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Etude du projet de loi no 25
Loi modifiant le Code des professions
et d'autres dispositions législatives
(Onze heures cinquante minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
La commission des corporations professionnelles est réunie pour
faire l'étude des mémoires présentés concernant le
projet de loi no 25.
Les membres de la commission sont M. Bertrand (Vanier), M. Blank
(Saint-Louis), M. Borde-leau (Abitibi-Est), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Fallu (Terrebonne), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M.
Forget (Saint-Laurent), M. Laberge (Jeanne-Mance) remplacé par M. Gravel
(Limoilou), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laurin (Forget), M. Martel
(Richelieu), M. Morin (Sauvé), M. Rancourt (Saint-François), M.
Shaw (Pointe-Claire), M. Springate (Westmount) remplacé par Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Vaillancourt (Jonquière) remplacé par
M. Dussault (Châteauguay), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
M. Fontaine (Nicolet-Yamaska) remplacé par M. Le Moignan
(Gaspé).
Il faudrait maintenant désigner un rapporteur à cette
commission. M. Bordeleau (Abitibi-Est) accepterait-il? Il y a consentement.
Alors, le député d'Abitibi-Est sera rapporteur des travaux de
notre commission.
Les organismes que nous entendrons aujourd'hui seront: l'Association
d'acupuncture du Québec Inc., le mémoire 6; l'Institut canadien
d'acupuncture, le mémoire 4; la Corporation professionnelle des
médecins du Québec, le mémoire 2, et la Chambre de
notaires du Québec, le mémoire 1.
M. le ministre.
Exposé préliminaire du ministre, M.
Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, dès le
début des travaux de cette commission parlementaire, je désire
présenter le contexte dans lequel se situe le projet de loi no 25 et
décrire brièvement non pas l'ensemble du projet, mais les
principaux sujets qui font l'objet des mémoires qui doivent retenir
l'attention de la commission dans l'immédiat.
Ce projet de loi contient les modifications législatives que
l'Office des professions avait proposées avant la dissolution de
l'Assemblée précédente. En ce sens, on peut dire que ce
projet de loi tend à fermer le dossier législatif
constitué sous le gouvernement précédent. Bien que
l'actuel gouvernement ait fait siennes les modifications proposées,
celles-ci ne sauraient donc être perçues comme l'esquisse d'une
quelconque réforme que le gouvernement actuel pourrait projeter dans ce
domaine. C'est pourquoi le gouvernement n'entend pas étendre les
débats aux sujets qui ne sont pas traités dans le présent
projet de loi. L'occasion d'en discuter nous sera fournie lorsque, après
étude par l'Office des professions et décision du Conseil des
ministres, le gouvernement jugera opportun de présenter de nouvelles
lois qui refléteront sa philosophie propre.
D'ici là, j'invite toutes les personnes qui auraient des
commentaires ou des suggestions sur les modifications qui pourraient être
apportées éventuellement au Code des professions et aux autres
lois professionnelles à les communiquer à l'Office des
professions.
Nous passerons tout d'abord l'étude des mémoires qui ont
trait à l'acupuncture, présentés respectivement par
l'Association d'acupuncture du Québec, l'Institut canadien d'acupuncture
et la Corporation professionnelle des médecins.
Il convient donc de présenter brièvement les dispositions
du projet de loi no 25, portant sur l'acupuncture. Cette technique,
pratiquée en Orient depuis plusieurs milliers d'années, suscite
en Occident et au Québec beaucoup d'intérêt dans l'opinion
publique et les milieux scientifiques depuis quelques années.
Au Québec, on compte présentement environ une cinquantaine
de personnes qui se réclament de l'acupuncture. La majorité
d'entre elles appartient à l'une des trois principales associations qui
les regroupent, soit l'Association d'acupuncture du Québec et l'Institut
canadien d'acupuncture, dont nous étudierons les mémoires, ainsi
qu'au Centre d'acupuncture du Québec.
La demande de services dans ce domaine n'a cessé de croître
et le nombre de personnes exerçant cette discipline a augmenté
sensiblement, cela, au moment même où les tribunaux ont
décidé à plusieurs reprises, en particulier depuis un an,
que l'exercice de l'acupuncture constituait un acte médical. Il est donc
apparu nécessaire que l'exercice de l'acupuncture par des personnes qui
ne sont pas médecins soit encadré au plus tôt par une loi
en vue d'assurer au public l'accès à des services dont la
qualité soit contrôlée.
Il est également important de régulariser une situation
qui ne peut qu'engendrer des tensions entre les médecins et les
acupuncteurs. A ces fins, les dispositions du projet de loi no 25
prévoient ce qui suit: Premièrement, que la Loi médicale
soit modifiée pour permettre, au Bureau de la corporation
professionnelle des médecins du Québec, de proposer des
règles relatives à la formation des personnes autres que des
médecins qui désirent exercer l'acupuncture; à l'exercice
de l'acupuncture par ces personnes; à la tenue d'un registre de ces
personnes; enfin, à l'application des pouvoirs du comité
d'inspection professionnelle et des pouvoirs d'enquête du syndic à
l'égard de ces personnes.
En second lieu, le projet propose qu'il soit prévu dans la loi
médicale que ce règlement ne peut être adopté
qu'après consultation de l'Office des professions et des personnes
intéressées et qu'il soit sujet à l'approbation du
lieutenant-gouverneur en conseil. Qu'il soit également prévu dans
cette loi, comme c'est le cas à l'égard d'autres pouvoirs
réglementaires des corporations pro-
fessionnelles, que l'office peut se substituer à la Corporation
professionnelle des médecins si celle-ci néglige d'établir
cette réglementation dans un délai déterminé par
l'office ou n'établit pas ladite réglementation de façon
satisfaisante.
En troisième lieu, il est proposé qu'une disposition
transitoire détermine les conditions d'inspection au registre des
personnes ayant déjà exercé l'acupuncture au Québec
avant l'entrée en vigueur des dispositions donnant force de loi aux
recommandations qui précèdent.
Plus tard, nous entendrons les représentants de la Chambre des
notaires au sujet des modifications apportées par le projet de loi au
registre des testaments tenu par la Chambre des notaires. Brièvement,
puisque la Chambre viendra elle-même nous expliquer ce dont il s'agit, je
me permettrai de résumer la question de la manière suivante: En
vertu des articles 100, 138 et suivants de la Loi du notariat, la chambre a la
responsabilité de tenir un registre des testaments, codicilles et
révocations de testaments reçus en minutes par les notaires. Tel
qu'il existe présentement, ce registre ne constitue pas un
mécanisme complet d'information et de protection du public, car seuls
les actes testamentaires reçus en minutes y sont enregistrés
alors que, par ailleurs, des actes testamentaires rédigés sous
une autre forme peuvent aussi être déposés chez les
notaires par le testateur.
Dans le but de fournir au public les mêmes services à
l'égard des actes testamentaires qui ne sont pas reçus en
minutes, le projet de loi propose, conformément à la demande de
la Chambre, que les articles 100, alinéa 12, 138 et suivants de la Loi
du notariat soient modifiés de façon à prévoir que
le registre des testaments, tenu par la Chambre des notaires, contienne
également les actes testamentaires simplement déposés par
le testateur chez le notaire.
Ce vendredi nous entendrons le mémoire de l'Ordre des
infirmières et infirmiers qui aborde, tout comme celui de la Corporation
professionnelle des médecins, les dispositions du projet de loi qui
tendent à limiter le droit d'exercer d'un professionnel en vertu de son
état de santé. Les dispositions dont il s'agit ont pour but de
préciser la procédure à suivre lorsqu'il y a lieu de
limiter le droit d'exercice d'un professionnel en raison de son état de
santé, en modifiant la portée des décisions du Bureau des
corporations professionnelles à cet égard et en facilitant la
désignation des médecins chargés d'évaluer cet
état de santé.
A l'heure actuelle, M. le Président, le bureau d'une corporation
professionnelle ne peut que radier ou refuser d'inscrire au tableau un
professionnel dont l'état de santé est incompatible avec
l'exercice de sa profession, d'après le rapport de trois
médecins. Si, dans bien des cas, son état de santé peut
empêcher le professionnel de poser l'ensemble des actes constituant
l'exercice d'une profession et justifier de la sorte sa radiation ou sa
non-inscription au tableau, il peut arriver que l'état de santé
d'un professionnel ne crée d'empêchement qu'à
l'égard de certains actes professionnels bien
déterminés.
On pense, par exemple, au cas de certains professionnels de la
santé: médecins, dentistes, infirmières,
physiothérapeutes, chiropraticiens, qui, sans avoir la maîtrise
parfaite de leurs gestes, de leurs mains, peuvent, par ailleurs, poser toute
une gamme d'actes professionnels moins exigeants pour les mains, comme le
diagnostic, la consultation, etc. Dans ces cas, la radiation ou la
non-inscription au tableau paraissent constituer des mesures trop radicales,
qui peuvent même d'ailleurs créer des injustices pour le
professionnel visé, et cette façon de procéder risque de
priver la clientèle de celui-ci de services professionnels auxquels elle
voudrait avoir recours.
En vue de permettre que la procédure prévue à
l'article 51 du Code des professions soit adaptée aux circonstances de
chaque cas, le projet de loi no 25 modifie cet article de façon à
permettre au bureau de pouvoir simplement restreindre le droit d'exercice d'un
professionnel, lorsque son état de santé l'exige. Par ailleurs,
des trois médecins responsables de procéder à l'examen
médical, le premier serait nommé par le bureau de la corporation
intéressée, le second par le professionnel qui doit subir
l'examen et le troisième par les deux premiers médecins
désignés. Cette procédure présente
l'inconvénient suivant: le professionnel et même les deux premiers
médecins désignés pourraient retarder ou paralyser le
mécanisme d'enquête par leur refus ou leur lenteur à
désigner un médecin.
Pour remédier à cette situation, le projet de loi modifie
l'article 51 du Code des professions en vue de limiter les délais
à l'intérieur desquels le professionnel doit agir et les deux
premiers médecins doivent désigner un médecin ou informer
le bureau de son nom et, en vue de prévoir qu'à défaut par
eux d'agir dans ces délais, le bureau de la corporation aura le pouvoir
de désigner un médecin à leur place.
Enfin, en marge de la modification apportée à la Loi sur
la pharmacie par le projet de loi 25 relativement aux statuts et aux droits des
assistants-pharmaciens, nous entendrons, vendredi, l'Ordre des pharmaciens
ainsi qu'un groupement d'assistants-pharmaciens, qui s'intitule "Le Renouveau
pharmaceutique"; enfin, un groupement de commis de pharmacie qui se nomme
"L'Association des préparateurs d'officine ".
Pour bien saisir la question, un bref retour en arrière s'impose.
Je vous promets de ne pas m'étendre trop longuement sur le sujet, M. le
Président, compte tenu du fait que nous allons entendre les principaux
intéressés.
Il existait, en vertu des lois sur la pharmacie antérieures
à celles de 1973, une catégorie de personnes exerçant la
pharmacie sans avoir obtenu le diplôme d'études en pharmacie
requis à cette fin. Il s'agit des assistants-pharmaciens. Ceux-ci
obtenaient ce statut après avoir complété certaines
conditions d'admission rattachées à leurs connaissances en
pharmacie, mais sans avoir complété toutes les conditions
nécessaires à l'obtention du statut de licencié en
pharmacie requis pour être inscrits au tableau de l'ordre en tant que
pharmaciens. Sous réserve de certaines restric-
tions, ces assistants-pharmaciens avaient toutefois les mêms
droits, les mêmes pouvoirs, les mêmes responsabilités que
les pharmaciens. La nouvelle loi sur la pharmacie de 1973 mit un terme à
la possibilité pour l'Ordre des pharmaciens d'admettre de nouveaux
membres à titre d'assistants.
Cependant, les droits acquis des personnes déjà
détentrices de ce titre furent reconnus par la loi qui, à
l'article 43, prévoit que ces personnes sont considérées
comme des pharmaciens aux fins de la Loi sur la pharmacie et du Code des
professions. Cependant, la loi a maintenu les principales restrictions qui
existaient antérieurement quant aux droits des assistants-pharmaciens.
Celles-ci ont trait à l'élection des membres du bureau, au droit
de vote aux assemblées générales de l'ordre et au droit
d'être propriétaires d'une pharmacie. 72 personnes sont
présentement inscrites au tableau de l'ordre à titre
d'assistants-pharmaciens et se trouvent visées par ces dispositions
particulières.
En novembre 1975, un groupement d'assistants-pharmaciens, le Renouveau
pharmaceutique du Québec, faisait parvenir à mon
prédécesseur ainsi qu'à l'office et à l'Ordre des
pharmaciens un mémoire dans lequel il demandait l'abrogation de ces
trois restrictions. Ce mémoire devait entraîner une
réévaluation de la situation.
Il en est résulté que deux des restrictions
imposées par l'article 43 aux assistants-pharmaciens, soit celles qui
portent sur l'élection des membres du bureau et sur le droit de vote aux
assemblées générales de l'ordre, paraissent peu
pertinentes à la préoccupation du législateur de
protéger le public; tandis que de meilleures garanties de protection
sont offertes au public si les assistants-pharmaciens continuent à ne
pouvoir exercer leur profession seuls, à titre de propriétaires,
et demeurent assujettis à l'obligation de travailler de concert avec un
pharmacien propriétaire.
En conséquence, l'article 43 de la Loi sur la pharmacie est
modifié de façon que soient abrogées les restrictions qui
existent quant aux droits des assistants-pharmaciens, relatifs à
l'élection des membres du bureau et au droit de vote aux
assemblées générales de l'ordre.
Tels sont, M. le Président, les principaux sujets dont nous
aurons à traiter au cours des séances de cette commission.
Sans plus tarder, je vous demanderais donc d'inviter le premier
groupement à se faire entendre et je vous demanderais également
de faire en sorte que nous puissions entendre aujourd'hui les quatre
mémoires dont les auteurs ont été convoqués
à ces séances.
Le Président (M. Marcoux): Je céderai d'abord la
parole au député de Saint-Laurent pour commenter ces remarques
préliminaires.
Remarques de l'Opposition
M. Claude Forget
M. Forget: Merci, M. le Président. Je n'ai pas l'intention
de prendre beaucoup de temps puis- que, comme le ministre l'a indiqué,
quatre groupes ont été convoqués pour participer à
nos travaux durant la journée. Je puis d'ailleurs assurer le ministre de
notre collaboration pour ce qui est de donner suite au voeu qu'il vient
d'exprimer quant à la possibilité de permettre à chacun de
ces groupes et aux quatre de s'exprimer durant le cours de nos
travaux d'aujourd'hui.
J'ai cependant l'intention de souligner, un peu comme l'a fait le
ministre lui-même, au début de ses remaruqes, que même s'il
s'agit là d'un texte qui a été substantiellement
élaboré par le gouvernement précédent et que cela
ferme en quelque sorte un dossier législatif ouvert à cette
époque, il reste des questions extrêmement importantes qui ont
été abordées, non pas par la voie de projets de loi, mais
par le moyen d'études ou de rapports spécifiques qu'a
préparés et publiés l'Office des professions, au cours de
la dernière année ou il y a un peu plus d'un an, sur deux sujets
extrêmement importants autour desquels il y avait eu des discussions
entre l'Office des professions, différents groupes
intéressés et certainement aussi le gouvernement
précédent. Ce sont deux sujets qu'il sera absolument important
d'aborder au cours des sessions ultérieures et j'espère que,
parmi les orientations auxquelles le ministre a fait allusion et qu'il a
l'intention d'aborder au cours des prochains mois, figurent ces deux sujets. Je
mentionne spécifiquement la question du statut, de l'avenir, de la
vocation des professions à titre réservé qui a fait
l'objet d'une étude publiée en septembre 1976, je crois, et qui
soulève des problèmes extrêmement importants quant à
l'évaluation du rôle, de la place de ces organismes, de la raison
d'être, s'il en est, d'une distinction d'une profession à champ de
pratique exclusif et d'une profession à titre réservé.
C'est là une question extrêmement importante et je ne crois pas
que l'on puisse très longtemps différer les décisions qui
s'imposent dans ce domaine.
Il y a également un rapport, qui a été
publié plus récemment, celui-là, mais qui a fait l'objet
de longues études et d'une longue réflexion au sein de l'Office
des professions et qui a trait à la réglementation des honoraires
professionnels. Il y a, de ce côté aussi, des questions
fondamentales qui se posent, à savoir s'il est approprié, pour un
ensemble de lois qui a pour but la protection du public, que l'on
confère à des corporations professionnelles le soin de
réglementer les honoraires imposés à ce public. Ceci,
également, à mon avis, devra faire l'objet de propositions
gouvernementales et des travaux de l'Assemblée nationale dans des
délais assez brefs puisque l'espèce d'animation suspendue dans
laquelle tout le monde se trouve à ce sujet dans le moment n'est, en
soi, ni bonne ni souhaitable et que, d'autre part, il existe des
prétentions législatives d'un autre ordre et même d'un
autre ordre de gouvernement à l'effet de réglementer ou
d'intervenir dans ce domaine. C'est donc un sujet qui a beaucoap de
ramifications sur plusieurs plans.
Ceci étant dit, pour simplement faire le rappel de ces questions
auxquelles nous nous sommes intéressés dans le passé et
auxquelles nous conti-
nuerons, je l'espère, à nous intéresser par les
travaux législatifs, ceci ne doit pas retarder davantage les travaux de
la commission, qui sont beaucoup plus modestes, avouons-le, pour ce qui est des
amendements contenus au projet de loi no 25. Je n'ai pas l'intention de me
prononcer quant au fond d'aucune de ces questions puisque nous devons d'abord
entendre les groupes qui sont devant nous.
En terminant, M. le Président, j'aimerais soulever, à
titre de demande de directive ou de question de règlement, un point qui,
à mon avis, revêt une certaine importance sur le plan de
l'éthique des membres de cette commission. Je ne le fais pas dans le but
d'être désagréable mais je crois que nos invités et
les groupes qui se succéderont devant nous aujourd'hui et vendredi,
devraient être assurés sur un point, à savoir qu'aucun
membre de cette commission parlementaire ne fait partie, à l'heure
actuelle, du bureau ou du conseil d'administration de l'une quelconque des
corporations professionnelles qui sont en jeu. Je crois que c'est une assurance
que nous devrions pouvoir donner. Quant à moi, je la donne très
facilement, puisque ce n'est pas mon cas, mais je crois qu'il faudrait
être absolument sûr que nul n'est en quelque sorte juge et partie
dans les questions qui sont soumises à la commission. Je ne porte aucune
accusation, mais je crois que c'est une précaution qu'il serait bon de
prendre dans le contexte.
Le Président (M. Marcoux): Avant de donner suite à
cette demande de vérification ou de clarification, je vais céder
la parole au député de Gaspé.
M. Michel Le Moignan
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je n'ai que
quelques brèves remarques puisque nous aurons l'occasion, à
l'audition des mémoires des groupes intéressés, d'entrer
davantage dans le fond du débat.
Je veux simplement me réjouir de voir que l'Office des
professions est placé sous la bonne garde du ministre de l'Education.
C'est un des aspects que nous allons toucher en cours de route et je pense
qu'à ce moment-là le ministre sera en mesure de nous aider
puisque cette loi-ci apporte une modification au Code des professions. Quand il
s'agira du mémoire de la Chambre des notaires, peut-être qu'il y a
des points spécifiques que je toucherai à ce moment-là;
nous sommes d'accord sur l'ordre général et les aspects
particuliers des modifications qui s'ajoutent. Nous pourrons, au fur et
à mesure, les considérer.
Je ne voudrais pas personnellement retarder les groupes qui sont ici
aujourd'hui et je vais me résumer pour l'instant à ces quelques
remarques.
Le Président (M. Marcoux): Avant de clarifier pour tout le
monde la question soulevée par le député de Saint-Laurent,
je proposerais aux membres de cette commission de s'entendre sur une
répartition du temps pour l'audition des mémoires. Après
certaines discussions avec les membres de la commission, je vous propose que
nous prenions 20 minutes pour entendre ceux qui présentent le
mémoire; ensuite, 20 minutes seront accordées au parti
ministériel, 15 minutes à l'Opposition officielle et 10 minutes
à l'Union Nationale, pour dialoguer avec nos invités. Je voudrais
savoir si cette proposition agrée aux membres de cette commission.
M. Forget: Oui, M. le Président.
M. Le Moignan: Oui, M. le Président.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, me
permettez-vous, puisque le député de Saint-Laurent a
soulevé la question de la participation à notre commission de
membres des bureaux d'un ordre professionnel, de vous faire observer que le
député qui siège à cette commission est ici
à titre de législateur, tout comme il le sera lorsque le
même projet de loi viendra en deuxième lecture et enfin, pour son
adoption finale, devant l'Assemblée nationale elle-même. Je ne
sache pas qu'un membre d'une corporation, ou même celui qui participe au
bureau, à l'exécutif d'un ordre, soit exclu du débat
législatif en raison de cela.
Il me semble que nous pouvons faire confiance à chaque
député pour qu'il connaisse lui-même, d'emblée, les
limites de son intervention, dans des circonstances qui peuvent effectivement
être délicates. Mais puisque le député, en tout
état de cause, peut toujours intervenir sur tout projet de loi en
Chambre, je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas le faire en commission.
Toutefois, M. le Président, je suis prêt à m'en
remettre à votre sagesse proverbiale pour trancher ce délicat
problème.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, pour ajouter brièvement
sur cette question de règlement, je n'ai pas voulu soulever des
questions plus larges que celles qui sont strictement nécessaires pour
mener à bien les travaux de cette commission. Si je l'avais fait,
j'aurais certainement soulevé la question du caractère
approprié ou inapproprié du maintien, par quelqu'un qui
accède à un poste de député à
l'Assemblée nationale, de son statut d'officier élu d'un
organisme quelconque qui peut avoir à formuler des requêtes ou des
demandes auprès du Parlement. Mais c'est une question beaucoup plus
large sur laquelle je ne m'arrête pas pour l'instant.
Je crois que si une telle situation existait, il serait souhaitable
qu'une telle personne ne participe pas aux travaux de notre commission
parlementaire puisqu'une telle personne, étant à la fois
pétitionnaire et juge, en quelque sorte, comme membre de la commission
du bien-fondé d'une telle pétition, d'une telle requête,
serait dans une situation extrêmement délicate. Il est coutumier
que les délibérations sur un sujet où on est
soi-même impliqué se fassent sans notre participation. Mais c'est
strictement une règle d'éthique,
généralement observée même si elle n'est pas
écrite, dont il est question ici, M. le Président.
M. Martel: M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Très brièvement
parce que je suis à la veille d'être suffisamment
informé.
M. Martel: ... je me sens un peu concerné parce que je
suis administrateur de l'Ordre des pharmaciens et également
député et adjoint aux affaires sociales. Je pense que mon
rôle, à cette commission parlementaire, de même que mon
rôle à l'Assemblée nationale, est celui d'un
législateur. Si, à l'Assemblée nationale, je ne suis pas
privé de mon droit de législateur, de représentant d'une
circonscription électorale, je ne vois pas pourquoi, en commission
parlementaire où nous sommes soumis au même règlement
qu'à l'Assemblée nationale, je serais privé de ce
même droit.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Laurent n'a pas demandé une directive comme telle, il n'a pas
invoqué un règlement. Je crois qu'il a plutôt émis
un voeu ou qu'il a suggéré...
M. Forget: C'est une demande de directive étant
donné que ma question est autre que théorique puisque le
député de Richelieu..
Le Président (M. Marcoux): Si vous en faites une demande
de directive, je ne vois pas en vertu de quel règlement je pourrais
empêcher un député de l'Assemblée nationale de
siéger comme membre de cette commission et de participer à nos
débats et à nos travaux. Que le ou les députés qui
pourraient être impliqués par vos remarques aient
l'objectivité ou le souci de la vérité en indiquant bien,
aux autres membres de la commission et à nos invités, s'il y a
lieu, qu'ils sont membres d'un bureau de direction d'une corporation, je pense
que cela va de soi. Mais je ne crois pas qu'en vertu de nos règlements
actuels j'aie le pouvoir d'empêcher un membre de l'Assemblée
nationale de siéger, de prendre part aux travaux de cette commission,
même s'il est membre d'un bureau de direction.
On n'a pas invoqué de règlement précis mais
si...
M. Blank: La question est celle-ci: On n'a pas le droit de
légiférer, il n'y a pas d'article qui couvre une situation
semblable. Mais, par analogie, il y a l'article 87 où l'on parle de la
pratique d'une profession. Je n'ai pas l'article 37 de la loi, de la
législature. On dit: "Un associé ou quelqu'un d'associé
avec une profession", ici je ne parle pas de professions d'avocat ou notaire,
je ne le dis pas exprès, mais c'est cela, "n'a pas le droit de
siéger sur les comités ou de se présenter à ce
comité, ou que son associé ou quelqu'un dans son association
présente un projet de loi, une proposition, devant la Chambre". C'est un
peu analogue à la situation de notre ami, le député de
Richelieu. Je ne veux pas qu'on l'empêche, mais qu'au moins quand cette
question des pharmaciens sera discutée, qu'il expose sa situation ou
qu'il décide de se retirer du débat. Je pense qu'il n'y a rien
dans la loi qui touche exactement à cela, mais par analogie, l'article
87 de la loi s'applique. Je pense que si un de mes associés était
ici, je me retirerais.
Le Président (M. Marcoux): On m'a demandé une
directive formelle; je ne voyais pas, en vertu de nos règlements de
l'Assemblée ce qui pouvait m'inciter à interdire un
député de participer aux travaux de cette commission. Mais comme
vous invoquez un article de la Loi de la législature que je ne
connaissais pas, d'ici la reprise de nos travaux au milieu de
l'après-midi, j'analyserai la question et, à ce moment-là,
je trancherai de façon définitive. Mais je comprends bien le
député de Saint-Louis; il est d'accord avec mon
interprétation jusqu'à maintenant, à savoir qu'il n'y a
pas d'interdiction formelle, mais que pour la planification du débat, il
invite, comme moi, les personnes que cela pourrait concerner, à indiquer
leur appartenance à tel conseil d'administration, de telle corporation.
Nous l'avons interprété sans connaître l'article, dans le
même sens. Est-ce que ça va?
M. Forget: Ça va.
Le Président (M. Marcoux): Comme nous nous sommes entendus
sur les procédures, j'inviterais maintenant l'Association d'acupuncture
du Québec Inc., à s'approcher. Si je comprends bien, c'est vous
qui vous êtes approché. Je vous inviterais à vous
présenter ainsi qu'à présenter vos collègues. Vous
aurez une vingtaine de minutes, soit pour lire les parties de votre
mémoire, soit pour résumer votre mémoire; vous pourrez en
dégager les lignes essentielles. Ensuite, le dialogue s'engagera avec
les membres de cette commission.
Association d'acupuncture du Québec
M. Farley (Jean-Guy): M. le Président, M. le ministre,
madame et messieurs les députés. Permettez-moi de me
présenter et de vous présenter ceux qui sont avec moi pour faire
valoir le point de vue de l'Association d'acupuncture du Québec.
Mon nom est Jean-Guy Farley, procureur de l'Association d'acupuncture du
Québec, depuis l'octroi des lettres patentes le 8 septembre 1972,
constitutant l'Association d'acupuncture du Québec. A titre de
procureur, j'ai également représenté certains membres de
l'Association d'acupuncture du Québec devant les tribunaux, en
décembre, dans des procédures intentées par le
Collège des médecins, la Corporation professionnelle des
médecins du Québec, et, en particulier, le professeur Wexu, dans
une cause qui a fait l'objet d'un jugement de la part du juge Cyrille Morin
à Montréal, en décembre 1974. Je suis donc en mesure de
vous affirmer que, depuis le début, j'ai pu constater personnellement
que l'Association d'acupuncture du Québec et son président ont
toujours été très soucieux de l'intérêt et de
la protection du public.
A ma droite, le professeur Wexu. Il est le président fondateur de
l'Association d'acupuncture du Québec, vice-président de la
Société mondiale académique d'acupuncture, membre de la
Société de médecine de Paris, membre de l'Académie
des sciences d'Italie, et il vient d'être nommé professeur au
Collège de médecine orientale de l'Université de Wong
Kwong de Corée j'espère que la prononciation est bonne
et je dois souligner qu'à ce poste, il est le premier Occidental
à occuper un tel poste. On peut dire aussi que, pendant qu'au
Québec, certains hésitaient à reconnaître sa
compétence en acupuncture, les Orientaux le faisaient sans nous
attendre. On pourrait également dire qu'il est le père de
l'acupuncture en Amérique du Nord, ayant participé à sa
diffusion depuis 1951 environ. Le professeur Wexu, un peu plus tard, dans un
bref exposé, vous fera connaître la position de l'Association
d'acupuncture du Québec.
A ma gauche, mon confrère, Me Gérard Mo-rency, de
Québec. Lorsque l'Office des professions s'est penché sur le
dossier de l'acupuncture, Me Morency a prêté son concours à
l'Association d'acupuncture du Québec et a assuré une liaison
avec l'Office des professions et les autres organismes concernés. Avec
la collaboration des membres de l'Association d'acupuncture du Québec,
il a travaillé à la préparation du mémoire de
l'association et, après le bref exposé du professeur Wexu, il
fera connaître les points saillants du mémoire.
A ma gauche, et à la gauche de mon confrère Morency, M.
Lucien Pelletier, il est le vice-président de l'Association
d'acupuncture du Québec et il est conseiller de la Société
mondiale d'acupuncture.
Les membres de la commission auront sans doute noté qu'il y a
aussi une délégation d'acupuncteurs et je suis certain qu'on me
sera gré de ne pas vous les présenter.
Sans plus tarder je cède la parole au professeur Wexu.
M. Wexu (Oscar): M. le Président, messieurs les
députés. Permettez-moi de me présenter, je suis le
président de l'Association d'acupuncture du Québec,
incorporée en 1972. Notre association est la seule organisation
d'acupuncture en Amérique du Nord, reconnue dans le monde entier et
membre du comité international de l'acupuncture. Notre excellente
réputation, dans le pays et dans le monde, fait peur à la
corporation médicale qui essaie, par tous les moyens, de faire semblant
que nous n'existons pas et qui utilise en même temps les moyens les plus
perfides pour nous écraser.
La question qui se pose aujourd'hui n'est pas de savoir si la pratique
de l'acupuncture doit être contrôlée, mais par qui elle doit
l'être. L'éventail de réponses proposées n'est pas
très vastes: par les acupuncteurs ou par les médecins. La seule
réponse possible et valable est que l'acupuncture doit être
contrôlée par ceux qui la connaissent et la pratiquent: les
acupuncteurs. Pourquoi? Les avocats et les policiers ont, tous deux, fait le
serment de travailler au respect de la justice, mais ne traiterait-on pas de
fou celui qui suggérerait que l'une des professions est contraire
à la pratique de l'autre? Les pharmaciens et les médecins
travaillent tous deux à soigner les malades, et pourtant que dirait-on
de celui qui prônerait le contrôle de la médecine par les
pharmaciens? Les acupuncteurs et les médecins travaillent tous deux
à soulager et guérir les souffrances, mais leurs méthodes
et moyens sont aussi différents entre eux que ceux du policier qui veut
emprisonner, et ceux de l'avocat qui veut libérer, chacun dans un esprit
de justice.
L'acupuncture et la médecine ne sont pas nécessairement
complémentaires; elles peuvent et risquent d'être souvent
contradictoires. J'en veux pour preuve, les milliers de patients qui viennent
nous voir en désespoir de cause après avoir passé des
années, du médecin à l'hôpital et de l'hôpital
à la pharmacie, pour s'empoisonner sur la "caston-guette". Dans notre
pratique, nous essayons de soigner les malades qui, pendant des années,
ont cru à la solution de l'elixir miraculeux des grands laboratoires
pharmaceutiques. L'acupuncture ne peut pas être pratiquée
salutairement sur les corps imprégnés de produits chimiques.
L'idéologie de l'acupuncture et l'idéologie de la médecine
étant contradictoires, en vertu de quels critères les
représentants de l'une assumeraient-ils le contrôle sur celle de
l'autre. Une association de dépendance entre les médecins et les
acupuncteurs ne peut servir l'intérêt public. Le droit de la
population à la santé est reconnu dans le monde entier. Ce droit
implique l'accès aux pratiquants des divers arts médicaux. Ce
droit ne sera pas plus pris en entier si l'accès à l'acupuncture
est subordonné à l'avis d'un médecin.
Le corps médical du Québec a reconnu maintes fois
être ignorant des choses de l'acupuncture. Le corps médical peut
affirmer que l'acupuncture, qu'il dit ignorer, peut être néfaste,
n'a pas été prouvé expérimentalement etc. Face
à de telles affirmations, lesquels d'entre nous continueraient de croire
que les médecins conseilleront l'acupuncture à leurs patients. Il
y a pire. Avec quelle compétence et quelle formation le médecin
jugerait-il de la compétence des acupuncteurs? Tout notre histoire au
Québec démontre que les médecins ont été nos
adversaires les plus acharnés. Ils s'opposent même à
l'obligation que leur imposerait le projet de loi 25 de consulter les
acupuncteurs existants.
L'Association d'acupuncture du Québec ne peut, pas plus que les
chiropraticiens, optométris-tes et autres professionnels
paramédicaux, accepter de tomber sous les jupes d'une corporation qui
nie des principes aussi fondamentaux que le droit d association.
Pour l'Association d'acupuncture du Québec, le projet de loi no
25 est un projet de loi discriminatoire et inacceptable. Il place les
acupuncteurs sous l'esclavage du corps médical. Il donne aux
médecins le pouvoir de révoquer et accorder des permis de
travail. L'Office des professions doit servir de médiateur entre les
professionnels et le public. A notre grande surprise et colère, il a
présenté un projet de loi qui supprime la liberté de
l'acupuncteur. Il met en doute sa compétence et
son intégrité. Je n'ai connaissance d'aucune injure
semblable qui ait été infligée par un projet de loi
à un groupe de professionnels du Québec. Je crois que cela
n'existe pas.
Le projet de loi no 25 veut conférer aux médecins le
contrôle de l'accès à la profession d'acupuncteur, le
contrôle de son exercice, le contrôle de la capacité des
acupuncteurs, le contrôle des patients qui veulent être
traités et le contrôle de la limitation du nombre de traitements.
Nous ne voulons pas être les esclaves d'un groupe de personnes qui sont
nos adversaires déclarés et qui ont pour objectif avoué
d'utiliser l'Office des professions pour assurer le plus tôt possible le
monopole et la pratique de l'acupuncture aux médecins.
Les médecins ont déclaré publiquement et
répètent qu'ils veulent notre disparition. M. le
Président, le projet de loi no 25. dans sa forme actuelle, nous demande
de nous accrocher nous-mêmes la corde au cou. Notre but est de promouvoir
notre profession afin de répondre à l'espoir que place en nous la
population. Je comprends que les médecins sont malheureux, pour ne pas
dire furieux, de voir leur clientèle se diriger vers la médecine
de l'avenir, vers la médecine sans pilule. Par le biais de l'Office des
professions, ils veulent préserver leur chasse gardée. Je dis et
je répète que ce n'est pas le rôle de l'Office des
professions de voler au secours des médecins. Ce n'est pas le rôle
de l'Office des professions d'assujettir les acupuncteurs à qui que ce
soit. Ce n'est pas le rôle de l'Office des professions de limiter
l'accès à l'acupuncture sous la pression du corps médical
qui essaie de nous assujettir pour mieux nous anéantir.
L'homme actuel vit dans une atmosphère polluée, boit de
l'eau et mange des aliments traités chimiquement. Comment pourrait-il
envisager de se départir des maux qui l'affligent par d'autres produits
chimiques? Les médecins ont compris que la chimiothérapie risque
de vivre ses dernières heures s'ils ne bloquent pas immédiatement
l'accès du public à une médecine naturelle comme
l'acupuncture. Nous avons été harcelés, poursuivis,
traînés en justice par des gens auxquels nous soumettrait le
projet de loi no 25.
Confier le contrôle de l'acupuncture aux médecins, M. le
Président, serait aussi illogique que de confier le contrôle du
ministère actuel de l'Education à un membre du parti de
l'Opposition. Nous reconnaissons, M. le Président, la
nécessité d'un contrôle plus organisé de
l'acupuncture. En 1972, nous avons incorporé l'Association d'acupuncture
du Québec pour organiser notre profession. Nous n'avons cessé de
mettre le pubiic en garde contre les charlatans. Nous avons mis sur pied des
cours de trois ans pour assurer une formation complète aux acupuncteurs.
Nous avons lutté pour que cet art millénaire soit disponible pour
les Québécois. De plus, notre souci de professionnalisme est
allé jusqu'à adopter volontairement un cours de
déontologie très sévère et à veiller
à la rigidité de son application.
Nous avons combattu et combattons encore pour promouvoir une
médecine naturelle, une médecine économique, accessible,
une médecine qui se passe de l'arsenal coûteux des hôpitaux
et des munitions pharmaceutiques ruineuses pour les patients et pour l'Etat.
Nous demandons que nos efforts ne soient pas anéantis par le projet de
loi no 25. Tout ce que nous souhaitons, M. le Président, c'est de voir
l'Assemblée nationale nous accorder le même traitement que toutes
les autres professions paramédicales. Je vous remercie de m'avoir
écouté.
M. Morency (Gérard): Maintenant, M. le Président,
je voudrais étant donné l'orientation gouvernementale
relativement à l'acupuncture, expliquer sommairement le mémoire
que nous avons déposé au nom de l'Association d'acupuncture du
Québec.
J'attire l'attention des membres de la commission parlementaire, en
premier lieu, rapidement, sur l'Association d'acupuncture, qui, je vous le fais
remarquer, a des conditions d'admission très sévères et
qui compte parmi ses membres, entre autres, des pharmaciens, des
chiropraticiens, des infirmiers, des optométristes, des biologistes et
des hygiénistes. D'ailleurs, l'association a comme condition
préalable qu'on ait complété des études
collégiales en sciences de la santé ou l'équivalent. Sans
plus tarder, quant à l'association elle-même, je souligne
également le travail que l'association a fait au niveau de l'Office des
professions, soit un travail de consultation, un travail aussi relativement aux
nombreux mémoires écrits qui ont été
déposés auprès de l'Office des professions, et
également les rencontres que nous avons eues avec l'Office des
professions. Finalement, j'attire l'attention des membres de la commission sur
les demandes officielles d'ailleurs vous le constaterez dans les
rapports de l'Office des professions de reconnaissance qui ont
été faites depuis de nombreuses années par l'Association
d'acupuncture.
Dans un deuxième point de notre mémoire, on fait
état de l'évolution de l'acupuncture au Québec. J'attire
votre attention sur les rapports et le travail faits par l'Office des
professions. Sans blâmer nécessairement l'Office des professions,
si on fait l'évolution de ce qui s'est passé à l'office,
on constate que, dans le rapport de 1974-1975, le deuxième rapport
relativement à l'acupuncture, on dit: L'intérêt du public
et les poursuites pénales exigent que l'on fasse quelque chose
relativement à l'acupuncture. A ce moment-là, on recommande au
gouvernement la création d'un centre d'expérimentation
d'acupuncture dirigé par des médecins et des non-médecins
à Sherbrooke et une subvention de $100 000 est allouée à
cet effet. Immédiatement, sur ce point, il y a eu une
contestation de l'association disant: II faut regarder tout demême ce qui se passe dans le monde entier sur l'acupuncture et ne pas
tenter de découvrir le fondement scientifique du résultat que
donnent les traitements d'acupuncture, mais plutôt de régir et de
contrôler immédiatement. A la suite de cela, l'association a
revendiqué immédiatement une autogestion professionnelle pour
l'acupuncture au
même type que la chiropratique, la podiatrie, la denturologie,
l'orthophonie et l'ergothérapie, d'autres sciences
paramédicales.
En 1975-1976, dans son rapport, l'Office des professions déclare
que les recherches n'ont pas donné les résultats
escomptés. A ce moment-là, on soumet, pour régler le
dossier de l'acupuncture, un amendement à l'article 19 de la Loi
médicale proposant la délégation de l'acte médical
par un pouvoir de règlement conféré à la
Corporation professionnelle des médecins. A ce sujet, l'opposition de
l'Association d'acupuncture, comme vient de l'exprimer le professeur Wexu, est
claire, elle a toujours été claire. Nous demandons une
reconnaissance professionnelle au même titre que les autres professions
paramédicales. Les motifs sont exposés dans notre mémoire.
Entre autres, je voudrais quand même m'attarder à deux motifs que
j'estime très importants: la garantie maximale de la protection du
public et le contrôle impartial de l'exercice de l'acupuncture.
Relativement à la protection maximale du public, nous soumettons
que les poursuites pénales ont été nombreuses. J'attire
votre attention sur l'annexe A qui accompagne notre mémoire. On vous y
donne sommairement les nombreuses poursuites pénales et les montants
d'amendes payées par les acupuncteurs pour pouvoir pratiquer leur
profession, nonobstant le fait qu'un tribunal a décidé,
conformément à la Loi médicale qui en passant,
c'est l'article 29 est une disposition large et très
monopolisante dans sa définition, d'établir qu'il s'agissait de
traitement de patients; c'est certain que c'est un traitement. C'est certain
qu'au niveau de la Loi médicale, c'est un acte médical, mais on a
décidé également que le chiropraticien qui pratiquait
avant que la loi soit mise en vigueur posait un acte médical et il
pratiquait illégalement la médecine.
Dans ce contexte, où il y a eu un conflit continuel entre la
Corporation professionnelle des médecins et les acupuncteurs je
pense que confier le pouvoir de réglementation à la Corporation
professionnelle des médecins serait tout simplement anéantir
toute garantie aux yeux du public. La Corporation professionnelle des
médecins aura à choisir entre l'intérêt de ses
membres, l'intérêt des acupuncteurs non médecins et
également l'intérêt du public. Je pense que c'est faire fi
de la protection du public et placer une corporation dans une situation de juge
et partie, où elle aura à choisir entre certains
intérêts et l'intérêt du public. D'ailleurs, c'est ce
que l'Office des professions a toujours prôné.
Dans notre mémoire, entre autres à la page 11, on vous
cite un passage du rapport de l'Office des professions où on exprime
l'idée de l'Office des professions sur l'éthique nouvelle qu'on
cherche à établir. On veut enlever les conflits
d'intérêt entre les membres et le public. Je pense que c'est le
premier motif qui sous-tend la position de l'association de ne pas être
en faveur du projet de loi quant au pouvoir de réglementation qui serait
conféré à la Corporation professionnelle des
médecins.
Il va sans dire que l'association n'est pas contre une
légalisation de l'acupuncture. Au contraire. L'association n'est pas non
plus contre le fait qu'il y ait un contrôle. Ce que l'association veut,
c'est un contrôle impartial également pour ses membres.
Le Président (M. Marcoux): Je veux vous dire qu'il vous
reste environ trois minutes pour présenter l'essentiel avant de passer
au dialogue.
M. Morency: D'accord. Je vais aller directement je vous
remercie de m'avoir souligné cela aux amendements
suggérés. L'amendement principal et primordial relativement au
projet de loi no 25 a trait à la corporation qui aura le pouvoir de
réglementation. Dans l'article 19a, on mentionne le bureau. Nous
soumettons que c'est pour les motifs que nous avons exprimés au
préalable qu'il devrait être établi un bureau
spécial, si on veut donner justice à la Corporation
professionnelle, si on veut se servir de la technique de l'amendement de la Loi
médicale pour légiférer et réglementer
l'acupuncture. A ce moment-là, on devrait donner cela à un bureau
que nous appelons spécial, qu'on pourrait techniquement ou de
façon législative former de quelque façon que ce soit,
mais composé d'acupuncteurs médecins et non médecins.
C'est essentiel. Les amendements qu'on suggère, quant à ce qui
suit, par exemple, à la formation, l'exercice, l'inspection
professionnelle, ont trait à la constitution du bureau. Je pense que
c'est le point primordial des revendications de l'association au niveau du
projet de loi no 25 qu'on puisse avoir un bureau impartial créé
également d'acupuncteurs non médecins, ceux qui pratiquent
actuellement l'acupuncture et, si l'on veut également, confié
à des acupuncteurs médecins. Je pense que c'est la seule solution
transitoire pour permettre la survie de l'acupuncture, si on se fie au projet
de loi no 25.
J'attire votre attention sur l'article 19a, du projet de loi, où
nous soumettons que les règlements devraient s'appliquer
également aux médecins qui veulent pratiquer l'acupuncture et non
seulement aux acupuncteurs non médecins. Ce sont les grands points du
mémoire.
Dans notre mémoire, nous soumettons la composition qui pourrait
être faite d'un bureau spécial et nous insistons pour que cet
amendement y soit inséré; nous croyons que c'est essentiel et
vital. Grosso modo, les autres amendements ont trait et se rattachent à
cet amendement que nous jugeons essentiel et important pour la survie de
l'acupuncture.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie d'avoir
résumé l'essentiel de votre mémoire en aussi peu de temps.
J'inviterais maintenant M. le ministre à ouvrir le débat.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je
commencer par quelques questions destinées à éclairer la
commission sur la nature de l'Association d'acupuncture du Québec et le
nombre de ses membres?
Pourriez-vous nous dire tout d'abord combien
il y a d'acupuncteurs au Québec en ce moment qui pratiquent
l'acupuncture et combien sont membres de l'association?
M. Wexu (Oscar): M. le député, je puis vous dire
que l'association compte 40 membres et que nous avons un groupe de cinq ou six,
sept ou huit acupuncteurs, je ne me rappelle pas, cela dépend, je ne
connais pas les nouveaux, qui ont été de nos
élèves. Je possède et je peux vous présenter leur
dossier. Certains de nos élèves ont abandonné les cours,
ont décidé de se nommer eux-mêmes acupuncteurs et ils ont
formé cette société que vous avez nommée tout
à l'heure. Evidemment, nous ne les reconnaissons pas comme acupuncteurs
parce qu'ils n'ont pas fini leur cours et il y a probablement un certain nombre
de médecins qui jouent à l'acupuncture. Il y a évidemment
plusieurs autres opportunistes qui se présentent comme acupuncteurs et
qui ne le sont pas. Tout ce que je peux vous direet je crois que l'Office
des professions aurait pu le faire lui-même, sans m'interroger
nous sommes la seule corporation d'acupuncteurs au Québec il n'y
en a pas d'autre et nous sommes incorporés depuis 1972 et je
crois que vous auriez dû d'abord consulter l'Association d'acupuncture
pour vous donner tous les détails sur les autres acupuncteurs. Je suis
celui qui a introduit l'acupuncture dans ce pays. Je suis le seul à
avoir formé tous les acupuncteurs, tous ces élèves qui se
prétendent acupuncteurs, et vous auriez évidemment pu avoir la
source depuis longtemps. Je crois que le fait du vieux proverbe
machiavélique "diviser pour régner" a été
employé contre nous, parce que nous n'avons jamais reçu une
attention différente. On nous a toujours considérés avec
les opportunistes et c'est pour cela que vous avez aujourd'hui une discussion
sur l'acupuncture qui devait être réglée avec l'Association
de l'acupuncture du Québec; tous les autres n'y seraient pas et il y
aurait un peu moins de travail pour la commission parlementaire.
M. Morin (Sauvé): Depuis combien d'années
l'acupuncture est-elle apparue au Québec?
M. Wexu (Oscar): Depuis 1970.
M. Morin (Sauvé): Et vous-même, M. Wexu, depuis
quelle époque vous en occupez-vous?
M. Wexu (Oscar): Je pratique l'acupuncture depuis 1951. Je suis
diplômé de l'Institut d'acupuncture de France et je suis aussi
diplômé de l'Ecole d'acupuncture de China's Life College Medecine
de Hong-Kong.
M. Morin (Sauvé): Pourriez-vous nous décrire,
brièvement, s'il est possible, la formation que reçoit un
acupuncteur et en particulier la formation qu'il reçoit dans des
institutions spécialisées dans cette discipline?
M. Wexu (Oscar): M. le ministre, je vais commencer par vous
donner les détails sur l'origine même de l'acupuncture dans les
instituts de Chine où...
M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas ce que je vous ai
demandé, M. Wexu.
M. Wexu (Oscar): Oui. Vous parlez de notre institut?
M. Morin (Sauvé): Je vous parle de la formation qu'ont
reçue, par exemple, les membres de votre association d'acupuncture.
M. Wexu (Oscar): Les membres de notre association, pour
être reçus au cours, doivent être des paramédicaux
qui ont une formation normale dans la profession médicale,
c'est-à-dire que ce sont des infirmiers, des physiothérapeutes,
des techniciens de laboratoire, des chiropraticiens, des gens qui ont suivi des
cours de massothérapie et de manipulation thérapeutique dans
notre institut de massothérapie et de manipulation thérapeutique.
Toutes ces personnes ont évidemment trois années d'études
médicales, et suivent ensuite chez nous un cours de trois sessions
universitaires qui peuvent parfois être terminées en deux ans.
Evidemment, il y a un stade de 500 heures que les étudiants doivent
subir à l'école même, à l'Institut d'acupuncture du
Québec, en dehors des cours théoriques qu'ils ont à
l'école.
M. Morin (Sauvé): Lorsque vous nous parlez d'une formation
paramédicale que doivent avoir les candidats qui se présentent
pour prendre des cours d'acupuncture, qu'est-ce que vous entendez?
M. Wexu (Oscar): Je parle évidemment des professions
paramédicales, ceux qui ont reçu une instruction sur l'anatomie,
la physionomie et la pathologie.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous exigez que ces
personnes, qui ont reçu une formation paramédicale, aient obtenu
un diplôme dans la discipline paramédicale qu'ils ont choisie?
M. Wexu (Oscar): Oui. Nous exigeons cela, oui.
M. Morin (Sauvé): Bon. Quelle discipline
paramédicale en particulier?
M. Wexu (Oscar): Nous avons beaucoup d'infirmières, nous
avons des physiothérapeutes, nous avons des techniciens de laboratoire,
nous avons des chiropraticiens, nous avons des pharmaciens, nous avons des
biologistes, des microbiologistes et, enfin, d'autres professions, des
techniciens en laboratoire. Ceux qui ont suivi des cours de
massothérapie et de manipulation thérapeutique dans notre
institut même.
M. Morin (Sauvé): M. Wexu, je ne voudrais pas entrer dans
les détails de la formation donnée dans ces cours d'acupuncture.
Je vais prendre un exemple et vous demander d'expliquer un peu en quoi peut
consister cette formation du deuxième semestre de la première
année où nous trouvons les chapitres suivants: Les
méridiens, les cinq
éléments, les points antiques, les règles
mère-fils, midi-minuit, époux-épouse. Pourriez-vous, par
exemple, nous décrire ce que cela peut comporter comme formation?
M. Wexu (Oscar): Comme formation, M. le ministre, tout est
question de la théorie de l'acupuncture, de la philosophie chinoise. Ce
n'est pas autre chose. Nous demandons leur préparation
paramédicale non pas pour appliquer cette thérapeutique mais pour
pouvoir appliquer en connaissance de cause de l'anatomie et de la physiologie
le traitement qui comporte toutes ces techniques que vous avez
énumérées. C'est une technique dans l'acupuncture.
M. Morin (Sauvé): Mais...
M. Wexu (Oscar): Mais je ne vois pas pourquoi vous...
M. Morin (Sauvé): Je voudrais que vous décriviez
l'entraînement que reçoit, par exemple, l'étudiant qui suit
ces cours de deuxième semestre.
M. Wexu (Oscar): Bien, M. le ministre, cet élève
reçoit le cours d'anatomie topographique, de localisation de points. On
donne les effets de ce point, on montre les combinaisons de points pour diriger
et pour manipuler l'énergie vitale sur laquelle nous travaillons. Dans
l'acupuncture, il y a l'énergie vitale sur laquelle nous employons ces
aiguilles qu'on enfonce à divers points stratégiques. C'est en
somme ce qui se passe, en très court.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que, déjà, au cours
de cette première année ou par la suite, les
élèves, les étudiants sont appelés à
manipuler les aiguilles et à les appliquer à des patients?
M. Wexu (Oscar): Non, pendant les cours qu'ils ont sous notre
surveillance, ils ne font pas autre chose; ils font les cours à la
clinique même, sous la surveillance d'acupuncteurs de longue date; ils
sont inscrits et ils regardent; ils manipulent les aiguilles aux points bien
déterminés qu'on leur suggère et qu'on leur donne, sous
notre surveillance. Quand nous nous rendons compte que l'élève,
l'étudiant, après avoir fini son cours et sa pratique de 500
heures à la clinique, il peut pratiquer l'acupuncture, est capable de se
débrouiller seul avec un patient, à ce moment-là, nous
décernons le diplôme.
D'ailleurs, il y a des élèves qui finissent leur cours en
deux ans et reçoivent leur diplôme après un an, parce
qu'ils n'ont pas encore réussi à finir leurs études et ne
répondent pas aux exigences demandées pour les traitements
d'acupuncture. C'est un fait.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ne voudrais
pas abuser et je sais que, sans doute les membres de l'Opposition auront des
questions à poser, sans compter les membres de la commission de ce
côté de la table. Je voudrais poser en- core seulement une
question qui me paraît importante: Combien d'heures par semaine les cours
théoriques comportent-ils? Combien d'heures d'enseignement?
M. Wexu (Oscar): II y a 4 à 5 heures de cours par semaine.
Nous devons tenir compte du fait que tous nos étudiants en acupuncture
sont des professionnels, qu'ils sont occupés; ils doivent quand
même gagner leur vie et ils ne peuvent suivre les cours que le samedi.
Avant de devenir acupuncteurs et pouvoir gagner leur vie, il faut qu'ils
pratiquent leur propre profession. Nous avons trouvé ce seul moyen de
donner le cours en entier, mais, durant la semaine, ils viennent assister aux
traitements. La clinique est à leur disposition pour bien se renseigner,
pour assister aux traitements et nous aider quelquefois à donner le
traitement: aider dans le sens que le patient est là, il prépare
le patient, il présente les aiguilles, on discute, il pose des
questions. L'école est ouverte toute la semaine, mais les cours
principaux sont dispensés le samedi.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, j'ai
terminé pour l'instant. Je voudrais donner l'occasion à mes
collègues de poser des questions, s'ils le désirent.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Richelieu.
M. Martel: Tout à l'heure, vous avez rejeté du
revers de la main la chimiothérapie. J'aimerais savoir de quelle
façon vous prétendez traiter, par exemple, une maladie comme la
tuberculose, qui est causée par le bacille de Koch.
M. Wexu (Oscar): M. le député, vous savez que, par
l'acupuncture, on traite le choléra et les traitements par acupuncture
pour le choléra sont plus efficaces que les traitements chimiques.
Pourquoi me posez-vous une question, alors que c'est une question sur le
bacille? Pourquoi ne me demandez-vous pas comment on traite n'importe quelle
autre chose? Nous sommes fort conscients que, quand il y a une question
d'infection où l'acupuncture par elle-même ne peut pas donner de
résultat, il faut envoyer le malade chez le médecin.
M. Martel: Vous reconnaissez donc l'importance de la
chimiothérapie?
M. Wexu (Oscar): Oui, une petite importance, mais nous voyons les
médecins de l'avenir, n'est-ce pas, ceux qu'on appelle les
médecins, en ce moment, nous les considérons comme
chimiothé-rapeutes. On voit pour les chimiothérapeutes environ
20% de la pratiaue de la médecine de l'avenir. C'est tout ce qu'on voit,
pour eux, c'est-à-dire des cas, comme vous dites, où des
personnes ont besoin de traitements antiviriliques ou dans des cas
spéciaux, des cas de chirurgie, où on a besoin de leurs
traitements. Leur travail serait extrêmement réduit et il sera
réduit sans discussion. L'homme
ne peut plus accepter de se polluer avec autant de
chimiothérapie; il n'y a pas de doute, aussitôt que le public va
être renseigné. Je vous donne un petit exemple. Vous avez entendu
dire qu'ici au Québec, c'est le pays où les tranquillisants se
vendent le plus au monde; vous savez cela? vous avez entendu cela? Alors,
pourquoi cela? Est-ce que nous sommes le pays le plus malheureux? Qui prescrit
ces tranquillisants? Ce ne sont pas les patients qui les achètent chez
Steinberg, ce sont les médecins qui les donnent. Comment cela se
fait-il? Il n'y a pas eu de commentaires. Je n'ai pas entendu ou lu qu'un seul
journaliste ait fait un commentaire sur le sujet. Pourquoi ne posez-vous pas
cette question?
M. Martel: Nous reconnaissons effectivement qu'il y a une
surconsommation de médicaments. Nous le reconnaissons.
M. Wexu (Oscar): Oui, ce que nous voulons régler, et c'est
nous qui allons faire régler la question, parce que nous allons
dévoiler tout ce que ces médecins font aujourd'hui. Mais il faut
que vous nous aidiez pour faire cela, il faut qu'on dévoile tout ce
qu'ils font.
M. Martel: Nous avons d'ailleurs une commission des affaires
sociales qui étudie, une façon de lutter contre la
surconsommation des médicaments. Elle soumettra son rapport au mois de
février. Mais par contre...
M. Wexu (Oscar): Je ne sais pas comment vous allez réussir
à faire cela. Ils sont tellement forts.
M. Martel: II ne faut pas prétendre que votre association
peut traiter n'importe quelle maladie simplement par votre science.
M. Wexu (Oscar): M. le député, l'acupuncture qui,
par sa théorie même, est le règlement de l'énergie
humaine équilibre, en cas de maladie, l'énergie du corps humain.
C'est-à-dire que la maladie est causée par un
débalancement de l'énergie humaine. L'acupuncture ne fait pas
autre chose que balancer cette énergie. C'est ce que nous faisons par
l'acupuncture. Nous traitons tout, presque tout. En plus de cela...
Le Président (M. Marcoux): Vous allez m'ex-cuser. Nous
allons nous revoir à 15 heures, le débat est engagé. Alors
la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures précises si
nous voulons compléter notre programme.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
Reprise de la séance à 15 h 7
Le Président (M. Marcoux): La commission des corporations
professionnelles est réunie pour poursuivre l'audition des
mémoires concernant le projet de loi no 25. Nous étions à
étudier le mémoire de l'Association d'acupuncture du
Québec et la parole était aux députés du
côté ministériel. M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, j'aimerais poser
encore quelques questions avant de céder la parole aux autres membres de
la commission. Ce matin, nous avons entendu le Dr Wexu nous dire que ses cours
théoriques s'étendaient sur cinq heures par semaine. Puis-je vous
demander, pour compléter les chiffres qui nous intéressent,
combien de semaines comporte un semestre d'étude?
M. Wexu (Oscar): II comporte exactement six mois, cinq mois et
demi à peu près.
M. Morin (Sauvé): Chaque semestre?
M. Wexu (Oscar): Oui.
M. Morin (Sauvé): Donc, en tout et...
M. Wexu (Oscar): Nous n'avons pas beaucoup de vacances. Nous
avons une semaine pendant les fêtes de Pâques et une semaine
pendant les fêtes de Noël et trois ou quatre semaines pendant
l'été.
M. Morin (Sauvé): De sorte que l'on peut prévoir
que vos cours théoriques s'étendent sur 45 semaines
peut-être?
M. Wexu (Oscar): Oui, à peu près. Les cours
théoriques prennent à peu près deux ans, quatre
semestres.
M. Morin (Sauvé): Quatre semestres. Donc, en tout et
partout, il y aurait donc 450 heures de cours théoriques.
M. Wexu (Oscar): On n'a pas calculé par heures; il devrait
être, environ, d'après nous, entre 600 et 700 heures, si nous
tenons compte que, pendant les cours pratiques, nous avons aussi le cours
pratique combiné avec le cours théorique, c'est-à-dire
qu'un des moniteurs, que ce soit moi-même ou un moniteur, nous discutons
sur les cas et sur tout ce qui se passe en ce qui concerne le traitement, sur
les malades.
M. Morin (Sauvé): M. Wexu, ces cours sont-ils
donnés gratuitement ou coûtent-ils quelque chose?
M. Wexu (Oscar): Non, c'est malheureux, nous n'avons aucune aide
de l'Etat, nous sommes une école privée. Nous avons donc à
payer toutes les taxes et cela nous coûte une fortune pour nous
défendre contre les médecins. Nous avons dépensé
$50 000 durant les dernières années pour
nous défendre contre la corporation médicale. Nous avons
des avocats qui sont toujours à nous défendre. Nous avons
à payer des amendes et nous avons à payer les frais de l'Institut
d'acupuncture et les professeurs. Nous exigeons $2000 pour le cours de deux
ans, c'est-à-dire $1000 par an.
M. Morin (Sauvé): Ceci aussi bien pour les cours
théoriques que pour...
M. Wexu (Oscar): Tout est inclus.
M. Morin (Sauvé): Tout est inclus.
Dans votre mémoire, au sujet de l'article 19b, on impose un total
de 1000 heures dans les matières qui seront définies par le
bureau. Ces 1000 heures comprennent aussi bien l'enseignement théorique
que le clinique. Est-ce qu'il est possible de préciser d'abord le nombre
d'heures théoriques et le nombre d'heures cliniques?
M. Wexu (Oscar): J'ai déjà précisé
que c'est 500 heures de cours cliniques et à peu près 500 heures,
ou plus, c'est toujours plus, de théorie, pendant les deux années
de cours. Il faut aussi ajouter que nous avons des conférenciers, nous
avons des cours, enfin des choses intéressantes, des séminaires,
des symposiums pendant cette période et...
M. Morin (Sauvé): Et ces 1000 heures sont
contrôlables? La présence de l'étudiant pendant ces 1000
heures est contrôlée?
M. Wexu (Oscar): Elle est évidemment
contrôlée par leur présence. Mais n'oubliez pas que nous
sommes une école privée et que nous avons travaillé en
cachette, nous avons été pourchassés, même en ce qui
concerne l'école, par les médecins, nous avons une école
de massage, on nous a traînés en cour pour avoir fait du massage.
Nous avons fini par avoir la permission de la corporation médicale de
faire du massage. Nous avons été obligés de tout faire en
cachette. Vous ne pouvez pas nous imposer de tenir un programme rigoureux. Ce
programme est plutôt imposé par nous-mêmes, parce que nous
sommes très exigeants en ce qui concerne l'enseignement à nos
élèves.
M. Morin (Sauvé): Peut-être encore une
dernière question. Pourriez-vous nous décrire les exigences
auxquelles l'étude de l'acupuncture est soumise et l'admission à
l'acupuncture dans d'autres pays, surtout en France?
M. Wexu (Oscar): Vous nous le demandez pour la France. La France
a fait ses règlements. L'acupuncture a été introduire en
France il faut que je fasse un peu l'historique de la chose pour arriver
à une conclusion l'acupuncture...
M. Morin (Sauvé): Etes-vous membres de la corporation
là-bas?
M. Wexu (Oscar): C'est le vice-président de la
corporation.
M. Wexu (Mario): Oui, je suis vice-président.
M. Morin (Sauvé): Là-bas en France. Non, je parle
au Dr Wexu.
M. Wexu (Oscar): Je suis membre, oui. Je suis même membre
du comité comme conseiller. Mais cela va changer, je vais être
membre du comité comme vice-président et représentant pour
le Canada.
M. Morin (Sauvé): Pouvez-vous nous décrire
maintenant le système français?
M. Wexu (Oscar): Le système français, comme je vous
l'ai dit, a été accaparé par les médecins, qui ont
réussi à faire ce que les médecins voulaient faire ici,
à monopoliser pour les médecins la pratique de l'acupuncture. Ils
ont alors décrété que l'acupuncture ne doit être
pratiquée que par des médecins. L'acupuncture, en France, n'est
pratiquée actuellement que par des médecins. La France, qui est
toujours citée en exemple, pas toujours très heureux, a
propagé cela dans quelques autres pays d'Europe. Mais, à
l'origine, l'acupuncture a été pratiquée en Chine, comme
vous le savez, vous savez qu'en Chine il y en a un nombre considérable.
Il y a 3 millions de médecins qui s'appellent des médecins pieds
nus, qui sont instruits sommairement pour pouvoir aider les malades dans les
centres ruraux où les médecins ne veulent pas aller.
Dans le reste du monde, l'acupuncture est pratiquée par des
paramédicaux comme elle devrait être pratiquée partout.
Pour nous, un médecin qui, après avoir eu son diplôme de
médecin, veut changer sa profession et pratiquer l'acupuncture, nous
considérons que c'est une chose qui ne devrait pas être
permise.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, j'aimerais demander au
porte-parole de l'Association d'acupuncture du Québec quelle devrait
être, selon celle-ci, la relation telle qu'elle l'imagine,
idéalement, entre les acupuncteurs et les médecins. Il y a, dans
son mémoire, une affirmation à savoir que les acupuncteurs sont
disposés à effectuer à des médecins la
référence de patients qui pourraient davantage
bénéficier, à leur avis, des services d'un médecin.
Je pense qu'on peut se poser un certain nombre de questions à cet
égard sur la préparation des acupuncteurs à jouer ce
rôle de référence. Mais, relativement aux médecins,
dans le sens opposé, comment l'Association d'acupuncture du
Québec envisage-t-elle cette relation? Par exemple, est-ce qu'elle a
considéré les problèmes que pourraient poser, à son
point de vue, les questions de délégation d'actes, est-ce que
cela se
pose ou pas? Quels sont ses commentaires relativement a la performance
d'actes d'acupuncture en fontion d'ordonnances médicales et à la
notion de surveillance médicale que l'on retrouve dans le mémoire
de la Corporation professionnelle des médecins du Québec?
M. Wexu (Oscar): M. le député, je vais
répondre à tout cela. Les patients qui arrivent à
l'acupuncture sont toujours des patients rejetés par la médecine.
Ce sont des patients qui, après avoir fréquenté plusieurs
médecins, des hôpitaux, ont subi des traitements et des
opérations et arrivent chez nous en désespoir de cause pour qu'on
les aide. En général, nous n'avons pas de recommandation
médicale, parce que vous comprenez bien que les médecins ne vont
pas nous recommander. Si vous êtes bien informé, vous devez savoir
qu'il y a très peu de médecins qui recommandent la
physiothérapie dans les hôpitaux mêmes. Il y a des
médecins qui travaillent dans des hôpitaux et qui ne savent
même pas qu'il y a là un service de physiothérapie. Cela
sort complètement de l'idéologie médicale d'envoyer un
patient à notre genre de thérapeute.
Quand vous parlez de toutes ces choses, vous pensez qu'une collaboration
entre médecins et acupuncteurs existe; vraiment, ce ne serait pas
possible. Ce ne serait pas possible normalement, parce que nous n'allons jamais
avoir une recommandation d'un médecin chez nous, surtout dans
l'état actuel des choses car ils savent bien que nous n'avons pas
beaucoup d'admiration pour eux. Ce n'est pas que nous n'avons pas d'admiration
parce qu'ils le méritent et que nous ne voulons pas la leur donner,
mais, dans notre for intérieur, nous ne sommes pas d'accord avec leurs
techniques et leurs traitements. Nous avons tous ces gens qui sont
passés par la médecine, nous avons traité 250 000
personnes au Québec qui avaient été tout simplement mal
traitées pendant des années. D'ailleurs, j'espère que
beaucoup d'entre vous sont déjà passés par les soins
médicaux et savent ce que cela veut dire, les pilules à l'infini,
les examens qui n'en finissent plus et toute la... médicale qui n'a
aucun sens.
Nous ne sommes pas d'accord avec cela. Nous faisons nos traitements
naturellement; nous n'introduisons aucun médicament dans le corps
humain, nous ne demandons de rayons-X que si vraiment ils sont absolument
nécessaires et, si nous les avons, on peut changer quelque chose
à la situation. Nous ne demandons pas toutes les radiographies de tous
les côtés, qui n'ont aucun sens, pour les tests de laboratoire et
tous les tests neurologiques que les gens sont appelés à avoir
pour la moindre chose. Je ne vois pas vraiment une collaboration du
médecin à l'acupuncteur.
Evidemment, nous sommes conscients que nous sommes des professionnels,
nous avons un passé dans les soins médicaux et nous avons une
éducation médicale. Nous savons jusqu'à quel point nos
connaissances et nos possibilités peuvent aller. Nous ne sommes pas des
ignorants, ni des imbéciles; d'ailleurs, comme expérience, que
voulez-vous que je vous donne de plus éloquent que l'exemple suivant?
Pendant dix ans de pratique de l'acupuncture dans la province de Québec,
il n'y a pas eu un seul cas de mauvaise pratique qui ait été
jugé par la justice ou par le corps médical. Ils nous ont
pourchassés, ils nous ont envoyé des espions pour subir des
traitements afin de voir si nous pouvions les guérir sans
médicament. Ils ont fait tout ce qu'ils ont pu.
M. Forget: Si vous me le permettez, ce n'est pas tellement la
description du monde dans lequel on se trouve ou des difficultés
passées que je voulais obtenir de vous, mais plutôt essayer de
comprendre l'affirmation où dans votre mémoire, vous admettez la
possibilité, pourvu que certains amendements y soient apportés,
que la solution que l'on retrouve dans le projet de loi 25 soit effectivement
retenue. Dans ce contexte, quelle signification faut-il accorder à la
notion de protection du public? Est-ce que je dois comprendre que la protection
du public relativement aux services des acupuncteurs, à votre avis,
repose essentiellement et exclusivement sur l'accès à la
profession, mais non pas l'accès aux services par les individus et que
vous réclamez pour les acupuncteurs le choix de déterminer
à qui ils rendent des services, dans quelles circonstances et non pas de
le faire seulement sur ordonnance médicale?
M. Wexu (Oscar): M. le député, vous savez bien que
le patient a la liberté, pas seulement la liberté, mais la
facilité, parce qu'il ne paie pas, il se sert de sa carte
médicale. Vous savez, j'ai connu des gens qui consultaient les
médecins au moins trois fois par jour, par téléphone ou
autrement. S'ils choisissent de demander nos services, ils doivent payer chez
nous. Nous ne sommes pas autorisés à utiliser la carte
médicale; ils ont tout essayé du point de vue médical et
ils arrivent chez nous pour trouver un endroit où ils peuvent enfin
être soulagés.
M. Forget: Je comprends. Vous persistez à me
décrire la situation actuelle, mais ce n'est pas le but de ma question.
Je veux savoir quelle est votre conception de ce qui devrait prévaloir
comme régime de protection du public et je dois conclure de vos
réponses que vous ne pouvez pas admettre de pratiquer sur ordonnance
médicale. Vous réclamez le droit de pouvoir pratiquer votre art
sur toute personne qui se présente chez vous sans avoir consulté
un médecin en premier lieu. Votre admission de la possibilité
d'un contrôle à l'intérieur de la Loi de la Corporation
professionnelle des médecins ne pourrait pas viser les indications
thérapeutiques, en quelque sorte, qui rendraient le traitement
d'acupuncture approprié ou non.
M. Wexu (Oscar): M. le député, est-ce que les
chiropraticiens, les denturologistes...
M. Forget: Ecoutez, je ne veux pas argumenter...
M. Wexu (Oscar): ... et les autres professionnels... Pourquoi
voulez-vous que nous l'acceptions?
M. Forget: Mon but n'est pas d'argumenter avec vous...
M. Wexu (Oscar): Ce serait ridicule que nous soyons les seuls qui
soient obligés de demander l'avis du médecin pour que les
patients puissent se faire traiter ou non, quand vous avez déjà
donné cette liberté à d'autres professions
paramédicales. Pourquoi voulez-vous que ce soit spécialement
nous? Nous pratiquons une profession qui est la moins dangereuse au monde, vous
nous demandez de demander l'avis du médecin; nous ne l'aurons pas.
M. Forget: Je ne demande rien du tout. Je veux tout simplement
savoir ce que vous demandez. C'est le but des questions.
M. Wexu (Oscar): Lorsqu'un patient vient chez nous, comme je vous
l'ai dit, il a déjà un passé pathologique assez
chargé.
M. Forget: Très bien. Je n'ai pas d'autre question.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais poser une question au Dr Wexu et je
veux bien vous comprendre. Il semble que, dans les hôpitaux du
Québec, nulle part on n'utilise l'acupuncture. Est-ce que je me
trompe?
M. Wexu (Oscar): II est impossible de la pratiquer. Quel
hôpital, quel médecin va admettre cela? Et puis, nous n'avons pas
d'acupuncteurs; le nombre d'acupuncteurs est extrêmement réduit.
Un acupuncteur ne pourra pas travailler chez lui s'il travaille à
l'hôpital. Quel hôpital va demander les services d'un acupuncteur
quand les médecins s'y opposent, s'opposent à leur existence?
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a des médecins ou des
anesthésistes qui se servent de l'acupuncture comme forme
d'anesthésie dans les hôpitaux au Québec?
M. Wexu (Oscar): A ma connaissance et, croyez-moi, je suis
un de ceux qui devraient le savoir il n'existe ni anesthésiste,
ni médecin qui connaisse l'acupuncture dans ce pays. Tous ceux qui
jouent à l'acupuncture dans les hôpitaux, comme les
médecins et comme d'autres, sont simplement des individus qui ont vu un
peu d'acupuncture qui ont lu un livre, qui ont participé à un
séminaire de trois jours à Toronto ou à New York, et qui
se déclarent acupuncteurs. Nous ne connaissons aucun de ces messieurs
qui pourrait avoir le titre officiel que la Société d'acupuncture
du Québec et la Société internationale pourraient
reconnaître.
Mme Lavoie-Roux: Vous ai-je bien compris tout à l'heure
quand vous disiez que les médecins ne devraient pas pratiquer
l'acupuncture et que cela devrait être laissé à des membres
de votre association?
M. Wexu (Oscar): Je n'ai pas dit aux membres de notre
association, non, mais aux acupuncteurs.
Mme Lavoie-Roux: J'ai donc mal compris.
M. Wexu (Oscar): En principe pourquoi un médecin pour
lequel l'Etat a dépensé $100 000 pour qu'il devienne
médecin et vous savez bien que nous avons besoin de
médecins dans tous les pays - laisserait-il sa profession pour apprendre
une autre profession et s'y donner? Quelle serait la raison? Il n'y en a pas,
sauf celle qu'il a probablement trouvé le moyen de faire un
bénéfice comme quelques-uns qui prennent $30 $100 ou $200, pour
leurs services, et la castonguette en même temps; ils ont donc
trouvé un moyen de gagner plus d'argent. Ils doivent pratiquer leur
profession. L'Etat a dépensé de l'argent pour ces messieurs.
L'acupuncture est pour les acupuncteurs.
Mme Lavoie-Roux: Admettriez-vous qu'un anesthésiste, dans
un hôpital, puisse, comme outil supplémentaire, se servir de
l'acupuncture?
M. Wexu (Oscar): Pas en anesthésie. Si c'est un
anesthésiste, il fait de l'anesthésie, s'il veut faire de
l'acupuncture, il faut que ce soit un acupuncteur. Est-il anesthésiste
ou acupuncteur? Pour un anesthésiste, pratiquer l'acupuncture, c'est
comme un médecin qui veut devenir acupuncteur pour se faire des
bénéfices matériels. Il ne faut pas que vous acceptiez
cela.
Mme Lavoie-Roux: Vous faisiez référence tout
à l'heure à ce qui se fait dans les hôpitaux chinois.
N'avez-vous pas, dans les hôpitaux chinois, justement une relation
très proche entre ceux qui pratiquent l'acupuncture et les
médecins et même des médecins qui pratiquent
l'acupuncture?
M. Wexu (Oscar): Evidemment, c'est une collaboration. Mais, en
Chine ou dans les pays où l'acupuncture se pratique légalement,
il y a un service d'acupuncture dans les hôpitaux, et il y a un
département pour la médecine allopathique. Là-bas, le
médecin qui trouve que son malade a une maladie de coeur, une maladie
rénale, une maladie de foie, qui est impropre à une
anesthésie par la drogue, va évidemment demander à
l'acupuncteur de faire une anesthésie par l'acupuncture. Il y a une
collaboration, mais c'est une collaboration d'égal à égal.
Le docteur en acupuncture et le docteur en allopathie ont tous les deux le
même titre et les mêmes droits. Pensez-vous que c'est possible ici?
Il n'est même pas question de dialogue. Au commencement, nous
étions traités de charlatans et on a fait tout ce que vous pouvez
imaginer, contre moi surtout. On est allé jusque dans ma vie
privée pour essayer de me détruire.
La corporation médicale a le malheur d'avoir eu comme
secrétaire d'abord, et ensuite comme président, un individu qui
ne devrait pas être là, mais c'est en dehors du sujet.
Malgré cela, la question est grave.
Mme Lavoie-Roux: M. Wexu, est-ce que je perçois bien la
situation? En Chine et dans d'autres pays d'Orient, on se sert
régulièrement de l'acupuncture comme forme d'anesthésie
dans les hôpitaux. Ici, vous vous en servez davantage comme forme de
thérapie.
M. Wexu (Oscar): Oui. Ce sont deux choses différentes. En
Occident, quand vous parlez, quand les gens parlent ici de l'acupuncture, ils
ont entendu seulement les faits spectaculaires de l'acupuncture:
l'anesthésie, opération, sans opération, couper,
anesthésie. C'est une des petites branches de l'acupuncture,
insignifiante. L'acupuncture est une médecine totale; elle traite toutes
les maladies, comme la médecine les traite, avec succès dans
certains cas, avec moins de succès dans d'autres. Mais elle est une
médecine qui traite tous les malades. Qu'elle soit utilisée dans
l'anesthésie, c'est le spectacle que l'Amérique et le monde
entier a eu. C'est comme cela que l'acupuncture s'est fait connaître en
Occident. C'est le spectable, assister à l'opération d'une
personne qui n'est pas droguée. C'est courant; cela se fait ici, cela se
fait en France, cela se fait en beaucoup de pays maintenant. Mais cela ne se
fait pas couramment parce que, quand même, c'est une
spécialité qui n'est pas facile.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, monsieur.
M. Wexu (Oscar): Cela me fait plaisir, madame.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: M. le Président, je voudrais demander une
question très simple. Si on compare la formation d'un médecin et
celle d'un acupuncteur, on constate qu'un médecin doit suivre un cours
de cinq ans et, par la suite, doit acquérir toute une formation que vous
connaissez très bien. Vous dites qu'avec, à peu près deux
années de formation, vous avez autant de connaissances pour poser un
diagnostic, dans la pathologie et toutes les formes de traitement en utilisant
un seul moyen, les piqûres.
M. Wexu (Oscar): M. le député, vous devez savoir
que nous avons trois années de préparation paramédicale et
deux ans d'acupuncture. Si vous avez cinq ou six ans d'études, vous les
médecins, c'est parce que vous avez pas mal de chimiothérapie
à faire, alors que nous, nous n'avons pas la chimiothérapie; tout
notre temps est occupé à la médecine naturelle. Alors,
nous compensons; c'est ce que vous perdez dans vos études de
chimiothérapie et beaucoup d'autres choses que nous n'utilisons pas.
Nous ne prenons, dans l'acupuncture et dans la préparation
paramédicale, c'est-à-dire médicale, que ce qui est
absolument nécessaire pour pouvoir être utile à notre
profession. Nous avons une profession qui exige des choses différentes
de la vôtre. Nous n'utilisons pas tous les examens que vous faites, des
examens coûteux d'ailleurs, ce n'est pas vous qui les faites,
c'est fait par les techniciens de laboratoire, ce n'est pas vous qui faites ces
choses, vous ordonnez à d'autres de les faire nous ne faisons pas
cela. Nous n'avons pas ce grand service, nous n'avons pas cette
responsabilité, nous ne sommes pas reçus dans les hôpitaux
et nous pratiquons notre profession avec les moyens à notre disposition.
Notre profession ne demande pas autant que la vôtre. Pour faire ce que
vous faites, vous avez besoin de grec et de latin; toute la terminologie qui
fait que les pauvres personnes vous regardent comme de grands savants. Nous
n'avons pas cela; nous avons la même chose en chinois.
M. Shaw: Pour le moment, on parle de la question de diagnostic.
Vous croyez, avec votre profession, que vous pouvez soigner n'importe quelle
maladie d'une personne?
M. Wexu (Oscar): M. le député, est-ce que la
médecine peut le faire? Vous me demandez une chose, voulez-vous poser la
même question aux personnes de votre profession: Est-ce que vous pouvez
vraiment faire tout ce que vous commencez à faire?
M. Shaw: Bien, est-ce que vous...
M. Wexu (Oscar): Vous ne pouvez pas.
M. Shaw: Est-ce que vous êtes prêt à
accepter...
M. Wexu (Oscar): Nous avons les garanties, nous avons un autre
genre de garantie.
M. Shaw: Personne ne peut soigner toutes les maladies.
M. Wexu (Oscar): Non, mais...
M. Shaw: On accepte cela. Mais on dit...
M. Wexu (Oscar): ... vous demandez si nous pouvons faire. Est-ce
que vous pouvez faire? Vous ne pouvez pas.
M. Shaw: Mais on dit que...
M. Wexu (Oscar): Vous pouvez constater très bien.
M. Shaw: Un instant, un instant. On dit...
Le Président (M. Marcoux): Un instant, s'il vous
plaît, M. le député de Pointe-Claire. Je pense qu'il est
important de préciser, pour nos invités,
que vous vous adressez aux membres de la commission en tant que
députés; vous ne vous adressez pas à tel membre de la
commission qui a teiie profession. Vous vous adressez aux législateurs
qui sont membres de cette commission.
M. Shaw: Je voudrais simplement vous poser la question: Si l'Etat
a besoin de protéger les droits des personnes qui ne sont pas
connaissantes de leur propre santé, il s'asstre des connaissances de
médecins responsables et les médecins ne sont pas les seuls
à prendre cette responsabilité. Ils ont, par la loi, la
responsabilité d'oeuvrer, d'agir pour les patients, pour les
protéger contre les soins qui ne sont peut-être pas à
l'avantage du patient.
M. Wexu (Oscar): M. le député, qui vous a
donné ce droit de faire tout ça? Vous avez un droit, ce n'est pas
le bon Dieu qui vous l'a donné. Ce sont les législateurs qui vous
ont donné ce droit. Comment avez-vous obtenu ce droit de vous occuper
des malades? Les premiers politiciens vous ont donné le droit
extraordinaire que vous avez aujourd'hui; c'est la seule profession dans le
monde qui soit le bon Dieu sur la terre. Elle a tous les privilèges,
tous les pouvoirs. Pourquoi? Parce que les législateurs ont pensé
qu'eux, ils vont pouvoir guérir tout le monde, que la maladie va
disparaître. C'est pour cela que la profession médicale a acquis
ce terrible privilège qu'elle a aujourd'hui. On vous a donné pour
tâche de guérir les malades, mais vous n'avez pas réussi.
Les maladies ont augmenté, le nombre de malades a triplé,
quadruplé; on ne s'en rend pas compte, n'est-ce pas, à cause du
chiffre de la population. Ecoutez, vous avez un droit, pourquoi ne pas nous
donner ce même droit?
M. Shaw: Vous voulez prendre la même responsabilité
que la corporation...
M. Wexu (Oscar): Pourquoi pas? On ne le demande pas, mais ne vous
croyez pas le bon Dieu sur la terre. Vous avez un droit que les
législateurs vous ont offert. Et, ce droit, je le discute, je le
conteste, parce que les traitements que vous donnez ne sont pas aussi bons
qu'ils devraient être, et vous ne prenez pas soin de vos patients comme
il faut. Quand le patient vient chez nous, il est plus malade que quand il est
allé chez vous. Comment voulez-vous que je croie en vous?
M. Shaw: Vous dites...
M. Wexu (Oscar): Parce que vous avez les droits du bon Dieu parce
que les législateurs vous ont donné ce droit qui date de 200 ans.
Il va falloir réviser tout cela.
M. Shaw: Chez vous, cela va être réglé.
M. Wexu (Oscar): Pas chez moi, pas chez moi. J'ai dit que le
législateur...
M. Shaw: Chez vous, je dis sans...
M. Wexu (Oscar): ... un beau jour, va être obligé de
régler cette situation, parce qu'elle est devenue désastreuse
pour l'Etat. L'Etat ne peut pas supporter tous les malades qu'il supporte
maintenant. Vous savez qu'il y a plus de malades; quand il n'y aura plus de
médecins, il n'y aura plus de malades.
M. Shaw: Moi, je suis un dentiste...
M. Wexu (Oscar): Je ne parle pas de vous.
M. Shaw:... et je suis bien prêt à accepter que si
j'ai mal au foie...
M. Wexu (Oscar): Vous n'avez pas besoin de la médecine
pour pratiquer la dentisterie.
M. Shaw: ... si j'ai besoin de voir un médecin.
M. Wexu (Oscar): Vous allez venir chez l'acupuncteur...
M. Shaw: Ah!
M. Wexu (Oscar): ... et, dans quelque temps, vous serez bien.
M. Shaw: Mais vous n'êtes pas prêt à
accepter...
M. Wexu (Oscar): C'est tout ce que je peux vous dire.
Mme Lavoie-Roux: II a raison.
M. Shaw: Mais vous n'êtes pas prêt à
accepter...
M. Wexu (Oscar): Vous savez que la médecine n'a absolument
rien fait pour le foie...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire, le député de Gaspé a aussi demandé
la parole. Comme il reste à peine trois minutes pour votre parti, je
vais lui laisser quelques...
Mme Lavoie-Roux: ...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: M. le Président, merci. Je ne suis pas
médecin...
Le Président (M. Marcoux): Chanceux... M. Wexu (Oscar):
Vous êtes bien ainsi.
M. Le Moignan: Je m'intéresse beaucoup tout de même
à l'acupuncture. Si on y regarde bien, il y a des milliers
d'années de médecine orientale et nous sommes habitués
à notre système occidental. Je sais bien que la raison qui vous
amène ici aujourd'hui n'est pas tellement pour nous de discuter, de
juger de la valeur scientifique de l'acu-
puncture. Mais je m'aperçois que vous êtes tout de
même deux groupes ici, je n'ai pas à vous demander de
répondre pour l'autre groupe auquel vous avez fait allusion ce matin,
mais si j'ai bien lu, en vitesse, l'autre mémoire, ils sont prêts
à accepter des médecins. Est-ce que cela répugne qu'un
médecin puisse étudier l'acupuncture? Est-ce qu'un médecin
pourrait jouer les deux rôles ici au Québec?
M. Wexu (Oscar): M. le député, je vais vous
répondre. C'est au gouvernement de décider mais je
considère, comme spécialiste dans la matière, que ce
serait une grande faute de prendre un médecin pour lequel vous avez
dépensé de l'argent, de changer sa profession pour qu'il puisse
devenir acupuncteur. Pourquoi voulez-vous cela? Premièrement, la
corporation médicale devrait intervenir, parce que si le médecin
veut pratiquer l'acupuncture, c'est qu'il a certainement été
convaincu que l'acupuncture est meilleure que la médecine. Si j'avais
été convaincu que la médecine est meilleure que
l'acupuncture, je serais devenu médecin; je n'ai jamais voulu
l'être.
M. Le Moignan: Est-ce que cela répugne qu'il fasse les
deux?
M. Wexu (Oscar): Pourquoi un médecin va-t-il changer
d'idée, laisser sa profession pour devenir acupuncteur? C'est un choc
pour le Collège des médecins spécialement. Il devrait
l'interdire. S'il ne le fait pas... Il en a certainement envie, mais il ne le
fait pas. Chez nous, il voulait nous tenir.
M. Le Moignan: Est-ce que cela répugne qu'un
médecin puisse pratiquer les deux?
M. Wexu (Oscar): Cela me répugne de dépenser de
l'argent chez eux. Cela coûte $100 000 les-dites actions d'un
médecin, monsieur.
M. Le Moignan: Etes-vous médecin?
M. Wexu (Oscar): Je ne le suis pas, je suis acupuncteur. Je suis
un médecin de la médecine chinoise.
M. Le Moignan: Mais vous êtes membre de la
Société de médecine de Paris. Qu'est-ce que cela veut
dire?
M. Wexu (Oscar): C'est exact. Oui, je le suis, mais pas comme
médecin, comme auxiliaire médical. Par ma valeur dans la
médecine, je suis dans la science de la médecine, je suis
reçu par la Société de médecine de Paris. On
m'offre cet immense honneur. C'est un immense honneur. Je ne sais pas à
quoi cela me sert. Je me rends bien compte que je suis traité par ces
messieurs du Collège des médecins comme si cela n'a aucune grande
valeur pour vous, mais il y en a d'autres, à l'étranger...
M. Le Moignan: J'aurais une dernière petite question.
M. Wexu (Oscar): Oui.
M. Le Moignan: Médecine traditionnelle: L'acupuncture.
M. Wexu (Oscar): Elle n'est pas traditionnelle, M. le
député, je m'excuse.
M. Le Moignan: Ici dans notre langage occidental, si vous
voulez.
M. Wexu (Oscar): C'est au pratique. La médecine
traditionnelle, c'est la médecine chinoise.
M. Le Moignan: Oui, mais j'aimerais savoir si un médecin,
tout en étant médecin, peut retirer beaucoup de l'acupuncture en
ne combinant pas les deux. Y a-t-il une objection sérieuse à
cela?
M. Wexu (Oscar): Oui, monsieur. C'est cela l'intérêt
s'il parle en scientifique pour son propre plaisir à la maison, s'il
veut jouer avec sa famille à l'acupuncture, d'accord. Mais on a des
acupuncteurs pour cela. Pourquoi voulez-vous qu'on fasse deux professions
à la fois, un cumul de professions? Le bureau des professions va-t-il
accepter cela? C'est un cumul de professions.
M. Le Moignan: Mais il serait plus complet à ce
moment-là. Si vous faites toute une partie que lui pourrait faire
ensuite.
M. Wexu (Oscar): Comment plus complet? Il n'en a pas besoin. Nous
avons des professionnels pour l'acupuncture. Pourquoi voulez-vous qu'il
professe?
Le Président (M. Marcoux): Je dois remercier l'Association
de l'acupuncture du Québec de la présentation de son
mémoire. Je crois que vous avez pu voir par les questions que vous avez
suscitées l'intérêt des membres de la commission.
J'inviterais maintenant l'Institut canadien d'acupuncture à venir
nous présenter son mémoire.
M. Farley: Qu'il me soit permis de remercier les membres de la
commission de nous avoir permis de nous faire entendre.
Le Président (M. Marcoux): Merci, messieurs.
Avant de vous céder la parole, il y a eu une demande de directive
qui a été soulevée ce matin. J'avais dit que j'y
reviendrais au début de l'après-midi, mais je ne voulais pas
diviser en deux la présentation du premier mémoire.
Après consultation auprès de certaines personnes, je dois
revenir à l'interprétation que j'avais donnée ce matin en
réponse à la demande de directive qu'on m'avait faite qui
était, pour ceux qui étaient absents à ce
moment-là: Est-il compatible d'être membre entre autres, d'un
bureau de direction d'une corporation professionnelle et de siéger comme
membre à cette commission, spécialement au moment où cette
corporation pourrait venir présenter un mémoire ou
défendre un point de vue?
On avait invoqué, à ce moment-là, la Loi de la
Législature, entre autres, l'article 87, par analogie. Cet article 87
s'intitule "Associé d'un député" et se lit comme ceci: "II
est interdit à quiconque qui exerce sa profession avec un
député de donner ou de signer de son nom un avis concernant un
projet de loi, de comparaître pour y plaider devant une des commissions
de l'Assemblée nationale, d'être agent parlementaire ou d'appuyer
ou de repousser de quelque manière que ce soit, devant une des
commissions de l'Assemblée nationale, un projet de loi, une
résolution, une pétition ou une matière quelconque soumis
à la considération d'une telle commission". On précise
bien que c'est un associé d'un député qui est à ce
moment en société.
Il avait été clair ce matin que, si on se
référait à nos règlements de l'Assemblée
nationale comme tels, on ne pouvait en invoquer aucun visant à
empêcher un député de siéger comme membre de cette
commission, s'il est en même temps un membre d'un bureau de direction,
d'une corporation professionnelle. L'interprétation que l'on donne de
l'article 87 vise explicitement les associés d'un député
dans toute société possible, mais ne vise pas le cas qui nous a
été présenté. Je crois qu'il faut s'en tenir
à l'interprétation de la réponse que j'avais faite ce
matin.
Il peut être utile ou même valable, pour les personnes qui
pourraient être visées par cette question, d'indiquer avant une
intervention simplement leur appartenance à tel groupe social ou
à tel milieu, de façon à clarifier l'objectivité
des questions ou des commentaires. En aucun cas, l'article 87 de la Loi de la
législature, aussi bien qu'un des règlements de
l'Assemblée nationale, ne peut être invoqué pour
empêcher un député de siéger comme membre de cette
commission, s'il est déjà membre d'un bureau de direction d'une
corporation professionnelle. Oui?
Mme Lavoie-Roux: Question de directive, M. le Président.
J'ai bien compris l'interprétation que vous avez faite de la situation,
mais est-ce que dans le cas de vote, est-ce qu'il serait normal que la personne
utilise son droit de vote dans une situation comme celle-là ou est-ce
que là-dessus tout est silencieux aussi?
Le Président (M. Marcoux): En conséquence de ce que
j'ai dit, c'est très clair que tout député qui est membre
de cette commission a tous les pouvoirs d'un député.
Mme Lavoie-Roux: En fait, c'est une règle d'éthique
qui n'est pas écrite, à laquelle on a fait
référence.
Le Président (M. Marcoux): Oui, c'est une
interprétation d'une possibilité, mais il n'y a rien ni dans la
loi, ni dans les règlements de l'Assemblée nationale, qui
pourrait aller dans ce sens. Or, maintenant, j'inviterais M. Lafrenière
à nous présenter ses collègues et à
présenter son mémoire. Vous avez une vingtaine de minutes pour
présen- ter, pour résumer ou pour citer les principaux passages
de votre mémoire avant que le dialogue ne s'engage avec les autres
membres de la commission.
Institut canadien d'acupuncture Inc.
M. Lafrenière (Robert): M. le Président, M. le
ministre de l'Education, MM. les législateurs, M. le Président de
l'Office des professions. Je représente l'Institut canadien
d'acupuncture incorporé en vertu de la troisième partie de la Loi
des compagnies. Ici, à mes côtés, j'ai le plaisir
d'être accompagné par M. Henri Solinas, qui est le
président de l'Institut d'acupuncture canadien, aussi le Dr Roger Ghys,
qui est le vice-président de ce même institut et qui est aussi le
vice-président de l'Union mondiale des médecins acupuncteurs et
des sociétés d'acupuncture. Il a aussi travaillé à
la traduction anglaise du traité d'acupuncture du Dr Van Nghi,
professeur à la faculté de médecine de Marseille. Il y a
ici des professeurs de l'Institut canadien d'acupuncture, dont Mlle Claudette
Blouin, M. Jacques Clark, M. Jacques Hébert, M. David Bentata. Le Dr
Ghys est aussi "fellow" du Collège royal de Londres et "fellow" du
Collège royal des physiciens du Canada.
Ceci pour vous dire que l'institut que je représente n'a pas
l'intention de se montrer en contradiction, ni comme antagoniste du
Collège des médecins. Les acupuncteurs sont conscients que
médecins et acupuncteurs ont le même objectif, visent le
même but c'est-à-dire la santé du patient.
Cependant, pour arriver à cet objet, à ce même but,
ils préconisent, dans la plupart des cas, des voies ou des moyens
différents. La médecine occidentale, à leur point de vue,
est différente de l'acupuncture, connue aussi sous le nom de
médecine chinoise.
Les acupuncteurs de l'Institut canadien d'acupuncture prétendent
que le projet de loi no 25 a un bon côté, en ce sens, que ce
projet permettra aux acupuncteurs de sortir de l'illégalité.
Cependant, ils ne prétendent pas pour autant que le projet de loi no 25
est un idéal, parce que ce projet semble, par ses moyens, placer sous la
tutelle d'une autre profession la pratique elle-même de
l'acupuncture.
Vous savez déjà que l'esprit et la philosophie du Code des
professions est réfractaire au fait qu'une profession soit
accrochée à une autre profession, est réfractaire au fait
qu'une profession soit la parente pauvre d'une autre profession.
Conséquemment, l'idéal eut été que les acupuncteurs
accèdent à une corporation professionnelle. Cependant, ils sont
conscients que leur petit nombre est déjà une objection. Ils sont
conscients aussi que jusqu'à maintenant, aucune autorité
existante peut peser ou analyser leurs qualifications et aucune
autorité, non plus, suivant l'état actuel des choses, ne peut
contrôler l'exercice de leur profession. C'est pourquoi ils
considèrent comme un moindre mal de donner leur assentiment au projet de
loi no 25, et ils veulent tout simplement, par leur exposé, cet
après-midi, mettre le
législateur en garde contre la possibilité qu'il y aurait
de prendre les médecins non pas comme des collaborateurs, mais comme des
oppresseurs.
Ils sont conscients aussi que les médecins peuvent être les
meilleurs guides et les meilleurs collaborateurs pour l'établissement de
la pratique de l'acupuncture et aussi pour le contrôle de son
exercice.
Ceci étant dit, messieurs, je pense que je vais laisser la parole
au président de l'Institut canadien d'acupuncture, M. Henri Solinas, et
vous aurez probablement tôt compris les raisons pour lesquelles j'ai
laissé à M. Solinas le soin de vous donner les explications plus
précises sur le mémoire qu'il a rédigé
lui-même et donner aussi toutes les informations qu'il vous plaira de lui
demander sur la formation des acupuncteurs, suivant l'école qu'il
dirige.
Alors, messieurs, je vous présente M. Henri Solinas, le
président de l'Institut.
M. Solinas (Henri): M. le ministre, messieurs les
députés, M. le Président, il me fait plaisir d'abord de
vous présenter...
Le Président (M. Marcoux): II ne faudrait pas oublier Mme
le député.
M. Solinas: Mme le député; merci de me l'avoir
signalé.
Toute idée parcourt trois phases pour s'imposer. D'abord, elle
apparaît ridicule, puis elle est combattue et, finalement, elle est
ressentie comme une évidence. C'est un peu l'histoire du cheminement de
l'acupuncture en Occident et au Québec en particulier, qui se trouve
résumée dans ces propos de Schopenhauer. Cela pourrait être
l'histoire du cheminement de n'importe quelle idée.
Les membres de l'Institut canadien d'acupuncture, dont je me fais
aujourd'hui l'interprète, sont fiers, sinon d'avoir pu l'imposer, ce qui
est le rôle du législateur, du moins, de pouvoir la proposer et de
pouvoir l'exposer et de l'avoir fait au moment où elle était
niée et combattue, ce qu'ont fait aussi d'autres acupuncteurs
n'appartenant pas à notre organisme par des démarches
différentes, et je dois signaler un organisme qui n'est pas
représenté ici aujourd'hui et qui a quand même joué
un très grand rôle en la personne de M. Bernard Grimeau qui, lui,
s'occupe des centres d'acupuncture du Québec, mais qui se rallie
à notre mémoire.
Dans le cheminement de l'acupuncture au Québec, notre groupe
s'est situé entre deux fanatismes aussi peu féconds l'un que
l'autre, car ils n'ont pu que s'engendrer mutuellement. C'est, d'une part,
celui de certains médecins qui, imbus d'eux-mêmes, ont nié
l'acupuncture, par ignorance, ou qui, frustrés, l'ont combattu pour
mieux la monopoliser. C'est, d'autre part, celui de certains acupuncteurs qui,
imbus d'eux-mêmes, ont nié la médecine pour faire de
l'acupuncture une panacée ou qui, frustrés, l'ont combattue parce
qu'ils se sont mal remis psychologiquement de la lutte que leur a livrée
la Corporation profession- nelle des médecins. Dans cette jungle, il ne
manquait qu'un Bokassa se couronnant lui-même empereur de l'acupuncture
à grands renforts de publicité. Il semble que nous l'ayons et ce
dernier, convaincu d'avoir reçu à grands renforts de
publicité encore le message céleste d'organiser une croisade
contre le monstre médical, est allé jusqu'à prôner
l'illégalité plutôt qu'une collaboration future avec la
médecine; il est allé aussi jusqu'à monter une
véritable corporation professionnelle à travers une association
qui agissait comme telle.
Notre position est donc entre deux fanatismes. Nous aurions
préféré que nos démarches débouchent sur la
formation d'une corporation professionnelle autonome, mais nous n'y sommes pas
parvenus. Nous espérons que, dans l'avenir, cette idée aura plus
de chance de s'imposer et nous pourrons revenir à la charge puisque nous
n'abandonnons pas et nous faisons confiance à ce qui nous est
proposé.
Ce qui nous est offert, c'est un choix entre, d'une part,
l'illégalité ou le projet de loi no 25, c'est-à-dire
passer Noël dehors ou le passer dedans avec un sapin. Il faudrait
être extravagant pour ne pas choisir le moindre de deux maux. Les membres
de l'Institut canadien d'acupuncture sont donc favorables à ce projet de
loi qu'ils considèrent comme pouvant constituer une première
étape importante dans le développement de cette science au
Québec car rien n'a été fait jusqu'à présent
et ce projet de loi a au moins le mérite de sortir l'acupuncture de
l'illégalité, de la débarrasser de quelques relents
d'ésotérisme qu'elle traîne encore derrière elle
à cause de son origine orientale. Il a aussi pour mérite de
protéger le public et c'est pour nous ce qui est finalement le
plus important et de mettre sur pied un système de contrôle
des connaissances, ce qui est absolument nécessaire et indispensable
pour que l'acupuncture soit appliquée de façon qualitative et que
sa spécificité demeure rigoureuse.
La collaboration avec la médecine, nous ne pouvons aller contre
puisque nous l'avons prônée depuis le début, ce qui
explique les divergences des points de vue entre les groupes d'acupuncteurs au
Québec. Cette collaboration, nous l'avons prônée et nous
avons entamé le dialogue d'abord avec la Corporation professionnelle des
médecins, nous avons été les premiers à essayer de
faire de l'information au niveau de la Corporation professionnelle des
médecins et à mettre en évidence non pas l'opposition, ce
qui serait une folie, car l'acupuncture, qui appartient à la
médecine traditionnelle chinoise, et la médecine occidentale ont
en fait le même but, c'est de traiter le patient. Nous ne voyons
là que de la complémentarité et tout inconscient ne
pouvait finalement y voir que de l'opposition.
Si ces deux médecines s'appuient sur des conceptions
physiologiques et peut-être une séméiologie qui sont
différentes, elles sont pour autant complémentaires. Dans
l'intérêt du patient, chaque fois que nous l'avons pu, nous avons
pris contact cela n'a pas toujours été facile
avec
son médecin et nous avons demandé des examens
complémentaires, des examens paramédicaux absolument
nécessaires d'un certain traitement donné en acupuncture à
moins de prendre le risque d'offrir un très mauvais service. Nous avons
référé des patients à un contrôle objectivant
le résultat et nous avons essayé de travailler au maximum avec la
collaboration médicale pour avoir le maximum de connaissances sur le
patient concerné, car c'est lui, finalement, qui est le plus important
là-dedans.
Nous n'avons donc aucune opposition en ce qui concerne les patients que
nous traitons d'ailleurs déjà sur référence, ainsi
que des médecins eux-mêmes. Nous avons participé à
des publications scientifiques, telle l'Information médicale, et au
niveau de l'enseignement de l'acupuncture, l'institut a regroupé des
médecins et des non-médecins. Comme l'acupuncteur devra pratiquer
en Occident, pour enlever la barrière du langage qui aurait pu exister
entre la médecine occidentale et l'acupuncture, la première
partie d'une pathologie est toujours présentée à la
façon occidentale et accompagnée de son traitement par un
médecin, et la seconde partie, c'est la conception
énergétique de la même pathologie et ce que peut faire
l'acupuncture dans la pathologie mentionnée.
En outre, l'acupuncture ne traite pas tout. L'acupuncture n'est pas une
panacée et nous n'avons pas la prétention de tout traiter.
L'acupuncture a des limites et a des indications et ces limites et ces
indications sont très nettement définies dans le mémoire
que nous avons déposé.
Jusqu'à présent la collaboration avec la médecine,
dans notre cas, s'est opérée sur une base saine, chacun
respectant sa spécificité et tenant compte l'un de l'autre.
Cependant, il nous faut admettre que le projet de loi no 25 risque, s'il est
accepté comme tel et s'il n'est pas amendé, de transformer nos
alliés que sont les médecins en oppresseurs. C'est pourquoi nous
voulons mettre en garde le législateur de la porte qu'ouvre sur
l'arbitraire ce projet qui confère au bureau le droit de vie et de mort
sur l'acupuncture et les acupuncteurs. En effet, nous ne trouvons nulle part
dans le projet un mécanisme protégeant l'autonomie de
l'acupuncteur et nous pouvons entrevoir, pour ce dernier, une relation qui
pourrait se faire éventuellement dans le sens d'employeur à
employé, et ce n'est pas fait. Il y est simplement mentionné que
le bureau, avant d'adopter un règlement, en vertu du présent
article, doit consulter l'Office des professions du Québec et les
organismes représentatifs des personnes concernées.
Pour mettre l'accent sur l'arbitraire, nous prendrons des exemples
concrets. On peut déjà prévoir que le bureau, avec lequel
nous sommes prêts à travailler et prêts à faire une
table ronde dans la mesure où on y sera admis, on peut
déjà prévoir que ce bureau, avec les pouvoirs que lui
confère ce projet de loi et pourquoi s'en priverait-il, puisque
son rôle est, entre autres, de protéger les intérêts
des médecins? peut décider que l'acupuncteur ne pourra
traiter que sur recommandation médicale. Cela peut paraître
anodin, certes, et même idéal, mais, à la réflexion,
c'est nier la liberté de choix qui appartient au patient et c'est le
priver d'un droit fondamental.
En second lieu, c'est le rendre tributaire d'un médecin qui peut,
et o'est son droit, ne pas être favorable à l'acupuncture ou veut
continuer de l'ignorer car, en prendre connaissance, c'est encore vouloir
l'étudier. C'est rendre l'acupuncteur tributaire du médecin. On
se pose la question: Qu'adviendra-t-il du patient qui voudra aller à
l'acupuncture et auquel son médecin ne voudra pas donner de
recommandation? Il communiquera avec l'acupuncteur qui lui trouvera un
médecin ouvert à l'acupuncture et prêt, lui, à
donner une recommandation. Il n'aura fait que retarder le début de son
traitement et chaque acupuncteur aura son ou ses médecins de
service.
C'est encore présupposer que tous les médecins, qui sont
de bonne foi et nous l'admettons connaissent très bien les
indications et les limites de l'acupuncture, ce dont le bureau va aussi
décider. Or, on sait que la médecine occidentale peut s'appuyer
sur cette séparation arbitraire entre l'organique et le fonctionnel et
retirer du champ d'action de l'acupuncture des pathologies qui répondent
très bien au traitement.
En se fiant aux statistiques que nous avons établies, 80% des
patients référés à l'acupuncture par des
médecins avec lesquels nous collaborons étroitement sont des
malades chroniques, rebelles à toutes les thérapeutiques, ou des
patients dont les douleurs sont insupportables, malgré les doses
massives d'analgésiques qui leur sont administrées, ou dont la
maladie, de fonctionnelle qu'elle était, est devenue organique, ce qui
nous permet de conclure que, pour que ce système fonctionne bien avec le
bureau, il faudrait qu'on voit dans l'acupuncture autre chose qu'un
procédé d'analgésie. On parlait tout à l'heure
d'anesthésie par acupuncture, je me permettrai de signaler à
cette docte assemblée qu'il n'existe pas d'anesthésie par
acupuncture. Il existe une analgésie par acupuncture, mais il n'existe
pas d'anesthésie, jusqu'à maintenant, par acupuncture.
Deuxièmement, c'est nier aussi l'aspect préventif de cette
thérapeutique et je rappellerai qu'en Chine, l'acupuncteur
équilibrait l'énergie de ses patients à chaque saison. Je
cite le Soouenn qui dit que l'acupuncture traite la maladie avant qu'elle ne
s'installe. Effectivement, qu'adviendrait-il du patient qui vient pour un
traitement d'entretien saisonnier et qui vient équilibrer son
énergie s'il n'a pas de recommandation médicale? Et on constate
aussi que l'acupuncture est utilisée sur un plan curatif lorsque tout a
échoué. Cette recommandation médicale pourrait avoir une
très grande importance, dans la mesure où ne seraient
remboursés par la Régie de l'assurance-maladie que les
traitements ordonnés par le médecin. Cela peut très bien
se concevoir et ce n'est pas incompatible. Cela va demander une très
grosse information auprès du médecin, mais le bureau peut
très bien fonctionner et nous avec, pour autant que l'information qui
sera donnée aux médecins pour utiliser l'acupuncture sera large
et
que nous pourrons être des partenaires capables d'apporter quelque
chose dans ce débat.
Troisièmement, le bureau omnipotent peut aussi décider que
les acupuncteurs ne pourront pratiquer qu'en présence d'un
médecin. Là, nous voyons se dessiner ce qui peut arriver, puisque
la physiothérapie nous en donne un exemple remarquable et va nous
permettre d'étayer le sujet.
En effet, tous les physiothérapeutes qui étaient
contraints d'avoir un orthopédiste présent pendant les
traitements ont couru ces spécialistes qui se mettaient aux
enchères et exigeaient, en plus d'un certain confort, loyer gratuit chez
les physiothérapeutes pour les consultations privées, un
pourcentage astronomique sur les traitements donnés, sinon plus de
référence et plus de présence. Comme quoi, le
proxénétisme peut prendre diverses formes et peut même
déjà ériger un système si les lois lui permettent
d'éclore sous le vocable élégant de mandarine.
En fait, nous sommes favorables à ce projet de loi, il a ce
mérite de nous sortir de l'illégalité, mais où est
la garantie que ce bureau qui sera tout-puissant va nous faire une place dans
une discussion que nous sommes prêts à ouvrir, que ce soit en ce
qui concerne les matières nécessaires à la formation de
l'acupuncteur, que ce soit au niveau des examens, que ce soit au niveau de
l'information, au niveau de la codification des pathologies, puisque nous ne
traitons pas tout et effectivement, il est nécessaire que cette
complémentarité existe, parce que ça évitera
à l'acupuncteur de traiter où il ne doit pas traiter et ça
permettra au médecin de référer quand il peut
référer.
Je pense que je vous ferai grâce du reste du mémoire, je
n'ai souligné que quelques points importants et je peux là-dessus
m'arrêter. Nous sommes favorables au projet de loi dans la mesure
où on nous fait une place à table.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie pour la
présentation de votre mémoire. M. le ministre.
M. Morin: Merci, M. le Président. Un point qui me
paraît important dans votre mémoire, messieurs, a trait à
la formation des médecins pratiquant ou désirant pratiquer
l'acupuncture. Si j'ai bien compris votre mémoire, cette formation
devrait être essentiellement la même que celle des acupuncteurs
non-médecins. C'est bien ce que dit votre mémoire.
M. Solinas: C'est bien ce que dit le mémoire et voici
pourquoi. Il est évident que nul ne peut être mieux
préparé, de par les connaissances en sciences fondamentales qu'il
a, que le médecin pour aborder l'acupuncture. Le problème est le
suivant. S'il existe une acupuncture, il ne peut pas exister deux types
d'acupuncteurs et je disais, en paraphrasant justement ce qu'on disait de la
musique, il ne peut pas y avoir deux types de musique; il y a la bonne et la
mauvaise. La bonne est la même pour tous. Dans les pays comme la France
où la médecine a monopolisé l'acupuncture, nous avons des
médecins qui suivent un cours de trois ans.
M. Morin: Je ne voudrais pas entrer dans un débat pour
savoir si on peut comparer la musique, qui est essentiellement un art, qui est
aussi science par certains de ses aspects, à l'acupuncture. Car s'il
existe une bonne acupuncture et une mauvaise, je ne suis pas sûr qu'on
puisse convaincre tous les êtres humains que telle musique est bonne et
que telle autre est mauvaise. Il faudrait laisser une large place au goût
de chacun là-dedans. Je suis sûr que votre attitude est plus
scientifique que celle qui serait fondée sur la musique, ou uniquement
sur une comparaison avec la musique.
Serait-il opportun de prévoir par règlement, la formation
des médecins qui voudraient devenir acupuncteurs et comment voyez-vous
la chose? Est-ce que ce règlement devrait prévoir un certain code
de déontologie, devrait-il comporter des stages de perfectionnement pour
les médecins, quelle sorte de formation devrait-on prévoir pour
les médecins? Si le Dr Ghys voulait répondre à cette
question, j'en serais fort aise, puisque je sais qu'il a eu l'occasion de
réfléchir à ces problèmes.
M. Ghys: Je vais essayer de répondre à la fois en
tant que médecin et acupuncteur, ce qui n'est pas toujours facile. Je
crois qu'il existe des pays, la France par exemple, où l'acupuncture est
une spécialité médicale au même titre, par exemple,
que la rhumatologie. Evidemment, là, le problème est
résolu d'une certaine façon. Ici, nous sommes dans un contexte
entièrement différent, tant au point de vue médical qu'au
point de vue social. Donc, je crois qu'il faut partir des bases qui existent
déjà, il faut considérer que l'acupuncture a
démarré au Canada et au Québec en particulier en dehors de
la profession médicale.
Pour répondre à votre question, je pense que ce qu'il
faudrait, c'est qu'il existe des cours qui soient ouverts, à la fois aux
médecins et aux non-médecins. Je ne pense pas qu'à ce
stade-ci, on puisse envisager d'en arriver au stade où on en est en
France, c'est-à-dire de faire de l'acupuncture une
spécialité médicale comme les autres, mais je crois que
les médecins qui voudraient se lancer dans l'acupuncture devraient
absolument se remettre un petit peu à l'école de la
médecine chinoise.
Lorsque moi-même j'ai commencé à faire de
l'acupuncture, il y a à peu près huit ans, je ne dirais pas que
j'ai dû oublier certaines des notions que j'avais apprises à
l'école, mais j'ai dû les réviser complètement.
C'est ce genre de révision qui devrait être exigé de la
part des médecins qui voudraient en faire de façon pratique.
Maintenant, je ne vois pas de meilleure école pour cela qu'une
école où, précisément, on pourrait continuer
ensuite à se perfectionner dans l'acupuncture tout en restant, bien
sûr, médecin à part entière. Est-ce que cela
répond à votre question, M. le ministre?
M. Morin (Sauvé): Oui, je crois que cela y répond
et je voudrais vous dire, pour ne pas prendre
indûment le temps de la commission, M. le Président, et
donner aux autres membres l'occasion de poser des questions au sujet de ce
mémoire très sérieux qui nous a été soumis,
que nous sommes prêts à étudier très
sérieusement la possibilité d'ajouter, à l'article 19a de
la loi médicale, des dispositions qui couvriraient l'exercice de
l'acupuncture par les médecins de façon à nous assurer que
le médecin qui désire pratiquer l'acupuncture puisse vraiment en
faire un apprentissage sérieux.
M. Ghys: M. le ministre, si vous me permettez j'aimerais ajouter
quelque chose. Il y a un peu plus de trois ans j'ai écrit aux doyens des
deux facultés de médecine. Je voyais le problème se
profiler à l'horizon. J'ai écrit aux doyens des facultés
de médecine de Laval et de Montréal en leur proposant d'avoir des
discussions sur la possibilité de faire, non pas un cours d'acupuncture
à la faculté de médecine, mais au moins un cours
d'information sur l'acupuncture.
Un des deux doyens m'a envoyé un accusé de
réception poli et l'autre ne m'a même pas répondu. Mais en
ce qui nous concerne nous sommes toujours ouverts au dialogue.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Richelieu.
M. Martel: Après avoir entendu les deux associations sur
cette science qui ont semblé dire qu'au Québec nous
n'étions pas tellement avancés dans ce domaine on a
parlé de la France, de la Chine, du Japon je me pose une
question. Il y a un organisme pour qui j'ai beaucoup de respect, l'Organisation
mondiale de la santé, qui a son siège social à
Genève. Est-ce qu'elle reconnaît cette science de
l'acupuncture?
M. Ghys: Je pense que l'Organisation mondiale de la santé,
jusqu'à maintenant, n'a pas pris position de façon
précise. Je connais un médecin qui vit à Genève et
qui a dit beaucoup de mal de l'acupuncture, mais c'est un médecin qui
aime prendre des positions un petit peu extrêmes et, par
conséquent, je pense qu'il parlait en son nom personnel seulement.
Pas plus tard qu'hier, je peux vous dire que j'ai reçu une lettre
de la Canadian Medical Association dans laquelle elle considérait que
l'acupuncture était un acte médical qui pouvait être
considéré dans le cas de "malpractice".
Par conséquent, cela veut quand même dire que l'opinion
médicale en général est de plus en plus ouverte à
l'acupuncture. L'Organisation mondiale de la santé est évidemment
un organisme supranational, mais c'est aussi, par certains côtés,
un organisme politique. Par conséquent, dans ce domaine-là, on ne
doit peut-être pas s'attendre que ce soit elle qui rompe ou jette les
ponts les premiers.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, premièrement,
j'aimerais souligner que je me réjouis de l'intention que vient
d'exprimer le ministre relativement à cette question de
réglementation de l'acupuncture, quel que soit celui qui se destine
à la pratiquer.
Effectivement, le premier problème qui confronte le gouvernement
vis-à-vis une pratique nouvelle, une technique ou un art nouveau, c'est
d'abord de décider si cette technique a une quelconque validité
et, sinon, d'en interdire carrément l'exercice et, si elle a quelque
validité, de s'assurer que tous ceux qui la pratiquent soient soumis
exactement aux mêmes règles et aux mêmes obligations de
compétence professionnelle et soient astreints aux mêmes
obligations d'acquérir cette compétence professionnelle. Je crois
que c'est un premier point qui mérite d'être souligné.
Cependant, si cette réglementation peut se faire avec une
application universelle, il demeure que des non-médecins continueront,
en vertu même du projet de loi, de pratiquer l'acupuncture.
Le groupe qui est devant nous a exprimé son désaccord
quant à la nécessité de le faire selon une ordonnance
médicale. Je crois que cela est très clair, qu'il n'est pas
question pour eux de le faire de façon exclusive sur ordonnance
médicale. Ils acceptent, bien sûr, des références
venant de médecins. Cependant, ils refusent d'être liés
à le faire seulement sur ordonnance médicale et à le faire
sous supervision médicale, quelle que soit la signification que l'on
donne à ce mot. Est-ce que cette affirmation de ma part est exacte ou
est-ce qu'on voudrait la qualifier?
M. Solinas: M. le député, idéalement, nous
préférerions travailler sur recommandation médicale, mais
cela suppose tellement de choses que cela priverait certains patients qui n'ont
pas de recommandation de venir en acupuncture. Nous souhaitons travailler sur
recommandation médicale, mais nous ne voulons pas enlever la
possibilité au patient qui n'a pas de recommandation de pouvoir venir
nous trouver, quitte à le référer nous-mêmes, comme
nous le faisons actuellement, au médecin.
M. Forget: A plus forte raison, refusez-vous la notion de
surveillance immédiate ou de surveillance directe? C'est-à-dire
les notions auxquelles vous avez fait allusion, je crois, dans le contexte de
la pratique de la physiothérapie, d'une supervision sur place avec la
présence du médecin, ou des notions analogues.
M. Solinas: II faudrait que cette présence apporte quelque
chose. Dans le contexte, elle n'apporterait rien. Cela ne nous dérange
pas, d'un côté, d'avoir un médecin, comme c'est le cas
à l'heure actuelle, qui vient faire son tour pour voir comment cela se
passe en acupuncture. S'il y a un apport de sa part, c'est bien, mais s'il
vient pour superviser un traitement qu'il ne connaît pas lui-même,
cela a très peu d'intérêt.
M. Ghys: M. le ministre, excusez-moi, M. le député,
si vous permettez, j'aimerais prendre l'exemple des spécialistes en
médecine. Je suis spécialiste moi-même. Comme tous les
spécialistes, il arrive que je reçoive des
références d'un omnipraticien, qui parfois pourrait être
mon fils ou presque, qui visiblement me considère comme un
supertechnicien.
Je comprends très bien, dans ces conditions, non seulement les
réticences, mais je dirais les craintes des acupuncteurs
non-médecins qui ont peur que la collaboration franche et à
double sens qu'ils envisagent ne soit remplacée, dans certains cas, par
une relation de subordination.
Si la collaboration franche peut se faire dans les deux sens, je crois
qu'il n'y aurait aucun problème.
M. Forget: Pour ce qui est de cette collaboration dans l'autre
sens, c'est-à-dire de la référence par un acupuncteur
à un médecin, est-ce que, à votre avis, les qualifications
actuelles de ceux qui pratiquent actuellement l'acupuncture les rendent
capables de faire, avec un sens adéquat de responsabilité, avec
une compétence suffisante, ces références, dans tous les
cas où il serait plus approprié que les services d'un
médecin soient impliqués ou qu'un médecin soit
impliqué plutôt que les services d'acupuncture?
M. Ghys: Je peux donner encore une fois un exemple personnel. Je
collabore depuis plusieurs années avec M. Solinas et avec d'autres
acupuncteurs aussi, d'ailleurs, et je ne me souviens pas d'un seul cas d'un
acupuncteur sérieux qui ne m'ait pas parlé d'un cas où il
avait des doutes sur les indications de l'acupuncture ou également avait
des doutes sur le diagnostic exact. Je pourrais même dire que certains
cas extrêmement intéressants, médicalement, m'ont
été référés par des acupuncteurs qui se
rendaient bien compte qu'il y avait un problème médical. Donc, je
crois qu'il existe ici un certain nombre d'acupuncteurs qui sont, à mon
avis, très qualifiés. Parmi tous ceux que je connais aucun
d'entre eux n'hésiterait d'ailleurs à passer un examen de
qualification, si cet examen était exigé d'eux. Je crois qu'avec
des gens qui ont cette approche et qui ont cette éthique
professionnelle, il ne devrait pas y avoir de gros problèmes.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Si je peux continuer dans la même ligne de
pensée, vous jugez que cela serait préférable s'il y avait
quelqu'un de votre profession, de l'acupuncture, qui faisait partie de
l'équipe de surveillance. Pour quelle raison?
M. Solinas: La raison est bien simple. Il s'agit d'acupuncture.
Il s'agit d'un bureau de médecins. Nous sommes des acupuncteurs, non des
médecins, et nous voudrions pouvoir participer à une commission
qui établira des règlements. Car si nous sommes exclus des
règlements qui se prendront, nous ne voyons pas ce que nous pourrions
apporter alors que nous avons quand même beaucoup de choses à
apporter. Nous sommes prêts à nous présenter devant une
commission avec des médecins, pour la bonne raison que nous
considérons d'abord qu'une bonne partie de l'acupuncture ne peut pas se
faire sans la médecine, car comment un acpuncteur pourrait-il traiter
s'il ne peut pas disposer de la part des médecins d'une collaboration
qui lui permettrait d'obtenir des examens paramédicaux, comme la
radiologie par exemple? Car l'acupuncteur, présentant l'acupuncture
comme une panacée, ne peut quand même pas prétendre aussi
avoir des yeux qui remplacent les rayons X.
M. Shaw: Vous êtes prêts à accepter la
surveillance du Collège des médecins? Vous êtes prêts
à accepter que si vous faites partie du comité qui est
responsable de l'établissement des normes de votre profession, vous
êtes prêts à accepter ces normes pour votre profession?
Troisièmement, vous êtes prêts à accepter de
travailler pas nécessairement sur ordonnance mais sur
référence? C'est cela que vous voulez?
M. Solinas: Sur référence. Nous sommes prêts
à travailler sur référence. Evidemment, nous travaillons
déjà sur référence, en ce qui nous concerne.
M. Shaw: Disons que vous avez un patient qui a un problème
qui est bien traité par les gens de votre profession, vous êtes
prêts à accepter que le diagnostic premier soit fait par un
médecin?
M. Solinas: Habituellement, quand le patient vient nous trouver,
comme je l'ai expliqué, son cas n'a pas été
réglé autrement, car il ne viendrait pas se faire planter des
aiguilles. Ce patient, habituellement, a un diagnostic qui l'accompagne. S'il
n'en a pas ou si nous avons un doute sur le diagnostic ou si nous ne pouvons
pas le déterminer exactement, nous le référons
nous-mêmes à la médecine. Nous voulons justement que
l'acupuncture ne se détache pas de la médecine, parce que la
collaboration avec la médecine est non seulement nécessaire, mais
encore elle est indispensable. Si une guerre se créait ou si un iatus
existait entre les deux, ce serait la pire catastrophe qui pourrait arriver,
car le patient ne pourrait pas profiter ni des avantages de l'un, ni des
avantages de l'autre; chacun se considérant comme détenant la
vérité absolue, alors que nous pensons être un arsenal
supplémentaire pour la médecine et pour les patients. Si demain,
nous avons nous-mêmes une maladie infectieuse, bacille de Koch, nous
serons les premiers à consulter les médecins, car nous
considérons que si l'acupuncture peut éviter à un de tes
reins d'être faible et susceptible de recevoir la maladie, elle
n'intervient quand même pas dans des problèmes de type viral, de
type infectieux ou dans des problèmes où il y a des
lésions organiques. Je crois qu'on est capable de savoir,
comment elle est départagée à l'intérieur de
ses limites et de ses indications.
M. Shaw: D'accord. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Quelques questions qui ne se recoupent pas
nécessairement, qui sont dites peut-être un peu au hasard, mais
qui vont peut-être également aider à compléter le
tableau.
Dans l'une de vos recommandations, vous nous précisez que vous
désirez que la formation des médecins soit également
régie. On en a parlé tantôt. Maintenant, à la
limite, entre un médecin de médecine générale ou un
spécialiste et un médecin-acupuncteur, il peut y avoir des marges
énormes, à savoir un médecin pratiquant certains aspects
de l'acupuncture, faisant certainsje m'excuse, je n'ai pas le vocabulaire
qui convienne à la pratique de votre artdonc, qui utilise des
aiguilles, pour parler en langage un peu courant.
Certes, le médecin qui est lié par son code de
déontologie ne devrait pas poser un geste qui, selon ses connaissances,
ne serait pas suffisant. Mais comment vérifier, entre les deux, cette
sorte d'entre-deux-médecin-un-peu-acupuncteur et
médecin-acupuncteur reconnu?
M. Solinas: Je pense que le médecin qui est tenu par son
serment d'office ne peut pas prodiguer des soins qu'il ne connaît pas.
Nous lui faisons, nous, totalement confiance. Il est évident que nous
préférerions que le médecin qui va pratiquer l'acupuncture
doive avoir la même formation que l'acupuncteur, les sciences
fondamentales en moins, puisque les sciences fondamentales il les acquiert au
cours de ses études; c'est-à-dire que c'est un cours qui,
vraisemblablement, durerait moins longtemps.
Maintenant, nous souhaitons, dans notre groupe, que des médecins
s'intéressent de plus en plus à l'acupuncture, qu'ils en viennent
même, jusqu'à un certain point, à la pratiquer, car au
niveau de la recherche et au niveau de ce que nous pouvons apporter de
façon complémentaire, nous ne ferons que faire avancer
l'acupuncture.
M. Fallu: Quand vous dites: Jusqu'à un certain point,
est-ce que c'est jusqu'à un certain point à la pratiquer, ou
à la pratiquer jusqu'à un certain point?
M. Solinas: C'est-à-dire qu'il est difficile, pour un
médecin, dans le système où il est actuellement, de
pouvoir pratiquer l'acupuncture, compte tenu du temps que demande un
traitement. Donc, peu de médecins y sont véritablement
intéressés. Il serait intéressant, surtout, de pouvoir
avoir des médecins qui s'adonnent à l'étude de
l'acupuncture pour que nous puissions faire avancer dans ce domaine-là
la recherche, car, armé, d'un côté, par des conceptions de
type occidental et ayant acquis aussi des conceptions
énergétiques de type oriental, on pourrait faire avancer beaucoup
plus rapidement cette science, que si les acupuncteurs d'un côté
et les médecins de l'autre se regardaient comme des chiens de
faïence, alors qu'ils doivent coopérer pour l'avancement.
M. Fallu: II est question, entre autres, dans le projet de loi no
25, que le bureau détermine des règles relatives à
l'exercice de l'acupuncture.
Tantôt on semblait prendre pour acquis que cette pratique se
ferait soit sous ordonnance ou soit sous référence. Mais il n'y a
pas également d'autres méthodes prévues ou
souhaitées éventuellement par les acupuncteurs, dont le point de
départ serait le diagnostic même posé par les
acupuncteurs?
M. Ghys: Je répondrai à cela, M. le
député, que le diagnostic occidental est une chose et le
diagnostic, en médecine chinoise, en est une autre, en ce sens que,
évidemment, ils ne sont pas nécessairement contradictoires, mais
ils procèdent de pensées et d'un raisonnement différents.
Donc, je pense qu'un acupuncteur qui connaît son métier me semble
être parfaitement justifié de poser son diagnostic "à la
chinoise", si vous voulez, sans que, nécessairement, il y ait une
référence obligatoire par un médecin qui, lui, aurait
posé le diagnostic "à l'occidentale". Il faut bien admettre que
la plupart des gens que voient les médecins, comme la plupart des gens
que voient les acupuncteurs ne sont quand même pas mourants. Donc, par
conséquent, il y a quand même bien des cas où je ne vois
pas pourquoi un acupuncteur, de la même façon qu'un
chiropraticien, par exemple, ne pourra pas dire: Voilà! Cette personne a
mal à l'épaule. On va soigner son épaule.
Maintenant, pour répondre à votre première
question, je voudrais encore me faire le porte-parole des craintes de certains
acupuncteurs sérieux, honnêtes, mais non médecins.
En Ontario, il se donne un cours d'acupuncture réservé aux
médecins. Il faut être médecin pour prendre ce cours.
Maintenant, si vous payez $300 et que vous suivez un cours pendant une fin de
semaine, vous avez un beau certificat d'acupuncture. Je crois que ce que
certains acupuncteurs craignent, c'est que eux, qui ont étudié
l'acupuncture pendant trois ans, ne soient finalement subordonnés
à des médecins qui l'ont étudiée pendant une fin de
semaine. Je m'empresse de dire que ce cas n'existe pas au Québec, mais
une crainte que certains pourraient avoir.
M. Fallu: Les règlements eux-mêmes y verront. On
l'espère.
M. Ghys: Certainement.
M. Fallu: Ceci m'amène justement à
l'écriture même des règlements. Vous proposez, dans votre
mémoire, à la page 15, que le bureau consulte les
représentants, en l'occurrence l'Institut canadien. Or, il était
également question de participation même à ce bureau.
Laquelle des deux positions, s'il vous plaît?
M. Solinas: Nous préférerions une participation
à ce bureau et nous ne voyons pas, à l'heure actuelle, qui peut
participer à un bureau qui serait composé de médecins car,
des deux groupes que constitue l'acupuncture au Québec, l'un est
totalement opposé à la médecine. Alors, nous ne voyons pas
comment un dialogue pourrait s'établir avec d'autres.
M. Lafrenière: Vous me permettrez d'ajouter, M. le
député, que le bureau de la Corporation professionnelle des
médecins est composé de 24 médecins et les discussions
autour du projet de loi 25 nous ont permis de comprendre qu'un comité
serait ajouté, mais ce comité serait constitué de deux
médecins et d'un acupuncteur. Je suggère tout simplement,
à ce moment-ci de la discussion, que les acupuncteurs soient
représentés plus proportionnellement à un comité ou
à une commission. De deux choses l'une, ou l'acupuncture est une science
distincte de la médecine occidentale ou elle ne l'est pas. Mais si nous
tenons pour acquis que l'acupuncture est une science distincte, il se trouve
certainement des hommes dans la province de Québec qui se sont
spécialisés en acupuncture. Il faudrait alors qu'il y ait une
représentation proportionnelle au sein d'un éventuel
comité que prévoit le projet de loi 25 actuellement. Bien
sûr, nous soulignons avec plaisir la suggestion du ministre de
l'Education d'ajouter une réglementation qui prévoira l'exercice
de l'acupuncture par les médecins, ce qui n'existait pas jusqu'à
maintenant dans le projet de loi 25, et qui est une heureuse suggestion, quitte
à ce qu'elle soit discutée en temps opportun.
Mais, de toute façon, l'idée sur laquelle je veux
insister, c'est que les acupuncteurs, qui sont qualifiés et bien
formés les autorités seront là pour les trouver
représentent adéquatement et proportionnellement leurs
confrères à une commission que la réglementation pourra
créer.
M. Fallu: Une dernière question, si vous me le permettez,
M. le Président. L'Association d'acupuncture du Québec, la
vôtre, fait mention d'un engagement de fonds de l'ordre de $100 000 qui
aurait été fait à l'avantage, si je crois bien, du centre
universitaire de recherches de Sherbrooke, de l'Université de
Sherbrooke. L'un et l'autre, vous vous plaignez que cette étude n'aurait
pas été menée à terme ou n'aurait pas donné
les conclusions attendues ou que les fonds n'auraient pas été
complètement dépensés, ou quoi encore. Certes, nous ne
sommes pas ici à une commission sur les engagements financiers
parce qu'on aurait le ministre des Finances ou quelqu'un du Conseil du
trésor pour répondre mais, étant donné qu'il
y a des choses un peu bizarres qui planent à travers ces observations,
j'aimerais que vous précisiez, s'il vous plaît!
M. Solinas: Nous avons appris, lors d'une visite à
l'Office des professions, qu'un budget avait été prévu
pour de l'expérimentation concernant l'acupuncture et qu'une partie de
ce budget avait été utilisée à l'Université
de Sherbrooke, justement pour étudier les effets de l'acupuncture. Cela
a été fait, je pense, dans un centre de rhumatologie de
l'Université de Sherbrooke.
M. Fallu: A quelle époque?
M. Solinas: Les dates sont... Je pense qu'un représentant
de l'Office des professions pourrait les préciser. C'était il y a
deux ans.
M. Lafrenière: Cette information fait partie de la
documentation provenant de l'Office des professions. Je crois que c'est vers
1975 qu'un montant d'environ $100 000 a été consacré et
dirigé à l'Université de Sherbrooke pour que l'on fasse
des recherches concernant la validité ou l'à-propos de
l'acupuncture ici dans la province de Québec et au Canada, mais
particulièrement dans la province de Québec.
Il semble qu'il n'y ait pas eu, à la suite de ces études,
pour lesquelles un montant de $100 000 a été consacré, de
rapport concluant. C'est ce que le mémoire indique et c'est ce qu'il
laisse un peu en suspens.
M. Solinas: Nous avions demandé de pouvoir participer aux
recherches et c'était l'objet d'ailleurs de notre visite à ce
moment-là à l'Office des professions et on nous avait dit que
cela était impossible parce qu'il fallait que le budget soit
administré par une université. Nous avions rencontré le
directeur de la politique scientifique, à ce moment-là. Et c'est
à la suite, d'ailleurs, de cette décision que ne pouvant relever
le défi d'une recherche à l'intérieur d'une
université, nous avons relevé notre défi et nous sommes
nous-mêmes allés, en accord avec les médecins, là
encore, en clinique communautaire pendant une année pour faire nos
preuves, la clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles.
M. Fallu: Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie nos invités
de la présentation de leur mémoire. J'inviterais maintenant la
Corporation professionnelle des médecins du Québec à venir
nous présenter son mémoire.
M. Solinas: Merci.
Corporation professionnelle des médecins du
Québec
M. Roy (Augustin): M. le Président, M. le ministre, Madame
le député, Messieurs les députés, mesdames,
messieurs, je suis le Dr Augustin Roy, président, dont on a parlé
tout à l'heure, de la Corporation professionnelle des médecins du
Québec.
Le Président (M. Marcoux): Vous êtes un des
habitués des commissions parlementaires alors vous n'avez pas de
problème.
M. Roy (Augustin): C'est cela et pas si méchant qu'on le
dit quand on me connaît bien. A ma gauche, le secrétaire
général adjointhabitué des commissions
parlementaires et du parlement également de la corporation, M.
André Lapierre; à sa gauche, le Dr Woo Lou, qui est un
médecin gradué de l'Université Aurora de Shanghai, en
Chine continentale, qui a fait son cours de chirurgie à Philadelphie, en
Pennsylvanie, qui a fait également de l'entraînement en chirurgie
au Québec, à Chicoutimi et à Québec, qui est
spécialiste en chirurgie de la province de Québec et du
Collègue royal, qui est chirurgien à l'hôpital Laval de
Québec, qui pratique l'acupuncture à l'hôpital Laval de
Québec, selon un protocole de recherche cela répond
peut-être à une question posée tout à l'heure par
Mme Lavoie-Roux il est également professeur agrégé
au département de chirurgie de l'Université Laval, et
président de la Société de chirurgie du Québec pour
l'année 1977-1978. Nous n'avons pas, évidemment, amené
avec nous tous les médecins d'origine chinoise qui connaissent
l'acupuncture. Nous pensions que nous étions assez nombreux ici pour
défendre la cause de l'acupuncture et de la médecine. A sa
gauche, le Dr Paul-Emile Patry, également secrétaire
général adjoint de la corporation; à ma droite le Dr
André Saindon, anesthésiste, qui s'occupe du département
d'enseignement continu à la Corporation des médecins et qui a eu
la charge de préparer le mémoire sur l'acupuncture; à sa
droite, Me Louis Payette, notaire et avocat, qui est notre conseiller
juridique.
Nous ne voulons pas, évidemment, opprimer personne, nous sommes
remplis de bonne volonté et notre but, évidemment, est la
protection du public dans le domaine de la dispensation des soins
médicaux. Vous admettrez avec moi que ce n'est pas toujours une mince
tâche, vous en avez eu la démonstration un peu aujourd'hui.
Dès l'avènement de l'acupuncture au Québec, la
corporation professionnelle des médecins du Québec déclara
que son exercice était un acte médical et cela a
été fait le 20 septembre 1973 et je dois lire in extenso cette
déclaration de 1973 qui se lisait comme suit: "La technique de
l'acupuncture consiste en introduction d'aiguilles dans le corps, dans le but
de produire un effet curatif ou palliatif. Il s'agit d'un acte médical
qui peut être posé sur le plan technique ou expérimental
à la suite de l'établissement d'un diagnostic précis. Le
collège c'était le collège à l'époque
encourage l'expérimentation de l'acupuncture, ainsi que la
formation de médecins compétents dans cette technique
médicale qui pourrait être éventuellement appliquée
par d'autres professionnels de la santé formés
adéquatement sous la responsabilité et la surveillance d'un
médecin. "Le collège insiste cependant sur le fait que cette
technique n'est pas une panacée et qu'aucune explication scientifique de
son mode d'action n'a été apportée dans l'état
actuel de nos connaissances et des données de la science
médicale".
Ce que nous écrivions et déclarions en sep- tembre 1973
est encore vrai aujourd'hui. Cette opinion fut confirmée par les
tribunaux puisque la corporation obtint gain de cause dans toutes les
poursuites qu'elle intenta pour pratique illégale de la médecine
par des non-médecins exerçant l'acupuncture.
On a fait état de ces condamnations et de ces poursuites
aujourd'hui, elles datent de 1974. Depuis, je dois dire qu'il y a eu un certain
moratoire, on n'a pas engagé d'autres poursuites. Le but de ces
poursuites était d'établir de la jurisprudence, parce que nous
maintenons que c'était un acte médical. Les tribunaux, j'ai deux
jugements ici, du juge Cyrille Morand, dans la cause de M. Oscar Wexu, et du
juge Roch Lefrançois, dans la cause de M. Lucien Pelletier, qui
étaient tous deux ici présents ce matin, ont décidé
que c'était un acte médical comme d'ailleurs dans la
jurisprudence ailleurs au monde.
Le deuxième objectif était d'en arriver à une
certaine répression des abus par des personnes qui exerçaient
illégalement l'acupuncture.
Malgré les condamnations obtenues, cette action s'est
montrée peu efficace à cause du nombre grandissant d'acupuncteurs
non médecins, nom-re que la corporation estime, plus ou moins, à
75 actuellement, à cause des longs délais entre l'instruction des
causes et les décisions rendues et du peu d'importance des sentences
imposées, soit une amende de $200 environ par chef d'accusation.
Devant l'échec relatif des mesures permises par le Code des
professions, la corporation s'est montrée disposée à
considérer d'autres moyens pour assurer une meilleure protection du
public. Dès l'automne 1975, elle demanda à l'Office des
professions de proposer à l'Assemblée nationale un amendement
à la loi médicale qui permettrait à la corporation de
réglementer l'étude de l'exercice de l'acupuncture par des
non-médecins de la même façon qu'elle peut
réglementer l'étude de l'exercice de l'obstétrique par les
sages-femmes. En réponse à cette requête, l'office demanda
à la corporation de lui faire une proposition concrète pour
l'automne 1976. Au printemps 1976, le comité administratif formait un
comité ad hoc composé de quatre médecins du Québec
compétents en acupuncture. Siégeaient à ce comité,
le Dr Lou, qui est ici, c'est un médecin du Québec, et
également un médecin de l'Ontario, le Dr Joseph Wong, d'origine
chinoise, qui a reçu sa formation médicale en Chine,
spécialiste en médecine physique et en réhabilitation. Le
comité a consulté également le Dr Jackson Riddle, qui est
le secrétaire exécutif du New York Stade Board of Medecine, qui a
été également président de la New York State
Commission of Acupuncture, commission formée par le gouverneur
Rockefeller pour étudier justement l'acupuncture et qui était
composée de médecins, dentistes, ostéopathes,
représentants du public, députés, sénateurs, et
dont le rapport fut rendu public en 1974 et qu'on vous donne en annexe à
notre rapport.
Au début de l'automne 1976, la corporation remettait son rapport
à l'Office des professions du Québec. En passant, le rapport
Riddle est très bien
fait et j'engage tous ceux qui sont intéressés au domaine
de l'acupuncture a le lire d'une page à l'autre.
Principes directeurs qui guident notre action. Les suggestions et
modifications à la loi médicale que la corporation a soumises et
qui sont jointes en annexe à notre mémoire sont basées sur
les considérations suivantes: a), pour la protection du public,
l'acupuncture ne doit être autorisée que sous supervision
médicale; b), en aucun temps, le traitement par acupuncture ne doit
priver un malade d'un traitement reconnu efficace en médecine
conventionnelle, qu'il soit curatif ou palliatif; c), en ce qui concerne les
non-médecins, seuls ceux qui exercent actuellement l'acupuncture
à temps plein au Québec doivent être admissibles aux
examens de la corporation en vue de l'exercice de l'acupuncture, sans avoir
à faire la démonstration d'une formation dans une institution
approuvée; d), les pouvoirs d'enquête du syndic et du
comité d'inspection professionnelle doivent pouvoir être
utilisés par la corporation pour contrôler l'application d'un
éventuel règlement.
Supervision médicale. Tous les règlements
étudiés par le comité ad hoc de la corporation, qu'il
s'agisse de ceux d'Etats américains ou de provinces canadiennes,
à l'exception de celui d'un Etat américain, qui est le Nevada,
par exemple, qui, par ailleurs a un règlement très
sévère, exigent la supervision médicale directe. En
Ontario, par exemple, après avoir démontré une formation
jugée adéquate par le Collège des médecins et
chirurgiens de l'Ontario et réussi ses examens, l'acupuncteur non
médecin ne peut exercer que sous supervision médicale directe et
dans une institution, c'est-à-dire un hôpital, un
établissement ou une école de médecine.
Dans l'Etat de New-York, en plus de ces conditions, on ajoute que
l'acupuncture ne doit être exécutée que dans le cadre d'un
projet de recherche. Nous vous déposons ici les règlements
respectifs de cette province et de cet Etat, règlements que vous avez
reçus tout à l'heure.
La supervision médicale directe a été une
recommandation du New York State Commission on Acupuncture, dont nous avons
déposé copie précédemment. Elle a été
aussi recommandée par la Conférence nationale sur l'acupuncture,
tenue à Ottawa en janvier 1975, à laquelle ont participé
des représentants des collèges des médecins de chaque
province, des observateurs du ministère de la Santé nationale et
du Bien-Etre social et de la plupart des gouvernements provinciaux, de
l'Association des consommateurs du Canada, du Conseil médical de la
recherche et d'autres délégués et observateurs. Nous vous
déposons les conclusions de cette conférence ainsi que la liste
des participants, en annexe IV, et attirons votre attention sur la
quatrième recommandation.
Je cite: "Que, si des paramédicaux qualifiés et reconnus
sont autorisés à fournir des services d'acupuncture, a)On leur
demande de prouver leur compétence jusqu'à un niveau
proportionnel au degré de responsabilité qui leur est
déléguée; b) Ils n'aient le droit de fournir ces services
que dans les établissements approuvés, à des malades ayant
été examinés, dont la maladie est connue et pour lesquels
une thérapie a été prescrite par un médecin ou par
un dentiste autorisé. De plus, qu'ils soient tenus de pratiquer sous la
surveillance immédiate d'un médecin ou d'un dentiste dûment
autorisé à exercer dans cet établissement. '
Les raisons suivantes justifient la position de ces organismes: a)
L'acupuncture n'est pas sans complication. Nous avons joint en annexe à
notre mémoire les références appuyant cette affirmation;
b) II n'est pas reconnu de valeur curative à l'acupuncture. D'autre
part, on lui attribue des propriétés palliatives; elle peut
soulager certaines douleurs. Cette propriété peut toutefois
être dangereuse pour le malade, car elle peut masquer les symptômes
douleureux d'une maladie grave curable si diagnostiquée et
traitée à temps par la médecine conventionnelle. Je
pourrais vous donner des exemples de grossesses ectopiques, d'appendicites
aiguës, etc. c) Les méthodes diagnostiques de la
médecine orientale sur lesquelles s'appuie l'acupuncture varient selon
les écoles et, parfois même, selon les individus. Son degré
de fiabilité n'est pas tel qu'il assure une sécurité
suffisante au malade. Un diagnostic certain doit être établi au
préalable.
La supervision que préconise la Corporation est une supervision
médicale indirecte et "plus permissive" que celles, entre autres, de
l'Etat de New-York et de la province de l'Ontario. Elle s'exercerait de la
façon suivante: l'acupuncteur autorisé par la Corporation ne
poserait les actes requis par sa discipline que chez des patients porteurs d'un
certificat médical. Après un certain temps ou un certain nombre
de séances de traitement, il devra faire rapport au médecin.
Entre-temps et cela répond à une question qui a
été posée tout à l'heure il est
autorisé à examiner le patient, à poser un diagnostic
selon sa discipline et à choisir tant les sites d'acupuncture que les
méthodes de stimulation. Le médecin n'intervient en aucune
façon au cours de ce processus. La Corporation permet cette latitude
à l'acupuncteur parce que, au préalable, elle s'est
assurée que cette personne a une connaissance de la médecine
orientale et de l'acupuncture, de ses limites, de ses complications et de la
conduite à tenir ainsi que de certaines notions
élémentaires de médecine conventionnelle qui font que le
risque de préjudice au malade par l'implantation d'aiguilles, ou
coïncidant avec l'implantation d'aiguilles, est peu probable.
Deuxième point: Besoin du traitement par médecine
conventionnelle.
La Corporation est d'avis, au stade de développement où en
est l'acupuncture, qu'il serait "dangereux" d'inclure dans une loi ou dans la
réglementation qui vise à contrôler le travail des
acupuncteurs, des éléments qui pourraient laisser croire
que l'acupuncture peut se substituer à la médecine
conventionnelle. Le fait que l'acupuncture est connue depuis plusieurs milliers
d'années ne prouve pas pour autant sa pertinence comme méthode
moderne de traitement. Il n'y a pas encore de preuve scientifique certaine
expliquant son mode d'action. "En aucun temps, donc, un traitement par
acupuncture ne devrait priver un malade d'un traitement curatif ou palliatif
reconnu efficace en médecine conventionnelle. L'acupuncture ne devrait
être employée que comme adjuvant au traitement principal."
Troisième considération: Admissibilité à
l'exercice de l'acupuncture.
L'admissibilité à l'exercice d'une discipline, qu'il
s'agisse d'un métier ou d'une profession, requiert deux obligations:
celle de démontrer une formation ou un apprentissage adéquat et
celle de réussir à des tests ou examens.
Dans l'état actuel des choses, il est difficile à la
Corporation professionnelle des médecins de vérifier avec
certitude la formation qu'ont reçue les acupuncteurs exerçant
actuellement au Québec. En effet, ceux formés au Québec
l'ont été dans une ou des écoles non sanctionnées
par le ministère de l'Education, qui n'ont pas de véritables
programmes de l'avis même des experts de l'Opération sciences de
la santé qui était une étude commanditée par
le ministère de l'Education et le ministère des Affaires
sociales. Vous trouverez dans le rapport 7, le dossier numéro 7, sous
secteur professions en émergeance, tout un chapitre sur
l'acupuncture. Leur opinion vous est rapportée dans notre
mémoire et je vous cite brièvement une phrase qui est
extraite de l'Opération OSS : "II semble que, dans la plupart des
cas, sauf en Chine, ce ne sont pas des programmes au sens où nous
l'entendons généralement dans les universités du
Québec. "Pour ce qui est des autres, ceux formés à
l'extérieur du Québec, la Corporation est privée de ses
moyens habituels de vérification de la qualité d'une école
de formation puisqu'il n'y a aucun répertoire reconnu des écoles
d'acupuncture et qu'il n'existe aucun organisme d'agrément de ces
écoles. "Compte tenu que l'objectif premier de l'amendement à la
Loi médicale est de développer une mesure plus efficace pour
protéger le public contre les acupuncteurs incompétents, la
corporation est prête à admettre, à ses examens, les
acupuncteurs exerçant à temps plein au Québec au moment de
l'adoption du projet de loi 25, sans que ces derniers aient à faire la
preuve d'une formation dans une institution approuvée. L'accès
aux examens, sans vérification préalable de la formation, doit,
par ailleurs, être limité dans le temps. Le projet de loi 25,
à l'article 24, prévoit une date limite au 1er janvier 1978 et,
comme ce projet de loi ne sera vraisemblablement adopté qu'à la
fin de 1977, nous suggérons un délai additionnel de trois
mois.
Pour ceux qui désireraient être admissibles aux examens de
la corporation après le 1er avril 1978, il leur sera exigé
d'être titulaires, soit d'un diplôme approuvé par le
lieutenant-gouverneur en conseil, après consultation avec la
corporation, soit d'un diplôme décerné à
l'extérieur du Québec et jugé équivalent par la
corporation".
Quatrième considération: Les pouvoirs d'enquête du
syndic et du comité d'inspection professionnel. Les personnes
réussissant aux examens de la corporation se verront décerner une
attestation et seront inscrites au registre des acupuncteurs de la corporation.
Cette attestation sera renouvelable annuellement, à moins que le bureau
de la corporation estime que, pour la protection du public, il requiert qu'elle
ne le soit pas, après recommandation du syndic ou du comité
d'inspection professionnel. En cas de non-renouvellement, l'acupuncteur pourra
se prévaloir d'un droit d'appel devant un tribunal des professions.
Commentaires en rapport avec les articles en ce qui concerne les points
de loi textuels: Deux contraintes imprévues y apparaissent ainsi que
quelques précisions importantes. La première a trait à
l'article 25, premier chapitre, premier alinéa, où on dit qu'on
doit avoir une consultation avec les organismes représentatifs des
personnes concernées avant d'adopter tout règlement. On impose au
bureau l'obligation de consulter les organismes représentatifs des
acupuncteurs en ce qui a trait à la formation des acupuncteurs, à
l'exercice de l'acupuncture, aux conditions et modalités d'inscription
au registre, à l'application des pouvoirs du comité d'inspection
professionnel et du syndic et aux matières sur lesquelles doit avoir
porté l'enseignement de ceux qui peuvent être éli-gibles
aux examens de la corporation.
Selon le deuxième alinéa de l'article 19, de la Loi
médicale actuelle, l'obligation de consultation d'une classe de
personnes n'est exigée que lorsque la corporation détermine des
actes qui peuvent être délégués à cette
classe de personnes. En ce qui concerne l'acupuncture, la corporation ne
détermine pas les actes qu'une classe de personnes, les acupuncteurs non
médecins en l'occurrence, serait autorisée à poser; elle
détermine plutôt les règles relatives à
l'étude de l'exercice de l'acupuncture. Dans ce cas, la loi ne devrait
pas prévoir une consultation obligatoire, comme il n'en est pas
prévu, dans le même article de loi, pour la détermination
des règles relatives à l'étude et à l'exercice de
l'obstétrique par les sages-femmes.
De plus, la corporation tient à souligner les difficultés
de réalisation de la consultation des acupuncteurs non médecins
et la situation de conflit d'intérêts dans laquelle ils seront
placés. Ils ne sont pas tous regroupés dans le même
organisme; plusieurs associations existent et certaines d'entre elles sont en
position d'antagonisme. L'obligation de consultation va même
jusqu'à l'application des pouvoirs du comité d'inspection
professionnel et du syndic, pouvoirs clairement définis et dictés
par le Code des professions, donc non négociables; il s'agit clairement
de la séparation de l'administratif et du judiciaire.
Pour ces raisons, la corporation demande à la commission de
reconsidérer cette obligation de consultation, lui laissant la latitude
d'effectuer les consultations qu'elle jugera nécessaires et de
s'entourer des experts appropriés en vue d'élaborer un
règlement juste et équitable, qui, de toute façon, doit
être adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil, après
un délai de 30 jours de sa publication dans la Gazette officielle du
Québec. Vous avez d'ailleurs vu, aujourd'hui, l'exemple des
difficultés qu'on pourrait prévoir lors de consultations sur ces
règlements.
Deuxième contrainte: Le jury d'examinateurs, en ce qui concerne
le paragraphe "d", article 19d de l'article 25. Ce paragraphe impose à
la corporation qu'un membre du comité d'examinateurs soit
désigné par l'Office des professions du Québec. Dès
le début des pourparlers avec l'office, il fut clairement convenu que la
corporation accepterait un observateur de l'office et uniquement un
observateur. La corporation demande de retirer ce membre du jury
désigné par l'office et de le remplacer par un observateur. Ce
dernier, ainsi que les quatre administrateurs du bureau, représentants
du public, désignés par l'Office des professions, suffiront, de
l'avis de la corporation, à assurer à l'office
l'équité des examens.
Une imprécision en ce qui concerne l'article 19a. Etant
donné que le Code des professions réfère
expressément aux pouvoirs des corporations professionnelles de faire
subir des examens pour les fins d'obtention d'un permis ou d'un certificat de
spécialiste en rapport avec l'article 92i du Code des professions
où on spécifie, d'une façon claire, qu'il y a lieu d'avoir
des examens professionnels, la corporation croit préférable, pour
éviter toute ambiguïté de l'article 19, alinéa a) du
projet de loi 25 qui se lit: "A la formation des personnes autres que des
médecins qui désirent exercer l'acupuncture", l'on ajoute "et aux
examens de la corporation qu'ils doivent passer" pour être bien certain
qu'on a ce pouvoir d'organiser des examens.
Une autre imprécision en ce qui concerne l'article 19a,
paragraphe b, en ce qui a trait à l'exercice de l'acupuncture par ces
personnes, la corporation a toujours soumis et soumet encore que des personnes
qui ne sont pas médecins et qui exerceront l'acupuncture ne pourront le
faire qu'à la condition de respecter certaines normes de pratique, si on
veut vraiment que le public soit protégé. Ces normes peuvent
consister, par exemple, dans le fait que le malade soit porteur d'un certificat
médical, dans les dossiers que les acupuncteurs doivent tenir ou encore
dans la durée des traitements d'acupuncture. Aussi, la corporation
suggère-t-elle que l'article 19a se réfère
expressément aux conditions d'exercice auxquelles les acupuncteurs
devraient être assujettis. On suggère donc d'ajouter à la
fin de l'alinéa les mots "et aux conditions de cet exercice".
Il y a une imprécision en ce qui concerne l'article 19b, qui
commence par les mots suivants: "Malgré les paragraphes a et c du
premier alinéa de l'article 19a, le bureau doit inscrire au registre
prévu à cet article toute personne qui"... Il semble y avoir
à cet article un paragraphe, ou tout au moins une erreur de
rédaction peut-être, qu'il y aurait lieu de corriger en retirant
de cet article la référence au paragraphe c. En effet, la mention
du paragraphe c semble indiquer que, malgré les règlements que le
bureau pourrait formuler, en vertu de l'article 19a relativement à
l'étude et à l'exercice de l'acupuncture, celui-ci se verrait
dans l'obligation d'inscrire toute personne qui formulerait une demande de
renouvellement de son inscription au registre, même si elle ne
répond pas aux exigences de ce règlement. Ici, on traite de cas
grands-pères, c'est-à-dire de personnes déjà en
exercice, et pour qui on n'aura pas à considérer les exigences
normales de formation. C'est pour cela qu'on est d'accord qu'il y a une
objection à ce qu'on enlève la référence à
ce paragraphe a) mais qu'on garde celle du paragraphe c).
Le paragraphe fait en même temps référence à
un enseignement théorique et clinique d'au moins 1000 heures dans les
matières définies par règlement. On suggère de
retirer ce paragraphe parce qu'il est très difficile de le
vérifier.
En ce qui concerne l'utilisation du titre d'acupuncteur, nous avons la
remarque suivante à formuler: II est à noter que le projet de loi
25 ne prévoit pas d'article amendant le Code des professions aux fins de
réserver l'utilisation du titre d'acupuncteur aux seules personnes qui
seraient autorisées par la loi à exercer l'acupuncture au
Québec. Il serait donc nécessaire d'ajouter un paragraphe f)
à l'article 19a qui se lirait comme suit: "f) à l'utilisation du
titre d'acupuncteur", parce qu'il ne sert à rien de réglementer
l'utilisation et l'exercice de l'acupuncture, si n'importe qui ne peut porter
le titre d'acupuncteur.
En conclusion sur l'acupuncture, la position de la corporation est
très pragmatique et plus permissive que celle adoptée ailleurs,
notamment en Ontario et dans l'Etat de New-York. Elle a pour but premier de
procurer à la corporation un autre moyen d'assumer son mandat pour la
protection du public dans le contrôle de techniques nouvelles dans notre
monde médical. Son second objectif vise à permettre à
l'acupuncture de démontrer qu'elle pourrait avoir sa place dans
l'arsenal thérapeutique nord-américain; nous ne sommes donc pas
protectionnistes. La corporation n'endosse pas pour autant les principes qui
sous-tendent l'acupuncture et qui demeurent tout à fait empiriques. Il y
a de la recherche qui se fait ici, il y en a qui se fait en Chine, il y a 300
personnes dans un institut scientifique à Sangaï. Il y a longtemps
qu'elles travaillent et n'ont pas encore trouvé; j'espère
qu'elles vont trouver un jour, on ne le sait pas. La corporation ne veut pas
que l'attitude pragmatique qu'elle a adoptée serve d'instrument de
promotion de l'acupuncture. Si l'Etat accepte de confier à la
corporation la surveillance de l'exercice de l'acupuncture par des
non-médecins, elle insiste pour que les principes et
considérations précédemment exposés se
reflètent dans les amendements de la Loi médicale proposés
à l'Assemblée nationale ainsi que dans les règlements qui
en découleront.
M. le Président, j'ai encore quelques mots aussi sur deux autres
articles du projet de loi qui touchent les articles 51 et 53 du Code des
professions et qui sont extrêmement importants. Je vais les lire
rapidement, mais, avant de terminer, je désirerais attirer votre
attention sur la deuxième partie de notre mémoire, qui porte sur
les amendements aux articles 51 et 53 du Code des professions, qui permettent
à une corporation d'ordonner à un professionnel de se soumettre
à un examen médical, s'il y a doute que son état physique
ou psychique est incompatible avec l'exercice de sa profession. A ce sujet, je
vous reporte aux pages 20 et 21 de notre mémoire, en insistant sur les
paragraphes 2, 3 et 4. A notre avis, les amendements suggérés par
le projet de loi ne répondent pas complètement aux besoins des
corporations; je ne parle pas seulement de nous, je parle de toutes les
corporations. En effet, la radiation et la restriction du droit à
l'exercice que le bureau pourrait imposer à un professionnel,
constituent des moyens parfois exorbitants, parfois insuffisants, compte tenu
des problèmes que présentent les professionnels qui doivent se
soumettre à un tel examen.
Il faut rappeler ici que la plupart de ces professionnels sont des
personnes qui présentent des problèmes d'ordre psychiatrique, de
toxicomanie, d'alcoolisme ou de détérioration mentale, dus
à un processus de vieillissement. Il est donc parfois nécessaire
d'avoir, comme éventail de sanctions, la possibilité de radier ou
de restreindre le droit d'exercice et surtout d'assortir de conditions le droit
d'exercice du professionnel. C'est-à-dire, par exemple, dans le cas d'un
alcoolique, de lui permettre de continuer à exercer sa médecine,
mais sous surveillance et à condition qu'il se fasse traiter.
Le Code des professions ne permet pas que soit radié
automatiquement du tableau un professionnel qui est interdit ou en cure
fermée. Nous avons des exemples où il a été
obligatoire nous en avons trois d'exiger un examen
médical, par trois médecins, alors que le professionnel
était en cure fermée ou interdit par les tribunaux avec tous les
documents et examens à l'appui. C'est-à-dire que vous avez un
professionnel, interné dans un hôpital psychiatrique, et nous
devons aller lui faire faire un examen psychiatrique pour démontrer
qu'il est malade et surtout lui demander de se désigner un
médecin pour dire qu'il est malade. Il y a une espèce
d'absurdité et je pense qu'il y a d'autres lois qui font que,
automatiquement, quand quelqu'un est interdit ou en cure fermée, il
devrait perdre son droit d'exercer, jusqu'à preuve du contraire,
jusqu'à ce qu'il revienne à la santé s'il peut y
revenir cela existe dans d'autres lois.
Il nous apparaît donc important d'ajouter l'article, tel que
rédigé à la page 21 de notre mémoire et qui se lit
comme suit: "Le nom d'un professionnel qui est interdit ou qui est en cure
fermée ne peut apparaître au Tableau; il ne peut y être
inscrit et, le cas échéant, doit en être radié par
le Secrétaire sur réception d'une preuve à cet effet."
Lorsqu'une corporation ordonne un examen médical qui doit être
fait par trois médecins, il faut, si on veut donner une bonne expertise,
fournir aux trois médecins examinateurs, les informations contenues dans
le dossier de ce professionnel et qui sont de nature à les assister dans
un examen médical. Il faut se rappeler qu'il s'agit, le plus souvent, de
problèmes de psychiatrie, de toxicomanie ou d'alcoolisme où il
est nécessaire, pour les médecins examinateurs, de
connaître l'évolution du comportement du professionnel, au cours
des années antérieures; examens qui ne sont pas faciles à
faire dans l'espace d'une heure. Les conseillers juridiques de notre
corporation nous indiquent que la transmission de telles informations pourrait
être interprétée comme une preuve faite à l'insu du
professionnel examiné en langage courant "une preuve dans le dos"
à moins que la loi prévoie expressément que ces
informations puissent être transmises aux trois médecins
examinateurs nommés par les deux parties en cause.
Il y a évidemment d'autres articles du Code des professions sur
lesquels nous aimerions discuter, apporter des éclaircissements et,
surtout, sur lesquels nous aimerions voir des amendements apportés; ils
sont mentionnés dans notre mémoire et nous espérons que,
plus tard, à une autre occasion, l'honorable ministre de l'Education,
responsable de l'application du Code des professions, fera une révision
d'autres articles du code pour une meilleure application des lois
professionnelles. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il me
paraît sage que le Collège des médecins ait opté,
compte tenu de toutes les circonstances que nous connaissons, pour le principe
de l'encadrement de l'acupuncture, plutôt que pour le principe des
poursuites qui ne semblaient pas obtenir de résultats bien concrets.
Dans votre démarche visant à encadrer l'acupuncture, vous
avez eu l'heureuse idée de voir ce qui se faisait ailleurs, en
particulier chez nos voisins immédiats, l'Etat de New-York et l'Ontario.
Dans ce dernier cas, en particulier, vous avez constaté que s'appliquait
le principe de la surveillance médicale. J'imagine que la
législation et la réglementation de l'Ontario ont eu une
influence importante sur les mémoires que vous nous avez soumis. Il
n'est pas mauvais, d'ailleurs, que la législation et la
réglementation puissent se comparer entre territoires voisins, autrement
on peut facilement devenir témoins de ce qui se produit à
l'occasion, voir se déplacer des gens selon la permissivité
relative de la réglementation.
Vous avez soulevé de nombreux points. Je ne pense pas que nous
ayons le temps de tous les revoir ce soir. Certains ne posent pas de
problème, il y en a d'autres sur lesquels j'aimerais vous interroger
brièvement.
Je disais que certains vont presque de soi; nous pensons, par exemple,
inscrire dans la loi ou dans le Code des professions cela n'est pas
encore tout à fait décidé, mais cela ne serait pas
sous l'article 19b, comme vous semblez le proposer le principe que
nul ne peut utiliser le titre d'acupuncteur s'il n'est inscrit au registre. Il
reste à déterminer l'endroit le plus idoine où inscrire ce
principe.
J'en viens maintenant à quelques questions qui m'ont paru
ressortir particulièrement de votre exposé et des exposés
qui ont précédé le vôtre. La première
question a trait à la formation des médecins qui
désireraient pratiquer l'acupuncture. L'institut nous a fait, à
cet égard, une suggestion, une recommandation, à l'effet que le
médecin, n'étant pas automatiquement de par sa formation un
acupuncteur, devrait se soumettre à des études sérieuses
avant de pratiquer cet art. Autrement dit, on tend à placer sur le
même pied les non-médecins et les médecins devant les
exigences de la pratique de l'acupuncture. Pourriez-vous me faire savoir,
docteur, si vous seriez d'accord, et à quelles conditions, pour que les
médecins eux-mêmes reçoivent une formation dans la mesure
où ils désirent se spécialiser, disons, dans ce domaine de
l'acupuncture?
M. Roy (Augustin): M. le ministre, nous avons déjà
considéré la question. Nous pouvons vous dire qu'il y a un
certain nombre de médecins au Québec qui exercent l'acupuncture.
Le nombre est quand même très limité. Vous avez l'exemple,
ici, du docteur Lou; il y a évidemment quelques médecins à
Montréal, mais le nombre est quand même très limité
et peut-être trop limité. Ceux qui l'exercent, le docteur Ghys en
est un exemple également, l'exercent après avoir fait des
études appropriées. D'ailleurs, il y a une provision dans le Code
de déontologie qui dit que même si un médecin a le droit
d'exercer la médecine et l'acupuncture est un acte
médical, cela fait partie d'une technique, de l'arsenal
thérapeutique de la médecine même si le
médecin a théoriquement le droit de faire toute la
médecine, tous les médecins sont limités d'une certaine
façon par le Code de déontologie qui dit qu'ils ne doivent
exercer que ce pourquoi ils sont compétents. C'est-à-dire que
moi, par exemple, étant donné que je suis dans l'administration
depuis longtemps, je serais à blâmer si je m'aventurais, sauf en
cas d'urgence, à faire de l'obstétrique demain matin, ou si je
m'aventurais à faire de la radiologie thérapeutique, à
donner les radiations, parce que je n'ai pas la compétence pour le
faire. Donc, un médecin est déjà limité par son
Code de déontologie. Tous les médecins qui font de l'acupuncture,
ils sont peut nombreux, ont suivi des cours de perfectionnement en acupuncture.
C'est notre intention, et nous sommes d'accord, que, par voie de
réglementation, par le biais du Code de déontologie plutôt
que par le biais de la loi, le médecin, comme d'ailleurs cela existe
dans l'Etat de New York, soit aussi soumis à une certaine formation en
acupuncture, à un certain nombre de cours additionnels, compte tenu de
sa formation de base, et aussi de cours pratiques. Mais nous ne verrions pas
d'un bon oeil, par ailleurs, que l'on amende la Loi médicale et que l'on
restreigne l'article 29 de la Loi médicale qui définit l'exercice
de la médecine et qui en exclut, par ailleurs, par exemple,
l'acupuncture qui fait partie de l'exercice général de la
médecine. Mais nous sommes parfaitement d'accord pour que l'on
réglemente d'une certaine façon par, soit le Code de
déontologie ou soit une réglementation ayant rapport avec la
pratique de l'acupuncture, le fait que pour exercer l'acupuncture, un
médecin devrait avoir suivi certains cours pratiques et certains cours
théoriques. C'est le bon sens même. D'ailleurs, un médecin
qui ne ferait pas cela, ou qui ne le ferait immédiatement à
l'heure actuelle, s'expose à des problèmes au niveau de notre
Code de discipline à nous, parce que, à ce moment-là, s'il
lui arrive des difficultés, il serait susceptible d'être poursuivi
en justice et poursuivi en discipline.
M. Morin (Sauvé): Le deuxième problème dont
j'aimerais vous entretenir, docteur, c'est celui de la référence.
Nous serions d'accord pour convenir qu'on ne peut forcer un médecin
à référer un patient à un acupuncteur si la chose
est contraire à sa conscience professionnelle ou à la conception
qu'il se fait de la médecine. Je vous avoue, cependant, que nous sommes
enclins à penser qu'il faut respecter la volonté du patient qui
voudrait consulter un acupuncteur et qu'une fois éclairé par le
médecin sur les conséquences, voire sur les dangers d'un tel
traitement, nous sommes enclins à penser que la volonté du
patient devrait être déterminante. Quelle est votre attitude
à l'égard de ce problème?
M. Roy (Augustin): C'est une question de principe. D'abord, nous
voulons sensibiliser les médecins à la question de l'acupuncture.
Déjà, je dois dire, et des personnes qui exercent l'acupuncture
à l'heure actuelle peuvent l'affirmer, même si l'acupuncture n'est
pas légalisée au Québec, qu'il existe des relations assez
étroites entre certains médecins et certains médecins non
acupuncteurs, même si cela n'est pas légal, encore une fois. Nous
croyons qu'il peut y avoir des demandes pour l'acupuncture dans certains cas.
Nous ne pouvons pas forcer, évidemment, les médecins à
référer des cas à des acupuncteurs, mais nous croyons
qu'il va s'établir, et c'est déjà commencé
des échanges entre omnipraticiens en général et
même des spécialistes et acupuncteurs, en vue de ces
références d'un acupuncteur à un médecin. Nous
voulons, par ailleurs, protéger le public et nous avons même
discuté du cas, pensant à une addition à notre Code de
déontologie.
Nous avons même pensé cela n'est pas officiel
à un document de travail, je pense que je vais vous le lire parce qu'il
a une certaine pertinence; il est court. Nous avons pensé ajouter deux
articles dans notre Code de déontologie ce n'est pas final, c'est
un document de travail qui se liraient comme suit:
Le premier article: "Un médecin, qui remet à son patient
le certificat que requiert le règlement concernant l'exercice
d'acupuncture par des personnes qui ne sont pas médecins, doit a) y
avoir
fait subir un examen médical complet à la suite duquel un
diagnostic a été établi et, s'il y a lieu, confirmer par
les examens de radiologie et de laboratoire appropriés; b) l'avoir
éclairé sur les bénéfices possibles et sur les
dangers de l'acupuncture; c) lui avoir prescrit ou l'avoir
éclairé, le cas échéant, sur les traitements
médicaux curatifs ou palliatifs reconnus efficaces auxquels il peut
être soumis."
Supposons qu'une patiente décide absolument d'aller faire traiter
un cancer du sein par l'acupuncture, je pense que le médecin a
l'obligation d'informer adéquatement la malade, de l'examiner à
nouveau après la période indiquée, c'est-à-dire
après un certain nombre de jours, de mois ou de semaines et après
un certain nombre de traitements.
Le deuxième article qui répond plus spécifiquement
à votre question dit qu'un médecin ne peut référer
à un acupuncteur un patient qui souffre de pathologie, pour laquelle
existe un traitement curatif ou palliatif reconnu efficace et auquel le patient
peut être soumis, à moins qu'il ne soit décidé
d'administrer l'acupuncture que, comme adjuvant au traitement principal, dans
un but uniquement palliatif; le médecin et c'est l'important
peut, néanmoins, dans tous les cas où le patient le
requiert, lui remettre le certificat prévu à. l'article
précédent. Là, nous pensons suggérer à ce
moment-là à un médecin d'obtenir, s'il est certain que le
traitement de l'acupuncture ne peut pas être bénéfique
alors que d'autres traitements pourraient l'être, une signature du
patient faisant en sorte qu'il ne soit pas poursuivi pour dommages parce qu'il
l'a référé à une technique qui n'est pas encore
reconnue sur le plan médical pour ce genre de maladie, tout en
respectant le désir du patient. Parce qu'on a quand même un
certain rôle à jouer dans la société. Je vois
régulièrement et actuellement il y a deux cas, portés
à ma connaissance, de patients qui vont se faire traiter au Mexique.
Je connais pertinemment et je suis de près deux patients qui sont
actuellement traités au Mexique par une méthode nouvelle de
thérapie cellulaire. Imaginez-vous que, dans le domaine de la
santé, on invente des méthodes régulièrement parce
que c'est payant et qu'il y a des intérêts dans cela. On les
envoie dans certains endroits, on les réfère et j'ai actuellement
deux personnes: l'une pour un cancer du pancréas, une autre pour un
cancer de la langue, qui sont suivies, au Mexique, pour un traitement qui est
absolument aberrant. Je pense qu'on a une certaine responsabilité de
bien informer les malades des risques qu'ils prennent, mais, si quelqu'un veut
se tuer, on ne peut pas toujours l'empêcher de le faire.
M. Morin (Sauvé): Je constate que vous avez...
M. Roy (Augustin): Je ne parle pas de l'acupuncture en faisant
cette référence.
M. Morin (Sauvé): Non, j'ai bien compris que vous parliez
par métaphore.
M. Roy (Augustin): Oui.
M. Morin (Sauvé): Docteur, je constate que vous avez
ajouté à votre projet de modifications au Code de
déontologie dont j'avais copie. La dernière phrase que vous avez
lue à la commission n'apparaissait pas sur ma copie. L'ancien texte
il faut en convenir ne respectait guère la volonté
du patient. Si j'ai bien compris votre réponse, vous entendez,
désormais, en déférer davantage à la volonté
du patient.
M. Roy (Augustin): M. le ministre, c'est après une
rencontre avec vous, où nous avons pris bonne note de vos suggestions,
des recommandations que vous avez faites, des points d'interrogation que vous
souleviez, que nous avons ajouté ce paragraphe qui, évidemment
est encore à l'état de projet, mais ça date de
l'été parce que nous croyions que la commission
parlementaire aurait lieu à l'été. Evidemment le tout doit
être soumis à l'Office des professions et au lieutenant-gouverneur
en conseil, mais cela a été ajouté après une
rencontre que nous avons eue avec vous, pour vous montrer que nous
étions ouverts à ce libre choix du malade, tout en informant bien
le malade des risques qu'il peut prendre, parce que nous avons une
responsabilité vis-à-vis des malades.
M. Morin (Sauvé): Bien. M. le Président, j'aurais
encore quelques questions, mais elles sont de moindre importance et je voudrais
donner l'occasion à mes collègues de poser des questions
également, de sorte que je mettrai un terme à mon
interrogatoire.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, il y a deux
éléments dans le mémoire de la Corporation professionnelle
des médecins qui posent certains problèmes et au sujet desquels
je voudrais poser des questions à M. Roy.
Premièrement, au niveau des intentions que l'on peut retrouver
exprimées dans ce mémoire. Il y a, d'une part, l'intention fort
louable d'assurer la protection du public. C'est toujours un vif plaisir que
d'entendre des représentants de corporations professionnelles
réaffirmer cette obligation; encore que c'est avec souvent beaucoup plus
de conviction qu'on le fait, quand on vise les autres, que ses propres membres,
mais c'est bien humain; il n'y a certainement rien de nouveau
là-dedans.
Il y a cependant une autre intention qui apparaît à travers
plusieurs recommandations du mémoire, c'est une intention, à mon
avis, de protectionnisme commercial. Il me semble c'est un peu trop
évident que la corporation cherche à protéger un
marché ou une part d'un marché si on peut employer
l'expression...
Le Président (M. Marcoux): Un instant. Je dois rappeler
à tous les assistants de cette
commission qu'il est interdit de manifester de quelque façon que
ce soit.
M. Forget: J'aimerais, dans ce contexte, que M. Roy puisse nous
expliquer pourquoi la recommandation que les actes d'acupuncture soient
posés à la suite d'une ordonnance médicale ou d'une
référence médicale, peut être conciliée avec
la constation qui est faite, par ailleurs, qu'un très petit nombre de
médecins connaissent l'acupuncture? Comment peut-on
référer un malade pour un traitement par un autre professionnel,
alors que, par définition et à cause de l'histoire qui est
connue, l'immense majorité des médecins ignorent tout des
indications, des risques, comme des avantages, d'un traitement
d'acupuncture?
Comment peut-on donner une ordonnance médicale qui soit valable
et comment ne pas voir dans cette recommandation un désir de forcer une
consultation médicale avant toute visite chez l'acupuncteur?
M. Roy (Augustin): N'étant pas économiste comme M.
le député de Saint-Laurent, nous connaissons mal les lois du
protectionnisme...
M. Forget: On vous fait confiance.
M. Roy (Augustin):... mais nous pouvons vous assurer... Oui, j'ai
bien aimé l'économie, j'ai étudié à
l'Université de Montréal et cela devrait faire partie de
l'expérience de tout médecin, d'ailleurs.
Je dois dire qu'il n'est aucunement question, pour nous, de
protectionnisme commercial ou professionnel, parce que, comme je l'ai
mentionné, très très peu de médecins s'occupent de
l'acupuncture, alors que nous aurions voulu qu'il y ait plus de médecins
qui s'y intéressent. Les médecins ne courent pas après les
malades, les bureaux de médecins sont achalandés, ils sont
remplis de malades. Que les gens fassent de l'acupuncture ne dérange
absolument pas les médecins. Je connais même beaucoup de
médecins qui s'opposent à ce que nous reconnaissions
l'acupuncture, à ce qu'elle soit légalisée... Si nous
avons fait des efforts pour demander à l'Office des professions et au
gouvernement d'agir, non seulement au gouvernement d'aujourd'hui, mais au
gouvernement antérieur dont vous faisiez partie, c'était
justement dans l'intérêt du public pour éviter les abus du
public; les gens qui étaient fraudés dans leur santé, qui
étaient leurrés et dont on abuse de la naïveté, et
pour qui on appliquait des traitements, des guérisons, qui ne peuvent
pas être effectués dans l'état normal des choses à
l'heure actuelle, pour des maladies comme la sclérose en plaques, par
exemple, les paraplégies et je pourrais vous en nommer une kyrielle. On
abuse de la confiance, de la naïveté d'un certain nombre de pauvres
gens, en général, de malades chroniques, sauf des cas
problèmes graves pour la médecine, pour lesquels la
médecine n'a pas actuellement de remèdes, de moyens de
guérison assurés. On se soucie de la protection de ces gens et
non pas de notre protection à nous. Si on a certai- nes
inquiétudes et si on veut que les gens passent avant par le
médecin pour avoir un bon diagnostic, parce que le médecin est
préparé pour faire un bon diagnostic, c'est parce que, à
l'heure actuelle, et je demande à qui que ce soit de me contredire, il
n'y a aucune base scientifique en ce qui concerne l'application de
l'acupuncture. On croit que l'acupuncture a des applications et des effets dans
certains cas particuliers; on a parlé, ce matin, qu'on guérissait
la tuberculose ou le choléra par l'acupuncture. C'est absolument faux;
on ne peut pas guérir des maladies infectieuses, on ne peut pas
guérir des problèmes cardiaques, ni des problèmes du foie.
Il y a certaines applications au niveau de la douleur et c'est pour
éviter l'exploitation des gens, pour qu'il y ait un bon diagnostic, pour
ne pas, qu'à un moment donné, les gens nous arrivent avec des
témoignages comme, lorsqu'on arrive de chez certains guérisseurs,
ou même lorsqu'on passe par l'Oratoire ou par Sainte-Anne de
Beaupré; j'ai été guéri, j'ai été
guéri. Il faut quand même un diagnostic de base pour éviter
l'exploitation des gens. Ce n'est aucunement pour protéger les
intérêts des médecins, ils n'ont pas besoin de cela; nous
avons, d'ailleurs, de la difficulté à vendre l'acupuncture aux
médecins. Nous voulons intéresser davantage les médecins
pour qu'ils collaborent davantage avec les acupuncteurs; nous croyons qu'il y a
quelque chose là-dedans; peut-être que dans 50 ans on le
trouvera.
Cela fait 4 ou 5 mille ans que cela se pratique en Chine; cela a
été mis au ban en Chine. Cela a recommencé en 1949 sous la
présidence du président Mao pour des raisons politiques. Je
pourrais parler de l'acupuncture pendant des heures sur le plan politique, sur
le plan idéologique. L'acupuncture est à la base d'une
philosophie. On se pose beaucoup de questions à ce sujet, mais il y a
quand même une certaine protection des gens, mais pas la protection des
médecins, je peux vous assurer cela.
M. Forget: Je ne veux pas interrompre M. Roy dans son
exposé fort éloquent, mais, indignation mise à part,
j'aimerais qu'il essaie de répondre quand même a une question
très précise que je lui ai posée. Il recommande dans son
mémoire qu'il y ait une ordonnance médicale, une
référence médicale par voie d'ordonnance, avant un
traitement d'acupuncture. Et il reconnaît, par ailleurs, que les
indications pour l'acupuncture de même que les avantages ou les
inconvénients possibles d'un traitement d'acupuncture sont largement
inconnus des médecins. Comment peut-il concilier sa recommandation avec
la constatation qu'il fait? Je sais bien qu'il peut y avoir des charlatans dans
tous les domaines. On n'empêche pas les gens d'aller à l'Oratoire
Saint-Joseph même sous prétexte qu'ils ne sont pas tous
miraculés...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Forget: ... de la même façon qu'on va voir les
médecins pour des maladies qui sont incura-
bles et on ira sûrement voir des acupuncteurs pour des choses
qu'ils ne peuvent pas faire. C'est un problème beaucoup plus large que
la question que je lui ai posée.
Comment concilier un principe d'une ordonnance médicale qui
serait délivrée par des gens de façon qui a
été admise. On avoue ne pas connaître, ne pas être en
possession des connaissances nécessaires pour donner l'ordonnance en
question. Tout ce qu'on pourrait faire, en donnant l'ordonnance, c'est se baser
sur des connaissances médicales et les possibilités
médicales de traitement, dans le sens traditionnel du mot, mais si on ne
connaît pas l'acupuncture, je ne vois pas en quoi l'ordonnance peut
être nécessaire.
M. Roy (Augustin): L'ordonnance est nécessaire pour
l'établissement d'un diagnostic approprié et précis. Seul
le médecin, à cause de son entraînement et sa formation, a
les capacités d'établir ce diagnostic précis. Après
l'établissement du diagnostic et s'il y a eu échec avec les
traitements ordinaires de la médecine et que le médecin ou le
patient croit prenons le cas de migraines, par exemple, le cas de
certaines douleurs d'origine indéterminée qui ne sont pas
guéries avec les méthodes actuelles de la médecine
que l'acupuncture pourrait aider, à ce moment-là, il fait le
diagnostic et réfère le cas à l'acupuncture. Il n'est pas
nécessaire, pour le médecin, de connaître la technique de
l'acupuncture à ce moment-là. On a fait mention, tout à
l'heure, du fait que l'acupuncture était une technique, un corps de
traitement, qu'il fallait savoir se servir des aiguilles, savoir où les
piquer, comment utiliser la stimulation.
L'important, pour nous, c'est l'établissement d'un diagnostic
précis qui va accompagner le malade chez l'acupuncteur et qui va faire
en sorte qu'il va être soigné pendant six, huit semaines, ou un
mois, non pas pendant toute la vie sans aucun résultat. Si l'acupuncture
ne donne pas de résultat et qu'il retourne à la médecine
conventionnelle, qu'il y ait un échange entre l'acupuncteur et le
médecin. Il n'y a aucun paradoxe là-dedans. L'importance de la
consultation...
M. Forget: M. le Président, si vous me permettez...
M. Roy (Augustin): ... et pour l'établissement du
diagnostic.
M. Forget: En d'autres termes, ce n'est pas une véritable
ordonnance qui, sur la base d'une connaissance des effets possibles du
traitement, dit: Voici, étant donné le diagnostic, je vais suivre
le traitement approprié. C'est un peu un dernier recours. Avant tout
essayé, on se dit que s'il n'y a pas d'autre chance, on va essayer cela,
ne sachant pas exactement ce que cela peut donner. Mais c'est une conception
assez nouvelle de l'ordonnance médicale ou de la référence
médicale.
M. Roy (Augustin): Non, je n'irais pas jusqu'à dire cela.
En fait, ce n'est pas une ordonnance. Si vous lisez notre mémoire, on ne
mentionne "ordonnance" nulle part, ni "prescription" nulle part. On mentionne
tout simplement que le médecin établit un diagnostic dans un
certificat médical qui inclut le diagnostic et qu'il le remet à
l'acupuncteur ou au patient. Ce n'est pas une ordonnance.
M. Forget:... que cette personne est en bonne santé. Comme
le certificat de santé buccale dans le cas des dentistes
vis-à-vis des techniciens. Est-ce que c'est ce que vous avez à
l'esprit?
M. Roy (Augustin): Dans ce cas-là, évidemment, ce
n'est pas la même chose. Dans le cas du dentiste, le certificat est
établi comme quoi l'état de la bouche est en bonne santé.
Mais dans le cas du malade, le certificat disant, par exemple, que monsieur ou
madame souffre de céphalée, a eu tel, tel et tel examen, et on
vous le réfère pour traitement.
M. Forget: C'est une pathologie qui est susceptible de traitement
par l'acupuncture.
M. Roy (Augustin): Que nous pensons.
M. Forget: II faut donc une connaissance de l'acupuncture pour
poser ce jugement. Quand le diagnostic est la direction vers un traitement, il
faut qu'il y ait un certain lien de causalité, un certain lien que l'on
connaît de façon scientifique.
M. Roy (Augustin): Ce n'est pas nécessaire de
connaître la technique de l'acupuncture. On va faire la...
M. Forget: Mais les indications.
M. Roy (Augustin): Les indications, oui, mais je vais faire la
même analogie avec la physiothérapie. Ce n'est pas
nécessaire, pour le médecin, de connaître la
physiothérapie pour référer un cas à un
physiothérapeute. C'est la même chose pour référer
à un acupuncteur.
M. Forget: On a vu cela, oui. Je ne veux pas faire de faux humour
mais on a vu que, effectivement, vous avez raison.
M. Roy (Augustin): On peut référer à des
psychologues aussi.
M. Forget: Ma dernière question, M. le Président,
sur la question des connaissances qui doivent être
possédées par un organisme de contrôle pour, effectivement,
contrôler ce qu'on veut contrôler: Est-ce qu'il n'apparaît
pas dans vos recommandations au sujet d'une consultation nécessaire dans
le projet, d'un groupe représentatif, qu'il y a malgré tout un
principe qui devrait être inscrit dans la loi, peut-être sous une
autre forme on peut imaginer d'autres façons de le faire -
tel qu'un comité ad hoc de personnes, médecins ou non, qui ont eu
une formation systématique et rigoureuse dans les techniques d'acu-
puncture pour pouvoir contrôler cette activité avec une
meilleure connaissance, avec les instruments nécessaires pour le faire
avec responsabilité.
Est-ce que le fait d'écarter toute consultation n'est pas une
recommandation un peu extrême et ne seriez-vous pas prêt à
admettre qu'il pourrait être approprié que, de la façon
décrite dans le projet de loi, ou d'une autre façon, qu'on tienne
compte de la nécessité que l'organisme de contrôle dispose
des connaissances essentielles pour pouvoir contrôler autrement que de
façon économique...
Il ne s'agit pas d'un contrôle économique, il ne s'agit pas
d'un contrôle, de restrictions à l'accès, si je comprends
bien, mais véritablement d'un contrôle professionnel; donc, il
faudrait qu'il soit exercé en consultation étroite avec la
participation étroite de gens qui sont formés dans cette
connaissance.
M. Roy (Augustin): Nous sommes tout à fait d'accord avec
cela. D'ailleurs, lorsque nous avons rédigé notre mémoire,
nous l'avons fait préparer par des médecins experts en
acupuncture. Il existe des médecins experts en acupuncture. Cela
n'exclut pas des consultations avec des non-médecins acupuncteurs, j'en
suis sûr. Ce que l'on dit, c'est que la façon dont la loi est
rédigée va rendre la réglementation extrêmement
lourde, tellement lourde qu'on risque qu'il n'y ait pas de règlements
qui se fassent. Vous avez vu les deux types qui sont venus ce matin, qui
étaient assez opposés. Je peux vous dire qu'il y a quatre ou cinq
organisations d'acupuncture et j'en découvre
régulièrement. Hier, j'en ai découvert une nouvelle, qui
s'appelle l'Ordre des acupuncturistes du Québec, et celui qui a
enregistré la raison sociale est le Dr David Rioux. C'est un nouveau. Il
y en a quatre, cinq ou six; lesquelles vont être représentatives
et comment allons-nous pouvoir nous entendre? On ne parle pas le même
langage, on n'est pas sur la même longueur d'onde. Mais, d'un autre
côté, on va consulter des experts médecins et des experts
non médecins. On veut une réglementation pour protéger le
public et on la veut le plus rapidement possible. Cela fait déjà
deux ans qu'on attend. On n'a poursuivi personne pour la pratique de
l'acupuncture mais on ne peut pas se croiser les bras éternellement et
laisser certaines personnes se faire exploiter.
J'accepte qu'il y ait des non-médecins acupuncteurs actuellement,
qui le font bien, qui sont honnêtes. Je voudrais, le plus vite possible,
que ceux-là soient reconnus et qu'on légalise leur situation,
mais, d'un autre côté, que l'on arrête au plus vite les
autres d'exploiter le public.
M. Forget: Vous ne seriez pas opposés à ce que,
dans la loi, on reconnaisse la nécessité d'une structure ad hoc
pour exercer ce contrôle de façon responsable, avec des
acupuncteurs médecins ou non médecins, de manière que ce
pouvoir qui vous serait donné soit exercé de façon visible
dans la loi, de manière à tenir compte de la
nécessité de le faire avec ceux qui connaissent le domaine.
M. Roy (Augustin): II ne nous apparaît pas
nécessaire de l'avoir dans la loi parce que nous croyons que toute la
réglementation doit être approuvée par l'Office des
professions. L'Office des professions peut faire ces consultations avec
n'importe qui, peut avoir des experts à sa disposition, de même
que le lieutenant-gouverneur en conseil, qui, lui, approuve la
réglementation après. Je pense que ce serait beaucoup moins lourd
comme mécanisme. Actuellement, on a tellement de consultations
obligatoires qu'on n'aboutit à rien. On a l'expérience
malheureuse de la délégation des actes, par exemple, entre
professionnels. Cela fait deux ans qu'on a des règlements de
préparés et cela n'aboutit pas.
Mais, écoutez, on veut régler le problème de
l'acupuncture dans l'intérêt d'un certain nombre de personnes
compétentes, bien intentionnées, dans bon nombre de cas, et
qualifiées, et, dans l'intérêt du public, le plus vite
possible, non pas dans cinq ans. C'est tout de suite qu'on veut le faire et on
est capable de le faire. Mais si on nous met ce croc-en-jambe dans la loi, je
vous garantis que, dans deux ans, dans trois ans, on va arriver encore avec les
mêmes résultats, le règlement ne sera pas passé.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je suis
très heureuse de voir et cela ne m'étonne pas que
la Corporation professionnelle des médecins a le souci de
protéger le public. Je vais quand même me faire un petit peu
l'avocat du diable. En page 1, au quatrième ou cinquième
paragraphe, ce souci de protéger le public enfin, que quelqu'un a
reconnu comme un devoir de votre association a permis à la
corporation de réglementer l'étude et l'exercice de
l'obstétrique par les sages-femmes. Je voudrais savoir, depuis 1975,
comment cette réglementation de l'étude et de l'exercice de
l'obstétrique par votre corporation des sages-femmes a conduit au
développement d'une profession qui, dans de nombreux pays, rend des
services imminents. A moins que je ne m'abuse, il me semble que les seules
personnes qui jouent leur rôle de sage-femme ici, ce sont quelques
infirmières perdues dans le Grand-Nord ou dans des villages
éloignés. Mais, en même temps que vous demandez, par un
souci du bien commun, de réglementer l'étude et l'exercice de
l'obstétrique par les sages-femmes, dans quelle mesure vous
êtes-vous souciés aussi d'en provoquer le développement? Je
ne suis pas certaine mais je crois qu'à maints égards on pourrait
très bien servir la population et parfois à un coût moindre
par le développement des services des sages-femmes.
M. Roy (Augustin): Je ne veux pas m'embar-quer dans de grandes
discussions à cette heure-ci, mais...
Mme Lavoie-Roux: Ce ne sera pas trop long, si vous comprenez le
parallèle que je veux faire. Je
veux bien que vous ayez un pouvoir de contrôle ou de surveillance
d'autres professionnels mais je ne voudrais pas non plus que cela paralyse leur
développement. Peut-être que ma question découle d'une
fausse impression... Je vous laisse répondre.
M. Roy (Augustin): Je vais être très bref. En fait,
ce paragraphe qui nous permet de réglementer en ce qui concerne les
sages-femmes, était dans l'ancienne Loi médicale et a
été gardé dans la nouvelle Loi médicale. Cela
existe depuis de très nombreuses années; il y a une
réglementation effectivement. Il y en avait des sages-femmes à
une époque lointaine. A cause du développement de la
médecine, de l'amélioration de la qualité des soins, du
zonage et de la régionalisation des services obstétricaux
organisés par le ministère des Affaires sociales, tout cela a
fait que les sages-femmes sont disparues du portrait. Il y a quelques
infirmières de colonie qui en font encore, mais elles sont très
très peu nombreuses; leur cas va être réglé par le
biais de délégation d'acte à des infirmières. Il
n'y a pas ici au Québec de sages-femmes. On n'a pas de demandes
officielles de groupes de sages-femmes. Ce serait probablement un recul que de
revenir à l'ère des sages-femmes alors qu'on a fait des efforts
extraordinaires pour diminuer la mortalité maternelle au Québec,
la mortalité infantile, la mortalité prénatale, alors
qu'on voit justement les résultats qui ont commencé à
s'accomplir, résultats qui sont dus aux efforts des gouvernements
antérieurs. Je félicite le député de Saint-Laurent
d'avoir travaillé à cette question de la
régionalisation...
Mme Lavoie-Roux: ... sur les sages-femmes. M. Forget: ...
pas coupable.
M. Roy (Augustin): ... des soins obstétricaux. Mais c'est
un autre problème que celui de l'acupuncture. On en reparlera plus
loin.
Mme Lavoie-Roux: II reste quand même que c'est toujours
cela le dilemme: on veut, d'une part, protéger le public, je pense que
c'est un objectif fort valable, la santé du public. Mais d'autre part,
je ne suis pas prête à dire que les sages-femmes, c'est
dépassé. Surtout au moment où on commence à
retourner de plus en plus aux accouchements à domicile, je pense que je
ne serais pas prête à les mettre de côté tout de
suite. Là, je me demande si vraiment le bien public qu'on veut
défendre est défendu de la meilleure façon possible.
Je vois aussi votre souci de défendre le public contre les abus
de soi-disant charlatans. Je voudrais vous poser une question; elle est
très concrète. Vous allez dire: Elle est loin de l'acupuncture,
mais je pense qu'il faut faire la même surveillance qu'on veut faire
à l'égard des autres; elle peut être importante aussi
à l'égard de ses propres membres. Je ne parle pas seulement des
médecins, je pourrais parler d'un tas d'autres cor- porations
professionnelles qui ont des problèmes similaires. Mais vraiment, quand
je vois des médecins qui soumettent des femmes à des cures
d'amaigrissement à une piqûre par jour je ne sais pas
quelle sorte soi-disant font des miracles et chargent tant de la
piqûre, je voudrais bien savoir si, au plan scientifique, c'est quelque
chose que votre corporation professionnelle reconnaît comme de la bonne
médecine.
M. Roy (Augustin): Si Mme Lavoie-Roux... Mme Lavoie-Roux:
... acupuncture cela. M. Roy (Augustin): ... lit les journaux...
Mme Lavoie-Roux: Alors, je connais des personnes.
M. Roy (Augustin): ... si elle les lisait avant d'être
élue député de L'Acadie, elle a dû voir que nous
avons fait une conférence de presse, que nous avons émis un
communiqué dénonçant spécifiquement l'usage
d'injections, en particulier, de gonadotrophine chorionique dans le traitement
de l'obésité. Nous avons dénoncé également
l'utilisation des hydrolyseurs protéines qui sont actuellement à
la mode. Vous regarderez l'émission "Consommateurs avertis" le 29
décembre à six heures trente à l'antenne de Radio-Canada;
il en sera question. C'est une question extrêmement vaste. Nous l'avons
dit à plusieurs reprises, il y a des abus non seulement par les
médecins...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a des sanctions disciplinaires de
prises, à ce moment-là, docteur Roy?
M. Roy (Augustin): En ce qui concerne l'injection d'hormones
comme telle, nous avons tenté sur le plan scientifique de prouver pour
dire devant un comité de discipline que cela n'est pas bon. C'est
extrêmement difficile sur le plan scientifique de prouver que cela n'est
pas bon. Nous avons pensé plutôt agir au niveau de
l'éducation des gens et de l'information. A force de dire aux gens que
cela n'est pas bon, on espère que les gens n'iront pas. Mais
malgré cela, je dois faire une affirmation que vous n'aimerez
peut-être pas et la plupart de la clientèle de ces
médecins et non-médecins sont des femmes on reçoit
des téléphones et on leur dit: ce n'est pas bon, cela n'a pas de
sens. Ce ne sont pas seulement des femmes non instruites qui vont là
pour reprendre le langage d'un ancien premier ministre mais ce
sont des femmes très souvent, même des femmes
députés qui vont suivre des traitements d'amaigrissement.
Mme Lavoie-Roux: II ne doit pas y en avoir eu beaucoup.
M. Roy (Augustin): Je ne parle pas de vous, mais des femmes
artistes. Vous leur dites que ce n'est pas bon mais elles y vont quand
même.
Mme Lavoie-Roux: ... de privilège, si Cela continue.
M. Roy (Augustin): Pourquoi? Parce que vous avez affaire à
une maladie du comportement, un trouble de l'affectivité. C'est comme
l'alcoolisme, comme une toxicomanie. Ce n'est pas mêlant. Est-ce que nous
pouvons prendre les gens par la main, ou mettre des policiers aux portes des
bureaux d'un médecin ou non-médecin pour leur dire: N'allez pas
là, cela n'a pas de bon sens. On ne peut pas le faire. On dit aux gens
que cela n'a pas de bon sens. Mais, comme je vous ai dit tout à l'heure,
si quelqu'un veut se jeter en bas du pont Laporte ou en bas du pont
Jacques-Cartier, comment puis-je l'arrêter? On dit que cela n'a pas
d'allure, mais les gens continuent d'y aller. Je n'ai pas le choix, que
voulez-vous, on ne peut pas faire plus. Est-ce que c'est assez clair?
Mme Lavoie-Roux: Non.
Le Président (M. Marcoux): Sur le même sujet?
Mme Lavoie-Roux: Allez-y, je reviendrai.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: M. le Président, comme je veux
réserver quelques minutes pour le député de Pointe-Claire,
je voudrais poser deux questions au docteur Roy. Dans votre mémoire,
vous parlez de principes directeurs et vous dites, à la page 5, "que ne
soient admissibles à l'examen de la Corporation que ceux qui exercent
actuellement la fonction d'acupuncteur à plein temps au Québec."
Qu'arrive-t-il à ceux qui se préparent actuellement à
l'exercice de cette profession et les autres qui, ultérieurement,
voudraient pouvoir aussi l'exercer? Quelle est votre position à ce
moment-là?
M. Roy (Augustin): Les autres devront faire la preuve de leur
formation parce que cette clause s'applique à ceux que l'on
considère grands-pères, ceux qui sont déjà en
pratique. Parce qu'il n'y avait pas d'organisme, d'endroit de formation, on
dit: sans faire la preuve de votre formation, on vous accepte à
l'examen. Plus tard, il faudra des preuves d'une formation dans un endroit
reconnu.
M. Le Moignan: Vous avez mentionné, tout à l'heure
aussi, qu'il y aurait peut-être un moyen d'intéresser les
médecins à l'acupuncture. Est-ce qu'on ne pourrait pas
prévoir, dans nos facultés, l'addition de cette discipline afin
de mieux renseigner les médecins, à cause des médecins
acupuncteurs que vous avez dans le moment? Comme le docteur Ghys, je crois, l'a
mentionné, est-ce qu'on ne pourrait pas permettre à la population
de retirer un meilleur service si les acupuncteurs peuvent exercer, surtout
s'ils sont médecins?
M. Roy (Augustin): En fait, il y a beaucoup
d'améliorations qui ont été apportées aux cours de
médecine, beaucoup de révisions qui sont faites, les programmes
sont révisés, et même encore là, évidemment,
il faut que cela évolue au rythme des besoins de la
société. On le dit constamment à la faculté de
médecine; on aimerait bien cela que les législateurs et le
gouvernement le disent aussi, non seulement à donner des cours
d'acupuncture. Vous vous intéressez davantage à ta
médecine du travail, à la gériatrie, à la
nutrition, à la physiothérapie, etc. La médecine est
tellement vaste, il faudrait en ajouter. Mais les professeurs nous disent:
Où est-ce qu'on va prendre tout ce temps-là? Peut-être
qu'on va en arriver un jour prochainement à dire: II faudra une
année additionnelle de médecine. Le gouvernement va avoir des
responsabilités à remplir tout à l'heure, parce qu'il va
falloir faire en sorte qu'on ait des médecins aptes à former et
à traiter les malades dans le contexte social actuel pour
répondre aux besoins de la société. Il y a beaucoup de
choses à faire, je l'admets, je le concède. Mais je dois vous
dire que nous, on veut collaborer. J'aurais bien aimé que mes
collègues aient la chance de dire un mot, mais le temps est court. Le
docteur Lou surtout qui a une grande expérience en acupuncture et exerce
une base expérimentale aurait pu vous donner des démonstrations
pratiques de ce qu'on peut faire en acupuncture. Mais je peux dire qu'on l'a
l'expertise; on est très bien intentionné. Comme je vous le dis,
nous n'avons pas l'intention d'être méchants vis-à-vis de
personne. On disait ce matin qu'on était furieux parce qu'il y avait des
non-médecins qui faisaient de l'acupuncture. Je peux vous dire bien
franchement et honnêtement que cela ne nous dérange en aucune
façon, mais on veut, par ailleurs, protéger le public; c'est cela
qu'on veut faire, c'est tout simple. Si on est ici aujourd'hui, c'est parce
qu'on l'a demandé nous, l'Office des professions; on a poussé sur
le gouvernement pour qu'il se passe quelque chose pour que le public soit mieux
protégé. Il y a d'autres domaines dans lesquels il faudrait
agir.
M. Le Moignan: Une dernière petite question. Il ne s'agit
peut-être pas de donner un cours à tous les étudiants en
médecine, mais pour une meilleure information de ces futurs
médecins et du public également, information objective sur le
rôle de l'acupuncture. C'est peut-être cela qu'il nous manque dans
le moment. On est porté à avoir trop de
préjugés.
M. Roy (Augustin): II y a beaucoup de lacunes dans notre
société à certains niveaux, je le concède.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie, très brièvement.
Mme Lavoie-Roux: Vu qu'on a la présence du docteur Lou
avec nous, qui, je pense, est membre du personnel de l'hôpital Laval
à Québec... Vous avez parlé, pas d'un projet pilote, en
fait, mais d'un certain cadre dans lequel vous fonctionnez.
Pourriez-vous expliciter davantage et nous dire de quelle façon
vous voyez cette utilisation de l'acupuncture comme un instrument de service
à l'intérieur de l'hôpital et du traitement des
patients?
M. Lou (Woo): Merci beaucoup, madame, de m'avoir donné une
chance de parler. Je dois dire que je suis très fier d'appartenir
à un hôpital qui a un service d'acupuncture. Je dois dire
également que la place de l'acupuncture, actuellement, en
médecine traditionnelle, c'est-à-dire conventionnelle, comme on
la pratique, est à l'état de recherche et
d'expérimentation. Ce qui m'intéresse, ce n'est pas de
guérir les malades mais d'essayer de voir les mécanismes
d'action. Je dois aussi avouer, après avoir entendu mes collègues
acupuncteurs, qu'ils me semblent connaître plus l'acupuncture et la
médecine chinoise que moi. Moi, je l'ai eu comme héritage, j'ai
lu des livres et j'ai été à l'entraînement, mais sur
les grands principes de l'énergie, je ne suis pas tout à fait
d'accord et je ne peux pas être d'accord sans avoir la preuve
scientifique, c'est-à-dire que je crois que le mécanisme est
neuro-humeral. Vous avez dû entendre parler des recherches du Dr
Chrétien; on est en train d'essayer de doser une substance qui serait
déclenchée par l'acupuncture. Cette substance serait
sécrétée par l'hypophyse. Les Chinois n'étaient pas
fous; ils ont remarqué qu'en pesant à certains endroits du corps
il y avait une certaine douleur et que cette douleur pouvait calmer d'autres
douleurs. C'est tout cela le mécanisme. Nous sommes en train d'essayer
de doser, mais la quantité est tellement petite qu'on fait cela au
laboratoire d'endocrinologie moléculaire, et les gens de la recherche ne
sont pas pressés. Les jours passent et ils veulent mettre la technique
au point.
Je voudrais aller plus vite mais je suis impuissant. Je suis sûr
que, d'ici peu, on va découvrir les mécanismes. Cela n'est pas
dû ni aux médecins ni aux acupuncteurs. C'est dû aux gens
qui ont mis de l'argent dans la recherche pour les mécanismes de la
douleur. Si l'acupuncture est mal connue depuis 5000 ans elle est
inconnue pour ainsi dire... Tout le monde a des théories, c'est facile
de dire le ying, le yang. J'ai vécu là-dedans tout le temps mais
je n'y ai jamais cru beaucoup parce que cela ne peut pas satisfaire notre
esprit dans le contexte actuel. Il y a autre chose et c'est cette autre chose
qu'il faudrait trouver.
En ce qui concerne les médecins acupuncteurs, je crois que ce
serait surtout dans le domaine de la recherche... Je croirais qu'on est
à la veille de découvrir... Ces recherches ont été
faites il y a quatre ou cinq ans, surtout par les pharmaciens. Ce sont des gens
qui ont de l'argent, qui ont mis de l'argent dans la recherche, non pas pour la
recherche mais...
M. Martel: Surtout les compagnies pharmaceutiques.
M. Lou: Oui, oui, excusez-moi. ... à la recherche de la
pilule magique mais sans créer de l'ac- coutumance. Ils ont
découvert l'endophine, ce produit que je vous ai mentionné, mais,
malheureusement, cela crée encore de l'accoutumance. Ils ont
découvert en même temps que cette substance existe à
l'état naturel chez l'humain et que l'acupuncture est le moyen de faire
sécréter cette substance.
Mme Lavoie-Roux: Dr Lou, est-ce que vous diriez, compte tenu des
connaissances qu'on a présentement sur l'acupuncture, qu'elle n'aurait
pas de pouvoirs curatifs mais davantage le pouvoir de soulager la douleur?
Est-ce qu'elle a des pouvoirs curatifs?
M. Lou: Je suis dans ce domaine actuellement. On prétend
que cela peut guérir beaucoup de maladies. Mais là, on arrive au
problème suivant: Où est la part de l'acupuncture et où
est la part de la psychosomatique?
C'est difficile à dire, mais si on peut doser une substance pour
démontrer que le système nerveux agit, là
réellement, on pourrait.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie beaucoup. Merci Dr Roy.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie les
représentants de la corporation. Je m'excuse on a déjà
passé beaucoup de temps. Ensuite il y a la Chambre des notaires. Disons
que théoriquement il resterait cinq minutes pour le parti
ministériel, mais, c'est parce qu'on est plongé dans un dilemme,
il y a la Chambre des notaires que nous devons entendre.
M. Shaw: Je suis bien prêt à attendre un autre cinq
minutes pour la Chambre des notaires, pour avoir une chance de...
Le Président (M. Marcoux): Oui, mais est-ce que vous allez
être prêt à continuer jusqu'à sept heures moins quart
ou six heures 30, parce qu'à huit heures ce soir, il y a deux autres
commissions qui doivent siéger. Si nous commencions
immédiatement, je pense que nous pourrions, d'après ce qu'on m'a
dit, probablement entendre la Chambre des notaires.
M. Shaw: M. Roy, je suis prêt à vous entendre un
peu.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que je pourrais demander à
mes collègues de coopérer. Nous avons déjà
consacré au dernier intervenant plus que le temps qui était
prévu et je crois que l'Opposition a eu plus que sa part. D'autre part
nous sommes engagés à entendre la Chambre des notaires et on me
dit que cela pourrait se faire assez rapidement. Il faudrait probablement
prévoir que de toute façon nous allons dépasser 18 heures.
Est-ce que je pourrais inviter mes collègues peut-être à
renoncer à prolonger un entretien qui, par ailleurs, a été
fort intéressant?
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a consentement?
J'inviterais maintenant la Chambre... Je vous remercie les représentants
de la Corporation professionnelle des médecins du Québec;
j'inviterais maintenant la Chambre des notaires du Québec.
M. Roy: On vous remercie, M. le Président, et MM. les
membres de la commission, et on espère que le projet de loi va
être adopté avant l'ajournement de la session dans
l'intérêt du public.
Chambre des notaires du Québec
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre! J'inviterais...
Est-ce que M.Tétreault est là?
M. Morin (Sauvé): C'est le notaire Julien Mackay.
Le Président (M. Marcoux): M. Mackay, alors je vous
inviterais à vous présenter et à présenter vos
collègues.
M. Mackay (Julien): M. le Président, M. le ministre, Mme
le député, MM. les députés, M. le président
de l'Office des professions. Mon nom est Julien Mackay; je suis le
président de la Chambre des notaires du Québec. Je suis
accompagné à ma droite par Me Jean-Bernard Coupai,
secrétaire de la Chambre des notaires et, à ma gauche, par le
notaire Jean Lindsay qui est en même temps attaché au service de
la recherche et de l'information de la Chambre.
Notre intervention sera courte, nous changeons totalement d'aspect de
discussion. Il n'est plus question de pathologie et de médecine, mais je
dois vous dire qu'on attaque quand même un grand principe fondamental,
memento mori. Cela ne sera pas plus drôle que...
M. Morin (Sauvé): C'est après l'application du
traitement.
M. Mackay: Oui, parallèlement à l'application, il
faudrait penser faire un testament; tout le monde doit le faire. Notre
mémoire fait état que la Chambre des notaires, comme service
public, a organisé en 1961 un registre central des testaments. Ce
registre permet de retracher facilement l'inscription d'un testament fait chez
un notaire du Québec, le registre étant obligatoire et universel.
Tous les testaments notariés faits au Québec sont inscrits, et le
registre des testaments, tel qu'il existe présentement, ne
prévoit que l'inscription des testaments notariés reçus en
minutes. L'importance et la nécessité d'un tel registre sont
admises par tous.
Le registre des testaments est une source d'information efficace pour le
praticien lors du règlement d'une succession, tout en étant un
mécanisme de publicité adéquat pour le testateur qui,
souhaitant garder confidentielles ses dernières volontés,
désire, cependant, qu'à son décès, ses
héritiers puissent rapidement et sans peine trouver son testament. Le
registre des testaments, depuis sa création, satisfait fort bien aux
exigences de la pratique notariale et au souci de protéger au mieux les
intérêts du public.
Le registre des testaments n'est cependant pas un mécanisme
d'information et de protection complet puisque, comme nous l'avons
déjà mentionné, seuls les testaments authentiques y sont
inscrits. Or, notre droit civil, suivant les termes de l'article 842 du Code
civil, reconnaît trois formes de testaments: le testament authentique
reçu en minutes, le testament olographe et le testament suivant la forme
dérivée de la loi d'Angleterre. Ces deux dernières formes
de testament ne sont pas susceptibles d'enregistrement auprès du
registre des testaments.
Il n'existe actuellement aucun registre analogue au registre des
testaments permettant l'inscription et la conservation des testaments
olographes et des testaments selon la forme dérivée de la loi
d'Angleterre. La Chambre des notaires, consciente de cette situation, croit
opportun de recommander que soient modifiées, dans les plus brefs
délais, les dispositions de la Loi du notariat de manière
à permettre l'enregistrement au registre des testaments des testaments
olographes et de ceux faits suivant la forme dérivée de la Loi
d'Angleterre. Les modifications proposées ont pour but de permettre le
dépôt au nombre des minutes d'un notaire des testaments olographes
et dérivés de la loi d'Angleterre.
C'est ainsi que le testateur qui désire que son testament
olographe ou fait suivant l'autre forme soit inscrit au registre des
testaments, devra déposer au nombre des minutes d'un notaire ce
testament. Le notaire dressera à cet effet un acte de dépôt
qui fait foi de la date du dépôt et assurera la permanence du
document. Dans son rapport mensuel au registre des testaments, le notaire
indiquera la liste des testaments reçus en minutes et la liste des actes
de dépôt reçus durant le mois précédent.
Lors du dépôt du testament, lequel devra être fait
par le testateur personnellement, le notaire, exerçant son devoir de
conseil, pourra vérifier la validité du testament, expliquer au
testateur le contenu de l'acte déposé et, lorsqu'il le juge
utile, lui recommander de rédiger un nouveau testament.
La Chambre des notaires estime que l'enregistrement des testaments
olographes et suivant la forme dérivée de la loi d'Angleterre est
une mesure nécessaire et susceptible d'accroître la protection de
l'intérêt public. La chambre est d'avis également que la
procédure proposée, tout en permettant une publicité
adéquate des testaments olographes et dérivés de la forme
anglaise, aura pour avantage d'assurer la permanence de ces testaments.
En conclusion, la Chambre des notaires émet l'opinion que son
registre des testaments est l'organisme tout désigné pour tenir
ce registre des testaments olographes et faits dans la forme anglaise. De plus,
afin de justifier cette demande d'amendement, nous vous soumettons ici le texte
de la deuxième partie de l'article 897 du Code de
procédure civile: Si l'original du testament est
déposé chez un notaire, il peut ordonner à celui-ci de le
produire au greffe. Ce texte reproduit, en ne conférant
l'autorité qu'au juge, l'ancien deuxième alinéa de
l'article 857 du Code civil.
Cette partie de l'article 897 du Code de procédure civile
s'applique exactement aux cas soumis. Suite à une ordonnance d'un juge,
le testament olographe ou fait suivant la forme dérivée de la loi
d'Angleterre et déposé chez un notaire peut être produit au
greffe et homologué suivant la procédure ordinaire. Cette
deuxième partie de l'article 897 du Code de procédure civile n'a
pas son correspondant en droit substantif. Une procédure doit
correspondre à l'exercice d'un droit prévu au Code civil ou dans
une loi statutaire.
C'est pourquoi nous vous soumettons que ces amendements doivent
être apportés à la Loi du notariat. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il semble que
nous soyons d'accord sur presque tous les points quant aux modifications que
nous souhaitons apporter à la législation. En particulier, nous
sommes tout à fait d'accord avec l'ajout proposé à
l'article 138 et qui autorise l'ordre à tenir un registre à son
siège social des testaments reçus en minutes, mais
également encore les testaments qui pourraient être
déposés chez eux par des testateurs. Cela nous paraît
être une amélioration sensible du texte dans sa forme
initiale.
A l'article 21, le projet de loi actuel, quand on le compare avec le
texte proposé, le texte de l'article 100, paragraphe 12, tel qu'il
existait auparavant, montre que nous serions enclins à ne pas inclure la
détermination de l'endroit où sera tenu le service de
renseignements relatifs aux testaments et le registre central. Il nous
paraît que cet endroit se trouve en quelque sorte désigné
à l'article 138. Voulez-vous intervenir là-dessus?
M. Mackay: Oui, M. le ministre. Nous avons
transféré cela au début de l'article 138: "L'ordre tient
à son siège social".
M. Morin (Sauvé): Donc, cette question est...
M. Mackay: C'était déjà dans la loi,
à l'article 138.
M. Morin (Sauvé): C'est cela. Donc, on peut
considérer que cette question est réglée.
M. Mackay: Oui, un peu cela.
M. Morin (Sauvé): Pour ce qui est de l'article 100,
douzième paragraphe, très bien. Me tournant maintenant vers
l'article 140, je sais que vous souhaitiez, d'après votre
mémoire, ajouter quelques mots vers le milieu de cet article. Je vous
rappelle le texte: "Le bureau peut, par règlement, déterminer les
honoraires exigibles pour l'inscription des testaments, codicilles et
révocations de testaments dans le registre des testaments". Et vous
souhaitiez ajouter, après le mot testaments, "et actes de
dépôt de tels documents". La raison pour laquelle l'ajout de ces
mots ne nous paraît pas essentiel est tout simplement que cela nous
paraît être contenu dans la notion même de testament. C'est
la raison pour laquelle nous ne voudrions pas alourdir le texte
inutilement.
Quelle serait votre réaction à cette attitude?
M. Mackay: Dans l'ancienne loi, nous ne parlions que des
testaments en minute.
M. Coupai (Jean-Bernard): Dans la loi actuelle?
M. Mackay: Dans la loi actuelle. C'est pourquoi nous voulons
être clairs même si cela semble alourdir le texte. Le bureau peut,
par règlement, déterminer les honoraires exigibles pour
l'inscription des testaments, codicilles et révocations de testaments,
et ceci faisait référence exclusivement aux testaments en minute,
et comme nous faisons une modification à la loi, nous avons cru qu'il
serait plus clair d'ajouter, à cet endroit: "... et actes de
dépôt de tels documents". Cela peut être un testament, un
codicille ou une révocation faite dans une forme qui n'est pas la forme
authentique.
M. Morin (Sauvé): Et, à votre avis, le mot
"testaments", dans le contexte de l'article 140 et de la loi, se
réfère uniquement à des testaments reçus en
minute.
M. Mackay: Pas nécessairement uniquement. Actuellement,
oui, parce que seuls les testaments en minute peuvent être inscrits.
Alors, on ne veut pas qu'il y ait de doutes après la modification que
les honoraires qui sont exigibles pour l'inscription ne couvriraient pas
l'inscription d'un acte de dépôt. Les honoraires sont minimes, ils
sont de $3. Mais on voulait être certains que cette modification à
l'article 140 ferait en sorte qu'on couvre le problème sans
difficulté.
Au risque d'alourdir le texte, je ne crois pas que cela alourdisse
tellement. Ce n'est certainement pas un accroc à la langue.
M. Morin (Sauvé): Vous avez sans doute raison, notaire,
surtout si le mot "testaments" est interprété de façon
restrictive dans ce contexte, il vaudrait peut-être mieux le
préciser. Oui, je crois que nous allons nous rendre à vos
arguments sur ce point.
M. le Président, étant donné l'heure tardive,
c'étaient les deux points sur lesquels je voulais insister. Pour les
autres, il me paraît qu'il n'y a que de très petites
différences de style ou d'expression, et je pense que cela ne
soulèverait pas de problèmes insurmontables.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, nous sommes
également d'accord. La seule question
que j'ai, c'est qu'il semble que les frais soient établis par le
registre central qui est sous la garde de la Chambre des notaires. La seule
assurance que je veux avoir, c'est qu'une fois que tout le monde y mettra son
testament olographe ou autrement, que tout à coup, on ne subisse pas une
hausse des taux.
Dans le moment, je trouve que $3, c'est raisonnable. La recherche, c'est
$10; mais il faut toujours penser à cela: la tentation est forte, une
fois...
M. Coupai: II n'en est pas du tout question, madame.
Mme Lavoie-Roux: II n'en est pas question. Mais
évidemment, vous ne pouvez pas...
M. Coupai: Promesse de notaire.
Mme Lavoie-Roux: Ordinairement, je pense qu'elles sont assez
bonnes. Vous ne pouvez quand même pas prévoir pour votre
succession.
M. Coupai: Naturellement, non. Il y a l'Office des
professions.
M. Mackay: La modification est faite par règlement
approuvé par l'Office des professions et par le lieutenant-gouverneur en
conseil.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Mackay: Ce n'est pas par résolution, c'est par
règlement, ce qui présuppose un mécanisme assez
complexe.
Mme Lavoie-Roux: Cela va, merci beaucoup.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Je voudrais apporter une remarque. M. le ministre,
je pense qu'il y aurait toute une publicité à faire. Je ne veux
pas donner trop de cas, mais j'ai été témoin de trop de
fâcheuses expériences dans le passé où les gens
n'avaient pas un testament fait devant notaire, un testament olographe ou
encore dérivé de la forme d'Angleterre, la forme anglaise. Ce qui
est arrivé, au moment du décès, dans quelques cas bien
précis, c'est que le testament a disparu par enchantement et cela a
créé des problèmes. Les notaires en savent plus que moi.
Je pense que s'il y avait une publicité pour encourager les gens
à faire des testaments, surtout si cet amendement est accepté,
à ce moment, cela éviterait des choses; même parmi des
professionnels, j'ai vu des choses comme cela se produire. Parfois, c'est
l'enfant qui l'a fait disparaître parce qu'il n'était pas... Et le
reste...
Je crois qu'il serait bon qu'une certaine publicité soit
faite.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je prends note
de la suggestion et je pense que la Chambre des notaires elle aussi pourra
aviser sur la façon de faire connaître cette possibilité
désormais plus large de s'assurer que les dispositions testamentaires
soient respectées.
M. Mackay: Je constate, M. le ministre, que le projet de loi tel
que présenté n'inclut pas l'amendement à l'article 140.
Dans le texte qu'on me donne ici, l'article 22 c'est l'article 138, l'article
23 c'est l'article 141.
M. Morin (Sauvé): Mais est-ce que vous n'étiez pas
d'accord? Cela a été discuté avec la chambre.
M. Mackay: Je constate maintenant qu'à la suite du
dépôt de notre mémoire, le texte qu'on me donne ici comme
devant être le texte officiel du projet de loi n'inclut pas l'amendement
à l'article 140. Je ne sais pas s'il a subi une modification au niveau
de l'Office des professions.
M. Morin (Sauvé): On me dit que cela a été
discuté avec la chambre et que vous étiez d'accord.
M. Mackay: Nous n'avons pas d'objection, parce qu'il s'agissait
strictement d'une concordance, pour être plus sûr. Le fait que cela
soit ou que cela ne soit pas dans l'article 140, à mon humble avis, ne
modifie pas; cela respecte votre remarque initiale. Ce n'est pas essentiel.
C'était pour plus de prudence, chose dont les notaires sont parfaitement
conscients, la prudence.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vais jeter un
coup d'oeil à nouveau sur la disposition pour m'en assurer.
M. Mackay: Parfait.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Trois-Rivières.
M. Vaugeois: Une question très rapide. Je profite de la
circonstance pour poser une question qui est un peu en dehors du sujet. Mais
comme vous déposez actuellement les testaments dans un registre central
et que cela se fait depuis plusieurs années, je me demande si vous avez
pensé à l'accessibilité de ces documents pour les
chercheurs, les historiens ou les sociologues en particulier? Quelle est votre
position là-dessus?
M. Mackay: Permettez-moi de vous dire d'abord que le testament
n'est pas déposé. Le testament reste chez le notaire; nous ne
faisons qu'une inscription au registre du nom de l'individu qui est d'une
confidentialité absolue. Nous ne révélons l'existence
d'une inscription testamentaire que sur production d'un extrait de
décès, une preuve de décès, sauf pour les membres
de la corporation notariale. En dehors de cela, il est impossible, même
à des chercheurs... Et même dans 30, 40 ou 50 ans, nous n'aurons
pas la preuve que
l'individu qui a fait son testament à 18 ans est
décédé; donc nous devons respecter le secret
professionnel. Il n'est même pas question pour l'instant de
détruire les bandes actuelles, même après un délai
de 50 ans, parce qu'il y a peut-être des gens qui, comme Mathusalem, vont
retarder leur vie. L'original du testament, tant que l'individu vit, est un
document essentiellement confidentiel et même les greffes de notaires qui
sont déposés à la Cour supérieure sont soumis au
même mécanisme; on ne donne la référence à
l'existence d'un testament que sur production d'une preuve de
décès.
M. Vaugeois: Ecoutez, ce n'est certainement pas le moment de
débattre de la question. Vous nous donnez une réaction d'une
façon professionnelle, moi, je soulève sur un plan professionnel
aussi l'intérêt extraordinaire que présente ce genre de
document pour une histoire sociale, une histoire si vous voulez d'une
population et je pense qu'un jour ou l'autre nous pourrons avoir la souplesse
du Vatican et finir, quitte à ce que la prescription soit très
longue, mais qu'on puisse avoir accès à ce genre de document au
même titre que d'autres registres d'état civil qui nous permettent
de mieux connaître, je pense, l'évolution d'une population.
M. Mackay: M. le député, la majorité des
testaments sont quand même enregistrés éventuellement pour
opérer transmission de la propriété. Vous les avez au long
dans les registres des bureaux d'enregistrement et je crois que c'est pas mal
ce que les historiens examinent et comme vous dites, c'est une source
d'histoire absolument sensationnelle. Le ministre Morin me faisait part des
archives qu'il possède actuellement, de vieux documents reçus
devant des membres du culte, notaires royaux, parce que dans ce temps,
c'était possible. Et cela constitue des archives absolument
remarquables.
M. Le Moignan: Avez-vous constamment des testaments olographes au
bureau des notaires aussi?
M. Mackay: Pendant la vie du testateur et à son
décès, le testament olographe devra être
vérifié, suivant les procédures du Code de
procédure civile, l'article 897 et alors il est déposé
à la Cour supérieure. Il devient une archive publique de la Cour
supérieure. Mais pendant l'existence du testateur, il reste chez le
notaire et si l'individu révoquait son testament, le testament restera
toujours dans les archives du notaire, pour, à son décès,
être transmis à un autre notaire et, éventuellement,
rejoindre les archives publiques du protonotaire de la Cour supérieure.
Nous avons actuellement dans les palais de justice, tous les greffes de
notaires depuis 1642. C'est une source considérable de renseignements
pour les historiens.
Le Président (M. Marcoux): Je suis convaincu que le
ministère du Revenu serait intéressé à
connaître votre recette de confidentialité et sur ce, je vous
remercie d'être venus présenter votre mémoire, en cette
journée de tempête, aux membres de la commission des corporations
professionnelles. Je voudrais vous indiquer les mémoires que nous
entendrons normalement vendredi prochain, toujours à la
discrétion du leader parlementaire du gouvernement. Ce seront les
mémoires... Tout simplement les numéros, les mémoires nos
7, 3,10 et 9. Alors, la commission, normalement après la période
de questions, vendredi. Oui, vous avez une question?
M. Mackay: Nous désirons vous remercier de cette constante
collaboration que nous avons des autorités du gouvernement. Nous
apprécions cela.
Le Président (M. Marcoux): C'est nous qui vous remercions
de nous avoir attendus toute la journée, mais cela n'a pas
été désespérément. La commission des
corporations professionnelles ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 14)