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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le jeudi 19 août 1976 - Vol. 17 N° 126

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives

et institutions financières

Etude du projet de loi no 7 Loi de la protection

du consommateur

Séance du 19 août 1976

(Dix heures quinze minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, des coopératives et des institutions financières): A l'ordre, messieurs!

Nous reprenons ce matin l'audience sur le projet de loi no 7. Dans l'ordre, nous entendrons la Commission des services juridiques, Electrolux Limitée, l'Association des marchands de meubles bonne valeur.

Est-ce qu'il y a des représentants de chacun de ces trois organismes? La Commission des services juridiques et M. Yves Lafontaine.

Commission des services juridiques

M. Lafontaine: Mme le ministre, Messieurs. Notre présence ici s'explique d'abord par le fait que nous représentons habituellement et dans tous les cas des personnes qui sont économiquement défavorisées et, en vertu de notre loi, nous devons aussi voir à la prévention et à l'éducation juridique de ces gens. Nous devons aussi favoriser si possible des mesures législatives qui pourraient leur venir en aide.

Nous avons une certaine expérience depuis le mois de juin 1973 et nous nous sommes, entre autres, attaqués à certains dossiers collectifs de consommation. Disons, je pense aux ventes pyramidales avec Holiday Magic, je pense au Foyer de la future ménagère, je pense à de nombreux dossiers sur les véhicules usagés et aussi...

Le Président (M. Lafrance): M. Lafontaine, me permettriez-vous de vous interrompre quelques instants?

M. Lafontaine: Certainement.

Le Président (M. Lafrance): Vous êtes représentant, président de l'association?

M. Lafontaine: Je suis vice-président de la Commission des services juridiques. Mon voisin, Me Auger est au service de recherche chez nous, à la Commission des services juridiques.

Le Président (M. Lafrance): Merci.

M. Lafontaine: Je m'excuse de ne pas m'être présenté auparavant.

Maintenant, c'est entendu qu'il n'y a pas de difficulté de notre part, nous représentons le consommateur et, si vous voyez dans nos commentaires un parti pris pour le consommateur, c'est évident, c'est le seul genre de clientèle qu'on représente. Nous avons cru bon de venir à la commission parlementaire, si les nantis peuvent avoir des avocats pour les représenter, nous croyons que ceux qui ne sont pas nantis ont le droit aussi d'avoir des avocats pour les représenter.

Disons que j'ai un commentaire général au départ, nous sommes très satisfaits de la nouvelle loi qui est présentement en préparation. Il y a certainement des sections complètes qui sont une amélioration totale sur ce qui se faisait antérieurement. Autrement dit, il ne faudrait pas croire que notre présence ici soit dans le but de vouloir faire des changements essentiels à la loi telle que présentée.

Il y a des modifications que nous aimerions voir apporter; par contre, comparés à la loi antérieure, c'est évident que les changements sont majeurs. Il est évident aussi que, pour notre clientèle, ce sera beaucoup plus facile de pouvoir obtenir certains droits qui lui étaient refusés précédemment.

Etant donné qu'on est au stade de l'étude de la loi, nous avons pensé faire certaines suggestions et en discuter avec vous, si vous pensez que c'est possible de modifier le projet de loi.

Une première suggestion que nous faisons, c'est que nous disons que cela prendrait peut-être un ministère des consommateurs ou, à tout le moins, une régie ou une commission. Nous n'avons peut-être pas à élaborer tellement longtemps là-dessus. Nous disons, entre autres, que, s'il y avait un ministère des consommateurs, pour fins d'identification, ce serait certainement plus facile, parce que, maintenant, le ministère a plusieurs têtes ou plusieurs directions générales. Il y a aussi le fait qu'une commission est plus séparée, plus à part, plus autonome qu'un ministère à différentes têtes. Nous ne voulons pas élaborer là-dessus, étant donné que, bien entendu, il y a une question budgétaire en dessous de cette affaire.

Il est aussi vrai que la Loi sur la protection du consommateur, telle qu'elle est à l'étude présentement, prévoit, entre autres, différents mécanismes qu'il faudra peut-être créer. Il faudra ajouter, autrement dit, au budget pour l'application de certaines parties de la loi. Si le ministère applique la loi intégralement, cela prendra des enquêteurs. Cela prendra aussi des comptables pour vérifier les comptes en fiducie. Il faudra peut-être aussi avoir certains tests, par exemple, sur des objets vendus. Il y aura, autrement dit, des analyses qui devront être faites et je crois que cela prendra des sommes additionnelles. Je veux dire que, si la loi est adoptée telle quelle, il faudra aussi prévoir un budget en conséquence afin qu'elle puisse recevoir une application aussi totale que possible.

On retrouve avec plaisir l'article 231. L'article 231, c'est le pouvoir de mise en garde du directeur de l'Office de la protection du consommateur, ainsi que du ministre ou d'une personne autorisée à cette fin par le ministre ou le directeur. Il est évident que ceci est une manière rapide d'empêcher des excès.

A titre d'exemple, nous-mêmes, à l'aide juridique, nous avons peut-être un peu devancé cela en ce sens qu'il nous est arrivé dans certaines régions, devant des manoeuvres frauduleuses qui ont été faites, que nous l'ayons dit à la presse et à la radio. Et, effectivement, je dois vous dire que les choses se sont réglées immédiatement. Par contre, il faut dire aussi qu'à certains moments, entre autres, pour les ventes pyramidales, nous avons dénoncé publiquement cette compagnie et nous avons été poursuivis pour $1 million. On s'est organisé avec la poursuite quand même, mais c'est pour dire qu'on comprend très bien l'article suivant, l'article 232, qui prévoit que le directeur pourrait être à l'abri de poursuites si on démontre, autrement dit, que cela a été fait quand même de bonne foi. Il ne faudrait pas qu'il y ait de mauvaise foi de sa part.

C'est une des meilleures armes que le consommateur a en main; il a quelqu'un qui le représente réellement et qui va publiquement dénoncer des fraudes, parce que, dans bien des cas, ce sont tout simplement des fraudes. Je trouve absolument normal qu'une personne dénonce des fraudes et qu'elle se sente à l'abri en dénonçant des fraudes.

Il y a une amélioration que nous suggérons à l'article 205. Nous disons que, si après six mois un consommateur a porté plainte à l'Office de la protection du consommateur, s'il n'y a pas eu de poursuites qui ont été intentées, le consommateur lui-même puisse intenter cette poursuite. A titre d'exemple, si un consommateur allait dans un magasin et faisait un vol à l'étalage, il est bien entendu que le commerçant pourrait intenter une poursuite immédiatement et, le lendemain, la personne qui aurait volé se retrouverait devant le tribunal. Présentement, on confie cela au lieutenant-gouverneur, c'est-à-dire au procureur général. C'est aussi normal que ce soit le procureur général qui agisse en dernier ressort là-dessus. Il y a peut-être une modification possible, c'est qu'on pourrait permettre, par exemple, à celui qui veut poursuivre de le faire, une fois que l'autre aura manifesté son intention de ne pas poursuivre ou qu'il se sera écoulé un délai de six mois. Mais il faut se rappeler qu'en vertu de la Loi des poursuites sommaires il y a quand même toujours une possibilité de préenquête de la part du juge avant de décider si oui ou non il va porter la plainte. Je comprends que le fait de demander que ce soit toujours au procureur général d'intenter la plainte, la raison qu'il y a en arrière de cela c'est qu'on ne veut pas, autrement dit, qu'il y ait de plaintes abusives qui feraient perdre, par exemple, la réputation d'un commerçant pour quelque chose qui serait rejeté par la suite, que la plainte soit rejetée. Moi, je dis: On peut pallier cela — déjà présentement cela existe en vertu de la Loi des poursuites sommaires — par une préenquête que le juge peut faire avant de décider si oui ou non il doit intenter la plainte tel que demandé par le consommateur.

Il y a aussi une autre mesure qui est possible. On peut aussi donner le pouvoir au consommateur de le faire et on peut aussi donner au procureur général la permission de retirer la plainte même une fois qu'elle a été portée, autrement dit, une espèce de nolle prosequi comme cela existe présentement en droit criminel. C'est une suggestion que j'apporte, qui n'est pas dans le mémoire.

Nous avions fait une remarque sur la définition de "véhicule motorisé". Je voudrais simplement retirer cette remarque parce qu'à l'analyse, elle ne tient pas. Effectivement, la définition qu'il y a dans le projet de loi actuel nous satisfait pleinement. Au début, nous avions cru voir quelque chose qui n'allait pas mais nous retirons, autrement dit, la suggestion que nous faisions à la page 5 de notre mémoire sur le véhicule motorisé parce que nous sommes d'accord.

La section dans laquelle il y a, quant à moi, beaucoup de viande, si je puis dire, si vous me passez l'expression, porte sur la vente d'automobiles usagées. Il est bien sûr que vous avez certainement dû avoir et que vous aurez encore des représentations sur la vente d'automobiles usagées. Il faut dire que nous aussi, nous en avons, des représentations, quotidiennement, dans ce domaine. Je dois vous dire que dans notre clientèle, il y a beaucoup de causes sur ce sujet. Quand on reproche au législateur de faire de la législation à la pièce, en apparence, quant à moi, ce n'est pas de la législation à la pièce parce que, effectivement, on vient de frapper un problème qui est crucial parce que c'est un problème qui se retrouve assez régulièrement.

On va dire: Vous semblez être durs vis-à-vis des garagistes alors que vis-à-vis d'un individu qui vend son automobile, vous n'êtes pas durs. A ce moment-là, on dit que la loi est discriminatoire. Ce n'est pas vrai que la loi est discriminatoire. C'est qu'on est toujours plus difficile, on requiert toujours plus d'un professionnel en semblable matière. On n'a pas à demander la même qualité de quelqu'un qui ne connaît pas la chose à fond. La prétention normale — je crois que cela va de soi — c'est qu'un garagiste, c'est une personne qui connaît l'automobile qu'il vend. C'est normal qu'on exige plus de lui que d'un particulier. Le fait qu'un particulier soit protégé parce qu'il va acheter d'un garagiste, je pense que c'est tout à l'honneur des garagistes. Cela ne diminuera certainement pas leur réputation que de dire: Ces personnes sont des personnes fiables. Lorsqu'elles vous vendent, elles vous vendent sans garantie.

Dans le projet de loi, cependant, quant à moi, il y a une modification qui doit être apportée, qui me semble assez essentielle. On garantit la vente d'automobiles usagées dans une proportion de 50%-50%. Autrement dit, l'étendue de la couverture, d'abord, sur le moteur et sur le rouage d'entraînement c'est 50%-50%. Qu'est-ce que cela veut dire? J'ai déjà plaidé des causes de 50-50, j'ai déjà eu des clients qui sont venus me voir avec des causes de 50-50.

Je m'excuse. C'est sur la réparation — 50%-50% — et, quant à être parti, je vais continuer mon raisonnement sur les 50%-50%.

Les 50-50 qu'il y a sur la réparation sont une obligation de garantie qui appartient à celui qui fait la réparation ou à celui qui vend l'automobile.

L'obligation de garantie lui incombe. Or, c'est lui qui est le garagiste. Donc, c'est lui qui va faire la réparation. Il est très facile pour lui, à ce moment, de prendre, autrement dit, la main-d'oeuvre qu'il fournit et de l'étirer ou de la prolonger, d'augmenter le coût des pièces, de telle sorte que cela coûterait exactement la même chose que si c'était 100%.

C'est un argument pratique que j'ai vécu dans les causes que j'ai eues.

Il y a aussi un autre argument. Suivant le droit civil, avant même qu'il n'y ait une Loi sur la protection du consommateur, l'acheteur d'un véhicule était protégé contre les vices cachés de la chose. Etre protégé des vices cachés de la chose, cela voulait dire, entre autres, le moteur, le rouage d'entraînement, le différentiel parce que, ordinairement, ce sont des défauts cachés qu'on trouve là-dedans. Ce ne sont pas des défauts apparents.

Là-dessus, on disait quand même qu'il y avait une exception, en ce sens que le vendeur pouvait dire qu'il ne s'engageait à aucune garantie. C'est-à-dire qu'on le vendait "as is, where is" ou tel que vu. Ce sont des expressions qui étaient employées.

Il y a plusieurs causes dont des causes de la Cour suprême qui disent que, même si ces phrases sont employées, étant donné que c'est vous qui êtes censé connaître la chose, vous n'êtes jamais dégagé de votre fait personnel. Cela veut donc dire que vous êtes quand même obligé à la garantie des défauts cachés, même si vous les avez exclus.

Donc, cela veut dire que, suivant le Code civil tel qu'il existe aujourd'hui, déjà, vous êtes garanti à 100% contre des défauts cachés alors que la Loi sur la protection du consommateur vient la réduire à 50%.

Je pense que, pour cela, il serait assez simple de dire que c'est garanti tout simplement. D'ailleurs, je comprends difficilement comment on peut dire qu'une chose est garantie à 50%. Quant à moi, une chose est garantie ou elle n'est pas garantie parce qu'à certain moment, cela devient difficile de le déterminer. Pourquoi pas 75%, pourquoi pas 25%? Autrement dit, on garantit peut-être ou on ne garantit pas.

Il y a une autre chose, quant à nous, qui devient très difficile d'application. On prévoit que, pour exercer cette garantie, le consommateur devra donner un préavis avant l'exercice de son recours judiciaire.

J'ai pris connaissance du mémoire du Barreau qui a été soumis et je suis d'accord sur ce mémoire. Effectivement, cette question de délai péremptoire, sous peine de perte de droit d'action, nous semble quelque chose d'assez exorbitant et quand même aussi un peu désuet.

On retrouve cet exemple dans la Loi des cités et villes. Il faut dire que, dans la Loi des cités et villes, la ville ne s'est jamais engagée contractuellement à protéger les personnes qui marchaient sur ses trottoirs. Effectivement, même s'il arrive quelque chose dans la municipalité, on dit: Elle devrait être avisée. Autrement dit, afin de pouvoir faire enquête et de voir ce qui est arrivé, suivant les chartes municipales, la plupart du temps, on donne quinze jours. Tandis que, dans la Loi sur la protection du consommateur, il y a déjà une obligation contractuelle que le commerçant passe avec son consommateur. Donc, si la loi est claire à cet effet, il sait fort bien qu'il peut être amené à une action en garantie dans un délai donné.

On dit, dans la jurisprudence, pour les défauts cachés: Dans un délai raisonnable. Effectivement, les cours ont interprété, la plupart du temps, ces délais comme étant entre trois et six mois, à peu près, ce qui était le délai raisonnable pour lequel on pouvait être remboursé pour des défauts cachés.

Pour ces raisons, je crois qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait un délai. Qu'est-ce que cela peut faire au niveau pratique? C'est que toute personne voyant le délai s'écouler et se disant: Est-ce qu'effectivement il y a des défauts ou s'il n'y en a pas? Il va envoyer automatiquement l'avis durant le délai. Il dit: Après cela, on verra ce qui va se développer et je prendrai action ou je ne prendrai pas action. Le délai pour prendre action est très court, aussi. J'ai peur que cela oblige les personnes à faire face à des frais judiciaires peut-être inutilement, alors qu'il serait possible, quant à moi, d'arriver à un arrangement satisfaisant entre les deux parties.

Il ne faut pas oublier que c'est toujours un fardeau, de la part d'une personne, que de devoir s'adresser à un tribunal. Cela prend des démarches particulières. C'est une perte de temps, c'est long, c'est difficile. Je dois dire que, dans la plupart des cas, tous les garages responsables s'organisent avec les clients afin de leur donner satisfaction. C'est une bien bonne raison, ce sont des personnes avec qui ils font affaires, des personnes qu'ils veulent revoir. Je comprends que la Loi sur la protection du consommateur, ce n'est pas pour ces gens responsables, c'est surtout pour protéger le consommateur vis-à-vis des personnes qui essaient de lui jouer des tours. Je pense que, pour cette raison, on devrait d'abord enlever la nécessité d'un avis préalable et, en plus de cela, prolonger la durée du délai pour intenter des poursuites.

Au sujet de la garantie elle-même, nous avons fait une longue gradation, mais nous avons changé d'avis depuis ce temps. Ce que nous proposons c'est que, d'abord, le commerçant garantisse le bon fonctionnement de l'automobile et de ses accessoires plutôt que d'être obligé de définir le moteur, le rouage d'entraînement. Cela devient trop difficile, donc, pourquoi ne pas garantir l'automobile elle-même et ses accessoires, quitte à laisser aux tribunaux l'interprétation qui sera certainement plus facile.

Nous abandonnons, aussi, l'idée d'une gradation suivant le prix. Nous abandonnons pour la simple et bonne raison qu'encore là, il est difficile à l'analyse de maintenir le fait que, suivant que vous payez tel prix, vous avez droit à telle garantie, suivant que vous payez un prix supérieur, votre garantie devrait être supérieure.

Dans tous les cas, ce que nous préconisons, c'est 90 jours ou 3000 milles. C'est bien entendu que, si quelqu'un achète un véhicule Cadillac usagé, d'après ce que nous proposions, il aurait une garantie plus forte que s'il achetait une Honda Civic qui pourrait avoir exactement la même usure, le même âge. A ce moment, il n'aura pas la même garantie sur la Honda Civic. Etant donné que nous représentons les défavorisés, on ne voit pas pourquoi il n'aurait pas la même garantie. Par contre, on comprend qu'il y a aussi une autre chose. Il existe une tradition dans le commerce; il y a des gens défavorisés qui ne peuvent se permettre de payer un prix potable pour une automobile. Il existe, à ce moment, ce qu'on appelle des "minounes".

Effectivement, l'acheteur sait que, pour le prix qu'il paie, il va avoir une "minoune", sauf qu'il se dit: Je prends ma chance; étant donné le prix que cela me coûte, on va voir ce que je peux avoir comme service avec. Il serait normal de prévoir, à ce moment — notre suggestion s'appliquerait à des véhicules qui coûteraient moins de $500 — que le consommateur pourrait renoncer à cette garantie. Nous trouvons que ce serait normal puisqu'il le saurait au préalable. Il le saurait. Autrement dit, c'est lui-même qui aurait accepté cette condition.

Au fond, un des principes de base de cette Loi sur la protection du consommateur, c'est que le Code civil est rendu désuet. Avant, on prétendait que les deux parties étaient égales. Entre parties égales, il était donc possible de négocier et d'arriver à un contrat qui satisferait les deux parties. Aujourd'hui, les deux parties sont devenues tellement inégales, dans le sens que, d'un côté, vous avez les multinationales et, de l'autre, vous avez un consommateur. Effectivement, les multinationales ont des batteries d'avocats pour préparer leurs contrats, etc. Deuxièmement, dans la plupart des cas, il s'agit de contrats d'adhésion. Par contrat d'adhésion, je veux dire que ce n'est pas une question de négocier des conditions. Quand tu es un consommateur, on te dit: C'est cela, ton contrat. Tu le prends ou tu ne le prends pas. Si tu ne le prends pas, tu iras ailleurs. S'il va ailleurs, c'est exactement la même chose; c'est le même contrat qu'on lui propose.

Je comprends très bien qu'on impose des restrictions à cette liberté contractuelle. Autrement dit, c'est pour égaliser les deux parties, pour leur permettre, ni plus ni moins, d'avoir des droits équivalents.

Nous avons aussi décidé de rayer ce qu'il y avait dans notre mémoire à 53b), le dernier bout: "dans un rayon de 100 milles de l'adresse où le contrat a été conclu", à propos des frais de dépannage, de telle sorte que l'obligation de garantie qui appartient au commerçant, il puisse l'exercer de la façon qu'il le voudra. Si lui-même décide d'aller le chercher si cela dépasse 100 milles, cela n'a pas d'importance. Son obligation de garantie, c'est à lui que cela incombe. Il agira de la façon qu'il le voudra.

C'est pourquoi, en conséquence, nous supprimons aussi la suggestion de 53 c) que nous avions faite à la page 9. Il faut se souvenir que si on peut peut-être imaginer des situations qui peuvent sembler excessives pour le commerçant, celui-ci peut toujours aussi décider d'annuler le contrat en vertu de l'article 57 qui existe dans le projet de loi actuel. Donc, s'il y a quelque chose qui lui semble trop coûteux par rapport au coût de l'automobile ou par rapport à ce qu'il croyait que ça lui coûterait, il peut toujours décider de remettre l'argent au consommateur et reprendre l'automobile tout simplement.

A l'article 53 d), même notre propre formulation est défectueuse. Je m'excuse, mais il faudrait lire, à la place: "La garantie prévue à l'article 53 ne couvre pas les pièces et la main-d'oeuvre nécessaires à l'entretien normal", tout simplement. Ce que l'on a mentionné là, c'est une garantie qui s'appliquait aux frais; on ne garantit pas les frais. On garantit, autrement dit, les pièces ou la main-d'oeuvre. Autrement dit, la garantie ne s'applique pas pour ce qui est de l'entretien normal d'un véhicule. On ne spécifie pas ce qui est normal, mais je pense que le juge pourrait l'interpréter.

Quant aux réparations de l'automobile, ce sont les mêmes choses que nous avons dites à propos de la vente des véhicules automobiles. Nous voudrions qu'il y ait une amélioration à propos du droit de rétention. En vertu du droit civil actuel, le garagiste qui a apporté des améliorations à un véhicule, qui prétend avoir apporté des améliorations à un véhicule peut toujours garder le véhicule tant qu'il n'est pas payé. Il y a une disproportion évidente, dans la plupart des cas, entre le montant des réparations qu'il peut faire et la valeur de son gage, ni plus ni moins, ou son droit de rétention. Nous suggérons que le droit de rétention existe seulement pour des montants de réparation supérieurs à $150. De toute façon, le garagiste n'est jamais obligé de faire les réparations.

Il y a une autre amélioration qu'on voudrait voir apporter à la loi, c'est à propos des sanctions civiles qui sont les articles 197 et 198. Après avoir fait étudier le mémoire par les différentes corporations régionales, il nous est souvent revenu la question suivante. Par exemple, l'article 22 prévoit que si un contrat ne respecte pas les exigences prescrites aux articles 15, 16 et 17, le consommateur peut en demander l'annulation. Suivant l'ancienne loi, à l'article 117, s'il y avait une contravention à ces articles, le consommateur pouvait aussi, à son choix, demander la suppression du coût de crédit, s'il y avait eu un crédit d'accordé à l'occasion de ce contrat. Autrement dit, ça permettait au consommateur de garder le prêt ou le bien qui avait été financé, sauf qu'il n'était pas obligé de payer le crédit. Aujourd'hui, on dit que son recours, d'après la déduction qu'on peut en faire, ce serait simplement de demander la nullité du contrat. Nous disons que l'ancienne loi, dans ce cas spécifique, était plus large que la loi actuelle.

Maintenant, cela a aussi pour effet d'amener une espèce de confusion. Vous avez les articles

22, 105, 150, 188 qui disent que pour tel et tel article, c'est ça que vous pouvez faire. Par contre, à la fin, il semble y avoir un article général qui dit que si on manque à cette loi-ci, on a le droit de demander telle chose, telle chose ou telle chose. Nous croyons que les articles spécifiques limitent les articles 197 et 198.

C'est peut-être simplement une difficulté de rédaction. Nous voulions le soumettre pour que ce soit plus clair.

Il y a aussi une disposition que nous voulons voir ajouter, c'est que les tribunaux, c'est-à-dire les juges, même si ce n'est pas soulevé devant eux, aient le pouvoir de faire appel eux-mêmes à la loi qui pourrait exister. Je trouve que ce serait tout à fait normal de le faire.

On entre encore dans une autre section sur laquelle vous avez certainement des mémoires assez coriaces, la vente à tempérament. En pratique, quant à moi, la vente à tempérament cela n'existe plus. La vente à tempérament, c'est la vente par laquelle un vendeur se réservait le pouvoir de propriété sur un bien tant qu'il ne lui était pas payé. C'est bien entendu que son droit de rétention avait de la valeur suivant l'objet qu'il avait vendu. Pour faciliter le commerce, il faut permettre des garanties de crédit les plus larges possible. Ce qui arrive, c'est que le bien lui-même, étant donné la qualité des biens d'aujourd'hui, se déprécie très rapidement. Ce qui arrive, c'est que le commerçant a décidé — et la compagnie de finance aussi, bien entendu — de passer à côté de la vente à tempérament.

Anciennement, étant donné la liberté contractuelle complète, il y avait ce qu'on appelait la vente conditionnelle. La vente conditionnelle a longtemps existé. C'était une vente par laquelle le vendeur se réservait la propriété de l'objet. Advenant le défaut de l'acheteur de payer le prix tel que stipulé au contrat, la vendeur pouvait reprendre l'objet, le revendre à qui il voulait et au prix qu'il le voulait, déduire cela du montant qui lui était dû par l'acheteur et continuer à poursuivre l'acheteur pour le montant qui lui était dû.

Par la Loi de la protection du consommateur actuelle, la loi 45 anciennement, on a dit: Quand un commerçant, dans un cas de vente à tempérament, reprend l'objet, il n'y a plus rien qui lui est dû. Il a repris sa garantie, donc il n'y a plus rien qui lui est dû. Devant cette loi, qu'est-ce que les compagnies de finance ont fait? C'est qu'elles ont passé au prêt personnel, en ce sens qu'on dit: II n'y a plus de vente à tempérament. Vous allez voir un marchand et vous lui dites: Je suis prêt à acheter tel bien, sauf que je ne suis pas capable de le payer tout de suite. Le marchand va dire: Ne t'en fais pas, j'ai ma compagnie de finance. Va à la compagnie de finance. Elle va te faire un prêt personnel et, après cela, tu viendras me payer. Tu viendras me payer en tout ou en partie cependant.

Là on voit pourquoi cela fait si mal d'avoir ajouté les articles 172 et 174 qui prévoient que le commerçant, aujourd'hui, n'aurait plus le droit d'avoir un "kick back" de la compagnie de finance, c'est-à-dire d'avoir une espèce de pour- boire pour tous les contrats qu'il va lui envoyer, qu'il fait financer par cette compagnie de finance. Il ne faut pas se le cacher, c'est un usage reconnu aujourd'hui, un commerçant qui fait financer les biens qu'il vend par une compagnie qui est ordinairement la même compagnie avec laquelle il fait affaires lui donne un boni ou un "kick back" pour tous les contrats qu'il réussit à lui passer.

C'est bien sûr que cela amène un attrait tant pour la compagnie de finance que pour le commerçant, tellement que le commerçant, aujourd'hui, n'est pas intéressé à vous vendre au comptant, parce que cela lui rapporte moins que s'il vous vend à crédit. S'il vous vend à crédit, la compagnie de finance lui donne un "kick back". Qui paie pour? C'est bien évident que c'est le consommateur. On va vous faire accroire qu'il n'y a personne qui paie pour, cela n'est pas vrai. C'est bien évident que ce n'est pas la compagnie de finance qui paie pour, ce n'est pas non plus le marchand qui paie pour, c'est le consommateur.

Autrement dit, pour passer à côté de la vente à tempérament, on a instauré comme pratique courante le fait que, quand vous vendez un bien, vous envoyez votre acheteur éventuel à la compagnie de finance. Vous en retirez, bien entendu, un profit immédiat et, de la part du consommateur, si le contrat est financé seulement partiellement par le prêt personnel... Exemple: J'achète un bien de $500. Je donne $50 comptant. Il reste $450. La compagnie de finance peut dire: Voici, monsieur, je vous finance pour $300. Il reste $150 à payer. D'accord? Au bout d'un temps, le consommateur ne fait pas ses versements. Le marchand qui a fait une vente à tempérament et à qui il est dû $150 reprend son bien. Donc, le consommateur ne lui doit plus rien. Il a repris un bien pour $150, lequel bien peut valoir, on ne le sait pas, $300, $400 ou $500. Mais le consommateur n'a pas fini de payer pour ce bien, parce qu'il lui reste un prêt personnel à la compagnie qui lui a prêté.

Effectivement, on est passé à côté de la vente à tempérament, c'est bien clair. Le marchand a repris son bien et l'autre continue à avoir sa dette pour ce bien vis-à-vis de la compagnie de finance.

Une autre pratique qui se développe aussi: Vous avez des exemples en annexe ici, des lettres qui sont envoyées au consommateur.

C'est que, quand un client est référé comme cela, à la suite de l'achat d'un bien de compagnie de finance, la compagnie de finance lui dit: Votre crédit est maintenant établi, vous pouvez venir en chercher pas mal plus que ce que vous avez besoin pour ce bien, venez nous voir. Il se peut fort bien que nous puissions vous faire un prêt qui va combler l'ensemble des paiements que vous avez à faire à gauche puis à droite, présentement. On ne dit pas que cela se fait gratuitement ou que cela se fait avec un coût, mais il est bien évident que cela se fait avec un coût.

Et si on regarde l'endettement perpétuel de nos clients qui empruntent pour payer et qui réempruntent pour boucher l'autre trou, effectivement c'est une pratique commerciale quant à moi qui peut être condamnable, parce qu'elle incite les gens à emprunter simplement.

Notre suggestion, c'est que, quand il y a un prêt, à la suite de l'achat d'un bien et qu'on est capable de démontrer que la compagnie de finance et le vendeur sont liés, à ce moment, la compagnie de finance ait les mêmes obligations. Exemple: Si je m'en vais chez un marchand de meubles et que j'achète des meubles et qu'effectivement le contrat est financé subséquemment par une compagnie de finance, c'est-à-dire non pas le contrat, la compagnie de finance me prête, un prêt personnel, et là je vais payer mon marché. Si, par hasard, il n'y a pas livraison du bien ou le marchand dans l'entre-temps fait faillite, je suis quand même obligé vis-à-vis de la compagnie de finance, parce que là on n'a pas négocié le contrat avec la compagnie de finance, elle a fait simplement un prêt personnel, mais effectivement les deux parties étaient liées et autrement dit, un vendait les biens et l'autre finançait les biens qui étaient vendus par cette personne. A ce moment, on passe encore à côté du bill 45, c'était l'autre façon qu'on avait découverte de passer à côté du bill 45.

Une petite remarque à l'article 3, en passant. On dit que les professionnels ne sont pas couverts par la Loi sur la protection du consommateur, j'en suis, sauf qu'il y a des activités de professionnels qui ne sont peut-être pas des activités de professionnels par exemple. Vous avez les audioprothésistes qui vous vendent des appareils auditifs, s'ils décident de faire le tour d'une maison de vieillards, par exemple, et puis que leurs vendeurs sont sur le chemin pour vendre des appareils auditifs, à ce moment, je me demande si ce sont vraiment des commerçants. Je pense qu'à ce moment ce sont réellement des commerçants, justement, ce ne sont pas des professionnels. Donc, nous disons que, pour les professionnels, quand ils deviennent des commerçants, à ce moment, qu'ils soient couverts par la loi.

Le vendeur itinérant. La plupart des grandes difficultés que nous avons à propos de la qualité des objets vendus, c'est surtout de la part de personnes qui font de la vente itinérante. Il y a des compagnies responsables, cela va de soi, on n'en entend même pas parler, le consommateur a ce qu'il achète, il n'y a pas de problème. Par contre, il y en a d'autres qui utilisent votre intimité, autrement dit, l'intimité de votre domicile. Vous êtes assis le soir chez vous en famille, vous avez la paix, vous pouvez relaxer, et là, il arrive quelqu'un dans votre intimité, qui décide de profiter de cette situation particulière pour vous faire acheter quelque chose. Tout ce que vous avez dans l'esprit c'est quand est-ce qu'il va sortir, peut-il sortir. Effectivement, vous êtes quasiment prêt à faire n'importe quoi pour qu'il puisse sacrer son camp. Donc, le législateur avait prévu une période de réflexion pour faire annuler ce contrat. Maintenant, je me demande même pourquoi il y aurait des vendeurs itinérants aujourd'hui. Vous avez remarqué que les ventes par catalogue, la plupart des grands magasins ont cessé même cela. Parce qu'anciennement, les gens étaient éloignés, il n'y avait pas de magasins dans les environs, on faisait venir par catalogue. Les vrais vendeurs itinérants qu'on a connus anciennement, il en reste peut-être dans les campagnes éloignées, il arrive quelquefois. Nous disons que nous ne comprenons tout simplement pas pourquoi on vend des choses, comme, par exemple, des maisons mobiles par vendeurs itinérants. Ce sont des achats qui valent de $15 000 à $18 000. Je peux en choisir des plus criants que cela, je crois. Pourquoi est-ce qu'on vend des avertisseurs de fumée qui se vendent $300 à $400 et qui valent peut-être $30 à $40. Dans des maisons, on en profite pour faire une projection de film pour montrer des enfants atrocement brûlés et puis là, les parents regardent cela avec leurs enfants, je vous garantis qu'ils passent pour sans-coeur s'ils n'en achètent pas. C'est une manière de procéder de vendeur itinérant. Peut-être que pour éviter le fait qu'il y ait de bons vendeurs itinérants qui perdent leur réputation ou des choses semblables, pourquoi simplement ne pas la limiter au moins à un montant de $700 quitte à la prochaine loi de l'abolir complètement, parce qu'on ne voit pas la nécessité du vendeur itinérant?

Une autre suggestion aussi, c'est qu'on dise que le délai de dix jours qui est prévu par la loi sur lequel nous sommes d'accord, compte à partir de la livraison du bien, parce que, la plupart du temps, c'est lorsque tu reçois le bien que là tu fais un mauvais saut. Donc, on dit que le délai de réflexion devrait commencer à partir de ce moment-là.

Nous voulons aussi essayer de boucher un trou dans la définition du mot "dirigeant" au début. Surtout en matière pénale, on dit que le dirigeant est responsable lui aussi, par exemple, de la publicité qui peut être faite par sa compagnie. On dit que le dirigeant, cela devrait couvrir aussi l'actionnaire parce qu'en fait, l'actionnaire, ordinairement, c'est celui qui est propriétaire de la compagnie, qui a intérêt, autrement dit.

Une autre suggestion que nous faisons à propos des permis. On dit que le directeur émet des permis et, s'il émet des permis et que le vendeur n'est pas satisfait de la décision, qu'il la refuse, effectivement, il peut aller en appel devant un juge de la Cour provinciale. Nous disons: Pourquoi le consommateur n'aurait-il pas le même pouvoir s'il accorde un permis? Je pense que ce serait normal qu'à ce moment-là, ce soit un pouvoir qui s'équi-vaille de part et d'autre.

Ce qui est maintenant, ce qu'on appelle la règle 78, c'est la fameuse question de la réduction du coût d'intérêt lorsque vous payez une dette avant échéance. Cette méthode de calcul en est une actuarielle qui est extrêmement difficile. D'abord, pour avoir des résultats là-dessus, je dois vous dire que nous, à la Commission des services juridiques, cela nous a pris un grand bout de temps et on a obtenu des résultats différents d'actuaires qui étaient des actuaires extragouvernementaux, nous avons eu aussi des avis d'experts gouvernementaux et, enfin, des compagnies de finances nous ont donné aussi une autre façon actuarielle de calculer. Ce qui arrive, c'est qu'il y a des divergences assez grandes dans ces différen-

tes façons de calculer. Nous, nous disons: On va prendre la règle habituelle qui veut que des intérêts, ce soit le loyer de l'argent. Donc, si l'intérêt est le loyer de l'argent, tu as à payer de l'intérêt pour le temps pendant lequel tu as eu cet argent à ta disposition. Nous ne voyons pas pourquoi le consommateur aurait une pénalité spéciale à payer lorsqu'il paie avant l'échéance. S'il paie avant l'échéance, qu'il paie l'intérêt pour le temps qui a couru à ce moment-là. Il me semble que c'est une pratique absolument normale.

Le reste, à la page 23, ce sont simplement des modifications mineures que nous aimerions voir apporter pour rendre peut-être la loi plus claire et éviter des ambiguïtés. Donc, fondamentalement, nous sommes d'accord avec ce qui a motivé cette loi, et je dois dire la très grande majorité de tous les articles qui sont là. Il y a sûrement un pas en avant qui est fait de la part du consommateur et nous, qui représentons habituellement ces consommateurs devant les tribunaux ou qui sommes en train de régler des choses avec les commerçants, nous disons que cela va nous donner un sérieux coup de main. On va pouvoir réellement faire un ouvrage qui sera plus facile pour ces consommateurs.

Nous disons aussi que l'Office de la protection du consommateur va maintenant avoir un pouvoir qui est réel. Je pense surtout au pouvoir de contre-publicité qui, quant à moi, est très fort et qui est drôlement nécessaire. D'un côté, vous aviez des personnes qui étaient munies de capitaux pour faire de la publicité et qui, de toute façon, en refilaient les coûts au consommateur, mais, aujourd'hui, on dit: C'est l'Office de la protection du consommateur qui est mandaté pour nous représenter, qui va être capable de faire une publicité, aussi, pour le consommateur. Je pense que ce serait normal.

En terminant, je voudrais simplement ajouter que, pour nous, s'il était possible d'avoir l'action de groupe ou la "class action" — je sais qu'il y a un projet dans l'air présentement —j e pense qu'avec cela, on aurait réellement un éventail pas mal complet et qu'on pourrait maintenant dire: Au Québec, on a une charte des droits de la protection du consommateur. Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrance): Merci beaucoup, M. Lafontaine.

Madame le ministre.

Mme Bacon: J'aimerais d'abord dire qu'en ce qui concerne un ministère des consommateurs, je prends bonne note de votre suggestion, soit d'en faire un ministère, une commission indépendante ou une régie. J'aimerais quand même souligner, peut-être parce que j'ai regardé ce ministère avec un regard neuf, à mon arrivée au ministère, qu'à ce stade-ci ou au moment de l'arrivée, je croyais plus important de modifier d'abord la Loi sur la protection du consommateur avant de modifier certaines structures.

Vous venez de dire vous-même qu'on a quand même fait un pas en avant en présentant une telle loi et, à mes yeux, il me semblait vraiment plus important de le faire que de penser immédiatement aux structures. Tout de même, c'est une étape de franchie.

Nous apportons une structure ou des conseils 'ou des experts aux membres de l'Office de la protection du consommateur en étant partie intégrante du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

Je pense qu'en faisant, en ce moment, partie du ministère tel que constitué l'office peut tout de même influencer les instances gouvernementales de la même façon que s'il faisait partie d'autres structures. Mais je pense encore une fois — et je dois le répéter — qu'à ce stade-ci il était beaucoup plus sérieux, beaucoup plus important et impératifs de faire une nouvelle loi, une refonte complète de la loi existante à cause de cette évolution rapide des problèmes qui touchent les consommateurs.

Comme vous le savez, l'article 272 du projet de loi nous permet un recours au fonds consolidé de la province pour l'exercice financier 1976/77 et 1977/78.

Alors, nous avons sûrement lieu de croire que cela nous permettra d'obtenir le budget nécessaire en rapport avec les responsabilités qui seront accrues, que la nouvelle loi confiera à l'Office de la protection du consommateur.

Vous parlez aussi de la nécessité d'intensifier des campagnes d'information et je suis d'accord. Auriez-vous des domaines, en particulier, où vous voyez une nécessité immédiate de faire des campagnes d'information?

M. Lafontaine: II peut y avoir deux plans d'information, sans y avoir songé plus longtemps. Il y a peut-être une information qui s'appelle une éducation. C'est peut-être cela qui serait la base...

Quant à moi, il y a peut-être une certaine recherche fondamentale à faire là-dedans. Je ne suis pas un publiciste. Je ne m'adresse pas, non plus, à des enfants. A ce moment, on s'adresserait à des adultes, mais il y a certainement des adultes qui sont enfants peut-être dans le domaine de la consommation. Il y a peut-être cela à avoir d'abord, une publicité fondamentale qui dise aux gens, ni plus, ni moins: Avant d'acheter, pensez donc à votre affaire. Demandez-vous donc si vous en avez réellement besoin. Demandez-vous donc si le bien que vous voulez avoir va réellement combler vos aspirations. C'est peut-être une façon de faire la publicité.

Il y a aussi une publicité qui serait peut-être plus agressive. Je n'aime pas le mot, mais cela va tellement avec publicité, agressif, que tu te demandes parfois si ce n'est pas ensemble. Je veux dire qu'on peut faire une publicité qui soit plus dirigée vers des points spécifiques, en ce sens qu'il y a des points chauds, par exemple. Mais il ne faut quasiment pas fixer ces points chauds à l'avance, parce que c'est mouvant. Par exemple, vous avez — c'est normal; c'est un trait du commerce — des choses, à un certain moment, qui sortent, Vous avez des vagues de choses. Par

exemple, vous avez eu la fameuse question des ventes pyramidales. C'est une vague; à un certain moment, cela passe, parce qu'à un certain moment quelqu'un dit: C'est assez, ces ventes pyramidales. C'est un type de publicité plus directe et qui s'adresse directement aux personnes.

C'est bien évident qu'au début la première publicité qu'il faudra faire sera de dire: La Loi sur la protection du consommateur existe. Il y a des choses là-dedans. Je pense qu'on peut passer l'année simplement à dire cela. Ce serait déjà un fameux bon départ, parce qu'il y a même des commerçants qui ne le savent pas. Cela a même été une manière de se défendre au niveau pénal que de dire: On ne connaît pas cette loi, même de la part de commerçants.

Je pense que la première publicité, c'est peut-être cela, le premier domaine, pour la première année. On fera une recherche plus exhaustive quand on aura fini de la vendre, d'abord, dans le public.

Mme Bacon: D'accord. Quant à certaines définitions, vous avez semblé mettre de côté la définition d'automobile, mais je pense que cela nous a tellement été dit et mentionné par différents groupements ou associations qui sont venus nous rencontrer qu'il faudra tout de même se pencher sur cette définition d'automobile.

Est-ce l'automobile conventionnelle? Sont-ce certains autres véhicules qu'il faut inclure? En ce moment, nous nous posons des questions quant à la définition du mot automobile et nous allons nous pencher un peu là-dessus.

M. Lafontaine: Quant à nous, la définition est large.

Mme Bacon: Oui.

M. Lafontaine: Nous représentons des consommateurs. En conséquence, nous en sommes satisfaits. Si on regarde la définition habituelle d'un véhicule, c'est un moyen de transport terrestre.

Mme Bacon: Vous n'incluriez pas...

M. Lafontaine: II y a des gens qui vous diront que cela couvre des bateaux et des avions. Ce n'est pas vrai. Un véhicule, c'est un moyen de transport terrestre, en partant.

Qu'il soit motorisé, cela veut dire qu'il a un appareil qui lui sert à se transporter d'un endroit à un autre. Quant à nous, c'est suffisant. On va vous dire: Cela couvre-t-il la grosse machinerie, les bulldozers ou des choses semblables? Essayez de me trouver des consommateurs de bulldozers, je pense que vous n'en trouverez pas.

Mme Bacon: C'est pour cela que je mentionnais que nous nous interrogions sur...

M. Lafontaine: Peut-être que c'est assez large. C'est pour cela qu'au début on avait dit qu'on n'était pas tout à fait d'accord. Après cela, on s'est mis à le regarder plus à fond et on s'est dit: Je pense que c'est ce que cela veut dire et c'est bien.

Mme Bacon: D'accord. Si on arrive au droit de rétention, par exemple, le maintien du droit de rétention pour les réparations de moins de $150 a-t-il causé un problème particulier à votre clientèle?

M. Lafontaine: Qu'il n'y ait plus de droit de rétention ou qu'on continue à en avoir un, ce qui arrivait c'est que nos personnes n'étaient pas capables de sortir parce qu'elles avaient fait un graissage ou un changement d'huile.

Mme Bacon: Vous avez vraiment eu des problèmes.

M. Lafontaine: Je m'excuse, Me Auger pourrait-il répondre?

Mme Bacon: Oui.

M. Auger (Jacques): Là-dessus, franchement je dois dire qu'on n'a pas eu de problème majeur à ce niveau. Mais ce qu'on veut introduire aussi dans la loi, c'est une espèce de sanction du devis de réparation qu'on demande d'effectuer avant de faire les réparations. On dit que le droit de rétention devrait tomber si la loi n'a pas été respectée. C'est une façon de mettre des dents à cet article, tout simplement.

Mme Bacon: Parce qu'il y a une autre question qu'on peut se poser aussi, c'est: Comment le garagiste sera-t-il payé si on abolit totalement le droit de rétention?

M. Lafontaine: II sera payé comme tout autre commerçant dans tout autre genre de commerce qui n'a pas de droit de rétention. C'est un droit tout à fait spécial et exorbitant qui lui est accordé à un moment donné et on ne sait pas pourquoi. L'électricien qui va chez vous, ou le plombier, ne repartira pas avec le filage qu'il a posé chez vous ou quoi que ce soit. Il n'y a pas de droit de rétention...

Mme Bacon: Ce serait assez compliqué. M. Lafontaine: ... là-dessus.

Mme Bacon: Dans les sanctions civiles, il est évident que nous sommes sensibilisés à ce problème et je pense qu'on va procéder à un réaménagement des sanctions civiles. Par ailleurs, ne croyez-vous pas qu'une plus grande gradation de sanctions civiles par rapport à l'importance respective des violations du commerçant serait utile?

M. Lafontaine: Par rapport?

Mme Bacon: Par rapport à l'importance respective des violations, qu'il y ait une gradation.

M. Lafontaine: Cela dépend ce qu'on entend par respective. Disons, par exemple, que je loue un appartement. Que je le paie $400 ou $100 par mois, j'ai le droit d'avoir 70 degrés Fahrenheit de chaleur dedans. Autrement dit, cela ne sera pas le montant du loyer qui va faire que j'ai le droit de geler dans un et d'être confortable dans l'autre. Cela dépend de l'importance de la modification ou de la garantie elle-même.

Mme Bacon: C'est plus global que cela. M. Lafontaine: Bien, c'est ce que je crains. Mme Bacon: Au lieu d'être très spécifique.

M. Lafontaine: C'est difficile, aussi, de dire quand on commence et quand on arrête. C'est bien facile de dire: Peut-être que cela va causer une baisse des prix du marché. La garantie sera moins longue si on vend plus cher, donc on va vendre moins cher et on va avoir moins de garantie. Je ne le sais pas. Cela me surprendrait beaucoup.

Mme Bacon: Vous avez fait une suggestion, au deuxième paragraphe de l'article 198. J'aimerais que vous la précisiez. Est-ce que cela permet au consommateur en défense d'invoquer tous les moyens tendant à repousser une action directe lorsque la prescription sera écoulée en demande?

M. Lafontaine: J'ai en mémoire d'autres mémoires qui ont déjà été présentés, je m'excuse pour les deux mémoires. Il y a des mémoires qui disent trois ans pour demander l'annulation d'un contrat et c'est le bout. Cela n'a pas de bon sens. Six mois, cela serait déjà encore beau. Il faut se rappeler que, de l'autre côté, le commerçant qui veut exercer son droit a cinq ans pour réclamer son dû sur le contrat. Mais le consommateur, pourra dire: C'est bien malheureux, je ne te paierai pas, ton contrat n'est pas bon ou ton objet n'est pas bon, il a trois ans. Il ne faudrait peut-être pas trop charrier là-dessus et dire que trois ans c'est exorbitant. Si on veut descendre le pouvoir du commerçant et poursuivre à trois ans, d'accord. A ce moment-là, on pourra s'en tenir à trois ans, trois ans, je n'aurai pas d'objection. On sera peut-être égaux à ce moment-là devant la loi. Mais, qu'on pleure, aujourd'hui, parce que le législateur dit: On devrait monter cela à trois ans! Je trouve que ce n'est pas le temps de pleurer. Il n'y a pas matière à pleurer. C'est la première réflexion qui me vient là-dessus.

Le deuxième paragraphe, c'est que je dis: Si le commerçant n'est pas sûr de son contrat, que va-t-il faire? Il va atteindre trois ans et demi pour vous poursuivre. Il va dire: Celui-là, je ne lui en parlerai pas, j'ai peur que cela me pète dans la face.

Je mets ce contrat de côté, je prends une note dans mon agenda et, deux ans et demi après, je le poursuis. Il ne pourra plus dire: Monsieur, j'invoque la Loi de la protection du consommateur pour ne pas vous payer. J'en demande la nullité. Il va être trop tard pour lui pour demander la nullité. On dit: Pourquoi ne pas faire cela clairement? Je comprends que la jurisprudence a des tendances là-dessus. Pourquoi ne pas l'écrire, comme quoi il aura droit en défense, même si son délai de trois ans est écoulé, de soulever ce moyen qui lui appartenait s'il avait été dans les trois ans?

Autrement dit, pourquoi privilégier une des parties au contrat?

Mme Bacon: Dans les ventes à tempérament, aux articles 128 à 144, vous suggérez un nouvel article qui vise à transformer un contrat de prêt personnel en contrat de vente à tempérament si certaines conditions sont retrouvées. Ne croyez-vous pas qu'il va y avoir de la difficulté quand viendra le temps de prouver que le consommateur a effectué un prêt personnel dans le but d'acheter un bien que le commerçant ou la personne qui a effectué le prêt savait ou aurait dû savoir que ce prêt serait utilisé en vertu de l'achat d'un bien?

M. Lafontaine: Peut-être, mais j'aimerais cela l'avoir.

Disons, par exemple, que je suis face à un garage — je m'excuse d'employer des corporations connues — si j'ai une automobile GM qui est financée par GMAC, je m'arrangerai bien avec le fardeau de la preuve dans ce cas. Je suis capable de faire établir que le commerçant reçoit une commission chaque fois qu'il envoie quelqu'un à cette compagnie de finance. Je pense que je m'arrangerai très bien avec cette présomption. C'est une présomption qui serait facilitée par le fait qu'elle serait dans la loi. Je comprends qu'il y ait une difficulté de rédaction énorme dans cet article. Nous y avons pensé longtemps et souvent. On pense peut-être l'avoir. Il se peut qu'on ne l'ait pas non plus. Quant à nous, je pense que, de toute façon, ce sont des particuliers, entre vous et moi. Il est bien évident que celui qui finance et celui qui vend l'objet sont des personnes qui se connaissent, qui sont en relation d'affaires. Assez souvent, si on prend le garage, il est financé lui-même par cette propre compagnie. Il ne faut pas s'imaginer que les compagnies envoient des automobiles dans une cour de vendeur et qu'elles ne demandent pas le paiement immédiat. La plupart du temps, c'est la compagnie de finance qui finance les clients du gars qui finance le gars lui-même. C'est assez facile pour moi de démontrer qu'ils sont parties liées. Il y a peut-être d'autres façons de le rédiger. On pensait que c'était une amélioration, pour tout de suite.

Mme Bacon: Vous suggérez aussi qu'on inclue aux pratiques interdites l'interdiction de solliciter par téléphone un emprunt. Est-ce que vous ne vous limiteriez qu'à ce genre de sollicitation par téléphone ou si vous ne croyez pas qu'il faudrait inscrire aux pratiques interdites toute sollicitation par téléphone, ou si vous vous limitez aux sollicitations pour emprunt?

M. Lafontaine: Vous le permettez pendant un bout de temps dans votre nouvelle définition du

vendeur itinérant, au moment où vous parlez de la sollicitation. Dans l'ancienne loi, on disait: Si la sollicitation est faite à l'extérieur, c'est un vendeur itinérant. Pour un véhicule neuf, aujourd'hui, vous dites: Même si on appelle chez lui pour lui offrir une automobile et qu'il vient après signer le contrat au garage, il ne sera plus un vendeur itinérant.

Mme Bacon: Le contrat est signé.

M. Lafontaine: Là-dessus, j'ai peut-être des divergences, mais je ne voudrais pas manquer la beauté du projet de loi pour des choses semblables. Disons qu'il y avait des choses qui me plaisaient dans cette loi. Je m'excuse, je pense que j'ai manqué votre question.

Mme Bacon: Je me demandais si vous ne vouliez pas inclure, dans les pratiques interdites, toute sollicitation par téléphone au lieu de vous limiter aux sollicitations pour emprunt.

M. Lafontaine: C'est encore le même principe que j'émettais tantôt à propos du vendeur itinérant. Le vendeur itinérant est quelqu'un qui vient briser votre intimité. Il entre chez vous et il vient vous vendre quelque chose. Vous ne voulez pas le voir du tout. Il y a quand même une question de volonté dans un contrat que vous voulez passer avec quelqu'un. C'est cela la base des contrats. Vous n'êtes plus libre. Il y a quelqu'un qui vient vous agresser. A ce moment, vous allez dire: On va aussi supprimer toute publicité, quoique la publicité c'est vis-à-vis d'un consommateur indéterminé. Par le démarchage ou le téléphone, vous vous adressez à quelqu'un de déterminé. Si vous défendez toute sollicitation, il faudra que ce soit une personne déterminée, quant à moi. C'est évident que, si vous le faites par téléphone ou si vous le faites en personne, cela revient au même. Le téléphone est votre instrument, c'est le crayon que j'ai au bout du doigt pour écrire sur le papier. C'est la même chose. C'est comme si je me rendais chez-lui; c'est une sollicitation en fait, mais c'est une sollicitation d'une personne déterminée. Quant à moi, la raison qui est en dessous du fait de défendre toute publicité par écrit ou par démarchage c'est exactement la même chose pour le téléphone, c'est le même raisonnement qu'il y a en dessous. C'est une agression, cela empêche la volonté de s'exprimer librement. C'est un des concepts fondamentaux des contractuels, une volonté libre qui puisse exercer.

Mme Bacon: On revient aux vendeurs itinérants. Avez-vous des données bien précises sur lesquelles vous vous basez pour limiter à $400?

M. Lafontaine: Non. C'est aussi simple que ça, nous n'avons pas de données précises. C'est que nous avons regardé la sorte de biens qui se vendait habituellement et et $400, aujourd'hui, c'est moins que cela a déjà été. Vous comprenez qu'il y a des choses, quant à nous, qui nous ont semblé criantes. Vous avez eu, par exemple, les ventes pyramidales qui nous ont marqués beaucoup. Vous avez eu les foyers de la future ménagère qui nous ont aussi marqués beaucoup. Là-dedans, il y a des petits contrats, il y en avait qui étaient un peu plus gros.

Vous avez eu les fameux vendeurs de congélateurs qui fournissent toute la viande, qui sont d'ailleurs encore annoncés dans le journal aujourd'hui avec le taux de crédit, entre autres, qui n'est pas mentionné. Il y a des infractions qui se commettent actuellement. On a dit $400 de telle sorte qu'on se dise, au moins, que ce sera moins grave si c'est en bas de $400. Mais il n'y a pas de rationnel, que ce soit $300, $400 ou $500. C'est un peu comme quand vous dites, dans la loi, le démarchage en bas de $10. Pourquoi dit-on $10? Pourquoi on ne dit pas $15, on ne dit pas $8? A un moment donné, il faut s'arrêter; c'est simplement ça.

Mme Bacon: Mais vous voudriez qu'il y ait des normes chiffrées comme ça dans la loi?

M. Lafontaine: C e serait plus facile d'application peut-être, étant donné que l'on est rendu dans le raffinement, ce serait peut-être possible.

Mme Bacon: Vous suggérez aussi le délai de réflexion de dix jours, que ce délai court à compter de la livraison du bien.

M. Lafontaine: C'est exact.

Mme Bacon: Vous ne tenez pas compte...

M. Lafontaine: De l'obligation de payer, vous allez dire.

Mme Bacon: Non, mais il y a une "cooling-off period" — excusez-moi, M. le député de Lafontaine — mais la vente à l'essai, je pense...

M. Lafontaine: Moi aussi, je m'appelle Lafontaine. Il y a la vente à l'essai.

Mme Bacon: Oui. Est-ce qu'il y a confusion entre le délai de réflexion et la vente à l'essai à ce moment-là? Parce que c'est une vente à l'essai, ce que vous suggérez.

M. Lafontaine: Non, je dis que le délai de réflexion compte à partir de la livraison. Autrement dit, que le contrat de vente, la "cooling-off period", comme vous dites...

Mme Bacon: Oui.

M. Lafontaine: ...en vous excusant, compte à partir du moment où, effectivement, on a reçu le bien. La plupart du temps, les personnes se ressaisissent quand ils ont le bien, le voient ou l'utilisent, par exemple. Il y a des compagnies responsables qui vous disent: Garde le bien, il n'y a pas de problème, utilise-le, tu vas voir comme il est

bon. Si le bien est bon, le consommateur le garde et il pourrait avoir un an de "cooling-off period"; il n'y a pas de question. Mais, au fond, si on donne une "cooling-off period", c'est pour permettre au consommateur de dire: Attends un peu, ce que j'ai acheté là, effectivement, cette machine à coudre qui était censée être révolutionnaire ou telle chose, ce n'est pas ça du tout. Effectivement, je la retourne. Autrement dit, je ne veux pas dire qu'on enlève la vente à l'essai, ça revient à une vente à l'essai, ni plus ni moins. Exactement. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on fasse des ventes à l'essai, cela existait dans le Code civil antérieurement, cela existe encore aujourd'hui pour les vendeurs itinérants; pourquoi pas?

Mme Bacon: Je reviendrais peut-être à la révision des décisions du directeur. Est-ce que je dois comprendre que vous permettez au consommateur d'attaquer en tout temps, sans l'assujettir à aucun délai, à aucune formalité, les décisions du directeur, accordant un permis, par exemple, ou refusant de l'annuler ou de le suspendre?

M. Lafontaine: Non, je ne suis pas entré dans ce détail. Je suggère exactement la même chose que pour le commerçant.

Mme Bacon: Mais est-ce que c'est... Vous n'allez pas aussi loin que d'attaquer...

M. Lafontaine: Que d'attaquer toutes les... Non, il y a d'autres moyens légaux...

Mme Bacon: ...toutes les décisions.

M. Lafontaine: ...possibles dans d'autres champs particuliers, mais, pour l'émission d'un permis, on dit, s'il émet un permis, pourquoi un consommateur pourrait dire: Tu as fait erreur, tu aurais peut-être été mieux de ne pas émettre de permis? De toute façon, c'est soumis à un autre tribunal. Quant à la question du délai ou de la façon de procéder, nous suggérons que ce soit le même mode de fonctionnement que celui... C'est d'ailleurs très simple. Entre vous et moi, pour une fois, dans un domaine légal, on est arrivé à quelque chose d'assez simple, qui n'est pas coûteux et qui est rapide; je suis d'accord avec ça.

Mme Bacon: D'accord. En fait, quant à vos remarques à la règle 78, sans faire de promesse, parce que je n'en ferai pas aux séances de cette commission-ci, nous étudierons les suggestions que vous nous faites.

M. Lafontaine: Vous prétendez que ça peut changer?

Mme Bacon: II peut y avoir modification, c'est pour ça qu'on fait cette commission d'ailleurs. Merci.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Lafontaine.

M. Léger: M. le Président, je veux d'abord féliciter la Commission des services juridiques de son excellent mémoire. Cela fait du bien, dans une commission parlementaire où on étudie un projet de loi dont l'objectif est la protection du consommateur, d'entendre des gens qui ont le préjugé favorable aux consommateurs. Parce que, jusqu'à maintenant, nous avons entendu des groupes qui sont indirectement intéressés à la protection du consommateur et directement intéressés à réaliser des bénéfices ou une continuation dans leur commerce ou dans leur fonction première qui est celle de vendre des produits ou de fabriquer des produits.

Je pense que ceux qui sont venus jusqu'ici avaient soit des droits à défendre ou des privilèges à défendre ou voulaient nous sensibiliser à des préoccupations ou à des problèmes que la loi leur apportait, mais, directement aujourd'hui, on voit un organisme qui a un intérêt direct à la protection du consommateur, c'est très sain, parce qu'on voit une perception et une préoccupation très différente qui entre directement dans l'objectif qu'on veut viser.

D'abord, je voudrais peut-être avoir quelques éclaircissements sur des affirmations que vous faites. A la page 14, entre autres, vous sortez un problème bien précis qui est celui d'une vente à tempérament évitée par la vente d'un produit et, par la suite, d'un emprunt qui est complètement différent, mais qui a le même objectif, c'est-à-dire de faire payer le produit qu'on achète. Je pense que le gros problème, parce que la définition que vous mettez devant nous, je ne sais pas jusqu'à quel point elle couvrirait ce problème. Il reste toujours à faire la preuve du lien qui existe entre l'achat de tel bien et spécialement la dette qui s'ensuit. Dans la pratique, avez-vous été capables de prouver qu'il y avait un lien comme tel? Y a-t-il eu des poursuites dans les cas que vous avez mentionnés?

M. Lafontaine: Présentement, ce n'est pas utile. Il n'y a pas de loi qui changerait quelque chose, si on prouvait cela autrement dit. Par contre, je vous dis qu'il y a une présomption en partant qui est favorable. On dit: Un contrat de prêt personnel est péremptoirement sensé être un contrat de vente à tempérament si telle chose arrive. Donc, je n'ai plus à prouver que cela a été fait dans le but d'éviter la vente à tempérament, mais simplement à prouver le fait... Si je prouve autrement dit que ce sont des personnes liées... A titre d'exemple, je vais prendre la Loi de l'impôt qui dit: Vous êtes liés si vous avez tel pourcentage ou si vous faites telle chose ou telle chose. Cela me suffira. Je n'aurai pas besoin de prouver qu'on a fait cela dans le but d'éviter une vente à tempérament. J'aurai à prouver que, lors de la vente d'un bien, il y a eu un prêt personnel et que c'est une présomption de fait, autrement dit, que ces deux parties ont entre elles des relations régulières et même commerciales dans ce cas.

M. Léger: Mais avez-vous eu des cas... Parce

que vous donnez deux exemples différents, celui d'un achat d'un objet qui...

M. Lafontaine: Oui.

M. Léger: ...vaut $500 et dont le prêteur dit: Je ne prête que $300. La différence doit être payée soit à tempérament ou au comptant et, quand c'est à tempérament et qu'il reste $150 à payer au commerçant, c'est le fait que le consommateur ne paierait pas la totalité de ses $150 qui fait que le commerçant peut reprendre le bien tout en ayant été payé $300, tandis que l'autre cas est celui où on emprunte la totalité de la somme et, à ce moment, le commerçant a reçu la somme totale.

M. Lafontaine: C'est exact.

M. Léger: Mais il y a une différence dans les deux cas?

M. Lafontaine: Oui, c'est que, dans le deuxième cas, il y a quand même l'obligation, de la part du commerçant, par exemple, de livrer l'objet ou de garantir l'objet qu'il va livrer. S'il y avait eu un contrat de vente à tempérament et si le commerçant l'avait porté à la compagnie de finance qui lui aurait donné de l'argent pour le contrat, la compagnie de finance, étant donné qu'il s'agissait d'une vente à tempérament, était obligée de garantir l'acheteur sur le bien vendu, était obligée, par exemple, si le marchand ne la livrait pas, de la livrer ou de la faire livrer par quelqu'un d'autre. La compagnie de finance a dit: Pour nous autres, ce sont trop de risques, on ne s'amusera pas là-dedans. D'accord? Tu feras la vente que tu voudras. Nous autres, on va lui faire un prêt personnel. D'accord? Mais si, par hasard, l'objet a des défauts dedans ou s'il advient une faillite et que l'objet n'est pas livré, le gars n'aura pas son objet mais il va être obligé de payer à la compagnie de finance par exemple.

Autrement dit, on avait déjà prévu dans l'ancienne Loi sur la protection du consommateur une façon d'empêcher ces choses. Aujourd'hui, on a inventé quelque chose de plus fin, de plus subtil, on va faire un contrat de prêt personnel pour passer à côté. C'est cela en fait qui arrive.

M. Léger: Avez-vous eu des cas où la compagnie de finance a prêté la totalité du prix que le consommateur doit payer au commerçant et dont le commerçant a été payé en totalité et que, par la suite, le commerçant ait repris le bien alors qu'il ne lui doit plus rien? Non.

M. Lafontaine: Non, à ce moment, il ne peut pas reprendre le bien s'il a été payé en entier, parce qu'il n'y a plus de lien. Le contrat...

M. Léger: C'est uniquement s'il y a un solde de paiement...

M. Lafontaine: C'est toujours quand il y a un solde. S'il est payé en entier, cela ne se peut pas.

M. Léger: D'accord. Vous parlez aussi de taux d'intérêt et d'intérêt à un certain moment. Il y a des choses qui n'existent pas nécessairement dans la loi. Quelle est votre opinion là-dessus, sur des points qui auraient peut-être dû être dans la loi? Pensez-vous qu'il devrait y avoir un taux maximal d'intérêt pour éviter les abus qui existent actuellement en pratique? Vous êtes-vous penché sur le fait qu'il devrait y avoir un taux maximal d'intérêt prévu dans la loi?

M. Lafontaine: Je n'ai pas de recours sur la constitution qui est à l'étranger, je ne peux pas vous le dire. Parce qu'effectivement c'est un problème constitutionnel de limiter le taux d'intérêt.

M. Bonnier: Le taux d'intérêt sur quoi, M. le député de Lafontaine?

M. Léger: Sur un prêt.

M. Bonnier: Là, vous entrez dans une autre juridiction.

M. Léger: Maintenant, concernant les ventes au comptant, nous pensons qu'il devrait y avoir un contrat qui lie et le commerçant et le consommateur pour une vente au comptant.

M. Lafontaine: II y en a toujours un.

M. Léger: Mais, dans la vente au comptant, il n'y en a pas toujours un.

M. Lafontaine: Bien oui. Il faut s'entendre, un contrat peut être verbal.

M. Léger: Oui, mais est-ce couvert comme tel au point de vue de la garantie sur un bien durable? Dans la loi actuelle, il y a un contrat entre une personne qui achète en payant comptant un bien durable et, par la suite, si la garantie n'a pas été octroyée gratuitement par le commerçant ou le manufacturier, il n'y a pas nécessairement une garantie.

M. Lafontaine: Oui, effectivement, c'est à cela qu'il faut faire attention. Vous avez une garantie légale ou une garantie conventionnelle comme on l'appelle. Une garantie légale, c'est celle qui existe en vertu de la loi. Autrement dit, vous n'avez pas besoin de contrat pour la faire valoir; elle existe en vertu de la loi. La garantie conventionnelle, c'est celle qui existe en vertu d'un contrat sur lequel on s'est entendu entre nous.

Par exemple, vous avez une garantie légale quand vous achetez une automobile. Si vous achetez une automobile comptant — je peux même l'acheter d'un particulier; je l'achète de vous personnellement d'accord — et qu'il y a des défauts cachés dans votre automobile, j'ai une garantie légale même si je n'ai pas de contrat qui me protège contre les défauts cachés qui existaient dans cela. Je prends l'exemple que le Code civil donne: Si j'achète un animal qui est atteint de tubercu-

lose, si cela se déclare dans les 90 jours, l'autre est obligé de me rembourser et je suis obligé de lui redonner son animal qui a la tuberculose. C'est une garantie légale, je n'ai pas besoin de contrat. C'est un contrat verbal simplement.

M. Léger: Je prenais le contrat, mais je devrais simplement parler plutôt d'écrit. Une facture n'est pas nécessairement un contrat.

M. Lafontaine: C'est un écrit.

M. Léger: C'est un écrit. A ce moment, est-ce que vous pensez que la loi devrait couvrir les ventes au comptant qui sont faites pour un bien de $300 et plus pour qu'il y ait un écrit permettant que ce bien durable soit couvert par une garantie parce qu'il y a eu un écrit?

M. Lafontaine: Moi, je vous dis qu'il l'est présentement, qu'il y ait un contrat écrit ou qu'il n'y en ait pas. Parce qu'effectivement toute vente comporte une garantie déjà en vertu de la loi. C'est une garantie contre l'éviction, qui garantit que celui qui l'a vendue en était bien propriétaire, qui garantit aussi contre les défauts cachés que comporte la chose. Peut-être que je ne comprends pas bien.

M. Léger: Maintenant, sur un autre point, vous avez parlé, entre autres, des gens qui s'endettent d'une façon perpétuelle, qui réempruntent pour continuer à payer ou à boucher d'autres trous. Est-ce que vous pensez que, pour éviter cela, on devrait peut-être, au niveau de la Loi sur la protection du consommateur, se pencher sur un minimum de paiement comptant, je ne sais pas, de 15% à 20% de la valeur, une période maximale, par exemple, de trois ans pour faire les paiements, pour s'assurer qu'une personne n'achète pas de produits inutiles, de produits qu'elle n'est pas capable de payer et dont la publicité a créé chez elle un besoin? Autrement dit, une personne qui ne serait pas capable de faire des paiements en dedans de 36 mois d'un montant X, parce qu'elle n'a pas les moyens, si on lui dit: Tu peux le payer pendant cinq ans, on ne lui rend pas un service. Le commerçant se permet de vendre un produit et le client n'est pas capable de donner un certain montant comptant, c'est parce qu'il n'avait pas les moyens de l'acheter. C'est vrai qu'il faut éduquer les gens, mais il ne faut pas aussi faciliter le crédit à un point tel que les gens sont démunis devant une publicité qui les incite à acheter de façon très forte, n'ayant pas les moyens, tandis qu'avec une loi, s'ils ne peuvent pas remplir telles ou telles conditions, c'est que d'eux-mêmes ils n'avaient pas la possibilité de l'acheter.

M. Lafontaine: C'est une question de fond, quant à moi, que vous posez là. Il y a différents principes en cause. D'abord, il y a un principe qui s'appelle quand même la liberté de s'engager, puis qui s'appelle aussi la liberté contractuelle. Si les deux parties sont égales, je préfère la liberté à un dirigisme dans une loi. Je pense tout de suite en partant que c'est cela.

Deuxièmement, si vous tombez dans la question des petits prêts ou dans la question d'intérêt, je me demande s'il n'y a pas une difficulté constitutionnelle. Ce n'est pas parce que je veux éviter la question que je vous dis cela. Je dis simplement que c'est un fait que ces choses existent. Maintenant, quand est-ce que cela va commencer, puis quand est-ce que cela va arrêter? Qui va être assez fin, un bon matin, pour dire: Pour un tel, cela va être tel montant, puis, pour un autre, cela va être un autre montant? Quant à moi, vous ne pouvez pas faire un principe général; je pense que cela devient très difficile. Je ne sais pas comment on pourrait s'y prendre. Je suis prêt à écouter vos suggestions, mais ce n'est pas facile.

M. Léger: On semble quand même être d'accord sur le principe que le consommateur, devant une multinationale — l'exemple le plus extrême — devant même la société qui est axée directement sur une publicité, un marketing et des produits qui ne sont pas nécessairement des produits nécessaires et utiles mais pour lesquels on crée des besoins, devant cela, devant la complexité des contrats et devant toutes ces attitudes où les compagnies ou les commerçants sont beaucoup plus habiles dans le domaine de leurs produits, dans le domaine des contrats, le consommateur, dis-je, est un peu démuni.

Ce que je voulais mentionner par là, c'est le fait que, si une personne n'a pas les moyens de payer mensuellement un produit qu'elle paie pendant 36 mois, c'est parce qu'elle n'avait pas les moyens de l'acheter. C'est tout simplement parce que, très souvent, ces gens sont tellement incités à acheter un produit qu'ils sont prêts à acheter... D'ailleurs, la publicité dit souvent: Cela coûte $22 par mois pour avoir telle chose, sans mentionner la période de temps, ce qui devrait être illégal. Mais quand même, c'est tout simplement la capacité de payer mensuellement qui devient le critère pour dire: Je suis capable de l'acheter. Parce que, trop souvent, les gens n'ont pas l'argent comptant.

Ce que je voulais mentionner dans cette façon de présenter une certaine défense pour les consommateurs démunis, c'est que ce critère de trois ans ou de quatre ans permettait de savoir quel est le montant qu'une personne peut se permettre de payer et d'éviter, par la suite, qu'elle embarque à la remorque des compagnies de finance pour s'en sortir. Je vous donnais l'exemple de 36 mois mais cela peut être autre chose.

M. Lafontaine: Autrement dit, vous voudriez que le législateur déclare illégal, par exemple, le fait pour une personne de s'endetter pour plus que tant durant une période X, étant donné son revenu de tant.

M. Léger: ... les ventes à tempérament.

M. Lafontaine: Cela devient drôlement difficile, quant à moi, d'application. Je ne sais pas. Il y

a peut-être d'autres façons aussi. Par contre, vous disiez tantôt: C'est une société de consommation, la publicité devient agressive. C'est peut-être une partie du problème, parce que plus on avance, plus on devient raffiné et plus il faut faire attention. Par contre, d'un autre côté, si on donne au consommateur ou à l'Etat qui, en fait, quant à moi, représente le bien commun, l'occasion d'embarquer dans ce domaine et de faire de l'information et de l'éducation, et qu'on donne le pouvoir aux directeurs de dire: Tel bien qu'on vous soumet à tel prix, ne vaut pas cela, n'est pas bon ou c'est de la fraude cette affaire-là, je pense qu'on va déjà boucher pas mal de trous. C'est mon opinion.

Cela ne veut pas dire que je suis contre le consommateur. C'est simplement pour dire qu'à un moment donné cela devient difficile. Il faut aussi se rappeler qu'il y a la notion de profit de la part du commerçant. Si vous n'avez pas de commerçant, vous n'avez pas de biens non plus. Il y a aussi cela. C'est toujours la réalité qu'il y a en dessous de toutes ces choses. Autrement dit, les uns et les autres ont le droit de vivre, sauf qu'il faut que le balancier se tienne au milieu. Quand il est parti sur un bord, il faut le déplacer un petit peu. Je pense que le mieux placé pour faire cela, c'est l'Etat parce que, de l'autre côté, vous avez un gros morceau.

M. Léger: Une dernière question. Concernant les voitures usagées qui sont vendues par des marchands et les voitures vendues par des usagers, vous sembliez dire que pour une voiture vendue par un usager, celui-ci n'est nécessairement pas aussi professionnel que l'autre. Donc, on doit être beaucoup plus sévère vis-à-vis du professionnel ou celui dont c'est le métier de le faire. Mais comme on nous a apporté des chiffres à savoir que 45% des voitures usagées sont vendues par des individus, qu'à l'intérieur de ces 45%, il y a même des voitures qui sont vendues avec l'aide du marchand d'automobiles et qu'il y a aussi, à l'intérieur de ces 45%, une bonne partie qui est vendue par des personnes qui en font un commerce faisant croire que c'est tout simplement une voiture qu'elles ont a vendre alors qu'elles ont tout un système d'établi et qu'elles les vendent même à des adresses différentes — il y a des annonces dans les journaux où on voit la même adresse pour plusieurs vendeurs d'automobiles — ne pensez-vous pas que cela devrait aussi être couvert, même les automobiles qui sont vendues par des personnes autres que des marchands autorisés comme tels?

M. Lafontaine: Si le projet de loi reste tel qu'il est présentement et qu'on se retrouve avec une garantie à 50-50, présentement, si on reste à 50-50, le particulier qui vend une automobile usagée qui comporte des défauts cachés est engagé à 100%, quant à l'obligation de garantie, et le commerçant à 50%. Il faut d'abord établir cela clairement avant de partir. Disons qu'on s'en vient avec une garantie a 100%; le vendeur d'automobile qui est un particulier serait obligé à 100% lui-même pour les défauts cachés aussi. Cela revient pas mal au même, disons, entre vous et moi, sauf que lorsque des garagistes vous disent: Vous nous donnez...

Il y a une autre chose aussi qui est importante au niveau de la liberté. Le contrat du commerçant est étudié. Je le sais. J'ai déjà fait des contrats de commerçants d'automobiles. Il est étudié, et on a pris soin de prévoir toutes les éventualités.

Le particulier n'a pas la même façon de s'y prendre, comme, par exemple, les exclusions de garantie. Dans les contrats de vente d'automobiles, c'est régulier que vous voyiez cela. C'est tellement régulier que le contrat est imprimé à l'avance. Le particulier ne sait même pas qu'il peut s'exonérer de la garantie, d'une manière ou d'une autre. Il ne le sait pas.

Je pense qu'il faut tenir compte de cela quand on dit qu'il y en a un qui a moins d'obligations que l'autre. Il a peut-être moins de compétence aussi, tant au niveau juridique qu'au niveau de la compétence professionnelle comme garagiste. Ce sont peut-être ces deux principes qu'il faut mettre ensemble.

M. Léger: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

Mme Bacon: J'aimerais peut-être seulement apporter une précision à une des interrogations de votre mémoire quant à l'action collective...

M. Lafontaine: Oui.

Mme Bacon: ...que je n'ai pas relevée tout à l'heure. Je m'en excuse. Nous avions considéré inscrire dans notre projet de loi l'action collective mais, à ce moment, nous ne pouvions couvrir que les relations entre commerçant et consommateur. J'ai déjà fait des démarches auprès du ministre de la Justice, qui devra déposer une loi sur l'action collective — évidemment, je ne peux m'engager au nom du ministre de la Justice — qui couvrira l'ensemble de la population.

Je pense qu'on ne doit pas se limiter aux relations entre consommateur et commerçant et que nous devons couvrir l'ensemble de la population. C'est un peu ce qui nous a fait dire en ce sens de ne pas nous limiter par notre loi, mais de donner la possibilité au ministère de la Justice de légiférer.

M. Lafontaine: Je suis pleinement d'accord et, plutôt que de ne pas en avoir eue, j'ai aimé au moins qu'on ait eu celle-là.

Mme Bacon: Si cela retarde trop, on le fera.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: M. le Président, cela ne sera pas long. M. Lafontaine, vous avez exprimé beaucoup de satisfaction quant à l'esprit et la portée de l'ar-

tide 231 donnant au ministre, au directeur et à d'autres fonctionnaires le pouvoir de divulguer certaines informations dans le but de faire l'éducation et l'information du consommateur, mais à la suite d'une enquête seulement.

D'autres groupes nous ont fait valoir qu'il y avait peut-être un danger, qu'il faudrait peut-être apporter certaines restrictions à cet article parce qu'il y a peut-être un danger, quant aux droits de la personne, qu'il y ait vraiment abus dans ce domaine.

Cela vous a-t-il effleuré un peu l'esprit, à savoir qu'il pourrait y avoir des abus et qu'à ce moment il faudrait quand même apporter une certaine restriction malgré le bien-fondé des objectifs poursuivis?

M. Lafontaine: De toute façon, toute loi est un peu discriminatoire pour certaines personnes par rapport à d'autres...

M. Bonnier: Oui.

M. Lafontaine: ...si on part du plus haut niveau en descendant.

M. Bonnier: Mais là, on donne quand même...

M. Lafontaine: C'est vrai que de donner des pouvoirs à un ministre ou à une personne peut couper le cou à une autre personne. Pour parler franchement, c'est quasiment cela. Autrement dit...

M. Bonnier: A la suite d'une enquête cependant, une enquête administrative.

M. Lafontaine: Oui, c'est à la suite d'une enquête. Maintenant, il est évident que, s'il y a mauvaise foi, cela ne peut pas tenir. Même si une personne est exemptée en vertu de n'importe quoi et qu'elle commet un geste qui équivaut à de la fraude ou à de l'abus de pouvoir, elle est toujours sous la sanction des tribunaux. Même le gouvernement lui-même.

Tu ne peux pas, autrement dit, enlever l'autre pouvoir qui est le pouvoir judiciaire. Il est évident que devant un abus de pouvoir — et c'est un jurisprudence constante — les cours peuvent intervenir, peu importe ce qu'il pourrait y avoir dans la loi.

Mais vaut-il mieux courir le risque pendant un certain temps que cela soit ainsi, quitte après cela à voir ce que cela peut donner?

J'ai aussi confiance en quelqu'un qui fera une enquête qui est de l'extérieur qu'en quelqu'un qui va s'adresser à la télévision en payant pour faire valoir quelque chose qui n'existe peut-être pas. J'ai aussi confiance en cela. La liberté est peut-être des deux côtés.

Le Président (M. Lafrance): On vous remercie beaucoup, M. Lafontaine, ainsi que votre collaborateur, pour votre présentation et pour avoir bien voulu répondre aux questions.

M. Lafontaine: Cela nous a fait plaisir.

Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons maintenant les représentants d'Electrolux Ltée, avec M. Clasper.

Electrolux Ltée

M. Rivard (Jean): M. le Président, monsieur le ministre, messieurs les membres de la commission parlementaire, mon nom est Jean Rivard.

Je suis père de six enfants dont quatre aux études. J'habite la ville de Québec. Je suis directeur de la compagnie Electrolux et vice-président des ventes pour l'Est du Canada. C'est au double titre de père de famille et de vice-président des ventes que je désire vous faire des représentations sur le mémoire que nous vous avons soumis. Tout d'abord, je voudrais vous présenter quatre Canadiens français qui ont atteint les plus hauts postes de commande chez Electrolux. A ma gauche, M. Lionel Béland, de Montréal, notre président; à ma droite, M. Jacques Brossard, de Montréal aussi, notre trésorier; et, aux deux extrémités, à l'extrême gauche, MM. Adrien Drouin et Polydore Cloutier qui sont deux gérants régionaux des ventes.

Le but de cet exposé est de réviser deux articles particuliers du projet de loi no 7. Il s'agit des articles 41 et 42. Tout le monde connaît Electrolux pour avoir servi fidèlement depuis 42 ans les consommateurs du Québec. Qui, parmi vous, n'a pas eu un jour la visite de ce bon père de famille qui a frappé à votre porte pour vous offrir de vous démontrer son équipement dans votre foyer?

Il y a 20 ans, lorsque je faisais du porte-à-porte, parce que je suis venu de la route, je suis un vendeur de nature, il arrivait occasionnellement que quelqu'un me demandait ce qu'était Electrolux ou encore me disait qu'il préférait remplacer sa glacière par un réfrigérateur ou se faire installer une toilette à l'eau avant de s'acheter un aspirateur. Evidemment, les années ont passé et Electrolux, qui a survécu aux crises économiques et à la guerre, a grandi avec le Québec. De notre petite usine de la rue Laurier à Montréal, nous sommes passés à une usine très moderne à Pointe-Claire et, il y a trois ans, nous avons dû augmenter la superficie de plancher à 200 000 pieds carrés. Tout cela pour vous dire que nous attribuons nos succès aux facteurs suivants.

Premièrement, notre technique de mise en marché par la vente directe de nos marchands itinérants au domicile du consommateur. Avec votre permission, j'ouvre ici une parenthèse pour dire que le marchand itinérant que j'ai été pendant des années ne brise pas l'intimité du foyer. Nous n'entrons pas avec le pied dans la porte. La façon de procéder que vous avez sans doute connue et expérimentée vous-même est qu'un marchand se présente à la porte, sonne à la porte, discute avec la dame, demande la permission de venir lorsque le mari y sera pour présenter son produit. En définitive, le foyer est l'endroit par excellence pour pouvoir expérimenter et vérifier le produit qu'on

offre, en présence de tous les membres de la famille.

Deuxièmement, la qualité du produit que nous avons offert et le service après vente que nos 2100 employés et marchands itinérants ont toujours offert aux consommateurs par le biais de nos 74 succursales disséminées au Québec. Que ce soient nos marchands de Gaspé, de Schefferville, de Québec, de Montréal ou de Noranda, le service est uniforme d'une frontière à l'autre. Le total des salaires payés à nos employés du Québec en 1975 fut au-dessus de $21 000 000. Tout ceci pour vous faire réaliser l'importance qu'Electrolux peut avoir dans l'économie du Québec.

Nous avons aussi apporté notre large contribution à l'économie de notre belle province en versant, pour l'année 1975, en taxe de vente et impôt, $3 800 000. S'il est vrai que nous avons survécu à des crises économiques et à une guerre, il est aussi vrai de vous dire, messieurs, dames, que nous ne croyons pas être en mesure de continuer à faire des affaires au Québec si les articles 41 et 42 du projet de loi no 7 ne sont pas modifiés, pour nous permettre de continuer à offrir, de laisser dans le foyer du consommateur de l'équipement électroménager de valeur, sans pouvoir toucher, au moment de la transaction, un versement initial ne représentant, en définitive, qu'une fraction de la valeur de l'équipement.

Le fait, par le consommatuer, de verser un petit montant d'argent au moment de la transaction a pour effet de démontrer son sérieux dans la chose, sans quoi il n'y a rien qui tienne. Quand avons-nous vu un marchand sérieux vendre et laisser au consommateur une pièce d'équipement de valeur — je ne vous parle pas d'articles de $25 ou $30, je vous parle d'équipement de valeur — sans au moins avoir reçu un versement initial? De plus, si nous nous plaçons strictement au point de vue administratif d'une compagnie, aucune compagnie ne pourrait se permettre de maintenir des inventaires assez élevés pour suffire à laisser des machines dans les résidences visitées par tout ce monde.

Ce serait physiquement impossible. Notre système de mise en marché ne tiendrait plus. L'essence même de notre commerce qui est du porte-à-porte serait complètement éliminée. Je suis bien convaincu que ce n'est pas l'objectif du projet de loi. Il faudrait sérieusement songer à fermer notre usine de Pointe-Claire et nos 74 succursales au Québec. Que dire de la mise à pied de nos 2100 employés.

J'ai été vendeur pendant des années, je me demande si le projet de loi no 7 passait, si je retournais vendeur, si je ne songerais pas sérieusement à embrasser une autre carrière. Je me demande de quelle façon un marchand itinérant peut se promener dans les maisons, de porte en porte, offrir des produits de la qualité que nous offrons, de la valeur qu'ils ont, de laisser cela dans la maison à la merci du consommateur... Vous savez, le consommateur doit être protégé, nous y sommes. Nous avons bénéficié des largesses de la loi précédente. Nous avons profité de cela en ce sens qu'un nombre indéterminé de marchands que nous qualifions de marchands "flight-by-night", qui passent, qui laissent la marchandise et qui disparaissent.

Nous avons eu à souffrir de cela pendant des années. Le consommateur, la population, surtout les campagnes, là où les gens étaient moins avertis, avant que la télévision devienne de plus en plus populaire... Ces gens qui passaient, qui vendaient des tas d'affaires avec des noms ronflants, qui mettaient de la pression dans les ventes à la maison, qui forçaient les gens à acheter et qui leur disaient même: Si vous achetez telle affaire, on va vous procurer de l'argent, on va être capable de vous obtenir une subvention pour l'acheter.

Votre loi nous autorise à nous débarasser de ces gens. C'était de la concurrence malhonnête. Nous avons survécu à cela. Vous savez, si on était des vendeurs de tableaux, si on avait des tableaux à présenter dans des foyers, ce serait facile pour les gens de suspendre le tableau et de ne pas en abuser, de le laisser là dix jours, quinze jours. Est-ce qu'on l'aime toujours au bout de quinze jours? Il ne s'agit pas de tableaux, il s'agit d'appareils électroménagers. Il s'agit d'aspirateurs, de laveuses de tapis.

Vous figurez-vous ce qu'il va arriver dans une maison si un vendeur se présente, demande la permission de faire sa démonstration, il est accepté, se présente le soir, quand l'époux est là, entre sa marchandise, montre son produit, attire l'attention de la cliente, excite chez elle le désir de se la procurer... Le petit mari, qui est dans le coin et qui voit cela, ne peut pas refuser à son épouse un appareil comme cela. Il désire le lui acheter. Vous avez vécu l'expérience? Qu'est-ce qui arriverait maintenant de ces braves gens si on laissait le même équipement là? Avec votre article no 41 qui dit que ces gens n'ont aucune obligation avant dix jours, sauf l'obligation de l'article 48, de dédommager le commerçant s'ils ont endommagé des articles. Je me figure immédiatement... Vous savez que nous sommes à la merci de toutes sortes d'acheteurs. Il y a des acheteurs, des gens sérieux. Il y a aussi des gens qui n'ont pas l'intention d'acheter, qui ne peuvent pas se permettre d'acheter, mais qui vont quand même profiter du fait d'une démonstration pour dire: Cela m'intéresse, je vais signer votre contrat, on l'essaye et on vous donne des nouvelles. Le client a dix jours pour y penser, la "cooling-off period". Qu'est-ce qui arrive? Immédiatement, dès que le vendeur est sorti, on entreprend le grand ménage saisonnier. On passe l'équipement à la bru du deuxième étage qui n'en a pas, et il y a la grand-maman de la porte d'à côté qui n'a pas ces belles machines-là. Viens essayer cela, lave tes tapis. Au bout de dix jours, on avertit Electrolux: Venez chercher votre équipement, on ne le garde pas.

Nous sommes vis-à-vis de l'équipement usagé, de l'équipement que personne de vous ne voudrait acheter pour du neuf et payer au prix de détail. Nous sommes en présence d'une famille qui s'est servie de deux pièces de machinerie de valeur pendant dix jours et qui nous remet des ap-

pareils qui ne sont pas en bonne condition. Quelle est notre recours? Si les gens ne l'achètent pas, dans la plupart des cas, c'est qu'ils n'ont pas les moyens de l'acheter.

L'article 48 dit: On peut avoir recours contre ces gens pour se faire dédommager de nos réparations. De quelle façon, si cela monte à $40 ou $50? On va créer plus de tort, plus de dommage à notre réputation, à essayer d'exiger de ces gens $40 ou $50. Ces gens vont dire quoi? Ils vont dire à tout le monde, à tous ceux qui veulent les entendre: Electrolux nous a rentré des machines, on les a eues en essai dix jours et là, on nous fait un compte de $30 parce que les machines sont un peu égratignées.

Mais ils ne diront pas que la machine était égratignée. Ils ne diront pas qu'il y a eu des dommages, ils ne diront pas que les machines étaient défraîchies. Ils vont dire: Ils essaient de nous faire payer $30 et ils nous menacent de mettre ça dans les mains des avocats si on ne paie pas. Alors, ça devient une situation intenable. Cela devient une situation où on ne pourrait pas, avec un délai aussi prolongé, laisser de l'équipement de cette valeur dans des maisons sans avoir à en subir une perte.

La compagnie Electrolux a remis au gouvernement du Québec une garantie de $500,000, un demi-million, pour la parfaite exécution de nos obligations vis-à-vis des consommateurs. Jusqu'à maintenant, nous avons toujours été à la hauteur de la situation. En tant que vice-président des ventes, j'ai émis des instructions dans toutes les succursales: Immédiatement, sur demande d'un client, rembourser la journée même le montant comptant. Ce sont ses droits et nous les respectons.

Vous savez, nous avons passé, comme je l'ai mentionné tantôt, des crises économiques. Nous n'en sommes pas totalement sortis. Nous avons des gens qui travaillent pour nous, qui visitent des domiciles tous les jours. Ce n'est pas toujours facile pour ces gens. Si on leur impose des restrictions aussi sévères que celles qui s'en viennent, assurément je me demande si ça va apporter de la protection au consommateur. Prenons un consommateur qui prend de l'équipement chez lui et qui décide, au bout de dix jours, de se servir de son privilège de révocation. Je prétends que, s'ils ont 5 jours pour y penser, ils vont s'empresser de s'en servir, ils vont s'empresser d'expérimenter les appareils, ils vont s'empresser de vérifier si, oui ou non, ils vont les garder. Mais, s'ils ont dix jours, on court une chance qu'ils oublient, la dixième journée, de prévenir Electrolux qu'ils n'en veulent pas.

On va être en présence d'un client qui va être pris pour acheter, parce que son contrat est devenu valide, légal, l'équipement qu'il n'avait pas l'intention d'acheter. Nous aurions des amendements à vous proposer; vous les avez eus dans le mémoire que nous vous avons soumis, à la page 12. Les solutions satisfaisantes suivantes, autant du point de vue de notre compagnie que de celui du consommateur, pourraient être apportées aux problèmes mentionnés précédemment. Ce qui suit consiste en une élaboration de quelques amendements suggérés que nous aimerions voir appliqués au texte de la loi et nous serions heureux d'en discuter le contenu avec vous.

Section 40, paragraphe d). La faculté accordée au consommateur de résoudre le contrat à sa seule discrétion dans les cinq jours suivant celui où chacune des parties est en possession de l'exemplaire du contrat qui lui est destiné. Je regrette, c'est à la page 7. Ce qui arrive, c'est que j'ai demandé à ma secrétaire de me le dactylographier avec plus d'interlignes, c'est plus facile à lire. Je regrette, si je vous ai induit en erreur.

Vous avez aussi l'interdiction de percevoir tout paiement partiel ou total avant l'expiration de la période prévue au paragraphe d), à moins que la marchandise de grande valeur soit livrée lors de la signature du contrat. Vous pourriez ajouter cette ligne à l'intérieur de votre paragraphe et cela vous accorderait quand même la protection du consommateur en ceci que cela exclurait le marchand itinérant qui ne laisserait pas de la marchandise de valeur dans un foyer. Vous seriez complètement couvert par ça. Les compagnies sérieuses seraient aussi couvertes, les gens qui laissent de la marchandise de valeur chez les clients, chez le consommateur.

La section 41. Le contrat conclu entre un commerçant itinérant et un consommateur peut-être résolu à la seule discrétion de ce dernier dans les 5 jours suivant celui où chacune des parties est en possession de l'exemplaire du contrat qui lui est destiné.

Section 42. Le commerçant itinérant ne peut percevoir aucun paiement partiel ou total du consommateur avant l'expiration du délai de résolution prévu à l'article 41, à moins que la marchandise de grande valeur soit livrée lors de la signature du contrat par le consommateur. A notre humble opinion, MM. les membres de la commission, ces clauses insérées à votre projet de loi atteindraient, je crois bien, l'objectif visé par votre loi, qui est la protection du consommateur, la protection du marchand et aussi des hommes de loi.

M. Léger: Est-ce qu'il n'y aurait pas une erreur dans votre texte, à la section 42? Le dernier mot ne serait-il pas plutôt le commerçant? Je saisis mal votre idée. Ce ne serait pas: "A moins que la marchandise de grande valeur soit livrée lors de la signature du contrat par le commerçant"?

M. Rivard: Oui, vous avez raison.

M. Léger: Plutôt que "par le consommateur"?

M. Rivard: Je m'excuse. Electrolux exploite un commerce propre, honnête et respectable. Le nom d'Electrolux est synonyme de qualité et service. Nos 42 années d'expérience sont là pour le prouver. Dans le but de pouvoir continuer nos activités au Québec, au nom de tous les miens, nous vous soumettons pour sérieuse considération les deux amendements que je viens de vous lire. M. le Président, nous vous remercions sincèrement de

nous avoir accordé le privilège de pouvoir vous soumettre un mémoire. Je voudrais terminer en vous citant une déclaration du ministre, Mme Bacon, lors de sa conférence de presse donnée à la suite du dépôt en première lecture de la loi, le 30 mars dernier, devant l'Assemblée nationale. "Comme objectif, nous voulons faire de la Loi de la protection du consommateur un instrument accessible aux consommateurs, aux commerçants et aux hommes de loi." Nous sommes de la deuxième catégorie, madame. In medio stat virtus.

Le Président (M. Lafrance): Sur cette citation, Mme le ministre, vous avez la parole.

Mme Bacon: M. le Président, toutes les remarques de la compagnie Electrolux portent sur deux sujets qui concernent la vente à domicile. J'aimerais peut-être commencer par le délai de résolution de dix jours accordé au consommateur. On ira par la suite à l'interdiction qui est faite aux commerçants de percevoir tout paiement avant l'expiration de cette période.

Commençons par le délai de résolution de dix jours. Je ne voudrais pas entrer dans un débat juridique, au départ, mais il y a peut-être une mise au point à faire. Quand on prévoit un délai de dix jours, cela comprend les samedis, les dimanches et les jours fériés, tandis que le délai de la loi actuelle — la loi 45 — de cinq jours ne comprenait pas les samedis, les dimanches et les jours fériés. Si on fait la différence entre les deux, cela nous paraît énorme, parce qu'on dit: C'est le double, de cinq à dix jours. En fait, la différence est presque de trois jours ou de deux jours, selon ie cas.

J'aimerais quand même, ce matin, au départ, sans aller plus loin, faire cette mise au point. Vous faites plusieurs suggestions, mais quel délai accorderiez-vous au consommateur pour résoudre son contrat? Est-ce que vous remettiez au consommateur tous les montants qu'il vous avait versés lorsqu'il décidait de résoudre le contrat, quand on pense à la loi actuelle? Est-ce que votre politique a changé avec l'introduction de la loi, en 1971?

M. Rivard: Voici madame...

Mme Bacon: Avant 1971, donc, et après 1971?

M. Rivard: Avant 1971, depuis l'existence de la compagnie, avant même que cette loi soit promulguée, nous avons toujours été une compagnie... J'ai vécu cela, parce que j'ai été entraîné comme cela. Nous avons toujours respecté le désir du client. Même il y a dix ans, il y a quinze ans, il y a vingt ans, quand un client, pour une raison ou pour une autre, après avoir pensé à son achat toute la nuit nous appelait le lendemain pour nous dire: M. Rivard, ma femme n'a pas dormi de la nuit, on n'est pas capable d'acheter cela tout de suite, on voudrait vous remettre cela, c'était un devoir pour nous de retourner chez le client, d'aller chercher notre équipement et de lui rendre son argent, le montant versé.

En réponse à une question précédente, madame, nous sommes satisfaits de la loi existante et de son délai de refroidissement de cinq jours. Nous sommes satisfaits de cela. Nous avons toujours respecté intégralement cette loi. Nous sommes très sévères pour qui que ce soit de notre personnel qui ne se conformerait pas aux termes de la loi. Est-ce que cela répond à vos questions, madame?

Mme Bacon: En fait, vous avez respecté la loi depuis 1971 avec les cinq jours, mais, auparavant, avant cette loi, avant 1971, est-ce que vous aviez des périodes que vous accordiez à vos clients ou si vous n'avez...

M. Rivard: Une période normale...

Mme Bacon: ...commencé qu'avec la loi existante, la loi 45?

M. Rivard: Ce qu'on jugeait normal, c'est que quelqu'un nous appelle le lendemain ou le surlendemain pour nous dire: Votre équipement, je ne le garde pas. Si quelqu'un nous appelait après une semaine, après avoir fait le tour de la maison et l'avoir passé au voisin, on insistait pour faire respecter notre contrat. Depuis que la loi est adoptée, nous agissons de cette façon.

Mme Bacon: II y a une autre remarque que j'aimerais faire.

Vous estimez que le délai de dix jours va amener une baisse dans vos affaires. Est-ce que vous ne déduisez pas, à ce moment, que le consommateur qui n'a plus le temps de réfléchir décidera de ne pas acheter? Vous avez quand même confiance dans vos produits, vous dites que vous avez des produits durables, des produits qui se vendent bien. Est-ce que le fait d'augmenter cette période de réflexion...

M. Rivard: Cela nous met à la merci de cette catégorie de consommateurs que nous ne pouvons pas discerner au moment de la présentation au domicile. J'ai tenté une expérience hier par téléphone en vérifiant auprès d'une grosse compagnie multinationale ayant une place d'affaires à Québec. J'ai appelé ces gens et j'ai demandé leur département d'appareils électroménagers. Au type qui me parlait j'ai demandé: Vous vendez des aspirateurs? Il m'a dit: Oui, monsieur. Je lui ai dit: C'est l'anniversaire de naissance de mon épouse, je voudrais lui en acheter un aujourd'hui. Ecoutez, est-ce que c'est vrai que vous vendez sans comptant et, si ma femme n'aime pas sa machine dans un mois, elle peut vous la retourner? Il a dit: Voyons, monsieur, ce n'est pas logique ce que vous dites là, vous n'êtes pas sérieux. On va vendre sans comptant à quelqu'un qui a un crédit établi. Est-ce que vous avez une carte de crédit chez nous? J'ai dit: Non, je n'ai jamais fait affaires avec vous. Il a dit: Vous n'êtes pas sérieux.

Alors, je crois, madame, que cela donne la réponse. Nous ne pouvons pas faire affaires avec

des gens de la même façon que ce genre de commerce, parce que nous n'avons pas d'expérience de crédit avec des gens que nous rencontrons pour la première fois. Alors, lorsqu'on frappe à une porte, les gens qui veulent bien nous recevoir, qui veulent bien voir notre démonstration, on est consentant à laisser l'équipement, on est consentant à leur vendre les appareils, nous assumons nous-mêmes le crédit a Electrolux; nous ne faisons pas affaires avec les compagnies de finance. Alors, nous sommes consentants à laisser notre équipement. Quand le vendeur apporte son contrat à la succursale, nous ne faisons pas une enquête de crédit sur cette personne, nous acceptons le contrat intégralement, tel qu'il nous est soumis. Tout ce que nous demandons aux personnes c'est de nous fournir deux références familiales du client, du consommateur. Immédiatement, nous lui donnons son crédit. Quand on arrive avec une période de dix jours de délai, le client prend l'équipement, comme je l'ai expliqué tantôt, il va s'en servir dix jours. Le client sérieux, il n'y a aucun problème, c'est la majorité, mais c'est l'autre pourcentage qui n'est pas sérieux, c'est celui-là. Vous savez, il y a un autre point, madame; c'est que, quand il y a de l'équipement dans une maison, fût-il de première qualité, fût-il même ce qu'il y a de mieux sur le marché — vous me permettrez de le mentionner — il est quand même à la merci de certains vendeurs plus ou moins honnêtes qui circulent, qui sont des marchands itinérants. Alors il passe dans la maison et dit: Ah! Madame, vous avez un appareil Electrolux. Elle répond: Je ne l'ai pas encore acheté, on l'a en essai. Alors à ce moment, automatiquement, l'appareil vient de sortir de la maison, parce que le vendeur compétiteur malhonnête le descend complètement.

Donc, si on accorde quelques jours de plus avant que la transaction ne soit consommée, automatiquement, nous nous exposons encore à cela en plus.

Mme Bacon: Vous me surprenez quand même quand vous affirmez dans votre mémoire: Nous croyons fortement que la prolongation de la période de cinq à dix jours n'est pas dans l'intérêt du consommateur — je vous cite — puisqu'elle aura pour effet d'encourager ce dernier à remettre sa décision quant à garder le produit. Vous donnez un début d'explication dans votre mémoire; moi j'estime que cette explication est insuffisante. J'aimerais que vous me donniez encore plus de détails. Votre explication est que le consommateur risque de dépasser inconsciemment le délai prévu sans prendre d'action légale de résolution. Est-ce que vous ne pourriez pas me donner plus de détails là-dessus?

M. Rivard: Voici le cas, comme je vous l'ai expliqué tantôt, je m'excuse; un vendeur entre dans une maison, établit le contact, se présente le soir, montre son équipement, fait signer le contrat, la vente est faite.

Si, dans une période de cinq jours, tel que cela existe actuellement, nous n'avons pas en- tendu parler du client, la vente est faite. Dans l'esprit du consommateur qui n'est pas sérieux — c'est celui-là qui nous préoccupe le plus et, croyez-moi, il y en a beaucoup — cinq jours, on se souvient que cinq jours, c'est vite fait. Il faut vite rappeler, il faut vite faire le ménage, il faut vite rendre l'appareil. Mais, dans l'esprit du consommateur qui a dix jours — vous savez qu'on va le publier, si cela devient loi, tout le monde va le savoir cette période qui a été étirée à dix jours donne cette chance au consommateur non pas d'expérimenter encore plus l'appareil, parce que la décision est déjà prise, qu'il l'achète ou qu'il ne l'achète pas, mais cela va simplement lui donner un délai additionnel qui va lui permettre, dans la plupart des cas, d'oublier qu'il faut le remettre.

C'était l'esprit de cette note que vous avez en face de vous.

Mme Bacon: C'est parce que vous nous disiez que ce n'était pas dans l'intérêt du consommateur. Mais est-ce que ce n'est pas cela, l'intérêt du consommateur, que de lui donner plus de temps de réflexion? Est-ce que ce n'est pas dans son intérêt que de lui donner plus de temps?

M. Rivard: Mme le ministre, je m'adresse à vous et à tous les autres membres de la commission qui avez déjà, sans doute, acheté un appareil, de cette marque ou d'une autre. Soyons réalistes: Est-ce que cela prend dix jours pour décider si, oui ou non, on aime un appareil?

Mme Bacon: Je ne voudrais pas revenir à ce que j'ai dit au début, mais, quand on compte les jours fériés, samedi et dimanche, la différence entre cinq et dix jours est minime.

M. Rivard: Même là, nous croyons sincèrement que la période actuelle dans le texte de loi actuel est suffisante pour permettre à la personne de prendre une décision sérieuse, à l'intérieur de son foyer, après avoir vu et entendu les explications du vendeur itinérant et avoir eu le privilège de l'essayer elle-même, sur ses propres tapis, sur ses propres meubles, dans son foyer, dans l'intimité de son foyer, le lendemain, lorsqu'elle est seule, que l'époux est au travail et les enfants absents, qu'il n'y a de pression de personne. Elle a ce privilège de l'essayer chez elle, d'expérimenter, de faire toutes les petites expériences qu'elle désire; il me semble que cela ne prend pas cinq jours. Je vous jure que, le lendemain, la consommatrice s'en est servi.

C'est d'aillerus la même expérience lorsqu'on achète une fourrure à une dame. On l'étrenne très rapidement, on a bien hâte de la porter. Alors, pour l'aspirateur ou la laveuse à tapis, je crois que la période de cinq jours que nous vivons actuellement est entièrement suffisante. C'est notre opinion.

Mme Bacon: Si on revient à l'article 42, l'interdiction qui est faite au commerçant...

M. Rivard: Cela, c'est plus grave.

Mme Bacon: ...de percevoir tout paiement— disons qu'on va laisser le délai et qu'on va venir à cela — j'aurais deux questions sur la politique de votre compagnie actuellement.

Premièrement, quelle est votre politique quant à la livraison de vos produits? Est-ce que vous les livrez toujours au moment de la signature du contrat?

M. Rivard: Oui, madame.

Mme Bacon: Ma deuxième question, qui s'enchaîne. Est-ce que vous exigez du consommateur une certaine somme d'argent lors de la signature du contrat...

M. Rivard: Oui, madame.

Mme Bacon: ...soit un paiement total ou un paiement partiel?

M. Rivard: Soit un paiement total ou un paiement partiel.

Mme Bacon: Vous l'exigez toujours.

M. Rivard: Oui, madame, sûrement. Nos marchands itinérants ont des instructions de ne pas laisser d'équipement si les gens ne versent pas un montant comptant.

Mme Bacon: Et vous livrez toujours la marchandise au moment de la signature.

M. Rivard: Immédiatement, madame. Sur réception. D'ailleurs, les gens l'exigent. Les gens vont dire: C'est cette machine que je veux avoir parce que celle-là, elle doit être meilleure qu'une autre que vous avez dans votre voiture parce que les vendeurs ont toujours une meilleure machine pour faire la démonstration que l'autre qui est dans la voiture. Ce qui est faux, qui n'existe pas, mais, enfin, on se plie à leurs demandes. Ou encore, ils vont nous dire: J'en veux une neuve. Celle-là a peut-être fait dix ou quinze démonstrations, alors qu'on vient de l'ouvrir, de la sortir de sa boîte, qu'elle n'a servi que chez elle. Allez en chercher une dans votre voiture. Alors, on va en chercher une qui n'a jamais été déballée et on la lui donne.

Mme Bacon: Dans votre mémoire, vous dites aussi que l'interdiction de percevoir tout paiement avant l'expiration du délai de dix jours va engendrer de l'incertitude, de la confusion aussi dans les transactions. Est-ce que vous pourriez nous dire pourquoi les gens seraient incertains ou confus à ce moment-là?

M. Rivard: Madame, cela va surtout engendrer un paquet d'embêtements et on ne pourra pas passer à travers.

Mme Bacon: Pour Electrolux.

M. Rivard: Pour Electrolux, oui. On en a discuté très sérieusement. Je suis directeur de la compagnie. Nous nous sommes réunis à plusieurs occasions. Nous avons analysé cette situation très sérieusement. Vous savez qu'actuellement le problème des inventaires, pour un bon administrateur, c'est de maintenir des inventaires bas parce qu'un inventaire coûte très cher à maintenir.

Alors, nous avons une force de vente de 1600 marchands au Québec. Ces 1600 marchands qui se promènent de porte en porte doivent avoir avec eux deux machines de chaque modèle dans leur voiture et nous devons en maintenir sur les planchers de nos 74 succursales suffisamment pour que, le lendemain, nous puissions leur donner de la marchandise.

Quand on fait la transaction chez un client, on entre deux machines. Le marchand revient le lendemain matin avec son contrat. Nous lui redonnons d'autre équipement. Nous passons immédiatement ce contrat, il est sorti des inventaires et, à moins d'avis contraire, la période actuelle de résiliation de cinq jours, c'est classé.

Alors, immédiatement, on présume en le recevant que la transaction sera faite, sera consommée. Alors, on fait parvenir notre contrat à notre siège social à Montréal et, immédiatement, tout le processus de paiement du marchand se met en marche pour pouvoir remettre à ce père de famille sa paie en fin de semaine pour qu'il puisse mettre du pain et du beurre sur la table pour sa femme et ses enfants.

C'est notre système. Si on n'a pas de comptant, cela nous prend... Nécessairement, nous n'avons pas cette entrée de capitaux qui nous vient tous les jours, de tout le monde. On ne peut pas opérer sans cela. Et je ne vois pas quel serait le point, pour quelle raison, quand nous avons déposé auprès du gouvernement une somme aussi imposante que le demi-million de dollars pour garantir nos obligations vis-à-vis de la clientèle, pourquoi on serait obligé de faire cela.

Mme Bacon: J'aimerais peut-être mentionner aussi que, d'après le projet de loi que nous avons devant nous, les sommes qui sont perçues...

M. Rivard: ... sont déposées en fiducie. Mme Bacon: ... sont déposées en fiducie.

M. Rivard: C'est ce que nous faisons actuellement.

Mme Bacon: Alors, comment pouvez-vous vous en servir à ce moment pour le roulement de votre chiffre d'affaires s'il est déposé en fiducie?

M. Rivard: Une vente qui ne serait pas consommée est une vente où il n'y aurait pas cette somme. Alors, il faudrait garder en filière le contrat de côté et attendre cette période de dix jours pour savoir si le client va nous donner l'argent ou non. A ce moment, on ne pourrait pas

rapporter à notre siège social que nous avons tel chiffre d'affaires de fait.

Nous opérons avec des contrats. Nous opérons, j'imagine, avec des marges de crédit. Cela relève de la trésorerie et non de moi. J'imagine que tant de transactions complétées représentent X au point de vue d'entrée de capitaux. Suis-je correct, M. Brossard, ou avez-vous des commentaires?

M. Brossard (Jacques): J'aurais une correction à apporter, M. Rivard.

M. Rivard: S'il vous plaît.

M. Brossard: Comme le ministre le disait, les fonds perçus au moment de la vente ne servent pas à la liquidité de la compagnie. Ils sont déposés à la succursale et ils sont maintenus là durant la période de "refroidissement" afin que, s'il y a des cancellations, on puisse rembourser immédiatement le consommateur.

Le problème des inventaires se situe surtout à la liberté qu'auraient nos consommateurs et nos marchands de laisser un nombre élevé de nos produits dans beaucoup de foyers et c'est surtout, selon notre point de vue, pour prouver le sérieux d'une transaction. Lorsqu'un client est réellement sérieux, veut acheter, on lui laisse le produit et on lui dit: Voilà, on le laisse chez vous. On est sérieux en voulant vendre. On est sérieux en voulant que vous essayez le produit chez vous, mais, par contre, il faut que vous aussi soyez sérieux. Remettez-nous un montant d'argent, lequel montant nous garderons en fiducie pendant que vous réfléchissez à nos produits et, lorsque la période sera terminée, le contrat sera complété.

Mais cette période de dix jours et la non-perception engendreront, nous croyons, une augmentation sensible de nos inventaires et c'est un fardeau extrêmement difficile à supporter.

Mme Bacon: ... administratif.

M. Rivard: C'est plutôt à ce niveau que nos objections se font valoir.

Mme Bacon: J'aimerais...

M. Rivard: Au niveau des inventaires.

Mme Bacon: Vous mentionnez aussi que ces dispositions dans la loi sont révolutionnaires, mais on ne fait pas encore de révolution ici. J'aimerais vous dire que, dans la législation française, il y a une semblable disposition qui a été mise à l'épreuve.

Vous affirmez aussi qu'il n'y a aucun problème et que le consommateur est remboursé rapidement s'il décide de résilier le contrat. J'aimerais vous signaler qu'à l'office, on nous rapporte certains problèmes dans de tels cas. Les gens ont des problèmes à se faire rembourser. Il faut donner des ordres à des compagnies.

Quand on dit qu'on légifère parce qu'il y a eu des abus, je pense qu'on le fait suivant les pratiques courantes.

M. Brossard: Mme le ministre, je peux répondre à votre question. Depuis le début de la loi 45, Loi de la protection du consommateur, nous avons été appelés devant la commission qui était dirigée par Mme Niquette Delage, à ce moment-là. C'est l'année passée, en juin 1975 que j'ai comparu devant la commission. On m'a cité trois cas. Un de ces cas était un remboursement qui avait été effectué, mais qui avait excédé la période de sept jours. D'accord? Un autre était un cas où nous n'avions pas fourni un état de compte détaillé au client lors de sa demande et il avait eu certains problèmes. Le troisième cas m'échappe, je dois vous le dire.

J'avais demandé, à ce moment-là, à Mme Delage s'il y avait de nombreux cas qui se produisaient et on m'avait informé qu'il n'y en avait que quelques-uns.

Mme Bacon: Je tiens à souligner que je ne fais pas le procès d'Electrolux.

M. Brossard: D'accord.

Mme Bacon: Je mentionnais cela en général.

M. Rivard: En général.

M. Brossard: A ce moment-là, les procédures de la compagnie étaient que la succursale devait nous écrire, au siège social pour nous aviser de l'annulation ou de l'intention du client d'annuler son contrat. On émettait un chèque du siège social pour le retourner à la succursale. Le marchand allait chez le client et remettait le chèque au client. Tout cela créait une période qui excédait le délai prévu par la loi. A la suite de notre présence devant Mme Delage, nous avons émis des instructions aux succursales, les autorisant à rembourser à même les fonds dans la succursale. Ceci, à notre avis, a éliminé les problèmes qui étaient causés précédemment. Je dois vous avouer sincèrement que, dans ma fonction, je n'ai jamais reçu, par la suite, de plaintes du bureau du consommateur.

Mme Bacon: On tente, des deux côtés, de se sensibiliser davantage à ces problèmes.

La Commission des services juridiques nous faisait des propositions, des suggestions à l'effet qu'il y aurait lieu de limiter à $400 les ventes. Aimeriez-vous commenter ce montant, par exemple?

M. Rivard: Une affaire semblable serait très difficile d'application. Vous vous imaginez que... Je ne vois pas comment cela pourrait s'appliquer.

Mme Bacon: D'inscrire un montant da la loi...

M. Rivard: D'ailleurs, madame, mettre dans la loi...

Mme Bacon: ...vous ne trouveriez pas cela réaliste.

M. Rivard: ...un montant de crédit à offrir à ces gens. Est-ce cela?

Mme Bacon: Des montants d'achats faits...

M. Rivard: Le montant total du chiffre d'affaires.

Mme Bacon: Oui, le montant de vente à domicile serait limité à $400 par foyer.

M. Rivard: Je crois bien que cela ferait de la discrimination. Je pense à Electrolux, premièrement, où quelquefois les gens vont acheter les deux appareils a la fois. Je pense aussi à ces gens qui sont quand même des professionnels de la vente et qui vendent des adoucisseurs d'eau; il y a même des piscines qui se vendent à domicile. Non, je crois que ce serait discriminatoire.

Mme Bacon: Vous mentionnez aussi dans votre mémoire des marchandises de grande valeur. Cela dépend de l'interprétation de chacun, quand on dit de grande valeur. Quel est le montant moyen d'une vente chez vous?

M. Rivard: Quand j'ai exposé...

Mme Bacon: Qui détermine si c'est un objet de grande valeur ou non? Ce sont encore des questions que je me pose.

M. Rivard: Je n'ai fait que citer le texte que vous avez et moi-même, quand je l'ai mentionné, j'ai éliminé le mot grande. Je considère que ce sont des objets de valeur.

Mme Bacon: Dans une loi, ce serait difficile de dire: Les objets de valeur ou de grande valeur. Je pense qu'on ouvre la porte à toutes sortes d'interprétations.

M. Rivard: Je me demande s'il ne serait pas à propos, à ce moment-là, de dire peut-être: Toute marchandise d'une valeur au détail au-dessus de $100 ou au-dessus d'une somme à déterminer, pour au moins évaluer quelque chose qui en vaille la peine.

Il est sûr que cet article 42 est discriminatoire contre le marchand itinérant. Il ne faut pas en vouloir aux marchands itinérants, parce que ce sont de braves citoyens comme vous et moi, qui gagnent leur vie de cette façon, de façon très honorable. Je ne partage pas l'opinion de celui qui m'a précédé au micro en disant qu'ils viennent briser l'intimité des gens. Je me répète, je sais, mais j'ai été vendeur assez longtemps et j'ai toujours respecté cette partie.

Mme Bacon: Je reviens à ma question. Quel est le montant moyen d'une vente?

M. Rivard: Le montant moyen de nos ventes est de $350.

Mme Bacon: $350.

M. Rivard: Oui, madame.

Mme Bacon: Quand on parle de récupération de montant versé, je veux justement revenir à cela, parce que c'est là où il y a eu des abus, où il y a eu des plaintes chez le consommateur, où il éprouve le plus de difficultés. J'exclus les particuliers. Il y a des démarches, des téléphones, des lettres, des appels. Evidemment, l'office est obligé de s'occuper de ces démarches, mais je pense qu'on est justifié d'intervenir de la façon prévue dans le projet de loi. D'une façon ou d'une autre, que ce soit la façon finale ou qu'on considère autre chose, ce ne sont pas des dispositions inutiles. Je pense que vous affirmiez presque catégoriquement dans votre mémoire que ce sont des dispositions inutiles. Je ne voudrais pas que vous restiez avec cette impression. C'est parce qu'il y a eu des abus, des problèmes chez les consommateurs qu'il a fallu agir. Je pense qu'on a mentionné tantôt que c'est l'Etat qui doit le faire à ce moment. On n'a pas le choix.

Ce ne sont sûrement pas des dispositions inutiles. Qu'elles le soient dans cette version ou dans une autre, cela répond à des problèmes auxquels ont eu à faire face des consommateurs. Tant mieux si tous nos vendeurs sont sans reproche. On a quand même des cas bien précis, à l'office, où on a eu des problèmes. C'est un peu cette sensibilisation à ces problèmes que je tente de faire. Je trouve que vous étiez très très catégorique dans votre mémoire sur l'inutilité de telles dispositions.

M. Rivard: Voici, madame. D'abord, ce ne sont pas tous les vendeurs qui sont sans reproche. Nous le déplorons. Nous visons, par une sélectivité beaucoup plus suivie, à l'amélioration de cette profession. Chez Electrolux, c'est un point d'honneur. Par contre, les problèmes que la commission ou que l'Office de la protection des consommateurs a connus de la part des consommateurs... Vous savez qu'il y a un gros pourcentage de ces consommateurs qui ne sont pas sans reproche. Beaucoup de ces gens se servent de ces lois pour se permettre des abus de toute nature. Les mêmes lois sociales qui existent et qui font beaucoup de bien à un peuvent servir de tremplin pour tous les abus imaginables pour d'autres gens. Nous savons ces choses-là.

La position vous a peut-être semblé radicale, mais nous sommes convaincus que si cette loi est acceptée dans son intégrité telle qu'on la connaît actuellement ou telle qu'elle est soumise dans le projet de loi no 7, assurément, nous allons être dans une situation très corsée. Nous allons avoir une situation difficile à vivre et je me demande si nous pourrions nous en sortir. Permettre que le nombre de marchands que nous avons se promènent d'une porte à l'autre avec de l'équipement de

la valeur de celui que nous avons et le laisser là pour une période de temps très prolongée sans toucher aucun comptant, être à la merci de toutes ces gens, je pense que cela manque de sérieux.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Lafontaine.

M. Léger: Vous avez surtout parlé de deux points précis. Sur un vous ne m'avez pas convaincu et, sur l'autre, vous m'avez un peu ébranlé.

En ce qui me concerne, la période de dix jours, comme l'a dit le ministre tantôt, je pense que c'est quand même deux ou trois jours supplémentaires et ce n'est pas cela qui peut retarder énormément la décision. Elle peut être prise en dedans de ces huit ou dix jours. Je ne vois pas de problème majeur de ce côté.

De l'autre côté, sur l'aspect d'une somme qui soit un acompte ou un total à l'intérieur des dix jours, il y a peut-être un seul argument qui m'a ébranlé. Ce n'est pas que cela vous coûte des dépenses pour commencer à ouvrir tous les dossiers administratifs d'une personne qui peut changer d'idée après. Cela vous coûte des dépenses. Cela, je pense que ce sont les risques du métier.

Le fait que vous craignez qu'on laisse un nombre tellement élevé d'appareils et que vous allez avoir un problème d'inventaire, c'est-à-dire que chacun de vos 1600 vendeurs soit dans l'obligation de laisser un ou deux appareils, cela veut dire que vous doublez ou triplez votre inventaire. A la longue, cela se replace. Après un certain temps, il va se créer une habitude. Vous allez prévoir que cela va être à peu près le même montant d'inventaire, parce qu'il va se créer une habitude de fonctionnement. Il s'agirait peut-être beaucoup plus de la qualité de vos vendeurs qui ne laisseraient pas d'appareil à des gens parce qu'ils auront senti qu'ils ne sont pas capables de le garder, n'étant pas sérieux.

C'est plutôt l'aspect du sens de responsabilité du consommateur qui, ayant donné un certain montant, même s'il sait qu'il est protégé et que s'il refuse, il va être remboursé.

Il va être obligé de ne pas briser la marchandise, même si la loi, à l'article 48, dit qu'il peut être poursuivi pour avoir brisé l'appareil.

Mais il y a le fait, au point de vue psychologique, que la personne qui a acheté l'a fait peut-être sous pression, peut-être pas sous pression; mais, une fois qu'elle l'a acheté, elle doit garantir que cet appareil soit en bonne condition et qu'elle ne fera pas appel à son désir de se fouter d'un bien. Dans ce sens-là, peut-être, mais, jusqu'à maintenant, c'est simplement cet aspect. Est-ce que, d'après vous, le fait de ne pas donner d'argent comme acompte peut enlever le sens des responsabilités aux gens qui l'achètent?

M. Rivard: Assurément. Les gens vont dire: On a la machine en essai. Vous avez entièrement raison.

M. Léger: J'ai seulement cette question, parce que dans l'ensemble je pense que les autres ar- guments concernent des problèmes inhérents à votre commerce. Mais, comme de raison, il faut que le consommateur soit sérieux. Il a de la protection avec l'article 48, à l'effet qu'il peut changer d'idée, mais il doit tenir compte du fait que l'appareil ne lui appartient pas tant qu'il n'a pas été engagé par un contrat qui lui dit que c'est au bout de 10 jours qu'il doit être un acheteur qui conserve l'appareil et qu'il doit le payer.

M. Béland: Je vous remercie de vos commentaires, M. le député; ils sont très à propos, c'est exactement le but qu'on veut viser. C'est la question du paiement initial qui nous trouble, plus que la période de refroidissement, beaucoup plus, pour les raisons que vous venez de donner.

Le Président (M. Lafrance): M. Rivard et vos collègues, on vous remercie énormément pour la présentation de votre mémoire et de vous être prêtés à la période de questions.

Nous entendrons l'Association des marchands de meubles Bonne valeur, dont M. Jacques De Bel-lefeuille est le directeur général.

Association des marchands de meubles Bonne valeur

M. De Bellefeuille: Mme le ministre, M. le Président, mesdames, messieurs, on vous remercie d'avoir bien voulu nous inviter à présenter notre mémoire devant votre groupement. Mon nom est Jacques De Bellefeuille, je suis le directeur-gérant du groupement Bonne valeur. C'est une association de 120 marchands de meubles et accessoires électroménagers dans toute la province. Mon compagnon est M. Tremblay, notre secrétaire, Gaston Tremblay, propriétaire d'un commerce de meubles ici à Québec.

L'Association des marchands de meubles Bonne valeur désire se faire entendre au sujet du nouveau projet. Nous employons 1375 personnes à temps plein, 400 ou 500 à temps partiel et notre volume d'affaires est au-dessus de $100 millions. La très grande majorité de nos produits vendus dans nos magasins sont des produits du Québec et je dirais que la quasi-totalité sont des produits canadiens.

Nous félicitons le ministère de se pencher du côté consommateur et il nous fait grand plaisir de voir que la loi du consommateur sera améliorée. Nous l'endossons quasi à 100%. Nous considérons que notre clientèle, canadienne d'expression française à 95% chez nos marchands, est fort intéressante et nous ne voudrions pas la qualifier de clientèle adulte et la comparer aux enfants de 12 ou 13 ans comme l'avocat a mentionné tout à l'heure. Nos consommateurs du Québec, nous le croyons, sont des gens avertis.

Nous endossons toutes les associations de protection du consommateur et nous avons longtemps travaillé avec Niquette Delage pour améliorer le sort de nos consommateurs. Il y a un point qui nous chatouille, dans votre nouveau projet, et c'est l'article 172. "Nul ne peut payer une ristourne, un boni, une commission, ou accorder quelque avantage

que ce soit à un commerçant en considération de la cession de la créance résultant d'un contrat assorti d'un crédit passé entre ce commerçant et un consommateur."

Nous avons beaucoup de difficultés à accepter cet article et nos raisons sont, nous croyons, très valables, car, à titre de commerçants, nos profits sont limités. Nous devons nous plier à la compétition. Nous devons prendre des marges de profit raisonnables et nous considérons que nos marchands ont droit à des marges de profit raisonnables.

A la fin d'une année, un marchand de meubles, si vous regardez son bilan, son rapport d'impôt, après impôt, il lui reste entre 2%, 2,5% et 3%. On doit compter tous les dollars dans l'exercice du commerce. Ici, votre projet de loi voudrait nous empêcher d'aller chercher ce que l'avocat tout à l'heure a appelé un "kick-back", mais ce n'est pas tellement cela, ce n'est pas tellement un "kickback" qu'on va chercher. Il a dit que les compagnies de finance nous donnaient... Les compagnies de finance ne donnent rien. L'ère du "bénévolat", c'est terminé. On va chercher une ristourne chez les compagnies de finance, une ristourne sur le volume qu'on leur donne. Ce volume, on le leur accorde parce que notre clientèle a besoin de crédit. Nos Canadiens d'expression française ont besoin de crédit pour se meubler. Il est normal que tous puissent se meubler confortablement.

Tout ce que nous faisons, c'est que nous aidons des consommateurs à financer leurs achats à des taux d'intérêt raisonnables, et c'est mentionné sur tous les contrats de finance. Cela varie selon les compagnies, mais il est laissé au consommateur le choix de décider si, oui ou non, il veut faire affaires avec cette compagnie.

La compagnie remet au marchand une petite ristourne, à la fin de l'année, basée sur le volume, sans charges additionnelles au consommateur; c'est faux. Le consommateur ne paie pas pour cela. Le marchand la perçoit de la compagnie de finance, parce qu'on dirige plus de commerce chez cette compagnie de finance.

Bien entendu, on peut aider le consommateur à se financer. Il vient se financer dans le magasin. Il n'a pas à se déplacer. On ne fait que lui rendre service. N'est-il pas normal d'être payé pour les documents qu'on doit remplir, parce que ces documents sont compliqués? Il faut obtenir des renseignements sur le client. C'est le marchand de meubles qui doit payer son personnel pour faire ce travail. La solvabilité du client doit être établie. On a des recherches à faire. C'est encore le marchand qui paie pour cela. Il nous faut effectuer la comptabilité pour la facturation. On s'occupe de la réception des montants d'argent. Cela a l'air simple de s'occuper de la réception des montants d'argent, mais, souvent, ce sont des contrats qui sont financés pour 36 mois.

Donc, notre marchand doit percevoir les montants d'argent pendant 36 mois, les remettre à la compagnie. Cela peut être une compagnie de finance et cela peut être une banque. Mais on doit percevoir ces montants d'argent et les remettre à la compagnie. Cela ne se fait pas sans frais. Nous avons des frais pour cela aussi.

Il faut tenir compte des contraintes de la loi relativement aux biens. Il faut accepter le risque d'avoir à absorber des pertes dans le cas de non-paiement du client, en cas de désertion — cela arrive.

Disons que ce sont les exceptions, mais cela arrive. S'il y a désertion, il faut retourner chercher la marchandise. Encore là, il y a des frais qui sont impliqués. Il faut contrebalancer les frais de recouvrement sur le compte, il faut admettre les risques de poursuites judiciaires pour le recouvrement. Tout ce travail doit se payer. La façon dont cela se paie présentement, et c'est accepté partout à travers le pays, c'est par une ristourne de compagnies de finance ou des banques. Et nous croyons qu'il est absolument nécessaire pour nos marchands d'avoir ces sommes d'argent pour pouvoir faire un profit raisonnable à la fin de l'année, parce qu'encore une fois, dans le meuble, dans le commerce du meuble ou des appareils électroménagers, tous les dollars comptent. Pour assurer l'essor économique de notre industrie, qui est la troisième dans la province, parce que cela fait partie de l'industrie du bois, le meuble, nous croyons que nos marchands devraient avoir la possibilité de gagner leur vie sans avoir des sommes d'argent qui leur sont enlevées, surtout quand cela n'affecte aucunement le consommateur.

On termine, encore une fois, en vous félicitant de vouloir améliorer le sort du consommateur. On se rend compte que le ministère de l'Industrie et du Commerce se penche un peu, aujourd'hui, sur le côté commerce et on vous en félicite. On l'a fait publiquement à quelques reprises, on apprécie beaucoup les efforts que le gouvernement, par le ministère de l'Industrie et du Commerce, section commerce, a fait, à ce jour, pour les commerçants de la province de Québec, parce que nous représentons des petits marchands. C'est une association de 120 marchands détaillants et disons que ce sont les marchands détaillants, la petite industrie, qui ont su tenir l'économie de notre province. Alors, gardons l'essor de l'économie en protégeant nos marchands de meubles du Québec. Merci.

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. de Bellefeuille.

Madame le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'aimerais faire quelques remarques et peut-être, par la suite, poser certaines questions à M. De Bellefeuille et à son collègue.

L'article 172. Evidemment, votre mémoire porte nécessairement sur l'article 172. Nous ne doutons pas que cet article a des conséquences importantes pour les marchands de meubles. Nous ne sommes pas surpris non plus de vos critiques très vives, mais nous ne sommes pas sûrs que vous ayez saisi nettement les intentions de cet article. A notre avis, nous, l'article 172 vise à corriger des anomalies dans le système de la distribu-

tion du crédit, système qui constitue une véritable incitation à ignorer ou à contrecarrer les intérêts du consommateur. Vous-même apportez un certain éclairage sur ces pratiques. A la page 4 de votre mémoire, par exemple, vous déclarez: "Puisque le volume crée des bénéfices au cessionnaire, le marchand s'attend à partager ces profits." Vous reconnaissez donc vous-même qu'en tant que marchand, vous êtes en quelque sorte devenu un associé de la compagnie de finance, et vous êtes intéressé à rechercher un profit, non seulement sur vos activités propres qui sont la vente d'articles, mais aussi sur leur financement qui est fait par un tiers, soit l'institution financière. Il y a déjà, à mon sens, une incitation très forte à favoriser l'endettement. Nous touchons, sûrement, à ce moment-ci, le noeud du problème. Il s'agit d'un lien véritablement organique entre le marchand et la compagnie de crédit, et l'article 172 a justement le mérite de toucher aux éléments de ce problème.

Comme vous le savez, dans le domaine communément appelé l"'acceptance", le fournisseur de crédit a pour véritable client, non pas l'emprunteur, mais le marchand. Et c'est pour lui presque exclusivement qu'il peut, c'est par lui qu'il peut rejoindre le consommateur, et la compagnie de crédit et donc pratiquement à la remorque du marchand.

Il en résulte que le principal marché du fournisseur de crédit ne peut être assuré qu'avec le concours du marchand qui lui, contrôle son besoin de clients. Voilà donc ce marchand avec un singulier pouvoir de négociation aussi. C'est une porte ouverte, d'après moi, à la surenchère sur les bonis et sur les réserves.

Le plus offrant, parmi les fournisseurs de crédit, pourra compter sur un volume croissant d'emprunteurs et le principal intéressé, le consommateur, celui qui paie ultimement, n'a aucune part dans ces négociations entre le marchand et la compagnie. Il ignore même qu'il y a des frais cachés qui se déguiseraient sous forme d'intérêt, par exemple. Nous avons eu, au ministère, plusieurs exemples de l'avidité de certains marchands en matière de commissions et de bonis. Cette recherche effrénée de ces bénéfices s'exerce même sur des accessoires aussi peu importants que l'assurance, qui est quand même un accessoire.

Nous avons beaucoup parlé d'équilibre dans les contrats entre consommateurs et commerçants. C'est même l'objet principal de la Loi sur la protection du consommateur que nous avons devant nous. Alors, comment pourrions-nous tolérer plus longtemps des négociations en coulisse entre commerçants où le mobile est le profit et non l'intérêt du consommateur?

D'ailleurs, ce dernier — le consommateur — n'a malheureusement pas, généralement, l'expertise pour analyser les composantes du crédit et pour effectuer aussi des comparaisons qui doivent être faites à ce moment-là. Le pourrait-il que des transferts de fonds non divulgués lui échapperaient de toute façon.

Loin de nous — je voudrais que ce soit bien compris — l'idée de nier que le marchand peut en- courir des dépenses à l'occasion d'une vente à crédit, mais pourquoi ferait-il un profit qui n'a aucune relation directe, bien souvent, avec ces dépenses? C'est pourtant le cas de bonis et de ristournes. Nous sommes prêts à vous écouter davantage. Nous vous posons des questions aussi et nous nous attendons bien d'avoir certaines réponses qui vont apporter peut-être un autre éclairage. Il nous apparaît quand même impératif de dissocier le rôle de marchand du rôle de fournisseur institutionnel de crédit. Que chacun soit rémunéré selon son apport économique propre et que le consommateur soit renseigné sur les coûts véritables — nous en sommes — mais surtout que cessent ces transferts pour ainsi dire occultes qui, artificiellement, augmentent les coûts de crédit, surtout que cesse la surenchère de ristourne, parce que cela existe, qui gonfle artificiellement et sans raison les coûts du crédit et cela, d'après notre interprétation, toujours au détriment du consommateur.

Ce sont quelques réflexions que je voulais livrer, M. le Président, avant de passer à des questions qui sont vraiment importantes pour nous et pour les membres de cette commission.

J'aimerais d'abord savoir quel pourcentage de vos ventes est financé soit par les compagnies de finance ou soit par les banques. Est-ce que vous avez des statistiques que vous pouvez fournir aux membres de cette commission?

M. De Bellefeuille: Oui, nous avons des statistiques approximatives, parce que cela dépend un peu des secteurs, des secteurs d'une ville donnée, des secteurs de la province. Il y a certains secteurs où il y a plus de ventes à crédit que dans d'autres.

Mme Bacon: C'est régionalisé.

M. De Bellefeuille: Oui. Si on prend notre cas, où nous avons 120 membres qui couvrent toute la province, on peut facilement dire que plus du tiers des ventes sont faites à crédit.

Mme Bacon: Financées par des compagnies de finance ou...

M. De Bellefeuille: Par des compagnies de finance.

Mme Bacon: Des compagnies de finance et des banques.

M. De Bellefeuille: Oui. Et des banques. Mme Bacon: Les deux. M. De Bellefeuille: Oui.

Mme Bacon: Vous ne pouvez pas répartir quel est le pourcentage pour les compagnies de finance et quel est le pourcentage pour les banques.

M. De Bellefeuille: Non. C'est assez difficile. Cela dépend des marchands. Nous avons des

marchands qui font affaires avec des institutions bancaires; il y en a d'autres qui préfèrent faire affaires avec certaines compagnies de finance, et il y en a plusieurs. Quand vous dites que les taux d'intérêt pénalisent le consommateur, cela ne le pénalise peut-être pas tellement, puisque les taux d'intérêt des compagnies de finance sont connus au moment où il signe son contrat. Il n'est pas question de dire: Cela va lui coûter plus parce que ce marchand a un montant qui lui est remis par la compagnie de finance pour le travail qu'il a fait, pas des dons. Qu'on soit très clair.

Mme Bacon: II faut que la compagnie de finance le prenne quelque part, cet argent-là, cette ristourne.

M. Tremblay (Gaston): Si vous me permettez de m'exprimer, souvent, un marchand ne donne pas assez de volume à la compagnie de finance pour que la compagnie de finance envoie un de ses employés travailler à temps plein dans le magasin.

La compagnie trouve que cela coûte meilleur marché de donner une ristourne comme cela que de mettre un employé qui serait payé par la compagnie en question et qui resterait là à temps plein.

Mme Bacon: On s'éloigne un peu. En moyenne, quel est le pourcentage de ristourne de commissions payées par une compagnie de finance?

M. De Bellefeuille: C'est un montant très minime. Cela peut représenter quoi en pourcentage...?

Mme Bacon: ...de votre chiffre d'affaires?

M. Tremblay (Gaston): Cela dépend de la compagnie avec qui on transige.

Mme Bacon: Cela varie-t-il suivant les compagnies de finance, suivant les banques? Ce n'est pas le même pourcentage qui est donné?

M. Tremblay (Gaston): Non. Ce n'est le même pourcentage. Evidemment, il y a une "bracket" de chiffres d'affaires aussi. Si le type donne un certain chiffre d'affaires, il aura peut-être un meilleur pourcentage en revenu.

Mme Bacon: On nous dit que, dans les contrats de crédit cédés aux compagnies de finance, c'est cédé sans recours. Est-ce sans l'endossement du marchand ou le marchand endosse-t-il chaque fois?

M. De Bellefeuille: Cela dépend aussi des compagnies. Vous avez des compagnies qui prêtent sans recours et des compagnies qui prêtent avec recours.

Mme Bacon: Ce n'est pas généralisé.

M. De Bellefeuille: Non. Libre au marchand de décider avec quelle compagnie il veut transiger.

Mme Bacon: Les marchands pourraient-ils envisager de ne plus faire de crédit si l'article 172 était adopté? Vos membres seraient-ils réellement prêts à prendre le risque de perdre une vente — vos concurrents seraient évidemment de cet avis — mais perdriez-vous des ventes si l'article 172 était adopté tel que rédigé?

M. De Bellefeuille: Oui, certainement, si le client de nos marchands n'a pas la possibilité de se faire financer. Prenez le jeune couple qui décide de s'acheter un ameublement. Il arrive chez le marchand et il fait son choix. Ils sont deux. Ils font leur choix. Ils prennent ceci et cela et l'ameublement coûte $2000 ou $3000. Si ces gens n'ont pas la facilité de se faire financer chez nous, ils iront chez des organisations qui font leur propre finance, Sears, Eaton, Morgan, Simpson, qui ne sont pas uniquement à Montréal maintenant, mais qui sont dans toute la province.

Alors, nos marchands de meubles qui sont marchands indépendants perdront ces ventes au détriment de Bad Boy, une compagnie de l'Ontario, Sears, multinationale. Alors, on vous demande de bien vouloir nous donner une chance de se protéger encore.

Mme Bacon: Certains de vos membres appartiennent-ils à des compagnies de finance ou sont-ils liés à ces compagnies, comme les filiales, les compagnies du même groupe ou est-ce totalement séparé de ces compagnies?

M. De Bellefeuille: C'est totalement séparé. Nos marchands transigent avec la compagnie qui fait leur affaire. Il y a certains secteurs où vous ne pouvez pas faire affaires. Prenons la Gaspésie. Si Niagara n'a pas de bureaux, ils ne peuvent pas faire affaires avec Niagara. Cela dépend un peu de la position de nos marchands. Il y en a qui font affaires avec HFC, IAC. Ils choisissent la compagnie qu'ils veulent.

Mme Bacon: Pouvez-vous nous dire quelle est la proportion des reprises, ce qu'on appelle repossession, par exemple? Y a-t-il des pourcentages connus à ce moment?

M. Tremblay (Gaston): Le pourcentage est assez faible parce qu'au départ il y a une enquête qui est faite sur le crédit du client et, à ce moment, si on se trompe... Cela peut être de l'ordre de 1% environ.

Mme Bacon: 1%?

M. Trembaly (Gaston): 1%.

Mme Bacon: Dans ce 1%, quel serait le pourcentage de la valeur récupérée? Cela a-t-il été établi par vos membres?

M. Tremblay (Gaston): Habituellement, quand on reprend de la marchandise, on peut la revendre peut-être à 25% ou 30% de sa valeur réelle parce qu'elle est défraîchie, réellement.

Mme Bacon: Une dernière question, M. le Président. Est-il plus avantageux pour vous de vendre au comptant qu'au crédit?

M. De Bellefeuille: Certainement. On préférerait de beaucoup faire toutes nos ventes au comptant, sûrement.

Mme Bacon: Si, demain, il n'y avait plus de ristourne, si les ristournes étaient vraiment bannies, continueriez-vous quand même à faire affaire avec les compagnies financières?

M. De Bellefeuille: Sûrement, mais on devrait augmenter nos prix. Il faut absolument que cela soit couvert quelque part. On ne peut travailler, pas plus que personne ici pour rien. Du bénévolat, on ne peut plus en faire. On n'est pas intéressé à en faire, à part cela. Si on ne l'a pas de la compagnie de finance, il va falloir le prendre quelque part. On ne peut tout de même pas perdre de l'argent à faire financer les consommateurs. Comme je vous le dis, il y a 30% des consommateurs qui ont besoin d'être financés. On leur rend ce service, mais on ne peut rendre ce service pour rien à la compagnie prêteuse.

Mme Bacon: Vous hausseriez le coût des biens que vous vendez.

M. De Bellefeuille: Pardon?

Mme Bacon: Hausseriez-vous le coût des...

M. De Bellefeuille: II faudrait qu'on prenne l'argent quelque part. On n'a pas le choix. Si on ne peut pas finir avec nos 2% de profit à la fin de l'année...

Le Président (M. Lafrance): Le député de Lafontaine.

M. Léger: Tantôt, est-ce que j'ai bien compris quand vous disiez que quand une compagnie de finance vous avait donné une ristourne, c'est quand même vous autres qui perceviez le montant auprès du client.

M. De Bellefeuille: Certainement.

M. Léger: Quel est le rôle de la compagnie de finance? Elle prête de l'argent à vous.

M. De Bellefeuille: Non.

M. Léger: Elle vous donne l'argent, à vous, pour l'achat complet, mais après cela, vous le percevez du client et, en réalité, c'est un prêt qui n'est pas fait au client mais qui est fait à vous.

M. Tremblay (Gaston): Excusez-moi, mais le prêt est fait au client moyennant que son crédit soit bon et que la marchandise soit livrée en bonne et due forme. Justement, dans l'exposé de ce matin, on disait que, marchandise livrée ou pas, lorsque le marchand avait reçu son paiement et l'argent de la compagnie de finance, il se foutait un petit peu... Au contraire, parce que même si on livre un ameublement qui comprend dix à quinze articles et qu'il reste un article à livrer parce qu'il y a eu un retard dans la livraison par le manufacturier, la compagnie de finance ne paie pas. Même si cela prend deux ou trois mois, cela prend également deux ou trois mois pour avoir le chèque de la compagnie de finance. C'est la question du financement du client. On parle aussi du client qui, à un certain moment, va voir une banque. La banque refuse son prêt, peut-être parce qu'il y a un manque d'expérience, c'est un jeune couple ou quelque chose comme cela. A ce moment-là, on considère que la compagnie de finance a son rôle à jouer parce qu'elle prête à ces gens et qu'elle leur donne la chance de se procurer les meubles qu'ils veulent avoir pour leur ménage. Je considère qu'elles ont un rôle à jouer qui est assez important.

M. Léger: Y a-t-il un lien entre le contrat que vous signez avec le client et le contrat qui est signé avec la compagnie? Cela devient-il un prêt personnel ou si c'est un lien directement entre le client, vous et la compagnie de finance?

M. Tremblay (Gaston): Cela devient un prêt personnel entre la compagnie de finance et le client, avec certaines réserves de responsabilité et moyennant les ententes qu'il y a au préalable avec le marchand.

M. Léger: Ce que je ne comprends pas, c'est le fait que vous ayez une ristourne pour faire la perception.

M. Tremblay (Gaston): D'accord, mais écoutez, je vais vous expliquer cette ristourne comme ceci: Voyez-vous, le samedi, le jeudi soir ou le vendredi soir, si on n'avait pas à encaisser les versements du client, je n'aurais pas besoin de mettre deux filles dans le bureau pour recevoir ces gens. Nous avons, dans le magasin, des vendeurs et les vendeurs ne s'occupent pas d'encaisser l'argent. Il nous faut du personnel spécialisé dans le domaine. Cela coûte meilleur marché à la compagnie de finance de nous donner une ristourne que de mettre un employé pour encaisser ces versements, parce que c'est a temps partiel.

M. Léger: Le ministre a essayé d'obtenir tantôt un pourcentage ou un chiffre quelconque. Chaque fois, vous disiez: Cela dépend du volume d'argent que vous faites passer à la compagnie et cela dépend de différentes raisons. Dans votre texte, vous dites que vous avez un volume de ventes de $115 millions. Un dans l'autre, aussi bien le volume d'un marchand, qui est plus gros ou plus petit, sur $115 millions, dans une année, quelle somme avez-vous reçue des compagnies de finance?

M. De Bellefeuille: Le tiers.

M. Léger: Combien?

M. De Bellefeuille: Le tiers.

M. Léger: Je veux dire: Combien en extra?

M. De Bellefeuille: On a financé le tiers des $115 millions. Nos ventes sont de $115 millions. Le tiers de nos clients.

M. Léger: Ce n'est pas cette question que je posais. Je me suis peut-être mal exprimé. Si vous avez un chiffre d'affaires de $115 millions de ventes dans l'année, vous avez eu le tiers de cela, soit $40 millions, qui a été passé aux compagnies de finance au niveau des emprunts pour vos clients. Sur les $40 millions, quelle est la ristourne que les compagnies de finance vous ont donnée?

M. De Bellefeuille: On ne peut pas vous répondre là-dessus, parce que nos marchands sont autonomes et ils font affaires avec la compagnie de finance qu'ils choisissent. Ce n'est pas le groupe qui fait affaires avec la compagnie de finance. Notre volume total de ventes est de $115 millions, mais nos marchands font affaires avec différentes compagnies. Ils ont leurs propres arrangements avec les compagnies de finance.

M. Léger: Est-ce que vous pouvez me donner l'exemple d'un marchand qui va vendre dans une année pour $500 000 ou $1 million? Il aurait combien? Quel est le chiffre que vous pouvez nous donner?

M. Tremblay (Gaston): Si je peux m'exprimer, on a deux magasins qui se trouvent situés à sept ou huit minutes de marche l'un de l'autre, un sur la rue Saint-Vallier ouest et l'autre, sur la rue Saint-Joseph. Je puis vous dire qu'il y a un pourcentage beaucoup plus fort de ventes financées par la compagnie de finance sur la rue Saint-Vallier que sur la rue Saint-Joseph. C'est peut-être parce que le magasin qui est situé sur la rue Saint-Vallier est entouré d'ouvriers, de types qui travaillent, tandis qu'à l'autre on dessert plutôt Québec et les environs. On va chercher plus de ventes au comptant au nouveau magasin que sur la rue Saint-Vallier.

La question de pourcentage sur la compagnie de finance, c'est assez difficile. Chez nous, ce n'est jamais le même. Si, par exemple on finance...

M. Léger: Quel est le barème?

M. Tremblay (Gaston): De la ristourne, cela peut être dix, douze ou quinze. Cela dépend du volume qu'on donne. On nous met des "brackets". Si j'ai $1 million comme chiffre d'affaires et que je finance un demi-million de dollars, j'obtiens une "bracket" de X, peut-être 3% ou 4% de plus. Etant donné qu'on est sur une "bracket" du tiers du chiffre d'affaires, à ce moment, on va chercher une ristourne qui est meilleure. Disons qu'elle est jumelée à la "bracket" qu'on devrait atteindre.

M. Léger: Vous parlez de 10%, 12%. Cela veut dire que, si vous donnez à une compagnie de finance $500 000 à prêter, vous retireriez $50 000 pour la perception. Cela ne se peut pas.

M. Tremblay (Gaston): C'est toujours basé sur les frais, c'est-à-dire que, sur un contrat de finance, s'il y a $54 d'intérêt, on peut peut-être avoir 10% du montant d'intérêt.

M. Léger: De l'intérêt.

M. Tremblay (Gaston): C'est ça. Exactement. Ce n'est jamais une ristourne complète sur le montant qu'on leur donne, c'est toujours selon l'intérêt. Voyez-vous, si on vend un réfrigérateur, à 24 mois, évidemment, la ristourne sera meilleure que si on l'a vendu, au même montant, à 12 mois. Parce que le montant de l'intérêt est plus élevé.

M. Léger: Donc, si c'est 10% de l'intérêt qui est à payer...

M. Tremblay (Gaston): Environ.

M. Léger: ...la compagnie de finance aurait facturé à 16%, si elle avait elle-même conservé le financement et la collection, mais, parce que c'est vous qui le faites, elle vous donne 2% additionnels ce qui fait que le client doit payer 18% d'intérêt puisque l'intérêt doit être payé par le consommateur.

M. Tremblay (Gaston): Je ne suis pas prêt à dire ça, parce que, si la compagnie de finance était obligée d'engager le personnel, si on envoyait tous les clients à la compagnie de finance, elle serait obligée de s'engager un personnel proportionné au travail et elle serait obligée de facturer au même taux. Autrement dit, le montant qu'elle nous donne, c'est le montant que ça lui coûterait en administration pour garder un personnel chez elle au lieu de chez nous.

M. Léger: Mais vous devez certainement, pour diriger le financement à une compagnie plutôt qu'à une autre, être payé non seulement pour le coût que ça vous demande pour la perception ou s'il y a un boni en plus. Parce que vous n'êtes pas tout simplement obligé d'être uniquement payé pour le coût qu'elle aurait elle-même payé, la compagnie de finance, si elle avait le personnel voulu, mais, puisque vous le mettez, elle vous paie pour le coût du personnel, vous pouvez quand même avoir un montant supplémentaire pour vous embarquer avec ce problème. Ce n'est pas uniquement pour payer les dépenses de ce personnel que vous faites ça, il y a un boni en plus de cela.

M. Tremblay (Gaston): Non, si on considère les montants que coûte aujourd'hui la main-d'oeuvre pour administrer la comptabilité des ver-

sements reçus au magasin, on est même en-dessous à l'heure actuelle. Mais ça fait pour nous. On récupère, dans ce sens qu'on se dit: Le client est toujours en relation avec le magasin, nos vendeurs le connaissent et le vendeur comprend et connaît tellement son client, il le voit tous les mois si vous voulez, que si le client a autre chose à acheter, éventuellement, il y aura le contact avec son vendeur et il achètera. Pour le vendeur et le client, il se sent plus en sécurité quand il vient payer au magasin. Personnellement, je crois qu'il aime mieux ça.

M. Léger: Est-ce que les marchands transigent avec plusieurs compagnies de finance de façon que le consommateur ait le choix de différentes compagnies de finance?

M. Tremblay (Gaston): Certainement. Chez moi, si je parle de chez moi, parce qu'il faut que je parle de chez moi, si un client dit: Ecoutez, je fais affaires avec Niagara Finance. J'y ai un compte. Il n'y a aucune objection; on remplit un contrat de Niagara, cela ne nous fait rien.

M. Léger: Dans les deux cas, que le client paie comptant ou qu'il paie à tempéramment, vous, vous êtes payé comptant, soit par la compagnie de finance, soit par le client.

M. Tremblay (Gaston): C'est cela, seulement quand la livraison complète est faite.

M. Léger: D'accord. A ce moment, vous êtes quand même peu en conflit d'intérêts vis-à-vis du consommateur, puisque, dans les deux cas, vous êtes payé comptant, sauf que, dans le cas d'un financement, vous recevez un boni supplémentaire. Même si vous préférez que les gens paient comptant — vous avez dit tantôt que c'est plus avantageux pour vous que le client paie comptant — vous avez quand même un intérêt supplémentaire à ce qu'il paie par tempéramment, puisque, en plus du même prix, vous ne remettez pas au client, parce qu'il paie comptant, ce que vous auriez eu par ristourne, si vous l'aviez donné à une compagnie de finance.

Dans les deux cas, il y a nécessairement un avantage de l'avoir en finance plutôt qu'au comptant.

M. Tremblay (Gaston): Quand le client vient chez moi et achète un ameublement de $3000 comptant, il me paie et à ce moment, je ne le revois plus. Je n'ai plus à engager du personnel pour le recevoir pendant 12 mois, 24 mois ou 36 mois, parce que le montant est versé chaque mois. Le client fait son versement tous les mois.

Dans le cas contraire, quand le client a payé comptant, évidemment, il ne nous coûte rien en administration. C'est la différence. La ristourne qui nous est donnée, c'est simplement pour dédommager l'administration qu'on a envers la compagnie pour ce qu'il y en a, parce qu'on lui envoie son argent.

Il y a la différence aussi que, si le client nous fait un chèque pour la compagnie, au nom du Foyer du meuble, si vous voulez, on l'endosse, si le chèque n'est pas bon ou s'il n'y a pas de provisions suffisantes, nous, nous avons envoyé un chèque en bonne et due forme à la compagnie de finance et, à ce moment, c'est à nous de faire les démarches auprès du client pour qu'il nous fasse un autre chèque ou qu'il fasse son versement en bonne et due forme.

Les montants qu'on reçoit, cela ne dédommage pas à 50%, si vous voulez, l'administration que cela nous coûte seulement pour percevoir ces versements.

M. Léger: D'accord.

M. De Bellefeuille: On n'a pas seulement à percevoir l'argent. Un contrat de finance, c'est assez compliqué. Il faut le faire préparer par un vendeur sur le plancher. Prenez le cas d'un jeudi soir où le magasin est rempli de monde et où il arrive un couple. Le vendeur est accaparé par ce couple pendant une demi-heure de plus, simplement pour lui remplir son contrat de finance; il faut que cela se paie aussi. Le gars a peut-être perdu une autre vente ailleurs, mais on est obligé d'endurer tout cela et de payer.

La faible ristourne que les marchands reçoivent, cela leur est dû; ils ont travaillé pour.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Mme Bacon: J'aurais seulement deux petites questions et je vais terminer par la suite. N'est-il pas exceptionnel que les marchands de votre groupe perçoivent les versements pour les compagnies de finance? Est-ce que ce n'est pas versé aux compagnies de finance directement par le consommateur ou si c'est une règle générale?

M. De Bellefeuille: Je ne voudrais pas dire que cela s'applique à toutes les compagnies de finance, mais il y a une majorité de compagnies de finance avec qui nos membres font affaires, où nous nous occupons de percevoir les versements mensuels pour la compagnie.

Mme Bacon: Est-ce que c'est exceptionnel ou si cela se fait en général?

M. De Bellefeuille: En général. Moi, je vous parle de nos membres, chez nos membres.

M. Tremblay (Gaston): On parle de nos membres.

M. De Bellefeuille: Je ne parle pas de tous les marchands de meubles de la province.

Mme Bacon: Est-ce que cela se fait à la demande du marchand avec la compagnie de finance?

M. De Bellefeuille: Ce sont des politiques de compagnie, cela se fait comme cela.

Mme Bacon: Ce sont des ententes entre les compagnies de finance et les marchands, que le marchand perçoive le financement.

M. De Bellefeuille: C'est cela.

M. Harvey (Charlesbourg): M. le Président...

Le Président (M. Lafrance): Le député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Lorsque vous parlez de vos membres, quels sont les prérequis pour être membre de votre association? Est-ce que vous mettez en commun vos efforts, votre chiffre d'affaires pour procéder par exemple à des achats...

M. De Bellefeuille: Non, c'est une association de marchands. Les prérequis chez nous, il faut que le marchand soit un véritable marchand ayant pignon sur rue avec des antécédents honnêtes, un crédit qui nous est acceptable. On fait les enquêtes de crédit auprès de notre compagnie de crédit, qui est Créditel, et un véritable marchand de meubles.

M. Harvey (Charlesbourg): Maintenant, est-ce que vous mettez en commun aussi vos efforts pour faire des pools d'achats?

M. De Bellefeuille: Nous, nos membres sont absolument autonomes et font leurs propres achats individuellement, on n'achète rien.

M. Harvey (Charlesbourg): Du côté bancaire ou du financement, c'est également...

M. De Bellefeuille: Nous, on ne finance personne.

M. Harvey (Charlesbourg): ... l'autonomie de chacun.

M. De Bellefeuille: C'est cela. Nous, c'est une association de marchands indépendants et on essaie de choisir les marchands les plus honnêtes de la province.

M. Harvey (Charlesbourg): D'accord. On sait aujourd'hui, c'est un secret de polichinelle, combien coûte un réfrigérateur. Généralement, des marchands se prêtent volontiers à montrer la facture au client. Ils conservent quand même un pourcentage qu'on appelle raisonnable, minimum, peut-être 10%. Le marchand est très heureux s'il est payé comptant mais la formule de financement me paraît, moi, en tout cas, être une forme de marketing, une forme de mise en marché.

M. De Bellefeuille: C'est simplement une forme de mise en marché. Ce n'est pas une question d'aller faire de l'argent avec les ristournes qu'on peut recevoir des compagnies de finance, parce que cela couvre à peine les frais encourus par les marchands.

M. Harvey (Charlesbourg): Moi, je ne suis pas prêt à dire que c'est malhonnête. C'est évident qu'il y a des ristournes qui sont fort impressionnantes de temps en temps, mais...

M. De Bellefeuille: Dépendant du volume. Le marchand qui fait $1 million comme chiffre d'affaires va nécessairement donner plus de volume à sa compagnie de finance ou ses compagnies de finances que le petit marchand qui fait $200 000.

Tout est relatif. C'est payé d'après le volume du chiffre d'affaires.

M. Harvey (Charlesbourg): Une dernière question, M. le Président, si vous me le permettez. Est-ce que vous déposez en fiducie ou si vous avez — je ne sais pas si la question a été posée, peut-être que Mme le ministre vous l'a demandé — un dépôt ou un fonds de réserve pour ce qu'on appelle communément les mauvaises créances?

M. De Bellefeuille: A titre d'association, non, parce qu'on ne s'en occupe pas, mais à titre de marchand indépendant, les marchands le font.

M. Harvey (Charlesbourg): Est-ce que M. Tremblay pourrait répondre à cette question?

M. Tremblay (Gaston): Oui, c'est-à-dire que pour ce qui est d'un fonds de réserve pour les mauvaises créances, on n'a pas de compte de banque spécifiquement pour cela.

M. Harvey (Charlesbourg): Et sur les ristournes que vous percevez des compagnies? Est-ce qu'on touche toujours à votre article?

M. Tremblay (Gaston): Disons qu'on ne considère pas les pertes qu'on peut faire, on ne fait aucune réserve...

M. Harvey (Charlesbourg): C'est en dépôt, en fait, un peu comme une vente. Cela s'ajoute au compte bancaire, dans les opérations financières...

M. Tremblay (Gaston): C'est dans le débit ou... cela dépend.

M. Harvey (Charlesbourg): Très bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Maskinongé.

M. Picotte: Si je vais chez un de vos membres acheter quelque chose et que je vous dis: Pourriez-vous me suggérer une compagnie de finance avec qui je peux faire affaires dans le but de vous payer après? Vous me dites: A tel endroit, je suis pas mal certain que tu vas faire des affaires, que cela va fonctionner. Je m'en vais là, individuellement, avant l'achat et je reviens vous payer. Est-ce que dans l'optique de la compagnie de finance, vous recevez un boni?

M. De Bellefeuille: Absolument pas parce que là, vous faites affaires directement avec la compagnie, à Mégantic ou je ne sais où. Vous empruntez de l'argent — c'est un prêt personnel — et vous venez nous payer. On n'a rien là-dessus. C'est simplement quand on se donne le mal de faire financer un consommateur, qu'on se donne tout le mal de remplir le contrat, de faire la perception, de tout faire pour la compagnie de finance qu'on croit qu'on devrait être payé pour cela.

M. Picotte: Autrement dit, ce sont des honoraires de service...

M. De Bellefeuille: C'est cela. Ce sont des honoraires.

M. Picotte: ... que vous recevez pour avoir... M. De Bellefeuille: C'est exactement cela. M. Picotte: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Laurier.

M. Marchand: Si vous perdiez ces bonis et ces ristournes, est-ce que cela pourrait vous affecter au point que vous auriez de la difficulté à faire affaires comme les gros marchands comme Sears, Eaton et La Baie? Est-ce que ce serait vraiment...

M. De Bellefeuille: On ne pourrait pas offrir le service de financement à notre clientèle qui en a besoin. Si c'était juste par fantaisie, pour faire plus de profits...

M. Marchand: Vous offririez le financement quand même, mais non le boni ni la ristourne.

M. De Bellefeuille: Quel financement pourrait-on offrir? Le financement du marchand? On n'a pas de marchand qui a les reins assez solides pour le faire.

M. Marchand: Je veux dire que la compagnie de finance vous avancerait quand même l'argent mais vous n'auriez pas les bonis ni les ristournes qui font peut-être la marge de vos ventes, qui vous permettent de rivaliser avec les prix que peuvent donner les magasins que je viens de nommer.

M. Tremblay (Gaston): Je peux vous dire là-dessus que, souvent, un client est rejeté par la banque et c'est la compagnie de finance qui le prend. Dans le cas, par exemple, d'une pauvre femme qui vient d'avoir une malchance avec son réfrigérateur, son réfrigérateur est plein de viande, il ne fonctionne plus, il n'est pas réparable. Alors, si la compagnie de finance ne prêtait pas à cette personne, celle-ci perdrait sa viande et, en même temps, elle n'aurait pas l'occasion d'acheter un réfrigérateur, et on considère qu'un réfrigérateur n'est pas un objet de luxe.

Dans certains cas, je peux vous dire que les compagnies de finance acceptent souvent des personnes qui ont été rejetées par la banque.

M. Marchand: En fait, ce que je demandais, ce n'était pas tout à fait cela. C'était — et je pense que vous avez répondu — que cela nuirait complètement à votre commerce et que vous auriez de la difficulté à concurrencer... Les marchands indépendants ne seraient plus capables de concurrencer les grosses compagnies.

M. Tremblay (Gaston): C'est cela.

M. Marchand: C'est cela?

M. Tremblay (Gaston): Oui, exactement.

Le Président (M. Lafrance): Les membres de la commission m'excuseront — j'ai oublié — de ne pas avoir fait un changement parmi les membres de la commission. C'était M. Caron qui remplaçait M. Boutin. Alors, pour le bénéfice du journal des Débats...

M. De Bellefeuille et M. Tremblay, nous vous remercions de la présentation de votre mémoire et d'avoir bien voulu répondre aux questions.

Alors, la commission des consommateurs, coopératives et institutions financières ajourne ses travaux à mardi matin, 10 h 30.

(Fin de la séance 13 h 6)

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