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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le jeudi 26 août 1976 - Vol. 17 N° 134

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude du projet de loi no 7

Loi sur la protection du consommateur

Séance du jeudi 26 août 1976 (Dix heures quinze minutes)

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs! Les membres de la commission ce matin sont les suivants: Mme Bacon (Bourassa), MM. Bellemare (Johnson), Bonnier (Taschereau), Boudreault (Bourget) qui remplace Boutin (Abitibi-Ouest), Burns (Maisonneuve), Chagnon (Lévis), Harvey (Charlesbourg), Harvey (Dubuc), Léger (Lafontaine), Marchand (Laurier), Masse (Arthabaska), Picotte (Maskinongé), Roy (Beauce-Sud), Samson (Rouyn-Noranda), Tremblay (Iberville).

M. Léger: II y aurait une correction. M. Burns (Maisonneuve) est remplacé par M. Charron (Saint-Jacques).

Le Président (M. Houde, Limoilou): M. Burns (Maisonneuve) est remplacé par M. Charron (Saint-Jacques). M. Marchand (Laurier) est remplacé par M. Malépart (Sainte-Marie). Ce matin, nous entendrons Vidéo-Presse, le Conseil des normes de la publicité, l'Association des annonceurs, Rowntree Mackintosh Canada Ltée et Sélection du Reader's Digest (Canada) Limitée.

Rowntree Mackintosh Canada Limitée fait partie d'un autre groupe. Si les membres de la commission sont d'accord, j'inviterais immédiatement Me Jacques De Billy à présenter non pas son mémoire, mais à dire s'il va se présenter à nouveau.

Me Jacques De Billy.

Rowntree Mackintosh Canada Ltée.

M. De Billy (Jacques): M. le Président, Mme le ministre, messieurs les membres de la commission, je suis le procureur de Rowntree Mackintosh Canada Ltée. Cette compagnie qui produit des confiseries, est membre de l'Association des manufacturiers de confiseries du Canada; cette association a produit un mémoire et doit se faire entendre le 16 septembre. Ma cliente croit que ce serait une répétition et que ce serait faire perdre le temps des membres de la commission de présenter un mémoire qui sera répété le 16 par son association. Ma cliente n'a pas de facteur ou d'argument spécifique, spécial à elle, différent des autres manufacturiers.

Avec la permission de la commission, nous déposons le mémoire. Les officiers de ma cliente seront ici avec les autres membres de l'Association des manufacturiers de confiseries le 16 septembre pour faire les représentations qu'ils dési- rent faire et répondre aux questions que les membres de la commission pourraient avoir à poser. Si c'est le plaisir de la commission, je...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce que les membres acceptent le dépôt du mémoire de Rowntree Mackintosh Canada Ltée?

Une Voix: D'accord.

M. Boudreault: Est-ce qu'il va être présenté, lui?

M. De Billy: Non, il est semblable. M. Boudreault: II est semblable?

M. De Billy: C'est un mémoire, dans le fond, pratiquement semblable qui concerne les mêmes sections du projet de loi, qui concerne l'association en général. Ce serait, je pense, affaiblir le mémoire de l'association de voir un membre présenter les arguments seul, au début, et, après cela, voir l'association répéter ces mêmes arguments.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Mémoire déposé. Merci, M. De Billy.

M. De Billy: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Houde, Limoilou): J'invite immédiatement les représentants de Vidéo-Presse. Auriez-vous l'amabilité de vous présenter et présenter ceux qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

Vidéo-Presse

M. Guimar (Pierre): M. le Président, Mme le ministre, messieurs les députés, bonjour. Mon nom est Pierre Guimar, je dirige la revue Vidéo-Presse, qui est une publication de la maison d'édition qui s'appelle Editions Paulines, dont M. Fidèle Molino, à ma droite, est le président. Lise Labarre, à ma gauche, ainsi que M. Gabriel Dejean, sont responsables des relations extérieures.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Et la demoiselle?

M. Guimar: Lise Labarre, à ma gauche, et Gabriel Dejean.

Nous avons déposé devant la commission un mémoire assez modeste fait avec nos propres moyens. On n'a eu ni le temps, ni l'occasion ni les moyens de consulter des équipes d'avocats ou un studio légal quelconque; c'est pourquoi c'est avec modestie que nous invitons les membres de cette commission à se pencher sur la teneur de l'article 163 du projet de loi no 7 concernant la publicité destinée aux enfants de moins de 13 ans.

En effet, nous publions une revue qui s'appelle Vidéo-Presse qui, depuis cinq ans, est destinée aux enfants de 8 à 15 ans; une revue dont le besoin, je crois, était assez évident dans la province de Québec, surtout au début des années

soixante-dix, quand la plupart des revues destinées aux enfants étaient déjà disparues et quand la concurrence ou disons la pression assez forte des revues en provenance d'Europe ou des Etats-Unis détournait un peu, à notre avis, l'enfant de son milieu véritable ou de son milieu socioculturel véritable.

C'est avec beaucoup de sacrifices que nous avons bâti cette revue. C'est grâce à sa qualité — qui, je crois, est aussi évidente — que nous avons pu l'établir; la revue est tirée actuellement à 50 000 exemplaires. A la sortie du projet de loi no 7, nous avons entendu parler comme tout le monde, à travers les media, les journaux et la télévision, de cet article destiné à supprimer la publicité destinée aux enfants de moins de 13 ans. Au début, nous ne nous croyions pas concernés, puis on a consulté les directeurs de l'Office du consommateur à Montréal en lui posant des questions précises: Le projet de loi no 7 empêcherait-il qu'on annonce, à travers les pages du Vidéo-Presse, de la publicité destinée aux enfants? C'était la première question.

La deuxième question était la suivante: Avons-nous le droit, d'après le texte de la loi, de solliciter des abonnements auprès des enfants qui sont les lecteurs de notre revue? La réponse a été négative sur les deux points. La réponse, je le répète, nous provenait du directeur de l'Office de la protection du consommateur. C'est pourquoi nous avons cru bon de présenter à cette commission notre mémoire. Je crois que vous avez en main une copie du mémoire en question et je n'ai pas besoin de me répéter.

Vous avez, au début, la présentation de ce qu'est Vidéo-Presse ou de ce que sont les Editions Paulines. Je dois ajouter à cette présentation le fait suivant. Nous sommes membres d'une communauté religieuse qui s'appelle la Société de Saint-Paul. Cela ne veut dire absolument rien, bien entendu, mais c'est pour expliquer ma présence ici. Je ne suis pas Canadien de naissance, je suis Canadien de choix. La raison de ma présence au Canada est que j'ai été invité par mes supérieurs à me rendre ici. Le but de notre communauté est justement l'apostolat à travers les moyens de communication sociale. C'est pourquoi c'est une oeuvre éducative que nous poursuivons à travers les Editions Paulines et aussi à travers notre revue.

Je disais que Vidéo-Presse, on l'a bâti, donc, selon notre philosophie de la vie et dans le sens de la mission que nous avons, c'est pourquoi on en a fait, depuis cinq ans, une revue culturelle, éducative, saine et québécoise surtout, parce qu'on veut que l'enfant soit centré sur la réalité de chez lui. Or, l'article 163 du projet de loi semble compromettre l'existence même de cette revue qui est restée désormais la seule revue canadienne destinée aux enfants. A notre avis, le texte de l'article ou de la loi, quand il parle de publicité destinée aux enfants, devrait probablement apporter quelques nuances parce qu'il y a certainement des nuances entre un produit comme une revue et d'autres produits appelés de consommation.

C'est pourquoi nous nous demandons, en fin de compte, à travers tout le mémoire, si ce ne se- rait pas le cas, justement, d'introduire une distinction dans l'article de loi, entre la publicité et le bien culturel qui sont parfois essentiels, souvent essentiels, et le bien de consommation. Je n'ai pas besoin de donner beaucoup d'exemples, je crois qu'on peut saisir assez facilement la liste qu'on pourrait faire suivre à ce titre de bien de consommation.

Un autre facteur nous a laissés perplexes aussi: Quelle serait la politique du ministère des Consommateurs — au cas où le projet de loi serait adopté tel quel — en ce qui concerne l'article 163 en ce qui concerne les revues étrangères qui, nous le savons, ont de la publicité et sollicitent aussi des abonnements auprès des jeunes lecteurs? On se demande aussi si, pour ces revues étrangères, le ministère serait disposé à faire une exception ou bien s'il serait simplement disposé à fermer les portes à ces revues au cas où la loi serait adoptée telle quelle.

Je crois que ce sont là les grandes lignes de notre mémoire. Moi, je n'aurais rien d'autre à ajouter.

Mme Bacon: C'est avec beaucoup de sympathie que j'ai pris connaissance de votre mémoire, M. Guimar. A première vue, votre revue me paraît exemplaire, tant par son contenu que par sa présentation. La publicité qu'elle renferme porte sur des biens culturels et fait aussi appel à l'enfant ou à l'adolescent, à ses facultés les plus élevées. Je le reconnais, le contenu des messages publicitaires correspond et s'intègre mieux à un objectif social de formation de citoyens, soit la formation académique, culturelle des enfants du Québec.

Nous sommes ici en face d'un cas limite où l'objet et la formulation modérée du message rejoignent plutôt l'information que la véritable réclame. Sans doute, il ne serait pas opportun aujourd'hui même de décréter une interdiction si tous les publicitaires avaient jusqu'ici été inspirés par les mêmes soucis pédagogiques et moraux que sont les vôtres. N'oublions pas cependant que toute interdiction, de sa nature même, vise un ensemble de cas d'espèce et il peut arriver, par exception, que certains cas ne présentent pas les caractères nocifs ou abusifs qu'il s'agit d'éliminer. Toutefois, il me semble prématuré, au stade actuel des travaux de cette commission, d'apporter des exceptions au principe d'abolition sans avoir pu mesurer, après les études nécessaires, toutes les conséquences qui en découleront.

Je suis d'avis que cette commission doive entendre toutes les représentations des intervenants sur les articles 163 et 164. Par la suite, je pourrai déterminer si quelques tempéraments peuvent être apportés à la loi, à l'article 164, et qui puissent tenir compte des cas comme le vôtre, par exemple. Je tiens cependant à affirmer qu'il ne peut être question de renoncer au principe même de l'article 164. Les objectifs qui sont poursuivis me paraissent essentiels à une véritable Loi de la protection du consommateur. Je reste convaincue aussi que l'interdiction de la publicité aux enfants continue d'être un élément indispensable à un vé-

ritable assainissement du climat entourant l'enfant et la consommation.

Dans le but de mesurer l'impact économique de cette interdiction sur votre rentabilité et de déterminer aussi la nature des pressions qui peuvent constituer, sur les parents, votre publicité, j'aurais quelques questions, ce matin, à vous poser. Par exemple, vous venez de mentionner que le tirage annuel est de 50 000 exemplaires. Quel est le pourcentage d'accroissement de votre tirage par année? Avez-vous les statistiques en main?

M. Guimar: Oui, je peux répondre. Nous avons nos propres statistiques. Hélas! je ne les ai pas apportées ici, mais je les connais par coeur. Nous avons tiré le premier numéro, au mois de mai 1971, à 30 000 exemplaires. Nous avons progressé environ de 3000, 4000 exemplaires par mois, évidemment, à chaque année. C'est pourquoi nous en sommes, aujourd'hui, à 50 000 en cinq ans d'existence. C'est la courbe de l'accroissement annuel. Le tirage augmentait à tous les ans de 3000 exemplaires par mois.

Mme Bacon: Quelle est la proportion des ventes qui se fait par abonnement par rapport à celle qui se fait aux kiosques?

M. Guimar: Nous avons remarqué, à notre grande surprise, que les écoles du Québec étaient très intéressées à Vidéo-Presse parce qu'elles trouvaient là du matériel didactique ou pédagogique de premier ordre. Les derniers chiffres sont les suivants. Au mois de juin 1976, nous avions 20 000 abonnés environ qui recevaient la revue chez eux. Les enfants ou les parents même recevaient la revue à la maison; autant la recevaient à l'école. Des enfants s'abonnaient à l'école puisqu'on nous avait proposé des remises spéciales pour des abonnements de groupe, douze et plus. Un certain nombre d'enfants se sont abonnés à l'école. Donc, 40 000 sont diffusés comme cela, par abonnement. Le reste est vendu au numéro, c'est-à-dire avec des moyens assez aléatoires comme les kiosques à journaux ou la vente, même dans les écoles, à dépôt.

Mme Bacon: La publicité à l'intérieur de la revue représente quand même une certaine source de revenu, êtes-vous en mesure de nous dire dans quel pourcentage?

M. Guimar: A l'intérieur des pages de la revue, si vous avez remarqué, tout est dédié aux Editions Paulines, c'est notre propre éditeur. C'est pourquoi on n'a aucune source de revenu publicitaire à partir de cela.

Mme Bacon: La revue telle qu'elle est rédigée.

M. Guimar: La revue, telle qu'elle est rédigée, n'accepte pas de la réclame venant de l'extérieur. La seule demi-page porte sur les aventures de Gaston Lagaffe. Je m'excuse de l'avoir cité. C'est un échange avec la bande dessinée que la maison Dupuis, de Belgique, nous a concédée.

Mme Bacon: Comment faites-vous votre publicité? Vous dites que les écoles en achètent, prennent des abonnements. Y a-t-il une autre façon pour vous de publiciser votre revue?

M. Guimar: Au début du mois de septembre — notre année commence au mois de septembre et se termine au mois de juin, la revue paraît dix fois par année — nous envoyons à tous les anciens abonnés, le coupon de réabonnement les invitant à se réabonner. Nous avons une réponse d'à peu près 90% des personnes qui se réabonnent. Les écoles nous demandent aussi des feuillets publicitaires pour distribuer à l'école même aux enfants. L'enfant apporte le feuillet à la maison et, la plupart du temps, ce sont les parents qui, évidemment, sortent l'argent pour abonner l'enfant. A travers l'école, enfin, le reste des enfants s'abonnent.

Mme Bacon: Quelles sont les catégories d'âge que vous visez dans votre revue? Il doit y avoir certaines catégories d'âge?

M. Guimar: Oui, nous visons les enfants de huit à quinze ans. J'ai les statistiques publiées dans la revue elle-même. Le gros de nos lecteurs se situe entre onze et treize ans, présentement, quoiqu'on reconnaisse — des pédagogues aussi qui ont examiné la revue — que la revue s'adresse peut-être à une catégorie d'âge un peu supérieure. On a remarqué que l'enfant aime garder la revue, la conserver et la faire relier même dans des cahiers spéciaux qu'on offre pour les années à venir. On a des preuves que des enfants du secondaire et du CEGEP aussi s'en servent pour leurs études, ou bien les parents la gardent à la maison comme élément de la bibliothèque familiale.

L'enquête que nous avons faite il y a deux ans, en tout cas, nous disait qu'on a 1,2% de nos lecteurs qui ont huit ans, 1,7% neuf ans, 13% dix ans, 18,7% onze ans, 27,4% douze ans, 18,1% treize ans, 11,7% quatorze ans, 5% quinze ans et 3,2% de seize ans en montant.

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Lafontaine.

M. Léger: Je voudrais d'abord vous féliciter pour la qualité de votre revue, la présentation, le contenu, la disposition des articles; je pense que c'est une revue de qualité. Au départ, en regardant votre mémoire, je me suis dit que les articles 163 et 164, dans leur intention profonde, ne visaient peut-être pas ce genre de revue. Du moins, cela me donnait l'impression que ce n'est pas ce genre de publicité qu'on voulait viser dans l'obligation de ne pas faire de publicité auprès des enfants de 13 ans.

Ma première réaction est que votre publicité est bien faite, bien présentée. Elle fait appel au monde culturel de l'enfant et non pas à ses instincts ou à ses désirs d'augmenter les biens, mais

beaucoup plus à s'informer et à se cultiver. De ce côté, je pense que vous avez une revue très bien faite.

Comme de raison, il faut trouver dans un texte de loi quelque chose qui fait qu'on rejoint exactement la quantité de gens voulue. Il faut le mettre dans des termes. C'est là que je me pose la question: Doit-on spécifier que la publicité ne doit pas être adressée aux enfants, uniquement pour la publicité qui n'est pas culturelle, ou si la publicité de revue peut être acceptée? Je ne sais pas comment on pourrait l'exprimer mais, de toute façon, je ne pense pas que c'est ce qu'on veut viser , par les articles de la loi.

C'est beaucoup plus la publicité qui agresse l'enfant, genre télévision ou radio, spécialement à la télévision, où l'enfant n'est pas obligé d'aller chercher quelque chose; il fait le geste quand même de le désirer, alors, sa volonté n'est pas mise à épreuve. S'il désire la revue, il va la prendre. Mais la télévision, il la subit, et comme il n'a pas encore développé ses mécanismes de défense, le filtre normal qu'on doit faire dans la perception des choses à cet âge n'est pas encore développé, c'est là qu'on veut le rejoindre surtout.

Au niveau des abonnements des jeunes, vous avez dit tantôt que vous aviez 20 000 abonnements qui étaient livrés à la maison et 20 000 abonnements livrés à l'école. Cela veut donc dire que l'enfant reçoit à l'école un abonnement plutôt que de le recevoir à la maison?

M. Guimar: Cela veut dire qu'étant donné qu'il y a un prix de faveur pour les abonnements de groupe, souvent les professeurs mêmes se chargent de les recueillir à l'intérieur de l'école, puisqu'ils se servent de Vidéo-Presse à peu près comme d'un manuel scolaire. Ils exhortent les enfants à se procurer Vidéo-Presse pour les faire bénéficier d'une revue spéciale, ils la font venir à l'école où elle est distribuée.

M. Léger: Ah oui! C'est toute une classe d'une trentaine d'élèves à qui le professeur dit: On va travailler dans la revue Vidéo-Presse. Prenez l'abonnement...

M. Guimar: C'est ainsi.

M. Léger: Quelle sorte d'entente avez-vous avec les professeurs pour que le professeur décide de prendre votre revue plutôt qu'un autre outil pédagogique?

M. Guimar: On n'a rien de spécial. L'abonnement annuel pour cette année est de $8.50 dans les écoles, on le concède à $8.25, c'est tout ce qu'on fait.

M. Léger: Mais, pour que le professeur décide de prendre votre revue, c'est uniquement parce qu'il a vu qu'elle était bonne? Vous n'avez pas fait de "canvassing" auprès des professeurs de la commission scolaire?

M. Guimar: Non, non, aucun pot-de-vin, monsieur.

M. Léger: Vous dites que la publicité qui est à l'intérieur ne provient pas de compagnies extérieures, mais de vos propres services, qui ont eux-mêmes besoin de...

M. Guimar: C'est l'ensemble de production de littérature-jeunesse qu'on a mis sur pied depuis 1971 et Vidéo-Presse nous sert justement de véhicule pour ces produits de jeunesse que nous annonçons à travers nos pages, sauf, comme je le disais tout à l'heure, pour le cas de la demi-page dédiée aux albums de Gaston Lagaffe, c'est une bande dessinée. Nous publions une page de cette revue dans Vidéo-Presse et, en contrepartie, nous offrons à la maison Dupuis une demi-page publicitaire.

M. Léger: En réalité si vous ne pouviez pas faire cette publicité, avec l'article, tel qu'il est rédigé cela ne vous dérangerait pas quand même tellement, puisque le pourcentage de revenu ne serait pas coupé d'une somme essentielle.

M. Guimar: En effet, mais ce n'est pas ce qui nous préoccupe tellement. Cela nous préoccupe parce que, évidemment, la production-jeunesse des Editions Paulines ne trouverait pas un véhicule pour être connue, mais ce qui nous inquiète en plus, c'est surtout pour la revue Vidéo-Presse elle-même, c'est-à-dire qu'on a peur à l'avenir de ne pouvoir dire à l'enfant dont l'abonnement vient de se terminer: Ton abonnement est terminé, veux-tu te réabonner? C'est que, d'après l'interprétation du directeur de l'Office de la protection du consommateur de Montréal, cela serait de la publicité à but commercial.

C'est ce qui nous inquiète surtout; notre perplexité n'est pas à cause de la réclame dans Vidéo-Presse mais de la réclame pour Vidéo-Presse.

M. Léger: Mais comment faites-vous votre sollicitation pour obtenir des abonnements à la maison?

M. Guimar: On envoie nos feuillets publicitaires à travers les journaux, on fait un encart spécial, on le met dedans. On ne fait pas de publicité à la télévision. On l'a fait pendant quatre mois en 1973, puis on y a renoncé, parce que cela ne marchait pas; enfin, on ne pouvait pas se le permettre avec le budget qu'on a. Actuellement, tout ce qu'on fait, c'est qu'on envoie à nos propres abonnés, aux anciens abonnés, le feuillet de réabonnement. C'est bien fait d'ailleurs; on y présente les programmes de l'année. Grâce à cela simplement, l'enfant se réabonne dans la proportion de 90%. Quant aux nouveaux abonnés, on les recrute grâce au feuillet qu'on envoie aux écoles ou à la sollicitation même du directeur d'école; il le distribue à l'enfant, qui l'apporte chez lui et on décide à la maison si l'enfant s'abonne ou pas.

M. Léger: Est-ce qu'il y a des commissions scolaires qui vous ont refusé cette possibilité.

M. Guimar: Excusez, il y a une autre chose la "mailing list" aussi, vous savez, il y a des compagnies spécialisées qui déposent à la maison des listes pour la publicité, mais là, c'est adressé à la famille, ce n'est pas à l'enfant lui-même.

M. Léger: Mais est-ce que parfois les commissions scolaires s'opposent à ce que vous ayez du matériel publicitaire dans l'école?

M. Guimar: II y a des commissions scolaires qui n'acceptent pas de l'avoir.

M. Léger: Avez-vous des voyageurs sur la route pour voir les clients à la maison?

M. Guimar: Excusez-moi, je n'ai pas saisi la question.

M. Léger: Avez-vous des voyageurs ou des vendeurs sur la route pour vendre l'abonnement?

M. Guimar: Non.

M. Léger: Non? Alors, vous ne faites que de...

M. Guimar: On l'a fait de temps à autre. Plutôt que de livrer par la poste les feuillets publicitaires, parfois, on les a fait livrer par des voyageurs. Par exemple, Mlle Lise Labarre s'est rendue jusqu'au Nouveau-Brunswick une fois pour faire connaître la revue dans l'école. Ce n'est pas malgré nous, mais, enfin, nous avons été très surpris de voir comment la revue a été appréciée a l'école au point qu'on avait de la sollicitation de la part de l'école pour qu'on aille jusqu'à elle.

M. Léger: D'accord. Je vous remercie.

Le Président (M. Houde, Limoilou): D'autres questions des membres de la commission? Alors, merci bien.

M. Guimar: Merci.

Conseil des normes de la publicité

Le Président (M. Houde, Limoilou): J'invite immédiatement les représentants du Conseil des normes de la publicité. Votre nom, monsieur, et votre fonction.

M. Watier (Maurice): Maurice Watier, secrétaire de direction du Conseil des normes de la publicité.

M. le Président, Mme le ministre, messieurs, je ne lirai pas mot à mot le rapport — le mémoire que nous avons présenté a quelque 56 pages — mais je vais essayer de le résumer le mieux possible en y ajoutant certaines autres considérations. Comme nous nous sommes assigné la tâche de parler de la publicité destinée aux enfants, il est presque inévitable que nous soyons perçus de prime abord comme des bourreaux d'enfants, comme des gens peut-être sans foi, sans loi, sans conscience et sans morale. Mais qu'à cela ne tienne, si nous pensions que nous étions de ces vilains, je crois que nous ne nous présenterions pas devant vous.

Parlons d'abord, si vous le voulez bien, du Bureau consultatif de la publicité au Canada dont nous relevons, qui a été institué en 1957 par l'Association canadienne des annonceurs. En 1966, son conseil d'administration recrutait des représentants des media, des principales associations de media. En 1967, l'association était composée également d'associations d'agences de publicité, de la principale association d'agences de publicité. Le Bureau consultatif de la publicité au Canada, donc, notre bureau au Québec — le bureau consultatif, c'est le bureau national — a pour mission de distribuer et de veiller à l'application des codes d'éthique de la profession publicitaire. Il sert d'agent de liaison avec les consommateurs et les gouvernements. Il commandite en outre des recherches au niveau universitaire sur les effets sociaux et économiques de la publicité. A partir de 1970, il a accordé des bourses universitaires pour l'obtention de doctorats. Ainsi, entre autres bénéficiaires de ces bourses, nous comptons M. Donald Béliveau, en 1970, étudiant à Laval et à Sherbrooke, Yvon Allaire, en 1971, étudiant à Sherbrooke, Robert D. Tamilia, en 1973, de McGill, qui ont respectivement étudié les problèmes de transfert de la publicité d'une langue ou d'une culture à une autre, l'efficacité des mass media sur les changements d'attitude du public et le comportement des consommateurs canadiens-français.

Le Bureau consultatif de la publicité au Canada s'occupe de l'application principalement de quatre ou même de cinq codes. Le premier est le code canadien des normes de la publicité, le deuxième est le code de la publicité radiotélévisée destinée aux enfants, le code de la publicité aux consommateurs des médicaments dispensés sans ordonnance médicale, et maintenant — pas le cinquième, mais le quatrième — le code de la publicité des cosmétiques, des parfums, des produits de toilette en général. Nous croyons que notre action est efficace, en règle générale, parce que notre groupe rallie pratiquement tous les grands annonceurs, tous les media d'information et toutes les agences de publicité.

Il travaille en collaboration avec les gouvernements, les associations de consommateurs et divers autres groupes, et possède les moyens d'obliger les professions publicitaires à respecter ces codes de la publicité. Nous tenons à dire que nous ne désirons pas remplacer les gouvernements, les offices de protection du consommateur, les sociétés d'Etat et ainsi de suite.

Notre rôle en est un de complémentarité. Nous respectons nécessairement toutes les lois et tous les règlements qui existent dans la province et le pays.

Notre action a mérité les louanges du gouvernement londonien et des praticiens de publicité en Angleterre, qui ont grandement apprécié notre travail et qui ont même commencé à l'appliquer dans leur pays.

M.William Ewen, Deputy Chairman du National Advertising Review Board des Etats-Unis, s'est

exprimé en ses termes: "Chapeau bas devant le travail extraordinaire accompli par le Bureau consultatif de la publicité au Canada en matière d'autodiscipline publicitaire".

M. Jules Arvay, de Toronto, directeur régional du service des pratiques commerciales, section de la publicité trompeuse, du ministère des Consommateurs et des Entreprises — nous avons traduit librement les noms des organismes — s'est pour sa part exprimé ainsi: "J'affirmerai qu'il existe un haut standard de vérité en publicité, principalement à cause de l'attitude empreinte de responsabilité qu'a manifestée le Bureau consultatif de publicité au Canada".

D'autres pays s'intéressent à nos méthodes. Ce sont nommément la Suède, l'Autriche, l'Allemagne et la France. Nous nous empressons de faire remarquer qu'un nombre d'annonces mensongères, trompeuses ou répréhensibles d'une façon ou d'une autre semble bien peu élevé proportionnellement. Nous parlons au point de vue des annonces nationales, puisque nous avons reçu 563 annonces qui ont été portées à notre attention en 1974. C'est bien peu si on considère que les media d'information diffusent annuellement des milliers et même des milliards de messages publicitaires. Nous ne disons pas cela pour minimiser le besoin d'éliminer les annonces mensongères et répréhensibles. Cela s'impose sans conteste.

L'an dernier, de janvier à la fin de décembre 1975, nous avons reçu 382 plaintes dont 51 ont été obtenues, soit environ 13%. Dans le cas de la publicité aux enfants, à cause sans doute de notre système d'approbation avant diffusion, nous ne recevons en moyenne qu'une plainte par mois.

Je parle là au niveau national. Je parlerai plus tard de ce qui se passe effectivement à ce sujet dans le Québec. Il est sans doute intéressant de noter que, d'après les bulletins de l'Office de la protection du consommateur du Québec, 16 demandes de poursuite en justice seulement ont été faites par cet organisme en ce qui a trait à la publicité aux enfants, depuis la fin de 1972 jusqu'à la fin de 1974. Il n'y a eu que six jugements de rendus. D'après les bulletins, il n'y a eu aucune demande de poursuite en 1975 et 1976. Ces chiffres, dans le cas de l'Office de la protection, s'appliquent à tous les media.

C'est l'Association canadienne des radiodiffu-seurs, qui comprend nécessairement les téléviseurs, qui a créé en 1971 ce code que nous administrons et qui en a confié l'application au Conseil des normes de la publicité. Ce code est mis en vigueur avec d'autant plus d'efficacité et de rigueur que le CRTC, dont des membres siègent à nos comités, lui a donné son appui le plus entier.

Il n'y a pas d'intérêt pour les annonceurs à diffuser des annonces qui ne porteraient pas notre numéro de citation. C'est d'ailleurs impossible. Une citation qui passerait une annonce qui ne porterait pas notre numéro d'approbation risque de perdre son permis de diffusion.

La Société Radio-Canada s'est également engagée à ne pas diffuser, dans ses émissions dites de famille, mais présentant des messages destinés aussi aux enfants, d'annonces qui ne porteraient pas notre numéro d'acceptation.

Je tiens à souligner — cela est très important — que Radio-Canada ne diffuse pas maintenant d'annonces pendant, immédiatement, avant ou immédiatement après ses émissions pour les enfants, mais elle les annonce pour les enfants à d'autres heures de la programmation.

Il existe une autre chose qu'il est très important de souligner. Nos divers comités groupent, comme nous l'avons déjà dit, des représentants des consommateurs, des annonceurs, des diffuseurs et des publicitaires. Nous sommes, en outre, pensons-nous, le seul organisme privé du genre où des consommateurs participent à toutes nos délibérations, non seulement au niveau des comités, mais même au conseil de notre association à titre de membres de l'administration. En effet, nous comptons au Québec, dans notre conseil, trois membres de l'Association des consommateurs. Si nous ajoutons les membres qui en font partie en plus, à titre de substituts, nous en avons cinq.

Je dois dire que le mémoire que nous avons présenté — nous le spécifions bien au début — est le mémoire des professionnels de la publicité et non pas celui des consommateurs membres de notre groupe. Nous donnons en pages 9 et 10 les membres de notre comité. Je dois dire que notre comité est totalement autonome du comité national. Il est arrivé que nous ayons refusé des annonces qu'on a acceptées au niveau national.

Nous devons dire, aussi, que notre organisation, qui ne s'intéresse pas uniquement qu'à faire des profits immédiats, a confié des travaux de recherche à des universités, à l'université de York, par exemple, de McGill et de Guelph. Elle a publié et diffusé à travers le pays un travail intitulé Publicité et Vérité, rédigé par quatre théologiens de l'université de Toronto, travaillant sous les auspices de l'Association canadienne des annonceurs et l'Institut de la publicité canadienne, deux associations membres de notre groupement. Nous avons, de plus, diffusé en anglais, à travers le pays, un cahier intitulé La publicité des enfants, du Dr André Caron de l'Université de Montréal, travail patronné par le Publicité-Club de Montréal.

Nous mettons actuellement au point un travail sur la sécurité, un autre sur la valorisation de la femme en publicité et nous procédons à l'amélioration de la publicité destinée aux enfants. Nous faisons une étude sur l'influence des dessins animés dits "cartoons" dans le métier. La dernière étape de la recherche aura lieu au Québec, puisque c'est le Québec qui s'est opposé le plus à l'utilisation des dessins animés dans les annonces télévisées, dans toutes les annonces, d'ailleurs, pour enfants.

J'aimerais vous citer ce que dit André Siegfried, membre de l'Académie française, humaniste bien connu. Cela remonte à quelques années, c'est en 1952, mais je crois que c'est encore d'actualité. Il a dit: "Les pays qui dépensent le plus en publicité sont ceux qui se portent le mieux". Il a dit cela à la Sorbonne, devant un vaste auditoire. "En publicité surtout, être honnête, c'est être habile. Maintenant, attention, a-t-il ajouté, il n'y a pas à la longue de publicité efficace si elle est malhonnête. A la vérité, les Américains qui sont

des gens pratiques ont abouti à la conclusion que l'honnêteté, après tout, c'est la meilleure politique. Même si on n'a pas le goût d'être honnête, l'intérêt vous conseille de l'être, parce que, si vous dites le produit est bon et que ce produit soit mauvais, il ne faudra pas très longtemps à l'acheteur pour s'en apercevoir. De telle sorte qu'un produit qui fait de la publicité et un produit qui continue à faire de la publicité, c'est la garantie qu'il a réussi, puisqu'il continue et en réalité, lorsqu'il veut durer, lorsqu'il veut avoir des relations durables avec sa clientèle, il ne peut pas se permettre d'être malhonnête."

Remarquez bien que je ne prétends pas que tout est parfait en publicité. Loin de là. Mais, je crois qu'il est bon de se rappeler ces mots de Voltaire qui sont cités de mémoire: L'homme n'est pas parfait, mais il est perfectible. C'est pourquoi nous tentons constamment d'améliorer la profession publicitaire dans l'intérêt de la communauté tout entière.

Passons, si vous le voulez bien, maintenant, à quelques considérations sur la publicité. On a fait grand état, dernièrement, du fait qu'on estime à environ 1600 par jour le nombre de messages publicitaires qu'un consommateur reçoit, 1600 par jour. Bien sûr, le nombre d'annonces présentées au consommateur est très élevé. Par contre, il ne faut pas donner l'impression que nous sommes ensevelis sous l'avalanche des messages qui nous sont adressés. Il faut ajouter, citant sans doute la même source que ceux qui parlent de 1600 messages, que 80 seulement de ces messages retiennent l'attention du consommateur et 12 seulement, à peine, provoquent chez lui quelque réaction.

Il faut comprendre aussi qu'un annonceur ne fait pas nécessairement de la publicité pour atteindre tout le monde. Là-dessus, on se base sur la part du marché. Un annonceur qui aurait une part du marché et, effectivement, quand il a une part du marché de 20%, c'est énorme, mais cela veut dire, quand même, que 80% des acheteurs potentiels ignorent son produit ou son service ou le rejettent.

Je dois dire en plus que 1600 messages par jour, c'est en quelque sorte un chiffre magique qui est mis en doute par les publicitaires eux-mêmes. On a employé ce chiffre — certaines grandes compagnies, entre autres, ont employé ce chiffre — pour dire aux publicitaires: II faut que vous ayez de l'originalité, il faut que vous ayez quelque chose à dire qui soit remarqué. Autrement, votre message va passer inaperçu.

On a aussi fait grand état du fait qu'au Canada, bon an, mal an, on consacrait à la publicité une somme d'environ $1,5 milliard. Il faut dire que la publicité, comme le confirme le Dr O.G. Firestone, professeur de l'Université d'Ottawa, dans The Economie Implication of Advertising, livre publié en 1967, que la publicité est l'un des moyens les plus économiques d'atteindre un grand nombre de personnes dans une société hautement industrialisée.

Il est établi aussi que, lorsqu'il s'agit de produits fabriqués en grande série, comme les arti- cles qu'on utilise couramment chez soi, les frais de publicité ne s'élèvent souvent qu'à une fraction de cent par article. Ces chiffres sont tirés de la revue La publicité d'aujourd'hui.

Il ne faut pas se surprendre, je crois, que $1,5 milliard soit consacré annuellement à la publicité parce qu'il faut comprendre que, dans ce chiffre, sont compris, par exemple, les $10 millions que dépense le Canada en publicité. En 1974, le Canada a effectivement publié — le gouvernement central — pour $10 millions en publicité. Il était au troisième rang des plus grands annonceurs. Le Québec a dépensé, pour sa part, pour la même année, près de $4 millions et il était au 15e rang des plus grands annonceurs alors que l'Ontario était au 30e rang, avec $3 millions. Ces sommes ne comprennent pas les chiffres ou les budgets publicitaires dépensés par des sociétés d'Etat telles que Air Canada, l'Hydro-Québec, la loterie du Québec, la Société des alcools et le reste.

Alors, il ne faut pas s'en scandaliser parce que tout a augmenté considérablement. Ainsi, le budget de la province de Québec, qui était de quelque $735 millions, en 1960/61, est passé, en 1966/67, à environ $10 milliards.

On a également grandement insisté sur le fait que la publicité devrait être rationnelle. Or, selon des économistes et selon les psychologues, il y a bien des façons d'être rationnel. L'homme — tout le monde l'admet — n'est pas simplement un être raisonnable dans le sens qu'une logique impeccable le veut, dans le sens cartésien.

Il est intelligent, bien sûr, mais il est aussi émotif et dans une société évoluée, l'homme n'a pas que des besoins économiques, logiques, rationnels. Il satisfait également, c'est bien sûr, des fantaisies. Il a dépassé le stade de la seule survivance. De nos jours, le théâtre, les lettres, les arts, le sport sont des besoins pour l'homme. On donne au mot "besoin ", non pas le sens de choses indispensables, de choses vitales, mais le besoin au point de vue économique est quelque chose qui peut nous plaire, nous donner une satisfaction, un petit bonheur, non pas le bonheur, mais un ou des petits bonheurs. Si vous le voulez, à ce sujet-là, il faut tenir compte des modèles de comportement de l'homme qui ont été établis par des économistes et surtout par des psychologues. J'en ai retenu quatre, d'un livre intitulé Le Marketing, par Etienne Cracco et Jacques Rostenne. Il s'agit d'un livre édité en 1972 par les Editions Commerce, Centre éducatif et culturel, de Montréal. M. Cracco est membre du Centre d'enseignement supérieur des affaires à l'Université catholique de Louvain et M. Rostenne est ou était alors à l'Université de Sherbrooke.

Prenons, si vous le voulez bien, très rapidement, les cinq modèles qu'ils ont établis du comportement humain. Il y a ceux qui se conduisent selon le modèle de Marshall, qui dit que l'homme est surtout intéressé par les mobiles économiques, par les prix et revenus, et fait un calcul utilitaire avant chaque achat. Bien sûr, on dit comme critique de ce système: Tous les individus n'agissent pas comme des machines calculatrices.

D'autres ont établi le modèle de comportement de Pavlov — le chien qui salive — selon lequel l'homme se comporte de manière plutôt habituelle que réfléchie. Certaines configurations de mobiles incitent le même comportement à cause d'expériences enrichissantes dans le passé.

Tout le monde ne veut pas être coulé dans le même moule, même s'il s'agit d'une forme de conditionnement automatique. On peut effectivement changer ses habitudes et les gens changent effectivement d'habitudes.

Il y a aussi le modèle de comportement basé sur la doctrine de Freud selon laquelle on est fortement influencé par des motifs et des fantaisies profondément enracinées dans son esprit. Sa libido, son instinct sexuel influence considérablement l'homme. Bien sûr, tous les humains ont un subconscient, mais tous n'ont pas besoin de soins psychiatriques.

Il y aussi le modèle de Vleben, qui était d'abord un économiste et qui est devenu surtout un psychologue à la longue, ou un sociologue plutôt, qui dit que l'homme est influencé par les groupes sociaux passés et présents. Ce modèle admet qu'il y a en somme des moutons de Pa-nurge. Il admet que, dans la société, il y a des sui-veux et qu'il y a des esprits indépendants qui veulent faire à leur guise. En somme, plusieurs hurlent avec les loups, ou ils délaissent la meute pour être des citoyens libres.

Il y a un autre modèle dont il est moins important peut-être de parler ici aujourd'hui, c'est le modèle de Hobbes. Hobbes, lui, s'occupe surtout des acheteurs pour les grandes entreprises. Il dit que ça consiste à concilier le gain individuel et celui de l'organisation qui les emploie. On prétend que les publicitaires sont des maîtres en psychologie et connaissent les moyens d'influencer l'homme à son insu. L'homme demeure malgré tout un inconnu.

En guise de conclusion, les deux éminents professeurs que j'ai mentionnés tout à l'heure disent que ces modèles nous éclairent sur le comportement de l'être humain. Mais personne encore n'a réussi à rassembler toutes les bribes d'information en un outil conhérent destiné à l'analyse du comportement.

Il y a des vérités dans chacune des hypothèses mises de l'avant. L'homme demeure encore, comme je l'ai dit, un inconnu et c'est pourquoi la publicité, croyons-nous, demeure un art plus qu'une science.

Maintenant, nous passons à un sujet très délicat, mais extrêmement important, soit un sondage effectué par un groupe de recherche en communication de l'Université de Montréal.

Malheureusement, nous devons dire — nous avons fait expertiser le sondage — que ce sondage, en somme, nous pouvons le qualifier d'un travail d'amateurs. Nous avons été désarmés devant ce qui nous paraissait être un questionnaire pour le moins superficiel qui permettait aux responsables de l'Université de Montréal qui l'ont fait, de tirer des conclusions qui nous stupéfiaient. Nous avons cru qu'il était tout indiqué de demander l'avis d'une maison réputée et indépendante du Québec qui, d'ailleurs, a effectué bon nombre de travaux pour le gouvernement du Québec.

Nous nous sommes tournés donc vers SORE-COM société de recherches en sciences du comportement qui nous a fait le rapport que nous reproduisons intégralement dans les pages qui suivent. Il est intéressant. Je vais vous lire textuellement les principales conclusions de l'expertise qui a été faite. Je dois dire que celui qui a fait l'expertise, le propriétaire de la maison SORECOM, M. Soucy Gagné, est professeur à l'Université du Québec, il a été directeur des recherches à Radio-Canada et je pense qu'il est reconnu comme quelqu'un qui connaît bien son affaire.

En résumé, dit-il, je crois que le questionnaire comme tel est celui de chercheurs peu expérimentés dans ce genre de travail. C'est dommage, car ils auraient certainement pu avoir accès aux services professionnels du centre de sondage de l'Université de Montréal qui tout récemment s'est penché avec compétence sur la question des sondages et qui aurait pu les aider à mieux structurer l'ensemble des questions.

En résumé, le sondage que nous avons examiné, continue-t-il de dire, est loin de répondre à tous les critères d'un sondage scientifique. La cause qu'on veut lui faire servir est sûrement légitime, mais on aurait eu profit à se donner des instruments adéquats. Aussi, je comprends très bien les réticences que vous avez à accepter de telles données, comme preuves à l'appui du taux "scien-tipublicité" pour enfants. Il m'apparaît que l'enquête téléphonique est loin d'être l'instrument dont il faut avoir recours pour approfondir ce dossier. Je vous prie de noter d'éviter les enquêtes téléphoniques qui sont loin d'être les instruments qu'il faut.

Nous avons, d'ailleurs, dans notre mémoire, reproduit intégralement le rapport de M. Gagné, ou de SORECOM. Nous reproduisons également le questionnaire tel qu'il a été fait et on met en doute certaines questions.

Maintenant, nous sommes au courant d'un autre sondage qui a été fait et qui donne un autre son de cloche, un son de cloche tout à fait différent. Cette recherche a été faite par un étudiant de l'Université Concordia, de Montréal, M. Marcel Adam, pour obtenir une maîtrise; il travaillait sous la conduite du Dr Peter Pasold et d'autres professeurs. Le Dr Pasold est adjoint en marketing. Or le résultat donné a été bien différent.

Remarquez bien que nous ne prétendons pas — nous n'avons pas commandité cette enquête — et nous ne disons pas que c'est nécessairement la vérité et toute la vérité; mais il est bon de retenir qu'il s'agit d'une enquête qui donne des résultats tout différents et d'une enquête qui a quand même été faite par un étudiant de l'Université de Concordia pour l'obtention d'une maîtrise.

On doit noter que son enquête n'est pas encore terminée. Au moment où nous avons présenté le mémoire, elle n'était pas terminée. Nous mentionnons, dans notre programme, où l'enquête a eu lieu: entre autres, dans des centres commerciaux situés un peu partout dans la province. Il arrive un chiffre de 76% de ceux qui sont

satisfaits du contenu des émissions pour enfants, qui s'accordent assez bien avec celui de 57% de ceux qui sont satisfaits ou modérément satisfaits de la publicité destinée aux enfants. Avec 61,38% de ceux qui disent que la publicité est meilleure aujourd'hui qu'il y a cinq ans.

Cela je crois, est très important. Il y a 39,9% de ce total qui répondent qu'il faudrait éliminer les dessins animés. Vous savez que la province de Québec ne permet pas les dessins animés dans les annonces pour enfants. Nous, du Conseil des normes pour la publicité, avertissons continuellement les annonceurs nationaux qu'ils ne peuvent se servir de dessins animés dans les annonces pour enfants au Québec.

Il me semble qu'il serait malheureux qu'une loi aussi importante que celle qu'on veut présenter, préparer et faire adopter soit basée, parce qu'il nous semble qu'elle l'est, sur une loi reposant sur un travail d'amateur. Je dois dire que le responsable de l'Université de Montréal qui a conduit l'enquête a fait énormément de publicité à son sondage. Il a publié deux articles dans le journal La Presse où il a exprimé exactement ce qu'il avait trouvé. Il a également passé à une émission qui s'appelle Consommateurs avertis de Radio-Canada. Il a été dit au cours de cette émission que Radio-Canada avait fait une enquête qui démontrait que 50% de la population rejetait ou voulait abolir la publicité pour les enfants. Or, malheureusement, c'est totalement faux. Cette stratégie res-seînble un peu, je crois, à de la propagande malhonnête. Je ne dis pas qu'on a voulu en faire, mais cela ressemble à de la propagande malhonnête. Comme preuve à l'appui que Radio-Canada n'a pas fait le sondage en question, j'ai une lettre de Radio-Canada même qui réfute, et je vais vous la lire si vous me le permettez. On me dit: "Je viens vous communiquer la réponse à la question que vous aviez d'abord posée à M. Jean Fortier et que vous m'avez formulée par la suite, notamment dans votre lettre du 9 juin. L'opinion des parents sur la publicité destinée aux enfants n'a pas fait l'objet, à ma connaissance, de sondage spécifique par Radio-Canada. D'où vient alors l'allusion faite en ce sens par l'émission Consommateurs avertis? Les recherches que j'ai effectuées ont confirmé l'hypothèse que vous aviez vous-même émise dans votre lettre du 8 avril à M. Fortier. S'il s'agit du montage fait à la demande de M. LeBarbé, directeur du service de publicité à la radio de Radio-Canada dont vous avez copie, il est évident que Radio-Canada a été mal citée".

Parlant des recherches, et je vous disais, comme le disait M. Gagné de SORECOM, que la recherche, enfin le Gallup Pool, si vous voulez, ce genre de recherche par téléphone n'est certainement pas ce qu'il faut pour étudier la publicité aux enfants. Nous croyons que la recherche devrait être faite par des éducateurs, des pédiatres, des sociologues. Nous sommes au courant de recherches qui se font depuis à peu près quinze ans aux Etats-Unis. La National Science Foundation, des Etats-Unis, a entrepris, il y a quelque temps, un programme de recherche sur les effets de la publicité télévisée destinée aux enfants. Ce travail est effectué par des experts en éducation, en psychologie et en marketing des universités Harvard, Hartford et Pennsylvanie, sous la direction d'un comité consultatif formé, entre autres, de représentants d'une agence de publicité, du Bureau of Consumer Protection, de l'Action for Children's Television, de la National Association of Broadcasters, du Consumer Affairs, Western Union, du Medical School Health Sciences Center, du State University of New York, du Standford Medical Center de l'Université de Stanford et du Department of Political Science du Massachusets Institude of Technology.

Dans un rapport préliminaire publié en mars de cette année, ce groupe de recherche souligne, entre autes choses, qu'il n'existe pas un ensemble — on l'appelle un "pool" — bien défini d'information sur l'impact qu'exerce sur les enfants la publicité à la télévision. D'ailleurs, le docteur Ca-ron de l'Université de Montréal a dit sensiblement la même chose.

Il a dit, en somme, qu'on commençait tout juste à étudier cela et qu'on avait très peu de données valables. En somme, il n'y a pas du tout de consensus d'établi;

Deuxièmement, qu'on possède des connaissances limitées dans ce domaine et à moins de se baser sur des réalités de recherche bien évidentes, on risque, en imposant une réglementation, de restreindre sans nécessité la liberté d'expression des annonceurs et des diffuseurs;

Troisièmement, que nous devons savoir comment les enfants comprennent les messages qui leur sont adressés pour établir si les réglementations qui existent présentement permettent de leur présenter des messages publicitaires qui sont justes — on emploie le mot "fair" — et vraies dans l'optique de leur perception.

On ajoute que le jargon des sciences sociales peut paraître formidable bien qu'il n'exprime, en ce domaine, que fort peu de chose.

Autres réflexions sur la publicité aux enfants. Il est important, à ce sujet, de constater que dans Publicité et Vérité, qui a été publié par les quatre théologiens dont j'ai parlé tout à l'heure, on mentionne, en page 11 du rapport qui a été fait, "qu'une attention particulière doit être accordée aux réclames adressées aux enfants, surtout celles présentées par des autorités ou des héros". On dit: "Les enfants achèteront avec beaucoup d'empressement un produit ainsi présenté sans se soucier de sa qualité".

On doit donc dire que les théologiens, les moralistes ne disent pas que la publicité aux enfants est immorale. Il faut quand même voir les choses, je crois, telles qu'elles ont été dites et là, ce n'est pas nous qui parlons mais bien des théologiens.

On doit tenir compte aussi que la publicité destinée aux enfants a beaucoup évolué au cours des quelque cinq dernières années. C'est une chose que beaucoup de gens ne savent pas parce qu'ils ne regardent souvent pas les annonces adressées aux enfants. Je crois qu'il n'est pas exact de dire, aujourd'hui, que les annonceurs emploient des méthodes subversives pour toucher les enfants. Contrairement à autrefois, il est main-

tenant écrit en toutes lettres — c'est inscrit dans le Code de la publicité radio-télévisée destinée aux enfants et dans le règlement de la province de Québec à ce sujet— que la présentation doit être véridique, les descriptions écrites et sonores ne doivent pas exagérer les caractères spécifiques du produit. Pour bien préciser la taille relative de l'objet annoncé, il doit être accompagné d'un autre objet familier à l'enfant, qu'on doit présenter des résultats susceptibles d'être atteints par un enfant d'intelligence moyenne, que le mot nouveau ne peut être utilisé que pendant une année, qu'on doit éviter d'exercer des pressions exagérées sur les parents, que dans les messages qui offrent des primes, on doit mettre l'accent sur les produits eux-mêmes, qu'aucune station ne peut diffuser plus que quatre minutes d'annonces publicitaires pendant une demi-heure de programmation pour enfant, qu'il est interdit aux vedettes et aux autres personnes d'émissions pour enfants de promouvoir des produits, que les personnages des dessins animés et des marionnettes ne doivent pas promouvoir explicitement un produit, que les personnalités et les vedettes bien connues des enfants n'ont pas le droit de témoigner en faveur de produits, sauf s'il s'agit d'annonceurs professionnels qui ne figurent pas dans les émissions destinées aux enfants, que les prix et les conditions d'achat doivent être indiqués, s'ils le sont, de façon précise et complète, que le prix ne doit pas être minimisé par l'emploi de mots tels que seulement, à prix d'aubaine, et le reste, que la description et la démonstration doivent spécifier qu'un montage est requis si tel est le cas, que la publicité des jouets évitera toute comparaison avec le modèle de l'année précédente pour ne pas diminuer la joie que procure à un enfant le jouet qu'il possède, que la publicité ne doit pas présenter des adultes ou des enfants accomplissant des actions contraires à la sécurité, que la publicité doit s'abstenir de montrer l'emploi de produits d'une façon hasardeuse ou dangereuse, que la publicité doit s'abstenir de mettre à l'honneur des valeurs qui ne respectent pas la morale, l'éthique ou la législation, que la publicité ne doit pas laisser entendre que la possession ou l'usage d'un produit rend son propriétaire supérieur, que l'annonceur doit fournir sur demande la preuve de la véracité de ses allégations.

Alors, cela résume en somme notre code de la publicité pour les enfants que nous révisons, comme je vous l'ai dit, continuellement. Nous en avons fait, je crois, cinq révisions depuis 1971.

Il nous semble aussi, après avoir lu ce que proposait l'Association des consommateurs et le rapport qui a été fait par les conseillers du ministère qu'on devrait désormais s'adresser aux parents à des heures où les enfants ne regardent pas la télévision. Mais il faut voir à quelles heures les enfants regardent la télévision. Et quand on consulte BBM, c'est-à-dire le Bureau of Broadcast Measurement, qui est la source la plus fiable en ce qui a trait aux cotes d'écoute, on voit que, par exemple, si on parle de Montréal, entre dix-neuf heures et vingt-trois heures, donc entre sept heures et onze heures du soir, à CBS il y a, à l'écoute un auditoire total formé de 11,6% d'enfants de deux à onze ans; que de douze heures à seize heures trente, au canal 2, l'auditoire pour les enfants est de 25,1%, tandis qu'au 10, il est de 20%, donc dans l'ensemble, entre sept heures et onze heures du soir, il y a environ 10% d'enfants de deux à onze ans qui sont à l'écoute; de midi à quatre heures trente, il y a environ 22% de l'auditoire qui est constitué d'enfants; que, de seize heures trente à dix-huit heures, où on a principalement le bloc des émissions pour enfants, il y a 42% des enfants qui sont à l'écoute de Radio-Canada et que 26,7% sont à l'écoute du 10; ces chiffres sont tirés de BBM du printemps de 1976. Je crois que c'est quand même très important et cela veut dire que, même si on adresse désormais les messages aux parents, il y aura moins de contrôle sur ce qui sera dit certainement et les enfants verront quand même les annonces qui seront adressées aux parents et seront certainement influencés.

J'aimerais ajouter, parce qu'on sait que l'Association des consommateurs a, depuis très longtemps, demandé l'abolition de l'annonce aux enfants, qu'il y a au Québec, d'après Statistique Canada 1974, 1 721 000 ménages. En étant très libéral, on peut donc dire que les 15 000 membres de l'Association des consommateurs ne représentent pas 1% des foyers québécois, soit 0,03% de la population entière, si on se base sur 6 millions d'habitants. Remarquez bien, on ne veut pas dire, et on ne veut pas décrier l'Association des consommateurs, nous travaillons avec ces personnes et nous les estimons, mais il faut quand même voir les choses telles qu'elles sont.

En conclusion, nous disons qu'il y a certainement beaucoup de danger à éliminer la publicité pour les enfants. C'est sous-entendu que, s'il est légal de fabriquer des produits et de les vendre, il est presque normal de pouvoir les annoncer. Et que, si les annonceurs ne peuvent pas annoncer à la télévision et même dans d'autres media au Québec, ils annonceront peut-être ailleurs. Il y aurait peut-être danger qu'il se produise à l'inverse de ce qui s'est passé il y a quelque vingt ans, alors que, l'Ontario ayant aboli la publicité de l'alcool, de grands magazines s'installèrent au Québec, de manière à imprimer ici et à diffuser partout au Canada la publicité en faveur des alcools. On pourrait fort bien se servir, par exemple, de la publicité directe, toutes sortes d'affaires pour essayer de passer les frontières du Québec. On pourrait également peut-être faire de la publicité, pour tout ce que j'en sais, en français ou, en tout cas, même en anglais pour les enfants sur les postes américains qui sont entendus dans le Québec.

Alors, nous avons l'impression qu'il vaut mieux inscrire et contrôler que de supprimer.

Nous avons déjà présenté cinq éditions différentes du code de la publicité radiotélévisée, soit en octobre 1971, en mai 1973, en septembre 1973, en août 1974 et en janvier 1976, date de notre dernière édition. Pour les annonces pour les enfants que nous voyons, nous avons, en une seule année, d'avril 1975 à mars 1976, étudié pour approbation 268 messages radiotélévisés destinés aux enfants et pour approbation 267.

Sur les messages soumis pour approbation, pour préapprobation, nous en avons refusé et ou fait modifier 121, pour des raisons de manque de sécurité, d'emploi d'impératifs, d'exagération, de demandes de renseignements suffisants, etc. Quant aux annonces soumises pour approbation, nous en avons rejeté et fait modifier dix-huit, bien qu'il s'agissait, dans presque tous ces cas, d'une seconde soumission. On avait d'abord donné une préapprobation et ensuite on donnait l'approbation.

Or, depuis environ quinze ans, comme je le disais tout à l'heure, au Canada et aux Etats-Unis, nous étudions le problème de la publicité aux enfants. Nous devons, je crois, continuer les recherches entreprises; autrement, chacun laissera libre cours à ses préjugés, ses émotions, ses opinions personnelles et nous n'arriverons pas à un consensus qui serait le fruit d'études menées ensemble.

Nous avons mentionné aussi qu'il serait bon d'étudier, et les théologiens l'ont dit, le fait que les enfants effectivement, bien qu'on ait dit le contraire, sont des acheteurs et ils sont des acheteurs, parce que les parents veulent qu'ils soient des acheteurs. On sait tous, par exemple, qu'il y a des enfants qui vendent des journaux et qui livrent les journaux, qui sont payés pour le faire, qui font des commissions, qui sont payés pour le faire, qui reçoivent de l'argent de leurs parents et les parents laissent les enfants libres de dépenser l'argent comme ils l'entendent et c'est un apprentissage de la vie.

Nous croyons que la publicité dans une certaine mesure et ce fait d'avoir de l'argent de poche pour les enfants constituent un apprentissage de la vie. Je me rappelle moi-même, et peut-être aussi ceux qui ont cinquante ans parmi nous, il n'y en a peut-être pas beaucoup, mais je me rappelle que, quand j'étais jeune, même quand on ne nous donnait que $0.10 ou $0.25 par semaine, les parents nous laissaient dépenser nos $0.10; très souvent, ces $0.10, on pouvait fort bien les employer pour s'acheter des bonbons, mais on pouvait également les économiser, en économiser pendant quelques semaines, pour pouvoir aller aux petites vues, comme on disait, qui étaient présentées dans les soubassements de l'église par les bons frères.

Alors, que l'enfant apprenne jeune un peu à se contrôler, c'est normal. La publicité offre nécessairement un choix, mais personne — même les plus riches — ne peut acheter tous les produits de l'industrie et du commerce, c'est impossible. Alors, il faut apprendre, et le plus vite possible, à faire un choix. C'est pour cela aussi que nous croyons, et les théologiens dont j'ai parlé tout à l'heure disent la même chose, qu'il faudrait enseigner les lois de l'économie et tout cela, les droits des consommateurs, dans les écoles.

Il faudrait aussi, et le club dont je suis le président, le Cercle des cadres de la publicité l'a proposé, qu'on enseigne la publicité dans les écoles, au niveau du CEGEP, au niveau de l'université, pour renseigner les gens, parce qu'il ne s'agit pas de faire de la prohibition, je crois à mon avis, qu'il vaut mieux faire de l'éducation. A mon avis, je parle du groupe que je représente, nous devons continuer les recherches entreprises; autrement, je ne sais pas où cela nous mènera.

Et quelles sont nos recommandations spécifiques? En bref, les parents actuellement, par votre règlement sur la publicité, et grâce à notre comité de la publicité radiotélévisée destinée aux enfants, sont protégés en ce qui concerne les enfants contre les exagérations de la publicité mensongère, frauduleuse, etc.

L'abolition de la publicité destinée aux enfants auxquels, croyons-nous, elle sert d'apprentissage à la vie, risque qu'on ait recours à des méthodes qui échapperont à une surveillance aussi efficace que celle qui existe à l'heure actuelle. Et, comme depuis quinze ans environ, des gens sérieux, des universitaires, des gens de diverses autres disciplines se penchent sur le problème de la publicité adressée aux enfants et étoffent graduellement ce dossier, il est prématuré, pensons-nous, d'abolir sans plus de souci et de recherche cette publicité.

Nous recommandons donc de maintenir encore pendant quelque temps la situation présente. Nous suggérons, en deuxième lieu, de former avec des représentants de votre ministère, Mme le ministre, d'autres groupes et des universitaires, un comité pour étudier en profondeur la question de la publicité destinée aux enfants, ne craignons pas d'élargir nos horizons, en recueillant tout ce qui se fait, qui s'est dit, qui se dit à travers le monde. Ainsi, on ne risquera pas, par une action hâtive, de poser des gestes qu'on pourrait par la suite regretter. Merci.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Merci, monsieur. Avant de donner la parole au ministre, j'aurais à mentionner un changement parmi les membres de la commission. M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Harvey (Dubuc): Le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, notre position concernant la publicité destinée aux enfants de moins de treize ans est clairement indiquée dans le projet de loi no 7 et demeure inchangée.

Les raisons qui ont présidé à cette prise de position ont été élaborées abondamment lors de la présentation de mémoires précédents et je tiens peut-être ce matin à rappeler brièvement ces raisons. Tout d'abord, face à la publicité en général, l'enfant est incapable d'exercer sa liberté de choix et devient ainsi un agent à la solde du commerçant, sinon son complice. De plus, une recherche parrainée par le Bureau consultatif de publicité nous apprend que l'enfant d'âge préscolaire a souvent de la difficulté à distinguer entre le contenu des émissions pour enfants et le contenu des messages publicitaires.

L'enfant est aussi démuni face au contenu immédiat du message publicitaire. En effet, il n'a pas le pouvoir de dépenser, malgré ce qu'on entend ce matin, sauf celui que vont lui fournir ses parents. Dans la majorité des cas, les biens qui lui sont offerts n'ont pas ou peu de rapport avec l'objectif visé par notre société concernant les en-

fants, c'est-à-dire en faire de meilleurs citoyens.

Pour votre part, reprenant plusieurs des arguments que nous avons entendus des tenants du maintien de la publicité destinée aux enfants, vous ajoutez en surcroît que l'abolition de la publicité destinée aux enfants auxquels croyez-vous, elle sert d'apprentissage à la vie, risque qu'on ait recours à des méthodes qui échapperont à la surveillance aussi efficace que celle qui existe à l'heure actuelle.

Il est vrai, advenant l'adoption de la prohibition de la publicité destinée aux enfants, que l'enfant de 13 ans demeurera exposé à la publicité des adultes, mais cette publicité sera dorénavant régie de façon plus stricte par les normes édictées, par les pratiques interdites, par exemple. C'est la situation qui prévaut actuellement et, avec l'introduction des pratiques interdites au bill 7, c'est toute la publicité qui s'en verra, nous l'espérons, assainie. Ainsi, cette mesure ne soustraira aucunement l'enfant à son contexte économique et social ou à l'expérience de la vie, comme vous le dites. Mais elle éliminera à juste titre les interventions publicitaires qui s'adressent directement à lui et devant lesquelles il est sans défense.

Vous affirmez de plus qu'un rapport intérimaire d'un groupe de recherche publié récemment nous apprend entre autres choses que les connaissances sur l'impact de la publicité aux enfants sont restreintes. Il faut savoir comment les enfants comprennent les messages publicitaires pour mesurer la portée de la réglementation existante et qu'à moins de se baser sur des résultats de recherche bien évidents, on risque, en imposant une réglementation, de restreindre sans nécessité la liberté d'expression des annonceurs de diffusion.

La publicité destinée aux enfants existe depuis plusieurs années et la recherche sur le sujet également, et il n'est pas surprenant, vu la complexité du problème, du sujet, que les recherches connues ne fournissent pas de résultats unanimes, c'est bien évident, sur le sujet.

Nous souhaitons de plus qu'elles se poursuivent afin que nos connaissances puissent toujours s'accroître. Nous devons cependant prendre nos responsabilités dès maintenant et nous ne pouvons attendre les résultats de recherches qui pourront toujours être contredits par d'autres recherches subséquentes, pour protéger les enfants.

L'enjeu est suffisamment important pour que nous abolissions dès maintenant la publicité destinée aux enfants, et les facteurs négatifs que peuvent subir les publicitaires et les radiodiffuseurs nous apparaissent minimes par rapport à ceux que peuvent subir les enfants qui deviennent, et nous le répétons, de véritables otages psychologiques, sinon des complices de commerçants.

Sans nier certains effets bénéfiques des codes d'éthique ainsi que de la législation sur le sujet, nous croyons que l'enfant n'est pas en mesure de résister efficacement à la publicité qui lui est adressée, n'ayant pas encore atteint le développement psychologique et intellectuel permettant ce discernement. Ce ne sont pas certaines exigences du code d'éthique, et je n'en cite qu'une seule "éviter d'exercer des pressions exagérées sur les parents dans les messages qui offrent des primes, on doit mettre l'accent sur les produits eux-mêmes, aucune station ne peut diffuser plus que quatre minutes d'annonce publicitaire pendant une demi-heure de programmation pour les enfants," ce ne sont pas les exigences, dis-je, du code d'éthique qui vont mettre l'enfant à l'abri des sollicitations, qui vont lui permettre de résister aussi adéquatement à celles-ci et l'empêcher d'acheter.

En terminant, permettez-moi de faire remarquer que le sondage du groupe de recherche en jurimétrie auquel vous faites abondamment allusion dans votre mémoire — je pense que vous y consacrez une vingtaine de pages sur les 54 de votre mémoire — n'est qu'une des nombreuses études que j'ai citées dans ma causerie devant les membres du Advertising and Sales Executives Club de Montréal. Il existe de nombreuses et excellentes raisons en dehors de ce sondage pour abolir la publicité destinée aux enfants. Je n'ai donc pas ce matin l'intention d'entreprendre la guerre des sondages à laquelle vous semblez me convier. Je vous laisse le soin de poursuivre le débat avec le groupe de recherche en jurimétrie. Ce sont quelques remarques que j'avais à faire ce matin.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Lafontaine.

M. Léger: Moi aussi, plus j'allais en profondeur dans le document, plus on me convainquait davantage du danger de la publicité pour les enfants, surtout avec des exemples où on va chercher des explications chez Freud, qui travaille et qui influence les comportements, les personnes et qui va directement dans le subconscient. Si un adulte peut essayer parfois de se défendre là où il a de la difficulté, quand les méthodes de publicité vont jusqu'à travailler sur le subconscient et je cite les mots, je pense, de M. Watier, qui parlait de rejoindre et influencer l'homme à son insu, imaginons-nous que l'enfant, même quand il est prêt à écouter, qu'il est attentif, est déjà démuni. Si les méthodes de publicité ont comme objectif de créer chez les gens des besoins de leurs produits en allant les influencer à leur insu, dans leur subconscient, pour que, par la suite, on crée chez eux des besoins et qu'on change les comportements, c'est d'autant plus dangereux pour des enfants qui n'ont pas encore réussi à établir des mécanismes de défense et à filtrer les informations pour en ressortir après un jugement avec les choix qu'ils pourraient normalement faire.

Je pense entre autres, c'est un exemple de la publicité, à un médicament où on a des adultes qui sont souvent des enfants retardés et qui ont des problèmes de comportement et qui voient dans cette publicité de l'automédication; on crée chez eux des habitudes qui rendent ces personnes dépendantes, vulnérables, parce qu'elle croient à un besoin de béquille quotidienne pour faire face aux difficultés, parce que la publicité a créé chez eux un besoin de trouver dans cette béquille

une façon de faire face aux difficultés de la vie. Je me demande jusqu'à quel point un organisme comme le vôtre est beaucoup plus représentatif des enfants, parce que j'ai vu que vous avez attaqué directement tantôt les associations de consommateurs qui, selon vous, ne représentent qu'un petit nombre de parents. Je pense que votre association représente non pas des enfants, mais des intérêts beaucoup divergents et différents des intérêts réels des enfants.

Je pense que, si vous n'êtes pas capable d'atteindre celui qui achète, c'est-à-dire que si vous pensez que le parent ne peut pas, par votre publicité, développer chez lui le désir de trouver dans les jouets ou dans les utilisations qu'on peut donner aux enfants le choix qu'il faut donner à ces enfants pour les développer davantage à l'intérieur des jouets éducatifs, parce que vous ne pensez pas faire appel à l'intelligence des parents qui ont la responsabilité d'éduquer leurs enfants et même de trouver dans les milieux de leurs jeux quotidiens de quelles sortes de jouets ils ont besoin pour développer tel ou tel aspect de leur personnalité, c'est que vous croyez plutôt qu'il faut directement influencer l'enfant, parce qu'il va faire pression sur ses parents pour acheter cet objet.

Quand vous m'arrivez avec l'argument que l'enfant est un consommateur parce qu'on lui donne 10 cents et qu'il peut peut-être avoir $1 de dépenses par semaine, je pense bien que ce n'est pas avec cette quantité d'argent qu'il va être un gros consommateur. Il va beaucoup plus influencer ses parents sur l'aspect émotif, et c'est d'autant plus dangereux quand on pense qu'il y a au Québec près de 175 000 enfants qui dépendent de parents vivant de l'aide sociale. Ces enfants vont regarder la télévision comme les autres et ils vont être influencés comme les autres et vont être frustrés, parce que leurs parents ne peuvent pas leur donner ce qu'ils réclament, du fait que, dans les 175 000 cas, ce sont des parents qui vivent de l'assistance sociale.

Vous affirmez plus tard dans votre mémoire que la publicité, quand elle dure, quand on continue à annoncer, c'est parce que cela va bien et que si on a réussi à vendre, c'est parce que le produit est bon, etc.

Vous me sortez l'argument de Voltaire: "L'homme n'est pas parfait, mais il est perfectible." Je vous cite l'argument de Napoléon qui a déjà dit: "Même si tu as tort, si tu continues de l'affirmer, tôt ou tard, tu auras raison ". Cela ne veut pas dire que c'était réellement la bonne chose parce qu'il a gagné son point, parce qu'il a été tenace. C'est là qu'on doit se fier à des règles beaucoup plus sévères que votre code d'éthique. Dans votre code d'éthique, vous dites qu'il est formellement interdit aux vedettes et aux autres personnages d'émissions pour enfants de promouvoir des produits, des primes ou des services. On voit encore que cela fonctionne. On voit encore des pyjamas Patof et des choses comme celles-là. Le code est une indication de votre bonne volonté, mais il n'a aucunement une valeur de réglementation. Je n'ai pas de questions à vous poser, sauf que vous m'avez convaincu davantage que la publicité pour enfants ne doit absolument pas être faite d'une façon systémative. Elle doit être complètement bannie et peut-être remplacée par une publicité de jouets ou d'autres utilisations pour les parents où ceux-ci pourront déceler ce qui est bon pour leurs enfants et non pas aller rejoindre directement l'enfant qui n'a pas les moyens de se défendre dans une situation ou dans un monde où les intérêts des adultes sont tellement différents — surtout dans le domaine des affaires — des besoins réels des citoyens.

Quand vous me parliez tantôt des sondages, vous me faites penser à des politiciens qui prennent les sondages qui ne font pas leur affaire et qui les descendent sur la qualité d'échantillonnage. Je pense que, si les compagnies que vous représentez voulaient avoir un sondage, elles ne prendraient certainement pas l'échantillonnage que vous nous avez montré tantôt où on prenait les échantillons de gens qui allaient à des centres d'achats, qui sont des acheteurs et des consommateurs et dont l'ensemble du choix n'est pas nécessairement représentatif du groupe de citoyens qui doivent être influencés par la publicité. Cet échantillonnage n'est absolument pas acceptable. Je vois que vous mettez beaucoup d'importance sur la qualité du sondage. Je me demande même si le mémoire qui est présenté avait pour but de nous convaincre ou seulement convaincre les gens de la publicité que vous avez les bonnes méthodes pour influencer le comportement des gens et pour davantage vendre des produits que de nous convaincre, nous, ici, que nous devons, par les arguments que vous avez apportés, permettre la publicité aux enfants.

Ce sont les remarques que je voulais faire. Vous m'avez davantage convaincu que ce n'est pas un bon avantage que de permettre à la publicité de rejoindre les enfants.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Y a-t-il d'autres questions des membres de la commission?

M. Watier: Est-ce que vous me permettez...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Un instant, s'il vous plaît! Y a-t-il d'autres questions des membres de la commission? Je vais vous permettre. Habituellement, en commission parlementaire, il n'est pas permis à ceux qui présentent des mémoires de répliquer...

M. Watier: Ah bon!

Le Président (M. Houde, Limoilou): ... aux exposés des députés.

Je vais vous permettre une courte réplique.

M. Watier: Je désirerais dire à M. Léger que je ne crois pas qu'il ait compris ce que j'ai dit, dans une bonne mesure. C'est probablement le manque de communication. Nous n'avons pas dit que nous représentions la population. Nous nous sommes présentés comme étant représentants des annonceurs des media et des publicitaires. Nous l'avons dit.

M. Léger: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit: Vous avez attaqué la représentativité des associations de consommateurs parce qu'elles ne représentaient qu'une infime minorité de parents et d'enfants. Je dis: Vous n'êtes pas plus représentatif, dans votre communication, de ces enfants, mais vous utilisez quand même, par les groupes que vous représentez, les ondes publiques dans lesquels les intérêts, non pas des enfants, mais les intérêts de ceux qui veulent vendre leurs produits: ce serait les rendre publics pour cela.

M. Watier: Ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu dire. J'ai dit qui nous représentons, c'est clair; nous savons qui nous représentons et vous le savez, nous vous l'avons dit. Nous avons dit qu'il faudrait faire une consultation plus large pour avoir un échantillonnage plus large de la population.

Deuxièmement, nous avons dit, et les parents le veulent, que les enfants peuvent souvent exercer un choix. La publicité, en leur donnant des éléments de choses qu'ils peuvent voir... Les parents demandent: Qu'est-ce que tu aimerais avoir... Si les enfants sont un peu au courant, ils peuvent plus facilement exercer un choix. Vous nous avez dit que c'était presque un voeu pieux, notre code, parce qu'on y voyait encore des Patof et des affaires comme celles-là; je vous prie de nous dire quelle annonce de publicité fait cela. Nous avons même refusé à un annonceur d'utiliser Patof, même à onze heures du soir, parce que nous avons dit qu'il s'agissait d'une chose qui s'adressait aux enfants et qu'étant une vedette d'émissions d'enfants, il n'avait pas le droit. Je vous défie de nous donner une annonce précise où on permet à une vedette de faire de l'annonce aux enfants. Ce n'est pas exact du tout.

Vous parlez de nos sondages, aller dans les centres d'achats, que ce n'est pas représentatif et ainsi de suite. On vous dit tout simplement que les sondages... Vous parlez de la guerre des sondages. Vous savez que même les partis politiques font de la publicité et qu'on essaie de convaincre les gens à leur insu; même les partis politiques font cela.

Mais nous n'essayons pas de les convaincre à leur insu. Nous avons dit, à la suite des deux professeurs en question, que c'est bien beau de dire ces choses, mais ce n'est pas prouvé du tout. On ne connaît pas encore tous les éléments du comportement humain. Ce sont encore des choses qui doivent être étudiées. Alors, je crois que dans une bonne mesure, vous n'avez pas du tout répondu à ce que je disais.

M. Léger: Votre organisme serait-il prêt à faire un sondage, à financer un sondage uniquement auprès de parents dont les enfants sont âgés de 13 ans et moins pour avoir réellement l'opinion de ces parents?

M. Watier: J'ai dit, dans ma présentation, que nous croyions que les sondages de cette nature n'étaient pas ce qui apportait l'éclairage qu'il faut à la situation. L'éclairage qu'il faut à la situation, il faut aller le chercher chez les éducateurs, chez les psychologues, chez les psychiatres, chez tous ces gens-là. C'est ce que nous avons dit. La recherche américaine dont nous avons parlé a eu le souci de faire ce travail, qui est un travail beaucoup plus sérieux et beaucoup plus scientifique. Voilà ce que nous avons dit.

Association canadienne des annonceurs

Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors, merci bien, M. Watier. J'appelle immédiatement l'Association des annonceurs.

M. Trudeau: M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la commission, permettez-moi d'abord de vous remercier de votre invitation à nous présenter devant vous au sujet de notre mémoire sur le projet de loi no 7, Loi de la protection du consommateur.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Un instant, s'il vous plaît! Voulez-vous vous présenter et présenter ceux qui vous accompagnent.

M. Trudeau (Walter): Je m'appelle Walter Trudeau, je suis le président de la section québécoise de l'Association canadienne des annonceurs et aussi le vice-président à l'échelle nationale. Je suis à l'emploi des Distilleries Corby limitée en qualité de directeur des relations à l'exécutif et des services au consommateur. M. Jacques Lefebvre m'accompagne. Il est membre de l'Association canadienne des annonceurs, et aussi directeur des relations publiques pour le groupe SNC, une entreprise québécoise d'envergure nationale et internationale qui fait aussi partie de l'Association canadienne des annonceurs.

Pour vous situer un peu sur qui nous représentons l'ACA a été fondée en 1914 par 15 compagnies. Nous comptons maintenant 220 membres au Canada et environ 60 ont leur siège social au Québec. Nos membres dépensent environ $450 millions par année en publicité au Canada et vendent des biens et des services d'une valeur de $40 milliards à $50 milliards. De 25% à 33% de ces chiffres d'affaires sont réalisés au Québec. Il n'y a que six de nos membres qui ne font pas affaires au Québec; il s'agit de deux compagnies régionales de téléphone...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Un instant, s'il vous plaît! Dans cet exposé, par écrit, on parle de millions et vous parlez de milliards.

M. Trudeau: II s'agit de milliards; c'est une erreur de copiste.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Alors, ce sont des milliards.

M. Trudeau: Oui. Six de nos membres ne font pas affaires au Québec: il s'agit de deux compagnies régionales de téléphone, une association régionale de producteurs de lait, une chaîne régionale d'alimentation et deux compa-

gnies régionales d'électricité. Toutes les autres compagnies sont membres de l'ACA; plus de 215 entreprises sont actives au Québec. La plupart y ont des bureaux ou des usines, sinon leurs produits y sont distribués par des grossistes; les détaillants de ces produits sont achetés par presque tous les consommateurs québécois.

Il serait impossible de calculer en dollars les bénéfices économiques que les membres de l'ACA apportent au Québec. On ne peut dire que ces bénéfices sont très substantiels. L'ACA est donc de toute évidence intéressée au plus haut point par une législation qui touche les affaires et le commerce dans cette province. Nous désirons qu'il soit bien compris que notre mémoire, que nous avons soumis en mai dernier — vous avez eu le loisir de lire — l'a été dans l'intention de vous aider à rendre la loi efficace.

Notre désir de vous aider a été principalement motivé par ce qui suit. La loi est faite pour protéger le consommateur. Cet objectif sous-entend que le consommateur doit être protégé de certaines personnes ou entreprises comme des individus louches, des exploiteurs ambulants, bref, des criminels qui font leur proie du consommateur qu'ils trichent, qu'ils volent ou lui causent toutes sortes de torts.

Franchement, M. le Président, le but du projet de loi est le même que celui des membres de l'ACA. Nos membres sont des entreprises bien connues, des entreprises responsables, dirigées par des hommes d'affaires responsables et imbus d'un sens moral. Ces entreprises sont en affaires depuis des décennies. Elles ont l'intention de continuer d'être en affaires longtemps.

Vous êtes d'accord, M. le Président, qu'on ne peut rester en affaires qu'en protégeant le client, en le traitant d'une façon honnête et équitable. C'est pourquoi nous nous faisons les défenseurs de toute législation qui a pour but de protéger le consommateur, de le protéger contre les pratiques malhonnêtes, contre la publicité frauduleuse, contre les contrats inéquitables, contre des prix trop élevés et contre des marchandises de pécadille.

Voilà pourquoi nous voulons aider à rendre cette loi efficace contre ceux qui menacent le consommateur, sans faire de tort ni au consommateur, ni à l'honnête manufacturier ou commerçant qui traite honnêtement ses clients, en qui ces derniers ont confiance. C'est pour cette raison que l'ACA croit fermement que la définition des mots et des phrases clés est de la plus haute importance. Nous avons souligné cette préoccupation dans plusieurs chapitres de notre mémoire. Nous ne voulons pas le répéter ici; nous voulons simplement appuyer sur le fait que nous serions heureux de mettre à votre disposition, si c'est nécessaire ou si vous le trouver acceptable, des avocats expérimentés qui oeuvrent dans le domaine de la publicité depuis longtemps et qui pourraient peut-être être utiles à ce moment.

Maintenant, au chapitre intitulé Définitions, nous avons tenté dans notre mémoire d'attirer votre attention sur ce problème. L'ACA voit un problème semblable dans la rédaction des articles 27 et 28 du projet de loi qui semblent assimiler des énoncés publicitaires aux garanties couvrant des biens vendus ou achetés. Plusieurs déclarations concernant les biens ou des services sont exprimées clairement comme des opinions, elles sont faites comme telles et sont reçues comme telles. L'ACA est d'accord qu'un énoncé fait dans une annonce clairement conçue pour inciter le consommateur à acheter le produit annoncé peut fort bien, par la suite, faire partie du texte de la garantie qui accompagne le produit. Mais nous suggérons que cela devrait être clairement exprimé dans la loi. Nous croyons que tel n'est pas le cas dans le moment.

La loi devrait donc définir clairement le concept de garantie.

Les articles 146, 147 et 152 du projet de loi no 7 traitent de la publicité frauduleuse. L'ACA croit que ces pratiques défendues tombent déjà sous le coup des articles de la loi fédérale anticartel qui traitent de ce genre de publicité. Nous suggérons donc que ces articles sont un duplicata d'une législation qui protège suffisamment le consommateur. Mais nous avons un autre commentaire. Les articles tels que rédigés visent tous les annonceurs. L'honnête marchand qui voudra se conformer à la loi trouvera que la publicité est extrêmement difficile, coûteuse en argent et en temps, et, au bout du compte, qu'elle dessert plus le consommateur qu'elle ne le sert. Mais, si l'idée de vouloir tromper intentionnellement était incorporée dans les articles 146 et 152, alors le marchand honnête serait aidé dans ses communications avec ses clients. Par contre, si le marchand honnête se sent contraint et limité dans la façon dont il peut communiquer avec le consommateur, c'est ce dernier qui en souffrira en fin de compte, car il sera privé de l'information dont il a besoin et qu'il devrait recevoir.

Une fois de plus, la rédaction très vague du présent article 153 défendrait, entre autres, de distribuer des échantillons au consommateur. L'échantillonnage est une technique des plus avantageuses pour le consommateur, elle porte son attention à de nouveaux produits qu'il ne connaîtrait jamais autrement. Notre mémoire suggère des changements dans la rédaction de cet article.

L'ACA croit que l'article 156 du projet de loi couvre beaucoup trop de terrain dans sa présente rédaction puisqu'il pourrait, entre autres, interdire des sondages légitimes du marché. Ces sondages sont entrepris par des maisons importantes et réputées afin de découvrir si leurs produits plaisent aux consommateurs et elles le font pour deux raisons. Premièrement, c'est pour permettre au producteur de fabriquer un produit qu'il pourra vendre avec profit et, deuxièmement, pour lui permettre de fabriquer un produit qui plaît au consommateur. Evidemment, ces deux objectifs sont identiques en pratique. L'ACA croit fermement que l'intention du projet de loi est d'empêcher les escrocs de tromper le public et de lui soutirer de l'argent sous de faux prétextes. L'ACA suggère donc que le texte de cet article devrait refléter cette intention.

L'article 158, qui traite des primes, peut, à notre avis, faire plus de tort que de bien aux consommateurs. Les petites primes, comme les serviettes dans les boîtes de savon ou les jouets dans les boîtes de céréales, accordent, en général, un véritable bénéfice au consommateur. Le manufacturier achète ces primes en grande quantité et le coût de chaque unité est très bas. C'est le consommateur qui profite de cette économie. De plus, il y a presque toujours des produits comparables ne contenant pas de prime. Le consommateur y trouve son profit de deux façons: il a la liberté de choisir entre les produits et il a la liberté de choisir un produit qui lui donne quelque chose de plus pour le prix qu'il paie.

L'interdiction générale des primes d'une valeur nominale ou l'obligation de donner au consommateur le choix entre la prime et la valeur au comptant de cette prime, ne donnerait rien au consommateur, ni le protégerait, selon nous.

L'ACA croit que les articles 161 et 162, traitant de l'annonce du crédit, pourraient aussi faire plus de tort que de bien au consommateur, si on ne les modifie pas. L'ACA n'a qu'une observation à ajouter à toutes celles que vous avez déjà reçues à ce sujet. L'accès du crédit permet à de nombreux citoyens de réaliser leur désir légitime de posséder une voiture, une maison ou un autre appareil domestique. Si le consommateur ne peut plus se renseigner sur les arrangements de crédit au moyen de la publicité, le consommateur et l'économie dans son ensemble vont en souffrir.

L'ACA est particulièrement inquiète quant aux effets possibles qu'aura l'interdiction de la publicité destinée aux enfants, telle que prévue par le projet de loi. Nous approuvons toutes mesures et toutes lois visant à contrer les abus dans la publicité, que cette publicité soit destinée aux enfants, aux adultes ou n'importe quel autre groupe de population. Nous aimerions, cependant, attirer votre attention sur quelques points en particulier. D'abord, la publicité destinée aux enfants est présentement contrôlée par cinq agences différentes. Si vous le voulez bien, je vais peut-être sauter un peu ce qu'il y a d'écrit devant vous. Je crois qu'on a déjà parlé pas mal de la publicité aux enfants ce matin. Je pense qu'on n'en tirera pas grand-chose. Je le soumets à votre attention, mais sans y aller dans tous les détails, je pense qu'on peut s'en dispenser.

Cette présentation, M. le Président, Mme le ministre, vous est faite au nom de la section québécoise de l'Association canadienne des annonceurs, dans un esprit de sincère collaboration et elle est le fruit d'une vive inquiétude. Nous représentons ici une association dont les membres contribuent de façon considérable à l'économie de cette province. Nous ne voulons pas voir cette contribution diminuer. Nous ne voulons pas voir le consommateur québécois lésé. Nous ne voulons pas voir les membres de notre association lésés non plus. Nous voulons collaborer à créer, dans la mesure du possible, une loi de la protection du consommateur qui deviendra un modèle pour le Canada et les autres pays.

Nous aimerions donc suggérer ceci: Si notre mémoire et notre présentation ont soulevé des questions sur lesquelles vous aimeriez entendre notre opinion élaborée et mûrement réfléchie, nous vous demandons de nous poser ces questions. Vous pouvez le faire maintenant si vous aimez ou par écrit dans les prochains jours. Nous serons heureux de vous fournir des réponses pondérées avec le même esprit qui nous a amenés ici aujourd'hui, un esprit de collaboration. Merci encore de l'invitation de nous présenter devant vous aujourd'hui.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je m'attarderai surtout sur les mémoires que nous avons reçus antérieurement en vous remerciant de les avoir complétés ce matin par certaines remarques. Vous aviez certaines inquiétudes quant à des définitions comme commerçant, consommateur, publicité, publicitaire, manufacturier. J'aimerais vous dire que le ministère prend en considération ces définitions, parce que déjà plusieurs organismes nous ont soumis aussi les mêmes inquiétudes. Cela rejoint les remarques que nous avons déjà entendues. Quant à l'article 24, vous suggérez que la phrase "l'usage auquel ce bien est normalement destiné" réponde à un critère objectif plutôt que subjectif", à mon avis, les tribunaux sont déjà habitués à apprécier des termes subjectifs que véhicule le Code civil. Je ne pense pas que cela devrait nous effrayer outre mesure ou effrayer les commerçants outre mesure. A l'article 31, quant à l'explication que vous demandez de l'expression "la période de validité d'une garantie... doit être fixée d'une façon précise", cela vise à éliminer les garanties du genre garantie à vie, puisqu'il est impossible de déterminer précisément la durée d'une vie.

Alors, on tente d'éliminer, par cet article, les garanties à vie.

A l'article 5, Lésions majeures, le ministère considère cette disposition nécessaire en vue de rétablir l'équilibre dans les contrats entre commerçants et consommateurs. C'est ce qui sous-tend aussi toute la loi que nous avons voulu présenter, de rétablir cet équilibre. La constatation fondamentale qui donne lieu à ces règles est que, généralement, les contrats avec les consommateurs ne sont pas négociés. Au contraire, il s'agit plutôt de contrats qui ont de nombreuses caractéristiques des contrats d'adhésion, par exemple. En d'autres mots, le rôle de consommateur se limite à accepter ou à refuser d'apposer sa signature. C'est un peu pour cela que nous avons voulu faire l'article 5.

A l'article 7, vous dites que cela va augmenter les coûts pour l'industrie sans pour autant augmenter la protection des consommateurs honnêtes. Il nous semble, en effet, que l'éthique la plus élémentaire exige que le commerçant supporte certaines conséquences de ses actes. C'est un peu l'explication que nous pouvons donner à l'article 7.

A l'article 15, la langue du contrat, par l'article 15, nous avons voulu établir une concordance avec l'article 33 de la Loi sur la langue officielle parce que cet article étant "tout contrat exigeant un écrit", les mêmes principes que perçoit l'article 33, pour les contrats d'adhésion ou les contrats où figurent des clauses types imprimées... En conséquence, à notre point de vue, je pense que la concordance nous semblait parfaite. De toute façon, nous pouvons revoir l'article 15 du projet de loi no 7 et l'article 33 de la Loi sur la langue officielle.

Si nous comprenons bien, vous désirez permettre aussi les fausses représentations, si elles ne sont pas intentionnelles, dans la publicité trompeuse. Nous y voyons un problème pratique. Peut-être que vous pourrez nous apporter des lumières ce matin. Faire la preuve d'intention en matière pénale, par exemple. Remarquez qu'il ne s'agit pas de Code criminel, mais d'infractions qui, à leur face même, sont de nature à tromper le consommateur. Pourquoi le commerçant ne s'abstiendrait-il pas de ces représentations s'il n'a pas fait les vérifications nécessaires?

Nous doutons que vous vouliez encourager, c'est évident, les responsabilités du commerçant, mais j'aimerais vous faire remarquer, d'ailleurs, que, pour l'ensemble des dispositions pénales, dans tout notre droit public, la preuve d'intention n'est jamais requise. Alors, pourquoi ce traitement privilégié pour le commerçant? Parce que vous semblez privilégier un traitement. Peut-être qu'on peut répondre immédiatement? On reviendra à d'autres articles.

M. Trudeau: Ni l'un ni l'autre ne sommes des hommes de droit. J'aimerais bien prendre vos questions en considération...

Mme Bacon: Peut-être les revoir par la suite.

M. Trudeau: ... et vous soumettre nos réponses.

Mme Bacon: D'accord.

A l'article 150, si on en vient à la présomption, il y a peut-être un malentendu dans l'interprétation de cet article ou il n'était pas suffisamment clair. Cet article accorde une présomption selon laquelle le consommateur n'aurait pas contracté si le commerçant n'avait pas usé d'une pratique interdite. Cependant, le consommateur aurait quand même le fardeau de la preuve pour établir, devant les tribunaux, que le commerçant a usé d'une pratique interdite. Ce n'est pas aussi clair que cela. Il faudra qu'il soit responsable du fardeau de la preuve, ce qui a amené le consommateur à conclure un contrat avec le commerçant. Ce n'est pas aussi facile pour le consommateur. Il faudra qu'il fasse la preuve.

A l'article 153, vous soulevez le cas des échantillons. Cela nous a déjà été soulevé. Nous allons étudier sûrement cette question. Mais il est évident que cet article s'adresse à des biens en vente et non aux échantillons.

Aux articles 154 et 155, nous avons déjà reçu des commentaires que nous avons notés, notamment en ce qui concerne les annonces de sociétés bien connues, les messages utilisés. Ce point sera étudié à nouveau par nos législateurs.

A l'article 156, j'aimerais peut-être avoir des éclaircissements sur vos objections quant à la dissimulation des motifs véritables du commerçant. Je ne sais pas si vous pouvez le faire immédiatement, ce matin, mais rien n'empêche, à notre avis, les études de marché et les sondages chez les consommateurs mis au courant. Nous ne voyons pas d'empêchement par l'article 156.

M. Lefebvre (Jacques): Voici le point de vue. Prenons le cas précis d'une brasserie qui voudrait connaître l'opinion d'un secteur de la population, soit sur une bière qui existe déjà et une nouvelle bière qu'elle voudrait lancer sur le marché. Le fait d'envoyer un enquêteur d'une société de sondage parler au consommateur ou parler au répondant, lui poser des questions sur ses bières préférées, sur ce qu'il attend d'une bière, est-ce que, dans l'esprit de la loi, c'est une communication? Parce qu'à ce moment-là, il n'est pas dans l'esprit du sondage de dire au répondant: Je viens faire une enquête sur la bière et je représente telle compagnie. Au contraire, on essaie, autant que possible, que ce soit anonyme de façon que le répondant n'influence pas son choix en disant: Ah oui! parce que c'est Labatt qui le fait, je vais dire oui ou non. Dans ce sens, la communication est au niveau des sondages, que ce soit de marché, des sondages qui touchent directement les communications commerciales ou encore des sondages sur la publicité. Est-ce que ces sondages sont compris dans l'esprit de la loi qui dit: "Entrer en communication avec un consommateur."?

Mme Bacon: Je mentionnais tout à l'heure que nous n'excluons pas les études de marché ou les sondages, mais si le consommateur est mis au courant...

M. Lefebvre: Vous voulez dire qu'à ce moment-là...

Mme Bacon: ... dans votre exemple, vous ne mettez pas le consommateur au courant entièrement dans votre communication avec lui, c'est-à-dire pourquoi vous communiquez avec lui, le motif de la communication.

M. Lefebvre: On va probablement... Mme Bacon: Vous allez prendre...

M. Lefebvre: Une société de sondage le ferait probablement à la fin du sondage en disant: Merci d'avoir collaboré, c'est un sondage qui est commandité ou organisé par telle ou telle compagnie. En fait, cela fait partie des techniques de sondage; c'est exactement comme quand on fait un sondage pour un parti politique. Le bonhomme qui fait le sondage ne se présente pas en disant:

Bonjour, je fais un sondage pour le Parti libéral ou le Parti québécois, il dit: Je fais un sondage sur une question politique.

Est-ce suffisant, dans l'esprit de la loi, de dire: Je fais un sondage pour La Presse, par exemple, ou je fais un sondage pour un journal, est-ce suffisant de communiquer les motifs véritables du pourquoi de la communication avec le consommateur?

M. Trudeau: Que ce soit fait par la suite ou à la fin de l'enquête ou...

Mme Bacon: De la communication. M. Trudeau: ... de la communication.

Mme Bacon: Si le consommateur est mis au courant du but poursuivi par la personne qui entre en communication avec lui, l'article 156 n'empêche pas ces études de marché ou ces sondages. Je pense que ça peut être ambigu comme interprétation. De toute façon, nous aîlons regarder de plus près l'interprétation qu'on peut lui donner.

M. Lefebvre: Est-ce que le but de l'article était d'éviter certaines pratiques qui ont eu lieu, qui sont bannies maintenant, justement sous le prétexte de faire des sondages et finalement, on retombait avec l'achat d'une encyclopédie ou de publication quelconque.

Mme Bacon: C'est ça. On ne donnait pas entièrement, dans la communication, les motifs poursuivis.

M. Lefebvre: D'accord, merci.

Mme Bacon: Vous affirmez que l'article 158 du projet de loi est susceptible d'augmenter le coût des biens pour le consommateur au Québec. J'aimerais avoir des explications là-dessus. Il semble qu'un marché de six millions de personnes comporte des économies d'échelle déjà suffisantes pour prévenir les augmentations de prix. Il existe, par exemple, en Scandinavie... le problème ne devrait pas exister, il y a différentes ethnies, différentes juridictions politiques et on ne semble pas se plaindre de ce problème.

M. Trudeau: II peut y avoir plusieurs explications. Je peux peut-être essayer de vous en donner une et, encore une fois, j'aimerais pouvoir avoir une réponse plus adéquate par la suite.

Une des réponses que je peux vous suggérer, c'est que si cet article était inclus, il n'est pas impossible qu'un manufacturier au niveau national qui a un pouvoir d'achat assez extraordinaire, ne pouvant pas offrir cette prime avec son produit, se retrouve dans une situation de compétition.

Je ne sais pas si vous allez être d'accord avec moi mais si on exclut ceci, ce n'est pas dit que certains genres de commerçants ne trouveront pas une autre façon de contourner la loi et c'est un peu une hantise qu'on a sur cet article.

Mme Bacon: Ce n'est pas quant au marché de $6 millions du Québec que cela peut quand même apporter certaines économies.

M. Trudeau: Oui.

Mme Bacon: Oui, M. Lefebvre.

M. Lefebvre: C'est qu'il reste quand même que, pour un manufacturier qui vend à l'échelle nationale, que ce soit du savon ou que ce soit un dentrifrice, avec les lois fédérales maintenant sur l'étiquetage bilingue et maintenant des lois provinciales sur l'étiquetage bilingue, cela fait que, maintenant, la tendance pour des économies d'échelle est que le manufacturier va vendre son savon, son produit, dans un même emballage, que ce soit à Toronto, à Frédériction ou à Vancouver. Alors, ce qui arrivera, c'est qu'éventuellement, s'il peut, avec une céréale, vendre ou offrir une prime ou quoi que soit à l'ensemble du Canada à l'exception du Québec, à ce moment-là, c'est dire que le marché du Québec devient un marché particulier où on sera obligé de faire des emballages particuliers. C'est à ce moment-là que les économies d'échelle tombent et, automatiquement, le consommateur est pris pour payer la différence.

M. Trudeau: Le coût de production peut augmenter.

M. Lefebvre: C'est cela.

Mme Bacon: A 161, je l'ai déjà dit à d'autres organismes, cet article sera étudié de nouveau: la publicité sur le crédit. Quant à l'article 162, cette disposition vise à empêcher que la publicité soit axée sur un élément alléchant de crédit, par exemple, tout en donnant, en évitant de donner les autres éléments qui n'ont peut-être pas autant d'attraits chez le consommateur. C'est cette disposition qui est contenue dans l'article 162.

Quant à la publicité destinées aux enfants, j'ai l'intention de faire comme vous, de ne pas reprendre ma position à l'occasion de l'audition d'autres mémoires. J'ai pu le faire amplement. Alors, je m'en tiens moi aussi à d'autres articles. Article 167 et article 204. Vous parlez d'autres personnes en cause dans votre mémoire. J'aimerais vous rassurer tout de suite au sujet des cameramen, des acteurs, des monteurs, des annonceurs, des développeurs de films. Ce n'est nullement notre intention de nous en prendre à ces employés. Les poursuites, par définition, se veulent exemplaires, mais ce n'est pas à ce genre d'employés que nous voulons nous en prendre.

Article 168, les permis. L'article équilibre le sens qu'on a voulu lui donner, puisque le permis du commerçant itinérant ou le permis du commerçant d'automobile usagé, ce n'est pas nécessairement un gage de compétence ou de capacité ou de solvabilité du commerçant. C'est exactement ce que nous avons voulu lui donner, exprimer comme sens, évidemment. Quant à la charge de la preuve, à l'article 203, il est évident qu'un poste

administratif confère du prestige à celui qui le détient, mais il confère aussi des responsabilités qu'on ne saurait faire dévier sur la corporation en invoquant simplement le voile corporatif.

Je ne sais pas si vous trouvez que c'est un mauvais principe, mais je pense que c'est de moins en moins original en Amérique du nord. Peut-être que vous avez d'autres commentaires à faire sur 203?

M. Trudeau: J'espère pouvoir vous les faire par la suite si vous n'en faites pas de différence.

Mme Bacon: D'accord.

M. Trudeau: Est-ce que je peux juste ajouter un commentaire sur l'article 168? Encore une fois, je pense que cela réitère peut-être ce que j'ai déjà dit dans la présentation ce matin. On s'oppose un peu au sens qu'on donne à ce moment-ci à la loi. C'est encore une fois en faisant la différence entre ce qu'on considère, nous, les annonceurs nationaux honnêtes et le petit commerçant qui vend des bebelles de toutes sortes et dont le consommateur peut être protégé par cet article. Il y a peut-être juste une question de définition.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Lafontaine.

M. Léger: M. le Président, je voudrais seulement parler sur deux ou trois articles. A l'article 158 concernant les primes. Mettons une boîte de savon ou une boîte de céréales. Pouvez-vous nous dire si dans deux boîtes différentes, l'une avec prime et l'autre sans prime, c'est la même quantité du produit?

M. Lefebvre: Au point de vue du volume?

M. Léger: Oui.

M. Lefebvre: Je ne saurais vous dire.

M. Léger: Ce n'est pas tellement grave, il y a plusieurs compagnies comme cela. Prenons le savon Tide. On vend des boîtes, supposons, à 3 livres et 3 onces avec une serviette et le même Tide avec 4 livres et 4 onces sans serviette. Le contenant de 3 livres et 3 onces est plus cher que celui de 4 livres et 4 onces. Ne pensez-vous pas qu'il y a obstacle à la liberté de choix du consommateur, parce que, même si c'est indiqué là-dessus, le consommateur a beaucoup plus l'impression qu'il a un cadeau en achetant un produit? Même si c'est indiqué, les gens ne lisent pas tout ce qui est écrit. Le fait qu'on essaie beaucoup plus de mousser la qualité du produit par une prime a pour résultat qu'on passe à côté de l'objectif réel en voulant jouer sur des attitudes ou des comportements des gens qui ont plutôt l'impression d'avoir un bénéfice quelconque. Ne pensez-vous pas que c'est cela qu'on voulait rejoindre par l'absence de prime de façon qu'on doive faire la publicité sur la qualité du produit pour que les gens disent: Je l'achète parce qu'il est le meilleur et non pas parce que j'ai une prime?

M. Trudeau: II y a un argument que je peux vous donner, car je suis au courant, et j'essaierai de vous en donner d'autres par la suite, si vous voulez. Les gens qui font de la publicité et qui sont les manufacturiers, disons dans les boîtes de savon, puisqu'on donne cet exemple, me disent que les gens vont pouvoir se procurer, par exemple, une serviette peut-être au coût de 60 cents. Si on achète cette même serviette dans n'importe quel magasin, elle va peut-être coûter — je vous donne des chiffres approximatifs — $1.20 ou $1. Il y a certainement une économie, à cause du volume d'achat de ces compagnies, sur le total de serviettes qu'elles vont acheter pour les inclure dans ces contenants.

L'argument sur lequel on se base — je ne peux vous répondre au point de vue du volume honnêtement, je vais le faire, par exemple, par la suite — c'est qu'il y a quand même une valeur supplémentaire qui est incluse dans l'empaquetage de cette boîte de savon.

M. Léger: On pourrait mettre un coupon sur la boîte pour dire: Vous pouvez avoir une serviette de 60 cents plutôt que de la payer $1.20. Mais le fait de mettre une prime pour acheter un produit, normalement, devrait montrer la faiblesse du produit, puisqu'on est obligé de mettre quelque chose de plus qu'uniquement la qualité du produit. Il y a des compagnies qui ont réalisé cela. Elles ont dit: II y a des clients qui aiment se faire berner et il y en a d'autres qui sont perspicaces. On va faire les deux. J'ai vu la même compagnie — je parle du savon Tide, entre autres — faire de la publicité sur le Tide avec une serviette; la serviette était belle, la demoiselle à la télévision montrait la belle serviette en sortant du bain. C'était pour les clients qui aimaient se faire berner, parce qu'ils ont l'impression d'avoir des cadeaux. Mais comme le fabricant savait qu'il y avait d'autres clients qui étaient beaucoup plus perspicaces, il leur disait: Achetez la boîte de savon de 4 livres et 4 onces, vous aurez plus de savon, etc. On a essayé de rejoindre les deux groupes de consommateurs. Je pense que c'est ce qui n'est pas bon, c'est qu'on ne travaille pas dans l'intention d'informer le client de la qualité d'un produit qu'on veut qu'il achète, mais on essaie de le berner parce qu'on dit: II peut facilement être berné. C'est ce que je voulais mentionner. Vous mettez comme objectif...

M. Lefebvre: J'aimerais corriger une petite chose que vous avez dite. Je pense que la loi exige que l'on indique le poids net. C'est le poids du savon qu'on indique, ce n'est pas le poids du savon avec la serviette ou l'assiette.

M. Léger: D'accord.

M. Lefebvre: Je pense qu'un manufacturier ne pourrait pas prétendre: Vous allez avoir plus de savon parce qu'il n'y aura pas de serviette. S'il y a

plus de savon dedans, c'est indiqué sur l'emballage. D'ailleurs, il y a une loi qui le précise.

M. Léger: La loi exige qu'on indique le poids du contenu, le poids du produit qu'on vend.

M. Lefebvre: C'est cela.

M. Léger: Mais les deux publicités sont faites pour rejoindre deux groupes de clients. Il y a ceux qui pensent qu'ils ont un cadeau, alors que cela n'en est pas un, puisque, pour un prix inférieur, on va avoir plus de savon sans la prime. C'est la même chose au niveau des céréales, où vous avez un poids inférieur de céréales, mais qui sont colorées, et il y a une bebelle dedans et on paie beaucoup plus cher. Vous remarquez, par exemple que la bonne vieille céréale Corn Flakes est depuis toujours meilleur marché que tous les nouveaux produits avec tous les petits gadgets, les couleurs et certaines petites choses qu'on met dedans et qui n'ont aucun rapport avec la qualité du produit, mais qui amènent les gens à l'acheter parce qu'il y a soit tel personnage dessus, comme il y avait un bout de temps, le lion ou une petite bebelle etc., ce qui fait que le client achète à cause de la prime. Ce n'est pas réellement de l'information au client au niveau de la qualité du produit.

M. Lefebvre: Pour ne pas éterniser ce débat, nous, de l'ACA, représentons un ensemble d'annonceurs qui sont également tant des compagnies de savon et de céréales que des banques, etc.

Vous aurez sûrement l'occasion d'ici quelques jours ou quelques semaines, je pense, de poser ces mêmes questions à l'Association des manufacturiers de produits d'épicerie, qui seront plus en mesure de vous donner des précisions là-dessus.

M. Léger: D'accord. Je voudrais seulement faire une remarque qui ne vous concernait pas. Vous affirmez que si les compagnies, au point de vue national, font un produit et que, si, dans une des provinces, le gouvernement a une préoccupation de passer des lois pour le bien de sa collectivité, selon sa mentalité, sa culture et sa façon de voir ainsi que sa façon de vivre, selon ce que vous venez de dire tantôt, cela voudrait dire qu'on serait obligé de payer plus cher parce que, chez nous, on a décidé de faire une loi qui d'une façon protège le consommateur, alors, que dans d'autres provinces, c'est une autre sorte de loi qu'il faut. Cela démontre le problème d'une confédération dans laquelle on doit uniformiser les produits pour le bien de la compagnie qui dit: Je vais pouvoir le vendre meilleur marché parce que je le fais d'une façon uniforme à travers tout le Canada, alors qu'une partie du pays doit légiférer selon les besoins de sa collectivité et en subir un préjudice parce qu'on ne veut pas comprendre que cette collectivité des besoins différents et doit voter des lois différentes. Alors, même si c'est un état indépendant, c'est la même chose; les produits qui viennent au Canada doivent quand même se donner un prix compétitif et un prix acceptable, même si les lois du Canada sont différentes des lois des Etats-Unis.

M. Lefebvre: M. Léger, je ne sais pas si vous l'êtes encore, mais vous étiez propriétaire d'une Citroën il y a quelques années. Vous savez très bien que les Citroëns SM ne se vendent plus maintenant aux Etats-Unis parce que les Français ont décidé qu'il n'était pas rentable pour eux, vu le volume de Citroën qu'ils vendaient aux Etats-Unis, de répondre aux normes antipollution. Ils ont donc préféré ne pas vendre de Citroën aux Etats-Unis parce qu'ils n'arrivaient pas à en assumer les frais. Je pense qu'ils vendaient 5000 autos Citroën aux Etats-Unis. Alors, c'est le même principe.

Je dis au contraire que la loi 22 sur l'étiquetage des produits et la loi fédérale ont permis que nous ayons maintenant des étiquettes bilingues partout au Canada justement parce que la loi fédérale l'exige. On est allé un peu plus loin et on applique les normes provinciales même à travers le Canada, parce que c'est plus rentable de faire une seule boîte que d'en faire une bilingue, une un peu plus bilingue et une autre un peu moins bilingue selon les provinces. Je dis donc qu'on a une loi qui a profité à l'ensemble du pays. Pourquoi en voter une autre qui risquerait peut-être, je ne dis pas que cela va arriver, à cause de normes particulières au Québec, d'enlever ces économies d'échelle?

M. Léger: Mais si une des provinces décide d'aller de l'avant, d'être progressive et d'avoir du leadership dans un domaine, elle ne devrait pas être paralysée parce que d'autres provinces ne peuvent pas le faire.

M. Lefebvre: Ah non!

M. Léger: A un moment donné, il va falloir que les autres provinces réalisent peut-être que le Québec va voter une loi qui peut être supérieure à celle qui existe ailleurs et peut-être y aura-t-il uniformité de ce côté. Mais ce n'est pas un obstacle parce que les autres ne le font pas que nous serons punis dans notre province, chez nous, parce qu'on vote des lois conformes à nos besoins.

M. Lefebvre: D'accord. Mais on peut pas toujours être les seuls à avoir le...

M. Trudeau: C'est une chose, je peux vous le certifier, je vais d'ailleurs vous donner la preuve que nous sommes très fiers de ce qui se fait au Québec, en ce qui touche aux lois en général. Nous pouvons avoir des objections sur certaines choses ou certains articles et là je vais peut-être divulguer quelque chose, j'ai l'intention dans les prochains jours d'inviter madame le ministre à Toronto au mois de novembre à un colloque qu'on a commencé l'an passé et qui réunit justement les différents ministres de la consommation des différentes provinces du Canada. Nous voulons inviter le ministre responsable à venir à Toronto à ce moment-là pour expliquer les bienfaits de cette loi.

M. Charron: Je regrette, madame le ministre ne pourra pas y aller, elle sera en campagne électorale à ce moment-là.

Mme Bacon: Ou dans l'Opposition.

M. Léger: A l'article 161-162, on disait que l'accès au crédit permet à de nombreux citoyens de réaliser leur légitime désir de posséder une voiture, une maison, etc. Je pense que le crédit existe et tout le monde le sait, mais qu'on fasse de la publicité du crédit dans le but de promouvoir l'achat d'un objet, cela n'est pas recommandé en ce sens que le produit doit être publicisé. Les gens savent qu'ils peuvent avoir du crédit, mais si on y ajoute cette publicité au crédit, à ce moment-là, cela veut dire qu'on veut inciter bien des gens qui n'en auraient pas les moyens à dire: Je vais avoir le crédit, pas de problèmes.

Déjà ils savent qu'ils ont le crédit, s'ils veulent acheter le produit, il faut nécessairement qu'on ait une préoccupation d'éduquer les gens à ne pas s'endetter inutilement. Rendre la facilité au crédit pour acheter un produit, ce n'est pas dans l'ordre des choses, puisque le produit doit être vendu, le produit doit être désiré et, par la suite, la personne décide si elle peut le payer comptant ou si elle peut l'acheter à crédit, mais non pas mettre l'accent sur le crédit qui est l'argument qui permet la facilité et non pas la responsabilité.

M. Lefebvre: Est-ce que vous touchez surtout, à ce moment, le crédit ou la publicité par cartes de crédit? Ou est-ce que vous entendez également, je ne sais pas, moi... Il y a 6000 succursales bancaires au Québec, est-ce que le fait qu'une succursale bancaire affiche dans sa vitrine que l'intérêt est à X pour cent ce mois-ci ou encore qu'il y a des prêts consentis pour l'automobile ou quoi que ce soit, cela est de la publicité également ou... On semble souvent, dans cette loi, toucher surtout la publicité à la télévision, est-ce que cela est de la publicité, par exemple? Est-ce que le fait qu'on m'envoie, avec mon état de compte à la fin du mois, un dépliant publicitaire qui dit: Vous pouvez échanger votre voiture puis vous pouvez avoir un prêt personnel à la banque ou à la caisse populaire...

M. Léger: Non, c'est beaucoup plus l'aspect de faire miroiter au client que tel produit, il peut l'avoir pour $10 par mois ou $50 par mois ou $25 par mois, dans ce style. Autrement dit, la personne se dit: Ce produit, je ne sais pas si je suis capable de l'acheter, cela coûte... mais, en somme $20, $25 par mois, cela marche, pas de problème. Dans cet esprit, pour lui, il voit la facilité, alors qu'il s'endette puis il ne s'en aperçoit pas.

M. Lefebvre: D'accord.

M. Trudeau: On s'entend assez bien sur ce qu'on dit, je pense qu'on en a parlé tout à l'heure, c'est un peu sur chacune de ces définitions qu'on veut avoir des détails, c'est sur les définitions de cette loi, ce que cela implique exactement.

M. Léger: Je vous remercie.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Sainte-Marie.

M. Malépart: Faisant suite à la publicité sur le crédit, vous mentionnez dans le texte que la publicité permet aux gens de découvrir les différents moyens de crédit. Par expérience, si je pense aux annonces qu'on voit à la télévision, pour en nommer une couple, une compagnie de crédit qui invite la population à faire son rapport d'impôt puis elle lui prête, je ne pense pas qu'elle éduque bien les gens à dire quel taux d'intérêt et de quelle façon, et tout cela. Je pense que c'est surtout un moyen de se faire une clientèle puis, après cela, lui offrir des possibilités. Vous avez aussi une autre compagnie qui fait de l'annonce, si ma mémoire est fidèle, je vais décrire un peu la publicité qui se fait. C'est son employé qui est tout heureux d'avoir aidé un client, je me demande s'il est vraiment heureux quand il sait la différence de coûts à comparer avec ceux qu'il pourrait avoir avec une banque. Je me demande si vraiment il est heureux, je me demande si on ne trompe pas un peu les gens. Je me dis: II y aurait peut-être avantage qu'il y ait une publicité, inviter les annonceurs à faire la publicité comme le député de Lafontaine le mentionnait. Si vous dites: Je veux avoir une voiture, c'est $25, $50 ou $100 par mois, mais peut-être inclure obligatoirement le coût de l'intérêt, non pas en pourcentage parce qu'il y a beaucoup de façons de présenter cela, mais en coût réel, en cents et piastres, cela ferait réfléchir davantage les gens, que ce soit une banque ou une compagnie de finance, que les deux soient soumises aux mêmes règlements.

M. Trudeau: Je crois qu'il y a une loi qui régit déjà cette chose.

M. Malépart: Pas dans la publicité. M. Trudeau: Mais dans le contrat...

M. Malépart: Mais que ce soit indiqué au point de vue de publicité jusqu'à un certain point, sans trop compliquer les choses, justement parce que vous comprenez comme moi, puisqu'on parle de la télévision, si, dans un message de 60 secondes, on passe la moitié ou 20 secondes ou 60 secondes à expliquer le montant, des fois le message sera moins fort. Mais cela peut s'inclure certainement comme exemple. Je suis quand même persuadé que vous avez assez d'experts et qu'il ne serait pas mauvais que vous pensiez que les groupes que vous représentez ont peut-être un rôle économique, parce qu'on parle souvent d'un rôle économique, mais tout le monde commence à penser qu'il a un rôle social à jouer aussi. Peut-être que, dans la proportion du message, si vous commencez à faire choisir les gens en disant tel taux, il ne serait pas mauvais, avec toute l'équipe, je pense bien, si on vous force, la nature humaine, vous allez sûrement trouver des trucs.

M. Trudeau: En tant que représentant des annonceurs, on nous suggère tellement de lois dans le moment qu'on commence à être pas mal habitué autant pour la publicité que dans d'autres domaines à faire face à beaucoup de lois.

Du côté social, vous apportez un très bon point. Je pense qu'en général je puis affirmer que les compagnies qu'on représente ici aujourd'hui ont un sens social et font normalement de la publicité honnête. On peut citer des exemples en partie. Un exemple, ce n'est pas le général qui est représenté pour notre association.

M. Malépart: Je pense, à mon avis, que pour jouer un rôle social dans la société d'aujourd'hui, il n'est pas suffisant de dire: Je suis honnête. Je pense que vous pouvez inciter vos annonceurs à jouer un rôle éducatif aussi. Cela serait peut-être un avantage. Vos annonceurs auraient peut-être une meilleure presse.

M. Trudeau: On n'a aucune objection à cela.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député d'Iberville.

M. Tremblay: Si vous voulez qu'on joue un rôle éducatif, il faudrait nous permettre de faire de la publicité auprès des enfants pour les éduquer.

M. Lefebvre: On peut commencer à éduquer les adultes, on éduquera les enfants après.

M. Tremblay: M. Trudeau, est-ce que les compagnies de bière, qui annoncent à la télévision, sont membres de l'ACA?

M. Trudeau: Oui.

M. Tremblay: Les agences d'information de publicité qui annoncent leurs produits sont-elles membres de l'ACA?

M. Trudeau: Nous, nous représentons les annonceurs, pas les agences.

M. Tremblay: Les compagnies de bière, en général, au Québec sont membres chez vous.

M. Trudeau: Oui.

M. Tremblay: Quand vous voyez des messages publicitaires des compagnies de bière, en général, surtout à la télévision, qui associent finalement la joie de vivre, le bien-être, se bien porter avec des images séductives — vous savez ce que je veux dire — ne croyez vous pas que c'est pousser un peu loin le message constamment répété qu'en buvant une telle sorte de bière, par exemple, on s'assure un espèce de bonheur quotidien qui nous rend la vie plus facile etc? On omet, naturellement, d'amener à l'attention de l'auditeur les problèmes énormes que l'alcoolisme crée chez la population, pas rien qu'au Québec, un peu partout. Ce n'est pas comme moralisateur que je vous pose cette question, mais cela me concerne assez personnellement et je trouve qu'on devrait y aller dans le sens de la publicité des bières, surtout, parce qu'on en consomme beaucoup au Québec. Je ne suis pas contre la consommation de la bière. C'est un bienfait de la nature. Il me semble que le grand bonheur de vivre ne réside pas seulement dans la consommation de la bière. La sérénité de l'esprit est quelque chose pour les gens.

M. Trudeau: Si j'ai bien compris la question, est-ce que c'est en fait le contenu des messages publicitaires...

M. Tremblay: Vous me comprenez très bien. Vous savez très bien que, lorsqu'on annonce une bière — je ne spécifierai pas de marque — on associe la consommation de la bière au bonheur, à la joie de vivre, au bienfait etc... Comme citoyen, vous-même imbu, en dehors de vos travaux de publicitaire... Il me semble que votre association pourrait suggérer aux compagnies des formules un peu plus réalistes pour annoncer leurs bières, et ne pas faire croire à nos jeunes de 18, 19 et 20 ans qu'aller à la discothèque et prendre sept ou huit bières dans une veillée, c'est cela le bonheur.

M. Trudeau: Ecoutez...

M. Tremblay: Répondez-moi.

M. Trudeau: Ce n'est pas l'intention des jeunes de là. Comme on le disait tout à l'heure, on présente l'ensemble de nos annonceurs dont les brasseurs font partie. Je puis certainement prendre en considération ce que vous dites et leur faire le message, c'est sûr.

En publicité, on prend des exemples de jeunes qui vont à la discothèque, mais on prend aussi des exemples de jeunes qui font du sport ou différentes choses. On prend des exemples heureux pour démontrer que, tout en s'amusant, on peut consommer une bière. Je ne pense pas qu'on incite les gens à une surconsommation. On leur donne un exemple d'une espèce de manière de vivre et dont cela fait partie. Dans un message de 60 secondes, on ne peut pas se permettre tellement de choses, on essaie de trouver un moment, une joie quelconque et démontrer cette chose. C'est peut-être le montant de publicité qui vous fait peut-être réfléchir dans ce sens.

Vous savez, même si on est publicitaire — on a parlé antérieurement, ce matin, du nombre de messages — même si on est dans le métier, nous aussi, des fois, cela peut nous taquiner, le nombre de messages publicitaires, autant pour la bière que pour autre chose. Justement, si on regarde un événement sportif, entre autres, que l'événement est commandité par une brasserie et qu'on voit plusieurs messages dans l'espace de deux heures, c'est sûr que cela peut nous tomber sur les nerfs.

M. Tremblay: Je vous comprends. Ce n'est pas tellement cet aspect-là. La bière, on peut l'annoncer, c'est sans doute un produit délicieux.

C'est surtout l'aspect qu'on associe la consommation de la bière à ce genre de joie de vivre, de bonheur que l'on peut... On peut l'accompagner partout. C'est une réflexion personnelle que je me fais comme membre de la commission. Je pense qu'elle sera traduite quelque part. Je suis sûr que je représente l'opinion de beaucoup de gens.

Ces annonces, on les souffre, parce que ce sont seules les compagnies qui ont a peu près les moyens de nous présenter des événements sportifs à la télévision qui coûteraient des sommes astronomiques à d'autres compagnies. Elles ont une espèce de privilège, je suppose, et elles en profitent. Je ne les blâme pas au point de vue des affaires, mais, sur le plan de la moralité, je me demande si c'est bien accueilli.

M. Lefebvre: Je pense qu'il faudrait également noter que les lois qui régissent la publicité sur les alcools et la bière sont des lois qui sont administrées par la Société des alcools au Québec ou encore par le CRTC, le Conseil de la radiotélévision du Canada. Il y a tellement de contraintes à faire un message commercial sur une bière que, finalement, à part parler du bonheur, il n'y a presque pas de choses qu'on puisse dire. On ne peut pas parler du prix, il n'y a presque rien. On ne peut pas montrer la bouteille tant de temps, on ne peut pas montrer quelqu'un qui la porte à ses lèvres; il y a un tas de restrictions qui font que, finalement... Je me demande comment les publicitaires réussissent encore à nous intéresser quelquefois dans des messages publicitaires sur la bière, parce que je vous jure que, si vous prenez le temps d'aller voir, une journée, les contraintes avec lesquelles ils sont obligés de travailler, ce n'est pas facile.

M. Tremblay: La bière que notre arrière-grand-père buvait...

M. Lefebvre: Oui.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Merci beaucoup, messieurs.

J'invite immédiatement les représentants de Sélection de Reader's Digest (Canada) Limitée.

Sélection du Reader's Digest (Canada)

M. Courtois (Bernard): M. le Président, Mme le ministre, messieurs les députés, mon nom est Bernard Courtois, je suis avocat et je représente ici Sélection du Reader's Digest. J'ai avec moi, à ma gauche, Mme Jocelyne Missinich qui est chef de la rédaction des documents publicitaires de la compagnie; M. James Mackey qui est directeur des ventes au consommateur; M. Colin Irving, également avocat, et M. Marc Simard du service de la comptabilité de la compagnie.

Me Irving et moi-même sommes les conseillers juridiques de la compagnie depuis plusieurs années et nous sommes au courant comme tels des activités de l'entreprise.

Je ne lirai pas le mémoire qui a déjà été soumis. Je vais essayer d'être le plus bref possible et de m'en tenir aux points que je veux souligner, ici, ce matin. Je voudrais noter le but de notre présence ici qui n'est pas de contester le projet de loi ou les principes qui semblent l'avoir motivé. Au contraire, Sélection, depuis plusieurs années, tente et trouve avantage à faire affaires avec le consommateur sur une base franche et honnête. Nous n'avons aucune objection à ce qu'un plus haut niveau d'éthique soit appliqué à tout le monde dans le commerce, y compris les compétiteurs de la compagnie.

Le but du mémoire et de notre intervention ici ce matin est de tenter d'obtenir certaines précisions sur certaines dispositions de la loi ou de faire des commentaires qui viseraient à rendre la loi plus vivable pour les commerçants qui cherchent à l'appliquer.

On peut expliquer brièvement que Sélection du Reader's Digest est une compagnie qui a son siège social à Montréal et qui fait affaires à travers le Canada et, dans une moindre mesure, à l'extérieur du pays. La compagnie vend — c'est bien connu — la revue Sélection du Reader's Digest, des livres condensés et divers autres produits comme livres, des disques etc.

Si je passe directement aux commentaires précis sur divers articles du projet de loi, j'ai d'abord une question de détail sur l'article 29 du projet de loi qui prévoit qu'un consommateur peut retourner un bien au commerçant même si la garantie est accordée par une autre personne comme, par exemple, le fabricant.

Nous avons soumis, dans le mémoire, quelques commentaires qui viseraient à obtenir une précision minime qui ferait que le consommateur ne s'en prévaudrait que lorsqu'il y a un avantage pour lui et non, par exemple, pour lui permettre de transmettre un bien pour service de la garantie à grande distance, alors que cela augmenterait les frais de la compagnie pour lui fournir les services. Les commentaires que nous faisons sur le prochain article, qui est le sous-paragraphe f) de l'article 152, exigeraient de faire ressortir le prix total d'un produit de façon plus avantageuse que le montant des paiements périodiques. C'est une disposition qui diffère légèrement des exigences semblables que l'on retrouve, par exemple, dans le même projet de loi au paragraphe e) de l'article 152, quant à un ensemble de biens où on n'exige pas de faire ressortir le prix global de façon plus avantageuse, mais de façon également avantageuse. Quant aux exigences que l'on retrouve également dans la législation des autres provinces sur la question du prix total par rapport aux paiements périodiques, les exigences, normalement, sont de faire ressortir le prix total de façon aussi avantageuse et non de façon plus avantageuse.

La distinction, ici, est très légère. Je ne pense pas que le consommateur y trouve quelque avantage que ce soit. Cependant, cela nécessiterait une modification coûteuse de la documentation et des autres aspects de la mise en marché d'une entreprise comme Sélection. Nous croyons que c'est là une modification qui, sans donner de bénéfice véritable au consommateur, apporte une diversité de réglementation et de législation dans les diver-

ses provinces canadiennes, diversité qui donne déjà passablement de difficultés aux entreprises qui font affaires à l'échelle nationale. Nous suggérons que la petite modification soit effectuée afin de garder l'uniformité et que l'on exige tout simplement que le prix total soit divulgué de façon au moins aussi avantageuse que les versements périodiques.

Nos commentaires suivants portent sur l'article 158, l'article sur les primes. Il en a déjà été question, ce matin. La compagnie est concernée à deux égards. D'abord, Parce que la compagnie offre elle-même souvent des primes et, de plus, parce que la compagnie annonce, dans sa revue, les produits ou portes les offres d'autres compagnies dans sa revue. Pour ce qui est des produits de la compagnie même, depuis la rédaction du mémoire que nous avons soumis, une revue a annoncé diverses primes offertes par la compagnie. Dans partiquement tous les cas, ce sont des primes accessoires de valeur assez minime comme, par exemple, de petits livrets. Ce sont des primes auxquelles la compagnie n'applique aucune valeur dans sa publicité, c'est-à-dire que la compagnie ne dit pas: Voici, vous obtenez, pour le même prix, une prime qui vaut tant, $0.29, $1 ou quoi que ce soit. La compagnie ne mentionne pas de prix ou de valeur pour les primes.

Nous voyons que l'article se restreint aux primes pour lesquelles le marchand spécifie une valeur dans sa publicité. Vu sous cet angle, nous avons deux commentaires. D'abord, il faut être franc. Cela n'affectera pas les offres faites par la compagnie, mais cela rendra à la compagnie la vie un peu plus facile dans l'appréciation des annonces qui lui sont soumises pour être publiées dans sa revue, c'est-à-dire qu'il deviendra un peu plus facile de savoir si l'annonce est conforme aux exigences de la loi ou non. Cependant, il reste un certain niveau d'ambiguïté ici et nous croyons qu'il serait utile de définir ce qu'est une prime au sens de l'article. Par exemple, pour distinguer des cas de primes ou d'offres conjointes.

Ensuite, je passe à l'article 161, qui a également été mentionné ce matin, celui qui défend de faire de la publicité sur les biens et services que les consommateurs peuvent se procurer au moyen du crédit qu'on leur offre. Nous avons pris note des commentaires de Mme le ministre et, évidemment, ce qui nous intéresse ici, c'est de pouvoir mentionner au client, lorsque nous lui offrons un produit, qu'il peut également l'acheter à crédit, c'est-à-dire de pouvoir annoncer à la fois le produit et le crédit disponible.

Nous avions également un autre commentaire qui suggérait d'appliquer à cet article la définition du mot "crédit" qu'on retrouve déjà ailleurs dans la loi au paragraphe a) de l'article 81, là encore, pour fins de clarification.

Passons ensuite aux articles 163 et 164 qui concernent la publicité destinée à des enfants de moins de treize ans. La compagnie comme telle, je crois, n'en fait pas ou à peu près pas, mais évidemment la compagnie, encore dans sa revue, véhicule des annonces pour d'autres annonceurs, d'autres marchands. L'article tel que rédigé cause certains problèmes, parce qu'il est difficile d'apprécier si oui ou non une annonce est destinée aux enfants. Je prends un exemple qui me vient à l'esprit, sans vouloir exprimer quelque jugement que ce soit sur la valeur de l'annonce; je pense, par exemple, à la compagnie A & W, qui annonce à la télévision ou, je crois aussi, dans les revues au moyen d'un ourson qui se promène pour aller acheter des hamburgers ou quoi que ce soit. Il est difficile de savoir si cette publicité est destinée à des adultes, à toute la famille ou destinée aux enfants. On pourrait prendre d'autres exemples, mais ce qui nous concerne, ce serait une précision qui ferait que l'article ne s'appliquerait qu'aux annonces ou aux parties d'annonces, c'est-à-dire qu'une partie seulement de l'annonce serait destinée aux enfants, mais que l'article précise que ce sont des annonces destinées principalement aux enfants et non des annonces qui pourraient être destinées à la fois aux enfants et au reste de la famille ou, en tout cas, qu'on apporte des précisions qui nous permettraient de pouvoir vivre et de pouvoir vraiment appliquer cet article.

Je passe maintenant aux dispositions du projet de loi qui concernent les comptes en fiducie. Il y a présentement dans les règlements en vertu de la Loi de la protection du consommateur des dispositions quant aux comptes en fiducie, on les reprend pour partie et on y ajoute quelques nouvelles dispositions. Une des nouvelles dispositions est un article d'application assez générale, l'article 176. Il exige de placer dans un compte en fiducie toute somme reçue par suite d'un contrat en vertu duquel l'obligation principale est exécutée par le commerçant plus de deux mois après la réception de l'argent et ce, jusqu'à l'exécution de l'obligation principale. Il me semble qu'on veut viser ici le genre de contrat où le client va acheter à l'avance soit des meubles ou quoi que ce soit et que cela lui est livré plus tard, et on veut s'assurer que les sommes ne sont pas dilapidées par une entreprise qui pourrait faire faillite entre-temps, etc. Cependant, tel que rédigé, l'article est d'application générale et on pourrait le considérer comme applicable au contrat sous forme d'abonnement. Dans le cas d'un abonnement, il est difficile de déterminer à quel moment l'obligation principale du commerçant est exécutée, puisque c'est exécuté successivement. De plus, les compagnies qui font affaires de cette façon, les compagnies qui vendent des revues, des périodiques ou quoi que ce soit, ont l'habitude de ne pas mettre de côté ces sommes; ce sont des sommes considérables qui servent à la marche financière de l'entreprise, et d'avoir à les mettre de côté, cela affecterait sérieusement ces entreprises et ce serait d'un impact financier très grave pour ces entreprises. Nous ne croyons pas qu'il y ait là un mal qu'il y ait lieu de corriger. Nous ne croyons pas qu'il y ait eu de grands désavantages pour les consommateurs québécois à cet égard. Nous croyons ici qu'il s'agit encore d'un article qui pourrait être précisé ou limité un peu sans nuire au bénéfice qu'il veut prodiguer aux consommateurs et pourtant en ne mettant pas ici en péril et en position compétitive très désavantageuse les

compagnies qui oeuvrent au Québec. Evidemment, il y a des gens qui vendent des revues pu des périodiques à travers le Canada, qui ne sont pas implantés au Québec et qui n'auraient pas à s'imposer de telles obligations très coûteuses. Cela ne s'applique pas seulement aux gens qui vendent des revues ou des périodiques. Je pense, par exemple, aux câblodistributeurs, qui font payer les gens un an à l'avance pour les services; je pense aux orchestres symphoniques, qui font que les gens peuvent s'abonner au début de l'année et qui y vont successivement pendant l'année, ou au théâtre ou quoi que ce soit. Or, aux entreprises de ce genre, où l'exécution du contrat est sous forme successive ou d'abonnement, il n'y a pas de justification de leur imposer ce qui serait un fardeau financier très lourd et qui, en ce moment, ne semble pas causer de tort aux consommateurs.

Nous suggérons donc ici d'exclure de l'application de l'article 176 les contrats sous forme d'abonnement ou les contrats à exécution successive. Enfin, nos derniers commentaires portaient sur l'article 208 qui permet à un publicitaire d'opposer, à une poursuite pénale intentée en vertu du livre II, le fait que l'infraction n'aurait été commise qu'en raison du fait qu'il y avait des motifs raisonnables de se fier à une information provenant du commerçant ou du manufacturier.

Cela correspond aux dispositions que l'on retrouve à la loi fédérale pour les enquêtes sur les coalitions et dans certaines autres lois provinciales en matière de pratique commerciale ou de protection du consommateur. Cependant, nous croyons ici que l'application de l'article devrait être étendue, devrait être élargie et en ce qui a trait aux poursuites pénales et en ce qui a trait aux poursuites civiles. Par exemple, nous croyons qu'il y aurait lieu d'éviter, lorsque le consommateur n'en subit aucun préjudice, de permettre au consommateur d'abuser d'une infraction technique ou d'un vice de forme minime.

Je pense à une erreur de forme accidentelle, une erreur de copiste qui serait de bonne foi, qui ne nuirait pas au consommateur et dont les divers facteurs, le fardeau de la preuve, incomberaient au commerçant ou à l'annonceur et non pas au poursuivant ou au consommateur, c'est-à-dire qu'on placerait le fardeau de la preuve à l'annonceur ou au commerçant d'établir qu'il est de bonne foi, que l'erreur est accidentelle, qu'elle est minime, que c'est un vice de forme, une erreur de copiste.

On retrouve quelque chose de semblable dans d'autres lois au Canada même. Je pense, par exemple, qu'il y a, dans la loi sur la protection des consommateurs, en Ontario, le paragraphe 4 de l'article 48, un article qui permet de mettre de côté, lorsque le marchand se relève du fardeau de la preuve, des erreurs minimes et techniques de ce genre. Je pense également à l'article 37.3, paragraphe 2, de la loi fédérale des enquêtes sur les coalitions, qui permet de corriger une erreur de la sorte en en avisant le plus tôt possible le consommateur.

Alors, ces genres de dispositions-là, nous croyons que la loi devrait les contenir. C'est bien beau de protéger le consommateur, mais, dans les faits, il est arrivé que des consommateurs prennent avantage de fautes minimes comme cela pour essayer de se soustraire à ce qui serait normalement des obligations légitimes. Alors, je termine en vous disant que, si vous avez des questions sur divers aspects du mémoire ou d'autres aspects du projet de loi, Me Irving et moi-même sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, nous avons ons bonne note de la suggestion de Me Courtois de préciser le texte de l'article 29, de façon que la garantie ne puisse être exercée que lorsqu'il n'existe pas un endroit plus facilement accessible ou porté à la connaissance du consommateur pour qu'il puisse se prévaloir de la garantie. Je tiendrais cependant à vous dire que l'article 29 tel que rédigé n'empêche pas le consommateur, qui veut se prévaloir d'une garantie non octroyée par le commerçant, de faire parvenir son bien au manufacturier qui lui a accordé la garantie.

L'article 29 ne fait que donner au consommateur la faculté de choisir la possibilité la plus avantageuse pour lui, soit retourner le bien au commerçant qui lui a vendu ce bien ou soit retourner le bien au fabricant ou au manufacturier qui lui a accordé la garantie. On n'enlève pas le choix au consommateur. A l'article 152, vous suggérez qu'on remplace le dernier membre de phrase de cet article, qui se lit comme suit je vous en fais la lecture: .. et le faire ressortir d'une façon plus avantageuse", le mot "plus" par le mot "aussi", de façon que la phrase se lise: "...et le faire ressortir de façon aussi avantageuse". De la sorte, dites-vous, notre législation sera dans le même sens que la législation d'autres provinces canadiennes.

Disons que nous sommes conscients de ce problème et nous en tiendrons compte dans la révision du projet de loi. A l'article 158, en ce qui concerne les primes, nous avons pris aussi note de votre désir de voir se préciser la définition de prime. Comme vous affirmez avoir utilisé souvent les primes, il y a quelques questions que j'aimerais poser; par exemple: Etes-vous en mesure d'affirmer que, si le consommateur n'avait pas de prime, il paierait probablement, de toute façon, le même prix pour le produit, ou est-ce qu'il paierait moins cher?

M. Courtois: Nos informations sont que la prime ne coûte rien au consommateur, c'est-à-dire que la prime est utilisée comme technique de mise en marché, comme la publicité elle-même. En utilisant la prime, on réussit à vendre un plus grand nombre de produits en dépensant moins d'argent à la promotion. Cette différence dans le coût de promotion dépasse même le coût de la prime. A ce moment-là, cela permet à la compagnie de mettre en marché de façon plus efficace et cela coûte moins cher. La prime ne coûte rien au consommateur.

D'ailleurs, je peux relever des discussions qui ont précédé tantôt. On a posé des questions pour savoir si, quand la prime est incluse, on diminue la quantité ou la qualité du produit. Je pense que c'est déjà couvert dans ce projet de loi et dans la loi fédérale actuelle. Si on le fait, on trompe le consommateur. L'annonce, la publicité est trompeuse ou fausse. Je pense que c'est une question d'application des lois existantes et non de modifications.

Les informations que nous avons sont que la prime ne coûte rien au consommateur en plus du fait, évidemment, que c'est sûr qu'elle ne coûte pas grand-chose à la compagnie puisqu'elle l'achète en très grande quantité. Mais cela n'augmente pas le prix des biens que Sélection vend au consommateur. Au contraire, c'est la raison pour laquelle c'est fait. C'est que cela coûte moins cher comme technique publicitaire que d'autres moyens qui pourraient être employés.

M. Irving (Colin K.): Je peux ajouter quelque chose, Mme le ministre, si vous le voulez bien. Nous pouvons vous envoyer sous peu des statistiques sur le sujet que vient de mentionner M. Courtois pour expliquer comment, dans une promotion, l'usage d'une prime peut, en effet, diminuer les coûts. Etes-vous intéressée?

Mme Bacon: Oui, j'aimerais bien. Quelle serait la fréquence d'utilisation des primes, par exemple, dans les produits que vous vendez? Est-ce que vous avez compilé cette fréquence?

M. Courtois: Je n'ai pas immédiatement ce renseignement. Tout ce que je pourrais faire, c'est de donner la fréquence d'utilisation ou dire dans quelle proportion on l'utilise. La compagnie en fait une assez grande utilisation.

Mme Bacon: C'est régulier.

M. Courtois: C'est régulier. Elle vend des livres avec des livrets qui portent sur le même sujet, qui sont accesssoires aux divers produits. C'est souvent cela qui est utilisé. Parfois, on utilise des gravures, des choses comme cela, mais l'utilisation en est assez fréquente.

Mme Bacon: Quel est le genre de primes que vous offrez? Est-ce que c'est toujours la même chose ou si cela varie?

M. Courtois: Par exemple, dans la publicité pour vendre la revue, à l'époque de Noël, on inclut un agenda, un petit livret qui est un agenda. Dans un livre sur des questions médicales, on va inclure un petit livret décrivant le fonctionnement du corps humain ou des choses comme cela. Dans un livre sur le bricolage, on va inclure un livret disant quoi faire dans le cas de diverses urgences. C'est le genre de primes que l'on utilise généralement. Il y a déjà eu, je pense, pour un livre sur des artistes ou pour un livre sur les animaux des gravures d'artistes ou des gravures d'animaux, des choses comme cela. Généralement, c'est un accessoire.

M. Irving: Un de nos problèmes, c'est de savoir si un livret relié au produit, comme; par exemple, le livret sur le corps humain, constitue une prime ou non ou si "prime ' veut dire des choses comme des serviettes dans des boîtes de savon, ce dont on a parlé beaucoup ce matin. C'est pour cela qu'on suggère une définition plus efficace.

Mme Bacon: D'accord.

M. Courtois: On peut peut-être en profiter pour souligner également que la compagnie met un grand soin à faire la description de ses primes, c'est-à-dire que lorsque la prime est liée à l'achat d'un produit, on ne dit jamais que la prime est gratuite. La compagnie va mentionner à l'occasion que la prime est gratuite; c'est quand il n'y a aucune obligation d'acheter le produit. Il arrive des cas où un produit est offert à l'essai, pour une période de dix jours, deux semaines ou une semaine et où on inclut une prime. La prime peut être gardée même si le produit ne l'est pas. Dans ces cas, on permet l'utilisation du mot "gratuit". C'est le seul cas.

Mme Bacon: Est-ce que vous connaissez la valeur annuelle totale des primes que vous offrez? Est-ce qu'il y a une valeur annuelle qui est chiffrée?

M. Courtois: Je n'ai pas ce renseignement ici. Je ne pense pas qu'il soit prêt immédiatement. Mais nous pourrions vous faire parvenir...

Mme Bacon: D'accord.

M. Courtois: ... la statistique qui indiquerait, par rapport au chiffre d'affaires des ventes de la compagnie, ce qui la mettrait même en perspective, la proportion...

Mme Bacon: Le montant.

M. Courtois: ... qui correspond au coût des primes.

Mme Bacon: D'accord.

Sur l'article 161, on a assez discuté ce matin là-dessus.

Notre objectif, en inscrivant cet article dans la loi, c'est évidemment d'empêcher d'annoncer le crédit et en proposant des biens achetés accessoirement à l'offre de crédit; c'est l'objectif poursuivi par le législateur. Quant aux articles 163 et 164, vous me permettrez de ne pas préciser non plus, puisque nous l'avons suffisamment fait ce matin. Je m'arrêterai particulièrement quant à la publicité s'adressant et aux enfants et aux adultes que vous avez mentionnée dans votre mémoire. Nous allons peut-être regarder de plus près ce genre de publicité.

L'article 176. Relativement aux contrats en fi-déicommis, nous allons prendre bonne note de votre demande d'exclusion à des contrats sous forme d'abonnement ou à exécution successive

quant à l'application de cet article. Nous allons étudier davantage cette question.

M. Courtois: On peut interjeter ici peut-être que c'est quelque chose qui affecterait sérieusement la compagnie.

Mme Bacon: D'accord.

M. Irving: Dans le cas de Sélection, Mme le ministre, il s'agit d'un montant entre $5 millions et $7 millions et cet argent sert à financer les activités de la compagnie. Elle serait dans une très mauvaise position vis-à-vis de la concurrence de Toronto où d'autres livres sont publiés.

Mme Bacon: D'accord. Nous prenons aussi note de la suggestion, à l'article 208, d'étendre la portée de l'article de même que celle de prévoir, à la Loi de la protection du consommateur, un correctif semblable à celui de l'article 37,3 de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions qui permet, lorsqu'une infraction résulte d'une erreur, malgré les précautions raisonnables, de porter l'erreur à l'attention des personnes qui sont affectées. Alors, nous allons aussi nous arrêter à cet article 208.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais d'abord, avant de prendre les points précis du mémoire — d'ailleurs plusieurs des questions viennent d'être posées par le ministre — demander aux représentants de Sélection du Reader's Digest de nous expliquer brièvement — je pense que c'est dans l'intérêt de toute la commission — le fonctionnement d'un type de marché que Reader's Digest n'est pas le seul à avoir et qui est, en tout cas, largement répandu au point d'en devenir le modèle.

Je veux parler de ces ventes à consentement étendu, je dirais, sur le temps qui existaient, je me souviens, il y a déjà une dizaine d'années, où avec l'achat d'un disque, par exemple, à prix réduit, sur un éventail annoncé, on avait ce disque à prix réduit si en même temps on s'engageait — si ma mémoire est fidèle — à prendre tous les deux mois un autre disque dans la sélection qui était offerte...

Vous me faites signe que non, je vais immédiatement vous donner l'occasion d'expliquer le fonctionnement de ce marché.

M. Courtois: La compagnie ne procède pas de cette façon. Je peux vous expliquer le domaine dans lequel la compagnie vend d'une façon qui ressemble à cela, c'est pour ses livres condensés. Nous procédons de la façon suivante: L'annonce explique, souvent offre un livre gratuit ou un livre à prix minime, un livre étant identique aux autres ou en format plus réduit, au moment où c'est mentionné.

La publicité mentionne qu'en acceptant le premier livre ou le livre gratuit, selon le cas, le consommateur consent à recevoir les autres; on mentionne le prix, on mentionne la fréquence des autres livres. On mentionne également que le consommateur n'est obligé d'en accepter aucun; il peut prendre le livre gratuit et s'en tenir là. D'ailleurs, il y a une assez large proportion de gens qui le font; environ 25% des gens qui prennent le premier livre ne continuent jamais jusqu'au deuxième. Je pense que la proportion même dépasse de beaucoup ce pourcentage. Cela va varier selon le succès du format publicitaire.

Alors, le client — cela lui est dit ouvertement — peut se retirer en tout temps et ne contracte aucune obligation; la seule obligation qu'il contracte, c'est que la compagnie peut lui envoyer des livres qui demeurent, en fait, à l'essai. De plus, on peut préciser qu'il n'y a pas de système de coût-prêt qui fonctionne, il n'y a pas de date. On ne dit pas au consommateur: Vous devez nous répondre dans tel délai, à défaut de quoi vous devez garder le livre. Il peut le retourner en tout temps et il peut demander de cesser en tout temps.

M. Charron: Qu'est-ce qui vous indique par après qu'un consommateur a accepté votre livre, gratuitement ou à prix réduit? Est-ce que tout le monde reçoit systématiquement un second livre, cette fois, à des termes différents du premier? Est-il libre de le garder ou de le renvoyer, etc? Ou doit-il vous signaler son consentement à recevoir les autres par la suite?

M. Courtois: Le terme est identique partout. Cela fonctionne comme suit, comme je l'ai mentionné. La publicité originale le dit. D'ailleurs, chaque fois que l'on se réfère à la publicité, au produit qui est reçu gratuitement, on suit immédiatement avec la mention du fait que d'autres livres vont suivre à moins qu'on ne reçoive un avis contraire du consommateur. C'est mentionné nettement.

M. Charron: II doit fournir un avis contraire.

M. Courtois: II doit fournir un avis contraire. Dans tous les cas, à moins que le client ne nous ait exprimé le désir de cesser les envois, il va recevoir un deuxième livre, qu'il peut toujours retourner d'ailleurs; le troisième également, il pourra le retourner. De cette façon, le profil du nombre de gens qui reçoivent ces envois diminue énormément.

M. Charron: M. Courtois, cela me conduit à la question que je voulais vous poser.

M. Courtois: D'abord...

M. Charron: Un autre renseignement, est-ce que la compagnie fournit elle-même une enveloppe de retour affranchie à l'intérieur de laquelle, en faisant une coche, le consommateur qui reçoit le tout premier volume indique s'il est intéressé à en recevoir de nouveau ou pas, ou si c'est de lui-même qu'il doit rédiger une lettre, l'envoyer à la

compagnie, disant: J'ai bien reçu votre premier livre, mais ne m'en envoyez plus d'autres?

M. Courtois: Oui, normalement. Il est arrivé à l'occasion que l'on paie les frais de retour, mais, la plupart du temps, ce n'est pas le cas. C'est le consommateur qui aura à payer le renvoi du livre. Il ne faut pas oublier que, déjà, dans la publicité originale qu'il a reçue, on lui mentionne qu'il en reçoit d'autres. Il a consenti. D'habitude, s'il ne veut pas continuer, dès le second livre, la décision n'est pas très loin à son esprit et suit immédiatement. Il a consenti à en recevoir un gratuitement et un autre pour lequel il n'aura qu'à payer les frais de poste, s'il n'a pas décidé d'annuler l'envoi avant même de le recevoir, parce qu'il le peut, et comme je vous dis, il y a une grande proportion des gens qui annulent immédiatement après avoir reçu le livre gratuit.

M. Charron: Ce que je veux savoir maintenant, c'est s'ils annulent immédiatement après la réception du livre gratuit? Est-ce qu'ils le font à partir d'une formule déjà fournie par la société que vous représentez? C'est-à-dire que, lorsque je reçois le livre en question, le tout premier, il y a, incluse dans le livre, une formule avec retour affranchi, comme on en retrouve souvent où, à l'intérieur, c'est écrit: J'ai bien reçu votre livre, mais je ne veux plus recevoir d'autres livres. Si c'est ma position, je fais une croix. Ou, si c'est: J'ai bien reçu votre livre et j'attends impatiemment les autres qui doivent suivre, est-ce que la compagnie fournit le formulaire ou si le client doit prendre son papier, ses enveloppes, ses timbres et sa formule pour vous signaler dans sa langue qu'il n'a pas l'intention de recevoir d'autres livres?

M. Irving: La réponse à votre question est là. Dans l'envoi original, on a presque toujours deux enveloppes à retourner, marquée oui ou non. On explique l'offre et on explique que, si on accepte l'offre, on va envoyer d'autres livres. On n'envoie pas avec le premier livre une autre enveloppe, comme vous venez de le mentionner. C'est au consommateur d'envoyer tout simplement une carte postale ou quelque chose d'autre, à n'importe quel moment.

M. Charron: Bon! Je posais cette question pour que la commission transpose facilement. On n'a pas besoin de bien des exemples. Je peux être un consommateur négligent à l'occasion. Je peux ne plus être effectivement intéressé par une offre que vous nous faites, mais je néglige de vous signaler, pour une raison ou pour une autre, à la suite de la réception du livre, que je ne suis pas intéressé à en recevoir d'autres. C'était celui-là que je voulais avoir. Vous m'en envoyez un autre. Je néglige à nouveau de vous le payer. Lorsqu'il y a des comptes en souffrance sur le deuxième livre, est-ce que vous en envoyez un troisième?

M. Courtois: Si, sur le premier livre que le consommateur doit payer, la facture n'est pas alors payée, les autres ne suivent pas.

M. Charron: Les autres ne suivent pas. Le livre dont vous parlez, il est de quel montant habituellement dans les...

M. Courtois: Je crois que c'est $5.29 à peu près. Ce sont des livres qui comprennent la condensation de quatre ou cinq ouvrages.

M. Charron: Est-ce que je peux vous demander si la compagnie a beaucoup de comptes en souffrance de $5.29 avec plusieurs clients?

M. Courtois: Je crois que le montant, le pourcentage de perception des comptes est d'environ 85% à 90%. Il peut y avoir de 10% à 15% de comptes en souffrance à divers moments. Comme vous pouvez le concevoir, à un moment donné, cela devient plus économique de...

M. Charron: De les abandonner. Il y a un taux d'intérêt, évidemment, qui se porte sur les $5.29 ou si, même un an plus tard, c'est toujours la somme de $5.29 que vous réclamez?

M. Courtois: En ce moment, la compagnie ne facture pas d'intérêt sur ces comptes, à quelque moment que ce soit.

M. Charron: Bien. Maintenant, me reportant au mémoire directement, sur votre remarque sur l'article 29, qu'a reprise le ministre également tout à l'heure, je voudrais vous poser une question pour bien comprendre le sens de votre intervention là-dessus. Est-ce que vous croyez que la garantie devrait prévoir que le consommateur puisse se prévaloir de cette garantie chez un autre dépositaire ou un autre détaillant que celui chez lequel il s'est procuré le produit ou le fabricant lui-même?

M. Courtois: C'est peut-être difficile au point de vue d'un autre dépositaire, à moins que ce soit... Cela va dépendre des arrangements avec le manufacturier. Que le consommateur puisse s'en prévaloir chez le commerçant chez qui il a acheté ou chez le manufacturier, nous sommes d'accord. Si le commerçant a d'autres magasins, je ne sais pas; en tout cas, Sélection n'exploite pas de magasin ou quoi que ce soit. Le problème que nous voyons se soulever, c'est une question de détail finalement. Si un client est fâché ou quoi que ce soit, s'il est dans un coin reculé et, au lieu d'aller porter le produit au bureau de la compagnie locale, il décide de l'envoyer à l'autre bout du pays, simplement pour que cela coûte plus cher. C'est justement de limiter l'application de l'article au cas où le consommateur y trouve un avantage.

M. Charron: II y a l'article 158 maintenant. Dans l'explication que vous avez fournie aux réponses de Mme le ministre tout à l'heure, vous avez soutenu que l'inclusion de primes lors d'un achat équivaut, à toutes fins pratiques, à une technique de marketing. Il est évalué et calculé que cette technique publicitaire par la prime permet souvent à des entreprises de faire des écono-

mies sur un budget de promotion du produit qui aurait été, à l'occasion, souvent plus coûteux que l'inclusion d'une prime. Donc, le marchand y gagne à l'inclusion d'une prime, etc. J'aimerais vous poser la question suivante: Est-ce que vous ne devez pas faire de la publicité sur la prime également, c'est-à-dire faire connaître que le consommateur a droit à une prime en s'adjoignant... Il vous faut faire une campagne de publicité de la prime elle-même accompagnant le produit si vous voulez que la prime soit connue. Vous avez, à un certain moment, le choix entre l'inclusion d'une prime à un achat ou payer pour annoncer votre produit tout court tel qu'il est. Un marchand peut estimer que la prime va lui faire vendre plus de . produits qu'une simple campagne publicitaire autour du produit. C'est là qu'il fait son choix économique. J'en conviens.

Il y a aussi les dépenses à encourir pour faire connaître le fait qu'il a décidé d'inclure une prime à son produit. Est-ce que cette promotion de la prime n'équivaut pas, en dépenses, à la promotion du produit tout court, s'il n'y avait pas la prime incluse?

M. Courtois: La promotion de la prime va se faire dans une annonce publiée dans la revue ou dans un dépliant envoyé par le courrier au consommateur en ajoutant quelques lignes mentionnant qu'il y a une prime. Ces coûts sont compris dans les coûts considérés pour savoir si cela coûte moins cher de mettre en marché avec une prime comme sans prime, c'est-à-dire que les comparaisons sont faites sur les deux bases, les cas où on n'a pas de prime, donc on n'en annonce pas, et les cas où on a des primes, donc on les mentionne. Dans les deux cas, il va nous arriver, c'est pour cela que la compagnie choisit d'offir des primes, qu'effectivement cela lui coûte moins cher, tout compris.

M. Charron: Les articles 163 et 164, je pense que je n'ai pas à revenir là-dessus. Quant à votre remarque sur l'article 176, les ventes par abonnement, elle est tout à fait pertinente, je pense bien.

J'ai été heureux de voir que Mme le ministre disait la retenir. De toute façon, nous la retenons également, si jamais la mémoire de Mme le ministre connaît des défaillances. Pour le reste, je crois que votre mémoire nous a rapporté une participation intéressante et nous en tiendrons compte dans l'étude article par article du projet de loi. Je vous en remercie.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député d'Iberville.

M. Tremblay: M. le Président, M. Courtois, à l'occasion de vos campagnes publicitaires sur les abonnements — naturellement, je suis abonné au Reader's Digest depuis nombre d'années et j'en suis très heuresux — on reçoit souvent de la correspondance et, bien sûr, c'est un commerce, il faut respecter tout cela. Les tirages de gros lot qu'on nous annonce une couple de fois par année, c'est très alléchant, on peut répondre non par exemple à l'offre d'abonnement d'un livre ou d'un article et on nous dit que nous participons quand même au tirage, sauf que, si on répond oui, il y a quelque chose d'additionnel au tirage, qui s'y ajoute. D'accord. Quelle est la proportion des gagnants de ces tirages qui, en l'occurence, ont répondu non, par exemple, et qui ont quand même été chanceux?

M. Irving: Je peux répondre à la question. Nous avons fait des recherches très récemment pour le gouvernement d'Ontario sur cette question. Le pourcentage des gagnants qui ont répondu non est exactement le même que le pourcentage en total; le fait que 60% des gens disaient non dans un concours, c'était aussi 60% des gagnants qui disaient non, c'est le même nombre parfaitement.

M. Tremblay: Et même le gros lot?

M. Irving: Oui, oui, si je ne me trompe, dans les dernières années, c'est presque toujours quelqu'un qui disait non qui a gagné le gros lot.

M. Tremblay: Mais la loi de la moyenne travaille quand même en votre faveur.

M. Courtois: II faut souligner que, dans la proportion des gens qui répondent non, donc la proportion des inscriptions au tirage, si on essaie de trouver des chiffres représentatifs, il y aura trois non pour un oui. Ce que Me Irving vous dit, c'est que le nombre de gagnants correspond à cela également. On pourrait souligner que la compagnie aimerait bien que le public ait confiance également et sache que les inscriptions "non" sont inscrites tout autant que les inscriptions "oui". De toute façon, le tirage est vraiment fait dans la légalité.

M. Tremblay: Quand vous nous envoyez le résultat des tirages et que cela paraît sur les journaux que telle personne a gagné, je ne le sais pas, peut-être que vous pourriez mentionner que c'est une personne qui a répondu non? Cela donnerait confiance aux autres de peut-être répondre oui ou de continuer à rester abonnés de toute façon.

M. Courtois: Peut-être.

M. Tremblay: Deuxième question, c'est anodin, si vous voulez, je m'attendais à voir arriver Jacqueline Lavoie, j'ai toujours espérance de la voir un jour. Je pensais que c'était madame; est-ce un nom fictif ou si réellement cette personne vit?

M. Courtois: Je crois que, dans un passé lointain, il y a déjà eu une véritable Jacqueline Lavoie. Il faut concevoir que cette compagnie envoie un très grand volume de documents publicitaires qui doivent être signés; si on doit prendre le nom d'une employée présentement au service de la compagnie, qui pourrait changer de poste ou quit-

ter la compagnie, à un moment donné, cela pourrait coûter très cher d'avoir à rééditer des textes ou à les republier. C'est donc une personne qui, pour le moment, est fictive.

M. Tremblay: Alors; la belle Jacqueline est un mythe. Très bien.

M. Courtois: Oui.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Merci bien. La commission ajourne ses travaux à mardi matin, dix heures et trente.

(Fin de la séance à 13 h 19)

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