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Etude des crédits de l'Office des
professions
(Seize heures quarante minutes)
M. Boucher (président de la commission): A l'ordre,
messieurs! La commission des corporations professionnelles est réunie
pour étudier le programme 12 des crédits du ministère de
l'Education.
Les membres de la commission, pour cet après-midi, sont MM.
Bertrand (Vanier) remplacé par M. Gagnon (Champlain); Blank
(Saint-Louis), Bordeleau (Abitibi-Est); de Bellefeuille (Deux-Montagnes)
remplacé par Marquis (Matapédia); Fallu (Terrebonne), Fontaine
(Nicolet-Yamaska), Forget (Saint-Laurent), Laberge (Jeanne-Mance), Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), Laurin (Bourget), Martel (Richelieu), Morin
(Sauvé), Rancourt (Saint-François), Shaw (Pointe-Claire),
Springate (Westmount), Vaillancourt (Jonquière), Vaugeois
(Trois-Rivières).
M. Brassard: Je remplace quelqu'un mais je ne sais pas qui.
Le Président (M. Boucher): M. Brassard remplace M.
Martel.
Comme il s'agit d'un programme des crédits du ministère de
l'Education, il n'y a pas lieu de nommer un rapporteur. Je cède la
parole à M. le ministre immédiatement.
Exposé préliminaire du ministre M.
Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi de
rappeler, au seuil de l'étude des crédits de l'Office des
professions du Québec, que cet office a été
créé par le Code des professions, lequel est entré en
vigueur le 6 juillet 1973. Par la suite, à l'automne de la même
année, l'office a été mis en marche. Je rappelle ces faits
pour les membres de la commission qui n'auraient pas l'expérience de la
chose comme l'aurait, par exemple, le représentant de l'Opposition
officielle qui fut, autrefois, responsable de l'application du Code des
professions.
M. Blank: Et le député de Saint-Louis qui
était président de la commission où il y a eu 132
séances pour entendre des mémoires.
M. Morin (Sauvé): Je consens à reconnaître
les mérites du député de Saint-Louis par la même
occasion.
M. Lalonde: C'est parce qu'il est beaucoup plus vieux que nous
autres. On ne s'en souvient pas, on n'était pas là.
M. Morin (Sauvé): Depuis le 1er décembre 1976, j'ai
assumé la responsabilité de l'application du Code des professions
ainsi que de l'application des 21 lois constituant les corporations
professionnelles au Québec. Puis-je vous rappeler, également, que
l'office se compose de cinq membres nommés par le lieutenant-gouverneur
en conseil.
Ceux-ci doivent être membres d'une corporation professionnelle.
Quant aux employés de l'office, ils sont nommés sur
recommandation des membres par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Certains des membres de l'office sont ici cet après-midi.
J'aimerais vous présenter tout d'abord le président, Me
René Dussault, lequel est entré en fonction, d'ailleurs,
dès le début de l'Office des professions du Québec. Nous
avons également parmi nous le vice-président, M. Dionne. Les
autres membres sont: Mlle Edith Aston, physiothéra-peute, M. Guy Drouin,
ingénieur et M. Paul-Emile Patry, chirurgien. Le secrétaire est
M. Edouard Champoux, qui est ici également.
Situé au coeur même de la réforme des professions,
l'office est un organisme de surveillance dont la fonction principale est de
voir à ce que chaque corporation professionnelle s'acquitte
convenablement de sa tâche de protection du public. Pour remplir ce
mandat qui est difficile, voire délicat par moment, l'office dispose
d'importants pouvoirs sur les 38 corporations professionnelles, dont voici les
plus importants: 1) l'office nomme, après consultation du Conseil
interprofessionnel, un certain nombre de personnes choisies hors des cadres de
la corporation au bureau de chaque corporation; 2) l'office publie, deux fois
par année, les décisions rendues par les comités de
discipline des professions et Dar le Tribunal des professions, lequel, vous le
savez, est un tribunal spécialisé composé de juges de la
Cour provinciale; 3) l'office s'assure que chaque corporation adopte un
ensemble de règlements régissant son activité. L'Office
des professions a le pouvoir d'établir à la place des
corporations les règlements reliés directement à la
protection et à la sécurité du public, comme dans le cas
de la déontologie et de l'arbitrage des comptes, si ces corporations
refusent de les adopter dans les délais fixés par l'office; 4)
enfin l'office fait au gouvernement des recommandations, notamment au sujet des
modifications à apporter aux lois régissant les corporations
professionnelles, ce qui s'est produit tout récemment.
Ceci amènera l'adoption, sans doute au cours de
l'été, du projet de loi no 25, lequel se trouve actuellement
devant l'Assemblée et comporte un certain nombre de modifications,
intéressant particulièrement la médecine, la pharmacie, la
dentu-rologie, le Barreau et la Chambre des notaires.
L'office peut également conseiller le ministre et le gouvernement
sur la constitution de nouvelles corporations professionnelles, la fusion ou la
dissolution de corporations existantes.
J'aimerais dire quelques mots avant de terminer sur le rôle et les
pouvoirs des corporations re-
connues en vertu du Code des professions. Ceci simplement en vue
d'éclairer nos délibérations et à titre liminaire.
Chaque corporation professionnelle possède un certain nombre de pouvoirs
qui constituent autant de garanties en vue de la protection du public. Ainsi,
avant d'admettre un candidat à l'exercice de la profession, la
corporation s'assure qu'il possède les qualifications requises.
La corporation adopte également divers règlements relatifs
à la conduite de ses membres, à la publicité et aux normes
de tenue de dossiers et de cabinets de consultation. En outre, la corporation
contrôle l'intégrité de ses membres au moyen d'un
comité de discipline. Ce comité entend toutes les plaintes qui
sont portées à l'encontre des professionnels pour manquement aux
règles de conduite touchant, par exemple, le secret professionnel,
l'accès aux dossiers par le client, les explications nécessaires
pour les services rendus aux consommateurs, etc.
En ce qui concerne le contrôle de la compétence des
membres, chaque corporation est munie d'un comité d'inspection
professionnelle. Ce comité voit à ce que les membres
n'exécutent pas un travail pour lequel ils ne possèdent pas les
aptitudes et les connaissances requises.
Enfin, chaque corporation organise également, pour ses membres,
des stages de formation continue leur permettant de mettre
périodiquement leurs connaissances à jour.
La corporation tient une liste officielle de ses membres et veille
à ce que personne n'exerce illégalement la profession.
Voilà, M. le Président, le système qui a
été mis sur pied en 1973 et même s'il a pu y avoir quelques
problèmes, on peut affirmer qu'il a depuis fort bien fonctionné,
compte tenu qu'il s'agissait de faire démarrer un nouvel organisme
chargé de mettre de l'ordre dans un domaine qui en appelait
beaucoup.
Je dois dire à l'honneur de tous les ministres qui m'ont
précédé que, jusqu'ici, l'office a toujours eu l'appui des
gouvernements qui se sont succédé et qu'il possède
également le plein appui du gouvernement actuel dans l'exécution
des tâches extrêmement délicates qui lui sont
confiées. C'était par manière d'introduction, M. le
Président, et je serais maintenant tout à fait disposé
à entendre les observations des membres de l'Opposition ou des
députés ministériels ou encore à répondre
à leurs questions avec l'aide de ceux qui m'accompagnent cet
après-midi.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Commentaires de l'Opposition M. Fernand
Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, je remercie le ministre de
ses quelques remarques d'introduction. J'aimerais dans le même souffle
féliciter le président de l'Office des professions qui, suivant
les renseiqnements qui ont été publiés récem- ment,
vient d'être nommé au poste extrêmement exigeant de ministre
de la Justice au Québec.
M. Morin (Sauvé): Sous-ministre.
M. Lalonde: C'est sûrement un lapsus qu'il faudrait faire
examiner par quelque psychiatre, peut-être même du gouvernement; je
serais prêt à me soumettre.
M. Morin (Sauvé): Nous en avons plusieurs à
l'Assemblée.
M. Lalonde: Sous-ministre de la Justice. Tout d'abord, je tiens
à féliciter Me Oussault de cette marque de confiance qui lui a
été faite par le nouveau gouvernement. Je ne parlerai pas
longtemps des quelques mois extrêmement fructueux que j'ai passés
avec lui. Je crois que j'étais le premier ministre pas en un seul
mot responsable de l'application de ce programme après la mise en
vigueur de cette loi. J'ai vu en Me Dussault un pionnier extrêmement
articulé et en pleine possession des connaissances nécessaires
pour mettre en place ce nouvel organisme, aussi un collaborateur de
première classe. Je le félicite de sa nomination en lui
souhaitant mes observations ne peuvent manquer d'avoir une connotation
personnelle aussi de la part de l'Opposition le meilleur succès
dans ses nouvelles fonctions.
J'aimerais aussi féliciter le gouvernement d'avoir fait un choix
aussi heureux dans cette fonction aussi exigeante, comme je le disais, aussi
précieuse.
Etant donné que les félicitations ne sont pas de rigueur
ni très courantes dans le genre de fonction que j'occupe, est-ce que je
pourrais aussi remercier le ministre d'avoir c'est un concours de
circonstances, je veux quand même lui prêter aussi beaucoup de
bonne volonté a cet égard eu la délicatesse de
déposer le rapport de l'office à l'Assemblée nationale
avant l'étude des crédits? C'est un geste qui aide beaucoup
l'Opposition dans l'examen qu'elle doit faire avec le gouvernement des
crédits de l'année courante.
J'ai eu l'occasion, étant dans une fonction similaire, de ne pas
pouvoir déposer le rapport avant l'étude des crédits et
d'être dans cette situation. Il y a un tas de circonstances qui, souvent,
empêchent de le faire où on doit presque avoir l'impression de
mettre l'Opposition dans une situation vulnérable. J'ai eu l'occasion,
à la commission de la justice, justement, de le souligner à
l'égard du ministre de la Justice qui avait déposé,
quelques jours auparavant, le rapport annuel des activités de la
Sûreté du Québec. Je tiens à le faire actuellement
parce que je crois qu'il serait même indiqué qu'on fasse en sorte,
si possible, que le rapport d'activité des différents organismes
et des ministères des années précédant
immédiatement l'étude des crédits soit
déposé presque automatiquement, de sorte qu'on puisse faire une
discussion des crédits en connaissance de cause.
M. le Président, seulement quelques mots pour souligner le fait
que la réforme des profes-
sions est sûrement un des joyaux à la couronne des anciens
gouvernements. Je le dis avec d'autant plus de liberté que je ne faisais
pas partie de celui qui l'a adoptée. C'est un modèle, je crois,
dans ce secteur d'activité, pour beaucoup de sociétés
étrangères. En même temps, l'Office des professions qui a
été appelé à voir non seulement à
l'application quotidienne des dispositions de la loi mais aussi à
l'orientation, à la planification et même au rôle de conseil
du gouvernement, l'a fait, je crois d'une façon rarement
égalée dans cet appareil gouvernemental.
Est-ce que je pourrais, immédiatement, poser une question au
ministre sur le remplacement du président de l'office? J'aurais d'autres
remarques générales après coup.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, au moment
où je vous parle, une personne a été pressentie pour
remplir le poste et réfléchit à la décision
importante qu'elle doit prendre, d'ici quelques jours, quelques semaines au
maximum. Me Dussault doit nous quitter à la fin du mois de juin c'est
donc une décision qui présentait un certain caractère
d'urgence. Il y a déjà quelques jours que j'ai commencé
à me mettre en quête d'un successeur et je puis assurer le
député de Marguerite-Bourgeoys que j'ai recherché avant
tout une personne qui serait de la trempe de celui qui nous quitte. Donc, une
personne qui aurait à la fois une haute compétence sur le plan
technique à l'égard des professions et, en même temps, la
capacité de penser les problèmes de fond que soulève le
Code des professions, que soulève l'exercice des professions. Un homme
qui soit à la fois d'action et de pensée n'est pas facile
à trouver. Je pense avoir réussi, avec mes collègues du
gouvernement, à découvrir cette personne mais, tant que je
n'aurai pas sa réponse, je ne suis pas en mesure d'annoncer quoi que ce
soit.
M. Lalonde: Je remercie le ministre. Etant donné que la
nomination n'est pas encore faite, est-ce que le ministre accepterait nos
meilleurs voeux de succès dans le choix du remplaçant de Me
Dussault? Je n'ai pu parcourir, étant donné que j'étais
occupé à d'autres fonctions, d'autres commissions parlementaires,
qu'assez rapidement le rapport annuel et j'ai cru retrouver quelques-unes des
préoccupations que nous avons quittées, il y a quelques mois. En
particulier, sur l'évolution des services professionnels,
l'évolution du professionnalisme plutôt, dans un sens plus
large.
Les questions qu'on se posait, que la société en fait, par
le biais du gouvernement et de l'office, se pose sur l'avenir, par exemple, des
professions à titre réservé, on en fait une
synthèse très précieuse. Sur les nouvelles conditions
d'exercice des professions, il reste toutefois qu'il y a quand même
plusieurs mois on parle même de deux ans qu'on a
commencé. Ce n'est pas un reproche, c'est une réflexion en
profondeur, qui vient quand même assez tôt après le
début de la mise en oeuvre de cette loi. Devons-nous continuer à
traiter du professionnalisme au Québec de la façon dont la loi
nous l'indique? J'aimerais deman- der au ministre, et s'il le
préfère, qu'il se sente libre de demander au président de
l'assister dans la réponse, dans quelle mesure on peut s'attendre
à une déclaration de politique éventuellement à cet
égard.
Discussion générale
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le
député de Marguerite-Bourgeoys et mes collègues de
l'Assemblée et des deux côtés de la Chambre auront sans
doute pris connaissance non seulement du rapport de l'office pour
l'année 1976/77, mais du rapport que j'ai rendu public il y a quelque
temps, intitulé: "L'évolution du professionnalisme au
Québec". C'est un document fort important pour l'avenir. Je l'ai soumis,
pour avis, au Conseil interprofessionnel qui est en train d'en faire une
critique détaillée. On m'annonce même que je recevrai le
rapport du CIQ d'ici quelques jours, plus précisément le 27
juin.
Je voudrais souligner trois points majeurs qui se dégagent de ce
rapport.
Premièrement, les données recueillies permettent
d'identifier cinq guides qui, en plus des facteurs
énumérés à l'article 25 du Code des professions,
permettent à l'office de mieux évaluer l'opportunité de
suggérer au gouvernement la création de nouvelles corporations ou
encore la fusion ou la dissolution de corporations existantes. Sur le plan
pratique, les résultats de l'étude me paraissent marquer un
progrès considérable par rapport au passé. Par ailleurs,
les données du rapport incitent le gouvernement et l'office à
faire preuve de prudence dans les recommandations visant à la
création de nouvelles corporations, plus particulièrement dans le
cas de groupements oeuvrant dans les milieux de salariés où le
corporatisme professionnel semble assez peu adapté.
Dans ce cas, l'office entend jouer un rôle actif et compte
solliciter la collaboration des employeurs et des syndicats pour tenter
d'identifier, compte tenu de leurs compétences respectives, les
mécanismes aptes à permettre aux corporations de jouer
effectivement leur rôle dans les milieux salariés. Il appartient
au conseil interprofessionnel de participer activement à cette
réflexion, comme je le disais il y a un instant, et j'attends son
rapport incessamment.
Quant aux demandes des corporations à titre réservé
de voir leur statut juridique transformé en corporations d'exercice
exclusif ce sont des demandes avec lesquelles le député de
Marguerite-Bourgeoys sera sûrement tout à fait familier
l'étude conclut que l'octroi d'un exercice exclusif n'est pas une
panacée du point de vue de la protection du public. En plus de provoquer
des difficultés sérieuses au plan de la définition des
champs de pratique, l'exercice exclusif comporte plusieurs inconvénients
sociaux considérables dont le contrôle du marché par les
seuls membres de la profession et la tendance au cloisonnement des champs de
pratique, ainsi qu'au morcellement des activités de travail.
Depuis la publication du rapport, l'office a commencé à
rencontrer chacun des groupes
ayant sollicité la reconnaissance professionnelle pour discuter
de leurs demandes et évaluer dans quelle mesure chaque demande peut se
concilier avec ses orientations en ce qui a trait au développement du
professionnalisme. Ces rencontres qui actuellement, ont commencé, se
poursuivront jusqu'à l'automne. Au cours de cette période,
l'Office des professions souhaite recevoir de tous les groupes et
également de tous les milieux intéressés, d'ailleurs, les
commentaires et les suggestions aptes à l'aider à préciser
son orientation.
Pour répondre encore plus directement à la question du
député, j'ajouterai que le gouvernement, à la
lumière de cette consultation qui est commencée depuis le 8
février et qui se poursuit à l'heure actuelle, aura à
faire des choix et à énoncer une politique sur l'évolution
du professionnalisme. Le gouvernement entend le faire avant tout dans une
perspective sociale qui, je dois le dire, n'est pas éloignée de
celle qu'on trouve dans le rapport de l'office.
Peut-être y a-t-il des détails à ajouter à
cet exposé général, mais j'entends prendre conseil
à ce sujet.
L'essentiel a certainement été exposé. Il y a deux
types de problèmes. Il y a d'abord celui des 24 ou 25 groupes de
travailleurs ou de personnes qui sollicitent une reconnaissance professionnelle
et, donc, qui cherchent une recommandation positive auprès du
gouvernement de la part de l'Office des professions. Nous allons rencontrer,
d'ici à la fin de l'année 1977, tous et chacun de ces groupements
ou associations. Il y a d'autre part des professions à titre
réservé qui souhaitent une transformation de leur statut
juridique. Dans ces cas, une question plus globale se pose, à savoir si
effectivement, la fermeture de champs de pratique, qui implique le recours aux
poursuites pour pratique illégale est réaliste dans des domaines
comme ceux que nous avons présentement du côté des 17
corporations à titre réservé.
Je veux simplement souligner que la Corporation professionnelle des
médecins dépense plus de $100 000 par année en poursuites
pour pratique illégale et pas toujours avec le succès qu'elle
souhaiterait obtenir. En 1973, lorsque la Loi sur la denturologie a
été adoptée, l'Ordre des dentistes comportait,
après 30 ans de bataille sur le plan de la poursuite pour pratique
illégale des anciens techniciens dentaires dits
mécaniciens-dentistes l'Ordre des dentistes comportait, dis-je, 1800
membres, et on avait 1000 personnes qui pratiquaient dans
l'illégalité la denturologie. Ce qui démontre que cela
peut apparaître une solution-miracle que d'avoir un champ de pratique
fermé et d'empêcher des personnes non compétentes ou
estimées non compétentes d'exercer leur activité, mais en
pratique, cela peut être aussi extrêmement illusoire.
Quant à nous, à l'Office des professions, on
réfléchit plutôt dans le sens d'identifier, au profit du
public, les personnes qui offrent des garanties de compétence. Il y a un
contrôle constant sur la discipline professionnelle, sur la
compétence non seulement lors de l'évaluation des qualités
académiques. Il faudrait, dans une optique plus grande de prise en
charge des responsabilités par la population que celle-ci puisse dire:
Si on va voir, par exemple, un physiothérapeute professionnel ou un
psychologue professionnel, on a des garanties qu'on n'a pas si on va voir
d'autres personnes, dans des champs d'activité qui sont en
évolution constante et, où apparaissent de nouveaux groupes.
Egalement, je termine là-dessus, avec le développement des
techniques au niveau collégial dans presque toutes les professions
où il y a des diplômes universitaires, le découpage
d'exercice exclusif, de réserve d'un champ de pratique entre ceux qui
sortent de l'université et ceux qui sortent du CEGEP s'avère
extrêmement difficile à établir.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Juste sur ce point-là, je sais que le
président de l'office a déjà exprimé, à
diverses reprises, je pense, la possibilité de réviser en
profondeur la section 3 qui touche les professions à titre
réservé. Est-ce que ce serait possible de nous dire ce qu'en
pense le président, comment voit-il cette réforme s'il a
pensé à une réforme dans ce domaine?
M. Morin (Sauvé): Du côté des titres
réservés, comme le champ de pratique n'est pas
réservé aux membres mais seulement le port du titre, nous
essayons de faire des efforts très intensifs pour amener des
regroupements dans des secteurs d'activité connexes. Je pense, par
exemple, aux conseillers d'orientation professionnelle avec les psychologues et
d'autres. Cela nous apparaît une voie pour donner une meilleure
cohésion à certaines professions à titre
réservé. Egalement, quant à nous et nous nous
sommes exprimés en ce sens, dans le rapport sur l'évolution du
professionnalisme nous pensons que lorsque la technique de
délégation d'actes professionnels d'une corporation d'exercice
exclusif à des non-membres sera en exécution, ces actes devraient
d'abord être délégués, s'il y a une corporation
professionnelle dans le secteur, aux membres de cette corporation, pour que ces
actes soient pris en charge par des personnes sur lesquelles s'exerce un
contrôle de discipline et de compétence. Ce sont des gestes
spécifiques qui, je pense, peuvent renforcer la vie des professions
à titre réservé.
Mais, encore une fois, au-delà de ceci, c'est sûr que le
problème demeure celui de la fermeture des champs d'activité par
rapport au titre réservé. Mais il faut constater que la plupart
des professions à titre réservé sont, en même temps
des professions composées majoritairement de salariés.
Je veux simplement dire qu'il y a certainement là un
problème majeur, les corporations professionnelles ayant
extrêmement de difficultés à jouer leur rôle de
discipline, d'inspection professionnelle vis-à-vis de leurs membres
salariés. Par tradition, le mécanisme de la corporation
professionnelle a toujours été vu comme orienté vers des
règlements de pratique privée. On essaie, par
exemple, d'introduire dans les codes de déontologie des
dispositions plus particulières qui tiennent compte des demandes de
corporations professionnelles qui sont dans des situations de salariés.
De façon peut-être plus concrète, je pense qu'à la
suite de l'évaluation qui sera faite après avoir reçu des
commentaires du milieu professionnel sur le rapport concernant
l'évolution du professionalisme, il appartiendra, comme le ministre l'a
mentionné, au gouvernement de prendre une position sur l'ensemble de la
question.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'on doit conclure,
des remarques qu'on vient d'entendre, qu'aucune décision ne sera prise
à l'égard des demandes des corporations actuelles à titre
réservé, des professions à titre réservé de
se voir accorder le statut d'exercice exclusif ou des 24 ou 25 demandes pour de
nouvelles reconnaissances? Aucune décision ne serait prise avant que le
gouvernement n'ait énoncé de nouvelles politiques à la
suite de l'étude, de la consultation qui est faite actuellement sur le
rapport que le ministre a déposé il y a quelques mois.
M. Morin (Sauvé): Si j'ai bien saisi la question du
député de Marguerite-Bourgeoys, il désire savoir si le
gouvernement attendra d'avoir entendu tous les intéressés avant
d'annoncer les décisions.
M. Lalonde: Ou l'office attendra que le gouvernement ait
énoncé ses nouvelles politiques, dont le ministre vient de nous
parler, avant de donner ces reconnaissances qui sont demandées pour les
25 nouvelles corporations ou les autres.
M. Morin (Sauvé): Assurément, oui. Je crois que
c'est l'esprit dans lequel nous avons travaillé depuis que la
responsabilité m'est échue. L'office a son idée sur cette
question. Il a même fait un rapport sur l'évolution du
professionnalisme dont nous parlions tout à l'heure. L'office estime que
la situation est mûre pour un débat public et la situation est
également mûre pour un nouvel énoncé de politique.
Autrement dit, après quatre années de fonctionnement, alors que
s'exerce sur l'office un certain nombre de pressions pour la création de
nouveaux titres réservés ou de nouveaux champs d'exercice
exclusifs, l'office estime qu'on est à une croisée des chemins,
qu'il y a un certain nombre de décisions fondamentales à prendre.
Ces décisions fondamentales, il n'y a que le gouvernement qui puisse les
prendre, et, lorsqu'il les aura annoncées, l'office les appliquera, tout
simplement.
Il y a des choix qui doivent être renouvelés, en quelque
sorte. L'office, bien qu'ayant préparé le terrain, estime qu'il
ne lui appartient pas de faire ces choix fondamentaux seul et que le
gouvernement doit prendre ses responsabilités. C'est ce que nous voulons
faire. J'ajouterai que depuis le 8 février 1977 le président de
l'office a rencontré un certain nombre de groupements, et il serait
peut- être d'intérêt pour les députés membres
de cette commission que j'en mentionne quelques-uns: la Corporation des
techniciens professionnels du Québec; l'Association de l'immeuble;
l'Association d'acupuncture; l'Association des psychoéducateurs;
l'Association des technologistes agricoles; la Société des
décorateurs-ensembliers; l'Institut des conseillers en administration;
l'Association des architectes paysagistes; l'Association des
puéricultrices; la Corporation des techniciens inhalothérapeutes
du Québec. Viennent s'ajouter à cette liste d'autres groupements
qui n'ont pas encore été vus comme les bibliothécaires et
les biologistes et d'autres qui bien sûr frappent aux portes de l'office,
comme le député de Marguerite-Bourgeoys s'en souviendra, depuis
déjà quelque temps.
Ce n'est que lorsque toutes ces discussions auront eu lieu que le
gouvernement, avec, d'ailleurs, les conseils de l'office, prendra ses
décisions.
Budget de l'Office des professions
M. le Président, je ne voudrais surtout pas empêcher les
membres de la commission de poser des questions sur n'importe quel aspect du
travail de l'office, mais comme le temps passe, je voudrais ajouter quelques
commentaires sur le budget de l'année qui vient.
On aura observé qu'il n'a pas connu une croissance bien
considérable par rapport à l'année dernière. L'an
dernier ce budget était de $1 696 200. Il passe cette année
à $1 744 500, c'est-à-dire une augmentation de quelque $48 000.
Ce n'est pas beaucoup par les temps qui courent sur un budget de plus de un
million de dollars. Il faut constater que l'office est administré de
façon très serrée et de façon très
compétente.
Si les députés ont des questions sur les détails de
ce budget, sur les coûts de fonctionnement, sur le capital requis ou
encore sur les paiements de transferts ou les prêts et avances, je suis
tout à fait disposé à répondre à leurs
questions.
M. Lalonde: M. le Président, j'ai remarqué dans le
rapport annuel qu'une des préoccupations les plus immédiates et
sûrement prioritaires, parce qu'elle est inscrite dans le rapport en
toute priorité, c'est une plus grande ouverture à l'information.
Et en sous-paragraphe du rapport, je n'ai pas de numéro de page, on
parle d'informer sur les règlements visant la protection du public.
L'augmentation de $48 000 du budget va-t-elle permettre à l'office, dans
le cours de l'exercice actuel, de mettre sur pied un programme? L'office
croit-il que ce programme visant à informer le public sur la protection
que la loi lui donne et que les corporations doivent lui offrir doit être
financé par les corporations elles-mêmes, par les groupes
eux-mêmes?
M. Morin (Sauvé): Là-dessus, je voudrais indiquer
que, justement l'an dernier, on avait une priorité majeure à
l'Office des professions de faire de
l'information sur les droits et recours à la disposition des
usagers de services professionnels. Cela a conduit à la publication
d'une brochure à plus d'un million d'exemplaires dans Perspectives du 2
mai 1976.
Egalement, suite à ceci, il y a eu une campagne dans le cadre de
la Minute juridique en collaboration avec la Commission des services
juridiques. Des messages plus spécifiques, au-delà de 4500, ont
été adressés à la population, du mois de septembre
au mois de janvier de l'an dernier. C'était une première
démarche importante.
Du côté de l'information, je voudrais souligner que les
médias d'information ont énormément collaboré, et
que c'est important, dans de tels cas, de profiter des occasions qui ne
demandent pas de déboursés budgétaires pour informer les
citoyens et les usagers de services professionnels non seulement sur cette
nouvelle législation professionnelle, mais également sur les
points d'intérêts immédiats qui les concernent.
Il est certain que les corporations professionnelles ont un rôle
important à jouer dans le domaine de l'information. C'est d'ailleurs
l'un des indicateurs de la protection du public, à savoir si une
corporation fait ou non des démarches d'information auprès de sa
clientèle.
Il y a divers mécanismes qui ont été
suggérés. Par exemple, dans la réglementation sur la tenue
des cabinets de consultation et des bureaux, de tenir à la disposition
du public les règlements fondamentaux comme les codes de
déontologie, et les règlements concernant la conciliation et
l'arbitrage des comptes.
Cela nous apparaît comme des moyens très concrets de
permettre aux personnes qui sont dans les salles d'attente, dans les cabinets
de consultation de se familiariser effectivement avec ces types de
documents.
On a introduit dans les règlements de la plupart des corporations
professionnelles ce type de dispositions.
Du côté des corporations elles-mêmes, bien sûr,
il y a un travail d'information à accentuer. On est conscient que cela
prend souvent des budgets. On a constaté fréquemment qu'il y a
plusieurs corporations qui font de l'information; le Barreau en a fait
énormément depuis quelques années, pour en mentionner une;
la Corporation des médecins en a fait également et d'autres.
Il y a toujours un écueil dans l'information faite par les
corporations professionnelles. C'est souvent une information qui vise une
certaine promotion de la profession et l'écueil vient du fait que
d'autres professions c'est délicat la marge entre certaines
professions la ressentent parfois vivement ou trouvent qu'on
empiète sur un champ de pratique. L'office doit collaborer avec les
corporations professionnelles pour faire en sorte que les brochures et autres
documents d'information ne créent pas de tensions interprofessionnelles,
mais soient de nature à donner l'information la plus objective possible
au public.
C'est à peu près ce que je peux dire à ce moment.
On n'a pas amorcé sur le plan de l'information de démarche aussi
précise que celles que nous avions durant la dernière
année, à la suite de la brochure publiée à plus
d'un million d'exemplaires et de la Minute juridique, mais l'Office des
professions attache la plus haute importance à cette fonction
d'information. Je pense que c'est un de ses rôles majeurs, qui peut
permettre aux usagers de services professionnels d'avoir peut-être un
meilleur réflexe, de développer une certaine autoprotection
vis-à-vis des services professionnels. C'est un milieu où on a eu
tendance à se laisser prendre en charge peut-être trop
aisément. On essaie justement de promouvoir cette prise en charge en
mettant à la disponibilité des usagers de services des documents
aussi majeurs que le type de règlement que j'ai mentionné tout
à l'heure.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que le budget actuel
contient, quand même, des ressources financières? Même si,
comme le président de l'office vient de le mentionner, il n'y a pas de
programme aussi précis que pour l'exercice précédent, le
budget prévoit-il quand même des ressources à cet
égard et quelle serait la différence entre les ressources que
l'office avait il y a un an et celles qui sont prévues actuellement?
M. Morin (Sauvé): C'est dans le secteur des services.
Depuis le début, l'Office des professions a eu des sommes d'argent assez
importantes, malgré tout, par rapport à l'ampleur de son budget,
en ce qui a trait à des commandites de recherches, pour appuyer notre
service de recherches, sommes qui peuvent être utilisées pour des
fins d'information également. On a l'intention d'essayer de faire
certaines brochures, mais plus spécifiques que celles que nous avons
faites, par groupes de professions par exemple. C'est toujours délicat,
encore une fois. On ne veut pas prendre la place des corporations
professionnelles en ce domaine, mais on voudrait, dans des secteurs, par
exemple, comme les services dentaires où il y a quatre professions qui
se chevauchent: dentistes, denturologistes, techniciens dentaires,
hygiénistes dentaires, pouvoir donner l'information au public. Il y a le
problème de s'assurer qu'on a l'accord des corporations professionnelles
sur ce type de documentation, mais on a les sommes dans notre budget, au titre
des services, pour faire ce type de démarche.
M. Lalonde: Ma question était: Quel est l'écart
entre l'exercice précédent et l'exercice courant à ce
poste?
M. Morin (Sauvé): Etant donné qu'on a
dépensé l'an dernier un bon montant pour la campagne
d'information, je pense qu'on a l'équivalent de l'an dernier. La
campagne d'information se chiffrait par au-delà de $80 000.
M. Lalonde: C'est ce que je voulais savoir. Est-ce que, autrement
dit, l'office avait l'intention de dépenser beaucoup moins malgré
cette priorité ou l'équivalent?
M. Morin (Sauvé): Non, on a l'équivalent de l'an
dernier.
M. Fontaine: M. le Président, dans le secteur services, on
avait, l'an dernier, $488 000, mais, cette année, on a $444 000, $44 000
de moins. L'écart vient d'où?
M. Morin (Sauvé): En fait il y a eu des restrictions
budgétaires demandées par le Conseil du trésor l'automne
dernier.
Effectivement, il n'y a pas, dans un budget comme celui de l'office,
beaucoup de place où on peut compresser. On voit la part des traitements
des employés de l'office. Il y a des sommes fixes qu'on doit rembourser
aux présidents de comités de discipline. Egalement, on doit
rembourser les membres externes, les administrateurs que nous nommons aux
corporations professionnelles, pour leurs frais de déplacement lorsqu'il
y a des jetons de présence. C'était l'endroit où il
pouvait y avoir une compression. Effectivement, je dois dire que, malgré
la compression et le rythme de croissance, l'Office des professions a les
sommes nécessaires pour s'acquitter de sa tâche avec satisfaction
durant la prochaine année.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: M. le Président, je vous remercie de m'avoir
donné la parole. Je me rends compte, entre autres, que le débat
préliminaire est terminé, qu'on est très loin, d'ailleurs,
dans l'étude du programme 12, élément 1 et unique. Si vous
me permettez, je reviendrai sur le débat initial pour enfin tomber
directement, par la suite, de plain-pied au programme 12.
M. Lalonde: M. le Président, je ne voulais pas interrompre
le député, mais nous sommes encore dans les
généralités et j'invoque, d'ailleurs, le même
argument que le député pour revenir sur' d'autres questions plus
tard, au moins jusqu'à 18 heures.
Le Président (M. Boucher): Au programme, il n'y a pas
d'éléments.
M. Morin (Sauvé): De toute façon, M. le
Président, en ce qui nous concerne, nous sommes prêts à
traiter simultanément les questions générales et les
détails. Si les députés veulent en convenir, nous
recevrons toutes les questions.
Le Président (M. Boucher): II n'y a pas
d'élément à ce programme, alors, vous pouvez parler de
n'importe quoi.
Evolution du professionnalisme
M. Fallu: Merci de votre tolérance, M. le
Président. J'aimerais, pour ma part, également, féliciter
M. Dussault pour le défi nouveau qu'il va affronter. Après avoir
mis sur pied l'Office des professions, ce sera sans doute tout un défi
que de voir maintenant ne serait-ce que la réforme du Code civil.
J'aimerais également le féliciter pour l'excellence de son
rapport annuel qui est beaucoup plus qu'un simple rapport factuel d'un exercice
annuel et c'est une qualité rare dans des rapports et qui
va jusqu'aux aspects prospectifs. C'est ainsi, entre autres, qu'au moment
où on nous annonce, dans le rapport annuel, qu'il y a certains
problèmes relatifs à l'Office des professions,
simultanément, on nous présente, en Chambre, en première
lecture, le projet de loi 25 que nous aurons bientôt, d'ailleurs, le
plaisir d'étudier ici même à cette commission.
A propos de l'Office des professions, j'aimerais souligner, entre
autres, un aspect qui fait déjà partie, sans doute, de la
préoccupation de l'office, mais sur lequel j'aimerais insister, c'est
celui de la formation des professionnels. Certes, le tamisage, j'allais dire,
de l'entrée dans les professions se fait déjà passablement
bien. Mais il est un aspect sur lequel, et à titres divers, d'ailleurs,
les professions mettent de plus en plus d'insistance et vers lequel je crois
que les professions auraient avantage à tendre, c'est celui de ce que
j'appellerais, pour parler en vocabulaire de déformation
professionnelle, une véritable éducation récurrente. Je
veux dire par là, pour traduire en langage vulgaire...
M. Morin (Sauvé): La formation continue.
M. Fallu: Exactement. Les professionnels doivent, de plus en
plus, retourner à l'école. Et l'école, à ce moment,
ce n'est pas nécessairement l'université ou le CEGEP ou
autrement, ne plus j'allais dire, pour caricaturer à la limite
se fier uniquement au vendeur au détail de pilules, ou le
démonstrateur d'instruments pour parfaire leur formation, mais que dans
chaque profession, on mette véritablement en oeuvre des programmes
d'éducation récurrente, de telle sorte que nos professionnels
soient continuellement à la fine pointe de leur propre science, de leur
propre technique. D'ailleurs, si je le dis, ce n'est pas nécessairement
pour accuser les professions, loin de là. Je sais que certaines de ces
professions se sont déjà donné des mécanismes
internes pour pouvoir amener chacun de leurs membres a un degré de
perfection.
Je soulignerai en passant et sans vouloir faire d'exclusivité les
dentistes qui, dans le monde d'ailleurs, ont une des meilleures
réputations parce que, justement, ils se sont donné des
mécanismes de recyclage. Il en va d'ailleurs un peu de même avec
les optométristes. Quant à la protection du consommateur, il y a
eu, et cela est assez net, deux aspects: celui de l'information et celui d'un
mécanisme judiciaire mis sur pied. Du côté de
l'information, qui représente d'ailleurs près de 25% du budget
total de l'office, je crois que, si dans un prochain budget il y avait une part
supplémentaire à mettre, c'est vraiment de ce côté
qu'il faudrait le faire. L'autre aspect de la protection du consommateur, c'est
l'aspect judiciable qui maintenant ne laisse plus à un certain code
d'éthique ou de déontologie d'une profession le jugement, mais
bien à un tribunal qui, n'étant pas partie, va déjà
et
dorénavant mieux protéger le consommateur. Quant à
l'avenir du professionnalisme, j'espère que, et je m'adresse, M. le
Président, par vous-même au ministre responsable, je souhaiterais
un débat public. Un débat public car les professions au
Québec ont été relativement mal perçues dans notre
société, dans leurs traditions. Au moment où il y a chez
eux un changement très profond qui s'opère, au moment où
les ingénieurs sont en large part des salariés, pour ne pas dire
des syndiqués déjà, au moment où les
médecins deviennent et deviendront très certainement de plus en
plus des salariés, au moment, bref, où les avocats de la
même façon deviennent, et surtout avec le nouveau gouvernement, de
plus en plus des salariés...
M. Lalonde: Tout le monde sera des salariés.
M. Fallu: ... il faudrait vraiment revoir, et revoir dans un
débat public, l'orientation du professionnalisme au Québec. Quant
aux éléments de détail, j'y reviendrai un peu plus
tard.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je
commencer par la dernière question soulevée par le
député et portant sur l'évolution des professions et la
nécessité d'un débat public sur le rapport qui a
été soumis par l'office? Je dois dire que ce débat public,
il n'a jamais cessé, depuis 1973. J'ai été moi-même
témoin, au sein de plusieurs commissions parlementaires, de
débats considérables sur le rôle de la profession, sur les
limites que ce système permettait, sur les limites qui existaient
à ce système pour en venir à la protection du public et en
même temps assurer une haute qualité de services. Il y a eu de
plus, avant la rédaction du rapport sur l'évolution du
professionnalisme, deux séries de consultation publique qui ont
été effectuées par l'office et qui ont soulevé
beaucoup d'intérêt dans tous les milieux qui s'intéressent
à la question. Si le député voulait préciser ce
qu'il entend par débat public, peut-être serais-je en mesure de
lui dire si nous devrions aller plus loin encore que tout ce qui a
été fait jusqu'ici. Il est bien certain que, lorsque le
gouvernement de son côté va annoncer ses politiques, il y aura des
retombées publiques et il y aura certainement des réactions dans
l'opinion publique. De même, lorsque l'office d'ici quelques jours rendra
public son rapport sur les honoraires professionnels, on peut s'attendre qu'il
y ait une réaction dans l'opinion publique.
Je vois déjà le député de Saint-Louis qui
craint pour son avenir.
M. Blank: J'ai déjà fait un rapport à la
AIB, je ne veux pas faire un autre rapport.
M. Morin (Sauvé): Justement.
M. Lalonde: II y en a qui ont l'avenir derrière eux,
à part cela.
M. Fallu: Oui. Je répondrai par une étude en
commission parlementaire.
M. Morin (Sauvé): Si tel est le cas, je puis rassurer le
député. Avant que le Code des professions ne soit modifié,
à la suite des conclusions que le gouvernement tirera de ce rapport sur
l'évolution du professionnalisme et des contacts auxquels l'office
procède en ce moment avec tous les groupements qui demandent un titre
réservé ou un champ exclusif, il y aura certainement à ce
moment un débat en commission parlementaire. Et même probablement
un débat dans l'opinion publique parce que nous touchons là, on
s'en rend compte, à des intérêts sociaux fort importants,
tant du côté de ceux qui demandent à être
protégés que du côté des consommateurs de
services.
Le député a également soulevé deux autres
questions auxquelles je voudrais répondre très rapidement. La
première a trait à la formation des professionnels. Je voudrais
lui dire qu'en ce moment une étude est en voie d'être
complétée au sein de l'office. Cette vaste étude sur la
formation initiale et la formation continue des professionnels et sur le
rôle des nombreux organismes qui sont concernés devrait être
rendue publique au cours de l'année qui vient. Je ne doute pas qu'elle
stimule la réflexion de tous ceux qui s'intéressent aux
problèmes liés à la formation des professionnels, qui
souhaitent participer à la recherche de mesures capables
d'améliorer, en fonction des exigences de la protection du public, le
fonctionnement du système de formation des professionnels.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ... je suis entièrement d'accord avec le
ministre pour consulter le public lorsqu'il se proposera de changer les
orientations fondamentales concernant la protection du public et le Code des
professions.
M. Morin (Sauvé): Si elles sont changées.
M. Lalonde: Oui. Parce qu'il l'a fait pour la loi 25, qui a une
portée quand même beaucoup moins en profondeur, je sais que le
ministre et le gouvernement trouveront indiqué de le faire.
J'aimerais poser quelques questions un peu plus précises. En ce
qui concerne la publication, l'information, on sait que la loi prévoit
la publication des règlements soit en vertu de l'article 92 ou de
l'article 177, et peut-être même en vertu d'autres dispositions de
la loi, dans la Gazette officielle. Dans le passé, j'ai eu l'occasion de
me rendre compte jusqu'à quel point cette exigence pouvait comporter de
lourdeurs au niveau des coûts aussi. Est-ce que des dispositions ont
été prises? Par exemple, est-ce que le gouvernement continue
je crois qu'il avait commencé à le faire
à
aider financièrement certaines corporations qui n'ont pas les
moyens de supporter ce coût?
M. Morin (Sauvé): Le député de
Marguerite-Bourgeoys, qui a été responsable de l'application du
Code des professions, sait que lorsque les règlements sont
publiés dans la Gazette officielle, ou encore les avis de
règlements parce que certains doivent faire l'objet d'une
première publication avant même que le gouvernement ne
décide du contenu définitif des règlements, ces
publications ne coûtent rien aux corporations.
M. Lalonde: Aux corporations.
M. Morin (Sauvé): Rien du tout, quelle que soit leur
longueur, et Dieu sait s'il y en a qui sont longs et
détaillés.
D'autre part, l'office possède également des conseillers
juridiques qui sont à la disposition des professions pour les aider dans
la réaction de leurs règlements ou même pour toute question
d'ordre professionnel qui pourrait surgir.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'il y a des
règlements qui ont été adoptés par l'office
à la place des corporations? Je pense plus particulièrement aux
codes de déontologie dont l'adoption est imposée par la loi aux
diverses corporations. Est-ce que l'adoption de ces codes de déontologie
est terminée actuellement ou est-ce que c'est en bonne voie?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le gouvernement
a dû à l'occasion et sur la recommandation de l'office,
naturellement, modifier certaines parties de règlements qui ne lui
paraissaient pas satisfaisantes. Il est bien normal que le gouvernement doive
agir de la sorte. Cela se faisait du temps où le député de
Marguerite-Bourgeoys était responsable de l'office et cela a
continué de se faire depuis lors, parce que la loi prévoit que
c'est le gouvernement qui a le dernier mot dans la rédaction de ces
règlements.
Toute l'idée de la mise en place de l'office, c'est
précisément de s'assurer que ces règlements ne sont pas
laissés à l'entière liberté de chaque ordre
professionnel. D'ailleurs, même auparavant, il en était ainsi,
sauf que, si ma mémoire est bonne, chaque ordre professionnel avait
accès directement au gouvernement. Celui-ci devait, à ce
moment-là, exercer un certain pouvoir de contrôle sur le contenu
des règlements. Il n'acceptait pas les règlements tels qu'ils lui
étaient présentés. Je dois dire que, depuis que l'office
existe, le contrôle est beaucoup plus méticuleux et serré,
c'est sûr.
M. Lalonde: Oui, cela je le savais, M. le Président. Ce
que je voulais savoir, c'est seulement le progrès qui avait
été fait. On sait que des corporations ont plus de ressources que
d'autres. Je pense plus particulièrement au code de déontologie
qui, quand même, édicte la conduite que les membres doivent suivre
à l'égard du public. Est-ce que c'est chose faite? Je sais qu'on
s'attendait, à ce moment-là, que cela prenne quand même
quelques années. Il y a presque quatre ans que c'est en place.
J'aimerais simplement qu'on nous dise où on en est.
M. Morin (Sauvé): D'ici l'été, il y aura 21
codes de déontologie en vigueur sur 38, de nouveaux codes
élaborés en fonction du Code des professions. Cela ne veut pas
dire que, dans les autres cas, il n'y a pas de code de déontologie, mais
ce sont les anciens qui continuent à s'appliquer. Il y a eu un travail
considérable de fait dans le cas du Barreau, par exemple, où, le
4 mai dernier, le code de déontologie a été
approuvé après un travail de plus de deux ans. Alors, 21 codes de
déontologie auront été adoptés au mois de
juillet.
Egalement, je voudrais simplement souligner que, depuis le début
de l'Office des professions, on n'a pas encore utilisé notre pouvoir
supplétif d'établir, à la place d'une corporation, un
règlement dans son entier. On a préféré, à
force de discussions, essayer de faire en sorte que les règlements
soient satisfaisants pour la protection du public. Bien sûr, cela ne nous
a pas empêchés, comme le ministre responsable l'a souligné,
de recommander au gouvernement au moment de l'approbation par
arrêté en conseil d'apporter, en fonction des pouvoirs qui lui
appartiennent à l'article 93 du Code des professions, des changements
à des règlements. Mais on n'a pas été
obligé, à ce moment-ci, d'adopter véritablement, de
façon complète, un règlement à la place d'une
corporation qui ne voulait pas le faire.
On ne souhaite pas avoir à le faire, bien sûr, le pouvoir
est là et je pense qu'il est important mais on essaie de procéder
plutôt par persuasion et discussion.
Sur l'ensemble de la réglementation, il y a dans le rapport
d'activités des tableaux, aux pages 77 et 78, qui donnent l'état
de la situation, au 31 mars 1977. Au fond, il y a 700 règlements
à adopter en vertu du Code des professions. C'est énorme.
Il y avait, le 31 mars, du côté des règlements
obligatoires, 227 règlements présentés à l'Office,
et du côté des règlements facultatifs, 237. Cela veut dire
qu'il y en avait 464 dans le circuit, le 31 mars. On est rendu à
au-delà de 500, présentement. Les tableaux indiquent ceux qui ont
subi la première publication et même une deuxième pour une
approbation définitive. On a procédé en faisant une
quinzaine ou une vingtaine de règlements modèles, de
règlements types, qu'on adapte en discutant avec chacune des
corporations professionnelles, ce qui permet d'espérer passer à
travers. Je pense que tous ces règlements modèles sont bien
connus maintenant des corporations. Il s'agit de considérer les
adaptations nécessaires pour tenir compte des particularités
importantes de chacune des professions.
On peut dire que sur l'ensemble de la réglementation, le point de
non retour est franchi. C'est une opération considérable, mais
les statistiques, jusqu'au 31 mars, démontrent qu'il y a lieu
d'être optimiste pour compléter dans la prochaine année ou
la prochaine année et demie au plus.
M. Lalonde: J'aurais une dernière question, M. le
Président, tout en m'excusant de poser des questions qui trouvent la
réponse dans le rapport annuel. Je l'ai parcouru, surtout le
début, mais je n'ai pas eu le temps de consulter tous les tableaux.
J'aimerais savoir, avant de conclure, la date que le ministre aurait en
tête pour la tenue des séances de la commission parlementaire
concernant le projet de loi no 25. Est-ce qu'il s'attend de faire cela à
l'automne ou si ce sera avant l'ajournement de l'été, s'il y en a
un?
M. Morin (Sauvé): Non, je peux rassurer le
député de Marguerite-Bourgeoys. L'intention du gouvernement,
telle qu'elle m'était énoncée encore tout récemment
par le leader du gouvernement en Chambre, c'est de procéder avant
l'ajournement d'été.
M. Lalonde: S'il y en a un.
M. Morin (Sauvé): S'il y en a un, bien sûr.
M. Lalonde: II ne faut pas être trop présomptueux,
M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Non, mais, bien sûr, nous aurons
d'autant plus de latitude pour le présenter à l'Assemblée
et à la commission parlementaire que, peut-être, nous aurons le
loisir de siéger ici durant tout le mois d'août. Peut-être
n'y aura-t-il plus jamais de vacances, c'est possible.
M. Lalonde: Pourquoi pas? En terminant, seulement un commentaire.
Le député tantôt je m'excuse, j'oublie le nom de son
comté de Terrebonne, mentionnait la qualité, la haute
tenue, la facture du rapport annuel qu'il a consulté. Il soulignait le
caractère de prospection de ce rapport. J'aimerais abonder dans ce sens
et aussi lui suggérer de lire même le premier rapport de l'Office
des professions. Il verra que l'Office on ne peut pas mentionner
l'Office sans parler du président avait insisté, avait
tenu à donner à ce rapport un caractère tel que le
ministre responsable était sûrement l'un des plus fiers de
déposer ce rapport à l'Assemblée nationale.
M. Morin (Sauvé): Faut-il ajouter, M. le Président,
qu'à ce moment-là le ministre responsable était le
député de Marguerite-Bourgeoys?
M. Lalonde: C'est un témoignage.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
Inspection professionnelle
M. Fontaine: Au niveau de l'inspection professionnelle, la
section VI, je serais intéressé de connaître quelles ont
été les difficultés rencontrées par l'office et les
diverses corporations professionnelles relativement à la mise en
application des comités d'inspection. Est-ce que cela fonctionne
raisonnablement?
M. Morin (Sauvé): Les comités sont à peu
près tous sur pied. Tous les règlements prévoyant la
procédure de fonctionnement des comités d'inspection
professionnelle sont en vigueur. C'est une chose. C'est de la structure. Le
plus difficile pour chaque profession c'est de développer des outils
d'évaluation de la compétence qui soient objectifs, non
discriminatoires, non arbitraires, particulièrement dans la zone grise.
Il ne s'agit pas de faire prévaloir une doctrine ou une école de
pensée à l'intérieur d'une profession. Il faut prendre
bien soin de conserver le pluralisme, les débats vigoureux sur le plan
scientifique. Il y a des outils qui sont différents, qu'on parle de
comptables agréés ou de médecins ou d'autres professions.
Il y a une réflexion importante qui se fait actuellement dans les
corporations professionnelles. Il y a deux phases prévues dans les
règlements. Une phase dite préventive où il y a un
programme de surveillance générale de la profession qui est
publié à chaque année dans le bulletin de la corporation
professionnelle pour les membres. Sur échantillon on évalue les
dossiers. On regarde la pratique des membres purement sur échantillon.
On n'a pas à se sentir visé comme professionnel lorsque ceci se
produit. Ceci donne un effet de retour pour déceler les lacunes qu'il
pourrait y avoir autant au niveau des programmes de formation initiale que
continue. Egalement les lacunes possibles dans la pratique d'un praticien
individuel. Evidemment il y a une phase coercitive qui peut intervenir; le
comité peut recommander au bureau d'imposer un stage de perfectionnement
et même de limiter le permis de pratique pendant la durée du
stage.
C'est évidemment la phase la plus délicate. Il est
important qu'il y ait des critères précis. Nous avons tenu un
colloque avec l'ensemble des corporations au cours de la dernière
année sur le mécanisme de l'inspection professionnelle. On a
l'intention de poursuivre la discussion parce que c'est une question qui ne
peut pas se régler dans une seule année, qui est
particuliarisée à chaque profession. Evidemment, il est important
que le milieu professionnel perçoive cette inspection comme une mesure
positive et non pas comme une mesure répressive dont on a peur. Il y a
toute une présentation qui est extrêmement importante à
faire de la part des corporations professionnelles. Dans l'ensemble, compte
tenu de la difficulté et de la nouveauté de ce type de
mécanisme, on peut dire que cela procède très bien dans la
plupart des professions.
M. Fontaine: Je ne sais pas si c'est possible de savoir s'il y a
des professionnels qui ont dû effectivement aller faire un stage de
perfectionnement.
M. Morin (Sauvé): Oui. Cela n'a pas été fait
de façon coercitive. Cela a été fait sur une base
volontaire où on a convaincu, dans des professions, en médecine
en particulier, des professionnels de quitter leur pratique pendant un certain
temps afin de se recycler dans un centre hospitalier. Il y a eu une restriction
de leur permis d'exercice. Ceci fai-
sait suite au fonctionnement du comité d'inspection
professionnelle. Il y en a eu dans d'autres professions également. Le
mécanisme même dans sa phase où on demande à un
professionnel de réduire son champ de pratique et de suivre des stages
de perfectionnement, a été appliqué dans certaines
professions. C'était une réalité. C'est plus que des
mots.
M. Fontaine: Est-ce la profession elle-même qui demande
à son membre de se recycler?
M. Morin (Sauvé): Ce sont des comités d'inspection
professionnelle c'est la raison même de l'autogestion
professionnelle, c'est le coeur de la science, de l'aspect scientifique et de
l'application à des cas particuliers qui sont composés de
pairs, de membres de chacune des professions.
M. Fontaine: Au niveau des enquêtes touchant
l'intégrité, la contestation des honoraires professionnels et le
remboursement de sommes détournées, est-ce qu'il y a eu beaucoup
de plaintes de ce côté?
M. Morin (Sauvé): L'office publie deux fois par
année un recueil des décisions disciplinaires concernant les
corporations professionnelles. Dans le dernier rapport d'activité
le prochain doit venir très rapidement on fait état de 250
décisions rendues, dont 34 par le Tribunal des professions. Il y a
habituellement de douze à quinze corporations professionnelles où
il y a des sentences disciplinaires à chaque année, et on voit
que le mécanisme s'accroît. L'exercice de la discipline dans les
professions, je pense, est de plus en plus vigilant, tel que le
révèle le grossissement de ces recueils disciplinaires.
Du côté de l'arbitrage des comptes, et du fonds
d'indemnisation, il y a d'abord avant l'arbitrage la conciliation et cela donne
de bons résultats. L'arbitrage lui-même, évidemment,
implique des comptes plus élevés et il n'y a pas une dizaine
d'arbitrages par année. Nous recevons des plaintes à l'Office des
professions également. Sans avoir par la loi de pouvoir
spécifique, on fait un suivi administratif précis. On en a
reçu au-delà de 230 ou 238, je pense, durant la dernière
année. Cela concerne surtout des problèmes de compétence
et des problèmes de montants d'honoraires professionnels. On en a
beaucoup, notamment, dans le domaine des services dentaires.
M. Fontaine: Je vois, dans votre rapport, que l'office
étudie différentes formules dont une qui permettrait aux
professionnels de faire une certaine publicité sur le prix des actes
qu'ils exécutent le plus couramment et sur leur tarif horaire. Est-ce
que vous pourriez commenter cette phrase?
M. Morin (Sauvé): Le rapport de l'office sur la
réglementation des honoraires professionnels dans la pratique
privée sera rendu public dans la dernière semaine du mois de juin
et sera aupara- vant remis au ministre responsable. C'est un rapport qui fait
suite à trois ans d'étude. On avait d'abord commandité une
étude technique auprès du Centre de recherche en
développement économique de l'Université de
Montréal. Par la suite, il y a eu des consultations publiques où
on a reçu 32 mémoires que nous avons auditionnés à
Montréal et à Québec, et en vertu de l'article 12-U du
Code des professions nous devons faire nos recommandations au gouvernement.
Bien sûr, la décision ultime appartiendra au gouvernement
dans ce domaine. C'est un rapport où on fait état de l'ensemble
de la question et des solutions adoptées ou recommandées par
l'office. Il me serait difficile d'élaborer plus longuement, mais je
pense que je puis affirmer avec certitude qu'avant le 30 juin le rapport sera
rendu public par l'Office des professions. Il y aura certainement un
débat important qui s'ensuivra, une discussion dans l'ensemble des
professions au Québec.
M. Fontaine: On sait que, dans plusieurs professions,
actuellement, il y a une saturation des membres, notamment peut-être au
Barreau. Est-ce que la question du contingentement des professions a fait
l'objet d'une étude à l'office?
M. Morin (Sauvé): C'est une question qui a une
portée considérable qui dépasse, je crois, les
responsabilités de l'Office des professions. C'est une
responsabilité proprement gouvernementale. Elle touche, sans doute, plus
l'éducation que les professions proprement dites. A titre de ministre de
l'Education, j'ai eu à me pencher là-dessus récemment. Le
tout est de savoir si les études doivent nécessairement
déboucher sur l'exercice d'une profession ou d'un métier, puisque
la même chose peut être dite pour les diverses techniques, ou si
les études doivent être conçues comme étant
indépendantes du marché du travail. Je vous avouerai que c'est un
dilemme auquel se heurtent de très nombreux pays d'Occident à
l'heure actuelle et que je n'ai pas tiré de conclusions
définitives là-dessus. D'ailleurs, partout dans les pays
occidentaux et même au-delà, on s'interroge.
J'ai, cependant, des tendances et ma tendance, c'est de ne pas lier de
façon directe les études et le marché du travail, les
études et la profession. Dans mon esprit, les études doivent
demeurer le plus libres possible. Mais les étudiants doivent être
prévenus au départ que certains champs d'activités sont
encombrés, tandis que d'autres le sont beaucoup moins. Je peux vous
dire, à l'heure actuelle, ci cela peut vous être utile, messieurs
les députés, que, dans le domaine des techniques administratives,
il y a 600 places disponibles dans les écoles, les collèges et
les universités québécoises. Il n'y a pas de candidats,
tandis que pour d'autres techniques ou professions, il y a, comme le fait
observer le député, encombrement.
La tendance que j'ai énoncée ne forme pas encore une
politique gouvernementale. C'est une orientation propre au ministre que je
viens d'énoncer. Je voudrais qu'il soit clair que nous
n'en viendrons pas à des conclusions de façon
immédiate là-dessus. Cela fait d'ailleurs plusieurs années
que plusieurs pays s'interrogent et n'en sont pas venus à des
conclusions définitives. Sauf que je serai probablement conduit de plus
en plus à bien expliquer publiquement à tous les
intéressés qu'étant donné les variations
continuelles du marché du travail et des professions, on ne peut pas
dire à un étudiant qui entreprend telles ou telles études,
qu'il peut compter sur une profession ou un débouché à la
sortie. Il faut donc de plus en plus que ceux qui s'intéressent aux
études le fassent par goût et par talent. Pour le reste, ce sont
des problèmes qui ne sont pas toujours liés à
l'éducation, mais qui sont liés au développement
économique, à des questions beaucoup plus vastes sur lesquelles
le ministre de l'Education n'exerce pas de contrôle absolu, cela va sans
dire.
M. Fontaine: Est-ce qu'il y a un comité d'étude,
à votre ministère, qui se penche sur cette question?
M. Morin (Sauvé): Non, il n'y a pas au ministère de
comités d'étude qui se penche sur la question. Mais je puis vous
dire que plusieurs personnes, au ministère, songent à cet aspect
du problème depuis déjà quelque temps, depuis
déjà même un certain temps. Quant à moi, j'y
songeais même avant d'arriver à la responsabilité de
l'éducation. J'imagine, d'ailleurs, que plusieurs députés
autour de cette table ont dû se pencher là-dessus avant de devenir
députés.
M. Lalonde: II n'y a pas d'encombrement a niveau des
députés, par exemple!
M. Morin (Sauvé): Mais il y a encombrement au niveau des
candidats!
M. Lalonde: Au niveau des candidats. Mais là il y a une
sorte de formule qui fait le tamisage.
M. Morin (Sauvé): C'est cela. Ce n'est pas un examen
professionnel, malheureusement.
M. Lalonde: Malheureusement, maintenant surtout.
M. Morin (Sauvé): Je ne passerai pas de commentaires, mais
cela fait quelque temps qu'on pourrait souhaiter un examen professionnel.
M. Fontaine: Pour terminer, je voudrais également, comme
tous les autres membres de cette commission, féliciter, bien sûr,
M. Dussault, pour l'accession à son nouveau poste de sous-ministre de la
Justice. Je pense que sa nomination était fort justifiée. Je dois
le féliciter également pour le professionnalisme et le travail
acharné avec lequel il a travaillé depuis le début de la
formation de l'Office des professions.
Je pense que son travail a fait que cet organisme, actuellement, est
empreint d'une grande crédibilité et cela facilitera d'autant
plus la tâche à son successeur. Je suis assuré
également qu'il aura beaucoup de travail à effectuer au
ministère de la Justice. Chose peut-être cocasse, il aura
sûrement particulièrement à lutter sur la question de la
constitutionnalité du tribunal qu'il avait fondé lui-même.
Je lui souhaite le plus grand succès à son nouveau poste.
M. Fallu: M. le Président, quelques brèves
questions, si vous permettez.
Le Président (M. Boucher): Une courte question, M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: A propos des communications, est-ce que l'ensemble des
contrats qui sont donnés le sont après soumissions publiques,
notamment dans les imprimés?
M. Morin (Sauvé): Oui, tous les imprimés ont
été donnés après appel d'offres.
M. Fallu: Merci. $175 000 de transferts, c'est pour quoi, de
façon générale, ou à qui ces transferts sont-ils
accordés?
M. Morin (Sauvé): Ce sont les subventions que le ministre
responsable octroie ou qu'il peut octroyer, en vertu de la loi, aux
corporations professionnelles pour leur aider à accomplir leur
tâche de protection du public.
M. Fallu: Merci. Dans le rapport, vous soulignez, entre autres,
la difficulté de nommer les administrateurs externes. Je ne sais pas si
vous avez des solutions. J'ai vécu, en tout cas, des situations assez
cocasses là-dedans, j'ai vu des gens, très peu
représentatifs du milieu qu'ils devaient représenter. Je pense
qu'il faudrait vraiment revoir cela à l'Office des professions.
A l'annexe 5, il est question des avocats des comités de
discipline des corporations professionnelles. A la lecture, j'ai
été relativement étonné d'apprendre que des
connaissances figuraient dans ces listes nominales. J'aimerais savoir
rapidement comment et par qui ils sont désignés; par qui sont-ils
rémunérés et pour combien de temps sont nommés ces
gens?
M. Morin (Sauvé): En vertu de la loi, les avocats
appelés à présider les comités de discipline ou
à agir comme substituts pour prendre des causes sur une base ad hoc sont
nommés par le gouvernement, après consultation du Barreau du
Québec. Effectivement, le Barreau a fourni une première liste et,
à deux occasions par la suite, a été appelé
à "ressourcer" cette liste. Les avocats sont
rémunérés à même le budget de l'Office des
professions quant à leurs frais de déplacement et de
séjour et également quant aux honoraires qui leur sont consentis
pour ce type de travail.
M. Fallu: Merci.
M. Fontaine: Avant de terminer, est-ce qu'on doit comprendre que
la commission va se réunir à
nouveau la semaine prochaine pour étudier le nouveau projet de
loi?
M. Morin (Sauvé): Peut-être dans le courant des
trois semaines qui viennent, mais je ne puis assurer le député
que ce sera la semaine prochaine. Tout dépendra de la marche des travaux
de la Chambre.
Le Président (M. Boucher): Le programme 12 est-il
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Je tiens à remercier non
seulement les députés de ce côté-ci, mais
également les représentants de l'Opposition qui, je crois, ont
démontré que l'Office des professions du Québec a l'appui
de tous les partis dans la tâche très délicate qui lui est
impartie. Je pense également que les divers témoignages qui ont
été rendus au président de l'office au moment où il
va quitter ses hautes fonctions pour accéder à un poste non moins
important dans l'administration de l'Etat, je pense que ces hommages peuvent
servir au président de conclusion fort propice et agréable aux
quatre années qu'il a consacrées à l'Office des
professions.
Je voudrais simplement profiter de l'occasion pour souligner le travail
extrêmement important et inlassable à la fois du
vice-orésident et du personnel de l'Office des professions du
Québec. J'en profite également, en terminant je dis cela
à l'endroit de tous les députés que ces questions
pourraient intéresser pour vous informer qu'au sein de mon
cabinet se trouve un conseiller spécial en la personne de Gilles
Bergeron, qui suit toutes ces questions professionnelles de très
près et qui sert de charnière entre le ministre et l'Office des
professions.
Le Président (M. Boucher): Du consentement unanime de ses
membres, la commission des corporations professionnelles ajourne ses travaux
sine die. Je vous remercie.
(Fin de la séance à 18 h 6)