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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le jeudi 25 mai 1978 - Vol. 20 N° 93

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de l'Education


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère de l'Éducation

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, madame messieurs!

La commission de l'éducation est réunie ce matin pour étudier les crédits du ministère de l'Éducation.

Les membres de cette assemblée sont M. Alfred (Papineau), M. Lacoste (Sainte-Anne), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marquis (Matapédia), M. Morin (Sauvé), M. Paquette (Rosemont), M. Picotte (Maskinongé).

Y a-t-il des changements au niveau des membres de cette assemblée pour cette journée?

Nous en étions rendus au programme 4, élément 1.

M. le ministre.

Réponses du ministre

M. Morin (Sauvé): M. le Président, avant que nous examinions les statistiques relatives à l'application de la Charte de la langue française, j'aimerais apporter des réponses à des questions qui m'ont été posées hier, notamment par Mme le député de L'Acadie. Ces réponses portent sur les classes d'accueil et sur les ADP.

Mme Lavoie-Roux: La question des ADP a été soulevée par M. Laplante, mais très brièvement.

M. Morin (Sauvé): Pour ce qui est...

Mme Lavoie-Roux: Cela m'intéresse, de toute façon.

M. Morin (Sauvé): Commençons par les ADP. Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): Je suis en mesure de vous donner des chiffres qui font état de la situation actuelle. Ils sont datés du 24 mai. Tout d'abord, à la DGDP, la Direction générale du développement pédagogique, nous avons un assez grand nombre d'ADP quoique, semble-t-il, il soit légèrement supérieur à celui de l'an dernier en raison des plans sectoriels de développement. Je pourrais vous énumérer toute la liste, mais je vous donnerai les totaux qui sont plus éloquents.

À la DGR, la Direction générale des réseaux, le soutien pédagogique aux petites écoles exige la présence de 24 ADP alors que, l'an dernier, il y en avait 37. Au niveau des plans sectoriels de développement, soit français langue maternelle, art, éducation physique, milieu défavorisé, nous avons cette année beaucoup plus d'ADP que l'an dernier, mais ils se trouvent surtout dans les régions ou dans les commissions scolaires. Je vais m'expliquer. En tout et partout, il y a cette année 193

ADP, alors que l'an dernier, il y en avait 134. Il y a donc eu augmentation des ADP, non pas surtout au niveau du ministère mais bien dans les régions et dans les commissions scolaires. Au ministère, nous en avons 119, mais nous avons ajouté à cela 43 ADP, c'est-à-dire 33 de plus que l'an dernier, pour mettre en oeuvre nos politiques à l'égard des milieux défavorisés, notamment dans la foulée de la série d'émissions intitulée Passe-partout.

De même pour les plans sectoriels de développement, français langue maternelle, art et éducation physique, 31 nouveaux ADP se trouvent dans les régions pour aider à leur mise en oeuvre. Voilà donc le tableau général. Augmentation globale du nombre d'ADP, mais surtout à l'extérieur du ministère lui-même.

Mme Lavoie-Roux: Si vous me permettez une question, M. le Président. Les autres ADP se trouvent répartis dans quelles matières?

M. Morin (Sauvé): À la direction des programmes — c'est par niveau qu'on me l'a indiqué — il y en a 16 au primaire, 14 au secondaire et 5 en adaptation scolaire. À la direction de la mesure et de l'évaluation, nous en avons 7; au service de Ja recherche, 4, comme l'an dernier. À la formation des maîtres et au matériel didactique, 9, alors que nous n'en avions que 5 l'an dernier. Pour les plans sectoriels de développement, au ministère même — voilà qui répond directement à votre question — pour le français, langue maternelle, nous en avons 9; pour les langues secondes, 8, à l'accueil aux non francophones, 5; aux arts, 9 et à l'éducation physique, 8. Cela reflète évidemment nos priorités et les développements que nous voulons donner au français, langue maternelle, aux langues secondes, aux arts et à l'éducation physique.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il serait possible d'avoir un tableau de l'évolution des ADP en fonction des matières, par exemple, pour les trois dernières années?

M. Morin (Sauvé): Nous pourrions vous fournir cela...

Mme Lavoie-Roux: C'est parce que cela demeure quand même... J'ai beau prendre quelques notes et quelques chiffres...

M. Morin (Sauvé): Oui.

Mme Lavoie-Roux: ... cela donnerait un meilleur portrait de l'évolution, je pense...

M. Morin (Sauvé): Nous pouvons vous fournir ce tableau, mais je tiens déjà à vous dire que pour les plans sectoriels de développement, ce sont de nouveaux ADP, de nouveaux personnels. Je vais demander qu'on vous sorte les chiffres. Cependant, je vous ferai remettre personnellement le tableau et si vous avez des questions, alors on

pourra les aborder de manière à ne pas revenir indéfiniment sur les mêmes questions.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Pour ce qui est maintenant de la clientèle scolaire des classes d'accueil, nous avons des chiffres fort intéressants à vous communiquer. Ils datent du 25 mai.

Je me contenterai de relever les chiffres les plus impressionnants. À la commission scolaire Baldwin-Cartier, il y a 13 classes d'accueil pour 232 élèves; à la CECM — voilà qui va intéresser particulièrement Mme le député — 111 classes d'accueil pour 1555 élèves.

Mme Lavoie-Roux: Quelle est l'augmentation par rapport à l'an dernier?

M. Morin (Sauvé): On m'indique que c'est à peu près la même chose, oui. C'est quand même impressionnant que nous ayons toutes ces classes d'accueil, qui francisent, qui préparent les jeunes venus de l'étranger à accéder à l'école française.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement vous faire remarquer qu'il n'y a là rien de nouveau, en fait...

M. Morin (Sauvé): Non, c'est pour répondre... Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

M. Morin (Sauvé): ... aux questions que vous m'aviez posées, tout simplement.

Mme Lavoie-Roux: C'est ça.

M. Morin (Sauvé): Vous vouliez savoir combien il y en avait. Il se peut, cependant, que dans certaines commissions scolaires...

Mme Lavoie-Roux: II y en ait de nouvelles. M. Morin (Sauvé): ... il y en ait de nouvelles. Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): À la CECQ, il n'y a qu'une classe pour 18 élèves. Je vais vous donner les chiffres principaux. À Jérôme Le Royer, 17 classes pour 271 élèves; à Sainte-Croix, dans le nord de Montréal. 14 classes pour 215 élèves...

Mme Lavoie-Roux: ... une augmentation, je pense.

M. Morin (Sauvé): C'est possible. Je pourrais aussi vous faire sortir l'évolution de la clientèle scolaire des classes d'accueil, mais cela exigerait beaucoup de recherches pour faire un tableau synoptique.

À la commission scolaire Sault-Saint-Louis, il y a sept classes pour 123 élèves. Même au BEPGM, il y a deux classes pour 36 élèves.

Comme vous le savez, nous étudions la possibilité d'étendre le nombre de classes d'accueil au Bureau des écoles protestantes de l'agglomération montréalaise. Les représentants du BEPGM m'ont demandé si je consentirais à augmenter le nombre de classes d'accueil et, en vue de régler nos problèmes avec cette commission scolaire, j'étais tout à fait disposé à leur permettre d'intégrer les jeunes immigrants à des classes d'accueil, pour les diriger ensuite vers les classes françaises protestantes. Sur ce point, j'étais prêt à faire preuve d'une très grande souplesse, puisque je pense qu'il nous faut rechercher la solution de ces problèmes, non pas dans l'affrontement, mais dans la bonne volonté de part et autre. Dans la mesure où le BEPGM veut maintenant faire preuve de bonne volonté, il ne trouvera, auprès du ministère, qu'une oreille attentive et bienveillante.

M. Saint-Germain: M. le Président, est-ce que ceci doit se faire selon un principe qui veut qu'il y ait de bonnes relations entre le gouvernement et le Protestant School Board ou est-ce que cela doit se faire dans l'intérêt de la communauté?

M. Morin (Sauvé): Les deux choses ne sont pas nécessairement opposées. Cela doit se faire dans l'intérêt supérieur du Québec, mais, s'il est possible de le faire de façon ordonnée, paisible et civilisée, nous préférons de loin ces méthodes. Est-ce que le député me suggère d'utiliser les injonctions et la police?

M. Saint-Germain: Non, mais je crois que le développement de cette section française du Protestant School Board correspond aux intérêts supérieurs du Québec; c'est la raison pour laquelle j'ai été un peu surpris de voir que vous vous étiez limités à des questions de bonnes relations entre le Protestant School Board et le gouvernement.

M. Morin (Sauvé): II y a beaucoup plus que cela dans notre démarche, il y a aussi le respect des convictions religieuses des gens. Il se peut, étant donné la diversité croissante du Québec sur le plan sociologique, qu'il y ait de plus en plus de protestants francophones ou d'élèves qui ne soient pas catholiques et qui préfèrent l'école protestante qui, vous le savez, est une école très diversifiée. Il y a des orthodoxes qui vont à l'école protestante, il y a même des Israélites qui vont à l'école protestante, mais s'ils sont d'origine linguistique française, il n'y a aucune raison pour laquelle nous ne développerions pas notre secteur protestant francophone. Je l'ai dit déjà publiquement en toute lettre, c'est un secteur qui, je crois, est appelé à se développer dans l'avenir, et ce dans l'intérêt supérieur de la collectivité.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela m'étonne quand même de vous entendre dire que vous êtes prêt à utiliser de la souplesse pour leur donner des classes d'accueil, si tel est leur désir. Tant et aussi longtemps qu'on aura un système protestant, un système catholique, un système

confessionnel, pour dire plus justement, de toute évidence on aura autant droit à des classes d'accueil que le secteur catholique, non? Alors, je comprends mal la souplesse que vous allez démontrer, cela me semble assez naturel, à moins qu'on le refuse, c'est autre chose.

M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas de ma part qu'il y a une plus grande souplesse. Je pense qu'il n'y a jamais eu qu'un esprit d'accueil de notre part, mais je constate qu'il y a évolution au BEPGM, puisque c'est de son côté qu'il n'y avait pas ces mêmes bonnes dispositions à l'égard de l'enseignement en français. Or, il semble qu'il y ait évolution et que désormais il soit prêt à développer le secteur francophone sans doute plus qu'il n'avait envisagé de le faire dans le passé. Les classes d'accueil sont évidemment une charnière qui permet la transition de l'école anglaise ou du milieu anglophone vers des classes françaises.

Je fais grâce à la commission de toutes les autres commissions scolaires où il y a deux, trois, quatre, dix classes d'accueil, à moins qu'on ne veuille avoir toute la liste.

Mme Lavoie-Roux: Non, "une seule" qu'il m'intéresserait de connaître, celles de la région de Sherbrooke et de la région de l'Outaouais. Deux, pas une.

M. Morin (Sauvé): Oui, d'abord dans la région de l'Outaouais-Hull, nous avons quatre classes d'accueil pour 73 élèves. Pour ce qui est de Sherbrooke, nous n'avons que deux classes d'accueil pour 34 élèves. Il est évident que les classes d'accueil se concentrent avant tout à Montréal, c'est-à-dire à la CECM, à Baldwin-Cartier, au BEPGM, à Chambly, à Chomedey de Laval, à Greenfield Park, à Jérôme-LeRoyer, etc.

Mme Lavoie-Roux: II semble bien, M. le ministre, que les efforts que le ministère de l'Immigration fait pour tenter de distribuer — distribuer est peut-être un mauvais mot — mais au moins d'orienter les nouveaux venus vers d'autres régions du Québec n'ont pas un grand succès jus-qu'à aujourd'hui, si on en juge par ces statistiques?

M. Morin (Sauvé): De toute façon, nous partions de si bas, c'est-à-dire de l'inexistence de classes d'accueil à travers le Québec, que de voir apparaître quelques classes à travers le territoire, dont quatre dans I'Outaouais-Hull, je crois que c'est tout de même assez encourageant. Cela ne veut pas dire qu'il ne reste pas beaucoup à faire.

Pour ce qui est des résultats obtenus par le ministère de l'Immigration, je pense qu'il faudrait poser la question au ministre de l'Immigration. Je n'ai pas sous les yeux les chiffres qui me permettraient de juger du succès ou de l'insuccès de cette politique de répartition des effectifs sur l'ensemble du territoire.

Mme Lavoie-Roux: Cela peut quand même être une indication.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que cela peut servir d'indication? Oui. Et il faudrait peut-être étudier cela à la lumière d'un tableau de l'évolution des classes d'accueil dans chacune de ces régions depuis quelques années. On verrait, à ce moment-là, apparaître des tendances.

M. Le Moignan: M. le Président, si Mme le député le permet. Puisqu'on parle d'immigration, c'est peut-être prématuré, mais depuis l'adoption de la loi 101, vous n'avez peut-être pas les chiffres à votre ministère puisque vous parlez du ministère de l'Immigration, est-ce qu'il est entré beaucoup d'immigrants au Québec depuis le 1er août 1977? Est-ce que vous êtes en mesure d'analyser la clientèle scolaire pour septembre, face à l'arrivée des immigrants qui ne sont pas francophones, ni anglophones ou encore des immigrants anglophones qui seraient entrés au Québec? Est-ce que vous avez, actuellement, des chiffres ou si c'est prématuré?

M. Morin (Sauvé): Je n'ai pas de chiffres sur le nombre de personnes adultes qui sont entrées au Québec depuis ces dates. Je pourrais en obtenir en m'adressant au ministère de l'Immigration.

À l'éducation, nous voyons ces questions sous l'angle de l'école et sous l'angle de la clientèle scolaire que nous amène cette immigration. Là, nous avons des chiffres assez précis. Nous pouvons vous dire: II y a tant d'enfants qui ont demandé à être admis à l'école. Tant sont dans les écoles françaises, tant sont dans les écoles anglaises. D'ailleurs, ce sont des chiffres que je m'apprêtais à vous donner, en ayant maintenant terminé avec les ADP et les classes d'accueil.

M. Le Moignan: C'est la clientèle scolaire qui nous intéresse. Peut-être plus tard, lorsque vous aurez ces chiffres, ce serait intéressant de les connaître, de voir les nationalités et de voir si la majorité va opter pour l'école française.

M. Morin (Sauvé): Là-dessus, M. le Président, je suis en mesure de vous donner quelques détails. Le député de L'Acadie et le député de Jacques-Cartier m'ont posé plusieurs questions. Je pourrais commencer par un tableau général, si vous le voulez bien, que j'ai pu obtenir au cours de la nuit, mais qui ne comporte pas des chiffres dont je puisse dire qu'ils soient d'aujourd'hui. Ce sont des chiffres d'il y a quelques semaines. Ce sont les derniers que nous ayons et il se fait un rapport toutes les deux ou trois semaines. Je vais tenter de vos donner des chiffres qui paraissent encore valables aujourd'hui.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il serait possible que ces chiffres nous soient distribués? C'est très difficile de suivre des statistiques sans copies. Est-ce qu'il y en a eu de faites? (10 h 30)

M. Morin (Sauvé): C'est juste. Je vais demander qu'on vous photocopie le tableau que je vais maintenant commenter. Nous allons nous en procurer une copie. C'est le tableau de la page 17.

Nous pourrions également faire photocopier le tableau de la page 19, de même qu'il faudrait faire photocopier les 17 cas où j'ai dû, pour cause de déclarations erronées, retirer des reconnaissances d'admissibilité à l'école anglaise.

Le Président (M. Jolivet): On va faire des photocopies, on pourra vous les donner ensuite.

Mme Lavoie-Roux: En attendant les photocopies, pour terminer sur les classes d'accueil, je voudrais vous faire part d'un problème qui m'a été souligné.

M. Morin (Sauvé): Oui.

Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il faut l'évaluer avant d'en arriver à des conclusions trop fracassantes, mais l'information que j'ai eue provient quand même de source sérieuse. Des élèves qui viennent des classes d'accueil sont ensuite intégrés dans les classes régulières; peu de temps après un certain nombre est diagnostiqué comme souffrant de troubles d'apprentissage. On les repousse vers des classes spécialisées ou enfin des classes où ils ont des... Il ne faudrait quand même pas créer une catégorie d'élèves qui deviennent déviants dans le sens clinique du mot, à partir d'enfants de classes d'accueil. Je sais, par exemple, que le problème... L'an dernier, je vous l'avais souligné. Je ne sais pas si le ministère a fait un suivi là-dessus. J'avais apporté ce problème à la CECM, le problème des Haïtiens. Mais je ne parle pas particulièrement des Haïtiens, je parle de l'ensemble des étudiants. Parfois, les professeurs ont de la difficulté à accepter plusieurs des enfants qui arrivent avec une connaissance de la langue peut-être pas aussi bonne que les Québécois d'à côté. On retrouvera à certains endroits cette tendance à les refouler vers des classes spéciales.

Je vous signale le problème. Je pense que le moins qu'on puisse faire, c'est d'en prendre note et de trouver les moyens de vérifier que cette chose n'aille pas en augmentant et ne se reproduise pas.

M. Morin (Sauvé): J'en prends bonne note, Mme le député. Nous allons tenter de savoir si ces classes d'accueil donnent lieu à des pourcentages plus élevés que la normale d'élèves en difficultés d'apprentissage...

Mme Lavoie-Roux: Quand ils se retrouvent dans les classes régulières.

M. Morin (Sauvé): ... lorsqu'il se trouvent naturellement dans les classes régulières, à la fin de leur classe d'accueil. Je vais faire examiner cela de très près. Si c'est le cas, nous allons voir ce qu'il y a moyen de faire pour corriger la situation. Ce n'est pas normal. Quoiqu'on puisse trouver des explications à ce phénomène, il faut tenter de faire en sorte que ces jeunes ne portent pas toute leur vie la conséquence du déplacement de leurs parents, du fait que leurs parents soient venus habiter le Québec.

J'imagine que ces mêmes difficultés existeraient si on les intégrait au côté anglais, mais ce n'est pas une raison pour nous désintéresser du problème.

Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je dois vous dire que du côté anglais — je ne peux pas parler du côté protestant, mais du côté anglo-catholique — on a, pendant des années, intégré des enfants non francophones ou non anglophones dans les écoles. Je pense aux écoles qui regroupent un grand nombre d'enfants d'origine italienne. Il y avait une tolérance très élevée à ces difficultés, alors qu'il semblerait que la tolérance soit moins grande, parce que — c'est toujours le même problème — on a moins de traditions dans le sens de l'intégration de ces enfants aux écoles françaises.

M. Morin (Sauvé): Oui, mais la tolérance peut se traduire de plusieurs façons. Cela peut signifier une indifférence au problème. On fait tout simplement entrer les élèves dans la machine, peu importe comment ils en sortent à l'autre bout. C'est une forme de tolérance. Une autre forme plus intelligente, c'est d'avoir des services qui répondent à ce type de problèmes et qui permettent d'intégrer davantage les enfants à leur classe, et éventuellement, à la communauté. C'est plutôt cette seconde solution que, personnellement, je serais enclin à rechercher.

Mme Lavoie-Roux: Je reviens à ma question des Haïtiens. Est-ce que le ministère s'en est préoccupé? J'ai posé la question l'an dernier.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais simplement dire que le ministère...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): ... suit la situation des Haïtiens. Nous avons d'ailleurs reçu des représentations de leur part. C'est un dossier que nous surveillons au fil des mois. Si le député de Papineau veut ajouter quelque chose...

M. Alfred: J'ai reçu personnellement des lettres de gens qui m'ont dit que les Haïtiens eux-mêmes prennent les choses en main. Ils ont créé des classes pour essayer de résoudre les problèmes qu'éprouvaient certains Haïtiens. D'autre part, jusqu'à preuve du contraire, ils sont très satisfaits de l'aide qui a été apportée par le gouvernement.

Mme Lavoie-Roux: Tant mieux, s'il n'y a pas de problème.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vois que nous avons encore de la concurrence de l'extérieur. Je ne sais pas s'il est possible de faire arrêter ce bruit. J'ai l'impression que si nous

devons endurer cela toute la matinée, viendra l'heure de la suspension, nous serons tous à moitié éberlués. Est-il possible de faire cesser ces bruits?

Le Président (M. Lacoste): On l'a demandé, ce matin. Cela n'a pas été fait. On va aller vérifier de nouveau pour faire cesser les bruits, la pollution par le bruit.

Application de la Charte de la langue française

M. Morin (Sauvé): Bien. M. le Président, peut-être puis-je traiter d'une autre question avant que les tableaux n'arrivent. On m'a demandé hier le nombre d'enfants qui ont obtenu ce qu'on pourrait appeler des dispenses en raison du séjour temporaire de leurs parents au Québec. J'ai un chiffre qui, sans être peut-être tout à fait définitif, donne une très bonne idée de l'ordre de grandeur. Il y a 480 cas, qui représentent 0,21% de l'ensemble des élèves du secteur anglophone. Je puis vous expliquer en raison de quel motif ces enfants se sont vus déclarés admissibles à l'enseignement en anglais.

Vous savez qu'il y a des personnes qui font des études ou des recherches pour une durée de moins de trois ans, dont les enfants peuvent aller à l'école anglaise, de même les personnes affectées au Québec pour moins de trois ans dans l'industrie, dans le commerce, enfin, les fonctionnaires étrangers et les membres des forces armées. Sur les 480 enfants qui ont obtenu des déclarations d'admissibilité, la moitié sont des enfants des membres des forces armées, exception qui est prévue dans la loi. Le second groupe le plus important, ce sont les personnes affectées au Québec pour moins de trois ans dans l'industrie ou le commerce, enfin, pour une raison ou pour une autre. C'est un chiffre qui doit être presque complet. Vous l'avez d'ailleurs sur les tableaux qu'on va vous faire distribuer. Nous allons vous donner la réponse dans un instant.

Le Président (M. Jolivet): Pour votre bénéfice, on vient de m'avertir qu'on essaie de faire cesser ce bruit, ce vacarme à l'extérieur. On essaie, je dis bien.

M. Morin (Sauvé): Jusqu'à maintenant, M. le député, nous avons eu quatre cas de refus. On vous a sans doute signalé — la presse s'en est chargée — que certains se seraient vantés d'avoir fait des déclarations mensongères pour obtenir cette déclaration d'admissibilité. Il semble qu'il y ait eu quelques cas de ce genre, mais, naturellement, il est très difficile de vérifier si, oui ou non, quelqu'un dit la vérité, si un secrétaire de compagnie ou un président de compagnie dit la vérité quand il envoie une lettre à la personne désignée par moi pour reconnaître l'admissibilité à l'école anglaise, lettre selon laquelle telle ou telle personne est au Québec pour moins de trois ans.

Nous avions voulu faire preuve de la plus grande souplesse et, comme vous le voyez, il n'y a eu que quatre cas de refus sur... Je m'excuse. Je dois me corriger. Il y a neuf cas de refus. Donc, 9 sur 489, ce qui fait qu'il reste 480 élèves qui sont à l'école anglaise en vertu de cette exception.

Nous avons l'intention, si l'enquête que j'ai demandée devait révéler qu'il y a eu des abus, de nous montrer plus exigeants à l'égard des documents que toute personne doit présenter à l'appui d'une demande comme celle-là. Désormais, si, je dis bien, s'il se révèle qu'il y a eu des abus — ce dont je ne suis pas encore totalement persuadé; il faudra attendre que j'aie plus de renseignements — s'il y avait eu abus, il se pourrait que nous exigions désormais des sociétés industrielles ou commerciales qui désirent faire exempter des personnels temporaires, non plus seulement une simple lettre du directeur du personnel, mais une résolution en bonne et due forme de la société. C'est à ce genre de remède que je songe pour éviter que des gens mentent à l'État et s'en fassent même une gloire. Je pense que c'est une indication du niveau de moralité publique qui est en train de s'instaurer dans certains milieux anglophones que de constater que, non seulement on mentait, mais on était fier d'avoir menti, comme les journaux l'ont rapporté.

M. Saint-Germain: Mais, est-ce que vous croyez qu'il y a lieu d'être si exigeant puisqu'il n'y a que 480 élèves et la moitié vient des forces armées? C'est assez facile à vérifier si on appartient aux forces armées oui ou non. C'est dire qu'il reste 240 élèves, c'est très peu.

M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas interpréter les propos du député comme...

M. Saint-Germain: Très, très peu.

M. Morin (Sauvé): ... un appui au mensonge systématique...

M. Saint-Germain: Absolument pas!

M. Morin (Sauvé): ... mais, s'il se révèle qu'on nous a menti en plusieurs dizaines de cas, par exemple, je pense qu'il y aura lieu de renforcer la procédure, de renforcer le mécanisme.

M. Saint-Germain: Je ne dis pas qu'on doit mentir, mais, s'il fallait tous être très sévères pour les gens qui mentent, que ce soit au niveau de l'impôt sur le revenu ou autrement, il y aurait beaucoup de citoyens qui perdraient leur réputation. Je veux simplement dire que 240 élèves, ce n'est pas ça qui va mettre la culture française en danger au Québec.

M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas une question de mettre la culture française en danger, M. le Président, c'est une question de respect de la loi, et je pense que c'est la responsabilité, c'est le devoir de

tout gouvernement de s'assurer que la loi est observée correctement. Autrement, on a deux catégories de citoyens: Ceux qui disent la vérité et qui en prennent les conséquences, ceux qui mentent et qui s'en tirent. J'estime que ce n'est pas acceptable.

M. Saint-Germain: C'est un champ d'activités où beaucoup s'en tirent, parce qu'il y a beaucoup d'élèves au niveau de certaines commissions scolaires qui sont dans le réseau anglais tout à fait illégalement et on ne semble pas vouloir agir.

M. Morin (Sauvé): Ils ne s'en tirent pas financièrement.

M. Saint-Germain: Pourquoi y aurait-il deux poids, deux mesures?

M. Morin (Sauvé): Et si M. le député de Jacques-Cartier veut me suggérer des mesures plus draconiennes, je serais très heureux de les entendre. Est-ce que le député de Jacques-Cartier me suggère de mettre la police dans les écoles, d'avoir recours aux injonctions? Est-ce que le Parti libéral aurait connu une certaine évolution dans sa pensée depuis quelque temps, là-dessus? (10 h 45)

M. Saint-Germain: Si M. le ministre veut bien me donner ses fonctionnaires et l'autorité voulue pour agir, j'agirai bien, mais à titre de membre de l'Opposition, j'ai à ma gauche un recherchiste et c'est le seul que je puisse consulter. Alors, je serais très mal à l'aise de vous suggérer les technicités voulues pour appliquer la loi. Je constate que si le gouvernement a l'autorité voulue pour légiférer, il est aussi responsable de voir à ce que ses lois soient appliquées. Voilà que, pour 240 élèves...

M. Morin (Sauvé): Très heureux de vous l'entendre dire!

M. Saint-Germain: ... vous prenez des positions de principe, lorsque vous savez qu'il y en a des milliers d'autres qui sont dans le réseau. La seule façon, pour vous, de donner l'image que vous voulez appliquer la loi, c'est de retirer les subventions. C'est une drôle de façon d'appliquer la loi.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que M. le député pourrait me décrire le comportement du gouvernement précédent? Il me semble qu'il était à l'Assemblée entre 1973 et 1976, lorsque la loi 22 a été mise en vigueur dans les écoles. Pourrait-il nous expliquer comment le gouvernement libéral s'est comporté à cette époque? Je serais très intéressé de le savoir; remarquez que je m'en doute. S'il ne le sait pas, je puis le lui décrire.

M. Saint-Germain: J'étais à l'Assemblée et en ce temps-là j'ai donné mon opinion de la même façon que je la donne aujourd'hui. Si vous croyez que je vais défendre l'ancien gouvernement, je ne suis pas aussi partisan que cela. Je suis capable, dans le Parti libéral, au niveau du caucus ou autrement, de donner mon opinion comme je le fais ici présentement. Mais je dis simplement que le ministre, pour ces enfants qui sont dans la province de Québec temporairement, se montre très sévère, énonce de grands principes, mais tout cela sonne excessivement faux parce qu'il y a, dans le même réseau, des milliers d'enfants qui, d'une façon tout à fait évidente, n'ont pas le droit d'être là et qui y sont.

M. Morin (Sauvé): Mais, M. le député, ce n'est pas le même cas.

M. Saint-Germain: Votre loi n'est pas applicable. Alors, vous devriez, soit la modifier, soit agir...

M. Morin (Sauvé): Je vais vous donner...

M. Saint-Germain: ... la modifier pour qu'elle reflète la vérité du milieu. C'est une situation intenable. Pour ce qui regarde le respect de l'autorité, l'application des lois au Québec, c'est un mauvais exemple. On semble s'entêter à ne pas vouloir voir le problème en face.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, il faut bien distinguer chaque cas. Dans celui des séjours temporaires, il s'agit de gens qui se vantent d'avoir menti à l'État. Nous allons voir ce que nous pouvons faire pour remédier à cette situation. L'autre cas est celui des élèves qui se trouvent illégalement dans les classes anglaises et, là, je vous dirai tout à l'heure, si cela vous intéresse, exactement ce que nous comptons faire.

Si le député nous suggère que nous ne sommes pas assez sévères, pas assez souples, que nous devrions envisager des moyens plus draconiens, ce serait nouveau de la part du parti qu'il représente, mais je suis tout à fait prêt à I'écouter. S'il estime que nous n'avons pas appliqué la loi avec suffisamment de sévérité dans le cas des élèves fréquentant illégalement les écoles anglaises, ma foi! je serais très heureux de l'entendre dire clairement de la part d'un représentant du Parti libéral.

M. Saint-Germain: Pour quelle raison demanderais-je au ministre d'être plus sévère dans I'application d'une loi qui n'est pas du tout applicable? Ce n'est pas le point que je veux soutenir. Je soutiens que vous avez adopté une loi qui n'est pas applicable, qui soulève des passions et qui crée des problèmes importants au Québec. Vous laissez aller l'illégalité.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, il ne faut pas...

M. Saint-Germain: Vous vous cachez derrière des technicités administratives, tout simplement.

M. Morin (Sauvé): Le député disait, tout à I'heure, qu'il n'était pas partisan au point de

prendre des attitudes extrêmes. Il faut tout de même qu'il tienne compte du fait que, jamais on n'a eu une rentrée scolaire aussi calme que celle de septembre dernier. Il dit que la loi soulève les passions. Oui, pendant quelques semaines, mais cela s'est bien apaisé; nous nous dirigeons même maintenant, je pense, vers une application de la loi qui fera que la grande majorité des immigrants se retrouveront, éventuellement, à l'école française. À l'heure actuelle, évidemment, en raison de l'attitude adoptée par le gouvernement qui consistait à ne point fractionner les familles, il y a beaucoup d'enfants qui vont à l'école anglaise parce qu'ils ont un frère ou une soeur aînée qui s'y trouve déjà. On verra, tout à l'heure, dans les tableaux qu'il y en a un certain nombre dans cette catégorie, mais la loi n'a pas donné lieu à de si grandes empoignades, elle a même été appliquée dans la très grande majorité des commissions scolaires anglophones et sans discussion; alors, il ne faut pas dramatiser.

M. Saint-Germain: Le fait, M. le Président, que plusieurs citoyens du Québec ont laissé la province et le fait que certains investissements qui devaient être faits ne l'ont pas été, a concouru à créer la situation que nous vivons aujourd'hui.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, si le député veut élargir le débat, je le veux bien, mais je lui ferai observer qu'il a été démontré statistiquement que les départs du Québec avaient commencé dès 1970. Or je ne sache pas que c'était le Parti québécois qui était au pouvoir à cette époque-là. Là aussi, vous allez sans doute vous retrouver en accord plus ou moins étroit avec l'ancien gouvernement, M. le député.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont.

M. Saint-Germain: S'il vous plaît, M. le Président, j'aurais une autre question. En plus de ces 480 élèves, est-ce qu'il y a des élèves qui auraient eu le droit — je suppose que vous n'avez pas ces statistiques, ces chiffres — par ce même article de la loi 101, d'être intégrés au réseau de langue anglaise, mais qui ne sont pas prévalus de ce privilège, qui ont simplement accepté d'étudier en français?

M. Morin (Sauvé): Tout ce que je puis vous dire là-dessus, c'est qu'il y a un bon nombre d'élèves qui auraient pu choisir d'aller à l'école anglaise, mais qui se retrouvent dans les écoles françaises en raison de l'application de la charte. Si vous voulez, je peux vous trouver les chiffres. Vous avez d'ailleurs un tableau que je vous ai fait distribuer et qui est numéroté tableau no 4, page 19. Vous allez constater que se trouvent à l'école française 3825 enfants qui étaient admissibles à l'école anglaise et qui néanmoins sont à l'école française. Je crois que c'est un chiffre dont on doit tenir compte.

M. Saint-Germain: C'est un chiffre qui reflète le nombre d'élèves qui pourraient être intégrés au réseau anglais, selon n'importe quel article de la loi 101, qui ont un droit strict, si vous voulez, d'après la loi 101 en général. Ce chiffre ne s'applique pas nécessairement aux 480 élèves ou à l'article dont je ne me souviens pas du numéro...

Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, M. le ministre, est-ce qu'on a des chiffres sur le nombre d'enfants qui étaient aux écoles françaises l'an dernier et qui ont demandé leur transfert à l'école anglaise? Parce que, pour parler de la CECM, il y a toujours eu une majorité d'enfants d'ascendance irlandaise qui était dans les écoles françaises. C'est un chiffre qui... Alors, il y avait déjà un nombre assez considérable d'enfants qui auraient eu droit à l'école anglaise et qui allaient à l'école française. Ce qu'il serait intéressant de savoir c'est s'il y en a qui, pour ne pas perdre leur droit à l'école anglaise, ont demandé de retourner à l'école anglaise?

M. Morin (Sauvé): II y a toujours eu des phénomènes de transfert linguistique, aussi bien des francophones qui réclamaient le droit d'aller à l'école anglaise ou vice versa, des anglophones dont les parents décidaient de les inscrire à l'école française. Si vous voulez bien considérer le tableau 2 de la page 14, je crois qu'on vous l'a fait distribuer également, vous allez avoir un aperçu des transferts linguistiques entre le 30 septembre 1976 et le 30 septembre 1977. Nous n'avons pas de chiffres plus récents que ceux-là.

M. Paquette: Si M. le ministre le permet, dans la loi 101, sauf erreur... Parce que vous évoquiez le cas de l'enfant irlandais qui aurait pu transférer du côté anglais pour ne pas perdre ses droits à l'école anglaise pour ses descendants, sauf erreur, il y a un article dans la loi 101 qui fait en sorte qu'une personne qui a droit à l'accès à l'école anglaise ne perd pas son droit si elle fréquente l'école française. Je pense que c'est un des articles, je ne me souviens plus lequel.

M. Morin (Sauvé): C'est juste, de façon à favoriser le plus possible le passage à l'école française, oui.

M. Paquette: On a prévu cette réaction possible dans la loi 101.

Mme Lavoie-Roux: On se demandait pendant combien de générations ils pouvaient retourner demander leurs droits, vous vous souvenez?

M. Paquette: Oui, c'est ça.

M. Saint-Germain: Malheureusement, c'est un article qui n'est pas connu de la masse des gens. J'ai eu souvent à expliquer, dans mon milieu, la portée de cet article et le droit que ça pouvait donner aux descendants de ces enfants de retourner à l'école anglaise si bon leur semblait. Je crois que c'est un article qu'on devrait mettre en évidence, surtout chez les minorités.

M. Paquette: Oui.

M. Saint-Germain: Parce qu'il ne faut pas se cacher que, bien avant l'application de la loi 101, il y avait déjà une amorce, il y avait beaucoup d'anglophones qui envoyaient leurs enfants à l'école française et que ce nombre était ascendant. Je crois que, pour cette minorité de gens, la loi 101 a créé un traumatisme tel que beaucoup ont retiré leurs enfants de l'école française pour les retourner à l'école anglaise.

M. Paquette: Les chiffres démentent cette assertion.

M. Morin (Sauvé): Écoutez, je vais prendre ça sous toute réserve...

M. Saint-Germain: Oui, oui.

M. Morin (Sauvé): ... je ne crois pas que ce soit tout à fait le cas, il y a tout de même 3712 transferts de l'anglais au français, dont 2088 dans le centre de Montréal. N'est-ce pas?

M. Saint-Germain: Mais ce n'est pas facile d'établir des statistiques là-dessus...

M. Morin (Sauvé): Non.

M. Saint-Germain: ... ou de faire des observations là-dessus.

M. Morin (Sauvé): C'est convenu et c'est pour ça que je vous donne les tableaux dans l'état où nous les avons. Mais je ne suis pas prêt à accepter l'idée qu'en raison de la charte, il y a moins d'anglophones dans les écoles françaises du Québec.

M. Saint-Germain: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai simplement voulu dire qu'il y avait des gens qui avaient un droit strict d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise, mais qui envoyaient tout de même ces enfants à l'école française.

M. Morin (Sauvé): Oui, mais en raison du fait qu'ils...

M. Saint-Germain: Tandis que les chiffres que vous nous donnez...

M. Morin (Sauvé): ... ne perdent pas leurs droits, je crois qu'il y en a beaucoup qui le font, parce qu'ils se rendent compte que le Québec, désormais, va être français et qu'ils en tirent les conséquences.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je crois que, pour répondre d'une façon tout à fait correcte à ces questions, il faudrait quand même connaître l'origine de ces enfants qui ont demandé leur transfert, soit d'un côté, soit de l'autre. Cela, vous ne l'avez pas. Je crois que c'est la seule réponse qui pourrait vraiment nous dire si cela a influencé ou si ça n'a pas influencé, si on veut aller dans les détails.

M. Morin (Sauvé): Écoutez, je constate tout de même ce que je vous démontrais tout à l'heure; à la lecture du tableau 4, il y a, à l'école française, 3825 enfants qui auraient le droit d'aller à l'école anglaise.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais il y avait au moins ça avant, sinon davantage.

M. Morin (Sauvé): Je n'ai pas les tableaux...

Mme Lavoie-Roux: C'est ça, on ne peut pas faire d'études.

M. Morin (Sauvé): ... pour le démontrer parce qu'auparavant, il n'y avait pas de système d'admissibilité à l'école anglaise, tel que nous l'avons mis en oeuvre dans la Charte de la langue française. Avant, c'étaient les tests linguistiques qui étaient un peu comme une passoire.

Mme Lavoie-Roux: Je comprends que le ministre en profite pour décocher une flèche. Mais je pense...

M. Morin (Sauvé): J'ai tout un carquois, si ça vous intéresse.

Mme Lavoie-Roux: Oui, cela, je le sais. Mais il reste quand même qu'il y a des endroits où ce serait possible de vérifier. Je nomme cette commission scolaire parce qu'elle a ces statistiques; la CECM les avait quant aux langues d'origine. Alors, au moins pour ce secteur, la CECM, on pourrait savoir s'il y a eu une évolution quant à cette population anglaise qui est passée du secteur français à l'anglais, ou vice versa. Il y avait quelques milliers d'enfants. Comme on parle de 3825 pour l'ensemble des commissions scolaires, je pense que, déjà, on pourrait avoir une indication.

M. Morin (Sauvé): Mme le député, je vais faire faire une recherche, je ne dis pas qu'elle pourrait aboutir à temps pour cette commission parlementaire, mais, aussitôt que j'aurai les chiffres, dans le sens que vous indiquez, au cours des semaines qui viennent, je vous les ferai communiquer.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Si vous voulez, on pourra en parler en Chambre, à l'occasion de la période des questions.

M. Le Moignan: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, au moment où j'avais été interrompu sur la question du droit de parole au député de Rosemont, on m'avait dit qu'on n'avait pas terminé du côté du parti libéral.

M. Le Moignan: J'avais seulement une question additionnelle.

Le Président (M. Jolivet): D'accord.

Mme Lavoie-Roux: ... questions qui viennent.

M. Le Moignan: Non, c'est une question additionnelle. Parce qu'on vient de regarder le tableau 2 et, quand on mentionne les transferts linguistiques du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, j'ai bien l'impression que ça concerne la Gaspésie presque exclusivement. Je vois que vous avez: transferts de l'anglais au français, ce qui donne 34 élèves et peut-être ce qui est plus surprenant, du français à l'anglais, 46 élèves. Est-ce que ce seraient les Irlandais — ce sont surtout les Irlandais chez nous — qui, à cause de leur droit à l'école anglaise, seraient revenus au secteur anglais, après avoir commencé au secteur français? (11 heures)

M. Morin (Sauvé): II est possible que ce soient des cas d'enfants appartenant à des familles où le père est d'une langue et la mère de l'autre. De toute façon, on peut dire avec certitude que ces 46 enfants ont le droit d'être à l'école anglaise. Donc, ils sont peut-être de mariages mixtes, comme on dit quelquefois.

M. Le Moignan: Je vois plus loin. Dans votre dernier tableau, pour le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, il n'y a aucun problème, parce que c'est zéro sur toute la ligne. Cela veut dire que ces enfants sont dans la légitimité.

M. Morin (Sauvé): Vous pouvez tenir pour acquis qu'ils y ont droit, parce que, dans cette région, il n'y a eu aucune difficulté d'application de la Charte de la langue française, aucune. Il se peut aussi que ce soient des enfants dont le frère ou la soeur aînés se trouvaient déjà à l'école anglaise et qui, de ce fait, se sont vus reconnaître par la charte le droit d'y aller eux aussi.

M. Le Moignan: II y avait eu quatre ou cinq cas, mais je crois que c'étaient plutôt des erreurs, parce qu'on avait envoyé des questionnaires à des parents qui étaient surtout anglophones, pour essayer de modifier leur raison d'être à l'école anglaise. J'en avais dit un petit mot l'automne dernier et cela s'est réglé automatiquement. C'est plutôt une erreur de parcours.

M. Morin (Sauvé): Oui. Maintenant, je voudrais ajouter un commentaire là-dessus, puisque l'occasion m'en est donnée. Vous savez que le gouvernement, dans le souci de ne pas diviser les familles, avait reconnu aux enfants ayant un frère, une soeur aînés, à l'école anglaise, le droit d'aller à la même école.

Pendant quelques années, cela signifie que plusieurs enfants vont aller à l'école anglaise. Nous avons voulu, de ce côté, ouvrir une porte que la loi 22 avait fermée, à notre sens, d'une façon qui ne tenait pas compte de l'unité familiale.

Nous avons voulu respecter l'unité familiale et nous savions que cela coûterait, au secteur français, quelques centaines, sinon quelques milliers d'enfants.

M. Le Moignan: C'est temporaire, de toute façon.

M. Morin (Sauvé): Mais c'est très temporaire, parce que, éventuellement, ces frères et soeurs aînés vont sortir du système et cette exception va tendre à diminuer d'année en année.

Mme Lavoie-Roux: ... pour leurs descendants.

M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement, ils l'auront acquis pour leurs descendants. Est-ce que Mme le député...

Mme Lavoie-Roux: J'étais pour cette mesure, je l'ai prônée, alors, vous n'avez pas besoin de poser la question, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Vous êtes d'accord avec cette mesure?

Mme Lavoie-Roux: Tout à fait. M. Morin (Sauvé): Bon.

Mme Lavoie-Roux: Mais je voudrais vous poser une question sur les 4772 enfants du tableau 3. Il pourrait être fort intéressant si on pouvait également savoir d'où viennent ces enfants, peut-être dans le sens de leur commission scolaire et dans le sens de leur langue maternelle.

M. Morin (Sauvé): Vous voulez dire ceux qui peuvent invoquer la scolarité antérieure?

Mme Lavoie-Roux: La scolarité antérieure des parents. 4772 est un nombre quand même assez considérable.

M. Morin (Sauvé): Cela ne me paraît pas un nombre considérable au point qu'on doive se poser des questions. Je pense qu'il y a tout simplement beaucoup de parents...

Mme Lavoie-Roux: II serait intéressant de savoir la langue maternelle de ces enfants.

M. Morin (Sauvé): Je comprends. Nous allons également faire faire cette recherche, Mme le député, et je vous en communiquerai les résultats aussitôt que possible.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, c'était consécutif à des remarques du député de Jacques-Cartier qui essayait de faire croire que la rentrée scolaire avait été tumultueuse. C'était d'ailleurs une prédiction que lui et ses collègues nous avaient faite l'été

dernier, lorsque nous étions en train d'étudier la loi 101...

M. Saint-Germain: Excusez-moi, M. le Président. Vous déformez mes paroles. Je n'ai pas dit que la rentrée scolaire avait été tumultueuse. Je n'ai jamais dit cela.

M. Paquette: Vous avez dit qu'il y avait eu énormément de problèmes. Vous n'avez peut-être pas utilisé le mot "tumultueux ", mais vous avez dit qu'il y avait eu énormément de tension.

M. Saint-Germain: II y en a beaucoup qui n'ont pas protesté, ils ont fouté le camp. Ils n'ont pas créé de problèmes à la rentrée scolaire, ils n'étaient plus là.

M. Paquette: On n'embarquera pas dans ce sujet, mais il y a moins de gens qui ont quitté le Québec l'an dernier qu'en 1970. On nous disait que c'était à cause des événements d'octobre. Heureusement qu'il y avait les événements d'octobre, en 1970, pour servir de prétexte. Cela m'étonnerait beaucoup que 77 000 Québécois aient quitté le Québec à cause des événements d'octobre, en 1970.

M. Alfred: ... Pierre-Elliott Trudeau.

M. Paquette:... Je pense qu'on essaie de faire flèche de tout bois. Je voudrais avoir des chiffres. J'ai posé la question, en Chambre, au ministre et il n'avait pas tous les éléments, à ce moment-là, il y a quelques mois. Peut-être les a-t-il maintenant.

Je constate, au tableau III, que nous avons un total de 2137 enfants qui sont considérés comme inadmissibles à l'enseignement en anglais, suivant différents critères. A-t-on le nombre total d'enfants jugés inadmissibles à l'enseignement en anglais et qui reçoivent l'enseignement en anglais? Comment ce chiffre, pour cette année, se compare-t-il avec la première et la seule année d'application de la loi 22?

M. Morin (Sauvé): Je dois d'abord vous dire que ce chiffre de 2137 inadmissibles résulte de la démarche qui consiste à se pencher sur le dossier de ceux qui font une demande. Il se peut et, de fait, nous savons qu'il en existe d'autres qui n'ont pas fait la démarche de se faire... Non, je regrette, ce n'est pas quelques milliers, Mme le député, quelques centaines, mais pas quelques milliers. Il ne faudrait tout de même pas essayer de dramatiser les problèmes en les décuplant. Il y a sans doute...

Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous nous assurer qu'il n'y a pas plus de 1000 enfants au PSBGM et moins de 1000 à la CECM qui ont illégalement dans les écoles?

M. Morin (Sauvé): II n'y en a pas 1000, d'après les chiffres que je connais à l'heure actuelle et qui me viennent de la CECM, que j'estime être des chiffres assez fiables.

Mme Lavoie-Roux: II y en a combien, M. le ministre?

M. Morin (Sauvé): Je peux vous sortir le chiffre, mais cela ne dépasse pas 1000, à ma connaissance.

Mme Lavoie-Roux: Au PSBGM, il y en a combien? Dans les écoles privées ethniques, il y en a combien?

M. Morin (Sauvé): Un instant! Voulez-vous, nous allons procéder par ordre. À la CECM, cette commission scolaire a fait un recensement assez étroit, une vérification de la situation qui nous paraît valable somme toute. La CECM nous apprend qu'il y aurait 873 élèves qui se trouveraient illégalement dans ses écoles.

Mme Lavoie-Roux: Ceux-là, M. le ministre, je vous le ferai remarquer, sont ceux qu'elle a pu identifier. Il y a ceux qu'elle n'est pas capable d'identifier. Mais même en prenant vos 873, cela fait déjà... C'est seulement pour la CECM. Parlons du PSBGM maintenant.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je tiens à rectifier les propos du député qui voudrait laisser entendre qu'il existerait, comme cela, des milliers d'enfants illégalement inscrits à la CECM. La CECM nous dit que ce chiffre est fiable et quelle avait les moyens de vérifier exactement combien il s'en trouvait. À moins qu'elle ne veuille mettre en doute la bonne foi de son ancienne commission scolaire...

Mme Lavoie-Roux: C'est toujours l'argument de force du ministre.

M. Morin (Sauvé): II faut se brancher.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, alors, donnez-nous les chiffres du PSBGM maintenant.

M. Morin (Sauvé): Maintenant, pour le PSBGM, nous allons vous sortir les chiffres dans un instant. Au PSBGM, nous avons, au ministère, selon nos propres chiffres, dénombré 900 enfants illégalement inscrits à l'école protestante anglaise. Il se peut cependant que ce chiffre atteigne 1500.

Mme Lavoie-Roux: Nous sommes rendus à 2400, M. le ministre, cela fait quelques milliers et non pas quelques centaines.

M. Morin (Sauvé): Non, je regrette infiniment, là, vous prenez...

Mme Lavoie-Roux: 2400!

M. Morin (Sauvé): Un instant! Il faut bien s'entendre. Vous laissiez entendre tout à l'heure que c'étaient des chiffres absolument faramineux.

Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, absolument pas.

M. Morin (Sauvé): M. le Président...

Mme Lavoie-Roux: Vous êtes rendu à 2400, et ceux des écoles privées ethniques, M. le ministre?

M. Morin (Sauvé): L'ensemble des écoles privées ethniques s'est conformé à la loi 101. Il n'y en a qu'une qui est un collège des Cantons de l'Est dont j'oublie le nom, Stanstead College, qui a décidé de ne plus accepter les subventions gouvernementales et qui, de ce fait, les a perdues. Mais je tiens à le dire, les écoles privées se sont conformées non seulement au processus, mais à la loi, de sorte que, M. le Président, ces commissions scolaires, tant le BEPGM que la CECM se verront privées, comme le gouvernement l'a annoncé — notre politique n'a pas changé là-dessus — des subventions per capita qui sont prévues pour l'enseignement primaire et secondaire. C'est la sanction que nous avions décidé d'imposer dès le début et nous allons nous en tenir à cette politique. Si mes collègues du Parti libéral me recommandent d'utiliser des moyens plus draconiens, j'examinerai la chose, sûrement. J'ai hâte d'entendre ce qu'ils ont à me suggérer sur la question, parce qu'au temps de la loi 22, cela n'a pas été très brillant.

M. Saint-Germain: Combien y avait-il d'enfants, au temps de la loi 22, qui étaient illégalement dans le réseau anglais?

M. Morin (Sauvé): J'allais dire que si je voulais parler de la façon dont s'exprimait tout à l'heure le député, je dirais comme cela: Quelques milliers. En réalité, c'est plutôt quelques centaines. Le chiffre...

Mme Lavoie-Roux: II y en avait beaucoup moins, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): ... je tiens à vous le dire également, est aussi incertain que ceux que nous pouvons vous donner parce...

Mme Lavoie-Roux: Alors, même...

M. Morin (Sauvé):... qu'il y a eu, là aussi, des gens qui ne se sont pas soumis aux tests. Il y a des gens qui se trouvent dans les écoles anglaises, et qui s'y trouvent illégalement, en vertu de l'application de la loi 22 ou à l'encontre de l'application de la loi 22. On n'a jamais su le nombre exact.

M. Saint-Germain: C'était beaucoup...

M. Morin (Sauvé): Nous en avons une idée.

M. Saint-Germain: ... plus bas que le nombre des élèves qui sont là illégalement aujourd'hui, croyez-moi!

M. Morin (Sauvé): C'est plusieurs centaines tout de même. Si vous avez des suggestions à me faire sur la façon dont on devrait procéder, encore une fois, je les attends avec beaucoup d'intérêt.

M. Saint-Germain: Vous ne pensez pas qu'on va vous demander, M. le ministre, de sortir de force les enfants des écoles. Vous perdez votre temps. Je pense qu'on est assez civilisés dans cette province pour ne pas aller jusque-là.

M. Morin (Sauvé): Ah! Je suis heureux de vous l'entendre dire!

M. Saint-Germain: II faudrait tout de même que le gouvernement adopte des lois qu'il peut appliquer. Il ne serait pas dans la situation aujourd'hui où, sciemment, des gens posent des actes illégaux et où vous jouer un rôle extrêmement passif en les regardant aller. C'est un précédent dangereux.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ne voudrais pas laisser passer des propos aussi irresponsables. Le gouvernement ne laisse pas passer. Le gouvernement, au contraire, fait tout ce qui est en son pouvoir pour maintenir le contact avec le BEPGM et avec la CECM pour tenter de trouver des solutions et pour tenter d'amener les intéressés à accepter cette loi et à s'y conformer. Il n'y a pas si longtemps encore, j'ai rencontré les gens du BEPGM pour m'entretenir avec eux de la possibilité, justement, d'avoir recours aux classes d'accueil, pour m'entretenir avec eux de la possibilité de développer le secteur protestant francophone. Je puis vous dire — ce n'est pas un secret puisque cela a été déclaré officiellement, cela a même fait l'objet de résolutions de la part du BEPGM — que leur attitude a évolué et que, maintenant, peu à peu, progressivement, comme nous l'avions prévu, ils songent à appliquer les dispositions de la Charte de la langue française. C'était évidemment, une grande transformation. Nous savions d'avance qu'il y aurait quelques difficultés d'application, puisque nous avions sous les yeux les difficultés d'application de la loi 22. Nous savions qu'il y avait eu des désobéissances à la loi 22. Nous savions que le gouvernement antérieur n'avait pu remédier à cet état de choses, mais, néanmoins, nous pensions que ce grand changement devait être fait, que la charte devait faire en sorte qu'un plus grand nombre d'enfants aillent à l'école française, et surtout, il fallait absolument mettre fin au système vraiment odieux des tests linguistiques. N'oubliez pas que c'était le principal objet de la Charte de la langue française.

Mme Lavoie-Roux: Alors que vous avez continué à les appliquer après que vous êtes arrivés au pouvoir et que vous n'étiez pas obligés de les appliquer, c'est bien beau de jouer le vertueux pour faire de la politique.

M. Morin (Sauvé): Je ne laisserai pas passer non plus ce genre d'assertions.

Mme Lavoie-Roux: C'est ce qui s'est passé quand vous avez fait votre déclaration en décembre 1976, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Quand on est un gouvernement responsable, on applique la loi jusqu'à ce qu'on l'ait changée. J'ai bien dit, à ce moment, Mme le député s'en souviendra, que, tant que la loi 22 serait en vigueur, le gouvernement n'avait pas d'autre choix que celui de l'appliquer, mais qu'il fallait la changer au plus tôt. Vous avez tout fait pour essayer d'empêcher qu'on s'éloigne de ces tests linguistiques. Alors, ne venez pas, aujourd'hui, jouer les vertueuses. (11 h 15)

M. Saint-Germain: II n'est pas...

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, M. le Président, ce que je voudrais faire remarquer, et de la façon la plus calme possible, c'est que légiférer dans le domaine de la langue d'enseignement, ça demeure extrêmement difficile...

M. Morin (Sauvé): C'est vrai, oui.

Mme Lavoie-Roux: Extrêmement difficile...

M. Paquette: Dans tous les pays c'est comme ça.

Mme Lavoie-Roux: ... et, que ce soit la loi 22... On pourrait se chicaner; il est évident qu'il y a eu moins d'enfants illégaux dans les écoles sous la loi 22 que sous la loi 101, mais ça m'importe peu.

M. Morin (Sauvé): Bien! Il y a eu moins...

Mme Lavoie-Roux: La chose importante, c'est que je pense qu'il aurait fallu — ça, je l'ai dit au moment de la loi 22, je l'ai dit au moment de la loi 101 — c'est qu'il fallait, pour les personnes qui étaient déjà ici, au Québec, et qui étaient venues sous d'autres conditions, des mesures de transition les plus souples possible, justement pour ne pas créer ce genre de résistance qui, finalement, a aliéné des groupes ethniques qui s'étaient, à maints égards, bien intégrés au Québec. Cela, c'est une constatation qui vaut tant pour la loi 22 que pour la loi 101. Je pense que les chiffres que nous avons devant nous prouvent, de toute évidence, que ça demeure une situation difficile. Je pense surtout aux enfants qui — je comprends que c'est la volonté de leurs parents et le choix de leurs parents — finalement, sont dans les écoles catalogués comme des illégaux. Je trouve ça vraiment malheureux pour les enfants.

M. Paquette: Mais Mme le député va peut-être admettre avec moi...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Paquette: ... que la cause peut-être la plus déterminante qui a influé sur ce nombre d'illégaux est le battage publicitaire qu'il y a eu pendant toute la période où on a débattu la loi 101. Quand on traite dans les journaux, dans les assemblées un gouvernement d'ethnocentriste, de discriminatoire, de raciste, il y a des gens qui le croient et qui se disent: Nous avons le droit de ne pas obéir aux lois que vote un tel gouvernement. Moi, je pense que l'essentiel...

M. Morin (Sauvé): II y a des membres du Parti liberal...

M. Paquette: ... du problème vient de là, et les membres du Parti libéral y ont contribué pour beaucoup.

Mme Lavoie-Roux: Je regrette...

M. Paquette: J'ai fait beaucoup d'assemblées dans l'ouest de Montréal...

Mme Lavoie-Roux: Je regrette...

M. Paquette: ... et je pense que je peux être sûr de mon affirmation...

Mme Lavoie-Roux: Mais j'avais la parole, quand même!

M. Paquette: Non, c'est moi qui avais la parole. Je vous avais laissé continuer, mais j'étais en train de poser des questions au ministre.

Mme Lavoie-Roux: Bien non, cela n'avait pas...

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Il a raison. La parole était au député...

M. Paquette: C'est moi qui ai demandé les statistiques... J'ai demandé qu'on compare les effets de la loi 22 avec ceux de la loi 101 pour qu'on ait les chiffres sur la table et qu'on arrête de...

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est exact. C'est vous qui aviez posé cette question, c'est vrai.

Mais je regrette et je pense que dans tous mes propos... Et j'aimerais que vous relisiez, par exemple, mes derniers discours de la troisième lecture ou j'ai fait appel aux membres de groupes ethniques...

M. Paquette: Je suis bien prêt à le reconnaître et ma remarque ne vous visait aucunement.

Mme Lavoie-Roux: ... et même vous disiez que parmi mes collègues, des gens avaient incité à la désobéissance, je voudrais bien... Moi, de mémoire, je ne me souviens pas. Si vous avez des preuves, je voudrais bien que vous les apportiez et...

M. Paquette: On peut vous tirer des...

Mme Lavoie-Roux: ...je ne pense pas qu'aucun de mes collègues ait incité...

M. Paquette: Je peux vous trouver des citations.

Mme Lavoie-Roux: ... la population à la désobéissance, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Je n'ai pas dit que certains de vos collègues avaient incité à la désobéissance. Je pense que je pourrais trouver des déclarations d'un ou deux de vos collègues à ce sujet. Ce n'est pas là-dessus que je veux insister. Je veux insister sur le climat qui a été créé au sein des minorités ethniques et dans la communauté anglophone, volontairement, parce qu'on est dans un combat politique sur l'avenir du Québec et votre parti veut avoir de son côté toutes les forces possibles. C'était, d'ailleurs, la raison du "filibuster" qu'on a eu sur la loi 101, c'est-à-dire de faire pourrir la situation le plus possible...

Mme Lavoie-Roux: Je regrette, M. le ministre, mais quand vous voyez que même le premier ministre, il y a deux jours, à Toronto, reconnaît qu'il faudrait des assouplissements, par exemple, dans I'affichage des groupes culturels, et ce même si la loi ne le prévoit pas — c'est ce qu'il vient de donner, il y a deux jours, en réponse à M. Burton, à Toronto — c'est qu'il y en avait des éléments de la loi 101 qui étaient discriminatoires, qui étaient trop rigides et qui étaient exagérés. C'est ça qu'on a combattu et si on avait à le refaire, je le referais, M. le Président.

Une voix: Lesquels?

M. Paquette: Mme Lavoie-Roux, on est en train de...

Mme Lavoie-Roux: Oui, de faire un autre débat...

M. Paquette: Mme le député de L'Acadie, on est en train de déterrer de vieilles choses...

Mme Lavoie-Roux: Bien oui.

M. Paquette: ... mais je me souviens vous avoir entendue, à la commission, nous dire que le critère de l'accès à l'école anglaise était discriminatoire. Je reconnais que vos collègues ont fait bien pire, dans certaines assemblées, dans le West Island, en traitant le gouvernement de raciste à l'occasion.

Dès le lendemain, la Commission des droits de la personne venait apporter un démenti formel à vos propos en disant: Ce n'est justement pas un critère discriminatoire, parce qu'il n'est pas basé sur des considérations ethniques. Nulle part, dans la loi. y a-t-il des éléments basés sur des considérations ethniques. On parle de francisation, on ne parle pas de promotion des francophones dans les entreprises, parce qu'on ne voulait pas avoir à définir francophone, on ne voulait pas avoir à examiner l'origine ethnique des gens et, pour cette raison, on a même accepté d'avoir une loi un peu moins efficace qu'elle aurait pu l'être, parce qu'on ne voulait pas entrer dans un processus qui aurait pu conduire certains fonctionnaires à faire de la discrimination. La Commission des droits de la personne nous a donné raison là-dessus.

Quant aux critiques de M. Burton sur l'affichage ou la publication de livres en anglais, je pense qu'on a cherché toutes les petites bêtes noires dans la loi. C'était évident, dans l'intention du gouvernement, qu'on n'allait pas empêcher la publication de volumes en anglais au Québec, ni la publicité de ces volumes en anglais; la meilleure preuve, c'est qu'on a fait des tas d'exceptions pour l'utilisation de l'anglais dans les hôpitaux anglophones, pour l'utilisation de l'anglais dans les messages publicitaires des journaux et des media anglophones. On aurait pu, si on avait été honnête, en déduire que, pour les livres, dans les librairies, ce serait la même chose, même si ce n'était pas écrit explicitement. Dans une loi, on ne peut pas penser à tout; dès qu'on nous a signalé la chose, le premier ministre a dit: Bien sûr qu'on peut publier des livres en anglais.

Mme Lavoie-Roux: On vous l'avait signalé au moment de l'étude du projet de loi 101, mais vous ne sembliez pas avoir d'oreille là-dessus. Il ne faut quand même pas reprendre...

M. Paquette: Je ne me souviens pas de cela, Mme le député, j'aimerais que vous me citiez le journal des Débats à ce sujet.

Mme Lavoie-Roux: ... le débat de la loi 101 à ce moment-ci, parce qu'on pourrait aller bien loin. D'ailleurs, vous venez d'avoir un avis, il n'y a pas tellement longtemps. C'est la Commission des droits de la personne qui parle justement de l'intolérance des directives du ministre des Transports à l'égard des occasionnels et veut prévoir des périodes de transition; cela a été déposé en Chambre il y a quelques jours.

M. Paquette: Je l'ai lu et on n'y parle pas de l'intolérance du ministre des Transports. On ne dit pas, non plus, que cette mesure était contradictoire à la Charte des droits et libertés de la personne, on dit que le ministre devrait faire preuve de souplesse envers les travailleurs qui ne parlent pas français. Je pense que c'est une nuance qu'il faut apporter.

Mme Lavoie-Roux: De toute façon, la population vous a jugés pour votre loi 101 et elle vous jugera de nouveau aux prochaines élections.

M. Paquette: La grande majorité de la population est d'accord avec la loi 101, malgré le battage publicitaire que le Parti libéral et d'autres aussi ont fait dans l'ouest de l'île de Montréal qui, à mon avis, est la cause principale du grand nombre de personnes qui sont illégalement à l'école anglaise actuellement. C'est le climat qui a été créé à ce moment.

M. Saint-Germain: M. le Président, sur le même sujet, si vous me le permettez.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député, je ne voudrais pas qu'on interrompe, depuis tout à l'heure que j'essaie de suivre; je comprends qu'il y a une très grande souplesse qui a été accordée à la commission, mais je pense qu'on devrait permettre au député de pouvoir poursuivre son droit de parole. Vous pouvez lui poser des questions, s'il le permet.

M. Paquette: Que voulez-vous faire? Vous voulez intervenir?

M. Saint-Germain: Oui, 30 secondes...

M. Paquette: J'ai attendu patiemment que vous parliez tantôt.

M. Saint-Germain: Juste sur le sujet que vous venez de discuter. Vous voulez parler de déclarations malheureuses, il faudrait relever tout ce qui a été dit lors de l'étude du projet de loi 63, ce qui aété dit lors de l'étude du projet de loi 62...

Mme Lavoie-Roux: Parlez donc de ce que vous avez fait lors de la loi 22, quand vous étiez dans l'Opposition.

M. Saint-Germain: De tout ce qui s'est dit, de toutes les accusations qui ont été portées.

M. Paquette: On n'a jamais traité le Parti libéral de raciste.

M. Saint-Germain: À ce point de vue... M. Alfred: ... de raciste.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont, vous avez encore la parole pour un bout de temps.

M. Paquette: Oui, M. le Président, j'avais d'autres questions sur le sujet de la répartition de la population scolaire, suivant la langue d'enseignement. Je me réfère au tableau à la page A-07, on retrouve là des statistiques sur la répartition de la clientèle. Est-il exact que, jusqu'en 1975, suite à la dénatalité — parce qu'on n'a pas les chiffres antérieurs, mais, si mes souvenirs sont exacts — le secteur anglophone était en décroissance moins rapide que le secteur francophone. Je constate qu'en 1976-1977, sous l'empire de la loi 22, c'est à peu près la même chose. En 1977-1978, on constate une diminution de 6,5%. Je voulais faire la remarque suivante. Encore une fois, on a fait un battage publicitaire, en particulier dans les journaux anglophones, selon lequel la communauté anglophone était en train de disparaître. On constate qu'il y a 206 000 enfants dans le secteur anglais et 1 053 000 dans le secteur français, ce qui correspond à peu près à la proportion de la population, c'est-à-dire 83% d'un côté, et 16% de l'autre. Est-ce qu'on a les chiffres correspondants pour la région de Montréal?

M. Morin (Sauvé): Je puis vous dire que jusque vers l'année 1975-1976, la décroissance chez les anglophones était inférieure à la décroissance chez les francophones. La raison en était sûrement l'apport important des immigrants au secteur anglophone qui venait compenser une dénatalité qui frappait aussi durement, sinon même plus durement que du côté francophone. Mais depuis l'année 1976-1977, comme vous le voyez, il y a une évolution inverse. On voit déjà qu'en 1976-1977 la décroissance était légèrement supérieure du côté des anglophones par rapport aux francophones. En 1977-1978, je ne tenterai pas d'expliquer le phénomène, c'est peut-être l'effet de la loi 101, c'est peut-être autre chose, mais je crois qu'il y a une part qui revient à l'application de la charte, la décroissance s'accentue beaucoup plus chez les anglophones que chez les francophones. Nous en sommes maintenant à moins 6,5% du côté anglophone et à moins 4% du côté francophone.

M. Paquette: Je voulais faire remarquer à la commission que c'est peut-être là l'effet de la loi 101. Elle a une certaine efficacité, mais ce n'est pas dramatique encore.

M. Morin (Sauvé): Cependant, je dois dire que...

M. Paquette: On ne peut pas dire que la minorité anglophone est menacée. J'aimerais avoir les chiffres pour la région de Montréal, si vous les avez, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Je ne pense pas que nous les ayons sur place, mais nous pourrions les trouver et vous les communiquer, M. le député. J'ajouterai seulement une chose. Au fur et à mesure que les aînés qui se trouvent déjà dans le système anglophone se résorberont, passeront à travers le système anglophone, et que les élèves ne pourront plus invoquer la présence d'un aîné à l'école anglophone, l'école française bénéficiera de plus en plus, particulièrement pour tous les nouveaux immigrants, de cet apport de clientèle qui avant allait plutôt à l'école anglaise. Donc, on peut penser que l'effet de la Charte de la langue française sera à moyen et à long terme, de freiner la décroissance de l'école française.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, sur cette dernière remarque que les nouveaux immigrants iront dorénavant à l'école française, je pense que là s'ajouteront les immigrants anglophones, mais pour les nouveaux immigrants non anglophones, non francophones, le phénomène d'intégration à l'école française était chose faite depuis la loi 22. D'ailleurs, j'avais apporté des statistiques sur les classes d'accueil de Montréal à cet effet. C'était dans une proportion de 95% si on tient compte qu'il y a des étudiants qui se perdent en cours de route, en ce sens qu'ils quittent l'école, qu'ils s'en vont ailleurs ou qu'ils retournent dans leur pays. Ce qui s'ajoutera, ce seront les immigrants anglo-

phones, parce que déjà les immigrants non anglophones, non francophones, par le truchement des classes d'accueil, étaient intégrés en quasi-totalité aux écoles françaises.

M. Saint-Germain: Ensuite, M. le Président, il faut remarquer aussi que le nombre d'enfants à l'école anglaise a diminué, il ne faut pas se le cacher. Je représente un comté de l'ouest de l'île de Montréal. Les familles anglaises qui ont quitté les lieux, on ne les compte plus. C'est une question de fait. La propriété d'ailleurs a baissé de près de 20% à un moment donné dans cette région, tandis qu'elle se permettait d'augmenter de prix encore dans les régions francisées. C'est cela la vérité. Maintenant, si c'est ce qui plaît au gouvernement, c'est dommage, parce que dans le fond... (11 h 30)

M. Paquette: Qu'est-ce que vous avez dit?

M. Saint-Germain: J'ai dit: Si c'est ça qui plaît au gouvernement, c'est dommage, parce que. dans le tond, lorsqu'il y a une désorganisation sociale à un moment donné, il est nécessairement...

M. Paquette: Si c'est ça que vous racontez dans votre comté, il va y avoir encore plus de départs.

M. Saint-Germain: ... il s'ensuit... M. Paquette: Bien oui.

M. Saint-Germain: ... toujours une désorganisation économique. Ceux qui sont le plus durement frappés par la situation économique actuellement sont des gens de langue française, croyez-moi.

M. Alfred: ... M. le député.

M. Saint-Germain: C'est ça le rationnel dans cette situation, c'est ça le rationnel.

M. Alfred: II n'y en a pas.

M. Saint-Germain: La personne de langue anglaise qui a une formation, une expérience au niveau de l'industrie, ce n'est pas elle qui va être chômeuse, elle a une liberté d'action, elle va gagner sa vie au Québec, en Ontario, même aux États-Unis.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Alfred: J'allais dire, M. le Président, que le Parti libéral du Québec est prêt à sacrifier tous les Québécois francophones pour acheter des votes de la minorité anglophone.

M. Saint-Germain: Ce sont des accusations en l'air. On a fait notre possible et je ne suis pas moins francophone et Canadien français que vous pouvez I'être non plus. Je désire que mes enfants soient de langue française. Mais, écoutez une minute, le nationalisme, cela a une limite. Le bon sens devrait toujours primer.

M. Alfred: Allons donc, allons donc!

M. Saint-Germain: Pensez-vous qu'avec la loi 101, on a sauvé la culture française dans le Québec? C'est de la foutaise.

M. Alfred: Avec vous, par exemple, on ne sauvera pas grand-chose.

M. Saint-Germain: Depuis que j'ai l'âge de raison, on rencontre...

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Saint-Germain: ... à tous les niveaux...

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Saint-Germain: ... des sauveurs de la langue française, voyons donc!

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Saint-Germain: Cela fait longtemps qu'on est sauvé, croyez-moi. Je n'ai pas ces complexes d'avoir peur de perdre ma langue tous les jours et tous les mois.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jacques-Cartier, je vous demande, s'il vous plaît, de respecter le droit de parole.

M. Saint-Germain: Enfin, qu'il parle avec sens.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau, avez-vous terminé?

M. Alfred: J'ai terminé devant l'envolée de M. le député de quelque part.

M. Saint-Germain: Ne me donnez pas de leçon sur la façon d'être Canadien français, je n'accepte pas ça.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, voulez-vous, nous allons revenir aux chiffres. Ce sont quand même les chiffres qui permettent de se faire une idée plus exacte de la réalité et je dirais plus nuancée. On pourrait peut-être terminer justement sur des nuances, puisque toute cette question doit être traitée de la façon la plus objective possible. Tout à I'heure, nous disions qu'il y avait eu une décroissance de 6,5% dans le réseau anglophone. C'est intéressant de comparer cela avec la décroissance dans la population globale. Si vous me permettez, je vais constater qu'en 1977, par rapport à 1976, la décroissance a été, dans la population, de 0,3% chez les anglophones. C'est loin d'être l'exode massif dont parlait le député de

Jacques-Cartier, 0,3% de moins, tandis que, pour ce qui est du réseau scolaire, elle est de 6,5%.

Il y a donc là un chiffre qui resterait à expliquer, je n'en connais pas toutes les composantes, tous les tenants et aboutissants, mais c'est intéressant de le constater.

M. Paquette: Ce qui signifierait que les départs jouent un rôle mineur dans le déclin de la population.

M. Morin (Sauvé): Je n'en tire pas de conclusion, je livre les chiffres, et chacun en fera ce qu'il voudra. Toujours est-il qu'on constate que la décroissance dans le réseau scolaire anglophone est 24 fois plus élevée que la décroissance dans la population, si je compare 0,3% et 6,5%, c'est à peu près ça.

M. Saint-Germain: Vous admettrez que, même avec le taux de natalité, actuellement, les populations augmentent au Canada et pratiquement dans tout le monde occidental, même encore, si les départs annulent l'augmentation et font qu'on accuse une baisse, c'est qu'ils sont assez nombreux, sur une période très courte. On parle de questions d'un an. On ne parle pas de cinq ans ou de dix ans.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, il serait peut-être bon que je donne encore un ou deux chiffres qui pourront servir de munitions à nos amis libéraux ou peut-être leur permettre, avec nous, de faire certaines nuances.

J'avais un tableau sous les yeux, il y a un instant, qui montrait que, pour ce qui est des enfants qui ont été déclarés admissibles par rapport à ceux qui en ont fait la demande, la proportion, sous l'empire de la loi 22, était de 78,9%, tandis que sous la loi 101, elle est de 79%. Donc, c'est similaire, sans doute parce que nous avons ouvert la porte aux enfants dont le frère et la soeur se trouvaient déjà à l'école anglaise.

Donc, je me répète. Par rapport au nombre de demandes, de dossiers étudiés, la proportion de ceux qui sont déclarés admissibles, en 1976-1977, est de 78,9%, tandis qu'elle est de 79% en 1977-1978 sous l'empire de la loi 101. C'est seulement après quelques années que le redressement majeur amorcé par la loi 101 va faire sentir ses effets, quand ne jouera plus l'exception frère-soeur aîné.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie.

M. Morin (Sauvé): Vous voyez, on est dans les nuances, on n'est pas du tout dans les différences cataclismiques.

Mme Lavoie-Roux: J'aurais un point à préciser et une question à poser. Je pense qu'il faut, Si on veut arriver à des conclusions qui soient rationnelles — je suis bien d'accord que les statistiques soient examinées, qu'on les interprète de différentes façons — il y a le 0,3% de la soi- disant diminution de la population anglophone, avec la diminution de 6,5%, dans le réseau scolaire.

Il faudrait quand même se demander, en fonction des statistiques démographiques qui ont été données pour la dernière année, qui montrent un départ de la province de l'ordre — et je le donne approximativement — de 50 000 à 60 000 — il y en a qui ont parlé de 75 000, mais ce sont des chiffres qu'il faudrait vérifier. C'est vrai qu'il y a eu aussi des départs considérables en 1970, probablement suite aux événements d'octobre à ce moment-là. C'est quand même la réalité, que vous le vouliez ou non.

M. Morin (Sauvé): Ce serait intéressant de savoir combien étaient partis avant octobre, parce que c'est plutôt la fin de l'année, octobre.

Mme Lavoie-Roux: La comparaison qu'on a faite, cela a été entre 1970 et 1977. Mais peu importe. Entre ces deux extrêmes, il y a eu une période de progression de la population du Québec, alors que maintenant, cette année, on se retrouve quand même vis-à-vis un déficit net de quelques milliers de personnes. Je pense qu'on a parlé d'un déficit net de 2000 ou 3000. Ce sont des chiffres que je n'ai pas sous la main. Mais il reste que...

M. Paquette: Ce ne serait pas la première fois dans l'histoire du Québec que cela arrive, qu'on ait un solde migratoire négatif.

Mme Lavoie-Roux: Mais c'est dans l'ensemble de la population, n'est-ce pas?

M. Paquette: Oui, dans l'ensemble de la population.

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, peu importe. Cela aussi, il faudrait le vérifier. Mais il reste qu'en fonction de la diminution de 6,5% dans le réseau, avec le 0,3, il faudrait peut-être avoir d'autres explications à ceci.

Les deux questions que je veux poser au ministre sont les suivantes: La première concerne les appels qui ont été interjetés auprès de la Commission d'appel. La deuxième: Quelle est la population que le PSBGM réclame comme étant sa population scolaire pour 1977-1978 et celle que le ministère de l'Éducation lui reconnaît comme étant officiellement sa population.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi d'abord de commenter la question portant sur le nombre d'appels qui ont été présentés à la commission établie en vertu du chapitre 8 de la Charte de la langue française.

Voici les chiffres les plus récents. Ils datent du 23 mai. 765 appels ont été logés, dont 73 ont été retirés, ce qui laisse un solde de 693 appels effectivement déposés devant la commission.

Au 23 mai, 254 dossiers avaient été étudiés. Là-dessus, il y a eu des décisions affirmatives

autorisant l'appel et, bien sûr, des décisions négatives, refusant l'appel. Le total des décisions affirmatives est de 138. Le total des décisions négatives, de 103. Le nombre élevé de décisions affirmatives vient du fait que la commission s'est éloignée du jugement rendu par le juge Deschênes selon lequel la scolarité des parents...

Mme Lavoie-Roux: L'élémentaire.

M. Morin (Sauvé): ... devait s'étendre à l'ensemble des années du niveau primaire, ce qui évidemment explique, pour une bonne part, les 138 élèves qui sont admissibles à l'enseignement en anglais. C'est une question sur laquelle je me penche d'ailleurs à l'heure actuelle, puisque nous considérons que la décision des tribunaux était la bonne, que l'interprétation du juge Deschênes était la bonne. Je dois m'interroger maintenant sur cette différence qu'il y a entre les critères appliqués par le tribunal et les critères appliqués par la commission.

Toutefois, pour l'heure, ces décisions sont sans appel, comme vous le savez, puisque la charte en a décidé ainsi.

Mme le député m'avait également demandé hier — j'en profite pour glisser ces chiffres — combien d'enfants avaient invoqué le règlement relatif aux difficultés d'apprentissage. Le chiffre est de six. Combien y avait-il eu de séjours temporaires? La réponse est sept, de sorte que le total des décisions rendues atteint 254 et il reste 439 dossiers à l'étude au 23 mai.

Naturellement, ces 439 dossiers devraient être réglés au cours de l'été, sûrement pour la rentrée d'automne, au plus tard.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, dans le cas des enfants qui ont des difficultés d'apprentissage, sont-ils obligés de demander une exemption ou est-ce que c'est le jugement de la commission... Cela pourrait peut-être changer les chiffres que vous avez pour l'identification de ces enfants. Je ne me souviens pas de ce que les règlements prévoient.

M. Morin (Sauvé): Ce sont évidemment des professionnels...

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Morin (Sauvé): ... qui nous aident à trancher ces cas qui sont quelquefois très difficiles, parce que, comme vous le savez, il y a difficultés d'apprentissage et difficultés d'apprentissage, de sorte que... Vous avez sûrement pris connaissance du...

Mme Lavoie-Roux: Du règlement.

M. Morin (Sauvé): ... règlement.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas si vous aviez eu des observations à nous faire là-dessus, mais il ne semble pas que le règlement donne naissance à des difficultés. Il faudra toujours s'en remettre aux experts pour trancher ces cas.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Ma question n'était pas dans ce sens-là. D'ailleurs, je l'ai peut-être mal formulée. Les enfants sont-ils, en fait, obligés de demander une exemption ou est-ce que la commission scolaire, qui se trouve devant un enfant où c'est clair qu'il est très handicapé, peut l'accepter automatiquement à l'école anglaise, s'il est de langue maternelle anglaise, quoique vous n'ayez pas retenu ce critère?

M. Morin (Sauvé): Ce que nous craindrions, si seules les commissions scolaires disposaient de ce pouvoir de décider, c'est qu'il y ait des masses d'enfants en difficulté d'apprentissage du jour au lendemain.

Mme Lavoie-Roux: Oui, quand même!

M. Morin (Sauvé): C'est pourquoi nous exigeons qu'il y ait une demande et que les cas soient vérifiés.

Mme Lavoie-Roux: Ah! il y a une demande de faite.

M. Morin (Sauvé): II y a une demande de la part des parents, oui. C'est prévu au règlement. Nous pouvons nous tourner vers le PSBGM.

Sur le même sujet, M. le député?

M. Saint-Germain: Sur le même sujet, s'il vous plaît.

M. Morin (Sauvé): Oui.

M. Saint-Germain: II vous reste encore plusieurs appels qui n'ont pas été étudiés ou dont le jugement n'a pas été rendu.

M. Morin (Sauvé): Je pourrai vous expliquer pourquoi, si vous le désirez.

M. Saint-Germain: Allez-y.

M. Morin (Sauvé): Beaucoup de ces appels portent sur l'interprétation qu'il faut donner à certains documents et, surtout, je pense que beaucoup de dossiers sont incomplets. Je n'ai pas de chiffres, mais on me dit que, règle générale, si les décisions ne sont pas rendues, c'est que la commission d'appel a été obligée de demander un complément d'information. Les pièces étaient incomplètes. Les citoyens intéressés ne s'étaient pas donnés la peine, quelquefois, d'aller chercher les pièces à conviction exigées par l'application de la loi 101.

M. Saint-Germain: En fait, cette année, ces enfants étaient dans le réseau anglais. Ces 765...

M. Morin (Sauvé): Pas nécessairement.

M. Saint-Germain: Mais la grande majorité. (11 h 45)

M. Morin (Sauvé): J'imagine qu'un certain nombre se trouvait dans le réseau anglais, mais il se peut — je n'ai pas de chiffre, il faudrait vérifier la chose — qu'il y ait des enfants qui se trouvent à l'école française, mais dont les parents ont demandé, néanmoins, qu'on reconnaisse leurs droits.

M. Saint-Germain: Les décisions négatives: on entend par "négatives" des décisions qui ne permettent pas à un élève de s'intégrer au réseau de langue anglaise. Qu'est-ce qui est arrivé à ces enfants? Est-ce qu'ils ont changé de réseau?

M. Morin (Sauvé): II est sans doute trop tôt pour répondre à cette question, M. le député, parce que la plupart des décisions sont récentes. Nous n'allions pas, du jour au lendemain, sortir des enfants qui sont en fin d'année scolaire. Je pense bien, d'ailleurs, que ce ne serait pas ce que nous recommanderait le député. Seulement, l'année prochaine, ils devront s'acheminer vers l'école française, puisqu'ils ne sont pas habilités à aller à l'école anglaise, et si, par hasard, ils ne le faisaient pas, bien sûr, il n'y aurait pas de subvention pour ces enfants, ni diplôme éventuellement.

M. Saint-Germain: Ils vont grossir le nombre de ceux qui sont illégalement dans le réseau de langue anglaise.

M. Morin (Sauvé): Je ne le sais pas. Nous n'avons pas de chiffre démontrant où se trouvent ces enfants à l'heure actuelle. Je voudrais ajouter un complément d'information à ce que je viens de dire. Plusieurs des 459 dossiers à l'étude sont des dossiers qui sont arrivés tout récemment à la commission d'appel, parce que vous le savez...

Mme Lavoie-Roux: C'est une interprétation de la commission d'appel, je pense.

M. Morin (Sauvé): C'est bien possible qu'il y en ait quelques-uns qui résultent de l'interprétation de la commission d'appel. Toujours est-il qu'il y a 271 dossiers arrivés récemment devant la commission. J'imagine qu'au cours des années, il va y en avoir comme cela chaque année, au début, quelques centaines. Un bon jour, il n'y en aura plus que quelques dizaines par année.

M. Saint-Germain: Maintenant, au point de vue pédagogique, qu'est-ce qui arrive de ces enfants qui ont débuté en anglais et qui vont terminer leur année en français? Est-ce qu'il n'y a pas des inconvénients qu'on leur crée au point de vue du développement, du succès scolaire?

M. Morin (Sauvé): Non. M. le député, je croyais vous avoir répondu il y a un instant que nous n'allons certainement pas interrompre l'année. D'ailleurs, la plupart de ces décisions sont survenues en fin d'année scolaire. Vous pensez bien que nous n'allions pas exiger que les enfants soient illico transportés dans les écoles françaises.

M. Saint-Germain: C'est entendu, mais au début de l'année prochaine.

M. Morin (Sauvé): Au début de l'année prochaine, s'ils se retrouvent, comme il se doit, dans les écoles françaises et qu'ils ont des difficultés d'apprentissage, il faudra, notamment, élargir les classes d'accueil. Ils pourront, d'ailleurs, rester dans le réseau protestant s'ils le veulent. Il faudra, cependant, augmenter le nombre de classes d'accueil. C'est d'ailleurs ce que le BEPGM nous a proposé récemment et que j'ai accepté, soit dit en passant.

M. Saint-Germain: Oui, mais dans le réseau protestant français ou dans le réseau français catholique, au point de vue pédagogique, c'est le même problème.

M. Morin (Sauvé): C'est le même problème du passage d'une langue à une autre, mais il semble que cela ne pose pas de problème pour les quelques milliers de transferts annuels, dans un sens comme dans l'autre... Donc, ces enfants ne seront pas plus désavantagés que si leurs parents avaient décidé d'eux-mêmes de les mettre à l'école française.

Mme Lavoie-Roux: Ce sont surtout des élèves de première année?

M. Morin (Sauvé): Oui, j'imagine qu'il y a surtout des élèves de première année, mais il peut y en avoir qui étaient des illégaux de la loi 22 et qui se trouvent en deuxième ou en troisième année cette année, n'est-ce pas? Quelques centaines. Pour ces enfants, il y aura, bien sûr, une difficulté, mais elle sera causée, en grande partie, par l'attitude des commissions scolaires et des parents qui, heureusement, en nombre restreint, ont refusé de se conformer à la Charte de la langue française.

M. Saint-Germain: Parce qu'en fin de compte, c'est peut-être là le tort important que l'application de la loi peut faire. Ce sont toujours les enfants qui en subissent les conséquences, ce ne sont pas nécessairement les adultes, mais de toute façon...

M. Morin (Sauvé): C'est pour cette raison que nous sommes prêts à tout faire pour faciliter ce passage à l'école française...

M. Saint-Germain: Dans votre...

M. Morin (Sauvé): ... à moins que le député nous dise qu'il est contre le passage à l'école française, c'est autre chose, mais nous pensons...

M. Saint-Germain: Non, je voulais simplement dire qu'on devrait avoir des lois qui puissent s'appliquer avec assez d'élégance, ou assez de

souplesse pour ne pas créer des difficultés aux enfants. C'est simplement là mon opinion.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que vous pensez que le bureau d'admissibilité ou la commission d'appel n'ont pas été un peu lents à rendre leurs décisions, puisqu'on se retrouvait aux mois de mars et avril avec un grand nombre d'élèves au sujet desquels on ne s'était pas encore prononcé. Ce retard, finalement nuit à l'élève, au bout du compte. Le retard au bureau d'admissibilité, ensuite à la commission d'appel qui doit rendre ses décisions. Le processus est très long...

M. Morin (Sauvé): Ah! Le...

Mme Lavoie-Roux: ... et, finalement, ça pénalise l'élève.

M. Morin (Sauvé): Naturellement, nous avons mis ces organismes en marche durant l'année. La commission d'appel, vous le savez, ne s'est sérieusement mise à l'ouvrage qu'il y a quelques mois et j'estime que, déjà, les choses devraient être nettement améliorées pour l'an prochain, puisqu'elle est en place. Elle a maintenant un mécanisme, elle a un personnel qui connaît le fonctionnement de la loi 101. Je n'hésiterai pas à dire que, dès l'an prochain, et pour les années suivantes, le mécanisme d'appel sera beaucoup plus efficace. Il fallait prévoir que cette année il y aurait des difficultés liées à la mise en marche du système.

Mme Lavoie-Roux: Ça va pour la commission d'appel, mais pour le bureau d'admissibilité, il n'y a eu aucun retard causé par le bureau d'admissibilité?

M. Morin (Sauvé): Ah non! Les seuls retards véritables ont été causés par le manque de coopération du PSBGM.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Bon! Maintenant, M. le Président, on peut se tourner vers une autre question posée par Mme le député de L'Acadie et qui a trait, justement, au PSBGM, ou, comme nous disons en français, au BEPGM.

La clientèle budgétisée au 30 juin 1977, dans la première étape de la démarche qui tend à identifier le nombre d'élèves qui se trouvent dans le système, a été déclarée par le BEPGM comme étant 47 188 élèves.

Mme Lavoie-Roux: Ah!

M. Morin (Sauvé): Par la suite, au 30 septembre 1977, à la deuxième étape prévue dans le déroulement des opérations, la clientèle déclarée a été de 47 211. Naturellement, avec notre souplesse habituelle, nous avons pris ces chiffres comme de l'argent comptant. On nous déclarait que c'était le chiffre; nous avons accepté le chiffre, comme nous le faisons pour toutes les com- missions scolaires, tenant pour acquise la bonne foi intégrale de toutes les parties intéressées.

Or, au 15 mai 1978, le nombre d'élèves régulièrement inscrits, selon les chiffres du ministère de l'Éducation, est de 42 708. Il faut maintenant que je vous donne le détail de cela. Les 42 708 sont constitués de 41 280 élèves déclarés admissibles et de 1428 élèves recevant, au PEBGM, l'enseignement en français...

Mme Lavoie-Roux: Et qui sont aussi admissibles...

M. Morin (Sauvé): ... dont la situation est régulière.

Mme Lavoie-Roux: Qui sont dans une situation normale, c'est ça. Ce qui fait un total de 42 708, d'accord.

M. Morin (Sauvé): Bon! Ajoutons à cela, maintenant, les élèves dont les dossiers paraissent admissibles, mais qui doivent être complétés par la fiche nominale. Le nombre est de 1479. Ajoutons à cela encore les dossiers qui sont en traitement et dont nous ne connaissons pas le sort ultime. Ils sont au nombre de 498.

Mme Lavoie-Roux: Ce qui fait...

M. Morin (Sauvé): Alors! Maintenant, il y a des difficultés qui sont liées à des étudiants intégrés au BEPGM, à la suite d'ententes entre le ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires sociales. Je puis vous dire quel est le chiffre, mais nous ne savons pas s'il se trouve ou non dans les nombres que je vous ai déjà donnés, nous sommes en train de vérifier. Il se pourrait donc que ce chiffre, qui est de 863, fasse partie des 42 708 que je vous donnais tout à l'heure. Il se pourrait qu'une partie s'additionne et qu'une partie ne s'additionne pas. Tant que les recherches ne seront pas effectuées, c'est difficile de le savoir.

Il y a encore 953 élèves déclarés inadmissibles; c'est le chiffre que je vous donnais tout à l'heure. Nous savons que ces élèves n'ont pas le droit d'être au BEPGM.

De sorte que le chiffre de 47 000 était légèrement soufflé et même peut-être beaucoup soufflé. Nous sommes en train de vider cette question avec le BEPGM, de même qu'avec l'aide du CSIM, le Conseil scolaire de l'île de Montréal qui, lui, évidemment veut savoir à quoi s'en tenir, parce que les subventions qu'il doit remettre au BEPGM seront en fonction du nombre d'élèves régulièrement inscrits, de sorte que, avant que nous fermions les livres de nos subventions au CSIM et au BEPGM, au mois de juin ou au mois de juillet, nous allons devoir connaître exactement le nombre d'enfants régulièrement inscrits au BEPGM. Ils connaissent notre attitude là-dessus et je pense qu'on peut s'attendre, de leur part, à une coopération qui a bien tardé à venir, mais qui semble prendre maintenant des chemins plus favorables.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, si je fais l'addition de tous les chiffres que vous m'avez donnés, le PSBGM dit: Nous avons 47 211 élèves. Si je tiens compte de vos... Vous en avez 1479 qui sont probablement admissibles, enfin il faut les qualifier, on ne le sait pas encore, en tout cas, en les additionnant, cela c'est là...

M. Morin (Sauvé): Additionnons-les pour simplifier, je n'ai pas d'objection contre cela.

Mme Lavoie-Roux: Et j'additionne les 498, j'oublie d'où ils viennent...

M. Morin (Sauvé): Oui, mais là, c'est beaucoup plus sujet à caution.

Mme Lavoie-Roux: Bon, plus sujet à caution, alors, c'est plus grave. Je les avais additionnés et j'arrivais à 44 600, je leur donnais tout le bénéfice du doute.

M. Morin (Sauvé): Oui.

Mme Lavoie-Roux: Là, il y a les 800 inadaptés qui sont en suspens. Je ne les ai pas additionnés aux 44 600.

M. Morin (Sauvé): D'accord.

Mme Lavoie-Roux: Mais, comme, d'un autre côté, vous nous dites que les 500 sont très douteux, j'arrive à un total de 44 600 — il se peut que je me sois trompée de quelques unités si quelqu'un m'arrive en me disant que c'est 608 ou même 508 ou 700 — avec une différence de 2811 enfants. J'espère que j'ai bien soustrait, 44 600 de 47 211, qui étaient les chiffres qu'ils déclaraient en septembre 1977. J'arrive avec une différence de 2811 enfants, et j'y ai inclus vos 500 problématiques. De deux choses lune, je vais utiliser votre terme, le PSBGM a fort gonflé ses chiffres — c'est un terme poli — ou il y a beaucoup plus d'illégaux que vous n'en soupçonnez. Vous m'avez dit, tout à l'heure, que peut-être que cela peut aller chercher jusqu a 1500 au PSBGM, parce que je trouve qu'on est rendu à 2811.

M. Morin (Sauvé): Mme le député, avant que vous n'alliez plus loin et que vous ne tentiez d'insinuer que tous ces gens sont illégaux, je dois vous dire que ce n'est pas le cas. D'après les conversations...

Mme Lavoie-Roux: Non, j'ai bien compris les chiffres que vous m'avez donnes comme étant illégaux. (12 heures)

M. Morin (Sauvé): ... ce que nous avons avec le BEPGM, il y en a 1500 à 1600 qui seraient illégaux. Les autres, il s'agit d'erreurs. Il s'agit aussi de concilier le fichier central avec leurs catégories et leurs chiffres, mais il y a probablement un certain nombre d'erreurs administratives, de gens qui figurent sur deux listes. Enfin, il y a certainement des erreurs de type administratif dans leurs calculs. Je n'en tirerai pas d'autres conclusions que celle-là pour l'instant.

Mme Lavoie-Roux: Sauf que pour une population de 47 000, cela fait beaucoup d'erreurs administratrives.

M. Morin (Sauvé): Effectivement, et je vous avoue que de part et d'autre nous nous posons des questions.

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'il faut être très prudent sur les 1500 enfants que vous apportez comme étant les seuls — je déteste le terme "illégaux" pour des enfants — non admissibles.

M. Lacoste: Les commissions scolaires, au mois de mai ou juin, avant la fin de l'année scolaire, ont fait une projection du nombre d'élèves possible. Cela devait être la même chose pour le PSBGM. Quelle a été cette projection?

Mme Lavoie-Roux: On l'a donnée tout à l'heure. C'était...

M. Morin (Sauvé): Je l'ai donnée, 47 188.

Mme Lavoie-Roux: II l'a donnée au début, mais c'était celle de septembre 1977. Cela a été sa déclaration officielle. Les élèves comptés pour lesquels il réclamait des subventions, c'était 47 211. Alors, pour toute cette situation, quand j'ai dit quelques milliers, je n'ai rien à retirer.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Morin (Sauvé): II y a un autre aspect que me signale le sous-ministre. Notre système de contrôle au ministère, nos fichiers, sont de plus en plus complets et nous sommes beaucoup mieux équipés qu'on ne l'était l'an dernier ou il y a deux ans pour effectuer un contrôle de ce qui se passe réellement. De sorte qu'à l'heure actuelle le BEPGM cherche ces enfants-là dans ses écoles.

Mme Lavoie-Roux: II est obligé de les chercher.

M. Morin (Sauvé): II est obligé de les chercher et nous verrons bien s'il les trouvera, mais il se pourrait qu'il y en ait quelques-uns qui n'existent pas.

Mme Lavoie-Roux: II y a une marge d'erreur qui peut être raisonnable dans une grande commission scolaire, mais quand on passe de 42 000 à 47 000, grosso modo, cela fait une marge assez considérable.

M. Morin (Sauvé): Je tiens à dire, à l'éloge de la CECM — cela va certainement faire plaisir à Mme le député de L'Acadie — que la marge d'erreur à la CECM n'est que de 300 à 400.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que sur une population de...

M. Morin (Sauvé): Pour un nombre d'élèves bien supérieur.

Mme Lavoie-Roux: 150. Est-ce que ce sont vraiment des erreurs ou les a-t-on comptés? Enfin, peu importe.

M. Morin (Sauvé): Suspendons la question pour l'instant. On aura sûrement le loisir de s'en reparler quand nous aurons vidé la question avec le BEPGM. Je ne veux pas me lancer dans une diatribe ou prêter des intentions mauvaises à qui que ce soit. Vérifions et ensuite nous pourrons faire des commentaires.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. De toute façon, ce n'est pas mon intention de me lancer dans une diatribe contre lui. Je voulais simplement vérifier si les chiffres que vous avez voulu nous donner des illégaux étaient ceux que, de bonne foi, vous avez voulu nous donner. Il semble qu'ils pourraient être supérieurs à ceux-là. Mais de toute façon...

M. Morin (Sauvé): J'aurais bien pu penser que ce n'est pas au BEPGM que vous cherchiez noise, mais plutôt au gouvernement. J'aurais pu m'en douter.

Mme Lavoie-Roux: Oui, évidemment, c'est normal. Je suis ici pour faire opposition au gouvernement et j'essaie de le faire le mieux possible pour qu'il corrige ce qui doit être corrigé. Je voudrais quand même vous demander... Hier vous nous avez donné des chiffres que je n'ai plus, on les a peut-être ici... Selon ces chiffres, il y avait tant de demandes d'admission à l'école anglaise. C'était de l'ordre de 23 000; en tout cas, peu importe. Un certain nombre a été déclaré admissible et un autre non admissible. Est-ce que tous les non-admissibles qui avaient demandé l'admissibilité à l'école anglaise, vous les retrouvez à l'école française ou il s'en est perdu en cours de route?

M. Morin (Sauvé): Si vous le voulez, nous allons considérer le tableau que je vous ai fait distribuer il y a un instant, qui, malheureusement, n'est pas le plus récent que nous souhaiterions avoir. Il remonte au mois de février et il est intitulé: Statistiques relatives aux enfants déclarés inadmissibles par le BAEA. Vous pourrez constater que sur les 1632 déclarés inadmissibles, 634 recevaient à ce moment l'enseignement en anglais et, 933 n'étaient pas inscrits au fichier du ministère de l'Éducation.

Mme Lavoie-Roux: Ils ne sont nulle part, ceux-là, enfin, on peut se douter où ils sont, mais ils ne sont officiellement nulle part.

M. Morin (Sauvé): On ne le sait pas et c'est pourquoi nous cherchons, à l'heure actuelle, à les identifier.

Mme Lavoie-Roux: C'est ça.

M. Morin (Sauvé): Sous la colonne langue d'enseignement inconnue, vous voyez qu'il y en a 65.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils peuvent être déménagés, ces enfants-là?

M. Morin (Sauvé): Tandis que vous pouvez voir, dans la première colonne...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): ... que 329 élèves déclarés inadmissibles reçoivent l'enseignement en français. Il y en a peut-être d'autres, mais pour l'instant, ce sont les chiffres dont nous sommes certains. Et puis, il y a des dossiers qui, à ce moment-là, étaient à compléter, dont plusieurs l'ont sûrement été depuis lors, au nombre de 16 176. J'imagine que la plupart de ceux-là sont admissibles.

Mme le député, vous m'aviez posé une autre question à laquelle je voudrais répondre qui est celle des cas où j'ai dû, en vertu des pouvoirs que la Charte de la langue française me confère, annuler des décisions prises par la personne désignée par moi pour constater l'admissibilité à l'école anglaise. J'ai dû annuler l'inscription à l'école anglaise de 19 enfants appartenant à 17 familles. Tout simplement parce que les déclarations qui avaient servi de fondement à la décision de la personne désignée étaient erronées ou mensongères. C'est ainsi que certains avaient déclaré être arrivés au Québec avant le 26 août, mais étaient en réalité arrivés après le 26 août, après vérification.

C'est ainsi que certains avaient déclaré qu'ils avaient un frère ou une soeur aîné dans le système alors qu'en réalité, ils n'en avaient pas. Donc, j'ai dû annuler 19 inscriptions. Je ne saurais vous dire exactement si ces enfants se trouvent à l'école française ou à l'école anglaise, à l'heure actuelle. Je le saurai sans doute l'automne prochain.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est quand même pas très considérable.

M. Morin (Sauvé): Non, ce n'est pas considérable, ce n'est pas un chiffre définitif non plus, ce sont les derniers que je possède.

M. Le Moignan: II y a quelques noms d'anglophones, vous ne savez pas s'ils étaient ainsi inscrits avant ou après non plus.

M. Morin (Sauvé): Si on veut bien regarder les noms qui pourraient être qualifiés d'anglophones, il y a Linda Anne Fuller, fille de William Fuller, Tamara Hamilton, dont le prénom pourrait indiquer qu'elle n'est pas d'origine écossaise, David Kanath, peut-être est-ce un anglophone et il y aurait également un cas à Trois-Rivières, celui de

M. Marcel Johnston et un cas dans la région dite Western Quebec, celui de M. Rodney.

M. Le Moignan: Western Quebec, c'est West Island?

M. Morin (Sauvé): C'est la région de l'Outaouais.

Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, je pense que la commission scolaire s'appelle ainsi.

M. le ministre, c'est vraiment une information technique que je vous demande. L'information m'a été demandée quelques fois et je ne le savais pas. Comme l'occasion se présente, j'en profite. Quand vous considérez l'arrivée des parents au Québec, ordinairement, c'est parce que le père change son lieu de travail, et il arrive au Québec, disons, au mois d'août pour commencer à travailler.

Mais, compte tenu des démarches pour prendre possession d'une maison que ces gens ont achetée et que la famille déménage, celle-ci peut arriver et prendre logis officiellement le 1er septembre, alors que le père est peut-être à son lieu de travail le 1er juillet ou le 1er août. Quelle date considérez-vous à ce moment-là? Il y a des gens qui m'ont posé la question et vraiment, je ne le savais pas.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que c'était pour la première année d'application, madame, ou pour la seconde? Ce n'est pas du tout le même problème. S'il s'agit de la première année d'application, la date du 26 août, qui est la date d'entrée en vigueur de la loi, est évidemment déterminante. Mais, pour les années subséquentes, le problème ne se pose plus.

Mme Lavoie-Roux: C'était pour la première année de l'application de la loi. Est-ce que c'est l'adresse du père...

M. Morin (Sauvé): Si le père était résident ici avant, il tombait sous l'exception, en effet. C'est comme cela, du moins, que la loi a été interprétée. Je pourrais vous donner un cas qui est intéressant, mais qui montre qu'aucun de ces cas n'est semblable au suivant.

Il s'agit du cas de M. Kanath, de l'élève David Kanath. J'ai écrit la lettre suivante au père de cet enfant: "D'après les informations que nous a fournies le Bureau des écoles protestantes du Grand-Montréal, votre enfant, David, fréquentait, en 1976-1977, la section française de l'école Maisonneuve." C'est intéressant, c'est un cas d'inscription à l'école française du BEPGM. Mais il y avait une demande, semble-t-il, d'inscription à l'école anglaise. Je continue la lecture de la lettre, je crois que cela éclairera davantage. "Par suite d'une mauvaise transcription des données relatives à la langue dans laquelle il recevait l'enseignement, une déclaration d'admissibilité a été émise, par erreur, en son nom. "Comme votre enfant n'a pas droit à ce document, je dois, en vertu de l'article 78 de la Charte de la langue française, l'annuler, etc."

On me signale que, dans ce cas-là — et il se peut qu'il y en ait un ou deux autres — il n'avait même pas demandé l'admission. Mais il y a eu ce qu'on appelle un baptême par immersion pour un très grand nombre d'enfants qui se trouvaient sur des listes. Alors, il y avait eu une mauvaise transcription dans les listes, ce qui faisait que cet enfant s'est retrouvé avec une reconnaissance de son admissibilité à l'école anglaise, alors qu'il ne l'avait même pas réclamée. J'ai dû annuler.

Mme Lavoie-Roux: Alors, ce n'est pas vraiment un cas de fraude?

M. Morin (Sauvé): Non. Il y en a quelques-uns. C'est une erreur dans ce cas-là. Et il y a aussi d'autres cas d'erreurs pures et simples comme celle-là.

Mme Lavoie-Roux: Comment les cataloguez-vous, au ministère? Il faudrait peut-être les appeler des cas d'erreurs plutôt que des cas de fraude. J'étais restée avec l'impression que ces gens-là avaient essayé de frauder et ce n'est pas le cas.

M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas le cas pour tous.

Mme Lavoie-Roux: II faudrait peut-être faire une distinction, pour que les parents ne gardent pas une réputation de fraudeurs, alors qu'ils n'en sont pas, dans des cas comme celui-là.

M. Morin (Sauvé): Vous avez tout à fait raison. De toute façon, nous ne faisons de catégories que sous la cote suivante: "Personne dont la reconnaissance pour fins d'admissibilité à l'école anglaise a été annulée par le ministre." Mais il y a eu cependant des cas où on nous a fait des déclarations qui n'étaient pas exactes.

M. Le Moignan: Le père de l'enfant en question a-t-il accepté votre décision? Oui. Y a-t-il eu une réaction de la part du père de l'enfant à la réception de votre lettre? Non.

M. Morin (Sauvé): À ma connaissance, non, mais ils peuvent se pourvoir en appel devant la commission. Je leur indique d'ailleurs — je n'ai pas terminé la lettre tout à l'heure — qu'ils peuvent en appeler de toute décision du ministre. C'est prévu dans la loi, comme vous le savez. (12 h 15)

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, c'est plutôt une question de règlement. J'ai l'impression qu'on s'attarde sur un sujet qui est très intéressant. Je me demande si on ne l'a pas vidé actuellement et si on ne devrait pas revenir à une procédure un peu plus stricte, si on veut avoir le temps d'aborder d'autres sujets qui sont tout aussi importants. Je pense que c'est dans l'intérêt de tout le monde à cette commission. On avait suggéré, Mme le député de L'Acadie, en particulier, avait suggéré

que, pour chacun des sujets, chaque porte-parole de parti ait vingt minutes et qu'ensuite on permette aux autres députés qui le veulent de s'exprimer, en alternant de chacun des deux côtés de la table.

Le Président (M. Jolivet): J'ai été très large sur cette utilisation, ce matin, parce que je croyais qu'il valait la peine de vider ce sujet. Je ne vois pas d'objection à ce qu'on revienne à ce que j'avais annoncé, ce matin, à 10 heures, au début de la réunion, au programme 4, élément 1.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis d'accord avec la suggestion du député de Rosemont, mais, s'il me permettait une dernière question qui viderait la question des commissions scolaires protestantes, vu qu'on y a touché...

Je lisais, dans le dernier rapport du Conseil supérieur de l'éducation — j'ai essayé de le retrouver, je ne le retrouve pas, j'espère que je n'ai pas fait erreur en le lisant — qu'il se retrouvait au Québec — je vous le dis sous toute réserve...

M. Morin (Sauvé): Parlez-vous du rapport que j'ai déposé hier en Chambre?

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est le bulletin mensuel, semestriel ou bisannuel où on parlait qu'il y avait au Québec 70 000 ou 80 000 protestants de langue française. Je me demandais de quelle façon ces enfants étaient servis.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je suis quelque peu...

Mme Lavoie-Roux: Je suis surprise, moi aussi.

M. Morin (Sauvé): ... étonné du chiffre qui est donné par Mme le député. Si elle pouvait me donner la citation exacte, nous pourrions vérifier ensemble.

Mme Lavoie-Roux: Je l'ai ici. Moi aussi, cela m'a étonnée, je l'ai lue ce matin, en fait. Merci. Je fais allusion au bulletin du 6 mai 1978 où on parle de l'identité religieuse. Le comité protestant souligne finalement — il fait diverses considérations — qu'il existe au Québec plus de 80 000 protestants francophones actuellement très mal desservis. C'est tout ce que je...

M. Paquette: Est-ce qu'on parle de protestants au sens large...

Mme Lavoie-Roux: C'est de la part du comité...

M. Morin (Sauvé): Je pense que c'est au sens très large.

M. Paquette: Oui, ou de gens de religion protestante.

M. Morin (Sauvé): Oui, je pense que...

M. Paquette: Est-ce qu'on inclut les Juifs francophones là-dedans ou... C'est parce que je n'ai pas le...

Mme Lavoie-Roux: Non, je ne crois pas.

M. Morin (Sauvé): L'explication va connaître certainement des précisions d'ici quelque temps, parce que j'ai demandé au comité protestant de faire une étude... Pardon, pour être exact, c'est le comité protestant qui m'a demandé si j'accepterais de subventionner une étude sur la question du nombre de protestants francophones qui se trouvent dans nos écoles. J'ai accepté de subventionner cette étude. Elle se poursuit en ce moment. Il ne peut s'agir, je pense, dans l'état actuel du dossier, que d'une sorte d'estimation préliminaire qui va devoir être revue. C'est un chiffre qui est un peu étonnant. Je pense que probablement, ces gens se seront basés sur Statistique Canada qui donne toujours des catégories très élastiques dans ce domaine de la confessionnalité. Je suis prêt à accepter n'importe quelle hypothèse, à condition qu'ils me la démontrent. S'il était vrai qu'il y avait 50 000, 60 000 ou 70 000 protestants francophones au Québec, il faudrait enfin qu'on reconnaisse le fait et qu'on mette à la disposition de ces gens des écoles, ce qui n'a pas été le cas dans le passé, les protestants francophones étant littéralement refoulés, il faut bien le reconnaîre, vers l'école anglaise, en dépit du bon sens.

Mme Lavoie-Roux: Alors, vous allez faire examiner cette hypothèse?

M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire que c'est le comité qui, à l'heure actuelle, grâce à une subvention, est en train de préparer un rapport qui me sera, bien sûr, communiqué.

Le Président (M. Jolivet): On revient donc au début de notre cahier, à ce programme 4, élément 1. Vous étiez rendus... Mme le député, des questions?

Mme Lavoie-Roux: Mon premier temps était écoulé, et je pense que j'en ai repris avec la question de la langue. Je ne sais pas si on le met de côté ou non. Je suis bien prête à céder ma place...

Le Président (M. Jolivet): À la question du député...

Mme Lavoie-Roux: II reste dix minutes. Si un député veut entrer dans un autre grand sujet.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a des questions provenant d'autres...

Programme d'enseignement des langues d'origine

M. Paquette: J'ai plusieurs sujets. L'un concerne cette nouvelle expérience qui a commencé cette année l'enseignement en langue maternelle pour les enfants d'origine italienne et portugaise.

M. Morin (Sauvé): Oui...

M. Paquette: J'aimerais savoir a quel niveau cela se situe, dans quel contexte. Combien y a-t-il d'enfants d'impliqués.

M. Morin (Sauvé): À l'heure actuelle, nous sommes en train de mettre au point les programmes et de discuter de l'implantation de ce que nous appelons le PELO, programme d'enseignement des langues d'origine, avec les communautés intéressées, notamment avec la communauté italienne et le groupe portugais qui se sont montrés très intéressés par la possibilité que nous leur offrions. Nous avons également des rencontres depuis plusieurs mois avec la communauté grecque, mais les choses vont plus lentement parce que la communauté grecque possède déjà un enseignement, qu'on appelle, je crois, l'enseignement du samedi. Elle veut être sûre que les enseignements que nous mettrons à sa disposition ne gênent pas ces enseignements du samedi, de sorte que la discussion se poursuit.

Dans le cas des italianophones et des gens originaires du Portugal, les choses ont progressé au point que nous pensons qu'il serait possible d'ouvrir les premières classes dès septembre 1978, au niveau primaire. C'est une décision que j'ai prise, parce que je me suis rendu compte que c'est là que sont les véritables besoins, dans la mesure où les enfants des immigrants nouveaux seront dirigés vers l'école française. J'ai donc opté pour le niveau primaire et la toute première année, au départ, peut-être une année ou deux — nous sommes encore à en discuter — plutôt que de prendre I'initiative d'offrir ces enseignements au niveau secondaire.

Il n'est pas exclu, cependant, que nous mettions en toute également, peut-être pas en septembre 1978, mais l'année suivante, des enseignements au niveau secondaire, dans la mesure où le nombre d'enfants italianophones ou d'origine portugaise ! autorisera.

M. Paquette: J'imagine qu'au niveau secondaire, ça pourrait aussi être ouvert à tous les enfants...

M. Morin (Sauvé): Évidemment! L'intérêt de la chose, ce n'est pas seulement d'ouvrir la possibilité aux italianophones, par exemple, de maintenir leur culture, leur langue, la connaissance de leur histoire et de leur littérature. L'intérêt, c'est d'offrir aux Québécois francophones la possibilité d'apprendre ! italien. Peut-être peut-on penser que ce ne serait pas un mauvais substitut pour le latin, à un moment où les jeunes se sont beaucoup éloignés des langues anciennes, de même pour le grec. Je ne vois pas pourquoi les jeunes qui s'intéressent au grec n'apprendraient pas la langue moderne, plutôt que de ne rien apprendre en fait de langue ancienne. Il y a là, je crois, une possibilité, qui ne montrera tous ses effets qu'à la longue, de ramener les Québécois vers l'étude des langues étrangères classiques.

M. Paquette: Donc, vous comptez ouvrir certaines classes au niveau primaire dès la prochaine année scolaire.

M. Morin (Sauvé): Au niveau primaire.

M. Paquette: Et cela aura quelle extension? Il y aura combien d'enfants d'impliqués? Il y aura combien de classes?

M. Morin (Sauvé): Au départ, ce sera, d'après le dernier état des discussions, quelques classes expérimentales...

M. Paquette: Oui.

M. Morin (Sauvé): ... c'est-à-dire, au maximum, quelques centaines d'enfants. Je tiens aussi à souligner au député que, dans le livre vert, nous avons prévu qu'il y aurait l'enseignement de la langue d'origine, de la culture d'origine, dès la première année du secondaire. Mais, évidemment, le livre vert se situe dans une perspective de moyen et de long terme, puisqu'il faut d'abord que nous ayons formé, au niveau primaire, une clientèle qui voudra continuer de s'intéresser à sa langue d'origine et à sa culture d'origine, une fois arrivée au secondaire.

M. Paquette: Est-ce que le projet, dans son état actuel, porte sur toutes les années du cours primaire?

M. Morin (Sauvé): Oui. mais pas d'un seul coup.

M. Paquette: Progressivement?

M. Morin (Sauvé): Oui, progressivement, nous voulons l'étendre dans la mesure où les clientèles seront disponibles et intéressées et il semble que. du côté italien, il y a un intérêt très réel et très vif, de même que chez les Portugais. Nous commencerons par une ou deux années — c'est en discussion à l'heure actuelle — et on l'étendra à la troisième, à la quatrième, à la cinquième et à la sixième éventuellement.

M. Le Moignan: Si le député le permet, juste une petite question.

M. Paquette: Oui.

M. Le Moignan: Quelle proportion allez-vous donner à l'enseignement de la langue française et de la langue italienne pour ceux qui vont débuter en septembre 1978?

M. Morin (Sauvé): Au départ, ces enfants n'auront pas moins de langue française. Pour savoir comment insérer cet enseignement de langue italienne, pour ces groupes, dans la grille horaire, nous sommes en train d'en discuter avec eux à l'heure actuelle et j'ai l'impression que ce n'est qu'après une ou deux années d'expérience

qu'on va pouvoir vraiment décider comment insérer cela harmonieusement dans la grille. Nous sommes un peu hésitants, à l'heure actuelle, nous discutons de la chose avec des groupes et aussi, forcément, il va falloir en discuter avec les commissions scolaires qui vont accepter de mener à bien l'expérience.

M. Le Moignan: J'ai bien l'impression que, dans la plupart de ces cas, ces jeunes Italiens parlent la langue anglaise actuellement, peut-être pas tellement de...

M. Morin (Sauvé): Je ne tiendrais pas cela pour acquis, mais c'est possible qu'il y ait quelques cas de ce genre parmi ceux qui vont être dirigés vers l'école française.

Le Président (M. Jolivet): Mme le député de L'Acadie, sur la même question.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. C'est ce qui est compliqué de respecter les 20 minutes parce que, si on ne vide pas un sujet, on va y revenir après coup.

Le ministre y a d'ailleurs déjà touché; c'est sur la question de l'organisation scolaire. Je me demandais comment vous procéderiez. Le ministre dit: On devra obtenir la collaboration des commissions scolaires, etc. Y a-t-il eu des démarches de faites auprès de commissions scolaires? De quelles commissions scolaires s'agit-il? Et, comme je pense qu'on veut quand même que les enfants soient le plus possible intégrés à l'école de leur milieu et que, déjà, on éprouve certaines difficultés à intégrer, par exemple, dans les horaires, les enfants qui ont des cours d'enseignement religieux... On arrive ici avec un certain nombre d'enfants qui voudraient de l'italien, du grec ou de l'espagnol, et d'autres qui ne les suivront pas. Est-ce que vous avez un peu...

M. Morin (Sauvé): Effectivement, c'est compliqué, mais comme nous pensons d'abord aux enfants, il va falloir que nous adoptions toutes ces vastes machines à ces réalités nouvelles et à ces services que nous voulons donner à la population.

Mme le député veut savoir quelles sont les commissions scolaires qui sont intéressées. Nous avons, à l'heure actuelle, des discussions avec la CECM. Dans le cas des Portugais, nous tentons de voir si nous ne devrons pas également traiter avec !a commission scolaire de l'Outaouais-Hull, puisqu'il se trouve un groupe important de Portugais à Hull, comme Mme le député le sait. À l'heure actuelle, ce sont les commissions scolaires intéressées, et on comprend facilement pourquoi c'est surtout la CECM qui va donner suite à ce projet.

Mme Lavoie-Roux: Je comprends la réponse du ministre qui me dit: C'est complexe tout cela, mais est-ce qu'à ce moment-ci, puisque vous annoncez le projet probablement pour septembre — il vous reste trois mois — est-ce déjà un peu articulée la façon dont vous allez organiser l'horaire?

M. Morin (Sauvé): Oui, cela a déjà fait l'objet de discussions avec la CECM. Je ne peux pas vous dire exactement où on en est aujourd'hui, parce que cela se discute, je dirais, chaque semaine en ce moment, mais il s'agit d'expériences à l'automne. Nous ne pouvons pas nous permettre d'ouvrir les portes toutes grandes d'un seul coup, parce que nous n'aurions ni les enseignants ni les moyens pédagogiques pour le faire. Il s'agit donc, avec l'aide des associations d'enseignants d'italien, de mettre sur pied quelques classes qui vont nous servir de pilotes. Bien sûr, par la suite, il se peut que nous devions désigner certaines écoles comme offrant ces programmes, parce qu'il s'y trouve des concentrations particulières d'enfants.

Il n'est pas exclu qu'on dirige vers ces écoles, comme cela se fait dans d'autres cas, des enfants qui désirent se prévaloir du PELO.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que... je comprends.

Le Président (M. Jolivet): Comme il est 12h 30, j'ajourne sine die. Le droit de parole sera, à ce moment-là, encore au député de Rosemont, tout en tenant compte de la dernière question de Mme le député de L'Acadie.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

Reprise de la séance à 16 h 16

Le Président (M. Jolivet): La commission permanente de l'éducation se réunit pour étudier les crédits budgétaires du ministère de l'Éducation.

Sont membres de cette assemblée M. Alfred (Papineau), M. Lacoste (Sainte-Anne), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marquis (Matapédia), M. Morin (Sauvé), M. Paquet-te (Rosemont), M. Picotte (Maskinongé).

On doit aussi me donner d'autres noms car il y aura des changements ce soir, je pense, au niveau de la liste des membres.

Mme Lavoie-Roux: Nous sommes toujours ici.

Le Président (M. Jolivet): II y aura quelques changements qui me seront annoncés tout à l'heure.

Mme Lavoie-Roux: Nous sommes bien d'accord.

Le Président (M. Jolivet): Nous en étions au programme 4, élément 1. Nous recommencions... Puisque le député qui avait le droit de parole à ce moment, M. le député de Rosemont, n'est pas ici, nous revenons à l'ordre normal. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il restait une question que je voulais poser au

moment où nous avons suspendu les travaux. Je voulais demander au ministre si, pour la mise en oeuvre de son plan d'enseignement des langues d'origine, il prévoyait des professeurs de plus et à quel endroit du budget ceci émane, parce qu'apparemment, on irait un peu en dehors des normes. Comme il s'agit d'enseigner l'italien, j'imagine qu'on doit recourir à des professeurs supplémentaires.

M. Morin (Sauvé): Effectivement, M. le Président, il va nous falloir faire appel à du personnel hautement spécialisé, des enseignants de la langue italienne, voire de la langue portugaise, peut-être, l'an prochain, de langue grecque, et cela émarge au budget du plan de développement des langues. C'est le troisième aspect du plan de développement des langues, le premier étant consacré au français langue maternelle, le second aux deux langues secondes et enfin, le troisième, aux langues d'origine.

Mme Lavoie-Roux: Merci. Je pense que cela peut-être une suite logique, je voudrais passer à l'enseignement de la langue seconde, M. le Président. L'an dernier, au moment de l'étude des crédits du ministère, le ministre nous avait dit qu'on venait de lui remettre un rapport d'étude touchant l'enseignement des langues, mais qu'à ce moment-là, il devait consulter d'autres personnes, différents spécialistes — vous retrouveriez cela, je pense, dans vos notes du discours d'ouverture — et je voulais savoir si ce rapport lui a été remis et s'il pourrait nous en remettre copie. J'imagine que c'est quand même un rapport qui pourrait intéresser les membres de la commission.

Troisième question: Quelle suite entend-il donner à ce rapport qui, probablement, devait contenir des recommandations?

M. Morin (Sauvé): Le rapport auquel Mme le député fait allusion est un rapport interne du ministère qui nous a servi à préparer le livre vert. Je ne crois pas opportun de le rendre public pour la simple raison que c'était un document de travail interne. Pour en avoir une idée, je pense qu'on peut se référer au livre vert.

C'est à la suite de ces études que nous avons décidé quelles seraient les hypothèses de travail proposées à la population en matière de langue seconde.

Mme Lavoie-Roux: Je regrette quand même que nous ne puissions pas en avoir une copie, mais enfin, c'est au ministre d'en décider. Je pense que ce n'est quand même pas un rapport... Je suppose qu'il pourrait avoir des dimensions politiques, mais c'était vraiment dans un but de réflexion qu'il aurait pu nous être utile.

Je voudrais maintenant demander au ministre les mesures concrètes qu'il entend prendre, il va nous dire qu'il attend le rapport de la consultation sur le livre vert. Ce rapport ne sera compilé ou le rapport final ne sortira, j'imagine, comme vous l'avez dit en Chambre, que vers octobre ou novembre, au début de l'automne. Est-ce qu'il y a des choses, des expériences ou des projets concrets, qu'on entend mettre de l'avant dès septembre, sinon on reportera encore d'une année le changement ou l'amélioration des programmes relativement à l'enseignement de la langue seconde.

M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, comme nous savons que nous allons vers de nouveaux programmes en matière d'enseignement des langues secondes, vers un renforcement de la qualité de cet enseignement, qui laissait beaucoup à désirer, j'avais déjà commencé au cours de l'année 1977-1978, à mettre en place un dispositif qui pourrait nous permettre, par la suite, une intervention efficace en faveur des langues secondes.

C'est ainsi que l'an dernier, nous avons engagé 190 conseillers pédagogiques pour l'encadrement de l'enseignement des langues secondes. Nous avons également, durant l'année passée, poursuivi le programme de perfectionnement des maîtres à temps partiel. Nous avons réalisé des stages d'été en Louisiane pour 98 maîtres. Nous avons continué les recherches sur l'immersion. Nous avons poursuivi des activités interlinguistiques et 85 000 élèves y ont participé. Enfin, nous avons fait des expériences dans certaines commissions scolaires, quant à l'enseignement de l'anglais dès le début du niveau primaire.

Pour l'année qui vient, nous allons accroître encore les ressources en conseillers pédagogiques, puisque nous allons leur consacrer $1 300 000 de plus, seulement pour les conseillers pédagogiques. Nous allons également... M. le Président, j'entends la cloche qui sonne.

Mme Lavoie-Roux: II faut quand même continuer vos réponses un petit peu.

M. Morin (Sauvé): Je peux terminer cette réponse et, ensuite, nous pourrons aller voter. Nous avons prévu — peut-être est-il utile de le préciser — pour l'année qui vient, des recherches dans les commissions scolaires sur l'enseignement des langues secondes. Nous avons prévu un montant de $400 000 de projets autorisés et, au chapitre des innovations, un autre montant de $400 000. Enfin, pour la coordination de tous ces projets, nous avons vu à ce que les commissions scolaires puissent engager un contractuel et un budget de $30 000 est prévu à cet effet.

Nous avons également l'intention de maintenir les activités dites interlinguistiques. Autrement dit, le dispositif de l'enseignement des langues secondes se renforce en vue de l'implantation de nouveaux programmes au cours des années qui viennent. Nous perfectionnons les maîtres, nous engageons des conseillers pédagogiques. Autrement dit, nous sommes en train de créer l'infrastructure qui va nous permettre d'améliorer cet enseignement.

Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si on a le temps pour une autre question.

Le ministre pourrait-il nous dire les résultats des expériences faites cette année, comme il vient

de le signaler, dans l'enseignement de l'anglais langue seconde, en première année, des possibilités d'immersion et quelles sont les autres projets de recherche qu'il entend faire? Il nous dit: On consacre $400 000 à de la recherche. Mais la recherche sur la langue seconde, sur quels aspects particuliers va-t-elle porter?

M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas encore reçu les résultats des recherches sur l'enseignement de l'anglais en première année. Comme vous le savez, c'est une question pédagogiquement délicate, difficultueuse, et je ne sais quand viendront les résultats. Nous avons tout de même mis la recherche en marche.

D'autre part, à la commission scolaire des Milles-Îles, une recherche a été effectuée, avec d'ailleurs, je pense, une aide spéciale que le ministère a fournie à cette commission scolaire. C'est au niveau secondaire que ces expériences ont été faites; ce sont des expériences d'enseignement de l'anglais pendant tout un semestre.

Le Président (M. Jolivet): Je vais suspendre les travaux le temps d'aller au vote, nous reviendrons ensuite.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise de la séance à 16 h 39)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, madame et messieurs!

Au moment de se quitter, la parole était à M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): II conviendrait peut-être que j'ajoute quelques commentaires sur les expériences qui ont été faites ailleurs qu'au Québec, et également quelques commentaires sur l'expérience des Mille Îles, dont j'entretenais Mme le député il y a un instant.

Pour ce qui est des expériences faites à l'extérieur du Québec, nous suivons de très près, au ministère, l'évolution de l'enseignement des langues secondes, particulièrement dans les autres provinces canadiennes et aux États-Unis. Nous faisons cela, d'ailleurs, depuis cinq ans. Nous continuerons de le faire parce que cela nous touche, évidemment, de très près.

Pour ce qui est des Mille Îles, cette commission scolaire n'a pas encore fourni le rapport final sur l'expérience qu'elle mène conjointement avec Greenfield Park. Elle doit, incessamment, le faire. Ce projet pourra vraisemblablement être accepté à titre d'expérience. Nous avons participé financièrement, d'ailleurs, à la réalisation de cette expérience pour un montant de $20 000 en 1977-1978. Nous avons également participé, par le biais de subventions émanant du secrétariat d'État, à d'autres activités dans le domaine de la langue seconde, par exemple des cours d'été en français langue secon- de à la commission scolaire de l'agglomération de Hull. Nous avons également pu fournir des animateurs en langue seconde dans ces écoles primaires de Hull. Voilà ce que je voulais ajouter pour l'instant. Peut-être Mme le député a-t-elle d'autres questions sur les langues secondes.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais demander au ministre s'il serait possible d'avoir la liste des projets de recherche que le ministère entend subventionner pour l'année 1978/79 et pour lesquels il y a des montants de $400 000 prévus, comme vous nous l'avez signalé tout à l'heure.

M. Morin (Sauvé): On peut vous fournir la liste si vous le désirez.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): Je ne l'ai pas sous la main...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): ... mais, peut-être, demain matin.

Mme Lavoie-Roux: Cela va. Il y a une chose que je voudrais faire remarquer, entre parenthèses. D'une façon générale, quand nous demandons des choses, les gens sont assez fidèles à nous les remettre. Mais, parfois, parce que ça retarde, nous ne les avons pas. Alors, je voudrais au moins qu'on ne l'oublie pas, parce que c'est intéressant. Je sais que ces choses sont publiques, il n'y a rien de...

Le Président (M. Jolivet): Ce sera, en réalité, mardi prochain.

Mme Lavoie-Roux: Ah oui! À moins qu'on décide de rester demain.

M. Morin (Sauvé): Oui, à la prochaine séance.

Mme Lavoie-Roux: Voici une autre question que je voudrais aborder. Je sais que dans les écoles françaises du PSBGM, pas toutes, mais dans un certain nombre d'écoles ethniques, et peut-être la majorité — là-dessus, je n'ai pas de données — je ne voudrais pas qu'on interprète ma question nécessairement comme un plaidoyer en faveur de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, en première année, on enseigne l'anglais, langue seconde, en première ou en deuxième année. Au PSBGM. dans les écoles françaises, on enseigne l'anglais dès la première année, je pense. La deuxième au plus tard, de toute façon, je pense que c'est dès la première.

Pourquoi je pose la question et je reviens sur un vieux débat? Ce matin, on a parlé de l'intégration des immigrants, la résistance de certains, etc., et si vous me permettez quelques exemples que j'ai lus... enfin, j'en ai eu un, plus récemment, à mon bureau de comté. Il m'est arrivé un citoyen d'origine portugaise, dont l'enfant est illégalement

inscrit dans une école anglo-catholique. Or, il voulait faire légaliser, si je peux dire, le statut d'élève régulier de son enfant. Ce que je trouvais fort légitime. Alors, je lui ai expliqué tous les dédales, etc., sa demande en vue de l'admissibilité, il voulait le garder à l'école anglaise, évidemment, mais, en tout cas, son droit d'appel, etc., et, compte tenu des détails qu'il avait, il me semblait fort peu probable qu'il puisse être admis à l'école anglaise. Enfin, ce n'est pas moi qui suis le comité de l'admissibilité, mais il reste quand même qu'on a assez de données pour le savoir. (16 h 45)

La grande objection au fait d'envoyer son enfant à l'école française... Je lui ai même parlé des écoles. Je vous ai dit tout à l'heure qu'il était d'origine portugaise, mais il est d'origine italienne — Saint-Philippe-Bénézy et j'oublie l'autre nom. Il y aurait quand même cette possibilité, parce que je me dis que ce qu'il faut dans le fond, c'est de les ramener au secteur français et de redonner un statut d'élèves réguliers le plus possible à ces enfants dont les familles sont quand même ici depuis une vingtaine d'années dans certains cas.

La grande objection, c'est qu'il dit qu'évidemment il y avait une question de transport, cela devenait difficile pour lui, mais je n'étais tout de même pas capable de le convaincre d'envoyer son enfant à l'école française. Il m'a dit: Je n'aurai jamais de garantie que mon enfant va apprendre la langue seconde d'une façon adéquate. Il me resterait le secteur protestant français. Cela, je pense que cela ne le... D'ailleurs, on sait qu'il y en a qui sont allés au secteur protestant anglais ou même français, parce qu'ils pensaient y apprendre l'anglais. Est-ce fondé? Est-ce que ce n'est pas fondé? Leurs espoirs seraient peut-être aussi déçus, mais il reste que, si on tient compte de la réalité des aspirations des parents, etc., je me dis: C'est quand même un problème à examiner de près et si on veut finir par franchir cette étape d'intégration difficile. On l'a vu ce matin avec les chiffres qui ont été produits il va falloir que le ministère pose des gestes concrets. Tout ce que le ministre nous a dit, d'ajouter des conseillers pédagogiques, enfin de créer l'infrastructure qui va permettre... j'en suis, mais, pour les parents qui ont des enfants à l'école aujourd'hui, allez leur expliquer que vous êtes en train de mettre les infrastructures en marche. Allez dire cela à la majorité des parents qui désirent mordicus que leur enfant apprenne la langue seconde, vous n'allez pas très loin.

Je me demandais, compte tenu de ces expériences, on ne peut même pas parler d'expériences, ce serait presque une tradition, mais de cette habitude, dans ces écoles, d'enseigner l'anglais dans les premières années, quand, le plus souvent, ce n'est pas la première, si on l'a examinée du point de vue... si on a fait des recherches sur les répercussions, chez ces enfants, de l'enseignement et, là, souvent, c'est pratiquement une troisième langue, parce qu'il y a le français, l'anglais et la langue d'origine. Je voudrais savoir quelle est la position du ministre. C'est que, d'une façon, il a condamné avec assez de véhémence — et on s'en souviendra — les expériences que la CECM voulait tenter en première année, alors qu'il l'a accusée d'improvisation. Je suis loin d'être sûr que son jugement n'était pas un peu émotif, d'autant plus qu'il s'agissait de quelques classes dans une très grande commission scolaire. Mais je voudrais quand même savoir quelle est, non pas la position du ministre sur l'enseignement du français en première année, mais sa position sur la nécessité, pour la population — et là, je parle de la population en général et également de la population francophone — de sentir qu'il y a des gestes véritables qui sont posés, qu'on voie qu'on progresse quelque part. Sur ce que le ministre vient de dire, je suis d'accord pour l'infrastructure, mais, pour les parents, il n'y a rien de concret qui leur indique que les choses avancent.

M. Morin (Sauvé): Au cours de la tournée du livre vert, je me suis beaucoup fait parler de cette question et, ma foi, pas toujours dans le même sens. Beaucoup de parents, d'enseignants sont venus revendiquer que cet enseignement ne commence qu'au niveau secondaire; un plus grand nombre de parents sont venus demander qu'au contraire, il commence au primaire, et certains m'ont demandé qu'il commence avant la quatrième année, selon l'hypothèse qui est celle du livre vert. À l'heure actuelle, nous nous trouvons devant des choix que je vais devoir faire cet été et annoncer dans mon plan d'action à l'automne. Je suis à faire analyser tous les questionnaires que nous avons reçus, les 23 000 questionnaires que nous avons reçus, tous les mémoires, pour voir où se trouve la prépondérance d'opinions et aussi pour prendre connaissance de tous les arguments qui sont invoqués de part et d'autre. Souvent, ces arguments sont d'ordre pédagogique; souvent, ils débordent le cadre pédagogique et sont d'ordre politique, par exemple.

Plusieurs commissions scolaires ont invoqué, dans le passé, le plan de développement des langues et ont offert l'enseignement de l'anglais avant la quatrième année du primaire ou avant la cinquième, pardon, puisque la règle était la cinquième. Il y en a plusieurs qui l'ont organisé en quatrième année, quelques-unes en troisième et alors de très rares en première année, comme dans l'Outaouais, à Schefferville et à Fermont. Mais c'est très limité. En bas de la quatrième année, il n'y en a que quelques-uns.

L'automne dernier, on pensait pouvoir régler le problème auquel Mme le député a fait allusion et qui est celui d'offrir aux enfants des Néo-Québécois non seulement l'école française, mais une école française dans laquelle il y aurait une part importante d'enseignement de l'anglais. Dans cette perspective, on se souviendra que MM. Taddeo et Montini ont fait des propositions à la CECM, ont présenté des propositions selon lesquelles il y aurait, dans certaines classes, un enseignement de l'anglais, langue seconde, allant jusqu'à 72 minutes par jour, ce qui équivalait, à peu près, au tiers du temps. Devant cette manoeu-

vre qui, à ma grande surprise a trouvé beaucoup d'appuis au sein de la CECM, auprès des commissaires, j'ai dû intervenir et faire parvenir à toutes les commissions scolaires du Québec une directive intitulée: Conditions de présentation et d'approbation des projets soumis par les commissions scolaires dans le cadre de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, avant la cinquième année du primaire, parce que nous connaissons un très grave problème qui est celui de la pénurie des professeurs d'anglais, langue seconde.

C'est la raison pour laquelle nous avons tellement mis l'accent sur le programme de perfectionnement des maîtres. Ce problème n'est pas encore réglé et ce que je crains par-dessus tout, c'est un enseignement de l'anglais, dès la première année, qui serait plus de nature politique que de nature pédagogique et qui ferait appel à des maîtres non qualifiés.

À l'heure actuelle, nous avons même de la difficulté à en trouver pour un enseignement correct de l'anglais en cinquième année et en sixième année, où il est autorisé d'emblée. De sorte qu'avant d'autoriser de nouveaux programmes avant la cinquième année, je désire d'abord m'assurer que le programme est sérieux, qu'il n'est pas improvisé, que nous avons les enseignants pour qu'il soit donné correctement et je tiens aussi à terminer la consultation du livre vert pour décider à quel moment sera située l'année au cours de laquelle l'enseignement de l'anglais, langue seconde, pourra commencer comme question de principe.

À l'heure actuelle, j'attends donc les résultats du livre vert pour prendre des décisions. Je pense que je serai appelé à les prendre cet été. D'ailleurs, nous étudions la chose activement en ce moment au ministère.

Nous travaillons donc activement au sein du ministère à mettre la main à ces décisions.

Mme Lavoie-Roux: Je vais être obligée de revenir après parce que je n'ai pas fini. Je vais poser une autre question, si j'ai le temps. Est-ce qu'on pourrait nous fournir la liste des commissions scolaires, qu'elles soient protestantes ou catholiques, des écoles ethniques privées ou publiques qui donnent l'enseignement de l'anglais comme langue seconde avant la cinquième année? Alors, le nom des commissions scolaires et le nombre d'enfants qui sont servis de cette façon.

M. Morin (Sauvé): Nous pouvons certainement répondre affirmativement à la première partie de votre question. Pour ce qui est du nombre d'enfants, ça peut signifier des recherches. Enfin...

Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas besoin de ces réponses demain matin. On peut en prendre note et me les faire suivre dans une semaine. Je ne veux pas tenir tout le monde debout toute la fin de semaine, c'est-à-dire toutes les nuits d'ici la fin de semaine.

M. Morin (Sauvé): II y en a peut-être pour plusieurs semaines de recherches, puisqu'il y a 33 commissions scolaires qui sont dans ce cas.

Mme Lavoie-Roux: C'est quand même assez considérable.

M. Morin (Sauvé): Oui, mais cela ne s'applique pas nécessairement dans toutes leurs écoles. C'est pour cela qu'il y a toute une recherche à faire.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Tout à l'heure, vous disiez que les 72 minutes qui avaient été prévues pour l'enseignement de l'anglais, en première année voulaient dire presque le tiers du temps d'enseignement. Est-ce que, à l'élémentaire, le temps d'enseignement n'est pas de 1500 minutes par semaine?

M. Morin (Sauvé): Non. La moyenne est de 1380 minutes.

Mme Lavoie-Roux: II y a des endroits où on a 1500 minutes. Au deuxième cycle et au premier cycle, il y a une différence.

M. Morin (Sauvé): Vous n'en avez pas plus au premier cycle. Vous en avez plutôt moins. La moyenne s'établissant à 1380 minutes, il se peut qu'il y en ait 1500 au second cycle, mais cela diminue évidemment le nombre de minutes au premier cycle.

Mme Lavoie-Roux: II reste que 360 minutes sur 1380 par semaine, cela ne donne pas le tiers.

M. Morin (Sauvé): Cela peut descendre à 1260 minutes au premier cycle.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous n'avez quand même pas un tiers du temps consacré à l'anglais.

M. Morin (Sauvé): Non, mais tout de même, c'est une fraction importante du temps, vous en conviendrez. J'avais le souci, tout en voulant faciliter le plus possible l'apprentissage de la langue seconde, de ne pas transformer nos écoles françaises en écoles bilingues.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que la demande avait été faite. Je n'ai pas à défendre la proposition des personnes qui l'ont faite à la CECM. Mais il aurait quand même fallu comprendre que c'était une approche... Pourquoi lui étais-je très sympathique? C'est que j'aurais favorisé cette approche au moment des difficultés que nous avions dans la loi 22. Je trouvais que c'était plus positif d'amener ces enfants à l'école française, dans une période de transition, surtout qu'il y avait des écoles qui regroupaient suffisamment d'Italiens et de Portugais entre autres, pour qu'on puisse justement donner cet enseignement à ces enfants, là où on pouvait les regrouper en nombre suffisant.

Je pense que cela aurait diminué considérablement le problème des illégaux dont on parlait ce matin. Penser que cette mesure exceptionnelle de transition conduirait à une anglicisation des écoles françaises, je ne peux m'empêcher de dire que c'était aller très loin dans les conclusions.

M. Morin (Sauvé): Mme le député, je ne partage pas votre avis. Ce genre de situation tend à perdurer et finit par faire partie des droits de l'homme, ou faut-il dire des droits de la personne, une fois qu'on en a admis le principe. Je tiens à vous faire observer qu'en dépit du battage publicitaire qui a entouré ces 72 minutes d'anglais, il n'y a pas eu plus d'une vingtaine d'inscriptions de la part des parents.

Mme Lavoie-Roux: II faut quand même reconnaître, M. le ministre, que devant l'attitude que vous avez prise, qui a été tout à fait négative, les parents se sont dit: Si on y va — c'étaient des illégaux qui étaient dans les écoles et qu'il fallait ramener — ils vont nous repérer et après cela ce sera fini. Il y a vraiment eu cette crainte des parents qui a joué beaucoup. Ceux qui sont allés aux rencontres qu'il y a eu à ce moment-là à Notre-Dame-de-Pompéi pourraient vous en rendre témoignage et vous dire ce qui s'est passé.

Je voudrais aussi...

Le Président (M. Jolivet): Mme le député je vous ai laissé dépasser votre temps de sept minutes.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, je continuerai après.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir sur cette question des langues secondes. J'ai relu attentivement le programme de l'Union Nationale, alors que... (17 heures)

M. Morin (Sauvé): ... programme de l'Union Nationale.

M. Le Moignan: Un beau programme, je vous en ferai parvenir une copie demain, M. le ministre. ... on nous a reproché d'avoir modifié notre position vis-à-vis de la liberté de choix des parents. En relisant ce programme, je n'ai pas du tout trouvé cette expression, liberté de choix. Je sais qu'on en a fait grand état du côté de l'Opposition officielle, même à l'Assemblée nationale.

M. Morin (Sauvé): En raison de sa clientèle anglophone.

M. Le Moignan: À quelques reprises, mais il n'y a rien dans notre programme qui parle de liberté de choix pour la langue. Il est question de liberté de culture, ce qui est une autre affaire. M. le ministre, en parlant de la langue...

M. Morin (Sauvé): Pourriez-vous nous expliquer la différence que vous faites exactement entre liberté de choix et liberté de culture? Cela m'intéresse de fouiller le tréfonds de l'âme de l'Union Nationale.

M. Le Moignan: Quand on parle de culture...

Mme Lavoie-Roux: C'était dans leur livre blanc, M. le député.

M. Le Moignan: On pourrait revenir à cela plus tard, mais je crois qu'il y a toute une différence — M. le ministre le sait très bien — entre la langue et la culture. La culture peut englober à la fois la langue, le milieu de vie, les traditions, les coutumes, etc. On peut garder sa culture et en même temps posséder une autre langue.

Quand on parle de la culture, du choix des francophones et des anglophones de conserver leur milieu de vie. On invite les anglophones à étudier la langue française au Québec, c'est bien normal, bien légitime dans le contexte. Il y en a 20% qui vivent avec 80%, c'est normal qu'ils puissent s'exprimer en français, quand on sait que dans des milieux comme les nôtres, certains anglophones n'ont jamais appris à parler deux mots de français au coeur de la ville de Gaspé. La question de la culture, c'est un point, la question de langue, c'est un autre.

M. Morin (Sauvé): Si je vous ai bien compris, l'Union Nationale n'est pas en faveur de la liberté de choix?

M. Le Moignan: Sur la question de la langue. Je veux préciser ce petit point au départ, parce qu'on en a fait état dans les journaux et j'ai relu le programme. On parlait de deux langues officielles, le français et l'anglais, mais la liberté des parents d'inscrire leurs enfants à l'école française ou à l'école anglaise, cela n'y a jamais figuré. On a prétendu que le chef aurait fait des déclarations, mais je n'ai pas de preuve de cela. Je ne juge pas le chef, je juge le programme.

Ce qui m'amène à ceci, M. le Président, c'est que les francophones n'ont pas le choix. Ils doivent envoyer leurs enfants à l'école française. Nous avons mentionné ce matin la possibilité pour les francophones d'envoyer leurs enfants à l'école italienne ou portugaise. C'est donc dire qu'en première année, le francophone qui va s'inscrire à l'école italienne va commencer à apprendre la langue française et la langue italienne en même temps, si j'ai bien compris.

M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire qu'il ne commencera pas à l'apprendre, il va développer les connaissances de sa langue maternelle.

M. Le Moignan: Oui, il a déjà des connaissances acquises parce qu'il parle déjà le français.

M. Morin (Sauvé): Voilà!

M. Le Moignan: Le même enfant pourrait aussi parler l'anglais, il pourrait être bilingue.

M. Morin (Sauvé): Cela lui ferait beaucoup à apprendre en première année.

M. Le Moignan: Non, je ne parle pas de trois langues j'en suis sur le français. Le petit Canadien français ou le francophone qui s'inscrit à l'école italienne parle déjà, maîtrise sa langue. Un enfant de cinq ou six ans possède au moins tous les rudiments de sa langue. A-t-il un handicap en cours de route? Sera-t-il capable de poursuivre les deux? Je n'y ai aucune objection, j'aimerais posséder l'italien.

M. Morin (Sauvé): M. le député, vous m'éton-nez un peu, vous parlez d'inscription d'élèves francophones à l'école italienne?

M. Le Moignan: Oui, j'ai cru comprendre ce matin que la chose était possible.

M. Morin (Sauvé): Ah! vous pensez au projet PELO.

M. Le Moignan: J'ai peut-être mal saisi.

M. Morin (Sauvé): Oui, c'est une interprétation un peu large de ce que j'ai annoncé ce matin. J'ai annoncé qu'il existerait, pour les enfants d'origine italienne, des classes de langue italienne, de grammaire italienne, dès le niveau primaire et à titre d'essai à l'automne, mais il n'est pas question d'écoles italiennes..

M. Le Moignan: Non, mais je croyais...

M. Morin (Sauvé): ... il n'est pas question même de classes italiennes. Il est question de classes françaises au sein desquelles les petits Québécois d'origine italienne auront accès à un enseignement de l'italien.

M. Le Moignan: Comme cela, je vous ai mal interprété ce matin.

M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement.

M. Le Moignan: Je croyais que dans cette classe où il y avait ce groupe d'Italiens, une minorité de francophones aurait pu s'y joindre. Je ne voyais aucune objection à cela, mais je me posais la question suivante: Pour l'avancement dans les études secondaires ou autres, est-ce qu'il aurait été en état de le maîtriser très bien? Ce n'était pas votre intention d'avoir des classes italiennes. C'est plutôt des classes...

M. Morin (Sauvé): Non. D'ailleurs, je m'étonne que vous n'ayez bondi, à ce moment, puisque ce que vous suggérez, en somme, c'est que je transforme le système scolaire québécois en système italien. Ce n'est pas du tout l'intention du PELO.

M. Le Moignan: Non.

Mme Lavoie-Roux: On va remplacer la langue anglaise comme langue seconde par la langue italienne.

M. Le Moignan: Non, je vous trouvais très généreux, à ce moment, mais je sais que vous n'avez pas l'intention d'inviter tous les Québécois à parler l'italien. Il n'y a aucune inquiétude. Je sais que ce n'était pas votre but, mais je trouvais...

M. Morin (Sauvé): Quoique, comme je l'ai expliqué, au niveau secondaire, il ne serait pas malheureux que les jeunes Québécois apprennent l'italien. Les options d'italien et de portugais, éventuellement de grec, pourraient être ouvertes aux jeunes Québécois.

M. Le Moignan: Oui, mais pour atteindre cet idéal...

Mme Lavoie-Roux: ... l'espagnol. Déconcentration

M. Le Moignan:... il faut qu'ils soient dans un milieu, parce que si on pense que nos francophones de Québec vers Matane vont développer la maîtrise de la langue seconde anglaise, c'est un rêve. On sait très bien qu'à cause du milieu, ils n'y parviendront jamais, à l'exception de ceux qui vont pousser leurs études davantage. Votre idée, je la trouvais bonne. Ce n'était pas votre idée, mais je l'élargissais. Je me dis que si, dans la ville de Montréal, où il y a beaucoup d'Italiens ou de Por-tuguais, on peut compléter les deux en même temps, à ce moment, on aurait l'avantage... puisque vous parliez des langues classiques, le latin ou le grec, oui, le latin, en dépit de nos cinq années d'étude en langue grecque, c'est bien difficile de le parler, mais en langue latine, c'était plus facile. Je vous suis mieux, je vous comprends. J'y voyais une belle possibilité pour nos jeunes d'apprendre, à la fois, l'italien. Je pense que ce point est réglé.

Deuxièmement, je voudrais employer une expression utilisée en Chambre cet après-midi, la "déconcentralisation".

M. Saint-Germain: C'est un encadrement. M. Le Moignan: Dans votre tour d'horizon...

Mme Lavoie-Roux: C'est l'encadrement de la maquette horaire.

M. Le Moignan: Au début de la semaine... L'encadrement des Italiens et des Portuguais... Dans votre rapide tour d'horizon, M. le ministre, au début de cette commission, vous aviez parlé justement de la déconcentration, qui était une de vos priorités. Vous avez mentionné deux régions pilotes. Je crois avoir retenu la Gaspésie, Bas-Saint-Laurent et Hull.

M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement. Nous avons inauguré la direction régionale à Rimouski il y a quelques mois. L'autre région est l'Outaouais-Hull.

M. Le Moignan: J'aimerais que vous explicitiez davantage la réussite, parce que vous l'avez simplement mentionnée en passant, parce qu'il est question d'ajouter, je crois, quatre régionales de plus. Est-ce que les résultats de votre expérience sont positifs jusqu'à maintenant?

Mme Lavoie-Roux: Ils vont faire l'évaluation à l'automne.

M. Morin (Sauvé): L'évaluation s'est faite, évidemment, de façon officieuse tout au long du fonctionnement de ces deux directions régionales et aussi des bureaux régionaux qui existent déjà dans plusieurs régions, mais qui n'ont pas encore le statut de direction. L'évaluation formelle sera faite au cours des mois qui viennent. Jusqu'ici, je puis vous dire que nous sommes très satisfaits de l'évolution de ces bureaux régionaux devenus, dans deux cas déjà, direction régionale. En effet, cela permet de rapprocher le ministère des besoins et des aspirations de chaque région. Dans le cas de la direction régionale de Rimouski, nous avons là-bas quelques dizaines de personnes qui sont implantées dans la région et se tiennent au courant des problèmes de la région quotidiennement. C'est cela la déconcentration, beaucoup plus que les quatre programmes d'activités qui, eux répondent plutôt au souci de décentralisation. Naturellement, les deux choses sont liées. À l'avenir, je compte utiliser couramment le néologisme créé de toutes pièces par le député de Jacques-Cartier, cet après-midi. Désormais, nous allons vers la "déconcentralisation".

M. Le Moignan: C'est un très bon mot.

Mme Lavoie-Roux: Ce serait peut-être plus efficace.

M. Saint-Germain: Cela fera un mot de plus, toujours.

M. Morin (Sauvé): Cela fera en plus un mot très significatif. Je félicite le député de Jacques-Cartier, qui a eu un moment de génie inconscient.

M. Le Moignan: Inconscient...

M. Saint-Germain: Les grands génies, vous savez, sont toujours un peu inconscients.

Mme Lavoie-Roux: La déconcentralisation, je n'y avais pas pensé...

M. Le Moignan: Mais, M. le ministre, je vous donnais Rimouski comme exemple. Maintenant, est-ce qu'ils ont des pouvoirs... Ils n'ont pas encore de pouvoirs décisionnels, jusqu'à maintenant, sur place?

M. Morin (Sauvé): Je vais demander au sous-ministre, l'un de ceux qui a été le plus actif dans la création de ce pouvoir déconcentré. Il y a aussi M. Parent, qui doit être là, le directeur... Il n'est pas là, malheureusement, mais je vais demander au sous-ministre adjoint de vous décrire exactement ce qui se passe dans une direction régionale comme celle de Rimouski.

Effectivement, dans les directions régionales, celle de Rimouski en particulier et celle de Hull, l'objectif visé, c'est de faire en sorte que tous les pouvoirs de décision qui appartiennent actuellement au central, relativement au vécu des commissions scolaires quant à des demandes d'autorisation, qu'il s'agisse de l'aspect budgétaire, des équipements, des enseignements, des personnels, l'objectif visé, c'est de faire en sorte que ça devienne des unités administratives ayant des pouvoirs et des responsabilités sur leur territoire.

Pour la présente année, 1977-1978, ces directions régionales n'avaient pas encore en main ces pouvoirs, parce que ça suppose quand même des modifications législatives pour faire en sorte qu'elles soient investies de pouvoirs. Mais elles agissaient comme telles, compte tenu qu'au central, l'ensemble des décisions étaient données à la direction régionale comme si, de facto, c'était fait. Alors, les commissions scolaires ont transigé avec les directions régionales, tant dans le domaine administratif, au niveau du financement, des équipements, des personnels, qu'au niveau pédagogique, l'autorisation des enseignements, des développements de programmes d'enseignement et des différents services complémentaires, tels que le service aux étudiants ou autres. Il y a eu du personnel ajouté dans les directions régionales, personnel qui vient du central. Ce ne sont pas des postes nouveaux dans les secteurs primaire et secondaire. C'est un déplacement de postes du central vers les régions.

M. Le Moignan: Mais combien d'années prévoyez-vous pour en arriver à de nouvelles mesures législatives pour légaliser le travail, en quelque sorte, ou est-ce que vous allez attendre l'expérience d'autres centres?

M. Morin (Sauvé): À vrai dire, les nouvelles règles législatives ne seront peut-être pas nécessaires dans l'immédiat. Nous pouvons faire beaucoup au plan administratif. Nous n'avons pas eu besoin d'autorisation législative, par exemple, pour créer les directions régionales. Il se peut qu'éventuellement, dans la foulée du livre vert, et une fois que nous verrons plus clair sur les critères de décentralisation et les objets de décisions qui pourraient être transférées aux commissions scolaires, il se peut que nous en venions à la conclusion qu'il vaut mieux modifier la Loi de l'instruction publique, mais ce n'est pas le cas pour l'instant. De toute façon, cela viendrait après 1981.

M. Le Moignan: Je voudrais peut-être aborder un autre problème.

M. Alfred: Sur le même sujet.

M. Le Moignan: Une question, oui?

M. Alfred: M. le ministre, moi aussi, je suis très en faveur des directions régionales, mais j'aurais voulu, par exemple...

M. Morin (Sauvé): Vous en avez une excellente dans votre région.

M. Alfred: D'accord, oui, mais tout ce que je veux, par exemple, c'est que nous soyons très prudents dans l'établissement des directions régionales, même si ça fonctionne très bien, parce que je veux que cela soit au moment ou les parents sont réellement conscients de ce qui se passe au niveau de ces directions régionales. On peut bien avoir des directions régionales, mais il faut aussi changer les mentalités, changer la façon d'agir, la façon de se comporter, et je ne voudrais pas que les directions régionales se comportent avec des dimensions traditionnelles ou autre chose, avec les mêmes comportements que ceux qu'elles avaient dans le passé. C'est très beau en soi, je voudrais que ça se continue, que les décisions se prennent, bien sûr, au niveau du milieu, mais je voudrais que les décisions soient réellement prises par le milieu, en respectant les attentes et les besoins du milieu. (17 h 15)

M. Morin (Sauvé): Je puis vous dire, M. le député, que ce n'est pas par hasard que les premières directions régionales ont été créées dans deux régions, dont l'une en particulier a connu beaucoup d'animation dans le passé. C'est celle du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Cependant, si nous devions attendre que le milieu vienne nous réclamer à cor et à cri de créer ces directions régionales, il se pourrait que nous attendions longtemps. C'est la raison pour laquelle il faut quelquefois devancer légèrement le milieu. Le seul fait de créer des directions régionales peut amener une meilleure participation des grands agents de l'éducation dans le milieu. C'est dans cet esprit que nous le faisons, mais je puis vous assurer que nous n'implantons pas de direction générale avant que le moment ne soit mûr pour le faire.

Questions générales

M. Le Moignan: II est vrai que votre gouvernement a certainement progressé du côté de l'enseignement religieux, de l'enseignement moral. Dans votre livre vert, vous mentionnez, vous l'avez indiqué...

M. Saint-Germain: Je ne voudrais pas importuner le député, mais est-ce qu'on reste sur le même sujet ou si on peut dévier légèrement?

M. Le Moignan: Je pense qu'on m'avait alloué 20 minutes.

Le Président (M. Jolivet): II a 20 minutes; s'il veut aller au deuxième pour combler ses 20 minutes, il n'y a pas de problème.

M. Saint-Germain: On pourra revenir sur ce sujet?

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Le Moignan: Je ne crois pas utiliser mes 20 minutes, de toute façon.

En plus, cette année, au point de vue de la pastorale, au primaire, je crois que c'est un très grand progrès. Mais il y a une question qui me chicote et qui me tracasse un peu, ce sont les jeunes qui sont exemptés de l'enseignement religieux. Ce n'est peut-être pas tragique dans des milieux comme le nôtre ou peut-être dans une école où il y a trois, quatre ou cinq enfants qui, malheureusement, arpentent les corridors, parce qu'on n'a pas d'organisation. J'ai aussi rencontré des parents des milieux urbains qui ont des problèmes aussi. Je crois que cela doit être l'une de vos préoccupations. Dans une école où les inscriptions sont nombreuses, il y a 25, 30, 40 ou 50 enfants — peut-être moins — est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de leur organiser une classe d'activités spéciales ou un enseignement, non pas religieux, mais social ou moral? Ce n'est peut-être pas facile. Je ne parle pas de nos milieux, c'est presque impensable, mais là où les écoles sont plus importantes, où les parents demandent peut-être un pourcentage plus élevé de la dispense de cet enseignement religieux ou moral?

M. Morin (Sauvé): Au cours de la tournée du livre vert, j'ai reçu de très nombreuses plaintes au sujet de l'exercice de ce droit d'exemption. Particulièrement en ce qui concerne les élèves. De surcroît, des associations comme l'AQADER, qui défendent le droit à l'exemption, sont venues nous dire que ce droit n'est pas effectivement respecté dans la majorité des cas.

Cet hiver, devant le nombre de plaintes que nous recevions, nous avons créé, au sein du ministère, deux comités internes, pour étudier l'exercice du droit d'exemption, pour le rendre plus efficace au niveau des commissions scolaires, pour faire en sorte que cela ne corresponde pas à des promenades dans le corridor ou à des séances à la bibliothèque, mais que cela corresponde, selon d'ailleurs les règlements du comité catholique, à un enseignement moral, ce qu'on appelle l'éducation morale.

L'autre comité, le second, cherche les moyens de mieux équiper les enseignants appelés à donner cet enseignement d'éducation morale.

Au cours des mois et des années qui viennent, j'ai constaté, durant la tournée du livre vert, qu'il y aura beaucoup à faire pour que ce droit à l'exemption soit respecté et fasse l'objet d'un enseignement équivalent. Car les parents qui demandent l'exemption ont pour souci, et nous l'ont fait savoir, de faire donner à leurs enfants un enseignement moral.

M. Le Moignan: Est-ce que vous avez des statistiques jusqu'à maintenant? Cela peut représenter quel pourcentage?

M. Morin (Sauvé): Jusqu'ici, les nombres sont infinitésimaux, mais, si vous le désirez, nous pouvons faire une recherche. Il faudra que nous la fassions auprès des commissions scolaires pour tenter de vous dire combien il y a d'élèves ou de parents qui demandent l'exemption, peut-être même un des deux comités internes a-t-il ces chiffres. C'est bien possible. Nous l'avons noté, M. le député. Lorsque j'aurai la réponse, je vous la communiquerai.

M. Le Moignan: Vous avez fait état, dans votre exposé d'ouverture, de 20 000 ou 30 000 questionnaires, le chiffre n'a pas d'importance...

Mme Lavoie-Roux: 23 000.

M. Le Moignan:... 23 000. Il s'agit de la valeur des questionnaires, pas du questionnaire comme tel, mais de la valeur des réponses. À certains endroits, une personne est allée, elle a réuni 100 ou 200 parents, ils ont pris le questionnaire en main, ils étaient pressés, elle leur a dit: Voici comment répondre. Vous avez un choix entre cinq, alors, faites un X sur le troisième. Elle était pressée, il n'y a pas eu de question et elle est disparue. Sous toutes réserves, cela s'est fait dans deux ou trois cas qu'on a portés à mon attention. Je me dis, à ce moment-là, quelle est la valeur du questionnaire quand on indique... je ne veux pas dire que les 23 000... Il y a toujours des exceptions, mais...

M. Morin (Sauvé): Vous me donnez vous-même ces exemples sous toutes réserves. J'aimerais bien que vous les précisiez parce qu'on ne peut pas, à l'occasion de rumeurs énoncées sous toutes réserves, juger d'une vaste opération qui a entraîné la participation de plusieurs dizaines de milliers de personnes, puisque, pour beaucoup de questionnaires, la participation moyenne a été de dix personnes.

M. Le Moignan: J'ai un ou deux cas où les parents m'ont affirmé: On n'a pas eu le choix, on n'a pas pu poser de questions, le monsieur était pressé. Il a dit: Répondez ici, répondez ici. Quand on ne savait pas, il a dit: Laissez faire.

M. Morin (Sauvé): Ce qui s'est produit, c'est que certaines associations qui défendent des droits spécifiques, notamment pour la confession-nalité, ont souvent procédé de la sorte. Ils ont réuni des gens, ils leur ont fait remplir des questionnaires. Mais nous avons une idée d'où peuvent venir ces questionnaires et je pense qu'on va tenter d'en tenir compte, mais, sur un nombre de 23 000, cela ne peut pas être la majorité, vous comprenez. C'est un nombre infime de groupes qui ont procédé de la sorte.

M. Le Moignan: Non, je vous l'ai dit, mais je sais que cela s'est fait.

M. Morin (Sauvé): Vous n'êtes pas le premier à m'en parler d'ailleurs.

Mme La voie-Roux: Moi aussi, j'ai eu des exemples, M. le ministre, que les choses se sont passées comme cela et pas nécessairement en faveur de groupes de confessionnalité. Il y en a eu dans ce cas-là, je l'admets avec vous, mais il y a aussi d'autres groupes qui voulaient... Vous savez, chacun essaie de faire valoir ses idées et il y a eu même des réunions très houleuses où on a presque essayé de boycotter les séances.

M. Le Moignan: Dans les exemples que j'apporte, ce n'était pas des types qui voulaient défendre l'école catholique. Ce ne sont pas du tout des membres d'associations du genre. C'est quelqu'un qui passait, c'était en Gaspésie, j'ai oublié les noms; je pourrais peut-être les retrouver, mais cela ne change rien, en somme, à la valeur générale.

M. Morin (Sauvé): De toute façon, nous avons voulu faire compléter ces questionnaires par un sondage qui est fait de façon scientifique, avec échantillonnage et questions à l'appui, qui nous donnera des données complémentaires. Autrement dit, nous ne serons pas à la merci d'un seul instrument, mais nous avons voulu les multiplier pour nous donner une idée de ce que le milieu pense. L'instrument le plus important, pour autant que je suis concerné, c'est la tournée, qui me permet de rencontrer directement les principaux agents d'éducation et, en tournée, jusqu'ici, j'ai déjà reçu 400 mémoires et je m'apprête à en recevoir encore une centaine au mois de juin. Donc, en tout et partout, j'aurai moi-même, personnellement, entendu quelque 500 mémoires. Je vous assure que ce contact direct avec la population est éminemment salutaire.

M. Le Moignan: M. le Président m'indique, je pense, que mon temps tire à sa fin. Nous venons de parler de lait spirituel, je voudrais aborder encore le sujet du lait, la même question du lait.

On a fait allusion, à l'Assemblée nationale cet après-midi, à la distribution du lait dans les écoles. C'est commencé, vous prévoyez atteindre cette année 350 000 jeunes. Est-ce que ceci se fait à la demande des commissions scolaires? Je sais que, dans notre région, peut-être parce que le lait vient d'en dehors, il y a très peu de commissions scolaires qui procurent cet avantage à leurs jeunes. Est-ce que vous procédez selon un plan établi pour couvrir la province ou si ce sont les premiers qui demandent qui sont les premiers servis?

M. Morin (Sauvé): Un instant, je vous prie. Nous cherchons une réponse précise à vous donner.

Le choix des commissions scolaires est fait par une équipe du ministère de l'Éducation et on se base essentiellement sur la richesse du milieu, sur ce qu'on a appelé la carte de la pauvreté, l'étude qui a été faite des milieux défavorisés, pour choisir d'abord les commissions scolaires dont la

population en avait le plus besoin. C'est le premier critère de choix. Le deuxième critère, c'est de compléter la distribution, pour les commissions scolaires déjà choisies dans un territoire donné. Il y avait des populations qui n'en recevaient pas encore, parce que la première opération a été restreinte. Cela a été de compléter les milieux déjà choisis dans un premier temps.

Le critère de base, c'est d'abord d'identifier les milieux défavorisés pour faire la distribution du lait dans les écoles.

M. Le Moignan: Le nôtre est déjà identifié depuis longtemps, est-ce qu'il se donne beaucoup de lait dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie?

M. Morin (Sauvé): Nous pouvons peut-être vous donner des chiffres plus précis.

M. Le Moignan: Plus tard.

M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas donner simplement des réponses vagues.

M. Le Moignan: Cela ne presse pas, ça peut venir la semaine prochaine.

M. Morin (Sauvé): Nous pouvons vous trouver ça. Mais sachez, M. le député de Gaspé, que, d'ici septembre 1981, nous avons l'intention, c'est du moins notre objectif, de couvrir 100% des clientèles scolaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau avait demandé la parole.

M. Alfred: C'était pour compléter un peu la question qu'avait touchée le député de Gaspé concernant le formulaire qui a été envoyé aux parents. Personnellement, j'ai participé à une rencontre où a été invité un certain philosophe, professeur à l'Université de Montréal, pour parler aux parents du livre vert. Ce qui m'a le plus surpris, premièrement, je suis catholique d'abord et pratiquant ensuite, en même temps, c'est que ce philosophe professeur délégué par les commissaires de Montréal est arrivé dans l'Outaouais, a rencontré douze parents...

Mme Lavoie-Roux: Un professeur de Montréal?

M. Alfred: Oui, de Montréal, un philosophe qui reste à Montréal.

Mme Lavoie-Roux: II n'a pas été délégué par les commissaires de Montréal.

M. Alfred: En arrivant dans l'Outaouais; malheureusement, ce monsieur a pris le temps de tenter de démolir le livre vert. Il n'a pas fait la différence entre un livre vert et un livre blanc, d'une part. D'autre part, j'étais très surpris de voir comment il cherchait à mettre en doute les intentions mêmes du ministre dans ce livre vert.

Ma présence, heureusement, a corrigé les choses...

Mme Lavoie-Roux: Je n'en doute pas.

M. Alfred: ... et troisièmement...

Mme Lavoie-Roux: Vous aviez un allié.

M. Alfred: ... c'est vrai d'ailleurs. Troisièmement, ce qui m'a le plus surpris, c'est de voir ce gars démolir sans scrupule les courants pédagogiques qui peuvent quand même inspirer les théoriciens de l'éducation pour pouvoir modifier certains rapports de l'enseignement. Malheureusement, les parents étaient là et tout le monde acceptait ce que monsieur disait.

Premièrement, il n'était pas question... Le premier point qui consistait, bien sûr, la première hypothèse était d'emblée acceptée. La deuxième hypothèse, il fallait d'emblée la rejeter et la troisième aussi. Donc, c'était sans discussion; les parents devaient accepter la première et, sans discussion, rejeter la deuxième. J'ai trouvé personnellement, pour un catholique, qu'il manquait d'ouverture. J'ai repris effectivement, j'ai ajouté que le ministre de l'Éducation était catholique pratiquant et moi aussi, qui y assistais, que j'étais un catholique pratiquant, mais que nous avons beaucoup de respect pour les autres.

C'est regrettable que ce gars qui est arrivé dans l'Outaouais, ait adopté ce ton pour faire remplir les formulaires. (17 h 30)

M. Morin (Sauvé): Évidemment, les questions d'éducation tiennent aux tripes des gens. C'est bien compréhensible, puisqu'il s'agit des enfants, il s'agit de l'avenir. Cela ne tient pas seulement à l'esprit et au coeur. Cela prend aux tripes. Il ne faut pas s'étonner que le livre vert ait mobilisé beaucoup de citoyens de toutes les tendances. C'était d'ailleurs destiné précisément à un grand débat. Chacun défendait ses couleurs. C'était bien normal. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de s'en scandaliser. Mais, bien sûr, c'est la responsabilité du ministre de l'Éducation de trouver le raisonnable à travers toutes ces discussions. Voilà qui est plus compliqué.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Si je ne m'abuse, on a mentionné pendant la discussion qu'il y avait une pénurie de professeurs de langue anglaise comme langue seconde. Ai-je raison?

Mme Lavoie-Roux: C'est ce que le ministre a dit.

M. Saint-Germain: II y avait une pénurie de professeurs de langue anglaise.

M. Morin (Sauvé): De langue seconde, de professeurs d'anglais, langue seconde.

M. Saint-Germain: Cela explique pourquoi, je suppose, il y a tout de même des professeurs qui enseignent l'anglais langue seconde et qui ne connaissent pratiquement pas la langue.

M. Morin (Sauvé): II y a d'autres raisons qui peuvent être dues au fameux système du "bumping", comme on l'appelle, et à la permanence, qui fait que, pour protéger un emploi, quelquefois, on envoie un professeur enseigner ce pourquoi il n'était pas spécialisé. C'est un problème sur lequel nous nous penchons à l'heure actuelle, dans la perspective des prochaines négociations.

M. Saint-Germain: Le ridicule de toute l'affaire, c'est exactement cela. Vous allez dépenser des centaines de milliers de dollars, dépasser le million de dollars, probablement, pour étudier les questions pédagogiques, les techniques pédagogiques, pour enseigner l'anglais langue seconde.

M. Morin (Sauvé): C'est de l'argent pour le perfectionnement.

M. Saint-Germain: C'est de l'argent pour le perfectionnement. Vous allez tout encadrer cela, encore à coups de centaines de mille dollars et vous allez déconcentrer et décentraliser cela. Mais il reste qu'il y aura dans le réseau des gens qui enseignent l'anglais et qui ne le connaissent pas. Mais, dans un système centralisé comme on a au niveau de l'éducation dans le Québec, ce sont des choses aussi ridicules que cela qui existent.

Comment voulez-vous que les parents aient une certaine confiance, à I'heure actuelle, dans ce réseau? Si le ministre disait à la population...

M. Morin (Sauvé): C'est un lourd héritage.

M. Saint-Germain: II faut que les élèves de langue anglaise qui terminent leurs études, au moins au niveau du cégep — et on pourrait aller jusqu'au niveau secondaire — puissent connaître assez d'éléments de la langue anglaise, pour au moins pouvoir converser, lire un journal ou un livre en anglais, et vice versa pour l'autre réseau. Nos jeunes, au niveau du cégep, devraient être bilingues jusqu'à un certain point.

M. Morin (Sauvé): Trilingues, tandis que vous y êtes.

M. Saint-Germain: Non, restons au mot "bilingue", on a tellement de difficulté à être bilingue, on va laisser tomber les trois langues, si vous voulez, pour le moment.

M. Morin (Sauvé): Le problème, c'est que nous n'avons même pas les ressources pour cela.

M. Saint-Germain: Si le ministre pouvait nous dire aujourd'hui: On va chercher où sont ces professeurs qui enseignent l'anglais et qui ne connaissent pas cette langue. On va se débarrasser d'eux, et jusqu'au dernier. Ce serait un langa- ge que la population comprendrait. La population dirait: On a au moins un patron dans le système.

M. Morin (Sauvé): Je pense que vous devriez demander à votre voisine, ancienne présidente de commission scolaire, ce qu'elle en pense.

Mme Lavoie-Roux: J'appuierais ce que le député...

M. Saint-Germain: C'est la vérité pure et simple.

Mme Lavoie-Roux: J'y reviendrai.

M. Saint-Germain: S'il y avait, dans ce système, un patron, un leadership quelque part.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour répondre au député de Jacques-Cartier, ce n'est pas pour rien que nous tentons de donner aux enseignants qui sont responsables de cet enseignement l'occasion de se perfectionner. Ce n'est pas pour rien que nous mettons dans les réseaux, à la disposition des commissions scolaires, des conseillers pédagogiques de plus en plus nombreux qui, eux, sont qualifiés. C'est pour aider les enseignants à mieux faire leur travail à travers tout le réseau.

Si on s'en tenait à une décentralisation qui remettrait à chaque commission scolaire ce problème, il y a des régions entières du Québec qui ne trouveraient pas un seul professeur d'anglais. C'est notre responsabilité, au gouvernement, de nous assurer que sont mis à la disposition de tous les professeurs, dans toutes les régions, des occasions de se perfectionner.

Pour le reste, c'est bien beau de traiter toutes les choses à coups de hache, mais il y a une convention collective signée par l'ancien gouvernement et, pour autant que je suis concerné, je suis lié par cette convention collective, comme j'étais lié par la loi 22.

M. Saint-Germain: Mais, au moins à la prochaine convention, M. le ministre, est-ce que vous allez insister...

M. Morin (Sauvé): Oui, nous allons...

M. Saint-Germain: ... lors des négociations afin que ces choses n'existent pas? C'est contre l'intérêt public que cela existe.

M. Morin (Sauvé): Je peux vous répondre de façon très directe, M. le député, c'est un de mes soucis et nous allons tenter de créer un champ pour l'enseignement de l'anglais. Est-ce que la partie syndicale l'acceptera d'emblée, cela reste à voir, mais ce sera certainement l'un de nos soucis que de créer un certain nombre de champs qui n'existent pas à l'heure actuelle.

M. Saint-Germain: Cela le sera peut-être, mais quel résultat aurez-vous? Qu'arrivera-t-il lors des prochaines négociations?

M. Morin (Sauvé): J'espère que ce seront des résultats...

M. Saint-Germain: Cela va se faire en cachette entre les représentants du gouvernement et les représentants des syndicats. Il n'y a personne qui sera au courant de l'évolution des discussions...

M. Morin (Sauvé): Bah!

M. Saint-Germain: ... et à un moment donné, qu'est-ce qui va nous arriver?

M. Morin (Sauvé): Bah!

M. Saint-Germain: La population aura une solution au problème.

M. Morin (Sauvé): Vous jugez.

M. Saint-Germain: Là, il va avoir le contrat.

M. Morin (Sauvé): Vous jugez selon les manières de faire de l'ancien gouvernement, M. le député.

M. Saint-Germain: C'est toujours du pareil au même, M. le ministre. Il ne faut pas s'en décourager. Au niveau de l'éducation...

M. Morin (Sauvé): J'espère bien qu'on va arriver à améliorer quand même un peu la situation.

M. Saint-Germain: ... on étudie, on recherche, on change la procédure. Il faut y aller doucement, il faut protéger ses arrières, il faut protéger ses intérêts politiques, il faut protéger ses intérêts pécuniaires. Tout le monde se protège...

M. Morin (Sauvé): Vous avez appris cela au Parti libéral?

M. Saint-Germain: ... mais les enfants ne sont jamais protégés. Ce sont les derniers qui arrivent, il n'y a rien qui passe.

M. Morin (Sauvé): C'est le contraire et, grâce au livre vert justement, nous essayons de remettre l'intérêt de l'enfant au centre de nos préoccupations. Ce que vous venez de nous dire, M. le député, correspond...

M. Saint-Germain: Cela fait...

M. Morin (Sauvé): ... sûrement à ce qui existait sous l'ancien gouvernement. Il ne faut pas en faire un critère de conduite pour tous les gouvernements à venir.

M. Saint-Germain: Des livres verts, des livres blancs, des livres multicolores, cela existe depuis... On étudie, au ministère de l'Éducation, depuis le rapport de la commission Parent.

M. Morin (Sauvé): II y a eu un livre blanc sur la langue au Québec. Maintenant, il y a une Charte de la langue française.

M. Saint-Germain: On a étudié toutes sortes d'affaires, les méthodes globales, toutes sortes de patentes. On étudie, cela n'a pas de bon sens.

M. Morin (Sauvé): Ah oui! mais...

M. Saint-Germain: Les choses les plus concrètes, les plus visibles, les plus évidentes...

Mme Lavoie-Roux: C'est ce que le ministre de la consommation a dit.

M. Saint-Germain: On n'a pas besoin de faire de grandes études pour savoir que quelqu'un qui enseigne l'anglais et qui n'en connaît pas la langue ne fera jamais un bon professeur d'anglais...

M. Morin (Sauvé): M. le député, il ne faut pas...

M. Saint-Germain: Le commun des mortels sait cela.

M. Morin (Sauvé): ... non plus tomber dans le simplisme. Il y a beaucoup de professeurs qui enseignent l'anglais qui ne le connaissent pas bien, mais qui ont des rudiments et qui même le parlent quelque peu. Il s'agit de leur donner l'occasion de se perfectionner.

M. Saint-Germain: Vous allez avoir de la misère à perfectionner un professeur d'anglais qui ne connaît pas la langue anglaise. Premièrement, vous serez obligé de commencer par la lui enseigner.

M. Morin (Sauvé): C'est justement l'objet du programme de perfectionnement. Vous faites là une bien grande découverte.

M. Saint-Germain: Vous devrez, après cela, lui donner des éléments de pédagogie pour pouvoir enseigner ce qu'il sait.

M. Morin (Sauvé): Normalement, il a déjà des éléments de pédagogie, puisqu'il est enseignant.

M. Saint-Germain: Lorsqu'il sera rendu là, il sera prêt à prendre sa retraite et un autre va arriver en arrière. C'est simpliste tout ce que je dis là.

M. Morin (Sauvé): Oui.

M. Saint-Germain: C'est simpliste.

M. Morin (Sauvé): Oui.

M. Saint-Germain: Mais ce qu'il y a de complexe, c'est le système qui est complexe. Dans un système aussi complexe, les idées simplistes n'ont jamais leur place, parce qu'une idée simple n'en-

tre pas dans le système. C'est beaucoup trop compliqué.

M. Morin (Sauvé): L'Idée simple, oui.

M. Saint-Germain: L'idée la plus simple dérange tout le monde. Écoutez une minute, on ne peut pas entrer cela dans le système.

M. Morin (Sauvé): M. le député, une idée simple peut faire son chemin, une idée simpliste, rarement.

M. Saint-Germain: On ne jouera pas sur les mots, cela ne donne rien, monsieur. Jouer sur les mots...

M. Morin (Sauvé): Depuis tout à l'heure, vous nous faites part d'idées passablement simplistes qui n'arrangent rien.

M. Saint-Germain:... ne règle aucun problème au niveau de l'éducation. Disons une idée simple. Comprenez-vous? Quant à mon propos, vous allez voir que lorsque vous viendrez rendre compte de votre administration au niveau du public, le public n'est pas si imbécile. Ce sont des choses qu'il connaît, qu'il sait, qu'il comprend. Il va en tenir compte.

M. Morin (Sauvé): Je suis tout à fait prêt à rendre compte de mes actes devant la population. D'ailleurs, l'Assemblée nationale nous donne l'occasion de le faire tous les jours, encore aujourd'hui, et je continuerai à rendre compte de mes actes.

M. Saint-Germain: II y a des pays...

M. Morin (Sauvé): Si la population n'est pas contente de la façon dont nous gouvernons, il va nous arriver ce qu'il vous est arrivé.

M. Saint-Germain: La même chose et, de plus, c'est à la veille d'arriver. Ici, nous sommes du même avis.

M. Morin (Sauvé): Cela, nous verrons.

M. Saint-Germain: L'enseignement des langues, ce n'est pas nouveau. Il y a des pays, la Belgique, la Suisse... Enfin, si vous êtes un peu en contact avec la population du Québec, surtout les immigrés, vous avez des gens qui savent parler deux ou trois langues couramment, et ils ont appris cela à l'école. Il devrait exister des façons dans le monde occidental d'enseigner l'anglais ou une langue seconde. Ce n'est pas du nouveau. C'est vieux comme les hommes. Est-ce que le ministère s'est intéressé à observer ce qui se passait dans ces pays?

Mme Lavoie-Roux: C'est depuis la tour de Babel.

M. Morin (Sauvé): Bien sûr. J'aimerais beau- coup vous voir déployer le même enthousiasme pour l'enseignement du français qui, lui aussi, laisse à désirer, M. le député. J'aurais pensé que vous nous feriez également quelques représentations de ce côté. Pour ce qui est de l'anglais langue seconde, nous avons effectivement suivi ce qui se fait dans d'autres pays. Nous sommes au courant de certaines recherches en Grande-Bretagne, notamment, qui nous porteraient à croire qu'il vaut mieux retarder l'enseignement de la langue seconde au secondaire, parce que ces études tendent à montrer que l'apprentissage trop jeune d'une langue seconde crée de la confusion mentale.

M. Saint-Germain: ... aurait bien pu vous parler.

M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas si vous avez appris la langue seconde très jeune, M. le député?

M. Saint-Germain: On ne fera pas l'histoire du Québec, monsieur, mais seulement, il y a des choses simples, comme vous dites. Je peux vous parler simplement, si vous voulez, de la question de I'éducation en langue française.

M. Alfred: II y a du simplisme aussi.

M. Saint-Germain: J'ai résolu le problème de mes enfants, parce que j'ai fait exactement comme vous. J'ai envoyé mon fils au collège Stanislas. D'ailleurs, c'est là que j'ai appris à vous connaître. Vous étiez pour moi un parfait inconnu; je me souviens très bien, lors d'une assemblée de parents-maîtres, que vous aviez soutenu les droits des Canadiens français, au Stanislas, vis-à-vis de nos partenaires français, exclusivement. Vous vous souvenez très bien de cela, cela fait déjà quelques années. Cela n'a pas résolu le problème du Québec. Une institution comme le Stanislas a résolu le problème des langues, imaginez-vous. On y enseigne un excellent français. Probablement que cela vous a marqué. Ces gens ont eu la simple idée d'aller chercher à Londres des professeurs d'anglais. Ce sont des idées simples. Avec des idées tout à fait simples, ils ont réussi à se bâtir un prestige, imaginez-vous donc; tous les élèves, même dans les quartiers les plus pauvres, voudraient aller au Stanislas. Qu'est-ce que vous voulez! Seulement, ces idées toutes simples des autorités du collège Stanislas, c'est bien trop simple pour entrer dans le système d'enseignement du Québec. On a un système d'enseignement beaucoup trop compliqué pour cela.

M. Morin (Sauvé): II y aurait une idée simple qui mérite d'être explorée, M. le député, et qui serait, non pas d'aller chercher des enseignants à Londres, puisque nous en avons tout de même en surplus ici, du côté anglophone.

M. Saint-Germain: ... un autre, mais c'est simple. Allons, je vous écoute.

M. Morin (Sauvé): Nous pourrions sans dou-

te — il faudrait voir, évidemment, à quelles conditions, dans quelles circonstances — nous pourrions peut-être faire en sorte que des enseignants francophones enseignent le français à l'école anglaise et vice versa. Ce serait une idée simple, du moins au premier énoncé; elle a déjà fait l'objet de démarches sans grand succès. Je ne pense pas, cependant, qu'on doive l'abandonner. Au cours de l'année qui vient, j'aimerais explorer cette possibilité avec la partie syndicale.

M. Saint-Germain: Mais cette idée est tout à fait simple, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Mais ça, c'est une idée simple...

M. Saint-Germain: Vous ne l'avez pas inventée.

M. Morin (Sauvé): ... mais pas trop simpliste.

M. Saint-Germain: Vous ne l'avez pas inventée. Moi, j'ai entendu émettre ces opinions dans mon comté par d'humbles citoyens, sur le coin de la rue, dans une discussion. Vous dites qu'on a fait des essais, je n'en doute pas. Vous avez dit que les idées simples faisaient souvent leur chemin. Cela a l'air de prendre du temps, parce qu'il n'y a rien de résolu encore à ce point de vue. (17 h 45)

M. Lacoste: Le Parti libéral n'en a jamais fait, par exemple.

M. Saint-Germain: Mais c'est pourtant simple.

Mme Lavoie-Roux: II en a fait autant que ce qu'il y a présentement.

M. Alfred: M. le Président...

M. Lacoste: Qu'est-ce que vous avez fait, vous autres?

M. Saint-Germain: Si tout ça ne se fait pas, c'est qu'il y a des gens ou des groupes de gens qui ont des intérêts à conserver. Tout le monde sait ça et tout le monde admet ça, et il n'y a jamais eu, au-dessus de ces gens-là, des hommes assez forts, assez de leadership, que ce soit au niveau des gouvernements ou au niveau des ministres, des hommes capables de vendre ces opinions, d'aller chercher l'appui de la population pour faire passer ces idées toutes simples dans le système et arriver avec des conclusions pratiques qui ne coûtent pas des millions, mais qui sont extrêmement efficaces. C'est ça que la population attend. La population ne s'attend pas à des livres verts, à des études. Le monde en a soupé de ces choses.

Je n'ai absolument rien contre le fait qu'on étudie. On doit toujours étudier, mais qu'on ne se serve jamais d'études pour mettre de côté des solutions tout à fait simples, parce qu'on s'est trop servi de ces arguments dans le passé.

Vous savez, pour un homme qui veut être im- mobile, pour un homme qui est encarcané, qui ne peut pas bouger sans heurter les intérêts de qui que ce soit ou de quelqu'un, c'est tout à fait simple de former un comité, c'est classique, d'ailleurs, pour faire des études, et on part. On va se chicaner, à savoir si on doit enseigner le français en troisième, en quatrième ou en première année. Qu'on fasse des recherches ou des études pour savoir en quelle année on doit l'enseigner au point de vue pédagogique, rien de mal, mais, pendant qu'on fait ça, qu'on ne fasse rien, c'est absolument catastrophique.

On aimerait que vous preniez, sur des sujets comme ceux-ci, des positions claires, au moins pour nous dire où vous allez. Vous savez, c'est bien beau, on ne peut pas blâmer un ministre de faire le tour de la province et d'entrer en contact avec les populations, c'est normal. Mais comme on sait que le ministre n'est qu'un homme, sur 100 000 qui sont intéressés à gagner leur vie dans l'éducation, c'est bien peu. Lorsqu'on sait la limite de ses décisions, c'est bien peu, et surtout lorsqu'on sait à quelle vitesse, au Québec, les ministres de l'Éducation passent, on peut se demander, même un professeur, jusqu'à quel point ça peut être pratique. C'est très satisfaisant pour le ministre, le temps qu'il est là, (je savoir ce qui se passe. C'est gratifiant. Cela lui donne du "pep". Tout ça, qu'est-ce qu'il en a comme résultat? Il n'y a jamais eu de miracle, entre vous, moi et nous deux! C'est ça, la vie, que voulez-vous? C'est la raison pour laquelle j'ai insisté, hier, pour la "décentra-tion" — il ne faut pas que je me trompe...

Mme Lavoie-Roux: ...

M. Saint-Germain: Vous riez de ça?

Mme Lavoie-Roux: Non, décen...

M. Saint-Germain: Non, la décentralisation, voyons donc! C'est pour ça que je vous dis que tous ces problèmes ne se résoudront pas, il n'y aura pas de solution autrement. C'est là la solution, mettre les décisions au niveau des autorités locales, pour toute décision qui peut être prise localement. Il y a moyen de faire cela et de rendre ce système démocratique de façon que les gens sachent où sont les responsabilités. Encadrez ce que vous voulez ou déconcentrez ce que vous voulez, cela ne changera pas grand-chose dans cinq ou dix ans. Il faudra nécessairement en arriver à décentraliser le système et laisser les parents prendre leur décision. Tant que vous ne serez pas rendus là, il n'y aura pas de miracle qui va se faire au Québec. Pas parce que la population ne veut pas payer... On sait combien la population du Québec a accepté de se faire taxer à la limite pour améliorer son système d'éducation. S'il y a eu des améliorations sensibles? Certainement. Ceux qui sont de notre âge l'ont constaté; on ne l'a pas constaté par des lectures prolongées, on l'a constaté dans la rue, de visu, terre à terre. Mais au point où nous en sommes, avec les sommes dont nous disposons et que nous dépensons, nous commençons à sentir que les résultats laissent énormément à désirer.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): II y a bien des points avec lesquels je me trouvais d'accord dans ce qu'a dit le député de Gaspé, notamment lorsqu'il parle de décentralisation et de l'idée qui consiste à permettre aux parents de jouer un rôle plus considérable dans la gestion de la commission scolaire...

M. Saint-Germain: Répondez-vous au député de Gaspé ou à moi?

M. Le Moignan: C'est une réponse qu'il ne m'avait pas donnée.

M. Saint-Germain: Bon, c'est que vous aviez dit le député de Gaspé.

Le Président (M. Jolivet): Correction, c'est le député de Jacques-Cartier.

M. Morin (Sauvé): C'est juste, excusez-moi. Je reprends le fil de ma pensée...

M. Saint-Germain: Excusez-moi!

M. Morin (Sauvé): Je n'aurais pas dû confondre ces deux députés si différents et si talentueux, chacun à sa manière cependant.

Oui, vous avez totalement raison de penser que nous devons décentraliser les décisions. C'est pour cela que nous songeons à la possibilité de créer ces quatre plans-programmes d'activités qui seront préparés par les commissions scolaires avec l'aide des écoles et même avec l'aide des principaux agents de l'éducation dans chaque école. Je crois que c'est une idée simple — pour utiliser votre vocabulaire — mais qu'elle a des chances de réussir...

M. Saint-Germain: On dira que c'est une idée simpliste.

M. Morin (Sauvé): J'espère bien que non parce que cette idée que vous venez d'énoncer me paraît assez valable. De toute façon, je ne sais pas si vous avez lu le livre vert, mais vous auriez retrouvé, dans celui-ci, des idées assez analogues à celles que vous avez énoncées lorsque vous avez parlé de décentralisation.

Sachez une chose: Nous allons nous attacher, dans la foulée du livre vert, à donner le plus possible la chance aux commissions scolaires de prendre des décisions portant sur des questions comme celles-là. Évidemment, il doit y avoir au centre un ministère qui est responsable d'assurer des services minimaux à travers tout le territoire et un programme minimum pour tous les Québécois. Ce ministère sera responsable de voir à ce que, dans telle région, il n'y ait pas tel enseignement de la langue seconde, alors que dans la région voisine ou une région plus éloignée il n'y en a aucun. L'inconvénient de trop décentraliser, c'est qu'on peut aboutir à des régimes pédagogiques qui soient trop différents d'un endroit à l'autre. Je pense qu'il faut éviter également cet excès.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Saint-Germain: Si vous le permettez, pour terminer, monsieur... Je n'ai pas terminé.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez plus de 20 minutes de passées déjà.

M. Saint-Germain: Je termine là-dessus, M. le Président, si vous voulez, en disant simplement que la différence qu'il y a entre ma façon de voir et la façon du ministre, puisqu'on s'entend sur ces principes de décentralisation, c'est que je crois que la décentralisation sera efficace pour autant que les hommes élus dans le bas de l'échelle auront des responsabilités. Et parmi ces responsabilités, on pourrait parler de diviser la recherche dans la province, ce sont des choses qui peuvent se faire, mais cette responsabilité qu'ils ont de dépenser l'argent du public doit nécessairement se refléter par un pouvoir de taxation. Tant qu'on n'en arrivera pas là, cela restera des mots, la décentralisation.

M. Morin (Sauvé): C'est la raison pour laquelle le gouvernement maintiendra la possibilité d'un impôt foncier pour fins non subventionnées.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Je voulais simplement, M. le Président, ajouter quelques remarques aux propos du député de Jacques-Cartier. J'ai trouvé qu'il était un peu radical, parce que, si on fait table rase de tous nos professeurs francophones qui enseignent la langue seconde, je pense qu'à ce moment-là le ministre de l'Éducation va être dans une très mauvaise posture à partir du mois de septembre. J'ai vécu ce problème dans notre région. Je sais que beaucoup de...

M. Saint-Germain: Je ne voudrais pas vous interrompre, mais je n'ai pas dit que tous les professeurs du Québec qui enseignaient l'anglais ne connaissaient pas cette langue.

M. Le Moignan: Non, je m'en viens...

M. Saint-Germain: Je n'ai jamais dit qu'une telle décision ferait qu'on se débarrasserait de la majorité des professeurs d'anglais du Québec. Là, cela aurait été radical. Je parle d'une minorité.

M. Le Moignan: Je me rapproche de vous tranquillement, mais je connais un peu la situation. Je sais que beaucoup, avec des cours de perfectionnement, pourraient certainement y réussir, parce qu'ils ont déjà des rudiments de la langue, mais il y a une expérience que j'ai tentée dans mon milieu quand j'étais directeur des études, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): ... Ceux d'en haut ont fini l'amiante en troisième lecture.

M. Le Moignan: Les chanceuxl Ils vont aller prendre une crème d'amiante.

Mme Lavoie-Roux: Ils auraient pu nous inviter en passant.

Le Président (M. Jolivet): Continuez, là où vous étiez.

M. Le Moignan: Ce ne sera pas très long, parce que j'ai promis au député de Papineau de lui laisser quelques minutes.

M. le député de Jacques-Cartier, je ne veux pas dramatiser, je sais qu'il y a un certain nombre de professeurs, mais il y a toujours les cours de perfectionnement. J'ai fait une expérience quand j'étais directeur des études. J'avais engagé des professeurs anglophones et, chez nous, cela a été très révélateur. Ils connaissaient un peu la langue française, mais les progrès ont été marqués, évidents, là où ces professeurs enseignaient la langue seconde au cours classique.

Du côté anglophone — j'ai une très bonne expérience pour avoir visité leurs écoles, avoir assisté à certains cours — il y a un immense travail qui doit être fait, parce que la langue seconde, dans les classes anglophones, du moins de notre région que je connais très bien... Les professeurs connaissent un peu la langue seconde, mais ils auraient aussi besoin de se recycler, comme dans d'autres régions. Je pense qu'un immense effort doit être fait de ce côté, quoique, aujourd'hui, les professeurs se soint améliorés, c'est mieux que c'était il y a dix ans ou vingt ans.

C'est un simple petit complément que je voulais apporter, non pas pour détruire votre argumentation car elle est trop forte, mais pour la compléter.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, je suis presque assuré que le député de L'Acadie ne partage pas l'argumentation du député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Un autre.

Mme Lavoie-Roux: Attendez et je vous le dirai après.

M. Alfred: Je pense que M. le député de Jacques-Cartier a parlé de l'apprentissage de l'anglais comme langue seconde pour nos Français. Il veut bien que nos Français soient bilingues, ce sur quoi, nous, du gouvernement, sommes d'accord. Mais il n'a pas insisté avec autant de vigueur sur l'apprentissage du français comme langue seconde pour nos anglophones, d'une part.

Mme Lavoie-Roux: C'était la langue seconde.

M. Saint-Germain: On discutait de langue seconde.

M. Alfred: Langue seconde, de part et d'autre.

M. Saint-Germain: Oui, mais la langue seconde...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jacques-Cartier!

M. Alfred: Je dis pour les deux parties.

M. Saint-Germain: On me fait dire des choses que je n'ai pas dites.

M. Alfred: Deuxièmement, M. le député de Jacques-Cartier a parlé du perfectionnement des professeurs, il a parlé des professeurs d'anglais qui ne sont pas compétents. J'aurais voulu qu'il parle de perfectionnement pour tous les professeurs en général. J'aurais voulu qu'il ne privilégie pas l'anglais au détriment des mathématiques, au détriment du français, au détriment de la chimie.

Une chose retient mon attention. En mettant en doute la compétence des professeurs pour enseigner l'anglais, il met en même temps en doute la compétence du directeur de l'école qui doit évaluer mensuellement le rendement pédagogique de chaque professeur. Il n'appartient donc pas au ministre de l'Éducation de mettre tout le monde dehors. Il appartient au directeur de l'école de mesurer le rendement pédagogique de chaque professeur. Si, à la fin de l'année, il se rend compte que le professeur n'est pas en mesure de répondre adéquatement à ce qu'on attend de lui, je pense qu'à ce moment-là, il appartient au directeur de l'école, à l'agent pédagogique du département en question, d'en arriver aux conclusions qui s'imposent.

M. Saint-Germain: Vous irez leur dire.

M. Alfred: Sans les mettre dehors, mettre à la disposition de ces professeurs qui seraient handicapés des méthodes de perfectionnement pour qu'ils apprennent.

Mon Dieu, si on suivait, à mon humble avis, l'argumentation du député de Jacques-Cartier, je me demande où nous irions. Pour un libéral, cela m'étonne.

Le Président (M. Jolivet): On peut suspendre les travaux, à moins que le ministre n'ait un dernier mot à dire.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, est-ce que je pourrais souhaiter que nous passions à autre chose ce soir? Il nous reste quand même divers aspects de l'enseignement primaire et secondaire à couvrir. Il nous reste tout le collégial, l'universitaire. Si on veut être là jusqu'à la mi-juin, on n'a qu'à continuer au rythme actuel.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, les préoccupations du ministre sont certainement justifiées. Il reste qu'il y aurait quelques questions supplémentaires très précises que je voudrais poser. Je ne pense pas avoir fait de discours de vingt

minutes pour passer le temps. Vous pourriez peut-être me donner une réponse à ces questions après le souper.

M. Morin (Sauvé): Sûrement. Voulez-vous nous les donner maintenant? Il reste tout de même deux minutes avant six heures. Si elles comportent des chiffres, nous pourrions... (18 heures)

Mme Lavoie-Roux: Non. Ce ne sont pas, d'une façon générale, des questions qui comportent des chiffres. C'est une question à laquelle vous n'avez pas répondu tout à l'heure. On ne m'a pas répondu si, dans les commissions scolaires protestantes, on enseignerait l'anglais en première année. Il semble, dans le fond, y avoir un décalage entre l'enseignement de la langue seconde — on parle à ce moment-ci de la langue anglaise — entre les commissions scolaires catholiques et les commissions scolaires protestantes.

Là-dessus qu'est-ce que le ministre compte faire? Tout à l'heure vous déploriez le fait... étant donné que vous n'aviez pas accédé à la demande que l'enseignement de l'anglais soit donné aux Italiens... Il y a quand même deux écoles qui fonctionne selon ce système à Montréal. Pour des raisons que l'on connaît, elles étaient bilingues, elles ont été graduellement... Ce sont quand même des questions qui font que les gens se disent: Si on va dans le secteur protestant, il y a peut-être plus de chances qu'on apprenne l'anglais. Comme je le disais tout à l'heure, fondées ou non, ce sont des réalités. Je sais qu'il y a beaucoup d'écoles juives où on enseigne l'anglais très tôt, etc., enfin, c'est ce genre de questions. Après cela, il y a des remarques que je voulais faire. Par exemple, quelle évaluation a-t-on faite du programme de perfectionnement des professeurs de langue seconde, que ce soit du côté anglais ou du côté français, parce qu'on y a quand même mis passablement de millions depuis... Est-ce qu'on est à la cinquième année cette année?

M. Morin (Sauvé): C'est la cinquième année du plan de développement des langues.

Mme Lavoie-Roux: Du plan de développement des langues. On y a mis passablement d'argent. Dans quelle mesure a-t-on évalué si ces professeurs se retrouvaient à enseigner l'anglais, langue seconde ou vice versa? Je sais fort bien qu'à la suite, par exemple, du "bumping", qu'à la suite du projet de rotation à l'intérieur des écoles élémentaires qui avait été prévu pour utiliser les professeurs qui s'étaient perfectionnés, à la suite du fait aussi que l'enseignement de l'anglais n'était prévu qu'au deuxième cycle du secondaire, cette rotation s'avérait beaucoup plus difficile que du côté anglais. On peut continuer dans la même veine. Je pense qu'il faut que les gens se perfectionnent, mais il faudrait quand même évaluer, après quatre ans, où se retrouvent ces professeurs. On pourrait se retrouver, après y avoir mis considérablement d'efforts financiers, devant un insuccès relatif, si vous voulez.

Du point de vue du surplus des professeurs, ce que je voulais dire, c'est que, par exemple, au PSBGM, je pense que le sous-ministre pourrait le vérifier beaucoup plus facilement que moi, parmi leurs professeurs en surplus mais qui ne demeureront peut-être pas tous en surplus à cause des conditions qu'on connaît, la très grande majorité des 103 professeurs qu'ils ont identifiés comme étant du surplus, je pense que je n'exagérerais pas en disant que 90 d'entre eux sont des professeurs d'anglais. Ce ne sont pas nécessairement des professeurs de langue seconde, mais ce seraient peut-être des gens faciles à recycler comme professeurs d'anglais langue seconde. Il y aurait 90 professeurs d'anglais dans le surplus du PSBGM. Il faudrait également voir...

M. Morin (Sauvé): Combien dites-vous?

Mme Lavoie-Roux: Sur les 103, mais il n'en restera peut-être pas 103. On connaît toutes les dispositions. Mais la très grande majorité sont des professeurs d'anglais. Cela m'a été dit par le PSBGM. Il y a également, et cela aussi, il faudrait le vérifier, McGill qui contribue à un effort assez considérable, je pense, dans la formation de professeurs d'anglais langue seconde. En janvier, je pense, on m'a dit qu'il y avait une cinquantaine de ces professeurs ou qui étaient sans emploi ou qui enseignaient dans d'autres matières que celle pour laquelle ils avaient été formés. Enfin, je me demande si on a vraiment fait l'inventaire des ressources. Je connais les contraintes de la convention collective. Même si, à certains moments, le député de Jacques-Cartier nous a fait rire, et ce n'est peut-être pas mauvais rendu à 18 heures, il y a beaucoup de vrai dans ce qu'il dit, à l'égard du fait qu'on fait des efforts de perfectionnement des maîtres, mais qu'on ne les retrouve pas là où ils devraient être.

Du côté de la prochaine négociation, je vous souhaite bien d'être capable de créer un champ. C'est quand même là un des gros handicaps que l'on a vis-à-vis de tout cet enseignement de la langue seconde. Avec le surplus de professeurs, la clause de l'ancienneté est toujours celle qui prévaut. On pourrait se retrouver, malgré de gros efforts, dans cinq ou dix ans, avec peu de progrès. Je ne sais pas de quel côté il faut orienter les efforts, mais je crains que si on continue ce plan de perfectionnement sans essayer d'évaluer ce qui s'est fait durant les quatre premières années, on ne se retrouve avec des déceptions assez grandes.

M. Morin (Sauvé): Merci, Mme le député. Je vais tenter de répondre à ces questions tout à l'heure à la reprise, vers 20 heures. Est-ce que je puis espérer, M. le Président, que nous pourrons passer à l'enseignement collégial durant la soirée?

Mme Lavoie-Roux: Non, je ne le crois pas, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que je puis espérer que nous terminerons l'enseignement primaire et secondaire?

Mme Lavoie-Roux: Je ne peux pas vous donner de garantie là-dessus, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Mme le député, je ne voudrais pas avoir à vous rappeler que j'ai accepté de retarder le début de cette commission parlementaire parce qu'on m'a bien assuré, de votre part, que nous terminerions à temps, dans les délais prévus, sinon j'aurais insisté pour que nous commencions à la date et à l'heure prévue.

Mme Lavoie-Roux: Ce que je peux vous garantir, M. le ministre, c'est que nous ne retarderons pas la date qui a été prévue pour la fin des travaux.

M. Morin (Sauvé): C'est bien. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

Reprise de la séance à 20 h 13

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'éducation poursuit l'étude des crédits du ministère de l'Éducation.

Si on m'a bien informé, vous étiez à l'étude du programme 4, enseignement primaire et secondaire public. La parole était au député de...

Mme Lavoie-Roux: Non, elle était au ministre. Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, Mme le député de L'Acadie m'avait posé un certain nombre de problèmes relatifs à l'enseignement des langues. Permettez-moi d'apporter quelques réponses ou quelques esquisses de réponses.

Pour ce qui est de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, dans les classes françaises du BEPGM, il semble bien, d'après les renseignements que nous avons pu obtenir que, effectivement, il se donne un enseignement de la langue seconde dans les petites classes, mais c'est à vérifier, parce que nous n'en connaissons pas, du moins, nous n'avons pas sous la main l'étendue exacte de cet enseignement.

Récemment, le BEPGM a fait part à la population d'un projet au terme duquel il y aurait eu un enseignement non pas bilingue, mais quasiment bilingue, dans ses classes françaises. Il y aurait eu une proportion de 25% de l'enseignement qui se serait donné en anglais.

Mme Lavoie-Roux: C'est ce qu'il propose, je crois, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Oui, il propose cela et également des techniques d'immersion. C'est tout à fait contraire à ce dont nous avions convenu lors de nos rencontres. Je ne sais pas d'où est venue exactement cette suggestion, mais il est clair — d'ailleurs. M. Gauthier, des écoles protestantes françaises, l'a fait savoir publiquement — que le programme qui s'applique dans les écoles françaises du BEPGM est le programme normal, le programme québécois. Je n'ai pas l'intention d'approuver un système qui serait pour le quart anglophone.

Peut-être le BEPGM a-t-il pensé qu'en transformant, qu'en bilinguisant son système d'écoles françaises, il arriverait à attirer certains immigrants vers ses écoles. Mais, si ce devait être le cas, je ne serais certainement pas d'accord. Ces écoles françaises doivent le rester. Il reste, évidemment, à discuter de la place exacte que doit avoir l'enseignement de la langue seconde dans ces écoles, mais je ne saurais approuver une situation où l'on trouverait le quart de l'enseignement en anglais, ou encore des techniques d'immersion dès le primaire pour ces jeunes élèves.

D'ailleurs, j'ai cru constater, à la lecture des journaux ces temps derniers, que les enseignants et la direction des écoles françaises du BEPGM partagent mon souci et n'ont pas l'intention de se laisser transformer en écoles bilingues. Cela soulève — et avant même que la question ne vous vienne à l'esprit, j'y réponds — la question de connaître le statut exact des écoles françaises du BEPGM à l'intérieur de cette vaste structure.

Il va falloir, je crois, qu'on s'achemine, au fur et à mesure que le nombre d'élèves francophones va augmenter au BEPGM, vers un système analogue à celui que nous connaissons à la CECM, en faveur des anglo-catholiques. Il faut absolument que les franco-protestants du BEPGM arrivent à obtenir des droits semblables aux anglo-catholiques de la CECM. Sur ce plan, je dois dire, Mme le député...

Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait d'accord avec vous.

M. Morin (Sauvé): que la CECM a été exemplaire depuis des années et que ces droits ne sont pas seulement pour la minorité anglophone; ils sont également pour les francophones qui sont en minorité dans un système. Voilà pour la première question.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je peux quand même vous...

M. Morin (Sauvé): Oui, allez-y, puisque j'en ai plusieurs auxquelles je dois vous apporter des réponses. Si vous voulez faire des commentaires, je vous y invite.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que ce dont vous venez de parler est un projet qui, quelles que soient les intentions du PSBGM — j'ai dit le PSBGM pendant trop longtemps, il va falloir que je me discipline à dire le B...

M. Morin (Sauvé): BEPGM.

Mme Lavoie-Roux: ... EPGM. Ma question était celle-ci: Seriez-vous contre... Et je crois qu'ils donnent cet enseignement de l'anglais dans les basses classes, disons 20 minutes par jour, progressivement, selon le programme final de 5e et 6e année. Vous n'écarteriez pas cette possibilité? Je pense que cela se donne depuis des années, depuis qu'ils ont des classes françaises.

M. Morin (Sauvé): Je ne serais pas tenté d'aller à l'encontre de situations existantes, sauf si on me démontrait, naturellement, que c'est péda-gogiquement néfaste. Donc, je ne prévois pas de difficulté de ce côté, si on s'en tient à des horaires de 20 minutes, bien sûr. Mais si on tentait d'instaurer un enseignement de l'anglais pour le quart du temps, là je ne marcherais pas du tout, je tiens à vous le dire.

Mme Lavoie-Roux: Cela va.

M. Morin (Sauvé): La seconde question portait sur les deux écoles francophones ou en voie de francisation de la CECM, à destination des italianophones, des jeunes enfants d'origine italienne, les écoles Saint-Philippe-Benizi et Notre-Dame-de-la-Consolata qui relèvent toutes les deux de la CECM.

Mme Lavoie-Roux: De la Défense.

M. Morin (Sauvé): De la Défense ou de la Consolata?

Mme Lavoie-Roux: De la Défense.

M. Morin (Sauvé): Comme elle relève de la CECM, je ne doute pas un seul instant que vous ayez raison, madame.

Mme Lavoie-Roux: À moins qu'on ne l'ait baptisée à nouveau.

M. Morin (Sauvé): Dans ces cas, il s'agit d'écoles qui étaient autrefois bilingues. Ce sont des expériences libérales d'il y a quelques années, si ma mémoire est bonne.

Mme Lavoie-Roux: II y a environ 60 ans, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Est-ce juste? Pour les deux écoles?

Mme Lavoie-Roux: Oui, pour les deux écoles. M. Morin: Bon.

Mme Lavoie-Roux: Enfin, cela date de très loin. Il y avait vraiment une tradition. Au départ, c'étaient des écoles trilingues qui, finalement, sont devenues plutôt bilingues.

M. Morin (Sauvé): Bien. Il s'agit donc, si j'ai bien compris — et là-dessus, vous pourrez nous éclairer puisque vous avez connu l'expérience de plus près que nous — d'une sorte de processus de "phasing out"; il s'agit, peu à peu, de transformer ces écoles en écoles françaises. Je crois que c'était l'objectif visé par la politique de ces dernières années.

Dans mon esprit, ces écoles doivent devenir des écoles françaises avec un bon enseignement de l'anglais, langue seconde. Autrement dit, nous devons évoluer vers une situation normale. Je ne serais pas partisan d'avoir, pendant trop longtemps, sauf à titre de transition, des cas particuliers qui pourraient avoir tendance, par la suite, à se généraliser. Je ne crois pas que l'école bilingue ou qui fait une trop large place à l'anglais, langue seconde, dès le primaire soit souhaitable. Qu'on commence à y faire l'apprentissage de la langue seconde, j'en suis; qu'on tente de consacrer le quart ou le tiers du temps à l'anglais, cela, je n'en serais pas partisan, sous aucun prétexte.

La vraie solution consiste, à mon avis, à des apprentissages tout à fait élémentaires à ce niveau et à un enseignement intensif de l'anglais au niveau secondaire, avec des professeurs de qualité, des moyens d'enseignement idoines, de bonnes techniques d'enseignement. C'est surtout à ce niveau, je pense, qu'on peut arriver à atteindre les objectifs de formation que nous nous sommes donnés dans le livre vert pour l'enseignement de l'anglais, langue seconde.

Passons maintenant au perfectionnement des professeurs d'anglais, langue seconde. Nous avons prévu, l'an dernier, un dégagement pour une session complète et ce système semble avoir donné satisfaction.

Mme Lavoie-Roux: Mais ceci était le cas pour les professeurs de langue seconde, ils étaient dégagés pour une session.

M. Morin (Sauvé): C'était effectivement le cas, en vertu du plan de développement des langues.

Mme Lavoie-Roux: De développement des langues.

M. Morin (Sauvé):... depuis environ deux ans. Mme Lavoie-Roux: Plus que cela.

M. Morin (Sauvé): Tournons-nous maintenant vers le français, langue seconde. La solution qui avait été trouvée était différente. C'était celle du dégagement hebdomadaire qui permettait à l'enseignant de continuer à enseigner, à exercer son métier. Cette expérience s'est avérée moins intéressante, moins rentable, par rapport aux résultats que nous avons obtenus. C'est la raison pour laquelle, actuellement, nous cherchons d'autres solutions plus pratiques, y compris celle que je mentionnais cet après-midi et qui a trait à l'échange d'enseignants: les anglophones enseignant dans les classes françaises et vice versa. C'est une solution difficultueuse parce que vous n'ignorez pas qu'elle met en cause des postes d'enseignants et que, de ce fait, elle évoque automatiquement des réticences du côté des syndicats. Néanmoins,

c'est une solution que je veux explorer en vue des prochaines négociations qui vont commencer en janvier 1979.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, excusez-moi de vous interrompre mais, à l'intérieur de cette question à laquelle vous tentez de me donner une réponse, la question précise que j'avais posée était: Quelle évaluation avions-nous faite de ce programme de perfectionnement des maîtres, que ce soit français ou anglais, langue seconde quant à leur réaffectation dans des postes qui correspondaient quand même à des études pour lesquelles ils avaient été dégagés pendant un semestre?

M. Morin (Sauvé): Le fonctionnement des règles de la sécurité d'emploi fait qu'il nous est très difficile de répondre à une question comme celle-là. Je dois vous dire que je ne connais pas la réponse. Si vous le désirez, nous pouvons entreprendre les recherches nécessaires, mais j'imagine que nous en aurions pour quelque temps avant d'obtenir une réponse.

M. le Président, puis-je vous demander de faire cesser ces bruits. Ils sont directement sur le mur de la salle, et nous n'arriverons pas à nous entendre de la soirée?

Une voix: On s'est déjà entendu, M. le ministre.

Mme Lavoie-Roux: Pour que vous me donniez une réponse dans les 24 heures ou les 72 heures, ou même dans une semaine ou quinze jours, mais je pense qu'on aura investi après cinq ans — et le sous-ministre ou M. le ministre, vous pourrez me corriger — tout près de $100 millions dans le plan de développement des langues, durant les cinq dernières années.

M. Morin (Sauvé): Tout n'était pas pour le perfectionnement, naturellement.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais quand même, ce sont des sommes considérables, et il faudrait, à un moment donné faire l'évaluation de tout ceci, d'autant plus que, si j'ai bien lu dans le livre, vous le continuez, vous le prolongez pour 1979/80 et ainsi de suite. Je pense qu'après quatre ou cinq ans on a suffisamment de données accumulées pour pouvoir faire l'évaluation et voir s'il y a lieu de réorienter... C'est dans ce sens que je pose la question. Je sais bien qu'on ne peut pas me donner de réponse précise et je n'en demande pas.

M. Morin (Sauvé): De toute façon, comme vous le suggérez, il est temps de faire le point sur cette question, avant d'engager de nouveaux fonds l'année prochaine. Toujours dans la foulée du livre vert, c'est une des questions que je compte tirer au clair. Elle est bien notée d'ailleurs.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Morin (Sauvé): Vous aviez ensuite soulevé la question du surplus d'enseignants au PSBGM et vous vous étiez demandé s'il n'y avait pas moyen, justement, de les transférer.

Mme Lavoie-Roux: De les recycler, toujours.

M. Morin (Sauvé): Ou de les recycler, mais nous ne saurions les recycler et assumer les frais de recyclage que si on peut être sûr de leur réaffectation à l'intérieur d'un réseau qui aurait besoin d'eux. Or, vous savez comme moi que les transferts interréseaux se sont révélés fort difficiles jusqu'ici. Il ne faut pas abandonner pour autant, je crois, mais les quelques expériences d'échanges poste à poste, qui ont eu lieu de 1974 à 1976, à ce qu'on me dit — c'est avant mon arrivée au ministère — on me dit que cela n'a pas fonctionné. Mais peut-être que M. le sous-ministre peut vous donner des détails, cela se passait avant que j'y sois. Il semble bien que cela n'a pas donné les résultats qu'on en attendait. (20 h 30)

Absolument pas, pour différentes raisons; la première était qu'il y avait une difficulté d'unité d'accréditation syndicale. Un enseignant qui venait d'un syndicat de la CECM et qui allait enseigner à Jérôme LeRoyer... il y avait là des responsabilités d'unités syndicales. Il y avait aussi surtout le climat à l'intérieur de l'école pour un anglophone qui arrive et qui doit s'insérer dans une communauté francophone. Ceci a causé plusieurs difficultés et a fait aussi que des enseignants qui avaient accepté se sont retirés de ces projets en cours d'année, pouvant difficilement se soumettre à ce genre de choses. La première année de fonctionnement, on a vu une vingtaine d'échanges; la deuxième année, une dizaine et, finalement, la dernière année, on n'a pu en trouver à cause de ces difficultés essentiellement d'ordre technique syndical et aussi du climat à l'intérieur des écoles.

Mme Lavoie-Roux: II reste, M. le ministre, qu'au début vous avez dit qu'une des difficultés pour l'anglais, c'est qu'il n'y a pas suffisamment de professeurs. Là, je rejoins le député de Jacques-Cartier qui l'a dit en d'autres mots: ce sont vraiment toutes ces contraintes... C'est quand même extraordinaire qu'à Montréal, avec un secteur anglais important et un secteur français également très important, on ne puisse pas profiter, dans l'apprentissage des langues, de cet échange.

M. Morin (Sauvé): Oui, c'est vraiment un peu étonnant. On pourrait s'attendre que de tels échanges soient courants. Si l'Angleterre et la France étaient voisins, j'imagine que de tels échanges seraient courants. Mais, évidemment, chacun sait qu'il y a ici un certain nombre de problèmes qui rendent les rapports entre les groupes un peu plus difficiles et qui éveillent des méfiances réciproques qui sont difficiles à dominer. Néanmoins, si on pourrait arriver à recréer un certain climat de confiance, dans la foulée du livre vert, j'espère qu'on pourrait arriver à faire débloquer des solutions de ce genre.

J'ai dit, cet après-midi, que ces solutions m'intéressaient, que j'ai l'intention de voir jusqu'à quel point on pourrait les appliquer.

Mme Lavoie-Roux: Je remercie le ministre pour ses réponses. Je répète ce que j'ai dit cet après-midi, en dépit d'un programme intensif de perfectionnement des maîtres, de mise en place d'une infrastructure favorable et de révision de programmes également, je pense que cela prend du temps avant que l'effet se fasse sentir dans les écoles et pour les parents. C'est probablement la raison pour laquelle on entend encore autant de récriminations de ce côté.

Pour finir les langues, parce que je pense qu'il faudrait passer à un autre sujet, un mot sur l'enseignement du français. Je me demandais si, compte tenu encore une fois des fameuses clauses d'ancienneté et de "bumping", on ne se retrouvait pas avec le même problème, à savoir que des professeurs se retrouvent professeurs de français. Vous savez, je pense que tout le monde a connu — et le sous-ministre s'en rappellera — le temps où tout le monde pouvait enseigner le français; tout le monde ne peut enseigner la chimie mais tout le monde peut enseigner le français. On est peut-être moins porté à y attacher de l'importance, compte tenu que même les parents disent: Je peux enseigner le français. C'est pour cela qu'il y a tant de critiques sur le français, c'est là où tout le monde pense se sentir familier. Ce serait quand même une chose à surveiller et je me demandais s'il y avait une évaluation de ceci qui était faite, de la même façon que pour l'enseignement de l'anglais ou des langues secondes.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, dans les faits, la situation pour l'enseignement du français est moins grave que celle qu'on peut trouver à l'égard de certaines autres disciplines. Pour une raison bien simple: c'est que la plupart des enseignants de français ont plus d'années d'ancienneté et n'ont pas été victimes, comme d'autres, de cette fameuse technique que vous mentionniez tout à l'heure, la technique des conventions collectives qu'on pourrait appeler la technique du déplacement. Il se fait que le français n'a pas connu les mêmes déboires que, par exemple, l'instruction religieuse ou l'enseignement des arts, où on trouve effectivement un certain nombre d'enseignants qui n'ont pas été spécialisés pour ces tâches spécifiques.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais être aussi optimiste que le ministre, mais je pense qu'il y a des professeurs d'histoire, dans le temps où on ne l'enseignait plus ou plutôt on l'enseignait moins, des professeurs de science qui ont été refoulés vers l'enseignement du français. Est-ce qu'on s'est préoccupé de les perfectionner, ceux-là? Cela a peut-être été moins généralisé que dans le cas de la langue seconde, mais...

M. Morin (Sauvé): Oui. Prenons soin de bien distinguer entre le niveau primaire et le niveau secondaire.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Morin (Sauvé): Les problèmes ne sont pas les mêmes. Au primaire, vous le savez nous avons affaire à des généralistes, en principe, de sorte que tout professeur du niveau primaire doit pouvoir enseigner correctement le français.

Mme Lavoie-Roux: Je pensais au secondaire.

M. Morin (Sauvé): C'est au niveau secondaire que le problème existe. On me dit que — il doit bien y avoir quelques exceptions à la règle — de façon générale, les professeurs de français ont été moins victimes que d'autres de ces techniques de déplacement.

Mme Lavoie-Roux: L'an dernier, M. le ministre, dans le programme de perfectionnement des maîtres de français, vous aviez l'intention de les mettre en congé, si vous voulez, pendant des périodes plus longues que ce qui avait été auparavant. Par contre, il y avait un problème d'agencement, c'est-à-dire de remplacement des professeurs. Est-ce qu'on a pu facilement contourner la difficulté et, finalement, ont-ils un programme de perfectionnement différent?

M. Morin (Sauvé): Effectivement, j'avais doublé le nombre de jours. Je l'avais porté de 15 à 30...

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Morin (Sauvé):... ce qui avait effectivement doublé les crédits consacrés à ce programme. Il semble qu'il n'y ait pas eu de difficulté, qu'en fait on soit arrivé à surmonter les difficultés qui se sont présentées dans le remplacement, dans l'agencement des horaires.

Mme Lavoie-Roux: Je voulais simplement pour terminer... Je regardais les Débats de l'an dernier parce qu'on a discuté, à plusieurs reprises justement, du "bumping", du remplacement des professeurs. L'an dernier, des statistiques nous avaient été données: sur 70 000 professeurs, il y en avait 12 000 qui n'enseignaient plus dans leur spécialité. Je ne crois pas qu'avec la diminution de la population ceci se soit amélioré. Je pense que s'il y a eu quelque chose, c'est que cela a pu s'accentuer un peu. D'ailleurs, le ministre, à ce moment-là, admettait qu'il y avait un véritable problème auquel il faudrait, au moment de la prochaine convention, tenter d'apporter des remèdes.

M. Morin (Sauvé): Nous pensons avoir des chiffres tout à fait précis au mois de juillet. Il est difficile de les obtenir avant le mois de juillet cette année. Encore une fois, ce problème est réel, surtout dans l'enseignement de certaines matiè-

res. Au cours des négociations qui viennent l'an prochain, j'ai bien l'intention d'examiner la possibilité de créer plus de champs, de protéger plus de champs. Si, à l'heure actuelle, nous avons toutes ces difficultés, ces situations qui, quelquefois, sont inacceptables... Quelquefois cependant il faut dire que l'enseignant se recycle et s'adapte; tous les cas ne sont pas désastreux mais, effectivement, il y en a beaucoup qui entraînent des situations qui laissent à désirer et c'est pour cela que j'ai l'intention de profiter de la prochaine négociation collective pour revoir cette question.

Distribution du lait dans les écoles

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le ministre. Je ne sais pas si j'ai encore le droit de parole. Je voudrais revenir sur une question que le député de Gaspé avait soulevée très brièvement avant le souper, c'est la question de la distribution du lait dans les écoles. Nous avions soulevé cette question en Chambre parce que je pense qu'on en avait décidé, ou elle a été mise à l'oeuvre après l'étude des crédits l'an dernier.

M. Morin (Sauvé): À l'automne, exactement.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Alors, deux questions très précises: Est-ce qu'on a fait une évaluation de ce programme, comme vous m'aviez informé qu'on ferait, avant de décider de doubler les crédits ou d'augmenter les sommes pour ce programme?

M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour ce que nous en savons, à la suite de conversations — moi-même j'ai eu des conversations avec les représentants de plusieurs commissions scolaires — l'évaluation au pif que j'ai pu en faire me conduit à la conclusion que ce programme, jusqu'ici, a été un succès. Cependant, l'évaluation formelle ne peut avoir lieu qu'à la fin de la présente année, c'est-à-dire dans le courant de l'été, avant que nous entrions dans la deuxième année du programme.

D'après tout ce que nous en savons, donc, il y a lieu non seulement de poursuivre ce programme, mais de l'étendre; ce que nous faisons, évidemment, en l'étendant à 350 000 élèves l'an prochain et en espérant atteindre l'objectif de 100%. Autrement dit, pour septembre 1981, nous espérons que tous les enfants du Québec, dans leur école, auront droit au lait gratuit tous les jours.

Maintenant, si vous voulez en savoir plus long sur l'évaluation, je peux demander à M. le sous-ministre; je ne sais pas s'il a quelque chose à ajouter.

C'est difficile d'ajouter quelque chose de plus, si ce n'est le nombre de demandes que nous recevons de la part des commissions scolaires en vue d'être choisies pour ce programme, ce qui manifeste quand même un grand intérêt pour ce faire, parce que la plupart des commissions scolaires, par leur directeur général, nous demandent d'être choisies pour obtenir ce service de la distribution du lait.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je pense que je me dois de vous faire part que j'ai passablement de réticence quant à l'universalité du programme, tel que vous entendez le faire. Cela me paraît beaucoup, de la part du gouvernement, une décision politique et économique.

M. Morin (Sauvé): Economique, mais politique, s'il vous plaît! Enfin, quoi! Qu'y a-t-il de politique dans le lait aux enfants? On nous le réclame depuis des années. Je vous en prie!

Mme Lavoie-Roux: Je vous ferai remarquer, M. le ministre, que ce fut déjà le cas, bien avant que j'y sois, cette fois à la CECM, où on donnait le lait aux enfants et peut-être qu'un sous-ministre qui est ici pourrait en témoigner. Finalement, ce programme a été retiré, d'abord parce qu'il se faisait un gaspillage. Deuxièmement, il n'était pas requis dans toutes les écoles. J'ajouterais que, présentement, il met en veilleuse certaines études qui avaient été faites au plan de programmes d'alimentation, particulièrement dans les milieux défavorisés. À l'heure actuelle, dans le fond, c'est que vous prenez du lait ou vous n'avez rien. Alors, les gens prennent du lait. On m'a dit... Pardon?

M. Alfred: II y a du Coke.

Mme Lavoie-Roux: Parlons-en du Coke. Je voudrais alors poser cette autre question. Est-ce que le ministère de l'Éducation a développé une politique d'alimentation ou une politique de nutrition pour l'ensemble des écoles de la province? On peut bien donner du lait aux enfants, et on pourrait arguer jusqu'à demain matin pour savoir si c'est bon ou si c'est mauvais. Les arguments qui, je pense, vont à l'encontre d'une politique généralisée, entendez-moi bien, c'est le fait qu'on ne répond pas nécessairement à des besoins et, deuxièmement, on ne répond peut-être pas à des priorités au plan de l'alimentation et, troisièmement, c'est un programme qui est imposé sans tenir compte des besoins réels des milieux. On dépense quand même des sommes considérables.

Si on songe, par exemple, que, dans la majorité des commissions scolaires, il n'y a pas encore de programme alimentaire et que les commissions scolaires sont obligées d'autofinancer leurs cafétérias, leurs casse-croûte, appelez-les comme vous voudrez, soit qu'elles les confient à des concessionnaires ou qu'elles les exploitent elles-mêmes, et, comme on dit dans le langage populaire, pour que ces cafétérias et ces casse-croûte puissent s'autofinancer, on y met ce que les gens appellent des bons "vendeurs"... Vous avez peut-être du lait distribué dans les écoles, mais, par contre, vous avez des enfants qui s'alimentent fort mal. Je fais exception ici pour l'île de Montréal, et probablement pour quelques autres commissions scolaires qui doivent avoir des préoccupations de cet ordre.

M. le ministre, je voudrais que vous alliez faire un tour dans les cafétérias d'un grand nombre d'écoles de cette province pour réaliser que c'est bien beau une politique du lait, mais, est-ce qu'on répond vraiment aux besoins les plus fondamentaux d'éducation en nutrition chez les enfants? Je pense que c'est une question fondamentale que le ministère de l'Éducation devrait se poser et essayer de voir là où sa priorité devrait être. Je répète que c'est contre une distribution généralisée, sans tenir compte des autres priorités et besoins des milieux. (20 h 45)

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je me sens tout à fait en sympathie avec les observations dont vient de nous faire part Mme le député de L'Acadie. Cependant, je dois constater que le fait de répandre l'habitude du lait, de la distribuer gratuitement aux enfants ne va pas à l'encontre d'une politique de nutrition qui, en tout état de cause, ne peut être que le résultat de longs efforts. C'est vraiment une question à moyen et à long terme que celle d'inculquer aux enfants des habitudes de nutrition saine. Autrement dit, je ne voudrais pas sacrifier le court terme, ce que nous pouvons faire immédiatement, comme la politique du lait, qui a l'avantage d'amener les enfants à consommer du lait et à prendre des habitudes du lait, plutôt que des boissons gazeuses et autres poisons, ce qui a donc des retombées économiques sur le plan de l'agriculture, je ne voudrais pas sacrifier le court terme dis-je, à des objectifs à long terme. On peut poursuivre les deux de front.

Pour ce qui est des habitudes de nutrition chez les enfants, à l'heure actuelle, il se fait des efforts. Je ne voudrais pas que vous laissiez l'impression que tout est à l'abandon. Vous avez mentionné vous-même que sur le plan montréalais, dans le cadre du CSIM, le conseil a élaboré des politiques de nutrition dont j'ai entendu dire le plus grand bien, à Montréal.

Mme Lavoie-Roux: Je peux vous en parler longuement, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Je n'en doute pas. Ceci s'améliore d'année en année et s'étend d'année en année. Encore une fois, nous sommes appelés, je crois, à faire une contribution financière, d'ailleurs. Nous n'hésitons pas à le faire. De plus, il se fait dans ces domaines des efforts que je vais demander à M. le sous-ministre de vous décrire; il les connaît mieux que moi.

À la suite d'un comité de travail conjoint comprenant les ministères de l'Agriculture et des Affaires sociales, la Fédération des commissions scolaires et le ministère de l'Éducation, une étude a été demandée pour faire le point sur le développement d'une politique alimentaire dans les écoles. Un rapport a été déposé, je crois, au début de l'année 1977. Une des conclusions du rapport a été de développer davantage une politique d'information sur une saine alimentation, plutôt que d'investir directement dans des repas ou des choses de ce genre dans les écoles, information destinée, en particulier aux enfants.

De ce côté, le ministère des Affaires sociales avait fait une enquête dans les écoles de la CECM. Les résultats de l'enquête ne démontraient pas de résultat probant à l'égard de la politique alimentaire d'aide à la nutrition. Depuis, ce qui a été développé, c'est une politique d'information à une saine alimentation, par les Affaires sociales, à laquelle le ministère contribue grandement pour l'introduire dans les écoles de façon telle que toute la population scolaire puisse bénéficier d'une information adéquate sur une saine alimentation à développer. C'est dans ce sens qu'actuellement les efforts sont tournés.

Mme Lavoie-Roux: Si je suis le raisonnement du sous-ministre, M. le ministre, je me demande s'il dit que le fait qu'on essaie de mettre des aliments plus sains à l'intérieur des cafétérias ne donne pas de résultat probant quant aux habitudes nutritives; on pourrait se demander si le fait de distribuer du lait gratuitement, a des effets probants au point de vue de l'éducation de la nutrition. Il reste... .

M. Morin (Sauvé): II y a une différence, Mme le député. Le lait est gratuit, tandis que les cafétérias ne le sont pas, de façon générale.

Mme Lavoie-Roux: Non, sauf que dans le cas des cafétérias de l'île de Montréal — d'ailleurs, c'est un programme, tout le monde le sait, qui a débuté à la CECM, et je suis très fière d'avoir été là quand il a débuté, qui a ensuite été étendu à l'île de Montréal — il y a des aliments qui sont subventionnés. Par exemple, si vous achetez — je vous donne cela comme exemple, je peux me tromper — une poire au lieu d'une tablette de chocolat, vous allez payer votre poire un prix minime. Je ne sais pas si on a des poires à ce temps-ci de l'année, parce qu'elles doivent être à un prix fabuleux...

M. Morin (Sauvé): Là, vous exprimez des préférences personnelles.

Mme Lavoie-Roux: Mais vous paierez le maximum pour votre tablette de chocolat, ce qui incite les enfants à le faire, et tous les menus sont équilibrés, sont balancés. Je dois dire que le gros effort — à moins que je ne m'abuse et qu'il y ait eu des changements durant les deux dernières années — les gros efforts financiers pour financer ce programme de nutrition sont pris à même la surtaxe du conseil scolaire de l'île. Il se peut que, maintenant, peut-être, le ministère y contribue d'une certaine façon, mais, à ma connaissance, au moment où j'étais là, c'était payé par la surtaxe de l'île de Montréal. Mais, à tout événement, je suis d'accord pour que le ministère des Affaires sociales fasse une éducation, mais, cette politique du ministère, est-ce que vous l'avez, est-ce que vous pouvez nous la donner, cette politique de nutrition, développée conjointement par le ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires sociales?

M. Morin (Sauvé): Une politique d'information?

Mme Lavoie-Roux: Ah, vous n'avez pas de politique de nutrition.

M. Morin (Sauvé): Non, c'est une politique d'information développée par les Affaires sociales auprès de la population.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous entendez développer une politique de nutrition?

M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas de politique de nutrition, mais, parmi les objectifs de formation que nous proposons pour l'éducation physique au niveau primaire, nous voulons que l'enfant ait compris l'importance des règles non seulement de l'hygiène générale, mais également de l'hygiène alimentaire. Si vous avez pu consulter...

Mme Lavoie-Roux: Oui, j'ai vu ça.

M. Morin (Sauvé): ... le livre vert, au paragraphe 2-44, vous avez pu constater que cela fait partie de notre notion de ce que constitue l'éducation physique, et il nous paraît que c'est une première étape, non sans exclure que nous mettions en place des politiques comme celle du lait, pour l'instant. Par la suite, quand nous aurons généralisé le lait, nous pourrons songer à d'autres étapes. Tout cela est évidemment coûteux et peut-être pensez-vous que nous avons commencé par les choses les plus simples, ce qui ne serait pas inexact. Il est évidemment plus simple de distribuer du lait que d'offrir des repas complets, mais il faut, évidemment, tenir compte des coûts qui sont impliqués dans une pareille démarche.

Mme Lavoie-Roux: N'oubliez pas, M. le ministre, que cette démarche va coûter de plus en plus cher au gouvernement. Vous êtes rendus à $6 millions cette année et je pense qu'on doit aller vers les $13 millions l'an prochain. C'est quand même beaucoup d'argent, ce qui mérite, je pense, qu'on évalue très prudemment... Je comprends qu'il y a des objectifs — et je répète, des objectifs, même si le ministre proteste — politiques et économiques dans cette distribution du lait, mais que ce soit vraiment pour servir le mieux possible les intérêts de la population scolaire. Je pense que j'ai pris mes vingt minutes.

Le Président (M. Marquis): M. le député de...

M. Morin (Sauvé): Puis-je apporter une précision? Il y a eu des efforts de définition d'une politique alimentaire, qui avait été élaborée en 1976, et on s'est rendu compte que ça nous coûterait $23 millions pour l'appliquer. Ce n'était pas dans l'ordre des possibilités financières à ce moment-là. C'est pourquoi nous avons préféré commencer par une habitude alimentaire, qui est celle du lait.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que ces $23 millions, c'était pour une politique alimentaire pour l'ensemble des écoles de la province?

M. Morin (Sauvé): Selon les critères tels que développés à l'époque, à Montréal...

Mme Lavoie-Roux: Bon!

M. Morin (Sauvé): ... pour des clientèles données, ceux qui mangent à l'école le midi, qui doivent, parce qu'ils sont transportés...

Mme Lavoie-Roux: Oui. Vous auriez peut-être pu faire comme le lait et commencer par un certain nombre d'écoles, quitte, au fur et à mesure, d'universaliser la mesure ou de la généraliser.

M. Morin (Sauvé): Nous aurions pu faire mille et une choses, mais nous avons choisi la politique du lait.

Mme Lavoie-Roux: Oui, et je sais fort bien.

M. Morin (Sauvé): Bon! Et nous allons d'abord étendre celle-là, puis, ensuite, on passera à autre chose.

Le Président (M. Marquis): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais poursuivre sur le même sujet.

Nous parlons d'une masse de $6 millions et il y a deux clientèles qui peuvent et, à mon sens, doivent bénéficier de cette somme importante. Il y a, d'un côté, la classe agricole, les producteurs de lait qui, de toute évidence, bénéficieront de cette somme.

M. Morin (Sauvé): ... des retombées que suppose l'habitude de consommer du lait par les jeunes.

M. Goldbloom: D'accord, M. le Président, j'y arriverai dans un instant, parce que, deuxièmement, il y a la clientèle scolaire, il y a les enfants. Si nous sommes, comme collectivité, comme administration publique, pour dépenser $6 millions pour le bénéfice des enfants, je pense bien que le ministre, dans le contexte actuel, admettrait facilement que l'on doit être en mesure de démontrer un bénéfice pour eux, pour justifier le programme; parce que, si l'on pense aux cultivateurs, il y a, depuis l'histoire du Québec, de nombreux programmes qui ont permis de leur verser des sommes pour compenser le fait que l'écoulement de leurs produits laissait à désirer dans les conditions de marché qui existaient à l'époque.

Si l'on voulait donner en subventions un montant de $6 millions aux producteurs de lait dans le cadre des programmes du ministère de l'Agriculture, il y avait facilement moyen de le faire.

On a choisi d'ajouter à cela, à cette aide aux cultivateurs, aux producteurs de lait, un élément additionnel, c'est-à-dire la distribution de ce lait dans les écoles.

Le ministre nous dit, et je pense que le sous-ministre a renforcé sa déclaration: Les commis-

sions scolaires nous ont demandé ce programme et cela depuis un bon moment et avec insistance. M. le Président, je soumets respectueusement à votre considération que si les commissions scolaires demandaient une intensification importante de l'emploi des moyens audio-visuels ou de la télévision à l'école, le ministère étudierait en détail la valeur de ces moyens d'enseignement avant d'accepter tout simplement que la demande des commissions scolaires reçoive une réponse favorable, sans examen critique.

Il me semble donc, M. le Président, qu'il aurait fallu démontrer ou bien un état, généralisé ou répandu de façon importante, de malnutrition chez les enfants, ou bien une consommation inquiétante et dangereuse de boissons gazeuses. Le ministre a lui-même offert ce dernier argument pour justifier la distribution du lait dans les écoles.

Entre parenthèses, M. le Président, je voudrais lui dire amicalement que c'est une bonne chose qu'il jouisse en ce moment-là de son immunité parlementaire, parce qu'il a parlé des boissons gazeuses et d'autres "poisons". C'est un mot qui est un peu fort. Je me demande s'il existe véritablement une preuve que ce sont des poisons. On peut dire que ce ne sont pas les éléments les mieux choisis pour l'alimentation de nos enfants; mais les appeler "poisons", c'est aller un peu loin.

M. Morin (Sauvé): C'était une image, mais je ne puis que m'étonner d'entendre un médecin prendre la défense des boissons gazeuses. C'est la première fois que cela m'arrive, M. le Président.

M. Goldbloom: M. le Président...

M. Alfred: En politique, tout est permis.

M. Goldbloom: C'est une brillante intervention.

M. le Président, le ministre exagère, de toute évidence. Je n'ai pas pris la défense des boissons gazeuses, j'ai pris la défense du ministre, amicalement, en lui suggérant d'être prudent dans son choix de mots. C'est tout ce que j'ai fait. De plus, je lui ai dit que s'il incrimine les boissons gazeuses pour justifier son programme "lait-école", il serait bien inspiré d'avoir des chiffres, d'avoir des études qui prouvent qu'effectivement, il y en a une consommation exagérée par des spécialistes en nutrition, avant de dire: II faut donner du lait dans les écoles pour diminuer la consommation des boissons gazeuses. (21 heures)

M. le Président, le ministre se rappellera les interventions de l'Opposition, notamment pendant la période des questions, sur le sujet du programme "lait-école". Je voudrais lui faire lecture d'une lettre qui m'a été envoyée par un confrère pédiatre qui est professeur titulaire de pédiatrie à l'Université de Montréal et chef du service de pédiatrie à l'hôpital Sainte-Justine. Suite aux questions que j'ai posées et que d'autres députés ont posées en Chambre, notamment au ministre de l'Agriculture — mais si ma mémoire est fidèle, à un moment donné le ministre de l'Éducation a participé aux réponses — j'ai écrit au président de l'Association des pédiatres de la province de Québec, le Dr Maurice Bouchard. Le Dr Bouchard a communiqué avec le Dr Claude-C. Roy, qui est, comme je viens de le dire, professeur titulaire à l'Université de Montréal et chef du service de pédiatrie à l'hôpital Sainte-Justine de Montréal.

Voici la réponse du Dr Roy au Dr Bouchard: "J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre lettre en date du 29 août au sujet du programme "lait-école" organisé par le ministère de l'Agriculture du Québec. J'ai aussi pris connaissance de la lettre du député de D'Arcy McGee, le Dr Victor Goldbloom, ainsi que du communiqué de presse du ministère de l'Agriculture. "Ce programme de distribution gratuite de lait à une clientèle choisie d'enfants entre les âges de cinq et douze ans me paraît tout à fait non défendable du côté nutrition. L'enquête Nutrition Canada, en effet, révèle que la quantité moyenne de produits laitiers consommés par les jeunes Québécois dans ce groupe d'âge est de 602 grammes par jour; ceci correspond à une consommation de deux portions et demie par rapport à une quantité recommandée de deux à trois portions par jour. La part de calcium pour ce groupe d'âge est, telle que suggérée par la National Academy of Sciences, de 800 milligrammes. Or, l'enquête Nutrition Canada nous révèle que nos jeunes Québécois absorbent 1071 milligrammes de calcium quotidiennement, ce qui est bien au-delà du chiffre recommandé. Par ailleurs, l'apport medium en vitamine D se situait au-dessous des quantités recommandées, mais il faut retenir qu'au moment où l'enquête Nutrition Canada a été faite, l'enrichissement du lait entier en vitamine D n'était pas obligatoire. Il est certain qu'aujourd'hui, la vitamine D absorbée quotidiennement par les jeunes entre les âges de cinq et onze ans dépasse largement le minimum recommandé de 400 unités par jour. "Il est d'autre part absolument erroné de croire que les frais dentaires diminueront en entreprenant ce programme de lait-école. Il s'agit d'un argument tout à fait sans fondement. "Si ce programme de "lait-école" n'est pas défendable du côté apport de calcium et de vitamine D, il ne l'est pas non plus du côté calories. En se référant à nouveau à l'enquête Nutrition Canada, on réalise que les calories moyennes ingérées par le groupe d'âge qui nous intéresse se chiffrent à 2437 calories par jour, ce qui dépasse la moyenne nationale, qui est de 2300, et les recommandations de la National Academy of Sciences, qui est de 2400.

Pour ce qui est de l'effet nuisible à long terme d'une ingestion augmentée de graisse animale saturée, je ne crois pas qu'il y ait aucun danger de ce côté. Les informations disponibles ne nous permettent pas non plus de recommander plutôt l'ingestion de lait 2% que celle du lait entier. Par ailleurs, si nous voulons un traitement conforme à la politique de nutrition amorcée par le ministère des Affaires sociales, il y aurait peut-être lieu de recommander le lait 2% plutôt que le lait entier,

étant donné l'incidence très élevée d'obésité au Québec. "J'ai toujours été frappé par le paradoxe entre le soin que prennent les chercheurs à établir la validité de nouvelles connaissances en matière de nutrition et l'absence d'évaluation des programmes de nutrition entrepris par les gouvernements. Le ministère de l'Agriculture n'échappe pas à ce paradoxe, car il semble d'emblée convaincu du besoin du programme et d'avance du succès de ce programme. "Je ne peux pas m'opposer à l'instauration de la distribution de lait dans les écoles élémentaires, mais je n'en vois aucunement l'utilité. Je crois qu'il existe des priorités beaucoup plus grandes en matière de nutrition pour les enfants d'âge scolaire. Le programme, en somme, sera beaucoup plus profitable à l'industrie laitière qu'aux petits Québécois qui auront droit au verre de lait-école".

M. le Président, je voudrais être tout à fait honnête...

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, est-ce que la machine va arrêter une autre fois?

Le Président (M. Marcoux): J'ai fait des représentations à cet effet, jusqu'à 22 heures.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse.

M. Goldbloom: Je vous en prie. M. le Président, pour être tout à fait honnête à l'égard du ministre, je voudrais faire lecture d'une deuxième lettre qui m'a été adressée par son collègue, le ministre des Affaires sociales, à la suite de la remise, par votre humble serviteur, au ministre des Affaires sociales, de la correspondance dont je viens de faire lecture. Voici la réponse du ministre des Affaires sociales: "Je fais suite à la lettre que vous m'avez adressée concernant le programme "lait-école" du ministère de l'Agriculture et l'avis qu'a exprimé M. Claude Sirois, chef du service de la pédiatrie de l'hôpital Sainte-Justine à l'égard de ce programme. "Tout d'abord, permettez-moi de vous faire remarquer que le lait-école est du lait à 2% additionné de vitamines A et D et non du lait entier. Au plan nutritionnel, ce lait convient à des jeunes en croissance. S'il est vrai qu'en moyenne, les apports en produits laitiers sont suffisants chez les élèves de l'élémentaire, il faut toutefois signaler que le ministère des Affaires sociales a nettement identifié des déficiences chez les enfants de l'élémentaire des milieux défavorisés. C'est d'ailleurs cet état de fait qui a incité les fonctionnaires de mon ministère à demander que le programme "lait-école" s'adresse prioritairement à ces enfants. "Par ailleurs, on m'informe que le ministère de l'Agriculture projette d'évaluer le programme "lait-école" à la fin de sa première année d'application. Je vous prie de croire que le ministère des Affaires sociales entend participer activement à cette évaluation et qu'il formulera alors les re- commandations que lui dicteront les plus récentes données qu'il aura pu recueillir sur cette question".

M. le Président, dans les statistiques fournies par le ministère de l'Éducation, je constate, outre le fait que $6 millions seront dépensés à cette fin, que sur 253 commissions scolaires, il y en a 136 qui participeront au programme, ce qui veut dire, en chiffres ronds, 54% des commissions scolaires.

Le ministre peut-il affirmer que plus de 54% des commissions scolaires — et il est mentionné que la CECM et la CECQ sont du nombre des commissions participantes — que plus de 50% de nos commissions scolaires se situent dans des milieux défavorisés et que, spécifiquement, on a identifié des besoins par rapport à un degré significatif de malnutrition chez la majorité des enfants qui fréquentent la majorité de nos écoles?

M. Morin (Sauvé): Avez-vous terminé, M. le député?

J'aurais quelques observations à faire en réponse à votre exposé que j'ai trouvé fort intéressant. Tout d'abord, je voudrais vous rappeler que cette politique du lait gratuit est destinée, d'abord et avant tout, comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure, aux milieux défavorisés.

Elle est destinée également aux enfants qui n'ont pas l'habitude du lait. Ce serait une erreur de croire que tous les enfants québécois souffrent de la surconsommation que vous avez mentionnée. Beaucoup d'enfants, vous le savez très bien, docteur, se gavent de toutes sortes de boissons qui n'ont pas la valeur nutritive du lait, qui sont enrichies de toutes sortes de sucres plus ou moins artificiels et qui constituent des dangers pour les jeunes, pour leurs habitudes alimentaires futures. De sorte que si votre correspondant eût voulu être complet — peut-être voudrez-vous lui écrire pour lui demander de compléter sa recherche — il eût fallu qu'il compare la consommation du lait avec ce qui est consommé dans certaines écoles, ou même à l'extérieur des écoles, par les jeunes. Alors, j'aurais trouvé que la recherche était plus éloquente et m'apportait davantage. Pour l'instant, je constate simplement que le médecin tient pour acquis que tous les petits Québécois ne boivent que du lait. Ce n'est pas le cas et vous savez, comme pédiatre vous-même, que beaucoup d'enfants ne boivent pas de lait, particulièrement dans les milieux défavorisés, et que beaucoup d'enfants, même dans les milieux non défavorisés, boivent trente-six choses plutôt que du lait.

Ceci étant dit, je vous demanderais de me communiquer copie de la correspondance, si vous n'y voyez pas d'objection, puisque ce programme doit être évalué au cours de l'été qui vient, avant qu'il ne soit étendu encore davantage; à la fin de l'année prochaine, alors que nous aurons touché à peu près la moitié de la clientèle scolaire du primaire, soit 350 000 élèves. Avant de procéder à une autre extension, je serais intéressé à vérifier les observations dont vous m'avez fait part il y a un instant. Mais avec 350 000 élèves touchés à la fin de l'année prochaine, nous n'aurons touché

encore que les milieux défavorisés. Ils sont très nombreux au Québec. Ce sont des régions entières qui sont dans cet état. Même si vous affirmez que 54% des commissions scolaires sont touchées, cela ne veut pas dire que 54% des écoles le sont, parce que toutes les écoles de toutes les commissions scolaires ne sont pas nécessairement touchées par le programme, jusqu'ici. Nous n'avons pas eu les moyens de l'étendre nécessairement à toutes les écoles des commissions scolaires qui se sont prévalues de ce programme.

M. Goldbloom: M. le Président, s'il s'agit des écoles élémentaires seulement, il s'agit de 136 commissions scolaires sur 202 seulement, ce qui veut dire 67% des commissions scolaires.

Je n'ai pas utilisé les chiffres pour démontrer que les enfants du Québec ne boivent que du lait, mais le Dr Roy, dans son témoignage, indique que l'enfant moyen, au Québec, boit déjà assez de lait.

Or, il me semble que si, en moyenne, les enfants du Québec boivent déjà assez de lait, et même dépassent légèrement les quantités recommandées, il serait désirable de démontrer que la clientèle cible est composée d'enfants qui sont en bas de la moyenne et ne consomment pas assez de lait. C'est l'essentiel. (21 h 15)

Si le ministre me dit que ces mêmes enfants boivent, en même temps, d'autres choses, et de façon exagérée, il me semble que le ministre de l'Éducation pourrait exercer une influence s'il n'a pas l'autorité pour émettre une directive, — je ne le sais pas, peut-être que non — mais qu'il exerce au moins son influence pour exclure des écoles les choses qu'il trouve dommageables à la santé des enfants. Il me semble que ce serait une intervention plus directe que de dire: Nous allons offrir du lait gratuitement pendant que les enfants devront payer à la cafétéria les autres boissons, et nous espérerons que le lait offert gratuitement déplacera, dans le régime alimentaire de l'enfant moyen, les boissons gazeuses et d'autres choses qui sont moins désirables.

Or, M. le Président, c'est simplement un souci d'objectivité scientifique qui m'anime lorsque je soulève toute cette question. Le ministre a répondu qu'à la fin de l'année il y aura évaluation du programme. La seule chose qui m'inquiète, devant cette réponse rassurante du ministre, c'est que, rendus à la fin de l'année, les producteurs de lait se seront habitués à recevoir annuellement $6 millions de plus, et il ne se déshabitueront pas facilement à recevoir ce montant.

Le gouvernement continuera-t-il de fournir le montant, même si l'évaluation démontre que le programme n'est pas justifié?

M. Morin (Sauvé): S'il se révélait, à la suite de recherches sans doute plus approfondies, que ce programme de lait va contre la santé, se révèle plus nuisible, par exemple, que les boissons gazeuses, il est évident que le gouvernement devrait reconsidérer cette politique, mais je ne suis pas parfaitement persuadé par la correspon- dance dont m'a fait part le Dr Goldbloom, le ministre, le député de Jacques-Cartier, dis-je...

M. Goldbloom: De D'Arcy McGee.

M. Morin (Sauvé): ... de D'Arcy McGee, excusez-moi, toute mes excuses.

M. Goldbloom: Pas toutes, c'est un bon gars le député de Jacques-Cartier.

M. Morin (Sauvé): Non, ce n'était pas dit de façon péjorative, mais...

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est un homme sympathique.

M. Saint-Germain: Si vous l'aviez appelé le député de Papineau...

Une voix: Ne réveillez pas les...

M. Goldbloom: Ou de Rosemont, encore pire.

M. Morin: C'est la raison pour laquelle j'ai demandé au député de D'Arcy McGee de me communiquer la correspondance dont il a fait état. Je voudrais en prendre connaissance, y compris les détails qui sont importants. Si j'avais une suggestion à faire au député, ce serait d'écrire une autre lettre qui pourrait compléter celle-là, aux mêmes chercheurs, aux mêmes médecins pour leur demander s'ils ont quoi que ce soit à dire sur la consommation des boissons gazeuses par les Québécois. C'est un de nos soucis, je puis vous le dire, c'est un des soucis du point de vue de l'éducation — je ne parle pas du point de vue de l'agriculture — de substituer du lait aux boissons gazeuses.

Vous aurez quelques difficultés à me persuader qu'il vaut mieux pour un jeune de consommer certaines de ces boissons gazeuses plutôt que du lait, surtout qu'ils en consomment sans doute déjà à l'extérieur de l'école aussi.

M. Goldbloom: Effectivement, M. le Président, il faut tenir compte de l'ensemble du régime alimentaire de l'enfant. Cela est clair. Il me semble cependant que le ministre, en disant qu'il serait préférable, qu'il pourrait être préférable que l'enfant consomme davantage de lait et moins de boissons gazeuses, risque d'oublier un facteur additionnel qui est celui de la suralimentation qui peut causer des problèmes importants.

Le ministre, avec sa formation scolaire, littéraire et autres, se rappellera que, dans l'histoire du monde, on a souvent dit qu'il y avait deux instruments qui avaient tué plus de monde que l'épée. Il y avait la plume, et il y avait la fourchette.

Le fait que les enfants du Québec, en moyenne, consomment déjà assez de lait, devrait nous faire réfléchir sur l'opportunité de leur en donner davantage.

M. Morin (Sauvé): Si j'ai bien compris, M. le député de D'Arcy McGee me suggère qu'après la

peste, la famine, l'épée et la fourchette, il y aurait le berlingot.

Je suis sensible à ses arguments. Il n'est de politique gouvernementale qui ne soit sujette à révision s'il s'avère qu'elle ne porte pas les fruits qu'on en attend ou qu'elle produit des résultats contraires à ceux qu'on en attend...

M. Goldbloom: C'est pourquoi on pourrait dire cela de la loi 101.

M. Morin (Sauvé): Nous changeons de sujet, mais là, vous serez sur des bases scientifiques moins certaines.

M. Goldbloom: N'est-ce pas, n'est-ce pas!

M. Morin (Sauvé): Je suis, je vous l'avoue, intéressé par les propos du député de D'Arcy McGee. Je ne dirais certainement pas le contraire, parce que je dirais le contraire de ma pensée, mais je voudrais que cela soit complété. M. le député, puisque vous avez des relations dans le monde médical et scientifique, s'il y avait moyen d'obtenir quelques considérations du même ordre sur la consommation des boissons gazeuses par les enfants, je crois qu'il y aurait de quoi faire dresser les cheveux sur la tête.

On me parlait récemment de travailleurs — qui certainement n'ont pas acquis ces habitudes n'importe où, les habitudes scolaires y ont peut-être contribué — qui pendant une journée buvaient jusqu'à la douzaine de bouteilles de boissons gazeuses. Vous aurez quelque difficulté à me persuader que cela n'a pas d'effets nocifs sur leur santé. Vous savez comment sont fabriquées ces boissons gazeuses, vous savez quels produits artificiels elles contiennent. Le lait a au moins l'avantage d'être un produit naturel.

M. Goldbloom: M. le Président, je ne reviendrai pas sur l'argumentation...

Le Président (M. Marcoux): ... la dernière goutte.

M. Goldbloom: ... de lait, c'est cela... Je ne reviendrai pas sur l'argumentation que je viens de porter à l'attention du ministre il y a quelques instants. Je lui dirai tout simplement que qui dit chercheur dit chercheur de vérité, et je lui offre ma collaboration pour lui fournir — dans la mesure des moyens scientifiques et humains — la vérité sur l'alimentation des enfants et sur l'opportunité d'ajouter du lait à ce que consomment déjà les enfants.

M. Morin (Sauvé): J'accepte cette collaboration, M. le député. Si vous avez l'amabilité de me tenir au courant de votre correspondance scientifique, je tenterai d'en faire mon profit.

M. Goldbloom: Volontiers, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Non, de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Marcoux): Pardon, de Jacques-Cartier. Excusez-moi.

M. Goldbloom: Cette fois, c'est à moi d'être insulté.

M. Saint-Germain: J'avoue, M. le Président, que je suis très mal à l'aise pour faire cette intervention, moi qui ai reproché antérieurement au ministère de l'Éducation d'être toujours en étude. Voilà qu'on s'aperçoit qu'on a mis en place un programme qui a coûté $6 millions, qui va coûter $12 millions l'année prochaine et où il n'y a pas eu d'étude du tout. C'est réellement le monde à l'envers.

M. Morin (Sauvé): Les crédits viennent du ministère de l'Agriculture, M. le député.

M. Saint-Germain: Là on se comprend, M. le ministre, là on se comprend. Quand le ministre de l'Éducation se met à faire de l'agriculture, c'est ce que cela donne. C'est exactement ce que cela donne.

M. Morin (Sauvé): En l'occurrence, ce serait plutôt le ministre de l'Agriculture qui se serait mis à faire de l'éducation, mais je suis loin d'être persuadé que ce soit aussi nocif que vous voudriez le laisser croire.

M. Saint-Germain: Oui, mais rien n'empêche que vous avez mis ce programme en place et vous n'avez fait aucune étude pour le soutenir.

M. Morin (Sauvé): Si.

M. Saint-Germain: Si vous avez des études, dites-le nous, déposez-les.

M. Morin (Sauvé): Si, si. Il y a tout de même des études de plusieurs organismes internationaux qui nous démontrent que le lait est un produit naturel et que les jeunes en croissance en ont besoin.

M. Saint-Germain: Cela, c'est évident, mais on n'a jamais dit qu'il n'y avait pas de ces études.

M. Morin (Sauvé): Alors, il vous faut des recherches pour démontrer cela?

M. Saint-Germain: II faudrait faire des recherches pour savoir, dans la province de Québec, une des provinces où le niveau de vie est le plus haut au monde...

Mme Lavoie-Roux: Et où il y a beaucoup de vaches.

M. Saint-Germain: ... et où il y a beaucoup de vaches — il y en a même trop, il semble — si, réellement...

Mme Lavoie-Roux: II y en a même à l'Assemblée nationale.

M. Saint-Germain: ... on a besoin d'un tel programme. N'essayez pas de croire qu'on défend la vente ou la consommation des liqueurs gazeuses et des biscuits au chocolat, on parle de quelque chose de bien spécifique. Vous avez établi, avec l'argent du public, un programme, et voilà qu'on voit, en noir et blanc, que vous n'avez fait aucune étude préliminaire, vous avez agi par oreille. Sous quelle influence? Je ne le sais pas. Pour protéger les intérêts de qui? Des cultivateurs?

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je m'inscris en faux contre cette intervention, puisque, dans l'intervention beaucoup plus nuancée du député de D'Arcy McGee, il était tout de même visible que certains milieux défavorisés peuvent faire leur profit d'une politique comme celle-là. Donc, avant de la dénoncer a priori, il faudrait tenir compte de cet aspect des révélations scientifiques du député de D'Arcy McGee. Si nous n'avions pas posé de geste comme celui-là, aujourd'hui, le député de Jacques-Cartier, selon sa bonne habitude, viendrait nous blâmer de passer notre temps à faire des études. Cela me rappelle l'ancien député des Îles-de-la-Madeleine qui disait tout le temps en Chambre: Ce n'est pas des chercheurs qu'il nous faut, c'est des trouveurs. C'est aussi brillant que cela.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Morin (Sauvé): M. le Président, la commission de l'agriculture siège en bas en ce moment, j'invite le député à s'y rendre.

M. Saint-Germain: Peut-être, quand le ministre de l'Éducation se lance dans des programmes qui, en fait, ne sont pas de sa responsabilité, devrait-il demander des conseils à quelqu'un qui s'y connaît dans le domaine. C'est tout ce qu'il en est. Pourquoi ne pas donner du fromage, par exemple, à nos enfants? Ce serait peut-être plus intelligent. C'est que, premièrement, c'est plus facile à distribuer et cela se conserve mieux, il y aurait peut-être moins de gaspillage. On pourrait leur fournir des pommes aussi; on produit beaucoup de pommes dans le Québec, on dit même qu'on a des difficultés de mise en marché. On pourrait aussi leur donner du poisson frais; on dit que, au Québec, contrairement au Japon, on ne consomme pas assez de poisson.

Mais, lorsqu'on voit comment le ministère de l'Éducation a de la difficulté à éduquer les jeunes, s'il faut qu'il se mette à les nourrir en plus, on n'a pas fini, cela va coûter cher tout à l'heure, croyez-moi, et cela ne veut pas nécessairement dire que cela va être beaucoup plus efficace, parce que le gouvernement ne peut pas faire de discernement, il va donner du lait à tous les enfants dans une école, il ne peut pas sélectionner les enfants qui en auraient réellement besoin et ceux qui n'en ont pas besoin. Tout à l'heure, on ne pourra pas même se limiter à certains quartiers ou à certaines commissions scolaires. C'est bien typique du gouvernement pour qui, lorsqu'il y a un programme, c'est de l'étendre à tout le monde et de le généraliser. On s'aperçoit qu'on est parti là dans une aventure. Je crois que le ministre devrait, au moins, faire faire des études par des gens qui s'y connaissent. D'ailleurs, il n'y a rien de nouveau là-dedans; je me souviens très bien que, lorsqu'on allait à l'école, dans notre paroisse, il y avait une distribution de lait qui se faisait.

M. Morin (Sauvé): Cela mène à l'obésité, m'a-t-on dit.

M. Saint-Germain: Ce n'est pas le lait pour moi, M. le ministre, soyez sans inquiétude, et je n'ai jamais envoyé mes enfants à l'école pour les faire nourrir non plus. Je les ai envoyés à l'école pour leur donner une éducation, ce qu'on n'a pas toujours réussi à faire, malheureusement.

M. Goldbloom: Et, du côté gouvernemental, il y a une certaine vulnérabilité sur ce sujet.

M. Saint-Germain: II me semble tout de même qu'il serait excessivement important qu'il y ait, dans le domaine de la nutrition, une formation que l'on pourrait donner dans nos écoles. Il me semble important — et je ne suis pas le seul à le dire — qu'on donne aux jeunes des cours valables au point de vue de la qualité des nourritures que l'on consomme et des effets, au point de vue santé, de cette nourriture. Cela a manqué dans le Québec. Il n'y a pas si longtemps, dans cette province, on vivait une vie rurale, les gens travaillaient, gagnaient leur vie au grand air, habituellement, et cette société québécoise s'est transformée très vite. Aujourd'hui, on mène une vie beaucoup plus sédentaire, on vit à l'intérieur, avec des degrés de température qui varient très peu. Malheureusement, nous avons tout de même conservé, par tradition, une certaine façon de se nourrir qui n'est plus et qui n'est pas adaptée aux nécessités modernes. Cela aiderait énormément si le ministère de l'Éducation donnait aux jeunes dans ses programmes, au niveau élémentaire comme au niveau secondaire, et même dans les études plus avancées, des cours sur la qualité de la nutrition. D'ailleurs, au niveau du cégep, cela pourrait entrer très aisément dans les cours de chimie ou les expériences de laboratoire en chimie, et ainsi de suite. Mais on ne fait pas cela.

(21 h 30)

En plus, dans nos écoles, au niveau des restaurants ou de ceux qui sont amenés à servir le lunch, on permet de vendre à peu près n'importe quoi. On ne semble absolument pas s'en scandaliser. Vous n'avez pas besoin de grandes études pour faire cela. Vous entrez dans les écoles et vous voyez ce qui peut s'y vendre, toutes sortes de choses dont les enfants ne devraient pas faire usage.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Jacques-Cartier a droit à vingt minutes.

M. Saint-Germain: Vous avez des mères de famille qui s'évertuent à priver leurs enfants de liqueurs douces ou de friandises et de gâteaux, et qui essaient de les nourrir de façon convenable. Malheureusement, lorsqu'ils sont à l'école ils ne sont plus sous l'autorité des parents. C'est là que les enfants vont boire des liqueurs douces. On remet aux enfants des sommes pour se nourrir et ils se limitent à acheter des friandises avec cet argent qu'on leur remet. Il n'y a aucune autorité sur eux et ils en profitent.

Ce n'est pas en distribuant du lait à coup de millions qu'on va arriver à solutionner un tel problème.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je espérer que ce débat touche maintenant à sa fin et dire que des deux dernières interventions, je retiendrai la plus scientifique et j'en ferai mon bénéfice?

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je pourrais ajouter un mot?

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

M. Morin (Sauvé): Sur le même sujet.

Mme Lavoie-Roux: Sur le même sujet, mais très brièvement. D'abord, une question très précise. Je vois qu'on a fait l'acquisition d'un grand nombre de réfrigérateurs; j'espère qu'on ne sera pas obligé de les revendre dans quelques années. Mais là n'est pas le point de ma question. Est-ce qu'on peut me dire qui en a fait l'acquisition? Est-ce que c'est le ministère de l'Éducation? Si tel est le cas, a-t-on procédé par soumissions?

M. Morin (Sauvé): Ce sont les commissions scolaires qui ont acheté les réfrigérateurs avec une subvention du ministère de l'Éducation. Pour la façon dont on a procédé, je n'en suis pas sûr. Il me semble avoir entendu dire entre les branches qu'on ait voulu que ces réfrigérateurs soient fabriqués au Québec. C'est la seule notion que j'en ai. Je vais prendre conseil, si vous voulez.

M. Saint-Germain: M. le Président...

M. Morin (Sauvé): La réponse, me dit-on, est la suivante: Lors de la première série d'achat, qui devait sans doute avoir lieu l'automne dernier au moment où la politique a été mise en oeuvre, on a procédé par soumissions au ministère de l'Agriculture auprès de firmes québécoises. Cette fois-ci, nous allons passer par le service général des achats. Il y aura, une fois de plus, soumissions et application, cette fois, de la politique d'achat au Québec qui est entrée en vigueur depuis lors.

Mme Lavoie-Roux: Parfait. M. le ministre, tout à l'heure, vous disiez que jusqu'à maintenant il n'y avait que les milieux défavorisés qui avaient été servis par cette politique. Comme je le disais au début de mon intervention, je suis contre la généralisation sans évaluation.

Il serait peut-être bon que vos services s'en-quièrent auprès des diverses commissions scolaires. Il y a des commissions scolaires où c'est rendu, non plus dans les milieux défavorisés... parce que les sommes ont été allouées par commission scolaire. Ce ne sont pas que des enfants de milieux défavorisés qui reçoivent le lait. Si on tient compte des remarques de mon collègue de D'Arcy McGee, je pense qu'on ne peut que le regretter, même si on nous avait dit qu'avant de procéder à une autre étape de cette distribution de lait, ce serait évalué, d'autant plus que, tout à l'heure, vous nous avez dit qu'en 1981 ce serait rendu universel...

M. Morin (Sauvé): C'est l'objectif, mais quitte à le revoir, si l'évaluation nous révèle qu'il n'est pas nécessaire d'étendre la politique à tout le monde.

Mme Lavoie-Roux: II faudrait se hâter de faire l'évaluation; on est rendu à $6 millions, de toute façon. Je pense que c'est fort regrettable qu'elle n'ait pas été faite. J'inviterais le ministre qui, je comprends, veut être solidaire du cabinet quand on fait ce genre de politique, à ne pas oublier qu'il est le ministre de l'Éducation alors que le député de Lévis est le ministre de l'Agriculture. Ceci me semble essentiel.

M. Morin (Sauvé): C'est une politique qui a été largement approuvée par les parents, je peux vous le dire. On m'en parle jusque durant ma tournée sur le livre vert. Les parents sont ravis, de façon générale, de cette politique. Ils savent très bien ce que les enfants consomment dans les écoles quand il n'y a pas de lait. Il faut tenir compte de cette dimension.

Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le ministre, je serais prête à vous appuyer et à réaliser que ce que vous dites est bon si je ne savais pas qu'en même temps, dans nombre de cafétérias — là-dessus, vous pourriez peut-être faire un autre lien — ce qu'on donne aux enfants, ce sont les aliments dont vous parliez tout à l'heure, que vous avez décrits comme étant — enfin, il ne faut pas que j'utilise le même terme, je vais me faire réprimander par mon collègue...

M. Morin (Sauvé): N'hésitez pas, n'hésitez pas, madame, je vous en prie.

Mme Lavoie-Roux:... de D'Arcy McGee. Écoutez, c'est de la patate frite, c'est de la pizza, des pâtes et des desserts. C'est pour cela que j'ai l'impression qu'on met un peu, dans certains milieux, la charrue avant les boeufs. Enfin, comme on parle de l'agriculture...

M. Morin (Sauvé): Je dois dire que je suis très favorablement impressionné, madame le député, par ce qui se fait au sein du CSIM, dans sa tentative de sortir des écoles les pires de ces poisons. Bien sûr, on n'a peut-être pas réussi encore sur toute la ligne mais on a tout de même, par exemple, introduit la pomme à la place d'un certain nombre de gâteaux qui se vendaient auparavant et qui, sur le plan nutritif, ne représentaient à peu près rien ou représentaient un apport qui n'était pas nécessaire à la croissance de l'enfant.

Mais là, je vais laisser la place à l'homme scientifique qui va sûrement me dire que ces gâteaux n'étaient pas si mauvais que cela.

Mme Lavoie-Roux: Je regrette, M. le ministre, mais vous glissez dans les argumentations du député de D'Arcy McGee pour essayer de lui faire dire que les liqueurs gazeuses étaient bonnes alors que — évidemment, vous vous défendez comme vous pouvez, mais le fond du problème n'est pas celui-là.

Bon, on pourrait peut-être passer à un autre sujet, M. le ministre.

M. Saint-Germain: J'aimerais bien terminer, M. le Président.

M. Morin (Sauvé): M. le député de D'Arcy McGee va pouvoir y revenir.

M. Saint-Germain: Je sais bien que le ministre n'a pas trop confiance en ma formation scientifique; d'ailleurs, dans sa dernière phrase, il me l'a laissé sentir. Vu que c'est un sujet qui n'est pas explosif, la nutrition, et qu'il a immensément confiance en son système d'éducation, s'il faisait étudier ce que le Dr Roy dit par ses commandos du pif, peut-être qu'on pourrait arriver à des conclusions scientifiques et valables.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vais m'enquérir de cette possibilité.

M. Saint-Germain: Cela ne serait pas dangereux pour les enfants, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Ce serait le commando du lait.

M. Saint-Germain: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Ou de la nutrition, M. le ministre.

M. Goldbloom: M. le Président, peut-on demander au ministre si l'introduction de la pomme à l'école a un rapport avec un certain retour à des habitudes d'Adam et Eve dans la deuxième phase de leur existence?

M. Morin (Sauvé): M. le Président...

Le Président (M. Marcoux): C'est le mot de la fin de ce débat, je crois.

M. Morin (Sauvé): Oui, j'ose l'espérer.

Le Président (M. Marcoux): Je vous inviterais, pour les vingt minutes environ...

M. Morin (Sauvé): Car nous voilà de retour au paradis terrestre.

M. Saint-Germain: Vous avouerez...

M. Morin (Sauvé): Peut-être pourrions-nous maintenant faire avancer les débats, compte tenu de la faute originelle.

Le Président (M. Marcoux): J'ai peur qu'il ne se commette quelques péchés...

M. Saint-Germain: Vous avouerez, M. le Président, que...

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous désirez aborder un autre sujet?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Marcoux): Mme le député de L'Acadie.

Les milieux défavorisés

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais, — très brièvement, je vais surprendre le ministre — je pense qu'on est un peu fatigué — aborder le programme des milieux défavorisés.

Je vois, M. le ministre, qu'on continue de mettre en place, c'est-à-dire de développer le programme Passe-partout. On donne des chiffres quant au nombre de commissions scolaires qui ont été impliquées, à la façon dont les animateurs ont travaillé, etc. Est-ce que, là aussi, encore une fois, on procède à une évaluation de ce programme pour les milieux défavorisés qui, en fait, on l'a dit l'année dernière, est un programme qui va dans tous les foyers? Il faudrait peut-être savoir s'il va davantage dans les foyers des familles moyennes que dans celles des milieux défavorisés, sauf dans les cas où vous avez des animateurs.

Est-ce qu'on évalue ce programme?

M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, je dois vous dire, d'abord, que plusieurs types d'évaluation sont appliqués à la série Passe-partout. Il y a d'abord une évaluation qui porte sur chaque émission, sur le contenu de chaque émission. Elle est regardée et critiquée sur le plan pédagogique et sur le plan esthétique. En plus de cela, il doit y avoir d'autres évaluations. Je vais demander au sous-ministre responsable du secteur de vous donner les détails.

Il y a. effectivement, trois types d'évaluation. Il y a celle que vient d'évoquer M. le ministre, qui est une évaluation par émission, qui se fait par une équipe de pédagogues et qui se fait beaucoup plus à partir du sens commun, de l'observation, de l'expérience des éducateurs, que de grilles très

scientifiques. Elle fait l'objet de remarques consignées. Dans certains cas, certaines séquences sont reprises pour améliorer l'émission, mais c'est surtout par addition. C'est le premier type d'évaluation.

Le deuxième type d'évaluation en est une que je qualifierais d'évaluation d'impact. Les émissions sont-elles écoutées? Elles sont écoutées par qui? Sont-elles écoutées davantage par les plus jeunes, par les plus vieux? A ce jour, les rapports que nous avons montrent que cette émission est celle qui a la plus haute cote d'écoute de toutes les émissions pour enfants, actuellement, au Québec, y compris les grandes émissions comme Bobino, par exemple. C'est ce que j'appellerais l'évaluation de l'impact.

Il y a un troisième type d'évaluation qui commence, présentement, et qui est plus complexe, on le devine. C'est la qualité de l'émission au plan de l'atteinte des objectifs. Comme c'est une émission qui poursuit d'abord des objectifs de développement psychomoteur et socio-affectif chez les enfants, davantage que d'apprentissage des connaissances, il est difficile, évidemment, d'évaluer les retombées d'une telle émission. Les travaux sont avancés et on commence à valider des instruments pour ce faire. C'est très complexe, c'est long, mais cela se fait. On a commencé à le faire.

Mme Lavoie-Roux: Je vous félicite, je trouve cela excellent.

Du point de vue des autres programmes prévus, il y a une augmentation des budgets de $1 million pour les milieux défavorisés, du moins d'après la page 41, où on voit qu'il y a $1 million de plus pour les milieux défavorisés. A quoi ce million sera-t-il affecté?

En même temps, je vous pose une autre question. Quels sont les autres programmes que vous développez dans ce secteur, ou sur lesquels vous mettez l'accent?

M. Morin (Sauvé): Pour la première partie de votre réponse, cet argent est affecté, en priorité, à l'encadrement de ces émissions Passe-partout. On devine bien que ces émissions, qui sont faites pour des enfants d'âge préscolaire, sont faites pour tous les enfants du Québec. Les enfants défavorisés ne sont pas différents au point où il faille des émissions spécifiques pour eux. Cependant, dans la préparation et dans l'évaluation qu'on fait de ces émissions, on est particulièrement attentif à s'adresser à des enfants de milieux moyens et défavorisés. On évite donc des séquences qui renvoient à des mondes tout à fait impensables pour des enfants plus défavorisés. C'est l'aspect de l'ajustement de l'émission. Il est difficile de trouver une moyenne; pour vous donner un exemple, un téléphone couleur, est-ce quelque chose qu'on met dans une émission télévisée qui s'adresse à des enfants défavorisés? Ce sont des questions aussi concrètes que celle-là qui se posent. Si on fait manger les enfants, leur fait-on — je ne veux pas faire de chicane ici — manger un cocktail de crevettes comme entrée? (21 h 45)

Mme Lavoie-Roux: On était d'accord pour le lait.

M. Morin (Sauvé): Les réalisateurs ont des problèmes techniques de ce genre. Pour être bien certains de pallier cette difficulté qu'on essaie de contourner le mieux possible, on assure aux commissions scolaires défavorisées un soutien d'encadrement des familles qui soit supplémentaire. Le million qu'on ajoute pour l'année prochaine, c'est pour l'encadrement. Cet encadrement, il s'agit de pédagogues animateurs qui seront engagés par les commissions scolaires, sur subventions spéciales du ministère, et qui oeuvreront dans 35 commissions scolaires en septembre prochain auprès des parents des milieux défavorisés. Nous avons déjà expérimenté dans quatre commissions scolaires ce mode d'approche. On l'étendra aux 35 commissions scolaires les plus pauvres du Québec, les plus défavorisées, en septembre prochain.

De plus nous doterons les parents de ces milieux défavorisés d'instruments, de cahiers Passe-partout et les enfants de baluchons Passe-partout qui vont comprendre un certain nombre de petits outils dont les enfants ont besoin et qu'ils sont souvent trop pauvres pour se procurer comme des plumes feutre, des cahiers à colorier, etc. Le million est donc pour supporter, dans les milieux défavorisés, l'émission.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces commissions scolaires ont des prématernelles?

M. Morin (Sauvé): Quatre ans? Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Morin (Sauvé): Le programme des maternelles quatre ans, par voie de conséquence, ne sera pas développé davantage au cours de la prochaine année. La logique, c'est de tenter, graduellement, de ne pas dédoubler les maternelles quatre ans et l'utilisation de la télévision éducative.

Plusieurs de ces commissions scolaires, cependant, ont déjà des maternelles quatre ans; j'ai la liste ici et plusieurs en ont déjà. Alors, on ne les enlève pas pour autant ces maternelles quatre ans, parce que les maternelles quatre ans ont justement été allouées aux milieux les plus défavorisés depuis le début. Cela se dédouble en partie. On les maintient pour le moment.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

De quelle façon faites-vous le regroupement des parents parce qu'il s'agit d'enfants d'âge préscolaire? Est-ce que les animateurs regroupent les parents pour faire l'animation?

M. Morin (Sauvé): On a eu quatre expériences cette année, deux dans les régions urbaines deux en régions plus éloignées. Ce que je sais — je n'ai pas travaillé de très près à cela — c'est qu'aucun des quatre animateurs n'a travaillé de la même façon. Il y a des milieux très défavorisés où il faut faire pratiquement du porte à porte pour aller

chercher les parents. Des milieux un peu plus organisés où la commission scolaire peut déjà, par des activités parapédagogiques d'information pour les parents, regrouper ces parents.

On essaie justement de développer des modèles d'intervention auprès des parents, d'où le fait que nos critères de sélection et d'engagement de ces pédagogues animateurs, c'est d'abord des gens qui doivent avoir un profil d'éducateur et qui ont travaillé au préscolaire, qui ont quelques années d'expérience, qui ont travaillé dans ces milieux autant que possible et qui habitent dans les régions où ils vont travailler. Vous connaissez bien ce problème de la localisation des animateurs.

Mme Lavoie-Roux: En fait, l'argent va d'abord au développement du programme de télévision lui-même, à son évaluation et à la formation des animateurs. Est-ce qu'il y a d'autres points — il y a des prématernelles qui existent à certains endroits — sur lesquels vous mettez l'accent? Je vais vous en nommer; par exemple, du côté de la formation des maîtres, du côté de l'animation du milieu. Il reste que, de plus en plus, on a prouvé que là où il peut y avoir certains résultats, c'est là où on peut faire une mobilisation générale du milieu, des ressources communautaires, etc, qui vraiment s'impliquent comme un tout dans cette action. Est-ce que vous avez ce type d'animation?

M. Morin (Sauvé): Ce vers quoi nous nous acheminons, dans ce programme d'intervention en milieu défavorisé, c'est vers l'élaboration d'une politique d'intervention. Une politique explicite, aussi générale que possible et, par voie de conséquence, d'un plan d'intervention en milieu défavorisé. Le mode de travail que nous avons adopté depuis trois ans, au ministère de l'Éducation, dans ce dossier délicat, c'est une double action dans le fond. Une série de mesures sont expérimentées dans divers milieux et à divers niveaux, concrètement. Donc, des sommes qui sont versées dans les commissions scolaires et qui laissent des traces de toute façon, même si parfois, comme c'est un peu expérimental, il y a une certaine perte.

Parallèlement, des travaux de recherche et de réflexion sont en cours sur la question des milieux défavorisés, sur les choix sociaux qu'il faut retenir, en vue d'en arriver à une politique. Ce que nous faisons — le comité de travail qui élabore cette politique en collaboration avec des gens de l'extérieur — nous mettons continuellement ensemble des réflexions plus théoriques de recherche et des évaluations d'action.

Dans le milieu, nous avons présentement des actions du type suivant: des expérimentations de formation d'équipes-écoles, dans quatre écoles, dans quatre commissions scolaires. Je me souviens que la Commission scolaire La Neigette était impliquée dans ces expériences, de même que trois autres. Il y a quatre commissions scolaires dans lesquelles nous avons développé, depuis deux ans ces expériences... Nous sommes partis de l'hypothèse que la présence d'une équipe d'éducateurs, dans un milieu défavorisé, deman- dait un type de sensibilisation particulier. Voilà une chose qui est assez concluante. C'est un élément qui devrait sûrement être retenu dans un plan la formation d'équipes-écoles.

Nous avons des expériences plus modestes, plus difficiles, du côté du soutien au niveau secondaire. Nous avons alloué $284 000 répartis entre un certain nombre de commissions scolaires qui ont fait des propositions pour des projets concrets. Nous avons déjà identifié un certain nombre de projets qui sont porteurs d'avenir et qui pourront servir dans un plan sur tout le territoire.

Nous avons les maternelles, bien sûr, quatre ans et cinq ans, qui prennent $3 700 000 du budget. Le programme le plus important actuellement, c'est le programme Passe-partout, qui prend une bonne partie du budget parce qu'il est en production. Quand la production sera terminée, nous bénéficierons de cette production pour dix ans; on calcule une utilisation de dix ans de Passe-partout.

Mme Lavoie-Roux: Dans vos efforts d'animation du milieu pour mobiliser l'ensemble du milieu, est-ce que vous avez à ce moment-ci...

M. Morin (Sauvé): Quand vous parlez d'ensemble du milieu, vous parlez d'un milieu défavorisé?

Mme Lavoie-Roux: Oui, dans un milieu défavorisé.

M. Morin (Sauvé): Dans un milieu défavorisé, ce que nous faisons présentement, c'est modeste. C'est un ou deux animateurs dans la commission scolaire qui vont commencer à essayer de regrouper les parents, de les sensibiliser aux problèmes particuliers de leurs enfants. Parallèlement et concurremment, il y a des écoles qui doivent développer une démarche particulière. C'est concurrent et cela s'additionne aussi. On fait la promotion de Passe-partout dans le même milieu. Certains de ces milieux bénéficient déjà de la maternelle quatre ans. On fournit les outils particuliers de soutien à l'émission Passe-partout. Cela commence à faire une certaine somme de moyens; c'est par addition aussi.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Je suis d'accord pour cela mais, je veux dire, est-ce que vous essayez de sortir de l'école parce que toutes ces mesures, pour amener le milieu dans l'école et amener cet effort de coordination... quand même, le milieu a des ressources en dehors de l'école.

M. Morin (Sauvé): À ce jour, je dois dire qu'on a fait peu de choses pour rendre un peu globale notre action. Le premier problème que l'on rencontre quand on développe une politique d'intervention en milieu défavorisé, c'est ce que je qualifierais la limite de l'intervention éducative. Je pense qu'on le soulignera dans la politique; on soulignera, dans le fond, que le ministère de

l'Éducation veut bien prendre la tranche qui lui revient là-dedans et faire quelque chose plutôt que de dire que cela prendrait de grandes politiques globales, attendons-les. Mais je crois que vous allez convenir que cela prend d'autres interventions qu'éducatives.

Il faut songer que tout cela devrait être complété par des politiques d'habitation, par des politiques d'allocation, par de nombreuses politiques sociales mais que, cependant, à l'éducation, nous n'étions pas obligés d'attendre que tout aboutisse pour nous mettre en route, d'autant...

Mme Lavoie-Roux: ... on n'est jamais parti.

M. Morin (Sauvé): ... que nous nous sommes persuadés que ce type d'intervention pouvait être bénéfique et pouvait aider à placer les enfants sur un pied d'égalité, au moment où ils entrent en première année. C'est l'objectif que nous visons.

Mme Lavoie-Roux: Deux questions — parce que je ne veux pas m'étendre de toute façon, il est 21 h 55 — qui sont des questions plus concrètes. La première, je l'ai soulevée en préambule l'autre jour, suite à une intervention du ministre: Quelles sont les intentions du ministère à l'égard du financement des programmes en milieu défavorisé du Conseil scolaire de l'île de Montréal? On sait fort bien — je pense qu'on l'a établi l'autre jour avec le sous-ministre — que c'est au plus 20% à 25% que le ministère assume; ce n'est pas que les milieux ne doivent pas essayer d'établir des priorités qui ne soient pas celles-là.

Je pense que, eu égard aux sommes que le ministère verse dans d'autres commissions scolaires, il y a un peu une question de justice, à ce moment-là. Autant je veux que les milieux viennent à mettre de côté, ou à établir, comme priorité, dans leurs ressources financières, ce problème, tant et aussi longtemps que vous ne demandez pas aux autres milieux de le faire, je trouve qu'on est très exigeant à l'égard du conseil scolaire de l'île de Montréal qui, quand même, y met des sommes considérables.

M. Morin (Sauvé): La question s'adresse, bien sûr, à M. le ministre.

Le budget du Conseil scolaire de l'île de Montréal destiné aux milieux défavorisés est de $5 600 000, et vous le saviez, je pense. De ce montant, $1 600 000 sont consacrés à l'animation et à quelques autres activités, tandis que $4 millions sont consacrés aux maternelles 4 ans et aux prématernelles. Sur ce montant de $5 600 000, le conseil recevra 28% du gouvernement, c'est-à-dire $1 100 000.

Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez augmenté, je pense, de quelques centaines de mille, cette année.

M. Morin (Sauvé): C'est cela, de façon que Montréal reçoive, grosso modo, sa part de ce que nous distribuons à travers l'ensemble du Québec, pour les milieux défavorisés.

Mme Lavoie-Roux: Dans quelle mesure, les autres commissions scolaires font-elles un effort pour financer elles-mêmes une partie, ou même, aller au-delà des programmes que le ministère...?

M. Morin (Sauvé): II se fait quelques efforts sur lesquels il faudrait aller chercher des précisions. Je dois vous dire que Montréal est en avance.

Évidemment, il existe, au niveau du conseil, une motivation particulière qui l'amène à s'occuper de ces questions. C'est, tout simplement, que la loi 73 lui fait une obligation de s'en occuper, alors que nous n'avons pas une pareille obligation...

Mme Lavoie-Roux: Oui, la loi 71.

M. Morin (Sauvé): Loi 71, dis-je. Une pareille obligation n'existe pas pour les autres commissions scolaires.

Mme Lavoie-Roux: Vous savez pourquoi elle l'a, l'obligation. C'est parce qu'elle se l'est créée elle-même. C'est-à-dire que la CECM avait beaucoup insisté pour que ce soit inclus dans la loi 71. Il faudrait aussi que ce même mouvement puisse originer des autres commissions scolaires.

M. Morin (Sauvé): Oui. C'est une des raisons pour lesquelles les budgets destinés aux milieux défavorisés augmentent. Il faut dire que le milieu montréalais a peut-être aussi des moyens dont ne disposent pas certaines autres régions. En tout cas, je ne voudrais pas diminuer son mérite, parce que je considère que ce qu'il s'y fait, dans ce domaine, est remarquable.

Mme Lavoie-Roux: C'est bien beau d'avoir un témoignage d'estime, mais je me demande si, compte tenu du nombre de la population à servir dans ces milieux, comparativement à d'autres commissions scolaires, il n'y aurait pas un effort plus grand qui pourrait être fait par le ministère de l'Éducation.

M. Morin (Sauvé): Ils ont leur part. Tant mieux s'ils font davantage. Je crois qu'ils ont raison de faire davantage, parce que, vous savez comme moi que les milieux défavorisés de certains quartiers de Montréal ont grand besoin qu'on mette en place des programmes qui leur soient destinés. Ils reçoivent leur dû, en proportion de la population et du nombre d'élèves qui relèvent de leur responsabilité.

Mme Lavoie-Roux: Je vais poser ma question différemment.

Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir, alors, un effort plus grand de la part du ministère à l'égard de toutes les commissions scolaires, qui ferait

qu'elles pourraient recevoir davantage, ou même, développer davantage de services, sans être traitées avec plus de faveur que les autres?

M. Morin (Sauvé): Les autres commissions scolaires ne peuvent être amenées à prendre des attitudes comme celle-là que peu à peu. Il y a là un élément d'éducation, pour les y amener graduellement. Nous tentons de le faire avec ce que nous versons à destination des milieux défavorisés. Je dois dire, cependant, qu'avant qu'on arrive au niveau de ce qui se fait à Montréal, il va y avoir du travail à faire. (22 heures)

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, dernièrement il y a un rapport qui a été déposé, par Mme Giroux, touchant, je crois, le Bas-du-Fleuve et la Gaspésie — ou l'Est du Québec — on en faisait état à la radio, c'était... Je ne sais pas si vous les appelez encore des études de pauvreté. Est-ce qu'il n'y a pas un rapport qui dernièrement a été...

M. Morin (Sauvé): Ce à quoi Mme Giroux a fait allusion, à la télévision, lors d'une entrevue, c'est cette étude sur les zones de pauvreté qu'on vous a d'ailleurs fait tenir déjà. C'est l'étude à cahier rouge.

Mme Lavoie-Roux: Non, je ne l'ai pas reçue.

M. Morin (Sauvé): Oui, c'est moi qui vous l'ai postée, l'année passée, mais on en a d'autres exemplaires.

Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, je devrais la retrouver.

M. Morin (Sauvé): L'année dernière, à la suite de la commission parlementaire. Il en avait été question à la commission parlementaire, on en avait pris note et, quatre mois après, quand elle est sortie, elle a été envoyée aux membres de la commission parlementaire, mais cela dit, elle ne vous est peut-être pas parvenue.

Mme Lavoie-Roux: C'est à celle-là qu'elle faisait allusion.

M. Morin (Sauvé): C'est une étude qui s'appelle "Les zones de pauvreté" dans laquelle il y a deux cartes couleur qui montrent la distribution des commissions scolaires. C'est assez impressionnant, d'ailleurs.

Mme Lavoie-Roux: II reste que les besoins sont quand même très grands en dehors de Montréal également. Est-ce que vous avez l'impression que vous développez à un rythme suffisant pour servir tous les milieux défavorisés de l'extérieur de Montréal?

M. Morin (Sauvé): Avant de nous lancer dans une politique complète et détaillée, il fallait avoir des instruments de travail. C'est la raison pour laquelle nous avons commencé par établir cette fameuse carte des zones de sous-développement.

Mme Lavoie-Roux: Vous les avez maintenant!

M. Morin (Sauvé): Nous les avons et, à l'automne, j'ai eu l'occasion de le dire déjà, une politique va être construite à partir de ce rapport.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que vous vous engagez à ce que ce plan de développement des zones défavorisées soit déposé avant Noël? Je suis même généreuse, je pourrais vous dire à l'automne, je vous dis avant Noël.

M. Morin (Sauvé): Normalement, la politique elle-même devrait être déposée chez le ministre à l'automne, au mois de septembre ou du moins vers septembre et le plan devrait suivre au cours de l'année, du moins d'après les travaux que nous poursuivons.

Mme Lavoie-Roux: Cette année-ci ou l'autre?

M. Morin (Sauvé): II faudra que ce plan aille devant le Comité permanent de développement social, il faudra qu'il aille également devant le Conseil des ministres. Normalement c'est une opération qui prend de six à sept semaines.

Mme Lavoie-Roux: Je pensais que vous alliez dire de six à sept mois.

M. Morin (Sauvé): Non, de six à sept semaines. Il y a eu des livres blancs qui ont pris plus de temps, mais d'autres ont été expédiés en trois semaines, c'est variable.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Marcoux): Sur ces remarques, nous allons...

M. Morin (Sauvé): Pouvons-nous adopter... Le Président (M. Marcoux): Le programme 4?

M. Morin (Sauvé): ... ce qui est relatif au primaire et au secondaire, madame?

Mme Lavoie-Roux: Je regrette, mais j'aurais encore des questions pour mardi matin.

M. Morin (Sauvé): Bon. M. le Président, je voudrais simplement avoir une idée de la répartition du temps...

Mme Lavoie-Roux: Non, je pense...

M. Morin (Sauvé):... parce qu'il faut que nous ayons le temps pour le collégial et l'universitaire.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je ne veux pas m'engager d'une façon rigoureuse, je pense qu'on pourrait terminer l'élémentaire et le secondaire mardi matin et que nous pourrions commencer le collégial et la suite mardi après-midi.

M. Morin (Sauvé): Ce serait encore raisonnable et nous aurions l'espoir de terminer jeudi.

Mme Lavoie-Roux: Je vous ai garanti que vous termineriez jeudi.

M. Morin (Sauvé): Oui, mais c'est que vous n'êtes pas la seule dans le tableau, il y a l'éloquent député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Monsieur, moi j'en ai assez, croyez-moi; le plus tôt fini, mieux ce sera.

Mme Lavoie-Roux: Voyons!

Le Président (M. Marcoux): La commission de l'éducation ajourne ses travaux à mardi prochain, dix heures...

(Fin de la séance à 22 h 4)

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