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Version finale

30e législature, 4e session
(16 mars 1976 au 18 octobre 1976)

Le mercredi 15 septembre 1976 - Vol. 17 N° 140

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 7 — Loi sur la protection du consommateur


Journal des débats

 

Commission permanente des

consommateurs, coopératives et

institutions financières

Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection du consommateur

Séance du mercredi 15 septembre 1976 (Dix heures vingt-quatre minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières): A l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire reprend les auditions des mémoires concernant la Loi sur la protection du consommateur et, pour la deuxième fois, nous avons le plaisir d'accueillir la Chambre de commerce de la province de Québec. Avant de demander à la chambre de présenter son mémoire, je voudrais faire part des changements à ladite commission.

M. Lessard remplace M. Burns: M. Charron remplace M. Léger; M. Boudreault remplace M. Chagnon et M. Assad remplace M. Harvey (Dubuc).

Le mémoire présenté par la Chambre de commerce de la province de Québec a trait aux commerçants itinérants. A vous la parole, messieurs de la Chambre de commerce.

Chambre de commerce de la province de Québec

M. Blais (Charles): M. le Président, Mme le ministre, messieurs les membres, mon nom est Charles Blais, vice-président de la Chambre de commerce de la province de Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de représentants des entreprises exerçant un commerce itinérant. Les noms de ces entreprises apparaissent en annexe du mémoire et sont les suivants: Alsi Compagnie Ltée, Gerbex Enrg., les laboratoires Vachon Inc., Produits sanitaires Laurentides Inc., les Produits Star Inc., Universal Herb Inc., Red Indian Herbs Ltée, Rolmex Inc., Santé naturelle Ltée, Superco Enrg., Wildo Inc., Produits sanitaires Météor Inc.

Ce groupe d'entreprises a constitué un bureau de direction dont il me fait plaisir de vous présenter les membres. MM. Rolland Saint-Pierre et René Clément de Rolmex; MM. Georges et Jean-Marc Gingras, de Universal Herbs Inc; M. Adrien Gagnon, de Santé naturelle Ltée; M. Jean-Paul Denis, de Produits Star; M. Marcel Mercier, de Superco; et ici, M. Jean-Paul Létourneau, vice-président exécutif de la Chambre provinciale; M. Pierre Morin, directeur général des affaires publiques de la Chambre de commerce provinciale et Me Francine Charbonneau, de la Chambre de commerce de la province de Québec.

Avant d'entreprendre la lecture de ce mémoire, permettez moi, M. le Président, deux remarques. Premièrement, la chambre a déposé le 11 août dernier un mémoire plus global sur l'ensemble du projet de loi. Elle recommandait alors une refonte de la loi qui n'aurait pour effet d'assujettir le commerçant itinérant qu'à l'obtention d'un permis. Il s'agissait là, à notre avis, de l'aspect essentiel pour la protection du consommateur puisque le directeur de l'office peut ou non octroyer ce permis ou encore le retirer. Il posséderait donc littéralement droit de vie ou de mort sur les commerçants itinérants. La problématique était donc la protection du consommateur. Le mémoire d'aujourd'hui s'inscrit dans une autre problématique, celle de la survie des entreprises visées par le projet de loi s'il devait être adopté dans sa rédaction actuelle.

Deuxièmement, après avoir disposé du mémoire soumis aujourd'hui, la chambre apprécierait pouvoir revenir sur ses propos du 11 août dernier alors que certaines interrogations, certaines générales, d'autres spécifiques, furent soulevées par la commission et certains de ses membres. M. le Président, avec votre permission, nous procéderons maintenant à la lecture du mémoire traitant des commerçants itinérants.

Le Président (M. Lafrance): D'accord, sur votre mémoire d'aujourd'hui. Parce que, sur les propos qui ont été tenus lors d'une autre séance... Le mémoire comprend les commerçants itinérants et on va s'en tenir à ce mémoire. Parce que, si on permet à tous les organismes de revenir sur des questions qui ont déjà été débattues et qui ont déjà été proposées par leurs organismes on va être obligé de reprendre les mémoires un par un. Avec 85 mémoires, on ne peut pas faire ça, mais, étant donné que vous avez présenté un mémoire aujourd'hui sur les commerçants itinérants, nous nous en tiendrons aux commerçants itinérants.

M. Blais: M. le Président, strictement, vous avez raison. Mais nous aimerions faire certaines remarques parce que nous croyons que, sur certains points, notre mémoire n'a pas été compris dans le sens...

M. Lessard: M. le Président, si vous permettez, c'est qu'on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures. On ne peut pas, à cette commission parlementaire, permettre que des organismes reviennent sur le mémoire qui a été présenté. Que votre mémoire ait été mal interprété ou bien interprété, de quelle façon qu'il ait été interprété, on ne peut pas. Vous avez un mémoire ce matin. Quant à moi, je pense que le président a entièrement raison et je ne permettrai pas, ni à la Chambre de commerce, ni à tout autre organisme, de revenir sur un mémoire qui a déjà été présenté.

Vous avez à présenter ce matin un mémoire que nous avons devant nous et nous vous entendrons sur ce mémoire. Nous n'accepterons pas qu'on puisse reprendre l'argumentation sur l'autre mémoire que vous avez déjà présenté et que les membres de la commission parlementaire ont entendu ici. Vous avez eu l'occasion, lors de cette présentation, de donner les explications nécessaires et de répondre probablement aux questions.

M. Blais: Je ne veux pas insister davantage, M. le Président, mais cette commission parlementaire siège au bénéfice du consommateur. S'il était dans l'intérêt du consommateur que nous clarifiions certains points de notre mémoire, je pense qu'il serait difficile pour vous de vous en tenir strictement à la procédure parlementaire.

Le Président (M. Lafrance): Je pense que, lorsque la Chambre de commerce de la province a présenté son mémoire lors de sa première visite, il a été entendu, il a été reçu, toutes les questions ont été posées par tous les membres de la commission qui ont voulu poser des questions. S'il y a eu des interprétations qui ont été faites en dehors de la commission, ce n'est pas à la commission à reprendre les mauvaises interprétations que vous mentionnez.

Prenez les moyens que d'autres avaient à leur disposition pour répondre à ces questions. Les membres de la commission ont été éclairés avec satisfaction sur votre mémoire.

M. Létourneau (Jean-Paul): M. le Président, si vous me permettez d'intervenir, lors de notre comparution devant la commission, madame le ministre, par la voix de Me Rioux, nous a indiqué des points d'interrogation par rapport à des questions juridiques d'interprétation de la loi que nous avions soulevées.

Nous avons réétudié ces questions et nous avons des réponses...

M. Lessard: Je regrette, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): On va le laisser aller.

M. Létourneau: Nous avons réétudié ces questions. Nous avons des éclaircissements à fournir à la commission. Si nous ne pouvons le faire verbalement, nous aimerions au moins déposer devant la commission ces éclaircissements sur les interprétations juridiques que nous avons données et qui soulevaient des questions de la part de madame le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'apprécie qu'on les dépose ce matin, mais je ne voudrais pas qu'on ouvre à nouveau la discussion sur les différents sujets. Nous avons eu, encore hier, certains groupes qui sont venus devant nous, qui n'avaient pas toutes les réponses à nos questions et qui nous ont mentionné que dans les semaines à venir, même les mois a venir — puisque souvent, cela 'demande une recherche de quelques semaines — ils nous feraient parvenir des réponses précises.

Je pense qu'on devrait s'en tenir à la même méthode de travail. Si la Chambre de commerce a des réponses à nous donner, qu'elle les dépose aujourd'hui, mais je ne voudrais pas qu'on ouvre à nouveau le débat. Je pense que nous avons fait connaître nos positions, de part et d'autre, à l'occasion de cette commission parlementaire et je crois personnellement que nous devrions nous en tenir ce matin à ce sujet "commerçants itinérants" qui fait l'objet du mémoire numéro 3A. Je pense que ce serait suffisant pour la commission. Les membres de la commission ont été suffisamment éclairés.

M. Létourneau: M. le Président...

M. Lessard: M. le Président, si vous le permettez...

Le Président (M. Lafrance): Je redonnerai la parole à M. Létourneau tantôt.

M. Lessard: Quant à nous, membres de la commission parlementaire, nous n'avons pas à interpréter et je ne pense pas que nous avons interprété vos propos lors du dépôt de votre mémoire. Que des journalistes ou d'autres aient interprété votre mémoire, cela peut poser un certain problème. Mais quant à nous, nous prenons connaissance du mémoire et, si vous voulez — comme on l'a indiqué à certains organismes hier — déposer des documents qui complètent votre premier mémoire, il n'y a aucun problème. Vous avez simplement à faire parvenir votre documentation au ministre, ainsi qu'aux membres de la commission parlementaire, et nous en prendrons connaissance. D'accord?

M. Blais (Charles): Nous allons procéder à la lecture du mémoire des commerçants itinérants.

M. Morin (Pierre): Nous vous soumettons aujourd'hui une prise de position élaborée avec la collaboration des entreprises citées en annexe. Ces entreprises sont solidaires de cette prise de position et la Chambre la fait sienne en vertu d'un mandat de son assemblée générale qui l'autorise à se prononcer sur un groupe défini de membres.

Objet des présentations. Le propos de ce mémoire est dirigé aux articles 37 à 48 du projet de loi à l'étude ainsi qu'à certains autres articles de concordance.

Etat de la situation. La totalité des entreprises représentées ici aujourd'hui emploie des représentants qui se présentent chez le consommateur pour lui offrir leurs produits. Elles détiennent toutes le permis exigé en vertu de la loi actuelle et leurs représentants détiennent la carte d'identité prévue.

La nature des produits offerts varie largement mais il s'agit généralement de produits de consommation courante tels suppléments alimentaires et articles ménagers. La moyenne de leurs transactions se situe aux environ de $20.

Généralement, les représentants itinérants de ces sociétés se voient attribuer un territoire en exclusivité, territoire pouvant varier en étendue d'un quartier en territoire urbain jusqu'à une circonscription électorale en milieu rural. Ces représentants sont généralement rémunérés à commission.

Il y a plus de 4000 représentants dont la principale source de revenus est le commerce itinérant pour le compte des entreprises représentées aujourd'hui. Plusieurs centaines d'autres person-

nes supplémentent aussi à leurs revenus par cette activité.

Généralement, le représentant itinérant laisse chez le consommateur une fiche descriptive ou un catalogue de ses produits incluant une liste de prix. Lors de visites subséquentes ou sur appel du consommateur, celui-ci commande le produit de son choix.

Toutes les sociétés mentionnées en annexe offrent aux consommateurs une garantie de satisfaction contre remboursement. Cette garantie ne peut toujours être explicite puisque certaines lois l'interdisent.

Appréciation du projet de loi 7. Si les articles traitant des commerçants itinérants du projet de loi sur la protection du consommateur devaient être adoptés tels que rédigés, il en résulterait un préjudice considérable aux entreprises représentées ici, préjudice pouvant même aller jusqu'à la disparition de certaines de ces entreprises dont le comportement s'est toujours manifesté dans le respect de la loi.

Nous ne nions pas qu'il y ait eu des abus perpétrés à l'endroit du consommateur par des commerçants itinérants aussi bien avant l'adoption de la loi actuelle que depuis.

Nous avons autant d'intérêt que le législateur à mettre un terme à ces abus, incidemment, pas plus fréquents que chez les commerçants à place d'affaires fixe. Là encore, comme dans le commerce itinérant, les incidences d'abus sont marginales par rapport à l'ensemble des transactions, car il y va de la bonne réputation et de la capacité de commercer, de traiter avec les consommateurs dans un climat de confiance.

Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi imposerait un minimum de trois visites chez le consommateur par transaction, faisant du fait augmenter les frais de chaque transaction avec pour conséquence, pour la moyenne des ventes, de les rendre non rentables. De plus, comme la majorité des produits impliqués en sont de consommation courante, les délais auraient pour résultat une perte substantielle du marché par le phénomène de substitution auprès d'autres commerçants, limitant ainsi la concurrence qui joue actuellement en faveur du consommateur.

En effet, après avoir requis le permis et le cautionnement obligatoires ainsi que les cartes d'identité pour chacun des représentants, voilà que, pour une considération excédant $10, l'on exige un contrat constaté par écrit, un délai de résolution dudit contrat de dix jours aux frais du commerçant itinérant avec responsabilité pour un délai additionnel de sept jours et l'interdiction de percevoir quelque paiement, partiel ou total, que ce soit, même contre livraison immédiate des biens qui font l'objet du contrat avant l'expiration du délai.

Il ne manque plus, dans ce contexte, que la condamnation lapidaire par les rédacteurs de la loi qualifiant a priori les commerçants itinérants d'escrocs sans avoir à en faire la preuve. C'est trop facile.

Nous préférons croire qu'il s'agit d'une faute d'appréciation où les modalités spécifiques tra- duisent mal l'intention première d'offrir au consommateur une plus grande protection dans ses transactions avec des commerçants itinérants.

Nous sommes d'accord avec ce dernier objectif.

Avant de vous communiquer des propositions d'amendements concrètes à certains articles, il nous importe de vous souligner que, dans sa rédaction actuelle, les commerçants auraient pu se soustraire dans une certaine mesure à l'application de la loi: morcellement des ventes, inclusion d'un grand nombre de produits dans la définition de produits alimentaires, établir des représentants comme commerçants et les laisser se débrouiller avec la loi, etc. Là n'est pas notre intérêt ni celui du consommateur.

Recommandations et propositions d'amendements: Premièrement, étendre la protection de la loi aux contrats de moins de $10. En effet, nous comprenons mal pourquoi le consommateur ne bénéficierait pas de l'entière protection de la loi, même pour les achats de moins de $10.

Nous croyons que la carte de représentant présentée au consommateur devrait être une assurance que le cautionnement déposé le protège au cas où la loi serait violée.

Amendement: Retirer de l'article 38 l'alinéa a).

Deuxièmement, maintenir le délai de résolution du contrat à dix jours, ainsi que les délais de restitution. Cette recommandation peut paraître étrange pour le législateur. La raison en est cependant assez simple: Certains produits, les médicaments brevetés, entre autres, sont régis à la vente par des dispositions du gouvernement du Canada et ne peuvent faire l'objet d'aucune reprise, échange ou garantie. Les entreprises sérieuses misent sur la qualité de leurs produits et sur la satisfaction de leurs clients.

Recommandation: Aucun amendement.

Troisièmement, porter à $25 ou plus l'obligation du contrat constaté par un écrit. La protection de la loi étant étendue à tous les contrats visés par l'article 38, le constat du contrat par un écrit autre que la facture ayant cours présentement ne nous apparaît pas comme essentiel. La disposition actuellement prévue crée un désavantage concurrentiel additionnel aux entreprises fonctionnant par représentants itinérants.

Amendement à l'article 40: Le contrat pour une considération totale excédant $25 doit être constaté par écrit et divulgué, et la suite de l'article.

Quatrièmement: Inscrire une date d'échéance sur la carte de représentant.

Alors que le permis de commerçant échoit à une période fixe, les cartes de représentants ne portent aucune date d'échéance. Ce qui facilite l'utilisation frauduleuse de la carte de représentant à l'insu du commerçant et au détriment du consommateur.

Recommandation: Prévoir dans les règlements l'émission de la carte de représentant avec inscription d'une date d'échéance.

Cinquièmement: Modifier les dispositions ayant trait au paiement.

Nous appuyons la disposition concernant l'interdiction de percevoir tout acompte; cependant, nous croyons que le commerçant itinérant devrait pouvoir recevoir un paiement pour les biens ou produits lors de la livraison de ces derniers, même avant l'expiration du délai de résolution du contrat. Voilà le dilemme pratique posé par cette disposition: a)1. Le commerçant itinérant ne délivrera pas les biens faisant l'objet du contrat avant l'expiration des délais de résolution, auquel cas le consommateur sera mis en possession des biens acquis alors que la protection de la loi sera déjà caduque; ou bien, 2. le commerçant itinérant délivrera les biens faisant l'objet du contrat dès qu'ils seront disponibles et même avant l'expiration du délai de résolution prévu à l'article 41.

Mais il devra alors, afin de se protéger et compte tenu du fait qu'il y aura délivrance sans paiement, obtenir un reçu de la part du consommateur attestant la livraison, sinon la disposition 44 du projet de loi entraînera des difficultés de preuve, car le droit commun veut que dans le cas de biens mobiliers "possession vaut titre " ou l'article 2268 du Code civil.

L'achat de deux contenants d'insectiside de bétail, par exemple, est considérablement compliqué et peut détruire tout le climat de confiance entourant une transaction.

L'article 41 détruit le bilatérisme du contrat. En fait, il introduit le contrat purement potestatif dans le droit québécois. Il n'y a pas vraiment de contrat conclu entre le commerçant et le consommateur puisque le sort du contrat dépend de la volonté d'une seule personne. En conséquence, il n'y a pas rencontre des volontés des parties contractantes.

Les représentants rémunérés à commission doivent faire les frais de trois visites avant d'avoir droit à leur commission. Résultat à court terme: disparition ou diminution du nombre des représentants.

Il serait tellement plus simple, maintenant que ces entreprises ont satisfait aux exigences du permis et déposé le cautionnement garantissant leur solvabilité, de leur permettre de percevoir au moins le paiement pour les biens livrés au consommateur, sans restreindre son droit à la résolution du contrat dans les délais prévus.

Nous proposons un amendement. Je vous signale que nous l'avons quelque peu modifié par rapport au texte qui vous est soumis actuellement. L'article 40e) se lirait comme suit: l'interdiction de recevoir tout paiement avant l'expiration de la période prévue au paragraphe d), à moins d'avoir reçu livraison des biens ou services faisant l'objet du contrat.

A l'article 42, il y a une petite modification par rapport au texte. Le commerçant itinérant ne peut recevoir aucun paiement du consommateur avant la livraison des biens ou services faisant l'objet du contrat durant le délai de résolution prévu à l'article 41.

Conclusion. L'objectif de la Chambre dans ce mémoire est double. Premièrement, offrir au consommateur une protection réelle et efficace dans ses relations avec le commerçant itinérant car il y va de notre intérêt; faire en sorte, deuxièmement, que la protection offerte au consommateur ne lui coûte pas trop cher.

Les amendements qui vous ont été soumis, nous le croyons, atteindraient ces deux objectifs.

Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'aurais quelques remarques à faire concernant ce mémoire. Il y a certaines prétentions qu'on entend en fait à cette tribune et qui nous font réagir. Ainsi par exemple, à la page 4 de ce mémoire, j'aimerais bien rappeler à la Chambre de commerce que les rédacteurs de la loi ne visent pas à lapider les commerçants itinérants et à les qualifier d'escrocs sans en avoir fait la preuve. On fait des déclarations ou on prétend des choses dans certains mémoires, et j'ai l'impression que, souvent, les gens qui sont devant nous ont peut-être beaucoup plus d'imagination que les rédacteurs de la loi en avaient au moment de la rédaction. C'est qu'on n'a jamais été aussi loin dans notre imagination qu'on puisse le lire ce matin dans ce mémoire.

Au sujet des commerçants itinérants, nous nous permettons de souligner que le nombre de plaintes formulées à l'office par les consommateurs, c'est un nombre vraiment important; nous voulons rappeler également que certains organismes qui ont présenté ou présenteront des mémoires à cette commission trouvent que le projet de loi no 7 ne va pas assez loin en ce qui concerne les commerçants itinérants. Il est évident qu'on entend donc différents sons de cloches.

Votre mémoire présente toutefois certaines suggestions qui sont très intéressantes et qui visent à rendre plus étendue la protection faite au consommateur et à rendre aussi plus pratique, et cela c'est très important, l'application des articles concernant les commerçants itinérants. Je mentionnerai par exemple, votre suggestion d'étendre la protection de la loi aux contrats de moins de $10 et votre approbation de maintenir le délai de résolution qui comporte le contrat à dix jours et qui est beaucoup plus étendu que ce que nous avions à la loi actuelle, à la loi 45.

Il en est de même de votre suggestion d'inclure dans les règlements l'inscription de la date d'échéance sur la carte du représentant. Je pense que ce sont des suggestions qui sont très pratiques, qui sont très importantes. Quant à votre suggestion de porter à $25 l'obligation du contrat constaté par écrit, nous en prenons bonne note et je pense que cela nous a déjà été mentionné dans certaines rencontres ou discussions que nous avons eues avec d'autres groupes ou même au niveau de certains individus.

Nous avons eu des suggestions qui sont similaires à la vôtre. J'aurais une question à poser concernant le commerçant itinérant qui livre chez le consommateur un bien qui fait l'objet d'un contrat avant l'expiration du délai de résolution. Est-ce que le commerçant exerce ainsi une forme de pression sur le consommateur qui l'inciterait à

renoncer à son droit de résolution s'il faisait la livraison avant l'expiration de la période de réflexion?

M. Blais: M. Saint-Pierre.

M. Saint-Pierre (Roland): Je ne crois pas, de tous les groupes qui sont ici... M. le Président, excusez-moi, je veux vous remercier de nous avoir écouté d'ailleurs, parce que, franchement, c'est très important, je pense, pour la survie de toutes ces compagnies. Je ne crois pas, dans le groupe que nous représentons. Ce sont de petites, ce sont des biens de consommation de tous les jours. Que ce soit un produit pour la constipation ou que ce soit un petit onguent pour une petite éraflure, que ce soit un vaporisateur quelconque, que ce soit un "air spray" en français, des brosses, ceci et ça, ce n'est pas là. Je crois qu'on représente ici un groupe qui n'a pas à forcer les ventes puisque chaque représentant est dans un secteur assez défini et il visite toujours le même client. Alors, je pense qu'ils deviennent des amis, des connaissances, comme le magasin du village, de la petite ville. Je pense que les gens se connaissent. A part cela, pourquoi est-ce qu'on irait faire une vente, comme on dit, à pression pour $20 ou $25, $15, imaginez un peu. Alors, je ne crois pas. Je veux aussi souligner que la livraison immédiate, mais ce à quoi nous tenons — cela fait 29 ans que je suis dans la vente personnellement — c'est que l'argent soit perçu sur livraison seulement. Donc, vous êtes certain que le client a sa marchandise, il l'a vue avant de payer. C'est une protection du consommateur. Chez nous, c'est comme cela que cela fonctionne.

Mme Bacon: Si le commerçant décidait de résoudre son contrat dans les délais prévus par la loi, par exemple, est-ce qu'il lui serait facile de reprendre son argent à l'occasion de cette résolution de vente, de contrat?

M. Morin (Pierre): Si vous me permettez, Mme le ministre, il y a là une difficulté qui des fois tient du produit. Comme vous le savez il y a des produits parapharmaceutiques sur lesquels le gouvernement du Canada empêche toute reprise. La pratique des commerçants, qui sont ici avec nous aujourd'hui et ceux qui sont dans le même domaine, a toujours été et, à ce chapitre, je crois que l'office peut l'attester, de toujours reprendre le produit sans discuter. C'est une question aussi d'avoir un client satisfait, mais vous voyez le dilemme dans lequel cela place, par contre, pour cette même satisfaction du client, du consommateur, il y a quand même une loi fédérale qui dit: Vous n'avez pas le droit de le faire.

Mme Bacon: Je pense que les plaintes reçues à l'Office de la protection du consommateur sont dans ce sens. Le consommateur, pour récupérer la somme qu'il a déjà versée, doit faire de nombreux appels téléphoniques, de nombreuses démarches face au commerçant pour pouvoir, finalement, recouvrer son montant, le paiement qu'il a versé.

Est-ce que vous avez, dans votre pratique, parce que vous avez la connaissance quotidienne de ces problèmes, est-ce qu'il y a des problèmes auxquels vous avez eu à faire face?

M. Saint-Pierre (Roland): Madame, pour être bien franc ici, je vais parler en mon nom personnel. Durant toute l'année passée — je pourrais même vous donner le chiffre de vente qui est quand même élevé; nous sommes au-delà de 600 représentants — nous avons eu deux réclamations. Même si la loi fédérale nous dit qu'on ne peut pas garantir un produit paramédical ou autre, parce qu'on ne peut pas garantir satisfaction dans ce domaine, on l'a fait quand même pour les deux clients qui ont réclamé. Je pense — tout le groupe ici, on en a discuté avant de venir ici, tout le monde s'est bien mis d'accord — que si le client vous achète... Vous-même, Mme le ministre, vous dites que vous achetez un "hair spray" une bonne journée et vous n'êtes pas trop satisfaite. Pourquoi ne pas le rembourser? Pourquoi ne pas en vendre un autre? Parce que c'est la garantie de qualité du produit. Vous avez des maisons qui le font, je ne peux pas les nommer ici, mais vous avez des maisons qui le font, des magasins sur de grandes rues où, si vous n'êtes pas satisfait de la marchandise, vous la retournez.

Et ces gens font des affaires, croyez-moi. Pourquoi, nous, ne pas donner 100% de garantie? Je pense que tout le monde qui est ici est d'accord pour donner 100% de garantie au consommateur. C'est la manière de garder un client et c'est très bon marché de rembourser. Pour n'importe quelle raison que ce soit. Le produit peut être bon, mais Madame ou Monsieur ne sont pas satisfaits; qu'on le rembourse, c'est la manière de garder un client satisfait. Je pense que c'est la meilleure publicité.

Mme Bacon: D'accord.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Saguenay.

M. Lessard: M. le Président, j'avais l'intention de soulever certains éléments positifs du mémoire relevés par le ministre. Je pense qu'il y a trois propositions qui permettraient d'améliorer encore la loi et dont nous tiendrons certainement compte. En ce qui concerne le paiement initial, actuellement... Parce que je connais assez bien certaines compagnies que vous représentez et qui font de la vente à domicile. Actuellement, la plupart du temps, vous ne recevez pas de paiement initial, c'est-à-dire que vous recevez le paiement au moment de la livraison de la marchandise. C'est la coutume générale.

M. Morin (Pierre): M. le Président, effectivement, c'est le cas, sauf que, généralement, la livraison aurait lieu à l'intérieur du délai de résolution qui est prévu et c'est de là que venait le problème.

M. Lessard: C'est ça. Normalement, aussi, je reviens à la deuxième question que je voulais vous

poser, quand vous parlez de livraison à l'intérieur du délai prévu par la loi, ça veut dire que la livraison se fait à l'intérieur de dix jours. Normalement, c'est la semaine suivante.

M. Morin (Pierre): Cela peut être la journée même.

M. Lessard: Dans certains cas, ça peut être la journée même. Mais il y a une question qui me préoccupe quand même et je voudrais que vous y répondiez. Si vos produits sont tellement bons, si vos produits sont tellement nécessaires pour le consommateur, pourquoi êtes-vous obligés d'aller faire de la vente à domicile? Pourquoi ne pas les laisser, comme n'importe quel autre produit, sur les étagères d'un commerçant ou d'un distributeur et le consommateur qui aura besoin de ce produit l'achètera lui-même sans avoir la pression?

J'avoue que c'est fatiguant, c'est tannant. C'est toujours une pression. On voit arriver le vendeur... Je comprends, par exemple, tel que l'expliquait tout à l'heure...

M. Morin (Pierre): M. Saint-Pierre.

M. Lessard: ...M. Saint-Pierre, qu'il est vrai que la plupart du temps, dans nos régions, le vendeur devient un peu l'ami de la famille. Ce sont des gens qui sont connus. Ce n'est pas comme pour certaines ventes.

Il reste quand même qu'on se dit: Elle vient ce matin. Il y a toujours une pression sur le consommateur. On laisse le catalogue et on dit, bien souvent, que c'est une vente spéciale. Il y a toujours une forme de pression.

La question que je vous pose... Je comprends qu'il y a le développement du commerce et ainsi de suite. Mais tous ces produits, par exemple, de Rolmex, de Gerbex, les herbages, en particulier, sont un genre de médicaments qui ne sont pas prescrits par le médecin et que le consommateur accepte d'acheter. Or, la personne qui vend ces produits n'est pas spécialisée. Ce n'est même pas un médecin, ce n'est même pas une infirmière; c'est une personne qu'on a formée, ou, en tout cas, qui se dit être formée. Cela m'inquiète parfois.

Dans d'autres cas, vous avez parlé de produits pharmaceutiques. Je pense qu'il y a des pharmacies, il y a des maisons spécialisées où on peut acheter ces produits. Si ces produits sont si nécessaires pour le consommateur, pourquoi êtes-vous obligés d'aller en faire la vente à domicile?

M. Blais: M. Clément de la maison Rolmex aimerait faire un commentaire sur votre question.

M. Clément (René): Monsieur, d'ici dix ans, 65% ou 80% de la population de la province de Québec aura plus de 65 ans et, pour la majorité, ce sera très difficile de se déplacer.

Présentement, dans des villes comme Montréal, vous avez des pharmacies dans des grands centres commerciaux, qui ne font aucune livraison, et les gens ne peuvent plus se déplacer pour aller chercher leurs produits. Qu'est-ce qu'ils font?

M. Lessard: A ma connaissance, les régions où vous faites de la vente à domicile... Je connais les régions et la vente à domicile se fait dans les régions rurales, dans des campagnes, dans les petites villes. Votre réponse voudrait dire que bien souvent les gens sont incapables de se déplacer pour aller faire leurs achats alimentaires, leur marché de fin de semaine.

M. Létourneau: M. le Président, Jean-Paul Lé-tourneau. La vente de produits à domicile est une forme de mise en marché qui est, à ce que je sache, légale et permise dans notre société. Des fabricants peuvent désirer, à un moment donné, passer par des distributeurs pour vendre leurs produits. On voit cela dans le domaine des balayeuses, dans le domaine des produits domestiques...

M. Lessard: Mais je me pose la question.

M. Létourneau: Oui, mais c'est une forme de mise en marché qui est légale.

M. Lessard: Oui, oui.

M. Létourneau: Elle élimine beaucoup de frais de distribution. C'est le passage direct du manufacturier, par un seul intermédiaire, au client. C'est un contact direct avec le client. Il y a des maisons de très haute réputation — nous en avons avec nous — qui procèdent de cette façon et qui amènent à la clientèle un produit de très bonne qualité avec la même protection pour le consommateur que n'importe quelle autre. C'est une activité parfaitement légale et nous croyons qu'elle a son bien-fondé. Nous ne pensons pas qu'il y ait lieu de la remettre en question.

Nous ne pensons pas que le projet de loi no 7 remette en question ce mode de distribution des biens ou services dans notre société. S'il fallait remettre cela en question, nous nous serions préparés une toute autre argumentation pour justifier cette forme de distribution de biens ou de services.

Il ne faut pas oublier, M. le Président, que dans seulement les compagnies qui sont représentées ici — c'est bien loin d'être la totalité de celles qui font ce genre de distribution — il y a 4000 représentants qui tirent leur revenu principal de la distribution de leurs produits. C'est une façon pour ces gens de gagner leur vie. Enfin, nous n'étions pas préparés à faire face à une argumentation au sujet de la mise en cause de ce mode de distribution. Je ne pense pas que le projet de loi no 7 non plus ne le fasse. Il se peut que des gens trouvent, comme le député le signale, qu'à un moment donné on n'aime pas recevoir ces gens. Personne n'est obligé de les recevoir, cela va de soi. Mais quand même, il y a un grand nombre de clients de ces établissements qui sont très heureux de faire affaires avec ces représentants et qui les considèrent même sur un plan, comme l'a signalé M. Saint-Pierre, d'amitié. C'est d'ailleurs la marque de commerce des représentants des meilleures maisons dans ce domaine.

M. Lessard: M. le Président, je ne pense pas avoir mis en doute, ni la légalité, ni la qualité des produits. Je connais des maisons, je pense qu'on peut en citer une qui n'est pas dans votre document, qui n'est pas représentée ici, mais quand même, je pense bien que tout le monde a conscience que les produits Avon sont des produits d'excellente qualité. Je ne doute pas des qualités des produits, en fait, dont les maisons sont représentées ici. Mais, c'est justement, il reste quand même que, au nom de la protection du consommateur, même si ce n'est pas inscrit dans la loi, nous devons, nous, les membres de la commission parlementaire, nous poser quand même la question, pour la protection du consommateur.

Je pense, par exemple, à Red Indian Herbs qui est une maison de produits pharmaceutiques dont les produits sont vendus par des gens qui ne sont pas spécialisés comme tels, qui ne sont même pas infirmiers et qui vont conseiller le client sur un certain nombre de maladies. Je ne voudrais pas entrer... Mais je m'interroge quand même pour la protection du consommateur, pour la protection même de la santé du consommateur si on devrait permettre que ces produits soient vendus à l'extérieur des pharmacies.

Actuellement, c'est légal de faire de la vente à domicile, mais je me pose la question, étant donné les abus considérables, je dis bien les abus considérables que nous avons eu à déplorer dans le passé et les plaintes nombreuses qui sont parvenues à l'Office de la protection du consommateur et qui nous parviennent dans nos bureaux ici, si on ne devrait pas limiter — je pense bien que vous avez à répondre à cela — encore plus considérablement la vente à domicile. Je m'interroge, je me pose la question et, devant un projet de loi comme cela, je pense que vous devez vous aussi être capables de répondre à nos objections sur la vente à domicile.

Je comprends, lorsque, tout à l'heure, on disait: il y a un contact direct entre le consommateur et la maison représentée et que cela coûte moins cher et que c'est moins dispendieux pour le consommateur, permettez-moi d'avoir de gros points d'interrogation. Parce que le pourcentage qui est laissé, particulièrement en ce qui concerne les produits de vente à domicile, le pourcentage qui va dans le porte-monnaie, si vous voulez, dans la poche du distributeur, est très fort. Qu'on ne se le cache pas. Je pense bien que tout le monde a déjà connu la situation ou connu des représentants. Le pourcentage va jusqu'à 35% et 40%. Peut-être que, dans certains cas, c'est plus. Je n'ai jamais été représentant, mais je connais des représentants, des milieux où cela se fait.

Quand on me dit que c'est moins cher pour le consommateur, je m'interroge, je me pose des questions.

Au nom de la protection du consommateur, on est ici pour s'interroger et se poser des questions. Je me dis que le consommateur connaît, avec toute la publicité existante, même qu'il y a trop de publicité, ses besoins. Le consommateur, lorsqu'il va faire son marché en fin de semaine, ou lorsqu'il se présente à une pharmacie, connaît ses besoins. C'est toujours la société. En fait, le vendeur itinérant s'inscrit dans la société de consommation. On va lui ouvrir de nouveaux besoins, on va lui créer bien souvent de nouveaux besoins. Je me pose la question qui m'est fondamentale, qui m'apparaît encore importante, c'est que je ne doute pas de la qualité, je ne mets pas en cause la qualité des produits qui sont énumérés ou des maisons qui vendent des produits dont la plupart me sont connus. Je ne mets pas en cause la qualité, mais je mets en cause, par exemple, la nécessité de vendre ces produits à domicile, d'autant plus qu'il s'agit de produits pharmaceutiques. J'attends une réponse. Jusqu'ici, vous ne m'avez pas convaincu encore.

M. Morin (Pierre): M. le Président, je vais essayer de répondre à ces nombreuses questions dans une certaine mesure avant de céder la parole à M. Gingras sur des points particuliers. Il faut remonter peut-être un peu dans le passé pour voir d'où est venu le commerçant itinérant. Il y a un passé historique. Il y avait un Québec, un pays rural, où les gens pouvaient plus difficilement se déplacer, ce qui a amené des commerçants, pour rejoindre, pour satisfaire les besoins d'une clientèle qu'ils avaient sur leur territoire, à se déplacer et à faire valoir la marchandise qu'ils avaient. Je crois qu'on en a même des exemples qui remontent au Moyen-Age, au niveau des fruits et légumes, enfin, de l'alimentation et de la plupart des besoins, du textile, ainsi de suite. Il y a d'abord cela. Il y avait la satisfaction des besoins, le fait de tenter, pour le commerçant, satisfaire les besoins de sa clientèle sur le plan historique. J'aimerais apporter, par contre, une précision. Il ne s'agit pas de produits pharmaceutiques. Il y a des produits parapharmaceutiques, oui. Là-dessus, deux points doivent être notés.

M. Lessard: Je parle des maux d'estomac, des maux... Même dans le cas de Red Indian Herbs, on va assez loin dans ces produits.

M. Morin (Pierre): II y a deux points que je veux soulever, précisément, sur ce plan.

M. Lessard: Ce sont des médicaments...

M. Morin (Pierre): Le premier est que le produit lui-même est vérifié par le ministère fédéral de la Santé et du Bien-Etre dans ses laboratoires. Deuxièmement, les textes publicitaires et le mot à mot de tous les textes publicitaires touchant les produits pharmaceutiques est aussi vérifié par le ministère fédéral de la Santé et du Bien-Etre.

M. Lessard: C'est le diagnostic qui m'inquiète. C'est lorsque la personne qui vend le produit fait le diagnostic...

M. Morin (Pierre): Me permettez-vous d'en venir au troisième maintenant?

M. Lessard: D'accord. Je m'excuse.

M. Morin (Pierre): L'an dernier, il y a eu un long débat sur la question de la surmédication. Nous avons fait une étude, la chambre a fait une étude en profondeur là-dessus. Statistiquement, il a été démontré qu'il n'y en avait pas; c'est le ministre Lalonde encore, à partir des chiffres de son ministère, qui démontrait lui-même que cette idée de surconsommation des produits et dans le cadre de l'automédication, parce qu'il s'agit bien ici d'automédication, n'existait pas. Là où il y avait eu des cas de morbidité et de mortalité, c'étaient exclusivement, je crois, ou presque exclusivement, dans 95% ou 96% des cas, des produits entièrement sous le contrôle d'un professionnel. Ce sont là des chiffres qui en soi sont éloquents et que nous avions soumis à l'Office des professions l'an dernier. Vous parlez beaucoup essentiellement du problème de l'automédication, du choix qu'a un consommateur... En fait, ce n'est pas le vendeur qui fait le diagnostic, il faut bien s'en rendre compte.

C'est le consommateur qui, en fait, identifie son bobo et qui a à sa disposition une série de produits, dans ce cas-ci, généralement, tous des produits naturels — ce qui ne veut pas dire que des produits chimiques ne peuvent pas faire la même chose — et qui sont choisis parmi cette gamme en fonction de ça. A venir jusqu'à maintenant, et encore aujourd'hui, l'automédication est peut-être une des formes les plus anciennes, mais aussi les plus modernes de tenter de se soigner et de se maintenir en santé.

Je ne sais pas si ça répond, en général, aux interrogations du député de Saguenay. Peut-être que M. Gingras... Il m'avait indiqué tantôt avoir un commentaire à faire sur un point particulier. Je lui cède le micro.

M. Gingras (Jacques): Premièrement, je vous demanderais d'excuser un peu la manière dont je pourrais m'exprimer. C'est la première fois que j'assiste à une commission parlementaire, et, à part les visites que je rends à nos députés provincial et fédéral, je n'en ai pas l'habitude. J'espère que je ne blesserai personne par mes paroles.

M. Lessard: M. Gingras, en 1970, quand nous avons été élus — en tout cas, quant à moi — pour la première fois, nous étions comme vous.

M. Gingras: Je vous en remercie.

Vous avez posé plusieurs questions tout à l'heure. Je me rappelle une question, entre autres, qui est très importante. Vous avez mentionné que vous semblez un peu douter, ni plus ni moins, de l'importance de l'automédication. Est-ce que c'est un peu ça votre question?

M. Lessard: C'est un peu autour de ça. M. Gingras: Oui.

M. Lessard: Je ne voudrais pas limiter la question générale...

M. Gingras: Non.

M. Lessard: ... à quelques produits. Je pose la question globalement.

M. Gingras: En général.

M. Lessard: Oui, en général.

M. Gingras (Jacques): Sans offenser personne, lorsqu'on n'a pas besoin ou lorsqu'on n'a pas eu besoin d'un service quelconque ou d'un produit quelconque, parfois il peut arriver qu'on soit sceptique envers ce service ou ces produits. Dans les produits pharmaceutiques, il y a un fait: lorsque les gouvernements décident une chose, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, il faut s'y plier. Il n'y a pas d'erreur là-dessus. Dans les produits pharmaceutiques, nous sommes régis par la loi fédérale, dans un sens. Il n'y a aucun produit pharmaceutique ou parapharmaceutique vendu par représentant, actuellement, qui soit vendu sans qu'une demande ait été faite à Ottawa et qu'un numéro de permis ait été délivré. C'est le ministère fédéral qui décide si on a le droit de mettre ce produit sur le marché, oui ou non, et, lorsqu'il le refuse, il n'y a rien à faire. Bon!

Maintenant, je passe à un autre sujet. Vous avez dit tout à l'heure, je crois, si je me rappelle bien, à propos du prix que c'était comme ci, comme ça.

Dans la revue Fortune, on dit que certains produits qui sont mis sur le marché dépensent en publicité plus de 20% à 25% dans certains cas. Dans nos cas, évidemment, la commission est élevée, je l'admets, par rapport aux frais sur la route, mais pour la plupart des compagnies qui sont ici, les frais de publicité sont très minimes. Pour la plupart, et je ne devrais pas parler de mon cas personnel. Nous avons moins de $300 de publicité par année pour 375 représentants.

La mise en marché sur référence, ou si vous aimez mieux l'expression "porte-à-porte", même si ce n'est pas du porte-à-porte que l'on fait, mais c'est cette... Ecoutez donc!

M. Lessard: Je ne sais pas comment vous appelez ça, du porte-à-porte?

M. Gingras: Pardon?

M. Lessard: Je...

M. Gingras: Non, je ne veux pas commencer...

M. Lessard: Non...

M. Gingras: ... à discuter avec vous... Je donne une explication du porte-à-porte. Pour nous, c'est une personne qui va d'une porte à l'autre, comme ça, et la référence, c'est lorsque des parents ou des amis ont utilisé un produit et disent: Un tel, un tel ou un tel serait intéressé. C'est ce qu'on appelle référence; et ce qu'on appelle porte-à-porte, c'est aller d'une porte à l'autre.

Evidemment, c'est une manière de mise en marché. Au lieu de payer de la publicité, il faut payer une commission. Moi, c'est la manière dont je procède.

Au point de vue de la livraison de dix jours, il y a cependant une chose. Si un client nous demande un analgésique ou, pour utiliser vos propres mots, pour les brûlures d'estomac, c'est indiqué que c'est pour les brûlures d'estomac sur la bouteille; c'est Ottawa qui a accepté cette réclame. C'est vrai que nos représentants ne sont pas des pharmaciens et ne sont pas non plus des médecins. Seulement, la loi des produits brevetés, si on prend cette loi, ou les autres produits, sont des produits qui peuvent être vendus par une autre personne qu'un pharmacien et en dehors des pharmacies. Sans cela, si nous n'obtenions pas ce permis, on n'aurait pas le droit de le vendre. Le ministère fédéral accepte l'automédication.

Si le gouvernement fédéral ou provincial change ses lois, on n'aura pas à discuter, on devra passer par là, mais c'est un fait. Alors, je crois que...

M. Saint-Pierre (Roland): Excusez, si vous me le permettez, M. le Président. Il me semble que cela prend le tour, ce matin, d'un procès contre les produits que nous vendons. Il faudrait peut-être voir...

M. Lessard: M. le Président, une question de privilège pour bien situer le débat. Nous n'avons pas ici en commission parlementaire à faire des procès d'intention; nous avons à entendre des mémoires et je ne pense pas, en tout cas, jusqu'ici, que nous ayons tenté d'aller à l'encontre d'un produit. Ce sur quoi nous nous interrogeons, c'est que la discussion commence à être vis-à-vis de tel produit ou tel autre.

La question qui est fondamentale et sur laquelle je m'interroge, c'est celle au sujet des produits, que ce soit ceux de Avon ou d'autres produits de beauté ou autre chose. J'ai même dit tout à l'heure que je ne doutais pas de la qualité des produits; dans certains cas, je les connais et je ne doute pas de leur qualité.

Mais je pense que je ne voudrais pas continuer parce qu'on pourrait commencer à discuter de ce qu'est la vente, du porte-à-porte et de la façon, par exemple, que tel représentant fait sa vente par rapport à tel autre; non. Je pense qu'on s'en tient à des questions générales et le débat ne se fait pas, comme tel, pour ou contre certains produits; il se fait sur le principe même de la nécessité ou de la non-nécessité de la vente à domicile.

Or, quant à moi, M. le Président, je pense bien qu'on ne se convaincra pas ou il serait difficile...

M. Saint-Pierre (Roland): Si vous permettez.

M. Lessard: ...d'avoir des réponses où on peut être convaincu. Mais la question reste encore importante dans mon esprit, en tout cas.

M. Saint-Pierre (Bernard): Si vous permettez, sur la question de commission, de pourcentage, on vous a dit que, chez nous, ce n'est pas cela qui nous donne le droit de vendre, ce n'est pas le montant de commission qui nous donne le droit d'exploiter le client. C'est chose certaine. Si on parle de commission, on travaille peut-être à 40%, le représentant et les autres, mais c'est peut-être pour vous informer qu'en produits pharmaceutiques, dans les pharmacies et dans beaucoup d'autres domaines, les commissions vont jusqu'à 57%, 60%, 70%. Alors, je pense qu'à domicile, nous ne prenons pas ce pourcentage.

Si on arrêtait les vendeurs itinérants qui ont des chiffres d'affaires assez considérables, demain matin, dans la province de Québec... Ce sont des produits qui existent sur le marché, dans les pharmacies que les gens peuvent prendre sur les tablettes, en général. Ce serait simplement permettre davantage aux multinationales... Je n'ai rien contre les multinationales. C'est aux Canadiens français d'essayer d'aller chercher leur part du marché; je pense que c'est mon point de vue: Essayer d'aller chercher notre part du marché comme Québécois.

Autrement, si vous arrêtez la vente à domicile ou, par exemple, le petit gars qui commence avec une petite compagnie et n'a pas les moyens de faire de la publicité et décide d'aller voir les petits épiciers, le petit restaurant du coin, à la campagne, pour essayer de se faire connaître et vendre son produit, pour éventuellement avoir assez d'argent pour faire un peu de publicité... Je pense que, tous les jours, vous avez des multinationales qui vendent; par exemple, Rolaids où on annonce: trente fois son poids d'acide. On vous le fait valoir et tout le monde en achète — le député, peut-être, est le premier à en acheter — mais vous l'achetez par la publicité. On se laisse dire par des coups de millions par les multinationales à la radio et à la télévision ou, par exemple, un petit gars rencontre quelqu'un et dit: Tel produit est bon pour l'hyper-acidité, c'est inscrit sur la bouteille. Ce sont des produits, au départ— je ne veux pas être trop long — approuvés par des formules qui passent devant des médecins, devant Food and Drug ou devant un autre service de consommateurs; que ce soit un "spray", un parfum, aujourd'hui, vous savez comme moi qu'il n'y a aucun produit qui passe sans avoir la bénédiction de ces hautes compétences.

Moi, je vous laisse là-dessus, je pense que cela ne donnera rien d'en faire un procès, je ne veux pas de procès. Je pense que nous allons nous plier, tous tant que nous sommes ici, à votre loi et laisser déterminer ce qu'on aura le droit de faire.

M. Lessard: D'accord, mais c'est parce qu'ici, à cette commission parlementaire, il y a eu des mémoires qui ont été présentés et certains de ces mémoires sont allés jusqu'à recommander l'abolition complète de la vente à domicile. En fait, c'est possible, dans la loi; c'est pour cela que je vous pose la question, globalement, pas concernant tel produit ou tel autre, mais globalement. M. le Président, quant à moi j'ai terminé mes commentaires. Je pense, comme on le soulignait tout à l'heure, qu'il y a des éléments positifs et je ne voudrais pas que, suite à ces questions, on pense que j'en avais ou que j'en ai contre certains produits.

Ce n'était pas du tout le sens de la discussion, qui était beaucoup plus générale. Cependant, nous sommes ici pour étudier une loi en vue de protéger le consommateur. Nous allons jusqu'à par exemple contrôler la publicité pour les enfants de 13 ans et moins. Il y a aussi, peut-être, une forme de publicité qui devrait être contrôlée, que ce soit sur les médicaments ou autre chose. Je remercie donc, M. le Président, la Chambre de commerce de la province de Québec qui est venue, au nom des différentes maisons qui sont indiquées à l'annexe au mémoire, présenter ce mémoire. Je pense, en particulier, qu'il comporte trois éléments positifs qui sont assez importants et dont nous tiendrons compte certainement lorsque nous aurons à étudier la loi article par article, à les proposer ou à y faire des amendements.

M. Morin (Pierre): M. le Président, les propos du député de Saguenay soulèvent toujours un peu des questions auxquelles on voudrait répondre. Il vient de soulever un point sur la question de la publicité; tantôt, c'étaient les commerçants itinérants, là c'est la publicité. Pour rester dans le domaine dont on discutait tantôt, il y a une étude qui a été faite aux Etats-Unis par l'Association des produits pharmaceutiques, précisément sur la publicité; or, vous savez que, dans les pays Scandinaves, en Suède et au Danemark, toute publicité sur les produits pharmaceutiques est interdite.

Ces deux pays ont pourtant le taux d'abus de drogues le plus élevé. C'est toujours une question, on se demande toujours ce qui précède l'autre, mais, avant de soulever des questions telles que celle, par exemple, de bannir toute publicité, il faut voir souvent, là où c'est déjà fait, quelles en sont les conséquences. Enfin, c'était un commentaire.

M. Lessard: J'aimerais bien connaître vos sources. En tout cas, je ne m'engage pas sur la Suède ce matin. Je ne sais pas s'il y a un taux de consommation très fort des médicaments et des drogues, mais on sait par exemple, avec la publicité qu'on nous fait à la radio et ailleurs, que la Suède est l'un des pays où la population est en meilleure santé, avec les exercices, etc. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Les membres de la commission remercient la Chambre de commerce pour son mémoire ainsi que les personnes qui représentent différentes compagnies qui sont venues présenter leur mémoire, qui ont bien voulu répondre aux questions. M. Létourneau a quelque chose à dire?

M. Létourneau: M. le Président, vous nous avez aimablement permis de déposer le document, je vous indique simplement que ce document que nous déposons concerne le premier mémoire, qui faisait partie intégrante de celui-ci. Compte tenu de la réception du mémoire, nous nous excusons du ton qu'il avait.

Le ministre avait relevé cinq points. Nous avons étudié les cinq points qui avaient été soulevés. Nous reconnaissons que nous avons erré sur un point. Nous maintenons nos quatre autres points et nous explicitons l'argumentation juridique qu'ils contenaient. Ce document est déposé auprès du secrétaire de la commission pour être distribué, M. le Président. Merci beaucoup.

M. Blais (Charles): M. le Président, merci beaucoup de nous avoir entendus.

Le Président (M. Lafrance): Merci bien. La commission ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 11 h 25)

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