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Commission permanente des
consommateurs, coopératives
et institutions financières
Etude du projet de loi no 7 Loi de la
protection
du consommateur
Séance du 19 août 1976
(Dix heures quinze minutes)
M. Lafrance (président de la commission permanente des
consommateurs, des coopératives et des institutions financières):
A l'ordre, messieurs!
Nous reprenons ce matin l'audience sur le projet de loi no 7. Dans
l'ordre, nous entendrons la Commission des services juridiques, Electrolux
Limitée, l'Association des marchands de meubles bonne valeur.
Est-ce qu'il y a des représentants de chacun de ces trois
organismes? La Commission des services juridiques et M. Yves Lafontaine.
Commission des services juridiques
M. Lafontaine: Mme le ministre, Messieurs. Notre présence
ici s'explique d'abord par le fait que nous représentons habituellement
et dans tous les cas des personnes qui sont économiquement
défavorisées et, en vertu de notre loi, nous devons aussi voir
à la prévention et à l'éducation juridique de ces
gens. Nous devons aussi favoriser si possible des mesures législatives
qui pourraient leur venir en aide.
Nous avons une certaine expérience depuis le mois de juin 1973 et
nous nous sommes, entre autres, attaqués à certains dossiers
collectifs de consommation. Disons, je pense aux ventes pyramidales avec
Holiday Magic, je pense au Foyer de la future ménagère, je pense
à de nombreux dossiers sur les véhicules usagés et
aussi...
Le Président (M. Lafrance): M. Lafontaine, me
permettriez-vous de vous interrompre quelques instants?
M. Lafontaine: Certainement.
Le Président (M. Lafrance): Vous êtes
représentant, président de l'association?
M. Lafontaine: Je suis vice-président de la Commission des
services juridiques. Mon voisin, Me Auger est au service de recherche chez
nous, à la Commission des services juridiques.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
M. Lafontaine: Je m'excuse de ne pas m'être
présenté auparavant.
Maintenant, c'est entendu qu'il n'y a pas de difficulté de notre
part, nous représentons le consommateur et, si vous voyez dans nos
commentaires un parti pris pour le consommateur, c'est évident, c'est le
seul genre de clientèle qu'on représente. Nous avons cru bon de
venir à la commission parlementaire, si les nantis peuvent avoir des
avocats pour les représenter, nous croyons que ceux qui ne sont pas
nantis ont le droit aussi d'avoir des avocats pour les représenter.
Disons que j'ai un commentaire général au départ,
nous sommes très satisfaits de la nouvelle loi qui est
présentement en préparation. Il y a certainement des sections
complètes qui sont une amélioration totale sur ce qui se faisait
antérieurement. Autrement dit, il ne faudrait pas croire que notre
présence ici soit dans le but de vouloir faire des changements
essentiels à la loi telle que présentée.
Il y a des modifications que nous aimerions voir apporter; par contre,
comparés à la loi antérieure, c'est évident que les
changements sont majeurs. Il est évident aussi que, pour notre
clientèle, ce sera beaucoup plus facile de pouvoir obtenir certains
droits qui lui étaient refusés précédemment.
Etant donné qu'on est au stade de l'étude de la loi, nous
avons pensé faire certaines suggestions et en discuter avec vous, si
vous pensez que c'est possible de modifier le projet de loi.
Une première suggestion que nous faisons, c'est que nous disons
que cela prendrait peut-être un ministère des consommateurs ou,
à tout le moins, une régie ou une commission. Nous n'avons
peut-être pas à élaborer tellement longtemps
là-dessus. Nous disons, entre autres, que, s'il y avait un
ministère des consommateurs, pour fins d'identification, ce serait
certainement plus facile, parce que, maintenant, le ministère a
plusieurs têtes ou plusieurs directions générales. Il y a
aussi le fait qu'une commission est plus séparée, plus à
part, plus autonome qu'un ministère à différentes
têtes. Nous ne voulons pas élaborer là-dessus, étant
donné que, bien entendu, il y a une question budgétaire en
dessous de cette affaire.
Il est aussi vrai que la Loi sur la protection du consommateur, telle
qu'elle est à l'étude présentement, prévoit, entre
autres, différents mécanismes qu'il faudra peut-être
créer. Il faudra ajouter, autrement dit, au budget pour l'application de
certaines parties de la loi. Si le ministère applique la loi
intégralement, cela prendra des enquêteurs. Cela prendra aussi des
comptables pour vérifier les comptes en fiducie. Il faudra
peut-être aussi avoir certains tests, par exemple, sur des objets vendus.
Il y aura, autrement dit, des analyses qui devront être faites et je
crois que cela prendra des sommes additionnelles. Je veux dire que, si la loi
est adoptée telle quelle, il faudra aussi prévoir un budget en
conséquence afin qu'elle puisse recevoir une application aussi totale
que possible.
On retrouve avec plaisir l'article 231. L'article 231, c'est le pouvoir
de mise en garde du directeur de l'Office de la protection du consommateur,
ainsi que du ministre ou d'une personne autorisée à cette fin par
le ministre ou le directeur. Il est évident que ceci est une
manière rapide d'empêcher des excès.
A titre d'exemple, nous-mêmes, à l'aide juridique, nous
avons peut-être un peu devancé cela en ce sens qu'il nous est
arrivé dans certaines régions, devant des manoeuvres frauduleuses
qui ont été faites, que nous l'ayons dit à la presse et
à la radio. Et, effectivement, je dois vous dire que les choses se sont
réglées immédiatement. Par contre, il faut dire aussi
qu'à certains moments, entre autres, pour les ventes pyramidales, nous
avons dénoncé publiquement cette compagnie et nous avons
été poursuivis pour $1 million. On s'est organisé avec la
poursuite quand même, mais c'est pour dire qu'on comprend très
bien l'article suivant, l'article 232, qui prévoit que le directeur
pourrait être à l'abri de poursuites si on démontre,
autrement dit, que cela a été fait quand même de bonne foi.
Il ne faudrait pas qu'il y ait de mauvaise foi de sa part.
C'est une des meilleures armes que le consommateur a en main; il a
quelqu'un qui le représente réellement et qui va publiquement
dénoncer des fraudes, parce que, dans bien des cas, ce sont tout
simplement des fraudes. Je trouve absolument normal qu'une personne
dénonce des fraudes et qu'elle se sente à l'abri en
dénonçant des fraudes.
Il y a une amélioration que nous suggérons à
l'article 205. Nous disons que, si après six mois un consommateur a
porté plainte à l'Office de la protection du consommateur, s'il
n'y a pas eu de poursuites qui ont été intentées, le
consommateur lui-même puisse intenter cette poursuite. A titre d'exemple,
si un consommateur allait dans un magasin et faisait un vol à
l'étalage, il est bien entendu que le commerçant pourrait
intenter une poursuite immédiatement et, le lendemain, la personne qui
aurait volé se retrouverait devant le tribunal. Présentement, on
confie cela au lieutenant-gouverneur, c'est-à-dire au procureur
général. C'est aussi normal que ce soit le procureur
général qui agisse en dernier ressort là-dessus. Il y a
peut-être une modification possible, c'est qu'on pourrait permettre, par
exemple, à celui qui veut poursuivre de le faire, une fois que l'autre
aura manifesté son intention de ne pas poursuivre ou qu'il se sera
écoulé un délai de six mois. Mais il faut se rappeler
qu'en vertu de la Loi des poursuites sommaires il y a quand même toujours
une possibilité de préenquête de la part du juge avant de
décider si oui ou non il va porter la plainte. Je comprends que le fait
de demander que ce soit toujours au procureur général d'intenter
la plainte, la raison qu'il y a en arrière de cela c'est qu'on ne veut
pas, autrement dit, qu'il y ait de plaintes abusives qui feraient perdre, par
exemple, la réputation d'un commerçant pour quelque chose qui
serait rejeté par la suite, que la plainte soit rejetée. Moi, je
dis: On peut pallier cela déjà présentement cela
existe en vertu de la Loi des poursuites sommaires par une
préenquête que le juge peut faire avant de décider si oui
ou non il doit intenter la plainte tel que demandé par le
consommateur.
Il y a aussi une autre mesure qui est possible. On peut aussi donner le
pouvoir au consommateur de le faire et on peut aussi donner au procureur
général la permission de retirer la plainte même une fois
qu'elle a été portée, autrement dit, une espèce de
nolle prosequi comme cela existe présentement en droit criminel. C'est
une suggestion que j'apporte, qui n'est pas dans le mémoire.
Nous avions fait une remarque sur la définition de
"véhicule motorisé". Je voudrais simplement retirer cette
remarque parce qu'à l'analyse, elle ne tient pas. Effectivement, la
définition qu'il y a dans le projet de loi actuel nous satisfait
pleinement. Au début, nous avions cru voir quelque chose qui n'allait
pas mais nous retirons, autrement dit, la suggestion que nous faisions à
la page 5 de notre mémoire sur le véhicule motorisé parce
que nous sommes d'accord.
La section dans laquelle il y a, quant à moi, beaucoup de viande,
si je puis dire, si vous me passez l'expression, porte sur la vente
d'automobiles usagées. Il est bien sûr que vous avez certainement
dû avoir et que vous aurez encore des représentations sur la vente
d'automobiles usagées. Il faut dire que nous aussi, nous en avons, des
représentations, quotidiennement, dans ce domaine. Je dois vous dire que
dans notre clientèle, il y a beaucoup de causes sur ce sujet. Quand on
reproche au législateur de faire de la législation à la
pièce, en apparence, quant à moi, ce n'est pas de la
législation à la pièce parce que, effectivement, on vient
de frapper un problème qui est crucial parce que c'est un
problème qui se retrouve assez régulièrement.
On va dire: Vous semblez être durs vis-à-vis des garagistes
alors que vis-à-vis d'un individu qui vend son automobile, vous
n'êtes pas durs. A ce moment-là, on dit que la loi est
discriminatoire. Ce n'est pas vrai que la loi est discriminatoire. C'est qu'on
est toujours plus difficile, on requiert toujours plus d'un professionnel en
semblable matière. On n'a pas à demander la même
qualité de quelqu'un qui ne connaît pas la chose à fond. La
prétention normale je crois que cela va de soi c'est qu'un
garagiste, c'est une personne qui connaît l'automobile qu'il vend. C'est
normal qu'on exige plus de lui que d'un particulier. Le fait qu'un particulier
soit protégé parce qu'il va acheter d'un garagiste, je pense que
c'est tout à l'honneur des garagistes. Cela ne diminuera certainement
pas leur réputation que de dire: Ces personnes sont des personnes
fiables. Lorsqu'elles vous vendent, elles vous vendent sans garantie.
Dans le projet de loi, cependant, quant à moi, il y a une
modification qui doit être apportée, qui me semble assez
essentielle. On garantit la vente d'automobiles usagées dans une
proportion de 50%-50%. Autrement dit, l'étendue de la couverture,
d'abord, sur le moteur et sur le rouage d'entraînement c'est 50%-50%.
Qu'est-ce que cela veut dire? J'ai déjà plaidé des causes
de 50-50, j'ai déjà eu des clients qui sont venus me voir avec
des causes de 50-50.
Je m'excuse. C'est sur la réparation 50%-50% et,
quant à être parti, je vais continuer mon raisonnement sur les
50%-50%.
Les 50-50 qu'il y a sur la réparation sont une obligation de
garantie qui appartient à celui qui fait la réparation ou
à celui qui vend l'automobile.
L'obligation de garantie lui incombe. Or, c'est lui qui est le
garagiste. Donc, c'est lui qui va faire la réparation. Il est
très facile pour lui, à ce moment, de prendre, autrement dit, la
main-d'oeuvre qu'il fournit et de l'étirer ou de la prolonger,
d'augmenter le coût des pièces, de telle sorte que cela
coûterait exactement la même chose que si c'était 100%.
C'est un argument pratique que j'ai vécu dans les causes que j'ai
eues.
Il y a aussi un autre argument. Suivant le droit civil, avant même
qu'il n'y ait une Loi sur la protection du consommateur, l'acheteur d'un
véhicule était protégé contre les vices
cachés de la chose. Etre protégé des vices cachés
de la chose, cela voulait dire, entre autres, le moteur, le rouage
d'entraînement, le différentiel parce que, ordinairement, ce sont
des défauts cachés qu'on trouve là-dedans. Ce ne sont pas
des défauts apparents.
Là-dessus, on disait quand même qu'il y avait une
exception, en ce sens que le vendeur pouvait dire qu'il ne s'engageait à
aucune garantie. C'est-à-dire qu'on le vendait "as is, where is" ou tel
que vu. Ce sont des expressions qui étaient employées.
Il y a plusieurs causes dont des causes de la Cour suprême qui
disent que, même si ces phrases sont employées, étant
donné que c'est vous qui êtes censé connaître la
chose, vous n'êtes jamais dégagé de votre fait personnel.
Cela veut donc dire que vous êtes quand même obligé à
la garantie des défauts cachés, même si vous les avez
exclus.
Donc, cela veut dire que, suivant le Code civil tel qu'il existe
aujourd'hui, déjà, vous êtes garanti à 100% contre
des défauts cachés alors que la Loi sur la protection du
consommateur vient la réduire à 50%.
Je pense que, pour cela, il serait assez simple de dire que c'est
garanti tout simplement. D'ailleurs, je comprends difficilement comment on peut
dire qu'une chose est garantie à 50%. Quant à moi, une chose est
garantie ou elle n'est pas garantie parce qu'à certain moment, cela
devient difficile de le déterminer. Pourquoi pas 75%, pourquoi pas 25%?
Autrement dit, on garantit peut-être ou on ne garantit pas.
Il y a une autre chose, quant à nous, qui devient très
difficile d'application. On prévoit que, pour exercer cette garantie, le
consommateur devra donner un préavis avant l'exercice de son recours
judiciaire.
J'ai pris connaissance du mémoire du Barreau qui a
été soumis et je suis d'accord sur ce mémoire.
Effectivement, cette question de délai péremptoire, sous peine de
perte de droit d'action, nous semble quelque chose d'assez exorbitant et quand
même aussi un peu désuet.
On retrouve cet exemple dans la Loi des cités et villes. Il faut
dire que, dans la Loi des cités et villes, la ville ne s'est jamais
engagée contractuellement à protéger les personnes qui
marchaient sur ses trottoirs. Effectivement, même s'il arrive quelque
chose dans la municipalité, on dit: Elle devrait être
avisée. Autrement dit, afin de pouvoir faire enquête et de voir ce
qui est arrivé, suivant les chartes municipales, la plupart du temps, on
donne quinze jours. Tandis que, dans la Loi sur la protection du consommateur,
il y a déjà une obligation contractuelle que le commerçant
passe avec son consommateur. Donc, si la loi est claire à cet effet, il
sait fort bien qu'il peut être amené à une action en
garantie dans un délai donné.
On dit, dans la jurisprudence, pour les défauts cachés:
Dans un délai raisonnable. Effectivement, les cours ont
interprété, la plupart du temps, ces délais comme
étant entre trois et six mois, à peu près, ce qui
était le délai raisonnable pour lequel on pouvait être
remboursé pour des défauts cachés.
Pour ces raisons, je crois qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait
un délai. Qu'est-ce que cela peut faire au niveau pratique? C'est que
toute personne voyant le délai s'écouler et se disant: Est-ce
qu'effectivement il y a des défauts ou s'il n'y en a pas? Il va envoyer
automatiquement l'avis durant le délai. Il dit: Après cela, on
verra ce qui va se développer et je prendrai action ou je ne prendrai
pas action. Le délai pour prendre action est très court, aussi.
J'ai peur que cela oblige les personnes à faire face à des frais
judiciaires peut-être inutilement, alors qu'il serait possible, quant
à moi, d'arriver à un arrangement satisfaisant entre les deux
parties.
Il ne faut pas oublier que c'est toujours un fardeau, de la part d'une
personne, que de devoir s'adresser à un tribunal. Cela prend des
démarches particulières. C'est une perte de temps, c'est long,
c'est difficile. Je dois dire que, dans la plupart des cas, tous les garages
responsables s'organisent avec les clients afin de leur donner satisfaction.
C'est une bien bonne raison, ce sont des personnes avec qui ils font affaires,
des personnes qu'ils veulent revoir. Je comprends que la Loi sur la protection
du consommateur, ce n'est pas pour ces gens responsables, c'est surtout pour
protéger le consommateur vis-à-vis des personnes qui essaient de
lui jouer des tours. Je pense que, pour cette raison, on devrait d'abord
enlever la nécessité d'un avis préalable et, en plus de
cela, prolonger la durée du délai pour intenter des
poursuites.
Au sujet de la garantie elle-même, nous avons fait une longue
gradation, mais nous avons changé d'avis depuis ce temps. Ce que nous
proposons c'est que, d'abord, le commerçant garantisse le bon
fonctionnement de l'automobile et de ses accessoires plutôt que
d'être obligé de définir le moteur, le rouage
d'entraînement. Cela devient trop difficile, donc, pourquoi ne pas
garantir l'automobile elle-même et ses accessoires, quitte à
laisser aux tribunaux l'interprétation qui sera certainement plus
facile.
Nous abandonnons, aussi, l'idée d'une gradation suivant le prix.
Nous abandonnons pour la simple et bonne raison qu'encore là, il est
difficile à l'analyse de maintenir le fait que, suivant que vous payez
tel prix, vous avez droit à telle garantie, suivant que vous payez un
prix supérieur, votre garantie devrait être supérieure.
Dans tous les cas, ce que nous préconisons, c'est 90 jours ou
3000 milles. C'est bien entendu que, si quelqu'un achète un
véhicule Cadillac usagé, d'après ce que nous proposions,
il aurait une garantie plus forte que s'il achetait une Honda Civic qui
pourrait avoir exactement la même usure, le même âge. A ce
moment, il n'aura pas la même garantie sur la Honda Civic. Etant
donné que nous représentons les défavorisés, on ne
voit pas pourquoi il n'aurait pas la même garantie. Par contre, on
comprend qu'il y a aussi une autre chose. Il existe une tradition dans le
commerce; il y a des gens défavorisés qui ne peuvent se permettre
de payer un prix potable pour une automobile. Il existe, à ce moment, ce
qu'on appelle des "minounes".
Effectivement, l'acheteur sait que, pour le prix qu'il paie, il va avoir
une "minoune", sauf qu'il se dit: Je prends ma chance; étant
donné le prix que cela me coûte, on va voir ce que je peux avoir
comme service avec. Il serait normal de prévoir, à ce moment
notre suggestion s'appliquerait à des véhicules qui
coûteraient moins de $500 que le consommateur pourrait renoncer
à cette garantie. Nous trouvons que ce serait normal puisqu'il le
saurait au préalable. Il le saurait. Autrement dit, c'est lui-même
qui aurait accepté cette condition.
Au fond, un des principes de base de cette Loi sur la protection du
consommateur, c'est que le Code civil est rendu désuet. Avant, on
prétendait que les deux parties étaient égales. Entre
parties égales, il était donc possible de négocier et
d'arriver à un contrat qui satisferait les deux parties. Aujourd'hui,
les deux parties sont devenues tellement inégales, dans le sens que,
d'un côté, vous avez les multinationales et, de l'autre, vous avez
un consommateur. Effectivement, les multinationales ont des batteries d'avocats
pour préparer leurs contrats, etc. Deuxièmement, dans la plupart
des cas, il s'agit de contrats d'adhésion. Par contrat
d'adhésion, je veux dire que ce n'est pas une question de
négocier des conditions. Quand tu es un consommateur, on te dit: C'est
cela, ton contrat. Tu le prends ou tu ne le prends pas. Si tu ne le prends pas,
tu iras ailleurs. S'il va ailleurs, c'est exactement la même chose; c'est
le même contrat qu'on lui propose.
Je comprends très bien qu'on impose des restrictions à
cette liberté contractuelle. Autrement dit, c'est pour égaliser
les deux parties, pour leur permettre, ni plus ni moins, d'avoir des droits
équivalents.
Nous avons aussi décidé de rayer ce qu'il y avait dans
notre mémoire à 53b), le dernier bout: "dans un rayon de 100
milles de l'adresse où le contrat a été conclu", à
propos des frais de dépannage, de telle sorte que l'obligation de
garantie qui appartient au commerçant, il puisse l'exercer de la
façon qu'il le voudra. Si lui-même décide d'aller le
chercher si cela dépasse 100 milles, cela n'a pas d'importance. Son
obligation de garantie, c'est à lui que cela incombe. Il agira de la
façon qu'il le voudra.
C'est pourquoi, en conséquence, nous supprimons aussi la
suggestion de 53 c) que nous avions faite à la page 9. Il faut se
souvenir que si on peut peut-être imaginer des situations qui peuvent
sembler excessives pour le commerçant, celui-ci peut toujours aussi
décider d'annuler le contrat en vertu de l'article 57 qui existe dans le
projet de loi actuel. Donc, s'il y a quelque chose qui lui semble trop
coûteux par rapport au coût de l'automobile ou par rapport à
ce qu'il croyait que ça lui coûterait, il peut toujours
décider de remettre l'argent au consommateur et reprendre l'automobile
tout simplement.
A l'article 53 d), même notre propre formulation est
défectueuse. Je m'excuse, mais il faudrait lire, à la place: "La
garantie prévue à l'article 53 ne couvre pas les pièces et
la main-d'oeuvre nécessaires à l'entretien normal", tout
simplement. Ce que l'on a mentionné là, c'est une garantie qui
s'appliquait aux frais; on ne garantit pas les frais. On garantit, autrement
dit, les pièces ou la main-d'oeuvre. Autrement dit, la garantie ne
s'applique pas pour ce qui est de l'entretien normal d'un véhicule. On
ne spécifie pas ce qui est normal, mais je pense que le juge pourrait
l'interpréter.
Quant aux réparations de l'automobile, ce sont les mêmes
choses que nous avons dites à propos de la vente des véhicules
automobiles. Nous voudrions qu'il y ait une amélioration à propos
du droit de rétention. En vertu du droit civil actuel, le garagiste qui
a apporté des améliorations à un véhicule, qui
prétend avoir apporté des améliorations à un
véhicule peut toujours garder le véhicule tant qu'il n'est pas
payé. Il y a une disproportion évidente, dans la plupart des cas,
entre le montant des réparations qu'il peut faire et la valeur de son
gage, ni plus ni moins, ou son droit de rétention. Nous suggérons
que le droit de rétention existe seulement pour des montants de
réparation supérieurs à $150. De toute façon, le
garagiste n'est jamais obligé de faire les réparations.
Il y a une autre amélioration qu'on voudrait voir apporter
à la loi, c'est à propos des sanctions civiles qui sont les
articles 197 et 198. Après avoir fait étudier le mémoire
par les différentes corporations régionales, il nous est souvent
revenu la question suivante. Par exemple, l'article 22 prévoit que si un
contrat ne respecte pas les exigences prescrites aux articles 15, 16 et 17, le
consommateur peut en demander l'annulation. Suivant l'ancienne loi, à
l'article 117, s'il y avait une contravention à ces articles, le
consommateur pouvait aussi, à son choix, demander la suppression du
coût de crédit, s'il y avait eu un crédit d'accordé
à l'occasion de ce contrat. Autrement dit, ça permettait au
consommateur de garder le prêt ou le bien qui avait été
financé, sauf qu'il n'était pas obligé de payer le
crédit. Aujourd'hui, on dit que son recours, d'après la
déduction qu'on peut en faire, ce serait simplement de demander la
nullité du contrat. Nous disons que l'ancienne loi, dans ce cas
spécifique, était plus large que la loi actuelle.
Maintenant, cela a aussi pour effet d'amener une espèce de
confusion. Vous avez les articles
22, 105, 150, 188 qui disent que pour tel et tel article, c'est
ça que vous pouvez faire. Par contre, à la fin, il semble y avoir
un article général qui dit que si on manque à cette
loi-ci, on a le droit de demander telle chose, telle chose ou telle chose. Nous
croyons que les articles spécifiques limitent les articles 197 et
198.
C'est peut-être simplement une difficulté de
rédaction. Nous voulions le soumettre pour que ce soit plus clair.
Il y a aussi une disposition que nous voulons voir ajouter, c'est que
les tribunaux, c'est-à-dire les juges, même si ce n'est pas
soulevé devant eux, aient le pouvoir de faire appel eux-mêmes
à la loi qui pourrait exister. Je trouve que ce serait tout à
fait normal de le faire.
On entre encore dans une autre section sur laquelle vous avez
certainement des mémoires assez coriaces, la vente à
tempérament. En pratique, quant à moi, la vente à
tempérament cela n'existe plus. La vente à tempérament,
c'est la vente par laquelle un vendeur se réservait le pouvoir de
propriété sur un bien tant qu'il ne lui était pas
payé. C'est bien entendu que son droit de rétention avait de la
valeur suivant l'objet qu'il avait vendu. Pour faciliter le commerce, il faut
permettre des garanties de crédit les plus larges possible. Ce qui
arrive, c'est que le bien lui-même, étant donné la
qualité des biens d'aujourd'hui, se déprécie très
rapidement. Ce qui arrive, c'est que le commerçant a
décidé et la compagnie de finance aussi, bien entendu
de passer à côté de la vente à
tempérament.
Anciennement, étant donné la liberté contractuelle
complète, il y avait ce qu'on appelait la vente conditionnelle. La vente
conditionnelle a longtemps existé. C'était une vente par laquelle
le vendeur se réservait la propriété de l'objet. Advenant
le défaut de l'acheteur de payer le prix tel que stipulé au
contrat, la vendeur pouvait reprendre l'objet, le revendre à qui il
voulait et au prix qu'il le voulait, déduire cela du montant qui lui
était dû par l'acheteur et continuer à poursuivre
l'acheteur pour le montant qui lui était dû.
Par la Loi de la protection du consommateur actuelle, la loi 45
anciennement, on a dit: Quand un commerçant, dans un cas de vente
à tempérament, reprend l'objet, il n'y a plus rien qui lui est
dû. Il a repris sa garantie, donc il n'y a plus rien qui lui est
dû. Devant cette loi, qu'est-ce que les compagnies de finance ont fait?
C'est qu'elles ont passé au prêt personnel, en ce sens qu'on dit:
II n'y a plus de vente à tempérament. Vous allez voir un marchand
et vous lui dites: Je suis prêt à acheter tel bien, sauf que je ne
suis pas capable de le payer tout de suite. Le marchand va dire: Ne t'en fais
pas, j'ai ma compagnie de finance. Va à la compagnie de finance. Elle va
te faire un prêt personnel et, après cela, tu viendras me payer.
Tu viendras me payer en tout ou en partie cependant.
Là on voit pourquoi cela fait si mal d'avoir ajouté les
articles 172 et 174 qui prévoient que le commerçant, aujourd'hui,
n'aurait plus le droit d'avoir un "kick back" de la compagnie de finance,
c'est-à-dire d'avoir une espèce de pour- boire pour tous les
contrats qu'il va lui envoyer, qu'il fait financer par cette compagnie de
finance. Il ne faut pas se le cacher, c'est un usage reconnu aujourd'hui, un
commerçant qui fait financer les biens qu'il vend par une compagnie qui
est ordinairement la même compagnie avec laquelle il fait affaires lui
donne un boni ou un "kick back" pour tous les contrats qu'il réussit
à lui passer.
C'est bien sûr que cela amène un attrait tant pour la
compagnie de finance que pour le commerçant, tellement que le
commerçant, aujourd'hui, n'est pas intéressé à vous
vendre au comptant, parce que cela lui rapporte moins que s'il vous vend
à crédit. S'il vous vend à crédit, la compagnie de
finance lui donne un "kick back". Qui paie pour? C'est bien évident que
c'est le consommateur. On va vous faire accroire qu'il n'y a personne qui paie
pour, cela n'est pas vrai. C'est bien évident que ce n'est pas la
compagnie de finance qui paie pour, ce n'est pas non plus le marchand qui paie
pour, c'est le consommateur.
Autrement dit, pour passer à côté de la vente
à tempérament, on a instauré comme pratique courante le
fait que, quand vous vendez un bien, vous envoyez votre acheteur
éventuel à la compagnie de finance. Vous en retirez, bien
entendu, un profit immédiat et, de la part du consommateur, si le
contrat est financé seulement partiellement par le prêt
personnel... Exemple: J'achète un bien de $500. Je donne $50 comptant.
Il reste $450. La compagnie de finance peut dire: Voici, monsieur, je vous
finance pour $300. Il reste $150 à payer. D'accord? Au bout d'un temps,
le consommateur ne fait pas ses versements. Le marchand qui a fait une vente
à tempérament et à qui il est dû $150 reprend son
bien. Donc, le consommateur ne lui doit plus rien. Il a repris un bien pour
$150, lequel bien peut valoir, on ne le sait pas, $300, $400 ou $500. Mais le
consommateur n'a pas fini de payer pour ce bien, parce qu'il lui reste un
prêt personnel à la compagnie qui lui a prêté.
Effectivement, on est passé à côté de la
vente à tempérament, c'est bien clair. Le marchand a repris son
bien et l'autre continue à avoir sa dette pour ce bien vis-à-vis
de la compagnie de finance.
Une autre pratique qui se développe aussi: Vous avez des exemples
en annexe ici, des lettres qui sont envoyées au consommateur.
C'est que, quand un client est référé comme cela,
à la suite de l'achat d'un bien de compagnie de finance, la compagnie de
finance lui dit: Votre crédit est maintenant établi, vous pouvez
venir en chercher pas mal plus que ce que vous avez besoin pour ce bien, venez
nous voir. Il se peut fort bien que nous puissions vous faire un prêt qui
va combler l'ensemble des paiements que vous avez à faire à
gauche puis à droite, présentement. On ne dit pas que cela se
fait gratuitement ou que cela se fait avec un coût, mais il est bien
évident que cela se fait avec un coût.
Et si on regarde l'endettement perpétuel de nos clients qui
empruntent pour payer et qui réempruntent pour boucher l'autre trou,
effectivement c'est une pratique commerciale quant à moi qui peut
être condamnable, parce qu'elle incite les gens à emprunter
simplement.
Notre suggestion, c'est que, quand il y a un prêt, à la
suite de l'achat d'un bien et qu'on est capable de démontrer que la
compagnie de finance et le vendeur sont liés, à ce moment, la
compagnie de finance ait les mêmes obligations. Exemple: Si je m'en vais
chez un marchand de meubles et que j'achète des meubles et
qu'effectivement le contrat est financé subséquemment par une
compagnie de finance, c'est-à-dire non pas le contrat, la compagnie de
finance me prête, un prêt personnel, et là je vais payer mon
marché. Si, par hasard, il n'y a pas livraison du bien ou le marchand
dans l'entre-temps fait faillite, je suis quand même obligé
vis-à-vis de la compagnie de finance, parce que là on n'a pas
négocié le contrat avec la compagnie de finance, elle a fait
simplement un prêt personnel, mais effectivement les deux parties
étaient liées et autrement dit, un vendait les biens et l'autre
finançait les biens qui étaient vendus par cette personne. A ce
moment, on passe encore à côté du bill 45, c'était
l'autre façon qu'on avait découverte de passer à
côté du bill 45.
Une petite remarque à l'article 3, en passant. On dit que les
professionnels ne sont pas couverts par la Loi sur la protection du
consommateur, j'en suis, sauf qu'il y a des activités de professionnels
qui ne sont peut-être pas des activités de professionnels par
exemple. Vous avez les audioprothésistes qui vous vendent des appareils
auditifs, s'ils décident de faire le tour d'une maison de vieillards,
par exemple, et puis que leurs vendeurs sont sur le chemin pour vendre des
appareils auditifs, à ce moment, je me demande si ce sont vraiment des
commerçants. Je pense qu'à ce moment ce sont réellement
des commerçants, justement, ce ne sont pas des professionnels. Donc,
nous disons que, pour les professionnels, quand ils deviennent des
commerçants, à ce moment, qu'ils soient couverts par la loi.
Le vendeur itinérant. La plupart des grandes difficultés
que nous avons à propos de la qualité des objets vendus, c'est
surtout de la part de personnes qui font de la vente itinérante. Il y a
des compagnies responsables, cela va de soi, on n'en entend même pas
parler, le consommateur a ce qu'il achète, il n'y a pas de
problème. Par contre, il y en a d'autres qui utilisent votre
intimité, autrement dit, l'intimité de votre domicile. Vous
êtes assis le soir chez vous en famille, vous avez la paix, vous pouvez
relaxer, et là, il arrive quelqu'un dans votre intimité, qui
décide de profiter de cette situation particulière pour vous
faire acheter quelque chose. Tout ce que vous avez dans l'esprit c'est quand
est-ce qu'il va sortir, peut-il sortir. Effectivement, vous êtes
quasiment prêt à faire n'importe quoi pour qu'il puisse sacrer son
camp. Donc, le législateur avait prévu une période de
réflexion pour faire annuler ce contrat. Maintenant, je me demande
même pourquoi il y aurait des vendeurs itinérants aujourd'hui.
Vous avez remarqué que les ventes par catalogue, la plupart des grands
magasins ont cessé même cela. Parce qu'anciennement, les gens
étaient éloignés, il n'y avait pas de magasins dans les
environs, on faisait venir par catalogue. Les vrais vendeurs itinérants
qu'on a connus anciennement, il en reste peut-être dans les campagnes
éloignées, il arrive quelquefois. Nous disons que nous ne
comprenons tout simplement pas pourquoi on vend des choses, comme, par exemple,
des maisons mobiles par vendeurs itinérants. Ce sont des achats qui
valent de $15 000 à $18 000. Je peux en choisir des plus criants que
cela, je crois. Pourquoi est-ce qu'on vend des avertisseurs de fumée qui
se vendent $300 à $400 et qui valent peut-être $30 à $40.
Dans des maisons, on en profite pour faire une projection de film pour montrer
des enfants atrocement brûlés et puis là, les parents
regardent cela avec leurs enfants, je vous garantis qu'ils passent pour
sans-coeur s'ils n'en achètent pas. C'est une manière de
procéder de vendeur itinérant. Peut-être que pour
éviter le fait qu'il y ait de bons vendeurs itinérants qui
perdent leur réputation ou des choses semblables, pourquoi simplement ne
pas la limiter au moins à un montant de $700 quitte à la
prochaine loi de l'abolir complètement, parce qu'on ne voit pas la
nécessité du vendeur itinérant?
Une autre suggestion aussi, c'est qu'on dise que le délai de dix
jours qui est prévu par la loi sur lequel nous sommes d'accord, compte
à partir de la livraison du bien, parce que, la plupart du temps, c'est
lorsque tu reçois le bien que là tu fais un mauvais saut. Donc,
on dit que le délai de réflexion devrait commencer à
partir de ce moment-là.
Nous voulons aussi essayer de boucher un trou dans la définition
du mot "dirigeant" au début. Surtout en matière pénale, on
dit que le dirigeant est responsable lui aussi, par exemple, de la
publicité qui peut être faite par sa compagnie. On dit que le
dirigeant, cela devrait couvrir aussi l'actionnaire parce qu'en fait,
l'actionnaire, ordinairement, c'est celui qui est propriétaire de la
compagnie, qui a intérêt, autrement dit.
Une autre suggestion que nous faisons à propos des permis. On dit
que le directeur émet des permis et, s'il émet des permis et que
le vendeur n'est pas satisfait de la décision, qu'il la refuse,
effectivement, il peut aller en appel devant un juge de la Cour provinciale.
Nous disons: Pourquoi le consommateur n'aurait-il pas le même pouvoir
s'il accorde un permis? Je pense que ce serait normal qu'à ce
moment-là, ce soit un pouvoir qui s'équi-vaille de part et
d'autre.
Ce qui est maintenant, ce qu'on appelle la règle 78, c'est la
fameuse question de la réduction du coût d'intérêt
lorsque vous payez une dette avant échéance. Cette méthode
de calcul en est une actuarielle qui est extrêmement difficile. D'abord,
pour avoir des résultats là-dessus, je dois vous dire que nous,
à la Commission des services juridiques, cela nous a pris un grand bout
de temps et on a obtenu des résultats différents d'actuaires qui
étaient des actuaires extragouvernementaux, nous avons eu aussi des avis
d'experts gouvernementaux et, enfin, des compagnies de finances nous ont
donné aussi une autre façon actuarielle de calculer. Ce qui
arrive, c'est qu'il y a des divergences assez grandes dans ces
différen-
tes façons de calculer. Nous, nous disons: On va prendre la
règle habituelle qui veut que des intérêts, ce soit le
loyer de l'argent. Donc, si l'intérêt est le loyer de l'argent, tu
as à payer de l'intérêt pour le temps pendant lequel tu as
eu cet argent à ta disposition. Nous ne voyons pas pourquoi le
consommateur aurait une pénalité spéciale à payer
lorsqu'il paie avant l'échéance. S'il paie avant
l'échéance, qu'il paie l'intérêt pour le temps qui a
couru à ce moment-là. Il me semble que c'est une pratique
absolument normale.
Le reste, à la page 23, ce sont simplement des modifications
mineures que nous aimerions voir apporter pour rendre peut-être la loi
plus claire et éviter des ambiguïtés. Donc,
fondamentalement, nous sommes d'accord avec ce qui a motivé cette loi,
et je dois dire la très grande majorité de tous les articles qui
sont là. Il y a sûrement un pas en avant qui est fait de la part
du consommateur et nous, qui représentons habituellement ces
consommateurs devant les tribunaux ou qui sommes en train de régler des
choses avec les commerçants, nous disons que cela va nous donner un
sérieux coup de main. On va pouvoir réellement faire un ouvrage
qui sera plus facile pour ces consommateurs.
Nous disons aussi que l'Office de la protection du consommateur va
maintenant avoir un pouvoir qui est réel. Je pense surtout au pouvoir de
contre-publicité qui, quant à moi, est très fort et qui
est drôlement nécessaire. D'un côté, vous aviez des
personnes qui étaient munies de capitaux pour faire de la
publicité et qui, de toute façon, en refilaient les coûts
au consommateur, mais, aujourd'hui, on dit: C'est l'Office de la protection du
consommateur qui est mandaté pour nous représenter, qui va
être capable de faire une publicité, aussi, pour le consommateur.
Je pense que ce serait normal.
En terminant, je voudrais simplement ajouter que, pour nous, s'il
était possible d'avoir l'action de groupe ou la "class action" je
sais qu'il y a un projet dans l'air présentement j e pense qu'avec
cela, on aurait réellement un éventail pas mal complet et qu'on
pourrait maintenant dire: Au Québec, on a une charte des droits de la
protection du consommateur. Je vous remercie.
Le Président (M. Lafrance): Merci beaucoup, M.
Lafontaine.
Madame le ministre.
Mme Bacon: J'aimerais d'abord dire qu'en ce qui concerne un
ministère des consommateurs, je prends bonne note de votre suggestion,
soit d'en faire un ministère, une commission indépendante ou une
régie. J'aimerais quand même souligner, peut-être parce que
j'ai regardé ce ministère avec un regard neuf, à mon
arrivée au ministère, qu'à ce stade-ci ou au moment de
l'arrivée, je croyais plus important de modifier d'abord la Loi sur la
protection du consommateur avant de modifier certaines structures.
Vous venez de dire vous-même qu'on a quand même fait un pas
en avant en présentant une telle loi et, à mes yeux, il me
semblait vraiment plus important de le faire que de penser immédiatement
aux structures. Tout de même, c'est une étape de franchie.
Nous apportons une structure ou des conseils 'ou des experts aux membres
de l'Office de la protection du consommateur en étant partie
intégrante du ministère des Consommateurs, Coopératives et
Institutions financières.
Je pense qu'en faisant, en ce moment, partie du ministère tel que
constitué l'office peut tout de même influencer les instances
gouvernementales de la même façon que s'il faisait partie d'autres
structures. Mais je pense encore une fois et je dois le
répéter qu'à ce stade-ci il était beaucoup
plus sérieux, beaucoup plus important et impératifs de faire une
nouvelle loi, une refonte complète de la loi existante à cause de
cette évolution rapide des problèmes qui touchent les
consommateurs.
Comme vous le savez, l'article 272 du projet de loi nous permet un
recours au fonds consolidé de la province pour l'exercice financier
1976/77 et 1977/78.
Alors, nous avons sûrement lieu de croire que cela nous permettra
d'obtenir le budget nécessaire en rapport avec les
responsabilités qui seront accrues, que la nouvelle loi confiera
à l'Office de la protection du consommateur.
Vous parlez aussi de la nécessité d'intensifier des
campagnes d'information et je suis d'accord. Auriez-vous des domaines, en
particulier, où vous voyez une nécessité immédiate
de faire des campagnes d'information?
M. Lafontaine: II peut y avoir deux plans d'information, sans y
avoir songé plus longtemps. Il y a peut-être une information qui
s'appelle une éducation. C'est peut-être cela qui serait la
base...
Quant à moi, il y a peut-être une certaine recherche
fondamentale à faire là-dedans. Je ne suis pas un publiciste. Je
ne m'adresse pas, non plus, à des enfants. A ce moment, on s'adresserait
à des adultes, mais il y a certainement des adultes qui sont enfants
peut-être dans le domaine de la consommation. Il y a peut-être cela
à avoir d'abord, une publicité fondamentale qui dise aux gens, ni
plus, ni moins: Avant d'acheter, pensez donc à votre affaire.
Demandez-vous donc si vous en avez réellement besoin. Demandez-vous donc
si le bien que vous voulez avoir va réellement combler vos aspirations.
C'est peut-être une façon de faire la publicité.
Il y a aussi une publicité qui serait peut-être plus
agressive. Je n'aime pas le mot, mais cela va tellement avec publicité,
agressif, que tu te demandes parfois si ce n'est pas ensemble. Je veux dire
qu'on peut faire une publicité qui soit plus dirigée vers des
points spécifiques, en ce sens qu'il y a des points chauds, par exemple.
Mais il ne faut quasiment pas fixer ces points chauds à l'avance, parce
que c'est mouvant. Par exemple, vous avez c'est normal; c'est un trait
du commerce des choses, à un certain moment, qui sortent, Vous
avez des vagues de choses. Par
exemple, vous avez eu la fameuse question des ventes pyramidales. C'est
une vague; à un certain moment, cela passe, parce qu'à un certain
moment quelqu'un dit: C'est assez, ces ventes pyramidales. C'est un type de
publicité plus directe et qui s'adresse directement aux personnes.
C'est bien évident qu'au début la première
publicité qu'il faudra faire sera de dire: La Loi sur la protection du
consommateur existe. Il y a des choses là-dedans. Je pense qu'on peut
passer l'année simplement à dire cela. Ce serait
déjà un fameux bon départ, parce qu'il y a même des
commerçants qui ne le savent pas. Cela a même été
une manière de se défendre au niveau pénal que de dire: On
ne connaît pas cette loi, même de la part de
commerçants.
Je pense que la première publicité, c'est peut-être
cela, le premier domaine, pour la première année. On fera une
recherche plus exhaustive quand on aura fini de la vendre, d'abord, dans le
public.
Mme Bacon: D'accord. Quant à certaines définitions,
vous avez semblé mettre de côté la définition
d'automobile, mais je pense que cela nous a tellement été dit et
mentionné par différents groupements ou associations qui sont
venus nous rencontrer qu'il faudra tout de même se pencher sur cette
définition d'automobile.
Est-ce l'automobile conventionnelle? Sont-ce certains autres
véhicules qu'il faut inclure? En ce moment, nous nous posons des
questions quant à la définition du mot automobile et nous allons
nous pencher un peu là-dessus.
M. Lafontaine: Quant à nous, la définition est
large.
Mme Bacon: Oui.
M. Lafontaine: Nous représentons des consommateurs. En
conséquence, nous en sommes satisfaits. Si on regarde la
définition habituelle d'un véhicule, c'est un moyen de transport
terrestre.
Mme Bacon: Vous n'incluriez pas...
M. Lafontaine: II y a des gens qui vous diront que cela couvre
des bateaux et des avions. Ce n'est pas vrai. Un véhicule, c'est un
moyen de transport terrestre, en partant.
Qu'il soit motorisé, cela veut dire qu'il a un appareil qui lui
sert à se transporter d'un endroit à un autre. Quant à
nous, c'est suffisant. On va vous dire: Cela couvre-t-il la grosse machinerie,
les bulldozers ou des choses semblables? Essayez de me trouver des
consommateurs de bulldozers, je pense que vous n'en trouverez pas.
Mme Bacon: C'est pour cela que je mentionnais que nous nous
interrogions sur...
M. Lafontaine: Peut-être que c'est assez large. C'est pour
cela qu'au début on avait dit qu'on n'était pas tout à
fait d'accord. Après cela, on s'est mis à le regarder plus
à fond et on s'est dit: Je pense que c'est ce que cela veut dire et
c'est bien.
Mme Bacon: D'accord. Si on arrive au droit de rétention,
par exemple, le maintien du droit de rétention pour les
réparations de moins de $150 a-t-il causé un problème
particulier à votre clientèle?
M. Lafontaine: Qu'il n'y ait plus de droit de rétention ou
qu'on continue à en avoir un, ce qui arrivait c'est que nos personnes
n'étaient pas capables de sortir parce qu'elles avaient fait un
graissage ou un changement d'huile.
Mme Bacon: Vous avez vraiment eu des problèmes.
M. Lafontaine: Je m'excuse, Me Auger pourrait-il
répondre?
Mme Bacon: Oui.
M. Auger (Jacques): Là-dessus, franchement je dois dire
qu'on n'a pas eu de problème majeur à ce niveau. Mais ce qu'on
veut introduire aussi dans la loi, c'est une espèce de sanction du devis
de réparation qu'on demande d'effectuer avant de faire les
réparations. On dit que le droit de rétention devrait tomber si
la loi n'a pas été respectée. C'est une façon de
mettre des dents à cet article, tout simplement.
Mme Bacon: Parce qu'il y a une autre question qu'on peut se poser
aussi, c'est: Comment le garagiste sera-t-il payé si on abolit
totalement le droit de rétention?
M. Lafontaine: II sera payé comme tout autre
commerçant dans tout autre genre de commerce qui n'a pas de droit de
rétention. C'est un droit tout à fait spécial et
exorbitant qui lui est accordé à un moment donné et on ne
sait pas pourquoi. L'électricien qui va chez vous, ou le plombier, ne
repartira pas avec le filage qu'il a posé chez vous ou quoi que ce soit.
Il n'y a pas de droit de rétention...
Mme Bacon: Ce serait assez compliqué. M. Lafontaine:
... là-dessus.
Mme Bacon: Dans les sanctions civiles, il est évident que
nous sommes sensibilisés à ce problème et je pense qu'on
va procéder à un réaménagement des sanctions
civiles. Par ailleurs, ne croyez-vous pas qu'une plus grande gradation de
sanctions civiles par rapport à l'importance respective des violations
du commerçant serait utile?
M. Lafontaine: Par rapport?
Mme Bacon: Par rapport à l'importance respective des
violations, qu'il y ait une gradation.
M. Lafontaine: Cela dépend ce qu'on entend par respective.
Disons, par exemple, que je loue un appartement. Que je le paie $400 ou $100
par mois, j'ai le droit d'avoir 70 degrés Fahrenheit de chaleur dedans.
Autrement dit, cela ne sera pas le montant du loyer qui va faire que j'ai le
droit de geler dans un et d'être confortable dans l'autre. Cela
dépend de l'importance de la modification ou de la garantie
elle-même.
Mme Bacon: C'est plus global que cela. M. Lafontaine:
Bien, c'est ce que je crains. Mme Bacon: Au lieu d'être
très spécifique.
M. Lafontaine: C'est difficile, aussi, de dire quand on commence
et quand on arrête. C'est bien facile de dire: Peut-être que cela
va causer une baisse des prix du marché. La garantie sera moins longue
si on vend plus cher, donc on va vendre moins cher et on va avoir moins de
garantie. Je ne le sais pas. Cela me surprendrait beaucoup.
Mme Bacon: Vous avez fait une suggestion, au deuxième
paragraphe de l'article 198. J'aimerais que vous la précisiez. Est-ce
que cela permet au consommateur en défense d'invoquer tous les moyens
tendant à repousser une action directe lorsque la prescription sera
écoulée en demande?
M. Lafontaine: J'ai en mémoire d'autres mémoires
qui ont déjà été présentés, je
m'excuse pour les deux mémoires. Il y a des mémoires qui disent
trois ans pour demander l'annulation d'un contrat et c'est le bout. Cela n'a
pas de bon sens. Six mois, cela serait déjà encore beau. Il faut
se rappeler que, de l'autre côté, le commerçant qui veut
exercer son droit a cinq ans pour réclamer son dû sur le contrat.
Mais le consommateur, pourra dire: C'est bien malheureux, je ne te paierai pas,
ton contrat n'est pas bon ou ton objet n'est pas bon, il a trois ans. Il ne
faudrait peut-être pas trop charrier là-dessus et dire que trois
ans c'est exorbitant. Si on veut descendre le pouvoir du commerçant et
poursuivre à trois ans, d'accord. A ce moment-là, on pourra s'en
tenir à trois ans, trois ans, je n'aurai pas d'objection. On sera
peut-être égaux à ce moment-là devant la loi. Mais,
qu'on pleure, aujourd'hui, parce que le législateur dit: On devrait
monter cela à trois ans! Je trouve que ce n'est pas le temps de pleurer.
Il n'y a pas matière à pleurer. C'est la première
réflexion qui me vient là-dessus.
Le deuxième paragraphe, c'est que je dis: Si le commerçant
n'est pas sûr de son contrat, que va-t-il faire? Il va atteindre trois
ans et demi pour vous poursuivre. Il va dire: Celui-là, je ne lui en
parlerai pas, j'ai peur que cela me pète dans la face.
Je mets ce contrat de côté, je prends une note dans mon
agenda et, deux ans et demi après, je le poursuis. Il ne pourra plus
dire: Monsieur, j'invoque la Loi de la protection du consommateur pour ne pas
vous payer. J'en demande la nullité. Il va être trop tard pour lui
pour demander la nullité. On dit: Pourquoi ne pas faire cela clairement?
Je comprends que la jurisprudence a des tendances là-dessus. Pourquoi ne
pas l'écrire, comme quoi il aura droit en défense, même si
son délai de trois ans est écoulé, de soulever ce moyen
qui lui appartenait s'il avait été dans les trois ans?
Autrement dit, pourquoi privilégier une des parties au
contrat?
Mme Bacon: Dans les ventes à tempérament, aux
articles 128 à 144, vous suggérez un nouvel article qui vise
à transformer un contrat de prêt personnel en contrat de vente
à tempérament si certaines conditions sont retrouvées. Ne
croyez-vous pas qu'il va y avoir de la difficulté quand viendra le temps
de prouver que le consommateur a effectué un prêt personnel dans
le but d'acheter un bien que le commerçant ou la personne qui a
effectué le prêt savait ou aurait dû savoir que ce
prêt serait utilisé en vertu de l'achat d'un bien?
M. Lafontaine: Peut-être, mais j'aimerais cela l'avoir.
Disons, par exemple, que je suis face à un garage je
m'excuse d'employer des corporations connues si j'ai une automobile GM
qui est financée par GMAC, je m'arrangerai bien avec le fardeau de la
preuve dans ce cas. Je suis capable de faire établir que le
commerçant reçoit une commission chaque fois qu'il envoie
quelqu'un à cette compagnie de finance. Je pense que je m'arrangerai
très bien avec cette présomption. C'est une présomption
qui serait facilitée par le fait qu'elle serait dans la loi. Je
comprends qu'il y ait une difficulté de rédaction énorme
dans cet article. Nous y avons pensé longtemps et souvent. On pense
peut-être l'avoir. Il se peut qu'on ne l'ait pas non plus. Quant à
nous, je pense que, de toute façon, ce sont des particuliers, entre vous
et moi. Il est bien évident que celui qui finance et celui qui vend
l'objet sont des personnes qui se connaissent, qui sont en relation d'affaires.
Assez souvent, si on prend le garage, il est financé lui-même par
cette propre compagnie. Il ne faut pas s'imaginer que les compagnies envoient
des automobiles dans une cour de vendeur et qu'elles ne demandent pas le
paiement immédiat. La plupart du temps, c'est la compagnie de finance
qui finance les clients du gars qui finance le gars lui-même. C'est assez
facile pour moi de démontrer qu'ils sont parties liées. Il y a
peut-être d'autres façons de le rédiger. On pensait que
c'était une amélioration, pour tout de suite.
Mme Bacon: Vous suggérez aussi qu'on inclue aux pratiques
interdites l'interdiction de solliciter par téléphone un emprunt.
Est-ce que vous ne vous limiteriez qu'à ce genre de sollicitation par
téléphone ou si vous ne croyez pas qu'il faudrait inscrire aux
pratiques interdites toute sollicitation par téléphone, ou si
vous vous limitez aux sollicitations pour emprunt?
M. Lafontaine: Vous le permettez pendant un bout de temps dans
votre nouvelle définition du
vendeur itinérant, au moment où vous parlez de la
sollicitation. Dans l'ancienne loi, on disait: Si la sollicitation est faite
à l'extérieur, c'est un vendeur itinérant. Pour un
véhicule neuf, aujourd'hui, vous dites: Même si on appelle chez
lui pour lui offrir une automobile et qu'il vient après signer le
contrat au garage, il ne sera plus un vendeur itinérant.
Mme Bacon: Le contrat est signé.
M. Lafontaine: Là-dessus, j'ai peut-être des
divergences, mais je ne voudrais pas manquer la beauté du projet de loi
pour des choses semblables. Disons qu'il y avait des choses qui me plaisaient
dans cette loi. Je m'excuse, je pense que j'ai manqué votre
question.
Mme Bacon: Je me demandais si vous ne vouliez pas inclure, dans
les pratiques interdites, toute sollicitation par téléphone au
lieu de vous limiter aux sollicitations pour emprunt.
M. Lafontaine: C'est encore le même principe que
j'émettais tantôt à propos du vendeur itinérant. Le
vendeur itinérant est quelqu'un qui vient briser votre intimité.
Il entre chez vous et il vient vous vendre quelque chose. Vous ne voulez pas le
voir du tout. Il y a quand même une question de volonté dans un
contrat que vous voulez passer avec quelqu'un. C'est cela la base des contrats.
Vous n'êtes plus libre. Il y a quelqu'un qui vient vous agresser. A ce
moment, vous allez dire: On va aussi supprimer toute publicité, quoique
la publicité c'est vis-à-vis d'un consommateur
indéterminé. Par le démarchage ou le
téléphone, vous vous adressez à quelqu'un de
déterminé. Si vous défendez toute sollicitation, il faudra
que ce soit une personne déterminée, quant à moi. C'est
évident que, si vous le faites par téléphone ou si vous le
faites en personne, cela revient au même. Le téléphone est
votre instrument, c'est le crayon que j'ai au bout du doigt pour écrire
sur le papier. C'est la même chose. C'est comme si je me rendais
chez-lui; c'est une sollicitation en fait, mais c'est une sollicitation d'une
personne déterminée. Quant à moi, la raison qui est en
dessous du fait de défendre toute publicité par écrit ou
par démarchage c'est exactement la même chose pour le
téléphone, c'est le même raisonnement qu'il y a en dessous.
C'est une agression, cela empêche la volonté de s'exprimer
librement. C'est un des concepts fondamentaux des contractuels, une
volonté libre qui puisse exercer.
Mme Bacon: On revient aux vendeurs itinérants. Avez-vous
des données bien précises sur lesquelles vous vous basez pour
limiter à $400?
M. Lafontaine: Non. C'est aussi simple que ça, nous
n'avons pas de données précises. C'est que nous avons
regardé la sorte de biens qui se vendait habituellement et et $400,
aujourd'hui, c'est moins que cela a déjà été. Vous
comprenez qu'il y a des choses, quant à nous, qui nous ont semblé
criantes. Vous avez eu, par exemple, les ventes pyramidales qui nous ont
marqués beaucoup. Vous avez eu les foyers de la future
ménagère qui nous ont aussi marqués beaucoup.
Là-dedans, il y a des petits contrats, il y en avait qui étaient
un peu plus gros.
Vous avez eu les fameux vendeurs de congélateurs qui fournissent
toute la viande, qui sont d'ailleurs encore annoncés dans le journal
aujourd'hui avec le taux de crédit, entre autres, qui n'est pas
mentionné. Il y a des infractions qui se commettent actuellement. On a
dit $400 de telle sorte qu'on se dise, au moins, que ce sera moins grave si
c'est en bas de $400. Mais il n'y a pas de rationnel, que ce soit $300, $400 ou
$500. C'est un peu comme quand vous dites, dans la loi, le démarchage en
bas de $10. Pourquoi dit-on $10? Pourquoi on ne dit pas $15, on ne dit pas $8?
A un moment donné, il faut s'arrêter; c'est simplement
ça.
Mme Bacon: Mais vous voudriez qu'il y ait des normes
chiffrées comme ça dans la loi?
M. Lafontaine: C e serait plus facile d'application
peut-être, étant donné que l'on est rendu dans le
raffinement, ce serait peut-être possible.
Mme Bacon: Vous suggérez aussi le délai de
réflexion de dix jours, que ce délai court à compter de la
livraison du bien.
M. Lafontaine: C'est exact.
Mme Bacon: Vous ne tenez pas compte...
M. Lafontaine: De l'obligation de payer, vous allez dire.
Mme Bacon: Non, mais il y a une "cooling-off period"
excusez-moi, M. le député de Lafontaine mais la vente
à l'essai, je pense...
M. Lafontaine: Moi aussi, je m'appelle Lafontaine. Il y a la
vente à l'essai.
Mme Bacon: Oui. Est-ce qu'il y a confusion entre le délai
de réflexion et la vente à l'essai à ce moment-là?
Parce que c'est une vente à l'essai, ce que vous suggérez.
M. Lafontaine: Non, je dis que le délai de
réflexion compte à partir de la livraison. Autrement dit, que le
contrat de vente, la "cooling-off period", comme vous dites...
Mme Bacon: Oui.
M. Lafontaine: ...en vous excusant, compte à partir du
moment où, effectivement, on a reçu le bien. La plupart du temps,
les personnes se ressaisissent quand ils ont le bien, le voient ou l'utilisent,
par exemple. Il y a des compagnies responsables qui vous disent: Garde le bien,
il n'y a pas de problème, utilise-le, tu vas voir comme il est
bon. Si le bien est bon, le consommateur le garde et il pourrait avoir
un an de "cooling-off period"; il n'y a pas de question. Mais, au fond, si on
donne une "cooling-off period", c'est pour permettre au consommateur de dire:
Attends un peu, ce que j'ai acheté là, effectivement, cette
machine à coudre qui était censée être
révolutionnaire ou telle chose, ce n'est pas ça du tout.
Effectivement, je la retourne. Autrement dit, je ne veux pas dire qu'on
enlève la vente à l'essai, ça revient à une vente
à l'essai, ni plus ni moins. Exactement. Je n'ai pas d'objection
à ce qu'on fasse des ventes à l'essai, cela existait dans le Code
civil antérieurement, cela existe encore aujourd'hui pour les vendeurs
itinérants; pourquoi pas?
Mme Bacon: Je reviendrais peut-être à la
révision des décisions du directeur. Est-ce que je dois
comprendre que vous permettez au consommateur d'attaquer en tout temps, sans
l'assujettir à aucun délai, à aucune formalité, les
décisions du directeur, accordant un permis, par exemple, ou refusant de
l'annuler ou de le suspendre?
M. Lafontaine: Non, je ne suis pas entré dans ce
détail. Je suggère exactement la même chose que pour le
commerçant.
Mme Bacon: Mais est-ce que c'est... Vous n'allez pas aussi loin
que d'attaquer...
M. Lafontaine: Que d'attaquer toutes les... Non, il y a d'autres
moyens légaux...
Mme Bacon: ...toutes les décisions.
M. Lafontaine: ...possibles dans d'autres champs particuliers,
mais, pour l'émission d'un permis, on dit, s'il émet un permis,
pourquoi un consommateur pourrait dire: Tu as fait erreur, tu aurais
peut-être été mieux de ne pas émettre de permis? De
toute façon, c'est soumis à un autre tribunal. Quant à la
question du délai ou de la façon de procéder, nous
suggérons que ce soit le même mode de fonctionnement que celui...
C'est d'ailleurs très simple. Entre vous et moi, pour une fois, dans un
domaine légal, on est arrivé à quelque chose d'assez
simple, qui n'est pas coûteux et qui est rapide; je suis d'accord avec
ça.
Mme Bacon: D'accord. En fait, quant à vos remarques
à la règle 78, sans faire de promesse, parce que je n'en ferai
pas aux séances de cette commission-ci, nous étudierons les
suggestions que vous nous faites.
M. Lafontaine: Vous prétendez que ça peut
changer?
Mme Bacon: II peut y avoir modification, c'est pour ça
qu'on fait cette commission d'ailleurs. Merci.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Lafontaine.
M. Léger: M. le Président, je veux d'abord
féliciter la Commission des services juridiques de son excellent
mémoire. Cela fait du bien, dans une commission parlementaire où
on étudie un projet de loi dont l'objectif est la protection du
consommateur, d'entendre des gens qui ont le préjugé favorable
aux consommateurs. Parce que, jusqu'à maintenant, nous avons entendu des
groupes qui sont indirectement intéressés à la protection
du consommateur et directement intéressés à
réaliser des bénéfices ou une continuation dans leur
commerce ou dans leur fonction première qui est celle de vendre des
produits ou de fabriquer des produits.
Je pense que ceux qui sont venus jusqu'ici avaient soit des droits
à défendre ou des privilèges à défendre ou
voulaient nous sensibiliser à des préoccupations ou à des
problèmes que la loi leur apportait, mais, directement aujourd'hui, on
voit un organisme qui a un intérêt direct à la protection
du consommateur, c'est très sain, parce qu'on voit une perception et une
préoccupation très différente qui entre directement dans
l'objectif qu'on veut viser.
D'abord, je voudrais peut-être avoir quelques
éclaircissements sur des affirmations que vous faites. A la page 14,
entre autres, vous sortez un problème bien précis qui est celui
d'une vente à tempérament évitée par la vente d'un
produit et, par la suite, d'un emprunt qui est complètement
différent, mais qui a le même objectif, c'est-à-dire de
faire payer le produit qu'on achète. Je pense que le gros
problème, parce que la définition que vous mettez devant nous, je
ne sais pas jusqu'à quel point elle couvrirait ce problème. Il
reste toujours à faire la preuve du lien qui existe entre l'achat de tel
bien et spécialement la dette qui s'ensuit. Dans la pratique, avez-vous
été capables de prouver qu'il y avait un lien comme tel? Y a-t-il
eu des poursuites dans les cas que vous avez mentionnés?
M. Lafontaine: Présentement, ce n'est pas utile. Il n'y a
pas de loi qui changerait quelque chose, si on prouvait cela autrement dit. Par
contre, je vous dis qu'il y a une présomption en partant qui est
favorable. On dit: Un contrat de prêt personnel est
péremptoirement sensé être un contrat de vente à
tempérament si telle chose arrive. Donc, je n'ai plus à prouver
que cela a été fait dans le but d'éviter la vente à
tempérament, mais simplement à prouver le fait... Si je prouve
autrement dit que ce sont des personnes liées... A titre d'exemple, je
vais prendre la Loi de l'impôt qui dit: Vous êtes liés si
vous avez tel pourcentage ou si vous faites telle chose ou telle chose. Cela me
suffira. Je n'aurai pas besoin de prouver qu'on a fait cela dans le but
d'éviter une vente à tempérament. J'aurai à prouver
que, lors de la vente d'un bien, il y a eu un prêt personnel et que c'est
une présomption de fait, autrement dit, que ces deux parties ont entre
elles des relations régulières et même commerciales dans ce
cas.
M. Léger: Mais avez-vous eu des cas... Parce
que vous donnez deux exemples différents, celui d'un achat d'un
objet qui...
M. Lafontaine: Oui.
M. Léger: ...vaut $500 et dont le prêteur dit: Je ne
prête que $300. La différence doit être payée soit
à tempérament ou au comptant et, quand c'est à
tempérament et qu'il reste $150 à payer au commerçant,
c'est le fait que le consommateur ne paierait pas la totalité de ses
$150 qui fait que le commerçant peut reprendre le bien tout en ayant
été payé $300, tandis que l'autre cas est celui où
on emprunte la totalité de la somme et, à ce moment, le
commerçant a reçu la somme totale.
M. Lafontaine: C'est exact.
M. Léger: Mais il y a une différence dans les deux
cas?
M. Lafontaine: Oui, c'est que, dans le deuxième cas, il y
a quand même l'obligation, de la part du commerçant, par exemple,
de livrer l'objet ou de garantir l'objet qu'il va livrer. S'il y avait eu un
contrat de vente à tempérament et si le commerçant l'avait
porté à la compagnie de finance qui lui aurait donné de
l'argent pour le contrat, la compagnie de finance, étant donné
qu'il s'agissait d'une vente à tempérament, était
obligée de garantir l'acheteur sur le bien vendu, était
obligée, par exemple, si le marchand ne la livrait pas, de la livrer ou
de la faire livrer par quelqu'un d'autre. La compagnie de finance a dit: Pour
nous autres, ce sont trop de risques, on ne s'amusera pas là-dedans.
D'accord? Tu feras la vente que tu voudras. Nous autres, on va lui faire un
prêt personnel. D'accord? Mais si, par hasard, l'objet a des
défauts dedans ou s'il advient une faillite et que l'objet n'est pas
livré, le gars n'aura pas son objet mais il va être obligé
de payer à la compagnie de finance par exemple.
Autrement dit, on avait déjà prévu dans l'ancienne
Loi sur la protection du consommateur une façon d'empêcher ces
choses. Aujourd'hui, on a inventé quelque chose de plus fin, de plus
subtil, on va faire un contrat de prêt personnel pour passer à
côté. C'est cela en fait qui arrive.
M. Léger: Avez-vous eu des cas où la compagnie de
finance a prêté la totalité du prix que le consommateur
doit payer au commerçant et dont le commerçant a
été payé en totalité et que, par la suite, le
commerçant ait repris le bien alors qu'il ne lui doit plus rien?
Non.
M. Lafontaine: Non, à ce moment, il ne peut pas reprendre
le bien s'il a été payé en entier, parce qu'il n'y a plus
de lien. Le contrat...
M. Léger: C'est uniquement s'il y a un solde de
paiement...
M. Lafontaine: C'est toujours quand il y a un solde. S'il est
payé en entier, cela ne se peut pas.
M. Léger: D'accord. Vous parlez aussi de taux
d'intérêt et d'intérêt à un certain moment. Il
y a des choses qui n'existent pas nécessairement dans la loi. Quelle est
votre opinion là-dessus, sur des points qui auraient peut-être
dû être dans la loi? Pensez-vous qu'il devrait y avoir un taux
maximal d'intérêt pour éviter les abus qui existent
actuellement en pratique? Vous êtes-vous penché sur le fait qu'il
devrait y avoir un taux maximal d'intérêt prévu dans la
loi?
M. Lafontaine: Je n'ai pas de recours sur la constitution qui est
à l'étranger, je ne peux pas vous le dire. Parce qu'effectivement
c'est un problème constitutionnel de limiter le taux
d'intérêt.
M. Bonnier: Le taux d'intérêt sur quoi, M. le
député de Lafontaine?
M. Léger: Sur un prêt.
M. Bonnier: Là, vous entrez dans une autre
juridiction.
M. Léger: Maintenant, concernant les ventes au comptant,
nous pensons qu'il devrait y avoir un contrat qui lie et le commerçant
et le consommateur pour une vente au comptant.
M. Lafontaine: II y en a toujours un.
M. Léger: Mais, dans la vente au comptant, il n'y en a pas
toujours un.
M. Lafontaine: Bien oui. Il faut s'entendre, un contrat peut
être verbal.
M. Léger: Oui, mais est-ce couvert comme tel au point de
vue de la garantie sur un bien durable? Dans la loi actuelle, il y a un contrat
entre une personne qui achète en payant comptant un bien durable et, par
la suite, si la garantie n'a pas été octroyée gratuitement
par le commerçant ou le manufacturier, il n'y a pas
nécessairement une garantie.
M. Lafontaine: Oui, effectivement, c'est à cela qu'il faut
faire attention. Vous avez une garantie légale ou une garantie
conventionnelle comme on l'appelle. Une garantie légale, c'est celle qui
existe en vertu de la loi. Autrement dit, vous n'avez pas besoin de contrat
pour la faire valoir; elle existe en vertu de la loi. La garantie
conventionnelle, c'est celle qui existe en vertu d'un contrat sur lequel on
s'est entendu entre nous.
Par exemple, vous avez une garantie légale quand vous achetez une
automobile. Si vous achetez une automobile comptant je peux même
l'acheter d'un particulier; je l'achète de vous personnellement d'accord
et qu'il y a des défauts cachés dans votre automobile,
j'ai une garantie légale même si je n'ai pas de contrat qui me
protège contre les défauts cachés qui existaient dans
cela. Je prends l'exemple que le Code civil donne: Si j'achète un animal
qui est atteint de tubercu-
lose, si cela se déclare dans les 90 jours, l'autre est
obligé de me rembourser et je suis obligé de lui redonner son
animal qui a la tuberculose. C'est une garantie légale, je n'ai pas
besoin de contrat. C'est un contrat verbal simplement.
M. Léger: Je prenais le contrat, mais je devrais
simplement parler plutôt d'écrit. Une facture n'est pas
nécessairement un contrat.
M. Lafontaine: C'est un écrit.
M. Léger: C'est un écrit. A ce moment, est-ce que
vous pensez que la loi devrait couvrir les ventes au comptant qui sont faites
pour un bien de $300 et plus pour qu'il y ait un écrit permettant que ce
bien durable soit couvert par une garantie parce qu'il y a eu un
écrit?
M. Lafontaine: Moi, je vous dis qu'il l'est présentement,
qu'il y ait un contrat écrit ou qu'il n'y en ait pas. Parce
qu'effectivement toute vente comporte une garantie déjà en vertu
de la loi. C'est une garantie contre l'éviction, qui garantit que celui
qui l'a vendue en était bien propriétaire, qui garantit aussi
contre les défauts cachés que comporte la chose. Peut-être
que je ne comprends pas bien.
M. Léger: Maintenant, sur un autre point, vous avez
parlé, entre autres, des gens qui s'endettent d'une façon
perpétuelle, qui réempruntent pour continuer à payer ou
à boucher d'autres trous. Est-ce que vous pensez que, pour éviter
cela, on devrait peut-être, au niveau de la Loi sur la protection du
consommateur, se pencher sur un minimum de paiement comptant, je ne sais pas,
de 15% à 20% de la valeur, une période maximale, par exemple, de
trois ans pour faire les paiements, pour s'assurer qu'une personne
n'achète pas de produits inutiles, de produits qu'elle n'est pas capable
de payer et dont la publicité a créé chez elle un besoin?
Autrement dit, une personne qui ne serait pas capable de faire des paiements en
dedans de 36 mois d'un montant X, parce qu'elle n'a pas les moyens, si on lui
dit: Tu peux le payer pendant cinq ans, on ne lui rend pas un service. Le
commerçant se permet de vendre un produit et le client n'est pas capable
de donner un certain montant comptant, c'est parce qu'il n'avait pas les moyens
de l'acheter. C'est vrai qu'il faut éduquer les gens, mais il ne faut
pas aussi faciliter le crédit à un point tel que les gens sont
démunis devant une publicité qui les incite à acheter de
façon très forte, n'ayant pas les moyens, tandis qu'avec une loi,
s'ils ne peuvent pas remplir telles ou telles conditions, c'est que
d'eux-mêmes ils n'avaient pas la possibilité de l'acheter.
M. Lafontaine: C'est une question de fond, quant à moi,
que vous posez là. Il y a différents principes en cause. D'abord,
il y a un principe qui s'appelle quand même la liberté de
s'engager, puis qui s'appelle aussi la liberté contractuelle. Si les
deux parties sont égales, je préfère la liberté
à un dirigisme dans une loi. Je pense tout de suite en partant que c'est
cela.
Deuxièmement, si vous tombez dans la question des petits
prêts ou dans la question d'intérêt, je me demande s'il n'y
a pas une difficulté constitutionnelle. Ce n'est pas parce que je veux
éviter la question que je vous dis cela. Je dis simplement que c'est un
fait que ces choses existent. Maintenant, quand est-ce que cela va commencer,
puis quand est-ce que cela va arrêter? Qui va être assez fin, un
bon matin, pour dire: Pour un tel, cela va être tel montant, puis, pour
un autre, cela va être un autre montant? Quant à moi, vous ne
pouvez pas faire un principe général; je pense que cela devient
très difficile. Je ne sais pas comment on pourrait s'y prendre. Je suis
prêt à écouter vos suggestions, mais ce n'est pas
facile.
M. Léger: On semble quand même être d'accord
sur le principe que le consommateur, devant une multinationale l'exemple
le plus extrême devant même la société qui est
axée directement sur une publicité, un marketing et des produits
qui ne sont pas nécessairement des produits nécessaires et utiles
mais pour lesquels on crée des besoins, devant cela, devant la
complexité des contrats et devant toutes ces attitudes où les
compagnies ou les commerçants sont beaucoup plus habiles dans le domaine
de leurs produits, dans le domaine des contrats, le consommateur, dis-je, est
un peu démuni.
Ce que je voulais mentionner par là, c'est le fait que, si une
personne n'a pas les moyens de payer mensuellement un produit qu'elle paie
pendant 36 mois, c'est parce qu'elle n'avait pas les moyens de l'acheter. C'est
tout simplement parce que, très souvent, ces gens sont tellement
incités à acheter un produit qu'ils sont prêts à
acheter... D'ailleurs, la publicité dit souvent: Cela coûte $22
par mois pour avoir telle chose, sans mentionner la période de temps, ce
qui devrait être illégal. Mais quand même, c'est tout
simplement la capacité de payer mensuellement qui devient le
critère pour dire: Je suis capable de l'acheter. Parce que, trop
souvent, les gens n'ont pas l'argent comptant.
Ce que je voulais mentionner dans cette façon de présenter
une certaine défense pour les consommateurs démunis, c'est que ce
critère de trois ans ou de quatre ans permettait de savoir quel est le
montant qu'une personne peut se permettre de payer et d'éviter, par la
suite, qu'elle embarque à la remorque des compagnies de finance pour
s'en sortir. Je vous donnais l'exemple de 36 mois mais cela peut être
autre chose.
M. Lafontaine: Autrement dit, vous voudriez que le
législateur déclare illégal, par exemple, le fait pour une
personne de s'endetter pour plus que tant durant une période X,
étant donné son revenu de tant.
M. Léger: ... les ventes à tempérament.
M. Lafontaine: Cela devient drôlement difficile, quant
à moi, d'application. Je ne sais pas. Il y
a peut-être d'autres façons aussi. Par contre, vous disiez
tantôt: C'est une société de consommation, la
publicité devient agressive. C'est peut-être une partie du
problème, parce que plus on avance, plus on devient raffiné et
plus il faut faire attention. Par contre, d'un autre côté, si on
donne au consommateur ou à l'Etat qui, en fait, quant à moi,
représente le bien commun, l'occasion d'embarquer dans ce domaine et de
faire de l'information et de l'éducation, et qu'on donne le pouvoir aux
directeurs de dire: Tel bien qu'on vous soumet à tel prix, ne vaut pas
cela, n'est pas bon ou c'est de la fraude cette affaire-là, je pense
qu'on va déjà boucher pas mal de trous. C'est mon opinion.
Cela ne veut pas dire que je suis contre le consommateur. C'est
simplement pour dire qu'à un moment donné cela devient difficile.
Il faut aussi se rappeler qu'il y a la notion de profit de la part du
commerçant. Si vous n'avez pas de commerçant, vous n'avez pas de
biens non plus. Il y a aussi cela. C'est toujours la réalité
qu'il y a en dessous de toutes ces choses. Autrement dit, les uns et les autres
ont le droit de vivre, sauf qu'il faut que le balancier se tienne au milieu.
Quand il est parti sur un bord, il faut le déplacer un petit peu. Je
pense que le mieux placé pour faire cela, c'est l'Etat parce que, de
l'autre côté, vous avez un gros morceau.
M. Léger: Une dernière question. Concernant les
voitures usagées qui sont vendues par des marchands et les voitures
vendues par des usagers, vous sembliez dire que pour une voiture vendue par un
usager, celui-ci n'est nécessairement pas aussi professionnel que
l'autre. Donc, on doit être beaucoup plus sévère
vis-à-vis du professionnel ou celui dont c'est le métier de le
faire. Mais comme on nous a apporté des chiffres à savoir que 45%
des voitures usagées sont vendues par des individus, qu'à
l'intérieur de ces 45%, il y a même des voitures qui sont vendues
avec l'aide du marchand d'automobiles et qu'il y a aussi, à
l'intérieur de ces 45%, une bonne partie qui est vendue par des
personnes qui en font un commerce faisant croire que c'est tout simplement une
voiture qu'elles ont a vendre alors qu'elles ont tout un système
d'établi et qu'elles les vendent même à des adresses
différentes il y a des annonces dans les journaux où on
voit la même adresse pour plusieurs vendeurs d'automobiles ne
pensez-vous pas que cela devrait aussi être couvert, même les
automobiles qui sont vendues par des personnes autres que des marchands
autorisés comme tels?
M. Lafontaine: Si le projet de loi reste tel qu'il est
présentement et qu'on se retrouve avec une garantie à 50-50,
présentement, si on reste à 50-50, le particulier qui vend une
automobile usagée qui comporte des défauts cachés est
engagé à 100%, quant à l'obligation de garantie, et le
commerçant à 50%. Il faut d'abord établir cela clairement
avant de partir. Disons qu'on s'en vient avec une garantie a 100%; le vendeur
d'automobile qui est un particulier serait obligé à 100%
lui-même pour les défauts cachés aussi. Cela revient pas
mal au même, disons, entre vous et moi, sauf que lorsque des garagistes
vous disent: Vous nous donnez...
Il y a une autre chose aussi qui est importante au niveau de la
liberté. Le contrat du commerçant est étudié. Je le
sais. J'ai déjà fait des contrats de commerçants
d'automobiles. Il est étudié, et on a pris soin de prévoir
toutes les éventualités.
Le particulier n'a pas la même façon de s'y prendre, comme,
par exemple, les exclusions de garantie. Dans les contrats de vente
d'automobiles, c'est régulier que vous voyiez cela. C'est tellement
régulier que le contrat est imprimé à l'avance. Le
particulier ne sait même pas qu'il peut s'exonérer de la garantie,
d'une manière ou d'une autre. Il ne le sait pas.
Je pense qu'il faut tenir compte de cela quand on dit qu'il y en a un
qui a moins d'obligations que l'autre. Il a peut-être moins de
compétence aussi, tant au niveau juridique qu'au niveau de la
compétence professionnelle comme garagiste. Ce sont peut-être ces
deux principes qu'il faut mettre ensemble.
M. Léger: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Le ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières.
Mme Bacon: J'aimerais peut-être seulement apporter une
précision à une des interrogations de votre mémoire quant
à l'action collective...
M. Lafontaine: Oui.
Mme Bacon: ...que je n'ai pas relevée tout à
l'heure. Je m'en excuse. Nous avions considéré inscrire dans
notre projet de loi l'action collective mais, à ce moment, nous ne
pouvions couvrir que les relations entre commerçant et consommateur.
J'ai déjà fait des démarches auprès du ministre de
la Justice, qui devra déposer une loi sur l'action collective
évidemment, je ne peux m'engager au nom du ministre de la Justice
qui couvrira l'ensemble de la population.
Je pense qu'on ne doit pas se limiter aux relations entre consommateur
et commerçant et que nous devons couvrir l'ensemble de la population.
C'est un peu ce qui nous a fait dire en ce sens de ne pas nous limiter par
notre loi, mais de donner la possibilité au ministère de la
Justice de légiférer.
M. Lafontaine: Je suis pleinement d'accord et, plutôt que
de ne pas en avoir eue, j'ai aimé au moins qu'on ait eu
celle-là.
Mme Bacon: Si cela retarde trop, on le fera.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Taschereau.
M. Bonnier: M. le Président, cela ne sera pas long. M.
Lafontaine, vous avez exprimé beaucoup de satisfaction quant à
l'esprit et la portée de l'ar-
tide 231 donnant au ministre, au directeur et à d'autres
fonctionnaires le pouvoir de divulguer certaines informations dans le but de
faire l'éducation et l'information du consommateur, mais à la
suite d'une enquête seulement.
D'autres groupes nous ont fait valoir qu'il y avait peut-être un
danger, qu'il faudrait peut-être apporter certaines restrictions à
cet article parce qu'il y a peut-être un danger, quant aux droits de la
personne, qu'il y ait vraiment abus dans ce domaine.
Cela vous a-t-il effleuré un peu l'esprit, à savoir qu'il
pourrait y avoir des abus et qu'à ce moment il faudrait quand même
apporter une certaine restriction malgré le bien-fondé des
objectifs poursuivis?
M. Lafontaine: De toute façon, toute loi est un peu
discriminatoire pour certaines personnes par rapport à d'autres...
M. Bonnier: Oui.
M. Lafontaine: ...si on part du plus haut niveau en
descendant.
M. Bonnier: Mais là, on donne quand même...
M. Lafontaine: C'est vrai que de donner des pouvoirs à un
ministre ou à une personne peut couper le cou à une autre
personne. Pour parler franchement, c'est quasiment cela. Autrement dit...
M. Bonnier: A la suite d'une enquête cependant, une
enquête administrative.
M. Lafontaine: Oui, c'est à la suite d'une enquête.
Maintenant, il est évident que, s'il y a mauvaise foi, cela ne peut pas
tenir. Même si une personne est exemptée en vertu de n'importe
quoi et qu'elle commet un geste qui équivaut à de la fraude ou
à de l'abus de pouvoir, elle est toujours sous la sanction des
tribunaux. Même le gouvernement lui-même.
Tu ne peux pas, autrement dit, enlever l'autre pouvoir qui est le
pouvoir judiciaire. Il est évident que devant un abus de pouvoir
et c'est un jurisprudence constante les cours peuvent intervenir, peu
importe ce qu'il pourrait y avoir dans la loi.
Mais vaut-il mieux courir le risque pendant un certain temps que cela
soit ainsi, quitte après cela à voir ce que cela peut donner?
J'ai aussi confiance en quelqu'un qui fera une enquête qui est de
l'extérieur qu'en quelqu'un qui va s'adresser à la
télévision en payant pour faire valoir quelque chose qui n'existe
peut-être pas. J'ai aussi confiance en cela. La liberté est
peut-être des deux côtés.
Le Président (M. Lafrance): On vous remercie beaucoup, M.
Lafontaine, ainsi que votre collaborateur, pour votre présentation et
pour avoir bien voulu répondre aux questions.
M. Lafontaine: Cela nous a fait plaisir.
Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons maintenant les
représentants d'Electrolux Ltée, avec M. Clasper.
Electrolux Ltée
M. Rivard (Jean): M. le Président, monsieur le ministre,
messieurs les membres de la commission parlementaire, mon nom est Jean
Rivard.
Je suis père de six enfants dont quatre aux études.
J'habite la ville de Québec. Je suis directeur de la compagnie
Electrolux et vice-président des ventes pour l'Est du Canada. C'est au
double titre de père de famille et de vice-président des ventes
que je désire vous faire des représentations sur le
mémoire que nous vous avons soumis. Tout d'abord, je voudrais vous
présenter quatre Canadiens français qui ont atteint les plus
hauts postes de commande chez Electrolux. A ma gauche, M. Lionel Béland,
de Montréal, notre président; à ma droite, M. Jacques
Brossard, de Montréal aussi, notre trésorier; et, aux deux
extrémités, à l'extrême gauche, MM. Adrien Drouin et
Polydore Cloutier qui sont deux gérants régionaux des ventes.
Le but de cet exposé est de réviser deux articles
particuliers du projet de loi no 7. Il s'agit des articles 41 et 42. Tout le
monde connaît Electrolux pour avoir servi fidèlement depuis 42 ans
les consommateurs du Québec. Qui, parmi vous, n'a pas eu un jour la
visite de ce bon père de famille qui a frappé à votre
porte pour vous offrir de vous démontrer son équipement dans
votre foyer?
Il y a 20 ans, lorsque je faisais du porte-à-porte, parce que je
suis venu de la route, je suis un vendeur de nature, il arrivait
occasionnellement que quelqu'un me demandait ce qu'était Electrolux ou
encore me disait qu'il préférait remplacer sa glacière par
un réfrigérateur ou se faire installer une toilette à
l'eau avant de s'acheter un aspirateur. Evidemment, les années ont
passé et Electrolux, qui a survécu aux crises économiques
et à la guerre, a grandi avec le Québec. De notre petite usine de
la rue Laurier à Montréal, nous sommes passés à une
usine très moderne à Pointe-Claire et, il y a trois ans, nous
avons dû augmenter la superficie de plancher à 200 000 pieds
carrés. Tout cela pour vous dire que nous attribuons nos succès
aux facteurs suivants.
Premièrement, notre technique de mise en marché par la
vente directe de nos marchands itinérants au domicile du consommateur.
Avec votre permission, j'ouvre ici une parenthèse pour dire que le
marchand itinérant que j'ai été pendant des années
ne brise pas l'intimité du foyer. Nous n'entrons pas avec le pied dans
la porte. La façon de procéder que vous avez sans doute connue et
expérimentée vous-même est qu'un marchand se
présente à la porte, sonne à la porte, discute avec la
dame, demande la permission de venir lorsque le mari y sera pour
présenter son produit. En définitive, le foyer est l'endroit par
excellence pour pouvoir expérimenter et vérifier le produit
qu'on
offre, en présence de tous les membres de la famille.
Deuxièmement, la qualité du produit que nous avons offert
et le service après vente que nos 2100 employés et marchands
itinérants ont toujours offert aux consommateurs par le biais de nos 74
succursales disséminées au Québec. Que ce soient nos
marchands de Gaspé, de Schefferville, de Québec, de
Montréal ou de Noranda, le service est uniforme d'une frontière
à l'autre. Le total des salaires payés à nos
employés du Québec en 1975 fut au-dessus de $21 000 000. Tout
ceci pour vous faire réaliser l'importance qu'Electrolux peut avoir dans
l'économie du Québec.
Nous avons aussi apporté notre large contribution à
l'économie de notre belle province en versant, pour l'année 1975,
en taxe de vente et impôt, $3 800 000. S'il est vrai que nous avons
survécu à des crises économiques et à une guerre,
il est aussi vrai de vous dire, messieurs, dames, que nous ne croyons pas
être en mesure de continuer à faire des affaires au Québec
si les articles 41 et 42 du projet de loi no 7 ne sont pas modifiés,
pour nous permettre de continuer à offrir, de laisser dans le foyer du
consommateur de l'équipement électroménager de valeur,
sans pouvoir toucher, au moment de la transaction, un versement initial ne
représentant, en définitive, qu'une fraction de la valeur de
l'équipement.
Le fait, par le consommatuer, de verser un petit montant d'argent au
moment de la transaction a pour effet de démontrer son sérieux
dans la chose, sans quoi il n'y a rien qui tienne. Quand avons-nous vu un
marchand sérieux vendre et laisser au consommateur une pièce
d'équipement de valeur je ne vous parle pas d'articles de $25 ou
$30, je vous parle d'équipement de valeur sans au moins avoir
reçu un versement initial? De plus, si nous nous plaçons
strictement au point de vue administratif d'une compagnie, aucune compagnie ne
pourrait se permettre de maintenir des inventaires assez élevés
pour suffire à laisser des machines dans les résidences
visitées par tout ce monde.
Ce serait physiquement impossible. Notre système de mise en
marché ne tiendrait plus. L'essence même de notre commerce qui est
du porte-à-porte serait complètement éliminée. Je
suis bien convaincu que ce n'est pas l'objectif du projet de loi. Il faudrait
sérieusement songer à fermer notre usine de Pointe-Claire et nos
74 succursales au Québec. Que dire de la mise à pied de nos 2100
employés.
J'ai été vendeur pendant des années, je me demande
si le projet de loi no 7 passait, si je retournais vendeur, si je ne songerais
pas sérieusement à embrasser une autre carrière. Je me
demande de quelle façon un marchand itinérant peut se promener
dans les maisons, de porte en porte, offrir des produits de la qualité
que nous offrons, de la valeur qu'ils ont, de laisser cela dans la maison
à la merci du consommateur... Vous savez, le consommateur doit
être protégé, nous y sommes. Nous avons
bénéficié des largesses de la loi
précédente. Nous avons profité de cela en ce sens qu'un
nombre indéterminé de marchands que nous qualifions de marchands
"flight-by-night", qui passent, qui laissent la marchandise et qui
disparaissent.
Nous avons eu à souffrir de cela pendant des années. Le
consommateur, la population, surtout les campagnes, là où les
gens étaient moins avertis, avant que la télévision
devienne de plus en plus populaire... Ces gens qui passaient, qui vendaient des
tas d'affaires avec des noms ronflants, qui mettaient de la pression dans les
ventes à la maison, qui forçaient les gens à acheter et
qui leur disaient même: Si vous achetez telle affaire, on va vous
procurer de l'argent, on va être capable de vous obtenir une subvention
pour l'acheter.
Votre loi nous autorise à nous débarasser de ces gens.
C'était de la concurrence malhonnête. Nous avons survécu
à cela. Vous savez, si on était des vendeurs de tableaux, si on
avait des tableaux à présenter dans des foyers, ce serait facile
pour les gens de suspendre le tableau et de ne pas en abuser, de le laisser
là dix jours, quinze jours. Est-ce qu'on l'aime toujours au bout de
quinze jours? Il ne s'agit pas de tableaux, il s'agit d'appareils
électroménagers. Il s'agit d'aspirateurs, de laveuses de
tapis.
Vous figurez-vous ce qu'il va arriver dans une maison si un vendeur se
présente, demande la permission de faire sa démonstration, il est
accepté, se présente le soir, quand l'époux est là,
entre sa marchandise, montre son produit, attire l'attention de la cliente,
excite chez elle le désir de se la procurer... Le petit mari, qui est
dans le coin et qui voit cela, ne peut pas refuser à son épouse
un appareil comme cela. Il désire le lui acheter. Vous avez vécu
l'expérience? Qu'est-ce qui arriverait maintenant de ces braves gens si
on laissait le même équipement là? Avec votre article no 41
qui dit que ces gens n'ont aucune obligation avant dix jours, sauf l'obligation
de l'article 48, de dédommager le commerçant s'ils ont
endommagé des articles. Je me figure immédiatement... Vous savez
que nous sommes à la merci de toutes sortes d'acheteurs. Il y a des
acheteurs, des gens sérieux. Il y a aussi des gens qui n'ont pas
l'intention d'acheter, qui ne peuvent pas se permettre d'acheter, mais qui vont
quand même profiter du fait d'une démonstration pour dire: Cela
m'intéresse, je vais signer votre contrat, on l'essaye et on vous donne
des nouvelles. Le client a dix jours pour y penser, la "cooling-off period".
Qu'est-ce qui arrive? Immédiatement, dès que le vendeur est
sorti, on entreprend le grand ménage saisonnier. On passe
l'équipement à la bru du deuxième étage qui n'en a
pas, et il y a la grand-maman de la porte d'à côté qui n'a
pas ces belles machines-là. Viens essayer cela, lave tes tapis. Au bout
de dix jours, on avertit Electrolux: Venez chercher votre équipement, on
ne le garde pas.
Nous sommes vis-à-vis de l'équipement usagé, de
l'équipement que personne de vous ne voudrait acheter pour du neuf et
payer au prix de détail. Nous sommes en présence d'une famille
qui s'est servie de deux pièces de machinerie de valeur pendant dix
jours et qui nous remet des ap-
pareils qui ne sont pas en bonne condition. Quelle est notre recours? Si
les gens ne l'achètent pas, dans la plupart des cas, c'est qu'ils n'ont
pas les moyens de l'acheter.
L'article 48 dit: On peut avoir recours contre ces gens pour se faire
dédommager de nos réparations. De quelle façon, si cela
monte à $40 ou $50? On va créer plus de tort, plus de dommage
à notre réputation, à essayer d'exiger de ces gens $40 ou
$50. Ces gens vont dire quoi? Ils vont dire à tout le monde, à
tous ceux qui veulent les entendre: Electrolux nous a rentré des
machines, on les a eues en essai dix jours et là, on nous fait un compte
de $30 parce que les machines sont un peu égratignées.
Mais ils ne diront pas que la machine était
égratignée. Ils ne diront pas qu'il y a eu des dommages, ils ne
diront pas que les machines étaient défraîchies. Ils vont
dire: Ils essaient de nous faire payer $30 et ils nous menacent de mettre
ça dans les mains des avocats si on ne paie pas. Alors, ça
devient une situation intenable. Cela devient une situation où on ne
pourrait pas, avec un délai aussi prolongé, laisser de
l'équipement de cette valeur dans des maisons sans avoir à en
subir une perte.
La compagnie Electrolux a remis au gouvernement du Québec une
garantie de $500,000, un demi-million, pour la parfaite exécution de nos
obligations vis-à-vis des consommateurs. Jusqu'à maintenant, nous
avons toujours été à la hauteur de la situation. En tant
que vice-président des ventes, j'ai émis des instructions dans
toutes les succursales: Immédiatement, sur demande d'un client,
rembourser la journée même le montant comptant. Ce sont ses droits
et nous les respectons.
Vous savez, nous avons passé, comme je l'ai mentionné
tantôt, des crises économiques. Nous n'en sommes pas totalement
sortis. Nous avons des gens qui travaillent pour nous, qui visitent des
domiciles tous les jours. Ce n'est pas toujours facile pour ces gens. Si on
leur impose des restrictions aussi sévères que celles qui s'en
viennent, assurément je me demande si ça va apporter de la
protection au consommateur. Prenons un consommateur qui prend de
l'équipement chez lui et qui décide, au bout de dix jours, de se
servir de son privilège de révocation. Je prétends que,
s'ils ont 5 jours pour y penser, ils vont s'empresser de s'en servir, ils vont
s'empresser d'expérimenter les appareils, ils vont s'empresser de
vérifier si, oui ou non, ils vont les garder. Mais, s'ils ont dix jours,
on court une chance qu'ils oublient, la dixième journée, de
prévenir Electrolux qu'ils n'en veulent pas.
On va être en présence d'un client qui va être pris
pour acheter, parce que son contrat est devenu valide, légal,
l'équipement qu'il n'avait pas l'intention d'acheter. Nous aurions des
amendements à vous proposer; vous les avez eus dans le mémoire
que nous vous avons soumis, à la page 12. Les solutions satisfaisantes
suivantes, autant du point de vue de notre compagnie que de celui du
consommateur, pourraient être apportées aux problèmes
mentionnés précédemment. Ce qui suit consiste en une
élaboration de quelques amendements suggérés que nous
aimerions voir appliqués au texte de la loi et nous serions heureux d'en
discuter le contenu avec vous.
Section 40, paragraphe d). La faculté accordée au
consommateur de résoudre le contrat à sa seule discrétion
dans les cinq jours suivant celui où chacune des parties est en
possession de l'exemplaire du contrat qui lui est destiné. Je regrette,
c'est à la page 7. Ce qui arrive, c'est que j'ai demandé à
ma secrétaire de me le dactylographier avec plus d'interlignes, c'est
plus facile à lire. Je regrette, si je vous ai induit en erreur.
Vous avez aussi l'interdiction de percevoir tout paiement partiel ou
total avant l'expiration de la période prévue au paragraphe d),
à moins que la marchandise de grande valeur soit livrée lors de
la signature du contrat. Vous pourriez ajouter cette ligne à
l'intérieur de votre paragraphe et cela vous accorderait quand
même la protection du consommateur en ceci que cela exclurait le marchand
itinérant qui ne laisserait pas de la marchandise de valeur dans un
foyer. Vous seriez complètement couvert par ça. Les compagnies
sérieuses seraient aussi couvertes, les gens qui laissent de la
marchandise de valeur chez les clients, chez le consommateur.
La section 41. Le contrat conclu entre un commerçant
itinérant et un consommateur peut-être résolu à la
seule discrétion de ce dernier dans les 5 jours suivant celui où
chacune des parties est en possession de l'exemplaire du contrat qui lui est
destiné.
Section 42. Le commerçant itinérant ne peut percevoir
aucun paiement partiel ou total du consommateur avant l'expiration du
délai de résolution prévu à l'article 41, à
moins que la marchandise de grande valeur soit livrée lors de la
signature du contrat par le consommateur. A notre humble opinion, MM. les
membres de la commission, ces clauses insérées à votre
projet de loi atteindraient, je crois bien, l'objectif visé par votre
loi, qui est la protection du consommateur, la protection du marchand et aussi
des hommes de loi.
M. Léger: Est-ce qu'il n'y aurait pas une erreur dans
votre texte, à la section 42? Le dernier mot ne serait-il pas
plutôt le commerçant? Je saisis mal votre idée. Ce ne
serait pas: "A moins que la marchandise de grande valeur soit livrée
lors de la signature du contrat par le commerçant"?
M. Rivard: Oui, vous avez raison.
M. Léger: Plutôt que "par le consommateur"?
M. Rivard: Je m'excuse. Electrolux exploite un commerce propre,
honnête et respectable. Le nom d'Electrolux est synonyme de
qualité et service. Nos 42 années d'expérience sont
là pour le prouver. Dans le but de pouvoir continuer nos
activités au Québec, au nom de tous les miens, nous vous
soumettons pour sérieuse considération les deux amendements que
je viens de vous lire. M. le Président, nous vous remercions
sincèrement de
nous avoir accordé le privilège de pouvoir vous soumettre
un mémoire. Je voudrais terminer en vous citant une déclaration
du ministre, Mme Bacon, lors de sa conférence de presse donnée
à la suite du dépôt en première lecture de la loi,
le 30 mars dernier, devant l'Assemblée nationale. "Comme objectif, nous
voulons faire de la Loi de la protection du consommateur un instrument
accessible aux consommateurs, aux commerçants et aux hommes de loi."
Nous sommes de la deuxième catégorie, madame. In medio stat
virtus.
Le Président (M. Lafrance): Sur cette citation, Mme le
ministre, vous avez la parole.
Mme Bacon: M. le Président, toutes les remarques de la
compagnie Electrolux portent sur deux sujets qui concernent la vente à
domicile. J'aimerais peut-être commencer par le délai de
résolution de dix jours accordé au consommateur. On ira par la
suite à l'interdiction qui est faite aux commerçants de percevoir
tout paiement avant l'expiration de cette période.
Commençons par le délai de résolution de dix jours.
Je ne voudrais pas entrer dans un débat juridique, au départ,
mais il y a peut-être une mise au point à faire. Quand on
prévoit un délai de dix jours, cela comprend les samedis, les
dimanches et les jours fériés, tandis que le délai de la
loi actuelle la loi 45 de cinq jours ne comprenait pas les
samedis, les dimanches et les jours fériés. Si on fait la
différence entre les deux, cela nous paraît énorme, parce
qu'on dit: C'est le double, de cinq à dix jours. En fait, la
différence est presque de trois jours ou de deux jours, selon ie
cas.
J'aimerais quand même, ce matin, au départ, sans aller plus
loin, faire cette mise au point. Vous faites plusieurs suggestions, mais quel
délai accorderiez-vous au consommateur pour résoudre son contrat?
Est-ce que vous remettiez au consommateur tous les montants qu'il vous avait
versés lorsqu'il décidait de résoudre le contrat, quand on
pense à la loi actuelle? Est-ce que votre politique a changé avec
l'introduction de la loi, en 1971?
M. Rivard: Voici madame...
Mme Bacon: Avant 1971, donc, et après 1971?
M. Rivard: Avant 1971, depuis l'existence de la compagnie, avant
même que cette loi soit promulguée, nous avons toujours
été une compagnie... J'ai vécu cela, parce que j'ai
été entraîné comme cela. Nous avons toujours
respecté le désir du client. Même il y a dix ans, il y a
quinze ans, il y a vingt ans, quand un client, pour une raison ou pour une
autre, après avoir pensé à son achat toute la nuit nous
appelait le lendemain pour nous dire: M. Rivard, ma femme n'a pas dormi de la
nuit, on n'est pas capable d'acheter cela tout de suite, on voudrait vous
remettre cela, c'était un devoir pour nous de retourner chez le client,
d'aller chercher notre équipement et de lui rendre son argent, le
montant versé.
En réponse à une question précédente,
madame, nous sommes satisfaits de la loi existante et de son délai de
refroidissement de cinq jours. Nous sommes satisfaits de cela. Nous avons
toujours respecté intégralement cette loi. Nous sommes
très sévères pour qui que ce soit de notre personnel qui
ne se conformerait pas aux termes de la loi. Est-ce que cela répond
à vos questions, madame?
Mme Bacon: En fait, vous avez respecté la loi depuis 1971
avec les cinq jours, mais, auparavant, avant cette loi, avant 1971, est-ce que
vous aviez des périodes que vous accordiez à vos clients ou si
vous n'avez...
M. Rivard: Une période normale...
Mme Bacon: ...commencé qu'avec la loi existante, la loi
45?
M. Rivard: Ce qu'on jugeait normal, c'est que quelqu'un nous
appelle le lendemain ou le surlendemain pour nous dire: Votre
équipement, je ne le garde pas. Si quelqu'un nous appelait après
une semaine, après avoir fait le tour de la maison et l'avoir
passé au voisin, on insistait pour faire respecter notre contrat. Depuis
que la loi est adoptée, nous agissons de cette façon.
Mme Bacon: II y a une autre remarque que j'aimerais faire.
Vous estimez que le délai de dix jours va amener une baisse dans
vos affaires. Est-ce que vous ne déduisez pas, à ce moment, que
le consommateur qui n'a plus le temps de réfléchir
décidera de ne pas acheter? Vous avez quand même confiance dans
vos produits, vous dites que vous avez des produits durables, des produits qui
se vendent bien. Est-ce que le fait d'augmenter cette période de
réflexion...
M. Rivard: Cela nous met à la merci de cette
catégorie de consommateurs que nous ne pouvons pas discerner au moment
de la présentation au domicile. J'ai tenté une expérience
hier par téléphone en vérifiant auprès d'une grosse
compagnie multinationale ayant une place d'affaires à Québec.
J'ai appelé ces gens et j'ai demandé leur département
d'appareils électroménagers. Au type qui me parlait j'ai
demandé: Vous vendez des aspirateurs? Il m'a dit: Oui, monsieur. Je lui
ai dit: C'est l'anniversaire de naissance de mon épouse, je voudrais lui
en acheter un aujourd'hui. Ecoutez, est-ce que c'est vrai que vous vendez sans
comptant et, si ma femme n'aime pas sa machine dans un mois, elle peut vous la
retourner? Il a dit: Voyons, monsieur, ce n'est pas logique ce que vous dites
là, vous n'êtes pas sérieux. On va vendre sans comptant
à quelqu'un qui a un crédit établi. Est-ce que vous avez
une carte de crédit chez nous? J'ai dit: Non, je n'ai jamais fait
affaires avec vous. Il a dit: Vous n'êtes pas sérieux.
Alors, je crois, madame, que cela donne la réponse. Nous ne
pouvons pas faire affaires avec
des gens de la même façon que ce genre de commerce, parce
que nous n'avons pas d'expérience de crédit avec des gens que
nous rencontrons pour la première fois. Alors, lorsqu'on frappe à
une porte, les gens qui veulent bien nous recevoir, qui veulent bien voir notre
démonstration, on est consentant à laisser l'équipement,
on est consentant à leur vendre les appareils, nous assumons
nous-mêmes le crédit a Electrolux; nous ne faisons pas affaires
avec les compagnies de finance. Alors, nous sommes consentants à laisser
notre équipement. Quand le vendeur apporte son contrat à la
succursale, nous ne faisons pas une enquête de crédit sur cette
personne, nous acceptons le contrat intégralement, tel qu'il nous est
soumis. Tout ce que nous demandons aux personnes c'est de nous fournir deux
références familiales du client, du consommateur.
Immédiatement, nous lui donnons son crédit. Quand on arrive avec
une période de dix jours de délai, le client prend
l'équipement, comme je l'ai expliqué tantôt, il va s'en
servir dix jours. Le client sérieux, il n'y a aucun problème,
c'est la majorité, mais c'est l'autre pourcentage qui n'est pas
sérieux, c'est celui-là. Vous savez, il y a un autre point,
madame; c'est que, quand il y a de l'équipement dans une maison,
fût-il de première qualité, fût-il même ce
qu'il y a de mieux sur le marché vous me permettrez de le
mentionner il est quand même à la merci de certains
vendeurs plus ou moins honnêtes qui circulent, qui sont des marchands
itinérants. Alors il passe dans la maison et dit: Ah! Madame, vous avez
un appareil Electrolux. Elle répond: Je ne l'ai pas encore
acheté, on l'a en essai. Alors à ce moment, automatiquement,
l'appareil vient de sortir de la maison, parce que le vendeur
compétiteur malhonnête le descend complètement.
Donc, si on accorde quelques jours de plus avant que la transaction ne
soit consommée, automatiquement, nous nous exposons encore à cela
en plus.
Mme Bacon: Vous me surprenez quand même quand vous affirmez
dans votre mémoire: Nous croyons fortement que la prolongation de la
période de cinq à dix jours n'est pas dans l'intérêt
du consommateur je vous cite puisqu'elle aura pour effet
d'encourager ce dernier à remettre sa décision quant à
garder le produit. Vous donnez un début d'explication dans votre
mémoire; moi j'estime que cette explication est insuffisante. J'aimerais
que vous me donniez encore plus de détails. Votre explication est que le
consommateur risque de dépasser inconsciemment le délai
prévu sans prendre d'action légale de résolution. Est-ce
que vous ne pourriez pas me donner plus de détails là-dessus?
M. Rivard: Voici le cas, comme je vous l'ai expliqué
tantôt, je m'excuse; un vendeur entre dans une maison, établit le
contact, se présente le soir, montre son équipement, fait signer
le contrat, la vente est faite.
Si, dans une période de cinq jours, tel que cela existe
actuellement, nous n'avons pas en- tendu parler du client, la vente est faite.
Dans l'esprit du consommateur qui n'est pas sérieux c'est
celui-là qui nous préoccupe le plus et, croyez-moi, il y en a
beaucoup cinq jours, on se souvient que cinq jours, c'est vite fait. Il
faut vite rappeler, il faut vite faire le ménage, il faut vite rendre
l'appareil. Mais, dans l'esprit du consommateur qui a dix jours vous
savez qu'on va le publier, si cela devient loi, tout le monde va le savoir
cette période qui a été étirée à dix
jours donne cette chance au consommateur non pas d'expérimenter encore
plus l'appareil, parce que la décision est déjà prise,
qu'il l'achète ou qu'il ne l'achète pas, mais cela va simplement
lui donner un délai additionnel qui va lui permettre, dans la plupart
des cas, d'oublier qu'il faut le remettre.
C'était l'esprit de cette note que vous avez en face de vous.
Mme Bacon: C'est parce que vous nous disiez que ce n'était
pas dans l'intérêt du consommateur. Mais est-ce que ce n'est pas
cela, l'intérêt du consommateur, que de lui donner plus de temps
de réflexion? Est-ce que ce n'est pas dans son intérêt que
de lui donner plus de temps?
M. Rivard: Mme le ministre, je m'adresse à vous et
à tous les autres membres de la commission qui avez déjà,
sans doute, acheté un appareil, de cette marque ou d'une autre. Soyons
réalistes: Est-ce que cela prend dix jours pour décider si, oui
ou non, on aime un appareil?
Mme Bacon: Je ne voudrais pas revenir à ce que j'ai dit au
début, mais, quand on compte les jours fériés, samedi et
dimanche, la différence entre cinq et dix jours est minime.
M. Rivard: Même là, nous croyons sincèrement
que la période actuelle dans le texte de loi actuel est suffisante pour
permettre à la personne de prendre une décision sérieuse,
à l'intérieur de son foyer, après avoir vu et entendu les
explications du vendeur itinérant et avoir eu le privilège de
l'essayer elle-même, sur ses propres tapis, sur ses propres meubles, dans
son foyer, dans l'intimité de son foyer, le lendemain, lorsqu'elle est
seule, que l'époux est au travail et les enfants absents, qu'il n'y a de
pression de personne. Elle a ce privilège de l'essayer chez elle,
d'expérimenter, de faire toutes les petites expériences qu'elle
désire; il me semble que cela ne prend pas cinq jours. Je vous jure que,
le lendemain, la consommatrice s'en est servi.
C'est d'aillerus la même expérience lorsqu'on achète
une fourrure à une dame. On l'étrenne très rapidement, on
a bien hâte de la porter. Alors, pour l'aspirateur ou la laveuse à
tapis, je crois que la période de cinq jours que nous vivons
actuellement est entièrement suffisante. C'est notre opinion.
Mme Bacon: Si on revient à l'article 42, l'interdiction
qui est faite au commerçant...
M. Rivard: Cela, c'est plus grave.
Mme Bacon: ...de percevoir tout paiement disons qu'on va
laisser le délai et qu'on va venir à cela j'aurais deux
questions sur la politique de votre compagnie actuellement.
Premièrement, quelle est votre politique quant à la
livraison de vos produits? Est-ce que vous les livrez toujours au moment de la
signature du contrat?
M. Rivard: Oui, madame.
Mme Bacon: Ma deuxième question, qui s'enchaîne.
Est-ce que vous exigez du consommateur une certaine somme d'argent lors de la
signature du contrat...
M. Rivard: Oui, madame.
Mme Bacon: ...soit un paiement total ou un paiement partiel?
M. Rivard: Soit un paiement total ou un paiement partiel.
Mme Bacon: Vous l'exigez toujours.
M. Rivard: Oui, madame, sûrement. Nos marchands
itinérants ont des instructions de ne pas laisser d'équipement si
les gens ne versent pas un montant comptant.
Mme Bacon: Et vous livrez toujours la marchandise au moment de la
signature.
M. Rivard: Immédiatement, madame. Sur réception.
D'ailleurs, les gens l'exigent. Les gens vont dire: C'est cette machine que je
veux avoir parce que celle-là, elle doit être meilleure qu'une
autre que vous avez dans votre voiture parce que les vendeurs ont toujours une
meilleure machine pour faire la démonstration que l'autre qui est dans
la voiture. Ce qui est faux, qui n'existe pas, mais, enfin, on se plie à
leurs demandes. Ou encore, ils vont nous dire: J'en veux une neuve.
Celle-là a peut-être fait dix ou quinze démonstrations,
alors qu'on vient de l'ouvrir, de la sortir de sa boîte, qu'elle n'a
servi que chez elle. Allez en chercher une dans votre voiture. Alors, on va en
chercher une qui n'a jamais été déballée et on la
lui donne.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, vous dites aussi que
l'interdiction de percevoir tout paiement avant l'expiration du délai de
dix jours va engendrer de l'incertitude, de la confusion aussi dans les
transactions. Est-ce que vous pourriez nous dire pourquoi les gens seraient
incertains ou confus à ce moment-là?
M. Rivard: Madame, cela va surtout engendrer un paquet
d'embêtements et on ne pourra pas passer à travers.
Mme Bacon: Pour Electrolux.
M. Rivard: Pour Electrolux, oui. On en a discuté
très sérieusement. Je suis directeur de la compagnie. Nous nous
sommes réunis à plusieurs occasions. Nous avons analysé
cette situation très sérieusement. Vous savez qu'actuellement le
problème des inventaires, pour un bon administrateur, c'est de maintenir
des inventaires bas parce qu'un inventaire coûte très cher
à maintenir.
Alors, nous avons une force de vente de 1600 marchands au Québec.
Ces 1600 marchands qui se promènent de porte en porte doivent avoir avec
eux deux machines de chaque modèle dans leur voiture et nous devons en
maintenir sur les planchers de nos 74 succursales suffisamment pour que, le
lendemain, nous puissions leur donner de la marchandise.
Quand on fait la transaction chez un client, on entre deux machines. Le
marchand revient le lendemain matin avec son contrat. Nous lui redonnons
d'autre équipement. Nous passons immédiatement ce contrat, il est
sorti des inventaires et, à moins d'avis contraire, la période
actuelle de résiliation de cinq jours, c'est classé.
Alors, immédiatement, on présume en le recevant que la
transaction sera faite, sera consommée. Alors, on fait parvenir notre
contrat à notre siège social à Montréal et,
immédiatement, tout le processus de paiement du marchand se met en
marche pour pouvoir remettre à ce père de famille sa paie en fin
de semaine pour qu'il puisse mettre du pain et du beurre sur la table pour sa
femme et ses enfants.
C'est notre système. Si on n'a pas de comptant, cela nous
prend... Nécessairement, nous n'avons pas cette entrée de
capitaux qui nous vient tous les jours, de tout le monde. On ne peut pas
opérer sans cela. Et je ne vois pas quel serait le point, pour quelle
raison, quand nous avons déposé auprès du gouvernement une
somme aussi imposante que le demi-million de dollars pour garantir nos
obligations vis-à-vis de la clientèle, pourquoi on serait
obligé de faire cela.
Mme Bacon: J'aimerais peut-être mentionner aussi que,
d'après le projet de loi que nous avons devant nous, les sommes qui sont
perçues...
M. Rivard: ... sont déposées en fiducie. Mme
Bacon: ... sont déposées en fiducie.
M. Rivard: C'est ce que nous faisons actuellement.
Mme Bacon: Alors, comment pouvez-vous vous en servir à ce
moment pour le roulement de votre chiffre d'affaires s'il est
déposé en fiducie?
M. Rivard: Une vente qui ne serait pas consommée est une
vente où il n'y aurait pas cette somme. Alors, il faudrait garder en
filière le contrat de côté et attendre cette période
de dix jours pour savoir si le client va nous donner l'argent ou non. A ce
moment, on ne pourrait pas
rapporter à notre siège social que nous avons tel chiffre
d'affaires de fait.
Nous opérons avec des contrats. Nous opérons, j'imagine,
avec des marges de crédit. Cela relève de la trésorerie et
non de moi. J'imagine que tant de transactions complétées
représentent X au point de vue d'entrée de capitaux. Suis-je
correct, M. Brossard, ou avez-vous des commentaires?
M. Brossard (Jacques): J'aurais une correction à apporter,
M. Rivard.
M. Rivard: S'il vous plaît.
M. Brossard: Comme le ministre le disait, les fonds perçus
au moment de la vente ne servent pas à la liquidité de la
compagnie. Ils sont déposés à la succursale et ils sont
maintenus là durant la période de "refroidissement" afin que,
s'il y a des cancellations, on puisse rembourser immédiatement le
consommateur.
Le problème des inventaires se situe surtout à la
liberté qu'auraient nos consommateurs et nos marchands de laisser un
nombre élevé de nos produits dans beaucoup de foyers et c'est
surtout, selon notre point de vue, pour prouver le sérieux d'une
transaction. Lorsqu'un client est réellement sérieux, veut
acheter, on lui laisse le produit et on lui dit: Voilà, on le laisse
chez vous. On est sérieux en voulant vendre. On est sérieux en
voulant que vous essayez le produit chez vous, mais, par contre, il faut que
vous aussi soyez sérieux. Remettez-nous un montant d'argent, lequel
montant nous garderons en fiducie pendant que vous réfléchissez
à nos produits et, lorsque la période sera terminée, le
contrat sera complété.
Mais cette période de dix jours et la non-perception
engendreront, nous croyons, une augmentation sensible de nos inventaires et
c'est un fardeau extrêmement difficile à supporter.
Mme Bacon: ... administratif.
M. Rivard: C'est plutôt à ce niveau que nos
objections se font valoir.
Mme Bacon: J'aimerais...
M. Rivard: Au niveau des inventaires.
Mme Bacon: Vous mentionnez aussi que ces dispositions dans la loi
sont révolutionnaires, mais on ne fait pas encore de révolution
ici. J'aimerais vous dire que, dans la législation française, il
y a une semblable disposition qui a été mise à
l'épreuve.
Vous affirmez aussi qu'il n'y a aucun problème et que le
consommateur est remboursé rapidement s'il décide de
résilier le contrat. J'aimerais vous signaler qu'à l'office, on
nous rapporte certains problèmes dans de tels cas. Les gens ont des
problèmes à se faire rembourser. Il faut donner des ordres
à des compagnies.
Quand on dit qu'on légifère parce qu'il y a eu des abus,
je pense qu'on le fait suivant les pratiques courantes.
M. Brossard: Mme le ministre, je peux répondre à
votre question. Depuis le début de la loi 45, Loi de la protection du
consommateur, nous avons été appelés devant la commission
qui était dirigée par Mme Niquette Delage, à ce
moment-là. C'est l'année passée, en juin 1975 que j'ai
comparu devant la commission. On m'a cité trois cas. Un de ces cas
était un remboursement qui avait été effectué, mais
qui avait excédé la période de sept jours. D'accord? Un
autre était un cas où nous n'avions pas fourni un état de
compte détaillé au client lors de sa demande et il avait eu
certains problèmes. Le troisième cas m'échappe, je dois
vous le dire.
J'avais demandé, à ce moment-là, à Mme
Delage s'il y avait de nombreux cas qui se produisaient et on m'avait
informé qu'il n'y en avait que quelques-uns.
Mme Bacon: Je tiens à souligner que je ne fais pas le
procès d'Electrolux.
M. Brossard: D'accord.
Mme Bacon: Je mentionnais cela en général.
M. Rivard: En général.
M. Brossard: A ce moment-là, les procédures de la
compagnie étaient que la succursale devait nous écrire, au
siège social pour nous aviser de l'annulation ou de l'intention du
client d'annuler son contrat. On émettait un chèque du
siège social pour le retourner à la succursale. Le marchand
allait chez le client et remettait le chèque au client. Tout cela
créait une période qui excédait le délai
prévu par la loi. A la suite de notre présence devant Mme Delage,
nous avons émis des instructions aux succursales, les autorisant
à rembourser à même les fonds dans la succursale. Ceci,
à notre avis, a éliminé les problèmes qui
étaient causés précédemment. Je dois vous avouer
sincèrement que, dans ma fonction, je n'ai jamais reçu, par la
suite, de plaintes du bureau du consommateur.
Mme Bacon: On tente, des deux côtés, de se
sensibiliser davantage à ces problèmes.
La Commission des services juridiques nous faisait des propositions, des
suggestions à l'effet qu'il y aurait lieu de limiter à $400 les
ventes. Aimeriez-vous commenter ce montant, par exemple?
M. Rivard: Une affaire semblable serait très difficile
d'application. Vous vous imaginez que... Je ne vois pas comment cela pourrait
s'appliquer.
Mme Bacon: D'inscrire un montant da la loi...
M. Rivard: D'ailleurs, madame, mettre dans la loi...
Mme Bacon: ...vous ne trouveriez pas cela réaliste.
M. Rivard: ...un montant de crédit à offrir
à ces gens. Est-ce cela?
Mme Bacon: Des montants d'achats faits...
M. Rivard: Le montant total du chiffre d'affaires.
Mme Bacon: Oui, le montant de vente à domicile serait
limité à $400 par foyer.
M. Rivard: Je crois bien que cela ferait de la discrimination. Je
pense à Electrolux, premièrement, où quelquefois les gens
vont acheter les deux appareils a la fois. Je pense aussi à ces gens qui
sont quand même des professionnels de la vente et qui vendent des
adoucisseurs d'eau; il y a même des piscines qui se vendent à
domicile. Non, je crois que ce serait discriminatoire.
Mme Bacon: Vous mentionnez aussi dans votre mémoire des
marchandises de grande valeur. Cela dépend de l'interprétation de
chacun, quand on dit de grande valeur. Quel est le montant moyen d'une vente
chez vous?
M. Rivard: Quand j'ai exposé...
Mme Bacon: Qui détermine si c'est un objet de grande
valeur ou non? Ce sont encore des questions que je me pose.
M. Rivard: Je n'ai fait que citer le texte que vous avez et
moi-même, quand je l'ai mentionné, j'ai éliminé le
mot grande. Je considère que ce sont des objets de valeur.
Mme Bacon: Dans une loi, ce serait difficile de dire: Les objets
de valeur ou de grande valeur. Je pense qu'on ouvre la porte à toutes
sortes d'interprétations.
M. Rivard: Je me demande s'il ne serait pas à propos,
à ce moment-là, de dire peut-être: Toute marchandise d'une
valeur au détail au-dessus de $100 ou au-dessus d'une somme à
déterminer, pour au moins évaluer quelque chose qui en vaille la
peine.
Il est sûr que cet article 42 est discriminatoire contre le
marchand itinérant. Il ne faut pas en vouloir aux marchands
itinérants, parce que ce sont de braves citoyens comme vous et moi, qui
gagnent leur vie de cette façon, de façon très honorable.
Je ne partage pas l'opinion de celui qui m'a précédé au
micro en disant qu'ils viennent briser l'intimité des gens. Je me
répète, je sais, mais j'ai été vendeur assez
longtemps et j'ai toujours respecté cette partie.
Mme Bacon: Je reviens à ma question. Quel est le montant
moyen d'une vente?
M. Rivard: Le montant moyen de nos ventes est de $350.
Mme Bacon: $350.
M. Rivard: Oui, madame.
Mme Bacon: Quand on parle de récupération de
montant versé, je veux justement revenir à cela, parce que c'est
là où il y a eu des abus, où il y a eu des plaintes chez
le consommateur, où il éprouve le plus de difficultés.
J'exclus les particuliers. Il y a des démarches, des
téléphones, des lettres, des appels. Evidemment, l'office est
obligé de s'occuper de ces démarches, mais je pense qu'on est
justifié d'intervenir de la façon prévue dans le projet de
loi. D'une façon ou d'une autre, que ce soit la façon finale ou
qu'on considère autre chose, ce ne sont pas des dispositions inutiles.
Je pense que vous affirmiez presque catégoriquement dans votre
mémoire que ce sont des dispositions inutiles. Je ne voudrais pas que
vous restiez avec cette impression. C'est parce qu'il y a eu des abus, des
problèmes chez les consommateurs qu'il a fallu agir. Je pense qu'on a
mentionné tantôt que c'est l'Etat qui doit le faire à ce
moment. On n'a pas le choix.
Ce ne sont sûrement pas des dispositions inutiles. Qu'elles le
soient dans cette version ou dans une autre, cela répond à des
problèmes auxquels ont eu à faire face des consommateurs. Tant
mieux si tous nos vendeurs sont sans reproche. On a quand même des cas
bien précis, à l'office, où on a eu des problèmes.
C'est un peu cette sensibilisation à ces problèmes que je tente
de faire. Je trouve que vous étiez très très
catégorique dans votre mémoire sur l'inutilité de telles
dispositions.
M. Rivard: Voici, madame. D'abord, ce ne sont pas tous les
vendeurs qui sont sans reproche. Nous le déplorons. Nous visons, par une
sélectivité beaucoup plus suivie, à l'amélioration
de cette profession. Chez Electrolux, c'est un point d'honneur. Par contre, les
problèmes que la commission ou que l'Office de la protection des
consommateurs a connus de la part des consommateurs... Vous savez qu'il y a un
gros pourcentage de ces consommateurs qui ne sont pas sans reproche. Beaucoup
de ces gens se servent de ces lois pour se permettre des abus de toute nature.
Les mêmes lois sociales qui existent et qui font beaucoup de bien
à un peuvent servir de tremplin pour tous les abus imaginables pour
d'autres gens. Nous savons ces choses-là.
La position vous a peut-être semblé radicale, mais nous
sommes convaincus que si cette loi est acceptée dans son
intégrité telle qu'on la connaît actuellement ou telle
qu'elle est soumise dans le projet de loi no 7, assurément, nous allons
être dans une situation très corsée. Nous allons avoir une
situation difficile à vivre et je me demande si nous pourrions nous en
sortir. Permettre que le nombre de marchands que nous avons se promènent
d'une porte à l'autre avec de l'équipement de
la valeur de celui que nous avons et le laisser là pour une
période de temps très prolongée sans toucher aucun
comptant, être à la merci de toutes ces gens, je pense que cela
manque de sérieux.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Lafontaine.
M. Léger: Vous avez surtout parlé de deux points
précis. Sur un vous ne m'avez pas convaincu et, sur l'autre, vous m'avez
un peu ébranlé.
En ce qui me concerne, la période de dix jours, comme l'a dit le
ministre tantôt, je pense que c'est quand même deux ou trois jours
supplémentaires et ce n'est pas cela qui peut retarder
énormément la décision. Elle peut être prise en
dedans de ces huit ou dix jours. Je ne vois pas de problème majeur de ce
côté.
De l'autre côté, sur l'aspect d'une somme qui soit un
acompte ou un total à l'intérieur des dix jours, il y a
peut-être un seul argument qui m'a ébranlé. Ce n'est pas
que cela vous coûte des dépenses pour commencer à ouvrir
tous les dossiers administratifs d'une personne qui peut changer d'idée
après. Cela vous coûte des dépenses. Cela, je pense que ce
sont les risques du métier.
Le fait que vous craignez qu'on laisse un nombre tellement
élevé d'appareils et que vous allez avoir un problème
d'inventaire, c'est-à-dire que chacun de vos 1600 vendeurs soit dans
l'obligation de laisser un ou deux appareils, cela veut dire que vous doublez
ou triplez votre inventaire. A la longue, cela se replace. Après un
certain temps, il va se créer une habitude. Vous allez prévoir
que cela va être à peu près le même montant
d'inventaire, parce qu'il va se créer une habitude de fonctionnement. Il
s'agirait peut-être beaucoup plus de la qualité de vos vendeurs
qui ne laisseraient pas d'appareil à des gens parce qu'ils auront senti
qu'ils ne sont pas capables de le garder, n'étant pas
sérieux.
C'est plutôt l'aspect du sens de responsabilité du
consommateur qui, ayant donné un certain montant, même s'il sait
qu'il est protégé et que s'il refuse, il va être
remboursé.
Il va être obligé de ne pas briser la marchandise,
même si la loi, à l'article 48, dit qu'il peut être
poursuivi pour avoir brisé l'appareil.
Mais il y a le fait, au point de vue psychologique, que la personne qui
a acheté l'a fait peut-être sous pression, peut-être pas
sous pression; mais, une fois qu'elle l'a acheté, elle doit garantir que
cet appareil soit en bonne condition et qu'elle ne fera pas appel à son
désir de se fouter d'un bien. Dans ce sens-là, peut-être,
mais, jusqu'à maintenant, c'est simplement cet aspect. Est-ce que,
d'après vous, le fait de ne pas donner d'argent comme acompte peut
enlever le sens des responsabilités aux gens qui l'achètent?
M. Rivard: Assurément. Les gens vont dire: On a la machine
en essai. Vous avez entièrement raison.
M. Léger: J'ai seulement cette question, parce que dans
l'ensemble je pense que les autres ar- guments concernent des problèmes
inhérents à votre commerce. Mais, comme de raison, il faut que le
consommateur soit sérieux. Il a de la protection avec l'article 48,
à l'effet qu'il peut changer d'idée, mais il doit tenir compte du
fait que l'appareil ne lui appartient pas tant qu'il n'a pas été
engagé par un contrat qui lui dit que c'est au bout de 10 jours qu'il
doit être un acheteur qui conserve l'appareil et qu'il doit le payer.
M. Béland: Je vous remercie de vos commentaires, M. le
député; ils sont très à propos, c'est exactement le
but qu'on veut viser. C'est la question du paiement initial qui nous trouble,
plus que la période de refroidissement, beaucoup plus, pour les raisons
que vous venez de donner.
Le Président (M. Lafrance): M. Rivard et vos
collègues, on vous remercie énormément pour la
présentation de votre mémoire et de vous être
prêtés à la période de questions.
Nous entendrons l'Association des marchands de meubles Bonne valeur,
dont M. Jacques De Bel-lefeuille est le directeur général.
Association des marchands de meubles Bonne
valeur
M. De Bellefeuille: Mme le ministre, M. le Président,
mesdames, messieurs, on vous remercie d'avoir bien voulu nous inviter à
présenter notre mémoire devant votre groupement. Mon nom est
Jacques De Bellefeuille, je suis le directeur-gérant du groupement Bonne
valeur. C'est une association de 120 marchands de meubles et accessoires
électroménagers dans toute la province. Mon compagnon est M.
Tremblay, notre secrétaire, Gaston Tremblay, propriétaire d'un
commerce de meubles ici à Québec.
L'Association des marchands de meubles Bonne valeur désire se
faire entendre au sujet du nouveau projet. Nous employons 1375 personnes
à temps plein, 400 ou 500 à temps partiel et notre volume
d'affaires est au-dessus de $100 millions. La très grande
majorité de nos produits vendus dans nos magasins sont des produits du
Québec et je dirais que la quasi-totalité sont des produits
canadiens.
Nous félicitons le ministère de se pencher du
côté consommateur et il nous fait grand plaisir de voir que la loi
du consommateur sera améliorée. Nous l'endossons quasi à
100%. Nous considérons que notre clientèle, canadienne
d'expression française à 95% chez nos marchands, est fort
intéressante et nous ne voudrions pas la qualifier de clientèle
adulte et la comparer aux enfants de 12 ou 13 ans comme l'avocat a
mentionné tout à l'heure. Nos consommateurs du Québec,
nous le croyons, sont des gens avertis.
Nous endossons toutes les associations de protection du consommateur et
nous avons longtemps travaillé avec Niquette Delage pour
améliorer le sort de nos consommateurs. Il y a un point qui nous
chatouille, dans votre nouveau projet, et c'est l'article 172. "Nul ne peut
payer une ristourne, un boni, une commission, ou accorder quelque avantage
que ce soit à un commerçant en considération de la
cession de la créance résultant d'un contrat assorti d'un
crédit passé entre ce commerçant et un consommateur."
Nous avons beaucoup de difficultés à accepter cet article
et nos raisons sont, nous croyons, très valables, car, à titre de
commerçants, nos profits sont limités. Nous devons nous plier
à la compétition. Nous devons prendre des marges de profit
raisonnables et nous considérons que nos marchands ont droit à
des marges de profit raisonnables.
A la fin d'une année, un marchand de meubles, si vous regardez
son bilan, son rapport d'impôt, après impôt, il lui reste
entre 2%, 2,5% et 3%. On doit compter tous les dollars dans l'exercice du
commerce. Ici, votre projet de loi voudrait nous empêcher d'aller
chercher ce que l'avocat tout à l'heure a appelé un "kick-back",
mais ce n'est pas tellement cela, ce n'est pas tellement un "kickback" qu'on va
chercher. Il a dit que les compagnies de finance nous donnaient... Les
compagnies de finance ne donnent rien. L'ère du
"bénévolat", c'est terminé. On va chercher une ristourne
chez les compagnies de finance, une ristourne sur le volume qu'on leur donne.
Ce volume, on le leur accorde parce que notre clientèle a besoin de
crédit. Nos Canadiens d'expression française ont besoin de
crédit pour se meubler. Il est normal que tous puissent se meubler
confortablement.
Tout ce que nous faisons, c'est que nous aidons des consommateurs
à financer leurs achats à des taux d'intérêt
raisonnables, et c'est mentionné sur tous les contrats de finance. Cela
varie selon les compagnies, mais il est laissé au consommateur le choix
de décider si, oui ou non, il veut faire affaires avec cette
compagnie.
La compagnie remet au marchand une petite ristourne, à la fin de
l'année, basée sur le volume, sans charges additionnelles au
consommateur; c'est faux. Le consommateur ne paie pas pour cela. Le marchand la
perçoit de la compagnie de finance, parce qu'on dirige plus de commerce
chez cette compagnie de finance.
Bien entendu, on peut aider le consommateur à se financer. Il
vient se financer dans le magasin. Il n'a pas à se déplacer. On
ne fait que lui rendre service. N'est-il pas normal d'être payé
pour les documents qu'on doit remplir, parce que ces documents sont
compliqués? Il faut obtenir des renseignements sur le client. C'est le
marchand de meubles qui doit payer son personnel pour faire ce travail. La
solvabilité du client doit être établie. On a des
recherches à faire. C'est encore le marchand qui paie pour cela. Il nous
faut effectuer la comptabilité pour la facturation. On s'occupe de la
réception des montants d'argent. Cela a l'air simple de s'occuper de la
réception des montants d'argent, mais, souvent, ce sont des contrats qui
sont financés pour 36 mois.
Donc, notre marchand doit percevoir les montants d'argent pendant 36
mois, les remettre à la compagnie. Cela peut être une compagnie de
finance et cela peut être une banque. Mais on doit percevoir ces montants
d'argent et les remettre à la compagnie. Cela ne se fait pas sans frais.
Nous avons des frais pour cela aussi.
Il faut tenir compte des contraintes de la loi relativement aux biens.
Il faut accepter le risque d'avoir à absorber des pertes dans le cas de
non-paiement du client, en cas de désertion cela arrive.
Disons que ce sont les exceptions, mais cela arrive. S'il y a
désertion, il faut retourner chercher la marchandise. Encore là,
il y a des frais qui sont impliqués. Il faut contrebalancer les frais de
recouvrement sur le compte, il faut admettre les risques de poursuites
judiciaires pour le recouvrement. Tout ce travail doit se payer. La
façon dont cela se paie présentement, et c'est accepté
partout à travers le pays, c'est par une ristourne de compagnies de
finance ou des banques. Et nous croyons qu'il est absolument nécessaire
pour nos marchands d'avoir ces sommes d'argent pour pouvoir faire un profit
raisonnable à la fin de l'année, parce qu'encore une fois, dans
le meuble, dans le commerce du meuble ou des appareils
électroménagers, tous les dollars comptent. Pour assurer l'essor
économique de notre industrie, qui est la troisième dans la
province, parce que cela fait partie de l'industrie du bois, le meuble, nous
croyons que nos marchands devraient avoir la possibilité de gagner leur
vie sans avoir des sommes d'argent qui leur sont enlevées, surtout quand
cela n'affecte aucunement le consommateur.
On termine, encore une fois, en vous félicitant de vouloir
améliorer le sort du consommateur. On se rend compte que le
ministère de l'Industrie et du Commerce se penche un peu, aujourd'hui,
sur le côté commerce et on vous en félicite. On l'a fait
publiquement à quelques reprises, on apprécie beaucoup les
efforts que le gouvernement, par le ministère de l'Industrie et du
Commerce, section commerce, a fait, à ce jour, pour les
commerçants de la province de Québec, parce que nous
représentons des petits marchands. C'est une association de 120
marchands détaillants et disons que ce sont les marchands
détaillants, la petite industrie, qui ont su tenir l'économie de
notre province. Alors, gardons l'essor de l'économie en
protégeant nos marchands de meubles du Québec. Merci.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. de
Bellefeuille.
Madame le ministre.
Mme Bacon: M. le Président, j'aimerais faire quelques
remarques et peut-être, par la suite, poser certaines questions à
M. De Bellefeuille et à son collègue.
L'article 172. Evidemment, votre mémoire porte
nécessairement sur l'article 172. Nous ne doutons pas que cet article a
des conséquences importantes pour les marchands de meubles. Nous ne
sommes pas surpris non plus de vos critiques très vives, mais nous ne
sommes pas sûrs que vous ayez saisi nettement les intentions de cet
article. A notre avis, nous, l'article 172 vise à corriger des anomalies
dans le système de la distribu-
tion du crédit, système qui constitue une véritable
incitation à ignorer ou à contrecarrer les intérêts
du consommateur. Vous-même apportez un certain éclairage sur ces
pratiques. A la page 4 de votre mémoire, par exemple, vous
déclarez: "Puisque le volume crée des bénéfices au
cessionnaire, le marchand s'attend à partager ces profits." Vous
reconnaissez donc vous-même qu'en tant que marchand, vous êtes en
quelque sorte devenu un associé de la compagnie de finance, et vous
êtes intéressé à rechercher un profit, non seulement
sur vos activités propres qui sont la vente d'articles, mais aussi sur
leur financement qui est fait par un tiers, soit l'institution
financière. Il y a déjà, à mon sens, une incitation
très forte à favoriser l'endettement. Nous touchons,
sûrement, à ce moment-ci, le noeud du problème. Il s'agit
d'un lien véritablement organique entre le marchand et la compagnie de
crédit, et l'article 172 a justement le mérite de toucher aux
éléments de ce problème.
Comme vous le savez, dans le domaine communément appelé
l"'acceptance", le fournisseur de crédit a pour véritable client,
non pas l'emprunteur, mais le marchand. Et c'est pour lui presque exclusivement
qu'il peut, c'est par lui qu'il peut rejoindre le consommateur, et la compagnie
de crédit et donc pratiquement à la remorque du marchand.
Il en résulte que le principal marché du fournisseur de
crédit ne peut être assuré qu'avec le concours du marchand
qui lui, contrôle son besoin de clients. Voilà donc ce marchand
avec un singulier pouvoir de négociation aussi. C'est une porte ouverte,
d'après moi, à la surenchère sur les bonis et sur les
réserves.
Le plus offrant, parmi les fournisseurs de crédit, pourra compter
sur un volume croissant d'emprunteurs et le principal intéressé,
le consommateur, celui qui paie ultimement, n'a aucune part dans ces
négociations entre le marchand et la compagnie. Il ignore même
qu'il y a des frais cachés qui se déguiseraient sous forme
d'intérêt, par exemple. Nous avons eu, au ministère,
plusieurs exemples de l'avidité de certains marchands en matière
de commissions et de bonis. Cette recherche effrénée de ces
bénéfices s'exerce même sur des accessoires aussi peu
importants que l'assurance, qui est quand même un accessoire.
Nous avons beaucoup parlé d'équilibre dans les contrats
entre consommateurs et commerçants. C'est même l'objet principal
de la Loi sur la protection du consommateur que nous avons devant nous. Alors,
comment pourrions-nous tolérer plus longtemps des négociations en
coulisse entre commerçants où le mobile est le profit et non
l'intérêt du consommateur?
D'ailleurs, ce dernier le consommateur n'a malheureusement
pas, généralement, l'expertise pour analyser les composantes du
crédit et pour effectuer aussi des comparaisons qui doivent être
faites à ce moment-là. Le pourrait-il que des transferts de fonds
non divulgués lui échapperaient de toute façon.
Loin de nous je voudrais que ce soit bien compris
l'idée de nier que le marchand peut en- courir des dépenses
à l'occasion d'une vente à crédit, mais pourquoi ferait-il
un profit qui n'a aucune relation directe, bien souvent, avec ces
dépenses? C'est pourtant le cas de bonis et de ristournes. Nous sommes
prêts à vous écouter davantage. Nous vous posons des
questions aussi et nous nous attendons bien d'avoir certaines réponses
qui vont apporter peut-être un autre éclairage. Il nous
apparaît quand même impératif de dissocier le rôle de
marchand du rôle de fournisseur institutionnel de crédit. Que
chacun soit rémunéré selon son apport économique
propre et que le consommateur soit renseigné sur les coûts
véritables nous en sommes mais surtout que cessent ces
transferts pour ainsi dire occultes qui, artificiellement, augmentent les
coûts de crédit, surtout que cesse la surenchère de
ristourne, parce que cela existe, qui gonfle artificiellement et sans raison
les coûts du crédit et cela, d'après notre
interprétation, toujours au détriment du consommateur.
Ce sont quelques réflexions que je voulais livrer, M. le
Président, avant de passer à des questions qui sont vraiment
importantes pour nous et pour les membres de cette commission.
J'aimerais d'abord savoir quel pourcentage de vos ventes est
financé soit par les compagnies de finance ou soit par les banques.
Est-ce que vous avez des statistiques que vous pouvez fournir aux membres de
cette commission?
M. De Bellefeuille: Oui, nous avons des statistiques
approximatives, parce que cela dépend un peu des secteurs, des secteurs
d'une ville donnée, des secteurs de la province. Il y a certains
secteurs où il y a plus de ventes à crédit que dans
d'autres.
Mme Bacon: C'est régionalisé.
M. De Bellefeuille: Oui. Si on prend notre cas, où nous
avons 120 membres qui couvrent toute la province, on peut facilement dire que
plus du tiers des ventes sont faites à crédit.
Mme Bacon: Financées par des compagnies de finance
ou...
M. De Bellefeuille: Par des compagnies de finance.
Mme Bacon: Des compagnies de finance et des banques.
M. De Bellefeuille: Oui. Et des banques. Mme Bacon: Les
deux. M. De Bellefeuille: Oui.
Mme Bacon: Vous ne pouvez pas répartir quel est le
pourcentage pour les compagnies de finance et quel est le pourcentage pour les
banques.
M. De Bellefeuille: Non. C'est assez difficile. Cela
dépend des marchands. Nous avons des
marchands qui font affaires avec des institutions bancaires; il y en a
d'autres qui préfèrent faire affaires avec certaines compagnies
de finance, et il y en a plusieurs. Quand vous dites que les taux
d'intérêt pénalisent le consommateur, cela ne le
pénalise peut-être pas tellement, puisque les taux
d'intérêt des compagnies de finance sont connus au moment
où il signe son contrat. Il n'est pas question de dire: Cela va lui
coûter plus parce que ce marchand a un montant qui lui est remis par la
compagnie de finance pour le travail qu'il a fait, pas des dons. Qu'on soit
très clair.
Mme Bacon: II faut que la compagnie de finance le prenne quelque
part, cet argent-là, cette ristourne.
M. Tremblay (Gaston): Si vous me permettez de m'exprimer,
souvent, un marchand ne donne pas assez de volume à la compagnie de
finance pour que la compagnie de finance envoie un de ses employés
travailler à temps plein dans le magasin.
La compagnie trouve que cela coûte meilleur marché de
donner une ristourne comme cela que de mettre un employé qui serait
payé par la compagnie en question et qui resterait là à
temps plein.
Mme Bacon: On s'éloigne un peu. En moyenne, quel est le
pourcentage de ristourne de commissions payées par une compagnie de
finance?
M. De Bellefeuille: C'est un montant très minime. Cela
peut représenter quoi en pourcentage...?
Mme Bacon: ...de votre chiffre d'affaires?
M. Tremblay (Gaston): Cela dépend de la compagnie avec qui
on transige.
Mme Bacon: Cela varie-t-il suivant les compagnies de finance,
suivant les banques? Ce n'est pas le même pourcentage qui est
donné?
M. Tremblay (Gaston): Non. Ce n'est le même pourcentage.
Evidemment, il y a une "bracket" de chiffres d'affaires aussi. Si le type donne
un certain chiffre d'affaires, il aura peut-être un meilleur pourcentage
en revenu.
Mme Bacon: On nous dit que, dans les contrats de crédit
cédés aux compagnies de finance, c'est cédé sans
recours. Est-ce sans l'endossement du marchand ou le marchand endosse-t-il
chaque fois?
M. De Bellefeuille: Cela dépend aussi des compagnies. Vous
avez des compagnies qui prêtent sans recours et des compagnies qui
prêtent avec recours.
Mme Bacon: Ce n'est pas généralisé.
M. De Bellefeuille: Non. Libre au marchand de décider avec
quelle compagnie il veut transiger.
Mme Bacon: Les marchands pourraient-ils envisager de ne plus
faire de crédit si l'article 172 était adopté? Vos membres
seraient-ils réellement prêts à prendre le risque de perdre
une vente vos concurrents seraient évidemment de cet avis
mais perdriez-vous des ventes si l'article 172 était adopté tel
que rédigé?
M. De Bellefeuille: Oui, certainement, si le client de nos
marchands n'a pas la possibilité de se faire financer. Prenez le jeune
couple qui décide de s'acheter un ameublement. Il arrive chez le
marchand et il fait son choix. Ils sont deux. Ils font leur choix. Ils prennent
ceci et cela et l'ameublement coûte $2000 ou $3000. Si ces gens n'ont pas
la facilité de se faire financer chez nous, ils iront chez des
organisations qui font leur propre finance, Sears, Eaton, Morgan, Simpson, qui
ne sont pas uniquement à Montréal maintenant, mais qui sont dans
toute la province.
Alors, nos marchands de meubles qui sont marchands indépendants
perdront ces ventes au détriment de Bad Boy, une compagnie de l'Ontario,
Sears, multinationale. Alors, on vous demande de bien vouloir nous donner une
chance de se protéger encore.
Mme Bacon: Certains de vos membres appartiennent-ils à des
compagnies de finance ou sont-ils liés à ces compagnies, comme
les filiales, les compagnies du même groupe ou est-ce totalement
séparé de ces compagnies?
M. De Bellefeuille: C'est totalement séparé. Nos
marchands transigent avec la compagnie qui fait leur affaire. Il y a certains
secteurs où vous ne pouvez pas faire affaires. Prenons la
Gaspésie. Si Niagara n'a pas de bureaux, ils ne peuvent pas faire
affaires avec Niagara. Cela dépend un peu de la position de nos
marchands. Il y en a qui font affaires avec HFC, IAC. Ils choisissent la
compagnie qu'ils veulent.
Mme Bacon: Pouvez-vous nous dire quelle est la proportion des
reprises, ce qu'on appelle repossession, par exemple? Y a-t-il des pourcentages
connus à ce moment?
M. Tremblay (Gaston): Le pourcentage est assez faible parce qu'au
départ il y a une enquête qui est faite sur le crédit du
client et, à ce moment, si on se trompe... Cela peut être de
l'ordre de 1% environ.
Mme Bacon: 1%?
M. Trembaly (Gaston): 1%.
Mme Bacon: Dans ce 1%, quel serait le pourcentage de la valeur
récupérée? Cela a-t-il été établi par
vos membres?
M. Tremblay (Gaston): Habituellement, quand on reprend de la
marchandise, on peut la revendre peut-être à 25% ou 30% de sa
valeur réelle parce qu'elle est défraîchie,
réellement.
Mme Bacon: Une dernière question, M. le Président.
Est-il plus avantageux pour vous de vendre au comptant qu'au crédit?
M. De Bellefeuille: Certainement. On préférerait de
beaucoup faire toutes nos ventes au comptant, sûrement.
Mme Bacon: Si, demain, il n'y avait plus de ristourne, si les
ristournes étaient vraiment bannies, continueriez-vous quand même
à faire affaire avec les compagnies financières?
M. De Bellefeuille: Sûrement, mais on devrait augmenter nos
prix. Il faut absolument que cela soit couvert quelque part. On ne peut
travailler, pas plus que personne ici pour rien. Du bénévolat, on
ne peut plus en faire. On n'est pas intéressé à en faire,
à part cela. Si on ne l'a pas de la compagnie de finance, il va falloir
le prendre quelque part. On ne peut tout de même pas perdre de l'argent
à faire financer les consommateurs. Comme je vous le dis, il y a 30% des
consommateurs qui ont besoin d'être financés. On leur rend ce
service, mais on ne peut rendre ce service pour rien à la compagnie
prêteuse.
Mme Bacon: Vous hausseriez le coût des biens que vous
vendez.
M. De Bellefeuille: Pardon?
Mme Bacon: Hausseriez-vous le coût des...
M. De Bellefeuille: II faudrait qu'on prenne l'argent quelque
part. On n'a pas le choix. Si on ne peut pas finir avec nos 2% de profit
à la fin de l'année...
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Lafontaine.
M. Léger: Tantôt, est-ce que j'ai bien compris quand
vous disiez que quand une compagnie de finance vous avait donné une
ristourne, c'est quand même vous autres qui perceviez le montant
auprès du client.
M. De Bellefeuille: Certainement.
M. Léger: Quel est le rôle de la compagnie de
finance? Elle prête de l'argent à vous.
M. De Bellefeuille: Non.
M. Léger: Elle vous donne l'argent, à vous, pour
l'achat complet, mais après cela, vous le percevez du client et, en
réalité, c'est un prêt qui n'est pas fait au client mais
qui est fait à vous.
M. Tremblay (Gaston): Excusez-moi, mais le prêt est fait au
client moyennant que son crédit soit bon et que la marchandise soit
livrée en bonne et due forme. Justement, dans l'exposé de ce
matin, on disait que, marchandise livrée ou pas, lorsque le marchand
avait reçu son paiement et l'argent de la compagnie de finance, il se
foutait un petit peu... Au contraire, parce que même si on livre un
ameublement qui comprend dix à quinze articles et qu'il reste un article
à livrer parce qu'il y a eu un retard dans la livraison par le
manufacturier, la compagnie de finance ne paie pas. Même si cela prend
deux ou trois mois, cela prend également deux ou trois mois pour avoir
le chèque de la compagnie de finance. C'est la question du financement
du client. On parle aussi du client qui, à un certain moment, va voir
une banque. La banque refuse son prêt, peut-être parce qu'il y a un
manque d'expérience, c'est un jeune couple ou quelque chose comme cela.
A ce moment-là, on considère que la compagnie de finance a son
rôle à jouer parce qu'elle prête à ces gens et
qu'elle leur donne la chance de se procurer les meubles qu'ils veulent avoir
pour leur ménage. Je considère qu'elles ont un rôle
à jouer qui est assez important.
M. Léger: Y a-t-il un lien entre le contrat que vous
signez avec le client et le contrat qui est signé avec la compagnie?
Cela devient-il un prêt personnel ou si c'est un lien directement entre
le client, vous et la compagnie de finance?
M. Tremblay (Gaston): Cela devient un prêt personnel entre
la compagnie de finance et le client, avec certaines réserves de
responsabilité et moyennant les ententes qu'il y a au préalable
avec le marchand.
M. Léger: Ce que je ne comprends pas, c'est le fait que
vous ayez une ristourne pour faire la perception.
M. Tremblay (Gaston): D'accord, mais écoutez, je vais vous
expliquer cette ristourne comme ceci: Voyez-vous, le samedi, le jeudi soir ou
le vendredi soir, si on n'avait pas à encaisser les versements du
client, je n'aurais pas besoin de mettre deux filles dans le bureau pour
recevoir ces gens. Nous avons, dans le magasin, des vendeurs et les vendeurs ne
s'occupent pas d'encaisser l'argent. Il nous faut du personnel
spécialisé dans le domaine. Cela coûte meilleur
marché à la compagnie de finance de nous donner une ristourne que
de mettre un employé pour encaisser ces versements, parce que c'est a
temps partiel.
M. Léger: Le ministre a essayé d'obtenir
tantôt un pourcentage ou un chiffre quelconque. Chaque fois, vous disiez:
Cela dépend du volume d'argent que vous faites passer à la
compagnie et cela dépend de différentes raisons. Dans votre
texte, vous dites que vous avez un volume de ventes de $115 millions. Un dans
l'autre, aussi bien le volume d'un marchand, qui est plus gros ou plus petit,
sur $115 millions, dans une année, quelle somme avez-vous reçue
des compagnies de finance?
M. De Bellefeuille: Le tiers.
M. Léger: Combien?
M. De Bellefeuille: Le tiers.
M. Léger: Je veux dire: Combien en extra?
M. De Bellefeuille: On a financé le tiers des $115
millions. Nos ventes sont de $115 millions. Le tiers de nos clients.
M. Léger: Ce n'est pas cette question que je posais. Je me
suis peut-être mal exprimé. Si vous avez un chiffre d'affaires de
$115 millions de ventes dans l'année, vous avez eu le tiers de cela,
soit $40 millions, qui a été passé aux compagnies de
finance au niveau des emprunts pour vos clients. Sur les $40 millions, quelle
est la ristourne que les compagnies de finance vous ont donnée?
M. De Bellefeuille: On ne peut pas vous répondre
là-dessus, parce que nos marchands sont autonomes et ils font affaires
avec la compagnie de finance qu'ils choisissent. Ce n'est pas le groupe qui
fait affaires avec la compagnie de finance. Notre volume total de ventes est de
$115 millions, mais nos marchands font affaires avec différentes
compagnies. Ils ont leurs propres arrangements avec les compagnies de
finance.
M. Léger: Est-ce que vous pouvez me donner l'exemple d'un
marchand qui va vendre dans une année pour $500 000 ou $1 million? Il
aurait combien? Quel est le chiffre que vous pouvez nous donner?
M. Tremblay (Gaston): Si je peux m'exprimer, on a deux magasins
qui se trouvent situés à sept ou huit minutes de marche l'un de
l'autre, un sur la rue Saint-Vallier ouest et l'autre, sur la rue Saint-Joseph.
Je puis vous dire qu'il y a un pourcentage beaucoup plus fort de ventes
financées par la compagnie de finance sur la rue Saint-Vallier que sur
la rue Saint-Joseph. C'est peut-être parce que le magasin qui est
situé sur la rue Saint-Vallier est entouré d'ouvriers, de types
qui travaillent, tandis qu'à l'autre on dessert plutôt
Québec et les environs. On va chercher plus de ventes au comptant au
nouveau magasin que sur la rue Saint-Vallier.
La question de pourcentage sur la compagnie de finance, c'est assez
difficile. Chez nous, ce n'est jamais le même. Si, par exemple on
finance...
M. Léger: Quel est le barème?
M. Tremblay (Gaston): De la ristourne, cela peut être dix,
douze ou quinze. Cela dépend du volume qu'on donne. On nous met des
"brackets". Si j'ai $1 million comme chiffre d'affaires et que je finance un
demi-million de dollars, j'obtiens une "bracket" de X, peut-être 3% ou 4%
de plus. Etant donné qu'on est sur une "bracket" du tiers du chiffre
d'affaires, à ce moment, on va chercher une ristourne qui est meilleure.
Disons qu'elle est jumelée à la "bracket" qu'on devrait
atteindre.
M. Léger: Vous parlez de 10%, 12%. Cela veut dire que, si
vous donnez à une compagnie de finance $500 000 à prêter,
vous retireriez $50 000 pour la perception. Cela ne se peut pas.
M. Tremblay (Gaston): C'est toujours basé sur les frais,
c'est-à-dire que, sur un contrat de finance, s'il y a $54
d'intérêt, on peut peut-être avoir 10% du montant
d'intérêt.
M. Léger: De l'intérêt.
M. Tremblay (Gaston): C'est ça. Exactement. Ce n'est
jamais une ristourne complète sur le montant qu'on leur donne, c'est
toujours selon l'intérêt. Voyez-vous, si on vend un
réfrigérateur, à 24 mois, évidemment, la ristourne
sera meilleure que si on l'a vendu, au même montant, à 12 mois.
Parce que le montant de l'intérêt est plus
élevé.
M. Léger: Donc, si c'est 10% de l'intérêt qui
est à payer...
M. Tremblay (Gaston): Environ.
M. Léger: ...la compagnie de finance aurait facturé
à 16%, si elle avait elle-même conservé le financement et
la collection, mais, parce que c'est vous qui le faites, elle vous donne 2%
additionnels ce qui fait que le client doit payer 18% d'intérêt
puisque l'intérêt doit être payé par le
consommateur.
M. Tremblay (Gaston): Je ne suis pas prêt à dire
ça, parce que, si la compagnie de finance était obligée
d'engager le personnel, si on envoyait tous les clients à la compagnie
de finance, elle serait obligée de s'engager un personnel
proportionné au travail et elle serait obligée de facturer au
même taux. Autrement dit, le montant qu'elle nous donne, c'est le montant
que ça lui coûterait en administration pour garder un personnel
chez elle au lieu de chez nous.
M. Léger: Mais vous devez certainement, pour diriger le
financement à une compagnie plutôt qu'à une autre,
être payé non seulement pour le coût que ça vous
demande pour la perception ou s'il y a un boni en plus. Parce que vous
n'êtes pas tout simplement obligé d'être uniquement
payé pour le coût qu'elle aurait elle-même payé, la
compagnie de finance, si elle avait le personnel voulu, mais, puisque vous le
mettez, elle vous paie pour le coût du personnel, vous pouvez quand
même avoir un montant supplémentaire pour vous embarquer avec ce
problème. Ce n'est pas uniquement pour payer les dépenses de ce
personnel que vous faites ça, il y a un boni en plus de cela.
M. Tremblay (Gaston): Non, si on considère les montants
que coûte aujourd'hui la main-d'oeuvre pour administrer la
comptabilité des ver-
sements reçus au magasin, on est même en-dessous à
l'heure actuelle. Mais ça fait pour nous. On récupère,
dans ce sens qu'on se dit: Le client est toujours en relation avec le magasin,
nos vendeurs le connaissent et le vendeur comprend et connaît tellement
son client, il le voit tous les mois si vous voulez, que si le client a autre
chose à acheter, éventuellement, il y aura le contact avec son
vendeur et il achètera. Pour le vendeur et le client, il se sent plus en
sécurité quand il vient payer au magasin. Personnellement, je
crois qu'il aime mieux ça.
M. Léger: Est-ce que les marchands transigent avec
plusieurs compagnies de finance de façon que le consommateur ait le
choix de différentes compagnies de finance?
M. Tremblay (Gaston): Certainement. Chez moi, si je parle de chez
moi, parce qu'il faut que je parle de chez moi, si un client dit: Ecoutez, je
fais affaires avec Niagara Finance. J'y ai un compte. Il n'y a aucune
objection; on remplit un contrat de Niagara, cela ne nous fait rien.
M. Léger: Dans les deux cas, que le client paie comptant
ou qu'il paie à tempéramment, vous, vous êtes payé
comptant, soit par la compagnie de finance, soit par le client.
M. Tremblay (Gaston): C'est cela, seulement quand la livraison
complète est faite.
M. Léger: D'accord. A ce moment, vous êtes quand
même peu en conflit d'intérêts vis-à-vis du
consommateur, puisque, dans les deux cas, vous êtes payé comptant,
sauf que, dans le cas d'un financement, vous recevez un boni
supplémentaire. Même si vous préférez que les gens
paient comptant vous avez dit tantôt que c'est plus avantageux
pour vous que le client paie comptant vous avez quand même un
intérêt supplémentaire à ce qu'il paie par
tempéramment, puisque, en plus du même prix, vous ne remettez pas
au client, parce qu'il paie comptant, ce que vous auriez eu par ristourne, si
vous l'aviez donné à une compagnie de finance.
Dans les deux cas, il y a nécessairement un avantage de l'avoir
en finance plutôt qu'au comptant.
M. Tremblay (Gaston): Quand le client vient chez moi et
achète un ameublement de $3000 comptant, il me paie et à ce
moment, je ne le revois plus. Je n'ai plus à engager du personnel pour
le recevoir pendant 12 mois, 24 mois ou 36 mois, parce que le montant est
versé chaque mois. Le client fait son versement tous les mois.
Dans le cas contraire, quand le client a payé comptant,
évidemment, il ne nous coûte rien en administration. C'est la
différence. La ristourne qui nous est donnée, c'est simplement
pour dédommager l'administration qu'on a envers la compagnie pour ce
qu'il y en a, parce qu'on lui envoie son argent.
Il y a la différence aussi que, si le client nous fait un
chèque pour la compagnie, au nom du Foyer du meuble, si vous voulez, on
l'endosse, si le chèque n'est pas bon ou s'il n'y a pas de provisions
suffisantes, nous, nous avons envoyé un chèque en bonne et due
forme à la compagnie de finance et, à ce moment, c'est à
nous de faire les démarches auprès du client pour qu'il nous
fasse un autre chèque ou qu'il fasse son versement en bonne et due
forme.
Les montants qu'on reçoit, cela ne dédommage pas à
50%, si vous voulez, l'administration que cela nous coûte seulement pour
percevoir ces versements.
M. Léger: D'accord.
M. De Bellefeuille: On n'a pas seulement à percevoir
l'argent. Un contrat de finance, c'est assez compliqué. Il faut le faire
préparer par un vendeur sur le plancher. Prenez le cas d'un jeudi soir
où le magasin est rempli de monde et où il arrive un couple. Le
vendeur est accaparé par ce couple pendant une demi-heure de plus,
simplement pour lui remplir son contrat de finance; il faut que cela se paie
aussi. Le gars a peut-être perdu une autre vente ailleurs, mais on est
obligé d'endurer tout cela et de payer.
La faible ristourne que les marchands reçoivent, cela leur est
dû; ils ont travaillé pour.
Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.
Mme Bacon: J'aurais seulement deux petites questions et je vais
terminer par la suite. N'est-il pas exceptionnel que les marchands de votre
groupe perçoivent les versements pour les compagnies de finance? Est-ce
que ce n'est pas versé aux compagnies de finance directement par le
consommateur ou si c'est une règle générale?
M. De Bellefeuille: Je ne voudrais pas dire que cela s'applique
à toutes les compagnies de finance, mais il y a une majorité de
compagnies de finance avec qui nos membres font affaires, où nous nous
occupons de percevoir les versements mensuels pour la compagnie.
Mme Bacon: Est-ce que c'est exceptionnel ou si cela se fait en
général?
M. De Bellefeuille: En général. Moi, je vous parle
de nos membres, chez nos membres.
M. Tremblay (Gaston): On parle de nos membres.
M. De Bellefeuille: Je ne parle pas de tous les marchands de
meubles de la province.
Mme Bacon: Est-ce que cela se fait à la demande du
marchand avec la compagnie de finance?
M. De Bellefeuille: Ce sont des politiques de compagnie, cela se
fait comme cela.
Mme Bacon: Ce sont des ententes entre les compagnies de finance
et les marchands, que le marchand perçoive le financement.
M. De Bellefeuille: C'est cela.
M. Harvey (Charlesbourg): M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): Lorsque vous parlez de vos membres,
quels sont les prérequis pour être membre de votre association?
Est-ce que vous mettez en commun vos efforts, votre chiffre d'affaires pour
procéder par exemple à des achats...
M. De Bellefeuille: Non, c'est une association de marchands. Les
prérequis chez nous, il faut que le marchand soit un véritable
marchand ayant pignon sur rue avec des antécédents
honnêtes, un crédit qui nous est acceptable. On fait les
enquêtes de crédit auprès de notre compagnie de
crédit, qui est Créditel, et un véritable marchand de
meubles.
M. Harvey (Charlesbourg): Maintenant, est-ce que vous mettez en
commun aussi vos efforts pour faire des pools d'achats?
M. De Bellefeuille: Nous, nos membres sont absolument autonomes
et font leurs propres achats individuellement, on n'achète rien.
M. Harvey (Charlesbourg): Du côté bancaire ou du
financement, c'est également...
M. De Bellefeuille: Nous, on ne finance personne.
M. Harvey (Charlesbourg): ... l'autonomie de chacun.
M. De Bellefeuille: C'est cela. Nous, c'est une association de
marchands indépendants et on essaie de choisir les marchands les plus
honnêtes de la province.
M. Harvey (Charlesbourg): D'accord. On sait aujourd'hui, c'est un
secret de polichinelle, combien coûte un réfrigérateur.
Généralement, des marchands se prêtent volontiers à
montrer la facture au client. Ils conservent quand même un pourcentage
qu'on appelle raisonnable, minimum, peut-être 10%. Le marchand est
très heureux s'il est payé comptant mais la formule de
financement me paraît, moi, en tout cas, être une forme de
marketing, une forme de mise en marché.
M. De Bellefeuille: C'est simplement une forme de mise en
marché. Ce n'est pas une question d'aller faire de l'argent avec les
ristournes qu'on peut recevoir des compagnies de finance, parce que cela couvre
à peine les frais encourus par les marchands.
M. Harvey (Charlesbourg): Moi, je ne suis pas prêt à
dire que c'est malhonnête. C'est évident qu'il y a des ristournes
qui sont fort impressionnantes de temps en temps, mais...
M. De Bellefeuille: Dépendant du volume. Le marchand qui
fait $1 million comme chiffre d'affaires va nécessairement donner plus
de volume à sa compagnie de finance ou ses compagnies de finances que le
petit marchand qui fait $200 000.
Tout est relatif. C'est payé d'après le volume du chiffre
d'affaires.
M. Harvey (Charlesbourg): Une dernière question, M. le
Président, si vous me le permettez. Est-ce que vous déposez en
fiducie ou si vous avez je ne sais pas si la question a
été posée, peut-être que Mme le ministre vous l'a
demandé un dépôt ou un fonds de réserve pour
ce qu'on appelle communément les mauvaises créances?
M. De Bellefeuille: A titre d'association, non, parce qu'on ne
s'en occupe pas, mais à titre de marchand indépendant, les
marchands le font.
M. Harvey (Charlesbourg): Est-ce que M. Tremblay pourrait
répondre à cette question?
M. Tremblay (Gaston): Oui, c'est-à-dire que pour ce qui
est d'un fonds de réserve pour les mauvaises créances, on n'a pas
de compte de banque spécifiquement pour cela.
M. Harvey (Charlesbourg): Et sur les ristournes que vous percevez
des compagnies? Est-ce qu'on touche toujours à votre article?
M. Tremblay (Gaston): Disons qu'on ne considère pas les
pertes qu'on peut faire, on ne fait aucune réserve...
M. Harvey (Charlesbourg): C'est en dépôt, en fait,
un peu comme une vente. Cela s'ajoute au compte bancaire, dans les
opérations financières...
M. Tremblay (Gaston): C'est dans le débit ou... cela
dépend.
M. Harvey (Charlesbourg): Très bien. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Maskinongé.
M. Picotte: Si je vais chez un de vos membres acheter quelque
chose et que je vous dis: Pourriez-vous me suggérer une compagnie de
finance avec qui je peux faire affaires dans le but de vous payer après?
Vous me dites: A tel endroit, je suis pas mal certain que tu vas faire des
affaires, que cela va fonctionner. Je m'en vais là, individuellement,
avant l'achat et je reviens vous payer. Est-ce que dans l'optique de la
compagnie de finance, vous recevez un boni?
M. De Bellefeuille: Absolument pas parce que là, vous
faites affaires directement avec la compagnie, à Mégantic ou je
ne sais où. Vous empruntez de l'argent c'est un prêt
personnel et vous venez nous payer. On n'a rien là-dessus. C'est
simplement quand on se donne le mal de faire financer un consommateur, qu'on se
donne tout le mal de remplir le contrat, de faire la perception, de tout faire
pour la compagnie de finance qu'on croit qu'on devrait être payé
pour cela.
M. Picotte: Autrement dit, ce sont des honoraires de
service...
M. De Bellefeuille: C'est cela. Ce sont des honoraires.
M. Picotte: ... que vous recevez pour avoir... M. De
Bellefeuille: C'est exactement cela. M. Picotte: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Laurier.
M. Marchand: Si vous perdiez ces bonis et ces ristournes, est-ce
que cela pourrait vous affecter au point que vous auriez de la
difficulté à faire affaires comme les gros marchands comme Sears,
Eaton et La Baie? Est-ce que ce serait vraiment...
M. De Bellefeuille: On ne pourrait pas offrir le service de
financement à notre clientèle qui en a besoin. Si c'était
juste par fantaisie, pour faire plus de profits...
M. Marchand: Vous offririez le financement quand même, mais
non le boni ni la ristourne.
M. De Bellefeuille: Quel financement pourrait-on offrir? Le
financement du marchand? On n'a pas de marchand qui a les reins assez solides
pour le faire.
M. Marchand: Je veux dire que la compagnie de finance vous
avancerait quand même l'argent mais vous n'auriez pas les bonis ni les
ristournes qui font peut-être la marge de vos ventes, qui vous permettent
de rivaliser avec les prix que peuvent donner les magasins que je viens de
nommer.
M. Tremblay (Gaston): Je peux vous dire là-dessus que,
souvent, un client est rejeté par la banque et c'est la compagnie de
finance qui le prend. Dans le cas, par exemple, d'une pauvre femme qui vient
d'avoir une malchance avec son réfrigérateur, son
réfrigérateur est plein de viande, il ne fonctionne plus, il
n'est pas réparable. Alors, si la compagnie de finance ne prêtait
pas à cette personne, celle-ci perdrait sa viande et, en même
temps, elle n'aurait pas l'occasion d'acheter un réfrigérateur,
et on considère qu'un réfrigérateur n'est pas un objet de
luxe.
Dans certains cas, je peux vous dire que les compagnies de finance
acceptent souvent des personnes qui ont été rejetées par
la banque.
M. Marchand: En fait, ce que je demandais, ce n'était pas
tout à fait cela. C'était et je pense que vous avez
répondu que cela nuirait complètement à votre
commerce et que vous auriez de la difficulté à concurrencer...
Les marchands indépendants ne seraient plus capables de concurrencer les
grosses compagnies.
M. Tremblay (Gaston): C'est cela.
M. Marchand: C'est cela?
M. Tremblay (Gaston): Oui, exactement.
Le Président (M. Lafrance): Les membres de la commission
m'excuseront j'ai oublié de ne pas avoir fait un
changement parmi les membres de la commission. C'était M. Caron qui
remplaçait M. Boutin. Alors, pour le bénéfice du journal
des Débats...
M. De Bellefeuille et M. Tremblay, nous vous remercions de la
présentation de votre mémoire et d'avoir bien voulu
répondre aux questions.
Alors, la commission des consommateurs, coopératives et
institutions financières ajourne ses travaux à mardi matin, 10 h
30.
(Fin de la séance 13 h 6)