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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 1 septembre 1976 - Vol. 17 N° 136

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection du consommateur

Séance du mercredi 1er septembre 1976

(Dix heures dix-sept minutes)

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des consommateurs coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

Nous reprenons les auditions concernant le projet de loi no 7, à la commission élue permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières. Avant de débuter, je voudrais faire mention de deux changements à la commission. M. Charron (Saint-Jacques) remplace M. Burns (Maisonneuve) et M. Cornellier (Saint-Hyacinthe) remplace M.Tremblay (Iberville).

Aujourd'hui, nous entendrons l'Association pétrolière du Québec, la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins, Mattel Canada, Parker Brothers et l'Association des marchands d'automobiles de Québec Inc.

Cinq organismes sont représentés. Pour revenir aux membres de la commission, M. Faucher (Nicolet-Yamaska) remplace M. Marchand (Laurier).

L'Association pétrolière du Québec, représentée par M. Roger Hamel et Me Henri Lanctot. A vous la parole.

Association pétrolière du Québec

M. Hamel (Roger): Bonjour, j'aimerais d'abord me présenter. Je suis Roger Hamel, président de l'Association pétrolière du Québec et directeur au Québec pour la Compagnie pétrolière impériale Limitée. A ma droite, Me Henri Lanctot, qui est conseiller juridique de l'association et qui occupe le même poste chez Texaco Canada Ltée; à ma gauche, M. Roger Taschereau, qui est secrétaire-trésorier de l'APQ et qui est directeur de la division du Québec pour la compagnie Texaco Canada Ltée.

L'Association pétrolière du Québec est une association à but non lucratif qui regroupe quatorze entreprises pétrolières oeuvrant au Québec dans les domaines du raffinage, du transport et de la commercialisation des produits pétroliers. Vous trouverez la liste de nos membres au début de notre mémoire.

J'en profite pour remercier tout de suite, au nom de l'association que je préside, la commission parlementaire pour l'occasion qu'elle nous donne aujourd'hui de faire entendre notre point de vue sur les questions relatives à la protection du consommateur.

Comme nous avons déjà déposé notre mémoire, je me bornerai à vous faire part de l'esprit avec lequel nous abordons ces questions en plus de relever certains points dans le projet de loi qui nous préoccupent plus particulièrement aussi bien dans notre intérêt de commerçants que dans celui des consommateurs.

En ce qui concerne notre attitude face aux problèmes que rencontrent les consommateurs, nous souscrivons aux objectifs que proposent la loi et le législateur. Nous sommes convaincus qu'il y a moyen de concilier les intérêts de nos membres avec ceux des consommateurs. D'ailleurs, notre existence ne repose-t-elle pas justement sur le maintien de bonnes relations avec nos clientèles?

Il y a cependant, selon nous, un écueil à éviter. Il n'existe pas de solutions abstraites à des problèmes concrets. Nous favorisons donc une approche pragmatique aux problèmes que peuvent poser nos rapports commerciaux avec les consommateurs.

Nous reconnaissons et acceptons que la société évolue et nous appliquons, parfois depuis longtemps, certaines des mesures préconisées dans le projet de loi.

Pour sa part, la société doit reconnaître et accepter que les entreprises subissent certaines contraintes inhérentes à notre système économique. Aussi il nous apparaît normal de retrouver dans une loi sur la protection du consommateur un juste équilibre entre ces deux réalités.

Avec votre permission, je commencerai par relever un certain nombre de points qui sont plus particulièrement susceptibles d'affecter nos opérations. Quant à Me Lanctot, il examinera plus en détail les mécanismes juridiques en cause et suggérera certaines corrections ou modifications dans le seul but de favoriser une meilleure compréhension et une application plus souple et nuancée des nouvelles règles.

La définition du consommateur telle qu'énoncée dans le projet est particulièrement large et imprécise. S'il est souhaitable de protéger le consommateur inexpérimenté, on peut cependant s'interroger sur l'opportunité d'étendre la même protection à des personnes qui, compte tenu de leurs connaissances et de leur appartenance au monde des affaires, sont en mesure de se former un jugement beaucoup mieux éclairé. C'est évidemment la situation du commerçant qui achète des biens pour l'exercice de son commerce. En général, il entretient avec ses fournisseurs des relations qui se caractérisent surtout par leur absence de formalisme et par la grande rapidité avec laquelle interviennent les transactions.

Exiger dans ces cas un cadre formel plus rigide n'aura certainement pas pour objet d'améliorer la situation, surtout si l'on considère que d'autres lois lui accordent déjà toute la protection dont il peut avoir besoin.

Vous trouverez dans notre mémoire une suggestion pour la définition du consommateur qui, selon nous, dissipe l'équivoque possible avec le texte du projet tel qu'il se présente maintenant.

Dans un autre domaine, nous sommes particulièrement heureux de voir que le projet à l'étude contient une section sur les réparations d'automobiles. Il nous apparaissait, en effet, impérieux de mettre un peu d'ordre dans les relations entre garagistes et consommateurs.

Nous nous demandons toutefois si ces derniers seront les principaux bénéficiaires de toutes les mesures envisagées. A cet égard, nous savons qu'un certain nombre d'organismes impliqués plus directement que nous le sommes dans ces questions ont soumis ou soumettront des mémoires qui contiendront certainement quelques suggestions pertinentes. En matière de crédit, nous constatons que la plupart des dispositions du projet ne nous posent pas de problèmes véritables quant à leur application. Ces questions nous sont en général familières et nous suivons parfois depuis longtemps certaines des pratiques suggérées. Notre mémoire contient quelques remarques sur des questions spécifiques qui soulèvent pour nous des difficultés sans pour autant offrir des avantages particuliers aux consommateurs.

C'est le cas, entre autres, de certaines transactions que nous considérons "au comptant" mais où le consommateur a la faculté de payer dans un certain délai, sans frais. Ces ventes sont toutefois assorties d'une pénalité qui a pour but d'inciter le consommateur à effectuer sa remise dans le délai imparti. Nos membres n'ont jamais conçu cette modalité comme une façon de financer l'obligation du consommateur. Or le projet à l'étude transforme ces transactions au comptant en transactions assorties d'un crédit variable et les assujettit aux formalités applicables dans tels cas. Ces formalités sont pour nous administrativement lourdes et, pour les éviter, nous devrons exiger du consommateur qu'il paye sur livraison. Vous imaginez sans peine les incovénients qui pourraient résulter lors d'une livraison d'huile à chauffage, par exemple.

Nous sommes aussi préoccupés par l'impossiblité pour le commerçant d'exiger des frais de crédit sur le solde impayé tant que le consommateur n'a pas reçu à son adresse l'état de compte. A-t-on pensé au problème que cela pose à l'expéditeur de prouver que le consommateur a bien reçu sont état de compte à son adresse? Réalise-t-on que de nombreux consommateurs négligent d'informer leurs créanciers d'un changement d'adresse? A-t-on un seul instant envisagé la difficulté de calculer sur une base individuelle les frais de crédit applicables? Même l'ordinateur le plus perfectionné y perdrait son latin.

Cela nous mène à aborder la question de l'avis de six mois que nous devons donner au consommateur lors d'une modification des conditions du contrat de crédit variable.

Cette obligation pose surtout des problèmes lors d'un changement du taux de crédit et nous considérons que la disposition actuelle est passablement irréaliste dans le contexte inflationnaire que nous connaissons.

Il faut tout de même se rendre compte que le commerçant, tout autant que le consommateur, d'ailleurs, subit la fluctuation des taux d'intérêt sur les emprunts qu'il contracte auprès d'une banque ou autre institution de crédit. Pourquoi le consommateur serait-il à l'abri de ces fluctuations lorsqu'il fait des achats en se servant d'une carte de crédit?

En outre, à supposer que l'inflation se résorbe un peu et qu'il devienne possible d'offrir un crédit à meilleur marché, la règle envisagée empêcherait le consommateur d'en bénéficier avant six mois.

Certains membres de cette commission, lors de séances antérieures, se sont émus à juste titre du rôle de la publicité en matière de crédit. Il est vrai que les mécanismes de publicité et de marketing peuvent susciter chez certaines personnes des besoins artificiels. Il n'en reste pas moins que le crédit est un avantage qu'offre notre système économique. Le tout est de savoir bien l'utiliser. La publicité offre à cet égard l'avantage d'informer le consommateur de l'usage qu'il peut faire de son crédit. Que peut-il acheter? Où peut-il le faire et à quelles conditions? C'est pourquoi nous croyons qu'il faut maintenir une publicité honnête et informative par opposition à une publicité de type propagande et incitative. La législation devrait donc, selon nous, s'orienter vers une réglementation pour éliminer les abus plutôt que vers une suppression pure et simple de la publicité.

Enfin, en notre qualité de dirigeants d'entreprises, nous nous inquiétons de la présomption de culpabilité à notre égard qu'introduit le projet de loi. Cette disposition est tout à fait contraire au principe fondamental que pose la présomption d'innocence en droit pénal. Pourquoi serions-nous considérés coupables avant même d'avoir été jugés?

Pour conclure, nous aimerions dire à cette commission que nous sommes d'accord pour chercher à rendre notre système économique plus humain. Cet effort passe par la valorisation du consommateur, nous en convenons, mais elle doit aussi s'assortir d'un respect des objectifs et de la contribution des commerçants dans notre société. De plus, nous espérons qu'au-delà des moyens législatifs les autorités responsables continueront à privilégier l'information et l'éducation qui offrent, selon nous, les meilleures perspectives de protection pour les consommateurs.

Maintenant, je demanderais à Me Lanctot de présenter ses commentaires.

M. Lanctot (Henri): Messieurs, dans son exposé, M. Roger Hamel indique l'aspect large et imprécis de la définition de consommateur. Nous comprenons aussi que plusieurs groupes ou associations qui sont venus devant vous ont fait remarquer que la définition de consommateur laissait à désirer. Pour nous, consommateur signifie que toute personne physique qui n'agit pas en qualité de commerçant est nécessairement un consommateur. Or, le projet de loi ne contient aucune définition de commerçant. Aussi nous avons cru opportun de suggérer dans notre mémoire une autre définition de consommateur, et je me permets de vous la lire au complet: "Une personne physique agissant pour des fins autres que commerciales ou autres que l'utilisation de biens ou de services dans ses affaires, sa profession ou son métier". L'avantage que comporte cette définition est qu'elle identifie le consommateur en fonction de la nature de la transaction et non pas

en fonction du statut ou de l'état d'une personne.

J'aimerais ici aborder l'élargissement de la lésion entre majeurs que prévoient les articles 5 et 6 du projet de loi. Bien que les membres de notre association ne prévoient pas subir des problèmes particuliers par l'application de ces articles, il n'en demeure pas moins que comme commerçants ils s'inquiètent de la répercussion de ces dispositions sur le commerce généralement.

L'absence d'une véritable définition de contrat, dans le cadre du projet de loi, nous fait croire que ces dispositions s'appliquent à toute transaction, si minime soit-elle. En outre, les articles 5 et 6, en facilitant encore plus l'annulation de toute transaction, créent une incertitude chez le commerçant. Nous nous demandons dans une certaine mesure si le projet de loi, par ses dispositions, ne favorise pas ainsi la vente à l'essai.

En raison du champ d'application très vaste du projet de loi, nous nous interrogeons sur l'opportunité d'élargir encore plus en faveur du consommateur le droit d'annulation de toute transaction intervenue entre un commerçant et un consommateur. Il ne faut pas croire que notre association s'oppose à l'annulation des transactions lorsque les circonstances révèlent des méthodes frauduleuses pour l'obtention du consentement du consommateur. Aussi, nous suggérons que l'article 118 de la loi actuelle soit maintenu et que le cadre de l'exercice de ce droit d'annulation soit précisé par une meilleure définition de consommateur et de celle de contrat.

En matière de crédit, nous indiquons que l'article 96 peut être une source de confusion.

De plus, selon notre interprétation, cet article va contre la pratique commerciale actuellement suivie et reconnue qui veut que toute somme capitale avancée porte intérêt à compter du premier jour de sa remise. Au point de vue pratique, il est à prévoir qu'il deviendra alors impossible pour le consommateur de commencer ses remboursements à plus de 45 jours de la date de la remise de la somme capitale. Nous suggérons que cet article 96 soit révisé.

Dans le cadre de la politique d'information au consommateur, il serait peut-être indiqué qu'il soit maintenant obligatoire de révéler au consommateur explicitement la date où les intérêts commencent à courir au lieu de prévoir qu'aucun intérêt ne courra pendant une période de 45 jours, comme le stipule l'article 96. Ainsi, le consommateur bien informé serait incité à commencer ses remboursements plus tôt sans pénaliser celui qui désire retarder ses remboursements de capital.

Dans notre mémoire, nous avons commenté la dernière partie du deuxième paragraphe de l'article 117. Elle prévoit que les pénalités, au cas de non-paiement à l'échéance, sont considérées comme du crédit variable. Nous comprenons l'objectif recherché par le législateur; cependant, la rédaction de ce texte est très large et M. Hamel vous a décrit le genre de situation auquel il peut s'appliquer.

Notre interprétation de la dernière partie de ce paragraphe est fort plausible. Comme nous pensons que ce n'est pas le but recherché par le lé- gislateur, nous avons suggéré la suppression de cette partie, à moins que le législateur clarifie ce qu'il entend régir, de manière à exclure le genre de transactions que nous avons décrit.

J'aurais ici un commentaire plutôt d'ordre technique sur l'article 119. La rédaction de cet article pose à nos membres un problème d'ordre pratique. Nous ne pouvons par renouveler une carte de crédit à un consommateur qui n'a jamais utilisé sa carte de crédit, bien qu'il l'ait sollicitée. Nous devrions, selon cet article, vérifier dans chaque cas, lors d'un renouvellement ou d'un remplacement d'une carte de crédit, si le consommateur a, de fait, utilisé sa carte. Pour éviter ce problème, nous suggérons l'addition du mot "sollicitée" dans l'article 119.

Dans le domaine des infractions et sanctions pénales, nous constatons que l'article 113 de la loi actuelle n'est pas reproduit dans le projet de loi. Pour votre information, cet article stipule qu'une erreur ou une omission de bonne foi ne constitue pas une infraction au sens de la loi. En raison de la complexité de la loi, de ses nombreuses exigences et des fardeaux qu'elle impose aux commerçants, cet article 113 devrait, selon nous, être retenu dans le projet de loi.

Enfin, au sujet de l'article 197, nous suggérons que le recours du consommateur contre le commerçant qui n'a pas respecté les dispositions de la présente loi ou n'a pas rempli l'une des obligations que lui impose la loi soit conditionnel à ce que le consommateur agisse de bonne foi et qu'il établisse clairement, devant les tribunaux, comme condition préalable à l'exercie de son recours, que telle inobservance par le commerçant lui a causé un véritable préjudice.

Ces conditions préalables à l'exercice d'un recours du consommateur ne sont pas nouvelles. Elles existent actuellement en matière de droit civil. Notre suggestfon a pour but que soient évitées des poursuites judiciaires frivoles ou de mauvaise foi par le consommateur.

Nous croyons que le formalisme introduit par le projet de loi peut favoriser des poursuites futiles. Comme règle générale, la sanction de l'inobservance des dispositions de la présente loi par un commerçant devrait relever de l'Office de protection du consommateur et ce n'est qu'en cas de préjudice subi par le consommateur que ce dernier peut invoquer telle inobservance à l'appui de sa demande de réduction d'obligation ou d'annulation du contrat intervenu entre lui et le commerçant. Ce sont là les quelques remarques que j'avais à vous faire; et nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie. Mme le ministre.

Mme Bacon: Quelques commentaires et questions, si vous me le permettez. Aux articles 5 et 6 touchant aux lésions entre majeurs, aux pages 4, 5 et 6 de votre mémoire, vous mentionnez que vous êtes d'avis que ces articles 5 et 6 consacrent le droit du consommateur à l'irresponsabilité. Je peux citer, par exemple, les articles 5 et 6, une in-

certitude dans les transactions où ces articles encouragent le consommateur à poser des actes irréfléchis.

Le problème posé par la rédaction des articles 5 et 6 a déjà été discuté lors de la présentation d'autres mémoires, notamment le mémoire du Barreau ou de l'Institut de la publicité canadienne. De toute façon, nous prenons note de vos remarques concernant la rédaction de ces articles.

A la page 8, la réparation d'automobiles, vous nous dites que les membres de votre association reçoivent souvent des plaintes de clients contre certains détaillants de telle ou telle compagnie pétrolière. Quelle procédure employez-vous pour remédier à ces plaintes dont sont victimes les consommateurs quand ils viennent vous en faire part? Est-ce que vous avez des procédures d'établies que vous devez suivre?

M. Hamel: Oui, nos membres, normalement, ont des procédures. Notre commerce est assez compliqué. On a vraiment trois sortes de débits d'essence, si vous voulez: ceux qui sont exploités par les compagnies elles-mêmes, soit directement ou par l'entremise de filiales à part entière, des détaillants qui sont locataires dans des postes qui appartiennent aux compagnies de pétrole, des détaillants qui ont des hypothèques, si vous voulez, des compagnies de pétrole pour leur permettre de construire un poste et, finalement, des détaillants qui sont complètement indépendants.

Ils ont tout simplement l'emblème, le sigle de la compagnie; ils vendent les produits pétroliers d'une compagnie.

Evidemment, nous avons toute une gamme de différents postes de débit où il y a plus ou moins de contrôle. Evidemment, si c'est une filiale d'une compagnie de pétrole qui exploite le poste, on a un contrôle complet. Maintenant, s'il y a une plainte qui arrive chez nous, par exemple, ce qui arrive, c'est que, si c'est un de nos postes, nous avons des garanties sur le travail qui est fait, réparation ou entretien d'une voiture. Les garanties s'étendent sur une certaine période. Cela varie entre les compagnies. Chez nous, c'est 4000 milles ou 90 jours. Là, on s'occupe de la plainte. Normalement, quand il y a une plainte qui vient chez nous, on communique immédiatement, si possible, personnellement, avec le client pour régler la plainte aussi rapidement que possible. Quand il s'agit d'un de nos détaillants, qui est indépendant dans tous les sens du mot, qu'il soit locataire, qu'il ait une hypothèque ou qu'il soit indépendant chez lui, là, il faut passer par le détaillant, lui faire part de la plainte, lui expliquer de quoi il s'agit, lui expliquer que notre bon nom et le sien sont en jeu et lui demander de s'occuper de la plainte. Maintenant, dans certains cas, le détaillant n'accepte pas notre point de vue; il n'accepte pas le point de vue de son client, parce que c'est vraiment son client. Je dirais que, dans la majorité des cas, ce sont les compagnies de pétrole elles-mêmes qui s'en occupent, vu que, vraiment, c'est notre nom qui est en jeu, parce que je pense que la grande majorité de la population ne comprend pas les différentes sortes de détaillants que nous avons.

Mme Bacon: Vous mentionnez aussi l'article 70 qui a trait à l'évaluation du prix des réparations. Vous dites que le garagiste augmentera le coût de ces réparations afin d'éviter qu'il ne soit obligé d'assumer toute erreur supérieure à 10%, tel que stipulé dans la loi. Est-ce que vous avez d'autres modalités d'application à cet article à nous proposer? Avez-vous d'autres propositions bien précises?

M. Hamel: Je peux donner la réponse; ensuite, Me Lanctot, s'il le désire, pourra ajouter des commentaires. Je pense que la règle, ce qui existe dans la majorité des cas maintenant, c'est qu'il y a une estimation qui est faite par le garagiste. Si le garagiste voit qu'il peut accomplir le travail, souvent c'est une défectuosité du moteur, par exemple, quelque chose qui se passe... Je ne suis pas garagiste et je ne suis pas mécanicien, mais je pense que tout le monde ici autour de la table a connu des problèmes semblables. On arrive chez le garagiste. Il y a un bruit dans le moteur.

Il ne sait pas exactement ce qui se passe, mais il pense. Il fait un diagnostic de ce qu'il pense que c'est et il dit que cela va coûter $150. Il fait de son mieux pour faire les réparations dans le coût estimé mais, en ouvrant le moteur, il voit que ce n'est pas cela du tout. Il y a des changements de pièces plus importantes à faire, etc. Il doit rappeler le client pour avoir son approbation pour des réparations majeures ou plus grandes.

Ce que nous comprenons dans ce qui est proposé par cette loi, c'est que le client devra, à ce moment-là, revenir signer une autre estimation pour une majoration dans l'estimation qui a été donnée. Je ne pense pas que nous pourrons fonctionner avec des règlements semblables, parce que maintenant nous connaissons notre clientèle. Un garagiste connaît la plupart de sa clientèle. Il l'appelle pour lui dire qu'il y a quelque chose qui ne va pas ou il y a une fausse estimation et il ne savait pas exactement ce qui se passait. Il appelle et là, il a l'approbation du client.

Quelquefois, il y a des difficultés. Il y a des millions de transactions par jour dans notre industrie. Il va y avoir un certain nombre de problèmes, mais je dirais que les problèmes sont vraiment minimes pour cette raison.

Mme Bacon: Vous mentionniez que cela augmenterait le coût des réparations. C'est surtout cette idée que je retenais; j'aimerais connaître d'autres propositions que vous auriez à nous faire.

M. Lanctot: Je vais répondre en un premier temps sur la question de coût. On a l'impression que la procédure d'estimation va tomber. A ce moment-là, l'individu va vraiment entrer dans un engagement et va vouloir se protéger, même s'il y a une marge de 10%. Il va nécessairement augmenter son coût quitte, quelquefois, à réduire par la suite. Il va certainement y avoir des moyens qui vont se prendre pour éviter qu'il y ait une perte de leur côté.

Quant à suggérer un texte, il faut comprendre que les compagnies de pétrole sont dans le pé-

trole et les réparations sont plutôt un accessoire dans la forme d'exploitation. C'est pour cela que nous n'avons pas voulu trop nous aventurer dans ce texte.

Mme Bacon: Vous aviez mentionné l'article 96. Cet article répète les exigences du règlement actuel quant aux tolérances dans la divulgation du coût de crédit. Ce règlement qui existe vous a-t-il causé des problèmes bien spécifiques que vous aimeriez mentionner ce matin?

M. Lanctot: Je dois vous avouer en toute franchise que je n'ai pas en mémoire le texte du règlement. En lisant le texte, on était plutôt embêté. On ne savait pas trop quel genre d'interprétation lui donner. Notre but était plutôt d'attirer l'attention sur le problème que posait l'article 96.

Mme Bacon: C'est une difficulté d'interprétation surtout.

M. Lanctot: C'est dans ce sens. Il peut y avoir plusieurs interprétations dans ce texte. On vous en donne deux dans notre mémoire et je suis certain qu'en y pensant on pourra en trouver d'autres.

Mme Bacon: D'accord. Aux pages 13 à 16 de votre mémoire, l'article 124, vous avez fait certaines remarques concernant le dernier paragraphe. Vous mentionnez une cause hors de sa volonté ou de force majeure — une grève des postes, par exemple — alors que le consommateur ne reçoit pas son état de compte où des frais de crédit devraient alors être exigés; c'est un peu ce que vous mentionnez dans votre dossier. Nous allons prendre note de ces remarques qui sont fort pertinentes aussi.

Sur quelles données vous basez-vous pour affirmer que le délai de six mois qui est prévu dans l'article 126 est déraisonnable? Avez-vous des données bien précises?

M. Lanctot: Nous n'avons pas de données sur cette question; le seul problème c'est qu'il faut à ce moment planifier presque un an d'avance. Disons que l'organisation des cartes de crédit est un système énorme. Cela se fait par ordinateur et il est impossible de réagir dans un délai de deux ou trois semaines. Il faut presque prévoir d'avance une augmentation ou une modification; cela peut s'étendre sur un délai de six mois et, là, l'avis est donné. En fait les résultats atteints ont lieu un an après et les conditions au moment de l'entrée en vigueur de la modification, n'existent probablement plus.

Alors, c'est extrêmement lourd et cela cause des problèmes à notre organisation. D'autre part, le consommateur, lorsqu'il reçoit un avis de modification — ici nous pensons surtout au taux de crédit, il ne faut pas s'en cacher — a toujours la faculté de cesser d'utiliser sa carte de crédit. C'est l'option qui lui est donnée et c'est pour cela qu'on ne suggère aucun délai parce que, dès qu'il reçoit l'avis, il prend sa décision: Ecoutez, c'est trop élevé comme taux, je ne suis pas d'accord, et il cesse de l'utiliser. Pour nous, c'est un client perdu. En prenant cette décision, c'est le risque qu'on décide de prendre.

Mme Bacon: A l'article 161, je dois dire que plusieurs mémoires nous ont mentionné aussi cette difficulté d'interprétation. Cela peut poser certains problèmes, je crois, la façon dont il est rédigé actuellement; alors, nous sommes à étudier une autre formulation. Quant à l'article 203 — encore hier, je vous l'avais mentionné — je pense qu'il faut voir les trois dernières lignes de ce paragraphe où on dit que le tribunal jugera: "... à moins qu'il n'établisse à la satisfaction du tribunal qu'il n'a pas acquiescé à la commission de cette infraction." Je pense que ces trois dernières lignes sont aussi importantes que les premières lignes de cet article.

M. Lanctot: C'est certain qu'il y a peut-être une méthode de défense, mais on trouve que cette méthode de défense est extrêmement ténue. C'est difficile de faire une preuve négative devant les tribunaux. Vous allez diriger une entreprise qui va venir dire: J'ai donné telles directives, on ne les a pas suivies. La réponse peut être: Pourquoi n'avez-vous pas pris des mesures pour voir à ce que vos directives soient suivies? On peut répondre: J'étais absent, j'étais à l'extérieur du pays. A ce moment, c'est vraiment une preuve qui est extrêmement difficile à administrer, la preuve négative, ici.

Mme Bacon: Je voudrais peut-être mentionner que cela existe en Ontario selon le Common law, au chapitre des pratiques interdites. Nous retrouvons exactement dans ce texte ontarien ce que nous retrouvons à l'article 203. Je ne pense pas que les gens s'en plaignent tellement.

De toute façon...

M. Hamel: Je ne pense pas qu'on devrait prendre l'Ontario comme exemple, vous savez...

Mme Bacon: Mais il y en a plusieurs qui s'en servent...

M. Hamel: Ah, je vois...

Mme Bacon: Quant à votre conclusion, il est évident que nous partageons votre avis voulant qu'une bonne éducation du public pourrait aider le consommateur. Ce serait peut-être la meilleure façon, mais pour nous — et je pense que vous serez d'accord — c'est vraiment à très long terme qu'on pense régler sous forme d'éducation certains problèmes auxquels les consommateurs ont à faire face. Mais à court terme, je pense qu'on n'échappe pas à une législation pour les problèmes qu'il faut régler immédiatement. C'est pourquoi nous faisons la refonte de la loi 45 que, à cause de cette situation des problèmes du consommateur qui évolue rapidement, il nous faut réétudier davantage, mais il est évident que nous sommes d'accord avec vous. L'éducation du public est un moyen très important, mais, à nos yeux.

ce n'est pas le moyen de régler des problèmes à très court terme. Je crois que le moyen législatif, une loi qui est destinée à protéger davantage les consommateurs peut faire beaucoup pour le moment, quitte à toujours garder à l'esprit que la meilleure façon est encore une meilleure éducation que nous tentons de faire par nos services.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Lafontaine.

M. Léger: M. le Président, j'aimerais que vous me donniez des exemples concrets de l'affirmation que vous faites à la page 4. Vous en avez parlé un peu tantôt, mais quand même, quand vous affirmez que le droit du consommateur à l'irresponsabilité, cela peut être consacré par cette loi, pouvez-vous expliquer concrètement ce qui vous amène à cette conclusion que ce projet de loi, aux articles 5 et 6, consacre le droit du consommateur à l'irresponsabilité.

M. Hamel: Vous donner des exemples concrets. Un consommateur fait faire, disons, un alignement de roues chez un de nos détaillants. Il fait aligner les roues de sa voiture et va ensuite frapper une chaîne de trottoir, par exemple, à deux coins de rues et il revient dire que les roues étaient mal alignées, qu'il faut que le travail se refasse et tout cela. Je suis d'accord qu'il faut que le travail se refasse, mais il semble, selon les règlements qui sont devant nous, que le garagiste ou le détaillant agissant comme garagiste va avoir beaucoup moins de possibilité contre le consommateur dans ce cas. C'est vraiment une objection ou une plainte assez farfelue.

Pendant que je pense à un autre exemple, si Me Lanctot...

M. Lanctot: Nous avons affirmé cette expression dans une perspective à long terme. Je vais vous donner un exemple. Dans la loi actuelle, la loi 45, il existe le délai de cinq jours dans le cas du vendeur itinérant. J'ai remarqué, dans mes relations avec différentes personnes, que ce délai de cinq jours est devenu, pour les gens, un délai qui s'appliquait à tout genre de transaction et même aux transactions au comptant. A ce moment, vous avez une espèce de connaissance populaire qui est déformée de la loi. Avec les possibilités d'annuler plus facilement les transactions, avec la connaissance que les gens vont prendre, soit par les media d'information, soit par les différentes associations, il va se créer une espèce de connaissance. On peut annuler facilement un contrat. On croit que les gens vont être moins portés à réfléchir sur l'opportunité de l'achat de tel ou tel bien, parce qu'il va dire: Je peux l'annuler, je trouverai bien un prétexte pour l'annuler.

Actuellement, si une vente est finale, quelqu'un va vraiment dire: Est-ce que j'en ai besoin? Il va s'arrêter à réfléchir sur l'acte qu'il va poser. C'est dans cette perspective qu'on a présenté cette affirmation.

J'aimerais ajouter que les articles 5 et 6 sont peut-être quasiment superflus. La loi vient donner ici toutes sortes de nouveaux droits aux consommateurs. J'en ai noté dans le domaine des garanties, dans le domaine des présomptions, vous en avez au point de vue preuve testimoniale. Mon expérience en matière d'annulation de contrat, surtout dans des cas d'abus, était plus des problèmes de preuve que des problèmes de prouver qu'il y avait abus. Je crois que, avec toutes les nouvelles dispositions qui favorisent le consommateur, ces deux articles sont presque superflus, ils créent beaucoup plus d'inconvénients aux commerçants. N'oubliez pas aussi que vous avez la prescription de trois ans.

M. Léger: Vous devez quand même admettre qu'aux articles 5 et 6, tel qu'il est écrit à la troisième ligne, eu égard aux circonstances, il y a obligation à un juge d'évaluer la situation. Ce n'est pas automatique.

Vous avez aussi l'exemple de l'article 6 où on dit: "II doit tenir compte de la condition des parties". Cette loi a pour objectif de protéger le consommateur qui subit de plus en plus un système qui est créé par des habitudes, des comportements, un système économique qui, dans cette "struggle for life", cette "struggle for profit", amène continuellement les entreprises à trouver les moyens de faire plus de profits, plus de ventes. Tout un système se crée sur le dos du consommateur. A ce moment, il faut lui donner la chance de s'en sortir.

Vous dites que cela amène le consommateur à être moins porté à réfléchir. Je pense que c'est l'inverse. Cela amène de plus en plus le consommateur à réfléchir. S'il achète un produit et qu'il le fait sous l'émotion du moment ou sous la pression d'un vendeur ou d'une publicité qui lui donne l'image que ce produit est bon et qu'il a réellement besoin de ce produit, la période de réflexion lui permet justement de se rendre compte que ce produit n'est pas ce qu'il aurait voulu, n'est pas ce que la publicité lui avait donné. C'est dans ce sens, je pense, qu'on protège le consommateur.

Il y a toujours la possibilité, s'il y a un conflit, que ce soit le tribunal qui juge au lieu de laisser uniquement au vendeur, qui, lui, veut vendre, le soin de dire: Je t'ai vendu, tu es pris avec, reste avec.

Je pense que c'est dans cet esprit qu'on voulait redonner un certain équilibre au consommateur. Le consommateur, c'est dans cette loi qu'il peut trouver les moyens de se défendre, tandis que les hommes d'affaires, les manufacturiers, les producteurs ou les fabricants, eux, ont toutes les autres lois qui leur permettent de se faire justice.

M. Lanctot: Dans cette perspective, je regarde ici les pratiques interdites qui, à mon avis, sont beaucoup plus utiles au consommateur que les articles 5 et 6. Les pratiques interdites, c'est un apport extraordinaire pour le consommateur.

Ensuite, vous parlez du phénomène de marketing, du fait de convaincre le consommateur d'acheter. Il ne faut pas oublier que vous avez aussi le phénomène de la réaction antipublicité qu'on remarque un peu partout. Juste au niveau

des émissions de radio et de télévision consacrées aux problèmes des consommateurs, il y a l'émergence d'associations de consommateurs pour se défendre; vous avez toutes les publications dans ce domaine.

Alors, le consommateur s'est organisé aussi pour répondre à cette publicité. On comprend un peu votre réaction face à l'approche de vente, face à la publicité, mais il ne faut pas ignorer que vous avez un contre-phénomène à cela qui, à mon avis, va être de plus en plus fort avec le temps.

Je pense que M. Hamel veut ajouter quelque chose.

M. Hamel: J'aurais un petit commentaire à ajouter. On ne s'est pas dit contre la refonte de la loi no 45. Au contraire, il y a beaucoup de choses très positives dans tout cela. Mais les articles 5 à 12 sont vraiment tous contre le commerçant.

Si on regarde au Québec et au Canada, le "système" n'a pas fonctionné si mal que cela. Si on regarde le niveau de vie et tout cela, tout ce qui est publicité n'est pas mal, tout ce qui est marketing n'est pas mal, tout ce qui est dans l'entreprise ne fait pas défaut nécessairement. On ne pourra pas corriger toutes les erreurs humaines par l'adoption d'une Loi sur la protection du consommateur. On ne s'oppose pas, dans ce sens, mais je pense que c'est tellement lourd, ce qui est dans ces articles 5 à 12, qu'on va se retrouver continuellement devant la cour à défendre une vente qu'on aura faite à un client.

Prenez l'huile à chauffage. Il y a des milliers de transactions par jour de ventes d'huile à chauffage où, en somme, le consommateur et la compagnie de pétrole ne sont pas vraiment en communication. Il y a un contrat. On en livre automatiquement selon les degrés de température. Qu'est-ce qui arriverait maintenant? Le consommateur réalise qu'il y a un contrat aujourd'hui. S'il veut qu'on cesse les livraisons, il nous appelle, annule son contrat et tout se fait dans les règles, pas de problème. Mais, selon ces sections dans la loi, si je les comprends bien, un consommateur, maintenant, pourra annuler son contrat n'importe quand en disant que son huile ne chauffe pas aussi bien qu'avant, qu'on lui a vendu quelque chose qui a moins de BTU qu'il y en avait. Là, il faudrait aller se défendre en cour. Même si on gagnait dans toutes nos causes, je pense que ce sera un fardeau très lourd à supporter.

M. Léger: Je vois bien les arguments que vous apportez, mais on est ici depuis pratiquement un mois à entendre les différents groupes qui viennent donner leur point de vue, avec leur mémoire. Je remarquais que tous les groupes qui sont venus présenter des mémoires sont d'accord avec la Loi sur la protection du consommateur. Mais, si on additionne tous les articles que chacun n'aime pas, je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'articles qui vont être acceptés. S'il fallait dire: Si quelqu'un se choque contre tel article, on ne l'adopte pas, je pense qu'il ne resterait pas beaucoup d'articles dans ce projet de loi.

Tout le monde est pour l'ensemble du projet de loi, pour le principe de la protection du consommateur, mais chacun a trouvé 12, 15, 22 articles qui ne font pas son affaire. J'additionne cela et on est rendu à 272, 273 articles qui ont été critiqués. C'est normal. Mais, si on regarde la nécessité d'une Loi sur la protection du consommateur, si on fait un recul devant la société dans laquelle on vit, si on laisse un peu chacun des arbres pour regarder la forêt, on s'aperçoit qu'il se crée de plus en plus dans la société dans laquelle on vit un système créé par certains vices de la libre entreprise, qui est quand même absolument essentielle et importante.

La libre entreprise permet quand même une concurrence et crée des produits meilleurs plus concurrentiels; cela est normal. Mais ceci crée aussi, dans ce "struggle for profit and struggle for life", une habitude de surproduction de produits pour les avoir à meilleur prix. Après cela, on crée un système de marketing pour vendre et écouler les produits qu'on a créés en surproduction, mais on n'en avait pas nécessairement besoin. Par la suite, on implante un système de marketing pour créer des besoins chez les gens. Après cela, pour être capable de les acheter, on crée un autre système, qui est celui du crédit. A ce moment, les gens se voient pris, le consommateur voit la société se transformer par un des agents les plus importants les producteurs, les manufacturiers et les marchands. On est obligé, parce qu'on a changé un peu son échelle de valeur; le besoin est plus fort. Et, je vois l'affirmation que vous faites à la fin; vous dites, une affirmation bien claire: II n'en reste pas moins que le crédit est un avantage qu'offre notre système économique.

Le crédit est un avantage, non pas pour le consommateur, mais pour les producteurs qui veulent vendre davantage. Auparavant, on avait l'avantage de pouvoir bénéficier du passé, c'est-à-dire l'argent qu'on avait accumulé, pour acheter un produit. On est rendu maintenant à hypothéquer l'avenir pour être capable d'acheter ce qu'on nous a créé comme besoin chez nous. Devant tout ce système, il se crée un besoin de protéger ce consommateur qui est victime de tout un système de production dont uniquement le profit est l'intérêt premier. Quand on nous dit que c'est pour le bien du consommateur qu'on a fait tel produit parce que cela va faire du bien au consommateur, c'est parfois exact, mais ce n'est pas l'ensemble du système. Moi, je vois des affirmations comme cela: II n'en reste pas moins que le crédit est un avantage pour notre système économique. Les gens ont tant de choses à acheter parce qu'on en a créé le besoin pour faire comme M. Jones, M. Smith ou M. Durand à côté de chez nous. Il faut acheter, on n'a pas l'argent, mais il faut hypothéquer l'avenir. C'est ce système, cette anarchie. Quelqu'un disait que, dans un système où il y a des forts et des faibles, la loi libère, tandis qu'une absence de loi contraint et emprisonne le consommateur. C'est pour cela que la loi du consommateur doit protéger ces gens.

Vous avez mentionné tantôt le problème de la livraison d'huile à chauffage à domicile. Encore là,

expliquez-moi comment cela pourrait nuire à cette transaction de remettre au consommateur son état de compte à son adresse. Moi je pense à l'exemple, vous me répondrez là-dessus, d'un livreur d'huile qui va livrer soit à la maison de campagne ou à la maison de ville, alors que le propriétaire est absent, des quantités d'huile. En général, cela est fait d'une façon normale. Mais très souvent — je ne pourrais pas donner de pourcentage — il est arrivé bien des cas où vous avez des livreurs d'huile qui ont faussé les formules, qui ont faussé des états de compte, qui ont donné moins d'huile qu'ils n'en ont facturée, et personne ne pouvait vérifier. Il a beau y avoir un compteur après le camion de livraison d'huile, on a vu des exemples où des gens jouaient le calculateur, arrêtaient le chiffre et repartaient la machine à un numéro plus avancé. Ils donnaient l'impression qu'on avait livré 200 ou 400 gallons d'huile alors que la personne n'est pas là pour vérifier. Elle ne savait pas combien il lui en restait; elle s'aperçoit à la fin de l'hiver qu'elle a consommé peut-être une fois et demie plus d'huile que l'année dernière. On est dans une période d'inflation, c'est peut-être parce que l'huile coûte plus cher, mais très souvent c'est parce qu'on n'a pas pu vérifier. Est-ce que vous ne pensez pas qu'il serait beaucoup plus normal pour protéger le consommateur qu'à chaque livraison d'huile l'état de compte soit livré à l'adresse précise? Je prends le cas du type qui demeure en ville, qui n'est pas à la campagne. On a livré de l'huile pendant qu'il n'était pas là et il n'a pas reçu l'état de compte pour vérifier chaque fois s'il avait réellement reçu la quantité qu'il fallait selon ses besoins.

M. Hamel: M. le Président, je ne suis pas ici pour défendre tous les livreurs d'huile. Il y en a des centaines dans la province de Québec. J'apprécie beaucoup votre suggestion. Je pense que je peux parler pour tous nos membres, tous les membres de l'APQ. Quand une livraison d'huile se fait par nos membres, ce qui représente une grande majorité des livraisons d'huile à chauffage au Québec, le compte est laissé à la place de livraison. Le compteur du camion est vérifié par le ministère de l'Industrie et du Commerce, dans chaque cas, et est vérifié par les compagnies régulièrement. On indique la date de livraison, le "gal-lonnage", le prix et le coût total. Alors, dans chaque cas, le consommateur peut voir s'il y a quelque chose qui est anormal, et nous-mêmes, parce qu'on garde des dossiers. Normalement, notre clientèle, on la garde longtemps.

On peut voir par les registres s'il y a un changement radical, on peut avertir le consommateur, on le saurait nous-mêmes si les livraisons, par exemple, augmentaient en dehors. C'est justement pour cela qu'on peut faire des livraisons automatiques, parce qu'on sait exactement, mieux que le consommateur lui-même, quand il a besoin d'huile à chauffage. On suit cela de très près.

Maintenant, vous avez parlé de fraude et vous n'avez pas donné de détails. Je pense que je sais à quoi vous pensez. Il y a eu des articles, récemment, dans les journaux. C'est tellement minime, sur le total de livraisons qui se font d'huile à chauffage au Québec, que cela n'a pas tellement d'importance. Ces gens qui ont été fraudés ont été remboursés, je suis sûr, mais sur le total, c'est très minime.

M. Léger: Comment pouvez-vous affirmer que c'est minime puisqu'on n'a parlé que des cas qu'on a pu déceler? C'est donc dire que c'était possible.

M. Hamel: C'est possible.

M. Léger: De quelle façon pouvez-vous vérifier ou empêcher que ces anomalies, que ces fraudes se fassent? Comment se fait-il qu'on puisse jouer avec... — je ne sais pas si on appelle cela l'odomètre — pas l'odomètre, mais...

M. Hamel: Le compteur?

M. Léger: ...le compteur du camion pour laisser l'impression qu'on a livré 200 gallons d'huile alors qu'on en a livré peut-être seulement 50 gallons?

M. Hamel: Tout est possible, monsieur.

M. Léger: Comment pouvez-vous contrôler ces choses-là afin d'éviter les abus? Souvent le consommateur n'est pas à la maison quand on livre l'huile.

M. Hamel: Souvent.

M. Léger: A ce moment-là, on laisse un petit papier qui n'est pas un état de compte, qui est simplement un papier sur lequel on lit qu'à partir de tel numéro jusqu'à tel numéro on a livré tant de gallons d'huile.

M. Hamel: C'est la facture, monsieur.

M. Léger: Le montant n'est pas dessus, il reçoit une facture par la suite.

M. Hamel: Le montant est dessus, oui.

M. Léger: La quantité d'huile est livrée à tel prix, mais il n'y a pas de montant total.

M. Hamel: Le montant total est dessus, oui.

M. Léger: Sur ceux que j'ai vus, il y a le chiffre imprimé du début du compteur, le chiffre à la fin et le nombre de gallons d'huile, mais il n'y a pas le montant total. La facture vient par la suite.

M. Hamel: Est-ce que je pourrais envoyer un représentant de notre compagnie à votre maison? On aimerait bien vous avoir comme client pour l'huile à chauffage. Je vous assure que notre facture a le montant total.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est fait à la mitaine, c'est bien plus dangereux de se faire faire.

M. Léger: Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a nécessairement une petite facture de couleur en deux ou trois copies, je pense bien. Ce n'est pas l'état de compte, c'est uniquement le fait que la personne a livré de l'huile et on dit qu'il y a tant de gallons d'huile de livrés. Après cela, on reçoit, par la poste, l'état de compte du mois.

M. Hamel: Pas dans le cas de nos membres, en tout cas, qui représentent la grande majorité. Je ne peux pas vous assurer ce qu'il en est dans votre cas parce que je ne connais pas votre fournisseur.

M. Léger: Comment pouvez-vous expliquer que ces choses puissent arriver? Vous dites que c'est minime. Vous dites que les gens ont été remboursés; cela, vous le croyez, mais ce n'est pas sûr. Comment se peut-il qu'on puisse avoir joué comme cela avec les compteurs pour la livraison de l'huile aux propriétaires absents?

M. Hamel: Je ne veux pas donner des idées aux fraudeurs sur la façon de procéder, mais c'est très simple. On va espérer qu'ils ne lisent pas les procès-verbaux des présentations ici. Je vais vous donner un exemple très facile. Le fournisseur va chez vous— faites attention— il doit livrer 140 gallons. Disons que votre réservoir de 200 gallons a baissé et que vous avez de la place pour 140 gallons. C'est ce qu'on vise normalement dans un réservoir de 200 gallons; on vise entre 140 et 160 gallons. Il doit livrer 140 gallons; il met le boyau dans votre réservoir et il met seulement 130 gallons. Il a un autre petit réservoir à côté et— il n'y a personne à la maison, c'est peut-être la nuit—il met 10 gallons dans ce réservoir, dans son bidon. Il s'en va avec ça et il les accumule. C'est une façon très facile de procéder.

Ce qui va arriver, avec le système de livraison automatique qui protège la clientèle, c'est que son réservoir va continuellement diminuer. Au bureau, nous, ce qu'on a comme livraison, c'est 140 gallons. Au bout de quelques mois, il ne vous restera plus d'huile dans votre réservoir. Là, tout de suite, il y a une investigation qui se fait. Je peux vous dire, encore une fois, que cela arrive très rarement. Très rarement. C'est tellement facile à découvrir, c'est tellement facile.

M. Léger: Ce que j'ai pu déceler, dans ces cas-là, c'est qu'on remettait l'huile dans le camion.

M. Hamel: Oui, c'est une autre façon, remettre le boyau dans le camion.

M. Léger: En retournant à la maison-mère... M. Hamel: C'est encore plus facile.

M. Léger: ...il y avait une quantité d'huile plus grande.

M. Hamel: Non, non, il peut aller la vendre ailleurs, la vendre au comptant, à meilleur marché ou quelque chose comme cela. C'est une autre possibilité.

M. Léger: Qu'est-ce que vous allez faire pour empêcher cela?

M. Lanctot: J'aurais un commentaire sur cette question. Vous soulevez probablement le problème dont les journaux ont parlé au mois de mars. Il faut regarder les gens qui étaient impliqués dans cela. On vous a expliqué le système des relations qui existent entre la compagnie de pétrole et ses détaillants. Vous retrouvez le même genre de système au niveau de l'huile à chauffage.

Vous avez les livraisons directes, les chauffeurs sont à notre emploi, ils doivent se rapporter, les camions sont vérifiés chaque soir. Mais vous avez aussi des livreurs, des entrepreneurs indépendants dans l'huile à chauffage qui viennent acheter tout simplement le produit chez nous et ils vont le vendre pour leur propre compte. Et si vous regardez bien, les gens qui ont été impliqués là-dedans ne sont pas membres de notre association. Ce sont tous des livreurs indépendants, il n'y a aucune relation, sauf peut-être pour l'achat du produit chez nous.

On ne peut pas exercer un contrôle là-dessus. Mais vous voyez l'effet de la publicité: les compagnies de pétrole fraudaient le public. C'est un exemple. Il y avait, je pense, dix-huit cas et on en a fait une généralité. Alors je pense que quand M. Hamel dit qu'il ne faut pas donner trop d'importance à cela, qu'il faut situer cela dans le contexte des livraisons, il a raison.

M. Léger: Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrance): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: M. le Président, disons que je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que le député de Lafontaine vient de souligner, surtout sur deux points majeurs à l'effet que si on écoutait la majorité des représentations qui sont faites depuis le début de l'ouverture de cette commission, il faudrait amender la quasi totalité des articles pour faire un projet de loi qui puisse satisfaire tout le monde. Dans les auditions qu'on a eues, depuis quelques semaines, de la part de presque tous les organismes qui sont venus, qui se sont présentés devant la commission, on a remarqué une foule de suggestions, on a remarqué une foule d'interprétations. Mais aussi il y a une chose qui est très importante, c'est qu'on s'attaque, dans la plupart des revendications qui sont faites, à certains articles qui reviennent toujours.

Ce sont presque toujours les mêmes qui reviennent, et c'est ce que, peut-être, Mme le ministre soulignait, lorsqu'elle prend en bonne considération vos remarques. Si beaucoup d'autres associations reviennent toujours sur les mêmes articles, c'est peut-être parce qu'on a trouvé les vraies failles. Alors je remarque que certainement chez au-delà de la moitié si ce n'est pas plus, il y a eu très peu ou peu de suggestions valables.

Deuxième point où je diffère d'opinion: moi je suis pour le crédit, mais pas pour le crédit exces-

sif, peut-être le crédit contrôlé, parce que je sais que c'est ce qui peut amener quand même la majorité des gens à pouvoir devenir propriétaires de quelque chose et faire leur place dans la société comme propriétaires de maisons ou d'automobiles pour aller travailler ou des biens essentiels. Alors le crédit peut peut-être contrôlé pour empêcher les excès, mais je crois qu'il est nécessaire dans notre système et je crois qu'il faut qu'il soit maintenu et encouragé, mais il faut prévenir les abus qui peuvent être faits.

Il y a cependant une question ou deux que je voulais vous poser. Vous soulignez, à la page 8 de votre mémoire, que dans le cas des réparations d'automobile, le nouveau système dans cette loi augmentera les coûts de réparation.

Vous avez mentionné aussi que les garagistes, souvent, devaient faire une estimation approximative. C'est drôle parce que lorsque les garagistes sont venus devant la commission, ils n'étaient pas tout à fait d'accord avec ce que vous avancez. Eux, de leur côté, sont plus d'accord avec la loi, parce qu'ils disent que cela va les forcer à faire une estimation réelle du problème puis on chargera le temps en conséquence. Et si le client accepte l'estimation qui sera faite, on déduira le temps de l'estimation sur la facture. S'il la fait faire ailleurs, cette estimation sera à la charge du client. C'est peut-être le point où vous pouvez dire que cela peut être au détriment du consommateur, mais on remarque que le consommateur, en général, se dirige plutôt vers un garagiste ou une station-service qui fait son affaire, où il est de plus en plus client permanent, parce qu'il sent que c'est là qu'il est le mieux servi, et c'est ce que les garagistes recherchent.

Dans leur mémoire, ces associations étaient en plein accord avec cela et prétendaient que probablement cela n'augmenterait pas le coût, excepté peut-être sur un point, qui avait été souligné en commission par le député de Laurier, où il était impossible de faire des estimations, soit sur la réparation du système électrique de l'automobile. C'est un point. Ensuite, il y avait un autre point; un moteur, on peut quand même l'ouvrir, regarder ce qu'il y a à l'intérieur et exiger le coût de l'estimation. Qu'est-ce que vous pensez de cela?

M. Hamel: Comme je l'ai dit, c'est une question qu'on se pose. Est-ce que cela sera à l'avantage du consommateur? Dans le moment, de la façon dont on fonctionne, les compagnies de pétrole n'exploitent pas, sauf en certains cas — et le total est très minime, encore une fois — des garages directement. Dans certains cas, notre façon de procéder, c'est que, quand le client arrive, on lui fait une estimation. Maintenant, si la loi nous oblige à le faire et oblige le client à payer l'estimation, on se dit: Si on est payé pour, d'accord, mais est-ce que cela avantagera le consommateur? La seule question qu'on se posait, c'est que, si le garagiste veut se protéger, il sera peut-être porté à faire son estimation plus élevée, quitte à rembourser ou à faire le travail à meilleur marché, s'il voit que cela peut se faire à meilleur marché. Il y a peut-être moins de pression sur l'efficacité. On ne le sait pas, c'est une question qu'on se pose.

M. Boutin: Vous avez soulevé tout à l'heure un exemple que je trouve assez pertinent, mais avec lequel je ne suis pas d'accord. Vous avez soulevé l'exemple d'un alignement d'automobile. Vous pouvez faire une estimation sur un alignement d'automobile et changer les pièces. Je me dis que c'est impossible de garantir un alignement d'automobile. On peut garantir un balancement de roues, on peut garantir le fonctionnement de choses comme cela, mais un alignement, c'est impossible à garantir, parce que vous pouvez désaligner votre automobile dix minutes après être sorti du garage en question. C'est pour cela que je suis resté surpris.

M. Hamel: Au moins, nous sommes d'accord.

M. Boutin: J'étais surpris, parce que vous l'avez donné comme exemple, tout à l'heure, d'une chose qu'on peut garantir. Je dis que la portée est assez forte quand même. C'est impossible à garantir.

M. Hamel: Je suis absolument d'accord. M. Boutin: D'accord.

Le Président (M. Picotte): Le député de Charlesbourg, sur le même sujet?

M. Harvey (Charlesbourg): Oui parce que cela a une continuité directe. Je pense que l'exemple qui a été formulé par mon collègue confirme en quelque sorte l'exemple qui avait été donné tout à l'heure par M. Hamel, à l'effet qu'un alignement ne peut pas être garanti, puisqu'un incident mineur, juste à la sortie du garage, vient court-circuiter le travail qui vient d'être fait. Je pense que vous confirmez en quelque sorte ce qui avait été avancé. En fait, lorsque vous évoquez l'opinion que cela coûtera plus cher finalement au consommateur si on impose dans les textes de loi l'obligation d'obtenir une estimation des réparations, cela revient à dire en quelque sorte qu'il existe au Québec actuellement, soit des cliniques qui portent un nom commercial — pour ne pas les mentionner, les cliniques Esso — ou encore le Bureau d'assurance du Canada qui, lui aussi, ouvrira, s'il ne l'a pas déjà amorcé, un nouveau système de centres d'évaluation. C'est à ce titre qu'on laisse à l'intérieur du système la liberté au consommateur d'obtenir son estimation.

Personnellement, en tout cas, mes opinions sont claires et bien connues là-dessus, j'ai des réserves quant à inscrire dans le texte de loi l'obligation d'obtenir une estimation, parce que je me dis qu'il y a quand même une certaine confiance qui doit exister entre son technicien d'automobile ou son garagiste et aussi le consommateur. Sans exception — je parle pour moi — jamais un marchand d'automobile n'a osé me présenter une facture de $400, alors que l'estimation globale pouvait être de $100. Au moment où cela est arrivé, le garagiste a toujours eu et la décense et aussi la responsabilité professionnelle de me téléphoner pour me dire: Sais-tu, le pépin est plus grave qu'on ne le croyait. Je pense que c'est à ce titre

que vous voulez illustrer que le fait d'imposer dans le texte de loi une estimation des réparations va nécessairement coûter quelque chose au consommateur, cela va de soi, parce que le marchand d'automobiles ou encore le garagiste, il faut qu'il investisse du temps pour faire cette estimation. Encore là, il ne pourra sûrement pas garantir automatiquement son estimation sans se garder ce qu'on appelle une marge de manoeuvre ou une réserve sécuritaire, ce qui aura pour effet finalement que cela va coûter plus cher au consommateur. C'est cela que vous voulez dire?

M. Hamel: C'est cela.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est cela que je comprends moi aussi et je vous comprends très bien.

Le Président (M. Picotte): Une très longue question et une courte réponse.

M. Harvey (Charlesbourg): Très bien, je suis entièrement d'accord.

Le Président (M. Picotte): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: J'aurais deux questions qui ne sont pas très longues, je pense bien. Ma première se réfère au texte de M. Hamel, à la page 5, en ce qui regarde les exigences relativement au concept de crédit. Actuellement, vous concevez cela comme une vente au comptant lorsque le client n'a pas à rembourser immédiatement, mais a tant de jours pour rembourser. Mais vous craignez, étant donné que cela pourrait être considéré comme une vente à crédit, les technicités administratives que vous auriez à subir, qui vous compliqueraient l'existence. A quel article de la loi vous référez-vous à ce moment-là? Est-ce à l'article 8 ou 9, 107 ou 124? Je suis un peu confus pour savoir exactement...

Une Voix: Article 109.

M. Hamel: C'est à Me Lanctot de répondre.

M. Lanctot: Je crois que c'est 117.

M. Bonnier: Cela peut être celui-là aussi.

M. Lanctot: Dans l'article 117... M. Bonnier: Cela peut être celui-là.

M. Lanctot: ... au deuxième paragraphe, j'en ai discuté dans ma présentation, à la fin on dit: Aux fins de l'alinéa précédent, en parlant du crédit variable, les pénalités imposées aux cas de non-paiement à l'échéance sont réputées être des frais de crédit. Nous avons donné comme exemple...

M. Bonnier: Ils sont soumis à toutes les technicités nécessaires.

M. Lanctot: C'est cela. Vous avez, par exemple, au point de vue pratique l'huile à chauffage. La majorité de notre clientèle est sur une base de paiements échelonnés. Vous avez aussi plusieurs cas où c'est paiement sur livraison. Lorsque vous arrivez pour livrer 200 gallons, cela va coûter environ $90, et l'individu n'a pas ses $90 dans les poches. Surtout si on arrive un vendredi, on ne peut lui enlever cela pour son week-end. Au point de vue pratique, on lui laisse une facture où c'est marqué "payable sur réception". Généralement, on s'attend que la personne nous paie dans la semaine qui suit. On note à la fin, au-delà de 30 jours, qu'il y a une pénalité qui s'applique. Ce sont des frais d'administration ou de service. Vous avec ce genre de formule dans beaucoup de commerces. De fait, c'est une transaction au comptant, mais on laisse un certain temps pour payer. Cette période n'est pas financée. C'est plutôt une vente de convenance qu'on donne au consommateur.

Si vous prenez ici le terme de pénalité au cas de non-paiement, cela couvre ces transactions. Dans l'objectif même de ce paragraphe, probablement que les gens n'avaient pas a l'esprit ce genre de transaction. Mais, par les termes mêmes, ce texte permet l'interprétation qu'on avance. C'est pour cela que l'on dit: Soit qu'il soit supprimé ou soit qu'il soit amendé de façon à exclure ce type de transaction.

M. Bonnier: Si cela restait, il faudrait que vous ayez d'autres conditions de crédit.

M. Lanctot: Cela serait du crédit variable.

M. Bonnier: Ce serait un contrat de crédit avec...

M. Lanctot: On serait soumis à toutes les modifications et les différentes dispositions, alors que de fait ce n'est pas du crédit variable. Ce n'est pas notre intention de financer.

M. Bonnier: Ma deuxième question se réfère à l'exploitation d'un certain nombre de garages, soit directement par les compagnies ou par l'entremise d'autres. Etes-vous au courant d'un système qui consisterait à rémunérer le mécanicien qui ferait vendre toutes sortes d'articles, par exemple des courroies pour un générateur et ces choses-là? Existerait-il un système à l'effet que les mécaniciens reçoivent une certaine commission s'ils font vendre tant d'articles?

M. Taschereau: II y a certains gérants indépendants qui le font. C'est local, à ce moment-là. Un gérant de station-service qui va décider de dire...

M. Bonnier: Un locataire à ce moment-là.

M. Taschereau: Un locataire, cela n'existe pas, à ce que je sache, dans les activités de compagnies comme telles; cela existe sous forme de boni, à l'occasion, je pense. Ne me demandez pas de vous donner des noms, je n'en connais pas.

II est arrivé dans le passé que j'aie connu des dirigeants de stations-service qui disaient à leur mécanicien ou à leur homme de service: Très bien, cette semaine, je veux que vous vérifiiez très bien les courroies de ventilation. Cela s'est fait sur une base locale et très rapidement. Mais comme système général, cela n'existe pas, à ce que je sache, actuellement, dans les compagnies pétrolières. Pas chez nous, en tout cas.

M. Bonnier: Très bien.

M. Lanctot: ... au comité paritaire, sur cette question, de l'interdire. Disons vaguement, mais...

M. Bonnier: C'est une pratique interdite par le comité paritaire.

M. Lanctot: C'est cela, je ne suis pas certain, mais c'est l'impression que j'ai.

M. Bonnier: Merci.

Le Président (M. Lafrance): MM. Hamel, Lanctot et Taschereau, nous vous remercions de votre présentation et d'avoir bien voulu répondre aux questions des membres de la commission.

M. Hamel: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons maintenant la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins.

Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins

M. Charron: M. le Président, madame le ministre, messieurs les membres de la commission parlementaire, mesdames et messieurs, avec votre permission, je vous présenterai d'abord les membres du groupe qui représente ici ce matin la Fédération de Québec des unions régionales des caisses populaires Desjardins.

D'abord, à ma droite, M. René Croteau, directeur général de la fédération; à ma gauche, M. Louis Tardif, directeur des services juridiques; je retourne à ma droite, Mme Madeleine Joubert, directeur des communications, et, à mon extrême gauche — il n'est pas gauchiste pour autant — M. André Morin, économiste conseiller aux affaires gouvernementales et aux affaires coopératives d'épargne et de crédit au Canada pour le compte de la fédération, et votre humble serviteur, Paul-Emile Charron, secrétaire général de la fédération.

Tout d'abord, je dois exprimer la vive appréciation de la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins pour cette occasion qui lui est offerte par la commission parlementaire de venir exprimer ici le point de vue et les observations de la fédération. Je ne crois pas nécessaire de vous présenter la fédération; je pense que tout le monde connaît la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins qui regroupe 1251 caisses populaires Desjardins affiliées, pour être précis, et 3,3 millions de membres qui sont des consommateurs d'épargne et de crédit.

Si vous voulez, avec votre permission, je vais donner la lecture du mémoire qui n'est pas tellement long— il contient 12 pages— peut-être avec quelques commentaires. Ce sera à vous de décider ensuite.

Introduction. Les grands objectifs poursuivis par la loi sur la protection du consommateur rejoignent ceux que poursuit maintenant depuis 75 ans le Mouvement des caisses populaires Desjardins. En favorisant un équilibre de forces entre le consommateur et le commerçant, le législateur vise, en effet, l'un des principaux buts poursuivis par les caisses populaires et les autres coopératives, c'est-à-dire aider les consommateurs à atteindre un mieux-être économique et social.

C'est pourquoi nous ne pouvons qu'appuyer une législation dont les principaux objectifs consistent, premièrement, à réglementer ce qui peut conduire à des pratiques abusives ou déloyales à l'endroit du consommateur; deuxièmement, à permettre au consommateur d'être mieux informé de ses droits et de ses obligations lorsqu'il transige avec un commerçant; troisièmement, à offrir une loi et un règlement général rédigés en termes clairs et précis, les rendant ainsi directement accessibles au consommateur.

Quatrièmement, à permettre des recours efficaces et expéditifs lorsque le consommateur devient victime d'abus de droit.

Nous croyons que le projet de loi no 7 rejoint de façon générale ce que nous attendions d'une loi de la protection du consommateur. Par ailleurs, nous vous sommes reconnaissants de nous permettre, par la tenue de cette commission parlementaire, de vous recommander certaines modifications au texte actuel du projet de loi. Ce faisant, nous avons la conviction d'apporter une contribution additionnelle à la protection des droits du consommateur.

Première recommandation: Exemption de la loi. L'objectif principal visé par une loi de la protection du consommateur consiste à réglementer les relations d'affaires pouvant s'établir à l'occasion de transactions commerciales entre un commerçant et le public consommateur. Or, il est bien connu que ces relations ne sont pas celles qui existent entre une coopérative et ses membres. D'une part, la coopérative n'existe que dans l'intérêt de ses membres. D'autre part, la coopérative est justement une association formée de consommateurs. C'est pourquoi les coopératives et leurs membres ne peuvent voir l'utilité ni l'opportunité d'une réglementation qui leur serait appliquée de façon artificielle, en faisant complètement abstraction de leur entité propre et, de ce fait, risquant de porter atteinte de façon sérieuse à l'influence et à la liberté d'action de ces coopératives en faveur de leurs membres.

En d'autres termes, les sociétaires des caisses populaires n'aiment pas que, quand ils transigent avec leurs caisses populaires, ils aient en face d'eux un commerçant, parce que le crédit, dans les coopératives d'épargne et de crédit, est un crédit encadré par une commission de crédit et par une assemblée générale qui est là pour les protéger. S'ils s'organisent des coopératives d'épargnes et de crédit, c'est pour s'autoprotéger,

par l'assemblée générale des propriétaires à la base et par une commission de crédit mandataire. Il y a un cadre de protection, et les relations qui régissent les membres avec leur caisse ne sont pas de même nature ni au plan juridique, ni au point substantiel. On pourrait faire un long développement là-dessus, on pourra voir plus tard. Je vais peut-être revenir un peu plus loin sur ce point.

Est-il nécessaire de rappeler que le législateur québécois a reconnu, de façon explicite et non équivoque, la nature véritable des coopératives? A titre d'exemple, rappelons que l'article 76 de la Loi des caisses d'épargne et de crédit stipule que toutes les activités productives des caisses étant essentiellement coopératives, elles sont exclusivement restreintes à leurs membres. Cet article précise que ces activités coopératives ne sont pas réputées constituer l'exploitation d'un commerce.

Par ailleurs, il serait facile de faire la preuve que, dans les faits, l'activité coopérative se situe à l'antipode de ce que veut régir la Loi sur la protection du consommateur. C'est cela l'opposition qu'il y a. En somme, c'est une activité coopérative qui va en opposition à une activité commerciale qui exige un certain nombre de choses que la coopérative ne réalise pas. Il y a une différence dans la nature même juridique et dans son fonctionnement et dans sa substance. Si l'opération est différente de sa nature, celui qui l'émet est nécessairement différent. On ne peut pas faire autrement. Qu'il suffise de rappeler que les membres d'une coopérative en sont les propriétaires-usagers et qu'ils ont tous, en assemblée générale, un droit de vote égal.

Quant aux contrats de prêts qui interviennent entre un caisse populaire et ses membres, rappelons qu'ils sont approuvés par ces derniers, lesquels en déterminent et la forme et le contenu, y compris les garanties et les conditions de remboursement. C'est l'allusion que je faisais tout à l'heure à l'encadrement du crédit d'une certaine manière. Peut-être pas dans le sens technique qu'utilisent les Français, mais dans notre sens à nous. On peut parler d'encadrement du crédit dans un autre sens, évidemment.

C'est pourquoi nous voudrions formuler de nouveau la demande que nous avions faite lors de la présentation du projet de loi qui est devenu la loi actuelle de la protection du consommateur. En effet, considérant que la Loi sur la protection du consommateur veut réglementer les relations entre les commerçants et les consommateurs; considérant que les coopératives ne peuvent être directement ou indirectement assimilées à des commerçants, nous recommandons que les coopératives ne soient pas assujetties aux dispositions de la Loi sur la protection du consommateur. 2. Modification de la loi.

Tout en étant confiants que le bien-fondé de notre première recommandation pourra cette fois être reconnu, vu l'expérience vécue sous la loi actuelle, nous voulons faire certaines autres recommandations qui portent sur le projet de loi tel que déposé en première lecture.

Le règlement général de la loi, d'abord.

L'article 270 du projet de loi stipule que, du moins pour un certain temps, le règlement général présentement en vigueur va s'appliquer aux articles de la nouvelle loi qui sont équivalents aux articles de la loi actuelle. Qu'il nous soit permis de déplorer que le présent règlement général puisse s'appliquer à la nouvelle loi, sans avoir d'abord été repensé et rédigé à nouveau. C'est peut-être fait, mais ce n'est pas venu à ma connaissance. Nous déplorons cette éventualité pour les motifs suivants: 1.Le règlement actuel, présentant de sérieuses difficultés d'interprétation, son application automatique à la nouvelle loi ne ferait qu'aggraver la situation; 2.Le texte intégral du règlement général applicable à la nouvelle loi, à cause des dispositions nouvelles qu'il renfermera, est indispensable à la compréhension totale et à l'appréciation complète du projet de loi.

C'est pourquoi nous recommandons que le règlement général relatif à la Loi sur la protection du consommateur soit rédigé à nouveau et qu'il n'entre en vigueur qu'après consultation de tous les intéressés.

Autre modification concernant le prêt d'argent consenti à l'avance.

La définition du contrat de crédit variable, telle que prévue à l'article 117 du projet de loi, ainsi que les dispositions du règlement général qui le visent ne permettent pas l'imposition de frais de crédit à compter de la date à laquelle le crédit est consenti. D'autre part, les dispositions de l'article 94 du projet de loi permettent une telle imposition, à compter de la date des avances, lorsqu'il s'agit d'un contrat de prêt d'argent à exécution successive.

Or, les caisses populaires veulent pouvoir offrir à leurs membres la possibilité d'obtenir d'elles un prêt d'argent consenti à l'avance pour un montant prédéterminé et dont les sommes, à la demande du membre ou sur son ordre, pourraient être versées ou créditées à son compte. Ce contrat, conclu indépendamment de toute entente préalable entre la caisse populaire et des tiers, ne doit surtout pas être confondu avec ce qu'il est convenu d'appeler la carte de crédit.

Considérant que ce genre de contrat ne semble pas explicitement visé par les dispositions de l'article 94 du projet de loi, nous recommandons que ce genre de contrat soit réputé être un prêt d'argent auquel s'appliquent les dispositions de l'article 94 du projet de loi.

Autre point, le contrat de crédit variable.

L'article 126 du projet de loi stipule que le commerçant doit donner au consommateur un préavis d'au moins six mois de toute modification relative aux frais de crédit d'un contrat de crédit variable. Nous estimons que ce délai est excessif et que son imposition peut se traduire par une hausse sensible des frais de crédit exigés par les commerçants, lesquels voudront peut-être prévoir les changements maintenant fréquents des taux d'intérêt.

Par contre, nous comprenons qu'il soit important de prévenir suffisamment tôt le consommateur de toute modification des frais de crédit découlant de l'utilisation d'un crédit variable. Nous sommes d'avis que le délai prévu pourrait toutefois être plus court, tout en offrant la même protection au consommateur.

C'est pourquoi nous recommandons que le délai de préavis prévu à l'article 126 du projet de loi soit réduit à deux mois, pour ne pas dire, même, un mois.

L'expression "commerçant" dans les annexes.

Certains articles du projet de loi, en particulier les articles 108 et 116, semblent imposer — je préférerais dire imposent — l'obligation de reproduire textuellement ce qui apparaît dans les annexes du projet de loi. Or, ces annexes désignent sous le vocable "commerçant" celui qui transige avec le consommateur.

Sans répéter ce que nous avons dit précédemment dans le cadre de notre première recommandation à l'effet d'exempter les coopératives de l'application de la Loi sur la protection du consommateur, nous voulons rappeler que les coopératives ne sont présentement assimilées à des commerçants qu'en vertu d'une déclaration à ce sujet insérée dans la Loi de la protection du consommateur.

C'est pourquoi nous recommandons que les coopératives puissent, dans tout contrat conclu en faveur de leurs membres, se désigner autrement que par le vocable "commerçant", pourvu que le vocable utilisé tienne compte de la nature du contrat intervenu. C'est bien sûr que, si les caisses populaires trouvent inadmissible, non raisonnable, d'être assimilées à des commerçants parce que ce n'en sont pas, il ne faut pas leur demander de se déclarer; elles peuvent peut-être accepter d'être traitées comme tel, mais il ne faut pas leur demander de se déclarer des commerçants. Là, cela dépasse la mesure.

Les stipulations de non-responsabilité. L'article 7, du projet de loi se lit comme suit: "Sont sans effet les stipulations par lesquelles un commerçant se dégage des conséquences de son fait personnel ou de celui de ses représentants."

Cet article, tel que rédigé, pouvant s'appliquer à tout genre de contrat de service, nous voudrions souligner certaines conséquences de son application à certains services présentement offerts par les caisses populaires à leurs membres. Nous nous contenterons, à cet égard, de citer deux exemples: la location de coffrets de sûreté et l'acceptation de contre-ordres de paiement. Voilà deux cas où la caisse populaire ne pourrait, sans faire montre d'imprévoyance, accepter toutes les conséquences qui en découlent. En effet, comment la caisse populaire pourrait-elle, par exemple, se tenir entièrement responsable des effets déposés sans son intervention dans un coffret de sûreté, ou encore se tenir responsable des recours auxquels pourrait prétendre le détenteur d'un ordre de paiement mis en circulation sans son intervention?

C'est pourquoi, nous recommandons que les caisses d'épargne et de crédit soient exemptées des dispositions de l'article 7 du projet de loi, lorsqu'elles transigent avec leurs membres.

Concernant les permis. Les articles 236 et 238 du projet de loi imposent aux commerçants qui concluent des contrats de prêt d'argent l'obligation d'obtenir un permis auprès du directeur de l'Office de la protection du consommateur et même, le cas échéant, de fournir un cautionnement.

Les caisses populaires étant soumises au droit de surveillance du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières et détenant déjà un permis de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, nous devons nous opposer fermement à ce qu'elles puissent être tenues d'obtenir un second permis qui n'accorderait d'ailleurs aucune protection additionnelle à leurs membres.

C'est pourquoi nous recommandons que les caisses d'épargne et de crédit soient exemptées des dispositions des articles 236 à 250 du projet de loi, concernant les permis.

La publicité.

L'article 161 du projet de loi se lit comme suit: "Nul ne peut faire de la publicité informant les consommateurs sur les biens et services qu'ils peuvent se procurer au moyen du crédit qu'on leur offre."

Tout en approuvant la répression des pratiques abusives en matière de publicité, en particulier celles qui peuvent inciter le consommateur à faire un usage inconsidéré ou immodéré du crédit, nous voulons être assurés que les caisses populaires pourront continuer à informer leurs membres des bienfaits de l'épargne et d'un usage judicieux du crédit.

Nous croyons, en effet, qu'une saine éducation à l'épargne et au crédit ne doit pas être confondue avec l'incitation à obtenir, peu importent les besoins ou les moyens réels du consommateur, la jouissance immédiate de biens qui ne sont pas essentiels à son mieux-être. Il serait cependant préjudiciable au consommateur d'empêcher qu'il soit informé des avantages qu'il pourrait retirer d'un usage raisonnable du crédit, par exemple, en vue de la consolidation de ses dettes.

C'est pourquoi nous recommandons que l'article 161 du projet de loi soit modifié pour préciser la pratique interdite qu'il vise, c'est-à-dire l'incitation à faire un usage du crédit pour l'obtention immédiate de biens matériels particuliers.

D'autre part, l'article 155 du projet de loi est à l'effet de défendre à un commerçant de faire toute publicité sans dévoiler en particulier sa qualité de commerçant et son adresse.

Selon nous, cet article ne devrait pas s'appliquer à la publicité dite "institutionnelle" comme celle, par exemple, que fait une union régionale pour ses caisses affiliées ou la fédération pour l'ensemble du mouvement des caisses populaires Desjardins. Par exemple, faire connaître les services, une image du mouvement.

C'est pourquoi nous recommandons que les fédérations régies par la Loi des caisses d'épargne

et de crédit soient exemptées des dispositions de l'article 155 du projet de loi.

Les comptes en fiducie.

L'article 177 du projet de loi précise que les comptes en fiducie dont il traite doivent être détenus dans une banque à charte ou autre institution autorisée par la loi à recevoir des dépôts.

Les caisses d'épargne et de crédit étant également autorisées par la loi à recevoir des dépôts, nous recommandons que l'article 177 du projet de loi soit modifié pour y désigner nommément les caisses d'épargne et de crédit.

Conclusion.

En terminant, nous voulons de nouveau féliciter le législateur pour l'intérêt qu'il manifeste à l'endroit du consommateur en présentant ce nouveau projet de loi. Qu'il nous soit permis cependant d'insister de nouveau sur l'inopportunité d'assujettir les coopératives du Québec à la réglementation concernant la protection du consommateur. D'ailleurs, la simple constatation du nombre des exemptions actuelles, dont la liste apparaît en annexe, et de celles demandées ci-dessus ne confirme-t-elle pas notre prétention que les opérations des coopératives ne sont pas celles qu'entend viser la Loi sur la protection du consommateur?

Nous sommes donc confiants que notre point de vue pourra être partagé par cette commission et que pourra se poursuivre librement l'action bienfaisante des caisses populaires en faveur de leurs membres et de la communauté québécoise.

Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. Charron.

Mme le ministre.

Mme Bacon: J'aimerais faire remarquer que, tout comme le législateur, la Fédération du Québec des caisses populaires Desjardins favorise l'équilibre des forces entre le consommateur et le commerçant, tout en nous faisant part ce matin de certaines préoccupations qu'elle voudrait nous voir partager concernant différents articles de la loi qui la touchent particulièrement.

Il est évident que le ministère prend bonne note de votre demande d'exemption pour les coopératives, tel que vous le stipulez à la page 4. Vous faites une seconde recommandation, à savoir que l'actuel règlement général doit être rédigé à nouveau et n'entrer en vigueur qu'après la consultation de tous les intéressés. J'aimerais mentionner que nous sommes actuellement à revoir la réglementation. Nous pouvons peut-être affirmer deux choses ce matin. D'abord, notre intention a été de rapatrier le droit substantif à l'intérieur de la loi et nous avons aussi l'intention de rendre plus claire et plus facile la compréhension de l'actuel règlement. En deuxième lieu, quant à votre proposition de soumettre a consultation les futurs règlements avant leur adoption, j'aimerais mentionner qu'il s'agit là d'une suggestion qui nous a été faite par plusieurs groupes, plusieurs associations. Nous l'avons entendue à plusieurs reprises ici et nous prenons aussi bonne note de cette suggestion que vous nous faites ce matin.

Aux pages 5 et 6 de votre mémoire, vous mentionnez les prêts d'argent consentis à l'avance. Dans l'esprit du législateur, le prêt d'argent consenti à l'avance a toujours été un contrat de prêt d'argent. L'article 94 s'applique à ce moment-là. Nous aimerions toutefois que vous nous précisiez votre pensée sur ce sujet. Je pense que vous avez donné certaines explications, mais vous entretenez une crainte au sujet de l'article 117 et de l'article 94 du projet de loi. Je pense que cette crainte résulte d'une difficulté de compréhension de ces articles.

Pourriez-vous préciser davantage votre pensée au sujet de ces craintes que vous entretenez quant aux articles 94 et 117?

M. Tardif (Louis): Oui, madame. En fait, actuellement, par l'interprétation que nous donnons et que nous avons d'ailleurs communiquée aux conseillers juridiques de votre ministère, nous croyons que par application des articles 24g) et 4.11 du règlement, actuellement, il n'est pas possible à une caisse populaire de consentir une ouverture de crédit à un de ses membres pour la raison que pour calculer le taux de crédit, il faut connaître "le solde à recouvrir — je cite le texte du règlement — à la fin de la période précédente". Ce qui fait qu'on pourrait imaginer qu'un membre d'une caisse populaire, par exemple, emprunte la somme de $1000, disons le 5 du mois, qu'il rembourse avant le 30 du mois et ce serait un prêt sans intérêt.

Or, dans une caisse populaire, il y a un principe sacré, c'est l'équité, le traitement égal entre les membres. Jusqu'à maintenant, cela a été un obstacle qui a empêché la caisse populaire de fournir un des services pour lesquels elle existe, c'est-à-dire fournir un crédit.

Et cette ouverture de crédit, évidemment, on peut le dire, est demandée, sollicitée, attendue des membres.

Mme Bacon: D'accord. A l'article 126, vous avez mentionné de réduire certains critères. On se basait sur six mois, vous trouvez cela excessif, maintenant vous mentionnez deux mois dans votre mémoire. Ce matin, vous réduisez encore à un mois le délai. Est-ce qu'il y a des raisons bien spécifiques, autres que celles mentionnées dans le mémoire, pour la réduction du délai?

M. Morin (André): C'est une question de fluctuation du taux d'intérêt, madame le ministre. L'impression que l'on a, c'est que si les traiteurs sont obligés de préciser six mois à l'avance le taux auquel ils prêteront, la tendance sera beaucoup plus à vouloir se protéger contre ces fluctuations-là et demander un taux plus élevé que de demander un taux de marché. Il nous semble, de notre côté, que ce qui serait le plus réaliste, c'est que les emprunteurs payent le taux que coûte l'argent suivant la situation présente, et c'est peut-être ici un taux variable qui serait le plus intéressant. En logique théorique, je comprends qu'un taux variable comporterait d'autres problèmes, mais quand vous nous parlez d'un délai de six mois pour un changement, je trouve

qu'on est allé à l'autre extrême du taux variable qui s'ajusterait instantanément suivant les conditions de marché.

Les caisses populaires sont des coopératives d'épargne aussi, en même temps que des coopératives de crédit. Comme elles ont aussi des épargnants et des emprunteurs, c'est la question d'équité qui nous préoccupe ici. On ne voudrait pas garantir à des emprunteurs un taux qui pourrait, à un moment donné, à cause des changements rapides dans la situation monétaire, comporter des inconvénients pour les épargnants.

Mme Bacon: Vous réduisez ce matin jusqu'à un mois, si j'ai bien compris, M. Charron. Vous mentionniez deux mois dans votre mémoire, ce matin, même un mois. Aucun délai?

M. Charron (Paul-Emile): Deux mois. J'avais pensé que c'aurait été suffisant, mais on dit: pas plus que deux mois. J'avais même pensé qu'un mois aurait été suffisant. Je pense que c'est une incitation au prêteur à se justifier, à trouver des raisons pour demander le taux le plus élevé, pour ne pas se faire prendre dans les fluctuations à la baisse. Quand cela fluctue à la baisse il peut se faire prendre, alors il dit: Je vais demander le taux le plus élevé. Cela peut être interprété comme une incitation à demander le taux le plus élevé. Alors on dit, on peut réduire la période de protection du consommateur, c'est l'objectif, sans causer préjudice, évidemment, au prêteur. Je pensais qu'une période d'un mois c'est pas mal suffisant, mais le mémoire dit deux mois. Mon opinion est qu'un mois ce serait même suffisant. C'est une question d'appréciation.

Mme Bacon: D'accord. Vous nous suggérez, à la page 8 de votre mémoire, de vous exempter de l'article 7. Est-ce que la position de principe de votre fédération, face aux clauses de non-responsabilité pour lesquelles un commerçant se dégage ou son représentant, est-ce que cette position est due à l'expérience que vous avez? Vous mentionnez certaines raisons, dans votre mémoire, mais je pense aux clauses de non-responsabilité. Est-ce que vous maintenez encore cette position?

M. Tardif (Louis): Oui, madame. En fait je ne dirai pas que c'est une objection de principe. Je pense que, probablement, vous et moi sommes d'accord que celui qui a le gros bout du bâton ne doit pas indûment écarter sa responsabilité pour les actes qu'il pose. Par contre ce que nous voulons dire, c'est que, dans les opérations quotidiennes, j'en ai donné deux ici, je pourrais en ajouter d'autres, il y a plusieurs cas où vraiment la caisse doit dégager sa responsabilité. Si vous voulez, je vais vous donner un autre exemple que nous n'avons pas mentionné ici dans le mémoire; la question des dépôts de nuit.

La caisse est fermée, quelqu'un va déposer un sac dans une chute pour recevoir un dépôt de nuit. Il est bien sûr que la caisse doit dire, dans un document qu'elle signe avec son membre, qu'elle n'est pas le mandataire du membre jusqu'au moment où le sac sera ouvert et qu'on pourra constater qu'est-ce qu'il y a dans le sac. Alors il y a des situations comme cela où, vraiment, la caisse, comme nous le disons dans le mémoire, ferait montre d'imprévoyance. Il serait même injuste pour les autres membres de la coopérative si on ne prévoyait pas que, dans certains cas, la caisse ne peut pas assumer certaines responsabilités tout en donnant des services à ses membres. Elle veut bien rendre service à ses membres, mais à un moment donné il faut quand même respecter l'équilibre entre ces mêmes membres. C'est un peu notre point de vue madame.

Mme Bacon: D'accord. A l'article 161, comme d'autres groupements, vous nous mentionnez ce matin ces difficultés d'interprétation que nous sommes à étudier présentement, puisque déjà, au cours des dernières semaines, on nous l'a mentionné à plusieurs reprises. Quant à l'article 155, c'est un peu la même chose. Même si on a tenté de rendre le texte le plus clair possible, le plus précis possible, il y a aussi des difficultés d'interprétation. Nous allons réétudier la rédaction de l'article 155. A l'article 177, vous nous avez fait une demande. Je pense qu'on doit considérer d'ajouter aussi les caisses populaires à l'article 177.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron (Claude): Merci, M. le Président. Je veux remercier les représentants des caisses populaires pour les remarques qu'ils nous ont faites sur le projet de loi no 7. Puisque Mme le ministre a abordé certaines questions précises, j'en aurai quelques-unes aussi, mais j'aimerais d'abord aborder la question de principe, en fin de compte, que vous posez à l'entrée de votre mémoire et, où, à toutes fins pratiques, vous sollicitez — je pense que le texte est suffisamment clair pour mériter d'être rappelé — que les coopératives ne soient pas assujetties aux dispositions de la Loi sur la protection du consommateur. Lorsqu'on prend connaissance des remarques précises sur certains aspects de la loi, nous sommes portés — d'ailleurs, on en a pris note des deux côtés de la table — à vous donner raison, à l'occasion, sur les dispositions précises. Quant au principe général, de la façon dont il est formulé, il nous apparaît peut-être un peu gros pour être accepté ainsi.

En effet, il est vrai que les coopératives ont d'abord des responsabilités dans l'intérêt de leurs membres; c'est ce qui fait leur valeur sociale, tout autant qu'économique dans une collectivité. Il reste que ce sont aussi, une fois que les membres les ont constitués, des services publics. En ce sens, elles participent et ont affaire dans la vie publique avec des gens qui ne sont pas nécessairement les membres de ladite coopérative. En ce sens, parce qu'elles ont également ce rôle en plus du rôle interne entre leurs membres, elles peuvent à l'occasion porter lésion à certains consommateurs et avoir des comportements qui, sans dire qu'ils nuisent à l'ensemble des consommateurs,

peuvent à l'occasion leur porter préjudice. Elles doivent donc être considérées comme n'importe quelle autre institution de crédit ou bancaire. J'ai sursauté à la lecture du texte, de la façon dont c'est affirmé aussi catégoriquement. Il faudrait que vous reveniez peut-être pour un moment sur cette affirmation de principe pour nous redire pourquoi les coopératives, parce qu'elles sont des coopératives, ne devraient pas être assujetties aux dispositions de la Loi sur la protection du consommateur.

M. Charron (Paul-Emile): II faut bien se comprendre. C'est bien clair que j'ai signalé que les coopératives étaient des associations de consommateurs. C'est dit clairement et formellement dans le mémoire, dès le point de départ, que nous sommes en faveur du principe de la Loi sur la protection du consommateur et même que les objectifs que nous poursuivons rejoignent ceux que la Loi sur la protection du consommateur poursuit. Ce qui nous contrarie, ce qui contrarie les caisses, c'est que, dans l'entrée de cette loi, on leur dit: Vous vous assimilez à des commerçants et vous devez vous déclarer commerçants.

En d'autres termes, il faudrait peut-être nous trouver une raison dans l'association de façon à ne pas nous contrarier. Il y a des positions de principe; nous sommes d'accord sur les principes. Il y a aussi des positions de principe qui disent dans une loi: Vous n'êtes pas des commerçants, vous n'êtes pas des établissements financiers, etc. Dans une loi, on dit cela et, dans une autre loi, on dit: N'oubliez pas que vous êtes d'autre chose. On ne peut pas être aure chose. Si je suis du sexe mâle, je suis du sexe mâle. Ce n'est pas une loi qui va changer cela, pas même une loi du Parlement britannique. Il peut tout faire, excepté changer un homme en femme. Ne nous demandez pas de changer une nature. Nous n'avons pas de pouvoir substantiel, c'est-à-dire de changer de nature. Nous défendons notre nature. En d'autres termes, nous ne pouvons pas demander à nos sociétaires: Déclarez-vous, considérez-vous comme des commerçants et devenez des commerçants. Cela, on n'en veut pas. Qu'on nous trouve une autre raison; qu'on nous ajoute quelque part, très bien, mais ne nous demandez pas de nous assimiler.

Qu'on nous assimile, d'accord, mais ne nous demandez pas de déclarer dans des documents que nous sommes telle chose alors que nous ne sommes pas telle chose. Ce n'est pas acceptable, cela ne paraît pas pensable ni raisonnable.

M. Charron: Je prends bonne note de votre remarque.

M. Charron (Paul-Emile): Je pense qu'on se comprend.

M. Charron: Oui. Mais je voudrais quand même obtenir un aveu de votre part. Vous admettrez sans doute, tout ce que vous avez dit étant vrai, qu'il arrive que dans la réalité concrète, dans la transaction entre une coopérative et un citoyen X de telle ville Y du Québec, le rapport soit exac- tement le même. Ce n'est qu'accidentel que l'endroit où il s'est procuré un bien soit géré d'une façon coopérative alors qu'à la porte à côté où il aurait pu se procurer le même bien, probablement à un prix plus élevé, il aurait eu affaire à une entreprise capitaliste traditionnelle.

Pour lui, lorsqu'il s'agit d'assurer la garantie de son bien, l'important est qu'il en a pour son argent, autrement dit qu'il ne s'est pas fait rouler. Si l'appareil est défectueux, qu'il puisse le retourner. Si la garantie est expirée, qu'il puisse bénéficier de toutes les garanties de la loi. Cela devient — j'espère ne pas vous blesser en disant cela — secondaire que l'endroit où il l'a acheté soit géré d'une façon coopérative ou soit la propriété d'un anglo-saxon de l'ouest de la ville de Montréal. Quand on se met sous l'angle du consommateur, il a droit à une protection. Il peut avoir acheté dans une coopérative et dans ce sens, pour lui, dans son angle — je comprends bien le vôtre — vous êtes un commerçant comme les commerçants au sens de la loi. C'est la distinction qui est faite dans le sens de la loi.

M. Charron (Paul-Emile): En d'autres termes, la personne dont vous parlez, son langage et son attitude impliquent qu'il ne fait pas la différence entre une coopérative financière et une autre institution financière qui agit comme un intermédiaire financier en empruntant des fonds du public, et c'est là qu'intervient la Loi de la protection du consommateur. C'est un intermédiaire financier qui peut abuser, d'où nécessité d'avoir une loi avec laquelle nous sommes d'accord.

Mais, nous, nous ne sommes pas des intermédiaires financiers au sens de la loi, à cause de l'opération commerciale. C'est là-dessus qu'il faut s'entendre; si on comprend cela, on va comprendre le reste et on trouvera peut-être des moyens. En d'autres termes, nous n'avons aucune espèce d'objection, nous sommes soumis à la loi, actuellement. Il faudrait présenter cela de façon à ce que ceux qui sont concernés disent: D'accord, cela fonctionne, mais ne nous demandez pas des choses qu'on ne veut pas faire, parce que cela nous contrarie dans notre propre nature. Vous comprenez? Trouvez d'autres arguments, mettez-nous dans la loi, si vous voulez, mais trouvez-nous une raison acceptable. Ne nous demandez pas de nous déclarer d'une autre nature. J'insiste sur ce point, l'activité commerciale et l'activité coopérative, ce n'est pas de même nature. La caisse populaire, comme corporation qui enregistre les opérations, exactement comme la banque, c'est une corporation, une entité juridique, mais ce n'est pas une entité financière en ce sens. Je vais vous expliquer pourquoi.

Les sociétaires mettent leurs épargnes en commun justement pour assurer leur propre protection en se prêtant leurs propres épargnes. Il y a une assemblée générale des sociétaires qui décide des normes et il y a une commission de crédit qui est mandatée pour faire respecter les normes. Les sociétaires, s'ils ne sont pas satisfaits parce qu'ils ne sont pas bien protégés, s'en viennent en assemblée générale et ils se plaignent. Cela fait une grosse différence.

Le commerce de l'argent présuppose trois choses: un prêteur, un emprunteur et une personne intermédiaire, un organisme financier intermédiaire qui empoche la différence. Pour l'empêcher d'empocher trop ou d'abuser, on met une loi pour faire la protection qui va se situer entre les deux. Nous n'avons pas besoin de cela, parce que l'abus n'est pas possible. Ce sont les gens qui se prêtent leur argent. Il n'y a pas trois institutions, il n'y a pas un prêteur et il n'y a pas un emprunteur et un organisme financier qui empoche et qui peut abuser du prêteur et qui peut même abuser de l'emprunteur. D'où la nécessité d'avoir une loi, mais on dit qu'on n'est pas cela. Nous sommes tout à fait d'accord, il y a nécessité d'assurer la protection du consommateur, d'autant plus que nous en sommes. On ne peut tout de même pas se renier nous-mêmes. On se dit: Faites cela de façon à ce que ce soit accepté ou acceptable aux gens de la base. Ne leur demandez pas de changer de nature ou de déclarer surtout qu'ils sont d'une autre nature. Je peux vous en dire plus.

M. Harvey (Charlesbourg): M. le Président, si mon collègue me le permet. Sur le même sujet, prenons à titre d'exemple, quelqu'un qui achète chez Cooprix à Montréal, boulevard Legendre, alors que pour le financement des biens meubles les prêts sont assurés par le mouvement coopératif ou les caisses. A ce moment-là le consommateur bénéficie, en vertu de la loi 45, des mêmes privilèges de la période de réflexion; il a aussi les mêmes droits de recours, toujours en vertu de la loi 45, et vous voudriez, parce que c'est tout l'ensemble du financement du groupe, que ce soit exclu. Je dis qu'on ne peut pas être enceinte seulement ou un peu; on l'est ou on ne l'est pas. Je veux dire que je suis d'accord pour que vous préconisiez une protection du consommateur. Vous répondez très certainement à des besoins. Je suis un sociétaire d'une caisse populaire et je m'en réjouis, mais d'un autre côté je pense que dans le contexte présent le consommateur, ici, c'est lui qu'on vise; les mêmes prérogatives imposées à l'entreprise soi-disant capitaliste doivent être les mêmes profils d'exigences pour l'entreprise coopérative. C'est mon point de vue, M. Charron.

M. Morin: M. le Président, si vous me le permettez... Ecoutez, le problème là-dessus, ce n'est pas que les caisses populaires veulent faire n'importe quoi. Les caisses, je pense, avec leur 75 années d'expérience, ont prouvé qu'elles étaient préoccupées de la protection du consommateur.

Mais regardons le problème juste en face au plan légal; vous avez deux lois dans la province de Québec gui sont administrées par le même ministère. La loi des caisses d'épargne et de crédit, à l'article 76, dit bel et bien que les activités des caisses d'épargne et de crédit ne sont pas réputées faire l'objet d'un commerce. Vous avez une autre loi, celle qui est sur la table aujourd'hui, pour vous dire qu'au départ lorsqu'on parlera de commerçants, cela voudra dire caisses populaires. Il va falloir trancher quelque part.

Maintenant, les caisses ne cherchent pas, encore une fois, à faire n'importe quoi et éviter tou- tes les législations. Ce qui leur répugne, c'est que vous avez 16 000 bénévoles qui ont toujours voulu travailler pour les autres, qui ont toujours voulu travailler pour une formule coopérative et qui se sont tournés vers les autres. Or, vous arrivez avec une loi et vous les assimilez à des commerçants. C'est là que le bât blesse et c'est là que cela fait mal.

Si vous dites que la loi touche les commerçants et les caisses populaires, évitez de nous obliger à nous appeler commerçants quand on fait une transaction avec un de nos membres dans les contrats; évitez de dire toujours: Commerçants veut dire caisses populaires, car on va finir par créer le syllogisme que les caisses populaires sont des commerçants comme les autres. Cela fait 75 ans qu'on essaie de prouver que nous ne sommes pas des commerçants comme les autres. Quand on a dit non à la carte de crédit, je pense qu'on a manifesté une fois pour toutes à toute la province que nous n'étions pas des commerçants comme les autres. Votre loi dit, dès le départ: Chaque fois que vous verrez le mot "commerçants" pensez aux caisses populaires, et cette loi c'est pour la protection du consommateur. On le protège contre qui? Contre des exploiteurs. Vous ne parlez pas d'exploiteurs là-dedans, vous parlez de commerçants et chaque fois que vous lisez "commerçants", vous pensez caisses populaires. C'est cette image, caisses populaires égalent commerçants qui est le problème.

M. Charron: M. le Président, je remercie M. Morin de cette clarification de la position des caisses populaires. J'ai une seule question sur un article précis du projet de loi; peut-être la conclusion de votre intervention m'amène-t-elle à l'avancer encore plus. C'est sur votre remarque sur l'article 161, qu'on a déjà entendue à la table de cette commission depuis que nous l'étudions. Je cite l'article: "Nul ne peut faire de la publicité informant les consommateurs sur les biens et services qu'ils peuvent se procurer au moyen du crédit qu'on leur offre". J'ai mal compris l'inquiétude des caisses populaires sur l'application éventuelle de cet article parce que je n'y vois pas de rapprochement avec la publicité du crédit lui-même à l'intérieur d'une caisse populaire, c'est-à-dire votre droit d'annoncer le taux d'intérêt et les conditions fixés par la commission de crédit de chacune des caisses. Cet article n'interdit pas la publicité du crédit, si je l'ai bien compris. Il interdit de faire de la publicité sur les biens et services que le crédit peut procurer. Le crédit demeure toujours un élément de la vie économique habituelle — je suis assez bien placé pour vous en parler — ce qui veut dire qu'on peut certainement, à l'intérieur des caisses populaires, continuer à affirmer, surtout si on a un taux avantageux par rapport à des concurrents, la qualité du taux et les conditions d'admission au crédit de la caisse populaire sans contrevenir à l'article 161, fût-il adopté dans sa forme actuelle.

Mme Joubert (Madeleine): L'interprétation que nous faisions de l'article 161 était qu'il était impossible de faire de la publicité sur les services

des caisses. Or, les caisses offrent des services d'épargne et de crédit. Ce que nous demandons, c'est une précision dans la loi, indiquant, justement comme vous le dites, qu'il est possible de faire de la publicité des services des caisses, parce que nous avons une publicité indiquant qu'il y a tel ou tel service à votre disposition. Ce n'est pas clair, selon nous, dans l'article 161 de la loi. Nous souhaiterions avoir des précisions. Cependant, quant à la publicité incitative, nous sommes d'accord avec le projet de loi.

M. Charron: II est évident que, si les caisses populaires se mettaient à dire — Dieu merci, elles ont échappé à ce genre de publicité que je connais — Pourquoi pas trois semaines au soleil en plein mois de février, par exemple, adressez-vous ici, endettez-vous et partez c'était ce genre de publicité — je pense qu'on informerait les consommateurs sur les biens et services, c'est-à-dire un voyage au soleil, par exemple, qu'ils peuvent acquérir en s'endettant. Cependant, je n'ai jamais vu ce genre de publicité dans les caisses populaires. S'il faut travailler sur l'article pour atteindre très clairement ce sens, on le fera, mais on ne veut certainement pas interdire à une caisse d'afficher chez elle ou d'informer ses sociétaires, les membres, qu'à compter de telle date, par exemple, le taux d'intérêt sera de tel montant et que la commission de crédit a fixé tel et tel nouveaux critères. Il n'y a rien, il me semble, qui devrait interdire cela. Si je suis sociétaire d'une coopérative d'épargne et de crédit, je veux bien savoir ce que me donne mon épargne dans cette coopérative et mes chances de crédit là-dedans. Cela ne devrait être, en aucun temps, illégal. S'il faut travailler la loi, disons qu'on prend bonne note de votre inquiétude et qu'on travaillera là-dessus pour l'éviter.

M. Charron (Paul-Emile): Une clarification. M. Charron: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Je reviens à un point que vous avez souligné tout à l'heure comme exemple: les dépôts de nuit. Je suis tout à fait d'accord, parce qu'ordinairement la majorité des gens qui utilisent ce procédé est dans le commerce en général ou un genre de commerce quelconque. Ils doivent se prémunir contre des vols quelconques ou des dommages en s'assurant à cet effet. Il y a un genre d'assurance qui est prévue pour les gens qui, étant dans certaines activités, sont obligés souvent de faire un dépôt de nuit. Que vous soyez responsables dans un cas comme cela, je suis d'accord comme pour n'importe quelle autre institution.

Cependant, je reviens aux avancés de mon collège de Saint-Jacques et je suis un peu d'accord avec ce qu'il disait au début. Vous avez une définition, d'un côté, et vous avez ce que vous faites, de l'autre côté. C'est pour cela que je me dis que, dans le cas présent, vous faites des transactions commerciales, vous faites des transactions comme n'importe quel autre. Je suis membre et, quand j'ai obtenu mon premier prêt à la caisse populaire, on a dit: On se prête à nous-mêmes. Je n'étais pas sociétaire et je commençais dans l'affaire. Il y a seize ou dix-sept ans de cela. On m'a dit: D'accord, cela va te coûter $5; on va te donner une part sociale et on va te prêter le montant d'argent. Qu'est-ce que tu veux: $1500 ou $2000? J'ai choisi ce que j'ai voulu, mais je peux vous dire, par exemple, que j'ai vu, il y a peu de temps, des caisses populaires qui prêtaient à des taux plus élevés que des banques. C'est entendu, si tu n'as pas ta part sociale de $5, cela ne veut pas dire grand-chose si on regarde le coût d'intérêt que tu dois payer en surplus.

C'est pour cela que je me dis que, d'un côté, ce que vous avez avancé tout à l'heure me porte à penser: Est-ce que vous voudriez qu'on définisse, dans ce projet de loi, le mot "commerçant" tel qu'il est en ajoutant "les caisses d'épargne et de crédit"?

M. Charron (Paul-Emile): D'abord, le mot "commerçant" n'est pas défini dans la loi. Ce serait peut-être bon qu'il soit défini. Il s'agit des relations du commerçant avec le consommateur.

M. Boutin: C'est vrai.

M. Charron (Paul-Emile): Le consommateur est défini, le commerçant ne l'est pas. Et vous nous demandez, par ailleurs, de nous identifier à un commerçant. On ne peut pas accepter cela. Alors, il s'agirait de trouver un autre moyen, c'est tout.

D'ailleurs, vous, ce n'est pas la question des principes que vous posez. C'est la question du résultat, de l'efficacité de l'application des principes.

M. Boutin: Oui.

M. Charron (Paul-Emile): Mais nous, on dit: Comme institution, la caisse populaire, comme intermédiaire juridique, corporation, le surplus, elle fait, disons, les mêmes opérations, de la même manière que le voisin, mais ce qui fait la différence de nature, c'est que le résultat est réparti aux membres. On ramène les opérations au plus simple. Donc, les abus ne sont pas possibles ou, s'il y a des abus, le mécanisme fait la correction en allant se plaindre au conseiller de surveillance ou à l'assemblée générale qui peut le corriger. Autrement, si cela ne fonctionne pas, cela veut dire que le mécanisme n'est pas bon.

Si vous croyez que, vraiment, la coopérative ne donne pas les résultats qu'elle devrait en regard de la protection du consommateur, mettez-la dans la loi, si vous le voulez, mais pas en demandant de dire: Elle est d'une autre nature et elle fait des opérations commerciales.

M. Boutin: Je comprends que c'est un dilemme légal bien plus qu'autre chose. En fait, la définition, je me dis...

M. Charron (Paul-Emile): Non. Si c'était juste le point de vue légal, c'est-à-dire le vêtement, cela ne toucherait pas au moine! On ne discuterait pas là-dessus. C'est la substance qui...

M. Boutin: Vous disiez, tout à l'heure: Cela revient aux membres. On sait une chose; c'est qu'une caisse qui prend de mauvaises décisions pour ses membres, c'est quand même une chose coûteuse. On a vu des caisses populaires qui, depuis le début, n'ont jamais remis quoi que ce soit à leurs membres et elles ont fait des choses qui ont été très coûteuses pour leurs membres. Ce n'est pas parce qu'elles ont fait des faillites, ce n'est pas possible... Possible dans le système actuel. Mais il y a quand même des façons d'administrer. Aujourd'hui, je prétends que beaucoup de coopératives devraient suivre des principes élémentaires d'administration autant que n'importe quel autre organisme.

M. Charron (Paul-Emile): C'est cela, oui.

M. Boutin: On a vu tellement de faillites dans les coopératives, d'un bord et de l'autre. Moi, je fais partie de trois coopératives. Je le sais. Je pense que c'est la Loi des institutions financières, au départ, qu'il faudrait peut-être regarder.

M. Charron: (Paul-Emile): Ce que vous signalez ne relève pas de cette loi. Cela relève de l'application des autres lois.

M. Boutin: Oui.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Taschereau.

M. Bonnier: Taschereau, M. le Président. C'est tout près de l'Abitibi!

Je pense que la question soulevée par le député de Saint-Jacques et reprise par quelques-uns des membres de cette commission mérite un examen un peu plus approfondi. Je pense bien que les représentants de la fédération ont très bien expliqué qu'il ne s'agissait pas d'un problème juridique mais d'un problème d'essence. Il faudrait pratiquement avoir recours à tout un cours de coopé-ratisme pour comprendre que la distinction fondamentale repose davantage sur le contrôle que les membres peuvent avoir, pas au niveau de la comparaison des services. Je pense que, là-dessus, il y aurait peut-être d'autres réflexions à faire.

Il y aurait aussi le fait qu'il ne faudrait peut-être pas associer — là-dessus, peut-être que la remarque de l'honorable député de Charlesbourg était juste — caisse populaire et d'autres types de coopératives, en particulier dans le domaine de la consommation où, là, on est assez large quant aux services. Là-dessus, je pense bien que le député de Saint-Jacques avait raison. Un certain nombre de coopératives donnent des services pas simplement à leurs membres. Cela, je trouve que c'est anticoopératif.

Pour ma part, en tout cas, j'ai une couple de questions à vous poser mais avant de les poser, je voudrais simplement dire ceci: Je crois que si c'est le fonctionnement des coopératives qui est fallacieux, qui n'est pas concordant avec les objectifs qui sont poursuivis et avec la notion d'une coopérative, c'est là-dessus qu'on devrait travailler.

Je pense que la remarque de M. Charron est juste, c'est l'observance, le fonctionnement et l'administration des lois coopératives qu'il faudrait surveiller de plus près. Mais, lorsqu'on parle d'autres types de lois telles que celle de la protection du consommateur, on devrait certainement penser différemment en ce qui regarde une coopérative et un autre type de commerce, ou un autre type d'entreprise, devrais-je dire.

J'ai deux question. Vous savez que cette loi ne s'applique pas aux hypothèques de premier rang. Je me demandais si vous aviez des commentaires à faire quant aux hypothèques de deuxième rang qui, elles, sont soumises à cette loi. Je sais qu'un certain nombre de caisses populaires font quand même des prêts avec garanties hypothécaires de deuxième rang. Est-ce que selon votre point de vue cela devrait également être soumis ou non?

C'est un point que vous n'avez pas examiné?

M. Charron (Paul-Emile): Non. Pour ma part, on n'a pas fait un examen...

M. Croteau (René): M. le Président, c'est exact que certaines caisses font des hypothèques de deuxième rang mais c'est un volume qui est relativement minime par rapport à l'activité principale. La tradition dans les caisses c'est qu'elles font des hypothèques de premier rang. Pour répondre de façon précise à la question posée, c'est qu'on n'a pas eu d'échange à cet effet. Cela signifie pour nous, avec les consultations qui ont été poursuivies dans toutes les régions, que cela ne semble pas poser de problème actuellement dans les caisses.

M. Bonnier: Vous n'avez pas d'objection à ce que ce soit soumis à la loi comme tel?

M. Croteau: Cela l'est déjà, la deuxième hypothèque.

M. Bonnier: Oui. Vous n'avez pas d'objection à ce que ce soit soumis, parce qu'on a eu des représentations...

M. Croteau: Peut-être exceptionnellement, mais j'en doute. S'il y en a, c'est exceptionnel.

M. Bonnier: II y a une autre question aussi, M. le Président — c'est ma dernière — relativement à un système de ristourne qui est ordinairement accordée par des institutions financières à certains commerçants, en particulier dans le domaine mobilier. Je voudrais savoir s'il arrive qu'il y ait des caisses populaires qui ont ce type de système avec des commerçants de leur localité. Deuxièmement,

ce système, parce qu'il est prohibé dans le projet de loi, serait prohibé dans l'avenir; est-ce que vous trouvez que c'est un système qu'on devrait encourager?

M. Croteau: Si on se place toujours dans la perspective de la protection du consommateur, c'est évident qu'il y a peut-être des choses à examiner dans cette pratique. Mais, pour autant qu'on est concerné — on a fait des recherches; M. Morin pourra faire des commentaires tantôt là-dessus — c'est que de façon globale il y a des caisses qui font de ces sortes de prêts, après entente avec un commerçant, pour du mobilier de maison ou quelquefois de l'automobile. Mais il n'y a pas de ristournes ou de commissions qui sont versées dans le cadre de ces contrats. Il y a des implications de coût. Pour exprimer une opinion valable, il faudrait quand même prendre le temps de chiffrer et voir quelles sont les conséquences comme coût additionnel ou moindre pour le consommateur, parce que c'est lui qui est impliqué.

Je sais que M. Morin a fait des consultations aussi sur ce point en particulier.

M. Morin (André): En fait, sur l'article 172, interdisant les ristournes à ceux qui consentent aux garagistes des prêts au nom d'autres institutions financières, je pense que les caisses populaires n'ont aucune objection à cela. Comme le signalait M. Croteau, nous n'avons pas cette politique et les prêts des caisses populaires ne sont pas poussés par des commerçants. Un réflexe là-dessus, c'est peut-être de réaliser que le crédit à la consommation est de plus en plus poussé par des commerçants ou par des garagistes ou des marchands de meubles qui peuvent ouvrir un prêt au nom d'une institution financière presque instantanément. On est bien conscient que le marché du crédit à la consommation n'est plus un marché d'acheteurs comme autrefois où ceux qui avaient besoin de crédit cherchaient une institution financière pour obtenir le crédit désiré; on est rendu avec un marché de vendeurs. Vous avez des gens qui poussent le crédit. Alors cet article 172, à sa face, nous plaît pour les caisses populaires.

Maintenant, quelle serait l'incidence pour le consommateur? Nous n'avons pas chiffré cet aspect. Qu'est-ce que cela voudrait dire comme économie, par exemple, pour le consommateur? Nous n'avons pas chiffré cet aspect.

M. Bonnier: Merci.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je vais être très bref. Je ne voudrais pas prolonger indûment ces débats. Je crois avoir entendu mon collègue de Taschereau — et je veux bien l'avoir compris — dans son préambule, dire: Le député de Charlesbourg était juste ou est injuste. Je ne crois pas avoir été...

M. Bonnier: Etait juste.

M. Harvey (Charlesbourg): Bon, je vous remercie.

M. Bonnier: Jamais je n'aurais dit "injuste".

M. Harvey (Charlesbourg): C'est une chose que je voulais clarifier dès le départ. Je voyais justement, à la page 11 — et c'est là le sens de ma question — et vous m'avez rendu l'exemple très facile dans votre mémoire, nous sommes tous sur les règles du jeu qui devraient être observées par l'ensemble du mouvement coopératif quel qu'il soit, à quelque niveau qu'il se pose. Que nous soyons au niveau des caisses populaires comme au niveau du mouvement oeuvrant dans l'alimentation — je nomme à titre d'exemple la Fédération des magasins Co-Op — ou dans d'autres domaines coopératifs — les coopératives agricoles, à titre d'exemple — si nous sommes coopératifs, nous le sommes ou nous ne le sommes pas.

Lorsque nous sommes coopératifs, nous acceptons quand même les règles du jeu à l'intérieur d'un système et c'est là qu'a originé, je pense bien, le sens profond, le sens social que nous devons reconnaître de créer un système de protection du consommateur à l'intérieur du mouvement coopératif. Pendant de longues années, vous avez été exclusifs dans ce domaine jusqu'au jour où le gouvernement décide lui aussi d'entrer dans ce monde puisque le mouvement coopératif ne pouvait quand même pas couvrir l'ensemble du territoire. A cet égard, je me souviens très bien, puisque j'étais membre du gouvernement en 1970, que le mouvement Desjardins, dans son ensemble, s'est prononcé à 100% d'accord sur la loi 45 du temps.

Maintenant, pour une autre raison, on nous dit, à la page 10: On voudrait être exclu, nous, des règles de publicité ou de promotion via l'article 55. A la page 11, on dit, tout de suite après, quasi du même souffle: A l'article 177, alors que dans les banques à charte on autorise les dépôts à recevoir sur les comptes en fiducie, on voudrait, dans ce cas-là, que l'article 177 soit changé pour inclure les caisses d'épargne et de crédit. Là, cela couvre également votre territoire. Je pense que cela ferait votre bonheur. Cela n'inclut pas le fait d'être mis de côté à l'intérieur de la loi, ce que vous réclamez dans l'article précédent.

M. Charron (Paul-Emile): Ce que nous avons demandé en 1970, quand vous étiez là...

M. Harvey (Charlesbourg): Oui.

M. Charron (Paul-Emile): Vous êtes là, d'ailleurs. Vous continuez à l'être.

M. Harvey (Charlesbourg): Tout progresse.

M. Charron (Paul-Emile): Ce qu'on a demandé en 1970 et ce que nous demandons aujourd'hui, c'est exactement la même chose. A ce moment-là,

on a dit: On est pour la Loi sur la protection du consommateur. Nous en sommes, des consommateurs. C'est sûr, au point de vue de l'épargne et du crédit et à tous les autres points de vue, personne n'aime être exploité, c'est certain. Là-dessus, on est parfaitement d'accord. D'ailleurs, on le dit dans le mémoire, on rejoint les mêmes objectifs. C'est la porte d'entrée par laquelle on passe que nous n'aimons pas.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui, d'accord. Mais le rôle du gouvernement est un rôle supplétif pour l'ensemble d'une opération.

M. Charron (Paul-Emile): Ne nous demandez pas de faire trois tours avant d'entrer par une porte. Quand on entre par une porte, on entre comme cela, mais on ne demande pas de faire deux tours.

M. Harvey (Charlesbourg): Je vous comprends, M. Charron, mais vous devez sûrement, vous aussi, comprendre qu'il fallait d'abord éclaircir si j'avais été injuste ou si j'étais juste à l'endroit de votre mémoire.

M. Charron (Paul-Emile): Non, vous n'avez pas été injuste.

M. Harvey (Charlesbourg): Je le comprends très bien.

M. Charron (Paul-Emile): Vous n'avez pas été injuste.

M. Harvey (Charlesbourg): Je respecte vos réserves.

M. Charron (Paul-Emile): On s'est justement compris.

M. Harvey (Charlesbourg): Très bien, M. Charron.

Le Président (M. Lafrance): Merci, M. Charron, ainsi que vos collègues pour la présentation de votre mémoire ainsi que d'avoir bien voulu répondre aux questions des membres de la commission.

Nous entendrons maintenant Mattel Canada Inc. M. Williams.

Le Président (M. Harvey, Charlesbourg):

Nous avons comme président à la table, je crois, M. Lindsay Williams. On vous invite d'abord à confirmer votre identité et aussi à nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Mattel Canada Inc.

M. Robb: Peut-être, M. le Président, puis-je nous présenter. Je suis Me James Robb. Aujourd'hui, je représente la cie Mattel. M. Lindsay Williams est le président de la compagnie Mattel Canada Inc. Il a résidé en Australie où il était pré- sident de la compagnie. Il y a vécu la plus grande partie de sa vie dans l'industrie du jouet. Il y a aussi M. Conrad Dorion qui est directeur régional de l'est du Canada, région qui comprend l'est de l'Ontario, les Maritimes et le Québec. Il est avec la compagnie depuis dix ans.

La présentation de la compagnie porte sur les articles 163 et 164 et sera faite par M. Dorion.

M. Dorion (Conrad): M. le Président, Mme le ministre, messieurs de la commission parlementaire. Nous vous remercions de l'occasion qui nous est donnée d'exprimer nos vues sur ce projet de loi, lequel aura des effets désastreux pour Mattel Canada, car notre seul revenu provient du commerce des jouets.

Nous avons présenté un mémoire à cette commission, lequel réfute les arguments principaux favorisant l'interdiction de la publicité destinée aux enfants. Je n'ai pas l'intention de vous lire ce mémoire, mais tout simplement de détailler certains points. Je crois qu'il existe dans l'esprit de beaucoup de gens une fausse impression au sujet des sommes d'argent dépensées pour annoncer nos jouets voulant que, par le fait même, le consommateur doive débourser une somme plus élevée que pour un jouet dont on n'a fait aucune réclame. En général les frais de publicité ne dépassent pas 5% du prix de détail. Il existe des preuves concluantes démontrant que les articles dont on ne fait aucune réclame se vendent à des prix supérieurs à ceux des articles similaires qui sont annoncés.

Il n'est pas de bonne éthique de destiner la publicité aux enfants, puisque ceux-ci ne disposent d'aucun revenu important. Mes propres enfants reçoivent une allocation hebdomadaire et je présume que la plupart des enfants de cette province sont dans la même situation. Supposons que tous les enfants du Canada âgés de cinq à douze ans reçoivent une allocation hebdomadaire de $0.50, leur pouvoir d'achat serait alors de $1 million par semaine.

Nous croyons que ce projet de loi est discriminatoire. Les jouets sont destinés strictement aux enfants, contrairement aux produits de consommation tels que bonbons, chocolats, lesquels sont consommés par une grande partie de la population adulte.

L'enfant, dans bien des cas, est un acheteur plus averti que nombre d'adultes, et nous devons respecter le droit qu'un enfant a de disposer de son argent de poche comme bon lui semble. La publicité comme telle n'est pas mauvaise et dans l'industrie du jouet elle est un moyen de distribution. Contrairement aux céréales que l'on mange tous les matins, le même jouet n'est vendu qu'une seule fois à la même personne. Il va sans dire que cette province étant géographiquement partie de l'Amérique du Nord, notre mode de vie et certaines de nos habitudes sont nord-américains.

Il est entendu que nous allons coopérer avec la commission, avec le gouvernement du Québec au sujet du projet de loi no 7. Toutefois, nous avons la certitude qu'un certain volume de publicité venant de l'extérieur du Québec, sur lequel

l'Assemblée nationale n'a pas juridiction, sera visionné par de nombreux enfants habitant notre province.

Nous ne voudrions surtout pas être tenus responsables d'une telle situation puisqu'elle échappe à notre contrôle. Les articles 163 et 164 ont été interprétés de plusieurs façons et nous aimerions que certains aspects de ces deux articles soient clarifiés.

Est-ce qu'une affiche sur le comptoir d'un magasin est considérée comme de la publicité? Est-ce qu'un catalogue, par exemple celui de Simpson Sears qui affiche des jouets sur une quarantaine de pages, est considéré comme de la publicité destinée aux enfants? Si tel est le cas, sera-t-il banni du Québec? Il existe certaines annonces commerciales qui ont été préparées de telle façon qu'elles s'adressent aux parents. Est-il possible que ces annonces soient déclarées illégales? Les jouets, par leur nature, sont conçus pour les enfants et il est impossible de les dissocier l'un de l'autre. De la façon dont le projet de loi est conçu, il nous sera très difficile, sinon impossible, de nous y conformer, puisque le jouet en lui-même et encore plus l'emballage est une forme de publicité.

Il est à noter que notre publicité est saisonnière et que l'horaire des moyens de diffusion est déjà très chargé. Si celui-ci doit être écourté, la concurrence au niveau du temps disponible sera très illégale, car les firmes qui se servent des ondes à longueur d'année seront certainement favorisées. Mon exposé est maintenant terminé. Je suis à la disposition des membres de la commission pour répondre à leurs questions.

Le Président (M. Harvey, Charlesbourg):

Mme le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je n'aimerais pas encore ce matin reprendre toute l'argumentation que j'ai fait valoir au cours des dernières séances, même depuis l'ouverture de cette commission parlementaire, concernant notre position quant aux articles 163 et 164. Je pense que cette position est connue. Notre intention n'est pas d'interdire toute publicité, comme on semble le dire dans le mémoire, mais cette position vise uniquement la publicité destinée aux enfants de moins de treize ans. Je soumets encore ce matin qu'il revient aux parents de décider ce qui est bon et ce qui est bien pour les enfants et que toute atteinte à cette liberté de choix des parents pour leurs enfants ne peut trouver vraiment de fondement, ni sur le plan moral, comme on l'indique dans le dossier, ni sur le plan économique.

Vous mentionnez aussi votre présence dans des projets sociaux, des projets communautaires. Nous osons croire que cette présence procède beaucoup plus de votre intérêt social que d'un intérêt purement commercial. Nous espérons que vous saurez maintenir cette présence dans différents projets. Quant à la publicité utilisée pour assurer la bonne marche de ces projets, elle n'est pas visée par l'article 163, si elle n'est pas, comme nous le pensons et comme nous voulons le croire, à but commercial, mais à but social, comme vous le mentionnez dans votre mémoire.

J'aurais quelques questions à poser ce matin. Est-ce que vous connaissez le nombre des compagnies concurrentes au Québec dans le marché du jouet? Est-ce que vous pouvez connaître ce nombre de compagnies concurrentes, par exemple?

M. Dorion: Je n'ai pas de chiffre exact, mais il doit y en avoir environ une trentaine, j'imagine.

Mme Bacon: Une trentaine de compagnies. Dans l'ensemble du Québec?

M. Dorion: Dans l'ensemble du Québec.

Mme Bacon: Est-ce que vous connaissez le chiffre d'affaires de l'ensemble du marché du jouet?

M. Dorion: Le chiffre d'affaires au détail, au Canada, est d'environ $200,000.

Mme Bacon: $200 millions?

M. Dorion: $200 millions, pardon. La portion du Québec est d'environ 25%.

Mme Bacon: Quel est le volume de publicité pour l'ensemble du Québec en ce qui concerne ce marché des jouets?

M. Dorion: Je n'ai pas de réponse à ce sujet. Le volume de Mattel est d'environ 25% des montants dépensés, soit entre $1,2 million et $1,5 million.

Mme Bacon: Pour votre compagnie? Est-ce qu'il y a eu certaines tendances dans le marché du jouet au cours des cinq dernières années? Est-ce qu'il y a une tendance à l'augmentation ou à la diminution des ventes, ou est-ce qu'il y a un équilibre qui peut être atteint?

M. Dorion: II y a une tendance à l'augmentation des ventes.

Mme Bacon: A l'augmentation des ventes? M. Dorion: Oui.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, j'ai accroché sur un point majeur du mémoire présenté par Mattel Canada Inc., ce matin.

En voulant répondre aux arguments de ceux qui s'opposent à la publicité destinée aux enfants — et j'en suis, je pense que nous en sommes tous, d'ailleurs, alentour de cette table — vous invoquez comme tout premier argument que vous tâchez de réfuter l'argument moral. Vous le définissez ainsi, vous dites: Premièrement, l'aspect moral. Il a été débattu qu'il n'est pas de la bonne

éthique de destiner la publicité aux enfants, puisque ceux-ci ne disposent d'aucun revenu important. Je ne sais pas où vous avez pris cette affirmation, ce n'est certainement pas aux travaux de la commission, depuis que nous siégeons sur ce projet de loi. Il a peut-être été apporté comme élément d'explication à une position, mais l'argument moral que les membres ont eu l'occasion d'exprimer à rencontre de la publicité destinée aux enfants, ce n'est pas parce qu'ils ne disposent d'aucun revenu important, c'est parce qu'ils sont tout simplement des enfants. En ce sens ils ne sont pas des consommateurs adultes, capables, comme vous, comme moi, comme tous ceux alentour de cette table, de savoir ce qui s'appelle se faire chanter la pomme pour un produit qu'on nous présente comme étant beaucoup plus beau qu'il n'est. Ils ne sont pas capables de déterminer la valeur réelle d'un objet et d'évaluer, en fonction du marché et de leurs capacités financières, si cela vaut ce qu'on nous demande. Ils ne savent pas s'ils sont en mesure, à partir du revenu qu'ils ont, de s'offrir ce produit. Tous ces mécanismes économiques appartiennent aux adultes ou à tout le moins appartiennent aux enfants de treize ans en montant. En bas de treize ans, on ne peut pas espérer d'un consommateur d'avoir toute cette rationalité d'approche d'un produit qui lui est offert et d'évaluer la valeur.

Vous savez comme moi qu'il y a des adultes de 50 ans pour qui il faudrait à l'occasion interdire la publicité également, parce qu'ils sont effectivement victimes. On dirait qu'ils n'ont pas les moyens d'évaluer que ce produit est exagéré pour eux, qu'ils n'ont pas les moyens de se le procurer, que, s'ils se le procurent, ils auront des difficultés financières pendant des mois pour avoir profité de quelques heures de jouissance autour d'un objet qu'ils avaient mal évalué.

Pour les adultes on ne peut rien, sauf établir des mécanismes qui vont empêcher des roublards d'utiliser la naïveté de ces gens. C'est ce à quoi on travaille dans ce projet de loi. Mais, pour les enfants, nous ne pouvons rien, sauf — comme j'ai eu l'occasion de l'exprimer, je ne veux pas reprendre cela — littéralement les retirer du circuit économique puisqu'ils ne sont pas aptes, à l'âge qu'ils ont, à devenir des consommateurs avertis, des consommateurs capables d'évaluer, etc. Ce n'est pas parce qu'ils n'ont aucun revenu. L'argument que vous donnez quant à l'argent de poche et le droit que vous réclamez pour les enfants de disposer de leur argent de poche comme bon leur semble, vous admettrez avec moi que ce n'est pas un argument de grand poids, ce matin. Ce n'est pas cela qui va nous ébranler. Je pense que les parents — vous-même avez donné votre propre exemple — donnent de l'argent à leurs enfants pour un tant soit peu les initier à l'activité économique, lentement, par petites sommes. C'est pour les habituer à s'apercevoir que, s'ils ont $5 pour la semaine, qu'ils en dépensent $3 le lundi, il va leur en rester $2 pour la fin de la semaine. S'ils ont un projet familial en fin de semaine, ils vont y arriver complètement dépourvus. C'est un apprentissage économique que font les enfants, selon l'âge. Rarement en bas de sept ou huit ans va-t-on remettre des sommes un tant soit peu importantes à des enfants, même dans le but de l'apprentissage économique.

Non, vraiment, la commission ne s'est pas heurtée à la faiblesse de revenus des enfants, mais je pense que la commission a surtout été sensible au fait qu'ils sont des gens inaptes à se prononcer comme consommateurs.

Comme nous sommes à travailler sur une loi de la protection du consommateur et qu'ils ne sont pas des consommateurs, nous avons décidé de les exclure du projet de loi, en ce sens que nous avons décidé de les exclure du circuit commercial où la publicité fait son oeuvre.

Quant à l'autre aspect, madame le ministre a bien fait de le signaler, d'autres groupes avant vous ont parlé de l'intérêt social des entreprises et, comme elle, j'ose croire qu'il s'agit effectivement d'un intérêt social; d'ailleurs, elle a bien fait de vous rappeler que les articles 163 et 164 qui font l'objet de votre mémoire n'écartent pas... Si vous établissez des programmes d'éducation physique dans tout le pays pour que les enfants se tiennent en bonne forme, pour qu'ils pratiquent du sport, qu'ils n'abandonnent pas trop l'activité, je n'ai aucune objection à dire que Mattel Canada contribue à cela, mais ce que nous voulons éviter, et je veux terminer avec cela, ce n'est pas de vendre vos produits; nous ne voulons pas mettre Mattel et les employés, que vous utilisez dans votre mémoire pour toucher l'âme des membres de cette commission, nous ne voulons pas mettre la compagnie dans la rue et ses employés en chômage. D'ailleurs, tant qu'il y aura des enfants, il y aura des jouets à faire pour les enfants.

Ce que nous voulons, c'est que vous vous adressiez au véritable consommateur. Tous les parents autour de cette table — je n'en suis pas un — j'en suis convaincu, sont déjà en train de songer à la période des fêtes qui s'approche et savent très bien que, pour faire plaisir à un enfant, c'est un jouet qu'il faut lui donner et qu'il y a probablement peu de bons produits aussi bien faits que les jouets venant de chez Mattel, à l'occasion, toute comparaison gardée avec d'autres produits. Adressez-vous donc aux parents, dites-leur que vous avez créé, pour leurs enfants, des jouets intelligents, que vous avez créé des jouets qui vont développer leurs facultés, les éduquer, développer leurs facultés "acuitives", leur sensibilité, même leurs sensations physiques si on s'adresse à des tout-petits.

N'ayez pas peur, les parents sont aujourd'hui de plus en plus éduqués et en mesure de voir si, effectivement, tel jouet remis au petit bambin de quatre ans ou de cinq ans va effectivement, plutôt que d'en faire un petit monstre qui va tenter d'assassiner le reste du voisinage à partir d'un revolver en plastic, va plutôt développer son intelligence; par exemple, un enfant de trois ans va développer sa perception des couleurs. Il en existe des jouets intelligents. N'ayez pas peur de les présenter aux parents, je pense que les parents sont de plus en

plus aptes à les saisir. Ils sont de plus en plus capables de savoir que, s'ils achètent tel produit, cela n'apporte véritablement rien à l'enfant, que, dans trois semaines, cela va être brisé, dans deux semaines, il va s'en désintéresser parce qu'il aura entendu parler ou il aura vu, dans les mains de son petit voisin, autre chose de meilleur. Ce sont les parents qui savent ce que sont des enfants et ce ne sont pas les enfants eux-mêmes qui sont capables de le déterminer.

Mais de la publicité de jouets destinée aux parents, ce n'est pas interdit et personne ne veut l'interdire, au contraire. J'ai acheté, pour mes petits neveux et nièces, des jouets à la période des fêtes. Simpson peut m'envoyer 40 pages de catalogue sur les jouets, je vais les regarder avec attention parce que je vais essayer de trouver le jouet le plus apte à la personnalité de mes neveux et nièces que je connais; mais point, à la ligne.

Adressez-vous à moi. N'utilisez pas ces enfants, c'est moi qui vais l'acheter de toute façon et c'est pour eux que je vais le faire et c'est en fonction de leur bien que je veux le faire.

Je pense qu'à l'âge qu'ils ont, je suis mieux placé qu'eux pour déterminer ce qui leur convient. J'ai entendu ailleurs, et cela va probablement revenir encore aussi, dire que nous voulons interdire la publicité à Mattel ou que nous voulons interdire la publicité des jouets, c'est faux. Nous voulons interdire la publicité destinée aux enfants et la publicité qui utilise les enfants, mais améliorer, au contraire, la publicité destinée aux parents. Je suis convaincu qu'attirer l'attention des parents et prouver la valeur éducative des jouets que vous avancez va doubler quelque chose? Voulez-vous vous prononcer sur les interventions qui ont eues lieu?

Vous pouvez le dire en anglais si vous le voulez. You can speak English.

M. Williams (Lindsay): Thank you Mr. Président. I have prepared the statement and unfortunately I am not in a position to understand whether my statement is in context with what has already gone on. I apologize for that. I wanted to say the links of our presentation to you this morning. Now I should be considered in direct proportion to the gravity of the problems that we foresee if sections 163 and 164 are enacted without amendment. We did not believe that the intent of this bill is to restrain us or restrict this company from doing business in this province. However if we were to take one interpretation of these two sections, I am concerned with the problem that blooms ahead of us. My play is simple: regulate, control, but, please, do not deprive us or my company of the right to communicate with our customers.

Merci.

Le Président (M. Lafrance): Thank you very much, Mr. Williams.

Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent se prononcer?

Alors merci beaucoup, M. Williams et M. Dorion ainsi qu'à votre collègue. Thank you very much.

Et, maintenant, avant l'heure du lunch, nous pourrions entendre Parker Brothers. Alors, M. Vernon.

Parker Brothers

M. Bridge (John): M. le Président, je suis le gérant des ventes de l'Est du Canada pour la compagnie Parker Brothers et je suis domicilié à Montréal, avec un bureau à Place Bonaventure. M. Vernon, mon confrère, qui est aussi mon patron, est le président de Parker Brothers, une division de General Mills Canada Ltée, une compagnie canadienne qui possède une autonomie complète. Il est aussi ex-président de l'Association des manufacturiers de jouets au Canada. C'était l'année dernière.

Nous sommes engagés dans la fabrication, l'importation et la distribution de jeux, jouets, produits d'art manuel au Canada et l'exportation de certains de ceux-ci dans plusieurs pays du monde.

Nos produits, dont vous reconnaîtrez le nom, sont le Monopoly, le Mille Bornes, les Grands Maîtres, Jour de Paye, les trucs de mécano et plusieurs autres. 32% de nos ventes sont réalisées dans la province de Québec.

A ce point, j'aimerais remercier la commission d'avoir pris le temps de nous écouter, ici, aujourd'hui. Nous avons fait un effort consciencieux pour soumettre un mémoire sur un sujet qui peut devenir un point émotionnel. Nous soulevons le point que les émotions, sur un si important sujet que l'annonce aux enfants de moins de treize ans, à la télévision,'ne doivent pas venir en ligne de compte. Il faut être objectif.

Je voudrais ici vous indiquer notre position. A notre avis, une famille ne peut être isolée ou divisée de façon à protéger un membre d'une famille d'un autre, soit physiquement, psychologiquement ou matériellement, pas plus qu'un tel membre ne peut être isolé de l'influence exercée par un autre, ou de toute autre influence extérieure à base commerciale ou autrement.

Nous portons notre appui à la tendance des années 1970, orientée vers la consommation. Nous croyons que ladite tendance est nettement le résultat de l'attitude consciente et instruite du public qui prévoit recevoir, des entreprises qui lui rendent un service, un juste traitement et un certain en-avoir-pour-son-argent.

Parker Brothers reconnaît respectueusement que les entreprises responsables ont toujours traité leurs clients avec justice. Par conséquent, il est axiomatique que la législation et les règlements introduits par nos gouvernements au cours des dernières années ont reçu l'appui et la coopération de la majorité des entreprises au Canada.

En plus, les nouvelles lois expriment par écrit ce qui, nous le croyons, est et a toujours été des normes solides exercées dans la pratique des affaires.

Si les articles 163 et 164 sont adoptés, Parker Brothers déclare respectueusement qu'il n'y aura aucune réduction d'implication des parents et de leur responsabilité de guider et d'assister leurs enfants. Un parent ne peut se permettre d'abdiquer

de ses responsabilités envers ses enfants. C'est absolument nécessaire d'avoir le choix d'accomplir cette tâche de la meilleure façon possible.

Je suis parent, j'accepte mes responsabilités. Je suis certain, comme mon cher monsieur l'a dit tout à l'heure, que tout le monde veut accepter ses responsabilités. Un parent responsable accepte ses responsabilités.

Les implications qui auraient un effet négatif sur l'économie en général, tel que la perte d'ouvrage au Québec, les répercussions dans l'industrie du jouet en particulier et dans toute autre industrie qui tente d'informer les enfants de ses produits vous ont déjà été énumérées.

Je voudrais souligner que l'industrie laitière — c'est important dans la province de Québec — annonce à la télévision. Est-ce que cela encourage les jeunes aux périodes où vous ne voulez pas avoir d'annonces à boire du lait? Est-ce ça que vous voulez décourager? C'est un fait. Notre opinion est que la clause 133 éliminerait cette forme d'annonce. La manière la plus simple de décrire le terme "annonce" est ceci: C'est le passage de renseignements. Suivant ceci, selon la section 163, sera-t-il permis d'avoir des démonstrations de jouets chez le commerçant, pour mieux informer le consommateur? Le consommateur, comme monsieur l'a dit, est averti, aujourd'hui; il l'est beaucoup plus qu'il ne l'était et il s'ensuit que sa famille et ses enfants le sont aussi. C'est une annonce, une démonstration dans un magasin. Prenez notre boîte de Monopoly; c'est une annonce, c'est une forme d'annonce. Comment pourrait-on dire ce qu'il y a dans la boîte si on ne peut pas avoir une couverture? C'est une manière d'informer. Est-ce que vous êtes contre cela?

La brochure décrivant d'autres produits qu'un manufacturier fabrique, qui est insérée dans un paquet — elle se trouve dans le produit et a un but d'informer — est-ce une autre forme d'annonce, cela? Est-ce cela que vous visez?

Il y a aussi le catalogue qui a été mentionné par le représentant de Mattel, celui de Sears, celui de Cardinal. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais Cardinal, c'est une entreprise québécoise. Je suis certain qu'ils ont au moins 200 employés, ils ont 40 magasins, c'est une industrie importante; Sears aussi. Selon notre interprétation de l'article 163, est-ce que ceci doit être éliminé? Je crois que vous avez répondu jusqu'à un certain point à cela. J'aimerais avoir une clarification sur ce point.

Tout ceci met en cause la question de renforcement, soit d'abord l'interdiction d'exercer la publicité commerciale.

Deuxièmement, l'interdiction d'exposer un enfant à cette même publicité. Nous sommes confus. Est-ce possible d'avoir une définition de toute forme d'annonce commerciale? Voulez-vous parler de l'annonce à la télévision ou de toute forme d'annonce? Comme vous le savez, la province de Québec a un code d'annonce aux enfants, c'est un des meilleurs au monde. Toute compagnie qui fait de la publicité pour enfants se conforme à ce code. Nous pensons que ce code est une excellente façon de s'assurer que nos enfants ne sont exposés qu'aux annonces vérifiées et approuvées.

Serait-il possible — encore, vous êtes contre, c'est ce qu'on a entendu durant les deux dernières journées — de modifier l'article 133 de façon que toutes les annonces publicitaires à la télévision, adressées aux enfants, correspondent aux normes du code? Nous croyons que c'est avantageux d'avoir un règlement qui contrôle l'annonce à la télévision au lieu d'une loi du Parlement qui interdise l'annonce à la télévision. Il y a deux raisons à cela. Une réglementation beaucoup plus souple. Le gouvernement peut vouloir changer un règlement quand la recherche scientifique détermine sans doute, d'une manière ou d'une autre, que l'annonce à la télévision est au détriment de l'enfant. Nous voudrions, l'industrie, le gouvernement, tous les intéressés, certainement changer l'aspect nuisible de la chose.

Je vous remercie de nous avoir écoutés. S'il y a des questions, nous serions fiers d'y répondre. M. Vernon s'excuse de ne pas être capable de parler le français couramment. Il fait un effort extraordinaire. A mon contact, il commence à comprendre, mais le parler... Il est incapable de discuter en français avec nous.

Le Président (M. Lafrance): M. Bridge, nous vous remercions.

If Mr Vernon wants to speak in English, he can go ahead.

Mr Vernon (A.J.): Thank you very much. I have no technical details to add to our presentation. I thank you very much for the opportunity of having been able to be present and hopefully discuss our thoughts with you.

I hope that, by the briefness of our presentation, you do not think that this is not a serious matter. We, as a company in business, in this country and in this province, feel that, if this legislation, this particular clause 163 is inacted with the wording the way it is presently constituted, we as a corporation and indeed the entire toy industry would be subjected to very difficult times, and it is very very serious to us. It is realy all I have to say.

Le Président (M. Lafrance): Thank you, Mr. Verdon. Mme le ministre.

Mme Bacon: Je n'ai pas l'intention encore une fois, M. le Président, de revenir sur l'entière argumentation concernant les articles 163 et 164. Le ton un peu agressif de M. Bridge ce matin est compréhensible. Nous avons nous-mêmes évalué, avant de rédiger les articles 163 et 164, l'impact que pourrait causer de tels articles sur l'ensemble du commerce et de la publicité, parce que cela touche aussi les agents de publicité, les télédiffuseurs. Je ne voudrais pas que M. Bridge ait l'impression que nous n'avons pas fait une évaluation ou d'étude approfondie sur le sujet avant la rédaction de la loi. Quand le législateur est obligé de légiférer dans certains domaines, c'est parce qu'il y a eu des abus, qu'il veut les corriger et en prévenir certains autres qui pourraient surgir dans les années qui viennent.

Vous le signalez dans votre mémoire, les parents sont les consommateurs qui prennent la

plupart des décisions et, tels qu'énoncés, les article 163 et 164 se veulent le reflet de cette réalité. Je l'ai mentionné tantôt, pour l'autre mémoire, ce sont les parents qui ont la responsabilité des enfants. On reproche souvent au gouvernement de prendre des responsabilités pour d'autres; dans un domaine comme celui-ci, nous croyons que les parents doivent réaliser leurs responsabilités face aux enfants en ce qui a trait au choix à faire de biens de consommation à obtenir pour les enfants.

Ceci exclut par le fait même toute possibilité de remplacer l'interdiction par un contrôle par exemple, comme c'est suggéré, ce contrôle fût-il le plus parfait possible.

Je pense que nous devons, à ce moment, prendre des décisions importantes et sérieuses. Il faut que l'interdiction totale d'une publicité à but commercial fasse partie de ce projet de loi pour protéger les consommateurs.

Quant au problème particulier que vous soulevez, tel que la diminution de revenus de publicité, nous avons déjà fait connaître notre opinion à ce sujet. Vous affirmez aussi que l'interdiction de la publicité aux moins de treize ans va amener une diminution dans le choix des produits offerts et vous mentionnez même moins d'intérêt à améliorer le produit. Je ne suis pas certaine de cette affirmation. Je ne suis pas d'accord sur cette affirmation. C'est peut-être en contradiction avec le sérieux et le souci de justice dont vous vous prévalez dans le mémoire. Je pense que vous démontrez que votre compagnie est une compagnie sérieuse, que vous avez un souci de justice. C'est un peu ce qui a présidé aux arguments qui suivent dans votre mémoire. J'aimerais peut-être que vous explicitiez cette affirmation, parce que, pour moi en tout cas, cela ne semble pas tellement sérieux.

M. Bridge: Quant à la qualité de la programmation, s'il n'y a pas de fonds pour la programmation de programmes montrés aux enfants, la qualité va diminuer. Une des manières, c'est que cela prend des fonds pour cela. L'industrie du jouet aide beaucoup la programmation à la télévision.

Mme Bacon: Ce n'est pas la qualité des produits. Cela ne diminuera pas. Ces produits ne seront pas diminués. La qualité sera la même.

M. Bridge: Si les ventes ne sont pas là, si on ne peut pas annoncer... Si on ne peut pas informer les gens que ce produit est disponible, c'est absolument prévisible que les ventes vont diminuer.

Mme Bacon: Je reviens là-dessus. Vous me comprenez très bien, M. Bridge. La qualité de vos produits ne diminuera en rien.

M. Bridge: Je vais vous accorder... Je n'irais pas travailler pour une compagnie qui ferait cela.

Mme Bacon: Vous ne pourrez pas assister à la compétition. J'essaie de faire...

M. Bridge: Vous avez complètement raison sur ce point.

Mme Bacon: J'essaie de faire appel à votre sérieux, parce que, comme je le disais tantôt, je voudrais qu'on prenne un ton très serein dans nos discussions et que tout en respectant chacun l'opinion de l'autre, on essaie de mieux comprendre peut-être le pourquoi d'une telle hésitation et ce qui a présidé à cette décision qui nous a amenés à rédiger les articles 163 et 164.

Quand vous parlez de qualité de produit, le moins d'intérêt à améliorer ces produits, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, parce qu'encore une fois, vous le mentionnez, vous ne travailleriez pas pour une compagnie qui n'offre pas des jouets de qualité et aussi vous ne pourriez pas faire face à la concurrence.

On a parlé tantôt d'une trentaine de compagnies au Québec. Il y a combien d'enfants qui achètent des jouets au Québec? Je n'ai pas de chiffres précis, mais il y a quand même un bon nombre d'enfants dont les parents achètent ces produits, que ce soient les vôtres ou les produits d'autres compagnies.

Je ne pense pas que bannir complètement cette publicité à but commercial empêche, encore une fois, les parents d'acheter. Ces parents sont ceux qui choisissent, sont ceux qui ont le revenu, sont ceux qui peuvent savoir la somme exacte dont ils peuvent disposer pour acheter des produits. Diriger votre publicité vers ces parents, je ne pense pas que cela enlève des ventes à votre compagnie. Je ne pense pas que cela change la qualité du produit. Je ne pense pas que cela vous enlève toute imagination pour améliorer la qualité de vos produits. Je pense seulement aux agences de publicité qui doivent déjà — parce qu'elles sont aussi censées faire preuve d'imagination — penser à des compagnies de publicité adressées aux parents pour vendre les objets que vous vendez: les jouets aux enfants. Mais, que les parents, eux, qui ont le pouvoir d'achat, soient capables de faire le choix, de discerner ce qu'ils sont capables de payer, compte tenu du revenu familial.

Vous mentionniez le lait, tantôt, je pense que, dans l'esprit du législateur, vous allez un peu par l'absurde. Ce n'est pas notre intention d'abandonner. Le rôle social que vous voulez jouer serait très bien accepté, parce que, comme vous dites, ce ne sont pas des rôles que vous voulez jouer et qui sont maintenant à but commercial. Si vous voulez jouer un rôle social, nous sommes d'accord, mais il restera que l'aspect commercial est tout à fait en dehors de ce rôle social qu'on veut jouer. Là-dessus, l'article 63 n'est pas appliqué dans de tels rôles. Elle veut faire boire du lait aux enfants. Loin de nous l'idée d'interdire complètement cette sorte de publicité. Je voudrais que cela soit bien compris ce matin que nous ne voulons pas, encore une fois, abolir complètement votre capacité de ventes dans la province de Québec, nous ne voulons pas vous empêcher de faire affaires au Québec, au contraire, nous ne voulons surtout pas empêcher que vous amélioriez la qualité de vos produits.

Ce que nous voulons, c'est que cette publicité soit dirigée aux parents qui ont le pouvoir d'achat.

M. Charron: M. le Président, je pense que je n'ai rien d'autre à ajouter. Je pense que madame le ministre vient de faire le point sur la question maintes fois débattue à cette table.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Vous mentionniez tout à l'heure, M. Bridge, que les parents doivent prendre leurs responsabilités et que vous étiez de ceux-là; je vous en félicite.

M. Bridge: Merci.

M. Harvey (Charlesbourg): Mais vous admettez du même souffle que la publicité qui est faite par votre maison, à l'instar d'autres fabricants de jouets, s'adresse directement aux enfants et que cette publicité a quand même une influence directe chez l'enfant et que, finalement, c'est aux parents de décider s'ils doivent agréer aux demandes des enfants ou s'y refuser. C'est ce que vous appelez "prendre ses responsabilités".

M. Bridge: Contrairement à ce que vous pensez, toutes les annonces de notre maison jusqu'à très récemment ont été dirigées vers les parents. Parmi les points que M. Irwin a énumérés hier, retenons que le temps disponible, de sept heures à dix heures, soit trois heures, est pris complètement par des annonceurs qui font de la publicité à longueur d'année. La nature de notre commerce en fait un commerce saisonnier; comme cela, nous n'avons presque plus d'occasion d'acheter le temps requis pour répondre aux normes que vous voulez. C'est très difficile, le temps n'est pas disponible.

M. Harvey (Charlesbourg): Ecoutez, je vais reprendre ma question. Vous parliez des "responsabilités des parents".

M. Bridge: Oui.

M. Harvey (Charlesbourg): Vous dites: Nous faisons notre annonce à la télévision pour susciter un besoin et également faire fonctionner notre entreprise.

M. Bridge: Oui, d'accord.

M. Harvey (Charlesbourg): Nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais vous admettez du même souffle que, finalement, vous influencez les enfants qui, eux, s'adressent aux parents pour se procurer le jouet et que c'est à ce moment que les parents doivent prendre leurs responsabilités.

M. Bridge: Oui.

M. Harvey (Charlesbourg): Ils décident de l'acheter ou de le refuser. Je ne mets pas en doute la qualité de vos produits; au contraire, j'admets que ce sont de loin les meilleurs produits sur le marché. Vous pourrez même vous en servir comme publicité personnelle, si vous voulez. Je suis moi-même peut-être un de ceux qui trouvent vos jouets familiaux en particulier les plus intéressants au monde, ce sont des jeux intelligents et des jeux fort agréables pour des loisirs de famille. Mais là n'est pas la question, c'est que vous admettez que votre publicité vise les enfants, influence les enfants et vous dites: C'est aux parents de prendre leurs responsabilités.

M. Bridge: Oui, parce qu'il faut qu'un enfant se développe normalement. Il faut qu'il apprenne à différencier ce qui est bon de ce qui n'est pas bon. Cette éducation ne peut pas commencer à l'âge de treize ans.

C'est un procédé graduel. Une journée, on a douze ans et 364 jours; l'autre journée, on a treize ans et là, on est exposé à tout.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui, d'accord. A titre d'exemple, j'ai quatre enfants et c'est bien sûr que tout ce qui est "publicisé" à la télévision, le mot n'est pas français, mais je le dis entre guillemets... Il est bien clair que durant la période intensive d'achat de cadeaux, c'est ce qu'ils ont vu à la télévision qu'ils désirent avoir et finalement ils veulent tout avoir. C'est bien clair que c'est aux parents de décider la liste des priorités et d'acheter le jouet le plus intelligent, celui qu'on pense également répondre le plus aux besoins de l'enfant, coller le plus à sa réalité ou à ses besoins.

M. Bridge: N'abdiquez pas votre rôle comme parent, mais donnez-lui la chance de faire le choix. Pour lui aussi, peut-être que c'est extrêmement bon ou peut-être que cela ne l'est pas. Le parent arrive et prend la décision. C'est très difficile de dire non aujourd'hui. Cela donne lieu à toutes sortes de discussions. Le jeune veut avoir une réponse. C'est tout le temps facile de dire oui. C'est le "cut out", comme on dit. Cela donne lieu à des discussions entre les parents et les enfants. Le jeune, il faut qu'il évolue graduellement et intelligemment.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est là que vous établissez — je rejoins votre mémoire — que, finalement, il y a une liste de priorités qui doivent être établies au même niveau que vous dites à un certain paragraphe que même les parents sont un peu des enfants. Et si le gouvernement ne laisse pas le libre choix à certains moments, on risque que le gouvernement se fasse demander une kyrielle de choses et que finalement ce soit encore au même gouvernement de dire: Faites-vous une idée, les priorités cela pourrait être cela. Vous ne pouvez pas tout avoir finalement. C'est pour cela qu'on a la loi qui est devant nous. C'est pour cela qu'on la modifie. Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrance): Merci beaucoup, M. Bridge. Thank you very much, Mr Vernon. La commission parlementaire suspend ses travaux jusqu'à quinze heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 15)

Reprise de la séance à 15 h 10

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

Avant de reprendre les auditions à la commission parlementaire, je voudrais faire part aux membres de la commission d'un changement: M. Bellemare remplace M. Picotte, pour la fin de la présente séance.

M. Charron: M. Bellemare (Johnson) ou M. Bellemare (Rosemont)?

Le Président (M. Lafrance): M. Bellemare (Rosemont).

M. Charron: Bravo!

M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que c'est mieux?

M. Charron: Beaucoup mieux.

Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons l'Association des marchands d'automobiles de Québec Inc., M. Grondin et ses collègues.

Association des marchands d'automobiles de Québec Inc.

M. Grondin (Henri): Merci. M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la commission, j'ai le plaisir de représenter aujourd'hui l'Association des marchands d'automobiles de Québec Inc. Je suis accompagné de tous les membres du comité du mémoire de l'association. A ma gauche, M. Robert Giguère, qui est président du comité, et M. Pierre Racine. A ma droite, M. Pierre Pouliot et M. Richard Cantin, qui est attaché à l'association.

L'Association des marchands d'automobiles de Québec regroupe plus de 135 marchands d'autos, soit la quasi-totalité de tous les marchands d'automobiles franchisés dans la région de Québec. Quand on dit la région de Québec, c'est la région du Québec métropolitain, plus tout le territoire qui s'étend sur la rive nord de Portneuf jusqu'au Saguenay et, sur la rive sud, de Lotbinière jusqu'à Rivière-du-Loup. Donc, c'est une des régions assez significatives du Québec.

Nos clients ont formé un comité pour étudier les implications du bill 7. Cependant, vu que deux autres associations de marchands d'automobiles avaient déjà manifesté l'intention de présenter des mémoires devant cette commission et de traiter certains points, l'association que je représente aujourd'hui se contentera de faire des représentations sur trois sujets particuliers, tel que cela apparaît au mémoire, soit la vente des automobiles usagées, articles 49 à 61, la réparation d'automobiles, articles 68 à 78, et l'interdiction au consommateur de renoncer à certaines prescriptions de la loi, articles 262 à 273.

En matière de vente de voitures usagées, le point fondamental de notre mémoire, Mme le mi- nistre, concerne le champ d'application de la loi elle-même, c'est-à-dire que nous voulons que toutes les ventes de voitures usagées soient assujetties à la loi et non pas seulement les ventes entre un commerçant et un consommateur.

L'association que je représente a fait une enquête sur le nombre de véhicules usagés qui sont vendus entre consommateurs. Nous avons pris des chiffres du Bureau des véhicules automobiles et nous avons compilé ces statistiques. Nous avons avec nous, ici, des exemplaires, pour tous les membres de la commission, du résultat de cette enquête. Cette enquête démontre qu'il y a au moins 45% des ventes de voitures usagées qui sont conclues entre consommateurs.

Quand on dit consommateurs, il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas seulement des individus mais également des organismes qui vendent des voitures, même des organismes paragouverne-mentaux qui vendent des voitures à des consommateurs. Je pense qu'avec la loi telle qu'elle est constituée, tel que le projet de loi est présentement, ces gens ou ces organismes sont considérés comme des consommateurs et ne seraient pas assujettis à la loi, par exemple des municipalités ou d'autres organismes.

Ainsi donc il y aurait la moitié des consommateurs qui ne seraient pas protégés par les dispositions d'une loi qui doit normalement protéger les consommateurs. Par ailleurs, Mme le ministre, nos clients sont bien placés pour savoir que l'honnêteté et la franchise ne sont pas toujours la règle dans les transactions entre consommateurs. Lorsque nos clients, par exemple, révèlent à un consommateur que sa voiture a besoin de réparations pour $500 ou $600, bien souvent le consommateur leur dit: Messieurs, au lieu de l'échanger au garage, je vais la vendre moi-même. Pourquoi il dit cela? Parce qu'il espère cacher à l'acheteur éventuel le défaut de la voiture et retirer un plus gros profit. Cela, évidemment, ne serait pas protégé par la loi telle qu'elle est là.

D'ailleurs, Mme le ministre, le Conseil de la protection du consommateur n'a-t-il pas commandé à au moins deux reprises que la loi soit amendée pour couvrir également les ventes entre consommateurs? Je vous réfère d'ailleurs au mémoire du conseil 1974/75, pages 41 et 42, lequel faisait d'ailleurs référence au mémoire de l'année précédente. Ce Conseil de la protection du consommateur est composé majoritairement de représentants des consommateurs, et non pas de commerçants. Pourtant ces gens recommandaient que la loi couvre, non seulement les ventes entre commerçant et consommateur, mais également toutes les ventes de voitures usagées.

Par ailleurs, nous avons certaines remarques techniques à formuler sur certains articles de ce chapitre concernant la vente de voitures usagées. Tout d'abord l'article 49, qui est la définition même de l'automobile usagée, à notre avis devrait être amendé pour exclure également le cas de l'automobile qui est utilisée pour sa simple démonstration. Dans le cas actuel, elle est considérée comme usagée si l'article tel que proposé est adopté. Nous suggérons d'ajouter aux exceptions le mot "démonstration".

A l'article 51, qui prévoit ce que doit contenir obligatoirement le contrat de vente de voitures usagées, nous sommes d'accord sur la majorité des dispositions qui sont là. Mais nous croyons qu'au paragraphe f), qui exige que l'on relève au consommateur le nom, l'adresse et l'occupation du dernier propriétaire, cette mention soit obligatoire seulement si le consommateur l'exige et si le commerçant le sait.

A l'alinéa A) du même article qui exige que l'on mentionne les réparations majeures effectuées à l'automobile, l'expression "réparation majeure" n'étant pas définie, nous croyons que cela peut être un problème de savoir ce qu'est une réparation majeure. Nous suggérons donc que ce soit simplement limité à un minimum de $150. Quant aux réparations de plus de $150 qui se rapporteraient à un même rouage d'entrainement, elles devraient être mentionnées au contrat; ce ne serait pas nécessaire de mentionner les autres.

Quant à l'article 53 qui parle, encore une fois, de garantie minimum obligatoire dans le cas de vente de voitures usagées de plus de $1000, nous suggérons que le montant de $1000 soit porté à $2000 et que ce montant soit même indexé chaque année; parce qu'on comprend que cette loi est une loi qui va quand même durer plus d'une année. Nous suggérons également que cette garantie soit limitée non seulement à deux mois, mais également à 2000 milles.

Enfin, nous soutenons qu'il n'est pas logique d'imposer cette garantie malgré le désir du consommateur, lorsque le consommateur destine l'automobile à un usage qui ne nécessite pas de garantie explicite, parce que vous savez que toute garantie doit nécessairement se monnayer. Si on offre une garantie, il va falloir remonter les prix. Il arrive que des consommateurs sont prêts à acheter des voitures usagées, sachant qu'elles ont certains défauts, mais ne veulent pas de garantie. Ils veulent y renoncer. Nous voudrions que ce soit possible.

Quant à l'article 56, il nous semble pour le moins superflu de préciser que la preuve de l'usage excessif incombe au commerçant. Il nous paraît superflu. Quant à l'article 59, nous croyons que tout avis du consommateur devrait être écrit, comme c'est le cas pour les avis que le commerçant doit donner. La même remarque s'appliquera d'ailleurs à l'article 78.

Quant à l'article 60, on y dit que la garantie du commerçant, garantie qui est prévue à l'article 53, suit la voiture, quel que soit le propriétaire subséquent. Est-ce qu'on doit comprendre que cela inclut le marchand ou le commerçant subséquent qui achèterait la voiture dans le délai de l'article 53? Parce qu'autrement dit, un autre commerçant pourrait bénéficier de la garantie qui est offerte à 53 lorsqu'il rachèterait la voiture. C'est pour le moins imprécis. Nous suggérons donc, tout simplement, d'enlever cet article 60.

Le second chapitre de notre mémoire concerne la réparation d'automobiles. Deux points dans cela, tout d'abord l'évaluation. Eh bien, nous décrivons dans le mémoire, les difficultés que le garagiste aura à essayer de surmonter. Quelles sont ces difficultés? D'abord, la loi indique qu'il faut évaluer le prix de l'évaluation elle-même.

Ensuite, il faut faire une évaluation préliminaire pour savoir si les réparations excéderont ou non $150 pour se conformer à l'article 72. Si cela excède $150, il faut faire une évaluation en détail. Nous croyons que le marchand devrait avoir l'occasion de préciser un délai limite pour la validité de son évaluation, parce que, si on évalue des dommages à telle date, il est possible que six mois après, le coût de la réparation ait augmenté. Il faudrait donc donner la possibilité de prévoir un délai limite pour faire exécuter les réparations.

En somme, nous soumettons, pour régler le problème qu'on devrait commencer l'article 73 par les mots "si le consommateur l'exige". Je pense que cela règlerait tout le problème de l'évaluation. Si le consommateur ne l'exige pas, on ne serait pas obligé de le faire.

Deuxième problème dans ce chapitre, c'est la remise des pièces. Ce n'est pas toujours possible, ce n'est sûrement pas rentable de le faire, tout d'abord, il y a le cas des voitures qui sont encore sur la garantie. A ce moment, le manufacturier exige qu'on lui retourne les pièces qu'on a pu trouver comme défectueuses dans la voiture. Donc, ce n'est pas possible de les retourner au consommateur. Dans le cas également où on remplace des pièces par d'autres pièces reconditionnées. Il faut retourner également les pièces que l'on a enlevées. Si on ne les enlève pas, c'est le consommateur qui va payer le double, le triple du prix pour rien, parce que ce qu'il va faire avec la pièce usagée, je me le demande.

En dernier lieu, nous ne sommes pas d'accord sur les articles 262 et 263 qui interdisent au consommateur de renoncer à certaines dispositions de la loi, qui parfois, ne lui sont utiles. Il ne faut pas oublier toujours que la garantie que l'on donne va faire augmenter les coûts, coûts que nécessairement le consommateur devra absorber. En somme, la dernière phrase de notre mémoire, c'est ceci: La loi reconnaît des droits au consommateur, ce qui est bien. Donnons-lui donc la liberté d'exercer ceux de ses droits qu'il considère avantageux pour lui.

Alors, M. le Président, Mme le ministre, nous sommes à la disposition de la commission pour répondre à toutes les questions qu'il vous plaira de poser aux gens qui m'accompagnent relativement à cela.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Mme Bacon: Vous suggérez à la page 2 de votre mémoire, à l'article 49, d'exclure de la définition de l'automobile "le véhicule désigné habituellement comme démonstrateur", celui que vous désignez couramment comme démonstrateur dans vos établissements. En pratique, est-ce qu'il n'arrive pas que certains véhicules ayant servi soit à la location, tout simplement des véhicules de courtoisie, par exemple, soient vendus comme démonstrateurs dans vos établissements?

M. Grondin: Je vais laisser M. Robert Giguère répondre à la question, c'est un marchand d'automobiles de Québec.

M. Giguère: J'ai compris le plus gros...

Mme Bacon: Vous vendez des voitures qui sont des voitures de courtoisie, par exemple, si je me trompe, vous me corrigerez, et aussi certains véhicules qui ont servi à la location. Dans certains garages, on peut louer des voitures. Est-ce que vous les désignez comme démonstrateurs, ces voitures ou s'il y a d'autres termes pour les désigner?

M. Giguère: Mme le ministre, depuis quelques années, nous sommes forcés par le ministère des Transports de louer des voitures portant des plaques immatriculées Z. Ces voitures sont assurément considérées comme usagées. Evidemment, il peut y avoir quelques marchands qui peuvent vendre ces voitures comme des démonstrateurs, mais ces voitures, au ministère des Transports, sont enregistrées comme des voitures ayant déjà servi une fois.

Donc, la voiture, sur notre terrain, est une voiture usagée et porte bien la mention de voiture usagée.

Mme Bacon: Les voitures que vous appelez démonstrateurs, est-ce qu'elles portent un "Z"?

M. Giguère: Dans l'article, on ne nie pas que nos vendeurs ont comme j'ai moi-même une voiture qu'on appelle démonstrateur, que je peux vendre à 8000 milles ou 9000 milles. Ce n'est pas là le but de l'article...

Mme Bacon: Vous appelleriez démonstrateur une autre voiture usagée?

M. Giguère: C'est la voiture que nous avons en inventaire et que le client veut essayer d'une façon ou d'une autre, il veut "tester" la tenue de route de cette voiture; alors la voiture, à la fin de l'année, peut avoir fait 30, 40 ou 50 milles. C'est surtout à cause de cette voiture qu'on voudrait faire ajouter la mention "démonstrateur". On ne parle pas de voiture de 10 000 milles. D'un autre côté, toutes les voitures dont nous nous servons, le manufacturier accepte d'en prolonger la garantie. Donc, il n'y a pas de problème pour le consommateur.

Mme Bacon: Même une voiture de courtoisie par exemple.

M. Giguère: Non.

Mme Bacon: Non plus.

M. Giguère: Une voiture qui n'a jamais été enregistrée, c'est-à-dire la voiture portant une plaque d'immatriculation "X", est connue du manufacturier, parce que nous sommes tenus de lui envoyer un affidavit prouvant que la voiture est un dé- monstrateur et c'est seulement dans ce cas-là que le manufacturier prolonge la garantie.

M. Charron: De quel ordre est cette prolongation par rapport à une voiture...

M. Giguère: 6000 milles additionnels, mais il ne faut jamais que ce qu'on appelle un démonstrateur dépasse 12 000 milles. C'est-à-dire que la garantie ne pourrait pas... si vous avez un démonstrateur de 22 000 milles, le manufacturier refuserait de prolonger la garantie.

Il faut que le millage soit au-dessous de 12,000 milles. Alors, il n'y a pas de problème pour le client d'acheter un démonstrateur, ce qu'on appelle le démonstrateur, ce que j'appelle ma voiture, parce que la garantie est donnée par le manufacturier et non pas donnée aux voitures que vous mentionnez, Mme Bacon, les voitures servant à la location.

Mme Bacon: D'accord. Vous déplorez dans votre mémoire le fait que les ventes entre consommateurs ne soient pas couvertes par la loi; les ventes entre consommateurs, je pense, demeureront et demeurent encore régies par le Code civil. On ne peut pas nier cela. Et étant deux profanes en la matière qui font une transaction, l'égalité subsiste assez généralement dans ces cas de vente entre consommateurs. Je ne vois pas pourquoi on établirait un équilibre puisqu'il y a égalité entre les deux. Toute la philosophie de la loi vise les relations entre commerçants et consommateurs et non entre consommateurs eux-mêmes. Quand on voit l'ensemble des articles de la loi en matière de sécurité automobile, on vient de mentionner le ministère des Transports, il est évident que c'est encore le ministère des Transports qui a juridiction en matière de sécurité.

M. Grondin: Mais y a-t-il vraiment égalité, équilibre? Je pense que M. Racine, qui est directeur du garage Denis Pépin, à Québec, peut vous en parler.

M. Racine: Madame le ministre, à ce sujet il faut apporter certaines précisions quant à ce que vous pensez être l'égalité qui existe entre deux consommateurs. Je vous donne l'exemple suivant: Un consommateur se présente chez un garagiste pour échanger sa voiture contre une voiture neuve. Le garagiste, à ce moment, doit procéder à l'évaluation de la voiture afin d'en déterminer l'état et de procéder aux réparations qui s'imposent. Alors, on soumet au consommateur le résultat de l'évaluation en disant: Vous avez besoin de changer vos freins ou peut-être de pneus, le moteur cogne un peu, etc, etc. Voyant le montant des réparations qu'il a à effectuer, le consommateur se verra, dans le contexte actuel, non seulement tenté, mais en fait vous le projetez dans la situation où il a tout avantage à vendre sa voiture lui-même pour abuser de l'inconséquence de l'autre consommateur.

Alors, l'équilibre que vous croyez exister entre deux consommateurs est souvent un déséquilibre,

le vendeur du véhicule usagé ayant au préalable consulté un expert en la matière. D'autre part, il arrive assez souvent aussi qu'un consommateur désire échanger son véhicule pour un véhicule neuf au moment où surviennent des problèmes mécaniques qui peuvent s'avérer coûteux.

C'est seul son garagiste du coin de la rue qui peut le lui souligner.

Il va lui dire: Tes valves claquent ou tu as un petit problème au "crank". Je m'excuse du langage technique. Ce sont des réparations qui peuvent être dispendieuses. Le consommateur peut avoir, à ce moment, l'option de dire: Plutôt que de mettre un montant exorbitant sur la voiture, j'aime autant changer mon véhicule. Il est en toute connaissance de fait que le véhicule est en mauvaise condition mécanique et il profite de l'occasion, effectivement, pour le refiler à un autre consommateur qui, lui, n'a pas les recours que, normalement, la loi devrait lui permettre.

Mme Bacon: Par le fait qu'il y ait 45%, comme vous le mentionniez tantôt comme chiffre, du commerce qui se fait entre consommateurs, est-ce que cela a diminué les ventes de voitures usagées dans les garages ou si votre expérience est la même? Les ventes ont-elles augmenté?

M. Giguère: Mme le ministre, je peux vous répondre par des chiffres que les marchands d'automobiles gardent de mois en mois, ce qu'on appelle un "reissue" de vente, un rapport entre les ventes de voitures neuves et les ventes de voitures usagées, lequel rapport était environ de 1,3, c'est-à-dire que nous vendions 1,3 voiture usagée par voiture neuve voilà peut-être six ou sept ans, lequel rapport est rendu aujourd'hui à 0,9. Aujourd'hui, le marchand d'automobiles vend plus de voitures neuves que de voitures usagées. Le marché de l'usagé s'est transporté dans un marché parallèle. Le client a plus de facilité à vendre sa voiture et il peut la vendre beaucoup plus cher s'il s'adresse aux petites annonces ou s'il la vend lui-même.

M. Racine: II faut considérer, Mme le ministre, le fait suivant. Il y a énormément de ventes entre consommateurs qui se font par les marchands d'automobiles, dans le sens de ce qu'on appelle une vente d'accommodation. C'est le client qui trouve un autre particulier à qui il désire vendre son véhicule et la transaction se fait par le garagiste.

A ce moment, il s'agit de voir l'implication que cela pourrait avoir pour le garagiste d'être tenu à garantir un véhicule qui, en fait, n'a jamais été en sa possession physique.

Mme Bacon: Vous ne pensez pas que le fait que le garagiste, le commerçant doit donner des garanties à un acheteur d'une automobile usagée n'incitera pas les gens à aller acheter plutôt dans un garage que chez un particulier? Est-ce parce que vous voulez reprendre cette vente de voiture usagée que vous avez ces arguments aujourd'hui?

M. Racine: Pas nécessairement. L'argumentation que vous avez à la page B-3893 nous a été servie lors de la présence de l'association provinciale.

Ce n'est pas nécessairement pour protéger le marché. C'est pour rétablir l'équilibre. Je pense qu'il y a aussi le fait suivant: si on prête au consommateur toute l'intelligence que vous voulez bien lui prêter en disant — là, je vous cite — On veut établir un certain climat de confiance entre les commerçants et le consommateur et non seulement au niveau des individus; au contraire, si la loi exige certaines garanties, les individus, par le fait même, ne feront pas commerce entre eux, on n'a plus besoin de Loi sur la protection du consommateur.

J'ai l'impression que le consommateur va continuer à faire affaires avec un autre consommateur et à prendre une petite chance, de temps en temps, pour essayer d'épargner $100 ou $200, de façon que le véhicule lui coûte un peu moins cher.

De ce fait, il va y avoir encore un gonflement de ce marché entre consommateurs, qui n'est pas du tout protégé. On a 45% ici; on n'a pas l'impression que, si les consommateurs entre eux étaient couverts, cela modifierait énormément les proportions. Mais on a l'impression que cela protégerait drôlement mieux le consommateur acheteur du consommateur vendeur qui, à ce moment-là, pose quasiment un geste de commerçant.

Ce qu'on vous souligne, c'est que, la plupart du temps, le consommateur vendeur a déjà acquis les connaissances nécessaires de par l'expert que, normalement, il a consulté avant l'échange de son véhicule.

Mme Bacon: Ma dernière question, vous n'y avez pas répondu. Votre intention est-elle de reprendre le marché des voitures usagées? Est-ce plus profitable que ce soit pris en main par les commerçants?

M. Racine: Je vous ai dit, Mme le ministre, que ce n'était pas le but de notre intervention. C'était pour tout simplement rétablir l'équilibre des forces que vous croyez exister et qui n'existe pas en fait. Mais il n'est pas évident que cela va rapatrier le marché de la voiture usagée chez les marchands. Il n'est pas du tout évident que cela va avoir cela comme effet.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je pense que la question...

Mme Bacon: II n'a pas terminé.

Le Président (M. Lafrance): Si vous permettez...

M. Racine: Je n'avais pas fini, monsieur. M. Bellemare (Rosemont): D'accord, allez-y.

M. Racine: Pour reprendre l'argumentation que vous nous serviez, s'il existe ce même climat

de confiance entre consommateurs que celui qui existe entre marchands et consommateurs, les transactions entre consommateurs vont se faire plus nombreuses. Alors, ce n'est pas nécessairement en vue de rapatrier ce marché...

Mme Bacon: Ce marché.

M. Racine: ...mais pour établir l'équilibre des forces.

Mme Bacon: A l'article 51, paragraphe f), vous suggérez que le nom, l'adresse, l'occupation du dernier propriétaire ne soient pas donnés, seulement si le consommateur l'exige. Ne trouvez-vous pas que c'est nécessaire au moment de l'achat et même utile de connaître qui était le consommateur précédent et que cela peut guider dans certaines transactions? Par exemple, on verra si c'est une voiture-taxi qui a été drôlement utilisée par rapport à un autre genre de voiture.

M. Grondin: Si le consommateur l'exige, pas de problème. Si le consommateur ne l'exige pas...

Mme Bacon: Vous ne croyez pas utile de le donner de toute façon?

M. Grondin: II faut donner le nom, pas seulement à quoi il a servi. C'est bien cela que dit la loi.

Mme Bacon: Oui. Mais l'utilité, est-ce que vous trouvez cela nécessaire?

M. Giguère: Dans le moment, Mme le ministre, lorsque le client le demande, on donne le nom de l'ancien propriétaire, avec le numéro de téléphone.

Mme Bacon: Vous ne mentionnez pas quelle a été l'utilisation du véhicule, si c'était une voiture-taxi ou une autre.

M. Racine: C'est évident, on peut le souligner, Mme le ministre, mais c'est parce que vous stipulez, dans la loi, l'occupation du dernier propriétaire et, ensuite, l'usage auquel le véhicule a servi. C'est bien difficile de faire une enquête complète sur la vie de l'ancien propriétaire, quel genre d'occupation ce type avait, ce qu'il fait dans la vie, quel genre d'utilisation il faisait du véhicule. On consentirait facilement à donner le nom et l'adresse. A ce moment-là, le consommateur pourra facilement s'informer de ce qui apparaît ici. Mais on ne peut pas demander au marchand d'exiger de l'ancien propriétaire de lui divulguer ce qu'il fait dans la vie et de divulguer l'utilisation du véhicule.

M. Giguère: Je pense, Mme le ministre, que ce que vous avez en tête, c'est certaines voitures comme les taxis, les compagnies de voitures de location, les voitures de police. Lorsque le client achète une voiture usagée, il a en sa possession l'ancien enregistrement de la voiture. S'il voit que l'enregistrement est un T ou un Z, il n'a pas besoin de savoir quelle était l'usage de la voiture, il le voit par l'enregistrement. On lui donne l'enregistrement; sur l'enregistrement il y a le nom, l'adresse. Là où on trouve que ce serait difficile, c'est si le client a triché. Il a pu faire du taxi avec sa voiture puis, à la dernière minute, il a changé l'enregistrement de la voiture, il a triché et il nous arrive avec un enregistrement ou une plaque d'immatriculation qui ne représente pas ce que la voiture faisait avant.

Mme Bacon: Vous mentionnez à l'article 59, l'avis prévu qui, d'après nous, n'est pas discriminatoire, l'avis verbal. Est-ce que vous ne trouvez pas que l'avis écrit que vous suggérez serait beaucoup plus lourd d'application qu'un simple avis verbal? La preuve de l'avis verbal, d'après nous, ne pose pas de problème insoluble, mais vous, vous exigez un avis écrit de la part du consommateur. Vous ne trouvez pas cela trop lourd de l'exiger?

M. Grondin: Pardon?

Mme Bacon: Vous ne trouvez pas trop lourd cette pratique par rapport à l'avis verbal?

M. Grondin: On ne demande pas que ce soit par poste recommandée ou des choses semblables. On dit simplement qu'il doit y avoir un écrit pour bien démontrer qu'il y a eu un avis, parce que le problème, avec les avis verbaux, c'est la question de la preuve qu'il faut faire ensuite. Le client dit: Je vous ai averti, j'ai téléphoné un jour au garage, je vous l'ai dit. A qui avez-vous parlé? Je ne me rappelle pas, j'ai parlé à un employé. Qui, quand, comment? On n'en sait rien, alors que, quand il y a un avis écrit, au moins il y a quelque chose qui reste; il y a une pièce, les écrits restent.

Mme Bacon: Vous ne pensez pas que le juge puisse faire apprécier la preuve, à ce moment?

M. Grondin: Vous savez, les consommateurs, Madame, il y en a qui sont très honnêtes, mais il y en a peut-être quelques-uns qui le sont moins. Ils pourront toujours prétendre qu'ils ont donné un avis verbal. Qui va être en mesure de les démentir? Mes clients ont quand même des établissements où il y a souvent des dizaines et des centaines d'employés. Est-ce qu'on a vraiment donné un avis verbal? Nous, on pense qu'il y a des consommateurs qui pourraient toujours le prétendre, puis on ne sera pas en mesure de contrôler. A l'article 59, c'est cela le problème. On demande un avis écrit. D'ailleurs, partout dans la loi on demande un avis écrit. Le marchand d'autos, quand il avise le consommateur, la loi prévoit que cela doit être par écrit. Il ne suffit pas d'un coup de téléphone. On aimerait la réciproque. On a peur que certains consommateurs abusent des commerçants.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: Merci, M. le Président. Je remercie également le groupe de la présentation du

mémoire. Comme il l'a signalé lui-même, il est en quelque sorte solidaire de deux groupes qui ont traité du même sujet. C'est d'ailleurs sur des témoignages précédents que nous avons entendus avec beaucoup d'intérêt que j'aimerais avoir votre opinion. Vous en parlez vous-même. C'est à propos de l'article 53 sur la garantie obligatoire à offrir pour un marchand d'autos usagées. On s'est fait dire de façon très colorée, mais certainement très remarquée de la part de la commission, il y a une semaine ou deux, lors d'une séance, que si cet article devait être adopté il aurait un effet d'entraînement sur les prix des voitures usagées, en ce sens que quelqu'un nous a dit aussi clairement que cela: Si vous m'obligez à garantir une minoune de $1000, parce qu'aujourd'hui, pour $1000, on a quelque chose pas loin de la minoune — si vous me dites que je suis obligé de la garantir alors je n'ai plus de minoune à $1000, c'est $1500 automatiquement ou $1600.

Si vous me faites prendre le risque d'une garantie sur une voiture de $1000, moi je vais être obligé d'augmenter mes prix en conséquence.

Si j'ai bien remarqué, lorsque vous nous suggérez de porter à $2000 le seuil à partir duquel une garantie s'exerce sur une auto usagée, c'est que vous faites en quelque sorte à peu près la même analyse et vous ne voulez pas courir le risque de garantir une voiture qui se vend $1000 actuellement. J'aimerais que vous spécifiez ce point de vue, parce qu'il n'est sans doute pas dans l'intention du ministre, ni de personne de la commission, d'ainsi occasionner une hausse de coût pour ceux qui n'ont malheureusement par les moyens de s'acheter d'autre chose qu'une voiture usagée.

Vouloir leur donner une garantie aussi insuffisante que deux mois ou 2000 milles et leur faire payer cette garantie jusqu'à $500 ou $600 de plus qu'ils paieraient actuellement sans cette garantie sur cette voiture, je ne pense pas que, si tel devait être le cas, aussi clair que cela, on aurait rendu un grand service. Vous savez, vous nous suggérez d'inclure 2000 milles avec la valeur aussi; 2000 milles c'est vite fait. Moi je fais cela par mois avec ma voiture, c'est-à-dire que je me trimbale pas mal sur la 20 entre Montréal et Québec. Mais aujourd'hui quelqu'un qui s'achète une voiture a toujours l'espoir de faire un peu plus que deux mois, surtout lorsqu'il va mettre jusqu'à $1500 là-dessus.

Or, si on lui donne une garantie aussi courte et que pour ce faire on l'oblige à payer peut-être 50% de plus pour se rendre propriétaire d'une voiture usagée, tout compte fait, en ballant, on n'a peut être pas rendu un très grand service au consommateur. Puisqu'on est à la recherche, puis que vraiment je cherche à me faire une opinion là-dessus, j'aimerais que vous nous expliquiez ce point qui a déjà été défendu par un autre groupe.

M. Giguère: Alors je vous donne mon point de vue. Premièrement, je ne dirais pas dans tous les cas mais, habituellement, plus la voiture est dispendieuse, moins la garantie coûte cher. C'est très évident, parce que plus la voiture est dispendieuse, évidemment, plus vous approchez du modèle 1975/76; la voiture a moins de dépréciation.

Si vous tombez dans des voitures bon marché, des voitures de $500 à $600, qu'on appelle les minounes, évidemment la garantie coûterait peut-être — je n'ai aucune idée, c'est une police d'assurance — cela coûterait peut-être $600; je n'ai aucune idée là-dessus. On n'a jamais fait des calculs d'ailleurs. Vous posez la question: Qu'est-ce que coûterait la garantie? Qu'est-ce que cela coûterait...

M. Charron: Supposons, vous, monsieur, que vous avez dans votre garage une voiture, à l'heure où on se parle, qui est de $1000. Quelqu'un arrive chez vous ce soir et il vous offre $1000; il peut partir avec. Si demain matin vous savez que, contrairement à ce soir, vous avez en plus une garantie de deux mois à mettre sur cette voiture que vous avez évalué vendre $1000 aujourd'hui, modifieriez-vous votre prix demain et de quel ordre?

M. Giguère: De quel ordre, je ne peux pas vous dire à peu près. Mais, si la loi s'appliquait demain matin, je pourrais vous le dire dans six ou sept mois, parce que là j'aurais l'expérience. Je dirais: Les voitures que j'ai vendues au-dessus de $1000 ayant la garantie déterminée par la loi m'ont coûté en moyenne $350 ou $250, mais je lancerais un chiffre peut-être de $150 à $200.

Il ne faut pas oublier un point aussi. Il n'y a pas tellement longtemps, les manufacturiers manufacturant les voitures flambant neuves, n'ayant jamais servi, avaient des garanties de quatre mois ou 4000 milles. Maintenant, on parle de voitures qui ont 25 000 milles, 30 000 milles ou 40 000 milles et on veut leur donner des garanties dépassant, ce que vous avez mentionné, deux mois. Là, on tombe, je ne dirais peut-être pas dans l'absurde, mais dans l'exagération, parce que ce qu'il va arriver, c'est que le marchand d'automobiles ou le vendeur va se créer un fonds de réserve, une assurance. Alors, le client qui fera attention à sa voiture, qui conduira prudemment, aura payé sa police d'assurance, aura payé sa voiture peut-être $250 plus cher pour rien; tandis qu'à côté, le client qui fera un usage excessif de sa voiture, se servira de la garantie, mais aidera à faire augmenter mes futures voitures, parce que tous les clients qui feront un usage excessif, dans mes livres, je vais dire: La moyenne est rendue à $342, donc, les prochaines voitures, je vais les augmenter de $342.

M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que le député de Saint-Jacques me permettrait de vous poser...

M. Charron: ...seulement une question...

M. Bellemare (Rosemont): Seulement une question, si le député de Saint-Jacques me le permet. Je dois vous dire, monsieur, au départ que vous faussez la vérité. Actuellement, pour les automobiles neuves, c'est 12 000 milles ou un an. Est-ce exact?

M. Giguère: Oui. Ce que j'ai dit...

M. Bellemare (Rosemont): Je crois que c'est 25 000 milles.

M. Giguère: Non, j'ai dit qu'il n'y a pas très longtemps, la garantie était de 4000 et quatre mois.

M. Bellemare (Rosemont): Actuellement, qu'est-ce que c'est?

M. Giguère: Actuellement, c'est 12 000 milles.

M. Bellemare (Rosemont): Ou un an...

M. Giguère: Ou un an. C'est cela.

M. Bellemare (Rosemont): Le premier qui arrive.

M. Giguère: C'est 12 000 milles ou un an, le premier qui arrive.

M. Bellemare (Rosemont): D'accord. Je remercie le député de Saint-Jacques de m'avoir permis de poser cette question.

M. Giguère: Non, je ne me suis pas trompé. Il n'y a pas très longtemps, la garantie était de 4000 milles.

M. Grondin: La même voiture...

M. Charron: Seulement, monsieur, avant...

M. Giguère: C'est cela...

M. Grondin: II ne faut pas qu'on laisse l'impression que M. Giguère fausse les faits. Il a dit que la voiture qui, dans le temps, était neuve, il y a dix ans, par exemple, même neuve, on lui garantissait seulement 4000 milles. Cette voiture a dix ans d'usure, c'est une "minoune" maintenant. Elle est dans la cour. Aujourd'hui, on demanderait que le marchand lui donne plus de garantie que quand elle était neuve. C'est cela que M. Giguère a voulu dire.

M. Bellemare (Rosemont): Non, si vous me le permettez, M. le député de Saint-Jacques, M. le Président, je n'ai pas parlé de "minoune", parce que si vous parlez de "minoune", vous allez vous enliser. J'ai parlé de machines neuves. Je dis que c'est 12 000 milles garantis ou un an. Est-ce exact? C'est tout ce que je veux savoir. Ce n'est pas plus.

M. Giguère: C'est exact.

M. Bellemare (Rosemont): C'est exact?

M. Giguère: C'est exact.

M. Bellemare (Rosemont): Merci.

M. Giguère: C'est parce que tantôt, on ne parlait pas de voiture neuve, on parlait de voiture usagée.

M. Bellemare (Rosemont): Vous avez...

M. Charron: On vient de discuter momentanément des effets qu'aurait l'entrée en vigueur de la loi sur les prix, les valeurs des voitures, mais à l'heure où on se parle, est-ce que les membres de votre association et même d'autres que vous connaissez dans le Québec, offrent sur une voiture usagée un semblant de garantie ou un minimum de garantie ou si c'est, une fois qu'elle est sortie de votre garage...

M. Giguère: Ce n'est pas un semblant de garantie, c'est une garantie.

M. Charron: C'est de quel ordre, c'est de quelle nature?

M. Giguère: Dans ma cour, je vends des voitures usagées. Si, de bouche à oreille, le client dit: Chez Giguère, on s'est fait refiler une mauvaise voiture, là, ce qui va arriver, c'est que mon inventaire va augmenter et la clientèle va aller l'acheter ailleurs. C'est tout simplement cela.

M. Charron: Alors, vous donnez quoi comme garantie actuellement? Si je veux acheter une voiture chez vous...

M. Giguère: On donne 50-50, et on est conciliant. Lorsqu'on voit que le bris a dépassé 30 jours, c'est une discussion avec le client.

M. Charron: Un mois, 50-50. M. Giguère: Un mois, 50-50.

M. Charron: S'il arrive un ennui majeur ou mineur à l'intérieur du premier mois de l'achat, vous partagez la note avec le consommateur.

M. Giguère: Ecoutez, si le client sort la voiture le dimanche et nous appelle le mercredi pour nous dire: Je suis en panne, on ne lui prend rien. La garantie, on ne l'exécute pas au pied de la lettre, on la donne pour que le client soit satisfait.

Mais on ne donne pas la garantie sur toutes les voitures.

M. Charron: II y en a qui partent sans garantie. M. Giguère: Assurément, oui.

M. Charron: Celles sur lesquelles vous feriez cette offre de 50-50 à l'intérieur d'un mois, ce sont celles, en gros — c'est évident qu'on parle de cas d'espèce, pour chaque voiture en particulier — qui sont évaluées à combien sur le marché?

M. Giguère: La procédure, c'est que lorsqu'on reprend une voiture, si on sent qu'elle a un problème mineur, on la reconditionne. Cette voiture

peut valoir $950, mais elle peut être dans le même état qu'une voiture presque neuve. L'autre voiture peut se vendre $2500 mais si on sait que la carrosserie est rouillée, que le moteur est près de mourir, on ne touche pas à la voiture et on la vend "as is". C'est une voiture non garantie. Le client, lorsqu'il achète une voiture et qu'on ne lui donne pas de garantie, sait avant de l'acheter que c'est parce que cette voiture ne serait pas rentable, parce qu'avant de donner la garantie, il faut la réparer, il faut la reconditionner.

Si elle n'est pas digne d'être reconditionnée, elle n'est pas digne d'avoir une garantie.

M. Charron: Le genre de garantie dont vous venez de parler, 50-50 à l'intérieur d'un mois, est-ce que c'est une pratique seulement chez vous ou si c'est une pratique à peu près dans l'ensemble des garages?

M. Giguère: Je dirais que c'est...

M. Charron: II y a un monsieur de Pépin Automobiles à côté de vous. C'est quoi chez vous?

M. Racine: C'est à peu près la même chose. Le fait est que dans des véhicules de l'année dernière, on peut étendre la garantie jusqu'à trois mois et 3000 milles, ce qu'à peu près tous les garagistes font. C'est assez similaire. Maintenant, quant à garantir dans l'ensemble de la province que tout se passe partout pareil, il n'y a pas de politique générale d'établie. C'est pour ça que dans le texte de loi, on trouve qu'une standardisation serait souhaitable, mais à des conditions qui seraient raisonnables. Parce que quand on parle d'une voiture de $1000, vous le souligniez tantôt, ce n'est pas une voiture de l'année passée, ni de l'année d'avant. C'est une voiture de 5 ans. Toutes les chances sont que cette voiture ait 50,000 ou 60,000 milles. Le coût de la garantie serait exorbitant pour le consommateur. Il y en a plusieurs qui aiment mieux prendre la chance de s'acheter une voiture de ce prix en disant: Je l'arrangerai si elle me tombe des mains.

M. Charron: D'accord.

M. Racine: On suggère que la garantie existe normalement, mais qu'on puisse, si c'est stipulé au contrat, se libérer de la garantie en accord avec le consommateur.

M. Charron: D'accord, je n'ai plus d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Si j'ai bien compris l'énoncé de tout à l'heure, vous disiez que les ventes entre particuliers ou entre consommateurs ont un but assez précis, soit d'obtenir un prix plus élevé que celui qu'on peut obtenir en échange dans un garage. C'est ordinairement la raison pour laquelle c'est fait, et vous, vous suivez ce qu'on appelle le "red book" en ce qui concerne vos échanges et vos prix, suivant ceux de la compagnie.

Alors, pourrait-on dire que, dans l'ensemble, le consommateur va payer plus cher pour son automobile en l'achetant d'un autre consommateur et sans être protégé en plus. C'est cela que vous voulez avancer?

M. Giguère: C'est bien cela.

M. Boutin: Pensez-vous qu'il serait plus juste que certains centres de diagnostic soient établis d'un côté comme de l'autre, comme on en parle actuellement, et puissent permettre aux consommateurs d'être protégés en ce qui concerne les ventes entre consommateurs?

M. Giguère: D'abord, il faudrait trouver les centres de diagnostic. Ils sont pas mal tous disparus jusqu'à ce jour.

M. Boutin: II est question d'en faire d'autres; on a entendu parler de cela dernièrement.

M. Racine: Ce dont vous parlez sont des centres d'évaluation pour les accidents de voiture, alors, c'est le BAC, le Bureau d'assurances du Canada, qui est censé établir ces centres, mais l'évaluation d'un problème d'accident est fort différent de l'évaluation d'un problème mécanique, là où il y a énormément de démontage à faire, tandis que dans l'accident, c'est visible, c'est apparent, c'est extérieur au véhicule.

M. Boutin: Ici, on parle de protéger le consommateur, pensez-vous qu'un individu, parce que, lorsqu'on le regarde dans tout autre type de commerce, il devient particulier, peut, lui aussi, lorsqu'il vend son automobile à un autre, avoir une position de force vis-à-vis du consommateur et devenir, à ce point de vue-là, un simple consommateur comme n'importe quel autre? C'est ce qu'on avance dans le projet de loi.

M. Racine: Lors de la vente du véhicule? M. Boutin: Oui.

M. Racine: C'est ce que j'expliquais tantôt, c'est que l'équilibre des forces que vous croyez exister, la plupart du temps n'existe pas. J'expliquais que le premier geste quand un type veut vendre sa voiture, en général, c'est parce qu'il veut en acheter une neuve. Alors, il va chez son garagiste, fait évaluer sa voiture et, entre le moment où il signe le contrat d'achat avec l'évaluation de son véhicule et le moment où il prend livraison du véhicule, parce que cela peut prendre parfois trois semaines ou un mois à commander le véhicule, il peut essayer de la vendre à un prix plus élevé.

Le garagiste lui ayant dit: Ecoutez, il y a telle chose, telle chose à faire sur votre véhicule. Alors, le consommateur vendeur devient renseigné sur l'état de son véhicule au moment où il se présente chez le garagiste. Un autre facteur, c'est qu'il peut aller chez son garagiste du coin et le garagiste,

entendant un cognement dans le moteur, dit: Ecoute, ton moteur n'en a pas pour longtemps, mon ami. Tu ferais mieux de faire attention. Le gars décide de changer de voiture et profite de l'occasion pour essayer de la vendre à un autre consommateur, qui lui, ne s'y connaît pas. Alors, dans les transactions entre consommateurs, ce que vous croyez être une transaction entre deux personnes qui ne s'y connaissent pas, je veux dire, dans les faits, ce n'est souvent pas le cas.

M. Boutin: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Charlesbourg.

M. Harvey (Charlesbourg): Sur le même sujet, M. le Président, lorsque vous parlez de revendre l'automobile entre les individus, M. Giguère, tout à l'heure, indiquait qu'il devrait y avoir, en tout cas, égalité pour tous à l'intérieur du projet de loi. Est-ce à dire que vous auriez à nous suggérer un mécanisme quelconque à l'intérieur des règlements pour faire que, pour celui qui vend son automobile au marchand, lequel tient compte évidemment du "red book" qu'on appelle le livre rouge, au moment de la revente, puisqu'il est obligé d'en garantir certaines mécaniques pour une période de temps donnée, il est normal qu'à ce moment-là, le livre rouge ne tienne plus compte de la nouvelle revente et que vous preniez, par un certain profit, une marge de sécurité qui vous permette de vendre l'automobile un peu plus cher que le livre rouge le dicte normalement, à la valeur de rachat comme telle?

C'est un peu cela? Vous n'avez pas besoin d'une loi pour cela, mais, dans l'éventualité où une loi vous obligerait à le faire.

Quelle est la marge de sécurité dont vous avez besoin dans la revente de cette automobile? Vous achetez à la valeur au livre, c'est bien cela, et vous revendez ensuite avec une différence de prix qui s'appelle, d'une part, peut-être votre profit, parce que si vous êtes obligé de donner une garantie, en vertu de la loi, le profit, vous pouvez le manger assez vite... Dans l'éventualité de revendre les automobiles à partir du garage avec une marge de sécurité, vous êtes d'avis que le consommateur comme tel paiera ses automobiles plus cher, d'une part et deuxièmement, si vous êtes obligé d'assurer une garantie, dans quelle mesure le faites-vous? On a bien compris que vous suggérez $2000 au lieu de $1000. Là, déjà, vous avez eu l'occasion d'expérimenter un tant soit peu l'automobile. Troisièmement, si nous, nous avions à accepter une loi comme celle-là, en tenant compte de votre suggestion des $200Q, quelle serait la suggestion que vous auriez à nous faire concernant les règlements des personnes qui ne respectent pas ces mécanismes de revente?

M. Giguère: A titre d'exemple, la pénalité d'une vente entre consommateur et consommateur...

M. Harvey (Charlesbourg): Et consommateur.

M. Pouliot (Pierre): II y a quelques années, on a suggéré d'établir pour tout le monde un certificat de conformité mécanique. Lorsqu'il y aurait vente entre les consommateurs, ces certificats pourraient s'appliquer à tout le monde, aussi bien pour nous autres que pour le consommateur. Ce serait certainement une mise en garde pour protéger le consommateur. Je pense que le ministère des transports est sur le point de suggérer quelque chose dans ce sens.

M. Harvey (Charlesbourg): Pour éviter cette chose, le BVA, le Bureau des véhicules automobiles, a obligé, en quelque sorte, l'acheteur d'une automobile d'un individu, d'un particulier, à connaître l'histoire de l'automobile: s'il s'agit d'un taxi, s'il s'agit d'une voiture immatriculée ou d'une automobile louée. Les garagistes sont assujettis à ces restrictions du bureau.

M. Giguère: Ce ne sont que des normes de sécurité d'ordre mécanique concernant les freins, concernant la conduite, mais ne s'appliquant pas au différentiel, à la transmission et au moteur.

M. Harvey (Charlesbourg): Iriez-vous jusqu'à dire qu'un individu qui vend son automobile personnelle à un ami devient, dans bien des cas, son ancien ami, parce qu'il ne veut plus le voir après.

M. Giguère: On dit trop que les voitures se vendent entre amis et amis. Je ne pense pas.

M. Harvey: Entre consommateurs.

M. Giguère: Cela se vend entre consommateurs, pas entre amis. Cela se fait surtout dans le cas du patron qui vend sa voiture à son employé. Ou bien deux employés qui travaillent dans la même manufacture, l'un entend dire que la voiture de John Doe, cela fait peut-être trois ans qu'il la conduit, mais c'est une bonne voiture parce que John Doe connaissait la mécanique et qu'il l'a toujours bien entretenue. Ce qu'il ne sait pas, c'est que John Doe, qui connaît la mécanique, s'il vend sa voiture, c'est parce qu'il a une raison de la vendre.

M. Harvey: C'est cela.

M. Giguère: Ce qu'on juge, là-dessus, ce n'est pas la question de reprendre un marché, parce que l'usagé, dans notre commerce, c'est une source. Il faut défouler, il faut remplacer notre usagé, il faut qu'il tourne. C'est une question d'application. On ne comprend pas que deux vendeurs d'automobiles... le consommateur, lorsqu'il devient vendeur, on calcule qu'il devient comme nous autres, il est vendeur. Lorsqu'il vend sa voiture, il la vend pour faire un profit, tandis que nous, on ne vend pas une voiture usagée pour faire un profit, on vend une voiture usagée pour s'en débarrasser. On l'a reprise en partant parce que...

M. Bellemare (Rosemont): C'est-à-dire que vous êtes bénévoles.

M. Giguère: Pardon?

M. Bellemare (Rosemont): Vous êtes bénévoles.

M. Harvey (Charlesbourg): On parle d'automobiles usagées.

M. Bellemare (Rosemont): II est bénévole parce qu'il ne fait pas de profit.

M. Harvey (Charlesbourg): II est agent d'affaires.

M. Giguère: Lorsque mon voisin vient chez moi pour changer sa voiture et qu'il me dit: Prenez-vous ma voiture usagée? Si je dis non, qu'est-ce que vous pensez qu'il va faire?

M. Harvey (Charlesbourg): II va aller ailleurs.

M. Giguère: II va aller ailleurs, n'est-ce pas? Alors, moi, je suis un homme d'affaires. Je dis: Oui, je la prends, votre voiture.

M. Harvey (Charlesbourg): Exactement.

M. Giguère: Je dis au client: Votre voiture, je me charge de l'écouler. Je me charge de la reprendre; maintenant, mais pour la revendre, il faut que je la peinture, il faut que je la frotte, il faut que je la polisse, il faut que je la rende désirable. C'est ce qu'on fait. Il y a des coûts là-dessus.

Lorsque vous parliez du "red book", tantôt, du livre rouge, il y a deux prix dans le livre rouge. Il y a le prix "as is" et il y a le prix au détail. Le prix au détail, c'est le prix d'une voiture à un millage raisonnable, d'apparence raisonnable, avec une "mécanique" raisonnable. Si on reprend la voiture et qu'elle est dans une condition détériorée, on applique la différence entre le prix de reconditionnement, appliqué à notre prix coûtant, mais qui sera le futur prix vendant.

Evidemment, on a aussi des commissions à payer à nos vendeurs et on a l'administration. Cela entre là-dessus.

M. Harvey (Charlesbourg): D'accord.

M. Racine: Si vous nous demandez une suggestion, on formule celle-ci: Assujettissez tout le monde aux mêmes obligations, quitte à ce qu'il soit fait comme à la Régie des loyers, par exemple, un contrat standard. On prend un loyer moyen, par exemple, à $150 par mois, douze mois. C'est un contrat qui intervient entre deux personnes pour un montant de $1800. On a pris la peine de faire des contrats standards avec un tas d'obligations à l'intérieur de ce contrat qui intervient bien souvent entre un locataire et un locateur qui a peut-être deux ou trois loyers, en fait deux consommateurs. Pourquoi ne fait-on pas la même chose dans le cas des ventes d'automobiles? Cela protégerait tout le monde.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, si vous me permettez, j'aimerais poser une question à monsieur, si vous me le permettez, mon cher député de Charlesbourg. L'aspect que vous soulignez, je crois qu'il n'entre pas en ligne de compte. Quand on parle de loyers, c'est une nécessité. Une automobile, ce n'est pas une nécessité. Je ne vois pas pourquoi vous arrivez à une comparaison entre une automobile et rester chez soi.

M. Racine: Vous avez une perception bien spéciale de l'automobile, mon cher monsieur. Je ne connais pas grand monde qui se promène constamment à pied. Si c'est votre avis, je le respecte mais, pour la plupart des gens, c'est devenu une nécessité.

M. Bellemare (Rosemont): Ce n'est pas comme habiter, par exemple.

M. Racine: Pardon?

M. Bellemare (Rosemont): Ce n'est pas comme habiter.

M. Racine: Ah non! Ce n'est pas tout à fait comme habiter. C'était un exemple que je donnais, monsieur.

M. Bellemare (Rosemont): J'ai dit: Comme habiter.

M. Racine: C'est ce que je vous dis, habiter. Comme dans habitant.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Taschereau.

M. Bonnier: J'ai une seule question, M. le Président, très courte, que j'avais posée ce matin relativement aux pratiques dans les réparations de voitures. Selon votre connaissance, est-ce qu'il arrive souvent que des propriétaires de garages offrent une commission aux mécaniciens dans le cas où ils suggèrent de changer des pièces?

M. Racine: Non seulement ce n'est pas d'usage, mais les mécaniciens, pour vous donner un exemple, dans la région de Québec, sont tous régis par une convention collective qui stipule un taux horaire.

M. Bonnier: Un comité paritaire, vous voulez dire.

M. Racine: Non, non, une convention collective. Les gens sont syndiqués. Ils sont régis à la fois par le comité paritaire et par une convention collective. Effectivement, le comité paritaire, le décret, c'est un prolongement de la convention collective. A ce moment-là, ce qui se produit, c'est que les gens sont strictement payés à l'heure. Le mécanicien, pour donner un exemple, peut faire $5 l'heure. Pour une présence de 40 heures par semaine, cela fait $200 la semaine. Il n'y a pas de...

M. Bonnier: Ce n'est pas une pratique courante.

M. Racine: Absolument pas. Pas à ma connaissance. On connaît la plupart des garages de notre région.

M. Bonnier: Je vous remercie.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, j'aurais une dernière question, si vous me le permettez.

Le Président (M. Lafrance): Une dernière?

M. Bellemare (Rosemont): Une dernière, soyez-en assuré.

Le Président (M. Lafrance): Je retiens le mot "dernière".

M. Bellemare (Rosemont): Soyez assuré, M. le Président, que ce sera la dernière question.

M. Giguère — je crois que c'est le nom — lorsque vous nous dites: lorsque arrivent les intérêts ou les échéanciers, si vous aimez mieux, qu'on doit payer à votre garage ou à vos associés, peu importe, vous arrivez et vous dites que vous y allez d'une façon conciliante. Mais si la personne ne vous paie pas, qu'est-ce que vous faites?

M. Giguère: D'ailleurs, je n'ai jamais mentionné cela, mais...

M. Bellemare (Rosemont): Bien, vous avez dit tout à l'heure: d'une façon conciliante que vous...

M. Giguère: Les garanties.

M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas, qu'est-ce que vous faites?

M. Giguère: S'il ne paie pas quoi?

M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas?

M. Giguère: Le prix de la voiture.

M. Bellemare (Rosemont): S'il ne vous paie pas, qu'est-ce que vous faites?

M. Masse: Ils saisissent le gars.

M. Bellemare (Rosemont): C'est cela que je vous demande, s'il ne vous paie pas...

M. Giguère: Votre question me semble assez confuse. Est-ce que vous pourriez expliquer?

M. Harvey (Charlesbourg): Nous autres, on le comprend, on est habitué, on le voit souvent. Il parle des garanties 50/50; dans l'éventualité où vous faites vos réparations, vous payez vos 50%, les autres 50% devant être payés par Jos. Bleau. Il ne vous paie pas; qu'est-ce que vous faites? Bien souvent, vous en faites votre deuil; c'est cela. C'est bien répondu, cela.

M. Bellemare (Rosemont): Là, il ne s'agit pas de faire 22 culbutes. Je vous demande si la personne avec laquelle vous dites que vous êtes très conciliant, vous essayez d'une façon conciliante...

M. Giguère: Oui.

M. Bellemare (Rosemont): ... s'il ne vous paie pas et que vous avez été financés par des compagnies prêteuses... Le gars n'a pas une mosus de cenne, il faut le dire, il n'a pas une maudite cenne pour vous payer; qu'est-ce que vous faites? C'est la question que je vous pose.

M. Giguère: En posant la question, vous avez donné la réponse; vous dites: II n'a pas une mosus de cenne, il n'y a pas grand-chose qu'on peut faire.

M. Bellemare (Rosemont): Bien, qu'est-ce que vous faites?

M. Giguère: On ne fait rien, c'est cela.

M. Bellemare (Rosemont): Bien quoi, vous lui laissez l'auto?

M. Giguère: La loi prévoit...

M. Bellemare (Rosemont): Vous lui laissez l'auto?

M. Giguère: La loi prévoit...

M. Bellemare (Rosemont): J'aimerais que vous le disiez au micro parce que c'est enregistré. Vous lui laissez l'auto? S'il ne vous paie pas, vous lui laissez l'auto?

M. Giguère: On lui laisse sa voiture.

M. Bellemare (Rosemont): Vous lui laissez sa voiture?

M. Giguère: S'il ne paie pas la moitié de sa réparation?

M. Bellemare (Rosemont): Non, non, je parle de vente.

M. Giguère: Non, non, là, je m'excuse...

M. Bellemare (Rosemont): Moi, je m'en vais chez vous...

M. Giguère: J'aimerais que vous répétiez la question avant de...

M. Bellemare (Rosemont): On va s'entendre, peut-être que je me suis mal exprimé.

Le Président (M. Lafrance): On pourrait régler le problème en demandant au député de Rosemont d'y aller ce soir et de revenir demain.

M. Bellemare (Rosemont): Mon cher Président, si vous me permettez...

Le Président (M. Lafrance): Vous avez dit: Une dernière question.

M. Bellemare (Rosemont): Le jour où je n'aurai plus le droit de parler en commission parlementaire, ce sera le jour où je ne serai plus député.

Le Président (M. Lafrance): Vous avez pris l'engagement de poser une seule question, je vous donne la permission de poser une question.

M. Bellemare (Rosemont): Une question apporte des sous-questions.

Le Président (M. Lafrance): Une autre question et j'ajourne la séance après.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, vous me permettez une autre question.

Le Président (M. Lafrance): Oui, une.

M. Bellemare (Rosemont): Alors, je demande à monsieur. J'achète une voiture chez vous, une minoune, j'achète l'auto, je m'en vais chez vous et, au bout d'un an, je n'honore plus mes paiements, qu'est-ce que vous faites?

M. Giguère: Moi, personnellement, chez Gi-guère Automobiles, on ne fait rien; la compagnie de finance, puisque vous supposez que la voiture est financée, c'est cela?

M. Bellemare (Rosemont): Exact.

M. Giguère: Là, le client décide, par manque d'argent ou différentes raisons, d'arrêter de faire ses paiements, la compagnie de finance lui envoie un avis et reprend la voiture en sa possession.

M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que vous vous avez été payé là-dessus?

M. Giguère: Ah! non, je suis endosseur du contrat.

M. Bellemare (Rosemont): Vous êtes l'endosseur du contrat puis vous avez retiré 21,7%.

M. Giguère: Pas moi, la compagnie de finance.

M. Bellemare (Rosemont): Ou 9% de ristourne.

M. Giguère: Pardon?

M. Bellemare (Rosemont): Combien vous avez de ristourne?

M. Racine: Monsieur, c'est un véritable spaghetti oratoire que vous êtes en train de nous servir là, et on a tous bien mangé ce midi. On ne se comprend plus.

M. Bellemare (Rosemont): Non, non...

Le Président (M. Lafrance): Je regrette, le député a le droit de poser les questions qu'il veut, qu'elles vous plaisent ou non. C'est à moi à décider si on devrait ajourner le débat oui ou non. Le député de Rosemont.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président... Accepté.

Le Président (M. Lafrance): Vous m'avez demandé la permission de poser une question, elle est posée. La commission ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

Merci, Messieurs Giguère et compagnie.

(Fin de la séance à 16 h 7)

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