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Version finale

39e législature, 2e session
(23 février 2011 au 1 août 2012)

Le mercredi 11 mai 2011 - Vol. 42 N° 11

Étude détaillée du projet de loi n° 82 - Loi sur le patrimoine culturel


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Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures quatre minutes)

Le Président (M. Marsan): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 82 sur le patrimoine culturel.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Curzi (Borduas) est remplacé par M. Lemay (Sainte-Marie--Saint-Jacques); Mme Richard (Marguerite-D'Youville) par Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); et M. Robert (Prévost) par M. Turcotte (Saint-Jean).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Nous débuterons sans plus tarder avec les remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez d'un maximum de 20 minutes pour vos remarques d'ouverture. À vous la parole.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. D'abord, je veux vous saluer, M. le Président. Vous êtes avec nous sur cette commission depuis le début, et c'est très agréable.

Alors, nous avons un travail qui a été accompli, qui est important, avec la commission parlementaire où nous avons entendu les mémoires et les groupes et nous allons continuer article par article.

Je veux saluer le député de Drummond et, également, je veux vous présenter les personnes qui m'accompagnent: alors, la députée de Mille-Îles; le député de Charlesbourg; le député de Lévis, qui est également mon adjoint parlementaire; Me Hélène Gagnon, qui est notre spécialiste, bien sûr, sur toutes les questions qui touchent les détails et tout ce qui touche le juridique; M. Louis Vallée, qui est sous-ministre adjoint; également, Mme Maryline Tremblay, qui est ma conseillère politique; et Mme Karine, dont j'oublie le nom de famille, qui est aussi ma nouvelle conseillère politique.

Une voix: Gendreau.

Mme St-Pierre: Gendreau. Parfait. Alors, bonjour à tous. Également, bonjour à tous ceux et celles qui nous écoutent par le truchement de la télévision, le canal parlementaire. Je pense que tous ceux qui s'intéressent et qui se passionnent pour le patrimoine ont suivi nos travaux en commission parlementaire lorsque nous avons accueilli les groupes ici. Il y a eu 56 mémoires qui ont été déposés. Nous avons rencontré 50 groupes et individus qui ont vraiment pris fait et cause pour notre patrimoine. Et il y avait évidemment, vous l'avez vu aussi, M. le Président, une qualité... La qualité de nos échanges était vraiment remarquable. Et je tiens à remercier chaleureusement toutes les personnes qui se sont donné la peine soit de rédiger des mémoires et aussi de se déplacer pour venir ici, en commission parlementaire.

Il s'agit d'adopter une loi qui est moderne, qui nous permettra de faire davantage pour la protection et la mise en valeur de toutes les composantes du patrimoine culturel adaptées aux réalités du XXIe siècle. Les effets de cette loi seront bénéfiques pour tous les Québécois et toutes les Québécoises, car elle nous permettra de protéger et de transmettre aux générations qui nous suivent les joyaux de notre patrimoine culturel, qu'il soit maritime, industriel, religieux, moderne ou autre.

Alors, lors de nos auditions... les journées d'auditions ont été enrichies en rencontres et en avis précieux. Nous avons tenu compte, nous avons analysé tout ce qui a été dit pendant la commission parlementaire. Donc, c'est important pour nous de faire en sorte qu'on tienne compte et qu'on analyse les suggestions qui nous ont été faites, et, au fur et à mesure de nos travaux, on pourra faire certains commentaires.

Donc, ce projet de loi n° 82 est attendu. Il a été accueilli très favorablement. Je dirais qu'il n'a peut-être pas fait l'unanimité complète, mais je pense qu'il a été accueilli très favorablement. Il est très attendu par les milieux, les gens du milieu.

Je vais citer ici un article qui a été préparé par le Conseil du patrimoine vivant. En fait, c'est une lettre qui a été préparée par le Conseil du patrimoine vivant, et on cite ici les travaux que nous avons entrepris, et ça nous parle de patrimoine immatériel, et le Conseil du patrimoine vivant, je cite, dit: «À titre de regroupement national des acteurs en patrimoine immatériel, le Conseil québécois du patrimoine vivant souhaite féliciter la ministre de la Culture ainsi que toute son équipe pour avoir mis de l'avant un tel progrès vers davantage de diversité culturelle et davantage de reconnaissance pour des richesses populaires jusqu'à présent négligées par les pouvoirs et institutions publiques.»

Donc, le Conseil du patrimoine vivant, qui tenait un congrès récemment ici, à Québec, a vraiment salué ce projet de loi et l'attend évidemment avec impatience.

Donc, les journées d'échange ont mis en lumière un fait qui me réjouit particulièrement: c'est que la valeur du patrimoine culturel n'est plus à démontrer. Je pense qu'on a compris au fil des ans l'importance de vraiment protéger et souligner tout ce que nous faisons du côté... en matière de patrimoine. Je vais citer ici Mme Fotopoulos, de la ville de Montréal, qui a dit qu'investir en patrimoine c'est, entre guillemets, «winner», et je pense que c'est vraiment... C'est vrai, c'est gagnant. Aujourd'hui, on reconnaît que le patrimoine contribue de façon importante au développement économique et culturel ainsi qu'à l'amélioration de la qualité du cadre de vie de toutes les régions du Québec.

**(15 h 10)**

Nous avons aussi entendu en consultation beaucoup de suggestions, de propositions intéressantes, comme je le disais, dont la portée est toutefois davantage à caractère administratif. Cependant, et tel que j'ai eu l'occasion de le dire lors du débat sur l'adoption de principe, ces propositions peuvent difficilement trouver une place dans un texte de loi comme celui-ci. Tout ce qui touche les questions d'ordre... qui touche les questions financières, c'est-à-dire avec des signes de piastre, évidemment, ça relève de mon collègue ministre des Finances et de ma collègue qui est présidente du Conseil du trésor. Donc, on ne peut s'avancer sur ces chemins pendant l'étude de ce projet de loi. On peut faire des suggestions, on peut faire des commentaires, on peut évidemment dire qu'on en veut plus, bien sûr, et, nous aussi, nous en voulons plus, mais on ne peut pas, dans ce projet de loi là, déterminer des clauses qui entraînent des questions d'ordre financier.

Mon ministère est néanmoins à pied d'oeuvre pour recenser, analyser et donner suite à celles -- aux recommandations qui ont été faites -- que nous pensons réalisables dans les phases d'implantation de la future loi. Donc, il y aura des phases d'implantation, il y aura des... de la formation qui sera faite, il y aura de l'accompagnement également, et ça, c'est important. C'est important de le dire, que les gens ne seront pas laissés à eux-mêmes avec cette loi et ne sachant comment l'implanter, alors je pense... D'ailleurs, lors de nos consultations sur le terrain, on a été très, très clairs là-dessus qu'il y aurait un accompagnement.

Pour ce qui est des programmes, il y a eu plusieurs commentaires, donc des orientations qui seront prises, qui seront mises en place par le ministère, notamment en ce qui concerne le soutien qui sera offert aux municipalités. Nous avons pris note de ces remarques et nous prenons l'engagement, bien sûr, d'accompagner les municipalités sur... On a parlé évidemment de l'expertise qui sera nécessaire. Bien sûr, nous allons accompagner les municipalités.

D'autres commentaires exprimés par les participants à la consultation par mes collègues de l'opposition m'ont inspiré des pistes d'amélioration du projet de loi. Donc, je présenterai, au cours de l'étude, des propositions d'amendement qui visent à bonifier le projet de loi, à préciser certaines de ses dispositions. Alors, je pense que c'est important de le dire à cette étape-ci, au tout début de nos travaux, que nous avons entendu... Nous avons écouté, nous avons entendu, nous avons travaillé, nous avons rédigé et nous aurons des amendements à proposer, et j'imagine que, de votre côté, il y aura des amendements également qui nous seront proposés.

Donc, je veux souligner l'importance que j'accorde à l'adoption de ce projet de loi et non seulement, moi, mais également tout mon gouvernement. C'est un projet de loi qui s'élève, je pense, au-dessus de toute partisanerie. C'est un projet de loi qui est dans l'intérêt de tous les Québécois et de toutes les Québécoises, et c'est un projet de loi qui fait des ouvertures, ouvre des fenêtres très importantes, si on pense au patrimoine immatériel. Et il y a un article que je vais citer dans quelques instants, dans lequel on retrouve des commentaires de Mme Cameron, qui sont très importants sur la question de notre projet de loi.

Donc, on parle de patrimoine immatériel, de personnages, des événements, des lieux historiques qui offrent aux municipalités qui le désirent une possibilité de faire plus.

La loi actuelle va être actualisée, et j'ajouterais que tout retard dans l'adoption de la nouvelle loi retarde d'autant les interventions importantes qui permettront de protéger, de sauvegarder les éléments significatifs de notre patrimoine qui, pour le moment, ne sont absolument pas couverts par la loi. Alors, ce n'est pas une question d'urgence, c'est une question de dire: Bien là, le projet de loi est là, c'est une architecture qui se tient. C'est un projet de loi qui comporte 265 articles et qui est vraiment quelque chose qui fait avancer la question de la protection du patrimoine au Québec.

Donc, je pense qu'on peut être assez fiers du travail qui a été accompli. Et je peux dire que le patrimoine culturel est une source partagée de mémoire et de valeurs et qu'il favorise le sentiment d'identité, d'appartenance et de continuité. Nous considérons que l'intérêt public de la connaissance, de la protection, de la mise en valeur et de la transmission des éléments du patrimoine culturel pour le bénéfice des générations présentes et futures est fondamental. Nous reconnaissons le caractère dynamique et évolutif du patrimoine culturel puisque nous considérons également que le patrimoine culturel est un facteur de développement culturel, social et économique et qu'il contribue à la qualité de vie.

Et, puisque nous considérons que la protection du patrimoine culturel favorise le caractère durable du développement, nous reconnaissons, bien sûr, le rôle que jouent les organisations et les communautés en faveur de la connaissance, de la protection et de la mise en valeur de la transmission du patrimoine culturel. Alors, c'est important de faire ces remarques préliminaires et de dire à quel point nous commençons nos travaux avec beaucoup, beaucoup d'enthousiasme. Et j'ai très, très hâte que nous puissions présenter aux Québécois et aux Québécoises un projet de loi qui, je l'espère, sera adopté à l'unanimité. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communications à faire ses remarques préliminaires pour une période maximale de 20 minutes. M. le député de Drummond.

M. Yves-François Blanchet

M. Blanchet: Merci, M. le Président. D'emblée, mes salutations à tout le monde, Mme la ministre, les gens du cabinet, les gens du ministère, collègues, M. le Président.

Je pense, je le suppose à défaut d'en avoir l'expérience, que nous entreprenons maintenant ce qui est peut-être le rôle essentiel du parlementaire, du législateur. Malheureusement, on pourrait craindre que l'auditoire soit inversement proportionnel à la pertinence. Ainsi, si on entend beaucoup parler de la période de questions, qui n'est pas toujours pertinente, on n'entend peut-être pas assez parler des travaux parlementaires des commissions qui, souvent, sont d'une grande pertinence, et j'espère que nous le serons.

Je partage l'analyse de la ministre, que j'avais soulignée aussi au début des travaux, au début des consultations, que ce n'est pas un sujet qui prête à la partisanerie, et j'en suis fort aise. Cela dit, évidemment, je ne renoncerai pas à notre rôle d'opposition qui est, d'une part, de soulever les possibles lacunes dans un projet de loi et aussi d'être les représentants, d'être les porte-parole, d'être les porte-voix de gens qui, peut-être, n'auront pas été entendus.

Évidemment, le système politique étant ce qu'il est, nous sommes porteurs d'une vision des choses dont les gens, ultimement, disposent mais qui est, à bien des égards, différente de celle du parti au pouvoir. Je suppose que les risques d'accrochage sont peu nombreux, je le souhaite, nous, d'avoir -- et tout le monde, et je m'inclus -- la maturité nécessaire pour que ça se passe le mieux possible, mais il y aura vraisemblablement des débats.

Nous souhaitons aussi l'adoption d'un projet de loi, d'une loi. Nous souhaitons l'adoption d'une loi parce que les milieux culturels, les gens dans la population qui sont conscients de l'importance du patrimoine dans leur vie, dans leur quotidien... Je dis bien «qui sont conscients». J'ai l'impression que le patrimoine est important dans la vie de tout le monde pour ce dont c'est porteur, mais ce n'est pas tout le monde qui s'y attarde, ce n'est pas tout le monde qui s'y intéresse. J'ai l'impression que les gens qui en sont conscients et qui s'y intéressent souhaitent l'adoption, effectivement, d'un projet de loi.

Nous devons souhaiter que ce qu'il deviendra soit effectivement adopté, mais c'est sous toutes réserves de ce qu'il deviendra. On ne sait pas aujourd'hui, c'est vraisemblablement normal, on ne sait pas de quoi il sera fait ultimement. On sait qu'il y aura des amendements, qu'il y aura des discussions, on sait qu'on va vraisemblablement convenir ensemble, autour de la table, de changements que nous considérerons comme des améliorations.

Sur des questions fondamentales, peut-être qu'on est déjà sur la même page et qu'on ne le sait pas, mais, sur certaines questions fondamentales, je ne serai pas et mes collègues ne seront pas disposés à des compromis. Il y a des questions fondamentales qui doivent être traitées et améliorées, mais peut-être que déjà les amendements qu'on nous prépare vont les traiter de façons qui nous sembleront adéquates.

Le moment, l'urgence quant à l'adoption de cette loi... Le plus tôt est vraisemblablement toujours le mieux, mais jamais au prix du contenu, jamais au prix de ce qu'elle doit contenir, offrir, établir comme cadre. Il faudra vraisemblablement pas mal d'années avant qu'on revienne sur cette question. Alors, il faut réaliser tout le potentiel qui est ouvert ici à partir d'aujourd'hui pour faire de cette loi-là une pièce maîtresse pour la préservation, la perpétuation de notre patrimoine, et ça appelle un travail minutieux. On l'a dit au tout début, le patrimoine n'est pas une notion aussi... Comment dire? Il y a des gens pour qui on dit «patrimoine» puis on imagine la poussière accumulée sur un objet dans un musée, et ce n'est tellement pas ça, le patrimoine. Le patrimoine est une notion évolutive, le patrimoine est une notion vivante, le patrimoine se construit tout le temps. Et, pour cette raison-là, je pense que cette espèce d'aspect dynamique du patrimoine doit être pris en compte. Parce qu'on a rencontré des gens qui, sans être passéistes, sont des spécialistes en histoire, d'autres en archéologie, d'autres en ethnologie, d'autres en muséographie, et tous ces gens-là amènent une passion qui démontre en soi jusqu'à quel point c'est vivant, le patrimoine.

**(15 h 20)**

Il y a des formes de patrimoines qui ne subsistent que si elles sont maintenues vivantes. Pour beaucoup, le patrimoine dit immatériel est une forme de patrimoine dont la meilleure forme, la meilleure possibilité, le meilleur véhicule de transmission est sa pratique, et son exécution, et le fait qu'il soit effectivement toujours vivant, qu'il soit pratiqué par des gens qui en transmettent la connaissance, l'art, autant au sens artisan qu'artisanal, qu'artistique, à d'autres gens. Et c'est la plus belle démonstration de la nécessité, d'une part, de le transmettre et de la nécessité de rentrer adéquatement, complètement cette notion-là dans le projet de loi.

Évidemment, on en a parlé, on y reviendra, sur la notion de paysage patrimonial, qui est peut-être le plus beau trésor qu'on laisse aux générations futures, et c'est sûrement un des trésors qui sont les plus attaqués, assaillis par le développement ou une certaine vision du développement économique. Il y aura effectivement des discussions que je suppose intenses quant aux modalités de transfert aux municipalités de juridictions, de pouvoirs. Et, sur tous ces sujets et sur tous les autres, il faudra toujours s'alimenter, se nourrir à partir de ce que les rencontres de citoyens et de groupes nous ont données.

Ces gens-là, je suppose que c'est vrai aussi du côté du ministère, nous contactent encore régulièrement. À chaque jour, on a des courriels de gens qui nous disent: Vous êtes rendus où? Quand est-ce que ça commence? Avez-vous regardé tel élément? On a fait telle suggestion dans notre mémoire, est-ce que vous allez pousser sur ça? On a ce genre de contacts là, ce qui suppose que les nombreuses organisations et les nombreux individus qui sont venus nous voir ont des attentes.

Je reviens sur une notion qui n'a manifestement pas fait consensus: une loi doit être, devrait être le bras législatif d'une politique. Les Québécois devraient connaître, auraient dû connaître ce qu'étaient les intentions du gouvernement quant au patrimoine culturel avant que nous ne devions nous pencher sur les modalités et l'encadrement législatif qui permettent la mise en place et la réalisation de ces intentions-là. C'est une sorte de compromis que nous avons fait en disant: Allons-y quand même avec la loi sans la politique. Parce qu'effectivement il y a une forme difficile à quantifier, sur laquelle il est difficile d'être précis, avec des bons et des mauvais côtés, mais il y a une forme possible d'urgence qui fait que nous disons: Allons-y, étudions la loi. Mais espérons que nos discussions vont permettre la mise en forme, vont permettre que soient accumulés l'ensemble des données, des éléments essentiels qui permettraient, qui feraient en sorte qu'apparaîtrait, dans des délais aussi souhaitables et aussi courts, une politique du patrimoine culturel qui, de façon assez largement établie par les gens qui sont venus nous rencontrer, fait présentement défaut.

Quand on parle de patrimoine aux gens que l'on rencontre, c'est avec des exemples qu'ils nous interpellent. Telle personne nous parle de son église; telle personne nous parle d'une tradition maritime; telle personne nous parle d'un ensemble d'éléments. C'est toujours fascinant. Les suggestions qu'on nous fait, même, sont souvent très intéressantes. Et c'est par les exemples que les gens expriment leur intérêt pour le patrimoine, et c'est normal. Le patrimoine, aux yeux des gens, ce n'est pas la notion théorique. Le patrimoine, aux yeux des gens, c'est: Qu'est-ce que ça représente dans mon passé, dans mon présent puis dans l'avenir que je voudrai transmettre? Et c'est pour toutes ces raisons-là que je pense qu'une politique est essentielle.

Enfin, je veux bien qu'une loi ne soit pas un exercice budgétaire. Cela dit, il me semble quand même nécessaire d'avoir à l'esprit, d'être conscients du fait qu'une décision doit venir avec les ressources nécessaires à son application, à défaut de quoi elle est passablement vide. Nous n'avons aucune idée de ce que sont les ressources nécessaires. Et je rappelle que pas même la ville de Montréal, qui est pourtant très bien équipée en termes d'équipes, en termes d'infrastructures et en termes d'organisation pour gérer le patrimoine et la culture, pas même la ville de Montréal ne pouvait nous donner la moindre idée de ce qu'ils pensaient être les ressources nécessaires à la mise en oeuvre de leur partie de cette loi-là, et de toute évidence le ministère non plus à ce stade-ci. Or, la loi trace un chemin, et on ne sait pas combien il en coûtera pour emprunter ce chemin-là.

C'est peut-être un peu déplorable, alors j'en appelle à tout le monde qui a le devoir de le faire, j'en appelle à se pencher sur l'identification de ce que seront les besoins, en particulier au niveau des municipalités, de telle sorte que rapidement un gouvernement pourra prendre la responsabilité de mettre en oeuvre, de déployer ces ressources-là. Parce qu'on revient et on reviendra beaucoup sur la question des municipalités dont on a assez clairement établi que les plus petites municipalités ne sont pas sur le bord d'avoir les ressources nécessaires. À la limite, dans bien des cas, elles ont un intérêt qui est très théorique. Elles ont une notion de ce que c'est, mais elles ne savent pas ce que ça implique pour elles. Et il y a cette approche, il faut aller auprès de ces gens-là, leur dire: Voici ce que c'est.

La question qui est soulevée évidemment pour une municipalité, c'est, si je prends une responsabilité et que j'ai le choix de la prendre, nous dit-on, mais qu'il n'y a pas de ressources certaines qui viennent avec, il y a de bonnes chances que je n'accepte pas cette responsabilité-là. Donc, il faudra aller auprès des municipalités. Il faudra aussi voir si la municipalité est la meilleure zone, le meilleur niveau, la meilleure juridiction pour procéder à cette espèce de transfert de juridiction et s'il n'y a pas des instances davantage régionales qui auraient, avec un plus haut niveau de probabilité à leur disposition, à l'intérieur du territoire dont elles sont gestionnaires, accès aux ressources d'expertise qui sont nécessaires.

Je reviens temporairement... rapidement, pardon, sur la notion de patrimoine religieux qui, sans être nommée comme telle dans le projet de loi, existe plus qu'en filigrane à peu près partout. Pourquoi? Pour l'évidente raison que le patrimoine religieux est, même désacralisé, le plus important élément de patrimoine passé de notre culture collective qui ait laissé des traces. Ces traces-là sont le coeur, le centre d'à peu près chaque municipalité et chaque paroisse au Québec. On ne peut pas regarder dans d'autres directions, faire comme si ça n'existait pas. Il faut le voir, le nommer et le prendre à bras-le-corps.

Et on connaît les difficultés que vivent un grand nombre de municipalités à travers le Québec, de villages, de petites communautés qui veulent s'approprier des édifices auparavant à caractère religieux qui sont laissés en désuétude par une Église temporelle qui ne veut pas en assumer l'entretien parce que la fréquentation des citoyens... les brebis égarées ne rentrent pas au bercail en nombre suffisant pour que ça vaille le coût. Et donc ça laisse, au coeur des communautés, des immeubles pourtant précieux, pourtant riches de valeur patrimoniale, qui se détériorent, et dont les coûts de restauration, le cas échéant, vont être de plus en plus élevés.

Il y a une espèce de point de rupture où ça finit par être moins cher de jeter à terre que de le réparer et, quand on passe ce point de rupture là, on vient de rentrer dans un petit drame local à chaque fois. Il faut envisager ces questions-là. La loi n'est pas un budget mais la loi doit envisager, doit paver le chemin pour que des solutions soient trouvées lorsque les communautés veulent prendre en main et en charge ces éléments de patrimoine qui leur appartiennent.

Je finirai en disant ceci: Il y a une notion centrale à tout ce qui est culturel. Le patrimoine est évidemment une notion culturelle, et j'utilise «culture» en son sens le plus large, en son sens, à la limite, ethnologique du terme: l'ensemble de nos valeurs, de nos comportements, de nos institutions, de nos croyances, de nos traditions. Tout ce qui est culturel est forcément identitaire. Il est toujours ce qui est la base de l'appartenance à une société et à une communauté. Il n'existe pas de société et de communauté dans l'histoire du monde qui n'ait d'abord procédé à son rassemblement, à sa propre création sans que ce soit sur la base d'une identité commune.

J'ai l'impression que l'absence de la notion d'identité dans le projet de loi le prive d'une partie importante de son âme. Et, en culture, l'âme fait foi de beaucoup de choses.

C'est donc avec tout ça à l'esprit qu'on va y aller un par un sur l'ensemble des articles, l'ensemble des alinéas et l'ensemble des paragraphes, et je vous dis d'emblée que nous voudrons les étudier sous cette forme, sans que ce soit nécessairement plus long, mais parce qu'il y a des détails qui sont de première importance dans chacun de ces éléments. Et nous allons vraisemblablement, j'ai bon espoir, aboutir avec une loi qui jouera le rôle essentiel pour l'avenir culturel du Québec qu'on doit lui insuffler. Merci, M. le Président.

**(15 h 30)**

Le Président (M. Marsan): Merci, M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière de culture et de communications.

Je voudrais demander s'il y a d'autres députés qui veulent faire des remarques préliminaires. M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques, la parole est à vous.

M. Martin Lemay

M. Lemay: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je vous salue. Je salue Mme la ministre et toute son équipe. Je salue également les collègues des deux côtés. Effectivement, comme notre collègue de Drummond l'a dit, on arrive ici, et je pense que ça va continuer de cette façon-là, de façon positive et constructive.

Je reprendrai un peu sur la lancée de notre collègue. Effectivement, de façon générale, s'il y a peut-être une critique de base à apporter au projet de loi, c'est qu'on a l'impression, M. le Président, que ce projet de loi là aurait pu être présenté ici, au Québec, en Ontario, au Massachusetts, à la rigueur en France ou en Italie parce que c'est un projet de loi technique, un peu mécanique, ce qui est normal -- c'est un projet de loi, on s'entend que ce n'est pas un livre d'histoire, ce n'est pas un chapitre de l'histoire du Québec -- mais il reste, M. le Président, que, si on veut travailler à un projet de loi qui a près de 300 articles, si un gouvernement, quel qu'il soit, va donner 50 millions, ou 100 millions, ou 150 millions de ressources à un ministère pour faire son travail, c'est qu'il y a une raison, et cette raison-là, M. le Président, c'est effectivement que ce patrimoine décrit une histoire, l'histoire d'une nation, l'histoire d'une nation singulière et particulière en Amérique.

Et ça, M. le Président, au fil des questions, peut-être que les choses vont s'éclairer un petit peu, mais, à l'heure actuelle, quand on lit le projet de loi, comme je l'ai dit tout à l'heure, et je le dis en tout respect, j'imagine ce que c'est comme travail pour l'équipe du ministère de pondre littéralement un projet de loi de cette ampleur-là, plus le travail qui a été fait avant, mais il demeure que, quand on le lit, probablement que l'Ontario aurait probablement la même chose, peut-être des ressources en moins ou en plus. Bref, on ne sent pas, M. le Président, cette...

Et ça, je profite de ce commentaire pour donner peut-être une vision plus large. C'est qu'avec le temps on est en... et c'est un peu le problème du ministère de l'Éducation, à l'heure actuelle, et de plusieurs historiens, je dois le dire, c'est qu'on est venu à penser que l'histoire nationale voulait dire nécessairement histoire nationaliste, alors que c'est tout à fait différent, M. le Président. Ça n'a même aucun rapport.

L'histoire nationale est un système de recherche historique qui est là depuis à peu près 200 ans, mais qui, par les historiens professionnels, a été délaissée depuis une vingtaine d'années à cause que le national, ça, on ne touche plus à ça, la mondialisation, les cultures, et tout. Bref, M. le Président, ça va un peu dans le courant actuel, et j'y reviendrai plus tard, quand je parlerai de l'histoire, de l'histoire telle qu'on la vit à l'heure actuelle, de l'histoire avec un grand H.

Donc, M. le Président, qui dit patrimoine dit histoire. L'histoire, c'est ce qui est arrivé. Des historiens professionnels ou amateurs disent: Cet événement-là est arrivé, cet endroit-là a été peuplé par telles personnes, et, pour en arriver à dire ça, ça prend des preuves, et les preuves -- c'est là qu'intervient le patrimoine -- alors c'est des lettres, c'est des restants de campements, c'est des bateaux, c'est des maisons, c'est des abris, c'est une manière de faire les choses, une manière de faire les canots dans telle ou telle région.

Bref, le patrimoine est intimement évidemment appuyé sur l'histoire. C'est la raison pour laquelle, M. le Président -- vous connaissez ma passion pour l'histoire -- je vais intervenir souvent en ce sens-là parce que les deux sont intimement liés; il n'y a pas de patrimoine sans histoire. Et, si notre histoire est délaissée pour toutes sortes de raisons, eh bien, ultimement, le patrimoine va l'être avec. On aura beau se donner le meilleur des projets de loi, le patrimoine sera délaissé éventuellement lui aussi, peu importe la volonté et peu importe le gouvernement en place.

Bref, M. le Président, le patrimoine, c'est donc la trace de l'histoire, des individus, des peuples, des communautés. Mais je reviens à une définition -- je vous parlais tout à l'heure d'histoire nationale et de nation -- je renchéris sur ce que notre collègue a dit, je pense qu'il est toujours bon de se rappeler la définition d'Ernest Renan. Je crois que tout le monde peut s'entendre à dire que c'est à peu près la meilleure définition du terme de «nation», définition qu'il a écrite à la fin du XIXe siècle, et je cite: «Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis.»

Alors, c'est ça, une nation. Une nation, c'est d'abord un passé partagé et c'est un présent qui fait en sorte de continuer ensemble ce passé-là. Et, M. le Président, c'est effectivement ce qu'on ne retrouve pas nécessairement dans ce projet de loi, mais qu'on ne retrouve pas ailleurs aussi. Et je reviendrais à cette chose-là, mais le passé, pour toute nation au monde, est fondamental, sa connaissance, sa reconnaissance, c'est le patrimoine. C'est la raison pour laquelle, je crois -- et la ministre, avec son équipe, l'aura constaté et d'autres avant elle -- quand un gouvernement dépose un tel projet de loi, ça suscite de l'espoir et ça suscite également beaucoup de mouvement de tous les groupes à travers le Québec qui s'occupent du patrimoine et de l'histoire.

D'ailleurs, je prendrais quelques secondes simplement pour leur rendre hommage, à ces groupes, qui, à travers le Québec, travaillent partout, avec peu de moyens très souvent, pour protéger, pour faire des expositions, pour faire des dépliants, pour informer la population. Et on a eu 50 groupes durant les consultations publiques. Il y en a eu autant pour... pas l'avant-projet de loi mais le dépôt, là, de la politique du patrimoine. Donc, on l'a vu et on peut le constater -- on en connaît tous dans chaque racoin de nos circonscriptions électorales -- comment ces groupes font, au Québec, un travail exceptionnel, M. le Président. Et on ne peut que les féliciter et souhaiter qu'ils continuent à travailler de façon aussi importante.

Donc, je parlais, M. le Président, de l'importance de l'histoire. Mais, pendant quelques minutes, je vais discuter d'un point qui, moi, me tient à coeur, c'est, depuis la Deuxième Guerre mondiale, il y a eu un changement dramatique -- et c'est mes termes, M. le Président -- un changement dramatique face à l'histoire dans tous les pays occidentaux. Mais, au Québec, avec la Révolution tranquille dont on fête le 50e, comme c'est souvent notre cas -- latins que nous sommes -- on a été encore plus loin que toutes les autres nations du monde, M. le Président. Et je n'aurai qu'à citer une phrase de M. Fernand Dumont, qui est peut-être un des... sinon le plus grand intellectuel. M. Dumont a écrit, je crois que c'est au milieu des années quatre-vingt-dix: «La Révolution tranquille est allée plus avant. Cette fois, la rupture a été consommée. Il a paru à nos élites que pour concevoir des projets d'avenir, il ne suffisait pas [d'un] recommencement[...]. Il a semblé [ qu'on devait apprivoiser] l'avenir par le déni du passé. Difficile entreprise...

«Comment une capacité de création adviendrait-elle à un peuple s'il est convaincu d'avance que ce qu'il a auparavant accompli est sans valeur? Nous sommes donc redevenus, d'une certaine façon, "un peuple sans histoire".»

Donc, les grands changements de la Révolution tranquille, que nous saluons, ont eu ce travers-là d'un peu effacer toute l'histoire, les 350 premières années, en fait. Et ça, c'est un problème dont nous avons à faire face, M. le Président. C'est un problème que nous avons à faire face et, dans tout le questionnement que je vais avoir au courant de l'étude de ce projet de loi, cette question-là viendra toujours, M. le Président: la reconnaissance de l'histoire, se donner les moyens, bien sûr, mais aussi se sortir de cette mode de ne rendre d'hommage ou à peu près qu'aux 50 ou 60 dernières années, M. le Président.

**(15 h 40)**

Je regarde... je vois la ministre qui me regarde, je ne dis pas que c'est le gouvernement actuel, je ne dis pas que c'est le cas de la ministre, je dis que c'est le cas au Québec depuis les 50 dernières années, M. le Président. Et il va falloir garder ça en notre mire, M. le Président, parce qu'une politique du patrimoine doit savoir que les difficultés que nous avons avec notre propre histoire... les deux mènent à l'autre, M. le Président. Je vous donne quelques exemples: il y aura la fête, la fête des Patriotes, là, dans deux semaines. Et, indépendamment de notre idéologie politique, M. le Président, les patriotes ont existé, les événements sont arrivés. Indépendamment de notre idéologie politique, la difficulté que nous avons à faire des commémorations au Québec, on l'a vu avec le 400e, on l'a vu avec d'autres, M. le Président, ça dénote un problème. Et ce n'est pas vrai que la ministre et son ministère disent: Ce n'est pas grave, ça ne nous regarde pas, ce n'est pas vrai.

Donc, les commémorations officielles, j'appelle ça des commémorations d'État dans... à moins que je me trompe, on le saura au fur et à mesure que nous étudierons, au Québec, ça n'existe pas depuis longtemps, les commémorations. Et, quand il y en a, malheureusement, bien, ça devient en débats politiques tout le temps. Donc, M. le Président, je trouve ça attristant, cette situation. Ce qui démontre la difficulté de bien assumer notre histoire. De quelque camp politique que nous soyons, M. le Président, je veux être clair là-dessus.

Il y a un dossier, il y a quelques années, 2006-2007, qui a suscité beaucoup, beaucoup de débats, c'est le changement au ministère de l'Éducation du nouveau cours d'histoire. Je pense qu'on se rappelle tous ce que ça a occasionné comme débats, et le ministre, qui est le leader actuellement, le leader du gouvernement, a dû revoir un peu rapidement, là, les fondements du cours d'histoire. Mais, encore là, M. le Président, comme on le voit, la difficulté... Je ne dis pas que l'histoire n'occasionne jamais de débat, au contraire, mais la difficulté que nous avons à bien asseoir l'histoire d'une façon ou de l'autre fait en sorte également... démontrera comment le patrimoine sera également traité, M. le Président.

Et je profite de l'occasion pour déposer en cette commission... Il y a eu une analyse de faite du nouveau cours d'histoire, on peut le critiquer, on peut en penser ce qu'on veut, mais, quand même, alors c'est le nouveau cours d'histoire au secondaire. Alors, j'aimerais le déposer, M. le Président, en cette commission.

Et j'aimerais déposer d'autre chose aussi, c'est une étude de la Fondation Lionel-Groulx. Il n'y a plus de cours d'histoire au cégep, donc...

Une voix: ...

M. Lemay: Oui, mais c'est tous gouvernements confondus, M. le Président. Donc, je dépose une autre étude: L'état désastreux de l'enseignement de l'histoire nationale dans le réseau collégial public du Québec. C'est une étude qui vient tout juste d'être faite, et j'aimerais les déposer en cette commission.

Donc, M. le Président, si on parle de patrimoine, donc on parle d'histoire; si on parle d'histoire, il faut regarder l'état de l'histoire au Québec pour nous donner des indices. Alors, je viens de déposer deux études, j'en dépose une troisième, M. le Président...

Une voix: ...

M. Lemay: Bien, voilà. Exactement. Alors, c'est Les commémorations historiques nationales au Québec -- Recommandations pour une politique d'envergure, qui a été déposée en janvier 2011. Alors, je dépose ici cette étude de l'Institut de recherche du Québec qui démontre, M. le Président, s'il le fallait, notre incapacité de bien commémorer au Québec. Ça fait...

Une voix: ...

M. Lemay: Cinq minutes? Ça fait aussi partie, M. le Président, du patrimoine, des interrogations que nous pouvons avoir. Et ce n'est pas vrai que le ministère n'a pas un rôle à jouer là-dedans. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai, M. le Président, je suis convaincu. Si ce n'est pas le ministère de la Culture et son équipe en patrimoine, je me demande bien c'est qui.

L'Assemblée nationale fait son travail en ce qui concerne l'Assemblée, on le sait, on est dans le 125e, mais, à part l'Assemblée nationale et quelques commémorations de temps en temps, au Québec, il n'y en a pas; une politique de commémoration, il n'y en a pas. Ce n'est pas récent, c'était comme ça il y a 10 ans, c'était comme ça il y a 15 ans. J'aurais souhaité, dans ce projet de loi, qu'il y aurait eu au moins quelques idées de partagées là-dessus, M. le Président. Alors, je vais accélérer parce que le temps passe vite.

Si ça peut nous consoler, M. le Président, la revue Historia, qui est une revue de France, il y a quelques mois, a déploré aussi le manque d'histoire à l'école, le manque d'histoire. Et là je parle de la France, là. Mais, si la France, l'Allemagne, les États-Unis peuvent avoir certains débats sur l'histoire, peuvent avoir... puis quelquefois peuvent oublier... C'est des pays... De un, c'est des pays. Deux, on n'a qu'à se promener dans ces pays-là pour s'apercevoir que l'histoire... Il reste qu'une nation comme la nôtre, qui est plutôt petite -- petite en termes de nombre, évidemment -- et qui est entourée évidemment de l'océan de 300 millions, je pense que, nous, si nous avons des difficultés avec notre propre histoire et notre patrimoine, je pense qu'à terme c'est plus dangereux, mais il reste que la revue Historia a demandé aux Français de se mobiliser pour -- je vous le donne en mille, M. le Président -- sauver l'histoire. En France!

Alors, c'est les mêmes phénomènes ici, exactement les mêmes, M. le Président, et ça aura des conséquences sur des lois du patrimoine et sur la façon dont ces lois-là pourront amener des bonnes choses à la population.

Je termine. Et là ce sera des critiques constructives que j'aurai pour le ministère, parce qu'à un moment donné il faut regarder le projet de loi, et ce projet de loi là nous amène à nous poser des questions. Donc, j'ai été sur le site Internet du ministère, M. le Président, et évidemment Internet, je pense que personne ne pourra débattre de l'importance, mais il reste qu'il y a le Répertoire du patrimoine culturel du Québec... J'ai imprimé ça il y a quelques semaines, là, si ça a changé dernièrement, j'irai voir, mais je suis obligé de vous dire que c'est un peu pauvre, un peu pauvre. Alors, je vais déposer les photos.

Donc, on peut taper les noms, mais, si on va sur d'autres sites biographiques, c'est beaucoup plus riche. Je m'attendrais, un site du patrimoine du ministère de la Culture, à avoir quelque chose d'un petit peu plus consistant. Ça, dans la loi, à ma connaissance, bon, peut-être qu'on parle d'informatisation du patrimoine, là, mais il me semble que, comme banque de données, ça pourrait être intéressant que le ministère, en s'associant à d'autres évidemment, pourrait offrir aux jeunes Québécois ou aux jeunes Québécoises un site de qualité où il y a beaucoup d'informations, ce qui n'est malheureusement pas le cas, M. le Président, à l'heure actuelle. Dans le projet de loi, en tout cas, il n'y a rien qui nous enligne.

Autre chose, il y a... Je comprends que Sainte-Anne-de-Sabrevois, à l'heure actuelle, ont beaucoup d'autres chats à fouetter avec l'inondation, je les salue d'ailleurs, mais c'est là qu'est la maison natale d'Honoré Mercier. Alors, le ministère, à ma connaissance, envoie 2 000 $ à la ville pour qu'ils entretiennent, mais j'ai été visiter, et c'est assez... c'est gênant. Mais, encore là, c'est comme ça depuis 10 ans, là. Donc, si je regarde le projet de loi, ça n'améliore pas ça, là. Donc, la maison natale d'Honoré Mercier, qui est entourée d'arbres magnifiques, il y a un grand parterre en arrière, ça pourrait être un endroit fabuleux. Le projet de loi ne vient pas... À moins que la maison natale... Elle appartient déjà à la ville. La ville, avec les ressources qu'elle a, elle fait ce qu'elle peut, M. le Président. Donc, je ne suis pas certain que, dans le projet de loi, ça va changer ça, malheureusement. Mon collègue le disait: C'est sûr qu'on n'est pas en train d'étudier le budget du ministère, mais il y a une corrélation aussi entre la loi et la volonté politique de l'appliquer un peu partout à travers le Québec, M. le Président.

Donc, j'ai tapé quelques noms, je reviens sur le répertoire: Louis Jolliet, quelques paragraphes, là. Bon, il a juste découvert le Mississippi, là. Mais c'est un peu triste, M. le Président. Et je reviens sur l'autre exemple...

Une voix: ...

**(15 h 50)**

M. Lemay: Une minute, puis je termine en disant ceci. L'autre exemple, c'est... Semble-t-il que c'est sa maison natale en bas de la côté -- j'ai déjà donné l'exemple -- et c'est indiqué, là, il y a une petite plaque, là, «Maison natale de Louis Jolliet» qui a... Il a fait les trois quarts du continent en canot, ce n'est quand même pas rien, là. Il a été à la baie d'Hudson par le lac Saint-Jean. Il a été au Labrador en canot. Il a découvert le Mississippi en canot. C'est un des plus grands explorateurs d'Amérique du Nord. Il est né ici, à Québec, et là on va à sa maison natale où il y a le téléphérique, il y a une petite plaquette. Bien, vous rentrez dans sa maison, c'est le téléphérique; il n'y a même pas une affiche, il n'y a même pas un livre, il n'y a rien. Puis il y a plus de statues à Chicago qu'il y en a ici.

Donc, vous voyez? Je termine en disant ceci, c'est que tous les problèmes réels qu'on apporte, est-ce que ce projet de loi vient les régler? Peut-être, et je le souhaite sincèrement, M. le Président. Mais, personnellement, je ne suis pas convaincu. Ce qui n'empêche pas, et je termine vraiment là-dessus, ce qui n'empêche pas de dire que c'est un projet de loi important, on va l'étudier sérieusement, on va poser des questions sérieuses et, très certainement que ça constituera une avancée. Mais, sur le fond des choses, sur les difficultés que nous avons en histoire et sur les difficultés que nous avons avec notre propre patrimoine, malheureusement, je ne suis pas convaincu à cet égard-là. Merci, M. le Président, de votre patience.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques. Quant aux documents... Les documents vont être disponibles sur le site du Greffier.

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Et c'est ça va être sur... Ils sont déjà disponibles, mais ils vont être sur le site du Greffier de l'Assemblée nationale. Alors, tous les députés pourront y avoir accès. Alors, je comprends qu'il y a trois documents. Il n'y avait pas d'autre document que vous vouliez déposer?

M. Lemay: Non, pas pour l'instant.

Le Président (M. Marsan): O.K., c'est beau. Alors, maintenant, je voudrais vous demander: Est-ce qu'il y a d'autres députés qui voudraient faire des remarques préliminaires? Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, la parole est à vous.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue à tout le monde, à Mme la ministre, à mes collègues, aussi à tous les gens qui entourent... autant les gens du ministère que notre conseiller politique qui nous accompagne ou qui nous soutient avec beaucoup d'expertise aussi.

Alors, M. le Président, le début des travaux qu'on a à faire sur le projet de loi n° 82 est important. On n'a pas toujours la chance de travailler sur des projets de loi aussi structurants et qui font, bon, il faut le dire, histoire en tant que telle. Ce projet de loi va s'inscrire dans les volontés gouvernementales de répondre à un besoin de renouveler une loi, mais aussi répondre à: Quelles sont les aspirations que l'on veut, l'on souhaite pour notre propre patrimoine, pour notre histoire? Et, on l'a vu durant les auditions, et, moi, je disais que le mot «patrimoine» a eu tellement de qualificatifs durant les auditions qu'on a vécues... Alors, c'était le patrimoine... Une journée, on nous parlait de patrimoine archéologique; une autre journée, c'était du patrimoine maritime; une autre journée, il était religieux; une autre journée, il était immatériel. Et il s'est qualifié comme ça au moins une dizaine de formes différentes, et ce fut des consultations très, très enrichissantes. Je peux vous le dire, il y a beaucoup de volets de cette consultation-là qui, en tout cas, en ce qui me concerne, étaient des volets du patrimoine que je n'avais même pas... Je n'avais aucune connaissance là-dessus. Donc, c'est toujours important, justement, de participer à ce genre de processus là.

Aujourd'hui, on débute l'article par article et, comme je disais à mes collègues, moi, c'est toujours la partie que je préfère parce qu'on vient concrétiser de vraies volontés, on vient mettre des mots sur des intentions. Et c'est une partie du travail du législateur qui est, à mon avis, une des plus intéressantes.

Par contre, un des faits importants, c'est un projet de loi volumineux, c'est un projet de loi qui doit nous donner, en tout cas, une lancée vers une vision. Malheureusement, la vision qui sous-tend le projet de loi, on ne l'a pas, puisqu'il n'y a pas de politique, il n'y a pas de politique annoncée par le gouvernement. Donc, on a un projet de loi, mais on n'a pas la vision qui sous-tend ce projet de loi là, malheureusement; parce qu'il y avait eu des travaux de fait auparavant.

Je nous rappellerai, en 2005-2006, M. le Président, le mandat d'initiative qu'il y avait eu ici en lien avec tout le patrimoine religieux. Une commission itinérante, je ne sais pas si vous aviez participé, M. le Président, mais une commission itinérante qui s'est promenée à travers le Québec, qui a été visiter des endroits magnifiques, et un rapport imposant. Et, malheureusement, ce rapport-là, qui est très riche en recommandations, on n'en voit pas la couleur dans le projet de loi. Et ça, c'est regrettable, parce qu'il y avait là des pistes de solution intéressantes, il y avait là des avenues qui auraient permis, justement, de répondre à ce que ce mandat d'initiative a identifié comme problématique mais aussi comme solution à mettre de l'avant. Et il y aurait eu lieu, par le biais du projet de loi que nous allons étudier dans les prochains jours, de répondre à ce mandat d'initiative là. Parce qu'il y avait là, à l'intérieur des recommandations, des pistes de solution qui établissaient une reconnaissance de notre patrimoine religieux.

Je ne dis pas que le projet de loi ne vient pas répondre à certains aspects du patrimoine religieux, mais il ne vient pas répondre au mandat d'initiative et aux recommandations de ce mandat-là. Alors, c'est comme l'impression qu'il y a eu un mandat, il y a eu des recommandations, on a tabletté un rapport, il doit y avoir pas mal de poussière depuis 2006. Et le travail important, parce qu'il y avait eu un travail de fait des deux côtés, là... Parce que, quand on fait des mandats d'initiative, là, la partisanerie est mise de côté, et on est là pour aller au fond des choses. Et, malheureusement, ce mandat-là, il est en quelque part, là, sur une tablette, et il prend la poussière, au même titre que notre patrimoine religieux d'ailleurs.

Et vous comprenez que, moi, la partie... Même si j'ai appris beaucoup de choses durant les consultations, la partie du patrimoine religieux est la partie qui m'intéresse le plus parce que je suis confrontée, dans mon propre comté, à une réalité du fait que le ministère n'a pas de plan. Et, bien que le projet de loi nous parle de plan de conservation, il n'y a pas de plan de réaffectation. Et il faut, il faut se donner une façon de faire au Québec qui nous permettra de faire valoir notre patrimoine religieux.

Vous, comme nous tous, quand on va en Europe, qu'est-ce qu'on visite dans un premier temps? Ce sont des églises. Qu'elles soient de n'importe quelle confession, on visite des églises. Un circuit patrimonial d'églises au Québec, ça n'existe pas malheureusement. Et on en a de superbes. On en a de superbes. L'église Saint-Nom-de-Jésus, d'Hochelaga-Maisonneuve, fait partie d'un circuit recommandé par Tourisme Montréal. D'ailleurs, dans le renouvellement de la brochure de Tourisme Montréal, l'église du Très-Saint-Nom-de-Jésus est encore annoncée. Elle est fermée depuis 2009. Alors, c'est la preuve que c'était un joyau puisqu'on était prêt à faire visiter à l'ensemble de la planète cette église-là, mais malheureusement elle a été fermée.

Elle a été fermée, et on ne discutera pas des règles... pourquoi elle a été fermée, ça appartient à l'archevêché. Cependant, et ça, là-dessus, je rejoins la ministre, je suis d'accord avec elle, l'archevêché a une responsabilité dans ce dossier-là. On se rappellera que le Québec a été construit par les Églises. On a développé, avec des Églises, des villages et des paroisses. L'archevêché a récolté beaucoup d'argent de ces gens-là. Les communautés ont construit les églises, se sont payé des ornements à l'intérieur des églises, et il y a, à l'intérieur de nos églises, un patrimoine architectural. Il y a des richesses. Il y a des oeuvres d'art. Il y a des artefacts. Il y a vraiment tout un ensemble qui représente notre histoire québécoise, qui représente l'histoire que l'on a construite à l'intérieur de nos églises. Et, malheureusement, puisqu'il n'y a aucune stratégie d'action, eh bien, ce patrimoine-là devient tout simplement absent de certains villages, de certaines villes, de certains quartiers parce qu'il n'y a aucune, aucune stratégie, aucun plan d'action pour, un, le protéger, deux, s'assurer à qui il appartient.

**(16 heures)**

Parce que la Loi des fabriques étant ce qu'elle est versus les pouvoirs de l'archevêché et... Une entente qui n'a pas encore été renouvelée par le ministère de la Culture avec, entre autres, l'archevêché de Montréal, une entente qui prévoyait que, lorsque l'archevêché voulait se délester d'une église, d'un des bâtiments, il l'offrait dans un premier temps au gouvernement, et le gouvernement avait une période de temps, avait un an pour décider si, comme gouvernement, il voulait en faire quelque chose. Mais ce programme-là a été modifié, M. le Président. Il avait été modifié dans les dernières années, parce qu'auparavant, dans sa première version, il y avait un deuxième volet et, le deuxième volet, c'est malheureusement celui-là qui a été abandonné par le gouvernement en place. Ce deuxième volet là était un budget qui était là pour faire naître des projets dans la communauté. Et ce budget-là permettait justement aux communautés locales, en étant informées que leur église ou l'espace religieux qui était sur leur territoire serait fermé, ça permettait aux communautés une période de réflexion, ça permettait de faire faire des études et ça permettait de mettre en place des projets.

Et, moi, je vais vous le dire, M. le Président, Hochelaga-Maisonneuve est le témoin privilégié de ça parce que nous avons sauvé deux bâtiments comme ça, deux églises que nous avons transformées et qui sont toujours là aujourd'hui, viables, et qui sont toujours là à la disponibilité en mettant... et en ouvrant leurs portes tous les jours à des citoyens de notre quartier.

Le Chic Resto Pop, M. le Président, le Chic Resto Pop, qui accueille tous les jours 1 000 personnes, qui délivre 3 000 repas par jour, est devenu une école de formation, est un lieu justement pour que les gens du quartier qui sont démunis puissent avoir accès à des repas à bon marché. Eh bien, ça se passe dans une église, une église qui a conservé son cachet d'église mais qui, à l'intérieur, a été transformée pour justement faire bénéficier l'ensemble de la communauté. Le sous-sol de l'église a été transformé, c'est maintenant un vaste chantier, c'est une grande cuisine d'apprentissage où, justement, des gens qui sont sur des programmes avec l'aide sociale puissent recevoir une formation d'appoint et ensuite se diriger vers des métiers de la cuisine. On a trouvé oeuvre utile à ce bâtiment.

Un deuxième bâtiment, l'église Saint-Barnabé, qui, elle, est devenue un centre communautaire, un centre communautaire qui répond aux itinérants. Mais ça, là, ça ne s'est pas fait comme ça, là. Ça s'est fait avec l'aide du gouvernement. Et il a fallu que le gouvernement puisse justement aider les organismes locaux à mettre sur pied ces programmes-là. Les organismes locaux n'ont pas les moyens de mettre ces projets-là de l'avant seuls. Il faut de l'accompagnement, il faut de l'aide. Eh bien...

Et je le vois dans le dossier de Saint-Nom-de-Jésus. Actuellement, la communauté, depuis la fermeture de l'église, s'est mobilisée. On a même fait faire une étude sur le bâtiment pour vérifier, dans un premier temps, et pour être très responsables: Est-ce que le bâtiment est solide? Parce qu'à quelque part, c'est la première chose qu'il faut faire, il faut bien s'assurer que ces vieilles bâtisses là, qui ont cent ans, bien s'assurer qu'elles sont solides. Alors, eh oui, elle est solide, on nous l'a confirmé, on a payé une étude qui nous a coûté plus de 10 000 $, à la communauté, et c'est la communauté qui s'est mobilisée pour payer l'étude.

Dans un deuxième temps, suite justement à la... La ministre nous avait dit: Déposez-moi un projet, on va vous accompagner. On a payé une firme, ArtExpert, une firme spécialiste justement en projets culturels, parce que l'église Saint-Nom-de-Jésus il y a un orgue magnifique, un orgue Casavant, un orgue de 96 jeux, 6 500 tuyaux. C'est un orgue impressionnant, avec un orgue de tribune et un orgue de choeur, c'est deux orgues dans la même église. C'est impressionnant. Et l'orgue, il est toujours conçu en fonction de l'endroit où il va aller, dont la voûte de l'église répond justement à la puissance de l'orgue. Eh bien, on a fait faire une deuxième étude, une étude de faisabilité d'un projet culturel, étude que nous avons déposée, étude qu'encore la communauté a payé, M. le Président. Il n'y a pas eu d'aide extérieure. C'est la communauté qui a payé cette étude-là. Eh bien, cette étude-là fait la démonstration de la viabilité du projet.

Nous avons déposé ce document auprès de la ministre en demandant que, là, il va nous falloir de l'aide parce que, là, l'archevêché dit: Là, là, depuis 2009, l'église est fermée, et, moi, je soutiens cette église-là, je paie le chauffage, l'entretien, etc., et ça me coûte 100 000 $ par année. Et, quand je parle de soutien aux communautés, M. le Président, c'est de ça qu'on parle. Oui, l'archevêché a des responsabilités, et je suis d'accord avec la ministre que l'archevêché ne peut pas juste dire: On s'en lave les mains, on ferme les bâtisses, et il ne se passe plus rien. Ça, je suis tout à fait d'accord et je soutiens ce discours-là. On ne peut pas se ramasser avec 2 971 églises au Québec demain matin qui appartiennent au gouvernement. Non, ça n'a pas de bon sens, on est d'accord. À partir de là, on est d'accord. Mais, dans les communautés où il y a des projets, des projets qui sont accompagnés par l'ensemble de la communauté, où il y a des gens d'affaires qui se prêtent aux conseils d'administration de ces organismes-là, eh bien, non, il ne faut pas les laisser tomber. Il faut les accompagner.

Est-ce que notre but, c'est de faire fermer les églises? Est-ce que c'est ça, le but? Est-ce que c'est de faire fermer une église, abandonner notre patrimoine? Je ne pense pas. Moi, je pense qu'il faut aller jusqu'au bout, accompagner les gens pour s'assurer, s'assurer que les projets puissent voir le jour. À l'église Saint-Nom-de-Jésus, il y a un projet extraordinaire. Et je peux vous dire qu'on est en train de regarder... Parce qu'il y a toutes sortes de rumeurs, toutes sortes de rumeurs qui viennent faire dire que c'est rendu que c'est une autre église qui veut nous voler notre orgue, M. le Président. Comprenez-vous ça? Là, on se chicane entre curés. Alors, là, ça n'a pas de bon sens.

Puis le pire, ils en ont acheté une... Ils en ont acheté un, orgue, dans l'autre église, ça a coûté 100 000 $, mais ça va coûter 800 000 $ le déménager. Celui de Saint-Nom-de-Jésus, on a évalué les coûts à 800 000 $ à 1 million pour le défaire, le mettre dans le camion et le réinstaller. 1 million. Nous, ce qu'on demande actuellement à la ministre, là, c'est un fonds pour assurer le chauffage de l'église pour la période, là, et ça, on lui demande à peu près 50 000 $. Là, il y a quelque chose qu'on ne comprend plus. Là, il va falloir que quelqu'un m'explique, parce qu'effectivement est-ce qu'on veut sauver l'église Saint-Nom-de-Jésus? Est-ce qu'on veut sauver le patrimoine qui est important, pour lequel des populations se sont mobilisées?

Il y a un manifeste qui a été déposé à la ministre durant nos consultations pour la sauvegarde du patrimoine religieux, un manifeste qui justement reprenait le cas de Saint-Nom-de-Jésus, et on le voit, le cas de Saint-Nom-de-Jésus, il est représentatif, et c'est pour ça que je vous l'explique en détail, M. le Président, parce qu'il est représentatif de ce qui se passe sur le terrain. Parce que les communautés locales sont laissées à elles-mêmes. Et, si le programme qu'il y avait avant et qui permettait d'accompagner les groupes locaux serait encore en vigueur, eh bien, ça ferait en sorte qu'on aurait justement un fonds qui nous permettrait d'articuler des projets et de voir venir aussi les choses. Parce que malheureusement les communautés sont informées au moment où l'archevêché décide. C'est eux qui décident quand ils ferment une église.

Alors, on apprend ça un an à l'avance, dans une annonce dans le journal, comme ça s'est passé chez nous. Un an à l'avance. On nous avait dit que c'était une église puis on s'est ramassé avec une annonce dans le journal qui disait «deux églises». Et pas deux petites, deux magnifiques. Alors, l'archevêché est maître d'oeuvre là-dedans, avise le ministère de la Culture, met une petite annonce dans le journal disant: Nous allons fermer votre église dans un an. Un an plus tard, ils ferment l'église. Ils attendent que le ministère leur réponde; le ministère ne répond pas, ils ferment l'église, puis on laisse ça là, comme ça, puis on attend.

Mais vous savez ce qui se passe en plus, M. le Président, quand on ferme une église? Bien, il y a un compte de taxes qui arrive, un compte de taxes municipal, parce que ce n'est plus un lieu de culte, et là la municipalité envoie le compte de taxes. Dans le cas de Saint-Nom-de-Jésus, c'est 10 000 $ par année. Le compte de taxes, il est arrivé à l'archevêché. Ils ne l'ont pas trouvé drôle. Ils ne connaissent pas ça, des comptes de taxes, eux autres. Alors là, ils en ont reçu un, et là celui qui va acquérir l'église se ramasse avec 30 000 $ de taxes à payer. Alors, là, là, c'est la surprise.

Alors, c'est la preuve qu'on n'a pas de stratégie d'action. C'est la preuve qu'on n'a pas de vision là-dedans. Il faut mettre en place une vision. Il faut mettre en place une façon de faire qui va nous permettre de protéger notre patrimoine. Et là je vous parle de l'église Saint-Nom-de-Jésus, je pourrais vous parler de plusieurs églises au Québec, parce que, dans chacun des villages du Québec, on va vivre cette situation-là. Et c'est tragique, je peux vous dire. Moi, j'ai des gens qui débarquent dans mon bureau qui sont, exemple, le petit-fils de celui qui était l'ébéniste de l'église ou le petit-fils du décorateur intérieur qui a peint les murales sur les fresques de l'église, et qui ne veulent pas que le patrimoine familial, dans ce cas-là, soit abandonné, parce que, pour la communauté, l'église, c'est vraiment le centre du village.

Et, moi, je lis encore dans les documents de la ville de Maisonneuve... Parce qu'on se rappellera que c'était une ville, Maisonneuve, à l'époque, et la cathédrale de la ville de Maisonneuve était l'église Saint-Nom-de-Jésus. Alors, défaire l'église Saint-Nom-de-Jésus, comme le proposait l'archevêché et le maire de Montréal, pour en faire du logement social, vous comprenez que, malgré qu'à Hochelaga-Maisonneuve il n'y a personne qui va dire qu'on ne veut pas de projet de logement social, bien au contraire, mais on ne veut pas laisser tomber un pan de notre histoire. C'est quelque chose qui ne se marie pas. On ne peut pas abandonner notre cathédrale de notre ville de Maisonneuve parce que quelqu'un veut vendre le terrain.

M. le Président, le projet de loi tel qu'il est là ne répond pas aux recommandations du mandat d'initiative qui a eu lieu en 2005-2006, et c'est regrettable, et je souhaite, je souhaite que la ministre nous apporte des modifications pour qu'on puisse voir comment on va se donner les moyens. Et, je suis d'accord, on ne sauvera pas les 2 971 églises, je suis d'accord. Il n'y a personne ici qui veut faire ça. Mais il faut se donner les moyens... des endroits où il y a des projets, où il y a une communauté qui soutient ces projets-là, il faut avoir les moyens de soutenir les projets. Et ça, M. le Président, pour moi, c'est important.

Et il faut avoir de la vision avec notre patrimoine religieux et avoir de la vision à long terme parce que le Fonds du patrimoine, lorsqu'il donne une subvention, il ne faut pas que ça engage seulement que pour cinq ans l'archevêché: il faut que ça engage pour plus longtemps.

Saint-Nom-de-Jésus a bénéficié d'une subvention de 600 000 $ en 1996. 600 000 $ étaient injectés dans l'orgue de Casavant et, en 2009, cette église-là a été fermée. Ça, ce n'est pas avoir de la vision. Il faut se donner un plan, il faut donner des obligations à l'archevêché, et ça, ce n'est pas dans le projet de loi, malheureusement. Et, moi, je pense qu'on est dû pour justement un plan d'action concret.

Et, quand on me parle de plan de conservation dans le projet de loi, moi, je voudrais qu'on voit... aller plus loin et donner aussi des obligations aux partenaires. Merci, M. le Président.

**(16 h 10)**

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce que d'autres députés voudraient faire des remarques préliminaires? M. le député de Lévis, la parole est à vous.

M. Gilles Lehouillier

M. Lehouillier: Oui. Moi, M. le Président, je voudrais parler un petit peu, moi aussi, de patrimoine religieux. Avant de parler du patrimoine religieux, M. le Président, je voudrais quand même souligner ici que, dans le cadre du patrimoine bâti, à l'Université de Montréal, on sait qu'il y a une chaire, une des chaires les plus importantes au Québec, la chaire de recherche du Canada en patrimoine bâti, de l'Université de Montréal, dont Mme Christina Cameron en est la titulaire. Et, moi, ça, c'est... On parle du 10 mai... du 11 mai. Alors, ce qu'elle disait du nouveau projet de loi, et là on parle quand même d'une sommité au Québec, en matière de patrimoine, mais ce qu'elle disait du nouveau projet de loi, M. le Président, elle disait: «Le nouveau projet de loi sur les biens culturels présenté par la ministre Christine St-Pierre, par exemple, qui intègre le patrimoine matériel et immatériel, s'il est adopté, [ce projet de loi là, dit-elle, il deviendrait] la loi la plus avancée au pays -- la loi la plus avancée au Canada -- et de loin, dit-elle.

«Mme Cameron note aussi l'effet issu du Da Vinci Code...» Bon, là, c'est un autre exemple qu'elle donne. Et, en plus, un peu plus loin, elle dit... Que pense-t-elle de la gestion du patrimoine ici? Elle parle du Québec. Alors, ce qu'elle dit finalement, c'est que «le Québec, comparativement au reste du Canada, est plus avancé dans ses réflexions, plus intéressé et plus engagé». Alors, je pense, M. le Président, qu'il faut faire attention quand on porte des jugements, notamment en ce qui touche le patrimoine religieux. Puis je fais juste rappeler, M. le Président, parce qu'à une certaine époque donnée j'ai été conseiller municipal pendant 20 ans, à la ville de Lévis. Et je me souviens qu'à ce moment-là, à l'époque du Parti québécois, il y avait carrément un moratoire au niveau du patrimoine religieux, alors, un moratoire qui faisait en sorte qu'il ne se faisait rien dans le patrimoine religieux, strictement rien, pas d'amélioration, pas de rénovation, rien de tout ça. Alors, c'est aussi simple que ça, il faut le dire.

Et, depuis 2005, on a quand même mis de l'avant le Fonds du patrimoine culturel, on a quand même mis de l'avant aussi les fonds du patrimoine religieux qui font en sorte qu'on est sorti du moratoire. Et, bon an, mal an, dans les églises reconnues, c'est 30 millions par année, M. le Président, qui sont consacrés à l'entretien du patrimoine religieux. Et toutes les églises au Québec, ce qui n'a pas été fait avant 2003, toutes les églises au Québec ont été répertoriées par catégories. Et les églises où la culture se pratique font l'objet de ce programme de 30 millions de dollars par année. Et, moi, ce qu'il me disait, c'est qu'après la sécheresse, après la sécheresse avant 2003, enfin, on a des fonds qui sont consacrés à la restauration du patrimoine religieux.

Mais il y a plus que ça, M. le Président, puis c'est drôle parce que j'entendais des choses tantôt au niveau des églises, et, c'est drôle, il n'y a personne de l'autre côté de la table, M. le Président, qui a parlé de l'entente, de la fameuse entente, un modèle d'entente reconnu non seulement au Canada, mais dans l'ensemble nord-américain, M. le Président, donc rendu public en février 2007, un programme d'entente avec l'archevêché, donc qui est proposé, qui est proposé à tous les diocèses et qui porte sur les biens appartenant aux fabriques et aux corporations épiscopales. Cette entente-là, ce modèle d'entente stipule que le gouvernement s'engage à favoriser activement la conclusion d'ententes entre l'évêque, les fabriques, les corporations épiscopales, les municipalités régionales et locales et d'autres partenaires aux plans local, régional ou national pour la mise en place de partenariat dans le financement de la restauration, de la rénovation du bâti religieux.

L'aide financière provient du Fonds du patrimoine culturel québécois ou encore du programme Aide à la restauration du patrimoine religieux. Et, dans ce dernier cas, l'aide est accordée en vertu de l'entente conclue entre le ministère et le Conseil du patrimoine religieux du Québec. Et là, M. le Président, il faut quand même dire qu'il y a toute... il y a des règles maintenant qui encadrent tout ça parce que, dans le cadre de l'entente sur l'utilisation des églises, la corporation épiscopale ou la fabrique devra, un an avant de fermer une église au culte, avec l'autorisation de l'évêque, faire connaître sa décision à la population du territoire correspondant à la paroisse concernée. La population devra et doit disposer à ce moment-là d'un délai raisonnable pour proposer un nouvel usage du bâtiment. C'est actuellement ce qui se produit exactement dans mon comté. C'est exactement ce qui se produit dans mon comté, M. le Président, où là, actuellement, la fabrique travaille sur l'excédent des bâtiments religieux qu'ils ont. Et ils soumettent ça à la population au moment où on se parle, et il y a un débat qui se fait à la population. Mais c'est drôle, mais c'est drôle qu'on n'ait pas parlé de ça. Alors donc...

Une voix: ...

Mme Poirier: ...c'est ce que j'ai dit.

M. Lehouillier: Non, mais ce que je veux juste...

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Lévis...

M. Lehouillier: Ce que je veux juste...

Le Président (M. Marsan): ...vous vous adressez à la présidence.

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): S'il vous plaît!

Une voix:

M. Lehouillier: Exactement. Alors, moi...

Le Président (M. Marsan): S'il vous plaît!

M. Lehouillier: Moi, ce que je veux dire, c'est que... Ce que je veux dire, M. le Président, puis ce que je veux dire en termes clairs parce que c'est quand même important de le rappeler, alors c'est un projet de loi... C'est un projet de loi qui est beaucoup plus large que ce qu'on avait, qui inclut des nouvelles notions comme le patrimoine immatériel, les paysages culturels patrimoniaux, les personnages, les lieux et événements historiques. C'est un projet de loi qui reconnaît aux municipalités des pouvoirs similaires à ceux du ministre ou de la ministre en ce qui a trait à la protection et à l'identification du patrimoine à l'échelle locale. C'est une loi qui a beaucoup plus de mordant en ce sens qu'elle permet à la ministre et aux municipalités d'intervenir plus facilement pour protéger un bien qui serait menacé. Et, M. le Président, moi, je pense qu'au niveau des municipalités... et ça, je pense qu'on est maintenant dans un contexte où, si on veut protéger le patrimoine religieux, il faut que tout le monde y concoure.

Alors, moi, je suis un de ceux qui croient, et c'est l'objet du projet de loi, qu'il faut faire appel aux communautés de base pour aider à protéger ce patrimoine-là et qu'il faut travailler avec les municipalités. On n'a pas le choix. Seul, le ministère ne pourra jamais y arriver. Mais on ne peut pas y aller non plus de façon coercitive, en mettant de côté les lois sur l'aménagement et l'urbanisme qui nous gouvernent. Et je pense qu'il faut travailler dans un climat de confiance et de partenariat.

Alors, moi, je vous donne juste un exemple, en archéologie, dans mon comté. Alors, maintenant le secteur privé, les promoteurs qui développent des projets, par exemple à Saint-Romuald ou dans ces coins-là, le long du fleuve, participent. C'est nouveau, ça, c'est du jamais-vu à Lévis, et ça fait école un peu partout au Québec maintenant. Les promoteurs privés doivent participer aux fouilles archéologiques, la municipalité l'exige. Et ça, ça a développé un aspect intéressant qui nous permet d'aller chercher de nouveaux fonds et de faire des études archéologiques.

Donc, le projet de loi n'est pas là pour établir des plans d'action précis. Alors, c'est comme si on voudrait qu'on intègre dans le projet de loi des plans d'action. Le projet de loi est là pour avoir une durée dans le temps et faire en sorte qu'à un moment donné, au niveau des municipalités, ce ne sont pas des exigences qu'on a, qu'on donne aux municipalités, ce sont des nouveaux pouvoirs, et, ces nouveaux pouvoirs là, les municipalités les ont réclamés.

Prenons par exemple les fouilles archéologiques, prenons par exemple des bâtiments patrimoniaux en démolition, etc. Maintenant, les municipalités ont les pouvoirs d'intervenir, ont les pouvoirs d'arrêter, de stopper des travaux, et ça, c'est un aspect qui est drôlement intéressant. De même, M. le Président, toutes les nouvelles notions reliées aux événements, aux lieux, aux personnages historiques, tout le patrimoine immatériel, tout le paysage culturel patrimonial.

Mais, encore là, dans le paysage culturel patrimonial, qu'est-ce que le projet de loi fait? Le projet de loi dit: Ça va être d'abord les citoyens dans leurs milieux qui vont avoir la responsabilité première de faire jaillir ces projets de paysage culturel parce que, dans un paysage culturel, M. le Président, il y a des gens qui habitent sur des paysages qu'on reconnaît culturels, il y a de la vie, il y a du monde qui agissent à tous les jours, et ça, ça doit se faire dans le respect des municipalités.

Alors, on ne pourra jamais, demain matin, imposer d'en haut la reconnaissance de paysages si les milieux concernés n'acceptent pas ces paysages-là. Alors, nous, ce qu'on propose, c'est une opération qui part du bas vers le haut mais avec un accompagnement. Et je pense que le projet de loi mérite d'être regardé très, très, très sérieusement de ce point de vue là.

Alors donc, c'est une loi également qui permet une plus grande transparence. Alors, prenons par exemple au niveau des plans de conservation. Ça va être public, M. le Président. Même chose pour les paysages, ça va être public, ça va se faire avec la population.

**(16 h 20)**

Maintenant, je pense que la ministre l'a signalé en introduction, est-ce que maintenant on va exiger que toutes les municipalités d'une MRC sont obligées d'être d'accord pour qu'il y ait un paysage reconnu ou est-ce que ça va être comme c'est dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et dans les lois? Est-ce que ça va être à la majorité des élus de la MRC? Ça, je pense qu'il y a des portes ouvertes là-dessus. Mais le principe de base, c'est que jamais on ne pourra faire avaler à des collectivités la reconnaissance de paysages si eux-mêmes n'y concourent pas, et elles-mêmes n'y concourent pas. Et je pense que c'est l'essence même du projet de loi.

Alors donc, moi aussi, ce que je trouve fort intéressant dans ce projet de loi, c'est le fameux régime d'ordonnance qui vise à protéger temporairement un bien susceptible de présenter une valeur patrimoniale qui paraît menacée. Donc, ça, pour moi, c'est quelque chose d'assez exceptionnel. Le projet de loi qui prévoit la désignation de personnages décédés, d'événements ou de lieux historiques d'intérêt national qui sont inscrits au registre. L'objectif, c'est d'entretenir leur place dans la mémoire collective et de favoriser une plus grande appréciation dans la connaissance. Le patrimoine immatériel, qui est au niveau des savoir-faire, des connaissances, des expressions, des pratiques et des représentations fondées sur la tradition, m'apparaît une avancée exceptionnelle, et de nombreuses personnes effectivement le reconnaissent.

Donc, je pense que, quand on regarde aussi au niveau des paysages culturels patrimoniaux, des mesures de contrôle qui sont adoptées et appliquées par les instances locales, qui demeurent -- il ne faut pas l'oublier -- responsables de leurs territoires... Mais, en même temps, je pense que la loi vient d'ouvrir, vient d'ouvrir des perspectives extraordinaires pour la reconnaissance des paysages. Mais c'est sûr que, demain matin, on sait que... On voit, des fois, qu'il y a des gens qui disent: Il faudrait reconnaître toute la vallée du Saint-Laurent comme paysage culturel. Ça ne fait pas sérieux non plus. Alors, il faut essayer de faire confiance aux municipalités à la base.

Bref, moi aussi, M. le Président, j'entreprends cette étude article par article de façon positive, mais, moi, c'est sûr que ma préoccupation, ça va être de m'assurer que cette démarche-là n'aille pas d'en haut vers le bas, mais que cette démarche-là soit partagée en même temps par les élus municipaux, les citoyens sur le territoire, et c'est la raison pour laquelle je pense que c'est un projet de loi qui est pensé en fonction de ça. On ne veut pas imposer des choses aux gens, mais on veut les aider, les accompagner et faire en sorte qu'on puisse protéger notre patrimoine.

Cela étant dit, M. le Président, je pense que... et, moi, j'en suis très, très fier: chaque année, j'ai l'occasion d'annoncer dans mon comté des réfections d'église. J'ai l'intention... j'annonce, dans mon comté, des projets, et ça, je trouve ça drôlement intéressant pour la suite des choses, M. le Président. Et je suis convaincu, je suis convaincu qu'on peut, si on s'en donne la peine, regarder ce projet de loi là comme étant une avancée exceptionnelle dans nos milieux de vie.

Alors, voilà, M. le Président, et je voudrais, en terminant, juste si je peux retrouver les quelques exemples que je voulais donner... Parce qu'il reste quand même qu'il y a des bons exemples qui avaient été signalés de ce côté-là, ici, au niveau du patrimoine religieux. Alors, juste au niveau des projets de conservation des biens mobiliers de... religieux, bien, écoutez, il faut croire que ces ententes-là que le gouvernement négocient portent fruit parce qu'il y a 150 recyclages qui ont été réalisés et il y a 29 projets de recyclage qui sont en cours. Alors, M. le Président, on pourrait parler ici, exemple, de: l'église St. James, au Saguenay--Lac-Saint-Jean, l'église menacée de démolition et déménagée dans le parc Ball en 1997; après une campagne de travaux de restauration, l'édifice accueille le Centre d'histoire Sir William Poiré; alors, l'église Saint-Esprit, Québec, Capitale-Nationale; alors on a l'église St. Matthews, Québec, Capitale-Nationale; l'église de Saint-André d'Asbestos, en Estrie; l'ancienne chapelle du collège Laurent; dans mon comté, il y a eu l'Anglicane, à Lévis, etc.

Alors, moi, je pense qu'il se fait un travail exceptionnel, et, il faut le dire, c'est depuis que le gouvernement actuel est là qu'il se fait le plus d'investissement dans la protection du patrimoine religieux, sans compter le 1,2 milliard des infrastructures pour les équipements culturels. Alors, ça, c'est du jamais-vu dans toute l'histoire. Le 1,2 milliard pour les équipements culturels, M. le Président, c'est jamais... C'est du jamais-vu dans l'histoire culturelle du Québec qu'on ait donné autant d'argent aux immobilisations culturelles. Alors, il faut faire attention puis il faut relativiser les choses. Je pense que l'accompagnement du gouvernement est là.

Nous, ce qu'on propose, c'est un modèle dans ce projet de loi qui met à contribution les collectivités locales et régionales et qui fait en sorte que ces collectivités locales et régionales là, avec la créativité qu'on leur connaît, M. le Président, peuvent trouver aussi des solutions pour travailler en accompagnement avec le gouvernement, parce que, oui, nos ressources financières ne sont pas illimitées. Mais je tiens à dire une chose par contre, c'est que, depuis 2003, il s'est fait un redressement énorme dans le financement du patrimoine religieux, il s'est fait un redressement énorme dans le financement de nos équipements culturels parce que, moi, je peux vous dire une chose, à l'époque où j'étais conseiller municipal, c'était la disette au niveau de la rénovation du patrimoine religieux. Ce n'était pas compliqué, on était mieux de ne pas présenter de projet, il n'y avait pas une cenne. C'était ça, la réalité. Merci.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y aurait d'autres députés qui voudraient faire des remarques préliminaires.

Alors, ceci termine l'étape des remarques préliminaires. Je voudrais, à ce stade-ci, vous présenter les gens du secrétariat qui nous accompagnent: Mme Catherine Grétas, Mme Émilie Bevan et Mme Madeleine Lévesque. Alors, ça nous fait plaisir de vous avoir avec nous, je vous assure.

Je voudrais maintenant vous... Vous voulez poser une question, M. le député de Drummond?

M. Blanchet: Je veux m'assurer que nous procédions paragraphe par paragraphe et alinéa par alinéa.

Le Président (M. Marsan): Oui. Avant de procéder article par article, je voudrais simplement vous souligner qu'il y a une étape aussi, c'est les motions préliminaires. Mais je comprends qu'il n'y a pas de motion préliminaire.

Étude détaillée

Alors, ça nous amène immédiatement à vouloir étudier ce projet de loi n° 82, qui comporte... qui est composé de 265 articles. Alors, la suggestion que vous nous faites, M. le député de Drummond, c'est de prendre article par article et, évidemment, paragraphe par paragraphe par la suite.

M. Blanchet: Oui.

Le Président (M. Marsan): Alors, nous allons procéder de cette façon. Alors, nous en sommes à la prise en considération de l'article 1 du projet de loi. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Juste pour question de précision, au cours de nos travaux, à certains moments, si on veut, de consentement, bien sûr, passer à d'autres articles en attendant qu'on trouve des solutions, je pense que c'est possible, là.

Le Président (M. Marsan): Oui. C'est le propre de chaque commission et sur consentement.

Mme St-Pierre: Je l'avais fait dans un autre projet de loi. Oui. Je voulais être sûre que...

Le Président (M. Marsan): Absolument.

Mme St-Pierre: Alors, quand j'aurai aussi des amendements, j'en aurai 32 à proposer... Donc, au moment de l'article... Une fois arrivé à cet article-là, j'annonce l'amendement avant de lire l'article. C'est ça, M. le Président? Aidez-moi.

Le Président (M. Marsan): Une question...

Mme Poirier: M. le Président, peut-être pour faciliter nos travaux, puis, nous, pour voir venir avant, est-ce que la ministre accepterait de déposer ses amendements immédiatement pour qu'on puisse les voir venir, justement, dans le cadre de nos travaux?

Le Président (M. Marsan): Alors, vous pouvez...

Mme St-Pierre: Ça se fait d'habitude, ça?

Le Président (M. Marsan): Oui, soit, comme dans le premier cas que vous avez cité, à chacun des articles, ou encore ça peut être déposé ensemble, là, à un moment donné que vous jugez opportun.

Mme St-Pierre: Est-ce que je peux leur demander la même chose s'ils ont, eux aussi, des amendements pour qu'on fasse le...

Mme Poirier: Vous pouvez nous le demander.

Le Président (M. Marsan): Vous pouvez le demander.

Mme Poirier: Nous, on n'a pas préparé d'amendement pour le moment.

Mme St-Pierre: Vous n'avez aucun amendement à proposer?

Mme Poirier: Pour le moment, il n'y en a pas de rédigé...

Mme St-Pierre: Ah non?

Mme Poirier: ...parce qu'on attendait les vôtres et, à ce moment-là, on va pouvoir répondre à ces amendements-là.

Mme St-Pierre: Ah bon! O.K.

Le Président (M. Marsan): Oui, M. le député de Drummond.

M. Blanchet: La perception que j'en ai, mais on va voir comment ça va se dérouler, c'est qu'on va discuter. On l'a déjà fait d'ailleurs, je me souviens d'un projet de loi qu'on avait travaillé ensemble, puis on avait discuté, on en était arrivés à quelque chose qui ne demandait pas qu'on ait déposé à l'avance des amendements qui seraient concurrents avec d'autres amendements que le gouvernement pourrait avoir déposés. Mais il y a des idées en abondance.

Mme St-Pierre: O.K. À ce moment-là, M. le Président, on déposera nos amendements au fur et à mesure des travaux. Très bien? Merci.

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est votre décision. Alors, nous procédons de nouveau à la prise en considération de l'article 1. Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Merci, M. le Président. Alors, je procède à la lecture de l'article 1.

Donc: «La présente loi a pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la mise en valeur et la transmission du patrimoine culturel, dans l'intérêt public et dans une perspective de développement durable.

«Elle a également pour objet de favoriser la désignation de personnages, d'événements et de lieux...»

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): On va juste finir la lecture.

Mme St-Pierre: Parce que c'est l'article...

M. Blanchet: Si on y va paragraphe par paragraphe.

Mme St-Pierre: Non. On a dit article par article.

Le Président (M. Marsan): On va lire l'article...

M. Blanchet: On lit l'article au complet, puis, après ça, on revient. Excusez-moi, Mme la ministre.

Le Président (M. Marsan): Oui. C'est ça. Alors, terminez la lecture de l'article 1.

**(16 h 30)**

Mme St-Pierre: O.K. Alors: «Elle a également pour objet de favoriser la désignation de personnages, d'événements et de lieux historiques.

«Le patrimoine culturel est constitué de personnages, de lieux et d'événements historiques, de documents, d'immeubles, d'objets et de sites patrimoniaux, de paysages culturels patrimoniaux et de patrimoine immatériel.»

Donc, dans cet article, M. le Président, bien sûr, vous retrouvez tout l'esprit du projet de loi. Donc, sont intégrées, bien sûr, dans le patrimoine culturel les notions de patrimoine... paysage culturel patrimonial, pardon, et également de patrimoine immatériel. Donc, dès le départ, on l'inscrit dans l'article 1.

Si on veut parler alinéa par alinéa, le premier alinéa détermine que c'est dans l'intérêt public et dans une perspective de développement durable -- donc, développement durable toujours dans la logique du développement durable que nous sommes tenus, là, d'indiquer dans nos projets de loi -- que le projet de loi vise à favoriser la connaissance, la protection, la mise en valeur et la transmission du patrimoine culturel. La référence à l'intérêt public concorde avec le caractère d'ordre public de la Loi des biens culturels qui a été amplement reconnue par les tribunaux. Quant à la mention «perspective de développement durable», elle s'inscrit dans le cadre des dispositions législatives récentes en cette matière, comme je l'ai indiqué, dans la Loi sur le développement durable.

Donc, si on veut aller au deuxième alinéa, on énonce un autre objet de la loi qui est de favoriser la désignation de personnages. Ça, lorsque le député de... Hochelaga-Maisonneuve? Non?

Des voix: Sainte-Marie--Saint-Jacques.

Mme St-Pierre: ...Sainte-Marie--Saint-Jacques parlait de personnages, bien, on vient lui donner dans le projet de loi... On vient vraiment répondre à certaines de ses préoccupations: événements, lieux historiques.

Le troisième alinéa définit ce qu'on entend par «patrimoine culturel» aux fins du projet de loi et reflète l'évolution de cette notion.

Aussi, sur l'aspect identitaire, moi, je pense que le projet de loi a tout à fait un caractère identitaire. Le mot n'est pas là, mais, lorsqu'on parle de patrimoine culturel, on parle, bien sûr, de l'aspect identitaire ,à mon avis. Alors, je pense que l'article 1 vient nous conforter, là, dans cette portée... Tout le projet de loi, je pense, en entier a vraiment une portée identitaire. On l'a souligné avec le commentaire de Mme Cameron, c'est un projet de loi qui va beaucoup plus loin que tout ce qu'on peut retrouver au Québec. Et je pense que nous avons là une pièce législative qui montre le caractère spécifique du Québec et comment le Québec veut définir son identité.

Maintenant, à cette étape-ci, je vous demanderais de me guider. Est-ce que là on parle... Comment ça marche?

Le Président (M. Marsan): Oui, je pense qu'à la demande du député de Drummond... Il voudrait maintenant prendre le premier paragraphe de l'article 1. Mais cependant, lorsque nous ferons le vote, nous allons voter l'article dans son ensemble à la fin. D'accord? Alors, M. le député de Drummond, la parole est à vous.

M. Blanchet: Merci, M. le Président. Moi, je vais m'attarder au premier paragraphe, parce que je les ai étudiés par paragraphes. Le premier paragraphe de l'article 1 est effectivement névralgique. Ça, je pense qu'on s'entendra tous là-dessus. Et, lors des discussions, lors des consultations, il y avait une espèce de séquence dont il me semblait souhaitable qu'elle apparaisse dans les fondements mêmes de la loi, et je m'explique.

Selon moi, le premier palier, le premier niveau d'intervention, c'est l'identification de ce qui est patrimonial. Mais on ne peut pas s'astreindre à l'identifier, parce que, comme on l'a établi, c'est un ensemble infini. Il n'y a pas de limite à ce qui peut être considéré comme étant patrimonial. Donc, ce n'est pas que l'identification, c'est bien circonscrire un inventaire. Et je pense que, d'entrée de jeu, il faut que la loi établisse, parmi ces objets, qu'elle doit circonscrire, procéder à l'identification de ce qui sera retenu comme étant patrimonial, sinon on arrive avec un vague qui pourrait être très complexe dans la gestion de cette loi-là.

La deuxième étape, pour ma part, je créais une distinction entre la préservation et la protection. Je donnais -- mais le dictionnaire n'est pas totalement d'accord avec moi là-dessus -- deux sens; il y avait deux aspects à cette fonction, à cet objet.

Il y a l'aspect de préservation -- on pourrait dire pérennisation, à la limite -- purement technique d'un objet. Un objet ancien est sujet à être altéré par le temps, par tout ce qu'il subit. Et donc il y a une partie de pure protection, préservation, pérennisation physique de l'objet qui est un enjeu.

Il y a aussi, évidemment, sa protection face à d'autres interventions humaines, et évidemment l'actualité nous a suggéré la notion de vol, dont des objets, des éléments, des documents patrimoniaux. Et, de toute façon, c'est courant, des objets qui sont trouvés, qui ont un caractère, une valeur patrimoniale, mais qui ne sont pas remis aux autorités pour un traitement adéquats mais gardés sur la bavette de la cheminée dans la maison, exposés aux changements de température, à la fumée du poêle et à tout ce qu'on peut imaginer. C'est quelque chose qui arrive.

Et donc il y a la protection et la préservation qui me semblent être deux notions. Je ne tranche pas sur comment le traiter, mais je pense que c'est assez fondamental, surtout dans la perspective de ceux qui vont vivre l'exécution de la mise en application de cette loi-là.

Le troisième aspect. Il y a des gens parmi ceux qui sont venus nous consulter... Il y a des gens qui ont soulevé la relative faiblesse de l'intention quant à la mise en valeur. La mise en valeur est mentionnée, c'est déjà bien. La transmission est mentionnée, c'est bien. J'avais une notion de diffusion la plus large possible. J'avais une notion à chercher de démocratisation de cette connaissance-là, à la limite, qu'il me semblait nécessaire d'élaborer. Évidemment, il ne faut pas arriver avec un premier paragraphe de 14 lignes.

Un autre élément, mais je le soumets simplement à votre attention: il y a plusieurs formes de patrimoine, et ça, on y revient. J'aurais cru opportun qu'on parle des différentes manifestations du patrimoine ou des différentes manifestations de la connaissance du patrimoine parce que c'est seulement à la fin de ce paragraphe, selon moi, que la notion de connaissance doit apparaître. Elle n'est pas l'étape initiale de la démarche, mais elle est bien l'objet, à quelque part, dans une certaine mesure, de la démarche.

La notion d'intérêt public, elle est très générale.

La notion de développement durable, j'aurais une question à la ministre sur ça. On le dit, on le mentionne. J'aimerais mieux comprendre, de façon concrète, quelle est la portée, qu'est-ce que ça implique, quel est le sens réel dans l'application de la loi du fait qu'on ait mis là, comme on tend à le mettre un peu partout maintenant, la notion de développement durable. Il faut que ça ait un sens très concret, très tangible. Il faut que ça favorise des comportements et que ça inhibe d'autres comportements. J'aimerais avoir un développement là-dessus.

Et, si on est d'accord pour dire qu'effectivement le patrimoine est un facteur d'appartenance à une culture commune, que c'est un facteur identitaire, puisque c'est fondamental, j'aurais souhaité que ça apparaisse d'emblée dans le tout début du libellé de la loi.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Bien, le fait d'inscrire le terme «développement durable», c'est que ça vient engager la responsabilité de l'ensemble, de l'ensemble du gouvernement. À la suite de la Loi sur le développement durable, à ce moment-là, il y a eu comme une obligation des ministères de s'inscrire dans la Loi sur le développement durable. Donc, c'est pour cette raison que, dorénavant, on inscrit le terme «développement durable».

Le Président (M. Marsan): M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Je suppose que ça viendra avec des... Écoutez, justement, je souhaite que ça ne soit pas qu'un mot. Donc, j'aimerais avoir des exemples de ce que ça favorise ou de ce que ça empêche si on le met, on l'indique, d'entrée de jeu, dans le premier paragraphe de la loi. Ça doit conditionner les comportements de ceux qui vont mettre en oeuvre la loi.

Mme St-Pierre: Oui, tout à fait.

M. Blanchet: Et j'aimerais avoir quelque chose de concret. J'aimerais que... Moi, je serais chez moi, je regarderais ça, je dirais: Bon, O.K., mais qu'est-ce que ça veut dire? Qu'est-ce que ça va changer, là, dans le concret? Qu'est-ce que ça va changer pour les gens qui vont vivre et appliquer cette loi-là au quotidien ou la subir?

**(16 h 40)**

Mme St-Pierre: Bien, quand on inscrit des termes dans une loi, d'abord, le législateur ne parle pas pour rien dire, bien sûr, et ce qui fait en sorte, c'est que nous nous inscrivons dans la Loi sur le développement durable, et lorsque nous prenons des actions, lorsque nous prenons des décisions, on doit être dans le développement durable, c'est-à-dire qu'on ne jette pas les choses, on doit les faire durer. Lorsqu'on prend une décision, bien, il faut qu'on l'ait en tête, la notion de développement durable.

Le recyclage, c'est du développement durable. Transformer un édifice, donner une autre vocation à un édifice, c'est du développement durable. C'est ça que ça veut dire, le développement durable. Enfin, c'est comme ça, moi, que je le comprends, là. Je ne sais pas si, vous, vous avez d'autres définitions. Mais c'est de toujours faire en sorte que les choses durent: développement durable. Alors, les exemples de recyclage de bâtiments sont... Le plus bel exemple... Les shops Angus, à Montréal, c'est du développement durable. Et. si vous donnez une autre vocation à un édifice, vous ne rasez pas l'édifice, vous lui donnez une autre vocation, vous vous inscrivez dans le développement durable. Et s'inscrire dans le développement durable, aussi, c'est des économies d'énergie, c'est toute la notion que l'on retrouve dans la Loi sur le développement durable. Alors, chaque ministère est tenu par la Loi sur le développement durable d'adopter du développement durable dans l'exercice de ses responsabilités.

M. Blanchet: C'est une balise générale. Est-ce que la Loi sur le développement durable contient des éléments qui seraient plus spécifiquement applicables, à prendre en considération dans le contexte de cette loi-ci?

Mme St-Pierre: ...le patrimoine culturel, parce que la protection, le développement durable... Dans la Loi sur le développement durable, on retrouve, à moins que je ne me trompe, la notion de patrimoine culturel, protection du patrimoine. Ça dit ici, dans mes notes, que l'article 1 et 2 -- mais on n'est pas rendu à l'article 2, on est à l'article 1, là -- sont cohérents avec le principe de protection du patrimoine culturel nommé au paragraphe k de la Loi sur le développement durable et de l'article 6, paragraphe k de l'article 6. Au paragraphe k de l'article 6 de la Loi sur le développement durable, ça se lit ainsi: «"Protection du patrimoine culturel" -- c'est entre guillemets: le patrimoine culturel, constitué de biens, de lieux, de paysages, de traditions et de savoirs, reflète l'identité d'une société. Il transmet les valeurs de celle-ci de génération en génération et sa conservation favorise le caractère durable du développement.»

Alors, la notion de patrimoine se retrouve dans la Loi sur le développement durable à l'article 6, paragraphe k. Donc, nous, on est... En fait, je pense qu'on était obligés de l'écrire dans notre loi.

M. Blanchet: Bon. Là, j'ai...

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Oui. Juste un instant, s'il vous plaît. Lorsqu'un invité intervient, pour les fins de notre transcription, si c'est possible de vous identifier.

Mme Gagnon (Hélène): Hélène Gagnon, avocate. Je m'excuse.

Le Président (M. Marsan): Non, c'est correct. Voulez-vous juste rappeler la réponse que vous avez faite? C'était court.

Mme Gagnon (Hélène): Oui, bien, j'ai dit: Ça s'inscrit dans la même finalité, là, que la Loi sur le développement durable.

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est ça.

Mme St-Pierre: Moi, je pense que, M. le Président, si on n'avait pas retrouvé...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme St-Pierre: ...ce terme-là dans l'article 1, je pense que ça aurait été une erreur de notre part. C'était un devoir de l'écrire.

M. Blanchet: Vous m'en voyez ravi parce que je suis un fervent de la notion générale de développement durable. Et d'ailleurs j'ai trouvé intéressant qu'à plusieurs reprises les gens qui sont venus nous rencontrer demandaient que le patrimoine soit traité comme le développement durable, sans savoir ou sans reconnaître d'emblée qu'il en fait partie, parce que le développement durable est beaucoup associé à l'environnement, alors que c'est effectivement plus large et que la culture en fait nommément partie, de même que le social et une forme de développement économique.

J'ai soulevé en vrac un certain nombre de points qui pourraient faire une salade trop touffue pour rester comestible.

Je ne sais pas exactement comment procéder pour voir si on est capable de travailler à une espèce de séquence et de priorisation des notions. D'abord, une question: Peut-on envisager -- j'aimerais qu'on envisage -- qu'effectivement la notion d'identité soit intégrée à ce paragraphe? Lorsqu'on dit «dans une perspective», bien, la perspective... pour inclure dans une perspective identitaire, dans une perspective... évidemment, la perspective de l'intérêt public, du développement durable, bref, ces notions-là, on pourrait l'ajouter et déjà on viendrait conférer un sens et un bout d'âme fort intéressant à ce début de la démarche.

Mme St-Pierre: Bien, écoutez, il faudrait peut-être voir avec notre spécialiste en droit, mais, étant donné qu'on retrouve la notion «reflète l'identité d'une société» dans la Loi sur le développement durable, quand elle définit la protection du patrimoine culturel, il me semble que... Je ne sais pas s'il y a moyen de l'inscrire.

Mme Gagnon (Hélène): Mme Gagnon, avocate. Donc, c'est quand même déjà inscrit.

Le Président (M. Marsan): Alors, juste rappeler votre nom.

Mme Gagnon (Hélène): Excusez. Je ne l'ai pas dit assez fort: Hélène Gagnon.

Le Président (M. Marsan): Mme Gagnon, c'est ça.

Mme Gagnon (Hélène): Alors, comme c'est déjà inscrit dans la Loi sur le développement durable comme étant un de ses principes fondamentaux, ce n'est pas requis de le répéter, là, dans la loi.

M. Blanchet: La Loi sur le développement durable me semble être une notion... un ensemble de principes importants relativement larges. Et, lorsqu'on ne mentionne pas quelque chose, ça n'a pas la même portée que lorsqu'on le mentionne, c'est la raison pour laquelle on écrit «développement durable», c'est ce qu'on vient de nous expliquer. Pour cette même raison et a fortiori parce qu'il s'agit d'une loi qui porte sur le patrimoine et sur la culture, je pense qu'on a tout à gagner à d'emblée mettre de l'avant et souligner l'importance de la perspective identitaire. Il ne s'agit essentiellement à cet égard-là que d'ajouter le mot, et je pense que le rayonnement qui vient avec va envoyer un message qui sera apprécié par les gens qui s'intéressent au patrimoine.

Mme Gagnon (Hélène): Tout ce que je peux vous dire, c'est que...

Le Président (M. Marsan): ...

Mme Gagnon (Hélène): Tout ce que je peux dire, c'est que c'est déjà inscrit dans l'article 6, paragraphe k. L'identité est mentionnée là. En faisant référence au développement durable, ça s'inscrit aussi dans... Je veux dire, c'est déjà inclus. Pour le reste, c'est à vous de... C'est aux parlementaires de décider.

M. Blanchet: Moi, pour ma part, il me semble insuffisant de considérer qu'une notion est incluse parce qu'elle fait partie du libellé d'une autre loi. Je pense qu'il faut que ce soit intégré à... Puisque c'est à ce point-là fondamental et qu'on parle bien du tout début de l'objet même de la loi, j'insiste sur la nécessité que ce soit inclus.

Mme St-Pierre: Si je peux proposer, M. le Président, je pourrais demander à Me Gagnon de voir à si on peut faire une concordance avec le paragraphe k de l'article 6. Est-ce qu'il y a moyen d'intégrer? Je sais que vous allez devoir réfléchir, là.

Le Président (M. Marsan): Alors, Me Gagnon.

Mme St-Pierre: Parce que, si on le retrouve au... Si on le retrouve dans la définition de «protection du patrimoine culturel»... «Le patrimoine culturel, constitué de biens, de lieux, de paysages, de tradition et de savoirs, reflète l'identité d'une société. Il transmet les valeurs de celle-ci de génération en génération et sa conservation favorise le caractère durable du développement.» Alors, moi, je vais demander à Me Gagnon d'analyser la chose. Je ne sais pas si, à cette étape-ci, on...

Mme Poirier: ...

Le Président (M. Marsan): Allez-y.

Mme Poirier: ...la ministre voit ça, là, le paragraphe k, là.

Mme St-Pierre: C'est dans mes commentaires à moi, c'est que... C'est mes notes supplémentaires.

Mme Poirier: O.K. C'est parce qu'on cherchait le «k», nous.

Mme St-Pierre: O.K. Ce que M. le député de Drummond m'a demandé, c'est: Pourquoi on retrouvait la notion de développement durable et qu'est-ce que ça voulait dire pour le commun des mortels, le développement durable? Et, dans mes notes, ce qu'on... Ce qu'on m'a dit, dans mes notes, c'est que ça fait référence... Bien, ça, je l'ai dit, ça fait référence à la Loi sur le développement durable et, dans cette loi-là, à l'article 6, paragraphe k, on retrouve la définition de la protection du patrimoine culturel. Et, dans la définition de la protection du patrimoine culturel, on y retrouve le mot «l'identité d'une société», «reflète l'identité d'une société».

Alors, ce qu'on est en train de dire, c'est que, puisque c'est dans la Loi sur le développement durable et que nous refaisons référence à la Loi sur le développement durable, Me Gagnon soumet que ce n'est pas nécessaire de reprendre le terme dans notre projet de loi puisque c'est déjà dans la Loi sur le développement durable, et on fait référence à la Loi sur le développement durable. On est tenus... Mais on peut l'analyser, là. C'est une question qui est très pertinente.

M. Blanchet: Je conviens que ça pourrait ne... Je pourrais convenir, soyons précis, que ça pourrait ne pas être nécessaire, mais ça n'en serait pas moins souhaitable. Voilà.

Mme St-Pierre: Alors, comment on devrait procéder? Parce que je ne sais pas, est-ce que ça peut vous prendre quelques heures? Voulez-vous qu'on suspende?

Le Président (M. Marsan): Voulez-vous suspendre le premier paragraphe de l'article 1?

Mme St-Pierre: Ou voulez-vous suspendre une dizaine de minutes pour qu'on se fasse une tête?

Le Président (M. Marsan): Oui, on peut immédiatement, si vous êtes d'accord, on...

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Juste un instant. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Si vous permettez, puisque ça viendrait avec une modification du libellé du premier paragraphe, je pourrais vous redire, pour fins de considération, les autres éléments, au moins ceux qui me semblaient les plus importants, voir si ça peut être d'emblée intégré à votre réflexion.

Je crois pertinent que, dans la séquence, nous commencions par l'identification, idéalement même la circonscription, de ce qu'on reconnaît comme étant patrimonial, suivi des notions de protection et idéalement de pérennisation et après, évidemment, la mise en valeur et la transmission de la connaissance. Je soumets ça à votre bienveillante attention parce que c'est comme ça que la séquence logique se déroule dans l'exercice d'un processus de traitement du patrimoine.

Le Président (M. Marsan): Alors, vous avez soumis votre suggestion?

M. Blanchet: C'est ça que j'ai fait.

Le Président (M. Marsan): Si vous voulez, je vais suspendre nos travaux pour quelques instants. On va prendre quelques minutes et on se retrouve, là, aux environs de 5 heures. Alors, je vais suspendre quelques instants. Je vous remercie.

(Suspension de la séance à 16 h 50)

 

(Reprise à 16 h 58)

Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux, et il y avait un amendement qui a été déposé. Alors, Mme la ministre, voulez-vous nous lire cet amendement? Nous sommes toujours au paragraphe un de l'article 1.

Mme St-Pierre: Donc, M. le Président, je propose l'amendement suivant:

L'article 1 de cette loi est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa, après les mots «patrimoine culturel», de «reflet de l'identité d'une société».

Le Président (M. Marsan): Alors, est-ce qu'il y a des commentaires ou questions?

M. Blanchet: Le commentaire que je ferais, c'est que c'est indicateur, de façon positive, de la suite des travaux. Il me semble qu'on...

Le Président (M. Marsan): Est-ce que ça convient à tous les députés? Nous allons poursuivre.

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Non, on prend... Ah! c'est un amendement, donc on pourrait le mettre aux voix immédiatement.

Mme Gagnon (Hélène): ...

Le Président (M. Marsan): Moi, je l'ai ici dans le premier alinéa.

Mme Gagnon (Hélène): Ah! vous l'avez.

Le Président (M. Marsan): Alors, j'imagine que tout le monde est d'accord avec cet amendement? C'est adopté.

Alors, nous revenons à l'article 1. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires ou questions? M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques.

M. Lemay: Merci, M. le Président. Ce sera seulement quelques commentaires. Alors...

Le Président (M. Marsan): Excusez, M. le député. J'entends que le salon bleu nous appelle pour un vote.

Alors, nous allons suspendre immédiatement nos travaux et nous reprendrons à la suite du vote au salon bleu. Merci.

(Suspension de la séance à 17 heures)

 

(Reprise à 17 h 23)

Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux. Et nous en étions à l'article 1. Et je voulais savoir s'il y avait d'autres interventions sur le paragraphe un. M. le...

M. Lemay: Ah!

Le Président (M. Marsan): Le paragraphe un?

M. Lemay: Attendez un peu, paragraphe un de l'article 1.

Le Président (M. Marsan): On a fait un amendement tantôt.

M. Lemay: Oui.

Le Président (M. Marsan): Tel qu'amendé.

M. Lemay: Oui, tout à fait. Alors, bien, écoutez...

Le Président (M. Marsan): Alors, M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques.

M. Lemay: Comme je disais tout à l'heure, M. le Président, dans les trois paragraphes, en tout cas les deux premiers, c'est de «favoriser la connaissance, la protection...» Bon! Et le deuxième paragraphe de cet article, c'est: «favoriser la désignation de personnages, d'événements et de lieux historiques».

Donc, comme on le voit, c'est «favoriser la connaissance», donc c'est la... On présume, M. le Président... Évidemment, ces articles-là seront plus longs, parce que, là, on est dans les définitions, on est dans les fondements du projet de loi. Et jusqu'à temps aussi, si la cloche ne sonne pas trop souvent, qu'on prenne une espèce d'erre d'aller, là, de rythme pour l'étude.

Bref, j'en reviens toujours à la même question: Est-ce que, dans le fond, dans ce projet de loi... qu'est-ce qui va faire en sorte... Je l'ai souligné tantôt rapidement, mais qu'est-ce qui va faire en sorte que ça va favoriser la connaissance, la protection, la mise en valeur? Je vous parlais, M. le Président, du musée Honoré-Mercier, à Sainte-Anne-de-Sabrevois. Encore une fois, les gens de Sainte-Anne-de-Sabrevois ont, à l'heure actuelle, d'autres chats à fouetter, on se comprend, on les comprend. Il reste que vous me permettrez de citer la page Internet qui est: Région de Saint-Jean-sur-Richelieu, musée Honoré-Mercier. C'est indiqué que c'est en 1962 que le musée ouvre ses portes et que l'ancienne demeure d'Honoré Mercier est acquise et devient site historique. Donc, c'est une site historique depuis 1962, M. le Président, et elle est dans l'état que je vous ai souligné tantôt rapidement. Donc, mon questionnement est de savoir, et je reviendrai plus longuement au deuxième alinéa, mais: En quoi le projet de loi sera-t-il un changement avec l'ancien en ce qui concerne favoriser la connaissance, la protection? Parce qu'on le voit il y a déjà... Je ne sais pas c'est quoi, le nombre d'immeubles. Je prends juste les immeubles protégés au Québec, c'est quoi? Cinq... 1 000, 1 500 au plus. Bon. En quoi ce projet de loi va donner un élan, si vous voulez, supplémentaire, d'une part, à ce qui existe déjà, ce qui est déjà protégé? Et je reviendrai plus tard, M. le Président, sur le deuxième parce que, là, on parle nommément de désignation. Donc, c'est là mon questionnement: En quoi ce projet de loi va favoriser la connaissance de ce qui existe déjà?

Et on poursuivra, M. le Président, pour que, vous l'aurez compris... On poursuivra tout le long de l'étude de ce projet de loi sur ce type de questionnement là parce que, pour ce qui est de la protection du patrimoine, de la mise en valeur, ce n'est quand même pas nouveau, là, on a une expertise, même si, à mon sens, et j'insiste là-dessus, M. le Président, tous gouvernements confondus, tous gouvernements confondus, je trouve, M. le Président, qu'il y a des lacunes en ce qui concerne ces enjeux. Et je reviendrai plus longuement au deuxième paragraphe.

Le Président (M. Marsan): O.K. Alors, Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Écoutez, si on regarde l'ancien... bien, l'ancien, enfin la loi actuelle, la Loi sur les biens culturels, il n'y a pas d'objet. On va... On est allés... Ils ont écrit la loi en allant directement aux définitions. Ça commence comme ça: «Définitions et applications». Ici, on fait «Objets, définitions et applications» parce qu'on veut, dans l'objet, vraiment, là, dire qu'est-ce que c'est, l'importance, l'importance qu'on veut accorder à cette notion de patrimoine culturel.

Sur la question des désignations, bien, c'est sûr qu'au fur et à mesure de nos travaux ça va se préciser, ça va s'éclaircir parce que, dans chaque chapitre, section, il y a... on vient comme dire exactement ce qu'on veut faire. Alors, le projet de loi, il va se déployer au fur et à mesure que nous allons l'étudier. Donc, la désignation, c'est une notion nouvelle, totalement nouvelle qui entre dans le projet de loi.

Ce n'est pas dans la Loi sur les biens culturels, c'est quelque chose de nouveau que nous amenons parce que justement... D'ailleurs, ils m'avaient fait des commentaires à une couple de reprises à l'Assemblée nationale en disant: On n'a pas nos personnages historiques, on n'a pas de... on ne sait pas exactement, puis on aimerait ça qu'on trouve un endroit où on pourrait avoir vraiment le catalogue au complet. Ça existe au gouvernement fédéral, au fédéral, mais ici, Québec, non.

Alors donc, on s'est dit, et ça a été demandé -- puis ça, lors des consultations également, on en a parlé abondamment -- que ça pourrait être intéressant soit pour le gouvernement du Québec ou pour des municipalités d'avoir de la désignation. Donc, on a le classement, la citation, la désignation. Donc, on vient ajouter une autre catégorie qui vient encore plus préciser, qui va faire en sorte qu'on va encore plus souligner notre patrimoine en termes de personnages qui ont été importants. Ça peut être des lieux de mémoire également et des événements. Alors, on y ajoute... On l'enrichit, finalement, notre projet de loi en y ajoutant ces éléments-là qu'on va retrouver aux articles 12 et suivants. Alors, vous allez avoir plus d'explications, mais c'est sûr qu'on ne peut pas sauter d'un article à l'autre. Ça va être plus de détails sur exactement ce qu'on fait lorsqu'on va arriver à ces articles-là.

L'article 1 ici vient... l'objet, les objets, vient comme dire: Bien, voici ce qu'on fait. En passant, il n'y a pas d'hiérarchisation non plus. Et il y a une logique aussi parce que, quand on parle de favoriser la connaissance, la protection, la mise en valeur, bien, il faut commencer quelque part, donc il faut avoir la connaissance de quelque chose. Après ça, on parle de protection, après ça on parle de mise en valeur, mais ce n'est pas une hiérarchisation: telle chose est plus importante que l'autre. Il faut qu'on commence quelque part. En fait, c'est la chaîne, la chaîne de l'événement, et c'est dans cette logique-là que l'article... que le premier paragraphe a été écrit, rédigé.

Et, pour ce qui est du deuxième paragraphe, bien, c'est une notion tout à fait nouvelle que nous ajoutons par rapport à la Loi sur les biens culturels, la loi actuelle que nous connaissons. Et, dans le troisième paragraphe, bien là il vient ajouter l'autre élément, l'autre... les deux autres pans importants et majeurs, je pense, sans faire d'hiérarchisation dans notre projet de loi. Là, il vient y mettre la question de lieux, d'événements historiques, de documents, d'immeubles et, bien sûr, patrimoine immatériel et paysages culturels patrimoniaux.

Alors, je pense qu'on vient ici, là, dans ces trois paragraphes-là vraiment dire: Voici, notre projet de loi... C'est l'objet de notre projet de loi et c'est là-dessus que nous entendons travailler et détailler notre action.

**(17 h 30)**

Le Président (M. Marsan): M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques.

M. Lemay: Simplement pour dire que je reviendrai plus tard sur le deuxième paragraphe, M. le Président, qui, moi, me semble... Mais je vais quand même annoncer mes couleurs en ce sens qu'une fois qu'on favorise la désignation, je comprends qu'il y a d'autres articles de lois, mais qu'arrive-t-il après, M. le Président? J'annonce déjà mes couleurs pour le deuxième paragraphe. Qu'est-ce qui arrive après? C'est ça, mon questionnement. Je l'ai dit, la maison Honoré-Mercier, elle est déjà désignée, mais elle est dans l'état terrible où elle est à l'heure actuelle. Je ne prends que cet exemple. Évidemment, on pourra en trouver beaucoup. Elle est dans cet état-là depuis une vingtaine d'années, M. le Président. J'insiste là-dessus, là, ce n'est pas avant-hier, là, donc... Mais je reviendrai sur le deuxième principalement.

La ministre... je fais aussi un commentaire. Bon, la maison à René Lévesque, la maison Louis-Hippolyte-La Fontaine, on pourrait en nommer énormément. Je ne dis pas que c'est la faute à personne. Je dis: l'état de fait, c'est ça.

Mais je soulignerais quand même, suite à ce que la ministre a dit... Et je reviendrai après, je laisserai la place à mon collègue qui... Lui, c'est plutôt le premier paragraphe. Parcs Canada, c'est un excellent exemple. Parcs Canada, là, vraiment, en termes de ressources, en termes de moyens, en termes de protection du patrimoine, pour moi, c'est un excellent exemple. Et je rêve du jour où on pourra intégrer Parcs Canada au ministère de la Culture avec toutes leurs compétences, leurs connaissances. Pour moi... Je rêve de ça un jour.

Mme St-Pierre: ...rêve de ça.

M. Lemay: Indépendant ou pas, là, ce n'est pas de ça que je parle. Je parle... Moi, évidemment, je veux tous les pouvoirs, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lemay: Pas pour moi personnellement, là, mais pour notre État.

Une voix: ...

M. Lemay: Non, non, non, pas du tout.

Une voix: ...

M. Lemay: Pas du tout. L'État, c'est moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Marsan): Est-ce que ça termine le premier paragraphe? Non? Le premier?

M. Lemay: Mais Parcs Canada est effectivement un excellent exemple, là, mais je reviendrai. Ceci étant dit, je reviendrai de façon plus longue sur le deuxième paragraphe.

Le Président (M. Marsan): Alors, d'autres interventions sur le premier paragraphe?

M. Lemay: Ah! Parcs Canada, c'est vraiment...

Le Président (M. Marsan): D'autres...

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): Oui?

Une voix: ...consulte mon sage collègue.

Le Président (M. Marsan): Alors, je demandais s'il y avait d'autres interventions sur le premier paragraphe.

M. Blanchet: Excusez-moi, M. le Président. Nous nous consultâmes, mon collègue et moi. J'ai relevé un certain nombre de points avec lesquels j'étais plus ou moins confortable ou dont j'avais l'impression qu'ils pourraient être l'objet de bonification. Je les ai un peu expliqués, je vais revenir et je pourrais aboutir avec une proposition d'amendement à laquelle je réfléchis présentement avec intensité.

Et, parmi ces thèmes-là, il y avait, bon, d'abord la notion de favoriser. Je me demandais, mais ça, je vais en faire une question, Mme la ministre... «Favoriser» me semblait, moi, un terme pas assez fort, si je peux m'exprimer ainsi. Et je me questionnais sur les motifs qui pourraient être des motifs à caractère juridique, là, à caractère de: C'est comme ça que ça s'écrit parce que ça veut dire ça en termes législatifs, le mot «favoriser». Mais je trouve que le terme n'est pas très stimulant. Il ne démontre pas une volonté ferme. Et peut-être qu'il y a d'autres mots qui pourraient démontrer davantage de fermeté dans la volonté. Alors, je ne sais pas si quelqu'un peut m'expliquer le choix de ce terme spécifique.

Mme St-Pierre: Bien, écoutez, je vais demander à Me Gagnon, qui est la spécialiste dans le terme... dans la façon de rédiger une loi. Moi, ça m'apparaît... «Favoriser», c'est... Bien sûr, ça dit, «favoriser», nous favorisons, nous allons, nous voulons faire en sorte que ces choses-là soient considérées comme importantes. Alors, quand on favorise quelque chose, c'est qu'on lui donne la première place, à mon avis. Mais je pense qu'on va avoir un dictionnaire... on va commander un dictionnaire bientôt. Mais peut-être que Me Gagnon... Parce que c'est sûr qu'on peut discuter évidemment -- puis c'est tout à fait normal, et je comprends l'intention du député -- du poids de chaque mot, puis là on prend un dictionnaire puis on joue au scrabble, puis on décide qu'on prend tel mot par rapport à l'autre, mais c'est clair que chaque mot a été analysé dans le sens de comment on peut avoir le mot le plus précis pour faire en sorte que, si cette loi-là se retrouve devant les tribunaux, bien, qu'on puisse avoir un argumentaire pour dire: On a choisi ce mot-là. Le législateur ne parle pas pour rien. Est-ce que vous me permettez de céder la parole à Me Gagnon?

Le Président (M. Marsan): Absolument. Alors, Me Gagnon.

Mme Gagnon (Hélène): Bien, je pense que ça veut bien dire ce que ça veut dire, c'est-à-dire qu'on tend à améliorer, c'est ça, à favoriser la connaissance. Si on prend des termes plus forts, du type «garantir», bien là, ça implique des conséquences assez fortes. Ça serait... Je ne pense pas que je recommanderais aux parlementaires ici de prévoir quelque chose comme «garantir la connaissance, la protection à tout prix», parce que, là, on a les moyens qu'on a aussi, là. Je veux dire, c'est... Il faut y aller avec quelque chose... Je pense que «favoriser», ça dit bien ce que ça veut dire. On met en place toutes les mécaniques, tous les moyens pour permettre d'atteindre une protection la meilleure.

M. Blanchet: Dans le libellé législatif... Vous me corrigerez, parce que vous êtes une experte et je n'en suis pas un. Un libellé législatif n'est jamais un absolu, dans le sens où la loi interdit... d'autres lois, là, interdisent formellement certaines choses qui se produisent malgré tout. Il y a même parfois des seuils de tolérance. Est-ce que le fait, par exemple, de dire «la présente loi a pour objet d'assurer»...

Mme Gagnon (Hélène): Bien, ça, c'est quand même... Ça implique des responsabilités pour la ministre, pour l'État quand on prévoit quelque chose comme ça.

M. Blanchet: C'est l'objectif.

Mme Gagnon (Hélène): Ce n'est pas sans conséquences. C'est sûr et certain que, quand on... Si on écrivait ça, «a pour objet de garantir», c'est quasiment un absolu. Ce n'est pas...

M. Blanchet: Ça a une volonté d'absolu, mais...

Mme Gagnon (Hélène): C'est sûr, je comprends ce que vous dites, quand on dit: On a beau interdire, les gens ne respectent pas, mais ça a des conséquences aussi: pénales, de poursuites ou autres. La même chose, si on a un objectif trop absolu, bien, je veux dire, l'État peut être poursuivi également.

M. Blanchet: L'État peut être poursuivi?

Mme Gagnon (Hélène): Bien oui. C'est la finalité même de la loi. Là, c'est quelque chose d'important, de fondamental, l'objet d'une loi. C'est vraiment sa finalité. C'est ça qui teinte tout le reste de la loi. Donc, si on y va avec des termes trop absolus, je veux dire, on le sait, il y a beaucoup de groupes, de gens qui ne sont pas nécessairement du même avis en patrimoine. On l'a vu aussi lors des consultations, les avis sont divergents.

M. Blanchet: Garantir, j'aurais tendance à vous suivre là-dessus. Garantir veut dire: prendre la responsabilité face à une tierce partie que ça va être ça, la résultante. Moi, j'utilisais le mot «assurer».

Mme Gagnon (Hélène): C'est pas mal des synonymes, je vous dirais.

Mme St-Pierre: Monsieur... Est-ce que je peux dire quelque chose?

Le Président (M. Marsan): Bien oui.

**(17 h 40)**

Mme St-Pierre: M. le Président, je pense qu'il faut se garder, comme gouvernement, aussi une certaine marge de manoeuvre. Puis, si on utilise le terme «garantir», c'est sûr que, là, on entre dans des considérations financières. Bien sûr, on veut avoir le plus d'argent possible. Bien sûr, on voudrait en faire le plus possible, et on en fait déjà beaucoup, on en fait énormément. Et je pense que «favoriser», bien, ça donne le message que ça fait partie de nos priorités. Mais il serait dans la même... Il serait dans l'autre position, et il comprendrait très bien le poids des mots, là, ce que ça veut dire. Et je pense qu'on est dans une logique que, oui, c'est important. On en fait une priorité. Et favoriser, bien, ça fait partie de ce qu'on favorise, c'est ce à quoi on donne le plus d'importance.

Alors, moi, je recommanderais que nous gardions ce libellé pour garder effectivement une certaine marge de manoeuvre, non seulement pour nous qui sommes là, mais pour... Tu sais, on souhaite être là encore longtemps, mais c'est pour tous les gouvernements qui vont suivre, qu'ils aient une certaine possibilité de flexibilité. Parce que, à un moment donné, si on y va de façon... Et, après, dans le projet de loi... Le projet de loi, comme je dis, il se déploie et il explique les actions que nous voulons faire. Il y a des amendes très, très sévères si quelqu'un... M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques parlait d'une maison qui n'était pas entretenue par la municipalité, mais, si la maison est citée, la municipalité est tenue par la... Et il y a le Fonds du patrimoine culturel, qui est là pour aider à la restauration. Si la maison est citée et qu'elle appartient à une municipalité, et que la municipalité ne respecte pas la loi, bien, la municipalité s'expose à avoir... à vivre des conséquences de ne pas respecter la loi.

Et d'ailleurs j'ai voulu que les amendes soient plus sévères dans cette... On va y arriver plus tard. J'ai voulu que ça soit plus sévère pour vraiment responsabiliser les gens qui ont ce patrimoine-là et qui doivent l'entretenir.

Alors, moi, je pense qu'on doit être prudents, pas uniquement pour nous mais pour tous ceux et celles qui, dans les années... Parce que la dernière loi, la Loi sur les biens culturels, elle date de 1970... 1972, donc, on travaille pour plusieurs années, là, à venir, et ça n'a pas été soulevé à aucun moment dans les mémoires. Je n'ai pas vu personne qui a soulevé ça dans les mémoires, à ma connaissance, je n'ai pas vu personne qui a soulevé ça en commission parlementaire. Alors, je pense que tout à l'heure la question d'identité, c'était... Je trouvais que c'était correct parce que c'était une façon, vraiment, d'ajouter un plus, mais présentement, moi, je pense qu'on doit rester avec ce mot, qui est fort mais qui laisse une certaine souplesse aux décideurs.

Le Président (M. Marsan): Merci. M. le député de Drummond.

(Consultation)

M. Blanchet: ...il me reste, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): 8 min 40 s.

M. Blanchet: C'est beaucoup. Je n'aurai pas besoin de tout ça.

Une voix: ...

M. Blanchet: Non, non, pas obligé. Écoutez, je réfléchis à un libellé, parce que... Encore là, je reviens sur la séquence logique et l'identification avant la protection, avant, donc, qu'on puisse parler de connaissance qui, elle, sera transmise. Et ça, ça me semble logique, ce n'est pas politique, là, C'est vraiment une question de logique, tenant compte de ce que, moi, je connais de cet univers-là, compte tenu de mes antécédents personnels en culture et en ethnologie.

L'autre élément, qui est encore une fois davantage relatif à ce que je sais qu'à un libellé purement législatif: on ne transmet pas le patrimoine. On ne protège pas ou on ne favorise pas l'identification du patrimoine mais bien de manifestations du patrimoine. Il y a de nombreuses formes de manifestations du patrimoine qui sont énumérées ultérieurement à différents endroits dans la loi. Mais ce sont des manifestations de patrimoine et non pas le patrimoine comme étant un bloc qui est une identité qui est indiscernable, là, par nature.

Et donc j'arrivais à quelque chose qui disait: «La présente loi a pour objet de favoriser l'identification, la protection, la connaissance et la transmission des manifestations du patrimoine culturel», le reste ne bougeant pas. C'est davantage dans une perspective d'être conformes avec une certaine logique que dans une perspective purement législative. C'est dans cette séquence-là que ça se produit dans l'exercice, dans la vie d'une activité à caractère patrimonial.

Puis l'autre élément est un élément de logique. Le patrimoine en bloc n'est pas une entité, c'est un ensemble de manifestations, ce qui est d'ailleurs la raison pour laquelle il y a des nomenclatures qui sont faites ultérieurement et sur lesquelles on reviendra. Alors, je ne sais pas trop comment procéder à cet égard-là, M. le Président, mais je m'en remets à vos lumières.

Le Président (M. Marsan): Bien, je pense qu'habituellement c'est... Nos règles sont très connues. Si vous voulez améliorer un projet de loi, vous en faites des amendements. Si vous voulez avoir des informations...

M. Blanchet: En fait, est-ce que je peux demander l'avis, un avis de la ministre a priori? Voyons un peu qu'est-ce que ça donne de ce côté-là.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Bien, moi, je pense, j'ai toujours pensé, dans tous nos travaux, que la transmission du patrimoine, ça disait vraiment ce que ça avait à dire, mais, si, les spécialistes, quand ils parlent du patrimoine, parlent de «manifestations du patrimoine» et que les chercheurs parlent de «manifestations du patrimoine» et non pas «du patrimoine», écoutez, je... Il est plus... Je pense qu'il est plus spécialiste que moi, là, mais, moi, je n'ai jamais... Il me semble que j'ai... on a toujours parlé... Et, dans le langage normal...

M. Blanchet: Dans l'usage, dans une conversation, ce que vous dites est tout à fait exact. Si on fait une précision, si on faisait un texte avec un caractère plus pointu, on préciserait probablement. Et je vous dirais aussi que les gens qui venaient ici avaient en général chacun un angle, chacun une spécialité, certains sur le patrimoine vivant, certains sur le patrimoine immatériel dans une définition autre, certains sur...

Mme St-Pierre: Bien, à ce moment-là, ils auraient dû dire: Sur les manifestations du patrimoine vivant, sur les manifestations du patrimoine immatériel.

M. Blanchet: Non, parce que, là, à ce moment-là, on rentrerait dans des sous-ensembles de sous-ensembles, là.

Mme St-Pierre: O.K.

M. Blanchet: On pourrait se rendre à l'infini avec ça. C'est juste que le patrimoine n'est pas un bloc uniforme. Ça n'existe pas comme ça. Je ne dis pas que quelqu'un qui interpréterait ne comprendrait pas de quoi il s'agit, mais je prétends qu'il s'agit d'une précision valable en termes techniques, vue sous la loupe de gens qui oeuvrent dans cet univers-là.

Mme St-Pierre: Alors, vous voudriez proposer un amendement?

M. Blanchet: On peut procéder sous cette forme-là aussi, là. J'imagine qu'il y a une façon de formuler l'amendement par contre, là.

Une voix: ...

Mme St-Pierre: ...dit que les experts ne l'utilisent même pas. L'expression «les manifestations du patrimoine», ce n'est pas utilisé par les experts.

M. Blanchet: Qui sont les experts?

Mme St-Pierre: Bien...

Le Président (M. Marsan): Des gens du ministère, c'est ça?

M. Blanchet: O.K., bien, je vais le demander, mais... Je vais le demander de façon absolument polie, sans... La nature de l'expertise, là, je le dis très poliment... Si quelqu'un me dit: Non, non, moi, je suis issu de ce milieu-là, voici, c'est ça, ma formation, puis on n'utilise pas ça, bien là, je vais dire: Ah, bien là, formation contre formation, on va peut-être tomber d'accord facilement, là.

«Expert» est une notion fort large. Moi, je ne me prétendrais pas expert, mais j'ai quand même passé une grande partie de ma vie là-dedans, là.

Mme St-Pierre: Bien, écoutez, moi, je...

M. Blanchet: Tu sais, c'est un peu pour la même raison... Je vais vous donner un exemple, si vous permettez, M. le Président. La convention sur la diversité des expressions culturelles, bien, on a dit «la diversité des expressions culturelles», et non pas «sur la diversité culturelle». Pourquoi? Parce qu'on a convenu qu'il y avait un type de précision à amener sur cette notion-là. On parle exactement du même type d'exercice. On parle exactement du même type de nuance. Ce n'est pas «la convention sur la diversité culturelle», ce que beaucoup de gens voulaient d'ailleurs, mais bien une «convention sur le diversité des expressions culturelles», amenant cette notion que ce n'est pas la culture mais bien ses manifestations, «expressions» et «manifestations» étant passablement synonymes dans ce contexte-là.

Mme St-Pierre: Il me semble, M. le Président, que, si on parle d'une manifestation, pas dans le sens de «manifester», là, mais dans le sens... une manifestation, ça ne fait pas référence à un objet, par exemple. Prenons les bas-reliefs d'Oka, ce n'est pas pour moi une manifestation du patrimoine religieux, c'est un objet qui représente le patrimoine religieux. Je ne sais pas, il me semble que... On a deux doctorats en ethnologie ici, là, qui nous disent que ça ne s'utilise pas comme... Mais, moi, je ne me souviens pas de l'avoir entendu. Mais si vous êtes peut-être plus expert...

M. Blanchet: J'en conviens. Je conviendrai de la moitié, je conviendrai que ça peut ne pas être utilisé, je ne conviendrai pas que ça ne s'utilise pas. Ça, c'est sûr, sûr, sûr, mais je n'irai pas à la recherche d'exemples. Mais, s'il y a deux doctorats en ethnologie qui me disent que ça ne s'utilise pas, je vais convenir qu'on peut ne pas le mettre, mais je ne conviendrai pas que, comment dire, ça n'aurait pas de bon sens. Ça, je n'en conviendrai pas.

Mme St-Pierre: Parce qu'il me semble, quand on utilise le mot «manifestation» de quelque chose, qu'il y a comme une action, tandis que ça peut être un objet, et, moi, je craindrais que le mot «manifestation» n'inclurait pas l'objet.

Une voix: ...

Mme St-Pierre: Mais je craindrais que ça serait interprété que ça n'inclurait pas l'objet, que ça exclurait les objets. Je pense que... Et puis il me semble que ça se comprend très bien, là.

Le Président (M. Marsan): Alors, d'autres commentaires? M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques.

**(17 h 50)**

M. Lemay: Oui, merci. Rapidement, M. le Président, je reviens sur le premier: «favoriser la connaissance». J'ai parlé à quelques reprises, et peut-être qu'on y reviendra, du site Internet du ministère sur lequel il y a quelque chose de base, il faut le dire. Mais là j'ai remarqué que, dans le document qui a été déposé par la ministre, qui est Demande de renseignements de l'opposition sur l'organisation du ministère et le patrimoine, là où on a des choses intéressantes, la Direction des relations publiques s'occupe du site Internet. Et là je vois un petit peu plus loin qu'ils sont deux personnes. Alors, à deux personnes, on ne peut pas vraiment demander de miracles, là, M. le Président.

Donc, je me demande si la ministre, à court ou à un moyen terme, s'attend peut-être à, je ne sais pas, moi, des développements de ce côté-là, du volet patrimonial, du site du ministère qui s'appelle, M. le Président, Répertoire du patrimoine culturel du Québec. Il y a une base qui n'est pas inintéressante en termes de biographie, en termes de photographies, de photos, bon, de ce qui est classé ou autre, mais il me semble qu'on aurait avantage à le rendre peut-être un petit peu plus complet, un petit peu plus facile d'accès, un instrument de recherche peut-être un petit peu plus fort. Alors, est-ce que la ministre... Toujours dans l'objectif de favoriser la connaissance, justement, est-ce que la ministre et son équipe a ou aura des projets éventuellement. Parce qu'on le sait, aujourd'hui, Internet, les jeunes, les jeunes étudiants qui recherchent des informations sur des personnages, des endroits, des lieux, il me semble que le site du ministère pourrait être tout indiqué en ce cas-là. Surtout, M. le Président, que... Évidemment, je souhaite qu'il y ait des relations avec la bibliothèque. La Bibliothèque de l'Assemblée nationale, il y a une masse de connaissances et d'expertises de ce côté-là.

Je dois dire -- peut-être que je me trompe, M. le Président -- je dois dire que ça, je ne le sens pas. Si les gens de la Bibliothèque de l'Assemblée nationale sont sollicités par le ministère pour avoir... Aïe! il y a de l'information de ce côté-là, M. le Président, de la bibliothèque.

Mme St-Pierre: ...point d'ordre, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Oui.

Mme St-Pierre: Bien, c'est parce que je pensais qu'on parlait de l'article 1, puis là il est rendu à la Bibliothèque de l'Assemblée nationale.

M. Lemay: Bien, c'est ça, favoriser la connaissance.

Le Président (M. Marsan): Nous sommes toujours à l'article 1.

Mme St-Pierre: Bien, c'est parce que...

M. Lemay: Le site Internet pour favoriser la connaissance, ça me semble essentiel, non?

Mme St-Pierre: M. le Président, il y a...

Le Président (M. Marsan): Oui, allez-y, Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Il y a 400 employés qui travaillent au ministère de la Culture, si on exclut les sociétés d'État, et on a prévu qu'il y aurait au moins 15 personnes pour la mise en oeuvre du projet de loi. Alors, ce qu'il voit maintenant, ce n'est pas ce qui va se passer avec la façon dont on entend déployer les ressources. Et ça n'empêche pas, si on a besoin de ressources supplémentaires, d'aller en chercher, là, on n'est pas... Mais ce n'est pas dans un projet de loi qu'on dit: Ça va être deux personnes qui vont faire telle chose, puis on va avoir le site Internet, puis, dans cinq ans, ça ne s'appellera plus un site Internet. Je veux dire, il faut à un moment donné, là... Puis il y a 400 personnes dans ce ministère-là, là, il y a certainement du monde qui va travailler sur la mise en oeuvre, puis on a prévu qu'il y aurait 15 personnes qui vont travailler pour la mise en oeuvre du projet de loi. Alors...

M. Blanchet: M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, M. le député de Drummond, vous demandez la parole.

M. Blanchet: Petit commentaire. Je vous invite à assurer que, quels que soient les propos que quelqu'un aura l'intention de tenir, ce sera à lui de juger s'il considère que c'est pertinent ou pas, à condition qu'il ne parle pas d'automobile, là. Mais, moi, je ne vois pas de point d'ordre.

Deuxième affaire, j'entends qu'il y a des ressources de réservées au ministère pour l'administration de cette loi-là, bien, c'est la première nouvelle. Est-ce qu'on peut élaborer là-dessus?

Mme St-Pierre: On prévoit qu'on va avoir 15 personnes qui vont être affectées à la mise en oeuvre, parce qu'on l'a dit pendant la commission parlementaire, quand les gens sont venus nous voir, les gens des municipalités. Les gens sont venus nous voir: On n'a pas l'expertise; comment on va faire, et tout ça? Et on l'a dit à plusieurs reprises: Nous allons vous accompagner dans la mise en oeuvre de la loi. Et on a prévu à peu près 12 mois pour arriver, là, avec ce qu'on a dans la loi, pour guider, pour encadrer, pour aider les municipalités et ceux qui sont touchés par la loi.

Alors, on a prévu de déployer des ressources à l'intérieur du ministère, à l'intérieur de ce qu'on a comme ressources, puis on va le faire. C'est ça qu'on a prévu. Je l'ai dit. Je l'ai dit à plusieurs reprises en commission parlementaire, que nous allons accompagner.

M. Blanchet: Est-ce qu'on peut avoir les détails sur... pas le nom, là, pas le nom des 15 personnes, mais ça va être quoi, les postes, ils vont faire quoi?

Mme St-Pierre: Bien, c'est parce qu'on n'est pas rendus là. On est rendus, là, à l'article 1.

M. Blanchet: Je ne m'empêcherai pas de vous le demander.

Mme St-Pierre: Mais on va... Bien, vous pouvez me le demander, mais, je veux dire, je vous dis 15 personnes. Là, on n'a pas encore déterminé: M. Tremblay, du Lac-Saint-Jean, va s'occuper du site Internet...

M. Blanchet: Je ne veux pas le nom. Vous dites 15...

Mme St-Pierre: Mme Saint-Hilaire, de...

M. Blanchet: Si vous dites 15 personnes, vous devez savoir ce qu'ils vont faire.

Mme St-Pierre: Bien, ils vont accompagner. Ils vont s'occuper justement de ça, les répertoires qu'on veut enrichir. Ils vont s'occuper de...

M. Blanchet: Bien, des accompagnateurs.

Mme St-Pierre: ...du patrimoine, du... comment guider pour les désignations.

M. Blanchet: Est-ce que vous avez identifié des postes? Vous avez 15... Ça veut dire qu'on a dit «15», ça veut dire: Il y en a qui vont faire ça, il y en a qui vont faire ça. Ce n'est pas des accompagnateurs, ils ont des titres, ils ont quelque chose, ils ont une amorce de description de ce que vont être leurs fonctions. Ce n'est pas, tu sais: On a décidé arbitrairement, c'est un bloc de 15, voici 15 personnes, puis on verra après ce qu'on fait avec. On doit avoir établi un peu ce que vont être leurs fonctions, leurs attributions à ces gens-là.

Mme St-Pierre: ...

Le Président (M. Marsan): Oui?

Mme St-Pierre: M. le Président, si vous permettez, je demanderais à M. Louis Vallée, qui est sous-ministre adjoint au ministère, d'expliquer tout ce qui a été prévu pour la mise en oeuvre du projet de loi.

Le Président (M. Marsan): Alors, c'est monsieur? Voulez-vous vous...

M. Vallée (Louis): Louis Vallée.

Le Président (M. Marsan): C'est ça. M. Vallée. Vous êtes sous-ministre adjoint?

M. Vallée (Louis): Sous-ministre adjoint, oui.

Le Président (M. Marsan): Vous avez la parole.

M. Vallée (Louis): En fait, vous référiez tout à l'heure au document que nous avons déposé. Vous voyez là-dedans qu'il y a quand même beaucoup d'équivalents temps complet au ministère qui travaillent en patrimoine. Alors là, ça se déploie dans l'ensemble du réseau du ministère. Mme St-Pierre parlait de 400 employés, mais on a 14 centres de services en région. Et c'est tous des gens qui -- c'est des portes -- sont des portes d'entrée, finalement, pour des dossiers patrimoine. An central -- ce qu'on appelle le central, je vous dirais, Québec, l'édifice de Québec, et Montréal -- on a 30 personnes qui travaillent en patrimoine, Direction du patrimoine et de la muséologie. Alors, il y a 30 personnes.

Maintenant, comme Mme St-Pierre l'a évoqué aussi tout à l'heure, ça, c'est la loi, c'est un projet de loi, mais, bien entendu, on est déjà à pied d'oeuvre pour la suite des choses, c'est-à-dire que, lorsque cette loi sera adoptée, si elle est adoptée, il faut penser à la mise en oeuvre. Mme St-Pierre vous a également indiqué qu'il y a une année avant l'entrée en vigueur comme telle de la loi. Vous connaissez ces choses-là.

Alors, vous pouvez penser qu'on n'attendra pas -- et on n'a pas attendu -- peut-être la fin juin 2011 pour travailler là-dessus. Alors, ce que Mme St-Pierre dit également, c'est que c'est un projet qu'on mène sous l'approche de gestion de projet. Alors, il y a donc une personne à la tête d'une organisation, donc ce n'est pas la Direction du patrimoine proprement dite, mais il y a une personne qui est dégagée à temps plein pour piloter l'opération qui va nous permettre de livrer tous les outils qui sont prévus, qui sont nécessaires après l'adoption de cette loi, et ça inclut des travaux extrêmement importants pour revoir notre site Internet, le Répertoire du patrimoine culturel, y introduire les nouvelles notions de patrimoine lorsqu'on parlera de personnages, etc. Nous avons à coeur... Parce qu'on a fait faire des études là-dessus, on a identifié les éléments, ce que vous souleviez également: quelqu'un qui cherche une information sur un événement ou plutôt sur un bien, un lieu, etc. On est conscients qu'il y a des améliorations à apporter au site, et ça va être fait, on travaille là-dessus.

Or, Mme St-Pierre parlait de ce site Internet, mais c'est également... Il y a une série de guides qui vont être produits. Si la notion de personnage est retenue, bien, il y aura une façon que le ministère indiquera comment normalement des personnages... On s'inspire largement de ce que le fédéral fait. Alors, on n'invente pas ça dans nos bureaux; on s'inspire de choses qui existent ailleurs. Alors, il y aura des façons et des guides, autant pour le ministère, de façon à ce que tout le monde comprenne bien comment on va travailler et sur quelle base les recommandations vont être faites à la ministre. La même chose va s'appliquer pour les municipalités qui veulent identifier des personnages, des lieux ou autres en région.

Alors, on pourra peut-être, si Mme St-Pierre le souhaite, vous déposer l'espèce de schéma de l'ensemble de la structure de travail qui est prévue pour la prochaine année, probablement que c'était prévu plus tard dans le processus ici, mais c'est quelque chose peut-être que Mme St-Pierre voudra faire. En tout cas, on laisse ça...

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme St-Pierre: Je vais compléter la réponse. Je vais citer la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui a dit, tout à l'heure, dans son intervention: On a peu souvent l'occasion de voir des projets de loi aussi structurants qui font histoire. Alors, on est dans un immense chantier. On n'est pas dans quelque chose, là: c'est a, b, c, d, puis ça... C'est vraiment un immense chantier, et on veut être le plus complet possible. On veut répertorier le plus de choses possible au niveau local, au niveau national. On veut que les choses... On veut que les Québécois connaissent leur patrimoine. On veut qu'ils se l'approprient, on veut que...

Et, pendant toute la commission parlementaire et, avant la commission parlementaire, pendant nos travaux à la suite du livre vert, on a été en lien constant avec les municipalités, les grandes municipalités, Montréal, Québec, et avec l'Union des municipalités, avec la Fédération des municipalités, puis j'ai été en lien constant... Les gens du ministère ont été en lien constant avec ces gens-là pour être capables de s'arrimer et qu'ils soient vraiment dans le coup du projet de loi. Alors, ça a commencé il y a plusieurs années. On a fait notre travail, on a fait une démarche qui a été vraiment constante, rigoureuse, logique et qui nous mène aujourd'hui à ça.

Le projet de loi, quand on va l'étudier, je l'ai dit tout à l'heure, je le répète, il va se déployer et on va entrer dans les détails de ce qu'on entend faire. Mais, moi, je pense qu'on a intérêt à avoir un tel projet de loi pour l'avenir du Québec. Sans ce projet de loi, là, je ne peux pas faire de désignation. Je ne peux pas entrer dans le patrimoine immatériel. Je ne peux pas entrer dans le patrimoine paysager culturel. Alors, je veux dire, on veut entrer dans ces domaines-là, parce que c'est important pour les Québécois, c'est important pour l'identité, l'identité québécoise. On veut entrer dans ces domaines-là, c'est notre volonté d'entrer dans ces domaines-là.

Alors, pour entrer dans ces domaines-là, ça nous prend une porte d'entrée, puis, si je n'ai pas la porte d'entrée pour le faire, je ne suis pas capable de le faire. Alors, c'est comme la poule ou l'oeuf, là, je veux dire, il faut qu'on ait ces outils-là pour pouvoir entrer dans ces domaines-là. C'est aussi simple que ça, mais c'est clair que la stratégie, comment, après, on va le mettre en oeuvre. notre projet de loi, il va y avoir un travail qui va se faire. Comme l'a dit M. Vallée, on a des directions régionales partout. On est bien équipés au ministère. Ensuite, on a nos sociétés d'État. On a nos musées nationaux, c'est-à-dire, on est comme... on est déployés, on est très bien déployés. Il y a des choses extraordinaires qui se font depuis des années, et on veut poursuivre sur cette lancée-là.

Donc, ce n'est pas petit, là, ce qu'on est en train de faire, là. C'est un grand chantier puis c'est pour l'avenir, l'avenir du Québec, l'avenir des Québécois et des Québécoises, pour que leur histoire bien soit encore plus ancrée. Et, moi, je pense que c'est là que c'est important. Alors, voilà.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die, et je vous remercie.

(Fin de la séance à 18 heures)

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