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Etude du projet de loi no 67 Loi sur l'assurance
automobile
(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Boucher): La commission des
consommateurs, coopératives et institutions financières est
réunie pour poursuivre l'étude du projet de loi no 67, Loi sur
l'assurance automobile, et pour entendre les organismes convoqués pour
aujourd'hui.
Les membres de la commission sont pour aujourd'hui: MM.
Beauséjour (Iberville), Bisaillon (Sainte-Marie), Gagnon (Champlain),
Gosselin (Sherbrooke); M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplace M. Goulet
(Bellechasse); M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Giasson (Montmagny-L'Islet)
remplace M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); MM. Landry (Fabre),
Larivière (Pontiac), Lefebvre (Viau); M. Gravel (Limoilou) remplace M.
Marois (Laporte); M. Marquis (Matapédia), Mme Payette (Dorion), MM.
Raynauld (Outremont), Roy (Beauce-Sud); M. Shaw (Pointe-Claire) remplace M.
Russell (Brome-Missisquoi); M. Saint-Germain (Jacques-Cartier); M. Paquette
(Rosemont) remplace M. Vaillancourt (Jonquière).
Les organismes convoqués pour aujourd'hui sont dans l'ordre: M.
J.-A. Patry à titre personnel; le Groupe de protection de
l'environnement représenté par M. Guy Duplantie,
secrétaire; Renaud & Sénécal,
représentés par M. Marc Charbonneau; l'Association des
propriétaires d'autobus du Québec représentée par
M. Wilbrod Bhérer; l'Association provinciale des marchands d'automobiles
du Québec Ltée représentée par M. Denys Demers,
directeur général; M. Louis-Marie Dallaire à titre
personnel; Marcel Côté, Ajusteurs Joliette Limitée,
représenté par M. Marcel Côté et M. Serge Dauray,
à titre personnel.
M. J.-A. Patry ainsi que M. Serge Dauray se sont désistés.
Donc, le premier organisme serait le Groupe de protection de l'environnement,
représenté par M. Guy Duplantie, secrétaire.
M. Roy: Si vous le permettez, M. le Président, avant que
ne débute je m'excuse auprès de nos invités
la lecture des mémoires devant la commission, j'aimerais savoir combien
de mémoires sont actuellement déposés pour être
entendus devant la commission parlementaire.
Deuxièmement, est-il possible d'avoir la liste des
mémoires?
Le Président (M. Boucher): Mme le ministre.
Mme Payette: Les dernières informations que j'ai à
ce sujet je ne suis pas au secrétariat de la commission
sont qu'il y aurait 20 ou 22 mémoires déposés. Je n'ai
pas, pour l'instant, la liste complète non plus. J'imagine que le
secrétariat pourrait fournir cette information au député
de Beauce-Sud.
M. Roy: Est-ce qu'on pourrait fournir l'information aux membres
de la commission pour peut-être donner le temps de faire l'inventaire de
cela? On pourrait peut-être nous donner cette information lorsqu'on
reprendra nos travaux cet après-midi.
Le Président (M. Boucher): J'en prends note et demanderai
au secrétariat de déposer cette liste.
M. Roy: Deuxième question, M. le Président. La
semaine dernière a paru une nouvelle à la
télévision qui nous a montré un peu le travail
qu'effectuait présentement la Régie de l'assurance automobile. On
nous a fait part d'un certain nombre de personnes dont déjà les
services avaient été retenus, qui étaient
déjà à l'emploi de la régie; on nous a fait part
également que ce nombre pouvait être augmenté
éventuellement. J'aimerais savoir ceci, pour la bonne gouverne des
membres de la commission, parce que je pense que c'est important qu'on soit
informé du travail que fait la régie à l'heure actuelle,
étant donné que le mandat de la régie comme tel, la loi
67, n'a pas encore été voté.
J'aimerais savoir, dans un premier temps, quel est le mandat qu'aurait
reçu la Régie de l'assurance automobile à ce jour, quel
est le travail qu'elle effectue présentement et quelles sont les
hypothèses de travail sur lesquelles on se base. Le président de
la régie a déclaré à la télévision
qu'il travaillait selon certaines hypothèses de travail. Est-ce que la
commission pourrait être informée?
Mme Payette: M. le Président, je renvoie le
député de Beauce-Sud à la loi 49, qui a été
adoptée à la fin de la session qui s'est terminée au mois
d'août, qui a été sanctionnée le 26 août 1977.
Le mandat de la régie y est clairement explicité et la
régie remplit ce mandat exclusivement.
M. Roy: Autrement dit, la régie, actuellement, ne
travaillerait pas selon des hypothèses concernant l'éventuel
régime d'assurance automobile qui doit être voté ou qui
sera soumis devant l'Assemblée nationale.
Mme Payette: La régie doit absolument se préparer
à recevoir la loi 67; donc, effectivement, elle s'y prépare en
termes de calculs de tarification, elle négocie des ententes, bien
sûr, mais qui ne pourraient s'appliquer à moins que le projet de
loi 67 ne soit approuvé.
M. Roy: Merci, M. le Président. J'aimerais demander, de
plus, si la régie a négocié des ententes, puisqu'elle
avait pour mandat, en vertu de l'article 2 de la loi 49, de conclure des
ententes avec l'autorisation du gouvernement, bien entendu avec
la Commission des accidents du travail du Québec.
Est-ce que le gouvernement a effectivement donné son
autorisation? Si oui, est-ce que les ententes sont conclues? Si non, où
en sont rendus les pourparlers?
Mme Payette: M. le Président, cela me fera plaisir de
demander un rapport complet au président de la régie sur ce sujet
et cela me fera plaisir de le déposer pour l'information des
députés.
M. Roy: Merci. Dernière question, puisqu'on a de
très bonnes réponses ce matin, cela nous encourage à en
poser d'autres.
Mme Payette: Vous avez toujours des bonnes réponses, M. le
député.
M. Roy: C'est vrai. De la part du ministre des Consommateurs on a
toujours de bonnes réponses. Alors, cela m'encourage à en poser
une autre. Est-ce qu'on pourrait connaître, officiellement, les noms des
cinq membres de la régie, ainsi que leur curriculum vitae et la date de
leur nomination? J'aimerais savoir s'il y a quelqu'un qui représente
effectivement les consommateurs au sein de la régie, et quelle est cette
personne.
Mme Payette: Je vous déposerai la liste des membres de la
régie dûment constituée actuellement. Je ne pense pas qu'il
y ait, à ma connaissance, quelqu'un chargé de défendre
particulièrement les droits des consommateurs au sein de ce conseil
d'administration. C'est cependant prévu dans une autre étape, au
niveau de la Corporation des assureurs dont il est question dans le projet de
loi 67.
M. Roy: Ce sera la Corporation des assureurs qui devra assumer
cette responsabilité.
Mme Payette: Dans laquelle il pourrait y avoir des
représentants des consommateurs.
M. Roy: Mais il n'y a personne de prévu actuellement au
niveau de la régie pour représenter les consommateurs comme
tels.
Mme Payette: Si j'ose dire, M. le député, je pense
que je suis là pour cela. Mais je ne pense pas qu'on ait
spécifié, dans le mandat, qu'il y ait quelqu'un qui
défende les droits des consommateurs. Il n'y a aucune raison de penser
qu'ils ne soient pas défendus par ceux qui sont présents.
M. Roy: Je comprends, mais j'en fais la remarque; je me souviens
très bien des propos qu'avait tenu Mme le ministre elle-même
à ce moment-là, disant que les consommateurs seraient
protégés et que les consommateurs auraient droit au chapitre,
c'est-à-dire qu'il y aurait quelqu'un nommé,
désigné spécifiquement pour protéger le
consommateur québécois au sein de cette régie ou au sein
des mécanismes supérieurs de la régie, et non pas par voie
de conséquence ou par voie indirecte, en venir avec l'association des
assureurs.
Mme Payette: On peut cependant penser que le rôle
joué dans cette régie par le surintendant des assurances, par le
sous-ministre en titre du ministère des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières, est exactement le
rôle qui est décrit par le député de Beauce-Sud.
M. Roy: Alors, on pourra avoir toutes ces réponses
à la reprise de nos travaux cet après-midi?
Mme Payette: Le plus rapidement possible au cours de la
journée.
M. Roy: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Une question, M. le Président. Croyez-vous que
nous allons continuer, toute cette semaine, tel que prévu, afin
d'entendre ces mémoires qui sont déjà
déposés?
Mme Payette: M. le Président, ce qui est prévu,
c'est que nous siégerons aussi longtemps que nécessaire pour
entendre les mémoires qui sont déposés. Si nous nous fions
au temps que nous avons pu prendre dans une journée qui a
déjà été une journée de commission
parlementaire il y a une dizaine de jours, nous pensons en avoir pour la
semaine au complet et quelques jours la semaine prochaine. On ne veut pas fixer
de limite de temps, pour l'instant tout au moins.
M. Shaw: D'accord.
Dépôt de document sur le mode de
financement
Mme Payette: M. le Président, s'il n'y a pas d'autres
questions, je voudrais déposer un document de travail qui serait
probablement extrêmement utile pour l'information des
députés de cette commission. C'est un document sur le mode de
financement. C'est le document de travail du 26 mai 1977 sur lequel repose le
choix du financement du régime. Si vous me le permettez, j'en ferai le
dépôt immédiatement.
Le Président (M. Boucher): D'accord.
M. Saint-Germain: Une dernière question, si vous me le
permettez. "Toute la semaine", est-ce que cela veut dire le vendredi
inclus?
Mme Payette: Cela veut dire le vendredi, M. le
Président.
M. Saint-Germain: Très bien; merci.
M. Roy: J'aurais une toute dernière question avec votre
permission.
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: Avec quel budget fonctionne la régie actuellement?
Effectivement, lors de l'étude des crédits du ministère
des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières,
comme dans l'étude des crédits des différents
ministères, la régie n'étant pas formée, il n'y
avait donc aucune prévision budgétaire. Est-ce qu'un budget
spécial lui a été affecté? A ce moment-ci, quel est
ce budget comme tel? Normalement, cela aurait dû faire l'objet d'un
budget supplémentaire à l'Assemblée nationale. Alors, il
doit y avoir eu...
Mme Payette: M. le Président, il suffit de se reporter aux
articles 21 et 22 de la loi 49. L'article 21 se lit comme suit: "Avec
l'autorisation préalable du gouvernement, la régie peut
contracter des emprunts par billets, obligations ou autres titres au taux
d'intérêt et aux autres conditions que détermine le
gouvernement."
L'article 22 se lit comme suit: "Le gouvernement peut, aux conditions
qu'il détermine: 1)garantir le paiement en capital et
intérêts de tout emprunt de la régie; 2) garantir
l'exécution de toute autre obligation de cette dernière.
3)autoriser le ministre des Finances à avancer à la régie
tout montant jugé nécessaire pour l'exécution de la
présente loi au taux d'intérêt, pour le laps de temps et
aux autres conditions qu'il détermine. Les sommes que le gouvernement
peut être appelé à payer en vertu de ces garanties ou
à avancer à la régie sont prises à même le
fonds consolidé du revenu."
M. Roy: II y a deux façons. Je comprends. Je connaissais
les dispositions qu'il y a dans la loi qui permettraient à la
régie d'effectuer des emprunts, mais il y aura aussi une autre
façon de procéder.
Comme on l'a vu à maintes et maintes occasions à
l'Assemblée nationale, lorsqu'il s'agit d'un nouvel organisme, le
gouvernement prévoit, à même le budget, un montant d'argent
qui lui est alloué, un budget de départ.
C'est un peu le but de ma question, à savoir s'il y avait un
budget de départ. S'il n'y a pas de budget de départ,
évidemment, on se réfère exclusivement aux dispositions de
la loi et on procède au niveau d'emprunts. Effectivement, y a-t-il eu
des emprunts de faits à ce moment-ci et quel est le volume de ces
emprunts?
Mme Payette: C'est exact, M. le Président. Pour respecter
la loi 49 il y a eu un emprunt de fait pour permettre le fonctionnement de la
régie. En même temps que je déposerai les autres
renseignements, je serai en mesure de déposer également les
montants dont il s'agit.
M. Roy: Merci.
Le Président (M. Boucher): Ceci étant dit, la
commission est-elle disposée à entendre le Groupe de protection
de l'environnement?
M. Roy: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Messieurs, si vous voulez bien
prendre place.
Groupe de protection de l'environnement
M. Brosseau (Réjean): Je tiens tout d'abord à vous
remercier, Mme le ministre, MM. les députés, de nous
écouter pendant quelques minutes. Mon nom est Réjean Brosseau, et
M. Waguy Geadah est avec moi. Nous représentons le Groupe de protection
de l'environnement. Quant au mémoire que nous voulons déposer, on
se demande si on est un petit peu en retard peut-être parce que notre
mémoire traite particulièrement des questions de financement du
programme.
Comme de raison, on n'avait pas le document qui vient d'être
déposé mais, enfin, on va donner notre opinion.
Mme Payette: Si vous permettez, juste une mise au point.
M. Brosseau: Oui.
Mme Payette: II ne faudrait pas qu'on pense que c'est une
exception qui a été faite pour le groupe qui est devant nous;
nous avons été extrêmement larges quant à la date de
réception des mémoires pour que plus de groupes et de citoyens
puissent s'exprimer. Nous avons tenu compte du fait que la loi 49 avait
été adoptée au mois d'août, que plusieurs organismes
se trouvaient, à ce moment-là, en vacances, et nous avons
laissé beaucoup de latitude quant à la date de réception
des mémoires.
M. Brosseau: Le Groupe de protection de l'environnement, c'est un
mouvement anti-pollution, comme son nom le dit. On oeuvre principalement dans
la région de Montréal-Est, à Pointe-aux-Trembles, à
Montréal. C'est probablement une des parties du Québec les plus
polluées. Juste pour vous donner un exemple, on reçoit tous les
jours 200 tonnes de SO2 sur la tête, à peu près
25 tonnes de poussière et autres.
On accueille chez nous le plus gros complexe pétrolier du Canada,
des cimenteries, une des plus grosses usines d'affinage de cuivre. Les
problèmes de pollution nous ont motivés à fonder un groupe
de lutte pour la protection de l'environnement et contre la pollution de l'eau
et de l'air.
Dans le programme d'assurance automobile, on voit une possibilité
d'améliorer l'environnement. Il faut dire, au début, qu'on est
tout à fait d'accord avec le programme d'assurance automobile.
On aurait aimé mieux qu'il aille plus loin et même,
à la limite, on serait d'accord pour que toutes les assurances soient
étatisées. Le programme d'assurance automobile, en fin de compte,
pour le simple citoyen va être un bon système d'assurance si les
méthodes de financement sont valables et si le paiement des
indemnités est valable. Le reste du débat pour le citoyen normal,
et nous sommes
des citoyens bien ordinaires, à savoir si cela doit être
étatique ou pas, cela nous touche peu. Si le système nous
plaît, si cela fait notre affaire, je pense que ce sera un bon
système.
On va s'attacher, dans notre cas particulièrement, à la
méthode de financement parce qu'on croit que dans la méthode de
financement on peut favoriser des politiques gouvernementales dans d'autres
domaines, comme dans le domaine de la protection de l'environnement. Nous
prétendons que le mode de financement doit respecter au moins dix
critères parmi lesquels il y en a qui sont facilement acceptables.
Le premier critère pour le mode de financement, c'est que les
bénéficiaires du programme doivent être les seuls à
en payer les frais et chacun de ceux-ci doit être cotisant.
Deuxième critère, le système d'évaluation des
primes ne doit pas être discriminatoire envers quelque groupe de la
société que ce soit. Troisièmement, le montant des primes
doit être proportionnel à l'utilisation qui est faite du
véhicule. Quatrièmement, la perception des primes doit être
facile et peu coûteuse. Cinquièmement, le mode de financement du
programme doit favoriser les politiques gouvernementales en d'autres domaines:
sécurité routière, protection de l'environnement,
transport en commun, protection du consommateur. Sixièmement, le mode de
paiement des primes doit être pensé en fonction des moins riches
et permettre l'étalement des primes. Septièmement, il doit
être possible de réaliser des économies par une diminution
de l'utilisation du véhicule ou par le choix de celui-ci.
Huitièmement, aucun fardeau économique injuste ne doit être
imposé pour les véhicules gagne-pain ou pour les transports en
commun. Neuvièmement, l'économie locale doit être
favorisée autant que cela puisse se faire et il ne doit pas être
tenu compte de l'effet du programme sur l'industrie des pays étrangers.
Dans le cas de l'automobile, cela s'applique parce que l'automobile est pas mal
une industrie étrangère. Dixièmement, le programme
d'assurance doit favoriser une prise de conscience de la population
vis-à-vis des problèmes de gaspillage, de surconsommation, de
mauvaise gestion budgétaire, etc.
C'est donc dire qu'en fin de compte, a priori, on serait porté
à croire que certains des critères, certains des dix points qu'on
considère, ne devraient pas être touchés par le programme
d'assurance automobile puisqu'il s'agit d'assurance. Par contre, nous croyons
qu'il y a deux façons de voir l'assurance: le côté de
l'assureur et le côté de l'assuré. Jusqu'à ce jour,
on a beaucoup discuté du côté de l'assureur. Il serait
peut-être bon de penser un peu à l'assuré.
Il s'agit, dans les méthodes de financement, d'avoir un petit peu
de justice et de penser aux gens qui sont peut-être un peu moins
favorisés, aux gens qui utilisent peut-être un peu moins
l'automobile et aux gens aussi qui veulent faire des économies, soit en
choisissant une automobile plus petite ou en l'utilisant moins.
La méthode de financement qu'on propose, en fin de compte, vise
à réduire l'utilisation de l'automobile. Idéalement, pour
réduire la consommation d'énergie et pour réduire les
embouteillages dans les centre-villes, les pollutions, etc., il faudrait qu'il
y ait de moins en moins d'automobiles qui soient utilisées inutilement.
C'est une solution idéale, par contre, notre société va
dans le sens contraire. Par le biais du financement de l'assurance automobile,
on peut inclure des incitations pour les gens qui désirent moins
utiliser leur automobile.
Nous, à Montréal-Est, Pointe-aux-Trembles, cela nous
concerne un peu parce que, chaque fois qu'il y a une augmentation de 1% de la
consommation d'essence, cela représente deux tonnes de SO2
qui nous retombent sur la tête et qu'on doit respirer. Le SO2
n'est pas particulièrement bon pour les poumons. Les études qu'a
faites l'Université McGill dans notre région montrent que les
enfants ont des problèmes pulmonaires. Le taux de problèmes
pulmonaires chez les enfants qui habitent à Pointe-aux-Trembles est plus
élevé que dans les villes normales. On pourrait aussi dire, juste
pour nous situer un peu, au niveau du SO2, qui est notre principal
problème, que la norme d'air ambiant est dépassée de trois
fois, multipliée par trois, 300%, à Pointe-aux-Trembles, par
rapport à ce qu'elle devrait être.
C'est pour cela qu'on est intéressé à ce qu'il se
produise de moins en moins d'essence, que les raffineries produisent de moins
en moins pour assurer une meilleure qualité de notre air. On
connaît aussi tous les problèmes de pollution que l'automobile
engendre. Je pense que c'est inutile d'aller trop loin là-dedans.
Ce qu'on propose pour défavoriser l'utilisation de l'automobile
et non pas défavoriser l'automobiliste, c'est un système en trois
points; ce n'est rien d'original de notre part, cela a déjà
été proposé ou dit dans les journaux; on propose, comme
système de financement, une taxe supplémentaire sur l'essence qui
pourrait être d'environ $0.10, qui devrait être d'environ $0.09,
$0.10, $0.11 ou $0.12, on ne sait trop, mais environ $0.10, une taxe sur le
poids de l'automobile, selon une échelle exponentielle croissante, qui
serait prélevée lors du paiement des plaques; comme de raison,
cela serait en sus des sommes déjà perçues par le
gouvernement pour le ministère des Transports; aussi une taxe annuelle
sur la valeur de l'auto, la valeur à l'achat, qui serait
décroissante, selon l'âge de l'automobile, toujours en sus de la
taxe de vente actuelle, ceci afin de favoriser les vieilles automobiles par
rapport aux neuves. Je peux peut-être expliciter, sans trop prendre de
temps, chacune de ces propositions.
La taxe sur l'essence, c'est probablement ce qui est le mieux connu.
Tout ce qu'on peut dire là-dessus, c'est que pour un automobiliste
moyen, $0.10 le gallon, cela représenterait environ $70 par
année. Ce serait le principal moyen de financer le programme si on part
de l'hypothèse qu'il faut aller chercher $135 ou $140, on ne sait pas
trop; or, la perception des $70 serait le moyen principal parmi les trois.
Comme de raison, quelqu'un qui fait peu de millage paie moins, la
méthode de taxation est facile, les primes sont étalées au
cours de l'année; de toute façon, on est habitué à
avoir
des augmentations et, pour une fois, cette augmentation serait de notre
côté. Toutes les augmentations qu'on a eues, on les comprend assez
mal. On nous donne toujours une augmentation en nous disant que c'est pour
conserver l'énergie, ainsi de suite, comme si on était coupable,
en fin de compte. Dans les augmentations qu'on devra subir au cours des
prochaines années, il ne serait pas mauvais que quelques-unes nous
reviennent sous forme de programmes sociaux au lieu d'aller dans les poches des
compagnies pétrolières sous forme de profits ou d'aller à
d'autres gouvernements.
On comprend assez mal pourquoi cette taxe sur l'essence a
été rejetée. On a parlé des problèmes des
régions frontalières; chez nous à Montréal,
à Pointe-aux-Trembles, le gallon d'essence, coûte $0.05 de moins
qu'ailleurs à Montréal. Pourtant, il n'y a pas d'affluence, on ne
se bat pas pour aller aux stations-service. On ne croit pas que le
problème des régions frontalières soit un problème
important. Cela pourrait l'être au début, mais pour $0.10 le
gallon, ce n'est pas suffisant pour traverser la frontière. On croit
surtout que la majorité des gens sont honnêtes et n'essaient pas
de frauder. D'ailleurs, il existe toutes sortes de systèmes de taxation
différents entre la province et d'autres pays, et on ne doit pas
établir un système en fonction des pays étrangers, mais en
fonction de notre propre population.
Les effets sur l'environnement, on en a parlé tantôt, ce
sont: une meilleure utilisation de l'automobile, favoriser les petites voitures
par rapport aux grosses, donner une incitation pécuniaire aux gens qui
veulent préserver l'énergie.
La taxe sur le poids de l'automobile, encore une fois, découle
d'une même préoccupation. Nous proposons un système
d'étalement exponentiel que vous retrouverez au tableau I, à la
fin. Dans te texte, il est dit "page suivante", mais la secrétaire l'a
mis à la fin. En fin de compte, c'est un système assez simple
où pour les premiers 2000 livres cela coûterait $0.01; de 2000
à 2500, $0.02 la livre; de 2500 à 3000, $0.03 la livre, ainsi de
suite. Dans le tableau, il y a une petite erreur; à la quatrième
colonne, on devrait lire "montant payé actuellement", c'est le montant
qui revient au ministère de la voirie actuellement. Le montant total qui
serait payé se retrouve dans la troisième colonne, et, dans la
dernière colonne, on a le montant qui irait à l'assurance
automobile. Par exemple, un type qui aurait une voiture de 2000 livres, une
mini, cela ne lui coûterait rien au point de vue de l'assurance. Par
contre, quelqu'un qui aurait une voiture de 5500 livres, cela lui
coûterait $100, ce qui nous paraît tout à fait normal.
Quelqu'un qui a les moyens de se payer une voiture de 5500 livres a les moyens
de payer $100 d'assurance.
Là-dessus, la seule chose qu'on peut ajouter est que nous croyons
que les transports en commun devraient être soustraits de tout paiement
de prime d'assurance automobile.
On ne croit pas qu'il devrait être nécessaire que les
transports en commun s'assurent. Les automobilistes, individuellement,
devraient assurer les transports en commun et puis, comme de raison, pour les
gens qui utilisent leur automobile pour gagner leur vie, il devrait y avoir un
statut spécial. Cela apparaît relativement facile à faire,
le gouvernement fédéral le fait dans ses déclarations
d'impôt. On peut déduire l'essence, on peut déduire le
montant surpayé pour l'essence, on peut le déduire de
l'impôt, etc.
Si on passe à la troisième proposition, parce que les
trois vont ensemble, on croit que, pour avoir un système qui serait
assez juste, cela ne doit pas être un système qui est simpliste,
mais qui doit tenir compte de plusieurs facteurs. La troisième taxe
serait également payée au moment du renouvellement des plaques;
la première est payée, la taxe sur l'essence, comme de raison,
est payée à la station de service; la taxe sur le poids de
l'automobile est payée avec les plaques, serait payée avec les
plaques, et la taxe annuelle sur la valeur de l'auto serait également
payée avec les plaques.
Alors, la taxe annuelle sur la valeur de l'auto... Le truc
là-dedans, c'est d'ajouter un pourcentage de taxes; d'abord, la
première année, à la taxe sur la vente et, la
deuxième année, au prix des plaques d'auto; ainsi, pour une
voiture neuve, il faudrait payer une taxe de 3%; la deuxième
année, une voiture de deux ans, une taxe de 2%; 2% sur la valeur de
l'achat. Autrement dit, si on achète, une voiture, on la paye $5000, sa
valeur reste à $5000, sa valeur imposable; alors, 2% s'appliquent sur
les $5000. Troisième année, 1%; 4e année, 1/2%, et,
après quatre ans, il n'y a plus de taxe. Autrement dit, il y a une
incitation à conserver son auto puisque la taxe n'existe plus à
ce moment-là.
Alors, en fin de compte, cela favorise la conservation des
matériaux, de l'automobile aussi; cela diminue le gaspillage.
Peut-être qu'on verrait moins de dépotoirs d'automobiles à
travers la province. Il y aurait peut-être un meilleur marché pour
les autos un peu plus vieilles qui deviendraient peut-être populaires
à ce moment-là. On pense qu'au Québec on se paye
peut-être des automobiles un peu trop souvent ou on achète des
automobiles neuves à un taux peut-être trop
élevé.
M. Geadah (Waguy): Au point de vue économique, je pense
que cette taxe aurait un effet quand même assez favorable.
Economiquement, ce moyen de taxation aurait un effet favorable parce qu'il
aurait pour effet de diminuer les montants d'argent qui sont
dépensés annuellement dans les automobiles neuves et dont la plus
grande partie s'en va à l'extérieur du Québec.
On a fait un petit calcul approximatif de ce qui se passe lorsqu'on
achète une automobile neuve de $5000. On a vu qu'à peu
près 30% de ce montant restent au Québec ou sont
dépensés au Québec, tandis que 70% s'en vont à
l'extérieur, parce qu'il ne faut pas oublier qu'au point de vue de
l'industrie automobile, le Québec importe beaucoup plus d'automobiles
qu'il n'en construit, tandis que, dans le montant équivalent
dépensé pour entretenir une automobile usagée, il n'y a
que 20% de ce montant qui s'en iraient à l'extérieur du
Québec,
en pièces qu'on achèterait de l'extérieur, tandis
que 80% sont dépensés au Québec même en
main-d'oeuvre, en pièces qui sont fabriquées localement.
Et, si on essaie de diminuer simplement de 10% le pourcentage
d'automobiles neuves achetées annuellement, cela représente,
d'après mon calcul, près de $100 millions en moins qui sortent du
Québec annuellement à ce chapitre. Evidemment, cela ne veut pas
dire que tout cet argent va rester au Québec. Il est évident que
les gens qui ne dépensent pas cet argent dans les automobiles vont le
dépenser dans d'autres biens de consommation, mais, comme je le disais
tantôt, le domaine de l'automobile, c'est celui où le
Québec est le plus handicapé par rapport à sa production
locale à comparer avec ce qu'il importe et puis, peut-être qu'une
partie de ce montant va aller en épargne, ce qui, non plus, n'est pas
mauvais pour l'économie, parce que cela fait plus d'argent disponible
pour les prêts, pour l'investissement, aini de suite.
M. Brosseau: Pour résumer, en fin de compte, notre
proposition favorise la petite automobile, l'automobile qui n'est pas
chère, l'automobile qui dure longtemps. Surtout pour des questions de
conservation d'énergie. Nous savons que si toutes les automobiles
étaient à quatre cylindres, nous pourrions économiser
à peu près 20% de notre essence. Par contre, tous les programmes
autres, comme l'isolation des maisons, la réduction des vitesses et
ainsi de suite, permettent d'espérer atteindre à peine 5% de
conservation de l'énergie, de diminution de consommation de
l'énergie. C'est pour cette raison que l'on croit que, par tous les
moyens possibles, il doit y avoir une certaine logique dans les actions
gouvernementales et on doit aller vers la préservation de
l'énergie, surtout quand il s'agit d'une énergie qui n'est pas
d'ici. C'est à peu près tout. S'il y a des questions, nous
pourrions y répondre.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Brosseau.
Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, je sens d'abord le besoin de
remercier ce groupe d'être venu présenter son mémoire
à la commission parlementaire et je voudrais l'assurer que les
préoccupations dont il a fait part ce matin sont également les
miennes. Il m'est arrivé à plusieurs reprises de dire que, comme
gouvernement, je ne souhaitais pas encourager la surmultiplication des
voitures, surtout dans des régions qui sont déjà
surchargées et que nous avions, comme gouvernement, l'intention de venir
en aide au transport en commun, plutôt que de concrétiser la
voiture comme un bien essentiel. Il est évident, je pense, que vous avez
fait beaucoup de travail sur ce document. Il y a des choses qui sont
intéressantes comme suggestions.
Là où vous insistez cependant pour une taxe sur l'essence,
je dois vous dire que nous avons étudié cette question en
profondeur et qu'il nous a fallu beaucoup de temps pour accepter d'y renoncer,
en ce qui nous concerne. Je pense que les raisons que je peux vous donner ce
matin sont les mêmes que celles qui ont été avancées
au moment où nous avons dit que nous renoncions à ce mode de
financement. Il y a tout de suite une difficulté, par exemple, si on
comprend bien que l'essence est un des carburants qui est utilisé dans
d'autres domaines que l'automobile, par exemple ne serait-ce que pour les
moteurs de bateaux. Il y a différentes utilisations de l'essence qui
compliquent le financement de l'assurance automobile par ce moyen. Il y a aussi
d'autres raisons. Vous avez dit tout à l'heure que vous croyez que tout
le monde était honnête. Je voudrais bien pouvoir faire le
même acte de foi; j'aimerais être sûre que les
Québécois, conscients du devoir social qu'ils ont de participer
au régime de l'assurance automobile, étant les principaux
concernés, n'iraient pas chercher leur essence outre-frontière,
en Ontario ou aux Etats-Unis. Sauf que les recherches que nous avons pu faire
en ce sens nous démontrent que la tentation est grande, que la nature
humaine est faible dans ces moments-là et qu'il se pourrait bien qu'une
grande partie de la population frontalière tente d'échapper
à cette taxe qui permet le financement. Il y a aussi un autre risque.
Vous mentionnez, à un certain moment, la situation du transport en
commun dans des régions comme celle que vous représentez. Je
comprends très bien que si on pense à Montréal, on pense
immédiatement qu'il faut encourager le transport en commun, mais
j'aimerais vous demander c'est moi qui vais vous poser la question
ce qui se passe pour d'autres régions que j'ai été
appelée à visiter et où j'ai constaté le
problème où l'automobile devient presque un bien essentiel.
C'est le cas sur la Côte-Nord, dans le Bas-du-Fleuve, dans des
régions qui sont plus éloignées où le transport en
commun est moins accessible, moins développé. En plus, cette
population est déjà surtaxée sur le prix de l'essence,
puisque l'essence y est vendue plus cher que dans d'autres régions du
Québec.
On est obligé de tenir compte de toutes ces circonstances. C'est
ce qui nous a amenés à renoncer à la taxe sur l'essence.
Vous dites, en plus, qu'il n'y a pas de frais à prélever une taxe
sur l'essence. Les études qu'on a fait faire dans ce sens
démontrent le contraire. Il y a des frais pour percevoir une taxe. Il
faudrait que la taxe soit assez élevée pour qu'elle soit
finalement rentable pour le financement de la réforme.
Dans un premier temps, je vais arrêter mes commentaires ici pour
voir ce que les autres membres de la commission ont à dire sur le sujet.
Il y a un certain nombre d'éléments. La proposition que vous
faites d'une taxe au moment de l'achat de la voiture est un des
éléments que je retiens. Je vais demander qu'on fasse une
étude sur ce sujet, qui n'a peut-être pas été faite
en profondeur. Je vous remercie de cette suggestion pour l'instant.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: M. le Président, je tiens à
remercier ce groupe qui nous a remis un mémoire sérieux. On
s'attache, pratiquement exclusivement, à la façon de financer le
système. On nous a bien dit qu'on se limitait à ce point de vue
parce qu'on pouvait l'analyser, pour des raisons personnelles, avec plus de
facilité. C'est tout de même aussi une facette importante du
problème.
On a mentionné qu'on était tout à fait
indifférent à l'étatisation, mais que, tout de même,
on n'avait pas étudié à fond ce principe de
l'étatisation. Je vous comprends très bien. C'est assez complexe.
Il reste que si, par le moyen de l'étatisation, on augmente les
coûts des assurances, c'est toujours le monde ordinaire, comme vous le
dites, qui en paiera les frais. Je ne veux pas dire que vous auriez dû
aller au fond des choses relativement à l'étatisation.
C'était bien libre à vous et d'autant plus qu'il est toujours
plus positif de parler des choses qu'on connaît que de celles qu'on ne
connaît pas. Il y a là tout de même un principe de base,
à mon avis, excessivement important et qui s'avérera un des
éléments faibles de cette loi. C'est un élément qui
rendra, très probablement, le système inhumain et qui en
augmentera les coûts, à mon avis.
Pour ce qui regarde la façon de financer, ce que vous soumettez,
comme je le disais, est très positif et nous oblige à analyser le
système de financement. Vous dites, dans votre second critère,
que "le système d'évaluation des primes ne doit être
discriminatoire envers quelque groupe de la société que ce soit."
Qu'entendez-vous exactement par là? Croyez-vous que le système
actuel est discriminatoire envers quelque groupe que ce soit?
M. Brosseau: Effectivement, on pense que c'est peut-être
une raison pour laquelle on dit que nous sommes un peu d'accord avec
l'étatisation. Remarquez bien que je vous donne tout à fait
raison, on n'a pas fait d'étude approfondie sauf sur nos cas personnels,
chacun des petits accidents que nous avons eus. On s'est rendu compte, à
partir de cela, que quand on dit qu'il y a un côté humain à
l'assurance, quant à mot, en tout cas, dans mes accidents, je ne l'ai
pas vu.
Dans le domaine général de l'assurance, j'ai l'impression
qu'il y a un groupe de gens qui m'examinent, qui ont mon profil financier et
qui m'étudient pour essayer de me soutirer le plus d'argent possible,
mais tout cela est très personnel.
Au niveau de la discrimination, ce qu'on veut dire, c'est qu'on ne croit
pas, étant donné qu'on accepte le "no fault", qu'on doive
rechercher la responsabilité. Les gens qui ont des accidents
d'automobile sont avant tout des victimes, on ne doit pas rechercher et dire
que tel groupe de personnes est plus susceptible... que ce soient les jeunes,
les femmes ou les vieillards, on pourrait en ajouter, les gens de couleur. Il
paraît même que les Esquimaux conduisent moins bien que les blancs.
En fin de compte, cela nous apparaît un peu inhumain. Si on accepte que
les gens ont le droit de conduire une automobile, une automobile c'est
dangereux, il faut accepter qu'il y ait danger d'accident, on ne doit pas
essayer de cataloguer. Il nous apparaît que c'est une question de justice
sociale pour nous de ne pas essayer de cataloguer après cela dans des
groupes de responsabilité surtout dans un programme étatique
où déjà le "no fault" est admis, on ne doit pas le
réintroduire par le biais du financement par la suite, non plus.
M. Geadah: Cela n'empêche pas qu'il y a toujours moyen de
pénaliser les gens qui conduisent mal. C'est le rôle des
policiers, par les points de démérite, de retirer les permis de
conduire à ceux qui conduisent saouls, ou des choses comme cela. Tout
simplement, on ne peut pas appliquer cela à un groupe et dire que les
gens qui sont les plus susceptibles de conduire en état
d'ébriété sont des hommes entre 40 et 60 ans,
c'est-à-dire que cette catégorie doit payer plus cher; mais,
quant à ceux qui conduisent en état
d'ébriété, il doit y avoir des clauses prévues pour
empêcher que cela se reproduise.
M. Saint-Germain: Si je vous posais cette question, c'est que,
enfin, le coût de ce système serait défrayé, comme
vous le dites bien, par les gens ordinaires. Ce ne sont pas les riches qui vont
défrayer le coût du système. Si vous avez une classe de
gens qui sont plus aptes, pour des raisons de groupe, à avoir plus
d'accidents que d'autres, il est certain que si on diminue la prime de ceux-ci,
il faudrait nécessairement augmenter la prime des autres. Tout se paie,
il s'agit de savoir qui paiera. Si vous avez des jeunes on a tous
été jeunes on sait très bien que lorsqu'on est
jeune on croit qu'on a de bons réflexes, on a confiance en soi, on a
confiance en son habileté, on crâne bien souvent, enfin, ce n'est
pas nécessairement un défaut de la jeunesse, mais c'est comme
cela, c'est ce qui a amené et les assureurs, actuellement, en
tiennent compte un surplus d'accidents surtout pour les jeunes hommes.
Si on diminue leurs primes relativement aux autres, il est, à mon avis,
évident que ce seront les autres travailleurs, les gens plus
âgés, mariés, qui ont des enfants, les cultivateurs et tous
ceux-là qui devront payer nécessairement la
différence.
Vous dites que, troisièmement, en taxant l'essence, le montant
des primes sera proportionnel à l'utilisation qui est faite du
véhicule.
Il y a certainement là, en taxant l'essence, un
élément à mon avis, qui pourrait, si vous voulez, rendre
justice à ceux qui se servent de leur automobile momentanément ou
pendant une certaine période de l'année et qui la remisent pour
l'hiver, par exemple. Une fois remisée, il n'y a pas de consommation
d'essence, il n'y a pas de prime et c'est une façon juste de payer les
coûts.
Vous dites, sixièmement, que le mode de paiement des primes doit
être pensé en fonction des moins riches en permettant
l'étalement des
contributions. Je vous ferai remarquer là-dessus que ce
système est payé par tout le monde; du moins, de la façon
qu'on le laisse entendre, la prime sera pratiquement, à quelques dollars
près, uniforme pour tout le monde. Mais il reste, par exemple, que celui
qui gagne $18 000 par année représente une augmentation de risque
vis-à-vis de la responsabilité de l'office, plus que celui, par
exemple, qui en gagne $8000. Il en reste que celui qui gagne $8000 paiera,
comme je le disais, à quelques dollars près, approximativement la
même prime que celui qui sera assuré pour $18 000.
D'un autre côté, les gens qui ont des revenus de $12 000
à $18 000 sont très pesamment taxés actuellement.
Tellement taxés qu'on peut faire perdre aux gens certaines motivations
au travail, ce qui est loin d'être, pour la société, un
élément positif au développement économique.
Huitièmement, vous dites: Aucun fardeau économique injuste. Je ne
comprends pas quel serait pour vous un fardeau économique injuste
imposé pour les véhicules gagne-pain.
M. Brosseau: Les taxis et les chauffeurs de taxi, les voyageurs
de commerce, quelqu'un qui utilise son automobile pour gagner sa vie. Dans
notre proposition, avec une taxe sur l'essence, un type qui fait 50 000 milles
par année, disons un voyageur de commerce, serait taxé beaucoup
plus qu'un autre, et peut-être d'une façon injuste, dans ce cas.
Pour ces gens comme pour les transports en commun aussi, s'ils étaient
taxés sur l'essence ou s'ils sont taxés de toute autre
façon, on croit que c'est injuste dans le cas des transports en commun.
Mais dans le cas des voitures gagne-pain, qu'on appelle, s'il y avait une taxe
sur l'essence ou même sur la valeur à l'achat on pense aux
camions qui peuvent valoir $30 000 ou quelque chose comme cela cette
taxe sur la valeur à l'achat serait un petit peu injuste pour des
questions d'assurance.
Dans ces cas, on croit qu'il doit y avoir un traitement spécial
pour éviter que ces gens aient à payer des montants
énormes. C'est-à-dire, toujours dans le cadre de notre
proposition, il faut comprendre. Dans le cadre de la proposition de la taxe sur
l'essence.
M. Saint-Germain: Est-ce que vous admettriez que je dise qu'en
diminuant, si vous voulez, la prime des véhicules gagne-pain,
indirectement ou même directement, c'est une subvention payée par
l'ensemble des automobilistes aux propriétaires de ces
véhicules?
M. Brosseau: Le transport en commun, on peut dire que c'est une
subvention. Dans le cas des voitures gagne-pain, on peut dire que c'est une
dépense qui se rattache à un revenu, comme c'est accepté
dans le rapport d'impôt; l'automobile elle-même, on peut la
déduire dans le rapport d'impôt. Ce serait un petit peu la
même chose parce que ce n'est plus une automobile pour le plaisir. Ce
n'est plus une automobile de luxe. C'est une automobile utilitaire. C'est une
automobile qui sert à gagner un revenu.
M. Saint-Germain: Oui, mais comme cette subvention, ou appelez-la
cette ristourne, ou ce rabais ne viendra pas du tonds consolidé de la
province, il va être imposé aux propriétaires
d'automobiles, qui sont en très grande majorité des gens
ordinaires.
M. Brosseau: Oui.
M. Saint-Germain: C'est ce que je veux faire ressortir.
Il est entendu que si on imposait, si vous voulez, aux
propriétaires des voitures gagne-pain la prime qu'ils doivent payer,
selon les risques inhérents à leur activité, si ceci
était subventionné par le fonds consolidé de la province,
là, vous faites payer tout le monde, les riches comme les pauvres.
M. Brosseau: On propose un tarif maximum comme c'est actuellement
le cas d'ailleurs; un voyageur qui fait 50 000 milles par année avec une
auto-commerce n'a pas une prime tellement plus élevée que moi qui
vais faire 2000 ou 3000 milles par année. On demande tout simplement que
le même équilibre soit maintenu. S'il y avait une taxe sur
l'essence, cet équilibre ne serait pas maintenu. Il faudrait alors le
rajuster, ce n'est pas un manque à gagner, en fin de compte, qu'on dit,
c'est de ne pas aller chercher dans les poches de ces gens des sommes qu'il est
injuste d'exiger.
M. Saint-Germain: Je crois que vous voulez, par ce système
de primes, inciter les gens à acheter des voitures moins dispendieuses
et à consommer moins d'essence. Je crois qu'il y a là un principe
excessivement valable. Trop souvent, dans nos lois, chaque ministère ou
chaque loi semble ne pas s'intégrer à l'ensemble de nos lois,
à l'ensemble des activités humaines dans la province. Comme ce
semble être le cas, au point de vue de la pollution, à cause aussi
des réserves en énergie qui semblent être minimes à
long terme et que toutes les autorités essaient d'induire les gens
à économiser l'énergie, il y aura là certainement
un élément très positif.
Pour ce qui regarde la taxe que vous voudriez que le gouvernement impose
sur les voitures neuves et les voitures usagées, avez-vous pris en
considération, par exemple, qu'une voiture usagée je ne
suis pas un spécialiste lorsqu'elle a atteint, lorsqu'elle a
voyagé de 55 000 à 60 000 milles commence à demander des
réparations? Le coût des réparations, actuellement, au
Québec, a énormément augmenté; il est aujourd'hui
excessivement dispendieux de faire réparer sa voiture; on peut
même dire que la réparation des voitures au Québec a
atteint un coût exorbitant. Actuellement, si on se place un peu dans le
contexte de certaines professions dont les services étaient tellement
dispendieux que ces services n'étaient plus au niveau des revenus des
gens, ce qui en a amené
l'étatisation, on peut aujourd'hui, quand un homme gagne $8000,
$10 000 ou $12 000 par année, se demander sérieusement s'il a les
moyens de faire réparer sa voiture.
M. Geadah: Si vous mettez cela au niveau individuel, j'ai fait
plusieurs fois des calculs, je crois que c'est préférable de
garder une automobile usagée, mais là...
M. Brosseau: Les automobiles ont aussi augmenté de prix,
proportionnellement, aux réparations. Je pense qu'il est toujours
préférable, pour toutes sortes de raisons, de conserver sa
voiture le plus longtemps possible, même si on inclut quelques
réparations.
M. Geadah: C'est cela, au point de vue individuel,
l'économie personnelle, mais ici, ce qu'on essaie de voir, c'est l'effet
global sur toute l'économie du Québec et non pas l'effet
individuel. Si vous voulez, on peut discuter de l'effet individuel, si c'est
plus rentable de garder une automobile sept ou huit ans plutôt que de
changer tous les trois ans, c'est un autre problème.
M. Saint-Germain: Je vous comprends mal.
M. Geadah: II y a deux aspects à la question;
individuellement, est-ce plus rentable de garder une automobile plus vieille ou
d'en acheter une neuve? Cela n'a pas été démontré
dans notre mémoire, tout ce que nous nous sommes attachés
à montrer, c'est l'effet global sur l'économie du Québec,
si seulement 10% des gens qui achètent des automobiles nouvelles chaque
année décidaient de garder leur auto une année de plus;
c'est au niveau global de l'économie du Québec qu'on a
essayé...
M. Brosseau: Pour le Québec, si 10% des gens gardent leur
automobile un an de plus, cela représente à peu près $100
millions qui seraient injectés dans l'économie
québécoise.
M. Geadah: Ou au moins qui ne sortiraient pas par cette
porte.
M. Saint-Germain: M. le Président, je vais clore
là-dessus. Je tiens à remercier nos interlocuteurs pour leurs
réponses.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais
également remercier le Groupe de protection de l'environnement pour les
buts qu'il soutient et également pour la réflexion qu'il nous
fait faire ce matin par le biais des propositions présentées.
Cependant, je pense que le législateur doit considérer le plus
possible l'ensemble de la population et faire la part des choses; il doit tenir
compte de l'ensemble de la situation qui touche tous les citoyens du
Québec et non pas seulement ceux des villes. Dans le mémoire, on
semble s'attacher un peu plus aux villes et oublier un peu les régions
éloignées. Quand on pense au système de taxation
proposé, par exemple, la taxe sur le poids de l'automobile et la taxe
annuelle sur la valeur à l'achat de l'automobile, à ce
moment-là, cela pourrait créer une certaine discrimination quant
aux personnes demeurant dans des milieux plus éloignés et
également quant aux personnes qui se servent de l'automobile comme outil
de travail. Je pense, par exemple, au voyageur de commerce qui doit, lui,
s'acheter une grosse automobile parce qu'il a affaire à voyager, il doit
transporter beaucoup de bagage; je pense que cette personne serait
surtaxée par rapport aux autres. Maintenant, vous pourrez
peut-être faire des commentaires là-dessus.
J'ai apprécié l'ensemble de votre mémoire et je me
demandais si votre réflexion est basée sur des études
statistiques ou si c'est simplement une réflexion personnelle de votre
groupe.
M. Brosseau: II n'y a pas d'étude statistique. Comme de
raison, un groupe comme le nôtre ne peut se permettre, n'a pas
accès aux statistiques. Par contre, j'aimerais relever un point. Vous
parliez des voyageurs de commerce; on est très conscient de cela, c'est
d'ailleurs pour cela qu'on dit qu'il doit y avoir un traitement spécial
pour ces gens-là. Si on avait notre système, il faudrait avoir un
traitement spécial pour ces gens comme pour d'autres groupes de la
société. On pense à d'autres véhicules comme les
tracteurs de ferme, les camions, les taxis. Il leur faudrait un traitement
spécial, mais cela reste quand même une petite partie de la
population.
Dans le cas des gens qui habitent hors des villes, la seule injustice
serait que ces gens font plus de millage et, comme de raison, participeraient
plus, étant donné que les distances sont plus longues à
parcourir. Cela leur coûterait peut-être un peu plus cher au niveau
de l'essence, quant à la taxe; il y aurait peut-être une petite
injustice là, il s'agirait de voir les distances. Par contre, est-ce que
ces gens utilisent... Je ne sais pas si un citadin fait moins de millage qu'un
type qui habite une région rurale. Je serais curieux d'avoir des
statistiques là-dessus; peut-être pas. Ce n'est pas sûr
qu'il y aurait là une injustice.
M. Fontaine: Les citadins font peut-être autant de millage,
mais ils ne sont pas obligés de s'acheter d'aussi grosses voitures. Dans
les régions plus éloignées, on est peut-être
obligé de s'équiper de meilleures voitures, de voitures plus
puissantes pour pouvoir parcourir de plus longues distances. Je ne sais pas ce
que vous en pensez.
M. Geadah: On ne s'attaque pas à la puissance de l'auto,
on s'attaque surtout au poids. Vous avez même vu qu'un très gros
constructeur américain a diminué le poids de ses automobiles
d'à peu près 600 ou 700 livres sans rien changer du tout. Ce
n'est pas parce qu'une auto est plus grosse qu'automatiquement elle est plus
sécuritaire.
M. Fontaine: Vous dites, comme premier principe dans votre
énoncé, que les bénéficiaires du programme doivent
être les seuls à en payer les frais et que chacun de ceux-ci doit
être cotisant. A ce moment-là, qu'est-ce que vous faites du
piéton qui sera nécessairement indemnisé par le
système? Devra-t-il payer également?
M. Brosseau: Je m'excuse, j'ai mal compris la question.
M. Fontaine: Vous dites que les bénéficiaires du
programme doivent être les seuls à en payer les frais. Si on prend
cette proposition, c'est dire que le piéton devrait également
participer au paiement des frais du système parce qu'il sera
indemnisé par le système.
M. Brosseau: C'est-à-dire qu'il est une victime, à
ce moment-là, et non pas un bénéficiaire. Les
bénéficiaires du programme sont les gens assurés par le
programme, c'est-à-dire les automobilistes. Je crois que tout le monde
est d'accord pour dire qu'il est assez rare qu'un piéton cause des
dommages à une voiture. Il devient une victime...
M. Fontaine: Non, mais il est assuré.
M. Brosseau: ... ce n'est pas un bénéficiaire du
programme. Je m'excuse, la phrase a peut-être été mal
écrite, mais c'est ce qu'on voulait dire, dans le fond. Nous voulons
dire tous les gens qui ont une automobile.
On pensait plutôt au cas des touristes qui viendraient au
Québec, qui, d'une certaine façon, seraient assurés sans
payer avec le système actuel. On ne le sait pas, parce qu'on n'a pas vu
le mode de financement, mais on pensait que ces gens-là seraient
assurés sans payer. On dit que tout le monde qui a une automobile
devrait payer. On ne pensait pas aux piétons; les piétons, comme
de raison, ne devraient pas payer, mais pour nous ce sont nettement des
victimes.
M. Fontaine: Qu'est-ce que vous pensez du financement universel,
comme cela se fait par exemple en assurance-maladie?
M. Brosseau: Disons que dans ceci, je ne pense pas que le
financement universel serait juste si on le pense par le biais de
l'impôt. En fin de compte, on favorise à ce moment-là
l'automobile en étalant sur toute la population les dégâts
causés par une petite partie de la population qui sont les
automobilistes. Cela devrait être le contraire; on devrait
défavoriser l'automobile, parce que même si c'est pratique
il y a beaucoup d'avantages à l'automobile c'est quand même
un certain fléau.
Alors, l'étalement pour l'ensemble de la population est un peu
injuste. Quelqu'un qui ne conduit pas une automobile serait assez, je pense,
choqué à tous les ans d'être obligé de payer pour
quelqu'un qui conduit une automobile.
M. Geadah: Non seulement cela, mais il n'y aurait pas
d'incitation à utiliser moins l'automobile, parce qu'à ce
moment-là, on dit: Puisque je paye de toute façon, autant en
avoir une.
M. Fontaine: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. A mon tour, je veux
féliciter et remercier ceux qui sont devant nous ce matin, le Groupe de
protection de l'environnement. J'aimerais demander par exemple, pour mon
information personnelle et aussi l'information des membres de la commission si,
votre Groupe de protection de l'environnement est un comité local qui
regroupe des citoyens de Pointe-aux-Trembles.
M. Brosseau: Oui.
M. Roy: Ce n'est pas un comité qui découle ou qui
dépend de l'administration elle-même de la Loi de la protection de
l'environnement? Vous êtes complètement autonome?
M. Brosseau: Pas du tout, non.
M. Roy: C'est un groupe privé, tout simplement une
association et vous vous êtes donné comme fonction, comme mission,
de vous préoccuper des questions d'environnement dans votre
territoire?
M. Brosseau: Exactement.
M. Roy: Je vous remercie pour cette précision.
Au tout début vous avez dit que vous étiez d'accord avec
l'étatisation. Est-ce que vous êtes d'accord avec
l'étatisation par principe ou par efficacité, parce qu'il faut
quand même nuancer, je pense?
M. Brosseau: Ce n'est pas un point fort de notre chose; on ne
voulait pas trop trop s'embarquer là-dessus. Ce n'est ni par principe,
ni par efficacité, c'est par expérience personnelle. Quand on
s'est regroupé pour écrire ce mémoire-là, on s'est
dit: Est-ce qu'on est satisfait du système actuel, comme ceux qui
avaient eu des accidents ou comme ceux qui payent des primes, etc.? Et dans
notre groupe, il n'y a personne qui était satisfait du système
actuel, de l'assurance automobile ni de toutes les assurances, d'ailleurs. On
en est venu à se dire qu'on croit un peu que le domaine de l'assurance
est une façon de nous soutirer de l'argent en invoquant des principes,
je ne dis pas malhonnêtes, mais en nous faisant peur.
Il faut voir un agent d'assurance venir vendre une assurance sur la vie.
C'est jouer avec la faiblesse des gens. Comme de raison, tout le monde a peur
de mourir, tout le monde a peur de ne pas laisser suffisamment d'argent
à ses descendants, etc. C'est un petit peu macabre, mais d'une
façon
ce n'est pas le point fort. On n'est pas spécialiste
là-dedans, on n'a pas fait une réflexion intense de ce
côté, on laisse à d'autres le débat qui a
été je pense assez bien amorcé à savoir: Est-ce que
cela doit être étatique ou pas? Ce qui nous préoccupe c'est
la méthode de financement.
M. Roy: En somme, ce que vous recherchez à atteindre,
c'est le meilleur système, le meilleur service d'assurance, des
modifications au système actuel avec lesquelles tout le monde est
d'accord, de façon à viser à une meilleure protection, une
meilleure méthode d'indemnisation et viser à trouver un moyen de
réduire le coût de l'assurance?
M. Brosseau: C'est-à-dire que nous on a juste
traité de la méthode de financement. Je ne sais pas si vous avez
lu notre mémoire.
M. Roy: Oui je l'ai lu, ici je l'ai tout en détail, et
annoté.
M. Brosseau: On traite seulement de la méthode de
financement. C'est le seul côté, parce que c'est dans le
financement qu'on peut introduire les questions de protection de
l'environnement, de conservation de l'énergie. Pour le reste, on laisse
à d'autres groupes qui sont peut-être préoccupés par
d'autres problèmes le soin de discuter de ces choses-là.
M. Roy: Vous avez étudié la méthode de
financement par rapport aux mesures incitatives que vous proposez en fonction
de la protection de l'environnement et non pas en fonction du coût, de ce
que pourrait coûter le système proposé actuel par rapport
au système d'entreprise privée?
M. Brosseau: Non.
M. Roy: Vous n'avez pas fait d'étude à ce
domaine-là. Vous n'avez pas fait d'étude non plus à partir
du fait que le régime actuel, le régime proposé est un
régime double.
On propose un régime doublé avec une administration
étatique vis-à-vis des indemnisations pour les dommages corporels
et on exige aussi l'autre système, qui est le système
privé, dans le cas des dommages matériels, en laissant la notion
de responsabilité; d'où deux administrations, deux dossiers, deux
enquêtes, deux études, deux réclamations dans le cas d'un
accident qui implique et des dommages corporels et des dommages
matériels. En somme, ce que vous me dites, c'est que vous n'avez pas
étudié cet aspect-là du projet de loi.
M. Brosseau: Nous nous sommes dit: II va y avoir un
système étatique d'assurance automobile. Le gouvernement, pour ce
faire, doit aller chercher une masse monétaire pour financer son
programme. Nous proposons une façon d'aller chercher cette masse
monétaire et où aller la chercher. Nous n'avons pas fait
l'étude par rapport au système privé, par rapport au
système d'état. D'autres pourront la faire mieux que nous.
M. Roy: Ni par comparaison des coûts que pouvait impliquer
une modification du système privé et le fait de maintenir un seul
système d'assurance automobile ou un système étatique
complet ou un système double comme celui qui est proposé à
l'heure actuelle.
M. Brosseau: Nous n'avons pas du tout regardé cet
aspect-là.
M. Roy: Vous n'avez pas fait de relation entre les trois, ni de
comparaison entre les coûts que pourrait comporter tel ou tel
système par rapport à un autre. Je lis à la page 3 de
votre mémoire: "Le mode de perception des primes qui sera choisi (il
l'est peut-être déjà) il y en a, d'ailleurs, un
d'indiqué dans la loi 67 se doit de respecter les critères
suivants si le but visé est d'offrir un service à la population
et non de lui soutirer le plus d'argent possible". En somme, selon vous, pour
que le système atteigne les objectifs que vous cherchez à
atteindre comme groupe, il devrait comprendre les dix critères que vous
énumérez ici. Si le système ne comprend pas ces
critères-là, ce n'est pas le système que vous pouvez
favoriser.
M. Brosseau: Ce que nous regardons, c'est le système de
perception des primes. La petite phrase ici: "Le mode de perception des
primes..." On ne conteste pas le mode d'assurance en soi, c'est le mode de
perception des primes.
M. Roy: Autrement dit, le mode de perception des primes que vous
proposez, c'est le mode qui tient compte de ces dix critères. Mais le
mode de perception des primes qui a été annoncé n'est pas
celui que vous pouvez considérer comme étant un système de
perception idéal. Vous le trouvez injuste, si j'ai bien compris tout
à l'heure.
M. Brosseau: On ne peut pas le trouver injuste, parce que nous ne
le connaissons pas. Nous disons qu'un système juste répondrait
à ces dix critères-là.
M. Roy: D'accord. Avez-vous examiné la loi 67, en tenant
compte des obligations et des pouvoirs de la régie dans le régime
d'assurance automobile?
M. Brosseau: Quand nous avons écrit le mémoire, la
loi 67 n'était pas disponible.
M. Roy: Vous n'avez pas pu examiner, le projet de loi 67?
M. Brosseau: Nous n'avons pas pu examiner le projet de loi 67;
cela a été écrit il y a déjà un petit bout
de temps.
M. Roy: Le député de Nicolet a posé une
question tout à l'heure et j'aimerais y revenir; elle porte sur la
première recommandation que vous faites: "Les
bénéficiaires du programme doivent être les seuls à
en payer les frais et chacun de ceux-ci doit être cotisant". Le
député de Nicolet a
parlé tout à l'heure des piétons qui sont
accidentés. On sait que le régime actuel, le régime de
responsabilité, indemnise les piétons lorsqu'ils sont victimes
d'accidents d'automobile et qu'ils ne sont pas responsables de l'accident,
mais, dans le nouveau régime, il ne faut pas oublier une chose, les
piétons peuvent être aussi responsables de l'accident. Ils seront
indemnisés par le régime et ils ne seront pas cotisants. Est-ce
ce que vous avez voulu souligner à ce niveau-là?
M. Brosseau: Non, du tout, tout au contraire même. Comme on
l'a dit tantôt, c'est peut-être idéaliste, mais je ne peux
pas voir comment un piéton peut être responsable d'un accident
d'automobile.
M. Roy: Je vais vous donner un exemple. Un piéton sort en
état d'ébriété, comme on dit, les pieds ronds,
d'une taverne, complètement "pa-queté" c'est le langage
qu'on emploie là-dedans il traverse la rue sur un feu rouge et il
provoque un accident. Il a le droit d'être indemnisé au même
titre qu'une personne qui traverserait la rue sur un feu vert et qui serait
heurtée par une automobile, qui traverse sur un feu rouge.
M. Brosseau: A ce moment-là il est la victime de sa
propre...
M. Roy: Conduite.
M. Brosseau: ...conduite.
M. Roy: Mais il n'est pas responsable.
M. Brosseau: Sans être spécialiste dans le domaine,
je pense que, dans le système actuel, le piéton est toujours
considéré comme une victime.
M. Roy: Je ne voudrais pas entreprendre une bataille juridique
là-dessus...
M. Brosseau: Je ne suis pas spécialiste là-dedans,
je ne veux pas m'embarquer là-dedans. Il peut y avoir des cas
d'exception, mais nous ne croyons pas que le piéton doit être un
cotisant.
M. Geadah: En mettant les choses à l'absurde, s'il n'y
avait pas d'automobiles, il n'y aurait pas d'accidents d'automobile, tandis que
s'il y a des piétons...
M. Roy: S'il n'y avait pas de piétons dans la rue, il n'y
aurait pas d'accidents et les piétons ne seraient pas...
M. Geadah: S'il n'y avait pas de piéton, il n'y aurait
plus personne.
M. Roy: On peut prendre cela par l'absurde des deux
côtés.
M. Geadah: S'il n'y a pas de piéton, il n'y a plus
personne.
M. Roy: S'il n'y avait pas d'automobile, vous ne seriez pas ici
ce matin et moi non plus.
M. Brosseau: On est tous piétons à nos heures.
M. Geadah: Exact...
M. Roy: Je vous remercie. Je n'ai pas d'autre question.
Mme Payette: ... commission parlementaire.
M. Roy: Mme le ministre aurait été obligée
de faire une commission parlementaire itinérante. Il aurait fallu faire
le voyage en diligence, comme dans le bon vieux temps.
Mme Payette: J'y serais allée à cheval, M. le
député de Beauce-Sud.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, j'aimerais remercier le
groupe de nous présenter un mémoire qui nous fait vraiment
réfléchir à fond sur le mode de financement du
régime.
La première chose, c'est qu'il y a dix critères qui nous
sont donnés avec lesquels on peut être d'accord, mais qui
réapparaissent un peu comme le quadrature du cercle, c'est-à-dire
dans la mesure où tu essaies de satisfaire à l'un il y en a un
autre qui flanche. Pour y arriver, je me demande s'il ne faudrait pas un
régime extrêmement complexe.
Je pourrais vous signaler aussi, pour chacun des trois modes que vous
proposez, des cas où il y a des injustices qui devraient être
corrigées, ce qui augmenterait la complexité du système,
donc les frais d'administration et tout ce qui s'ensuit.
Prenons, par exemple, la taxe sur l'essence. J'ai d'abord une question
fondamentale à vous poser. Dans les dix critères que vous avez
posés, si je vous disais entre une juste répartition sociale,
c'est-à-dire que les gens à plus faible revenu sont ceux qui vont
retirer le moins des indemnités, les gens a plus faible revenu devraient
payer moins que les gens qui ont un revenu plus élevé. Question
de justice distributive comparée à la question de
l'environnement.
La question de l'environnement, il y a peut-être moyen de la
traiter autrement avec des normes sur la fabrication des véhicules
moteurs, parce que la taxe sur l'essence est assez difficile d'application. On
est placé devant la complexité du système, soit le choix
entre la justice distributive et l'environnement. C'est peut-être trop
théorique. Qu'est-ce qu'on devrait choisir entre les deux? Vous avez
dû vous poser la question en préparant votre mémoire.
M. Brosseau: On a essayé de tenir compte des deux. On peut
être injuste sans le savoir, à un certain moment, mais on
essaie... quand on pense
aux petites voitures, aux voitures d'occasion, pour nous, en fin de
compte, on pense toujours aux gens qui ne sont pas riches.
Un exemple, la taxe sur la valeur à l'achat. Quelqu'un qui
s'achèterait une voiture, on peut prendre une Rolls Royce à $26
000, cette personne paierait une taxe énorme tandis que le
propriétaire d'une mini n'en paierait pas du tout. Il y a un peu de
justice sociale là-dedans.
La taxe sur l'essence également. Les gens qui font de longs
voyages, qui ont de longues vacances et qui font beaucoup de millage ne sont
pas, habituellement, des gens pauvres. Les gens des quartiers
défavorisés, à Montréal, ne voyagent pas beaucoup.
Ils restent dans leur quartier. Cela va dans le même sens. Reste,
peut-être, la question du poids. Il faudrait voir que les gens moins
riches achètent toujours de vieilles minounes qui pèsent
davantage et qui coûtent plus cher. Il est possible qu'avec un
système qui favorisait les petites on aboutirait avec de vieilles
petites minounes. Cela se rajusterait par soi-même. Il ne faut pas aller
jusqu'à dire que "environnement" s'oppose à "justice sociale".
C'est habituellement le contraire. Les gens qui sont riches peuvent, d'une
façon individuelle, régler leurs problèmes d'environnement
et de milieu de vie avec un chalet dans le nord ou des choses comme cela. Les
gens qui sont pris avec des problèmes d'environnement sont,
habituellement, des gens défavorisés.
Si on regarde notre quartier, Pointe-aux-Trembles, Montréal-Est,
qui est un quartier très ordinaire, on s'aperçoit que c'est
toujours nous qui avons les problèmes d'environnement. Les usines
d'épuration de la ville de Montréal aboutissent chez nous. Tout
cela c'est toujours chez nous. On dirait que cela va de pair. Injustice sociale
et environnement vont ensemble.
M. Paquette: II y a quand même un cas où c'est assez
clair qu'il y a contradiction. Prenez une région éloignée.
Les régions éloignées sont les plus économiquement
défavorisées au Québec. Je pense au Bas-Saint-Laurent, au
Nord-Ouest, les gens ont, généralement, plus de distance à
faire qu'à Montréal.
M. Brosseau: Cela dépend.
J'ai déjà travaillé dans la région de
Sept-lles, je ne faisais pas beaucoup de millage, il n'y avait pas beaucoup de
places où aller.
M. Paquette: Non, peut-être pas à Sept-lles.
M. Brosseau: Quand j'avais fait le tour de la rue principale...
Le seul vrai millage que j'ai fait, c'est quand je suis revenu à
Montréal, et j'en avais assez. Il faudrait voir, je ne sais pas s'il y a
une règle générale là-dessus. De toute
façon, ce que nous demandons, c'est que le profil de l'automobiliste
moyen devrait payer une prime moyenne. Par contre, il va s'agir de
déterminer, à un moment donné, si cela va être
$0.10, $0.12 ou $0.09. Là, il faut aller chercher dans les statistiques
plus précises pour savoir de combien il s'agit, et c'est à ce
moment qu'on pourra savoir s'il y a des injustices créées dans
certaines régions, mais, a priori, je ne suis pas convaincu qu'il y en
aurait en tenant compte que, de toute façon, il faut que les gens paient
une prime. Si ces gens n'avaient pas de prime à payer et, là, on
leur en imposerait une... Mais ils vont en avoir une, de toute
façon.
M. Paquette: Après étude, on pourrait
peut-être avoir des taux différents suivant les régions,
bien que ce soit difficile d'application. Je ne sais pas si vous avez
pensé à cela.
M. Brosseau: Non, nous ne sommes pas tout à fait d'accord
avec les taux différents selon les régions. Il nous semble que
cela doit être uniforme partout parce que c'est déjà
impliquer une discrimination. Il faudra qu'il y ait quelqu'un qui choisisse les
régions et il y a toujours des injustices créées à
ce niveau, et qui peuvent être créées.
M. Paquette: Maintenant, je m'interroge aussi sur
l'efficacité de la taxe sur l'essence comme moyen de discussion
d'utilisation de l'auto, et face à la protection de l'environnement;
c'est votre argument principal. Vous nous disiez tantôt que les gens ne
feront pas de différence aux régions frontalières pour
aller chercher de l'essence à l'extérieur, s'il y a seulement une
différence de $0.10. On pourrait faire le même raisonnement et se
dire que cela ne les dissuadera pas, non plus, d'utiliser l'auto et de polluer
l'environnement.
M. Brosseau: Effectivement, en fin de compte, peut-être que
la meilleure façon de préserver l'énergie serait de dire
qu'on peut vendre seulement des autos de quatre cylindres ou des autos qui font
tant de milles au gallon vraiment, pas selon l'agence américaine, mais
le vrai millage qui pourrait être mesuré.
M. Paquette: Votre troisième critère est
très intéressant de ce point de vue parce qu'avec une taxe sur la
valeur de l'auto, on va favoriser généralement les petites autos,
celles qui consomment le moins d'essence.
M. Brosseau: Ici, il s'agit de méthode incitative, comme
de raison. J'ai dit tantôt que, si, en fin de compte, on avait tous des
quatre cylindres, on pourrait économiser à peu près 20% de
notre énergie, l'essence du moins. Par méthode incitative, on ne
peut sûrement pas atteindre ce chiffre. Si on réussit à
motiver quelques gens à diminuer leur utilisation et ainsi de suite,
peut-être qu'on peut aller dans les 2% ou 3% au maximum. C'est à
peu près le maximum à atteindre. Par contre, on croit que, dans
chacune des actions gouvernementales, s'il y avait de telles méthodes
incitatives, on pourrait peut-être renverser la vapeur parce qu'à
l'heure actuelle, on vit dans une société...
M. Paquette: Une fois plusieurs mesures combinées,
peut-être que cela aurait une...
M. Brosseau: ... qui est pour l'automobile, et, pour nous
Québécois, cela nous apparaît injusti-
fié. Pour un Américain, la société
américaine, maintenant, c'est reconnu qu'économiquement c'est une
société basée sur l'industrie automobile; pas la
société québécoise. Alors, nous avons les
défauts de cette société américaine, mais on n'a
pas les avantages au point de vue de l'emploi, au point de vue de l'impulsion
économique; il s'agit de renverser la vapeur.
M. Paquette: Maintenant, pour quelles raisons avez-vous
rejeté le critère d'une taxe sur le permis de conduire puisque
vous dites que, normalement, ce doivent être les utilisateurs qui doivent
payer? On a parlé des piétons tantôt, mais il y a
également les conducteurs qui ne sont pas propriétaires de leur
automobile et, dans votre régime, on va évidemment les rattraper
par la taxe sur l'essence.
M. Brousseau: On va les rattraper par la taxe sur l'essence et
aussi par la taxe sur les plaques. Quant au permis de conduire, qu'il y ait $5
ou $10, on ne le rejette pas nécessairement. Disons qu'il ne nous
intéresse pas, à ce moment-ci.
Mme Payette: Cela ne fait pas de pollution.
M. Brosseau: Non, à part le papier, mais, si vous le
mettez sur du papier recyclé, on ne sera pas contre.
M. Paquette: Et, quant à votre troisième
critère que je trouve très intéressant, d'abord, c'est
peut-être là qu'on peut le plus agir sur l'économie
d'essence. Enfin, je ne sais pas, mais c'est l'impression que cela me donne, et
ensuite favoriser la petite et la moyenne entreprise québécoise,
en plus d'avoir une justice distributive là-dedans, c'est-à-dire
que les propriétaires de grosses voitures vont payer plus cher.
Les voitures luxueuses aussi vont payer plus cher. Le seul
problème que j'y vois concerne le fait que le citoyen serait
évidemment incité à garder son automobile plus longtemps;
en même temps, si les gens, étant négligents, laissent
également dépérir l'automobile, cela constitue un risque
supplémentaire d'accident.
M. Geadah: Ce n'est pas parce qu'on garde une automobile plus
longtemps qu'elle est automatiquement en mauvais état. C'est une autre
partie du problème.
M. Paquette: Pas automatiquement, mais les probabilités
sont plus fortes, vous l'admettrez.
M. Geadah: Je ne pense pas, non, parce qu'il y a de nouvelles
automobiles et il y a une garantie d'un an, et le nombre de
défectuosités qui arrivent pendant la première
année d'usage d'une automobile est très élevé
aussi; pendant cette année, cette automobile, on peut dire qu'elle est
dangereuse.
M. Brosseau: Du moment qu'elle n'a pas explosé, la
première année, que les freins n'ont pas manqué et que le
volant tient. Mais, encore une fois, ce n'est pas sûr. On remarque que
c'est une préoccupation d'assureur. Nous essayons de donner une
préoccupation d'assuré, de personne qui s'assure, pas de personne
qui assure.
M. Paquette: Ce n'est pas seulement une préoccupation
d'assureur, parce que s'il y a plus d'accidents, il y a plus de gens qui vont
se tuer et il y a plus de gens qui vont se blesser. Il faut penser à
cela aussi.
M. Brosseau: Oui, mais essayer d'évaluer un risque
à partir de l'âge de l'automobile, je pense que c'est une
préoccupation d'assureur. Par contre, pour diminuer les dommages qui
peuvent être causés par une vieille automobile, s'il y en a, il y
a des mesures qui pourraient et qui devraient être prises, d'ailleurs,
parce qu'il y en a déjà des vieilles automobiles,
indépendamment de n'importe quel système d'assurance, il va y
avoir de vieilles automobiles parce qu'il y a des gens qui ne sont pas capables
c'est un peu mon cas de se payer des automobiles neuves
régulièrement. Il peut y avoir un système de
vérification. On peut penser à toutes sortes de choses. Je serais
curieux de voir les statistiques sur les accidents causés par les
vieilles automobiles.
Une vieille automobile va moins vite. Elle comporte moins de risques. Il
y a toutes sortes de choses qu'on pourrait faire et qu'on pourrait dire
là-dessus.
M. Geadah: Là-dessus, autre chose. C'est que, quand on
parle des préoccupations de l'assureur, cela veut dire aussi qu'un
assureur évalue le risque, mais il n'a pas d'action sur cela, je veux
dire qu'il ne peut pas agir sur ce risque. Par exemple, quand on parlait de
primes qui sont proportionnelles à l'âge, parce que les jeunes ont
plus d'accidents, évidemment, quelqu'un qui entre dans la "business"
d'assurance évalue ce risque, constate cela et agit tout de suite en
conséquence. Mais le gouvernement a les moyens d'agir pour corriger cela
dans le cas des primes pour des gens qui présentent un plus grand risque
et les moyens de prendre les cas individuellement.
Dans le cas des automobiles aussi, vous parlez des vieilles automobiles
qui sont en mauvais état, le gouvernement a aussi les moyens de corriger
cette situation. Par exemple, en Ontario, il y a le certificat de
mécanique obligatoire, quand une automobile usagée change de
main. Donc, c'est à ce niveau qu'on dit que c'est une
préoccupation du gouvernement et le gouvernement n'a pas les mêmes
moyens, il en a bien plus que la compagnie d'assurance.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Merci, M. le Président. A la page 4 de votre
mémoire, vous précisez assez bien votre vision du financement du
régime par une taxe supplémentaire sur l'essence. Vous
proposez
même un taux au gallon, soit $0.10. En deuxième phase, vous
proposez également une taxe sur le poids de l'automobile, du
véhicule. Si le gouvernement devait faire siennes vos recommandations,
avez-vous évalué les conséquences qu'un tel programme de
financement du régime poserait à l'endroit de ceux qui
possèdent des véhicules lourds, entre autres les camionneurs?
Nous ne pensons pas uniquement aux camions qui sont la propriété
de grandes compagnies. Nous avons au Québec plusieurs milliers de
camionneurs artisans qui ont des véhicules qui consomment beaucoup, mais
avec lesquels ils font très peu de milles le gallon, surtout lorsqu'ils
voyagent le camion chargé.
S'il faut taxer l'essence pour ces gens à raison de $0.10, s'il
faut également appliquer une taxe nouvelle sur le poids du
véhicule, j'ai compris, que dans votre mémoire, vous voulez
exempter les entreprises à transport en commun, soit! Cela va, mais vous
avez toute une catégorie de propriétaires de véhicules
qui, si le régime était appliqué, selon les
recommandations que vous faites, devraient faire face à des coûts
prohibitifs; pour un certain nombre, ces camionneurs se battent pour
rétablir la tarification dans le genre de transport qu'ils font, ces
gens ne seraient plus en mesure de fonctionner à l'intérieur de
l'entreprise qui est la leur.
M. Brosseau: C'est pour cela qu'on dit, dans notre mémoire
on ne l'a peut-être pas dit assez fort, mais on l'a dit à
deux reprises que, pour ce qu'on appelle les véhicules
gagne-pain, et on pense que les véhicules gagne-pain, cela comprend les
voyageurs de commerce, mais cela comprend automatiquement les camionneurs parce
que, pour un camionneur, son camion est son gagne-pain.
Pour ce genre de véhicule, il faudrait, si notre système
était adopté, qu'il y ait un statut spécial qui, à
ce moment, serait un montant maximum c'est-à-dire que pour un
camion, on pourrait dire: $200 ou $300 qui serait retourné, comme
c'est déjà le cas, parce qu'il y a déjà un retour
sur le prix d'essence qui vient du fédéral, à l'heure
actuelle. Il y aurait un retour qui serait fait à ces gens pour le
trop-perçu. Ce qu'ils donneraient en trop à la station de service
leur reviendrait par le biais d'une déduction d'impôt, comme cela
se fait déjà à un autre niveau de gouvernement. C'est
évident que ce qu'il faut viser quand on dit défavoriser la
grosse voiture, défavoriser les gens qui font beaucoup de millage,
défavoriser les voitures qui sont lourdes, cela s'applique toujours aux
voitures de tourisme, c'est-à-dire aux voitures de luxe. Dès que
le véhicule n'est plus un véhicule de luxe, mais un
véhicule nécessaire pour gagner sa vie, quel qu'il soit, notre
approche ne s'applique plus. A ce moment il faut prévoir un taux maximal
d'assurance et, dans certains cas, comme dans le cas des transports en commun
et des voitures taxi, on prétend que ce taux maximal devrait être
abaissé, devrait être moins haut. Dans le cas des transports en
commun, on dit qu'il ne devrait pas y en avoir du tout parce que c'est un
service à la communauté que les transports en commun offrent.
Je suis complètement d'accord avec vous pour les camionneurs; il
ne faut pas défavoriser ces gens, comme d'autres catégories, les
cultivateurs avec leurs tracteurs. On peut penser aux commis-voyageurs,
à toutes sortes de gens qui utilisent leur auto ou leur camion pour
gagner leur vie; il ne faut pas leur faire payer des primes énormes, il
faut leur faire payer des primes qui soient très très
raisonnables.
M. Giasson: Vous admettez tout de même que ce serait assez
compliqué, entre autres pour un groupe tel que les camionneurs que de
devoir payer, à chaque gallon d'essence à acheter, les $0.10
en présumant que votre proposition soit acceptée
quitte à récupérer, après une année
d'exploitation, les paiements ou les sommes auxquelles ils auraient
contribué en trop. Ce serait obliger ces gens à payer, sur
l'achat de chaque gallon, une taxe de $0.10 et attendre la fin de
l'année pour pouvoir la récupérer, quand on sait que ces
gens vivent très souvent juste à la limite de la
rentabilité de leur entreprise de camionnage; ce serait quand même
demander beaucoup à ces gens.
M. Brosseau: Je ne sais pas parce que cela se fait
déjà; il y a déjà un retour sur l'essence qui
provient du fédéral. A cause de l'augmentation qui a
été trop élevée, de l'augmentation un peu
artici-ficielle du prix de l'essence je ne sais pas si cela s'applique
encore cette année, mais l'an dernier cela s'appliquait on
pouvait avoir un retour pour les gens c'est aussi mon cas qui
utilisaient leur automobile pour gagner leur vie. On pouvait avoir un retour
d'argent. Avec les ordinatrices qui existent de nos jours et les façons
faciles de traiter les rapports d'impôt, cela ne semble pas amener de
problème majeur. Cela amène un petit problème pour le type
qui remplit sa formule, le camionneur qui remplit sa formule; cela lui
amène un calcul supplémentaire, mais c'est un calcul qu'il fait
déjà pour avoir certaines autres déductions et aussi sa
déduction sur l'essence qu'il doit faire pour le fédéral.
Je pense que cela pourrait être relativement simple à faire.
M. Giasson: Oui, mais pour le camionneur ce ne serait pas le fait
de compléter une formule à la fin de l'année; ce n'est pas
le problème qu'il voit, c'est l'obligation de verser
immédiatement, à chacun de ses achats d'essence, une prime qui
serait de $0.10 le gallon. Il va la rattraper à la fin d'une
année d'exploitation, mais le déboursé doit être
fait tout au cours de l'année.
M. Geadah: II n'est pas nécessaire de faire cela seulement
une fois par année.
M. Brosseau: Cela pourrait peut-être représenter un
montant maximal de $200, $300, $400 ou $500; je ne sais trop, un camionneur ne
doit pas
faire plus de 100 000 milles par année. Il est vrai que la
consommation des camions est élevée, par exemple.
M. Giasson: C'est le millage au gallon avec un camion; vous
êtes dans un domaine qui est totalement différent de celui du
véhicule de promenade. Vous avez aujourd'hui de gros véhicules
qui vont faire quatre ou cinq milles au gallon et parfois même même
pas quatre ou cinq milles au gallon...
M. Brosseau: A ce moment il pourrait y avoir un retour
trimestriel ou quelque chose du genre. Il y a sûrement moyen de trouver
un système qui leur soit favorable, je pense; un système simple.
Cela pourrait être, comme je vous le dis, à tous les trois mois.
On pourrait leur retourner le trop-perçu à tous les trois mois ou
à tous les deux mois, selon les sommes impliquées.
M. Giasson: Ce ne serait pas facile parce que vous avez des
périodes dans l'année où le camionneur ne travaille pas,
son véhicule est arrêté.
Vient la période des travaux d'entretien de la voirie, là,
on fait appel à ses services et puis, durant une autre période au
cours de l'année, il est encore arrêté. Il faudrait que ce
soit sur une base annuelle, si c'était retenu comme principe.
M. Geadah: Au fédéral, cela se passe n'importe
quand. Vous n'avez qu'à remplir la formule, l'envoyer et on vous
retourne le montant d'argent. Vous pouvez faire cela chaque mois. Nous
suggérons de le faire tous les trois ou quatre mois, pour ne pas
être inondés de papier, mais on pourrait fixer un montant et
demander de ne pas remplir ces formules de demande de remboursement en dessous
de $100 ou de $200, de sorte que chaque fois que le gouvernement devra $200
à un camionneur, ce dernier remplit la formule et l'envoie.
M. Giasson: Mais il faudrait que vous ayez un contrôle,
à l'intérieur de la régie gouvernementale, pour
déterminer à quel moment le camionneur a souscrit le montant
maximal qu'il doit payer sur la taxe sur l'essence. Cela ne peut pas
fonctionner sur la même base que le fédéral. Le
fédéral rembourse tous les gallons d'essence consommés;
donc, dans le mois, s'il reçoit un rapport, il peut faire le
remboursement, mais la régie, elle, devra tenir compte d'un montant
minimum que le camionneur devra souscrire à l'intérieur du
programme de financement par l'achat d'essence.
M. Brosseau: Dans ce cas, elle pourrait le prendre sur les
plaques puisqu'on n'a pas intérêt à diminuer l'utilisation
du camionneur; alors, on pourrait le soustraire totalement à
l'application de...
M. Giasson: Comme pour les entreprises de transport en commun, on
pourrait oublier les camionneurs.
M. Brosseau: ... la taxe sur l'essence et reprendre la
totalité de l'assurance...
M. Geadah: Sur les plaques.
M. Brosseau: ... sur un montant fixe, par exemple, on dirait $300
comme montant fixe et c'est tout ce que vous avez à payer. Il n'est pas
question de poids, il n'est pas question de valeur à l'achat, il n'est
pas question d'essence pour vous autres. Notre système est pensé
pour les gens qui utilisent leur voiture pour le plaisir et non pas pour les
affaires. Pour les autres, on peut suggérer ou penser à n'importe
quel autre système qui serait juste pour ces gens.
M. Giasson: Merci. M. Brosseau: Merci.
Le Président (M. Boucher): Comme il n'y a pas d'autre
intervenant...
M. Saint-Germain: Juste une question, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Quant à cette taxe que vous voulez
imposer aux voitures neuves et aux voitures de deuxième année,
troisième année et quatrième année, afin d'inciter
les gens à conserver leur voiture plus longtemps, avez-vous pensé
au fait qu'il y a actuellement une très forte tendance à la
diminution de la puissance des moteurs et que, de plus en plus, les voitures
font plus de milles au gallon? Il y a aussi sur les nouvelles voitures
les gouvernements l'imposent actuellement ou l'imposeront dans un avenir
très rapproché des appareils pour diminuer la pollution
par la consommation d'essence. En motivant les gens à conserver leur
voiture plus longtemps, n'avez-vous pas tendance à mettre un frein,
à diminuer l'évolution qui se fait dans le sens que vous croyez
positif?
M. Brosseau: Oui. Effectivement, au niveau de l'automobile, on
est dans une période de transformation, une période
évolutive. On va atteindre un palier, à un certain moment. Cela
veut dire, comme vous dites, que ce que nous proposons ralentirait cette
évolution en conservant de vieilles automobiles au niveau de l'essence;
par contre, au niveau de la surconsommation des produits comme le fer, les
plastiques, etc., on s'améliore tout le temps. C'est dire qu'au
début du programme on perdrait peut-être la période
économisée en vieillissement d'automobile. Cependant, dès
que, initialement, une année est perdue une fois, après cela, on
la récupère tout le reste du temps que durera le système
étatique d'assurance.
M. Saint-Germain: Merci.
M. Brosseau: Merci.
Le Président (M. Boucher): Mme le ministre.
Mme Payette: Je voudrais simplement remercier à nouveau
les représentants de ce Groupe de protection de l'environnement.
J'aimerais lui souligner que dans son mémoire on propose et vous
l'avez répété à plusieurs reprises que la
taxe varie selon le poids du véhicule. C'est déjà un
critère retenu dans la tarification du BVA jusqu'à un certain
point; on va continuer d'explorer dans ce sens. Je voudrais vous faire part de
la logique qui intervient dans cette réforme de l'assurance automobile,
en ce sens que vous avez beaucoup insisté, par exemple, sur le fait
qu'on tente de faire durer au maximum les voitures qu'on possède
déjà. Vous comprendrez notre grand souci que ces voitures soient
sécuritaires en même temps. Je ne suis pas du tout convaincue,
comme le disait monsieur tout à l'heure, que les voitures qu'on
connaît présentement, tout au moins, qui durent quatre ans, six
ans, sept ans, restent des voitures sécuritaires. Si bien, qu'en
étant conscients, nous allons tenter d'intervenir dans ce domaine non
pas par le biais de la Loi de l'assurance automobile, mais par le biais de la
loi de la protection du consommateur qui devrait être
déposée avant la fin de cette année.
Dans ce sens, je pense qu'on voit là la logique du gouvernement,
d'une part en termes de sécurité sur la route, en termes de
sécurité pour les citoyens et en termes de contrôle de la
qualité des véhicules. Je vous remercie, M. le
Président.
M. Brousseau: Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Je remercie les membres du
Groupe de protection de l'environnement, au nom des membres de la commission.
J'inviterais le prochain organisme, Renaud & Sénécal,
représenté par M. Charbonneau. M. Char-bonneau, vous avez la
parole.
Renaud & Sénécal
M. Charbonneau (Marc): Mme le ministre, messieurs, j'aimerais
préciser au départ que je suis directement touché par le
projet de loi 67, puisque je suis expert en sinistres et ce depuis plus de
vingt ans. Afin de situer les membres de cette commission dans le bon contexte,
précisons qu'un expert en sinistres était autrefois connu sous le
nom d'"agent de réclamations" ou encore "ajusteur d'assurance".
Les fonctions d'un expert en sinistres qui travaille pour le compte de
plusieurs compagnies d'assurance consistent à enquêter sur les
circonstances entourant un sinistre et à effectuer le règlement
qui s'impose selon les directives de son commettant.
Mon intervention devant cette commission est faite à titre
personnel ainsi qu'au nom de mon employeur et de mes confrères de
travail. Je me permets également de me faire le porte-parole de la
grande majorité des experts en sinistres du Québec, qui ont sans
aucun doute les mêmes préoccupations que moi.
Tout en reconnaissant que le système actuel est désuet et
comporte beaucoup de lacunes, je m'oppose au projet de loi 67 pour deux raisons
principales qui sont d'égale valeur à mes yeux. Ces raisons sont
les suivantes: premièrement, la loi 67 entraînera pour plusieurs
centaines de Québécois la perte de leur emploi et,
deuxième raison, la loi 67 ne rencontre pas les objectifs
visés.
Lors des audiences tenues par Mme Payette sur la réforme de
l'assurance automobile à Hull, le 17 mai 1977, j'ai
présenté un mémoire qui malheureusement n'a pu être
lu, faute de temps, semble-t-il.
Cependant le ministre a répondu par écrit, au début
du mois d'août 1977, à mon mémoire, et le présent
document est composé d'extraits du mémoire déposé
le 17 mai, mais tient compte également des réponses de Mme
Payette, du texte du projet de loi 67, ainsi que du livre intitulé La
Réforme de l'assurance automobile, questions et réponses".
Dans un premier temps j'exposerai comment et pourquoi le projet de loi
67 affectera notre profession. Dans un deuxième temps, je
démontrerai que la loi 67 n'atteint pas les objectifs visés, et
présenterai une solution de rechange.
Premièrement, la loi 67 entraînera, pour plusieurs
centaines de Québécois, la perte de leur emploi.
Considérant que la réforme de l'assurance automobile
prévoit un système étatique, universel et sans
égard à la faute en ce qui a trait aux blessures corporelles et,
d'autre part, un régime privé, mais avec indemnisation directe en
ce qui concerne les dommages matériels, il me paraît tout à
fait évident que la quasi-totalité des experts en sinistres, de
même que leur personnel de soutien et sans doute une bonne partie du
personnel spécialisé dans les réclamations des compagnies
d'assurance du Québec devront, dès le 2 mars 1978, joindre les
rangs des chômeurs déjà assez considérables de la
belle province.
Il faudrait également tenir compte des investissements faits par
les propriétaires des divers bureaux d'experts en sinistres, sous forme
de mobilier, équipement de bureau, automobiles, etc., qui devront
être liquidés à perte. Il me paraît immoral pour tout
gouvernement qui se respecte, nonobstant les buts visés par ladite
réforme, de balayer d'un simple revers de la main employeurs et
employés qui devront tous, et ce quels que soient leur âge et leur
formation académique, se créer une nouvelle carrière.
Si cela est immoral pour un gouvernement d'agir ainsi, je crois que le
qualificatif est trop faible pour un gouvernement qui se veut
social-démocrate.
Soit dit en passant, il y a actuellement entre 850 et 1000
détenteurs de permis d'experts en sinistres au Québec, ce qui
implique employeurs et employés de bureaux indépendants d'experts
en sinistres, et si l'on tient compte du personnel de soutien, soit
secrétaires, téléphonistes, etc., nous en arrivons
facilement au chiffre de 2000, ce qui n'inclut pas le personnel à
l'emploi des compagnies d'assurance qui sera également affecté
par cette réforme, bien que tout semble indiquer que
les experts en sinistres indépendants soient appelés
à devenir les premières victimes de ladite réforme,
puisque les courtiers d'assurance, les compagnies d'assurance, de mêmes
que les avocats semblent être affectés, mais de moindre
façon.
J'ai exprimé ces inquiétudes dans mon mémoire
soumis lors des audiences tenues à Hull, le 17 mai, et Mme Payette dans
sa réponse tente de me rassurer. Voici d'ailleurs sa réponse: "Au
contraire, je crois que les experts en sinistres ont un rôle à
jouer dans le règlement des sinistres, tant en dommages corporels qu'en
dommages matériels, et comme je le mentionne ci-avant, la régie
utilisera sûrement les services d'experts en sinistres pour participer au
règlement de ces sinistres".
Le paragraphe qui suit est également tiré textuellement
des réponses faites par le ministre au mémoire mentionné
précédemment. "II est faux de prétendre que tous les
agents de réclamations devront disparaître de la carte. Certains
préféreront se recycler dans une autre profession. Cependant,
nous croyons qu'à l'intérieur du domaine des assurances
générales, la grande majorité des experts en sinistres
pourront continuer à oeuvrer. La réforme n'affecte en rien le
secteur des dommages matériels.
Quant aux blessures corporelles, des experts en sinistres seront
employés par la Régie de l'assurance automobile pour
vérifier les faits entourant une demande de prestations. Je ne suis
aucunement pessimiste. Cependant, la réponse du ministre n'est, à
mon avis, qu'un voeu pieux et je tenterai de vous démontrer
pourquoi.
Prenons tout d'abord le cas des blessures corporelles. Il a
déjà été établi que la Commission des
accidents du travail s'occupera, pour le compte de la régie, du
règlement des réclamations. La Commission des accidents du
travail a administré 288 700 demandes de prestations en 1976 et, selon
les projections du gouvernement, la Régie de l'assurance automobile
recevra, en 1978, un peu moins de 50 000 demandes. Par conséquent, la
Commission des accidents du travail n'aura qu'à augmenter son personnel
d'environ 17% et pourra ainsi s'occuper des réclamations en question,
à moins, évidemment, que la régie n'utilise
régulièrement et systématiquement les services des experts
en sinistres, afin de décourager les abus et les fraudes qui ne
manqueront pas. J'en doute fortement puisque le ministre prétend pouvoir
administrer la régie à un pourcentage inférieur à
8,8%. Conséquemment, cette nouvelle forme de bien-être social que
deviendra l'assurance automobile au Québec sera très
économique à administrer, mais coûtera très cher en
indemnités non justifiées.
Si l'on ajoute à cela le fait que le personnel recruté
à ce jour, tant par la régie que par la Commission des accidents
du travail, ne l'a pas été à même les experts en
sinistres, on constate comment l'on nous considère. D'autre part, en ce
qui concerne les dommages matériels, je me demande vraiment si le
ministre est sérieux dans ses affirmations, compte tenu du fait que le
projet de loi 67 prévoit la création d'une Corporation des
assureurs autorisés (titre IV). A l'article 155 on peut lire que cette
corporation doit établir une convention d'indemnisation directe
relative: 1) à l'indemnisation directe des assurés ayant subi un
dommage à leur automobile; 2) à l'évaluation des dommages
subis par des automobiles et à l'expertise nécessaire; 3)
à l'établissement d'un barème de circonstances d'accident
pour le partage de la responsabilité du propriétaire de chaque
automobile impliquée.
Si l'on tient compte également de l'article 103 du titre III,
chapitre III, intitulé "Indemnisation du dommage matériel", qui
se lit comme suit: "Nonobstant les dispositions du présent titre, le
recours du propriétaire en raison du dommage subi par son automobile ne
peut être exercé que contre son propre assureur si ce recours est
régi par la convention d'indemnisation directe visée dans
l'article 155". Je pense qu'il apparaît très clair que les experts
en sinistres dont la fonction est d'enquêter et de régler n'auront
absolument plus rien à faire dans ce domaine, puisque tout sera ou
pourra être réglé directement par les procureurs au moyen
de personnel non spécialisé qui n'aura qu'à appliquer le
barème de responsabilité.
D'autre part, quand Mme Payette prétend qu'à
l'intérieur du domaine des assurances générales la grande
majorité des experts en sinistres pourra continuer à oeuvrer, je
pense que cette affirmation est plus que gratuite. En effet, s'il y a
actuellement 1000 experts en sinistres, c'est qu'il y a du travail pour 1000
personnes. Si une partie, et soit dit en passant la très grande partie,
du travail disparaît, comment prétendre que les experts en
sinistres pourront gagner leur vie à l'intérieur du domaine des
assurances générales en ne s'occupant exclusivement que des
sinistres catégorie "biens"? Par ailleurs, le ministre affirme
candidement que certains préféreront se recycler dans une autre
profession. Avec, d'une part, le taux de chômage que l'on connaît
actuellement et, d'autre part, le niveau scolaire moyen des experts en
sinistres, je me demande vraiment dans quelle profession nous pourrons nous
recycler. Somme toute, il y aura, à partir du 2 mars 1978, au moins 50%
des experts en sinistres qui seront sans emploi et qui deviendront les
premières victimes de la réforme de l'assurance automobile. En
toute logique et surtout en toute justice, je me demande et je vous demande:
Qu'entendez-vous faire pour aider ces victimes à se recycler?
La deuxième raison, le projet de loi ne rencontre pas les
objectifs visés. Quoi qu'on en dise maintenant, les buts visés
par la réforme de l'assurance automobile étaient les suivants: 1)
une meilleure indemnisation de toutes les victimes; 2) une réduction
sensible des primes; 3) une indemnisation plus rapide en ce qui a trait aux
dommages matériels. Je ne prétends pas que le projet de loi
n'atteint aucun de ces buts. Cependant, la façon dont certains des buts
sont atteints, et encore très partiellement, laisse à
désirer. Par ailleurs, ces buts pourraient être atteints plus
complètement en
ne changeant pas radicalement le système actuel, mais en le
modifiant légèrement. Je me permets ici de vous rappeler qu'avant
les élections du 15 novembre 1976 les porte-parole du Parti
québécois mettaient particulièrement l'accent sur le
coût astronomique de l'assurance automobile au Québec par rapport
au reste du Canada, alors que Mme Payette, une fois son projet de
réforme publié, a avec honnêteté, je dois le
reconnaître, admis qu'elle ne pourrait faire aucune promesse en ce qui
concerne une économie et qu'il était possible que certains
Québécois soient appelés à débourser plus
pour les assurances qu'auparavant, alors que pour la majorité le
coût serait semblable.
Si j'ai bonne mémoire, le premier ministre lui-même avait
qualifié, lors d'un discours à Bou-cherville, le coût de
l'assurance automobile au Québec de "racket" ou encore de
"système de vol qualifié" et il avait dit qu'il était
scandaleux qu'un conducteur de Montréal, entre autres, ait à
payer $150 de plus par année qu'un automobiliste de Toronto. Il est
évident que le coût des primes d'assurance automobile au
Québec est plus élevé qu'ailleurs, ce qui l'est moins
toutefois, ce sont les raisons.
Il existe une raison qui n'est pas souvent mentionnée, mais qui a
quand même une importance capitale. En effet, au Québec, il existe
une présomption de faute contre l'automobiliste en rapport avec les
blessures subies par son passager, alors qu'ailleurs au Canada le passager
prend place dans un véhicule automobile à ses risques.
Afin de pouvoir récupérer de l'assureur de l'automobiliste
en question un montant quelconque en rapport avec ses blessures, il doit
prouver grossière négligence de la part de l'automobiliste ce
qui, évidemment, n'est pas toujours chose facile à faire.
D'autre part, c'est un fait connu de tous que nos routes sont moins bien
surveillées qu'ailleurs et que nos lois, moins sévères ou
plutôt moins sévèrement appliquées. En plus, la
signalisation routière est de bien piètre qualité
comparativement à celle de l'Ontario en particulier. L'état des
routes, en général, de même que la géographie sont
d'autres facteurs qui influencent le nombre d'accidents. Evidemment, une
réforme de l'assurance automobile ne corrigera aucunement cet
état de fait.
D'autre part, si on considère l'Ouest du pays par rapport avec le
Québec, il est évident que si le taux d'accident est moins
élevé là-bas, cela tient surtout au fait que le taux de
concentration urbaine est moins élevé de même que la
géographie est moins accidentée et que le climat y est beaucoup
plus clément.
En page deux du livre bleu qui est à l'origine du projet de loi
67, Mme Payette mentionne: "Un régime d'assurance automobile peut
permettre, et il doit le faire, une meilleure indemnisation des victimes, mais
le mal doit être enrayé à sa source. De meilleurs moyens de
sécurité routière, alliés à une plus grande
prudence sur la route, aideront à réduire au minimum les
tragédies de la circulation, et ce faisant, contribueront mieux qu'un
nouveau régime ne saurait le faire à faire baisser cette masse
globale de plus de $800 millions de primes qu'ont payés l'ensemble des
Québécois en 1976".
En fait, je pense qu'il s'agit là d'une admission sur les moyens
à prendre pour réduire les primes, ce que le projet de loi actuel
ne fera sûrement pas.
Il est à noter, de plus, que les indemnités prévues
à l'origine dans le livre bleu et sur la base desquelles les calculs de
rentabilité ont été faits afin d'assurer que les primes
seraient probablement au même niveau qu'elles ne le sont actuellement ont
été majorées dans le projet de loi no 67.
Considérant que les indemnités prévues à
l'origine ont, dans certains cas, été doublées, il est
évident qu'il en coûtera plus cher pour tout le monde à
partir du 1er mars 1978. D'autre part, on prétend que tous les
automobilistes seront maintenant indemnisés et mieux indemnisés.
Il est vrai que tous les automobilistes impliqués dans un accident et
blessés dans ce même accident seront, maintenant,
indemnisés, mais de là à dire qu'ils le seront mieux,
c'est une autre affaire.
Le principe appliqué prévoit des indemnités qui,
dans certains cas, seront, à mon humble avis, certainement trop
élevées alors que, dans d'autres, elles ne seront pas
suffisantes.
J'aimerais maintenant relever certains points contenus dans mon
mémoire du 17 mai. Ces points, de même que certaines questions
contenues dans une annexe à mon mémoire, sont demeurés
adroitement sans réponse.
Mme Payette a affirmé, suite aux audiences tenues à
Rimouski, le 7 mai 1977, que si les jeunes ont plus d'accidents, c'est qu'ils
ont de mauvaises voitures. J'aimerais savoir sur quelle étude cette
affirmation a été basée, car il est évident pour
tout le monde, sauf peut-être pour ceux que cela arrange de ne pas le
constater, que les jeunes ne conduisent pas, dans la plupart des cas, de
mauvaises voitures. Ils ont plutôt de belles voitures neuves, souvent
très puissantes.
Je remarque que le projet de loi contient une disposition à
savoir que les polices d'assurance devront comporter, tel que le mentionne
l'article 83, le montant et le pourcentage de la commission qui sera
versé au courtier ou à l'agent d'assurances. Cette mention doit
aussi apparaître sur tous les documents émanant d'un courtier ou
d'un agent. Il s'agit d'une version adoucie de ce que contenait le livre bleu,
puisque le projet de réforme à l'origine prévoyait que
cette commission serait négociable. A mon humble avis, la nourriture est
plus importante que l'assurance automobile. Je me demande pourquoi, si les
assureurs sont tenus de procéder ainsi, mon épicier, mon marchand
d'huile, mon pharmacien, etc., ne sont pas tenus d'en faire autant.
Me basant sur les informations que j'ai pu recueillir, je crois que
toute personne blessée dans un accident devra remplir une formule
similaire à celle remplie dans le cas d'un accident de travail. L'on
sait qu'une grande majorité des accidentés du travail ne peuvent
absolument pas remplir la formule plus ou moins complexe qu'on leur remet,
mais ils doivent recourir au service de leur employeur pour ce faire. Ma
question est donc la suivante. Dans le cas d'un accident automobile, qui
remplira la formule, puisqu'en fait, si l'on prétend garder les frais
d'administration à un minimum, le gouvernement ne créera
sûrement pas des bureaux régionaux dans tous les centres du
Québec?
Les indemnités prévues ne couvrent que 90% du revenu net.
Il semblerait que ceci est, pour tenir compte du fait qu'une victime qui ne
travaille pas n'ait pas à faire certaines dépenses
inhérentes au fait de travailler, et qu'ainsi la surcompensation est
évitée.
A mon humble avis, le fait d'être en état
d'incapacité augmente plutôt les dépenses d'un individu qui
doit constamment faire appel à de l'aide pour faire ses achats, voir
à l'entretien et à la réparation de sa
propriété, etc. Vous remarquerez que je ne pose pas la question,
mais je constate plutôt que, s'il est vrai que toutes les victimes seront
dorénavant indemnisées, il est également vrai que cesdites
victimes seront mal indemnisées.
Passons maintenant au projet de loi 67. La lecture de ce document me
porte à poser les questions suivantes lesquelles sont pour le moins
inquiétantes.
La définition du mot "automobile" dans le projet de loi se lit
comme suit: "Tout véhicule mû par un autre pouvoir que la force
musculaire et adapté au transport sur le chemin public mais non sur les
rails". Est-ce à dire que les propriétaires de cyclomoteurs et de
motocyclettes devront payer le même montant que le camionneur?
Au niveau des indemnités, le remplacement du revenu, chapitre II,
section I, il est prévu que des indemnités seront versées
aux catégories de personnes suivantes. a) la victime n'exerçant
au moment de l'accident aucun emploi tout en étant capable de
travailler; b) la victime qui était, au moment de l'accident, inscrite
à un collège ou à une université; c) la victime
qui, lors de l'accident, était mineure et sans emploi.
Comme la loi n'en fait pas mention, je présume que, si
l'incapacité totale n'est que temporaire, les indemnités
prévues seront alors payées pendant la période
d'incapacité. Ne trouvez-vous pas immoral de payer, à même
les sommes perçues de l'ensemble des automobilistes, un montant minimum
de $80 par semaine à un enfant aux études sans aucun emploi
durant deux ou trois mois, si les blessures l'empêchent de se rendre
suivre ses cours? Ne trouvez-vous pas illogique que le projet de loi
prévoit accorder au chapitre des autres indemnités le même
montant à tous pour le préjudice esthétique ou la perte
d'une main, etc., puisque le droit d'action disparait?
Certaines personnes seront alors trop bien indemnisées, et
d'autres pas suffisamment.
Le projet de loi 67 prévoit un droit d'appel, et c'est
très bien ainsi. Toutefois, il me semble illogique que l'appel soit
entendu par la Commission des affaires sociales, un autre organisme
gouvernemental. Vous me direz peut-être qu'il est facile de critiquer
mais qu'il est moins facile d'édifier.
Voici donc ma solution de rechange au projet de loi 67: 1) conservation
du schéma de la police d'assurance automobile actuel; 2)
assurance-responsabilité obligatoire pour un montant de $50 000; 3)la
police d'assurance contiendrait obligatoirement le chapitre B avec suppression
du droit de subrogation et amélioration des indemnités;
4)conservation du droit de recours aux tribunaux; 5)création d'un
tribunal spécial pour entendre les causes des accidents
d'automobile.
Je crois que l'indemnité actuelle de $35 payable en vertu du
chapitre B pour une personne occupant un emploi devrait passer au niveau du
salaire minimum et devrait être versée durant quatre ans. Un
conjoint travaillant à la maison et devenant invalide pourrait recevoir
jusqu'à un maximum de $75 par semaine pendant deux ans alors que les
ayants droit d'une victime décédée pourraient recevoir $10
000 et $2000 par enfant à charge, s'il s'agissait d'un soutien de
famille.
Je crois que, de cette façon, les 26% des victimes d'accidents
d'automobile qui ne sont actuellement pas indemnisées le seraient,
partiellement il est vrai, mais le seraient quand même alors que les
autres conserveraient leur droit de recours. Avec la création d'un
tribunal spécial pour entendre les causes d'accidents d'automobile, je
crois que l'on réussirait à accélérer les processus
et obtenir des jugements plus rapidement afin de régler les pertes dans
un délai beaucoup moins long. De plus, si l'on oblige les assureurs
à prendre les dispositions nécessaires pour que chaque expert en
sinistres sur la route puisse, dès le premier contact avec une victime,
lui remettre un chèque en vertu du chapitre B couvrant les deux
premières semaines de son incapacité sans délai de
carence, de même que certains frais médicaux, on éviterait
ainsi les lenteurs administratives actuelles auxquelles il est fait allusion
dans le livre bleu et qui pénalisent injustement les victimes
d'accidents d'automobile.
Je ne me fais pas d'illusions et sais pertinemment bien que mon
intervention ne changera absolument rien et que le projet de loi serait
éventuellement adopté pour le grand malheur de la plupart des
automobilistes, même ceux en faveur de la réforme, car ceux-ci
réaliseront tôt ou tard qu'en pratique la théorie qui est
à l'origine de la loi ne donne pas les résultats
escomptés. J'en fais mon deuil et je m'incline. Par ailleurs, je ne peux
concevoir et n'accepte pas qu'un gouvernement fasse des chômeurs,
à plus forte raison dans le contexte actuel. J'espère et j'irais
même jusqu'à dire que j'exige que le gouvernement prévoie
un mécanisme quelconque qui permettra à ceux à qui la
réforme fera perdre leur gagne-pain de se recycler, et ce, aux frais du
gouvernement pour un salaire égal à celui que ces personnes
gagnaient avant que cette loi n'en fasse des chômeurs.
Si le Dr Camille Laurin a pu dire, il y a quelques mois, garantir
à tous les anglophones du Québec qu'aucun d'entre eux ne perdrait
son emploi à cause de sa langue, je me demande vrai-
ment pourquoi les experts en sinistres en particulier devraient faire
les frais d'une réforme de l'assurance automobile.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Charbonneau. Mme le
ministre.
Mme Payette: M. Charbonneau, dans un premier temps et si mes
souvenirs sont bons, je pense que c'est la remarque que je vous avais faite
déjà, quand je vous entends, je me demande si, pour vous rendre
heureux, il ne faudrait pas augmenter le nombre de sinistres.
M. Charbonneau (Marc): Je ne crois pas, Mme Payette, mais
simplement je trouve que le projet de loi ne prévoit aucun
mécanisme, et il n'est fait nulle part mention de ce qui va arriver
à ceux qui perdront leur emploi à la suite des changements que
cela va apporter, et je trouve cela déplorable.
Mme Payette: Je voudrais vous poser une question, d'abord et
avant tout, pour l'information des membres de cette commission. Vous dites, en
première page de votre mémoire, que vous êtes le
porte-parole de la grande majorité des experts en sinistres au
Québec. Pouvez-vous me dire si vous représentez une association
professionnelle de vos membres?
M. Charbonneau (Marc): Absolument pas. D'ailleurs, au tout
début de mon mémoire, je vous dis qu'il est fait à titre
personnel, mais que je le fais également au nom de mon employeur et de
mes confrères de travail immédiats, ceux qui sont à
l'emploi de la même compagnie que moi...
Mme Payette: Ce sont ceux qui vous entourent. Vous n'avez pas
fait de consultation auprès des experts en sinistres.
M. Charbonneau (Marc): Absolument pas, non, il est fait à
titre personnel.
Mme Payette: Je voudrais juste répondre à une
interrogation pour ne pas dire accusation que vous portez à mon
égard au sujet de mon affirmation en ce qui concerne les jeunes. Je
voudrais vous faire remarquer qu'à aucun moment je n'ai affirmé
que les jeunes étaient victimes d'accidents d'automobile parce qu'ils
conduisaient de vieilles voitures. Je me suis interrogée parce qu'au
cours de la tournée qu'il m'a été donné de faire,
j'ai pu constater à plusieurs reprises que c'est une des choses qui
revenaient constamment.
J'ai d'ailleurs dit que j'aimerais pouvoir avoir des chiffres à
ce sujet si quelqu'un en possède. Je ne l'ai pas affirmé, parce
que je ne peux pas le démontrer, mais je reste convaincue que les
jeunes, très souvent, se trouvent propriétaires de voitures
qu'ils achètent au coût d'environ $300 à $800. C'est ce qui
est ressorti des consultations que j'ai pu avoir jusqu'à maintenant, qui
sont des voitures usagées, et là, c'est la majorité, il y
aura toujours des jeunes avec des voitures neuves, mais il y a tous ceux qui
ont des voitures usagées, des voitures que nous ne voulons pas conduire,
nous les gens de notre âge, parce qu'elles nous font peur.
Dans ce sens, si je n'ai pas de chiffres, j'ai certainement, en tout
cas, une interrogation à ce sujet. En ce qui me concerne, M. le
Président, c'est tout pour l'instant. Je reviendrai probablement vers la
fin.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Je remercie monsieur de son mémoire. Il
a débordé, si vous voulez, le contexte de sa profession pour en
faire une analyse plus globale. Ceci dit, il est évident que le statu
quo pour la province et pour les autorités en place au point de vue de
l'assurance automobile est inacceptable. C'est la raison pour laquelle,
d'ailleurs, même le gouvernement précédent a essayé
ou avait projeté une loi qui devait améliorer le système.
On aurait pu facilement analyser la situation actuelle, prendre ce qu'il y
avait de bon dans le système actuel et essayer d'éliminer les
coûts d'administration et les injustices que peuvent subir
présentement certains accidentés, et je pense surtout à
l'assurance obligatoire qui, à mon avis, est un élément
positif dans ce projet de loi.
Il reste que vous avez, par votre profession, évolué, vous
vous êtes créé une entreprise selon la loi et les
règlements et vous avez rendu service à la société
dans le contexte actuel. Ce passé devrait être reconnu, je crois,
par les autorités, si on pense à la justice sociale. Si on
exproprie un terrain, si on exproprie un bien en vue de l'intérêt
public, il serait inconcevable qu'on exproprie ce terrain ou ce bien public
sans indemniser le propriétaire qui l'a acquis en fin de compte selon
nos lois et les règlements. Dans votre cas, vous êtes un peu comme
les agents, les courtiers, vous perdez votre emploi ou une partie de vos
revenus sans dédommagement d'aucune sorte.
On ne vous a promis, d'aucune façon qu'il y aurait
dédommagement et qu'on vous accorderait une priorité, si vous
voulez, dans les nouveaux emplois qui seront créés soit par la
Commission des accidents du travail ou l'office. Il y a là, à mon
avis, une injustice flagrante. Ce ne serait peut-être pas facile d'y
remédier, mais il faut tout de même concevoir qu'il y a là
une injustice. Si votre profession avait disparu dans un contexte de libre
entreprise, à cause de l'avancement des techniques ou des moyens
administratifs, on aurait pu comprendre, mais on met fin à vos
activités par une loi, d'une façon abrupte, elles sont
brisées, cassées. Aujourd'hui, vous pouvez gagner votre vie.
Demain, vous ne pouvez plus et c'est tout.
De toute façon, au lieu de bonifier le statu quo, on a voulu tout
régenter. Comme le disait le député de Beauce-Sud, on a
créé un système à deux têtes, deux
administrations, deux moyens d'indemnisation, deux principes différents,
et les gens sérieux se posent réellement des questions. C'est un
système qui n'a pas d'antécédent, qu'on
devra construire de toutes pièces et on s'aperçoit vite
qu'on laisse de côté tous les professionnels, tous ceux qui ont
une expérience ou qui ont acquis avec le temps une expérience
dans ce domaine bien précis de l'assurance automobile.
Je crois que c'est dommage; on aurait pu améliorer le
système en prenant beaucoup moins de risques; quand je parle de risques,
je parle de risques vis-à-vis non pas de ceux qui sont exclusivement
dans le domaine de l'assurance actuellement, mais dans l'intérêt
de la population et dans l'intérêt des victimes de l'automobile.
Quel pourcentage d'affaires faites-vous en ce qui regarde l'automobile
actuellement? Quel est ce pourcentage au point de vue des experts?
M. Charbonneau (Marc): Ce pourcentage peut varier, je ne peux que
parler de ma propre expérience parce que ce pourcentage peut varier de
beaucoup selon l'endroit où les experts en sinistres travaillent. Par
exemple, dans une grande ville comme Montréal, il y a des bureaux qui ne
s'occupent exclusivement que de réclamations automobiles; je viens de
Hull et, habituellement, la plupart des bureaux, dans les centres plus petits
que les grands centres, s'occupent de réclamations diverses; disons que
leur travail est diversifié. Je dirais que l'automobile
représente environ 60% à 65% du travail que l'on fait
actuellement chez nous.
M. Saint-Germain: Etes-vous employé ou employeur?
M. Charbonneau (Marc): Je suis employé.
M. Saint-Germain: Et vous prétendez que vous courrez de
grands risques de perdre votre emploi si ce projet...
M. Charbonneau (Marc): Si ce n'est pas moi, ce sera mon voisin de
bureau ou mon autre voisin, de toute façon.
M. Saint-Germain: En ce qui regarde l'assurance qui
dédommagera les dégâts matériels; vous
considérez que l'utilité de vos services sera à la baisse
dans une...
M. Charbonneau (Marc): Certainement parce que le projet de loi
prévoit la création d'une espèce de grille de situations
qui prédéterminera les responsabilités. A ce moment,
forcément, les compagnies d'assurances n'auront pas besoin d'avoir
recours aux services d'experts en sinistres pour enquêter sur les
circonstances comme telles. Les circonstances d'un accident auront
déjà été... C'est-à-dire qu'il y aura
déjà une grille qui établira des circonstances
idéales, des circonstances d'accidents et un personnel non
spécialisé pourra, à ce moment, automatiquement attribuer:
C'est 75%/25% ou c'est 100% de responsabilité. Il ne restera ici
nous devrons intervenir pour enquêter que les cas d'exception qui
n'auront pas été prévus par la grille.
M. Saint-Germain: D'après votre expérience, dans
quel pourcentage du nombre des accidents cette grille pourrait-elle être
appliquée?
M. Charbonneau (Marc): Je pense qu'elle pourrait se rendre
à tout près de 90% des cas d'accidents.
M. Saint-Germain: Et traiter 90% des cas d'accidents avec une
telle grille, croyez-vous que cela créera des injustices pour ceux qui
subiront des dommages?
M. Charbonneau (Marc): Certainement, parce que cette grille ne
tiendra absolument pas compte des circonstances particulières à
un accident. Exemple, si la grille calcule qu'un accident survenu à une
intersection où l'automobiliste fait un virage à gauche est 100%
de sa responsabilité, à ce moment, il n'y aura aucune
enquête à faire pour déterminer si l'automobiliste qui
avait effectivement le droit de passage en a abusé en roulant trop
rapidement ou en cherchant à provoquer l'accident. Automatiquement, la
grille établira que celui qui tournait à gauche, quels que soient
les agissements de l'autre, sera responsable; alors, il y aura forcément
des abus.
M. Saint-Germain: Croyez-vous qu'avec cette grille les assureurs
devraient posséder un droit de subrogation les uns vis-à-vis des
autres?
M. Charbonneau (Marc): Je pense que, à toutes fins
pratiques, si on applique une grille, le droit de subrogation ne devrait pas
exister puisqu'une situation en remplacerait une autre. Quant à
appliquer une grille, on ne devrait pas... Je ne suis pas d'accord avec le
principe de la grille, mais, si on applique une grille, je ne vois pas
l'utilité d'un droit de subrogation à ce moment.
M. Saint-Germain: Dans le système actuel, on dit qu'un des
facteurs qui augmentent l'administration, c'est le fait que, lors d'un
accident, chaque assureur doit faire appel à un ajusteur et à un
estimateur.
S'il y a trois assureurs, par exemple, qui sont intéressés
par un accident, ce peut-être un accident mineur, mais vous avez tout de
même six personnes impliquées. Croyez-vous, partant du statu quo
actuel, qu'il y aurait moyen, relativement à votre travail, relativement
au travail des estimateurs, de simplifier la procédure de façon
à baisser les coûts d'administration actuels?
M. Charbonneau (Marc): Sûrement. Prenons le cas d'un
accident qui implique trois voitures. Il est vrai qu'il y a trois experts en
sinistres différents qui sont désignés; par ailleurs, il
n'y a pas toujours trois évaluateurs de désignés. Les
évaluateurs sont habituellement également des
indépendants. Alors, il est pratique courante dans l'industrie,
actuellement, d'accepter l'évaluation des dommages comme tels faite sur
les voitures par un évaluateur indépendant. Souvent, dans le cas
d'accidents im-
pliquant trois voitures, il n'y a qu'un ou deux éva-luateurs,
mais il y a à peu près toujours trois experts en sinistres
différents agissant ou faisant enquête pour le compte des trois
assureurs impliqués.
Je pense qu'il y aurait possibilité, tout en conservant le
système actuel, de changer un peu le rôle des agents de
réclamation pour éviter ces doubles ou triples enquêtes
afin qu'une enquête faite par un expert indépendant soit à
l'usage des trois assureurs impliqués. Je pense que cela pourrait se
faire tout en conservant le système actuel.
Mme Payette: M. le Président, est-ce que le
député de Jacques-Cartier me permettrait de donner une
information à la commission?
M. Saint-Germain: Oui, allez.
Mme Payette: Je voudrais simplement signaler que le plan Bacon,
qui avait déjà été présenté par
l'ancien gouvernement, comportait également des grilles
d'évaluation.
M. Saint-Germain: Oui, je n'ai pas dit le contraire.
Mme Payette: C'est pour informer les députés de
cette commission.
M. Saint-Germain: Je voulais savoir ce qu'il en pensait.
Personnellement, je ne suis prisonnier de personne, alors, je puis poser des
questions en toute liberté.
Pour revenir au sujet, on n'admet pas le statu quo, personne ne l'admet,
il faut modifier quelque chose, il faut baisser les coûts
d'administration. Au niveau de votre profession, est-ce que le fait de diminuer
le nombre d'estimateurs serait la seule façon que vous en envisagez?
M. Charbonneau (Marc): J'ai mentionné tantôt que mon
intervention est faite à titre personnel. Je n'ai absolument aucun moyen
technique me permettant de faire des études ou encore de compiler des
statistiques. C'est mon impression personnelle: je ne vois pas d'autres
solutions actuellement de façon, d'une part, à améliorer
ou à faire baisser les frais d'administration tout en conservant... Je
pense que le principe de faute doit être conservé tel qu'on le
connaît actuellement.
M. Saint-Germain: Vous croyez qu'il doit être
conservé totalement?
M. Charbonneau (Marc): II doit être conservé, mais
c'est mon impression personnelle.
M. Saint-Germain: Là-dessus, je vais laisser les autres
membres de la commission vous poser des questions.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Je voudrais remercier M. Charbonneau pour son
intervention.
La majeure partie de son mémoire consiste à s'interroger
quant à l'avenir des agents de réclamation, c'est-à-dire
des experts en sinistres. Son mémoire porte principalement
là-dessus. J'aurais peut-être aimé que le ministre, dans sa
réponse, donne un peu plus d'explications là-dessus. J'aimerais
que M. Charbonneau puisse nous dire, de son côté, comment il voit
la réponse du ministre qui lui disait que les courtiers devraient se
recycler ailleurs. Comment voit-il lui-même, personnellement, que ces
experts puissent le faire, ce recyclage?
M. Charbonneau (Marc): J'ai mentionné, dans mon
mémoire, que cela devrait être tait avec l'aide du gouvernement.
Je pense qu'il y aurait peut-être deux façons de voir les choses.
D'abord, il s'agirait de déterminer le nombre de personnes atteintes.
Cela deviendra assez facile, à ce moment-là, de le
déterminer simplement en faisant compiler, par chaque bureau
indépendant d'experts en sinistres, la proportion d'enquêtes
faites sur les accidents d'automobile par rapport aux autres sinistres. Une
fois qu'on aura établi le nombre, il faudrait peut-être que le
personnel, qu'on va forcément engager à la Commission des
accidents du travail ou ailleurs pour s'occuper de l'assurance automobile,
donne priorité aux anciens employés qui deviennent victimes de
cette loi.
Puisqu'on pense conserver les frais d'administration à un niveau
très bas, c'est donc dire qu'il n'y aurait pas de travail pour tous ceux
qui devront quitter le domaine d'expertise, alors que les autres on les aide
à se recycler. Il doit sûrement y avoir des compétences au
gouvernement pouvant à ce moment-là déterminer dans quelle
branche l'individu pourrait continuer à travailler sur la base de ce
qu'il peut faire. Cela représenterait peut-être la
minorité, la majorité ayant déjà été
recyclée à l'intérieur de la Commission des accidents du
travail ou encore de la Régie de l'assurance-automobile.
M. Fontaine: Si on considère, par exemple, que le
gouvernement, dernièrement, dans le domaine des petits abattoirs a
adopté des règlements qui ont eu pour effet de réduire le
nombre des abattoirs au Québec et, ceux qui doivent sortir du domaine
reçoivent une certaine indemnité, est-ce que vous
préconiseriez, dans votre domaine, que le gouvernement puisse instaurer
un système d'indemnités à ceux qui ne pourront pas se
recycler dans d'autres domaines et qui perdront leur emploi?
M. Charbonneau (Marc): Vous savez, c'est peut-être beau un
montant d'argent global, mais je pense que cela ne remplace pas, pour quelqu'un
qui a 35 ou 40 ans, 20 ou 25 ans d'emploi à faire. Ce serait beaucoup
plus logique, au lieu de dédommager globalement un individu, qu'on
l'aide à se recycler, quitte à lui payer des études
complémentaires, de façon qu'il puisse gagner sa vie dans un
autre domaine par la suite. Parce qu'il ne
faut pas oublier qu'il ne s'agit pas simplement là de
propriétaires d'entreprises mais également d'employés.
Dans le cas des abattoirs, j'imagine qu'il s'agissait des
propriétaires, alors, le type qui a déjà une entreprise,
peut prendre le montant d'argent qu'on lui donne et s'acheter une autre
entreprise. Mais ici, on parle d'employés qui n'ont peut-être pas
de notion de gérance d'entreprise. Ce serait peut-être un plus
mauvais service à leur rendre, que de leur donner un montant d'argent
global. Quant à moi, je préférerais ou je verrais
plutôt qu'on les aide, financièrement, à poursuivre des
études, ou enfin, à les changer de métier, à les
changer d'occupation.
M. Fontaine: Est-ce que le chiffre de 2000 personnes, employeurs
et employés, secrétaires et personnel de soutien, a
été vérifié?
M. Charbonneau (Marc): J'ai obtenu du service des assurances le
nombre de 850 à 1000 détenteurs de permis. Au moment où
j'ai vérifié, le chiffre n'était pas complet pour
l'année; alors, détenteurs de permis, experts en sinistres,
employeurs et employés, indépendants, il y en a entre 850 et
1000. On peut aller jusqu'au chiffre de 2000, si on inclut le personnel de
soutien d'une façon générale, mais je pense que le
personnel de soutien peut peut-être plus facilement se trouver de
l'emploi. Une secrétaire reste une secrétaire et une
téléphoniste aussi; mais un type qui a 45, 50 ans, qui n'a pas
fait autre chose dans sa vie que de s'occuper de réclamations, peut
difficilement on peut le lui demander se trouver un emploi du
jour au lendemain.
M. Fontaine: Par exemple, chez vous, à votre bureau, vous
êtes combien d'experts, combien d'employés?
M. Charbonneau (Marc): II y a une dizaine d'employés de
soutien également.
M. Fontaine: Qu'est-ce que vous prévoyez comme personnel,
après l'adoption de la loi 67?
M. Charbonneau (Marc): On prévoit qu'il devrait être
diminué au moins de moitié. Il y a une chose aussi qui est assez
difficile, on ne peut pas tenir compte d'un seul facteur. Certaines compagnies
d'assurances emploient des experts en sinistres, des employés directs
qui actuellement ne font à peu près que de l'assurance
automobile. Forcément, ces compagnies sont en train de recycler ces
employés qui vont s'occuper de réclamations par la suite. Ce qui
veut dire que, même si on établit déjà en partant
que notre volume de réclamations est à 60% ou 65% relatif
à l'automobile, cela ne veut pas dire qu'il va nous en rester 40%
à 45%; parce que dans les 40% ou 45% que l'on a actuellement,
peut-être qu'une partie sera conservée par les compagnies
d'assurances qui auront vu à recycler leur propre personnel
déjà sur la route. C'est très difficile de prévoir,
mais on sait que cela devrait être de moitié sûrement, au
moins de moitié.
M. Fontaine: Maintenant, dans un autre domaine, à la page
7 de votre mémoire, vous parlez de forme de fraudes qui pourraient
s'instaurer, face à ce système, est-ce que vous avez des exemples
à nous donner?
M. Charbonneau (Marc): Connaissant la nature humaine je me
suis occupé de réclamations pendant vingt ans tout le
monde est plus ou moins fraudeur. Il suffit de ne pas donner l'occasion de
l'être. Je pense que vous allez avoir une quantité fantastique de
réclamations pour des entorses. Tout le monde va avoir mal au cou
à la suite d'une collision de voiture, c'est évident.
A ce moment-là, vous allez remplir un formulaire, vous allez
l'envoyer au gouvernement, vous allez recevoir votre chèque.
Forcément, vous allez en avoir une quantité fantastique à
cause du principe même qui veut que personne ne vienne vérifier.
Du moins, je ne crois pas que cela soit prévu.
M. Fontaine: Est-ce pour cette raison que vous voudriez que soit
maintenu le système de responsabilité?
M. Charbonneau (Marc): C'est peut-être une des raisons,
mais je pense que cela fait partie des droits de chaque individu de pouvoir
porter devant la justice une cause dans laquelle il est
intéressé.
M. Fontaine: Pensez-vous également que, pour le dommage
matériel, par exemple, le fait d'avoir des grilles de
responsabilité aura comme conséquence, à toutes fins
pratiques, d'enlever le système de responsabilités pour le
dommage matériel également?
M. Charbonneau (Marc): Plus ou moins. Pour une très forte
proportion, à toutes fins pratiques, le système de
responsabilités n'est à peu près plus là. En
principe, il l'est, mais, en pratique, il ne le sera plus.
M. Fontaine: Un peu plus loin, à la page 12, vous faites
état du fait qu'ici au Québec, il y a une présomption de
faute qui est maintenue contre l'automobiliste en rapport avec les blessures
subies par son passager et qu'ailleurs au Canada, ce n'est pas la même
chose. Est-ce que vous pouvez nous dire que représentent les sommes
versées aux passagers au Québec par rapport aux sommes totales
qui sont versées?
M. Charbonneau (Marc): Comme je vous le disais tantôt, je
n'ai pas de statistiques et il m'est impossible de vous donner des
précisions sur cette question.
M. Fontaine: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire,
à la page 11, vous faites état des trois grands objectifs
poursuivis par la réforme auto-
mobile auxquels je souscris entièrement d'ailleurs:
premièrement, une meilleure indemnisation de toutes les victimes;
deuxièmement, une réduction sensible des primes;
troisièmement, une indemnisation plus rapide en ce qui a trait aux
dommages matériels. Dans les cas qui vous sont soumis vous avez
parlé de 80%, 90% des dossiers qui vous sont soumis, à l'occasion
d'accidents, pour étude, examen, évaluation, dans le cas
d'accidents d'automobiles...
M. Charbonneau (Marc): Vous voulez dire, votre pourcentage de
80%, 90%, par rapport à quoi?
M. Roy: Par rapport au nombre d'accidents. Autrement dit, les
dossiers qui sont portés à l'attention, que vous êtes
chargés d'examiner et pour lesquels vous devez faire un rapport.
M. Charbonneau (Marc): Le pourcentage est réaliste, je
pense.
M. Roy: Bon. C'est ce que j'avais d'ailleurs cru comprendre tout
à l'heure. Combien faut-il de temps, à partir du moment où
vous êtes avisés d'un accident, le temps minimum, pour être
en mesure de faire l'évaluation qui s'impose, de faire vos rapports et
vos recommandations aux compagnies? Combien cela prend-il de temps pour
examiner un dossier?
Mme Payette: M. le Président, si le député
de Beauce-Sud le permet, je pense que le chiffre de 90% qui a été
avancé par M. Charbonneau avait trait aux grilles d'évaluation et
non pas aux dossiers qui sont soumis aux experts en sinistres, à moins
que je n'aie fait une erreur.
M. Charbonneau (Marc): Exact. Mais le même pourcentage peut
quand même s'appliquer. Sur un nombre donné d'accidents, on est
appelé à intervenir entre 80% et 90% des cas probablement, le
reste étant des accidents très mineurs sur lesquels nous
n'intervenons pas. Mais Mme Payette a raison, le pourcentage tantôt
était à propos de la proportion que les grilles toucheront.
M. Roy: Ce n'est pas sur les grilles que je vais poser ma
question. Je voulais savoir, dans le régime actuel, quel était le
pourcentage des dossiers qui vous était référé.
M. Charbonneau (Marc): Sans doute entre 80% et 90%.
M. Roy: Pour ce qui a trait au temps, aux délais dont les
évaluateurs ont besoin pour faire leur rapport...
M. Charbonneau (Marc): Le temps minimum. M. Roy: Le temps
minimum peut être quoi?
M. Charbonneau (Marc): Tout dépend des circonstances, mais
cela peut être très court comme cela peut être très
long. Mais le temps minimum, où il n'y a aucun problème, je
dirais que, souvent, entre une semaine et dix jours, le rapport est
envoyé demandant les chèques. Mais cela peut aller jusqu'à
cinq ou six mois, aussi facilement que cela peut se régler très
rapidement.
M. Roy: En moyenne, selon votre expérience de 20
années, comment cela peut-il prendre de temps dans les dossiers? Je
comprends que vous en avez des longs et des plus courts, mais il y a quand
même... Si je pose cette question, c'est justement pour regarder les
problèmes qui sont les causes des longs délais dont beaucoup de
victimes d'accidents d'automobiles se plaignent au moment d'une
réclamation. Je veux, pour mon information personnelle et aussi pour
l'information des membres de la commission, voir, à votre niveau,
comment fonctionne le système actuel et, à partir du
fonctionnement du système actuel, la question des améliorations
qui pourraient être faites, sans verser dans le système
étatique ou le système à deux têtes?
M. Charbonneau (Marc): Quel que soit le chiffre que je vais vous
donner, il peut porter à des interprétations diverses. Avant de
vous le donner, j'aimerais préciser sur quelle base on s'entend. Sur
réception d'une réclamation, supposons l'automobiliste dont on
représente les assureurs, il est assuré pour ses propres
dommages, il est assuré pour collision. A ce moment, la plupart du
temps, la voiture est vue le lendemain, probablement, que la réclamation
nous est confiée. L'automobiliste n'a qu'à débourser son
déductible. Sur réception du compte de réparation le
garagiste est payé peut-être 30, 15 jours ou trois semaines
après. A ce niveau c'est rapide. Où cela l'est moins, souvent,
c'est au niveau de la détermination de la responsabilité
où, plutôt, je dirais pas tant au niveau de la
détermination de la responsabilité, mais au fait de la faire
accepter. Supposons que l'enquête nous révèle à ce
moment qu'on calcule que l'automobiliste pourrait être tenu à x%
responsable. L'autre automobiliste n'est souvent pas prêt à
l'accepter. Finalement, il y a des négociations qui se font. Au bout de
trois, quatre ou cinq semaines, il se décide à l'accepter.
Evidemment, si vous me demandez de vous donner un chiffre, cela
dépend de l'aspect de la réclamation. Quant à l'aspect de
la collision, l'assuré qui est habituellement couvert pour ses propres
dommages est réglé très rapidement.
En ce qui a trait à l'autre partie, cela peut être un peu
plus long, mais si cet automobiliste est également assuré pour
collision, il est réglé lui aussi rapidement par ses propres
assureurs. Ensuite, cela devient une négociation entre les deux
assureurs. Cela peut prendre encore plus de temps aussi. Vous donner un chiffre
à peu près, c'est alors très difficile.
M. Roy: Ce qui veut dire en somme qu'il n'y a peu près pas
de dossiers qui traînent plus longtemps que six mois chez les
évaluateurs?
M. Charbonneau (Marc): II y en a, mais c'est l'exception,
à ce moment.
M. Roy: A partir de là les dossiers sont remis entre les
mains des procureurs.
M. Charbonneau (Marc): Oui, et en plus il y a les dossiers de
blessures corporelles qui durent plus longtemps parce que les gens ne sont pas
toujours prêts à les régler à ce moment.
M. Roy: D'accord. A la page 15 de votre mémoire, vous
dites: "Le principe appliqué prévoit des indemnités qui,
dans certains cas, seront, à mon humble avis, certainement trop
élevées alors que dans d'autres, elles ne seront pas
suffisantes". Pouvez-vous me donner des exemples sur le plan pratique?
M. Charbonneau (Marc): J'en ai fait état à un
moment donné quand on prévoit indemniser mais j'ai
peut-être fait erreur, j'aimerais qu'on me l'explique un
étudiant mineur à raison de $80 par semaine quand il sera dans
une incapacité totale. Je me demande si le projet de loi prévoit
indemniser cet étudiant qui est victime d'un accident d'automobile au
moment où il devient totalement invalide, et ce pour toujours ou
à peu près pour toujours, où est-ce que, tel que je l'ai
mentionné dans mon mémoire, prenons le cas d'un enfant de
quatorze ou quinze ans qui se fait briser une jambe et qui est trois mois sans
aller à l'école, la loi prévoit lui donner $80 par
semaine? Si c'est le cas, je crois que c'est trop indemniser. En
définitive, c'est indemniser pour rien. Il n'y a pas de perte
financière.
M. Roy: Quant à cette question, ce serait l'honorable
ministre qui pourrait nous répondre quant aux intentions du gouvernement
relativement aux grilles d'évaluation et aux méthodes qui seront
utilisées quant à l'indemnisation des différentes
catégories de victimes.
J'aurai peut-être d'autres questions un peu plus tard, mais
à ce moment-ci, je laisserais la parole à d'autres.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Iberville.
M. Beauséjour: Merci, M. le Président. M.
Charbonneau, en page 10, et je vais en prendre des suivantes aussi, vous
indiquez en bas: "Certains Québécois seraient appelés
à débourser plus pour leur assurance qu'auparavant, alors que
pour la majorité le coût serait semblable". En page treize, vous
indiquez: "Je crois qu'il est évident qu'il en coûtera plus cher
pour tout le monde à partir du premier mars 1978". Il y a une
espèce de progression qui s'en vient. Si je continuais comme cela,
j'arriverais à vos propositions et je pourrais me dire que cela va
monter encore plus.
M. Charbonneau (Marc): Oui, il y a une espèce de
progression. J'ai l'impression que c'est peut-être le 2 mars 1978 qu'elle
va atteindre son but. J'ai l'impression très nette que de toute
façon c'est difficile de le prévoir cela ne
coûtera sûrement pas moins cher. Je ne le pense pas. D'ailleurs,
même M. de Coster n'a pas voulu se compromettre l'autre jour lorsqu'on
l'a interviewé à la télévision. Il disait que
globalement les primes seraient peut-être moindres, mais pour vous et moi
est-ce que cela va nous coûter le même prix, plus cher ou moins
cher? A ce moment, c'est bien difficile de le prévoir. De toute
façon, il n'y aura pas d'économie sustantielle au niveau de
chaque individu. Je ne le pense pas.
M. Beauséjour: On pourra peut-être y revenir
tantôt, mais à comparer aux suggestions que vous faites,
êtes-vous capable de faire un parallèle en tant que coût?
Est-ce que ce que vous proposez semble diminuer les coûts par rapport au
projet de loi 67 et au système actuel?
M. Charbonneau (Marc): Si vous lisez mon mémoire, je pense
qu'au niveau des coûts ce n'est pas tant la façon dont on voit
l'assurance, mais plutôt la fréquence d'accidents qui importe,
pour commencer. Qu'on réduise le nombre d'accidents par les mesures
appropriées et, à ce moment-là, forcément, quel que
soit le système, les primes vont coûter moins cher.
M. Beauséjour: Mais est-ce que vos propositions à
la page 19 supposent que cela aiderait à diminuer les coûts?
M. Charbonneau (Marc): Je n'ai aucune façon de
vérifier cela; je ne le sais pas, mais cela ne devrait pas coûter
plus cher que cela coûte actuellement.
M. Beauséjour: Ce qui revient à dire qu'on ne peut
pas se baser, en termes de coûts, sur l'un ou l'autre.
M. Charbonneau (Marc): Je ne le pense pas.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Premièrement, quel
pourcentage de vos dossiers je parle de tous les sinistres au
Québec implique des dommages corporels? Vous avez dit que, dans
votre propre bureau, c'est 65%; si on parle au niveau de toute la profession,
cela représente quel pourcentage des dossiers?
M. Charbonneau (Marc): Tantôt, j'ai mentionné que,
sur le volume du bureau chez nous, le nombre de dossiers qui ont rapport
à des accidents d'automobile, sans tenir compte de la distinction entre
dommages matériels et blessures corporelles, représentait de 60%
à 65%, le reste étant des réclamations sous des polices
feu ou vol, enfin. Votre question est-elle à propos de cela ou à
propos de la proportion blessures corporelles par rapport à dommages
matériels?
M. Shaw: Je parle de blessures corporelles. On parle d'assurance
automobile; on ne parle pas de vol ou du feu.
M. Charbonneau (Marc): Mon Dieu! 25% peut-être.
M. Shaw: Vous n'avez pas de chiffres exacts.
M. Charbonneau (Marc): Non, je n'ai pas de chiffres
là-dessus.
M. Shaw: Votre association va-t-elle présenter un dossier
ou un mémoire ici?
M. Charbonneau (Marc): Je ne le crois pas. Je ne sais pas si
l'association va en présenter; je ne le crois pas, non.
M. Shaw: Parce qu'il serait peut-être intéressant
pour la commission parlementaire de savoir le montant de travail prévu
pour le nouveau système de Régie de l'assurance automobile. Ce
n'est peut-être pas exactement le montant prévu par les
fonctionnaires qui s'occupent de cela.
Deuxièmement, il est bien dit que les retards dans
l'établissement des faits en ce qui a trait aux accidents avec blessures
corporelles est un gros problème au Québec et partout en
Amérique du Nord. Vous avez des retards, premièrement, dans les
cours. Comme experts en sinistres, quel pourcentage de vos dossiers a besoin
d'être acheminé vers les cours?
M. Charbonneau (Marc): 1% sans doute, pas plus de cela.
M. Shaw: Alors, 99%...
M. Charbonneau (Marc): ... se règlent en dehors des cours,
oui.
M. Shaw: ... sont réglés à
l'extérieur. M. Charbonneau (Marc): Oui.
M. Shaw: Pourquoi les retards? Personnellement, j'ai vu, parmi
les patients que j'ai soignés, des retards de deux ou trois
années avant que les indemnisations soient payées. Est-ce
seulement ceux qui sont en cour qui sont comme cela ou est-ce que cela arrive
même chez vous?
M. Charbonneau (Marc): Non, c'est-à-dire
qu'évidemment une réclamation pour blessures corporelles devient
prescrite au bout d'un an. Forcément, pour celles qui ne vont pas en
cour, les dossiers qu'on conserve sont réglés à
l'intérieur d'un an. S'ils sont réglés au bout de huit,
neuf ou dix mois seulement, la plupart du temps, c'est que la personne qui a
été blessée n'est pas prête à régler,
à ce moment-là. Elle préfère attendre quelque peu
afin de déterminer si sa situation va changer pour le mieux ou pour le
pire afin d'être indemnisée d'une façon qu'elle calcule
plus juste.
Maintenant, vous me posez la question à savoir pourquoi, par la
suite, cela peut prendre deux ou trois ans. Cela semble évident que les
cours de justice sont surchargées, mais probablement pas
nécessairement avec des accidents d'automobile. C'est pour cela que je
suggérerais, si la chose se fait, qu'un tribunal spécial pouvant
entendre les causes d'accidents d'automobile soit créé, de
façon à accélérer ces causes. Les causes
d'accidents d'automobile qui devraient être portées à la
cour seraient portées devant un tribunal spécial qui ne ferait
qu'entendre ces causes. Je pense, à ce moment-là, qu'elles
pourraient être entendues presque aussitôt qu'elles seraient
portées devant la cour.
M. Shaw: L'autre question, on parle maintenant du principe de "no
fault". C'est évident que si seulement 1% des cas est mieux
réglé avec "no fault", cela ne représente pas tellement
d'ouvrage, si nous pouvons trouver un autre moyen de régler les
problèmes pour donner plus d'équilibre dans les
indemnisations.
M. Charbonneau (Marc): Cela représente peut-être un
très petit pourcentage sur le volume, mais ce petit pourcentage inclut
habituellement les plus grosses réclamations. Le pourcentage est minime,
mais en termes financiers, cela représente pas mal plus d'argent que le
pourcentage de 1%, je crois. En somme, les réclamations qui sont
portées à la cour, ce sont des réclamations
d'importance.
M. Shaw: Cela implique une troisième question, parce qu'on
voit dans le projet de loi un maximum de $18 000 par année comme
indemnisation. Voyez-vous, dans votre profession, dans vos dossiers personnels
que vous avez suivis, des dommages plus élevés?
M. Charbonneau (Marc): Oui, forcément, il y en a de plus
élevés. Maintenant, ce montant de $18 000, je pense, a
été calculé en fonction d'un salaire moyen. Je ne sais pas
de quelle façon on l'a calculé. Il y en a forcément de
plus élevés. Je dois admettre qu'il va probablement satisfaire
une bonne partie de la population, forcément, qui ne gagne pas ou qui ne
gagne pas plus que $18 000 par année. Mais il reste quand même des
gens qui gagnent plus de $18 000 par année.
M. Shaw: A mon point de vue, la question du "no fault" même
est importante; en pratique, on demande à presque tout le monde
d'acheter $200 000 de protection d'assurance automobile. On ne voit pas souvent
des dommages matériels qui sont plus élevés que $10 000.
La différence est toujours la protection contre les dommages corporels
qui peuvent être impliqués.
M. Charbonneau (Marc): Exactement.
M. Shaw: Nous voyons que pour seulement les dommages
matériels, les $50 000 sont suffi-
sants, mais ici on parle d'un montant de $18 000. Les circonstances dans
lesquelles je voyage aux Etats-Unis, la régie paiera seulement le
montant qui est prévu dans la loi, peut-être jusqu'à $50
000 au maximum qui est demandé comme assurance, on voit maintenant des
"settlements" de $1 million. Pour être assuré, ai-je besoin
d'acheter une assurance en plus de celle qui est donnée par le
gouvernement par son projet de loi, pour être assez bien
protégé pour voyager à l'extérieur du
Québec, à votre point de vue?
M. Charbonneau (Marc): Si vous vous en tenez à ce que le
projet de loi exige, une assurance de $50 000, qui ne couvrirait au
Québec que les dommages matériels et qui, automatiquement,
à l'extérieur de la province s'ajusterait pour couvrir les
blessures corporelles et les dommages matériels au niveau minimum requis
par chaque Etat ou chaque province, je pense que le minimum, cela porte son
nom, c'est un minimum, vous devriez en avoir plus, parce que cela resterait un
minimum quand même.
M. Shaw: II s'agit d'avoir une base de $50 000 pour la protection
matérielle. Voyez-vous souvent des dommages matériels de plus de
$50 000? Premièrement, disons de plus de $10 000?
M. Charbonneau (Marc): C'est très rare. Quant aux dommages
matériels, pour couvrir tout le monde très adéquatement,
$25 000 seraient amplement suffisants.
M. Shaw: Vous pensez que le montant prévu par la
régie n'est pas adéquat pour la plupart des cas. Quel pourcentage
des cas?
M. Charbonneau (Marc): Dans quel sens posez-vous cette
question?
M. Shaw: Disons qu'un accident... M. Charbonneau (Marc):
Oui.
M. Shaw: ... qui implique à l'extérieur du
Québec des dommages corporels.
M. Charbonneau (Marc): C'est-à-dire que la limite de $50
000 prévue par la régie ne sera pas en dehors du Québec
obligatoirement $50 000. Elle doit s'ajuster, à ce moment, à ta
limite minimum de chaque Etat ou province. Mais $50 000, cela ne me semble pas
suffisant pour rouler en toute sécurité dans un Etat ou dans une
province où le système de responsabilités existe encore.
Je pense que $100 000 est un minimum requis à ce moment.
M. Shaw: Une dernière question sur votre
sécurité professionnelle. Il est évident que vous avez
fait la preuve que vous êtes demandés par la société
pour remplir un rôle qui est important? Est-ce que cela implique, pour le
coût de l'assurance, un gros montant d'argent? Est-ce qu'un tel pour-
centage d'une prime est prévu pour les services des sinistres?
M. Charbonneau (Marc): Je ne sais pas s'il y a eu des
statistiques de faites d'une façon séparée pour
déterminer que les experts en sinistres coûtaient X pour cent. Je
sais qu'on parle toujours de frais d'administration globaux, selon le
système actuel, qui incluent évidemment nos services, le service
de marketing, le service de courtage; mais je ne pense pas qu'il y ait de
chiffres de disponibles strictement pour ce que coûte l'expert en
sinistres, sur un dossier, en pourcentage; ce sont globalement les chiffres
qu'on donnait et qui faisaient partie des frais d'administration.
M. Shaw: Si on enlève la responsabilité de la
Commission des accidents du travail, si on dit, même avec la
régie, que les experts en sinistres peuvent fonctionner avec le
gouvernement, pensez-vous que c'est possible qu'ils occupent la même
fonction que maintenant?
M. Charbonneau (Marc): Pouvez-vous préciser un peu votre
question?
M. Shaw: Au lieu de dire que nous allons avoir un système
"no fault", vous aurez besoin de faire des enquêtes sur chaque cas.
Croyez-vous que c'est possible de faire cela avec les experts en sinistres du
Québec, qui sont disponibles maintenant partout au Québec, au
lieu de donner cette responsabilité à la Commission des accidents
du travail?
M. Charbonneau (Marc): Certainement parce que le réseau de
bureaux d'experts en sinistres indépendants s'étend partout au
Québec, dans les régions tout à fait
éloignées; partout où il y a un peu de population il y a
au moins un bureau d'experts en sinistres. Je pense qu'on pourrait
peut-être relier ces bureaux dans une espèce de corporation, tout
en conservant leur propre autonomie, et charger ces bureaux de s'occuper des
cas de la régie. Je pense que cela pourrait se faire très
facilement; de toute façon le réseau est déjà sur
place.
M. Shaw: Vous pensez que le service à la population sera
mieux fait?
M. Charbonneau (Marc): C'est-à-dire qu'il ne pourra
sûrement pas être pire puisqu'il est déjà là.
Le service est déjà sur place, alors il ne pourra sûrement
pas être pire.
M. Shaw: Avec mon expérience avec la Commission des
accidents du travail, cela n'est pas difficile d'être mieux.
M. Charbonneau (Marc): Je pense surtout au niveau des formules,
en fait. Il faut avoir transigé avec le public pendant 20 ans pour
savoir que les gens, dans la grande majorité des cas, n'ont absolument
aucune espèce d'idée à savoir comment on
remplit une formule. Je pense que ce seront des formules par-dessus des
formules que les gens ayant été victimes d'un accident
d'automobile vont devoir remplir pour avoir droit à une
indemnité, mais la plupart des gens ne peuvent pas ou ne veulent pas ou
n'aiment pas remplir des formules. En fait, à la Commission des
accidents du travail, il y a toujours quelqu'un qui représente
l'employeur qui peut aider l'employé à remplir lesdites formules,
mais, dans le cas d'un futur accident d'automobile, c'est l'individu
lui-même qui va devoir ramasser les faits et remplir sa formule de
façon à faire sa demande, mais de quelle façon ce sera
fait? Je me le demande. C'est pour cela que votre suggestion à propos du
réseau actuel des experts en sinistres pourrait être
intégrée au système prévu par la régie, de
façon à donner du service partout au Québec à tous
ceux qui sont victimes d'un accident d'automobile.
M. Shaw: Croyez-vous que cela va être demandé, mais
non pas dans une période prolongée, par la société?
Premièrement, les gens sont craintifs à l'endroit du gouvernement
et, deuxièmement, ils ont le problème, comme vous en avez
parlé, de remplir des formules pour être sûrs que tous les
montants des dommages auxquels ils ont droit seront bien payés. Leur
demande sera là bientôt.
M. Charbonneau (Marc): Je pense qu'il y a des gens qui auront
droit à des indemnités et qui ne les demanderont pas. C'est
possible que cela arrive, sûrement.
M. Shaw: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L' Islet.
Mme Payette: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait
d'apporter une information?
Une Voix: M. le Président, j'aimerais vous demander si
vous allez nous appeler avant une heure.
Le Président (M. Boucher): Ce sera certainement cet
après-midi, étant donné qu'on doit suspendre à
treize heures.
Une Voix: Alors, nous pouvons nous retirer et revenir à
trois heures?
Le Président (M. Boucher): D'accord. Une Voix:
Merci.
Mme Payette: M. le Président, je désirerais
apporter une information pour les membres de la commission, à partir de
chiffres qu'on peut trouver dans le rapport Gauvin. M. Charbonneau nous disait
ne pas connaître le pourcentage des frais d'administration des compagnies
d'assurance qui servent au règlement des sinistres. Là, on parle
des ex- ports en sinistres et des avocats. Cela totalise 12,3%, pour un grand
total, si on ajoute les avocats, de 14%. On évalue l'intervention d'un
expert en sinistres à une moyenne de $90 par intervention. On a
souligné tout à l'heure le fait qu'il peut y avoir trois
véhicules impliqués dans un accident et cela représente
trois experts en sinistres à une moyenne de $90 chacun.
Le but de l'intervention du gouvernement était bien de faire
baisser les prix. M. Charbonneau vient de nous confirmer que nous avions
raison.
M. Charbonneau (Marc): Je n'ai pas mentionné de
chiffre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Oui, ma question se rapporte à la solution de
rechange que vous proposez à la page 18 de votre mémoire. Dans
votre solution de rechange, si je comprends bien, vous apportez peu de
changements par rapport à ce qui existe présentement dans le
secteur de l'automobile. Tout ce que vous proposez, c'est de maintenir le
schéma général d'une police d'assurance automobile en y
apportant une modification, celle du chapitre B.
M. Charbonneau (Marc): Disons que je ne suis pas tout à
fait d'accord avec vous. Je conserve le principe de base, mais je
suggère quand même que l'assurance soit rendue obligatoire, d'une
part, et que, d'autre part, le chapitre B également soit obligatoire et,
enfin, que les indemnités prévues soient augmentées.
M. Giasson: Croyez-vous que votre solution de rechange, pour les
bénéficiaires du régime ou pour les automobilistes
plutôt, contribuerait à réduire les primes par rapport au
système qui existe en ce moment?
M. Charbonneau (Marc): Je ne crois pas, pas plus d'ailleurs que
je ne crois que le système du gouvernement réduira les primes non
plus. Je pense que les primes devront être réduites par le facteur
accident. S'il y a moins d'accidents, les primes seront moins dispendieuses. Le
système que je préconise devrait coûter à peu
près le même prix que le système actuel.
M. Giasson: Vous ne seriez pas plutôt d'avis que cela
coûterait un peu plus cher?
M. Charbonneau (Marc): Pour quelle raison?
M. Giasson: Vous appliquez un chapitre B obligatoire pour tout le
monde et qui va procéder au paiement des indemnités sans tenir
compte de la responsabilité. Vous n'avez pas de droit de recours de
subrogation à l'intérieur de cela; donc, cela veut dire que, dans
votre solution de rechange, il y aurait des victimes qui recevraient des
compensations à la suite d'un accident où l'automobiliste n'aura
aucune responsabilité.
Donc, si vous payez des compensations sans tenir compte de la
responsabilité, au chapitre B, je ne peux pas concevoir qu'il n'y ait
pas d'augmentation de coûts, à la prime applicable au chapitre B
par rapport à ce qu'on a présentement.
M. Charbonneau (Marc): Mais, de toute façon, ma solution
de rechange prévoit également l'assurance obligatoire, et vous
allez chercher, avec cela, un nombre quand même assez considérable
de primes qui vont grossir la masse globale de primes et qui, une fois
répartis sur l'ensemble des automobiles, devraient, je pense, ramener
les primes à peu près au niveau où elles sont
actuellement.
M. Giasson: Mais je considère que votre déduction
part d'un fait, celui qu'en rendant l'assurance obligatoire, vous allez
souscrire des primes additionnelles, mais c'est valable, votre point de vue, si
ceux qui ne sont pas assurés et qui, dans un régime obligatoire,
vont contribuer à l'ensemble du volume primes, représentent ce
qu'on appelle des bons risques. Par contre, si ce sont plutôt des mauvais
risques qui ne souscrivent pas à l'assurance et qui gardent les
mêmes habitudes, les mêmes comportements comme automobilistes,
comment pouvez-vous concevoir que la venue de ces gens-là à
l'intérieur du régime de façon obligatoire et leur
souscription de primes peuvent améliorer ou diminuer le coût
d'ensemble de fonctionnement, si ce sont des mauvais risques ou des gens qui
ont tendance à apporter plus d'accidents à l'intérieur du
régime que la moyenne de ceux qui y sont déjà?
M. Charbonneau (Marc): Je pense que, de toute façon, on ne
peut pas déterminer, à ce stade-ci, si les automobilistes ou dans
quelle proportion les automobilistes qui ne sont pas assurés
actuellement sont ou ne sont pas des bons ou des mauvais risques, mais une
chose est sûre, c'est qu'actuellement les automobilistes non
assurés coûtent quand même de l'argent au régime
puisqu'ils sont quand même victimes d'accidents et, étant
victimes, ils coûtent de l'argent au régime. Donc,
forcément, en les incorporant, en rendant l'assurance obligatoire, je
pense que tout devrait à peu près s'équilibrer et que la
prime de chaque individu ne serait pas plus dispendieuse qu'elle ne l'est
actuellement.
M. Giasson: Mon expérience m'a toujours
révélé, depuis plusieurs années, que, très
souvent, parmi ceux qui ne sont pas assurés, pour un bon pourcentage, ce
sont des gens que les compagnies ne veulent même pas avoir comme
assurés. Souvent, ce sont des gens qui se font refuser de l'assurance
par beaucoup d'assureurs.
M. Charbonneau (Marc): Oui, sûrement, qu'il y a une bonne
proportion...
M. Giasson: S'ils étaient des bons risques, je ne verrais
pas pourquoi les compagnies se désis- teraient de ces demandes
d'assurances venant de ces citoyens.
M. Charbonneau (Marc): Je pense que ce n'est pas la seule raison
pour laquelle les gens ne sont pas assurés. Ce ne sont pas tous des gens
dont les compagnies n'ont pas voulu comme assurés, sûrement
pas.
M. Giasson: Non, non, pas tous, mais vous reconnaîtrez
qu'il y en a une partie tout de même.
M. Charbonneau (Marc): A ce moment-là, cela devrait
s'équilibrer. D'accord. D'accord.
De toute façon, je n'ai pas de statistiques là-dessus, je
ne sais pas, mais je pense que cela devrait s'équilibrer. Il y a
sûrement des mauvais risques et de très mauvais risques parmi
ceux-là, comme il y a sûrement des risques très bons ou des
risques moyens et cela devrait s'équilibrer.
M. Giasson: Dans votre suggestion, dans votre solution de
rechange, vous êtes d'avis que, si c'était appliqué, ce
serait, au point de vue de la qualité d'indemnisation des victimes
d'accidents d'automobiles, au point de vue d'une meilleure application d'une
justice sociale la plus totale qu'on puisse espérer, votre
régime, à ce niveau, à ce point de vue, serait aussi
valable que la réforme proposée par le ministre des
Consommateurs.
M. Charbonneau (Marc): C'est-à-dire qu'on est sans doute
devant deux inconnues et il faut essayer une chose pour vraiment
déterminer si c'est bon ou si ce n'est pas bon. Je me dis qu'avant de
changer radicalement un système que l'on connaît depuis longtemps,
cela vaudrait peut-être la peine d'essayer de le modifier un tant soit
peu et, si cela ne fonctionne pas, au bout de quelques années, il sera
toujours temps de penser à le changer radicalement. En
définitive, il y a toujours quelque chose de bon dans quelque chose;
essayons plutôt d'éliminer ce qui n'est pas bon avant d'absolument
tout changer.
M. Giasson: Vous croyez surtout que la réforme va trop
vite et trop loin dans une même opération?
M. Charbonneau (Marc): Je pense que oui, et peut-être trop
loin inutilement en somme.
M. Giasson: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: J'ai particulièrement réagi aux
dernières pages de votre mémoire où vous dites qu'il
serait immoral pour un gouvernement social-démocrate de ne pas tenir
compte des pertes d'emplois qu'il pourra provoquer. Là-dessus, je suis
porté à vous donner raison. Là où je ne marche pas,
c'est dans la deuxième partie de votre mémoire où vous
nous dites que la réforme ne
remplira pas ses objectifs. J'ai l'impression que vous nous fabriquez un
système. Ce que vous nous proposez, je pense que cela ne diminuera pas
les primes non plus. Je pense que mon collègue de Montmagny-L'Islet a
donné suffisamment d'exemples là-dessus, et cela n'assurera pas
que tout le monde va être indemnisé. J'ai eu, depuis le 15
novembre, deux cas de personnes qui sont venues à mon bureau, où
le mari avait été tué dans un accident d'automobile et les
femmes, de 50 et 55 ans, qui ne pouvaient donc retourner sur le marché
du travail, ont été obligées d'attendre trois et cinq
ansparce que dans un cas c'était trois ans et dans l'autre
c'était cinq ans avant d'être indemnisées. Dans
votre cas, même si vous avez un tribunal spécial, cela va
accélérer un peu. Mais je dis que même une femme qui est
deux ans sans aucun revenu, je ne trouve pas cela acceptable. Je trouve cela
encore plus immoral que ce qu'un gouvernement social-démocrate pourrait
faire vis-à-vis de l'emploi.
M. Charbonneau (Marc): Si vous permettez, avec le chapitre B qui
devient obligatoire, cette femme toucherait à ce moment-là quand
même l'indemnité de base de décès qui serait de $10
000. Elle la toucherait immédiatement. Elle aurait la possibilité
de poursuivre par la suite si sa réclamation valait plus que ce
montant-là. Elle toucherait quand même de l'argent et c'est
pourquoi, dans le projet que je propose, je prévois le chapitre B
obligatoire pour éviter des situations comme celle que vous
mentionnez.
M. Paquette: Oui, mais dans quel délai recevra-t-elle les
$10 000?
M. Charbonneau (Marc): Avec le chapitre B, cela peut être
très rapidement. Il n'y a pas de problème là. Comme je le
mentionnais, en fait, si, par la loi, les compagnies d'assurances sont tenues
à payer plus rapidement ou du moins à nous autoriser à
payer plus rapidement, qu'on nous munisse de traites et qu'on puisse payer
rapidement, forcément que les victimes seraient indemnisées en
dedans de 15 jours. Pas d'erreur là.
M. Paquette: Je pense que le principal point sur lequel vous
mettez l'accent dans votre proposition, c'est une réduction du nombre
d'assurances. Bien sûr, il y a une grande partie de l'augmentation des
primes qui est là, mais je pense que dans le rapport Gauvin on disait
que, sur la période étudiée, de 1961 à 1971, il y
avait une augmentation des primes autour de 112%.
Par contre, il y avait eu une augmentation du nombre d'accidents de
seulement 30%. Donc, le coût res réparations y est pour beaucoup.
Le salaire des intermédiaires y est pour beaucoup également.
C'est peut-être là l'essentiel de l'augmentation des primes. C'est
bien sûr qu'il faut mettre de l'avant des mesures de
sécurité routière.
Ce que je trouve un peu contradictoire dans votre mémoire, c'est
que, dans la deuxième partie, vous nous faites un régime qui,
évidemment, a l'avantage de préserver le même nombre
d'experts en sinistres. J'ai l'impression que c'est dans la mesure où on
va réduire le nombre d'intermédiaires qu'on va pouvoir
réduire les coûts. C'est, d'ailleurs, ce que le rapport Gauvin
dit; il propose toute une série de mesures pour réduire le nombre
d'intermédiaires de façon à réduire les
coûts.
Le meilleur exemple que vous m'avez donné, dans une
réponse que vous avez donnée tantôt, c'est que vous me
dites: Le temps pour régler, un dossier, pour un expert en sinistres,
n'est pas surtout dû à l'évaluation. La réforme,
tout ce qu'elle vous enlève avec une grille, c'est l'évaluation.
Vous dites: C'est surtout dans la détermination de la
responsabilité des blessures corporelles.
M. Charbonneau (Marc): Oui. J'ai mentionné
également, par ailleurs, que souvent, dans le cas de blessures
corporelles, les gens ne veulent pas que ce soit réglé
immédiatement, préférant justement prendre le temps qu'ils
peuvent prendre. Il ne faut pas interpréter les statistiques d'une
manière absolue. Vous avez entièrement raison, mais je veux
simplement vous mentionner que souvent les délais sont provoqués
par les victimes elles-mêmes, en somme.
Question de dommages matériels, si les deux automobilistes sont
assurés pour collision, les deux automobilistes ne sont aucunement
pénalisés par le système de faute, puisqu'ils sont
indemnisés par leurs propres assureurs. Le délai qui intervient
par la suite, c'est souvent au niveau des assureurs, si les deux automobilistes
sont assurés pour leurs propres dommages en cas de collision. Alors, on
ne peut pas interpréter les statistiques d'une façon absolue.
M. Paquette: J'en conclus de cette affirmation que vous avez
faite qu'on aurait peut-être même avantage à étendre
la responsabilité au matériel. Notre objectif est de
réduire les coûts et d'avoir une indemnisation rapide. J'irais
plutôt dans le sens diamétralement opposé à celui de
votre réforme, quitte à prévoir un recyclage des gens qui
vont perdre leur emploi en vertu du régime.
M. Charbonneau (Marc): Vous avez mentionné tantôt
que Gauvin faisait état de la très grande augmentation des primes
par rapport au nombre d'accident. C'est un fait également que ce n'est
pas simplement les intermédiaires qui sont à blâmer. Il y a
également le coût des réparations dont il faut tenir
compte.
J'ai mentionné, dans mon mémoire, que mon intervention a
deux buts principaux. En somme, il aurait peut-être fallu que je n'en
fasse qu'un point; le premier point était la perte d'emploi. L'un ne va
pas sans l'autre peut-être, mais je pense que ce sont deux buts
très différents que je visais. Le premier était la perte
d'emploi par les experts en sinistres, et le deuxième était
qu'à mon avis il y aurait eu d'autres façons pour atteindre les
objectifs visés par la réforme. C'étaient deux
interventions, j'y vois une espèce de séparation, cela se
rejoint, à un moment donné, mais c'est quand même
séparé.
M. Paquette: Je veux mettre en évidence le fait qu'on ne
peut pas vraiment réduire les primes il faut être tous bien
conscients de cela et indemniser rapidement s'il n'y a pas un certain
nombre de réductions de coût ou de personnel. Si on augmente, par
exemple pour pousser cela à la limite on pourrait dire
qu'on ne fera pas de programme de prévention d'accidents parce que cela
va réduire l'emploi dans les petites et moyennes entreprises que sont
les garages. On n'est quand même pas pour faire cela.
Je trouve que la solution que vous apportez ne règle qu'un
problème, c'est celui de l'emploi des experts en sinistres alors qu'il
faudrait le régler autrement. D'ailleurs, j'aimerais avoir votre opinion
là-dessus, lors des audiences publiques...
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, M. le
député, il est 13 heures. Les membres de la commission
désirent-ils continuer pendant quelques minutes de plus ou revenir?
M. Roy: J'aurais d'autres questions à poser, si M.
Charbonneau n'a pas d'objection...
M. Paquette: On aurait pu finir très rapidement.
M. Roy:... pour revenir à 15 heures, on pourra reprendre
nos travaux.
M. Charbonneau (Marc): Je dois partir pour Hull. Je ne sais pas
si vous en avez pour longtemps, je dois partir.
M. Roy: Si vous avez des objections, je suis bien prêt, en
ce qui me concerne, à donner mon consentement pour qu'on retarde de cinq
ou dix minutes, si c'est nécessaire. Je n'ai qu'une couple de questions
à poser.
M. Paquette: Quant à moi, je peux me limiter
peut-être à une autre question.
Le Président (M. Boucher): Du consentement des membres,
nous allons prolonger jusqu'à 13 h 10.
M. Paquette: Je reviens sur le problème de la perte
d'emploi des experts en sinistres, je pense que c'est le mérite de votre
mémoire de nous le mettre en évidence. Ce point a
été mis largement en évidence durant les audiences aussi.
Lors de ces audiences, l'Association des agents de réclamations du
Québec a déclaré, sauf erreur, que les experts peuvent
s'intégrer au système proposé et demande au gouvernement
de prendre leur situation en considération. L'association
suggère, par exemple, d'accréditer les experts comme
intermédiaires entre l'accidenté et la régie. On a
parlé aussi d'un recyclage des experts dans le domaine de la
prévention des accidents, et il y a peut-être un rôle au
niveau des centres d'évaluation aussi qui vont être
créés par la loi.
Ensuite, je regarde ces 60% de vos affaires qui sont dans l'automobile,
d'autre part, le système ne vous élimine pas totalement de
l'évaluation...
M. Charbonneau (Marc): Comme je l'ai mentionné
tantôt...
M. Paquette: Combien avez-vous évalué d'emplois qui
pourraient être mis en jeu? Je dirais 300, peut-être.
M. Charbonneau (Marc): Disons que si on parle strictement des
experts en sinistres et si on établit le chiffre à 1000, je pense
qu'il y en a 500 ou à peu près, au bas mot 500 qui n'auront plus
de travail, forcément. Comme je l'ai mentionné tantôt, il y
a actuellement, en plus des experts en sinistres indépendants, des
experts en sinistres à l'emploi des compagnies d'assurance qui,
actuellement, ne font pas d'autres sinistres que les sinistres d'automobiles.
Les compagnies, puisque c'est leur propre personnel, sont à les
recycler, à ce moment, pour qu'ils puissent s'occuper de sinistres
d'autres catégories.
Forcément, si ces sinistres d'autres catégories
étaient donnés aux indépendants, selon le système
actuel, ils ne le seront plus avec le nouveau système. C'est autant de
travail de moins, également, en plus de ce qu'on enlève
directement. Mais quand vous disiez tantôt que l'association a fait
état que nous pourrions nous intégrer au système, c'est ce
que je mentionnais. J'aimerais que le gouvernement le reconnaisse et qu'il y
ait quelque chose de positif qui soit fait de façon à
éviter que des gens, en somme, perdent leur emploi, perdent leur
gagne-pain dans le contexte actuel. Qu'on fasse ce qu'on voudra, mais qu'on
fasse quelque chose pour nous aider à gagner notre vie par la suite.
C'est tout.
M. Paquette: J'aimerais mieux cela que le système que vous
nous proposez dans la deuxième partie de votre rapport.
M. Charbonneau (Marc): D'accord, mon Dieu.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. Je vais essayer de faire
cela très brièvement. Pour bien comprendre le mémoire, et
je pense que M. Charbonneau l'a assez bien expliqué, il s'agit, d'une
part, de regarder quelles sont les implications pour eux-mêmes, ce qui
est bien normal. Quand les gens de Domtar viennent ici, quand les gens de la
Waya-gamack, quand les gens de Tricofil et les autres qui se sentent
lésés ou craignent de perdre leur emploi se présentent
devant le gouvernement pour faire connaître leur point de vue, je pense
que c'est une situation et ce doit être un fait qui ne doit scandaliser
personne.
Maintenant, le commentaire que j'ai à faire à ce niveau-ci
n'a pas pour objet précis de protéger, de voir à garder la
situation des experts en sinistres. Mais j'aimerais bien qu'on se pose une
ques-
tion en commission parlementaire. C'est qu'à partir du moment
où on élimine les intermédiaires qui sont
rémunérés de façon forfaitaire, comme l'a dit
l'honorable ministre tout à l'heure, tel qu'il a été
mentionné dans le rapport Gauvin, il y a quand même quelqu'un
quelque part qui va faire leur travail. Qui va faire le travail? Comment on va
le faire? Est-ce qu'il y aura des économies? Prenons le cas de la
Commission des accidents du travail je prends cela à titre
d'exemplele "no fault" s'applique. Il n'y a jamais de réclamations
qui sont faites à l'endroit des employeurs ou à l'endroit des
personnes qui sont la cause des accidents.
Combien coûte l'évaluation et la préparation d'un
dossier? D'accord, il n'y a pas de forfaitaire, cela ne peut pas se calculer de
la même façon qu'on va calculer un forfaitaire dans le cas d'une
entreprise qui engage quelqu'un. Il y a quand même quelqu'un qui le fait
quelque part.
Compte tenu du fait que si le régime proposé est maintenu
tel quel, il ne faudra pas oublier qu'il y aura compilation de deux dossiers en
cas de réclamation s'il y a dommages corporels et s'il y a effectivement
dommages matériels. Sur ces deux dossiers, il y aura deux
enquêtes, il y aura deux personnes distinctes qui seront appelées
à examiner le dossier. Est-ce que le fait d'éliminer dans la
majeure partie et dans la majorité des cas les experts en sinistres et
qu'on les remplace par des personnes qui vont travailler à d'autres
niveaux, selon d'autres méthodes, va être effectivement une
économie pour les victimes d'accidents d'automobile et pour les
assurés? Je pense que c'est la question que nous devons nous poser et,
à ce moment, il est assez difficile d'avoir des chiffres précis.
C'est pourquoi je veux en profiter, en passant, pour remercier M. Charbonneau
de l'excellent mémoire qu'il nous a présenté, des points
de vue qu'il nous a soumis, ici à la commission, et je suis
assuré qu'en ce qui me concerne, le contenu de son mémoire va
sûrement m'aider dans la poursuite des travaux de la commission
parlementaire et aussi lors de l'étude et l'examen de la loi article par
article.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: II y a un autre élément que
j'aimerais ajouter à ceux apportés par le député de
Beauce-Sud, c'est qu'il faut aussi penser qu'il y a des pensions, des
annuités qui vont être payées et comme les dossiers de la
Commission des accidents du travail vont très probablement rester
ouverts, il y aura toujours, d'année en année, un droit d'appel;
si la victime croit que son cas s'est détérioré, elle
pourra passer d'autres examens médi- caux et recommencer toute la
procédure; alors, les dossiers ne seront jamais fixés; les
indemnités ne seront jamais fixées d'une façon
définitive; quelqu'un va avoir des formules à remplir, non pas
simplement lors de l'accident, mais il y en aura probablement au cours de
toutes ces années pendant lesquelles les indemnités seront
payées. C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, je voudrais remercier M.
Charbonneau, qui a bien défendu son point depuis plusieurs mois. Je ne
suis cependant pas sûre qu'il aura atteint le but qu'il visait; il a
peut-être justement atteint le but contraire, mais je voudrais quand
même lui répéter ce que j'ai déjà dit aux
experts en sinistres aussi bien qu'aux courtiers: Je voudrais que vous soyez
assurés que le gouvernement est conscient de l'intervention qu'il fait
dans le domaine de l'assurance automobile et qu'il tient compte des gens qu'il
touche. Je voudrais cependant aussi bien dire qu'il n'est pas question de
mettre les courtiers en dehors de l'assurance automobile pas plus que les
experts en sinistres; qu'il est question de supprimer les abus d'intervention
des intermédiaires dans ce domaine et que, à plusieurs reprises,
il m'a été donné de vous expliquer que, au fur et à
mesure que les centres d'évaluation seront construits, nous tenterons de
donner priorité à ceux qui auront été
touchés par la réforme.
Nous aurons besoin d'experts en sinistres pour se rendre dans des lieux
éloignés des centres d'évaluation et toujours c'est
une préoccupation constante pour le gouvernement nous ne perdons
pas de vue que l'intervention que nous faisons va toucher un certain nombre de
personnes. Nous savons à peu près, d'ailleurs, dans quels
pourcentages, qui ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux
que vous mettez de l'avant, mais nous en sommes conscients.
A ce niveau, je voudrais vous rassurer et vous dire que cela reste une
préoccupation et qu'au fur et à mesure nous arriverons ensemble,
si vous êtes prêts à collaborer, à trouver des
solutions.
Merci, M. le Président.
M. Charbonneau (Marc): Je remercie Mme le ministre.
Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de
la commission, je remercie M. Charbonneau.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 8)
Reprise de la séance à 15 h 6
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
A la suspension de ce matin, nous avions terminé avec M. Marc
Charbonneau de la firme Renaud et Sénécal. Présentement,
ce serait l'Association des propriétaires d'autobus du Québec,
représentée par M. Wilbrod Bhérer, mais avant de
céder la parole à M. Bhérer, Mme le ministre voudrait
faire une communication.
Précisions au sujet de la régie
Mme Payette: Je m'excuse auprès de l'association, je dois
prendre juste quelques minutes pour informer la commission des réponses
que la commission attend au sujet de la régie. La régie compte
actuellement un président, M. De Coster, nommé pour cinq ans;
comme vice-président on y retrouve M. Gérard Barbin,
sous-ministre en titre du ministère des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières; M. Ghislain Laflamme,
directeur du Bureau des véhicules automobiles; M. Jacques Roy,
surintendant des assurances, et M. Robert Sauvé, président de la
Commission des accidents du travail. Ces quatre personnes sont nommées
jusqu'au 1er mars 1978.
Le secrétaire est Me Suzanne Masson, sans délai, puisque
Mme Masson est fonctionnaire. A la deuxième question, le ministre des
Finances a prêté à la régie $1,5 million au taux de
9 1/2% à titre d'avance. Il y a une troisième question
également, si mes souvenirs sont précis, au sujet des ententes
conclues par la régie. La régie n'a conclu aucune entente. Elle
négocie présentement avec la Commission des accidents du travail,
avec d'autres organismes, mais aucune entente définitive n'a
été conclue.
M. Roy: Est-ce qu'on pourrait me permettre une question s'il vous
plaît?
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: On m'informe qu'il y aurait 130 personnes environ qui
actuellement auraient reçu un avis, à la Commission des accidents
du travail, leur disant qu'elles ne pourraient plus travailler à
l'avenir à la Commission des accidents du travail. Mes informations ne
sont peut-être pas officielles, mais je peux vous dire qu'elles sont
officieuses. J'aimerais savoir si la régie négocie; à ce
moment-là elle pourrait retenir les services de ces personnes, si cela
fait partie d'un plan d'ensemble, pour que ces personnes puissent être
mutées à la régie par la suite. Disons que c'est entendu
que pour répondre à la question sur la Commission des accidents
du travail, il faudrait poser la question au ministre du Travail mais pour ce
qui regarde la régie, est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des
négociations à ce niveau également?
Mme Payette: Je ne peux pas vous répondre, pour l'instant,
M. le député, je me ferai un plaisir de m'informer.
M. Roy: D'accord. Maintenant, une dernière question,
l'article 27 de la loi dit ceci: "La présente loi entrera en vigueur
à la date qui sera fixée par proclamation du gouvernement,
à l'exception des articles exclus par cette proclamation, lesquels
entreront en vigueur à toute date ultérieure qui pourrait
être fixée par proclamation du gouvernement".
Mme Payette: Vous parlez de quelle loi, M. le
député?
M. Roy: Je parle de la loi no 49. Est-ce que...
Mme Payette: Oui, ce n'est pas celle qu'on étudie ici,
là, excusez-moi.
M. Roy: Non, mais il est bien dit que l'Assemblée
nationale doit être informée au fur et à mesure de ce qui
se passe à la régie.
Mme Payette: Exact.
M. Roy: Comme l'Assemblée nationale ne siège pas et
que la commission parlementaire siège, je pense que c'est la seule
occasion que nous pouvons avoir de savoir ce qu'il en est au juste.
Mme Payette: Comme on sait qu'il y aura reprise des travaux le 18
octobre, il sera possible d'informer l'Assemblée nationale. Pour
l'instant, les informations que je vous transmets sont celles dont nous
disposons.
M. Roy: Mais vous ne pouvez pas me dire si la loi est
entrée en vigueur actuellement par proclamation?
Mme Payette: Le 1er septembre, c'est cela.
M. Roy: Elle est entrée en vigueur.
Mme Payette: La loi 49.
M. Roy: Est-ce qu'il y a eu des articles retenus ou si ce sont
tous les articles?
Une Voix: Tous.
M. Roy: Au complet. Merci.
Le Président (M. Boucher): Alors, sans plus tarder, je
cède la parole à M. Bhérer.
Association des propriétaires d'autobus du
Québec
M. Bhérer (Wilbrod): M. le Présidant, madame,
messieurs, nous vous remercions de l'invitation transmise par Mme Payette,
ministre des
Consommateurs, Coopératives et Institutions financières,
qui nous permet de venir, devant vous cet après-midi, discuter avec
vous...
Le Président (M. Boucher): M. Bhérer, pourriez-vous
approcher votre micro un peu plus, s'il vous plaît!
M. Bhérer: ... du projet de loi concernant l'assurance
automobile. Sont ici avec moi, de l'Association des propriétaires
d'autobus parce que je voulais être sûr que j'aurais des gens
avec moi M. Jacques Fournier, le président de l'association, des
Autobus Fournier; M. Paul Noreau, le secrétaire; M. Marcel Crevier,
président du comité qui a travaillé à la
préparation de ce mémoire; il est directeur général
de la compagnie Métropolitain Sud; M. Normand Denault, membre du
comité, qui est vice-président de Voyageur; M. Roger Deshaies,
des Autobus Deshaies qui est, lui aussi, membre du comité et
président des Autobus Deshaies.
Caractère représentatif de l'association. Les membres de
l'Association des propriétaires d'autobus du Québec
représentent la presque totalité des entreprises de transport en
commun au Québec, à l'exception des commissions de transport des
communautés urbaines. Ils mettent au service du public plus de 2000
autobus et leurs activités s'exercent à la fois dans les services
réguliers sur horaire ou irréguliers, le transport des
écoliers et les opérations en voyage spécial ou à
charte-partie, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur
de la province.
Notre but, en venant devant vous, M. le Président, madame, ce
n'est pas de critiquer la loi, c'est de vous aider à faire la meilleure
loi possible. Nos représentations sont à cet effet.
Nous avons divisé notre travail ainsi: dommages corporels:
dommages matériels.
Dommages corporels. A la commission parlementaire itinérante,
nous avions soulevé plusieurs questions quant à l'application du
régime, aux transporteurs publics et plus particulièrement quant
à leurs responsabilités intra et extra-provinciales.
Le projet de loi tente de répondre aux préoccupations de
notre industrie et nous commenterons les stipulations qui nous concernent
davantage, plus particulièrement, les articles 6, 7, 8, 102, 128 et
130.
L'article 6, il faut toujours le lire en fonction de l'article 4, qui
est l'article communément appelé le "no fault", pas de
responsabilité: "L'indemnisation bénéficie à toute
victime résidant au Québec et à ses personnes à
charge, que l'accident ait eu lieu au Québec ou hors du
Québec".
C'est une des préoccupations que nous avions soulevées
lors de notre audition devant la commission itinérante. Je vois qu'on y
a répondu.
Il en résulte que le voyageur résident je donne la
définition transporté par un autobus est victime d'un
accident survenu dans ou hors de la province de Québec aura droit
à une indemnité. Ceci nous préoccupait beaucoup, parce que
nous allons en dehors de la province de Québec avec des voyageurs qui
partent de Québec ou non des Québécois et si nous avions
un accident en dehors de Québec nous avions craint que ces gens ne
soient pas indemnisés. Alors la loi dit maintenant que les
résidents de Québec qui voyageront dans un véhicule de
Québec à l'extérieur de la province, tombent sous le coup
de la loi et seront indemnisés. Cela nous donne satisfaction pour les
résidents de Québec tout au moins, mais cela ne nous
enlève pas la responsabilité. On verra plus loin, quant aux gens
qui ne seront pas résidents de Québec et qui sont à
l'extérieur d'un de nos autobus à l'extérieur de
Québec et qui sont victimes de dommages corporels. Ceux-là ne
seront pas indemnisés en vertu du projet de loi. Cela nous cause des
problèmes. Vous verrez cela plus tard. Je signale tout simplement le
fait.
L'article 7 dit: "La victime d'un accident survenu hors du
Québec, qui a droit à l'indemnisation prévue au
présent titre peut bénéficier de celle-ci tout en
conservant ses recours pour l'excédent en vertu de la loi du lieu de
l'accident". On ne fait pas de distinction quant au recours à exercer,
dans ce cas, contre soit le résident ou soit le non-résident.
Cela veut dire qu'il aura un recours contre celui qui sera responsable
de l'accident, si c'est un résident, comme si ce n'était pas un
résident, et on le voit d'ailleurs plus loin. "Nonobstant l'article 4,
la régie qui indemnise une victime en vertu du présent article
est subrogée dans les droits de celle-ci et peut recouvrer les
indemnités ainsi que le capital représentatif des rentes qu'elle
est ainsi appelée à verser, de toute personne y compris le
résident qui est censé ne pas être passible de recours, en
vertu de l'article 4 qui, en vertu de la loi du lieu de l'accident, est
responsable de cet accident ou de son indemnisation".
Le résident victime d'un accident dans lequel il subit des
dommages corporels hors du Québec aura, en vertu de l'article 7, droit
à un recours pour une indemnité additionnelle contre celui qui
aura été la cause de l'accident, incluant un résident, et,
par voie de conséquence, le transporteur, si en vertu de la notion de
responsabilité il considère qu'il a un droit à une
indemnité supérieure à celle que lui accorde le
régime. Le transporteur et le résident qui sont victimes d'un
accident où ils subissent des blessures à l'extérieur,
pour le résident surtout, auront droit à un recours contre la
personne qui aura été responsable, en sus de l'indemnité
qu'ils recevront en vertu du plan d'assurance de Québec.
Il nous semble anormal, cependant et c'est là que nous
intervenons que ce recours contre un résident du Québec
assuré en vertu du plan puisse être conservé dans un
contexte de non-responsabilité applicable à celui qui a perdu
tout recours et contre lequel on ne peut exercer aucun recours au
Québec. Il nous semble anormal que quelqu'un qui serait cause d'un
accident en dehors du Québec et qui a été indemnisé
lui-même par le plan d'assurance du Québec, qui est couvert par le
plan d'assurance du Québec, puisse être poursuivi en dommages
malgré l'article 4. A quoi sert de s'assurer, si on reste responsable?
D'autant plus que cette loi enlève, aux termes de l'arti-
de 4, tout recours par la victime contre quiconque est responsable d'un
accident. Je n'ai pas à vous relire l'article 4 qui dit:
"L'indemnisation tient lieu de tous les droits, recours et droits d'action...".
Je comprends que, dans cet article, on dit: Nonobstant l'article 4. Mais,
enfin, dans l'article 4, on dit: II n'y a plus de recours contre lui et,
là, on dit: Parce qu'il a été responsable d'un accident en
dehors du Québec, il est responsable encore, il subit encore le recours,
il doit répondre à un recours contre lui.
D'autant plus que cette législation peut réserver aux
résidents indemnisés en vertu du plan un recours
excédentaire comme elle le fait contre la personne responsable de
l'accident survenu hors du Québec, pourvu que ce dernier soit un
non-résident non assuré en vertu du plan. Il nous semble tout
à fait anormal que quelqu'un assuré en vertu du plan,
protégé contre tout recours, se voie responsable d'un accident.
Par exemple, cela peut arriver jusqu'à ceci: si la victime d'un accident
hors du Québec est un Québécois, si celui-ci peut prouver,
en vertu de la législation du lieu où l'accident a lieu que le
transporteur est responsable de cet accident quant à lui, et s'il
prétend ne pas avoir été indemnisé dans toute la
mesure à laquelle il avait droit, il pourrait poursuivre le transporteur
pour l'excédent de l'indemnité qu'il aura reçue du
Québec.
Voici deux assurés qui sont censés avoir perdu leur
recours, qui, parce qu'ils sont victimes l'un de l'accident et l'autre
responsable en dehors du Québec, vont pouvoir se chicaner devant les
tribunaux là-bas. Cela nous semble tout à fait anormal et pas
acceptable quant à nous. La régie qui indemnise la victime d'un
accident survenu hors du Québec aura un recours subrogatoire, nonobstant
l'article 4, contre celui qui est responsable d'un accident jusqu'à
concurrence de l'indemnité payée. Pour les mêmes raisons,
ce recours ne devrait pouvoir être exercé contre un
résident; qu'il ait lieu contre un non-résident, nous trouvons
qu'il est tout à fait normal, mais pas contre un résident.
D'ailleurs, c'est ici que l'avocat intervient, et on peut se demander si
les tribunaux du Québec accueilleraient un recours en exemplification du
jugement d'un tribunal étranger, parce que, même si on obtient un
jugement dans une juridiction étrangère, il va falloir, pour
l'exécuter au Québec, obtenir un jugement devant un tribunal du
Québec en vertu de la procédure que nous appelons
l'exemplification d'un jugement. Je me demande si le tribunal
québécois acceptera de condamner en dommages pour blessures
corporelles un résident du Québec qui a été la
cause d'un accident en dehors du Québec, à cause de l'article 4,
qui l'exonère de tout recours.
En somme, pas deux poids, deux mesures. Ou bien je suis
exonéré toujours, ou bien je ne suis pas exonéré
toujours. Si je paie une prime pour être exonéré, il me
semble que je devrais l'être tout le temps.
Je parle surtout pour le transporteur public qui peut amonceler une
responsabilité considérable.
Conclusion. Si l'article 7 n'est pas modifié, le transporteur
devra continuer à s'assurer pour l'excédent des dommages
corporels dont pourrait être victime un "résident" lors d'un
accident survenu hors de la province et pour des dommages subis par un
"non-résident" dans un accident survenu hors de la province et, enfin,
pour le recours subrogatoire que pourrait exercer la régie contre lui en
raison d'un accident survenu hors de la province. Cela veut dire que nous
serons tenus de maintenir, pour les accidents survenus en dehors de la
province, les mêmes assurances que celles que nous avions auparavant.
En raison de ces faits, la responsabilité du transporteur restera
sensiblement la même et il devra maintenir la même couverture
d'assurances qu'il a présentement pour prévoir sa
responsabilité quant aux dommages corporels envers les
"résidents" comme envers "les "non-résidents".
Dommage matériel. Le principe de base est que ie
propriétaire de tout véhicule automobile immatriculé au
Québec doit détenir un contrat d'assurance-responsabilité
ou une attestation de solvabilité garantissant l'indemnisation du
dommage matériel causé par son véhicule jusqu'à
concurrence d'au moins $50 000. C'est la loi.
A l'article 102: "Nonobstant les dispositions du présent
chapitre, lorsqu'un accident implique une automobile (plutôt un
véhicule automobile) effectuant un transport public ou un transport
à titre onéreux dans le cours normal des affaires, son
propriétaire ou son assureur répond seul des dommages
matériels par les passagers, sans préjudice de son droit
d'être subrogé contre l'auteur de l'accident. La contribution aux
autres dommages s'établit selon les dispositions du présent
titre".
Il s'ensuit que le transporteur public, répondant seul des
dommages matériels subis par les passagers, devra avoir une assurance
supplémentaire au régime de base obligatoire, c'est-à-dire
qu'il devra maintenir la même couverture d'assurance que celle
présentement en vigueur parce que, dans bien des cas, les dommages
matériels auxquels il s'expose peuvent être supérieurs
à $50 000. Alors, si celui qui est assuré est un
Québécois et qu'il est assuré pour $50 000 et n'a pas
d'autres biens, le transporteur sera obligé de payer s'il brise l'un de
ses autobus ou s'il brise autre chose.
J'ajoute ceci: De plus, étant donné le coût
très" élevé des autobus mis à la disposition du
public voyageur par le transporteur public, dont le coût
s'élève jusqu'à $100 000 ou $125 000 aujourd'hui, les
assureurs devront tenir compte, dans leurs taux, de l'impossibilité pour
eux de récupérer du tiers responsable de l'accident la
différence entre le montant des dommages et celui de la couverture
minimale obligatoire, particulièrement s'il y a plusieurs
réclamations qui ne peuvent toutes être acquittées.
Si, dans la province de Québec ou ailleurs, un résident
est responsable de dommages matériels dans lesquels, par exemple, un
autobus de $100 000 est complètement démoli, les $50 000 ne
seront pas suffisants pour l'indemniser. Le trans-
porteur public sera obligé de maintenir une prime, pour ses
propres dommages, supérieure aux $50 000 qui deviendront tout simplement
une franchise pour lui.
Tout cela pour dire que les primes vont continuer d'être à
peu près ce qu'elles étaient auparavant pour le transporteur
public.
Le fonds d'indemnisation. La victime d'un dommage matériel, ainsi
que, nonobstant l'article 4, la victime d'un dommage corporel visée dans
le paragraphe b) de l'article 17, qui a droit au paiement d'une
indemnité en vertu de la présente loi, peuvent exiger le paiement
d'une indemnité, pour un dommage excédant $250, du Fonds
d'in-demnisation dans les cas suivants. On cite des cas. Je les cite pour
pouvoir dire ensuite: Ne faudrait-il pas ajouter le paragraphe?, comme suit: Si
le propriétaire du véhicule automobile en faute est un
non-résident insuffisamment assuré ou qu'on ne puisse rechercher
pour le paiement des dommages adjugés contre lui? Ne devrait-on pas
ajouter cela? Si un étranger, un non-résident du Québec
cause des dommages au Québec et qu'il n'est pas assuré ou qu'il
n'a pas de couverture d'assurance suffisante ou qu'il n'est pas responsable ou
qu'on ne peut pas aller le rechercher dans son pays ou dans l'Etat où il
demeure, il semble que le Fonds d'indemnisation devrait nous assurer, nous
couvrir jusqu'à concurrence des $50 000, tout au moins, si on veut que
la loi soit cohérente et correspondante, dans les énoncés
de principe, avec l'application.
Dans les cas prévus à l'article ci-haut mentionné,
si on ne fait pas cela, le transporteur qui n'est pas assuré pour ses
propres dommages ne pourra réclamer au Fonds d'indemnisation une somme
supérieure à $50 000 dans les cas prévus, l'exposant
à subir une perte considérable si son véhicule est
complètement détruit. Il devra donc être assuré pour
ses propres dommages matériels, en sus des premiers $50 000.
Le transporteur couvert pour ses propres dommages, jusqu'à
concurrence de la valeur de ses véhicules, réclamera à son
assureur les indemnités prévues à sa police d'assurance.
Toutefois c'est un autre élément que nous vous soumettons
l'assureur n'ayant aucun recours contre le fonds d'indemnisation, il
faudra éviter qu'il ne puisse contraindre son assuré, le
transporteur, à s'adresser auparavant au fonds. Enfin, ce que nous
prévoyons ici, c'est que le transporteur a un recours contre le fonds
d'indemnité et l'assureur n'en a pas.
Alors, comme le transporteur est assuré pour tous ses dommages,
sans franchise, l'assureur pourra lui dire: Réclame, toi, $50 000 du
fonds d'indemnisation et moi je te paierai la différence. Alors, on
voudrait que ce soit dit dans la loi que le transporteur ne sera pas
obligé de faire cela, parce que là il pourrait être victime
de pressions de son assureur. Enfin, on a bien confiance à nos
assureurs, mais on ne sait jamais.
Ce recours de l'assuré contre le fonds d'indemnisation, dans les
cas prévus, devrait plutôt être considéré
comme une franchise, en réduction de sa prime. En somme, dans le cas
où c'est le tiers qui est responsable, cela devrait être pour lui
une franchise en réduction de sa prime.
Contribution au régime et coût des différentes
assurances. Nous ne connaissons pas encore quelle sera la contribution du
transporteur public au financement du régime d'assurance automobile, qui
sera perçue lors de l'immatriculation des véhicules. Suivant une
étude faite auprès de nos membres, la protection pour dommages
corporels à autrui représente, dans les conditions actuelles,
environ 40% de la prime totale. Toutefois, sa contribution ne pourra atteindre
ce haut pourcentage du coût total de ses
assurances-responsabilité, puisque le régime ne le couvre que
partiellement. Je vous ai fait voir tous les cas dans lesquels, pour blessures
corporelles, il devra continuer de porter une assurance pour l'excédent
du recours contre le fonds d'indemnité. Il devra, en effet, conserver
à peu près le même montant de couverture pour dommages
corporels excédentaires en raison de ses activités à
l'extérieur du Québec et même à l'intérieur
du Québec, s'il doit être responsable des recours pour dommages
causés à l'extérieur du Québec.
Et cela a des implications, parce que l'assurance pour blessures
corporelles, comme pour dommages matériels, est faite dans le plan
d'assurance des autobus sur un rayon d'action. Plus le rayon d'action est long,
plus la prime est élevée. Plus il est court, moins elle est
élevée. Alors, cela a une implication très forte sur le
montant de la prime.
Il faudrait aussi conserver en mémoire et tenir en
considération que l'administration du plan coûtera plus de 15% des
primes perçues dans le régime de non-responsabilité, comme
le démontre l'expérience des autres provinces. Enfin, dans quelle
mesure est-ce vrai ou faux? Je ne suis pas en mesure de le dire, mais on nous
dit que c'est cela. En sus de l'augmentation du coût des primes, ces
dépenses additionnelles s'ajoutent à celles des autres frais
d'exploitation. Enfin, une autre considération à retenir, la
dissociation des assurances pour dommages corporels de celle des dommages
matériels amènera une augmentation du coût des primes
d'assurance pour le transporteur, car ce dernier ne pourra plus
bénéficier de réductions appréciables en se
couvrant globalement, résultant de la faible proportion des
réclamations pour dommages corporels causés à une victime
d'un accident dans un autobus, comparativement aux réclamations pour
dommages matériels.
Je ne sais pas si c'est à la connaissance de tous, mais il y a
une très faible proportion de recours pour dommage matériel
contre les propriétaires d'autobus comparativement aux recours pour
dommage corporel. Nous sommes apparemment très sécuritaires.
Voyager en autobus est de toute sécurité et il y a très
peu d'accidents dans lesquels des blessures corporelles sont infligées
à des passagers et même à des gens le long de la route.
C'est très rare que le propriétaire d'autobus soit responsable
d'un accident.
Si le voiturier public est appelé à payer un coût
plus élevé pour sa protection contre les dommages corporels
à autrui, cette augmentation sera répartie contre l'ensemble des
frais généraux d'exploitation entre les usagers du service qui,
en définitive, assument l'augmentation des coûts. Le transporteur
qui devra obtenir une couverture spéciale pour dommage corporel à
autrui dont il serait responsable à l'extérieur du Québec
paiera un montant supérieur à celui qu'il payait, alors qu'un
même assureur le couvrait pour sa responsabilité à
l'égard de tout dommage corporel.
Nous croyons que les transporteurs publics québécois, en
vertu du plan, paieront plus cher, de façon générale, pour
une couverture moins élevée et nous souhaitons que la
contribution du transporteur public soit fixée en fonction de l'usager
régulier du service et que ce dernier ne se voit pas imposer,
individuellement, un fardeau plus élevé que le
propriétaire du véhicule privé. Bien au contraire, dans la
plupart des cas, c'est par économie de temps et d'argent, en acceptant
certaines contraintes, qu'on emploie le transport en commun. Pour cette raison,
la contribution de l'usager devrait être moindre. Le tout
respectueusement soumis.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Bhérer. Mme le
ministre.
Mme Payette: M. le Président, comme quoi les commissions
parlementaires servent à quelque chose vous avez bien dit, M.
Bhérer, que vous souhaitiez bonifier ce projet de loi je vous
remercie de l'attention que vous y avez apportée. Effectivement,
à la suite de la présentation de votre mémoire, nous
sommes en train de réétudier l'article 7 que vous avez si
largement souligné en page 2, 3 et 4 du mémoire et où vous
dites, en page 4, qu'il nous semble anormal que ce recours contre un
résident du Québec assuré en vertu du plan puisse
être conservé dans un contexte de non-responsabilité, etc.
Cet article étant actuellement en réexamen et si la
rédaction de cet article prête à confusion, ce
n'était pas le but poursuivi par le projet de loi, si bien que nous
allons tenter de clarifier l'article 7, si c'est nécessaire.
Il y a encore de la confusion, me semble-t-il, cependant dans certaines
autres interventions. Vous parlez toujours des $50 000 rendus obligatoires pour
les dommages à autrui et vous semblez en parler comme si les
transporteurs publics étaient empêchés tout à coup
de s'assurer pour leurs besoins dans ce domaine. Ce montant de $50 000 est
toujours bien compris comme étant un minimum obligatoire pour les
dommages matériels à autrui. Rien n'empêche un transporteur
public, au contraire, connaissant ses besoins dans ce domaine, de prendre la
couverture dont il a besoin, je ne sais pas jusqu'où cela peut aller
dans le cas des transporteurs. En même temps, vous parlez des dommages
causés à la propriété d'au-trui, mais est-ce que,
avec votre expérience, vous pouvez nous indiquer s'il y a d'autres biens
d'au- trui que vous pourriez endommager que les bagages des passagers, leurs
vêtements par exemple? Qu'est-ce que cela implique les biens
matériels d'autrui que vous devez nécessairement protéger
par une assurance?
M. Bhérer: Ce n'est pas dans ce sens, madame. Je m'excuse.
J'ai peut-être mal exprimé mon point de vue. Pour lui, il a un
recours, jusqu'à concurrence d'une assurance possible de $50 000, contre
une personne qui serait la cause d'un accident dans lequel son autobus serait
brisé. Ce sont pour des dommages qu'il subit lui-même.
Mme Payette: Non. C'est pour cela qu'il y a bien confusion et
malentendu. Les $50 000 qui sont cités à l'intérieur du
projet de loi no 67 sont les $50 000 qui sont rendus obligatoires pour dommages
à autrui.
M. Bhérer: Oui.
Mme Payette: Donc cela couvrirait pour le transporteur public les
biens matériels qu'il transporte à bord de son véhicule,
mais qui ne sont pas sa propriété, qui sont la
propriété des autres, ou un véhicule qu'il endommage dans
un accident. L'assurance pour le véhicule personnel là on
pense à un particulier qui a une voiture son véhicule il
est libre de l'assurer ou pas. Dans le cas des transporteurs publics, est-ce
qu'il n'y a pas, cependant, une loi qui vous oblige à couvrir votre
propre véhicule?
M. Bhérer: Oui, il y a un minimum d'assurance que nous
devons maintenir en vigueur en vertu des règlements de la commission des
transports. Le propriétaire du véhicule privé, pour avoir
son permis de conduire ou son immatriculation est obligé de s'assurer
pour $50 000.
Mme Payette: Pas pour son véhicule, mais pour les dommages
à autrui.
M. Bhérer: Non, non. Pour les dommages à autrui.
Or, si je suis propriétaire d'un autobus qui vaut $125 000, si j'ai un
accident dans lequel mon véhicule est complètement brisé
et les biens matériels de mes passagers sont sérieusement
endommagés, j'aurai une réclamation de $100 000 contre le
propriétaire d'un véhicule privé qui serait responsable de
l'accident. Or, s'il n'est assuré que jusqu'à $50 000, je ne peux
pas réclamer plus de $50 000 à moins qu'il soit responsable,
qu'il soit solvable.
Mme Payette: Qu'est-ce qui se passe dans la situation actuelle,
M. Bhérer?
M. Bhérer: Dans la situation actuelle, dans certains cas,
il n'est pas assuré.
Mme Payette: Ou il est assuré pour $35 000?
M. Bhérer: Mais, madame, le problème c'est qu'on se
demande si actuellement, lorsqu'on est
en train de réviser toutes ces questions, on ne doit pas tenir
compte du fait que peut-être $50 000 ne sont pas suffisants.
Mme Payette: On ne peut obliger, me semble-t-il, toute une
population à prendre une assurance pour la fois où cela
impliquera un autobus qui serait complètement détruit. A ce
moment, cela reste de votre responsabilité, surtout comme transporteur
public, de voir à ce que votre véhicule soit convenablement
assuré pour ses propres dommages.
M. Bhérer: Madame, cependant, je ne vous fais pas un
reproche de cela. J'allègue cela tout simplement pour dire que nos
primes vont rester sensiblement les mêmes. Je ne vous fais par un
reproche de cela.
Mme Payette: Sauf les blessures corporelles.
M. Bhérer: Oui, mais on va être obligé de
maintenir... Je vous ai expliqué. Les primes sont calculées en
raison du rayon d'action. Dès que nous sortons de la province de
Québec, notre rayon d'action est élargi. Il va falloir se couvrir
pour notre responsabilité, pour dommages corporels envers des
non-résidents à l'extérieur du Québec.
Si vous maintenez l'article 7 dans l'état où il est, il
faudra même se couvrir pour des blessures corporelles à des
résidents du Québec subies en dehors du Québec au cas
où nous serions responsables.
Mme Payette: M. Bhérer, ce n'est pas moi qui vais vous
apprendre qu'il est difficile pour un gouvernement d'imposer ses lois à
l'extérieur du Québec. Pour donner un exemple très simple,
si on décidait, comme gouvernement, d'interdire aux gens de fumer, on
pourrait difficilement intervenir quand deux Québécois
décident de fumer à l'étranger.
M. Bhérer: Mais, cependant, si je suis assuré sans
responsabilité, sans recours à ma responsabilité, en vertu
du plan d'assurance du Québec, moi, Québécois,
propriétaire d'un véhicule ou personne privée, je ne
devrais pas être passible d'un recours en dommages pour dommages
causés à un résident du Québec à
l'extérieur du Québec.
Mme Payette: C'est la partie que nous nous apprêtons
à réexaminer, en ce qui concerne les résidents.
M. Bhérer: La loi, actuellement, dit cela, et j'ajoute, en
plus, que, même pour des dommages causés à un
non-résident à l'extérieur du Québec, je me sens
responsable parce que je ne suis pas assuré pour cela dans votre plan.
Votre plan ne m'assure pas pour cela, mais, pour un résident, il est
assuré et moi aussi, et on n'est pas supposé avoir de recours
l'un contre l'autre, à ce moment-là.
Mme Payette: Seriez-vous en mesure de me donner un renseignement,
vous ou le président de l'association qui vous accompagne? Quelle est la
prime moyenne payée actuellement par les transporteurs publics?
M. Bhérer: Par autobus? Mme Payette: Oui.
M. Bhérer: M. Deshaies me dit que cela lui coûte $75
000 pour quinze autobus, cela veut dire $5000 par autobus.
Mme Payette: Vraiment, je vous pose la question, si vous ne
pouvez pas me répondre... Ce serait peut-être intéressant,
cependant, que vous nous communiquiez la réponse. Pouvez-vous nous dire
ce qu'il en coûte, seulement pour la couverture au chapitre B?
M. Bhérer: C'est pour dommages matériels et
dommages corporels, cela, pour tous les dommages. Maintenant, nous estimons que
la prime pour dommages corporels... Nous avons fait une estimation assez
précise avec nos assureurs, lors du premier mémoire que nous vous
avons présenté, qui estimaient à environ 40% le coût
de la prime pour dommages corporels distincts des dommages matériels.
Cela voudrait dire que, par autobus, cela coûterait $2000 pour dommages
corporels.
Mme Payette: Quant à moi, j'ai terminé, M. le
Président, je reviendrai probablement après.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Bhérer: Les représentants de compagnies de
voyageurs me disent que c'est à peu près le coût, M.
Fournier aussi. Je pense bien que c'est à peu près le coût,
$5000 par autobus.
Mme Payette: 40% de $5000.
M. Bhérer: 40% de $5000. Mme Payette: D'accord!
M. Bhérer: Mais je répète ce qu'il est
important de comprendre dans la présentation de notre mémoire.
C'est qu'on ne prévoit pas beaucoup de réductions de notre prime,
eu égard aux implications que je vous mentionne et, si vous vouliez que
nous poursuivions, enfin, si vous êtes en train de faire une autre
rédaction, peut-être pourrions-nous, quelqu'un de nous, rencontrer
vos fonctionnaires et en discuter un peu plus clairement avec eux parce que
cela nous préoccupe beaucoup.
On veut bien être assuré, on veut bien être dans le
plan et on se chicane pas avec l'idée de l'assurance automobile que vous
proposez, mais on ne voudrait pas qu'elle impose à nos usagers un
fardeau plus lourd qu'il paie actuellement.
Mme Payette: M. le Président, si vous le permettez,
même si j'ai dit que j'avais terminé, je vous remercie parce qu'il
y a eu, effectivement, une grande collaboration depuis le printemps. Nous
allons rester en communications pour les détails, pour parachever le
projet.
M. Bhérer: Je suis heureux de savoir, madame, que nous
sommes en train de participer à une bonne législation.
Mme Payette: Merci beaucoup. M. Bhérer:
L'améliorer surtout.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Je tiens à vous remercier au nom de
l'Opposition officielle, de votre mémoire. Comme vous vous limitez
à faire des représentations sur des matières que vous
connaissez bien, puisque c'est votre propre cas, c'est toujours
intéressant de vous lire et de prendre connaissance de vos
présentations.
Pour revenir à l'article 6, lorsque vous dites qu'un accident a
lieu en dehors du Québec, des résidents du Québec
pourraient avoir des recours contre un propriétaire d'autobus, si
l'article demeurait tel quel. Est-ce qu'on ne pourrait pas dire aussi que c'est
une situation qui pourrait aussi affecter deux résidents du
Québec qui auraient un accident en dehors de la province?
M. Bhérer: Cela s'applique à n'importe qui.
M. Saint-Germain: Si on considère que dans certains
endroits bien définis, on sait par exemple qu'à Old Orchard, le
long du lac Champlain, il y a une multitude de Québécois qui
prennent leurs vacances, des Québécois pourraient même
être impliqués dans un accident où il y aura un ministre...
Malgré les politiques du gouvernement pour essayer de tenir nos
vacanciers dans Québec, il pourrait arriver, il arrivera, comme il est
arrivé, que deux résidents du Québec, soit à Old
Orchard, qui se frappent et, l'article, tel quel, le droit de recours contre
l'un ou contre l'autre serait maintenu.
M. Bhérer: II y en a un des deux qui est responsable et il
est sujet à un recours.
M. Saint-Germain: C'est cela.
M. Bhérer: Le problème va se soulever quand on va
venir pour faire exemplifier le jugement dans la province de Québec.
J'espère que la législation qui dit qu'il n'est pas responsable
s'appliquera.
M. Saint-Germain: Maintenant, lorsque vous avez un passager, un
touriste qui vient à Québec et qui prend un de vos transporteurs
pour aller aux Etats-Unis, l'assurance du Québec ne s'applique plus, du
moins, dès que vous allez franchir les frontières. Il faudrait
nécessairement que vous ayez une assurance pour protéger ce
passager.
M. Bhérer: C'est-à-dire que, d'après le
plan, comme nous lisons la loi actuellement, le non-résident qui circule
en dehors du Québec, dans un véhicule québécois,
n'est pas protégé par le plan.
M. Saint-Germain: II n'est pas couvert du tout.
M. Bhérer: Mais, un non-résident qui circule dans
un autobus québécois, à l'intérieur de la province,
est couvert par le plan.
M. Saint-Germain: La prime que vous seriez appelé à
payer à l'office ne couvrirait pas ce touriste qui prend l'autobus
à Montréal. Cela couvrirait jusqu'aux frontières.
Passé les frontières, ce serait votre assurance personnelle.
M. Bhérer: II faudra prendre une assurance en sus de celle
du plan pour le couvrir.
M. Saint-Germain: C'est cela.
M. Bhérer: Comme nous sommes tenus de le faire
actuellement par la Commission des transports.
M. Saint-Germain: Vous dites que le plan tel qu'appliqué,
si l'article 7 n'est pas modifié, baissera très peu la prime que
vous avez actuellement...
M. Bhérer: C'est cela.
M. Saint-Germain: ... sur les autobus, en général.
C'est 40%.
M. Bhérer: 40% de $5000 à peu près.
M. Saint-Germain: $5000 et 40% de $5000 pour vous protéger
contre les blessures corporelles que vous pourriez infliger.
M. Bhérer: C'est cela. Je vous donne un chiffre que nos
assureurs nous ont donné après étude comme étant
une moyenne raisonnable.
M. Saint-Germain: Si on vous oblige, au niveau de l'office,
à verser 40% de vos $5000 actuellement, cela voudrait dire une
augmentation pratiquement de 40% de vos primes.
M. Bhérer: C'est cela.
M. Saint-Germain: II devrait tout de même y avoir un
minimum de baisse dans vos primes, tel que vous les payez actuellement lorsque
le plan sera en vigueur. Il y aura toujours un minimum de protection. Est-ce
que vos assureurs l'on établi?
M. Bhérer: On croit que cela pourra réduire un peu
le coût total de l'assurance, mais ce n'est pas encore prouvé, on
ne peut pas encore dire cela.
M. Saint-Germain: Vous ne pouvez pas encore établir le
pourcentage de baisse?
M. Bhérer: Je pense qu'il va falloir vivre... D'abord on
ne connaît pas la sorte de prime qu'on va nous imposer. J'entendais ce
matin parler de prime calculée sur le gallon d'essence. Vous savez qu'un
autobus qui voyage quelqu'un a mentionné le fait ce matin
à une vitesse de croisière de 60 milles à l'heure parcourt
quelque chose comme dix ou douze milles au gallon. Cela coûterait cher
quand on sait qu'une augmentation de $0.03 par gallon équivaut à
0.5% d'augmentation de notre taux par passager, c'est-à-dire que si
notre taux, au mille, par passager est d'un chiffre approximatif de $0.05 le
mille, il faudrait ajouter, pour chaque $0.03 d'augmentation, mettons que ce
serait $0.21 d'augmentation, sept fois une demie, soit 3.5% d'augmentation des
$0.05 le mille par passager, comme augmentation du taux. Cela veut dire qu'un
taux de $10 serait augmenté tout de suite de $0.35 pour couvrir les
$0.21 d'augmentation si c'était sur cette base. J'espère que ce
ne sera pas sur le gallon d'essence qu'on imposera. Il a déjà
été question de cela et Mme le ministre a dit que ce ne serait
pas cela car ce serait très mauvais, pour nous comme pour les
camionneurs dont on parlait ce matin. Les gros usagers d'essence et de
carburant paieraient une prime hors de proportion avec le service rendu.
M. Saint-Germain: Je crois réellement qu'on devrait
étudier, au niveau du gouvernement, votre mémoire à fond,
non pas parce que vous êtes propriétaires d'autobus ou que les
propriétaires d'autobus méritent un traitement particulier, mais
si on veut, comme cela semble être les politiques des différents
gouvernements aujourd'hui, augmenter l'efficacité, augmenter la
clientèle des transports publics en vue d'abaisser le coût de
l'automobile et du transport par automobile, il me semble que si on augmente
indûment les frais d'administration des transports publics, par ricochet,
il faudra élever le coût du transport.
M. Bhérer: On augmentera le coût du transport et on
dissuadera indirectement les usagers des services de transport en commun
à voyager dans les services de transport en commun.
Mme Payette: Je pense que M. le...
M. Saint-Germain: C'est à l'appui de cette philosophie
qu'il serait important de ne pas...
Mme Payette: M. le député, me permettriez-vous une
question?
M. Saint-Germain: Là-dessus, oui, allez.
Mme Payette: Comme il dit que s'il y a une augmentation des
primes, il faudra augmenter le prix des transports en commun, s'il y a une
diminution des primes, est-ce qu'on verra baisser le prix du transport en
commun?
M. Bhérer: Madame, pourvu que nous fassions le revenu
nécessaire pour maintenir nos ac- tivités... Le quantum du revenu
alloué par la Commission des transports pour assurer la
viabilité, la permanence et la qualité de nos services est un
coefficient de 90%, c'est-à-dire qu'on accorde 10% de marge en sus de
nos coûts pour assurer la viabilité, c'est accepté dans
toute l'industrie.
Mme Payette: Alors, on a votre parole d'honneur que s'il y a une
diminution des primes d'assurance en ce qui concerne les transporteurs publics,
il y aura une diminution des prix du transport en commun?
M. Bhérer: En bas de 90% de nos coûts, il y aura
réduction ou il n'y aura pas d'augmentation, c'est-à-dire que...
Attention madame, je comprends votre astuce mais...
Mme Payette: Je n'en doute pas.
M. Bhérer:... il faudrait faire attention. Quand il faut
augmenter nos salaires tous les ans; quand les coûts d'exploitation
augmentent tous les ans; quand le coût du carburant augmente tous les ans
pas tous les ans, tous les trois, quatre ou six mois cela peut
empêcher l'augmentation des coûts; cela peut aussi amener une
réduction.
Pourvu que nous ayons 10% de rendement, nous sommes satisfaits.
Mme Payette: Parfait, j'en prends bonne note. Merci.
M. Bhérer: Je pense que c'est assez clairement
exprimé pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté.
M. Saint-Germain: II ne faudrait pas, non plus, leurrer le
public. Dans une province où il n'y a aucune loi, aucune régie,
ce qui permet aux corprs publics comme aux régies ou aux compagnies de
faire des profits exorbitants ou de payer des salaires exorbitants, avec
l'inflation qui existe, c'est entendu qu'une réduction de la prime ne
vous ferait pas réduire vos services parce que c'est loin d'être
le seul facteur qui concourt à vos frais d'exploitation; il y en a
d'autres que vous ne pouvez pas maîtriser.
M. Bhérer: Entre vous et moi, c'est très marginal,
le coût de l'assurance.
M. Saint-Germain: Lorsque les gouvernements ne sont pas capables
de limiter les augmentations des services publics, comme la santé ou
comme l'école, lorsqu'on n'est même pas capable de voir à
ce que des régies comme SIDBEC puissent fonctionner sans perte, il ne
faudrait pas demander aux citoyens de faire des miracles.
M. Bhérer: Je pourrais suggérer quelque chose
à Mme Payette, à Mme le ministre. Si vous imposiez la prime sur
la base de l'impôt sur le revenu, d'une fraction de l'impôt sur le
revenu, vous n'auriez pas de problème. Si nos revenus augmentent, vous
auriez une ristourne.
Mme Payette: De toute façon, on surveillera de près
le coût de vos primes d'assurance et les baisses qui suivront.
M. Bhérer: Oe toute manière, ce serait
peut-être la façon la plus juste de répartir les
coûts, comme on l'a fait pour l'assurance-maladie ou ces assurances
sociales là. Tout le monde paie en fonction de son revenu et tout le
monde est couvert de la même manière,
Mme Payette: Tant que tout le monde n'aura pas une
automobile...
M. Bhérer: Je vous ai déjà dit cela,
d'ailleurs, Mme le ministre.
Mme Payette: ... je ne pense pas que cela puisse se
comparer à la santé je pense qu'on doit faire porter le
coût de cette réforme à ceux qui ont des véhicules
automobiles.
M. Bhérer: Y a-t-il beaucoup de gens, aujourd'hui, qui ne
se servent pas d'une automobile, madame? Il y a les enfants.
Mme Payette: II y a trois millions de permis de conduire, de
véhicules; cela veut dire qu'il reste...
M. Bhérer: Oui, mais ceux qui vivent à
l'intérieur d'une automobile, qui se font transporter par un
véhicule automobile quel qu'il soit?
Mme Payette: Je m'excuse.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Je reviendrai s'il y a lieu. Je laisse mes
collègues poser des questions, si bon leur semble.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Je voudrais remercier Me Bhérer de son
intervention. Je pense que c'est une intervention où il y a eu une
recherche considérable et qui semble porter des fruits, puisque Mme le
ministre a dit qu'elle étudierait en particulier l'article 7 pour y
apporter des modifications s'il y a lieu.
Vous avez pendant un instant parlé du financement du
système. J'aimerais peut-être que vous vous étendiez un peu
là-dessus pour nous dire ce que vous préconiseriez comme
financement.
M. Bhérer: L'impôt sur le revenu. C'est la meilleure
forme de taxation dans un pays démocratique. Tout le monde paie
également, tout le monde paie suivant son revenu et il n'y a pas de
problème avec cela. Ceux qui gagnent de l'argent paient; ceux qui n'en
gagnent pas ne paient pas. On a tous des droits égaux. En somme, c'est
la formule de distribution des coûts la plus équitable, à
mon avis, dans toute formule démocratique. Dès qu on va chercher
des petits groupes en particu- lier pour financer des plans, on s'expose.
Ensuite, l'Etat retire de cela, vous savez. Enfin, je n'en vois pas d'autre que
celui-là.
M. Fontaine: Vous considérez, à ce
moment-là...
M. Bhérer: Cela coûterait quoi? 1/4% de
l'impôt sur le revenu ou 1/8%, je ne sais trop combien, mais enfin.
Mme Payette: C'est justement ça, le problème; on
finirait par ne plus savoir ce que coûte l'assurance automobile.
M. Bhérer: Madame, vous iriez peut-être chercher de
la sorte des points d'impôt du fédéral! C'est un point de
vue, vous savez.
M. Saint-Germain: Vous allez nous amener dans des discussions
sans fin!!
M. Fontaine: C'est donc dire que vous considérez...
M. Bhérer: Cela a été très sage, ce
matin; on peut rire un peu cet après-midi!
M. Fontaine: II faut considérer, à ce
moment-là, que tous les payeurs d'impôt sont soit des usagers de
l'automobile ou des bénéficiaires de l'assurance automobile.
M. Bhérer: Les payeurs d'impôt sont
bénéficiaires de l'assurance automobile.
Tout le monde aurait droit également, parce que là on
parle d'augmenter le coût de l'immatriculation, d'augmenter le coût
du permis de conduire. Si cela restait comme c'est là et que le
coût de l'assurance même était ajusté suivant le
coût, suivant une perception d'une partie de l'impôt sur le revenu,
tout resterait la même chose et quelqu'un qui a deux automobiles, par
exemple, qui ne se sert que d'une à la fois, quelqu'un qui n'a jamais eu
d'accident d'automobile... Cela fait 50 ans que je conduis une voiture et je
n'ai jamais eu d'accident, jamais je n'ai été impliqué
dans un accident où il y a eu des dommages corporels ou
matériels. Je vais payer comme les autres, je n'ai pas d'objection, mais
prenez cela à même mon impôt sur le revenu. Pourquoi pas?
Là je paierai en fonction de mon revenu.
M. Fontaine: Concernant l'autre sujet, à la page 7 de
votre mémoire, vous suggérez d'ajouter un 7e paragraphe pour un
recours au fonds d'indemnisation. Vous écrivez: " Si le
propriétaire du véhicule automobile en faute qui est un
non-résident insuffisamment assuré, ou qu'on ne puisse rechercher
pour le paiement des dommages adjugés contre lui. A ce moment-là,
vous suggérez qu'on puisse recourir contre le fonds
d'indemnisation...
M. Bhérer: C'est-à-dire que le fonds
d'indemnisation prévoit les cas dans lesquels on pourra
tirer sur lui, si la personne responsable d'un accident n'est pas
capable de payer pour des dommages matériels. Or, je crois que nous
devrions ajouter à cela le cas de la personne qui, vivant au
Québec, où ne vivant pas au Québec est responsable d'un
accident, c'est-à-dire ne vivant pas au Québec, parce que si elle
était au Québec, elle serait assurée pour $50 000,
responsable des dommages matériels, on ne peut pas la rechercher chez
elle, elle n'est pas assurée, elle n'est pas responsable, elle n'est pas
solvable; nous allons perdre.
Alors, comme ce sont les compagnies d'assurances qui remplissent ce
fonds-là, je pense bien que ce serait une assurance indirecte et ce
serait juste qu'on soit indemnisé comme pour le résident par le
non-résident qui n'est pas assuré.
M. Fontaine: Et à ce moment-là, est-ce qu'il y
aurait une subrogation de la part du fonds?
M. Bhérer: Oui, cela s'appliquera comme le reste.
M. Fontaine: Merci, c'est tout pour l'instant.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Oui, sur le même point d'humour qui vient d'avoir
lieu, l'échange qui vient d'avoir lieu à cette commission,
lorsqu'on a demandé au ministre d'aller chercher un point d'impôt
au fédéral, je me demande si on n'est pas en train d'en retourner
un point d'impôt au fédéral, par le fait qu'il y a bien des
personnes actuellement qui sont victimes d'accident d'automobile et elles ne
sont pas indemnisées en aucune façon, et elles
bénéficient de l'aide sociale, ou encore elles
bénéficient de la Régie de l'assurance-hospitalisation,
pour ce qui a trait aux soins qui doivent leur être donnés.
Actuellement, dans le régime actuel, 50% des coûts de ces
articles, que ce soit le bien-être social au niveau de la Régie de
l'assurance-hospitalisation, sont défrayés par le gouvernement
fédéral, en vertu d'une entente qui existe entre les deux. Alors,
en vertu du nouveau régime, actuellement, cela va être
assumé entièrement, complètement, totalement par les
Québécois. C'est pour cette raison que je le dis peut-être
en riant, mais je me demande si on n'est pas en train de retourner un point
d'impôt au gouvernement fédéral.
M. Bhérer: II va falloir surveiller cela.
M. Roy: II va falloir surveiller cela de très près.
Je peux vous assurer, M. Bhérer, que nous allons avoir l'oeil
très ouvert là-dessus.
J'aimerais demander au ministre à ce moment-ci, à la suite
des questions qui ont été posées tout à l'heure,
les discussions qui ont lieu autour de cette table sont toujours basées
sur un certain nombre d'hypothèses, quant au coût de l'assurance
comme telle, si on peut penser pouvoir recevoir les données de base qui
ont servi ou qui vont servir à l'établissement dudit
coût.
Quand le gouvernement sera-t-il en mesure, s'il n'est pas en mesure
immédiatement, de faire connaitre aux membres de la commission, le
coût définitif des différentes catégories
d'assurés? Il me parait extrêmement important, pour être
capable d'en faire une étude la plus objective possible, de trouver de
meilleures formules pour faire en sorte que les Québécois aient
un meilleur service d'assurance au meilleur coût. Actuellement, on est au
niveau des hypothèses. C'est assez ardu de travailler de cette
façon au niveau de la commission parlementaire.
On a téléphoné, la semaine dernière, au
bureau du ministre, et on nous a dit qu'on n'avait pas ces données
à l'heure actuelle.
Je ne sais pas sur quoi on s'est basé, mais on s'est
sûrement basé sur quelque chose.
Mme Payette: M. le Président, pour répondre au
député de Beauce-Sud, je lui dirai que le même "on" qui lui
a répondu lui a répondu ce matin qu'il essaierait de
déposer tout cela cette semaine.
M. Roy: Quand on dit que ce sera déposé cette
semaine, si c'est vendredi, nous courrons le risque que la commission
parlementaire ait presque terminé ses travaux et qu'un certain nombre de
mémoires extrêmement importants et un certain nombre d'organismes
aient été entendus devant la commission parlementaire.
Mme Payette: Je pense, M. le Président, que M. le
député de Beauce-Sud est en mesure de comprendre que les chiffres
sur lesquels nous nous basons ont évolué, même depuis le
dépôt du livre bleu et le dépôt du projet de loi, et
que constamment nous refaisons ces chiffres au fur et à mesure de
l'évolution de la situation. Nous essaierons, mais très
honnêtement, comme c'est le cas depuis le début, de déposer
le plus rapidement possible ce qui nous paraîtra être la situation
dernière, avant qu'on puisse dire... J'ai l'impression que cela va
bouger jusqu'à la fin. Il va y avoir une évolution jusqu'au
moment de l'adoption du projet de loi. Nous travaillons constamment aux
chiffres qui nous sont transmis, et nous allons continuer de le faire, mais
nous allons déposer cette semaine ce dont nous disposons.
M. Roy: Je remercie le ministre et j'apprécierais d'autant
plus que cela puisse être déposé le plus tôt
possible. J'aurais une question à poser à Me Bhérer. A
l'avant-dernière page de son mémoire, il note: "Enfin, une autre
considération à retenir, la dissociation des assurances pour
dommage corporel de celle des dommages matériels"... J'aimerais qu'on
m'explique quels seront les inconvénients que cela pourra comporter pour
les transporteurs publics lorsqu'ils auront des réclamations à
faire?
M, Bhérer: Je voudrais d'abord corriger une
déclaration que j'ai faite tout à l'heure. Le coût total
moyen on m'a donné un cas de $5000 tout à l'heure
de la prime par autobus est plutôt $3000
que $5000. Excusez-moi, on vient de me signaler cela. Le coût de
ces $3000 par autobus est 8% des frais de fonctionnement totaux. Alors une
réduction de 25% de la prime équivaudrait à 2% des
coûts de fonctionnement. Cela éclaircit l'idée.
Quant à la question qu'on vient de me poser, la dissociation des
primes, pour nous, signifie qu'il va falloir s'assurer pour des fins
spécifiques, comparé à une assurance globale. Pour des
fins spécifiques, étant donné que notre
responsabilité pour dommages corporels est très peu
fréquemment mise en cause, la prime qu'on payait pour cela compensait
pour la prime qu'on payait pour d'autres fins. Globalement, c'était tenu
en ligne de compte. Vu qu'on va dissocier ces deux primes-là maintenant,
la prime pour dommages matériels va peut-être augmenter
individuellement. La partie que compensait la prime payée pour dommages
corporels qui n'existera plus, mais qui était compensatoire parce qu'on
ne l'employait pas à plein rendement, elle va disparaître et on
croit que cela va faire augmenter le coût de notre assurance pour
dommages matériels, même si les limites restent les
mêmes.
M. Roy: En somme il y aurait une augmentation plus que
proportionnelle à la diminution du risque qui serait élevé
des polices d'assurance?
M. Bhérer: M. le député, je pense que c'est
difficile d'affirmer cela. Il faudrait attendre l'expérience. Encore une
fois, on ne connaît pas le coût de la prime. Si on me disait que
c'est l'impôt sur le revenu... Je reviens à cela parce que mon
collègue, Me Guy Poliquin, qui est avec moi, me fait remarquer, et
c'était un argument qui nous venait à l'idée, que
l'indemnisation à l'assuré est basée sur son revenu.
Pourquoi sa prime ne serait-elle pas basée sur son revenu? Tous les
dommages corporels causés à un assuré sont
indemnisés d'après son revenu jusqu'à concurrence de $18
000. Pourquoi ne paierait-il pas jusqu'à concurrence de $18 000?
M. Roy: Une prime basée selon son revenu plutôt
qu'une prime égalitaire, qu'une prime qui est égale pour tout le
monde.
M. Bhérer: Surtout que son indemnité est
basée sur son revenu.
M. Roy: Je vous remercie, Me Bhérer. Je n'ai plus de
question en ce qui me concerne.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Pour débuter, je voudrais vous poser une question
de principe. Au début, vous avez parlé de la question de
couverture à l'extérieur de la province de Québec. Mes
sources d'information, des avocats, ont dit la même chose, que ce n'est
pas vraiment une assurance. C'est seulement un fonds d'indemnisation qui
élargit ce qu'il était avant. Ce n'est pas vraiment une
assurance. Si vous avez une compagnie avec des passagers, que vous allez
à l'extérieur du Québec ou que vous en avez qui ne sont
pas résidents du Québec, vous devez vous couvrir par une
assurance, à part le fonds d'indemnisation. Quel pourcentage de vos
affaires avez-vous à l'extérieur du Québec?
M. Bhérer: A l'extérieur du Québec? M.
Shaw: Oui.
M. Bhérer: II y a des services qui transportent
régulièrement des passagers à l'extérieur du
Québec. Ce sont des services qui voyagent entre Montréal et
Toronto, entre Montréal et New York...
M. Shaw: Est-ce plus qu'un pour cent? M. Bhérer: Ah
oui!
M. Shaw: Ce matin, nous avons entendu dire que c'est seulement 1%
des cas qui ne sont pas réglés hors des tribunaux. C'est pour
cela que nous avons besoin de faire un système de "no fault", parce que
ce système enlève le problème des retards.
M. Bhérer: Un des éléments des voyages en
dehors du Québec, ce sont les voyages spéciaux ou à
charte-partie. C'est un volume d'affaires très imposant. Pour certains
opérateurs, cela représente 10% de leur revenu.
M. Shaw: Alors, cela implique...
M. Bhérer: Tous ne sont pas à l'extérieur du
Québec. Il y a une proportion importante dans cela qui est en dehors de
Québec. Il y a les autobus Fournier, Deshaies, Voyageur, qui exploitent
des services spéciaux ou à charte-partie en dehors du
Québec. Ils transportent des Québécois en dehors du
Québec.
M. Shaw: Notre responsabilité couvre toute action du
consommateur. Peu importe la façon, si on met une augmentation de
montant sur le revenu personnel, c'est une augmentation, c'est inflationniste.
Si nous pouvons démontrer que nous pouvons réduire le montant que
les Québécois vont payer pour leur couverture d'assurance, parce
que nous avons maintenant un système de fonds d'indemnisation, on parle
de l'assurance automobile, c'est de cela qu'on parle ici.
M. Bhérer: Si nous savions quel est le mode d'imposition
de la prime, nous pourrions facilement vous dire quelle en sera la
conséquence, mais on ne le sait pas.
M. Shaw: Cela arrive à la même chose. Si nous
faisons une autre régie, une autre banque pour les fonctionnaires au
Québec, cela va faire quelque chose qui est disponible maintenant au
secteur privé, qui peut être moins dispendieux, parce que les
profits qui sont faits par les compa-
gnies d'assurance sont un revenu du gouvernement. Si on peut
démontrer que c'est moins dispendieux d'imposer seulement une assurance
obligatoire pour tout le monde, pour donner le même résultat qu'on
cherche à obtenir avec cette Régie de l'assurance automobile,
cela a beaucoup plus de bon sens, si on considère premièrement
les besoins des consommateurs du Québec. Or, cela est la
responsabilité de cette commission parlementaire.
M. Bhérer: Dans le moment, tout ce que je peux vous dire,
c'est que 40% de la prime sert à payer notre assurance pour dommages
corporels; 40% de $3000, c'est $1200 que cela coûte actuellement pour les
dommages corporels.
M. Shaw: Vous n'avez aucun renseignement?
M. Bhérer: Je suis certain, d'après ce que je vous
dis, que le montant de cette prime de $1200, vu les implications que la loi
nous impose quant à notre responsabilité à
l'extérieur du Québec et quant à notre
responsabilité à l'intérieur du Québec
vis-à-vis d'étrangers qui vont voyager dans nos autobus, je pense
qu'on ne réduira pas tellement ce montant de $1200. Dans quelle mesjre
le sera-t-il? Je ne suis pas en mesure de vous Ie dire dans le moment, mais je
n'ai pas l'impression qu'il va être tellement réduit. C'est ce que
nous avons voulu manifester ici. C'est pour cela que je disais tout à
l'heure à Mme le ministre que peut-être, si nous pouvions avoir
des conversations pivées avec vos fonctionnaires, on pourrait donner des
renseignements un peu plus précis en discutant avec eux des implications
afin que vous sachiez exactement à quoi vous en tenir. On ne demande pas
mieux que de vous éclairer.
M. Shaw: Les étrangers qui voyagent dans vos autobus au
Québec, qui sont accidentés...
M. Bhérer: Ils ne sont pas couverts par le plan.
M. Shaw: ... ne sont pas couverts par le plan. Ont-ils recours
aux cours?
M. Bhérer: Ils ne sont pas couverts par le plan.
M. Shaw: Mais cela va être au Québec?
M. Bhérer: Ils ne sont pas sous le coup de la
responsabilité.
M. Shaw: Je ne sais pas si cela représente beaucoup de
monde, mais c'est évident que si vous avez des voyages à
Toronto...
M. Bhérer: Dans le fort du tourisme, cela
représente beaucoup de monde. Les services d'autobus dans la province de
Québec durant l'été sont alimentés pour une large
partie par l'apport touristique. Alors, c'est très important. Si ces
gens étaient couverts, là vraiment on réduirait
sensiblement notre coût d'assurance.
M. Shaw: Vous n'avez pas déjà parlé à
des compagnies d'assurances pour vous donner les différences des
chiffres, des montants qui seraient impliqués?
M. Bhérer: Non, c'est difficile de vous dire des chiffres
exacts, vous savez. Je suis rendu à $1200. Selon mon estimation,
d'après les conversations qu'on a eues, je pense que cela pourrait
réduire notre coût d'assurance peut-être de 30% à 40%
à l'intérieur de ces $1200.
M. Shaw: Qui paie le permis de conduire des chauffeurs
d'autobus?
M. Bhérer: Le chauffeur.
M. Shaw: Le chauffeur lui-même, mais cela représente
un autre coût pour lui.
M. Bhérer: Evidemment.
M. Shaw: Cela implique une augmentation de prix peut-être
pour l'assurance au complet.
M. Bhérer: Pour le chauffeur.
M. Shaw: Cela représente encore un coût pour le
chauffeur. Je ne vois aucun moyen de dire que cela représente une
diminution du coût de l'assurance automobile pour les
Québécois.
M. Bhérer: Je reviens toujours à cette idée.
On a entendu dire toutes sortes de choses. Il en coûte actuellement $2.50
au transporteur d'écoliers pour immatriculer son véhicule.
D'après les renseignements que nous avons eus, cela pourrait augmenter
jusqu'à $100 pour immatriculer son véhicule. Cela fait un gros
pourcentage d'augmentation. Si c'est cela, je vous assure que cela va lui
coûter de l'argent. Les frais de transport des écoliers vont
augmenter en conséquence, il n'y a aucun doute.
On dit que c'est moindre que l'augmentation pour l'immatriculation des
véhicules qui transportent d'autres personnes que des écoliers.
Si c'est sur cette base, cela voudrait dire que nos frais d'immatriculation
augmenteraient aussi, pas dans la même proportion parce qu'on paie
déjà un montant assez élevé. On parle d'une autre
taxe sur la pesanteur du véhicule, qui serait calculée avec sa
charge alors qu'actuellement elle est calculée sans sa charge.
Ce sont tous des éléments qu'on ne connaît pas
actuellement. On en a entendu parler, mais on ne les connaît pas. Si
c'est cela, jusqu'où cela va, je ne le sais pas. Je
répète, encore une fois, que la formule la plus simple, la plus
facile, c'est l'impôt sur le revenu. Là, on n'a plus de
problèmes. On va payer selon ses profits. Celui qui a un revenu
privé va payer et celui qui a des profits va payer en fonction de ses
profits.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Je constate, M. le Président, qu'il est
très difficile de discuter d'une façon positive lorsqu'on n'a pas
de donnée et qu'on n'a pas de chiffre. D'ailleurs, c'est la raison pour
laquelle, je crois, le ministère devrait nous fournir des chiffres,
même si ces chiffres changent au fur et à mesure des modifications
qu'on peut apporter au projet de loi. Si on nous apportait des chiffres, des
résultats d'étude et même le processus d'étude, le
genre d'étude qu'on a faite pour arriver à des chiffres
donnés avec une loi donnée, au fur et à mesure que la loi
change, qu'on discute d'un article donné de la loi, on pourrait voir
s'il y aurait intérêt à le changer ou à ne pas le
changer, avec chiffre à l'appui. Tandis que là, ce n'est pas
facile.
M. Bhérer: Nous avons un grand nombre de
propriétaires d'autobus d'écoliers parmi nos membres et à
ceux-là, il va en coûter cher. Si c'est vrai que cela va
coûter $100, quelque chose comme cela, par autobus d'écoliers,
cela va coûter joliment cher, au lieu de $2.50. Comme disait mon
collègue, les compagnies d'assurancesc'est toujours la même
histoire ne peuvent pas nous dire comment cela va réduire la
prime sans savoir quelle va être la couverture réelle. Si on
modifie la couverture dont on parle à l'article 7, cela peut
réduire la prime sensiblement.
M. Saint-Germain: Pour revenir à votre mémoire,
justement à cet article 7, à la page 7 de votre mémoire,
je ne suis pas avocat, mais est-ce que, puisque vous avez un avocat près
de vous...
M. Bhérer: J'ai un bon avocat. Mme Payette: Me
Bhérer.
M. Bhérer: Cela fait 47 ans que je pratique le droit, je
n'en ai point l'air.
M. Saint-Germain: C'est doublement correct. J'ai deux avocats
devant moi. A l'article 7, que vous voulez ajouter, est-ce qu'il n'est pas
inclus dans l'article 2? Lorsqu'on dit: "Si le propriétaire de
l'automobile n'est pas assuré ou n'est pas assuré suffisamment
d'après les règles établies dans la présente loi";
comme on ne spécifie pas qu'on parle simplement du propriétaire,
qu'il soit étranger ou résident du Québec, est-ce que vous
croyez que l'article 2 tel que rédigé exclut les
propriétaires étrangers?
M. Bhérer: Oui, mais dans notre esprit, cela ne s'applique
qu'aux Québécois, qu'aux résidents.
M. Saint-Germain: Ah bon!
M. Bhérer: Cela ne s'applique pas aux
non-résidents. Dans notre esprit, c'est peut-être... mais pour
fins de clarification, il serait plus simple si on ajoutait l'article qu'on
propose.
Mme Payette: M. le Président, comme je peux une fois
être entièrement d'accord avec le député de
Jacques-Cartier, vous me permettrez de noter cette exception. Je pense que le
député de Jacques-Cartier a parfaitement raison.
M. Saint-Germain: J'ai raison. Mme Payette: Oui.
M. Saint-Germain: Même si je ne suis pas avocat.
Mme Payette: Vous avez parfaitement raison. C'est-à-dire
que l'article proposé par cette association est déjà
compris dans l'article au point 2 et la dernière partie de la
proposition dans l'article au point 5.
M. Saint-Germain: Puisqu'on s'entend sur le fond, il ne devrait
pas y avoir de difficulté sur la forme, si l'article n'est pas assez
clair.
Mme Payette: Si on s'entend, c'est qu'il doit y avoir quelque
chose qui n'est pas correct.
M. Roy: C'est justement ce que je viens de dire.
Mme Payette: Et pour une fois, je suis d'accord avec vous
aussi.
M. Bhérer: II suffirait de rendre cela plus clair.
M. Saint-Germain: Vous parlez ici, à l'article, à
la page 8 de votre mémoire, que "ce recours de l'assuré contre le
fonds d'indemnisation, dans les cas prévus, devrait plutôt
être considéré comme une franchise, en réduction de
la prime". Nous n'avons pas de chiffres. Je ne sais pas jusqu'à quel
point ceci peut être un élément important, mais il me
semble qu'en toute justice, c'est ce qui devrait arriver. Ou qu'on donne
à vos assureurs le droit de s'adresser au fonds d'indemnisation, si on
le donne, on peut vous donner une réduction de prime.
M. Bhérer: Si ces derniers peuvent s'y adresser, on n'a
pas d'objection. Nous pensons que cela devrait être plutôt
employé par nous, pour une réduction de la prime à titre
de franchise. On ne serait pas obligé de s'assurer pour $50 000 dans les
cas prévus.
M. Saint-Germain: Puisque les particuliers l'ont, il n'y a pas de
raison pour que les personnes morales n'aient pas le même recours contre
le fonds d'indemnisation.
Je voulais aussi parler des 15%; l'administration du plan coûtera
plus de 15% des primes perçues dans le régime de
non-responsabilité, tel que vous le dites au paragraphe 2 de l'article
9. Je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter là-dessus
mais, puisque nous n'avons pas de chiffre, il faut bien admettre que vos
affirmations peuvent être aussi exactes que d'autres.
M. Bhérer: Nous avons pris, pour fins de
référence, l'expérience des autres provinces.
M. Saint-Germain: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, j'aimerais demander ceci
à nos invités. Ils font une affirmation assez forte vers la fin;
il nous disent que leurs coûts vont augmenter, que les primes risquent
d'augmenter alors qu'on ne connaît pas encore la prime exacte qui va
être demandée sur les plaques d'immatriculation ou par tout autre
moyen aux transporteurs.
Ce que j'ai compris de votre mémoire c'est qu'il y a
peut-être un facteur d'augmentation des coûts au niveau de
l'économie d'échelle que les compagnies d'assurances faisaient en
vous vendant un montant global d'assurances. Maintenant comme elles vont vous
assurer pour certains points bien précis, vous pensez que cela a des
chances de coûter plus cher. Mais, à part cela, tous les autres
éléments sont déjà des choses que vous payez
à même vos polices d'assurance; vous êtes déjà
obligés de vous assurer pour cela.
M. Bhérer: Oui, mais on le paye en fonction de notre
expérience à nous, non pas en fonction de l'expérience des
autres; ce n'est pas la même chose. L'assurance pour blessures
corporelles, parmi les propriétaires d'autobus est la moins
coûteuse qui soit sur le marché, parce que notre expérience
est meilleure que celle d'autres groupes.
M. Paquette: A cause de la responsabilité et du fait que
vous avez moins d'accidents?
M. Bhérer: C'est-à-dire que nous sommes moins
impliqués dans des accidents où il y a des dommages
corporels.
M. Paquette: Oui. Vous avez dit, tout à l'heure, que vous
sembliez préférer une formule d'impôt sur le revenu pour le
financement du régime. Moi, pour d'autres raisons, je trouve que cela a
un certain sens d'avoir une taxe progressive étant donné que les
indemnités vont être en fonction du revenu également, en ce
qui concerne les blessures corporelles. Mais il y a quand même un
problème; supposons qu'on mette cela sur l'impôt sur le revenu,
qu'est-ce qui empêche quelqu'un de mettre l'auto au nom de la personne
dans la famille qui a le moins de revenu, de façon à diminuer ses
primes? Il y a une série de problèmes comme cela.
M. Bhérer: Je pense que de ce côté le
gouvernement a seulement à faire des règlements, il n'y a pas de
problème. N'importe qui ne peut enregistrer une voiture à son
nom.
M. Paquette: Je pense que n'importe qui peut enregistrer une
voiture à son nom. Le mari peut la mettre au nom de la femme, il peut la
mettre au nom du garçon. Il y a quand même là un
problème technique.
Si je comprends bien, vous le demandez parce que cela permettrait
à vos passagers de payer, en quelque sorte, les coûts et de
réduire d'autant votre prime.
M. Bhérer: Cela mettrait tout le monde sur le même
pied. Ceux qui emploient l'autobus et qui sont protégés
paieraient. Le piéton qui n'emploie pas l'autobus, le cycliste, tout ce
monde qui n'a pas de véhicule paierait sa petite part pour l'assurance
qui lui est offerte. Autrement ce sera de l'assurance gratuite pour ces gens.
Le jeune homme qui...
M. Paquette: Si vous permettez; je pense qu'actuellement ces gens
ne paient pas d'assurance, c'est vous qui les assurez, mais ils en payent
indirectement dans le prix du billet.
M. Bhérer: Pour ceux qui voyagent dans nos autobus, mais
pour ceux qui voyagent à pied ou qui voyagent... Enfin, il n'y a pas
seulement nous autres. Même ceux-là, de toute manière,
individuellement ils vont le payer le prix de l'assurance. Ils vont le payer
également tandis qu'autrement ils paieraient d'après leurs
revenus. Ceux qui sont exemptés de l'impôt sur le revenu ne
paieraient pas et ils seraient assurés quand même.
Ceux qui ont un revenu supérieur au revenu maximum auquel ils
auraient droit par leur indemnisation paieraient en fonction de ce revenu.
C'est compensatoire, cela crée un équilibre. C'est toujours le
moyen d'équilibrer les coûts entre des personnes de revenus
divers, de revenus différents. Il y a un passage, des vases
communicants. Celui qui a plus de revenus paie pour celui qui en a moins. Dans
ma philosophie je ne suis pas un socialiste je trouve cela
équitable. Je ne suis pas un socialiste, je n'aime pas partager mes
biens avec les autres, mais pourvu que ce soit fait également, je suis
pour cela.
L'assurance-maladie, je trouve cela très bien.
L'assurance-hospitalisation, je trouve cela très bien. C'est fait sur
l'impôt sur le revenu. Il y en a qui ne paient pas, mais ils sont
assurés quand même. Les assistés sociaux ne paient pas et
ils sont assurés; les malades, ceux qui ont des revenus en bas de $3000,
ne paient pas et sont assurés. Enfin, c'est juste, s'ils n'ont pas le
moyen de payer, ces gens-là, mais celui qui a un revenu de $50 000 paie,
lui.
M. Paquette: Maintenant, j'ai de la difficulté à
identifier ce que vous nous proposez.
M. Bhérer: Si vous me le permettez, M. le
député...
M. Paquette: Vous craignez que vos primes augmentent. Si j'ai
bien compris, vous voudriez que plus de choses soient couvertes par le
régime étatique?
M. Bhérer: Non.
M. Paquette: Vous craignez aussi la mixité du
régime?
M. Bhérer: Non, non, non.
M. Paquette: Qu'est-ce que vous aimeriez en tant que formule
globale? C'est ce que j'aimerais savoir.
M. Bhérer: Non, non. Toute notre responsabilité
quant aux biens matériels, on est prêt à l'assumer, il n'y
a pas de problème; notre responsabilité pour les dommages
à l'extérieur, on est prêt à l'assumer, il n'y a pas
de problème; mais ce qui nous ennuie, c'est d'être responsables de
dommages à l'égard d'assurés résidant dans le
Québec. Cela nous impose l'obligation d'assurer tout le monde de la
même manière, parce que c'est le plus grand nombre de voyageurs.
C'est ce qui fait que nos primes d'assurance ne baisseront pas tellement.
M. Paquette: Ce n'est pas tellement le fait que ce soit un
régime mixte?
M. Bhérer: Je reviens à l'histoire de l'impôt
sur le revenu. Un propriétaire d'autobus, qui a une compagnie qui fait
des profits, va payer son impôt sur le revenu et il va contribuer comme
ça suivant ses revenus, suivant ses moyens. C'est cela,
l'équilibre.
M. Paquette: Sauf que c'est sur le gain de capital, c'est
taxé à moitié. Ensuite, c'est après avoir
réinvesti un paquet de sommes. C'est à 12%, c'est la même
chose pour toutes les compagnies, peu importe...
M. Bhérer: Oui, mais enfin...
M. Paquette: ... la taille des compagnies. En tout cas, on
pourrait discuter longtemps là-dessus.
M. Bhérer: Oui, les socialistes, les socialisants aiment
cette formule. Je n'en suis pas un et je l'aime.
M. Paquette: Vous aimez la progressivité de l'impôt
pour les particuliers, mais pour les compagnies peut-être moins.
M. Bhérer: Mais j'aime contribuer au système social
de ceux qui sont démunis, par exemple. C'est ma part de vie en
société.
M. Paquette: Je sens qu'on s'en va à l'encon-tre du
règlement. Je ne sais pas comment vous conciliez la justice
distributive...
M. Saint-Germain: C'est intéressant quand même.
M. Paquette: ... avec la taxation sur la moitié seulement
des gains de capital alors qu'un gars à salaire est taxé sur son
plein revenu.
M. Bhérer: Pour ce qui est du gain de capital, monsieur,
ce que j'ai acquis par mes économies, je ne tiens pas à ce que
personne vienne me le prendre. J'ai travaillé toute ma vie, j'ai acquis
un petit capital et je ne voudrais pas que personne vienne me le prendre par
une taxe sur le capital. C'est à moi, je l'ai gagné. Sur mon
revenu, par exemple, je suis prêt à partager.
M. Shaw: C'est un profit, "a corporate profit". Une Voix:
De 50%. Une moitié...
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé?
M. Paquette: Oui.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Non, je n'ai pas demandé la parole.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Viau.
M. Lefebvre: Je voudrais revenir sur les chiffres que vous avez
donnés tout à l'heure. Votre assurance moyenne est d'environ
$3000.
M. Bhérer: Oui.
M. Lefebvre: Vous avez dit que 40% c'est inscrit dans
votre texte de la prime couvrait le corporel. Vous avez aussi dit
qu'à peu près 40% de ces $1200 seraient une baisse réelle
assumée par cette assurance. Est-ce exact?
M. Bhérer: Ce serait un nouveau coût. Oui, c'est
cela. Environ $500.
M. Lefebvre: Ce qui veut dire $500. Ce qui veut dire aussi que si
le nouveau taux des plaques n'augmente pas plus que de $500, vous allez
être gagnant...
M. Bhérer: Bien, gagnant! On n'aura pas besoin...
M. Lefebvre: En aucun moment on a dit que cela dépasserait
ces $500; je comprends difficilement votre crainte, en disant que les
coûts vont augmenter. Si on prend 40% de 40% de $3000, cela donne $500.
Tant que les plaques ne coûteront pas plus que $500, vous êtes
certains, à toutes fins pratiques, que votre assurance ne sera pas plus
chère. Au contraire, elle a des tendances à être moins
chère.
M. Bhérer: Je ne le sais pas, c'est ce qui est le point
d'interrogation.
M. Lefebvre: Ce sont vos chiffres.
M. Bhérer: Oui, oui, mais je ne sais pas comment cela va
coûter, les frais d'immatricula-
tion. C'est pour cela que je disais tout à l'heure que si on
connaissait les chiffres...
M. Lefebvre: Non, mais on dit que tant que cela ne
dépasserait pas ce que j'ai dit, tant que cela ne dépasserait pas
$500, vous allez payer moins d'assurance.
M. Bhérer: On ne paiera pas moins, mais on ne paiera pas
plus.
M. Lefebvre: Cela je ne...
M. Roy: On ne sait pas si cela peut dépasser $500, c'est
là qu'est le point.
M. Bhérer: C'est cela le problème.
M. Lefebvre: Tant que cela ne dépassera pas.
M. Roy: C'est ce qui me faisait dire tout à l'heure que
nous faisions des discussions sur une base hypothétique, un peu comme un
conseil d'administration qui serait réuni pour étudier le bilan
d'une entreprise. On dirait: Les comptables n'ont pas fini de le
préparer, mais étudiez-le pareil. C'est ce qu'on fait.
Le Président (M. Boucher): Alors, il n'y a pas d'autres
intervenants, je redonne la parole à Mme le ministre.
Mme Payette: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
à la dernière page du mémoire, M. Bhérer, tout
simplement pour apporter une correction, si vous permettez, au deuxième
paragraphe, où vous affirmez que le plan coûtera plus de 15% des
primes perçues dans le régime de non-responsabilité, comme
le démontre l'expérience des autres provinces. Il y a plusieurs
provinces, cependant, qui envisagent un "no fault"; c'est le cas de la
Saskatchewan, du Manitoba, de la Colombie-Britannique, de l'Ontario, à
ma connaissance.
En Saskatchewan, actuellement, le pourcentage de frais d'administration
est de 20% sur l'ensemble des assurances, puisque toutes les assurances sont
étatisées, mais il n'y a pas de "no fault" dans le régime
étatique. Ce que nous visons, nous, avec le régime
proposé, c'est entre 20% et 25% de frais d'administration au total, y
compris l'entreprise privée et le régime d'Etat que nous
maintenons pouvoir administrer à 6% ou en dessous.
M. Bhérer: Tant mieux.
Mme Payette: Une autre chose que j'aimerais aussi vous dire: je
voudrais reconnaître votre grande générosité quand
vous nous proposez de vous taxer sur votre impôt sur le revenu et je suis
en train de me demander si on ne fera pas une exception pour vous tellement
vous l'avez réclamé. J'ai l'impression cependant que cela vous
coûterait plus cher à vous, M. Bhérer, sur l'impôt
sur le revenu que sur votre plaque d'immatriculation.
M. Bhérer: Oui, mais cela va coûter plus cher
à d'autres aussi qui ne payent pas actuellement, qui ne paieront pas
dans ce temps-là.
Mme Payette: Vous êtes prêt à partager. Si
vous êtes d'accord également, puisque vous avez
réclamé à deux reprises que les discussions puissent se
poursuivre avec les gens qui travaillent à la réforme, je me
permettrai de déléguer Me Jean-Pierre Marcotte, un des
conseillers juridiques auprès du ministère, qui pourra, en
communication avec votre association et avec vous, voir les détails de
l'application de la réforme en ce qui vous concerne.
M. Bhérer: Nous irons sûrement communiquer avec
lui.
Mme Payette: Je vous remercie infiniment de votre participation
à la commission.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je remercie les représentants de l'Association des
propriétaires d'autobus du Québec, Me Bhérer et Me
Poliquin, et nous allons passer à un autre mémoire.
M. Bhérer: Au nom de mes clients, M. le Président,
Mme le ministre et tous les membres de la commission, je vous remercie de votre
gentillesse et de la cote d'écoute que vous nous avez accordée.
Enfin, je vous remercie beaucoup. Nous sommes heureux d'avoir comparu devant
vous et nous espérons que notre contribution sera utile.
Précisions concernant les employés de la
CAT
Mme Payette: M. le Président, avant de passer à
d'autres intervenants, j'aimerais apporter une information à une
question du député de Beauce-Sud, au sujet de certaines rumeurs
officieuses concernant des employés de la Commission des accidents du
travail. Certains employés de la Commission des accidents du travail ont
en effet été mis en disponibilité, suite à
l'application de la politique de décentralisation de la Commission des
accidents du travail. Ces employés font partie de la fonction publique
cependant et jouissent du privilège de permanence et seront
réaffectés à d'autres fonctions. La régie, pour sa
part, s'est engagée à donner priorité à ces
personnes dans son recrutement.
M. Roy: Je remercie beaucoup Mme le ministre de ses informations,
mais est-ce qu'on l'a informée et serait-elle prête, de son
côté, à mandater quelqu'un de son cabinet pour faire
enquête auprès des personnes qui ont été mises en
disponibilité, parce que toutes celles qui se sont adressées
à la Régie de l'assurance automobile ont reçu un refus
catégorique et se sont vues informées
que tout le personnel était déjà engagé et
retenu. J'ai le témoignage de nombreuses personnes qui, actuellement,
sont mises en disponibilité à la Commission des accidents du
travail. On leur aurait dit: Dites à ces personnes de se
présenter à l'ouverture du bureau et de se représenter
à la fin de l'après-midi. De toute façon, elles ont leur
sécurité d'emploi. Comme il s'agit d'épargner les deniers
de l'Etat et que ces personnes sont au nombre de près de 140, c'est la
raison pour laquelle je suis rassuré par le fait que le ministre nous
confirme en commission parlementaire que ces personnes auront priorité
auprès de la Régie de l'assurance automobile. J'espère
qu'on en prendra bonne note dans ces milieux et qu'on verra à corriger
une opinion qui était répandue dans le milieu et à
corriger également les décisions qui ont été prises
concernant ces personnes.
Mme Payette: M. le député, je trouve qu'on calomnie
beaucoup la Régie de l'assurance automobile, mais, effectivement, je
maintiens la déclaration que je viens de vous faire et je pense que cela
rassurera tout le monde.
M. Roy: En vous remerciant, Mme le ministre, ce n'est pas dans
l'intention de calomnier la Régie de l'assurance automobile. Je n'ai pas
dit cela du tout.
Mme Payette: II ne s'agit pas de vous, M. le
député. J'ai dit: On calomnie beaucoup.
M. Roy: Je comprends. Mais je dis que les personnes qui se sont
plaintes de cet état de choses avaient eu cette réponse. C'est la
raison pour laquelle, pour ne pas ternir l'image de la Régie de
l'assurance automobile, j'ai soulevé ce point à la
commission.
Mme Payette: Je vous remercie de votre délicate attention
pour ta régie.
Le Président (M. Boucher): Ceci étant dit, le
prochain organisme convoqué est l'Association provinciale des marchands
d'automobiles du Québec Ltée, représentée par M.
Henri Grondin, procureur, M. Denis Demers et M. Frank Williams.
M. Grondin, vous avez la parole.
Association provinciale des marchands d'automobiles du
Québec Ltée
M. Grondin (Henri): M. le Président, Mme le ministre,
messieurs les membres de la commission, mon nom est Henri Grondin et je suis le
procureur de l'Association provinciale des marchands d'automobiles du
Québec. Je suis accompagné cet après-midi du
président de l'association, à ma gauche, M. Frank Williams, de
Hull, du vice-président, M. Gilles Bédard, de Lévis, de
même que de M. Denis Demers, qui est le directeur général,
et de M. Gilles Viel, également administrateur, de Québec.
L'Association provinciale des marchands d'automobiles, comme vous le
savez probablement, regroupe seulement des marchands "franchisés",
c'est-à-dire ceux qui ont une concession de voitures neuves d'un
manufacturier de voitures. Cette association les regroupe presque tous, soit
environ 850 marchands à travers le Québec. Ces gens-là
emploient environ 35 000 salariés et l'association s'est toujours
intéressée aux projets de réforme de l'assurance
automobile. L'association a présenté un mémoire à
la commission Gauvin, elle a préconisé certaines réformes
relativement au certificat de conformité, à l'examen
périodique des véhicules automobiles, etc. Elle a
également présenté un mémoire au ministre, Mme
Payette, sur le livre bleu.
L'association veut jouer un rôle à la fois actif et
positif. Quoi qu'on puisse en dire, nous voulons vraiment faire ce
mémoire-là dans l'intérêt du consommateur, parce que
les marchands d'automobiles que je représente aujourd'hui ont besoin de
cet appui du consommateur pour réussir en affaires. Nous ne voulons pas
répéter tout ce que nous avons déjà dit dans nos
mémoires antérieurs et surtout celui qui a été
présenté à Mme Payette il y a quelques mois, même si
nous continuons de nous interroger sur l'à-propos de chambarder tout le
système de l'assurance automobile, sans être bien sûrs de
l'économie réelle qui pourra en résulter pour le
consommateur. Cependant, nous voulons revenir sur un point bien particulier,
celui que nous connaissons le mieux. Nous croyons de notre devoir de parler,
justement, de la réparation des véhicules automobiles.
Or, à ce sujet, nous formulons deux types de recommandations. La
première a trait aux articles 138 à 158 du projet de loi.
Comme vous le savez, M. le Président et Mme le ministre, on a
formé, à l'article 138 du projet de loi, ce qu'on appelle la
Corporation des assureurs autorisés. Or, on constate, à la
lecture du projet de loi, que l'on confie des pouvoirs extrêmement larges
à cette nouvelle corporation dans le domaine de l'indemnisation des
dommages. Il semble, du moins à la lecture du projet de loi, que cette
corporation soit formée exclusivement de représentants des
compagnies d'assurance, même si le ministre ou une autre personne et le
surintendant des assurances y siègent. Nous croyons qu'il y a un danger
réel de confier seulement à des assureurs le soin de prendre
toutes les décisions à cet effet.
Si on regarde, par exemple, les articles 153, 154, 155 et 158, je vous
avoue que cela nous fait un peu peur. L'association provinciale, comme elle le
dit dans son mémoire à la page 3, soumet que, si les centres
d'évaluation devaient être l'outil le plus adéquat pour
réaliser des économies dans le cas de l'indemnisation
versée pour la réparation des dommages matériels, ces
centres d'évaluation, pour être efficaces, ne devraient pas
être régis et opérés uniquement par des assureurs.
Ils devraient comporter, de toute nécessité, la présence,
la participation et la collaboration des marchands d'automobiles qui sont les
représentants de l'industrie de la réparation. A tout le
moins,
cette formule éviterait tout contentieux sur le montant des
réparations entre les assureurs et les garagistes.
En somme, nous croyons essentiel de participer, comme
représentants des réparateurs d'automobiles, aux décisions
qui seront prises relativement aux centres d'évaluation et aux autres
mesures concernant la réparation des véhicules automobiles. Entre
autres, il faudra tenir compte, dans les normes qui seront établies par
cette corporation des assureurs, des distinctions régionales. Il faudra
tenir compte, également, de l'équipement qui peut différer
d'un garage à un autre. Il faudra également tenir compte des
conventions collectives qui existent chez certains marchands d'automobiles,
chez la plupart de nos membres, et qui n'existent peut-être pas chez
d'autres types de réparateurs. Enfin, il faudra tenir compte
également de la qualité de la réparation.
En somme, nous soumettons que les assureurs sont à la fois juge
et partie jusqu'à un certain point puisqu'ils vont définir les
règles du jeu et, ensuite, ils vont payer la facture dans le cas des
dommages matériels. Nous soumettons qu'ils n'ont pas les mêmes
intérêts que le consommateur; ils n'ont pas les mêmes
intérêts, non plus, que les réparateurs. C'est pour cela
que, si vous vous référez à la page quatre de notre
mémoire, nous redisons que nous croyons essentiel que des
représentants du public et de l'Association provinciale des marchands
d'automobiles participent aux décisions prises par la corporation ou, du
moins, soient obligatoirement consultés préalablement dans tout
ce qui les concerne.
C'est pour cela que nous soumettons un amendement à l'article 153
ce n'est pas 53, mais bien 153 qui pourrait se lire comme suit:
"La corporation détermine, conjointement avec les représentants
de l'Association provinciale des marchands d'automobiles du Québec, les
normes d'établissement et d'opération des centres qu'elle
agrée, ainsi que les conditions de retrait de son agrément.
Même chose pour l'article 155 qui commence par les mots "La
corporation doit établir une convention d'indemnisation directe
relative" au paragraphe deux, on devrait dire à
l'évaluation des dommages subis par les automobiles et à
l'expertise nécessaire après consultation de l'association que
nous représentons.
Nous souhaiterions également, M. le Président, que des
gens du Conseil de la protection du consommateur puissent également se
joindre à la corporation des assureurs. En somme, nous voulons que tous
les gens intéressés puissent participer à
l'établissement de ces normes.
En deuxième lieu, nous croyons que devraient être reconnus
par la loi, de façon automatique, comme centres d'évaluation
agréés, tous les établissements des membres de
l'Association des marchands d'automobiles. Vous savez que, pour être
membre de l'association, il faut détenir une franchise des
manufacturiers. Or, inutile de vous dire que les manufacturiers ont des normes
excessivement rigides, des exigences très dures en ce qui concerne
l'honnêteté et la solvabilité de ceux qui détiennent
des franchises.
En plus de cela, l'Association des marchands d'automobiles a certaines
normes d'éthique. Enfin, la plupart des marchands d'automobiles ont,
dans leur établissement, des syndicats accrédités qui
négocient des conventions collectives.
Ceci assure évidemment aux salariés des normes de salaires
et des conditions de travail adéquates, des normes d'hygiène
aussi, et tout cela pour dire que nos membres offrent un service garanti, ce
qui n'est peut-être pas le cas de tous les réparateurs
d'automobiles au Québec.
En somme, nous ne prétendons pas être les seuls à
pouvoir être accrédités par cette fameuse corporation, mais
nous pensons que nous sommes sûrement tous aptes à être
accrédités, quitte à laisser, par la suite, à la
corporation prévue à l'article 138 le soin de vérifier si
les normes qu'elle pourra adopter conjointement avec l'Association provinciale
sont bien respectées.
En somme, M. le Président, en terminant, nous voulons reprendre
cette conclusion du mémoire qui dit que même s'il est vrai que les
garagistes, en général, ont une côte à remonter dans
l'opinion publique, l'Association provinciale des marchands d'automobiles
veille à ce que tous ses membres rehaussent cette cote de confiance, et
elle désire participer à la mise en place du nouveau
système. Pour cela, nous en sommes conscients, il faudra apporter
quelques amendements mineurs au projet de loi, et nous avons confiance que vous
le ferez, et nous vous remercions à l'avance. Et comme j'ai avec moi les
représentants de l'association, ils sont à votre disposition pour
répondre à toutes les questions peut-être bien
particulières dans le domaine de la réparation des
véhicules automobiles.
Le Président (M. Bisaillon): Mme le ministre.
Mme Payette: M. le Président, vous me permettrez une
question d'abord à M. Williams, parce que j'ai dit tout à l'heure
qu'on calomniait souvent la Régie de l'assurance automobile, mais on
calomnie aussi le ministre, à certains moment, et M. Williams a
laissé au ministre une mauvaise réputation dans la région
de Hull en disant qu'il ne répondait pas aux lettres qu'on lui envoyait.
J'aimerais qu'il puisse corriger cette mauvaise impression qu'il a
laissée à Hull.
M. Williams (Frank): Je n'ai pas eu la réponse, non plus,
Mme le ministre.
M. Saint-Germain: Monsieur est ici non pas pour résoudre
des problèmes de relations personnelles entre lui et le ministre, nous
sommes ici pour avoir l'opinion de monsieur sur le contenu de son
mémoire. Si Mme le ministre a personnellement des problèmes avec
monsieur nous ne sommes pas à la commission pour les entendre, et je ne
vois pas qu'on doive perdre du temps à ce faire non plus.
Mme Payette: Oui, M. Saint-Germain. M. Williams: Elle a
mon adresse.
Mme Payette: C'est exact, on s'en occupera. Vous avez
mentionné, en lisant votre mémoire, que, pour avoir
l'autorisation d'exister, les grandes compagnies fabriquant des voitures
avaient des normes d'éthique extrêmement sévères.
Pourriez-vous détailler les normes qui sont imposées?
M. Grondin: J'ai parlé des normes de solvabilité et
d'honnêteté que les manufacturiers de voitures exigent avant de
donner une franchise d'automobiles.
Mme Payette: Oui.
M. Grondin: Evidemment, dans les détails, je laisserai
encore à M. le président le soin d'y répondre.
M. Williams: Quant aux normes des manufacturiers, bien entendu,
c'est la solvabilité de la personne, si elle a une bonne
réputation, si elle est connue dans la région où elle va
opérer. Il y en a beaucoup d'autres qui sont exigées aussi. S'il
y en a qui veulent ajouter quelque chose...
M. Bédard: C'est de connaître le produit qu'on vend,
chaque individu qui représente le manufacturier doit connaître le
produit aussi bien pour la réparation mécanique que pour le
débos-selage, la quantité de pièces aussi qu'il faut
garder en inventaire.
Mme Payette: Vous laissez entendre, à la page 2 de votre
document, que la réforme de l'assurance automobile, semble-t-il, nuirait
au commerce que vous exercez. J'aimerais savoir de quelle façon vous le
voyez. Si je lis le paragraphe, vous revenez à la charge sur la
réparation des véhicules automobiles et les conséquences
graves que pourrait avoir le projet de loi sur vos membres ainsi que sur le
consommateur. Pourriez-vous m'expliquer davantage quelles sont ces
conséquences graves?
M. Grondin: Madame, si la Corporation des assureurs décide
de tout faire sans nous consulter, qu'elle décide, par exemple, des taux
qu'elle va payer, qu'elle décide cela peut concerner, vous allez
dire, le marchand d'automobiles qu'une automobile plus vieille que telle
année ne devrait pas recevoir autre chose que des pièces de
seconde main dans les réparations, le consommateur est
intéressé. Il reste à savoir si on va lui poser une aile
reconditionnée ou une aile neuve, un pare-choc reconditionné ou
non ou des choses comme celles-là. Je vous donne des exemples
très bénins, mais cela peut être plus que cela, et je pense
que les gens qui sont avec moi peuvent vous donner des exemples de cas
où ils se battent eux-mêmes avec les estimateurs d'assurance pour
obtenir pour leurs clients une répara- tion adéquate. Mais si les
normes sont faites de telle façon qu'on n'y peut rien et qu'on n'est
même pas là pour en discuter au moment où elles vont
être établies, nous pensons évidemment que les assureurs
vont penser à eux d'abord.
Ils vont faire en sorte que cela ne coûte pas cher,
peut-être, mais est-ce que cela sera bon pour le consommateur? Je ne le
sais pas. C'est là, je pense, que nous disons que cela peut avoir des
conséquences graves à la fois pour le marchand d'automobiles qui
a un commerce, si on fixe d'autorité les taux, etc., et le nombre
d'heures que cela doit prendre pour faire telle réparation, cela peut
être important; cela peut avoir des conséquences également
sur le consommateur qui ne pourra peut-être pas obtenir, à cause
des normes, une réparation complète de son véhicule
puisqu'on va lui dire: Ecoutez votre voiture date de plus de deux
années, on ne peut pas faire mieux que cela.
C'est dans ce sens que nous disons que cela peut avoir des
conséquences graves et que nous voulons être présents au
moment où les décisions vont se prendre, où les normes
vont être établies.
Mme Payette: Est-ce qu'il n'y a pas eu, jusqu'à
maintenant, de la part de vos membres, une grande largesse au niveau des
réparations de voitures?
M. Grondin: Une grande quoi, je m'excuse? Mme Payette:
Largesse. M. Grondin: Largesse?
Mme Payette: Oui. Est-ce qu'on n'a pas tendance souvent, pour
donner satisfaction au client je veux dire que cela peut être fait
de cette façon de remplacer par des pièces neuves des
pièces qui pourraient être réparées?
M. Grondin: Je pense que c'est toujours d'accord avec la
compagnie d'assurances ou avec l'ajusteur.
M. Williams: Tout d'abord, c'est le client qui paie l'assurance.
Si vous avez une automobile qui est pratiquement neuve et que l'ajusteur sait
où il y a un morceau usagé, qu'il voudrait le passer, on dit au
client: Tu devrais avoir un morceau neuf pour être certain qu'il y a une
bonne réparation. C'est protéger le client. Il n'y a pas de
largesse. C'est dans l'intérêt du client. D'autres fois, cela n'a
pas de bon sens de mettre des pièces neuves parce que l'automobile a un
certain millage. On met des pièces usagées. Il n'y a pas de
largesse.
Mme Payette: Avec l'accord du client à ce moment.
M. Williams: II faut le déclarer au client. Il ne faudrait
pas s'en faire, nos services de débosselage, ce ne sont pas des gros
profits. C'est peut-être dans le rouge.
Mme Payette: Dans quel sens?
M. Williams: C'est un service qui demande beaucoup
d'investissement, qui coûte très cher à administrer. Si on
n'était pas obligé par les manufacturiers je ne dirais pas
que tous les manufacturiers exigent qu'on ait des services comme
ceux-là; j'en connais, comme les nôtres; il faut les avoir
peut-être qu'on ne les aurait pas du tout.
Mme Payette: C'est la partie de votre commerce qui est la moins
intéressante.
M. Williams: Oui, c'en est une partie.
Mme Payette: Du point de vue des revenus.
M. Williams: C'est cela.
Mme Payette: Est-ce que vous ne seriez pas portés,
à ce moment, à faire moins de débosselage et à
avoir tendance à remplacer les pièces, plutôt que de
"débosser" quand c'est faisable?
M. Williams: Cela dépend combien de temps cela prend. Cela
marche toujours à l'heure. Si cela prend plus de temps à le
débosseler, c'est sûr que la compagnie d'assurances va nous dire:
Mets-en un morceau neuf ou usagé. Si cela prend moins de temps, elle va
le faire débosseler.
Mme Payette: Actuellement, on a en face de nous seulement des
représentants de grands fabricants de voitures. On n'a pas de petits
garagistes du coin.
M. Williams: Les garagistes du coin ne peuvent pas être
dans notre association. On a un marchand de Datsun. C'est cela?
Une Voix: Autrefois. M. Williams: Autrefois.
Mme Payette: Est-ce que j'avais tort, parce que j'ai quand
même été une consommatrice de voitures, à une
certaine époque, de penser qu'il est souvent important pour le
consommateur de s'adresser parfois au petit garagiste du coin qui ne tient pas
à remplacer une voiture par une voiture neuve?
M. Grondin: Je vais laisser le soin au président de
répondre, madame, parce que je ne suis pas marchand d'automobiles.
Mme Payette: J'écoute le président.
M. Williams: C'est parce que cela dépend avec quelle
intention vous allez au garage du coin.
Mme Payette: On a dit depuis ce matin qu'il était
probablement souhaitable à la société vers laquelle on
s'en va, dans laquelle on vit, de conserver une voiture le plus longtemps
possible. Il m'est arrivé de penser, comme consommatrice, à
certains moments, quand on fait affaires avec le représentant d'un
manufacturier de voitures qui a intérêt à vendre des
voitures, qu'on a moins tendance à chercher à réparer
qu'au garage du coin où on ne cherche pas à vous en vendre une
nouvelle.
M. Viel (Gilles): Ce n'est pas nous qui cherchons à en
vendre une nouvelle. C'est simplement le taux horaire qui est trop
élevé par les conventions collectives. Le taux étant
élevé par les conventions collectives, cela coûte plus cher
de réparer la voiture que d'en acheter une nouvelle. C'est la raison
pour laquelle ce problème existe, tandis que, dans un garage du coin,
ces gens vont faire tant bien que mal, peut-être que ce sera bien fait,
l'ouvrage sera bien fait, mais ce sera meilleur marché parce qu'ils ne
sont pas régis par une convention collective.
Mme Payette: Est-ce qu'on aurait tort de penser qu'il y a une
surévaluation des dommages matériels dans des accidents
d'automobiles?
Une Voix: Non.
M. Williams: Mme Payette, la dernière fois vous nous avez
posé la même question. On y a peut-être mal répondu.
Ce n'est pas vrai; il y a trois personnes qui sont impliquées à
chaque fois, c'est le département de débosselage, l'expert et
très souvent le client lui-même.
Mme Payette: Alors, vous allez m'affirmer que ce que l'on paie
pour les réparations de voitures c'est vraiment le coût de la
réparation.
M. Williams: Avec profit, pour le marchand, sur cette
réparation, oui. On peut vous en montrer.
Mme Payette: II n'y a jamais d'exagération?
M. Williams: Là on va parler en général de
l'association. Je peux vous dire que je ne connais pas de cas particuliers qui
soufflent les prix.
Mme Payette: Est-ce que c'est déjà arrivé
qu'à l'intérieur de votre association vous ayez été
obligés de dénoncer un membre à cause de ses pratiques
dans ce sens?
M. Williams: C'est parce qu'on n'en connaît pas.
Mme Payette: II n'y en a pas du tout?
M. Williams: On n'en connaît pas du tout; si vous pouvez
nous en nommer, on va s'en occuper.
M. Grondin: Pour être avocat de l'association, madame, je
peux dire que les gens qui sont dans l'association, s'ils sentent qu'ils ont
quelque chose à se reprocher, donnent leur démission; mais je ne
crois pas qu'ils restent dans l'association. De plus je vous signalais
tantôt que les manufacturiers de voitures sont excessivement exigeants
et, si l'un
de leurs concessionnaires est vraiment pris à faire des choses
qui ne sont pas correctes, c'est le manufacturier lui-même qui s'en
charge et, comme on dit dans le métier, il décroche
l'enseigne.
Mme Payette: Terminé, pour l'instant, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: M. le Président, on a dit maintes et une
fois qu'il fallait absolument modifier le régime d'assurances du
Québec. Il y a bien des gens qui sont impliqués dans ce
régime et la majeure partie de ces gens, exceptés quelques-uns,
le demeureront. Il reste que réparer une voiture, aujourd'hui, est
excessivement dispendieux; c'est même trop dispendieux pour une personne
à revenu moyen. Quand je dis ceci je ne fais pas un reproche aux
marchands d'automobiles et aux garagistes, je constate; c'est pour moi une
question de fait. Je sais pertinemment que les coûts ont augmenté
énormément depuis trois ou quatre ans. Evidemment, cela ne fait
pas l'affaire du consommateur et j'ai aussi bien l'impression que cela ne fait
pas l'affaire des marchands qui sont pris avec des conventions collectives, des
salaires très élevés. Le chauffage, les taxes, tout
augmente. Je n'aimerais pas, actuellement, être garagiste; je vous le dis
en toute sincérité. Qu'il y ait des exagérations chez
vous, cela arrive là comme ailleurs. Dans toute corporation, même
au niveau des professionnels, il y a toujours des faiblesses, c'est le genre
humain. Cela existe, je suppose, chez vous comme ailleurs; probablement pas
plus et pas moins qu'ailleurs. Mais parce que le public voit d'un mauvais oeil
l'assurance en général, il y a bien des préjugés
qui se sont inculqués dans la population. On peut parler des avocats, on
peut parler des experts, on peut parler des agents d'assurances; il semble
qu'il y ait des préjugés défavorables qui existent envers
tous ces gens et, malheureusement, bien souvent, que ce soit les politiciens ou
d'autres personnes, on a tendance à faire un peu de démagogie sur
le dos de ces gens.
Ceci dit, vous avez un rôle à jouer en ce qui regarde
l'assurance automobile; vous l'avez joué dans le passé. Qu'on
vous aime ou qu'on ne vous aime pas, c'est encore vous qui allez réparer
les voitures, quel que soit le régime qu'on va avoir; même si ce
régime n'était absolument pas modifié, c'est encore vous
qui allez faire les réparations. Alors, je crois que tous ceux qui ont
une longue expérience dans le domaine de l'assurance, soit directement
ou indirectement, comme vous autres, auraient dû être longuement
consultés avant de légiférer sur cette question de
l'assurance automobile. Cela n'a malheureusement pas été fait, il
me semble, et c'est malheureux, parce que tous ceux qui ont une longue
expérience ou une connaissance pratique et une connaissance
professionnelle dans tout le domaine de l'assurance ne sont pas au niveau du
gouvernement ou du ministère des Consommateurs, des Coopératives
ou des Institutions financières; on n'a jamais fait d'assurance à
ce niveau, c'est nouveau pour eux. Cela ne veut pas dire que chaque personne
qui travaille au service de l'assurance est un profane ou n'a pas de
compétence.
Mais on ne se trompe pas en disant que, comme groupe, la
compétence et la longue expérience ne sont pas là. Comme
elles sont dans le public, comme elles sont dans tous ceux qui dans le
passé se sont occupés d'assurance, il aurait été
normal et prudent de dialoguer avec tous ceux qui se sont, dans le
passé, occupés d'assurance directement et indirectement et vous
en êtes.
C'est entendu qu'on donne à la Corporation des assureurs une
autorité. C'est entendu qu'on vous laisse de côté, mais
vous allez réparer des voitures quand même. Puisque vous allez les
réparer dans l'avenir, ne faudrait-il pas que vous ayez, vous aussi,
votre mot à dire? On pourra accepter ou refuser votre point de vue, mais
au moins vous pouvez apporter, à un certain niveau de discussion, une
expérience pratique, une façon pratique de voir les choses, ce
qui pourrait être dans l'intérêt des automobilistes et de
toute la communauté, parce que c'est tout le monde qui va payer pour
cette assurance.
Ceci dit, vous dites à la page 2: "Tout d'abord, nous constatons
que le projet de loi, au titre VI, soit les articles 138 à 158,
crée la Corporation des assureurs autorisés". Vous dites qu'on
lui confie des pouvoirs extrêmement larges dans le domaine de
l'indemnisation des dommages corporels et des dommages matériels.
Pourriez-vous mieux définir votre point de vue à cet
égard?
M. Grondin: Les dommages matériels. Il y a peut-être
une ambiguïté à cause de l'article 75 où les
compagnies d'assurances vont encore assurer pour les dommages corporels dans
certains cas, soit pour les dommages en dehors du Québec. Est-ce que la
Corporation des assureurs va avoir quelque chose à voir dans cela? On ne
le sait pas. Enfin, cela ne me paraît pas clair. Peut-être pas.
M. Saint-Germain: Dans le domaine qui vous concerne.
M. Grondin: Nous nous bornons à la question des
réparations purement matérielles, dans notre mémoire.
M. Saint-Germain: Pourriez-vous expliciter un peu plus votre
rôle?
M. Grondin: Depuis plusieurs années et tous les jours
encore, les gens que je représente ici discutent avec les assureurs
lorsque arrive le cas d'une réparation de voiture. Ce ne sont pas des
adversaires, mais ce sont des gens qui n'ont pas les mêmes
intérêts, si vous voulez. On discute autour d'une
réclamation avec le consommateur qui, habituellement, n'est pas loin.
Là, on apprend par un projet de loi qu'on confie à des assureurs
le soin de faire toutes sortes de normes relativement à la
réparation de voitures. Quelles vont être ces
normes? On ne le sait pas. Cette corporation aura-t-elle le pouvoir
d'établir, par exemple, des taux horaires? Cette corporation aura-t-elle
le pouvoir de mettre toutes sortes de restrictions quant aux
réparations? Va-t-on tenir compte des disparités
régionales? Va-t-on tenir compte des salaires que les garages
paient?
A l'heure actuelle, il y a des conventions avec les assureurs qui
tiennent compte du fait que le marchand est obligé de payer tel ou tel
taux de salaire en vertu de sa convention collective ou de son décret.
Toutes ces normes, entre autres, par exemple, toute la paperasse, si on peut
dire, qui va entourer cela, les formules qu'il va falloir signer et le reste,
qui va faire cela? D'après le projet de loi, cela semble être
confié exclusivement à des assureurs, donc des gens qui n'ont pas
les mêmes intérêts que les réparateurs et le
consommateur. Cela nous fait peur. On a dit; Qu'est-ce qu'ils vont sortir comme
normes? On leur donne un chèque en blanc. On permet au ministre et au
surintendant des assurances de s'asseoir autour de la table, c'est tout. Mais
les réparateurs dans cela, allons-nous avoir un mot à dire ou si
on va se faire imposer d'autorité, sans qu'on ait un seul mot à
dire, toutes sortes de normes qui vont toucher aux centres d'évaluation
et à la réparation elle-même?
Si vous lisez les articles en question, vous voyez tous les pouvoirs qui
sont donnés à cette fameuse corporation. Encore une fois,
pourquoi les assureurs seuls? Ils vont se comprendre entre eux, mais ils sont
juge et partie. S'il y avait un ou deux sièges donnés à
des représentants des réparateurs, l'association que je
représente, ou si, au moins, il y avait une assurance que tout ce qu'ils
vont faire devra passer par une consultation obligatoire et préalable,
déjà, je pense que mes gens seraient rassurés. Le public
en général aurait plus de chances d'être mieux servi. Il
faut se rappeler que les assureurs sont aussi en affaires. Je ne pense pas que
les normes qu'ils vont établir vont nécessairement tenir compte
des exigences de mes clients et des exigences du consommateur. Je n'ai pas
d'objection à ce qu'ils soient là, mais nous considérons
qu'ils ne devraient pas être seuls à décider.
Ce matin, j'entendais le ministre dire qu'il pourrait y avoir,
peut-être, d'autres personnes à cette corporation. Tant mieux,
mais, si je lis le projet de loi tel qu'il est rédigé, je ne vois
pas de place pour d'autres que les assureurs. On dit même, plus loin,
qu'il va y avoir des votes pondérés en fonction des primes qu'ils
reçoivent et le reste. Alors, il ne semble pas qu'on admette
d'étrangers, de laïques, si on peut dire, dans le domaine. Encore
une fois, les gens que je représente ici sont concernés.
Même si M. Williams a dit que ce n'est peut-être pas la partie la
plus intéressante du commerce, il reste que cela représente une
grande partie de leur commerce et il y a des sous qui entrent par cette
porte-là. Alors, on est intéressé à savoir quelles
vont être les normes qui vont nous régir. Remarquez encore une
fois, que ce n'est pas le gouvernement qui les établit, les normes; ce
n'est même pas la régie.
Vous donnez cela à un comité d'assurance et vous dites:
Occupez-vous de cela. C'est cela qui nous fait peur. C'est pour cela qu'on dit:
On est prêt à être là, puis à essayer de
collaborer. Ce n'est pas un rôle absolument négatif qu'on veut
jouer, pas du tout. Au contraire, on veut être positif. On a besoin,
nous, que les consommateurs nous estiment bien pour qu'ils viennent encore chez
nous. Comme l'a souligné Mme le ministre, il y a d'autres garagistes qui
font des réparations et, si on veut que les consommateurs continuent
à venir chez nous, il faut leur donner le meilleur service possible.
C'est dans ce sens, je pense, qu'on a intérêt, M. le
Président, à être représentés à cette
corporation. Le deuxième point de notre mémoire, c'est qu'on veut
être automatiquement accrédités, au début à
tout le moins, comme centres d'évaluation, quitte à ce que, par
la suite, on vérifie si les normes qui seront décidées
sont bel et bien remplies. Si quelqu'un ne remplit pas les normes, on
l'enlèvera. Mais, au départ, pour lancer le système, on
veut que les marchands d'automobiles, membres de l'association, soient
reconnus.
Il y a, par exempte, le système de bons de garantie, etc., qui
est assumé par cette association provinciale et cela fonctionne bien. On
peut vérifier auprès du ministère des Transports et
même au ministère des Institutions financières aussi en ce
qui concerne la protection du consommateur, il y a des bons de garantie globaux
pour tous les membres de l'association. Je pense que l'expérience a
démontré que les membres de l'association provinciale ne
coûtent pas cher, si vous voulez, ne dérogent pas aux
règles. Les bons de garantie sont là, mais vous n'avez pas de
marchands fautifs parmi nos membres. Quand on sort des statistiques, par
exemple, sur ce qu'on fait certains garagistes, il faudrait peut-être
distinguer entre les garagistes en général et les membres de
l'association qui, encore une fois, ont des normes très rigides, des
normes d'honnêteté et de solvabilité, je le
répète, importantes.
Alors, nous disons que l'association est capable encore de jouer un
rôle positif dans le domaine de la réparation d'automobiles en
participant peut-être à cette corporation, du moins en
étant consultée obligatoirement et préalablement. Notre
désir premier, ce serait d'en faire partie.
M. Saint-Germain: A part les dommages à la carrosserie,
vous avez aussi un certain pourcentage de dommages au niveau de la
mécanique dans les voitures lors d'accidents.
M. Grondin: Un pourcentage en mécanique, certainement.
M. Saint-Germain: Alors, c'est plus complexe que simplement la
carrosserie.
M. Williams: Oui.
M. Saint-Germain: Croyez-vous que l'autorité...
M. Williams: J'espère que l'assurance va comprendre cela
pour payer.
M. Saint-Germain: Croyez-vous qu'avec l'autorité qu'on
donne à la Corporation des assureurs actuellement un client pourrait
perdre le droit de faire réparer sa voiture où il l'entend, par
exemple?
M. Grondin: Cela dépend des normes. Regardez, les pouvoirs
de cette corporation, c'est très large. On ne le sait pas, puis je pense
que vous-même, vous ne pouvez pas le savoir non plus, puisque le projet
de loi déléguerait cela aux assureurs. Alors, est-ce que
l'assureur va dire: Ecoutez, je vous autorise à aller faire
réparer votre voiture dans n'importe quel garage où le taux
horaire n'est pas plus que tant? Cela peut être cela.
M. Williams: Ou bien le consommateur va payer la
différence. S'il donne un billet en pensant que cela coûte $800 et
que cela coûte $1100, il va payer $300.
M. Saint-Germain: Le consommateur pourrait aussi perdre le
droit...
M. Williams: Ou payer en surplus.
M. Saint-Germain: ...de réparer sa voiture lui-même,
s'il le désire.
M. Williams: Oui. Est-ce qu'il va être payé le
même prix, si c'est lui-même qui la répare?
M. Grondin: II n'y a pas de réponse, non plus, dans le
projet de loi sur cela.
M. Williams: C'est pour cela qu'on voudrait faire partie du
comité, si possible.
M. Saint-Germain: Alors, il me reste à souhaiter que le
ministre vous écoute d'une oreille sympathique. Merci, monsieur.
M. Viel: Peut-être aussi que, si le montant est payé
directement au client, la régie va payer deux fois pour la même
réparation. Parce que le type qui va retirer de l'argent pour son
véhicule, s'il ne le fait pas réparer, un mois plus tard, s'il a
un autre accident au même endroit...
Mme Payette: M. le Président, si vous me permettez, je
pense que je sens le besoin d'apporter un peu d'information parce qu'on risque
de perdre beaucoup de temps autour de toutes sortes de possibilités qui
n'existent pas. Ce qui est prévu, c'est effectivement la formation d'une
corporation des assureurs pour permettre à tous les assureurs de
s'asseoir à une même table et de négocier avec les
marchands d'automobiles et les garagistes les coûts de réparation
des véhicules. Ce que nous envisageons et ce que j'ai retenu comme
suggestion, c'est que, contrairement à ce qui est proposé,
c'est-à-dire que la corporation ne comprenne que les assureurs et des
représentants du gouverne- ment, c'est qu'il y ait, à cette
corporation, des assureurs, des représentants du gouvernement et des
représentants des consommateurs, par l'intermédiaire
peut-être de l'Office de la protection du consommateur. Il me
paraît évident que des marchands de voitures ou des garagistes
à l'intérieur de cette corporation seraient carrément en
conflit d'intérêts et ne pourraient pas négocier les taux
d'intérêt à l'intérieur de la corporation.
Ce qui est prévu comme fonctionnement de la corporation, c'est
à l'intérieur des centres d'évaluation qui,
peut-être bien, au début, devront être un certain nombre de
garages jusqu'à ce que les centres d'évaluation soient
construits. Le fonctionnement à l'intérieur du centre
d'évaluation est le suivant: Vous amenez votre véhicule
accidenté, il est immédiatement évalué et on vous
remet un ticket de réparation après que les taux auront
été négociés avec les garagistes, les taux
horaires, le nombre d'heures qu'il faut pour la réparation et le
coût des pièces. Avec ce ticket de réparation, vous avez la
liberté complète de vous rendre chez le garagiste de votre choix,
de faire faire votre réparation. Il ne peut pas se produire ce que
monsieur vient de signaler, qu'on ne fasse pas faire sa réparation
puisqu'on ne remet pas d'argent ni de chèque, mais un ticket de
réparation. Et on exigera, pour être plus sûr je vous
assure que, dans ce domaine-là, on n'est pas toujours convaincu que les
réparations soient toujours faites correctement on exigera que le
véhicule repasse par le centre d'évaluation pour qu'on puisse
vérifier la qualité des réparations. Ce n'est qu'à
ce moment-là que la corporation des assureurs émettra un
chèque au nom du garagiste.
M. Grondin: Qu'arrivera-t-il, Mme le ministre, si le
consommateur, pour toutes sortes de raisons, néglige de repasser au
centre d'évaluation une fois que sa voiture sera bien
réparée? Cela veut-il dire que le marchand d'automobiles devra
attendre indéfiniment le chèque de la régie ou de la
corporation?
Mme Payette: Je ne pense pas. Remarquez que cela serait
travailler encore sur des hypothèses que de vous répondre parce
que c'est la corporation qui devra fixer sa façon d'agir à
l'intérieur de cela, mais il me paraîtrait normal qu'après
un délai de temps prévu, si l'automobiliste ne vient pas faire
vérifier ses réparations, on puisse payer le garagiste qui l'aura
fait. Je ne vois pas quel intérêt aurait un consommateur à
ne pas faire vérifier sa réparation.
M. Grondin: Par négligence, j'ai bien dit.
Mme Payette: Ce serait l'exception qui confirme...
M. Grondin: Parce que cela le "tanne" ou cela le fatigue...
Mme Payette: ... la règle parce que ce serait plutôt
intéressant pour le consommateur de faire vérifier.
M. Williams: Mme Payette...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Je voudrais poser une question au ministre à ce
sujet. Considérez-vous comme un conflit d'intérêts de
négocier avec ceux qui vont donner des services?
Mme Payette: C'est un conflit d'intérêts si ceux qui
vont donner le service font partie de la corporation qui doit négocier
les tarifs et les coûts.
M. Shaw: Pourquoi?
Mme Payette: C'est évident! Si vous ne comprenez pas cela,
je ne peux pas vous faire un dessin.
M. Shaw: Parce qu'ils doivent partager les décisions des
deux côtés.
Mme Payette: Ils pourront négocier et, s'ils ne sont pas
d'accord, ils pourront dire qu'ils ne veulent pas donner le service pour le
prix qui leur est proposé. C'est à ce moment-là qu'ils
vont négocier. Ils ne peuvent pas faire partie de la corporation pour
négocier.
M. Shaw: Mais cela peut arriver, cela arrive maintenant
avec les soins dentaires si la régie décide de payer un
certain montant, parce que c'est décidé, et que les garagistes
n'acceptent pas de faire les réparations à ce
coût-là... Cela n'a pas de bon sens.
Mme Payette: Cela prend des négociations. M. Shaw:
Cela prend des négociations. Mme Payette: C'est cela. C'est
exact.
M. Shaw: Vous acceptez qu'il y ait un "in put" qui vienne d'un
garagiste, même au niveau du groupe qui prend des décisions.
Mme Payette: Je ne pense pas qu'il faille que les garagistes
soient au niveau des décisions, mais je pense qu'il faut négocier
avec les garagistes.
M. Roy: Si on me permet un point avec votre permission, M. le
Président, ce que vient de dire le ministre c'est bien beau en principe.
Sur le plan pratique, cela peut se passer de façon différente.
C'est peut-être là les appréhensions des garagistes qui
sont ici. Si dans la négociation, par exemple, on en vient à
évaluer les dommages d'un véhicule à tel montant, mais que
par contre il y a seulement un garage qui peut effectuer les réparations
à ce prix parce que, effectivement, il y a des négociations de
bloc, des négociations en gros, d'où une centralisation possible
des réparations dans des garages qui seraient situés dans des
centres donnés, mais qui ne seraient pas toujours à portée
de main du consommateur, étant surtout dans des régions plus
éloignées du Québec, cela fait en sorte que le
consommateur n'a aucune possibilité de vérification pendant le
temps que se fait les réparations. C'est cela le danger. C'est sur le
plan pratique. C'est évident qu'il y a différentes sortes
d'hypothèses, mais on doit quand même toutes les examiner parce
que le plus grand danger que nous courons de ce côté, c'est le
fait qu'il y a centralisation de la réparation des véhicules au
niveau des accidents si on ne fait pas en sorte qu'il y ait plus de gens, plus
de personnes qui fassent partie des comités pour examiner la situation.
Il y a une différence entre les représentants de l'association et
le membre de l'association locale.
M. Grondin: Mme le ministre...
Mme Payette: M. le Président, en réponse au
député de Beauce-Sud, le but que nous poursuivons est toujours de
faire baisser Je coût de l'assurance automobile.
M. Roy: On est tous d'accord avec cela.
Mme Payette: On fonctionne effectivement dans un domaine qui est
nouveau à beaucoup d'égards, pour lequel nous n'avons pas
toujours des exemples qui sont appliqués, mais dans le domaine dont nous
parlons actuellement, justement, nous avons un exemple qui fonctionne
parfaitement. Il existe des centres d'évaluation dans d'autres provinces
qui fonctionnent, comme je viens de le décrire, avec le résultat
que les négociations sont parfois difficiles, mais qu'on en arrive
à une entente et que tous les garagistes sont accrédités.
Il y a un précédent à cela. Heureusement, on peut
s'appuyer sur quelque chose qui fonctionne et qu'on a vu fonctionner. Dans ce
sens, c'est moins difficile d'en parler que quand on fait des hypothèses
sur des choses qui n'existent nulle part ailleurs. Là il y a un
exemple.
M. Grondin: M. le Président, je pense qu'il y a deux
sortes de négociations. Mme le ministre a parlé de
négociations entre la corporation et les réparateurs. Ensuite on
parle du centre d'évaluation où il va y avoir une
évaluation de la voiture. Notre intervention se situe d'abord au niveau
de la négociation entre la corporation des assureurs et les
réparateurs. C'est ce que j'ai bien compris de l'intervention de Mme le
ministre à savoir qu'il y aurait une corporation pour négocier
des ententes. Dans le projet de loi, ce n'est pas écrit qu'elle va
négocier des ententes. Du moins ce que j'ai lu, c'est qu'elle va
établir, déterminer des normes. Or, déterminer des normes
de fonctionnement, ce n'est pas nécessairement négocier une
convention. Cela veut dire décider arbitrairement de certaines normes
qu'on va, par la suite, appliquer.
Mme Payette: Une corporation...
M. Grondin: C'est à ce niveau qu'on a peur que les
assureurs décident tout seuls de normes avec lesquelles on va être
pris après au moment
où le centre d'évaluation va évaluer, mais il va
être trop tard pour discuter des normes. On va dire: Ecoutez, monsieur,
pour changer un pare-chocs, c'est une heure. C'est la norme, même si vous
n'êtes pas satisfait. La norme a été établie en haut
lieu. Par qui? Par la corporation. Après consultation de qui? Je
souligne que le projet de loi, du moins comme je te lis, ne m'apporte pas de
précisions. Si vraiment je peux tenir pour acquis qu'il va y avoir une
véritable négociation entre la corporation, d'une part, et les
représentants des réparateurs, tant mieux, mais il reste à
savoir de quelle façon cette négociation se ferait. Je souligne
que dans le projet de loi, je ne retrouve pas cette mention expresse à
savoir qu'il va y avoir des négociations sur les normes.
Deuxième sous-question, si vous me permettez...
Mme Payette: Pourrais-je répondre tout de suite parce que
si vous me posez une deuxième question je vous prierais de la
garder je n'aurai pas à répondre à celle-là.
Ce qu'il est dit dans le projet de loi, c'est que la corporation devra
déterminer les normes d'installation des centres
d'évaluation...
M. Grondin: Et de fonctionnement.
Mme Payette: II ne s'agit pas...
M. Grondin: Et de fonctionnement madame.
Mme Payette: La négociation ne peut pas ne pas avoir lieu,
c'est-à-dire que même si la corporation déterminait des
tarifs horaires de réparations, ce ne serait que parce que vous
êtes d'accord pour les exécuter à ce tarif.
M. Bisaillon: Cela vous donnerait quoi, à la corporation,
d'établir des barèmes de façon unilatérale si, par
la suite, tous les garagistes refusaient de les appliquer? Bien sûr que
cela suppose des négociations.
M. Grondin: C'est exactement ce que nous craignons, que les
normes fassent en sorte que seuls certains garagistes qui n'ont pas de
convention collective et qui n'ont pas de normes rigides à respecter
toutes sortes de normes d'hygiène ou de sécurité au
travail ou de conditions de travail des employés vont être
en mesure de le faire, seulement ces garagistes. Les membres de l'association
que je représente ici qui ont des établissements avec toutes
sortes d'outils nouveaux et coûteux ne seront pas capables si ces normes
sont établies sans qu'on soit présent. C'est exactement de cela
qu'on a peur.
M. Roy: ... par la suite, de certains établissements pour
la réparation qui deviendrait inévitable par la force des
choses.
M. Shaw: C'est peut-être une autre des raisons pour
lesquelles on n'a pas besoin de considérer que les garagistes sont
contre les centres d'évaluation. Si quelques personnes prennent des
décisions sans l'opinion de ceux qui sont dans ce métier, ce sera
plus faible. Ce n'est pas un conflit d'intérêts, cela n'implique
pas que tous les garagistes sont uniquement pour leurs propres
intérêts, ils sont aussi pour les intérêts des
consommateurs; ils sont des professionnels. Les commerces dépendent du
niveau de la qualité des services. A mon point de vue, il est impossible
de considérer que c'est un conflit d'intérêts d'avoir des
consultations avec ceux qui font partie de ce commerce.
Le Président (M. Boucher): Je ferai remarquer que le
député de Jacques-Cartier avait accordé la permission de
parler à d'autres députés. Maintenant, je lui retourne son
droit de parole, étant donné que c'est lui qui l'avait au
début.
M. Saint-Germain: Je crois que cela a été une
discussion très intéressante, c'est la raison pour laquelle je
n'ai pas exigé de reprendre la parole, M. le Président, mais il
reste qu'il n'y a absolument rien dans la loi qui vous garantit qu'on va
dialoguer avec vous, cela me semble évident. Que vous soyez craintifs,
c'est normal parce que vous pouvez, en un tour de main, être absolument
rejetés et vous faire imposer des prix ou des conditions de travail qui
seraient au détriment de vos activités ou même du public.
Je ne vois pas, par exemple, que la corporation des assureurs autorisés
pourrait obliger un automobiliste à faire réparer sa voiture,
premièrement parce que c'est sa voiture; que la corporation des
assureurs autorisés le compense pour les dommages qu'il a subis, j'en
suis, mais c'est sa voiture. Je ne vois pas pour quelle raison on ne pourrait
pas non plus le payer directement, quitte à lui de choisir son propre
garagiste, de faire réparer ou de ne pas la faire réparer, et de
la faire réparer à 100 milles, 125 milles ou 150 milles de chez
lui, s'il a intérêt à le faire parce qu'il a un parent,
parce qu'il a un ami garagiste ou autrement. Je ne vois pas pour quelle raison
on donnerait à la corporation je ne sais pas si on va la donner,
mais je ne sais même pas si la corporation des assureurs exigerait une
telle autorité, mais il reste qu'on n'a, dans la loi, absolument aucune
garantie que cela ne sera pas fait dans le sens que vous venez de
mentionner.
M. Grondin: Ce qui nous fait peur, M. le Président, c'est:
Est-ce la corporation qui va déterminer les règles de
compétence des gens qui vont être habilités à faire
les réparations ou pas? Est-ce que ce sera la corporation? Je ne le sais
pas et, encore une fois, je souligne que l'article 153, paragraphe 2, se lit
comme suit: La corporation détermine les normes d'établissement
et d'opération des centres qu'elle agrée, et c'est cela.
Mme le ministre, tantôt, a parlé de billets qui seraient
remis au centre d'évaluation, un ticket de réparation au client.
Mme le ministre pourrait-elle me dire si ce ticket de réparation va
contenir une énumération des réparations effectuées
ou s'il va aller plus loin et fixer également un prix global?
Mme Payette: M. le Président, en principe, il fait les
deux, il donne en détail les réparations effectuées, le
coût de chacune des réparations et le total. Si les garagistes
désirent contester cette évaluation, ils peuvent le faire et cela
peut être revu au centre d'évaluation mais, en principe, nous
aurons des spécialistes, des gens qui ont de l'expérience comme
estimateurs dans les centres d'évaluation.
M. Grondin: Est-ce que je peux comprendre, madame, que le ticket
en question, qui va contenir à la fois l'énumération des
choses à réparer et le prix, va être basé sur
certaines normes, lesquelles normes sont bien celles dont on parle à 153
et qui sont déterminées arbitrairement par la corporation des
assureurs?
Mme Payette: Non, monsieur. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Les
normes dont il est question dans l'article que vous citez sont les normes
d'installation et de fonctionnement des centres d'évaluation. En ce qui
concerne le tarif de réparation, cela ne sera possible de le fixer que
par une négociation entre les garagistes et cette corporation.
M. Grondin: Cela nous satisfait de savoir, à tout le
moins, que les garagistes seront consultés.
Mme Payette: Si j'osais, je vous inviterais à vous rendre
en Saskatchewan parce que vous allez être les premiers concernés.
Effectivement, c'est là qu'on voit que cela fonctionne.
M. Grondin: Si nous sommes les invités du gouvernement,
madame, cela nous fera plaisir.
Mme Payette: Je pense que vous êtes en mesure de vous
offrir ce voyage.
M. Saint-Germain: Mme Payette, vous avez mentionné tout
à l'heure ici...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier, est-ce que vous avez terminé?
M. Saint-Germain: Oui, je voulais revenir là-dessus, M. le
Président. Dans la Loi de l'assurance-maladie, on nomme qui sont les
représentants des professionnels qui doivent dialoguer avec les services
pour en arrivera un accord. C'est déterminé. C'est bien beau de
savoir ce qui se passe en Saskatchewan mais ce n'est pas notre loi.
J'espère que madame a raison. Qu'elle en viendra à cette
même conclusion.
Maintenant, pour revenir au ticket, je n'ai pas pu m'empêcher de
penser anciennement au secours direct, on donnait à chaque père
de famille, un ticket. Il y avait un endroit déterminé où
il devait aller et, en lui donnant, on lui disait ce qu'il n'avait pas le droit
d'acheter.
Je pense que le meilleur ticket qu'on peut donner à un
automobiliste et cela a toujours été le même ticket, des
billets bleus. Le gars, quand il a l'argent dans sa poche, il fait avec sa
voiture ce qu'il en veut et il ne la fait pas réparer s'il le veut, et
il va même la faire réparer là où il veut. Je ne
vois pas pour quelle raison les autorités diraient à chaque
citoyen ce qu'il doit faire avec une voiture qui a été
endommagée par autrui. De quel droit? On est rendu, au gouvernement,
qu'on veut dire à chaque citoyen ce qu'il doit faire dans sa vie
privée et même avec ses biens matériels. Un gars qui veut
se débarrasser de sa voiture, il a bien le droit de ne pas la faire
réparer. S'il calcule que cela ne vaut plus la peine de la faire
réparer et qu'il aime mieux avoir l'argent dans sa poche.
Cela se calcule un dommage et quand vous avez calculé qu'une
victime a subi un dommage, vous le calculez avec justice, mais on le paie.
C'est la façon la plus efficace. Il n'y a pas de billet. Il n'y a rien.
L'intéressé est payé. Il a une quittance et c'est fini.
Tout le monde est heureux. Je crois que c'est la seule façon de
moyenner. Je ne peux pas voir ce qu'un billet donné à un
automobiliste vient faire là-dedans. Cela va faire un tas de billets, un
tas de paperasse et un tas d'affaires, un tas de vérifications et tout
le monde va gueuler, personne ne va être content. Vous allez enlever la
liberté au gars d'aller au garage où il veut. J'aime bien, quand
j'achète, quand je demande des services, avoir le droit d'aller
où je l'entends.
Je pense que je suis assez vieux pour être capable de faire cela.
Je pense que les autres sont tous semblables à moi à ce point de
vue.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, je voudrais changer de sujet
un peu et ramener, ici, la discussion. On nous dit que les garagistes
voudraient faire partie du système, c'est-à-dire, être
eux-mêmes évaluateurs. C'est cela? J'ai bien compris? A un moment
donné, Me Grondin dit que les assureurs seront dans la loi juges et
parties. Je dis ceci sans malice, pour que vous puissiez me répondre,
donner votre point de vue, est-ce que les réparateurs ne seront pas
également juges et parties s'ils sont eux-mêmes évaluateurs
et réparateurs?
M. Grondin: Ce que nous demandons, c'est d'être
présents au moment de l'établissement des normes. C'est ce qui
nous intéresse d'abord et avant tout. Quant à la question de
l'évaluation des dommages, écoutez, c'est ce qui se fait
déjà à l'heure actuelle. Les représentants des
assureurs viennent vérifier, même le client vient vérifier,
c'est ce qui se fait déjà. C'est ce qu'on dit. Mais je pense
qu'il est impossible d'établir au départ des centres
d'évaluation indépendants, ce n'est pas possible. Il faut
être réaliste. Qui va décider de l'évaluation des
voitures? Est-ce que ce sera n'importe qui? On parle, dans le projet de loi, de
donner certaines accréditations à certains garages. Nous disons:
Nous aimerions que tous nos membres soient déjà
accrédités quitte, par la suite, à vérifier si les
normes sont bel et bien remplies. Si quelqu'un ne répond pas aux normes,
il perdra son accréditation.
Mais, ce qui est bien important, à notre avis, ce sont les normes
qui vont d'abord être fixées et,
encore une fois, nous constatons même si Mme le ministre
nous dit qu'il va y avoir une négociation, que le projet de loi n'en
parlait pas ou n'en parle pas encore du moins.
M. Fontaine: Je le tiens pour acquis. C'est bien sûr que ce
n'est pas mentionné dans le projet de loi.
Vous dites également dans votre mémoire, à la page
6, que les membres de votre association doivent respecter un certain code
d'éthique. Pourriez-vous préciser votre pensée?
M. Grondin: On est actuellement en train de faire un code
d'éthique écrit, mais, chose certaine, c'est qu'il y a des
normes. Par exemple, il faut vous dire qu'on n'accepte pas un marchand qui
vient d'avoir une nouvelle concession d'automobiles, on n'est pas sûr,
cela prend un certain temps, on attend pour voir, par l'expérience, pour
décider si oui ou non il doit entrer dans l'association, parce que je
vous répète qu'il y a des bons de garantie qui sont pris
globalement au nom de l'association, et si quelqu'un fait quelque chose qu'il
ne devrait pas faire, c'est l'ensemble de l'association qui peut être
pris. C'est dans ce sens qu'il y a des vérifications qui se font,
à tout le moins, avant l'admission d'un membre dans l'association, et
l'association travaille actuellement à un code d'éthique bien
clair avec des normes pour décider si on ne devrait pas, à un
certain moment, bannir de l'association telle personne. Si quelqu'un est en
dehors de l'association, je vous souligne qu'il est pénalisé; il
est pénalisé surtout en terme de bons de garantie qu'il est
obligé de prendre en fonction de la Loi de protection du consommateur et
de la Loi des Transports, le Code de la route.
M. Fontaine: La loi proposée va instaurer un régime
d'indemnisation sans égard à la faute pour les dommages
corporels. On dit que la faute demeure pour les dommages matériels. On
instaure une sorte de grille de responsabilités. En tant qu'avocat,
pouvez-vous nous dire si vous pensez que le système proposé va
conserver le régime de responsabilité en dommages
matériels?
M. Grondin: Même si je suis ici comme procureur de
l'association, j'aurais bien des choses à dire comme avocat, ancien
bâtonnier, mais je ne peux pas en parler aujourd'hui, je
dépasserais mon rôle. Je sais que le Barreau doit venir devant la
commission pour faire valoir son point de vue que j'endosse d'ailleurs,
en passant, Mme le ministre mais, pour aujourd'hui je pense que ce n'est
pas mon rôle d'en parler.
La grille n'a rien à voir comme telle, c'est évident que
c'est un mécanisme d'automatisme de responsabilité. On
décide d'avance qui est responsable, en fonction de normes suivant
lesquelles, si l'accident est arrivé de telle façon, ce sera un
tel qui est responsable à un tel pourcentage. Evidemment, on simplifie
beaucoup, c'est clair, mais, à mon avis, cela ne veut pas dire que,
moralement, la personne qui va être tenue responsable va avoir
été vraiment responsable. Il y aurait peut-être une
différence entre le responsable au sens de la loi et le responsable
moralement de l'accident. Enfin, même si on dit qu'on conserve le
principe de la responsabilité, on le mitige beaucoup.
M. Fontaine: Merci.
M. Grondin: Mais, pour les besoins du mémoire que j'ai
aujourd'hui, cela ne change rien à la prétention de mes
clients.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président.
A la page 2 de votre mémoire, dans le premier paragraphe, vous
dites que vous vous interrogez sur l'à-propos de chambarder tout le
système de l'assurance automobile sans être sûr de
l'économie réelle qui en résultera finalement pour le
consommateur.
Etant donné qu'on a passablement vidé la question
principale que vous posiez dans votre mémoire concernant le rôle
que devrait et que pourrait jouer votre association dans le cas de ce qui
concerne l'établissement des normes, j'aimerais vous demander, si c'est
possible, si ce n'est pas indiscret de vous poser cette question, qui devrait
payer le coût de ces centres d'évaluation.
M. Grondin: Le coût des centres d'évaluation?
M. Roy: Qui devrait payer le coût de ces centres
d'évaluation?
M. Grondin: Vous voulez dire la construction ou
l'opération?
M. Roy: L'opération.
M. Bédard (Gilles): L'assuré, j'imagine. Cela
devrait être l'assuré, parce que c'est l'assuré qui le paie
dans le moment; on dit que les garagistes fournissent l'évaluation sans
frais, mais, à un moment donné, les experts en sinistres sont
payés par les assurances et c'est l'assuré qui paie.
M. Roy: En somme, vous ne proposez pas de changement au mode de
financement relativement à l'évaluation des dommages?
Voyez-vous d'un bon oeil que ces centres d'évaluation soient
obligatoires partout dans le Québec?
M. Bédard (Gilles): II va falloir beaucoup de centres
d'évaluation, il y a des endroits un peu en dehors des grands centres.
Nous sommes 850 membres à travers la province.
M. Roy: En somme, vous ne seriez pas favorables à. ce que
les centres d'évaluation soient établis dans tout le territoire
du Québec de façon obligatoire. Je vous ai dit que je vous
poserais des questions indiscrètes.
M. Grondin: Cela nous paraît irréaliste. On a
déjà discuté de cette question dans un mémoire
précédent soumis à Mme le ministre Payette lors de sa
tournée. On a dit que cela nous paraissait absolument irréaliste,
non seulement tout de suite tout de suite, c'est clair que c'est
irréaliste mais même à long terme d'avoir des
centres d'évaluation surtout dans les endroits plus
éloignés. Une personne devra faire combien de milles pour aller
dans un centre d'évaluation? Il va falloir qu'elle fasse deux ou trois
visites; une première pour montrer sa voiture et une deuxième,
à tout le moins, après la réparation. S'il y a un
remorquage... Enfin, il y a toutes sortes de problèmes qu'on a
déjà discutés avec Mme Payette et je pense qu'elle est
bien au courant de cette question. C'est la raison pour laquelle on propose
d'être accrédité comme centre d'évaluation. On pense
que la mise sur pied de centres d'évaluation, de toute façon, ne
peut être faite ailleurs que dans les grandes villes. On a
déjà dit également qu'on n'a pas d'objection qu'il y en
ait à titre expérimental, au départ, pour voir ce que cela
fait. On a dit également que cela nous paraissait irréalisable,
irréaliste de changer le système actuel d'évaluation des
dommages par un système de centres d'évaluation à travers
la province.
M. Roy: C'est pourquoi je vous ai demandé qui devra en
assumer le coût tout à l'heure. C'est un peu pour cette raison que
j'ai demandé votre opinion à ce niveau.
Qu'est-ce que vous proposeriez comme formule dans des endroits où
un centre d'évaluation ne serait peut-être pas possible à
cause des distances que cela pourrait comporter pour les automobilistes?
M. Williams: Les marchands de notre association.
M. Roy: Uniquement?
M. Williams: Ou d'autres s'ils le veulent, pour autant que nos
marchands soient considérés dans ces villes ou villages.
M. Grondin: Avec les représentants des assureurs. Il n'est
pas nécessaire d'avoir un centre d'évaluation pour
contrôler nécessairement. Si la corporation en question
désire venir voir de quelle façon on fait l'évaluation
dans le centre, c'est son rôle de venir vérifier et même de
venir s'entendre avec le garagiste sur le montant de la réparation. Il
n'est pas question de vouloir décider tout seul, arbitrairement, du
montant de la réparation. A l'heure actuelle, l'évaluation des
dommages se fait et ce n'est peut-être pas si mal.
Mme le ministre a demandé tantôt s'il y avait des
exagérations. J'ai dit non, à notre connaissance, chez nous, il
n'y en a pas. Même si, parfois, il y en a ce serait l'exception
on pense tout de même qu'il serait encore mieux de garder le
système actuel en l'améliorant plutôt que de vouloir faire
des centres d'évaluation tout à fait indépendants.
M. Roy: II faut quand même tenir compte du fait que c'est
l'assureur qui paie dans ces cas-là. L'assureur, s'il n'est pas
satisfait d'une évaluation, peut en demander une deuxième et une
troisième. Il n'y a pas de problème.
M. Williams: Ce n'est pas l'évaluation comme la
réparation.
M. Roy: Comme la réparation, je comprends. Mais si, par
exemple, un assureur s'aperçoit qu'il y a exagération dans
l'évaluation de la réparation d'un véhicule, il lui est
toujours loisible, il a toujours la possibilité, la liberté,
actuellement, de demander une deuxième évaluation et d'aller le
faire évaluer ailleurs, dans un autre garage, faire une comparaison et
négocier après, sans que ce soit obligatoire d'avoir un centre
d'évaluation donné et obliger la personne à faire 35
milles, 40 milles ou même 50 milles pour aller dans un centre
d'évaluation.
M. Grondin: S'il y a déjà des normes très
fixes d'évaluation, il ne restera plus grand-chose à
décider. L'évaluation va se ressembler d'un garage à
l'autre. Si, par exemple, telle pièce est brisée et que la norme
dit que pour cette pièce le coût est tant et que le temps de la
réparation est de tant à tel taux de l'heure, c'est fixé.
Ce n'est pas compliqué à évaluer.
M. Roy: D'accord. Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: J'avais quelques questions que je vais laisser de
côté étant donné que l'ensemble des discussions a
permis de faire le tour de ce que je voulais demander. La seule chose que je
voudrais souligner, avant qu'on continue plus loin, c'est qu'il ne reste qu'un
seul autre mémoire à présenter et il est 17 h 40. Je
voudrais demander le consentement des participants de la commission pour qu'on
termine immédiatement et qu'on passe à cet autre mémoire
avant l'ajournement de sorte que cela nous laisserait la soirée
libre.
M. Shaw: J'ai une question à poser, M. le
Président, à l'Association des marchands d'automobiles du
Québec.
M. Bisaillon: Est-ce qu'on peut disposer de cette question?
Le Président (M. Boucher): On pourrait disposer de la
question du député de Sainte-Marie sur l'ajournement de ce
soir.
M. Saint-Germain: Personnellement, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Boucher): Immédiatement
après, on entendra le mémoire de M. Marcel Côté,
étant donné que M. Dallaire s'est désisté.
D'accord? M. le député de Pointe-Claire.
M. Shaw: Je voulais tout simplement établir les faits
selon le système actuel en ce qui concerne les intérêts du
consommateur.
En tout cas, moi, si j'ai un accident, si c'est à cause de
quelqu'un d'autre, je suis intéressé à la qualité
du service qui va être rendu. Alors, je ne pourrais pas travailler avec
une régie du gouvernement qui va décider si je suis satisfait ou
non. Deuxièmement, les intérêts des compagnies d'assurances
sont là, c'est pour cela qu'elles ont des experts en sinistres qui vont
faire des négociations avec les garagistes pour avoir le meilleur prix
pour me satisfaire. Puis, troisièmement, vous avez les
intérêts des experts en sinistres qui ont besoin de toujours
démontrer qu'ils sont capables, efficaces dans leur ouvrage et,
quatrièmement, vous avez les intérêts des courtiers
d'assurance qui veulent toujours me satisfaire, parce que c'est chez eux que je
place mon assurance.
Vous avez quatre points de vue qui vont protéger les
intérêts des consommateurs, puis à un moment donné,
avec le nouveau système, on crée vraiment une cellule du
gouvernement avec des pouvoirs qui sont trop contre mes intérêts,
alors je ne peux pas voir, si on représente ici les
intérêts des consommateurs, qu'on change le système actuel,
parce qu'à mon point de vue... Je veux simplement poser cette question:
Croyez-vous que les abus vont être plus excessifs avec un centre
d'évaluation qu'avec le système actuel?
M. Williams: II y a certainement des cas où cela va
arriver, mais dans le moment c'est plus difficile, parce qu'il y a beaucoup
plus de gens d'impliqués. Comme vous le dites, il y a quatre personnes
à satisfaire avant qu'on finisse de faire l'ouvrage sur l'automobile;
avec un seul centre d'évaluation, il y a certainement des places
où il va y avoir des abus.
M. Shaw: Parce qu'on peut constater, Mme le ministre, que les
gens de la Saskatchewan ne sont pas satisfaits avec leur système actuel
de centre d'évaluation. Vous pouvez le demander à n'importe
quelle personne de la Saskatchewan, parce que c'est toujours un autre
système de fonctionnaires, des listes d'attente, puis toutes des
affaires comme cela.
M. Williams: On a fait une petite enquête sur la
Saskatchewan, la chose qu'on n'a pas pu savoir, c'est quel montant le
gouvernement, par quel montant le gouvernement subventionne ces
centres-là. Nous, on dit qu'ils vont probablement être très
dispendieux ici et là-bas on aimerait savoir combien ils coûtent
et on ne peut pas le savoir.
M. Shaw: Alors, à votre point de vue, si on
considère, premièrement, les consommateurs, le système
actuel va être toujours meilleur que le système d'un centre
d'évaluation.
Mme Payette: C'est quoi la réponse, parce que justement
c'est très important? Est-ce que vous affirmez qu'effectivement cela
marche mieux maintenant qu'avec des centres d'évaluation? Est-ce qu'il
pourrait y avoir une amélioration avec des centres
d'évaluation?
M. Williams: Ce serait beaucoup plus facile de répondre
avec les centres d'évaluation qu'avec le système d'aujourd'hui si
on avait plus de détails, comme Me Grondin l'a demandé tout
à l'heure, il en a mentionné quelques-uns.
On ne sait pas réellement le fonctionnement de tout cela.
M. Grondin: Chose certaine, on est plus à la merci d'une
seule décision qu'à l'heure actuelle. Si les centres
d'évaluation, évidemment, agissent suivant les normes qui ont
beaucoup de bon sens, il est possible qu'ils satisfassent le consommateur, mais
encore une fois, on ne les connaît pas. Si les normes sont telles qu'il
est absolument impossible pour le consommateur d'avoir le choix d'aller faire
réparer sa voiture où il veut et de la façon qu'il
aimerait qu'elle soit réparée, je pense qu'à ce
moment-là c'est sûr que le consommateur va être moins bien
que maintenant. Cela nous paraît clair.
M. Bisaillon: Sauf que l'absence de ces renseignements vous
permet quand même de réclamer d'être reconnu dès le
départ comme centre d'évaluation, sans connaître toutes les
normes, toutes les façons de procéder, puis tout le
fonctionnement. Alors, comment, dans un cas, pouvez-vous sans connaître
tous ces détails, demander d'être tous reconnus comme centre
d'évaluation, puis, dans un autre cas, vous n'êtes pas capable de
me répondre à la question?
M. Grondin: C'est un tout.
M. Bédard (Gilles): Les réparateurs sont
censés connaître un peu ce qui se passe, puis on n'est pas
consultés du tout... Mais vous ne prévoyez pas nous consulter, on
voudrait l'être, c'est ce qu'on demande.
M. Bisaillon: Ce serait un très bon moyen de l'apprendre,
par exemple.
M. Shaw: Est-ce que vous pouvez démontrer que c'est
demandé par la population maintenant pour effectuer un changement total
comme cela?
M. Roy: C'est une bonne question.
Mme Payette: Je pense qu'il y a des réponses, M. le
député de Beauce-Sud. Vous la poserez dans votre
comté.
M. Roy: Maintenant que j'ai entendu la question, j'aimerais bien
avoir la réponse.
Mme Payette: Est-ce que tout le monde a terminé?
Le Président (M. Boucher): S'il n'y a pas d'autres
intervenants, je donne la parole à Mme le ministre.
Mme Payette: J'aurais juste une question. Vous avez parlé
d'un code d'éthique qui était en préparation. A quel
moment sera-t-il prêt?
M. Grondin: Je ne peux pas vous donner de date exacte, mais on a
parlé hier soir encore, M. le Président et moi, de ce fameux code
d'éthique.
Mme Payette: Vous en avez parlé comme d'une chose à
venir?
M. Grondin: Non, mais en préparation. Et les normes qu'on
veut mettre dedans. Vous savez que notre association est une association
formée en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies.
Ce n'est pas une corporation professionnelle qui a des pouvoirs de sanction
comme le Barreau ou la Chambre des notaires. A ce moment-là, H faut
vérifier quels sont les droits qu'on a de sanctionner nos membres,
à part celui de les mettre en dehors de l'association, de les renvoyer.
C'est dans ce sens qu'il faut bien vérifier avant de se mettre les pieds
dans les plats et d'avoir des recours, des poursuites de la part de nos
membres.
Mme Payette: Aurais-je raison de penser que le code
d'éthique est à l'état d'élaboration dans votre
esprit?
M. Grondin: Comme code, oui, mais j'ai dit tout à l'heure
qu'il y avait des normes d'éthique qui sont déjà
clairement établies. Si le marchand d'automobiles n'est pas
honnête, nous savons très bien qu'il ne pourra pas rester dans le
commerce; sans que nous le mettions nous-mêmes dehors, ce sera le
manufacturier.
Mme Payette: Ma question est au sujet d'un code d'éthique
à venir.
M. Grondin: II y en a un à venir, la réponse est
oui, mais il n'y en pas d'écrit comme tel.
Mme Payette: Mais vous n'avez pas de date à me donner?
M. Grondin: Je n'ai malheureusement pas de date précise
à vous donner.
M. le Président, avant de terminer, je voudrais remercier la
commission, spécialement Mme le ministre. Je dois dire qu'il y a un tas
d'interrogations que mes clients ont toujours à l'esprit et ce serait
peut-être utile, Mme le ministre, de nous permettre de rencontrer vos
fonctionnaires qui ont préparé le projet. Peut-être que les
questions que nous avons à l'esprit sont déjà
résolues par des projets de normes ou de règlements, mais je vous
avoue que cela nous rendrait extrêmement service et que cela rendrait nos
membres beaucoup moins inquiets si nous savions un peu ce qui s'en vient. Vous
avez fait ce soir la promesse que la corporation négocierait avec les
réparateurs. Nous vous disons que nous sommes disposés à
collaborer encore une fois avec vous et que nous aimerions être reconnus
de façon officielle pour représenter l'ensemble des marchands
d'automobiles, du moins l'ensemble des réparateurs pour négocier
ces fameuses normes qui, encore une fois, nous semblent dangereuses si on
laisse le tout seulement aux assureurs. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de
la commission, je remercie les représentants de l'Association des
marchands d'automobiles du Québec et j'inviterais maintenant Marcel
Côté, Ajusteurs Joliette Limitée.
Marcel Côté, Ajusteurs Joliette
Limitée
M. Côté (Marcel): M. le Président, Mme le
ministre, mesdames et messieurs, mon nom est Marcel Côté, 53 ans,
agent de réclamations, célébrant cette année son
trentième anniversaire dans le métier. Je suis membre de
l'Association provinciale des agents de réclamations depuis 1947; j'en
ai été le directeur pendant six ans. En 1970, j'ai
été élu vice-président pour une période de
trois ans. Depuis 1950, je suis membre de l'Association nationale des agents de
réclamations, et j'en fus le président provincial en 1972. Je
fais partie de la National Independant Adjusters Association,
c'est-à-dire l'Association américaine et internationale des
agents de réclamations. Je fais également partie de
l'International Association of Arson Investigators dont le siège social
est à Washington, D.C. Je fus le président fondateur de la
Fraternité des agents de réclamations, district de Joliette,
fondée en 1962.
J'ai entendu ce matin les commentaires de mon confrère, Marc
Charbonneau, de Hull. Je ne l'avais pas rencontré, je ne le connaissais
pas, je n'étais pas au courant de son mémoire. De mon
côté, j'ai étudié le projet de loi 67, et
principalement le chapitre III, sur les procédures de
réclamations et de paiement des indemnités.
J'extrapole un peu sur la procédure parce que j'imagine que cette
procédure sera détaillée dans les règlements qui
suivront la loi. Depuis janvier 1977, je suis en communication avec le
ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions
financières, je suis en communication avec la régie qui a
été mise sur pied pour savoir comment seront
réglées les réclamations. On m'apprend que le tout sera
directement réglé du siège social, que ce soit à
Québec ou ailleurs.
M. le Président, Mme le ministre, les articles 54, 61 et 64 du
projet de loi laissent entendre que vous procédez par des formules, des
formulaires et des rapports écrits. L'article 54 dit que le
réclamant doit présenter sa réclamation selon les
modalités prescrites et fournir toute information prescrite. L'article
61 dit qu'une attestation de revenu sera fournie par l'employeur, probablement
une formule. L'article 65 parle également de rapport médical qui
sera nécessairement une formule. On y dit que quiconque ne retourne pas
les formules commet une infraction. Les administrateurs de la Commission des
accidents du travail pourraient vous dire combien de milliers de dossiers ne
sont pas complétés parce que les récla-
mants requérants négligent simplement de retourner les
formulaires. C'est à peu près la même chose pour tous les
ministères et pour toute la régie.
Je puis affirmer que votre nouvelle clientèle, en
général, la clientèle avec laquelle je fais affaire depuis
trente ans, négligera de vous retourner les formulaires que vous
adresserez et que vous demanderez de retourner au siège social.
Lorsque nous demandons à notre clientèle pourquoi les
formules ne sont pas retournées, je pourrais vous élaborer une
vingtaine de raisons, une vingtaine de réponses. M. le Président,
Mme le ministre, le régime gouvernemental ne rendra pas service aux
consommateurs si son système de réclamations ne fonctionne pas
correctement. Il est heureux que la CAT ait décidé d'ouvrir des
bureaux régionaux pour améliorer son service et vous pourriez en
prendre le modèle.
Je suggère donc, M. le Président, Mme le ministre, qu'il
faut éliminer de vos projets, le contrôle par correspondance, le
contrôle par formules directement du siège social de la
régie. Il faut éliminer également l'enquête
téléphonique qui coûterait énormément
cher.
Il faudrait que dans chacune des régions administratives de la
province, dans le grand bassin de la population, vous établissiez un
sous-centre, un bureau régional ou un bureau local même si ce
bureau n'a pas plus d'autorité que de fournir les formules aux
réclamants, même s'il s'agit simplement de remplir les formules,
de les compléter correctement, de les faire signer et d'indiquer le
numéro de dossier et de les poster.
Il faudrait probablement, dans les sous-centres, un inspecteur qui se
rende directement à la maison du réclamant pour lui faire remplir
les formules, les faire signer au bon endroit et que l'inspecteur les retourne
lui-même au siège social.
Il faut absolument, M. le Président, Mme le ministre, que la
régie soit vue par la clientèle. Actuellement, la régie,
c'est une montagne que la clientèle ne connaît pas. Il faut
absolument que la clientèle puisse parler au régime. Vous verriez
qu'en installant des bureaux régionaux, la population serait bien
servie. Vous pourriez atteindre le succès que vous souhaitez. Si vous
proposez de faire fonctionner le régime pour le 1er mars 1978, il
faudrait peut-être commencer immédiatement à trouver des
responsables régionaux pour que vous leur enseigniez comment remplir les
formulaires afin que ces responsables régionaux connaissent le
mécanisme interne de la régie, ce qui rendra plus efficace le
service et ce qui permettra à la régie d'amorcer son travail le
1er mars, selon le projet.
Ce sont mes observations tout à fait personnelles que je soumets
respectueusement. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Côté.
Mme le ministre.
Mme Payette: M. Côté, je voudrais vous remercier
d'avoir eu la patience de passer la journée ici afin de nous apporter
votre document. Je n'ai pas tellement de questions à vous poser,
évidemment, parce que vous avez transformé un peu votre document
au cours de la journée. Ce n'est pas exactement le texte que j'ai sous
les yeux...
M. Côté: II est vrai que je l'ai transformé,
Madame, parce que je n'étais pas au courant de la procédure, mais
je résume à peu près les mêmes choses.
Mme Payette: J'imagine qu'à la lueur de ce que vous avez
entendu peut-être avez-vous eu envie de changer un peu votre texte. Cela
n'a pas beaucoup d'importance. Je voudrais vous rassurer, en tous les cas, par
rapport à un voeu que vous formulez, vous semblez heureux de la
décentralisation de la Commission des accidents du travail. Si cela peut
vous rassurer, je vais vous dire que nous sommes rattachés à
cette décentralisation et que les bureaux de l'assurance automobile
seraient les mêmes que ceux de la Commission des accidents du travail et,
dans ce sens, on répond déjà à un voeu que vous
exprimez.
Pour ma part, ce sera tout pour l'instant. Il y a peut-être
d'autres questions.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: M. Côté, nous vous remercions de
vos observations. Je crois que vous avez détaillé un point
extrêmement important. La diminution des primes est une des raisons
principales pour lesquelles les gens exigent une nouvelle modalité
à l'assurance automobile. Pour ce faire, il faut nécessairement
diminuer les coûts, et on semble vouloir éliminer bien des
intermédiaires. Il n'y a peut-être pas de mal à vouloir
mieux coordonner les activités des intermédiaires, mais je crois
que ce serait aller à l'extrême de dire que tous ces
intermédiaires jouent un rôle inutile et qu'ils ne rendent pas aux
victimes d'accidents comme à la population des services valables;
autrement ils n'existeraient simplement pas.
On les fait disparaître totalement ou partiellement, selon
différentes professions, mais il faut sérieusement se demander
qui va remplacer ces gens, qui va faire le travail que ces gens font. C'est une
question logique, c'est une question simple mais qui est très
importante, et on n'a pas de réponse. Quant à moi, je n'ai pas
encore eu de réponse, on en aura peut-être à l'avenir, je
ne le sais pas. Mais, tant qu'on n'aura pas de réponse, on ne peut pas
savoir si ce régime sera réellement humain ou si
l'accidenté devra faire face à une grosse machine gouvernementale
où il ne peut pas avoir justice, où il se sent perdu, où
il ne sait plus à qui s'adresser. J'ai dit dans le passé que
probablement bien des députés joueront ce rôle, on peut le
garantir à l'avance, bien que ce ne soit pas notre rôle de le
faire; il faudra faire un peu l'ombudsman relativement à ces cas. Alors,
je n'ai pas de réponse. Que voulez-vous? Je ne le sais pas, mais j'avoue
que c'est inquiétant.
M. Côté: Présentement, ce que je vois dans
le
régime proposé c'est que tout va fonctionner par formules
qui seront adressées par la poste, etc. Plusieurs ne retournent pas les
formules, ne complètent pas les formules, signent aux mauvais endroits,
ne répondent pas correctement aux dates. Cela veut dire qu'à un
moment donné, à la régie ou au régime, il va y
avoir des tonnes et des tonnes de papiers, de formules mal
complétées seront bloquées, et tout le système sera
bloqué.
Si on se propose de payer à tous les quinze jours, tel qu'on veut
le faire par système mécanique, le manque de réponses ou
le manque de renseignements sur les formules va bloquer complètement la
mécanique. Alors, cela ne pourra pas fonctionner. Pour suppléer
à ces formules mal complétées, je suggère dans
toutes les régions importantes la présence d'un
représentant du régime, de la régie, qui pourra aider
à compléter les formules.
Maintenant dans le cas des gens qui sont malades, qui sont
blessés, qui sont à la maison en convalescence, etc., qui ne
peuvent pas aller à la poste et qui ne peuvent pas courir après
des timbres, je suggère qu'un inspecteur se rende à ces endroits
pour faire compléter les formules; autrement, vous ne les aurez pas. La
proposition que vous faites de payer plus rapidement que les compagnies
d'assurances, la proposition que vous avancez de payer dans sept ou dans quinze
jours, ou une fois tous les quinze jours, vous ne pourrez pas la suivre, pour
la bonne raison que vous n'aurez pas les formules. C'est pour cela qae je dis
que cela prend un représentant dans chaque région importante pour
aider les consommateurs, aider la population à compléter les
formules.
M. Saint-Germain: Et ce travail pourrait être fait par un
représentant de la régie, il pourrait être fait aussi par
l'entreprise privée, par ceux qui sont dans le domaine aujourd'hui et
qui ont une expérience.
M. Côté: L'un ou l'autre.
M. Saint-Germain: Vous avez raison parce que, quant à la
Commission des accidents du travail, combien de fois, par exemple, comme
député, on reçoit un appel d'un blessé au travail
qui critique la commission parce qu'il n'a pas reçu son paiement, et il
nous certifie que tout a été envoyé. On prend le
téléphone, on appelle la commission, celle-ci nous répond:
On n'a pas encore reçu de réponse du médecin. On prend le
téléphone, on appelle l'accidenté et on lui dit: Ton
médecin ne l'a pas envoyé. Et il nous répond: II m'a dit
qu'il l'avait envoyé. A mon avis, il ne l'a pas envoyé parce
qu'à la commission on ne m'a pas menti et il n'est pas dans les
dossiers.
Alors, il faut que le type parte pour aller voir son médecin.
S'il est obligé d'avoir des pièces justificatives de son
employeur, voilà une autre personne ou une autre corporation qu'il doit
aller voir pour avoir des papiers qui justifient sa demande. Si c'est un
étudiant, il va falloir qu'il ait une preuve d'études, je suppose
bien, et dans quelle faculté. Il y aura un tas de renseignements qui
devront par- venir à la régie et qui seront certainement
complexes, même pour des personnes qui ont une certaine scolarité,
cela restera difficile. Cela me semble évident. Si ce travail est fait
par des fonctionnaires, ce ne sera pas fait pour rien. Cela augmenterait
énormément le coût de l'administration de tout parce que,
si la Commission des accidents du travail a déjà des
difficultés, et on sait qu'il y a des critiques sévères,
dans un champ d'activités très spécialisé, le gars,
c'est son employeur et c'est la commission. C'est à ces deux
extrêmes et le médecin, comme je vous le disais, avec qui il fait
affaires.
L'employeur est prêt à dialoguer. C'est facile,
comprenez-vous? Mais le salaire, c'est facile à déterminer; la
perte au point de vue financier, c'est facile à déterminer.
D'autant plus que l'accidenté au travail a choisi librement son emploi.
Mais, dans un contexte de rémunération comme celui-ci, c'est plus
complexe parce qu'il ne sera pas facile d'évaluer, par exemple, quelle
doit être l'indemnité d'un étudiant, croyez-moi. Cela va
être difficile.
M. Côté: Dans ce régime proposé, je
pense que nous pouvons nous attendre à dix fois plus de
réclamations qu'à la commission. Si on arrive à dix fois
plus de réclamations qu'à la commission, on peut s'imaginer
combien de formules il va y avoir, combien de formules ne seront pas
complétées. Il va rester, à la fin de l'année,
combien de dossiers qui ne marcheront pas, qui vont rester simplement morts,
pour la bonne raison que vous n'avez pas de réponse?
Mme Payette: M. le Président, est-ce que je peux apporter
une information à M. Côté.
Le Président (M. Boucher): Certainement.
Mme Payette: La Commission des accidents du travail a eu à
traiter, au cours de la dernière année, 280 000 demandes. Nous
attendons environ 50 000 demandes pour la Régie de l'assurance
automobile et, vous le savez, les accidents ont tendance à diminuer, ce
qui pourrait nous amener une baisse de cas à traiter et non pas une
augmentation; mais cela ne peut pas être dix fois ce que la Commission
des accidents du travail traite présentement. C'est une information que
je vous fournis.
M. Côté: Vous allez avoir le nombre de
blessés qui sont déclarés immédiatement et qui
peuvent représenter à peu près 50 000. Vous allez avoir le
nombre de personnes qui vont se trouver blessées quinze jours
après, un mois après, avec certificat médical à
l'appui, ainsi de suite, et cela va aller en augmentant tout le temps.
Maintenant, les 280 000 de la commission, je le crois, ce sont des chiffres qui
sont établis, mais il va y avoir énormément de
réclamations et je pense que le chiffre de 50 000 à 60 000 va
aller en augmentant. Combien cela va-t-il prendre de formules dans un dossier?
La première formule de rapport, si on compare avec la
Commission des accidents du travail, est préparée par
l'employeur.
Dans le cas qui nous intéresse, ce ne sera pas l'employeur qui va
la préparer, ce sera l'accidenté ou le propriétaire de
l'automobile. Comment est-il préparé mentalement à remplir
une formule? Est-ce qu'il a l'instruction pour la remplir? Est-ce qu'il peut
répondre aux questions qui sont posées? La première
formule à la commission qui est envoyée par l'employeur, dans
notre cas, elle sera envoyée par le réclamant. Est-ce qu'il sait
exactement quoi? Après cela, vous allez demander un certificat
d'employeur pour établir quel est son salaire. De ce côté,
il n'y aura probablement pas de difficultés. Vous allez demander,
ensuite, un rapport médical où il n'y aura peut-être pas de
difficulté non plus.
Mais, tout les mois, vous allez demander un nouveau rapport
médical. Ce qui veut dire qu'à un moment donné, dans la
fiche de tel accidenté, vous allez avoir cinq ou six ou sept formules;
cela prendra combien de temps pour que ces formules arrivent? Pendant ce temps,
vous attendez. A la régie, vous dites: Nous payons rapidement, nous
voulons payer rapidement. Vous êtes bloqués et ne pouvez pas payer
parce que les formules ne sont pas arrivées.
M. Saint-Germain: II faut penser aussi que, comme on paie par
annuité, un blessé dont on a déterminé
l'incapacité permanente a toujours droit à faire rouvrir son
dossier si son cas empire. Un dossier n'étant jamais fermé, Je
même individu, tous les ans, peut revenir avec une demande où il y
a un potentiel. Comme vous dites, plus il y aura d'annuités, plus il y
aura de révisions de cas. Cela ira certainement toujours en augmentant.
J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, j'ai simplement une
question. Je lisais le poème que vous avez annexé à votre
mémoire et vous dites, au dernier paragraphe: "J'ai
préparé, dans mon métier, la Relève,
Mon métier est tellement beau. Ce que l'avenir me
réserve,
Le Créateur me le dira trop tôt".
Comment prévoyez-vous que cette relève va pouvoir
travailler dans le système proposé?
M. Côté: Quand je parle de relève, dans cette
chose, c'est peut-être une question assez personnelle; c'est que j'ai un
fils de 25 ans qui travaille avec moi, et j'espère qu'à un moment
donné je pourrai lui léguer quelque chose, autant au point de vue
éducation qu'au point de vue instruction qu'au point de vue
professionnel ou métier. C'est ce que je veux dire quand je dis que j'ai
préparé une relève.
Lorsque cet article a été préparé, en
janvier ou février, pour être publié éventuellement
en mars, je n'étais pas au courant de ce qui se produirait
éventuellement et de ce qui arrive aujourd'hui.
M. Fontaine: Pensez-vous que votre fils va pouvoir continuer
à exercer cette profession?
M. Côté: Je ne sais pas du tout.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président.
Je voudrais demander à M. Côté d'après
sa longue expérience; les 30 années d'expérience qu'il a
dans le métier on peut dire que c'est un homme qui a du
métier quel délai il croit qu'il faudra dans le
régime proposé, à la lumière de ce qu'il a pu
constater jusqu'à présent, le délai minimum qu'il faudra
avant qu'une personne puisse espérer obtenir une indemnité.
M. Côté: Selon ce que je connais du nouveau
régime?
M. Roy: Oui.
M. Côté: II faudrait savoir premièrement
où la personne accidentée, blessée, va aller chercher son
rapport d'accident? Actuellement, il n'y a rien qui l'explique; cela viendra
dans les règlements. Est-ce que ce sera distribué par la
Sûreté du Québec? Est-ce que ce sera distribué par
ceux qui vendront les certificats d'immatriculation ou les permis? A quel
endroit ira-t-on chercher les formules? Les personnes qui vont se
découvrir blessées peuvent être déclarées
blessées sur le rapport de police, parce que c'est évident
qu'elles sont blessées; est-ce que les personnes pourront se rendre
chercher des formules, passer à un bureau quelconque, à la
Sûreté du Québec ou ailleurs? Pour préparer ces
formules, vous pouvez dire, selon la gravité de la blessure, que la
personne ou un délégué pourront vous l'envoyer dans une
semaine. Maintenant, la deuxième formule dont vous allez avoir besoin
sera la formule de l'employeur. Vu que l'accident n'est pas survenu chez
l'employeur, que l'accident n'est pas survenu avec son automobile, l'employeur,
pour certaines raisons, peut bien retarder, mettre cela de côté et
cela traînera pendant une semaine sur son bureau et il enverra son
certificat de salaire seulement au bout d'une semaine ou dix jours. Il n'est
pas tellement intéressé, ce n'est pas un accident du travail.
Là, vous avez les deux premiers documents: le rapport de l'accident et
le rapport de l'employeur.
Ensuite, cela vous prendra un rapport médical. Nous connaissons
très bien comment fonctionnent les systèmes d'urgence. Nous
connaissons comment fonctionnent les cliniques et nous connaissons
également l'empressement des médecins indépendants, qui ne
font partie ni de cliniques, ni d'un système d'urgence, de quelle
façon ils se dépêchent pour envoyer le rapport. Ceci veut
dire que cela peut prendre quinze jours, trois semaines, un mois avant que vous
ayez compilé la base du dossier des trois premières formules.
Vous ne pourrez pas payer avant quinze jours, trois semaines, un mois, si vous
n'avez pas ces trois formules.
Maintenant, on veut dire que vous allez payer plus vite que les
compagnies d'assurances. Je suis d'accord, c'est un très beau projet
dans ce sens, mais est-ce réalisable, de la façon dont vous
demandez au blessé d'envoyer ses formules. Les formules ne vous
arriveront pas. On envoie des formules à des gens et on se fait
répondre des raisons qui ne tiennent quasiment pas debout, pourquoi les
formules ne sont pas revenues. "Je ne vais pas au bureau de poste". "Je n'avais
pas de timbre". "Je ne sais pas lire". "Je ne signe pas de papiers
légaux", etc. Les gens comprendront-ils la formule? Les gens ne
comprennent pas la formule; au lieu de ne pas la comprendre et de risquer des
réponses, ils ne répondront pas.
A votre question, M. Roy, si les trois formules sont rentrées
assez tôt, il est possible que la régie puisse payer dans quinze
jours, mais les formules n'arriveront pas et vous serez aux prises avec le
dilemme de dire: On avait proposé de régler dans quinze jours ou,
du moins, on avait proposé de régler plus vite que les compagnies
d'assurances et on n'est pas capable de le faire parce que les formules
n'arrivent pas. C'est le même problème que nous avons. On nous
accuse de retarder énormément de choses, mais on n'a pas les
formules. Ce qu'on fait, c'est qu'on part et on va les chercher.
M. Roy: En somme, une des déficiences du système
actuel, qui fait qu'il y a des délais, c'est à cause des
difficultés que vous rencontrez en compilant les dossiers, pour avoir
les formules et les informations dont vous avez besoin. Et vous dites que le
fait d'avoir un régime étatique ne changera pas la situation
à ce niveau. Par contre, à cause de la non-responsabilité,
vous admettez quand même qu'il y aura un règlement des sinistres
un peu plus vite, à cause de cela.
M. Côté: D'accord!
M. Roy: J'aimerais vous demander quelle serait la formule, ou la
méthode que vous proposeriez au gouvernement. Dans le cas des
travailleurs autonomes, des cultivateurs, des personnes qui sont à leur
compte, pour lesquelles il n'y a pas de certificat de salaire possible, ce sera
un problème. Dans le cas de la Commission des accidents du travail,
actuellement, ce sont les travailleurs qui sont assurés. Quelques
employeurs sont assurés, mais ils le sont en vertu d'une
déclaration qu'ils font au moment de la cotisation annuelle. Ils sont
protégés pour un salaire de X. C'est déterminé
d'avance. Dans le cas de l'assurance automobile, ce ne sera pas
déterminé d'avance. A la lumière de votre longue
expérience, quelle serait la méthode de calcul? Quelle serait la
base à établir, de façon à ne pas pénaliser
davantage les personnes qui sont à leur compte, par rapport à
celles qui travaillent et qui ont un employeur, avec un salaire
déterminé à chaque semaine?
M. Côté: Actuellement, nous commençons par
demander des informations sur les rapports d'impôt. Nous avons
déjà un salaire déclaré sur le rapport
d'impôt. Maintenant, nous savons fort bien que les rapports d'impôt
ne sont pas toujours précis. Dans le cas d'un cultivateur, nous allons
examiner quel genre de ferme il a, combien il a de têtes de
bétail, et ainsi de suite, combien il récolte de produits. A la
lumière de toutes ces informations, nous pouvons éventuellement
établir un salaire moyen, qui a du bon sens, qui est
négocié avec le cultivateur. Nous disons: Vous avez perdu tant de
semaines, vos animaux ont continué à vous rapporter tel produit,
votre ferme a continué à être cultivée quand
même. Nous pouvons négocier avec le cultivateur pour un montant
par semaine, que nous multiplions par le nombre de semaines. Je
suggérerais de commencer par le rapport d'impôt, de commencer par
rénumération du bétail, sur la ferme, et ainsi de
suite.
M. Roy: En somme, vous suggéreriez à peu
près la même méthode de calcul que celle qui prévaut
à l'heure actuelle.
M. Côté: Oui.
M. Roy: Mais, dans ce domaine, ce n'est pas une méthode
rapide, parce que, au niveau de l'impôt, cela change assez
considérablement, d'une entreprise à l'autre, d'une année
à l'autre.
M. Côté: Ce n'est pas une méthode rapide.
C'est une méthode qui nécessite là visite d'un inspecteur,
une rencontre directe avec le cultivateur, avec le type qui travaille à
son propre compte. Si c'est un artisan qui fait des meubles, il faut voir
exactement la sorte de meubles qu'il fait, ainsi de suite. C'est la même
chose pour un sculpteur sur pierre ou sur métal.
Il faut voir exactement sur les lieux. J'imagine que, par ses formules,
la régie ne pourra pas trouver tout cela et ne pourra pas accorder
justice à ces gens si on ne va pas voir ce qui se passe.
M. Roy: II y a une dernière question que j'aimerais vous
poser, M. Côté. Puisque vous vous avez dit, au début, que
vous aviez fait partie d'une association canadienne, voire
nord-américaine, une association professionnelle, et comme Mme le
ministre nous a parlé de la Saskatchewan aujourd'hui j'y suis
déjà allé, mais pas pour examiner le régime
d'assurance automobile qui prévaut à cet endroit
connaissez-vous un peu le système d'assurance qui prévaut
actuellement en Saskatchewan, puisqu'on semble vouloir s'y
référer ici?
M. Côté: Je l'ignore totalement. Je sais que c'est
un régime étatique qui existe depuis 20 ou 30 ans, mais j'ignore
exactement de quelle façon il fonctionne.
M. Roy: Vous ne pouvez pas nous donner d'indication non plus en
ce qui a trait au délai, lorsque vient le temps d'indemniser les
victimes.
M. Côté: Malheureusement, je l'ignore.
M. Roy: Mais vous êtes au courant que le
gouvernement de la Colombie-Britannique s'est fait battre avec son
régime d'assurance automobile.
M. Côté: Je suis au courant. M. Roy:
Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: Je veux simplement dire un mot pour féliciter
M. Côté d'être venu nous faire sa présentation
aujourd'hui. Je crois comprendre que M. Côté endosse pleinement
toute la philosophie du régime qu'on propose, la nécessité
d'une réforme telle qu'on veut l'engager. Je crois comprendre le souci
qu'il nous amène qui me semble être particulièrement
fondé, sur la manière dont le citoyen consommateur va, au
lendemain, connaître vraiment les bénéfices de ce
régime au niveau du lien personnalisé qu'il va avoir avec la
Régie québécoise de l'assurance automobile.
Je crois que c'est une réflexion qu'on doit faire. Je crois que
votre contribution est un élément important dans cette
réflexion-là; c'est simplement ce que je voulais vous signaler. A
mon avis, actuellement, on fait un déblayage assez sérieux sur
tout cela. Moi, j'avoue que, par rapport à toutes les questions qui nous
sont formulées dans les tournées comme celles qu'on vient
d'effectuer dans nos comtés, il y a énormément de
questions sur l'assurance automobile.
C'est évident que faire une révolution ou une
réforme aussi substantielle que celle qu'on engage présentement
et qui était nécessaire... C'est, de fait, une révolution
ou un changement relativement substantiel par rapport à ce qui
était où il y avait beaucoup trop d'intermédiaires
sangsues autour du consommateur qui, en fin de compte, masquaient le
véritable intérêt du consommateur. Comment réaliser
cette transition entre un régime qui était vicié et un
régime où le consommateur sera bien servi, où il
connaîtra ce type de liens personnalisés avec l'organisation qu'il
se sera donnée?
Je crois que c'est une question que vous posez. Vous suggérez des
formes de décentralisation ou d'offices régionaux pour informer
les clients. L'idée me semble très sommairement lancée. Je
retiens la préoccupation et je dis: J'espère qu'on va avoir
l'occasion d'y revenir. C'est une question importante dans le public, la
relation qui va exister entre les citoyens et la régie. Je trouve que
c'est une question importante. Je crois qu'on ne doit pas l'escamoter. Je crois
que ce que vous avez apporté est une contribution à cette
réflexion. Quant à moi, je vais vous dire que, s'il vous arrivait
de vouloir continuer votre réflexion, il me ferait plaisir de
connaître les fruits de cette réflexion continuée que vous
pourriez nous apporter avant que le projet de loi soit adopté. Je vous
remercie.
M. Roy: J'aimerais avoir bien compris le député.
Est-ce qu'il a parlé d'un régime d'assurance vicié, le
régime actuel, ou d'un régime qui a be- soin
d'améliorations? Je pense que la nuance est, quand même,
importante. Je pense avoir bien compris l'esprit du ministre, pas ministre
encore, même si on parle de remaniement ministériel. J'aimerais
avoir bien compris l'esprit du député à ce
niveau-là.
M. Gosselin: Je pense que le régime actuel, la
manière actuelle dont les citoyens consommateurs sont traités,
est fondamentalement vicié. Il ne permet pas d'établir une
véritable discrimination, et joue constamment dans l'arbitraire. Je
crois qu'il y a beaucoup de groupes professionnels qui ont été
forcés de se définir à travers les règles du jeu
actuelles, d'une manière un petit peu parasitaire et un petit peu
déviée des véritables intérêts des
consommateurs. Je crois que le gouvernement que nous sommes a le devoir de
corriger ces règles du jeu, d'établir les justes protections qui
doivent être apportées aux consommateurs. Dans la distinction
qu'on a établie au niveau du régime pour la protection corporelle
et du régime pour la protection matérielle, je crois qu'on
établit très nettement le niveau de responsabilité de
l'Etat au niveau de ce que sont les individus qu'il doit protéger dans
un régime comme celui-là. Je crois que cela amène une
redéfinition globale de tous ceux qui étaient les
intermédiaires. La réflexion à faire de notre
côté où à continuer, c'est de voir à
introduire un système qui soit le plus fonctionnel possible. Une fois
acquis ces principes qu'on a reconnus comme étant nécessaires et
importants, il faut voir à appliquer un système aussi fonctionnel
que possible. J'avoue que, comme tous les citoyens, j'ai des questions et j'ai
bon espoir qu'on est en train de les résoudre.
M. Shaw: Est-ce que M. Côté est d'accord avec votre
position?
Le Président (M. Boucher): M. Côté avait
demandé la parole justement.
M. Côté: Si on prétend que le régime
actuel est vicié ceci peut être débattu dans
différents sens si on prétend que le régime est
faux actuellement, qu'il ne fonctionne pas correctement, c'est parce que les
compagnies d'assurances considèrent les agents de réclamations,
les experts en sinistres, etc., et leur service de réclamations comme
des parents pauvres.
Les patrons des compagnies d'assurances n'ont jamais aimé les
gars des réclamations, parce que c'est nous qui dépensons de
l'argent. C'est nous qui coûtons de l'argent. C'est un peu comme dans une
famille; on ne blâme pas notre femme, parce que notre femme
dépense de l'argent, on sait qu'elle ne peut pas faire autrement.
Mais dans une compagnie d'assurances, vous avez la partie courtiers, la
partie marketing, la partie publicité qui sont toutes des choses que les
compagnies approuvent, sanctionnent, et auxquelles elles donnent de l'argent,
de la liberté, permettent des comptes de dépenses pour leurs
représentants et ainsi de suite. Quand vous arrivez au point de vue de
la réclamation, vu que nous som-
mes ceux qui dépensent l'argent, nous sommes les parents pauvres
de la compagnie. Chaque fois qu'un bilan de compagnie va vers le rouge, le
moins rouge ou le plus rouge, cela dépend des réclamations, c'est
votre faute. Alors, trouvons chez vous à qui est la faute. Je
prétends que ce n'est pas notre faute. Il y a un
déséquilibre qui existe dans l'esprit des grands patrons des
compagnies d'assurances qui pensent que nous sommes les responsables. Nous ne
sommes pas les responsables, nous sommes les meilleurs vendeurs d'assurances
qu'il puisse y avoir. C'est nous qui vendons le produit, parce que c'est nous
qui payons le produit. Mais dans leur idée, nous sommes le
dépensier. Vu que nous sommes les dépensiers, nous sommes les
parents pauvres.
M. Shaw: Est-ce que cela va s'améliorer si l'Etat est
l'assureur?
M. Côté: C'est la réflexion que je me suis
faite lorsque j'ai préparé mon premier ou mon deuxième
mémoire. Si la régie oublie son service des réclamations,
vous manquez votre coup. Si vous ne portez pas une attention tout à fait
spéciale à votre régime de réclamations, vous
êtes voué à la faillite. La première année,
vous aurez épais comme ça de papier, la deuxième
année vous en aurez jusque par-dessus la tête. Votre service de
réclamations est le plus important qu'il peut y avoir et il faut y voir.
Actuellement, vous avez vendu au public l'idée d'embarquer dans la
régie, mais vous n'avez pas encore vendu l'idée de la
réclamation, ou vous n'avez pas demandé à vos responsables
qui sont en place actuellement à la régie, comment va fonctionner
le service de réclamations. Si ce service ne marche pas, rien ne
marchera. Ne vendez pas l'idée que vous allez commencer à payer
dans quinze jours ou dans un mois, ne vendez pas l'idée qu'à un
certain moment votre affaire va rouler rondement si vous avez oublié les
réclamations. Les réclamations à l'aide de formulaires ne
pourront pas marcher. Cela va vous prendre une autre aide pour la faire
marcher. Pensez aux réclamations, c'est seulement à cela qu'il
faut penser.
Mme Payette: M. le Président, si on me permet une
réponse à M. Côté, je pourrai vous rassurer et vous
dire que c'est notre seule préoccupation puisque nous n'avons pas de
marketing, nous n'avons pas d'assurance et nous n'avons pas
véritablement d'assuré dans le sens où on l'entend
actuellement. Nous n'avons que des indemnisés.
Le Président (M. Boucher): Au nom de tous les membres de
la commission, je remercie M. Côté et étant donné
l'heure, la commission doit ajourner...
M. Côté: Je vous remercie de m'avoir entendu.
Le Président (M. Boucher): Très bien, monsieur.
M. Saint-Germain: M. le Président, merci M.
Côté.
Est-ce qu'on pourrait savoir l'horaire des travaux pour demain, M. le
Président?
Le Président (M. Boucher): Je n'ai pas reçu l'ordre
des travaux pour demain de la part du secrétariat.
Mme Payette: M. le Président, je suis informée que
demain il n'y a que le BAC, le Bureau des assureurs du Canada qui se
présentera, demain matin, à 10 heures. Nous attendions
elle nous avait confirmé sa venue la CSN plus tard dans la
journée, mais elle s'est désistée aujourd'hui,
c'est-à-dire que nous n'avons pas reçu son mémoire. Pour
l'instant, nous ne savons pas si elle désirera se présenter plus
tard. Pour l'instant, nous n'aurons donc demain, que le Bureau des assureurs du
Canada.
M. Saint-Germain: Et nous terminerons à 18 heures ou dans
la soirée, s'il y a lieu?
Mme Payette: La coutume veut que le mercredi, on siège de
10 heures à midi. Nous verrons à midi, M. le Président,
où en seront nos travaux avec le Bureau des assureurs du Canada et nous
déciderons à ce moment-là si nous désirons
continuer à 15 heures ou non.
M. Saint-Germain: J'ai bien l'impression que de 10 heures
à midi, il s'agit d'un rapport assez volumineux...
Mme Payette: Nous continuerons à 15 heures.
Le Président (M. Boucher): La commission ajourne donc ses
travaux à 10 heures, demain matin, au salon rouge.
(Fin de la séance à 18 h 24)