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Commission permanente des
consommateurs, coopératives et
institutions financières
Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection du
consommateur
Séance du mercredi 1er septembre 1976
(Dix heures dix-sept minutes)
M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des
consommateurs coopératives et institutions financières): A
l'ordre, messieurs!
Nous reprenons les auditions concernant le projet de loi no 7, à
la commission élue permanente des consommateurs, coopératives et
institutions financières. Avant de débuter, je voudrais faire
mention de deux changements à la commission. M. Charron (Saint-Jacques)
remplace M. Burns (Maisonneuve) et M. Cornellier (Saint-Hyacinthe) remplace
M.Tremblay (Iberville).
Aujourd'hui, nous entendrons l'Association pétrolière du
Québec, la Fédération de Québec des caisses
populaires Desjardins, Mattel Canada, Parker Brothers et l'Association des
marchands d'automobiles de Québec Inc.
Cinq organismes sont représentés. Pour revenir aux membres
de la commission, M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Marchand
(Laurier).
L'Association pétrolière du Québec,
représentée par M. Roger Hamel et Me Henri Lanctot. A vous la
parole.
Association pétrolière du
Québec
M. Hamel (Roger): Bonjour, j'aimerais d'abord me
présenter. Je suis Roger Hamel, président de l'Association
pétrolière du Québec et directeur au Québec pour la
Compagnie pétrolière impériale Limitée. A ma
droite, Me Henri Lanctot, qui est conseiller juridique de l'association et qui
occupe le même poste chez Texaco Canada Ltée; à ma gauche,
M. Roger Taschereau, qui est secrétaire-trésorier de l'APQ et qui
est directeur de la division du Québec pour la compagnie Texaco Canada
Ltée.
L'Association pétrolière du Québec est une
association à but non lucratif qui regroupe quatorze entreprises
pétrolières oeuvrant au Québec dans les domaines du
raffinage, du transport et de la commercialisation des produits
pétroliers. Vous trouverez la liste de nos membres au début de
notre mémoire.
J'en profite pour remercier tout de suite, au nom de l'association que
je préside, la commission parlementaire pour l'occasion qu'elle nous
donne aujourd'hui de faire entendre notre point de vue sur les questions
relatives à la protection du consommateur.
Comme nous avons déjà déposé notre
mémoire, je me bornerai à vous faire part de l'esprit avec lequel
nous abordons ces questions en plus de relever certains points dans le projet
de loi qui nous préoccupent plus particulièrement aussi bien dans
notre intérêt de commerçants que dans celui des
consommateurs.
En ce qui concerne notre attitude face aux problèmes que
rencontrent les consommateurs, nous souscrivons aux objectifs que proposent la
loi et le législateur. Nous sommes convaincus qu'il y a moyen de
concilier les intérêts de nos membres avec ceux des consommateurs.
D'ailleurs, notre existence ne repose-t-elle pas justement sur le maintien de
bonnes relations avec nos clientèles?
Il y a cependant, selon nous, un écueil à éviter.
Il n'existe pas de solutions abstraites à des problèmes concrets.
Nous favorisons donc une approche pragmatique aux problèmes que peuvent
poser nos rapports commerciaux avec les consommateurs.
Nous reconnaissons et acceptons que la société
évolue et nous appliquons, parfois depuis longtemps, certaines des
mesures préconisées dans le projet de loi.
Pour sa part, la société doit reconnaître et
accepter que les entreprises subissent certaines contraintes inhérentes
à notre système économique. Aussi il nous apparaît
normal de retrouver dans une loi sur la protection du consommateur un juste
équilibre entre ces deux réalités.
Avec votre permission, je commencerai par relever un certain nombre de
points qui sont plus particulièrement susceptibles d'affecter nos
opérations. Quant à Me Lanctot, il examinera plus en
détail les mécanismes juridiques en cause et suggérera
certaines corrections ou modifications dans le seul but de favoriser une
meilleure compréhension et une application plus souple et nuancée
des nouvelles règles.
La définition du consommateur telle qu'énoncée dans
le projet est particulièrement large et imprécise. S'il est
souhaitable de protéger le consommateur inexpérimenté, on
peut cependant s'interroger sur l'opportunité d'étendre la
même protection à des personnes qui, compte tenu de leurs
connaissances et de leur appartenance au monde des affaires, sont en mesure de
se former un jugement beaucoup mieux éclairé. C'est
évidemment la situation du commerçant qui achète des biens
pour l'exercice de son commerce. En général, il entretient avec
ses fournisseurs des relations qui se caractérisent surtout par leur
absence de formalisme et par la grande rapidité avec laquelle
interviennent les transactions.
Exiger dans ces cas un cadre formel plus rigide n'aura certainement pas
pour objet d'améliorer la situation, surtout si l'on considère
que d'autres lois lui accordent déjà toute la protection dont il
peut avoir besoin.
Vous trouverez dans notre mémoire une suggestion pour la
définition du consommateur qui, selon nous, dissipe l'équivoque
possible avec le texte du projet tel qu'il se présente maintenant.
Dans un autre domaine, nous sommes particulièrement heureux de
voir que le projet à l'étude contient une section sur les
réparations d'automobiles. Il nous apparaissait, en effet,
impérieux de mettre un peu d'ordre dans les relations entre garagistes
et consommateurs.
Nous nous demandons toutefois si ces derniers seront les principaux
bénéficiaires de toutes les mesures envisagées. A cet
égard, nous savons qu'un certain nombre d'organismes impliqués
plus directement que nous le sommes dans ces questions ont soumis ou
soumettront des mémoires qui contiendront certainement quelques
suggestions pertinentes. En matière de crédit, nous constatons
que la plupart des dispositions du projet ne nous posent pas de
problèmes véritables quant à leur application. Ces
questions nous sont en général familières et nous suivons
parfois depuis longtemps certaines des pratiques suggérées. Notre
mémoire contient quelques remarques sur des questions spécifiques
qui soulèvent pour nous des difficultés sans pour autant offrir
des avantages particuliers aux consommateurs.
C'est le cas, entre autres, de certaines transactions que nous
considérons "au comptant" mais où le consommateur a la
faculté de payer dans un certain délai, sans frais. Ces ventes
sont toutefois assorties d'une pénalité qui a pour but d'inciter
le consommateur à effectuer sa remise dans le délai imparti. Nos
membres n'ont jamais conçu cette modalité comme une façon
de financer l'obligation du consommateur. Or le projet à l'étude
transforme ces transactions au comptant en transactions assorties d'un
crédit variable et les assujettit aux formalités applicables dans
tels cas. Ces formalités sont pour nous administrativement lourdes et,
pour les éviter, nous devrons exiger du consommateur qu'il paye sur
livraison. Vous imaginez sans peine les incovénients qui pourraient
résulter lors d'une livraison d'huile à chauffage, par
exemple.
Nous sommes aussi préoccupés par l'impossiblité
pour le commerçant d'exiger des frais de crédit sur le solde
impayé tant que le consommateur n'a pas reçu à son adresse
l'état de compte. A-t-on pensé au problème que cela pose
à l'expéditeur de prouver que le consommateur a bien reçu
sont état de compte à son adresse? Réalise-t-on que de
nombreux consommateurs négligent d'informer leurs créanciers d'un
changement d'adresse? A-t-on un seul instant envisagé la
difficulté de calculer sur une base individuelle les frais de
crédit applicables? Même l'ordinateur le plus perfectionné
y perdrait son latin.
Cela nous mène à aborder la question de l'avis de six mois
que nous devons donner au consommateur lors d'une modification des conditions
du contrat de crédit variable.
Cette obligation pose surtout des problèmes lors d'un changement
du taux de crédit et nous considérons que la disposition actuelle
est passablement irréaliste dans le contexte inflationnaire que nous
connaissons.
Il faut tout de même se rendre compte que le commerçant,
tout autant que le consommateur, d'ailleurs, subit la fluctuation des taux
d'intérêt sur les emprunts qu'il contracte auprès d'une
banque ou autre institution de crédit. Pourquoi le consommateur
serait-il à l'abri de ces fluctuations lorsqu'il fait des achats en se
servant d'une carte de crédit?
En outre, à supposer que l'inflation se résorbe un peu et
qu'il devienne possible d'offrir un crédit à meilleur
marché, la règle envisagée empêcherait le
consommateur d'en bénéficier avant six mois.
Certains membres de cette commission, lors de séances
antérieures, se sont émus à juste titre du rôle de
la publicité en matière de crédit. Il est vrai que les
mécanismes de publicité et de marketing peuvent susciter chez
certaines personnes des besoins artificiels. Il n'en reste pas moins que le
crédit est un avantage qu'offre notre système économique.
Le tout est de savoir bien l'utiliser. La publicité offre à cet
égard l'avantage d'informer le consommateur de l'usage qu'il peut faire
de son crédit. Que peut-il acheter? Où peut-il le faire et
à quelles conditions? C'est pourquoi nous croyons qu'il faut maintenir
une publicité honnête et informative par opposition à une
publicité de type propagande et incitative. La législation
devrait donc, selon nous, s'orienter vers une réglementation pour
éliminer les abus plutôt que vers une suppression pure et simple
de la publicité.
Enfin, en notre qualité de dirigeants d'entreprises, nous nous
inquiétons de la présomption de culpabilité à notre
égard qu'introduit le projet de loi. Cette disposition est tout à
fait contraire au principe fondamental que pose la présomption
d'innocence en droit pénal. Pourquoi serions-nous
considérés coupables avant même d'avoir été
jugés?
Pour conclure, nous aimerions dire à cette commission que nous
sommes d'accord pour chercher à rendre notre système
économique plus humain. Cet effort passe par la valorisation du
consommateur, nous en convenons, mais elle doit aussi s'assortir d'un respect
des objectifs et de la contribution des commerçants dans notre
société. De plus, nous espérons qu'au-delà des
moyens législatifs les autorités responsables continueront
à privilégier l'information et l'éducation qui offrent,
selon nous, les meilleures perspectives de protection pour les
consommateurs.
Maintenant, je demanderais à Me Lanctot de présenter ses
commentaires.
M. Lanctot (Henri): Messieurs, dans son exposé, M. Roger
Hamel indique l'aspect large et imprécis de la définition de
consommateur. Nous comprenons aussi que plusieurs groupes ou associations qui
sont venus devant vous ont fait remarquer que la définition de
consommateur laissait à désirer. Pour nous, consommateur signifie
que toute personne physique qui n'agit pas en qualité de
commerçant est nécessairement un consommateur. Or, le projet de
loi ne contient aucune définition de commerçant. Aussi nous avons
cru opportun de suggérer dans notre mémoire une autre
définition de consommateur, et je me permets de vous la lire au complet:
"Une personne physique agissant pour des fins autres que commerciales ou autres
que l'utilisation de biens ou de services dans ses affaires, sa profession ou
son métier". L'avantage que comporte cette définition est qu'elle
identifie le consommateur en fonction de la nature de la transaction et non
pas
en fonction du statut ou de l'état d'une personne.
J'aimerais ici aborder l'élargissement de la lésion entre
majeurs que prévoient les articles 5 et 6 du projet de loi. Bien que les
membres de notre association ne prévoient pas subir des problèmes
particuliers par l'application de ces articles, il n'en demeure pas moins que
comme commerçants ils s'inquiètent de la répercussion de
ces dispositions sur le commerce généralement.
L'absence d'une véritable définition de contrat, dans le
cadre du projet de loi, nous fait croire que ces dispositions s'appliquent
à toute transaction, si minime soit-elle. En outre, les articles 5 et 6,
en facilitant encore plus l'annulation de toute transaction, créent une
incertitude chez le commerçant. Nous nous demandons dans une certaine
mesure si le projet de loi, par ses dispositions, ne favorise pas ainsi la
vente à l'essai.
En raison du champ d'application très vaste du projet de loi,
nous nous interrogeons sur l'opportunité d'élargir encore plus en
faveur du consommateur le droit d'annulation de toute transaction intervenue
entre un commerçant et un consommateur. Il ne faut pas croire que notre
association s'oppose à l'annulation des transactions lorsque les
circonstances révèlent des méthodes frauduleuses pour
l'obtention du consentement du consommateur. Aussi, nous suggérons que
l'article 118 de la loi actuelle soit maintenu et que le cadre de l'exercice de
ce droit d'annulation soit précisé par une meilleure
définition de consommateur et de celle de contrat.
En matière de crédit, nous indiquons que l'article 96 peut
être une source de confusion.
De plus, selon notre interprétation, cet article va contre la
pratique commerciale actuellement suivie et reconnue qui veut que toute somme
capitale avancée porte intérêt à compter du premier
jour de sa remise. Au point de vue pratique, il est à prévoir
qu'il deviendra alors impossible pour le consommateur de commencer ses
remboursements à plus de 45 jours de la date de la remise de la somme
capitale. Nous suggérons que cet article 96 soit
révisé.
Dans le cadre de la politique d'information au consommateur, il serait
peut-être indiqué qu'il soit maintenant obligatoire de
révéler au consommateur explicitement la date où les
intérêts commencent à courir au lieu de prévoir
qu'aucun intérêt ne courra pendant une période de 45 jours,
comme le stipule l'article 96. Ainsi, le consommateur bien informé
serait incité à commencer ses remboursements plus tôt sans
pénaliser celui qui désire retarder ses remboursements de
capital.
Dans notre mémoire, nous avons commenté la dernière
partie du deuxième paragraphe de l'article 117. Elle prévoit que
les pénalités, au cas de non-paiement à
l'échéance, sont considérées comme du crédit
variable. Nous comprenons l'objectif recherché par le
législateur; cependant, la rédaction de ce texte est très
large et M. Hamel vous a décrit le genre de situation auquel il peut
s'appliquer.
Notre interprétation de la dernière partie de ce
paragraphe est fort plausible. Comme nous pensons que ce n'est pas le but
recherché par le lé- gislateur, nous avons suggéré
la suppression de cette partie, à moins que le législateur
clarifie ce qu'il entend régir, de manière à exclure le
genre de transactions que nous avons décrit.
J'aurais ici un commentaire plutôt d'ordre technique sur l'article
119. La rédaction de cet article pose à nos membres un
problème d'ordre pratique. Nous ne pouvons par renouveler une carte de
crédit à un consommateur qui n'a jamais utilisé sa carte
de crédit, bien qu'il l'ait sollicitée. Nous devrions, selon cet
article, vérifier dans chaque cas, lors d'un renouvellement ou d'un
remplacement d'une carte de crédit, si le consommateur a, de fait,
utilisé sa carte. Pour éviter ce problème, nous
suggérons l'addition du mot "sollicitée" dans l'article 119.
Dans le domaine des infractions et sanctions pénales, nous
constatons que l'article 113 de la loi actuelle n'est pas reproduit dans le
projet de loi. Pour votre information, cet article stipule qu'une erreur ou une
omission de bonne foi ne constitue pas une infraction au sens de la loi. En
raison de la complexité de la loi, de ses nombreuses exigences et des
fardeaux qu'elle impose aux commerçants, cet article 113 devrait, selon
nous, être retenu dans le projet de loi.
Enfin, au sujet de l'article 197, nous suggérons que le recours
du consommateur contre le commerçant qui n'a pas respecté les
dispositions de la présente loi ou n'a pas rempli l'une des obligations
que lui impose la loi soit conditionnel à ce que le consommateur agisse
de bonne foi et qu'il établisse clairement, devant les tribunaux, comme
condition préalable à l'exercie de son recours, que telle
inobservance par le commerçant lui a causé un véritable
préjudice.
Ces conditions préalables à l'exercice d'un recours du
consommateur ne sont pas nouvelles. Elles existent actuellement en
matière de droit civil. Notre suggestfon a pour but que soient
évitées des poursuites judiciaires frivoles ou de mauvaise foi
par le consommateur.
Nous croyons que le formalisme introduit par le projet de loi peut
favoriser des poursuites futiles. Comme règle générale, la
sanction de l'inobservance des dispositions de la présente loi par un
commerçant devrait relever de l'Office de protection du consommateur et
ce n'est qu'en cas de préjudice subi par le consommateur que ce dernier
peut invoquer telle inobservance à l'appui de sa demande de
réduction d'obligation ou d'annulation du contrat intervenu entre lui et
le commerçant. Ce sont là les quelques remarques que j'avais
à vous faire; et nous sommes à votre disposition pour
répondre à vos questions.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie. Mme le
ministre.
Mme Bacon: Quelques commentaires et questions, si vous me le
permettez. Aux articles 5 et 6 touchant aux lésions entre majeurs, aux
pages 4, 5 et 6 de votre mémoire, vous mentionnez que vous êtes
d'avis que ces articles 5 et 6 consacrent le droit du consommateur à
l'irresponsabilité. Je peux citer, par exemple, les articles 5 et 6, une
in-
certitude dans les transactions où ces articles encouragent le
consommateur à poser des actes irréfléchis.
Le problème posé par la rédaction des articles 5 et
6 a déjà été discuté lors de la
présentation d'autres mémoires, notamment le mémoire du
Barreau ou de l'Institut de la publicité canadienne. De toute
façon, nous prenons note de vos remarques concernant la rédaction
de ces articles.
A la page 8, la réparation d'automobiles, vous nous dites que les
membres de votre association reçoivent souvent des plaintes de clients
contre certains détaillants de telle ou telle compagnie
pétrolière. Quelle procédure employez-vous pour
remédier à ces plaintes dont sont victimes les consommateurs
quand ils viennent vous en faire part? Est-ce que vous avez des
procédures d'établies que vous devez suivre?
M. Hamel: Oui, nos membres, normalement, ont des
procédures. Notre commerce est assez compliqué. On a vraiment
trois sortes de débits d'essence, si vous voulez: ceux qui sont
exploités par les compagnies elles-mêmes, soit directement ou par
l'entremise de filiales à part entière, des détaillants
qui sont locataires dans des postes qui appartiennent aux compagnies de
pétrole, des détaillants qui ont des hypothèques, si vous
voulez, des compagnies de pétrole pour leur permettre de construire un
poste et, finalement, des détaillants qui sont complètement
indépendants.
Ils ont tout simplement l'emblème, le sigle de la compagnie; ils
vendent les produits pétroliers d'une compagnie.
Evidemment, nous avons toute une gamme de différents postes de
débit où il y a plus ou moins de contrôle. Evidemment, si
c'est une filiale d'une compagnie de pétrole qui exploite le poste, on a
un contrôle complet. Maintenant, s'il y a une plainte qui arrive chez
nous, par exemple, ce qui arrive, c'est que, si c'est un de nos postes, nous
avons des garanties sur le travail qui est fait, réparation ou entretien
d'une voiture. Les garanties s'étendent sur une certaine période.
Cela varie entre les compagnies. Chez nous, c'est 4000 milles ou 90 jours.
Là, on s'occupe de la plainte. Normalement, quand il y a une plainte qui
vient chez nous, on communique immédiatement, si possible,
personnellement, avec le client pour régler la plainte aussi rapidement
que possible. Quand il s'agit d'un de nos détaillants, qui est
indépendant dans tous les sens du mot, qu'il soit locataire, qu'il ait
une hypothèque ou qu'il soit indépendant chez lui, là, il
faut passer par le détaillant, lui faire part de la plainte, lui
expliquer de quoi il s'agit, lui expliquer que notre bon nom et le sien sont en
jeu et lui demander de s'occuper de la plainte. Maintenant, dans certains cas,
le détaillant n'accepte pas notre point de vue; il n'accepte pas le
point de vue de son client, parce que c'est vraiment son client. Je dirais que,
dans la majorité des cas, ce sont les compagnies de pétrole
elles-mêmes qui s'en occupent, vu que, vraiment, c'est notre nom qui est
en jeu, parce que je pense que la grande majorité de la population ne
comprend pas les différentes sortes de détaillants que nous
avons.
Mme Bacon: Vous mentionnez aussi l'article 70 qui a trait
à l'évaluation du prix des réparations. Vous dites que le
garagiste augmentera le coût de ces réparations afin
d'éviter qu'il ne soit obligé d'assumer toute erreur
supérieure à 10%, tel que stipulé dans la loi. Est-ce que
vous avez d'autres modalités d'application à cet article à
nous proposer? Avez-vous d'autres propositions bien précises?
M. Hamel: Je peux donner la réponse; ensuite, Me Lanctot,
s'il le désire, pourra ajouter des commentaires. Je pense que la
règle, ce qui existe dans la majorité des cas maintenant, c'est
qu'il y a une estimation qui est faite par le garagiste. Si le garagiste voit
qu'il peut accomplir le travail, souvent c'est une défectuosité
du moteur, par exemple, quelque chose qui se passe... Je ne suis pas garagiste
et je ne suis pas mécanicien, mais je pense que tout le monde ici autour
de la table a connu des problèmes semblables. On arrive chez le
garagiste. Il y a un bruit dans le moteur.
Il ne sait pas exactement ce qui se passe, mais il pense. Il fait un
diagnostic de ce qu'il pense que c'est et il dit que cela va coûter $150.
Il fait de son mieux pour faire les réparations dans le coût
estimé mais, en ouvrant le moteur, il voit que ce n'est pas cela du
tout. Il y a des changements de pièces plus importantes à faire,
etc. Il doit rappeler le client pour avoir son approbation pour des
réparations majeures ou plus grandes.
Ce que nous comprenons dans ce qui est proposé par cette loi,
c'est que le client devra, à ce moment-là, revenir signer une
autre estimation pour une majoration dans l'estimation qui a été
donnée. Je ne pense pas que nous pourrons fonctionner avec des
règlements semblables, parce que maintenant nous connaissons notre
clientèle. Un garagiste connaît la plupart de sa clientèle.
Il l'appelle pour lui dire qu'il y a quelque chose qui ne va pas ou il y a une
fausse estimation et il ne savait pas exactement ce qui se passait. Il appelle
et là, il a l'approbation du client.
Quelquefois, il y a des difficultés. Il y a des millions de
transactions par jour dans notre industrie. Il va y avoir un certain nombre de
problèmes, mais je dirais que les problèmes sont vraiment minimes
pour cette raison.
Mme Bacon: Vous mentionniez que cela augmenterait le coût
des réparations. C'est surtout cette idée que je retenais;
j'aimerais connaître d'autres propositions que vous auriez à nous
faire.
M. Lanctot: Je vais répondre en un premier temps sur la
question de coût. On a l'impression que la procédure d'estimation
va tomber. A ce moment-là, l'individu va vraiment entrer dans un
engagement et va vouloir se protéger, même s'il y a une marge de
10%. Il va nécessairement augmenter son coût quitte, quelquefois,
à réduire par la suite. Il va certainement y avoir des moyens qui
vont se prendre pour éviter qu'il y ait une perte de leur
côté.
Quant à suggérer un texte, il faut comprendre que les
compagnies de pétrole sont dans le pé-
trole et les réparations sont plutôt un accessoire dans la
forme d'exploitation. C'est pour cela que nous n'avons pas voulu trop nous
aventurer dans ce texte.
Mme Bacon: Vous aviez mentionné l'article 96. Cet article
répète les exigences du règlement actuel quant aux
tolérances dans la divulgation du coût de crédit. Ce
règlement qui existe vous a-t-il causé des problèmes bien
spécifiques que vous aimeriez mentionner ce matin?
M. Lanctot: Je dois vous avouer en toute franchise que je n'ai
pas en mémoire le texte du règlement. En lisant le texte, on
était plutôt embêté. On ne savait pas trop quel genre
d'interprétation lui donner. Notre but était plutôt
d'attirer l'attention sur le problème que posait l'article 96.
Mme Bacon: C'est une difficulté d'interprétation
surtout.
M. Lanctot: C'est dans ce sens. Il peut y avoir plusieurs
interprétations dans ce texte. On vous en donne deux dans notre
mémoire et je suis certain qu'en y pensant on pourra en trouver
d'autres.
Mme Bacon: D'accord. Aux pages 13 à 16 de votre
mémoire, l'article 124, vous avez fait certaines remarques concernant le
dernier paragraphe. Vous mentionnez une cause hors de sa volonté ou de
force majeure une grève des postes, par exemple alors que
le consommateur ne reçoit pas son état de compte où des
frais de crédit devraient alors être exigés; c'est un peu
ce que vous mentionnez dans votre dossier. Nous allons prendre note de ces
remarques qui sont fort pertinentes aussi.
Sur quelles données vous basez-vous pour affirmer que le
délai de six mois qui est prévu dans l'article 126 est
déraisonnable? Avez-vous des données bien précises?
M. Lanctot: Nous n'avons pas de données sur cette
question; le seul problème c'est qu'il faut à ce moment planifier
presque un an d'avance. Disons que l'organisation des cartes de crédit
est un système énorme. Cela se fait par ordinateur et il est
impossible de réagir dans un délai de deux ou trois semaines. Il
faut presque prévoir d'avance une augmentation ou une modification; cela
peut s'étendre sur un délai de six mois et, là, l'avis est
donné. En fait les résultats atteints ont lieu un an après
et les conditions au moment de l'entrée en vigueur de la modification,
n'existent probablement plus.
Alors, c'est extrêmement lourd et cela cause des problèmes
à notre organisation. D'autre part, le consommateur, lorsqu'il
reçoit un avis de modification ici nous pensons surtout au taux
de crédit, il ne faut pas s'en cacher a toujours la
faculté de cesser d'utiliser sa carte de crédit. C'est l'option
qui lui est donnée et c'est pour cela qu'on ne suggère aucun
délai parce que, dès qu'il reçoit l'avis, il prend sa
décision: Ecoutez, c'est trop élevé comme taux, je ne suis
pas d'accord, et il cesse de l'utiliser. Pour nous, c'est un client perdu. En
prenant cette décision, c'est le risque qu'on décide de
prendre.
Mme Bacon: A l'article 161, je dois dire que plusieurs
mémoires nous ont mentionné aussi cette difficulté
d'interprétation. Cela peut poser certains problèmes, je crois,
la façon dont il est rédigé actuellement; alors, nous
sommes à étudier une autre formulation. Quant à l'article
203 encore hier, je vous l'avais mentionné je pense qu'il
faut voir les trois dernières lignes de ce paragraphe où on dit
que le tribunal jugera: "... à moins qu'il n'établisse à
la satisfaction du tribunal qu'il n'a pas acquiescé à la
commission de cette infraction." Je pense que ces trois dernières lignes
sont aussi importantes que les premières lignes de cet article.
M. Lanctot: C'est certain qu'il y a peut-être une
méthode de défense, mais on trouve que cette méthode de
défense est extrêmement ténue. C'est difficile de faire une
preuve négative devant les tribunaux. Vous allez diriger une entreprise
qui va venir dire: J'ai donné telles directives, on ne les a pas
suivies. La réponse peut être: Pourquoi n'avez-vous pas pris des
mesures pour voir à ce que vos directives soient suivies? On peut
répondre: J'étais absent, j'étais à
l'extérieur du pays. A ce moment, c'est vraiment une preuve qui est
extrêmement difficile à administrer, la preuve négative,
ici.
Mme Bacon: Je voudrais peut-être mentionner que cela existe
en Ontario selon le Common law, au chapitre des pratiques interdites. Nous
retrouvons exactement dans ce texte ontarien ce que nous retrouvons à
l'article 203. Je ne pense pas que les gens s'en plaignent tellement.
De toute façon...
M. Hamel: Je ne pense pas qu'on devrait prendre l'Ontario comme
exemple, vous savez...
Mme Bacon: Mais il y en a plusieurs qui s'en servent...
M. Hamel: Ah, je vois...
Mme Bacon: Quant à votre conclusion, il est évident
que nous partageons votre avis voulant qu'une bonne éducation du public
pourrait aider le consommateur. Ce serait peut-être la meilleure
façon, mais pour nous et je pense que vous serez d'accord
c'est vraiment à très long terme qu'on pense régler sous
forme d'éducation certains problèmes auxquels les consommateurs
ont à faire face. Mais à court terme, je pense qu'on
n'échappe pas à une législation pour les problèmes
qu'il faut régler immédiatement. C'est pourquoi nous faisons la
refonte de la loi 45 que, à cause de cette situation des
problèmes du consommateur qui évolue rapidement, il nous faut
réétudier davantage, mais il est évident que nous sommes
d'accord avec vous. L'éducation du public est un moyen très
important, mais, à nos yeux.
ce n'est pas le moyen de régler des problèmes à
très court terme. Je crois que le moyen législatif, une loi qui
est destinée à protéger davantage les consommateurs peut
faire beaucoup pour le moment, quitte à toujours garder à
l'esprit que la meilleure façon est encore une meilleure
éducation que nous tentons de faire par nos services.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Lafontaine.
M. Léger: M. le Président, j'aimerais que vous me
donniez des exemples concrets de l'affirmation que vous faites à la page
4. Vous en avez parlé un peu tantôt, mais quand même, quand
vous affirmez que le droit du consommateur à l'irresponsabilité,
cela peut être consacré par cette loi, pouvez-vous expliquer
concrètement ce qui vous amène à cette conclusion que ce
projet de loi, aux articles 5 et 6, consacre le droit du consommateur à
l'irresponsabilité.
M. Hamel: Vous donner des exemples concrets. Un consommateur fait
faire, disons, un alignement de roues chez un de nos détaillants. Il
fait aligner les roues de sa voiture et va ensuite frapper une chaîne de
trottoir, par exemple, à deux coins de rues et il revient dire que les
roues étaient mal alignées, qu'il faut que le travail se refasse
et tout cela. Je suis d'accord qu'il faut que le travail se refasse, mais il
semble, selon les règlements qui sont devant nous, que le garagiste ou
le détaillant agissant comme garagiste va avoir beaucoup moins de
possibilité contre le consommateur dans ce cas. C'est vraiment une
objection ou une plainte assez farfelue.
Pendant que je pense à un autre exemple, si Me Lanctot...
M. Lanctot: Nous avons affirmé cette expression dans une
perspective à long terme. Je vais vous donner un exemple. Dans la loi
actuelle, la loi 45, il existe le délai de cinq jours dans le cas du
vendeur itinérant. J'ai remarqué, dans mes relations avec
différentes personnes, que ce délai de cinq jours est devenu,
pour les gens, un délai qui s'appliquait à tout genre de
transaction et même aux transactions au comptant. A ce moment, vous avez
une espèce de connaissance populaire qui est déformée de
la loi. Avec les possibilités d'annuler plus facilement les
transactions, avec la connaissance que les gens vont prendre, soit par les
media d'information, soit par les différentes associations, il va se
créer une espèce de connaissance. On peut annuler facilement un
contrat. On croit que les gens vont être moins portés à
réfléchir sur l'opportunité de l'achat de tel ou tel bien,
parce qu'il va dire: Je peux l'annuler, je trouverai bien un prétexte
pour l'annuler.
Actuellement, si une vente est finale, quelqu'un va vraiment dire:
Est-ce que j'en ai besoin? Il va s'arrêter à
réfléchir sur l'acte qu'il va poser. C'est dans cette perspective
qu'on a présenté cette affirmation.
J'aimerais ajouter que les articles 5 et 6 sont peut-être
quasiment superflus. La loi vient donner ici toutes sortes de nouveaux droits
aux consommateurs. J'en ai noté dans le domaine des garanties, dans le
domaine des présomptions, vous en avez au point de vue preuve
testimoniale. Mon expérience en matière d'annulation de contrat,
surtout dans des cas d'abus, était plus des problèmes de preuve
que des problèmes de prouver qu'il y avait abus. Je crois que, avec
toutes les nouvelles dispositions qui favorisent le consommateur, ces deux
articles sont presque superflus, ils créent beaucoup plus
d'inconvénients aux commerçants. N'oubliez pas aussi que vous
avez la prescription de trois ans.
M. Léger: Vous devez quand même admettre qu'aux
articles 5 et 6, tel qu'il est écrit à la troisième ligne,
eu égard aux circonstances, il y a obligation à un juge
d'évaluer la situation. Ce n'est pas automatique.
Vous avez aussi l'exemple de l'article 6 où on dit: "II doit
tenir compte de la condition des parties". Cette loi a pour objectif de
protéger le consommateur qui subit de plus en plus un système qui
est créé par des habitudes, des comportements, un système
économique qui, dans cette "struggle for life", cette "struggle for
profit", amène continuellement les entreprises à trouver les
moyens de faire plus de profits, plus de ventes. Tout un système se
crée sur le dos du consommateur. A ce moment, il faut lui donner la
chance de s'en sortir.
Vous dites que cela amène le consommateur à être
moins porté à réfléchir. Je pense que c'est
l'inverse. Cela amène de plus en plus le consommateur à
réfléchir. S'il achète un produit et qu'il le fait sous
l'émotion du moment ou sous la pression d'un vendeur ou d'une
publicité qui lui donne l'image que ce produit est bon et qu'il a
réellement besoin de ce produit, la période de réflexion
lui permet justement de se rendre compte que ce produit n'est pas ce qu'il
aurait voulu, n'est pas ce que la publicité lui avait donné.
C'est dans ce sens, je pense, qu'on protège le consommateur.
Il y a toujours la possibilité, s'il y a un conflit, que ce soit
le tribunal qui juge au lieu de laisser uniquement au vendeur, qui, lui, veut
vendre, le soin de dire: Je t'ai vendu, tu es pris avec, reste avec.
Je pense que c'est dans cet esprit qu'on voulait redonner un certain
équilibre au consommateur. Le consommateur, c'est dans cette loi qu'il
peut trouver les moyens de se défendre, tandis que les hommes
d'affaires, les manufacturiers, les producteurs ou les fabricants, eux, ont
toutes les autres lois qui leur permettent de se faire justice.
M. Lanctot: Dans cette perspective, je regarde ici les pratiques
interdites qui, à mon avis, sont beaucoup plus utiles au consommateur
que les articles 5 et 6. Les pratiques interdites, c'est un apport
extraordinaire pour le consommateur.
Ensuite, vous parlez du phénomène de marketing, du fait de
convaincre le consommateur d'acheter. Il ne faut pas oublier que vous avez
aussi le phénomène de la réaction antipublicité
qu'on remarque un peu partout. Juste au niveau
des émissions de radio et de télévision
consacrées aux problèmes des consommateurs, il y a
l'émergence d'associations de consommateurs pour se défendre;
vous avez toutes les publications dans ce domaine.
Alors, le consommateur s'est organisé aussi pour répondre
à cette publicité. On comprend un peu votre réaction face
à l'approche de vente, face à la publicité, mais il ne
faut pas ignorer que vous avez un contre-phénomène à cela
qui, à mon avis, va être de plus en plus fort avec le temps.
Je pense que M. Hamel veut ajouter quelque chose.
M. Hamel: J'aurais un petit commentaire à ajouter. On ne
s'est pas dit contre la refonte de la loi no 45. Au contraire, il y a beaucoup
de choses très positives dans tout cela. Mais les articles 5 à 12
sont vraiment tous contre le commerçant.
Si on regarde au Québec et au Canada, le "système" n'a pas
fonctionné si mal que cela. Si on regarde le niveau de vie et tout cela,
tout ce qui est publicité n'est pas mal, tout ce qui est marketing n'est
pas mal, tout ce qui est dans l'entreprise ne fait pas défaut
nécessairement. On ne pourra pas corriger toutes les erreurs humaines
par l'adoption d'une Loi sur la protection du consommateur. On ne s'oppose pas,
dans ce sens, mais je pense que c'est tellement lourd, ce qui est dans ces
articles 5 à 12, qu'on va se retrouver continuellement devant la cour
à défendre une vente qu'on aura faite à un client.
Prenez l'huile à chauffage. Il y a des milliers de transactions
par jour de ventes d'huile à chauffage où, en somme, le
consommateur et la compagnie de pétrole ne sont pas vraiment en
communication. Il y a un contrat. On en livre automatiquement selon les
degrés de température. Qu'est-ce qui arriverait maintenant? Le
consommateur réalise qu'il y a un contrat aujourd'hui. S'il veut qu'on
cesse les livraisons, il nous appelle, annule son contrat et tout se fait dans
les règles, pas de problème. Mais, selon ces sections dans la
loi, si je les comprends bien, un consommateur, maintenant, pourra annuler son
contrat n'importe quand en disant que son huile ne chauffe pas aussi bien
qu'avant, qu'on lui a vendu quelque chose qui a moins de BTU qu'il y en avait.
Là, il faudrait aller se défendre en cour. Même si on
gagnait dans toutes nos causes, je pense que ce sera un fardeau très
lourd à supporter.
M. Léger: Je vois bien les arguments que vous apportez,
mais on est ici depuis pratiquement un mois à entendre les
différents groupes qui viennent donner leur point de vue, avec leur
mémoire. Je remarquais que tous les groupes qui sont venus
présenter des mémoires sont d'accord avec la Loi sur la
protection du consommateur. Mais, si on additionne tous les articles que chacun
n'aime pas, je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'articles qui vont être
acceptés. S'il fallait dire: Si quelqu'un se choque contre tel article,
on ne l'adopte pas, je pense qu'il ne resterait pas beaucoup d'articles dans ce
projet de loi.
Tout le monde est pour l'ensemble du projet de loi, pour le principe de
la protection du consommateur, mais chacun a trouvé 12, 15, 22 articles
qui ne font pas son affaire. J'additionne cela et on est rendu à 272,
273 articles qui ont été critiqués. C'est normal. Mais, si
on regarde la nécessité d'une Loi sur la protection du
consommateur, si on fait un recul devant la société dans laquelle
on vit, si on laisse un peu chacun des arbres pour regarder la forêt, on
s'aperçoit qu'il se crée de plus en plus dans la
société dans laquelle on vit un système créé
par certains vices de la libre entreprise, qui est quand même absolument
essentielle et importante.
La libre entreprise permet quand même une concurrence et
crée des produits meilleurs plus concurrentiels; cela est normal. Mais
ceci crée aussi, dans ce "struggle for profit and struggle for life",
une habitude de surproduction de produits pour les avoir à meilleur
prix. Après cela, on crée un système de marketing pour
vendre et écouler les produits qu'on a créés en
surproduction, mais on n'en avait pas nécessairement besoin. Par la
suite, on implante un système de marketing pour créer des besoins
chez les gens. Après cela, pour être capable de les acheter, on
crée un autre système, qui est celui du crédit. A ce
moment, les gens se voient pris, le consommateur voit la société
se transformer par un des agents les plus importants les producteurs, les
manufacturiers et les marchands. On est obligé, parce qu'on a
changé un peu son échelle de valeur; le besoin est plus fort. Et,
je vois l'affirmation que vous faites à la fin; vous dites, une
affirmation bien claire: II n'en reste pas moins que le crédit est un
avantage qu'offre notre système économique.
Le crédit est un avantage, non pas pour le consommateur, mais
pour les producteurs qui veulent vendre davantage. Auparavant, on avait
l'avantage de pouvoir bénéficier du passé,
c'est-à-dire l'argent qu'on avait accumulé, pour acheter un
produit. On est rendu maintenant à hypothéquer l'avenir pour
être capable d'acheter ce qu'on nous a créé comme besoin
chez nous. Devant tout ce système, il se crée un besoin de
protéger ce consommateur qui est victime de tout un système de
production dont uniquement le profit est l'intérêt premier. Quand
on nous dit que c'est pour le bien du consommateur qu'on a fait tel produit
parce que cela va faire du bien au consommateur, c'est parfois exact, mais ce
n'est pas l'ensemble du système. Moi, je vois des affirmations comme
cela: II n'en reste pas moins que le crédit est un avantage pour notre
système économique. Les gens ont tant de choses à acheter
parce qu'on en a créé le besoin pour faire comme M. Jones, M.
Smith ou M. Durand à côté de chez nous. Il faut acheter, on
n'a pas l'argent, mais il faut hypothéquer l'avenir. C'est ce
système, cette anarchie. Quelqu'un disait que, dans un système
où il y a des forts et des faibles, la loi libère, tandis qu'une
absence de loi contraint et emprisonne le consommateur. C'est pour cela que la
loi du consommateur doit protéger ces gens.
Vous avez mentionné tantôt le problème de la
livraison d'huile à chauffage à domicile. Encore là,
expliquez-moi comment cela pourrait nuire à cette transaction de
remettre au consommateur son état de compte à son adresse. Moi je
pense à l'exemple, vous me répondrez là-dessus, d'un
livreur d'huile qui va livrer soit à la maison de campagne ou à
la maison de ville, alors que le propriétaire est absent, des
quantités d'huile. En général, cela est fait d'une
façon normale. Mais très souvent je ne pourrais pas donner
de pourcentage il est arrivé bien des cas où vous avez des
livreurs d'huile qui ont faussé les formules, qui ont faussé des
états de compte, qui ont donné moins d'huile qu'ils n'en ont
facturée, et personne ne pouvait vérifier. Il a beau y avoir un
compteur après le camion de livraison d'huile, on a vu des exemples
où des gens jouaient le calculateur, arrêtaient le chiffre et
repartaient la machine à un numéro plus avancé. Ils
donnaient l'impression qu'on avait livré 200 ou 400 gallons d'huile
alors que la personne n'est pas là pour vérifier. Elle ne savait
pas combien il lui en restait; elle s'aperçoit à la fin de
l'hiver qu'elle a consommé peut-être une fois et demie plus
d'huile que l'année dernière. On est dans une période
d'inflation, c'est peut-être parce que l'huile coûte plus cher,
mais très souvent c'est parce qu'on n'a pas pu vérifier. Est-ce
que vous ne pensez pas qu'il serait beaucoup plus normal pour protéger
le consommateur qu'à chaque livraison d'huile l'état de compte
soit livré à l'adresse précise? Je prends le cas du type
qui demeure en ville, qui n'est pas à la campagne. On a livré de
l'huile pendant qu'il n'était pas là et il n'a pas reçu
l'état de compte pour vérifier chaque fois s'il avait
réellement reçu la quantité qu'il fallait selon ses
besoins.
M. Hamel: M. le Président, je ne suis pas ici pour
défendre tous les livreurs d'huile. Il y en a des centaines dans la
province de Québec. J'apprécie beaucoup votre suggestion. Je
pense que je peux parler pour tous nos membres, tous les membres de l'APQ.
Quand une livraison d'huile se fait par nos membres, ce qui représente
une grande majorité des livraisons d'huile à chauffage au
Québec, le compte est laissé à la place de livraison. Le
compteur du camion est vérifié par le ministère de
l'Industrie et du Commerce, dans chaque cas, et est vérifié par
les compagnies régulièrement. On indique la date de livraison, le
"gal-lonnage", le prix et le coût total. Alors, dans chaque cas, le
consommateur peut voir s'il y a quelque chose qui est anormal, et
nous-mêmes, parce qu'on garde des dossiers. Normalement, notre
clientèle, on la garde longtemps.
On peut voir par les registres s'il y a un changement radical, on peut
avertir le consommateur, on le saurait nous-mêmes si les livraisons, par
exemple, augmentaient en dehors. C'est justement pour cela qu'on peut faire des
livraisons automatiques, parce qu'on sait exactement, mieux que le consommateur
lui-même, quand il a besoin d'huile à chauffage. On suit cela de
très près.
Maintenant, vous avez parlé de fraude et vous n'avez pas
donné de détails. Je pense que je sais à quoi vous pensez.
Il y a eu des articles, récemment, dans les journaux. C'est tellement
minime, sur le total de livraisons qui se font d'huile à chauffage au
Québec, que cela n'a pas tellement d'importance. Ces gens qui ont
été fraudés ont été remboursés, je
suis sûr, mais sur le total, c'est très minime.
M. Léger: Comment pouvez-vous affirmer que c'est minime
puisqu'on n'a parlé que des cas qu'on a pu déceler? C'est donc
dire que c'était possible.
M. Hamel: C'est possible.
M. Léger: De quelle façon pouvez-vous
vérifier ou empêcher que ces anomalies, que ces fraudes se
fassent? Comment se fait-il qu'on puisse jouer avec... je ne sais pas si
on appelle cela l'odomètre pas l'odomètre, mais...
M. Hamel: Le compteur?
M. Léger: ...le compteur du camion pour laisser
l'impression qu'on a livré 200 gallons d'huile alors qu'on en a
livré peut-être seulement 50 gallons?
M. Hamel: Tout est possible, monsieur.
M. Léger: Comment pouvez-vous contrôler ces
choses-là afin d'éviter les abus? Souvent le consommateur n'est
pas à la maison quand on livre l'huile.
M. Hamel: Souvent.
M. Léger: A ce moment-là, on laisse un petit papier
qui n'est pas un état de compte, qui est simplement un papier sur lequel
on lit qu'à partir de tel numéro jusqu'à tel numéro
on a livré tant de gallons d'huile.
M. Hamel: C'est la facture, monsieur.
M. Léger: Le montant n'est pas dessus, il reçoit
une facture par la suite.
M. Hamel: Le montant est dessus, oui.
M. Léger: La quantité d'huile est livrée
à tel prix, mais il n'y a pas de montant total.
M. Hamel: Le montant total est dessus, oui.
M. Léger: Sur ceux que j'ai vus, il y a le chiffre
imprimé du début du compteur, le chiffre à la fin et le
nombre de gallons d'huile, mais il n'y a pas le montant total. La facture vient
par la suite.
M. Hamel: Est-ce que je pourrais envoyer un représentant
de notre compagnie à votre maison? On aimerait bien vous avoir comme
client pour l'huile à chauffage. Je vous assure que notre facture a le
montant total.
M. Harvey (Charlesbourg): C'est fait à la mitaine, c'est
bien plus dangereux de se faire faire.
M. Léger: Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y
a nécessairement une petite facture de couleur en deux ou trois copies,
je pense bien. Ce n'est pas l'état de compte, c'est uniquement le fait
que la personne a livré de l'huile et on dit qu'il y a tant de gallons
d'huile de livrés. Après cela, on reçoit, par la poste,
l'état de compte du mois.
M. Hamel: Pas dans le cas de nos membres, en tout cas, qui
représentent la grande majorité. Je ne peux pas vous assurer ce
qu'il en est dans votre cas parce que je ne connais pas votre fournisseur.
M. Léger: Comment pouvez-vous expliquer que ces choses
puissent arriver? Vous dites que c'est minime. Vous dites que les gens ont
été remboursés; cela, vous le croyez, mais ce n'est pas
sûr. Comment se peut-il qu'on puisse avoir joué comme cela avec
les compteurs pour la livraison de l'huile aux propriétaires
absents?
M. Hamel: Je ne veux pas donner des idées aux fraudeurs
sur la façon de procéder, mais c'est très simple. On va
espérer qu'ils ne lisent pas les procès-verbaux des
présentations ici. Je vais vous donner un exemple très facile. Le
fournisseur va chez vous faites attention il doit livrer 140
gallons. Disons que votre réservoir de 200 gallons a baissé et
que vous avez de la place pour 140 gallons. C'est ce qu'on vise normalement
dans un réservoir de 200 gallons; on vise entre 140 et 160 gallons. Il
doit livrer 140 gallons; il met le boyau dans votre réservoir et il met
seulement 130 gallons. Il a un autre petit réservoir à
côté et il n'y a personne à la maison, c'est
peut-être la nuitil met 10 gallons dans ce réservoir, dans
son bidon. Il s'en va avec ça et il les accumule. C'est une façon
très facile de procéder.
Ce qui va arriver, avec le système de livraison automatique qui
protège la clientèle, c'est que son réservoir va
continuellement diminuer. Au bureau, nous, ce qu'on a comme livraison, c'est
140 gallons. Au bout de quelques mois, il ne vous restera plus d'huile dans
votre réservoir. Là, tout de suite, il y a une investigation qui
se fait. Je peux vous dire, encore une fois, que cela arrive très
rarement. Très rarement. C'est tellement facile à
découvrir, c'est tellement facile.
M. Léger: Ce que j'ai pu déceler, dans ces
cas-là, c'est qu'on remettait l'huile dans le camion.
M. Hamel: Oui, c'est une autre façon, remettre le boyau
dans le camion.
M. Léger: En retournant à la maison-mère...
M. Hamel: C'est encore plus facile.
M. Léger: ...il y avait une quantité d'huile plus
grande.
M. Hamel: Non, non, il peut aller la vendre ailleurs, la vendre
au comptant, à meilleur marché ou quelque chose comme cela. C'est
une autre possibilité.
M. Léger: Qu'est-ce que vous allez faire pour
empêcher cela?
M. Lanctot: J'aurais un commentaire sur cette question. Vous
soulevez probablement le problème dont les journaux ont parlé au
mois de mars. Il faut regarder les gens qui étaient impliqués
dans cela. On vous a expliqué le système des relations qui
existent entre la compagnie de pétrole et ses détaillants. Vous
retrouvez le même genre de système au niveau de l'huile à
chauffage.
Vous avez les livraisons directes, les chauffeurs sont à notre
emploi, ils doivent se rapporter, les camions sont vérifiés
chaque soir. Mais vous avez aussi des livreurs, des entrepreneurs
indépendants dans l'huile à chauffage qui viennent acheter tout
simplement le produit chez nous et ils vont le vendre pour leur propre compte.
Et si vous regardez bien, les gens qui ont été impliqués
là-dedans ne sont pas membres de notre association. Ce sont tous des
livreurs indépendants, il n'y a aucune relation, sauf peut-être
pour l'achat du produit chez nous.
On ne peut pas exercer un contrôle là-dessus. Mais vous
voyez l'effet de la publicité: les compagnies de pétrole
fraudaient le public. C'est un exemple. Il y avait, je pense, dix-huit cas et
on en a fait une généralité. Alors je pense que quand M.
Hamel dit qu'il ne faut pas donner trop d'importance à cela, qu'il faut
situer cela dans le contexte des livraisons, il a raison.
M. Léger: Je vous remercie.
Le Président (M. Lafrance): Le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Boutin: M. le Président, disons que je ne suis pas tout
à fait d'accord avec ce que le député de Lafontaine vient
de souligner, surtout sur deux points majeurs à l'effet que si on
écoutait la majorité des représentations qui sont faites
depuis le début de l'ouverture de cette commission, il faudrait amender
la quasi totalité des articles pour faire un projet de loi qui puisse
satisfaire tout le monde. Dans les auditions qu'on a eues, depuis quelques
semaines, de la part de presque tous les organismes qui sont venus, qui se sont
présentés devant la commission, on a remarqué une foule de
suggestions, on a remarqué une foule d'interprétations. Mais
aussi il y a une chose qui est très importante, c'est qu'on s'attaque,
dans la plupart des revendications qui sont faites, à certains articles
qui reviennent toujours.
Ce sont presque toujours les mêmes qui reviennent, et c'est ce
que, peut-être, Mme le ministre soulignait, lorsqu'elle prend en bonne
considération vos remarques. Si beaucoup d'autres associations
reviennent toujours sur les mêmes articles, c'est peut-être parce
qu'on a trouvé les vraies failles. Alors je remarque que certainement
chez au-delà de la moitié si ce n'est pas plus, il y a eu
très peu ou peu de suggestions valables.
Deuxième point où je diffère d'opinion: moi je suis
pour le crédit, mais pas pour le crédit exces-
sif, peut-être le crédit contrôlé, parce que
je sais que c'est ce qui peut amener quand même la majorité des
gens à pouvoir devenir propriétaires de quelque chose et faire
leur place dans la société comme propriétaires de maisons
ou d'automobiles pour aller travailler ou des biens essentiels. Alors le
crédit peut peut-être contrôlé pour empêcher
les excès, mais je crois qu'il est nécessaire dans notre
système et je crois qu'il faut qu'il soit maintenu et encouragé,
mais il faut prévenir les abus qui peuvent être faits.
Il y a cependant une question ou deux que je voulais vous poser. Vous
soulignez, à la page 8 de votre mémoire, que dans le cas des
réparations d'automobile, le nouveau système dans cette loi
augmentera les coûts de réparation.
Vous avez mentionné aussi que les garagistes, souvent, devaient
faire une estimation approximative. C'est drôle parce que lorsque les
garagistes sont venus devant la commission, ils n'étaient pas tout
à fait d'accord avec ce que vous avancez. Eux, de leur
côté, sont plus d'accord avec la loi, parce qu'ils disent que cela
va les forcer à faire une estimation réelle du problème
puis on chargera le temps en conséquence. Et si le client accepte
l'estimation qui sera faite, on déduira le temps de l'estimation sur la
facture. S'il la fait faire ailleurs, cette estimation sera à la charge
du client. C'est peut-être le point où vous pouvez dire que cela
peut être au détriment du consommateur, mais on remarque que le
consommateur, en général, se dirige plutôt vers un
garagiste ou une station-service qui fait son affaire, où il est de plus
en plus client permanent, parce qu'il sent que c'est là qu'il est le
mieux servi, et c'est ce que les garagistes recherchent.
Dans leur mémoire, ces associations étaient en plein
accord avec cela et prétendaient que probablement cela n'augmenterait
pas le coût, excepté peut-être sur un point, qui avait
été souligné en commission par le député de
Laurier, où il était impossible de faire des estimations, soit
sur la réparation du système électrique de l'automobile.
C'est un point. Ensuite, il y avait un autre point; un moteur, on peut quand
même l'ouvrir, regarder ce qu'il y a à l'intérieur et
exiger le coût de l'estimation. Qu'est-ce que vous pensez de cela?
M. Hamel: Comme je l'ai dit, c'est une question qu'on se pose.
Est-ce que cela sera à l'avantage du consommateur? Dans le moment, de la
façon dont on fonctionne, les compagnies de pétrole n'exploitent
pas, sauf en certains cas et le total est très minime, encore une
fois des garages directement. Dans certains cas, notre façon de
procéder, c'est que, quand le client arrive, on lui fait une estimation.
Maintenant, si la loi nous oblige à le faire et oblige le client
à payer l'estimation, on se dit: Si on est payé pour, d'accord,
mais est-ce que cela avantagera le consommateur? La seule question qu'on se
posait, c'est que, si le garagiste veut se protéger, il sera
peut-être porté à faire son estimation plus
élevée, quitte à rembourser ou à faire le travail
à meilleur marché, s'il voit que cela peut se faire à
meilleur marché. Il y a peut-être moins de pression sur
l'efficacité. On ne le sait pas, c'est une question qu'on se pose.
M. Boutin: Vous avez soulevé tout à l'heure un
exemple que je trouve assez pertinent, mais avec lequel je ne suis pas
d'accord. Vous avez soulevé l'exemple d'un alignement d'automobile. Vous
pouvez faire une estimation sur un alignement d'automobile et changer les
pièces. Je me dis que c'est impossible de garantir un alignement
d'automobile. On peut garantir un balancement de roues, on peut garantir le
fonctionnement de choses comme cela, mais un alignement, c'est impossible
à garantir, parce que vous pouvez désaligner votre automobile dix
minutes après être sorti du garage en question. C'est pour cela
que je suis resté surpris.
M. Hamel: Au moins, nous sommes d'accord.
M. Boutin: J'étais surpris, parce que vous l'avez
donné comme exemple, tout à l'heure, d'une chose qu'on peut
garantir. Je dis que la portée est assez forte quand même. C'est
impossible à garantir.
M. Hamel: Je suis absolument d'accord. M. Boutin:
D'accord.
Le Président (M. Picotte): Le député de
Charlesbourg, sur le même sujet?
M. Harvey (Charlesbourg): Oui parce que cela a une
continuité directe. Je pense que l'exemple qui a été
formulé par mon collègue confirme en quelque sorte l'exemple qui
avait été donné tout à l'heure par M. Hamel,
à l'effet qu'un alignement ne peut pas être garanti, puisqu'un
incident mineur, juste à la sortie du garage, vient court-circuiter le
travail qui vient d'être fait. Je pense que vous confirmez en quelque
sorte ce qui avait été avancé. En fait, lorsque vous
évoquez l'opinion que cela coûtera plus cher finalement au
consommateur si on impose dans les textes de loi l'obligation d'obtenir une
estimation des réparations, cela revient à dire en quelque sorte
qu'il existe au Québec actuellement, soit des cliniques qui portent un
nom commercial pour ne pas les mentionner, les cliniques Esso ou
encore le Bureau d'assurance du Canada qui, lui aussi, ouvrira, s'il ne l'a pas
déjà amorcé, un nouveau système de centres
d'évaluation. C'est à ce titre qu'on laisse à
l'intérieur du système la liberté au consommateur
d'obtenir son estimation.
Personnellement, en tout cas, mes opinions sont claires et bien connues
là-dessus, j'ai des réserves quant à inscrire dans le
texte de loi l'obligation d'obtenir une estimation, parce que je me dis qu'il y
a quand même une certaine confiance qui doit exister entre son technicien
d'automobile ou son garagiste et aussi le consommateur. Sans exception
je parle pour moi jamais un marchand d'automobile n'a osé me
présenter une facture de $400, alors que l'estimation globale pouvait
être de $100. Au moment où cela est arrivé, le garagiste a
toujours eu et la décense et aussi la responsabilité
professionnelle de me téléphoner pour me dire: Sais-tu, le
pépin est plus grave qu'on ne le croyait. Je pense que c'est à ce
titre
que vous voulez illustrer que le fait d'imposer dans le texte de loi une
estimation des réparations va nécessairement coûter quelque
chose au consommateur, cela va de soi, parce que le marchand d'automobiles ou
encore le garagiste, il faut qu'il investisse du temps pour faire cette
estimation. Encore là, il ne pourra sûrement pas garantir
automatiquement son estimation sans se garder ce qu'on appelle une marge de
manoeuvre ou une réserve sécuritaire, ce qui aura pour effet
finalement que cela va coûter plus cher au consommateur. C'est cela que
vous voulez dire?
M. Hamel: C'est cela.
M. Harvey (Charlesbourg): C'est cela que je comprends moi aussi
et je vous comprends très bien.
Le Président (M. Picotte): Une très longue question
et une courte réponse.
M. Harvey (Charlesbourg): Très bien, je suis
entièrement d'accord.
Le Président (M. Picotte): Le député de
Taschereau.
M. Bonnier: J'aurais deux questions qui ne sont pas très
longues, je pense bien. Ma première se réfère au texte de
M. Hamel, à la page 5, en ce qui regarde les exigences relativement au
concept de crédit. Actuellement, vous concevez cela comme une vente au
comptant lorsque le client n'a pas à rembourser immédiatement,
mais a tant de jours pour rembourser. Mais vous craignez, étant
donné que cela pourrait être considéré comme une
vente à crédit, les technicités administratives que vous
auriez à subir, qui vous compliqueraient l'existence. A quel article de
la loi vous référez-vous à ce moment-là? Est-ce
à l'article 8 ou 9, 107 ou 124? Je suis un peu confus pour savoir
exactement...
Une Voix: Article 109.
M. Hamel: C'est à Me Lanctot de répondre.
M. Lanctot: Je crois que c'est 117.
M. Bonnier: Cela peut être celui-là aussi.
M. Lanctot: Dans l'article 117... M. Bonnier: Cela peut
être celui-là.
M. Lanctot: ... au deuxième paragraphe, j'en ai
discuté dans ma présentation, à la fin on dit: Aux fins de
l'alinéa précédent, en parlant du crédit variable,
les pénalités imposées aux cas de non-paiement à
l'échéance sont réputées être des frais de
crédit. Nous avons donné comme exemple...
M. Bonnier: Ils sont soumis à toutes les
technicités nécessaires.
M. Lanctot: C'est cela. Vous avez, par exemple, au point de vue
pratique l'huile à chauffage. La majorité de notre
clientèle est sur une base de paiements échelonnés. Vous
avez aussi plusieurs cas où c'est paiement sur livraison. Lorsque vous
arrivez pour livrer 200 gallons, cela va coûter environ $90, et
l'individu n'a pas ses $90 dans les poches. Surtout si on arrive un vendredi,
on ne peut lui enlever cela pour son week-end. Au point de vue pratique, on lui
laisse une facture où c'est marqué "payable sur
réception". Généralement, on s'attend que la personne nous
paie dans la semaine qui suit. On note à la fin, au-delà de 30
jours, qu'il y a une pénalité qui s'applique. Ce sont des frais
d'administration ou de service. Vous avec ce genre de formule dans beaucoup de
commerces. De fait, c'est une transaction au comptant, mais on laisse un
certain temps pour payer. Cette période n'est pas financée. C'est
plutôt une vente de convenance qu'on donne au consommateur.
Si vous prenez ici le terme de pénalité au cas de
non-paiement, cela couvre ces transactions. Dans l'objectif même de ce
paragraphe, probablement que les gens n'avaient pas a l'esprit ce genre de
transaction. Mais, par les termes mêmes, ce texte permet
l'interprétation qu'on avance. C'est pour cela que l'on dit: Soit qu'il
soit supprimé ou soit qu'il soit amendé de façon à
exclure ce type de transaction.
M. Bonnier: Si cela restait, il faudrait que vous ayez d'autres
conditions de crédit.
M. Lanctot: Cela serait du crédit variable.
M. Bonnier: Ce serait un contrat de crédit avec...
M. Lanctot: On serait soumis à toutes les modifications et
les différentes dispositions, alors que de fait ce n'est pas du
crédit variable. Ce n'est pas notre intention de financer.
M. Bonnier: Ma deuxième question se réfère
à l'exploitation d'un certain nombre de garages, soit directement par
les compagnies ou par l'entremise d'autres. Etes-vous au courant d'un
système qui consisterait à rémunérer le
mécanicien qui ferait vendre toutes sortes d'articles, par exemple des
courroies pour un générateur et ces choses-là?
Existerait-il un système à l'effet que les mécaniciens
reçoivent une certaine commission s'ils font vendre tant d'articles?
M. Taschereau: II y a certains gérants indépendants
qui le font. C'est local, à ce moment-là. Un gérant de
station-service qui va décider de dire...
M. Bonnier: Un locataire à ce moment-là.
M. Taschereau: Un locataire, cela n'existe pas, à ce que
je sache, dans les activités de compagnies comme telles; cela existe
sous forme de boni, à l'occasion, je pense. Ne me demandez pas de vous
donner des noms, je n'en connais pas.
II est arrivé dans le passé que j'aie connu des dirigeants
de stations-service qui disaient à leur mécanicien ou à
leur homme de service: Très bien, cette semaine, je veux que vous
vérifiiez très bien les courroies de ventilation. Cela s'est fait
sur une base locale et très rapidement. Mais comme système
général, cela n'existe pas, à ce que je sache,
actuellement, dans les compagnies pétrolières. Pas chez nous, en
tout cas.
M. Bonnier: Très bien.
M. Lanctot: ... au comité paritaire, sur cette question,
de l'interdire. Disons vaguement, mais...
M. Bonnier: C'est une pratique interdite par le comité
paritaire.
M. Lanctot: C'est cela, je ne suis pas certain, mais c'est
l'impression que j'ai.
M. Bonnier: Merci.
Le Président (M. Lafrance): MM. Hamel, Lanctot et
Taschereau, nous vous remercions de votre présentation et d'avoir bien
voulu répondre aux questions des membres de la commission.
M. Hamel: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons maintenant la
Fédération de Québec des caisses populaires
Desjardins.
Fédération de Québec des caisses
populaires Desjardins
M. Charron: M. le Président, madame le ministre, messieurs
les membres de la commission parlementaire, mesdames et messieurs, avec votre
permission, je vous présenterai d'abord les membres du groupe qui
représente ici ce matin la Fédération de Québec des
unions régionales des caisses populaires Desjardins.
D'abord, à ma droite, M. René Croteau, directeur
général de la fédération; à ma gauche, M.
Louis Tardif, directeur des services juridiques; je retourne à ma
droite, Mme Madeleine Joubert, directeur des communications, et, à mon
extrême gauche il n'est pas gauchiste pour autant M.
André Morin, économiste conseiller aux affaires gouvernementales
et aux affaires coopératives d'épargne et de crédit au
Canada pour le compte de la fédération, et votre humble
serviteur, Paul-Emile Charron, secrétaire général de la
fédération.
Tout d'abord, je dois exprimer la vive appréciation de la
Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins
pour cette occasion qui lui est offerte par la commission parlementaire de
venir exprimer ici le point de vue et les observations de la
fédération. Je ne crois pas nécessaire de vous
présenter la fédération; je pense que tout le monde
connaît la Fédération de Québec des caisses
populaires Desjardins qui regroupe 1251 caisses populaires Desjardins
affiliées, pour être précis, et 3,3 millions de membres qui
sont des consommateurs d'épargne et de crédit.
Si vous voulez, avec votre permission, je vais donner la lecture du
mémoire qui n'est pas tellement long il contient 12 pages
peut-être avec quelques commentaires. Ce sera à vous de
décider ensuite.
Introduction. Les grands objectifs poursuivis par la loi sur la
protection du consommateur rejoignent ceux que poursuit maintenant depuis 75
ans le Mouvement des caisses populaires Desjardins. En favorisant un
équilibre de forces entre le consommateur et le commerçant, le
législateur vise, en effet, l'un des principaux buts poursuivis par les
caisses populaires et les autres coopératives, c'est-à-dire aider
les consommateurs à atteindre un mieux-être économique et
social.
C'est pourquoi nous ne pouvons qu'appuyer une législation dont
les principaux objectifs consistent, premièrement, à
réglementer ce qui peut conduire à des pratiques abusives ou
déloyales à l'endroit du consommateur; deuxièmement,
à permettre au consommateur d'être mieux informé de ses
droits et de ses obligations lorsqu'il transige avec un commerçant;
troisièmement, à offrir une loi et un règlement
général rédigés en termes clairs et précis,
les rendant ainsi directement accessibles au consommateur.
Quatrièmement, à permettre des recours efficaces et
expéditifs lorsque le consommateur devient victime d'abus de droit.
Nous croyons que le projet de loi no 7 rejoint de façon
générale ce que nous attendions d'une loi de la protection du
consommateur. Par ailleurs, nous vous sommes reconnaissants de nous permettre,
par la tenue de cette commission parlementaire, de vous recommander certaines
modifications au texte actuel du projet de loi. Ce faisant, nous avons la
conviction d'apporter une contribution additionnelle à la protection des
droits du consommateur.
Première recommandation: Exemption de la loi. L'objectif
principal visé par une loi de la protection du consommateur consiste
à réglementer les relations d'affaires pouvant s'établir
à l'occasion de transactions commerciales entre un commerçant et
le public consommateur. Or, il est bien connu que ces relations ne sont pas
celles qui existent entre une coopérative et ses membres. D'une part, la
coopérative n'existe que dans l'intérêt de ses membres.
D'autre part, la coopérative est justement une association formée
de consommateurs. C'est pourquoi les coopératives et leurs membres ne
peuvent voir l'utilité ni l'opportunité d'une
réglementation qui leur serait appliquée de façon
artificielle, en faisant complètement abstraction de leur entité
propre et, de ce fait, risquant de porter atteinte de façon
sérieuse à l'influence et à la liberté d'action de
ces coopératives en faveur de leurs membres.
En d'autres termes, les sociétaires des caisses populaires
n'aiment pas que, quand ils transigent avec leurs caisses populaires, ils aient
en face d'eux un commerçant, parce que le crédit, dans les
coopératives d'épargne et de crédit, est un crédit
encadré par une commission de crédit et par une assemblée
générale qui est là pour les protéger. S'ils
s'organisent des coopératives d'épargnes et de crédit,
c'est pour s'autoprotéger,
par l'assemblée générale des propriétaires
à la base et par une commission de crédit mandataire. Il y a un
cadre de protection, et les relations qui régissent les membres avec
leur caisse ne sont pas de même nature ni au plan juridique, ni au point
substantiel. On pourrait faire un long développement là-dessus,
on pourra voir plus tard. Je vais peut-être revenir un peu plus loin sur
ce point.
Est-il nécessaire de rappeler que le législateur
québécois a reconnu, de façon explicite et non
équivoque, la nature véritable des coopératives? A titre
d'exemple, rappelons que l'article 76 de la Loi des caisses d'épargne et
de crédit stipule que toutes les activités productives des
caisses étant essentiellement coopératives, elles sont
exclusivement restreintes à leurs membres. Cet article précise
que ces activités coopératives ne sont pas réputées
constituer l'exploitation d'un commerce.
Par ailleurs, il serait facile de faire la preuve que, dans les faits,
l'activité coopérative se situe à l'antipode de ce que
veut régir la Loi sur la protection du consommateur. C'est cela
l'opposition qu'il y a. En somme, c'est une activité coopérative
qui va en opposition à une activité commerciale qui exige un
certain nombre de choses que la coopérative ne réalise pas. Il y
a une différence dans la nature même juridique et dans son
fonctionnement et dans sa substance. Si l'opération est
différente de sa nature, celui qui l'émet est
nécessairement différent. On ne peut pas faire autrement. Qu'il
suffise de rappeler que les membres d'une coopérative en sont les
propriétaires-usagers et qu'ils ont tous, en assemblée
générale, un droit de vote égal.
Quant aux contrats de prêts qui interviennent entre un caisse
populaire et ses membres, rappelons qu'ils sont approuvés par ces
derniers, lesquels en déterminent et la forme et le contenu, y compris
les garanties et les conditions de remboursement. C'est l'allusion que je
faisais tout à l'heure à l'encadrement du crédit d'une
certaine manière. Peut-être pas dans le sens technique
qu'utilisent les Français, mais dans notre sens à nous. On peut
parler d'encadrement du crédit dans un autre sens,
évidemment.
C'est pourquoi nous voudrions formuler de nouveau la demande que nous
avions faite lors de la présentation du projet de loi qui est devenu la
loi actuelle de la protection du consommateur. En effet, considérant que
la Loi sur la protection du consommateur veut réglementer les relations
entre les commerçants et les consommateurs; considérant que les
coopératives ne peuvent être directement ou indirectement
assimilées à des commerçants, nous recommandons que les
coopératives ne soient pas assujetties aux dispositions de la Loi sur la
protection du consommateur. 2. Modification de la loi.
Tout en étant confiants que le bien-fondé de notre
première recommandation pourra cette fois être reconnu, vu
l'expérience vécue sous la loi actuelle, nous voulons faire
certaines autres recommandations qui portent sur le projet de loi tel que
déposé en première lecture.
Le règlement général de la loi, d'abord.
L'article 270 du projet de loi stipule que, du moins pour un certain
temps, le règlement général présentement en vigueur
va s'appliquer aux articles de la nouvelle loi qui sont équivalents aux
articles de la loi actuelle. Qu'il nous soit permis de déplorer que le
présent règlement général puisse s'appliquer
à la nouvelle loi, sans avoir d'abord été repensé
et rédigé à nouveau. C'est peut-être fait, mais ce
n'est pas venu à ma connaissance. Nous déplorons cette
éventualité pour les motifs suivants: 1.Le règlement
actuel, présentant de sérieuses difficultés
d'interprétation, son application automatique à la nouvelle loi
ne ferait qu'aggraver la situation; 2.Le texte intégral du
règlement général applicable à la nouvelle loi,
à cause des dispositions nouvelles qu'il renfermera, est indispensable
à la compréhension totale et à l'appréciation
complète du projet de loi.
C'est pourquoi nous recommandons que le règlement
général relatif à la Loi sur la protection du consommateur
soit rédigé à nouveau et qu'il n'entre en vigueur
qu'après consultation de tous les intéressés.
Autre modification concernant le prêt d'argent consenti à
l'avance.
La définition du contrat de crédit variable, telle que
prévue à l'article 117 du projet de loi, ainsi que les
dispositions du règlement général qui le visent ne
permettent pas l'imposition de frais de crédit à compter de la
date à laquelle le crédit est consenti. D'autre part, les
dispositions de l'article 94 du projet de loi permettent une telle imposition,
à compter de la date des avances, lorsqu'il s'agit d'un contrat de
prêt d'argent à exécution successive.
Or, les caisses populaires veulent pouvoir offrir à leurs membres
la possibilité d'obtenir d'elles un prêt d'argent consenti
à l'avance pour un montant prédéterminé et dont les
sommes, à la demande du membre ou sur son ordre, pourraient être
versées ou créditées à son compte. Ce contrat,
conclu indépendamment de toute entente préalable entre la caisse
populaire et des tiers, ne doit surtout pas être confondu avec ce qu'il
est convenu d'appeler la carte de crédit.
Considérant que ce genre de contrat ne semble pas explicitement
visé par les dispositions de l'article 94 du projet de loi, nous
recommandons que ce genre de contrat soit réputé être un
prêt d'argent auquel s'appliquent les dispositions de l'article 94 du
projet de loi.
Autre point, le contrat de crédit variable.
L'article 126 du projet de loi stipule que le commerçant doit
donner au consommateur un préavis d'au moins six mois de toute
modification relative aux frais de crédit d'un contrat de crédit
variable. Nous estimons que ce délai est excessif et que son imposition
peut se traduire par une hausse sensible des frais de crédit
exigés par les commerçants, lesquels voudront peut-être
prévoir les changements maintenant fréquents des taux
d'intérêt.
Par contre, nous comprenons qu'il soit important de prévenir
suffisamment tôt le consommateur de toute modification des frais de
crédit découlant de l'utilisation d'un crédit variable.
Nous sommes d'avis que le délai prévu pourrait toutefois
être plus court, tout en offrant la même protection au
consommateur.
C'est pourquoi nous recommandons que le délai de préavis
prévu à l'article 126 du projet de loi soit réduit
à deux mois, pour ne pas dire, même, un mois.
L'expression "commerçant" dans les annexes.
Certains articles du projet de loi, en particulier les articles 108 et
116, semblent imposer je préférerais dire imposent
l'obligation de reproduire textuellement ce qui apparaît dans les annexes
du projet de loi. Or, ces annexes désignent sous le vocable
"commerçant" celui qui transige avec le consommateur.
Sans répéter ce que nous avons dit
précédemment dans le cadre de notre première
recommandation à l'effet d'exempter les coopératives de
l'application de la Loi sur la protection du consommateur, nous voulons
rappeler que les coopératives ne sont présentement
assimilées à des commerçants qu'en vertu d'une
déclaration à ce sujet insérée dans la Loi de la
protection du consommateur.
C'est pourquoi nous recommandons que les coopératives puissent,
dans tout contrat conclu en faveur de leurs membres, se désigner
autrement que par le vocable "commerçant", pourvu que le vocable
utilisé tienne compte de la nature du contrat intervenu. C'est bien
sûr que, si les caisses populaires trouvent inadmissible, non
raisonnable, d'être assimilées à des commerçants
parce que ce n'en sont pas, il ne faut pas leur demander de se déclarer;
elles peuvent peut-être accepter d'être traitées comme tel,
mais il ne faut pas leur demander de se déclarer des commerçants.
Là, cela dépasse la mesure.
Les stipulations de non-responsabilité. L'article 7, du projet de
loi se lit comme suit: "Sont sans effet les stipulations par lesquelles un
commerçant se dégage des conséquences de son fait
personnel ou de celui de ses représentants."
Cet article, tel que rédigé, pouvant s'appliquer à
tout genre de contrat de service, nous voudrions souligner certaines
conséquences de son application à certains services
présentement offerts par les caisses populaires à leurs membres.
Nous nous contenterons, à cet égard, de citer deux exemples: la
location de coffrets de sûreté et l'acceptation de contre-ordres
de paiement. Voilà deux cas où la caisse populaire ne pourrait,
sans faire montre d'imprévoyance, accepter toutes les
conséquences qui en découlent. En effet, comment la caisse
populaire pourrait-elle, par exemple, se tenir entièrement responsable
des effets déposés sans son intervention dans un coffret de
sûreté, ou encore se tenir responsable des recours auxquels
pourrait prétendre le détenteur d'un ordre de paiement mis en
circulation sans son intervention?
C'est pourquoi, nous recommandons que les caisses d'épargne et de
crédit soient exemptées des dispositions de l'article 7 du projet
de loi, lorsqu'elles transigent avec leurs membres.
Concernant les permis. Les articles 236 et 238 du projet de loi imposent
aux commerçants qui concluent des contrats de prêt d'argent
l'obligation d'obtenir un permis auprès du directeur de l'Office de la
protection du consommateur et même, le cas échéant, de
fournir un cautionnement.
Les caisses populaires étant soumises au droit de surveillance du
ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions
financières et détenant déjà un permis de la
Régie de l'assurance-dépôts du Québec, nous devons
nous opposer fermement à ce qu'elles puissent être tenues
d'obtenir un second permis qui n'accorderait d'ailleurs aucune protection
additionnelle à leurs membres.
C'est pourquoi nous recommandons que les caisses d'épargne et de
crédit soient exemptées des dispositions des articles 236
à 250 du projet de loi, concernant les permis.
La publicité.
L'article 161 du projet de loi se lit comme suit: "Nul ne peut faire de
la publicité informant les consommateurs sur les biens et services
qu'ils peuvent se procurer au moyen du crédit qu'on leur offre."
Tout en approuvant la répression des pratiques abusives en
matière de publicité, en particulier celles qui peuvent inciter
le consommateur à faire un usage inconsidéré ou
immodéré du crédit, nous voulons être assurés
que les caisses populaires pourront continuer à informer leurs membres
des bienfaits de l'épargne et d'un usage judicieux du crédit.
Nous croyons, en effet, qu'une saine éducation à
l'épargne et au crédit ne doit pas être confondue avec
l'incitation à obtenir, peu importent les besoins ou les moyens
réels du consommateur, la jouissance immédiate de biens qui ne
sont pas essentiels à son mieux-être. Il serait cependant
préjudiciable au consommateur d'empêcher qu'il soit informé
des avantages qu'il pourrait retirer d'un usage raisonnable du crédit,
par exemple, en vue de la consolidation de ses dettes.
C'est pourquoi nous recommandons que l'article 161 du projet de loi soit
modifié pour préciser la pratique interdite qu'il vise,
c'est-à-dire l'incitation à faire un usage du crédit pour
l'obtention immédiate de biens matériels particuliers.
D'autre part, l'article 155 du projet de loi est à l'effet de
défendre à un commerçant de faire toute publicité
sans dévoiler en particulier sa qualité de commerçant et
son adresse.
Selon nous, cet article ne devrait pas s'appliquer à la
publicité dite "institutionnelle" comme celle, par exemple, que fait une
union régionale pour ses caisses affiliées ou la
fédération pour l'ensemble du mouvement des caisses populaires
Desjardins. Par exemple, faire connaître les services, une image du
mouvement.
C'est pourquoi nous recommandons que les fédérations
régies par la Loi des caisses d'épargne
et de crédit soient exemptées des dispositions de
l'article 155 du projet de loi.
Les comptes en fiducie.
L'article 177 du projet de loi précise que les comptes en fiducie
dont il traite doivent être détenus dans une banque à
charte ou autre institution autorisée par la loi à recevoir des
dépôts.
Les caisses d'épargne et de crédit étant
également autorisées par la loi à recevoir des
dépôts, nous recommandons que l'article 177 du projet de loi soit
modifié pour y désigner nommément les caisses
d'épargne et de crédit.
Conclusion.
En terminant, nous voulons de nouveau féliciter le
législateur pour l'intérêt qu'il manifeste à
l'endroit du consommateur en présentant ce nouveau projet de loi. Qu'il
nous soit permis cependant d'insister de nouveau sur l'inopportunité
d'assujettir les coopératives du Québec à la
réglementation concernant la protection du consommateur. D'ailleurs, la
simple constatation du nombre des exemptions actuelles, dont la liste
apparaît en annexe, et de celles demandées ci-dessus ne
confirme-t-elle pas notre prétention que les opérations des
coopératives ne sont pas celles qu'entend viser la Loi sur la protection
du consommateur?
Nous sommes donc confiants que notre point de vue pourra être
partagé par cette commission et que pourra se poursuivre librement
l'action bienfaisante des caisses populaires en faveur de leurs membres et de
la communauté québécoise.
Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. Charron.
Mme le ministre.
Mme Bacon: J'aimerais faire remarquer que, tout comme le
législateur, la Fédération du Québec des caisses
populaires Desjardins favorise l'équilibre des forces entre le
consommateur et le commerçant, tout en nous faisant part ce matin de
certaines préoccupations qu'elle voudrait nous voir partager concernant
différents articles de la loi qui la touchent
particulièrement.
Il est évident que le ministère prend bonne note de votre
demande d'exemption pour les coopératives, tel que vous le stipulez
à la page 4. Vous faites une seconde recommandation, à savoir que
l'actuel règlement général doit être
rédigé à nouveau et n'entrer en vigueur qu'après la
consultation de tous les intéressés. J'aimerais mentionner que
nous sommes actuellement à revoir la réglementation. Nous pouvons
peut-être affirmer deux choses ce matin. D'abord, notre intention a
été de rapatrier le droit substantif à l'intérieur
de la loi et nous avons aussi l'intention de rendre plus claire et plus facile
la compréhension de l'actuel règlement. En deuxième lieu,
quant à votre proposition de soumettre a consultation les futurs
règlements avant leur adoption, j'aimerais mentionner qu'il s'agit
là d'une suggestion qui nous a été faite par plusieurs
groupes, plusieurs associations. Nous l'avons entendue à plusieurs
reprises ici et nous prenons aussi bonne note de cette suggestion que vous nous
faites ce matin.
Aux pages 5 et 6 de votre mémoire, vous mentionnez les
prêts d'argent consentis à l'avance. Dans l'esprit du
législateur, le prêt d'argent consenti à l'avance a
toujours été un contrat de prêt d'argent. L'article 94
s'applique à ce moment-là. Nous aimerions toutefois que vous nous
précisiez votre pensée sur ce sujet. Je pense que vous avez
donné certaines explications, mais vous entretenez une crainte au sujet
de l'article 117 et de l'article 94 du projet de loi. Je pense que cette
crainte résulte d'une difficulté de compréhension de ces
articles.
Pourriez-vous préciser davantage votre pensée au sujet de
ces craintes que vous entretenez quant aux articles 94 et 117?
M. Tardif (Louis): Oui, madame. En fait, actuellement, par
l'interprétation que nous donnons et que nous avons d'ailleurs
communiquée aux conseillers juridiques de votre ministère, nous
croyons que par application des articles 24g) et 4.11 du règlement,
actuellement, il n'est pas possible à une caisse populaire de consentir
une ouverture de crédit à un de ses membres pour la raison que
pour calculer le taux de crédit, il faut connaître "le solde
à recouvrir je cite le texte du règlement à
la fin de la période précédente". Ce qui fait qu'on
pourrait imaginer qu'un membre d'une caisse populaire, par exemple, emprunte la
somme de $1000, disons le 5 du mois, qu'il rembourse avant le 30 du mois et ce
serait un prêt sans intérêt.
Or, dans une caisse populaire, il y a un principe sacré, c'est
l'équité, le traitement égal entre les membres.
Jusqu'à maintenant, cela a été un obstacle qui a
empêché la caisse populaire de fournir un des services pour
lesquels elle existe, c'est-à-dire fournir un crédit.
Et cette ouverture de crédit, évidemment, on peut le dire,
est demandée, sollicitée, attendue des membres.
Mme Bacon: D'accord. A l'article 126, vous avez mentionné
de réduire certains critères. On se basait sur six mois, vous
trouvez cela excessif, maintenant vous mentionnez deux mois dans votre
mémoire. Ce matin, vous réduisez encore à un mois le
délai. Est-ce qu'il y a des raisons bien spécifiques, autres que
celles mentionnées dans le mémoire, pour la réduction du
délai?
M. Morin (André): C'est une question de fluctuation du
taux d'intérêt, madame le ministre. L'impression que l'on a, c'est
que si les traiteurs sont obligés de préciser six mois à
l'avance le taux auquel ils prêteront, la tendance sera beaucoup plus
à vouloir se protéger contre ces fluctuations-là et
demander un taux plus élevé que de demander un taux de
marché. Il nous semble, de notre côté, que ce qui serait le
plus réaliste, c'est que les emprunteurs payent le taux que coûte
l'argent suivant la situation présente, et c'est peut-être ici un
taux variable qui serait le plus intéressant. En logique
théorique, je comprends qu'un taux variable comporterait d'autres
problèmes, mais quand vous nous parlez d'un délai de six mois
pour un changement, je trouve
qu'on est allé à l'autre extrême du taux variable
qui s'ajusterait instantanément suivant les conditions de
marché.
Les caisses populaires sont des coopératives d'épargne
aussi, en même temps que des coopératives de crédit. Comme
elles ont aussi des épargnants et des emprunteurs, c'est la question
d'équité qui nous préoccupe ici. On ne voudrait pas
garantir à des emprunteurs un taux qui pourrait, à un moment
donné, à cause des changements rapides dans la situation
monétaire, comporter des inconvénients pour les
épargnants.
Mme Bacon: Vous réduisez ce matin jusqu'à un mois,
si j'ai bien compris, M. Charron. Vous mentionniez deux mois dans votre
mémoire, ce matin, même un mois. Aucun délai?
M. Charron (Paul-Emile): Deux mois. J'avais pensé que
c'aurait été suffisant, mais on dit: pas plus que deux mois.
J'avais même pensé qu'un mois aurait été suffisant.
Je pense que c'est une incitation au prêteur à se justifier,
à trouver des raisons pour demander le taux le plus élevé,
pour ne pas se faire prendre dans les fluctuations à la baisse. Quand
cela fluctue à la baisse il peut se faire prendre, alors il dit: Je vais
demander le taux le plus élevé. Cela peut être
interprété comme une incitation à demander le taux le plus
élevé. Alors on dit, on peut réduire la période de
protection du consommateur, c'est l'objectif, sans causer préjudice,
évidemment, au prêteur. Je pensais qu'une période d'un mois
c'est pas mal suffisant, mais le mémoire dit deux mois. Mon opinion est
qu'un mois ce serait même suffisant. C'est une question
d'appréciation.
Mme Bacon: D'accord. Vous nous suggérez, à la page
8 de votre mémoire, de vous exempter de l'article 7. Est-ce que la
position de principe de votre fédération, face aux clauses de
non-responsabilité pour lesquelles un commerçant se dégage
ou son représentant, est-ce que cette position est due à
l'expérience que vous avez? Vous mentionnez certaines raisons, dans
votre mémoire, mais je pense aux clauses de non-responsabilité.
Est-ce que vous maintenez encore cette position?
M. Tardif (Louis): Oui, madame. En fait je ne dirai pas que c'est
une objection de principe. Je pense que, probablement, vous et moi sommes
d'accord que celui qui a le gros bout du bâton ne doit pas indûment
écarter sa responsabilité pour les actes qu'il pose. Par contre
ce que nous voulons dire, c'est que, dans les opérations quotidiennes,
j'en ai donné deux ici, je pourrais en ajouter d'autres, il y a
plusieurs cas où vraiment la caisse doit dégager sa
responsabilité. Si vous voulez, je vais vous donner un autre exemple que
nous n'avons pas mentionné ici dans le mémoire; la question des
dépôts de nuit.
La caisse est fermée, quelqu'un va déposer un sac dans une
chute pour recevoir un dépôt de nuit. Il est bien sûr que la
caisse doit dire, dans un document qu'elle signe avec son membre, qu'elle n'est
pas le mandataire du membre jusqu'au moment où le sac sera ouvert et
qu'on pourra constater qu'est-ce qu'il y a dans le sac. Alors il y a des
situations comme cela où, vraiment, la caisse, comme nous le disons dans
le mémoire, ferait montre d'imprévoyance. Il serait même
injuste pour les autres membres de la coopérative si on ne
prévoyait pas que, dans certains cas, la caisse ne peut pas assumer
certaines responsabilités tout en donnant des services à ses
membres. Elle veut bien rendre service à ses membres, mais à un
moment donné il faut quand même respecter l'équilibre entre
ces mêmes membres. C'est un peu notre point de vue madame.
Mme Bacon: D'accord. A l'article 161, comme d'autres groupements,
vous nous mentionnez ce matin ces difficultés d'interprétation
que nous sommes à étudier présentement, puisque
déjà, au cours des dernières semaines, on nous l'a
mentionné à plusieurs reprises. Quant à l'article 155,
c'est un peu la même chose. Même si on a tenté de rendre le
texte le plus clair possible, le plus précis possible, il y a aussi des
difficultés d'interprétation. Nous allons réétudier
la rédaction de l'article 155. A l'article 177, vous nous avez fait une
demande. Je pense qu'on doit considérer d'ajouter aussi les caisses
populaires à l'article 177.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron (Claude): Merci, M. le Président. Je veux
remercier les représentants des caisses populaires pour les remarques
qu'ils nous ont faites sur le projet de loi no 7. Puisque Mme le ministre a
abordé certaines questions précises, j'en aurai quelques-unes
aussi, mais j'aimerais d'abord aborder la question de principe, en fin de
compte, que vous posez à l'entrée de votre mémoire et,
où, à toutes fins pratiques, vous sollicitez je pense que
le texte est suffisamment clair pour mériter d'être rappelé
que les coopératives ne soient pas assujetties aux dispositions
de la Loi sur la protection du consommateur. Lorsqu'on prend connaissance des
remarques précises sur certains aspects de la loi, nous sommes
portés d'ailleurs, on en a pris note des deux côtés
de la table à vous donner raison, à l'occasion, sur les
dispositions précises. Quant au principe général, de la
façon dont il est formulé, il nous apparaît peut-être
un peu gros pour être accepté ainsi.
En effet, il est vrai que les coopératives ont d'abord des
responsabilités dans l'intérêt de leurs membres; c'est ce
qui fait leur valeur sociale, tout autant qu'économique dans une
collectivité. Il reste que ce sont aussi, une fois que les membres les
ont constitués, des services publics. En ce sens, elles participent et
ont affaire dans la vie publique avec des gens qui ne sont pas
nécessairement les membres de ladite coopérative. En ce sens,
parce qu'elles ont également ce rôle en plus du rôle interne
entre leurs membres, elles peuvent à l'occasion porter lésion
à certains consommateurs et avoir des comportements qui, sans dire
qu'ils nuisent à l'ensemble des consommateurs,
peuvent à l'occasion leur porter préjudice. Elles doivent
donc être considérées comme n'importe quelle autre
institution de crédit ou bancaire. J'ai sursauté à la
lecture du texte, de la façon dont c'est affirmé aussi
catégoriquement. Il faudrait que vous reveniez peut-être pour un
moment sur cette affirmation de principe pour nous redire pourquoi les
coopératives, parce qu'elles sont des coopératives, ne devraient
pas être assujetties aux dispositions de la Loi sur la protection du
consommateur.
M. Charron (Paul-Emile): II faut bien se comprendre. C'est bien
clair que j'ai signalé que les coopératives étaient des
associations de consommateurs. C'est dit clairement et formellement dans le
mémoire, dès le point de départ, que nous sommes en faveur
du principe de la Loi sur la protection du consommateur et même que les
objectifs que nous poursuivons rejoignent ceux que la Loi sur la protection du
consommateur poursuit. Ce qui nous contrarie, ce qui contrarie les caisses,
c'est que, dans l'entrée de cette loi, on leur dit: Vous vous assimilez
à des commerçants et vous devez vous déclarer
commerçants.
En d'autres termes, il faudrait peut-être nous trouver une raison
dans l'association de façon à ne pas nous contrarier. Il y a des
positions de principe; nous sommes d'accord sur les principes. Il y a aussi des
positions de principe qui disent dans une loi: Vous n'êtes pas des
commerçants, vous n'êtes pas des établissements financiers,
etc. Dans une loi, on dit cela et, dans une autre loi, on dit: N'oubliez pas
que vous êtes d'autre chose. On ne peut pas être aure chose. Si je
suis du sexe mâle, je suis du sexe mâle. Ce n'est pas une loi qui
va changer cela, pas même une loi du Parlement britannique. Il peut tout
faire, excepté changer un homme en femme. Ne nous demandez pas de
changer une nature. Nous n'avons pas de pouvoir substantiel,
c'est-à-dire de changer de nature. Nous défendons notre nature.
En d'autres termes, nous ne pouvons pas demander à nos
sociétaires: Déclarez-vous, considérez-vous comme des
commerçants et devenez des commerçants. Cela, on n'en veut pas.
Qu'on nous trouve une autre raison; qu'on nous ajoute quelque part, très
bien, mais ne nous demandez pas de nous assimiler.
Qu'on nous assimile, d'accord, mais ne nous demandez pas de
déclarer dans des documents que nous sommes telle chose alors que nous
ne sommes pas telle chose. Ce n'est pas acceptable, cela ne paraît pas
pensable ni raisonnable.
M. Charron: Je prends bonne note de votre remarque.
M. Charron (Paul-Emile): Je pense qu'on se comprend.
M. Charron: Oui. Mais je voudrais quand même obtenir un
aveu de votre part. Vous admettrez sans doute, tout ce que vous avez dit
étant vrai, qu'il arrive que dans la réalité
concrète, dans la transaction entre une coopérative et un citoyen
X de telle ville Y du Québec, le rapport soit exac- tement le
même. Ce n'est qu'accidentel que l'endroit où il s'est
procuré un bien soit géré d'une façon
coopérative alors qu'à la porte à côté
où il aurait pu se procurer le même bien, probablement à un
prix plus élevé, il aurait eu affaire à une entreprise
capitaliste traditionnelle.
Pour lui, lorsqu'il s'agit d'assurer la garantie de son bien,
l'important est qu'il en a pour son argent, autrement dit qu'il ne s'est pas
fait rouler. Si l'appareil est défectueux, qu'il puisse le retourner. Si
la garantie est expirée, qu'il puisse bénéficier de toutes
les garanties de la loi. Cela devient j'espère ne pas vous
blesser en disant cela secondaire que l'endroit où il l'a
acheté soit géré d'une façon coopérative ou
soit la propriété d'un anglo-saxon de l'ouest de la ville de
Montréal. Quand on se met sous l'angle du consommateur, il a droit
à une protection. Il peut avoir acheté dans une
coopérative et dans ce sens, pour lui, dans son angle je
comprends bien le vôtre vous êtes un commerçant comme
les commerçants au sens de la loi. C'est la distinction qui est faite
dans le sens de la loi.
M. Charron (Paul-Emile): En d'autres termes, la personne dont
vous parlez, son langage et son attitude impliquent qu'il ne fait pas la
différence entre une coopérative financière et une autre
institution financière qui agit comme un intermédiaire financier
en empruntant des fonds du public, et c'est là qu'intervient la Loi de
la protection du consommateur. C'est un intermédiaire financier qui peut
abuser, d'où nécessité d'avoir une loi avec laquelle nous
sommes d'accord.
Mais, nous, nous ne sommes pas des intermédiaires financiers au
sens de la loi, à cause de l'opération commerciale. C'est
là-dessus qu'il faut s'entendre; si on comprend cela, on va comprendre
le reste et on trouvera peut-être des moyens. En d'autres termes, nous
n'avons aucune espèce d'objection, nous sommes soumis à la loi,
actuellement. Il faudrait présenter cela de façon à ce que
ceux qui sont concernés disent: D'accord, cela fonctionne, mais ne nous
demandez pas des choses qu'on ne veut pas faire, parce que cela nous contrarie
dans notre propre nature. Vous comprenez? Trouvez d'autres arguments,
mettez-nous dans la loi, si vous voulez, mais trouvez-nous une raison
acceptable. Ne nous demandez pas de nous déclarer d'une autre nature.
J'insiste sur ce point, l'activité commerciale et l'activité
coopérative, ce n'est pas de même nature. La caisse populaire,
comme corporation qui enregistre les opérations, exactement comme la
banque, c'est une corporation, une entité juridique, mais ce n'est pas
une entité financière en ce sens. Je vais vous expliquer
pourquoi.
Les sociétaires mettent leurs épargnes en commun justement
pour assurer leur propre protection en se prêtant leurs propres
épargnes. Il y a une assemblée générale des
sociétaires qui décide des normes et il y a une commission de
crédit qui est mandatée pour faire respecter les normes. Les
sociétaires, s'ils ne sont pas satisfaits parce qu'ils ne sont pas bien
protégés, s'en viennent en assemblée
générale et ils se plaignent. Cela fait une grosse
différence.
Le commerce de l'argent présuppose trois choses: un
prêteur, un emprunteur et une personne intermédiaire, un organisme
financier intermédiaire qui empoche la différence. Pour
l'empêcher d'empocher trop ou d'abuser, on met une loi pour faire la
protection qui va se situer entre les deux. Nous n'avons pas besoin de cela,
parce que l'abus n'est pas possible. Ce sont les gens qui se prêtent leur
argent. Il n'y a pas trois institutions, il n'y a pas un prêteur et il
n'y a pas un emprunteur et un organisme financier qui empoche et qui peut
abuser du prêteur et qui peut même abuser de l'emprunteur.
D'où la nécessité d'avoir une loi, mais on dit qu'on n'est
pas cela. Nous sommes tout à fait d'accord, il y a
nécessité d'assurer la protection du consommateur, d'autant plus
que nous en sommes. On ne peut tout de même pas se renier
nous-mêmes. On se dit: Faites cela de façon à ce que ce
soit accepté ou acceptable aux gens de la base. Ne leur demandez pas de
changer de nature ou de déclarer surtout qu'ils sont d'une autre nature.
Je peux vous en dire plus.
M. Harvey (Charlesbourg): M. le Président, si mon
collègue me le permet. Sur le même sujet, prenons à titre
d'exemple, quelqu'un qui achète chez Cooprix à Montréal,
boulevard Legendre, alors que pour le financement des biens meubles les
prêts sont assurés par le mouvement coopératif ou les
caisses. A ce moment-là le consommateur bénéficie, en
vertu de la loi 45, des mêmes privilèges de la période de
réflexion; il a aussi les mêmes droits de recours, toujours en
vertu de la loi 45, et vous voudriez, parce que c'est tout l'ensemble du
financement du groupe, que ce soit exclu. Je dis qu'on ne peut pas être
enceinte seulement ou un peu; on l'est ou on ne l'est pas. Je veux dire que je
suis d'accord pour que vous préconisiez une protection du consommateur.
Vous répondez très certainement à des besoins. Je suis un
sociétaire d'une caisse populaire et je m'en réjouis, mais d'un
autre côté je pense que dans le contexte présent le
consommateur, ici, c'est lui qu'on vise; les mêmes prérogatives
imposées à l'entreprise soi-disant capitaliste doivent être
les mêmes profils d'exigences pour l'entreprise coopérative. C'est
mon point de vue, M. Charron.
M. Morin: M. le Président, si vous me le permettez...
Ecoutez, le problème là-dessus, ce n'est pas que les caisses
populaires veulent faire n'importe quoi. Les caisses, je pense, avec leur 75
années d'expérience, ont prouvé qu'elles étaient
préoccupées de la protection du consommateur.
Mais regardons le problème juste en face au plan légal;
vous avez deux lois dans la province de Québec gui sont
administrées par le même ministère. La loi des caisses
d'épargne et de crédit, à l'article 76, dit bel et bien
que les activités des caisses d'épargne et de crédit ne
sont pas réputées faire l'objet d'un commerce. Vous avez une
autre loi, celle qui est sur la table aujourd'hui, pour vous dire qu'au
départ lorsqu'on parlera de commerçants, cela voudra dire caisses
populaires. Il va falloir trancher quelque part.
Maintenant, les caisses ne cherchent pas, encore une fois, à
faire n'importe quoi et éviter tou- tes les législations. Ce qui
leur répugne, c'est que vous avez 16 000 bénévoles qui ont
toujours voulu travailler pour les autres, qui ont toujours voulu travailler
pour une formule coopérative et qui se sont tournés vers les
autres. Or, vous arrivez avec une loi et vous les assimilez à des
commerçants. C'est là que le bât blesse et c'est là
que cela fait mal.
Si vous dites que la loi touche les commerçants et les caisses
populaires, évitez de nous obliger à nous appeler
commerçants quand on fait une transaction avec un de nos membres dans
les contrats; évitez de dire toujours: Commerçants veut dire
caisses populaires, car on va finir par créer le syllogisme que les
caisses populaires sont des commerçants comme les autres. Cela fait 75
ans qu'on essaie de prouver que nous ne sommes pas des commerçants comme
les autres. Quand on a dit non à la carte de crédit, je pense
qu'on a manifesté une fois pour toutes à toute la province que
nous n'étions pas des commerçants comme les autres. Votre loi
dit, dès le départ: Chaque fois que vous verrez le mot
"commerçants" pensez aux caisses populaires, et cette loi c'est pour la
protection du consommateur. On le protège contre qui? Contre des
exploiteurs. Vous ne parlez pas d'exploiteurs là-dedans, vous parlez de
commerçants et chaque fois que vous lisez "commerçants", vous
pensez caisses populaires. C'est cette image, caisses populaires égalent
commerçants qui est le problème.
M. Charron: M. le Président, je remercie M. Morin de cette
clarification de la position des caisses populaires. J'ai une seule question
sur un article précis du projet de loi; peut-être la conclusion de
votre intervention m'amène-t-elle à l'avancer encore plus. C'est
sur votre remarque sur l'article 161, qu'on a déjà entendue
à la table de cette commission depuis que nous l'étudions. Je
cite l'article: "Nul ne peut faire de la publicité informant les
consommateurs sur les biens et services qu'ils peuvent se procurer au moyen du
crédit qu'on leur offre". J'ai mal compris l'inquiétude des
caisses populaires sur l'application éventuelle de cet article parce que
je n'y vois pas de rapprochement avec la publicité du crédit
lui-même à l'intérieur d'une caisse populaire,
c'est-à-dire votre droit d'annoncer le taux d'intérêt et
les conditions fixés par la commission de crédit de chacune des
caisses. Cet article n'interdit pas la publicité du crédit, si je
l'ai bien compris. Il interdit de faire de la publicité sur les biens et
services que le crédit peut procurer. Le crédit demeure toujours
un élément de la vie économique habituelle je suis
assez bien placé pour vous en parler ce qui veut dire qu'on peut
certainement, à l'intérieur des caisses populaires, continuer
à affirmer, surtout si on a un taux avantageux par rapport à des
concurrents, la qualité du taux et les conditions d'admission au
crédit de la caisse populaire sans contrevenir à l'article 161,
fût-il adopté dans sa forme actuelle.
Mme Joubert (Madeleine): L'interprétation que nous
faisions de l'article 161 était qu'il était impossible de faire
de la publicité sur les services
des caisses. Or, les caisses offrent des services d'épargne et de
crédit. Ce que nous demandons, c'est une précision dans la loi,
indiquant, justement comme vous le dites, qu'il est possible de faire de la
publicité des services des caisses, parce que nous avons une
publicité indiquant qu'il y a tel ou tel service à votre
disposition. Ce n'est pas clair, selon nous, dans l'article 161 de la loi. Nous
souhaiterions avoir des précisions. Cependant, quant à la
publicité incitative, nous sommes d'accord avec le projet de loi.
M. Charron: II est évident que, si les caisses populaires
se mettaient à dire Dieu merci, elles ont échappé
à ce genre de publicité que je connais Pourquoi pas trois
semaines au soleil en plein mois de février, par exemple, adressez-vous
ici, endettez-vous et partez c'était ce genre de publicité
je pense qu'on informerait les consommateurs sur les biens et services,
c'est-à-dire un voyage au soleil, par exemple, qu'ils peuvent
acquérir en s'endettant. Cependant, je n'ai jamais vu ce genre de
publicité dans les caisses populaires. S'il faut travailler sur
l'article pour atteindre très clairement ce sens, on le fera, mais on ne
veut certainement pas interdire à une caisse d'afficher chez elle ou
d'informer ses sociétaires, les membres, qu'à compter de telle
date, par exemple, le taux d'intérêt sera de tel montant et que la
commission de crédit a fixé tel et tel nouveaux critères.
Il n'y a rien, il me semble, qui devrait interdire cela. Si je suis
sociétaire d'une coopérative d'épargne et de
crédit, je veux bien savoir ce que me donne mon épargne dans
cette coopérative et mes chances de crédit là-dedans. Cela
ne devrait être, en aucun temps, illégal. S'il faut travailler la
loi, disons qu'on prend bonne note de votre inquiétude et qu'on
travaillera là-dessus pour l'éviter.
M. Charron (Paul-Emile): Une clarification. M. Charron: Je
vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député d'Abitibi-Ouest.
M. Boutin: Je reviens à un point que vous avez
souligné tout à l'heure comme exemple: les dépôts de
nuit. Je suis tout à fait d'accord, parce qu'ordinairement la
majorité des gens qui utilisent ce procédé est dans le
commerce en général ou un genre de commerce quelconque. Ils
doivent se prémunir contre des vols quelconques ou des dommages en
s'assurant à cet effet. Il y a un genre d'assurance qui est
prévue pour les gens qui, étant dans certaines activités,
sont obligés souvent de faire un dépôt de nuit. Que vous
soyez responsables dans un cas comme cela, je suis d'accord comme pour
n'importe quelle autre institution.
Cependant, je reviens aux avancés de mon collège de
Saint-Jacques et je suis un peu d'accord avec ce qu'il disait au début.
Vous avez une définition, d'un côté, et vous avez ce que
vous faites, de l'autre côté. C'est pour cela que je me dis que,
dans le cas présent, vous faites des transactions commerciales, vous
faites des transactions comme n'importe quel autre. Je suis membre et, quand
j'ai obtenu mon premier prêt à la caisse populaire, on a dit: On
se prête à nous-mêmes. Je n'étais pas
sociétaire et je commençais dans l'affaire. Il y a seize ou
dix-sept ans de cela. On m'a dit: D'accord, cela va te coûter $5; on va
te donner une part sociale et on va te prêter le montant d'argent.
Qu'est-ce que tu veux: $1500 ou $2000? J'ai choisi ce que j'ai voulu, mais je
peux vous dire, par exemple, que j'ai vu, il y a peu de temps, des caisses
populaires qui prêtaient à des taux plus élevés que
des banques. C'est entendu, si tu n'as pas ta part sociale de $5, cela ne veut
pas dire grand-chose si on regarde le coût d'intérêt que tu
dois payer en surplus.
C'est pour cela que je me dis que, d'un côté, ce que vous
avez avancé tout à l'heure me porte à penser: Est-ce que
vous voudriez qu'on définisse, dans ce projet de loi, le mot
"commerçant" tel qu'il est en ajoutant "les caisses d'épargne et
de crédit"?
M. Charron (Paul-Emile): D'abord, le mot "commerçant"
n'est pas défini dans la loi. Ce serait peut-être bon qu'il soit
défini. Il s'agit des relations du commerçant avec le
consommateur.
M. Boutin: C'est vrai.
M. Charron (Paul-Emile): Le consommateur est défini, le
commerçant ne l'est pas. Et vous nous demandez, par ailleurs, de nous
identifier à un commerçant. On ne peut pas accepter cela. Alors,
il s'agirait de trouver un autre moyen, c'est tout.
D'ailleurs, vous, ce n'est pas la question des principes que vous posez.
C'est la question du résultat, de l'efficacité de l'application
des principes.
M. Boutin: Oui.
M. Charron (Paul-Emile): Mais nous, on dit: Comme institution, la
caisse populaire, comme intermédiaire juridique, corporation, le
surplus, elle fait, disons, les mêmes opérations, de la même
manière que le voisin, mais ce qui fait la différence de nature,
c'est que le résultat est réparti aux membres. On ramène
les opérations au plus simple. Donc, les abus ne sont pas possibles ou,
s'il y a des abus, le mécanisme fait la correction en allant se plaindre
au conseiller de surveillance ou à l'assemblée
générale qui peut le corriger. Autrement, si cela ne fonctionne
pas, cela veut dire que le mécanisme n'est pas bon.
Si vous croyez que, vraiment, la coopérative ne donne pas les
résultats qu'elle devrait en regard de la protection du consommateur,
mettez-la dans la loi, si vous le voulez, mais pas en demandant de dire: Elle
est d'une autre nature et elle fait des opérations commerciales.
M. Boutin: Je comprends que c'est un dilemme légal bien
plus qu'autre chose. En fait, la définition, je me dis...
M. Charron (Paul-Emile): Non. Si c'était juste le point de
vue légal, c'est-à-dire le vêtement, cela ne toucherait pas
au moine! On ne discuterait pas là-dessus. C'est la substance qui...
M. Boutin: Vous disiez, tout à l'heure: Cela revient aux
membres. On sait une chose; c'est qu'une caisse qui prend de mauvaises
décisions pour ses membres, c'est quand même une chose
coûteuse. On a vu des caisses populaires qui, depuis le début,
n'ont jamais remis quoi que ce soit à leurs membres et elles ont fait
des choses qui ont été très coûteuses pour leurs
membres. Ce n'est pas parce qu'elles ont fait des faillites, ce n'est pas
possible... Possible dans le système actuel. Mais il y a quand
même des façons d'administrer. Aujourd'hui, je prétends que
beaucoup de coopératives devraient suivre des principes
élémentaires d'administration autant que n'importe quel autre
organisme.
M. Charron (Paul-Emile): C'est cela, oui.
M. Boutin: On a vu tellement de faillites dans les
coopératives, d'un bord et de l'autre. Moi, je fais partie de trois
coopératives. Je le sais. Je pense que c'est la Loi des institutions
financières, au départ, qu'il faudrait peut-être
regarder.
M. Charron: (Paul-Emile): Ce que vous signalez ne relève
pas de cette loi. Cela relève de l'application des autres lois.
M. Boutin: Oui.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Taschereau.
M. Bonnier: Taschereau, M. le Président. C'est tout
près de l'Abitibi!
Je pense que la question soulevée par le député de
Saint-Jacques et reprise par quelques-uns des membres de cette commission
mérite un examen un peu plus approfondi. Je pense bien que les
représentants de la fédération ont très bien
expliqué qu'il ne s'agissait pas d'un problème juridique mais
d'un problème d'essence. Il faudrait pratiquement avoir recours à
tout un cours de coopé-ratisme pour comprendre que la distinction
fondamentale repose davantage sur le contrôle que les membres peuvent
avoir, pas au niveau de la comparaison des services. Je pense que,
là-dessus, il y aurait peut-être d'autres réflexions
à faire.
Il y aurait aussi le fait qu'il ne faudrait peut-être pas associer
là-dessus, peut-être que la remarque de l'honorable
député de Charlesbourg était juste caisse populaire
et d'autres types de coopératives, en particulier dans le domaine de la
consommation où, là, on est assez large quant aux services.
Là-dessus, je pense bien que le député de Saint-Jacques
avait raison. Un certain nombre de coopératives donnent des services pas
simplement à leurs membres. Cela, je trouve que c'est
anticoopératif.
Pour ma part, en tout cas, j'ai une couple de questions à vous
poser mais avant de les poser, je voudrais simplement dire ceci: Je crois que
si c'est le fonctionnement des coopératives qui est fallacieux, qui
n'est pas concordant avec les objectifs qui sont poursuivis et avec la notion
d'une coopérative, c'est là-dessus qu'on devrait travailler.
Je pense que la remarque de M. Charron est juste, c'est l'observance, le
fonctionnement et l'administration des lois coopératives qu'il faudrait
surveiller de plus près. Mais, lorsqu'on parle d'autres types de lois
telles que celle de la protection du consommateur, on devrait certainement
penser différemment en ce qui regarde une coopérative et un autre
type de commerce, ou un autre type d'entreprise, devrais-je dire.
J'ai deux question. Vous savez que cette loi ne s'applique pas aux
hypothèques de premier rang. Je me demandais si vous aviez des
commentaires à faire quant aux hypothèques de deuxième
rang qui, elles, sont soumises à cette loi. Je sais qu'un certain nombre
de caisses populaires font quand même des prêts avec garanties
hypothécaires de deuxième rang. Est-ce que selon votre point de
vue cela devrait également être soumis ou non?
C'est un point que vous n'avez pas examiné?
M. Charron (Paul-Emile): Non. Pour ma part, on n'a pas fait un
examen...
M. Croteau (René): M. le Président, c'est exact que
certaines caisses font des hypothèques de deuxième rang mais
c'est un volume qui est relativement minime par rapport à
l'activité principale. La tradition dans les caisses c'est qu'elles font
des hypothèques de premier rang. Pour répondre de façon
précise à la question posée, c'est qu'on n'a pas eu
d'échange à cet effet. Cela signifie pour nous, avec les
consultations qui ont été poursuivies dans toutes les
régions, que cela ne semble pas poser de problème actuellement
dans les caisses.
M. Bonnier: Vous n'avez pas d'objection à ce que ce soit
soumis à la loi comme tel?
M. Croteau: Cela l'est déjà, la deuxième
hypothèque.
M. Bonnier: Oui. Vous n'avez pas d'objection à ce que ce
soit soumis, parce qu'on a eu des représentations...
M. Croteau: Peut-être exceptionnellement, mais j'en doute.
S'il y en a, c'est exceptionnel.
M. Bonnier: II y a une autre question aussi, M. le
Président c'est ma dernière relativement à
un système de ristourne qui est ordinairement accordée par des
institutions financières à certains commerçants, en
particulier dans le domaine mobilier. Je voudrais savoir s'il arrive qu'il y
ait des caisses populaires qui ont ce type de système avec des
commerçants de leur localité. Deuxièmement,
ce système, parce qu'il est prohibé dans le projet de loi,
serait prohibé dans l'avenir; est-ce que vous trouvez que c'est un
système qu'on devrait encourager?
M. Croteau: Si on se place toujours dans la perspective de la
protection du consommateur, c'est évident qu'il y a peut-être des
choses à examiner dans cette pratique. Mais, pour autant qu'on est
concerné on a fait des recherches; M. Morin pourra faire des
commentaires tantôt là-dessus c'est que de façon
globale il y a des caisses qui font de ces sortes de prêts, après
entente avec un commerçant, pour du mobilier de maison ou quelquefois de
l'automobile. Mais il n'y a pas de ristournes ou de commissions qui sont
versées dans le cadre de ces contrats. Il y a des implications de
coût. Pour exprimer une opinion valable, il faudrait quand même
prendre le temps de chiffrer et voir quelles sont les conséquences comme
coût additionnel ou moindre pour le consommateur, parce que c'est lui qui
est impliqué.
Je sais que M. Morin a fait des consultations aussi sur ce point en
particulier.
M. Morin (André): En fait, sur l'article 172, interdisant
les ristournes à ceux qui consentent aux garagistes des prêts au
nom d'autres institutions financières, je pense que les caisses
populaires n'ont aucune objection à cela. Comme le signalait M. Croteau,
nous n'avons pas cette politique et les prêts des caisses populaires ne
sont pas poussés par des commerçants. Un réflexe
là-dessus, c'est peut-être de réaliser que le crédit
à la consommation est de plus en plus poussé par des
commerçants ou par des garagistes ou des marchands de meubles qui
peuvent ouvrir un prêt au nom d'une institution financière presque
instantanément. On est bien conscient que le marché du
crédit à la consommation n'est plus un marché d'acheteurs
comme autrefois où ceux qui avaient besoin de crédit cherchaient
une institution financière pour obtenir le crédit
désiré; on est rendu avec un marché de vendeurs. Vous avez
des gens qui poussent le crédit. Alors cet article 172, à sa
face, nous plaît pour les caisses populaires.
Maintenant, quelle serait l'incidence pour le consommateur? Nous n'avons
pas chiffré cet aspect. Qu'est-ce que cela voudrait dire comme
économie, par exemple, pour le consommateur? Nous n'avons pas
chiffré cet aspect.
M. Bonnier: Merci.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je vais
être très bref. Je ne voudrais pas prolonger indûment ces
débats. Je crois avoir entendu mon collègue de Taschereau
et je veux bien l'avoir compris dans son préambule, dire: Le
député de Charlesbourg était juste ou est injuste. Je ne
crois pas avoir été...
M. Bonnier: Etait juste.
M. Harvey (Charlesbourg): Bon, je vous remercie.
M. Bonnier: Jamais je n'aurais dit "injuste".
M. Harvey (Charlesbourg): C'est une chose que je voulais
clarifier dès le départ. Je voyais justement, à la page 11
et c'est là le sens de ma question et vous m'avez rendu
l'exemple très facile dans votre mémoire, nous sommes tous sur
les règles du jeu qui devraient être observées par
l'ensemble du mouvement coopératif quel qu'il soit, à quelque
niveau qu'il se pose. Que nous soyons au niveau des caisses populaires comme au
niveau du mouvement oeuvrant dans l'alimentation je nomme à titre
d'exemple la Fédération des magasins Co-Op ou dans
d'autres domaines coopératifs les coopératives agricoles,
à titre d'exemple si nous sommes coopératifs, nous le
sommes ou nous ne le sommes pas.
Lorsque nous sommes coopératifs, nous acceptons quand même
les règles du jeu à l'intérieur d'un système et
c'est là qu'a originé, je pense bien, le sens profond, le sens
social que nous devons reconnaître de créer un système de
protection du consommateur à l'intérieur du mouvement
coopératif. Pendant de longues années, vous avez
été exclusifs dans ce domaine jusqu'au jour où le
gouvernement décide lui aussi d'entrer dans ce monde puisque le
mouvement coopératif ne pouvait quand même pas couvrir l'ensemble
du territoire. A cet égard, je me souviens très bien, puisque
j'étais membre du gouvernement en 1970, que le mouvement Desjardins,
dans son ensemble, s'est prononcé à 100% d'accord sur la loi 45
du temps.
Maintenant, pour une autre raison, on nous dit, à la page 10: On
voudrait être exclu, nous, des règles de publicité ou de
promotion via l'article 55. A la page 11, on dit, tout de suite après,
quasi du même souffle: A l'article 177, alors que dans les banques
à charte on autorise les dépôts à recevoir sur les
comptes en fiducie, on voudrait, dans ce cas-là, que l'article 177 soit
changé pour inclure les caisses d'épargne et de crédit.
Là, cela couvre également votre territoire. Je pense que cela
ferait votre bonheur. Cela n'inclut pas le fait d'être mis de
côté à l'intérieur de la loi, ce que vous
réclamez dans l'article précédent.
M. Charron (Paul-Emile): Ce que nous avons demandé en
1970, quand vous étiez là...
M. Harvey (Charlesbourg): Oui.
M. Charron (Paul-Emile): Vous êtes là, d'ailleurs.
Vous continuez à l'être.
M. Harvey (Charlesbourg): Tout progresse.
M. Charron (Paul-Emile): Ce qu'on a demandé en 1970 et ce
que nous demandons aujourd'hui, c'est exactement la même chose. A ce
moment-là,
on a dit: On est pour la Loi sur la protection du consommateur. Nous en
sommes, des consommateurs. C'est sûr, au point de vue de l'épargne
et du crédit et à tous les autres points de vue, personne n'aime
être exploité, c'est certain. Là-dessus, on est
parfaitement d'accord. D'ailleurs, on le dit dans le mémoire, on rejoint
les mêmes objectifs. C'est la porte d'entrée par laquelle on passe
que nous n'aimons pas.
M. Harvey (Charlesbourg): Oui, d'accord. Mais le rôle du
gouvernement est un rôle supplétif pour l'ensemble d'une
opération.
M. Charron (Paul-Emile): Ne nous demandez pas de faire trois
tours avant d'entrer par une porte. Quand on entre par une porte, on entre
comme cela, mais on ne demande pas de faire deux tours.
M. Harvey (Charlesbourg): Je vous comprends, M. Charron, mais
vous devez sûrement, vous aussi, comprendre qu'il fallait d'abord
éclaircir si j'avais été injuste ou si j'étais
juste à l'endroit de votre mémoire.
M. Charron (Paul-Emile): Non, vous n'avez pas été
injuste.
M. Harvey (Charlesbourg): Je le comprends très bien.
M. Charron (Paul-Emile): Vous n'avez pas été
injuste.
M. Harvey (Charlesbourg): Je respecte vos réserves.
M. Charron (Paul-Emile): On s'est justement compris.
M. Harvey (Charlesbourg): Très bien, M. Charron.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. Charron, ainsi que
vos collègues pour la présentation de votre mémoire ainsi
que d'avoir bien voulu répondre aux questions des membres de la
commission.
Nous entendrons maintenant Mattel Canada Inc. M. Williams.
Le Président (M. Harvey, Charlesbourg):
Nous avons comme président à la table, je crois, M.
Lindsay Williams. On vous invite d'abord à confirmer votre
identité et aussi à nous présenter les gens qui vous
accompagnent.
Mattel Canada Inc.
M. Robb: Peut-être, M. le Président, puis-je nous
présenter. Je suis Me James Robb. Aujourd'hui, je représente la
cie Mattel. M. Lindsay Williams est le président de la compagnie Mattel
Canada Inc. Il a résidé en Australie où il était
pré- sident de la compagnie. Il y a vécu la plus grande partie de
sa vie dans l'industrie du jouet. Il y a aussi M. Conrad Dorion qui est
directeur régional de l'est du Canada, région qui comprend l'est
de l'Ontario, les Maritimes et le Québec. Il est avec la compagnie
depuis dix ans.
La présentation de la compagnie porte sur les articles 163 et 164
et sera faite par M. Dorion.
M. Dorion (Conrad): M. le Président, Mme le ministre,
messieurs de la commission parlementaire. Nous vous remercions de l'occasion
qui nous est donnée d'exprimer nos vues sur ce projet de loi, lequel
aura des effets désastreux pour Mattel Canada, car notre seul revenu
provient du commerce des jouets.
Nous avons présenté un mémoire à cette
commission, lequel réfute les arguments principaux favorisant
l'interdiction de la publicité destinée aux enfants. Je n'ai pas
l'intention de vous lire ce mémoire, mais tout simplement de
détailler certains points. Je crois qu'il existe dans l'esprit de
beaucoup de gens une fausse impression au sujet des sommes d'argent
dépensées pour annoncer nos jouets voulant que, par le fait
même, le consommateur doive débourser une somme plus
élevée que pour un jouet dont on n'a fait aucune réclame.
En général les frais de publicité ne dépassent pas
5% du prix de détail. Il existe des preuves concluantes
démontrant que les articles dont on ne fait aucune réclame se
vendent à des prix supérieurs à ceux des articles
similaires qui sont annoncés.
Il n'est pas de bonne éthique de destiner la publicité aux
enfants, puisque ceux-ci ne disposent d'aucun revenu important. Mes propres
enfants reçoivent une allocation hebdomadaire et je présume que
la plupart des enfants de cette province sont dans la même situation.
Supposons que tous les enfants du Canada âgés de cinq à
douze ans reçoivent une allocation hebdomadaire de $0.50, leur pouvoir
d'achat serait alors de $1 million par semaine.
Nous croyons que ce projet de loi est discriminatoire. Les jouets sont
destinés strictement aux enfants, contrairement aux produits de
consommation tels que bonbons, chocolats, lesquels sont consommés par
une grande partie de la population adulte.
L'enfant, dans bien des cas, est un acheteur plus averti que nombre
d'adultes, et nous devons respecter le droit qu'un enfant a de disposer de son
argent de poche comme bon lui semble. La publicité comme telle n'est pas
mauvaise et dans l'industrie du jouet elle est un moyen de distribution.
Contrairement aux céréales que l'on mange tous les matins, le
même jouet n'est vendu qu'une seule fois à la même personne.
Il va sans dire que cette province étant géographiquement partie
de l'Amérique du Nord, notre mode de vie et certaines de nos habitudes
sont nord-américains.
Il est entendu que nous allons coopérer avec la commission, avec
le gouvernement du Québec au sujet du projet de loi no 7. Toutefois,
nous avons la certitude qu'un certain volume de publicité venant de
l'extérieur du Québec, sur lequel
l'Assemblée nationale n'a pas juridiction, sera visionné
par de nombreux enfants habitant notre province.
Nous ne voudrions surtout pas être tenus responsables d'une telle
situation puisqu'elle échappe à notre contrôle. Les
articles 163 et 164 ont été interprétés de
plusieurs façons et nous aimerions que certains aspects de ces deux
articles soient clarifiés.
Est-ce qu'une affiche sur le comptoir d'un magasin est
considérée comme de la publicité? Est-ce qu'un catalogue,
par exemple celui de Simpson Sears qui affiche des jouets sur une quarantaine
de pages, est considéré comme de la publicité
destinée aux enfants? Si tel est le cas, sera-t-il banni du
Québec? Il existe certaines annonces commerciales qui ont
été préparées de telle façon qu'elles
s'adressent aux parents. Est-il possible que ces annonces soient
déclarées illégales? Les jouets, par leur nature, sont
conçus pour les enfants et il est impossible de les dissocier l'un de
l'autre. De la façon dont le projet de loi est conçu, il nous
sera très difficile, sinon impossible, de nous y conformer, puisque le
jouet en lui-même et encore plus l'emballage est une forme de
publicité.
Il est à noter que notre publicité est saisonnière
et que l'horaire des moyens de diffusion est déjà très
chargé. Si celui-ci doit être écourté, la
concurrence au niveau du temps disponible sera très illégale, car
les firmes qui se servent des ondes à longueur d'année seront
certainement favorisées. Mon exposé est maintenant
terminé. Je suis à la disposition des membres de la commission
pour répondre à leurs questions.
Le Président (M. Harvey, Charlesbourg):
Mme le ministre.
Mme Bacon: M. le Président, je n'aimerais pas encore ce
matin reprendre toute l'argumentation que j'ai fait valoir au cours des
dernières séances, même depuis l'ouverture de cette
commission parlementaire, concernant notre position quant aux articles 163 et
164. Je pense que cette position est connue. Notre intention n'est pas
d'interdire toute publicité, comme on semble le dire dans le
mémoire, mais cette position vise uniquement la publicité
destinée aux enfants de moins de treize ans. Je soumets encore ce matin
qu'il revient aux parents de décider ce qui est bon et ce qui est bien
pour les enfants et que toute atteinte à cette liberté de choix
des parents pour leurs enfants ne peut trouver vraiment de fondement, ni sur le
plan moral, comme on l'indique dans le dossier, ni sur le plan
économique.
Vous mentionnez aussi votre présence dans des projets sociaux,
des projets communautaires. Nous osons croire que cette présence
procède beaucoup plus de votre intérêt social que d'un
intérêt purement commercial. Nous espérons que vous saurez
maintenir cette présence dans différents projets. Quant à
la publicité utilisée pour assurer la bonne marche de ces
projets, elle n'est pas visée par l'article 163, si elle n'est pas,
comme nous le pensons et comme nous voulons le croire, à but commercial,
mais à but social, comme vous le mentionnez dans votre
mémoire.
J'aurais quelques questions à poser ce matin. Est-ce que vous
connaissez le nombre des compagnies concurrentes au Québec dans le
marché du jouet? Est-ce que vous pouvez connaître ce nombre de
compagnies concurrentes, par exemple?
M. Dorion: Je n'ai pas de chiffre exact, mais il doit y en avoir
environ une trentaine, j'imagine.
Mme Bacon: Une trentaine de compagnies. Dans l'ensemble du
Québec?
M. Dorion: Dans l'ensemble du Québec.
Mme Bacon: Est-ce que vous connaissez le chiffre d'affaires de
l'ensemble du marché du jouet?
M. Dorion: Le chiffre d'affaires au détail, au Canada, est
d'environ $200,000.
Mme Bacon: $200 millions?
M. Dorion: $200 millions, pardon. La portion du Québec est
d'environ 25%.
Mme Bacon: Quel est le volume de publicité pour l'ensemble
du Québec en ce qui concerne ce marché des jouets?
M. Dorion: Je n'ai pas de réponse à ce sujet. Le
volume de Mattel est d'environ 25% des montants dépensés, soit
entre $1,2 million et $1,5 million.
Mme Bacon: Pour votre compagnie? Est-ce qu'il y a eu certaines
tendances dans le marché du jouet au cours des cinq dernières
années? Est-ce qu'il y a une tendance à l'augmentation ou
à la diminution des ventes, ou est-ce qu'il y a un équilibre qui
peut être atteint?
M. Dorion: II y a une tendance à l'augmentation des
ventes.
Mme Bacon: A l'augmentation des ventes? M. Dorion:
Oui.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, j'ai accroché sur un
point majeur du mémoire présenté par Mattel Canada Inc.,
ce matin.
En voulant répondre aux arguments de ceux qui s'opposent à
la publicité destinée aux enfants et j'en suis, je pense
que nous en sommes tous, d'ailleurs, alentour de cette table vous
invoquez comme tout premier argument que vous tâchez de réfuter
l'argument moral. Vous le définissez ainsi, vous dites:
Premièrement, l'aspect moral. Il a été débattu
qu'il n'est pas de la bonne
éthique de destiner la publicité aux enfants, puisque
ceux-ci ne disposent d'aucun revenu important. Je ne sais pas où vous
avez pris cette affirmation, ce n'est certainement pas aux travaux de la
commission, depuis que nous siégeons sur ce projet de loi. Il a
peut-être été apporté comme élément
d'explication à une position, mais l'argument moral que les membres ont
eu l'occasion d'exprimer à rencontre de la publicité
destinée aux enfants, ce n'est pas parce qu'ils ne disposent d'aucun
revenu important, c'est parce qu'ils sont tout simplement des enfants. En ce
sens ils ne sont pas des consommateurs adultes, capables, comme vous, comme
moi, comme tous ceux alentour de cette table, de savoir ce qui s'appelle se
faire chanter la pomme pour un produit qu'on nous présente comme
étant beaucoup plus beau qu'il n'est. Ils ne sont pas capables de
déterminer la valeur réelle d'un objet et d'évaluer, en
fonction du marché et de leurs capacités financières, si
cela vaut ce qu'on nous demande. Ils ne savent pas s'ils sont en mesure,
à partir du revenu qu'ils ont, de s'offrir ce produit. Tous ces
mécanismes économiques appartiennent aux adultes ou à tout
le moins appartiennent aux enfants de treize ans en montant. En bas de treize
ans, on ne peut pas espérer d'un consommateur d'avoir toute cette
rationalité d'approche d'un produit qui lui est offert et
d'évaluer la valeur.
Vous savez comme moi qu'il y a des adultes de 50 ans pour qui il
faudrait à l'occasion interdire la publicité également,
parce qu'ils sont effectivement victimes. On dirait qu'ils n'ont pas les moyens
d'évaluer que ce produit est exagéré pour eux, qu'ils
n'ont pas les moyens de se le procurer, que, s'ils se le procurent, ils auront
des difficultés financières pendant des mois pour avoir
profité de quelques heures de jouissance autour d'un objet qu'ils
avaient mal évalué.
Pour les adultes on ne peut rien, sauf établir des
mécanismes qui vont empêcher des roublards d'utiliser la
naïveté de ces gens. C'est ce à quoi on travaille dans ce
projet de loi. Mais, pour les enfants, nous ne pouvons rien, sauf comme
j'ai eu l'occasion de l'exprimer, je ne veux pas reprendre cela
littéralement les retirer du circuit économique puisqu'ils ne
sont pas aptes, à l'âge qu'ils ont, à devenir des
consommateurs avertis, des consommateurs capables d'évaluer, etc. Ce
n'est pas parce qu'ils n'ont aucun revenu. L'argument que vous donnez quant
à l'argent de poche et le droit que vous réclamez pour les
enfants de disposer de leur argent de poche comme bon leur semble, vous
admettrez avec moi que ce n'est pas un argument de grand poids, ce matin. Ce
n'est pas cela qui va nous ébranler. Je pense que les parents
vous-même avez donné votre propre exemple donnent de
l'argent à leurs enfants pour un tant soit peu les initier à
l'activité économique, lentement, par petites sommes. C'est pour
les habituer à s'apercevoir que, s'ils ont $5 pour la semaine, qu'ils en
dépensent $3 le lundi, il va leur en rester $2 pour la fin de la
semaine. S'ils ont un projet familial en fin de semaine, ils vont y arriver
complètement dépourvus. C'est un apprentissage économique
que font les enfants, selon l'âge. Rarement en bas de sept ou huit ans
va-t-on remettre des sommes un tant soit peu importantes à des enfants,
même dans le but de l'apprentissage économique.
Non, vraiment, la commission ne s'est pas heurtée à la
faiblesse de revenus des enfants, mais je pense que la commission a surtout
été sensible au fait qu'ils sont des gens inaptes à se
prononcer comme consommateurs.
Comme nous sommes à travailler sur une loi de la protection du
consommateur et qu'ils ne sont pas des consommateurs, nous avons
décidé de les exclure du projet de loi, en ce sens que nous avons
décidé de les exclure du circuit commercial où la
publicité fait son oeuvre.
Quant à l'autre aspect, madame le ministre a bien fait de le
signaler, d'autres groupes avant vous ont parlé de
l'intérêt social des entreprises et, comme elle, j'ose croire
qu'il s'agit effectivement d'un intérêt social; d'ailleurs, elle a
bien fait de vous rappeler que les articles 163 et 164 qui font l'objet de
votre mémoire n'écartent pas... Si vous établissez des
programmes d'éducation physique dans tout le pays pour que les enfants
se tiennent en bonne forme, pour qu'ils pratiquent du sport, qu'ils
n'abandonnent pas trop l'activité, je n'ai aucune objection à
dire que Mattel Canada contribue à cela, mais ce que nous voulons
éviter, et je veux terminer avec cela, ce n'est pas de vendre vos
produits; nous ne voulons pas mettre Mattel et les employés, que vous
utilisez dans votre mémoire pour toucher l'âme des membres de
cette commission, nous ne voulons pas mettre la compagnie dans la rue et ses
employés en chômage. D'ailleurs, tant qu'il y aura des enfants, il
y aura des jouets à faire pour les enfants.
Ce que nous voulons, c'est que vous vous adressiez au véritable
consommateur. Tous les parents autour de cette table je n'en suis pas un
j'en suis convaincu, sont déjà en train de songer à
la période des fêtes qui s'approche et savent très bien
que, pour faire plaisir à un enfant, c'est un jouet qu'il faut lui
donner et qu'il y a probablement peu de bons produits aussi bien faits que les
jouets venant de chez Mattel, à l'occasion, toute comparaison
gardée avec d'autres produits. Adressez-vous donc aux parents,
dites-leur que vous avez créé, pour leurs enfants, des jouets
intelligents, que vous avez créé des jouets qui vont
développer leurs facultés, les éduquer, développer
leurs facultés "acuitives", leur sensibilité, même leurs
sensations physiques si on s'adresse à des tout-petits.
N'ayez pas peur, les parents sont aujourd'hui de plus en plus
éduqués et en mesure de voir si, effectivement, tel jouet remis
au petit bambin de quatre ans ou de cinq ans va effectivement, plutôt que
d'en faire un petit monstre qui va tenter d'assassiner le reste du voisinage
à partir d'un revolver en plastic, va plutôt développer son
intelligence; par exemple, un enfant de trois ans va développer sa
perception des couleurs. Il en existe des jouets intelligents. N'ayez pas peur
de les présenter aux parents, je pense que les parents sont de plus
en
plus aptes à les saisir. Ils sont de plus en plus capables de
savoir que, s'ils achètent tel produit, cela n'apporte
véritablement rien à l'enfant, que, dans trois semaines, cela va
être brisé, dans deux semaines, il va s'en
désintéresser parce qu'il aura entendu parler ou il aura vu, dans
les mains de son petit voisin, autre chose de meilleur. Ce sont les parents qui
savent ce que sont des enfants et ce ne sont pas les enfants eux-mêmes
qui sont capables de le déterminer.
Mais de la publicité de jouets destinée aux parents, ce
n'est pas interdit et personne ne veut l'interdire, au contraire. J'ai
acheté, pour mes petits neveux et nièces, des jouets à la
période des fêtes. Simpson peut m'envoyer 40 pages de catalogue
sur les jouets, je vais les regarder avec attention parce que je vais essayer
de trouver le jouet le plus apte à la personnalité de mes neveux
et nièces que je connais; mais point, à la ligne.
Adressez-vous à moi. N'utilisez pas ces enfants, c'est moi qui
vais l'acheter de toute façon et c'est pour eux que je vais le faire et
c'est en fonction de leur bien que je veux le faire.
Je pense qu'à l'âge qu'ils ont, je suis mieux placé
qu'eux pour déterminer ce qui leur convient. J'ai entendu ailleurs, et
cela va probablement revenir encore aussi, dire que nous voulons interdire la
publicité à Mattel ou que nous voulons interdire la
publicité des jouets, c'est faux. Nous voulons interdire la
publicité destinée aux enfants et la publicité qui utilise
les enfants, mais améliorer, au contraire, la publicité
destinée aux parents. Je suis convaincu qu'attirer l'attention des
parents et prouver la valeur éducative des jouets que vous avancez va
doubler quelque chose? Voulez-vous vous prononcer sur les interventions qui ont
eues lieu?
Vous pouvez le dire en anglais si vous le voulez. You can speak
English.
M. Williams (Lindsay): Thank you Mr. Président. I have
prepared the statement and unfortunately I am not in a position to understand
whether my statement is in context with what has already gone on. I apologize
for that. I wanted to say the links of our presentation to you this morning.
Now I should be considered in direct proportion to the gravity of the problems
that we foresee if sections 163 and 164 are enacted without amendment. We did
not believe that the intent of this bill is to restrain us or restrict this
company from doing business in this province. However if we were to take one
interpretation of these two sections, I am concerned with the problem that
blooms ahead of us. My play is simple: regulate, control, but, please, do not
deprive us or my company of the right to communicate with our customers.
Merci.
Le Président (M. Lafrance): Thank you very much, Mr.
Williams.
Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent se
prononcer?
Alors merci beaucoup, M. Williams et M. Dorion ainsi qu'à votre
collègue. Thank you very much.
Et, maintenant, avant l'heure du lunch, nous pourrions entendre Parker
Brothers. Alors, M. Vernon.
Parker Brothers
M. Bridge (John): M. le Président, je suis le
gérant des ventes de l'Est du Canada pour la compagnie Parker Brothers
et je suis domicilié à Montréal, avec un bureau à
Place Bonaventure. M. Vernon, mon confrère, qui est aussi mon patron,
est le président de Parker Brothers, une division de General Mills
Canada Ltée, une compagnie canadienne qui possède une autonomie
complète. Il est aussi ex-président de l'Association des
manufacturiers de jouets au Canada. C'était l'année
dernière.
Nous sommes engagés dans la fabrication, l'importation et la
distribution de jeux, jouets, produits d'art manuel au Canada et l'exportation
de certains de ceux-ci dans plusieurs pays du monde.
Nos produits, dont vous reconnaîtrez le nom, sont le Monopoly, le
Mille Bornes, les Grands Maîtres, Jour de Paye, les trucs de
mécano et plusieurs autres. 32% de nos ventes sont
réalisées dans la province de Québec.
A ce point, j'aimerais remercier la commission d'avoir pris le temps de
nous écouter, ici, aujourd'hui. Nous avons fait un effort consciencieux
pour soumettre un mémoire sur un sujet qui peut devenir un point
émotionnel. Nous soulevons le point que les émotions, sur un si
important sujet que l'annonce aux enfants de moins de treize ans, à la
télévision,'ne doivent pas venir en ligne de compte. Il faut
être objectif.
Je voudrais ici vous indiquer notre position. A notre avis, une famille
ne peut être isolée ou divisée de façon à
protéger un membre d'une famille d'un autre, soit physiquement,
psychologiquement ou matériellement, pas plus qu'un tel membre ne peut
être isolé de l'influence exercée par un autre, ou de toute
autre influence extérieure à base commerciale ou autrement.
Nous portons notre appui à la tendance des années 1970,
orientée vers la consommation. Nous croyons que ladite tendance est
nettement le résultat de l'attitude consciente et instruite du public
qui prévoit recevoir, des entreprises qui lui rendent un service, un
juste traitement et un certain en-avoir-pour-son-argent.
Parker Brothers reconnaît respectueusement que les entreprises
responsables ont toujours traité leurs clients avec justice. Par
conséquent, il est axiomatique que la législation et les
règlements introduits par nos gouvernements au cours des
dernières années ont reçu l'appui et la coopération
de la majorité des entreprises au Canada.
En plus, les nouvelles lois expriment par écrit ce qui, nous le
croyons, est et a toujours été des normes solides exercées
dans la pratique des affaires.
Si les articles 163 et 164 sont adoptés, Parker Brothers
déclare respectueusement qu'il n'y aura aucune réduction
d'implication des parents et de leur responsabilité de guider et
d'assister leurs enfants. Un parent ne peut se permettre d'abdiquer
de ses responsabilités envers ses enfants. C'est absolument
nécessaire d'avoir le choix d'accomplir cette tâche de la
meilleure façon possible.
Je suis parent, j'accepte mes responsabilités. Je suis certain,
comme mon cher monsieur l'a dit tout à l'heure, que tout le monde veut
accepter ses responsabilités. Un parent responsable accepte ses
responsabilités.
Les implications qui auraient un effet négatif sur
l'économie en général, tel que la perte d'ouvrage au
Québec, les répercussions dans l'industrie du jouet en
particulier et dans toute autre industrie qui tente d'informer les enfants de
ses produits vous ont déjà été
énumérées.
Je voudrais souligner que l'industrie laitière c'est
important dans la province de Québec annonce à la
télévision. Est-ce que cela encourage les jeunes aux
périodes où vous ne voulez pas avoir d'annonces à boire du
lait? Est-ce ça que vous voulez décourager? C'est un fait. Notre
opinion est que la clause 133 éliminerait cette forme d'annonce. La
manière la plus simple de décrire le terme "annonce" est ceci:
C'est le passage de renseignements. Suivant ceci, selon la section 163,
sera-t-il permis d'avoir des démonstrations de jouets chez le
commerçant, pour mieux informer le consommateur? Le consommateur, comme
monsieur l'a dit, est averti, aujourd'hui; il l'est beaucoup plus qu'il ne
l'était et il s'ensuit que sa famille et ses enfants le sont aussi.
C'est une annonce, une démonstration dans un magasin. Prenez notre
boîte de Monopoly; c'est une annonce, c'est une forme d'annonce. Comment
pourrait-on dire ce qu'il y a dans la boîte si on ne peut pas avoir une
couverture? C'est une manière d'informer. Est-ce que vous êtes
contre cela?
La brochure décrivant d'autres produits qu'un manufacturier
fabrique, qui est insérée dans un paquet elle se trouve
dans le produit et a un but d'informer est-ce une autre forme d'annonce,
cela? Est-ce cela que vous visez?
Il y a aussi le catalogue qui a été mentionné par
le représentant de Mattel, celui de Sears, celui de Cardinal. Je ne sais
pas si vous êtes au courant, mais Cardinal, c'est une entreprise
québécoise. Je suis certain qu'ils ont au moins 200
employés, ils ont 40 magasins, c'est une industrie importante; Sears
aussi. Selon notre interprétation de l'article 163, est-ce que ceci doit
être éliminé? Je crois que vous avez répondu
jusqu'à un certain point à cela. J'aimerais avoir une
clarification sur ce point.
Tout ceci met en cause la question de renforcement, soit d'abord
l'interdiction d'exercer la publicité commerciale.
Deuxièmement, l'interdiction d'exposer un enfant à cette
même publicité. Nous sommes confus. Est-ce possible d'avoir une
définition de toute forme d'annonce commerciale? Voulez-vous parler de
l'annonce à la télévision ou de toute forme d'annonce?
Comme vous le savez, la province de Québec a un code d'annonce aux
enfants, c'est un des meilleurs au monde. Toute compagnie qui fait de la
publicité pour enfants se conforme à ce code. Nous pensons que ce
code est une excellente façon de s'assurer que nos enfants ne sont
exposés qu'aux annonces vérifiées et
approuvées.
Serait-il possible encore, vous êtes contre, c'est ce qu'on
a entendu durant les deux dernières journées de modifier
l'article 133 de façon que toutes les annonces publicitaires à la
télévision, adressées aux enfants, correspondent aux
normes du code? Nous croyons que c'est avantageux d'avoir un règlement
qui contrôle l'annonce à la télévision au lieu d'une
loi du Parlement qui interdise l'annonce à la télévision.
Il y a deux raisons à cela. Une réglementation beaucoup plus
souple. Le gouvernement peut vouloir changer un règlement quand la
recherche scientifique détermine sans doute, d'une manière ou
d'une autre, que l'annonce à la télévision est au
détriment de l'enfant. Nous voudrions, l'industrie, le gouvernement,
tous les intéressés, certainement changer l'aspect nuisible de la
chose.
Je vous remercie de nous avoir écoutés. S'il y a des
questions, nous serions fiers d'y répondre. M. Vernon s'excuse de ne pas
être capable de parler le français couramment. Il fait un effort
extraordinaire. A mon contact, il commence à comprendre, mais le
parler... Il est incapable de discuter en français avec nous.
Le Président (M. Lafrance): M. Bridge, nous vous
remercions.
If Mr Vernon wants to speak in English, he can go ahead.
Mr Vernon (A.J.): Thank you very much. I have no technical
details to add to our presentation. I thank you very much for the opportunity
of having been able to be present and hopefully discuss our thoughts with
you.
I hope that, by the briefness of our presentation, you do not think that
this is not a serious matter. We, as a company in business, in this country and
in this province, feel that, if this legislation, this particular clause 163 is
inacted with the wording the way it is presently constituted, we as a
corporation and indeed the entire toy industry would be subjected to very
difficult times, and it is very very serious to us. It is realy all I have to
say.
Le Président (M. Lafrance): Thank you, Mr. Verdon. Mme le
ministre.
Mme Bacon: Je n'ai pas l'intention encore une fois, M. le
Président, de revenir sur l'entière argumentation concernant les
articles 163 et 164. Le ton un peu agressif de M. Bridge ce matin est
compréhensible. Nous avons nous-mêmes évalué, avant
de rédiger les articles 163 et 164, l'impact que pourrait causer de tels
articles sur l'ensemble du commerce et de la publicité, parce que cela
touche aussi les agents de publicité, les télédiffuseurs.
Je ne voudrais pas que M. Bridge ait l'impression que nous n'avons pas fait une
évaluation ou d'étude approfondie sur le sujet avant la
rédaction de la loi. Quand le législateur est obligé de
légiférer dans certains domaines, c'est parce qu'il y a eu des
abus, qu'il veut les corriger et en prévenir certains autres qui
pourraient surgir dans les années qui viennent.
Vous le signalez dans votre mémoire, les parents sont les
consommateurs qui prennent la
plupart des décisions et, tels qu'énoncés, les
article 163 et 164 se veulent le reflet de cette réalité. Je l'ai
mentionné tantôt, pour l'autre mémoire, ce sont les parents
qui ont la responsabilité des enfants. On reproche souvent au
gouvernement de prendre des responsabilités pour d'autres; dans un
domaine comme celui-ci, nous croyons que les parents doivent réaliser
leurs responsabilités face aux enfants en ce qui a trait au choix
à faire de biens de consommation à obtenir pour les enfants.
Ceci exclut par le fait même toute possibilité de remplacer
l'interdiction par un contrôle par exemple, comme c'est
suggéré, ce contrôle fût-il le plus parfait
possible.
Je pense que nous devons, à ce moment, prendre des
décisions importantes et sérieuses. Il faut que l'interdiction
totale d'une publicité à but commercial fasse partie de ce projet
de loi pour protéger les consommateurs.
Quant au problème particulier que vous soulevez, tel que la
diminution de revenus de publicité, nous avons déjà fait
connaître notre opinion à ce sujet. Vous affirmez aussi que
l'interdiction de la publicité aux moins de treize ans va amener une
diminution dans le choix des produits offerts et vous mentionnez même
moins d'intérêt à améliorer le produit. Je ne suis
pas certaine de cette affirmation. Je ne suis pas d'accord sur cette
affirmation. C'est peut-être en contradiction avec le sérieux et
le souci de justice dont vous vous prévalez dans le mémoire. Je
pense que vous démontrez que votre compagnie est une compagnie
sérieuse, que vous avez un souci de justice. C'est un peu ce qui a
présidé aux arguments qui suivent dans votre mémoire.
J'aimerais peut-être que vous explicitiez cette affirmation, parce que,
pour moi en tout cas, cela ne semble pas tellement sérieux.
M. Bridge: Quant à la qualité de la programmation,
s'il n'y a pas de fonds pour la programmation de programmes montrés aux
enfants, la qualité va diminuer. Une des manières, c'est que cela
prend des fonds pour cela. L'industrie du jouet aide beaucoup la programmation
à la télévision.
Mme Bacon: Ce n'est pas la qualité des produits. Cela ne
diminuera pas. Ces produits ne seront pas diminués. La qualité
sera la même.
M. Bridge: Si les ventes ne sont pas là, si on ne peut pas
annoncer... Si on ne peut pas informer les gens que ce produit est disponible,
c'est absolument prévisible que les ventes vont diminuer.
Mme Bacon: Je reviens là-dessus. Vous me comprenez
très bien, M. Bridge. La qualité de vos produits ne diminuera en
rien.
M. Bridge: Je vais vous accorder... Je n'irais pas travailler
pour une compagnie qui ferait cela.
Mme Bacon: Vous ne pourrez pas assister à la
compétition. J'essaie de faire...
M. Bridge: Vous avez complètement raison sur ce point.
Mme Bacon: J'essaie de faire appel à votre sérieux,
parce que, comme je le disais tantôt, je voudrais qu'on prenne un ton
très serein dans nos discussions et que tout en respectant chacun
l'opinion de l'autre, on essaie de mieux comprendre peut-être le pourquoi
d'une telle hésitation et ce qui a présidé à cette
décision qui nous a amenés à rédiger les articles
163 et 164.
Quand vous parlez de qualité de produit, le moins
d'intérêt à améliorer ces produits, je ne suis pas
tout à fait d'accord avec vous, parce qu'encore une fois, vous le
mentionnez, vous ne travailleriez pas pour une compagnie qui n'offre pas des
jouets de qualité et aussi vous ne pourriez pas faire face à la
concurrence.
On a parlé tantôt d'une trentaine de compagnies au
Québec. Il y a combien d'enfants qui achètent des jouets au
Québec? Je n'ai pas de chiffres précis, mais il y a quand
même un bon nombre d'enfants dont les parents achètent ces
produits, que ce soient les vôtres ou les produits d'autres
compagnies.
Je ne pense pas que bannir complètement cette publicité
à but commercial empêche, encore une fois, les parents d'acheter.
Ces parents sont ceux qui choisissent, sont ceux qui ont le revenu, sont ceux
qui peuvent savoir la somme exacte dont ils peuvent disposer pour acheter des
produits. Diriger votre publicité vers ces parents, je ne pense pas que
cela enlève des ventes à votre compagnie. Je ne pense pas que
cela change la qualité du produit. Je ne pense pas que cela vous
enlève toute imagination pour améliorer la qualité de vos
produits. Je pense seulement aux agences de publicité qui doivent
déjà parce qu'elles sont aussi censées faire preuve
d'imagination penser à des compagnies de publicité
adressées aux parents pour vendre les objets que vous vendez: les jouets
aux enfants. Mais, que les parents, eux, qui ont le pouvoir d'achat, soient
capables de faire le choix, de discerner ce qu'ils sont capables de payer,
compte tenu du revenu familial.
Vous mentionniez le lait, tantôt, je pense que, dans l'esprit du
législateur, vous allez un peu par l'absurde. Ce n'est pas notre
intention d'abandonner. Le rôle social que vous voulez jouer serait
très bien accepté, parce que, comme vous dites, ce ne sont pas
des rôles que vous voulez jouer et qui sont maintenant à but
commercial. Si vous voulez jouer un rôle social, nous sommes d'accord,
mais il restera que l'aspect commercial est tout à fait en dehors de ce
rôle social qu'on veut jouer. Là-dessus, l'article 63 n'est pas
appliqué dans de tels rôles. Elle veut faire boire du lait aux
enfants. Loin de nous l'idée d'interdire complètement cette sorte
de publicité. Je voudrais que cela soit bien compris ce matin que nous
ne voulons pas, encore une fois, abolir complètement votre
capacité de ventes dans la province de Québec, nous ne voulons
pas vous empêcher de faire affaires au Québec, au contraire, nous
ne voulons surtout pas empêcher que vous amélioriez la
qualité de vos produits.
Ce que nous voulons, c'est que cette publicité soit
dirigée aux parents qui ont le pouvoir d'achat.
M. Charron: M. le Président, je pense que je n'ai rien
d'autre à ajouter. Je pense que madame le ministre vient de faire le
point sur la question maintes fois débattue à cette table.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): Vous mentionniez tout à l'heure,
M. Bridge, que les parents doivent prendre leurs responsabilités et que
vous étiez de ceux-là; je vous en félicite.
M. Bridge: Merci.
M. Harvey (Charlesbourg): Mais vous admettez du même
souffle que la publicité qui est faite par votre maison, à
l'instar d'autres fabricants de jouets, s'adresse directement aux enfants et
que cette publicité a quand même une influence directe chez
l'enfant et que, finalement, c'est aux parents de décider s'ils doivent
agréer aux demandes des enfants ou s'y refuser. C'est ce que vous
appelez "prendre ses responsabilités".
M. Bridge: Contrairement à ce que vous pensez, toutes les
annonces de notre maison jusqu'à très récemment ont
été dirigées vers les parents. Parmi les points que M.
Irwin a énumérés hier, retenons que le temps disponible,
de sept heures à dix heures, soit trois heures, est pris
complètement par des annonceurs qui font de la publicité à
longueur d'année. La nature de notre commerce en fait un commerce
saisonnier; comme cela, nous n'avons presque plus d'occasion d'acheter le temps
requis pour répondre aux normes que vous voulez. C'est très
difficile, le temps n'est pas disponible.
M. Harvey (Charlesbourg): Ecoutez, je vais reprendre ma question.
Vous parliez des "responsabilités des parents".
M. Bridge: Oui.
M. Harvey (Charlesbourg): Vous dites: Nous faisons notre annonce
à la télévision pour susciter un besoin et
également faire fonctionner notre entreprise.
M. Bridge: Oui, d'accord.
M. Harvey (Charlesbourg): Nous sommes tous d'accord
là-dessus. Mais vous admettez du même souffle que, finalement,
vous influencez les enfants qui, eux, s'adressent aux parents pour se procurer
le jouet et que c'est à ce moment que les parents doivent prendre leurs
responsabilités.
M. Bridge: Oui.
M. Harvey (Charlesbourg): Ils décident de l'acheter ou de
le refuser. Je ne mets pas en doute la qualité de vos produits; au
contraire, j'admets que ce sont de loin les meilleurs produits sur le
marché. Vous pourrez même vous en servir comme publicité
personnelle, si vous voulez. Je suis moi-même peut-être un de ceux
qui trouvent vos jouets familiaux en particulier les plus intéressants
au monde, ce sont des jeux intelligents et des jeux fort agréables pour
des loisirs de famille. Mais là n'est pas la question, c'est que vous
admettez que votre publicité vise les enfants, influence les enfants et
vous dites: C'est aux parents de prendre leurs responsabilités.
M. Bridge: Oui, parce qu'il faut qu'un enfant se développe
normalement. Il faut qu'il apprenne à différencier ce qui est bon
de ce qui n'est pas bon. Cette éducation ne peut pas commencer à
l'âge de treize ans.
C'est un procédé graduel. Une journée, on a douze
ans et 364 jours; l'autre journée, on a treize ans et là, on est
exposé à tout.
M. Harvey (Charlesbourg): Oui, d'accord. A titre d'exemple, j'ai
quatre enfants et c'est bien sûr que tout ce qui est "publicisé"
à la télévision, le mot n'est pas français, mais je
le dis entre guillemets... Il est bien clair que durant la période
intensive d'achat de cadeaux, c'est ce qu'ils ont vu à la
télévision qu'ils désirent avoir et finalement ils veulent
tout avoir. C'est bien clair que c'est aux parents de décider la liste
des priorités et d'acheter le jouet le plus intelligent, celui qu'on
pense également répondre le plus aux besoins de l'enfant, coller
le plus à sa réalité ou à ses besoins.
M. Bridge: N'abdiquez pas votre rôle comme parent, mais
donnez-lui la chance de faire le choix. Pour lui aussi, peut-être que
c'est extrêmement bon ou peut-être que cela ne l'est pas. Le parent
arrive et prend la décision. C'est très difficile de dire non
aujourd'hui. Cela donne lieu à toutes sortes de discussions. Le jeune
veut avoir une réponse. C'est tout le temps facile de dire oui. C'est le
"cut out", comme on dit. Cela donne lieu à des discussions entre les
parents et les enfants. Le jeune, il faut qu'il évolue graduellement et
intelligemment.
M. Harvey (Charlesbourg): C'est là que vous
établissez je rejoins votre mémoire que,
finalement, il y a une liste de priorités qui doivent être
établies au même niveau que vous dites à un certain
paragraphe que même les parents sont un peu des enfants. Et si le
gouvernement ne laisse pas le libre choix à certains moments, on risque
que le gouvernement se fasse demander une kyrielle de choses et que finalement
ce soit encore au même gouvernement de dire: Faites-vous une idée,
les priorités cela pourrait être cela. Vous ne pouvez pas tout
avoir finalement. C'est pour cela qu'on a la loi qui est devant nous. C'est
pour cela qu'on la modifie. Je vous remercie.
Le Président (M. Lafrance): Merci beaucoup, M. Bridge.
Thank you very much, Mr Vernon. La commission parlementaire suspend ses travaux
jusqu'à quinze heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 15)
Reprise de la séance à 15 h 10
M. Lafrance (président de la commission permanente des
consommateurs, coopératives et institutions financières): A
l'ordre, messieurs!
Avant de reprendre les auditions à la commission parlementaire,
je voudrais faire part aux membres de la commission d'un changement: M.
Bellemare remplace M. Picotte, pour la fin de la présente
séance.
M. Charron: M. Bellemare (Johnson) ou M. Bellemare
(Rosemont)?
Le Président (M. Lafrance): M. Bellemare (Rosemont).
M. Charron: Bravo!
M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que c'est mieux?
M. Charron: Beaucoup mieux.
Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons l'Association
des marchands d'automobiles de Québec Inc., M. Grondin et ses
collègues.
Association des marchands d'automobiles de
Québec Inc.
M. Grondin (Henri): Merci. M. le Président, Mme le
ministre, MM. les membres de la commission, j'ai le plaisir de
représenter aujourd'hui l'Association des marchands d'automobiles de
Québec Inc. Je suis accompagné de tous les membres du
comité du mémoire de l'association. A ma gauche, M. Robert
Giguère, qui est président du comité, et M. Pierre Racine.
A ma droite, M. Pierre Pouliot et M. Richard Cantin, qui est attaché
à l'association.
L'Association des marchands d'automobiles de Québec regroupe plus
de 135 marchands d'autos, soit la quasi-totalité de tous les marchands
d'automobiles franchisés dans la région de Québec. Quand
on dit la région de Québec, c'est la région du
Québec métropolitain, plus tout le territoire qui s'étend
sur la rive nord de Portneuf jusqu'au Saguenay et, sur la rive sud, de
Lotbinière jusqu'à Rivière-du-Loup. Donc, c'est une des
régions assez significatives du Québec.
Nos clients ont formé un comité pour étudier les
implications du bill 7. Cependant, vu que deux autres associations de marchands
d'automobiles avaient déjà manifesté l'intention de
présenter des mémoires devant cette commission et de traiter
certains points, l'association que je représente aujourd'hui se
contentera de faire des représentations sur trois sujets particuliers,
tel que cela apparaît au mémoire, soit la vente des automobiles
usagées, articles 49 à 61, la réparation d'automobiles,
articles 68 à 78, et l'interdiction au consommateur de renoncer à
certaines prescriptions de la loi, articles 262 à 273.
En matière de vente de voitures usagées, le point
fondamental de notre mémoire, Mme le mi- nistre, concerne le champ
d'application de la loi elle-même, c'est-à-dire que nous voulons
que toutes les ventes de voitures usagées soient assujetties à la
loi et non pas seulement les ventes entre un commerçant et un
consommateur.
L'association que je représente a fait une enquête sur le
nombre de véhicules usagés qui sont vendus entre consommateurs.
Nous avons pris des chiffres du Bureau des véhicules automobiles et nous
avons compilé ces statistiques. Nous avons avec nous, ici, des
exemplaires, pour tous les membres de la commission, du résultat de
cette enquête. Cette enquête démontre qu'il y a au moins 45%
des ventes de voitures usagées qui sont conclues entre
consommateurs.
Quand on dit consommateurs, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas
seulement des individus mais également des organismes qui vendent des
voitures, même des organismes paragouverne-mentaux qui vendent des
voitures à des consommateurs. Je pense qu'avec la loi telle qu'elle est
constituée, tel que le projet de loi est présentement, ces gens
ou ces organismes sont considérés comme des consommateurs et ne
seraient pas assujettis à la loi, par exemple des municipalités
ou d'autres organismes.
Ainsi donc il y aurait la moitié des consommateurs qui ne
seraient pas protégés par les dispositions d'une loi qui doit
normalement protéger les consommateurs. Par ailleurs, Mme le ministre,
nos clients sont bien placés pour savoir que l'honnêteté et
la franchise ne sont pas toujours la règle dans les transactions entre
consommateurs. Lorsque nos clients, par exemple, révèlent
à un consommateur que sa voiture a besoin de réparations pour
$500 ou $600, bien souvent le consommateur leur dit: Messieurs, au lieu de
l'échanger au garage, je vais la vendre moi-même. Pourquoi il dit
cela? Parce qu'il espère cacher à l'acheteur éventuel le
défaut de la voiture et retirer un plus gros profit. Cela,
évidemment, ne serait pas protégé par la loi telle qu'elle
est là.
D'ailleurs, Mme le ministre, le Conseil de la protection du consommateur
n'a-t-il pas commandé à au moins deux reprises que la loi soit
amendée pour couvrir également les ventes entre consommateurs? Je
vous réfère d'ailleurs au mémoire du conseil 1974/75,
pages 41 et 42, lequel faisait d'ailleurs référence au
mémoire de l'année précédente. Ce Conseil de la
protection du consommateur est composé majoritairement de
représentants des consommateurs, et non pas de commerçants.
Pourtant ces gens recommandaient que la loi couvre, non seulement les ventes
entre commerçant et consommateur, mais également toutes les
ventes de voitures usagées.
Par ailleurs, nous avons certaines remarques techniques à
formuler sur certains articles de ce chapitre concernant la vente de voitures
usagées. Tout d'abord l'article 49, qui est la définition
même de l'automobile usagée, à notre avis devrait
être amendé pour exclure également le cas de l'automobile
qui est utilisée pour sa simple démonstration. Dans le cas
actuel, elle est considérée comme usagée si l'article tel
que proposé est adopté. Nous suggérons d'ajouter aux
exceptions le mot "démonstration".
A l'article 51, qui prévoit ce que doit contenir obligatoirement
le contrat de vente de voitures usagées, nous sommes d'accord sur la
majorité des dispositions qui sont là. Mais nous croyons qu'au
paragraphe f), qui exige que l'on relève au consommateur le nom,
l'adresse et l'occupation du dernier propriétaire, cette mention soit
obligatoire seulement si le consommateur l'exige et si le commerçant le
sait.
A l'alinéa A) du même article qui exige que l'on mentionne
les réparations majeures effectuées à l'automobile,
l'expression "réparation majeure" n'étant pas définie,
nous croyons que cela peut être un problème de savoir ce qu'est
une réparation majeure. Nous suggérons donc que ce soit
simplement limité à un minimum de $150. Quant aux
réparations de plus de $150 qui se rapporteraient à un même
rouage d'entrainement, elles devraient être mentionnées au
contrat; ce ne serait pas nécessaire de mentionner les autres.
Quant à l'article 53 qui parle, encore une fois, de garantie
minimum obligatoire dans le cas de vente de voitures usagées de plus de
$1000, nous suggérons que le montant de $1000 soit porté à
$2000 et que ce montant soit même indexé chaque année;
parce qu'on comprend que cette loi est une loi qui va quand même durer
plus d'une année. Nous suggérons également que cette
garantie soit limitée non seulement à deux mois, mais
également à 2000 milles.
Enfin, nous soutenons qu'il n'est pas logique d'imposer cette garantie
malgré le désir du consommateur, lorsque le consommateur destine
l'automobile à un usage qui ne nécessite pas de garantie
explicite, parce que vous savez que toute garantie doit nécessairement
se monnayer. Si on offre une garantie, il va falloir remonter les prix. Il
arrive que des consommateurs sont prêts à acheter des voitures
usagées, sachant qu'elles ont certains défauts, mais ne veulent
pas de garantie. Ils veulent y renoncer. Nous voudrions que ce soit
possible.
Quant à l'article 56, il nous semble pour le moins superflu de
préciser que la preuve de l'usage excessif incombe au commerçant.
Il nous paraît superflu. Quant à l'article 59, nous croyons que
tout avis du consommateur devrait être écrit, comme c'est le cas
pour les avis que le commerçant doit donner. La même remarque
s'appliquera d'ailleurs à l'article 78.
Quant à l'article 60, on y dit que la garantie du
commerçant, garantie qui est prévue à l'article 53, suit
la voiture, quel que soit le propriétaire subséquent. Est-ce
qu'on doit comprendre que cela inclut le marchand ou le commerçant
subséquent qui achèterait la voiture dans le délai de
l'article 53? Parce qu'autrement dit, un autre commerçant pourrait
bénéficier de la garantie qui est offerte à 53 lorsqu'il
rachèterait la voiture. C'est pour le moins imprécis. Nous
suggérons donc, tout simplement, d'enlever cet article 60.
Le second chapitre de notre mémoire concerne la réparation
d'automobiles. Deux points dans cela, tout d'abord l'évaluation. Eh
bien, nous décrivons dans le mémoire, les difficultés que
le garagiste aura à essayer de surmonter. Quelles sont ces
difficultés? D'abord, la loi indique qu'il faut évaluer le prix
de l'évaluation elle-même.
Ensuite, il faut faire une évaluation préliminaire pour
savoir si les réparations excéderont ou non $150 pour se
conformer à l'article 72. Si cela excède $150, il faut faire une
évaluation en détail. Nous croyons que le marchand devrait avoir
l'occasion de préciser un délai limite pour la validité de
son évaluation, parce que, si on évalue des dommages à
telle date, il est possible que six mois après, le coût de la
réparation ait augmenté. Il faudrait donc donner la
possibilité de prévoir un délai limite pour faire
exécuter les réparations.
En somme, nous soumettons, pour régler le problème qu'on
devrait commencer l'article 73 par les mots "si le consommateur l'exige". Je
pense que cela règlerait tout le problème de l'évaluation.
Si le consommateur ne l'exige pas, on ne serait pas obligé de le
faire.
Deuxième problème dans ce chapitre, c'est la remise des
pièces. Ce n'est pas toujours possible, ce n'est sûrement pas
rentable de le faire, tout d'abord, il y a le cas des voitures qui sont encore
sur la garantie. A ce moment, le manufacturier exige qu'on lui retourne les
pièces qu'on a pu trouver comme défectueuses dans la voiture.
Donc, ce n'est pas possible de les retourner au consommateur. Dans le cas
également où on remplace des pièces par d'autres
pièces reconditionnées. Il faut retourner également les
pièces que l'on a enlevées. Si on ne les enlève pas, c'est
le consommateur qui va payer le double, le triple du prix pour rien, parce que
ce qu'il va faire avec la pièce usagée, je me le demande.
En dernier lieu, nous ne sommes pas d'accord sur les articles 262 et 263
qui interdisent au consommateur de renoncer à certaines dispositions de
la loi, qui parfois, ne lui sont utiles. Il ne faut pas oublier toujours que la
garantie que l'on donne va faire augmenter les coûts, coûts que
nécessairement le consommateur devra absorber. En somme, la
dernière phrase de notre mémoire, c'est ceci: La loi
reconnaît des droits au consommateur, ce qui est bien. Donnons-lui donc
la liberté d'exercer ceux de ses droits qu'il considère
avantageux pour lui.
Alors, M. le Président, Mme le ministre, nous sommes à la
disposition de la commission pour répondre à toutes les questions
qu'il vous plaira de poser aux gens qui m'accompagnent relativement à
cela.
Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.
Mme Bacon: Vous suggérez à la page 2 de votre
mémoire, à l'article 49, d'exclure de la définition de
l'automobile "le véhicule désigné habituellement comme
démonstrateur", celui que vous désignez couramment comme
démonstrateur dans vos établissements. En pratique, est-ce qu'il
n'arrive pas que certains véhicules ayant servi soit à la
location, tout simplement des véhicules de courtoisie, par exemple,
soient vendus comme démonstrateurs dans vos établissements?
M. Grondin: Je vais laisser M. Robert Giguère
répondre à la question, c'est un marchand d'automobiles de
Québec.
M. Giguère: J'ai compris le plus gros...
Mme Bacon: Vous vendez des voitures qui sont des voitures de
courtoisie, par exemple, si je me trompe, vous me corrigerez, et aussi certains
véhicules qui ont servi à la location. Dans certains garages, on
peut louer des voitures. Est-ce que vous les désignez comme
démonstrateurs, ces voitures ou s'il y a d'autres termes pour les
désigner?
M. Giguère: Mme le ministre, depuis quelques
années, nous sommes forcés par le ministère des Transports
de louer des voitures portant des plaques immatriculées Z. Ces voitures
sont assurément considérées comme usagées.
Evidemment, il peut y avoir quelques marchands qui peuvent vendre ces voitures
comme des démonstrateurs, mais ces voitures, au ministère des
Transports, sont enregistrées comme des voitures ayant
déjà servi une fois.
Donc, la voiture, sur notre terrain, est une voiture usagée et
porte bien la mention de voiture usagée.
Mme Bacon: Les voitures que vous appelez démonstrateurs,
est-ce qu'elles portent un "Z"?
M. Giguère: Dans l'article, on ne nie pas que nos vendeurs
ont comme j'ai moi-même une voiture qu'on appelle démonstrateur,
que je peux vendre à 8000 milles ou 9000 milles. Ce n'est pas là
le but de l'article...
Mme Bacon: Vous appelleriez démonstrateur une autre
voiture usagée?
M. Giguère: C'est la voiture que nous avons en inventaire
et que le client veut essayer d'une façon ou d'une autre, il veut
"tester" la tenue de route de cette voiture; alors la voiture, à la fin
de l'année, peut avoir fait 30, 40 ou 50 milles. C'est surtout à
cause de cette voiture qu'on voudrait faire ajouter la mention
"démonstrateur". On ne parle pas de voiture de 10 000 milles. D'un autre
côté, toutes les voitures dont nous nous servons, le manufacturier
accepte d'en prolonger la garantie. Donc, il n'y a pas de problème pour
le consommateur.
Mme Bacon: Même une voiture de courtoisie par exemple.
M. Giguère: Non.
Mme Bacon: Non plus.
M. Giguère: Une voiture qui n'a jamais été
enregistrée, c'est-à-dire la voiture portant une plaque
d'immatriculation "X", est connue du manufacturier, parce que nous sommes tenus
de lui envoyer un affidavit prouvant que la voiture est un dé-
monstrateur et c'est seulement dans ce cas-là que le manufacturier
prolonge la garantie.
M. Charron: De quel ordre est cette prolongation par rapport
à une voiture...
M. Giguère: 6000 milles additionnels, mais il ne faut
jamais que ce qu'on appelle un démonstrateur dépasse 12 000
milles. C'est-à-dire que la garantie ne pourrait pas... si vous avez un
démonstrateur de 22 000 milles, le manufacturier refuserait de prolonger
la garantie.
Il faut que le millage soit au-dessous de 12,000 milles. Alors, il n'y a
pas de problème pour le client d'acheter un démonstrateur, ce
qu'on appelle le démonstrateur, ce que j'appelle ma voiture, parce que
la garantie est donnée par le manufacturier et non pas donnée aux
voitures que vous mentionnez, Mme Bacon, les voitures servant à la
location.
Mme Bacon: D'accord. Vous déplorez dans votre
mémoire le fait que les ventes entre consommateurs ne soient pas
couvertes par la loi; les ventes entre consommateurs, je pense, demeureront et
demeurent encore régies par le Code civil. On ne peut pas nier cela. Et
étant deux profanes en la matière qui font une transaction,
l'égalité subsiste assez généralement dans ces cas
de vente entre consommateurs. Je ne vois pas pourquoi on établirait un
équilibre puisqu'il y a égalité entre les deux. Toute la
philosophie de la loi vise les relations entre commerçants et
consommateurs et non entre consommateurs eux-mêmes. Quand on voit
l'ensemble des articles de la loi en matière de sécurité
automobile, on vient de mentionner le ministère des Transports, il est
évident que c'est encore le ministère des Transports qui a
juridiction en matière de sécurité.
M. Grondin: Mais y a-t-il vraiment égalité,
équilibre? Je pense que M. Racine, qui est directeur du garage Denis
Pépin, à Québec, peut vous en parler.
M. Racine: Madame le ministre, à ce sujet il faut apporter
certaines précisions quant à ce que vous pensez être
l'égalité qui existe entre deux consommateurs. Je vous donne
l'exemple suivant: Un consommateur se présente chez un garagiste pour
échanger sa voiture contre une voiture neuve. Le garagiste, à ce
moment, doit procéder à l'évaluation de la voiture afin
d'en déterminer l'état et de procéder aux
réparations qui s'imposent. Alors, on soumet au consommateur le
résultat de l'évaluation en disant: Vous avez besoin de changer
vos freins ou peut-être de pneus, le moteur cogne un peu, etc, etc.
Voyant le montant des réparations qu'il a à effectuer, le
consommateur se verra, dans le contexte actuel, non seulement tenté,
mais en fait vous le projetez dans la situation où il a tout avantage
à vendre sa voiture lui-même pour abuser de l'inconséquence
de l'autre consommateur.
Alors, l'équilibre que vous croyez exister entre deux
consommateurs est souvent un déséquilibre,
le vendeur du véhicule usagé ayant au préalable
consulté un expert en la matière. D'autre part, il arrive assez
souvent aussi qu'un consommateur désire échanger son
véhicule pour un véhicule neuf au moment où surviennent
des problèmes mécaniques qui peuvent s'avérer
coûteux.
C'est seul son garagiste du coin de la rue qui peut le lui
souligner.
Il va lui dire: Tes valves claquent ou tu as un petit problème au
"crank". Je m'excuse du langage technique. Ce sont des réparations qui
peuvent être dispendieuses. Le consommateur peut avoir, à ce
moment, l'option de dire: Plutôt que de mettre un montant exorbitant sur
la voiture, j'aime autant changer mon véhicule. Il est en toute
connaissance de fait que le véhicule est en mauvaise condition
mécanique et il profite de l'occasion, effectivement, pour le refiler
à un autre consommateur qui, lui, n'a pas les recours que, normalement,
la loi devrait lui permettre.
Mme Bacon: Par le fait qu'il y ait 45%, comme vous le mentionniez
tantôt comme chiffre, du commerce qui se fait entre consommateurs, est-ce
que cela a diminué les ventes de voitures usagées dans les
garages ou si votre expérience est la même? Les ventes ont-elles
augmenté?
M. Giguère: Mme le ministre, je peux vous répondre
par des chiffres que les marchands d'automobiles gardent de mois en mois, ce
qu'on appelle un "reissue" de vente, un rapport entre les ventes de voitures
neuves et les ventes de voitures usagées, lequel rapport était
environ de 1,3, c'est-à-dire que nous vendions 1,3 voiture usagée
par voiture neuve voilà peut-être six ou sept ans, lequel rapport
est rendu aujourd'hui à 0,9. Aujourd'hui, le marchand d'automobiles vend
plus de voitures neuves que de voitures usagées. Le marché de
l'usagé s'est transporté dans un marché parallèle.
Le client a plus de facilité à vendre sa voiture et il peut la
vendre beaucoup plus cher s'il s'adresse aux petites annonces ou s'il la vend
lui-même.
M. Racine: II faut considérer, Mme le ministre, le fait
suivant. Il y a énormément de ventes entre consommateurs qui se
font par les marchands d'automobiles, dans le sens de ce qu'on appelle une
vente d'accommodation. C'est le client qui trouve un autre particulier à
qui il désire vendre son véhicule et la transaction se fait par
le garagiste.
A ce moment, il s'agit de voir l'implication que cela pourrait avoir
pour le garagiste d'être tenu à garantir un véhicule qui,
en fait, n'a jamais été en sa possession physique.
Mme Bacon: Vous ne pensez pas que le fait que le garagiste, le
commerçant doit donner des garanties à un acheteur d'une
automobile usagée n'incitera pas les gens à aller acheter
plutôt dans un garage que chez un particulier? Est-ce parce que vous
voulez reprendre cette vente de voiture usagée que vous avez ces
arguments aujourd'hui?
M. Racine: Pas nécessairement. L'argumentation que vous
avez à la page B-3893 nous a été servie lors de la
présence de l'association provinciale.
Ce n'est pas nécessairement pour protéger le
marché. C'est pour rétablir l'équilibre. Je pense qu'il y
a aussi le fait suivant: si on prête au consommateur toute l'intelligence
que vous voulez bien lui prêter en disant là, je vous cite
On veut établir un certain climat de confiance entre les
commerçants et le consommateur et non seulement au niveau des individus;
au contraire, si la loi exige certaines garanties, les individus, par le fait
même, ne feront pas commerce entre eux, on n'a plus besoin de Loi sur la
protection du consommateur.
J'ai l'impression que le consommateur va continuer à faire
affaires avec un autre consommateur et à prendre une petite chance, de
temps en temps, pour essayer d'épargner $100 ou $200, de façon
que le véhicule lui coûte un peu moins cher.
De ce fait, il va y avoir encore un gonflement de ce marché entre
consommateurs, qui n'est pas du tout protégé. On a 45% ici; on
n'a pas l'impression que, si les consommateurs entre eux étaient
couverts, cela modifierait énormément les proportions. Mais on a
l'impression que cela protégerait drôlement mieux le consommateur
acheteur du consommateur vendeur qui, à ce moment-là, pose
quasiment un geste de commerçant.
Ce qu'on vous souligne, c'est que, la plupart du temps, le consommateur
vendeur a déjà acquis les connaissances nécessaires de par
l'expert que, normalement, il a consulté avant l'échange de son
véhicule.
Mme Bacon: Ma dernière question, vous n'y avez pas
répondu. Votre intention est-elle de reprendre le marché des
voitures usagées? Est-ce plus profitable que ce soit pris en main par
les commerçants?
M. Racine: Je vous ai dit, Mme le ministre, que ce n'était
pas le but de notre intervention. C'était pour tout simplement
rétablir l'équilibre des forces que vous croyez exister et qui
n'existe pas en fait. Mais il n'est pas évident que cela va rapatrier le
marché de la voiture usagée chez les marchands. Il n'est pas du
tout évident que cela va avoir cela comme effet.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je pense que la
question...
Mme Bacon: II n'a pas terminé.
Le Président (M. Lafrance): Si vous permettez...
M. Racine: Je n'avais pas fini, monsieur. M. Bellemare
(Rosemont): D'accord, allez-y.
M. Racine: Pour reprendre l'argumentation que vous nous serviez,
s'il existe ce même climat
de confiance entre consommateurs que celui qui existe entre marchands et
consommateurs, les transactions entre consommateurs vont se faire plus
nombreuses. Alors, ce n'est pas nécessairement en vue de rapatrier ce
marché...
Mme Bacon: Ce marché.
M. Racine: ...mais pour établir l'équilibre des
forces.
Mme Bacon: A l'article 51, paragraphe f), vous suggérez
que le nom, l'adresse, l'occupation du dernier propriétaire ne soient
pas donnés, seulement si le consommateur l'exige. Ne trouvez-vous pas
que c'est nécessaire au moment de l'achat et même utile de
connaître qui était le consommateur précédent et que
cela peut guider dans certaines transactions? Par exemple, on verra si c'est
une voiture-taxi qui a été drôlement utilisée par
rapport à un autre genre de voiture.
M. Grondin: Si le consommateur l'exige, pas de problème.
Si le consommateur ne l'exige pas...
Mme Bacon: Vous ne croyez pas utile de le donner de toute
façon?
M. Grondin: II faut donner le nom, pas seulement à quoi il
a servi. C'est bien cela que dit la loi.
Mme Bacon: Oui. Mais l'utilité, est-ce que vous trouvez
cela nécessaire?
M. Giguère: Dans le moment, Mme le ministre, lorsque le
client le demande, on donne le nom de l'ancien propriétaire, avec le
numéro de téléphone.
Mme Bacon: Vous ne mentionnez pas quelle a été
l'utilisation du véhicule, si c'était une voiture-taxi ou une
autre.
M. Racine: C'est évident, on peut le souligner, Mme le
ministre, mais c'est parce que vous stipulez, dans la loi, l'occupation du
dernier propriétaire et, ensuite, l'usage auquel le véhicule a
servi. C'est bien difficile de faire une enquête complète sur la
vie de l'ancien propriétaire, quel genre d'occupation ce type avait, ce
qu'il fait dans la vie, quel genre d'utilisation il faisait du véhicule.
On consentirait facilement à donner le nom et l'adresse. A ce
moment-là, le consommateur pourra facilement s'informer de ce qui
apparaît ici. Mais on ne peut pas demander au marchand d'exiger de
l'ancien propriétaire de lui divulguer ce qu'il fait dans la vie et de
divulguer l'utilisation du véhicule.
M. Giguère: Je pense, Mme le ministre, que ce que vous
avez en tête, c'est certaines voitures comme les taxis, les compagnies de
voitures de location, les voitures de police. Lorsque le client achète
une voiture usagée, il a en sa possession l'ancien enregistrement de la
voiture. S'il voit que l'enregistrement est un T ou un Z, il n'a pas besoin de
savoir quelle était l'usage de la voiture, il le voit par
l'enregistrement. On lui donne l'enregistrement; sur l'enregistrement il y a le
nom, l'adresse. Là où on trouve que ce serait difficile, c'est si
le client a triché. Il a pu faire du taxi avec sa voiture puis, à
la dernière minute, il a changé l'enregistrement de la voiture,
il a triché et il nous arrive avec un enregistrement ou une plaque
d'immatriculation qui ne représente pas ce que la voiture faisait
avant.
Mme Bacon: Vous mentionnez à l'article 59, l'avis
prévu qui, d'après nous, n'est pas discriminatoire, l'avis
verbal. Est-ce que vous ne trouvez pas que l'avis écrit que vous
suggérez serait beaucoup plus lourd d'application qu'un simple avis
verbal? La preuve de l'avis verbal, d'après nous, ne pose pas de
problème insoluble, mais vous, vous exigez un avis écrit de la
part du consommateur. Vous ne trouvez pas cela trop lourd de l'exiger?
M. Grondin: Pardon?
Mme Bacon: Vous ne trouvez pas trop lourd cette pratique par
rapport à l'avis verbal?
M. Grondin: On ne demande pas que ce soit par poste
recommandée ou des choses semblables. On dit simplement qu'il doit y
avoir un écrit pour bien démontrer qu'il y a eu un avis, parce
que le problème, avec les avis verbaux, c'est la question de la preuve
qu'il faut faire ensuite. Le client dit: Je vous ai averti, j'ai
téléphoné un jour au garage, je vous l'ai dit. A qui
avez-vous parlé? Je ne me rappelle pas, j'ai parlé à un
employé. Qui, quand, comment? On n'en sait rien, alors que, quand il y a
un avis écrit, au moins il y a quelque chose qui reste; il y a une
pièce, les écrits restent.
Mme Bacon: Vous ne pensez pas que le juge puisse faire
apprécier la preuve, à ce moment?
M. Grondin: Vous savez, les consommateurs, Madame, il y en a qui
sont très honnêtes, mais il y en a peut-être quelques-uns
qui le sont moins. Ils pourront toujours prétendre qu'ils ont
donné un avis verbal. Qui va être en mesure de les
démentir? Mes clients ont quand même des établissements
où il y a souvent des dizaines et des centaines d'employés.
Est-ce qu'on a vraiment donné un avis verbal? Nous, on pense qu'il y a
des consommateurs qui pourraient toujours le prétendre, puis on ne sera
pas en mesure de contrôler. A l'article 59, c'est cela le
problème. On demande un avis écrit. D'ailleurs, partout dans la
loi on demande un avis écrit. Le marchand d'autos, quand il avise le
consommateur, la loi prévoit que cela doit être par écrit.
Il ne suffit pas d'un coup de téléphone. On aimerait la
réciproque. On a peur que certains consommateurs abusent des
commerçants.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: Merci, M. le Président. Je remercie
également le groupe de la présentation du
mémoire. Comme il l'a signalé lui-même, il est en
quelque sorte solidaire de deux groupes qui ont traité du même
sujet. C'est d'ailleurs sur des témoignages précédents que
nous avons entendus avec beaucoup d'intérêt que j'aimerais avoir
votre opinion. Vous en parlez vous-même. C'est à propos de
l'article 53 sur la garantie obligatoire à offrir pour un marchand
d'autos usagées. On s'est fait dire de façon très
colorée, mais certainement très remarquée de la part de la
commission, il y a une semaine ou deux, lors d'une séance, que si cet
article devait être adopté il aurait un effet d'entraînement
sur les prix des voitures usagées, en ce sens que quelqu'un nous a dit
aussi clairement que cela: Si vous m'obligez à garantir une minoune de
$1000, parce qu'aujourd'hui, pour $1000, on a quelque chose pas loin de la
minoune si vous me dites que je suis obligé de la garantir alors
je n'ai plus de minoune à $1000, c'est $1500 automatiquement ou
$1600.
Si vous me faites prendre le risque d'une garantie sur une voiture de
$1000, moi je vais être obligé d'augmenter mes prix en
conséquence.
Si j'ai bien remarqué, lorsque vous nous suggérez de
porter à $2000 le seuil à partir duquel une garantie s'exerce sur
une auto usagée, c'est que vous faites en quelque sorte à peu
près la même analyse et vous ne voulez pas courir le risque de
garantir une voiture qui se vend $1000 actuellement. J'aimerais que vous
spécifiez ce point de vue, parce qu'il n'est sans doute pas dans
l'intention du ministre, ni de personne de la commission, d'ainsi occasionner
une hausse de coût pour ceux qui n'ont malheureusement par les moyens de
s'acheter d'autre chose qu'une voiture usagée.
Vouloir leur donner une garantie aussi insuffisante que deux mois ou
2000 milles et leur faire payer cette garantie jusqu'à $500 ou $600 de
plus qu'ils paieraient actuellement sans cette garantie sur cette voiture, je
ne pense pas que, si tel devait être le cas, aussi clair que cela, on
aurait rendu un grand service. Vous savez, vous nous suggérez d'inclure
2000 milles avec la valeur aussi; 2000 milles c'est vite fait. Moi je fais cela
par mois avec ma voiture, c'est-à-dire que je me trimbale pas mal sur la
20 entre Montréal et Québec. Mais aujourd'hui quelqu'un qui
s'achète une voiture a toujours l'espoir de faire un peu plus que deux
mois, surtout lorsqu'il va mettre jusqu'à $1500 là-dessus.
Or, si on lui donne une garantie aussi courte et que pour ce faire on
l'oblige à payer peut-être 50% de plus pour se rendre
propriétaire d'une voiture usagée, tout compte fait, en ballant,
on n'a peut être pas rendu un très grand service au consommateur.
Puisqu'on est à la recherche, puis que vraiment je cherche à me
faire une opinion là-dessus, j'aimerais que vous nous expliquiez ce
point qui a déjà été défendu par un autre
groupe.
M. Giguère: Alors je vous donne mon point de vue.
Premièrement, je ne dirais pas dans tous les cas mais, habituellement,
plus la voiture est dispendieuse, moins la garantie coûte cher. C'est
très évident, parce que plus la voiture est dispendieuse,
évidemment, plus vous approchez du modèle 1975/76; la voiture a
moins de dépréciation.
Si vous tombez dans des voitures bon marché, des voitures de $500
à $600, qu'on appelle les minounes, évidemment la garantie
coûterait peut-être je n'ai aucune idée, c'est une
police d'assurance cela coûterait peut-être $600; je n'ai
aucune idée là-dessus. On n'a jamais fait des calculs d'ailleurs.
Vous posez la question: Qu'est-ce que coûterait la garantie? Qu'est-ce
que cela coûterait...
M. Charron: Supposons, vous, monsieur, que vous avez dans votre
garage une voiture, à l'heure où on se parle, qui est de $1000.
Quelqu'un arrive chez vous ce soir et il vous offre $1000; il peut partir avec.
Si demain matin vous savez que, contrairement à ce soir, vous avez en
plus une garantie de deux mois à mettre sur cette voiture que vous avez
évalué vendre $1000 aujourd'hui, modifieriez-vous votre prix
demain et de quel ordre?
M. Giguère: De quel ordre, je ne peux pas vous dire
à peu près. Mais, si la loi s'appliquait demain matin, je
pourrais vous le dire dans six ou sept mois, parce que là j'aurais
l'expérience. Je dirais: Les voitures que j'ai vendues au-dessus de
$1000 ayant la garantie déterminée par la loi m'ont
coûté en moyenne $350 ou $250, mais je lancerais un chiffre
peut-être de $150 à $200.
Il ne faut pas oublier un point aussi. Il n'y a pas tellement longtemps,
les manufacturiers manufacturant les voitures flambant neuves, n'ayant jamais
servi, avaient des garanties de quatre mois ou 4000 milles. Maintenant, on
parle de voitures qui ont 25 000 milles, 30 000 milles ou 40 000 milles et on
veut leur donner des garanties dépassant, ce que vous avez
mentionné, deux mois. Là, on tombe, je ne dirais peut-être
pas dans l'absurde, mais dans l'exagération, parce que ce qu'il va
arriver, c'est que le marchand d'automobiles ou le vendeur va se créer
un fonds de réserve, une assurance. Alors, le client qui fera attention
à sa voiture, qui conduira prudemment, aura payé sa police
d'assurance, aura payé sa voiture peut-être $250 plus cher pour
rien; tandis qu'à côté, le client qui fera un usage
excessif de sa voiture, se servira de la garantie, mais aidera à faire
augmenter mes futures voitures, parce que tous les clients qui feront un usage
excessif, dans mes livres, je vais dire: La moyenne est rendue à $342,
donc, les prochaines voitures, je vais les augmenter de $342.
M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que le député de
Saint-Jacques me permettrait de vous poser...
M. Charron: ...seulement une question...
M. Bellemare (Rosemont): Seulement une question, si le
député de Saint-Jacques me le permet. Je dois vous dire,
monsieur, au départ que vous faussez la vérité.
Actuellement, pour les automobiles neuves, c'est 12 000 milles ou un an. Est-ce
exact?
M. Giguère: Oui. Ce que j'ai dit...
M. Bellemare (Rosemont): Je crois que c'est 25 000 milles.
M. Giguère: Non, j'ai dit qu'il n'y a pas très
longtemps, la garantie était de 4000 et quatre mois.
M. Bellemare (Rosemont): Actuellement, qu'est-ce que c'est?
M. Giguère: Actuellement, c'est 12 000 milles.
M. Bellemare (Rosemont): Ou un an...
M. Giguère: Ou un an. C'est cela.
M. Bellemare (Rosemont): Le premier qui arrive.
M. Giguère: C'est 12 000 milles ou un an, le premier qui
arrive.
M. Bellemare (Rosemont): D'accord. Je remercie le
député de Saint-Jacques de m'avoir permis de poser cette
question.
M. Giguère: Non, je ne me suis pas trompé. Il n'y a
pas très longtemps, la garantie était de 4000 milles.
M. Grondin: La même voiture...
M. Charron: Seulement, monsieur, avant...
M. Giguère: C'est cela...
M. Grondin: II ne faut pas qu'on laisse l'impression que M.
Giguère fausse les faits. Il a dit que la voiture qui, dans le temps,
était neuve, il y a dix ans, par exemple, même neuve, on lui
garantissait seulement 4000 milles. Cette voiture a dix ans d'usure, c'est une
"minoune" maintenant. Elle est dans la cour. Aujourd'hui, on demanderait que le
marchand lui donne plus de garantie que quand elle était neuve. C'est
cela que M. Giguère a voulu dire.
M. Bellemare (Rosemont): Non, si vous me le permettez, M. le
député de Saint-Jacques, M. le Président, je n'ai pas
parlé de "minoune", parce que si vous parlez de "minoune", vous allez
vous enliser. J'ai parlé de machines neuves. Je dis que c'est 12 000
milles garantis ou un an. Est-ce exact? C'est tout ce que je veux savoir. Ce
n'est pas plus.
M. Giguère: C'est exact.
M. Bellemare (Rosemont): C'est exact?
M. Giguère: C'est exact.
M. Bellemare (Rosemont): Merci.
M. Giguère: C'est parce que tantôt, on ne parlait
pas de voiture neuve, on parlait de voiture usagée.
M. Bellemare (Rosemont): Vous avez...
M. Charron: On vient de discuter momentanément des effets
qu'aurait l'entrée en vigueur de la loi sur les prix, les valeurs des
voitures, mais à l'heure où on se parle, est-ce que les membres
de votre association et même d'autres que vous connaissez dans le
Québec, offrent sur une voiture usagée un semblant de garantie ou
un minimum de garantie ou si c'est, une fois qu'elle est sortie de votre
garage...
M. Giguère: Ce n'est pas un semblant de garantie, c'est
une garantie.
M. Charron: C'est de quel ordre, c'est de quelle nature?
M. Giguère: Dans ma cour, je vends des voitures
usagées. Si, de bouche à oreille, le client dit: Chez
Giguère, on s'est fait refiler une mauvaise voiture, là, ce qui
va arriver, c'est que mon inventaire va augmenter et la clientèle va
aller l'acheter ailleurs. C'est tout simplement cela.
M. Charron: Alors, vous donnez quoi comme garantie actuellement?
Si je veux acheter une voiture chez vous...
M. Giguère: On donne 50-50, et on est conciliant.
Lorsqu'on voit que le bris a dépassé 30 jours, c'est une
discussion avec le client.
M. Charron: Un mois, 50-50. M. Giguère: Un mois,
50-50.
M. Charron: S'il arrive un ennui majeur ou mineur à
l'intérieur du premier mois de l'achat, vous partagez la note avec le
consommateur.
M. Giguère: Ecoutez, si le client sort la voiture le
dimanche et nous appelle le mercredi pour nous dire: Je suis en panne, on ne
lui prend rien. La garantie, on ne l'exécute pas au pied de la lettre,
on la donne pour que le client soit satisfait.
Mais on ne donne pas la garantie sur toutes les voitures.
M. Charron: II y en a qui partent sans garantie. M.
Giguère: Assurément, oui.
M. Charron: Celles sur lesquelles vous feriez cette offre de
50-50 à l'intérieur d'un mois, ce sont celles, en gros
c'est évident qu'on parle de cas d'espèce, pour chaque voiture en
particulier qui sont évaluées à combien sur le
marché?
M. Giguère: La procédure, c'est que lorsqu'on
reprend une voiture, si on sent qu'elle a un problème mineur, on la
reconditionne. Cette voiture
peut valoir $950, mais elle peut être dans le même
état qu'une voiture presque neuve. L'autre voiture peut se vendre $2500
mais si on sait que la carrosserie est rouillée, que le moteur est
près de mourir, on ne touche pas à la voiture et on la vend "as
is". C'est une voiture non garantie. Le client, lorsqu'il achète une
voiture et qu'on ne lui donne pas de garantie, sait avant de l'acheter que
c'est parce que cette voiture ne serait pas rentable, parce qu'avant de donner
la garantie, il faut la réparer, il faut la reconditionner.
Si elle n'est pas digne d'être reconditionnée, elle n'est
pas digne d'avoir une garantie.
M. Charron: Le genre de garantie dont vous venez de parler, 50-50
à l'intérieur d'un mois, est-ce que c'est une pratique seulement
chez vous ou si c'est une pratique à peu près dans l'ensemble des
garages?
M. Giguère: Je dirais que c'est...
M. Charron: II y a un monsieur de Pépin Automobiles
à côté de vous. C'est quoi chez vous?
M. Racine: C'est à peu près la même chose. Le
fait est que dans des véhicules de l'année dernière, on
peut étendre la garantie jusqu'à trois mois et 3000 milles, ce
qu'à peu près tous les garagistes font. C'est assez similaire.
Maintenant, quant à garantir dans l'ensemble de la province que tout se
passe partout pareil, il n'y a pas de politique générale
d'établie. C'est pour ça que dans le texte de loi, on trouve
qu'une standardisation serait souhaitable, mais à des conditions qui
seraient raisonnables. Parce que quand on parle d'une voiture de $1000, vous le
souligniez tantôt, ce n'est pas une voiture de l'année
passée, ni de l'année d'avant. C'est une voiture de 5 ans. Toutes
les chances sont que cette voiture ait 50,000 ou 60,000 milles. Le coût
de la garantie serait exorbitant pour le consommateur. Il y en a plusieurs qui
aiment mieux prendre la chance de s'acheter une voiture de ce prix en disant:
Je l'arrangerai si elle me tombe des mains.
M. Charron: D'accord.
M. Racine: On suggère que la garantie existe normalement,
mais qu'on puisse, si c'est stipulé au contrat, se libérer de la
garantie en accord avec le consommateur.
M. Charron: D'accord, je n'ai plus d'autres questions, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Boutin: Si j'ai bien compris l'énoncé de tout
à l'heure, vous disiez que les ventes entre particuliers ou entre
consommateurs ont un but assez précis, soit d'obtenir un prix plus
élevé que celui qu'on peut obtenir en échange dans un
garage. C'est ordinairement la raison pour laquelle c'est fait, et vous, vous
suivez ce qu'on appelle le "red book" en ce qui concerne vos échanges et
vos prix, suivant ceux de la compagnie.
Alors, pourrait-on dire que, dans l'ensemble, le consommateur va payer
plus cher pour son automobile en l'achetant d'un autre consommateur et sans
être protégé en plus. C'est cela que vous voulez
avancer?
M. Giguère: C'est bien cela.
M. Boutin: Pensez-vous qu'il serait plus juste que certains
centres de diagnostic soient établis d'un côté comme de
l'autre, comme on en parle actuellement, et puissent permettre aux
consommateurs d'être protégés en ce qui concerne les ventes
entre consommateurs?
M. Giguère: D'abord, il faudrait trouver les centres de
diagnostic. Ils sont pas mal tous disparus jusqu'à ce jour.
M. Boutin: II est question d'en faire d'autres; on a entendu
parler de cela dernièrement.
M. Racine: Ce dont vous parlez sont des centres
d'évaluation pour les accidents de voiture, alors, c'est le BAC, le
Bureau d'assurances du Canada, qui est censé établir ces centres,
mais l'évaluation d'un problème d'accident est fort
différent de l'évaluation d'un problème mécanique,
là où il y a énormément de démontage
à faire, tandis que dans l'accident, c'est visible, c'est apparent,
c'est extérieur au véhicule.
M. Boutin: Ici, on parle de protéger le consommateur,
pensez-vous qu'un individu, parce que, lorsqu'on le regarde dans tout autre
type de commerce, il devient particulier, peut, lui aussi, lorsqu'il vend son
automobile à un autre, avoir une position de force vis-à-vis du
consommateur et devenir, à ce point de vue-là, un simple
consommateur comme n'importe quel autre? C'est ce qu'on avance dans le projet
de loi.
M. Racine: Lors de la vente du véhicule? M. Boutin:
Oui.
M. Racine: C'est ce que j'expliquais tantôt, c'est que
l'équilibre des forces que vous croyez exister, la plupart du temps
n'existe pas. J'expliquais que le premier geste quand un type veut vendre sa
voiture, en général, c'est parce qu'il veut en acheter une neuve.
Alors, il va chez son garagiste, fait évaluer sa voiture et, entre le
moment où il signe le contrat d'achat avec l'évaluation de son
véhicule et le moment où il prend livraison du véhicule,
parce que cela peut prendre parfois trois semaines ou un mois à
commander le véhicule, il peut essayer de la vendre à un prix
plus élevé.
Le garagiste lui ayant dit: Ecoutez, il y a telle chose, telle chose
à faire sur votre véhicule. Alors, le consommateur vendeur
devient renseigné sur l'état de son véhicule au moment
où il se présente chez le garagiste. Un autre facteur, c'est
qu'il peut aller chez son garagiste du coin et le garagiste,
entendant un cognement dans le moteur, dit: Ecoute, ton moteur n'en a
pas pour longtemps, mon ami. Tu ferais mieux de faire attention. Le gars
décide de changer de voiture et profite de l'occasion pour essayer de la
vendre à un autre consommateur, qui lui, ne s'y connaît pas.
Alors, dans les transactions entre consommateurs, ce que vous croyez être
une transaction entre deux personnes qui ne s'y connaissent pas, je veux dire,
dans les faits, ce n'est souvent pas le cas.
M. Boutin: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Charlesbourg.
M. Harvey (Charlesbourg): Sur le même sujet, M. le
Président, lorsque vous parlez de revendre l'automobile entre les
individus, M. Giguère, tout à l'heure, indiquait qu'il devrait y
avoir, en tout cas, égalité pour tous à l'intérieur
du projet de loi. Est-ce à dire que vous auriez à nous
suggérer un mécanisme quelconque à l'intérieur des
règlements pour faire que, pour celui qui vend son automobile au
marchand, lequel tient compte évidemment du "red book" qu'on appelle le
livre rouge, au moment de la revente, puisqu'il est obligé d'en garantir
certaines mécaniques pour une période de temps donnée, il
est normal qu'à ce moment-là, le livre rouge ne tienne plus
compte de la nouvelle revente et que vous preniez, par un certain profit, une
marge de sécurité qui vous permette de vendre l'automobile un peu
plus cher que le livre rouge le dicte normalement, à la valeur de rachat
comme telle?
C'est un peu cela? Vous n'avez pas besoin d'une loi pour cela, mais,
dans l'éventualité où une loi vous obligerait à le
faire.
Quelle est la marge de sécurité dont vous avez besoin dans
la revente de cette automobile? Vous achetez à la valeur au livre, c'est
bien cela, et vous revendez ensuite avec une différence de prix qui
s'appelle, d'une part, peut-être votre profit, parce que si vous
êtes obligé de donner une garantie, en vertu de la loi, le profit,
vous pouvez le manger assez vite... Dans l'éventualité de
revendre les automobiles à partir du garage avec une marge de
sécurité, vous êtes d'avis que le consommateur comme tel
paiera ses automobiles plus cher, d'une part et deuxièmement, si vous
êtes obligé d'assurer une garantie, dans quelle mesure le
faites-vous? On a bien compris que vous suggérez $2000 au lieu de $1000.
Là, déjà, vous avez eu l'occasion d'expérimenter un
tant soit peu l'automobile. Troisièmement, si nous, nous avions à
accepter une loi comme celle-là, en tenant compte de votre suggestion
des $200Q, quelle serait la suggestion que vous auriez à nous faire
concernant les règlements des personnes qui ne respectent pas ces
mécanismes de revente?
M. Giguère: A titre d'exemple, la pénalité
d'une vente entre consommateur et consommateur...
M. Harvey (Charlesbourg): Et consommateur.
M. Pouliot (Pierre): II y a quelques années, on a
suggéré d'établir pour tout le monde un certificat de
conformité mécanique. Lorsqu'il y aurait vente entre les
consommateurs, ces certificats pourraient s'appliquer à tout le monde,
aussi bien pour nous autres que pour le consommateur. Ce serait certainement
une mise en garde pour protéger le consommateur. Je pense que le
ministère des transports est sur le point de suggérer quelque
chose dans ce sens.
M. Harvey (Charlesbourg): Pour éviter cette chose, le BVA,
le Bureau des véhicules automobiles, a obligé, en quelque sorte,
l'acheteur d'une automobile d'un individu, d'un particulier, à
connaître l'histoire de l'automobile: s'il s'agit d'un taxi, s'il s'agit
d'une voiture immatriculée ou d'une automobile louée. Les
garagistes sont assujettis à ces restrictions du bureau.
M. Giguère: Ce ne sont que des normes de
sécurité d'ordre mécanique concernant les freins,
concernant la conduite, mais ne s'appliquant pas au différentiel,
à la transmission et au moteur.
M. Harvey (Charlesbourg): Iriez-vous jusqu'à dire qu'un
individu qui vend son automobile personnelle à un ami devient, dans bien
des cas, son ancien ami, parce qu'il ne veut plus le voir après.
M. Giguère: On dit trop que les voitures se vendent entre
amis et amis. Je ne pense pas.
M. Harvey: Entre consommateurs.
M. Giguère: Cela se vend entre consommateurs, pas entre
amis. Cela se fait surtout dans le cas du patron qui vend sa voiture à
son employé. Ou bien deux employés qui travaillent dans la
même manufacture, l'un entend dire que la voiture de John Doe, cela fait
peut-être trois ans qu'il la conduit, mais c'est une bonne voiture parce
que John Doe connaissait la mécanique et qu'il l'a toujours bien
entretenue. Ce qu'il ne sait pas, c'est que John Doe, qui connaît la
mécanique, s'il vend sa voiture, c'est parce qu'il a une raison de la
vendre.
M. Harvey: C'est cela.
M. Giguère: Ce qu'on juge, là-dessus, ce n'est pas
la question de reprendre un marché, parce que l'usagé, dans notre
commerce, c'est une source. Il faut défouler, il faut remplacer notre
usagé, il faut qu'il tourne. C'est une question d'application. On ne
comprend pas que deux vendeurs d'automobiles... le consommateur, lorsqu'il
devient vendeur, on calcule qu'il devient comme nous autres, il est vendeur.
Lorsqu'il vend sa voiture, il la vend pour faire un profit, tandis que nous, on
ne vend pas une voiture usagée pour faire un profit, on vend une voiture
usagée pour s'en débarrasser. On l'a reprise en partant parce
que...
M. Bellemare (Rosemont): C'est-à-dire que vous êtes
bénévoles.
M. Giguère: Pardon?
M. Bellemare (Rosemont): Vous êtes
bénévoles.
M. Harvey (Charlesbourg): On parle d'automobiles
usagées.
M. Bellemare (Rosemont): II est bénévole parce
qu'il ne fait pas de profit.
M. Harvey (Charlesbourg): II est agent d'affaires.
M. Giguère: Lorsque mon voisin vient chez moi pour changer
sa voiture et qu'il me dit: Prenez-vous ma voiture usagée? Si je dis
non, qu'est-ce que vous pensez qu'il va faire?
M. Harvey (Charlesbourg): II va aller ailleurs.
M. Giguère: II va aller ailleurs, n'est-ce pas? Alors,
moi, je suis un homme d'affaires. Je dis: Oui, je la prends, votre voiture.
M. Harvey (Charlesbourg): Exactement.
M. Giguère: Je dis au client: Votre voiture, je me charge
de l'écouler. Je me charge de la reprendre; maintenant, mais pour la
revendre, il faut que je la peinture, il faut que je la frotte, il faut que je
la polisse, il faut que je la rende désirable. C'est ce qu'on fait. Il y
a des coûts là-dessus.
Lorsque vous parliez du "red book", tantôt, du livre rouge, il y a
deux prix dans le livre rouge. Il y a le prix "as is" et il y a le prix au
détail. Le prix au détail, c'est le prix d'une voiture à
un millage raisonnable, d'apparence raisonnable, avec une "mécanique"
raisonnable. Si on reprend la voiture et qu'elle est dans une condition
détériorée, on applique la différence entre le prix
de reconditionnement, appliqué à notre prix coûtant, mais
qui sera le futur prix vendant.
Evidemment, on a aussi des commissions à payer à nos
vendeurs et on a l'administration. Cela entre là-dessus.
M. Harvey (Charlesbourg): D'accord.
M. Racine: Si vous nous demandez une suggestion, on formule
celle-ci: Assujettissez tout le monde aux mêmes obligations, quitte
à ce qu'il soit fait comme à la Régie des loyers, par
exemple, un contrat standard. On prend un loyer moyen, par exemple, à
$150 par mois, douze mois. C'est un contrat qui intervient entre deux personnes
pour un montant de $1800. On a pris la peine de faire des contrats standards
avec un tas d'obligations à l'intérieur de ce contrat qui
intervient bien souvent entre un locataire et un locateur qui a peut-être
deux ou trois loyers, en fait deux consommateurs. Pourquoi ne fait-on pas la
même chose dans le cas des ventes d'automobiles? Cela protégerait
tout le monde.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, si vous me
permettez, j'aimerais poser une question à monsieur, si vous me le
permettez, mon cher député de Charlesbourg. L'aspect que vous
soulignez, je crois qu'il n'entre pas en ligne de compte. Quand on parle de
loyers, c'est une nécessité. Une automobile, ce n'est pas une
nécessité. Je ne vois pas pourquoi vous arrivez à une
comparaison entre une automobile et rester chez soi.
M. Racine: Vous avez une perception bien spéciale de
l'automobile, mon cher monsieur. Je ne connais pas grand monde qui se
promène constamment à pied. Si c'est votre avis, je le respecte
mais, pour la plupart des gens, c'est devenu une nécessité.
M. Bellemare (Rosemont): Ce n'est pas comme habiter, par
exemple.
M. Racine: Pardon?
M. Bellemare (Rosemont): Ce n'est pas comme habiter.
M. Racine: Ah non! Ce n'est pas tout à fait comme habiter.
C'était un exemple que je donnais, monsieur.
M. Bellemare (Rosemont): J'ai dit: Comme habiter.
M. Racine: C'est ce que je vous dis, habiter. Comme dans
habitant.
Le Président (M. Lafrance): L'honorable
député de Taschereau.
M. Bonnier: J'ai une seule question, M. le Président,
très courte, que j'avais posée ce matin relativement aux
pratiques dans les réparations de voitures. Selon votre connaissance,
est-ce qu'il arrive souvent que des propriétaires de garages offrent une
commission aux mécaniciens dans le cas où ils suggèrent de
changer des pièces?
M. Racine: Non seulement ce n'est pas d'usage, mais les
mécaniciens, pour vous donner un exemple, dans la région de
Québec, sont tous régis par une convention collective qui stipule
un taux horaire.
M. Bonnier: Un comité paritaire, vous voulez dire.
M. Racine: Non, non, une convention collective. Les gens sont
syndiqués. Ils sont régis à la fois par le comité
paritaire et par une convention collective. Effectivement, le comité
paritaire, le décret, c'est un prolongement de la convention collective.
A ce moment-là, ce qui se produit, c'est que les gens sont strictement
payés à l'heure. Le mécanicien, pour donner un exemple,
peut faire $5 l'heure. Pour une présence de 40 heures par semaine, cela
fait $200 la semaine. Il n'y a pas de...
M. Bonnier: Ce n'est pas une pratique courante.
M. Racine: Absolument pas. Pas à ma connaissance. On
connaît la plupart des garages de notre région.
M. Bonnier: Je vous remercie.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, j'aurais une
dernière question, si vous me le permettez.
Le Président (M. Lafrance): Une dernière?
M. Bellemare (Rosemont): Une dernière, soyez-en
assuré.
Le Président (M. Lafrance): Je retiens le mot
"dernière".
M. Bellemare (Rosemont): Soyez assuré, M. le
Président, que ce sera la dernière question.
M. Giguère je crois que c'est le nom lorsque
vous nous dites: lorsque arrivent les intérêts ou les
échéanciers, si vous aimez mieux, qu'on doit payer à votre
garage ou à vos associés, peu importe, vous arrivez et vous dites
que vous y allez d'une façon conciliante. Mais si la personne ne vous
paie pas, qu'est-ce que vous faites?
M. Giguère: D'ailleurs, je n'ai jamais mentionné
cela, mais...
M. Bellemare (Rosemont): Bien, vous avez dit tout à
l'heure: d'une façon conciliante que vous...
M. Giguère: Les garanties.
M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas, qu'est-ce que
vous faites?
M. Giguère: S'il ne paie pas quoi?
M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas?
M. Giguère: Le prix de la voiture.
M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas, qu'est-ce que
vous faites?
M. Masse: Ils saisissent le gars.
M. Bellemare (Rosemont): C'est cela que je vous demande, s'il ne
vous paie pas...
M. Giguère: Votre question me semble assez confuse. Est-ce
que vous pourriez expliquer?
M. Harvey (Charlesbourg): Nous autres, on le comprend, on est
habitué, on le voit souvent. Il parle des garanties 50/50; dans
l'éventualité où vous faites vos réparations, vous
payez vos 50%, les autres 50% devant être payés par Jos. Bleau. Il
ne vous paie pas; qu'est-ce que vous faites? Bien souvent, vous en faites votre
deuil; c'est cela. C'est bien répondu, cela.
M. Bellemare (Rosemont): Là, il ne s'agit pas de faire 22
culbutes. Je vous demande si la personne avec laquelle vous dites que vous
êtes très conciliant, vous essayez d'une façon
conciliante...
M. Giguère: Oui.
M. Bellemare (Rosemont): ... s'il ne vous paie pas et que vous
avez été financés par des compagnies prêteuses... Le
gars n'a pas une mosus de cenne, il faut le dire, il n'a pas une maudite cenne
pour vous payer; qu'est-ce que vous faites? C'est la question que je vous
pose.
M. Giguère: En posant la question, vous avez donné
la réponse; vous dites: II n'a pas une mosus de cenne, il n'y a pas
grand-chose qu'on peut faire.
M. Bellemare (Rosemont): Bien, qu'est-ce que vous faites?
M. Giguère: On ne fait rien, c'est cela.
M. Bellemare (Rosemont): Bien quoi, vous lui laissez l'auto?
M. Giguère: La loi prévoit...
M. Bellemare (Rosemont): Vous lui laissez l'auto?
M. Giguère: La loi prévoit...
M. Bellemare (Rosemont): J'aimerais que vous le disiez au micro
parce que c'est enregistré. Vous lui laissez l'auto? S'il ne vous paie
pas, vous lui laissez l'auto?
M. Giguère: On lui laisse sa voiture.
M. Bellemare (Rosemont): Vous lui laissez sa voiture?
M. Giguère: S'il ne paie pas la moitié de sa
réparation?
M. Bellemare (Rosemont): Non, non, je parle de vente.
M. Giguère: Non, non, là, je m'excuse...
M. Bellemare (Rosemont): Moi, je m'en vais chez vous...
M. Giguère: J'aimerais que vous répétiez la
question avant de...
M. Bellemare (Rosemont): On va s'entendre, peut-être que je
me suis mal exprimé.
Le Président (M. Lafrance): On pourrait régler le
problème en demandant au député de Rosemont d'y aller ce
soir et de revenir demain.
M. Bellemare (Rosemont): Mon cher Président, si vous me
permettez...
Le Président (M. Lafrance): Vous avez dit: Une
dernière question.
M. Bellemare (Rosemont): Le jour où je n'aurai plus le
droit de parler en commission parlementaire, ce sera le jour où je ne
serai plus député.
Le Président (M. Lafrance): Vous avez pris l'engagement de
poser une seule question, je vous donne la permission de poser une
question.
M. Bellemare (Rosemont): Une question apporte des
sous-questions.
Le Président (M. Lafrance): Une autre question et
j'ajourne la séance après.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, vous me
permettez une autre question.
Le Président (M. Lafrance): Oui, une.
M. Bellemare (Rosemont): Alors, je demande à monsieur.
J'achète une voiture chez vous, une minoune, j'achète l'auto, je
m'en vais chez vous et, au bout d'un an, je n'honore plus mes paiements,
qu'est-ce que vous faites?
M. Giguère: Moi, personnellement, chez Gi-guère
Automobiles, on ne fait rien; la compagnie de finance, puisque vous supposez
que la voiture est financée, c'est cela?
M. Bellemare (Rosemont): Exact.
M. Giguère: Là, le client décide, par manque
d'argent ou différentes raisons, d'arrêter de faire ses paiements,
la compagnie de finance lui envoie un avis et reprend la voiture en sa
possession.
M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que vous vous avez
été payé là-dessus?
M. Giguère: Ah! non, je suis endosseur du contrat.
M. Bellemare (Rosemont): Vous êtes l'endosseur du contrat
puis vous avez retiré 21,7%.
M. Giguère: Pas moi, la compagnie de finance.
M. Bellemare (Rosemont): Ou 9% de ristourne.
M. Giguère: Pardon?
M. Bellemare (Rosemont): Combien vous avez de ristourne?
M. Racine: Monsieur, c'est un véritable spaghetti oratoire
que vous êtes en train de nous servir là, et on a tous bien
mangé ce midi. On ne se comprend plus.
M. Bellemare (Rosemont): Non, non...
Le Président (M. Lafrance): Je regrette, le
député a le droit de poser les questions qu'il veut, qu'elles
vous plaisent ou non. C'est à moi à décider si on devrait
ajourner le débat oui ou non. Le député de Rosemont.
M. Bellemare (Rosemont): M. le Président...
Accepté.
Le Président (M. Lafrance): Vous m'avez demandé la
permission de poser une question, elle est posée. La commission ajourne
ses travaux à demain matin, dix heures.
Merci, Messieurs Giguère et compagnie.
(Fin de la séance à 16 h 7)