Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission permanente des
consommateurs, coopératives et
institutions financières
Etude du projet de loi no 7 Loi sur la protection du
consommateur
Séance du mercredi 15 septembre 1976 (Dix heures vingt-quatre
minutes)
M. Lafrance (président de la commission permanente des
consommateurs, coopératives et institutions financières): A
l'ordre, messieurs!
La commission parlementaire reprend les auditions des mémoires
concernant la Loi sur la protection du consommateur et, pour la deuxième
fois, nous avons le plaisir d'accueillir la Chambre de commerce de la province
de Québec. Avant de demander à la chambre de présenter son
mémoire, je voudrais faire part des changements à ladite
commission.
M. Lessard remplace M. Burns: M. Charron remplace M.
Léger; M. Boudreault remplace M. Chagnon et M. Assad remplace M. Harvey
(Dubuc).
Le mémoire présenté par la Chambre de commerce de
la province de Québec a trait aux commerçants itinérants.
A vous la parole, messieurs de la Chambre de commerce.
Chambre de commerce de la province de
Québec
M. Blais (Charles): M. le Président, Mme le ministre,
messieurs les membres, mon nom est Charles Blais, vice-président de la
Chambre de commerce de la province de Québec. Je suis accompagné
aujourd'hui de représentants des entreprises exerçant un commerce
itinérant. Les noms de ces entreprises apparaissent en annexe du
mémoire et sont les suivants: Alsi Compagnie Ltée, Gerbex Enrg.,
les laboratoires Vachon Inc., Produits sanitaires Laurentides Inc., les
Produits Star Inc., Universal Herb Inc., Red Indian Herbs Ltée, Rolmex
Inc., Santé naturelle Ltée, Superco Enrg., Wildo Inc., Produits
sanitaires Météor Inc.
Ce groupe d'entreprises a constitué un bureau de direction dont
il me fait plaisir de vous présenter les membres. MM. Rolland
Saint-Pierre et René Clément de Rolmex; MM. Georges et Jean-Marc
Gingras, de Universal Herbs Inc; M. Adrien Gagnon, de Santé naturelle
Ltée; M. Jean-Paul Denis, de Produits Star; M. Marcel Mercier, de
Superco; et ici, M. Jean-Paul Létourneau, vice-président
exécutif de la Chambre provinciale; M. Pierre Morin, directeur
général des affaires publiques de la Chambre de commerce
provinciale et Me Francine Charbonneau, de la Chambre de commerce de la
province de Québec.
Avant d'entreprendre la lecture de ce mémoire, permettez moi, M.
le Président, deux remarques. Premièrement, la chambre a
déposé le 11 août dernier un mémoire plus global sur
l'ensemble du projet de loi. Elle recommandait alors une refonte de la loi qui
n'aurait pour effet d'assujettir le commerçant itinérant
qu'à l'obtention d'un permis. Il s'agissait là, à notre
avis, de l'aspect essentiel pour la protection du consommateur puisque le
directeur de l'office peut ou non octroyer ce permis ou encore le retirer. Il
posséderait donc littéralement droit de vie ou de mort sur les
commerçants itinérants. La problématique était donc
la protection du consommateur. Le mémoire d'aujourd'hui s'inscrit dans
une autre problématique, celle de la survie des entreprises
visées par le projet de loi s'il devait être adopté dans sa
rédaction actuelle.
Deuxièmement, après avoir disposé du mémoire
soumis aujourd'hui, la chambre apprécierait pouvoir revenir sur ses
propos du 11 août dernier alors que certaines interrogations, certaines
générales, d'autres spécifiques, furent soulevées
par la commission et certains de ses membres. M. le Président, avec
votre permission, nous procéderons maintenant à la lecture du
mémoire traitant des commerçants itinérants.
Le Président (M. Lafrance): D'accord, sur votre
mémoire d'aujourd'hui. Parce que, sur les propos qui ont
été tenus lors d'une autre séance... Le mémoire
comprend les commerçants itinérants et on va s'en tenir à
ce mémoire. Parce que, si on permet à tous les organismes de
revenir sur des questions qui ont déjà été
débattues et qui ont déjà été
proposées par leurs organismes on va être obligé de
reprendre les mémoires un par un. Avec 85 mémoires, on ne peut
pas faire ça, mais, étant donné que vous avez
présenté un mémoire aujourd'hui sur les commerçants
itinérants, nous nous en tiendrons aux commerçants
itinérants.
M. Blais: M. le Président, strictement, vous avez raison.
Mais nous aimerions faire certaines remarques parce que nous croyons que, sur
certains points, notre mémoire n'a pas été compris dans le
sens...
M. Lessard: M. le Président, si vous permettez, c'est
qu'on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures. On ne peut pas, à
cette commission parlementaire, permettre que des organismes reviennent sur le
mémoire qui a été présenté. Que votre
mémoire ait été mal interprété ou bien
interprété, de quelle façon qu'il ait été
interprété, on ne peut pas. Vous avez un mémoire ce matin.
Quant à moi, je pense que le président a entièrement
raison et je ne permettrai pas, ni à la Chambre de commerce, ni à
tout autre organisme, de revenir sur un mémoire qui a déjà
été présenté.
Vous avez à présenter ce matin un mémoire que nous
avons devant nous et nous vous entendrons sur ce mémoire. Nous
n'accepterons pas qu'on puisse reprendre l'argumentation sur l'autre
mémoire que vous avez déjà présenté et que
les membres de la commission parlementaire ont entendu ici. Vous avez eu
l'occasion, lors de cette présentation, de donner les explications
nécessaires et de répondre probablement aux questions.
M. Blais: Je ne veux pas insister davantage, M. le
Président, mais cette commission parlementaire siège au
bénéfice du consommateur. S'il était dans
l'intérêt du consommateur que nous clarifiions certains points de
notre mémoire, je pense qu'il serait difficile pour vous de vous en
tenir strictement à la procédure parlementaire.
Le Président (M. Lafrance): Je pense que, lorsque la
Chambre de commerce de la province a présenté son mémoire
lors de sa première visite, il a été entendu, il a
été reçu, toutes les questions ont été
posées par tous les membres de la commission qui ont voulu poser des
questions. S'il y a eu des interprétations qui ont été
faites en dehors de la commission, ce n'est pas à la commission à
reprendre les mauvaises interprétations que vous mentionnez.
Prenez les moyens que d'autres avaient à leur disposition pour
répondre à ces questions. Les membres de la commission ont
été éclairés avec satisfaction sur votre
mémoire.
M. Létourneau (Jean-Paul): M. le Président, si vous
me permettez d'intervenir, lors de notre comparution devant la commission,
madame le ministre, par la voix de Me Rioux, nous a indiqué des points
d'interrogation par rapport à des questions juridiques
d'interprétation de la loi que nous avions soulevées.
Nous avons réétudié ces questions et nous avons des
réponses...
M. Lessard: Je regrette, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): On va le laisser aller.
M. Létourneau: Nous avons réétudié
ces questions. Nous avons des éclaircissements à fournir à
la commission. Si nous ne pouvons le faire verbalement, nous aimerions au moins
déposer devant la commission ces éclaircissements sur les
interprétations juridiques que nous avons données et qui
soulevaient des questions de la part de madame le ministre.
Mme Bacon: M. le Président, j'apprécie qu'on les
dépose ce matin, mais je ne voudrais pas qu'on ouvre à nouveau la
discussion sur les différents sujets. Nous avons eu, encore hier,
certains groupes qui sont venus devant nous, qui n'avaient pas toutes les
réponses à nos questions et qui nous ont mentionné que
dans les semaines à venir, même les mois a venir puisque
souvent, cela 'demande une recherche de quelques semaines ils nous
feraient parvenir des réponses précises.
Je pense qu'on devrait s'en tenir à la même méthode
de travail. Si la Chambre de commerce a des réponses à nous
donner, qu'elle les dépose aujourd'hui, mais je ne voudrais pas qu'on
ouvre à nouveau le débat. Je pense que nous avons fait
connaître nos positions, de part et d'autre, à l'occasion de cette
commission parlementaire et je crois personnellement que nous devrions nous en
tenir ce matin à ce sujet "commerçants itinérants" qui
fait l'objet du mémoire numéro 3A. Je pense que ce serait
suffisant pour la commission. Les membres de la commission ont
été suffisamment éclairés.
M. Létourneau: M. le Président...
M. Lessard: M. le Président, si vous le permettez...
Le Président (M. Lafrance): Je redonnerai la parole
à M. Létourneau tantôt.
M. Lessard: Quant à nous, membres de la commission
parlementaire, nous n'avons pas à interpréter et je ne pense pas
que nous avons interprété vos propos lors du dépôt
de votre mémoire. Que des journalistes ou d'autres aient
interprété votre mémoire, cela peut poser un certain
problème. Mais quant à nous, nous prenons connaissance du
mémoire et, si vous voulez comme on l'a indiqué à
certains organismes hier déposer des documents qui
complètent votre premier mémoire, il n'y a aucun problème.
Vous avez simplement à faire parvenir votre documentation au ministre,
ainsi qu'aux membres de la commission parlementaire, et nous en prendrons
connaissance. D'accord?
M. Blais (Charles): Nous allons procéder à la
lecture du mémoire des commerçants itinérants.
M. Morin (Pierre): Nous vous soumettons aujourd'hui une prise de
position élaborée avec la collaboration des entreprises
citées en annexe. Ces entreprises sont solidaires de cette prise de
position et la Chambre la fait sienne en vertu d'un mandat de son
assemblée générale qui l'autorise à se prononcer
sur un groupe défini de membres.
Objet des présentations. Le propos de ce mémoire est
dirigé aux articles 37 à 48 du projet de loi à
l'étude ainsi qu'à certains autres articles de concordance.
Etat de la situation. La totalité des entreprises
représentées ici aujourd'hui emploie des représentants qui
se présentent chez le consommateur pour lui offrir leurs produits. Elles
détiennent toutes le permis exigé en vertu de la loi actuelle et
leurs représentants détiennent la carte d'identité
prévue.
La nature des produits offerts varie largement mais il s'agit
généralement de produits de consommation courante tels
suppléments alimentaires et articles ménagers. La moyenne de
leurs transactions se situe aux environ de $20.
Généralement, les représentants itinérants
de ces sociétés se voient attribuer un territoire en
exclusivité, territoire pouvant varier en étendue d'un quartier
en territoire urbain jusqu'à une circonscription électorale en
milieu rural. Ces représentants sont généralement
rémunérés à commission.
Il y a plus de 4000 représentants dont la principale source de
revenus est le commerce itinérant pour le compte des entreprises
représentées aujourd'hui. Plusieurs centaines d'autres
person-
nes supplémentent aussi à leurs revenus par cette
activité.
Généralement, le représentant itinérant
laisse chez le consommateur une fiche descriptive ou un catalogue de ses
produits incluant une liste de prix. Lors de visites subséquentes ou sur
appel du consommateur, celui-ci commande le produit de son choix.
Toutes les sociétés mentionnées en annexe offrent
aux consommateurs une garantie de satisfaction contre remboursement. Cette
garantie ne peut toujours être explicite puisque certaines lois
l'interdisent.
Appréciation du projet de loi 7. Si les articles traitant des
commerçants itinérants du projet de loi sur la protection du
consommateur devaient être adoptés tels que rédigés,
il en résulterait un préjudice considérable aux
entreprises représentées ici, préjudice pouvant même
aller jusqu'à la disparition de certaines de ces entreprises dont le
comportement s'est toujours manifesté dans le respect de la loi.
Nous ne nions pas qu'il y ait eu des abus perpétrés
à l'endroit du consommateur par des commerçants itinérants
aussi bien avant l'adoption de la loi actuelle que depuis.
Nous avons autant d'intérêt que le législateur
à mettre un terme à ces abus, incidemment, pas plus
fréquents que chez les commerçants à place d'affaires
fixe. Là encore, comme dans le commerce itinérant, les incidences
d'abus sont marginales par rapport à l'ensemble des transactions, car il
y va de la bonne réputation et de la capacité de commercer, de
traiter avec les consommateurs dans un climat de confiance.
Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi imposerait un
minimum de trois visites chez le consommateur par transaction, faisant du fait
augmenter les frais de chaque transaction avec pour conséquence, pour la
moyenne des ventes, de les rendre non rentables. De plus, comme la
majorité des produits impliqués en sont de consommation courante,
les délais auraient pour résultat une perte substantielle du
marché par le phénomène de substitution auprès
d'autres commerçants, limitant ainsi la concurrence qui joue
actuellement en faveur du consommateur.
En effet, après avoir requis le permis et le cautionnement
obligatoires ainsi que les cartes d'identité pour chacun des
représentants, voilà que, pour une considération
excédant $10, l'on exige un contrat constaté par écrit, un
délai de résolution dudit contrat de dix jours aux frais du
commerçant itinérant avec responsabilité pour un
délai additionnel de sept jours et l'interdiction de percevoir quelque
paiement, partiel ou total, que ce soit, même contre livraison
immédiate des biens qui font l'objet du contrat avant l'expiration du
délai.
Il ne manque plus, dans ce contexte, que la condamnation lapidaire par
les rédacteurs de la loi qualifiant a priori les commerçants
itinérants d'escrocs sans avoir à en faire la preuve. C'est trop
facile.
Nous préférons croire qu'il s'agit d'une faute
d'appréciation où les modalités spécifiques tra-
duisent mal l'intention première d'offrir au consommateur une plus
grande protection dans ses transactions avec des commerçants
itinérants.
Nous sommes d'accord avec ce dernier objectif.
Avant de vous communiquer des propositions d'amendements
concrètes à certains articles, il nous importe de vous souligner
que, dans sa rédaction actuelle, les commerçants auraient pu se
soustraire dans une certaine mesure à l'application de la loi:
morcellement des ventes, inclusion d'un grand nombre de produits dans la
définition de produits alimentaires, établir des
représentants comme commerçants et les laisser se
débrouiller avec la loi, etc. Là n'est pas notre
intérêt ni celui du consommateur.
Recommandations et propositions d'amendements: Premièrement,
étendre la protection de la loi aux contrats de moins de $10. En effet,
nous comprenons mal pourquoi le consommateur ne bénéficierait pas
de l'entière protection de la loi, même pour les achats de moins
de $10.
Nous croyons que la carte de représentant présentée
au consommateur devrait être une assurance que le cautionnement
déposé le protège au cas où la loi serait
violée.
Amendement: Retirer de l'article 38 l'alinéa a).
Deuxièmement, maintenir le délai de résolution du
contrat à dix jours, ainsi que les délais de restitution. Cette
recommandation peut paraître étrange pour le législateur.
La raison en est cependant assez simple: Certains produits, les
médicaments brevetés, entre autres, sont régis à la
vente par des dispositions du gouvernement du Canada et ne peuvent faire
l'objet d'aucune reprise, échange ou garantie. Les entreprises
sérieuses misent sur la qualité de leurs produits et sur la
satisfaction de leurs clients.
Recommandation: Aucun amendement.
Troisièmement, porter à $25 ou plus l'obligation du
contrat constaté par un écrit. La protection de la loi
étant étendue à tous les contrats visés par
l'article 38, le constat du contrat par un écrit autre que la facture
ayant cours présentement ne nous apparaît pas comme essentiel. La
disposition actuellement prévue crée un désavantage
concurrentiel additionnel aux entreprises fonctionnant par représentants
itinérants.
Amendement à l'article 40: Le contrat pour une
considération totale excédant $25 doit être constaté
par écrit et divulgué, et la suite de l'article.
Quatrièmement: Inscrire une date d'échéance sur la
carte de représentant.
Alors que le permis de commerçant échoit à une
période fixe, les cartes de représentants ne portent aucune date
d'échéance. Ce qui facilite l'utilisation frauduleuse de la carte
de représentant à l'insu du commerçant et au
détriment du consommateur.
Recommandation: Prévoir dans les règlements
l'émission de la carte de représentant avec inscription d'une
date d'échéance.
Cinquièmement: Modifier les dispositions ayant trait au
paiement.
Nous appuyons la disposition concernant l'interdiction de percevoir tout
acompte; cependant, nous croyons que le commerçant itinérant
devrait pouvoir recevoir un paiement pour les biens ou produits lors de la
livraison de ces derniers, même avant l'expiration du délai de
résolution du contrat. Voilà le dilemme pratique posé par
cette disposition: a)1. Le commerçant itinérant ne
délivrera pas les biens faisant l'objet du contrat avant l'expiration
des délais de résolution, auquel cas le consommateur sera mis en
possession des biens acquis alors que la protection de la loi sera
déjà caduque; ou bien, 2. le commerçant itinérant
délivrera les biens faisant l'objet du contrat dès qu'ils seront
disponibles et même avant l'expiration du délai de
résolution prévu à l'article 41.
Mais il devra alors, afin de se protéger et compte tenu du fait
qu'il y aura délivrance sans paiement, obtenir un reçu de la part
du consommateur attestant la livraison, sinon la disposition 44 du projet de
loi entraînera des difficultés de preuve, car le droit commun veut
que dans le cas de biens mobiliers "possession vaut titre " ou l'article 2268
du Code civil.
L'achat de deux contenants d'insectiside de bétail, par exemple,
est considérablement compliqué et peut détruire tout le
climat de confiance entourant une transaction.
L'article 41 détruit le bilatérisme du contrat. En fait,
il introduit le contrat purement potestatif dans le droit
québécois. Il n'y a pas vraiment de contrat conclu entre le
commerçant et le consommateur puisque le sort du contrat dépend
de la volonté d'une seule personne. En conséquence, il n'y a pas
rencontre des volontés des parties contractantes.
Les représentants rémunérés à
commission doivent faire les frais de trois visites avant d'avoir droit
à leur commission. Résultat à court terme: disparition ou
diminution du nombre des représentants.
Il serait tellement plus simple, maintenant que ces entreprises ont
satisfait aux exigences du permis et déposé le cautionnement
garantissant leur solvabilité, de leur permettre de percevoir au moins
le paiement pour les biens livrés au consommateur, sans restreindre son
droit à la résolution du contrat dans les délais
prévus.
Nous proposons un amendement. Je vous signale que nous l'avons quelque
peu modifié par rapport au texte qui vous est soumis actuellement.
L'article 40e) se lirait comme suit: l'interdiction de recevoir tout paiement
avant l'expiration de la période prévue au paragraphe d),
à moins d'avoir reçu livraison des biens ou services faisant
l'objet du contrat.
A l'article 42, il y a une petite modification par rapport au texte. Le
commerçant itinérant ne peut recevoir aucun paiement du
consommateur avant la livraison des biens ou services faisant l'objet du
contrat durant le délai de résolution prévu à
l'article 41.
Conclusion. L'objectif de la Chambre dans ce mémoire est double.
Premièrement, offrir au consommateur une protection réelle et
efficace dans ses relations avec le commerçant itinérant car il y
va de notre intérêt; faire en sorte, deuxièmement, que la
protection offerte au consommateur ne lui coûte pas trop cher.
Les amendements qui vous ont été soumis, nous le croyons,
atteindraient ces deux objectifs.
Le Président (M. Lafrance): Mme le ministre.
Mme Bacon: M. le Président, j'aurais quelques remarques
à faire concernant ce mémoire. Il y a certaines
prétentions qu'on entend en fait à cette tribune et qui nous font
réagir. Ainsi par exemple, à la page 4 de ce mémoire,
j'aimerais bien rappeler à la Chambre de commerce que les
rédacteurs de la loi ne visent pas à lapider les
commerçants itinérants et à les qualifier d'escrocs sans
en avoir fait la preuve. On fait des déclarations ou on prétend
des choses dans certains mémoires, et j'ai l'impression que, souvent,
les gens qui sont devant nous ont peut-être beaucoup plus d'imagination
que les rédacteurs de la loi en avaient au moment de la
rédaction. C'est qu'on n'a jamais été aussi loin dans
notre imagination qu'on puisse le lire ce matin dans ce mémoire.
Au sujet des commerçants itinérants, nous nous permettons
de souligner que le nombre de plaintes formulées à l'office par
les consommateurs, c'est un nombre vraiment important; nous voulons rappeler
également que certains organismes qui ont présenté ou
présenteront des mémoires à cette commission trouvent que
le projet de loi no 7 ne va pas assez loin en ce qui concerne les
commerçants itinérants. Il est évident qu'on entend donc
différents sons de cloches.
Votre mémoire présente toutefois certaines suggestions qui
sont très intéressantes et qui visent à rendre plus
étendue la protection faite au consommateur et à rendre aussi
plus pratique, et cela c'est très important, l'application des articles
concernant les commerçants itinérants. Je mentionnerai par
exemple, votre suggestion d'étendre la protection de la loi aux contrats
de moins de $10 et votre approbation de maintenir le délai de
résolution qui comporte le contrat à dix jours et qui est
beaucoup plus étendu que ce que nous avions à la loi actuelle,
à la loi 45.
Il en est de même de votre suggestion d'inclure dans les
règlements l'inscription de la date d'échéance sur la
carte du représentant. Je pense que ce sont des suggestions qui sont
très pratiques, qui sont très importantes. Quant à votre
suggestion de porter à $25 l'obligation du contrat constaté par
écrit, nous en prenons bonne note et je pense que cela nous a
déjà été mentionné dans certaines rencontres
ou discussions que nous avons eues avec d'autres groupes ou même au
niveau de certains individus.
Nous avons eu des suggestions qui sont similaires à la
vôtre. J'aurais une question à poser concernant le
commerçant itinérant qui livre chez le consommateur un bien qui
fait l'objet d'un contrat avant l'expiration du délai de
résolution. Est-ce que le commerçant exerce ainsi une forme de
pression sur le consommateur qui l'inciterait à
renoncer à son droit de résolution s'il faisait la
livraison avant l'expiration de la période de réflexion?
M. Blais: M. Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Roland): Je ne crois pas, de tous les groupes
qui sont ici... M. le Président, excusez-moi, je veux vous remercier de
nous avoir écouté d'ailleurs, parce que, franchement, c'est
très important, je pense, pour la survie de toutes ces compagnies. Je ne
crois pas, dans le groupe que nous représentons. Ce sont de petites, ce
sont des biens de consommation de tous les jours. Que ce soit un produit pour
la constipation ou que ce soit un petit onguent pour une petite
éraflure, que ce soit un vaporisateur quelconque, que ce soit un "air
spray" en français, des brosses, ceci et ça, ce n'est pas
là. Je crois qu'on représente ici un groupe qui n'a pas à
forcer les ventes puisque chaque représentant est dans un secteur assez
défini et il visite toujours le même client. Alors, je pense
qu'ils deviennent des amis, des connaissances, comme le magasin du village, de
la petite ville. Je pense que les gens se connaissent. A part cela, pourquoi
est-ce qu'on irait faire une vente, comme on dit, à pression pour $20 ou
$25, $15, imaginez un peu. Alors, je ne crois pas. Je veux aussi souligner que
la livraison immédiate, mais ce à quoi nous tenons cela
fait 29 ans que je suis dans la vente personnellement c'est que l'argent
soit perçu sur livraison seulement. Donc, vous êtes certain que le
client a sa marchandise, il l'a vue avant de payer. C'est une protection du
consommateur. Chez nous, c'est comme cela que cela fonctionne.
Mme Bacon: Si le commerçant décidait de
résoudre son contrat dans les délais prévus par la loi,
par exemple, est-ce qu'il lui serait facile de reprendre son argent à
l'occasion de cette résolution de vente, de contrat?
M. Morin (Pierre): Si vous me permettez, Mme le ministre, il y a
là une difficulté qui des fois tient du produit. Comme vous le
savez il y a des produits parapharmaceutiques sur lesquels le gouvernement du
Canada empêche toute reprise. La pratique des commerçants, qui
sont ici avec nous aujourd'hui et ceux qui sont dans le même domaine, a
toujours été et, à ce chapitre, je crois que l'office peut
l'attester, de toujours reprendre le produit sans discuter. C'est une question
aussi d'avoir un client satisfait, mais vous voyez le dilemme dans lequel cela
place, par contre, pour cette même satisfaction du client, du
consommateur, il y a quand même une loi fédérale qui dit:
Vous n'avez pas le droit de le faire.
Mme Bacon: Je pense que les plaintes reçues à
l'Office de la protection du consommateur sont dans ce sens. Le consommateur,
pour récupérer la somme qu'il a déjà versée,
doit faire de nombreux appels téléphoniques, de nombreuses
démarches face au commerçant pour pouvoir, finalement, recouvrer
son montant, le paiement qu'il a versé.
Est-ce que vous avez, dans votre pratique, parce que vous avez la
connaissance quotidienne de ces problèmes, est-ce qu'il y a des
problèmes auxquels vous avez eu à faire face?
M. Saint-Pierre (Roland): Madame, pour être bien franc ici,
je vais parler en mon nom personnel. Durant toute l'année passée
je pourrais même vous donner le chiffre de vente qui est quand
même élevé; nous sommes au-delà de 600
représentants nous avons eu deux réclamations. Même
si la loi fédérale nous dit qu'on ne peut pas garantir un produit
paramédical ou autre, parce qu'on ne peut pas garantir satisfaction dans
ce domaine, on l'a fait quand même pour les deux clients qui ont
réclamé. Je pense tout le groupe ici, on en a
discuté avant de venir ici, tout le monde s'est bien mis d'accord
que si le client vous achète... Vous-même, Mme le ministre, vous
dites que vous achetez un "hair spray" une bonne journée et vous
n'êtes pas trop satisfaite. Pourquoi ne pas le rembourser? Pourquoi ne
pas en vendre un autre? Parce que c'est la garantie de qualité du
produit. Vous avez des maisons qui le font, je ne peux pas les nommer ici, mais
vous avez des maisons qui le font, des magasins sur de grandes rues où,
si vous n'êtes pas satisfait de la marchandise, vous la retournez.
Et ces gens font des affaires, croyez-moi. Pourquoi, nous, ne pas donner
100% de garantie? Je pense que tout le monde qui est ici est d'accord pour
donner 100% de garantie au consommateur. C'est la manière de garder un
client et c'est très bon marché de rembourser. Pour n'importe
quelle raison que ce soit. Le produit peut être bon, mais Madame ou
Monsieur ne sont pas satisfaits; qu'on le rembourse, c'est la manière de
garder un client satisfait. Je pense que c'est la meilleure
publicité.
Mme Bacon: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Le député de
Saguenay.
M. Lessard: M. le Président, j'avais l'intention de
soulever certains éléments positifs du mémoire
relevés par le ministre. Je pense qu'il y a trois propositions qui
permettraient d'améliorer encore la loi et dont nous tiendrons
certainement compte. En ce qui concerne le paiement initial, actuellement...
Parce que je connais assez bien certaines compagnies que vous
représentez et qui font de la vente à domicile. Actuellement, la
plupart du temps, vous ne recevez pas de paiement initial, c'est-à-dire
que vous recevez le paiement au moment de la livraison de la marchandise. C'est
la coutume générale.
M. Morin (Pierre): M. le Président, effectivement, c'est
le cas, sauf que, généralement, la livraison aurait lieu à
l'intérieur du délai de résolution qui est prévu et
c'est de là que venait le problème.
M. Lessard: C'est ça. Normalement, aussi, je reviens
à la deuxième question que je voulais vous
poser, quand vous parlez de livraison à l'intérieur du
délai prévu par la loi, ça veut dire que la livraison se
fait à l'intérieur de dix jours. Normalement, c'est la semaine
suivante.
M. Morin (Pierre): Cela peut être la journée
même.
M. Lessard: Dans certains cas, ça peut être la
journée même. Mais il y a une question qui me préoccupe
quand même et je voudrais que vous y répondiez. Si vos produits
sont tellement bons, si vos produits sont tellement nécessaires pour le
consommateur, pourquoi êtes-vous obligés d'aller faire de la vente
à domicile? Pourquoi ne pas les laisser, comme n'importe quel autre
produit, sur les étagères d'un commerçant ou d'un
distributeur et le consommateur qui aura besoin de ce produit l'achètera
lui-même sans avoir la pression?
J'avoue que c'est fatiguant, c'est tannant. C'est toujours une pression.
On voit arriver le vendeur... Je comprends, par exemple, tel que l'expliquait
tout à l'heure...
M. Morin (Pierre): M. Saint-Pierre.
M. Lessard: ...M. Saint-Pierre, qu'il est vrai que la plupart du
temps, dans nos régions, le vendeur devient un peu l'ami de la famille.
Ce sont des gens qui sont connus. Ce n'est pas comme pour certaines ventes.
Il reste quand même qu'on se dit: Elle vient ce matin. Il y a
toujours une pression sur le consommateur. On laisse le catalogue et on dit,
bien souvent, que c'est une vente spéciale. Il y a toujours une forme de
pression.
La question que je vous pose... Je comprends qu'il y a le
développement du commerce et ainsi de suite. Mais tous ces produits, par
exemple, de Rolmex, de Gerbex, les herbages, en particulier, sont un genre de
médicaments qui ne sont pas prescrits par le médecin et que le
consommateur accepte d'acheter. Or, la personne qui vend ces produits n'est pas
spécialisée. Ce n'est même pas un médecin, ce n'est
même pas une infirmière; c'est une personne qu'on a formée,
ou, en tout cas, qui se dit être formée. Cela m'inquiète
parfois.
Dans d'autres cas, vous avez parlé de produits pharmaceutiques.
Je pense qu'il y a des pharmacies, il y a des maisons
spécialisées où on peut acheter ces produits. Si ces
produits sont si nécessaires pour le consommateur, pourquoi
êtes-vous obligés d'aller en faire la vente à domicile?
M. Blais: M. Clément de la maison Rolmex aimerait faire un
commentaire sur votre question.
M. Clément (René): Monsieur, d'ici dix ans, 65% ou
80% de la population de la province de Québec aura plus de 65 ans et,
pour la majorité, ce sera très difficile de se
déplacer.
Présentement, dans des villes comme Montréal, vous avez
des pharmacies dans des grands centres commerciaux, qui ne font aucune
livraison, et les gens ne peuvent plus se déplacer pour aller chercher
leurs produits. Qu'est-ce qu'ils font?
M. Lessard: A ma connaissance, les régions où vous
faites de la vente à domicile... Je connais les régions et la
vente à domicile se fait dans les régions rurales, dans des
campagnes, dans les petites villes. Votre réponse voudrait dire que bien
souvent les gens sont incapables de se déplacer pour aller faire leurs
achats alimentaires, leur marché de fin de semaine.
M. Létourneau: M. le Président, Jean-Paul
Lé-tourneau. La vente de produits à domicile est une forme de
mise en marché qui est, à ce que je sache, légale et
permise dans notre société. Des fabricants peuvent
désirer, à un moment donné, passer par des distributeurs
pour vendre leurs produits. On voit cela dans le domaine des balayeuses, dans
le domaine des produits domestiques...
M. Lessard: Mais je me pose la question.
M. Létourneau: Oui, mais c'est une forme de mise en
marché qui est légale.
M. Lessard: Oui, oui.
M. Létourneau: Elle élimine beaucoup de frais de
distribution. C'est le passage direct du manufacturier, par un seul
intermédiaire, au client. C'est un contact direct avec le client. Il y a
des maisons de très haute réputation nous en avons avec
nous qui procèdent de cette façon et qui amènent
à la clientèle un produit de très bonne qualité
avec la même protection pour le consommateur que n'importe quelle autre.
C'est une activité parfaitement légale et nous croyons qu'elle a
son bien-fondé. Nous ne pensons pas qu'il y ait lieu de la remettre en
question.
Nous ne pensons pas que le projet de loi no 7 remette en question ce
mode de distribution des biens ou services dans notre société.
S'il fallait remettre cela en question, nous nous serions
préparés une toute autre argumentation pour justifier cette forme
de distribution de biens ou de services.
Il ne faut pas oublier, M. le Président, que dans seulement les
compagnies qui sont représentées ici c'est bien loin
d'être la totalité de celles qui font ce genre de distribution
il y a 4000 représentants qui tirent leur revenu principal de la
distribution de leurs produits. C'est une façon pour ces gens de gagner
leur vie. Enfin, nous n'étions pas préparés à faire
face à une argumentation au sujet de la mise en cause de ce mode de
distribution. Je ne pense pas que le projet de loi no 7 non plus ne le fasse.
Il se peut que des gens trouvent, comme le député le signale,
qu'à un moment donné on n'aime pas recevoir ces gens. Personne
n'est obligé de les recevoir, cela va de soi. Mais quand même, il
y a un grand nombre de clients de ces établissements qui sont
très heureux de faire affaires avec ces représentants et qui les
considèrent même sur un plan, comme l'a signalé M.
Saint-Pierre, d'amitié. C'est d'ailleurs la marque de commerce des
représentants des meilleures maisons dans ce domaine.
M. Lessard: M. le Président, je ne pense pas avoir mis en
doute, ni la légalité, ni la qualité des produits. Je
connais des maisons, je pense qu'on peut en citer une qui n'est pas dans votre
document, qui n'est pas représentée ici, mais quand même,
je pense bien que tout le monde a conscience que les produits Avon sont des
produits d'excellente qualité. Je ne doute pas des qualités des
produits, en fait, dont les maisons sont représentées ici. Mais,
c'est justement, il reste quand même que, au nom de la protection du
consommateur, même si ce n'est pas inscrit dans la loi, nous devons,
nous, les membres de la commission parlementaire, nous poser quand même
la question, pour la protection du consommateur.
Je pense, par exemple, à Red Indian Herbs qui est une maison de
produits pharmaceutiques dont les produits sont vendus par des gens qui ne sont
pas spécialisés comme tels, qui ne sont même pas infirmiers
et qui vont conseiller le client sur un certain nombre de maladies. Je ne
voudrais pas entrer... Mais je m'interroge quand même pour la protection
du consommateur, pour la protection même de la santé du
consommateur si on devrait permettre que ces produits soient vendus à
l'extérieur des pharmacies.
Actuellement, c'est légal de faire de la vente à domicile,
mais je me pose la question, étant donné les abus
considérables, je dis bien les abus considérables que nous avons
eu à déplorer dans le passé et les plaintes nombreuses qui
sont parvenues à l'Office de la protection du consommateur et qui nous
parviennent dans nos bureaux ici, si on ne devrait pas limiter je pense
bien que vous avez à répondre à cela encore plus
considérablement la vente à domicile. Je m'interroge, je me pose
la question et, devant un projet de loi comme cela, je pense que vous devez
vous aussi être capables de répondre à nos objections sur
la vente à domicile.
Je comprends, lorsque, tout à l'heure, on disait: il y a un
contact direct entre le consommateur et la maison représentée et
que cela coûte moins cher et que c'est moins dispendieux pour le
consommateur, permettez-moi d'avoir de gros points d'interrogation. Parce que
le pourcentage qui est laissé, particulièrement en ce qui
concerne les produits de vente à domicile, le pourcentage qui va dans le
porte-monnaie, si vous voulez, dans la poche du distributeur, est très
fort. Qu'on ne se le cache pas. Je pense bien que tout le monde a
déjà connu la situation ou connu des représentants. Le
pourcentage va jusqu'à 35% et 40%. Peut-être que, dans certains
cas, c'est plus. Je n'ai jamais été représentant, mais je
connais des représentants, des milieux où cela se fait.
Quand on me dit que c'est moins cher pour le consommateur, je
m'interroge, je me pose des questions.
Au nom de la protection du consommateur, on est ici pour s'interroger et
se poser des questions. Je me dis que le consommateur connaît, avec toute
la publicité existante, même qu'il y a trop de publicité,
ses besoins. Le consommateur, lorsqu'il va faire son marché en fin de
semaine, ou lorsqu'il se présente à une pharmacie, connaît
ses besoins. C'est toujours la société. En fait, le vendeur
itinérant s'inscrit dans la société de consommation. On va
lui ouvrir de nouveaux besoins, on va lui créer bien souvent de nouveaux
besoins. Je me pose la question qui m'est fondamentale, qui m'apparaît
encore importante, c'est que je ne doute pas de la qualité, je ne mets
pas en cause la qualité des produits qui sont
énumérés ou des maisons qui vendent des produits dont la
plupart me sont connus. Je ne mets pas en cause la qualité, mais je mets
en cause, par exemple, la nécessité de vendre ces produits
à domicile, d'autant plus qu'il s'agit de produits pharmaceutiques.
J'attends une réponse. Jusqu'ici, vous ne m'avez pas convaincu
encore.
M. Morin (Pierre): M. le Président, je vais essayer de
répondre à ces nombreuses questions dans une certaine mesure
avant de céder la parole à M. Gingras sur des points
particuliers. Il faut remonter peut-être un peu dans le passé pour
voir d'où est venu le commerçant itinérant. Il y a un
passé historique. Il y avait un Québec, un pays rural, où
les gens pouvaient plus difficilement se déplacer, ce qui a amené
des commerçants, pour rejoindre, pour satisfaire les besoins d'une
clientèle qu'ils avaient sur leur territoire, à se
déplacer et à faire valoir la marchandise qu'ils avaient. Je
crois qu'on en a même des exemples qui remontent au Moyen-Age, au niveau
des fruits et légumes, enfin, de l'alimentation et de la plupart des
besoins, du textile, ainsi de suite. Il y a d'abord cela. Il y avait la
satisfaction des besoins, le fait de tenter, pour le commerçant,
satisfaire les besoins de sa clientèle sur le plan historique.
J'aimerais apporter, par contre, une précision. Il ne s'agit pas de
produits pharmaceutiques. Il y a des produits parapharmaceutiques, oui.
Là-dessus, deux points doivent être notés.
M. Lessard: Je parle des maux d'estomac, des maux... Même
dans le cas de Red Indian Herbs, on va assez loin dans ces produits.
M. Morin (Pierre): II y a deux points que je veux soulever,
précisément, sur ce plan.
M. Lessard: Ce sont des médicaments...
M. Morin (Pierre): Le premier est que le produit lui-même
est vérifié par le ministère fédéral de la
Santé et du Bien-Etre dans ses laboratoires. Deuxièmement, les
textes publicitaires et le mot à mot de tous les textes publicitaires
touchant les produits pharmaceutiques est aussi vérifié par le
ministère fédéral de la Santé et du Bien-Etre.
M. Lessard: C'est le diagnostic qui m'inquiète. C'est
lorsque la personne qui vend le produit fait le diagnostic...
M. Morin (Pierre): Me permettez-vous d'en venir au
troisième maintenant?
M. Lessard: D'accord. Je m'excuse.
M. Morin (Pierre): L'an dernier, il y a eu un long débat
sur la question de la surmédication. Nous avons fait une étude,
la chambre a fait une étude en profondeur là-dessus.
Statistiquement, il a été démontré qu'il n'y en
avait pas; c'est le ministre Lalonde encore, à partir des chiffres de
son ministère, qui démontrait lui-même que cette
idée de surconsommation des produits et dans le cadre de
l'automédication, parce qu'il s'agit bien ici d'automédication,
n'existait pas. Là où il y avait eu des cas de morbidité
et de mortalité, c'étaient exclusivement, je crois, ou presque
exclusivement, dans 95% ou 96% des cas, des produits entièrement sous le
contrôle d'un professionnel. Ce sont là des chiffres qui en soi
sont éloquents et que nous avions soumis à l'Office des
professions l'an dernier. Vous parlez beaucoup essentiellement du
problème de l'automédication, du choix qu'a un consommateur... En
fait, ce n'est pas le vendeur qui fait le diagnostic, il faut bien s'en rendre
compte.
C'est le consommateur qui, en fait, identifie son bobo et qui a à
sa disposition une série de produits, dans ce cas-ci,
généralement, tous des produits naturels ce qui ne veut
pas dire que des produits chimiques ne peuvent pas faire la même chose
et qui sont choisis parmi cette gamme en fonction de ça. A venir
jusqu'à maintenant, et encore aujourd'hui, l'automédication est
peut-être une des formes les plus anciennes, mais aussi les plus modernes
de tenter de se soigner et de se maintenir en santé.
Je ne sais pas si ça répond, en général, aux
interrogations du député de Saguenay. Peut-être que M.
Gingras... Il m'avait indiqué tantôt avoir un commentaire à
faire sur un point particulier. Je lui cède le micro.
M. Gingras (Jacques): Premièrement, je vous demanderais
d'excuser un peu la manière dont je pourrais m'exprimer. C'est la
première fois que j'assiste à une commission parlementaire, et,
à part les visites que je rends à nos députés
provincial et fédéral, je n'en ai pas l'habitude. J'espère
que je ne blesserai personne par mes paroles.
M. Lessard: M. Gingras, en 1970, quand nous avons
été élus en tout cas, quant à moi
pour la première fois, nous étions comme vous.
M. Gingras: Je vous en remercie.
Vous avez posé plusieurs questions tout à l'heure. Je me
rappelle une question, entre autres, qui est très importante. Vous avez
mentionné que vous semblez un peu douter, ni plus ni moins, de
l'importance de l'automédication. Est-ce que c'est un peu ça
votre question?
M. Lessard: C'est un peu autour de ça. M. Gingras:
Oui.
M. Lessard: Je ne voudrais pas limiter la question
générale...
M. Gingras: Non.
M. Lessard: ... à quelques produits. Je pose la question
globalement.
M. Gingras: En général.
M. Lessard: Oui, en général.
M. Gingras (Jacques): Sans offenser personne, lorsqu'on n'a pas
besoin ou lorsqu'on n'a pas eu besoin d'un service quelconque ou d'un produit
quelconque, parfois il peut arriver qu'on soit sceptique envers ce service ou
ces produits. Dans les produits pharmaceutiques, il y a un fait: lorsque les
gouvernements décident une chose, qu'on le veuille ou qu'on ne le
veuille pas, il faut s'y plier. Il n'y a pas d'erreur là-dessus. Dans
les produits pharmaceutiques, nous sommes régis par la loi
fédérale, dans un sens. Il n'y a aucun produit pharmaceutique ou
parapharmaceutique vendu par représentant, actuellement, qui soit vendu
sans qu'une demande ait été faite à Ottawa et qu'un
numéro de permis ait été délivré. C'est le
ministère fédéral qui décide si on a le droit de
mettre ce produit sur le marché, oui ou non, et, lorsqu'il le refuse, il
n'y a rien à faire. Bon!
Maintenant, je passe à un autre sujet. Vous avez dit tout
à l'heure, je crois, si je me rappelle bien, à propos du prix que
c'était comme ci, comme ça.
Dans la revue Fortune, on dit que certains produits qui sont mis sur le
marché dépensent en publicité plus de 20% à 25%
dans certains cas. Dans nos cas, évidemment, la commission est
élevée, je l'admets, par rapport aux frais sur la route, mais
pour la plupart des compagnies qui sont ici, les frais de publicité sont
très minimes. Pour la plupart, et je ne devrais pas parler de mon cas
personnel. Nous avons moins de $300 de publicité par année pour
375 représentants.
La mise en marché sur référence, ou si vous aimez
mieux l'expression "porte-à-porte", même si ce n'est pas du
porte-à-porte que l'on fait, mais c'est cette... Ecoutez donc!
M. Lessard: Je ne sais pas comment vous appelez ça, du
porte-à-porte?
M. Gingras: Pardon?
M. Lessard: Je...
M. Gingras: Non, je ne veux pas commencer...
M. Lessard: Non...
M. Gingras: ... à discuter avec vous... Je donne une
explication du porte-à-porte. Pour nous, c'est une personne qui va d'une
porte à l'autre, comme ça, et la référence, c'est
lorsque des parents ou des amis ont utilisé un produit et disent: Un
tel, un tel ou un tel serait intéressé. C'est ce qu'on appelle
référence; et ce qu'on appelle porte-à-porte, c'est aller
d'une porte à l'autre.
Evidemment, c'est une manière de mise en marché. Au lieu
de payer de la publicité, il faut payer une commission. Moi, c'est la
manière dont je procède.
Au point de vue de la livraison de dix jours, il y a cependant une
chose. Si un client nous demande un analgésique ou, pour utiliser vos
propres mots, pour les brûlures d'estomac, c'est indiqué que c'est
pour les brûlures d'estomac sur la bouteille; c'est Ottawa qui a
accepté cette réclame. C'est vrai que nos représentants ne
sont pas des pharmaciens et ne sont pas non plus des médecins.
Seulement, la loi des produits brevetés, si on prend cette loi, ou les
autres produits, sont des produits qui peuvent être vendus par une autre
personne qu'un pharmacien et en dehors des pharmacies. Sans cela, si nous
n'obtenions pas ce permis, on n'aurait pas le droit de le vendre. Le
ministère fédéral accepte l'automédication.
Si le gouvernement fédéral ou provincial change ses lois,
on n'aura pas à discuter, on devra passer par là, mais c'est un
fait. Alors, je crois que...
M. Saint-Pierre (Roland): Excusez, si vous me le permettez, M. le
Président. Il me semble que cela prend le tour, ce matin, d'un
procès contre les produits que nous vendons. Il faudrait peut-être
voir...
M. Lessard: M. le Président, une question de
privilège pour bien situer le débat. Nous n'avons pas ici en
commission parlementaire à faire des procès d'intention; nous
avons à entendre des mémoires et je ne pense pas, en tout cas,
jusqu'ici, que nous ayons tenté d'aller à l'encontre d'un
produit. Ce sur quoi nous nous interrogeons, c'est que la discussion commence
à être vis-à-vis de tel produit ou tel autre.
La question qui est fondamentale et sur laquelle je m'interroge, c'est
celle au sujet des produits, que ce soit ceux de Avon ou d'autres produits de
beauté ou autre chose. J'ai même dit tout à l'heure que je
ne doutais pas de la qualité des produits; dans certains cas, je les
connais et je ne doute pas de leur qualité.
Mais je pense que je ne voudrais pas continuer parce qu'on pourrait
commencer à discuter de ce qu'est la vente, du porte-à-porte et
de la façon, par exemple, que tel représentant fait sa vente par
rapport à tel autre; non. Je pense qu'on s'en tient à des
questions générales et le débat ne se fait pas, comme tel,
pour ou contre certains produits; il se fait sur le principe même de la
nécessité ou de la non-nécessité de la vente
à domicile.
Or, quant à moi, M. le Président, je pense bien qu'on ne
se convaincra pas ou il serait difficile...
M. Saint-Pierre (Roland): Si vous permettez.
M. Lessard: ...d'avoir des réponses où on peut
être convaincu. Mais la question reste encore importante dans mon esprit,
en tout cas.
M. Saint-Pierre (Bernard): Si vous permettez, sur la question de
commission, de pourcentage, on vous a dit que, chez nous, ce n'est pas cela qui
nous donne le droit de vendre, ce n'est pas le montant de commission qui nous
donne le droit d'exploiter le client. C'est chose certaine. Si on parle de
commission, on travaille peut-être à 40%, le représentant
et les autres, mais c'est peut-être pour vous informer qu'en produits
pharmaceutiques, dans les pharmacies et dans beaucoup d'autres domaines, les
commissions vont jusqu'à 57%, 60%, 70%. Alors, je pense qu'à
domicile, nous ne prenons pas ce pourcentage.
Si on arrêtait les vendeurs itinérants qui ont des chiffres
d'affaires assez considérables, demain matin, dans la province de
Québec... Ce sont des produits qui existent sur le marché, dans
les pharmacies que les gens peuvent prendre sur les tablettes, en
général. Ce serait simplement permettre davantage aux
multinationales... Je n'ai rien contre les multinationales. C'est aux Canadiens
français d'essayer d'aller chercher leur part du marché; je pense
que c'est mon point de vue: Essayer d'aller chercher notre part du
marché comme Québécois.
Autrement, si vous arrêtez la vente à domicile ou, par
exemple, le petit gars qui commence avec une petite compagnie et n'a pas les
moyens de faire de la publicité et décide d'aller voir les petits
épiciers, le petit restaurant du coin, à la campagne, pour
essayer de se faire connaître et vendre son produit, pour
éventuellement avoir assez d'argent pour faire un peu de
publicité... Je pense que, tous les jours, vous avez des multinationales
qui vendent; par exemple, Rolaids où on annonce: trente fois son poids
d'acide. On vous le fait valoir et tout le monde en achète le
député, peut-être, est le premier à en acheter
mais vous l'achetez par la publicité. On se laisse dire par des
coups de millions par les multinationales à la radio et à la
télévision ou, par exemple, un petit gars rencontre quelqu'un et
dit: Tel produit est bon pour l'hyper-acidité, c'est inscrit sur la
bouteille. Ce sont des produits, au départ je ne veux pas
être trop long approuvés par des formules qui passent
devant des médecins, devant Food and Drug ou devant un autre service de
consommateurs; que ce soit un "spray", un parfum, aujourd'hui, vous savez comme
moi qu'il n'y a aucun produit qui passe sans avoir la bénédiction
de ces hautes compétences.
Moi, je vous laisse là-dessus, je pense que cela ne donnera rien
d'en faire un procès, je ne veux pas de procès. Je pense que nous
allons nous plier, tous tant que nous sommes ici, à votre loi et laisser
déterminer ce qu'on aura le droit de faire.
M. Lessard: D'accord, mais c'est parce qu'ici, à cette
commission parlementaire, il y a eu des mémoires qui ont
été présentés et certains de ces mémoires
sont allés jusqu'à recommander l'abolition complète de la
vente à domicile. En fait, c'est possible, dans la loi; c'est pour cela
que je vous pose la question, globalement, pas concernant tel produit ou tel
autre, mais globalement. M. le Président, quant à moi j'ai
terminé mes commentaires. Je pense, comme on le soulignait tout à
l'heure, qu'il y a des éléments positifs et je ne voudrais pas
que, suite à ces questions, on pense que j'en avais ou que j'en ai
contre certains produits.
Ce n'était pas du tout le sens de la discussion, qui était
beaucoup plus générale. Cependant, nous sommes ici pour
étudier une loi en vue de protéger le consommateur. Nous allons
jusqu'à par exemple contrôler la publicité pour les enfants
de 13 ans et moins. Il y a aussi, peut-être, une forme de
publicité qui devrait être contrôlée, que ce soit sur
les médicaments ou autre chose. Je remercie donc, M. le
Président, la Chambre de commerce de la province de Québec qui
est venue, au nom des différentes maisons qui sont indiquées
à l'annexe au mémoire, présenter ce mémoire. Je
pense, en particulier, qu'il comporte trois éléments positifs qui
sont assez importants et dont nous tiendrons compte certainement lorsque nous
aurons à étudier la loi article par article, à les
proposer ou à y faire des amendements.
M. Morin (Pierre): M. le Président, les propos du
député de Saguenay soulèvent toujours un peu des questions
auxquelles on voudrait répondre. Il vient de soulever un point sur la
question de la publicité; tantôt, c'étaient les
commerçants itinérants, là c'est la publicité. Pour
rester dans le domaine dont on discutait tantôt, il y a une étude
qui a été faite aux Etats-Unis par l'Association des produits
pharmaceutiques, précisément sur la publicité; or, vous
savez que, dans les pays Scandinaves, en Suède et au Danemark, toute
publicité sur les produits pharmaceutiques est interdite.
Ces deux pays ont pourtant le taux d'abus de drogues le plus
élevé. C'est toujours une question, on se demande toujours ce qui
précède l'autre, mais, avant de soulever des questions telles que
celle, par exemple, de bannir toute publicité, il faut voir souvent,
là où c'est déjà fait, quelles en sont les
conséquences. Enfin, c'était un commentaire.
M. Lessard: J'aimerais bien connaître vos sources. En tout
cas, je ne m'engage pas sur la Suède ce matin. Je ne sais pas s'il y a
un taux de consommation très fort des médicaments et des drogues,
mais on sait par exemple, avec la publicité qu'on nous fait à la
radio et ailleurs, que la Suède est l'un des pays où la
population est en meilleure santé, avec les exercices, etc. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Les membres de la commission
remercient la Chambre de commerce pour son mémoire ainsi que les
personnes qui représentent différentes compagnies qui sont venues
présenter leur mémoire, qui ont bien voulu répondre aux
questions. M. Létourneau a quelque chose à dire?
M. Létourneau: M. le Président, vous nous avez
aimablement permis de déposer le document, je vous indique simplement
que ce document que nous déposons concerne le premier mémoire,
qui faisait partie intégrante de celui-ci. Compte tenu de la
réception du mémoire, nous nous excusons du ton qu'il avait.
Le ministre avait relevé cinq points. Nous avons
étudié les cinq points qui avaient été
soulevés. Nous reconnaissons que nous avons erré sur un point.
Nous maintenons nos quatre autres points et nous explicitons l'argumentation
juridique qu'ils contenaient. Ce document est déposé
auprès du secrétaire de la commission pour être
distribué, M. le Président. Merci beaucoup.
M. Blais (Charles): M. le Président, merci beaucoup de
nous avoir entendus.
Le Président (M. Lafrance): Merci bien. La commission
ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 11 h 25)