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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le lundi 12 décembre 1977 - Vol. 19 N° 283

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 67 — Loi sur l'assurance automobile


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 67 Loi sur l'assurance automobile

(Dix sept heures cinq minutes)

Le Président (M. Bertrand): A l'ordre, madame, messieurs! La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières poursuit l'examen du projet de loi no 67, intitulé Loi sur l'assurance automobile. Les membres de cette commission sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Gagnon (Champlain), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Goulet (Bellechasse), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Landry (Fabre), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Giasson (Montmagny-L'Islet); M. Lefebvre (Viau) remplacé par M. Rancourt (Saint-François); M. Marois (Laporte) remplacé par M. Perron (Duplessis); M. Marquis (Matapédia), Mme Payette (Dorion), M. Raynauld (Outremont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Russell (Brome-Missisquoi) remplacé par M. Le Moignan (Gaspé); M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Vaillancourt (Jonquière).

Nous en étions à l'étude de l'article 7.

Indemnisation du dommage corporel Dispositions générales (suite)

M. Roy: Avant, M. le Président, si vous le permettez, avec votre permission, j'aurais encore une question à poser à Mme le ministre, mais, cette fois-là, cela concernera le sujet de l'assurance automobile. Si vous me le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Allez toujours, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: J'aimerais savoir si la réglementation concernant le régime d'assurance automobile est prête.

Mme Payette: Hélas, non, M. le Président. La réglementation n'est pas prête. Mon engagement tient toujours, cependant. Dès qu'elle sera prête, elle sera connue.

M. Roy: Mais comme nous avons une motion guillotine, non pas pour nous couper le cou, mais pour nous couper la langue...

Mme Payette: Dont je ne suis absolument pas responsable, M. le Président.

M. Roy: Je sais que vous n'êtes pas responsable, mais, quand même, est-ce qu'on peut espérer, est-ce qu'il y a une petite lueur d'espoir, toute petite, qu'on pourra connaître la réglementation avant que la commission ne soit tenue de faire son raport devant l'Assemblée nationale?

Mme Paquette: Nous faisons tout ce que nous pouvons, M. le Président, pour que ce soit prêt avant, mais je ne peux pas prendre d'engagement, à ce moment-ci, pour des personnes qui travaillent à ma place. Si c'était moi qui le faisais, je pourrais prendre un engagement.

M. Roy: Si c'était vous qui le faisiez...

Mme Payette: Ce serait déjà prêt, M. le Président.

M. Roy:... ce serait déjà prêt. Alors, on apprécie énormément la capacité de travail et les intentions de Mme le ministre là-dessus, mais il n'y a aucune mini-certitude, si minime soit-elle.

Mme Payette: II faudrait, M. le député, après cette absence de deux jours, que je puisse vérifier de nouveau, mais, à ma connaissance, aujourd'hui, je ne suis pas informée que ce soit prévu dans les 24 ou 48 heures.

M. Roy: Pour terminer ma question, est-ce que Mme le ministre pourrait, demain matin, avant de commencer les travaux...

Mme Payette: Vous informer où en sont les travaux? Certainement, M. le Président.

M. Roy: Merci.

Le Président (M. Bertrand): Article 7, adopté?

Mme Payette: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Point encore?

Mme Payette: Ah Fabien, vous vouliez l'adopter vendredi.

M. Roy: Oui, c'est parce que...

Le Président (M. Bertrand): Au moment d'ajourner les travaux, la dernière fois, je crois que nous étions vers la fin du débat sur l'article 7.

Mme Payette: M. le Président, justement le député de Beauce-Sud nous avait fait savoir qu'il état disposé à adopter les articles 6, 7 et 8 d'un seul coup, puisqu'il avait posé des questions sur les trois en même temps.

M. Roy: Vous savez, la nuit porte conseil et comme j'ai rencontré plusieurs personnes hier, plusieurs m'ont interrogé; on m'a posé certaines questions auxquelles je n'étais pas capable de répondre, parce qu'effectivement, nous ne connaissions pas la réglementation. Deux questions qui m'ont été posées, si c'est possible d'avoir des précisions de ce côté, je pense que ça pourrait permettre d'apporter un peu plus de lumière dans le débat. Articles 6, 7 et 8, je ne veux pas...

Le Président (M. Bertrand): L'article 6 est terminé de toute façon.

M. Roy: En tout cas, sur ces articles, étant donné qu'il y a des amendements qui ont été proposés comme tels: Une personne qui est résidente du Québec et qui est aux Etats-Unis, dans un véhicule du Québec, si elle est victime d'un accident d'automobile — on dit toujours que c'est la loi de l'endroit qui prévaut, l'endroit où l'accident a lieu qui permet l'application du régime d'indemnisation — donc, une personne résidant au Québec, qui a un accident aux Etats-Unis, qui est dans le véhicule d'un citoyen du Québec et qui est victime d'un accident d'automobile, qui subit des dommages corporels, est-ce qu'elle peut se prévaloir de la loi américaine, la loi qui prévaut sur le lieu de l'accident pour intervenir et poursuivre le propriétaire du véhicule?

Mme Payette: M. le Président, ce que prévoit la loi est assez clair à l'article 7, où on dit que le Québécois qui a un accident à l'étranger a droit à l'indemnisation prévue au régime public et a le droit aussi, parce qu'on ne peut pas légiférer à l'extérieur, de prendre les recours qui lui sont ouverts dans d'autres juridictions.

M. Roy: Ce qui veut dire que je dois garder une responsabilité publique pour les passagers de mon véhicule, à l'extérieur du Québec.

Deuxième question, M. le Président, une personne qui est victime d'un accident à l'âge de 12 ans — ce sont des cas particuliers — et qui reste infirme pour la vie, incapable de travailler pour la vie.

Il se marie à vingt-deux ans et, effectivement, a une famille, deux ou trois enfants. Sa femme et ses enfants pourront-ils bénéficier du régime d'indemnisation, dix ans ou quinze ans plus tard?

Mme Payette: M. le Président, il faudrait savoir, dans l'exemple qu'on a donné, quelle est l'invalidité à laquelle on fait référence. Est-ce que la personne qui, à douze ans, subit un accident d'automobile, devient invalide, incapable de travailler? C'est cela?

M. Roy: C'est cela.

Mme Payette: A ce moment-là, pour ce qui est de la rente prévue dans le projet, nous avons des dispositions qui accordent à une telle victime, pendant sa minorité, la rente minimale. Au-delà de sa période de majorité, à partir de dix-huit ans, un calcul sera prévu pour accorder à cette victime une compensation. Il faut se référer aux catégories, quand on fait référence à des victimes, dans le projet de loi, un peu plus tard, on va parler des catégories de victimes. Il y a les victimes avec emploi, sans emploi, les mineurs, les étudiants. Lorsqu'on traite d'une victime, il faut se référer à l'article précis.

M. Roy: Je vous remercie de ces informations, malgré que je crains, comme tous mes collègues. autant du côté ministériel que du côté de l'Opposition, qu'il ne nous sera pas possible d'étudier ces articles, étant donné la guillotine qui nous guette, comme je le disais tantôt; elle ne nous guette pas la tête, mais elle nous guette la langue, en fin de semaine.

Mme Payette: Si on pouvait commencer maintenant, on avancerait.

M. Roy: Je m'excuse, Mme le ministre, M. le Président, mais j'espère que mes collègues ont bien compris que les passagers québécois, qui seront dans les automobiles des Québécois, en dehors de la frontière du Québec, seront responsables — j'espère qu'on a bien compris cela du côté ministériel — en vertu de la loi qui prévaut, l'endroit où aura lieu l'accident, d'où l'obligation de garder une couverture de responsabilité publique pour les dommages corporels. Ce qui me fait dire, M. le Président, à cause des grandes conventions qui existent, comme le député de Montmagny-L'Islet en a parlé l'autre jour...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Beauce-Sud...

M. Roy: M. le Président, j'ai la parole et je termine là-dessus.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous pourriez répéter votre dernière affirmation?

M. Roy: Les citoyens résidant au Québec, qui sont passagers dans une automobile du Québec, et qui seront victimes d'un accident survenu en dehors du Québec, aux Etats-Unis, sont couverts par le régime d'accidents d'automobiles du Québec, comme citoyens du Québec, mais pourront, si, en vertu de la loi qui prévaut, à l'endroit où l'accident a lieu, revenir contre le propriétaire du véhicule, d'où l'obligation de garder, dans notre police d'assurance, une couverture pour dommages corporels, pour responsabilité publique, en dehors du Québec.

Je pense qu'on touche là un gros point, on touche là un point fondamental dans la réforme de l'assurance automobile, ce qui fait en sorte que la duplication que nous avons à l'heure actuelle risque de causer des préjudices extrêmement graves à l'endroit des citoyens, à l'endroit des gens qui auront à se déplacer outre frontière.

Mme Payette: J'ai laissé le député de Beauce-Sud aller jusqu'au bout, mais il ne faudrait pas qu'il recommence à semer la panique et la fausse information dans la population. Il ne s'agit pas là d'un gros point qu'on vient de découvrir, c'est un petit point qu'on va retrouver à l'article 75. C'est ce qui prévaut présentement dans les polices d'assurance et qui sera maintenu, comme cela a été expliqué la semaine dernière.

M. Roy: C'est exactement cela, mais la réforme ne change rien, c'est cela que je veux dire.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, Mme le ministre vient de nous informer que l'article 75 s'applique. Je cherche l'article 75. Je le retrouve à la section II du titre III qui est l'indemnisation du dommage matériel. Mme le ministre pourrait-elle préciser sur l'application de l'article 75 pour ce qui concerne les dommages corporels, à savoir...

Je viens d'avoir la réponse de mon collègue de Montmagny-L'Islet, selon laquelle le troisième paragraphe de cet article s'applique aussi aux dommages corporels, il reste que cela ne fait que confirmer l'appréhension du député de Beauce-Sud, à savoir que les Québécois devront avoir des assurances au-delà du régime public pour se tenir garants de toute réclamation qu'ils pourraient avoir pour des accidents qui auraient lieu à l'extérieur de la province.

Mme Payette: II est vrai que les Québécois devront avoir une police d'assurance, une seule, dans laquelle on trouvera ce paragraphe dont on a discuté vendredi dernier, en l'absence du député de Marguerite-Bourgeoys. Ce paragraphe qui dit que la police couvre également l'assuré pour toutes les provinces canadiennes et les états américains, aussi bien pour les dommages matériels que pour les blessures corporelles. Dans ce sens, ce n'est pas quelque chose qui s'ajoute, c'est quelque chose qui existe déjà dans le contrat d'assurance et qui sera maintenu.

J'ai même dit qu'en principe, le coût de ce paragraphe dans la police d'assurance devrait diminuer à cause du fait que nous enlevons de ce paragraphe la couverture des dommages corporels à des Québécois qui seront indemnisés par la régie.

M. Lalonde: La remarque de Mme le ministre à propos de mon absence de vendredi m'amène quand même à lui expliquer — cela ne concerne que moi — que c'était mon incapacité de parler, à ce moment, n'ayant plus de voix. C'est revenu, le ministre peut être tranquille. Je suis là pour longtemps encore. M. le Président, il reste que...

Mme Payette: M. le Président, mon allusion à l'absence du député de Marguerite-Bourgeoys n'avait rien à voir avec les raisons pour lesquelles il n'était pas là. Il y avait une tempête de neige. Il y avait d'autres personnes qui n'étaient pas là, sauf qu'il aura raté cette longue discussion...

M. Lalonde: A ce moment, son allusion est encore plus malvenue.

Mme Payette: C'était tout simplement que vous aviez raté cette longue discussion et cette explication au sujet de cet article qu'on retrouve dans les polices d'assurance, qui ont d'ailleurs été données, en grande partie, par le député de Montmagny-L'Islet.

M. Lalonde: M. le Président, il reste que, que ce soit sous forme d'une police ou de plusieurs polices, le coût de cette assurance pour garantir les Québécois à l'encontre des réclamations pour dommages corporels lors d'accidents survenus à l'extérieur du Québec, doit s'ajouter au coût qui nous est déclaré ici, par les documents qui nous sont remis. Voilà encore un coût caché, un coût qui, si on le compare au coût du régime actuel, doit être ajouté à ceux qu'on nous donne.

Le Président (M. Bertrand): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, j'ajouterai là-dessus, pour terminer cette histoire, que, si on marque une certaine surprise à cet égard, ce n'est pas tellement parce que cela s'ajoute au régime actuel, c'est parce que, je pense, dans l'opinion publique, il n'y avait plus d'assurance-responsabilité pour dommages corporels. Là, on est en train de faire préciser des points qui étaient dans le projet de loi, mais qui, effectivement, n'ont pas été perçus comme cela. Même nous, cela nous a pris beaucoup de temps avant de découvrir tous ces points. Je pense qu'on réaffirme ici le fait que, pour les dommages corporels, on pensait qu'il n'y aurait plus d'assurance privée pour cela. Là, on s'aperçoit qu'on en a besoin d'une. Comme le député de Marguerite-Bourgeoys vient de le dire, c'est un coût qui s'ajoute à l'ensemble des coûts qui nous sont déjà présentés.

Le Président (M. Bertrand): L'article 7 est-il adopté?

M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Bertrand): Adopté sur division. Article 8, Mme le ministre.

Mme Payette: L'article 8 se lit comme suit: "La victime d'un accident survenu au Québec et qui n'y est pas résidante, est indemnisée par la régie, en vertu du présent titre, dans la proportion où elle n'est pas responsable de l'accident, à moins d'une entente différente entre la régie et la juridiction du lieu de résidence de cette victime. "Nonobstant l'article 4, en cas de désaccord entre la régie et la victime sur la responsabilité de cette dernière, le recours de la victime contre la régie à ce sujet est soumis au tribunal. La responsabilité est déterminée selon les règles du droit commun dans la mesure où les articles 97 à 102 n'y dérogent pas."

Le but de l'amendement: La reformulation entière de cet article est nécessaire pour clarifier les droits et obligations des parties en cause. Au premier alinéa, on ne dit plus que la victime non résidante a le droit d'être indemnisée, mais bien qu'elle est indemnisée, ceci afin d'éviter que certains puissent se dire: On en a le droit, mais on préfère ne pas l'exercer et plutôt poursuivre. On suit en cela la phraséologie employée à l'article 3. Au premier alinéa également, on a changé le mot organisme par le mot juridiction, ce dernier terme

étant de portée plus large. Ainsi une entente pourrait éventuellement être conclue entre la régie et une juridiction dont l'administration d'un régime d'indemnisation pourrait être confiée à l'entreprise privée, ce qui n'aurait pu être fait en vertu du texte actuel. Au deuxième alinéa, il a été clairement établi que la victime non résidante avait un droit contre la régie.

M. Saint-Germain: M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Pour la victime d'un accident qui se produit au Québec, mais qui n'en est pas résidante — si je comprends bien le sens de cet article — cela veut dire que la victime aura un droit de recours contre la régie, en autant qu'elle est coupable ou non coupable, où il pourra ainsi s'établir un pourcentage de responsabilité. Si elle est coupable, elle n'est indemnisée en aucune façon. Alors, voilà tout de suite une personne qui est parmi nous et qui perd certains droits que la loi donne aux résidants. D'un autre côté, si elle est déclarée non coupable par les tribunaux de droit commun, elle peut être compensée. Mais elle reste tout de même compensée selon la loi et le règlement du projet de loi no 67, c'est-à-dire qu'on lui enlève un privilège ou un droit qui est enlevé aux Québécois.

Parce que c'est un système de non-responsabilité, ce droit et ce privilège sont exclus lorsque c'est un touriste, mais, d'un autre côté, si le touriste n'est absolument pas responsable, il reste tout de même limité aux limites de la régie. Je crois qu'il y a là une injustice pour ceux qui voyagent au Québec, il y a une incohérence, et je me demande, surtout si on considère que l'industrie touristique, au Québec, est en difficulté, s'il n'y a pas là un facteur qui viendra à être connu, surtout chez les Américains qui nous fournissent la majorité de nos touristes et qui fera que la province de Québec sera définitivement moins recherchée comme lieu de vacances.

Il faut tout de même penser que la majorité des gens qui nous visitent sont des gens qui ont un revenu qui dépasse souvent amplement $18 000. Ces gens, s'ils ont un accident dans le Québec, vont être obligés de prouver leur responsabilité ou leur non-responsabilité dans un accident, mais, d'un autre côté, ils vont être limités, jamais ils ne pourront recevoir plus que la rente. Cela va comporter un risque certain pour tous les touristes.

Je crois qu'il serait préférable que, si on les fait relever du système de non-responsabilité, comme dans le statu quo actuel, on leur laisse un droit de recours relativement aux dommages qu'ils auront subis. Je ne vois pas une autre façon de résoudre ce problème parce que, autrement, vous pouvez être assurés que, dans les dépliants touristiques, on va nécessairement... Je ne parle pas de ceux qui seront publiés par le gouvernement du Québec, probablement qu'on va éviter de dire cela aux Américains, mais les Américains ont assez de moyens de se renseigner que cela sera certainement su par tout ceux qui viennent au Québec, soit d'une façon régulière, parce qu'il y a des Américains qui ont des champs d'été au Québec, qui y viennent régulièrement; ils peuvent aussi avoir des amis ou des parents, si on pense, par exemple, à tous les Franco-Américains qui nous visitent annuellement; ces gens vont savoir cela et certainement cela va rendre le Québec moins attrayant; la même chose pour les Ontariens.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Seulement une question, M. le Président. Est-ce qu'il y a des ententes particulières en voie d'élaboration, conformément au paragraphe 1 de cette loi, ententes avec les autres états? Si oui, quelles seraient ces ententes, sinon, qu'est-ce que vous entrevoyez?

Mme Payette: II n'y a pas encore d'entente, M. le Président, avec les autres Etats. J'ai informé cette commission vendredi que le surintendant des assurances du Québec avait participé au congrès des surintendants des assurances des différents états américains il y a maintenant sept ou huit jours et qu'il doit nous faire rapport à ce sujet dans les jours qui viennent.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que le député de Jacques-Cartier a trouvé quelque chose qui n'est pas tellement extraordinaire. C'est le même système qu'actuellement pour les non résidants du Québec qui viennent ici. S'ils sont responsables de l'accident, c'est bien dommage, ils ne peuvent pas poursuivre l'autre partie. S'ils ne sont pas responsables, ils peuvent poursuivre l'autre partie. C'est le système actuel, sauf que s'ils sont indemnisés, ils le seront en vertu du titre 1 de la présente loi.

M. Saint-Germain: C'est cela l'injustice.

M. Giasson: Pas tout à fait. Il y a une nuance. On ne peut pas dire que la...

Le Président (M. Bertrand): M. le député d'Outremont.

M. Giasson: ... situation qui va prévaloir, suite à l'application de cet article, va créer une situation absolument identique à celle qu'on a présentement. Parce que les victimes, présentement, qui subissent des accidents au Québec et qui peuvent prouver une perte de revenu très importante, ne sont pas limitées aux $18 000, ce qui sera le cas.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai dit: Sauf qu'ils seront indemnisés en vertu du titre 1 de la présente loi. C'est cela la différence.

Le Président (M. Bertrand): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je pense qu'on est en train de comprendre... Les arguments ont déjà été avancés. Je dirai d'un côté que cela me paraît une incohérence sérieuse dans le projet de loi, puisque dans le cas des non résidants, on leur donne accès aux tribunaux de droit commun pour établir le degré de responsabilité; mais comme on vient de le préciser, en échange de cet accès aux tribunaux, il n'y a qu'une responsabilité bien inférieure, du côté de la régie, à la responsabilité qu'un assureur privé serait tenu de fournir en vertu du régime actuel. En effet, le non résidant, même s'il n'est absolument pas responsable, ne pourra être dédommagé et indemnisé que dans la mesure du programme général prévu par ce projet de loi 67. Cela me paraît une limitation, d'abord qui introduit un cas d'exception sans raison. Je crois que la régie, comme assureur, si la régie doit devenir un assureur, devrait au moins offrir les mêmes services que n'importe quel assureur. A l'heure actuelle — et cela me paraît d'ailleurs assez ironique lorsqu'on prétend toujours que des régies publiques peuvent faire mieux que des entreprises privées — on a un beau cas inverse où on limite la responsabilité de la régie publique à un niveau bien inférieur à celui qu'on voudrait souvent exiger de l'entreprise privée. C'est d'ailleurs, à mon avis— ce n'est pas la première fois que cela arrive, cela arrive presque tout le temps — un cas qui mérite d'être souligné; là il s'agit bien d'un assureur public qui va donner des services inférieurs à ceux que n'importe quel assureur privé donnerait dans les mêmes circonstances. Alors, je pense que cet article mériterait d'être modifié parce que je pense que c'est nous faire du tort à nous-mêmes, comme Québécois, puisque ça va donner une mauvaise réputation au Québec dans le cas d'accidents ou des non-résidants sont impliqués et ne seront pas responsables.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Montmagny...

Mme Payette: M. le Président, je voudrais ajouter une information avant qu'on termine l'intervention du député d'Outremont. Il faudrait tenir compte, dans toutes ces remarques, de l'article 6 où les non-résidants voyageant dans des autos immatriculées au Québec, des autos de location, des taxis, des autobus ou des voitures prêtées par des citoyens du Québec, sont couverts automatiquement par le régime sans avoir à démontrer la responsabilité de qui que ce soit.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Saint-Germain: Contrairement, M. le Président, l'inverse n'est pas vrai. Nos résidants qui vont visiter les Etats-Unis, l'Ontario ou une autre province canadienne sont couverts par la régie, c'est vrai. Mais ces voyageurs conservent tous les droits de recours que la loi leur donne dans les différents Etats où ils vont voyager, ils ne sont absolument pas limités. Ils vont aller en cour, ils vont plaider; s'ils ne sont absolument pas responsa- bles, et s'ils prouvent à la cour qu'ils ont subi $100 000 de dommages, ils vont être dédommagés. D'ailleurs, la loi le prévoit bien parce qu'elle se conserve un droit de subrogation pour les indemnités qu'elle paiera à nos Québécois qui voyagent.

Mais lorsque l'étranger va être au Québec, on le limite, lui, par exemple.

M. Raynauld: M. le Président, si vous me permettez, je voudrais compléter, justement dans ce sens. Il est prévu, semble-t-il, des espèces d'accords de réciprocité, si je comprends bien, par le premier alinéa. Cela voudrait dire, s'il y a un contenu à ces accords de réciprocité, qu'il peut très bien se produire le cas où il y aurait une entente avec l'Ontario en vertu de laquelle le même traitement serait donné de part et d'autre. Dans ces cas-là, il est évident, me semble-t-il, que vous seriez obligé d'accorder à ces résidants la pleine couverture pour les dommages corporels et au complet, dans la mesure où une autre province comme l'Ontario, par exemple, donne déjà aujourd'hui des indemnités complètes lorsque la non-responsabilité existe.

La même chose arriverait pour des Etats américains. Par conséquent, est-ce que vous voulez conserver ça comme des arguments de négociation ou est-ce que vous ne pourriez pas déjà dire, dans le projet de loi, que vous accordez aux non-résidants les mêmes droits que les résidants du Québec auront lorsqu'ils vont voyager à l'étranger ou à l'extérieur du Québec?

Mme Payette: M. le Président, si vous permettez, pour essayer de clarifier la situation, la phrase qui dit: "à moins d'une entente différente entre la régie, la juridiction du lieu de résidence de cette victime", cela vise à couvrir des endroits ou des juridictions où il y a un régime semblable à celui du Québec. Cela veut dire que si l'Ontario adoptait un régime "no fault", dans le sens du Québec ou comme celui que le Manitoba et la Saskatchewan sont en train de bâtir, ça voudrait dire que la régie québécoise pourrait s'entendre avec la juridiction étrangère aux fins d'indemniser réciprociquement leurs ressortissants ou leurs résidants. Il n'y aurait pas à ce moment-là à indemniser un résidant onta-rien ou l'Ontario n'aurait pas à indemniser un résidant québécois.

C'est dans ce sens que l'entente a été prévue.

M. Raynauld: Si l'Ontario demandait de traiter les Ontariens qui viennent au Québec de la même façon que les Québécois sont traités en Ontario?

M. Giasson: Dans le contexte présent.

M. Raynauld: Dans le contexte présent. Il n'y aurait pas d'entente possible?

Mme Payette: Je pense, M. le Président, que les mots ententes différentes, entre la régie et la juridiction, visent à couvrir, j'imagine, des régimes semblables, où il serait difficile, à un moment donné, de pouvoir avoir des ententes entre une ju-

ridiction qui a un système de responsabilité et une autre qui a un système complètement sans égard à la responsabilité.

M. Lalonde: On pourrait avoir une entente avec la Nouvelle-Zélande. C'est à peu près le seul endroit où les gens ont fait la folie qu'on est en train de faire.

Mme Payette: Cela serait bon d'y aller. M. Lalonde: Cela serait excellent.

Mme Payette: Cela serait une folie très intéressante.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. Giasson: M. le Président, les dispositions de l'article qui fait l'objet du débat nous amènent à nous poser des cas types qui pourraient se produire. Dans l'hypothèse où une victime d'accident survenu au Québec à une personne qui n'habite pas le Québec, à la suite duquel la régie a décidé, a rendu la décision qu'il n'y avait aucune part de responsabilité civile de la part de l'automobiliste ou de la personne qui a pu provoquer cet accident... Partant de ce fait établi, la régie dirait à cette personne: C'est dommage, l'automobiliste ou la personne que vous jugez responsable n'a aucune responsabilité.

A partir de là, est-ce qu'il faut comprendre que la victime habitant hors du Québec, à la suite de l'accident au Québec, aurait tout de même cette capacité d'en appeler devant un tribunal de droit commun pour faire examiner la décision de la régie en matière de responsabilité?

Mme Payette: M. le Président, le deuxième alinéa de cet article dit bien qu'en cas de désaccord entre la régie et la victime sur la responsabilité de la victime, le recours de la victime contre la régie, à ce sujet, est soumis au tribunal. je pense que la victime non-résidente qui ne pourrait pas s'entendre avec la régie sur le partage de la responsabilité impliquant un Québécois, par exemple, ou un autre non-résident, pourrait s'adresser au tribunal de droit commun pour faire départager la responsabilité encourue lors de l'accident.

M. Giasson: Sans aucune restriction. C'est un droit absolu que cette victime aurait?

Mme Payette: Oui. C'est ce que dit le deuxième alinéa, M. le Président.

M. Giasson: Et à partir du moment où la régie admettrait, à la suite d'accident, une responsabilité partielle ou partagée et déciderait d'indemniser cette victime en proportion de la responsabilité partagée en pourcentage, si la victime jugeait que la proportion de responsabilité de l'accident, telle que déterminée par la régie, ne correspond pas à la réalité ou à sa perception des choses, elle pour- rait aller devant le tribunal et, peut-être, si c'était là le jugement rendu, faire augmenter la part de l'indemnisation qui aurait été proportionnelle à la responsabilité découlant de l'accident. Cela pourrait aller jusque-là, faire augmenter une fraction d'indemnité que la régie admettrait, toujours en proportion de la responsabilité dans l'accident?

Mme Payette: M. le Président, prenons un exemple où on dirait, à la suite d'un accident... Le non-résident essaie de régler, avec la régie, le pourcentage de responsabilité. La régie dit, par exemple, que c'est 50%-50%, qu'il y a un partage égal de responsabilité. Le non-résident n'étant pas d'accord, il n'a qu'à s'adresser au tribunal pour faire renverser ce que la régie prétend, comme dans la situation actuelle, par exemple, où ce serait un assureur qui vous dirait: Considérant telle ou telle affaire, considérant la situation des véhicules, considérant ceci et considérant cela, à ce moment-là, on arrive à un partage de 50%-50% de la responsabilité. Si vous n'êtes pas d'accord, à ce moment-là, libre à vous de poursuivre, pour démontrer la responsabilité de l'autre.

M. Giasson: Et si, a priori, la victime en cause acceptait la décision de la régie dans un premier temps, comment s'apercevoir des indemnités, si elle jugeait par après que le partage des responsabilités tel que déterminé ne correspond plus à sa vision des faits? Est-ce qu'on lui laisserait le droit, après avoir accepté, dans un premier temps, de toucher les indemnités, de retourner devant un tribunal?

Mme Payette: C'est le droit commun qui s'appliquerait.

M. Giasson: II n'y aurait pas de quittance ou de reconnaissance de fait de sa part à partir du moment où elle touche une première indemnisation?

Mme Payette: Dans la situation actuelle, je pense que des ententes peuvent intervenir entre une victime et un assureur. L'entente lie-t-elle l'assuré? Supposons, par exemple, que j'ai un accident avec un autre individu et que je ne suis pas responsable, mais que l'assureur du responsable me dit: Je te considère responsable à 50%. Je décide, à un moment donné, que j'accepte ce règlement de bonne foi, sans avoir été vicié dans le consentement, etc., je pense qu'à un moment donné, il y aurait difficulté pour un individu d'aller prouver qu'il n'a pas donné son accord, son consentement à une entente, mais, dans la mesure où il y aurait eu, par exemple, un consentement d'arraché, au mauvais sens du terme, je pense qu'il serait possible pour un non-résidant à la suite de l'entente, de quand même poursuivre la régie. Il s'agit, je pense, du maintien de la situation actuelle.

M. Saint-Germain: M. le Président, je croyais...

M. Giasson: C'est parce qu'il y a danger de revivre le même phénomène dans l'hypothèse que

l'on fait qu'une foule de situations qui ont été vécues, même dans un système de responsabilité; des victimes avaient vraiment besoin de toucher l'argent qui pouvait leur revenir et ont réglé trop vite plutôt que de se prévaloir de leur droit d'aller chercher le maximum d'indemnisation.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sauf qu'il faut bien faire la distinction que cela s'applique à des non-résidants et que ce n'est quand même pas l'immense majorité des cas, alors que l'exemple que vous donnez s'appliquait, règle générale, à des résidants du Québec, à des Québécois.

M. Giasson: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense que la distinction est fondamentale, quoique je comprends le problème que vous soulevez en ce sens qu'on s'adresse à des non-résidants ici et non pas à des résidants du Québec.

M. Giasson: Vous comprenez que si c'est un ressortissant étranger dont le revenu est faible, il n'a pas autant de marge de manoeuvre que celui qui a de bonnes ressources et qui dit: Je suis prêt à attendre; je conteste la décision de la régie. Cela prendra le temps que cela voudra. Je vais devant le tribunal. Je m'en vais chercher le maximum, parce que j'ai cette capacité financière d'attendre, de faire face à tous ces délais et d'aller au maximum de mes capacités de réclamation.

Il va encore y avoir des cas un peu analogues à ceux qu'on vit.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: On dit que ce régime peut faire diminuer le nombre de touristes au Québec. A mon point de vue, ce serait l'inverse, si jamais on commençait à donner la bonne information. Qu'est-ce qui arrive actuellement à un touriste, hors du Québec, qui a un accident au Québec avec un des 23% d'individus qui n'ont pas d'assurance actuellement? C'est une chose à considérer. Au moins, le touriste qui va venir au Québec va savoir que, dorénavant, tout le monde est assuré. Personnellement, pour avoir travaillé dans l'assurance, je sais jusqu'à quel point cela inquiète le touriste hors Québec qui actuellement voyage au Québec et a un accident. Cela veut dire qu'il est obligé de prendre ses précautions.

M. Giasson: ... s'il n'est pas responsable de l'accident présentement.

M. Gagnon: Pardon?

M. Giasson: Le touriste, le non-résidant du Québec qui devient victime d'un accident dans lequel il n'a pas de responsabilité va prouver sa non-responsabilité par un jugement, va déposer cela au fonds d'indemnisation des victimes de la route et il va être indemnisé par le fonds.

M. Gagnon: Je suis d'accord, mais, encore là, cela prend combien de temps? Tandis que, par le nouveau régime, on saura fort bien que tout le monde est assuré.

Mme Payette: II y a un maximum de $35 000, quel que soit le nombre des accidentés impliqués dans l'accident.

M. Gagnon: C'est cela. Je pense que la loi ne fera pas fuir le tourisme, au contraire.

Lorsqu'on donnera les bons renseignements, cela peut l'attirer sûrement, parce qu'on sera plus en sécurité, dorénavant au Québec, qu'on ne l'a jamais été.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, dans cet article, on commence à trouver l'un des nombreux inconvénients du caractère artificiel du régime choisi par le gouvernement. On trouvera d'ailleurs, dans les autres articles qui suivent, des conséquences bizarres, abracadabrantes et souvent injustes de ce vide de principe qu'on retrouve dans la commodité que le gouvernement a choisie. On s'est dit: On fait un échange. On va donner des indemnités pour tout le monde et on va enlever le système de responsabilité, d'une part, et même limiter les indemnités. On fait cet échange pour atteindre des buts quand même désirables, à savoir que tout le monde sera indemnisé. On ne peut pas admettre les étrangers avec leurs véhicules parce qu'ils ne participent pas au financement. Ou bien, aux frontières, on leur impose une taxe sur l'assurance pour qu'ils participent, ou bien on les laisse entrer et on leur dit: C'est vrai. Etant donné que vous ne participez pas, on ne peut pas vous faire bénéficier du régime d'indemnité automatique. Alors, on va vous donner la charge de prouver votre non-responsabilité pour avoir droit aux indemnités.

D'un autre côté, ce qu'on vient de leur remettre, c'est-à-dire le fardeau de la responsabilité, on ne leur remet pas la contrepartie, c'est-à-dire un système qui n'a pas de limite quant aux indemnités s'ils ne sont pas responsables.

L'objection du député de Champlain tantôt, à savoir qu'il y a des touristes qui arrivent ici et ont des accidents dont ils ne sont pas responsables... Avec les 23% qui ne sont pas assurés, ils peuvent arriver devant une situation où, n'étant pas responsables d'un accident, ils ne sont pas indemnisés. La réponse à cela, ce n'est pas cette espèce de système incohérent, c'est l'assurance obligatoire sur laquelle tout le monde est d'accord. L'assurance obligatoire, il reste à savoir comment on applique cela. Je comprends les difficultés qu'un gouvernement peut avoir à appliquer l'assurance obligatoire. Je comprends qu'il peut arriver la situation où il y a toujours un petit pourcentage de gens qui vont réussir à ne pas se couvrir, enfin, réussir à s'enlever du système, mais pas 23%. Je pense qu'il y a une façon d'appliquer un système

d'assurance obligatoire qui couvrirait au moins 95% et qui laisserait un très petit pourcentage de non-assurés.

On est donc devant cette situation où, à la suite des réponses que le conseiller juridique nous a données... Je ne veux pas mal interpréter ses réponses, mais il m'a semblé qu'à la suite des précisions qu'il nous a données, les ententes de réciprocité soient quand même assez limitées, parce qu'il faudrait que ce soit avec un Etat ou un territoire où il y a un système à peu près semblable au nôtre qu'il pourrait y avoir des ententes. Si on ne me corrige pas, je pense que c'est à peu près ce qui nous a été dit.

Mme Payette: M. le Président, c'est effectivement ce que j'ai dit. Rien n'empêche qu'il puisse en exister entre un Etat qui aurait un "no fault " partiel jusqu'à concurrence de $18 000. A ce moment, cela deviendrait d'application assez difficile vis-à-vis de la régie qui, elle, paie jusqu'à un montant limité.

M. Lalonde: Oui, c'est justement cela.

Si Dieu nous prête vie, et si le leader du gouvernement nous prête du temps, on va arriver à certains articles, pas très éloignés, où on a des exemples, à remplir des cahiers, d'injustices créées par cet aspect artificiel, qui toutes — et je réfère aux injustices — pourraient être éliminées en acceptant un droit de recours au-delà du régime. C'en est un. Si on acceptait un droit de recours au-delà du régime, le régime réussirait à enlever les plus criantes injustices de la situation actuelle, à savoir les délais dans l'indemnisation et le fait que beaucoup de victimes ne sont pas indemnisées. Mais au-delà de cela, on conserverait le moyen de parer à toutes ces situations, comme je l'ai dit tantôt, situation dont certaines sont bizarres et mêmes drôles. Mais il y en a qui sont tout simplement injustes. J'ai hâte d'arriver à certains articles où j'aurai des exemples à vous donner — et d'autres députés en ont — où c'est le monde à l'envers. Et l'application stricte d'un système artificiel qui ne correspond pas du tout à ce que les gens veulent et surtout à ce dont les gens ont besoin.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, il y a environ — selon certaines statistiques — 16% des accidents au Québec où il y a des blessures corporelles; je pense qu'on peut s'entendre là-dessus. Je ne possède pas de statistiques qui démontreraient combien de non-résidents font partie de ces 16%. Je pense que le débat que l'Opposition mène actuellement est en principe valable. D'autre part, il ne s'applique qu'à une infime minorité de ces 16%.

Il y a peut-être des endroits dans le monde où un Québécois peut aller avec son automobile, mais est-ce qu'il existe partout des fonds d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile? Je ne le sais pas. Mais est-ce concevable qu'un Québécois s'en aille ailleurs — aux Etats-Unis ou ailleurs — et qu'il ait un accident dont il n'est pas responsable, qu'il soit heurté par une personne qui n'a pas d'assurance responsabilité et qu'il ne puisse exercer aucun recours? C'est possible ailleurs aussi. Au non-résident qui vient ici, on dit: Si vous n'êtes pas responsable, nous vous indemnisons en vertu des indemnités prévues au titre 1 du projet de loi 67. Si vous êtes responsable, vous n'avez pas le droit à l'indemnité, mais vous pouvez aller combattre la régie devant le tribunal de droit commun. C'est ce que le conseiller juridique a répondu tout à l'heure.

Il y a 16% des accidents au Québec où il y a des blessures corporelles. Je suis bien prêt à mener un débat là-dessus. Si la question que vous soulevez impliquait beaucoup de gens, elle serait très valable, mais j'aimerais savoir de combien de personnes on parle actuellement. On parle peut-être de moins de 1% de ces 16%.

M. Lalonde: Si vous permettez, M. le Président, c'est une question qui nous est posée. Je comprends qu'il y a le principe que le savant procureur de Jonquière pourrait nous exprimer en latin "de minimis non curat pretor", c'est-à-dire qu'on ne s'occupe pas des grenailles; je pense que c'est à peu près cela en français. Mais il reste que la possibilité d'une situation comme celle-là peut être un facteur important dans la décision des touristes ou des gens de l'extérieur. Il n'y a pas seulement des touristes, des non-résidents, ce sont aussi des gens qui travaillent, qui viennent faire des affaires, qui viennent faire des échanges ici, qui viennent avec leur voiture et ce ne sont pas nécessairement des gens de Californie qui viennent en avion. Il y a tous les états voisins et les provinces voisines du Québec.

Quel que soit le système constitutionnel qu'on conserve ou qu'on change, cela va rester tel quel géographiquement. C'est peut-être quelques centaines de victimes, dans les faits, mais ça affecte des dizaines et des dizaines de milliers dans leur décision de venir ou non parce qu'il y a des possibilités qu'ils soient dans ces centaines. C'est l'effet psychologique qui, à mon sens, peut être néfaste. On a assez de difficulté à avoir des touristes, à les encourager, on dépense des centaines de milliers de dollars dans de beaux projets de publicité pour venir visiter le Québec — alors qu'on va passer nos vacances à Ogunquit — mais il faut tout de même être un peu cohérent.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ils vont aussi savoir que tous les gens sont assurés au Québec; ils vont savoir qu'on vient d'adopter un régime d'assurance obligatoire et que tous vont détenir une assurance.

M. Lalonde: Ils vont savoir qu'ils n'ont aucun droit de recours au-delà. Premièrement, qu'ils n'ont aucun droit de recours au-delà du régime des indemnités, mais, en plus de cela, il va falloir qu'ils ne soient pas responsables pour être indemnisés alors que les Québécois, responsables ou non, sont indemnisés. On les traite réellement

en visiteurs pas tellement désirés, on les traite réellement en conducteurs et en passagers de deuxième classe parce que nous, on n'est pas obligé de déterminer la responsabilité pour profiter du système — c'est d'ailleurs l'idée fondamentale de cela, la disparition de la responsabilité — mais eux, par exemple, il va falloir qu'ils ne soient pas responsables pour profiter du régime; c'est là que m'apparaît l'incohérence du système.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'autre part, vous admettrez que, au niveau de tous les dommages matériels — il faut quand même le dire— ils vont savoir qu'en venant au Québec, peu importe par qui ils sont heurtés, la personne qui conduit ou qui est propriétaire de l'automobile va avoir une police d'assurance responsabilité pour au moins $50 000. Quand vous allez à l'extérieur, vous posez-vous la question, avant de partir: Si j'ai un accident et que je ne suis pas en tort — est-ce que c'est ça qui détermine votre voyage? — est-ce que je vais pouvoir poursuivre l'autre partie?

M. Lalonde: Beaucoup. En fait je pense, je ne sais pas si le député de Jonquière a eu l'occasion d'aller visiter les pays voisins, mais quand vous décidez d'y aller avec votre voiture, vous vous posez des questions, surtout si vous amenez votre famille ou des amis, vous êtes responsables moralement. J'espère que le député de Jonquière va se poser ces questions, désormais, quand il ira passer ses vacances avec ses collègues de l'Assemblée nationale dans le Maine.

M. Vaillancourt (Jonquière): Surtout pas, avec ma femme et mes enfants; ça va faire.

M. Lalonde: Surtout pas. Non, mais quand même, sérieusement, ce sont des questions qu'il faut se poser.

Mme Payette: Cela est bien plus "cheap" que mon allusion à votre absence de vendredi!

M. Lalonde: Vous regrettez mon absence de vendredi, n'est-ce pas?

Mme Payette: Cela est bien plus "cheap" que mon allusion à votre absence de vendredi.

M. Lalonde: Que voulez-vous, j'écoute ce qu'on me dit. Apparemment, à l'Assemblée nationale, au mois d'août, on s'en va dans le Maine, ce n'est pas de ma faute, ce sont les journaux qui en parlaient; on ne va pas reprocher aux journalistes de le rapporter, il y avait même des photographies du premier ministre à Ogunquit, alors que nous, nous étions ici sur la colline parlementaire.

Mme Payette: Antiréglementaire, M. le Président.

M. Lalonde: C'est Mme le ministre qui m'a demandé de donner des précisions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Si on faisait tous ensemble des reproches au gouvernement américain pour la législation qu'il vient d'imposer aux Américains et qui détruit un peu le tourisme au Québec et à Montréal. Je pense que ce serait beaucoup plus valable. Je pense que ce n'est pas cela qui va arrêter le tourisme. Si tout le monde appuyait le gouvernement pour la localisation du centre des congrès à Montréal, cela augmenterait également le tourisme au Québec. Vous n'êtes pas d'accord, M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: Oui, mais il ne faut pas noyer le poisson.

M. Vaillancourt (Jonquière): Tous ensemble, travaillons pour que le centre des congrès se bâtisse au meilleur endroit, cela va être bon pour le tourisme.

M. Lalonde: On est d'accord sur un centre de congrès. M. le Président, je suis d'accord sur un centre de congrès, je suis d'accord avec toutes les mesures pour encourager le tourisme et aussi pour faire changer les politiques du gouvernement américain qui réduisent... Mais, au-delà de cela, il ne faut quand même pas faire exprès pour leur dire de rester chez eux. C'est quand même noyer le poisson que de parler du centre des congrès surtout qu'il va être quelque part au-dessus d'un endroit entre deux parties d'une ville. Enfin, je vais violer le règlement, si je continue. Il reste, M. le Président, que cela m'apparaît — je veux conclure là-dessus — le droit de recours, ici et dans d'autres articles où les injustices vont être encore plus criantes, cela va pénaliser des gens de chez nous, du monde de chez nous, des bon Québécois et Québécoises qui vont être impliqués. Le droit de recours réglerait cela. Là, on a un exemple qui va être encore plus criant dans d'autres articles qui s'en viennent du caractère artificiel qui ne court pas à des principes fondamentaux.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je viens d'obtenir des statistiques sur le nombre d'accidents impliquant des blessures corporelles des non-résidants au Québec, sur le nombre total d'accidents au Québec; sur 168 486 accidents au Québec, en 1976, il y en a eu 997, c'est-à-dire même pas 1%, à peu près...

M. Giasson: Cela fait 1%.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, parce que 1% cela ferait 1684, environ 5/10 de 1%...

M. Giasson: Ne mêlez pas les blessés avec les accidents.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, je parle...

M. Giasson: Le livre bleu nous donne en 1975, 1893 morts, 51 919 blessés impliqués dans 164 384 accidents. Vous êtes autour de 1%.

M. Vaillancourt (Jonquière): Dans 168 000 accidents survenus au Québec en 1976, il y a eu 997 non-résidants qui ont été blessés ou tués.

M. Giasson: En 1976, d'accord.

M. Vaillancourt (Jonquière): 997 non-résidants qui ont été blessés ou tués, dans 168 486 accidents. Or 1% donnerait 1684, 997 devrait donner environ 0,7%.

M. Giasson: Vous avez combien de blessés dans les 168 000 accidents en 1976?

M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'ai pas ce...

M. Giasson: Le livre bleu nous les donne pour l'année 1975.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): On parle de véhicules impliqués.

M. Saint-Germain: Je comprends très mal l'argument de...

M. Vaillancourt (Jonquière): 997 véhicules impliqués sur 168 000.

M. Saint-Germain: Vous savez, lorsqu'on met des pourcentages, c'est anonyme. Ce sont des images, mais la réalité, c'est qu'il y aura pratiquement 1000 personnes, 1000 accidents où des étrangers seront impliqués et ça fait 1000 personnes au moins. Cela peut être plus, parce que, dans un même accident, plusieurs étrangers peuvent être impliqués. Cela me semble être une injustice.

M. Gagnon: Admettez donc, par exemple...

M. Saint-Germain: Ce sont des humains. Le gars arrive, il perd son fils, il perd sa femme. Ecoutez, quand bien même il y en aurait un seul, c'est un être humain.

Mme Payette: M. le Président, il s'agit de 997 véhicules sur à peu près 160 000...

M. Saint-Germain: Bien oui.

Mme Payette:... et, dans ces véhicules, on n'a pas le pourcentage de blessures corporelles. Il se peut qu'il y en ait seulement quelques-uns sur 997 véhicules.

M. Saint-Germain: Bien oui et puis? On tue une personne, ce n'est pas grave.

Mme Payette: Des grenailles.

M. Saint-Germain: II y a un hold-up dans une banque et il n'y en a qu'un de tué, on est six millions au Québec. Il y en a un qui meurt, pourquoi dépenser des centaines de milliers de dollars pour essayer de chercher le coupable?

M. Gagnon: Admettez donc que le nouveau régime va donner aux touristes beaucoup plus de sécurité qu'on n'en a jamais donnée.

M. Saint-Germain: Voyons donc!

M. Gagnon: Infiniment plus de sécurité.

M. Saint-Germain: Ecoutez, on ne compare pas le nouveau régime à un ancien régime. Tout le monde renie le statu quo.

M. Gagnon: Vous comparez sur des hypothèses actuellement.

M. Saint-Germain: Quant à changer quelque chose, pourquoi ne pas le faire bien? Je ne compare pas sur des hypothèses. Actuellement, même pour un non-résidant, il y a le fonds de compensation. C'est $35 000 pour l'indemnisation, il y a au moins ça. Mon but particulier, en faisant ces comparaisons, ce n'est pas de comparer une banane et une poire. Je ne compare pas le nouveau régime à l'ancien régime, on compare le nouveau régime pour ce qu'il est, le nouveau régime traite mal les étrangers. Cela m'apparaît absolument évident.

M. Gagnon: Lorsque vous dites que ça va chasser le touriste, vous faites une comparaison. Il reste qu'on donne plus de sécurité aux touristes qu'ils n'en ont jamais eu sur le plan des accidents d'automobiles au Québec.

M. Saint-Germain: C'est faux... M. Raynauld: C'est faux.

M. Saint-Germain: ... le touriste qui s'en vient au Québec aujourd'hui sait que, s'il subit $100 000 de dommages, il va avoir un droit de recours; il le sait.

M. Vaillancourt (Jonquière): S'il n'est pas assuré, il est limité à $35 000, par exemple, moins $200.

M. Saint-Germain: Ecoutez, si le gouvernement veut faire adopter l'assurance obligatoire, on est complètement d'accord, pour faire disparaître les injustices que vous mentionnez. Mais ce n'est pas ça qu'on fait, on étudie un projet de loi qui nous dit: On va traiter...

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais ça que le député de Jacques-Cartier mette autant de ferveur et de conviction à défendre les Québécois qu'il en met à défendre le pourcentage de 0,5% de non-résidants blessés au Québec.

M. Saint-Germain: On dit qu'un homme prouve jusqu'à quel point il est civilisé en traitant les étrangers et les dépourvus. A part ça, avec le plaidoyer que j'ai fait contre l'assurance automobile, j'ai la conscience bien nette au sujet des efforts que j'ai faits pour protéger les Québécois

contre un système qui ne tient pas debout, qui n'a aucun sens et qui est ridicule.

Je voulais apporter une précision relativement à la question qui a été posée par le député de Montmagny, et faire ressortir un point particulier, parce que j'avais compris que, dans sa question, le député de Montmagny incluait aussi, dans le droit de recours vis-à-vis des tribunaux, qu'un étranger pouvait apporter devant la cour le quantum des sommes que la régie doit lui verser. Si j'ai bien compris la réponse du procureur, l'étranger va avoir un droit de recours relativement à sa responsabilité dans l'accident, mais il n'a pas de droit de recours, relativement aux sommes qui lui seront versées par la régie. Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Payette: Vous avez bien compris, M. le député.

M. Saint-Germain: Alors, voilà! M. le Président, j'aurais une motion d'amendement à faire, relativement à l'article 8, pour que cet article 8 soit remplacé par le suivant: "La victime d'un accident survenu au Québec et qui n'y est pas résidante conserve son droit de recours contre la régie. La responsabilité et les indemnités versées sont déterminées par une cour de justice, selon les règles du droit commun, dans la mesure où les articles 97 à 102 n'y dérogent pas".

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): N'y aurait-il pas lieu, à ce stade-ci, puisqu'un amendement doit ajouter ou retrancher des mots, d'inviter le député de Jacques-Cartier à dire quels sont les mots qui sont modifiés, retranchés ou ajoutés, face à la motion principale qui est l'article...

M. Saint-Germain: On vient de le dire, c'est l'article 8.

M. Raynauld: C'est au dernier paragraphe. Le dernier alinéa reste là et tous les autres sont remplacés.

Le Président (M. Bertrand): De toute façon, à ce moment-ci, avant de rendre une décision sur la recevabilité de cette motion d'amendement, j'ajourne les travaux jusqu'à huit heures ce soir.

(Suspension de la séance à 16 heures)

Reprise de la séance à 20 h 6

Le Président (M. Clair): A l'ordre, madame, messieurs!

La commission permanente des consommateurs, coopératives et institutions financières est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi no 67 intitulé Loi sur l'assurance automobile.

Messieurs, comme vous pouvez le constater, je remplace le député de Vanier pour présider cette commission. Etant donné que je l'ai vu très brièvement, pourriez-vous me confirmer que vous en étiez à l'étude de l'article 8, qu'une motion d'amendement à l'article 8 par le député de Jacques-Cartier avait été proposée, mais que la recevabilité n'avait pas encore été débattue?

M. Saint-Germain: C'est bien cela.

Le Président (M. Clair): Elle n'avait pas encore été déclarée recevable par le président. Sur la recevabilité de la motion.

M. Vaillancourt (Jonquière): Nous n'avons rien à dire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je pense qu'elle est parfaitement recevable. On a peut-être mentionné quelques mots avant la suspension à 18 heures, du côté ministériel, en ce sens qu'on ne pourrait pas, par motion d'amendement remplacer tout un article par un autre. Il me semble avoir entendu cela. Si ce n'est pas le cas, je voudrais quand même vous mentionner que si cela devait être un élément de votre décision, je pense que le règlement vous permet de considérer le fait que les premiers mots de l'article 8, tel que proposé par le député de Jacques-Cartier, sont les mêmes que ceux de l'article 8 proposé par le ministre. On pourrait faire du patinage de procédure en disant qu'on va remplacer tel mot, après tel mot et cela reviendrait au même.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est pour cela d'ailleurs que je n'ai pas soulevé cette question, puisque je sais fort bien que vous pourriez l'amender en disant que l'article soit modifié en ajoutant après les mots, les mots suivants.

M. Lalonde: C'est cela. Pour cette question, je pense que c'est clair. Quant au principe même, je pense qu'il s'agit ici de modalités. On est rendu réellement dans les articles qui déterminent de quelle façon certaines victimes... On parle quand même de victimes qui sont dans une situation exceptionnelle. On a même mentionné avant l'ajournement qu'il s'agit de victimes qui ne résident pas au Québec. On parle réellement de modalités. Cela ne contrevient pas du tout aux principes principaux qui ont déjà été énoncés dans les articles précédents.

Le President (M. Clair): D'autres intervenants sur la recevabilité de la motion? Je déclare la motion recevable, malgré le fait que soulignait le député de Marguerite-Bourgeoys qu'on pourrait toujours disputer que la motion devrait plutôt se lire, de remplacer les mots après "survenu au Québec " par les mots de la motion du député de Jacques-Cartier, mais étant donné que ce fait n'est pas soulevé par les ministériels, je la déclare recevable.

Des intervenants sur la motion d'amendement? Est-ce que vous aviez une méthode particulière de procéder ou si vous procédiez suivant l'esprit le plus strict du règlement?

M. Lalonde: On avait un excellent président — et, j'en suis sûr, un excellent successeur — qui appliquait la règle d'équité, qui tentait, quand même, de faire la rotation d'un parti à l'autre, mais dans l'ensemble.

Le Président (M. Clair): C'est simplement pour savoir s'il y avait une espèce de "gentleman agreement" spécial à cette commission, puisque je n'en ai pas suivi les travaux.

Mme Payette: Gentlewoman agreement! M. Lalonde: Gentle person!

Le Président (M. Clair): Qui demande la parole? Article 8, la motion d'amendement du député de Jacques-Cartier est-elle adoptée? M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, sans reprendre l'ensemble du débat puisque nous avons déjà discuté du fond des articles 6, 7 et 8 à quelques reprises depuis vendredi dernier, je voudrais quand même appuyer cet amendement. Je voudrais l'appuyer parce que vous savez que la position de notre parti sur le système de responsabilité, sur l'absence de responsabilité est telle que nous aurions voulu, même si on n'a pas été capable d'avoir le débat de fond, que le principe de responsabilité soit conservé pour l'excédent du régime de base qui est proposé dans le projet de loi 67. Nous y voyons donc une possibilité de nous rapprocher de cet idéal en ce qui concerne au moins les non-résidants. Si nous le faisons à l'intérieur de cet article, c'est parce que, déjà, l'article original proposait un régime particulier pour les non-résidants, régime particulier qui comporte un recours devant les tribunaux de droit commun pour l'établissement du degré de responsabilité dans un accident, mais, comme l'article original limite l'application de ces règles de droit commun aux indemnités prévues par le régime de base, d'abord, nous y voyons une exception à l'ensemble du projet de loi qui s'applique à une partie peut-être très minime des victimes d'accidents, mais quand même une exception, et compte tenu que ces exceptions représentent quand même des sources d'incohérence pour le projet de loi, il nous semble qu'il aurait été préférable, si on doit donner un recours, de conserver le principe de responsabilité d'abord, et ensuite de donner un recours aux non- résidants, comme, d'ailleurs, il était absolument indispensable pour établir le degré de responsabilité dans un accident et pourvoir aux indemnités prévues.

Je pense qu'il aurait été préférable d'aller jusqu'au bout de ce principe et si on reconnaît le principe de responsabilité, on devrait aussi reconnaître que les indemnités pour l'ensemble des dommages subis devraient s'appliquer. L'objet de l'amendement est donc de permettre un recours aux tribunaux de droit commun, pas seulement pour rétablir le principe de la responsabilité mais également pour rétablir les indemnités prévues. On a dit cet après-midi que ce principe s'applique à un petit nombre d'accidentés. Moi j'y vois une raison pour être en faveur de cet amendement plutôt que d'être contre l'amendement. Parce que s'il s'agit d'une modalité d'application qui n'est pas financièrement coûteuse, tant mieux, à ce moment-là, on devrait respecter la justice dans la plus grande mesure possible.

Ensuite, je dirai, en faveur de cet amendement, — je l'ai dit cet après-midi et je le répète— il me frappe que dans cet article tel qu'il est proposé, on restreigne la responsabilité de la régie à un point tel que s'il s'agissait d'un assureur privé, il devrait, lui, prévoir les indemnités maximales plutôt que d'être limité à ce régime d'indemnités de base. C'est tel que le propose le projet de loi.

Enfin, je pense que si nous voulons modifier des régimes qui sont relativement communs en Amérique du Nord, qui sont des régimes de responsabilité partielle ou totale, il me semble que nous avons grand avantage au Québec à conserver, pour le traitement des non-résidants, des régimes qui soient aussi proches de la pratique qui existe encore soit dans les autres provinces qui sont les plus proches des nôtres, soit dans les états limitrophes, les états américains limitrophes. Je pense qu'il faudra faire, si cet amendement n'était pas adopté, une publicité considérable auprès des gens qui viendront au Québec, parce que le régime sera différent. Dans le cas des victimes non responsables, je pense qu'il faut admettre que dans ces cas-là, les indemnités prévues sont inférieures à celles que les régimes, dans ces autres provinces ou dans ces états limitrophes, pourraient prévoir.

Par conséquent, si nous voulons éviter que des réputations même abusives, même excessives, se créent, que des images se créent à propos du Québec, je pense qu'il faudrait une très grande campagne d'information, qui serait évidemment inutile, si nous acceptions l'amendement tel qu'il est proposé.

Cet amendement, en effet, prévoit le paiement intégral des indemnités pour l'ensemble des dommages subis et non pas seulement une partie de ces dommages. Je pense que, si, comme on le sait cet après-midi, chaque fois qu'on part aux Etats-Unis, on se demande quel est l'Etat américain qui va avoir un régime plus ou moins particulier d'assurance automobile, ce n'est pas tellement comme ça que ça se pose, il me semble. On s'est fait une image, une idée, et on pense, peut-être à tort, mais, en général, que lorsqu'on va dans un

état limitrophe américain, le régime est à peu près semblable au nôtre.

Je pense qu'on ne se trompe pas d'ailleurs en disant ça, en pensant ça. Bien sûr que l'on s'informerait, si on allait dans des pays ou des provinces qui nous sont complètement inconnus, dont on ne connaîtrait pas le régime d'assurance automobile qui y existe. On s'informerait, et bien sûr, cela affecterait nos décisions de voyager ou de ne pas voyager, si on apprenait que, dans un cas d'accident, on n'était pas susceptible d'être indemnisé complètement. Je pense qu'il en va de même de ce nouveau régime introduit ici, on l'a dit assez, le gouvernement s'en vante, il dit que c'est une innovation, peut-être une première mondiale, à l'exception de la Nouvelle-Zélande, mais les innovations ont leur prix.

Les innovations ont ce prix qu'il faut que les gens soient informés de ce régime; s'ils ne sont pas informés de ce régime et qu'ils ont de mauvaises surprises, ça va jouer contre l'économie du Québec, ça va certainement jouer contre l'industrie touristique et ça va être aussi un facteur additionnel dans les évaluations que les gens vont faire, dans l'intérêt qu'ils auront de venir travailler au Québec, de venir faire des affaires au Québec ou même de venir y passer leurs vacances. Je pense que ce n'est pas notre intérêt d'agir ainsi et, justement dans la mesure où cette motion impliquerait un très petit nombre de victimes, je pense que c'est une raison supplémentaire pour être en faveur d'un paiement intégral des dommages subis.

On nous a aussi dit cet après-midi que, par rapport au régime actuel, le régime proposé pouvait comporter certains avantages. C'est exact, il peut comporter certains avantages, mais il comporte aussi des désavantages. Il n'est pas connu, ce régime nouveau qui nous est proposé et, pour les non-résidants, il comporte aussi des désavantages qui ne sont pas connus et qui pourraient soulever sûrement des questions, sinon des inquiétudes, dans l'esprit des gens qui sont susceptibles de venir au Québec.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député d'Outremont, pourriez-vous me permettre une question? Je comprends très bien la deuxième phrase de l'amendement, mais pas la première phrase de l'amendement "conserve son droit de recours contre la régie"; je comprends que dans le deuxième paragraphe, la deuxième phrase, il est dit; La responsabilité, les indemnités... Ils s'en vont devant un tribunal de droit commun qui décide, et de la responsabilité et du quantum des dommages, si la personne n'est pas responsable.

Mais quel est le sens de la première partie de l'amendement, "conserve son droit de recours contre la régie"? Est-ce que c'est en vertu d'un système de responsabilité ou de non-responsabilité? Deuxième question: Est-ce que c'est en vertu des indemnités prévues dans la loi 67? Ce n'est pas clair dans...

M. Raynauld: II me semble que c'est clair, c'est de conserver son droit de recours contre la régie, implicitement dans un régime de responsabilité. Et ensuite, on précise de quelle responsabilité il s'agit. C'est la responsabilité de l'accident et aussi les indemnités, indépendamment du régime proposé par la loi 67. Si on est dans un régime de responsabilité, c'est, je suppose, le régime actuel qui s'applique comme il s'applique dans les autres provinces, où on réclame des indemnités pour des dommages subis et la cour établit le quantum — c'est le vocabulaire des gens dans l'assurance — de ces dommages. Mais c'est la totalité des dommages.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour bien comprendre, cela veut dire que le non-résidant au Québec s'adresse à la régie, et la régie le déclare responsable. Cette personne s'en va devant le tribunal de droit commun qui lui, peut le déclarer non responsable...

M. Raynauld: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bien.

M. Beauséjour: Faites-vous une idée, vous n'êtes pas d'accord tous les deux.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'exemple, la victime...

M. Lalonde: Si vous permettez, c'est qu'elle ne s'adresse pas à la régie comme étant un payeur d'indemnité.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour déterminer la responsabilité, c'est ce que j'ai dit.

M. Lalonde: Elle s'adresse à la régie, pour lui payer, pas l'indemnité, en vertu du projet de loi, limitée à $18 000.

M. Vaillancourt (Jonquière): Si vous voulez écouter mon exemple. Je vais vous poser la question, parce que j'aimerais comprendre. Je ne suis pas nécessairement contre l'amendement, mais je voudrais le comprendre. S'il y a seulement moi qui ne le comprend pas, je m'excuse auprès des autres.

Le non-résidant au Québec s'adresse à la régie et la régie décide que cette personne est responsable. Cette personne, selon votre amendement, peut s'adresser au tribunal de droit commun qui, lui, peut dire: Je ne suis pas d'accord avec la régie et je vous déclare non responsable. A ce moment-là, le tribunal lui accorde les indemnités, non pas en vertu du projet de loi 67, mais des dommages réellement subis. D'accord? C'est cela? C'est une des hypothèses.

M. Raynauld: Sous réserve de l'opinion de mon collègue, j'avais compris que, si le non-résidant subit un accident, il s'adresse à la régie pour savoir quel est le règlement que la régie pourrait lui proposer, qu'il soit responsable ou non. La régie peut décider, à ce moment-là, qu'il n'est pas responsable et de lui verser une indem-

nité de tant. Que la décision de la régie porte sur le degré de responsabilité ou sur le quantum des indemnités versées, dans les deux cas, le non-résidant pourrait se retourner et en appeler devant les tribunaux de droit commun pour faire renverser la décision de la régie soit sur l'un, soit sur l'autre des deux cas. C'est comme cela que j'avais compris cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'accord.

M. Raynauld: J'avais à peu près terminé mon plaidoyer pour cet amendement. Encore une fois, je pense qu'en résumé, il me semble que cet amendement vient compléter un début, qui est déjà dans l'article lui-même, d'arrangement spécial et particulier pour les non-résidants qui comporte un élément de responsabilité dans les accidents, ce qui représente une exception au principe général du projet de loi. Nous le portons jusqu'à sa conséquence ultime, c'est-à-dire un recours devant les tribunaux à la fois pour établir le degré de responsabilité et le niveau des indemnités si ce non-résidant n'est pas satisfait de la décision de la régie.

M. Saint-Germain: Je crois que l'avocat nous avait bien dit qu'il y avait un recours devant les tribunaux pour la responsabilité, mais non pas pour le quantum.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais c'est l'amendement.

M. Raynauld: C'est ce que je dis, mais l'amendement porte à la fois sur le degré de responsabilité et sur le volume des indemnités, tandis que l'article lui-même ne porte que sur la responsabilité.

Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur la motion d'amendement?

Mme Payette: J'ai demandé la parole. Le Président (M. Clair): Mme le ministre.

Mme Payette: Je voulais simplement prendre quelques minutes pour faire remarquer que c'est avec un amendement qu'on touche l'incohérence. L'Opposition a sans doute oublié qu'à l'article 6 que nous avons adopté, nous indemnisons les non-résidants qui voyagent dans des véhicules immatriculés au Québec, qui sont des passagers dans des voitures-taxis, si bien qu'à l'article 8, avec l'amendement qui est proposé, ne seraient pénalisés que les non-résidants piétons ou voyageant dans leur propre véhicule. Si cela ne s'appelle pas de l'incohérence, je ne sais pas comment cela s'appelle, si bien que je serai contre cet amendement.

M. Raynauld: Voulez-vous répéter, Mme le ministre, je n'ai pas compris? Je m'excuse.

Mme Payette: Voulez-vous relire l'article 6?

M. Raynauld: Je l'ai lu plusieurs fois. Je sais qu'un non-résidant peut être indemnisé lorsqu'il conduit une voiture immatriculée au Québec.

M. Vaillancourt (Jonquière): Plus que cela. M. Raynauld: C'est cela que j'ai compris.

M. Vaillancourt (Jonquière): Lorsqu'il est passager...

Mme Payette: D'un taxi.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... ou conducteur.

M. Raynauld: Ou qu'il est passager dans une voiture immatriculée au Québec. Là, on ne parle pas de cela, on parle des voitures qui ne sont pas immatriculées au Québec.

Mme Payette: C'est bien ce que je dis.

M. Vaillancourt (Jonquière): Votre amendement ne devrait-il pas plutôt se lire, si on veut être logique avec l'article 6: La victime d'un accident survenu au Québec et qui n'y est pas résidant, autre que celle prévue à l'article 6, deuxième ou troisième paragraphe?

M. Lalonde: M. le député...

M. Vaillancourt (Jonquière): Voulez-vous parler de toutes les victimes non-résidantes ou voulez-vous parler de celles non comprises dans l'article 6? Cela serait...

M. Raynauld: Ah! cela...

M. Lalonde: Si le député de Jonquière veut faire un sous-amendement, nous autres, on va en discuter.

M. Vaillancourt (Jonquière): Là, on ne le sait plus trop. C'est une question que je pose, parce qu'on a adopté l'article 6.

M. Lalonde: C'est peut-être exact.

M. Vaillancourt (Jonquière): II y a déjà un paquet de non-résidants qui sont couverts par l'article 6. Actuellement, ceux qui ne sont pas couverts sont ceux qui conduisent leur propre véhicule automobile au Québec, il ne faut pas l'oublier, alors que votre article, tel que rédigé, fait totalement abstraction du fait qu'on a adopté l'article 6 et soumet à un régime de responsabilité ceux qu'on a enlevés du système de responsabilité, c'est-à-dire tous les passagers non-résidants, tous les conducteurs d'une automobile immatriculée au Québec et non-résidants. On les protège eux.

Pour eux, il n'est pas question de responsabilité. Ils sont indemnisés. Votre article pourrait pénaliser beaucoup de personnes qui sont actuellement protégées par l'article 6 tel que rédigé.

M. Lalonde: II s'Infère de la lecture de l'article, quand on parle et qu'on dit: "et qui n'y est pas résidant", que cela ne frappe pas les mêmes personnes qui sont décrites a l'article 6 puisque, par l'amendement du ministre récemment, on a fait en sorte que tout propriétaire, conducteur ou passager d'une automobile est réputé être un résidant. L'incohérence vient probablement de l'article 6. Qu'est-ce que vous voulez? A l'article 8, on essaie de corriger un petit peu ce projet de loi qui est un véritable nid d'incohérence. C'est possible qu'on contredise un peu ce qui s'est passé avant parce qu'on n'a pas réussi à convaincre le gouvernement de mettre un peu de plomb dans son projet de loi, un peu de cohérence. Maintenant, si le député de Jonquière veut, par un sous-amendement, suggérer une amélioration, nous avons quand même cette qualité, nous, de l'Opposition, nous sommes très modestes. Nous n'avons pas prétendu régler tout le problème dans un amendement. C'est à peu près le seul qui a été accepté jusqu'à maintenant. Si le député veut nous aider, on sera prêt à en discuter.

M. Vaillancourt (Jonquière): II ne faudrait pas interpréter nécessairement mes paroles comme une acceptation d'un amendement éventuel. Ce que je veux dire, c'est que, si on adoptait l'article 8 tel que rédigé, il faudrait nécessairement, si on veut être cohérent, retourner à l'article 6.

M. Lalonde: C'est possible, à ce moment...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est probable, même.

M. Lalonde: ... unanimement, la commission pourrait facilement retourner à l'article 6. Si c'est seulement à l'article 8 que vous voyez la lumière, c'est facile ensuite de retourner à l'article 1 et de revenir en arrière pour tout corriger.

Le Président (M. Clair): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais seulement ajouter un mot là-dessus. Je n'ai peut-être pas la subtilité des juristes, mais je ne vois pas du tout en quoi l'article 8 pourrait venir en conflit avec l'article 6. On dit à l'article 8 que le non-résidant conserve son droit de recours. Cela ne veut pas dire...

M. Vaillancourt (Jonquière): Je peux vous l'expliquer. C'est parce que...

M. Raynauld: Oui, si vous voulez. Il conserve son droit de recours contre la régie. Même s'il est indemnisé, en vertu de l'article 6, il pourra encore ne pas être d'accord avec cela. Quel est le point?

M. Vaillancourt (Jonquière): A l'article 6, que nous avons d'ailleurs adopté, probablement sur division, puisque les articles adoptés à l'unanimité sont rares, on dit que, lorsque l'accident survient au Québec, sont réputés, aux fins de la loi, résider au Québec le propriétaire, le conducteur et le passager d'une automobile immatriculée au Québec, ce qui veut dire qu'un Américain non résidant au Québec qui est passager dans une voiture de taxi sera considéré, à toutes fins utiles et à toutes fins que de droit, comme un Québécois, ne sera pas soumis au système de la responsabilité; il sera indemnisé par la régie. Quand vous faites votre amendement à l'article 8, vous dites: La victime d'un accident survenu au Québec et qui n'y est pas résidante... C'est décrit de façon tellement large que cela englobe, dans votre article 8, ceux que l'on prévoit...

M. Lalonde: Non, M. le Président, l'article 6 existe.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Lalonde: C'est seulement les autres résidants que l'article 8 couvre.

M. Raynauld: ...

M. Saint-Germain: Ecoutez, je ne suis pas...

M. Lalonde: C'est évident.

Le Président (M. Clair): Un à la fois, s'il vous plaît, messieurs, un à la fois, pour les fins du journal des Débats. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Je ne sais pas, je ne suis pas légiste et je ne suis même pas avocat, mais, lorsque je lis dans le deuxième paragraphe "lorsque l'accident survient au Québec, sont réputés résider au Québec le propriétaire, le conducteur et le passager d'une automobile immatriculée au Québec", on dit que ces gens, selon la loi, sont des résidants du Québec. C'est ce que cela dit. Nous autres, on parle des autres.

Une Voix: C'est cela.

M. Saint-Germain: II n'y a pas de contradiction là-dedans. Le ministre devrait savoir cela. Il me semble que, si le ministre lit le français comme nous — elle non plus n'est pas avocat, pas plus que moi — c'est clair, on dit, selon la loi, ce sont des résidants du Québec. C'est fini. C'est classé. C'est définitif. Nous autres, dans notre amendement, on parle des non-résidants, on ne parle plus des autres. Ils sont exclus, par le fait même, dans la définition qu'on veut donner d'un type qui est assis dans une automobile qui est immatriculée au Québec; on dit que celui-là n'est plus un étranger, c'est un résidant du Québec. Cela me semble être clair, direct, définitif. Là, on parle des non-résidants. On ne parle plus de ceux-là.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Jacques-Cartier, d'Outremont ou de Marguerite-Bourgeoys, j'aurais une autre question à poser. Lorsque vous dites qu'il conserve son droit de recours contre la régie, je comprends que, dans une affaire de responsabilité, parce que la régie aura à trancher... Est-ce qu'il conserve aussi un droit de recours contre le Québécois responsable de l'accident?

M. Lalonde: II est évident que la régie prend fait et cause du Québécois. Il est évident que le seul recours qu'a le non-résidant c'est contre la régie qui prend fait et cause du Québécois, mais qui se trouve dans la position, simplement, de l'autre partie dans l'accident, qui a à décider si elle paie ou non, ou de l'assureur de cette autre partie de l'accident qui a à décider si elle est responsable ou si l'autre partie à l'accident est responsable et combien cela vaut. Si elles ne s'entendent pas elles vont en cour. C'est évident.

Le Président (M. Clair): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Une autre réponse, encore une fois, non légale, non juridique, c'est que la régie est un assureur. Il a la même chose que n'importe quel autre assureur.

M. Saint-Germain: Je pense qu'on serait mieux de demander à notre légiste de s'approcher. Ce serait moins long, je pense bien.

Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur la motion d'amendement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Un instant!

Le Président (M. Clair): M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: Dans l'amendement qui nous est proposé il est question de deux choses: déterminer la responsabilité et les indemnités. On est revenu souvent en disant: "afin qu'un non-résidant puisse recevoir le plein montant". Ce que je remarque, par exemple, c'est qu'on a quand même oublié d'indiquer que, supposons $18 000, ce qui serait un plein montant, c'est pour une année, ce qui veut dire que si la personne n'est pas responsable et qu'il est décidé qu'elle devrait recevoir un montant de $18 000 pendant dix ans, le montant devient différent. Cela devient $180 000. Et à l'article 12, il y a aussi la possibilité de donner un montant forfaitaire. Ceci veut dire que le montant global d'une façon ou d'une autre peut dépasser de beaucoup puisqu'on dit: le montant de base.

M. Saint-Germain: Absolument pas.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Beauséjour: C'est pour cela que, personnellement, je serai contre l'amendement, parce que je ne vois pas ce que cela vient ajouter.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! Le député de Marguerite-Bourgeoys et le député de Jonquière. Quand on veut la parole, on la demande, s'il vous plaît.

M. Lalonde: Je n'ai pas parlé.

Le Président (M. Clair): Vous aviez demandé la parole.

M. Lalonde: Oui, oui. Je pensais que vous me rappeliez à l'ordre, M. le Président.

M. Saint-Germain: M. le Président, j'aimerais avoir le droit de parole.

M. Lalonde: M. le Président, si je suis en faveur de cet amendement, c'est à contrecoeur. Au fond, on va se trouver, par cet amendement, à traiter d'une façon un peu plus civilisée les gens qui n'habitent pas ici que les gens qui habitent ici. On va se trouver à mettre un peu de justice dans les rapports qui vont se créer par des accidents ou des individus qui ne sont pas des résidants du Québec, qui vont être partis, alors que ce gouvernement, dans son projet d'apprenti sorcier, a refusé ce droit de recours à ses propres résidants du Québec. Cela me crée un problème, M. le Président; il n'est pas mince, parce qu'au fond, ayant été incapable, jusqu'à maintenant, de faire comprendre au gouvernement que le droit de recours à ses propres citoyens canadiens résidant au Québec est nécessaire pour un projet, un régime qui va pouvoir régler les injustices que l'on trouve dans le projet de loi 67, on doit quand même se soucier de le donner à d'autres alors qu'on se l'est refusé à nous-mêmes. On se l'est refusé de façon bien évidente, on a essayé de trouver un régime qui ne coûte pas beaucoup plus cher que le régime actuel mais qui va, tout en permettant l'indemnisation d'un plus grand nombre de personnes, refuser l'indemnisation complète à un aussi grand nombre de personnes. J'ai expliqué cet après-midi, avant que soit faite la motion d'amendement, les raisons pour lesquelles je serai en faveur de cet amendement, à savoir que le droit de recours élimine les situations bizarres, étranges qui sont créées par le caractère artificiel, le caractère de panacée, le caractère de remède de guérisseur que ce gouvernement a donné à son projet de loi, à son régime, afin de tenter de tout englober, mais en oubliant des principes fondamentaux de justice sociale. Cela m'apparaît une occasion de remettre dans ce projet un peu plus de justice, à savoir qu'une fois qu'on a réglé les problèmes principaux par un régime de base qui indemnise tout le monde, au moins pour un minimum, on laisse, pour l'excédent, le droit des gens à fonctionner simplement comme nous l'avons fait ici, qu'on laisse le système de responsabilité s'exercer dans la liberté des gens, tout simplement.

Naturellement, on n'est peut-être pas encore rendu au moment où Mme le ministre va nous dire combien d'automobiles il faut avoir et quelle sorte, de quelle grandeur, de quelle couleur. Mais, avant d'en arriver là, elle nous l'a annoncé la semaine dernière, j'étais là, c'est avant mon départ, j'aimerais qu'on ouvre la porte à un peu de liberté, qu'on ouvre la porte à l'exercice, Je vais employer un mot cher aux péquistes, "normal" des droits des gens. Il m'apparaît malheureux qu'on doive tenter

de retrouver ce caractère, d'injecter dans ce projet de loi ce caractère à l'égard des non-résidants. Mais c'est la première occasion que nous avons de le faire, on a tenté de le faire avant, ça n'a pas été reçu, à cause du caractère un peu spécial du libellé de la loi, qui était très difficile à amender.

Je ne critique pas les décisions de la présidence, mais c'est la première occasion et c'est à regret que nous présentons, pour des non-résidants, un amendement qui m'apparaît donner des droits à des gens, on aurait bien aimé que ce soit nos gens à nous, les gens,qui restent ici, qui résident au Québec.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, lorsque je regarde l'amendement apporté à l'article 8 et que je regarde l'article 8 tel que proposé, on se rend compte qu'il n'y a qu'un seul point en litige entre le texte original et l'amendement. Dans l'amendement, on permet un recours devant un tribunal de droit commun en ce qui concerne les indemnités, et elles pourraient, dans ce cas-là, être supérieures à celles prévues à la loi. L'article 8 prévoyait déjà qu'il y avait, pour les non-résidants conduisant leur propre véhicule au Québec, un système de responsabilité. La régie ne payait pas, si le non-résidant était responsable, mais, par contre, le non-résidant pouvait, dans l'article 8, tel que nous l'avons ici, s'adresser aux tribunaux pour faire vérifier ou réviser la décision de la régie en ce qui concerne la responsabilité.

Si, d'autre part, la régie en venait à la conclusion que le non-résidant était non responsable de l'accident, il était indemnisé en vertu de l'article 8, selon les indemnités prévues à la loi 67. Donc, la seule utilité, à toutes fins pratiques, de l'amendement du député de Jacques-Cartier est de permettre, au-delà de la responsabilité, de s'adresser au tribunal de droit commun pour obtenir des indemnités supérieures ou inférieures à celles prévues à la loi 67.

Nous avons déjà accepté, dans des articles préalables, qu'au Québec, toute personne qui était victime, selon les définitions d'un accident d'automobile, d'un dommage corporel était indemnisée en vertu et en fonction des indemnités déjà prévues au projet de loi 67. Je pense que c'est clair. Nous avons également adopté qu'un résidant québécois qui avait un accident hors du Québec était également couvert et indemnisé en vertu des indemnités prévues à la loi, sauf que, dans ce cas-là, la régie était subrogée dans les droits de cet assuré contre la personne responsable de l'accident en vertu des lois en vigueur là où avait lieu l'accident.

A l'article 6 qui est adopté également, nous protégeons — et j'ai donné des statistiques cet après-midi — tous les résidants non québécois, passagers ou conducteurs d'un véhicule automobile immatriculé au Québec.

Nous avons établi cet après-midi que moins de 1% des véhicules automobiles impliqués dans un accident au Québec concernait des non- résidants. En plus de cela, nous protégeons déjà, à l'article 6, tous les passagers et tous les conducteurs non-résidants, mais conduisant un véhicule automobile immatriculé au Québec, de telle sorte que l'Opposition voudrait que l'on donne, à ces non-résidants responsables d'un accident, ce que l'on ne donne pas, dans ce même article de loi, aux résidants québécois.

Ces personnes peuvent également détenir des polices d'assurance-responsabilité personnelles. Ces résidants peuvent avoir des polices d'assurance personnelles comme nous. Nous disons qu'au-delà de $18 000, les citoyens québécois qui veulent protéger leurs intérêts supérieurs à $18 000, peuvent, en vertu de l'article 3 ou de l'article 4, je pense, détenir une assurance supplémentaire pour protéger les risques de pertes au-delà de $18 000.

C'est cela que l'Opposition officielle veut. En ce qui me concerne, je vais voter contre l'amendement du député de Jacques-Cartier, puisqu'il n'est pas dans l'intention du député de Jonquière, en tout cas — et je ne pense pas que ce soit l'intention du gouvernement — d'aller au-delà des indemnités prévues à la loi.

Il est bien évident que la journée où nous permettrons à des non-résidants d'aller s'adresser au tribunal de droit commun pour obtenir des indemnités supérieures à celles du régime, en ce qui me concerne, la journée où on fera cela, je le ferai et je le demanderai pour les Québécois.

Il n'est pas question de donner à des non-résidants plus de droits qu'aux Québécois. Nous avons décidé que le régime actuel serait un régime de non-responsabilité, avec les indemnités qui étaient prévues par la loi. Libre à ceux qui veulent s'assurer de façon supplémentaire, de le faire.

M. le Président, je pense que c'est là le but de l'amendement de l'Opposition officielle et je voterai contre cet amendement.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Lalonde: Quelques secondes seulement pour réagir.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je prends note du fait que le député de Jonquière ne veut pas donner plus de droits aux non-résidants qu'aux Québécois, reconnaissant là le fait qu'on en a donné beaucoup moins aux Québécois par ce projet de loi...

M. Vaillancourt (Jonquière): Article 96, M. le Président. J'ai dit que la journée...

M. Lalonde: M. le Président, l'article 96, c'est quand j'aurai fini de parler.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je présumais votre consentement.

M. Lalonde: Non, je n'ai pas terminé. C'était trop beau de vous entendre.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous pouvez terminer, vous avez la parole:

M. Lalonde: J'avais déjà souligné l'aspect regrettable de cette situation qui nous amenait, nous, de l'Opposition officielle, à suggérer de donner plus de droits à des non-résidants. Le député de Jonquière a concouru à mon opinion. Il ne veut pas donner plus de droits à des non-résidants. Je le comprends. Cela prouve qu'on a donné moins de droits aux Québécois, et cela prouve que le gouvernement s'est peinturé dans un coin, avec son projet de loi artificiel.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'article 96, M. le Président, ce que je veux dire, et si le député de Marguerite-Bourgeoys veut que je précise, je vais préciser. Je considère que les Québécois, en vertu du régime actuel, sont extrêmement bien protégés et qu'ils auront les indemnités prévues à la loi.

Ce qu'on a voulu protéger, et ceux qu'on a voulu protéger, M. le Président, c'est ceux qui, d'après des études qui ont été faites, gagnaient des salaires de $18 000 ou moins, et c'est la grosse majorité des Québécois.

Ce qu'on dit également, c'est que ceux qui gagnent plus de $18 000 — même si, personnellement, je n'emploierai jamais les termes employés par le député de Jacques-Cartier — sont capables de se procurer une protection supplémentaire.

Je n'ai jamais voulu dire, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, et je le répète, que ce projet de loi ne donnait pas de droits. Au contraire, il en donne beaucoup, puisqu'il indemnise des gens qui sont responsables d'un accident, ces victimes qui, auparavant, n'étaient aucunement indemnisées.

Mais je dis, par contre, que s'il fallait donner un recours devant les tribunaux de droit commun — parce que j'ai voté personnellement contre un recours devant les tribunaux de droit commun, pour ceux qui étaient assujettis au régime — je serais absolument illogique avec moi-même si je permettais un tel droit à des non-résidants.

Je vous dirai bien franchement que, la journée où la loi sera amendée pour permettre aux non-résidants d'aller devant les tribunaux de droit commun pour obtenir des revenus supplémentaires, à ce moment, on fera le même amendement pour les Québécois.

Le Président (M. Clair): Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Le député de Jonquière n'a jamais rien compris dans cela. Le gouvernement a établi un régime de non-responsabilité. Il s'en fait un principe. On dit: On ne peut pas, dans le contexte social d'aujourd'hui, où la voiture est tellement entrée dans les moeurs que ce n'est plus un loisir, ce n'est plus un moyen de se transporter au travail, c'est entré dans les moeurs, c'est pratiquement une obligation aujourd'hui d'avoir une voiture... Pratiquement tous les gens ou toutes les familles en ont une. C'est dans les moeurs.

On sait pertinemment que les conducteurs d'automobiles ont tant de décisions à prendre au mille. On en est même arrivé jusque-là. Il ne faudrait pas les rendre responsables, parce qu'on a été distrait — c'est humain d'être distrait — parce qu'on a fait une fausse manoeuvre — c'est normal de faire une fausse manoeuvre — à un moment donné; parmi les multiples décisions qu'on est amené à prendre lorsqu'on voyage en automobile, on ne peut pas empêcher un être humain de faire une erreur de jugement; c'est inhérent à la nature humaine. On a argumenté comme cela, pour bien prouver qu'il fallait avoir un régime de "no fault". Nous avons accepté cela comme régime de base, mais ce grand principe, quand c'est pour les étrangers, ne compte plus, ce ne sont pas des êtres humains, ils n'ont pas le droit d'être distraits, ils n'ont pas le droit de faire les erreurs que nos concitoyens peuvent faire sur la route. Pour eux, la voiture est un objet de luxe, ce n'est pas dans les moeurs. Ce grand principe ne s'applique plus, ce principe qu'on défend envers et contre tous, et qui est défendable, je l'avoue. Quand on arrive au Québec, cela ne tient plus.

Il me semble évident qu'il y a une relation entre le régime de non-responsabilité et la façon dont on dédommage les gens dans cette loi. A mon avis, il y a une relation directe. Si, à un moment donné, on en restait au régime de responsabilité, on serait réellement obligé de changer les structures de la loi et il y aurait des répercussions au niveau des indemnisations et ainsi de suite. On n'a pas voulu faire cela. On a accepté, comme principe, la non-responsabilité et on a bâti un projet de loi en conséquence. Voilà.

Pour l'étranger, cela n'existe pas. On lui dit: Toi, mon "boy", on va te payer, si tu es capable de nous prouver que tu es absolument innocent dans cet accident. On le taxe en partant. D'un autre côté, on ne te donnera pas le droit de demander la valeur des dommages que tu as subis. C'est là qu'est fondamentalement la différence entre le traitement qu'on donne à l'étranger et celui qu'on donne au citoyen du Québec. Le citoyen du Québec n'a pas à prouver sa non-responsabilité. Pas du tout. On dit à l'étranger: Toi, par exemple, tu seras obligé de la prouver. Et on ne donne rien en compensation pour cela, parce qu'on dit: D'un autre côté, tu ne recevras pas plus que le régime établi pour tous les Québécois, régime basé sur la non-responsabilité. C'est là qu'est réellement l'injustice.

On dit aux Québécois: Vous allez avoir ce régime, que vous soyez responsables ou non. C'est ce qu'on dit à tout le monde. Mais au non-résidant, on dit: Non, tu seras obligé de prouver ta non-responsabilité. Il y a là un handicap et on ne lui donne rien en compensation. Il me paraît absolument évident qu'on le traite d'une façon bien différente de celle qu'on traite le citoyen du Québec.

Si on veut laisser la responsabilité au voyageur, qu'on lui laisse aussi ce qui est la suite de la

responsabilité, qu'on lui laisse le droit d'actionner pour les dommages qu'on lui fait. Ce n'est pas une charité à lui faire, à mon avis. Si vous ne le faites pas, les étrangers seront certainement beaucoup moins bien traités que nos concitoyens. Cela me semble évident.

On pose une condition pour faire entrer les étrangers dans le système et on ne leur donne rien en compensation. On les limite à des indemnités qui tiennent compte du "no fault". Il y a là une injustice. Notre amendement ne fait pas autre chose que d'essayer de traiter les voyageurs dans le même sens qu'on traite nos propres concitoyens. C'est tout ce qu'il en est.

Le Président (M. Clair): Mme le ministre.

Mme Payette: J'ai trouvé malheureuse cette allusion à des droits en plus ou des droits en moins, dans la mesure où ce que nous proposons, par ce régime, c'est d'échanger le droit de recours par le droit à l'indemnisation, qui nous paraissait un droit plus fondamental dans la société dans laquelle on vit, avec le nombre d'accidents, le nombre de véhicules aussi qui circulent sur nos routes.

J'aimerais qu'on arrête de charrier quant à une indemnisation complète ou incomplète, parce que, dans le système que nous connaissons présentement, dans le régime de la responsabilité, le total des indemnités qui sont payées présentement est de l'ordre de $219 millions. Si on ajoutait à cela des indemnités pour les 28% de la population qui ne sont jamais indemnisés, on pourrait atteindre un total de $274 millions. Avec le régime que nous proposons, vous savez que nous envisageons des indemnités de l'ordre de $320 millions à $322 millions, dans la première année.

Quand on parle d'une indemnisation incomplète, j'aimerais qu'on se rappelle ces chiffres avant de lancer des choses comme cela.

Le Président (M. Clair): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: Je pense que ma remarque va s'inscrire exactement à la suite de la dernière intervention du ministre. Je voulais demander également, à propos de l'intervention du député de Jonquière, si le système proposé est si généreux que cela et s'il est plus généreux que le système actuel, quelle opposition vous avez à ce qu'on reconnaisse que les gens pourraient se faire indemniser suivant les tribunaux de droit commun? S'il était si généreux que cela, à ce moment, cela ne coûterait rien. On répond à cela en disant: Le régime que nous proposons est bien plus complet que les indemnités du régime actuel. Si c'est vrai, reconnaissons qu'il n'y a pas d'inconvénient à ce qu'on aille devant les tribunaux de droit commun faire reconnaître ces indemnités pour qu'elles soient versées.

En plus, je voudrais bien mentionner, à titre d'exemple, que cet amendement que nous proposons est vraiment également la contrepartie de l'article 9 qui va suivre où la régie peut recouvrer également les indemnités qu'elle verse en vertu du même principe de subrogation.

Je pense que, si on voulait aller au bout du principe établi même dans l'article 8 original, l'amendement aurait sa place et serait d'une logique absolument sans faille.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Jacques-Cartier.

M. Lalonde: J'aurais simplement quelques mots à ajouter à la dernière intervention du ministre...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... qui nous a dit que tout ce qu'on voulait faire, c'était d'échanger le droit de recours pour l'assurance d'une indemnisation. Or, c'est exactement ce qu'on refuse aux étrangers, dans l'article 8.

Le Président (M. Clair): C'est justement, M. le député. Je voulais simplement indiquer que je sens qu'il y a un glissement au fur et à mesure des intervenants vers...

M. Lalonde: Madame a glissé avant moi, laissez-moi glisser avec elle.

Le Président (M. Clair): Je suis d'accord, mais je ne voudrais pas qu'on change le sujet de la conversation.

M. Lalonde: Non, mais c'est très pertinent, parce que ce qu'on reproche à l'article 8 et ce que veut corriger l'amendement, c'est cette espèce d'incohérence — vous n'étiez pas ici cet après-midi quand on en a parlé — de tout le système. On dit: On échange le droit de recours pour une assurance d'indemnisation. C'est une décision qu'on peut faire, mais, quand on arrive aux non-résidants, on dit: Vous n'avez pas l'assurance-indemnisation, il va falloir que vous prouviez la responsabilité de l'accident. On enlève d'un côté et on n'enlève pas de l'autre.

Cet échange dont le ministre faisait état dans sa dernière intervention m'apparaît complètement renié par l'article 8 que veut corriger justement l'amendement, parce que, dans l'article 8, on dit: Bon, si vous n'êtes pas résidant ici, vous allez devoir prouver la responsabilité avant d'avoir droit à quoi? Pas à une indemnisation complète, à l'indemnisation de la régie. Dans cet échange qu'on a fait pour tout le monde, on enlève une contrepartie pour les étrangers. C'est à cela que nous nous opposons.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Jacques-Cartier, voulant que l'article 8 soit remplacé par le suivant: "La victime d'un accident survenu au Québec et qui n'y est pas résidante, conserve sont droit de recours contre la régie; la responsabilité et les indemnités versées sont déterminées par une cour de justice selon les règles du droit commun dans la mesure

où les articles 97 à 102 n'y dérogent pas." Est-elle adoptée?

M. Vaillancourt (Jonquière): Rejetée.

M. Saint-Germain: Vote enregistré, M. le Président.

M. Lalonde: Appel nominal.

Le Président (M. Clair): Que ceux qui sont...

M. Lalonde: Vous n'avez pas présidé durant le projet de loi 101, sûrement?

Le Président (M. Clair): Non, sûrement pas. Dans les documents que m'a remis le député de Vanier, il y a plusieurs listes de membres. Je serais embêté de vous dire laquelle est valide pour aujourd'hui... M. Beauséjour (Iberville)?

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Bisaillon (Sainte-Marie)? M. Gagnon (Champlain)?

M. Gagnon: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Gosselin (Sherbrooke)? M. Goulet (Bellechasse)? M. Laberge (Jeanne-Mance)?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Landry (Fabre)? M. Giasson (Montmagny-L'Islet)? M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Perron (Duplessis)?

M. Perron: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Marquis (Matapédia)?

M. Marquis: Contre.

Le Président (M. Clair): Mme Payette (Dorion)?

Mme Payette: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Raynauld (Outremont)?

M. Raynauld: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Roy (Beauce-Sud)? M. Le Moignan (Gaspé)?

M. Le Moignan: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Saint-Germain (M. Jacques-Cartier)?

M. Saint-Germain: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt (Jonquière)?

M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.

Le Président (M. Clair): Le résultat est quatre pour l'adoption de la motion, et huit contre. La motion est donc rejetée.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'article 8 est-il adopté?

Le Président (M. Clair): L'article 8 est-il adopté?

M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté sur division.

Le Président (M. Clair): Adopté sur division. J'appelle l'article 9. Mme le ministre.

Mme Payette: L'article 9 se lit comme suit: Nonobstant l'article 4, la régie qui indemnise une victime en raison d'un accident survenu au Québec est subrogée dans les droits de celle-ci et peut recouvrer les indemnités ainsi que le capital représentatif des rentes qu'elle est ainsi appelée à verser de toute personne ne résidant pas au Québec qui est responsable de cet accident dans la proportion où elle en est responsable, et de toute personne qui est tenue à l'indemnisation des dommages où elle en est responsable, et de toute personne qui est tenue à l'indemnisation des dommages corporels causés dans ledit accident par ce non-résidant. La subrogation s'opère de plein droit par la décision de la régie d'indemniser la victime. Le recours de la régie est soumis au tribunal et se prescrit par trois ans à compter de la subrogation. La responsabilité est déterminée suivant les règles du droit commun dans la mesure où les articles 97 à 102 n'y dérogent pas.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président...

Mme Payette: Est-ce que je pourrais expliquer l'amendement, M. le Président?

Le Président (M. Clair): Mme le ministre.

Mme Payette: L'article 9 du projet déposé en première lecture traitait de la définition du mot

"conjoint". On a vu que la définition de ce mot, au paragraphe 7 de l'article 1, avait été modifiée et, avec cette modification, l'article 9 devient inutile. Le nouvel article traite du droit de subrogation de la régie contre un non-résidant lorsque l'accident survient au Québec. C'est le contenu de l'article 15 du projet de loi déposé en première lecture qui a été repris et modifié pour plus de clarté. Comme ce droit de subrogation était en relation avec l'article 8, il a été placé immédiatement après cet article. Les modifications visent à préciser à partir de quel moment la régie obtient le droit de subrogation et la prescription applicable à la régie. Le délai de prescription était auparavant prévu à l'article 16; comme les droits de subrogation de la régie sont peu nombreux, il a été jugé bon d'inclure le délai de prescription dans le corps même de l'article.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Lalonde: Excusez-moi, sur une question de règlement. Est-ce que vous avez déclaré l'amendement recevable?

Mme Payette: II est reçu, M. le Président, puisqu'il ont tous été déposés en bloc.

M. Lalonde: Non, M. le Président, il n'a certainement pas été reçu. D'ailleurs, je pense que, là-dessus, il ne faut pas se méprendre. L'entente qui avait été faite avec l'accord du président était que les amendements ou les articles avec les amendements proposés devenaient des motions principales, mais sujets à l'acceptation par la présidence suivant les règlements, pour autant que cela ne change pas le principe du projet de loi adopté en deuxième lecture et toutes les autres règles que vous connaissez bien.

Le Président (M. Clair): Je déclare l'amendement recevable. Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Raynauld: M. le Président, une question d'information. L'article 9a sera-t-il discuté séparément de l'article 9? C'est parce qu'il y a un autre amendement qui a été proposé par le gouvernement.

Le Président (M. Clair): Nous en discuterons séparément.

M. Raynauld: Séparément. Très bien.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: M. le Président, ici, je crois que c'est le comble de l'incohérence, franchement. Là, on va à la limite. Tout à l'heure, on a parlé d'une victime. Maintenant, c'est simplement le type, l'étranger qui n'est pas victime d'accident, mais on juge qu'il en a causé un. J'avoue que je comprends mal ces dispositions. Je ne répéterai pas l'argument que j'ai donné tout à l'heure relativement au principe. On se fait un principe de quelque chose ou on ne s'en fait pas un principe. Si le gouvernement se fait un principe de la non-responsabilité totale de tout ce qui regarde les blessures corporelles... Ecoutez, pour quelle raison va-t-on tenir les étrangers responsables d'accidents d'automobiles, si on a longuement discuté — et on l'a fait — en faveur de la non-responsabilité, disant que ce n'était pas raisonnable de rendre les gens responsables d'accidents d'automobile? On l'a dit et on l'a répété. On pourrait même, à la rigueur, dire que ce principe est établi... Même s'il est établi par la loi, il pourrait facilement être absolument indépendant d'un régime d'assurance automobile. Cela pourrait être simplement une assurance automobile donnée. Autrement dit, on aurait pu, dans une loi, établir la non-responsabilité des conducteurs d'automobile et laisser pratiquement le tout aux assureurs privés et pratiquement ne pas changer le statu quo, au point de vue des assureurs.

Je dis que c'est le comble, parce qu'on déroge au principe par le simple fait que le type est un étranger. Je vous ferais remarquer que, dans tout cela, le Code criminel demeure quand même, si un étranger a conduit d'une façon dangereuse à cause de la drogue, à cause de l'alcool ou simplement par irresponsabilité, on peut toujours l'atteindre par le Code criminel. Là, on met l'étranger complètement en dehors du principe. On lui dit: Tu vas être obligé de prouver que tu es responsable ou pas et on donne à la régie un droit de subrogation vis-à-vis de l'étranger.

Qu'est-ce qui arrive? L'étranger a toujours sa police d'assurance; supposons que c'est un Américain, il est protégé; habituellement, les étrangers qui voyagent au Québec ont leur assurance. Il peut bien aussi ne pas être assuré, on va le poursuivre, il va être obligé de venir à son procès, l'avocat de la régie va dire devant le juge: Vous savez, une distraction, pour le chauffeur, ce n'est pas humain. Le gars qui est distrait est responsable. Le gars qui fait une fausse manoeuvre... Autrement dit, il va soutenir le contraire de tout ce qui a été dit lors de l'étude de cette loi et le contraire de tout ce qu'on dit en commission, pour gagner son point, absolument opposé.

C'est ainsi qu'on va placer l'avocat de la régie qui va poursuivre l'étranger. Probablement que s'il y avait un excellent avocat, la régie pourrait nous donner un bon coup de main à ce stade-ci à l'Opposition, ce serait un excellent collaborateur. Si jamais le député de Jonquière est en dehors de la politique et si on s'adonnait à l'engager comme avocat de la régie, avec passion, il dirait...

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, on m'accuserait de profiter d'une nomination politique.

M. Saint-Germain: ... il soutiendrait devant le juge exactement le contraire de ce qu'il vient de nous dire. En plus, il y a un droit de subrogation.

C'est entendu que l'étranger va être dans une situation assez difficile pour se défendre contre la régie, qui va établir devant le juge qu'on donne à la victime du Québec une telle indemnité. Il va falloir établir et projeter dans l'avenir ce que ça va coûter, cette indemnité qu'on va payer à la victime pour le reste de ses jours. Est-ce que ça va comprendre aussi toute les dépenses que la régie va être obligée de faire pour la réhabilitation de cette victime, si elle est réellement invalide de façon définitive?

Pour être logique, si on donne un droit de subrogation à la régie, il faudrait bien en donner un à la Régie de l'assurance-maladie. Parce que, comme la Régie de l'assurance-automobile n'a pas de droit de subrogation vis-à-vis de la Régie de l'assurance-maladie, il serait juste, si la régie veut se faire rembourser par cet étranger, que la Régie de l'assurance-maladie ait aussi le droit de se faire rembourser pour les dépenses inhérentes aux soins qu'on donnera à la victime du Québec, parce que la Commission des accidents du travail devra obtenir un droit de subrogation.

Je ne comprends pas très bien pour quelle raison on traite ainsi les étrangers, les gens d'ailleurs qui coûtent plusieurs centaines de milliers de dollars; on fait de l'annonce pour attirer les gens du Québec, on sait qu'au niveau du ministère du Tourisme, combien de centaines de milliers de dollars on peut dépenser, on a à voter ces budgets tous les ans.

Voilà qu'après les avoir invités, leur avoir dit que le Québec est un endroit plaisant, après avoir vanté nos paysages, surtout notre hospitalité, on les traite comme des gens qui sont réellement bâ-drants, des gens qui n'ont pas les mêmes droits que nos citoyens et cela aura certainement des répercussions dans l'avenir, sur l'image du Québec.

Ensuite, on a parlé, en page huit, des victimes. Et on a soutenu, envers et contre tous, que cela ne valait pas la peine de faire un amendement, parce que cela ne concernait qu'un tout petit nombre d'individus. C'était très important, cette argumentation, très valable, au point de vue du ministre. Je peux faire ici la même argumentation...

M. Raynauld: II y a plus de responsables.

M. Saint-Germain: Peut-être qu'il va nous arriver avec cela et dire qu'il y a plus de responsables que de victimes.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas cela que j'allais dire.

M. Saint-Germain: Alors, s'ils sont un très petit nombre, 1%.

Le Président (M. Clair): MM. les députés, s'il vous plaît! Un à la fois.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de...

M. Saint-Germain: Mais si on prend l'argumentation du petit nombre entre les victimes qui sont étrangères, cela n'empêche pas le gouvernement, malgré ce très petit nombre de responsables, de mettre un article bien spécial dans la loi, pour que la régie aille chercher son argent, pour des indemnités que la régie sera certainement obligée de payer.

Cela devient important. C'est important, même s'il n'y avait que trois ou quatre personnes, ou une dizaine. Il faut aller chercher notre argent. L'argumentation que vous avez donné du petit nombre, il faudrait bien, en toute honnêteté, la répéter à ce stade-ci.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, ce n'est pas cela que j'allais dire, mais je me demande si on n'aurait pas dû accepter la suggestion du député d'Outremont et étudier les articles 9 et 9a en même temps. Si le député de Jacques-Cartier avait pris la peine de lire l'article 9a, il y a une bonne partie de ses affirmations qui n'aurait même pas été faite.

Je pense que, M. le député d'Outremont, votre suggestion n'était pas si mauvaise que cela.

M. Saint-Germain: Non, j'ai dit qu'on doit permettre à l'assurance-maladie... C'est ce qu'on fait, on va le faire. Le gars va passer devant le tribunal, par la régie, par la Commission des accidents du travail et par la Régie de l'assurance-maladie. On va lui donner; celui-là, on va l'attraper. On va... On va aller chercher notre argent. C'est exactement cela qui arrive.

Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur l'article 9? Le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais me limiter à une question technique. Comment va-t-on faire pour estimer le capital représentatif des rentes que la régie sera appelée à verser? Si je comprends bien le projet de loi, lorsqu'il y a une rente qui est versée, cela dépend évidemment du décès de la personne. Cela peut être quarante ans, cela peut être deux ans, cela peut être cinq ans. Comment fait-on pour estimer cela?

Mme Payette: M. le Président, je pense qu'il y a eu discussion à ce sujet l'autre jour lorsque le député de Montmagny-L'Islet avait posé la question. Il avait été établi, je pense, qu'avec la projection du taux d'intérêt, avec la projection du montant qui est appelé à être versé aux victimes, à ce moment-là, il était possible de faire la capitalisation des sommes que les victimes pouvaient recevoir. Ce faisant, se servant des tables, il est possible de calculer le montant que représentent les indemnités versées sous forme de rentes, le montant en capital.

M. Raynauld: M. le Président, je pense qu'on ne se comprend pas. Sur la capitalisation et sur la valeur présente des rentes à verser, cela va très bien. Il n'y a pas de problème pour cela, ce n'est pas là qu'est le problème. C'est le montant d'argent qui va être versé. Lorsqu'on se sert de cette méthode, on s'en sert à partir des tables de morta-

lité, on fait des moyennes statistiques. Et pour établir le coût du régime, dans son ensemble, on a utilisé cette méthode et il n'y a pas de problème. On dit: En moyenne, il y en a qui meurt un peu plus vite et un autre qui meurt un peu plus tard. En moyenne, cela va arriver à cela.

Mais il s'agit ici d'un cas particulier, si je comprends bien. Il s'agit d'un non-résidant. On essaie de recouvrer des sommes de ce non-résidant. Et c'est un cas particulier, vous ne pouvez plus vous servir de tables de mortalité et d'histoires comme cela. C'est un cas spécial, particulier. Et il me semble que vous devez savoir, pour être capable d'établir le capital aujourd'hui de la rente, combien d'années vous allez la payer, la rente?

C'est cela qui est ma question. Ce n'est pas tellement l'actualisation ou le taux d'intérêt.

Mme Payette: Je travaille pour le ministère des Consommateurs encore maintenant.

J'aimerais apporter quelques précisions sur la question qui est soulevée, je pense qu'elle est intéressante. Si je comprends bien votre question— on va essayer de discuter un peu du problème pour voir si moi aussi je le perçois comme vous — une actualisation de bénéfices futurs implique, comme on l'admettait l'autre jour, l'application de moyennes, enfin une survenance moyenne d'événements futurs.

Dans le cas d'un Québécois soutien de famille, qui serait tué au Québec par un étranger, la régie bénéficierait d'un droit de subrogation contre un étranger. Etes-vous d'accord avec moi, M. le député d'Outremont?

M. Raynauld: Oui, jusque là.

Mme Payette: J'imagine que, dans le cas où c'est un conjoint qui aurait environ 35 ans, il se fait actuellement, dans les cours de justice, des calculs de prestations futures qui se guident des facteurs d'actualisation basés sur l'expectative de vie. Il est évident que la régie ne peut pas attendre 45 ou 50 ans, d'ici à ce que la victime meure, pour aller faire une subrogation contre un non-résidant.

C'est vrai que, dans un cas particulier, la régie devra baser une subrogation sur des facteurs moyens d'actualisation, mais si ces accidents, ces situations se produisent un certain nombre de fois durant l'année ou durant les années à venir, je pense qu'en gros, si les hypothèses utilisées dans l'actualisation sont saines, on devrait aller chercher, en moyenne, la valeur de ces rentes. C'est peut-être dans cette optique qu'il faut voir le problème.

M. Raynauld: Je ne connais pas les pratiques des cours ou les pratiques des sociétés d'assurance. Ce que vous me dites, somme toute, c'est que même s'il s'agit d'un cas particulier, on se sert quand même de moyennes pour établir le montant global à verser.

Mme Payette: Le droit de subrogation de la régie se prescrit trois ans après l'indemnisation.

Cela fait un délai, j'imagine. On peut tenir compte de certains facteurs, de l'âge du bénéficiaire des prestations de la régie. Cela donne des éléments d'information sur l'importance des prestations qui lui seront versées.

J'imagine que ce sont des éléments suffisants pour déterminer un montant d'indemnisation.

M. Raynauld: J'ai l'impression que ce sont des choses auxquelles on pourrait facilement apporter un argument. Je veux laisser cela aux juristes.

Mme Payette: On tombe assez rapidement dans des éléments assez techniques. On aborderait un problème peut-être plus difficile si on parlait d'invalidité.

M. Raynauld: D'invalidité.

Mme Payette: Oui, je l'admets avec vous. Si un Québécois est blessé et devient invalide, la prestation est basée sur la capacité de gain. C'est difficile à évaluer. Là encore on peut tenir compte de la nature. Pour ce cas, on pourrait évaluer le pourcentage d'invalidité, les chances de retour au travail. J'imagine qu'un juge, devant les faits, devant toutes les informations quant à la gravité d'une blessure, pourra en évaluer le coût pour la régie, même si encore là le droit se prescrit après trois ans et qu'il faut aller chercher les sommes tout de suite. J'imagine que c'est faisable. Cela pose un problème particulier, je l'admets avec vous. Il n'est pas insoluble.

Le Président (M. Clair): Le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: J'ai reconnu, dans les propos de M... Je n'ai pas saisi votre nom.

Mme Payette: Cloutier.

M. Lalonde: ... Cloutier, les façons qu'on a actuellement de calculer les indemnités pour les cas de dommages, surtout dans le cas d'invalidité, mais je me demande si le texte qui nous est proposé — c'est moins à vous que je m'adresse que peut-être au conseiller juridique — qui dit que le capital représentatif de rentes va permettre justement à des juges de conclure de la même façon... Qu'est-ce qu'un capital représentatif de rentes? Il faudrait être sûr que c'est bien ce que l'actuaire nous dit. Il faut que cela se traduise dans un texte juridique qui, quant à moi, soulève des problèmes.

Le capital représentatif de la rente donnée, c'est surtout dans le cas d'une incapacité, d'une invalidité. On a trois ans, on peut jouer sur trois ans pour avoir une idée peut-être un peu plus précise des chances. Quels sont les calculs, comment savoir si la régie va être appelée à payer telle rente annuelle, et pendant combien de temps, selon l'âge de la personne, etc? Il reste qu'il peut y avoir aussi des inconnues là-dedans. Il y en a une, par exemple qui est variable, à savoir la capacité de

reprendre le travail, dans trois, quatre ou cinq ans. Est-ce qu'avec ce texte on couvre la situation?

Mme Payette: M. le Président, le problème que vous soulevez, c'est en regard de la durée de versement des indemnités par la régie et, ensuite, par raport à l'exercice du droit de subrogation, à savoir quel montant finalement la régie va pouvoir réclamer. Est-ce exact?

M. Lalonde: Oui, c'est cela. Mme Payette: C'est cela?

M. Raynauld: C'est surtout le premier problème.

Mme Payette: La durée?

M. Raynauld: Oui, surtout celui-là.

Mme Payette: Lorsqu'on fait mention du capital représentatif des rentes qu'elle est ainsi appelée à verser, est-ce qu'on ne voit pas, dans ces mots, que la régie verse des rentes, que ces rentes sont périodiques? En appliquant le capital que le versement des rentes va constituer, est-ce que ce n'est pas cela finalement qu'on vise dans le texte? Comment savoir à l'avance, au bout d'un an, si une personne va continuer à être invalide toute sa vie? Il y a peut-être des médecins qui sont plus experts que nous pour déterminer ces questions et je pense aussi que si on applique cela dans le régime actuel, il y avait quand même des difficultés lorsqu'on en venait à déterminer l'invalidité de quelqu'un, lorsqu'on essayait de savoir si c'est à 15 ou si c'est à 10, à partir de quel moment quelqu'un est invalide totalement. A ma connaissance, c'est aussi difficile que d'essayer d'évaluer si quelqu'un est incapable de travailler ou non. Je pense que, là-dessus, les tribunaux appliqueront les principes qu'ils ont actuellement et se serviront de témoignages d'experts, comme les actuaires, également des médecins, pour déterminer la durée de l'invalidité de quelqu'un, invalidité exprimée en termes d'incapacité à retourner au travail, plutôt qu'en pourcentage.

M. Lalonde: Est-ce que ce ne serait pas plus clair de dire qu'on va recouvrer les indemnités, ainsi que la valeur en capital des rentes, parce qu'on ne parle pas, en fait, de la valeur en capital des rentes?

Mme Payette: Je pense que les mots "capital représentatif" sont les mots usuels en termes actuariels, à ma connaissance.

M. Saint-Germain: M. le Président...

Le Président (M. Clair): Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Si on prenait, par exemple, un exemple bien pratique pour essayer de voir jusqu'à quel point cet article et les autres peuvent nous entraîner, surtout celui-là, si vous voulez bien, il faut penser qu'une victime qui peut être aussi un touriste ou un voyageur au Québec peut aussi être tenue victime et responsable de l'accident, ou partiellement responsable de l'accident. Supposons, avec le régime qu'on a, qu'un type est victime d'accident et, comme on a dit tout à l'heure, que c'est un étranger. Il va en cour, il a un droit de recours, il ne peut pas s'entendre avec la régie. La régie va dire à cette victime étrangère: Vous êtes, monsieur, tenu à 50% responsable de l'accident. Le type s'en va chez lui. On peut même en prendre soin ici, à Québec.

L'hospitalisation est finie, il peut être transporté aux Etats-Unis, par exemple, il continue son hospitalisation là et au bout de trois mois, on lui dit: II n'y a plus rien à faire, vous avez les jambes partiellement paralysées. Vous avez droit à 50% de l'indemnisation du régime du Québec.

Entre-temps, c'est un employé d'une compagnie, c'est un administrateur, et il gagne $40 000 par année. La compagnie continue à le payer et quand son hospitalisation est terminée, que sa convalescence est terminée, étant donné qu'il a rendu service à la compagnie, elle ne voit pas d'objection à ce qu'il poursuive sa carrière comme administrateur à cette même compagnie. Il n'a jamais perdu son salaire, et malgré son handicap, il va continuer à gagner plus de $18 000 par année. Qu'est-ce que la régie va lui donner? Une somme minime pour mutilation, dans les $20 000. Est-ce cela?

Mme Payette: M. le Président, dans le cas où quelqu'un est en mesure de retourner au travail, il est évident qu'il n'y aura pas de perte de revenu. A ce titre, il ne sera pas indemnisé. Cependant, s'il a des frais médicaux, s'il y a une mutilation, comme vous venez de le dire, il y a des indemnités qui lui sont versées à ce titre, mais pas pour perte de salaire, puisqu'il n'en perd pas.

M. Saint-Germain: Alors, l'indemnité, c'est un montant forfaitaire.

Mme Payette: En cas de mutilation, oui.

M. Saint-Germain: Qui sera à l'intérieur des $20 000. C'est tout ce qu'il recevra, parce qu'il n'a jamais perdu son salaire, est-ce vrai ou faux?

Mme Payette: C'est vrai.

M. Saint-Germain: S'il a été hospitalisé dans la province de Québec, la Régie de l'assurance-maladie et de l'assurance-hospitalisation vont lui faire payer 50% de ses soins, qu'il sera obligé de diminuer, nécessairement, sur le montant forfaitaire qu'on lui aura remis.

Mme Payette: M. le Président, est-ce que vous me permettez? Dans l'exemple que vous avez apporté, évidemment, si l'individu a un droit, vous venez de dire que c'est un non-résidant qui a un droit, à ce moment, il n'est pas responsable.

M. Saint-Germain: J'ai dit qu'il était responsable de l'accident à 50%, alors on va aller chercher 50% des frais d'hospitalisation et des frais médicaux qu'on lui a donnés. Cela va diminuer d'autant plus l'indemnisation ou le montant forfaitaire qu'il recevra pour mutilation. Le type est dans une chaise roulante, il marche avec des béquilles, et c'est tout ce qu'il va recevoir. Il va se retourner et il recevra une action de la régie, parce qu'on n'a pas tenu compte de la responsabilité pour le citoyen du Québec. Et si le même citoyen du Québec gagne aussi $40 000 par année, et qu'il n'est plus capable d'occuper de nouveau son emploi — en autant qu'il gagne plus de $18 000, l'exemple tient, s'il travaille dans la construction, par exemple — on lui paie une rente totale. On lui donne entre $12 000 et $13 000 par année. On ne va pas chercher 50% de la rente. On actionne la victime étrangère pour le montant total de la rente. Cette personne ne reçoit rien, elle n'est pas capable de rien recevoir, elle est sérieusement handicapée, mais elle sera obligée de payer $100 000. C'est quelque chose!

Mme Payette: Dans la proportion de sa responsabilité...

M. Saint-Germain: Est-ce vrai ou faux ce que je dis, M. l'avocat?

Mme Payette: Vous avez donné un exemple très long. Je n'ai malheureusement pas pu suivre toutes les données que vous avez...

M. Saint-Germain: Je peux recommencer, si vous voulez.

Mme Payette: Recommencez si vous voulez, sauf que j'ai noté que vous avez dit qu'il y avait 50-50 de responsabilité.

M. Saint-Germain: J'ai dit: de responsabilité.

Mme Payette: A ce moment, ce qui est prévu dans le régime, à moins qu'il ne soit un résidant qui est passager d'une automobile immatriculée Québec...

M. Saint-Germain: Non.

Mme Payette: C'est un vrai non-résidant.

M. Saint-Germain: Un vrai non-résidant qui entre au Québec, il conduit son automobile et il a un accident. Il va à la régie, il n'est pas content, il actionne la régie et porte sa cause devant nos tribunaux de droit commun. Le juge lui dit: Vous êtes à 50% responsable de l'accident. Il retourne chez lui. J'ai décrit la situation, je pense que vous m'avez écouté, vous m'avez compris. Il reçoit le montant forfaitaire à l'intérieur des $20 000. Point. La même personne est responsable de 50% de l'accident. La victime, le résidant québécois qui a frappé est dans la même situation que lui, mais il n'a pas de responsabilité, la régie va le dédomma- ger totalement. Le type est un travailleur de la construction qui est invalide d'une façon définitive, ou peut-être pourrait-il répondre au téléphone, supposez cela si vous voulez.

De toute façon, vous allez payer pour ce gars. L'Américain va être chez lui, il ne reçoit pratiquement rien pour l'accident, parce que la somme qu'il va recevoir, avec la facture d'hôpital, il ne restera pius grand-chose. Mais la régie va arriver avec une action de $100 000; il va plaider et comme de raison, il va perdre. Là, il va recevoir un compte de $100 000; parlez-lui du Québec, à ce gars-là.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... il y a quelque chose d'assez inusité ici que j'ai pris un peu de temps à trouver. L'exemple du député de Jacques-Cartier est quand même très révélateur là-dessus. Il est évident, quand on met les deux articles 8 et 9 l'un en face de l'autre, qu'on traite de façon différente la même situation, à savoir que l'étranger qui arrive au Québec avec son automobile, non immatriculée ici, qui a un accident, doit prouver la responsabilité de l'autre pour être dédommagé. On n'est pas arrivé dans les problèmes à savoir comment vous allez contrôler — ça va bien dans les autres articles — à savoir s'il peut avoir un emploi; le bonhomme est retourné en Californie et les inspecteurs de la régie ne sont pas là, à moins que la régie veuille faire un monstre avec sa structure.

Enfin, il est retourné en Californie et une certaine responsabilité a été établie, lui permettant de recevoir quelque chose, disons 50%. D'un autre côté, immédiatement après ou dans les trois ans, la régie se retourne contre l'assureur de l'Américain et demande le montant actuel ou actualisé, enfin, un montant en capital qui peut être dans les $50 000 ou $100 000 — je ne sais pas comment ça peut être évalué, les actuaires pourront nous dire ça, on sait que c'est un montant capital beaucoup plus considérable que le montant de la rente annuelle qu'il reçoit — il peut recevoir $5000 par année et sa compagnie d'assurances peut être appelée à payer immédiatement ou dans les trois ans le capital de cette rente. C'est-à-dire que ça va se trouver à être le capital et l'exemple du député de Jacques-Cartier rend cela encore plus intéressant. Le Québécois qui a été blessé dans le même accident dont il est responsable à 50%, l'intérêt de le savoir, cette responsabilité, c'est pour savoir combien on va payer l'étranger.

Parce que le Québécois est payé selon son revenu, 90% de $18 000. Donc, les 50% de responsabilité vont entrer en jeu seulement pour savoir quel est le montant actualisé qui va être payé par notre autre bonhomme, je crois. On peut peut-être me corriger si je fais erreur.

Mme Payette: Non, le pourcentage de responsabilité, c'est pour savoir jusqu'à quel point on indemnise le non-résidant.

M. Lalonde: Dans la réclamation de l'article 9, on dit: Dans la proportion où elle en est responsable. Donc, cette responsabilité va avoir un effet sur le remboursement de capital. Mais il reste que d'un côté, il y a un bonhomme ou une bonne femme qui reçoit une rente qui va peut-être être assujettie souvent à la discrétion de la régie. Les articles où la régie fait valoir sa discrétion, j'en ai une liste, je suis seulement rendu à l'article 55. L'article 12, les anciens articles... Remplacer la rente par un paiement unique ou périodique, la régie peut déterminer un revenu brut ou autre, articles 19 et 20. Article 21, évaluer le revenu brut présumé d'un étudiant, ça peut être un étudiant, ce bonhomme ou cette bonne femme.

Alors, c'est assujetti à la discrétion de la régie, à savoir s'il va pouvoir profiter de son bout de l'arrangement. Mais d'un autre cêté, lui-même ou son assureur va devoir débourser maintenant un montant capital. Est-ce que vous trouvez ça juste? Est-ce que ce n'est pas — ce n'est pas à vous que je pose la question, c'est au député, au gouvernement — est-ce qu'on ne traite pas d'une façon exorbitante la réclamation que l'on veut faire de sa partie de responsabilité alors qu'on lui donne seulement une partie beaucoup moins intéressante pour... Là, on peut arriver, je ne veux pas faire du mélo, mais dans quelle mesure les compagnies d'assurances de ces gens qui vont venir ici... Ils vont leur dire: Cela va te coûter un peu plus cher, parce que tu t'en vas au Québec. Là on n'est pas traité de la même façon.

Dans quelle mesure cela ne peut-il pas avoir un effet sur le coût de l'assurance de ces gens qui vont s'en venir au Québec? Dans quelle mesure cela ne pourrait-il pas être une incitation à aller ailleurs?

Au-delà des principes, de la pratique — on aime cela le tourisme, le tourisme est d'ailleurs l'une de nos industries les plus importantes — est-ce qu'on n'a pas le droit de se poser des questions.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne comprends pas pourquoi le député de Marguerite-Bourgeoys s'offusque de ce droit de subrogation qu'on donne à la régie. Dans le système actuel, le non-résidant, supposons l'Américain, qui vient aussi au Québec, et qui est responsable d'un accident, qui rend invalide une famille québécoise ou un père de famille s'attend et doit s'attendre, à recevoir, éventuellement, dans l'année suivante, une action en dommages de la part de ce citoyen québécois; il sera assuré, ce non-résidant, ou il ne le sera pas; s'il ne l'est pas, probablement que dans son pays ou dans son Etat, il y aura un organisme qui s'appelle ou qui ressemble au fonds d'indemnisation, il s'attend à cela. C'est un système de responsabilité.

Et pourtant, dans le système actuel, ce citoyen non résidant du Québec, responsable d'un accident, ne reçoit rien, ou à peu près rien du Québec. Au lieu de la victime qui va poursuivre... Vous savez qu'en droit, à moins que je ne me trompe, on ne peut céder plus de droits qu'on en a. La personne qui en subroge une autre dans ses droits possède exactement les mêmes droits et recours que l'autre. On ne peut céder ce qu'on n'a pas. A l'impossible nul n'est tenu. Vous connaissez tous ces principes.

M. Lalonde: Pierre qui roule n'amasse pas mousse.

M. Vaillancourt (Jonquière): La seule différence qu'apporte l'article 9, c'est quoi? C'est qu'au lieu que ce soit le père de famille québécois, le citoyen québécois qui poursuive le non-résidant américain responsable de l'accident, c'est tout simplement la régie qui prend lieu et place pour la victime, par la subrogation, qui ne prend pas plus, mais pas moins, que les droits de la victime, et qui intente, au lieu d'une action d'un an, au lieu d'une prescription d'un an, dans un délai de trois ans, une action en dommages contre le responsable de l'accident.

En fin de compte, c'est le système, dans le cas de la subrogation d'un non-résidant responsable, de la responsabilité que l'on connaît actuellement, sauf qu'on dit, à cet Américain: Si tu n'es pas responsable de l'accident, ou si tu es proportionnellement, ou en partie, responsable, on va t'indemniser en fonction de ta responsabilité. C'est ce qu'on dit à cet Américain.

Je ne comprends pas le pourquoi de ces propos, surtout de la part du député de Marguerite-Bourgeoys, qui est avocat et qui connaît tout cela, qui sait que le pauvre citoyen de l'Etat du Vermont, peut, s'il cause un accident demain matin, au Québec, et s'il est responsable, recevoir une action en dommages de $100, $125, $150, $25 000, selon les dommages subis par la victime. Il recevra cette même action, mais au lieu de la recevoir de la victime, il la recevra de la régie qui a été subrogée dans les droits et recours de la victime.

Je pense que c'est très cohérent ce texte-là. C'est très logique et cela correspond à un système d'équité absolument normal.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jacques-Cartier ou M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le député de Jacques-Cartier me le permet, je l'en remercie. Je n'ai pas réussi à me faire comprendre du député de Jonquière, je vais recommencer. J'ai parlé d'un cas de 50%-50% de responsabilité. M. le député de Jonquière, ce qui m'apparaît injuste, et dans une certaine mesure, un peu odieux, c'est le fait que, d'un côté, on indemnise, par cette loi, à même des rentes qui sont assujetties à beaucoup de discrétion de la régie, et, de l'autre côté, la régie reçoit un droit,

dans les trois ans, de se faire rembourser le plein montant de la valeur actualisée en capital, alors que c'est un capital qui va être calculé, dans une bonne mesure, à même une rente qu'elle pourra, de sa propre discrétion, l'année suivante, réduire, avec des appels aux tribunaux de droit commun. On n'en connaît pas là-dedans, sur la question strictement de la rente. C'est cela qui m'apparaît incohérent et injuste. D'un côté, la régie dit...

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, vous n'en êtes pas...

M. Lalonde: Si on a établi la responsabilité 50-50, ce sont les tribunaux qui ont fait cela. Disons que tout le monde est heureux, 50-50. Je vous donne tel montant, que je peux réduire dans deux ans si j'apprends que vous êtes retourné au travail. Entre-temps, je vous actionne pour le plein montant du capital actualisé. Cela ne m'apparaît pas tellement civilisé comme façon de faire affaire avec le monde.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais dans la proportion où elle en est responsable, c'est-à-dire...

M. Lalonde: C'est 50-50.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, d'accord. Donc, vous n'en êtes pas...

M. Lalonde: Mais dans la manière d'indemniser, ce n'est pas 50-50. Ah non!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! Un à la fois, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais c'est une discussion.

M. Lalonde: Non, sur la subrogation, on n'a seulement qu'à la subroger à 50%, naturellement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne me sens pas capable, comme je ne suis pas actuaire, de répondre à cette question, mais je dis...

M. Lalonde: C'est politique, ce n'est pas actuariel.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... M. le Président, par votre intermédiaire, au député de Marguerite-Bourgeoys que je pense que les mots "capital représentatif des rentes" veulent dire que le tribunal va essayer de dire quelle est la valeur capitale qui pourrait ou qui serait en mesure ou qui serait susceptible de donner au bénéficiaire une rente mensuelle pendant X périodes données.

M. Lalonde: On a parlé de cela tantôt, je me fie aux avocats et aux actuaires.

Le Président (M. Clair): Le député d'Outremont.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le tribunal tiendra compte, je présume, dans l'appréciation du quantum de ce capital, des intérêts dont va pouvoir bénéficier la Régie de l'assurance automobile sur la somme capitale au fil des années. Je présume en toute équité.

M. Lalonde: Ou même totale de la discrétion qui existe dans la Loi de ta régie. A ce moment-là, le capital peut devenir assez illusoire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je fais aussi confiance aux juges, aux actuaires et aux avocats là-dessus.

Le Président (M. Clair): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: Sur le même point, ce n'est pas tellement sur l'évaluation encore une fois, c'est sur le contraste qu'il y a, d'une part, entre payer une rente à une victime et réclamer un capital complet. Si on voulait être logique, il faudrait aussi permettre aux non-résidants de recevoir la valeur en capital de l'indemnité que la régie va lui offrir et, d'autre part, la régie pourra réclamer la valeur en capital du non-résidant. Il y a un hiatus entre les deux et cet hiatus est incontestable à mon sens.

Ou bien la régie réclame une rente ou l'équivalent d'une rente ou, si elle ne veut pas payer la valeur en capital, à ce moment-là, cela me paraît difficile qu'elle puisse aussi la réclamer. C'est un hiatus qui existe dans le traitement qui est donné aux non-résidants. C'est cela l'histoire.

On discutait tout à l'heure sur un plan plus juridique. La subrogation, par exemple, on dit que c'est la même chose que ce qui est payé à la victime au Québec, mais ce n'est pas la même chose que ce qui est payé à la victime qui est un non-résidant. Sur le plan de la subrogation en tant que telle, j'ai l'impression qu'il y a aussi un problème.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député d'Outremont, si on regarde l'article 12, on se rend compte que la régie peut, lorsqu'elle est d'avis qu'il est à propos de le faire pour aider la réadaptation de la victime ou, dans le cas d'une victime résidant hors du Québec ou cessant d'y résider, remplacer la rente visée dans l'article 26 ou dans l'article 44 partout paiement périodique ou par un paiement unique représentatif de la valeur de l'indemnité.

Evidemment, je comprends comme vous que ce n'est pas une obligation, mais, du moins, la porte est certainement ouverte à l'article 12, parce que...

M. Lalonde: La porte est ouverte à la discrétion et à l'arbitraire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais à la discussion également, parce que nous sommes rendus à l'article 9 et on pourra en parler à nouveau à l'article 12, mais on voit déjà que le législa-

teur a pensé à cette possibilité de capitaliser immédiatement cette rente versée à la victime hors du Québec.

M. Raynauld: Le législateur aurait pu y penser pour l'article 9, s'il y avait pensé pour l'article 12.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a rien qui nous dit qu'il ne le fera pas.

M. Lalonde: Nous annoncez-vous un amendement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais je vous dis qu'on en parle à l'article 12. Peut-être que vous ne le savez pas.

M. Lalonde: Le génie du législateur jusqu'à maintenant, du côté du gouvernement, ne nous a pas...

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous avez dit au début que les articles de la loi étaient très bien rédigés et j'en ai pris note.

M. Lalonde: C'était à l'intention du libellé et des avocats qui ont travaillé là-dessus et non pas des députés.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne l'ai jamais pris pour les députés.

Le Président (M. Bertrand): Le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Cependant les assureurs américains qui assurent leurs clients, les Américains, vont voir leurs clients être victimes d'accidents d'automobiles au Québec ou responsables d'accidents d'automobiles au Québec et ils vont s'apercevoir de tous les problèmes que cela leur occasionne.

Si leurs clients ne sont pas dédommagés convenablement des dommages causés, il n'est pas dit, dans certains Etats, qu'il n'y aura pas de recours contre leur propre assureur, dans l'Etat où ils demeurent, qu'ils n'auront pas le droit d'arriver chez leur assureur et de dire: Ecoutez, je suis dans un fauteuil roulant et j'ai reçu $5000, et ensuite aller devant leur juge et plaider contre leur propre assureur. Ils vont le faire. Vous pouvez être absolument assurés qu'ils vont le faire. Si vous pensez qu'ici, on peut faire les fous, on peut voter n'importe quelle loi "niaiseuse", jamais les Américains vont nous empêcher de le faire, mais vous n'obligerez jamais les Américains, les assureurs américains à ne pas admettre dans leur police, à un moment donné: Cette police d'assurance ne tient pas pour une personne qui voyage au Québec. Vous pouvez être assurés que c'est ce qui va arriver. Vous pourrez vous obstiner, et donner les arguments les plus fous que vous voulez pour gagner votre point et tenir votre bout, les assureurs américains vont tenir leur bout eux aussi. On ne peut pas jouer dans la tête du monde comme cela.

Vous allez vous réveiller un bon matin avec des assureurs américains qui diront à leurs clients, et ce sera écrit dans la police: Cette police est non valable pour tout conducteur d'automobile dans la province de Québec. D'accord? Ou bien, payez-nous! Ou bien, si vous allez dans le Québec, vous allez nous donner une prime additionnelle de tant. C'est tout. C'est ce qui va arriver, vous pouvez en être assurés.

M. Lalonde: C'est un autre coût caché.

M. Saint-Germain: Quand les assureurs américains auront de leurs clients qui seront victimes d'accidents au Québec et que cela leur coûtera beaucoup plus cher que lorsqu'ils voyagent ailleurs, ces assureurs vont aller chercher leur argent. Qu'est-ce que vous voulez?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président... Est-ce que j'ai la parole?

Le Président (M. Bertrand): Vous l'avez maintenant.

M. Vaillancourt Jonquière): M. le Président, ce que je ne comprends pas... Je comprends l'exemple du député de Jacques-Cartier. Savez-vous que, dans le système actuel, votre gars, qui est assuré par une compagnie d'assurances privée aux Etats-Unis, s'il est responsable de l'accident, ne recevra rien du Québec, sinon une action en justice du Québécois qu'il va avoir blessé par sa faute? C'est ce qu'il va recevoir. Sa compagnie d'assurances privée, qu'est-ce qu'elle fait après qu'elle a indemnisé le Québécois qui a eu des dommages corporels par la faute du non-résidant, qu'est-ce qu'elle fait, sinon la même chose que les compagnies d'assurances privées nous font au Québec? Une augmentation de primes, M. le député de Jacques-Cartier, par votre intermédiaire, M. le Président, évidemment...

M. Saint-Germain: Qu'est-ce qu'il va faire, le juge?

M. Vaillancourt (Jonquière): Votre exemple est complètement boiteux.

M. Saint-Germain: Non!

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous le savez.

M. Saint-Germain: Pas du tout. Que va faire le juge américain lorsque le citoyen américain va arriver devant lui et qu'il va dire: M. le juge, je suis dans un fauteuil roulant aujourd'hui à cause d'un accident survenu au Québec? J'ai été tenu responsable de 50% de cet accident. Il va sortir ce qu'il a reçu et il va dire: Cela m'a donné $5000 ou $7000. J'ai une police d'assurance, M. le juge, de telle compagnie américaine qui me garantit qu'on va payer les dommages lorsque je ne suis pas responsable. Je ne suis pas responsable et je ne suis pas capable de percevoir de montant.

M. Vaillancourt (Jonquière): S'il n'est pas responsable, quand la régie poursuivra ce citoyen non-résidant...

M. Saint-Germain: II va se faire...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... prétendument non responsable, parce que vous savez que la régie...

M. Saint-Germain: Oui, mais il va se faire...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Jacques-Cartier, vous venez de soulever un point intéressant.

M. Saint-Germain: Ecoutez, s'il a blessé le type, un citoyen québécois, et qu'il a été tenu simplement responsable pour 50%, il va être obligé de payer l'indemnité entière. Les assureurs américains vont-ils accepter cela? Ils vont dire: On est prêt à payer 50% des dommages, mais on ne peut pas payer 100%. Notre client a été tenu à 50% responsable, mais ils lui font payer le montant total de l'indemnité.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je ne peux que répéter que la subrogation de la régie ne lui donnera pas plus de droits que la victime, tout simplement. C'est cela la clef du système.

M. Saint-Germain: Non. Si c'est un citoyen américain, vous le savez pertinemment, M. le député... Le citoyen québécois n'a pas de responsabilité à établir, qu'il soit responsable à 50% ou non, il reçoit une indemnité totale. Comme la régie a le droit de subrogation, l'action va être pour la somme totale...

M. Vaillancourt (Jonquière): Comment, pour la somme totale? La subrogation va être pour les droits et recours qui étaient possédés avant la subrogation par la victime.

M. Saint-Germain: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense que vous auriez intérêt à consulter votre collègue.

M. Saint-Germain: D'accord. Je m'excuse.

M. Vaillancourt (Jonquière): Excusez-moi! Je l'accepte.

M. Saint-Germain: La victime du Québec va être payée à 100%. La régie aura un droit de subrogation de 50%, mais cette somme de 50% va être tellement plus considérable que ce que le citoyen américain va recevoir dans de nombreuses occasions, surtout s'il gagne $35 000 ou $40 000 et s'il peut continuer à travailler ou si la compagnie qui l'engage veut le garder, il ne recevra pratiquement rien. Et cette somme de 50% d'indemnité payée par la régie au citoyen québécois va dépas- ser amplement l'indemnité que lui, va recevoir. C'est ce que j'ai voulu dire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Qu'est-ce qu'il reçoit du Québec dans le système actuel, s'il est responsable?

M. Lalonde: 50%.

M. Vaillancourt (Jonquière): Qu'est-ce qu'il reçoit du Québec s'il est responsable?

M. Saint-Germain: II va recevoir 50%.

M. Vaillancourt (Jonquière): S'il est responsable de l'accident, qu'est-ce qu'il reçoit du Québec dans le système actuel? Il reçoit quoi?

M. Saint-Germain: Bien oui, mais écoutez...

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez pas répondu à ma question.

M. Saint-Germain: ... l'assureur américain qui vend une police à son client...

M. Gagnon: M. le député, qu'est-ce qu'il reçoit dans le même exemple, actuellement?

M. Saint-Germain: II va être payé selon exactement la teneur de la police que l'assureur américain lui a vendue. Exactement la même teneur.

M. Gagnon: Cela ne serait pas pareil.

M. Saint-Germain: Non, cela ne serait pas pareil, c'est certain.

M. Vaillancourt (Jonquière): Autrement dit, vous acceptez qu'un citoyen québécois...

M. Saint-Germain: Parce que le citoyen américain, premièrement, s'il gagne $40 000...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Jacques-Cartier, je vais vous poser une question...

M. Saint-Germain: ... par année, sa police d'assurance, en cas de non-responsabilité, lui promet un dédommagement pour perte de revenu de $40 000, surtout pour le temps où il ne travaillera pas. C'est cela qu'il va recevoir. Si le gars est dans une chaise-roulante pendant un an et demi il va recevoir $60 000 "dret-là" pour la perte de revenu pendant un an et demi s'il n'a pas travaillé.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jacques-Cartier...

M. Saint-Germain: C'est cela que l'assureur américain va lui dire. C'est cela qu'il va obtenir s'il a un accident aux Etats-Unis. Quand il va arriver à Québec, qu'est-ce qu'il va recevoir?

Mme Payette: M. le Président, est-ce que le député de Jacques-Cartier est en train de nous

dire qu'un citoyen américain qui gagne $40 000 a une assurance-salaire de $40 000 ou est-ce qu'il a une assurance automobile responsabilité?

M. Saint-Germain: Je suis en train de dire qu'un citoyen américain qui gagne $40 000 par année...

Mme Payette: II n'est pas assuré d'avoir $40 000 par son assureur américain. Il a beau être Américain.

M. Saint-Germain: ... et s'il est un an et demi dans une chaise roulante, il a un droit d'action de $60 000 contre le responsable. C'est de cela qu'il a le droit. Et au Québec, il ne l'a plus.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Jacques-Cartier, est-ce que vous acceptez qu'un citoyen québécois non responsable, qui subit des préjudices corporels par la faute d'un non-résidant ou par la faute d'un Américain, puisse intenter lui-même une action en dommages contre ce responsable non-résidant? Est-ce que vous acceptez ce fait là?

M. Saint-Germain: Si je m'en vais aux Etats-Unis, moi...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est simple comme question. Est-ce que vous acceptez le fait que si vous êtes blessé au Québec et que vous n'êtes pas responsable, mais que vous avez été blessé par la faute d'un citoyen américain ici au Québec...

M. Saint-Germain: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous acceptez le fait que vous pouvez personnellement, dans le régime actuel, poursuivre vous-même ce citoyen américain?

M. Saint-Germain: Bien non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous acceptez cela?

M. Saint-Germain: Moi, j'ai été frappé par un Américain et j'ai été payé "dret-là", par la compagnie parce que je n'étais pas responsable. C'est ma compagnie qui a été chercher l'argent.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous acceptez cela? M. le député d'Outremont, est-ce que vous acceptez cela?

M. Raynauld: II dit oui. C'est cela qu'il dit.

M. Saint-Germain: J'ai eu un accident avec un Américain. Je n'étais pas responsable. Ma compagnie m'a payé tous les dommages. Qu'est-ce qui est arrivé avec la compagnie? Ma compagnie a eu un droit de subrogation. Je ne sais pas ce qu'ils ont fait avec, ce sont eux qui se sont arrangés avec cela. Ils m'ont payé, moi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous l'acceptez, ce fait là?

M. Saint-Germain: Bien, tiens.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous acceptez le fait que la régie, étant subrogée dans les droits de ce citoyen québécois, puisse avoir pour les mêmes droits pour ces mêmes recours, ces mêmes obligations un recours contre ce même citoyen américain non résidant?

M. Saint-Germain: Je l'admets bien. Mais partez de la même base.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bon, on vient de régler le problème.

M. Saint-Germain: Bien oui!

M. Vaillancourt (Jonquière): II ne reste que le problème de la capitalisation.

M. Saint-Germain: Voyons donc!

M. Lalonde: Qui est l'injustice fondamentale.

M. Vaillancourt (Jonquière): On n'était pas là-dessus avec le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Je suis revenu au premier exemple que j'ai donné. Vous lirez le journal des Débats et vous allez voir que mon exemple tient, et amplement à part cela. Il tient tellement que vous aurez avant longtemps, et vous saurez me le dire, des restrictions sur les polices d'assurance américaines.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est le maintien de la responsabilité en ce qui concerne le...

Mme Payette: Cela les incitera à instaurer un régime de "no fault" aux Etats-Unis, ce qui serait éminemment souhaitable.

M. Saint-Germain: Cela me fait penser, lorsqu'on donne un coup de pied au derrière d'un éléphant, les éléphants partent tous en peur.

Mme Payette: M. le Président, est-ce qu'on peut adopter l'article 9?

M. Saint-Germain: Ils sautent les clôtures.

Le Président (M. Bertrand): L'article 9 est-il adopté?

Mme Payette: Adopté, M. le Président. M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté.

M. Raynauld: M. le Président, il y avait un article 9a.

Mme Payette: II vient après, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand): Oui. Article 9, adopté sur division.

M. Lalonde: Oui.

Le Président (M. Bertrand): Article 9a. Mme le ministre.

Mme Payette: L'article 9a se lit comme suit, M. le Président: "Dans les cas visés dans le deuxième alinéa de l'article 7 et nonobstant l'article 4, dans les cas visés dans l'article 9, les personnes suivantes, lorsqu'elles sont subrogés dans les droits de la victime en vertu des lois ci-après mentionnées, possèdent les mêmes recours que la régie pour recouvrer leurs créances contre la personne ne résidant pas au Québec, qui est responsable de l'accident, ou contre la personne tenue à l'indemnisation des dommages corporels causés dans cet accident par un non-résidant? "La Commission des accidents du travail et, le cas échéant, l'employeur, en vertu de la Loi des accidents du travail, Statuts refondus, 1964, chapitre 159, la Commission des accidents du travail, en vertu de la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, 1971, chapitre 18, la Régie de l'assurance-maladie du Québec, en vertu de la Loi de l'assurance-maladie, 1970, chapitre 37, et le gouvernement, en vertu de la Loi sur l'assurance-hospitalisation. Statuts refondus du Québec, 1964, chapitre 163, et en vertu de la Loi de l'aide sociale, 1969, chapitre 63".

M. Saint-Germain: M. le Président...

Mme Payette: Dans le régime, le but de ce nouvel article est de prévoir le droit de subrogation des organismes publics. Dans le régime actuel, les organismes publics, tel la CAT, la RAMQ, la RQ ont un droit de subrogation contre le responsable d'un accident. Ainsi, ces organismes peuvent recouvrer du responsable ou de son assureur les montants dépensés pour un accidenté d'automobile. En principe, ce droit est aboli. Cependant, dans la mesure où la régie conserve un droit de subrogation contre un non-résidant, il est normal d'accorder le même droit à ces organismes.

Ce droit n'était pas prévu dans le projet déposé en première lecture.

M. Saint-Germain: Voilà, ça fait suite à ce que je disais tout à l'heure, il faut aller au bout de ses peines. Si on accepte l'article 9, celui-là fait la suite.

M. le Président, cela veut dire que, si jamais le Québec se sépare, je vais même avoir de la difficulté à me décider à le visiter après la séparation du Québec avec une loi semblable. En fin de compte, je trouve que vous donnez une mauvaise image du Québec et ça créera des inconvénients sérieux au niveau de l'industrie touristique, parce que, croyez-moi, les assureurs américains seront nécessairement obligés de tenir compte de toutes ces dispositions. Je ne souhaite pas qu'ils aillent jusqu'à modifier leurs polices d'assurance, mais il ne faudra pas non plus être surpris qu'ils le fassent.

S'ils le font, ce sera très négatif pour l'image du Québec et cela ne vaudra pas les sommes qu'on pourrait économiser de cette façon. D'ailleurs, on a mentionné que ça concernait un petit nombre de victimes et que ce serait de la contre-propagande contre les millions dépensés pour essayer d'attirer le tourisme au Québec.

Le Président (M. Bertrand): Adopté? Mme Payette: Adopté, M. le Président. M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Bertrand): Adopté sur division. Article 10.

Mme Payette: M. le Président, l'article 10 se lit comme suit: "L'indemnité d'une victime incapable est versée à son tuteur ou à son curateur ou, à défaut, à une personne désignée par la régie. La personne ainsi désignée a les obligations d'un tuteur ou d'un curateur, selon le cas".

M. Saint-Germain: Alors...

Le Président (M. Bertrand): Un instant!

Mme Payette: "Le but, M. le Président, était de prévoir que l'indemnité puisse être versée à une autre personne que la victime lorsque celle-ci est mineure ou incapable. Le but de l'amendement, en vertu de l'article 10 prévu dans le projet déposé en première lecture, était que la régie pouvait exercer une discrétion qui vienne en contradiction avec un jugement de la Cour Supérieure nommant un tuteur sur avis du conseil de famille.

C'est la même situation pour un curateur. L'amendement vise donc à corriger la possibilité de contradiction; de même, s'il n'y a pas de tuteur ou de curateur, la personne qui reçoit l'indemnité doit l'administrer de la même façon qu'un tuteur ou un curateur".

Le Président (M. Bertrand): Le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Quelle est la contradiction que le ministre vient de mentionner entre la décision d'un juge et la décision de la régie? Est-ce bien ce que j'ai compris?

Mme Payette: M. le Président, ce qui est arrivé, c'est que, dans la version du projet de loi en première lecture, on avait repris la formulation qui était dans la Loi des accidents du travail, où on ne faisait pas référence à un tuteur ou à un curateur.

Il aurait pu arriver que la régie verse une indemnité à une personne autre qu'un incapable, qui ne soit pas le tuteur, ni le curateur. Suite aux représentations du Barreau, qui ont été faites en commission parlementaire, la formulation a été

reprise pour justement prévoir le cas du tuteur et du curateur.

M. Lalonde: M. le Président, pourquoi donner un droit à la régie de désigner quelqu'un, alors que tout notre régime de droit civil et aussi la Loi de la curatelle publique prévoient la façon dont ces personnes sont représentées?

Mme Payette: Le principe qui est consacré dans l'article, c'est que l'indemnité est versée au tuteur ou au curateur. Advenant le cas où des personnes désirent qu'il n'y en ait pas, à ce moment-là, la régie pourrait désigner une personne. Mais le principe, c'est que dès qu'il y a un tuteur ou un curateur, il reste au conseil de famille à se réunir et à nommer un tuteur pour que la régie verse l'indemnité au tuteur.

Mais s'il n'y en a pas et si la victime ne désire pas qu'il y en ait, ou sa famille ne désire pas qu'il y en ait, à ce moment-là, il est possible que l'indemnité puisse être versée à une personne que désigne la régie.

Le Président (M. Bertrand): Madame, messieurs, à ce moment-ci, nous devons ajourner nos débats. Oui, M. le député de Jonquière?

M. Vaillancourt (Jonquière): Etant donné que nous ne sommes rendus qu'à l'article 10, je me demande si on ne pourrait pas avoir un consentement unanime pour poursuivre les travaux de la commission jusqu'à une heure plus avancée, jusqu'à onze heures ou minuit peut-être?

M. Lalonde: M. le Président, si on avait le commencement de la moitié du quart du soupçon que le gouvernement nous laisserait étudier ce projet de loi en toute sérénité, jusqu'au bout, cela nous ferait plaisir, quant à moi, de participer à un consentement, qui, je l'espère, serait unanime. Mais avec le bâillon et la guillotine qu'on fait suspendre au-dessus de notre tête, c'est rire de nous autres. Ce n'est pas du tout ce que le député de Jonquière avait l'intention de faire. Mais c'est le sentiment que j'ai, selon lequel c'est nous demander de faire un peu plus de petits exercices de comédie, pour continuer une heure de plus.

Le Président (M. Bertrand): La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 3)

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