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Commission permanente de l'Education
Bill 62 Loi concernant l'organisation scolaire
sur l'île de Montréal
Séance du jeudi 19 février 1970
(Quatorze heures cinq minutes)
M. CROTEAU (président de la commission de l'Education): A
l'ordre, messieurs! Nous vous souhaitons la bienvenue. Voici l'ordre du jour:
Nous entendrons six organismes suivant l'ordre établi. Avant de
débuter, est-ce que le ministre de l'Education aurait quelque chose
à dire?
M. CARDINAL: Oui, très brièvement, M. le Président,
merci. Tel que convenu, cette séance débute à deux heures
et se terminera à cinq heures trente; nous reprendrons à huit
heures ce soir pour terminer à dix heures ou dix heures trente, selon
les circonstances.
Après entente avec l'Opposition, nous reprendrons la suite de ces
séances le mercredi 25 février vers quatre heures, après
la période des questions à l'Assemblée nationale. Le
député d'Ahuntsic est sans doute d'accord avec le chef de
l'Opposition. Ceci guidera les gens qui veulent nous présenter des
mémoires.
Pour ajouter une deuxième remarque, j'ai reçu, au
ministère, plusieurs de ces mémoires. Nous ne voulons
évidemment pas raccourcir le droit de parole qui est donné aux
gens, mais dans certains cas, s'il était possible de nous
présenter ce que j'appellerais la substance du mémoire, ce serait
préférable, parce que certains d'entre eux sont très longs
et très techniques, mais les documents seront quand même
déposés en entier au journal des Débats et auprès
des membres de la commission. Je pense que cela pourrait aider tous les
participants et permettre la discussion qui s'impose à la suite des
mémoires. Ce serait mieux que d'entendre, il faut bien le dire,
répéter souvent les mêmes suggestions qui ont
déjà été faites.
C'est d'ailleurs une façon de procéder qui a
été utilisée dans le passé pour le projet de loi 56
et pour d'autres. Je dis cela simplement à titre de suggestion et de
contribution pour l'avancement de nos travaux. Merci, M. le
Président.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je concours avec le ministre pour
ce qui est des heures de séances pour aujourd'hui et pour le 25.
Cependant, j'aimerais me faire l'interprète de plusieurs groupes qui
s'inquiètent je ne sais pas si le ministre en a eu connaissance;
en tout cas, je me fais leur interprète au cas où la demande ne
lui aurait pas été faite du rythme de fonctionnement de la
commission à partir du 25.
Le ministre a déjà mentionné qu'il avait
déjà reçu, je crois, autour de 6 mémoires. Une
très faible proportion de ces mémoires a été
entendue jusqu'à maintenant.
M. CARDINAL: Six.
M. LEFEBVRE: Quelle est l'intention du ministre quant aux séances
après le 25 février?
M. CARDINAL: L'intention du gouvernement, mon intention c'est,
après entente avec l'Opposition, de procéder aussi
fréquemment que les travaux parlementaires nous le permettront. Je pense
que le fait que la session ouvre le 24 et que dès le 25...
Je pense que le fait que la session débute le 24 et que,
dès le 25, après la période des questions, nous allions en
commission indique ce désir que nous avons d'entendre tout le monde dans
le plus bref délai. De fait, encore certains organismes ont
communiqué avec moi ce matin pour nous demander quand ils pourraient
être entendus. Je dis: le plus rapidement possible, selon que les travaux
parlementaires et les travaux des autres commissions le permettront.
Aujourd'hui, je ne sais pas à quel point les gens de l'autre
côté de la barre sont initiés aux travaux des
députés malgré les articles sur l'absentéisme qui
paraissent dans certains journaux. Il y avait ce matin, trois commissions qui
siégeaient. Il y en a deux cet après-midi, aucun de nous ne peut
se multiplier et c'est ce qui constitue le problème. Il va falloir que
les représentants de l'Opposition et du parti ministériel
s'entendent sur cette échéance que je désire la plus
rapprochée possible.
Nous commencerons dès le lendemain de l'ouverture de la session,
et nous continuerons au rythme le plus rapide possible, avec les autres travaux
parlementaires.
M. LEFEBVRE: Je peux déduire de la réponse du ministre que
c'est son intention de tenir plusieurs séances de la commission par
semaine.
M. CARDINAL: Si c'est possible, oui.
M. LEFEBVRE: En prenant toutes les mesures possibles.
M. CARDINAL: Oui.
M. LEFEBVRE: Cela peut éclairer aussi les gens qui veulent se
présenter devant la commission.
M. CARDINAL: J'ajoute un autre détail. Malheureusement, le 25,
dans la soirée, nous ne pourrons pas siéger parce que les
représentants de Sa royale Majesté nous convient. Il sera
impossible d'être devant cette commission, mais à la fin de la
journée du 25, nous nous entendrons pour reprendre les travaux
aussitôt que possible, durant la même semaine, si le temps nous le
permet.
M. LEFEBVRE: S'agit-il de la royale Majesté gabonnaise ou
anglaise ou française?
M. CARDINAL: Il n'y a pas de majesté au Gabon. La seule royale
majesté que je reconnaisse comme existante, c'est celle qui est à
Londres.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, nous entendrons...
M. LEFEBVRE: M. le Président, si vous me le permettez, mon
collègue de Saint-Laurent aurait une question particulière. Elle
a été suscitée par des gens de son comté. Je pense
qu'il pourrait la poser maintenant.
M. PEARSON: M. le ministre, vous avez déjà
mentionné, lors d'une séance précédente, et
d'ailleurs en public, que vous attachiez beaucoup d'importance à
certains grands principes du bill 62, qui se résumaient, en autant que
je me souvienne, à peu près à quatre, et que vous
étiez moins catégorique sur les modalités. Un de ces
principes-là, je pense que c'est la meilleure répartition du
fardeau de la taxe sur l'île de Montréal.
M. CARDINAL: Vous parlez de l'article 698.
M. PEARSON: C'est ça. Bon, alors j'en viens à l'article
698, vous m'avez deviné. On dit: "Nonobstant toute loi contraire, les
terres en culture dans le territoire de l'île de Montréal doivent
être évaluées, pour fins scolaires, à leur valeur
réelle." Or, dans mon comté, le comté de Saint-Laurent, il
reste encore quelques cultivateurs, peut-être 10 à 12, et si on
calcule selon cet article-là, la taxe scolaire pourrait passer de,
peut-être, $100 à plus de $40,000 pour la même année.
Est-ce que cet article-là, c'est de cette façon-là qu'on
doit l'interpréter? Ce serait pour une terre d'à peu près
70 arpents.
M. CARDINAL: Ce problème particulier des quelques terres
maraîchères de l'île de Montréal et de l'île
Bizard cela n'affecte donc pas seulement Saint-Laurent, mais aussi
l'île Bizard qui fait partie de ce groupement métropolitain
a été porté à notre connaissance au
ministère de l'Education. J'ai immédiatement créé
un petit groupe d'experts en matière fiscale, comprenant quelqu'un du
financement et quelqu'un de la planification, qui actuellement est en train de
me préparer un travail sur la façon dont nous devrons
considérer les terres en culture du territoire métropolitain. Je
puis donc dire ceci: Il y aura certainement une modification qui sera faite
à la suite de cette étude pour tenir compte de ce facteur qui
avait été oublié. Quel sera l'amendement? Je ne suis pas
prêt à répondre, mais c'est un problème qui a
été isolé et sur lequel nous travaillons
présentement.
M. LEFEBVRE: Cela peut éviter quelques syncopes dans le
comté de Saint-Laurent.
M. PEARSON Pas seulement dans le comté de Saint-Laurent.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y a l'île Bizard.
M. CARDINAL: Oui, il y a l'île Bizard. Je suis d'autant plus
sensibilisé au problème que je connais bien cette région.
H y a une partie de Côte-des-Neiges, de Saint-Laurent et de l'île
Bizard qui est affectée par ça. J'ajoute un autre détail,
cependant. Malgré cette étude que nous faisons, il existe
déjà, par les lois actuelles, un tempérament, puisque tous
ceux qui sont considérés comme agriculteurs bona fide
reçoivent du ministère des Finances, après rapport du
secrétaire-trésorier de la commission scolaire, un remboursement
équivalent à 35 p.c. du montant annuel de taxes foncières
pour fins scolaires. Ceci demeure malgré le bill 62. Le bill 62 n'est
qu'un amendement je l'ai dit à la Loi de l'instruction
publique; le reste de la loi et les autres lois demeurent les mêmes.
M. PEARSON: Alors, cela veut dire: Nonobstant toute loi contraire.
M. CARDINAL: C'est ça. Cela veut dire que les 35 p.c. demeurent,
malgré l'adoption du projet de loi 62. Je suis heureux de le dire, parce
que ça peut être déjà ce que j'appelais un
tempérament ou une modération des problèmes. D'autre part,
on étudie, quand même, la situation des terres en culture sur le
territoire.
M. PEARSON: Ce comité d'experts ne nous apportera pas
nécessairement deux définitions du mot agriculteur, une pour
Montréal et une autre pour la province?
M. CARDINAL: Je répète ce que j'ai dit tantôt: Je
n'en sais rien. Je n'ai pas reçu ses recommandations; Le bill 62 va
créer une situation particulière à Montréal. Il est
possible que cet important amendement à la Loi de l'instruction publique
apporte certaines définitions particulières pour Montréal,
mais je ne suis pas en mesure, je le dis bien franchement, de donner la
réponse aujourd'hui.
Tout ce que je peux dire, pour rassurer le député de
Saint-Laurent et ses électeurs, c'est que les 35 p.c. de remboursement
ne sont pas modifiés pour autant et que le sujet comme tel est
étudié particulièrement.
M. PEARSON: Autrement dit, on va attendre que les amendements soient
apportés, je suppose...
M. CARDINAL: Je les apporterai soit devant cette commission, soit au
comité ou en deuxième lecture, selon que les circonstances le
permettront.
M. PEARSON: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons donc l'Association des principaux de
Montréal. Son porte-parole est M. Fernand Lyonnais. C'est bien
ça? Vous avez la parole.
M. Fernand Lyonnais
M. LYONNAIS: M. le Président, M. le Ministre, Madame Casgrain,
MM. les Députés Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, permettez
d'abord que je vous présente les personnes représentant
l'Association des principaux de Montréal qui m'accompagnent
actuellement. Ici, à ma gauche, M. Jean-Paul Ricard,
vice-président de l'association; à ma droite, Mlle Henriette
Pépin, directrice de l'école Notre-Dame-du-Bon-Conseil de
Montréal et M. Yvon Hétu, directeur de l'école secondaire
Le Plateau de Montréal.
Je présenterai tout d'abord les grandes lignes de pensée
de notre mémoire, après quoi chacun de mes compagnons et
compagnes liront le plus rapidement possible une partie de notre mémoire
que nous considérons comme en étant la base. Nous essaierons de
résumer, pour le bénéfice du comité, la partie de
la fin que nous considérons cependant importante, c'est-à-dire
celle du statut du principal, que nous aimerions voir défini une fois
pour toutes dans un texte de loi, un texte légal ou un règlement.
Cela fait des années que la Fédération des associations de
principaux réclame ceci, qui n'a toujours été simplement
défini que dans des ententes, dans des négociations, dans des
conventions, mais jamais dans un texte de loi.
Considérant l'importance des mesures préconisées
par le gouvernement en vue du renouvellement des structures scolaires de
l'île de Montréal; considérant le rôle fondamental
joué par ses membres, tant dans l'éducation des enfants que dans
l'administration des écoles, l'Association des principaux de
Montréal, qui groupe les directeurs et directrices des écoles
françaises de la Commission des écoles catholiques de
Montréal soit dit en passant au moins 600 membres a
jugé nécessaire de faire connaître au gouvernement ses
réflexions, ses remarques et ses recommandations concernant le projet de
loi no 62 intitulé Loi concernant l'organisation scolaire sur
l'île de Montréal.
L'Association des principaux se déclare d'accord sur le principe
de l'unification des Commissions scolaires de l'île de Montréal.
Elle estime toutefois que cette unification doit s'accompagner d'une
décentralisation des responsabilités, d'un mode de
désignation très démocratique, tant des commissaires que
des membres du conseil de l'île.
L'Association des principaux estime également que pour satisfaire
les justes droits de tous les citoyens de l'île de Montréal, la
loi concernant l'organisation scolaire doit offrir des garanties linguistiques
et confessionnelles non équivoques.
C'est dans le sens de ces prises de position globales que l'Association
des principaux de Montréal propose les observations et les suggestions
suivantes.
Je vous passe immédiatement mademoiselle Henriette Pépin,
qui va vous faire les recommandations sur les commissions scolaires.
Mlle Henriette Pépin
MLLE PEPIN: Commissions scolaires.
Les municipalités scolaires, article 582. "L'Association des
principaux de Montréal n'a pas d'objection de principe à la
division de l'île de Montréal en onze municipalités
scolaires. Elle s'inquiète toutefois de la situation qui sera celle de
la municipalité scolaire no 1. Cette municipalité couvre en effet
un territoire déjà défavorisé et appelé
à le devenir de plus en plus. Sur un tel territoire, les rapports des
éducateurs avec les enfants et les parents sont particulièrement
difficiles, les problèmes scolaires et disciplinaires très
nombreux. Pour ces motifs, l'Association des principaux de Montréal
craint que, sur le territoire de cette commission scolaire, le recrutement et
la conservation du personnel posent un problème et que, en
conséquence, on doive ou engager du personnel
inexpérimenté ou obliger des hommes et des femmes à
oeuvrer toute leur vie dans un milieu difficile et parfois déprimant.
"Considérant les inquiétudes qui viennent d'être
exposées, l'Association des principaux souhaite donc que la carte
scolaire de l'île de Montréal, telle qu'elle est
présentée en annexe du projet de loi, soit retouchée de
façon que les dangers ci-haut décrits soient évités
dans la mesure du possible. "S'il s'avérait impossible de modifier la
carte scolaire de l'île, il devra être clairement entendu, tant de
la part du ministre que du Conseil de l'île, que les commissions
scolaires de territoires défavorisés devront disposer de budgets
proportionnellement supérieurs à ceux des autres commissions
scolaires. "Elles devront, en effet, s'assurer les services d'un plus grand
nombre d'éducateurs spécialisés, de psychologues, de
travailleurs sociaux, etc. Le nombre d'élèves par classe devra
être moins élevé que dans d'autres milieux, ce qui exigera
un plus grand nombre de professeurs. 2 Objets et pouvoirs des
commissions scolaires, articles 586, 587, 588. "Le rôle des commissions
scolaires est défini par le projet de loi de façon
imcomplète et confuse. Il n'est fait mention, 3n effet, ni des classes
maternelles, ni des cours pour adultes, ni des services pédagogiques et
para-pédagogiques qui doivent être offerts à une population
scolaire. "Par ailleurs, la restriction du cours d'études à onze
années paraît malheureuse, parce qu'elle ne tient pas compte des
fluctuations, déjà nombreuses dans le passé et
prévisibles pour
l'avenir, et selon lesquelles les cours d'étude offerts par les
commissions scolaires ont oscillés entre onze et douze ans.
Enfin, des formules telles que "cours d'études... adoptés
ou reconnus pour les écoles publiques catholiques, pour les
écoles publiques protestantes, etc." et "programmes d'études et
règlements édictés ou approuvés pour les
écoles publiques catholiques, protestantes ou autres que catholiques ou
protestantes" cadrent mal avec l'ensemble du projet de loi.
Compte tenu de ces remarques, l'Association des principaux de
Montréal suggère que l'article 586 soit reformulé de la
façon suivante: "Chaque commission scolaire doit prendre les mesures
nécessaires pour organiser et administrer, en conformité avec les
programmes édictés ou approuvés par le ministère de
l'Education, les cours des classes maternelles, de l'enseignement
élémentaire, de l'enseignement secondaire polyvalent,
c'est-à-dire général et technique, à l'intention de
tous les enfants de son territoire, et des adultes qui désirent recevoir
des cours de ces niveaux. "Elle doit aussi, si nécessaire en
collaboration avec d'autres commissions scolaires et avec le conseil de
l'île, assurer les classes spéciales pour enfants exceptionnels.
"Chaque commission scolaire doit églament assurer les services
médicaux, sociaux et psychologiques, les services d'orientation scolaire
et professionnelle, ainsi que les services de pastorale ou leur
équivalent, dans toutes les écoles soumises à sa
juridiction." b) L'Association des principaux de Montréal se dit
d'accord avec le premier paragraphe de l'article 587 concernant la
sélection et l'engagement du personnel par les commissions scolaires.
Elle juge néanmoins que la loi devrait assurer la possibilité
d'une certaine mobilité du personnel de direction. A cette fin,
l'Association des principaux de Montréal suggère que les postes
de direction soient offerts par concours à tout le personnel enseignant
ou dirigeant de l'île de Montréal. Le conseil de l'île
serait chargé de veiller à la mise en application de cette
disposition. c) En accord avec ce qui a été dit dans le
préambule de ce mémoire, l'Association des principaux estime
qu'il faut accorder une autonomie et un pouvoir réel aux commissions
scolaires régionales, dans les limites d'une juste intégration
dans un ensemble plus vaste.
Or, le deuxième paragraphe de l'article 587 ne paraît pas
accorder un pouvoir suffisant aux commissions scolaires en ce qui concerne
l'implantation des équipements scolaires dans le territoire sur lequel
une commission a autorité. De plus, si on se reporte à l'article
659, on constate que l'affectation des immeubles de chaque territoire est
remise entièrement entre les mains du conseil de l'île. Sur ce
point, l'Association des principaux de Montréal estime que la commission
scolaire, étant plus au fait des besoins concrets de son territoire, est
plus compétente que le conseil de l'île. Il est donc
suggéré que le rôle des commissions scolaires soit beaucoup
plus grand dans l'implantation des équipements, l'affectation des
immeubles et l'entretien des équipements scolaires.
Il faudrait donc reformuler l'article 587 paragraphe 2 de la
façon suivante : "Chaque commission scolaire a aussi pour rôle de
voir, en collaboration avec le conseil, à l'implantation des
équipements scolaires dans le territoire sur lequel elle a
autorité, de recommander au conseil l'acquisition des immeubles requis,
de voir à l'affectation des immeubles de son territoire et à
l'entretien de ses équipements scolaires." d) C'est également aux
commissions scolaires qu'il appartient de s'enquérir des désirs
des parents concernant le caractère linguistique et confessionnel des
écoles où leurs enfants seront accueillis. Chaque année,
en mars, la commission scolaire doit donc faire parvenir à tous les
parents de son territoire une formule sur laquelle ils doivent indiquer leur
choix quant à la confessionnalité et à la langue de
l'école qui acceuillera leur enfant en septembre suivant. Les parents
rempliront autant de formules qu'ils ont d'enfants d'âge scolaire. e)
Toujours en conformité avec la décentralisation proposée
par ce mémoire, l'Association des principaux de Montréal estime
qu'il faut respecter le plus possible les échelons hiérarchiques
et que, sauf pour des cas exceptionnels ou litigieux, les commissions scolaires
ne devraient pas avoir à recourir au ministre.
Chacun sait, d'ailleurs, que les recours trop fréquents au
ministre occasionnent des pertes de temps considérables et nuisent
à l'efficacité de l'administration. Dans ce sens, l'Association
des principaux de Montréal suggère donc que les commissions
scolaires demandent toutes les autorisations nécessaires au conseil et
non au ministre, même l'autorisation dont il est question au second
paragraphe de l'article 588. La même recommandation s'applique aux
articles 615et 616.
L'article 615, paragraphe 2, devrait donc se lire comme suit: "En cas
d'urgence ou de nécessité, le conseil peut autoriser..." A
l'article 616on remplacera "ministre" par "conseil" à la
troisième et à la treizième lignes, et on modifiera le
début du troisième paragraphe de la façon suivante: "Sur
recommandation du conseil, le lieutenant-gouverneur en conseil peut aussi..." 3
Composition des commissions scolaires (articles 590, 592).
L'organisation scolaire de l'île de Montréal gagnera
à être unifiée dans le sens proposé par le projet de
loi, mais à la condition expresse qu'à chaque niveau de la
pyramide administrative, toutes les personnes intéressées
à l'éducation soient représentées.
Pour assurer cette représentativité maximum, l'Association
des principaux de Montréal suggère:
1) Que le nombre des commissaires soit normalement de neuf. Ce nombre ne
paraît pas excessif dans le cas présent puisque les
municipalités scolaires de l'île de Montréal auront chacune
une population scolaire de 40,000 à 50,000 élèves. 2) Que
ces neuf commissaires représentent les trois groupes de citoyens qui,
à des titres divers, sont particulièrement
intéressés à l'éducation, à savoir: a) le
peuple dans son ensemble, b) les parents, c) les éducateurs.
On ne saurait trop insister sur le droit des éducateurs à
être représentés au sein de la commission scolaire, puisque
ce sont eux qui, en tant qu'enseignants ou en tant que membres de la direction
des écoles, sont le plus près des élèves et le plus
au fait des problèmes concrets de la vie scolaire.
Quant à la représentation des parents et de la population,
elle est déjà assurée par le projet de loi et
l'Association des principaux de Montréal est d'accord avec cette
représentation. 3) Que le nombre de commissaires puisse être
porté à 11, lorsque cette mesure s'avérera
nécessaire pour assurer une meilleure représentation de
l'élément minoritaire. Comme le soulignait le rapport Pagé
(p. 67), la diversité des situations dans les différentes
municipalités scolaires de l'île de Montréal doit
s'accompagner d'une certaine flexibilité quant au nombre des
commissaires. L'Association des principaux de Montréal pense que la
diversité des situations sera respectée si le conseil de
l'île a le pouvoir de nommer deux commissaires additionnels, lorsqu'une
meilleure représentativité l'exige.
En conformité avec les précédentes remarques,
l'Association des principaux de Montréal suggère que les articles
590, 591 et 592 soient rédigés de la façon suivante:
590"Chaque commission scolaire est composée de commissaires
élus au suffrage universel, de commissaires élus par un
collège électoral, conformément aux articles 640 et
suivants, et de commissaires élus par les éducateurs de chaque
commission scolaire par le truchement des associations de principaux et
d'enseignants. 591"Les commissaires élus au suffrage universel
sont au nombre de trois. Les commissaires élus par un collège
électoral sont au nombre de trois. Les commissaires élus par les
éducateurs sont au nombre de trois. 592 "Dans les cas où il
le juge opportun pour assurer une meilleure représentation de groupes
minoritaires, le conseil de l'île a le pouvoir de nommer deux autres
commissaires portant ainsi le nombre maximum de commissaires à onze." 4)
Cens d'éligibilité des commissaires (article 596). Pour respecter
et sauvegarder le caractère francophone de l'île de
Montréal, l'Association des principaux de Montréal pense que
toute personne incapable de comprendre ou de parler correctement le
français devrait se voir refuser l'accès à la fonction de
commissaire. Elle suggère, en ce sens, d'ajouter à l'article 596
un paragraphe ainsi conçu: g) "Toute personne incapable de parler
couramment français." 5) Election des commissaires au suffrage universel
(articles 603-604).
A)Pour respecter le principe émis ci-haut, en 2-c), à
propos de l'article 288, l'Association des principaux de Montréal estime
que la deuxième partie de l'article 603 devrait se lire de la
façon suivante: 603-b) "Si aucune personne n'a été mise en
cadidature pour un poste de membre d'une commission scolaire, le conseil comble
la vacance sur recommandation des commissaires déjà élus
ou nommés".
B)Pour des raisons d'économie et d'efficacité,
l'élection des commissaires élus au suffrage universel devrait se
faire le même jour et dans les mêmes locaux que les
élections municipales. L'Association des principaux de Montréal
suggère donc d'amender les articles 598 à 604 inclusivement en ce
sens. 6) Fonctionnaires de la commission scolaire (article 612). L'Association
des principaux de Montréal s'est longuement penchée sur l'un des
problèmes les plus importants que posera la mise en application du
projet de loi no 62. La loi concernant l'organisation scolaire sur l'île
de Montréal a fait naître, en effet, de nombreuses
inquiétudes sur le sort réservé à la langue et
à la religion dans une organisation scolaire de structure
unifiée.
Partant de l'expérience concrète qui est la leur, les
pincipaux de Montréal estiment qu'il est possible de faire justice
à tous, de respecter les diversités linguistiques et religieuses,
de conserver même le caractère confessionnel des écoles,
à la condition que la loi apporte
quelques précisions concernant les fonctionnaires qui seront
nommés par les commissaires d'écoles.
Les précisions que l'Association des principaux de
Montréal suggère d'apporter à la loi sont les suivantes.
Les commissaires d'école doivent nommer un directeur
général et deux directeurs généraux associés
aux études, l'un de langue française, l'autre de langue anglaise,
chargé respectivement des études françaises et des
études anglaises. Ces directeurs généraux associés
devront s'adjoindre des personnes compétentes pour l'organisation des
cours conformes aux programmes adoptés ou reconnus par le
ministère de l'Education dans chacune des matières, notamment
dans l'enseignement religieux catholique et protestant ou de tout autre
enseignement équivalent.
Grâce à la présence obligatoire de ces
fonctionnaires au sein de chaque commission scolaire, on sera assuré,
d'une part, d'un enseignement de caractère français et anglais,
d'autre part, d'un enseignement religieux et, dans le cas des écoles
neutres, de ce qui tient lieu d'enseignement religieux.
De plus, les commissaires devront nommer un directeur associé
à l'organisation scolaire et aux services aux étudiants. Ce
directeur associé aura, entre autres fonctions et avec le concours de
personnes compétentes, la responsabilité de mettre sur pied et de
faire fonctionner tous les services aux étudiants, notamment le service
de pastorale catholique, protestante et autre.
Enfin, les commissaires devront nommer un directeur associé
chargé du personnel enseignant et non-enseignant.
Comme on peut le constater, cette structure précise, sans
être rigide, assure à tous et à chacun des citoyens toutes
les garanties tant linguistiques que confessionnelles et elle assure, de par sa
présence au niveau de la commission scolaire, la décentralisation
des études et des services que l'Association des principaux de
Montréal estime indispensable.
Cette autonomie des commissions scolaires dans l'organisation des cours
et des services n'exclut pas sa dépendance vis-à-vis des
directives et des normes du ministère de l'Education ni sa collaboration
avec des équipes de recherche mises sur pied par le Conseil de
l'île, mais elle marque clairement que, selon les voeux de l'Association
des principaux de Montréal, c'est à la commission scolaire
régionale que revient la tâche de l'organisation, de la mise en
oeuvre tant des cours que des services.
Les lignes qui précèdent incitent donc à souhaiter
la reformulation de l'article 612 de la façon suivante : "Les
commissaires d'école doivent nommer un directeur général.
Ils doivent aussi nommer deux directeurs généraux associés
aux études, l'un de langue française, l'autre de langue anglaise,
chargés respectivement de l'organisa- tion des cours français et
des cours anglais, en conformité avec les programmes adoptés ou
reconnus par le ministère de l'Education. "Les commissaires doivent
également nommer un directeur général associé au
personnel, ainsi qu'un directeur général associé à
l'organisation scolaire et aux services aux étudiants. Ce dernier aura
notamment pour tâche de mettre sur pied et de faire fonctionner des
services de pastorale catholique, protestante et autre. "Ils peuvent aussi
nommer d'autres fonctionnaires et employés conformément à
l'article 204."
M. LE PRESIDENT: Avant d'aller plus loin, peut-être le ministre de
l'Education aurait-il quelques remarques à faire?
M. CARDINAL: Si vous le permettez, comme votre mémoire est
très bien structuré et en trois parties différentes,
peut-être pourrait-on, sans entreprendre de discussion, me permettre de
faire un certain nombre de remarques sur les points que vous venez de
soulever.
M. LYONNAIS: D'accord.
M. CARDINAL: Tout d'abord, à la page 3, vous parlez de la
région no 1 qui serait défavorisée. Quand vous ajoutez
qu'elle est appelée à le devenir davantage, je vous dis que je ne
suis plus d'accord, parce que, justement, le premier objectif de l'application
du projet de loi 62, par le rôle du conseil métropolitain, est
d'éviter que des régions ne soient défavorisées par
rapport à d'autres. Le premier objectif est justement
l'égalité des services sur tout le territoire, tant dans le
domaine de la pédagogie que dans le domaine des équipements.
Cependant, vous posez une question et j'y réponds. Y aura-t-il des
modifications de la carte scolaire? J'en ai parlé ici devant cette
commission. J'en ai parlé vendredi dernier à l'Alliance des
professeurs de Montréal. Il y aura certainement des modifications
d'apportées à la carte présentée. Nous-mêmes,
au ministère, nous nous sommes rendu compte que simplement pour des
raisons d'équipement, par exemple, il y a des lignes de cette carte qui
mériteraient d'être déplacées. Nous allons attendre
d'autres mémoires, mais nous savons d'ores et déjà que
certains nous parlent de sept, d'autres de neuf, d'autres de onze, d'autres de
treize commissions. Evidemment, votre mémoire part du projet de loi tel
qu'il a été présenté, et que j'appellerai encore
une fois document de travail.
Pouvoir des trois niveaux:...
M. LYONNAIS: Si vous le permettez, M. le Ministre, c'est pour ça
que nous recommandons justement de refaire la carte scolaire. Nous sommes
convaincus que le projet de loi 62 va apporter l'égalité au point
de vue des services et tout ça. C'est justement là ce que nous
recon-
naissons que, dans cette région, il y aurait peut-être
besoin de plus de services, de plus d'aide, si vous voulez, que les milieux
normaux.
M. CARDINAL: D'ailleurs, c'est un exemple que nous avons apporté
à la commission à la dernière séance. Quant aux
pouvoirs des trois niveaux, j'ai dit et je répète que les
pouvoirs indiqués: le conseil métropolitain, pour les
régions qu'on appelle les commissions scolaires, et pour, ce dont nous
parlerons tantôt, le comité d'école, seront revisés.
Je suis un des premiers à avoir admis en public, par exemple, que
l'intervention du ministre au niveau du conseil métropolitain me
paraissait devoir être trop fréquente si on prenait le texte
à la lettre.
Quant aux maternelles et aux adultes, j'ai répondu à cette
question à la dernière commission permanente de l'Education. Le
bill 62 vient modifier la Loi de l'instruction publique. Il ne se prononce donc
pas sur le niveau maternel et sur le niveau d'éducation des adultes
parce que ceci est un tout autre problème qui a été
soulevé à l'occasion des négociations et de la signature
des conventions collectives. Des jugements ont été rendus quant
aux pouvoirs du ministère dans ces domaines de la maternelle et de
l'enseignement aux adultes. Ce n'est donc pas le projet de loi 62 qui
résoudra ce problème, même pour Montréal, ce serait
un amendement à la Loi de l'instruction publique, après
étude de ces décisions arbitrales qui ont été
rendues à l'occasion des négociations.
Quant aux onze années formant l'élémentaire et le
secondaire, je souligne un point important ici, qui a déjà
été rappelé: le projet de loi 62, pour une fois, met en
application le règlement no 1 en joignant, sous l'autorité d'une
même commission scolaire, l'élémentaire et le secondaire.
Mais il va falloir que l'on réussisse à régler la zone
grise qui existe entre le secondaire et le collégial, de même
qu'on a réglé celle qui existait entre le collégial et
l'universitaire. A ce moment-là, ce n'est pas le projet de loi 62 qui va
le résoudre, ce seront des politiques qui seront étudiées
à la direction générale de l'élémentaire et
du secondaire. Quelqu'un a d'ailleurs été nommé
récemment à cet effet et, par conséquent, ce n'est pas un
texte de loi qui va établir ceci. C'est l'application du
règlement no 1 et un comité de travail qui sera
créé, comme il y avait eu le comité mixte
université et collège pour régler ce niveau. Pour ce qui
est de l'équipement...
M. LYONNAIS: M. le ministre, avant d'aller plus loin, M. Hétu
aurait une remarque à faire à ce sujet.
M. HETU: La question des adultes, vous en avez parlé. On se
demande si, dans nos écoles polyvalentes à Montréal, il ne
serait pas bon que l'on respecte le principe d'administration d'une seule
direction. Or, il arrive que nous avons des principaux pour les cours du jour
et d'autres principaux qui viennent le soir dans nos mêmes écoles.
Il serait peut-être temps que l'on applique ce principe: un
bâtiment, une direction.
M. CARDINAL: Disons que le projet de loi ne nous le permet pas.
Tantôt, vous reveniez vous-même sur la définition de
l'école, une école n'est plus un bâtiment, je suis d'accord
avec vous. N'oublions pas que l'éducation des adultes se divise en deux
branches aujourd'hui: d'une part, ce qu'on a appelé jusqu'à
présent les cours d'éducation populaire et, d'autre part, les
cours de recyclage qui dépendent d'une entente avec le
fédéral, qui a été reconduite après deux ans
et qui est renégociée. Les cours d'éducation populaire ont
été une expérience qui s'est faite en marge du
système lui-même. Tantôt, je parlais de ces décisions
arbitrales qui ont été rendues; nous sommes, si vous voulez, pris
avec ce problème qu'il nous faut régler au niveau de tout le
Québec.
Quant à l'équipement, vous suggérez que se soit
remis au niveau des commissions scolaires. Cette suggestion, j'ai, pour ma
part, beaucoup de difficulté à l'accepter parce que, justement,
si l'on veut cette égalité d'équipement, il va falloir
passer la planification de l'quipement au niveau du conseil
métropolitain, sans quoi nous allons retomber en peu d'années
dans le même problème où des commissions scolaires, parce
qu'elles auront un budget différent de la commission scolaire voisine,
parce qu'elles auront des écoles déjà construites et qu'il
y aura des limites à son territoire, en viendront à voir des
écoles occupées à plus qu'il ne faut, ou à moins
qu'il ne faut, ou de qualités différentes. Disons que ceci me
paraît être difficilement acceptable dans l'esprit du projet de
loi.
Quant à la formule pour le choix de la langue et de la religion,
le projet de loi 63, dans son article 2, prévoit que l'enseignement se
donne en français, que toutefois les parents peuvent demander un
enseignement en anglais. Certaines commissions scolaires, ceci a
été évoqué à la dernière
séance, ont déjà commencé un travail dans ce
domaine.
J'annonce dès aujourd'hui que, la semaine prochaine, dans une
conférence de presse, je donnerai toute la réglementation
acceptée par le gouvernement pour l'application du projet de loi 63, la
réglementation officielle du ministère y compris la formulation
qui sera utile, les délais prévus, etc. Donc, votre suggestion
fait plus que tomber en bonne terre, elle sera réalisée
dès la semaine prochaine.
Enfin, nombre de commissaires, que ce soit six, sept, huit, neuf, dix ou
onze, ceci est sujet à étude. Je l'ai souvent dit. Merci de vos
suggestions au sujet des fonctionnaires. Elles seront sérieusement
étudiées. C'était ce que j'avais à mentionner sur
cette première partie. Je ne sais pas si quelqu'un de l'Opposition a
quelques
remarques à ajouter, mais je pense qu'il vallait la peine
d'éliminer tout de suite ces problèmes-là, puisque
certains d'entre eux sont, ou bien déjà résolus ou bien
à l'étude.
M. LE PRESIDENT: M. le député d'Ahuntsic.
M. LEVEBVRE: M. le Président, j'aimerais commenter, très
brièvement, à mon tour, l'excellent mémoire que nous
venons d'entendre. Je pense qu'il contient des suggestions très
constructives. Il y en a une que le ministre a semblé oublier ou sur
laquelle il a, sans doute, diplomatiquement, glissé et que je
soulignerai en premier lieu, spécifiquement, pour cette raison. C'est la
suggestion ou enfin l'hypothèse que les éducateurs, comme tels,
soient représentés au sein des commissions scolaires. Je ne suis
pas en mesure, pour ma part, de donner une opinion de groupe sur cette question
parce que nous ne l'avons pas étudiée, mais je trouve que la
suggestion, en tout cas, est intéressante et je félicite ceux qui
l'ont faite.
Maintenant, au sujet des milieux défavorisés, je crains
que le ministre n'ait pas tout à fait saisi l'intention des auteurs du
mémoire. Je félicite les principaux. C'est un problème,
comme ils le savent, que je connais fort bien pour y avoir été
mêlé, il y a plusieurs années. Il n'y a aucun doute
possible que, dans les zones défavorisées de Montréal, ce
qu'il faut, ce n'est pas une égalité de traitement, c'est un
privilège. En fait, c'est plus...
M. CARDINAL: Est-ce que vous me permettez une intervention? J'ai dit
égalité de services et non pas de traitement.
M. LEFEBVRE: Enfin, je voulais être sûr que le message
s'était rendu.
M. CARDINAL: Quant à l'autre question, ce n'est pas par
diplomatie que je l'ai oubliée, car j'ai rencontré l'Alliance des
professeurs...
M. LEFEBVRE: Si le ministre veut me laisser parler; je l'ai
écouté patiemment tout à l'heure.
M. CARDINAL: D'accord, je vais user de la même patience!
M. GRENIER: On pourrait parler de l'unanimité chez vous.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. LEFEBVRE: Non, quant à l'unanimité, elle est tout
à fait faite. Incidemment, le député de Frontenac m'invite
à ouvrir une parenthèse. Certains membres de la presse, M. le
Président, se sont publiquement inquiétés de
l'unité qui existait au sein de notre parti. Je peux vous dire que
l'unité s'est faite lors du caucus et nous avons convenu qu'à
l'instar de son parrain, le bill 62 était ambigu et sinueux. Nous aurons
l'occasion de le démontrer en temps et lieu. Ceci était pour
répondre à l'aimable intervention du député de
Frontenac.
Mais, M. le Président, je reviens à mon sujet: les milieux
défavorisés. Je comprends qu'il n'est pas possible dans une loi
d'inscrire, par exemple, des normes budgétaires ou des choses de cet
ordre-là, mais il me semble qu'à l'occasion de cette
restructuration scolaire complète sur l'île de Montréal, le
Parlement, qui aura à voter cette loi, devrait indiquer clairement qu'il
est maintenant sensibilisé au problème des milieux
défavorisés. Je sais qu'à la CECM cela a été
un processus qui a pris cinq ou six ans. La CECM vient d'adopter des mesures
excellentes dont, pour ma part, je la félicite. Mais je me souviens de
l'origine de cette idée-là. Je sais que c'est une chose qui a mis
du temps à être perçue par tout le monde; les principaux en
conviendront. C'est pourquoi ils ont eu tout à fait raison, à mon
sens, d'attirer l'attention de la commission sur ce point-là.
J'espère que, dans les amendements, le gouvernement trouvera le moyen
sinon, nous l'aiderons à les trouver de rendre cette
motivation ou cette intention plus claire qu'elle ne l'est
présentement.
Au sujet des équipements, je dois dire on constatera, une
fois de plus, que nous ne prenons pas des positions strictement par esprit
partisan, comme certains voudraient le croire que je partage l'opinion
du ministre. J'ai l'impression que la structure du bill rend presque
obligatoire, si vous voulez, le fait que les équipements soient
administrés par le conseil scolaire plutôt que par les
commissions. Enfin, il y aurait possibilité de faire tout un
débat là-dessus.
En page 8, lorsque vous faites allusion aux inconvénients qu'il y
a à recourir au ministre, trop souvent, vous êtes d'une politesse
considérable. Vous avez évité de mentionner un mot qui est
bien connu dans le langage politique et qui s'appelle le patronage. Je pense
que les recours trop fréquents au ministre sont autant de portes
ouvertes à cette bête multiforme dont on connaît toutes les
ruses.
M. le Président, quant à la question du nombre de
commissaires, à première vue il me semble, en toute bonne foi,
que votre suggestion comporte la difficulté, qu'il y a peut-être
moyen de surmonter, mais enfin comporte la difficulté de la
représentation des divers groupes minoritaires. Vous y faites allusion
dans un amendement, mais, en fait, il faut bien se rendre compte que, selon la
logique du bill 62, il y aura sur l'île indépendamment de
la forme précise que prendront les commissions scolaires, je pense que
c'est là que se situera une partie du débat il y aura
forcément quatre sortes d'écoles, des écoles
françaises catholiques, anglaises catholiques, des écoles
françaises tout court, et des écoles anglaises tout court.
Alors, au niveau des commissions scolaires,
évidemment, il nous semble, quels que soient, encore une fois,
les détails de structure de ces commissions, qu'il faudra s'assurer que
chacun de ces types de clientèle sera représenté. Les
votes 3,3,3, je crois, compliqueraient un peu cet aspect-là de la
représentativité des commissions scolaires ou des commissaires
d'écoles. M. le Président, ce sont les seules remarques que je
voulais faire, à ce moment-ci. Je pense que ma collègue, madame
Kirkland-Casgrain, aurait...
M. LE PRESIDENT: Oui.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, pour que certains
ministériels cessent de se réjouir, après les remarques
qu'on a entendues, je m'étais proposé de faire certaines
remarques. Mais en écoutant les représentations très sages
de mademoiselle Pépin et de l'organisme qu'elle représente, je
m'étais proposé de ne pas les faire. Cependant, au risque de
répéter un peu ce qu'a dit mon collègue, le
député d'Ahuntsic, je pense que je me dois de la
féliciter, ainsi que l'organisme qu'elle représente, même
si mon collègue l'a très bien fait avant moi. J'aimerais dire que
ce qui me plaît particulièrement dans les suggestions faites,
c'est qu'il y en a qui, justement, sont de nature à diminuer la
discrétion ministérielle, et, à mon sens, elles apportent
un peu plus de démocratie à la loi.
M. CARDINAL: M. le Président, j'aimerais m'arrêter sur deux
points qui ont été mentionnés. En dehors de toute
référence politique ou "politicailleuse", ce que le
député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas fait, je dirai ceci: J'ai
félicité tantôt le porte-parole des principaux pour les
suggestions heureuses qu'il a faites quant aux fonctionnaires. Cette phrase
était générale, parce que je ne veux pas me prononcer sur
chacune des suggestions qui sont faites. J'ai dit qu'on les étudierait.
Certaines, justement, en fonction du choix de la langue, de la religion, sont
des suggestions positives.
Au sujet des interventions du ministre, dans le projet de loi tel que
rédigé, j'avais mentionné déjà mon intention
de revoir ceci, pour des fins d'efficacité, et ici, je n'allègue
pas du tout les questions de patronage. Si on veut être ou objectif ou
méchant sur le sujet, cette bête sinueuse aux mille tentacules,
quand elle ne s'établit pas à un niveau, elle s'établit
à un autre. Par conséquent, sur ce point, je suis loin de manquer
de candeur.
M. LEFEBVRE: Est-ce que la conclusion du ministre, c'est qu'il aime
autant l'avoir à son niveau?
M. CARDINAL: Non, absolument pas, il ne faut rien inférer de
ceci. Je ne fais pas de psycho-sociologie. Le dernier sujet touche la
représentation des enseignants. Devant l'Allian- ce des professeurs,
l'autre soir, j'ai développé un thème, que je ne veux pas
reprendre aujourd'hui, mais que j'avais déjà évoqué
devant cette commission. Je pense qu'à l'occasion d'une restructuration
semblable, il va falloir que tous les groupes, quels que soient leurs
intérêts, se rendent compte que, dans l'enseignement, il n'y a
plus que les parents, que l'on disait autrefois représentés par
tel ou tel groupe, il y a les parents, qui ont des rôles de prévus
dans la loi; il y a les enseignants et les administrateurs. J'ai mis le mot
administrateur dans le sens large, comprenant la direction et les
administrateurs, et il y a l'Etat. La suggestion qui est faite, même si
je ne l'accepte pas, disons, à première vue, dans la forme
où elle est faite, est une suggestion qui entre parfaitement dans cette
philosophie que j'ai évoquée.
Je soulignerai que, l'autre soir, devant l'Alliance, il y avait des
étudiants aussi. Ils ont immédiatement rebondi en disant oui il y
a aussi les étudiants. Nous allons entendre tous les groupes, mais je
retiens, pour le moment, sans exclure les étudiants, et par là je
ne fais de promesses à personne, qu'il y a des parents, des enseignants,
des administrateurs au niveau local, et l'Etat, et qu'il faut à la fois
réussir ce que n'a pas réussi la loi du ministère de
l'Education parce qu'on n'a pas amendé profondément la Loi de
l'instruction publique réussir la participation c'est un
grand mot, qui est encore lâché de ces trois organismes ou
de ces trois institutions, si l'on veut.
Et à compter du moment où l'Etat a le rôle qu'il a
par la création du ministère de l'Education, qu'a institué
le gouvernement précédent et que nous avons continué, il
faut cesser d'avoir des craintes de tout ordre que ce soit et s'expliquer
clairement à ce sujet. Mais, encore une fois, félicitations! Je
voulais compléter les remarques de M. Lefebvre et je vois que ceci ne
diminue en rien l'impact de ses propos. Je voulais tenir ces propos, cependant,
sur le plan où le député de Marguerite-Bourgeoys et
moi-même l'avons fait.
M. LEFEBVRE: Si mon collègue me permet juste une seconde, est-ce
que le ministre serait d'accord, puisque cela fait bien des fois que les gens
lui font cette remarque il vient de dire lui-même qu'il
était étonné des pouvoirs, qu'il juge maintenant
exorbitants, qui lui sont confiés dans le bill 62 est-ce que le
ministre serait prêt tout de suite à annoncer à la
population la bonne nouvelle qu'il renonce à son droit de choisir
lui-même les onze ou les quinze membres du Conseil scolaire de
l'île de Montréal? Ce serait un geste fort apprécié
et une preuve de sa bonne foi, lorsqu'il nous dit qu'il a trop de pouvoirs.
M. CARDINAL: Ce n'est pas du tout du même genre. Ce n'est pas le
pouvoir du ministre
je voudrais replacer le député d'Ahuntsic sur la
voie c'est le pouvoir...
M. LEFEBVRE: C'est le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. CARDINAL: ... du lieutenant-gouverneur en conseil. C'est tout
à fait différent du ministre.
M. LEFEBVRE: Ah, franchement, la leçon n'est pas forte.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y a une certaine analogie...
M. LEFEBVRE: Le ministre ne répond pas à ma question?
Non?
M. CARDINAL: Bien, c'est-à-dire que la question ne peut pas se
poser dans ces termes-là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent
M. PEARSON: J'avais juste une courte question pour demander une
précision à l'Association des principaux de Montréal. A la
page 11, vous dites: "L'Association des principaux de Montréal pense que
toute personne incapable de comprendre ou de parler correctement le
français devrait se voir refuser l'accès à la fonction de
commissaire." Etant donné qu'il y aura environ onze commissions
scolaires vous suggérez un chiffre différent, je pense
il est permis de penser que, peut-être, il y aurait quelques
commissions scolaires à majorité anglophone. Est-ce que, par
cette recommandation, vous auriez la même exigence pour ces commissions,
à savoir que ces commissaires-là devraient parler correctement le
français?
M. LYONNAIS: Oui, nos exigences demeureraient les mêmes, parce que
nous avons fait cette recommandation, suite, si vous voulez, à
l'enquête de la commission Laurendeau-Dunton, composée de dix
membres, dont six membres anglophones; ils ont recommandé que dans la
province de Québec, même à Montréal, la langue de
travail soit le français. Alors, même si, dans une commission
scolaire en particulier, la majorité était anglophone, il restera
quand même que, à cause des relations, à un moment
donné, d'une commission à l'autre et de l'ensemble de l'île
comme telle, la langue française sera très importante comme
véhicule de communication. Nous sommes tout de même à
Montréal et dans la province de Québec.
M. PEARSON: Bon, d'accord.
M. CARDINAL: Si vous me permettez, là-dessus, on peut aller
jusque là ou ne pas aller jusque là. Il y a une constatation que
je dois faire présentement et elle ne s'applique pas uniquement à
Montréal. Je reçois parfois au ministère je ne veux
pas employer un mot fort, parce qu'il ne s'agit pas de soulever des passions
disons, des réflexions de contribuables qui m'écrivent
que, ou bien les commissaires du territoire où ils sont ne parlent pas
le français, alors qu'eux ne parlent que le français, ou bien ils
ne parlent pas l'anglais alors qu'eux ne parlent que l'anglais. Le
problème me paraît beaucoup plus important dans la région
ouest de l'île de Montréal. Il y a, entre autres, une commission
scolaire qui n'est pas sur l'île de Montréal, mais qui est sur la
rive nord, de l'autre côté de l'île, maintenant
appelée Laval, où tout le personnel est uniquement de langue
anglaise, alors qu'une partie de la population est de langue française.
Est-ce qu'à l'occasion du projet de loi 62 une telle recommandation doit
être incluse dans la loi? C'est une question qui n'est pas facile
à résoudre d'un coup. J'avais souligné ce point. Le
député de Saint-Laurent, lui, l'a souligné verbalement et
à voix haute et intelligible. Je le retiens parce que, dans le fond, il
se rattache non seulement au projet de loi no 62, mais au projet de loi no 63
aussi.
M. LYONNAIS: M. le ministre, nous n'avons pas eu tort de faire cette
recommandation, suite à la recommandation de la commission
Lauren-deau-Dunton, qui, tout de même, était en majorité
anglophone et qui a recommandé cette chose-là.
M. CARDINAL: C'est exact, ceci a été cité lors du
débat en deuxième lecture du projet de loi no 63.
M. LE PRESIDENT: La deuxième partie, en ce qui concerne les
commissions...
M. LYONNAIS: Nous aurions quelques mots à ajouter, si vous
voulez, avant d'attaquer la deuxième partie.
M. HETU: J'aimerais peut-être enlever une confusion à
propos des équipements. Le projet de loi dit, à l'article 587,
que chaque commission scolaire a pour rôle de conseiller le conseil sur
l'implantation des équipements scolaires dans le territoire.
Ce que nous demandons, nous, c'est peut-être un petit peu plus
qu'un rôle de conseil. Nous demandons que le conseil de l'île voie,
en collaboration avec les commissions scolaires, à l'implantation des
équipements. Nous n'avons pas demandé que les équipements
appartiennent aux commissions scolaires, mais simplement qu'il y ait un petit
peu plus qu'un conseil, une collaboration.
M. CARDINAL: D'accord.
M. LYONNAIS: Comités d'écoles.
M. HETU: L'association des principaux...
M. LE PRESIDENT (M. Crôteau): Pour les fins du journal des
Débats, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?
M. HETU: Yvan Hétu, principal à l'école secondaire
Le Plateau.
L'Association des principaux de Montréal se réjouit du
rôle que le projet de loi attribue aux parents dans l'éducation et
souhaite que les parents collaborent plus spontanément et plus
intensément avec la direction des écoles des différentes
municipalités scolaires.
L'Association des principaux de Montréal regrette cependant que
le législateur n'ait pas jugé bon de faire porter la section III
du projet de loi sur l'école plutôt que sur les comités
d'écoles. La structure actuelle du projet de loi pourrait en effet
laisser croire que l'organisation scolaire de l'île de Montréal
comportera trois paliers: conseil de l'île, commissions scolaires et
comités d'écoles, quand, sans aucun doute, la structure
réelle comportera: conseil de l'île, commissions scolaires et
écoles.
En plus d'écarter cette ambiguïté, la section sur
l'école aurait permis de mieux définir le rôle et les
fonctions du directeur d'école par rapport au comité
d'école, aux commissions scolaires et au conseil de l'île. On
trouvera à la fin de ce mémoire le plan de ce que pourrait
devenir la section III du projet de loi si on tenait compte des voeux de
l'Association des principaux de Montréal.
Même si le législateur n'a pas jugé opportun de
redéfinir l'école et le rôle de la direction locale par
rapport aux nouvelles structures, l'Association des principaux se permet de
rappeler que: 1) Le directeur de l'école et ses adjoints sont les
responsables immédiats de l'administration de l'école, de
l'enseignement qui s'y donne et des services qui y sont offerts. 2) La
décentralisation souhaitée au niveau des commissions scolaires
est également souhaitée au niveau des écoles. Au lieu de
multiplier les services de suppléance coûteux au niveau de la
commission scolaire, il serait préférable de confier une
responsabilité plus grande au principal en ce qui concerne le choix,
l'orientation et la formation de son personnel, l'organisation
pédagogique et disciplinaire, le réaménagement de
l'école et les relations qu'il doit entretenir avec les
différentes communautés de son milieu. H serait également
normal qu'il dispose lui-même d'un budget annuel nécessaire
à l'entretien courant de l'école et à l'achat de certain
matériel de consommation. C'est d'ailleurs dans ce sens que la
Commission des écoles catholiques de Montréal travaille depuis
quelques années. Il serait d'ailleurs normal que le statut du principal
et sa fonction soient définis dans le cadre de ce projet de loi. Pour
appuyer cette recommandation, l'Association des principaux de Montréal
propose, en annexe à ce mémoire, quelques textes qui montrent que
depuis longtemps déjà les principaux veulent voir leur
tâche reconnue et définie.
En ce qui concerne la section III de l'actuel projet de loi, les
recommandations de l'Association des principaux sont les suivantes: 1)
Définition de l'école, article 622.
La définition de l'école que propose l'article 622
soulève de nombreuses craintes. Il pourrait en effet arriver, si l'on
conserve cette définition, que plusieurs écoles, et donc
plusieurs directions différentes, partagent le même
édifice. L'expérience ayant prouvé la
précarité d'une telle formule, l'Association des principaux de
Montréal suggère que soit adoptée une définition de
l'école qui assure à celle-ci une unité de lieu et de
direction.
La majorité des principaux de Montréal souhaite par
ailleurs que, pour faciliter le bon fonctionnement de l'école, on
assure, dans la mesure du possible, l'unité de langue et de religion. On
ne refuse pas néanmoins l'existence d'écoles
multiconfessionnelles ou bilingues lorsque le regroupement par langue et
religion s'avère difficile ou impossible.
Vous avez par la suite la définition que nous proposons et est
exactement ce que je viens de dire. 2) Fonctions du comité
d'école, article 623.
L'Association des principaux de Montréal estime que c'est
à la commission scolaire, par l'intermédiaire des personnes
compétentes, directeurs d'études, directeurs d'écoles,
etc., qu'il appartient de veiller à la qualité de l'enseignement
donné à l'école. L'enseignement étant un acte
professionnel, on ne peut veiller à sa qualité que si on
possède la compétence professionnelle adéquate.
Il faut donc, en accord avec ce qui vient d'être dit, modifier
l'alinéa b) de l'article 623 et y parler plutôt de collaboration
que de vigilance.
Par ailleurs, si l'on veut que soit respecté le rôle du
principal, qui est celui de premier responsable de la vie scolaire, il convient
que le comité d'école s'adresse à lui et non à la
commission scolaire pour faire toute recommandation pertinente relativement
à la vie scolaire. Il faut donc corriger en ce sens l'alinéa c)
tout en ajoutant que, dans les cas litigieux et
lorsque la compétence du principal sera mise en cause, le
comité pourra en appeler à la commission scolaire.
Enfin, comme la collaboration des parents est requise non seulement pour
l'amélioration des services scolaires, mais, d'abord et avant tout, dans
la plupart des cas, pour leur bon fonctionnement, il faut nuancer en ce sens
l'alinéa a) de l'article 623.
Le présent mémoire suggère donc que l'article 623
se lise comme suit: Tout comité d'école est un organisme
consultatif auprès de la direction de l'école. Il a pour
fonctions: a) d'encourager les parents à collaborer au bon
fonctionnement et à l'amélioration des services scolaires; b) de
collaborer avec l'école en vue d'assurer aux enfants tant un
enseignement qu'une éducation de la première qualité; c)
de faire à la direction de l'école toute recommandation qu'il
juge pertinente relativement à la qualité de l'enseignement et
à la vie scolaire.
Un tel comité a aussi pour fonction de participer,
conformément à la présente partie, à
l'élection des membres de la commission scolaire. 3) Election du
comité d'école et des membres du collège
électoral.
Le projet de loi no 62 institue d'office le directeur de l'école
président d'élection. L'Association des principaux de
Montréal reconnaît que le principal est sans doute l'homme le
mieux placé pour dresser la liste des parents et même,
peut-être, pour présider l'élection du comité
d'école et des membres du collège électoral. Il reste,
néanmoins, que la plupart des directeurs d'écoles de
Montréal s'opposent à ce qu'on leur impose d'office une telle
fonction.
Leur tâche est déjà lourde et il leur serait souvent
difficile de trouver le temps et l'énergie nécessaires pour
assumer la fonction de président d'élection. On pourrait
également, pour certains cas, les accuser d'avoir favorisé tel ou
tel candidat ou de s'être laissés influencer par tel ou tel
groupe. Pour éviter les conséquences fâcheuses que cela
pourrait avoir, conséquences qui nuiraient au bon fonctionnement de
l'école et à la bonne entente entre parents et directeurs
d'écoles, l'Association des principaux de Montréal se croit tenue
de refuser catégoriquement que le directeur de l'école soit
d'office président d'élection. Elle demande que les articles 627,
628, 629, 632, 634, 635, 638, 639, 640 et 641 soient amendés en ce
sens.
En ce qui concerne les élections du comité d'école,
l'Association des principaux de Montréal estime également que la
période d'élection pourrait se terminer à six heures le
soir, plutôt qu'à huit heures. Elle suggère que l'article
635 soit corrigé en ce sens. Elle estime qu'une allocation devrait
être prévue pour rémunérer le président
d'élection ou toute autre personne prêtant ses services aux fins
de l'élection du comité d'école et du collège
électoral.
L'Association des principaux de Montréal suggère donc que
l'article 656 soit complété de la façon suivante... Ceci
résume ce qui vient d'être dit.
M. LE PRESIDENT: Le ministre de l'Education aurait-il quelque chose
à ajouter?
M. CARDINAL: Oui, si vous le permettez, je vais faire comme pour la
première partie, tantôt. Votre page 15 se rattache à la
définition de l'école. Je ne puis pas en parler sans mentionner
ce qui est écrit à la page 17. Je redis donc une chose, ici:
L'article 122, à mon humble avis, est à refaire.
Pour ma part, je n'aime pas cette définition qu'on a faite de
l'école. Il faut, cependant, noter que l'article 122 est une
définition technique, uniquement pour la section trois dans laquelle cet
article se trouve, et non pas une définition pour toute la loi, sans
quoi elle aurait été au début de la loi. C'est une
question de technique juridique. L'école doit être conçue
et la loi devrait la définir en conséquence comme
une communauté d'étudiants sous une direction pédagogique
donnée. C'est dans ce sens-là que je l'ai toujours vu et dit, je
pense, même devant cette commission, plutôt que dans le sens d'un
bâtiment ou d'une partie de bâtiment ou de parties de plusieurs
bâtiments.
Sur ce point, nous sommes d'accord, vos suggestions sont heureuses et
s'ajoutent à celles que nous avons et que nous aurons.
Quant à la définition du principal, vous me permettrez
d'être aussi franc que dans l'autre sens; je ne pense que ce soit
à l'occasion du projet de loi no 62 qu'on devrait le définir,
puisqu'il dépasse le cadre de la simple restructuration et,
particulièrement, de l'île de Montréal. Je vais dire une
chose que je n'ai peut-être pas mentionnée en public encore, que
j'ai mentionnée, cependant, devant les directeurs de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec: Nous préparons au ministère non pas pour
demain ou la semaine prochaine, parce que c'est beaucoup trop complexe
une loi-cadre des commissions scolaires, qui serait, dans le fond, une refonte
profonde de la Loi de l'instruction publique et qui touchera ces
problèmes que vous avez mentionnés dans la première partie
de votre mémoire, comme la maternelle, l'éducation des adultes,
la définition du principal ou d'une commission scolaire, le rôle
général des commissions scolaires, etc. Alors, je vous dis ceci
pour le moment.
Quant à la participation des parents, il est exact qu'elle est
à définir. M. Hétu était l'autre soir à
cette réunion de l'Alliance, il a pu y voir un échange assez vif.
Les enseignants acceptaient très difficilement cette vigilance ou cette
collaboration des parents, au niveau de l'école. Il y en a même un
d'entre eux qui semblait vouloir l'exclure totalement, et, à ce
moment-là; je me suis permis une boutade en disant : Les parents, il va
falloir apprendre à les faire
participer ou les abolir! Et M. Rocher, qui était là, dit
que c'était plus facile d'atteindre un des objectifs que l'autre! Il va
falloir trouver des modalités de participation. Vous en suggérez
une très pécise, ceci peut être étudié. Je ne
peux pas avoir de réaction immédiate. Il faut qu'à la fois
les parents aient ce rôle du choix de la langue, de la foi, ce rôle
d'électeurs par le collège électoral et un rôle, au
niveau de l'école, en collaboration avec ceux qui sont de
l'école, enseignants et dirigeants.
Nous allons entendre, évidemment, des sons de cloche
différents, selon que nous allons entendre les enseignants, les
principaux, les commissaires ou les parents, peut-être, à ce
sujet. Ceci est vraiment à étudier, parce que c'est la
première fois que les parents ont une participation légale.
Avant, elle était purement volontaire et pas toujours acceptée,
ni des parents, ni des enseignants.
Quant aux modalités d'élection six heures ou huit
heures, ou toute autre modalité disons qu'ici une chose
mérite d'être soulignée: Nous faisons ce travail au
ministère de l'Education, en collaboration avec le ministère des
Affaires municipales. S'il y a lieu qu'il y ait une réorganisation
municipale de l'île de Montréal, il serait possible de concevoir
c'est un projet, ce n'est pas une politique que j'annonce que les
élections scolaires et municipales aient lieu le même jour, aux
mêmes heures, dans les mêmes bureaux de votation, suivant les
mêmes modalités. Simplement à une élection, nous
avons calculé, au ministère, que nous économiserions $1
million. Un million de dollars qui pourrait être utilisé pour
l'éducation ou pour des fins municipales, moitié-moitié,
si les modalités étaient coordonnées. C'est dans ce sens
que je prends les suggestions en disant que les deux ministères se
coordonneront.
Et c'est tout ce que j'ai à dire sur cette deuxième
partie. Je laisse la parole à mon ami d'en face.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je serai très bref, parce
qu'il y a des points sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir à
l'occasion de la présentation d'autres mémoires: s'il nous
fallait, à chaque fois, souligner tous les points, ça
éterniserait les débats.
Je connais bien les principaux de Montréal et j'y compte
plusieurs amis. Je connais la qualité générale de leurs
services, mais il me semble et je le dis en toute amitié
que le mémoire, sur ce point, est un peu pointilleux. Il me semble que
l'article 623 n'a rien d'injurieux et si l'on veut que les parents... Cela peut
être sur le plan de la démocratie vécue, c'est un article
qui a quand même une certaine importance. Quant à moi, je
voudrais, sans m'opposer aux recommandations que vous faites, attirer votre
attention sur le fait que, si vous donnez trop aux parents l'impression qu'ils
ne connaissent rien ou, enfin, que leur rôle est strictement un
rôle de "chiâlage", vous aurez de la difficulté à les
intéresser.
Si, au contraire, vous les invitez, comme le fait le texte de l'article
623... A mon avis, c'est loin d'être le plus mauvais article; il y en a
plusieurs autres qui sont pires que celui-là, du moins dans mon esprit.
"Veiller à la qualité de l'enseignement, je comprends très
bien que, dans l'oreille d'un principal, ça puisse sonner un peu dur.
Mais, au fond, qu'est-ce que ça change? En tout cas, il y aurait
peut-être moyen de trouver un compromis entre vos deux textes. J'attire
votre attention sur le fait que votre texte est peut-être un peu
restrictif et pas tellement encourageant pour les parents.
Maintenant, il y a des cas d'exception, que vous connaissez comme moi,
où les parents doivent avoir le droit d'aller se plaindre à la
commission scolaire. Je serais d'accord avec votre article c) si le principal
était élu par les parents, autrement dit, s'ils pouvaient s'en
débarrasser s'il n'est pas bon. Après tout, les principaux ne
sont pas meilleurs que les députés. Si nous, les
députés, nous ne sommes pas bons, les électeurs se
débarrassent de nous. Il en va de même pour les gouvernements. Je
ne vois pas pourquoi les principaux seraient au-dessus de tout le monde. Ce que
dit l'article 623, qui donne aux parents le droit d'aller se plaindre à
la commission scolaire du principal de leur école, ça
m'apparaît un recours raisonnable, honnêtement. Même si
j'admets que, dans la plupart des cas, ce ne sera pas nécessaire, il
faut prévoir des cas d'exception. Il y a des brebis noires partout. Il y
en a chez vous. Il y en a ici.
M. HETU: Remarquez qu'on n'enlève pas ce droit de recours aux
parents. On dit que, de plus en plus, les principaux se sont habitués
à diriger en coopération avec les parents. Il y a des
comités consultatifs d'école de plus en plus et on est
habitué de travailler avec eux. Pour ce qui est de "veiller à la
qualité de l'enseignement", eh bien, changeons les termes; qu'ils
viennent collaborer, qu'ils apportent leurs remarques.
M. LEFEBVRE: Ce serait peut-être un moyen terme, mais il me semble
que votre texte est trop restrictif.
M. HETU: Du tout, on les appelle à la collaboration. On les
invite même à collaborer avec nous.
M. CARDINAL: Il y a un point sur lequel je serais entièrement
d'accord avec le député d'Ahuntsic, c'est que les parents ont le
droit de se plaindre. Ils n'ont pas de canal pour se plaindre, actuellement, si
bien qu'ils se plaignent de façon diverse et souvent au mauvais endroit.
Ils sont frustrés à cause de ça. Il faut qu'ils aient une
façon institutionnelle de se plaindre. Deuxièmement, un point qui
a été
souligné par d'autres et que je me plais à rappeler ici,
c'est que l'article 623 va devenir de l'éducation pour les parents. Cela
est important. Oublions le point de vue juridique. Les parents, participant
à l'enseignement de leurs enfants, vont finir par comprendre cet
enseignement et par s'éduquer eux-mêmes. Actuellement, à
cause de la réforme et de la rapidité des
événements, ils sont au moins une génération en
retard. Les parents coopérant avec l'école, dans le sens le plus
large sortons des textes c'est déjà de
l'éducation des adultes sous une forme qu'on n'a jamais connue et qui
est certainement meilleure que le recyclage, etc.
C'est drôle, au ministère, je reçois beaucoup de
lettres le nombre, je ne le sais pas. Beaucoup, ce n'est pas des
centaines par semaine; disons quelques centaines par année,
peut-être deux cents de parents qui se plaignent d'un enseignant
ou d'un principal. Ils ont peur d'aller voir le principal pour se plaindre d'un
enseignant ou d'aller voir un enseignant pour se plaindre du principal. J'en
appelle à un ancien membre de la CECM. Je me rappelle avoir
été 16 ans dans l'enseignement à un autre endroit, mais
où l'on avait les mêmes problèmes. Qu'on parle d'un
principal, d'un doyen, d'un enseignant ou d'un professeur, c'est pareil.
Les parents ont le droit de se plaindre. Pour éviter qu'ils se
plaignent, faisons-les participer, de sorte qu'ils puissent, à la fois,
s'éduquer et faire valoir leurs griefs. M. Lefebvre a parfaitement
raison. Nous ne sommes pas sans défaut, nous; vous autres, non plus, et
les enseignants, non plus. Les relations entre l'Etat et les enseignants, d'une
part, et les parents et les enseignants, d'autre part, je le dis clairement,
ont été fort gâtées par les périodes de
négociations. Par conséquent, il y a là une
échappatoire institutionnelle qui va permettre de refaire ces images
réciproques, de part et d'autre.
M. HETU: Je voudrais faire remarquer au ministre de l'Education et au
député d'Ahuntsic qu'à l'article 623 nous demandons qu'il
soit écrit dans le texte de loi que ce comité est consultatif.
Nous insistons pour que ce comité soit consultatif, parce que, dans nos
écoles, nous avons des comités de professeurs, des conseils
d'écoles qui sont aussi consultatifs. S'il fallait donner aux parents
l'impression qu'ils ont un comité décisif, exécutoire, je
crois qu'à ce moment-là les professeurs demanderaient, et avec
raison, d'avoir aussi un comité de cogestion ou de décision au
sein de l'école.
M. CARDINAL: M. Hétu, me permettez-vous d'attirer votre attention
sur deux de vos recommandations?
Dans une première partie du mémoire, vous demandez que les
enseignants, comme tels, viennent élire des commissaires qui pourront
être des gens dont les qualités ou le cens
d'éligibilité vont varier selon chaque mémoire qui va nous
être présenté. Cela a déjà commencé.
Dans une deuxième partie, vous dites que si l'on donne aux parents
quelque chose qui semble leur laisser un pouvoir de décision, les
enseignants vont le demander. Il va falloir coordonner ça à deux
niveaux: au niveau du comité d'école et au niveau de ce qu'on
appelle encore, malheureusement, la commission scolaire, enfin, la division,
les onze divisions. Ce n'est pas un reproche que je fais là, c'est une
coordination des divers rôles. Les parents auront un rôle à
deux niveaux. Les enseignants pourraient avoir un rôle à deux
niveaux. Nous en avons parlé tantôt.
UNE VOIX: Oui.
M. CARDINAL: Mais il va falloir que tout ceci soit bien
équilibré. C'est une expérience de démocratie que
nous allons faire. Mais que le mot "consultatif" y soit, cela aussi me
paraît un peu pointilleux. Chaque fois que l'Etat a créé un
comité ou une commission consultative, c'est épouvantable comme
cela prend peu de temps pour que, si les consultations de ces commissions et
comités ne sont pas acceptées, ce soit tout comme si ces
organisations, malgré les termes employés dans les lois, avaient
un pouvoir de décision. Entre la réalité de ce qui se
passera pour un texte de loi et ce qu'il y a dans le texte de loi, il y a tout
un monde.
M. HETU: Ecoutez, M. le Ministre, si vous ne l'indiquez pas dans le
texte de loi que ce comité devrait être consultatif! Si on lit
l'article 623, on peut penser que ce comité est au-dessus du principal
et que c'est lui qui a un rôle à jouer, devant "veiller à
la qualité de l'enseignement". C'est dans ce sens que les principaux ont
voulu rectifier le texte de loi.
M. LEFEBVRE: Je pense qu'on a convenu avec vous, M. Hétu, enfin
pour notre part et j'ai l'impression que le ministre est aussi d'accord
que ce sous-paragraphe "de veiller à la qualité de
l'enseignement" avait besoin d'être précisé. D'accord,
parce que c'est équivoque. Mais le reste, franchement, il me semble que
cela ne prête pas à équivoque. Pourquoi dire aux gens: Vous
savez, vous n'avez que le droit de... Pourquoi insister quand, en fait, ils
n'en ont pas, de pouvoirs? Pourquoi leur dire qu'ils n'en ont pas? Au point de
vue psychologique, je trouve que vous vous placez dans une position difficile.
Il ne faut pas oublier que les lois ont une portée éducative
importante, et selon que la loi semble ouvrirune porte ou la fermer, les gens
vont entrer ou pas. Je pense, encore une fois, que nous nous entendons.
Peut-être qu'il vous est arrivé ce qui arrive souvent aux
politiciens, que votre parole ait dépassé votre pensée.
Peut-être que votre texte est, allé un peu plus loin, au fond, que
ce que vous semblez souhaiter en réalité.
M. HETU: Non, disons que nous avons réagi, parce qu'en lisant le
projet de loi, il n'est question du principal qu'à deux reprises:
premièrement, comme président d'élections et,
deuxièmement, pour lui dire qu'il n'a pas droit de vote. Devant ceci, je
crois que les principaux ont bien voulu...
M. CARDINAL: Est-ce qu'on peut prendre un argument ad hominem et vous
dire: Si on dit aux parents d'avance: Vous avez le droit de penser, mais vous
n'avez pas le droit de décider, ils auront la même réaction
que vous? Nous comprenons très bien.
M. LEFEBVRE: Je pense que nous nous entendons.
M. CARDINAL: Très bien, d'accord.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, la troisième partie: le Conseil
scolaire de l'île de Montréal.
M. RICARD: Jean-Paul Ricard, vice-président de l'Association des
principaux de Montréal.
L'Association des principaux de Montréal estime que le Conseil
scolaire de l'île de Montréal, tel qu'il est
préconisé par la section IV du projet de loi numéro 62,
est un organisme indispensable qui pourra rendre les plus grands services
à l'éducation sur l'île de Montréal. Pour atteindre
ce but, ce conseil devra posséder les pouvoirs et l'indépendance
nécessaires à son efficacité, ne pas se substituer aux
commissions scolaires et être composé de membres
représentant la population. A cet effet, l'Association des principaux de
Montréal croit que les fonctions de cet organisme doivent être
beaucoup mieux définies qu'elles ne le sont dans l'actuel article 659,
que le conseil doit jouir d'une plus grande indépendance
vis-à-vis du ministère de l'Education et, enfin, que la
majorité des membres de ce conseil doivent être des
représentants élus des commissions scolaires. Fonctions du
conseil.
La formulation de l'article 659 est inadéquate car, de par sa
concision et l'accumulation de termes au sens mal défini, cet article
pourrait être interprété de telle sorte que le conseil
deviendrait une super-commission scolaire. Avant de proposer une formulation
plus adéquate, ce mémoire rappelle que l'Association des
principaux de Montréal considère le conseil comme un organisme de
financement des commissions scolaires, un organisme de planification à
long terme et à grande échelle et, enfin, comme un organisme
chargé de mettre sur pied et de faire fonctionner des
services-ressources auxquels les commissions scolaires puissent recourir au
plan administratif ou pédagogique. Cette façon de concevoir le
rôle du conseil s'exprime dans la formulation que ce mémoire
propose de l'article 659: "Le Conseil a pour fonctions principales: a) de
prélever les taxes requises pour la réalisation des objets des
commissions scolaires de son territoire; b) d'établir, en collaboration
avec les commissions scolaires régionales, le plan de
développement du système scolaire de l'île de
Montréal; c) de définir, en collaboration avec les commissions
scolaires régionales, les normes fondamentales des services et des
dépenses pour le territoire et les faire accepter par le
ministère de l'Education; d) de négocier, après
consultation des commissions scolaires régionales, l'échelle des
traitements et de salaires et les conditions de travail pour tout le personnel
enseignant et non-enseignant de son territoire ou participer aux
négociations provinciales, le cas échéant, avec le
ministère de l'Education; e) d'étudier les budgets que les
commissions scolaires régionales doivent lui soumettre, présenter
l'ensemble de ces budgets ainsi que son propre budget au ministère de
l'Education, et distribuer aux commissions scolaires les sommes prévues
par les budgets ainsi approuvés; f) mettre sur pied et faire
fonctionner, au bénéfice des commissions scolaires du territoire,
les services qui peuvent être organisés à meilleur compte
ou plus efficacement sur une base commune: archives, bibliothèques,
informatique, statistique et prévisions, service juridique, services de
recherche en administration scolaire, en pédagogie, en pastorale, et en
toutes disciplines faisant partie des programmes d'étude; g) aider les
commissions scolaires et, au besoin, leur suppléer, pour certains types
d'enseignement très spécialisés et destinés
à un petit nombre de personnes; h) voir, en collaboration avec les
commissions scolaires, à l'implantation des équipements scolaires
dans l'île de Montréal; i) acquérir, sur recommandation des
commissions scolaires, les immeubles requis et en conserver la
propriété".
On aura remarqué que cette formulation s'efforce de
préciser les termes trop vagues contenus dans le projet, tels que
"financement", "planification", "coordination". A ces fonctions que le
présent mémoire reconnaît au conseil, mais dans un sens
précis, s'ajoutent certaines fonctions de suppléance
limitées à des cas précis, notamment la recherche et
certains services coûteux en équipement et en person-
nel. Est cependant retirée du conseil la responsabilité
exclusive de l'implantation des équipements ainsi que de l'affectation
des immeubles. L'Association des principaux de Montréal croit, en effet,
conformément à ce qui a été dit à propos de
l'article 587, que ces fonctions reviennent, au moins en partie, aux
commissions scolaires qui, plus près de la population, en connaissent
mieux les besoins.
Composition du Conseil:
D'accord avec le souci de représentation démocratique qui
anime tout ce mémoire, l'Association des principaux de Montréal
estime que les articles 662, 666 et 667 devraient se lire comme suit: 662) "Le
Conseil est composé de quinze membres dont quatre sont nommés par
le lieutenant-gouverneur en conseil et dont onze sont choisis parmi et
désignés par les commissaires d'écoles des commissions
scolaires de l'île de Montréal à raison d'un par
commission". Article 666) "Toute vacance est comblée, pour la
durée non écoulée du mandat de la personne à
remplacer, selon la même façon de procéder que celle qui a
servi à la désignation de la personne à remplacer. Si la
vacance doit être comblée par un élu d'une commission
scolaire et que celle-ci néglige de désigner un membre dans les
trente jours, la vacance est comblée par le lieutenant-gouverneur en
conseil". Article 667) "Les membres du conseil de l'île élisent
parmi eux le président et le vice-président du conseil".
Pouvoirs et devoirs du Conseil (article 670):
Sans entrer dans les détails des pouvoirs et devoirs du conseil,
l'Association des principaux de Montréal n'hésite pas à
affirmer que les pouvoirs dévolus au conseil, du point de vue financier,
sont beaucoup trop limités.
Ces restrictions excessives aux pouvoirs du conseil exigent des recours
constants au ministre de l'Education ou des Affaires municipales, lesquels
recours auront pour effet de paralyser l'administration. L'Association des
principaux de Montréal suggère donc que les articles 670 et
suivants soient corrigés dans un sens qui permette plus de
liberté au conseil et exige moins de recours au gouvernement.
M. LE PRESIDENT: M. le ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Messieurs, encore une fois mes félicitations. Mes
remarques seront brèves. Vous aimeriez que le conseil
métropolitain devienne une super-commission scolaire. Evidemment, les
choses pourraient être prévues autrement et je pourrais craindre
qu'il devienne un autre ministère de l'Education. C'est d'ailleurs
là une question de point de vue et on pourrait discuter de cela plus
longuement. Je sais que le député d'Ahuntsic aura beaucoup de
choses à dire sur ce point-là, en temps et lieu. Mais il faudrait
se poser la question: Qu'est-ce qu'une commission scolaire dans le projet de
loi 62? Je l'ai dit, ce terme n'est employé que parce qu'il existe dans
la Loi de l'instruction publique. Il peut avoir une nouvelle conception de
cette division territoriale qui devait jouer dans l'esprit du
législateur, surtout au niveau pédagogique.
M. LYONNAIS: Vous permettez, M. le ministre, dans notre esprit, c'est
justement d'éviter soit une trop grande décentralisation, et
également une trop grande centralisation. Je pense qu'il doit y avoir
moyen de trouver un juste milieu.
M. CARDINAL: D'ailleurs, j'ai dit tantôt que cet article serait
modifié quant aux pouvoirs et aux interventions du ministre, et
malgré l'invitation pressante du député d'Ahuntsic,
tantôt, je n'ai pas encore de mandat au nom du gouvernement, pour
promettre un amendement quant à la nomination ou l'élection des
membres du conseil métropolitain.
Après réflexion et après avoir écouté
tous les gens, nous nous prononcerons.
M. LEFEBVRE: M. le Président, pour aider le ministre à se
prononcer, justement, d'abord je voudrais, pour ma part, féliciter
l'Association des principaux. Je crois que l'ensemble des suggestions qui sont
faites, relativement à l'article 659, mérite certainement une
étude approfondie. Je crois que ce ne serait pas sérieux, de la
part de qui que ce soit, de dire qu'on approuve ou qu'on désapprouve en
bloc une chose comme celle-là. Mais, je trouve que vous avez fait un
effort considérable. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que cet
article 659 est très ambigu; c'est l'un des articles qui sont
comme je l'ai dit tout à l'heure, peut-être à l'exemple du
parrain du bill ambigus et sinueux.
J'aurais, M. le Président, à ce stade-ci et pour des
raisons que vous allez comprendre facilement, une proposition à faire,
et c'est là que je rejoindrai l'invitation que m'a presque faite le
ministre de l'Education, je ferai une suggestion appuyé par mon
collègue de Marguerite-Bourgeoys, à moins que le ministre ne
veuille l'appuyer lui-même, ce à quoi nous n'aurions aucune
objection.
J'expliquerai d'abord l'intention de ma proposition et ensuite j'en
donnerai lecture.
Nous avons déjà entendu un certain nombre de
mémoires. Nous allons en entendre peut-être, au total, 70. Chacun
de ces mémoires se prononce sur un certain nombre de questions
fondamentales dans le bill et, églament, sur des questions qui sont
d'ordre secondaire. Mais, parmi ces questions fondamentales, il n'y a aucun
doute, il y a le mode de constitution du
conseil scolaire, le mode de constitution des commissions scolaires
ce sont là les deux points centraux: peut-être de
même que les fonctions de chacun de ces organismes.
Or, il nous est apparu, à nous qui siégeons de ce
côté-ci de la Chambre, à la suite d'un caucus que nous
avons tenu hier, qu'à ce stade-ci il serait dans l'intérêt
de l'Assemblée nationale et dans l'intérêt de cette
commission permanente de l'Education de faire un sondage d'opinions
auprès de tous les gens qui ont soumis des mémoires. Il ne sera
jamais possible d'additionner ces mémoires les uns avec les autres,
parce que chacun part de son propre point de vue et construit un édifice
à partir de ses propres hypothèses. Si l'on veut tenter de voir
un peu plus clair, je crois qu'il serait utile, à ce stade-ci, que la
commission permanente de l'Education fasse elle-même un sondage
auprès des groupes qui ont déjà soumis des
mémoires, afin de connaître les opinions précises de ces
groupes sur un certain nombre de questions.
Voulez-vous en distribuer aux membres de la presse et aux membres de la
commission s'il vous plaît? Aux membres de l'autre côté
aussi, dans la mesure où il en reste.
Je lis mon questionnaire, M. le président. J'en fais encore une
fois une proposition, secondé par le député de
Marguerite-Bourgeoys, à moins que le ministre veuille disputer cet
honneur au député de Marguerite-Bourgeoys, dont je connais
l'humilité et le renoncement ; je suis sûr qu'elle cédera
galamment son privilège au ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Je m'excuse d'interrompre le député
d'Ahuntsic...
M. LEFEBVRE: Oui...
M. CARDINAL: ... mais, cependant, je n'enlèverai certainement ni
cet honneur ni ce plaisir au député de Marguerite-Bourgeoys, qui
est la seule femme de l'Assemblée nationale.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Merci.
M. LEFEBVRE: Je propose donc, secondé par le député
de Marguerite-Bourgeoys, que la commission de l'Education, réunie
aujourd'hui en séance régulière, décide de faire
parvenir à tous les organismes qui ont soumis ou qui se sont inscrits
comme devant soumettre un mémoire à la commission permanente de
l'Education le questionnaire suivant:
Premièrement, seriez-vous favorable à l'élection de
la majorité des membres du conseil scolaire par les membres des
commissions scolaires, par les membres des collèges électoraux ou
au suffrage universel?
Deuxièmement, croyez-vous que les membres du conseil scolaire
devraient être choisis, a) obligatoirement parmi les membres des
commissions scolaires? b) obligatoirement en dehors des membres des commissions
scolaires?
Le ministre se rappellera que, lors d'un débat à la radio,
nous avions tous les deux évoqué ce problème du double
mandat, qui est prévu par le bill actuel, où vous retrouvez les
mêmes personnes à la fois administrateurs des commissions
scolaires et administrateurs au niveau du conseil, ce qui risque de
créer des situations assez difficiles, en ce sens que cela deviendrait
pratiquement des emplois à temps plein. Comme il n'y a pas, à ma
connaissance, de rémunération prévue de façon
précise pour ce genre de fonction, il y aurait danger, peut-être,
que l'on se lance dans la difficulté de l'enrichissement sans cause.
Troisièmement, croyez-vous que la loi devrait être
amendée pour assurer une représentation minimale, au sein des
commissions scolaires, aux parents inscrits sur chacune des quatre listes
suivantes: catholiques français, catholiques anglais, français,
anglais?
Quatrièmement, croyez-vous que le nombre des commissions
scolaires devrait être réduit à neuf, à sept ou
augmenté à treize?
J'admets tout de suite remarquez bien que j'insiste
là-dessus qu'un tel sondage ne peut pas avoir un caractère
tout à fait scientifique ou définitif. Il aiderait, en tout cas,
à déterminer les points où il y a un consensus parmi les
groupes et ceux où il y a des divergences de vues plus difficiles
à concilier. Ceci m'apparaîtrait dans l'intérêt
public.
Cinquièmement, croyez-vous que la loi devrait prévoir,
à l'intérieur de chacune des commissions scolaires, les postes
administratifs suivants: un directeur de l'enseignement catholique
français, un directeur de l'enseignement catholique anglais, un
directeur de l'enseignement français et un directeur de l'enseignement
anglais?
Comme on le sait, actuellement, le bill prévoit qu'au niveau des
commissions scolaires il y aura des directeurs généraux adjoints,
classés uniquement en fonction de la confessionnalité. C'est
là l'une des grandes ambiguïtés de l'honorable ministre de
l'Education. Beaucoup de gens se demandent pourquoi il ne veut pas, au niveau
du bill 62 puisqu'il admet l'existence d'écoles
françaises, d'écoles catholiques françaises, etc, les
quatre catégories reconnaître une direction
pédagogique qui corresponde à ces quatre catégories. Cela
semble à plusieurs personnes du sens commun, mais ça ne semble
pas avoir, jusqu'à maintenant, frappé l'attention du
ministre.
Sixièmement, êtes-vous d'accord pour que les fonctions
suivantes soient dévolues au conseil scolaire? Là, notre liste
ressemble un peu à celle de l'Association des principaux. Il y a le
problème de l'éducation des enfants gravement handicapés.
Le bill n'en dit rien, mais il est clair que nous n'allons pas avoir, à
Montréal, onze ou treize écoles pour les enfants aveugles,
sourds
ou très gravement frappés du point de vue mental, par
exemple. Ceci serait une dépense absolument folle. Il est surprenant que
le gouvernement n'ait pas pensé, justement.
L'éducation des adultes, c'est la même chose.
Remarquez que je réponds un peu aux questions, mais ça
n'empêche pas les autres de répondre différemment ; nous
sommes en démocratie. Moi, j'ai déjà dit et je le
répète que ce serait insensé d'avoir onze services de
l'éducation des adultes sur le territoire de l'île de
Montréal. C'est un domaine où j'ai été
appelé à travailler d'assez près. Il est clair que ce
serait multiplier inutilement les dépenses et pratiquement jeter
l'argent par les fenêtres que de faire ça.
Financement, construction et entretien des immeubles, informatique,
recherche. Peut-être que la liste des principaux pourrait
compléter ce questionnaire. Je dis tout de suite, M. le
Président, que notre geste n'a pas de caractère partisan. Nous
n'aurions pas d'objection, pourvu que l'essentiel de ce questionnaire soit
respecté, à ce que le gouvernement ajoute des questions ou
suggère une formulation différente. C'est un geste qui est
posé dans l'intérêt public. Nous croyons que ce serait un
précédent intéressant qu'une commission parlementaire,
à un stade comme celui-ci, de ses travaux, fasse une consultation
rapide.
J'insiste sur le fait que, dans notre esprit, ça ne devrait pas
être une mesure dilatoire; nous croyons que cela peut se faire
très rapidement. Si le gouvernement est d'accord, la commission pourrait
le faire. Je mentionne tout de suite que, si le gouvernement n'est pas
d'accord, l'Opposition le fera, parce que nous sommes intéressés
à connaître l'opinion de tous les groupes sur les questions que
nous avons formulées. Nous souhaitons que le gouvernement accepte notre
proposition et que ce geste soit un geste non partisan, bipartisan, si vous
voulez. Notre ami du Crédit social n'est pas ici; ça ne peut pas
être tripartite.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il est ici.
M. LEFEBVRE: Il est là! Alors, ça pourrait être un
geste tripartite, si les groupes intéressés sont d'accord.
Voilà une proposition en bonne et due forme sur laquelle la commission
devra se prononcer.
M. CARDINAL: M. le Président, comme le député
d'Ahuntsic, en faisant cette suggestion puisqu'on ne peut pas parler de
motion ici ou cette motion, si on veut, appuyée par le
député de Marguerite-Bourgeoys, n'a fait aucune allusion à
la politique, quoique, en terminant, il ait souhaité que ce soit
bipartite ou tripartite, je ne ferai pas la remarque suivante. Il reste que,
lors d'une autre commission, son ancien chef de parti s'était
opposé à un référendum. Or, à cette
commission c'est lui qui en propose un.
M. LEFEBVRE: Ce n'est pas un référendum
M. CARDINAL: Blague à part, M. le Président, je ne sais
pas à quelle réaction s'attend le député
d'Ahuntsic.
M. LEFEBVRE: A une réaction mauvaise, de la part du ministre.
M. CARDINAL: Je m'attends toujours à ce genre de réflexion
de la part du député d'Ahuntsic. C'est malheureux, il va partir
sans s'en être guéri.
M. LEFEBVRE: Surprenez-moi.
M. CARDINAL: La réaction est immédiate et directe. Je
prends la motion telle qu'elle est, avec les remarques qui ont
été faites par le député d'Ahuntsic. Je veux parler
d'une remarque en particulier. Si le député d'Ahuntsic est
d'accord, j'accepte immédiatement que ce questionnaire soit transmis
à tous ceux qui ont demandé de se faire entendre devant la
commission, c'est-à-dire que c'est restreint à la commission, il
ne s'agit pas d'une enquête publique.
M. LEFEBVRE: Non, pas du tout.
M. CARDINAL: Deuxièmement, comme il a fait lui-même
l'invitation, j'aimerais qu'on me laisse ces questions pour voir si, au
ministère, on ne pourrait pas en ajouter quelques autres, par exemple,
parce qu'il y a d'autres problèmes. Vous-même l'avez dit
tantôt, peut-être qu'on pourrait...
M. LEFEBVRE: J'ai posé une condition, M. le Président,
c'est que...
M. CARDINAL: Cela se fasse rapidement.
M. LEFEBVRE: Nous n'avons pas d'objection, pourvu que nous soyons
appelés à participer.
M. CARDINAL: Oui, c'est cela.
M. LEFEBVRE: Mais si c'est une initiative de la commission, nous ne
voudrions pas que le ministère transforme les questions pour en faire
son affaire.
M. CARDINAL: Ce n'est pas cela du tout.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: A condition aussi que le délai soit
limité.
M. LEFEBVRE: Oui.
M. CARDINAL: Oui, je vais terminer, si vous permettez. Nous sommes
aujourd'hui le jeudi 19 février, si je ne me trompe; nous nous
réunissons le 25 l'ouverture de la session est le 24 et je
peux suggérer ceci, si l'Opposition
est d'accord, qu'au début de la prochaine séance,
j'apporte notre version du questionnaire, que je la soumette sur-le-champ, et
que nous nous entendions sur le texte définitif du questionnaire. Vous
avez donc la procédure, le délai et l'accord de principe.
M. LEFEBVRE: Parfait, très bien. Je félicite le ministre.
Nous en sommes heureux et je crois que cela va aider à clarifier
l'opinion des groupes intéressés en fonction de certains
objectifs.
M. LE PRESIDENT: Je ferais remarquer au député d'Ahuntsic
qu'il y aurait peut-être un petit changement à faire sur le
questionnaire destiné aux institutions qui ont déjà
été entendues.
M. LEFEBVRE: Oui, d'accord.
M. CARDINAL: Nous reviserons le questionnaire.
M. LEFEBVRE: D'accord.
M. CARDINAL: Je m'abstiens de répondre aux questions, je ferai
une seule remarque au sujet d'une question sur laquelle le député
d'Ahuntsic est revenu souvent. Je la fais comme contribution à la
réflexion de ceux qui se sont fait entendre ou qui se feront entendre
devant cette commission et des députés des deux
côtés de cette table.
Une chose me frappe, c'est qu'en général on ne discute pas
tellement le nombre de membres du Conseil métropolitain. On ne discute
pas tellement le fait qu'il y ait quatre membres de désignés par
le lieutenant-gouverneur. Ce qui est à discuter c'est: Est-ce que les
commissaires vont eux-mêmes choisir ce représentant au Conseil
métropolitain ou si c'est le gouvernement qui en choisira un par
commission scolaire? Tout en se posant une sous-question, sur laquelle M.
Lefebvre et moi nous sommes débattus publiquement, soit: Est-il bon ou
mauvais qu'il y ait un double mandat? Que ce soit un mode ou l'autre, il y aura
des gens qui seront à deux niveaux et qui auront plus de pouvoirs dans
leur commission scolaire que les autres. Bon.
La question que je pose est celle-ci: Supposons qu'il y ait six ou neuf
commissaires qui sont tous élus, que ce soit les commissaires qui en
choisissent un entre eux qui ira en haut, ou que le gouvernement, parmi ceux
qui sont élus, en fasse monter un en haut, je me dis: A partir de quel
principe profond, irréfragable et sacramentel une personne élue
n'est-elle pas égale à une autre personne élue? Je ne pose
que cette question, je ne réponds même pas au questionnaire,
à ce moment-là.
M. LEFEBVRE: Nous connaissons d'avance votre réponse et vos
tendances, mais ce qui nous intéresse c'est de connaître les
tendances des groupes qui ont manifesté leur intérêt. Nous
pensons qu'il est plus démocratique, pour parler clairement, que la
démocratie parte de la base pour aller vers le sommet, plutôt que
le sommet choisisse, au sein des commissions scolaires, les commissaires qui
font son affaire. On sait très bien qu'il va choisir des bons petits
bleus tranquilles.
Si c'est un gouvernement d'une autre couleur, j'admets que la tendance
sera peut-être la même. Le gouvernement va changer bientôt,
nous en avons la conviction, et nous travaillons peut-être, en quelque
sorte, contre nos propres intérêts, si je suivais l'esprit du
ministre. Mais, nous recherchons surtout l'intérêt public, M. le
Président.
M. CARDINAL: D'accord. Puis-je savoir si ce questionnaire a
été approuvé par le caucus du Parti libéral?
M. LEFEBVRE: C'est ce que j'ai affirmé.
M. CARDINAL: Ah, bon. Je pense qu'il ne sera pas nécessaire que
j'en fasse autant pour que les délais soient plus courts.
Nous avons confiance en ceux qui nous représentent à cette
table, sans être obligé d'aller au caucus, d'accord?
M. GOLDBLOOM: M. le Président, si vous me permettez d'ajouter une
remarque aux commentaires qui viennent d'être faits, une suggestion est
venue il y a quelques semaines d'un éditorialiste du Devoir, que j'ai
retenue parce que je l'ai trouvée très intéressante.
C'est que les conseillers, les membres du conseil de l'île de
Montréal soient élus au nombre de onze, un par commission
scolaire, mais que le gouvernement, en conservant le droit d'en nommer quatre
autres, soit tenu par la loi de se servir de ce pouvoir pour redresser un
déséquilibre quant à la représentation, surtout
dans le cas des minorités, évidemment. Mais il se peut même
que le déséquilibre soit défavorable à la
majorité, parce que dans certaines commissions scolaires on aurait
trouvé une personne très qualifiée qui n'était pas
de la majorité, et que le gouvernement voudrait rétablir
l'équilibre normal. C'est-à-dire proportionnel.
J'attire l'attention du ministre sur cette suggestion que j'ai
trouvée très intéressante.
M. CARDINAL: J'ai moi-même pris connaissance de cette suggestion
et, en fait, je l'ai déjà dit devant cette commission.
Actuellement, le découpage des journaux, la cueillette des
mémoires et des lettres parce qu'il y en a beaucoup et des
télégrammes se fait et un dossier est constitué du projet
de loi 62. Ce dossier, d'ailleurs, est à la disposition de tous
ceux qui veulent poser des questions. Effectivement, une question de M.
Lesage sera apportée ici, qui a été mise en annexe au
journal des Débats du 11 décembre. Toutes ces choses, je les
médite dans mon coeur. J'en parlerai au cabinet des ministres et je
donnerai la position du gouvernement.
M. LEFEBVRE: M. le Président, pendant que le ministre parle du
dossier qu'il a en sa possession, est-ce que le ministre aurait objection
et si oui je suppose qu'il daignera nous dire pourquoi à
déposer devant la commission permanente de l'Education un mémoire
que, selon la rumeur, il aurait reçu du comité protestant du
Conseil supérieur de l'Education et dont nous n'avons pas officiellement
pris connaissance? Est-ce que ce document...
M. CARDINAL: Je vais donner les explications immédiatement. J'ai
déjà dit, à la séance du 27 novembre 1969, que le
Conseil supérieur et certains au pluriel ou au singulier, de ses deux
comités avaient manifesté le désir, lors d'une rencontre
avec moi, de présenter des mémoires. Le Conseil supérieur
a alors demandé à ne pas venir devant la commission. Il a
demandé qu'en vertu de la loi qui le régit c'est
l'interprétation du Conseil supérieur discutable ou non il
ne soit pas entendu et se réserve lui-même le soin de rendre
public son mémoire et celui ou ceux de ses comités.
Je n'ai donc personnellement aucune objection à rendre public le
mémoire du conseil ou de ses comités, mais je ne peux pas le
faire sans l'autorisation du conseil ou de ses comités qui s'en
réfèrent à la loi adoptée en 1964 et qui se disent
les conseillers directs du ministre en vertu même de la loi.
M. LEFEBVRE: J'attire l'attention du ministre sur le fait qu'il est un
peu étonnant alors que d'après tout ce que nous entendons de la
part de groupes représentatifs des églises protestantes de
Montréal nous avons entendu la semaine dernière un
représentant de deux de ces églises, en tout cas, et
d'après mes renseignements c'est également l'opinion du Greater
Protestant Montreal School Board des gens apparemment très bien
postés pour représenter l'opinion du groupe protestant à
Montréal disent une chose et, apparemment, le comité protestant
du Conseil supérieur aurait pris une position différente. Je
crois que la commission doit être éclairée sur ça.
Je pense que c'est...
M. CARDINAL: Si vous le permettez, M. le Président, je vais dire
ceci: Je suis disposé personnellement à demander à M.
Garant, le président du Conseil supérieur et aussi au
président du comité protestant, M. Bradwick, s'ils nous
permettent de rendre publique une chose qu'on m'a envoyée à titre
confidentiel, Moi, je suis mal pris. Je n'ai pas voulu amener devant cette
commission ni lors des débats sur le projet de loi 62, ni sur le projet
de loi 56, où s'est produit le même phénomène, si on
peut ainsi s'exprimer, je n'ai pas voulu qu'on discute ici d'ailleurs,
je pense que ce n'est pas à une commission de discuter de
l'interprétation d'une loi l'attitude qu'a prise le Conseil
supérieur et ses comités.
M. LEFEBVRE: Bien, on connaît l'attitude du Conseil
supérieur; cela a été publié dans les journaux.
M. CARDINAL: Oui, c'est lui qui a décidé de le publier; ce
n'est pas moi. C'est lui qui, selon la loi, s'est réservé le
droit de la publier. Tout ce que je puis promettre, moi, c'est de demander
à ceux qui auraient posé ce geste...
M. LEFEBVRE: D'accord.
M. CARDINAL: ... de me permettre de venir ici, mais je ne peux pas me
porter garant de l'attitude des responsables.
M. LEFEBVRE: D'accord.
UNE VOIX: Maintenant, votre quatrième partie, la taxation.
M. WHITE: Si vous me permettez, un très bref commentaire sur le
projet de questionnaire. Mon nom est Peter White, je représente
l'Association pour la réforme de l'éducation. Je voudrais faire
un très bref commentaire sur le projet de questionnaire proposé
par le député d'Ahuntsic et qui semble avoir reçu
l'approbation du comité. Si j'ai bien compris, à la lecture du
questionnaire, ce dernier, tel que rédigé, exclut la
possibilité des commissions scolaires à base linguistique.
J'aimerais faire remarquer aux membres du comité que, jusqu'ici, la
très grande majorité des associations anglophones qui se sont
prononcées sur le projet de loi se serait prononcée en faveur
d'une formule, au moins temporaire, basée sur les commissions scolaires
à base linguistique. Je proposerais donc la possibilité que cette
question soit ajoutée à ce questionnaire.
M. LE PRESIDENT: Vous voulez suggérer, simplement?
M. WHITE: C'est ça.
M.LEFEBVRE: Je ferai remarquer à M. White que le questionnaire,
comme je l'ai souligné tout à l'heure, n'est pas du tout et ne se
prétend pas être une revue exhaustive de toutes les questions que
l'on peut se poser à propos du bill 62, mais je pense que ce sont des
questions pertinentes qui ont rapport à la rédaction actuelle du
bill. Les gens auront droit, d'abord, de répondre ou de ne pas
répondre, et
je crois que rien n'empêche les gens de continuer à
présenter des mémoires qui vont bien au-delà des quelques
questions qui sont incrites là. Ce n'était pas notre intention,
à nous en tout cas, d'avoir un questionnaire qui soit au-delà de
ce que j'ai lu, tout simplement parce que nous avons cru que, sur ces points
précis, il était intéressant de voir quel était le
consensus. Ceci n'empêche aucunement les groupes de faire, comme vous
l'avez fait vous-mêmes et comme d'autres l'ont fait, des recommandations
qui sont d'un tout autre ordre et qui sont complètement en dehors du
cadre qui est prévu ici. Ce questionnaire ne préjuge de rien,
n'est pas une prise de position; il est simplement une façon de voir ce
que les gens pensent en fonction d'un certain nombre d'articles. Encore une
fois, je ne crois pas que cela épuise le débat; je crois que
ça pourrait l'éclairer, cependant. Mais, quant à nous,
nous ne sommes pas disposés à élaborer un questionnaire
qui soit beaucoup plus exhaustif. C'est le genre de questions auxquelles nous
aimerions avoir les réponses des groupes. Je ne sais pas si ça
répond...
M. CARDINAL: Je suis entièrement d'accord avec le
député d'Ahuntsic. Je ferais un commentaire qui ne vient pas du
tout de la suggestion de M. White, mais que j'aurais peut-être dû
faire tantôt. Ce questionnaire que nous avons accepté unanimement,
semble-t-il quitte à le refaire ensemble, et il n'est pas
exhaustif je suis le premier à l'admettre, comme le
député d'Ahuntsic, je souhaite ardemment qu'il n'arrive pas
à ce questionnaire ce qui est arrivé à d'autres
questionnaires depuis les débuts de l'étude du projet de loi no
62, c'est-à-dire que les associations qui seront invitées
à y répondre y répondent chacune pour elle, sans qu'aucun
groupe, aucune personne, aucun organisme ne vienne suggérer des
réponses. Je voudrais bien que ce soient les réponses directes de
ces associations, qu'il n'y ait pas une nouvelle vague de requêtes
stéréotypées, parce que quelqu'un, en quelque part, aurait
décidé que les réponses aux questions devraient être
celles-là. Je le dis, même si ça peut déplaire que
je le dise, j'ai accepté cette proposition de bonne foi, supposant et
croyant la bonne foi du député d'Ahuntsic et des membres de
l'Opposition et présupposant la bonne foi de tous ceux qui
répondront au questionnaire.
M. LE PRESIDENT: Très bien: taxation.
M. LYONNAIS: Avant de passer à la taxation, seulement une
remarque très courte. M. le ministre me le permettra. Pour employer un
de ses arguments de tout à l'heure, lorsqu'il a dit que les personnes
élues aux commissions scolaires sont toutes égales, parce
qu'elles ont toutes été élues, nous basant
là-dessus, nous trouvons drôle que ces personnes soient
nommées par le ministre; justement, si elles sont toutes égales
au point de vue du droit, ce serait plus démocratique que les gens des
commissions scolaires, eux-mêmes élus, choisissent eux-mêmes
parmi cette égalité les personnes qu'ils jugent les plus
représentatives.
M. CARDINAL: Une précision: A cause du journal des Débats
les écrits restent et à cause de certaines
remarques dans la presse, je voudrais bien souligner que ce n'est pas le
ministre qui les nomme.
M. LYONNAIS: Ah bon, d'accord.
M. CARDINAL : Ah non, pas du tout. Il n'est même pas question du
ministre à cet article. C'est le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. LYONNAIS: C'est ce que voulait dire, le lieutenant-gouverneur. Vous
précisez ma pensée. D'accord.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent a une
question.
M. PEARSON: Je voudrais demander une petite précision. A la page
23, au sujet de l'article 659, je note, par exemple, à l'article b):
"D'établir, en collaboration..."; à l'article c): "De
définir, en collaboration..."; à l'article d): "De
négocier, après consultation..." à l'article h): "Voir en
collaboration..." et à l'article i): "Sur recommandation". Est-ce que
vous pourriez préciser davantage vos expressions; "recommandation et
collaboration"?
M. LYONNAIS: Je demande à M. Hétu, qui a participé
à la rédaction du questionnaire, de vous apporter la
réponse précise sur ce point-là.
M. HETU: Le conseil scolaire ne décide pas lui-même, mais
il a affaire, quand même, à des commissions scolaires. Il doit
toujours travailler en collaboration avec les commissions scolaires avant de
prendre une décision. C'est en vue de la décentralisation que
nous demandons que chacune des fonctions du conseil de l'île soit dans ce
sens-là.
M. PEARSON: A moins que je n'aie mal saisi, h) c'est: "Voir, en
collaboration avec les commissions scolaires, à l'implantation des
équipements scolaires dans l'île de Montréal." Un peu plus
bas, à la page 24, au milieu du paragraphe, on voit: "Est cependant
retirée du conseil la responsabilité exclusive de l'implantation
des équipements, ainsi que de l'affectation des immeubles."
M. HETU: Dans le projet de loi, on semble dire que ceci est exclusif au
conseil de l'île. On veut simplement que ce soit fait en collaboration
avec les commissions scolaires. Les affecta-
tions peuvent être, si vous voulez, entérinées par
le conseil de l'île, mais nous croyons qu'elles doivent se faire par les
commissions scolaires, parce que les commissions scolaires sont plus
près de l'action que le conseil de l'île.
M. PEARSON: D'accord, mais à l'article 659, on voit, dans les
dernières lignes: "Il est responsable de l'implantation des
équipements scolaires dans l'île de Montréal en tenant
compte des recommandations des commissions scolaires." Alors, d'après
vous, cela veut dire que le texte de la loi n'est pas suffisant...
M. HETU: Je l'ai dit, tout à l'heure: Il ne faut pas simplement
tenir compte des recommandations; il faut qu'il y ait collaboration. Si les
commissions scolaires envoient leurs recommandations et que le conseil de
l'île décide, à ce moment-là, il n'y a pas eu
collaboration avec les commissions scolaires et le conseil de l'île.
M. LE PRESIDENT: Alors, la fameuse taxation.
M. LYONNAIS: M. Hétu, si vous voulez lire la partie très
courte sur la taxation.
M. HETU: A propos de la taxation, je voudrais préciser qu'il ne
s'agit pas, évidemment, de donner suite, à M. Porteous, qui nous
a dit, le 5 février, que les Anglais s'occupaient des affaires et les
Français, de la culture.
Alors, le texte a été préparé. Nous avons
des Canadiens français capables de s'occuper des affaires. L'Association
des principaux ne se reconnaît aucune compétence dans ce sens,
mais se réjouit de voir que la taxation sera mieux répartie au
niveau de l'île de Montréal.
M. LE PRESIDENT: Alors, nous vous remercions.
M. CARDINAL: Est-ce que je peux poser une question, M. le
Président? Vous avez un autre document, d'aspect technique. Est-ce que
vous désirez qu'il ne soit que remis aux membres de la commission et au
ministère ou si vous croyez qu'il est judicieux qu'il soit
déposé au journal des Débats? Il y a là une
question de frais, d'utilité. Je vous pose la question.
M. LYONNAIS: Non, c'est un instrument de travail. Je pense que ce serait
mieux qu'il soit simplement remis aux membres.
M. CARDINAL: Alors, vous nous dispensez de le publier. Nous le
conserverons pour fins de travail.
M. LYONNAIS: C'est ça.
M. CARDINAL: Nous vous remercions beaucoup et nous vous
félicitons du ton serein avec lequel vous avez, à la fois,
déposé le mémoire, défendu le mémoire,
défendu vos opinions et discuté avec les membres de cette table.
Je souhaite que les séances continuent dans cet esprit.
M. LEFEBVRE: Je me joins, pour ces félicitations, au ministre de
l'Education. Merci beaucoup, messieurs.
M. LYONNAIS: Il y aurait peut-être un autre petit point sur lequel
nous aurions voulu insister et qui n'a pas été abordé du
tout, tout à l'heure; c'est la question de l'école. M. le
ministre a bien dit qu'une de nos demandes principales parce que cela
concerne notre fonction de principaux d'écoles, qui nous
intéresse grandement c'est une meilleure définition de
notre statut.
Si vous avez remarqué, nous avons proposé que le
troisième palier, si vous voulez, nous aurions
préféré, au lieu des structures réelles, que ce
soit l'école, à laquelle se rattache, justement, le comité
d'école et ainsi de suite. Et à l'intérieur de cela,
permettre de mieux définir notre statut comme principal.
M. CARDINAL: Oui, d'accord. J'avais remarqué ceci. C'est pourquoi
j'avais relié la page 15 à la page 17.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je crois que le ministre et moi
avons commis une erreur, qui est réparable. Nous avons dit: Merci,
messieurs. Il aurait fallu dire mademoiselle et messieurs.
M. CARDINAL: D'accord. Mais à cette assemblée,
mademoiselle ou mesdames, Mme Casgrain le sait, le masculin comprend toujours
le féminin. Je n'ai pas dit ni qu'il l'embrassait, ni qu'il
l'emportait.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui. Mais, M. le Président, c'est
justement une suggestion que j'ai faite à mon confrère, le
député d'Ahuntsic, que, quand même, il fallait dire
mademoiselle dans ce cas-ci, étant qu'elle avait fait des
représentations.
M. CARDINAL: D'accord.
M. LEFEBVRE: La correction fraternelle est active parmi nous, mais
l'unité règne. Cela, il faut le dire.
M. CARDINAL: Pourquoi vous sentez-vous le besoin de le dire?
M. LYONNAIS: Alors nous vous remercions.
M. LE PRESIDENT: La Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal. M. François-Albert Angers, président. M. Angers,
vous pouvez y aller.
M. François-Albert Angers
M. ANGERS: M. le Président, M. le ministre, je commence par vous
présenter les personnes qui m'accompagnent. Ici, à ma droite, Mme
Gertrude Sirois, qui est membre du conseil d'administration de la
Société Saint-Jean-Baptiste; M. René Charette, qui est le
directeur général de la société; M. Gérard
Turcotte, qui en est le secrétaire général, et M. Gilles
Caron, qui est le directeur des sections.
Alors, je vais vous présenter notre mémoire. Au cours de
son dernier congrès annuel, tenu du 13 au 16 mars dernier, la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal a tenu un colloque
sur le problème de la restructuration scolaire dans l'île de
Montréal. A la fin du colloque, un texte de résolution a
été approuvé qui, ratifié par le comité des
résolutions du congrès, fut ensuite voté à
l'unanimité par le congrès même.
A ce moment, la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal avait formulé les principes suivants: a) rejet de toute
division scolaire selon la langue; b) unité linguistique du
système d'enseignement général du Québec; c)
établissement d'écoles ou de classes bilingues pour les
anglophones, tels que définis dans le mémoire de la
Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal au comité
parlementaire de l'éducation; d)maintien du caractère
confessionnel des structures scolaires, y compris la création de
structures neutres là où les parents le désirent et
où les enfants sont en nombre suffisant; e) formation d'un conseil
métropolitain pour percevoir les taxes scolaires sur toute l'île
de Montréal et en distribuer le produit entre les diverses
administrations scolaires selon le nombre d'élèves sous leur
juridiction respective; f ) organisation des administrations scolaires de
façon que les parents prennent une part active à l'administration
des écoles.
Comment ces prises de position se rapportent-elles au bill 62 qui a
été soumis pour étude à la dernière session
de l'Assemblée nationale du Québec?
Disons que nous ne saurions d'abord passer sous silence le fait que la
loi 63 ait modifié la situation qui existait au moment où cette
résolution était votée. Se sont ainsi trouvés
séparés les deux problèmes qui paraissaient alors devoir
être entremêlés dans la loi sur la restructuration scolaire
de Montréal, à savoir: d'une part, le régime linguistique
d'enseignement au Québec et d'autre part, les structures scolaires.
Autant nous avons félicité le gouvernement d'avoir
effectué cette séparation des deux ques- tions pour que chacune
puisse être étudiée à son mérite, autant nous
ne pouvons que réitérer ici notre réprobation formelle de
la proclamation juridique du bilinguisme officiel au Québec par la
reconnaissance du droit absolu et sans limite accordé aux parents de
choisir, pour leurs enfants, entre des écoles de langue anglaise et des
écoles de langue française que les commissions scolaires sont
alors obligées de leur fournir sur demande.
Ainsi ramené au seul problème des structures scolaires,
rappelons brièvement en quoi consiste maintenant le bill 62. Pour ne pas
retarder le débat, on peut sauter cette partie. Nous avons tenu à
inscrire ici, en résumé, notre compréhension du projet de
loi, ce qui permet aux membres... Pardon?
M. CARDINAL: C'est pour vous dire, M. Angers, que je suis d'accord avec
votre proposition, parce que, de fait, je l'ai lu cette partie du texte et
votre association semble avoir fort bien compris l'analyse du projet, analyse
qui avait été faite, d'ailleurs, aux deux premières
séances de la commission. D'accord.
M. ANGERS: C'est pour cela que nous l'avions mis pour que vous
vérifiiez si nous avions bien compris la loi: vous aviez d'ailleurs fait
remarquer, il y a quinze jours, que certaines personnes semblaient ne pas avoir
lu la loi.
M. LEFEBVRE: C'est une prudence qui n'est pas exagérée,
parce que cela arrive au ministre de ne pas bien comprendre.
M. ANGERS: Alors, je saute donc à la conclusion de cette partie
qui dit, à la page 4: "Ces dispositions générales qui sont
énumérées soulèvent, à notre avis, trois
ordres de questions: a) celles qui concernent la composition du conseil
scolaire; b) celles qui regardent les fonctions respectives du conseil
scolaire, des commissions scolaires et des comités d'école; c)
celles qui touchent le problème de la confessionnalité ou de la
non-confession-nalité des écoles dans les commissions scolaires
telles que constituées.
Dans le développement de notre exposé, nous aborderons
d'abord le premier point; nous passerons ensuite au troisième,
étant donné qu'il conditionne, dans une certaine mesure, le
deuxième.
L'une des plus grandes causes de malaise dans les structures scolaires
actuelles de Montréal provient de l'absence du caractère
démocratique dans la constitution des commissions scolaires. Alors
qu'à peu près partout ailleurs dans le Québec les
commissions scolaires sont des corps élus par les contribuables, plus ou
moins parfaitement identifiés avec les parents, selon les milieux, la
population de la ville de
Montréal, qu'elle soit catholique ou protestante, a
été privée du droit de choisir elle-même ses
commissaires d'école et d'exercer un contrôle sur l'administration
de sa commission scolaire. Cela était et est devenu d'autant plus
inacceptable que Montréal a les dimensions voulues pour être une
société très diversifiée et par suite aussi valable
pour l'exercice du droit démocratique que l'ensemble du Québec
lui-même.
Tout particulièrement dans le cadre des structures scolaires
telles qu'on veut les rénover, on ne voit pas pourquoi le mode
démocratique d'administration des écoles y serait plus mauvais
qu'envisagé par rapport à un gouvernement démocratiquement
élu par l'ensemble du Québec.
Autrement dit, les reproches que l'on fait assez
généralement aux administrations locales et en vertu desquels on
s'autorise à pratiquer la centralisation perdent la majeure partie de
leurs raisons d'être par rapport à un territoire qui pourrait en
lui-même constituer une province.
En vertu de ces considérations, nous ne voyons pas la raison de
la mainmise par le gouvernement, dans les structures rénovées,
sur le conseil scolaire de l'île de Montréal, auquel on attribue,
pour des raisons de commodité administrative et d'équité
fiscale, des pouvoirs qui sont généralement ceux qui sont
dévolus aux commissions scolaires ordinaires. A notre avis, le conseil
scolaire devrait donc être une émanation des commissions
scolaires; non pas une créature du gouvernement du Québec.
C'est pourquoi nous proposons de substituer, au mode de nomination
prévu par le bill 62, une élection par chaque commission scolaire
concernée d'un membre au conseil scolaire, à quoi nous ne voyons
pas d'objection d'adjoindre un représentant nommé par le
gouvernement afin de faciliter les relations entre ce corps scolaire
particulièrement important et l'Etat.
En ce qui concerne la question de la confessionnalité et des
structures scolaires, le gouvernement du Québec, par le bill 62, se
place dans une curieuse position. Après avoir affirmé, dans la
loi 63, le libre choix des parents à la langue d'enseignement à
l'école, à titre de pure capitulation ou de pure
générosité, comme l'on voudra, devant les
prétentions des anglophones, puisque ce droit n'est nullement compris
dans la charte universelle des droits de l'homme ou dans les libertés
démocratiques traditionnelles, voilà que le gouvernement impose
des structures scolaires allant fortement à l'encontre de toutes nos
traditions, sans consulter spécifiquement les parents dans un domaine
où, justement, la Charte des droits de l'homme affirme l'existence des
libertés fondamentales que les gouvernants ont le devoir de
respecter.
En effet, on connaît bien, d'une part, le jugement maintenant
fameux de la cour européenne des Droits de l'homme suivant lequel
"reconnaître à toute personne placée sous la juridiction
d'un Etat un droit à être instruite dans la langue de son choix
conduirait à des résultats absurdes" et, d'autre part, l'article
2 du protocole additionnel qui se lit comme suit : "L'Etat, dans l'exercice des
fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de
l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette
éducation et cet enseignement conformément à leurs
convictions religieuses et philosophiques ".
On pourra arguer ici que le bill 62 reconnaît ce droit puisqu'il y
est prévu, à l'article 586, comme nous l'avons vu
précédemment, que chaque commission scolaire devra donner des
écoles publiques catholiques, protestantes ou autres que catholiques ou
protestantes conformément "aux programmes d'études et aux
règlements édictés ou approuvés pour les
écoles publiques catholiques, protestantes ou autres que catholiques ou
protestantes, selon le cas."
Mais la question n'est pas si simple. Le problème en jeu, qui
touche à celui de la liberté de conscience, est si grave qu'il
postule le droit pour les parents à l'école de leur choix, selon
la forme et les structures qu'ils peuvent juger efficaces pour que
l'enseignement qui s'y donne soit bien conforme à leurs convictions.
Du moins ce droit est-il légitimement celui que réclament
les catholiques qui veulent s'en tenir à la doctrine fondamentale de
l'Eglise en la matière.
Que ce soit là en effet la portée de la doctrine de
l'Eglise ne saurait faire l'objet d'aucun doute, même après
Vatican Il. En effet, le décret conciliaire Gravissimum
éducationis, promulgué le 28 octobre 1965, ne peut pas être
plus net à ce sujet.
En voici quelques extraits, sans doute bien connus, mais qu'il importe
de répéter et qui sont parfaitement clairs. Premièrement,
"un droit premier et inaliénable des parents qui doivent donc jouir
d'une liberté véritable dans le choix de l'école".
Deuxièmement, rôle de l'Etat qui consiste à
"protéger les devoirs et les droits des parents et autres personnes qui
jouent un rôle dans l'éducation et leur fournir son aide" et qui
doit exercer cette fonction "selon le principe de subsidiarité à
défaut d'initiative prise par les parents et des autres
sociétés et compte tenu des désirs des parents".
Troisièmement, aux parents catholiques le concile rappelle le
"devoir de confier leurs enfants, où et lorsqu'ils le peuvent, à
des écoles catholiques. Leur devoir de soutenir celles-ci selon leurs
ressources et de collaborer avec elles pour le bien de leurs enfants."
Quatrièmement, pour que les parents puissent exercer ce devoir et
cette liberté, le texte du concile précise même qu'il y a
un devoir de l'Etat de "respecter la justice distributive en
répartissant les subsides publics de telle sorte que les parents
puissent jouir d'une vraie liberté dans le choix de l'école de
leurs enfants, conformément à leur conscience".
Si l'Eglise réclame de l'Etat le respect, dans
l'exercice de ses fonctions en éducation, des désirs des
parents jusqu'au niveau d'un devoir de subsidiarité dans l'organisation
de l'école, si d'autre part le grave devoir qui est fait aux parents
d'envoyer leurs enfants à des écoles catholiques va jusqu'au
soutien de telles écoles à même leurs ressources propres,
si l'Etat se voit prescrire le devoir de fournir sa juste part de subventions
à ces écoles séparées, s'il en est ainsi, il va de
soi que le premier droit des parents catholiques est d'être
consultés sur les formes qu'ils veulent voir revêtir à
l'organisation scolaire publique qui pourra concerner leurs enfants.
L'application de ces principes au cas particulier du Québec a
déjà d'ailleurs amené nos évêques à
formuler quelques règles de principe relatives à notre situation
propre qui ne sont pas moins claires. En juin 1966, le cardinal Maurice Roy,
archevêque de Québec, disait: "En face des changements de
structures qui sont à se faire, les parents devront désormais
prendre mieux conscience de leurs responsabilités et s'occuper
personnellement de leurs écoles. Il faudra que les catholiques, comme
les autres d'ailleurs, demandent ce qu'ils désirent pour leurs enfants
et fassent valoir leurs droits. Ils ne se contenteront pas d'attendre qu'on
leur présente une école toute faite, ils prendront une part
active à son édification et verront à ce qu'elle soit
organisée comme il se doit." La pensée du cardinal Léger
n'a pas été moins précise.
On lit, dans ses réflexions pastorales sur notre enseignement,
tout d'abord le passage suivant: "Affirmer qu'à cause de leur
inexpérience ou de leur manque d'aptitude, les parents doivent renoncer
à leurs droits et s'en remettre à l'Etat, c'est
déjà une invitation au totalitarisme". Puis dans l'école
chrétienne et nos responsabilités: "Il faut se dissocier de cette
philosophie scolaire qui conçoit l'école comme un simple
instrument de l'Etat et qui invite à négliger ses liens avec les
parents... ce qui ne peut être admis, ni qu'on soit amené à
négliger ou à considérer comme secondaires les liens de
l'école aux parents. "L'Eglise, au concile, a repris sans
hésitation le principe de la responsabilité première des
parents en éducation... Le concile n'a fait que sanctionner de son
autorité une pensée très traditionnelle fondée sur
une philosophie très réaliste de la fonction parentale: prendre
sur soi de mettre un enfant au monde, c'est accepter la charge d'être les
premiers et principaux responsables de tout ce qui sera nécessaire pour
que cet enfant grandisse et s'épanouisse... Il faut quand même
dire que l'ordre de l'éducation tout entier doit être basé
sur le principe de la responsabilité première des parents."
Sur la question plus spécifique des structures, le cardinal
Léger a aussi voulu répondre aux critiques de l'institution
chrétienne, à ceux qui soutiennent je le cite que
"c'est par la seule force de l'esprit et du témoignage qu'on devrait
assurer la présence de l'Eglise dans les milieux de l'éducation.
Le principal reproche, continue-t-il, qu'on doit faire aux critiques excessives
de l'idée d'institution chrétienne, c'est justement leur manque
de réalisme. Dans le monde très complexe et très
structuré où nous vivons, on ne peut s'en remettre aux seules
forces du témoignage individuel, il faut encore recourir à l'aide
indispensable des soutiens juridiques et des cadres institutionnels. Il faut
comprendre les exigences fondamentales de l'école catholique... exiger
avec une énergie tenace, clairvoyante, vigilante, tout ce qui est
nécessaire dans l'ordre des soutiens juridiques, structurels et
institutionnels."
La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, dans le
passé, et encore jusqu'à son dernier congrès de mars
dernier, s'est toujours prononcée en faveur de structures scolaires
confessionnelles, c'est-à-dire de commissions scolaires
spécialisées dans l'ordre confessionnel, commissions scolaires
composées de commissaires catholiques pour administrer des écoles
catholiques ou de commissaires protestants pour administrer des écoles
protestantes, etc.
Jusqu'à tout récemment, elle l'a fait en étant
sûre de représenter le désir et la volonté de la
presque totalité de ses membres, aussi bien que tous les citoyens
francophones du Québec.
Son comité d'étude sur l'éducation et son conseil
général croient encore qu'en fonction du principe de la
confessionnalité conservée à l'école, ce
régime est préférable à tout autre,
indépendamment des questions mêmes de principe, en fonction, comme
le disait le père Arès "d'une question de sécurité,
d'efficacité ou, selon le mot du cardinal Léger, "de
réalisme".
Mettons même de côté la question de
sécurité de l'école confessionnelle pour le moment. Nous
n'insisterons tout d'abord que sur l'efficacité. A notre avis, c'est
faire bon marché de l'importance du caractère confessionnel ou
non confessionnel de l'école que de confier l'administration
pédagogique (et par suite, dans une bonne mesure, administrative) de
l'école, à des commissaires hétérogènes,
soit catholiques, soit protestants, soit neutres ou d'autres religions. Car, en
terme d'efficacité, il y a à considérer justement
l'efficacité de l'école confessionnelle.
A notre avis, c'est un système bâtard que celui qui
consiste à mettre tous les types d'écoles dans la même
commission scolaire et à obliger, comme il se doit dans tout conseil
d'administration, un ensemble composé de catholiques, de protestants ou
d'agnostiques à se prononcer respectivement avec les autres sur
des questions spécifiques concernant soit l'école catholique,
soit l'école protestante, soit les écoles autres que catholiques
ou protestantes.
Autrement dit, dans un comité comme celui-là, si chacun
des gens qui sont là voulait respecter la liberté des autres, il
faudrait que les protestants et les agnostiques s'abstiennent de
tout vote sur les questions qui concernent l'école catholique,
que les catholiques et les agnostiques s'abstiennent de tout vote sur les
questions qui concernent les écoles protestantes, et que les protestants
et les catholiques s'abstiennent de tout vote sur les questions qui concernent
l'école agnostique.
M. CARDINAL: Me permettez-vous? C'est un ex cursus que vous venez de
faire. Appliquez-vous la même règle au niveau de
l'Assemblée nationale et, par conséquent, sur un projet
semblable, aurait-il fallu distinguer les juifs des catholiques et des
protestants?
M.ANGERS: L'Assemblée nationale vote des lois, tandis que la
commission scolaire administre des écoles et prend des décisions
relatives au fonctionnement administratif de l'école.
M. CARDINAL: Exactement, vous venez de faire la distinction entre
l'école et la commission scolaire.
M. ANGERS: Ce n'est pas la même chose. M. CARDINAL: Je vous laisse
continuer.
M. ANGERS: Ce n'est pas la même chose du tout. La commission
scolaire, en somme, décide des questions pratiques de fonctionnement de
l'école dans le cadre de la loi qu'a votée le ministère.
Justement, il est indéniable qu'à ce moment-là, il y aura
des questions qui se poseront qui concernent les catholiques, sur lesquelles
les protestants devront voter, parce qu'on ne conçoit pas que ça
fonctionne comme je viens de le dire. Dans un conseil d'administration, tout le
monde doit prendre ses responsabilités et voter sur les questions qui
sont soumises.
C'est pour ça qu'il faut la spécialisation quand les
problèmes sont trop complexes.
L'école dite neutre seule peut bien s'accommoder d'un tel
régime, justement parce que son effort de neutralité,
c'est-à-dire de dissociation avec toute confession religieuse, peut se
trouver bien servie par la juxtaposition d'administrateurs de diverses options
religieuses, quant à ce qu'il faut éviter pour que l'école
neutre ne retombe pas dans une teinte de confessionnalisme.
Nous croyons que la caractéristique confessionnelle de
l'école est quelque chose d'importance majeure pour ceux qui y croient;
et que par suite, la spécialisation des fonctions confessionnelles par
commissions scolaires, constitue en la matière une règle
d'efficacité et de progrès, comme c'est le cas dans tout autre
domaine de l'organisation où entrent en conflit des facteurs ou des
intérêts trop divers. La spécialisation n'est-ce pas, c'est
la loi du progrès dans toute forme d'organisation. Dès qu'une
chose devient importante, on la fait administrer par un organe
spécialisé qui ne s'occupe que d'elle. Et on ne donne aux
organismes généraux, que l'administration des règles
générales. Cela, c'est une loi qui se pratique dans toutes les
entreprises, qui se pratique dans le monde entier, dès qu'on veut faire
progresser, parce qu'une question prend de l'importance, de sorte qu'une
commission scolaire multi-confessionnelle, c'est au fond dire: La
confessionnalité n'a pas l'importance qu'on lui attribue et, à ce
moment-là, je crois qu'il appartient aux parents seuls de dire si c'est
vrai qu'ils croient qu'elle n'a pas cette importance et qu'elle peut être
administrée de cette façon complexe.
Nous endossons totalement à ce sujet les remarques de
l'abbé Maurice Audet, responsable de la pastorale scolaire du
diocèse de Montréal, dans son article du Devoir du 13 janvier
1970. Nous l'avons annexé à notre mémoire, parce que c'est
un homme qui a de l'expérience et qui montre quelles seront les
difficultés concrètes, dans une commission scolaire
multi-confessionnelle, de faire une véritable école
confessionnelle catholique. Elles expriment, à la lumière de
l'expérience, les causes d'inefficacité d'un tel
système.
Le vrai problème à résoudre est celui d'un conflit
entre l'efficacité administrative, qui est surtout ce qui est
envisagé par les diverses autorités concernées dans le
bill 62, et l'efficacité pédagogique de l'école. Et pour
parler ici en termes d'organisation de production, puisque l'école est
la production d'un service, il importe de constater que le produit à
considérer ici dans sa qualité, c'est le service
pédagogique; et que, par suite, l'efficacité proprement
administrative des services scolaires ne doit pas se faire aux dépens de
celui-ci, du moins pas d'une façon majeure. Or, en matière
d'école confessionnelle, nous sommes là devant un problème
de qualité majeure; bien plus, devant un problème de droit
fondamental des parents et des enfants, droit reconnu par la charte des Droits
de l'homme. Celui-ci doit donc passer avant l'efficacité administrative,
qui doit être la meilleure possible dans le cadre de cette
réalisation. Il importe de payer ensuite le coût; les coûts
que l'on paie, c'est pour obtenir des services d'une certaine qualité.
Ce n'est jamais bien faire que, pour réduire le coût, de faire
disparaître la qualité de la production.
A l'heure actuelle, en raison des mouvements et des changements qui se
produisent dans notre société, le principe du droit des parents
n'en demeure pas moins. A partir du moment où le gouvernement envisage
des modifications de structures qui rompent avec des traditions bien
établies, il importe qu'il procède à une consultation
véritable des parents.
Avant d'insister davantage sur ce point, nous voudrions répondre
rapidement à l'argument selon lequel, après tout, réclamer
des commissions scolaires juridiquement confessionnelles,
c'est demander ce qui n'existait pas auparavant chez nous, sauf dans le
cas spécial de Montréal. Et pourtant, ajoute-t-on, la
confessionnalité de l'école n'apparaissait nullement en danger
à ceux-là mêmes qui la voient aujourd'hui menacé.
Nous voulons seulement préciser que l'argument est tout à fait
spécieux, puisque si nos anciennes commissions scolaires
n'étaient pas confessionnelles de droit, elles l'étaient de fait
par la spécialisation confessionnelle qui était la
caractéristique de chaque commission scolaire, même si,
juridiquement, elles étaient l'école commune.
En effet, c'est par le droit à la dissidence qu'était
respecté principalement le droit des parents à l'école de
leur choix, au temps où il n'y avait guère, dans notre milieu,
que des catholiques et des protestants. C'est donc à mauvais escient
qu'on oppose une telle argumentation à ceux qui s'insurgent contre le
régime nouveau que représenterait le bill 62, non pas un
régime d'école commune représentant l'orientation
confessionnelle de la majorité avec dissidence prévue pour la
minorité, mais un régime de commissions scolaires
unifiées, administrant indifféremment des écoles de
plusieurs types confessionnels.
Dans l'état actuel des choses, la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal estime que l'essentiel est de
revendiquer pour tous ses membres comme pour toute la population la
possibilité d'exercer totalement leur liberté de choix quant
à l'école qu'ils veulent pour leurs enfants, aussi bien au plan
des structures qu'au plan des programmes. Puisqu'il y a en la matière un
droit des parents, il n'appartient, en définitive, à aucun groupe
de pression particulier, qu'il soit société nationale, syndicat
professionnel, chambre de commerce, etc, sauf, à défaut d'autres
organismes proprement compétents, de vouloir imposer une solution. A mon
sens, c'est encore moins l'affaire du gouvernement, puisqu'on sait fort bien
que les chartes des droits de l'homme sont faites, d'une façon
générale, pour amener les gouvernements à respecter les
libertés des citoyens. Par conséquent, les gouvernements n'ont
pas à statuer sur la liberté de la presse, sur la liberté
de conscience ou sur la liberté des parents quant au choix de
l'école; ils ont à la respecter, ce n'est pas la même
chose.
Il y a, à l'heure actuelle, des associations de parents de
diverses natures. Que le gouvernement, directement ou par leur
intermédiaire je laisse au gouvernement le soin de faire la
consultation qu'il croira efficace voie à consulter vraiment
démocratiquement les parents de l'île de Montréal quant aux
types de structures scolaires qu'ils veulent voir s'établir sur ce
territoire.
M. le ministre, il y a quinze jours, vous avez beaucoup insisté
sur la nécessité de ne pas oublier certaines
réalités. Vous en avez énuméré
quelques-unes. Vous avez donné des opinions sur cela. Vous avez dit
qu'à votre avis, quand cela fonctionnera, il n'y aura peut-être
pas tellement de catholiques qui voudront l'école catholique. Le
député de Montmorency, je pense, vous a opposé qu'à
son avis 80 p.c. des parents vont vouloir des écoles catholiques. Vous
avez parlé du comité catholique qui aurait pris certaines
décisions, mais le comité catholique ne représente ni les
parents ni les évêques. Par conséquent, c'est un
comité administratif qui doit, lui aussi, tenir compte de la
volonté des parents. En somme, le droit des parents, c'est une
réalité dont il faut tenir compte. C'est la réalité
d'un droit fondamental. Il faut l'inclure dans les réalités dont
vous voulez tenir compte. Remarquez bien que c'est ce que fait la
Société Saint-Jean-Baptiste qui ne se prononce plus sur la
structure qu'il faut donner, mais dit: Vous allez donner aux parents les
structures qu'ils veulent. Demandez-leur quelles sont les structures qu'ils
veulent.
Comme la liberté de choix de l'option philosophique et religieuse
de l'école est une des libertés fondamentales qui relèvent
des droits de l'homme, nous soulignons qu'elle ne peut pas se régler par
le seul assentiment d'une majorité qui déciderait pour la
minorité. Il s'agit, au contraire, de consulter les parents sur leurs
désirs et leurs options en vue de donner, autant que possible, à
chaque catégorie d'options philosophique et religieuse l'école
qui lui convient.
Si les parents de l'île de Montréal en totalité ou
en presque totalité approuvent les commissions scolaires
unifiées, nous sommes d'accord pour que les commissions scolaires soient
unifiées. Si 50 p.c. des parents veulent des écoles
confessionnelles et 50 p.c. des écoles unifiées, il faudra
trouver une structure qui donne les deux et l'organiser pour qu'elle soit
efficace. C'est parfaitement concevable.
Il ne s'ensuit pas qu'il doive en résulter un fouillis
administratif. Rien n'empêche de garder une division fondamentale du
territoire, avec pour chacun une commission scolaire correspondant à
l'option majoritaire, quitte à rattacher les minoritaires à une
division territoriale voisine où ils sont majorité ou à
former une commission scolaire supplémentaire aux dimensions de
l'île pour une minorité trop faible. Bref, nous voulons dire que
c'est à tort, à notre avis, que l'on fait une sorte de drame des
complications administratives qui résulteraient de la
spécialisation confessionnelle des commissions scolaires.
Dans le cadre du bill 62, c'est le conseil scolaire de l'île qui
possèderait et administrerait tous les biens immobiliers
nécessaires à l'organisation scolaire du territoire. Nous ne
croyons pas que cette centralisation administrative soit de très bon
augure pour le fonctionnement efficace du mécanisme scolaire. On pense,
évidemment, aux attributions plus difficiles de locaux qui
résultent des cloisonnements du territoire en commissions scolaires,
comme c'est
le cas à l'heure actuelle. Nous croyons que ce problème
particulier doit trouver sa solution particulière qui ne doit pas avoir
pour conséquence de faire des commissions scolaires des organismes
dépourvus de la maîtrise des biens dont elles doivent se servir
pour remplir leurs fonctions.
Que le conseil scolaire de l'île ait un certain pouvoir
d'arbitrage, de centralisation des renseignements ou même
éventuellement d'intervention pour remédier à des
situations par trop anormales, cela peut être nécessaire. Mais ne
nous parait pas qu'il y ait lieu d'aller plus loin dans cette voie pour le
moment.
Quant aux comités d'école, leurs fonctions dans les cadres
actuels nous apparaissent tout à la fois insuffisantes pour que soit
assuré le respect du droit des parents à obtenir, dans le secteur
public comme dans le secteur privé, l'école de leur choix. Dans
les structures actuellement conçues, c'est à eux qu'il
conviendrait en somme de conférer tous les pouvoirs pédagogiques
habituellement confiés aux commissions scolaires pour que, dans des
écoles dont ils n'ont pas choisi les structures et dont la direction
peut être hétérogène, l'option philosophique ou
religieuse de chaque catégorie de parents puisse être
sûrement appliquée et respectée.
A des solutions de ce type, on objecte, avec beaucoup de vraisemblance
et de raison, l'impossibilité de répartir d'une façon
vraiment satisfaisante fonctions administratives et fonctions
pédagogiques, de sorte qu'on puisse dire que les commissions scolaires
s'occuperaient des fonctions administratives, et les comités
d'école des fonctions pédagogiques. Nous convenons volontiers de
cette difficulté, et c'est pourquoi, en termes d'efficacité
pédagogique et administrative, nous croyons préférable une
spécialisation des commissions scolaires selon les types d'écoles
plutôt que la commission scolaire composite administrant plusieurs types
d'écoles, avec des comités d'école qui auraient des
pouvoirs réels en ce qui concerne le fonctionnement pédagogique
de l'école.
Qu'on ne nous reproche pas de ne pas présenter des solutions plus
concrètes par le détail. D'ailleurs, nous ne pourrions pas le
faire parce que nous ne connaissons pas, nous non plus, quelle est la
volonté actuelle des parents, personne ne la connaît, nous avons
tous des opinions, nous ne sommes pas en mesure d'indiquer des nombres, des
proportions, nous n'en savons rien, nous croyons que. Il n'appartenait pas
à la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal de
faire les dépenses qu'il aurait fallu pour poursuivre une étude
approfondie d'une réorganisation des structures scolaires de
Montréal. Mais de la lecture du rapport Pagé, des
déclarations du ministre, comme des échanges que nous avons eu
avec diverses personnes, ainsi que de la structure même de la loi, nous
avons tiré la conclusion que les points de vue adminis- tratifs et
financiers l'ont emporté de beaucoup dans sa conception sur les points
de vue pédagogiques, surtout dans leur aspect quant au droit respectif
des parents qui veulent ou non la confessionnalité. Bien plus, nous
avons acquis la conviction que par cette unité et cette centralisation
des structures scolaires de l'île de Montréal, le gouvernement
essaie de régler par voies indirectes le problème qu'il n'a pas
eu le courage de régler directement par une loi et une politique globale
de la langue française au Québec.
La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, pour sa
part, n'approuve pas une politique qui consiste à donner aux anglophones
du Québec tous les droits en matière linguistique, pour essayer
ensuite de les inciter seulement à respecter la primauté du
français ou à les étouffer à l'intérieur de
cadres qui, par le jeu des majorités, tendraient à donner le
pouvoir aux seuls francophones. Nous affirmons au contraire la
nécessité de proclamer le français comme seule langue
officielle au Québec, donc d'établir d'une façon
très claire la position du français en territoire
québécois, puis de définir d'une façon claire et
nette les droits ou privilèges des anglophones, de ceux à qui
nous reconnaissons le droit de se déclarer tels. Après quoi, nous
n'aurons pas besoin de leur contester le droit à leurs écoles
protestantes parce qu'elles pourraient équivaloir en fait à une
apparence de sectorisation linguistique du régime scolaire.
On voit très bien que, lorsqu'on aura bien défini la
situation linguistique du Québec, on pourra avoir des commissions
scolaires qui seraient toutes françaises dans l'île de
Montréal, avec des groupes de syndics, comme on appelle les commissions
dissidentes, qui, elles, satisferaient aux droits des anglophones, tels que
définis par nos lois. Et je n'ai jamais compris, moi, pourquoi on avait
donné la liberté totale de choisir, et qu'on appelle ça du
racisme si on prétend définir ce que c'est qu'un anglophone. Les
Ontariens ont parfaitement réglé la chose dans, leur cas, en
disant, non pas: Les parents ont la liberté de choisir, mais: Dix
contribuables francophones ont le droit de demander une classe en
français, du moment que le nombre d'enfants est suffisant. Nous aurions
pu avoir une loi exactement semblable qui aurait garanti tous les droits des
anglophones bien mieux qu'ils le sont actuellement. Actuellement, nous sommes
dans l'équivoque, et vous voyez les anglophones réclamer des
structures linguistiques, justement parce que, disent-ils, vous nous avez
donné le libre choix égal aux autres, dans le Québec,
alors nous avons droit à nos structures scolaires comme les
Français, équivoque qui se manifeste à l'heure actuelle,
devant votre commission dans les revendications des anglophones, et qui vient
de la mauvaise structure du bill 63.
Nous résumons donc comme suit les recommandations formelles et
précises ce ce rapport.
Premièrement, que le comité scolaire de l'île soit
composé d'autant de membres, plus un, qu'il y aura de commissions
scolaires sur le territoire de l'île et que chaque commission scolaire de
même que le ministère de l'Education nomment un des membres du
comité.
Deuxièmement, que les commissions scolaires soient les vrais
propriétaires des biens immobiliers qui leur sont nécessaires
pour l'accomplissement de leurs fonctions, mais que le conseil scolaire de
l'île jouisse du pouvoir de centraliser les renseignements sur l'usage de
ses biens et d'intervenir pour en reviser la distribution, en cas de
besoin.
Troisièmement, que le régime des commissions scolaires,
quant à leur caractère confessionnel et non confessionnel, soit
établi en conformité avec les désirs des parents
dûment consultés et construit de façon à respecter
la multiplicité des options que révélera cette
consultation.
Quatrièmement, que le comité d'écoles se voit
accorder des pouvoirs qui permettent un exercice plus efficace du droit des
parents dans l'école.
Alors, nous avons ajouté, en annexe, l'article de monsieur
l'abbé Maurice Audet; il n'est pas nécessaire de le lire; les
membres du comité pourront en prendre connaissance. Comme je vous l'ai
dit, nous l'endossons, parce que nous croyons qu'il révèle bien
les difficultés d'application technique de la confessionnalité
dans les structures unifiées.
M. LE PRESIDENT: M. le ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Merci, M. Angers. Merci à la Société
Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Je ne parlerai que de quelques points,
parce que, évidemment, le débat de fond s'est déjà
fait en partie à deux séances de cette commission et se fera
certainement à l'Assemblée nationale, au moment des
deuxième et troisième lectures. Mais, je voudrais prendre
quelques points, et rapidement, pour permettre à tous les groupes de
s'exprimer., je voudrais relever les choses suivantes. Premièrement, le
mémoire semble reprocher au gouvernement de ne pas avoir consulté
les parents et de ne pas le faire. Notons que ce projet de loi je l'ai
dit et je le répète est dans la ligne du rapport Parent et
des recommandations du conseil supérieur de l'Education; aussi, en
partie, dans la ligne de certaines recommandations du rapport Pagé, et
je ne citerai pas d'autres organimes. Je ne cite que ceux-là parce que
la Commission royale d'enquête sur l'éducation, avant 1966, a fait
son rapport à la suite de séances publiques où les gens
ont pu se faire entendre. En annexe du journal des Débats du 11, on cite
des statistiques sur les organismes qui se sont fait entendre et qui
étaient favorables ou non à des commissions scolaires
uniques.
Deuxièmement, le conseil suérieur de l'Education a
parcouru la province pour entendre la population, y comprenant les parents, et
a fait des recommandations dans le même sens.
Troisièmement, présentement, dans le diocèse de
Montréal, on sait qu'il y a une consultation qui a été
demandée par l'évêque de Montréal; on sait que de
nombreux groupes qui présentent devant nous des mémoires ont
consulté leurs membres. Je suppose que tous ceux qui représentent
des groupes ont consulté leurs membres; dans le cas de la
Saint-Jean-Baptiste on le sait, c'est le congrès de mars 1969. La
consultation se poursuit présentement, alors que nous avons
déjà environ de 65 à 75 mémoires devant nous. Si on
prend le total de toutes les personnes représentées par les
organismes qui viennent, ça commence à être une
consultation importante. Je ne peux pas admettre que quelqu'un, parce qu'il est
membre de la Saint-Jean-Baptiste, ne soit pas considéré comme
parent, ou s'il est membre de l'association des principaux d'écoles ou
toute autre chose. Cette consultation se poursuivra durant les autres
séances de la commission, elle se poursuivra par le questionnaire qui va
être distribué et par d'autres enquêtes qui pourront
être faites si besoin en est. Elle se poursuivra à
l'Asemblée nationale, parce que quand même ici, on n'est
peut-être pas d'accord mais les représentants
mandatés qui sont à l'Assemblée nationale, ils ont
été élus et ils ont été élus avec un
certain nombre de politiques. Ils ont eux-mêmes indiqué un certain
nombre de choix et, par exemple, dans le cas de la restructuration scolaire de
Montréal, ceci n'est pas un phénomène nouveau dans l'Union
Nationale, puisque c'est à la suite des travaux des divers commissions
et comités que j'ai indiqués que ce gouvernement-là a
lui-même constitué la commission de la restructuration scolaire de
l'île de Montréal. Je n'accepte donc pas que l'on dise que l'on
impose une loi sans consultation. Au contraire, il va falloir tenir le milieu
entre une consultation interminable et l'adoption de la loi. Sur ce point, je
ne puis pas accepter ce reproche, ni pour le gouvernement, ni pour
l'Assemblé nationale.
Le deuxième point, c'est qu'il est exact que l'on nous a
cité souvent des paroles ou des écrits venant
d'évêques ou de l'Eglise ou autre chose. Dans ces textes, l'on
parle beaucoup d'écoles, et l'on parle très rarement, à ma
connaissance, de commissions scolaires. L'on parle parfois de structures,
d'accord.
Sur ce point, la Société Saint-Jean-Baptiste est fort
honnête, puisqu'elle dit: Ce n'est peut-être pas cette structure
qui va sauvegarder l'école catholique. On ne fait pas de proposition
concrète à ce sujet-là. On vous demande de le trouver.
Alors, vous ne faites pas cette confusion que d'autres organismes font sans
cesse en considérant la commission scolaire comme le rempart de
l'école catholique.
Vous nous félicitez d'avoir séparé les projets de
loi 62 et 63. Je me permets une question qui contient peut-être une part
de méchanceté. Je me demande quelle aurait été
l'attitude de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal
si on n'avait pas séparé les questions et si on les avait mises
dans un seul et même projet de loi. J'ai senti à quelques moments
dans ce mémoire des attitudes différentes vis-à-vis de
chacun des deux projets de loi. Encore une fois, on pourrait discuter
longuement des droits des parents. A partir de la Déclaration des droits
de l'homme, on peut dire: Il n'y a rien dans ce texte-là sur la langue,
sauf telle chose; il y en a peu où il y en a sur la religion. Donc, on
peut avoir, sur le bill 63, une attitude quant à la liberté
linguistique et on peut en avoir une autre quant à la liberté du
choix de la foi.
Là, il y a une question de cohérence. Il y a une autre
chose, à ce sujet, que je veux souligner. Je ne crois pas,
personnellement on me corrigera; il y a des gens de l'Opposition en face
de moi que le gouvernement et l'Assemblée nationale aient fait ce
que vous appelez "la proclamation juridique du bilinguisme officiel au
Québec". C'est une interprétation du projet de loi 63 que je
respecte, mais je trouve l'affirmation forte et cette attitude difficile
à concilier avec votre attitude quant à la confession.
Est-ce que, en conclusion, il faudrait un référendum pour
l'Etat chaque fois que, dans l'élaboration de ses politiques, il a une
décision importante à prendre? C'est une question qui est
discutée à une autre commission. Mais, je dirais ceci : A cause
de son caractère radical et je n'en cache rien nous avons
désiré au gouvernement que le projet de loi 62 ne se
réalise qu'après une véritable consultation et nous
employons tous les moyens que nous pouvons pour la faire. Cependant, le
gouvernement devait indiquer des politiques précises et des objectifs
précis en présentant un tel projet de loi. C'est à partir
de ceci qu'il peut voir la réaction d'une population donnée.
Encore une fois, je pense que c'est à l'Etat,
représenté par l'Assemblée nationale, par les
députés, de prendre la décision, d'autant plus que tout le
monde sait qu'ils auront un examen à subir bientôt et que, par
conséquent, ils en subiront les conséquences. Ces deux lois
n'étant que des lois je ne dis pas cela à titre de
consolation s'il fallait qu'il y ait un changement radical de tout le
gouvernement ou même sans cela, on pourrait toujours les amender. Il n'y
a rien là-dedans qui touche des droits constitutionnels. Ce ne sont que
des moyens pour atteindre certains objectifs. Je ne referai pas le débat
du projet de loi 63. Je vais laisser de côté ce qui se rapporte
à ce qui est maintenant une loi.
Je laisserai la parole à l'Opposition ou aux autres
députés qui désireraient intervenir. Votre mémoire
va, quand même, vraiment au fond des choses. C'est ce qu'a à faire
ici le gouvernement. Je pense que je me suis assez longuement exprimé.
Je n'ai pas l'intention, d'ailleurs, de cesser de le faire. Le
député d'Ahuntsic ne cesse de m'encourager à continuer
dans cette bonne voie. Il a encore dit, lundi soir, à la radio: A
l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, on aura l'occasion de
s'exprimer longuement sur ceci. Non pas que je veuille éviter une
discussion, mais je ne veux pas reprendre la même discussion à
l'occasion de chacun des mémoires qui portera sur l'unification des
commissions scolaires.
M. ANGERS: Je conteste fortement l'interprétation du ministre sur
ma façon de traiter des droits fondamentaux qui sont garantis par la
charte des droits de l'homme. Je suggère que pour faire le test, vous
essayiez de faire une loi qui restreindrait la liberté de la presse et
que vous procédiez comme vous le faites.
M. CARDINAL: Faisons-nous une loi qui restreint la liberté des
parents?
M. ANGERS: Compte tenu des structures confessionnelles, oui.
M. CARDINAL: C'est justement ça, le fond de la question.
M. ANGERS: M. le ministre, c'est vrai que vous avez entendu beaucoup de
mémoires. Si vous dites: Nous allons respecter parce que nous
croyons que c'est le voeu de la population toutes les
réclamations en matière de formes d'organisation pour
protéger la confes-sionnalité qui nous sont
suggérées, je n'insisterais pas davantage.
Mais si vous me dites: Nous allons prendre la majorité des
mémoires et nous allons donner la forme que la majorité approuve,
je conteste.
M. CARDINAL: Vous avez raison, je n'ai jamais dit cela et je ne le dirai
jamais.
M. ANGERS: Je conteste ça tout de suite parce que,
évidemment, si vous croyez vous avez le droit de le croire
que l'ensemble des associations qui vont venir vous demander des structures
confessionnelles ne représentent qu'une minorité insignifiante de
la population et que, par conséquent, il n'y aurait pas lieu de leur
donner des écoles confessionnelles, il faut leur dire: Si elles en
veulent, qu'elles se donnent des écoles privées, ça ne
compte pas. Mais si vous voulez conclure ça des mémoires qui vous
sont présentés, je vous dis que ça ne marche pas. Ou vous
utilisez ces mémoires parce que vous dites: Oui, cela représente
des opinions et on donne aux gens ce qu'ils veulent, ou alors vous êtes
obligé d'aller à une consultation plus profonde pour vraiment
déterminer ce que réprésentent ces associations, parce que
vous en
avez, des gens qui vous demandent des structures confessionnelles.
M. CARDINAL: C'est exact, et il y en a d'autres qui demandent le
contraire.
M. ANGERS: C'est ça, il s'agit d'une liberté fondamentale.
C'est pour ça que je n'accepte pas du tout votre thèse: nous
présentons un projet de loi, nous le votons et nous serons battus aux
prochaines élections. Un procédé comme celui-là
serait terrible pour détruire toutes les libertés...
M. LEFEBVRE: Ce serait un bien pour la province.
M. ANGERS: Et c'est pourquoi je vous suggère d'essayer cela avec
une loi qui restreindrait la liberté de la presse, parce que là,
vous allez voir ce que vont vous dire les journalistes. Vous allez voir quelles
défenses ils vont apporter. Autrement dit, je ne crois pas que l'Etat
ait le droit de restreindre une liberté fondamentale et de dire: Nous
allons aller à l'élection et si nous sommes réélus,
elle sera restreinte. Je ne crois pas que nous puissions...
M. CARDINAL: N'allons pas jusque là, attention! Si nous prenons
une association en particulier, par exemple l'Association des parents
catholiques, j'ai posé la question précisément et
publiquement à son président. Quand il dit qu'il
représente tant de milliers de membres je suis d'accord, mais la
majorité des membres, il ne peut pas me dire s'ils sont à
Québec, à Montréal ou à Joliette. Le projet de loi
62 s'applique à Montréal. Je parle de la population de
Montréal et vous êtes la Société Saint-Jean-Baptiste
de Montréal. Là, ça va bien. Mais attention aux
associations! Il ne s'agit pas ici d'une loi qui s'applique ailleurs que sur un
territoire bien défini.
M. ANGERS: C'est ce que je vous dis, M. le ministre. Je ne vous conteste
pas le droit de nier leur représentativité pour ne pas leur
donner ce qu'ils demandent. Mais alors, vous avez le devoir de consulter
directement les intéressés, parce qu'il s'agit d'une loi qui
régit une liberté fondamentale. Après tout, on a beau dire
que les structures ne sont pas touchées, quand on revendique le droit
pour les parents de ne pas accepter l'école publique pour les
catholiques c'est ce que revendique l'Eglise et de se faire des
écoles catholiques à leur goût et de demander des subsides
au gouvernement, ça veut dire qu'on estime en somme que les parents ont
le droit de se prononcer sur les structures.
M. CARDINAL: Attention! Vous avez dit écoles. Connaissez-vous une
seule autre province au Canada où on a un tel droit, où on a des
commissions scolaires confessionnelles au sens de celles que nous avons?
M. ANGERS: Il y a des écoles séparées, il y a des
syndics d'écoles.
M. CARDINAL: Revenons à la réalité. Je connais
l'Ontario. Des écoles séparées, il y en a où, il y
en a combien et sur quels territoires? Je ne nie pas ces choses, mais quand
vous parlez d'un droit que vous qualifiez d'inaliénable, disons que je
serais d'accord avec votre inaliénabilité du droit, mais il
faudrait justement savoir quelle est la substance, la portée, la limite
de ce droit qui est inaliénable. Et ce droit, c'est celui qu'ont les
parents de choisir la foi dans laquelle leurs enfants seront instruits.
M. ANGERS: Non, non. D'avoir les écoles de leur choix, selon leur
désir. Remarquez bien le principe de subsidiarité. Je parle des
catholiques; d'autres groupes peuvent avoir d'autres conceptions. Mais c'est
leur conception et nous devons la respecter. C'est ça, la
liberté, dans ce cas. Je dirais que nous sommes là devant un
problème comme la liberté de la presse, la liberté de
conscience. Si les gens ne sont pas dans la voie droite à notre point de
vue, il faut quand même respecter leur voie parce que c'est la leur.
C'est là qu'est le problème.
M. CARDINAL: Vous contestez mon opinion, en fait, qui n'est pas que la
mienne. Ce que je conteste, c'est que vous disiez le mémoire le
laisse entendre et vous venez de le dire clairement que le projet, tel
qu'il est rédigé, vient totalement à l'encontre d'un droit
fondamental. Je dis que je ne suis pas d'accord parce que c'est la question des
voies et moyens qui se pose et on ne s'entend pas sur la définition des
voies et moyens.
Je respecte, évidemment, l'opinion de la Société
Saint-Jean-Baptiste, comme je respecte toutes les opinions que j'ai entendues
ici. Lorsque je dis que je ne veux pas faire un débat de fond, c'est que
je ne puis pas commencer, avec chaque association ou chaque groupe de parents,
un débat sur le fond de cette question.
Nous présentons une politique qui, je pense, est bien
définie sur ce point. La commission scolaire unique, cela me
paraît clair. Les voies et moyens de la réaliser, nous pourrons en
discuter, et je fais confiance à l'Opposition pour en discuter.
M. ANGERS: M. le ministre, je vous concède que la loi en
elle-même, présentée dans le public, est un
procédé tout à fait démocratique.
M. CARDINAL: Ah, bon!
M. ANGERS: Mais à une condition. Vous avez quand même fait
une déclaration qui disait: Nous changerons la loi sur certains
points, mais sur la commission scolaire unique, nous ne la changerons
pas. A ce moment-là, vous avez pris une position qui met le
problème en cause.
M. CARDINAL: C'est ce que je viens de dire. J'ai indiqué
très clairement la politique du gouvernement, sans
ambiguïté. Je pense qu'on ne peut pas me le reprocher.
M. ANGERS: A ce moment-là, je vous dis que cela viole la
liberté des parents qui ne veulent pas cette structure.
M. CARDINAL: C'est votre opinion.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Ahuntsic.
M. LEFEBVRE: M. le Président, on a bien raison de dire que la vie
a encore ses bons moments. J'attire l'attention des personnes présentes
sur le fait que jamais ministre, à ma connaissance, n'a autant tendu les
bras vers l'Opposition pour qu'elle vienne à son secours. Il y a une
justice immanente: Le ministre sait fort bien qu'il appartient à un
groupement politique qui a largement fait les dernières élections
en répandant la rumeur à travers la province que le gouvernement
libéral avait enlevé les crucifix des écoles.
M. CARDINAL: M. le Président.
M. LEFEBVRE: M. le Président, la liberté de parole
existe-t-elle?
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. CARDINAL: Oui, je vous laisse repartir tout de suite après. Le
député d'Ahuntsic, à la dernière séance ou
à cette séance, sauf de très légers écarts,
a été remarquable par son objectivité et l'absence de
relents partisans dans ses discours. J'aimerais qu'il délaisse les
sentiers qu'il est en train de prendre pour revenir à ceux qu'il avait
jusqu'à présent conservés avec tant de
sérénité.
M. LEFEBVRE: Je remercie le ministre de ses implorations. Mais
justement, il m'a tellement félicité, la dernière fois,
que j'étais devenu suspect pour mes collègues. Blague à
part, M. Angers me connaît bien, il y a vingt ans que nous croisons le
fer ensemble car nous avons rarement été d'accord. Pour ma part,
j'ai une expérience assez concrète de l'administration scolaire
à Montréal, et également des problèmes d'Eglise,
car je suis moi-même, comme lui, un catholique pratiquant.
Je laisserai au ministre le plaisir de se défendre parce que je
pense que la médecine que son groupe nous a servie, c'est à lui
de trouver le moyen de s'en sortir. Quant à moi, je pense que M. Angers
semble connaître assez mal la situation scolaire à
Montréal. Je pourrais facilement répliquer sur un bon nombre de
points qu'il a mentionnés, mais, encore une fois, c'est le projet de loi
du gouvernement, que le gouvernement s'explique. Quant à nous, lorsque
viendra le temps de voter en Chambre, nous aurons à voter, mais
malgré les invitations fort aimables du ministre, je ne ferai pas son
travail.
M. le Président, je voudrais féliciter M. Angers et la
Société Saint-Jean-Baptiste sur un paragraphe en particulier,
à la page 6 du rapport, concernant la formation du conseil scolaire. Je
crois que nous sommes tout à fait d'accord, et j'apprécie
hautement le fait que la Société Saint-Jean-Baptiste ait
jugé opportun de souligner ce point. J'espère que le ministre
finira par entendre raison parce que c'est l'un des points sur lequel, je le
répète, il y a unanimité.
J'aurais une question à poser à M. Angers au sujet du
paragraphe 2 de la page 19. Vous dites, dans votre mémoire, que les
commissions scolaires soient les vrais propriétaires des biens
immobiliers qui leur sont nécessaires pour l'accomplissement de leurs
fonctions, mais que le Conseil scolaire de l'île jouisse du pouvoir de
centraliser les renseignements sur l'usage de ces biens et d'intervenir pour en
reviser la distribution en cas de besoin.
M. Angers, voulez-vous indiquer par là que, selon vous, les
commissions scolaires devraient conserver la juridiction principale en ce qui
concerne la construction, la planification, la construction des écoles,
leur entretien et le reste?
M. ANGERS: Pas nécessairement la construction, la
propriété des écoles construites et leur administration
pour le fonctionnement de l'école. Autrement dit, qu'elles aient leurs
biens à elles et qu'elles puissent les utiliser sans être
obligées tout le temps d'avoir des références à un
organisme central qui est propriétaire et qui peut intervenir de toutes
sortes de façons. Le problèmes qui se pose, je pense,
problème qui a été posé par tous, c'est qu'il y a
des inégalités à Montréal, il y a des
sous-utilisations, des surutilisations, il faut que ça soit
compensé. Je dis donc: Trouvons un moyen administratif de compenser,
mais laissons aux commissions scolaires, une fois que la compensation est
faite, une fois qu'on l'a revisée, laissons-les avec leurs biens
administrer leurs écoles et fonctionner normalement.
M. LEFEBVRE: Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a une sorte
d'anomalie à séparer la fonction de planification de la
construction et de l'entretien, par exemple, et la propriété,
parce que si vous donniez effectivement, à chacune des onze vous,
vous n'avez pas parlé
de chiffres, mais je suppose que vous êtes d'accord avec un
chiffre variant de 7 à 13, peu importe...
M. ANGERS: Je n'ai pas parlé de chiffres parce que, étant
donné les suggestions que nous faisons sur le plan confessionnel, il
peut y en avoir une ou deux de plus.
M. LEFEBVRE: Bien disons qu'on parle entre 7 et 13, peu importe, le
raisonnement, à mon avis, serait le même.
M. ANGERS: C'est ça.
M. LEFEBVRE: Ce que je veux prouver, au fond, c'est qu'une fois de plus,
le ministre n'a pas fait son travail. Si le ministre avait fait son travail,
à mon humble avis, un groupe responsable comme la Société
Saint-Jean-Baptiste aurait fort bien compris les raisons pour lesquelles il est
impérieux que ce soit le conseil scolaire qui ait la
responsabilité et de la planification de la construction et de
l'entretien des écoles. Quiconque est moindrement familier vous
n'êtes pas tenu de l'être, mais le ministre est tenu de
l'être quiconque est le moindrement familier avec les
problèmes d'administration scolaire admettra, je pense, que vous pouvez
difficilement séparer les fonctions d'entretien et de construction, par
exemple.
Je veux dire que, quand vous avez la responsabilité d'un certain
nombre de bâtiments, vous devez avoir un personnel, vous devez avoir tout
un système pour l'entretien, et si vous avez la propriété
d'un certain nombre de bâtiments, vous avez également le droit
d'en disposer. Ce que je veux dire, c'est que cette fonction de
répartition des équipements, ça m'apparaît à
moi et, à mon avis, ça devrait apparaître, mais c'est au
ministre à faire la preuve. Or, je prétends, depuis le
début de ces audiences, que le ministre n'a pas accompli son travail,
qu'il n'a pas exposé à la population les raisons profondes de
certaines dispositions et, en particulier de celles-là, que nous
approuvons, nous, sans réserve, parce que nous la croyons conforme
à toutes les études qui ont été faites, et nous la
croyons émerger directement, si vous voulez, des
nécessités administratives. Mais ce n'est pas vous que je
blâme, je blâme le ministre de ne pas avoir suffisamment fait
comprendre à la population pourquoi il fallait un conseil scolaire qui
ait telle et telle juridiction; encore une fois, je pense que sur ce
point-là, la preuve était très facile à faire. Le
ministre ne s'est même pas donné la peine de le faire.
M. ANGERS: Je ne la vois pas beaucoup, moi, parce que, entre la
construction et l'entretien, la construction, ça se fait une fois pour
toutes. Que les commissions scolaires transmettent leurs besoins à un
conseil scolaire qui veut bâtir des écoles, je vois que ça
peut se faire, mais que les commissions scolaires soient ensuite
propriétaires de leurs biens et fonctionnent avec, parce qu'au point de
vue de l'efficacité administrative, ça me paraît
supérieur, je ne vois pas d'objection à ça, sauf les
problèmes qui surviennent de temps à autre.
M. LEFEBVRE: Mais pourquoi, dans un gouvernement, M. Angers...
M. ANGERS: L'Ecole des hautes études, par exemple, ce n'est pas
le conseil d'administration qui l'a construite, c'est le gouvernement, puis
celui-ci l'a donnée à un conseil d'administration qui s'en
sert.
M. LEFEBVRE: Pourquoi, dans un gouvernement comme celui du
Québec, est-ce le ministère des Travaux publics qui est
chargé des constructions pour tous les autres ministères? C'est
parce qu'autrement, chaque ministère devrait avoir un service de
construction et d'entretien des bâtisses. Je veux dire que ça
m'apparaît une chose relativement simple, mais, encore une fois, je
prends ça à titre d'exemple. J'aurais pu en prendre de plus
compliquées, mais j'ai plaisir à voir le ministre se
débattre avec ces problèmes. Je ne veux pas l'aider outre mesure,
ce n'est pas ma fonction, mais il me semble que, sur un point aussi simple, son
message aurait été facile à communiquer à
l'ensemble de la population. Vous n'êtes pas le seul groupe, il y en a
plusieurs qui ont dit ça, que ce serait mieux que les bâtisses
soient administrées ou les écoles soient propriété
des commissions scolaires. Encore une fois, je pense qu'avec les renseignements
dont le ministre dispose, la preuve est très facile à faire que,
tout logiquement et indépendamment de toutes les autres
considérations sur la confessionnalité, la langue, etc., du
strict point de vue administratif, les équipements scolaires, les
bâtiments c'est absolument logique, à mon avis, que ce soit la
responsabilité du conseil scolaire. Je prends ça à titre
d'exemple.
M. CARDINAL: Me permettez-vous, M. le Président, à ce
sujet-là, d'intervenir?
M.ANGERS: Je ne vois pas du tout cette logique-là moi.
M. CARDINAL: Je passerai au député d'Ahuntsic mon agenda
des rencontres à Montréal, parce que c'est là que le
projet s'explique. D'ailleurs, lui-même m'a vu à une
émission et a participé avec moi à une autre
émission; à ce moment-là, je lui ai parlé des
groupes que j'avais rencontrés et des émissions que j'avais
faites. Je n'accepte pas ce reproche. On dit que d'autres groupes ont soutenu
la même chose; à ma connaissance, il y a les parents catholiques,
l'Association des principaux, tantôt et avec beaucoup de nuance
et la Société Saint-Jean-
Baptiste. Dans les deux cas, la Société
Saint-Jean-Baptiste et les parents catholiques ont la même opinion pour
la même raison fondamentale qui revient à ceci: c'est que dans
leur système de pensée et vous me corrigerez si
j'interprète mal l'école catholique se place dans une
structure catholique avec des bâtiments qui lui appartiennent, un
équipement qui lui appartient, pour qu'il y ait un contrôle
presque parfait sur les enseignants, qui devraient être eux-mêmes
catholiques, sur les manuels, qui devraient être catholiques, et sur
l'édifice. On le voit dans votre mémoire, l'on conçoit
difficilement qu'il y ait, dans un même édifice, d'autres
personnes que des enseignants et des étudiants catholiques. Parce
qu'à compter du moment, dans ce système de pensée,
où l'on mêle, dans une même école, des gens qui sont
catholiques, protestants et autres, l'on n'a plus une école catholique
au sens où on interprète, où l'on croit interpréter
la position de l'Eglise à ce sujet. La question des bâtiments en
soi, je l'ai dit tantôt à l'association qui vous a
précédés, n'apparaît pas, dans le système que
préconise le projet de loi 62, pouvoir être changée.
La vie de tous les jours au ministère de l'Education, comme la
vie de tous les jours à la CECM lorsque le député
d'Ahuntsic y était, nous prouve, au contraire, que ce n'est pas le fait
de construire un édifice, de le transporter après à un
CEGEP, à une université ou à une commission scolaire qui
règle le problème, puisque la vie étudiante est
continuellement mouvante et que ce qui est exact, comme équipement dans
un territoire donné aujourd'hui, pour satisfaire une population
donnée, divisée selon la langue, la religion ou pas, mais
divisée sur le territoire donné, dans dix-huit mois ou dans deux
ans ou dans trois ans peut être complètement renversée
à cause des mouvements de population. Pourquoi les Italiens se sont-ils
dirigés vers Saint-Léonard? Pourquoi les francophones ont-ils
quitté Notre-Dame-de-Grâce et que beaucoup de gens qui
étaient de nouveaux arrivés se sont lancés dans l'ouest de
Notre-Dame-de-Grâce? Pourquoi Outremont, qui a été
longtemps une ville où il y avait une majorité anglophone,
est-elle devenue une ville à majorité francophone? Pourquoi, dans
le nord de Montréal, se sont établis surtout, à un moment
donné, des Canadiens français lors de l'expansion de la ville de
ce côté? Il y a une multitude de raisons sociologiques, mais ces
raisons font aujourd'hui que ça varie. Le nombre d'étudiants et
la natalité dans chacun de ces groupes, d'ailleurs, sont variables. Ils
sont variables d'un groupe à l'autre, ils sont variables dans le
même groupe, de périodes à d'autres. Si bien que ce qu'on
voit aujourd'hui, ce n'est pas la résultante de cent ans. Certains des
problèmes constatés aujourd'hui dans les commissions scolaires
d'Outremont, de ville Mont-Royal et de Montréal sont les
résultantes, tout simple- ment, des cinq dernières années.
Quand vous constatez que la division territoriale où des commissions
scolaires sont propriétaires conduit à des situations aussi
ridicules qu'il n'y a pas d'écoles polyvalentes ni pour les
garçons ni pour les filles dans un territoire comme celui d'Outremont,
c'est pour des raisons qui sont tout autres, c'est à cause du rôle
des institutions privées sur ce territoire-là, par exemple. S'il
y a quelque chose que je veux prouver, c'est qu'il y a toujours chaque fois un
groupe de raisons prévisibles ou imprévisibles qui fait que les
équipements doivent au sens français du terme
être très souples et doivent pouvoir servir à toute la
communauté, parce que payés par toute la communauté. Si
l'on poursuivait plus loin le raisonnement et que les commissions scolaires,
sur une base confessionnelle, devaient posséder leurs immeubles, il
faudrait que la taxation le demeure, parce qu'on n'admettrait pas, dans aucun
groupe, que les groupes fassent de la péréquation pour les
immeubles et l'on retomberait dans les situations où nous sommes
actuellement, ou certains groupes auraient un équipement meilleur qu'un
autre groupe. C'est le point fondamental de l'argumentation. Il a
été dit à quelques reprises, il sera encore
développé je vous le promets dans les semaines qui
vont venir. Je suis d'accord avec le député d'Ahuntsic sur un
point, il y a plusieurs choses dans le bill 62 il est long et
expliquer chacun de ces articles à la population, c'est une chose qui
est peu facile avec les moyens d'information que nous avons. Ce qui est
possible, c'est plutôt de répondre aux objections de chacun des
groupes ou de participer avec chacun des groupes à l'élaboration
d'amendements ou à l'étude de certains sujets. J'ai
été heureux que l'Alliance des professeurs, par exemple, m'ait
invité, avec d'autres personnes qui n'étaient pas du tout du
gouvernement, à leur mini-congrès pour avoir une réaction
de leurs membres avant de se présenter devant la commission permanente.
Tout en n'acceptant pas le reproche de M. Lefebvre qui, étant un habile
politicien, sait faire de tout bois flèche, je pense que, sur le plan de
l'équipement, vous êtes libres, à la Société
Saint-Jean-Baptiste, et vous, M. Angers, de ne pas accepter notre raisonnement,
mais sur ce plan du système de commission scolaire unique, avec le
conseil métropolitain, et avec la situation qui existe à
Montréal, et avec le système de taxation qui est modifié,
ceci se rattache ensemble. L'on ne peut pas changer ceci, à moins,
encore une fois, de changer la substance du projet de loi, ou les moyens
mêmes d'atteindre à certains objectifs, dont
l'égalité des services dans tous les domaines.
M. ANGERS: M. le Ministre, je dois dire d'abord que vous n'avez pas du
tout bien traduit notre pensée. Cette remarque-là, qui est dans
une partie particulière, n'a aucun rapport
avec la confessionnalité de l'école, mais bien avec
l'efficacité administrative. En somme...
M. CARDINAL: Cela apporte une précision.
M. ANGERS: ... qu'est-ce qui se passe dans la loi que vous faites? Vous
prenez les commissions scolaires anciennes et vous répartissez leurs
pouvoirs en trois catégories: une catégorie au conseil scolaire,
une autre à la commission scolaire et une catégorie au
comité d'école.
M. CARDINAL: Grosso modo.
M. ANGERS: Alors, en somme il s'agit de savoir si on a de la souplesse
dans la façon de régler l'attribution des pouvoirs ou si l'on
n'en a pas. Et dans les arguments que vous apportez, moi, avant d'être
convaincu parce que j'ai l'expérience de ce genre de
travail-là je demanderais à avoir, non pas seulement des
raisonnements abstraits sur des situations, mais des données
concrètes pour voir quelle importance réelle ces données
concrètes ont dans le temps. Souvent, on raisonne sur ces
problèmes-là et on centralise trop. On pose des arguments trop en
général et il n'y a pas de relation de cause à effet entre
les problèmes. Par exemple, à Saint-Viateur d'Outremont, il n'y a
pas d'école polyvalente, pour prendre un des points que vous avez
donnés. Il n'y a pas de relation de cause à effet entre cette
situation-là et le fait que les commissions scolaires seraient
propriétaires de leurs biens. C'est un autre problème.
Alors, comme je vous le dis, si je devais prendre tout ce que vous avez
dit et en faire la discussion serrée sur le plan technique, on verrait
qu'un bon nombre des arguments que vous avancez en faveur de cette formule
n'ont pas trait au véritable problème. Et au fond ce seraient les
analyses concrètes qui permettraient de voir si le
phénomène est si important, en fait, chaque année...
M. CARDINAL: Si important, chaque année! Nous le savons, au
ministère, et je vous invite à la direction
générale de l'équipement, à voir tous nos dossiers,
à voir quelle est la situation à Montréal.
M. ANGERS: ... et voir si ça implique cette solution-là,
nécessairement. C'est là qu'est le point.
M. CARDINAL: Cela, c'est un autre point. M. ANGERS: Alors, c'est un
raisonnement...
M. CARDINAL: C'est un point que j'appelle de voies et moyens où
la discussion, évidemment, a cours...
M. ANGERS: Pas seulement d'opinions, de nécessité.
M. CARDINAL: Justement c'est là... c'est une opinion.
M. ANGERS: C'est sur ce point-là que j'en discute, et je ne suis
pas convaincu, moi, de la nécessité de donner la totale
propriété au conseil scolaire...
M. CARDINAL: Pardonnez-moi, M. Angers, comme je le disais
tantôt,...
M. ANGERS: Par les arguments.
M. CARDINAL: ... j'ai déjà discuté avec vous
d'autres sujets; nous nous sommes trouvés parfois du même
côté de la table, parfois à des côtés
différents, dans des circonstances différentes. Je sais que vous
n'êtes pas à bout d'épuiser vos arguments, que vous
n'êtes pas facile à convaincre, et je respecte vos opinions, mais
je pense qu'il faut regarder l'heure et ne pas faire un débat à
deux ou à trois sur chacun de ces points-là.
M. ANGERS: Parce qu'il faudrait évoquer les problèmes que
ça va poser, dont on ne parle pas à l'heure actuelle sur le plan
administratif.
M. LEFEBVRE: Sur la question de fond soulevée par M. Angers, le
problème de la confessionnalité, j'avais lu le mémoire, je
l'ai réentendu, j'ai un certain nombre de notes. En temps et lieu,
peut-être que je ferai connaître mon opinion là-dessus, mais
pour le moment, la remarque que je me permettrais de faire à M. Angers,
c'est que le député de Montmorency, que vous avez invoqué
comme autorité tout à l'heure pour juger de l'évolution du
sentiment religieux à Montréal, n'est peut-être pas
l'autorité la plus compétente. Je crois que la
spécialité du député de Montmorency ce serait
plutôt de juger la fidélité du gouvernement de l'Union
Nationale en matière de confessionnalité. Là-dessus il est
pas mal bon.
M. TREMBLAY (Montmorency): M. le Président je suis tout à
fait surpris que...
M. ANGERS: Remarquez bien qu'encore là...
M. TREMBLAY (Montmorency): ... l'Opposition officielle libérale
ne soit pas tout à fait d'accord avec le gouvernement sur la question de
la confessionnalité. Si elle réserve son opinion, ce sera tout
simplement pour confirmer tout à l'heure qu'elle approuve
intégralement les politiques du gouvernement, en l'occurrence.
J'entendais le ministre, tout à l'heure, invoquer cette consultation des
parents. Je me demande si cette consultation que l'on invoque, on en a toujours
tenu compte.
Il y a eu le rapport Parent, le Conseil supérieur de
l'éducation, de multiples occasions
en fait, où ces consultations des parents sont restées
lettre morte; on n'en a pas tenu compte du tout par la suite.
Après avoir discuté et après avoir eu de longs
palabres à l'occasion de l'étude de cette loi, il ne faudrait pas
qu'il n'y ait absolument rien de positif de fait dans le sens de la
volonté de la majorité et de la volonté des parents.
Enfin, vous avez affirmé que, pour certaines questions, la commission
scolaire unifiée, c'était un principe fondamental et essentiel
auquel vous teniez dans cette loi. La question confessionnelle est un aspect
fondamental et essentiel. Même si je ne suis pas une autorité en
matière confessionnelle, j'ai tout de même des convictions; je
pense que le député d'Ahuntsic en possède lui aussi.
J'espère que le gouvernement saura reconnaître, enfin, la valeur
des exposés des organismes qui représentent les parents et qui
fournissent ici des études sur la question. Alors, M. le ministre,
indépendamment de ce que peut dire le député d'Ahuntsic,
qui a droit à son opinion que je considère valable de temps
à autre, j'espère que le gouvernement saura apporter, à la
lumière des exposés qui seront faits, des améliorations
que tout le monde estime nécessaires à cette loi no 62.
M. TETLEY: M. le Président, puis-je poser une question à
M. Angers? D'abord, j'ai bien aimé votre mémoire, M. Angers, et
surtout vos suggestions au sujet du conseil de l'île de Montréal,
etc. J'espère que le ministre va les suivre, mais, à la page 19,
troisième conclusion, vous préconisez plusieurs commissions
scolaires. Combien de commissions scolaires préconisez-vous?
Conserveriez-vous les 42 qui existent à l'heure actuelle sur
l'île?
M. ANGERS: Non. Non. Nous n'avons pas pu déterminer de nombre,
parce qu'avant de déterminer un nombre il faudrait savoir combien de
parents veulent des commissions scolaires catholiques et combien n'en veulent
pas, etc. Quand on connaîtra la volonté des parents, on pourra
construire. Je crois que c'est comme cela qu'on doit travailler. On doit
construire quelque chose qui est fonctionnel et qui, administrativement,
donnera le meilleur rendement possible. Il y a une allusion, un peu avant dans
le mémoire, au fait qu'on pourrait garder les 11 commissions scolaires
actuelles comme base et en faire 11 commissions scolaires pour les catholiques
de langue française ou selon la majorité, avec une
possibilité de dissidence. La dissidence peut être
rattachée à une autre commission scolaire. Alors, là, cela
peut être deux ou trois commissions scolaires de plus. Ça
dépend du nombre. Il faudra les dénombrer. Le problème
n'est pas aussi sombre qu'autrefois. Il n'y a plus seulement des catholiques et
des protestants; il y a peut-être des catholiques qui veulent des
écoles non confessionnelles et des protestants qui veulent des
écoles non confessionnelles.
Il faudrait connaître les voeux de la population pour
déterminer convenablement les structures. Il faudrait réduire le
nombre des commissions scolaires pour que cela ne soit pas
émietté et faire en sorte qu'elles ne soient pas trop
grandes, non plus, pour qu'elles puissent être assez près des
problèmes et administrer d'une façon convenable. Il faudra
éviter l'excès de centralisation, en somme.
M. TETLEY: Une question supplémentaire. Je crois que plusieurs de
vos membres sont favorables à l'unilinguisme. Lorsque vous parlez d'une
commission scolaire confessionnelle catholique, est-ce que ce serait
français ou anglais ou les deux ensemble?
M. ANGERS: Comme je vous l'ai dit, avec la loi no 63, que nous
n'acceptons pas, les choses ne peuvent pas être définies. Toutes
les commissions scolaires devraient être fondamentalement, à mon
sens, françaises. Les Anglo-Canadiens, dont les privilèges
devraient être définis d'une façon claire, devraient
utiliser leurs privilèges par voie de dissidence. Au fond, ce serait le
régime d'école commune, tel qu'il existe dans le reste du
Québec, avec, cependant, une définition très claire de ce
qu'est l'école pour les anglophones, du programme qu'on y donne de ceux
qui ont le droit de la fréquenter. Seulement, à l'heure actuelle
par la loi 63, on a donné à tous les parents la liberté
totale de choisir. Même les Canadiens français peuvent demander
des écoles anglaises.
Tout le monde peut demander des écoles anglaises. Tout le monde
peut demander des écoles françaises. Alors, on est dans un
fouillis indescriptible, en somme, par rapport au Québec qui doit rester
français et qui, pour la première fois de son histoire, est
juridiquement bilingue, je le répète, à mon sens, parce
qu'il y a égalité absolue du choix des parents dans la loi. Sans
rien enlever aux privilèges légitimes de la minorité
anglophone, cela pourrait être réglé autrement. Ensuite, on
pourrait définir les commissions scolaires. Comme c'est là, vous
réclamez, vous, les anglophones, des commissions scolaires anglaises.
Vous voulez un secteur linguistique. Il va donc falloir des commissions
scolaires anglaises d'un côté, des commissions scolaires
françaises de l'autre côté.
M. TETLEY: Oui, mais c'est moi qui pose les questions.
M. ANGERS: Si, justement, la loi définit des privilèges,
on pourrait avoir une loi comme dans l'Ontario. Il y aura des commissions
scolaires qui seront la commission scolaire commune. Ensuite, on permettra
à un certain nombre de contribuables anglophones de demander soit des
classes anglaises, soit des écoles anglaises. Comme l'Ontario le fait
pour les écoles françaises.
M. TETLEY: Donc, vous aurez au moins autant de commissions scolaires
qu'il en existe à l'heure actuelle et plusieurs...
M. ANGERS: Quarante-deux?
M. TETLEY: Quarante-deux. C'est ce qu'il semble, avec les dissidences,
parce que même aujourd'hui, il y a des commissions scolaires catholiques
qui sont en charge d'écoles françaises ou d'écoles
anglaises et vous aurez, suivant votre système de l'unilinguisme, si je
comprends bien je ne le juge pas, je voudrais tout simplement le
comprendre vous aurez aussi des dissidents catholiques, anglophones dans
des districts comme Notre-Dame-de-Grâce qui est à 75 p.c.
anglophone. Vous aurez, apparemment, des dissidents catholiques francophones.
Donc, vous aurez...
M. ANGERS: Pas des dissidents.
M. TETLEY: Oui, enfin, vous aurez deux systèmes au moins. Vous en
aurez peut-être plus de quarante-deux.
M. ANGERS: Non, c'est une question de division territoriale et de
grandeur pour chaque commission scolaire.
M. TETLEY: Oui.
M. ANGERS: En somme, encore une fois, on ne peut pas faire ça
dans l'abstrait.
M. TETLEY: Non, c'est ça.
M. ANGERS: Il faut avoir des normes et, après cela, on
bâtit une structure qui est administrativement satisfaisante avec les
services qu'on veut donner. Comme dans toute entreprise, on définit le
produit qu'on veut fabriquer et, ensuite, on construit une structure
administrative pour le fabriquer.
Or, quand on raisonne dans l'abstrait comme ça, on peut
multiplier à l'infini les commissions scolaires. Mais, dans la pratique,
je ne vois pas qu'il y ait besoin d'en avoir tant que ça, parce que
justement cela va se réduire à des groupes dissidents dans
certains coins, qui peuvent être ralliés parce qu'ils ne seront
pas assez nombreux dans un coin. On peut faire une plus grande commission
scolaire pour toute l'île de Montréal pour les catholiques, par
exemple, pour les catholiques anglais si leur nombre est tel que cela
demande...
M. CARDINAL: Si vous me le permettez, il n'y a rien d'abstrait ici, si
on part des travaux...
M. ANGERS: C'est ça.
M. CARDINAL: Le journal des Débats du 11 donne toutes les
populations anglaise, fran- çaise, catholique, protestante, etc., en
annexe. La division qui a été faite et qui peut être
modifiée, je l'ai dit, n'est pas faite à partir de
théories; elle est faite à partir des statistiques qui peuvent
être obtenues à Montréal, qui existent à la CECM,
qui existent au Protestant School Board of Greater Montreal, qui existent au
West Island et qui existent sur toute l'île de Montréal.
C'est-à-dire que...
M. ANGERS: Dans la discussion, il ne s'agit pas des structures actuelles
telles que vous les avez définies pour des commissions scolaires
unifiées.
M. CARDINAL: Non.
M. ANGERS: Il s'agit de la division territoriale que l'on ferait pour un
système où il y aurait des dissidences.
M. CARDINAL: Oui, d'accord, mais seulement, M. Angers et M. Tetley, il y
a une chose...
M. ANGERS: Il faudrait faire le recensement pour le savoir...
M. CARDINAL: ... il y a une chose sur laquelle je crois devoir revenir,
et je pense que nous devrons y revenir à chacune des séances de
la commission et à l'occasion de chacun des mémoires.
J'ai toujours apporté avec moi la loi 63 et, chaque fois qu'il y
a des questions de posées au sujet des garanties linguistiques ou des
garanties religieuses, je rappelle quand même ceci: C'est qu'après
l'adoption des deux lois nous serons dans un seul système de
législation. Quand dans un mémoire, par exemple ça
s'est présenté à cette table qu'est-ce qui nous est
dit? Qu'il peut y avoir des écoles françaises et des
écoles anglaises, des écoles catholiques, des écoles
protestantes; c'est que l'article 2 du projet de loi 63 modifiait
déjà l'article 203 je m'excuse de le
répéter, mais je suis obligé d'y revenir et le
projet de loi 62 modifie lui-même en entier l'article 203. Le total de
l'article 203, du projet de loi 63 et du projet de loi 62 dit, en
résumé ce n'est pas mot à mot : La commission
scolaire doit donner un enseignement français, doit donner un
enseignement anglais, doit donner un enseignement catholique, doit donner un
enseignement protestant, doit donner un enseignement autre. C'est le total de
ça qui fait que nous en avons discuté à la
première séance il peut y avoir plusieurs combinaisons de
ces choses-là. Mais...
M. ANGERS: Nous n'acceptons pas le bill 63.
M. CARDINAL: Vous ne l'acceptez pas, d'accord, mais je dis ceci, c'est
qu'il faut le prendre dans un tout. Dans un sens, vous avez
raison d'invoquer la loi 63; on ne peut pas, en discutant du bill 62,
faire comme si elle n'existait pas, elle existe.
M. LEFEBVRE: C'est ça, elle existe.
M. le Président, là où il y a un "credibility gap"
si on me permet ce mot de Bossuet c'est que le ministre, en
même temps qu'il affirme que le bill 63 prévoit quatre types
d'écoles, se refuse entièrement, dans la logique de son bill 62,
à fournir des explications concrètes sur les supports
pédagogiques qui seront donnés à ces types
d'écoles.
Le ministre se place dans une position absolument indéfendable,
à mon avis, et c'est là que les gens je suis convaincu,
j'ai discuté privément et publiquement avec plusieurs groupes et
de langue française et de langue anglaise et personne ne croit à
la bonne foi du ministre sous ce rapport, c'est mon expérience et je le
dis sans esprit partisan. Le ministre est bien plus miné dans l'opinion
publique qu'il semble le croire, et je commence à me demander s'il n'est
pas en train de se miner dans Bagot en plus. Mais ça, c'est son
problème. Mais, sur la question fondamentale, encore une fois, le
ministre vient de faire un raisonnement. M. le Président, un enfant de
neuf ans à qui vous diriez: Tu vas avoir quatre sortes d'écoles,
cela il le comprend. On dit: On comprend, d'accord. C'est ce que le bill est
censé dire, d'après lui. Ce n'est pas tout à fait si clair
que ça, mais disons que ce serait clair.
Maintenant, une école, ce n'est pas un bloc, ce n'est pas un
jouet, c'est une institution qui doit dispenser un enseignement. Or, les gens,
de très bonne foi, disent au ministre: Montrez-nous l'article qui nous
prouve que nous allons avoir les quatre types d'écoles avec un support
pédagogique convenable.
Que lisez-vous? Il y a un article qui dit: Dans chaque commission
scolaire, il y a un directeur général, assisté d'un
adjoint catholique, d'un adjoint protestant et d'un adjoint ni catholique ni
protestant. Mais, où sont les garanties linguistiques sur ce point
là? Aussi bien pour les Français que pour les Anglais, il n'y a
pas de garanties linguistiques. Le ministre dit: Vous connaissez la population,
vous savez comment la population est constituée. Je regrette, mais,
quand vous allez à sa carte et aux onze districts, vous devez vous posez
des questions. Il y a des choses qui sont évidentes. C'est pourquoi nous
avons dit: Nous allons poser des questions aux gens, nous allons bien voir! Le
ministre devrait se rendre compte je ne veux pas anticiper les
réponses des gens mais ça m'étonnerait que les gens
ne concluent pas à l'unanimité, à l'intérieur,
encore une fois du schèma proposé par le ministre.
Si l'on n'accepte pas le schèma, c'est une autre affaire, A
l'intérieur du schèma qui est proposé par le bill 62, la
logique la plus élémentaire voudrait que l'on assure, au niveau
des commissions scolaires, une direction pédagogique correspondant aux
quatre types d'écoles. Autrement, on leurre les gens ou on leur cache
quelque chose.
M. Angers a dit, dans son mémoire, que, d'après lui, le
ministre cachait quelque chose. C'est également l'opinion des
Anglo-Canadiens. Tout le monde a l'air d'être d'accord pour dire que le
ministre ne joue pas cartes sur table.
M. CARDINAL: M. le Président, je regrette. D'après
l'article 2 du bill 63, la commission scolaire est obligée de "prendre
les mesures nécessaires pour que les cours d'étude du niveau de
la première année à celui de la onzième
année inclusivement, adoptés ou reconnus pour les écoles
publiques catholiques, protestantes ou autres... Cela a été
prévu, à ce moment-là, dans le projet de loi no 63.
M. LEFEBVRE: On a lu tout cela.
M. CARDINAL: ..."selon le cas, soient dispensés, à tous
les enfants domiciliés dans le territoire soumis à leur
juridiction... "Il y a obligation, dans le projet de loi 63 je l'ai dit
à la fin, quand il y aura 63, plus 68 et 62 il y a obligation,
pour les commissions scolaires, dans ces lois-là, de prendre les
dispositions nécessaires pour assurer, on le dit ici, un enseignement
français et un enseignement anglais. Le bill 62 ne parle pas des
questions linguistiques, c'est exact.
Ce n'est pas parce que j'ai des idées cachées. J'ai dit
une chose, au début de la séance d'aujourd'hui. J'ai dit, au
sujet du projet de loi 63, que, la semaine prochaine, je rendrais publics les
règlements pour l'application du projet de loi 63. Le gouvernement vient
de les étudier. Ce sera connu dès la semaine prochaine, et d'ici
là, s'il y a encore des choses qui paraissent occultes, cachées,
ambiguës, etc., nous spécifierons davantage.
M. LEFEBVRE: Le ministre dit, somme toute, qu'il y a obligation pour un
soldat de faire la guerre, mais seulement, il ne donne pas de fusil au soldat.
Avec quoi fait-on la guerre quand on n'a pas de fusil? C'est exactement le
problème.
M. CARDINAL: Ne jouons pas sur les mots. M. LEFEBVRE: Non, non.
M. CARDINAL: La loi dit: la commission scolaire...
M. LEFEBVRE: Oui, la commission...
M. CARDINAL: ... avant d'accepter une loi, devra prendre les
dispositions nécessaires pour que...
M. LEFEBVRE: Bien oui.
M. CARDINAL: J'ai dit, en Chambre, qu'il y aurait des règlements
pour compléter ce projet de loi.
M. LEFEBVRE: Je comprends cela, mais vous lisez l'article, encore une
fois; tout le monde sait lire. Il n'y a pas que le ministre qui soit capable de
lire un article de loi. Vous avez un directeur général et trois
directeurs adjoints selon la confessionnalité.
M. CARDINAL: C'est 62.
M.LEFEBVRE: Il n'est pas question de langue, là.
M. CARDINAL: Non.
M. LEFEBVRE: Quelle garantie les gens ont-ils qu'il y aura les quatre
types d'écoles que vous prétendez promettre à la
population?
M. CARDINAL: Le projet de loi 63 a déjà adopté la
réglementation qui va compléter.
M. LEFEBVRE: Oui, mais dans le projet de loi 63, il n'est pas question
de direction pédagogique, voyons donc.
M. CARDINAL: C'est que vous avez tant aidé à
l'améliorer.
M. LEFEBVRE: Non, ce n'était pas un projet de loi qui
était fait pour cela; que le ministre ne cherche pas à noyer le
poisson. Le ministre est en mauvaise position.
M. LE PRESIDENT: Nous étudions le bill 62, et il faudrait s'en
tenir à cela.
M. LEFEBVRE: Il parle du bill 63 depuis dix minutes.
M. LE PRESIDENT: Je pense bien que nous avons pas mal vidé la
question en ce qui concerne le mémoire de la Société
Saint-Jean-Baptiste. Nous avons quatre autres organismes qui veulent se faire
entendre, et il est déjà bientôt cinq heures vingt-cinq. A
quelle heure reprendrons-nous?
M. CARDINAL: Nous avons convenu de reprendre à huit heures, et
c'est ce que nous allons faire. Il reste cinq minutes si d'autres
députés où d'autres personnes veulent s'exprimer sur le
mémoire qui vient d'être présenté.
M. ANGERS: M. le Président et M. le ministre, je veux vous
remercier de nous avoir entendu.
M. CARDINAL: Nous vous remercions d'être venus. Malgré les
divergences d'opinion, votre mémoire est reçu comme les autres.
La discussion, M. Lefebvre l'a dit, aura lieu largement bientôt. Alors,
nous suspendons jusqu'à huit heures.
M. LE PRESIDENT: Huit heures.
Reprise de la séance à 20 h 6
M. CROTEAU (président de la commission de l'Education): A
l'ordre, messieurs! Nous allons entendre le Congrès juif canadien. Je
crois que c'est M. Morton Bessner qui est...
M. BERGER: Mon nom est Monty Berger, et je vais identifier les membres
ici.
M. PEARSON: Je voudrais faire une suggestion, si la commission est
d'accord c'est libre à elle une suggestion qui aurait pour
effet, peut-être, d'accélérer les travaux de la commission.
Cet après-midi, on a entendu à peine deux organismes publics
venus présenter leur mémoire; pourtant, plusieurs avaient
été convoqués. Alors, ça n'a pas de bon sens.
Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité que les organismes qui
veulent se faire entendre, si le mémoire a une certaine longueur, qu'il
ne leur soit pas nécessaire, une fois identifiés, de le lire au
complet, mais que le mémoire soit automatiquement inscrit au journal des
Débats, que la personne qui représente l'organisme public en
fasse un bref résumé, peut-être de cinq à dix
minutes au maximum, qu'elle lise les principales recommandations et, ensuite,
qu'on passe à la période des questions? Lorsqu'on arrivera
à la période des questions, les arguments invoqués dans
les mémoires pourront être invoqués par celui qui
représente tel organisme en particulier pour répondre aux
questions, ce qui aurait pour effet de réduire sensiblement la longueur
de la lecture des mémoires.
Qu'en pensez-vous?
M. LE PRESIDENT: Vous êtes d'accord? M. CARDINAL: D'accord.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je crois que la suggestion de mon
collègue est excellente. Mais, je pense que cela serait important que
nous entendions je n'aurais pas d'objection à ce que nous
prenions deux ou trois minutes pour ça quelques-uns des
porte-parole des groupes qui sont ici ce soir. Remarquez que je pense que c'est
une suggestion qui pourrait difficilement s'appliquer ce soir, puisque la
procédure n'était pas établie.
Mais, en fait, ce que le député de Saint-Laurent propose,
c'est en pratique ce qui se fait, je crois, devant beaucoup de commissions
royales, où les gens qui viennent témoigner tiennent pour acquis
que les membres de la commission ont déjà lu leur mémoire.
Mais, ceci ne pourrait être valable, à mon humble avis,
qu'à l'avenir, parce qu'en toute humilité je le dis, en
tout cas, pour moi; d'ailleurs, je n'ai pas pu le lire, je viens de le
recevoir, votre mémoire. Alors, j'ai l'impression qu'il serait difficile
d'appliquer ça ce soir mais à l'avenir, si personne ne se
sent vexé, je pense que la suggestion du député de
Saint-Laurent est excellente.
M. CARDINAL: Oui, j'aurais deux choses à ajouter, et c'est dans
le même sens. Ceci est arrivé à chacune des séances,
et, malheureusement ce soir, je devrai quitter à dix heures pour un
conseil des ministres. Nous reprendrons mercredi le 25. A cause de la
période des questions, ce sera vers quatre heures, plus ou moins,
surtout que nous en serons au début de la session. Nous devrons ajourner
vers six heures, mercredi. Nous avons environ 70 mémoires. J'ai
déjà, au ministère, les mémoires de certaines
associations; ils n'ont pas été remis aux membres de la
commission. Pour ma part, ces mémoires-là, je suis prêt
à les remettre au secrétaire de la commission pour qu'on les
polycopie.
Ce soir, ce qui m'embarrasse, c'est que certaines personnes qui sont
venues aujourd'hui de Montréal ou d'ailleurs avaient l'impression
qu'elles pourraient avoir l'occasion de s'exprimer. Nous sommes pris entre deux
situations: ou bien nous écoutons un mémoire, un mémoire
et demi ou deux mémoires et ceux qui sont venus devront retourner sans
s'être exprimés, revenir le 25 et accepter le même risque
ou, au contraire, nous faisons un compromis et nous divisons deux heures entre
je ne sais combien de personnes. S'il y en a quatre, une demi-heure pour
chacune, quitte à ce que, si ces personnes n'ont pas pu se faire
entendre suffisamment, elles puissent revenir, vu non pas que nous changeons la
procédure, mais que nous proposons une nouvelle procédure. Sur ce
point, j'appuie entièrement le député de Saint-Laurent. Si
nous voulons vraiment que le projet de loi soit étudié et vienne
à l'Assemblée nationale, nous ne pouvons pas nous permettre que
chacun des mémoires prenne deux heures, ce qui est la moyenne
présentement.
En fait, le mémoire qui sera présenté au
début par le Congrès juif, j'en ai pris connaissance, mais
personnellement, je sais que les autres membres de la commission n'ont pas eu
cette occasion. Si les membres de la commission avaient à l'avenir la
possibilité de prendre connaissance des mémoires avant la
réunion, si nous avions ce qu'on appelle un document de base ou un
document de présentation résumant les mémoires et les
recommandations, nous pourrions avoir une discussion qui serait aussi
fructueuse que la lecture des mémoires. Car, les mémoires,
jusqu'à présent nous en avons entendu huit
reviennent, sauf pour des questions très techniques comme le CNR et le
CPR, sur les mêmes points, dans un sens ou l'autre ou avec des nuances et
les députés qui sont ici, que ce soit les représentants de
l'Opposition ou moi-même, nous reprenons dans le fond je ne sais
pas si M. Lefebvre acceptera ceci la même discussion sur les
mêmes sujets, que ce soit la commission scolaire unique, que ce soit
l'élection du conseil métropolitain, que ce soit le rôle de
la commission scolaire ou que ce soit la confessionnalité. Enfin, les
questions qui ont été présentées par l'Opposition
cet après-midi
sous forme de motion représentent une trame qui est l'ensemble
des questions.
Tout en respectant la démocratie, tout en ne bâillonnant
personne, tout en ne voulant pas que les gens n'aient pas l'occasion vraiment
de s'exprimer, la lecture d'un long mémoire est une chose fastidieuse
pour tout le monde; elle empêche les discussions et n'apporte
peut-être pas quelque chose de très concret à
l'étude parce que ceci se fait en dehors de la commission même. Je
ne sais pas comment nous pourrions procéder, ce soir. Je suis ouvert
à toutes les suggestions, mais comme je pense qu'il y a quatre
associations qui sont ici, peut-être pourrions-nous prendre cinq minutes
pour demander aux représentants de chacune des associations ce qu'ils en
pensent.
C'est à eux à décider. Nous, les
députés, sommes les serviteurs du public et à leur
disposition.
M. LEFEBVRE: Je suis bien d'accord. Est-ce que les quatre sont ici?
M. LE PRESIDENT: Nous avons le Congrès juif canadien, The Quebec
Association of Protestant School Administrators, The Montreal Teachers'
Association et l'Association des enseignants du Lakeshore.
M. LEFEBVRE: Est-ce qu'ils sont là, les représentants du
Lakeshore?
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. LEFEBVRE: Cela donnerait une demi-heure à chacun,
pratiquement, si on commençait tout de suite.
M. CARDINAL: C'est ça, on peut faire ça, mais s'ils sont
d'accord.
M. LEFEBVRE: Est-ce que ça vous convient ou si vous
préférez...?
M. BESSNER: Oui, M. le Président, nous allons essayer de donner
notre mémoire, sans lire tous les détails. Nous exposerons les
points considérés très essentiels, et le mémoire
sera déposé, avec la permission de la commission.
M. CARDINAL: Est-ce que l'on s'entend pour une demi-heure par
participant? On laisse cela au président. M. le Président, vous
êtes celui qui synchronise.
M. LE PRESIDENT: Très bien.
M. PEARSON: M. le Président, il a été entendu que
le mémoire lui-même va être imprimé au journal des
Débats.
M. CARDINAL: Et déposé en entier. M. PEARSON: Bon,
d'accord.
M. LE PRESIDENT: Alors, c'est très bien. M. Monty
Berger
M. BERGER: M. le Président, madame, messieurs, nous
apprécions l'occasion qui nous est offerte de présenter notre
mémoire ici. We would have been very delighted had we known of this new
suggestion because we arrived here this afternoon with a summary, and we were
advised that a document would not be in a record unless we read it
completely.
MR. CARDINAL: First of all, would you, please, give your name, surname
and so forth for the registration?
MR. BERGER: I am about to do that. My name is Monty Berger, I am
chairman of the committee on position of Jews in the education system of
Quebec, of the Quebec region of Canadian Jewish Congress. Members of our group
with me are Mr. Morton Bessner, chairman of the study committee which was
especially set up by Congress on bill 62, and Dr. Samuel Lewin, executive
director of the Eastern region of Canadian Jewish Congress.
The Canadian Jewish Congress is reprensentative of the Jewish community
through the election of delegates from organizations and the public at large by
democratic process. This is on page 4 of the "mémoire".
La communauté juive, au Québec, remonte à 1759 et
possède une histoire de plus de deux siècles d'existence
ininterrompue. Les membres de la communauté juive fournirent de
nombreuses et importantes contributions au développement de la province
de Québec dans un vaste domaine d'activités.
Quoique la communauté juive soit historiquement, dans une large
mesure, d'expression anglaise, elle rassemble actuellement une grande
proportion de gens bilingues. Depuis 1957, alors qu'une immigration en
provenance d'Afrique du Nord amena au Canada plusieurs milliers de familles
juives, dont la langue première est le français, cette tendance
vers le bilinguisme s'est régulièrement accrue. En
conséquence, la composition linguistique au sein de la communauté
juive est devenue de plus en plus variée. Un plus grand pourcentage de
la population juive s'exprime surtout en français, alors qu'une
proportion croissante de l'autre partie de la population juive est bilingue ou
étudie le français et voit à ce que ses enfants fassent de
même.
Now, I am moving to page 5, an English page:
Nevertheless, the members of the Jewish Community feel very strongly
that they and their children must retain the ability to be able to communicate
with each other in the Province of Quebec, with the rest of Canada and the
international community, in either the
English or French language, at their option. In order to be able to do
so, the educational system of the Province of Quebec, and particularly the
Island of Montreal, with respect to language, must assure the community the
availability of instruction in the language of its choice, from the first year
level to the eleventh year level inclusive in all courses of study of the
highest quality of pedagogical excellence.
Page 6, last paragraph of section 3 :
It is not our intention in this brief to deal with the impediments
presently facing the Jew in the Province of Quebec in the field of education.
We shall limit ourselves to expressing the hope that until such time as new
administrative structures are put into effect the specific problems of the
Jewish Community, as outlined in our earlier submissions, will be given due and
proper consideration by the respective authorities.
There follows a list of the many occasions in which the Canadian Jewish
Congress has submitted briefs. Our position tonight is consistent with these
various references and we wish them to be regarded as in the record. In
particular, on page 7, we wish to restate the views expressed on our submission
to the Commission of Inquiry on the position of the French language and on
language rights in Quebec : "We believe that all Quebecers must be given an
opportunity to benefit from a school system applicable to all residents without
distinction, which would provide the the necessary conditions for the
acquisition, furthering enhancement and growth of the French and English
languages and of the basis fundamental elements of cultural pluralism.
We recommend that the educational system be based on linguistic duality
within one overall school administration with the option open to all parents to
send their children to schools of their choice. The aim of all schools must be
an educational process equipping all students with a working knowledge of
French and English as languages of communication.
La communauté juive n'est pas monolithique et il existe des
différences d'opinion sur un certain nombre de questions. Des principes
généraux existent cependant, auxquels souscrit la
communauté juive dans son entité et au sujet desquels se fait une
unanimité complète, tels que l'acceptation d'une dualité
linguistique et d'un pluralisme culturel fondement de notre système
éducatif, le droit des parents de choisir la langue dans laquelle leurs
enfants seront instruits, le caractère démocratique des
structures administratives élues par un suffrage universel, la
participation des parents aux décisions prises et une
égalité d'imposition.
These are basic considerations that we feel most of the community agree
with, and Mr. Morton Bessner will detail these in more substance in a minute.
Just to sum up, it is our hope that the new prospective which is now being
projected for the school organization in Montreal will bring new vitality and
strenght to these basic concepts. However, we would underline that the road
from theory to practice is often long, unchartered and uncleared and strenuous
measures are required to secure the understanding, support and confidence of
the total population. We would urge this committee to attempt to provide
adequate information on a continuing basis to insure the confidence of all
sections of the community in the course of study and future legislation in this
subject.
I would now ask Mr. Morton Bessner to continue with our specific
recommendations.
MR. BESSNER: Posited on the background of briefs which has been
presented before and which we refer to in pages 6 and 7 of the English version
Mr. President and members of the committee a copy of which we have
deposited with the secretary of this committee, and we would ask that they be
part of the record posited against that, I think it is fair to say that
the position of the Canadian Jewish Congress is that the ultimate goal of any
amendments to the Education Act should be the establishment of a unified school
administration, democratically elected with adequate safeguards written into
Law to assure equality of educational opportunity and the necessary conditions
to provide courses of study of the highest pedagogical quality in the language
chosen by the parents.
With this basis premise in mind, the Canadian Jewish Congress submits a
number of recommandations which we consider to be essential to the development
of a viable education system according to the Parent Report, which has its
roots in tradition and looks ahead towards what is to come. We address
ourselves, Mr. President and Members of the Commission, to only those parts of
the Bill 62 to which we feel fundamental changes are essential and not to every
single part of the projected Bill 62, which, the Minister has said, is a
working paper.
With regard to the single School Board, our position is said on page 9
of the English version. We feel that the establishment of a single School Board
must be considered in the context of the overall aims of an education system
wich is to provide education of the highess possible quality to everyone
without distinction. In the context of Quebec, this, of course, involves
cultural pluralism and linguistic duality.
It could easily be argued that a single administrative organization is
better capable of organizing education of high quality, on elementary and
secondary levels, through such things as an enrichment of programs and by
making them more flexible to the recruitment of competent staff, through the
organization of
school libraries, physical education facilities, common services such as
the use of computers, maintenance services and things of that nature.
What is not equally certain is whether such single administrative
organization would be able to best maintain the diversity of religious choices
and the linguistic duality in the school system.
Unification is one thing but uniformity is another. There can be little
doubt that utmost care must be exercized less the demarcation lines between
these two concepts becomes blurred.
Le droit pour chacun à une éducation de la meilleure
qualité et de son choix revêt une priorité par rapport
à n'importe quel avantage qui pourrait découler d'une
administration scolaire unifiée sur l'île de Montréal. Il
n'est pas suffisant de légiférer sur des opportunités en
vue d'une éducation diversifiée. Il est essentiel que soient
clairement définies des procédures établissant comment
cette diversité peut être maintenant mise en oeuvre.
We submit that substantial revisions are essential in order to make the
proposed unification effective in establishing an educational system providing
equal opportunity for all without distinction and the necessary conditions for
linguistic duality and cultural pluralism, which are so basic to the Quebec
society.
Nous sommes convaincus qu'il est très important pour la
communauté non seulement d'être rassurée et
systématiquement informée au sujet du fait que chaque commission
scolaire possédera les moyens de fournir des cours d'études dans
la langue du choix des parents, mais aussi de savoir de quelle manière
ce système fonctionnera sous l'égide d'une administration
scolaire unifiée, telle que proposée.
We believe that it is important for the community not only to be
reassured and systematically informed about each board having facilities to
provide the courses of study in the language of choice of the parents, but also
to know how this system will work under the proposed unified school
administration. In particular, we feel that it is important to ensure that
there will be adequate staff, at all levels, to establish, supervise and
provide such courses and to make sure that these courses are of the highest
quality.
We therefore recommend that no bill, amending the Education Act, be
passed without provisions for the appointment of two associate directors
general, on a language basis, by each school board, one for all courses given
in French as the language of instruction and one for all courses given in
English as the language of instruction, who be charged with the responsibility
of the educational administration and supervision of the respective courses of
study in accordance with the parental option.
In addition, we say that the associate directors general must be
provided with sufficient back-up personnel to provide the courses of study on
the highest level of competence.
Coupled with these provisions, Mr. President and members of the
Commission, we submit that provisions must be added to bill 62 defining the
procedures for the exercise of parental option be open to all citizens of
Quebec without distinction.
In this context it is our considered opinion that such provisions are
essential in view of the provisions of Bill 63, which is now amending Section 3
of the Immigration Act by stipulating that the Minister of Immigration will,
"in co-operation with the Minister of Education, take the measures necessary so
that the persons who settle in Quebec may acquire the knowledge of the French
language upon arrival or even before they leave their country of origin, and
may have their children instructed in educational institutions where courses
are given in the French language."
It would be inconceivable if, in dealing with education of children of
settlers, a distinction were created between one resident and another and an
entire group set up in a separate category. We are categorically opposed to
such distinction. Such provisions would introduce into Quebec a concept, which
could have far-reaching repercussions by removing the equality of basic rights
between Quebec born and other residents of the Province.
Dealing with the School Council of the Island of Montreal, which is
found on page 13 of our English brief, the proposed recommendations give the
School Council of the Island of Montreal a very significant and important role
in the new structure. It is suggested that they have the responsibility for
financing, planning, coordination, etc. We believe it is most essential that
the Council reflect fully the total community and mirror all types of education
that will be taught by the Boards in courses of study adopted or recognized for
Catholic public schools, Protestant public schools and for public schools other
than Catholic and Protestant. And in parenthesis, Mr. Chairman, the definition
of other than Catholic and Protestant still remains to be discussed in its
respectly submitted needs definition in whatever proposed legislation is going
to be put before the people of Quebec.
With regard to the School Council of the Island of Montreal, we submit,
in order to have the confidence of the parents and the population at large, it
has to be democratically elected and, this, responsible to the community. We,
therefore, recommend that each school board, the members of which, under the
proposed Bill 62, are elected by the Members of the community, be empowered to
elect from among their members one representative to the Island Council.
In addition, we recommend that members, up to a maximum of 25 p.c. of
the elected members of the Island Council, should be named by the Minister of
Education to ensure that among them will be members other than the Catholic and
Protestant faith, so that the total diversity in dualism and make up of the
total community of Quebec will be represented on the School Council, at the
Island Council level.
We recommend further that to give a true democratic meaning to the
Island Council, the president and vice-president be elected by members of the
Council from among themselves and not be appointed by the Minister of Education
as presently stipulated in the working project.
With regard to the question of school municipalities and boundaries, Mr.
President, our recommendations are found at page 14 of the English text and we
will now move on to the question of qualifications for elections.
We feel that the people most directly affected by the education system
and the proposed regional school board are the parents of children who are
attending this school. We therefore feel that the qualification of Canadian
citizenship precludes an important segment of the community from having a voice
in the administration of the regional school board. We therefore recommend,
with regard to the qualifications for voting at the regional school board, that
the qualifications of the Canadian citizenship be amended, removed and replaced
by the requirement of Canadian residence for a period in excess of one year.
Now, any structure change of a fundamental nature as being proposed by the
project of Bill 62 almost of necessity causes some dislocation during a
transition period. When one administrative structure disappears and another one
entirely different takes its place, une période d'ajustement est
nécessaire en vue d'obtenir dans son entité l'objectif des
changements proposés, soit de maintenir la dualité linguistique
et le pluralisme culturel à un plus haut niveau et de la plus haute
qualité.
We therefore recommend that great care be exerciced in the
implementation of Bill 62 to make sure that the proposed changes are introduced
with the least dislocation and disruption of services. In particular, dealing
with the unification of the school boards at the regional level, special care
is required to make sure that the education of children, which is the essential
object of this bill and which is presently directed by different structures, is
done in effective stages so that there will be no lowering of standard because
of the transfer of administrative and pedagogical duties.
In conclusion, Quebec is a multicultural society and there can be no
doubt that spacious stress is needed on that aspect of public education which
is conducive to a more profund and enduring mutual understanding of the various
religious differences and the maintenance of linguistic duality, and I know
that we are all dedicated to this goal. We are grateful for the opportunity
which you have given us to express our views and we again reaffirm our request
that the mémoire en total soit déposé comme instrument de
travail.
M. CARDINAL: Quelques commentaires sur ce mémoire du
Congrès juif canadien. D'abord, il me plaît de souligner, surtout
après ce qu'a mentionné le député d'Ahuntsic cet
après-midi, que le premier discours que j'ai prononcé sur le bill
62 était à Westmount devant la communauté juive.
C'était, si je ne me trompe pas, au tout début de
décembre, peu de temps après le dépôt du projet de
loi.
Deuxièmement, un point technique: votre mémoire devrait
être déposé en entier au journal des Débats, mais je
pense que les annexes devraient simplement être remises aux membres de la
commission. Il y a là une question technique, budgétaire, etc.
Alors, je pense que tout le monde sera satisfait.
M. LE PRESIDENT: Alors, les sept documents que nous avons ici, M. le
Ministre...
M. CARDINAL: Copies pour les membres de la commission.
M. LE PRESIDENT: Copies pour les membres de la commission.
M. CARDINAL: Pour ce qui est de la communauté juive, je
soulignerai les points suivants. Depuis deux ans, j'ai été
fréquemment en contact avec la communauté juive. Pour la
première fois, nous sommes intervenus pour qu'au niveau du Protestant
School Board of Greater Montreal il n'y ait un représentant de la
communauté juive, pour que des écoles juives aient le statut
d'écoles associées avec, ou la CECM ou le Protestant School Board
of Greater Montreal. Lors du bill 56, Loi des institutions privées, nous
avons spécialement mentionné les écoles juives ce
qu'on pourrait appeler les "parochial schools" par comparaison comme
tombant sous l'effet de ce projet de loi, ce qui, de fait, s'est
réalisé. Par conséquent, devant la communauté
juive, je me sens parfaitement à l'aise de mentionner ces faits, puisque
cela a pris de nombreuses années avant que ces droits ou ces
reconnaissances juridiques ne lui soient accordés. D'ailleurs, quand
j'étais allé rencontrer la communauté juive à
Westmount, c'était justement pour rendre hommage à un membre du
Congrès juif, M. Bickell, qui s'était dévoué
longtemps dans le système d'éducation. Ceci a été
fait dans un sens de justice pour cette communauté qui est
établie ici depuis le XVIII siècle.
Je mentionnerai plus spécialement les faits
suivants. Au point de vue là le député
d'Ahuntsic devrait m'écouter particulièrement...
M. LEFEBVRE: M. le ministre, j'étais en conférence avec
mon collègue.
M. CARDINAL: Si je l'avais à côté de moi, moi aussi
ça m'arriverait souvent, mais...
M. LEFEBVRE: Il ne faut pas que le ministre soit jaloux!
MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... trop de collaboration.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEFEBVRE: J'écoute le ministre.
M. CARDINAL: Cet après-midi, j'ai déclaré qu'au
cours de la semaine prochaine, je donnerais la première
réglementation venant compléter le bill 63 et concernant les
inscriptions des élèves, parce que ceci est urgent. D'ici quinze
jours, au plus tard, j'aurai aussi une décision du conseil des ministres
quant aux règles administratives pour appliquer le bill 63. Ce soir,
disons que j'ouvrirai un peu, pour calmer certaines anxiétés, et
je dirai que...
M. LEFEBVRE: Réparer certaines erreurs! Excusez-moi, M. le
ministre.
M. CARDINAL: Vous êtes tout excusé. M. LEFEBVRE: Cela m'a
échappé.
M. CARDINAL: Je commence à vous connaître. Si le
gouvernement a adopté le projet de loi 63, si ce projet de loi
prévoit que les commissions scolaires doivent donner un enseignement en
français, à ceux qui le demandent un enseignement en anglais,
dans les deux cas un enseignement d'une langue seconde, c'est que, partout
où le nombre d'étudiants ou le nombre d'élèves le
justifiera, il faudra, au niveau de l'école et je pense à
chacun des mots que je dis il faudra au niveau de l'école un
système administratif qui pourra rendre possible, qui pourra rendre
réalisable dans le concret cette possibilité de choix.
Est-ce que ceci, dans les faits, prendra la forme d'un directeur
pédagogique, d'un directeur de l'enseignement français, d'un
directeur de l'enseignement anglais? Ce sont là des modalités. Ce
que je peux dire, ce soir, c'est qu'il y aura, dans les écoles où
le nombre d'étudiants d'une autre langue le rendra nécessaire ou
utile, si on veut être plus généreux, une structure
administrative qui permettra l'application de la loi no 63. C'est pourquoi,
jusqu'à présent, j'ai dit qu'il n'était pas
nécessaire de prévoir ceci dans le projet de loi 62. C'est une
question administrative qui dépend déjà d'une loi
adoptée. On peut nous dire: Les projets de loi 63 et 62 auraient pu
être étudiés en même temps ou ne constituer qu'une
seule et même loi. On a vu des gens, cet après-midi, nous
féliciter d'avoir sépare les deux projets de loi. Ne jugeons pas
le passé. Ce que je promets pour l'avenir, au nom du gouvernement et au
nom du ministère, c'est que, d'ici une quinzaine de jours, j'aurai en ma
possession cette décision du conseil des ministres sur la structure
administrative qui viendra donner, si vous voulez, des garanties
concrètes pour l'application de la loi 63.
Nous serons encore, à ce moment-là, c'est certain, dans
les débats concernant le projet de loi 62 et ceci sera connu. Quand on
est membre de l'Opposition, on peut poser des questions ou harceler le
gouvernement; c'est dans le jeu, d'ailleurs. Mais, lorsque vous
représentez le gouvernement, il faut que vos promesses et vos
déclarations soient fondées sur des travaux déjà
accomplis, sur des décisions déjà prises ou sur le point
d'être prises. Par conséquent, ce soir, je ne m'aventure pas sur
ce terrain, mais je vais plus loin que je ne l'ai fait dans les séances
précédentes en disant, à l'occasion de ces
mémoires, qu'il y aura, au niveau des écoles car c'est au
niveau des écoles que le directeur pédagogique est prévu
dans le projet de loi 62 un organisme administratif peu importe
son titre; on le définira très bientôt qui permettra
ce choix linguistique qui a été prévu par la loi no
63.
J'ajoute que les écoles privées qui
bénéficient de subventions de 60 p.c. ou de 80 p.c. pour leurs
dépenses de fonctionnement, en comparaison avec le secteur public, ne
sont pas abolies sur l'île de Montréal par le projet de loi 62.
Les écoles privées continuent de bénéficier des
avantages du projet de loi 56, qui est maintenant loi, depuis décembre
1968, et qui s'est appliqué à compter de cette année
scolaire, soit depuis juin 1969.
Je voudrais souligner un autre fait mentionné dans le
mémoire qui est devant vous: c'est ce que j'appellerai la
définition de "catholique", la définition de "protestant" et la
définition "d'autres". A plusieurs reprises, je suis intervenu pour
demander que le mot "catholique" ou le mot "protestant" ou le mot "autres"
soient définis. Même s'il n'est pas défini dans la loi,
à plusieurs reprises, en public ou devant cette commission, j'ai
mentionné l'interprétation qu'on devait donner à la
législation. J'ai ajouté que, s'il fallait être plus clair,
on le serait.
Un catholique, c'est un catholique romain baptisé dans l'Eglise
catholique, romaine, apostolique, etc. Un protestant, ce n'est plus un
protestant au sens actuel qui existe à Montréal,
c'est-à-dire que ce n'est pas tous les autres. Un protestant c'est
quelqu'un qui descend de ces personnes qui, au moment de la Réforme, ont
quitté l'Eglise catholique romaine. Ce n'est
donc pas les schismatiques, les orthodoxes, les Juifs, etc. Les autres
sont donc ceux qui ne sont ni catholiques au sens strict, ni protestant au sens
strict.
J'ai ajouté et je répète que quelqu'un qui est
catholique et qui veut envoyer ses enfants allons dans toutes les
combinaisons possibles à l'école protestante, au
véritable sens du mot, ou à l'école multiconfessionnelle,
ou quelqu'un qui est protestant et qui veut envoyer ses enfants à
l'école catholique ou à l'école autre, ou quelqu'un qui
est juif et qui veut envoyer ses enfants à l'école soit
catholique ou protestante ou autres, ont ce choix, en ce sens que le bill 62,
comme le bill 63, donne un choix absolu. Si ce n'est pas clair, on le rendra
plus clair. Il n'y a pas dans la loi une obligation pour les catholiques
d'aller à l'école catholique, pour les protestants d'aller
à l'école protestante. Il y a une obligation, pour la commission
scolaire, si des parents demandent un enseignement catholique, un enseignement
protestant ou un enseignement que j'appellerai multiconfessionnel, ou, si vous
voulez, une morale naturelle, il y a obligation, pour la commission scolaire,
de donner ces trois enseignements, comme il y a obligation, pour la commission
scolaire, en vertu du projet de loi 63, de donner l'enseignement en
français ou l'enseignement en anglais sur demande.
Alors, si ceci n'est pas clair dans la loi, comme ministre je le dis
pour que ce soit clair, et on amendera la loi pour que ce le soit. C'est une
liberté totale laissée aux parents de choisir l'école de
leur choix. J'ai connu, par exemple, à Lachine, lorsque j'y suis
demeuré, des gens de religion juive qui envoyaient leurs enfants
à l'école catholique parce que c'était une école
commune au sens de la loi, et que l'école devait les recevoir. Ils les
envoyaient là pour des raisons linguistiques ou pour des raisons tout
simplement pratiques. Quelqu'un le mentionnait récemment, si, dans une
région donnée de Montréal, l'école la plus proche,
pour une famille, c'est une école qui n'enseigne que, disons, la
religion catholique et la religion protestante, il est fort possible, pour un
juif, de choisir où l'enseignement catholique ou l'enseignement
protestant. Et, d'après les règlements du ministère,
actuellement, il est possible à des parents qui envoient leurs enfants
dans une école confessionnelle de demander que l'enseignement de la
religion ne leur soit pas donné. La loi 62 ne modifie pas la Loi de
l'instruction publique, ne modifie pas sauf l'article 203 la Loi
du conseil supérieur, et ne modifie pas les règlements actuels du
ministère de l'Education. C'est-à-dire que les droits qui
existent déjà continuent à exister. Il ne faut pas prendre
le bill 62 à part, il faut le prendre dans le contexte du
ministère de l'Education et de toutes les autres lois et
règlements qui le font fonctionner.
Quant à la période d'ajustement, quant à la
période transitoire, encore une fois, j'ai dit et je
répète que, après étude, il est probable, c'est le
plus que je puisse dire ce soir, que des étapes que j'ai appelées
en paliers ou en escalier soient prévues. J'admets que si le principe de
la loi, c'est d'abolir 42 commissions scolaires d'un coup, dans le concret,
dans l'exécution de la loi, il faut prévoir un
échelonnement d'étapes. L'on pourrait même concevoir que
l'on abolisse, disons, 20 commissions scolaires et qu'on en garde 22 ou qu'on
en abolisse 40 et qu'on en garde deux, pendant une période de x mois,
pour avoir des cadres, pour que l'on puisse fonctionner.
Ceci est à l'étude présentement. J'ai, d'ailleurs,
de la documentation sur le sujet. Une décision n'est pas encore prise;
nous en sommes à vous écouter. Je voulais faire ces remarques
d'une façon positive, pour indiquer les intentions du gouvernement et
pour éviter tout débat sur des questions qui ne
paraîtraient pas claires.
Messieurs, je vous remercie et je vous félicite de la
façon dont vous avez présenté votre mémoire.
M. LE PRESIDENT (M. Crôteau): L'honorable député de
D'Arcy-McGee.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, si vous me le permettez, j'aurais
deux commentaires et une question.
Je suis heureux que le ministre ait exposé, ce soir, avec un peu
plus de précision les intentions du gouvernement. Il me semble, quand
même, extraordinaire que nous ayons entrepris l'étude du projet de
loi 62 sans avoir ces détails clairement devant nous.
Je me rappelle, comme le ministre s'en souviendra, les débats
d'il y a plus d'une année sur le bill 85 d'alors. Les mémoires
que nous avons entendus à l'époque exprimaient des opinions sur
l'avenir de notre système scolaire. Nous avons tous été
frappés par un fait, par un phénomène commun à
presque tous ces mémoires-là. Ceux qui présentaient les
mémoires n'avaient pas pensé clairement et de façon
pratique les structures administratives et pédagogiques du
système d'enseignement.
Il me semble je suis obligé de le répéter
un peu extraordinaire que le ministre n'ait pas pensé tout cela
de façon précise, n'ait pas fait adopter tout cela par le conseil
des ministres d'avance ou, au moins, immédiatement après
l'adoption du bill 63, adoption qui remonte à deux mois et demi.
Deuxième commentaire. Le ministre constate que plusieurs des
mémoires sur le présent projet de loi la plupart, je
dirais font état du manque de détails, qui laisse planer
des doutes et des inquiétudes. Le ministre nous a dit, cet
après-midi, qu'il s'est promené un peu partout pour fournir des
renseignements. Il
nous a donné l'impression d'être satisfait de ses propres
efforts.
Je dois lui dire que l'on ne peut pas se contenter de transmettre le
message sans s'assurer qu'il a été reçu et compris. Je
suis obligé de constater, dans des mémoires qui émanent de
la communauté anglophone comme dans des mémoires qui
émanent de la communauté francophone, des inquiétudes
communes.
Finalement, la question que je voudrais poser au ministre. Nous avons
devant nous un projet de loi qui propose que les commissaires d'école
soient élus au suffrage universel, sauf le tiers par un collège
électoral.
Le ministre est au courant, comme moi, des difficultés qui ont
entouré ce problème dans le passé. Pour la
communauté juive qui, en ce moment, présente ce mémoire,
ces difficultés proviennent des articles 574 à 580 inclusivement
de la Loi de l'instruction publique.
Le ministre sait qu'à plusieurs reprises des efforts ont
été faits pour obtenir des modifications à ces articles de
façon à permettre le suffrage universel.
Voici un projet de loi qui ajoute les articles 581 à 712, mais
n'abolit ni ne change les articles 574 à 580. Les conseillers juridiques
du gouvernement et d'autres les conseillers juridiques du Protestant
School Board of Greater Montreal, entre autres ont exprimé l'avis
que d'autres problèmes d'ordre statutaire, constitutionnel
peut-être, empêchaient ce suffrage universel en ce qui concernait
et concerne toujours la communauté juive.
La question que je dois poser est celle-ci: Puisque les conseillers
juridiques du gouvernement ont exprimé l'avis que la modification des
articles 574 à 580, et particulièrement 580, n'aurait pas suffi
pour permettre le suffrage à la communauté juive, le ministre
est-il certain que, sans toucher à ces articles-là et en ajoutant
tous les articles que nous avons devant nous, les empêchements que nous
avons connus par le passé seront abolis et que le suffrage universel
prendra vraiment effet pour tout le monde?
M. CARDINAL: M. le Président, si vous me permettez de
répondre. Tout d'abord, je m'excuse, c'est peut-être une
déformation de mon passé de juriste, mais je me suis
peut-être jusqu'à présent refusé de
légiférer sur le cas particulier de Montréal, alors qu'on
a légiféré d'une façon générale, par
le bill 63, pour tout le Québec. En d'autres mots, les garanties que
l'on demande sur le plan linguistique pour Montréal, si on les fait dans
le bill 62 et non pas dans des règlements à l'occasion du bill
63, ne vont s'appliquer qu'à Montréal et non pas dans le reste du
Québec.
C'est pourquoi je les vois sous le chapeau du bill 63 et non pas sous
celui du bill 62. Le bill 62 est donc un cas particulier, puisqu'il ne
s'applique qu'à un territoire donné, le bill 63 s'appliquant
à tout le Québec.
M. LEFEBVRE: Un gros cas particulier.
M. CARDINAL: D'accord, mais c'est un cas regardant uniquement
Montréal. On ne réglerait pas le problème du reste du
Québec, si on ne légiférait que dans le bill 62.
M. LEFEBVRE: Non, mais ce n'est pas Saint-Glin-Glin, c'est beaucoup de
monde.
M. CARDINAL: D'accord, mais si on a des règlements, en vertu du
bill 63, qui s'appliquent à tout le Québec, y compris
Montréal, cela me parait mieux. C'est une opinion, mais je vais
continuer pour arriver à votre question. Pourquoi vouloir régler
à tout prix, dans le cas du bill 62 qui s'applique à
Montréal, le reflet d'un large cas particulier qui n'est quand
même pas toute la population du Québec? Je vais faire un pas de
plus.
Si le bill 63 nécessite des directeurs pédagogiques
français ou anglais, cette nécessité s'impose sur tout le
territoire du Québec. C'est pourquoi je ne crois pas avoir raison de le
régler uniquement sur le territoire de Montréal. Si on me demande
si je suis satisfait de ce que j'ai fait jusqu'à présent, je
réponds non; c'est dans mon caractère de n'être jamais
satisfait. On demande beaucoup aux ministres de l'Education, que ce soient mes
deux prédécesseurs, moi-même ou ceux qui suivront. J'ai
accepté ce défi à mes risques et dépens.
Si tous les détails n'ont pas été établis
à l'origine, parce que le député de D'Arcy-McGee a
commencé par là, c'était justement ceci est dit
sans arrière-pensée en vue de connaître d'abord les
opinions de certains intéressés plutôt que d'imposer des
solutions à l'avance. Ceci me paraissait faire partie d'une
stratégie plus démocratique. Enfin, je ne m"'enfarge" pas, au
sujet du bill 62, dans ce que j'appellerai le juridisme, en ce sens que ma
réponse à la question est oui.
H me semble mais ce n'est pas à moi à en
décider, ce sera éventuellement aux cours, si on va devant les
cours malgré les opinions contraires parues dans les journaux ou
ailleurs que l'on doive quand même légiférer dans
cette matière, donner le suffrage universel, incluant la
communauté juive, même si certains groupes viennent
prétendre que ceci est contraire à l'article 93, de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique. S'ils veulent contester, après,
ce point-là, je le regrette. C'est un moyen qui est différent de
l'exécutif on ne peut pas mêler le judiciaire, le
législatif et l'exécutif et je regretterais qu'en 1970
quelque groupe que ce soit, qu'il soit francophone ou anglophone la
menace, si menace il y a, venant des deux côtés vienne,
pour sauvegarder un statu quo, se servir de moyens juridiques pour
empêcher la réalisation d'une loi qui me paraît un
progrès, tout particulièrement pour la communauté juive,
qui, jusqu'à présent, pour des raisons juridi-
ques, il est exact, a été exclue, sauf les compromis qui
ont pu être faits au niveau du Protestant School Board of Greater
Montreal et au niveau de la CECM, tout récemment, il faut le dire.
Je n'hésite pas à répondre que, pour ma part, je
considère ceci satisfaisant, malgré des études juridiques
contradictoires que j'ai lues de la part de juristes au sein du gouvernement,
à l'extérieur du gouvernement ou de certains organismes.
Mais encore là, ce n'est pas à moi à
décider. Si l'on va devant les tribunaux, je ne puis savoir,
l'expérience passée me le prouvant... Je me rappelle une action,
quand j'étais au Trust Général du Canada, qui a
duré sept ans, avant que ça n'arrive à la cour
Suprême. Il y a eu trois jugements, tous les trois différents et,
évidemment, celui de la cour Suprême l'emporta.
Je souhaite tout simplement que les gens aient assez le sens de la
démocratie pour que les moyens juridiques ne soient pas employés
pour défendre ce que j'appelle le statu quo; c'est un terme poli tout
simplement. Je ne sais pas si ceci répond suffisamment au
député de D'Arcy-McGee, mais c'est mon opinion claire et
précise. Le député de D'Arcy-McGee sait que nous nous
sommes rencontrés dans mon bureau et ailleurs. J'ai rencontré des
membres de la communauté juive, et ma position a toujours
été celle-là, envers et contre certaines attitudes que
j'appellerai légalistes.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je suis obligé de demander
au ministre, puisqu'il a dit que ce n'est pas lui qui, en fin de compte,
déciderait, mais la cour, si la question était amenée
devant elle, s'il s'est quand même protégé par des opinions
juridiques qui...
M. CARDINAL: C'est exact. J'ai des opinions juridiques qui ont
été apportées à l'exécutif.
M. GOLDBLOOM: Le seul autre commentaire que je voudrais faire est
celui-ci: que si le ministre dit que ce n'est pas dans le bill 62 que l'on doit
prévoir un directeur des études en langue anglaise et un
directeur des études en langue française, parce que ce principe
pourrait s'appliquer et devrait s'appliquer à l'échelle de la
province, je lui répondrai que le fait de mettre ces modalités
dans le bill 62 n'empêcherait pas de les mettre également dans une
autre loi qui étendrait les mêmes structures à toute la
province. Mais le fait de ne pas inclure ces modalités dans le bill 62,
si elles devaient attendre un autre projet de loi qui viendrait plus tard, je
ne trouverais pas cela acceptable.
M. CARDINAL: D'accord. J'ai dit et je répète que d'ici
quinze jours, disons, pour me protéger, trois semaines, ces
règlements seront devant nous et que par conséquent on saura la
réponse.
M. GOLDBLOOM: La patience ne manque pas.
M. CARDINAL: Ce n'est pas de la patience. Ecoutez, non, je ne
m'embarquerai pas dans des questions partisanes et je dirai...
M. GOLDBLOOM: Non, j'ai parlé pour nous-mêmes.
M. CARDINAL: ... tout simplement que deux mois et demi, c'est peu quand
on songe à toute l'étude qu'il faut faire au ministère
pour que ces principes soient réalisables avec les budgets que nous
avons, le corps enseignant que nous avons, les structures que nous avons. Il
serait facile, si l'argent nous tombait du ciel et que les professeurs
poussaient dans les arbres, d'adopter rapidement les règlements les plus
généreux possibles.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je voudrais d'abord
féliciter le Congrès juif canadien de la qualité, de la
sérénité de son mémoire. Contrairement à
d'autres mémoires que nous avons entendus, je trouve que le ton de
celui-ci m'est apparu, en tout cas à moi, dépourvu de
préjugés ou de propos exagérés. Je crois que les
auteurs méritent des félicitations pour cela.
M. le Président, avec toute la bonne volonté du monde,
cependant, je n'arrive absolument pas à comprendre la logique du
ministre de l'Education et mon commentaire enchaîne avec celui de mon
collègue de D'Arcy-McGee. A la page 11 du mémoire du
Congrès juif canadien, que je prendrai à l'appui de mon
argumentation, texte anglais, on lit: "We, therefore, recommend that no bill be
passed without provisions for the appointment of two associate directors
general on a language basis, by each school board, one for all courses given in
French as the language of instruction and one for all courses given in English
as the language of instruction" et le reste.
M. le Président, vous voulez que je continue à lire? Cela
ne me fait rien.
MR. CARDINAL: As you like it.
M. LEFEBVRE: Cela fait plusieurs fois que des groupes et que
nous-mêmes, ici autour de la table, nous disons au ministre: Dans
l'hypothèse d'une commission scolaire unifiée, il est clair qu'il
doit y avoir une structure pédagogique qui supporte l'action au niveau
de l'école locale. Tantôt, je m'attendais à une
révélation sensationnelle. Le ministre a dit: Je surprendrai le
député d'Ahuntsic; qu'il m'écoute. Pour un instant, je me
suis dit: Enfin, le ministre a compris; il va nous annoncer quelque chose
d'important. Or, que nous a-t-il annoncé il me corrigera si je le
cite mal que, dans les règlements découlant du bill 63, le
gouvernement, dans sa générosité, allait pourvoir...
M. CARDINAL: Je n'ai pas dit ça.
M. LEFEBVRE: Non, mais c'est mon interprétation.
M. CARDINAL: D'accord.
M. LEFEBVRE: Je vous accorde même de la
générosité.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'était sous-entendu.
M. LEFEBVRE: C'est ça. Le gouvernement allait pourvoir à
ce qu'au niveau de l'école il y aurait, pour les parents qui ont choisi
l'enseignement dans une langue ou dans une autre, les mécanismes ou les
organismes nécessaires pour assurer que cet enseignement soit de bonne
qualité. Ceci aurait l'air d'indiquer autrement, les mots n'ont
plus de sens que, dans l'opinion du ministre, chaque école est un
tout et qu'elle vit par elle-même, comme une étoile qui a sa
propre orbite dans le système. Or, nous savons tous que ce n'est pas le
cas. Une école, même si elle est grosse, doit logiquement
être une unité rattachée à une unité plus
grande. Elle est, d'abord, rattachée à Dieu le Père qui
siège à Québec et qui s'appelle le ministre de
l'Education, bien sûr.
M. CARDINAL: Merci. Jusqu'à présent, je ne m'étais
pris que pour le Fils.
M. LEFEBVRE: Elle est rattachée aussi à un
intermédiaire que nous appelons, pour l'instant, une commission
scolaire. On peut l'appeler un conseil d'arrondissement; on peut l'appeler
comme on le voudra. Je ne veux pas accuser le ministre de mauvaises intentions;
je présume que ses intentions sont bonnes. Mais, le ministre voudrait
tromper le peuple qu'il ne procéderait pas autrement. Nous lui mettons
le doigt sur un problème précis le Congrès juif
vient de le faire, à sa façon à lui, et beaucoup de
groupes l'ont fait; nous-mêmes, nous l'avons fait et le ministre
nous répond par une chose qui n'est absolument pas une réponse,
sauf pour ceux qui n'y connaissent rien du tout. Il est bien évident que
ce n'est pas au niveau de l'école que l'on va assurer la
caractéristique d'un enseignement selon la culture française ou
d'un enseignement en langue anglaise. Ce n'est pas à ce
niveau-là; il faut aller un peu plus haut. Or, le ministre s'obstine
à dire: On ne peut pas mettre ça dans le bill 62; le bill 62 ne
s'applique qu'à la région de Montréal.
Précisément, ce n'est que dans la région de
Montréal que l'on veut chambarder, avec raison, les structures
actuelles. Je ne peux pas comprendre comment le ministre raisonne en
prétendant nous faire croire que les garanties linguistiques dont il se
vante seront assurées par un règlement du bill 63 au niveau de
l'école locale. Ce n'est pas à ce niveau-là qu'il y a un
problème. Tous les observateurs compétents que j'ai entendus sur
ce point ont souligné cette défectuosité du bill. Si le
ministre veut que l'hypothèse d'une commission unifiée soit
défendable, en toute honnêteté, vis-à-vis de tout le
monde et que personne n'ait d'arrière-pensée, il faut qu'il
considère comme sérieux ce quatrième paragraphe de la page
11 du mémoire que nous avons devant nous, qui est, encore une fois, une
formulation différente, mais qui a été faite par bon
nombre d'observateurs et de commentateurs du bill 62.
M. LE PRESIDENT: J'aimerais vous faire remarquer que nous avons convenu
d'une procédure au début. Nous avons dit que ce serait une
demi-heure.
M. LEFEBVRE: C'est une mauvaise procédure.
M. LE PRESIDENT: Nous avons commencé à 8 h 10 et il est
déjà 9 h 5. Je tiens seulement à vous le souligner.
M. LEFEBVRE: C'est une mauvaise procédure.
M. CARDINAL: On avait convenu que ce serait très, très
bref. D'une part, c'est vraiment dommage de constater que le
député d'Ahuntsic, qui vient de féliciter les membres du
Congrès juif pour leur sérénité et leurs
objectivité nous fasse ce spectacle.
Si je veux le prendre dans le même sens, je dirais: Je comprends
fort bien qu'il ne comprenne pas.
M. LEFEBVRE: C'est tout ce que vous avez à répondre?
M. CARDINAL: Oui, monsieur.
M. LEFEBVRE: Eh bien, vous serez jugé selon vos actes.
M. CARDINAL: C'est ça, et bientôt. Vous ne serez même
pas là pour le savoir, vous.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! M. LEFEBVRE: On verra
ça.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions à poser aux
représentants du Congrès? Alors, il n'y a pas d'autre question.
Nous vous remercions.
M. BESSNER: Merci.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, la Quebec Association of Protestant School
Administrators. What is your name? Votre nom? Parlez-vous français?
M. RIVARD: Oui, Robert Rivard. M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Vous vous identifiez comme M. Robert Rivard, le
porte-parole de votre association?
M. RIVARD: Oui. M. le Président...
M. LE PRESIDENT: On aimerait aussi connaître les gens qui vous
acccompagnent.
M. RIVARD: Je vais les présenter tout de suite.
M. le ministre, Mme Casgrain et les membres de la commission de
l'Education de l'Assemblée nationale du Québec, nous
représentons l'Association des administrateurs des écoles
protestantes du Québec, Quebec Association of Protestant School
Administrators. Comme membres de l'équipe, nous avons parmi nous Mlle
Sylvia Marksfield, principal adjoint d'une école secondaire, 29 ans
d'expérience. M. Noël Hamilton, principal d'une école
secondaire, 23 ans d'expérience. M. Hébert Matthews, assistant
administratif de l'association, 40 ans d'expérience. Je m'appelle Robert
Rivard, je suis principal d'une école secondaire et
vice-président de l'Association des administrateurs des écoles
protestantes du Québec. J'ai 32 ans d'expérience dans la
profession. Mlle Marksfield va présenter notre mémoire. Mlle
Marksfield.
Mlle Sylvia Marksfield
MLLE MARKSFIELD: M. le Président, M. le ministre, Mme Casgrain,
messieurs, mesdames, je regrette de ne pas pouvoir changer mon programme pour
ce soir, mais, comme j'ai beaucoup de bonnes réponses dans notre
mémoire, je vais commencer ma lecture.
Toute discussion qui se veut sérieuse sur les problèmes de
l'éducation au Québec nous ramène inévitablement au
fait indéniable que la majorité de la population est francophone.
Ceci étant acquis, on ne peut néanmoins ignorer les aspirations
légitimes d'une "minorité" substantielle comme celle que
représente l'élément anglophone du Québec. En
dépit des meilleures intentions de l'actuel gouvernement du
Québec, le bill 62 doit tenir compte du fait qu'une éducation en
anglais pour les anglophones n'est pas un privilège que le ministre de
l'Education accepterait d'accorder, mais un droit inaliénable qu'il
faudrait sauvegarder à tout prix, selon les principes les plus
élevés de démocratie et de liberté civile, et comme
un prolongement naturel de la Déclaration des droits de l'homme.
De plus, là où la langue d'instruction sera l'anglais, il
faudra s'assurer que le niveau professionnel du personnel enseignant soit au
moins équivalent aux critères exigés actuellement par les
commissions scolaires anglaises.
Nous n'avons nulle intention d'attaquer les mobiles du ministère
de l'Education, mais on ne peut nier que les remous engendrés par le
bill 62 ont créé, dans les coeurs et les esprits de
l'élément anglophone du Québec, une inquiétude et
un malaise qui vont quelquefois jusqu'à l'hystérie
collective.
Il est du devoir absolu du ministère de mettre un terme, une fois
pour toutes, à ce sentiment de crainte. Les appréhensions des
anglophones doivent être calmées par l'assurance que rien ne
menace l'éducation de leurs enfants.
La diversité culturelle dans une communauté n'est pas un
état pathologique. Bien au contraire, le développement et
l'épanouissement des divers groupes linguistiques ne peuvent que
contribuer à l'enrichissement général de toute la
population.
Les avantages du bill 62 sont évidents: uniformisation des taxes,
égalité de tous, et établissement d'un système
multiconfessionnel. Mais, ainsi que plusieurs l'on souligné,
l'éducation ne peut pas être considérée comme un
service au même titre que la voirie ou les transports; c'est une
matière qui touche à des valeurs tellement fondamentales que le
ministère doit procéder avec précaution pour tout
changement significatif dans ce domaine.
Par ailleurs, cette dichotomie de l'éducation n'est pas un
phénomène unique au Québec. Des problèmes de cette
nature se sont posés à la Belgique, à la Suisse, pour ne
citer que quelques exemples.
Il y a des problèmes, on ne peut le nier ; mais aucun
problème n'est insoluble pour des gens de bonne volonté. Une
politique coercitive ou répressive ne pourra jamais produire les
résultats que donnerait au contraire une adhésion volontaire ou
un accord mutuel. Nous pensons que notre mémoire présente les
principes de l'organisation des systèmes scolaires qui permettront aux
anglophones et aux francophones de la province d'atteindre un niveau jamais
atteint dans cette province, dans les domaines si étroitement
liés de l'éducation, la culture et le commerce.
Dans les territoires actuellement desservis par les commissions
scolaires de l'île de Montréal, il y a un grand nombre de gens des
deux langues principales, francophones et anglophones. L'Association des
administrateurs des écoles protestantes est convaincue que les
écoles et l'administration, jusqu'au niveau de la commission scolaire
régionale, devraient être divisées selon la langue; en
d'autres termes, il devrait y avoir des commissions scolaires régionales
de langue anglaise et des commissions scolaires régionales de langue
française. Notre conviction étant que les écoles et les
commissions scolaires devraient être divisées sur une base
linguistique pour le maintien et l'encouragement de la haute qualité
d'éducation dans les deux groupes linguistiques, nous ne pouvons
accepter le concept, proposé par le bill 62, de commissions
scolaires unifiées. Notre association, par conséquent, ne
peut accepter le bill 62 dans sa forme actuelle.
Depuis plus de cent ans, des administrations séparées de
langue française et de langue anglaise ont établi des
systèmes qui répondaient aux besoins spécifiques de leurs
élèves. Il nous paraît que c'est seulement par le maintien
de ces systèmes qu'on pourra continuer à répondre aux
besoins de nos élèves.
Dans un système unifié, le simple fait de prévoir
la nomination de responsables administratifs (Français, Anglais,
catholique, protestant, non-confessionnel) au sein de chaque groupe
administratif ou commission scolaire, ne fournit pas une protection suffisante
pour l'amélioration de l'enseignement et la transmission de
l'héritage culturel des groupes minoritaires. Avec deux systèmes
séparés, chacun basé sur sa langue, administrateurs et
professeurs seront beaucoup plus à même de choisir les manuels,
les méthodes et les programmes qui conviennent le mieux aux besoins de
leurs élèves.
Et je vous rappelle ici que, du côté protestant, les
professeurs ont une très grande liberté dans le choix des
méthodes ainsi que des manuels et une voix prédominante dans les
"curriculum committees" ceci, bien avant l'entente provinciale.
D'autre part, la plupart des professeurs et des administrateurs, dans un
tel système scolaire, auraient été eux-mêmes
instruits, auraient reçu leur formation professionnelle et acquis leur
expérience dans des systèmes éducatifs semblables, en
beaucoup de points, à celui que nous envisageons pour leurs
étudiants actuels, soit des systèmes basés sur une
division linguistique.
Et, pour l'avenir, une telle commission scolaire régionale, avec
un tel personnel, et de tels administrateurs sera bien plus apte à
offrir la meilleure éducation possible aux enfants des écoles
élémentaires et secondaires du Québec. A cause de la
grande mobilité des anglophones, le système scolaire devrait
être assez souple pour pouvoir absorber, à tous les niveaux, les
enfants de langue anglaise nouvellement arrivés dans la province, et
leur offrir une éducation qui leur permette de continuer leurs
études universitaires ou techniques au Québec, dans une autre
province du Canada ou dans un autre pays. Nous pensons que des commissions
scolaires régionales de langue anglaise sont la meilleure garantie pour
l'éducation de ces étudiants. Dans le passé, le
Québec a beaucoup bénéficié de l'immigration
d'étudiants et de professeurs venant d'autres provinces du Canada ou
d'autres pays du monde. Sans la garantie du choix de la langue
d'éducation telle que la propose le bill 63, nous sommes convaincus que
les immigrants, familles avec enfants d'âge scolaire, ou professeurs,
viendront au Québec moins nombreux et ce, au détriment de notre
belle province.
Nous sommes profondément convaincus que les immigrants ont besoin
d'autre chose que de la seule garantie du choix de la langue d'éducation
telle qu'elle est offerte par le bill 63; nous sommes profondément
convaincus que les immigrants ont besoin d'être complètement
rassurés sur l'éducation de leurs enfants et de savoir que
ceux-ci seront éduqués dans un système dont la base
linguistique particulière leur assure une formation qui convient
parfaitement à leurs besoins.
Les commissions scolaires. A la lumière de ce qui
précède, nous pensons que la section 582 et les suivantes doivent
être révisées pour assurer aux enfants de langue anglaise
et de langue française un enseignement qui soit le reflet de leur
culture propre et qui réponde le mieux à leurs besoins. A cet
effet, nous pensons que la section 582 devrait déclarer clairement la
nécessité d'établir des commissions scolaires
séparées selon la langue. De plus, nous pensons que toutes les
commissions existantes dans l'île de Montréal devaient être
remplacées par neuf commissions scolaires françaises et quatre
commissions scolaires anglaises, ainsi que l'a recommandé le conseil de
restructuration scolaire de l'île de Montréal. Enfin, la section
582 devrait stipuler que, dans le territoire de chacune de ces treize
commissions scolaires, chaque commission scolaire devrait avoir juridiction sur
tout l'enseignement préscolaire, élémentaire, secondaire,
ainsi que sur l'éducation des adultes autre qu'au niveau
universitaire.
En fait, la section 582 du bill 62 devrait confirmer les pouvoirs et
responsabilités que détiennent actuellement les commissions
scolaires. Notre association est convaincue que la création d'un conseil
scolaire de l'île de Montréal, suivant les recommandations du bill
62, représente une centralisation excessive du système scolaire,
et constitue, de ce fait, une menace au pouvoir des commissions scolaires. En
particulier, le bill 62 donne tout le contrôle financier au conseil
scolaire.
Nous craignons que l'enseignement ne se trouve menacé par le
danger d'un contrôle centralisé par le conseil scolaire de
l'île de Montréal, si ce conseil et le ministre de l'Education ont
le contrôle total de l'autorisation des dépenses et de
l'imposition des amendes et sanctions. Nous estimons que le conseil scolaire
devrait accorder des budgets aux commissions scolaires régionales, et
que ces commissions scolaires devraient bénéficier, de par la
loi, de la plus grande flexibilité possible dans les limites et budgets
accordés.
Il est certain qu'une commission scolaire régionale est beaucoup
plus au courant des besoins, à l'intérieur de son territoire
(d'où l'allocation de son budget pour aider ses enfants au maximum), que
ne peuvent l'être un conseil assez lointain et un ministère de
l'Education encore plus lointain et dont le ministre a seul le pouvoir
d'autoriser les dépenses. Nous pensons que la décentralisation
des pouvoirs, par l'entre-
mise de commissions scolaires régionales nanties de pouvoirs
considérables proches de l'autonomie, est le meilleur moyen d'aider les
éducateurs à répondre aux besoins des enfants dans les
diverses et différentes régions de l'île de
Montréal.
Effectivement, puisque les administrateurs de langue française
savent mieux que personne ce qui convient aux enfants dont ils ont la charge,
ces administrateurs devraient exercer leur savoir et leur compétence
dans des commissions scolaires françaises. De même, des
administrateurs de langue anglaise peuvent seuls s'occuper efficacement de
l'éducation des enfants de langue anglaise.
Pour résumer: 1. Les mots "chaque commission scolaire" devraient
être remplacés par: "chaque commission scolaire de langue
française ou chaque commission scolaire de langue anglaise". 2. Les mots
"de la première à la onzième année inclusivement"
devraient être remplacés par: "du jardin d'enfant à la
onzième année inclusivement". 3. L'article 203 de la Loi de
l'instruction publique mentionnée dans la section 586 du bill 62 ne
donne pas une description adéquate des fonctions des commissions
scolaires dans les systèmes modernes d'éducation. Par
conséquent, l'article 203 devrait être amendé pour traiter
plus justement des besoins et exigences de l'éducation moderne. A ce
propos, nous sommes d'accord avec le Conseil de restructuration scolaire de
l'île de Montréal. Nous suggérons donc que l'article 203
soit amendé de façon à inclure les fonctions suivantes: a)
organiser et administrer l'enseignement pré-scolaire,
élémentaire et secondaire polyvalent à l'intention de tous
les enfants de son territoire et des adultes qui requièrent un tel
enseignement ; b) surveiller et animer l'enseignement, déterminer les
méthodes à offrir au choix des écoles, organiser des cours
et élaborer des programmes supplémentaires, expérimentaux
ou nouveaux; c) assurer les services médicaux, sociaux, psychologiques,
le service d'orientation scolaire et professionnelle, les services de
pastorale, requis dans toutes les écoles sous sa juridiction, et en
favoriser l'intégration; d) choisir, engager et congédier le
personnel enseignant et non-enseignant et le personnel de direction des
écoles sous sa juridiction, leur assigner leur poste; assurer
l'inspection des écoles; e) assurer l'entretien et la réparation
des bâtiments scolaires, déterminer les besoins de locaux et
d'équipement, choi- sir les meilleurs emplacements pour les nouvelles
écoles, soumettre tout projet d'achat, de rénovation et de
construction et tout devis pédagogique au conseil scolaire de
l'île de Montréal; acheter tout le matériel requis;
organiser le transport des élèves et les
cafétérias; f ) préparer et soumettre au conseil scolaire
de l'île de Montréal le budget nécessaire à la bonne
marche et au progrès de ses écoles et au fonctionnement de ses
comités d'écoles; g) fournir des garanties religieuses pour un
enseignement confessionnel requis par les parents dans les écoles ou
commissions scolaires où le nombre le justifie; h) assurer aux enfants
la possibilité de fréquenter des écoles
éloignées de leur quartier, où ils puissent recevoir le
type d'enseignement religieux que leurs parents désirent, dans le cas
où un tel enseignement ne soit pas dispensé dans le territoire de
leur propre commission scolaire régionale.
Nous insistons sur le fait que les pouvoirs des commissions scolaires ne
devraient être réduits en aucune façon. Mieux encore, leur
pouvoir devrait être augmenté, en particulier, du fait que la
participation des parents sera plus grande que par le passé, comme en
témoigne la proposition d'établir dans chaque école des
comités d'école formés de parents.
D'autre part, depuis quelques années, les administrateurs et les
professeurs ont bénéficié, et les élèves en
ont profité, du processus consultatif en vertu duquel les professeurs
ont eu et auront une voix égale en matière de pédagogie,
de programme, du choix des méthodes et des manuels, du fonctionnement et
des règlements de l'école: bref, en tout ce qui concerne
l'éducation des enfants sous leur responsabilité.
Les commissions scolaires régionales sont, par conséquent,
renforcées par la participation des parents et des éducateurs, et
devraient alors jouir de pouvoirs considérables. Il ne fait aucun doute
qu'on ne devrait pas diminuer les pouvoirs des commissions scolaires.
On peut sauter d'ici jusqu'à la page 12. Je vous signale le
dernier paragraphe de la page 12.
Note de l'Editeur
Le texte en italique qui suit n'a pas été lu par la
représentante de la Quebec Association of Protestant School
Administrators, mais nous le publions ici afin d'éviter de reproduire en
entier le mémoire en appendice.
Bill 62 Section Il Commissions scolaires
Section 612
La section 612 devrait être divisée en 2 parties qui
indiqueraient clairement que les commissions scolaires seraient
séparées sur une base linguistique en commission scolaire
française et commission scolaire anglaise.
La première partie devrait être rédigée
ainsi: "Les commissaires d'école des commissions scolaires
françaises doivent nommer un directeur général ainsi que
deux directeurs-généraux associés chargés, l'un de
l'organisation des cours adoptés ou reconnus pour les écoles
publiques catholiques, l'autre pour ceux qui sont applicables aux écoles
publiques autres que catholiques ou protestantes. Les commissaires peuvent
aussi nommer d'autres fonctionnaires et employés conformément
à l'article 204. "
La deuxième partie devrait être rédigée
ainsi: "Les commissaires d'école des commissions scolaires anglaises
doivent nommer un directeur général ainsi que trois
directeurs-généraux associés chargés, l'un de
l'organisation des cours adoptés ou reconnus pour les écoles
publiques catholiques, le deuxième de l'organisation des cours
adoptés ou reconnus pour les écoles publiques protestantes, et le
troisième pour ceux qui sont applicables aux écoles publiques
autres que catholiques ou protestantes. Les commissaires peuvent aussi nommer
d'autres fonctionnaires et employés conformément à
l'article 204. "
En procédant ainsi, on sera assuré d'avoir des
fonctionnaires qualifiés pour les commissions scolaires
françaises et les commissions scolaires anglaises.
Bill 62 Section III Les comités d'école
L'Association des Administrateurs des écoles protestantes du
Québec est d'accord avec le principe de la création de
comités d'école dans nos écoles. Cependant, pour donner
aux parents une voix dans l'instruction religieuse, la section 623 devrait
être amendée par l'addition des clauses suivantes:
(d) de consulter les parents pour s'assurer que les enfants
reçoivent une instruction religieuse, morale ou civique correspondant
aux voeux de leurs parents;
(e) d'accepter ou de rejeter tous règlements proposés par
les autorités scolaires affectant des applications particulières
de confessionnalité ou non-confessionnalité dans l'école,
sous réserve des règlements des Comités catholique et
protestant du Conseil Supérieur de l'Education.
En outre, la section 623 devrait stipuler que le comité
d'école a une fonction consultative et non administrative, sauf en
matière de confessionnalité. Le comité d'école
devrait essentiellement avoir un double rôle d'intermédiaire:
(a) tenir les parents au courant;
(b) conseiller le principal (l'autorité compétente) et le
personnel, et faire des recommandations.
Le comité d'école ne sera pas habilité à
prendre des décisions engageant le principal et le personnel, sauf en
matière de confessionnalité.
Nous sommes d'avis que, de par sa formation et son expérience,
l'éducateur professionnel est plus qualifié que quiconque pour
s'occuper de l'amélioration du programme d'instruction et que les
décisions administratives devraient être laissées à
l'éducateur ainsi qu 'aux commissaires élus des Commissions
scolaires régionales.
Le Conseil scolaire de l'île de Montréal
L'Association des administrateurs des écoles protestantes du
Québec admet la nécessité de réaménagements
financiers permettant l'accessibilité de tous à l'enseignement:
uniformisation de l'évaluation et du taux de la taxe scolaire,
répartition des fonds aux commissions scolaires au prorata des besoins.
A ce sujet, l'Association laisse à des autorités plus
compétentes le soin de décider de la procédure à
suivre.
Dans ce mémoire, nous avons laissé de côté
les commentaires sur les dispositions financières de la Section IV
"Conseil scolaire de l'île de Montréal" et de la Section V
"Taxation".
En ce qui concerne la division des pouvoirs entre les Commissions
scolaires régionales et le Conseil scolaire de l'île,
l'Association croit fermement que les commissions scolaires régionales
devraient recevoir un pouvoir maximum en accord avec les objectifs
ci-dessus.
La section 662 du Bill 62 stipule que les membres du Conseil scolaire de
l'île seront nommés par le Lieutenant-Gouverneur en Conseil sur la
recommandation du Ministre. Nous pensons que ceci remet trop de pouvoir entre
les mains d'une seule personne. Nous pensons que cette procédure est
anti-démocratique.
Afin d'assurer une représentation démocratique au sein du
Conseil de l'île, la section 662 devrait être remplacée par
le texte suivant: "Le Conseil est composé de treize membres; chacune des
neuf commissions scolaires françaises et chacune des quatre commissions
scolaires anglaises nomme un membre."
En outre, nous estimons que la section 666 devrait être
revisée et rédigée de la façon suivante: "Toute
vacance est comblée par la Commission scolaire régionale
convenable. "
Enfin, nous pensons que le premier paragraphe de la section 667 devrait
être remplacé par le texte suivant: "Le président et le
vice-président du Conseil scolaire de l'île sont élus par
et parmi les membres du conseil et sont choisis, l'un parmi les
représentants des commissions scolaires françaises, l'autre parmi
les représentants des commissions scolaires anglaises. "
Nous savons que, dans le passé, les lois du Québec
stipulaient que, dans certains cas, des nominations devraient être faites
à des commissions scolaires. Il serait cependant erroné d'assumer
que, du moment que cela s'est fait dans le passé, cela devrait se faire
aujourd'hui et dans l'avenir. Si nous devions examiner deux mots, "loi" et
"justice", nous pourrions affirmer que nous obéissons à la loi,
parce que c'est nécessaire au maintien de l'ordre social.
Cela ne signifie pas, cependant, que nous croyons que chaque loi est
synonyme de justice si la loi est inflexible et ne se prête pas à
une interprétation en terme de droits humains de l'individu et de larges
secteurs de la société. La nomination de membres nous parait donc
flexible, et nous ne sommes pas d'avis que l'éducation, cette partie
vitale de la formation de l'esprit et de l'âme, devrait dépendre
des recommandations d'un seul homme, quelles que soient sa compétence,
sa sagesse et sa position. Nous pensons que la seule façon
démocratique de servir l'éducation est par l'élection des
membres.
Actuellement, les commissions scolaires de Montréal sont
confessionnelles de par la loi et sont, par conséquent,
protégées par l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique. Nous comprenons que, dans l'île de Montréal, des
groupes dissidents ont constitué des corporations d'administrateurs et
que ces corporations administrent des écoles qui sont légalement
confessionnelles. Il en découle que ceux qui bénéficient
des privilèges de telles écoles ont aussi des droits et des
privilèges garantis par la Constitution canadienne.
Lorsque le gouvernement du Québec adoptera des lois pour changer
la structure actuelle de l'éducation dans l'île de
Montréal, nous espérons que le gouvernement apportera des
modifications à la Constitution du Canada pour que les droits
linguistiques soient parfaitement protégés. C'est une
étape nécessaire qui peut, seule, offrir plus de garanties qu'un
décret provincial, qu'un simple vote majoritaire de l'Assemblée
nationale peut abroger.
En conclusion, nous regrettons, malgré une certaine note
optimiste, d'avoir à conclure sur un ton pessimiste. Il est probable
qu'avec la création de onze commissions scolaires, seulement deux auront
une majorité de langue anglaise. Si, par suite de l'adoption du projet
de loi 62 dans sa forme actuelle, un tel système est constitué,
nous pensons qu'il y a un grand danger que des ghettos culturels de langue
anglaise se constituent dans la région de l'ouest de l'île de
Montréal.
De la même manière, nous pouvons imaginer qu'il se
créera des ghettos français du fait que les parents qui auront
les moyens de déménager iront résider dans des
régions où ils estimeront que leurs enfants pourront profiter
d'une instruction plus conforme à leurs désirs. Si l'on ne
crée que deux commissions scolaires anglaises, nous avons peur que nos
jeunes éducateurs professionnels ne soient amenés à penser
que les chances de promotion à des postes de plus grande
responsabilité dans l'administration seront limitées.
Nous craignons aussi que cette situation ne provoque une baisse de
qualité dans le personnel engagé.
Nous pensons que les dangers de ghettos seront évités par
l'établissement de réseaux de neuf commissions scolaires
françaises et quatre commissions scolaires anglaises, réseaux qui
se recouvrent et couvrent toute l'île de Montréal.
Dans les commissions scolaires francophones qui seront
créées, il n'y a aucune garantie qu'il existera une structure
administrative de langue anglaise. Nous craignons que les écoles
anglaises ne puissent survivre dans de telles conditions.
Si les prédictions qui précèdent se
réalisent, les immigrants, en particulier ceux qui veulent que leurs
enfants reçoivent leur instruction en anglais, ne voudront pas venir au
Québec. L'industrie et le commerce ont besoin, pour prospérer,
des talents, des compétences et de l'expérience de ces gens qui,
pour leur travail, ont dû se déplacer souvent. Si de telles
personnes ne peuvent venir s'installer au Québec, l'économie du
Québec pourrait bien s'en ressentir profondément.
Notre association accueille cependant avec plaisir les sections du bill
62 qui insistent sur le principe de l'accessibilité de tous les enfants
du Québec à une éducation de qualité, sans
distinction de croyance ou de langue. Nous espérons sincèrement
que, dans nos efforts pour promouvoir l'accessibilité de tous les
enfants à l'enseignement, des structures scolaires seront mises en place
pour encourager le bilinguisme et pour éviter que nos enfants vivent
dans deux solitudes. Chaque enfant devrait être en droit de
bénéficier de l'enrichissement exceptionnel que lui apporterait
la participation à ce patrimoine culturel double.
Et voici enfin un résumé de nos recommandations: 1) Nous
recommandons que tout changement proposé dans la structure des
systèmes d'éducation de l'île de Montréal soit fait
selon les principes les plus élevés de démocratie et de
liberté civile, et comme un prolongement naturel de la
Déclaration des droits de l'homme. 2) Nous recommandons que le
système scolaire de l'île de Montréal soit établi
sur une base linguistique, c'est-à-dire des commissions scolaires
régionales de langue française et des commissions scolaires
régionales de langue anglaise. 3) Nous recommandons que toutes les
commissions scolaires existantes de l'île de Montréal soient
remplacées par neuf commissions scolaires de langue française et
quatre commissions scolaires de langue anglaise, ayant chacune juridiction sur
tout l'enseignement préscolaire, élémentaire et secondaire
dispensé dans son territoire. 4) Nous recommandons la formation d'un
conseil scolaire de l'île de Montréal, mais dont les pouvoirs ne
devraient pas être rendus excessifs par une trop grande centralisation.
5) Nous recommandons que les membres de ce conseil scolaire de l'île de
Montréal soient élus et non nommés. 6) Nous recommandons
que les commissions scolaires de langue française et les commissions
scolaires de langue anglaise reçoivent des pouvoirs et des
responsabilités au moins égaux aux pouvoirs et
responsabilités que détiennent actuellement les commissions
scolaires de l'île de Montréal, avec cependant certaines
restrictions en matières financières. 7) Nous recommandons que la
section 203 de la Loi de l'instruction publique soit revue et amendée
pour qu'elle puisse décrire adéquatement les fonctions des
systèmes modernes d'éducation. 8) Nous recommandons
l'établissement de comités d'école qui devraient avoir une
voix dans l'enseignement confessionnel. 9)Puisque l'article 93 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique donne des garanties constitutionnelles
aux commissions scolaires de l'île de Montréal, nous recommandons
que des garanties pour la protection totale des droits linguistiques soient
incorporées ailleurs que dans un décret provincial qui peut
être abrogé par un simple vote majoritaire de l'Assemblée
nationale.
M. LE PRESIDENT: Quelques remarques?
M. CARDINAL: M. le Président, félicitations à
madame pour sa voix française et féminine.
MLLE MARKSFIELD: Merci.
M. CARDINAL: Un tel mémoire passe beaucoup plus facilement de
cette façon. Si j'étais l'un des 220 millions d'anglophones en
Amérique, les craintes que l'enseignement de l'anglais ne vienne
à disparaître ou à diminuer de valeur, je les aurais
peut-être. Même si je reconnais que ces craintes existent, je ne
crois pas qu'elles soient fondées. L'histoire passée du
Québec en est la garantie. Ce ne sont pas les lois ou les décrets
qui garantiront l'avenir, mais la façon d'agir, de penser et de
s'exprimer des citoyens du Québec, de quelque culture qu'ils soient.
Merci sincèrement, madame, d'avoir exprimé ces craintes sur ce
ton sans passion, qui décrit bien une anxiété existante.
Pour y répondre, je ne puis que référer à tout ce
qui a déjà été dit à ce sujet aux
séances précédentes de cette commission. Il est inutile de
reprendre tout cela. Votre mémoire est une contribution, comme les
autres mémoires. Si vous appuyez le projet de loi 62 dans certains de
ses objectifs, il est bien évident que les moyens que vous
préconisez pour y arriver sont tout à fait différents de
ceux qui sont prévus dans le projet de loi. Pour l'instant, je ne puis
faire autrement que reconnaître les sentiments de crainte ou
d'anxiété que vous décrivez, mais vous me permettrez de ne
les point partager.
M. LEFEBVRE: C'est madame Rivard, je crois?
MLLE MARKSFIELD: Mademoiselle Marksfield.
M. LEFEBVRE: Très bien. J'aurais une question principale à
vous poser. J'en aurais bien une autre, mais je vais y réfléchir
en vous posant la première, parce que ma deuxième serait un peu
malicieuse, pas à votre endroit, remarquez.
MLLE MARKSFIELD: Allez-y.
M. LEFEBVRE: Je vais d'abord vous poser la première. A la page
14, je lis le paragraphe suivant: "Dans les commissions scolaires francophones
qui seront créées, il n'y a aucune garantie qu'il existera une
structure administrative de langue anglaise. Nous craignons que les
écoles anglaises ne puissent pas survivre dans de telles conditions." Ce
point de vue, vous l'exprimez, vous, d'une certaine façon. D'autres
l'ont exprimé à l'égard des écoles
françaises dans les districts prévus par le bill 62, où
les Français seront en minorité, car il y aura de tels
districts.
Ma question est la suivante: Si le bill 62, au niveau de la description
de la composition des commissions scolaires unifiées proposées
par le bill, au niveau de la représentation au sein même de la
commission, c'est-à-dire parmi les commissaires, et au niveau de la
direction
pédagogique, vous avait donné la garantie que, dans ces
commissions scolaires, les écoles de langue anglaise, pour les enfants
dont les parents auront choisi l'école de langue anglaise, auraient
reçu ce support pédagogique au niveau de la commission scolaire,
est-ce que l'ensemble de votre mémoire aurait pu en être
modifié ou si votre position aurait été la même?
Autrement dit, quelle est l'importance que vous accordez vous-même
à ce quatrième paragraphe de votre page 14?
MLLEMARKSFIELD: Je base mes commentaires sur la composition actuelle du
ministère de l'Education. Il n'y a que 23 membres de langue anglaise qui
travaillent maintenant pour le ministère. Alors, où est la
protection?
M. TETLEY: Sur combien?
MLLE MARKSFIELD: Sur 291 ou 300. Alors, ce n'est même pas 20
p.c.
M. CARDINAL: Pardon? Est-ce que l'enseignement de l'anglais a
diminué au Québec parce qu'il n'y a que 23 personnes de langue
anglaise?
MLLE MARKSFIELD: Il y a des difficultés, M. le ministre.
M. CARDINAL: Il y en a pour les Français, aussi.
M. BOUSQUET: Combien y en a-t-il à Toronto?
MLLE MARKSFIELD: Je l'ignore, monsieur.
M. LEFEBVRE: Si le député de Saint-Hyacinthe veut
être patient.
M. BOUSQUET : Ah! Vous l'ignorez !
MLLE MARKSFIELD: J'habite le Québec. Alors, c'est le
Québec qui m'attire et je ne veux pas devenir une
Québécoise errante.
M. CARDINAL: Me permettez-vous, mademoiselle?
M. LEFEBVRE: Mademoiselle n'a pas vraiment répondu à ma
question.
M. CARDINAL: Je voudrais qu'on revienne au sujet.
M. LEFEBVRE: Je crois que vous n'avez pas répondu à ma
question encore.
MLLE MARKSFIELD: Je le sais.
M. LEFEBVRE: Vous en êtes consciente.
Est-ce que je puis la poser de nouveau? Enfin, vous la connaissez.
J'aimerais avoir une réponse.
MLLE MARKSFIELD: Je ne suis pas certaine, monsieur, parce qu'il faut
vraiment signaler les garanties. On dit qu'il y a des garanties avec le bill
63, regardez les difficultés que nous avons maintenant. Comment
régler ce bill 63? M. Cardinal a indiqué qu'il va avoir des
formules la semaine prochaine, mais regardez les inquiétudes qui se sont
produites...
M. LEFEBVRE: Oui, parce que le ministre a attendu un an.
M. CARDINAL: Pardon, un an?
MLLE MARKSFIELD: ... Alors comment faire pour donner strictement une
réponse honnête à ce moment? Je ne peux pas.
M. LEFEBVRE: Mais je sens quand même, dans votre réponse,
que vous hésitez, c'est-à-dire que si vous aviez...
MLLE MARKSFIELD: Tout le monde hésite aujourd'hui, monsieur.
M. LEFEBVRE: Oui. Si vous aviez trouvé dans le bill 62 des
garanties au niveau de la commission scolaire, peut-être que ça
aurait changé votre jugement.
MLLE MARKSFIELD: Alors donnez-les-nous, énumérez-les,
décrivez-les et nous en parlerons, monsieur.
M. LEFEBVRE: Bon, j'ai une autre question à vous poser avant
d'arriver à ma question méchante...
MLLE MARKSFIELD: La méchante question?
M. LEFEBVRE: Non, la méchante s'en vient ensuite. Est-ce que vous
habitez Montréal?
MLLE MARKSFIELD: Oui, monsieur.
M. LEFEBVRE: Bon, vous connaissez bien la Commission des écoles
catholiques de Montréal?
MLLE MARKSFIELD: Plus ou moins, pas trop.
M. LEFEBVRE: Plus ou moins, voyez comme les solitudes sont terribles,
même sur la même île parce que vous avez de plus...
MLLE MARKSFIELD: Mais j'ai appris mon français à Lachine,
monsieur.
M. LEFEBVRE: Ah bon, mais vous avez, depuis cent ans...
MLLE MARKSFIELD: Comme M. Cardinal.
M. CARDINAL: J'ai appris l'anglais à Lachine.
MLLE MARKSFIELD: Bravo, chapeau, monsieur!
M. LEFEBVRE: Si vous avec des histoires de jeunesse à vous
raconter! Alors, à la Commission des écoles catholiques de
Montréal, depuis cent ans maintenant, je crois, on enseigne le
français et l'anglais, c'est-à-dire qu'il y a des écoles
françaises et anglaises, et je ne sache pas que les catholiques de
langue anglaise aient été tellement en difficulté du fait
de cette unification au niveau des structures scolaires. Je voudrais avoir
votre opinion là-dessus.
M. CARDINAL: Si vous le permettez, M. Lefebvre, avant que Mademoiselle
ne réponde, je voudrais citer un autre témoignage que je voudrais
apporter devant cette commission. Un commissaire de la commission des
écoles catholiques de Saint-Laurent, que j'ai déjà
cité devant cette commission, écrit ceci: "La commission scolaire
des écoles catholiques de Saint-Laurent est actuellement une commission
scolaire unifiée, selon la langue, et elle compte 35 p.c. de sa
population scolaire de langue anglaise, 35 p.c. Il y a une direction
générale à la tête de laquelle se trouve un
directeur général flanqué de deux adjoints...
M. LEFEBVRE: Oh, comme c'est bien dit! Continuez, M. le ministre,
là vous allez peut-être comprendre.
M. CARDINAL: Je lis là. M. LEFEBVRE: Continuez...
M. CARDINAL: "Son directeur de l'enseignement, c'est un
français...
M. LEFEBVRE: Oh, comme c'est bien dit! M. CARDINAL: Je peux
continuer?
M. LEFEBVRE: Oui, oui, si vous en avez d'autres lettres comme ça,
des gens qui ont compris.
M. CARDINAL: "A ma connaissance, et j'ai été
président de l'Association des éducateurs de Saint-Laurent
pendant trois ans, il n'y a jamais eu de commissaire anglophone à
Saint-Laurent. Et pourtant les anglophones ne se sont jamais plaints de cette
situation à Saint-Laurent. Ce système d'une commission scolaire
unifiée a donné d'excellents résultats. En effet, depuis
septembre dernier, un dialogue s'est établi dans un climat de
compréhension et d'acceptation réciproque des deux
communautés linguisti- ques. D'ailleurs, sur les sept commissions
scolaires préconisées dans le rapport Parent, une seule est
formée d'anglophones et dont la langue maternelle est
nécessairement l'anglais. Les trois autres, à majorité
dite anglaise, le sont à cause des immigrants qui se sont
intégres à la communauté anglophone plutôt que
francophone à cause du système actuel."
Cela, ce n'est pas moi qui écris ça, c'est M. Raymond
Désilets, qui est, non seulement commissaire à Saint-Laurent
bien, il l'a été pendant trois ans, il le mentionne ici
mais qui est maintenant président de la Fédération
des enseignants de l'île de Montréal.
M. LEFEBVRE: Est-ce que le ministre a noté le beau petit
paragraphe au sujet des émissions pédagogiques?
M. CARDINAL: J'ai noté, j'ai noté tous les paragraphes.
S'il n'a pas été commissaire, il a été
président des éducateurs pendant trois ans. De toute
façon, je le cite tel quel. C'est public, car cela a été
publié dans certains journaux francophones. Je ne sais pas si cela a
été publié dans d'autres journaux. Mais ceci est un fait
qui me frappe plus que la CECM, parce que là vous avez quand même
une municipalité dont le maire est de langue française, dont les
commissaires sont de langue française et qui a 35 p.c. de ses membres
anglophones. Mademoiselle parlait de Lachine tantôt. J'y ai exercé
et j'y ai vécu pendant un certain nombre d'années. On y a un
phénomène qui ressemble un peu à ceci: j'ai même cet
après-midi cité le cas d'anglophones de Lachine qui allaient dans
des écoles françaises et vice-versa. Disons que ceci ne
répond pas à la question de M. Lefebvre, mais s'ajoute à
sa question comme exemple de ce qui se produit.
M. LEFEBVRE: Les hésitations de mademoiselle Marksfield ont
été très éloquentes; elles ne sont pas inscrites au
journal des Débats, mais cela a suffi, en tout cas, pour que je
comprenne. Ma dernière question, c'est celle-là qui est
malicieuse, vous n'êtes pas obligée d'y répondre. Si on
vous donnait la garantie qu'on va changer de ministre de l'Education,
auriez-vous aussi peur du bill 62?
MLLE MARKSFIELD: Cela n'a rien à faire avec le ministre...
M. LEFEBVRE: C'est parce que, privément, j'entends d'autre
chose... C'est pour cela que je pose...
MLLE MARKSFIELD: Plus cela change, plus c'est la même chose!
M. CARDINAL: Sans cela, j'aurais posé la question à M.
Lefebvre: Est-ce que M. Lefebvre a déjà eu des aspirations qu'il
n'a pu satisfaire?
M. BOUSQUET: Je n'ai pas de question à poser. J'ai seulement le
commentaire suivant à faire. Je félicite madame d'avoir admis que
les Canadiens français des autres provinces sont ni plus ni moins que
des Canadiens errants!
M. PEARSON: J'aurais juste une petite question à poser à
madame. A la page 9...
M. RIVARD: Est-ce que je peux faire des commentaires? Le premier
s'adresse au ministre à propos des gens de langue anglaise de
Saint-Laurent. Mon école est bien proche de l'école Father
McDonald, à Saint-Laurent, et depuis six ans, je travaille parmi eux et
je sais bien qu'ils ne sont pas aussi contents que le ministre le pense.
M. CARDINAL: Ce n'est pas le ministre qui l'a dit. J'ai lu le
texte...
M. RIVARD: Ah! excusez. Une question à M. Lefebvre, je pense! A
Montréal, les structures de la commission dont vous parlez sont
séparées, n'est-ce pas? Il y a deux structures: une structure
pour les anglophones...
M. CARDINAL: Non, non, non. Au niveau de la commission scolaire, il n'y
a qu'une structure. Trois des commissaires sont nommés par
l'évêque; quatre sont nommés non pas par le ministre de
l'Education, mais par le lieutenant-gouverneur en conseil. Il n'y a jamais eu
deux structures. M. Lefebvre a été commissaire. Il y a des
structures pédagogiques, c'est la différence.
M. RIVARD: C'est cela que je veux dire. Il y a des structures...
M. LEFEBVRE: Vous comprenez que je connais fort bien cette institution,
y ayant vécu pendant cinq ans. Il est exact de dire qu'il y a, à
mon avis, une excellente protection pour les écoles de langue anglaise,
mais la majorité des commissaires est de langue française; la
direction générale de la commission scolaire est de langue
française; la direction générale des études est de
langue française.
Mais vous avez une forte structure pédagogique, enfin, aussi
forte qu'il est nécessaire, compte tenu des dimensions de cette
institution, et vous avez, évidemment, des gens de culture anglaise qui
dirigent des écoles de langue anglaise. C'est ce que nous nous
évertuons à demander au ministre depuis le début et c'est
ça qu'il n'a pas l'air de vouloir comprendre; et c'est la même
chose pour les Français, remarquez bien, j'insiste là-dessus. On
a le même problème avec les minorités françaises
dans deux districts prévus par le bill 62 où ces minorités
françaises n'ont aucune garantie, d'après le bill, qu'une
direction pédagogique compétente verra à assurer la
qualité d'un enseignement en langue française, mais nous avons
talonné le ministre tant et plus là-dessus. Vous avez vu ce qui
en est sorti. Vous en êtes juges comme moi.
M. PEARSON: J'aurais une question à poser, mais, avant de la
poser, j'aimerais avoir une précision de M. Rivard. Vous dites que vous
êtes principal d'une école près de Father MacDonald,
à Montréal?
M. RIVARD: Oui.
M. PEARSON: Et vous avez mentionné, tantôt, que les
catholiques anglophones de Saint-Laurent ne sont pas si contents. Qu'est-ce que
vous vouliez dire exactement? Dans quel sens? Est-ce que c'est dans le sens de
l'équipement? Des services scolaires? Des professeurs?
M. RIVARD: Tout ce que je peux dire, c'est que, parmi eux, plusieurs
viennent à notre école et ils voudraient bien que leurs enfants
reçoivent l'éducation qu'on offre dans nos écoles.
Deuxièmement, ce sont les parents qui nous disent qu'ils ont besoin de
plus d'écoles...
M. PEARSON: Ah bon!
M. CARDINAL: C'est exactement le problème, et je le connais
parfaitement. La commission scolaire protestante de Saint-Laurent a
refusé de passer des locaux à la commission scolaire catholique
de Saint-Laurent. Ceci est un fait, et j'ai tout le dossier au
ministère. C'est la raison pour laquelle une commission scolaire unique
et un conseil métropolitain peuvent distribuer les équipements.
Vous avez parfaitement raison. C'est pour ça qu'ils ne sont pas
contents.
M. PEARSON: Bon, maintenant, j'en arrive à ma question.
M. RIVARD: Oui. Vous savez peut-être qu'une des écoles
incluses ici, c'est une école qu'on appelle Helen Grove School et, en ce
moment, on l'utilise pour des programmes totalement français.
M. CARDINAL : Et pour regrouper les élèves qui viennent de
diverses paroisses de Saint-Laurent.
M. RIVARD: Justement.
M. CARDINAL: Et même d'en-dehors de Saint-Laurent. Je n'ai pas les
chiffres par coeur.
M. RIVARD: Mais, ce n'est pas...
M. PEARSON: Maintenant, à la page 9 de votre mémoire
peut-être que je saisis mal vous mentionnez au sujet de la
section 612:
"La section 612 devrait être divisée en deux parties qui
indiqueraient clairement que les commissions scolaires seraient
séparées sur une base linguistique en commission scolaire
française et en commission scolaire anglaise." Au sujet de la commission
scolaire française, vous mentionnez qu'on doit nommer un directeur
général ainsi que deux directeurs généraux
associés, l'un catholique et l'autre, applicable aux écoles
publiques autres que catholiques et protestantes.
Dans l'autre paragraphe, par contre, vous mentionnez, pour les
écoles anglaises, trois directeurs généraux, l'un
catholique, l'un protestant et l'un "autre".
Pour les écoles françaises, pourquoi le mot protestant, de
la façon dont vous le définissez, puisque vous mentionnez un
directeur aux écoles publiques autre que catholiques ou protestantes?
Voulez-vous signifier par là qu'automatiquement les protestants sont
anglophones?
MLLE MARKSFIELD: Je m'excuse, je ne comprends pas tout à fait
votre question, monsieur.
M. PEARSON: Dans votre division, au sujet de la section 612, vous
mentionnez, pour le secteur français, le nomination d'un directeur
général ainsi que deux directeurs généraux
associés, dont l'un pour les écoles publiques catholiques, et
l'autre pour les écoles publiques autres que catholiques et
protestantes.
MLLE MARKSFIELD: Il y a ceux qui sont protestants, ceux qui sont
catholiques et ceux qui sont autres.
M. PEARSON: Vous ne mentionnez que deux directeurs
généraux associés, un catholique et l'autre pour les
autres.
Au sujet de la nomination des directeurs généraux
associés pour le secteur anglophone, il y en a trois; un pour les
catholiques, un pour les protestants et un pour autres. Y a-t-il une raison
spéciale à cette distinction?
MLLE MARKSFIELD: Pour les écoles multi-confessionnelles alors,
parce qu'il doit aussi y avoir ce genre d'écoles.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je pourrais peut-être donner
un coup de main à Mlle Marksfield. La suggestion n'est pas originale de
la part de l'association qui présente ce mémoire, elle a
été faite à plusieurs reprises; on a dit que les
protestants d'expression française ne sont pas assez nombreux pour avoir
besoin strictement d'une structure à eux et qu'ils seraient
disposés à se joindre aux autres non catholiques d'expression
française.
Je ne voudrais pas parler pour les protestants d'expression
française, mais voilà l'argument qui a été souvent
avancé pour justifier la proposition que vous faites.
MLLE MARKSFIELD: Je vous remercie.
M. CARDINAL: Sauf qu'il faudrait s'entendre sur le sens du mot
protestant. Vous êtes un protestant, monsieur.
M. LE PRESIDENT (Crôteau): Il n'y a pas d'autre question? Alors
nous vous remercions. Il est dix heures moins cinq, on a mentionné
tantôt qu'on voulait terminer les travaux à dix heures.
M. CARDINAL: Malheureusement, il y a un comité
interministériel.
MLLE MARKSFIELD: Messieurs, de la part de la QAPSA, je vous remercie de
votre accueil ici, ce soir.
M. LE PRESIDENT: Très bien, merci.
M. CARDINAL: Je vous en prie, mademoiselle; cela nous a fait plaisir. La
prochaine fois, on se rappellera de vieux souvenirs de Lachine.
MLLE MARKSFIELD: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Avant d'ajourner, j'aimerais souligner ici qu'un M.
Gerald Fitzgerald, à titre personnel, a envoyé une lettre
à cette commission. Il aimerait qu'on la produise au journal des
Débats.
M. CARDINAL: Si vous le permettez, je ne suis pas entièrement
d'accord. Je reçois, chaque jour, au bureau, de ces lettres de gens qui
ne se présentent pas devant la commission. Ils nous envoient des lettres
à titre personnel en demandant qu'elles soient publiées au
journal des Débats. Il y a là une question de principe. Je ne
sais pas ce qu'en pense l'Opposition, mais le nombre de lettres
déjà reçues au ministère est de plusieurs
centaines.
Si le monsieur veut se présenter, il a ce droit, comme tout
citoyen.
M. LEFEBVRE: Je pense que je serai d'accord avec le ministre, car,
autrement, le journal des Débats pourrait devenir une masse
énorme.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il serait quand même important de l'aviser
qu'il peut se présenter.
M. CARDINAL: Oui, oui.
M. PEACOCK: M. le Président, je m'excuse de vous déranger
dans ce petit débat que je n'entends pas, mais je dois vous rappeler que
nous attendons ici depuis deux heures. Ce n'est pas comme cela qu'on entend les
gens. Nous avons amené tout notre conseil exécutif pour montrer
aux membres de cette commission l'importance que nous attachons à ce
débat. Malheureusement, à cause de plusieurs choses:
les gens qui veulent trop parler, ceux qui veulent lire tout leur
mémoire, nous sommes ici, à dix heures du soir, avec les gens de
Lakeshore sans avoir été entendus.
Je vous demande, au moins, la politesse de nous écouter en
premier lieu mercredi prochain. Y a-t-il une garantie formelle?
M. CARDINAL: Je vous le garantis.
M. PEACOCK: Les gens de Lakeshore pourront être entendus en
deuxième lieu.
M. CARDINAL: Attendez un peu. Vous parlez de Lakeshore deux fois.
Lequel?
M. PEACOCK: Le deuxième.
M. CARDINAL: Il y a deux groupes qui n'ont pas été
entendus aujourd'hui.
M. PEACOCK: Oui, la Montreal Teacher's Association, et Lakeshore.
M. CARDINAL: C'est cela. We are ready to hear you on next Wednesday
afternoon around four o'clock in the same order as indicated in the agenda
today. So, we garantee you that those two associations will be the two first
ones who will be heard, and the only ones in fact, at the next meeting of this
committee.
M. PEACOCK: Je m'excuse, M. le Président, mais je posais la
question au président des députés assemblés ici
à cette commission. Je ne comprends pas comment le ministre a pu
répondre. Je m'adresse à vous, M. le Président.
M. CARDINAL: Je m'excuse de vous avoir répondu, monsieur, et je
vous remercie de votre délicatesse.
M. LE PRESIDENT: Monsieur, je tiens à vous dire ici qu'il y a
collaboration entre l'Opposition et le parti ministériel.
Quant au président, sa fonction, c'est de maintenir l'ordre.
Alors ce que les membres des deux côtés de la table
décident, je pense bien que le président doit s'y soumettre.
M. LEFEBVRE: M. le Président, quant à moi, je comprends
l'impatience de nos amis de la Montreal Teachers Association, mais je ne pense
vraiment pas qu'ils puissent nous faire grief; nous avons tenté
d'établir une espèce d'entente en vertu de laquelle chaque groupe
aurait une demi-heure, mais c'est difficile de limiter le droit de parole des
gens. Vous-même, lorsque vous serez entendu, si, au bout de vingt
minutes, on vous disait que votre temps est fini, vous n'aimeriez probablement
pas ça. Franchement, malgré l'inconvénient qui vous est
causé du fait que vous devrez revenir, en toute objectivité, je
ne pense pas que vous puissiez faire de grief à la commission, je pense
que c'est un problème non partisan. Nous avons fait notre possible pour
écouter tout le monde.
M. PEACOCK: M. le Président, si je puis m'expliquer, nous serions
prêts à faire un petit résumé de notre point de vue,
si nous étions assurés que les membres ont lu notre
mémoire avant. Nous l'avons présenté il y a au moins un
mois. Pourquoi est-ce que ce n'est pas possible? Tout le monde exige qu'on lise
chaque mot, pour que ce soit enregistré. C'est pour cette raison que les
gens restent ici afin de lire chaque mot. Si vous pouviez nous assurer que
notre mémoire serait étudié sans être lu ici, nous
serions tout à fait d'accord pour prendre dix minutes.
M. LE PRESIDENT: C'est ce que nous avons convenu au début de la
séance. Nous avons donc vos mémoires; à la prochaine
séance, les membres de la commission auront pris connaissance de vos
mémoires et ils pourront vous interroger sur ces mêmes
mémoires.
M. PEACOCK: Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Alors, ajourné?
M. DAOUST: M. le Président, seulement une petite question. Je
sais que vous êtes pas mal fatigué à cette heure-ci, mais,
la semaine prochaine, aurions-nous plus qu'une demi-heure?
M. LE PRESIDENT: Nous allons siéger de quatre heures à
cinq heures et demie ou six heures? Six heures? Nous allons avoir deux
heures.
M. CARDINAL: Nous ne pouvons pas garantir l'heure du début de la
séance; nous sommes pendant la période des travaux
parlementaires; malgré la bonne volonté de l'Opposition et des
ministériels, nous sommes à la disposition de l'Assemblée
nationale; nous aurons entre une heure et une heure et demie pour les deux
mémoires.
M. LE PRESIDENT: Il ne faudrait pas que ces gens reviennent encore.
M. CARDINAL: Si ces deux associations pouvaient s'entendre, ce sont les
deux seuls que nous entendrons; elles peuvent se diviser ce temps.
M. LE PRESIDENT: Entendez-vous donc entre vous.
M. DAOUST: Je vous remercie. (Fin de la séance: 22 h 1)
APPENDICE MEMOIRE
SOUMIS PAR
LE CONGRES JUIF CANADIEN
SECTION DU QUEBEC 1. INTRODUCTION
Le Congrès Juif Canadien représente la communauté
juive, en vertu d'élections des délégués des
organisations et du public en général, par des
procédés démocratiques.
Il est divisé en régions qui administrent leurs programmes
locaux et s'occupent de toutes questions qui représentent un
intérêt pour la communauté juive locale en tant que telle.
C'est la région du Québec, du Congrès Juif Canadien, qui a
siège à Montréal, et en tant que porte-parole reconnu de
la communauté juive de la Province de Québec, qui se
présente aujourd'hui devant le Comité de l'Education de
l'Assemblée Nationale et soumet ce mémoire qui expose ses vues
sur la restructuration proposée de l'organisation scolaire à
Montréal. 2. LA COMMUNAUTE JUIVE - HISTORIQUEMENT ET
DEMOGRAPHIQUEMENT
La communauté juive au Québec, remonte à 1759 et
possède une histoire de plus de deux siècles d'existence
ininterrompue.
Les membres de la communauté juive fournirent, de nombreuses et
importantes contributions au développement de la Province de
Québec, dans un vaste domaine d'activités.
Quoique la communauté juive soit historiquement, dans une large
mesure, d'expression anglaise, elle rassemble actuellement une grande
proportion qui est bilingue. Depuis 1957, alors qu'une immigration en
provenance d'Afrique du Nord amena au Canada plusieurs milliers de familles
juives, dont la première langue est d'expression française, cette
tendance vers le bilinguisme s'est régulièrement accrue. En
conséquence, la composition linguistique au sein de la communauté
juive, est devenue de plus en plus variée et un plus grand pourcentage
de la population juive s'exprime en français en tant que première
langue, alors qu'une proportion croissante de l'autre partie de la population
juive est bilingue ou étudie le français et pourvoie à ce
que ses enfants fassent de même.
Néanmoins, les membres de la communauté juive
éprouvent profondément le sentiment, qu'eux-mêmes et leurs
enfants doivent conserver la faculté de communiquer entre eux dans la
Province de Québec, aussi bien qu'avec le reste du Canada et la
communauté internationale, tant en anglais qu'en français selon
leur choix.
A ces fins, le système éducatif de la Province de
Québec et plus particulièrement de l'île de
Montréal, en ce qui a trait aux langues, doit assurer à la
communauté l'accessibilité de l'éducation dans la langue
de son choix, à partir de la première jusqu'à la
onzième année d'études inclusivement, grâce à
des études de la plus haute qualité d'excellence
pédagogique.
3. POSITION DE LA COMMUNAUTE JUIVE AU SEIN DU SYSTEME SCOLAIRE DE LA
PROVINCE DE QUEBEC
La Communauté Juive de la Province de Québec,
chérit et est fière d'une longue histoire d'association et de
coopération étroite, avec ses concitoyens d'autres religions,
dénominations et origines, dans toutes les phases des activités
civiques, culturelles, économiques et philanthropiques. Dans le champ de
l'éducation, un processus historique aboutit en une affinité plus
étroite avec le système des écoles protestantes et en
conséquence, l'acceptation du fait que celles-ci sont les plus proches
d'un système d'éducation sans dénomination propre. La
Commission des Ecoles Catholiques de Montréal, décida tout
récemment, de faciliter l'admission dans ses écoles, d'enfants
d'expression française, autres que catholiques et actuellement, une
section d'une de ses écoles élémentaires a
été attribuée aux enfants juifs.
Notre intention n'est point en ce mémoire, de nous occuper des
difficultés actuelles auxquelles les juifs de la Province de
Québec ont à faire face en matière d'éducation.
Nous nous limiterons à exprimer l'espoir, que jusqu'à ce que de
nouvelles structures administratives soient mises en oeuvre, les
problèmes spécifiques de la communauté juive, tels que
soulignés dans nos mémoires précédents, fassent
l'objet de la considération qu'ils méritent par les
autorités respectives. 4 , MEMOIRES SOUMIS ANTERIEUREMENT PAR LE CONGRES
JUIF CANADIEN, EN EN MATIERE D'EDUCATION AU QUEBEC
Le Congrès Juif Canadien, a précédemment et en de
nombreuses occasions, exprimé ses vues en ce qui concerne le
système éducatif dans la Province de Québec. Nos
recommandations au sujet de la loi 62 sont fondées sur celles
précédentes qui comprenaient: a) Mémoire soumis à
la Commission Royale d'Enquête sur l'Education (Mars 1962) b)
Mémoire soumis à la Commission Royale sur la Taxation au
Québec (Janvier 1964) c) Mémoire soumis à la Commission
Parlementaire sur la Constitution (Juin 1964) d) Mémoire soumis au
Conseil Supérieur de l'Education au Québec (Octobre 1966) e)
Mémoire soumis au Comité de l'Education de l'Assemblée
Nationale au sujet de la Loi 56 (Novembre 1968) f) Mémoire soumis au
Comité de l'Education de l'Assemblée Nationale au sujet de la Loi
85 (Janvier 1969) g) Mémoire soumis à la Commission
d'Enquête sur la Position de la Langue Française et sur les Droits
Linguistiques au Québec (Août 1969).
Nous requérons respectueusement que ces mémoires qui sont
dans vos dossiers soient considérés comme faisant partie
intégrale du présent mémoire.
Nous désirons plus particulièrement citer à
nouveau, la position exprimée par nous, dans notre mémoire
à la Commission d'Enquête sur la Position de la Langue
Française et sur les Droits Linguistiques au Québec: « Nous
sommes convaincus, que tous les Québécois doivent
bénéficier de la même opportunité de jouir d'un
système scolaire applicable à tous les résidents, sans
distinction, et qui pourvoierait aux moyens nécessaires en vue de
l'acquisition future, des langues française et anglaise et des
éléments fondamentaux d'une culture pluraliste. « Nous
recommandons que le système éducatif soit basé sur une
dualité linguistique, au sein d'une même administration scolaire,
avec l'option allouée à tous les parents, d'envoyer leurs enfants
aux écoles de leur choix. Le but de toutes les écoles doit
être un processus éducatif fournissant aux étudiants une
connaissance d'usage du français et de l'anglais, en tant que langues de
communication. « La mise en oeuvre du système éducatif
scolaire suggéré, devrait inclure la pleine reconnaissance par le
Gouvernement du Québec du secteur d'écoles indépendantes
bénéficiant d'une aide gouvernementale la plus étendue et
dans lequel chaque groupe pourra, s'il le désire, assumer des
responsabilités supplémentaires de son propre chef, en vue de
développer son propre héritage culturel et religieux et ce
conformément aux « idéaux » démocratiques du
Québec et du Canada ».
5. OBSERVATIONS GENERALES
La loi No 62 qui modifierait fondamentalement le système
éducatif actuel, pour autant que l'administration de nos écoles
en est l'objet, revêt une importance primordiale pour la
communauté juive. Le Congrès Juif Canadien, Section du
Québec, dédia aux modifications y proposées une
étude des plus attentives. Son Comité sur la Position des Juifs
dans le système éducatif du Québec, établit
immédiatement un Comité d'Etudes chargé d'analyser ladite
loi sous tous ses aspects. Des réunions publiques furent tenues, ainsi
que des consultations individuelles avec des organisations et des personnes,
les plus qualifiées à exprimer des opinions sur cette question
vitale.
La Communauté Juive n'est pas monolithique et il existe des
différences d'opinions sur un certain nombre de questions. Des principes
généraux existent cependant, auxquels souscrit la
Communauté Juive dans son entité et au sujet desquels se fait une
unanimité complète, tels que l'acceptation d'une dualité
linguistique et d'un pluralisme culturel fondement de notre système
éducatif, le droit des parents de choisir la langue dans laquelle leurs
enfants seront instruits, le caractère démocratique des
structures administratives élues par un suffrage universel, la
participation des parents aux décisions prises et une
égalité d'imposition.
L'opinion bien considérée du Congrès Juif Canadien
est que le but ultime des amendements à la loi sur l'éducation,
devrait être l'établissement d'une administration scolaire
unifiée, élue démocratiquement avec des garanties
législatives écrites adéquates en vue d'assurer
l'égalité des droits en matière d'éducation et des
conditions nécessaires afin de fournir des programmes d'études
dans la langue choisie par les parents de la plus haute qualité
pédagogique. C'est dans cet ordre d'idées que le Congrès
Juif Canadien soumet respectueusement un certain nombre de suggestions et de
recommandations développé ci-après, que nous
considérons comme essentiel au développement du système
éducatif viable qui a« ses racines dans la tradition et regarde
vers l'avenir ». (Rapport de la Commission Parent). 6. COMMISSIONS
SCOLAIRES UNIQUES
Nous exposons respectueusement que la création proposée de
commissions scolaires uniques, soit considérée dans le contexte
des buts et des objectifs supérieurs de n'importe quel système
éducatif appelé à fournir une éducation de la plus
haute qualité possible pour tous sans distinction, et d'assurer à
tous l'éducation qu'ils requièrent. Dans le contexte de la
société québécoise, ceci comporte certainement un
pluralisme culturel et un dualisme linguistique.
Il pourrait être facilement soutenu qu'une organisation
administrative unique est plus capable que toute autre, d'organiser une
éducation supérieure au niveau élémentaire et
secondaire moyennant un enrichissement des programmes en rendant ceux-ci plus
flexibles, un recrutement de personnel compétent, une organisation de
bibliothèques scolaires, la création de moyens d'éducation
physique, l'usage de méthodes audio-visuelles et autres.
Ce qui n'est pas aussi certain, est de savoir si de pareilles
commissions seraient capables de mieux maintenir la diversité des choix
religieux et le dualisme linguistique dans le système scolaire.
L'unification est une chose et l'uniformité en est une autre. Sans aucun
doute, le plus grand soin doit être manifesté à mesure que
la ligne de démarcation entre ces deux concepts devient plus
estompée.
Le droit pour chacun à une éducation de la meilleure
qualité et de son choix, revêt une priorité par rapport
à n'importe quel avantage qui pourrait découler d'une
administration scolaire unifiée sur l'île de Montréal. Il
n'est pas suffisant de légiférer sur des opportunités en
vue d'une éducation diversifiée. Il est essentiel que soient
clairement définies des procédures établissant comment
cette diversité peut être atteinte et mise en oeuvre.
Nous exposons que des révisions substantielles sont essentielles
en vue de faire en sorte que l'unification proposée soit effective par
l'établissement d'un système éducatif prévoyant
l'opportunité égale pour tous sans distinction, ainsi que des
conditions nécessaires pour une dualité linguistique et un
pluralisme culturel qui, tous deux, sont des fondements de la
société québécoise.
7. DUALITE LINGUISTIQUE
A la lumière de l'article 2 de la loi en vue de promouvoir la
langue française au Québec Loi No 63 la loi sur
l'éducation fut amendée de sorte qu'il incombe à chaque
Commission Scolaire « de prendre les mesures nécessaires pour que
les cours d'études... adoptés ou reconnus pour les écoles
publiques catholiques, protestantes ou autres, selon le cas, soient
dispensés à tous les enfants... en langue française
», et « en langue anglaise à chaque enfant dont les parents
en font la demande lors de son inscription ».
Etant donné que la poursuite de l'instruction en français
et, ou, en anglais, apparaît comme étant une des
préoccupations majeures de plusieurs membres de la communauté,
nous recommandons que cette obligation soit clairement réaffirmée
dans la loi relative à l'organisation scolaire dans l'île de
Montréal.
Nous sommes convaincus qu'il est très important pour la
communauté non seulement d'être réassurée et
systématiquement informée au sujet du fait que chaque commission
scolaire possédera les moyens de fournir des cours d'études dans
la langue du choix des parents, mais aussi de savoir de quelle manière
ce système fonctionnera sous l'égide de l'administration scolaire
unifiée, telle que proposée.
Plus particulièrement, nous pensons qu'il est important d'assurer
que l'on disposera de personnel adéquat à tous les niveaux pour
établir, superviser et fournir de tels cours, et de s'assurer que ces
cours sont de la plus haute qualité.
En conséquence, nous recommandons qu'aucune loi ne soit
adoptée sans une disposition relative à la désignation de
deux directeurs généraux associés sur une base
linguistique et pour chaque commission scolaire, l'un pour tous les cours
d'instruction donnés en langue française, et l'autre pour tous
les cours d'instruction donnés en langue anglaise. Ces deux directeurs
généraux associés auraient charge de la
responsabilité de l'administration éducative et de la supervision
des cours respectifs d'études, conformément à l'option des
parents. Au surplus, les directeurs généraux associés
devraient à leur tour disposer d'un personnel suffisamment
expérimenté afin que les cours d'études
bénéficient du plus haut niveau de compétence et de
qualité.
De telles dispositions feraient que les parents seront plus
rassurés sachant que les programmes sont administrés et
exécutés par un personnel parlant la même première
langue que leurs enfants. 8. OPTION DES PARENTS
Nous exposons que des dispositions soient ajoutées à la
loi 62 définissant les procédures d'exercice de l'option des
parents en ce qui concerne la langue d'instruction, et que cette option soit
également ouverte à chacun sans distinction.
Notre opinion bien considérée est que de telles
dispositions sont essentielles en vue de celles de la loi 63 qui a
amendé la section 3 de la Loi sur l'Immigration (1968, Chapitre 68) en
stipulant que le Ministre de l'Immigration devra « prendre, de concert
avec le ministre de l'éducation les dispositions nécessaires pour
que les personnes qui s'établissent au Québec acquièrent
dès leur arrivée ou même avant qu'elles quittent leur pays
d'origine la connaissance de la langue française et qu'elles fassent
instruire leurs enfants dans des institutions d'enseignement où les
cours sont donnés en langue française ».
Tout ce qui peut être accompli en vue d'assister les nouveaux
venus dès leur arrivée, afin d'obtenir une connaissance d'usage
de la langue française, est certainement très recommandable et
utile. La communauté juive dans la limite de ses ressources, a depuis un
certain nombre d'années accompli exactement cette tache et aidé
les immigrants juifs à apprendre le français. Des cours de langue
française sont donnés par le Service d'Aide aux immigrants juifs
qui est l'agence centrale d'aide de la communauté juive aux nouveaux
venus et des livres de textes appropriés, ainsi que toute aide
éducative est disponible au profit de ces programmes.
Il serait cependant inconcevable si, à l'occasion de
l'éducation fournie aux enfants des nouveaux arrivants, une distinction
était créée entre un résident et un autre d'une
part, et que d'autre part, un groupe entier serait institué dans une
catégorie séparée. Nous sommes catégoriquement
opposés à pareille distinction. Ces dispositions introduiraient
au Québec une conception qui pourrait avoir des répercussions
lointaines en mettant un terme à l'égalité des droits
fondamentaux entre ceux nés au Québec et les autres
résidents de la Province, et au surplus elles seraient en contradiction
avec la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme.
9. CONSEIL SCOLAIRE DE L'ILE DE MONTREAL
Un rôle très important dans la restructuration
proposée de l'organisation scolaire à Montréal est
assigné au conseil scolaire de l'île de Montreal, qui sera
chargé du financement, de la planification et de la coordination des
services de chaque Commission. Il est très essentiel que le Conseil
reflète parfaitement la communauté totale et exprime tous les
types d'éducation qui seront dispensés par les Commissions, que
ce soit des cours d'études adoptés ou reconnus pour les
écoles publiques catholiques et pour les écoles publiques
protestantes, et pour les écoles publiques autres que catholiques et
protestantes, qui toutes devront dispenser une instruction en langue
française et anglaise. Nous exposons que le Conseil, en vue
d'acquérir la confiance des parents et de la population en
général, et afin qu'il soit plus effectif, devrait être
élu sur une base largement démocratique et être ainsi
responsable envers la communauté. Nous recommandons en
conséquence que chaque commission scolaire soit requise d'élire
parmi ses membres un représentant au Conseil scolaire de l'fle.
Des membres additionnels jusqu'à un maximum de 25% des membres
élus du Conseil de l'fle, pourraient être nommés par le
Ministre de l'Education qui s'assurerait que parmi ceux-là il y aura des
membres autres que catholiques et protestants.
Nous recommandons qu'afin de donner un vrai sens démocratique au
Conseil de l'fle, le Président et le Vice-Président soient
élus par les membres du Conseil et parmi ceux-ci, et non point
être désignés par le Ministre de l'Education tel qu'il est
actuellement stipulé dans la loi. 10. ARRONDISSEMENTS SCOLAIRES
Nous exposons que l'organisation scolaire à Montréal
fonctionnerait plus effectivement si le nombre des commissions scolaires
projetées était moindre, permettant ainsi un contrôle plus
effectif et efficient des écoles se trouvant sous la juridiction d'une
commission scolaire déterminée.
Nous recommandons que soit poursuivie l'étude des recommandations
de la Commission d'Enquête sur l'Education au Québec
Commission Parent qui envisageait seulement sept commissions scolaires
pour l'fle de Montreal. Au cas où le nombre des commissions scolaires
serait maintenu à onze, tel que prévu par la loi 62, nous
recommandons que leur délimitation soit modifiée à la
lumière de considérations démographiques et que plus
particulièrement, une portion de l'arrondissement scolaire No 4 soit
ajoutée à l'arrondissement scolaire No 2 qui lui est limitrophe,
et ce, en vue d'une administration plus efficace et plus cohésive des
écoles de cette région.
A l'appui de cette recommandation, nous joignons une copie d'une
étude qui indique la position spécifique des enfants juifs qui
actuellement fréquentent les écoles protestantes dans cette
région, et les avantages qui résulteraient des changements
proposés. 11. QUALIFICATIONS ELECTORALES
Telle qu'ainsi rédigée, la loi 62 dispose qu'en vue
d'avoir le droit de voter à l'élection d'un commissaire, il sera
nécessaire d'être, parmi d'autres conditions, citoyen canadien.
Cette disposition excluerait automatiquement les parents qui sont de nouveaux
arrivants, durant la période qui devrait s'écouler avant qu'ils
ne deviennent éligibles à la citoyenneté canadienne, soit
un minimum de cinq ans. Les élections scolaires, si importantes pour le
total de la population, sont d'un intérêt primordial pour ceux le
plus directement intéressés: soit les parents. La loi 62 à
juste titre, reconnaît la grande importance du rôle des parents
dans la décision qui a trait à l'éducation de leurs
enfants; aussi au niveau du comité scolaire, accorde-t-elle le droit de
vote à tous les parents, sans aucune exception. Nous pensons qu'une
période de résidence canadienne supérieure à une
année, est parfaitement suffisante pour habiliter une personne a voter
aux élections d'un commissaire scolaire et nous recommandons en
conséquence que la qualification de citoyen canadien afin de pouvoir
voter relativement aux commissaires scolaires soit abrogée et
remplacée par la condition d'une résidence canadienne pour une
période supérieure à une année.
12. TRANSITION
Des changements d'une nature aussi fondamentale, tels qu'ils sont
proposés par la loi 62, causeront nécessairement une dislocation
durant la période transitoire, alors qu'un ensemble d'organes
administratifs disparaîtra et qu'un autre d'une nature
complètement différente en prendra la place.
Un excès de zèle en vue d'effectuer des changements dans
un laps de temps minimum, conduirait nécessairement à une
situation chaotique et pour le moins temporairement la qualité de
l'éducation en souffrirait.
Une période d'ajustement est nécessaire en vue d'obtenir
dans son entité l'objectif des changements proposés, soit le
maintien de la dualité linguistique et du pluralisme culturel au plus
haut niveau et de la plus haute qualité.
En conséquence, nous recommandons qu'un grand soin soit
exercé dans l'exécution de la loi 62 afin de s'assurer que les
changements proposés sont introduits avec la dislocation et
l'interruption minima des services.
Ceci s'applique en particulier à l'unification des commissions
scolaires où un soin spécial est requis afin de s'assurer que
l'éducation des enfants qui fait l'objet actuellement de
différentes structures maintienne la plus haute qualité et une
excellence pédagogique.
Nous recommandons que l'unification des commissions scolaires soit
effectuée par étapes de manière qu'il n'y ait pas
d'abaissement des niveaux à cause du transfert des
responsabilités administratives et pédagogiques. 13. ECOLES
PRIVEES
Plus de 4,000 enfants juifs représentant 25 à 30% de la
population totale juvénile juive, fréquentent les écoles
diurnes juives à Montréal dans lesquelles ils reçoivent
leur éducation générale en sus des cours d'études
de religion et culture juives.
Actuellement, ces écoles jouissent du statut «
associé » avec la Commission Scolaire Protestante du Grand
Montréal et la Commission Scolaire Protestante du Grand
Saint-Martin.
Nous comprenons que la loi 62 n'altérera pas en aucune
manière la position des écoles privées en
général qui continueront à être soumises aux
dispositions de la loi sur l'éducation privée (Loi 56) ou la loi
37, qui institue le statut « associé ». 14. CONCLUSIONS
Dans une société multiculturelle telle que la nôtre,
il ne peut y avoir de doute qu'une attention spéciale soit
nécessaire en ce qui concerne cet aspect de l'éducation publique
qui mène à une plus profonde et durable compréhension
mutuelle entre les différentes variétés religieuses et le
maintien de la dualité linguistique. Nous sommes tous
dédiés à ce but. C'est notre espoir que la nouvelle
perspective qui est actuellement projetée pour l'organisation scolaire
à Montréal, apportera une nouvelle vitalité et force
à ces concepts fondamentaux. Le chemin qui mène de la
théorie à la pratique est souvent long, non tracé et
estompé, et des mesures énergiques sont requises pour assurer la
compréhension, l'aide et la confiance de la population
entière.
Nous sommes reconnaissants de l'opportunité qui nous a
été donnée d'exprimer nos vues et confiants que les
problèmes présentés dans ce mémoire seront
considérés avec équité et bonne volonté.
Respectueusement soumis, de la part de la Région du Québec
du Congrès Juif Canadien.
Nathan Gaisin, Monty Berger,
Président Président du Comité sur la
Position des Juifs dans le Système éducatif du
Québec
Morton Bessner, Dr. Samuel Lewin
Président du Comité d'Etudes Directeur Exécutif
Le 19 février 1970