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Etude du projet de loi no 67 Loi sur l'assurance
automobile
(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, madame,
messieurs!
La commission permanente des consommateurs, coopératives et
institutions financières reprend l'examen du projet de loi no 67, Loi
sur l'assurance automobile.
Les membres de cette commission sont M. Beauséjour (Iberville),
M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Gagnon (Champlain), M. Gosselin (Sherbrooke);
M. Goulet (Bellechasse) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M.
Laberge (Jeanne-Mance), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Landry (Fabre)
remplacé par M. Paquette (Rosemont); M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Giasson
(Montmagny-L'Islet); M. Lefebvre (Viau), M. Marois (Laporte), M. Marquis
(Matapédia), Mme Payette (Dorion), M. Raynauld (Outremont), M. Roy
(Beauce-Sud); M. Russell (Brome-Missisquoi) remplacé par M. Le Moignan
(Gaspé), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Vaillancourt
(Jonquière).
Au moment d'ajourner nos débats, hier, nous en étions
à l'étude de l'article 3 et la parole était au
député de Rosemont. M. le député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président. Mme Payette: M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): Oui, Mme le ministre?
Indemnités (suite)
Mme Payette: Si le député de Rosemont me le permet,
j'aurais une information en réponse à une question du
député de Nicolet-Yamaska au sujet des indemnités
payées en vertu de l'article 46 et de la décomposition de ces
indemnités.
Le Président (M. Bertrand): D'accord.
Mme Payette: Pour l'article 46, on compte, pour les
vêtements, $3 millions; pour le transport et les frais de séjour,
$4 millions; pour professionnels de la santé, $4 millions;
médicaments, prothèses et divers, $5 millions, pour un total de
$16 millions.
M. Fontaine: Est-ce qu'on a eu la réponse, à savoir
si les bijoux étaient considérés comme des
vêtements?
Mme Payette: Pas encore, c'est une question à laquelle on
aura une réponse au cours de la journée.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Rosemont.
Indemnisation du dommage corporel Dispositions
générales (suite)
M. Paquette: M. le Président, j'étais en train
d'expliquer, hier, pour quelles raisons il me semblait nécessaire
d'avoir une régie publique dans le domaine de l'indemnisation des
dommages corporels. J'ai évoqué l'avantage, pour les
Québécois, que les quelque $200 millions par année de
réserves accumulées pour payer les rentes indexées soient
contrôlés par leur instrument collectif plutôt que par un
certain nombre de compagnies privées. D'autre part, j'ai expliqué
que, pour donner aux victimes d'accidents d'automobiles une protection accrue
et garantie dans un régime de base pour l'indemnisation des dommages
corporels, et ceci, à un coût moyen ou moindre que celui qui
existe actuellement, il était nécessaire de se donner un
système sans égard à la responsabilité.
Bien sûr, pour répondre au député de
Nicolet-Yamaska, dans un régime sans égard à la
responsabilité, on pourrait concevoir un certain nombre de compagnies
privées, mais qui devraient offrir essentiellement le même
régime de base et le député de Nicolet-Yamaska semble
croire que l'existence d'une certaine concurrence qui jouerait à ce
moment-là uniquement sur l'efficacité dans les frais
d'administration, pourrait avoir un avantage sur une régie publique.
Je lui soulignerais qu'actuellement les compagnies je comprends
que ce n'est pas calculé exactement de la même façon, mais
j'attends toujours l'argumentation du député de Beauce-Sud
affectent 34% des primes perçues aux frais d'administration. S'il y
avait une régie publique qui prenait 34% des frais, je pense que tout le
monde crierait au scandale. Je n'ai pas l'impression que c'est en mettant les
compagnies privées... Vous pourrez répliquer après et dire
tout ce que vous aurez à dire là-dessus. Entre 34% et 6%, on aura
beau contester ces chiffres, et essayer de les faire bouger dans les deux
directions pour les rapprocher, on va avoir de la difficulté à
faire passer un des chiffres par-dessus l'autre. Je pense que c'est assez clair
que dans ce domaine, une régie publique peut fonctionner à un
coût moindre que dix compagnies privées puisque la concurrence ne
joue pas. On a un régime de base qui est identique.
J'aimerais également dire que je pense que toutes les objections
qu'on nous a apportées face à la régie publique tiennent
plus de la défense d'une philosophie sociale. On va peut-être
penser la même chose des arguments que j'amène aussi, mais je ne
pense pas, M. le Président. Je n'ai pas l'intention de défendre
l'entreprise publique dans tous les domaines. Par exemple, dans le domaine des
petites et moyennes entreprises privées que sont les bureaux de courtage
dans le domaine de
l'assurance automobile, je pense qu'ils ont une place et je crois, moi,
aux petites entreprises. Cependant, pour établir un régime social
coordonné, planifié, qui a une certaine taille, qui
nécessite un certain nombre de capitaux, il faut soit se tourner vers
d'importantes compagnies multinationales ou, si on veut commencer un peu
à prendre le contrôle de l'économie, se tourner vers
l'Etat.
D'autre part, M. le Président, j'aimerais rappeler à nos
amis d'en face la déclaration du député de
Montmagny-L'Islet, lui-même courtier d'assurances, qui disait, concernant
cette régie publique, là je cite le journal des Débats: II
m'apparaît assez difficile de convaincre l'entreprise privée de
procéder, en matière d'indemnisation des victimes de blessures
corporelles, sur la base d'un système de "no fault", de non
responsabilité, à partir de rentes indexées annuellement.
Je ne dis pas que c'est totalement impossible, mais ce serait difficile pour
des compagnies d'assurances, dans l'industrie privée. En effet, pour
avoir véritablement un système équitable, juste et
uniforme pour les réclamants, pour toutes les victimes, il faudrait que
les compagnies procèdent elles-mêmes, à partir d'un
mécanisme, d'une régie privée.
Je dirais au député de Beauce-Sud qu'on n'aurait
peut-être pas un monopole, mais on aurait un cartel d'entreprises
privées qui se coordonne avec une régie privée, laquelle
aurait des modes uniformes pour déterminer les pertes de capacité
ou tout autre événement découlant d'un accident
d'automobile, de manière que toutes les victimes de blessures
corporelles, suite à un accident d'automobile, soient vraiment
indemnisées sur une base égale.
Cette déclaration du député de Montmagny-L'Islet a
été faite le 24 août 1977. C'est au journal des
Débats.
M. le Président, je pense qu'il va être extrêmement
difficile pour les gens d'en face de nous convaincre que les compagnies
privées pourraient se donner une telle régie qui serait
privée, qui serait nécessaire pour payer des rentes
indexées, comme cela semble juste et équitable sur le plan de
l'indemnisation, et que cette exigence que nous avons quant à la
non-responsabilité implique presque automatiquement une régie
publique. Il y a évidemment d'autres facteurs qu'on nous a
apportés concernant, par exemple, la bureaucratie. Je ne pense pas
qu'avec 725 employés, comme nous l'a dit le président de la
régie, M. De Coster, on ait une bureaucratie énorme. On va
profiter d'organismes déjà existants et je souhaite que le
président de la régie et les courtiers s'entendent de
façon que les courtiers aient un rôle à jouer, afin de
réduire cette bureaucratie.
Mais je tiens également à affirmer qu'à mon avis la
bureaucratie dépend beaucoup plus de la taille des entreprises que du
mode de gestion. Dès qu'on a une grosse entreprise, qu'elle soit
coopérative, privée ou publique, on a des problèmes au
niveau de la bureaucratie. Dans ce domaine, malheureusement, il est difficile
de songer à une petite entreprise qui prendrait charge d'un
régime de base dans le domaine des blessures corporelles. Cela va
être nécessairement quelque chose d'assez gros et il y a moyen de
réduire la bureaucratie et d'humaniser.
Dans le domaine de l'éducation, par exemple, on s'apprête
à le faire, en décentralisant, en remettant des contrôles
aux écoles, en remettant des pouvoirs aux parents, un peu sur le
modèle de certains aspects de l'école privée. Il y a moyen
de le faire dans ce domaine, il y a moyen de le faire dans d'autres domaines,
mais il faut croire à l'entreprise publique. Il faut croire que la
bureaucratie n'est pas un mal nécessaire.
J'aimerais dire également que j'ai eu personnellement... Tout le
monde a eu des problèmes avec certaines bureaucraties d'entreprises
privées. J'ai eu des problèmes avec General Motors en essayant de
faire reconnaître des droits sur une garantie que j'avais.
J'allais de place en place et je n'arrivais pas à me faire
reconnaître des droits. J'ai exactement le même sentiment lorsque
j'essaie de défendre un électeur qui a droit à des
prestations d'assistance sociale et qui ne réussit pas à les
avoir.
Ce que je dis, c'est que cela dépend de la taille de la
compagnie, cela ne dépend pas du mode de gestion. Je dis qu'avec 725
employés, avec des mécanismes relativement simplifiés,
avec des indemnités qui vont être payées rapidement et avec
la possibilité d'un facteur humain supplémentaire, soit
l'introduction des courtiers dans le système ce que je souhaite
vivementje pense que nous pourrons réduire cette bureaucratie.
D'autre part, on a lancé les hauts cris concernant
l'histoiredes$200 millions qui seraient récupérés par une
régie publique. J'aimerais donner un exemple qui est celui de la Caisse
de dépôt et placement du Québec. Si on avait laissé
les fonds de retraite privés dans des compagnies privées au lieu
de les regrouper dans un fonds public, on n'aurait pas cet instrument puissant
qui gère près de $4 milliards par année je pense
que c'est de cet ordre au service des Québécois, et qui a
pris le contrôle de certaines banques et d'autres compagnies.
M. le Président, pour toutes ces raisons, je me suis
exclamé face à un texte, le rapport Desjardins, je crois, que le
député de Beauce-Sud lisait et qui disait: Ceci n'est qu'une
étape vers une étatisation complète. J'ai laissé
entendre que j'espérais qu'il en soit ainsi. J'aimerais dire que je
l'espère, à condition que nous puissions prouver que cette
régie publique est efficace.
Je pense que ce régime offre l'avantage de dire: On va avoir une
régie publique dans le domaine corporel, là où c'est le
plus urgent, là où c'est le plus pressant, là où
les besoins sociaux sont les plus évidents et on va voir ce que cela
donne. J'ai confiance qu'on va pouvoir l'administrer en deçà des
frais de l'entreprise privée. On va pouvoir donner un meilleur service
à la population à des coûts moindres. La prime moyenne va
baisser. C'est le défi qu'on a à relever en tant que
gouvernement. Je pense qu'il faut qu'on se laisse guider par des
théories. J'en ai exprimé certains aspects. Il faut que les
théories se conforment à la pratique et qu'elles donnent des
résultats.
Si les orientations de philosophie sociale
qu'on peut avoir là-dedans ne donnent pas de résultats, je
pense qu'on va être bien mal placés pour réaliser les
craintes du député de Beauce-Sud qui sont pour moi des
espoirs.
Le Président (M. Bertrand): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Je voudrais parler sur l'article 3. Comme il a
été dit hier, mais pour le préciser, je pense que cet
article comporte deux principes. Le premier, c'est celui d'une régie
publique et le deuxième, c'est le principe d'assurance sans égard
à la responsabilité.
Je parlerai d'abord contre l'établissement d'une régie
d'Etat. Si j'ai le temps, je parlerai peut-être du second principe un peu
plus tard.
En premier lieu, je voudrais bien marquer, je voudrais bien affirmer ici
que cette régie d'Etat a toutes les caractéristiques d'un
monopole. Un monopole, c'est un arrangement suivant lequel il n'y a qu'un seul
producteur qui offre un service donné. C'est un arrangement tel que le
consommateur perd la liberté de choisir celui qui lui offrira le service
en question.
Ce n'est pas nécessaire que ce soit la totalité d'un
service donné. Le service en question, quel qu'il soit, du moment qu'il
est fourni par un seul producteur, constitue donc un monopole.
Mon métier d'économiste m'a peut-être permis de
réfléchir davantage à ce genre de structure de
marché. J'ai aussi pris connaissance d'une documentation très
abondante qui existe déjà depuis plusieurs centaines
d'années. Cela m'a permis également de prendre contact avec des
auteurs qui, eux aussi, avaient réfléchi à ces
questions.
On peut se poser la question suivante: Quels sont les effets d'un
monopole? Je parlerai d'abord du monopole privé et j'indiquerai, par la
suite, que le monopole public a à peu près les mêmes
caractéristiques.
Le premier effet, qui est fondamental, d'un monopole privé, c'est
celui de restreindre la production. Contrairement à ce que les gens
pensent, le premier effet d'un monopole, ce n'est pas de créer des
profits excessifs, c'est de restreindre la production, de produire à un
niveau moins élevé que ce qui serait produit si on était
dans un régime de concurrence. Parce qu'on restreint la production, on
augmente les coûts de production, même dans un monopole
privé. Parce qu'on restreint la production, on augmente effectivement
les prix. Parce qu'il y a moins d'offres sur le marché, le prix peut
donc être plus élevé qu'autre-ment.
Généralement, cette augmentation de prix va se traduire par des
profits plus élevés, des profits excessifs dans un monopole
privé. Parfois, ces profits ne sont pas aussi élevés qu'on
pourrait le penser parce qu'il y a une autre caractéristique du monopole
qui est celle d'empêcher les autres d'entrer sur le marché. Dans
la mesure où les profits sont tellement élevés, cela
incite d'autres personnes à venir sur le marché.
Par conséquent, beaucoup de monopoles vont volontairement
restreindre les profits qu'ils vont faire, pour ne pas briser, pour ne pas se
faire enlever ce monopole par d'autres entrepreneurs. Parce qu'on restreint le
nombre de personnes qui offrent des services ou de la production, on uniformise
le produit ou le service en restreignant le nombre de personnes; on a moins de
chance d'avoir des services qui vont être définis de façon
différente par un autre entrepreneur, puisqu'il n'y en a plus qu'un
seul. On dit généralement: Un monopole restreint la
liberté de choix sur un plan philosophique, mais restreint la
liberté de choix en pratique également parce qu'on n'a pas
d'alternative. C'est pour cela qu'on dit que la variété de
produits, la variété de services diminue. Enfin, un monopole
privé conduit généralement, également, à
moins d'innovation et à moins de progrès technique, parce qu'il
n'y a pas d'expérimentation à partir d'autres idées que
pourraient avoir des entrepreneurs éventuels, mais qui n'existent
pas.
Donc, un monopole privé, c'est une structure de marché qui
restreint la production, qui fait augmenter les coûts de production.
C'est pour cela que, généralement, les économistes vont
dire qu'un monopole privé, c'est dommageable par rapport à un
régime de concurrence.
Un monopole public a tous les défauts que je viens de mentionner
moins un. Un monopole public a tous les défauts, moins le fait que les
profits excessifs, dans le cas d'un monopole public, appartiennent à
l'Etat, à la collectivité, plutôt qu'à
l'entrepreneur privé. Ce monopole public a tous ces défauts, en
plus de plusieurs autres défauts quj n'apparaissent pas lorsqu'on
examine un monopole privé. Quels sont ces défauts additionnels?
Le premier, c'est que, dans un monopole public, le volume de la production ou
le volume du service est défini d'une façon complètement
arbitraire. Dans le cas que nous avons ici, le régime public qui est
proposé, par exemple, dit: Cela va être limité à un
revenu de $18 000. Ces $18 000 sont absolument arbitraires. Cela aurait pu
être $19 000. Cela aurait pu être $17 000. Cela aurait pu
être $20 000. Dans tous les cas de production publique, le volume de
production est toujours déterminé de façon arbitraire.
Qu'on pense à la musique qui est offerte, c'est arbitraire. Qu'on pense
à la culture qu'on veut favoriser, c'est arbitraire. Qu'on pense aux
parcs publics, c'est arbitraire. Le niveau de production n'a toujours aucune
relation avec une réalité quelconque. L'arbitraire, pour moi,
c'est toujours injuste.
Deuxième défaut additionnel, les prix, d'habitude, dans
des régies publiques ou des monopoles publics sont souvent maintenus
à des niveaux artificiellement bas. C'est dans ce sens, d'ailleurs, que
les profits excessifs disparaissent.
On en serait même à penser que ce serait peut-être
avantageux que les régies publiques fassent des profits excessifs, mais
c'est contraire à la philosophie générale de ceux qui
favorisent ces monopoles publics et, par conséquent, on fixe des prix
artificiellement bas, avec le résultat qu'on fait accroître la
demande des consommateurs pour ces services publics. On fait augmenter la
demande, et comme le niveau de production est arbi-
traire, cela conduit toujours à des raretés. Il n'y a rien
de plus caractéristique de services publics que la répartition
des biens entre les consommateurs qui se fait toujours par les files d'attente,
par le rationnement, et là, on a une quantité d'exemples que l'on
peut donner de files d'attente et de rationnement. Pensons aux hôpitaux,
où les gens peuvent attendre pendant des demi-journées et des
journées pour se faire soigner. Pensons à l'éducation, et
là, c'est une chose qui m'a renversé, comme député.
Vous savez ce que j'ai fait au mois d'août et au mois de septembre? J'ai
fait des représentations pour faire entrer des étudiants dans des
universités, des corps publics, d'intérêt public. On en est
rendu au point qu'il faut faire intervenir des députés pour les
faire entrer dans des institutions publiques et on va me dire, à moi,
que ça, c'est un régime équitable, que c'est un
régime ouvert, que c'est un régime pour la philosophie sociale,
pour favoriser le plus grand nombre. Cela, c'est de la blague!
M. Paquette: Qu'est-ce que ça donnerait, une
université privée, M. le député?
M. Raynauld: C'est de la blague!
M. Paquette: Oui, pensez à une université
privée et pensez aux conséquences.
M. Raynauld: Les $18 000 de revenu... Une Voix:...
à prendre.
M. Paquette: On sait tout ça, ne vous en faites pas.
M. Raynauld:... est également... Ce revenu est donc un
maximum et, par conséquent, on va faire une répartition en
fonction des premiers arrivés, premiers servis. Je demande: Est-ce
qu'une répartition comme ça, c'est plus équitable qu'une
répartition en fonction de ce que les gens sont prêts à
payer pour un service? Est-ce que c'est plus équitable? Je le demande. A
mon avis, ce n'est pas plus équitable, c'est pire.
Ensuite, troisième défaut additionnel. Un monopole d'Etat,
ça ne se brise pas. Un monopole privé, ça se brise. A peu
près tous les monopoles privés dans l'histoire du monde ont
été brisés à un moment ou à un autre. Ils
ont été brisés par la force, le dynanisme des
sociétés dans lesquelles ils étaient, par le dynanisme
d'autres entrepreneurs qui ont trouvé un moyen de rogner, de
réduire et d'empêcher ce monopole de continuer à s'exercer
et à s'appliquer. Dans le cas d'un monopole d'Etat, c'est à peu
près impossible de contourner ça. Il y a la force de la loi qui
est là, et un monopole d'Etat ne se détruit pas ou se
détruit bien difficilement.
Quatrième défaut additionnel: un monopole privé
n'est jamais absolument total, absolument complet. Il y a toujours quelqu'un,
une imagination quelque part qui va finir par contourner l'affaire, de sorte
que, lorsqu'on dit qu'un monopole privé fait augmenter les coûts
de production, dans le cas d'un monopole public, les coûts augmentent
encore plus.
Cela a toujours été comme ça, il n'y a aucune
raison de penser que ce ne sera pas comme cela et toute l'histoire du monde le
démontre. La preuve a été faite par neuf que les
coûts augmentent encore plus dans un monopole public que dans un monopole
privé parce que ce monopole jouit d'une autorité exclusive et
souveraine à cause de la loi.
Je vais rendre le député de Rosemont jaloux d'une telle
information, lui qui vient de dire que s'il y avait jamais une régie
d'Etat qui avait des coûts de production ou des frais administratifs de
36%, ce serait absolument intolérable: je vais lui dire de consulter le
rapport annuel de la Régie de l'assurance-récolte du
Québec. Savez-vous quels sont les frais d'administration par rapport aux
indemnités versées dans le régime de la Régie
d'assurance-récolte du Québec? En 1976, c'était trois fois
plus que les indemnités versées; en 1977, c'était à
peu près le même montant: $2 600 000 pour administrer la
régie de l'assurance-récolte du Québec. On a versé
en indemnités $2100 000. Cela a coûté $2 600 000 pour
administrer et on a payé $2 100 000 et on vient me parler de cette
Régie d'assurance-récolte du Québec. Ceci nous
montre...
M. Vaillancourt (Jonquière): ... cette régie. Qui a
fait cela? C'est une erreur.
M. Paquette: Avez-vous d'autres exemples comme
celui-là?
M. Vaillancourt (Jonquière): En quelle année cela
a-t-il été fait?
M. Raynauld: ... jusqu'à quels excès peuvent
conduire les régies d'Etat. On vient nous dire... et heureusement le
député de Rosemont nous dit: II faut y croire. Qu'il y regarde
donc, et peut-être qu'à ce moment il va moins croire à la
possibilité de réduire la bureaucratie et les frais
d'administration. Bien sûr, on me dira que l'assurance-récolte
n'est pas la même chose que ce qu'on va faire en assurance automobile. On
a toujours dit cela, mais il y a des siècles d'expérience
là-dessus qui nous démontrent que ce n'est pas vrai, que
ça ne réduit pas les coûts de production, ça les
augmente.
M. Paquette: C'est une des rares régies qui soit comme
ça. C'est peut-être la seule et il faut s'en occuper.
M. Lalonde: La deuxième, c'est celle que vous faites.
M. Raynauld: Cinquième défaut additionnel des
monopoles publics: les produits. J'ai dit tout à l'heure qu'un monopole
privé uniformisait les produits et restreignait la variété
de choix et la sélection qu'on peut faire des services et des produits.
Dans le cas d'un monopole public, il est encore
davantage uniformisé. Pourquoi? c'est inhérent
à une régie d'Etat C'est que le mécanisme de
décision d'une régie d'Etat est nécessairement un
mécanisme réglementaire par opposition à des transactions
commerciales. Dans une transaction commerciale, il y a toujours la
possibilité ce sont des cas particuliers de faire une
transaction avec un individu différente de celle qui va être faite
avec un autre individu. Dans le cas d'une régie d'Etat, c'est
impossible. Je pense que ceux qui ont préparé la loi le savent.
Entre obligé de recourir à des lois, à des
mécanismes réglementaires et à des normes pour être
capable de faire verser ces indemnités introduit des contraintes
extraordinaires qui font que la liberté est davantage restreinte sur le
plan des indemnités à verser.
Sixième défaut additionnel: les monopoles privés
font quand même de l'argent et sont donc incités à offrir
un meilleur produit et un meilleur service. Même s'il n'y a pas de
concurrence, et peut-être parce qu'il n'y a pas de concurrence, ceux qui
décident, dans un monopole privé, ont une incitation à
être plus efficaces parce qu'ils vont faire davantage d'argent. Dans le
cas d'une régie ou d'un monopole d'Etat, cette incitation n'existe pas.
Quand elle n'existe pas on peut penser qu'il va y avoir encore moins
d'efficacité et que les coûts de production vont monter encore
plus.
Septième, défaut additionnel: dans une régie
d'Etat, il y a toujours un conflit d'intérêts entre l'Etat
producteur et l'Etat régulateur de l'activité, l'Etat qui fait la
répartition des ressources en faveur des plus riches ou des plus
pauvres. Il y a un conflit d'intérêts qui existe et je suis
surpris que des gens qui proposent l'adoption presque
généralisée de ce système d'entreprise publique ne
s'arrêtent pas un instant aux conséquences que peuvent
entraîner les conflits d'intérêts inhérents à
des régies d'Etat. Est-ce que l'Etat, lorsqu'il y aura
intérêt à se présenter comme producteur, à
avoir des services plus efficaces et que ceci vient à l'encontre de ses
autres objectifs... Comment va-t-il résoudre ces difficultés? H y
a donc un conflit d'intérêts qui n'existe pas dans un monopole
privé.
Enfin, huitième point. L'expérience des autres pays.
L'expérience de l'histoire a montré partout que ces
régimes étatiques, des régimes socialistes au sens propre
du terme, ont toujours gaspillé des ressources, ont toujours
refusé l'innovation, ont toujours violenté les consommateurs et,
finalement, dans ces pays, dans ces régimes je parle de l'ancien
régime où il y avait des choses cela a sombré dans
la décadence lorsqu'ils ont épuisé l'apport des
régimes antérieurs ou des régimes des autres pays qui ont
pu, pendant un certain temps, laisser croire que ces régimes
d'entreprise publique étaient efficaces. On épuise tout le stock,
et cela prend un certain nombre d'années, qui avait pu être
accumulé de ressources financières, humaines, d'innovation,
d'imagination, et on les étouffe complètement au bout d'un
certain nombre d'années; on tombe, à mon avis, dans la
décadence. Cela a été le sort des anciens régimes.
Il a fallu faire une Révolution française pour être capable
de détruire ces régimes de monopoles géné-
ralisés, et nous reprenons cette même voie où on essaie,
encore une fois, de dire: II faut s'opposer à ce régime qui a
été extraordinairement dynamique du système capitaliste
pour tâcher de s'orienter vers un régime qui a fait ses preuves
dans le passé et qui a échoué lamentablement.
Enfin, l'objection classique qui est faite aux entreprises
privées, si je puis dire, c'est la philosophie sociale dont le
député de Rosemont vient de parler, cette fameuse philosophie
sociale. Il y aurait certaines classes de citoyens qui ne pourraient pas se
payer les services ou les biens au prix du marché. La réponse
à cette objection, c'est une réponse d'une simplicité
inouïe. On peut toujours subventionner ceux que l'on veut aider.
Ce n'est pas nécessaire de subventionner les riches par les
systèmes qu'on impose, c'est ce qui ne m'entre pas dans la tête;
même pour l'assurance automobile, c'est la même chose, on va
essayer de réduire les primes. Pour les rendre uniformes, on va se
trouver à subventionner des gens qui seraient capables de payer plus
cher. Pourquoi on fait ça, est-ce qu'on fait ça pour aider les
pauvres? Non, on ne fait pas ça pour aider les pauvres. Si on faisait
ça pour aider les pauvres, il suffirait de le faire, de s'adresser aux
pauvres, leur donner des subventions, leur payer leur prime d'assurance, s'il
le faut. Ce serait encore infiniment supérieur comme système
à celui d'une régie d'Etat qui fait payer la même chose
à tout le monde, qui va faire payer plus cher aux pauvres.
Ceux que l'on veut aider, on leur fait payer plus cher pour les
indemnités qu'ils reçoivent, plutôt que de s'adresser
vraiment aux problèmes que l'on a, c'est-à-dire qu'il y a des
gens qui ne sont pas capables de payer, très bien, qu'on s'occupe de ces
gens-là, c'est une philosophie sociale qui est en faveur des pauvres. Ce
n'est pas de faire des régies d'Etat qui vont subventionner autant les
riches que les pauvres.
J'en viens maintenant aux arguments particuliers d'hier soir du
député de Rosemont, parce qu'on a eu l'avantage d'une
déclaration qui a essayé de nous donner certains arguments. On
nous a dit: Ce régime va donner une protection accrue, va donner une
protection garantie aux gens. Là-dessus, je dirai: Est-ce qu'il serait
possible d'être un peu conséquent, rigoureux là-dessus? Ces
deux arguments n'ont rien à voir avec la régie d'Etat, le
député de Rosemont le sait très bien. La protection
accrue, la protection garantie...
M. Paquette: J'ai dit que cela avait des conséquences, par
exemple.
M. Raynauld: Le député de Rosemont s'est servi de
ça pour prouver qu'une régie d'Etat était
nécessaire. Je dis: Protection accrue, protection garantie, c'est
causé par le système du "no fault" qui est introduit par le
projet de loi, ce à quoi je n'ai pas d'objection, j'y reviendrai tout
à l'heure. Mais cela n'a rien à voir avec la régie d'Etat,
rien, rien du tout. On pourrait obtenir tous les avantages de cette protection
accrue, de cette protection garantie, avec des entreprises privées et
l'entre-
prise publique n'a rien à voir avec ça. Régime
unique et régime uniforme, en plus.
On a dit: Si on avait un régime unique et uniforme, là, il
faudrait avoir une régie publique. Mais qu'est-ce que c'est que cette
nouvelle vertu, tout à coup, d'avoir un régime uniforme? Qui veut
ça, un régime uniforme? Personne ne veut ça. C'est quoi,
ça? Tout à coup, on avance ça comme un grand avantage du
nouveau régime. On n'en veut pas de régime uniforme. Ce qu'on
veut, c'est avoir une protection accrue et garantie. Mais si je suis
prêt, personnellement, à avoir une garantie plus grande, pourquoi
est-ce qu'on m'empêcherait de l'avoir? Si des gens qui sont plus pauvres,
supposément, ne sont pas capables de se...
M. Paquette: On ne vous en empêche pas.
M. Raynauld: ... payer cette protection accrue et garantie, que
l'Etat leur verse des subventions et ils vont être capables de se la
payer. Enfin, on dit, la capitalisation des rentes qui doivent servir à
l'Etat plutôt que d'être laissées aux entreprises. C'est le
dernier argument sur lequel le député est revenu ce matin.
Là-dessus, je dois m'inscrire en faux, complètement; un
investissement privé, pour moi, ce n'est pas par définition moins
utile, même à la société dans laquelle on vit, qu'un
investissement public.
En fait, on élargit le secteur public en faisant ça, on
change les règles de décision en faveur d'une centralisation
accrue du pouvoir économique pour servir des intérêts du
souverain plutôt que de défendre les libertés des citoyens.
Aux décisions volontaires qu'on prend dans toute transaction
commerciale, on substitue un impôt; remarquez l'origine de ce mot, c'est
une imposition involontaire qui, par nature, entraîne des
réactions négatives chez les gens; qu'on le veuille ou non, parce
que c'est involontaire, ça entraîne des réactions
négatives et par la suite, ça augmente le degré de
complexité de tous les problèmes sociaux que nous avons à
résoudre, ça rend les décisions de plus en plus
difficiles.
On se surprendra, par la suite, qu'on ait des difficultés, dans
les sociétés contemporaines. Accumuler des capitaux dans le
domaine public, c'est ne pas regarder plus loin que son nez. C'est faire preuve
d'une myopie lamentable, refuser délibérément de
considérer les conséquences à longue portée d'une
accumulation de décisions comme celles-là, de petites
décisions qui, en soi, peuvent ne pas être dommageables, mais qui,
à la longue, élargissent le secteur public, réduisent le
champ d'activités des agents économiques privés,
concentrent le pouvoir en quelques mains et ensuite, on dira que c'est une
philosophie sociale avancée. Je pense que c'est une philosophie sociale
retardée, sinon retardataire et rétrograde. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: J'ai écouté avec intérêt ce
matin mon collègue de Rosemont qui a poursuivi les énoncés
qu'il avait commencé à aborder hier soir, avant l'ajournement de
nos travaux. Je pense qu'après avoir entendu ce que j'ai entendu, cela
confirme nos appréhensions du début. Le projet de loi 67 ne
poursuit pas des objectifs sociaux comme tels, ne poursuit pas des objectifs
qui visent à rencontrer les plus grandes préoccupations de la
population, mais d'abord et avant tout des préoccupations
idéologiques, philosophiques.
On cherchait, par tous les moyens possibles le
député de Rosemont l'a dit hier soir l'Etat a besoin de
capitaux pour s'administrer. Si on va chercher $345 millions et que l'on
débourse, pendant l'année, de $70 millions à $75 millions,
comme on l'a dit hier, il reste $280 millions dont l'Etat peut disposer pour
d'autres fins.
M. Paquette: De façon limitée.
M. Roy: Evidemment, cela aide la marge de manoeuvre et cela
réduit d'autant le pouvoir d'emprunt, c'est-à-dire l'obligation
d'emprunter sur les marchés privés, même sur les
marchés étrangers.
Ce qu'on oublie, c'est que ces capitaux privés, qui contribuaient
au développement du secteur privé, vont empêcher d'autant
le développement du secteur privé et l'Etat aura une autre
justification de procéder à une deuxième étape pour
aller chercher plus d'argent, pour intervenir lui-même, pour compenser
aux déficiences qu'on retrouve dans le secteur privé.
Quand j'ai dit, et je le dis et je le répète encore ce
matin, que ce projet de loi ne constitue qu'une étape j'ai
cité le rapport Desjardins hier, je pensais qu'on allait me dire que
j'allais peut-être un peu loin, qu'on l'avait mis de côté.
Mais la réforme de l'assurance automobile, ce n'est pas autre chose que
le rapport Desjardins qui a été présenté le 7 mars
1975 et dont le livre bleu s'est inspiré largement.
Pour ceux qui n'étaient pas ici hier soir, la première
étape, trois ans, qu'on lit dans le rapport. Régie d'Etat: dans
un premier temps, le gouvernement pourrait créer une régie d'Etat
monopolistique chargée d'assurer une couverture de base dans un
système de responsabilité sans égard à la faute, en
ce qui concerne les blessures corporelles...
Mme Payette: M. le Président, est-ce que le
député de Beauce-Sud me permettrait une question?
M. Roy: Oui.
Mme Payette: Est-ce qu'il est bien dans le rapport du juge
Desjardins?
M. Roy: C'est le rapport du juge Desjardins, oui.
Mme Payette: D'accord.
M. Roy: ... laissant à l'industrie privée le soin
de couvrir les dommages non couverts par le régime de base, en ce qui
concerne les blessures corporelles et les dommages matériels, dans un
système de responsabilité conventionnel.
Dans un deuxième temps, le gouvernement pourrait prendre en main
la couverture des dommages matériels et celle des dommages
matériels non couverts par le régime de base. Voici ce qu'on dit
dans le régime de base: Les pertes économiques. Le régime
de base envisagé par le sous-comité est le même que le
régime préconisé par le comité Gauvin,
c'est-à-dire un régime de responsabilité sans égard
à la faute.
Ce qu'on dit un peu plus loin, dans la deuxième étape, et
c'est la raison pour laquelle le gouvernement ne procède pas
immédiatement, après trois ans et je prédis ce
matin que dans trois ans, le gouvernement aura tout étatisé dans
le secteur de l'assurance automobile c'est dit dans le rapport du juge
Desjardins, alors que l'on aura mis sur pied la société d'Etat et
rodé son administration, la tarification, la mise en marché et le
règlement des sinistres, que l'on aura mis sur pied un réseau de
centres d'évaluation, de contrôle et de récupération
des pièces, on pourra passer à une seconde étape qui
consistera à confier à la régie d'Etat l'indemnisation des
dommages aux automobiles, en vue de réaliser des économies. Les
économies, je pourrais l'ajouter entre parenthèses, parce qu'il
n'est pas sûr qu'on réalise des économies.
Nous passons à l'étude de ce projet de loi, la
première étape de l'étatisation complète du
Régime d'assurance automobile; la régie veut se donner et le
gouvernement veut donner à la régie le temps voulu pour monter
les structures, pour se préparer afin d'avoir tous les mécanismes
prêts, de façon à offrir un régime
monopolisé, étatique, complet, dans tout le régime
d'assurance automobile.
On a parlé tout à l'heure de 34% des coûts du
régime actuel contre 6% des coûts pour la régie d'Etat. Je
n'ai pas l'intention, je l'ai dit dès le début, de
défendre les assureurs privés, les compagnies d'assurances dans
ce projet de loi. Mes premières préoccupations sont celles
d'offrir un régime d'assurance susceptible de correspondre aux besoins
réels de la population, d'avoir le meilleur régime
d'indemnisation possible et d'avoir un régime humain.
Quand on vient me comparer 6% du coût d'administration de la
régie avec 34% du coût du régime actuel, je pense qu'on
veut comparer des pommes avec des carottes, puisque les règles du jeu
sont changées, sont complètement changées. La preuve de
l'humanisation du régime d'assurance automobile que le gouvernement veut
faire n'est pas faite. Lorsqu'on nous a remis le document hier, concernant la
Commission des accidents du travail, je pense que l'exemple était
extrêmement mauvais pour venir nous parler d'un régime humain,
alors que c'est la Commission des accidents du travail qui va être
chargée de recueillir les données et de s'occuper de voir, avec
les services dont elle dispose, à appliquer le régime
d'indemnisation; quand on sait très bien j'ai de nombreux
dossiers qu'après six mois, qu'après huit mois on n'a
même pas encore accusé réception de la demande de la
personne.
M. Fontaine: II y en a un qui se promène depuis dix
ans.
M. Roy: II y en a un qui se promène depuis dix ans, comme
dit le député de Nicolet-Yamaska, devant le parlement. Cela fait
trois gouvernements qu'on a depuis.
M. Fontaine: Ce n'est pas parce qu'il y a eu des erreurs avant,
qu'on est obligé de continuer.
M. Roy: On viendra nous parler d'un régime humain quand je
sais très bien actuellement que les cas des accidents du travail se
trouvent dans les bureaux de députés. Vous n'avez qu'à
consulter votre caucus pour savoir ce que vos députés en
pensent.
On parle, à un moment donné, d'un établissement de
décentralisation des bureaux dans les régions. Quand? On dit
qu'ils étaient absolument nécessaires. J'ai fait des batailles,
conjointement avec le Parti québécois parce qu'il était
nécessaire de revoir la Loi de la Commission des accidents du travail,
de fond en comble. Quand? Au lieu de moderniser le système pour
répondre à des objectifs et à des besoins qui sont urgents
depuis longtemps... Quand je dis depuis longtemps, je cite les propos
mêmes de mes col lègues du Parti québécois, au
moment où nous formions conjointement l'Opposition.
Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, avant d'aller
plus loin, j'aimerais simplement vous signaler qu'il vous reste une minute dans
votre droit de parole de vingt minutes sur l'article 3. A moins d'obtenir un
consentement unanime de la commission, je devrai appliquer le règlement
tel qu'il est écrit.
M. Roy: Avez-vous tenu compte du temps que j'ai utilisé
pour les motions que j'ai présentées également hier?
Le Président (M. Bertrand): Je viens justement de
référer à la transcription d'hier, M. le
député de Beauce-Sud, pour m'assurer que la décision que
je rendais était correcte.
M. Roy: Je me fie à vos savants calculs, M. le
Président.
Quand on vient me parler de mesures sociales je terminerai
là-dessus alors que, dans toutes ces mesures la contribution
payée par les citoyens était fonction de leurs revenus, alors que
les mesures sociales ont visé à leur donner les mêmes
services et que les rentes de la Régie des rentes du Québec sont
versées en tenant compte du montant de la cotisation versée,
alors que le coût du Régime d'assurance-hospitalisation et de
l'assurance-maladie est en fonction des revenus, les citoyens peu
importent...
M. Paquette: II y a un plafond. Dans l'assurance-maladie il y a
un plafond.
M. Roy: Avec un plafond, mais peu importent ceux qui n'ont pas de
revenus du tout et qui ne paient pas, ils ont droit aux mêmes services
d'hospitalisation et aux mêmes services de santé que les citoyens
les "mieux" démunis...
M. Vaillancourt (Jonquière): Comme les piétons et
les passagers dans l'assurance automobile.
M. Paquette: Dans l'assurance automobile aussi.
M. Roy: Je ne dirai pas les plus démunis. Pour l'assurance
automobile, on fait payer une contribution statutaire à tout le monde,
mais on donne moins de rentes aux pauvres qu'aux autres. C'est dans le
régime gouvernemental. Il n'est pas dit dans le document qu'on nous a
déposé que les pauvres allaient payer moins cher de prime
d'assurance. Ce n'est pas une mesure sociale que le gouvernement nous apporte,
ce n'est qu'un régime d'assurance. Dans le principe de l'assurance-vie,
le montant de l'assurance est en fonction de la prime qu'on paie.
Là-dessus, qu'on ne vienne pas me dire qu'on améliore
l'ancien régime. C'est exactement le même principe qui est
conservé. Alors, il n'y a pas d'amélioration. Il n'y a pas non
plus de diminution du coût de l'assurance pour les personnes. Il n'y a
pas d'humanisation du service. C'est une loi philosophique. C'est un
débat philosophique qui vise tout simplement à faire en sorte que
le gouvernement ait plus d'argent dans ses coffres pour pouvoir gouverner, pour
pouvoir moins emprunter. On n'ose peut-être pas le dire. Il y a seulement
le député de Rosemont qui a osé le souligner devant cette
commission parlementaire. Nous ne l'avons entendu dire par personne. Donc, on
pourrait même ajouter que c'est, en quelque sorte, une taxation
déguisée puisque, effectivement, c'est déjà
subventionné. Je disais $30 millions hier, mais c'est $40 millions,
parce qu'hier, j'avais oublié la taxe de 2,7% qui est payée par
les assureurs et qui constitue une contribution au trésor public de $9
millions par année, à même les assurés, à
même les personnes qui sont assurées par l'assurance
automobile.
M. le Président, je pense tout simplement, et je terminerai
là-dessus, que, peu importe ce que nous allons faire et ce que nous
allons tenter de proposer dans ce projet de loi, le gouvernement a fait son
lit. Il n'y a pas grand-chose qu'on puisse faire avec ce projet de loi pour
essayer de le bonifier, de l'humaniser, puisque c'est un projet de loi
philosophique.
M. Paquette: M. le Président, en vertu de 96, j'aimerais
simplement dire au député de Beauce-Sud que j'ai parlé des
$200 millions. Je n'ai pas dit que ces $200 millions serviraient aux
dépenses courantes de l'Etat et que cela amènerait l'Etat
à emprunter moins. J'ai dit que c'est de l'argent qui restera entre les
mains des Québécois et qui pourrait être investi, avec
certaines contraintes, parce qu'il faut s'assurer qu'on puisse payer les
rentes, et que les intérêts qui pourraient être faits sur
ces montants resteraient entre les mains de Québécois,
contrairement à ce qui se passe actuellement avec les entreprises
privées. Je n'ai pas dit que cet argent servirait à
réduire les emprunts et servirait au financement général
de l'Etat. D'autre part, en passant...
M. Raynauld: ... de la Régie de l'assurance-maladie.
M. Paquette: Je termine, M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): A partir de 96, il ne s'agit
pas de faire un nouvel énoncé de l'argumentation.
M. Paquette: D'accord. Vous avez raison. Je m'apprêtais
à le faire.
Le Président (M. Bertrand): Mme le ministre.
M. Roy: Je m'excuse, mais il y a quand même des choses qui
ont été dites. Ce n'est pas ce que j'ai dit et ce que j'ai dit du
député de Rosemont. Je n'ai pas dit que le gouvernement allait
emprunter moins. Cet argent va être placé à la Caisse de
dépôt et placement. Le gouvernement va emprunter là. J'ai
dit que cela réduirait ses emprunts a l'extérieur. C'est ce que
j'ai dit.
Le Président (M. Bertrand): D'accord. Mme le ministre.
M. Paquette: Je ne sais pas si cela va être à la
caisse de dépôt.
M. Roy: A la caisse de dépôt.
Une Voix: Vous ne le savez pas vous non plus.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre!
Mme Payette: M. le Président, je n'utiliserai pas les
vingt minutes. Je voudrais simplement...
Le Président (M. Bertrand): Vous avez un droit
illimité de parole, madame.
Mme Payette: Même à cela, vous savez que je n'abuse
pas de ce genre de choses. Je voudrais simplement expliquer au
député de Beauce-Sud que le juge Desjardins n'a pas fait partie
de notre comité de travail. J'ai, cependant, un grand respect pour le
juge Desjardins qui a fait, sur l'assurance automobile, une étude
consciencieuse qui l'a mené à des rapports qui sont logiques par
rapport à l'étude qui a été faite. J'ai
également beaucoup de respect pour M. Gauvin et le comité de
travail qui a donné lieu au rapport Gauvin sur l'assurance
automobile. Nous nous sommes, comme comité de travail, inspirés
de toutes les études qui avaient été faites sur le sujet,
aussi bien le rapport Gauvin, le rapport Desjardins que d'autres études
qui ont été faites dans d'autres parties du Canada
également, sauf, comme je le disais, que le juge Desjardins ne faisait
pas partie de notre comité de travail, ce qui ne nous a pas
empêchés, comme comité de travail, d'annoncer qu'il y avait
différentes étapes de prévues dans la réforme de
l'assurance automobile.
En ce qui concerne les dommages corporels, il est annoncé, depuis
le début du mois d'avril, que le gouvernement a l'intention, au cours
des prochaines années, de voir s'il est possible de prendre en charge,
dans le sens de l'intégrité physique de ses citoyens, la
couverture de tous les accidents causant des dommages corporels. Cela inclut,
au point de départ, les accidents de sport, les accidents de chasse et
pêche, les accidents durant les loisirs, noyade suite à un
pédalo défectueux, comme cela a été le cas il y a
quelques mois au Québec. Il y a une deuxième étape
prévue également dans la couverture des dommages matériels
qui est la possibilité pour la régie d'Etat d'entrer en
concurrence loyale avec l'entreprise privée. Ce sont les deux seules
étapes qui sont prévues par le comité de travail du
gouvernement sur l'assurance automobile.
Nous n'avons pas suivi le juge Desjardins jusqu'à la fin de son
raisonnement. Nous ne l'avons pas fait parce que, comme gouvernement, nous nous
sommes refusé à concrétiser la voiture comme un bien
essentiel dans la société dans laquelle nous vivons. Nous avons
voulu éviter ce piège de l'étatisation de la couverture
des dommages matériels qui aurait pu permettre de penser que l'Etat
considérait que la voiture était un bien essentiel.
J'ai été amenée, à plusieurs reprises,
à définir les biens que nous, comme gouvernement,
considérons vraiment essentiels. Il y a la santé,
l'éducation et le travail. Si on nous demandait d'en ajouter un, il ne
s'agirait pas de la voiture, il s'agirait plutôt de l'habitation qui
paraît un besoin criant au Québec.
Le député d'Outremont a fait allusion à la
liberté de choix que la concurrence laissait aux consommateurs, et je
rattacherai cette explication à la liberté de choix qui fait
qu'on se retrouve au Québec avec un parc automobile absolument
démesuré par rapport aux besoins que nous avons, la
liberté de choix qui induit le consommateur à la consommation,
qui le pousse à consommer ces voitures fabriquées ailleurs, pour
la plupart, et qu'on doit nécessairement changer tous les deux ou trois
ans parce qu'elles ne sont pas faites pour durer plus longtemps. C'est un monde
que nous refusons, ce monde de la surconsommation, parce qu'il ne s'agit plus
de consommation pure et simple, selon les besoins des citoyens, mais de
surconsommation.
M. Raynauld: C'est vous qui décidez cela.
Mme Paquette: Je voudrais également, M. le
Président, revenir à une affirmation du député de
Beauce-Sud. Il dit que la prime égale pour chacun est injuste. Je
voudrais qu'il comprenne bien, une fois pour toutes, qu'il ne s'agit pas d'un
impôt sur le revenu des citoyens et que la prime égale pour chacun
nous permet d'entrevoir l'indemnisation complète de toutes les victimes,
y compris les 30% qui ne sont que piétons et passagers dans le
système que nous connaissons. Ces 30% n'auront rien à
débourser pour une couverture complète.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): Très bien. M.
Saint-Germain: M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys avait demandé la parole.
M. Lalonde: Je vais laisser le député de
Jacques-Cartier faire quelques remarques.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Jacques-Cartier, alors.
M.-Saint-Germain: J'ai écouté avec attention la
déclaration du ministre, surtout lorsqu'elle a parlé de cette
civilisation de consommation. Il est clair, à mon avis, qu'actuellement,
dans cette province, dans le monde occidental, on dépense
énormément pour les voitures. La publicité et de telles
choses font peut-être que certains citoyens s'endettent
considérablement et même trop considérablement relativement
à ce qu'ils ont comme revenu. Les dépenses, les frais de...
Mme Payette: M. le Président, si le député
de Jacques-Cartier me permet une information, la voiture est la première
cause d'endettement au Québec.
M. Saint-Germain: Vous avez probablement raison. Mais ceci
dit...
M. Raynauld: C'est un bien durable. M. Saint-Germain: ... M. le
Président... Une Voix: Tous les biens durables...
M. Saint-Germain: ... je ne vois pas, dans nos structures, un
gouvernement, et je vois encore moins un ministre des consommateurs, dire aux
gens quand ils doivent acheter une voiture, quand ils ne doivent pas en acheter
et quelle marque ils doivent acheter. Je crois que c'est là un droit qui
appartient à chaque citoyen. Nos législations, traditionnellement
et depuis toujours, dans notre système démocratique, font qu'on
considère le citoyen comme une personne adulte, comme une personne
responsable et, pour autant qu'elle gagne sa vie par ses efforts et selon nos
lois et nos règlements, elle a le droit de disposer de ses revenus comme
elle l'entend.
Je me demande, M. le Président, pour qui le ministre se prend si
elle croit, dans sa sagesse, selon ce complexe de supériorité
qu'elle a et ses façons de voir, que son échelle des valeurs est
celle qui est acceptable pour la majorité des citoyens. Je crois qu'elle
rêve en couleur. Personnellement, et je crois que je parle au nom de la
majorité des consommateurs du Québec, je crois que les gens du
Québec et les Québécois ont assez de maturité pour
disposer de leurs revenus comme bon leur semble. A un moment donné, si
abus il y a, ils s'apercevront eux-mêmes qu'ils font des abus et ils
auront assez de capacité d'adaptation et de jugement pour revenir en
arrière et s'adapter à l'évolution des temps.
Il y a toujours une limite, M. le Président, à croire que
les gens qui sont élus sont d'une classe supérieure, d'une
moralité supérieure, d'une intelligence supérieure, d'une
sagesse supérieure.
Ils croient, parce qu'ils sont en autorité à un moment,
que cette autorité leur permet de dicter à tous les citoyens ce
qu'ils pensent, ce qu'ils croient et ce, à tout point de vue.
M. Lalonde: C'est de l'arrogance!
M. Saint-Germain: C'est de l'arrogance, M. le Président,
absolument de l'arrogance...
M. Vaillancourt (Jonquière): De l'incertitude.
M. Saint-Germain: Croyez-moi, j'ai bien plus de confiance dans le
jugement des citoyens du Québec que j'ai confiance à ce
gouvernement. Il fait des bêtises l'une après l'autre et s'il
fallait que les citoyens du Québec en fassent autant en si peu de temps,
je ne sais pas où on irait, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Nicolet-Yamaska a demandé la parole, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je ne croyais pas que je perdais mon tour en
cédant la parole au député de Jacques-Cartier.
Le Président (M. Bertrand): Vous ne le perdez pas. Tout de
suite après vous il y avait le député de Nicolet-Yamaska
qui s'était enregistré; quand vous avez cédé votre
droit de parole au député de Jacques-Cartier, j'ai compris que
vous reprendriez votre droit de parole après le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Lalonde: Cela va, et là je reconnais la mesure de ma
générosité.
Le Président (M. Bertrand): D'accord.
M. Raynauld: M. le Président, il avait enregistré
son nom hier soir; vous l'aviez sur votre liste.
M. Paquette: Pauvre petit!
Le Président (M. Bertrand): M. le député
d'Outremont, pourquoi dites-vous des choses comme celle-là? J'aurais
inscrit le nom du député de Marguerite-Bourgeoys, s'il avait
demandé la parole, mais il n'est pas inscrit sur la feuille que j'ai
devant moi.
M. le député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. De toute façon
je pense que, habituellement, on fait une certaine rotation entre les
différents partis politiques et, ce matin, je n'ai pas eu l'occasion de
prendre la parole encore.
Avant de débuter mon intervention, je voudrais poser une question
au ministre. Il y a des rumeurs qui circulent selon lesquelles certains
ministres auraient concernant la surconsommation dont on a parlé
jusqu'à trois ou quatre voitures. Pourriez-vous nous confirmer
cette information?
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est complètement
à l'encontre du règlement, M. le Président.
Mme Payette: C'est non seulement à rencontre du
règlement, mais c'est tellement niais encore une fois que je ne
répondrai pas.
M. Fontaine: Mme le ministre, si c'est niais, arrêtez d'en
parler parce que c'est vous qui avez soulevé la question.
M. Paquette: Citez-nous un nom?
M. Fontaine: Citez-nous un nom? Mme le ministre Payette, combien
avez-vous d'automobiles?
Mme Payette: Aucune.
M. Fontaine: Aucune automobile à votre nom.
M. Paquette: Vous voyez, vous êtes dans les "patates".
M. Fontaine: Vous n'avez pas d'automobile fournie par l'Etat?
Le Président (M. Bertrand): Article 3.
M. Fontaine: Je reviens sur le fond de la question, on a
parlé, hier, de l'ancien système et du système actuel. On
a dit que tout le monde était d'accord pour que l'assurance soit
obligatoire, et ce depuis longtemps, je pense que tout le monde est d'accord
là-dessus. On a dit, également, qu'on était d'accord pour
qu'il y ait un système de "no fault" qui soit instauré dans la
province de Québec. Un système qui pourrait
bénéficier à tout le monde, à la suite d'un
accident d'automobile pour qu'il n'y ait pas d'injustice et que toutes les
victimes soient indemnisées sur une certaine base à la suite d'un
accident.
Cependant, ce qu'on réclame depuis longtemps et ça
il y a plusieurs groupements qui l'ont réclamé c'est qu'il
y ait quand même, pour le surplus du régime proposé, un
recours en
responsabilité qui puisse être maintenu et je pense que ce
serait légitime si le régime proposé est tellement
complet, il y aurait moins de recours et, à ce moment, ça
permettrait à tout le monde d'obtenir justice. Ce qu'on réclame
également, c'est un droit d'appel à la suite d'un jugement de la
régie ou de la commission des affaires sociales pour permettre qu'il n'y
ait pas d'injustice dans le système proposé et que, encore une
fois, si le système est tellement juste, tellement bon, pourquoi refuser
un droit d'appel qui permettrait quelque chose en plus pour s'assurer que le
régime proposé n'offre pas d'injustice à qui que ce
soit?
On admet que l'ancien système le système actuel
est injuste à certains égards, mais on se demande si le
nouveau système ne le sera pas également parce qu'on sait que la
prime qui sera facturée à tous les usagers d'automobile est une
prime uniforme pour tous les usagers, mais, que d'un autre côté,
l'indemnisation ne se fait pas de la même façon; l'indemnisation
va se faire selon les revenus gagnés par les personnes à
être indemnisées. On sait qu'il y a des personnes qui gagnent $18
000 et d'autres qui gagnent $5000 ou $6000; ces personnes vont recevoir moins,
par contre elles vont payer la même prime. Si c'est cela la justice
sociale, il faut se poser des questions.
Il y a également le fait aussi que le piéton responsable
d'un accident d'automobile, qui ne participe pas au financement du
régime, va être indemnisé aux frais des automobilistes qui,
eux, vont payer la prime. Je pense que c'est un autre point dont il faut tenir
compte. Concernant maintenant le fait que l'assurance automobile pour dommages
corporels, devienne une assurance d'Etat, soit une étatisation, comme je
l'ai proposé hier, on pourrait sans doute permettre à la
régie de devenir un organisme de contrôle qui serait chargé
d'établir la philosophie sociale du gouvernement, de l'Assemblée
nationale. Cela permettrait de laisser la direction de l'entreprise, de
l'assurance, à l'entreprise privée, afin que l'entreprise
privée continue à donner le service personnalisé qu'elle
donne actuellement et cela à l'avantage des assurés. On sait
qu'actuellement il y a une police uniforme au Québec; la police que les
automobilistes paient actuellement au Québec, c'est une police uniforme,
qui est édictée par le surintendant des assurances. Il serait
possible d'émettre une police uniforme concernant le régime
actuel et de demander...
M. Paquette: II est contre cela, mais il ne l'a jamais dit, sauf
maintenant.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre!
M. Fontaine:... aux compagnies d'assurances d'établir
cette police, de la mettre en vigueur et de verser les indemnités, tel
que prévu dans la Loi de l'assurance automobile. Mme le ministre a
abordé tout à l'heure la question de la concurrence loyale en
dommages matériels qu'on va établir dans les années
à venir; on pourrait également faire de la concurrence loyale en
dommages corporels, et je me demande pourquoi le gouvernement n'a pas
pensé à cette solution ou ne veut pas l'établir. Si on
prétend que la régie d'Etat est tellement efficace, qu'elle
instaure son régime en concurrence avec les entreprises privées
et on va bien voir qui des deux va remporter le plus de succès.
Concernant la question de la bureaucratie, sujet dont le
député de Rosemont a parlé tout à l'heure, il a
bien dit que la bureaucratie est d'autant plus grande que l'entreprise est
grande. Je suis d'accord avec son affirmation. C'est pourquoi je suis contre la
régie d'Etat, parce que, là, la bureaucratie va s'y installer.
Mais si on gardait le système d'entreprise privée, étant
donné le fait que les entreprises sont beaucoup moins grandes que la
régie d'Etat, la bureaucratie est moins grande et elles offrent
actuellement un meilleur service, un service plus personnalisé.
M. Paquette: Combien d'employés à la
Great-West?
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre!
M. Fontaine: On peut vous donner un exemple, M. le
Président et, encore là, Mme le ministre pourra dire que c'est
niaiseux, parce qu'elle aime dire cela assez régulièrement.
Mme Payette: Quand ça l'est, je le dis.
M. Fontaine: Je vous donne l'exemple de ce qui s'est passé
hier, à cause de la tempête ici. Tous les employés du
gouvernement ont été renvoyés chez eux, tant ici à
Québec qu'à Montréal, parce qu'il tombait trois ou quatre
grains de neige.
M. Lalonde: On avait peur.
M. Fontaine: L'entreprise privée ne fait pas cela.
L'entreprise privée a gardé ses employés et elle les a
laissés retourner chez eux après le travail, parce qu'elle s'est
aperçue qu'il n'y avait pas de tempête, mais le
gouvernement...
Mme Payette: Ça, c'est encore niaiseux, là, ce
n'est pas de ma faute. Cela s'adonne comme cela.
M. Fontaine: Ecoutez, il est tombé quatre grains de neige.
Je suis parti de mon comté hier et j'ai fait 90 milles à 70
milles l'heure sur la Transcanadienne et puis...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est trop.
M. Fontaine: II n'y a pas de problème. Il n'y avait pas de
neige sur la Transcanadienne.
Mme Payette: Est-ce que votre ceinture était
attachée?
M. Fontaine: Oui, madame.
M. Raynauld: Quand c'est pour dépenser l'argent des
autres, c'est toujours niaiseux.
M. Saint-Germain: Dépenser l'argent des autres, ce n'est
pas grave, c'est l'argent des contribuables, ce n'est pas bien grave. Nous
avons siégé jusqu'à dix heures, mais c'est nous qui sommes
les niaiseux.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre!
M. Fontaine: On ne nous fera pas croire qu'une régie
d'Etat va être mieux administrée que l'entreprise privée,
ce n'est pas vrai, et jamais la population ne va pouvoir coller à ce que
vous essayez de lui faire croire. Donnez-nous donc la ventilation de vos
chiffres pour qu'on sache où vous allez aller chercher ces 6%
d'administration et on va s'apercevoir que, dans deux ou trois ans,
après que vous aurez découvert vos fous cachés, dont on a
commencé à parler hier, on va s'apercevoir que vos 6% sont bien
loin.
Ils vont peut-être se rapprocher de l'administration de la
Régie de l'assurance-récolte, dont le député
d'Outremont a fait mention tout à l'heure. C'est ce que j'avais à
dire là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys. Il n'est pas là... M. le
député...
M. Saint-Germain: Le voilà, M. le Président. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, on vous attend.
Le Président (M. Bertrand): Le député
d'Outremont ne pourra pas dire que je n'ai pas fait preuve de
magnanimité en attendant quelques secondes pour que le
député de Marguerite-Bourgeoys prenne son droit de parole.
M. Lalonde: M. le Président, je m'excuse, je pensais le
député de Nicolet-Yamaska un peu plus bavard. J'ai seulement
quelques remarques a ce stade-ci, M. le Président. C'est la
première fois que je vois le gouvernement étaler ses intentions
de façon aussi franche depuis un an. En fait, ie pense qu'il vient de
montrer son véritable visage et il n'est pas nécessairement
beau.
M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas gentil,
ça.
M. Lalonde: Je parle du visage du gouvernement. Ne prenez pas
ça individuellement.
Mme Payette: Pas un visage à deux faces, en tout cas.
M. Lalonde: Si j'ai parlé de visage, c'est parce que je
n'ai pas voulu dire autre chose que le gouvernement vient de montrer; elles ne
sont pas belles non plus.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, on n'est pas encore rendu au préjudice
esthétique.
M. Lalonde: C'était touchant d'entendre le
député de Jonquière hier, faire son acte de foi au
gouvernement, s'affranchir du Barreau; ça, il faut le faire. Tous les
membres du Barreau qui ont le malheur d'être membres du Barreau, tout
d'abord que voulez-vous, ça arrive à des gens comme
ça mais qui veulent quand même faire acte
d'honnêteté et d'intégrité, doivent au
départ, dire qu'ils sont membres du Barreau, parce que ça nous
est arrivé à un moment donné... erreur de jeunesse. Mais
au fond, c'est ce bon gouvernement qui est le meilleur. Parce que le ministre
avait déjà dit que les membres du Barreau étaient des
minables, et il faut quand même être consistant.
Le député de Jonquière l'a fait hier soir,
solennellement. D'ailleurs, il l'avait fait dans les journaux, un acte de
foi.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne l'ai pas lu. C'est en
réponse à M. Bergeron, c'est ça?
M. Lalonde: Oui, c'est ça. Cela aussi, c'est touchant.
Je n'ai pas l'intention de m'affranchir du Barreau, M. le
Président. Je vais vous dire que je n'ai aucun intérêt dans
l'assurance automobile. Malheureusement, ma pratique de droit est
terminée depuis six ans. J'essaie, à la petite journée, de
ce temps-là, mais les activités politiques, naturellement, ont
priorité. Je n'ai pas eu l'occasion de faire d'assurance automobile dans
ma pratique. Ce que j'en sais, c'est comme tout autre député
autour de cette table.
C'est à ce titre que je vais essayer de vous dire ce que je pense
de l'article 3. J'en sais assez toutefois pour savoir qu'il faut changer le
système actuel, qu'il faut le rendre plus juste, qu'il faut raccourcir
les délais d'indemnisation, et que l'on doive même, malgré
certaines objections de principe que des gens ont exprimées, et qui sont
valables, qu'on doive, à cause du phénomène automobile
dans notre société moderne, essayer d'éliminer un concept
juridique qui est fondamental dans notre droit: la faute, le sens de la
responsabilité. J'aime mieux la responsabilité que la faute; la
faute c'est quelque chose de plus relatif et de plus négatif.
Je suis d'accord avec cette élimination de la
responsabilité, du concept de responsabilité en ce qui concerne
les dommages causés par les automobiles, ou à l'occasion
d'accidents d'automobiles. Justement, c'est devenu un problème
d'appliquer le concept de responsabilité dans nos tribunaux vu le volume
des causes et les délais qui s'ensuivent, les injustices quant à
l'indemnisation.
L'article 3 élimine la responsabilité et, dans ce sens, je
suis d'accord. L'article 3 a deux modalités, toutefois, inacceptables
et, quand j'appelle ça modalité, je ne veux pas en appeler de
votre décision d'hier.
Disons que c'est une modalité de principe, ou un principe de
modalité. Mettez-le comme vous voulez. C'est de faire administrer ce
régime par une régie d'Etat, premièrement, et,
deuxièmement,
d'empêcher on le constate en lisant l'article 3
lui-même d'éliminer toute responsabilité,
au-delà même de l'indemnisation prévue par les autres
articles. L'article 4 est plus exprès là-dessus, mais je pense
qu'on peut inférer de l'article 3 qu'aucune réclamation qui
aurait recours au concept juridique de là responsabilité ne
pourrait être reçue par nos cours de justice, même
au-delà du régime de base.
Je n'ai malheureusement pas le temps d'aller plus avant en ce qui
concerne l'entreprise privée par rapport à la régie
publique. Je pense que les remarques du député d'Outremont, en
particulier, sont extrêmement éloquentes là-dessus. Il est
rare qu'on ait eu l'occasion de prendre connaissance de l'expérience des
diverses sociétés en ce qui concerne le recours à l'Etat,
la prise en charge par l'Etat. Je crois que ce n'est pas ce que veulent les
citoyens du Quebec. Je crois, au contraire, que la grande majorité des
citoyens veulent conserver, dans la mesure du possible, leur autonomie
individuelle, ne veulent pas être pris en charge par l'Etat, sauf
lorsqu'il n'y a pas de choix.
On n'a pas fait, dans l'assurance-maladie... Ce n'est pas que le Parti
libéral, en soi, soit viscéralement contre toute intervention de
l'Etat. On en a plusieurs exemples: l'électricité, on l'a
mentionnée hier, la sidérurgie; l'intervention de l'Etat dans les
activités professionnelles, c'est une autre réforme du Parti
libéral, d'un gouvernement libéral. Il y a aussi l'Office des
professions, l'assurance-maladie. Ce sont des initiatives dont certaines sont
moins heureuses et dont on a peut-être, après coup,
déploré pas celles que j'ai nommées, mais d'autres
initiatives, la Société générale de financement,
entre autres dont on n'a peut-être jamais
démontré...
Mme Payette: Vous êtes d'accord avec cela, M. le
député d'Outremont?
M. Lalonde: ... la nécessité.
Mme Payette: Je pense que le député
d'Outremont...
M. Lalonde: Est-ce que le chef de cabinet du ministre a des
interventions à faire?
Mme Payette: Non. Le ministre a une intervention si vous le lui
permettez.
M. Lalonde: Je le vois gesticuler en arrière. Est-ce qu'il
a des choses à dire?
Mme Payette: Si cela vous dérange, dans cette salle-ci, on
pourrait retourner là-bas.
M. Lalonde: Cela ne me dérange pas. Le gouvernement me
dérange 24 heures par jour, partout. Que ce soit ici ou ailleurs, cela
ne fait pas de différence.
Mme Payette: Vous n'étiez pas conscient des
réactions du député d'Outremont pendant que vous parliez,
ce que nous, on est en mesure de voir, parce qu'on est en face.
Le Président (M. Bertrand): Restez-en sur les principes et
non pas sur les modalités, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je dis que, lorsque l'Etat doit intervenir, lorsqu'il
n'y a pas de choix, à ce moment-là, on a prouvé dans le
passé que nous n'étions pas viscéralement contre cette
intervention. Ce n'est pas une question d'idéologie, comme cela semble
l'être pour les gens d'en face.
On n'a pas fait la démonstration que l'Etat doive intervenir
comme administrateur de ce régime. L'Etat devait intervenir pour
établir un régime plus juste. On verra dans quelle mesure il a
réussi quand on étudiera les autres articles. Mais que l'Etat
doive intervenir pour l'administrer, la démonstration n'a pas
été faite.
Nous allons voir, dans les articles qui suivent, jusqu'à quel
point le choix du gouvernement d'éliminer tout recours possible à
la responsabilité au-delà du régime de base crée
des situations abracadabrantes, anacroniques et, dans plusieurs cas, injustes,
socialement injustes. C'est pour éviter ces injustices que j'aurais une
motion d'amendement à proposer à l'article 3.
Il s'agirait d'ajouter après le mot "quiconque", qui est le
dernier mot de l'article 3, les mots "sauf pour les dommages excédant
les indemnités prévues dans la présente loi", exprimant
bien clairement que le principe est sauf, naturellement. C'est un régime
sans égard à la faute, sans égard à la
responsabilité pour les indemnités de base, mais au-delà
des indemnités de base, quiconque croit ne pas être
indemnisé suffisamment par le régime aura le droit de recourir
à la responsabilité, au concept de responsabilité pour
l'excédent. Je vous laisse en prendre connaissance, M. le
Président.
M. Paquette: M. le Président, sur la
recevabilité.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Sur la recevabilité, je pense que
l'amendement que nous propose le député de Marguerite-Bourgeoys
va à l'encontre du principe du projet de loi, tel qu'adopté en
deuxième lecture, qui établit un système de
non-responsabilité totale je pense que cela fait partie du
principe dans le domaine des dommages corporels.
L'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys aurait
tendance à nous ramener un concept de faute au-delà de certaines
limites. Je pense que, clairement, cela va à l'encontre du principe, tel
que voté en deuxième lecture.
M. Raynauld: Sur la recevabilité, M. le Président.
Contrairement à ce que vient de dire le député de
Rosemont, je suis persuadé que, dans ce cas-ci, il est impossible
d'invoquer le fait que cet amendement contrevient au principe même de
la
loi. Il est clair que, quand on affirme un principe comme celui de
l'abandon du principe de la responsabilité, il est tout à fait
normal et acceptable de vouloir qualifier l'application de ce principe.
Dans ce cas-ci, non seulement on ne contredit pas le principe, mais on
laisse le principe de non-responsabilité pour le régime de base.
Par conséquent, il est bien clair que cela ne le contredit pas puisqu'on
le laisse, mais on propose une modalité qui en limite l'application.
C'est, je pense, la définition même d'un amendement: limiter
l'application d'un principe général. L'amendement dit qu'on
reviendra au principe de responsabilité pour les dommages qui
excèdent le régime de base prévu dans la présente
loi. Par conséquent, je pense que cet amendement est tout à fait
receva-ble. J'en suis vraiment profondément convaincu.
M. Saint-Germain: M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, un porte-parole
par formation politique. M. le député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Je pense que l'amendement dont je n'ai pas copie,
mais dont j'ai pu prendre connaissance, serait recevable parce que le principe
de "no fault", qui a été adopté en deuxième
lecture, est, à mon avis, adopté en regard des indemnités
qui sont prévues dans le projet de loi. C'est-à-dire qu'on a
adopté le "no fault" dans le projet de loi 67 pour les indemnités
prévues dans le projet de loi. Il n'y a rien qui nous empêche,
actuellement, de modifier cet article pour dire que ce principe de "no fault",
prévu dans les articles du projet de loi pour les indemnités
prévues, ne s'applique pas en dehors de ces indemnités et que la
question de responsabilité, la notion de responsabilité demeure
quant au surplus. La philosophie de base, adoptée lors de la
deuxième lecture du projet de loi 67, est respectée, le principe
n'étant aucunement touché.
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): Non, je m'excuse.
M. Paquette: Non, il n'y a pas moyen.
M. Vaillancourt (Jonquière): On s'en doutait.
M. Paquette: Un gars peut s'essayer.
Le Président (M. Bertrand): Là-dessus, je m'excuse,
j'ai pu paraître m'informer auprès du gouvernement de l'attitude
qui était la sienne sur l'ensemble de ces principes, je voulais
uniquement avoir certains avis purement juridiques du conseiller du
gouvernement dans cette matière pour bien comprendre le sens de
l'article 4...
Une Voix: ...
Le Président (M. Bertrand): Non, je sais, mais j'ai besoin
de m'en inspirer pour rendre une décision sur l'article 3.
M. Fontaine: Chose que vous avez dite hier soir qu'on ne devait
pas faire.
Le Président (M. Bertrand): Attention, je pense bien que
vous n'empêcherez pas la présidence, pour rendre une
décision sur l'article 3, de regarder immédiatement s'il n'y a
pas un article qui suit et qui traite spécifiquement de cette question
et qui pourrait m'amener à juger que la motion d'amendement
présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys est
prématurée.
Sur l'article 3, je crois que j'ai bien indiqué hier dans la
décision que j'ai rendue sur deux motions d'amendement
présentées par le député de Beauce-Sud, que deux
principes m'apparaissaient intouchables, dans le cadre de l'étude,
article par article, du projet de loi 67. Ces principes sont l'instauration
d'un régime public d'assurance automobile, et donc création d'une
régie, et deuxièmement, la notion de "no fault" ou d'absence de
responsabilité.
Ces deux principes ont été votés en deuxième
lecture et ne peuvent faire l'objet d'amendements, sauf que la motion
d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys signifie que pour
les indemnités autres que celles prévues dans la présente
loi, il pourrait y avoir une notion de responsabilité qui pourrait
entrer en ligne de compte.
Or, je considère que dans l'article 3, le moins que l'on puisse
dire, c'est qu'une telle motion d'amendement serait prématurée.
Cela n'indique pas, par contre, qu'au moment de l'étude de l'article 4,
je pourrais pour autant juger recevable une telle motion d'amendement, parce
que non seulement et là, encore une fois, c'est la raison pour
laquelle j'ai demandé quelques avis du conseiller juridique il y
a un principe de non-responsabilité pour le régime public
d'assurance automobile, mais ce principe de non-responsabilité est aussi
un principe pour l'ensemble de la couverture qu'un individu pourrait prendre et
qui serait au-delà des indemnités prévues par le
régime public d'assurance automobile.
En d'autres mots, autant il y a un principe qui a été
discuté en deuxième lecture et qui touchait à la
création, à l'instauration d'un régime public d'assurance
automobile, autant il y avait aussi, et je l'ai indiqué au
député de Beauce-Sud hier, car il m'a posé la question
directement: Est-ce que la notion de non-responsabilité fait aussi
partie des principes de la discussion en deuxième lecture? J'ai dit oui.
Il s'agissait pour moi de savoir si cette notion de non-responsabilité
ne touchait que le régime public ou si elle touchait l'ensemble du
régime de l'assurance automobile, pour les indemnités telles
qu'elles sont décrites dans le projet de loi no 67, et aussi pour une
couverture supplémentaire qu'un individu serait libre de prendre
à l'extérieur du régime public d'assurance automobile.
Donc, je rends immédiatement la décision à deux
niveaux: au premier niveau, je juge la motion prématurée à
l'article 3, mais j'indique immédiatement que même si je ne
l'avais pas jugée prématurée à l'article 3 et si
elle était soumise à l'article 4, je la jugerais non recevable
parce que portant atteinte à un principe qui a été
discuté en
deuxième lecture et qui n'affecte pas seulement la couverture
publique, mais aussi la couverture privée du régime d'assurance
automobile.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): Oui.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... sur la motion
principale.
Le Président (M. Bertrand): Sur la motion principale, la
parole est au député de Marguerite-Bourgeoys. De toute
façon, il a maintenant quitté et m'a signifié qu'il ne
serait pas de retour à cette séance.
Le député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense qu'il me reste cinq minutes. Je vais essayer de faire vite.
Je voudrais tout d'abord relever certaines affirmations du
député de Jacques-Cartier quant à la protection des
consommateurs. Je suis bien d'accord, M. le Président, et j'aimerais que
le député de Jacques-Cartier m'écoute... Je suis bien
d'accord, M. le Président, que tous les Québécois
devraient être capables de disposer de leur revenu comme ils l'entendent,
et je pense que cela fait partie de notre concept de liberté.
D'autre part, M. le Président, je pense qu'il est du devoir de
tout gouvernement de protéger les consommateurs qui habitent le pays.
C'est pour cela que les gouvernements antérieurs, d'ailleurs, à
qui je dois rendre hommage, ont créé un ministère qui
s'appelle le ministère, entre autres, des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières, mais où
l'élément "consommateurs" est d'une importance vitale. C'est pour
ça également que les gouvernements antérieurs ont fait une
loi qui s'appelle la Loi de la protection du consommateur et que nous avons un
office qui s'appelle l'Office de la protection du consommateur avec un
président qui occupe cette fonction à temps plein. C'est pour
ça également que Mme le ministre a déjà
annoncé son intention avouée de s'en aller vers un code complet
de protection du consommateur et, d'autre part, c'est également dans
cette optique que le gouvernement a déposé, en première
lecture, une loi qui s'appelle Loi sur le recours collectif et qui a pour but
également de protéger le consommateur.
Je pense que même si tous les consommateurs
québécois devaient, en principe, disposer de leur revenu comme
ils l'entendent, ces lois n'ont aucunement l'intention de brimer leur
liberté, mais, au contraire, de les protéger dans l'exercice de
cette faculté qu'est la consommation. Je pense que le
député de Jacques-Cartier admettra que la majorité des
Québécois est certainement d'accord avec tout gouvernement qui
tente de protéger, d'une façon ou d'une autre, soit par le "class
action", soit par l'aide juridique, soit par un code du consommateur, soit par
un Office de la protection du consommateur, les droits des consommateurs
québécois qui habitent le pays.
M. le Président, j'ai été également heureux
de constater que deux collègues et confrères, le
député de Marguerite-Bourgeoys et le député de
Nicolet-Yamaska, se sont, comme moi, affranchis du Barreau et ont fait une
profession de foi envers la non-responsabilité, et je comprends
également que leur réserve provient surtout de la
création...
M. Fontaine: Le Barreau aussi. M. Raynauld: Le Barreau
aussi.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je suis encore très
heureux de constater que le Barreau l'a fait; donc, nous sommes unanimes
... et que leur réserve provient de la création de la
régie d'Etat et non pas de la conception ou du concept de
l'indemnisation sans égard à la faute.
M. Saint-Germain: II y a le droit de recours aussi qui est
important.
M. Fontaine: L'appel.
M. Saint-Germain: Le droit d'appel.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
depuis le début on parle beaucoup des indemnités qui seront
versées aux victimes, mais ce qu'on oublie de dire, c'est que, dans le
système actuel, il y a énormément de gens qui ne sont pas
du tout indemnisés, et je voudrais répéter ici une
affirmation qui vient du député de Beauce-Sud à l'effet
que les gens vont payer une prime égale, mais que, d'autre part, ils ne
recevront pas des bénéfices égaux. Je pense que Mme le
ministre a très clairement établi tout à l'heure
qu'environ 30% de ceux qui en recevront, selon les projections des
indemnisations de la Régie de l'assurance automobile, sont des passagers
ou des piétons qui n'auront aucun sou à verser en vertu de ce
régime et qui seront pourtant protégés. Je pense qu'il est
bon de souligner cet élément, qui est extrêmement
important.
D'autre part, on a parlé également du coût
d'administration du régime de la Régie de l'assurance automobile.
M. De Coster, que les amis d'en face connaissent très bien ou, du moins,
certains, est un homme sérieux qui, avec l'aide de collaborateurs et de
personnes compétentes, a établi, selon des critères qu'il
nous a expliqués hier, le coût d'administration du régime
à environ 6%. Le député d'Outremont a fait grand
état du coût d'administration de la Régie de
l'assurance-récolte, et je ne me rappelle pas du pourcentage dont il a
fait état à ce moment-là...
M. Raynauld: 300%.
M. Vaillancourt (Jonquière):... mais il faudrait quand
même rappeler que la Régie de l'assurance-maladie, selon les
derniers chiffres, fonctionne avec un taux d'administration de 6%, que la
Régie des rentes du Québec fonctionne avec un coût
d'administration d'environ 3% et que la Commission des accidents du travail
fonctionne avec un coût d'administration de 8%.
Je pense qu'il est bon de donner quand même ces trois autres
exemples pour démontrer et je ne mets pas en doute les chiffres
du député d'Outremont que la Régie de
l'assurance-récolte est peut-être le seul ou l'un des seuls
organismes publics à fonctionner à un taux d'administration aussi
grand et qu'au moins trois autres, en tout cas...
M. Raynauld: C'est le seul organisme d'assurance.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... nous ont
démontré, par le passé, qu'ils pouvaient fonctionner
à de meilleurs taux.
En terminant, M. le Président, j'aurais aimé parler du
sujet qui a été apporté par l'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys, mais comme cet amendement a
été déclaré irrecevable, j'en fais donc
abstraction. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): Bien, M. le
député...
M. Vaillancourt (Jonquière): En terminant, M. le
Président... Je pense qu'il me reste une minute...
Le Président (M. Bertrand): Je pense qu'il ne vous en
reste plus, M. le député de Jonquière, mais, du
consentement unanime...
M. Vaillancourt (Jonquière): Une minute, M. le
Président, tout simplement pour répondre au député
d'Outremont sur la concurrence.
Le Président (M. Bertrand): Seulement si j'ai le
consentement unanime, M. le député de Jonquière.
M. Saint-Germain: Oh! vous savez, on n'en est pas à une
minute près!
M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai ici une annonce qui a
paru dans le journal Le Nouvelliste, en date du samedi 3 décembre 1977,
de la part de la compagnie Allstate. Au dernier paragraphe de l'annonce en
question on lit ceci: "II serait bon de vous rappeler qu'Allstate vous fournira
encore, par la suite, un excellent service à des taux très
concurrentiels. De fait, rares sont ceux qui, partout au Québec,
obtiendront de meilleurs taux de primes pour leur assurance automobile. En
d'autres mots, vous serez toujours entre bonnes mains. Avec Allstate, vous
êtes entre bonnes mains."
M. le Président, je pense que cette annonce, de la part d'une
compagnie d'assurances qui sait que le projet de loi 67 sera
éventuellement adopté, prouve que la concurrence existe encore
entre les différentes compagnies d'assurances privées en ce qui
concerne le dommage matériel et que certaines compagnies se paient
même l'initiative d'annonces dans les journaux du Québec.
Une Voix: On n'a jamais dit le contraire.
Le Président (M. Bertrand): Est-ce que l'article...
M. le député de Rosemont.
M. Paquette: J'aimerais simplement ajouter que, en ce qui
concerne le programme d'assurance-récolte, on a fait faire une petite
recherche et le député d'Outremont a raison pour l'un des deux
programmes d'assurance-récolte, parce qu'il y a deux programmes
d'assurance-récolte. L'un concerne les cultures industrielles
celui-là est bien rodé, il est en opération depuis quelque
temps qui fonctionne à des frais d'administration de 13%
c'est quand même pas mal moins que 34% dans l'assurance automobile. Il y
a un deuxième programme qui touche les grandes cultures et qui est un
programme de $1.4 million, et celui-là opère à 103%
là-dessus vous avez raison. Mais on nous dit que c'est un programme en
voie de rodage. Il y a eu des difficultés. On a dû établir
un contrôle plus grand à cause de l'accessibilité et ce
programme est en train d'être complètement révisé,
il sera remplacé par un autre.
Je pense que cet exemple... il ne faudrait pas dire que ce sont les
programmes de l'assurance-récolte; il y en a un qui fonctionne à
13% et il y a un autre qui est en train d'être complètement
remplacé par autre chose. C'est à peu près le seul
exemple, je pense, que le député d'Outremont peut nous donner.
Cela montre que dans l'entreprise publique aussi il est possible, quand des
programmes fonctionnent mal, de les remplacer. Quand vous avez dit qu'un
monopole public ne se brise pas, vous en avez un là qui fonctionne
à 103% et que le gouvernement a décidé de remplacer par
autre chose parce que ça ne fonctionne pas. Par contre, il y en a un qui
fonctionne à 13%.
Il me reste encore un peu de temps, M. le Président. J'aimerais
répondre à certains arguments du député d'Outremont
concernant les monopoles publics. Il a dit qu'il y avait certains avantages,
qu'un monopole public n'avait pas de profits. Il y en a d'autres
également que j'avais mentionnés qui étaient une
réduction du coût en regard de la concurrence. Par exemple, quand
des compagnies privées sont en compétition, comme dans le domaine
de l'assurance automobile, elles sont obligées de maintenir du personnel
qui va aller chercher les primes et qui va leur permettre d'attirer vers elles
les clients. C'est ce que nous ont expliqué les experts en sinistres;
ils nous ont dit qu'une bonne partie de leur travail consistait justement
à faire de la publicité pour les compagnies d'assurances pour
lesquelles ils travaillent.
Il n'y a personne qui nous ait démontré... et c'est
justement l'un des problèmes qu'on a: pour le matériel, si on
voulait mettre une régie publique, on serait obligé de
réduire le personnel. Cela prouve qu'il y a une certaine
inefficacité en raison de la concurrence. On peut décider d'en
assumer le coût, dans certains cas, mais, dans d'autres cas, ça
devient inacceptable.
Lorsqu'il nous parle des files d'attente et du rationnement il a
donné l'exemple de
l'assurance-maladie, je lui donne raison, ça ne fonctionne pas
très bien l'assurance-maladie, il y a des réformes à faire
de ce côté...
Par contre, j'aimerais qu'il nous dise à quoi correspondent les
files d'attente et le rationnement dans le domaine de
l'électricité, qui est administrée par une régie
d'Etat qui est l'Hydro-Québec. J'aimerais qu'il nous dise ce que veulent
dire des files d'attente et le rationnement dans le régime qu'on veut
établir dans l'assurance automobile. Je pense que les gens vont avoir un
service beaucoup plus grand et vont attendre beaucoup moins longtemps, avec le
régime public tel qu'il est là, qu'avec le régime
privé qu'on a actuellement. Quand il parle de conflits
d'intérêts, que le gouvernement pourrait parfois être mis en
conflit d'intérêts, c'est un mot qui n'est absolument pas
approprié. Il a parlé d'un conflit d'intérêts entre
l'efficacité et l'efficacité gouvernementale qui devrait
être améliorée à certains moments et les exigences
propres au régime. Justement, il y a avantage à ce que ces
divergences qui peuvent survenir soient gérées par la même
autorité parce que ce sont tous des objectifs valables et qu'il faut
équilibrer.
Je pense qu'on a de meilleures garanties avec une régie d'Etat.
Je pourrais reprendre chacun des autres arguments. Je n'ai pas le temps.
Finalement, je dirai que, quand le député de Jacques-Cartier dit
que les gens ne veulent pas l'étatisation, cela dépend où.
Dans le domaine de l'assurance automobile, les gens veulent
l'étatisation. J'ai fait une tournée dans mon comté, j'ai
fait des assemblées avec des citoyens qui ne sont pas des
péquistes, j'en ai fait une la semaine passée et pas une personne
ne m'a amené les objections que l'Opposition nous sert. Les gens disent:
Ce qu'on a avec les compagnies privées, ce n'est pas un vrai
régime d'assurance parce que, quand on a la malchance d'avoir un
accident, on le paie trois ans après. Ils ne demandent que cela, la
prise en charge par l'Etat dans le domaine de l'assurance automobile.
Alors, M. le Président, également, pour terminer, quand le
député de Beauce-Sud nous parle des coûts cachés,
des $9 millions qui sont payés en taxes par les compagnies
privées, ces $9 millions sont basés sur le volume d'affaires des
compagnies. Etant donné que l'assurance sera désormais
obligatoire, le chiffre d'affaires des compagnies privées va se
maintenir à peu près au niveau actuel et il n'y a pas de
coûts cachés du tout. Quant au supposé coût
caché lié à la taxe de $0.01 sur l'essence, il est dans le
document rendu public par le ministre. Ce n'est pas du tout caché.
J'aimerais savoir si l'Opposition a d'autres coûts cachés en
tête, mais, jusqu'à maintenant, elle n'a pas réussi
à en trouver.
M. Raynauld: $40 millions.
M. Paquette: Les $40 millions sont basés sur les deux
facteurs que je viens de mentionner.
M. Raynauld: Un manque à gagner.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre! Est-ce que
l'article 3 serait adopté?
M. Saint-Germain: M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: J'aimerais dire qu'après avoir
écouté le député d'Outremont, il nous
apparaît tout à fait évident qu'on n'a pas fait la preuve,
au niveau du gouvernement, qu'un régime d'Etat serait plus efficace
qu'un régime privé.
Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, M. le
député de Jacques-Cartier, je veux simplement vous indiquer qu'il
vous reste deux minutes à votre droit de parole.
M. Saint-Germain: Je n'ai presque pas parlé.
Le Président (M. Bertrand): Hier, de 8 h 40 à 8 h
53 et, ce matin, de 10 h 57 à 11 h 2.
M. Saint-Germain: Vous êtes d'une
sévérité, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): On me demande de faire mon
travail, j'essaie de le faire le mieux possible.
M. Saint-Germain: Alors, si on reprend, je dis,
premièrement, qu'il n'était absolument pas nécessaire
d'avoir une régie d'Etat pour rendre, par exemple, l'assurance
obligatoire. Ce n'est absolument pas nécessaire d'avoir une régie
d'Etat pour avoir un régime de "no fault". Les coûts
d'administration qu'on nous a donnés, je suis persuadé qu'ils
seront très rapidement dépassés et je reste
persuadé qu'en changeant aussi profondément, comme on le fait
actuellement, le contexte légal dans lequel évoluent les
compagnies privées, elles aussi, si elles avaient été
responsables de l'administration de cette loi, auraient pu abaisser leurs frais
énormément. Dans les compagnies privées, actuellement, les
frais de règlement sont de 13,1%. Il me semble évident qu'en
instituant un régime "no fault", du moins pour un régime de base,
les frais d'avocat et les frais de règlement baisseraient
énormément. Ces frais pourraient baisser, qu'il y ait
étatisation ou qu'il n'y en ait pas. D'ailleurs, bien que le ministre se
réfère souvent à la commission Gauvin, le régime
que nous avons actuellement n'a jamais reçu l'appui du rapport Gauvin.
Les études du rapport Gauvin n'ont pas mené à une telle
conclusion parce que M. Gauvin, évidemment, dans son rapport, mettait
l'étatisation en dernier lieu.
En confiant l'indemnisation des victimes à la Commission des
accidents du travail...
M. Paquette: ... soit accepté par le gouvernement.
M. Saint-Germain: ... c'est entendu qu'il y a là... Vu que
la Commission des accidents du travail
est déjà formée, qu'elle a déjà de
l'expérience, ça va certainement faire baisser les coûts
d'administration davantage que si on est obligé de la reformer
complètement, comme on va être obligé d'établir la
régie de toute pièce.
Mais ça ne diminuera pas nécessairement les coûts
pour les citoyens, parce qu'il va y avoir dédoublement. On sait que
lorsqu'il y a dommages matériels ou du moins, lorsqu'il y a dommages
corporels, habituellement, il y a dommages matériels. Celui qui est
victime, dans le contexte actuel ou dans un contexte privé, ferait appel
au même assureur pour être dédommagé, tandis qu'avec
le système actuel, même si les dommages matériels et
corporels sont causés par le même accident, la victime va
être obligée de faire appel à une double administration et
ça va certainement concourir à augmenter les coûts.
Vous avez aussi les courtiers qui ont 11,3% de la valeur de la prime
comme rémunération. C'est entendu qu'actuellement, en les faisant
disparaître tout de suite, il apparaît qu'il va y avoir 11,3% de
réduction dans l'administration. Mais nécessairement, on va
être obligé, si on ne veut pas diminuer la qualité des
services rendus aux victimes... Les gens qui rendent ces services actuellement
vont être obligés d'être remplacés par d'autres
personnes qui rendront les mêmes services.
Si ce n'est pas la régie qui le fait, c'est la victime qui aura
la responsabilité d'engager, soit un avocat ou un autre conseiller pour
pouvoir obtenir justice dans tout ce dédale de technocrates et de
fonctionnaires qu'il va y avoir à la régie. Cela me semble tout
à fait évident. D'ailleurs, on l'a senti au gouvernement, parce
qu'il y a des pourparlers et on considère qu'il y aurait peut-être
avantage à conserver les services des courtiers lors de l'accident.
Le Président (M. Bertrand): Je vous demanderais de
conclure, s'il vous plaît.
M. Saint-Germain: Mais il reste qu'il y aura des coûts
d'administration attachés au dédoublement de la perception des
primes. Cela me semble absolument évident. La régie, en
éliminant les courtiers, ne pourra certainement pas diminuer de 11,3%
les frais d'administration de son régime. Ensuite, cela n'a pas
été tellement dit, mais il me semble évident qu'il y aura
un transfert de coûts au point de vue administration, de la régie
aux assureurs privés. Si on diminue de 35%, dans une police, le
coût de la prime, en enlevant la protection au point de vue dommages
corporels, il reste qu'on oblige les assureurs privés actuellement
à modifier considérablement leur police, à
réimprimer leur police. On les oblige à établir un nouveau
plan statistique, il faut nécessairement qu'ils modifient leur
système de tarification...
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement,
M. le Président, je suis parti à environ 11 h 43 et il restait
deux minutes au député de Jacques-Cartier, je constate en
arrivant à 11 h 48 qu'il a encore la parole.
Le Président (M. Bertrand): J'ai eu la largesse
extensible, j'ai demandé au député de Jacques-Cartier de
conclure.
M. Saint-Germain: C'est dommage, nous avons laissé au
député d'Outremont, de Rosemont la liberté de
parler...
Le Président (M. Bertrand): J'ai présumé...
M. Vaillancourt (Jonquière): De Jonquière. M.
Saint-Germain: De Jonquière.
Le Président (M. Bertrand): J'ai présumé
qu'il y aurait consentement unanime pour dépasser de quelques minutes,
M. le député de Jacques-Cartier. Mais à ce moment-ci, je
vous demanderais de conclure.
M. Saint-Germain: Je vais essayer d'accélérer, M.
le Président.
Le Président (M. Bertrand): Non, je vous demanderais
même de conclure. Et comme je ne parle pas au ministre de l'Education, je
pense que vous allez être capable d'y arriver.
M. Saint-Germain: II y a cette taxe de 2% concernant les
blessures aussi qu'on fait disparaître au niveau de la régie. Ce
sont certainement des revenus de moins que la régie recevra. En plus, on
continue de l'imposer à l'industrie privée qui assurera les
dommages matériels.
Pour conclure, M. le Président, si j'avais le temps de
disséquer les coûts d'administration des compagnies
privées, on verrait que, même en ce qui regarde les dommages
matériels, en faisant disparaître le droit de subrogation, en
ayant la compensation directe, en faisant disparaître cette
procédure d'évaluation des dommages, en ayant double emploi
je veux dire que chaque compagnie d'assurances est obligée
d'avoir ses propres ajusteurs et ses propres estimateurs on se rendrait
compte qu'on peut faire baisser énormément le coût
d'administration des assureurs privés, en changeant le contexte
légal dans lequel il évolue présentement, qui est
absolument inacceptable.
Les gouvernements passés, quels qu'ils soient, auraient dû
modifier le contexte légal et, en plus, établir l'assurance
obligatoire beaucoup plus tôt qu'aujourd'hui. Si on ne l'a pas fait,
c'est que les gouvernements ont voulu faire comme le gouvernement actuel,
prendre le problème globalement, au lieu de... Par exemple on aurait pu,
par une simple législation, rendre l'assurance obligatoire à peu
de frais et déjà on aurait amélioré le
système actuel d'une façon marquée.
Le Président (M. Bertrand): Bien. L'article 3 sera-t-il
adopté? M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, évidemment, lorsqu'on
tente de découvrir les conséquences de
l'application de l'article 3, on ne peut faire autrement que de
réfléchir sur la façon dont la régie va fonctionner
et de tenter de prévoir des mécanismes, des moyens, des
structures qu'elle devra mettre en place en vue de répondre à
l'indemnisation, la plus rapide possible, face aux victimes d'accidents
d'automobiles.
J'ai entendu les commentaires de différents députés
à cette table au cours de la matinée. Cela va d'un pessimisme
très grand d'un côté, à un optimisme des plus
émouvants de l'autre côté de cette table. Je crois que la
réalité va être différente, qu'elle va probablement
se situer au milieu ou vers le centre de ces deux positions, soit un optimisme
extrême ou plutôt le défaitisme, devant la
possibilité d'une régie publique, ses coûts
d'administration et, enfin, tous les éléments qui ont fait
l'objet du débat.
J'ai même entendu le député de Jonquière
invoquer des exemples: entre autres il a cité la compagnie Allstate.
Cette compagnie fondamentalement québécoise, qui fonctionne
à partir de capitaux essentiellement québécois, qui fait
l'objet de citations de la part du député de Jonquière
comme étant le modèle d'une entreprise qui veut
s'intégrer, qui développe une publicité face à la
mise en application du régime public.
Mme Payette: M. le Président, si le député
de Montmagny-L'Islet le permet, je pense que cela n'a pas du tout
été cité dans le sens donné par le
député de Montmagny-L'Islet. Cela a été cité
dans le sens d'une compagnie qui réagit correctement à la
réforme et qui sait qu'à compter du 1er mars, il faut qu'elle
prévienne sa clientèle du changement. C'est simplement dans ce
sens.
M. Giasson: Pourquoi avoir utilisé le nom de la compagnie
Allstate...
Mme Payette: Parce que c'est la seule...
M. Giasson: ... lorsqu'on sait fort bien que tous les assureurs
au Québec vont travailler de concert avec l'Etat en vue de
s'intégrer dans...
Mme Payette: Parce que c'est la seule qui s'est manifestée
actuellement dans une publicité faite ouvertement.
M. Giasson: On sait pour quelles raisons. Mme Payette: Oui, c'est
bien évident.
M. Giasson: C'était pour tenter, comme elle l'a fait dans
le passé...
Mme Payette: Le Bureau des assureurs du Canada devrait
peut-être faire cela au lieu de continuer à faire sa fausse
publicité, cependant.
M. Saint-Germain: On vit dans une démocratie...
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre!
M. Giasson: Le Bureau de l'assurance du Canada va fonctionner
à l'intérieur des lois que la province de Québec va
adopter, Mme le ministre.
Mme Payette: Ce qui ne les empêche pas actuellement de
dépenser l'argent de leurs clients pour faire une fausse
publicité.
M. Saint-Germain: C'est une question d'estimation.
M. Giasson: C'est votre point de vue. Il faudrait encore que je
vois toute la publicité faite par le BAC, le Bureau d'assurance du
Canada, pour établir si vraiment la publicité est aussi fausse
qu'on le dit présentement. En tout cas! Cela m'amusait quand même
de voir le député de Jonquière faire appel à une
compagnie telle que...
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne faisais pas appel, je
donnais l'exemple d'une compagnie.
M. Giasson: Appel à cette compagnie pour développer
l'exemple que vous pourriez...
M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'y faisais pas appel.
C'est un article de journal, c'est une annonce qui a paru dans un journal.
M. Giasson: En tout cas! Il y a également l'optimisme que
je trouve très grand du côté des gens d'en face en ce qui a
trait au coût d'administration de ce régime. Je dis que le
coût d'administration du régime va être largement
conditionné par la qualité et la rapidité du service qu'on
va donner aux personnes qu'on veut indemniser, aux victimes d'accidents
d'automobiles. Surtout, je songe à la remarque qui veut que, globalement
et de façon générale, le règlement des
indemnités aux victimes soit une affaire de trois ans. C'est encore
charrier, quand on y va d'une déclaration aussi générale!
Effectivement, le député de Jonquière sait fort bien que
le règlement d'un grand nombre de dossiers, dans le passé, s'est
fait de gré à gré entre le réclamant, la victime ou
le réclamant et le représentant de l'assureur. Ils n'ont pas mis
trois ans...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député,
s'il vous plaît, avec votre permission! J'ai dit que ce sont les causes
qui allaient devant les tribunaux, qui étaient contestées devant
un juge, qui prenaient trois ans...
M. Giasson: Ce n'est pas ce que vous avez dit tout à
l'heure.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est ce que j'ai dit...
M. Giasson: Ce n'est pas ce que vous avez dit tout à
l'heure. Vous êtes en train de préciser, mais tout à
l'heure vous avez été beaucoup plus global.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... dans le discours que j'ai
fait hier soir, alors que vous n'étiez
pas présent. Habituellement, celles qui se règlent hors
cour se règlent dans un délai allant de 10 à 18 mois. Il
faut quand même attendre les rapports médicaux. Si la cause va
devant la Cour supérieure et qu'on attend d'être sur le rôle
pour plaider la cause, cela prend régulièrement, du moins dans le
district de Chicoutimi, entre deux ans et trois ans et demi avant que la cause
ne soit entendue. Je ne parle pas des règlements hors cour.
M. Giasson: En tout cas, je peux au moins vous donner
l'expérience que j'ai vécue en regard des hypothèses qu'on
mène sur la rapidité de règlement que la régie
pourrait avoir. L'expérience personnelle que j'ai vécue pendant
de nombreuses années me permet de déclarer que 50% des
réclamations venant de victimes blessées ou ayant subi des
dommages corporels à des degrés divers, 50% de ces dossiers se
réglaient, selon mon expérience vécue, à
l'intérieur de trois mois. Seuls les dossiers où on
décidait de faire appel à une expertise juridique, à une
réclamation juridique ont connu des règlements longs.
J'ai vu très souvent des dossiers où des avances
volontaires ont été payées par les assureurs en attendant
que l'expertise médicale puisse déterminer, de façon
définitive, la perte de capacité.
M. Vaillancourt (Jonquière): Chapitre B.
M. Giasson: Pardon?
M. Vaillancourt (Jonquière): Chapitre 8.
M. Giasson: Non seulement sur le chapitre B, j'ai vu des
opérations de cette nature concernant des règlements en vertu du
chapitre A. Le chapitre B, il va de soi que cela peut se régler
très rapidement, puisqu'il s'agit d'un paiement volontaire et que le
montant maximal permis est plutôt peu élevé. Mais je parle
des règlements ou des versements qui ont été faits par des
assureurs qui reconnaissaient la responsabilité certaine de leurs
clients et qui, en vue d'accommodements, faisaient des avances à la
victime qui en réclamait, quitte à lui verser le paiement final
ou l'indemnité finale lorsque l'expertise médicale aurait
déterminé le montant ou la somme auquelle avait droit cette
victime.
C'est pour cela d'ailleurs que je vous indiquais tout à l'heure
qu'on va d'un pessimisme vers un grand optimisme sans tenir compte d'une
réalité qui a été vécue depuis fort
longtemps dans l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles.
Je me demande, à moins de bâtir des structures et de mettre
des équipes fort importantes qui seront au service des victimes, comment
la régie, dans au moins 50% des réclamations ou des paiements
d'indemnités pourra être plus rapide que ne l'était
l'industrie privée, compte tenu de son mode de fonctionnement qui est
connu par celui qui vous parle, également par d'autres personnes.
Je comprends que les représentants du Barreau étaient
habitués à voir les dossiers qui faisaient l'objet de
réclamations légales pour les victimes. C'étaient surtout
les dossiers vus par les avocats. Celui qui travaille à un autre niveau,
à l'intérieur de l'industrie de l'assurance, voyait
également d'autres dimensions de fonctionnement dans l'industrie
privée. J'ai peine à croire, à moins que, comme je l'ai
indiqué, la régie ne forme toute une équipe qui va se
tenir rapidement à la disposition des victimes d'accidents
d'automobiles, qu'elle puisse fonctionner plus rapidement que 50% des dossiers
de réclamations ou de dommages corporels qu'on a pu connaître dans
le passé.
Si la régie veut également donner ce service le plus
rapide, le plus courtois et vraiment être à la disposition des
victimes, il faudra qu'elle le prévoie dans l'ensemble de ses
coûts de fonctionnement, de ses frais d'administration. Ce sont les
raisons pour lesquelles j'ai toujours pensé que lorsqu'on escomptait,
qu'on prévoyait un coût moyen de fonctionnement ou de frais
d'administration de 6%, nous étions excessivement conservateurs. Cela
pourrait peut-être être possible si on réduisait au grand
maximum l'équipe qui va fonctionner à l'intérieur de la
régie avec les groupes qu'on veut adjoindre à la régie
pour contrôler et faire l'évaluation des réclamations des
victimes, mais comment est-ce possible à partir du moment où la
régie va vouloir vraiment être disponible à l'endroit des
victimes et va vouloir faire davantage que ce que pouvait faire l'industrie,
non seulement dans l'ensemble des dossiers de réclamations des victimes,
mais également dans cette partie de dossiers qui était
traitée avec rapidité? Je le dis et sans gêne, c'est
grâce à la collaboration, dans l'immense majorité des cas,
des courtiers d'assurances qui voulaient vraiment donner un service aux
assurés comme aux réclamants, parce que les qualités et
l'efficacité d'un courtier d'assurances, j'ai toujours prétendu
que cela se prouvait lors de réclamations. Souscrire des risques, c'est
l'opération absolument facile pour un courtier. Cet homme devient utile
lorsqu'il est en mesure de commencer à donner un service
dépendant de la prime que l'assuré avait payée ou des
droits que le réclamant pouvait avoir, même si ce n'était
pas lui qui avait souscrit la prime auprès de l'assureur.
Personnellement, je suis d'avis que la qualité du service que
pourra donner la régie de par l'ensemble des mécanismes ou des
structures qu'elle va se donner en vue de répondre aux
réclamations provenant des victimes, devra déboucher sur un
coût plus élevé que les prévisions très
optimistes de 6% qui sont celles du gouvernement présentement. Il
m'apparaît, à l'expérience, que nous allons
découvrir que, ce service étant de la qualité de ce qu'on
veut, ou du moins, de ce qu'on espère, le coût de l'administration
de la régie pourrait se situer beaucoup plus près de 10% dans la
réalité que les prévisions de 6%.
Je me demande aussi, dans certains cas de réclamations venant des
victimes, comment la régie pourrait être plus rapide ou même
aussi rapide
que ne l'étaient les services donnés sur beaucoup de
réclamations dans le passé. Là encore, s'il y avait
possibilité que la régie puisse s'entendre avec la
Fédération des courtiers afin de permettre à ceux-ci de
s'impliquer d'une manière ou d'une autre, qu'il resterait à
déterminer, dans le règlement des sinistres, je crois que ce
serait une garantie d'efficacité en matière de rapidité
encore plus grande, plutôt que de toujours laisser les victimes se
débattre avec leurs problèmes vis-à-vis les fonctionnaires
de la régie, même si on peut prêter les meilleures
intentions qui soient aux fonctionnaires de cette régie. On nous dit, on
nous révèle qu'il y aura possibilité d'utiliser...
M, Saint-Germain: M. le Président, je m'excuse
auprès de mon collègue, mais il est 12 heures. Est-ce qu'on finit
à 12 heures ou à 13 heures?
Le Président (M. Bertrand): A 13 heures.
M. Charron: A 13 heures.
M. Saint-Germain: II nous reste une heure.
M. Giasson: On nous dit que les onze bureaux régionaux de
la Commission des accidents de travail seront à la disposition des
victimes ou de toutes personnes qui seront aux prises avec des droits de
réclamation suite à des accidents. Comment peut-on prévoir
que dans certaines régions du Québec et vous accepterez
que je pense en fonction de la région que je connais, où je vis,
que je connais depuis toujours il y aura qualité et
rapidité de services lorsque les victimes devront s'adresser au bureau
le plus près et dans le cas qui nous occupe, le cas que je cite, ce
bureau est situé à Québec.
On va nous dire que, dans l'avenir, la Commission des accidents du
travail songe à ouvrir de nouveaux bureaux de service. On parle de les
multiplier de façon à couvrir le territoire du Québec
d'une quarantaine de bureaux de service. Mais, dans beaucoup de régions
du Québec, surtout les régions en dehors des centres urbains, je
vois déjà le comportement de la très grande
majorité des victimes. Première réaction: ces
gens-là ne songeront même pas à téléphoner au
bureau de service que la Commission des accidents du travail peut avoir dans le
secteur le plus rapproché du lieu de résidence de la victime. On
va s'adresser immédiatement, comme on le faisait dans le passé,
au bureau du courtier, et c'est celui-ci qui devra, s'il a cette attitude de
maintenir le meilleur service à l'endroit de son client ou d'un
réclamant, établir la communication téléphonique;
c'est celui-ci qui devra procéder, dans beaucoup de cas, à
compléter les formulaires qui seront nécessaires, d'abord, pour
produire une réclamation et qui devra également, à la
demande des réclamants et des victimes, qu'ils soient de ses clients ou
même des non-clients, compléter d'autres formules, puisqu'il est
facile d'imaginer que la Régie de l'assurance automobile, de la
même façon que les autres régies publiques que nous
connaissons, devra échanger de la correspondance, exiger de
l'information additionnelle, avoir plus de précisions, afin de traiter
les réclamations de façon convenable et de pourvoir au paiement
maximal qu'il est possible d'accorder, compte tenu de l'ensemble d'une
réclamation provenant d'une victime.
Mon expérience, encore une fois, m'indique que le courtier
d'assurances n'aura pas le choix. S'il veut véritablement continuer
d'être au service, d'accorder un véritable service aux
réclamants comme à ses clients, ses assurés, il devra
intervenir dans le dossier. J'invite le ministre des Consommateurs à
revoir, avec le président, le directeur de la régie, M. De
Coster, jusqu'où on peut vraiment donner une chance aux courtiers
d'assurances, par la fédération qui les représente, de
continuer de jouer le rôle que les citoyens... Ce sera un rôle que
les citoyens leur demanderont de jouer, même dans l'existence d'une
régie publique. On pourra certainement dire, et je crois que le ministre
a voulu l'indiquer dans le passé, que les courtiers devront continuer de
donner ce service sans exiger aucune rémunération, aucune
capitation, pour utiliser l'expression à laquelle a fait
référence, M. De Coster. On pourra prétendre que c'est le
rôle social, que c'est la responsabilité sociale que les courtiers
devront assumer. C'est un point de vue qu'on n'est pas obligé de
partager nécessairement.
Je connais suffisamment le monde des courtiers d'assurances pour savoir
que la plupart d'entre eux, pour ne pas dire l'immense majorité,
acceptent bien de jouer le rôle social qui est le leur, mais leur
demander de le jouer à l'infini, sans croire que ces gens-là
doivent faire un partage de l'ensemble du temps qu'ils consacrent aux
activités professionnelles, c'est demander beaucoup plus à ces
gens, qui oeuvrent dans une profession donnée, qu'on pourrait demander
à d'autres personnes qui travailleront à l'intérieur du
fonctionnement du système, comme fonctionnaire de la régie, comme
fonctionnaire de la Commission des accidents du travail ou d'autres organismes
auxquels on devra faire appel et qui, eux, à mon humble avis, doivent
également apporter leur contribution, leur part sociale au
fonctionnement d'un régime public, qui en sera un parmi tant d'autres.
Je ne verrais pas pourquoi on serait si exigeant à l'endroit des
courtiers d'assurances du Québec, à un degré nettement
plus élevé qu'on le serait à l'endroit de tout autre
intervenant qui aura à jouer un rôle à l'intérieur
du fonctionnement et de l'administration du régime public.
Pour ma part, je conçois que, connaissant les courtiers, ces
derniers vont accepter de jouer un rôle et vont y consacrer
sûrement une partie de leur temps, et ça, de façon
gratuite, en vue d'accommoder et d'aider les gens qui auront à
transiger, à négocier avec la Régie de l'assurance
automobile. Mais croire qu'on pourra demander de presser le citron à
l'infini, leur demander une collaboration qui devra être totale et sans
réserve, de façon permanente, de façon constante dans
l'avenir, et demander à ces groupes d'individus d'être nettement
au-delà de ceux qui seront payés et ré-
munérés à l'intérieur d'un régime de
travail et de conditions de travail, je dis que c'est rêver en
couleur.
Il en est ainsi de penser qu'on pourra faire faire de
"l'angélisme" à des gens qui, évidemment, suite aux
pressions du public, auront à intervenir, à faire du travail et
à jouer un rôle dans l'administration de la Régie de
l'assurance automobile.
M. le Président, est-ce qu'il me reste encore du temps?
Le Président (M. Bertrand): Oui, il vous reste encore deux
minutes.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'aurais une question
à vous poser, M. le député de Montmagny-L'Islet, si vous
le permettez, sur votre deux minutes?
M. Giasson: D'accord.
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous avez affirmé,
tout à l'heure, que votre expérience vous démontrait que,
à l'intérieur d'un délai de trois mois, plusieurs causes
se réglaient à l'amiable ou hors cour. N'est-il pas exact que les
réclamations pour blessures corporelles qui se réglaient à
l'intérieur d'un délai de trois mois, ou à peu
près, consistaient, dans la plupart des cas, dans des blessures mineures
où on pouvait obtenir, très rapidement, un rapport médical
ou encore au sujet desquels on n'avait pas besoin, du tout, de rapport
médical?
M. Giasson: Oui. Lorsqu'on pense au chapitre B de la police, vous
avez raison. C'est que l'industrie de l'assurance a aussi évolué
au cours des années. Il fut une époque lors de mes
premières années de pratique où on n'avait pas
cette ouverture, chez les assureurs, en vue d'un règlement rapide, mais,
avec les années, par suite du comportement des agents de
réclamations et d'un changement d'attitude ou de mentalité chez
les assureurs, face à la compétition, il s'est
véritablement développé une pratique, un désir de
vouloir être plus rapide dans le règlement de certaines
réclamations qui, nécessairement, n'impliquaient pas des sommes
astronomiques. Je dirais que c'est depuis huit ou dix ans qu'on a
réalisé cette ouverture nouvelle de la part de l'ensemble des
assureurs du Québec, en vue de régler plus rapidement certaines
réclamations. Je dirais même que, plus récemment depuis
cinq ans, par suite du comportement et de l'ouverture d'esprit de plusieurs
agents de réclamations, experts en sinistres, on a même vu des
compagnies s'ouvrir de façon à accepter, face à des
réclamations découlant du chapitre A de la police, soit un
chapitre de responsabilité, l'idée de verser des remises à
des réclamants où il était évident qu'ils avaient
le droit de réclamer, compte tenu de la responsabilité de
l'automobiliste qui détenait la police.
C'est une évolution des dernières années qui est
heureuse, remarquez bien, parce que person- nellement j'ai toujours
déploré, comme courtier d'assurances, qu'un certain nombre de
dossiers mettent tant de temps à apporter un premier chèque ou
une première indemnité à des victimes d'accidents
d'automobiles, surtout lorsqu'il s'agissait de victimes ou de réclamants
qui se situaient dans la catégorie des citoyens mal nantis et qui
avaient nécessairement besoin de toucher une indemnité plus
rapide que celui dont les moyens sont supérieurs ou qui a des
économies et qui peut, effectivement, se permettre d'attendre une
réclamation pour une période de deux, trois ans ou même
davantage.
La faiblesse de l'industrie privée s'est toujours située
vis-à-vis de ce volume de dossiers où on mettait tant de temps,
à cause des délais juridiques, des négociations, de
l'attente des rapports médicaux il y a une foule de raisons
à ces choses où on retardait le paiement, le
règlement d'un dossier, à une victime démunie, ne
possédant plus de ressources, et surtout ce qui avait parfois comme
conséquence de hâter un règlement pour ces victimes en
attente d'un règlement parce qu'elles avaient faim, parce qu'elles
avaient besoin. C'est ça la faiblesse que j'ai déclarée
dans le passé, je l'ai souvent dit, j'en ai discuté avec les
assureurs lors de réunions de courtiers d'assurances, c'était la
chose à corriger, c'était là le secteur le plus grave dans
le fonctionnement du régime qu'on connaissait.
Mme Payette: M. le Président, j'aimerais poser une
question au député de Montmagny-L'Islet. Vous avez plaidé
en faveur des courtiers j'ai un grand respect pour vous, je tiens
à vous le dire et je pense qu'on ne peut pas penser un seul
instant qu'il y ait, de la part du gouvernement, un refus d'inclure des
courtiers dans la réforme. On cherche le moyen et on cherche à
quel prix ça peut être fait. Vous n'excluez pas, cependant
du moins je l'espère les experts en sinistres qui pourraient,
effectivement, être des intermédiaires valables entre la
régie et la population.
Je voudrais aussi vous poser une question pour mon information. Est-ce
qu'il ne vous est pas arrivé de penser que c'était parfois un peu
facile de devenir courtier? J'ai été en contact avec certains
je ne veux absolument pas généraliser qui ne me
paraissaient pas prêts à remplir les fonctions qu'ils avaient?
M. Giasson: II en va, Mme le ministre, des courtiers comme des
autres groupes de travailleurs...
Mme Payette: Oui, sauf que le service auprès de la
population est à ce point important, dans les circonstances, qu'on peut
s'interroger sur certains d'entre eux.
M. Giasson: Oui. Vous avez parfaitement raison là-dessus;
sur l'ensemble du groupe des courtiers qui travaillent au Québec, on
peut s'interroger sur certains membres de la profession, mais vous admettez
qu'on peut le faire à l'endroit de
toutes les professions. Vous avez des gens qui ont des diplômes de
professionnels, et qui, dans l'application, sont de vraies nouilles. On les a
dans les professions et chaque profession fournit son monde...
Mme Payette: Vraiment, et honnêtement...
M. Giasson: Quel que soit le palier d'activité où
on est.
Mme Payette: Vraiment et honnêtement, c'est pour me
renseigner. Est-ce que vous voyez, vous qui avez une large expérience
dans ce domaine, un moyen d'arriver à une meilleure formation des
courtiers?
M. Giasson: Oui, déjà depuis quelques
années, la formation des courtiers d'assurances au Québec s'est
améliorée de façon profonde. Il fut un temps où la
qualification nécessaire pour devenir courtier et les examens
d'admission à la profession étaient très peu
sévères, on demandait peu de ces gens-là. Je reconnais
qu'à une époque, c'était vrai ce que vous dites là;
mais ceux qui ont adhéré à la fonction de courtier depuis
cinq ans, entre autres, ont dû fournir, au départ, des
prérequis beaucoup plus exigeants qu'ils ne l'étaient dans le
passé. Les examens de qualification sont totalement différents de
ce que nous avions il y a quinze ou vingt ans et même davantage. La
profession de courtier d'assurances de ce côté a
évolué de façon très importante. Ce n'est
peut-être pas encore complet. On sait qu'à l'avenir,
l'association, je ne parle pas de la fédération, mais
l'Association des courtiers d'assurances au Québec veut poser encore
plus d'exigences pour l'admission ou l'acceptation d'une personne à qui
on va donner une autorisation pour émettre une qualification de courtier
d'assurances.
Le mouvement est lancé, il y a de l'élimination qui se
fait, des gens quittent la profession pour une raison d'âge; il s'agit de
personnes qui avaient adhéré au champ de l'assurance à
l'époque où on était très peu exigeant et où
on pouvait devenir agent d'assurance au départ, par l'obtention d'un
permis du service des assurances qui, je le reconnais, demandait très
peu de qualifications, posait peu d'exigences. Mais ces gens-là, avec le
temps, quittent la profession, et ceux qui arrivent dans la profession sont
certainement des gens beaucoup mieux préparés, des gens qui
auront des connaissances techniques, à l'intérieur de la
profession, beaucoup plus grandes que celles des gens qui ont
adhéré à cette profession il y a 20 ou 25 ans.
Le Président (M. Bertrand): Alors, l'article 3 serait-il
adopté?
M. Roy: Avant, il y a une question et je ne sais pas qui pourrait
me fournir le renseignement; le député de Jonquière, Mme
le ministre ou le député de Montmagny-L'Islet. On a parlé
d'un certain nombre de dossiers qui étaient mal réglés et
pour lesquels les gens les plus démunis, je connais cer- tains cas
personnellement... Est-ce qu'on dispose de statistiques à l'heure
actuelle, de ce côté-là, pour nous dire, à peu
près, quel est le pourcentage parmi les victimes que ces cas peuvent
représenter?
Mme Payette: La seule statistique disponible, c'est le 1% qui se
rend jusqu'au jugement final devant les tribunaux. Pour le reste, il n'y a pas
de statistique disponible.
M. Roy: Alors, on admet que le pourcentage n'est pas tellement
élevé. Cela ne veut pas dire qu'on doive les laisser pour compte,
ce n'est pas ce que je veux dire. Je veux établir quand même un
ordre de grandeur.
Mme Payette: Je ne suis pas sûre qu'on puisse dire qu'il
n'est pas très élevé, puisqu'on ne le connaît pas.
Les règlements se font, soit avec des intermédiaires qui sont des
avocats, soit directement parfois avec l'évaluateur, soit directement
par certaines compagnies quand il s'agit de flottes. Alors, c'est
extrêmement difficile de mettre un chiffre là-dessus.
M. Roy: Est-ce que le député de Montmagny-L'Islet,
qui a une longue expérience là-dedans, pourrait me donner des
chiffres, si on me permet? Concernant le pourcentage des personnes qui sont
pauvres et qui subissent les préjudices dont on a fait état tout
à l'heure, quel pourcentage est-ce que cela peut représenter par
rapport au nombre de victimes? Est-ce qu'on peut donner un ordre de
grandeur?
M. Giasson: Je n'ai pas de chiffres précis
là-dessus, mais partons d'une hypothèse selon laquelle dans
l'ancien régime, qui fonctionne toujours, en vertu de la
responsabilité, vous aviez entre 25% et 30% des réclamants qui le
faisaient en recourant aux services d'un procureur, parce qu'on voulait aller
chercher le maximum possible et qu'on demandait des intervenants pour appuyer
la réclamation. A l'intérieur de ces 25% ou 30%, la grande
majorité des victimes se situait parmi les pauvres. Qu'est-ce que vous
voulez, c'est la même proportion qu'on retrouve, c'est la loi des
moyennes, dans ces réclamants qui étaient en attente pendant de
longues périodes, c'est la même moyenne ou proportion que l'on
peut retrouver à l'intérieur de la société
québécoise.
M. Roy: Mais tous ne se rendaient pas devant les tribunaux.
M. Giasson: Non.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est l'infime
minorité.
M. Giasson: C'est une minorité. Et même pour ceux
qui utilisaient les services d'avocats, souvent, le procureur décidait
d'une entente de gré à gré. On ne se rendait pas devant le
tribunal. Il y avait
négociation entre l'avocat, le procureur du réclamant et
le représentant de la compagnie, habituellement l'agent de
réclamation ou même l'avocat de la compagnie, mais surtout l'agent
de réclamation. On négociait pour en arriver à une entente
de gré à gré.
M. Vaillancourt (Jonquière): Mais pour répondre
aussi à M. le député de Beauce-Sud, il est vrai, comme l'a
dit le député de Montmagny-L'Islet, que certaines compagnies
récemment, dans certains cas, ont avancé à des personnes
mal nanties certaines sommes d'argent préalablement à l'entente
finale, c'est vrai. D'autre part, dans les 25% ou 30%, si je prends les
chiffres du député de Montmagny-L'Islet, qui venaient voir des
avocats, l'infime minorité allait devant la Cour supérieure pour
plaider sa cause.
Il n'en reste pas moins qu'il faut savoir comment se faisait ce
règlement. Bien souvent, je ne dis pas dans la plupart des cas, mais
souvent la victime se voyait en face d'une lettre de la compagnie d'assurances
qui disait qu'elle envisageait de contester la responsabilité. Inutile
de vous dire qu'à ce moment-là le procureur devait aviser son
client que si on allait devant les tribunaux la cause serait entendue dans x
mois ou à peu près, ce qui décourageait habituellement le
client.
De telle sorte que, le député de Montmagny-L'Islet y a
fait allusion tout à l'heure, j'avais oublié de le dire, ce
n'était pas rare que des victimes acceptent des montants
inférieurs aux montants auxquels ils avaient droit et auxquels un
jugement leur aurait donné droit pour régler la cause un an et
demi ou deux ans avant et ne pas courir le risque du procès. Parce qu'un
procès, dans le système de la responsabilité, c'est
toujours un risque.
Lorsque la responsabilité est évidente, il n'y a pas de
problème; lorsque la responsabilité peut être de 50-50 ou
de 60-40, la victime, qui peut assurer les frais de cour si elle perd
entièrement la cause, est bien souvent portée, tout en profitant
de l'argent deux ans avant, des intérêts sur le capital, si la
somme est le moindrement raisonnable, à accepter cette somme
inférieure à la somme qu'elle aurait eue si elle avait
gagné sa cause. Mais il y a toujours un si, si elle avait gagné
sa cause en Cour supérieure.
J'ai vu des victimes d'accident à qui j'ai dit: Si vous gagnez en
Cour supérieure le quantum de vos dommages, vous ne pourrez certainement
pas avoir moins de X montant, disons $10 000. La victime était
prête, souvent, 18 mois avant, à accepter la somme de $7000 en
capital parce qu'elle savait que, durant ces deux prochaines années,
elle pourrait se servir de ce montant et le placer à X%
d'intérêt, mais elle devait quand même donner 15% au
procureur, ce qui réduisait son capital de $1000.
Evidemment, le procureur laissait entièrement libre la personne
d'accepter ou de refuser. C'était le devoir du procureur de dire
à son client: Refusez cette somme, si c'était manifestement
déraisonnable, si cela allait à l'encontre des principes de la
justice. Mieux vaut aller devant les tribunaux, passer 18 mois plus tard
qu'accepter une somme manifestement injuste par rapport au quantum réel
des dommages. Il faut dire que cela arrivait.
Mme Payette: ... qui était perdu.
M. Roy: Dans quel pourcentage des cas?
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne voudrais pas donner de
statistiques. Je pourrais seulement parler des cas que j'ai vécus et non
pas de ceux des autres. Je pourrais vous dire que des règlements
à l'amiable entre la partie sans avocat et la compagnie d'assurances, ou
entre l'avocat et celui de la compagnie d'assurances, c'est la grande
majorité des cas. La question qu'on doit se poser, c'est: Est-ce que,
dans tous les cas, les victimes reçoivent exactement ou à peu
près la somme d'argent à laquelle elles ont réellement
droit en vertu du préjudice subi? C'est une question importante.
Souvent, le risque du procès, une attente trop longue, fait en
sorte que les victimes sont portées, et ça les compagnies
d'assurances le savent, à accepter des montants inférieurs,
là, je ne voudrais pas donner de pourcentage, pour régler la
cause, pour ne pas courir le risque de payer des frais de cour à
l'avocat de la partie adverse et ne pas courir le risque de tout perdre.
M. Saint-Germain: Ces difficultés...
M. Roy: Je ne peux pas parler d'une expérience comme
avocat, je ne suis pas avocat. Mais comme député, depuis huit
ans, je peux vous dire que, pour un cas d'assurance automobile mal
réglé les gens viennent de temps en temps à nos
bureaux j'ai dix cas d'accident du travail mal réglés.
M. Vaillancourt (Jonquière): Là, je ne voudrais
pas...
M. Roy: C'est l'Etat.
M. Vaillancourt (Jonquière): On parle de...
M. Roy: On veut corriger, mais de ce
côté-là...
M. Saint-Germain: La cause de ces difficultés devant les
tribunaux ou des discussions entre assureurs et assurés, est-ce que
c'est surtout le quantum ou la responsabilité?
M. Vaillancourt (Jonquière): Habituellement, lorsque la
responsabilité est évidente.
M. Saint-Germain: Je parle en général.
M. Vaillancourt (Jonquière): En général, je
pense que c'est la responsabilité, puisque souvent, en fait, notre
système de responsabilité, ce n'est pas nécessairement
100% pour la tierce partie ou 100% pour la victime. Je peux être
responsable à 25% du dommage, comme demandeur. La compagnie
d'assurances, à ce moment-là, va payer,
proportionnellement parlant. Mais, en ce qui concerne ma compagnie, si
moi, je suis assuré, elle sera obligée également de payer
l'autre, parce que je serai responsable à X% moi aussi. Cela peut
être 60%-40%, cela peut être 75%-25%. De là le risque du
procès. Et vous comprendrez que, comme la loi de la moyenne joue, la
plupart des demandeurs étant souvent des personnes moyennement
nanties... Devant ce risque-là parce que c'est une question qu'on
se faisait poser souvent si je perds, qu'est-ce que j'aurai à
payer? Tu auras à payer les frais judiciaires du procès.
Qu'est-ce que pourrait être ce montant? Face à une
réclamation de $7000, $8000, $9000, non seulement le gars court le
risque de tout perdre, mais, en plus, de se retrouver à payer les frais
judiciaires de la partie adverse, ce qui peut représenter souvent
plusieurs centaines de dollars, et même atteindre $1000 dans certains
cas.
Vous comprendrez que c'est difficile, à ce moment-là,
à moins d'avoir une responsabilité évidente...
M. Saint-Germain: Le "no fault" ferait disparaître une
bonne partie...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est surtout la
responsabilité.
M. Saint-Germain: Le "no fault " fait disparaître une bonne
partie ou la majorité de ces inconvénients.
Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, mais cette
conversation de salon fort intéressante...
M. Roy: M. le Président, ce n'est pas une conversation de
salon. C'est très important.
Le Président (M. Bertrand): Je sais. Seulement, elle nous
permet de donner une extension à un règlement qui dit bien que
les députés qui, jusqu'à maintenant, ont pris la parole
là-dessus, ont tous épuisé leur droit de parole.
M. Lalonde: J'ai parlé 20 minutes?
Le Président (M. Bertrand): Qui? Vous?
M. Lalonde: Sur l'article 3?
Le Président (M. Bertrand): Je pense que le
député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas parlé 20
minutes.
M. Lalonde: Non, sûrement pas.
Le Président (M. Bertrand): II est un des seuls,
d'ailleurs...
M. Vaillancourt (Jonquière): ... M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): Si mon calcul est bon, il lui
reste une minute.
M. Lalonde: Pardon?
Le Président (M. Bertrand): Une minute.
M. Lalonde: Une minute seulement. Vous êtes sûr?
M. Paquette: II me semblait que cela avait paru long!
M. Vaillancourt (Jonquière): Je le savais. Je le
savais.
Le Président (M. Bertrand): De 11 h 11 à 11 h 30.
Vous avez parlé dix-neuf minutes.
M. Vaillancourt (Jonquière): Juste assez pour
présenter son amendement.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Montmagny-L' Islet.
M. Giasson: C'est presque un privilège que je vous
demande. A la suite des questions que se posait le ministre il y a quelques
moments sur la compétence ou le professionnalisme de certains courtiers
d'assurances, je lui ai indiqué quelle était ma perception, ma
vision là-dessus.
Mais, puisque le député de Jonquière a parlé
longuement des modes de règlement de certaines réclamations, ou
des discussions qu'il y avait entre procureurs, j'ai découvert
également que, dans le monde des avocats, il y a eu des dossiers
où le professionnalisme n'était pas trop présent.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, c'est vrai.
M. Giasson: J'ai vu des dizaines, et je pèse mon mot, des
dizaines et des dizaines de dossiers, où les avocats, qui
représentaient les intérêts d'une victime, ont
été fort complaisants dans la négociation avec la
compagnie, parce qu'on se faisait donner 15% d'honoraires par la compagnie. Et
on se tournait vers son client et on en réclamait 10% ou 15%.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... accepter pour être
payés immédiatement.
M. Giasson: Je ne l'affirme pas à peu près. Copie
de chèques versés aux avocats...
M. Lalonde:... connaissance personnelle...
M. Vaillancourt (Jonquière): J'espère que M. le
député de Marguerite-Bourgeoys me fait confiance.
M. Lalonde: D'autres de ses confrères, je veux dire.
M. Vaillancourt (Jonquière): La bonne foi se
présume en vertu du Code civil.
Mme Payette: Sur les 6000 avocats au Québec, tout le monde
est au courant, mais personne ne pratique ce genre de cause.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je voudrais souligner autre
chose, puisqu'on est entré dans ce domaine-là. La prescription
étant d'un an en matière de blessures corporelles, M. le
député de Montmagny-L'Islet, vous admettrez et là,
je ne veux pas généraliser au niveau des estimations d'assurances
que, bien souvent pour ma part, cela m'est arrivé au moins
une vingtaine de fois en huit ans les gens arrivent à mon bureau,
convaincus qu'ils ont encore un droit de recours, l'expert lui disant: Vous
allez être payé. Ne prenez pas d'avocat pour rien, vous allez
être payé. On lui disait cela au bout de neuf mois, ou neuf mois
et demi. La personne arrivait à nos bureaux quatorze mois après
l'accident et on devait l'informer que, malheureusement, elle n'avait pas de
recours.
L'agent de réclamations avait peut-être une promotion au
sein de sa compagnie je ne veux pas faire le procès des
compagnies...
M. Giasson: Mais c'est une réalité aussi.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai des exemples, même
dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, d'estimateurs qui se sont
vantés d'avoir cette conduite, de façon volontaire. L'ignorance
de la loi n'est pas une excuse, c'est vrai. Mais, lorsqu'on est rendu à
faire attendre des personnes pour des chèques et qu'au bout d'un an et
un jour, le droit de recours n'existe plus, je pense que cela, c'est...
M. Paquette:... bourrer le monde.
Mme Payette: M. le Président, c'est l'éditorialiste
du Devoir qui, dans un article, avait parlé des parasites de l'assurance
automobile. Je pense qu'on n'ira pas plus loin, tout simplement. Mais il y en a
un peu dans tous les domaines. Il y a certains courtiers qui sont des
parasites, il y a certains avocats qui sont des parasites, il y a certains
experts en sinistres. Il y en a un peu dans toutes les professions.
M. Roy: II y en a même à l'Assemblée
nationale.
Mme Payette: Probablement, M. le député.
M. Lalonde: Bientôt, si on vous laisse faire, tous les
citoyens vont être des parasites du gouvernement.
Mme Payette: Pas du tout.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre! L'article 3
sera-t-il adopté?
M. Lalonde: Sur division, avec un grand "D". Un vote
enregistré.
Le Président (M. Bertrand): Vote enregistré?
Très bien.
Sur l'article 3, M. Beauséjour?
M. Beauséjour: Pour.
Le Président (M. Bertrand): M. Bisaillon, M. Gagnon, M.
Gosselin?
M. Gosselin: Pour.
Le Président (M. Bertrand): M. Fontaine? Il n'est pas
là? M. Laberge. M. Lalonde?
M. Lalonde: Contre.
Le Président (M. Bertrand): M. Paquette?
M. Paquette: Pour.
Le Président (M. Bertrand): M. Giasson?
M. Giasson: Contre.
Le Président (M. Bertrand): M. Lefebvre?
M. Lefebvre: Pour.
Le Président (M. Bertrand): M. Marquis?
M. Marquis: Pour.
Le Président (M. Bertrand): Mme Payette?
Mme Payette: Pour.
Le Président (M. Bertrand): M. Raynauld?
M. Lalonde: Je pense qu'il serait contre.
Le Président (M. Bertrand): Vous le pensez? En cas de
doute, je pense qu'on va laisser faire pour l'instant.
M. Lalonde: D'accord.
Le Président (M. Bertrand): M. Roy?
M. Roy: Contre.
Le Président (M. Bertrand): M. Le Moignan?
M. Le Moignan: Contre.
Le Président (M. Bertrand): M. Saint-Germain?
M. Saint-Germain: Contre.
Le Président (M. Bertrand): M. Vaillancourt
(Jonquière)?
M. Vaillancourt (Jonquière): Pour.
Le Président (M. Bertrand): Pour: 7 Contre: 5
L'article 3 est adopté. J'appelle l'article 4. Mme le
ministre.
Mme Payette: M. le Président, l'article 4 se lit
dorénavant comme suit: "Les indemnités prévues au
présent titre tiennent lieu de tous les droits, recours et droits
d'ac-
tion de quiconque en raison d'un dommage corporel causé par une
automobile et nulle action à ce sujet n'est reçue devant une cour
de justice. "Sous réserve de l'article 18, lorsqu'un dommage corporel a
été causé par une automobile, les compensations ou
avantages pécuniaires prévus pour l'indemnisation de ce dommage
par la Loi des accidents du travail (Statuts refondus 1964, chapitre 159) ou
par la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels (1971, chapitre
18) tiennent lieu de tous les droits, recours et droits d'action de quiconque
en raison de ce dommage corporel et nulle action à ce sujet n'est
reçue devant une cour de justice. "Les dispositions qui
précèdent dans le présent article ne s'appliquent pas dans
les cas visés dans l'article 17. Rien dans le présent article ne
limite le droit d'une victime de réclamer une indemnité en vertu
d'un régime privé d'assurance sans égard à la
responsabilité de quiconque".
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Lalonde: J'aurais peut-être une question avant le
député de Jacques-Cartier. Le ministre pourrait-il nous dire
pourquoi il défend cet article? Peut-il nous l'expliquer?
Mme Payette: Le but de l'amendement est d'abolir les recours en
responsabilité, y compris les actions subrogatoires à la suite
d'un accident d'automobile. Le but de l'amendement: cet article a
été reformulé entièrement en tenant compte du
procédé utilisé lors de l'adoption de la Loi des accidents
du travail.
Nous nous sommes servis des articles 13 et 15 de la Commission des
accidents du travail pour formuler un article plus étanche et, dans la
mesure du possible, dissuader ceux qui seraient tentés de
vérifier l'étanchéité de la loi.
Autrement dit, cet article, qui est capital pour la régie, dit
que les accidentés d'automobiles n'ont plus de droit de poursuite en
responsabilité devant les tribunaux en échange du droit aux
indemnités prévues dans la loi.
De plus, un amendement sera prévu dans les dispositions
transitoires pour modifier le Code civil au chapitre sur la
responsabilité civile, article 190a. L'article 4 doit s'appliquer
également aux accidentés du travail et aux victimes d'actes
criminels qui ne doivent pas avoir le droit de poursuite.
Dans le projet de première lecture, cette disposition
était comprise dans l'article 18, qui traite de la façon
d'indemniser ces victimes. Comme il s'agit d'une disposition fondamentale, elle
a été reproduite à l'article 4.
M. Roy: M. le Président, j'aimerais vous demander une
directive à ce moment-ci.
Le Président (M. Bertrand): Oui.
M. Roy: Cet article no 4 fait des réserves à l'ar-
ticle 18 et également à l'article 17. Les articles 17 et 18 ne
sont pas adoptés.
Le Président (M. Bertrand): Exact.
M. Roy: Nous avons des amendements à proposer. Je me
demande s'il ne serait pas plus sage de suspendre l'adoption de l'article no 4
et d'y revenir une fois que nous aurons passé à l'article 17 et
à l'article 18, étant donné qu'il y a des implications
dans ces deux articles. Ce sont un peu les difficultés que j'ai
soulignées hier. Si nous avons des amendements à proposer
à l'article 17 et si nous avons des amendements à proposer
à l'article 18 et que le gouvernement a de nouveaux amendements à
apporter à ces articles, cela change la portée de l'article
4.
Le Président (M. Bertrand): S'il y a consentement unanime,
vous savez...
M. Vaillancourt (Jonquière): Non, M. le Président,
et je voudrais dire pourquoi.
Le Président (M. Bertrand): D'accord.
M. Vaillancourt (Jonquière): Les amendements que veut
apporter le député de Beauce-Sud sont, de son aveu même,
aux articles 17 et 18. Or, on dit à l'article 4 que le présent
alinéa ne s'applique pas dans les cas visés dans l'article
17.
Je pense qu'il y a lieu de procéder à l'étude de
l'article 4. Lorsque nous serons rendus à l'article 17, s'il y a des
amendements, les amendements vaudront pour l'article 4.
M. Roy: Le gouvernement lui-même a des amendements à
l'article 17.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, mais cela ne nous
empêche pas d'étudier l'article 4.
M. Roy: Bon. On ne les a pas adoptés les amendements de
l'article 17. On ne les a pas adoptés les amendements de l'article 18.
Je demande tout simplement qu'on procède de façon normale, de
façon intelligente.
M. Paquette: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Bertrand): Oui.
M. Paquette: Je pense que tout ce que dit l'article 4, c'est
qu'il y aura des réserves du genre de celles prévues à
l'article 18 et à l'article 17. Lorsqu'on regardera les amendements que
vous voulez apporter ou les amendements que le gouvernement apporte aux
articles 17 et 18, on aura seulement à se rappeler que c'est en relation
avec l'article 4 qu'on les fait. Il me semble que ce serait mettre la charrue
devant les boeufs que d'aller aux articles 17 et 18. On sait qu'il faut faire
des réserves du genre de celles prévues aux articles 17 et 18. On
sait qu'il faut en faire, mais on ne sait pas
encore de quelle nature. On le précisera lorsqu'on sera rendu aux
articles 17 et 18.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): Oui, je m'excuse, avant, Mme
le ministre. Monsieur, d'accord.
Mme Payette: M. le Président, je peux tenter d'expliquer
ce en quoi consistent les références qui sont faites aux articles
17 et 18.
M. Roy: Je comprends, mais tout de suite, j'aimerais dire qu'il y
a un principe qui prévaut dans l'étude des lois, c'est qu'on ne
peut pas présumer d'amendements futurs tant et aussi longtemps que la
loi n'a pas été votée, que ce soient des amendements qui
viennent du côté gouvernemental, ou des amendements qui peuvent
venir du côté de l'Opposition. C'est un principe qui
prévaut dans l'examen de nos lois, qui a toujours prévalu et qui
prévaut encore aujourd'hui. Alors, on fait des réserves, mais des
réserves qui peuvent changer la portée de l'article 4. En ce qui
me concerne, je pense que c'est une question de collaboration dont nous avons
besoin en ce moment. Je comprends que le gouvernement peut dire ceci: Nous
avons la majorité, peu importe ce que l'Opposition pensera, peu importe
ce que l'Opposition décidera. On peut prendre cette décision.
Même là, on ne peut même pas présumer des intentions
du gouvernement. C'est un principe qui a toujours été
appliqué sur le plan législatif. C'est la raison pour laquelle
quand des articles de loi en viennent à se référer
à des articles ultérieurs dans le projet de loi, cela rend
l'étude d'une loi difficile. Alors, on n'a pas le droit de
présumer des intentions du gouvernement et le gouvernement n'a pas le
droit de présumer des intentions à venir de tous les
députés de l'Assemblée nationale, même des
collègues de l'Opposition. On fait référence à deux
articles de loi qui ne sont pas adoptés et pour lesquels on
connaît déjà la teneur de certains amendements. Il se peut
qu'un amendement soit présenté par le Parti libéral. Il se
peut que cet amendement soit considéré par le gouvernement comme
un amendement extrêmement valable et qu'on en vienne à
l'adopter.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
directives...
Le Président (M. Bertrand): Monsieur n'avait pas
terminé de donner ses explications.
Mme Payette: Les références qui sont faites aux
articles 17 et 18 ont pour but, en ce qui concerne l'article 17, de ne pas
appliquer l'abandon de la responsabilité au cas prévu à
l'article 17. A l'article 17, ce sont des exclusions au régime public
qui sont prévues et c'est pour faire en sorte que le régime de la
responsabilité soit reconduit, c'est-à-dire qu'actuellement ce
sont des cas prévus dans le système de responsabilité que
l'on connaît présentement. La réserve qui est faite, c'est
justement pour reconduire la situation du système de la
responsabilité.
Quant à la réserve à l'article 18, c'est
qu'à l'article 18 on prévoit de quelle façon
l'indemnisation des accidentés du travail, de même que
l'indemnisation des victimes d'actes criminels, sera faite. Or, c'est tout
simplement pour faire cette réserve. On veut rendre l'article 18
applicable et l'article 17 applicable en son entier.
M. Roy: Je comprends, mais je tiens quand même à
dire ceci: L'article 17 n'est pas adopté, peu importe la teneur qu'on
peut trouver. Il n'a pas encore été soumis à l'attention
de la commission, et l'article 18 non plus. Je ne pourrais pas, si je m'en
tiens strictement sur le plan du parlementarisme, me référer aux
dispositions des articles 17 et 18. Elles n'existent pas au niveau de la
commission, à ce moment, si je pousse le principe plus loin, parce
qu'elles n'ont pas été soumises à la commission.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Bertrand): J'adresse votre demande, M. le
député de Beauce-Sud, à l'ensemble des membres de la
commission. Est-ce que les membres de la commission accepteraient de...
M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais entendre le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Bertrand): Vous aimeriez entendre le
député de Marguerite-Bourgeoys? M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je suis flatté. Je pense que la demande du
député de Beauce-Sud a un certain fondement, sauf qu'il va
falloir commencer quelque part.
Tout se tient dans ce projet de loi et une fois arrivés à
l'article 17, on ne sera pas plus avancé si on a suspendu l'article 4,
parce qu'à l'article 4, en fait, on adopte un principe d'abandon de la
responsabilité on peut être d'accord ou non et
ensuite, on dit: Cela ne s'applique pas pour l'article 17. S'il fallait
attendre, pour faire référence à un article
ultérieur, que cet article soit adopté, on ne saurait plus jamais
comment commencer l'étude d'une loi, parce que personne ne sait quelle
sera la facture finale de chaque article, étant donné qu'on aura
toujours la possibilité de les amender à mesure qu'on avance. Je
comprends les préoccupations du député de Beauce-Sud et je
me demande jusqu'à quel point on pourrait faire avancer la discussion en
suspendant maintenant l'article 4.
Le Président (M. Bertrand): D'ailleurs, si on
étudiait l'article 17, M. le député de Beauce-Sud, il est
mentionné dans le dernier paragraphe que la responsabilité est
déterminée suivant les règles du droit commun dans la
mesure où les articles 97 à 102 n'y dérogent pas. On
pourrait, de fil en aiguille, remonter...
M. Roy: II faudrait qu'on s'interroge sérieusement sur la
rédaction de nos projets de lois, la construction de nos projets de
lois.
Mme Payette: ... mieux rédigés.
M. Roy: Hier, j'ai voulu parler d'un article qui apparaissait
plus loin. Je trouvais qu'il avait une certaine incidence avec le principe que
j'avais soulevé et je ne reviens pas sur la décision que vous
avez rendue. Votre décision a été très claire; je
l'ai acceptée. Mais je pense que si je peux vous demander une directive,
il faudrait quand même, avant l'adoption finale de l'article 4, qu'on
puisse peut-être, à un moment donné, s'interroger sur les
dispositions des articles 17 et 18. Il ne faudrait pas que la discussion soit
limitée.
Le Président (M. Bertrand): Je crois que, dans le cadre de
l'étude de l'article 4, il sera possible pour quelqu'un de tenter
d'obtenir des informations à l'appui des articles 17 et 18 dans les
conséquences qu'ils entraînent pour l'article 4, et non pas dans
leur contenu intrinsèque spécifique. Alors, puisqu'il n'y a pas
consentement pour suspendre l'étude de l'article 4, nous allons donc
l'aborder immédiatement.
M. le député de Jacques-Cartier, vous aviez demandé
la parole.
M. Saint-Germain: M. le Président, je crois qu'il y a
là, dans cet article, la négation d'un principe depuis longtemps
établi, c'est-à-dire le principe du système
judiciaire.
Je l'ai dit, M. le Président, dans mon discours de
deuxième lecture, mais je crois que je dois le répéter. Il
me semble absolument inconcevable que, dans une loi aussi importante, une loi
qui a autant d'envergure, on mette de côté le système
judiciaire, et je crois personnellement que c'est une tendance qu'ont eue
différents gouvernements, une tendance qui peut être très
dangereuse dans le temps pour ce qui concerne les libertés individuelles
de chaque citoyen.
Il me semble évident, avec l'évolution du monde,
devrais-je dire, et des différents systèmes de gouvernement, il
me semble de plus en plus évident que seules les sociétés
qui respectent l'indépendance du système judiciaire, que seules
ces sociétés, dis-je, peuvent permettre à leurs citoyens
de jouir d'une liberté individuelle, c'est-à-dire de cette
liberté dont nous jouissons ici dans le Québec, comme dans le
reste du pays.
Il me semble surtout que, pour cette loi en particulier parce qu'elle
dépasse largement la question administrative, elle la dépasse de
beaucoup, qu'on enlève aux tribunaux le droit de donner des verdicts
pour ce qui regarde l'administration de certaines régies ou de certaines
commissions, ceci peut se soutenir, mais il y a ici des principes fondamentaux
dans le projet de loi et je crois que, pour que ces principes de liberté
soient respectés et constamment respectés, le système
judiciaire doit être responsable, avoir sa responsabilité dans
l'application de cette loi.
Il me semble évident, pour ce qui regarde l'assurance automobile
en particulier, telle que nous la connaissons présentement, qu'il y a eu
des critiques justifiées de la part des citoyens et de beaucoup de gens
concernés par l'assurance automobile, envers l'administration de nos
tribunaux. D'ailleurs nous en avons entendu de ces critiques ce matin et, pour
ma part, je crois que, dans l'ensemble, ces critiques sont fondées. Je
vous ferai tout de même remarquer, M. le Président, que ces
critiques ne s'adressent pas à la qualité des jugements qui ont
été rendus par nos cours, elles s'adressent exclusivement
à l'inefficacité administrative de nos tribunaux. Je crois que
ces inconvénients, qu'on rencontre dans l'administration de la justice,
parce qu'un jugement rendu trop tard peut-être, en lui-même, un
déni de justice... L'administration de la justice peut être
améliorée. Ce n'est certainement pas une façon
d'améliorer les choses en mettant simplement le système
judiciaire de côté. On sait pertinemment que l'administration de
la justice, au Québec, est de la responsabilité du gouvernement
provincial. On a un ministre, il a la liberté d'action, il a en main les
pouvoirs d'améliorer notre système judiciaire, au niveau
administratif, et d'ailleurs, cette amélioration de l'administration de
nos tribunaux n'est pas demandée par les citoyens exclusivement en ce
qui concerne l'assurance automobile, elle est demandée et exigée
en ce qui concerne tout champ d'activité humaine.
Il y a là, M. le Président, une élimination
dangereuse et je suis un peu estomaqué, à titre de citoyen, qu'on
puisse le faire d'une façon, à mon avis, qui nous prouve que le
gouvernement et l'ensemble des députés du gouvernement ne
semblent pas sensibilisés à ce point de vue.
C'est une loi qui est excessivement complexe; inutile de dire qu'il sera
difficile, pour les victimes, de connaître les droits, les
privilèges et la protection que leur donne cette loi. Nous avons
étudié cette loi depuis plusieurs mois.
Plusieurs députés l'ont fait et nous découvrons
encore tous les jours des éléments qui ne nous avaient pas
frappés, qui étaient passés inaperçus ou qui
n'avaient pas été constatés. C'est une loi très
complexe, beaucoup plus complexe, par exemple, que la Loi des accidents de
travail. Pourtant, pour ceux qui sont députés, on sait
pertinemment qu'une multitude de citoyens sont obligés de faire appel
à nos services pour avoir un service juste de la Commission des
accidents du travail. On peut donc s'imaginer comment le profane, comment le
citoyen qui n'est pas familier avec cette législation pourra
réellement connaître les avantages et les droits que lui procure
cette loi. Ceci dit, plusieurs d'entre eux seront tout de suite obligés
de faire appel à un avocat et probablement que, dans les causes graves,
beaucoup des victimes qui auront subi des préjudices sérieux
devront le faire dès qu'elles auront à remplir leur formule
qu'elles devront faire parvenir à la régie pour être
dédommagées.
On sait pertinemment que ces formules sont souvent mal remplies, surtout
lorsqu'elles seront
remplies par les citoyens eux-mêmes et ces citoyens peuvent
éprouver des difficultés dès le premier jour. Les citoyens
qui auront ces difficultés vont faire la même chose qu'au niveau
de la Commission des accidents du travail, ils vont se mettre à faire
des appels téléphoniques, et tout ceci va prendre des jours. Il
est certain, M. le Président, que nos bureaux de députés
vont être remplis de ces victimes qui exigeront notre coopération
en vue de voir le dossier évoluer à un rythme convenable. S'ils
calculent qu'ils sont mal compensés pour les dommages subis, l'office
pourra transmettre à un fonctionnaire l'autorité voulue pour
faire une nouvelle étude du dossier. Si la conclusion est la même
ou si la victime se croit encore traitée avec injustice, elle fera appel
à la régie même et, après la régie, le
dernier droit d'appel appartiendra à la commission des affaires
sociales. Qui va défendre les citoyens au niveau de la Commission des
affaires sociales? Est-ce qu'on acceptera la présence d'un avocat ou
non? Probablement qu'on acceptera. On me dit oui. Tant mieux, mais la
Commission des affaires sociales n'est pas...
Mme Payette: Je voudrais informer le député de
Jacques-Cartier que c'est prévu dans la Loi de la commission des
affaires sociales.
M. Saint-Germain: Alors, tant mieux. Mais il reste que toute la
procédure... Je ne suis pas avocat, mais je sais pertinemment que, au
niveau de nos tribunaux, il y a toute une procédure d'établie: il
y a une procédure de preuve, il y a des règlements qui n'existent
nécessairement pas au niveau de cette commission.
En plus, cette commission sera formée de gens qui n'auront pas
l'indépendance des juges; ils ne seront pas nommés à vie,
ils seront nommés par les différents gouvernements pour des
mandats limités, leur indépendance sera très relative et,
même s'ils rendent justice correctement, bien des citoyens croiront que
ces commissaires sont influencés par la régie et ils ne pourront
certainement pas donner l'image que justice a été rendue.
Si on veut donner à cette commission les différents
facteurs de sécurité au point de vue de la justice, il faudra
simplement... On se verra obligé de former un autre tribunal, un
tribunal qui aura comme règles celles de nos tribunaux de droit commun
et on ne pourra pas s'en défaire. On pourra retomber exactement dans les
mêmes lacunes avec beaucoup plus de frais, probablement, et beaucoup plus
d'injustice.
Je me demande pour quelle raison le gouvernement veut limiter le droit
d'appel, le droit de recours à cette commission; c'est, pour moi, une
façon absolument inacceptable de faire les choses. Il n'est pas dit,
dans le contexte actuel, qu'au point de vue de l'administration de la justice,
au niveau de la Commission des affaires sociales, on ne tombera pas dans les
mêmes inconvénients et dans les mêmes
difficultés.
Il est inconcevable que l'on laise à la technocratie autant de
responsabilités et je crois que les citoyens en général
reprocheront à ce gouvernement d'avoir limité leur droit d'appel
et leur droit de recours.
Je ne parlerai pas plus longtemps là-dessus, M. le
Président, je laisserai à mes collègues l'occasion de
prendre la parole.
Le Président (M. Bertrand): Est-ce que l'article 4 sera
adopté?
M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté. Le
Président (M. Bertrand): Adopté. M. Roy: M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): Le député de
Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, c'est assez complexe. Sous
réserve de l'article 18 je me réfère un peu
à l'article 18 j'aimerais savoir ce qui arrive dans le cas d'une
personne qui est victime d'accident d'automobile alors qu'elle a droit à
des indemnités en vertu de la Loi des accidents de travail. Est-ce que
la Commission des accidents du travail a droit de revenir contre la personne
qui serait responsable de l'accident?
Mme Payette: M. le Président, si vous le permettez. Dans
le cas de la Loi des accidents du travail, il y a effectivement un droit de
subrogation contre la personne responsable de l'accident, pour autant que cette
personne responsable n'est ni l'employeur ni l'ouvrier.
La Loi sur l'assurance automobile abolit le droit de subrogation des
organismes contre le responsable, parce qu'on ne tient plus compte de la notion
de responsabilité. Dans les seuls cas où la régie
elle-même a un droit de subrogation, dans ces cas-là, il sera
également permis à des organismes publics, tels la Régie
de l'assurance-maladie, la Régie des rentes du Québec, la
Commission des accidents du travail, les employeurs qui ne contribuent pas au
fonds d'accident mais qui paient eux-mêmes, dans ces cas-là, dans
la mesure où la régie conserve un droit de subrogation, ce droit
est maintenu pour les organismes publics.
M. Roy: Vous parlez des organismes publics. Cela inclut
également la CAT?
Mme Payette: La Commission des accidents du travail.
M. Roy: J'aimerais savoir ce qui arrive dans le cas d'un accident
où la personne serait indemnisée en vertu de la Loi des accidents
du travail et que la responsabilité serait clairement
déterminée à l'encontre de la personne qui a
été la cause de l'accident.
Mme Payette: Pour ce qui est de l'indemnisation des dommages
corporels, il n'y a plus de re-
cherche de responsabilité. Les seuls cas où il y aura
maintien de la recherche de responsabilité, c'est lorsqu'il y aura un
accident au Québec impliquant un non-résident, tel que nous le
verrons un peu plus loin, à l'article 8. Dans ces seuls cas, dans la
mesure où on maintient la responsabilité, on maintient
également les droits inhérents au système de la
responsabilité, à savoir le droit de subrogation.
M. Giasson: Si je comprends bien, cela serait le cas d'un
accident dans lequel un Québécois serait blessé par un
automobiliste de l'extérieur, d'une province ou d'un Etat régi
encore par le système de la responsabilité civile.
Mme Payette: Ce n'est pas nécessairement, que dans le cas
d'un résident d'une autre province ou d'un Etat on tienne compte du
système de responsabilité de cet Etat.
Ce qu'on dit, pour les non-résidents, c'est que, lorsqu'ils
viennent au Québec et qu'il y a un accident impliquant un
non-résident, dans ce cas, c'est le système de la
responsabilité qui est maintenu, ce qui veut dire que la régie va
indemniser le non-résident dans la mesure où le
non-résident n'est pas responsable, tout comme si le régime
actuel était maintenu.
Or, pour le non-résident, il n'y a pas d'indemnisation
automatique par la loi; il faut donc qu'il y ait une démonstration de sa
non-responsabilité pour qu'il soit indemnisé. S'il
s'avérait que c'est le non-résident qui est responsable, à
ce moment-là, la régie conserve un droit de subrogation pour
recouvrer, de ce non-responsable ou de son assureur, toujours dans le cas
où c'est un non-résident, pour récupérer les sommes
que la régie a été appelée à verser par la
faute de ce non-résident.
Autrement dit, on maintient le droit de poursuite ou le droit de recours
en responsabilité dans le cas du non-résident, mais toujours
contre le non-résident, jamais contre un Québécois, un
résident du Québec.
Dans la même mesure, pour répondre à la question du
député de Beauce-Sud, les organismes comme la Commission des
accidents du travail conservent un droit de subrogation.
M. Roy: Ils le conservent, mais le citoyen du Québec,
l'automobiliste du Québec peut-il avoir la certitude et la garantie
qu'il n'y aura aucun recours contre lui-même s'il est responsable de
l'accident et que c'est prouvé, hors de tout doute, que la personne est
responsable?
Mme Payette: On pourrait, par exemple, dans le cas d'un accident
impliquant un Québécois et un non-résident... Si le
non-résident fait la démonstration, pour pouvoir obtenir les
indemnités de la régie, que c'est le Québécois qui
est responsable, c'est à peu près le cas qu'on peut soulever
où il serait possible qu'un organisme comme la régie ou un autre
organisme publique ait un droit de subrogation. Dans ce cas, il ne sera pas
permis à la régie de pouvoir récupérer les sommes
qu'elle a versées à un non-résident, ceci en vertu des
articles 3 et 4, l'article 4 principalement, qui dit qu'il n'y a aucune action
qui va être reçue devant une cour de justice.
Pour cela, il a fallu prévoir un amendement pour bien identifier
les cas où il sera possible d'avoir un droit de subrogation. C'est
l'article 9a qui a été introduit comme amendement.
M. Roy: Qu'est-ce qui arrive je pose des questions parce
que je pense que c'est quand même important qu'on le sache
à un joueur de hockey qui n'est pas un résident du Québec,
qui est victime d'un accident, qui se réfère, par exemple, au
droit international ou qui va puiser à certaines cours de justice pour
être en mesure de réclamer un plus gros montant, parce qu'il ne se
satisfait pas des indemnités qui sont prévus dans la Loi sur
l'assurance automobile du Québec? Qu'est-ce qui arrive à ce
moment-là?
Mme Payette: Nous avons dit tout à l'heure que, dans le
cas des non-résidents, ils étaient soumis au système de la
responsabilité. Dans la mesure où ils ne sont pas responsables,
ils vont pouvoir obtenir les indemnités de la régie, mais pas
plus que les indemnités de la régie, c'est-à-dire qu'ils
vont pouvoir obtenir jusqu'à $18 000. Tout comme un
Québécois serait dans la même situation, un joueur de
hockey québécois, par exemple, qui pourrait gagner un salaire
beaucoup plus élevé que $18 000 ou une autre personne, qui
pourrait gagner un salaire beaucoup plus élevé que $18 000, mais,
en vertu du régime qui est prévu, elle n'aura pas droit de
recours en responsabilité pour l'excédent des $18 000.
M. Roy: Elle n'a aucun droit de recours. Si elle se
réfère à certaines jurisprudences, par exemple, au niveau
du droit international, il y a quand même certains principes de droit
international. On sait qu'il y a des cours de justice, à un moment
donné, qui débordent de beaucoup les cadres de la justice
québécoise.
Mme Payette: On connaît à l'avance...
M. Roy: Je parle d'un joueur de hockey. Je pourrais bien prendre
une autre personne à qui un accident pourrait causer des pertes de $150
000 ou de $200 000 par année. On pourrait prendre le cas d'un artiste de
réputation internationale qui est au Québec et qui, à la
suite d'un accident, devient complètement incapable d'exercer sa
profession. Il serait plafonné à $18 000. S'il décide, en
vertu de certaines ententes, à savoir certaines protections sur le plan
international, qu'est-ce qui arrive à ce moment...? Est-ce que la
régie s'engage, de façon très claire et sans
équivoque, à prendre toute la responsabilité à son
compte pour protéger intégralement de façon à
être bien sûre que le citoyen du Québec ne pourra pas,
autrement dit, faire des réclamations par la suite.
Mme Payette: Ce que la loi dit à ce sujet, c'est que, dans
le cas où il y a un non-résident, comme
je l'ai expliqué tout à l'heure, c'est la régie qui
va indemniser le non-résident qui n'est pas responsable. On sait...
Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse, vous n'avez pas
terminé. Terminez donc votre réponse.
Mme Payette: Une seule phrase pour dire qu'on sait qu'en droit
international privé il y a quand même des difficultés. La
jurisprudence en droit international privé est loin d'être claire,
est loin d'être absolument étanche. Il peut dépendre de
l'endroit où la cause sera portée. Il peut dépendre des
interprétations. Il peut dépendre également du courant,
des tendances qui sont observées dans des juridictions qui sont
anglo-saxonnes, qui ont comme droit le "Common law". Aux Etats-Unis, ce n'est
pas du tout la même chose. Alors, il est absolument difficile ou
impossible de prévoir tous les cas qui peuvent survenir dans le
régime, surtout impliquant un non-résident.
M. Roy: J'aurais d'autres questions à poser
là-dessus.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Beauce-Sud, vous aurez le droit de parole lorsque nous reviendrons dans une
prochaine séance, si l'Assemblée nationale le veut bien, puisque
nous ajournerons nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 13 h 4)
Reprise de la séance à 17 h 9
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, madame et messieurs
les membres de la commission.
La commission des consommateurs, coopératives et institutions
financières poursuit l'examen du projet de loi no 67 intitulé Loi
sur l'assurance automobile.
Les membres de cette commission sont: M. Beauséjour (Iberville),
M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Gagnon (Champlain), M. Gosselin (Sherbrooke);
M. Goulet (Bellechasse) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M.
Laberge (Jeanne-Mance), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Landry (Fabre)
remplacé par M. Paquette (Rosemont); M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Giasson
(Montmagny-L'Islet); M. Lefebvre (Viau); M. Marois (Laporte) remplacé
par M. Grégoire (Frontenac); M. Marquis (Matapédia), Mme Payette
(Dorion), M. Raynauld (Outremont), M. Roy (Beauce-Sud); M. Russell
(Brome-Missisquoi), remplacé par M. LeMoignan (Gaspé); M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier) et M. Vaillancourt (Jonquière).
Nous en étions à l'étude de l'article 4 et la
parole est au député de Jonquière.
M. le député de Jonquière, vous avez la parole sur
l'article 4.
M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le
Président. C'est rare qu'on l'ait aussi rapidement. Quelques mots pour
donner suite à des propos tenus par le député de
Jacques-Cartier quant aux règles de preuve devant la Commission des
affaires sociales. En fait, celui-ci a fait état, ce matin, que les
règles de preuve seraient différentes de celles des tribunaux de
droit commun. Cela est certes vrai, mais, d'autre part, il ne faut jamais
oublier que, devant cette Commission des affaires sociales, il ne sera jamais
question de faire la preuve de la responsabilité ou de la faute de l'une
ou de l'autre des parties, de telle sorte que, selon les informations que je
possède, la Commission des affaires sociales pourra adopter
elle-même ses règles de procédure.
D'autre part, il est important de souligner que les avocats pourront
être présents devant la Commission des affaires sociales. Cela est
très bien ainsi puisqu'il ne fait aucun doute dans mon esprit que les
victimes d'accidents d'automobiles qui iront en appel devant cette commission
auront intérêt, je pense, même s'il n'est pas question de
responsabilité devant la commission, à faire appel à un
avocat pour défendre leurs intérêts.
D'autre part, M. le Président, on a souvent fait allusion, au
cours du débat sur la présente loi, de la composition du
tribunal. On faisait état surtout du fait que ce ne serait pas un juge
que l'on connaît habituellement qui présiderait cette commission.
Or, on sait que cette commission sera formée de trois personnes. Selon
les informations que je possède, un médecin fera partie de cette
commission et il y aura toujours un avocat, c'est-à-dire qu'une personne
ayant une formation juridique siégera à ce tribunal ou à
cette commission.
II est bien évident que ces personnes, M. le Président,
n'ont pas l'indépendance judiciaire qu'ont peut-être les juges de
tribunaux de droit commun, mais je pense qu'il est absolument
déplacé de douter de leur bonne foi, de leur conscience
professionnelle. Ces gens vont simplement juger en vertu de la preuve qui va
être faite devant eux. Je pense que les justiciables ou les victimes
d'accidents d'automobiles qui se présenteront devant la commission
auront toutes les garanties d'obtenir justice, étant
représentées par un avocat, ayant un médecin à
cette commission et, au moins, l'un des trois membres étant un avocat
ayant une formation juridique relative aux règles de preuve.
Je pense, M. le Président, que toutes ces clauses qui sont
incluses dans la loi donnent aux victimes toutes les garanties possibles
d'obtenir justice devant la Commission des affaires sociales. Ce qu'il reste
à souhaiter et à ce sujet je rejoins le
député de Montmagny-L'Islet et je termine mon intervention
là-dessus-c'est que, autant que possible, cette Régie d'assurance
automobile fasse en sorte, avec son personnel, que le règlement des cas
puisse se faire dans les meilleurs délais. Je pense que c'est là
un des points les plus importants de la discussion qu'on a actuellement.
Je constate que tous les partis de l'Opposition sont d'accord avec le
principe de la non-responsabilité; je constate également, avec
bonheur, que le Barreau est également d'accord avec ce principe. Ce qui
fait surtout peur aux gens de l'Opposition, c'est la création de la
Régie d'assurance automobile. Dans quel délai ça va se
faire? Comment ça va se régler? Est-ce que ça va
être une bureaucratie extraordinaire? Je pense que c'est le plus grand
souhait qu'on puisse faire, mais, selon les renseignements que nous avons, avec
725 personnes dans les bureaux qui vont être régionalisés,
décentralisés, je pense que, encore là, on s'est
donné toutes les garanties nécessaires pour malgré
le cas de Montmagny-L'Islet, dont les bureaux de la CAT sont situés
à Québec que les gens obtiennent justice dans les
meilleurs délais; du moins c'est à souhaiter et je pense que
ça doit être l'un des objectifs visés par la
régie.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, je suis étonné
des propos du député de Jacques-Cartier; non pas que je trouve
anormal qu'un député s'inquiète du maintien de notre
système judiciaire, ce avec quoi je suis parfaitement d'accord, mais
simplement sur le fait que l'article 4, à mon avis, est tout simplement
l'application du principe que nous venons d'adopter à l'article 3, quant
a ses conséquences juridiques dans le premier paragraphe.
Le premier paragraphe dit tout simplement que plus personne, au
Québec, ne pourrait être poursuivi, dans le cas d'un accident
automobile, devant les tribunaux, eu égard à sa
responsabilité.
Je pense que c'est une conséquence directe du principe de
non-responsabilité et, sauf er- reur et là, j'aimerais le
demander au conseiller juridique du ministre cet article ne traite pas
du droit d'appel possible d'un citoyen qui ne serait pas satisfait des
indemnités qui sont accordées par la régie.
Mme Payette: Cet appel est prévu plus loin dans la
procédure de réclamation et de paiement, autour de l'article 57
et de l'article 58.
M. Paquette: C'est bien ce que je pensais, M. le
Président, et j'aimerais bien que le député de
Jacques-Cartier m'écoute. Je pense que le premier paragraphe de
l'article 4, c'est tout simplement la conséquence, sur le plan
juridique, de la non-responsabilité et tout ce que cela dit, c'est que
personne ne pourrait être poursuivi devant les tribunaux quant à
sa responsabilité dans un accident d'automobile.
Le deuxième paragraphe, tout ce qu'il fait, c'est qu'il assure
à certaines personnes, qui pourraient être indemnisées
suivant la Loi des accidents du travail ou la Loi d'indemnisation des victimes
d'actes criminels, il permet à certaines personnes d'avoir le plein
montant auquel elles auraient droit suivant le régime public d'assurance
automobile.
Le troisième paragraphe traite de certaines exclusions normales,
par exemple un accident qui arrive durant une course automobile, et le dernier
paragraphe laisse une certaine place à l'entreprise privée de
prévoir des régimes supplémentaires que les citoyens
paieront et dont ils recevront les avantages, mais toujours sans
possibilité de poursuivre une personne devant les tribunaux quant
à sa responsabilité devant une assurance automobile. C'est tout
simplement un article étanche, à mon avis, qui enlève le
droit de recours et qui ne traite aucunement du droit d'appel. Cela reste
ouvert et ce sera dans les autres articles qu'on discutera de cela. Est-ce que
le droit d'appel devrait aller à la Commission des affaires sociales,
comme le propose le projet de loi, ou devant les tribunaux? Là, je ne
reprendrai pas les arguments du député de Jonquière, je ne
pense pas que ce soit nécessaire d'aller devant les tribunaux.
Autrement dit, il ne faut pas nier au législateur la
possibilité, par un nouveau régime, qui devient sans égard
à la responsabilité, de rendre non nécessaires certains
appels en justice. C'est précisément un des gains du
régime de faire en sorte que les indemnités soient garanties,
indépendantes de la responsabilité des citoyens et, encore une
fois, tout ce que fait l'article 4, c'est de préciser les
conséquences légales de ce régime de
non-responsabilité.
Le Président (M. Vaillancourt Jonquière): M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: M. le Président, je voudrais intervenir
très brièvement sur cet article et répéter, si cela
peut faire avancer les choses, devant l'attitude résolument hostile du
gouvernement à toute modification répétée que nous
nous inscrivons en faux contre quelques-uns des principes contenus dans cet
article.
Le premier paragraphe de cet article a le défaut majeur d'enlever
tout recours en justice à un citoyen québécois. Nous
réitérons une fois de plus, M. le Président, qu'il n'est
pas nécessaire, pour atteindre une solution socialement juste pour tous
les citoyens, d'enlever le droit de recours au système judiciaire. Nous
soutenons plutôt le contraire. Ce n'est pas parce que le système
judiciaire est actuellement lent que nous allons l'abolir et inclure dans un
projet de loi les amendes ou les peines qui vont de pair avec chaque offense.
Vouloir procéder ainsi signifierait que l'on ne croit pas à la
justice humaine et que l'on se fie à l'arbitraire et au
cloisonnement.
Nous sommes proches d'un gouvernement qui dirige avec des
ornières. Nous ne croyons pas que le gouvernement ait fait de cette
question de recours une question de principe. Rien n'empêche un
système public d'assurance des dommages corporels, sans égard
à la responsabilité, de prévoir un droit de recours
à un tribunal de droit commun. A l'argument qui dit que la
procédure actuelle est lente, nous pouvons répéter: Oui,
c'est vrai. Améliorez le système judiciaire, instituez
même, à la limite, un tribunal judiciaire responsable et
spécialisé dans l'audition de causes relevant de l'application de
la loi sur l'assurance automobile.
Je pense, de plus, M. le Président, qu'il serait possible de
laisser les différents tribunaux administratifs prévus par la
loi, appels à la régie et Commission des affaires sociales,
accomplir leurs rôles. Toutefois, il nous apparaît
nécessaire et juste de laisser un recours à un tribunal
judiciaire. L'expérience nous prouve que des jugements des tribunaux
administratifs peuvent desservir des citoyens...
M. Paquette: Question de règlement. Je m'excuse, mais je
pense que mon intervention précédente avait pour but de ramener
le débat sur le sens de l'article 4. Quand on en est rendu à
parler d'appels possibles devant les tribunaux, suite aux décisions de
la régie, je pense qu'on est totalement à l'extérieur de
l'article 4. Ce dont il faut discuter, c'est: Est-ce qu'on accepte, oui ou non,
les conséquences légales du principe de
non-responsabilité, c'est-à-dire qu'aucune action en justice ne
pourra être prise contre aucun citoyen quant à sa
responsabilité dans un accident d'automobile?
La question de déterminer si un droit d'appel sera maintenu, soit
devant la commission des affaires sociales ou devant les tribunaux, est une
autre question qui est traitée dans un article ultérieur.
M. Saint-Germain: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: On peut interpréter cet article 4
à sa façon. Mais je lis bien que lorsqu'on dit que les
indemnités prévues au présent titre tiennent lieu de tous
les droits, je crois que c'est un sens très général. Si
plus loin, dans le document ou dans la loi, on a voulu parler
spécifiquement du droit d'appel aux décisions de la régie,
ici rien n'empêche que c'est une rédaction qui est très
générale. Je ne suis pas avocat, mais je me demande bien si un
juge n'interpréterait pas cet article en particulier, comme voulant dire
que les droits de recours, à tous points de vue, sont abolis, parce
qu'on dit, en plus: Et nulle action à ce sujet n'est reçue devant
une cour de justice.
Je crois qu'on devrait avoir la liberté d'action
d'interpréter cet article no 4 dans le sens que le député
le fait actuellement, et je ne vois pas pour quelle raison on devrait
arrêter son argumentation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Gaspé, je pense être lié,
relativement à ce cas, par une décision de la présidence
qui, comme vous le savez, est indivisible. Le député de Vanier,
qui occupait ce fauteuil ce matin, suite à un amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys, à l'article 3, l'a
déclaré prématuré. Il a déclaré que
s'il était présenté à l'article 4, celui-ci serait
jugé irrecevable, puisque, selon lui, cela allait à rencontre du
principe.
Ce que je vous incite à faire, c'est de parler sur les objets de
l'article 4, tout en vous invitant le plus possible à ne pas parler des
droits d'appel devant les tribunaux de droit commun, puisque selon une
décision de la présidence, antérieurement rendue, cela
irait à l'encontre du principe des articles 3 et 4.
M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Mon intervention ne sera pas très longue.
Nous nous étions basés sur le fait qu'on mentionnait à cet
article 4, ce que le député de Jacques-Cartier vient de lire, ce
recours aux tribunaux. Nous pensions que l'un n'empêcherait pas
nécessairement l'autre cas d'agir. Je vais continuer simplement.
Je dis simplement que l'expérience nous prouve que les jugements
des tribunaux administratifs peuvent desservir des citoyens, qu'on doive
largement expliquer la situation des citoyens, avant même que l'on ne
modifie une décision. Chaque administration a tendance à se
protéger elle-même. Pensons à la Commission des accidents
de travail. Ce n'est pas que dans le système judiciaire actuel l'on
retrouve des lenteurs. Des dossiers à la CAT sont en suspens depuis des
années. Ce n'est pas parce que l'Etat intervient qu'il y a assurance de
justice.
Le projet de loi 67 n'amène pas, loin de là, la justice
immanente. Si l'on ne peut prévoir une accélération du
règlement des réclamations, ce n'est pas nécessairement
parce qu'il y aura une meilleure justice, mais bien parce qu'on aura
institutionnalisé les indemnités. Dans un sens et dans la
majorité des cas, nous pouvons prévoir que le processus
actuellement prévu satisfera la grande majorité des
réclamants.
En terminant, nous voulons tout simplement que le ministre accepte
d'améliorer son projet de loi en permettant le droit de recours et en
considérant les indemnités prévues comme étant
contestables devant un tribunal judiciaire qui aurait l'avantage de respecter
la séparation des pouvoirs si chers à notre
démocratie.
Dans cet état d'esprit, je voudrais proposer une motion de
sous-amendement à l'article 4. Puis-je vous la lire?
Le Président (M. Bertrand): Ce n'est pas une motion de
sous-amendement, c'est une motion d'amendement.
M. Paquette: C'est une motion d'amendement.
M. Le Moignan: Une motion d'amendement, excusez-moi. Je vais la
lire et je vous laisse le soin de la juger.
Le Président (M. Bertrand): Bien sûr. D'accord.
M. Le Moignan: Que le premier paragraphe de l'article 4 soit
remplacé et se lise ainsi: "Les indemnités prévues au
présent titre tiennent lieu d'indemnités de base en raison d'un
dommage corporel causé par une automobile. Toute victime insatisfaite du
règlement de la réclamation de dommages corporels causés
par une automobile peut en appeler selon: a) les processus administratifs
d'appel prévus à la présente loi et, en cas de
désaccord, avec les jugements de ces tribunaux administratifs. b)un
tribunal judiciaire."
Je vous confie ce document, M. le Président.
M. Paquette: M. le Président, sur la
recevabilité.
Le Président (M. Bertrand): Je vais attendre de le
relire.
M. Paquette: D'accord.
M. Vaillancourt (Jonquière): Pourrait-on en avoir une
copie?
Le Président (M. Bertrand): Je le relis pour que les
membres de la commission puissent l'avoir à l'esprit avant qu'ils ne
l'aient entre leurs mains.
Motion d'amendement présentée par le député
de Gaspé pour que le premier paragraphe de l'article 4 soit
remplacé et se lise ainsi: "Les indemnités prévues au
présent titre tiennent lieu d'indemnités de base en raison d'un
dommage corporel causé par une automobile. Toute victime insatisfaite du
règlement de la réclamation de dommages corporels causés
par une automobile peut en appeler selon: a) les processus administratifs
d'appel prévus à la présente loi et, en cas de
désaccord, avec les jugements de ces tribunaux administratifs. b)
à un tribunal judiciaire."
M. le député de Rosemont.
M. Paquette: Sur la recevabilité, je pense que cet
amendement est irrecevable pour un certain nombre de raisons. L'amendement
change complètement la nature du premier paragraphe.
Le premier paragraphe ne traite pas du droit d'appel concernant des
décisions de la régie. Cette question est traitée à
l'article 58 du projet de loi, où on mentionne qu'un réclamant,
qui se croit lésé par une décision rendue en
révision par la régie, peut interjeter l'appel de cette
décision à la commission des affaires sociales. C'est donc
à cet article que cet amendement devrait se faire, et par
conséquent, il est pour le moins prématuré. D'autre part,
si cet amendement est prématuré, il a de plus pour effet de
supprimer le premier paragraphe dans sa rédaction actuelle, lequel
paragraphe est lié au principe du projet de loi, le principe du projet
de loi est, en effet, un régime de non-responsabilité dans le
domaine des dommages corporels. Si nous supprimions le premier paragraphe pour
le remplacer par un nouveau paragraphe, qui est à peu près
l'équivalent de l'article 58 modifié du projet de loi, cela veut
dire que nous n'aurions plus dans le projet de loi aucun article qui traite des
conséquences légales de la non-responsabilité,
c'est-à-dire l'impossibilité pour quiconque, par un recours ou un
droit d'action, de tenir un citoyen responsable d'un accident d'automobile.
M. le Président, en résumé, cet article, par la
suppression du premier paragraphe, va contre le principe du projet de loi, et
deuxièmement, il est au moins prématuré, puisque cette
question est traitée à l'article 58 du projet de loi,
c'est-à-dire que le nouveau paragraphe qui est proposé est
traité, fait l'objet de l'article 58 du projet de loi.
Le Président (M. Bertrand): Est-ce qu'il y a des
députés de l'Opposition qui veulent se faire entendre sur la
recevabilité de cette motion d'amendement?
M. Saint-Germain: M. le Président, je crois que cet
amendement est dans l'ordre, comme je le disais tantôt, lorsqu'on dit que
l'indemnisation tient lieu de tous les droits, de tous les recours et droits
d'actions de quiconque, c'est un terme général. Ce n'est que plus
loin dans le projet de loi qu'on mentionne la perte de droit d'appel,
spécifiquement en ce qui a trait aux décisions de la commission
des affaires sociales.
M. le Président, à chaque fois qu'on semble modifier un
principe dans le projet de loi, même si on le limite partiellement, s'il
faut toujours revenir à dire qu'on modifie le principe qu'on a
accepté en deuxième lecture, je crois que l'Assemblée
nationale nous aurait simplement retiré le droit d'étudier en
commission ces articles qu'elle considérait de base. Alors, cet
amendement, ap-
porté par le député, ne va pas à rencontre
du principe, peut le modifier partiellement, mais il faut tout de même
admettre que ce que l'Assemblée nationale a accepté en
deuxième lecture, c'est le titre de la loi, c'est une loi sur
l'assurance automobile. Alors, je crois que, principalement et
fondamentalement, l'Assemblée nationale a cru bon d'admettre,
majoritairement, qu'il nous fallait apporter une loi sur l'assurance
automobile, c'est ça le grand principe de la loi, et tous les articles
sont là simplement pour déterminer ce que va être cette loi
sur l'assurance automobile. Si l'Assemblée nationale n'avait pas voulu
une loi sur l'assurance automobile, nous ne serions pas ici. Elle a voulu une
loi à ce sujet et c'est ça, fondamentalement, l'ordre que nous
avons reçu de l'Assemblée nationale.
Vous savez, M. le Président, que les principes à ce sujet
sont très nombreux, et si on ne peut pas apporter d'amendements en
prétendant que les principes sont modifiés, c'est dire que dans
les articles les plus importants, il sera absolument impossible, pour
l'Opposition, de soumettre à cette commission son point de vue et la
façon qu'elle conçoit ce que doit être une assurance
automobile dans le meilleur intérêt de la population.
M. Grégoire: M. le Président, sur la
recevabilité.
Le Président (M. Bertrand): Non, je m'excuse. Il y a un
seul représentant par formation politique sur la
recevabilité.
M. Grégoire: Alors, on ne peut pas parler...
Le Président (M. Bertrand): C'est fait au nom du
gouvernement.
M. Grégoire: S'il y a une discussion au nom du
gouvernement, on ne peut pas exprimer le point de vue qui peut être
dissident.
M. Vaillancourt (Jonquière): On ne veut pas de dissidents
en commission parlementaire.
M. Lalonde: On n'a pas d'objection, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): Je sais, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Grégoire: Est-ce que je peux demander le consentement
unanime?
M. Lalonde: Cela peut faciliter...
Le Président (M. Bertrand): De toute façon, le
député de...
M. Saint-Germain: Vous avez notre consentement, M. le
député.
M. Lalonde: On demandera le vôtre tout à
l'heure.
Le Président (M. Bertrand): Le député de
Gaspé peut utiliser son droit de parole sur la recevabilité,
comme c'est son droit à titre de représentant de l'Union
Nationale.
M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Personnellement, je n'ai pas d'objection à
ce que le député de Frontenac...
Le Président (M. Bertrand): Non, mais...
M. Le Moignan: ... mais je veux prendre mon droit de parole tout
de suite...
Le Président (M. Bertrand): Prenez-le
immédiatement.
M. Grégoire: Mais, M. le Président, seulement une
seconde là-dessus.
M. Le Moignan: Ce ne sera pas long.
M. Grégoire: J'ai demandé si j'avais le
consentement unanime.
Le Président (M. Bertrand): Cela viendra après, M.
le député de Frontenac.
M. Grégoire: Mais s'il ne parlait pas, il clorerait le
débat.
Le Président (M. Bertrand): Cela viendra après;
nous en discuterons une fois que le député de Gaspé sera
intervenu sur la recevabilité de la motion.
M. Grégoire: D'accord.
M. Le Moignan: M. le Président, je voudrais simplement
ajouter un mot. C'est qu'il me semble que l'amendement proposé ici ne se
réfère pas à un droit d'appel sur la
responsabilité, oui ou non, mais bien sur les indemnités
attribuées par la régie. C'est dans ce sens-là que nous
avons apporté notre amendement.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bertrand): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je m'excuse auprès du député de
Gaspé.
M. Le Moignan: J'ai terminé.
M. Lalonde: Je sais que vous avez une sagesse dont vous avez fait
preuve jusqu'à maintenant et je crois que la consultation juridique que
vous faites actuellement avec l'avocat du ministre est sûrement bien
fondée et dans le but de vous éclairer, mais nous n'avons pas le
loisir de nous faire écouter en même temps, parce que vous ne
lirez pas ce que nous allons dire sur la recevabilité; ce n'est pas
comme si vous aviez un délibéré.
Le Président (M. Bertrand): Vous avez raison, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, je vais être tout oreilles
vers le député de Gaspé et je prendrai, s'il le faut,
tantôt, quelques instants pour réfléchir à la
décision que j'aurai à rendre.
M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Je n'insisterai pas davantage, M. le
Président, je voulais simplement dire que l'amendement proposé ne
se réfère pas à un droit d'appel sur la
responsabilité, mais c'était plutôt sur les
indemnités que la régie aurait à payer. C'est tout ce que
je voulais ajouter. Ce n'est pas une question de principe et je termine avec
cela.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Frontenac, vous vouliez intervenir sur la recevabilité. Je n'accepterai
que s'il y a consentement unanime de la part des membres de la commission.
M. Saint-Germain: Accepté.
M. Paquette: En ce qui me concerne, je n'ai pas d'objection. Je
ne veux pas préjuger que mes collègues sont d'accord...
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Frontenac, exceptionnellement.
M. Le Moignan: M. le Président, n'y aurait-il pas moyen
d'obtenir une photocopie? Les députés se posent des
questions.
Le Président (M. Bertrand): C'est que j'avais absolument
besoin de cette feuille pour en prendre connaissance; je suspendrai la
séance quelques minutes, de toute façon, pour que les membres de
la commission puissent en avoir chacun une copie.
M. Grégoire: M. le Président, si l'amendement veut
dire qu'une victime d'un accident, ayant reçu le maximum d'indemnisation
prévu par la loi, a le droit d'avoir un recours au tribunal, à ce
moment, je dirais que ça irait contre le principe et que ce ne serait
pas recevable. Si elle veut avoir plus que le maximum prévu des
indemnisations, à ce moment, qu'elle ait une assurance additionnelle
d'un courtier privé, mais si, dans le cadre des décisions de la
Commission des accidents du travail et de la Commission des affaires sociales,
elle reçoit 50% du maximum prévu d'indemnisation dans cette loi,
à ce moment, je crois qu'elle a le droit d'avoir un appel devant un
tribunal qui ne soit pas une commission administrative; non pas parce qu'elle
voudra obtenir plus que les indemnisations...
M. Paquette: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, M. le
député de Frontenac! Il y a une question de règlement
soulevée par M. le député de Rosemont.
M. Paquette: En toute amitié pour mon collè- gue de
Frontenac, je tiens à dire qu'il est en train de parler sur le fond et
non sur la recevabilité.
M. Grégoire: C'est justement, c'est qu'en
spécifiant bien cette distinction dans l'amendement, c'est là
qu'on arrive ensuite à discuter sur la recevabilité.
S'il s'agit d'un appel d'une victime qui n'est pas satisfaite du montant
reçu dans le cadre des indemnisations prévues, si c'est ce que la
motion d'amendement veut dire, je crois qu'il devrait y avoir recours à
un tribunal.
Le Président (M. Bertrand): D'accord, mais il ne s'agit
pas de parler sur le fond, ici, M. le député de Frontenac;
simplement...
M. Grégoire: Je crois que, à ce moment, la motion
est recevable, si c'est ce dont il s'agit; je crois que la motion n'est pas
assez claire pour le distinguer et, si la motion n'est pas assez claire...
Le Président (M. Bertrand): C'est ce que nous allons
décider à l'instant, M. le député de Frontenac.
Je suspends pour un maximum de trois minutes, le temps de faire faire
des photocopies et de rendre une décision.
(Suspension de la séance à 17 h 38)
Reprise de la séance à 17 h 43
Le Président (M. Bertrand): J'aurais, avant de rendre la
décision, une question à poser au député de
Gaspé. Le paragraphe de la motion d'amendement se lit comme suit: "Toute
victime insatisfaite du règlement de la réclamation d'un dommage
corporel." S'agit-il d'une insatisfaction du règlement de la
réclamation d'un dommage corporel sur la base des indemnités que
procure le régime public d'assurance automobile?
M. Le Moignan: Oui, bien sûr.
Le Président (M. Bertrand): D'accord. C'est important. Je
vous explique pourquoi cet élément technique a son importance.
C'est qu'il est possible qu'il y ait aussi des indemnités
additionnelles. Si c'était le cas, nous parlons de deux choses en
même temps et il serait important de le clarifier. S'il ne s'agit que de
l'appel sur la base d'une insatisfaction du règlement de la
réclamation d'un dommage corporel à partir du régime
public existant en vertu de la loi, c'est une toute autre question.
Premièrement, M. le député de Gaspé, je
crois qu'il est fondamental que l'amendement que vous souhaitez apporter au
premier paragraphe soit vraiment un amendement qui a pour fonction de modifier
des mots dans ce premier paragraphe sans pour autant en attaquer le principe.
Je m'explique. Le premier paragraphe n'a pas comme
fonction, sur le plan législatif, de présenter un droit
d'appel ou de refuser un droit d'appel quant aux indemnités obtenues en
vertu du régime public d'assurance automobile. Il n'a comme seule
fonction que de consacrer le principe selon lequel les indemnités sont
obtenues par des individus, mais sans égard à la
responsabilité et, à ce titre, il ne peut y avoir aucun droit,
recours et droit d'action devant une cour de justice sur la question de
responsabilité.
Ce n'est donc pas un paragraphe qui a pour fonction de parler d'un appel
quant aux indemnités. Donc, l'amendement que vous souhaitez faire au
premier paragraphe de l'article 4 a pour effet d'enlever le principe même
qui se trouve dans le paragraphe premier de l'article 4. Votre motion
d'amendement et j'en comprends maintenant le sens veut indiquer
que, dans la mesure où des individus qui seraient insatisfaits des
indemnités obtenues, sans égard à la
responsabilité, sans droit ni recours, ni droit d'action, pourraient
tout de même faire appel de ces indemnités auprès d'un
tribunal administratif ou auprès d'un tribunal de droit commun.
Dans ces circonstances, je ne peux recevoir votre amendement, parce
qu'il tente d'abord d'amender un paragraphe, mais, en changeant
complètement le sens de ce paragraphe, et ce n'est pas simplement un
amendement sur la forme, c'est vraiment un amendement sur le fond, et ce fond,
nous l'avons bien dit lors d'une décision précédente, est
inattaquable parce qu'il a déjà été discuté
en deuxième lecture.
A ce moment-ci, je juge donc irrecevable votre motion d'amendement mais
uniquement, je veux bien l'indiquer, sur la base d'une présentation
prématurée à un mauvais moment sur un mauvais paragraphe
parce que la motion d'amendement vient alliéner le principe même
du premier paragraphe de l'article 4. Dans ce sens, je veux simplement
indiquer, M. le député de Gaspé, qu'un tel amendement, je
l'indique immédiatement, pourrait tout à fait être
recevable dans le cas de la discussion de l'article 57 ou 58 où il est
question d'appel concernant un règlement, concernant des
indemnités de réclamation dans le cas d'un dommage corporel. Il
est question là de tribunal administratif; il pourrait donc être
question, au moment d'un amendement, d'un second recours auprès d'un
tribunal de droit commun.
Je veux donc bien indiquer qu'autant je la juge prématurée
autant je ne la juge pas irrecevable en d'autres temps et d'autres lieux.
M. Le Moignan: M. le Président, si j'ai bien compris, vous
interprétez de façon légale ce qui est écrit dans
le premier paragraphe de l'article.
Le Président (M. Bertrand): Je suis obligé de
donner une interprétation légale du premier paragraphe pour
être en mesure de bien saisir si votre amendement a le droit de se situer
à ce moment-là. Ce que vous nous présentez, si
c'était discuté et voté, nous amènerait à
adopter ou à voter un paragraphe qui serait tout à fait de nature
diffé- rente de celui qui existe à l'heure actuelle. En d'autres
mots, vous demandez que le premier paragraphe soit tout autre que celui qui est
là et que nous votions sur un tout autre principe que celui qui est
inclus dans le premier paragraphe. Ce sont deux questions totalement
différentes l'une de l'autre.
Je dis donc qu'elle est simplement prématurée mais qu'elle
n'est pas pour autant irrecevable, ni dans son fond ni dans sa forme, à
un autre moment. C'est uniquement ce que je veux indiquer, M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président.
M. Saint-Germain: M. le Président, il devient
excessivement difficile de faire étudier par la commission le genre de
loi que nous, de l'Opposition, aimerions voir adopter. Vous savez sans doute,
M. le Président, parce que nous avons pris une position bien claire
à ce sujet lors de la deuxième lecture de ce projet de loi, que
l'Opposition officielle voudrait avoir un régime de base fondé
sur la non-responsabilité, mais, d'un autre côté, nous
voudrions qu'excédant ce régime de base les citoyens ou les
victimes conservent ce droit de recours aux tribunaux pour être
indemnisés relativement aux blessures corporelles qu'ils auraient
reçues et qui dépasseraient amplement ou tout simplement les
dommages que le régime peut se permettre légalement de remettre
aux victimes.
En ce sens, j'aimerais vous soumettre un amendement: "Que le
quatrième alinéa soit remplacé par l'alinéa
suivant: La victime d'un accident, qui a droit à l'indemnisation
prévue au présent titre, peut bénéficier de
celle-ci tout en conservant ses recours pour l'excédent".
Je ne veux pas plaider la recevabilité, mais permettez-moi tout
de même de vous...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de
Jacques-Cartier me permettrait-il une question?
M. Saint-Germain: Oui.
M. Vaillancourt (Jonquière): Pour l'excédent,
est-ce que c'est un système de responsabilité ou de
non-responsabilité?
M. Lalonde: C'est une modalité... de responsabilité
peut-être; il faut lire cela.
M. Saint-Germain: C'est une modalité, on pourrait...
M. Lalonde: De toute évidence, cela serait
responsabilité.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est ce que je
présumais. Sur la recevabilité, M. le Président.
Le Président (M. Bertrand): Cela serait
responsabilité, à cause du recours. M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
voudrais tout simplement vous référer à une dé-
cision que vous avez rendue ce matin, suite à une motion
d'amendement présentée par le député de
Jacques-Cartier, et ce, à l'article 3.
Je n'ai pas le texte de l'amendement proposé à ce
moment-là par le député de Marguerite-Bourgeoys
excusez-moi, c'était la motion d'amendement présentée par
le député de Marguerite-Bourgeoys mais je me rappelle
qu'à ce moment-là le sens de cette motion était le
même que celle que vous avez actuellement devant vous. Vous aviez dit,
à ce moment-là, qu'elle était prématurée.
Vous avez même ajouté que, si cette motion était
présentée à l'article 4, vous la jugeriez irrecevable. Je
vous rappelle tout simplement la décision que vous avez rendue ce matin
à ce sujet.
M. Lalonde: M. le Président, je n'étais
malheureusement pas ici lorsque vous avez disposé de ma motion
d'amendement. Je m'étais excusé auprès de vous, devant
partir d'urgence. Ce n'est pas parce que les absents ont tort, je ne peux pas
évoquer cet adage pour discuter de votre décision.
Je pense, par exemple, que si vous avez dit que ma motion était
prématurée et que, si elle était présentée
à l'article 4, elle serait irrecevable, c'est peut-être cette
dernière partie de votre décision qui aurait été
prématurée.
De toute façon...
Le Président (M. Bertrand): ... maturation à
l'article 4.
M. Lalonde: II faut bien s'entendre sur ce qu'est le principe. Si
le gouvernement pense que tout est principe dans ce projet de loi, on est aussi
bien de lever la séance et faire rapport à l'Assemblée
nationale. Je sais que votre tâche n'est pas facile. Vous avez toute ma
sympathie et le respect des députés de l'Opposition officielle,
sans doute, de même que des autres, dans la tâche que vous
accomplissez.
Il faut quand même voir aussi que la disparition du concept de
responsabilité, c'est le principe qui a été affirmé
et, je crois, adopté, à l'article 3. A l'article 4, il s'agit de
recours, les droits de recours de celui qui est indemnisé.
Si nous modifions ce droit de recours par une motion d'amendement, si
nous désirons modifier ce droit de recours par une motion d'amendement,
on peut, à ce moment-là, mais cela devient une modalité,
dire que ce recours que nous voulons voir modifié serait fait en
fonction des lois en vigueur, c'est-à-dire selon le concept de
responsabilité, mais cela devient une modalité de l'article 4,
s'il était adopté tel qu'amendé. Ce n'est plus une
question de principe. Le principe a été affirmé pour le
régime, sans égard à la responsabilité, mais pour
le régime seulement, tandis que, quant au droit de recours, c'est
au-delà du régime que nous voudrions voir modifier l'article 4 en
ce qui concerne les droits de recours seulement, et ajouter au recours de la
victime, tel que mentionné à l'article 4, un droit de recours qui
tienne compte de la responsabilité. Dans cette mesure, ce n'est pas au
principe du tout que nous nous attaquons, nous élargissons en fait
l'article 4. Nous conservons le principe selon lequel l'indemnisation tient
lieu de tous les droits et recours et nous l'élargissons un peu, c'est
tout. Ce n'est pas une question de principe, c'est une question de
modalité, à savoir que cet élargissement se ferait en
fonction du système de responsabilité.
Dans cette mesure, je pense que c'est une décision importante que
vous allez rendre, parce que nous allons aborder de plus en plus d'articles qui
vont s'éloigner du principe même, de la moelle du projet de loi
pour s'attacher davantage aux modalités de l'application. Je pense qu'on
commence à le faire à l'article 4.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Gaspé, avez-vous des commentaires là-dessus?
M. Le Moignan: Non, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense...
Le Président (M. Bertrand): Seulement s'il y a
consentement unanime des membres de la commission.
M. Vaillancourt (Jonquière): ... que c'est
extrêmement pertinent. Je suis assuré que M. le
député de Marguerite-Bourgeoys va...
M. Lalonde: Si c'est aussi éclairant que tantôt,
j'hésite à donner mon consentement.
Le Président (M. Bertrand): II n'est pas question du
député de Frontenac, il est question du député de
Jonquière.
M. Lalonde: Oui, sûrement. Je suis certain qu'il va faire
état d'autant de générosité à notre
égard.
M. Grégoire: Je voudrais soulever une question de
règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): Entre confrères.
Le Président (M. Bertrand): Brièvement. M. le
député de Frontenac, sur une question de règlement.
M. Grégoire: Lorsqu'un membre de la commission veut
parler, doit-il avoir le consentement unanime de tout le monde pour prendre la
parole?
Le Président (M. Bertrand): Sur ces questions-là,
oui, parce qu'habituellement, d'après nos traditions, M. le
député de Frontenac, sur les questions de recevabilité, on
permet un seul porte-parole par formation politique.
M. Grégoire: Est-on encore sur la recevabilité? Je
pensais que cela avait été réglé et que vous
l'aviez déclarée non recevable.
Le Président (M. Bertrand): Non. M. le
député de Jonquière, vous avez la parole,
brièvement, s'il vous plaîtl
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
j'aimerais tout simplement attirer votre attention sur la formulation de
l'article 3 tel que rédigé. J'ai suivi avec attention
l'argumentation du député de Marguerite-Bourgeoys. Je voudrais
vous dire que l'article 3 pourrait être écrit autrement, et
à ce moment, je donnerais raison au député de
Marguerite-Bourgeoys. Par exemple, s'il était écrit: La victime
d'un dommage corporel causé par une automobile est indemnisée,
sans égard à la faute, par la régie, et suivant les
dispositions du présent titre. Or, je vous ferais remarquer que c'est
l'indemnisation qui est faite par la régie et suivant les dispositions
du présent titre, et qu'il y a une virgule après le mot "titre",
de telle sorte que nous devons absolument lier les mots "sans égard
à la responsabilité de quiconque" aux mots "la victime d'un
dommage corporel causé par une automobile". Or, le principe de l'absence
de responsabilité est étendu à toute victime d'un dommage
corporel. Les mots "indemnisée par la régie et suivant les
dispositions du présent titre" ne s'appliquent qu'aux indemnités
prévues au titre 1. Autrement dit, l'article aurait été
écrit différemment si le législateur avait voulu enlever
la responsabilité seulement pour les dommages prévus au titre
1.
M. Saint-Germain: Je ne sais pas si je pourrais, mais il me
semble quej'ai en tête un argument...
Le Président (M. Bertrand): S'il y a un consentement
unanime, je vais vous entendre, M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Ce principe...
Le Président (M. Bertrand): Sur la
recevabilité.
M. Saint-Germain: Sur la recevabilité. Ce principe,
à l'article 4, a même été modifié par le
gouvernement on l'a vu en deuxième lecture pour les
étrangers voyageant au Québec et pour les Québécois
qui voyagent à l'extérieur. Dans l'article 17, on le dit au
paragraphe 4, il y a des gens qu'on élimine au point de vue des
blessures corporelles, il y a déjà des exceptions qui sont dans
la loi même et qu'on a acceptées lors du projet de loi en
deuxième lecture. Comment cela se ferait-il? Par quel raisonnement, nous
de l'Opposition, au niveau de cette commission, ne pourrions-nous pas modifier,
si vous voulez, cette extension ou ces remarques? On ajoute simplement une
exception comme il y en a déjà, incluse dans la loi. Cela me
semble être tout à fait évident.
Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie, messieurs,
pour vos remarques. L'énorme difficulté dans un tel projet de
loi, et je pense que c'est le cas sans doute pour l'ensemble des projets de
loi, mais cela me paraît très clair ici, c'est de bien arriver, au
moment où nous faisons l'étude de ce projet de loi, article par
article, à s'entendre sur ce qui est principe immuable, à la
suite d'une discussion en deuxième lecture à l'Assemblée
nationale.
En d'autres mots, jusqu'où va le principe? Où se
termine-t-il? Où commencent les modalités et les détails?
En d'autres mots, quelle est cette frontière, difficile à
définir d'ailleurs, où nous cessons de parler des principes et
nous commençons à parler des modalités?
J'ai déjà indiqué, dans une décision rendue
il y a quelques jours, à une question que me posait le
député de Beauce-Sud... C'était une directive qu'il me
demandait, à savoir est-ce que telle chose, c'est au niveau des
principes? Est-ce que tel élément, c'est au niveau des principes?
Il avait clairement demandé: Est-ce que l'absence de
responsabilité, la non-responsabilité, fait aussi partie des
principes de la loi telle que votée en deuxième lecture? Je lui
ai répondu clairement, à ce moment-là: Oui, M. le
député de Beauce-Sud. J'ai dit: Le principe de la loi, tel qu'il
m'apparaît avoir été énoncé en
deuxième lecture, demandait, proposait à l'Assemblée
nationale d'instaurer un régime public d'assurance automobile pour la
couverture des dommages corporels, sans égard à la
responsabilité, assurance obligatoire, et qu'il y avait, à
côté de cela, maintien d'un régime privé d'assurance
automobile pour la couverture des dommages matériels. Ce sont, en gros,
à peu de choses près, les mots que j'avais utilisés pour
résumer ce qui, aux yeux du président, apparaissait être
les principes immuables votés en deuxième lecture.
Dans le cas présent qui fait l'objet de cette motion
d'amendement, j'admets... Là-dessus, je pense que le
député de Jacques-Cartier s'est servi d'un élément
qui peut prêter un petit peu à confusion, à savoir
qu'à l'article 3, on affirme le principe de la
non-responsabilité. Mais ce n'est pas une critique que je veux
adresser aux législateurs, mais, comme président, j'argumente
dans cet article, on s'est trouvé à inclure deux grands
principes en même temps. Ceci, pour les fins de la discussion, peut
prêter à confusion, puisqu'on pourrait avoir le sentiment que l'un
est principe et l'autre est accessoire, alors qu'en réalité, si
on s'en remet à une analyse sémantique de cet article 3, on
réalise bien qu'effectivement il s'agit de deux principes
différents inclus dans un même article.
En d'autres mots, la non-responsabilité n'est pas un principe ou
une modalité qui est uniquement attaché à la
création d'un régime public d'assurance automobile; c'est aussi
un principe en tant que tel qui vaut pour la couverture faite par la
régie pour les indemnités de base, mais aussi pour la couverture
qui pourrait être celle que des gens accepteraient de prendre à
partir d'un supplément d'assurance additionnelle, au niveau du
régime privé.
Or, dans ces circonstances, c'est l'article 4 qui nous permet de
préciser l'article 3, même si l'article 3, quand on l'analyse dans
sa sémantique, m'apparaît suffisamment clair pour dire qu'il y
a
vraiment deux principes différents, la création du
régime public avec administration par une régie et la
non-responsabilité. C'est, je pense, spécifié clairement
au dernier paragraphe de l'article 4, où on dit: "Rien dans le
présent article ne limite le droit d'une victime de réclamer une
indemnité en vertu d'un régime privé d'assurance"
c'est donc une couverture additionnelle, mais là, on
répète bien, pour que ce soit très clair "sans
égard à la responsabilité de quiconque." En d'autres mots,
on réaffirme, à l'article 4, le principe qui avait
déjà été affirmé presque suffisamment
à l'article 3. Dans votre motion d'amendement, vous dites: La victime
d'un accident qui a droit à l'indemnisation prévue au
présent titre peut bénéficier de celle-ci. Vous
répétez, en d'autres mots, l'article 4, dernier paragraphe, en y
ajoutant cependant l'élément fondamental nouveau qui dit que la
personne conserverait ses recours pour l'excédent et vous avez, en
réponse à la question, indiqué que, quant à vous,
il s'agissait effectivement, à ce moment, de reconnaître la
responsabilité des individus au moment où ils exerçaient
leur recours pour l'excédent au-delà du régime qui est
couvert par la Régie de l'assurance automobile.
Dans ces conditions, je sais que vous comprenez fort bien la situation
telle qu'elle se présente pour moi. Je dois vraiment noter que ce que
vous demandez par la motion d'amendement, au dernier paragraphe de l'article 4,
c'est de revenir sur le principe qui a été voté à
l'article 3, répété à l'article 4, pour plus de
précision, et qui concerne la non-responsabilité. Dans ces
conditions, je ne veux pas me faire mauvais joueur et je pense que le
député de Marguerite-Bourgeoys a bien indiqué de quoi il
s'agissait. C'est que, dans ces premiers articles, au niveau des dispositions
générales, effectivement, un peu comme au moment du projet
de loi 101 on est vraiment dans des articles qui énoncent, on ne
peut plus clairement, les principes de la loi et, effectivement, les
modalités vont venir un peu plus tard. Dans les circonstances, M. le
député de Jacques-Cartier, je pense avoir expliqué assez
clairement pourquoi, même formulé comme il l'est, votre amendement
ne peut pas être jugé recevable.
M. Lalonde: M. le Président, il est 18 heures.
Le Président (M. Bertrand): Et même trois
minutes.
M. Lalonde: Oui, je ne vous ai pas interrompu.
Le Président (M. Bertrand): J'ajourne les travaux de cette
commission jusqu'à demain matin, dix heures.
(Fin de la séance à 18 h 6)