les coûts, sur la surveillance qu'exige un tel type de loi et sur les équipements nécessaires pour qu'elle soit vraiment observée et efficace. Je pense que c'étaient les principaux points qui nous tenaient à coeur.

Mme Bacon: Peut-être y a-t-il certains points bien spécifiques dans la loi, mais il y a quelques fonctionnaires qui sont ici et soyez assuré que ce ne sont pas des tracasseries que je vous propose. Peut-être qu'un de mes fonctionnaires pourrait donner certains articles bien spécifiques — puisque ce sont eux qui ont participé à la rédaction de la loi — qui ne me reviennent pas à l'esprit. Si la commission est d'accord.

Parmi les nombreux points qui ont été soulevés par votre organisme, il y a des points qui, sur le plan juridique, sont absolument acceptables, à mon sens, et qui s'avèrent des points qui, normalement, devraient nous porter à une réflexion ultérieure dans le but de voir s'il n'y aurait pas possibilité de les assimiler et, éventuellement, d'en arriver à des modifications.

Par contre, sur certaines affirmations à caractère juridique, il m'a semblé qu'on avait traité avec une certaine désinvolture, l'interprétation qu'on doit trouver de ces termes soit dans le Code civil ou dans la loi. Par exemple, je vais en signaler simplement quelques-uns, car je n'ai pas l'intention non plus que cela dégénère en débat juridique. On pourrait commencer à sortir les règles d'interprétation, les statuts du Québec, du fédéral, etc., et se dire: II y a une virgule quelque part qui a

été soulevée dans une jurisprudence, etc. Dans votre recommandation no 18, par exemple, il y a des références à l'emploi des mots "bien immobilier". Là, évidemment, il m'a semblé que vous trouviez qu'en employant un tel terme notre loi était drôlement handicapée.

C'est évident que si, pour vous, l'expression qu'on emploie équivaut à dire qu'on exclut tous les biens qui font l'objet d'un commerce, vous auriez raison. Par contre, si on regarde le Code civil, on s'aperçoit que la critique que vous destinez au mot "bien" ou "bien immobilier" s'adresse strictement au mot "meuble". L'article qui suit parle de l'interprétation de "meubles meublant".

Mais l'article 397 dit que le bien mobilier, tout en ayant son sens général, va même inclure ces réalités qu'on désigne sous le terme de "meubles" ou encore de "meubles meublants". Alors, je trouve que c'était là une affirmation tout de même assez facile, peut-être à tort, mais je serais enclin à croire que cette interprétation serait peut-être meilleure. De toute façon, à votre article 21 de votre mémoire, vous référez à l'article 4. Vous dites: En retenant les définitions ci-haut mentionnées, il s'agirait là de contrats portant exclusivement sur les services. Cela nous semble une conclusion bizarre. Cela semble à l'effet que seuls les services seraient des actes. Or, la loi porte bien sur la vente de biens. Je conçois que le bien n'est pas un acte mais, lorsque la loi traite de biens et de services, on ne peut tout de même pas prétendre que les actes dont il s'agit ne pourraient traiter que de services. Il parle de l'acte de vente. J'ai trouvé là une simplification un peu dangereuse de ce que la loi voulait véhiculer.

A l'article 28 de votre projet, vous référez à l'article 56 d). A l'article 28, vous dites: Compte tenu du paragraphe précédent, le commerçant porte la responsabilité de la véracité du totalisateur. L'article n'est pas du tout à cet effet. L'article dit simplement que le commerçant se porte garant de ce que le totalisateur indique, mais ne se porte pas garant de la véracité de ce qu'indique le totalisateur. Je trouve que c'est une affirmation qui, à mon sens, dépasse nettement ce que la loi voulait dire.

A votre article 42, qui réfère à l'article 158, vous dites que le permis d'un commerçant itinérant est assorti d'un cautionnement. Or, le cautionnement est précisément une preuve de solvabilité. Je regrette, ce n'est pas une preuve de solvabilité. Le cautionnement n'est pas une preuve de solvabilité. C'est simplement l'assurance, tout au plus, qu'un tiers satisfera aux obligations financières si le détenteur de permis est en défaut.

M. Poitras: On sait bien quand même que c'est en même temps une preuve de solvabilité. Cela ne s'émet pas quand...

Mme Bacon: Non, mais vous dites: II n'aura plus le droit maintenant de dire qu'il est solvable, parce qu'il n'a pas le droit de faire état de sa solvabilité; or, il a un cautionnement. Je dis: Le cautionnement n'est pas une preuve de solvabilité. Je prends les termes de votre rapport. Et, lorsqu'on critique la portée d'un terme précis, je crois que la critique qu'on lui adresse doit être elle-même rigoureuse, de façon à bien nous démontrer que le terme qu'on a pris la peine d'employer et d'étudier pour l'employer dans notre projet de loi est un terme qui est utilisé de façon erronée. Or je crois que ce n'est pas le cas.

Dans votre article 48 du projet, vous référez à l'article 202. Depuis quand le code pénal prévoit-il des dommages punitifs? C'est évident que le code pénal ne prévoit pas des dommages punitifs. C'est une notion qui est avant tout de droit civil. Il ne s'agit pas de dommages punitifs. Toute pénalité imposée par une loi est à caractère punitif. C'est simplement un barème qu'on donne au juge pour lui permettre de déterminer quelle est l'amende juste entre un maximum et un minimum, en tenant compte des dommages qui peuvent être encourus par des consommateurs ou un groupe de consommateurs.

A l'article 49, peut-être que je pourrais terminer avec cela parce que j'en aurais de nombreux autres, de toute façon, je vais terminer par ceci. Vous dites, dans votre article 49: Un simple déménagement exonère de la récidive. Ceci est dit très rapidement. Tout de même, il faut dire une chose. Lorsqu'une infraction a été commise et lorsqu'on démontre que la personne qui récidive a dans un acte d'accusation la même adresse et le même nom, à ce moment-là c'est une présomption qu'il s'agit de la même personne. Mais, s'il a changé d'adresse, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas récidive. On va démontrer qu'il a changé d'adresse et on va prouver, à ce moment-là, qu'il y a eu récidive. Là, j'ai pensé que c'était peut-être une manière de considérer l'interprétation de l'article d'une façon qui n'était pas tout à fait adéquate. En tout cas, je termine là étant donné que l'intention n'est pas nécessairement de prétendre que tous les points qui ont été soulevés ne sont pas bons. Au contraire, il y a d'excellents points que d'ailleurs nous avions notés. Nous avons conservé, vis-à-vis des autres interprétations juridiques, un grand sérieux, parce que c'était tout de même des points très sérieux. Mais c'est dommage qu'à travers cela nous ayons trouvé des interprétations qui démontraient peut-être que l'interprétation qu'on y donnait n'avait peut-être pas été fouillée. C'est un peu dans ce sens.

M. Poitras: M. le Président, je pense que nous l'avons dit tout à l'heure et nous recevons ces commentaires dans un très bon esprit. Nous serions prêts à admettre d'avance que peut-être tout n'a pas été fouillé ou tout n'a peut-être pas été examiné à fond. Il y a peut-être des réactions quand même à ces propos, si vous le permettez. Je ne sais pas si mes collègues... Je pense que c'est dans un esprit très constructif que nous voudrions les recevoir. Est-ce que Me Gourdeau, vous voudriez ajouter quelque chose?

M. Morin (Pierre): J'aurais peut-être simplement fait, M. le Président, un seul commentaire sur les deux premières remarques. L'article 4 est lié précisément à la définition de "bien". A l'article

21 de notre texte, on lit: "En retenant la définition ci-haut mentionnée." Il s'agissait de la définition de bien, et c'est sur la définition de bien que se posait la question, à savoir comment le définir. Nous suggérons d'ailleurs une définition à "bien" qui nous apparaît peut-être un peu plus pertinente.

Mme Bacon: Est-ce que vous faites référence au paragraphe b) de l'article 1?

M. Morin (Pierre): Paragraphe b) de l'article 1, oui.

Mme Bacon: Le bien est défini comme étant un bien mobilier?

M. Morin (Pierre): Bien mobilier. Nous vous recommandons de dire là, à "bien", qu'il s'agit de choses qui font l'objet d'un commerce. Pour être bien certain que la portée, la limpidité de la loi soit bien saisie.

Mme Bacon: Nous prenons note de votre suggestion.

M. Létourneau: M. le Président, comme l'a signalé Me Rioux, on pourrait argumenter longuement sur le bien-fondé d'une interprétation ou d'une autre, et il serait peut-être difficile, devant cette commission, d'entreprendre ce débat. Nous aimerions cependant pouvoir, comme l'a signalé notre président de la délégation, échanger avec ceux qui ont préparé la loi les interprétations que nous avons faites, et essayer de déterminer entre nous si nous avons bien vu les mêmes choses et de la même façon, et où il peut y avoir divergence d'opinions, et ensuite nous faire un jugement peut-être plus éclairé ou maintenir ce que nous avons dit, selon la façon dont nous serons éclairés par cet échange entre ceux qui ont préparé la loi et notre interprétation juridique que nous avons vu des termes qui ont été employés.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je voudrais poser une question à M. Létourneau ou à d'autres, peut-être. A la page 2, (6), vous traitez de l'éducation à la consommation. Je trouve que c'est très intéressant. Vous soulignez cependant que cette éducation devrait être obligatoire dans les écoles. L'éducation à la consommation, vous suggérez de la voir se faire de façon obligatoire dans nos écoles, alors que l'incitation à la consommation se fait hors des murs des écoles, c'est-à-dire par les moyens de publicité, radio, télévision, journaux, etc.

Est-ce que vous voulez dire par là que, selon vous, le meilleur moyen d'arriver à cette éducation à la consommation doit commencer par l'école en laissant de côté les autres secteurs pour le moment, ou si, dans votre esprit, ça doit se faire en même temps que des campagnes d'information par les mêmes moyens que les campagnes de pu- blicité se font? Est-ce que c'est ça que je dois conclure?

M. Létourneau: L'éducation à laquelle nous pensons dans les écoles n'exclut aucune autre action qui pourrait améliorer la protection du consommateur. Nous croyons cependant qu'elle est prioritaire, comme le disent le Conseil de la protection du consommateur et l'office, dans leur rapport respectif.

Nous croyons que, dans l'école, on devrait utiliser toutes les techniques les plus avancées, les plus efficaces pour informer, éduquer l'enfant sur la manière de devenir un consommateur avisé. Cela implique comment percevoir les messages qui sollicitent son désir de communication. Cela implique la manière de se protéger comme consommateur devant les sollicitations qui pourraient être abusives. Cela implique aussi la préparation d'un budget familial, des choses de ce genre qui sont des notions tout à fait élémentaires. Cela implique la connaissance de ce que sont les actes économiques que pose tout citoyen dans sa vie, de ce que c'est qu'un contrat, de ce que sont les institutions de crédit, les institutions auxquelles il aura à faire face, qu'est-ce que c'est qu'un bail, comment les lois protègent les gens quand ils ont à signer des contrats, etc. Evidemment, cela serait adapté au niveau de l'enseignement, au niveau scolaire où se trouve l'étudiant.

Mais ce qui arrive, c'est que cela n'existe pas, ces choses-là et, lorsque cela existe, c'est tellement optionnel que cela ne semble toucher qu'une partie infime des étudiants. Si la définition de l'éducation est la préparation à la vie, quelle sorte de préparation à la vie fait-on dans les écoles? Elle est extrêmement partielle si elle n'inclut pas l'enseignement de la façon pour l'individu de se comporter dans la vie, plus tard, pour être un consommateur avisé, ce qui est une des choses les plus fondamentales de son existence.

M. Samson: Vous dites que l'éducation à l'école, sous la forme que vous avez mentionnée, n'exclut pas, selon vous, les autres formes d'éducation populaire. Est-ce qu'il y a une raison spéciale pour laquelle vous n'avez pas insisté également sur les autres formes d'éducation populaire, en même temps?

M. Létourneau: M. le Président, c'est parce que l'éducation à l'école, c'est la façon la plus efficace de toucher tout le monde et d'enseigner, à un âge où l'esprit est plus réceptif, la rétention est plus grande. On inculque alors des principes de base de comportement qui, par la suite, vont se répercuter dans toute l'existence de l'individu. Surtout, c'est le moyen de rejoindre la totalité des personnes, la totalité de la population. Tout le monde passe par l'école; tous les autres moyens auxquels on a pensé ne réussiront jamais qu'à atteindre une fraction de la population.

M. Samson: Vous ne considérez tout de même pas, malgré la bonne volonté que je vois dans ce

paragraphe d'en arriver à une éducation à la consommation à l'école, que, si cela commençait le plus rapidement possible, cela veut dire en dedans de quelques mois, cela prendrait quand même un certain temps avant que cette éducation, donnée à des étudiants ne devienne, en fait, pratique, dans le sens que l'étudiant d'aujourd'hui est un consommateur de demain, mais il n'est pas un consommateur d'aujourd'hui. Nous discutons aujourd'hui d'une loi sur la protection du consommateur, justement parce que la nécessité, de plus en plus, depuis quelques années, s'est fait sentir d'en arriver à légiférer pour protéger le consommateur, parce qu'il y a eu des abus dans le passé. Je ne suis pas prêt à dire que ces abus ont été la majorité, au contraire. Mais quelques abus seulement justifiaient l'intervention législative.

Que suggérez-vous pour qu'on puisse atteindre la population qui est composée de consommateurs, les actuels consommateurs, et les protéger par l'éducation, sans que la loi prévoie pour eux une protection qu'ils ne peuvent pas se donner, faute d'éducation?

M. Létourneau: II y aurait certainement lieu, M. le Président, de développer des outils qu'a commencé à développer l'office de protection par un bulletin qui se veut un instrument d'information sur la protection du consommateur, par une diffusion plus large de l'information émise de cette source et par la diffusion, par d'autres moyens de communication que ce bulletin, de l'information en provenance de l'Office de la protection du consommateur.

Par ailleurs, il y a aussi des media d'information qui se font fort d'apporter leur contribution, de la façon qu'ils estiment la plus efficace, à l'éducation du consommateur, en dénonçant régulièrement les produits, sur le marché, qui ne rencontrent pas les expectatives du consommateur ou les expectatives qui ont été créées par la publicité.

C'est une forme très efficace d'éducation du consommateur parce que cela a fait disparaître du marché un certain nombre de produits ou de services qui, justement, étaient présentés d'une manière qui semblait abuser le consommateur.

Ce sont des formes efficaces qui, encore une fois, ne couvrent malheureusement qu'une très faible partie de la population.

M. Samson: Justement, sur ce sujet, à savoir la dénonciation d'un produit quelconque ou une forme quelconque de vente, vous avez semblé tantôt, dans votre mémoire, en tout cas, être préoccupé par le fait que les personnes qui auront à l'avenir, à prendre des décisions et dénoncer tel ou tel autre produit seront par le fait même couvertes par une certaine immunité. Vous semblez être inquiets de cette forme d'immunité. Alors, comment pouvons-nous concevoir votre inquiétude sur l'immunité qui peut être fournie aux responsables, d'une part, et, d'autre part, votre désir de voir les produits x dénoncés s'ils ne répondent pas aux exigences normales ou encore s'ils constituent un préjudice aux consommateurs?

M. Létourneau: Je ne suis pas légiste, mais je pense qu'il y a un vieux principe de loi qui dit: Vous êtes mieux de libérer dix coupables que de condamner un innocent. C'est peut-être un principe grossier au départ, mais enfin, je pense que c'est un principe assez bien reconnu en loi, qu'il faut donner le bénéfice du doute. La manière dont les dénonciations peuvent être faites sont préalables à tout examen de la cause en justice, d'après nous, ou devant un tribunal, quel qu'il soit. C'est simplement un pouvoir administratif très considérable qui est donné à des administrateurs publics et qui nous semble pouvoir donner lieu à des abus. S'il y avait, par malheur, des erreurs de commises, il ne peut pas y avoir de réclamations de faites pour les dommages causés qui pourraient être, dans certains cas, très considérables et même signifier la disparition de la carte de certaines entreprises. C'est ce que nous craignons, c'est ce genre d'erreurs que nous craignons et que nous voudrions éviter.

M. Samson: Je pense qu'on pourrait peut-être, à titre d'exemple, se référer aux dénonciations que nous avons connues dans le passé, par exemple pour une certaine forme de vente sans pression, dite pyramidale. Je me demande si, dans un cas comme cela, selon l'explication que vous venez de me donner, les responsables, les autorités auraient pu mettre un terme à ce genre d'activité s'il avait fallu attendre des jugements avant certaines dénonciations. Evidemment, vous comprendrez que les dénonciations peuvent être faites avec des nuances pour que le consommateur soit averti. A mon sens, le but d'une dénonciation, c'est mon interprétation personnelle, n'est pas d'empêcher le développement de l'industrie, du commerce ou du monde des affaires sous quelque forme que ce soit, mais d'empêcher les abus et d'empêcher que le consommateur subisse ces abus sous une forme presque légale mais illégitime, quand même. C'est pourquoi je trouve un peu délicat de vouloir en arriver à supprimer toute forme d'immunité pour les personnes qui seraient responsables de ces dossiers.

M. Poitras: Nous ne suggérons pas du tout... Lorsque nous recommandons et que nous sommes d'accord de laisser tous les articles sur les pratiques interdites, il y a déjà un pas considérable. Mais, comme vous, nous nous posons des questions, et je pense que c'est le moment de se les poser pour éviter qu'il y ait des erreurs que tous déploreraient et qui seraient faites sous le coup d'une loi. Je pense que ce sont ces questions que nous nous posons. Nous ne recommandons pas de revenir à hier ou de revenir à zéro lorsque nous recommandons un nombre considérable, enfin que nous considérons comme très important.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Mme Bacon: J'aurais peut-être seulement une dernière question très rapide. Est-ce que la Chambre de commerce, dans ses travaux, fait une cer-

taine éducation des commerçants, par exemple, une sensibilisation des commerçants qui sont membres de la Chambre de commerce? Autant on parle de l'éducation des consommateurs, autant il faut faire l'éducation de l'autre côté; des commerçants. Est-ce qu'il y a une partie de vos travaux qui est consacrée à cette éducation?

M. Létourneau: Oui, effectivement, madame. Seulement, il semblerait que ceux qu'il faut atteindre et qui sont les principaux contrevenants et les plus fréquents contrevenants aux lois concernant la protection du consommateur, ils ne sont pas nos membres; on ne les atteint pas, ceux-là. On avertit, on informe nos membres, on leur parle de ce qui pend au bout du nez de ceux qui se comportent de manière déraisonnable dans le marché et des lois qui viennent inexorablement les condamner. On parle de l'importance de l'autodiscipline et du code d'éthique, du code de déontologie, dans chaque secteur d'activité, et de son application. Il arrive que très peu de groupes de commerçants, il y a peut-être des exceptions, mais très peu ont des pouvoirs pour faire l'autodiscipline dans leur milieu. Ils seraient sujets, s'ils tentaient de le faire, à des poursuites très sévères. Alors, il faut, comme les professions, avoir des pouvoirs spéciaux donnés par le législateur pour exercer une autodiscipline à l'intérieur d'un groupe de commerçants pour, autrement dit, éliminer les moutons noirs. Le législateur n'a pas cru opportun jusqu'ici de donner le pouvoir, à des organismes représentant les milieux d'affaires, d'exercer dans leur propre milieu l'autodiscipline. A ce moment, cela prend des pouvoirs juridiques spéciaux. C'est pour cela que nous ne réussissons pas, dans la majorité des cas, à atteindre ceux qu'il faudrait atteindre.

M. Poitras: Je dois vous rappeler quand même que nous donnons depuis quelques années quelque 400 sessions d'étude à nos membres sur la formation dans les affaires, sur tous les genres, en collaboration avec le ministère de l'Education, effectivement. Alors, on fait une partie, vous ne pouvez pas prétendre à plus. M. Tremblay?

M. Tremblay (Pierre): II y a une chose que je voudrais souligner concernant l'ensemble du projet de loi. Dans notre mouvement, nous regroupons à la fois un nombre important de grandes entreprises et, par le biais des chambres locales, un nombre considérable de petites et moyennes entreprises. D'une part, la grande entreprise, une fois la loi adoptée, trouvera assez facilement les moyens de s'y conformer. Au niveau de la petite et de la moyenne entreprise, plusieurs articles de la loi créent pour ces gens des difficultés de fonctionnement qui nécessiteraient au niveau du ministère responsable, fort probablement, de l'éducation. Nous, de la chambre, aurions à faire de l'information et de l'éducation auprès des membres des chambres de commerce, petites et moyennes entreprises principalement. Encore là, il y en a beaucoup plus que les milliers de membres que nous représentons. Ces commerçants, ces petits et moyens entrepreneurs ne peuvent pas être considérés a priori comme des gens de mauvaise foi ou qui veulent frauder. Ils sont désireux de respecter la loi, mais ils auront sûrement besoin, si la loi était acceptée dans cette forme, d'une préparation pour pouvoir s'y conformer pleinement.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: Seulement un commentaire, M. le Président, sur cette très vieille cause de discussion dans le domaine de la consommation entre l'éducation et la protection. Je pense bien que, si on parle de consommation, c'est parce qu'on est dans une société d'abondance qui a amené une société de consommation intense.

A partir de ce moment, un certain nombre de personnes ont pris conscience que cela pouvait amener certains désordres de comportement, et c'est exact qu'il faut parler d'éducation à la consommation ou à la société de consommation, ce que M. Galbraith appelait "The Affluent Society". Mais c'est également vrai que, par ailleurs, malgré l'éducation qui existe, un certain nombre de pratiques sont difficilement contrôlables par le consommateur, et à ce moment, je pense que c'est le rôle de l'Etat d'agir, à quelque niveau que ce soit, dans ce sens.

Je pense bien qu'ici les remarques de la Chambre de commerce par rapport à l'éducation ne s'opposent pas. Je ne les prends pas comme étant opposées à la nécessité de lois de protection du consommateur, mais comme étant essentielles, quoi qu'il en soit, si l'on veut qu'une loi soit efficace. Tout de même, la Loi sur la protection du consommateur reste également essentielle pour aider le consommateur qui ne peut pas déceler certaines failles de pratique courante.

Je pense bien que l'objet véritable de cette loi, je ne l'ai pas perçu comme étant une espèce de bataille idéologique entre le consommateur et le commerçant. Je l'ai beaucoup plus vu comme étant un certain nombre de pratiques courantes dont il faudrait prendre garde d'informer, d'une part, le consommateur et, d'autre part, de prévenir l'utilisation ou l'usage — et vous êtes d'accord, la Chambre de commerce, sur les pratiques interdites — d'un certain nombre de pratiques qui vont contre l'intérêt du consommateur.

Vous avez raison, comme le groupe de ce matin, de vous demander, de nous demander combien cela peut coûter, quel est en fait l'intérêt économique, là-dedans, et je pense bien que ce sont des questions que le ministère aussi se pose. Mais je pense que le ministère est très préoccupé de l'éducation. Il s'agit de regarder les crédits de ce ministère pour voir qu'il y a un certain nombre de milliers de dollars — je ne sais pas combien, Madame le ministre — qui sont affectés spécifiquement à l'éducation, soit directement, soit indirectement, par des subventions à certains organismes dont c'est la fonction de faire cette éducation. Ce n'est pas nécessairement la fonction de l'Etat, c'est la fonction d'un certain nombre d'organismes. Je pense aussi, quand on se réfère au

ministère de l'Education, qu'il y a aussi des budgets dans ce sens. Je suis d'accord avec vous qu'il y a des programmes qui ne sont pas tout à fait définitifs, qui ne sont pas suffisamment rodés. Je me souviens très bien, lorsque j'étais dans un autre secteur, qu'on avait élaboré, avec la Chambre de commerce de Montréal, un programme à cet effet, mais c'est difficile de le mettre sur pied, parce que c'est dispendieux.

Je pense que ce que vous dites dans votre mémoire sur l'importance de l'éducation ne contredit pas du tout l'importance également d'une loi très serrée au niveau de la protection du consommateur.

M. Létourneau: M. le Président, si nous avons tellement insisté sur l'éducation, c'est que dès 1971, lorsque la loi 45 a été déposée, nous avons insisté devant le législateur, dans une commission parlementaire semblable, pour que des dispositions soient prises afin que l'expérience vécue par l'Office de protection du consommateur donne lieu à des échanges entre l'office et le ministère de l'Education pour développer, au ministère de l'Education, des cours concrets et pratiques pour enseigner ou éduquer adéquatement les jeunes à se préparer à être des consommateurs avisés. Nous avons dit cela dès 1971 et à notre connaissance il n'y a pas eu d'action significative qui indique que l'expérience qu'on a acquise de ce qui se passe dans les faits, à l'Office de protection du consommateur, ait fait l'objet de travaux ou d'ententes entre l'office ou le ministère concerné et le ministère de l'Education, aux fins de développer ces programmes de formation. Qu'ils soient diffusés par le ministère de l'Education, cela va de soi quand on parle de l'éducation dans les écoles. Il pourrait peut-être y avoir des ententes avec d'autres ministères, ou le ministère des Institutions financières lui-même pourrait s'en charger ou l'Editeur officiel de la province de Québec. Mais il nous semble qu'il n'y a pas eu d'effort significatif dans ce sens, c'est-à-dire de profiter de l'expérience acquise et des connaissances qu'on a accumulées au niveau de l'office pour développer un programme de formation.

C'est pourquoi nous revenons et nous insistons là-dessus; il s'est fait des efforts considérables dans la protection du consommateur sur le plan législatif. On est en train de refondre la loi, c'est une excellente chose. Nous en supportons la majorité des dispositions, mais qu'est-ce qu'on fait, qu'est-ce qui se passe dans le domaine de l'éducation?

Le Président (M. Lafrance): Merci. Oui?

M. Morin (Pierre): J'aurais un dernier petit commentaire, du moins de ma part, concernant ce que Mme le ministre a mentionné tantôt. Mme le ministre a souligné le fait que nous avions dit que ce projet de loi érigeait le consommateur et le commerçant en adversaires. L'économie de la loi dégage, à toutes fins pratiques, le consommateur de presque toute responsabilité dans plusieurs secteurs. Il peut même invoquer la preuve testimoniale pour répudier un écrit. Cela va assez loin. Il y a peut-être un article qui n'apparaît pas dans le projet de loi, qui lui, par contre, apparaissait et apparaît encore dans la loi 45. Il s'agit de l'article 113 qui dit: "Une erreur ou une ommission faite de bonne foi ne constitue pas une infraction au sens de la loi." Ce n'est pas grand-chose. Cet article n'apparaît pas, alors qu'il y en a 273 qui imposent aux commerçants des responsabilités, partout, de nouveaux formulaires, de nouvelles façons de faire affaires et, un jour, cela sera la loi pour tout le monde, la même journée.

Souvent, peut-être qu'on oublie cela, que cela va avec la loi pour les gros, pour les petits, pour tout le monde, la même journée. C'est un peu dans ce sens qu'il faut comprendre nos propos disant que la loi érige le commerçant et le consommateur en adversaires. Il les maintient dans une situation d'équilibre, comme le disait tantôt M. Poitras, qui était peut-être un déséquilibre, mais, cette fois-ci, à l'inverse.

Le Président (M. Lafrance): Je remercie les membres de la Chambre de commerce pour leur exposé et d'avoir bien voulu répondre aux questions. Soyez assurés que la commission a pris bonne note de vos recommandations.

La commission ajourne... Le député d'Arthabaska.

M. Massé: Pourrait-on savoir quels sont les organismes qui devront comparaître au cours de la journée demain?

Le Président (M. Lafrance): La Fédération des jeunes chambres du Canada français, l'Association canadienne des distributeurs d'équipement, section Québec, l'Association des garagistes spécialisés Inc., et l'Association des compagnies de téléphone du Québec Inc.

M. Massé: Merci.

Le Président (M. Lafrance): La commission ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

M. Poitras: Peut-on vous remercier de nous avoir donné autant de temps et de nous avoir permis d'approfondir nos propos?

(Fin de la séance à 17 h 34)

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