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Commission permanente de l'Education
Bill 62 Loi concernant l'organisation scolaire
sur l'île de Montréal
Séance du mercredi 11 mars 1970
(Seize heures dix minutes)
M. CROTEAU (président de la commission de l'Education): A
l'ordre, messieurs! Je vous souhaite la bienvenue. Si vous vous rappelez bien,
nous avons entendu M. le président, Mme Lavoie-Roux ainsi que M. Gagnon.
Oui, M. Carignan?
M. CARIGNAN: M. le Président, si vous me le permettez, je
voudrais signaler la présence ici d'un commissaire qui n'y était
pas la semaine dernière, M. Michael McDonald. Je voudrais
également signaler l'absence de deux commissaires qui étaient en
dehors de Montréal, MM. Gagnon et Daoust. M. Daoust est en Europe. Nous
espérions que M. Gagnon serait avec nous quand nous avons
été invités à venir ici. Il devait être de
retour à Montréal hier soir. Apparemment, il a manqué une
communication. Il est possible qu'il arrive, mais nous n'avons pas de ses
nouvelles. Quant à M. Daoust, évidemment, il est en Europe.
Je pense que vous signaliez vous-même que les commissaires qui
sont ici présents font tous partie de la majorité, à
l'exception de M. Pagé qui, sur certains points du rapport, a
exprimé des opinions qui lui sont particulières, et M.
Pagé ne s'est pas encore exprimé.
M. LE PRESIDENT: Alors, nous pourrons entendre M. Pagé.
Séances à Montréal
M. LEFEBVRE: M. le Président, avant d'entendre M. Pagé, si
vous le permettez, je soulèverai une procédure de la commission.
Simplement une minute, je crois que cela peut se régler très
rapidement. Il est arrivé et je suis convaincu que ce n'est pas
une erreur volontaire de votre part, M. le Président que dans le
rapport que vous avez soumis à la Chambre en date du 6 mars, vous avez
justement fait allusion à une motion que j'avais présentée
et qui avait été appuyée par le député de
D'Arcy-McGee. Je crois que pour que ce rapport soit complet il faudrait
ajouter, après le troisième paragraphe: Cette motion a
été adoptée à l'unanimité. Je crois que pour
l'information de la Chambre il est essentiel que ce détail, qui a son
importance, figure au rapport. Si nous pouvons nous mettre facilement d'accord
là-dessus je crois que cela évitera un débat et
qu'à ce moment-là la Chambre sera parfaitement informée de
ce qui s'est passé en fait. Nous avons tous copie du journal des
Débats et nous savons que j'ai posé la question directement au
ministre: Cette motion est-elle adoptée à l'unanimité? Le
ministre m'a répondu: Oui.
M. GARDNER: C'est inscrit au journal des Débats.
M. LEFEBVRE: Oui, bien sûr. Seulement, je crois, M. le
Président et c'est à vous que je m'adresse qu'il
aurait été normal et encore une fois je ne vous accuse de
rien qu'après ce troisième paragraphe vous fissiez mention
du sort qui avait été réservé à la motion,
comme c'est normal de le faire dans n'importe quel procès-verbal
où on fait allusion à une motion. On doit dire, je pense, ce
qu'il est advenu de la motion.
M. LE PRESIDENT: Alors, demain je produirai un rapport amendé
tout simplement, le même rapport, et j'inclurai ce troisième
paragraphe: Cette motion a été adoptée à
l'unanimité.
M. CARDINAL: M. le Président, je vous remercie. Justement,
plutôt que de faire un débat à ce sujet et, encore une
fois, de remettre la CECM à une autre séance même si
la chose peut être discutable, nous ne la discuterons pas je serai
d'accord avec le député d'Ahuntsic et avec vous, M. le
Président, pour qu'un rapport amendé, tel que mentionné,
soit présenté.
M. LEFEBVRE: M. le Président, je ne ferai qu'une remarque, et
nous ne susciterons pas de débat, là encore. Mais quant à
nous, nous regrettons que le gouvernement se fasse tirer l'oreille pour donner
suite à la motion de cette commission, ce qui oblige ces messieurs de la
CECM à revenir à Québec, alors que nous aurions
très bien pu aller les entendre à Montréal.
M. BOUSQUET: M. le Président, je ne vois pas pourquoi la
commission se transporterait à Montréal pour avoir le point de
vue des Montréalais sur le bill 62, alors qu'on n'a pas fait la
même chose pour le bill 63. De plus, je ne vois pas pourquoi,
d'après ce principe, on ne serait pas allé à Hull,
chercher le point de vue de Hull sur la création d'une communauté
urbaine. Je crois que cette histoire devrait se régler au plus
tôt, et je ne vois pas pourquoi on permet cela.
M. CHOQUETTE: M. le Président, si vous voulez me permettre une
observation. Si le député de Saint-Hyacinthe ne se transporte pas
à Saint-Hyacinthe, il va être défait dans
Saint-Hyacinthe!
M. BOUSQUET: Je n'ai pas besoin de me transporter et vous n'avez pas
besoin de poser de "si": je serai réélu.
M. LE PRESIDENT: Il ne faudrait pas commencer de polémique.
M. CARDINAL: M. le Président, je ne voudrais pas commencer de
polémique. Je voudrais, cependant, faire une mise au point pour ceux qui
nous écoutent. Et je pense que le député d'Ahuntsic
acceptera. J'ignorais totalement, comme probablement les députés
des deux côtés de cette Chambre, quel sort le président de
l'Assemblée nationale réserverait à notre rapport. C'est
le président lui-même. Et cela a été l'expression
même du leader de l'Opposition de dire sa surprise, face à ce qui,
normalement, se fait en sens inverse. Alors, ce n'est pas le gouvernement qui a
refusé, c'est le président qui a demandé qu'une
étude particulière de certains articles du règlement, 158
et d'autres que je n'invoquerai pas, soit faite, et c'est le leader de
l'Opposition qui a demandé un sursis pour se préparer à
répondre aux objections du président. Le journal des
Débats en fait foi et j'espère qu'on ne reviendra plus sur cette
question, sauf à l'Assemblée nationale.
M. LEFEBVRE: Nous y reviendrons demain, mais nous avons tout lieu de
croire, M. le Président, que le gouvernement est férocement
opposé à siéger à Montréal.
UNE VOIX: La semaine dernière...
M.LEFEBVRE: Oui, mais le ministre de l'Education n'a pas autant de poids
que le ministre du Travail, au cabinet, apparemment!
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.
UNE VOIX: Il pèse plus, c'est vrai.
M. LE PRESIDENT: M. le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: Seulement une remarque au sujet de celle que le
député de Saint-Hyacinthe a faite quand il a comparé le
bill 63 et le bill 62. Pour autant que je me souvienne, le bill 63 s'applique
à toute la province, tandis que le bill 62 est destiné à
l'île de Montréal.
M. BOUSQUET: Je ne vois pas pourquoi on ne serait pas allé
à Saint-Léonard. De toute façon, je suis d'avis qu'on ne
doit pas éterniser cette discussion. Je suis d'accord avec le ministre
de l'Education.
M. LE PRESIDENT: Très bien.
M. CARDINAL: Si vous permettez, je voudrais dire ceci. H faut quitter
ces lieux à 5 h 30. La salle doit être libérée,
parce qu'une autre rencontre se tiendra ici. J'en ai informé, d'ail-
leurs, le député d'Ahuntsic. Si nous pouvions procéder
dès maintenant, nous aurions environ une heure trente à nous avec
les représentants de la CECM.
M. LEFEBVRE: Parfaitement d'accord. M. LE PRESIDENT: M. Pagé.
Remarques de M. Joseph Pagé
M. PAGE: M. le Président, madame, messieurs, je vous remercie de
nous donner l'occasion de faire quelques remarques. Je suis solidaire de mes
collègues de la commission, quant aux principales recommandations
contenues dans notre mémoire. Toutefois et j'ai exprimé
mon opinion dans les notes en annexes de ce mémoire je
considère que les nouvelles dispositions de l'article 203 de la Loi de
l'instruction publique relatives à la lanque d'enseignement sont
suffisantes sans qu'il ne soit nécessaire d'ajouter dans le bill 62, qui
est un amendement à la Loi de l'instruction publique, des garanties
linguistiques. De même, je considère que les comités
confessionnels du Conseil supérieur de l'éducation
régiront, par leurs règlements, les écoles catholiques et
protestantes. H n'est pas nécessaire de prévoir d'autres
dispositions relatives à la confessionnalité que celles
déjà contenues dans le bill 62. Il faudrait peut-être
rédiger l'article relatif aux directeurs généraux
associés en concordance avec l'article de la Loi du ministère de
l'Education qui parle des sous-ministres associés.
La principale remarque concerne le cens d'éligibilité, le
cens électoral et les procédures d'élection au suffrage
universel tels que définis dans le bill 62. Dans un milieu urbain comme
celui de Montréal, il y aurait grand avantage à utiliser, mutatis
mutandis, les dispositions de la Loi des cités et villes. Le projet de
loi 62 contient vraiment trop peu de dispositions relativement à la
préparation de la liste des électeurs, à son examen, aux
officiers d'élection, aux bulletins de présentation, au scrutin,
au maintien du bon ordre, etc.
Problèmes d'unification
M. PAGE: Mon principal commentaire sera le suivant: Il importe de donner
aux problèmes que semble poser à certains l'unification des
structures administratives, de donner aux problèmes de l'unification des
structures administratives ses véritables dimensions.
Dix des onze commissions scolaires communes prévues par le projet
de loi 62 contrôlent, d'après les estimations de
l'Opération 55, presque autant ou plus d'élèves
anglophones que la plupart des commissions scolaires régionales
protestantes situées en dehors de l'île de Montréal. Deux
seules font exception: North Island, dans le comté de Laval, et South
Shore, dans
Chambly. Personne n'a jamais prétendu que l'enseignement en
dehors de Montréal était de qualité inférieure. A
noter que les régionales protestantes en dehors de Montréal ont
juridiction sur les deux niveaux d'enseignement: élémentaire et
secondaire.
De toute façon, ce ne sont pas surtout les structures
administratives qui donnent un système d'éducation de
qualité, mais plutôt la compétence, le dévouement et
l'esprit professionnel du directeur de chaque école et de
l'équipe d'éducateurs qui y enseignent. En outre, faut-il
rappeler que deux des commissions scolaires projetées auront
vraisemblablement une majorité d'administrateurs de langue anglaise et
que deux autres commissions auront une représentation anglophone pour au
moins la moitié de leurs membres. Une étude sommaire de
l'inscription actuelle montre que ces quatre commissions auront sous leur
juridiction environ 65 p.c. des élèves considérés
comme protestants dans l'île de Montréal.
De plus je parle toujours de la dimension du problème de
l'unification les élèves catholiques francophones et les
élèves catholiques anglophones de l'île de Montréal
sont déjà sous la juridiction d'une même autorité
administrative. Or, ces élèves représentent plus de 80
p.c. de la population scolaire de l'île de Montréal, qui est
actuellement de 403,000 étudiants. Des 78,000 enfants qui
fréquentent les écoles protestantes, environ 12 p.c. de
l'inscription totale de l'île sont protestants et environ 7 p.c. sont de
croyance judaïque, grecque, orthodoxe ou autre. En résumé,
il s'agit d'intégrer ces 19 p.c. à l'administration
déjà commune, unifiée à plus de 80 p.c, et ce, en
conservant la vocation des écoles actuelles dans la très grande
majorité des cas. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres de cette commission auraient des
questions à poser sur le rapport déposé par la CECM?
M. LEFEBVRE: Bien, moi, j'ai une question à poser à M.
Pagé, à moins que le ministre n'en ait.
M. CARDINAL: Non. Comme je me suis exprimé à la fin de la
dernière séance, je préfère laisser aux
députés le soin de poser des questions, soit aux membres de la
CECM soit à moi-même. J'ai déjà fait mes
commentaires, immédiatement après la lecture du rapport.
M. LEFEBVRE: Alors, M. le Président, j'aurais une question
à poser à M. Pagé en rapport avec la page 17 du
mémoire. Dans le haut de la page: "Garanties linguistiques", c'est
noté ici, sous votre signature et celle de M. Daoust: "Vu les
dispositions prévues pour l'élection des commissaires
suffrage universel et collège électoral et pour la
nomination des membres du conseil scolaire de l'île, toute disposition
visant à assurer automatiquement un certain nombre de
représentants à une minorité, soit au niveau du conseil,
soit au niveau de la commission scolaire, constituerait une altération
non justifiée du processus démocratique".
Ceci va à l'encontre de l'opinion exprimée par la
majorité de vos collègues qui, eux, se prononcent, si je me le
rappelle bien, pour qu'il y ait un minimum de quatre membres de langue anglaise
au niveau du conseil scolaire. Au niveau des commissions scolaires je
vous avoue que je ne l'ai pas en mémoire ils parlent d'un minimum
de un. La question que je veux vous poser, M. Pagé, c'est au niveau
philosophique, si vous voulez.
D'abord, votre mot "automatiquement" me semble équivoque. Vous
voulez dire, si je comprends bien: Toute disposition visant à assurer de
droit. Parce que le mot "automatiquement", je ne sais pas à quoi il
réfère.
M. PAGE: Ecoutez, peut-être que...
M. LEFEBVRE: Est-ce qu'on rendrait le sens de votre pensée si on
remplaçait le mot "automatiquement" par "de droit"?
M. PAGE: Oui.
M. LEFEBVRE: C'est ça?
M. PAGE: C'est synonyme, dans mon esprit.
M. LEFEBVRE: Bon. Je ne sais pas si vous aimeriez argumenter
là-dessus, mais à ce moment-là, en quoi cela vous
apparaît-il contraire au processus démocratique d'assurer qu'il y
ait, justement, un certain équilibre? Ceci est autant dans
l'intérêt des Canadiens français je tiens à
le souligner que dans l'intérêt des Anglo-Canadiens. Ce
n'est pas du tout une question qui n'intéresse qu'un côté,
puisque, comme vous le savez vous l'avez dit vous-même les
proportions sont inversées. A supposer que le bill soit voté tel
qu'il est actuellement, ce dont je doute, vous avez onze districts scolaires.
Il y en a deux où les Canadiens français sont en minorité.
J'ai peine à comprendre sur quelle base philosophique vous affirmez que
ce serait un accroc aux principes démocratiques que d'assurer une
représentation aux minorités.
M. PAGE: M. le Président, ce n'est pas sur le fait d'assurer une
représentation à la majorité. Si l'on établit le
suffrage universel ou l'élection par collège électoral, je
pense qu'il faut jouer le jeu. Il ne faut pas commencer à faire des
exceptions. Si on fait des exceptions, il va falloir tenir compte des
populations, confessionnelles ou linguistiques actuelles. Si l'on fait une loi,
je pense bien qu'il ne faudra pas l'amender à toutes les sessions.
Le milieu montréalais étant changeant, je pense qu'on ne
peut vraiment pas trouver de
formule qui pourrait coller à la réalité durable.
Cela pourrait peut-être répondre à des besoins
présents, à des circonstances présentes, mais, dans quatre
ans ou huit ans, ce sera peut-être tout à fait
démodé.
Démocratisation des structures
M. CARDINAL: Si vous me permettez, à ce sujet-là, j'ai dit
moi-même que le rapport de la CECM était l'un des plus
sérieux parmi les rapports que nous avons reçus. En plus de
ça, il a l'honnêteté de donner l'opinion de ceux qui, sur
certains points, ne s'entendent pas avec la majorité des commissaires.
Mais, sur ce point, j'ai quand même été surpris par le
rapport de la CECM, en ce sens que, partout où j'ai tenté
d'expliquer le projet de loi, j'ai insisté sur un des quatre objectifs,
soit la démocratisation des structures. J'ai indiqué quelle
était la philosophie derrière cette démocratisation. Il ne
suffisait pas seulement que les gens qui ne sont pas élus actuellement
le deviennent, mais nous allions beaucoup plus loin en proposant un suffrage
universel, en le portant à 18 ans et en faisant jouer le jeu de la
démocratie à son maximum, c'est-à-dire en ne mettant ni
garantie, ni cran d'arrêt dans ce jeu de la démocratie, pas plus
qu'ils n'existent au niveau d'une municipalité ou au niveau de
l'Assemblée nationale. Ce sont des exemples que j'ai donnés,
c'est-à-dire que j'ai cru et j'admets que ceci est discutable,
j'en ai discuté la semaine dernière avec un groupe anglophone.
Nous avons eu une bonne discussion, d'ailleurs, à ce sujet, et certains
étaient d'accord avec moi j'ai cru, dis-je, que, de même
qu'à travers tout le Canada nous avons joué ce jeu de la
démocratie, même si nous savions d'avance que nous étions
en minorité, même s'il n'a jamais été établi
qu'il y aurait un certain nombre de députés de langue
française ou de députés catholiques, que nous pouvions de
même à Montréal, qui est la métropole du Canada, qui
est la principale ville du Québec, tenter, entre les deux
communautés, pour briser cette clôture entre les deux solitudes,
de jouer le jeu de la démocratie.
Ce qui me frappe, ce n'est pas le ton du rapport de la CECM au
contraire, il est très serein à ce sujet-là c'est
l'attitude de certaines personnes qui, parce qu'elles sont minoritaires
et je ne parle pas des anglophones ici, les gens de langue française de
Saint-Laurent et d'Outremont ont sur ce point le même sentiment que les
anglophones de Pointe-aux-Trembles ou d'ailleurs ne fait pas confiance
d'avance à la démocratie, si vous voulez. Si, d'avance, on
indique un certain nombre de personnes, sur ce point je suis d'accord avec M.
Pagé; je ne sais pas ce que ce sera dans cinq ou dans dix ans. Il y aura
une période de temps pendant laquelle nous aurons les mêmes
parents, les mêmes enfants, les mêmes enseignants, les mêmes
édifices, et tout sera à peu près la même chose,
sauf les modifications de structures et la planification.
Mais, l'on sait et on l'a indiqué devant cette commission
que les fluctuations de population, dans une ville comme
Montréal, peuvent s'accomplir dans des périodes de temps
relativement courtes. J'ai donné certains exemples, déjà,
devant cette commission. Je sais qu'on s'est entendu sur certains des exemples,
mais je pense que c'est un des points où il est intéressant de
discuter. Si l'on parle de garanties linguistiques, ceci se rattache quand
même à un certain nombre de règles concernant le projet de
loi 63, règles qui ne sont pas encore connues. C'est pourquoi cette
discussion a un aspect théorique, si on se place purement sur le plan de
l'administration pédagogique.
C'est un aspect important, cependant, si on le place sur le plan du jeu
de la démocratie, c'est-à-dire que le projet de loi 62, tel que
rédigé, propose un système. Quand on le modifie par des
propositions semblables c'est la septième c'est le
système lui-même qui est modifié. On ne fonctionne plus
dans le même système, on prend un autre système. C'est un
système de démocratie où, d'avance, on tempère les
résultats du vote universel parce qu'on n'a pas confiance que les
administrateurs, élus par un suffrage universel, à la
majorité simple puissent respecter les droits minoritaires dans un
district donné. Le problème m'apparaît comme cela.
Minorités linguistiques
M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais quand même
relever quelques aspects de l'exposé du ministre au sujet du jeu des
principes démocratiques dans une question comme celle-ci. Dans son
exposé d'il y a quelques instants, le ministre disait qu'au Canada,
nous, Canadiens français, avions accepté d'être
minoritaires et d'avoir les députés que nous donnerait notre
nombre.
Dans le système électoral proposé par le projet de
loi présenté par le ministre, les collèges
électoraux sont généraux dans chaque région. Ils
élisent entièrement les commissaires d'écoles au niveau de
chaque région pour faire partie des différentes commissions
scolaires, des onze commissions scolaires régionales. Par
conséquent, il peut très bien se réaliser dans la
réalité que les minorités quelles soient
francophones, dans certains secteurs tels que celui où j'ai
été élu comme député, ou encore anglophones,
dans d'autres secteurs où la minorité est anglophone
n'aient aucun représentant élu au niveau des commissions
scolaires.
Je trouve que, dans l'état actuel des choses, il faut absolument
au moins trouver des mécanismes pour donner quelques garanties aux
minorités linguistiques dans chacun des secteurs pour qu'elles
reçoivent un traitement qui ne sera pas, enfin, j'hésite à
employer le mot
"oppressif" parce que je pense que ce mot serait peut-être
exagéré, mais un traitement équitable de la part de la
majorité. Ceci est impératif, à mon avis, et je crois que
la Commission des écoles catholiques, sans approuver les solutions qui
sont nécessairement proposées par elle, dans son mémoire,
voit quand même un peu la lumière sous ce rapport-là.
Malgré que je n'accepte pas nécessairement ces
solutions-là, lesquelles ne sont peut-être pas suffisantes,
d'ailleurs, quand même, son mémoire manifeste une bonne
volonté de sa part de reconnaître l'existence d'un
problème.
Tandis que l'attitude du ministre et même l'attitude de M.
Pagé, au fond, me laissent assez perplexe et je trouve qu'ils raisonnent
un peu comme s'ils étaient en dehors de la réalité, comme
si, au fond, la législation se passait strictement dans les grands
principes. La législation s'applique à des êtres humains,
et qu'on le veuille ou non, à Montréal on est obligé de
faire face à un monde qui est très mêlé, tant sur le
plan linguistique que sur le plan religieux. Je crois qu'il faut trouver des
moyens pour donner des garanties de traitement équitable aux
minorités. C'est pour cela que je n'abonde pas dans le sens de ce que
disent M. Pagé et le ministre. Je considère qu'il y a lieu de
trouver des moyens pour rassurer, au moins, les gens.
M. LE PRESIDENT (M. Croteau): Me Carignan aurait peut-être quelque
chose à ajouter.
M. CARIGNAN: Le ministre de l'Education a dit que la question
était discutable, et j'y vois une invitation à défendre,
sur ce point, le mémoire de la CECM.
M. CARDINAL: Vous avez parfaitement compris.
Vote proportionnel
M. CARIGNAN: Je suis d'accord avec lui sur un point; c'est qu'il faut
que la démocratie joue au maximum. C'est pourquoi, sur ce point, je me
suis joint à la majorité. Nous sommes habitués, nous au
Québec, à la règle de la majorité simple en temps
d'élection. Mais il y a des pays démocratiques, et
peut-être plus démocratiques, qui ont le système du vote
proportionnel. Le système du vote proportionnel tend à assurer
une représentation des minorités. On aurait pu songer à un
système de vote proportionnel pour assurer la représentation des
minorités, mais il n'y a pas de partis en administration scolaire. On ne
pouvait donc pas avoir recours à un mécanisme comme
celui-là. C'est pour cela qu'il a fallu faire preuve d'imagination et
essayer d'inventer un mécanisme qui aurait à peu près le
même résultât que le vote proportionnel qui, d'après
moi, est un mécanisme plus démocratique que le système de
la majorité simple.
Pour assurer au moins une voix à la minorité dans chacun
des districts, c'est quand même un mécanisme d'élection
qu'on a prévu. Maintenant, pour assurer quatre voix à la
minorité au conseil scolaire, je signale tout simplement que le
même résultat pourrait peut-être être obtenu d'une
façon différente. Quatre membres sont nommés par le
gouvernement; il pourrait être dit que un sur quatre sera anglophone. Les
mécanismes électoraux vont probablement assurer trois anglophones
au conseil scolaire parce que si la population estudiantine est majoritairement
anglophone dans seulement deux régions, les électeurs seront
majoritaires dans trois. Si le gouvernement nomme un anglophone sur quatre, le
résultat sera probablement quatre anglophones au conseil scolaire.
Je pense qu'il est bon de calmer des appréhensions qui existent
dans un secteur important de la population. Il faut que la réforme
scolaire se fasse dans l'harmonie. Je ne prétends pas que si le projet
de loi était adopté tel quel, les droits des minorités ne
seraient pas respectés, mais étant donné les
appréhensions qui existent, je crois bon qu'elles soient calmées
au moment où une réforme scolaire d'envergure est sur le point de
se réaliser.
M. LE PRESIDENT: M. le ministre de l'Education.
M. CARDINAL: Sur ce point, M. le Président je m'adresse
aux deux présidents on touche deux choses: la première,
c'est que je suis entièrement d'accord que cette réforme doit
s'opérer dans la sérénité. Tous mes efforts,
particulièrement dans ces dernières semaines, ont
été de rassurer divers groupes, qu'ils soient linguistiques ou
religieux. Justement, je référais tantôt à cette
expérience d'une rencontre avec un groupe d'anglophones et de trois
émissions qui ont passé en fin de semaine dernière. Cela
est un objectif que je recherche parce que j'ai déjà dit
moi-même que ce n'est pas par des lois qu'on rend les gens vertueux,
qu'on les rend sereins, qu'on les rend catholiques, qu'on les rend
français ou qu'on les rend anglais. Il faut que dans la population on
accepte une loi, sans quoi on cherche à biaiser.
Ceci souligne quand même un phénomène qui semble se
passer au Québec. Si je posais la question à l'envers: Y a-t-il
une seule autre province du Canada qui ait jamais senti le besoin de calmer les
minorités et d'adopter des lois qui garantissent les droits de ces
minorités? Si nous étions bien objectifs, la réponse
à la question serait sûrement négative.
Nous avons, dans le passé, au Québec, sous tous les
gouvernements je mets de côté la partisanerie
assuré ce respect des minorités. Nous l'avons tellement
assuré que nous sommes arrivés parfois, comme à
Montréal, à des situations où il y a eu
déséquilibre. Vous l'avez souligné dans un rapport. Quand
j'ai dit, tantôt,
que c'était discutable, c'est justement à cause de cet
aspect-là. Jusqu'où un gouvernement du Québec c'est
ça la question peut-il ou doit-il aller, faisant de bonnes lois,
dans cette opération de "rassurement", si le mot est
français?
Je suis d'accord avec le député d'Outremont qu'il y a
peut-être d'autres moyens que ceux suggérés par la CECM.
Des modes de votation, M. Carignan, qui en plus d'être président
de la CECM, a dirigé l'Institut de recherche de la faculté de
droit de l'Université de Montréal, sait fort bien qu'on en a
inventé 40, si ce n'est pas 50. Chacun d'eux a été surtout
analysé sur le papier, bien que certains aient été
essayés dans quelques pays. Ils ont conduit à des
résultats parfois autres que ceux qu'on espérait, à cause
de ce que j'appellerai le "side effect" des lois, comme des médicaments,
d'ailleurs. Il est arrivé autre chose que ce qu'on l'on prévoit.
Quand on va trop loin dans la recherche d'un but premier et que des buts
secondaires viennent s'y greffer, les gens voient là la
possibilité d'assurer des buts secondaires qui n'étaient pas dans
l'intention du législateur.
M. LEFEBVRE: M. le Président, puis-je enchaîner sur ce que
vient de dire le ministre? Je regrette qu'une fois de plus il soit si difficile
de le convaincre que le problème de la protection des droits des
minorités, c'est autre chose qu'une question de rassurer les gens. Nous,
nous y voyons une question de principe et je trouve que l'attitude du ministre
est vraiment inadmissible sur ce plan-là. Je ne vois pas ce qu'il gagne
à continuellement vouloir nous référer à des
précédents ailleurs. Je pense que nous avons fait beaucoup de
choses dans le Québec qui ne se sont jamais faites ailleurs. Certaines
dont nous devons être fiers et d'autres dont nous devrions avoir honte.
Je ne mentionnerai pas la liste de ces choses parce que nous sortirions du
présent débat.
Revenant à ce qu'a dit M. Carignan, je voudrais lui poser une
question. Je suis tout à fait d'accord avec l'opinion majoritaire des
commissaires quant à la nécessité de protéger les
minorités selon des mécanismes démocratiques et par le
moyen de l'élection. C'est pourquoi le terme "automatique" qu'employait
M. Pagé m'apparaissait équivoque. Au niveau du conseil scolaire,
puisque les deux problèmes sont reliés, c'est une même
question en fait d'assurer une représentation aux minorités.
Pourquoi tenez-vous M. le Président de la commission scolaire...
Peut-être que vous n'y tenez pas du tout, mais, enfin, au lieu de
demander au ministre d'assurer cette protection des droits des
minorités, pourquoi les onze membres élus au premier tour, si
vous voulez, n'auraient-ils pas la responsabilité d'en choisir quatre
autres par cooptation et d'assurer, au moment de cette cooptation, la
représentation de la minorité?
Je trouve que le ministre est présent à beaucoup
d'endroits dans ce bill-là. Il s'en est plaint lui-même,
d'ailleurs, et il a eu l'air étonné de cela l'autre jour. Je
crois qu'il faudrait lui faciliter les choses en ne multipliant pas les
occasions pour lui d'intervenir. Il semble que les Montréalais peuvent
régler cette affaire-là entre eux.
Conseil scolaire
M. CARIGNAN: Je ne suis pas sûr de bien comprendre la question.
Est-ce que vous demandez qu'aucun membre du conseil scolaire de l'île ne
soit nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil, mais que les quatre
qui, d'après le projet, doivent être nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil soient nommés par les onze autres?
M. LEFEBVRE: C'est ça.
M. CARIGNAN: Le problème a été discuté
à la commission. Le sentiment unanime a été que
c'était bon qu'un certain nombre de membres et quatre n'a pas
paru exagéré soient nommés par le gouvernement. Je
me souviens de certains arguments qui ont été donnés.
C'était possible, par exemple a-t-on dit, évidemment cela
ne répond pas à la suggestion que vous venez de faire que,
parmi les gens qui pourraient être désignés localement,
aucun ne soit libre. Il pourrait y avoir des gens compétents, bien
sûr, mais qui pourraient consacrer à l'administration scolaire une
journée par semaine, mais pas plus, qui ne pourraient pas, par
conséquent, accepter, disons, la charge de président ou de
vice-président. Il a été question d'assurer une...
MME LAVOIE-ROUX: A part la question de disponibilité que nous
avons considérée et que M. Carignan vient d'expliquer, on a
parlé également de l'intervention du gouvernement, par exemple,
au sujet du financement et de toutes les décisions que la commission
scolaire aurait à prendre et pour lesquelles il faudrait qu'elle se
réfère au gouvernement. Nous avons exprimé, dans le
mémoire, des réticences. Par contre, le gouvernement assumant, au
point de vue financier, des responabilités assez considérables,
qu'il y ait un ou quelques membres qui soient nommés par le
gouvernement, et qu'à ce titre-là le gouvernement ait un droit de
regard, nous n'y avions pas d'objection. Par contre, pour calmer les craintes
de monsieur le député au point de vue de ce que les gens
appellent la mainmise du gouvernement, etc., vous remarquerez qu'on a
recommandé que l'élection du président et du
vice-président soit faite par les onze membres qui sont
déjà élus par les commissions scolaires qui, selon leur
bon jugement, indépendamment de la disponibilité des quinze
membres et des autres facteurs, pour-
raient équilibrer ce qui pourrait sembler de l'extérieur
une mainmise par le gouvernement ou un contrôle trop absolu par le
gouvernement dans la nomination de ces quatre membres.
Mais honnêtement, que le gouvernement, assumant des
responsabilités financières et autres dans le système
d'éducation, ait des représentants, pour nous c'était une
chose logique.
M. CARDINAL: M. le Président, vous me permettez. Je pense qu'il
faudrait séparer tous les problèmes. Le problème de
l'intervention du ministre ou du ministère dans le fonctionnement normal
ou extraordinaire du conseil et la nomination ou l'élection des membres
du conseil, ce sont deux choses différentes. Elles sont reliées
par certains aspects mais prenons-les séparément.
Pour ce qui est des membres du conseil, admettons, par hypothèse
de travail, que onze de ces membres seraient désignés par les
commissions scolaires plutôt que d'être nommés non pas par
le ministre, mais par le lieutenant-gouverneur en conseil. Admettons cette
hypothèse. Même si on admet ceci, la raison pour laquelle je
demande que quatre membres soient nommés par le gouvernement, c'est
parce que l'Etat indépendamment des sommes qu'il investit dans
l'éducation, parce qu'il est l'Etat, parce qu'il a des devoirs envers
l'éducation et parce qu'il faut que les Québécois, enfin,
l'admettent et que l'on cesse de craindre l'Etat parce que c'est l'Etat
c'est pour cette raison, et cette raison fondamentale, qu'il doit,
d'après moi, y avoir des nominations directes venant de l'Etat, non pas
pour un droit de regard, non pas pour voir ce qu'il arrive des finances de
l'Etat, non pas parce que l'Etat paie un montant X, mais parce que l'Etat a le
droit, a le devoir et a comme rôle d'intervenir directement dans
l'éducation.
M. LEFEBVRE: M. le Président, à ce stade-ci, j'aurais deux
questions à poser au ministre, en rapport avec ce qu'il vient de dire.
Premièrement, est-ce que je dois comprendre que le ministre est
maintenant d'accord pour admettre un amendement à l'effet que onze
membres du conseil scolaire soient nommés ou choisis par les commissions
scolaires plutôt que par le ministre, comme c'est le cas actuellement?
Est-ce que le ministre vient de faire cette concession, oui ou non?
M. CARDINAL: Le ministre vient de dire: Dans l'hypothèse de
travail. Si on veut aller plus loin, je serai plus explicite sur ce que j'ai
déjà dit dans le passé. J'ai dit que ce projet de loi
était une politique du gouvernement. Il est bien évident que je
représente le gouvernement à cette table, mais nous avions
l'intention, après analyse des mémoires, d'amender le projet de
loi. Je serais prêt personnellement à ce que, sur ce point, le
gouvernement revoie sa position, mais en tenant compte de ce que je viens de
dire, sur lequel je ne suis pas prêt à reviser ma position.
M. LEFEBVRE: Eh bien, ce n'est pas trop tôt. Ma deuxième
question au ministre est la suivante: Est-ce que le ministre n'est pas d'accord
pour admettre qu'il y a dans la province des commissions scolaires
financées par le gouvernement dans une proportion bien plus grande que
ne le sont, actuellement, les commissions scolaires sur l'île de
Montréal? Si on admet le principe à mon avis, farfelu
que le ministre avance, cela voudrait dire je m'excuse du terme
qui n'est peut-être pas poli, mais enfin! ...
M. CARDINAL: M. Maritain, qui a écrit "L'homme et l'Etat", ne
marque pas le terme.
M. LEFEBVRE: Ah, c'est possible! Alors, changez-le pour un plus poli qui
veuille dire la même chose. Mais cela ne sert à rien de se payer
de mots, c'est l'impression que cela me fait. Alors, si on admettait ce
principe, ceci amènerait le gouvernement à nommer des
commissaires d'écoles dans toutes les commissions scolaires, puisque,
encore une fois, l'argument de la participation financière et de la
responsabilité du gouvernement, en matière d'éducation,
vaut autant et même davantage, si l'on se réfère à
la situation financière, dans le reste de la province. Je ne vois pas la
logique du ministre.
M. CARDINAL: Si vous me permettez, je vais enchaîner quand
même. Je n'ai pas utilisé l'argument financier. Je l'ai même
mis de côté. Il vaut tellement, cet argument-là, que j'ai
déjà annoncé devant cette commission la préparation
d'une loi-cadre des commissions scolaires, non pas pour la disparition des
commissions scolaires, mais pour qu'enfin il y ait, au niveau de
l'enseignement, un rôle précis qui soit accordé aux
administrateurs, aux enseignants et à l'Etat, sans oublier certains
niveaux, comme au niveau collégial et universitaire, aux
étudiants. Sur ce point, j'ai toujours énoncé une
politique qui était la même. Les modalités de ces
modifications à venir ne sont pas prêtes. J'ai cependant
indiqué déjà, à quelques reprises, que
j'espérais que, sur certains points, le projet de loi 62, à
Montréal, ait une valeur exemplaire pour le Québec. Encore une
fois, pour rassurer les gens, il ne s'agit pas de faire disparaître les
commissions scolaires, mais, actuellement, ni les enseignants ni l'Etat n'ont
un rôle défini et direct en matière d'éducation
à aucun niveau, si ce n'est au niveau des collèges; au niveau des
collèges, par le bill 21 qui a été accepté en
Chambre, on a admis que, au conseil d'administration de dix-neuf personnes, il
y en avait cinq désignées par l'Etat.
Il y avait des personnes désignées par les
parents, des personnes désignées par les étudiants,
des personnes désignées par le groupe pédagogique. C'est
là une illustration, justement, de ce qui, dans l'avenir, pourrait ou
devrait se faire par étapes sur tout le territoire du Québec.
M. LE PRESIDENT: M. le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: Seulement une courte question malicieuse au ministre. Est-ce
que dans son esprit les nominations de ces quatre membres seraient des
nominations faites pour dix ans, comme dans le cas de la loterie?
M. CARDINAL: C'est une question qui n'est pas pertinente. Je n'ai pas
dit qu'elle était impertinente, j'ai dit qu'elle n'était pas
pertinente. Le projet de loi prévoit la durée des mandats des
membres du conseil métropolitain. L'on sait qu'au Conseil
supérieur de l'éducation, dans les CEGEP, à
l'Université du Québec, ces nominations sont faites pour des
périodes d'un an, deux ans, trois ans et quatre ans, afin de permettre
une rotation continuelle de ces représentants de l'Etat.
M. LE PRESIDENT: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
Commissions scolaires
M. TETLEY: J'aurais deux questions à poser à M.
Pagé. M. Pagé, vous avez signé ce rapport comme membre de
la majorité et quant à l'autre rapport, qui porte votre nom, vous
étiez aussi pour la majorité, mais en fait, les deux rapports
sont contradictoires sur une question qui est fondamentale: l'unification. La
première question est: Pourquoi avez-vous changé d'avis?
Deuxièmement, M. Gagnon, qui est minoritaire, a donné les raisons
la semaine dernière, et peut-être pouvez-vous parler sur ses
commentaires.
M. PAGE: Il me fait plaisir de faire la mise au point que me donne
l'occasion de faire le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il
est vrai que dans le rapport du conseil de restructuration la majorité
des membres avait recommandé des commissions scolaires divisées
selon la langue. Il est vrai et les membres du conseil pourraient en
témoigner que je n'avais jamais partagé cette opinion. Je
n'ai pas signé le rapport minoritaire bien que je partageais les
opinions qui y étaient émises sur les commissions scolaires
unifiées, parce qu'à ce moment-là, comme président,
on m'a fait voir que si je signais l'un ou l'autre des rapports minoritaires,
cela détruirait passablement les autres recommandations du rapport. Il y
avait 25 recommandations dans le rapport. J'étais d'accord avec les 24
autres. Je n'étais pas d'accord avec la recommandation fondamentale et
je l'ai dit à ce moment-là. Je l'ai dit immédiatement
après et je le répète aujourd'hui. J'ai toujours
été d'avis, au cours des études du conseil, que la
solution du rapport Parent, la commission scolaire unifiée, était
la bonne solution pour Montréal.
M. CHOQUETTE: Est-ce que je pourrais poser une question?
M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier m'a
demandé la parole avant.
M. SAINT-GERMAIN: Pour revenir sur la question de la
représentativité du gouvernement au niveau du comité de
l'île de Montréal, M. le ministre a mentionné que le
gouvernement avait un droit de regard. C'est une théorie qu'il a
émise. J'aimerais lui demander si, avec toute l'autorité et les
responsabilités que le ministère de l'Education a concernant
l'éducation dans la province de Québec, il ne croit pas que c'est
déjà amplement suffisant pour que le ministère
imprègne sa philosophie et sa façon de voir en éducation
dans le Québec sans qu'il soit nécessairement obligé
d'avoir une représentation directe au niveau du comité.
M. CARDINAL: Il y aurait beaucoup de nuances à apporter pour
répondre à une question semblable que j'aime beaucoup,
d'ailleurs mais je vais laisser tomber les nuances pour répondre
non. Non, en ce sens que quand, en 1964, le projet de loi no 60 qui,
d'ailleurs, a fait autant de bruit que le projet de loi no 62 d'aujourd'hui
a été adopté, il a été adopté
à la suite de nombreux compromis. L'un de ces compromis était
l'existence du Conseil supérieur de l'éducation; l'autre,
c'était la non-modification profonde de la Loi de l'instruction
publique. C'est-à-dire qu'on a mêlé de l'ancien et du
nouveau, qu'on a laissé aux autorités locales les mêmes
responsabilités qu'avant et qu'on a donné à un
ministère un rôle qui est beaucoup plus et cela
apparaît dans votre question un rôle de leadership,
d'autorisation qu'un véritable pouvoir, si vous voulez.
Je prends des exemples. Nous pouvons planifier, dans tout le
Québec, la construction des écoles. Nous ne pouvons jamais
imposer la construction des écoles aux endroits que nous avons
planifiés. L'on sait que, dans certaines commissions scolaires, les
écoles ne se construisent pas lorsque le ministère, d'un
côté, n'autorise pas le choix de la commission scolaire, qu'il
considère non judicieux, et non dans l'ensemble du plan, et que, d'autre
part, la commission scolaire, jalouse de son autonomie, ne veut pas accepter
les suggestions que lui fait le ministère. Je pourrais donner des
exemples, mais je les laisse de côté, y en a de patents.
Je prends un autre exemple. Il y a chaque jour des questions qui sont
posées à la Chambre et où, dans ses réponses, le
ministre de l'Educa-
tion, quel qu'il soit, que ce soit le premier, le deuxième ou
celui qui est là présentement, est obligé de dire: Je ne
puis pas m'ingérer dans une instance locale. C'est tellement vrai que
c'est mon dernier exemple lorsqu'il y a eu la crise de Chambly, il
a fallu à l'Assemblée nationale une loi spéciale pour nous
permettre d'intervenir, parce que, au niveau et du gouvernement et du
ministère, on ne pouvait que tenir des réunions et tenter de
convaincre les gens, ce que nous avions déjà fait.
Nous n'avons appliqué la loi spéciale qu'à ce cas
en particulier et je me rappelle qu'au cours du débat en deuxième
lecture, j'avais souligné que nous avions pensé mettre une clause
omnibus pour appliquer les règles de ce cas-là à toutes
les commissions scolaires, pour nous permettre d'agir dans les cas d'urgence,
ce qui, alors, n'a pas été accepté comme principe.
Ma réponse est donc non, dans le système de loi actuel.
C'est évident que c'est mieux d'avoir un ministère de l'Education
que de n'en pas avoir, et je suis un de ceux qui n'ont jamais fait de
déclaration à l'encontre de ceci, mais je pense que, de 1964
à aujourd'hui, l'esprit des gens a déjà
évolué sur ce sujet. L'expérience est plus concluante
qu'elle ne l'était au bout d'un an ou de deux ans et je pense que,
malgré les défauts du ministère, malgré la
série de problèmes que nous avons, nous devons nous rendre compte
que, justement, une grande partie de ces problèmes vient de ce manque de
rôle défini je ne parle pas d'intervention et je ne parle
pas de droit de regard, mais de manque de définition véritable,
non pas de ce que j'ai appelé le gouvernement, mais de ce que j'ai
appelé l'Etat. C'est pourquoi, par exemple, dans le cas de Chambly, j'ai
parlé d'une loi de l'Assemblée nationale. Je ne voudrais pas
qu'on confonde la lieutenant-gouverneur et le ministre de l'Education, ou le
cabinet; quand je parle de l'Etat, je le prends dans son sens le plus large et
je parle d'un gouvernement comme étant celui qui régit un Etat
donné et on pas un conseil des ministres, à ce
moment-là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Richmond.
M. SAINT-GERMAIN: Les représentants, les commissaires
nommés par le gouvernement sur cette commission, si je prends justement
le point de vue que le ministre vient d'émettre concernant, par exemple,
la planification scolaire, la planification dans la construction des
écoles, seraient, si vous voulez, une extension, en fait, du
ministère.
M. CARDINAL: Non, non. Il faut prendre la loi telle qu'elle est,
malgré les paroles que je viens de dire. En fait, les gens que nous
nommons dans les CEGEP, qui constituent le conseil provisoire d'administration,
ne reçoivent pas de directives du ministère, mais ils travail-
lent en collaboration avec le ministère pour l'établissement des
budgets, etc, jusqu'à ce que le conseil total soit créé.
Et alors, comme membres de ce conseil, ils ne représentent pas le
gouvernement, pas du tout.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, s'ils ne représentent pas le
gouvernement, quelle est la garantie que le ministre peut avoir que ces gens
coopéreront plus avec le gouvernement? Parce que, enfin, en principe,
vous voulez laisser ces gens absolument libres.
M. CARDINAL : Oui. Je ne cherche pas de garanties, justement, à
l'effet qu'ils vont coopérer.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, s'il y a une liberté relie de ces gens
dans leurs décisions, qu'est-ce qui garantit qu'ils coopéreront
plus avec le gouvernement que s'ils étaient élus par le
peuple?
M. CARDINAL: Je ne cherche pas de garanties. C'est toute la question que
j'ai discutée, en dehors de mon texte, au colloque des CEGEP, la
question de représentativité. Je ne voudrais pas reprendre ce
sujet-là, parce que j'en ai parlé pendant une heure et demie ou
deux heures. Je vais résumé.
M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'étais pas là.
M. CARDINAL: Non, vous n'étiez pas là, que voulez-vous?
Vous pouvez toujours le lire dans les journaux. Je reviens donc à mon
sujet. On s'est habitué à l'idée que tout le monde
représentait quelqu'un d'autre: que les enseignants
représentaient les parents, que les commissaires représentaient
les contribuables, etc, et que tout le monde représentait quelque chose
quelque part. Au contraire, quand je parle de personnes désignées
par l'Etat, désignées par les parents, désignées
par les étudiants, désignées par les administrateurs, je
considère, premièrement, que ces personnes-là ne doivent
pas représenter ou les syndicats, ou les associations, ou les
groupements de ces divers éléments d'une population donnée
dans le domaine scolaire. Par exemple, je n'admets pas que, dans les CEGEP, ou
à l'Université de Montréal, en vertu de sa charte, les
étudiants qui sont là, désignés,
représentent un syndicat en particulier. Ils sont là comme
étudiants, qui ont reçu un mandat, si vous voulez, de la
communauté étudiante. A compter du moment où ils ont
reçu ce mandat, ils sont, comme nous, les députés, pendant
la durée de leur mandat.
Deuxièmement, ceux qui seraient là ne
représenteraient pas plus le parti au pouvoir. Ils seraient tout
simplement des gens, un jour désignés par l'Etat, pour un mandat
donné. Ce n'est pas une intervention directe de l'Etat que
je veux à tous ces niveaux. On n'en finirait plus. C'est une
décentralisation. Seulement, si l'on continue à conserver un
système pour tout le Québec où les commissaires ne sont
élus que par des contribuables donnés système qui
nous vient purement de l'histoire et qui n'a rien de sacramentel et que
l'on refuse sans cesse à l'Etat de pouvoir, au début de
l'organisation, désigner des personnes dont on aura
vérifié la compétence et la disponibilité
comme le disait, par exemple, la vice-présidente, tantôt de
s'occuper de certaines affaires publiques, on aura des problèmes.
Les personnes qui sont désignées dans les CEGEP, par
exemple, font leur travail gratuitement, mais on s'assure d'avance que ce sont
des gens qui auront le temps de le faire. Or, à ce conseil
métropolitain de Montréal, même si j'ai parfaitement
confiance en la démocratie, il pourrait arriver qu'il n'y ait personne
ou presque personne parmi les personnes élues qui puisse avoir ces
qualités de permanence et de disponibilité.
En d'autres mots, pour terminer parce que je ne voudrais pas
faire un long débat avec ça, malgré que cela pourrait
être intéressant ou pas, selon les points de vue je vais
lancer le mot: c'est une espèce de régime présidentiel, si
vous voulez, au niveau de l'administration scolaire. C'est tout simplement
ça. Oui?
M. LEFEBVRE: Il se fait de la nouvelle. Je ne sais pas si le ministre
s'en rend compte.
M. CARDINAL : Je ne fais pas de la nouvelle; je vais continuer à
exprimer mes opinions.
M. LEFEBVRE: Bien, c'est ce que nous faisons tous, M. le
Président. Je n'en fais pas grief au ministre. Si mon collègue le
permet, sans lui faire perdre la chaîne de ses questions, je voudrais
rappeler au ministre qu'il a tout bonnement annoncé, depuis quelques
minutes, que c'est l'intention du gouvernement, dans un avenir qu'il n'a pas
fixé, de nommer des membres dans toutes les commissions scolaires de la
province.
M. CARDINAL: Non, je n'ai pas annoncé ça.
M. LEFEBVRE: Le ministre se relira; c'est ce qu'il a dit tout à
l'heure.
M. CARDINAL: Si j'ai dit ça, je me suis mal exprimé. J'ai,
au contraire, dit en parlant des commissions scolaires...
M.LEFEBVRE: Je vous ai rendu service, une fois de plus!
M. CARDINAL: Vous passez votre temps à me rendre service,
monsieur le député d'Ahuntsic.
M. LEFEBVRE: Non, mais c'est important, M. le Président. Le
ministre est à se corriger parce qu'il avait dit quelque chose de grave
tantôt. Je ne voudrais pas que cela fasse la manchette des journaux
à Rimouski.
M. CARDINAL: Non, ce ne serait pas bon. J'ai simplement mentionné
qu'il y aurait une loi et que les modalités n'étaient pas
établies. Ce que je recherchais, c'est une possibilité, si vous
voulez, de la reconnaissance et de la définition du rôle de l'Etat
au niveau de l'administration scolaire régionale,
particulièrement, et locale. Quand on parle, par exemple, de joindre
l'élémentaire et le secondaire, il faut prendre cela ensemble.
Cela ne se prend pas par morceau ces choses-là. On a mentionné
tantôt c'est M. Pagé qui l'a fait que
déjà, dans le milieu anglophone, l'élémentaire et
le secondaire étaient joints. Le projet de loi 62 prévoit
ça déjà. Mais on ne l'a pas dans tout le Québec. On
n'a qu'un règlement où le ministre vient approuver ce qu'ils
font.
C'est vrai que j'ai déjà dit qu'il faudrait
peut-être que le règlement dise: Il faudrait que le ministre
approuve l'exception, quand on ne le fait pas. La loi est autre. Alors, que
l'on n'interprète pas mes paroles pour dire que j'ai lancé
l'idée de l'abolition des commissions scolaires ou l'idée qu'on
nommerait partout ce que vous avez appelé des représentants de
l'Etat. Au contraire, j'ai simplement répété ce que
j'avais dit devant la Fédération des commissions scolaires
M. le président, M. Pagé et d'autres étaient là
qu'il y aurait une loi-cadre des commissions scolaires qui tiendrait
compte d'un certain nombre d'impératifs que je viens de
répéter devant cette auguste commission.
M. LEFEBVRE: On vous lira au journal des Débats.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Il y a de nouveau quelque chose qui me frappe, M. le
Président. On a dit qu'il était bien possible que les gens qui
seraient élus comme commissaires ils seraient élus au
grand conseil par le peuple ou par les commissions scolaires, si vous voulez
ne soient pas disponibles pour travailler d'une façon
continuelle, en professionnels, si vous voulez, de l'administration
scolaire.
M. CARDINAL: Comme président, si vous voulez,
vice-président, etc.
M. SAINT-GERMAIN: Oui. Et on voit je crois que Madame de la
Commission scolaire de Montréal a confirmé ça dans
le fait que le gouvernement nomme des représentants à la
commission, une possibilité d'avoir comme président,
vice-président ou comme responsables
de tâches plus importantes, des personnes qui seraient libres.
Alors, si c'est logique, si les faits concourent à prouver ces
"avancés", il arrivera que ceux qui représentent les commissions
scolaires seront, par le fait même, obligés de nommer aux postes
supérieurs les représentants du gouvernement, parce que ce seront
les seules personnes qui seront libres de le faire.
Si cette opinion qui veut que les gens nommés par les commissions
scolaires ne soient pas des hommes libres capables d'accepter la nomination,
par exemple, de président de commission scolaire, si ces gens ont la
responsabilité de limiter en principe et selon la loi, de choisir...
M. CARDINAL: Permettez-vous que je vous interrompe? Je ne parle pas des
commissions scolaires, mais du conseil métropolitain.
M. SAINT-GERMAIN: Oui, du conseil métropolitain. Ce sont les
membres du conseil métropolitain qui vont nommer le président du
conseil métropolitain. Mais, leur choix sera bien limité, puisque
seuls les représentants nommés par le gouvernement seront libres
et prêts à accepter le poste de président. C'est ce qui va
arriver, en fait,
M. CARDINAL: On ne sait pas, mais il faut bien se rendre compte qu'il y
a là un véritable problème. Si vous questionniez M.
Carignan, par exemple, si vous questionniez M. Telley, qui est au Protestant
School Board of Greater Montreal, vous sauriez que tous les deux ont dû
abandonner toute autre fonction à temps plein; c'était le cas de
M. Gagnon avant et c'était le cas d'autres personnes, auparavant. Il
n'est pas possible qu'à ce niveau, surtout quand cela a trait à
l'administration de tout ce territoire métropolitain, de songer que
quelqu'un pourrait être président en assistant à des
réunions d'un conseil d'administration.
Si on réfère par analogie encore une fois, il faut
peser ses mots à ce qui se passe dans les sociétés
commerciales, financières, industrielles et autres, on s'aperçoit
qu'il y a toujours au sein d'un conseil d'administration qui se réunit
trois, quatre fois par année, en plus d'une assemblée avec les
actionnaires, un exécutif de gens qui sont plus disponibles, plus
rapprochés, plus près des problèmes qu'ils ont à
résoudre et qui sont eux-mêmes choisis par les membres du conseil
et dont, habituellement le président est quelqu'un qui s'occupe à
temps plein de cette chose en particulier. Ceci se retrouve non seulement au
niveau d'une commission scolaire de la grandeur de la CECM ou du Protestant
School Board, mais au niveau des grosses commissions scolaires, ailleurs. A
Québec, M. Bhérer consacrait presque tout son temps à la
CECQ.
M. LEFEBVRE: Est-ce que le ministre a pensé à la formule
de la cooptation? C'est aussi efficace, à ce point de vue-là, que
les nominations par le gouvernement.
M. CARDINAL: J'ai dit que c'était un des avantages que pouvait
apporter une nomination par le gouvernement...
M. SAINT-GERMAIN: Je vais essayer de résumer ce qui a
été dit, à mon avis, à la table, au point de vue de
la représentation. Vous avez, premièrement, tel que le bill le
dit, les commissions scolaires locales. Je crois que ces gens
représentent la population, et ils la représentent comme groupe.
C'est le groupe, à mon avis, qui représente réellement
l'électeur, le citoyen...
M. CARDINAL: Et les parents.
M. SAINT-GERMAIN: Et les parents, c'est le groupe. Le ministre garde,
conserve la responsabilité de nommer, parmi ce groupe, le
représentant de la commission scolaire à la grande commission qui
couvrira toute l'île, le conseil métropolitain. Il arrive que,
cette personne particulière, il est bien possible qu'elle ne soit
aucunement représentative, seule, du groupe qu'elle veut bien
représenter, parce qu'elle n'a pas été choisie par ce
groupe local, qu'elle a été choisie par le ministère. En
fait, ce sont ces gens, d'après le bill non modifié, qui
formeront le grand conseil scolaire. Ces gens auront l'obligation de se nommer
un président et, comme on l'a dit à la suite de nos discussions,
ils auront un choix très limité, parce qu'il est bien probable
que les seules personnes disponibles seront celles que le gouvernement aura
nommées. Je vois personnellement, dans tout ceci, une influence
écrasante du ministère de l'Education relativement à la
nomination du grand conseil. Je crois que c'est une influence
exagérée.
M. CARDINAL: Si vous permettez, disons que nous allons prendres les
problèmes un par un. Il y en a beaucoup plus que ça. Le
problème soulevé par le député d'Ahuntsic, est-ce
que ceux qui sont au niveau régional, qu'on appelle les arrondissements
ou les municipalités scolaires, devraient être au niveau
métropolitain?
M. LEFEBVRE: C'est une autre question.
M. CARDINAL: Oui, mais elle est reliée à celle-là.
Deuxièmement, il ne faut pas pousser des faits, comme des règles
logiques, à leur extrême. Rien n'empêcherait dans
l'hypothèse où les onze personnes seraient
désignées par les commissions scolaires, que l'une des onze
consente à abandonner en grande partie les fonctions qu'elle aurait dans
la vie pour se consacrer à la présidence. Ceci s'est
déjà vu ailleurs. Il suffit de convaincre quelqu'un qu'il doit se
dévouer pour la cause, et nous pourrions, en nous félicitant
nous-mêmes, dire que, dans
beaucoup de cas c'est ce que nous avons fait. Le député
d'Ahuntsic lui-même a consacré pas mal de temps à la chose
scolaire à un moment de son existence.
Je ne peux pas accepter que ce soit une intervention je ne me
souviens pas du qualificatif employé du ministère de
l'Education, à ce moment-là. J'ai, au contraire, dit que les
personnes désignées par le gouvernement ne devaient plus, une
fois désignées par le gouvernement, être des
représentants du gouvernement. Je pose la question autrement: Est-ce
qu'à la CECM, les personnes désignées par
l'archevêque de Montréal représentent
l'archevêché? Est-ce que les personnes désignées par
le gouvernement représentent le gouvernement? Si je suis votre logique
jusqu'au bout, je dis à M. Carignan: Vous avez été
nommé par le ministre c'est toujours ce qu'on a dit à
cette commission, même si j'ai toujours soutenu que ce n'est pas moi qui
l'avais nommé et par conséquent, vous obéissez au
ministre.
UNE VOIX: Oui...
M. CARDINAL: Pas oui. Non.
M. CHOQUETTE: Non, non, non.
M. CARDINAL: Répondez à la question.
M. CHOQUETTE: On peut y répondre assez simplement. Quand une
autorité nomme quelqu'un à un poste, même si cette personne
n'est pas complètement attachée à l'autorité qui la
désigne, il demeure toujours une certaine sympathie. Et là
j'emploie...
M. CARDINAL: Est-ce que vous allez dire cela de M. Daoust, de la FTQ,
qu'il va se laisser conduire par le ministre de l'Education?
M. CHOQUETTE: Non, non, je n'ai pas dit...
M. CARDINAL: Alors, laissons la théorie et prenons les faits.
M. CHOQUETTE: Ecoutez, avec votre expérience de la vie, dans
toutes les commissions et tout cela, vous savez très bien....
M. CARDINAL: Que dès qu'on a nommé ces gens, ils sont
indépendants, ils sont les premiers à nous faire des suggestions
qui n'entrent pas dans le cadre de ce que nous suggérons.
M. CHOQUETTE: Non. Si le ministre le permet, cela dépend de
l'indépendance du caractère des personnes
désignées.
M. CARDINAL: D'accord.
M. CHOQUETTE: C'est un premier facteur qu'il faut considérer,
parce qu'il y a des gens, évidemment, qui ont beaucoup de
caractère et qui ne se laissent pas dicter leur ligne de conduite. Par
contre, il y a des gens qui sont dans la main des autorités. Je crois
que cela peut varier entre ces deux extrêmes.
M. CARDINAL: J'aime mieux cela comme affirmation, d'accord.
M. LE PRESIDENT: Le député de Richmond.
M. LAFRANCE: M. le Président, c'est une simple opinion que je
désirerais obtenir de M. Carignan, s'il juge à propos de me la
fournir. Est-ce que d'après lui, d'après son expérience,
il croit que les quatre principes "cardinaux", je dirais, du bill...
M. CARDINAL: Merci.
M. LAFRANCE: ... qui sont: l'égalité de services, la
démocratisation de l'administration, la participation des parents et le
respect du pluralisme religieux, il y a possibilité de les
réaliser sans chambarder tout le système actuel? M. Carignan,
croyez-vous qu'il y a possibilité de faire cela?
M. CARIGNAN: Il m'apparaît impossible de donner à chacun la
même chance sans créer un organisme métropolitain. Et la
création d'un organisme métropolitain, cela suppose un changement
primordial dans le système actuel. Je pense qu'il faut également
donner aux non-catholiques et aux non-protestants une place qui leur soit
propre. C'est également un énorme changement dans le
système actuel où, évidemment, ils ont une place à
l'école, mais où ils ont une place dans un secteur catholique ou
dans un secteur protestant. Je pense qu'il faut faire subir un système
actuel des changements fondamentaux. Je ne sais pas si je réponds
entièrement à votre question?
Vous dites: Sans tout chambarder. Je dirai qu'il faut faire des
changements en profondeur, cela m'apparaït certain.
M. LAFRANCE: Autrement dit, en conservant les deux systèmes
confessionnels actuels, c'est-à-dire protestant et catholique et en
ajoutant un système neutre, est-ce qu'il y aurait possibilité de
le faire?
Confessionnalité
M. CARIGNAN: Là, je comprends un peu plus le sens de votre
question. C'est, au fond, la position de la commission sur le plan de la
religion. Je pense que le projet de loi no 62, quant à la religion
à l'école, pose trois problèmes: il y a la question de la
survivance de l'école catholique ou de l'école confessionnelle et
de l'enseignement confessionnel; il y a la
question de la nécessité ou de la
non-nécessité du caractère confessionnel des structures
administratives au niveau des commissions scolaires; il y a la question des
garanties additionnelles en matière confessionnelle.
Evidemment, la CECM est pour le maintien de l'école
confessionnelle et de l'enseignement confessionnel.
Elle croit même que l'école confessionnelle est une valeur
en elle-même et qu'il faut maintenir l'école confessionnelle. Elle
ne croit pas que, pour maintenir l'école confessionnelle, ce soit
nécessaire de conserver le caractère confessionnel, la structure
administrative au niveau de la commission scolaire.
Mais le sentiment de la majorité des commissaires sur la
question, c'est qu'il fallait des garanties religieuses additionnelles. La
garantie additionnelle que nous recommandons sur le plan religieux est la
création d'un comité confessionnel à l'échelle de
l'île, mais qui serait indépendant des commissions scolaires et du
conseil scolaire, et se rattacherait au Conseil supérieur de
l'éducation.
M. LAFRANCE: D'après vous, M. Carignan, les parents auront
évidemment un rôle important à jouer quant à la
confessionnalité.
M. CARIGNAN: Oui. Pour ce qui touche le classement des
élèves, le maintien de l'ambiance catholique dans les
écoles catholiques, on a confié un rôle important aux
comités dont nous recommandons la création. Maintenant, ces
comités-là sont des structures confessionnelles mais qui auraient
surtout un droit de regard, qui seraient consultés sur des points, qui
seraient proches de la population parce qu'ils seraient à
Montréal, et qui seraient tout à fait indépendants des
structures administratives. Ils se trouveraient à relever du Conseil
supérieur de l'éducation.
Pour être plus précis, du côté des catholiques
il s'agirait, au fond, de sous-comités du comité provincial, du
côté protestant la même chose; du côté
pluraliste, il ne pourrait pas s'agir de sous-comités parce qu'il n'y a
pas de comité provincial. Ce serait un comité pluraliste qui
existerait pour les écoles pluralistes, mais seulement à
Montréal, et qui jouerait un rôle équivalant au rôle
que jouerait, pour les catholiques, le comité provincial et le
comité régional.
Participation des parents
M. LAFRANCE: Pour cette raison j'ai noté, en lisant attentivement
votre mémoire pour lequel je dois vous féliciter, que vous
accordez, à la page 3 en particulier, une très grande importance
à la participation des parents. Vous dites: Depuis plusieurs
années déjà, la commission favorise la participation des
parents et a consenti des efforts considérables afin de permettre la
création de comités consultatifs d'éco- le. Pourriez-vous
nous dire, M. Carignan, quels sont ces efforts considérables qui ont
été faits et quels sont les montants qui ont été
attribués pour encourager ces groupements de parents?
MME LAVOIE-ROUX: M. le Président, si vous me permettez de
répondre à cette question et si vous me donnez quelques minutes,
j'aimerais développer cette participation des comités de parents.
Pour répondre d'abord à votre question, je ne peux vous donner de
chiffres exacts quant au montant qui est alloué aux comités
d'école. Depuis deux ans et demi, nous avons mis sur pied deux cent
comités d'école qui n'existaient pas avant cette époque.
Nous avons également mis sur pied des comités consultatifs
régionaux, parce que vous savez que la CECM est divisée en
régions. Nous avons également un comité consultatif
d'éducation, qui a des communications directes avec la CECM et
représente la totalité des comités d'école.
M. LAFRANCE: Pardon, madame, vous venez de faire allusion aux montants
qui ont pu être alloués; vous n'avez pas de chiffres?
MME LAVOIE-ROUX: Je peux vous dire, de mémoire, que chaque
comité d'école a droit à tant par enfant dans les
écoles. C'est un minimum de $100 de base plus $0.25 par
élève. Un montant est également versé aux
comités de région pour leurs activités.
M. CARDINAL: Me permettez-vous, M. le Président? Il y a deux
choses. Dans les normes de financement, par l'Etat, des commissions scolaires,
il y a déjà un per capita pour la pastorale et la
catéchèse, c'est-à-dire $11 par -élève. Ceci
est déjà différent des comités d'école. A la
CECM, vous avez un phénomène spécial et différent
des autres commissions scolaires.
Dans les autres commissions scolaires, c'était ce qu'on appelait
les ateliers pédagogiques, qui n'ont même pas été
prévus d'ailleurs par le rapport Parent et qui ont existé, et
où parents et enseignants se rencontraient pour diverses fins.
Il y avait aussi, et il y a aussi, dans certaines commissions scolaires,
des comités de catéchèse où les parents et la
direction de l'école se rencontrent; mais ceci varie selon les
commissions scolaires. A Montréal, il y a eu ceci d'original, ces
comités d'écoles. Je ne sais pas pour ma part, moi, quels sont
les montants qui y sont consacrés, mais ces montants qui y sont
consacrés le sont en plus de ceux qui sont déjà
attribués par la CECM pour la catéchèse, pour la
pastorale, pour l'enseignement de la religion et pour d'autres fins qui y
entrent, et le montant qu'on donnerait là n'est qu'une partie du montant
total consacré à ce qu'on a appelé tantôt
l'enseignement confessionnel.
MME LAVOIE-ROUX: Si vous voulez me permettre, je voudrais ajouter juste
quelques mots, au sujet du comité d'école. La CECM s'est
réjouie de voir la participation officielle qu'on voulait donner aux
parents dans le bill 62. Nous avons déjà une expérience,
comme je le mentionnais, de 200 comités d'école. Evidemment, tous
ces comités-là ne fonctionnent pas de la même façon:
il y en a qui sont plus efficaces, il y en a qui sont plus actifs, il y en a
d'autres qui le sont beaucoup moins; nous sommes dans une période
d'apprentissage pour ces comités d'école.
Ce que je voudrais recommander ici, c'est que, dans l'hypothèse
où le bill 62 serait adopté, je pense qu'on devrait
prévoir la création immédiate, suivant la mise en vigueur
de la loi, de ces comités d'école. A ce moment-ci, on les
prévoit au moment de la création des commissions scolaires; je
pense que ce serait peut-être trop tard pour faire cet apprentissage qui
permettrait un fonctionnement harmonieux de la direction des parents et des
enseignants.
On sait, par exemple, que les parents voient peut-être encore
leurs fonctions dans la chose scolaire en termes trop subjectifs parfois de
leur propre enfant. Ils n'ont peut-être pas encore
développé cette responabilité je dirais
collective de la chose scolaire. On voit également que les professeurs
qui, avec raison, ont lutté pour un statut professionnel ne l'ont quand
même pas depuis tellement longtemps, et ils voient facilement des
interventions de l'extérieur, comme par exemple, les interventions des
parents comme je dirais une attaque à leur autonomie ou
à leur indépendance. Vous avez l'autre force, qui est la
direction, laquelle se trouve actuellement à faire face à de
nouvelles exigences tant de la part des parents que des enseignants, et qui
doit également se définir en tant que responsable de
l'école et définir ses responsabilités à nouveau
dans cette nouvelle conception de l'école où ces trois forces ont
un rôle à jouer. Je pense donc que si on prévoyait
immédiatement la création de ces comités d'école,
même s'ils n'étaient pas permanents, parce qu'il y aura
évidemment des variations des enfants allant d'une école à
l'autre, on aura quand même fait cet apprentissage du rôle que les
parents seront appelés à jouer dans l'hypothèse de
l'adoption de cette loi.
M. LE PRESIDENT: Le député de D'Arcy-McGee. Pardon...
M. LAFRANCE: Qui est-ce...
M. LE PRESIDENT: Vous avez la parole.
M. LAFRANCE: Au plan électoral c'est ma dernière
question trouvez-vous que la majorité catholique et la
minorité linguistique ont suffisamment de garanties quant à leur
représentation?
M. CARIGNAN: Le sentiment de la majorité des commissaires, c'est
non. Nous avons cru bon, sur le plan confessionnel, de proposer des garanties
additionnelles, et églament en matière linguistique, mais il y a
des dissidences.
M. LAFRANCE: J'ai été heureux de noter qu'à la
première page, vous dites bien que cet accord général
donné par la commission s'accompagne cependant de réserves et
d'inquiétudes quant aux moyens suggérés. Je tiens à
le répéter.
M. CARIGNAN: Je dois ajouter cependant qu'avec les garanties que nous
suggérons, nous trouvons que c'est suffisant, enfin, avec celles que
nous proposons. Nous sommes tout à fait satisfaits. Je voulais ajouter,
quant aux comités d'école, que l'objectif de la commission, c'est
de créer pour chacune des écoles de son territoire un
comité d'école avant la création des futures commissions
scolaires.
Alors, on n'a pas besoin d'une loi pour les créer et les faire
fonctionner. Notre objectif c'est de réaliser ça à
l'intérieur de notre territoire au cours de l'année qui s'en
vient. Mais, enfin, on aimerait que ça se fasse partout sur tout le
territoire de l'île.
M. CARDINAL: M. le Président, si vous permettez, sur le
même sujet, pour terminer, parce que je ne veux pas que l'on passe
à autre chose, je voudrais informer le député de Richmond
qu'il y a quand même des choses qui se sont faites. Par exemple, au cours
de l'année qui vient de s'achever, nous avons créé au
ministère un service de l'enseignement religieux catholique. Nous avons
désigné quelqu'un à la tête de ce service. C'est
assez singulier les réactions: un journal qui s'appelait autrefois, si
je ne me trompe pas, l'Action catholique, a sorti un éditorial le
lendemain disant: Cardinal se prend-il pour un prélat parce qu'il a
créé un service d'enseignement religieux au ministère de
l'Education? Deuxièmement, j'ai moi-même dit, à la
première ou à la deuxième séance de cette
commission, que sur le plan religieux, s'il y avait lieu d'apporter des
garanties additionnelles, le gouvernement le ferait à la suggestion des
personnes qui viendraient lui en faire.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, le député
d'Outremont.
M. CHOQUETTE: Oui, sur le même sujet, très connexe. M.
Carignan, je voudrais vous poser une question; vous connaissez les objectifs
que poursuit le ministre de l'Education en présentant ce projet de loi.
H en a fait état non seulement au comité, ici,
fréquemment, mais également ailleurs dans les journaux, etc.,
etc.: démocratisation de l'enseignement, et ces choses-là. Je
voudrais vous poser la question suivante: Est-ce que, d'après vous, le
fait de garder à
peu près cette structure pyramidale qui est proposée par
le projet de loi, tout en ayant des commissions scolaires
séparées sur le plan linguistique, serait un empêchement
à la réalisation des objectifs proposés par le projet de
loi?
M. CARIGNAN: Ecoutez, moi, je pense que la meilleure façon de
réaliser ça, c'est la commission scolaire unifiée. Si vous
me ditez non, je ne prétends pas que ce soit impossible
d'améliorer la situation, en ayant des commissions scolaires
divisées sur la base de la langue ou de la religion. Enfin, il y a trois
possibilités, et les commissaires ont indiqué leur choix.
M. CHOQUETTE: Vous avez incontestablement droit à votre choix,
mais ici, vous êtes en commission, on peut vous contre-interroger.
M. CARIGNAN: Oui, allez-y.
M. CHOQUETTE: Alors, je ne sais pas si vous saisissez le sens de ma
question, je veux dire que, d'après vous, là, laissant votre
rapport de côté pour le moment, le fait de conserver à peu
près cette structure-là, mais en maintenant des commissions
scolaires divisées sur le plan linguistique, tel que proposé par
le Protestant School Board of Greater Montreal, est-ce que ce serait un
empêchement à la réalisation de certains objectifs sur le
plan de l'éducation des enfants, objectifs que vous jugez qui doivent
être atteints à l'heure actuelle?
M. CARIGNAN: Sur le plan de l'éducation des enfants...
M. CHOQUETTE : Parce que c'est ça sûrement qui est
primordial.
M. CARIGNAN: Bien oui.
MME LAVOIE-ROUX: Je pense qu'on aété assez clair et, lors
de la présentation la semaine dernière, M. Carignan a
parlé de la commission scolaire unifiée comme étant le
moyen je pense, moi personnellement par excellence d'une
véritable démocratisation.
On a, à l'heure actuelle, dans les faits, un système
séparé. A cause de l'histoire, il est séparé
officiellement, confessionnellement, mais on sait fort bien que, dans la
réalité, ça correspond à une division linguistique,
si on fait abstraction des anglo-catholiques qui sont avec nous.
On sait que ce système-là, pour des raisons de taxation,
pour des raisons de ressources, pour une foule de raisons, s'est
développé d'une façon très inégale. Pour
moi, je ne vois pas comment, en agrandissant ou en consacrant davantage cette
division j'ai reconnu qu'elle était confessionnelle mais que,
dans les faits elle correspondait, en somme, à une division linguistique
dans le moment en l'élargissant, en augmentant son nombre on va
réaliser cette démocratisation, on va enlever cette
disparité qui existe présentement.
M. CHOQUETTE: Madame, supposons que j'adopte une partie du projet de
loi, le conseil scolaire de Montréal, qui s'occupe de prélever
les impôts et qui fait approuver les budgets des différentes
commissions scolaires par le ministre de l'Education et qui répartit les
ressources suivant les besoins, au point de vue financier vous avez accompli le
nivellement sur le plan des ressources.
Après cela, vous avez, évidemment, la base de vos
écoles et enfin des orientations diverses: catholiques, protestantes ou
autres ou neutres, si l'on veut, avec des conseils d'école. Mais, au
centre de la pyramide, si vous maintenez pour le moment la division sur le plan
linguistique, est-ce que d'après vous, vous avez mis en cause les
objectifs que vous visez par le projet de loi?
M. CARIGNAN: Voyez-vous, je peux bien dire "non", mais cela serait vrai
également des divisions confessionnelles. Evidemment, l'enseignement
peut se donner selon les trois formules. Mon option provient de ma conception
de la démocratie. Je pense que le citoyen québécois ne
s'intéresse pas seulement à l'éducation de ses
coreligionnaires, ne s'intéresse pas uniquement à
l'éducation des membres de son groupe linguistique, il
s'intéresse à l'éducation de chaque citoyen, et il ne faut
pas restreindre son action politique à l'éducation de ses
coreligionnaires ou des membres de son groupement linguistique.
Un Québécois francophone s'intéresse à
l'enseignement du français dans les classes anglaises. Un catholique
s'intéresse à l'éducation civique de chaque enfant. Alors
je trouve que la formule de la commission scolaire unique est le formule la
plus démocratique, quant à moi. Mais vous me dites: Ne me parlez
pas de vos préférences. Dites-moi ce qui peut se faire selon les
autres formules. Evidemment l'enseignement peut se dispenser selon les trois
formules. L'enseignement se dispense actuellement et nous avons une division
religieuse.
Evidemment, la question du partage des ressources, des sources de
taxation, cela c'est le conseil scolaire de l'île qui le réalise.
Alors nous pouvons atteindre cet obtectif, qu'on ait les divisions
linguistiques, les divisions religieuses ou la commission scolaire unique.
Tout ce que je peux vous dire, c'est ce pourquoi moi je
préfère la commission scolaire unique: c'est à cause de ma
conception de la démocratie.
M. CHOQUETTE: Je voudrais mettre quelque chose au point, au clair. Je ne
critique pas nécessairement votre mémoire. Nous sommes ici pour
nous instruire et nous vous demandons votre point de vue. C'est dans cet esprit
que je vous ai posé cette question.
M. LE PRESIDENT: Le député de D'Arcy-McGee... Pardon?
M. BOUSQUET: Sur le même sujet, j'aimerais que M. Pagé
explicite sa position, étant donné que lui considère que
dans le bill 62 il y a suffisamment de garanties linguistiques et
religieuses.
M. PAGE: M. le président, si vous permettez, avant de
répondre à cette question, j'enchaînerai avec ce qu'a dit
le Président. Moi aussi, je suis d'accord pour dire que le meilleur
moyen pour assurer les objectifs prévus par le bill 62, c'est encore la
commission scolaire unifiée. Moi, j'aime mieux l'appeler la commission
scolaire commune, la commission scolaire de la communauté, de tout le
monde. C'est encore la meilleure formule pour donner une égalité
de service aux gens d'un territoire donné, d'un arrondissement
donné. Je pense que c'est la meilleure formule si on veut viser, en
démocratie, je pense, l'égalité de service pour tous les
citoyens, les enfants de tous les citoyens. Je pense que c'est le but
fondamental de la démocratie. Je pense que c'est aussi le meilleur moyen
de se réunir dans une ville comme Montréal, des gens de toutes
confessions ou de toutes cultures autour d'une même table pour
régler les problèmes, de la communauté; si on veut
créer à Montréal cet esprit communautaire, il va falloir
finir par s'asseoir autour d'une table, les administrateurs ensemble.
Et je dirai que du côté religieux ou confessionnel
on parle depuis Vatican II d'oecuménisme et tout cela tant que
nous resterons dans nos chapelles respectives, nous pratiquerons de moins en
moins l'oecuménisme.
M. LAFRANCE: A condition qu'on conserve les chapelles!
M. PAGE: M. le Président, je pense que j'ai dit là
pourquoi je considère la formule de la commission scolaire commune comme
la meilleure. Quant à votre question, M. le député de
Saint-Hyacinthe, sur le fait que je considérais qu'il y avait dans la
loi suffisamment de garanties confessionnelles et linguistiques, moi, je
considère le bill 62 comme un amendement à la loi de
l'instruction publique. Et la loi de l'Instruction publique, par son article
202 modifié par le bill 63, eh bien, garantit le libre choix de la
langue d'enseignement.
M. CARDINAL: M. Pagé, vous vous rappelez que c'est l'article
203.
M. PAGE: Est-ce que j'ai dit 202? Donc il y aurait une garantie sur le
plan linguistique. Sur le plan religieux, c'est encore un amendement de la Loi
de l'instruction publique, les autres lois, la Loi du ministère de
l'Education, la Loi du Conseil supérieur de l'éducation qui
crée des comités confessionnels, etc., qui constitue des
règlements qui ont force de loi pour les écoles confessionnelles
catholiques ou protestantes. Les commissions scolaires de Montréal, si
elles sont communes, devront, de toute nécessité, appliquer les
lois et les règlements en vigueur, la Loi de l'instruction publique, la
Loi du Conseil supérieur de l'éducation qui, à mon sens,
comporte des garanties suffisantes dans le domaine de la
confessionnalité.
M. CHOQUETTE: M. Pagé, permettez-moi une question. Vous dites
qu'il faut...
Ajournement
M. CARDINAL: M. le Président, on ne soulève pas dans une
commission une question de privilège ni même de procédure.
Je voudrais simplement indiquer que nous avons déjà passé
le temps et, comme il y a encore beaucoup de députés qui ont des
questions à poser, je ne voudrais pas abuser des représentants de
CECM. Je leur pose simplement une question et c'est à eux de
répondre. Je la pose à M. le Président. Comme nous devons
malheureusement terminer la séance d'aujourd'hui immédiatement et
comme il y a encore des députés qui ne se sont pas fait
entendre... Oui, cette horloge est en retard comme beaucoup de choses dans les
édifices du Parlement...
UNE VOIX: Du gouvernement.
M. CARDINAL: Non, j'ai dit du Parlement. Les représentants de la
CECM accepteraient-ils de revenir devant la commission pour continuer cet
échange?
M. CARIGNAN: Pour ma part, j'accepterais et je crois que les autres
accepteraient également.
M. CARDINAL: Et nous pourrions à ce moment-là ajourner. La
prochaine rencontre pourrait peut-être être fixée demain,
à la suite du débat qui se fera en Chambre.
M. LEFEBVRE: Pour ma part j'avais toute une série de questions
à poser. Mais comme on a pu le constater, ce bill soulève
beaucoup d'intérêt de ce côté-ci de la table et j'ai
réservé mes questions; mais nous pouvons peut-être demander
au président de la CECM de faire pression sur le ministre pour qu'il
consente à ce que nous siégions à Montréal. A ce
moment-là ça nous faciliterait les choses.
UNE VOIX: Nous sommes prêts.
UNE VOIX: Il nous faudrait nous assurer la présence de M.
Gagnon.
M. CARIGNAN: Nous espérions qu'il soit
avec nous aujourd'hui. Quand nous avons reçu l'invitation, nous
étions convaincus qu'il reviendrait à Montréal hier soir.
Nous avons accepté l'invitation et c'est seulement ce matin que nous
avons appris qu'il ne pourrait être des nôtres.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen, M. le
Président, vu la compétence au point de vue de l'éducation
des membres de la commission scolaire et comme c'est un dialogue
extrêmement intéressant, de pouvoir, à un moment
donné, prolonger nos sessions. Nous savons que le mercredi il y a un
caucus et un conseil des ministres, et il n'y a jamais eu de commission le
mercredi soir.
C'est seulement parce que c'est le mercredi. Si en Chambre on avait
accepté que ça siège un autre jour, ça aurait
été possible. Heureusement, au dernier journal des Débats,
il y a eu des affirmations qui ont été faites à ce sujet;
et comme aujourd'hui nous avons tous été très gentils et
que, sauf de très rares incursions dans la politique, nous nous sommes
tenus en dehors de ceci, je ne reviendrai pas sur ce sujet.
M. CARDINAL: Nous allons terminer et nous reviendrons avec la CECM
dès que nous nous serons entendus.
M. LE PRESIDENT: Alors vous remettrez vos questions à la
prochaine séance.
M. CARIGNAN: Evidemment, pour assurer la présence de tous les
commissaires, ce serait commode que nous le sachions le plus tôt possible
et pas uniquement la veille.
M. LE PRESIDENT: Nous allons savoir ça demain. Alors d'ici deux
ou trois jours, nous communiquerons pour la semaine prochaine.
(Fin de la séance 17 h 39)
ANNEXE
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS DU MONTREAL BOARD OF
TRADE
TOUCHANT LE BILL 62 DE LA PROVINCE DE QUEBEC, "LOI
CONCERNANT L'ORGANISATION SCOLAIRE SUR L'ILE DE MONTREAL"
Le Montreal Board of Trade 1. Fondé en 1822 par des hommes
d'affaires montréalais sous le nom de "Committee of Trade" et
incorporé en 1842 sous celui de "The Montreal Board of Trade", notre
organisme a toujours eu comme préoccupation première d'assurer le
bien-être commercial et industriel de Montréal en particulier, et
du Québec et du Canada en général. 2. Bien que le Board ne
s'identifie à aucun groupe linguistique montréalais, la plupart
de ses fondateurs appartenaient à la collectivité anglophone, et
aujourd'hui encore, sa première langue de communication demeure
l'anglais. 3. La principale exigence pour être membre du Board est que
les intéressés exercent leurs activités dans le commerce
ou l'industrie. Le Board représente maintenant plus de 3,500 entreprises
représentées par quelque 8,000 délégués. Les
activités de cet échantillonnage complet des secteurs commerciaux
et industriels de Montréal, s'étendent aux domaines les plus
divers, notamment la fabrication, la distribution, la finance, le transport, la
construction et les divers services professionnels. 4. De par ses
activités destinées à créer et à maintenir
un climat propice aux affaires, dans l'intérêt de tous les
secteurs de la collectivité, aux paliers local, provincial et national,
le Board joue depuis des années un rôle de premier plan dans la
croissance de Montréal. 5. C'est en sa qualité de porte-parole de
la collectivité d'affaires montréalaise que le Board soumet les
observations et recommandations qui suivent.
Principes d'enseignement 6. La collectivité d'affaires est en
faveur de l'égalité des droits à l'enseignement pour tous
et d'une structure scolaire démocratique. 7. L'égalité des
droits à l'enseignement, comme le soulignent des enseignants
compétents, ne doit pas entraîner l'uniformité de cet
enseignement. Il faut favoriser la souplesse des programmes d'études, la
diversité des méthodes didactiques, etc., afin de satisfaire les
besoins changeants et de plus en plus nombreux de l'importante
collectivité actuelle.
La portée fiscale du bill 62 8. Le Montreal Board of Trade appuie
la portée fiscale du bill 62, telle qu'exprimée dans les articles
du projet de loi relatifs à:
(a) la diminution du nombre de commissions scolaires
(b) l'uniformisation de la taxe scolaire
(c) la normalisation des évaluations
(d) la centralisation de certains services communs, dont le transport,
les services d'informatique, le recensement scolaire, le financement, etc. 9.
En étudiant la section V du bill 62, intitulée "Taxation", le
Board a constaté que par suite de l'adoption par l'Assemblée
Nationale du bill 75, "Loi de la Communauté urbaine de Montréal",
les articles 700 à 703 du bill 62 relatifs à la normalisation des
rôles d'évaluation devront être modifiés de
manière à tenir compte d'une période de transition
précédant la pleine mise en oeuvre de la normalisation
prévue dans le bill 75. Par suite de cette période de transition,
cette partie du bill 62 sera devenue inutile. 10. La section V du bill 62
prévoit également l'établissement de trois
catégories d'immeubles pour les fins de la taxe scolaire: les immeubles
appartenant à des particuliers, les immeubles appartenant à des
corporations et les immeubles non imposables. L'article 709 du bill 62 propose
qu'une surtaxe équivalant à la différence entre le taux
des particuliers et celui des corporations frappe les immeubles des
particuliers dont la valeur est supérieure à $100,000. On peut
supposer que cet article a pour but d'établir un mécanisme en
vertu duquel certaines propriétés "commerciales" seraient
assujetties à la taxe scolaire des corporations. Dans ce contexte, cette
disposition donne lieu à une inéquité dans le cas des
résidences privées des particuliers dont la valeur
s'élève àplusde $100,000. Le Board recommande par
conséquent que le bill 62 soit amendé de manière à
exempter ces résidences de la surtaxe envisagée, ce qui
éliminerait cette inéquité. » Les
diplômés et la collectivité d'affaires 11. L'une des
préoccupations premières et immédiates de la
collectivité d'affaires consiste à voir à ce que le
système scolaire d'où sont issus ses employés, assure aux
étudiants une formation qui leur permette de contribuer de façon
efficace au succès d'une entreprise. L'employé, son employeur et
la collectivité tout entière en bénéficient. 12. On
ne saurait nier que l'économie québécoise, dans son
ensemble, évolue dans un contexte commercial nord-américain et
international, et que la langue des affaires internationales est l'anglais. La
collectivité d'affaires du Québec, tant française
qu'anglaise, l'a maintes fois souligné. Du simple point de vue de leurs
opérations, les entreprises nationales et internationales
établies au Québec doivent communiquer en anglais, du moins
à l'extérieur de la province. Dans quantité d'entreprises,
la mobilité du personnel constitue un processus et un besoin normaux. Le
personnel doit pouvoir passer aisément d'un établissement
à l'autre de l'entreprise, où qu'ils soient situés. 13. Si
une entreprise ne peut s'assurer les services d'un personnel compétent
et possédant une formation adéquate, elle devra faire face, au
pis à l'échec, au mieux à la médiocrité. La
solution la plus radicale que puisse envisager un homme d'affaires consiste
à aller s'établir dans une autre localité mieux
adaptée aux besoins des affaires. 14. Compte tenu de ce qui
précède, il est essentiel:
(a) que le Québécois d'expression anglaise,
déjà viable dans le contexte nord-américain des affaires
et des communications, devienne apte à travailler de façon plus
efficace dans le milieu québécois francophone, et
(b) que le Québécois d'expression française,
déjà viable dans le contexte québécois
immédiat des affaires et des communications, devienne apte à
communiquer de façon efficace en anglais au sein des
collectivités d'affaires canadienne, nord-américaine et
internationale. 15. Il faut pour cela que les établissements scolaires
du Québec produisent des diplômés canadiens bilingues, tant
francophones qu'anglophones.
16. Bien que la langue constitue de toute évidence un aspect
important des communications, certains affirment que le milieu culturel de
l'individu a aussi un rôle important à jouer sur le plan des
communications, puisqu'elle détermine son interprétation de
certaines situations et ses réactions à leur égard. 17.
Cette théorie a récemment été mise de l'avant par
la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme
dans le livre III de son rapport, intitulé "Le monde du travail",
où l'on trouve, entre autres, les observations suivantes dans le
chapitre ayant trait aux "Différences culturelles dans le monde du
travail: "... Lorsque les membres d'une équipe de travail sont issus de
milieux culturels différents, il est normal que surviennent des
difficultés de communication, indépendamment des obstacles
d'ordre linguistique..." "... Il en est de même dans le secteur
privé... Une étude a démontré qu'il subsiste encore
sur un grand nombre de points des différences significatives et
importantes entre francophones et anglophones... " "... Les attitudes des
anglophones sont en général mieux accordées aux objectifs
purement économiques que celles des francophones, où tendent
à s'introduire des considérations d'un autre ordre... " "... Les
cadres anglophones se sont montrés plus souvent favorables à la
répartition des tâches et à la participation des
subordonnés aux décisions, alors que les francophones inclinent
plutôt vers une surveillance plus étroite du travail de leurs
subordonnés. En règle générale, les dirigeants
anglophones semblent être partisans d'un climat plus détendu,
où les conseils et les observations des collègues sont
recherchés et acceptés avec une équanimité
impersonnelle. Chez les francophones, en revanche, le concept de direction est
plutôt centré sur l'idée du "chef"; les
responsabilités et les critiques sont acceptées d'une
façon plus subjective..." "... Les attitudes diffèrent moins aux
échelons moyens et supérieurs de la direction qu'aux
échelons inférieurs. A ces échelons, le personnel
francophone se différencie tellement qu'il donne l'impression de
constituer un groupe à part dans l'équipe de direction... " 18.
Ces différences proviennent en grande partie de "l'éducation".
Par conséquent, les systèmes d'enseignement, (reflétant
les voeux des collectivités intéressées à les
promouvoir) doivent ncessairement différer sous certains aspects
fondamentaux comme ceux des méthodes d'enseignement, des principes
directeurs, etc. 19. Il faut laisser aux francophones et aux anglophones le
temps d'en arriver à un point d'entente sur l'attitude à adopter
face à leurs objectifs communs qui assurera l'alliance la plus efficace
et la plus acceptable des deux systèmes.
Recommandations touchant la structure du système scolaire Le
Montreal Board of Trade est d'avis que:
20. (a) La structures scolaire proposée par le bill 62, sous sa
forme actuelle, ne servira pas les intérêts économiques de
la collectivité d'affaires.
La croissance et le développement économiques constituent
les besoins fondamentaux de toute collectivité d'affaires. Ce sont
là, en effet, des facteurs de première importance dans la
création des emplois nécessaires à la main-d'oeuvre du
Québec, qui s'accroît aujourd'hui à un rythme annuel
effarant, tant du point de vue du nombre que des aptitudes.
La création, à l'heure actuelle, d'un système
scolaire complètement unifié, tel que le propose le bill 62,
entraverait de façon grave la croissance économique de
Montréal et du Québec dans son ensemble. 21. (b) Une structure
plus réaliste, fondée sur les principes mis de l'avant par la
Commission Pagé (*), par suite de l'étude qu'elle a
entreprise des recommandations émanant d'un vaste échantillonnage
de la collectivité montréalaise dans son ensemble, pourrait
comporter:
(i) un conseil scolaire de l'île unifié, constitué
de façon démocratique, dont les membres seraient élus par
les commissions scolaires régionales, et non désignés par
une autorité provinciale centralisée, et
(ii) des commissions scolaires régionales divisées selon
la langue, anglophones et francophones, qui seraient responsables de
l'administration des propriétés et de l'équipement, et qui
toucheraient des revenus annuels garantis, d'un montant égal par
étudiant, déterminés en fonction des niveaux scolaires en
cause.
Comme l'égalité des revenus ne garantit pas
l'égalité des droits à l'enseignement, un pourcentage de
la totalité des fonds scolaires disponibles devra être retenu par
le Conseil scolaire de l'île afin de pourvoir au fonctionnement des
services communs et de permettre à cet organisme de faire face à
tout problème spécial survenant dans une région quelconque
de l'île de Montréal.
(*) Cette recommandation ne doit toutefois pas être
considérée comme un appui sans réserve du rapport
Pagé, étant donné que certaines de ses recommandations
donneraient lieu, si elles étaient mises en oeuvre, à de graves
lacunes administratives.
(c) Quel que soit le système adopté, il faut éviter
d'imposer aux jeunes étudiants des exigences sévères en ce
qui touche leur connaissance du français pour l'obtention d'un
diplôme, ce qui entraverait la mobilité du personnel des
sièges sociaux, surtout dans le cas des employés en provenance
d'une autre région du pays. Ceux, parmi ces derniers, dont les enfants
sont sur le point de terminer leurs études
post-élémentaires, sont peu disposés ils en sont
même incapables à faire en sorte que leurs enfants
d'âge scolaire satisfassent aux exigences imposées aux
étudiants pour l'obtention d'un diplôme avec une connaissance
d'usage du français. Ces familles n'acceptent pas de s'établir
dans les localités où sont imposées de telles
"restrictions". Les conséquences de cette situation se sont
déjà faites sentir de façon sensible au sein de la
collectivité d'affaires montréalaise, où des personnes
compétentes possédant des aptitudes, etc., dont la province a
besoin, refusent de s'établir au Québec, tout cela au
détriment de l'économie québécoise.
Hugh P. Davidson J.B. Porteous,
Président du comité Président, d'étude sur
la restructuration The Montreal Board of Trade scolaire de l'île de
Montréal, The Montreal Board of Trade
E. Lorne Tracey,
Directeur général,
The Montreal Board of Trade
Déposé le S février 1970 à la commission
parlementaire de l'éducation par M. Porteous.