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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le jeudi 2 septembre 1976 - Vol. 17 N° 137

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection du consommateur

Séance du jeudi 2 septembre 1976 (Dix heures dix-sept minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs! Nous reprenons ce matin l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 7: Loi sur la protection du consommateur.

Avant de commencer les auditions, je voudrais faire part, aux membres de la commission, des changements suivants: M. Charron remplace M. Burns, M. Faucher remplace M. Chagnon, M. Lacroix remplace M. Harvey (Dubuc) et M, Côté remplace M. Marchand.

Nous entendrons d'abord l'Association des manufacturiers canadiens, M. André Galipeault.

Association des manufacturiers canadiens

M. Galipeault (André): Merci, M. le Président. Mme le ministre, membres de la commission, mon nom est André Galipeault. Je suis chef du contentieux de la compagnie Texaco et je suis aujourd'hui le porte-parole de l'Association des manufacturiers canadiens. Je suis accompagné de M. Thomas Lavoie, qui est conseiller juridique adjoint de la compagnie RCA Ltée, de M. Robert Anderson, CR, qui est secrétaire de Proctor & Gamble Company of Canada Ltd et qui est aussi président du sous-comité sur la législation de la protection du consommateur pour l'Association des manufacturiers canadiens, de M. Douglas Montgomery, qui est gérant du service de la législation de l'Association des manufacturiers canadiens et de M. Robert Snelgrove, qui est vice-président et chef du contentieux de la compagnie Massey Ferguson Industries Ltd, qui est le président national du comité de la législation de l'Association des manufacturiers canadiens.

Notre association apprécie d'avoir l'occasion de discuter avec vous du projet de loi no 7. Ce n'est pas mon intention aujourd'hui d'analyser en détail toutes les recommandations que vous trouverez dans notre mémoire à moins, évidemment, que vous préfériez que je procède de cette façon. J'entends plutôt vous donner un exposé sommaire de nos vues générales sur certains principes que nous considérons d'importance majeure à la fois pour le manufacturier et le consommateur québécois.

Je tiens tout d'abord à vous faire remarquer que le sous-comité de notre association, qui a la responsabilité d'étudier la législation sur la protection des consommateurs, groupe, en grande partie, des avocats oeuvrant au sein même des compagnies.

Ce comité a examiné le développement, à travers le Canada, d'une législation similaire durant les quelques dernières années.

Nous avons à cet effet rencontré des représentants des gouvernements de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l'Ontario, afin d'essayer de formuler ensemble une législation traitant des garanties des produits à la consommation et des pratiques commerciales dans ces diverses juridictions.

Nous avons de plus soumis un mémoire au gouvernement de la Colombie-Britannique. Nous soumettons donc que, possiblement, nos commentaires, au moins dans ces domaines, pourraient vous être de quelque utilité dans la formulation de votre propre législation. Nous aimerions évidemment voir autant d'uniformité que possible au Canada. Nous avons donc considéré votre projet de loi de façon à essayer de vous aider, afin d'en arriver à une législation réaliste et facile d'application.

Nous n'avons aucune idée philosophique préconçue et nous ne représentons pas ici aujourd'hui un secteur particulier des manufacturiers, mais, bien au contraire, nous tenons tout simplement à vous offrir notre expérience dans ce genre de législation. Vous avez décidé de moderniser votre Loi sur la protection du consommateur dans une forme que l'on pourrait qualifier d'omnibus. Québec, à cet effet, est la première province à procéder de cette façon, les autres provinces ayant procédé par divers stades, comme, par exemple, une loi traitant des garanties des biens à la consommation, une autre traitant des pratiques commerciales.

Evidemment, à notre avis, il est préférable d'avoir un seul statut incorporant toute législation traitant de la protection des consommateurs, même si le risque de commettre une faute quant à la politique ou à la formulation même de la loi est plus grand. Nous vous souhaitons tout le succès possible dans ce projet ambitieux. Nous tenons donc à vous féliciter d'avoir entrepris cette modernisation de la loi. Vous avez mis de l'avant de nouveaux concepts qui sont des plus intéressants et, comme vous le constaterez à la lecture de notre mémoire, nous avons considéré votre projet avec un esprit ouvert et nous nous sommes attaqués plus particulièrement à des problèmes techniques qui, selon notre expérience, doivent être résolus, si le projet de loi se veut équitable pour tous et facile d'application.

Nous sommes bien conscients du nombre restreint mais encore trop nombreux d'hommes d'affaires qui soumettent le public consommateur à des pratiques décevantes, même malhonnêtes. Ce petit groupe doit être éliminé et cette législation contribuera sans aucun doute à son élimination.

Par contre, il y a lieu de se demander si, en s'attaquant à ces pratiques décevantes et malhonnêtes, les rédacteurs n'ont pas discrédité jusqu'à un certain point la majorité des hommes d'affaires qui respectent l'éthique professionnelle. Nous espérons donc que ce mémoire vous aidera à améliorer ce projet de loi en donnant plus de force aux articles qui élimineront le commerçant malhon-

nête tout en modifiant les autres articles qui gêneraient inutilement les pratiques commerciales honnêtes.

Nous nous inquiétons du manque de détails et de l'imprécision de certains articles. En effet, nous croyons que cette loi ne devrait pas s'appliquer lorsque des biens sont vendus à des fins purement commerciales. Nous signalons donc que les relations entre commerçants et fournisseurs s'accommoderaient mal du formalisme d'une telle loi. Nous vous suggérons dans notre mémoire une nouvelle définition de l'expression "bien" pour pallier cette situation.

Nous comprenons, d'autre part, que vous proposiez de remédier à cette carence de détails en adoptant des règlements qui tiendront lieu de la loi en vertu du pouvoir de réglementation que vous confère l'article 211. Nous sommes quelque peu préoccupés des pouvoirs conférés au lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de cet article. Nous admettons que, dans des domaines complexes et changeants comme celui-ci, il est souhaitable qu'un organisme législatif ait le pouvoir de traiter de tous ces cas, mais il existe certains mécanismes de procédure qui peuvent et devraient être mentionnés dans la loi afin que l'on ne puisse alléguer qu'effectivement la Législature a cédé son pouvoir législatif à un tel organisme. L'article 211, par exemple, accorde le pouvoir de faire les règlements "pour établir des normes d'emballage, d'étiquetage ou de présentation de tout bien".

Nous suggérons, cependant, que ce pouvoir devrait être limité au cas où le lieutenant-gouverneur en conseil est d'avis qu'il y a eu prolifération de dimensions d'emballages ou qu'il en résulte une confusion dans l'esprit des consommateurs. Ce n'est naturellement qu'une illustration de notre point de vue. Nous voulons faire ressortir qu'il incombe à la Législature de spécifier les critères objectifs sans lesquels le pouvoir de réglementation ne pourrait être utilisé et aussi de spécifier le but que viseront ces règlements. Ce n'est, à notre avis, que si ces deux seuils sont imposés que l'examen juridiciaire du pouvoir de réglementation pourra avoir une signification réelle.

Nous croyons de plus qu'on devrait avoir recours à un autre mécanisme pour contrôler l'exercice du pouvoir de réglementation qui donnerait aux parties intéressées le droit de faire des représentations non seulement auprès du gouvernement, comme on le reconnaît a l'article 212, mais aussi auprès d'un tribunal indépendant ayant l'expertise voulue pour entendre les représentations d'ordre technique sur le mérite et la possibilité d'application des règlements envisagés.

Le livre I du projet de, loi no 7, qui traite des contrats relatifs aux biens et services, contient des exigences spécifiques et détaillées relatives à la nécessité d'avoir des contrats écrits et à la norme de tels contrats. Toutes ces exigences semblent s'appliquer sans distinction à tous les contrats écrits indépendamment de la valeur, du prix ou de la nature du contrat. Nous croyons que de telles exigences poseraient de sérieux problèmes commerciaux et créeront des situations difficiles et, afin d'éliminer l'aspect embêtant et le facteur de coûts prohibitifs, nous soumettons que toute transaction, toute vente ou tout service valant moins de $100 pourrait être exclu des exigences du livre I.

Ce projet de loi, selon nous, est de plus discriminatoire à l'égard des commerçants ou des manufacturiers. Même s'il peut être parfois nécessaire d'accorder au consommateur des droits préférentiels, par rapport aux commerçants et aux manufacturiers, il faut à notre avis reconnaître que les vendeurs ont certains droits fondamentaux qui doivent aussi être respectés. Nous croyons donc que lorsqu'un commerçant rédige un contrat et l'impose au consommateur, ce contrat devrait être interprété en faveur du consommateur. Cela est compatible avec la règle d'interprétation formulée à l'article 1019 du Code civil.

Nous croyons cependant que lorsqu'un consommateur insiste pour rédiger ses propres dispositions, il ne devrait pas avoir en outre le droit de profiter de ce principe, compte tenu particulièrement des vastes pouvoirs qu'ont les tribunaux de réviser ces contrats. Il se peut fort bien que certains consommateurs peu scrupuleux profitent d'honnêtes vendeurs en recourant à ce droit ainsi qu'à d'autres droits contractuels contenus dans le projet de loi.

Le chapitre qui traite de la vente ou du louage de biens et de services ne semble pas faire la distinction entre les biens neufs ou les biens usagés.

Nous pensons que les modalités d'une vente de biens usagés devraient être différentes de celles d'une vente de biens neufs.

De plus, tels qu'actuellement rédigés, certains articles sous ce chapitre créent une infraction de stricte responsabilité chaque fois qu'on a prouvé un degré quelconque de non-observation. Nous croyons qu'afin de conférer plus de justice à ces dispositions, il devrait être essentiel que le commerçant ait induit le consommateur à acheter et, deuxièmement, que le degré de non-observation crée un écart considérable entre les faits et ce qui a été énoncé par le commerçant.

Nous soutenons que votre projet de loi devrait toujours exiger la preuve que le commerçant, le manufacturier ou le publicitaire a agi sciemment au moment de la perpétration de l'offense. Ceci pourrait être réalisé en faisant du mens rea une condition sine qua non de chaque offense ou, au moins, en fournissant au vendeur un moyen de se défendre contre une plainte quelconque s'il peut prouver qu'il a agi avec diligence raisonnable.

Nous soutenons, de plus, qu'un consommateur devrait être tenu de prouver que le comportement du vendeur lui a causé un tort matériel en l'induisant en erreur à l'achat ou à la signature d'un contrat et que toute personne raisonnable aurait été trompée par ce comportement du marchand. Les commerçants et les publicitaires ne devraient pas être tenus responsables de déclarations erronées, mineures ou sans portée matérielle.

Notre association comprend les inquiétudes de votre gouvernement face à certains abus dans le domaine des réparations d'automobiles. Nous

avons, cependant, certaines réserves concernant la méthode qui est prévue pour remédier à ces abus. En effet, une analyse minutieuse des dispositions que l'on retrouve aux articles 68 à 78 révèle qu'effectivement elles pourraient nuire au consommateur.

En effet, ces dispositions comportent des mécanismes qui influenceront le garagiste à faire absorber à son client une augmentation de responsabilités en portant au maximum les estimations de réparations, ce qui pourra, en fin de compte, déboucher sur des coûts majorés pour le consommateur.

D'autre part, comme il est impossible de s'opposer à ce que vous avez mis de l'avant, nous croyons que l'on devrait songer sérieusement à créer une loi distincte pour traiter de ce problème particulier et peut-être le contrôler par certaines procédures administratives comme l'émission de permis au garagisge.

Il est à remarquer que l'Etat de la Californie a sanctionné une mesure législative analogue à celle qui est prévue dans votre projet de loi et a enregistré le coût le plus élevé de toutes les juridictions nord-américaines au chapitre des réparations. Nous avons appris que l'Etat du Michigan, qui a une législation similaire, considère actuellement la possibilité de la modifier.

Nous aimerions ajouter quelques mots sur l'article 158 qui semble interdire le recours aux primes en tant qu'instrument publicitaire, à moins qu'on offre au même moment au consommateur une valeur en espèces tenant lieu de la prime. Les primes constituent depuis longtemps un instrument de commercialisation permettant d'obtenir que l'on essaie des produits nouveaux ou permettant de stimuler la réutilisation d'anciens produits. On peut supposer qu'on interdit les primes plutôt que d'autres activités publicitaires parce qu'elles ont un effet néfaste particulier sur le consommateur et qu'il existe une preuve convaincante à cet effet. Il est sans doute possible, d'autre part, que les entreprises qui renonceront à offrir des primes affecteront tout simplement l'argent que ces dernières représentent à d'autres moyens de promotion qui ne procureraient aucun avantage apparent au consommateur.

Quant à la question de créer une interdiction absolue de toute publicité destinée à des enfants de moins de treize ans, voilà une question qui, à notre avis, est essentiellement d'ordre social et pourrait donc être sujette à contestation. Cependant, notre association base son objection sur le fait que son application pose des difficultés sérieuses. En effet, le manufacturier et le publicitaire auront le problème de décider si, aux termes de cette loi, on peut soutenir qu'une publicité quelconque est destinée à un enfant de moins de treize ans.

Même si les critères sont exposés à l'article 164, nous doutons fort que la loi puisse résoudre ce problème de façon satisfaisante.

Un problème connexe est celui de déterminer quelle sera l'incidence de cette interdiction sur les émissions et la publicité télévisée émanant de l'extérieur de la province.

Du point de vue sociologique, une des raisons de cette interdiction peut être le désir d'empêcher les publicitaires peu scrupuleux de mal influencer les enfants et nous supportons ce point de vue. Cependant, nous croyons que cette loi ne devrait pas empêcher les publicitaires honnêtes de communiquer certains messages commerciaux aux jeunes consommateurs. Effectivement, une grande partie de la publicité leur étant salutaire.

Notre dernier commentaire a trait à l'utilisation même de la loi. Il faut reconnaître que la loi n'est pas un instrument infiniment souple en ce qui concerne les normes sociales et économiques. Ses limites techniques sont précises, mais, d'autre part, il existe certains problèmes que la loi ne saurait résoudre sans infliger des coûts financiers ou sociaux disproportionnés, à notre avis.

Bref, nous félicitons à nouveau le gouvernement du Québec de proposer une modernisation de sa législation visant la protection du consommateur, mais nous tenons aussi à le mettre en garde contre l'exagération en ce qui concerne les droits de ce consommateur, qui pourrait aller jusqu'à détruire les droits commerciaux légitimes d'autres citoyens et qui pourrait entraîner un manque de respect de la loi et peut-être poser des difficultés quant à son application.

C'est là, M. le Président, la fin de notre exposé, à moins que vous ne désiriez que nous examinions d'autres questions plus en détail. Notre délégation est à votre entière disposition pour essayer de répondre à vos questions.

Le Président (M. Lafrance): Merci beaucoup, Me Galipeault.

Mme le ministre.

Mme Bacon: Quelques commentaires, M. le Président. Vous mentionnez, dans votre mémoire, la crainte que vous inspire le lieutenant-gouverneur en conseil quant à l'article 211. Un tel pouvoir réglementaire doit exister si nous voulons que notre Loi sur la protection du consommateur réponde vraiment aux aspirations de la population.

Comme vous le savez — je n'ai pas à vous rapprendre — le processus d'amendement des lois est des plus long et aussi dispendieux. Je pense qu'il faut tenir compte du coût de l'amendement des lois. Le pouvoir réglementaire nous semblait la façon la plus facile d'adapter la loi à des réalités quotidiennes sans avoir à suivre tout le processus d'amendement des lois.

Par l'article 212, nous nous obligeons à un préavis de 30 jours avant l'adoption des règlements.

A nos yeux, ce délai laisse donc à chacun l'occasion de pouvoir connaître ses droits et se conformer à ses obligations. Est-ce que, pour vous, ce délai semble trop court? Il y a certaines personnes qui nous demandent d'augmenter ou d'allonger ce délai, cette période de 30 jours. Est-ce que ce sont les 30 jours qui vous inquiètent?

M. Galipeault: M. le Président, la question des 30 jours nous inquiète en tant qu'association pour

la raison suivante. Très souvent, il y a plusieurs semaines qui s'écoulent avant que nous recevions, par exemple, l'exemplaire de la Gazette officielle du Québec. Deuxièmement, une fois que cette publication est reçue, notre association fonctionne par comités. Or, avant qu'on ait réuni le comité, qu'on ait étudié la loi, qu'on ait fait approuver le rapport du sous-comité par le comité principal de législation, puis qu'on vous envoie le mémoire, très souvent, les 30 jours sont écoulés. A cet égard, dans notre mémoire, nous faisons une recommandation d'un délai de 90 jours qui serait plus raisonnable, à notre avis, pour pouvoir vous présenter nos commentaires.

Quant à vos commentaires du début, nous admettons dans notre exposé qu'il y a une nécessité d'avoir une certaine souplesse et, la façon de le faire, c'est par voie de réglementation. Mais encore là, ce que nous aimerions, c'est qu'il y ait un dialogue, si possible, entre les diverses associations et le gouvernement afin qu'on puisse essayer d'en arriver à un produit qui sera acceptable par tout le monde.

Mme Bacon: D'accord. Quant à la publicité destinée aux enfants, j'ai pris bonne note de vos commentaires, mais je ne crois pas, ce matin, devoir établir à nouveau ma position, parce qu'elle a été suffisamment connue au cours de l'audition de mémoires précédents. Je suis consciente aussi qu'il y a eu de nombreuses faiblesses dans la version anglaise du projet de loi. Nous comptons, au moment où nous allons revoir la rédaction de ce projet de loi, apporter les corrections qui s'imposent dans la version anglaise, afin que tous les milieux comprennent bien les intentions nuancées ou non du législateur.

En ce qui concerne aussi les définitions, nous allons étudier de nouveau certaines définitions qui ne paraissent pas tellement claires. Il y a des définitions qui méritent d'être considérées à nouveau et revues.

A l'article 22, relativement aux présomptions en faveur du consommateur, il est évident que ce projet de loi prévoit un certain nombre de présomptions en faveur du consommateur, mais dans tous les cas le consommateur devra toujours prouver les faits fondant ces présomptions. Je ne vois pas l'inquiétude que vous avez soulignée ce matin.

M. Galipeault: A l'article 22, on lit: Si un contrat ne respecte pas les exigences prescrites, le consommateur peut en demander la nullité. Ce que nous avons mentionné dans notre mémoire, c'est qu'il ne semble pas y avoir un délai stipulé indiquant que le consommateur peut en demander la nullité. On soumet qu'il devrait y avoir un certain délai durant lequel il peut demander la nullité. Sans cela, on trouve que l'article 22 n'est pas délimité dans le temps.

Mme Bacon: On l'ajoute dans la loi. M. Galipeault: Oui.

Mme Bacon: D'accord. Quant à l'article 158, sur les primes, nous allons discuter avec certains autres organismes de ce problème, ils pourront faire connaître davantage leur opinion.

A l'article 174, il s'agit bien du pouvoir, pour les tribunaux, d'émettre une injonction ou de faire une déclaration quant à une pratique interdite. De tels remèdes, quant aux pratiques, existent dans d'autres provinces canadiennes comme en Colombie-Britannique, par exemple. Disons que nous n'innovons pas dans ce domaine, c'est courant dans d'autres provinces.

A l'article 233, les engagements volontaires, on en a très peu parlé au cours de l'audition des mémoires précédents. Il s'agit d'un engagement, évidemment, qui demeure volontaire. Même si le directeur en détermine les conditions, il n'y a rien qui oblige l'autre partie. L'objectif de cet article est essentiellement d'éviter de rendre judiciaire l'application de la loi, de sorte qu'un commerçant, un manufacturier ou un publicitaire, qui enfreint la loi ou qui est sur le point d'enfreindre la loi ou les règlements, puisse s'amender par un engagement volontaire. Cet article prévoit même, si des poursuites ont été entreprises contre cette personne, que le directeur peut les abandonner s'il y a engagement volontaire. Je ne sais pas si cela peut donner plus d'informations. Je pense qu'on n'a pas tellement précisé au cours des auditions de mémoires. C'est une des premières fois.

M. Galipeault: On a fait un commentaire, on voulait que ce soit réellement une déclaration ou un engagement qui soit négocié et non pas quelque chose qui soit imposé.

Mme Bacon: Non, non.

M. Galipeault: C'était le but de notre propos.

Mme Bacon: Je pense qu'il y a une possibilité de négociation avec le directeur et c'est volontaire, à ce moment-là.

M. Galipeault: Oui, d'accord.

Mme Bacon: Vous mentionnez aussi quelque chose sur les déclarations des commerçants, à la page 3 de votre mémoire. Vous affirmez que les commerçants et les publicitaires ne devraient pas être tenus responsables des déclarations erronées mineures ou sans portée matérielle. J'aimerais que vous définissiez davantage les déclarations erronées mineures ou sans portée matérielle. Est-ce que vous ne trouvez pas cela très relatif, au fond?

M. Galipeault: A la page 3 de notre mémoire? Je m'excuse.

Mme Bacon: Oui, sur les déclarations des commerçants. Je pense que vous avez certaines inquiétudes . Au troisième paragraphe, les tests de matérialité ou de raisonnement devraient être inclus dans la loi afin qu'un consommateur soit tenu de prouver le comportement du vendeur.

Vous mentionnez des déclarations erronées mineures ou sans portée.

M. Galipeault: On veut dire que de la façon dont le projet de loi est libellé, même une déclaration erronée qui serait mineure, ce serait suffisant, à notre avis, pour que la loi s'applique contre le vendeur dans ce cas. On croit que le consommateur doit être tenu de prouver que le comportement du vendeur lui a causé un préjudice et que cette erreur mineure, qui, peut-être, de fait, n'a pas influencé le consommateur de quelque façon que ce soit, ne soit pas reprochée au marchand.

Mme Bacon: II y a aussi, je pense, dans votre mémoire, certaines inquiétudes quant aux relations entre les manufacturiers et le gouvernement que nous pouvons relever. J'aimerais peut-être dire ce matin, comme je l'ai dit ailleurs, que nous avons l'intention d'avoir un agent de liaison entre l'Office de la protection du consommateur et tout le domaine des manufacturiers, des commerçants. Je pense que ce sera de nature à améliorer, à développer aussi les communications entre l'office et le monde des commerçants ou des marchands, des manufacturiers.

M. Galipeault: Sans aucun doute que...

Mme Bacon: J'aimerais le souligner ce matin, cela peut calmer certaines appréhensions.

M. Galipeault: Ce serait vraiment apprécié de notre association.

Mme Bacon: D'accord. Merci. . Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, j'aimerais remercier l'Association des manufacturiers de son mémoire. J'ai deux questions sur deux articles en particulier que vous avez, M. Galipeauit, tout de même repris de votre mémoire, probablement à cause de l'importance que vous leur accordez. Ce sont vos remarques, à l'article 32, sur la garantie. La commission a déjà eu l'occasion d'examiner cette question avec d'autres qui sont venus et j'aimerais reprendre avec vous, ce matin, une suggestion déjà envisagée afin de connaître votre réaction. Je peux même dire votre objection parce que je crois, si je comprends bien le texte de votre mémoire, que ce sont des objections que vous avez, mais j'aimerais que vous les développiez.

Se peut-il que l'on développe encore plus la pratique que certains grands magasins ou certains gros commerçants ont d'assumer sur place, eux-mêmes, la garantie, prenant à leur compte les frais de transport, par exemple, dont vous parlez dans votre mémoire, entre le commerçant et le manufacturier lui-même, c'est-à-dire entre le détaillant et le grossiste, par exemple? Ou si les frais sont trop élevés, peut-on penser que des entreprises de moindre envergure que celles qui le font actuelle- ment puissent adopter cette pratique et qu'en fin de compte ce sera toujours au consommateur d'assumer lui-même les frais, en faisant abstraction du vendeur, de rejoindre, de remettre le produit au manufacturier et de se faire rembourser ou remettre un nouvel appareil?

Est-ce qu'on peut envisager une pratique plus développée de la garantie sur place, c'est-à-dire chez le détaillant?

M. Galipeault: Voici, M. le Président, nous n'avons pas envisagé l'article 32 dans l'optique que vous venez de mentionner. Peut-être que mes confrères auraient plus de choses à dire là-dessus. Le seul problème que nous avons, c'était cette question de transport. On ne parle pas d'un article ménager minime; mais si on parle d'un article assez considérable, les frais de transport peuvent être assez considérables.

Maintenant c'est la seule facette qu'on a étudiée dans l'article 32. Je ne peux pas vous donner plus d'informations sur la suggestion que vous faites.

M. Montgomery (Robert): Le seul commentaire que je peux faire, c'est qu'il y a un abus possible, dans cet article. Vous pourrez noter que la Saskatchewan a fixé une limite de 50 milles pour le transport, indiquant qu'elle-même reconnaît la possibilité d'un abus. Et ce qu'on veut simplement vous indiquer c'est qu'il faut y aller tranquillement avec cet article, parce que cela peut être très dispendieux pour le manufacturier. Enfin, cela cause préjudice aux intérêts du consommateur si ceci n'est pas réaliste.

M. Boutin: Lorsqu'un client achète un réfrigérateur, vous avez une garantie d'un an, cinq ans sur le compresseur. Pour la garantie des quatre années supplémentaires sur le compresseur, je parle dans les garanties à l'extérieur des grands centres comme Montréal, le client devra payer normalement la main-d'oeuvre et le transport. La compagnie s'engage à fournir le compresseur en échange contre la vieille pièce, toujours. C'est une facette.

M. Charron: D'accord.

M. Galipeault: M. le Président, pour répondre à la première partie de votre question, je dirais non, on n'a pas répondu parce qu'on n'a pas le renseignement. Si vous voulez, on peut peut-être essayer de se renseigner et de vous envoyer...

M. Charron: D'accord, parce que...

M. Galipeault: ... un exposé supplémentaire sur la question que vous avez soulevée.

M. Charron: Très bien. A un autre endroit, à l'article 151... Je le lis à l'intention de la commission. "La pratique interdite du manufacturier ou du publicitaire est réputée être celle du commerçant qui en a eu ou qui aurait dû en avoir connais-

sance." Vous représentez ici aujourd'hui des manufacturiers et vous nous dites dans votre mémoire qu'il n'est pas raisonnable de tenir le commerçant responsable des prétentions ou des exposés du manufacturier ou du publicitaire. J'aimerais que vous développiez ici... En fin de compte, ce que vous nous demandez, c'est d'oublier cet article et d'en faire porter la responsabilité...

M. Galipeault: Pas pour autant que le manufacturier est concerné, mais pour autant que le commerçant est concerné.

M. Charron: Pour autant que le commerçant...

M. Galipeault: Automatiquement, ici, il semble y avoir une présomption qui est créée à l'article 151. Automatiquement, le commerçant est censé être au courant de toutes les représentations qui ont été faites par le manufacturier ou le publicitaire. Notre seule argumentation à cet effet est de dire: Souvent, les commerçants — tout dépend de l'article en question — peuvent avoir un millier de produits dont ils ont charge. C'est quasiment physiquement impossible pour le commerçant de savoir sciemment toutes les représentations qui lui ont été faites par les manufacturiers. On ne veut pas enlever la responsabilité du manufacturier ou du publicitaire. On ne voudrait pas que ce soit automatique. En d'autres mots, vous pouvez avoir un commerçant qui est absolument au courant des prétentions du manufacturier ou du publicitaire et, sciemment, il devrait être tenu responsable, mais, par contre, il peut ne pas être au courant. On suggère qu'il ne devrait pas être automatiquement tenu responsable.

M. Charron: Est-ce qu'au fond, M. Galipeault, il n'y a pas là-dedans, si vous voulez excuser le commerçant de la loi, la reconnaissance du fait que, souvent, dans la publicité, le manufacturier va, un tant soit peu, exagérer la valeur de la marchandise, l'utilité de la marchandise, la capacité d'utilisation de la marchandise et qu'en ce sens, le commerçant, qui se trouve à épouser la publicité en acceptant le produit chez lui, ne doit pas être tenu responsable de cette exagération? Si le consommateur revient et dit: Je me suis fait dire à la télévision que, si j'achetais ce produit, j'aurais tel ou tel résultat — paroles de Charbonneau, par exemple — et qu'on va aboutir à telle ou telle conséquence favorable. Or, je l'ai utilisé comme on m'avait dit de le faire, je ne l'ai pas eue. Il revient, évidemment, chez le commerçant et il dit au commerçant: Reprends ta patente, cela ne m'a pas donné de résultat. Là, vous nous dites, si on devait garder l'article tel qu'il est là, que c'est le commerçant qui est responsable de cela. Ce n'est pas lui qui a fait la publicité à la télévision. Ce n'est pas lui qui a vanté le produit. Il l'a seulement eu en stock, parce qu'il savait qu'il y avait des gens qui étaient pour le demander.

M. Galipeault: Notre seul point, c'est strictement la présomption qui est tout simplement im- putée contre le commerçant, automatiquement. Si le commerçant, réellement, est au courant de la publicité, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas tenu responsable au même titre que le manufacturier. Le commerçant, jusqu'à un certain point, devrait s'assurer que les prétentions du manufacturier sont exactes. D'autre part, il y a un tas de lois actuellement en vigueur qui forcent le manufacturier à être très sûr de ses prétentions avant de les exposer en public. Le consommateur, jusqu'à un certain point, est assez bien protégé. Je crois que la seule chose, c'est la présomption automatique contre le commerçant qu'on enlève.

M. Charron: Je vous remercie, M. Galipeault.

Le Président (M. Lafrance): M. Galipeault, ainsi que vos collègues... Le député de Taschereau.

M. Bonnier: Oui, M. le Président, je voudrais avoir un commentaire de nos invités relativement à l'article 203 que vous n'avez pas commenté dans votre mémoire. Vous nous dites que cet article, du moins le contenu et ses effets sont en application en Ontario et que ça ne semble pas soulever tellement de problèmes; mais on a eu quelques commentaires contraires par certains de nos invités, je me demandais si vous aviez... C'est l'article au niveau de la culpabilité. Lorsqu'une corporation est reconnue coupable, ses directeurs, individuellement, sont également présumés coupables. Ils ont donc le fardeau de la preuve. Est-ce que cela vous aurait causé des problèmes en Ontario?

M. Galipeault: Ce n'est pas un problème que nous avons étudié, j'essaie de voir si mes confrères ici...

M. Bonnier: Si ce n'est pas un problème, je n'insiste pas.

M. Galipeault: On a fait des commentaires, on n'a pas étudié, mais je vais voir si...

M. Montgomery: Pour commencer, je crois que c'est le point de vue de notre association, savoir que le droit criminel ne devrait pas faire partie d'un projet de loi qui dépend du droit civil. Pour cela, nous appuyons le rapport de la commission de refonte du droit au Canada qui a publié, dans les volumes 3 et 16, des commentaires à ce sujet.

Cela ne répond pas directement à votre question, mais en général, on parle ici du droit criminel. On croit que le Code criminel ne devrait pas appliquer des sanctions pour un projet d'ordre civil; simplement, quand il y a des gens qui posent des actes criminels, naturellement, il y a des punitions selon le Code criminel qui vont suivre.

On aimerait attirer l'attention de la commission sur le projet qui a été préparé par la commission de refonte du droit qui s'appelle la notion de blâme. Je crois que c'est un des principes fondamentaux de ce projet que vous devriez suivre.

En ce qui concerne votre question spécifique, la question de responsabilité des associés, si elles

sont impliquées dans la faute, je crois que selon leur responsabilité, elles doivent naturellement être punies. Ce à quoi nous nous sommes opposés souvent, c'est que quand il y a faute de la part du manufacturier, la compagnie limitée, elle doit poursuivre automatiquement les officiers qui sont responsables, si ce sont des criminels.

En d'autres mots, il doit y avoir deux procédures: une contre la compagnie et une autre contre les officiers de la compagnie.

M. Bonnier: Selon l'article, si on tient pour acquis que les officiers sont tenus responsables, ils doivent faire la preuve qu'ils ne le sont pas.

M. Galipeault: D'après l'article 203, vous mettez le fardeau de la preuve sur les officiers à prouver qu'ils n'avaient pas connaissance de la commission...

M. Bonnier: Apparemment, cela existe dans d'autres provinces et ça ne cause pas tellement de problèmes. Je voulais simplement avoir les commentaires...

M. Montgomery: Cela existe dans d'autres provinces. Si vous voulez, on pourrait vous faire des commentaires plus exacts et plus recherchés si c'est quelque chose qui vous inquiète.

M. Bonnier: Non, cela ne m'inquiète pas personnellement; mais c'est parce qu'on avait eu des commentaires contraires, c'est simplement pour vérifier la véracité de ces commentaires.

Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Galipeault, ainsi que vos collègues, pour votre présentation et pour vos réponses à nos questions. Merci beaucoup.

M. Galipeault: Merci, M. le Président.

Fabricants canadiens de produits alimentaires

Le Président (M. Lafrance): Nous entendrons maintenant les Fabricants canadiens de produits alimentaires dont le porte-parole est Me Jacques De Billy.

M. De Billy: M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la commission, mon nom est Jacques De Billy. Je suis le procureur de l'Association des fabricants canadiens de produits alimentaires. J'ai, à ma droite, M. Steele, le président de l'association; à ma gauche, M. Phillip Moyes, le vice-président exécutif, et à mon extrême droite, M. Langbo, président de Kellog-Salada, ainsi que M. Poirier, de General Foods.

Nous avons déposé, auprès de cette commission, un mémoire et un point auquel nous nous attaquerons spécialement; je comprends que c'est un point délicat, ce n'est pas une cause facile à gagner. Parfois, les avocats ont des causes difficiles. En toute humilité, nous représentons des cor- porations commerciales qui sont en affaires et qui doivent être rentables. Nous n'avons pas la prétention d'imposer aux représentants du peuple nos points de vue qui proviennent de la corporation commerciale.

Tout ce que nous voulons, c'est tenter de démontrer que cette prohibition complète va trop loin et n'est pas dans l'intérêt public. J'ai lu avec attention les rapports, les transcriptions des séances précédentes et je vois que la philosophie qui supporte cette prohibition de publicité à l'égard des enfants, c'est que les enfants ne sont pas, dans bien des cas, les vrais consommateurs, ne sont par les acheteurs.

M. le Président, je me demande si ce principe s'applique dans les cas d'un produit alimentaire. Il faut d'abord faire remarquer que cette prohibition complète va très loin. Il y en a, par exemple, qui se sont permis d'annoncer des livres pour enfants, des films pour enfants, des pièces de théâtre pour enfants, des articles de sport pour enfants. Il me semble que c'est presque une perturbation dans la vie commerciale. Mais je m'applique surtout à démontrer que cette prohibition, il me semble, est moins nécessaire et est peut-être superflue dans le cas des produits comestibles.

Les produits comestibles sont, en général, les produits d'une valeur relativement minime et, dans bien des cas, l'enfant est l'acheteur. On sait, par exemple, que pour les tablettes de chocolat, l'enfant, dans 50% des cas, est l'acheteur. L'enfant, à l'heure de la collation, à quatre heures, après avoir été en classe, alors qu'il a besoin d'énergie, va dire à sa mère: J'aimerais un gâteau. Peut-être sera-ce un gâteau Vachon, si la publicité le permet. Ou il dira: J'aimerais un verre de lait. On sait que l'Association des producteurs de lait fait de la publicité auprès des enfants qui sont les premiers consommateurs de lait. Et je crois que l'article 163 tel que libellé empêche toute publicité, même pour le lait, même pour recommander aux enfants de se servir de pâte dentifrice pour brosser leurs dents, et de prendre des jus de fruit ou de la crème glacée.

Je ne sais pas si je fais erreur, mais je soumets à la commission que je ne crois pas qu'il y ait eu d'abus, nous ne croyons pas qu'il y ait d'abus dans la publicité s'adressant aux enfants concernant les produits alimentaires, les produits comestibles.

Par exemple, on voyait récemment, de la publicité au sujet de la rentrée des classes. Est-ce que cela s'adresse à des enfants? Est-ce que toute cette publicité devient prohibée, illégale? On semblerait vouloir prohiber chez Dupuis et Frères ou chez Eaton une vitrine qui s'adresserait aux enfants parce qu'elle concernait des jouets, des vêtements ou des articles de sport pour enfant. Avec l'article 163, c'est très large. Nous soumettons, en toute déférence pour l'Association des produits alimentaires, ce point de vue que, dans le cas de l'alimentation, le même besoin ne se fait pas sentir de prohiber la publicité aux enfants. Comme je le mentionnais, ce sont souvent eux, les enfants, qui vont acheter leur crème glacée, leur tablette de

chocolat à la tabagie ou au magasin du coin. Les enfants sont maintenant plus évolués, ils sont capables de distinguer. Ce sont nos prétentions. Je me demande si cette prohibition n'aurait pas pour effet secondaire d'affaiblir certains de nos media, par exemple, certains de nos journaux hebdomadaires, locaux, régionaux qui vont perdre une partie de cette publicité, et peut-être les postes de radio locaux. C'étaient là les commentaires que nous désirions faire devant cette commission. Je crois que M. Steele a quelque chose à ajouter si la commission le permet, M. le Président.

M. Steele (Ernie): Merci, M. de Billy. J'aimerais ajouter peut-être quelques mots sur un sujet spécifique. Je crois que la publicité auprès des enfants est un sujet très complexe. Dans notre industrie, à ce moment, il y a un grand débat sur le sujet de la nourriture, sur la nécessité d'insister, dans l'éducation des enfants et même des adultes, sur les normes de bonne santé; c'est un problème dont s'occupent aussi les gouvernements, fédéral et provinciaux. Je crois que, dans le Québec, en ce moment, il y a un projet pour affecter $51 millions à Montréal pour aider les écoles à servir des repas aux écoliers. C'est aussi un problème de convaincre les parents et les enfants de coopérer avec ce projet. A notre avis, il sera nécessaire d'encourager la publicité commerciale, d'aider à mousser ce projet et d'aider les autres. Nous discutons en ce moment avec les fonctionnaires fédéraux, par exemple, au ministère de la Santé pour inciter tous les media à participer à la tâche d'éduquer le public dans ce domaine. Notre opinion est que ce n'est pas le temps de prohiber tous les messages auprès des enfants. Nous croyons que la loi 45 du Québec donne les pouvoirs de réglementer la publicité et nous appuyons les efforts que donne le conseil des normes à Québec pour éliminer toute publicité qui a pour but de faire pression sur les parents.

Nous préférons continuer avec ce régime et peut-être renforcer l'opinion du ministère. Il y a des problèmes, c'est sûr.

M. le Président, nous recommandons, comme M. De Billy l'a indiqué, après les délibérations de la commission et de l'Assemblée nationale, que si on ne peut pas modifier cet article, on puisse peut-être faire une exception pour tous les produits comestibles, les produits d'alimentation et les breuvages.

Comme je l'ai indiqué, il y a beaucoup de projets d'éducation dans ce domaine. Merci.

Mme Bacon: M. le Président, j'ai écouté à nouveau avec beaucoup d'attention, ce matin, les différents arguments qu'on veut bien nous présenter concernant la publicité destinée aux enfants. Je n'avais pas l'intention de reprendre tous les arguments que j'ai déjà exposés pour tenter de justifier mon point de vue et le point de vue du législateur quant aux articles 163 et 164.

On nous a fait valoir, au cours de mémoires précédents, certains projets à caractère social, par exemple, ou à caractère culturel, que des commerçants voudraient entreprendre ou ont déjà entrepris. Loin de nous cette idée de prohiber tout projet ou toute initiative à caractère social ou culturel que certains commerçants ou certaines compagnies voudraient entreprendre. Nous avons parlé — il est évident — de publicité à but commercial et nous osons croire que, lorsqu'on veut entreprendre une publicité à caractère social, on a éliminé tout but commercial. Si nous en restons à cette préoccupation sociale quand on parle du bien-être de l'enfant, par exemple, ou le souci de ce bien-être qui préoccupe les membres de cette commission, comme les personnes qui viennent ici s'adresser à nous, présenter des mémoires, je pense que nous avons tous ces préoccupations et nous voulons tous tenter, par différents moyens, d'atteindre les enfants, les parents. Quand on pense, par exemple, à la consommation du lait, certains aliments qui sont nécessaires pour les enfants, nous en sommes. Mais ce que nous voulons éliminer, c'est cette pression, cette sollicitation par différents moyens publicitaires, ces pressions exercées sur les enfants qui n'ont pas le pouvoir d'achat, ce sont les parents qui ont le pouvoir d'achat et ces enfants servent, à ce moment-là, d'otages pour les marchands par rapport à la relation qui devrait exister avec leurs parents.

Je pense que c'est surtout ce genre de publicité que nous voulons éliminer par l'article 163. Le principe même de cet article, pour nous, est défendable et nous avons tenté de le faire au cours des dernières séances de cette commission parlementaire et nous continuerons à le faire. Nous ne sommes pas encore complètement sensibilisés ou gagnés par cette sensibilisation qu'ont tenté de faire différents groupes quant à cette publicité à but commercial qui est encore nécessaire, d'après certains groupes.

Quant aux media d'information, aux agents de publicité, je n'en serais pas tellement inquiète parce que, si nous avons connu, dans le passé, de très bonnes agences de publicité, nous en connaissons de nouvelles, nous en avons rencontré quelques-unes, ce qui doit les caractériser, c'est beaucoup d'imagination et de créativité. Les bons agents de publicité ou les media d'information, avec lesquels ils ont à transiger, doivent déjà commencer à préparer une programmation qui serait différente de celle qui existe en ce moment, qui exercerait moins de pression sur les enfants et qui s'adresserait aux parents. Je fais confiance aux agents de publicité du Québec pour avoir assez de créativité et d'imagination pour changer leur façon de travailler et diriger cette pression, qui existe sur les enfants en ce moment, vers ceux qui sont les véritables consommateurs et qui ont le pouvoir d'achat, c'est-à-dire les parents.

Je n'ai pas l'intention d'aller beaucoup plus loin, M. le Président, ce matin. J'accepte avec beaucoup de sympathie les représentations qu'on a tenté de nous faire. M. De Billy a mentionné qu'il avait lu la transcription des séances précédentes; alors, il connaît très bien toute ma pensée là-dessus.

J'aurais quelques questions concernant les primes, à l'article 158. Je pense que certaines compagnies qui sont représentées ici offrent des produits et en même temps des primes avec ces produits. Est-ce qu'il est possible de savoir, d'abord, quels sont les produits offerts avec des primes et s'il y en a qui sont offerts sans prime, ou si c'est une pratique générale, courante d'offrir tous les produits qui sont représentés ici ce matin avec des primes? Est-ce qu'il y a des situations où on n'offre pas de prime?

M. Steele: C'est mon opinion, Mme le ministre, que dans les grands magasins, les supermarchés, parce que nous avons beaucoup d'exemples des produits qui continuent d'offrir des primes et d'autres à côté...

Mme Bacon: Qui ont cessé.

M. Steele: Oui. Il y a donc un bon choix pour les consommateurs. C'est l'opinion des compagnies qui ont utilisé cette forme de promotion que les primes aident à la vente de leurs produits. Je crois que les grandes compagnies qui manufacturent les céréales et les savons sont ici pour assister à cette présentation, et je crois que dans ce domaine il y a beaucoup d'inquiétude...

Mme Bacon: D'accord.

M. Steele: ... concernant les céréales et les savons. Je veux laisser ces groupes parler sur ce sujet.

Mme Bacon: A la page 10 de votre mémoire, vous déclarez que certains indices vous permettent de croire que le produit contenant la prime serait favorisé à plus de deux contre un par rapport au même produit sans la prime. Est-ce que vous avez des indices à cet effet? Est-ce qu'il y a des études de faites ou entreprises par votre groupement?

M. De Billy: M. Moyes va répondre sur ce point si vous le permettez, M. le Président.

M. Moyes (Phil): Oui, nous avons des études qui ne sont pas très profondes là-dessus, parce que, en effet, on n'a pas eu l'occasion d'étudier le même produit avec et sans prime.

Mme Bacon: Ah! bon.

M. Moyes: Mais ce qu'on a comme choix pour le consommateur, c'est essentiellement le choix entre une marque avec prime et une autre marque semblable sans prime. Là est le choix du consommateur.

Mme Bacon: II y aura toujours un choix pour le consommateur, d'accord.

M. Charron: M. le Président, M. De Billy, si vous avez lu les transcriptions du journal des Débats, vous devez savoir aussi qu'il n'est pas besoin de répéter notre position; il y a vraiment unanimité de la commission sur cette question. Mais vous avez voulu attirer notre attention sur la publicité de produits alimentaires comme tels en nous faisant remarquer que si nous avions peut-être raison sur d'autres produits, par exemple les jouets, nous devrions peut-être assouplir notre position sur les produits alimentaires. Vous êtes sans doute au courant, si vous avez travaillé sur ce dossier, du résultat d'une enquête menée au Québec par 40 bénévoles de l'Association des consommateurs du Canada, section du Québec, qui ont fait l'étude de produits annoncés durant des émissions de télévision destinées aux enfants, donc entre quatre heures et six heures, au cours du mois de février 1975, ce qui nous reporte quand même pas trop loin, de sorte que cela a encore une certaine valeur. Huit postes de télévision ont été soumis à un examen systématique. Les résultats de cette étude de produits annoncés nous permettent de conclure qu'une très grande partie de la publicité télévisée durant les émissions destinées aux enfants, soit 41,8%, portent sur la promotion d'habitudes alimentaires qui vont à rencontre d'une saine alimentation. On constate, par exemple, que 17,9% des commerciaux portent sur des tablettes de chocolat; 4,1% sur de la gomme à mâcher; 2,6% sur des friandises; 13,6% sur des céréales sucrées; 1,8% sur des eaux gazeuses.

Face à ce déferlement, l'importance des messages de l'Ordre des dentistes, qui conseillent aux enfants de brosser leurs dents, est de moins de 1% des commerciaux. Les incitations à faire de l'exercice, genre Participaction, pour que les enfants dépensent le surplus d'énergie accumulé par autant de sucre, sont de moins de 1% des commerciaux et paraissent dérisoires, dit cette étude.

Je voudrais vous demander, à la suite de ces statistiques, M. De Billy, si vous croyez ou si vous accepteriez l'hypothèse que la publicité de produits alimentaires destinés aux enfants soit accompagnée, à la fin du message télévisé, surtout lorsqu'il s'agit de produits comportant autant de calories, d'un avis semblable à celui que le ministère de la Santé nationale oblige les fabricants de cigarettes à déposer désormais, c'est-à-dire que la publicité, le message publicitaire devrait comporter nécessairement une période, un nombre de secondes où paraît très clairement un avis disant: Attention, l'abus de sucre cause chez les jeunes des caries dentaires souvent irrémédiables et peut conduire à une très mauvaise dentition. Ou: Attention, les céréales sucrées, que nous vous conseillons pour le petit déjeuner, comportent des dangers pour vos dents ou des dangers pour l'ensemble de votre santé physique.

Je vous demande cela non pas comme suggestion, mais en même temps pour savoir pourquoi les gens, dont vous êtes le procureur aujourd'hui, qui sont sans doute au fait de ces statistiques que je vous ai énumérées, puisque c'est eux qui paient ces commerciaux, et qui sont sans doute au fait aussi que leurs produits, lorsqu'ils sont trop consommés par les enfants, conduisent, comme nous l'avons établi à une séance de la commission des affaires sociales à un autre mo-

ment avec le ministre des Affaires sociales, à une mauvaise nutrition et à une mauvaise dentition chez les enfants, pourquoi n'ont-ils pas joint à leur publicité des avis semblables s'ils étaient au courant?

M. De Billy: Evidemment, c'est rare que, dans des messages publicitaires, on va dire: Mangez de la laitue, des légumes ou des choses qui seraient peut-être plus nécessaires à une diète balancée. Les parents ont un certain rôle à jouer dans la préparation des repas des enfants. Quant à la question que le député me pose, si les manufacturiers de produits alimentaires seraient disposés à ce qu'en même temps, il y ait une espèce de mise en garde, moi, je ne suis pas assez versé dans la diète pour savoir si l'enfant n'a pas besoin de beaucoup plus de sucre et de calories qu'un adulte. Peut-être que M. Langbo, qui est le président de Salada-Kellogg, pourrait donner ses commentaires.

Je me rappelle, lorsque j'étais jeune, il y a quelques années, j'allais au collège de Victoriaville et on nous donnait, pour collation, une tartine de mélasse. Evidemment, c'est parce qu'il nous fallait du sucre. Je pense que c'était psychologique. A cette heure-là, après la classe... Est-ce que cela pouvait affecter notre dentition? Je l'ignore. Maintenant, les enfants vont prendre une tablette de chocolat, ils vont prendre un gâteau Vachon, qu'on appelle Mae West, ou d'autres choses. Je pense que c'est probablement nécessaire au point de vue physiologique qu'après avoir pris son repas vers midi, à quatre heures, après la classe, l'enfant, avant de retourner jouer ou travailler, a besoin de sucre.

M. Charron: M. De Billy, je ne nie pas cela du tout. Je suis convaincu, plus que n'importe qui, que les enfants ont besoin de sucre, cela fait partie de la croissance normale. Mais 17,9% des messages télévisés, c'est un sur cinq, à peu près. Sur cinq minutes de publicité télévisée, il y en a une qui l'invite. On revient à toute notre entente. Un enfant n'a pas le jugement pour résister à cela quand, une minute sur cinq, il se fait suggérer de dévorer du chocolat.

On peut croire qu'il va en consommer de façon abusive, c'est-à-dire au-delà de ce qui lui est nécessaire, d'autant plus que sa dentition, jusqu'à l'âge de onze ou de douze ans n'est absolument pas formée encore, donc elle est sans protection. Vous connaissez la statistique, les jeunes Québécois ont la plus mauvaise dentition parmi tous les Canadiens.

M. De Billy: M. le Président, est-ce que ces statistiques n'indiquent pas qu'on fait de la publicité sur les articles où l'enfant et le consommateur ont le choix? Il n'y aura pas de publicité aux enfants leur demandant de choisir entre le pain Vaillancourt et le pain Gai-Lu-Ron, ou entre le beurre Coop et du beurre Laval, parce que c'est la mère qui le fait. Evidemment cela semble une proportion démesurée, comme vous le mentionnez, mais c'est parce que ce sont des articles où l'enfant a presque un choix. Il va l'acheter souvent lui-même, sa tablette de chocolat ou son eau gazeuse, et ce ne sont pas nécessairement des produits très recornmandables. Je ne pense pas que ce soient des profuits nocifs, mais peut-être qu'on serait mieux de s'en passer.

M. Charron: C'est comme la boisson, pour les adultes, ce n'est pas nécessairement nocif...

M. De Billy: C'est comme le tabac...

M. Charron: ...c'est même agréable, mais c'est toujours l'abus, et il y a des adultes qui ne résistent pas à l'abus. Chez les enfants, qui ne sont pas équipés en jugement, c'est tout à leur honneur d'ailleurs, pour être en mesure de déterminer ce qui est bon pour leur santé, il faut plutôt solliciter les parents.

Je vous donne un autre exemple, M. De Billy, et là je le fais sous toute réserve. De l'avis de quelqu'un que je connais, les bonbons Smarties qui existent, cela c'est vraiment de la publicité destinée aux enfants dans le sens de celle qu'il faut interdire. On a mécanisé la boîte de bonbons qui s'ouvre, les bonbons de différentes couleurs s'alignent, font des cercles, font des images, et ces bonbons-là, pour être encore plus attirants pour les enfants, sont dotés de différentes couleurs.

S'ils étaient tous blancs, probablement que le produit serait moins tape-à-l'oeil pour l'enfant. Il est évident que quand vous ouvrez une boîte, que vous les lancez sur la table, c'est attirant. Un ami dentiste m'a dit que le colorant dont on se sert pour passer du rose au jaune, au rouge, au vert sur ces bonbons est extrêmement nocif et est fait d'un produit chimique qui demeure sur les dents, qui colle sur les dents. D'ailleurs, les enfants qui en ont mangé ont souvent toutes les couleurs imaginables dans la bouche à la fin de la boîte. Ce colorant, dit-il, qui est, en fait, un matériel publicitaire destiné aux enfants, est très nocif pour la dentition des enfants. Mais on s'est dit, si on les met tous blancs, les enfants n'en voudront pas. Alors quitte à nuire à la dentition des enfants, mais pour vendre le produit, on les a colorés avec ce matériel qui a conduit à ce résultat. Je voudrais entendre les commentaires.

M. Steele: M. le Président, deux mots seulement. Le député a fait une comparaison un peu dure, je crois, entre le tabac et les aliments. Au Canada, peut-être aux Etats-Unis aussi, la consommation per capita des produits sucrés n'a pas changé depuis cinq ou sept ans, malgré la publicité. Au sujet des couleurs dans les aliments, je peux vous assurer que le fédéral, la Direction des aliments et drogues a des règlements très sévères sur cela.

M. Charron: Je voudrais aborder une autre question, celle des primes. Les céréales sont les principaux produits alimentaires avec des primes

dont vous avez parlé. J'ai, ici, l'enveloppe d'un produit alimentaire destiné aux enfants, les Toffee twist, toujours dans la langue officielle du Québec, et qui sont dotés d'une prime.

Je ne sais pas ce que vaut le produit à l'intérieur, mais je vous lis ce qui est écrit à l'extérieur de l'enveloppe: "Get a real plastic Adventure Club credit card just like that, plus a special discount premium list. Send $0.30 and a coupon." Je pense que le coupon est après cela. Non, c'est cela le coupon. Là, évidemment en français: "Obtenez une vraie carte de crédit Club d'Aventures en plastique tout comme celle de papa, plus une liste d'articles de primes à rabais spécial. Envoyez $0.30 plus un coupon." Adventure Club, boîte postale 2145, Grand Central Station, New York, New York, 10017, USA. Le coupon, c'est celui-ci. Tous les parents, je l'espère, vont comprendre que c'est abuser des enfants et détruire en quelque sorte ce que les enfants ont de plus respectable en les amenant de force, à partir d'un produit qu'ils goûtent, dans toute l'aventure des cartes de crédit, alors qu'ils n'ont même pas l'âge et qu'ils veulent tout simplement probablement manger quelque chose de bon, un produit alimentaire qui va leur apporter des calories suffisantes pour dépenser leur énergie. Si ce ne sont pas là des abus à l'endroit des enfants, il n'y en a pas.

M. Steele: M. le Président, ce n'est pas mon intention de défendre ce produit. Il y a beaucoup d'exemples qui, à mon point de vue, sont bizarres, mais le problème est celui-ci. Est-ce que vous prohibez toute la publicité, parce que nous avons quelques exemples comme cela?

M. Charron: Cela ne nous aide pas à nous en convaincre, en tout cas, je dois vous le dire. J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Alors, je remercie...

M. De Billy: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): ... M. De Billy et Fabricants canadiens de produits alimentaires pour avoir bien voulu répondre aux questions ainsi que pour la présentation de ce mémoire. Merci beaucoup.

Nous entendrons maintenant le Club automobile du Québec, avec M. Claude Dufresne.

Club Automobile du Québec

M. Dufresne: Mme le ministre, M. le Président, distingués membres de la commission parlementaire, avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais d'abord vous présenter les deux personnes qui sont avec moi: A ma droite, Mme Monique Tardif, qui est directeur du service de protection du consommateur au Club Automobile du Québec, et à ma gauche, M. Marc Turcot, qui est directeur général du Touring Club de Montréal, notre homologue dans la région de Montréal.

Nous voudrions vous faire part de nos commentaires et recommandations sur le projet de refonte de la Loi sur la protection du consommateur. Nous aimerions expliquer aussi les raisons et les buts de notre intervention. Organisme sans but lucratif et membre constituant de l'Association canadienne des automobilistes, le Club automobile du Québec et le Touring Club de Montréal regroupent 108 000 automobilistes dans la province de Québec. Nous croyons donc que notre représentativité ne peut être mise en doute, lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts des consommateurs automobilistes. C'est d'ailleurs dans le but de mieux informer et de protéger ces derniers, que nous avons mis sur pied, il y a trois ans, un service de protection du consommateur et un service de vérification technique. Il y avait dans ces domaines un vide à combler. Il allait de soi que c'est à l'intérieur d'un club automobile que les deux services pouvaient le mieux s'articuler. Jusqu'à présent, avec les possibilités qui nous étaient offertes, nous avons tenté de répondre aux très nombreuses plaintes et demandes de renseignements qui nous parvenaient. La loi 45 était malheureusement muette sur le sujet des garanties de réparation d'automobile et de vente de véhicules usagés. Il va sans dire que l'adoption du projet de loi no 7 nous fournirait un outil devenu indispensable pour notre travail et assurerait dans l'un des domaines des plus importants de la consommation une protection qui ne peut être considérée comme un privilège, mais comme un droit.

Je vous remercie de votre attention et je cède maintenant la parole à Mme Tardif, directrice de notre service de protection du consommateur, afin qu'elle vous fasse part d'une recommandation concernant divers points du projet de loi.

Mme Tardif (Monique): M. le Président, bien que nous approuvions de façon générale, la nouvelle rédaction de la Loi sur la protection du consommateur, nous croyons utile de souligner certains aspects qui, à notre avis, méritent d'être considérés à nouveau. On comprendra évidemment que nous avons préféré limiter notre intervention au domaine qui nous est familier. Nous croyons que l'expérience que nous avons acquise dans le domaine de l'automobile nous habilite à vous faire part de certaines recommandations.

Comme vous avez déjà en main le mémoire que nous avons présenté, nous aimerions nous attarder sur certaines recommandations, par exemple à la page 2, les articles 7, 8 et 9. Le but visé par ces articles est de rendre sans effet les stipulations qui y sont décrites. L'expérience démontre que la très grande majorité des consommateurs ont la certitude que toute clause comprise dans le contrat qui leur est soumis par un commerçant, qu'elle soit sans effet ou non en vertu de la loi, est une clause qui leur est opposable.

Ils considèrent que leur signature sera interprétée inévitablement comme une acceptation de toutes les stipulations comprises au contrat. En effet, il arrive fréquemment que des consommateurs

se font répondre par le commerçant: Lisez votre contrat, c'est écrit noir sur blanc, vous avez signé. Malheureusement, suite à ces rebuffades, rares sont les consommateurs qui vont continuer à vouloir faire valoir leurs droits. Nous recommandons que ces stipulations, au lieu d'être frappées de nullité, fassent plutôt partie des pratiques interdites. A ce moment-là, ce qu'il va y avoir sur le contrat du consommateur, va être vrai et non pas des choses qui vont être défendues par la loi et qu'il ne sera pas en mesure de vérifier.

A l'article 12, on dit que le commerçant doit indiquer le lieu de sa place d'affaires et que ce lieu est l'adresse du commerçant. Evidemment, on est d'accord avec cette disposition, mais il est arrivé, dans la pratique, certains cas où les recours du consommateur étaient illusoires dans le cas des multinationales qui font affaires dans la province de Québec par des concessionnaires. A un moment donné, ils font faillite ou ils se retirent des affaires. Toute la publicité a été faite au nom de la compagnie qui vend des concessions et le recours du consommateur est absolument nul. Il ne peut pas, il a acheté une garantie d'une multinationale qui était bonne dans tout le Canada et il se retrouve devant rien parce qu'on a fermé une concession donnée et il en existe d'autres à travers le Québec qui ne veulent pas respecter une garantie donnée par le concessionnaire, sous le nom d'une multinationale.

Dans les projets de l'Office de révision du code civil, spécialement dans le rapport sur la vente et le rapport sur les sûretés réelles, on parle de promouvoir l'établissement, à l'Office de protection du consommateur, d'un centre de dépôt pour certaines procédures ou certaines compagnies qui pourraient établir, comme place d'affaires... se référer à l'Office de protection du consommateur. Les multinationales pourraient, à un moment donné, être obligées, par la loi, de procéder de la même façon, à ce moment-là, le consommateur du Québec aurait toujours une possibilité et ça donnerait quand même du sérieux à ces compagnies.

A l'article 20, "Le commerçant doit remettre un exemplaire du contrat au consommateur ainsi qu'aux cautions de ce dernier."

A l'article 21, "Le consommateur n'est tenu à l'exécution de ses obligations qu'à compter du moment où il est en possession de l'exemplaire qui lui est destiné."

Nous sommes bien d'accord avec tout ça. Maintenant, il arrive des cas où le consommateur, à qui on n'a pas remis une copie du contrat, pourrait faire la preuve qu'effectivement un contrat existe. Là, il n'y a aucun moyen de le faire s'il n'a pas reçu sa copie de contrat. Pourquoi ne pas exiger, s'il y a signature du contrat, que le consommateur soit immédiatement mis en possession de cet exemplaire? C'est ce que nous recommandons pour les articles 20 et 21.

A l'article 30, on parle de garantie, "le commerçant ne peut se libérer de la garantie sans une renonciation écrite de la main du consommateur." Il y a déjà eu des commentaires faits sous cet article.

Certaines personnes du ministère ont répondu que le ministère voulait que la renonciation soit écrite de la main du consommateur et que ce ne soit pas simplement une signature.

D'après la rédaction de l'article, on pourrait peut-être l'interpréter de façon qu'une simple signature pourrait suffire. On a donc pensé qu'il y avait peut-être moyen de modifier la rédaction de l'article dans le sens de l'article 850 du Code civil et plutôt demander une renonciation écrite en entier et signée de la main du consommateur. A ce moment-là il n'y a pas moyen de l'interpréter autrement.

A l'article 38, dans les contrats de vente d'une automobile, on dit qu'il y a une exclusion en (b) pour les ventes d'automobiles par les vendeurs itinérants, pour toute la section des vendeurs itinérants. Cela nous laisse perplexes. Nous nous demandons si cela ne pourrait pas amener à des abus simplement parce qu'un contrat qui est signé à l'adresse du commerçant n'est pas soumis aux dispositions de la loi. Est-ce que cela n'empêcherait pas un vendeur itinérant de demander un permis de vendeur itinérant et de faire sa sollicitation de cette façon et d'amener le consommateur à signer chez le commerçant pour ne pas être soumis à la loi? On verrait beaucoup plus la suppression de cette exclusion et peut-être l'exclusion complète des marchands d'automobiles de la définition de commerçants itinérants.

A ce moment, c'est clair, ils ne sont pas touchés et ne sont jamais considérés comme vendeurs itinérants, au lieu d'en faire simplement une exclusion pour un contrat qui est signé chez eux. Il me semble que cela serait plus clair et plus facile d'interprétation pour le consommateur.

A l'article 52, qui a une très bonne valeur, "le commerçant doit fournir au consommateur un certificat attestant que l'automobile usagée satisfait aux normes d'inspection mécanique..." Si l'on réfère aux Statuts refondus, chapitre 231, tout ce qu'on trouve c'est que toute personne est tenue, telle que demande lui en est faite par le ministère des Transports, par ses préposés ou par toute autre personne chargée de l'application de la loi, de soumettre le véhicule automobile dont elle est propriétaire ou qu'elle conduit à une inspection ayant pour but de s'assurer que les freins, les appareils de direction et les autres parties et accessoires servent à prévenir les accidents et sont en bonne condition.

La certification mécanique qui est actuellement dans les Statuts refondus et qui fait partie du Code de la route nous apparaît quand même toucher certains points qui ne donnent pas grand-chose comme renseignements au consommateur. Nous nous demandons si ce certificat va faire partie du contrat et s'il n'y aurait pas lieu de le remplacer par une vérification technique complète qui va permettre au consommateur de connaître l'usure du véhicule usagé qu'il achète, plutôt que simplement lui dire qu'au moment de la vérification ses freins sont bons — il ne sait pas pour combien de temps, ils sont peut-être bons pour 1000 milles — qu'il y a des clignotants qui fonctionnent... A ce moment, cela ne donne pas une

idée réelle de la valeur du véhicule qu'il pense acheter. Ce sont des points qui pourraient s'avérer ne pas être bons dans un mois, n'avoir aucune valeur finalement.

On a, d'ailleurs, inclus avec notre mémoire une liste des vérifications qui, si elles étaient faites, pourraient quand même donner une idée de la valeur réelle du véhicule.

L'article 53 concerne les garanties pour les ventes de véhicules usagés, garanties de deux mois 50/50. Cette garantie nous semble illusoire et dans les cas que nous avons eu à traiter quand il y a une garantie 50/50, il y a souvent exagération au moment d'une réparation. L'évaluation, c'est le commerçant qui va la faire, la réparation également; le consommateur n'a pas le loisir d'aller voir ce que lui coûterait la même réparation ailleurs parce qu'elle doit être faite chez le commerçant.

Cela m'apparaît donner beaucoup de liberté du côté du commerçant et pas tellement de sécurité du côté du consommateur. On proposerait plutôt une garantie complète de deux mois sur le moteur et le rouage d'entraînement. D'autre part, nous avons pris connaissance des recommandations de la commission des services juridiques et nous trouvons que ce qui a été proposé dans ses rapports est souhaitable.

Nous serions prêts à appuyer la recommandation des services juridiques sur les garanties des véhicules usagés. Cela pourrait répondre au besoin des consommateurs.

A l'article 58, l'action basée sur l'article 53 devrait être intentée dans les 30 jours de l'expiration de la garantie. Ce délai de 30 jours nous apparaît extrêmement court et constitue une restriction aux droits d'un consommateur plutôt qu'un avantage, parce que, selon ce qui se fait actuellement, on pourrait prendre plus de 30 jours avant de prendre action dans ces cas.

A l'article 59, l'avis qui peut être verbal et qui doit être donné par le consommateur pendant la période de garantie est un avis d'intention d'exercer un recours et il nous semblerait plus normal d'exiger que, pendant la période de garantie, le consommateur avise le commerçant du défaut affectant son véhicule et demande les réparations nécessaires à son bon fonctionnement. Si, à la suite de cette demande, le commerçant ne veut pas faire la réparation nécessaire, à ce moment, il pourrait s'adresser au tribunal, mais que son recours au tribunal ne soit pas limité par un avis verbal d'intention pendant la période de garantie. A ce moment, peut-être que le problème va se régler, peut-être qu'il ne se réglera pas. Si le problème se règle, à ce moment, il n'y aura aucun besoin d'aller devant les tribunaux et cela va éviter un paquet d'avis qui devraient être donnés au cas où...

Pour toute la section des articles 52 à 61, ces nouveaux articles inclus au projet de loi nous apparaissent susceptibles de permettre au consommateur de mieux connaître ses droits et ses obligations lors de la signature d'un contrat d'achat d'une automobile usagée conclu avec un commerçant. Cependant, pour permettre une dif- fusion rapide et efficace des droits et recours du consommateur, nous recommandons que non seulement l'article 53, mais toutes les dispositions des articles 52 à 61 soient obligatoirement reproduites dans le contrat pour en faire partie intégrante. A ce moment, c'est bien beau de dire qu'il a un droit, mais s'il y a des limites à ce droit, il faut quand même le prévenir également que ce droit pourra tomber s'il ne se soumet pas à ses obligations.

L'article 60 prévoit le transfert de garantie à tout acquéreur subséquent d'une automobile usagée. Nous sommes d'accord avec cet article et on aimerait qu'il soit également étendu à la section "réparations d'automobiles". On a vu bien des cas où il y a eu une garantie de réparation de donnée; la voiture change de main, l'acheteur croit qu'il va bénéficier de la garantie de réparation qui a été donnée à l'ancien propriétaire et, quand il veut s'en prévaloir, on lui dit tout simplement que la garantie n'était pas transférable. Ce n'est quand même pas une garantie personnelle, c'est la garantie d'une réparation sur un véhicule. A ce moment, pourquoi ne suivrait-elle pas le véhicule et non pas la personne?

L'article 75 prévoit une garantie de bon fonctionnement des pièces réparées ou remplacées durant un mois ou 1000 milles. La majorité des garagistes offrent actuellement une garantie qui est plus élevée que cela. C'est bien évident que si la loi donne un minimum de 1 mois ou 1000 milles, la tendance va aller en s'accentuant vers cette garantie minimale. Nous recommandons qu'on donne plutôt une garantie de trois mois ou 3000 milles, ce qui apparaît normal si la réparation a été bien faite.

A propos de l'article 270 qui vise les règlements, nous croyons que l'objectif visé par le projet de loi no 7 comme future loi de la protection du consommateur pourrait être difficilement atteint si les règlements adoptés en vertu de la loi 45 demeuraient en vigueur. En effet, les règlements n'ont jamais répondu aux caractéristiques essentielles d'un texte s'adressant au consommateur, qui sont la clarté et la précision. Si ce projet de loi est adopté sans un nouveau règlement, l'interprétation en sera rendue encore plus difficile par les références incessantes qu'il faudra faire à la loi actuelle et à ses règlements. Nous recommandons donc que le règlement général relatif à la loi de la protection du consommateur soit rédigé à nouveau pour en simplifier la compréhension et pour tenir compte des dispositions nouvelles du projet de loi.

En terminant cette revue de nos principales recommandations concernant le projet de loi no 7, nous tenons à exprimer de nouveau notre satisfaction de voir la loi concernant la protection du consommateur québécois se préciser en tenant compte de l'expérience vécue.

Il ne faudrait sans doute pas penser que les modifications suggérées sont des critiques à l'égard du gouvernement. Nous voulons donner notre appui à toutes ces importantes améliorations qui sont contenues dans le projet de loi. Je

pense spécialement aux articles 148, 149, 150 qui concernent l'odomètre. Il y a également l'article 172, qui concerne les ristournes accordées au commerçant sur simple considération de la cession d'une créance. Il peut y avoir d'autres cas où cela pourrait être légitime mais s'il s'agit simplement d'une cession de créance, à ce moment-là, il ne devrait y avoirni ristourne, ni boni.

Soyez assurés de riotre entière collaboration non seulement dans la défense des droits du consommateur mais encore dans la recherche des moyens à prendre pour prévenir qu'il ne devienne la victime d'un système pour lequel l'objectif premier n'est pas toujours la satisfaction de ses besoins réels mais parfois l'obtention d'un profit à l'égard duquel le consommateur ne devient qu'une simple occasion d'affaires.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je voudrais mentionner, ce matin, avant de faire quelques remarques, que nous avons pris connaissance de votre mémoire avec beaucoup d'attention et d'intérêt. Vous avez voulu, par certaines remarques ou certaines suggestions, faire connaître je ne dirais pas votre désapprobation de certains articles mais peut-être votre intention de nous permettre d'améliorer davantage certains articles de cette loi tout en acceptant, en mentionnant votre appui sur certains autres articles qui sont pour nous très importants dans la refonte de cette loi 45, la loi existante, cette refonte complète que nous tentons de faire en ce moment. Je voulais tout simplement mentionner cette appréciation personnelle sur les travaux qui ont été effectués par le Club Automobile du Québec.

Vous recommandez que la rédaction de l'article 5, par exemple, soit modifiée pour qu'il ne devienne applicable qu'au consommateur. Le problème posé par la rédaction de l'article 5 a déjà été discuté lors de la présentation d'autres mémoires, notamment le mémoire du Barreau, par exemple. J'aimerais rappeler ce matin que cet article sera réétudié, ceci en relation avec l'article 6.

Quant à un commentaire à faire sur les articles 7, 8 et 9, je pense qu'ils doivent se lire en étroite relation avec les articles 262 et 263 du projet de loi no 7, qui font des dispositions du projet de loi des dispositions imperatives auxquelles on ne peut déroger. Si vous faites une étroite relation avec ces deux articles, cela peut peut-être enlever certaines des appréhensions que vous avez mentionnées.

Quant à l'article 12, vous soulevez certains problèmes et nous prenons bonne note aussi de votre suggestion. C'est la même chose pour l'article 22.

L'article 27 a pour but de s'appliquer au domaine contractuel, soit à la vente ou au louage des biens ou des services. Et les déclarations et la publicité des commerçants manufacturiers ou publicitaires, si c'est erroné ou si les déclarations sont trompeuses, ils peuvent être affectés par le biais du livre II du projet de loi sur les pratiques interdi- tes. Je pense qu'à ce moment-là, on peut quand même avoir une certaine protection.

Quant à l'article 30, évidemment, vous nous suggérez une modification technique de cet article. Nous prenons note aussi de votre suggestion.

Quant à l'article 38, où vous suggérez l'exclusion de l'alinéa b), vous avez donné des raisons mais j'aimerais peut-être que vous expliquiez ces raisons. Pour moi, en tout cas, ce n'est pas suffisant.

Mme Tardif: D'accord. Si on fait une exclusion simplement au niveau du contrat qui est signé chez le commerçant, il va quand même y avoir une certaine ambiguïté vis-à-vis du consommateur.

Le commerçant d'automobiles pourrait être un vendeur itinérant, pas le commerçant, mais le vendeur; il pourrait agir comme vendeur itinérant et, à ce moment, amener la signature du contrat à se faire chez le commerçant, et il ne serait pas soumis aux articles de la loi. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, au lieu d'exclure simplement ce contrat qui est signé chez le commerçant, de plutôt dire: Le vendeur d'automobiles n'est jamais un vendeur itinérant et ne peut pas agir comme vendeur itinérant? A ce moment, s'il agit comme vendeur itinérant, il va être soumis à la loi comme les autres, et s'il n'agit pas comme vendeur itinérant, il y aurait moyen de l'exclure ou, pour faire une exception simplement pour un genre de contrat, celui qui sera signé chez le commerçant, on exclut simplement un contrat, à ce moment.

Mme Bacon: A l'article 51, vous ne croyez pas que le fait de mentionner le modèle, la marque du véhicule, en plus du numéro de série, l'année de fabrication, cela va augmenter la protection du consommateur?

Mme Tardif: Cela va nous permettre au moins de voir pourquoi il paie, quelles sont les options qu'on lui facture sur sa voiture neuve et ce qu'il donne en échange. Souvent, quand c'est du neuf, on achète la voiture avec des options qui ajoutent à la valeur de la voiture; quand on la donne en échance, on paie pour les neuves, mais pour l'échange on n'en a plus. Si l'évaluation du véhicule était toujours faite en fonction des options qui donnent une valeur à la voiture et qui sont quand même listées au "red book", à ce moment, la valeur de la voiture serait augmentée.

Si on le met en place du fait qu'il paie pour ces options et qu'il donne les mêmes options en échange usagées, il va peut-être penser qu'il a une valeur d'échange sur son véhicule qui est supérieure à celle de la voiture où il n'y a aucune option qui est donnée dans le "red book".

Mme Bacon: A un niveau plus général de la vente de voitures usagées, est-ce que votre association reçoit des plaintes de la part de consommateurs en tant qu'organisme spécialisé?

Mme Tardif: Oui, notre service ne s'occupe que de cela. Il y a deux points finalement...

Mme Bacon: Est-ce qu'elles varient selon les régions? Par exemple, pour la grande région de Montréal ou d'autres régions, est-ce qu'on a des plaintes différentes?

Mme Tardif: On retrouve finalement à peu près les mêmes problèmes à la grandeur de la province. Ce sont souvent des problèmes de communication et d'information; les gens s'informent après avoir signé le contrat, des choses comme cela. Mais s'ils avaient déjà au départ sur le contrat qu'ils doivent signer plus de renseignements, ils réfléchiraient peut-être, avant de le signer, sur la valeur de ce qu'ils achètent.

Mme Bacon: Est-ce que l'article 51, tel que rédigé, contiendrait des difficultés d'application qui seraient insurmontables, d'après vous?

Mme Tardif: Ce n'est pas tellement plus difficile finalement de mettre plus de renseignements que moins et, de toute façon, ils vont être obligés d'avoir certains de ces renseignements pour les transferts d'immatriculation; il resterait simplement la liste de l'équipement facultatif. Souvent, même dans une voiture neuve, on va faire un prix global, mais on ne détaillera pas le prix de chacun des articles. A ce moment, le consommateur pourrait quand même faire un choix en voyant, par exemple, que, pour une option qu'il ne veut même pas avoir, il doit payer $200 ou $300; peut-être qu'il hésiterait avant de prendre ce véhicule plutôt qu'un autre.

Mme Bacon: A l'article 53, vous croyez que le fait de maintenir la règle 50/50 aurait pour effet d'augmenter le coût. Est-ce que vous avez reçu des plaintes au sujet du coût des réparations pour le consommateur, par exemple? Est-ce qu'il y a eu des plaintes à votre association?

Mme Tardif: Oui. Dans presque tous les cas de plaintes sur les garanties de véhicules usagés, c'est toujours sur le 50/50. C'est qu'à ce moment, le consommateur va faire... pardon?

Mme Bacon: Excusez-moi, partout au Québec?

Mme Tardif: Oui, oui.

Mme Bacon: Ou si vous régionalisez?

Mme Tardif: Quand il y a un problème sur la garantie, c'est presque toujours cela, s'il y a une garantie de 50/50, à ce moment, le consommateur s'informe ailleurs, puis il s'aperçoit que la réparation pourrait être effectuée à la moitié du prix de ce qu'on lui demande. Il se dit alors: Qu'est-ce que vaut ma garantie? Finalement, cela me coûte aussi cher que si je le faisais réparer ailleurs.

Mme Bacon: A l'article 58, quand on pense au délai de 30 jours qui est prévu à l'article, est-ce que vous avez un délai à nous suggérer? On nous mentionne souvent que c'est trop court, ce délai de 30 jours.

Mme Tardif: Je pense qu'un délai de 90 jours serait quand même le temps de...

Mme Bacon: Ce serait le délai que vous suggéreriez.

Mme Tardif: Oui, à ce moment-là, en 90 jours, il y a quand même pas mal de problèmes qui peuvent se régler sans avoir recours au tribunal.

Mme Bacon: Vos suggestions, aux articles 52 à 61, nous semblent très intéressantes. Nous en prenons bonne note. Quant à l'article 60, il est évident que votre suggestion nous a semblé intéressante et nous sommes vraiment à réétudier la rédaction de cet article puisque des représentations semblables ont été faites par d'autres groupements. A l'article 75, vous mentionnez que la garantie minimum d'un mois, 1000 milles est nettement insuffisante. Je pense que c'est la première fois qu'on nous dit que les garanties exigées par le projet de loi ne sont pas suffisantes, d'après les groupes qui viennent nous rencontrer. Vous mentionnez trois mois, 3000 milles. Est-ce que vous vous basez sur des études ou des données que vous avez pour mentionner trois mois, 3000 milles?

Mme Tardif: Quand on parle d'une garantie de réparation d'un mois, 1000 milles, applicable à tout le monde, tous les automobilistes ne roulent quand même pas 1000 milles par semaine. Il y en a qui font très peu de millage et la garantie d'un mois, à ce moment-là, est très courte. Pour celui qui roule beaucoup, 1000 milles, c'est vite passé. Est-ce que cela donne réellement le temps de voir si la réparation a été bien faite? Ce n'est pas certain. Si on avait une période plus étendue, si on a fait faire une réparation assez considérable surtout, parce qu'on parle toujours de réparations au-dessus d'un certain montant, à ce moment-là, on pourrait s'attendre que la réparation dure au moins trois mois, 3000 milles.

Mme Bacon: Et vous ne l'appliqueriez qu'aux réparations?

Mme Tardif: Aux réparations.

Mme Bacon: A l'article 270, nous sommes en train de revoir les règlements actuels et à en préparer qui suivront la loi no 7. Notre intention a été de rapatrier, d'abord, le droit substantif à l'intérieur de la loi. Il est évident que quand on pense à des normes chiffrées, par exemple, on essaie d'en avoir le moins possible dans des lois, mais nous sommes presque obligés de les inscrire dans les règlements. Notre intention est de rendre encore plus clair et plus facile de compréhension l'actuel règlement.

Mme Tardif: Est-ce que les règlements vont être soumis à une commission parlementaire également?

Mme Bacon: Quelques suggestions nous ont été faites. Nous essaierons, autant que possible, de faire adopter cette loi. Evidemment, nous ne voulons pas faire traîner en longueur l'adoption du projet de loi no 7. Nous sommes déjà en train de faire des travaux sur la réglementation. Nous espérons la faire connaître le plus tôt possible.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: Merci. Je veux remercier très sincèrement le Club Automobile du Québec de la présentation de ce mémoire. J'étais convaincu que la présentation de ce mémoire serait à la hauteur des services que rend cette association aux automobilistes québécois. Effectivement, je pense que le tour d'horizon que vous venez de refaire de votre mémoire avec Madame le ministre nous permet de nous rendre compte à nouveau que vous avez pertinemment étudié le projet de loi et que vous nous faites des suggestions très valables, lesquelles — puis-je le signaler avant de me rendre à mon unique question, puisque le tour vient d'être fait — par exemple à l'article 51, méritent d'être retenues.

Lorsque vous nous suggérez — vous êtes le premier groupe, je crois, à le faire, mais avec beaucoup de justification — d'inclure dans le contrat lui-même toutes les applications de cette loi, on sera convaincu, je pense, après plusieurs jours d'audition sur ce sujet, en particulier sur la section de l'automobile, de la pertinence réelle de cette suggestion.

Madame le ministre s'est étonnée un peu du fait que vous nous suggérez, à l'article 75 — ce sera l'endroit de ma seule question — d'étendre une garantie de trois mois ou 3000 milles à toutes les réparations d'automobile. Que vous soyez le premier groupe à le faire, je le comprends, puisque, auparavant, nous n'avons eu à peu près exclusivement que des réparateurs d'automobiles et des garagistes qui n'ont vraiment pas forcé la note pour prolonger la garantie sur les réparations qu'ils faisaient. Je me pose une question, que j'ai posée à d'autres groupes, et j'ai reçu des réponses inquiétantes pour le consommateur.

Vous savez qu'une garantie se monnaye en quelque sorte; plus on va étendre, de par la loi, la valeur d'une garantie, plus le marchand se rend compte du risque qu'il prend lui-même en remettant une voiture à quelqu'un et il a tendance à se reprendre sur le prix.

Ici, vous nous parlez de réparations, j'y reviendrai tout à l'heure. Prenons la vente d'automobiles usagées, puisque la loi parle aussi, à l'article 52 ou l'article 53, de la garantie sur la vente d'automobiles. On s'est fait dire, à la table où vous êtes actuellement, par d'autres représentants, d'autres groupes, que, s'ils sont obligés de donner une garantie trop grande sur une minoune qui vaut $1000, ils vont monter lé prix de la voiture, parce que, si cela vaut $1000, si je l'ai mise à $1000, c'est parce qu'il y a bien des risques que le gars me revienne avec des ennuis un petit bout de temps après, parce qu'elle ne vaut pas plus que $1000 et, en 1976, pour $1000, ce n'est pas une très très forte voiture.

Alors, cette personne dit: Moi, si vous m'obligez à mettre une garantie, je vais être obligé de vendre mon auto $1500 ou $1400. Hier, M. Gi-guère, je pense, si je me souviens bien, un marchand d'automobiles de Québec, nous expliquait que lui, il va, si la loi devait être comme telle, vraisemblablement se donner un certain temps d'expérience pour voir combien la garantie lui coûte en frais réels et, s'il s'aperçoit que c'est $350 ou $400, il va rajuster ses prix en conséquence. En fin de compte, ceci nous mettait comme interrogation, à nous ici qui travaillons sur la protection du consommateur: Est-ce qu'on ne serait pas en train tout simplement de changer le fardeau de place, mais de ne pas mieux protéger le consommateur, puisque là, au lieu de se faire prendre dans les réparations, éventuellement, il se fait prendre dès le départ dans le prix de l'automobile, parce qu'il aurait à payer la garantie qui serait convenable?

Là, vous nous parlez, à l'article 75, de réparations d'automobiles et d'atteindre trois mois ou 3000 milles pour n'importe quelle réparation. Je vous pose la même question: Est-ce que vous ne croyez pas que, si on retenait votre suggestion, on se trouverait ni plus ni moins à inviter les réparateurs d'automobiles, les garagistes, spécialisés ou non, à être un petit peu plus "chèrants", comme on dit, dans leurs réparations, étant donné que, s'ils remplacent une pièce d'automobile, ils garantissent qu'elle va fonctionner sans ennui pendant trois mois? Moi, j'aimerais bien cette suggestion, parce que j'ai connu cette expérience le printemps dernier. J'ai effectivement fait moins de 1000 milles avec ma voiture avant d'être obligé de la rapporter, parce que les gens ne me l'avaient pas arrangée comme il faut, mais, n'ayant aucune garantie à ce moment-là, j'ai été obligé de payer encore une fois tout le temps puis tout le travail. Heureusement, la deuxième fois, elle était arrangée, mais je me dis: J'ai eu une facture inutile au départ, parce que je n'ai même pas fait 1000 milles; cela m'avait coûté $120 et ils ne l'avaient pas arrangée comme il faut.

Or, je serais très sensible à étendre cette protection à trois mois ou 3000 milles, mais est-ce qu'on n'entraîne pas une augmentation de coût?

Mme Tardif: D'abord, j'aimerais répondre à vos deux points. Je vais d'abord parler des réparations d'automobiles. Actuellement, la pratique est quand même, dans les bons garages, de donner trois mois, 3000 milles. Chez les concessionnaires, on a cela, il y a même des fabricants qui donnent, pour des réparations, six mois, 6000 milles, qui garantissent que leur concessionnaire va donner six mois, 6000 milles sur les réparations. On demande trois mois, 3000 milles. Cela ne m'apparaît quand même pas exagéré. Comme, dans le marché habituel, c'est à peu près ce qui se donne actuellement, pourquoi tout le monde ne le donnerait-il pas?

Si c'est écrit dans la loi, trois mois, 3000 milles, à ce moment-là, tout le monde va être obligé de le donner. Si on descend à un mois, 1000 mil-

les, c'est bien sûr que certains autres points de la loi pourraient augmenter les coûts des commerçants et cela pourrait aussi les inciter à descendre la garantie de réparation à un mois, 1000 milles, ce qui est le minimum exigé par la loi. C'est ce que j'ai peur qui se produise après que la loi sera en vigueur.

M. Charron: Quand vous nous dites que la pratique de trois mois, 3000 milles est déjà assez courante, c'est, j'imagine, dans les gros garages, ceux qui vont réparer 25, 30 voitures à la fois, avec beaucoup d'employés. Je vous pose la question, en fait: Est-ce que cela va avec la taille de l'entreprise? Avec sept ou huit mécaniciens, par exemple, pour tout cela, on n'a pas une pareille garantie actuellement?

Mme Bacon: On l'a même dans certaines stations-service. On l'a chez les commerçants, on l'a dans les ateliers spécialisés également. Alors, je pense que, si on veut être sérieux, ce serait la garantie qui pourrait devenir loi.

M. Charron: Tout à l'heure, vous vous êtes faits solidaires de la suggestion de la Commission des services juridiques, je pense, sur la garantie à la vente.

C'est ce qu'on a appelé la garantie graduée, c'est 1000 milles ou un mois, dépendant de la valeur de l'auto. Est-ce que, dans les réparations, on peut aussi avoir une garantie graduée en quelque sorte, dans le sens que, s'il faut une réparation de $400 sur mon auto, et que je la paie $400, j'aurais peut-être droit à une garantie un peu plus longue que si on me fait un travail de $50? Ou, croyez-vous que dans le domaine de la réparation, cela devrait être uniforme?

Mme Tardif: Je pense que, dans le domaine des réparations, cela devrait être uniforme, que je fasse changer simplement mon alternateur ou que je fasse refaire mes freins, à ce moment, ma réparation devrait durer au moins trois mois ou 3000 milles sans que je n'aie de problème, parce que là, je verrais l'uniformité à trois mois, ou 3000 milles. Pour revenir à ce que vous m'avez posé comme question tout à l'heure sur l'augmentation des coûts de vente de voitures usagées, s'il y a, par exemple, une garantie graduée, qui suivrait la valeur du véhicule, je pense qu'on pourrait éliminer deux problèmes. D'abord, la question de sécurité. Si je ne suis pas obligée de donner de garantie sur le véhicule, il y a des fortes chances qu'à ce moment, pour certaines "minounes", qui auraient besoin d'aller directement à la ferraille, vont être remises sur le marché, même avec l'inspection mécanique, parce qu'à ce moment, pour une question de moteur, il n'y a rien de prévu. Nous le demandons actuellement, mais il n'y a rien de prévu. Le moteur peut peut-être faire deux jours, et je peux peut-être me rendre au coin de la rue avec mon auto après la signature du contrat. Je peux avoir bien des problèmes, si je n'ai pas de garantie du tout. S'il n'y a pas de moteur dans la voiture, même s'il y a des freins qui, au moment de l'inspection, sont bons, qu'est-ce que cela me donne d'acheter cela? Il vaut mieux donner un peu plus cher pour une voiture usagée et être capable de rouler avec elle pendant un certain temps; si je l'achète, ce n'est pas pour aller la déposer dans la cour chez nous.

M. Charron: Oui.

Mme Tardif: Si cela augmente un peut le coût, j'ai peut-être des chances d'avoir plus de services avec le véhicule usagé que j'achète. Il y a la question de sécurité. Si j'ai une garantie sur mon véhicule, à ce moment, il est probable que tous les éléments de sécurité vont être vérifiés et je vais avoir une chance de ne pas être un danger public avec cette voiture.

M. Charron: D'accord. Hier, quand on a abordé cette question avec M. Giguère — je m'excuse de le traîner malgré lui dans le débat, c'est parce que cela a eu lieu hier à la fin de la séance — je posais la question sur la pratique des 50/50 de réparation des voitures usagées. Je pense ne pas trahir ce qu'il nous a dit, en nous expliquant que cela se faisait un peu à la bonne franquette. Si la voiture vient d'être effectivement vendue et que c'est quelques jours à peine — c'est lui qui nous disait cela — cela va arriver très souvent qu'on va dire au gars: Tu ne paies rien, c'est 100%. Si je rn'aperçois qu'il l'a maganée un peu, qu'il l'a forcée ou je ne sais pas quoi, là...

Je voudrais vous demander, puisque vous travaillez beaucoup à la protection des automobilistes québécois, si c'est comme cela que vous percevez également la situation, savoir qu'actuellement, sur cette question des 50/50, cela se fait un peu à la bonne franquette. Il y a des gens qui sont malchanceux, d'autres qui vont tomber sur un vendeur un petit peu plus conciliant, mais en fait, comme protection stricte, cela n'existerait pas.

Mme Tardif: C'est exactement ce qui arrive. Dans certains cas, on va obtenir très facilement la réparation complète, parce qu'on va accepter que c'était défectueux au départ. Dans d'autres cas, il va y avoir des procès d'intention, des procès de conducteurs. On va tenter de prouver, sans avoir réellement de preuves, on va le condamner à payer. A ce moment, il faudrait éliminer cela et procéder à une réparation complète. Si c'est bon, c'est bon. Pourquoi pas la garantie complète?

M. Charron: D'accord, je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Taschereau.

M. Bonnier: M. le Président, seulement une question. Je voudrais seulement vérifier auprès du Club automobile. On nous a fait valoir qu'il serait peut-être préférable dans une perspective de protection du consommateur que, dans le cas de

vente de voitures usagées entre consommateurs, on mette dans la loi que le consommateur est obligé également de donner une certaine forme de garantie, puisqu'on en exige de la part du vendeur d'automobiles commerçant. Quelle est votre expérience dans ce domaine?

Mme Tardif: M y a autant de problèmes pour des ventes de voitures usagées faites entre consommateurs que des achats conclus chez un commerçant, c'est bien évident. Si la nouvelle disposition de la loi 13 concernant la vérification mécanique était réellement une bonne vérification mécanique obligatoire pour le transfert de propriété, déjà, on réglerait une partie des problèmes; de même si on préconisait, dans la Loi sur la protection du consommateur, une vérification mécanique complète pour permettre au consommateur de connaître la valeur de ce qu'il achète. Evidemment, pour le consommateur, c'est peut-être plus difficile d'exiger une garantie parce que je pense qu'il y a quand même une présomption, le commerçant doit connaître le véhicule, être capable d'en faire une inspection et en connaître sa valeur. Souvent, le consommateur ne sera même pas au courant d'un problème à venir sur sa voiture. Il va pouvoir dire: Je suis rendu à 50 000 milles, peut-être que j'aurai des problèmes, j'aime mieux changer immédiatement; mais, peut-être qu'il ne sait pas exactement dans quel délai il aura des problèmes majeurs sur sa voiture.

Je pense que dans bien des cas, il n'est pas au courant, alors, il pourrait difficilement...

M. Bonnier: II pourrait quand même faire faire une inspection par un garagiste...

Mme Tardif: C'est ça.

M. Bonnier: ...avant de la vendre à un autre consommateur.

Mme Tardif: Oui, si ça devenait obligatoire pour le transfert de propriété, une bonne...

M. Bonnier: Est-ce que vous croyez que ce serait une bonne pratique?

Mme Tardif: Absolument, c'est la seule façon, parce qu'à ce moment-là, vous avez non seulement la partie qui est sécuritaire, mais vous avez en plus le taux de compression sur le moteur, il va connaître même l'usure de ses freins ou de ses pneus, il va savoir à quoi s'attendre de ce véhicule.

M. Bonnier: Merci.

Le Président (M. Lafrance): Merci M. Du-fresne, Mme Tardif et M. Turcot pour votre mémoire ainsi que pour vos réponses à nos questions.

Maintenant, nous entendrons le Conseil de l'alimentation du Québec et M. Léonard Roy.

Conseil de l'alimentation du Québec

M. Roy: Je m'appelle Léonard Roy, je suis vice-président exécutif du Conseil de l'alimentation du Québec. Compte tenu de vos habitudes, est-ce qu'on peut espérer avoir le temps nécessaire pour faire notre exposé avant la suspension des travaux?

Le Président (M. Lafrance): Oui.

M. Roy: Oui.

M. le Président, Mme le ministre, MM. les membres de la commission, je m'appelle, encore une fois, Léonard Roy.

Le Président (M. Lafrance): Vous pouvez vous asseoir.

M. Roy: Merci. Je suis vice-président du Conseil de l'alimentation du Québec. M'accompagne, Me Frédéric Raymond, administrateur du conseil et conseiller juridique.

M. le Président, le Conseil de l'alimentation du Québec vous remercie de lui permettre de vous présenter un ensemble de recommandations pertinentes à la refonte de la Loi sur la protection du consommateur. Le Conseil de l'alimentation du Québec est une fédération corporative qui regroupe la plupart des associations professionnelles d'affaires dont les membres sont engagés dans les grands secteurs d'activité économique de la transformation et de la distribution alimentaire au Québec. Sans se substituer aux organisations sectorielles existantes et sans nuire à leur autonomie, le Conseil de l'alimentation du Québec complémente, coordonne et unifie l'action de la dizaine d'associations québécoises suivantes: L'Association des manufacturiers des produits alimentaires du Québec; le Conseil des salaisons du Canada, division du Québec; le Conseil de l'industrie laitière du Québec; l'Association des abattoirs agricoles du Québec; l'Association canadienne des manufacturiers de moulées, division du Québec; l'Association des épiciers en gros du Québec; l'Association des grossistes en fruits et légumes du Québec; l'Association des magasins à chaîne du Québec et l'Association des détaillants en alimentation du Québec.

Représentante des principaux chaînons de la chaîne alimentaire québécoise, viande, volaille, produits laitiers, légumes en conserve, produits alimentaires manufacturés, fruits et légumes à l'état frais, produits de minoterie et de meunerie, grossistes, chaînes de magasins, détaillants, notre fédération s'identifie, d'une part, au plus important secteur de production industrielle du Québec et permet, d'autre part, à l'ensemble de l'industrie agro-alimentaire de se rattacher à la pyramide des agents de la vie économique québécoise qui se retrouvent réunis au sein du Conseil du patronat du Québec.

Il y a près de dix ans que le Conseil d'alimentation du Québec joue ainsi le rôle d'un interprète

autorisé de l'industrie agro-alimentaire québécoise et d'interlocuteur valable pour les pouvoirs publics et les autres secteurs de notre société.

Durant cette décennie, l'industrie et le commerce alimentaires du Québec ont été la cible de choix des groupes de consommateurs organisés. La multiplication des manifestations d'insatisfaction des consommateurs a pu provoquer des réactions normales d'indignation, d'incompréhension, de raidissement de la part de nos milieux d'affaires, surpris, le plus souvent, dans leur routine vieillissante de commercialisation, ahuris d'avoir à remettre en cause des méthodes traditionnelles de commerce, étonnés également de constater que souvent ils ne donnaient pas au client le minimum de garantie et de sécurité qu'il était en droit d'attendre, tout en étant sympathiques, au cours des dernières années, aux réactions des consommateurs, justement frustrés que leur pouvoir d'achat ne pouvait rattraper la spirale inflationniste des prix des aliments les plus essentiels.

Avec le recul du temps, l'industrie et le commerce alimentaires reconnaissent que, dans le bilan de ces années difficiles, tout n'a pas été négatif. La vague du "consumérisme" a forcé une prise de conscience chez nos dirigeants d'entreprises, a permis d'entamer le dialogue avec la clientèle, a suscité des adaptations utiles à nos lois et règlements en vue de renseigner davantage le consommateur et de l'aider à faire ces choix; elle a réussi aussi à faire servir l'aiguillon de la concurrence à l'avancement de la cause commune.

Nos détaillants alimentaires, qui étaient sur la première ligne de feu, ont été les artisans du dialogue direct avec les consommateurs pour leur expliquer les règles du marché et les raisons des variations des structures de prix. Nos manufacturiers et grossistes ont été à l'avant-garde dans la révision du règlement des aliments du Québec ainsi que des normes de composition, de classification, d'identification des produits qui en découlent.

Durant des années, l'industrie alimentaire québécoise a étudié, avec les associations de consommateurs bona fide, le problème des précisions à apporter aux étiquetages de nos produits alimentaires. Bien avant la loi 22, l'industrie agroalimentaire québécoise présentait ses produits dans un bilinguisme intégral, non seulement au Québec, mais partout où les réseaux de distribution pouvaient porter ces produits à l'extérieur du Québec. Cette précieuse expérience des difficultés quotidiennes vécues avec les consommateurs nous a permis de départager ce qui était inspiré des besoins véritables des individus et ce qui émanait de groupes d'activistes, plus forts en rhétorique démagogique qu'en connaissance pratique des problèmes de marché, plus intéressés à susciter et exploiter le mécontentement, pour briser le système, qu'à aider véritablement les consommateurs.

Notre industrie s'est appliquée à composer avec les exigences légitimes des consommateurs et a dénoncer le jaunisme et la démagogie des groupes qui ont tenté de monopoliser à leurs fins le mécontentement créé par ces années de crise inflationniste que nous avons vécu en Amérique, et nous dirons tout à l'heure pourquoi cette situation pouvait arriver.

Nous croyons que le "consumérisme" a perdu sa virulence des débuts, en Europe et aux Etats-Unis, précisément parce que les consommateurs ont décidé de rationaliser leurs attitudes. Les consommateurs comprennent de plus en plus qu'ils finissent toujours par payer le coût de bon nombre de formules miracles que les grands-prêtres du "consumérisme" leur ont proposées et que souvent il leur en coûte plus cher, en mesures curatives, que les inconvénients que l'on veut corriger. D'où l'importance que prennent, aux Etats-Unis, les mesures législatives, comme la formule de l'équation coût-bénéfice à laquelle devront être soumis désormais tous les projets de loi ou de règlement proposés en vue d'aider les diverses classes de la société. D'où également le phénomène de l'entrée dans l'ombre des vedettes du "consumérisme" et la résurgence des associations bona fide de protection du consommateur, affranchies du compagnonnage gênant des activistes à préoccupation politique.

Il y a un nouvel aspect dans la problématique de la protection du consommateur que notre conseil entend faire valoir à l'appui de quelques-unes de ces prises de position. Ainsi, le postulat de la "protection du consommateur" a été porté par une puissante vague de "consumérisme", apparue au cours des années soixante, alors que la société nord-américaine était caractérisée par une économie d'abondance où les biens étaient produits en masse avec, souvent, très peu d'égard pour les critères de la qualité et de la durabilité. Il s'agissait, pour l'entreprise, d'écouler les biens produits le plus rapidement possible afin de produire encore plus. Cette situation d'abondance donna lieu malheureusement à des abus regrettables.

Il ne faut pas oublier que cette situation se situait dans un climat où il était toujours décent de dire — et on ne risquait jamais de se faire rudoyer en le disant — Pour que l'économie marche, il faut qu'il y ait, quelque part, dans le monde, une guerre effective ou une guerre larvée. C'est dans ce climat que ces choses se produisaient.

Cette situation générale prévaut-elle encore en 1976? De nombreux exemples récents (qu'il suffise de mentionner la toute récente crise de l'énergie) ont amené le Conseil de l'alimentation à repenser toute la problématique de la protection du consommateur dans le contexte d'une nouvelle société où la conservation remplacera la consommation des biens et où qualité, durabilité, réparabilité, recyclabilité des biens, l'utilité et un usage réfléchi desdits biens et services seront revalorisés. Cette optique commande la réflexion et le Conseil de l'alimentation en fera état dans le présent mémoire.

Quoiqu'il en soit, le "consumérisme" est une force en marche. Le monde des affaires est opti-

miste quant à son effet sur le marché. Je vous réfère ici à un récent article du Harvard Business Review.

Le "consumérisme" populaire est en voie d'être évincé, d'ailleurs, par le "consumérisme ' d'Etat. Cette orientation pourrait devenir dangereuse si l'Etat est la seule force importante dans ce domaine et si le secteur professionnel des consommateurs et le monde des affaires ne font pas le nécessaire pour assurer l'équilibre dans cette situation.

Le Conseil de l'alimentation du Québec, ayant eu l'avantage de faire connaître et défendre ses attitudes constructives jusqu'au niveau du Conseil de la protection du consommateur, désire profiter de la mise en question de la Loi sur la protection du consommateur pour faire ressortir et faire sien un ensemble de principes et de recommandations contenues dans le rapport 1974/1975 du Conseil de la protection du consommateur qui, à notre sens, sont passés inaperçus, à un point tel qu'il faut se demander s'il ne s'agit pas là d'une conspiration du silence, de la part de l'ensemble des groupes ou organismes à qui il s'adressait.

Nous trouvons très bien résumé dans le rapport annuel en question ce qu'on doit entendre par "la protection du consommateur"! "Le terme "protection" jumelé à "consommateur moyen" nous suggère les concepts suivants: "Le consommateur, en tant qu'individu, est isolé des autres consommateurs et est peu informé des lois et des règlements susceptibles de le protéger en général. "Seul, le consommateur ne peut susciter des changements. Il doit se joindre à d'autres individus qui ont les mêmes intérêts et les mêmes besoins. Il a tout à gagner à écouter et à parler au sein d'associations organisées, structurées, pour faire valoir ses doléances auprès des gouvernements. D'où la nécessité, pour les consommateurs, de s'unir au sein d'associations représentatives, bien structurées, capables de devenir des interlocuteurs valables pour l'Etat. "Le monde du commerce a aussi une responsabilité sociale envers ses clients, les consommateurs. Cette responsabilité doit s'exercer spécialement au niveau de la qualité des produits qu'il offre en vente et aussi par l'information qu'il transmet à sa clientèle, que ce soit par l'étiquetage des produits ou encore la publicité qu'il fait. "L'Etat doit, de son côté, venir en aide au consommateur par l'adoption de lois et règlements visant la protection du consommateur, ainsi que par la mise en place de mécanismes susceptibles d'assurer leur éducation et de leur fournir assistance en cas de besoin".

Nous tenons à rapprocher de cette description de la protection du consommateur quelques énoncés, contenus dans l'introduction au Programme des communautés européennes pour la protection et l'information des consommateurs, adoptés par le Conseil des ministres de la C.E.E., le 14 avril 1975; "Le consommateur n'est plus désormais considéré comme un acheteur et un utilisateur de biens et services, pour un usage personnel, fami- lial ou collectif, mais comme une personne concernée par les différents aspects de la vie sociale, qui peuvent directement ou indirectement l'affecter en tant que consommateur. "Le consommateur à l'état pur n'existe pas. Il est confronté à de multiples tensions: besoins, aspirations, pouvoir d'achat, influence des pratiques commerciales de la publicité et du crédit. Le consommateur d'autrefois, acheteur en général isolé sur un marché local de faible dimension, s'est transformé en un élément d'un marché de masse qui fait l'objet de campagnes publicitaires et de pressions de la part de groupes puissamment organisés de production et de distribution. Devant celles-ci, le consommateur ne se trouve pas en situation d'effectuer des choix objectifs, correspondant à ses véritables besoins réels, à ses possibilités financières. Il convient donc de définir, à partir de ces réalités vécues, une politique de la consommation qui permette au consommateur et à leurs organisations reconnues de jouer pleinement leur rôle de partenaire social et économique".

L'objet d'une telle politique de protection du consommateur est donc beaucoup plus que cette juxtaposition que l'on fait, dans la loi, entre consommateur par opposition à marchand. C'est malheureux, à notre sens, qu'on retrouve cette conception dans la définition, à l'article 1 du projet de loi.

Nous recommandons que ce consommateur soit défini par rapport à ses droits essentiels: -le droit à la protection de sa santé, sa sécurité et de ses intérêts économiques; -le droit à la réparation des dommages subis; -le droit à l'information et à l'éducation; -le droit à la consultation et à la représentation; et que l'exercice de ses droits, pour les fins du projet de loi, soit délimité à l'ensemble des actes d'achat posés pour des fins personnelles, familiales ou ménagères, c'est-à-dire à des fins autres que génératrices de revenus.

Le Conseil de la protection du consommateur attribue au commerce un rôle important dans cette protection de son client, le consommateur. La Communauté économique européenne parle du consommateur comme partenaire social économique avec les autres secteurs de la société. Il y a donc communauté d'intérêts entre le consommateur et le commerçant dans la recherche de l'exercice des droits essentiels du consommateur. Nous attachons une importance capitale à ce constat.

Si tel est le cas, il y a lieu d'étudier sérieusement les comportements tant des consommateurs québécois que des commerçants avant d'intervenir par voie législative dans leurs rapports communs. Il n'y a aucune idée dans notre esprit, à ce moment-ci, de dire que la loi n'est pas avenue dans le temps présent, mais nous voulons tout de même souligner: Comment voudrait-on qu'une loi puisse être efficace et coller à la réalité si aucune recherche sur le comportement des consommateurs, ses besoins, ses désirs et ses façons de décider n'a jamais été faite? A quand une étude sérieuse de l'impact de toute la gamme de législa-

tions et de réglementations sur la qualité et l'efficacité du processus de décision du consommateur?

Nous ne comprenons pas que cette dimension importante du problème de la protection du consommateur ne retienne pas davantage l'attention de nos législateurs.

Quoi qu'il en soit et tout en respectant les énoncés du Conseil de la protection du consommateur et de la Commission du CEE déjà cités, le Conseil de l'alimentation du Québec ne peut accepter cette notion trop facile et simpliste, qui semble trop souvent prédominer, à l'effet que le consommateur est un faible d'esprit, incapable de raisonner en fonction de ses besoins, qu'il faut protéger malgré lui. Il a besoin d'être aidé, d'être conseillé, d'être informé objectivement. Il faut cesser de voir en lui un interdit, une personne mise en tutelle par la société. Nous nous opposons fortement à cette attitude et à toute législation reposant sur de tels concepts, précisément parce que c'est ce climat qui permet aux activistes de tout poil de prétendre parler au nom de tout le monde alors qu'ils n'ont reçu mandat de personne.

Ce sont précisément ces considérations de représentativité et de responsabilité qui nous amènent à remettre en lumière les recommandations très à point et fort constructives du Conseil de la protection du consommateur sur la protection du consommateur par lui-même.

Compte tenu de la portée d'un grand nombre d'articles du projet de loi no 7, notamment dans les livres I, II et tout particulièrement dans le livre VI, nous croyons qu'il est utile de rappeler ici les principales constatations du Conseil de la protection du consommateur sur les critères de représentativité des associations de protection des consommateurs, sur les assises de leur crédibilité et de leur autorité.

Il existe au Québec deux types d'organisations pour la protection des consommateurs:

I.des associations proprement dites de consommateurs qui doivent rencontrer les critères de représentativité suivants: -avoir une personnalité juridique; -avoir un secrétariat ou une place d'affaires à une adresse connue; -être enregistrées au fichier central du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières; -avoir un budget basé sur des cotisations de membres; -avoir une représentativité contrôlable de ses membres; -avoir des objectifs d'éducation et d'information en matière de protection du consommateur; -posséder un programme d'action connu et accepté de ses membres. 2. Des organismes de services spécialisés qui tirent leur crédibilité ou leur utilité au service des consommateurs du fait de leur compétence et de leur efficacité dans la recherche, la vulgarisation de l'information et l'action dans les domaines de leur spécialisation. L'un et l'autre groupe d'organisation peuvent être identifiés à des corps de pression, voués à la protection des intérêts des consommateurs.

Pour les associations, agissant comme groupes de pression, il devient indispensable, dans le contexte social actuel, d'avoir des structures corporatives qui garantissent la délégation démocratique des pouvoirs par la base. Ces associations, tout comme les unions ouvrières, les corps professionnels, les associations d'affaires, doivent être en mesure de prouver que leurs interventions traduisent un mandat de ceux qu'ils représentent.

Ceci implique la tenue d'assemblées aux divers niveaux: local, régional et provincial, la procédure d'élection des officiers, l'élaboration du programme d'action, etc.

Les organismes de services spécialisés, qui ne comptent pas ou peu de membres, et de ce fait n'ont pas de véritables structures électives, peuvent être aussi utiles aux consommateurs que des groupements de masse, par leurs activités dans les domaines qui relèvent de la science et de la technique. Leur identification, sous ce rapport, doit être claire et complète afin que le public sache exactement à qui et à quoi il a affaire et puisse juger de la compétence de l'organisation, de même que des buts qu'ils poursuivent.

Ces organismes de services, tout comme les associations proprement dites, doivent assumer la responsabilité de leurs énoncés et de leurs interventions. Le public doit savoir que ces organismes sont sur un pied d'égalité avec toutes personnes physiques ou morales quant à leur responsabilité ou leur solvabilité.

Fort de son expérience du passé dans ses relations avec les consommateurs, le Conseil de l'alimentation du Québec souscrit sans réserve à qes normes de représentativité et de responsabilité qui devraient désormais caractériser les organismes bona fide de protection du consommateur. Nous voulons chez les associations de consommateurs plus de professionnalisme et d'autodiscipline qui leur permettent d'écarter de leur rang les démagogues qui leur nuisent plus qu'ils ne les aident. Le projet de loi no 7 doit tenir compte dès maintenant de ces structures juridiques qui doivent encadrer les activités de tous les groupes désireux de travailler à la protection du consommateur.

Par-delà les structures professionnelles, c'est encore par l'éducation à la consommation que nous pouvons aider le mieux le consommateur à se protéger lui-même. Les meilleures lois du monde ne parviendront pas à protéger le consommateur s'il ne fait pas lui-même l'effort de prendre connaissance des renseignements qui sont mis à sa portée et de l'information qui est canalisée vers lui. C'est dans ce contexte que l'éducation à la consommation prend toute son importance. Il faut ajouter la dimension de l'éducation à celle de la diffusion de l'information jugée utile au consommateur. Pour favoriser la compréhension de la société dans laquelle il vit, tout effort d'éducation doit porter de façon prioritaire sur les domaines suivants: d'abord, la nature et les causes des changements constants qui nous assaillent et les façons de nous comporter face à ces change-

merits; les mécanismes de base de l'économie et leurs effets sur l'individu; les façons de se comporter face à la multiplicité des choix offerts par la société de consommation ou aux exigences imposées par la société de conservation; la nature et le rôle du crédit et de l'épargne et la façon de les utiliser à son avantage; enfin, la gestion pratique de ses propres affaires à court et à long terme ainsi qu'au jour le jour.

Voici un aspect primordial de la protection du consommateur sur lequel le Conseil de l'alimentation du Québec compte voir l'Etat prendre des initiatives diverses et nombreuses. Existe-t-il, pour l'Etat, moyen plus positif et efficace de protéger le consommateur? C'est impératif que le projet de loi no 7 prévoie les structures nécessaires et les mécanismes de coordination interministérielle appropriés pour assurer la mise en place des initiatives d'éducation à la consommation. Dans bien des cas, l'intervention de l'Etat deviendrait inutile si les consommateurs eux-mêmes étaient plus responsables.

Si la collectivité consacrait autant d'énergie et de ressources financières à éduquer les consommateurs qu'elle en consacre à multiplier les contrôles des activités commerciales, il y aurait sûrement moins d'incidents à déplorer, disait récemment devant vous le Conseil du patronat du Québec.

Maintenant, quel est le rôle du monde des affaires dans la protection du consommateur?

Encore ici, il nous fait plaisir de faire écho aux énoncés du Conseil de la protection du consommateur.

D'une façon générale, dans l'optique du monde des affaires, les revendications des consommateurs n'ont rien d'excessif; rien qu'une entreprise sérieuse et un tant soit peu consciente de sa responsabilité sociale ne soit en mesure de donner à ses clients.

La communauté d'intérêts qui, au demeurant, existe entre le producteur, le distributeur et le consommateur devrait inciter le premier à procurer au dernier une information suffisamment éducative pour lui permettre d'exercer un choix éclairé.

Le Conseil de l'alimentation est convaincu que ce n'est que par la participation de chacun des intéressés à la discussion franche des problèmes qu'on pourra assurer une meilleure protection du consommateur.

Dans le but de favoriser ce dialogue, la collaboration du monde des affaires pourrait aussi se manifester par sa participation, de concert avec les représentants des consommateurs, à l'élaboration de normes relatives à la publicité, à l'étiquetage, au mode d'emploi des produits, aux formes de garantie, etc.

Même s'il s'agit là d'objectifs déjà fixés dans bon nombre d'entreprises et de secteurs industriels, l'Etat pourrait, en collaboration avec les intéressés, fixer de nouvelles normes d'éthique à ceux qui ne s'en sont pas encore donné.

Enfin, l'ensemble des documents législatifs ou réglementaires relatifs à la protection du consommateur devrait être colligé en un code qui ferait l'objet d'une très large diffusion auprès de toutes les entreprises faisant affaires avec le public.

On sait, par ailleurs, combien une réglementation mal faite peut menacer l'existence même de certaines entreprises. C'est pourquoi il est normal que le monde des affaires participe à l'élaboration de la réglementation relative à la protection du consommateur.

Il s'agit, par l'intermédiaire des organismes de concertation appropriés, de mettre en garde l'Etat aussi bien que les associations de consommateurs contre des interventions inutiles et toujours très coûteuses pour eux. Tout ceci présuppose que l'Etat reconnaisse le caractère représentatif des associations d'affaires créées à cette fin et tienne compte de leurs représentations.

Nous reconnaissons, enfin, que l'Etat a un rôle fondamental à jouer dans la protection du consommateur, c'est-à-dire celui d'exercer pour ses citoyens la justice distributive. Son action doit donc tendre vers un maintien de l'équilibre des forces en présence aux trois niveaux suivants: la coordination de l'action des consommateurs au moyen de ses divers organismes ou associations: la coordination des divers services gouvernementaux et leur plus grande accessibilité aux consommateurs; et la conjugaison de l'action des consommateurs et des commerçants avec celle de l'Etat.

Par contre, l'intervention de l'Etat, même justifiée, comporte ses propres limites: lorsque le coût de ses services dépasse celui des inconvénients qu'il cherche à corriger. L'objectif premier d'une loi, comme le projet de loi no 7, est justement l'établissement de cet équilibre de forces à établir entre le consommateur et le commerçant avec qui il fait affaires.

Avant de procéder à l'autre partie qui s'attaque directement à l'analyse légale de certains articles du projet de loi, nous voudrions ajouter deux considérations à cause de questions qui ont été soulevées par les associations qui nous ont précédés ici, ce matin. D'abord, on trouvera peut-être curieux que nous référions aussi souvent et d'une façon délibérée au rapport 1974/75 du Conseil de la protection du consommateur. Précisément, dans ce rapport on trouve des recommandations, dont nous avons cité une bonne partie, mais il y en a une sur laquelle, malheureusement, nous avions cru bon de glisser. Mais plus ça va et plus nous croyons utile de le refaire, ne serait-ce que pour assurer Mme le ministre et tous ses collègues de l'Assemblée nationale de notre entier appui derrière cette loi. On veut souligner, en passant, ce qu'on pourrait appeler certaines faiblesses, mais l'essentiel, les principes ou la philosophie est, à notre sens, absolument indispensable dans le contexte où nous vivons.

Le Conseil de la protection du consommateur, organisme de l'Etat, a consacré assez d'argent durant plusieurs mois, je dirais même deux ans, pour faire faire une enquête. Des gens du gouvernement sont allés en Europe, notamment en Angleterre et en Scandinavie, pour étudier le fonctionnement des organismes chargés de la protection

du consommateur et, d'une façon générale, comment l'Etat, dans ces pays, réagit à cette préoccupation déterminante.

A leur retour, ils ont fait des propositions qui, après mûre étude, ont été endossées par ce conseil et ont été consignées dans le rapport. Nous aurions souhaité, nous aussi, lire les débats qui se sont faits sur cette question depuis que vous siégez pour entendre les représentations des parties. Cela nous montre l'utilité fondamentale d'une de leurs recommandations. Après avoir souligné comment les associations de consommateurs devraient être aidées pour devenir mieux organisées, plus représentatives, plus conscientes du rôle qu'elles ont à jouer et avoir les moyens de le faire, on avait insisté énormément dans cette enquête et dans ces recommandations aussi sur le facteur de l'équilibre à établir. Enfin, pour que ce ne soient pas que des voeux pieux, on avait suggéré des mécanismes, des structures administratives dont l'une permettait aux associations de consommateurs de se réorganiser, de prendre conscience du rôle qu'elles pouvaient jouer et de pouvoir obtenir, dans cette structure gouvernementale, l'aide nécessaire pour jouer leur rôle.

Il s'agit d'une autre structure qui permettait de rendre accessible, à la fois au consommateur et au commerçant, les sources immenses d'information qui sont éparpillées dans tous les ministères du gouvernement du Québec à toutes fins pratiques, disons les trois quarts pour être réaliste, pour ne pas charrier. Mais il faut être absolument des spécialistes pour tout découvrir; vous en avez sur les loyers, sur la location dans un ministère, vous en avez sur la nourriture qui sont dans deux ministères et je pourrais vous faire une longue énumération. Là, il y avait eu des recommandations d'une structure pour regrouper tout cela et mettre cela accessible au consommateur et à tous les autres secteurs de la société qui en ont besoin, et directement dépendants de ce qu'on appelle actuellement l'Office de la protection du consommateur, puis il y avait une autre recommandation très pertinente, le troisième organisme gouvernemental, qui aurait permis de viser à réaliser cet équilibre qu'on recommande, entre les préoccupations normales et légitimes des consommateurs et aussi celles des commerçants, avec également la contribution de la fonction publique.

C'était un organisme tripartite groupant consommateurs, marchands et fonctionnaires. Alors, nous aimerions ici profiter de l'occasion pour recommander fortement, M. le Président, que s'il y a encore lieu, s'il est encore temps, ce projet de loi fasse une place importante à cette recommandation qui, encore une fois, a commandé des efforts conjugués de bien du monde et a impliqué aussi des déboursés considérables de l'Etat.

Deuxième constat de portée générale qui découle de ce qui a été soulevé, ce matin, au sujet de la publicité qui s'adresse aux enfants. M. le Président, j'aimerais attirer l'attention de Mme le ministre, sur un cas particulier. D'abord, en principe, c'est évident qu'il y a beaucoup à corriger dans ce domaine-là. Par contre il ne s'agit pas — je pré- sume de l'intelligence de tous ceux qui se penchent sur cette législation — de recourir au moyen très facile de couper le bras quand il y a un doigt de malade.

Je voudrais simplement attirer votre attention sur quelque chose qui se fait actuellement dans la province de Québec, en matière de publicité commerciale, puisque c'est le terme de référence que Mme le ministre a employé tout à l'heure, directement pour atteindre les enfants au sujet des bonnes habitudes alimentaires. Les producteurs de lait du pays souscrivent à même la paye des cultivateurs, plus d'un million et demi de dollars par année, pour soutenir des campagnes de publicité. Les producteurs de lait du Québec, à eux seuls, je ne sais pas s'ils sont davantage sensibilisés, souscrivent plus de la moitié de cette somme-là. Pourquoi? Pour réaliser des programmes à la télévision, à la radio, de la publicité directe, dirigée vers qui? Vers les enfants, les adolescents. Pourquoi? Evidemment, pour leur vendre du lait, pour qu'ils boivent du lait.

Il y a un principe derrière cela qui est le fruit de longues expériences de ceux qui sont dans le domaine: c'est un investissement. On met beaucoup d'argent pour atteindre les enfants, pour créer des habitudes alimentaires dès le jeune âge, parce qu'il y a huit ans, la Commission des écoles catholiques de Montréal, à un moment donné, à l'instigation de son département qui s'occupait de la bonne alimentation, a fait une enquête dans les écoles de Montréal. A la suite de cette enquête, on a appris que plus de 40% des enfants qui entrent à l'école le matin... on a demandé: As-tu déjeuné? Non. As-tu bu quelque chose? Oui. Qu'est-ce que tu as bu? Une boisson gazeuse.

Je n'ai pas besoin de vous donner la marque de commerce. Quand on est en face d'une situation comme celle-là, ce n'est pas un problème de publicité, ce n'est pas un problème de relations publiques. C'est un problème d'éducation. Ce n'est pas parce que c'est du pauvre monde qui ne pouvait pas se payer une pinte de lait. C'est parce qu'il y a une femme dans ce foyer qui n'était pas à la hauteur de la situation. C'est peut-être aussi brutal à dire, mais je le dis. Alors, depuis ce temps, les producteurs de lait du pays et ceux de la province de Québec ont décidé de ramer à contre-courant et d'investir beaucoup d'argent. Mme le ministre, ceci est de la publicité payée. Ceci est de la publicité commerciale. C'est pour cela que nous souhaitons qu'il vous soit possible, encore une fois, dans cette matière où vous avez parfaitement raison, où il faut des interventions curatives, mais que ces interventions curatives ne soient pas du genre de celles dont je vous ai parlé tout à l'heure, c'est-à-dire couper le bras parce qu'on a mal à un doigt.

Je tenais à apporter ce cas qui est un cas classique maintenant, puisque cela fait certainement douze ans que ce travail de publicité se fait dans la province de Québec. Je ne vous dirai pas que nous sommes très heureux des résultats que cela a donnés après tant d'efforts, mais il reste qu'avec les années, on espère pouvoir créer une

éducation. Peut-être aussi qu'en regardant cet aspect, si on pouvait se rendre compte que, dans ce domaine de la protection des consommateurs ou d'habitudes à créer... Parce qu'après tout, la protection du consommateur, c'est de l'aider à porter des jugements entre plusieurs offres qu'il a et à pouvoir se décider. C'est quelque chose qui demande des années. Alors, on ne devrait pas non plus aborder des questions comme la loi no 7 actuellement dans l'espérance que, le lendemain matin de sa promulgation, on va avoir réussi à guérir tous les maux. A partir d'ici, je vous demanderais de permettre à mon collègue d'expliquer davantage, d'une façon plus directe, les articles qui sont mis en cause ou qui mettent en cause le secteur de l'alimentation.

M. Raymond (Frédéric): Ma présentation va être divisée en deux parties. La première partie, c'est d'expliquer la philosophie ou l'approche globale qu'on a prise pour commenter les articles. Cela va beaucoup aider pour voir dans quel esprit on a commenté ces articles. Essentiellement, c'est la question d'une loi omnibus à comparer à légiférer dans certains secteurs particuliers. C'est un des problèmes qu'on avait avec la loi actuelle telle que formulée. C'est qu'il y a un mélange des deux. Ce mélange des deux, à l'heure actuelle, nous semble créer des problèmes. Je vais tout simplement expliciter cela. L'essentiel de la première partie de notre présentation est aux pages 13 et 14 du mémoire. Après cela, je vais aller directement aux changements qu'on soumet ou aux recommandations qu'on soumet respectueusement pour considération au ministère.

Dans son rôle de législateur, l'Etat peut légiférer de deux façons: soit par une législation omnibus ou soit par une législation sélective, s'atta-quant à des situations ou des abus qui nécessitent son intervention pour protéger le consommateur. La question est donc de déterminer dans quelle optique l'Etat devrait envisager une refonte de la loi de la protection du consommateur, eu égard à toutes les considérations qui, à notre avis, doivent être examinées dans l'un et l'autre cas.

Dans son essence même, une législation omnibus, ayant pour but de couvrir le plus grand nombre possible d'activités et de transactions reliées aux consommateurs, nous donnera inévitablement une loi façonnée par les compromis, par l'arbitraire et n'ayant aucun égard aux circonstances individuelles applicables à une industrie.

Comment peut-on assurer le progrès et le développement d'une nation si la certitude, tant nécessaire à l'entreprise pour organiser ses affaires et se développer, est constamment mise en doute par les possibles interprétations larges et inapro-priées pouvant être mises de l'avant par certains consommateurs de mauvaise foi ou certains fonctionnaires plus soucieux de voir à tester la loi que de la faire interpréter que d'assurer son but premier qui est de protéger le consommateur?

Parmi les excès où un tel genre de législation peut nous conduire, il y a certains articles — on va y revenir plus loin — où ça va justement beaucoup trop loin à notre avis... Qu'il nous suffise de souli- gner la tendance à ignorer les principes élémentaires gouvernant l'admissibilité de la preuve orale qu'on retrouve dans l'actuelle loi, l'apparition dans le texte de loi d'énoncés suggérant au tribunal de donner plus de poids à la protection du consommateur qu'à la poursuite des opérations industrielles de manufacturier, la disparition du concept de mens rea qui permettrait à l'entreprise honnête de s'exonérer la où aucune intention coupable n'existe ou lorsqu'un employé — un cas qui se produit très fréquemment — ignore sciemment la politique ou les instructions de son employeur.

Est-il vraiment besoin d'aller si loin pour protéger le consommateur? Ne risque-t-on pas, en voulant instaurer un meilleur équilibre, de tomber dans l'excès contraire et de créer une situation juridique qui rende la vie tout à fait impossible aux entreprises tant privées que gouvernementales? Un jour, peut-être quand on aura le triangle entre l'Etat et l'entreprise privée et les syndicats et la population en général, à ce moment-là, le gouvernement se soumettra lui-même à ses propres lois, alors tout à fait impossibles aux entreprises privées, à cause des actions abusives qu'une loi généreuse à l'absolu permettrait à n'importe qui d'exercer.

L'approche de la législation sélective a l'avantage de limiter ses effets au secteur où les abus sont les plus criants. Nous pouvons affirmer que l'actuelle Loi sur la protection du consommateur s'est inspirée de ce principe de législation sélective et a été efficace dans au moins trois domaines: l'information liée au crédit et à la consommation, la protection vis-à-vis des vendeurs itinérants et les contraintes imposées aux vendeurs d'autos usagées.

Le reste est dans le mémoire, mais, pour résumer en un mot comment on regarde la protection du consommateur, d'un côté, il y a le Code civil qui traite des transactions globales, des règles commerciales, de l'autre côté, on a une espèce de code de la protection du consommateur qui aurait peut-être 10, 15, 20 ou 30 chapitres, autant que c'est nécessaire, qui règlerait certains secteurs particuliers où il y a vraiment des abus à corriger. Pour le reste, nous pensons que le Code civil, qui prévoit justement — c'est un des points qu'on a un peu plus bas — les prévisions relatives à la fraude, la fausse représentation, l'erreur, la violence ou la crainte, la lésion... Cela existe déjà depuis fort longtemps dans le Code civil. On a un régime qui reflète les principes de liberté de la société et j'ai l'impression que le ministère, autant que l'entreprise et tout le monde, veut voir ces principes se continuer.

A ce moment, on voit tout simplement l'optique de la protection du consommateur comme un code qui régirait certains secteurs particuliers. Il y aurait un chapitre comme le chapitre qu'on a là sur le crédit, il y aurait un autre chapitre sur l'automobile, et ainsi de suite, à mesure qu'il y a des secteurs où une situation nécessite correction.

Je vais immédiatement à la page 17 où nos recommandations spécifiques sont mentionnées. Nous les avons titrées par articles. Je ne sais pas si c'était la meilleure approche, vu les autres mé-

moires qui ont été présentés ce matin, mais, enfin, c'est, j'imagine, une autre approche.

L'article 1b) dit: Le Conseil de l'alimentation suggère que la définition d'un "bien" soit amendée afin d'obtenir un texte qui cadre avec le contexte de la société de conservation comme nous l'avons définie dans notre introduction. Maintenant, ici, il y a un mot de notre comité, formé pour étudier la loi, que je n'ai pas reflété correctement. Nous avons défini "bien" un "bien mobilier durable". Le mot ne serait pas "durable"; ce serait plutôt un "bien mobilier technique" parce que, à l'heure actuelle, il y a de plus en plus de biens classifiés sous le mot de "biens techniques", à savoir les biens qui requièrent une certaine connaissance pour pouvoir les acheter, pour pouvoir les utiliser, et ainsi de suite.

A notre avis, c'est là que, vraiment, il y a un besoin pressant de protéger le consommateur. Réduire la définition d'un bien ou diminuer son cadre aux biens techniques, à notre avis, cadrerait parfaitement dans le corps ou dans l'optique globale de la loi comme nous la voyons. Si encore on n'inclut pas les biens techniques, on pourrait au moins exclure certains biens techniques qui sont déjà suffisamment, plus que suffisamment réglementés, en particulier la nourriture, le vêtement et quelqu'un mentionnait même les médicaments. Il y a déjà des lois qui régissent ces biens et il y aura probablement lieu de les exclure expressément à défaut de prendre l'autre approche qui est de se limiter spécifiquement aux biens techniques.

A l'article 1c), M. Roy, tout à l'heure, vous a clairement donné nos vues là-dessus, voulant qu'il y aurait lieu de définir le consommateur non seulement par rapport au marchand mais aussi par rapport à l'exercice de ses droits en particulier. Nous vous recommandons ici une définition. Nous pensons qu'il y aura sûrement lieu de l'améliorer et nous avons extrêmement confiance aux gens du ministère pour nous donner probablement une définition du consommateur, parce que c'est souvent une approche ignorée qu'une loi avec un titre aussi prestigieux que "la protection du consommateur" n'est pas seulement pour les avocats, mais aussi pour les gens qui peuvent la lire. Même si cela n'a pas une portée légale directe de définir le consommateur par rapport à l'exercice de ses droits, ce serait sûrement quelque chose à considérer.

A notre avis, ce serait peut-être quelque chose pour le ministère, soit en particulier, pour les gens qui s'occupent de préparer la loi. Il faudrait peut-être examiner cet angle, pour que quiconque la lise — en particulier dans les universités où on étudie beaucoup les lois qui touchent la protection du consommateur, les lois sur la compétition — un étudiant ou tout individu, puisse vraiment s'y retrouver et dire: C'est moi, le consommateur, et non pas seulement par rapport à cette opposition: consommateur marchand.

A l'article 3d), on a évidemment été un peu théorique ou, peut-être un peu rêveur, mais on l'a mis quand même, parce qu'à notre avis, c'était une question de principe. Le Conseil de l'alimentation ne peut accepter l'exclusion du projet de loi, des contrats des entreprises publiques telle qu'elle se retrouve à l'article 3d).

Dans une optique globale, la protection du consommateur est l'affaire, non seulement de l'entreprise à tous les niveaux de la mise en marché, mais aussi des groupes d'associations de consommateurs et de l'Etat. Tous et chacun n'ont qu'un intérêt et qu'un but, soit de représenter et de servir le consommateur au meilleur de leur capacité.

Il n'est donc que logique que l'Etat, en sa capacité de chef d'entreprise, se soumette à sa propre législation, sur le même pied que l'entreprise, et cesse une fois pour toutes de décréter des mesures législatives applicables à tous, sauf à lui-même.

Le Conseil de l'alimentation, tout en reconnaissant qu'un tel geste créerait un précédent de très grande portée, doit donc recommander que l'article 3d) soit exclu de la loi. De plus, un tel geste cadrerait bien avec une nouvelle politique visant à mieux administrer le secteur gouvernemental en cette période troublée que nous connaissons présentement, considérant la crise de confiance dans la population vis-à-vis de l'administration et de l'application des lois.

Le Président (M. Lafrance): Quand nous avons commencé l'étude de ce mémoire à midi quinze, je ne pensais pas que ce serait si long. Habituellement, on fait un résumé du mémoire qui est présent. Etant donné qu'il vous en reste au moins une dizaine de pages, sans parler de vos commentaires, je pense qu'on va suspendre les travaux jusqu'à quinze heures.

(Suspension de la séance à 13 h)

Reprise de la séance à 15 h 12

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

Nous reprenons l'audition du mémoire du Conseil de l'alimentation du Québec. Nous en étions à la page 18.

M. Raymond: Madame le ministre, messieurs les députés, comme on vient de le dire, nous en étions au début de la page 18, sur nos commentaires à l'article 5.

Le principal paragraphe de l'article 5 est le dernier paragraphe où nous recommandons qu'une révision globale, s'il y a lieu, en ce qui concerne le principe de l'article 5, qui est le principe de la lésion pour majeurs, que cette révision soit entreprise dans le cadre du Code civil. A défaut d'exclusion de cet article 5, le Conseil de l'alimentation recommande que son application soit limitée aux contrats qui, en vertu du présent livre, doivent être constatés par écrit, ce qui était d'ailleurs l'approche qui avait été adoptée dans l'ancienne loi et ce qui correspond, au fond, à la philosophie globale que nous nous sommes efforcés d'exposer durant la première partie de notre mémoire.

Article 6. Tel que rédigé, cet article ne fait que perpétuer un mythe et donner à la population en général de fausses illusions. L'expression "condition des parties" risque de stratifier notre société et de surimposer de nouveaux concepts dans notre droit actuel sans aller à la racine du problème.

En ce qui concerne le Conseil de l'alimentation, ce n'est qu'en améliorant le niveau économique de la population et par des programmes poussés d'éducation du consommateur que l'Etat pourra vraiment améliorer la condition de ce dernier. Le conseil recommande donc que cet article soit aboli.

Au titre II, nous avons un commentaire d'ordre général qui, encore, donne, si vous voulez, plus de poids à notre recommandation générale qui va s'ensuivre en ce qui concerne l'éducation du consommateur.

En ce qui concerne les règles de la formation des contrats, pour laquelle le livre I exige un écrit, le modèle de la formation des contrats, que l'on retrouve dans l'ancienne loi, correspond-il vraiment au comportement du consommateur? Comment une loi peut-elle être efficace et coller à la réalité si aucune recherche sur le comportement du consommateur, ses besoins, ses façons de décider et sur le genre d'information qu'il recherche lors de l'achat d'un bien, compte tenu des facteurs psychologiques, culturels et émotionnels qui l'affectent n'a été faite? A quand une étude sérieuse de l'impact de toute la gamme de lois et de règlements sur la qualité et l'efficacité du processus de décision du consommateur?

Le Conseil de l'alimentation croit que le modèle du comportement du consommateur proposé par l'article 15 et les suivants — on en a d'ailleurs brièvement parlé ce matin dans un autre mémoire — ne saura répondre aux besoins du consommateur et à la réalité concrète que dans la mesure où un programme poussé d'éducation du consommateur aura été mis en vigueur et où le commerçant se retrouvera face à face avec un consommateur instruit.

Au titre III, les dispositions générales, le Conseil de l'alimentation souhaite que cette section, vu qu'elle s'applique aux contrats de vente ou de louage de biens ou de services ainsi qu'aux contrats mixtes de vente ou de louage de biens ou services soit éventuellement incorporée au Code civil.

A l'article 24, évidemment en commentant cette section, il faut toujours aussi regarder que dans notre perspective la définition des biens devrait être limitée aux biens techniques ou à tout le moins exclure certains secteurs comme nous avions dit plus haut.

A l'article 24, le conseil exprime des doutes très sérieux quant à la signification pouvant être donnée à l'expression "usage auquel ce bien est normalement destiné". A notre avis, cela va être très difficile de dire quel est cet usage normal. Le prix d'un bien, par exemple, est un facteur très relatif, parfois on peut payer moins et avoir moins de qualité ou encore simplement on n'a pas les moyens de se procurer tel ou tel bien.

En effet, cette expression générale et incertaine pourra donner lieu à mille et une interprétations variant d'une personne à une autre, et l'entreprise aura le fardeau de déterminer sans jamais avoir le degré de certitude qui est nécessaire pour bien organiser ses affaires, quelle interprétation est la plus logique.

Deux conséquences nous paraissent en résulter: premièrement, l'entreprise ne pourra plus se permettre d'offrir au public consommateur une garantie générale non qualifiée sur ces biens; deuxièmement, l'entreprise hésitera énormément avant d'introduire un nouveau bien sur le marché et devra encourir des frais de recherche et de développement beaucoup plus élevés, afin de diminuer la marge d'incertitude créée par la garantie implicite de l'article 24.

L'article 24, en un mot, risque fort de décourager tout esprit d'innovation dans l'entreprise, ou à tout le moins dans certaines entreprises, selon la nature des biens que cette entreprise peut mettre sur le marché.

Le Conseil de l'alimentation recommande donc que l'article 24 soit révisé en utilisant l'approche adoptée par le ministère dans les sections subséquentes du projet de loi, soit de définir clairement le minimum d'information que toute garantie sur les biens devrait être offerte au consommateur. A notre avis, c'est beaucoup plus simple d'y aller par minimum. Il faut quand même se mettre dans le contexte concret de tous les jours. En particulier, moi-même étant un avocat, à un moment donné, j'ai à faire une recommandation sur telle ou telle chose et si les termes sont définis, ou si la définition des critères légaux est trop vague, cela devient presque impossible de figurer ou de déterminer exactement ce à quoi il faut s'en tenir, alors qu'à l'approche inverse, qui consiste en une loi qui définit clairement des minima, il est beau-

coup plus facile pour une entreprise de pouvoir s'y conformer.

Dans le contexte de la société de conservation que nous avons définie dans l'introduction, une garantie sur un bien devrait indiquer — nous avons six critères que notre comité a définis — premièrement, le coût détaillé de la garantie; deuxièmement, le nom et l'adresse du garant; troisièmement, la durabilité du bien et son utilité au consommateur; quatrièmement, comment utiliser, réparer et maintenir en bon état le bien; cinquièmement, la durée de la garantie et, sixièmement, toute autre condition s'y rattachant.

Evidemment, ces six critères prennent particulièrement de l'importance si l'on s'attache à la définition des biens techniques comme nous l'avons recommandé au tout début.

Et l'implication de tout ceci dans la société de conservation est que toutes ces choses coûteront beaucoup plus cher et c'est une question... Il y a une adaptation qui se fait dans la société, en particulier dans un autre domaine, dans le domaine du marketing. De plus en plus, les entreprises sont conscientes de la nécessité d'informer le consommateur, surtout sur les biens qui revêtent un certain caractère de complexité, afin qu'il puisse faire un usage réfléchi des biens.

A l'article 29, afin d'offrir au consommateur le plus grand nombre possible d'options, le Conseil de l'alimentation recommande d'ajouter, à la fin de l'article 29, la phrase suivante: "... à moins qu'il n'exécute lui-même la garantie ou que le consommateur consente à une réduction du prix du bien."

Les contrats de crédit, c'est un terme que nous avons brièvement exploré plus tôt. Dans une perspective globale, le Conseil de l'alimentation ne peut que rappeler, comme d'autres n'ont sûrement pas manqué de le faire, que toutes ces mesures visant à protéger le consommateur s'attaquent aux conséquences du problème et non à sa cause. Ce n'est qu'en améliorant le niveau de vie général de la population, son revenu, ses possibilités et par une éducation poussée du consommateur que l'on pourra vraiment résoudre des problèmes de notre société de crédit. Les gens n'ayant pas le moyen d'obtenir du crédit continueront, malheureusement, de faire affaires avec des gens malhonnêtes pour qui la loi n'existe pas. Je pense que, sur ce point, il y a beaucoup d'enquêtes qui ont été faites et il y a eu beaucoup d'évolution dans la pensée des recherchistes, en particulier en marketing, qui démontrent clairement justement que, souvent, la loi sur le crédit n'empêche pas les gens qui ont vraiment besoin de crédit d'aller faire affaires avec des gens qui ne leur donnent sûrement pas la meilleure protection du monde.

Dans ce chapitre, les articles 124 et 126 nous apparaissent également beaucoup trop onéreux pour le commerçant. Le dernier paragraphe de l'article 124 ne semble pas couvrir le cas où une grève des postes empêcherait le consommateur de recevoir un état de compte. Il s'agit ici d'un cas normal de force majeure et l'entreprise serait indûment pénalisée, d'autant plus que le consom- mateur est au courant de l'étendue de son obligation financière.

Quant à l'article 126, nous croyons que le délai pourrait être facilement réduit de six à trois mois sans pour autant diminuer la protection offerte au consommateur.

Dans la fameuse question des pratiques interdites, laquelle a été beaucoup débattue dans les semaines précédentes et encore ce matin, aux articles 146, 147 et 152, bien que le Conseil de l'alimentation soit d'accord avec le but fondamental de ce livre qui est de restreindre les excès dans la publicité et assumer au public consommateur une information honnête et véridique, le conseil prie le ministre de bien vouloir reconsidérer toute l'approche des articles 146, 147 et 152. Nous nous expliquons.

Tels que proposés, les dix articles multiplient le nombre de sous-catégories générales en vertu desquelles une entreprise peut être poursuivie, avec le résultat que les activités de l'entreprise risquent d'être constamment mises en doute par les interprétations multiples pouvant être mises de l'avant par certains consommateurs ou groupes de consommateurs ou par certains fonctionnaires plus soucieux de voir à tester la loi et la faire interpréter que d'assurer son but premier qui est de protéger le consommateur. C'est une conséquence qu'on retrouve souvent lorsque des lois omnibus sont introduites. C'est un phénomène qui a été remarqué énormément aux Etats-Unis et dans certaines autres provinces du Canada. Nous ne croyons pas que le ministère désire une loi façonnée par compromis, arbitraire, n'ayant aucun égard aux circonstances individuelles applicables à une industrie. On risque fort, à plus ou moins court terme, d'étouffer tout simplement toute publicité sur les biens et d'éliminer, à toutes fins pratiques, la mise en marché de nouveaux-produits.

De plus, il n'est fait mention nulle part ailleurs des critères précis en vertu desquels une représentation sera déterminée véridique ou fausse. Qu'arrive-t-il, par exemple, du cas où une représentation est susceptible de deux interprétations, l'une étant vraie, l'autre étant fausse? Comme alternative aux articles 146, 147 et 152, tel que recommandé précédemment lors de l'analyse des articles 24 et suivants sur la garantie, le conseil recommande plutôt que soit clairement défini le minimum d'information que toute publicité sur un bien devrait indiquer au consommateur. Dans l'optique de la société de conservation que nous avons définie dans notre introduction, cela comprendrait une information visant à promouvoir, en particulier, les besoins essentiels au consommateur, une utilisation plus efficace et intelligente des biens et services offerts sur le marché, afin d'en retirer une satisfaction maximale, et la durabilité des biens, ainsi que leur utilité, maintien en bon état et recyclabilité.

Article 151. Le Conseil de l'alimentation ne s'est pas opposé aux articles 29 et 30 du projet de loi visant à rendre le commerçant solidairement responsable avec le manufacturier en ce qui concerne le respect de la garantie.

Au sujet de la garantie, soit dit en passant, à notre avis, d'après notre comité, c'est une orientation qui est très souhaitable, soit que la législation puisse même pousser cette orientation, à savoir que le commerçant devienne l'agent du consommateur et non pas le représentant du manufacturier dans la mesure où la garantie reproduit cette philosophie qui semble actuellement impliquée dans le texte de loi. C'est excellent.

Maintenant, au niveau de la publicité, c'est là que se trouve nos réserves. Le conseil croit qu'il est impensable et irréaliste qu'un fardeau aussi onéreux soit imposé au marchand au niveau de la publicité des biens, vu l'impossibilité pour le marchand de contrôler toute la publicité faite sur un bien, à moins évidemment d'engager une armée de surveillants.

Voilà pourquoi le Conseil de l'alimentation recommande au ministère d'abolir l'article 151 du projet de loi. Quant aux articles 156 et 157, nous les avons lus et relus et, finalement, nous avons mis ces trois lignes. Peut-être que le ministère va émettre des commentaires plus complets là-dessus. Nous n'arrivons pas à comprendre l'utilité ou l'application pratique de ces deux articles qui nous semblent faire preuve d'une imagination beaucoup trop féconde et irréaliste.

Article 161. Le Conseil de l'alimentation questionne le motif social à la base de cet article. Comme nous l'avons souligné plus haut, ce n'est qu'en améliorant le niveau de vie général de la population, son revenu, et par une éducation poussée du consommateur que l'on pourra vraiment résoudre les problèmes de notre société de crédit.

Quant à l'article 163, à la lumière de ce qui a été dit ce matin, de l'intervention de M. Roy et, en particulier, de ce que Mme le ministre a indiqué en ce qui concerne la publicité aux enfants, la publicité à caractère social, il va y avoir des précisions de la part du ministère. Donc, les commentaires que nous avions là partaient du principe que toute publicité aux enfants serait restreinte. Nous croyons comprendre qu'éventuellement, il va y avoir quand même une forme de publicité à caractère social ou informatif; en particulier, l'exemple que M. Roy a mentionné, la campagne pour encourager les jeunes à boire du lait, probablement, tomberait sous une catégorie permise pour la publicité aux enfants.

Autrement dit, toutes ces questions ont été amplement développées et pensées par Mme le ministre ainsi que par les gens qui sont dans le ministère. Alors je pense que les remarques que nous avions là-dessus sont là et elles prennent un contexte différent à la lumière de ce que nous avons entendu.

Au livre V, titre 2, chapitre 1, les recours civils, nous recommandons fortement que la prescription d'une année de l'ancienne loi, beaucoup plus réaliste, soit conservée à l'article 198; évidemment, c'est le principe de garder la sécurité, d'avoir quand même un minimum d'assurance dans les transactions commerciales. Nous croyons qu'un consommateur est suffisamment protégé s'il a eu un an pour prendre une action, pour se préva- loir des dispositions de la Loi sur la protection du consommateur.

L'article 199 ne fait aucune référence à la notion de mens rea. Evidemment, il y a ici un principe de droit que la mens rea est présumée, mais il reste quand même que si la notion de mens rea n'est pas mentionnée dans le projet de loi, l'effet est de renverser le fardeau de preuve et nous ne croyons pas que vraiment il soit nécessaire d'aller si loin. Nul doute qu'un commerçant honnête doit pouvoir s'exonérer là où aucune intention coupable n'existe ou lorsqu'un employé ignore sciemment la politique et les instructions de son employeur. Ce dernier point est très important parce qu'en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, plusieurs entreprises se trouvent dans une situation où parfois il peut y avoir un article d'une loi qui est ignoré par une erreur d'un employé. Imaginez le cas d'une grande entreprise ou, disons, dans notre secteur particulier, d'un supermarché, cela peut poser des problèmes. Nous croyons qu'il y aurait lieu de revoir ces articles à la lumière de ces quelques lignes que nous avons commentées. Telle que rédigée à l'article 199, la présente loi risque fort de devenir exorbitante et une source d'abus continuels.

A l'article 203, vu le fardeau de preuve imposé aux dirigeants et administrateurs de compagnies par cet article, le Conseil de l'alimentation prie le ministère de définir dans la loi les éléments dont le tribunal devrait tenir compte, comme cela a été fait à d'autres articles, par exemple, l'article 112. C'est un point de la loi, comme philosophie globale, mais certaines sections avaient une approche législative qui était vraiment très bien, en particulier là où on définit les critères. C'est un thème sur lequel on revient, définir les minimums, définir les critères pour qu'on sache vraiment à quoi s'en tenir sur ces lois pour qu'on puisse les respecter de façon beaucoup plus certaine et de façon beaucoup plus globale.

Parmi ces éléments, le conseil, voulant refléter en cela la réalité quotidienne concrète de la plupart des compagnies qu'il représente, recommande que la preuve par toute compagnie impliquée, en vertu de l'article 203, à l'effet qu'une personne compétente a été nommée afin de voir à ce que toutes les dispositions aient été prises pour se conformer à la loi, soit suffisante pour établir qu'il n'y a pas eu entente à la commission de l'infraction par ses dirigeants et administrateurs.

A l'article 212, il nous apparaît de la plus haute importance qu'un préavis d'au moins 90 jours soit accordé avant l'adoption d'un règlement vu l'importance de la loi, en particulier le titre de cette loi, le prestige qu'elle revêt dans la population en général. Il y a aussi l'autre point qui avait été brièvement mentionné ce matin, dans un autre mémoire, par un autre groupe. C'est extrêmement difficile, en deça de 30 jours, de pouvoir se rencontrer, en particulier au Conseil de l'alimentation. Le comité qu'on a fait pour étudier cette loi... On a été obligé de faire cela. Même, il y a eu une partie qu'on aurait aimé pouvoir explorer encore plus en profondeur. Cela a été quand même une occasion pour tous les membres du comité de faire une re-

cherche. On est très content de la mise en question qu'on a faite en faisant cela. Le point que j'essaie de souligner, c'est que 30 jours, c'était beaucoup trop court pour une loi de cette importance, surtout une loi avec un prestige comme cela. Il y a peut-être des dispositions, certains décrets d'autres lois pour lesquels les 30 jours peuvent apparaître comme une période logique. Dans le cas d'une loi comme celle-ci, nous recommandons fortement 90 jours pour pouvoir commenter les règlements qui peuvent être adoptés en vertu de la loi. Pourquoi cet empressement à légiférer? Si on veut des lois sérieuses et réfléchies, il faut quand même tenir compte d'un minimum de délai.

Au Conseil de la protection du consommateur, à l'article 214, ce que nous avons essayé d'exprimer, c'est qu'à mesure que les discussions évoluaient, on arrivait toujours à cette conception d'un conseil. M. Roy pourrait peut-être commenter plus longuement, parce qu'il a été au Conseil de la protection du consommateur pendant trois ans exactement. C'était cette notion qui revenait et on a cru bon, quand même, de la mentionner. Nous croyons qu'il est grand temps que le Conseil de la protection du consommateur joue le rôle authentique qui doit lui revenir, qu'il soit une sorte de "mini-états généraux de la nation"où soient représentés l'Etat, l'entreprise et les associations de consommateurs et où soient discutées et subséquemment présentées à l'Etat législateur des recommandations et études sur la base desquelles l'Etat adoptera des législations authentiques et réalistes, qui sauront refléter un consensus général, pour protéger le consommateur.

De plus, un tel rôle justifierait pleinement l'octroi de deniers publics additionnels qui permettraient au conseil de vraiment remplir le rôle de premier plan qui lui revient.

A l'article 216, nous avons le commentaire suivant à formuler: II est d'une importance primordiale que la composition du conseil reflète — nous y sommes revenus à quelques reprises — le fameux triangle — on en parle dans plusieurs domaines; le domaine de la protection du consommateur en est un — Etat, entreprises, associations de consommateurs.

Dans cette optique, la composition idéale du conseil serait qu'un tiers du nombre total de ses membres soit alloué à chacun des trois secteurs et ceci, en particulier, si les entreprises publiques deviennent assujetties à la loi, tel que proposé plus haut.

Au chapitre de l'Office de la protection du consommateur, l'article 223c, cet article met en cause l'important concept de l'éducation à la consommation comme prérequis à toute politique de protection du consommateur.

Nous avons exposé précédemment ce que nous entendons par ce concept et nous trouvons que ce chapitre I du projet de loi est l'endroit où le législateur devrait expliciter sur la réforme qui s'impose en éducation publique pour pallier cette carence grave relative à l'éducation à la consommation.

Le Conseil de l'alimentation a ensuite défini cette optique, comment il verrait cette réforme au niveau de l'éducation. Il la voit centrée autour de quatre aspects principaux: 1. Décréter que l'éducation du consommateur est une priorité nationale; 2. Fournir l'assistance technique requise afin de développer des programmes éducatifs; 3. Encourager le développement et la formation des professeurs dans l'éducation des consommateurs; 4. Utiliser les bibliothèques scolaires et publiques comme centres d'informations au consommateur.

La réforme de l'éducation du consommateur aurait comme objectif global de le préparer à la société actuelle et future où l'usage réfléchi des biens — nous revenons encore sur ce thème parce que tout semble pointer vers là, de plus en plus, et récemment, au moment où notre mémoire a été rédigé — cela fait à peu près trois mois évidemment — il y a eu plusieurs mémoires, politiques globales, dans tous les domaines, qui montrent justement que cette optique de la société de consommation, c'est l'optique du futur, c'est l'optique qui s'en vient à pas très rapides — remplacera une société centrée sur la consommation désordonnée.

A notre avis, existe-t-il un moyen plus positif et efficace non seulement de protéger le consommateur mais aussi de favoriser l'initiative individuelle et la liberté?

A l'article 223f, comme première étape dans cette opération souhaitée entre les divers ministères et organismes gouvernementaux du Québec en matière de protection du consommateur, le Conseil de l'alimentation recommande que l'ensemble des documents législatifs ou réglementaires relatifs à la protection du consommateur soient colligés en un code similaire au Code civil, qui ferait l'objet d'une très large diffusion auprès des entreprises et du public. Dans une optique globale, le domaine de la protection du consommateur dépasse largement les cadres du projet de loi no 7 et englobe toutes les lois statutaires et règlements visant à protéger le consommateur en particulier, par exemple, les lois sur la conservation, et à lui donner un monde où il pourrait vivre et habiter heureux.

A l'article 223g, se pose le problème de la coopération entre les divers paliers de gouvernements sur lequel nous avons explicité dans notre état de question précédant notre analyse des articles du projet de loi.

En particulier, on note qu'il y a un chevauchement, à de nombreux endroits, entre les dispositions du livre I! du projet de loi et les récents amendements apportés à la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions.

Un autre point que je voudrais mentionner comme question, pour le ministère et les rédacteurs de la loi: Qu'est-ce qui va arriver, par exemple, si le fonctionnaire ou le directeur qui est nommé en vertu de la Loi sur la protection du consommateur...

C'est toujours hypothétique, mais ces choses se produisent de plus en plus, à mesure que le nombre de lois s'accroît et que chaque gouverne-

ment légifère. Qu'arrive-t-il si, par exemple, le directeur, au niveau provincial, ordonne à une entreprise de faire telle chose en vertu de sa loi et que l'administrateur, au niveau fédéral, en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, ordonne une chose différente? D'un strict point de vue légal, évidemment, on peut toujours arriver à s'en sortir en disant, comme cela se fait à l'heure actuelle devant les tribunaux que telle législation a priorité sur une autre, mais, au niveau pratique, il pourrait arriver des situations dans l'avenir où, précisément, un administrateur, soit provincial ou fédéral, pourrait ordonner deux choses complètement différentes et contradictoires en se basant sur sa loi propre.

L'article 231, comme l'article 174 d'ailleurs, ne semble pas couvrir les cas où une entreprise de bonne foi aurait contrevenu à la loi. Il y a toujours cette présomption, mais à notre avis c'est tellement plus simple de le marquer dans la loi. Evidemment, c'est un principe de loi établi que lorsque la mens rea n'est pas exclue elle est présumée, mais il reste quand même que ce serait valable dans le cadre de la loi de le mentionner clairement par le mot "sciemment" ou quelque chose du genre.

La divulgation des conclusions d'une enquête peut lui causer un tort sérieux et injustifiable. Tel qu'il est rédigé, cet article est empreint d'un esprit punitif abusif, assumant évidemment qu'une entreprise verrait les conclusions d'une enquête publiée alors qu'elle n'est pas trouvée coupable ou alors qu'il y a un malentendu ou quelque chose du genre.

A l'article 233, en l'absence d'une législation dont les termes, dans la mesure du possible, seront certains et déterminés, les premières lignes de cet article, à savoir "lorsque le directeur croit — le mot clé est le mot "croit" — qu'une personne a enfreint, enfreint ou est sur le point d'enfreindre la présente loi, deviennent exorbitantes et abusives.

Cela termine notre analyse du projet de loi et des principales conclusions auxquelles notre comité est arrivé. Maintenant, M. Léonard Roy va résumer nos conclusions et nos recommandations dans rapproche globale.

M. Roy (Léonard): M. le Président, pour faire plus court — nous avons déjà amplement abusé du temps de la commission — les recommandations et conclusions sont contenues dans les trois ou quatre pages à la fin de ce mémoire. Permettez simplement que je synthétise en disant qu'il faut une législation qui protège le consommateur. On ne discutera pas là-dessus, nous sommes totalement d'accord. Pour que ce ne soit pas un voeu pieux, comme il arrive trop souvent dans bien des domaines, il faut des associations de consommateurs bien organisées, structurées, représentatives. Nous avons besoin de ces associations pour travailler en équipe. C'est un fait que certain genre d'organisations qui se spécialisent dans la recherche ou dans les contrôles de la qualité rendent à l'entreprise des services signalés; nous en avons besoin, mais il faut qu'elles soient structurées, bien identifiées. Il faut qu'elles soient responsa- bles. Si elles portent des jugements, si elles portent des accusations, il faut qu'elles aient les structures nécessaires pour répondre de leurs accusations, advenant que ce ne soit pas véridique et fondé, comme n'importe quelle personne civile. Il faut faciliter les rencontres, le dialogue au sommet. La consultation et la concertation, qui ont été le mot d'ordre de certains partis politiques, c'est le temps de traduire cela dans les faits, à ce moment, à ce niveau, dans ce domaine particulier.

Alors, on ne se rencontre pas au hasard des corps représentatifs, d'intérêts qui parfois sont divergents. Il faut avoir des mécanismes qui nous permettent de se rencontrer et de dialoguer et il faut que quelqu'un amorce et ce quelqu'un, c'est l'Etat.

Il faut ensuite éduquer à la consommation, et on ajoute, aujourd'hui, à la conservation. Il faut l'accessibilité de toute l'information disponible répartie dans tous les organismes gouvernementaux. Il faut que cela soit à la portée de la main de tous ceux qui travaillent et qui oeuvrent dans ce champ. Il ne faut pas que cela soit des voeux pieux, encore, tenant compte que chaque ministère est un univers; il faudra que quelqu'un prenne l'initiative de faire quelque chose pour qu'on puisse retrouver cela tout au même endroit.

La loi omnibus est un cheminement vers de grandes difficultés. On tient pour acquis que ceux qui ont décidé d'aller dans cette direction sont capables d'y faire face. On fait confiance à ceux qui veulent agir.

Il y a une grande nécessité de conserver un équilibre institutionnel entre toutes les parties dans ce domaine. Autant que possible, on souhaiterait beaucoup que toute nouvelle législation, comme le projet de loi no 7, comporte ou débouche sur la perspective coût-bénéfice dans n'importe quoi. Que cela soit un règlement ou une loi, qu'on ait cette mentalité ou cette préoccupation coût-bénéfice, qu'on informe le consommateur, le public, à l'avance de ce que cela va coûter pour apporter une amélioration ou guérir un mal etc.

L'expérience des dix dernières années a prouvé que faute de l'avoir dit, on se ramasse, toujours après coup, à pleurer, comme on dit, parce que cela coûte bien cher cette affaire, mais on n'avait pas été prévenu. Et enfin, il faut que les entreprises publiques soient assujetties à la loi.

Quand on parle d'entreprises publiques, ici, il s'agit évidemment des organismes gouvernementaux, paragouvernementaux créés par des lois. Je réfère, par exemple, au système des plans conjoints, les offices de marché et toutes ces choses.

Enfin, on veut qu'il y ait une coopération entre les divers paliers de gouvernements, entre les ministères — nous l'avons dit tout à l'heure — et aussi au niveau fédéral et provincial. Nos préférences, comme corps public, comme industrie, vont à la province de Québec; si ce sont des matières de protection du consommateur, que cela soit des matières réservées au gouvernement des provinces.

M. le Président, cela résume les grandes lignes ou les points forts de l'attitude que désire

prendre devant vous, aujourd'hui, le Conseil de l'alimentation du Québec.

Le Président (M. Lafrance): Le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières.

Mme Bacon: J'aimerais tout d'abord remercier M. Roy et M. Raymond de leur mémoire. Le mémoire du Conseil de l'alimentation du Quebec a sûrement exigé une somme considérable de travail de la part de ses représentants. Ils ont travaillé à faire une grande recherche et une étude sérieuse. La synthèse qu'ils nous font en est la preuve vivante. Quand on lit ce mémoire, on s'aperçoit que le projet de loi no 7 a vraiment fait l'objet d'une étude sérieuse de la part du conseil.

J'aurais quelques remarques et commentaires à faire aussi, ne serait-ce que pour mentionner que ce projet de loi, tout comme des projets de loi analogues qu'on retrouve dans d'autres provinces, édicte sûrement des principes généraux qui visent à rétablir un équilibre contractuel entre les consommateurs et les commerçants. C'est ce que nous avons voulu faire par le projet de loi no 7. Les techniques de vente, de mise en marché, la pression de la publicité aussi, l'accès au crédit, la complexité technique de différents biens, les services offerts aux consommateurs, il y a les garanties qui sont entourées d'exigences procédurales qui rendent irréaliste la prétention que la signature du consommateur au bas d'un contrat est celle d'un acheteur aussi avisé que celle d'un commerçant.

Le but de la loi n'est donc pas de restreindre le développement de l'industrie et du commerce, mais se situe à un niveau bien supérieur, soit celui de l'équité des contrats. C'est ce qui est recherché par la partie substantive de la loi.

Votre mémoire nous reproche un manque de consultation. J'aimerais ici mentionner que nous avons tout de même consulté environ 40 groupements, associations ou même individus avant de déposer ce projet de loi. Je crois que l'audition de 82 mémoires que nous ferons au cours de ces semaines témoigne du contraire de ce que vous mentionnez.

J'aimerais ajouter aussi que le Conseil de la protection du consommateur compte parmi ses membres non seulement des représentants des consommateurs, mais aussi des représentants de marchands et de commerçants. Nous croyons à la consultation permanente. L'office se verra adjoindre un représentant, un agent de liaison, comme je l'ai déjà mentionné, qui fera la liaison non seulement avec les groupements gouvernementaux, les différents ministères, mais aussi avec les secteurs, comme par exemple, les marchands, les commerçants, pour ne nommer que ceux-là. Nous ne légiférons pas en fonction de petits groupes, mais bien pour l'ensemble des consommateurs québécois. Je pense que nous avons voulu traduire par ce projet de loi les préoccupations. C'est une préoccupation première de vouloir légiférer en fonction de l'ensemble des Québécois.

Votre conseil prétend que le projet no 7 devrait s'harmoniser peut-être avec d'éventuelles recommandations de l'Office de révision du code civil. Vous nous reprochez, du même souffle, le manque de coordination de notre loi avec d'autres lois contenant des dispositions semblables ou même des dispositions complémentaires. J'aimerais peut-être mentionner, parce que j'ai l'impression que cela doit être oublié, que notre gouvernement a institué certains comités interministériels chargés de coordonner l'ensemble des travaux, l'ensemble de la loi. Par exemple, le projet de loi no 7 a été étudié au comité ministériel de la qualité de la vie avant, évidemment, d'être étudié par le comité de législation, le cabinet.

Quant à l'Office de révision du code civil, j'aimerais rappeler que plusieurs dispositions du projet sont identiques aux recommandations faites dans le rapport du comité de l'Office de révision du code civil qui a été chargé d'étudier la vente et les obligations, par exemple. Nous retrouvons certaines de ces recommandations.

J'aimerais mentionner aussi que je suis en accord avec une des conclusions de votre rapport qui émet le principe qu'une société bien informée, de même qu'un consommateur bien éclairé, constitue la meilleure des garanties de protection pour le consommateur. Malheureusement, l'éducation du consommateur ne donne que des résultats à long terme, même si on essaie d'y tendre le plus possible. Ce qui nous oblige à suppléer par les voies législatives, par ce projet de loi, ces mesures législatives que nous devons mettre de l'avant.

Quant au Conseil de la protection du consommateur, on aura peut-être l'occasion d'y revenir tout à l'heure, j'aimerais mentionner tout de suite que depuis mon arrivée à ce ministère, j'ai cru bon de m'attacher sérieusement à la refonte de la loi sur la protection du consommateur, au lieu de faire de la structurite ou ne penser qu'à des structures.

Je pense qu'il était plus important de protéger l'ensemble des consommateurs que de voir à créer de nouvelles structures ou travailler en ce sens avant même de penser à changer cette loi qui, pour moi, était plus importante que des structures qui, somme toute, sont capables d'absorber ce projet de loi no 7 que nous mettons de l'avant, même telles qu'elles existent en ce moment.

Je reviens à l'analyse du projet de loi que vous avez faite, comme, par exemple, des définitions, comme le mot "consommateur" qui nous a été mentionné à plusieurs reprises à l'occasion de mémoires qui ont été soumis par d'autres groupes. C'est une définition que vous nous suggérez, mais, sans dire que nous l'acceptons, je peux tout simplement dire que nous réétudions la définition du mot "consommateur".

Il y a aussi l'article 5 et l'article 6. C'est un problème de rédaction qui nous a été soumis par plusieurs groupes, notamment celui du Barreau, et nous allons réétudier aussi cette définition.

Quant aux commentaires que je peux faire encore, M. le Président, j'aurais peut-être quel-

ques articles, comme l'article 24. Le comité du contrat de vente de l'Office de révision du Code civil reprend, à la page 50 de son rapport, cette expression consacrée, l'expression employée à l'article 24: "permettre l'usage auquel ce bien est destiné". Je pense que c'est substantiellement la même que celle utilisée par le Code civil à l'article 1522 et cet article a donc été interprété par notre jurisprudence et l'article 1522 du Code civil est une reprise du Code Napoléon, je n'ai pas à le rappeler ici.

A l'article 29, vous nous faites une suggestion dont nous prenons note de même qu'à certains autres articles, comme l'article 151 qui concerne la responsabilité du commerçant. Vous mentionnez aussi l'article 161 où il semble y avoir des difficultés d'interprétation de la part de différents groupes. Comme c'est susceptible de diverses interprétations, il est évident que cet article 161 sera réétudié afin de donner une interprétation plus claire face à ceux qui auront à administrer la loi ou à l'interpréter.

Aux articles 199 et 203, je ne doute pas de la sagesse de conserver cette originalité qu'est la défense de bonne foi en matière pénale. A l'article 203, évidemment, un poste administratif confère du prestige, mais, en même temps, il confère aussi, à mon avis, des responsabilités. Cet article, nous pouvons le retrouver au gouvernement d'Ontario, dans les pratiques interdites, et il ne semble pas, à mes yeux, que cet article soit très original en Amérique du Nord. On l'a déjà vu ailleurs aussi.

Votre suggestion à l'article 212 mérite aussi que nous en prenions bonne note. De même, si je reviens aux articles 214 et 216 pour le conseil, encore une fois, en faisant les commentaires que je faisais tout à l'heure, ça, peut-être personnel, mais je pense que l'ensemble des fonctionnaires de mon ministère qui ont à administrer la loi actuelle, la loi 45, ces fonctionnaires sont d'avis qu'il fallait d'abord s'attarder à la refonte de la loi, quitte, par la suite, à envisager de nouvelles structures s'il y a lieu de le faire à l'application de la nouvelle loi no 7.

Mais je pense que c'était beaucoup plus important, comme je le disais tout à l'heure, de légiférer pour l'ensemble des contribuables, l'ensemble des Québécois. En légiférant immédiatement, je pense que nous avons déjà accompli une bonne partie du chemin.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, une analyse aussi détaillée et je dirais consciencieuse de la part des membres du Conseil de l'alimentation du Québec de ce projet de loi mérite certainement que nous reconnaissions le fait qu'ils ont voulu participer très honnêtement aux travaux de la commission et je les en remercie.

Il y en a effectivement, Mme le ministre en a mentionné quelques-uns, d'autres qui ne peuvent pas échapper à l'attention; vous avez attiré notre attention sur certains articles qui ne sont pas mauvais dans le sens, mais qui risquent dans leur interprétation de conduire à des objectifs contraires à ceux que nous poursuivons. Votre expérience nous sert certainement de caution.

Il y a, par contre, un certain nombre de vos recommandations, que vous ne serez pas surpris de ne pas voir reprendre lorsque le projet de loi viendra en discussion article par article, parce qu'il y a effectivement, à un certain nombre d'endroits, une différence de philosophie et une différence de principes entre Vous et nous pour que nous nous en fassions les représentants.

Si je prends uniquement les pages de la conclusion qui reprennent, en fin de compte, les principes que l'on retrouve dans vos recommandations différentes, je dirais qu'il y a là une première différence fondamentale selon laquelle vous nous invitez à nous en tenir aux conditions minimales auxquelles un secteur particulier de l'économie doit se conformer. Je vous dirais que nous avons travaillé à la première rédaction de la loi en 1971 et que nous travaillerons aussi de bonne foi à cette amélioration de la loi 45 qui est la loi 7 justement avec la conviction du contraire. C'est que nous avons cru que, lorsqu'on se tenait aux conditions minimales, le goût du gain et le goût de l'appât du gain est tellement plus fort et subtil à l'occasion qu'il réussit à dépasser la bonne foi et à faire un certain nombre de victimes dans la société de consommation et, la plupart du temps, malheureusement, ceux qui sont déjà les plus démunis.

Moi le premier, je me refuse à une société où tout est réglementé, où tout est encadré où aucun geste à peu près n'est permissible sans que l'on, ait à répondre devant quelqu'un du pourquoi de la commission de cet acte, mais il reste que l'expérience contraire dans le domaine de la consommation nous incite, à certains endroits, à en mettre plus que moins. Je prends seulement l'exemple que vous avez vous-même mentionné et qui a fait l'objet de plusieurs discussions ici, celui de la publicité destinée aux enfants. J'aime mieux avoir un principe général et catégorique et ensuite travailler à des exceptions comme celle que M. Roy a donné, qui est parfaitement légitime, que de me dire: Parce que je veux qu'il y ait de la publicité pour les enfants, je vais laisser aller les escrocs — je les appelle comme cela — qui ont utilisé les enfants comme victimes. Je pense que c'est tout l'esprit du projet de loi dans lequel nous avons travaillé. Nous ne pouvons plus nous en tenir aux conditions minimales. Malheureusement, parfois là où cela apparaît comme tatillon et précis, c'est à partir d'une expérience concrète où on s'est dit: Si on ne le dit pas, ils vont contourner la loi. Si on ne l'exprime pas clairement, ils ont des gens payés pour cela et fort habiles, un peu comme pour la Loi de l'impôt, capables de toujours trouver la brèche, le point qui va faire qu'éventuellement un consommateur va se faire prendre au piège à un endroit ou à un autre...

J'ai pris note des endroits où vous nous signalez, à bonne raison je pense, que la loi est peut-être trop précise, trop sévère, trop restrictive, mais je vous dis que, dans l'ensemble, je suis beaucoup

plus solidaire de cette approche que d'une qui nous inviterait, comme vous l'avez fait, à nous en tenir aux conditions minimales.

Je donne un exemple parce que je ne veux pas non plus allonger inutilement un document qui, de toute façon, parle déjà beaucoup par lui-même. Mais, quand vous nous parlez de façon inquiète de la modification qu'apporte l'article 5, en apportant la lésion entre majeurs, toute nouvelle notion précédemment réservée aux relations avec mineurs; c'est vrai que, sur le plan de principe, c'est une étape dans une législation quand une société en est rendue à inclure ce principe là-dedans, mais elle n'est pas née de la pluie et du beau temps, cette décision, ou je dirais cette nécessité d'inclure cette modification dans ce projet de loi, c'est qu'il y avait — et la commission a été saisie par d'autres groupes de certains représentants — effectivement dans la pratique courante, c'est déplorable et je sais que ce n'est pas l'affaire de tout le monde et que ce n'est pas la pratique de tous les commerçants, mais il arrive, et de plus en plus fréquemment, que des cas de lésions entre majeurs se seraient produits et sont très désavantageux pour certains de nos concitoyens.

Nous y allons presque à reculons, mais nous sentons obligatoire d'inclure ce genre de notion dans un nouveau pacte, dans une nouvelle loi de la consommation. Je souligne que votre volonté, exprimée clairement par M. Roy au début de votre témoignage, de réunir toutes ces lois qui touchent le consommateur et d'y regrouper une philosophie en même temps, connaît sa première exception à votre appel, puisque vous nous suggérez, au sujet des dispositions générales concernant le louage ou la vente de biens et services, de les exclure d'un éventuel code de la consommation pour les laisser là où vous croyez qu'elles devraient normalement avoir leur place, soit les incorporer au Code civil. On ne peut pas défendre une position de principe, disant qu'on doit tout rassembler et en même temps suggérer qu'un chapitre aussi important que la vente et le louage d'une chose dans le monde de la consommation soient à l'écart de ce code. Je vous signale ce paradoxe curieux dans votre présentation, puisque, par ailleurs, la présentation est très cohérente même si, au départ, je vous le dis, notre approche procède d'un principe différent.

Je vous remercie beaucoup d'avoir fait ce travail pour la commission.

M. Roy: M. le Président, me serait-il permis, à ce moment-ci, de poser une question à votre collègue, M. Charron?

Le Président (M. Lafrance): Oui.

M. Roy: J'admets entièrement les expressions d'opinion de Mme le ministre, mais pour ce qui est de ce que vous venez d'exposer, ne croyez-vous pas qu'il y ait un effort véritable du gouvernement d'aller vers la formule de l'intervention directe pour guérir un mal? J'admets qu'il y a urgence et j'admets aussi que c'est bien beau de faire des théories ou faire paraître des thèses qui ont peut- être une portée à longue échéance, mais qu'il y a des maux à guérir demain matin. J'admets tout cela. Mais, n'y aurait-il pas moyen, au moment où vous allez avoir une loi qui, en définitive, règle le problème de tout le monde... Je me place dans le contexte du genre d'organisme de la protection du consommateur qu'on connaît, sans préjudice pour aucune association en particulier, où, faute de moyen ou faute d'organisation, on s'en remet à l'autre, l'autre étant toujours une façon absolue — l'Etat — de régler le problème.

Je vois dans la loi no 7, précisément, un sursaut de la part de l'Etat qui dit: Cela a assez duré, il faut aller au plus vite. On va régler cette affaire.

Ne croyez-vous pas qu'à ce moment vous êtes en train d'encourager cette espèce de non-participation, de prédisposition à laisser toujours Alphonse régler le problème pour soi, alors qu'il y aurait peut-être moyen, en même temps que vous faites cet effort, que vous donnez ce coup de barre décisif, de stimuler, comme je l'ai suggéré au début, par des organisations structurées...? J'admets, madame, que c'est entendu qu'à un moment donné, il faut mettre des priorités quelque part.

Personnellement, après 23 ans de carrière dans ce domaine, j'ai l'impression qu'on n'a jamais aidé ou permis aux groupes qui sont bien intentionnés, quand il s'agit de défendre les intérêts des consommateurs dans certains secteurs, de s'organiser pour être réellement quelque chose qui peut faire quelque chose.

C'est grave quand on regarde cela dans le contexte du Québec par rapport à d'autres contextes, à l'extérieur du Québec. Vous avez sans doute, comme moi, remarqué, il y a quinze jours, au moment du congrès national de l'Association canadienne des consommateurs, ce qu'on a mis en évidence, à la suite de ce congrès, dans les journaux: Le CAC change d'orientation. Désormais, le CAC tentera de présenter ses doléances et de discuter à fond ses problèmes avec la contrepartie, c'est-à-dire les manufacturiers, les commerçants, etc., avant de recourir à l'Etat en dernière instance pour une intervention policière.

Voici un corps public qui a assez de structures dans le moment pour être capable de se ressaisir, de choisir, parmi les moyens, ce qu'il a l'intention de faire et, à mon sens, de s'orienter vers quelque chose qui est prometteur. C'est-à-dire que les parties impliquées qui deviennent des adultes se disent: On va se parler au lieu de toujours s'en remettre à Alphonse pour régler le problème pour nous.

C'est la question que je vous pose: Croyez-vous qu'en donnant ce coup de barre décisif, comme on veut le faire, de la part du gouvernement du Québec, on ne passe pas à côté de l'occasion qu'il y aurait, en même temps, au moins, de préparer, de stimuler ou de donner un coup de barre aussi du côté des structures pour éviter, encore une fois, cette espèce de décrochage collectif de tous nos corps publics qui sont rendus à faire cela?

Sauf une ou deux, dans la province de Québec, les autres associations, il ne faudrait pas, demain matin, leur demander leur liste de mem-

bres, leur budget, la date de leur dernière assemblée annuelle, le programme d'action qui a été adopté et ces choses-là, n'est-ce pas? Il ne faudrait pas le faire, parce que cela n'existe pas. Dans les corps spécialisés qui font de la recherche sur le contrôle de la qualité, c'est un peu la même chose. Ils y vont à leur corps défendant, ces gens. La moindre anicroche qu'ils peuvent faire... D'abord, ils ne peuvent même pas être poursuivis en justice si leurs affirmations s'avèrent fausses. Alors, comment voulez-vous que les gens, au niveau consommateur et producteur, puissent faire oeuvre qui devrait normalement être leur ouvrage à eux, avant que cela parvienne aux autorités des gouvernements, si on n'a pas ce qu'il nous faut au point de vue structure pour se rencontrer? C'était le sens de ma question.

M. Charron: Vous avez ouvert une réponse vous-même en la posant, en disant: L'hypothèse la meilleure serait de le faire en même temps. Parce que tous ces groupes, même les plus avancés dans ce domaine, c'est-à-dire ceux qui peuvent se permettre d'établir une conciliation, de s'occuper eux-mêmes de leurs affaires, d'être assez structurés, assez mobilisés et assez pesants pour le faire, à un moment ou à un autre, réclament l'intervention de l'Etat et sont les premiers à le faire. Lorsqu'ils sont assez solides pour remarquer que telle ou telle pratique commerciale est suffisamment fréquente, cause suffisamment de problèmes pour nuire au développement harmonieux d'une collectivité, par exemple, une des choses qu'ils font presque obligatoirement, dans une société civilisée, c'est de se retourner vers l'Etat et de demander à l'Etat — lui seul peut le faire — de décréter telle pratique illégale.

Donc, on revient toujours au sens de la loi, puisque si la loi n'existait pas et n'interdisait pas certaines pratiques, tous ces groupes ne pourraient, à un moment ou à un autre, que battre une campagne publicitaire à l'encontre de ces pratiques, mais sans résultat concret.

J'admets bien qu'ils doivent être les premiers à mobiliser et à sensibiliser, mais le but de l'action est toujours de rendre telle pratique qu'un groupe juge discriminatoire, après avoir gagné l'appui de l'opinion publique, en dehors du champ normal de pratique de cette société, c'est-à-dire illégale.

Je suis d'ailleurs convaincu — ce sera ma conclusion, M. le Président — que si l'Etat et les différents partis politiques qui forment l'Assemblée nationale du Québec en sont aujourd'hui, pour la deuxième fois, à travailler sur un projet de loi sur la protection du consommateur et à inclure, à légaliser ou à illégaliser certaines pratiques commerciales, maintenant, c'est d'abord et avant tout à cause du travail de ces groupes auparavant. On peut le dire maintenant. Ce n'est certainement pas porter atteinte à qui que ce soit que de dire que l'Etat a été d'une nonchalance avant d'intervenir dans ce dossier. Il y a eu, à une époque, seulement ces groupes qui travaillaient. Maintenant, l'Etat intervient beaucoup et largement, jusque dans plusieurs pratiques. Cela cause un certain nombre de problèmes, un certain nombre de sou- cis, mais il faut y voir, en même temps, une volonté de corriger un retard que l'Etat a mis beaucoup de temps à combler. Je vous remercie, M. Roy.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: Je serai assez bref, M. le Président. J'ai été impressionné par plusieurs points de votre document, qui est d'ailleurs un de ceux qui m'ont le plus impressionné dans ceux que j'ai entendus jusqu'à ce jour. Il y a un point, à la page 22, surtout, lorsque vous soulignez, à l'article 151, des explications selon lesquelles le commerçant est un agent du consommateur et non du manufacturier. Vous venez de toucher un point bien sensible de l'aspect réaliste du commerce de la façon dont il se fait. C'est un point qui n'avait jamais été abordé par d'autres groupements qui sont venus ici. Je pense qu'il sera très important d'en tenir compte, à mon point de vue, en tout cas.

J'ai, quant à la page 20, deux courtes questions strictement techniques. Vous écrivez: Dans le contexte de la société de conservation que nous avons définie, une garantie sur un bien devrait indiquer: a) le coût détaillé de la garantie. Que voulez-vous dire?

M. Raymond: Cela reste à déterminer à chaque coût, mais qu'est-ce que la garantie, exactement, va en coûter au consommateur, selon chaque produit?

Ce n'est pas possible, à l'heure actuelle, dans le cadre d'un mémoire comme cela, ces six éléments, de prendre un produit en particulier et de définir quel va être le coût. Dans le cas d'une automobile, cela va varier; enfin c'est presque impossible, à l'heure actuelle, de dire: Tel produit cela va être telle ou telle chose.

Le point sur lequel je voudrais revenir, c'est un point que M. Charron avait mentionné, c'était justement cette approche de la loi globale versus l'approche minimum, la loi qui est conçue comme un minimum d'information. M. Charron dit: C'est comme la loi de l'impôt, il y a des avocats qui vont trouver des fissures et tout cela. A notre avis, si c'est un secteur particulier qui est suffisamment bien réglé, il ne sera pas possible, probablement, de trouver un moyen de se sortir de la loi particulière. Mais le point particulier d'une législation globale, c'est comme on l'a mentionné, il y a des fonctionnaires qui vont appliquer cette loi. Il y a des gens qui vont la lire. Puis vous savez, il y a toutes sortes de façons de lire une loi. Plus vous êtes global, plus il y a un risque. A un moment donné, vous regardez et vous dites: Bien là, où je m'en vais.

Là, je me mets particulièrement dans la position d'un avocat qui est conseiller juridique. On a des biens, des centaines et des milliers de biens, par exemple, dans un grand magasin, et à un moment donné on peut avoir des lois comme cela. Alors, dans quelle mesure telle loi représente-t-elle quel est l'usage auquel normalement ce bien est destiné? Qui va déterminer cela? En vertu de quel

critère? Si on pouvait avoir au moins des minima législatifs. Cela peut se faire parce qu'il y a des modèles, et je suis certain que les législateurs du ministère vont être capables de trouver de ces modèles. Les six points qu'on a mentionnés là font partie de ces critères généraux. Qu'est-ce que c'est qu'une loi? Qu'est-ce qu'on peut définir dans une garantie? Une garantie définit son coût, définit quel est le garant, ainsi de suite.

Alors n'importe qui achète un bien va avoir une idée générale de ce qu'il achète, combien cela lui coûte, ainsi de suite. C'est un aspect, à notre avis, qui est primordial. Puis l'autre aspect de cela, évidemment, c'est que cela va tout ensemble, cette loi. Puis quand on considère les moyens qui sont mis en oeuvre à la fin, les sanctions qui peuvent être appliquées, toutes ces dispositions où les directeurs sont responsables, que vous multipliez tout cet effet, vous arrivez à une loi qui, dans des dispositions générales, est, à certains points de vue, effarante.

Maintenant, dans certaines autres provinces, en Colombie-Britannique peut-être, il y a toujours la question aussi de la vigueur, de la mise en application des lois, comme vous le savez. Il y a beaucoup de lois qui sont très vastes, qui couvrent beaucoup puis qui ne sont presque pas appliquées. Je ne sais pas dans quelle mesure la loi de la Colombie-Britannique est appliquée, mais après l'avoir vue puis après l'avoir étudiée — je parle du Trade Practices Act — je peux vous assurer franchement que je me sentirais extrêmement inconfortable. Il y a plusieurs dispositions de cette loi qui frisent...

Evidemment, c'est une question de philosophie encore, et M. Charron l'a bien indiqué tout à l'heure. Vraiment, c'est une question de philosophie. M. Charron préfère une législation à caractère général. Nous autres on dit: La loi est un instrument trop puissant, puis on a trop de respect pour la loi, on ne peut pas se permettre d'arriver puis d'avoir des choses, en particulier sur les questions comme la garantie puis la publicité, parce qu'au fond, c'était l'essentiel de notre analyse. Les autres, puisque cela consistait en des secteurs particuliers, cela coïncidait avec notre philosophie. Là où il y a des abus, où il y a une situation à corriger, bien là, on légifère en particulier sur ce secteur.

Maintenant, l'autre point aussi que je voulais mentionner à l'intention des gens du ministère, c'est un point qui est de plus en plus développé: les cours de marketing à l'université, les cours de commerce, parce qu'aussi je suis professeur à l'université, à temps partiel, en marketing. Le marketing, la science du marketing, qui aide au fond, les entreprises, tout cela évolue de plus en plus, comme on l'a mentionné, par la société de conservation. Alors toutes les mesures dont on parle, quand on parle de protection du consommateur, société de consommation, on s'en va graduellement vers une restauration, un nouvel équilibre.

Il y a eu, à un moment donné, au début des années soixante, comme on l'a mentionné, une vague de "consommateurisme". Cette vague tend à diminuer. Il y a beaucoup de ces choses, dont on se plaignait, autrefois qui se réajustent naturellement. Alors c'était le contexte de la société de conservation. Dans une société de conservation, probablement même que l'éducation va devenir la primauté. Au lieu de légiférer pour réglementer l'industrie, il faudra légiférer pour éduquer, parce que cela va devenir trop important d'apprendre à bien utiliser les biens, apprendre à bien s'en servir, apprendre à les recycler, enfin toute l'optique de la société de conservation.

Puis il y a de plus en plus, dans les entreprises, cette prise de conscience. Je reviens à la question du député qui parlait justement du commerçant qui devient un agent du consommateur. Cette philosophie commence à pénétrer, à l'heure actuelle.

De plus en plus, les gens sont conscients. D'ailleurs, c'est une question de simple logique. Si vous allez dans un magasin et achetez un produit, vous voulez savoir exactement où sont les pièces de rechange, combien cela vous coûte, le plus de renseignements possible; en particulier, plus le bien est complexe, plus vous voulez de renseignements et, de plus en plus, dans les grands magasins, on va vous trouver ces renseignements. On va vous dire si les pièces sont disponibles; on va vous expliquer comment faire un usage réfléchi et intelligent des biens et, au fond, c'est cela qui est la garantie. Si l'Etat veut faire cela pour une loi, c'est pour cela qu'on était d'accord. Cela correspond...

Il se fait un rajustement naturel à l'heure actuelle vers l'inverse, le cycle, la fameuse balance. Maintenant, ce n'est plus la consommation, c'est la conservation. Cela éliminera, probablement, la nécessité de beaucoup de lois de la protection du consommateur. Peut-être même que, dans cinq ans ou dans dix ans, cela deviendra peut-être quelque chose du passé, une période, à un certain moment, où la société était dans une période d'abondance et où il y a eu une législation et, après cela, le monde nouveau a fait place. A ce moment, il n'y aura plus nécessité...

C'est une considération de base globale qui est là et qui mérite d'être considérée. D'ailleurs, toutes les études aussi qui ont été publiées depuis deux mois... C'est inouï. Le rapport du Conseil des sciences du Canada qui vient d'être publié il y a à peu près une semaine est encore dans la même optique. Alors, cela fait changer les choses. Il n'est plus question, à notre avis, de protection du consommateur. Il est question d'éducation du consommateur beaucoup plus que de protection du consommateur.

Mme Bacon nous dit que, pour elle, le premier pas était cela et que le deuxième était telle chose...

Le Président (M. Lafrance): S'il n'y a pas d'autres questions de la part des membres de la commission, ceci termine l'audition du mémoire du Conseil de l'alimentation du Québec.

Nous entendrons maintenant les représentants de Lever Detergents Limited.

Si vous voulez nous lire votre mémoire, nous sommes prêts.

Lever Détergents Limitée

M. Lesage (Alexandre): Je suis accompagné de M. Allan Rae qui est président de Lever Détergents Limitée, de M. Ernie Cooke, qui est directeur du marketing, et de M. René Lévesque, qui est directeur des ventes.

Le Président (M. Lafrance): René Lévesque, vous avez dit?

M. Lesage: René Lévesque. J'ai bien dit.

Lever Détergents Limitée est une filiale canadienne de Lever Brothers Limited. Cette dernière entreprise est une filiale d'Unilever Limited et lui appartient en totalité. Il s'agit, évidemment, comme on le voit, de ce qui est communément appelée une multinationale.

Lever Détergents Limitée a été constituée en compagnie séparée de Lever Brothers Limited en 1969.

Lever Brothers Limited a été constituée en société anonyme en 1899. Au cours des années écoulées, Lever a joué un rôle important dans le développement de l'industrie des savons et détergents dans chaque région du Canada, y compris, évidemment, le Québec.

Présentement, Lever Détergents Limitée fabrique et vend, par l'intermédiaire du commerce de détail, un grand assortiment de savons, de détergents synthétiques ainsi que des dentifrices. La compagnie concurrence d'autres manufacturiers pour l'approvisionnement de produits qui répondent à divers besoins du consommateur. Nous avons toujours été fiers de la qualité de nos produits et de leurs prix avantageux pour la ménagère canadienne.

Le but de la présentation de Lever, vous le constaterez, est très pratique et est dans la ligne de ce que Mme Bacon soulignait le mercredi 11 août lors de ses remarques préliminaires aux auditions de cette commission. Voici ce que disait le ministre et ce qu'elle attend des commerçants.

Vous disiez, Mme le ministre, qu'en ce qui concerne les commerçants comme Lever, la contribution majeure — et je vous cite — qu'ils pourront nous apporter, sera de nous éclairer sur les répercussions des dispositions législatives, sur leurs opérations quotidiennes et sur les conditions économiques dans lesquelles évoluent leurs entreprises.

Le mémoire de Lever Détergents Limitée se rapporte essentiellement à un produit qui est le produit Breeze mis en marché au Québec. Spécifiquement, quel serait l'effet d'une disposition législative,' à savoir l'article 158, si cette loi était adoptée par l'Assemblée nationale, sur ce produit bien spécifique qui est sur les tablettes des ménagères québécoises depuis 1950.

Nous sommes inquiets — je reviens au mémoire — du fait que l'article 158 du projet de loi no 7 pourrait être applicable à notre détergent à lessive Breeze. Au cours des dernières années, ii a été question à plusieurs reprises des détergents assortis de primes. Un point qu'il nous importe de souligner en premier lieu, c'est que les serviettes, il s'agit de tissus, soit des serviettes, soit des linges à vaisselle, qui sont assortis au détergent Breeze, ne sont pas des primes dans le sens usuel de facteur de promotion. Ce n'est pas quelque chose dont on dit: Une serviette gratuite, si vous achetez Breeze. La présentation n'est pas ainsi faite, mais bien un élément intégral de conditionnement de la marque. Nous voulons dire par là que Breeze a toujours été vendu dans un empaquetage qui comprend et le détergent et la serviette. Cela a toujours été les deux en même temps.

Breeze a été lancé en 1952 en offrant à la ménagère canadienne un détergent à lessive efficace avec débarbouillette ou serviette selon le format de l'empaquetage. Cette offre combinée s'est poursuivie de façon constante depuis 24 ans. Il importe de noter que Breeze n'a jamais décrit la serviette comme étant gratuite. Le produit a toujours été offert en quantité moindre que les produits concurrents, évidemment, pour mettre la serviette, mais en quantité assortie d'une débarbouillette ou d'une serviette. Cette offre combinée a toujours été avantageuse du fait que le détergent et la serviette assortie sont ainsi achetés à meilleur prix que si on achetait et du détergent et une serviette séparément. A ce compte, Breeze est devenu très populaire auprès de la ménagère canadienne. En fait, au milieu de la décennie 50, c'était le détergent à lessive le plus vendu au pays. Son volume d'affaires était et continue d'être ferme au Québec. La ménagère québécoise, entre autres, apprécie et continue d'apprécier cette offre combinée. Depuis 1952, les ménagères ont acheté environ 230 millions de boîtes de Breeze, comme on peut voir au tableau qui est annexé au mémoire.

Ce succès a été obtenu sans publicité au cours des premières années de distribution de la marque, ce qui démontre que' les ménagères apprécient de leur propre chef la valeur de Breeze. Il est vrai que les ventes de Breeze ont diminué au cours des années. D'ailleurs, vous allez le constater à la lecture du tableau, et ce, pour diverses raisons. L'une de celle-ci a été le lancement par les concurrents de produits offrant le même genre de bonne valeur. Il est également admis que de nombreuses ménagères préfèrent acheter leur détergent en plus forte quantité sans article de tissu. Evidemment, il y a de nombreux produits du genre à la portée de la ménagère, y compris ceux de notre fabrication.

La ménagère peut, d'emblée, faire le choix qui lui convient à l'achat de son détergent. Bien que les ventes de Breeze diminuent, il y a des milliers de ménagères, au Québec et ailleurs, qui apprécient et préfèrent l'offre de Breeze et qui continuent d'acheter ce produit d'année en année, de préférence à d'autres marques. Elles apprécient l'offre d'un détergent assorti d'un article de tissu. Elles désirent la serviette et ne peuvent l'acheter à

meilleur marché autrement. On estime que les ventes de Breeze en 1976 atteindront encore quatre millions de boîtes.

En période d'inflation, Breeze constitue un achat particulièrement avantageux. Si la ménagère québécoise devait acheter séparément une serviette ou une débarbouillette de qualité comparable et la qualité équivalente de détergent que contient l'empaquetage Breeze, elle aurait à débourser beaucoup plus pour les deux articles qu'elle ne débourse présentement en les achetant sous forme de Breeze.

Nous sommes en mesure d'obtenir des prix spéciaux pour les articles en tissu de bonne qualité, et ce de fournisseurs canadiens tels que Wa-basso, Caldwell et Centrex, grâce au volume important de nos achats. Nous reportons ces économies sur la clientèle de Breeze.

Le gouvernement du Québec est au courant du fait que Breeze, contrairement aux autres détergents empaquetés sans rien d'autre, rapporte une taxe provinciale au Québec sur les serviettes et débarbouillettes. Il s'agit évidemment de la taxe de vente. Cette taxe est payée directement par la compagnie à la trésorerie provinciale. A ce sujet, je me permets de faire remarquer immédiatement qu'il s'agit d'une entente intervenue entre le ministère du Revenu et la compagnie Lever Détergents Limitée, où la compagnie est considérée comme percepteur de la taxe et en fait remise à l'avance. Elle n'est pas considérée comme le consommateur ultime qui doit payer — la taxe de vente, c'est une autre loi que celle qui nous occupe — mais en vertu de la loi de l'impôt sur la vente au détail, la taxe de vente sur la serviette est payable par le consommateur qui est celui qui achète le produit; la taxe de vente est remise par la compagnie à titre d'agent ou de percepteur.

Au paragraphe 6, une expérience qui a été tentée par Breeze est décrite et je crois que ceci est révélateur. Antérieurement, en 1961, Breeze était offert de deux façons, en poudre à lessive bleue ou blanche, l'une et l'autre étant assorties d'articles en tissu identiques. Au cours de sondages de marché, en 1961, les serviettes des empaquetages de poudre blanche, la quantité et le prix de Breeze blanc ont été comparés à ceux des autres marques populaires sans prime. Il y avait deux Breeze, le Breeze sans tissu et le Breeze avec tissu. Nous allons voir ce qui est arrivé.

Dans ces conditions qui permettaient à la ménagère de choisir le même produit, avec ou sans article en tissu, les ventes de détergent blanc sans article en tissu ont diminué si rapidement que nous avons été obligés d'en arrêter la mise en marché en 1963. Ce que la ménagère achète, c'est le produit Breeze qui comprend les deux choses.

Conditionné sans article en tissu, ce produit n'était tout simplement pas à la hauteur de la marque Breeze recherchée et désirée par le consommateur. Evidemment, le consommateur appréciait la valeur supérieure du détergent assorti d'un article en tissu, même s'il réalisait qu'il devait payer un peu plus pour cet assortiment que pour un détergent seul. Si, dorénavant, nous étions obligés de vendre le Breeze sans serviette ou débarbouil- lette, nous croyons qu'il est bien évident que le consommateur abandonnerait la marque et que nous serions obligés d'en arrêter complètement la mise en marché.

Nous croyons que cela nous causerait des difficultés qui ne sont pas nécessaires, ainsi qu'au consommateur qui préfère acheter le Breeze. Nous considérons que cela serait particulièrement draconien et pas du tout nécessaire du fait que le consommateur est en présence d'un vaste choix de détergents au moment d'en effectuer l'achat.

Chaque boîte de Breeze indique clairement la quantité de détergent qu'elle contient et le détaillant en indique le prix. Nous n'avons jamais annoncé sur la boîte ou dans notre publicité que l'article en tissu était gratuit. L'offre est une combinaison de détergent et d'un article en tissu, et c'est une offre avantageuse. Notre prime, si c'est une prime au sens de l'article 158, n'a pas varié et a toujours fait partie intégrante du conditionnement du produit. Les articles en tissu n'ont jamais servi à la mise en oeuvre d'une promotion temporaire.

Nous vous prions, M. le Président, Mme le ministre et MM. les membres de la commission de prendre en considération ces remarques et de revoir l'article 158 tel que libellé, de façon qu'il puisse permettre à notre cliente de continuer la mise en marché du produit Breeze que nous vous avons décrit au cas où le mot "prime" pourrait être interprété comme s'appliquant au produit que nous offrons au consommateur.

Le Président (M. Lafrance): Merci Me Lesage. Mme le ministre.

Mme Bacon: J'aimerais d'abord vous remercier pour le mémoire que vous nous avez soumis. J'aurais peut-être quelques petites questions à vous poser. La boîte de Breeze que vous mentionniez tout à l'heure n'a jamais, je crois, indiqué la valeur de la serviette ou de la débarbouillette que vous offrez en prime à l'intérieur. Y a-t-il des raisons qui ont motivé cela? On a tout simplement mis de côté le fait soit qu'elle soit fournie gratuitement ou d'indiquer la valeur de cette prime. On ne l'a jamais fait.

M. Lesage: On ne l'a jamais fait. Evidemment, étant un peu profane comme vous pouvez le penser sur les techniques de mises en marché, je présume qu'il s'agissait là évidemment d'offrir au consommateur non pas seulement du savon, mais d'offrir deux produits combinés.

Le consommateur a pu, au cours de soixante et un, vérifier la différence entre les deux, relativement et facilement, car sur les tablettes il y avait l'un et l'autre. Encore aujourd'hui, la concurrence entre les divers savonniers étant tellement forte, nombreux sont ceux qui offrent la même quantité, sans cette pièce de tissu: la différence est tout de même assez facile à faire. Mais le prix n'est pas indiqué sur la boîte...

Mme Bacon: Mais quelle serait la valeur de cette prime?

M. Lesage: La valeur de cette prime, d'après les renseignements que j'en ai, serait de $0.90; évidemment, c'est le coût à Lever, j'entends; il y aurait des coûts d'empaquetage et certains autres coûts à ajouter, mais ce serait $0.90 pour la serviette de bain et...

M. Lévesque (René): Nous avons trois primes dans les boîtes, alors, la plus petite est de $0.22.

M. Lesage: Laquelle, s'il vous plaît.

M. Lévesque: Celle-ci, qui se trouve dans la boîte de 15 onces; la prime qui est dans la boîte de 30 onces nous revient à $0.38 et la serviette de bain à $0.90. Naturellement, de plus, on paie la taxe provinciale, ce qui amène la prime de $0.90 à environ $0.97 ou $0.98.

Mme Bacon: Avez-vous le montant que devrait payer le consommateur pour se procurer ces articles ailleurs que dans votre boîte?

M. Lévesque: Oui, on pourrait vous donner une idée, à savoir que les serviettes, soit Wabasso, Caldwell, ce sont les plus populaires, on peut les trouver dans les magasins Woolworth. Les prix vont varier entre environ $1.65 et $1.90; les essuie-mains, entre $0.98 et $1.29 et les débar-bouillettes entre $0.55 et $0.65 environ.

Mme Bacon: Vous mentionnez au paragraphe 3 de la page 3 de votre mémoire qu'il est également admis que de nombreuses ménagères préfèrent acheter leur détergent en plus forte quantité sans article de tissu. Pourquoi continuez-vous à offrir des primes et pourquoi, insistez-vous sur cet article 158 pour continuer d'offrir ces primes, si vous avouez vous-même qu'il est admis que de nombreuses ménagères préfèrent acheter leur détergent en plus forte quantité?

M. Lesage: Si vous permettez, cette affirmation qui est réelle, plusieurs ménagères préfèrent acheter du détergent... mais un nombre assez considérable d'entre elles préfèrent encore acheter les deux. Pourquoi ne pas laisser le choix à celles qui désirent acheter Breeze, détergent et serviette, de le faire, et à celles qui ne veulent acheter que le savon, de le faire également?

Mme Bacon: Avez-vous déjà fait des études en ce sens sur la clientèle qui achète ces boîtes de Breeze? Avez-vous des études de faites?

M. Lesage: II y a eu évidemment l'expérience de 1961 qui a été, quant à ceux qui ont fait la mise au marché, concluante à ce moment-là.

M. Levesque: Ce fut sans doute notre recherche la plus poussée en 1961 lorsqu'on a enlevé les serviettes de Breeze dans la poudre blanche et qu'il nous a fallu, deux ans plus tard, retirer le produit du marché parce que les consommatrices ne l'achetaient pas. Elles achetaient le produit avec les serviettes à l'intérieur.

Mme Bacon: ... à l'intérieur.

M. Levesque: Cela dans toute la province de Québec.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, Mme le ministre, se servant de sa grande expérience, a posé toutes les questions que je voulais poser.

Le Président (M. Lafrance): Me Lesage, ainsi que vos collègues, nous vous remercions pour votre mémoire.

Nous entendrons maintenant l'Assoiciation des savonniers canadiens.

Association des savonniers du Québec

M. Lesage: Je représente également l'Association des savonniers canadiens.

Le Président (M. Lafrance): Très bien, demeurez à votre siège.

M. Lesage: Je vais vous présenter, à ma gauche, où il vient de prendre place, M. Richard Bo-nar, qui est président du comité de législation de l'association; également, M. Raymond Kunsman, qui est directeur du marketing. M. Allan Rae, qui est un directeur exécutif de l'association, va également demeurer avec nous.

L'Association des savonniers comprend un nombre de membres assez imposant. Je ne crois pas qu'une liste des membres de l'association ait été annexée à la lettre qui vous a été tranmise. Croyez-vous, M. He Président, que je devrais le faire?

Le Président (M. Lafrance): Si vous le jugez utile, vous pouvez le faire.

M. Lesage: Je peux vous les nommer succinctement: Amway of Canada Ltd., Bristol-Myers Canada Ltd., Canada Packers Ltd., Cartier Chemical Co. Ltd., Chemical Developments (Canada) Ltd. — je parle de compagnies ayant leur siège au Québec maintenant — Colgate Palmolive Ltd. En Ontario, il y a Copeland Laboratories Ltd., Desoto Coating, Diversey (Canada) Ltd., Economic Laboratory Inc. — qui font affaires au Québec — Lever, qui est ici, Procter & Gamble — qui est aussi un savonnier — Purex Canada Ltd., Taylor Soaps, G.H. Wood & Co. Ltd., qui font également affaires dans le Québec.

M. le Président, vous avez en main une lettre du 28 mai qui n'était que l'indication que l'association voulait faire quelques représentations auprès de la commission parlementaire. Cette lettre n'était pas autre chose qu'un avis de présentation. M. Bonar et l'association me chargent de prier le président de même que le comité d'excuser la présentation de cette lettre... Celle-ci aurait été faite — me dit-on, parce que je n'étais pas au dos-

sier à ce moment— à la dernière minute et elle serait une traduction plus ou moins bien faite d'un original anglais. Si vous étiez assez aimables de ne pas trop lire cela et de porter attention à nos commentaires, ceci rendrait plus justice à l'association qui est devant vous.

Comme vous le voyez, l'association est composée des principaux manufacturiers de savon et de détergent au Canada et la plus grande partie de ses membres font affaires dans la province de Québec qui consomme de 25% à 30% des produits fabriqués par les membres de l'association au Canada.

L'association a évidemment pris connaissance des divers mémoires et des représentations faites par d'autres associations et par les compagnies. L'association comme telle endosse certaines des propositions qui ont été faites et elle déclare apprécier les efforts du gouvernement du Québec pour établir une législation qui protégera efficacement les consommateurs québécois.

Nous aimerions faire quelques commentaires plus précis sur l'article 158, communément appelé celui des primes. Les remarques qui ont été faites dans la présentation de Lever Détergents Limitée conviennent à l'association et elle les appuie.

Nous désirons souligner un point qui touche les habitudes d'achat des consommateurs des produits des membres de notre association. Le consommateur qui a décidé d'acheter un détergent à lessive d'une marque particulière et qui contient, en plus du détergent, soit une serviette, soit quelquefois de la verrerie, un verre, quelquefois de la coutellerie ou une assiette, n'agit pas sous l'impulsion du moment quand il achète de préférence cette marque qui contient l'article que nous allons appeler l'article prime. Il le fait par un choix arrêté parce qu'il a devant lui, en tablette, des détergents d'égale qualité qui lui sont offerts sans ces primes.

On constate que le consommateur achète régulièrement le même détergent de la même marque. Un consommateur donné qui achète du Breeze ou du Tide ou telle autre marque d'un autre fabricant continue, achète régulièrement, revient toujours à la même marque, qu'il y ait ou non la serviette, ou la verrerie et ce, parce qu'au cours des années, c'est un consommateur qui est satisfait de son achat — il peut en tout temps faire la comparaison avec les autres produits — tant au point de vue détergent qu'au point de vue de l'article qui accompagne le détergent. Il en résulte, pour le consommateur, une économie réelle tant sur le savon que sur l'article.

Ce que nous avons dit dans le cas de la serviette pour Breeze s'applique mutatis mutandis en ce qui regarde la verrerie ou la coutellerie, pour les autres membres de l'association. Ce genre de mise en marché où le mot gratis n'est pas écrit, ni le mot prime, c'est une offre combinée de deux choses. L'association demande que l'article 158 soit ainsi libellé: que cette mise en marché puisse continuer à être faite; ce que les légistes pourraient faire si le comité suit notre recommandation en définissant le mot "prime".

Le projet de loi semble aussi également rendre difficile, sinon impossible, une autre forme de mise en marché. Ici, il s'agit de l'offre de quantité additionnelle d'un produit, de pâte dentifrice, d'un détergent liquide ou autre où on voit: 1/3 gratuit. On offre quelque chose en plus du format régulier. Si vos légistes veulent prendre, avec moi, l'article 158 tel qu'il est actuellement libellé, M. le Président, je pourrais faire cette offre pour un achat futur mais je ne peux pas le faire... Je pourrais...Tout au moins, une interprétation rapide nous dit que je ne pourrais pas le faire pour un achat présent: Nul commerçant ne peut offrir une prime à un consommateur à l'exception d'un rabais sur un achat futur. Mais je ne peux pas offrir un rabais sur un achat présent. C'est ce que je fais quand je lui offre le tiers de plus pour le prix du format régulier.

Cette pratique de promotion de vente d'offrir une quantité additionnelle, à l'occasion d'une vente donnée, ne coûte rien au consommateur et profite à l'usager habituel du produit qui, lui, profite du surplus du produit qu'on lui offre. Et, également, ceci est un attrait pour, évidemment, amener un nouvel acheteur éventuel.

Cette forme de mise en marché qui est utilisée ne pourrait plus l'être parce qu'on ne pourrait pas non plus offrir une prime. Et comment remettre une valeur en argent sur ce genre de mise en marché.

Nous croyons qu'une clarification de l'article 158 pourrait corriger et permettre cette mise en marché.

Nous aimerions maintenant faire quelques commentaires sur l'article 153.

L'article 153 se lit comme suit: "Nul commerçant ou manufacturier ne peut faire parvenir à un consommateur un bien que ce dernier n'a pas demandé."

L'Association croit que cet article peut nuire aux intérêts des consommateurs et aux membres de son association. L'échantillonnage est un outil de mise en marché utifisé sur une base mondiale, partout dans le monde, et ce, depuis toujours peut-on dire, et il donne au consommateur et aussi au producteur l'occasion d'évaluer un nouveau produit. Le consommateur peut l'essayer gratuitement et le producteur en bénéficie en voyant si le consommateur désire utiliser ce nouveau produit ou, tout enfin, la réception qu'il fait de ce nouveau produit. Il s'agit évidemment de l'échantillonnage que l'on offre gratuitement au consommateur, sans aucune obligation de sa part. Il ne s'agit pas d'envoyer quelque chose que, si vous ne le retournez pas, vous devez acheter ou quelque chose du genre.

Nous ne croyons pas que le but de l'article 153 soit d'empêcher l'échantillonnage que nous venons de décrire mais bien d'empêcher l'envoi à des consommateurs de produits qu'ils auront à payer par l'obligation qui leur est créée par le simple fait de garder la marchandise chez eux.

Nous soumettons qu'un texte plus précis pourrait être établi pour distinguer l'échantillonnage gratuit de ce que j'appelle l'envoi conditionnel de marchandises.

C'étaient, M. le Président, les remarques que l'association voulait faire à la commission et, avec les membres de l'association qui sont ici, nous sommes à votre disposition pour répondre aux questions que vous auriez bien à nous soumettre.

Cependant, s'il y avait des questions auxquelles je ne pouvais pas répondre, je demanderais probablement à M. Bonar d'y répondre. M. Bonar a de la difficulté avec la langue française, il lui serait, avec la permission de la commission, plus facile de répondre en anglais aux questions qu'on lui poserait.

Le Président (M. Lafrance): Accordé. Mme le ministre.

Mme Bacon: En vous remerciant à nouveau de ce mémoire, j'aimerais mentionner qu'à la première page de la lettre que nous avions reçue, vous y aviez affirmé que les principaux fabricants de détersifs n'attribuent aucune valeur en argent aux serviettes, aux verres, linges à vaisselle qu'ils emballent avec leurs produits. Si vous n'attribuez pas de valeur en argent, pourquoi offrez-vous ces primes d'abord? Pourquoi les mettez-vous en évidence quand vous faites votre publicité, si elles n'ont pas de valeur?

C'est au troisième paragraphe.

Mr. Bonar: Mr. President, thank you very much for permitting me to speak in other than the official language. The question, as I understand it, is why do we, as an association, express, in our initial letter, the concept of not expressing, on packages of detergent, a value? One reason is that values do fluctuate.

We would hate to be cut up by a member of the Federal Government in the Department of Consumers and Corporate Affairs to be expressing a misleading piece of advertising by not keeping up with the vicissitudes of the market place that do allow prices to fluctuate in'a premium area. We do believe too that the consumer who is buying things that are generally known to him or her that values are there for them to compare with and a normal item that can be purchased and, therefore, there is not any opportunity for him to be mislead or to misunderstand what the value of an article is.

Once it is purchased, certainly, there is an opportunity to evaluate and determine whether or not it is a good value. That can be plugged into the system of knowledge that the consumer who buys has from other purchases and it can be quite readily indicated whether or not it is a good value but, primarily, it is the first reason, it is very difficult, as you may well appreciate to produce many packages of products with prices printed on them when we are not at all sure that the price will remain constant, nor are we at all sure that the packages will be sold as we hope that they will be readily. Sometimes, they are left on the shelf for a considerable period of time, depending on the particular market area.

So there are very real difficulties in the way of the manufacturer in expressing ongoing advertising in terms of on the package.

Mme Bacon: A l'article 153, il est évident qu'il s'agit des biens en vente et non des échantillons.

Je pense que nous devons, de toute façon, revoir la rédaction de l'article 153 qui porte à une mauvaise interprétation parce qu'il y a différents groupes aussi...

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, je n'ai pas de questions à poser.

Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres questions de la part des membres de la commission... Nous vous remercions, Me Le-sage ainsi que les collègues qui vous ont accompagné, pour la présentation du mémoire et pour avoir bien voulu répondre aux questions.

Alors, la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières ajourne ses travaux à mardi matin, le 14 septembre, à 10 h 30.

(Fin de la séance à 16 h 52)

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