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Étude des crédits du ministère de
l'Éducation
(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, madame
messieurs!
La commission de l'éducation est réunie ce matin pour
étudier les crédits du ministère de
l'Éducation.
Les membres de cette assemblée sont M. Alfred (Papineau), M.
Lacoste (Sainte-Anne), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan
(Gaspé), M. Marquis (Matapédia), M. Morin (Sauvé), M.
Paquette (Rosemont), M. Picotte (Maskinongé).
Y a-t-il des changements au niveau des membres de cette assemblée
pour cette journée?
Nous en étions rendus au programme 4, élément
1.
M. le ministre.
Réponses du ministre
M. Morin (Sauvé): M. le Président, avant que nous
examinions les statistiques relatives à l'application de la Charte de la
langue française, j'aimerais apporter des réponses à des
questions qui m'ont été posées hier, notamment par Mme le
député de L'Acadie. Ces réponses portent sur les classes
d'accueil et sur les ADP.
Mme Lavoie-Roux: La question des ADP a été
soulevée par M. Laplante, mais très brièvement.
M. Morin (Sauvé): Pour ce qui est...
Mme Lavoie-Roux: Cela m'intéresse, de toute
façon.
M. Morin (Sauvé): Commençons par les ADP. Mme
Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): Je suis en mesure de vous donner des
chiffres qui font état de la situation actuelle. Ils sont datés
du 24 mai. Tout d'abord, à la DGDP, la Direction générale
du développement pédagogique, nous avons un assez grand nombre
d'ADP quoique, semble-t-il, il soit légèrement supérieur
à celui de l'an dernier en raison des plans sectoriels de
développement. Je pourrais vous énumérer toute la liste,
mais je vous donnerai les totaux qui sont plus éloquents.
À la DGR, la Direction générale des réseaux,
le soutien pédagogique aux petites écoles exige la
présence de 24 ADP alors que, l'an dernier, il y en avait 37. Au niveau
des plans sectoriels de développement, soit français langue
maternelle, art, éducation physique, milieu défavorisé,
nous avons cette année beaucoup plus d'ADP que l'an dernier, mais ils se
trouvent surtout dans les régions ou dans les commissions scolaires. Je
vais m'expliquer. En tout et partout, il y a cette année 193
ADP, alors que l'an dernier, il y en avait 134. Il y a donc eu
augmentation des ADP, non pas surtout au niveau du ministère mais bien
dans les régions et dans les commissions scolaires. Au ministère,
nous en avons 119, mais nous avons ajouté à cela 43 ADP,
c'est-à-dire 33 de plus que l'an dernier, pour mettre en oeuvre nos
politiques à l'égard des milieux défavorisés,
notamment dans la foulée de la série d'émissions
intitulée Passe-partout.
De même pour les plans sectoriels de développement,
français langue maternelle, art et éducation physique, 31
nouveaux ADP se trouvent dans les régions pour aider à leur mise
en oeuvre. Voilà donc le tableau général. Augmentation
globale du nombre d'ADP, mais surtout à l'extérieur du
ministère lui-même.
Mme Lavoie-Roux: Si vous me permettez une question, M. le
Président. Les autres ADP se trouvent répartis dans quelles
matières?
M. Morin (Sauvé): À la direction des programmes
c'est par niveau qu'on me l'a indiqué il y en a 16 au
primaire, 14 au secondaire et 5 en adaptation scolaire. À la direction
de la mesure et de l'évaluation, nous en avons 7; au service de Ja
recherche, 4, comme l'an dernier. À la formation des maîtres et au
matériel didactique, 9, alors que nous n'en avions que 5 l'an dernier.
Pour les plans sectoriels de développement, au ministère
même voilà qui répond directement à votre
question pour le français, langue maternelle, nous en avons 9;
pour les langues secondes, 8, à l'accueil aux non francophones, 5; aux
arts, 9 et à l'éducation physique, 8. Cela reflète
évidemment nos priorités et les développements que nous
voulons donner au français, langue maternelle, aux langues secondes, aux
arts et à l'éducation physique.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il serait possible d'avoir un tableau
de l'évolution des ADP en fonction des matières, par exemple,
pour les trois dernières années?
M. Morin (Sauvé): Nous pourrions vous fournir cela...
Mme Lavoie-Roux: C'est parce que cela demeure quand même...
J'ai beau prendre quelques notes et quelques chiffres...
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Lavoie-Roux: ... cela donnerait un meilleur portrait de
l'évolution, je pense...
M. Morin (Sauvé): Nous pouvons vous fournir ce tableau,
mais je tiens déjà à vous dire que pour les plans
sectoriels de développement, ce sont de nouveaux ADP, de nouveaux
personnels. Je vais demander qu'on vous sorte les chiffres. Cependant, je vous
ferai remettre personnellement le tableau et si vous avez des questions, alors
on
pourra les aborder de manière à ne pas revenir
indéfiniment sur les mêmes questions.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Pour ce qui est maintenant de la
clientèle scolaire des classes d'accueil, nous avons des chiffres fort
intéressants à vous communiquer. Ils datent du 25 mai.
Je me contenterai de relever les chiffres les plus impressionnants.
À la commission scolaire Baldwin-Cartier, il y a 13 classes d'accueil
pour 232 élèves; à la CECM voilà qui va
intéresser particulièrement Mme le député
111 classes d'accueil pour 1555 élèves.
Mme Lavoie-Roux: Quelle est l'augmentation par rapport à
l'an dernier?
M. Morin (Sauvé): On m'indique que c'est à peu
près la même chose, oui. C'est quand même impressionnant que
nous ayons toutes ces classes d'accueil, qui francisent, qui préparent
les jeunes venus de l'étranger à accéder à
l'école française.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement vous faire remarquer
qu'il n'y a là rien de nouveau, en fait...
M. Morin (Sauvé): Non, c'est pour répondre...
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
M. Morin (Sauvé): ... aux questions que vous m'aviez
posées, tout simplement.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça.
M. Morin (Sauvé): Vous vouliez savoir combien il y en
avait. Il se peut, cependant, que dans certaines commissions scolaires...
Mme Lavoie-Roux: II y en ait de nouvelles. M. Morin
(Sauvé): ... il y en ait de nouvelles. Mme Lavoie-Roux:
Oui.
M. Morin (Sauvé): À la CECQ, il n'y a qu'une classe
pour 18 élèves. Je vais vous donner les chiffres principaux.
À Jérôme Le Royer, 17 classes pour 271
élèves; à Sainte-Croix, dans le nord de Montréal.
14 classes pour 215 élèves...
Mme Lavoie-Roux: ... une augmentation, je pense.
M. Morin (Sauvé): C'est possible. Je pourrais aussi vous
faire sortir l'évolution de la clientèle scolaire des classes
d'accueil, mais cela exigerait beaucoup de recherches pour faire un tableau
synoptique.
À la commission scolaire Sault-Saint-Louis, il y a sept classes
pour 123 élèves. Même au BEPGM, il y a deux classes pour 36
élèves.
Comme vous le savez, nous étudions la possibilité
d'étendre le nombre de classes d'accueil au Bureau des écoles
protestantes de l'agglomération montréalaise. Les
représentants du BEPGM m'ont demandé si je consentirais à
augmenter le nombre de classes d'accueil et, en vue de régler nos
problèmes avec cette commission scolaire, j'étais tout à
fait disposé à leur permettre d'intégrer les jeunes
immigrants à des classes d'accueil, pour les diriger ensuite vers les
classes françaises protestantes. Sur ce point, j'étais prêt
à faire preuve d'une très grande souplesse, puisque je pense
qu'il nous faut rechercher la solution de ces problèmes, non pas dans
l'affrontement, mais dans la bonne volonté de part et autre. Dans la
mesure où le BEPGM veut maintenant faire preuve de bonne volonté,
il ne trouvera, auprès du ministère, qu'une oreille attentive et
bienveillante.
M. Saint-Germain: M. le Président, est-ce que ceci doit se
faire selon un principe qui veut qu'il y ait de bonnes relations entre le
gouvernement et le Protestant School Board ou est-ce que cela doit se faire
dans l'intérêt de la communauté?
M. Morin (Sauvé): Les deux choses ne sont pas
nécessairement opposées. Cela doit se faire dans
l'intérêt supérieur du Québec, mais, s'il est
possible de le faire de façon ordonnée, paisible et
civilisée, nous préférons de loin ces méthodes.
Est-ce que le député me suggère d'utiliser les injonctions
et la police?
M. Saint-Germain: Non, mais je crois que le développement
de cette section française du Protestant School Board correspond aux
intérêts supérieurs du Québec; c'est la raison pour
laquelle j'ai été un peu surpris de voir que vous vous
étiez limités à des questions de bonnes relations entre le
Protestant School Board et le gouvernement.
M. Morin (Sauvé): II y a beaucoup plus que cela dans notre
démarche, il y a aussi le respect des convictions religieuses des gens.
Il se peut, étant donné la diversité croissante du
Québec sur le plan sociologique, qu'il y ait de plus en plus de
protestants francophones ou d'élèves qui ne soient pas
catholiques et qui préfèrent l'école protestante qui, vous
le savez, est une école très diversifiée. Il y a des
orthodoxes qui vont à l'école protestante, il y a même des
Israélites qui vont à l'école protestante, mais s'ils sont
d'origine linguistique française, il n'y a aucune raison pour laquelle
nous ne développerions pas notre secteur protestant francophone. Je l'ai
dit déjà publiquement en toute lettre, c'est un secteur qui, je
crois, est appelé à se développer dans l'avenir, et ce
dans l'intérêt supérieur de la collectivité.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela m'étonne
quand même de vous entendre dire que vous êtes prêt à
utiliser de la souplesse pour leur donner des classes d'accueil, si tel est
leur désir. Tant et aussi longtemps qu'on aura un système
protestant, un système catholique, un système
confessionnel, pour dire plus justement, de toute évidence on
aura autant droit à des classes d'accueil que le secteur catholique,
non? Alors, je comprends mal la souplesse que vous allez démontrer, cela
me semble assez naturel, à moins qu'on le refuse, c'est autre chose.
M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas de ma part qu'il y a une
plus grande souplesse. Je pense qu'il n'y a jamais eu qu'un esprit d'accueil de
notre part, mais je constate qu'il y a évolution au BEPGM, puisque c'est
de son côté qu'il n'y avait pas ces mêmes bonnes
dispositions à l'égard de l'enseignement en français. Or,
il semble qu'il y ait évolution et que désormais il soit
prêt à développer le secteur francophone sans doute plus
qu'il n'avait envisagé de le faire dans le passé. Les classes
d'accueil sont évidemment une charnière qui permet la transition
de l'école anglaise ou du milieu anglophone vers des classes
françaises.
Je fais grâce à la commission de toutes les autres
commissions scolaires où il y a deux, trois, quatre, dix classes
d'accueil, à moins qu'on ne veuille avoir toute la liste.
Mme Lavoie-Roux: Non, "une seule" qu'il m'intéresserait de
connaître, celles de la région de Sherbrooke et de la
région de l'Outaouais. Deux, pas une.
M. Morin (Sauvé): Oui, d'abord dans la région de
l'Outaouais-Hull, nous avons quatre classes d'accueil pour 73
élèves. Pour ce qui est de Sherbrooke, nous n'avons que deux
classes d'accueil pour 34 élèves. Il est évident que les
classes d'accueil se concentrent avant tout à Montréal,
c'est-à-dire à la CECM, à Baldwin-Cartier, au BEPGM,
à Chambly, à Chomedey de Laval, à Greenfield Park,
à Jérôme-LeRoyer, etc.
Mme Lavoie-Roux: II semble bien, M. le ministre, que les efforts
que le ministère de l'Immigration fait pour tenter de distribuer
distribuer est peut-être un mauvais mot mais au moins d'orienter
les nouveaux venus vers d'autres régions du Québec n'ont pas un
grand succès jus-qu'à aujourd'hui, si on en juge par ces
statistiques?
M. Morin (Sauvé): De toute façon, nous partions de
si bas, c'est-à-dire de l'inexistence de classes d'accueil à
travers le Québec, que de voir apparaître quelques classes
à travers le territoire, dont quatre dans I'Outaouais-Hull, je crois que
c'est tout de même assez encourageant. Cela ne veut pas dire qu'il ne
reste pas beaucoup à faire.
Pour ce qui est des résultats obtenus par le ministère de
l'Immigration, je pense qu'il faudrait poser la question au ministre de
l'Immigration. Je n'ai pas sous les yeux les chiffres qui me permettraient de
juger du succès ou de l'insuccès de cette politique de
répartition des effectifs sur l'ensemble du territoire.
Mme Lavoie-Roux: Cela peut quand même être une
indication.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que cela peut servir
d'indication? Oui. Et il faudrait peut-être étudier cela à
la lumière d'un tableau de l'évolution des classes d'accueil dans
chacune de ces régions depuis quelques années. On verrait,
à ce moment-là, apparaître des tendances.
M. Le Moignan: M. le Président, si Mme le
député le permet. Puisqu'on parle d'immigration, c'est
peut-être prématuré, mais depuis l'adoption de la loi 101,
vous n'avez peut-être pas les chiffres à votre ministère
puisque vous parlez du ministère de l'Immigration, est-ce qu'il est
entré beaucoup d'immigrants au Québec depuis le 1er août
1977? Est-ce que vous êtes en mesure d'analyser la clientèle
scolaire pour septembre, face à l'arrivée des immigrants qui ne
sont pas francophones, ni anglophones ou encore des immigrants anglophones qui
seraient entrés au Québec? Est-ce que vous avez, actuellement,
des chiffres ou si c'est prématuré?
M. Morin (Sauvé): Je n'ai pas de chiffres sur le nombre de
personnes adultes qui sont entrées au Québec depuis ces dates. Je
pourrais en obtenir en m'adressant au ministère de l'Immigration.
À l'éducation, nous voyons ces questions sous l'angle de
l'école et sous l'angle de la clientèle scolaire que nous
amène cette immigration. Là, nous avons des chiffres assez
précis. Nous pouvons vous dire: II y a tant d'enfants qui ont
demandé à être admis à l'école. Tant sont
dans les écoles françaises, tant sont dans les écoles
anglaises. D'ailleurs, ce sont des chiffres que je m'apprêtais à
vous donner, en ayant maintenant terminé avec les ADP et les classes
d'accueil.
M. Le Moignan: C'est la clientèle scolaire qui nous
intéresse. Peut-être plus tard, lorsque vous aurez ces chiffres,
ce serait intéressant de les connaître, de voir les
nationalités et de voir si la majorité va opter pour
l'école française.
M. Morin (Sauvé): Là-dessus, M. le
Président, je suis en mesure de vous donner quelques détails. Le
député de L'Acadie et le député de Jacques-Cartier
m'ont posé plusieurs questions. Je pourrais commencer par un tableau
général, si vous le voulez bien, que j'ai pu obtenir au cours de
la nuit, mais qui ne comporte pas des chiffres dont je puisse dire qu'ils
soient d'aujourd'hui. Ce sont des chiffres d'il y a quelques semaines. Ce sont
les derniers que nous ayons et il se fait un rapport toutes les deux ou trois
semaines. Je vais tenter de vos donner des chiffres qui paraissent encore
valables aujourd'hui.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il serait possible que ces chiffres
nous soient distribués? C'est très difficile de suivre des
statistiques sans copies. Est-ce qu'il y en a eu de faites? (10 h 30)
M. Morin (Sauvé): C'est juste. Je vais demander qu'on vous
photocopie le tableau que je vais maintenant commenter. Nous allons nous en
procurer une copie. C'est le tableau de la page 17.
Nous pourrions également faire photocopier le tableau de la page
19, de même qu'il faudrait faire photocopier les 17 cas où j'ai
dû, pour cause de déclarations erronées, retirer des
reconnaissances d'admissibilité à l'école anglaise.
Le Président (M. Jolivet): On va faire des photocopies, on
pourra vous les donner ensuite.
Mme Lavoie-Roux: En attendant les photocopies, pour terminer sur
les classes d'accueil, je voudrais vous faire part d'un problème qui m'a
été souligné.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il faut l'évaluer avant d'en
arriver à des conclusions trop fracassantes, mais l'information que j'ai
eue provient quand même de source sérieuse. Des
élèves qui viennent des classes d'accueil sont ensuite
intégrés dans les classes régulières; peu de temps
après un certain nombre est diagnostiqué comme souffrant de
troubles d'apprentissage. On les repousse vers des classes
spécialisées ou enfin des classes où ils ont des... Il ne
faudrait quand même pas créer une catégorie
d'élèves qui deviennent déviants dans le sens clinique du
mot, à partir d'enfants de classes d'accueil. Je sais, par exemple, que
le problème... L'an dernier, je vous l'avais souligné. Je ne sais
pas si le ministère a fait un suivi là-dessus. J'avais
apporté ce problème à la CECM, le problème des
Haïtiens. Mais je ne parle pas particulièrement des Haïtiens,
je parle de l'ensemble des étudiants. Parfois, les professeurs ont de la
difficulté à accepter plusieurs des enfants qui arrivent avec une
connaissance de la langue peut-être pas aussi bonne que les
Québécois d'à côté. On retrouvera à
certains endroits cette tendance à les refouler vers des classes
spéciales.
Je vous signale le problème. Je pense que le moins qu'on puisse
faire, c'est d'en prendre note et de trouver les moyens de vérifier que
cette chose n'aille pas en augmentant et ne se reproduise pas.
M. Morin (Sauvé): J'en prends bonne note, Mme le
député. Nous allons tenter de savoir si ces classes d'accueil
donnent lieu à des pourcentages plus élevés que la normale
d'élèves en difficultés d'apprentissage...
Mme Lavoie-Roux: Quand ils se retrouvent dans les classes
régulières.
M. Morin (Sauvé): ... lorsqu'il se trouvent naturellement
dans les classes régulières, à la fin de leur classe
d'accueil. Je vais faire examiner cela de très près. Si c'est le
cas, nous allons voir ce qu'il y a moyen de faire pour corriger la situation.
Ce n'est pas normal. Quoiqu'on puisse trouver des explications à ce
phénomène, il faut tenter de faire en sorte que ces jeunes ne
portent pas toute leur vie la conséquence du déplacement de leurs
parents, du fait que leurs parents soient venus habiter le Québec.
J'imagine que ces mêmes difficultés existeraient si on les
intégrait au côté anglais, mais ce n'est pas une raison
pour nous désintéresser du problème.
Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je dois vous dire que du
côté anglais je ne peux pas parler du côté
protestant, mais du côté anglo-catholique on a, pendant des
années, intégré des enfants non francophones ou non
anglophones dans les écoles. Je pense aux écoles qui regroupent
un grand nombre d'enfants d'origine italienne. Il y avait une tolérance
très élevée à ces difficultés, alors qu'il
semblerait que la tolérance soit moins grande, parce que c'est
toujours le même problème on a moins de traditions dans le
sens de l'intégration de ces enfants aux écoles
françaises.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais la tolérance peut se
traduire de plusieurs façons. Cela peut signifier une
indifférence au problème. On fait tout simplement entrer les
élèves dans la machine, peu importe comment ils en sortent
à l'autre bout. C'est une forme de tolérance. Une autre forme
plus intelligente, c'est d'avoir des services qui répondent à ce
type de problèmes et qui permettent d'intégrer davantage les
enfants à leur classe, et éventuellement, à la
communauté. C'est plutôt cette seconde solution que,
personnellement, je serais enclin à rechercher.
Mme Lavoie-Roux: Je reviens à ma question des
Haïtiens. Est-ce que le ministère s'en est préoccupé?
J'ai posé la question l'an dernier.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais
simplement dire que le ministère...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): ... suit la situation des Haïtiens.
Nous avons d'ailleurs reçu des représentations de leur part.
C'est un dossier que nous surveillons au fil des mois. Si le
député de Papineau veut ajouter quelque chose...
M. Alfred: J'ai reçu personnellement des lettres de gens
qui m'ont dit que les Haïtiens eux-mêmes prennent les choses en
main. Ils ont créé des classes pour essayer de résoudre
les problèmes qu'éprouvaient certains Haïtiens. D'autre
part, jusqu'à preuve du contraire, ils sont très satisfaits de
l'aide qui a été apportée par le gouvernement.
Mme Lavoie-Roux: Tant mieux, s'il n'y a pas de
problème.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vois que nous
avons encore de la concurrence de l'extérieur. Je ne sais pas s'il est
possible de faire arrêter ce bruit. J'ai l'impression que si nous
devons endurer cela toute la matinée, viendra l'heure de la
suspension, nous serons tous à moitié éberlués.
Est-il possible de faire cesser ces bruits?
Le Président (M. Lacoste): On l'a demandé, ce
matin. Cela n'a pas été fait. On va aller vérifier de
nouveau pour faire cesser les bruits, la pollution par le bruit.
Application de la Charte de la langue
française
M. Morin (Sauvé): Bien. M. le Président,
peut-être puis-je traiter d'une autre question avant que les tableaux
n'arrivent. On m'a demandé hier le nombre d'enfants qui ont obtenu ce
qu'on pourrait appeler des dispenses en raison du séjour temporaire de
leurs parents au Québec. J'ai un chiffre qui, sans être
peut-être tout à fait définitif, donne une très
bonne idée de l'ordre de grandeur. Il y a 480 cas, qui
représentent 0,21% de l'ensemble des élèves du secteur
anglophone. Je puis vous expliquer en raison de quel motif ces enfants se sont
vus déclarés admissibles à l'enseignement en anglais.
Vous savez qu'il y a des personnes qui font des études ou des
recherches pour une durée de moins de trois ans, dont les enfants
peuvent aller à l'école anglaise, de même les personnes
affectées au Québec pour moins de trois ans dans l'industrie,
dans le commerce, enfin, les fonctionnaires étrangers et les membres des
forces armées. Sur les 480 enfants qui ont obtenu des
déclarations d'admissibilité, la moitié sont des enfants
des membres des forces armées, exception qui est prévue dans la
loi. Le second groupe le plus important, ce sont les personnes affectées
au Québec pour moins de trois ans dans l'industrie ou le commerce,
enfin, pour une raison ou pour une autre. C'est un chiffre qui doit être
presque complet. Vous l'avez d'ailleurs sur les tableaux qu'on va vous faire
distribuer. Nous allons vous donner la réponse dans un instant.
Le Président (M. Jolivet): Pour votre
bénéfice, on vient de m'avertir qu'on essaie de faire cesser ce
bruit, ce vacarme à l'extérieur. On essaie, je dis bien.
M. Morin (Sauvé): Jusqu'à maintenant, M. le
député, nous avons eu quatre cas de refus. On vous a sans doute
signalé la presse s'en est chargée que certains se
seraient vantés d'avoir fait des déclarations mensongères
pour obtenir cette déclaration d'admissibilité. Il semble qu'il y
ait eu quelques cas de ce genre, mais, naturellement, il est très
difficile de vérifier si, oui ou non, quelqu'un dit la
vérité, si un secrétaire de compagnie ou un
président de compagnie dit la vérité quand il envoie une
lettre à la personne désignée par moi pour
reconnaître l'admissibilité à l'école anglaise,
lettre selon laquelle telle ou telle personne est au Québec pour moins
de trois ans.
Nous avions voulu faire preuve de la plus grande souplesse et, comme
vous le voyez, il n'y a eu que quatre cas de refus sur... Je m'excuse. Je dois
me corriger. Il y a neuf cas de refus. Donc, 9 sur 489, ce qui fait qu'il reste
480 élèves qui sont à l'école anglaise en vertu de
cette exception.
Nous avons l'intention, si l'enquête que j'ai demandée
devait révéler qu'il y a eu des abus, de nous montrer plus
exigeants à l'égard des documents que toute personne doit
présenter à l'appui d'une demande comme celle-là.
Désormais, si, je dis bien, s'il se révèle qu'il y a eu
des abus ce dont je ne suis pas encore totalement persuadé; il
faudra attendre que j'aie plus de renseignements s'il y avait eu abus,
il se pourrait que nous exigions désormais des sociétés
industrielles ou commerciales qui désirent faire exempter des personnels
temporaires, non plus seulement une simple lettre du directeur du personnel,
mais une résolution en bonne et due forme de la société.
C'est à ce genre de remède que je songe pour éviter que
des gens mentent à l'État et s'en fassent même une gloire.
Je pense que c'est une indication du niveau de moralité publique qui est
en train de s'instaurer dans certains milieux anglophones que de constater que,
non seulement on mentait, mais on était fier d'avoir menti, comme les
journaux l'ont rapporté.
M. Saint-Germain: Mais, est-ce que vous croyez qu'il y a lieu
d'être si exigeant puisqu'il n'y a que 480 élèves et la
moitié vient des forces armées? C'est assez facile à
vérifier si on appartient aux forces armées oui ou non. C'est
dire qu'il reste 240 élèves, c'est très peu.
M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas interpréter
les propos du député comme...
M. Saint-Germain: Très, très peu.
M. Morin (Sauvé): ... un appui au mensonge
systématique...
M. Saint-Germain: Absolument pas!
M. Morin (Sauvé): ... mais, s'il se révèle
qu'on nous a menti en plusieurs dizaines de cas, par exemple, je pense qu'il y
aura lieu de renforcer la procédure, de renforcer le
mécanisme.
M. Saint-Germain: Je ne dis pas qu'on doit mentir, mais, s'il
fallait tous être très sévères pour les gens qui
mentent, que ce soit au niveau de l'impôt sur le revenu ou autrement, il
y aurait beaucoup de citoyens qui perdraient leur réputation. Je veux
simplement dire que 240 élèves, ce n'est pas ça qui va
mettre la culture française en danger au Québec.
M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas une question de mettre la
culture française en danger, M. le Président, c'est une question
de respect de la loi, et je pense que c'est la responsabilité, c'est le
devoir de
tout gouvernement de s'assurer que la loi est observée
correctement. Autrement, on a deux catégories de citoyens: Ceux qui
disent la vérité et qui en prennent les conséquences, ceux
qui mentent et qui s'en tirent. J'estime que ce n'est pas acceptable.
M. Saint-Germain: C'est un champ d'activités où
beaucoup s'en tirent, parce qu'il y a beaucoup d'élèves au niveau
de certaines commissions scolaires qui sont dans le réseau anglais tout
à fait illégalement et on ne semble pas vouloir agir.
M. Morin (Sauvé): Ils ne s'en tirent pas
financièrement.
M. Saint-Germain: Pourquoi y aurait-il deux poids, deux
mesures?
M. Morin (Sauvé): Et si M. le député de
Jacques-Cartier veut me suggérer des mesures plus draconiennes, je
serais très heureux de les entendre. Est-ce que le député
de Jacques-Cartier me suggère de mettre la police dans les
écoles, d'avoir recours aux injonctions? Est-ce que le Parti
libéral aurait connu une certaine évolution dans sa pensée
depuis quelque temps, là-dessus? (10 h 45)
M. Saint-Germain: Si M. le ministre veut bien me donner ses
fonctionnaires et l'autorité voulue pour agir, j'agirai bien, mais
à titre de membre de l'Opposition, j'ai à ma gauche un
recherchiste et c'est le seul que je puisse consulter. Alors, je serais
très mal à l'aise de vous suggérer les technicités
voulues pour appliquer la loi. Je constate que si le gouvernement a
l'autorité voulue pour légiférer, il est aussi responsable
de voir à ce que ses lois soient appliquées. Voilà que,
pour 240 élèves...
M. Morin (Sauvé): Très heureux de vous l'entendre
dire!
M. Saint-Germain: ... vous prenez des positions de principe,
lorsque vous savez qu'il y en a des milliers d'autres qui sont dans le
réseau. La seule façon, pour vous, de donner l'image que vous
voulez appliquer la loi, c'est de retirer les subventions. C'est une
drôle de façon d'appliquer la loi.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que M. le député
pourrait me décrire le comportement du gouvernement
précédent? Il me semble qu'il était à
l'Assemblée entre 1973 et 1976, lorsque la loi 22 a été
mise en vigueur dans les écoles. Pourrait-il nous expliquer comment le
gouvernement libéral s'est comporté à cette époque?
Je serais très intéressé de le savoir; remarquez que je
m'en doute. S'il ne le sait pas, je puis le lui décrire.
M. Saint-Germain: J'étais à l'Assemblée et
en ce temps-là j'ai donné mon opinion de la même
façon que je la donne aujourd'hui. Si vous croyez que je vais
défendre l'ancien gouvernement, je ne suis pas aussi partisan que cela.
Je suis capable, dans le Parti libéral, au niveau du caucus ou
autrement, de donner mon opinion comme je le fais ici présentement. Mais
je dis simplement que le ministre, pour ces enfants qui sont dans la province
de Québec temporairement, se montre très sévère,
énonce de grands principes, mais tout cela sonne excessivement faux
parce qu'il y a, dans le même réseau, des milliers d'enfants qui,
d'une façon tout à fait évidente, n'ont pas le droit
d'être là et qui y sont.
M. Morin (Sauvé): Mais, M. le député, ce
n'est pas le même cas.
M. Saint-Germain: Votre loi n'est pas applicable. Alors, vous
devriez, soit la modifier, soit agir...
M. Morin (Sauvé): Je vais vous donner...
M. Saint-Germain: ... la modifier pour qu'elle reflète la
vérité du milieu. C'est une situation intenable. Pour ce qui
regarde le respect de l'autorité, l'application des lois au
Québec, c'est un mauvais exemple. On semble s'entêter à ne
pas vouloir voir le problème en face.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il faut bien
distinguer chaque cas. Dans celui des séjours temporaires, il s'agit de
gens qui se vantent d'avoir menti à l'État. Nous allons voir ce
que nous pouvons faire pour remédier à cette situation. L'autre
cas est celui des élèves qui se trouvent illégalement dans
les classes anglaises et, là, je vous dirai tout à l'heure, si
cela vous intéresse, exactement ce que nous comptons faire.
Si le député nous suggère que nous ne sommes pas
assez sévères, pas assez souples, que nous devrions envisager des
moyens plus draconiens, ce serait nouveau de la part du parti qu'il
représente, mais je suis tout à fait prêt à
I'écouter. S'il estime que nous n'avons pas appliqué la loi avec
suffisamment de sévérité dans le cas des
élèves fréquentant illégalement les écoles
anglaises, ma foi! je serais très heureux de l'entendre dire clairement
de la part d'un représentant du Parti libéral.
M. Saint-Germain: Pour quelle raison demanderais-je au ministre
d'être plus sévère dans I'application d'une loi qui n'est
pas du tout applicable? Ce n'est pas le point que je veux soutenir. Je soutiens
que vous avez adopté une loi qui n'est pas applicable, qui
soulève des passions et qui crée des problèmes importants
au Québec. Vous laissez aller l'illégalité.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il ne faut
pas...
M. Saint-Germain: Vous vous cachez derrière des
technicités administratives, tout simplement.
M. Morin (Sauvé): Le député disait, tout
à I'heure, qu'il n'était pas partisan au point de
prendre des attitudes extrêmes. Il faut tout de même qu'il
tienne compte du fait que, jamais on n'a eu une rentrée scolaire aussi
calme que celle de septembre dernier. Il dit que la loi soulève les
passions. Oui, pendant quelques semaines, mais cela s'est bien apaisé;
nous nous dirigeons même maintenant, je pense, vers une application de la
loi qui fera que la grande majorité des immigrants se retrouveront,
éventuellement, à l'école française. À
l'heure actuelle, évidemment, en raison de l'attitude adoptée par
le gouvernement qui consistait à ne point fractionner les familles, il y
a beaucoup d'enfants qui vont à l'école anglaise parce qu'ils ont
un frère ou une soeur aînée qui s'y trouve
déjà. On verra, tout à l'heure, dans les tableaux qu'il y
en a un certain nombre dans cette catégorie, mais la loi n'a pas
donné lieu à de si grandes empoignades, elle a même
été appliquée dans la très grande majorité
des commissions scolaires anglophones et sans discussion; alors, il ne faut pas
dramatiser.
M. Saint-Germain: Le fait, M. le Président, que plusieurs
citoyens du Québec ont laissé la province et le fait que certains
investissements qui devaient être faits ne l'ont pas été, a
concouru à créer la situation que nous vivons aujourd'hui.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, si le
député veut élargir le débat, je le veux bien, mais
je lui ferai observer qu'il a été démontré
statistiquement que les départs du Québec avaient commencé
dès 1970. Or je ne sache pas que c'était le Parti
québécois qui était au pouvoir à cette
époque-là. Là aussi, vous allez sans doute vous retrouver
en accord plus ou moins étroit avec l'ancien gouvernement, M. le
député.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Rosemont.
M. Saint-Germain: S'il vous plaît, M. le Président,
j'aurais une autre question. En plus de ces 480 élèves, est-ce
qu'il y a des élèves qui auraient eu le droit je suppose
que vous n'avez pas ces statistiques, ces chiffres par ce même
article de la loi 101, d'être intégrés au réseau de
langue anglaise, mais qui ne sont pas prévalus de ce privilège,
qui ont simplement accepté d'étudier en français?
M. Morin (Sauvé): Tout ce que je puis vous dire
là-dessus, c'est qu'il y a un bon nombre d'élèves qui
auraient pu choisir d'aller à l'école anglaise, mais qui se
retrouvent dans les écoles françaises en raison de l'application
de la charte. Si vous voulez, je peux vous trouver les chiffres. Vous avez
d'ailleurs un tableau que je vous ai fait distribuer et qui est
numéroté tableau no 4, page 19. Vous allez constater que se
trouvent à l'école française 3825 enfants qui
étaient admissibles à l'école anglaise et qui
néanmoins sont à l'école française. Je crois que
c'est un chiffre dont on doit tenir compte.
M. Saint-Germain: C'est un chiffre qui reflète le nombre
d'élèves qui pourraient être intégrés au
réseau anglais, selon n'importe quel article de la loi 101, qui ont un
droit strict, si vous voulez, d'après la loi 101 en
général. Ce chiffre ne s'applique pas nécessairement aux
480 élèves ou à l'article dont je ne me souviens pas du
numéro...
Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, M. le ministre, est-ce qu'on a
des chiffres sur le nombre d'enfants qui étaient aux écoles
françaises l'an dernier et qui ont demandé leur transfert
à l'école anglaise? Parce que, pour parler de la CECM, il y a
toujours eu une majorité d'enfants d'ascendance irlandaise qui
était dans les écoles françaises. C'est un chiffre qui...
Alors, il y avait déjà un nombre assez considérable
d'enfants qui auraient eu droit à l'école anglaise et qui
allaient à l'école française. Ce qu'il serait
intéressant de savoir c'est s'il y en a qui, pour ne pas perdre leur
droit à l'école anglaise, ont demandé de retourner
à l'école anglaise?
M. Morin (Sauvé): II y a toujours eu des
phénomènes de transfert linguistique, aussi bien des francophones
qui réclamaient le droit d'aller à l'école anglaise ou
vice versa, des anglophones dont les parents décidaient de les inscrire
à l'école française. Si vous voulez bien considérer
le tableau 2 de la page 14, je crois qu'on vous l'a fait distribuer
également, vous allez avoir un aperçu des transferts
linguistiques entre le 30 septembre 1976 et le 30 septembre 1977. Nous n'avons
pas de chiffres plus récents que ceux-là.
M. Paquette: Si M. le ministre le permet, dans la loi 101, sauf
erreur... Parce que vous évoquiez le cas de l'enfant irlandais qui
aurait pu transférer du côté anglais pour ne pas perdre ses
droits à l'école anglaise pour ses descendants, sauf erreur, il y
a un article dans la loi 101 qui fait en sorte qu'une personne qui a droit
à l'accès à l'école anglaise ne perd pas son droit
si elle fréquente l'école française. Je pense que c'est un
des articles, je ne me souviens plus lequel.
M. Morin (Sauvé): C'est juste, de façon à
favoriser le plus possible le passage à l'école française,
oui.
M. Paquette: On a prévu cette réaction possible
dans la loi 101.
Mme Lavoie-Roux: On se demandait pendant combien de
générations ils pouvaient retourner demander leurs droits, vous
vous souvenez?
M. Paquette: Oui, c'est ça.
M. Saint-Germain: Malheureusement, c'est un article qui n'est pas
connu de la masse des gens. J'ai eu souvent à expliquer, dans mon
milieu, la portée de cet article et le droit que ça pouvait
donner aux descendants de ces enfants de retourner à l'école
anglaise si bon leur semblait. Je crois que c'est un article qu'on devrait
mettre en évidence, surtout chez les minorités.
M. Paquette: Oui.
M. Saint-Germain: Parce qu'il ne faut pas se cacher que, bien
avant l'application de la loi 101, il y avait déjà une amorce, il
y avait beaucoup d'anglophones qui envoyaient leurs enfants à
l'école française et que ce nombre était ascendant. Je
crois que, pour cette minorité de gens, la loi 101 a créé
un traumatisme tel que beaucoup ont retiré leurs enfants de
l'école française pour les retourner à l'école
anglaise.
M. Paquette: Les chiffres démentent cette assertion.
M. Morin (Sauvé): Écoutez, je vais prendre
ça sous toute réserve...
M. Saint-Germain: Oui, oui.
M. Morin (Sauvé): ... je ne crois pas que ce soit tout
à fait le cas, il y a tout de même 3712 transferts de l'anglais au
français, dont 2088 dans le centre de Montréal. N'est-ce pas?
M. Saint-Germain: Mais ce n'est pas facile d'établir des
statistiques là-dessus...
M. Morin (Sauvé): Non.
M. Saint-Germain: ... ou de faire des observations
là-dessus.
M. Morin (Sauvé): C'est convenu et c'est pour ça
que je vous donne les tableaux dans l'état où nous les avons.
Mais je ne suis pas prêt à accepter l'idée qu'en raison de
la charte, il y a moins d'anglophones dans les écoles françaises
du Québec.
M. Saint-Germain: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai simplement
voulu dire qu'il y avait des gens qui avaient un droit strict d'envoyer leurs
enfants à l'école anglaise, mais qui envoyaient tout de
même ces enfants à l'école française.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais en raison du fait
qu'ils...
M. Saint-Germain: Tandis que les chiffres que vous nous
donnez...
M. Morin (Sauvé): ... ne perdent pas leurs droits, je
crois qu'il y en a beaucoup qui le font, parce qu'ils se rendent compte que le
Québec, désormais, va être français et qu'ils en
tirent les conséquences.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je crois que, pour
répondre d'une façon tout à fait correcte à ces
questions, il faudrait quand même connaître l'origine de ces
enfants qui ont demandé leur transfert, soit d'un côté,
soit de l'autre. Cela, vous ne l'avez pas. Je crois que c'est la seule
réponse qui pourrait vraiment nous dire si cela a influencé ou si
ça n'a pas influencé, si on veut aller dans les
détails.
M. Morin (Sauvé): Écoutez, je constate tout de
même ce que je vous démontrais tout à l'heure; à la
lecture du tableau 4, il y a, à l'école française, 3825
enfants qui auraient le droit d'aller à l'école anglaise.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais il y avait au moins ça avant,
sinon davantage.
M. Morin (Sauvé): Je n'ai pas les tableaux...
Mme Lavoie-Roux: C'est ça, on ne peut pas faire
d'études.
M. Morin (Sauvé): ... pour le démontrer parce
qu'auparavant, il n'y avait pas de système d'admissibilité
à l'école anglaise, tel que nous l'avons mis en oeuvre dans la
Charte de la langue française. Avant, c'étaient les tests
linguistiques qui étaient un peu comme une passoire.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends que le ministre en profite pour
décocher une flèche. Mais je pense...
M. Morin (Sauvé): J'ai tout un carquois, si ça vous
intéresse.
Mme Lavoie-Roux: Oui, cela, je le sais. Mais il reste quand
même qu'il y a des endroits où ce serait possible de
vérifier. Je nomme cette commission scolaire parce qu'elle a ces
statistiques; la CECM les avait quant aux langues d'origine. Alors, au moins
pour ce secteur, la CECM, on pourrait savoir s'il y a eu une évolution
quant à cette population anglaise qui est passée du secteur
français à l'anglais, ou vice versa. Il y avait quelques milliers
d'enfants. Comme on parle de 3825 pour l'ensemble des commissions scolaires, je
pense que, déjà, on pourrait avoir une indication.
M. Morin (Sauvé): Mme le député, je vais
faire faire une recherche, je ne dis pas qu'elle pourrait aboutir à
temps pour cette commission parlementaire, mais, aussitôt que j'aurai les
chiffres, dans le sens que vous indiquez, au cours des semaines qui viennent,
je vous les ferai communiquer.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Si vous voulez, on pourra en parler en
Chambre, à l'occasion de la période des questions.
M. Le Moignan: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, au moment
où j'avais été interrompu sur la question du droit de
parole au député de Rosemont, on m'avait dit qu'on n'avait pas
terminé du côté du parti libéral.
M. Le Moignan: J'avais seulement une question additionnelle.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
Mme Lavoie-Roux: ... questions qui viennent.
M. Le Moignan: Non, c'est une question additionnelle. Parce qu'on
vient de regarder le tableau 2 et, quand on mentionne les transferts
linguistiques du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, j'ai bien l'impression que
ça concerne la Gaspésie presque exclusivement. Je vois que vous
avez: transferts de l'anglais au français, ce qui donne 34
élèves et peut-être ce qui est plus surprenant, du
français à l'anglais, 46 élèves. Est-ce que ce
seraient les Irlandais ce sont surtout les Irlandais chez nous
qui, à cause de leur droit à l'école anglaise, seraient
revenus au secteur anglais, après avoir commencé au secteur
français? (11 heures)
M. Morin (Sauvé): II est possible que ce soient des cas
d'enfants appartenant à des familles où le père est d'une
langue et la mère de l'autre. De toute façon, on peut dire avec
certitude que ces 46 enfants ont le droit d'être à l'école
anglaise. Donc, ils sont peut-être de mariages mixtes, comme on dit
quelquefois.
M. Le Moignan: Je vois plus loin. Dans votre dernier tableau,
pour le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, il n'y a aucun problème,
parce que c'est zéro sur toute la ligne. Cela veut dire que ces enfants
sont dans la légitimité.
M. Morin (Sauvé): Vous pouvez tenir pour acquis qu'ils y
ont droit, parce que, dans cette région, il n'y a eu aucune
difficulté d'application de la Charte de la langue française,
aucune. Il se peut aussi que ce soient des enfants dont le frère ou la
soeur aînés se trouvaient déjà à
l'école anglaise et qui, de ce fait, se sont vus reconnaître par
la charte le droit d'y aller eux aussi.
M. Le Moignan: II y avait eu quatre ou cinq cas, mais je crois
que c'étaient plutôt des erreurs, parce qu'on avait envoyé
des questionnaires à des parents qui étaient surtout anglophones,
pour essayer de modifier leur raison d'être à l'école
anglaise. J'en avais dit un petit mot l'automne dernier et cela s'est
réglé automatiquement. C'est plutôt une erreur de
parcours.
M. Morin (Sauvé): Oui. Maintenant, je voudrais ajouter un
commentaire là-dessus, puisque l'occasion m'en est donnée. Vous
savez que le gouvernement, dans le souci de ne pas diviser les familles, avait
reconnu aux enfants ayant un frère, une soeur aînés,
à l'école anglaise, le droit d'aller à la même
école.
Pendant quelques années, cela signifie que plusieurs enfants vont
aller à l'école anglaise. Nous avons voulu, de ce
côté, ouvrir une porte que la loi 22 avait fermée, à
notre sens, d'une façon qui ne tenait pas compte de l'unité
familiale.
Nous avons voulu respecter l'unité familiale et nous savions que
cela coûterait, au secteur français, quelques centaines, sinon
quelques milliers d'enfants.
M. Le Moignan: C'est temporaire, de toute façon.
M. Morin (Sauvé): Mais c'est très temporaire, parce
que, éventuellement, ces frères et soeurs aînés vont
sortir du système et cette exception va tendre à diminuer
d'année en année.
Mme Lavoie-Roux: ... pour leurs descendants.
M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement, ils l'auront acquis
pour leurs descendants. Est-ce que Mme le député...
Mme Lavoie-Roux: J'étais pour cette mesure, je l'ai
prônée, alors, vous n'avez pas besoin de poser la question, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Vous êtes d'accord avec cette
mesure?
Mme Lavoie-Roux: Tout à fait. M. Morin (Sauvé):
Bon.
Mme Lavoie-Roux: Mais je voudrais vous poser une question sur les
4772 enfants du tableau 3. Il pourrait être fort intéressant si on
pouvait également savoir d'où viennent ces enfants,
peut-être dans le sens de leur commission scolaire et dans le sens de
leur langue maternelle.
M. Morin (Sauvé): Vous voulez dire ceux qui peuvent
invoquer la scolarité antérieure?
Mme Lavoie-Roux: La scolarité antérieure des
parents. 4772 est un nombre quand même assez considérable.
M. Morin (Sauvé): Cela ne me paraît pas un nombre
considérable au point qu'on doive se poser des questions. Je pense qu'il
y a tout simplement beaucoup de parents...
Mme Lavoie-Roux: II serait intéressant de savoir la langue
maternelle de ces enfants.
M. Morin (Sauvé): Je comprends. Nous allons
également faire faire cette recherche, Mme le député, et
je vous en communiquerai les résultats aussitôt que possible.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, c'était
consécutif à des remarques du député de
Jacques-Cartier qui essayait de faire croire que la rentrée scolaire
avait été tumultueuse. C'était d'ailleurs une
prédiction que lui et ses collègues nous avaient faite
l'été
dernier, lorsque nous étions en train d'étudier la loi
101...
M. Saint-Germain: Excusez-moi, M. le Président. Vous
déformez mes paroles. Je n'ai pas dit que la rentrée scolaire
avait été tumultueuse. Je n'ai jamais dit cela.
M. Paquette: Vous avez dit qu'il y avait eu
énormément de problèmes. Vous n'avez peut-être pas
utilisé le mot "tumultueux ", mais vous avez dit qu'il y avait eu
énormément de tension.
M. Saint-Germain: II y en a beaucoup qui n'ont pas
protesté, ils ont fouté le camp. Ils n'ont pas créé
de problèmes à la rentrée scolaire, ils n'étaient
plus là.
M. Paquette: On n'embarquera pas dans ce sujet, mais il y a moins
de gens qui ont quitté le Québec l'an dernier qu'en 1970. On nous
disait que c'était à cause des événements
d'octobre. Heureusement qu'il y avait les événements d'octobre,
en 1970, pour servir de prétexte. Cela m'étonnerait beaucoup que
77 000 Québécois aient quitté le Québec à
cause des événements d'octobre, en 1970.
M. Alfred: ... Pierre-Elliott Trudeau.
M. Paquette:... Je pense qu'on essaie de faire flèche de
tout bois. Je voudrais avoir des chiffres. J'ai posé la question, en
Chambre, au ministre et il n'avait pas tous les éléments,
à ce moment-là, il y a quelques mois. Peut-être les a-t-il
maintenant.
Je constate, au tableau III, que nous avons un total de 2137 enfants qui
sont considérés comme inadmissibles à l'enseignement en
anglais, suivant différents critères. A-t-on le nombre total
d'enfants jugés inadmissibles à l'enseignement en anglais et qui
reçoivent l'enseignement en anglais? Comment ce chiffre, pour cette
année, se compare-t-il avec la première et la seule année
d'application de la loi 22?
M. Morin (Sauvé): Je dois d'abord vous dire que ce chiffre
de 2137 inadmissibles résulte de la démarche qui consiste
à se pencher sur le dossier de ceux qui font une demande. Il se peut et,
de fait, nous savons qu'il en existe d'autres qui n'ont pas fait la
démarche de se faire... Non, je regrette, ce n'est pas quelques
milliers, Mme le député, quelques centaines, mais pas quelques
milliers. Il ne faudrait tout de même pas essayer de dramatiser les
problèmes en les décuplant. Il y a sans doute...
Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous nous assurer qu'il n'y a pas plus de
1000 enfants au PSBGM et moins de 1000 à la CECM qui ont
illégalement dans les écoles?
M. Morin (Sauvé): II n'y en a pas 1000, d'après les
chiffres que je connais à l'heure actuelle et qui me viennent de la
CECM, que j'estime être des chiffres assez fiables.
Mme Lavoie-Roux: II y en a combien, M. le ministre?
M. Morin (Sauvé): Je peux vous sortir le chiffre, mais
cela ne dépasse pas 1000, à ma connaissance.
Mme Lavoie-Roux: Au PSBGM, il y en a combien? Dans les
écoles privées ethniques, il y en a combien?
M. Morin (Sauvé): Un instant! Voulez-vous, nous allons
procéder par ordre. À la CECM, cette commission scolaire a fait
un recensement assez étroit, une vérification de la situation qui
nous paraît valable somme toute. La CECM nous apprend qu'il y aurait 873
élèves qui se trouveraient illégalement dans ses
écoles.
Mme Lavoie-Roux: Ceux-là, M. le ministre, je vous le ferai
remarquer, sont ceux qu'elle a pu identifier. Il y a ceux qu'elle n'est pas
capable d'identifier. Mais même en prenant vos 873, cela fait
déjà... C'est seulement pour la CECM. Parlons du PSBGM
maintenant.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je tiens
à rectifier les propos du député qui voudrait laisser
entendre qu'il existerait, comme cela, des milliers d'enfants
illégalement inscrits à la CECM. La CECM nous dit que ce chiffre
est fiable et quelle avait les moyens de vérifier exactement combien il
s'en trouvait. À moins qu'elle ne veuille mettre en doute la bonne foi
de son ancienne commission scolaire...
Mme Lavoie-Roux: C'est toujours l'argument de force du
ministre.
M. Morin (Sauvé): II faut se brancher.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, alors, donnez-nous les chiffres du
PSBGM maintenant.
M. Morin (Sauvé): Maintenant, pour le PSBGM, nous allons
vous sortir les chiffres dans un instant. Au PSBGM, nous avons, au
ministère, selon nos propres chiffres, dénombré 900
enfants illégalement inscrits à l'école protestante
anglaise. Il se peut cependant que ce chiffre atteigne 1500.
Mme Lavoie-Roux: Nous sommes rendus à 2400, M. le
ministre, cela fait quelques milliers et non pas quelques centaines.
M. Morin (Sauvé): Non, je regrette infiniment, là,
vous prenez...
Mme Lavoie-Roux: 2400!
M. Morin (Sauvé): Un instant! Il faut bien s'entendre.
Vous laissiez entendre tout à l'heure que c'étaient des chiffres
absolument faramineux.
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit, absolument
pas.
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes rendu à 2400, et ceux des
écoles privées ethniques, M. le ministre?
M. Morin (Sauvé): L'ensemble des écoles
privées ethniques s'est conformé à la loi 101. Il n'y en a
qu'une qui est un collège des Cantons de l'Est dont j'oublie le nom,
Stanstead College, qui a décidé de ne plus accepter les
subventions gouvernementales et qui, de ce fait, les a perdues. Mais je tiens
à le dire, les écoles privées se sont conformées
non seulement au processus, mais à la loi, de sorte que, M. le
Président, ces commissions scolaires, tant le BEPGM que la CECM se
verront privées, comme le gouvernement l'a annoncé notre
politique n'a pas changé là-dessus des subventions per
capita qui sont prévues pour l'enseignement primaire et secondaire.
C'est la sanction que nous avions décidé d'imposer dès le
début et nous allons nous en tenir à cette politique. Si mes
collègues du Parti libéral me recommandent d'utiliser des moyens
plus draconiens, j'examinerai la chose, sûrement. J'ai hâte
d'entendre ce qu'ils ont à me suggérer sur la question, parce
qu'au temps de la loi 22, cela n'a pas été très
brillant.
M. Saint-Germain: Combien y avait-il d'enfants, au temps de la
loi 22, qui étaient illégalement dans le réseau
anglais?
M. Morin (Sauvé): J'allais dire que si je voulais parler
de la façon dont s'exprimait tout à l'heure le
député, je dirais comme cela: Quelques milliers. En
réalité, c'est plutôt quelques centaines. Le chiffre...
Mme Lavoie-Roux: II y en avait beaucoup moins, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): ... je tiens à vous le dire
également, est aussi incertain que ceux que nous pouvons vous donner
parce...
Mme Lavoie-Roux: Alors, même...
M. Morin (Sauvé):... qu'il y a eu, là aussi, des
gens qui ne se sont pas soumis aux tests. Il y a des gens qui se trouvent dans
les écoles anglaises, et qui s'y trouvent illégalement, en vertu
de l'application de la loi 22 ou à l'encontre de l'application de la loi
22. On n'a jamais su le nombre exact.
M. Saint-Germain: C'était beaucoup...
M. Morin (Sauvé): Nous en avons une idée.
M. Saint-Germain: ... plus bas que le nombre des
élèves qui sont là illégalement aujourd'hui,
croyez-moi!
M. Morin (Sauvé): C'est plusieurs centaines tout de
même. Si vous avez des suggestions à me faire sur la façon
dont on devrait procéder, encore une fois, je les attends avec beaucoup
d'intérêt.
M. Saint-Germain: Vous ne pensez pas qu'on va vous demander, M.
le ministre, de sortir de force les enfants des écoles. Vous perdez
votre temps. Je pense qu'on est assez civilisés dans cette province pour
ne pas aller jusque-là.
M. Morin (Sauvé): Ah! Je suis heureux de vous l'entendre
dire!
M. Saint-Germain: II faudrait tout de même que le
gouvernement adopte des lois qu'il peut appliquer. Il ne serait pas dans la
situation aujourd'hui où, sciemment, des gens posent des actes
illégaux et où vous jouer un rôle extrêmement passif
en les regardant aller. C'est un précédent dangereux.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ne voudrais
pas laisser passer des propos aussi irresponsables. Le gouvernement ne laisse
pas passer. Le gouvernement, au contraire, fait tout ce qui est en son pouvoir
pour maintenir le contact avec le BEPGM et avec la CECM pour tenter de trouver
des solutions et pour tenter d'amener les intéressés à
accepter cette loi et à s'y conformer. Il n'y a pas si longtemps encore,
j'ai rencontré les gens du BEPGM pour m'entretenir avec eux de la
possibilité, justement, d'avoir recours aux classes d'accueil, pour
m'entretenir avec eux de la possibilité de développer le secteur
protestant francophone. Je puis vous dire ce n'est pas un secret puisque
cela a été déclaré officiellement, cela a
même fait l'objet de résolutions de la part du BEPGM que
leur attitude a évolué et que, maintenant, peu à peu,
progressivement, comme nous l'avions prévu, ils songent à
appliquer les dispositions de la Charte de la langue française.
C'était évidemment, une grande transformation. Nous savions
d'avance qu'il y aurait quelques difficultés d'application, puisque nous
avions sous les yeux les difficultés d'application de la loi 22. Nous
savions qu'il y avait eu des désobéissances à la loi 22.
Nous savions que le gouvernement antérieur n'avait pu remédier
à cet état de choses, mais, néanmoins, nous pensions que
ce grand changement devait être fait, que la charte devait faire en sorte
qu'un plus grand nombre d'enfants aillent à l'école
française, et surtout, il fallait absolument mettre fin au
système vraiment odieux des tests linguistiques. N'oubliez pas que
c'était le principal objet de la Charte de la langue
française.
Mme Lavoie-Roux: Alors que vous avez continué à les
appliquer après que vous êtes arrivés au pouvoir et que
vous n'étiez pas obligés de les appliquer, c'est bien beau de
jouer le vertueux pour faire de la politique.
M. Morin (Sauvé): Je ne laisserai pas passer non plus ce
genre d'assertions.
Mme Lavoie-Roux: C'est ce qui s'est passé quand vous avez
fait votre déclaration en décembre 1976, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Quand on est un gouvernement
responsable, on applique la loi jusqu'à ce qu'on l'ait changée.
J'ai bien dit, à ce moment, Mme le député s'en souviendra,
que, tant que la loi 22 serait en vigueur, le gouvernement n'avait pas d'autre
choix que celui de l'appliquer, mais qu'il fallait la changer au plus
tôt. Vous avez tout fait pour essayer d'empêcher qu'on
s'éloigne de ces tests linguistiques. Alors, ne venez pas, aujourd'hui,
jouer les vertueuses. (11 h 15)
M. Saint-Germain: II n'est pas...
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, M. le Président, ce que je
voudrais faire remarquer, et de la façon la plus calme possible, c'est
que légiférer dans le domaine de la langue d'enseignement,
ça demeure extrêmement difficile...
M. Morin (Sauvé): C'est vrai, oui.
Mme Lavoie-Roux: Extrêmement difficile...
M. Paquette: Dans tous les pays c'est comme ça.
Mme Lavoie-Roux: ... et, que ce soit la loi 22... On pourrait se
chicaner; il est évident qu'il y a eu moins d'enfants illégaux
dans les écoles sous la loi 22 que sous la loi 101, mais ça
m'importe peu.
M. Morin (Sauvé): Bien! Il y a eu moins...
Mme Lavoie-Roux: La chose importante, c'est que je pense qu'il
aurait fallu ça, je l'ai dit au moment de la loi 22, je l'ai dit
au moment de la loi 101 c'est qu'il fallait, pour les personnes qui
étaient déjà ici, au Québec, et qui étaient
venues sous d'autres conditions, des mesures de transition les plus souples
possible, justement pour ne pas créer ce genre de résistance qui,
finalement, a aliéné des groupes ethniques qui s'étaient,
à maints égards, bien intégrés au Québec.
Cela, c'est une constatation qui vaut tant pour la loi 22 que pour la loi 101.
Je pense que les chiffres que nous avons devant nous prouvent, de toute
évidence, que ça demeure une situation difficile. Je pense
surtout aux enfants qui je comprends que c'est la volonté de
leurs parents et le choix de leurs parents finalement, sont dans les
écoles catalogués comme des illégaux. Je trouve ça
vraiment malheureux pour les enfants.
M. Paquette: Mais Mme le député va peut-être
admettre avec moi...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Paquette: ... que la cause peut-être la plus
déterminante qui a influé sur ce nombre d'illégaux est le
battage publicitaire qu'il y a eu pendant toute la période où on
a débattu la loi 101. Quand on traite dans les journaux, dans les
assemblées un gouvernement d'ethnocentriste, de discriminatoire, de
raciste, il y a des gens qui le croient et qui se disent: Nous avons le droit
de ne pas obéir aux lois que vote un tel gouvernement. Moi, je pense que
l'essentiel...
M. Morin (Sauvé): II y a des membres du Parti
liberal...
M. Paquette: ... du problème vient de là, et les
membres du Parti libéral y ont contribué pour beaucoup.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette...
M. Paquette: J'ai fait beaucoup d'assemblées dans l'ouest
de Montréal...
Mme Lavoie-Roux: Je regrette...
M. Paquette: ... et je pense que je peux être sûr de
mon affirmation...
Mme Lavoie-Roux: Mais j'avais la parole, quand même!
M. Paquette: Non, c'est moi qui avais la parole. Je vous avais
laissé continuer, mais j'étais en train de poser des questions au
ministre.
Mme Lavoie-Roux: Bien non, cela n'avait pas...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Il a raison. La
parole était au député...
M. Paquette: C'est moi qui ai demandé les statistiques...
J'ai demandé qu'on compare les effets de la loi 22 avec ceux de la loi
101 pour qu'on ait les chiffres sur la table et qu'on arrête de...
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est exact. C'est vous qui aviez
posé cette question, c'est vrai.
Mais je regrette et je pense que dans tous mes propos... Et j'aimerais
que vous relisiez, par exemple, mes derniers discours de la troisième
lecture ou j'ai fait appel aux membres de groupes ethniques...
M. Paquette: Je suis bien prêt à le
reconnaître et ma remarque ne vous visait aucunement.
Mme Lavoie-Roux: ... et même vous disiez que parmi mes
collègues, des gens avaient incité à la
désobéissance, je voudrais bien... Moi, de mémoire, je ne
me souviens pas. Si vous avez des preuves, je voudrais bien que vous les
apportiez et...
M. Paquette: On peut vous tirer des...
Mme Lavoie-Roux: ...je ne pense pas qu'aucun de mes
collègues ait incité...
M. Paquette: Je peux vous trouver des citations.
Mme Lavoie-Roux: ... la population à la
désobéissance, M. le député de Rosemont.
M. Paquette: Je n'ai pas dit que certains de vos collègues
avaient incité à la désobéissance. Je pense que je
pourrais trouver des déclarations d'un ou deux de vos collègues
à ce sujet. Ce n'est pas là-dessus que je veux insister. Je veux
insister sur le climat qui a été créé au sein des
minorités ethniques et dans la communauté anglophone,
volontairement, parce qu'on est dans un combat politique sur l'avenir du
Québec et votre parti veut avoir de son côté toutes les
forces possibles. C'était, d'ailleurs, la raison du "filibuster" qu'on a
eu sur la loi 101, c'est-à-dire de faire pourrir la situation le plus
possible...
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, M. le ministre, mais quand vous
voyez que même le premier ministre, il y a deux jours, à Toronto,
reconnaît qu'il faudrait des assouplissements, par exemple, dans
I'affichage des groupes culturels, et ce même si la loi ne le
prévoit pas c'est ce qu'il vient de donner, il y a deux jours, en
réponse à M. Burton, à Toronto c'est qu'il y en
avait des éléments de la loi 101 qui étaient
discriminatoires, qui étaient trop rigides et qui étaient
exagérés. C'est ça qu'on a combattu et si on avait
à le refaire, je le referais, M. le Président.
Une voix: Lesquels?
M. Paquette: Mme Lavoie-Roux, on est en train de...
Mme Lavoie-Roux: Oui, de faire un autre débat...
M. Paquette: Mme le député de L'Acadie, on est en
train de déterrer de vieilles choses...
Mme Lavoie-Roux: Bien oui.
M. Paquette: ... mais je me souviens vous avoir entendue,
à la commission, nous dire que le critère de l'accès
à l'école anglaise était discriminatoire. Je reconnais que
vos collègues ont fait bien pire, dans certaines assemblées, dans
le West Island, en traitant le gouvernement de raciste à l'occasion.
Dès le lendemain, la Commission des droits de la personne venait
apporter un démenti formel à vos propos en disant: Ce n'est
justement pas un critère discriminatoire, parce qu'il n'est pas
basé sur des considérations ethniques. Nulle part, dans la loi. y
a-t-il des éléments basés sur des considérations
ethniques. On parle de francisation, on ne parle pas de promotion des
francophones dans les entreprises, parce qu'on ne voulait pas avoir à
définir francophone, on ne voulait pas avoir à examiner l'origine
ethnique des gens et, pour cette raison, on a même accepté d'avoir
une loi un peu moins efficace qu'elle aurait pu l'être, parce qu'on ne
voulait pas entrer dans un processus qui aurait pu conduire certains
fonctionnaires à faire de la discrimination. La Commission des droits de
la personne nous a donné raison là-dessus.
Quant aux critiques de M. Burton sur l'affichage ou la publication de
livres en anglais, je pense qu'on a cherché toutes les petites
bêtes noires dans la loi. C'était évident, dans l'intention
du gouvernement, qu'on n'allait pas empêcher la publication de volumes en
anglais au Québec, ni la publicité de ces volumes en anglais; la
meilleure preuve, c'est qu'on a fait des tas d'exceptions pour l'utilisation de
l'anglais dans les hôpitaux anglophones, pour l'utilisation de l'anglais
dans les messages publicitaires des journaux et des media anglophones. On
aurait pu, si on avait été honnête, en déduire que,
pour les livres, dans les librairies, ce serait la même chose, même
si ce n'était pas écrit explicitement. Dans une loi, on ne peut
pas penser à tout; dès qu'on nous a signalé la chose, le
premier ministre a dit: Bien sûr qu'on peut publier des livres en
anglais.
Mme Lavoie-Roux: On vous l'avait signalé au moment de
l'étude du projet de loi 101, mais vous ne sembliez pas avoir d'oreille
là-dessus. Il ne faut quand même pas reprendre...
M. Paquette: Je ne me souviens pas de cela, Mme le
député, j'aimerais que vous me citiez le journal des
Débats à ce sujet.
Mme Lavoie-Roux: ... le débat de la loi 101 à ce
moment-ci, parce qu'on pourrait aller bien loin. D'ailleurs, vous venez d'avoir
un avis, il n'y a pas tellement longtemps. C'est la Commission des droits de la
personne qui parle justement de l'intolérance des directives du ministre
des Transports à l'égard des occasionnels et veut prévoir
des périodes de transition; cela a été
déposé en Chambre il y a quelques jours.
M. Paquette: Je l'ai lu et on n'y parle pas de
l'intolérance du ministre des Transports. On ne dit pas, non plus, que
cette mesure était contradictoire à la Charte des droits et
libertés de la personne, on dit que le ministre devrait faire preuve de
souplesse envers les travailleurs qui ne parlent pas français. Je pense
que c'est une nuance qu'il faut apporter.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, la population vous a
jugés pour votre loi 101 et elle vous jugera de nouveau aux prochaines
élections.
M. Paquette: La grande majorité de la population est
d'accord avec la loi 101, malgré le battage publicitaire que le Parti
libéral et d'autres aussi ont fait dans l'ouest de l'île de
Montréal qui, à mon avis, est la cause principale du grand nombre
de personnes qui sont illégalement à l'école anglaise
actuellement. C'est le climat qui a été créé
à ce moment.
M. Saint-Germain: M. le Président, sur le même
sujet, si vous me le permettez.
Le Président (M. Jolivet): Un instant, M. le
député, je ne voudrais pas qu'on interrompe, depuis tout à
l'heure que j'essaie de suivre; je comprends qu'il y a une très grande
souplesse qui a été accordée à la commission, mais
je pense qu'on devrait permettre au député de pouvoir poursuivre
son droit de parole. Vous pouvez lui poser des questions, s'il le permet.
M. Paquette: Que voulez-vous faire? Vous voulez intervenir?
M. Saint-Germain: Oui, 30 secondes...
M. Paquette: J'ai attendu patiemment que vous parliez
tantôt.
M. Saint-Germain: Juste sur le sujet que vous venez de discuter.
Vous voulez parler de déclarations malheureuses, il faudrait relever
tout ce qui a été dit lors de l'étude du projet de loi 63,
ce qui aété dit lors de l'étude du projet de loi 62...
Mme Lavoie-Roux: Parlez donc de ce que vous avez fait lors de la
loi 22, quand vous étiez dans l'Opposition.
M. Saint-Germain: De tout ce qui s'est dit, de toutes les
accusations qui ont été portées.
M. Paquette: On n'a jamais traité le Parti libéral
de raciste.
M. Saint-Germain: À ce point de vue... M. Alfred:
... de raciste.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Rosemont, vous avez encore la parole pour un bout de temps.
M. Paquette: Oui, M. le Président, j'avais d'autres
questions sur le sujet de la répartition de la population scolaire,
suivant la langue d'enseignement. Je me réfère au tableau
à la page A-07, on retrouve là des statistiques sur la
répartition de la clientèle. Est-il exact que, jusqu'en 1975,
suite à la dénatalité parce qu'on n'a pas les
chiffres antérieurs, mais, si mes souvenirs sont exacts le
secteur anglophone était en décroissance moins rapide que le
secteur francophone. Je constate qu'en 1976-1977, sous l'empire de la loi 22,
c'est à peu près la même chose. En 1977-1978, on constate
une diminution de 6,5%. Je voulais faire la remarque suivante. Encore une fois,
on a fait un battage publicitaire, en particulier dans les journaux
anglophones, selon lequel la communauté anglophone était en train
de disparaître. On constate qu'il y a 206 000 enfants dans le secteur
anglais et 1 053 000 dans le secteur français, ce qui correspond
à peu près à la proportion de la population,
c'est-à-dire 83% d'un côté, et 16% de l'autre. Est-ce qu'on
a les chiffres correspondants pour la région de Montréal?
M. Morin (Sauvé): Je puis vous dire que jusque vers
l'année 1975-1976, la décroissance chez les anglophones
était inférieure à la décroissance chez les
francophones. La raison en était sûrement l'apport important des
immigrants au secteur anglophone qui venait compenser une
dénatalité qui frappait aussi durement, sinon même plus
durement que du côté francophone. Mais depuis l'année
1976-1977, comme vous le voyez, il y a une évolution inverse. On voit
déjà qu'en 1976-1977 la décroissance était
légèrement supérieure du côté des anglophones
par rapport aux francophones. En 1977-1978, je ne tenterai pas d'expliquer le
phénomène, c'est peut-être l'effet de la loi 101, c'est
peut-être autre chose, mais je crois qu'il y a une part qui revient
à l'application de la charte, la décroissance s'accentue beaucoup
plus chez les anglophones que chez les francophones. Nous en sommes maintenant
à moins 6,5% du côté anglophone et à moins 4% du
côté francophone.
M. Paquette: Je voulais faire remarquer à la commission
que c'est peut-être là l'effet de la loi 101. Elle a une certaine
efficacité, mais ce n'est pas dramatique encore.
M. Morin (Sauvé): Cependant, je dois dire que...
M. Paquette: On ne peut pas dire que la minorité
anglophone est menacée. J'aimerais avoir les chiffres pour la
région de Montréal, si vous les avez, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Je ne pense pas que nous les ayons sur
place, mais nous pourrions les trouver et vous les communiquer, M. le
député. J'ajouterai seulement une chose. Au fur et à
mesure que les aînés qui se trouvent déjà dans le
système anglophone se résorberont, passeront à travers le
système anglophone, et que les élèves ne pourront plus
invoquer la présence d'un aîné à l'école
anglophone, l'école française bénéficiera de plus
en plus, particulièrement pour tous les nouveaux immigrants, de cet
apport de clientèle qui avant allait plutôt à
l'école anglaise. Donc, on peut penser que l'effet de la Charte de la
langue française sera à moyen et à long terme, de freiner
la décroissance de l'école française.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, sur cette
dernière remarque que les nouveaux immigrants iront dorénavant
à l'école française, je pense que là s'ajouteront
les immigrants anglophones, mais pour les nouveaux immigrants non anglophones,
non francophones, le phénomène d'intégration à
l'école française était chose faite depuis la loi 22.
D'ailleurs, j'avais apporté des statistiques sur les classes d'accueil
de Montréal à cet effet. C'était dans une proportion de
95% si on tient compte qu'il y a des étudiants qui se perdent en cours
de route, en ce sens qu'ils quittent l'école, qu'ils s'en vont ailleurs
ou qu'ils retournent dans leur pays. Ce qui s'ajoutera, ce seront les
immigrants anglo-
phones, parce que déjà les immigrants non anglophones, non
francophones, par le truchement des classes d'accueil, étaient
intégrés en quasi-totalité aux écoles
françaises.
M. Saint-Germain: Ensuite, M. le Président, il faut
remarquer aussi que le nombre d'enfants à l'école anglaise a
diminué, il ne faut pas se le cacher. Je représente un
comté de l'ouest de l'île de Montréal. Les familles
anglaises qui ont quitté les lieux, on ne les compte plus. C'est une
question de fait. La propriété d'ailleurs a baissé de
près de 20% à un moment donné dans cette région,
tandis qu'elle se permettait d'augmenter de prix encore dans les régions
francisées. C'est cela la vérité. Maintenant, si c'est ce
qui plaît au gouvernement, c'est dommage, parce que dans le fond... (11 h
30)
M. Paquette: Qu'est-ce que vous avez dit?
M. Saint-Germain: J'ai dit: Si c'est ça qui plaît au
gouvernement, c'est dommage, parce que. dans le tond, lorsqu'il y a une
désorganisation sociale à un moment donné, il est
nécessairement...
M. Paquette: Si c'est ça que vous racontez dans votre
comté, il va y avoir encore plus de départs.
M. Saint-Germain: ... il s'ensuit... M. Paquette: Bien
oui.
M. Saint-Germain: ... toujours une désorganisation
économique. Ceux qui sont le plus durement frappés par la
situation économique actuellement sont des gens de langue
française, croyez-moi.
M. Alfred: ... M. le député.
M. Saint-Germain: C'est ça le rationnel dans cette
situation, c'est ça le rationnel.
M. Alfred: II n'y en a pas.
M. Saint-Germain: La personne de langue anglaise qui a une
formation, une expérience au niveau de l'industrie, ce n'est pas elle
qui va être chômeuse, elle a une liberté d'action, elle va
gagner sa vie au Québec, en Ontario, même aux
États-Unis.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Alfred: J'allais dire, M. le Président, que le Parti
libéral du Québec est prêt à sacrifier tous les
Québécois francophones pour acheter des votes de la
minorité anglophone.
M. Saint-Germain: Ce sont des accusations en l'air. On a fait
notre possible et je ne suis pas moins francophone et Canadien français
que vous pouvez I'être non plus. Je désire que mes enfants soient
de langue française. Mais, écoutez une minute, le nationalisme,
cela a une limite. Le bon sens devrait toujours primer.
M. Alfred: Allons donc, allons donc!
M. Saint-Germain: Pensez-vous qu'avec la loi 101, on a
sauvé la culture française dans le Québec? C'est de la
foutaise.
M. Alfred: Avec vous, par exemple, on ne sauvera pas
grand-chose.
M. Saint-Germain: Depuis que j'ai l'âge de raison, on
rencontre...
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Saint-Germain: ... à tous les niveaux...
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Saint-Germain: ... des sauveurs de la langue française,
voyons donc!
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Saint-Germain: Cela fait longtemps qu'on est sauvé,
croyez-moi. Je n'ai pas ces complexes d'avoir peur de perdre ma langue tous les
jours et tous les mois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jacques-Cartier, je vous demande, s'il vous plaît, de respecter le droit
de parole.
M. Saint-Germain: Enfin, qu'il parle avec sens.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau, avez-vous terminé?
M. Alfred: J'ai terminé devant l'envolée de M. le
député de quelque part.
M. Saint-Germain: Ne me donnez pas de leçon sur la
façon d'être Canadien français, je n'accepte pas
ça.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, voulez-vous,
nous allons revenir aux chiffres. Ce sont quand même les chiffres qui
permettent de se faire une idée plus exacte de la réalité
et je dirais plus nuancée. On pourrait peut-être terminer
justement sur des nuances, puisque toute cette question doit être
traitée de la façon la plus objective possible. Tout à
I'heure, nous disions qu'il y avait eu une décroissance de 6,5% dans le
réseau anglophone. C'est intéressant de comparer cela avec la
décroissance dans la population globale. Si vous me permettez, je vais
constater qu'en 1977, par rapport à 1976, la décroissance a
été, dans la population, de 0,3% chez les anglophones. C'est loin
d'être l'exode massif dont parlait le député de
Jacques-Cartier, 0,3% de moins, tandis que, pour ce qui est du
réseau scolaire, elle est de 6,5%.
Il y a donc là un chiffre qui resterait à expliquer, je
n'en connais pas toutes les composantes, tous les tenants et aboutissants, mais
c'est intéressant de le constater.
M. Paquette: Ce qui signifierait que les départs jouent un
rôle mineur dans le déclin de la population.
M. Morin (Sauvé): Je n'en tire pas de conclusion, je livre
les chiffres, et chacun en fera ce qu'il voudra. Toujours est-il qu'on constate
que la décroissance dans le réseau scolaire anglophone est 24
fois plus élevée que la décroissance dans la population,
si je compare 0,3% et 6,5%, c'est à peu près ça.
M. Saint-Germain: Vous admettrez que, même avec le taux de
natalité, actuellement, les populations augmentent au Canada et
pratiquement dans tout le monde occidental, même encore, si les
départs annulent l'augmentation et font qu'on accuse une baisse, c'est
qu'ils sont assez nombreux, sur une période très courte. On parle
de questions d'un an. On ne parle pas de cinq ans ou de dix ans.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il serait
peut-être bon que je donne encore un ou deux chiffres qui pourront servir
de munitions à nos amis libéraux ou peut-être leur
permettre, avec nous, de faire certaines nuances.
J'avais un tableau sous les yeux, il y a un instant, qui montrait que,
pour ce qui est des enfants qui ont été déclarés
admissibles par rapport à ceux qui en ont fait la demande, la
proportion, sous l'empire de la loi 22, était de 78,9%, tandis que sous
la loi 101, elle est de 79%. Donc, c'est similaire, sans doute parce que nous
avons ouvert la porte aux enfants dont le frère et la soeur se
trouvaient déjà à l'école anglaise.
Donc, je me répète. Par rapport au nombre de demandes, de
dossiers étudiés, la proportion de ceux qui sont
déclarés admissibles, en 1976-1977, est de 78,9%, tandis qu'elle
est de 79% en 1977-1978 sous l'empire de la loi 101. C'est seulement
après quelques années que le redressement majeur amorcé
par la loi 101 va faire sentir ses effets, quand ne jouera plus l'exception
frère-soeur aîné.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
M. Morin (Sauvé): Vous voyez, on est dans les nuances, on
n'est pas du tout dans les différences cataclismiques.
Mme Lavoie-Roux: J'aurais un point à préciser et
une question à poser. Je pense qu'il faut, Si on veut arriver à
des conclusions qui soient rationnelles je suis bien d'accord que les
statistiques soient examinées, qu'on les interprète de
différentes façons il y a le 0,3% de la soi- disant
diminution de la population anglophone, avec la diminution de 6,5%, dans le
réseau scolaire.
Il faudrait quand même se demander, en fonction des statistiques
démographiques qui ont été données pour la
dernière année, qui montrent un départ de la province de
l'ordre et je le donne approximativement de 50 000 à 60
000 il y en a qui ont parlé de 75 000, mais ce sont des chiffres
qu'il faudrait vérifier. C'est vrai qu'il y a eu aussi des
départs considérables en 1970, probablement suite aux
événements d'octobre à ce moment-là. C'est quand
même la réalité, que vous le vouliez ou non.
M. Morin (Sauvé): Ce serait intéressant de savoir
combien étaient partis avant octobre, parce que c'est plutôt la
fin de l'année, octobre.
Mme Lavoie-Roux: La comparaison qu'on a faite, cela a
été entre 1970 et 1977. Mais peu importe. Entre ces deux
extrêmes, il y a eu une période de progression de la population du
Québec, alors que maintenant, cette année, on se retrouve quand
même vis-à-vis un déficit net de quelques milliers de
personnes. Je pense qu'on a parlé d'un déficit net de 2000 ou
3000. Ce sont des chiffres que je n'ai pas sous la main. Mais il reste
que...
M. Paquette: Ce ne serait pas la première fois dans
l'histoire du Québec que cela arrive, qu'on ait un solde migratoire
négatif.
Mme Lavoie-Roux: Mais c'est dans l'ensemble de la population,
n'est-ce pas?
M. Paquette: Oui, dans l'ensemble de la population.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, peu importe. Cela aussi, il
faudrait le vérifier. Mais il reste qu'en fonction de la diminution de
6,5% dans le réseau, avec le 0,3, il faudrait peut-être avoir
d'autres explications à ceci.
Les deux questions que je veux poser au ministre sont les suivantes: La
première concerne les appels qui ont été interjetés
auprès de la Commission d'appel. La deuxième: Quelle est la
population que le PSBGM réclame comme étant sa population
scolaire pour 1977-1978 et celle que le ministère de l'Éducation
lui reconnaît comme étant officiellement sa population.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi
d'abord de commenter la question portant sur le nombre d'appels qui ont
été présentés à la commission établie
en vertu du chapitre 8 de la Charte de la langue française.
Voici les chiffres les plus récents. Ils datent du 23 mai. 765
appels ont été logés, dont 73 ont été
retirés, ce qui laisse un solde de 693 appels effectivement
déposés devant la commission.
Au 23 mai, 254 dossiers avaient été étudiés.
Là-dessus, il y a eu des décisions affirmatives
autorisant l'appel et, bien sûr, des décisions
négatives, refusant l'appel. Le total des décisions affirmatives
est de 138. Le total des décisions négatives, de 103. Le nombre
élevé de décisions affirmatives vient du fait que la
commission s'est éloignée du jugement rendu par le juge
Deschênes selon lequel la scolarité des parents...
Mme Lavoie-Roux: L'élémentaire.
M. Morin (Sauvé): ... devait s'étendre à
l'ensemble des années du niveau primaire, ce qui évidemment
explique, pour une bonne part, les 138 élèves qui sont
admissibles à l'enseignement en anglais. C'est une question sur laquelle
je me penche d'ailleurs à l'heure actuelle, puisque nous
considérons que la décision des tribunaux était la bonne,
que l'interprétation du juge Deschênes était la bonne. Je
dois m'interroger maintenant sur cette différence qu'il y a entre les
critères appliqués par le tribunal et les critères
appliqués par la commission.
Toutefois, pour l'heure, ces décisions sont sans appel, comme
vous le savez, puisque la charte en a décidé ainsi.
Mme le député m'avait également demandé hier
j'en profite pour glisser ces chiffres combien d'enfants avaient
invoqué le règlement relatif aux difficultés
d'apprentissage. Le chiffre est de six. Combien y avait-il eu de séjours
temporaires? La réponse est sept, de sorte que le total des
décisions rendues atteint 254 et il reste 439 dossiers à
l'étude au 23 mai.
Naturellement, ces 439 dossiers devraient être
réglés au cours de l'été, sûrement pour la
rentrée d'automne, au plus tard.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, dans le cas des enfants qui ont
des difficultés d'apprentissage, sont-ils obligés de demander une
exemption ou est-ce que c'est le jugement de la commission... Cela pourrait
peut-être changer les chiffres que vous avez pour l'identification de ces
enfants. Je ne me souviens pas de ce que les règlements
prévoient.
M. Morin (Sauvé): Ce sont évidemment des
professionnels...
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Morin (Sauvé): ... qui nous aident à trancher
ces cas qui sont quelquefois très difficiles, parce que, comme vous le
savez, il y a difficultés d'apprentissage et difficultés
d'apprentissage, de sorte que... Vous avez sûrement pris connaissance
du...
Mme Lavoie-Roux: Du règlement.
M. Morin (Sauvé): ... règlement.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas si vous aviez eu des
observations à nous faire là-dessus, mais il ne semble pas que le
règlement donne naissance à des difficultés. Il faudra
toujours s'en remettre aux experts pour trancher ces cas.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Ma question n'était pas dans ce
sens-là. D'ailleurs, je l'ai peut-être mal formulée. Les
enfants sont-ils, en fait, obligés de demander une exemption ou est-ce
que la commission scolaire, qui se trouve devant un enfant où c'est
clair qu'il est très handicapé, peut l'accepter automatiquement
à l'école anglaise, s'il est de langue maternelle anglaise,
quoique vous n'ayez pas retenu ce critère?
M. Morin (Sauvé): Ce que nous craindrions, si seules les
commissions scolaires disposaient de ce pouvoir de décider, c'est qu'il
y ait des masses d'enfants en difficulté d'apprentissage du jour au
lendemain.
Mme Lavoie-Roux: Oui, quand même!
M. Morin (Sauvé): C'est pourquoi nous exigeons qu'il y ait
une demande et que les cas soient vérifiés.
Mme Lavoie-Roux: Ah! il y a une demande de faite.
M. Morin (Sauvé): II y a une demande de la part des
parents, oui. C'est prévu au règlement. Nous pouvons nous tourner
vers le PSBGM.
Sur le même sujet, M. le député?
M. Saint-Germain: Sur le même sujet, s'il vous
plaît.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Saint-Germain: II vous reste encore plusieurs appels qui n'ont
pas été étudiés ou dont le jugement n'a pas
été rendu.
M. Morin (Sauvé): Je pourrai vous expliquer pourquoi, si
vous le désirez.
M. Saint-Germain: Allez-y.
M. Morin (Sauvé): Beaucoup de ces appels portent sur
l'interprétation qu'il faut donner à certains documents et,
surtout, je pense que beaucoup de dossiers sont incomplets. Je n'ai pas de
chiffres, mais on me dit que, règle générale, si les
décisions ne sont pas rendues, c'est que la commission d'appel a
été obligée de demander un complément
d'information. Les pièces étaient incomplètes. Les
citoyens intéressés ne s'étaient pas donnés la
peine, quelquefois, d'aller chercher les pièces à conviction
exigées par l'application de la loi 101.
M. Saint-Germain: En fait, cette année, ces enfants
étaient dans le réseau anglais. Ces 765...
M. Morin (Sauvé): Pas nécessairement.
M. Saint-Germain: Mais la grande majorité. (11 h 45)
M. Morin (Sauvé): J'imagine qu'un certain nombre se
trouvait dans le réseau anglais, mais il se peut je n'ai pas de
chiffre, il faudrait vérifier la chose qu'il y ait des enfants
qui se trouvent à l'école française, mais dont les parents
ont demandé, néanmoins, qu'on reconnaisse leurs droits.
M. Saint-Germain: Les décisions négatives: on
entend par "négatives" des décisions qui ne permettent pas
à un élève de s'intégrer au réseau de langue
anglaise. Qu'est-ce qui est arrivé à ces enfants? Est-ce qu'ils
ont changé de réseau?
M. Morin (Sauvé): II est sans doute trop tôt pour
répondre à cette question, M. le député, parce que
la plupart des décisions sont récentes. Nous n'allions pas, du
jour au lendemain, sortir des enfants qui sont en fin d'année scolaire.
Je pense bien, d'ailleurs, que ce ne serait pas ce que nous recommanderait le
député. Seulement, l'année prochaine, ils devront
s'acheminer vers l'école française, puisqu'ils ne sont pas
habilités à aller à l'école anglaise, et si, par
hasard, ils ne le faisaient pas, bien sûr, il n'y aurait pas de
subvention pour ces enfants, ni diplôme éventuellement.
M. Saint-Germain: Ils vont grossir le nombre de ceux qui sont
illégalement dans le réseau de langue anglaise.
M. Morin (Sauvé): Je ne le sais pas. Nous n'avons pas de
chiffre démontrant où se trouvent ces enfants à l'heure
actuelle. Je voudrais ajouter un complément d'information à ce
que je viens de dire. Plusieurs des 459 dossiers à l'étude sont
des dossiers qui sont arrivés tout récemment à la
commission d'appel, parce que vous le savez...
Mme Lavoie-Roux: C'est une interprétation de la commission
d'appel, je pense.
M. Morin (Sauvé): C'est bien possible qu'il y en ait
quelques-uns qui résultent de l'interprétation de la commission
d'appel. Toujours est-il qu'il y a 271 dossiers arrivés récemment
devant la commission. J'imagine qu'au cours des années, il va y en avoir
comme cela chaque année, au début, quelques centaines. Un bon
jour, il n'y en aura plus que quelques dizaines par année.
M. Saint-Germain: Maintenant, au point de vue pédagogique,
qu'est-ce qui arrive de ces enfants qui ont débuté en anglais et
qui vont terminer leur année en français? Est-ce qu'il n'y a pas
des inconvénients qu'on leur crée au point de vue du
développement, du succès scolaire?
M. Morin (Sauvé): Non. M. le député, je
croyais vous avoir répondu il y a un instant que nous n'allons
certainement pas interrompre l'année. D'ailleurs, la plupart de ces
décisions sont survenues en fin d'année scolaire. Vous pensez
bien que nous n'allions pas exiger que les enfants soient illico
transportés dans les écoles françaises.
M. Saint-Germain: C'est entendu, mais au début de
l'année prochaine.
M. Morin (Sauvé): Au début de l'année
prochaine, s'ils se retrouvent, comme il se doit, dans les écoles
françaises et qu'ils ont des difficultés d'apprentissage, il
faudra, notamment, élargir les classes d'accueil. Ils pourront,
d'ailleurs, rester dans le réseau protestant s'ils le veulent. Il
faudra, cependant, augmenter le nombre de classes d'accueil. C'est d'ailleurs
ce que le BEPGM nous a proposé récemment et que j'ai
accepté, soit dit en passant.
M. Saint-Germain: Oui, mais dans le réseau protestant
français ou dans le réseau français catholique, au point
de vue pédagogique, c'est le même problème.
M. Morin (Sauvé): C'est le même problème du
passage d'une langue à une autre, mais il semble que cela ne pose pas de
problème pour les quelques milliers de transferts annuels, dans un sens
comme dans l'autre... Donc, ces enfants ne seront pas plus
désavantagés que si leurs parents avaient décidé
d'eux-mêmes de les mettre à l'école française.
Mme Lavoie-Roux: Ce sont surtout des élèves de
première année?
M. Morin (Sauvé): Oui, j'imagine qu'il y a surtout des
élèves de première année, mais il peut y en avoir
qui étaient des illégaux de la loi 22 et qui se trouvent en
deuxième ou en troisième année cette année,
n'est-ce pas? Quelques centaines. Pour ces enfants, il y aura, bien sûr,
une difficulté, mais elle sera causée, en grande partie, par
l'attitude des commissions scolaires et des parents qui, heureusement, en
nombre restreint, ont refusé de se conformer à la Charte de la
langue française.
M. Saint-Germain: Parce qu'en fin de compte, c'est
peut-être là le tort important que l'application de la loi peut
faire. Ce sont toujours les enfants qui en subissent les conséquences,
ce ne sont pas nécessairement les adultes, mais de toute
façon...
M. Morin (Sauvé): C'est pour cette raison que nous sommes
prêts à tout faire pour faciliter ce passage à
l'école française...
M. Saint-Germain: Dans votre...
M. Morin (Sauvé): ... à moins que le
député nous dise qu'il est contre le passage à
l'école française, c'est autre chose, mais nous pensons...
M. Saint-Germain: Non, je voulais simplement dire qu'on devrait
avoir des lois qui puissent s'appliquer avec assez d'élégance, ou
assez de
souplesse pour ne pas créer des difficultés aux enfants.
C'est simplement là mon opinion.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que vous pensez que le
bureau d'admissibilité ou la commission d'appel n'ont pas
été un peu lents à rendre leurs décisions,
puisqu'on se retrouvait aux mois de mars et avril avec un grand nombre
d'élèves au sujet desquels on ne s'était pas encore
prononcé. Ce retard, finalement nuit à l'élève, au
bout du compte. Le retard au bureau d'admissibilité, ensuite à la
commission d'appel qui doit rendre ses décisions. Le processus est
très long...
M. Morin (Sauvé): Ah! Le...
Mme Lavoie-Roux: ... et, finalement, ça pénalise
l'élève.
M. Morin (Sauvé): Naturellement, nous avons mis ces
organismes en marche durant l'année. La commission d'appel, vous le
savez, ne s'est sérieusement mise à l'ouvrage qu'il y a quelques
mois et j'estime que, déjà, les choses devraient être
nettement améliorées pour l'an prochain, puisqu'elle est en
place. Elle a maintenant un mécanisme, elle a un personnel qui
connaît le fonctionnement de la loi 101. Je n'hésiterai pas
à dire que, dès l'an prochain, et pour les années
suivantes, le mécanisme d'appel sera beaucoup plus efficace. Il fallait
prévoir que cette année il y aurait des difficultés
liées à la mise en marche du système.
Mme Lavoie-Roux: Ça va pour la commission d'appel, mais
pour le bureau d'admissibilité, il n'y a eu aucun retard causé
par le bureau d'admissibilité?
M. Morin (Sauvé): Ah non! Les seuls retards
véritables ont été causés par le manque de
coopération du PSBGM.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Bon! Maintenant, M. le Président,
on peut se tourner vers une autre question posée par Mme le
député de L'Acadie et qui a trait, justement, au PSBGM, ou, comme
nous disons en français, au BEPGM.
La clientèle budgétisée au 30 juin 1977, dans la
première étape de la démarche qui tend à identifier
le nombre d'élèves qui se trouvent dans le système, a
été déclarée par le BEPGM comme étant 47 188
élèves.
Mme Lavoie-Roux: Ah!
M. Morin (Sauvé): Par la suite, au 30 septembre 1977,
à la deuxième étape prévue dans le
déroulement des opérations, la clientèle
déclarée a été de 47 211. Naturellement, avec notre
souplesse habituelle, nous avons pris ces chiffres comme de l'argent comptant.
On nous déclarait que c'était le chiffre; nous avons
accepté le chiffre, comme nous le faisons pour toutes les com- missions
scolaires, tenant pour acquise la bonne foi intégrale de toutes les
parties intéressées.
Or, au 15 mai 1978, le nombre d'élèves
régulièrement inscrits, selon les chiffres du ministère de
l'Éducation, est de 42 708. Il faut maintenant que je vous donne le
détail de cela. Les 42 708 sont constitués de 41 280
élèves déclarés admissibles et de 1428
élèves recevant, au PEBGM, l'enseignement en
français...
Mme Lavoie-Roux: Et qui sont aussi admissibles...
M. Morin (Sauvé): ... dont la situation est
régulière.
Mme Lavoie-Roux: Qui sont dans une situation normale, c'est
ça. Ce qui fait un total de 42 708, d'accord.
M. Morin (Sauvé): Bon! Ajoutons à cela, maintenant,
les élèves dont les dossiers paraissent admissibles, mais qui
doivent être complétés par la fiche nominale. Le nombre est
de 1479. Ajoutons à cela encore les dossiers qui sont en traitement et
dont nous ne connaissons pas le sort ultime. Ils sont au nombre de 498.
Mme Lavoie-Roux: Ce qui fait...
M. Morin (Sauvé): Alors! Maintenant, il y a des
difficultés qui sont liées à des étudiants
intégrés au BEPGM, à la suite d'ententes entre le
ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires
sociales. Je puis vous dire quel est le chiffre, mais nous ne savons pas s'il
se trouve ou non dans les nombres que je vous ai déjà
donnés, nous sommes en train de vérifier. Il se pourrait donc que
ce chiffre, qui est de 863, fasse partie des 42 708 que je vous donnais tout
à l'heure. Il se pourrait qu'une partie s'additionne et qu'une partie ne
s'additionne pas. Tant que les recherches ne seront pas effectuées,
c'est difficile de le savoir.
Il y a encore 953 élèves déclarés
inadmissibles; c'est le chiffre que je vous donnais tout à l'heure. Nous
savons que ces élèves n'ont pas le droit d'être au
BEPGM.
De sorte que le chiffre de 47 000 était légèrement
soufflé et même peut-être beaucoup soufflé. Nous
sommes en train de vider cette question avec le BEPGM, de même qu'avec
l'aide du CSIM, le Conseil scolaire de l'île de Montréal qui, lui,
évidemment veut savoir à quoi s'en tenir, parce que les
subventions qu'il doit remettre au BEPGM seront en fonction du nombre
d'élèves régulièrement inscrits, de sorte que,
avant que nous fermions les livres de nos subventions au CSIM et au BEPGM, au
mois de juin ou au mois de juillet, nous allons devoir connaître
exactement le nombre d'enfants régulièrement inscrits au BEPGM.
Ils connaissent notre attitude là-dessus et je pense qu'on peut
s'attendre, de leur part, à une coopération qui a bien
tardé à venir, mais qui semble prendre maintenant des chemins
plus favorables.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, si je fais l'addition de tous
les chiffres que vous m'avez donnés, le PSBGM dit: Nous avons 47 211
élèves. Si je tiens compte de vos... Vous en avez 1479 qui sont
probablement admissibles, enfin il faut les qualifier, on ne le sait pas
encore, en tout cas, en les additionnant, cela c'est là...
M. Morin (Sauvé): Additionnons-les pour simplifier, je
n'ai pas d'objection contre cela.
Mme Lavoie-Roux: Et j'additionne les 498, j'oublie d'où
ils viennent...
M. Morin (Sauvé): Oui, mais là, c'est beaucoup plus
sujet à caution.
Mme Lavoie-Roux: Bon, plus sujet à caution, alors, c'est
plus grave. Je les avais additionnés et j'arrivais à 44 600, je
leur donnais tout le bénéfice du doute.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Là, il y a les 800 inadaptés qui
sont en suspens. Je ne les ai pas additionnés aux 44 600.
M. Morin (Sauvé): D'accord.
Mme Lavoie-Roux: Mais, comme, d'un autre côté, vous
nous dites que les 500 sont très douteux, j'arrive à un total de
44 600 il se peut que je me sois trompée de quelques
unités si quelqu'un m'arrive en me disant que c'est 608 ou même
508 ou 700 avec une différence de 2811 enfants. J'espère
que j'ai bien soustrait, 44 600 de 47 211, qui étaient les chiffres
qu'ils déclaraient en septembre 1977. J'arrive avec une
différence de 2811 enfants, et j'y ai inclus vos 500
problématiques. De deux choses lune, je vais utiliser votre terme, le
PSBGM a fort gonflé ses chiffres c'est un terme poli ou il
y a beaucoup plus d'illégaux que vous n'en soupçonnez. Vous
m'avez dit, tout à l'heure, que peut-être que cela peut aller
chercher jusqu a 1500 au PSBGM, parce que je trouve qu'on est rendu à
2811.
M. Morin (Sauvé): Mme le député, avant que
vous n'alliez plus loin et que vous ne tentiez d'insinuer que tous ces gens
sont illégaux, je dois vous dire que ce n'est pas le cas. D'après
les conversations...
Mme Lavoie-Roux: Non, j'ai bien compris les chiffres que vous
m'avez donnes comme étant illégaux. (12 heures)
M. Morin (Sauvé): ... ce que nous avons avec le BEPGM, il
y en a 1500 à 1600 qui seraient illégaux. Les autres, il s'agit
d'erreurs. Il s'agit aussi de concilier le fichier central avec leurs
catégories et leurs chiffres, mais il y a probablement un certain nombre
d'erreurs administratives, de gens qui figurent sur deux listes. Enfin, il y a
certainement des erreurs de type administratif dans leurs calculs. Je n'en
tirerai pas d'autres conclusions que celle-là pour l'instant.
Mme Lavoie-Roux: Sauf que pour une population de 47 000, cela
fait beaucoup d'erreurs administratrives.
M. Morin (Sauvé): Effectivement, et je vous avoue que de
part et d'autre nous nous posons des questions.
Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'il faut être
très prudent sur les 1500 enfants que vous apportez comme étant
les seuls je déteste le terme "illégaux" pour des enfants
non admissibles.
M. Lacoste: Les commissions scolaires, au mois de mai ou juin,
avant la fin de l'année scolaire, ont fait une projection du nombre
d'élèves possible. Cela devait être la même chose
pour le PSBGM. Quelle a été cette projection?
Mme Lavoie-Roux: On l'a donnée tout à l'heure.
C'était...
M. Morin (Sauvé): Je l'ai donnée, 47 188.
Mme Lavoie-Roux: II l'a donnée au début, mais
c'était celle de septembre 1977. Cela a été sa
déclaration officielle. Les élèves comptés pour
lesquels il réclamait des subventions, c'était 47 211. Alors,
pour toute cette situation, quand j'ai dit quelques milliers, je n'ai rien
à retirer.
M. Saint-Germain: M. le Président...
M. Morin (Sauvé): II y a un autre aspect que me signale le
sous-ministre. Notre système de contrôle au ministère, nos
fichiers, sont de plus en plus complets et nous sommes beaucoup mieux
équipés qu'on ne l'était l'an dernier ou il y a deux ans
pour effectuer un contrôle de ce qui se passe réellement. De sorte
qu'à l'heure actuelle le BEPGM cherche ces enfants-là dans ses
écoles.
Mme Lavoie-Roux: II est obligé de les chercher.
M. Morin (Sauvé): II est obligé de les chercher et
nous verrons bien s'il les trouvera, mais il se pourrait qu'il y en ait
quelques-uns qui n'existent pas.
Mme Lavoie-Roux: II y a une marge d'erreur qui peut être
raisonnable dans une grande commission scolaire, mais quand on passe de 42 000
à 47 000, grosso modo, cela fait une marge assez
considérable.
M. Morin (Sauvé): Je tiens à dire, à
l'éloge de la CECM cela va certainement faire plaisir à
Mme le député de L'Acadie que la marge d'erreur à
la CECM n'est que de 300 à 400.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que sur une population de...
M. Morin (Sauvé): Pour un nombre d'élèves
bien supérieur.
Mme Lavoie-Roux: 150. Est-ce que ce sont vraiment des erreurs ou
les a-t-on comptés? Enfin, peu importe.
M. Morin (Sauvé): Suspendons la question pour l'instant.
On aura sûrement le loisir de s'en reparler quand nous aurons vidé
la question avec le BEPGM. Je ne veux pas me lancer dans une diatribe ou
prêter des intentions mauvaises à qui que ce soit.
Vérifions et ensuite nous pourrons faire des commentaires.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. De toute façon, ce n'est pas
mon intention de me lancer dans une diatribe contre lui. Je voulais simplement
vérifier si les chiffres que vous avez voulu nous donner des
illégaux étaient ceux que, de bonne foi, vous avez voulu nous
donner. Il semble qu'ils pourraient être supérieurs à
ceux-là. Mais de toute façon...
M. Morin (Sauvé): J'aurais bien pu penser que ce n'est pas
au BEPGM que vous cherchiez noise, mais plutôt au gouvernement. J'aurais
pu m'en douter.
Mme Lavoie-Roux: Oui, évidemment, c'est normal. Je suis
ici pour faire opposition au gouvernement et j'essaie de le faire le mieux
possible pour qu'il corrige ce qui doit être corrigé. Je voudrais
quand même vous demander... Hier vous nous avez donné des chiffres
que je n'ai plus, on les a peut-être ici... Selon ces chiffres, il y
avait tant de demandes d'admission à l'école anglaise.
C'était de l'ordre de 23 000; en tout cas, peu importe. Un certain
nombre a été déclaré admissible et un autre non
admissible. Est-ce que tous les non-admissibles qui avaient demandé
l'admissibilité à l'école anglaise, vous les retrouvez
à l'école française ou il s'en est perdu en cours de
route?
M. Morin (Sauvé): Si vous le voulez, nous allons
considérer le tableau que je vous ai fait distribuer il y a un instant,
qui, malheureusement, n'est pas le plus récent que nous souhaiterions
avoir. Il remonte au mois de février et il est intitulé:
Statistiques relatives aux enfants déclarés inadmissibles par le
BAEA. Vous pourrez constater que sur les 1632 déclarés
inadmissibles, 634 recevaient à ce moment l'enseignement en anglais et,
933 n'étaient pas inscrits au fichier du ministère de
l'Éducation.
Mme Lavoie-Roux: Ils ne sont nulle part, ceux-là, enfin,
on peut se douter où ils sont, mais ils ne sont officiellement nulle
part.
M. Morin (Sauvé): On ne le sait pas et c'est pourquoi nous
cherchons, à l'heure actuelle, à les identifier.
Mme Lavoie-Roux: C'est ça.
M. Morin (Sauvé): Sous la colonne langue d'enseignement
inconnue, vous voyez qu'il y en a 65.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils peuvent être
déménagés, ces enfants-là?
M. Morin (Sauvé): Tandis que vous pouvez voir, dans la
première colonne...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): ... que 329 élèves
déclarés inadmissibles reçoivent l'enseignement en
français. Il y en a peut-être d'autres, mais pour l'instant, ce
sont les chiffres dont nous sommes certains. Et puis, il y a des dossiers qui,
à ce moment-là, étaient à compléter, dont
plusieurs l'ont sûrement été depuis lors, au nombre de 16
176. J'imagine que la plupart de ceux-là sont admissibles.
Mme le député, vous m'aviez posé une autre question
à laquelle je voudrais répondre qui est celle des cas où
j'ai dû, en vertu des pouvoirs que la Charte de la langue
française me confère, annuler des décisions prises par la
personne désignée par moi pour constater l'admissibilité
à l'école anglaise. J'ai dû annuler l'inscription à
l'école anglaise de 19 enfants appartenant à 17 familles. Tout
simplement parce que les déclarations qui avaient servi de fondement
à la décision de la personne désignée
étaient erronées ou mensongères. C'est ainsi que certains
avaient déclaré être arrivés au Québec avant
le 26 août, mais étaient en réalité arrivés
après le 26 août, après vérification.
C'est ainsi que certains avaient déclaré qu'ils avaient un
frère ou une soeur aîné dans le système alors qu'en
réalité, ils n'en avaient pas. Donc, j'ai dû annuler 19
inscriptions. Je ne saurais vous dire exactement si ces enfants se trouvent
à l'école française ou à l'école anglaise,
à l'heure actuelle. Je le saurai sans doute l'automne prochain.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est quand même pas très
considérable.
M. Morin (Sauvé): Non, ce n'est pas considérable,
ce n'est pas un chiffre définitif non plus, ce sont les derniers que je
possède.
M. Le Moignan: II y a quelques noms d'anglophones, vous ne savez
pas s'ils étaient ainsi inscrits avant ou après non plus.
M. Morin (Sauvé): Si on veut bien regarder les noms qui
pourraient être qualifiés d'anglophones, il y a Linda Anne Fuller,
fille de William Fuller, Tamara Hamilton, dont le prénom pourrait
indiquer qu'elle n'est pas d'origine écossaise, David Kanath,
peut-être est-ce un anglophone et il y aurait également un cas
à Trois-Rivières, celui de
M. Marcel Johnston et un cas dans la région dite Western Quebec,
celui de M. Rodney.
M. Le Moignan: Western Quebec, c'est West Island?
M. Morin (Sauvé): C'est la région de
l'Outaouais.
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, je pense que la commission scolaire
s'appelle ainsi.
M. le ministre, c'est vraiment une information technique que je vous
demande. L'information m'a été demandée quelques fois et
je ne le savais pas. Comme l'occasion se présente, j'en profite. Quand
vous considérez l'arrivée des parents au Québec,
ordinairement, c'est parce que le père change son lieu de travail, et il
arrive au Québec, disons, au mois d'août pour commencer à
travailler.
Mais, compte tenu des démarches pour prendre possession d'une
maison que ces gens ont achetée et que la famille
déménage, celle-ci peut arriver et prendre logis officiellement
le 1er septembre, alors que le père est peut-être à son
lieu de travail le 1er juillet ou le 1er août. Quelle date
considérez-vous à ce moment-là? Il y a des gens qui m'ont
posé la question et vraiment, je ne le savais pas.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que c'était pour la
première année d'application, madame, ou pour la seconde? Ce
n'est pas du tout le même problème. S'il s'agit de la
première année d'application, la date du 26 août, qui est
la date d'entrée en vigueur de la loi, est évidemment
déterminante. Mais, pour les années subséquentes, le
problème ne se pose plus.
Mme Lavoie-Roux: C'était pour la première
année de l'application de la loi. Est-ce que c'est l'adresse du
père...
M. Morin (Sauvé): Si le père était
résident ici avant, il tombait sous l'exception, en effet. C'est comme
cela, du moins, que la loi a été interprétée. Je
pourrais vous donner un cas qui est intéressant, mais qui montre
qu'aucun de ces cas n'est semblable au suivant.
Il s'agit du cas de M. Kanath, de l'élève David Kanath.
J'ai écrit la lettre suivante au père de cet enfant:
"D'après les informations que nous a fournies le Bureau des
écoles protestantes du Grand-Montréal, votre enfant, David,
fréquentait, en 1976-1977, la section française de l'école
Maisonneuve." C'est intéressant, c'est un cas d'inscription à
l'école française du BEPGM. Mais il y avait une demande,
semble-t-il, d'inscription à l'école anglaise. Je continue la
lecture de la lettre, je crois que cela éclairera davantage. "Par suite
d'une mauvaise transcription des données relatives à la langue
dans laquelle il recevait l'enseignement, une déclaration
d'admissibilité a été émise, par erreur, en son
nom. "Comme votre enfant n'a pas droit à ce document, je dois, en vertu
de l'article 78 de la Charte de la langue française, l'annuler,
etc."
On me signale que, dans ce cas-là et il se peut qu'il y en
ait un ou deux autres il n'avait même pas demandé
l'admission. Mais il y a eu ce qu'on appelle un baptême par immersion
pour un très grand nombre d'enfants qui se trouvaient sur des listes.
Alors, il y avait eu une mauvaise transcription dans les listes, ce qui faisait
que cet enfant s'est retrouvé avec une reconnaissance de son
admissibilité à l'école anglaise, alors qu'il ne l'avait
même pas réclamée. J'ai dû annuler.
Mme Lavoie-Roux: Alors, ce n'est pas vraiment un cas de
fraude?
M. Morin (Sauvé): Non. Il y en a quelques-uns. C'est une
erreur dans ce cas-là. Et il y a aussi d'autres cas d'erreurs pures et
simples comme celle-là.
Mme Lavoie-Roux: Comment les cataloguez-vous, au
ministère? Il faudrait peut-être les appeler des cas d'erreurs
plutôt que des cas de fraude. J'étais restée avec
l'impression que ces gens-là avaient essayé de frauder et ce
n'est pas le cas.
M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas le cas pour tous.
Mme Lavoie-Roux: II faudrait peut-être faire une
distinction, pour que les parents ne gardent pas une réputation de
fraudeurs, alors qu'ils n'en sont pas, dans des cas comme celui-là.
M. Morin (Sauvé): Vous avez tout à fait raison. De
toute façon, nous ne faisons de catégories que sous la cote
suivante: "Personne dont la reconnaissance pour fins d'admissibilité
à l'école anglaise a été annulée par le
ministre." Mais il y a eu cependant des cas où on nous a fait des
déclarations qui n'étaient pas exactes.
M. Le Moignan: Le père de l'enfant en question a-t-il
accepté votre décision? Oui. Y a-t-il eu une réaction de
la part du père de l'enfant à la réception de votre
lettre? Non.
M. Morin (Sauvé): À ma connaissance, non, mais ils
peuvent se pourvoir en appel devant la commission. Je leur indique d'ailleurs
je n'ai pas terminé la lettre tout à l'heure qu'ils
peuvent en appeler de toute décision du ministre. C'est prévu
dans la loi, comme vous le savez. (12 h 15)
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, c'est plutôt une
question de règlement. J'ai l'impression qu'on s'attarde sur un sujet
qui est très intéressant. Je me demande si on ne l'a pas
vidé actuellement et si on ne devrait pas revenir à une
procédure un peu plus stricte, si on veut avoir le temps d'aborder
d'autres sujets qui sont tout aussi importants. Je pense que c'est dans
l'intérêt de tout le monde à cette commission. On avait
suggéré, Mme le député de L'Acadie, en particulier,
avait suggéré
que, pour chacun des sujets, chaque porte-parole de parti ait vingt
minutes et qu'ensuite on permette aux autres députés qui le
veulent de s'exprimer, en alternant de chacun des deux côtés de la
table.
Le Président (M. Jolivet): J'ai été
très large sur cette utilisation, ce matin, parce que je croyais qu'il
valait la peine de vider ce sujet. Je ne vois pas d'objection à ce qu'on
revienne à ce que j'avais annoncé, ce matin, à 10 heures,
au début de la réunion, au programme 4, élément
1.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je suis d'accord avec la
suggestion du député de Rosemont, mais, s'il me permettait une
dernière question qui viderait la question des commissions scolaires
protestantes, vu qu'on y a touché...
Je lisais, dans le dernier rapport du Conseil supérieur de
l'éducation j'ai essayé de le retrouver, je ne le retrouve
pas, j'espère que je n'ai pas fait erreur en le lisant qu'il se
retrouvait au Québec je vous le dis sous toute
réserve...
M. Morin (Sauvé): Parlez-vous du rapport que j'ai
déposé hier en Chambre?
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est le bulletin mensuel, semestriel ou
bisannuel où on parlait qu'il y avait au Québec 70 000 ou 80 000
protestants de langue française. Je me demandais de quelle façon
ces enfants étaient servis.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je suis quelque
peu...
Mme Lavoie-Roux: Je suis surprise, moi aussi.
M. Morin (Sauvé): ... étonné du chiffre qui
est donné par Mme le député. Si elle pouvait me donner la
citation exacte, nous pourrions vérifier ensemble.
Mme Lavoie-Roux: Je l'ai ici. Moi aussi, cela m'a
étonnée, je l'ai lue ce matin, en fait. Merci. Je fais allusion
au bulletin du 6 mai 1978 où on parle de l'identité religieuse.
Le comité protestant souligne finalement il fait diverses
considérations qu'il existe au Québec plus de 80 000
protestants francophones actuellement très mal desservis. C'est tout ce
que je...
M. Paquette: Est-ce qu'on parle de protestants au sens
large...
Mme Lavoie-Roux: C'est de la part du comité...
M. Morin (Sauvé): Je pense que c'est au sens très
large.
M. Paquette: Oui, ou de gens de religion protestante.
M. Morin (Sauvé): Oui, je pense que...
M. Paquette: Est-ce qu'on inclut les Juifs francophones
là-dedans ou... C'est parce que je n'ai pas le...
Mme Lavoie-Roux: Non, je ne crois pas.
M. Morin (Sauvé): L'explication va connaître
certainement des précisions d'ici quelque temps, parce que j'ai
demandé au comité protestant de faire une étude... Pardon,
pour être exact, c'est le comité protestant qui m'a demandé
si j'accepterais de subventionner une étude sur la question du nombre de
protestants francophones qui se trouvent dans nos écoles. J'ai
accepté de subventionner cette étude. Elle se poursuit en ce
moment. Il ne peut s'agir, je pense, dans l'état actuel du dossier, que
d'une sorte d'estimation préliminaire qui va devoir être revue.
C'est un chiffre qui est un peu étonnant. Je pense que probablement, ces
gens se seront basés sur Statistique Canada qui donne toujours des
catégories très élastiques dans ce domaine de la
confessionnalité. Je suis prêt à accepter n'importe quelle
hypothèse, à condition qu'ils me la démontrent. S'il
était vrai qu'il y avait 50 000, 60 000 ou 70 000 protestants
francophones au Québec, il faudrait enfin qu'on reconnaisse le fait et
qu'on mette à la disposition de ces gens des écoles, ce qui n'a
pas été le cas dans le passé, les protestants francophones
étant littéralement refoulés, il faut bien le
reconnaîre, vers l'école anglaise, en dépit du bon
sens.
Mme Lavoie-Roux: Alors, vous allez faire examiner cette
hypothèse?
M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire que c'est le
comité qui, à l'heure actuelle, grâce à une
subvention, est en train de préparer un rapport qui me sera, bien
sûr, communiqué.
Le Président (M. Jolivet): On revient donc au début
de notre cahier, à ce programme 4, élément 1. Vous
étiez rendus... Mme le député, des questions?
Mme Lavoie-Roux: Mon premier temps était
écoulé, et je pense que j'en ai repris avec la question de la
langue. Je ne sais pas si on le met de côté ou non. Je suis bien
prête à céder ma place...
Le Président (M. Jolivet): À la question du
député...
Mme Lavoie-Roux: II reste dix minutes. Si un député
veut entrer dans un autre grand sujet.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a des questions
provenant d'autres...
Programme d'enseignement des langues d'origine
M. Paquette: J'ai plusieurs sujets. L'un concerne cette nouvelle
expérience qui a commencé cette année l'enseignement en
langue maternelle pour les enfants d'origine italienne et portugaise.
M. Morin (Sauvé): Oui...
M. Paquette: J'aimerais savoir a quel niveau cela se situe, dans
quel contexte. Combien y a-t-il d'enfants d'impliqués.
M. Morin (Sauvé): À l'heure actuelle, nous sommes
en train de mettre au point les programmes et de discuter de l'implantation de
ce que nous appelons le PELO, programme d'enseignement des langues d'origine,
avec les communautés intéressées, notamment avec la
communauté italienne et le groupe portugais qui se sont montrés
très intéressés par la possibilité que nous leur
offrions. Nous avons également des rencontres depuis plusieurs mois avec
la communauté grecque, mais les choses vont plus lentement parce que la
communauté grecque possède déjà un enseignement,
qu'on appelle, je crois, l'enseignement du samedi. Elle veut être
sûre que les enseignements que nous mettrons à sa disposition ne
gênent pas ces enseignements du samedi, de sorte que la discussion se
poursuit.
Dans le cas des italianophones et des gens originaires du Portugal, les
choses ont progressé au point que nous pensons qu'il serait possible
d'ouvrir les premières classes dès septembre 1978, au niveau
primaire. C'est une décision que j'ai prise, parce que je me suis rendu
compte que c'est là que sont les véritables besoins, dans la
mesure où les enfants des immigrants nouveaux seront dirigés vers
l'école française. J'ai donc opté pour le niveau primaire
et la toute première année, au départ, peut-être une
année ou deux nous sommes encore à en discuter
plutôt que de prendre I'initiative d'offrir ces enseignements au niveau
secondaire.
Il n'est pas exclu, cependant, que nous mettions en toute
également, peut-être pas en septembre 1978, mais l'année
suivante, des enseignements au niveau secondaire, dans la mesure où le
nombre d'enfants italianophones ou d'origine portugaise ! autorisera.
M. Paquette: J'imagine qu'au niveau secondaire, ça
pourrait aussi être ouvert à tous les enfants...
M. Morin (Sauvé): Évidemment!
L'intérêt de la chose, ce n'est pas seulement d'ouvrir la
possibilité aux italianophones, par exemple, de maintenir leur culture,
leur langue, la connaissance de leur histoire et de leur littérature.
L'intérêt, c'est d'offrir aux Québécois francophones
la possibilité d'apprendre ! italien. Peut-être peut-on penser que
ce ne serait pas un mauvais substitut pour le latin, à un moment
où les jeunes se sont beaucoup éloignés des langues
anciennes, de même pour le grec. Je ne vois pas pourquoi les jeunes qui
s'intéressent au grec n'apprendraient pas la langue moderne,
plutôt que de ne rien apprendre en fait de langue ancienne. Il y a
là, je crois, une possibilité, qui ne montrera tous ses effets
qu'à la longue, de ramener les Québécois vers
l'étude des langues étrangères classiques.
M. Paquette: Donc, vous comptez ouvrir certaines classes au
niveau primaire dès la prochaine année scolaire.
M. Morin (Sauvé): Au niveau primaire.
M. Paquette: Et cela aura quelle extension? Il y aura combien
d'enfants d'impliqués? Il y aura combien de classes?
M. Morin (Sauvé): Au départ, ce sera,
d'après le dernier état des discussions, quelques classes
expérimentales...
M. Paquette: Oui.
M. Morin (Sauvé): ... c'est-à-dire, au maximum,
quelques centaines d'enfants. Je tiens aussi à souligner au
député que, dans le livre vert, nous avons prévu qu'il y
aurait l'enseignement de la langue d'origine, de la culture d'origine,
dès la première année du secondaire. Mais,
évidemment, le livre vert se situe dans une perspective de moyen et de
long terme, puisqu'il faut d'abord que nous ayons formé, au niveau
primaire, une clientèle qui voudra continuer de s'intéresser
à sa langue d'origine et à sa culture d'origine, une fois
arrivée au secondaire.
M. Paquette: Est-ce que le projet, dans son état actuel,
porte sur toutes les années du cours primaire?
M. Morin (Sauvé): Oui. mais pas d'un seul coup.
M. Paquette: Progressivement?
M. Morin (Sauvé): Oui, progressivement, nous voulons
l'étendre dans la mesure où les clientèles seront
disponibles et intéressées et il semble que. du côté
italien, il y a un intérêt très réel et très
vif, de même que chez les Portugais. Nous commencerons par une ou deux
années c'est en discussion à l'heure actuelle et on
l'étendra à la troisième, à la quatrième,
à la cinquième et à la sixième
éventuellement.
M. Le Moignan: Si le député le permet, juste une
petite question.
M. Paquette: Oui.
M. Le Moignan: Quelle proportion allez-vous donner à
l'enseignement de la langue française et de la langue italienne pour
ceux qui vont débuter en septembre 1978?
M. Morin (Sauvé): Au départ, ces enfants n'auront
pas moins de langue française. Pour savoir comment insérer cet
enseignement de langue italienne, pour ces groupes, dans la grille horaire,
nous sommes en train d'en discuter avec eux à l'heure actuelle et j'ai
l'impression que ce n'est qu'après une ou deux années
d'expérience
qu'on va pouvoir vraiment décider comment insérer cela
harmonieusement dans la grille. Nous sommes un peu hésitants, à
l'heure actuelle, nous discutons de la chose avec des groupes et aussi,
forcément, il va falloir en discuter avec les commissions scolaires qui
vont accepter de mener à bien l'expérience.
M. Le Moignan: J'ai bien l'impression que, dans la plupart de ces
cas, ces jeunes Italiens parlent la langue anglaise actuellement,
peut-être pas tellement de...
M. Morin (Sauvé): Je ne tiendrais pas cela pour acquis,
mais c'est possible qu'il y ait quelques cas de ce genre parmi ceux qui vont
être dirigés vers l'école française.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie, sur la même question.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. C'est ce qui est
compliqué de respecter les 20 minutes parce que, si on ne vide pas un
sujet, on va y revenir après coup.
Le ministre y a d'ailleurs déjà touché; c'est sur
la question de l'organisation scolaire. Je me demandais comment vous
procéderiez. Le ministre dit: On devra obtenir la collaboration des
commissions scolaires, etc. Y a-t-il eu des démarches de faites
auprès de commissions scolaires? De quelles commissions scolaires
s'agit-il? Et, comme je pense qu'on veut quand même que les enfants
soient le plus possible intégrés à l'école de leur
milieu et que, déjà, on éprouve certaines
difficultés à intégrer, par exemple, dans les horaires,
les enfants qui ont des cours d'enseignement religieux... On arrive ici avec un
certain nombre d'enfants qui voudraient de l'italien, du grec ou de l'espagnol,
et d'autres qui ne les suivront pas. Est-ce que vous avez un peu...
M. Morin (Sauvé): Effectivement, c'est compliqué,
mais comme nous pensons d'abord aux enfants, il va falloir que nous adoptions
toutes ces vastes machines à ces réalités nouvelles et
à ces services que nous voulons donner à la population.
Mme le député veut savoir quelles sont les commissions
scolaires qui sont intéressées. Nous avons, à l'heure
actuelle, des discussions avec la CECM. Dans le cas des Portugais, nous tentons
de voir si nous ne devrons pas également traiter avec !a commission
scolaire de l'Outaouais-Hull, puisqu'il se trouve un groupe important de
Portugais à Hull, comme Mme le député le sait. À
l'heure actuelle, ce sont les commissions scolaires intéressées,
et on comprend facilement pourquoi c'est surtout la CECM qui va donner suite
à ce projet.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends la réponse du ministre qui
me dit: C'est complexe tout cela, mais est-ce qu'à ce moment-ci, puisque
vous annoncez le projet probablement pour septembre il vous reste trois
mois est-ce déjà un peu articulée la façon
dont vous allez organiser l'horaire?
M. Morin (Sauvé): Oui, cela a déjà fait
l'objet de discussions avec la CECM. Je ne peux pas vous dire exactement
où on en est aujourd'hui, parce que cela se discute, je dirais, chaque
semaine en ce moment, mais il s'agit d'expériences à l'automne.
Nous ne pouvons pas nous permettre d'ouvrir les portes toutes grandes d'un seul
coup, parce que nous n'aurions ni les enseignants ni les moyens
pédagogiques pour le faire. Il s'agit donc, avec l'aide des associations
d'enseignants d'italien, de mettre sur pied quelques classes qui vont nous
servir de pilotes. Bien sûr, par la suite, il se peut que nous devions
désigner certaines écoles comme offrant ces programmes, parce
qu'il s'y trouve des concentrations particulières d'enfants.
Il n'est pas exclu qu'on dirige vers ces écoles, comme cela se
fait dans d'autres cas, des enfants qui désirent se prévaloir du
PELO.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que... je comprends.
Le Président (M. Jolivet): Comme il est 12h 30, j'ajourne
sine die. Le droit de parole sera, à ce moment-là, encore au
député de Rosemont, tout en tenant compte de la dernière
question de Mme le député de L'Acadie.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
Reprise de la séance à 16 h 16
Le Président (M. Jolivet): La commission permanente de
l'éducation se réunit pour étudier les crédits
budgétaires du ministère de l'Éducation.
Sont membres de cette assemblée M. Alfred (Papineau), M. Lacoste
(Sainte-Anne), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M.
Marquis (Matapédia), M. Morin (Sauvé), M. Paquet-te (Rosemont),
M. Picotte (Maskinongé).
On doit aussi me donner d'autres noms car il y aura des changements ce
soir, je pense, au niveau de la liste des membres.
Mme Lavoie-Roux: Nous sommes toujours ici.
Le Président (M. Jolivet): II y aura quelques changements
qui me seront annoncés tout à l'heure.
Mme Lavoie-Roux: Nous sommes bien d'accord.
Le Président (M. Jolivet): Nous en étions au
programme 4, élément 1. Nous recommencions... Puisque le
député qui avait le droit de parole à ce moment, M. le
député de Rosemont, n'est pas ici, nous revenons à l'ordre
normal. Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il restait une
question que je voulais poser au
moment où nous avons suspendu les travaux. Je voulais demander au
ministre si, pour la mise en oeuvre de son plan d'enseignement des langues
d'origine, il prévoyait des professeurs de plus et à quel endroit
du budget ceci émane, parce qu'apparemment, on irait un peu en dehors
des normes. Comme il s'agit d'enseigner l'italien, j'imagine qu'on doit
recourir à des professeurs supplémentaires.
M. Morin (Sauvé): Effectivement, M. le Président,
il va nous falloir faire appel à du personnel hautement
spécialisé, des enseignants de la langue italienne, voire de la
langue portugaise, peut-être, l'an prochain, de langue grecque, et cela
émarge au budget du plan de développement des langues. C'est le
troisième aspect du plan de développement des langues, le premier
étant consacré au français langue maternelle, le second
aux deux langues secondes et enfin, le troisième, aux langues
d'origine.
Mme Lavoie-Roux: Merci. Je pense que cela peut-être une
suite logique, je voudrais passer à l'enseignement de la langue seconde,
M. le Président. L'an dernier, au moment de l'étude des
crédits du ministère, le ministre nous avait dit qu'on venait de
lui remettre un rapport d'étude touchant l'enseignement des langues,
mais qu'à ce moment-là, il devait consulter d'autres personnes,
différents spécialistes vous retrouveriez cela, je pense,
dans vos notes du discours d'ouverture et je voulais savoir si ce
rapport lui a été remis et s'il pourrait nous en remettre copie.
J'imagine que c'est quand même un rapport qui pourrait intéresser
les membres de la commission.
Troisième question: Quelle suite entend-il donner à ce
rapport qui, probablement, devait contenir des recommandations?
M. Morin (Sauvé): Le rapport auquel Mme le
député fait allusion est un rapport interne du ministère
qui nous a servi à préparer le livre vert. Je ne crois pas
opportun de le rendre public pour la simple raison que c'était un
document de travail interne. Pour en avoir une idée, je pense qu'on peut
se référer au livre vert.
C'est à la suite de ces études que nous avons
décidé quelles seraient les hypothèses de travail
proposées à la population en matière de langue
seconde.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette quand même que nous ne
puissions pas en avoir une copie, mais enfin, c'est au ministre d'en
décider. Je pense que ce n'est quand même pas un rapport... Je
suppose qu'il pourrait avoir des dimensions politiques, mais c'était
vraiment dans un but de réflexion qu'il aurait pu nous être
utile.
Je voudrais maintenant demander au ministre les mesures concrètes
qu'il entend prendre, il va nous dire qu'il attend le rapport de la
consultation sur le livre vert. Ce rapport ne sera compilé ou le rapport
final ne sortira, j'imagine, comme vous l'avez dit en Chambre, que vers octobre
ou novembre, au début de l'automne. Est-ce qu'il y a des choses, des
expériences ou des projets concrets, qu'on entend mettre de l'avant
dès septembre, sinon on reportera encore d'une année le
changement ou l'amélioration des programmes relativement à
l'enseignement de la langue seconde.
M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, comme nous
savons que nous allons vers de nouveaux programmes en matière
d'enseignement des langues secondes, vers un renforcement de la qualité
de cet enseignement, qui laissait beaucoup à désirer, j'avais
déjà commencé au cours de l'année 1977-1978,
à mettre en place un dispositif qui pourrait nous permettre, par la
suite, une intervention efficace en faveur des langues secondes.
C'est ainsi que l'an dernier, nous avons engagé 190 conseillers
pédagogiques pour l'encadrement de l'enseignement des langues secondes.
Nous avons également, durant l'année passée, poursuivi le
programme de perfectionnement des maîtres à temps partiel. Nous
avons réalisé des stages d'été en Louisiane pour 98
maîtres. Nous avons continué les recherches sur l'immersion. Nous
avons poursuivi des activités interlinguistiques et 85 000
élèves y ont participé. Enfin, nous avons fait des
expériences dans certaines commissions scolaires, quant à
l'enseignement de l'anglais dès le début du niveau primaire.
Pour l'année qui vient, nous allons accroître encore les
ressources en conseillers pédagogiques, puisque nous allons leur
consacrer $1 300 000 de plus, seulement pour les conseillers
pédagogiques. Nous allons également... M. le Président,
j'entends la cloche qui sonne.
Mme Lavoie-Roux: II faut quand même continuer vos
réponses un petit peu.
M. Morin (Sauvé): Je peux terminer cette réponse
et, ensuite, nous pourrons aller voter. Nous avons prévu
peut-être est-il utile de le préciser pour l'année
qui vient, des recherches dans les commissions scolaires sur l'enseignement des
langues secondes. Nous avons prévu un montant de $400 000 de projets
autorisés et, au chapitre des innovations, un autre montant de $400 000.
Enfin, pour la coordination de tous ces projets, nous avons vu à ce que
les commissions scolaires puissent engager un contractuel et un budget de $30
000 est prévu à cet effet.
Nous avons également l'intention de maintenir les
activités dites interlinguistiques. Autrement dit, le dispositif de
l'enseignement des langues secondes se renforce en vue de l'implantation de
nouveaux programmes au cours des années qui viennent. Nous
perfectionnons les maîtres, nous engageons des conseillers
pédagogiques. Autrement dit, nous sommes en train de créer
l'infrastructure qui va nous permettre d'améliorer cet enseignement.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si on a le temps pour une autre
question.
Le ministre pourrait-il nous dire les résultats des
expériences faites cette année, comme il vient
de le signaler, dans l'enseignement de l'anglais langue seconde, en
première année, des possibilités d'immersion et quelles
sont les autres projets de recherche qu'il entend faire? Il nous dit: On
consacre $400 000 à de la recherche. Mais la recherche sur la langue
seconde, sur quels aspects particuliers va-t-elle porter?
M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas encore reçu les
résultats des recherches sur l'enseignement de l'anglais en
première année. Comme vous le savez, c'est une question
pédagogiquement délicate, difficultueuse, et je ne sais quand
viendront les résultats. Nous avons tout de même mis la recherche
en marche.
D'autre part, à la commission scolaire des Milles-Îles, une
recherche a été effectuée, avec d'ailleurs, je pense, une
aide spéciale que le ministère a fournie à cette
commission scolaire. C'est au niveau secondaire que ces expériences ont
été faites; ce sont des expériences d'enseignement de
l'anglais pendant tout un semestre.
Le Président (M. Jolivet): Je vais suspendre les travaux
le temps d'aller au vote, nous reviendrons ensuite.
(Suspension de la séance à 16 h 26)
(Reprise de la séance à 16 h 39)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, madame et
messieurs!
Au moment de se quitter, la parole était à M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): II conviendrait peut-être que
j'ajoute quelques commentaires sur les expériences qui ont
été faites ailleurs qu'au Québec, et également
quelques commentaires sur l'expérience des Mille Îles, dont
j'entretenais Mme le député il y a un instant.
Pour ce qui est des expériences faites à
l'extérieur du Québec, nous suivons de très près,
au ministère, l'évolution de l'enseignement des langues secondes,
particulièrement dans les autres provinces canadiennes et aux
États-Unis. Nous faisons cela, d'ailleurs, depuis cinq ans. Nous
continuerons de le faire parce que cela nous touche, évidemment, de
très près.
Pour ce qui est des Mille Îles, cette commission scolaire n'a pas
encore fourni le rapport final sur l'expérience qu'elle mène
conjointement avec Greenfield Park. Elle doit, incessamment, le faire. Ce
projet pourra vraisemblablement être accepté à titre
d'expérience. Nous avons participé financièrement,
d'ailleurs, à la réalisation de cette expérience pour un
montant de $20 000 en 1977-1978. Nous avons également participé,
par le biais de subventions émanant du secrétariat d'État,
à d'autres activités dans le domaine de la langue seconde, par
exemple des cours d'été en français langue secon- de
à la commission scolaire de l'agglomération de Hull. Nous avons
également pu fournir des animateurs en langue seconde dans ces
écoles primaires de Hull. Voilà ce que je voulais ajouter pour
l'instant. Peut-être Mme le député a-t-elle d'autres
questions sur les langues secondes.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais demander au ministre s'il serait
possible d'avoir la liste des projets de recherche que le ministère
entend subventionner pour l'année 1978/79 et pour lesquels il y a des
montants de $400 000 prévus, comme vous nous l'avez signalé tout
à l'heure.
M. Morin (Sauvé): On peut vous fournir la liste si vous le
désirez.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): Je ne l'ai pas sous la main...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): ... mais, peut-être, demain
matin.
Mme Lavoie-Roux: Cela va. Il y a une chose que je voudrais faire
remarquer, entre parenthèses. D'une façon générale,
quand nous demandons des choses, les gens sont assez fidèles à
nous les remettre. Mais, parfois, parce que ça retarde, nous ne les
avons pas. Alors, je voudrais au moins qu'on ne l'oublie pas, parce que c'est
intéressant. Je sais que ces choses sont publiques, il n'y a rien
de...
Le Président (M. Jolivet): Ce sera, en
réalité, mardi prochain.
Mme Lavoie-Roux: Ah oui! À moins qu'on décide de
rester demain.
M. Morin (Sauvé): Oui, à la prochaine
séance.
Mme Lavoie-Roux: Voici une autre question que je voudrais
aborder. Je sais que dans les écoles françaises du PSBGM, pas
toutes, mais dans un certain nombre d'écoles ethniques, et
peut-être la majorité là-dessus, je n'ai pas de
données je ne voudrais pas qu'on interprète ma question
nécessairement comme un plaidoyer en faveur de l'enseignement de
l'anglais, langue seconde, en première année, on enseigne
l'anglais, langue seconde, en première ou en deuxième
année. Au PSBGM. dans les écoles françaises, on enseigne
l'anglais dès la première année, je pense. La
deuxième au plus tard, de toute façon, je pense que c'est
dès la première.
Pourquoi je pose la question et je reviens sur un vieux débat? Ce
matin, on a parlé de l'intégration des immigrants, la
résistance de certains, etc., et si vous me permettez quelques exemples
que j'ai lus... enfin, j'en ai eu un, plus récemment, à mon
bureau de comté. Il m'est arrivé un citoyen d'origine portugaise,
dont l'enfant est illégalement
inscrit dans une école anglo-catholique. Or, il voulait faire
légaliser, si je peux dire, le statut d'élève
régulier de son enfant. Ce que je trouvais fort légitime. Alors,
je lui ai expliqué tous les dédales, etc., sa demande en vue de
l'admissibilité, il voulait le garder à l'école anglaise,
évidemment, mais, en tout cas, son droit d'appel, etc., et, compte tenu
des détails qu'il avait, il me semblait fort peu probable qu'il puisse
être admis à l'école anglaise. Enfin, ce n'est pas moi qui
suis le comité de l'admissibilité, mais il reste quand même
qu'on a assez de données pour le savoir. (16 h 45)
La grande objection au fait d'envoyer son enfant à l'école
française... Je lui ai même parlé des écoles. Je
vous ai dit tout à l'heure qu'il était d'origine portugaise, mais
il est d'origine italienne Saint-Philippe-Bénézy et
j'oublie l'autre nom. Il y aurait quand même cette possibilité,
parce que je me dis que ce qu'il faut dans le fond, c'est de les ramener au
secteur français et de redonner un statut d'élèves
réguliers le plus possible à ces enfants dont les familles sont
quand même ici depuis une vingtaine d'années dans certains
cas.
La grande objection, c'est qu'il dit qu'évidemment il y avait une
question de transport, cela devenait difficile pour lui, mais je n'étais
tout de même pas capable de le convaincre d'envoyer son enfant à
l'école française. Il m'a dit: Je n'aurai jamais de garantie que
mon enfant va apprendre la langue seconde d'une façon adéquate.
Il me resterait le secteur protestant français. Cela, je pense que cela
ne le... D'ailleurs, on sait qu'il y en a qui sont allés au secteur
protestant anglais ou même français, parce qu'ils pensaient y
apprendre l'anglais. Est-ce fondé? Est-ce que ce n'est pas fondé?
Leurs espoirs seraient peut-être aussi déçus, mais il reste
que, si on tient compte de la réalité des aspirations des
parents, etc., je me dis: C'est quand même un problème à
examiner de près et si on veut finir par franchir cette étape
d'intégration difficile. On l'a vu ce matin avec les chiffres qui ont
été produits il va falloir que le ministère pose des
gestes concrets. Tout ce que le ministre nous a dit, d'ajouter des conseillers
pédagogiques, enfin de créer l'infrastructure qui va permettre...
j'en suis, mais, pour les parents qui ont des enfants à l'école
aujourd'hui, allez leur expliquer que vous êtes en train de mettre les
infrastructures en marche. Allez dire cela à la majorité des
parents qui désirent mordicus que leur enfant apprenne la langue
seconde, vous n'allez pas très loin.
Je me demandais, compte tenu de ces expériences, on ne peut
même pas parler d'expériences, ce serait presque une tradition,
mais de cette habitude, dans ces écoles, d'enseigner l'anglais dans les
premières années, quand, le plus souvent, ce n'est pas la
première, si on l'a examinée du point de vue... si on a fait des
recherches sur les répercussions, chez ces enfants, de l'enseignement
et, là, souvent, c'est pratiquement une troisième langue, parce
qu'il y a le français, l'anglais et la langue d'origine. Je voudrais
savoir quelle est la position du ministre. C'est que, d'une façon, il a
condamné avec assez de véhémence et on s'en
souviendra les expériences que la CECM voulait tenter en
première année, alors qu'il l'a accusée d'improvisation.
Je suis loin d'être sûr que son jugement n'était pas un peu
émotif, d'autant plus qu'il s'agissait de quelques classes dans une
très grande commission scolaire. Mais je voudrais quand même
savoir quelle est, non pas la position du ministre sur l'enseignement du
français en première année, mais sa position sur la
nécessité, pour la population et là, je parle de la
population en général et également de la population
francophone de sentir qu'il y a des gestes véritables qui sont
posés, qu'on voie qu'on progresse quelque part. Sur ce que le ministre
vient de dire, je suis d'accord pour l'infrastructure, mais, pour les parents,
il n'y a rien de concret qui leur indique que les choses avancent.
M. Morin (Sauvé): Au cours de la tournée du livre
vert, je me suis beaucoup fait parler de cette question et, ma foi, pas
toujours dans le même sens. Beaucoup de parents, d'enseignants sont venus
revendiquer que cet enseignement ne commence qu'au niveau secondaire; un plus
grand nombre de parents sont venus demander qu'au contraire, il commence au
primaire, et certains m'ont demandé qu'il commence avant la
quatrième année, selon l'hypothèse qui est celle du livre
vert. À l'heure actuelle, nous nous trouvons devant des choix que je
vais devoir faire cet été et annoncer dans mon plan d'action
à l'automne. Je suis à faire analyser tous les questionnaires que
nous avons reçus, les 23 000 questionnaires que nous avons reçus,
tous les mémoires, pour voir où se trouve la
prépondérance d'opinions et aussi pour prendre connaissance de
tous les arguments qui sont invoqués de part et d'autre. Souvent, ces
arguments sont d'ordre pédagogique; souvent, ils débordent le
cadre pédagogique et sont d'ordre politique, par exemple.
Plusieurs commissions scolaires ont invoqué, dans le
passé, le plan de développement des langues et ont offert
l'enseignement de l'anglais avant la quatrième année du primaire
ou avant la cinquième, pardon, puisque la règle était la
cinquième. Il y en a plusieurs qui l'ont organisé en
quatrième année, quelques-unes en troisième et alors de
très rares en première année, comme dans l'Outaouais,
à Schefferville et à Fermont. Mais c'est très
limité. En bas de la quatrième année, il n'y en a que
quelques-uns.
L'automne dernier, on pensait pouvoir régler le problème
auquel Mme le député a fait allusion et qui est celui d'offrir
aux enfants des Néo-Québécois non seulement l'école
française, mais une école française dans laquelle il y
aurait une part importante d'enseignement de l'anglais. Dans cette perspective,
on se souviendra que MM. Taddeo et Montini ont fait des propositions à
la CECM, ont présenté des propositions selon lesquelles il y
aurait, dans certaines classes, un enseignement de l'anglais, langue seconde,
allant jusqu'à 72 minutes par jour, ce qui équivalait, à
peu près, au tiers du temps. Devant cette manoeu-
vre qui, à ma grande surprise a trouvé beaucoup d'appuis
au sein de la CECM, auprès des commissaires, j'ai dû intervenir et
faire parvenir à toutes les commissions scolaires du Québec une
directive intitulée: Conditions de présentation et d'approbation
des projets soumis par les commissions scolaires dans le cadre de
l'enseignement de l'anglais, langue seconde, avant la cinquième
année du primaire, parce que nous connaissons un très grave
problème qui est celui de la pénurie des professeurs d'anglais,
langue seconde.
C'est la raison pour laquelle nous avons tellement mis l'accent sur le
programme de perfectionnement des maîtres. Ce problème n'est pas
encore réglé et ce que je crains par-dessus tout, c'est un
enseignement de l'anglais, dès la première année, qui
serait plus de nature politique que de nature pédagogique et qui ferait
appel à des maîtres non qualifiés.
À l'heure actuelle, nous avons même de la difficulté
à en trouver pour un enseignement correct de l'anglais en
cinquième année et en sixième année, où il
est autorisé d'emblée. De sorte qu'avant d'autoriser de nouveaux
programmes avant la cinquième année, je désire d'abord
m'assurer que le programme est sérieux, qu'il n'est pas
improvisé, que nous avons les enseignants pour qu'il soit donné
correctement et je tiens aussi à terminer la consultation du livre vert
pour décider à quel moment sera située l'année au
cours de laquelle l'enseignement de l'anglais, langue seconde, pourra commencer
comme question de principe.
À l'heure actuelle, j'attends donc les résultats du livre
vert pour prendre des décisions. Je pense que je serai appelé
à les prendre cet été. D'ailleurs, nous étudions la
chose activement en ce moment au ministère.
Nous travaillons donc activement au sein du ministère à
mettre la main à ces décisions.
Mme Lavoie-Roux: Je vais être obligée de revenir
après parce que je n'ai pas fini. Je vais poser une autre question, si
j'ai le temps. Est-ce qu'on pourrait nous fournir la liste des commissions
scolaires, qu'elles soient protestantes ou catholiques, des écoles
ethniques privées ou publiques qui donnent l'enseignement de l'anglais
comme langue seconde avant la cinquième année? Alors, le nom des
commissions scolaires et le nombre d'enfants qui sont servis de cette
façon.
M. Morin (Sauvé): Nous pouvons certainement
répondre affirmativement à la première partie de votre
question. Pour ce qui est du nombre d'enfants, ça peut signifier des
recherches. Enfin...
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas besoin de ces réponses demain
matin. On peut en prendre note et me les faire suivre dans une semaine. Je ne
veux pas tenir tout le monde debout toute la fin de semaine,
c'est-à-dire toutes les nuits d'ici la fin de semaine.
M. Morin (Sauvé): II y en a peut-être pour plusieurs
semaines de recherches, puisqu'il y a 33 commissions scolaires qui sont dans ce
cas.
Mme Lavoie-Roux: C'est quand même assez
considérable.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais cela ne s'applique pas
nécessairement dans toutes leurs écoles. C'est pour cela qu'il y
a toute une recherche à faire.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Tout à l'heure, vous disiez que les 72 minutes qui avaient
été prévues pour l'enseignement de l'anglais, en
première année voulaient dire presque le tiers du temps
d'enseignement. Est-ce que, à l'élémentaire, le temps
d'enseignement n'est pas de 1500 minutes par semaine?
M. Morin (Sauvé): Non. La moyenne est de 1380 minutes.
Mme Lavoie-Roux: II y a des endroits où on a 1500 minutes.
Au deuxième cycle et au premier cycle, il y a une différence.
M. Morin (Sauvé): Vous n'en avez pas plus au premier
cycle. Vous en avez plutôt moins. La moyenne s'établissant
à 1380 minutes, il se peut qu'il y en ait 1500 au second cycle, mais
cela diminue évidemment le nombre de minutes au premier cycle.
Mme Lavoie-Roux: II reste que 360 minutes sur 1380 par semaine,
cela ne donne pas le tiers.
M. Morin (Sauvé): Cela peut descendre à 1260
minutes au premier cycle.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais vous n'avez quand même pas un
tiers du temps consacré à l'anglais.
M. Morin (Sauvé): Non, mais tout de même, c'est une
fraction importante du temps, vous en conviendrez. J'avais le souci, tout en
voulant faciliter le plus possible l'apprentissage de la langue seconde, de ne
pas transformer nos écoles françaises en écoles
bilingues.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que la demande avait été
faite. Je n'ai pas à défendre la proposition des personnes qui
l'ont faite à la CECM. Mais il aurait quand même fallu comprendre
que c'était une approche... Pourquoi lui étais-je très
sympathique? C'est que j'aurais favorisé cette approche au moment des
difficultés que nous avions dans la loi 22. Je trouvais que
c'était plus positif d'amener ces enfants à l'école
française, dans une période de transition, surtout qu'il y avait
des écoles qui regroupaient suffisamment d'Italiens et de Portugais
entre autres, pour qu'on puisse justement donner cet enseignement à ces
enfants, là où on pouvait les regrouper en nombre suffisant.
Je pense que cela aurait diminué considérablement le
problème des illégaux dont on parlait ce matin. Penser que cette
mesure exceptionnelle de transition conduirait à une anglicisation des
écoles françaises, je ne peux m'empêcher de dire que
c'était aller très loin dans les conclusions.
M. Morin (Sauvé): Mme le député, je ne
partage pas votre avis. Ce genre de situation tend à perdurer et finit
par faire partie des droits de l'homme, ou faut-il dire des droits de la
personne, une fois qu'on en a admis le principe. Je tiens à vous faire
observer qu'en dépit du battage publicitaire qui a entouré ces 72
minutes d'anglais, il n'y a pas eu plus d'une vingtaine d'inscriptions de la
part des parents.
Mme Lavoie-Roux: II faut quand même reconnaître, M.
le ministre, que devant l'attitude que vous avez prise, qui a été
tout à fait négative, les parents se sont dit: Si on y va
c'étaient des illégaux qui étaient dans les écoles
et qu'il fallait ramener ils vont nous repérer et après
cela ce sera fini. Il y a vraiment eu cette crainte des parents qui a
joué beaucoup. Ceux qui sont allés aux rencontres qu'il y a eu
à ce moment-là à Notre-Dame-de-Pompéi pourraient
vous en rendre témoignage et vous dire ce qui s'est passé.
Je voudrais aussi...
Le Président (M. Jolivet): Mme le député je
vous ai laissé dépasser votre temps de sept minutes.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, je continuerai après.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
sur cette question des langues secondes. J'ai relu attentivement le programme
de l'Union Nationale, alors que... (17 heures)
M. Morin (Sauvé): ... programme de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: Un beau programme, je vous en ferai parvenir une
copie demain, M. le ministre. ... on nous a reproché d'avoir
modifié notre position vis-à-vis de la liberté de choix
des parents. En relisant ce programme, je n'ai pas du tout trouvé cette
expression, liberté de choix. Je sais qu'on en a fait grand état
du côté de l'Opposition officielle, même à
l'Assemblée nationale.
M. Morin (Sauvé): En raison de sa clientèle
anglophone.
M. Le Moignan: À quelques reprises, mais il n'y a rien
dans notre programme qui parle de liberté de choix pour la langue. Il
est question de liberté de culture, ce qui est une autre affaire. M. le
ministre, en parlant de la langue...
M. Morin (Sauvé): Pourriez-vous nous expliquer la
différence que vous faites exactement entre liberté de choix et
liberté de culture? Cela m'intéresse de fouiller le
tréfonds de l'âme de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: Quand on parle de culture...
Mme Lavoie-Roux: C'était dans leur livre blanc, M. le
député.
M. Le Moignan: On pourrait revenir à cela plus tard, mais
je crois qu'il y a toute une différence M. le ministre le sait
très bien entre la langue et la culture. La culture peut englober
à la fois la langue, le milieu de vie, les traditions, les coutumes,
etc. On peut garder sa culture et en même temps posséder une autre
langue.
Quand on parle de la culture, du choix des francophones et des
anglophones de conserver leur milieu de vie. On invite les anglophones à
étudier la langue française au Québec, c'est bien normal,
bien légitime dans le contexte. Il y en a 20% qui vivent avec 80%, c'est
normal qu'ils puissent s'exprimer en français, quand on sait que dans
des milieux comme les nôtres, certains anglophones n'ont jamais appris
à parler deux mots de français au coeur de la ville de
Gaspé. La question de la culture, c'est un point, la question de langue,
c'est un autre.
M. Morin (Sauvé): Si je vous ai bien compris, l'Union
Nationale n'est pas en faveur de la liberté de choix?
M. Le Moignan: Sur la question de la langue. Je veux
préciser ce petit point au départ, parce qu'on en a fait
état dans les journaux et j'ai relu le programme. On parlait de deux
langues officielles, le français et l'anglais, mais la liberté
des parents d'inscrire leurs enfants à l'école française
ou à l'école anglaise, cela n'y a jamais figuré. On a
prétendu que le chef aurait fait des déclarations, mais je n'ai
pas de preuve de cela. Je ne juge pas le chef, je juge le programme.
Ce qui m'amène à ceci, M. le Président, c'est que
les francophones n'ont pas le choix. Ils doivent envoyer leurs enfants à
l'école française. Nous avons mentionné ce matin la
possibilité pour les francophones d'envoyer leurs enfants à
l'école italienne ou portugaise. C'est donc dire qu'en première
année, le francophone qui va s'inscrire à l'école
italienne va commencer à apprendre la langue française et la
langue italienne en même temps, si j'ai bien compris.
M. Morin (Sauvé): C'est-à-dire qu'il ne commencera
pas à l'apprendre, il va développer les connaissances de sa
langue maternelle.
M. Le Moignan: Oui, il a déjà des connaissances
acquises parce qu'il parle déjà le français.
M. Morin (Sauvé): Voilà!
M. Le Moignan: Le même enfant pourrait aussi parler
l'anglais, il pourrait être bilingue.
M. Morin (Sauvé): Cela lui ferait beaucoup à
apprendre en première année.
M. Le Moignan: Non, je ne parle pas de trois langues j'en suis
sur le français. Le petit Canadien français ou le francophone qui
s'inscrit à l'école italienne parle déjà,
maîtrise sa langue. Un enfant de cinq ou six ans possède au moins
tous les rudiments de sa langue. A-t-il un handicap en cours de route?
Sera-t-il capable de poursuivre les deux? Je n'y ai aucune objection,
j'aimerais posséder l'italien.
M. Morin (Sauvé): M. le député, vous
m'éton-nez un peu, vous parlez d'inscription d'élèves
francophones à l'école italienne?
M. Le Moignan: Oui, j'ai cru comprendre ce matin que la chose
était possible.
M. Morin (Sauvé): Ah! vous pensez au projet PELO.
M. Le Moignan: J'ai peut-être mal saisi.
M. Morin (Sauvé): Oui, c'est une interprétation un
peu large de ce que j'ai annoncé ce matin. J'ai annoncé qu'il
existerait, pour les enfants d'origine italienne, des classes de langue
italienne, de grammaire italienne, dès le niveau primaire et à
titre d'essai à l'automne, mais il n'est pas question d'écoles
italiennes..
M. Le Moignan: Non, mais je croyais...
M. Morin (Sauvé): ... il n'est pas question même de
classes italiennes. Il est question de classes françaises au sein
desquelles les petits Québécois d'origine italienne auront
accès à un enseignement de l'italien.
M. Le Moignan: Comme cela, je vous ai mal
interprété ce matin.
M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement.
M. Le Moignan: Je croyais que dans cette classe où il y
avait ce groupe d'Italiens, une minorité de francophones aurait pu s'y
joindre. Je ne voyais aucune objection à cela, mais je me posais la
question suivante: Pour l'avancement dans les études secondaires ou
autres, est-ce qu'il aurait été en état de le
maîtriser très bien? Ce n'était pas votre intention d'avoir
des classes italiennes. C'est plutôt des classes...
M. Morin (Sauvé): Non. D'ailleurs, je m'étonne que
vous n'ayez bondi, à ce moment, puisque ce que vous suggérez, en
somme, c'est que je transforme le système scolaire
québécois en système italien. Ce n'est pas du tout
l'intention du PELO.
M. Le Moignan: Non.
Mme Lavoie-Roux: On va remplacer la langue anglaise comme langue
seconde par la langue italienne.
M. Le Moignan: Non, je vous trouvais très
généreux, à ce moment, mais je sais que vous n'avez pas
l'intention d'inviter tous les Québécois à parler
l'italien. Il n'y a aucune inquiétude. Je sais que ce n'était pas
votre but, mais je trouvais...
M. Morin (Sauvé): Quoique, comme je l'ai expliqué,
au niveau secondaire, il ne serait pas malheureux que les jeunes
Québécois apprennent l'italien. Les options d'italien et de
portugais, éventuellement de grec, pourraient être ouvertes aux
jeunes Québécois.
M. Le Moignan: Oui, mais pour atteindre cet idéal...
Mme Lavoie-Roux: ... l'espagnol.
Déconcentration
M. Le Moignan:... il faut qu'ils soient dans un milieu, parce que
si on pense que nos francophones de Québec vers Matane vont
développer la maîtrise de la langue seconde anglaise, c'est un
rêve. On sait très bien qu'à cause du milieu, ils n'y
parviendront jamais, à l'exception de ceux qui vont pousser leurs
études davantage. Votre idée, je la trouvais bonne. Ce
n'était pas votre idée, mais je l'élargissais. Je me dis
que si, dans la ville de Montréal, où il y a beaucoup d'Italiens
ou de Por-tuguais, on peut compléter les deux en même temps,
à ce moment, on aurait l'avantage... puisque vous parliez des langues
classiques, le latin ou le grec, oui, le latin, en dépit de nos cinq
années d'étude en langue grecque, c'est bien difficile de le
parler, mais en langue latine, c'était plus facile. Je vous suis mieux,
je vous comprends. J'y voyais une belle possibilité pour nos jeunes
d'apprendre, à la fois, l'italien. Je pense que ce point est
réglé.
Deuxièmement, je voudrais employer une expression utilisée
en Chambre cet après-midi, la "déconcentralisation".
M. Saint-Germain: C'est un encadrement. M. Le Moignan:
Dans votre tour d'horizon...
Mme Lavoie-Roux: C'est l'encadrement de la maquette horaire.
M. Le Moignan: Au début de la semaine... L'encadrement des
Italiens et des Portuguais... Dans votre rapide tour d'horizon, M. le ministre,
au début de cette commission, vous aviez parlé justement de la
déconcentration, qui était une de vos priorités. Vous avez
mentionné deux régions pilotes. Je crois avoir retenu la
Gaspésie, Bas-Saint-Laurent et Hull.
M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement. Nous avons
inauguré la direction régionale à Rimouski il y a quelques
mois. L'autre région est l'Outaouais-Hull.
M. Le Moignan: J'aimerais que vous explicitiez davantage la
réussite, parce que vous l'avez simplement mentionnée en passant,
parce qu'il est question d'ajouter, je crois, quatre régionales de plus.
Est-ce que les résultats de votre expérience sont positifs
jusqu'à maintenant?
Mme Lavoie-Roux: Ils vont faire l'évaluation à
l'automne.
M. Morin (Sauvé): L'évaluation s'est faite,
évidemment, de façon officieuse tout au long du fonctionnement de
ces deux directions régionales et aussi des bureaux régionaux qui
existent déjà dans plusieurs régions, mais qui n'ont pas
encore le statut de direction. L'évaluation formelle sera faite au cours
des mois qui viennent. Jusqu'ici, je puis vous dire que nous sommes très
satisfaits de l'évolution de ces bureaux régionaux devenus, dans
deux cas déjà, direction régionale. En effet, cela permet
de rapprocher le ministère des besoins et des aspirations de chaque
région. Dans le cas de la direction régionale de Rimouski, nous
avons là-bas quelques dizaines de personnes qui sont implantées
dans la région et se tiennent au courant des problèmes de la
région quotidiennement. C'est cela la déconcentration, beaucoup
plus que les quatre programmes d'activités qui, eux répondent
plutôt au souci de décentralisation. Naturellement, les deux
choses sont liées. À l'avenir, je compte utiliser couramment le
néologisme créé de toutes pièces par le
député de Jacques-Cartier, cet après-midi.
Désormais, nous allons vers la "déconcentralisation".
M. Le Moignan: C'est un très bon mot.
Mme Lavoie-Roux: Ce serait peut-être plus efficace.
M. Saint-Germain: Cela fera un mot de plus, toujours.
M. Morin (Sauvé): Cela fera en plus un mot très
significatif. Je félicite le député de Jacques-Cartier,
qui a eu un moment de génie inconscient.
M. Le Moignan: Inconscient...
M. Saint-Germain: Les grands génies, vous savez, sont
toujours un peu inconscients.
Mme Lavoie-Roux: La déconcentralisation, je n'y avais pas
pensé...
M. Le Moignan: Mais, M. le ministre, je vous donnais Rimouski
comme exemple. Maintenant, est-ce qu'ils ont des pouvoirs... Ils n'ont pas
encore de pouvoirs décisionnels, jusqu'à maintenant, sur
place?
M. Morin (Sauvé): Je vais demander au sous-ministre, l'un
de ceux qui a été le plus actif dans la création de ce
pouvoir déconcentré. Il y a aussi M. Parent, qui doit être
là, le directeur... Il n'est pas là, malheureusement, mais je
vais demander au sous-ministre adjoint de vous décrire exactement ce qui
se passe dans une direction régionale comme celle de Rimouski.
Effectivement, dans les directions régionales, celle de Rimouski
en particulier et celle de Hull, l'objectif visé, c'est de faire en
sorte que tous les pouvoirs de décision qui appartiennent actuellement
au central, relativement au vécu des commissions scolaires quant
à des demandes d'autorisation, qu'il s'agisse de l'aspect
budgétaire, des équipements, des enseignements, des personnels,
l'objectif visé, c'est de faire en sorte que ça devienne des
unités administratives ayant des pouvoirs et des responsabilités
sur leur territoire.
Pour la présente année, 1977-1978, ces directions
régionales n'avaient pas encore en main ces pouvoirs, parce que
ça suppose quand même des modifications législatives pour
faire en sorte qu'elles soient investies de pouvoirs. Mais elles agissaient
comme telles, compte tenu qu'au central, l'ensemble des décisions
étaient données à la direction régionale comme si,
de facto, c'était fait. Alors, les commissions scolaires ont
transigé avec les directions régionales, tant dans le domaine
administratif, au niveau du financement, des équipements, des
personnels, qu'au niveau pédagogique, l'autorisation des enseignements,
des développements de programmes d'enseignement et des différents
services complémentaires, tels que le service aux étudiants ou
autres. Il y a eu du personnel ajouté dans les directions
régionales, personnel qui vient du central. Ce ne sont pas des postes
nouveaux dans les secteurs primaire et secondaire. C'est un déplacement
de postes du central vers les régions.
M. Le Moignan: Mais combien d'années prévoyez-vous
pour en arriver à de nouvelles mesures législatives pour
légaliser le travail, en quelque sorte, ou est-ce que vous allez
attendre l'expérience d'autres centres?
M. Morin (Sauvé): À vrai dire, les nouvelles
règles législatives ne seront peut-être pas
nécessaires dans l'immédiat. Nous pouvons faire beaucoup au plan
administratif. Nous n'avons pas eu besoin d'autorisation législative,
par exemple, pour créer les directions régionales. Il se peut
qu'éventuellement, dans la foulée du livre vert, et une fois que
nous verrons plus clair sur les critères de décentralisation et
les objets de décisions qui pourraient être
transférées aux commissions scolaires, il se peut que nous en
venions à la conclusion qu'il vaut mieux modifier la Loi de
l'instruction publique, mais ce n'est pas le cas pour l'instant. De toute
façon, cela viendrait après 1981.
M. Le Moignan: Je voudrais peut-être aborder un autre
problème.
M. Alfred: Sur le même sujet.
M. Le Moignan: Une question, oui?
M. Alfred: M. le ministre, moi aussi, je suis très en
faveur des directions régionales, mais j'aurais voulu, par
exemple...
M. Morin (Sauvé): Vous en avez une excellente dans votre
région.
M. Alfred: D'accord, oui, mais tout ce que je veux, par exemple,
c'est que nous soyons très prudents dans l'établissement des
directions régionales, même si ça fonctionne très
bien, parce que je veux que cela soit au moment ou les parents sont
réellement conscients de ce qui se passe au niveau de ces directions
régionales. On peut bien avoir des directions régionales, mais il
faut aussi changer les mentalités, changer la façon d'agir, la
façon de se comporter, et je ne voudrais pas que les directions
régionales se comportent avec des dimensions traditionnelles ou autre
chose, avec les mêmes comportements que ceux qu'elles avaient dans le
passé. C'est très beau en soi, je voudrais que ça se
continue, que les décisions se prennent, bien sûr, au niveau du
milieu, mais je voudrais que les décisions soient réellement
prises par le milieu, en respectant les attentes et les besoins du milieu. (17
h 15)
M. Morin (Sauvé): Je puis vous dire, M. le
député, que ce n'est pas par hasard que les premières
directions régionales ont été créées dans
deux régions, dont l'une en particulier a connu beaucoup d'animation
dans le passé. C'est celle du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie.
Cependant, si nous devions attendre que le milieu vienne nous réclamer
à cor et à cri de créer ces directions régionales,
il se pourrait que nous attendions longtemps. C'est la raison pour laquelle il
faut quelquefois devancer légèrement le milieu. Le seul fait de
créer des directions régionales peut amener une meilleure
participation des grands agents de l'éducation dans le milieu. C'est
dans cet esprit que nous le faisons, mais je puis vous assurer que nous
n'implantons pas de direction générale avant que le moment ne
soit mûr pour le faire.
Questions générales
M. Le Moignan: II est vrai que votre gouvernement a certainement
progressé du côté de l'enseignement religieux, de
l'enseignement moral. Dans votre livre vert, vous mentionnez, vous l'avez
indiqué...
M. Saint-Germain: Je ne voudrais pas importuner le
député, mais est-ce qu'on reste sur le même sujet ou si on
peut dévier légèrement?
M. Le Moignan: Je pense qu'on m'avait alloué 20
minutes.
Le Président (M. Jolivet): II a 20 minutes; s'il veut
aller au deuxième pour combler ses 20 minutes, il n'y a pas de
problème.
M. Saint-Germain: On pourra revenir sur ce sujet?
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Le Moignan: Je ne crois pas utiliser mes 20 minutes, de toute
façon.
En plus, cette année, au point de vue de la pastorale, au
primaire, je crois que c'est un très grand progrès. Mais il y a
une question qui me chicote et qui me tracasse un peu, ce sont les jeunes qui
sont exemptés de l'enseignement religieux. Ce n'est peut-être pas
tragique dans des milieux comme le nôtre ou peut-être dans une
école où il y a trois, quatre ou cinq enfants qui,
malheureusement, arpentent les corridors, parce qu'on n'a pas d'organisation.
J'ai aussi rencontré des parents des milieux urbains qui ont des
problèmes aussi. Je crois que cela doit être l'une de vos
préoccupations. Dans une école où les inscriptions sont
nombreuses, il y a 25, 30, 40 ou 50 enfants peut-être moins
est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de leur organiser une classe
d'activités spéciales ou un enseignement, non pas religieux, mais
social ou moral? Ce n'est peut-être pas facile. Je ne parle pas de nos
milieux, c'est presque impensable, mais là où les écoles
sont plus importantes, où les parents demandent peut-être un
pourcentage plus élevé de la dispense de cet enseignement
religieux ou moral?
M. Morin (Sauvé): Au cours de la tournée du livre
vert, j'ai reçu de très nombreuses plaintes au sujet de
l'exercice de ce droit d'exemption. Particulièrement en ce qui concerne
les élèves. De surcroît, des associations comme l'AQADER,
qui défendent le droit à l'exemption, sont venues nous dire que
ce droit n'est pas effectivement respecté dans la majorité des
cas.
Cet hiver, devant le nombre de plaintes que nous recevions, nous avons
créé, au sein du ministère, deux comités internes,
pour étudier l'exercice du droit d'exemption, pour le rendre plus
efficace au niveau des commissions scolaires, pour faire en sorte que cela ne
corresponde pas à des promenades dans le corridor ou à des
séances à la bibliothèque, mais que cela corresponde,
selon d'ailleurs les règlements du comité catholique, à un
enseignement moral, ce qu'on appelle l'éducation morale.
L'autre comité, le second, cherche les moyens de mieux
équiper les enseignants appelés à donner cet enseignement
d'éducation morale.
Au cours des mois et des années qui viennent, j'ai
constaté, durant la tournée du livre vert, qu'il y aura beaucoup
à faire pour que ce droit à l'exemption soit respecté et
fasse l'objet d'un enseignement équivalent. Car les parents qui
demandent l'exemption ont pour souci, et nous l'ont fait savoir, de faire
donner à leurs enfants un enseignement moral.
M. Le Moignan: Est-ce que vous avez des statistiques
jusqu'à maintenant? Cela peut représenter quel pourcentage?
M. Morin (Sauvé): Jusqu'ici, les nombres sont
infinitésimaux, mais, si vous le désirez, nous pouvons faire une
recherche. Il faudra que nous la fassions auprès des commissions
scolaires pour tenter de vous dire combien il y a d'élèves ou de
parents qui demandent l'exemption, peut-être même un des deux
comités internes a-t-il ces chiffres. C'est bien possible. Nous l'avons
noté, M. le député. Lorsque j'aurai la réponse, je
vous la communiquerai.
M. Le Moignan: Vous avez fait état, dans votre
exposé d'ouverture, de 20 000 ou 30 000 questionnaires, le chiffre n'a
pas d'importance...
Mme Lavoie-Roux: 23 000.
M. Le Moignan:... 23 000. Il s'agit de la valeur des
questionnaires, pas du questionnaire comme tel, mais de la valeur des
réponses. À certains endroits, une personne est allée,
elle a réuni 100 ou 200 parents, ils ont pris le questionnaire en main,
ils étaient pressés, elle leur a dit: Voici comment
répondre. Vous avez un choix entre cinq, alors, faites un X sur le
troisième. Elle était pressée, il n'y a pas eu de question
et elle est disparue. Sous toutes réserves, cela s'est fait dans deux ou
trois cas qu'on a portés à mon attention. Je me dis, à ce
moment-là, quelle est la valeur du questionnaire quand on indique... je
ne veux pas dire que les 23 000... Il y a toujours des exceptions, mais...
M. Morin (Sauvé): Vous me donnez vous-même ces
exemples sous toutes réserves. J'aimerais bien que vous les
précisiez parce qu'on ne peut pas, à l'occasion de rumeurs
énoncées sous toutes réserves, juger d'une vaste
opération qui a entraîné la participation de plusieurs
dizaines de milliers de personnes, puisque, pour beaucoup de questionnaires, la
participation moyenne a été de dix personnes.
M. Le Moignan: J'ai un ou deux cas où les parents m'ont
affirmé: On n'a pas eu le choix, on n'a pas pu poser de questions, le
monsieur était pressé. Il a dit: Répondez ici,
répondez ici. Quand on ne savait pas, il a dit: Laissez faire.
M. Morin (Sauvé): Ce qui s'est produit, c'est que
certaines associations qui défendent des droits spécifiques,
notamment pour la confession-nalité, ont souvent procédé
de la sorte. Ils ont réuni des gens, ils leur ont fait remplir des
questionnaires. Mais nous avons une idée d'où peuvent venir ces
questionnaires et je pense qu'on va tenter d'en tenir compte, mais, sur un
nombre de 23 000, cela ne peut pas être la majorité, vous
comprenez. C'est un nombre infime de groupes qui ont procédé de
la sorte.
M. Le Moignan: Non, je vous l'ai dit, mais je sais que cela s'est
fait.
M. Morin (Sauvé): Vous n'êtes pas le premier
à m'en parler d'ailleurs.
Mme La voie-Roux: Moi aussi, j'ai eu des exemples, M. le
ministre, que les choses se sont passées comme cela et pas
nécessairement en faveur de groupes de confessionnalité. Il y en
a eu dans ce cas-là, je l'admets avec vous, mais il y a aussi d'autres
groupes qui voulaient... Vous savez, chacun essaie de faire valoir ses
idées et il y a eu même des réunions très houleuses
où on a presque essayé de boycotter les séances.
M. Le Moignan: Dans les exemples que j'apporte, ce n'était
pas des types qui voulaient défendre l'école catholique. Ce ne
sont pas du tout des membres d'associations du genre. C'est quelqu'un qui
passait, c'était en Gaspésie, j'ai oublié les noms; je
pourrais peut-être les retrouver, mais cela ne change rien, en somme,
à la valeur générale.
M. Morin (Sauvé): De toute façon, nous avons voulu
faire compléter ces questionnaires par un sondage qui est fait de
façon scientifique, avec échantillonnage et questions à
l'appui, qui nous donnera des données complémentaires. Autrement
dit, nous ne serons pas à la merci d'un seul instrument, mais nous avons
voulu les multiplier pour nous donner une idée de ce que le milieu
pense. L'instrument le plus important, pour autant que je suis concerné,
c'est la tournée, qui me permet de rencontrer directement les principaux
agents d'éducation et, en tournée, jusqu'ici, j'ai
déjà reçu 400 mémoires et je m'apprête
à en recevoir encore une centaine au mois de juin. Donc, en tout et
partout, j'aurai moi-même, personnellement, entendu quelque 500
mémoires. Je vous assure que ce contact direct avec la population est
éminemment salutaire.
M. Le Moignan: M. le Président m'indique, je pense, que
mon temps tire à sa fin. Nous venons de parler de lait spirituel, je
voudrais aborder encore le sujet du lait, la même question du lait.
On a fait allusion, à l'Assemblée nationale cet
après-midi, à la distribution du lait dans les écoles.
C'est commencé, vous prévoyez atteindre cette année 350
000 jeunes. Est-ce que ceci se fait à la demande des commissions
scolaires? Je sais que, dans notre région, peut-être parce que le
lait vient d'en dehors, il y a très peu de commissions scolaires qui
procurent cet avantage à leurs jeunes. Est-ce que vous procédez
selon un plan établi pour couvrir la province ou si ce sont les premiers
qui demandent qui sont les premiers servis?
M. Morin (Sauvé): Un instant, je vous prie. Nous cherchons
une réponse précise à vous donner.
Le choix des commissions scolaires est fait par une équipe du
ministère de l'Éducation et on se base essentiellement sur la
richesse du milieu, sur ce qu'on a appelé la carte de la
pauvreté, l'étude qui a été faite des milieux
défavorisés, pour choisir d'abord les commissions scolaires dont
la
population en avait le plus besoin. C'est le premier critère de
choix. Le deuxième critère, c'est de compléter la
distribution, pour les commissions scolaires déjà choisies dans
un territoire donné. Il y avait des populations qui n'en recevaient pas
encore, parce que la première opération a été
restreinte. Cela a été de compléter les milieux
déjà choisis dans un premier temps.
Le critère de base, c'est d'abord d'identifier les milieux
défavorisés pour faire la distribution du lait dans les
écoles.
M. Le Moignan: Le nôtre est déjà
identifié depuis longtemps, est-ce qu'il se donne beaucoup de lait dans
le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie?
M. Morin (Sauvé): Nous pouvons peut-être vous donner
des chiffres plus précis.
M. Le Moignan: Plus tard.
M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas donner simplement des
réponses vagues.
M. Le Moignan: Cela ne presse pas, ça peut venir la
semaine prochaine.
M. Morin (Sauvé): Nous pouvons vous trouver ça.
Mais sachez, M. le député de Gaspé, que, d'ici septembre
1981, nous avons l'intention, c'est du moins notre objectif, de couvrir 100%
des clientèles scolaires.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau avait demandé la parole.
M. Alfred: C'était pour compléter un peu la
question qu'avait touchée le député de Gaspé
concernant le formulaire qui a été envoyé aux parents.
Personnellement, j'ai participé à une rencontre où a
été invité un certain philosophe, professeur à
l'Université de Montréal, pour parler aux parents du livre vert.
Ce qui m'a le plus surpris, premièrement, je suis catholique d'abord et
pratiquant ensuite, en même temps, c'est que ce philosophe professeur
délégué par les commissaires de Montréal est
arrivé dans l'Outaouais, a rencontré douze parents...
Mme Lavoie-Roux: Un professeur de Montréal?
M. Alfred: Oui, de Montréal, un philosophe qui reste
à Montréal.
Mme Lavoie-Roux: II n'a pas été
délégué par les commissaires de Montréal.
M. Alfred: En arrivant dans l'Outaouais; malheureusement, ce
monsieur a pris le temps de tenter de démolir le livre vert. Il n'a pas
fait la différence entre un livre vert et un livre blanc, d'une part.
D'autre part, j'étais très surpris de voir comment il cherchait
à mettre en doute les intentions mêmes du ministre dans ce livre
vert.
Ma présence, heureusement, a corrigé les choses...
Mme Lavoie-Roux: Je n'en doute pas.
M. Alfred: ... et troisièmement...
Mme Lavoie-Roux: Vous aviez un allié.
M. Alfred: ... c'est vrai d'ailleurs. Troisièmement, ce
qui m'a le plus surpris, c'est de voir ce gars démolir sans scrupule les
courants pédagogiques qui peuvent quand même inspirer les
théoriciens de l'éducation pour pouvoir modifier certains
rapports de l'enseignement. Malheureusement, les parents étaient
là et tout le monde acceptait ce que monsieur disait.
Premièrement, il n'était pas question... Le premier point
qui consistait, bien sûr, la première hypothèse
était d'emblée acceptée. La deuxième
hypothèse, il fallait d'emblée la rejeter et la troisième
aussi. Donc, c'était sans discussion; les parents devaient accepter la
première et, sans discussion, rejeter la deuxième. J'ai
trouvé personnellement, pour un catholique, qu'il manquait d'ouverture.
J'ai repris effectivement, j'ai ajouté que le ministre de
l'Éducation était catholique pratiquant et moi aussi, qui y
assistais, que j'étais un catholique pratiquant, mais que nous avons
beaucoup de respect pour les autres.
C'est regrettable que ce gars qui est arrivé dans l'Outaouais,
ait adopté ce ton pour faire remplir les formulaires. (17 h 30)
M. Morin (Sauvé): Évidemment, les questions
d'éducation tiennent aux tripes des gens. C'est bien
compréhensible, puisqu'il s'agit des enfants, il s'agit de l'avenir.
Cela ne tient pas seulement à l'esprit et au coeur. Cela prend aux
tripes. Il ne faut pas s'étonner que le livre vert ait mobilisé
beaucoup de citoyens de toutes les tendances. C'était d'ailleurs
destiné précisément à un grand débat. Chacun
défendait ses couleurs. C'était bien normal. Je ne pense pas
qu'il y ait lieu de s'en scandaliser. Mais, bien sûr, c'est la
responsabilité du ministre de l'Éducation de trouver le
raisonnable à travers toutes ces discussions. Voilà qui est plus
compliqué.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Si je ne m'abuse, on a mentionné pendant
la discussion qu'il y avait une pénurie de professeurs de langue
anglaise comme langue seconde. Ai-je raison?
Mme Lavoie-Roux: C'est ce que le ministre a dit.
M. Saint-Germain: II y avait une pénurie de professeurs de
langue anglaise.
M. Morin (Sauvé): De langue seconde, de professeurs
d'anglais, langue seconde.
M. Saint-Germain: Cela explique pourquoi, je suppose, il y a tout
de même des professeurs qui enseignent l'anglais langue seconde et qui ne
connaissent pratiquement pas la langue.
M. Morin (Sauvé): II y a d'autres raisons qui peuvent
être dues au fameux système du "bumping", comme on l'appelle, et
à la permanence, qui fait que, pour protéger un emploi,
quelquefois, on envoie un professeur enseigner ce pourquoi il n'était
pas spécialisé. C'est un problème sur lequel nous nous
penchons à l'heure actuelle, dans la perspective des prochaines
négociations.
M. Saint-Germain: Le ridicule de toute l'affaire, c'est
exactement cela. Vous allez dépenser des centaines de milliers de
dollars, dépasser le million de dollars, probablement, pour
étudier les questions pédagogiques, les techniques
pédagogiques, pour enseigner l'anglais langue seconde.
M. Morin (Sauvé): C'est de l'argent pour le
perfectionnement.
M. Saint-Germain: C'est de l'argent pour le perfectionnement.
Vous allez tout encadrer cela, encore à coups de centaines de mille
dollars et vous allez déconcentrer et décentraliser cela. Mais il
reste qu'il y aura dans le réseau des gens qui enseignent l'anglais et
qui ne le connaissent pas. Mais, dans un système centralisé comme
on a au niveau de l'éducation dans le Québec, ce sont des choses
aussi ridicules que cela qui existent.
Comment voulez-vous que les parents aient une certaine confiance,
à I'heure actuelle, dans ce réseau? Si le ministre disait
à la population...
M. Morin (Sauvé): C'est un lourd héritage.
M. Saint-Germain: II faut que les élèves de langue
anglaise qui terminent leurs études, au moins au niveau du cégep
et on pourrait aller jusqu'au niveau secondaire puissent
connaître assez d'éléments de la langue anglaise, pour au
moins pouvoir converser, lire un journal ou un livre en anglais, et vice versa
pour l'autre réseau. Nos jeunes, au niveau du cégep, devraient
être bilingues jusqu'à un certain point.
M. Morin (Sauvé): Trilingues, tandis que vous y
êtes.
M. Saint-Germain: Non, restons au mot "bilingue", on a tellement
de difficulté à être bilingue, on va laisser tomber les
trois langues, si vous voulez, pour le moment.
M. Morin (Sauvé): Le problème, c'est que nous
n'avons même pas les ressources pour cela.
M. Saint-Germain: Si le ministre pouvait nous dire aujourd'hui:
On va chercher où sont ces professeurs qui enseignent l'anglais et qui
ne connaissent pas cette langue. On va se débarrasser d'eux, et jusqu'au
dernier. Ce serait un langa- ge que la population comprendrait. La population
dirait: On a au moins un patron dans le système.
M. Morin (Sauvé): Je pense que vous devriez demander
à votre voisine, ancienne présidente de commission scolaire, ce
qu'elle en pense.
Mme Lavoie-Roux: J'appuierais ce que le
député...
M. Saint-Germain: C'est la vérité pure et
simple.
Mme Lavoie-Roux: J'y reviendrai.
M. Saint-Germain: S'il y avait, dans ce système, un
patron, un leadership quelque part.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour
répondre au député de Jacques-Cartier, ce n'est pas pour
rien que nous tentons de donner aux enseignants qui sont responsables de cet
enseignement l'occasion de se perfectionner. Ce n'est pas pour rien que nous
mettons dans les réseaux, à la disposition des commissions
scolaires, des conseillers pédagogiques de plus en plus nombreux qui,
eux, sont qualifiés. C'est pour aider les enseignants à mieux
faire leur travail à travers tout le réseau.
Si on s'en tenait à une décentralisation qui remettrait
à chaque commission scolaire ce problème, il y a des
régions entières du Québec qui ne trouveraient pas un seul
professeur d'anglais. C'est notre responsabilité, au gouvernement, de
nous assurer que sont mis à la disposition de tous les professeurs, dans
toutes les régions, des occasions de se perfectionner.
Pour le reste, c'est bien beau de traiter toutes les choses à
coups de hache, mais il y a une convention collective signée par
l'ancien gouvernement et, pour autant que je suis concerné, je suis
lié par cette convention collective, comme j'étais lié par
la loi 22.
M. Saint-Germain: Mais, au moins à la prochaine
convention, M. le ministre, est-ce que vous allez insister...
M. Morin (Sauvé): Oui, nous allons...
M. Saint-Germain: ... lors des négociations afin que ces
choses n'existent pas? C'est contre l'intérêt public que cela
existe.
M. Morin (Sauvé): Je peux vous répondre de
façon très directe, M. le député, c'est un de mes
soucis et nous allons tenter de créer un champ pour l'enseignement de
l'anglais. Est-ce que la partie syndicale l'acceptera d'emblée, cela
reste à voir, mais ce sera certainement l'un de nos soucis que de
créer un certain nombre de champs qui n'existent pas à l'heure
actuelle.
M. Saint-Germain: Cela le sera peut-être, mais quel
résultat aurez-vous? Qu'arrivera-t-il lors des prochaines
négociations?
M. Morin (Sauvé): J'espère que ce seront des
résultats...
M. Saint-Germain: Cela va se faire en cachette entre les
représentants du gouvernement et les représentants des syndicats.
Il n'y a personne qui sera au courant de l'évolution des
discussions...
M. Morin (Sauvé): Bah!
M. Saint-Germain: ... et à un moment donné,
qu'est-ce qui va nous arriver?
M. Morin (Sauvé): Bah!
M. Saint-Germain: La population aura une solution au
problème.
M. Morin (Sauvé): Vous jugez.
M. Saint-Germain: Là, il va avoir le contrat.
M. Morin (Sauvé): Vous jugez selon les manières de
faire de l'ancien gouvernement, M. le député.
M. Saint-Germain: C'est toujours du pareil au même, M. le
ministre. Il ne faut pas s'en décourager. Au niveau de
l'éducation...
M. Morin (Sauvé): J'espère bien qu'on va arriver
à améliorer quand même un peu la situation.
M. Saint-Germain: ... on étudie, on recherche, on change
la procédure. Il faut y aller doucement, il faut protéger ses
arrières, il faut protéger ses intérêts politiques,
il faut protéger ses intérêts pécuniaires. Tout le
monde se protège...
M. Morin (Sauvé): Vous avez appris cela au Parti
libéral?
M. Saint-Germain: ... mais les enfants ne sont jamais
protégés. Ce sont les derniers qui arrivent, il n'y a rien qui
passe.
M. Morin (Sauvé): C'est le contraire et, grâce au
livre vert justement, nous essayons de remettre l'intérêt de
l'enfant au centre de nos préoccupations. Ce que vous venez de nous
dire, M. le député, correspond...
M. Saint-Germain: Cela fait...
M. Morin (Sauvé): ... sûrement à ce qui
existait sous l'ancien gouvernement. Il ne faut pas en faire un critère
de conduite pour tous les gouvernements à venir.
M. Saint-Germain: Des livres verts, des livres blancs, des livres
multicolores, cela existe depuis... On étudie, au ministère de
l'Éducation, depuis le rapport de la commission Parent.
M. Morin (Sauvé): II y a eu un livre blanc sur la langue
au Québec. Maintenant, il y a une Charte de la langue
française.
M. Saint-Germain: On a étudié toutes sortes
d'affaires, les méthodes globales, toutes sortes de patentes. On
étudie, cela n'a pas de bon sens.
M. Morin (Sauvé): Ah oui! mais...
M. Saint-Germain: Les choses les plus concrètes, les plus
visibles, les plus évidentes...
Mme Lavoie-Roux: C'est ce que le ministre de la consommation a
dit.
M. Saint-Germain: On n'a pas besoin de faire de grandes
études pour savoir que quelqu'un qui enseigne l'anglais et qui n'en
connaît pas la langue ne fera jamais un bon professeur d'anglais...
M. Morin (Sauvé): M. le député, il ne faut
pas...
M. Saint-Germain: Le commun des mortels sait cela.
M. Morin (Sauvé): ... non plus tomber dans le simplisme.
Il y a beaucoup de professeurs qui enseignent l'anglais qui ne le connaissent
pas bien, mais qui ont des rudiments et qui même le parlent quelque peu.
Il s'agit de leur donner l'occasion de se perfectionner.
M. Saint-Germain: Vous allez avoir de la misère à
perfectionner un professeur d'anglais qui ne connaît pas la langue
anglaise. Premièrement, vous serez obligé de commencer par la lui
enseigner.
M. Morin (Sauvé): C'est justement l'objet du programme de
perfectionnement. Vous faites là une bien grande découverte.
M. Saint-Germain: Vous devrez, après cela, lui donner des
éléments de pédagogie pour pouvoir enseigner ce qu'il
sait.
M. Morin (Sauvé): Normalement, il a déjà des
éléments de pédagogie, puisqu'il est enseignant.
M. Saint-Germain: Lorsqu'il sera rendu là, il sera
prêt à prendre sa retraite et un autre va arriver en
arrière. C'est simpliste tout ce que je dis là.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Saint-Germain: C'est simpliste.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Saint-Germain: Mais ce qu'il y a de complexe, c'est le
système qui est complexe. Dans un système aussi complexe, les
idées simplistes n'ont jamais leur place, parce qu'une idée
simple n'en-
tre pas dans le système. C'est beaucoup trop
compliqué.
M. Morin (Sauvé): L'Idée simple, oui.
M. Saint-Germain: L'idée la plus simple dérange
tout le monde. Écoutez une minute, on ne peut pas entrer cela dans le
système.
M. Morin (Sauvé): M. le député, une
idée simple peut faire son chemin, une idée simpliste,
rarement.
M. Saint-Germain: On ne jouera pas sur les mots, cela ne donne
rien, monsieur. Jouer sur les mots...
M. Morin (Sauvé): Depuis tout à l'heure, vous nous
faites part d'idées passablement simplistes qui n'arrangent rien.
M. Saint-Germain:... ne règle aucun problème au
niveau de l'éducation. Disons une idée simple. Comprenez-vous?
Quant à mon propos, vous allez voir que lorsque vous viendrez rendre
compte de votre administration au niveau du public, le public n'est pas si
imbécile. Ce sont des choses qu'il connaît, qu'il sait, qu'il
comprend. Il va en tenir compte.
M. Morin (Sauvé): Je suis tout à fait prêt
à rendre compte de mes actes devant la population. D'ailleurs,
l'Assemblée nationale nous donne l'occasion de le faire tous les jours,
encore aujourd'hui, et je continuerai à rendre compte de mes actes.
M. Saint-Germain: II y a des pays...
M. Morin (Sauvé): Si la population n'est pas contente de
la façon dont nous gouvernons, il va nous arriver ce qu'il vous est
arrivé.
M. Saint-Germain: La même chose et, de plus, c'est à
la veille d'arriver. Ici, nous sommes du même avis.
M. Morin (Sauvé): Cela, nous verrons.
M. Saint-Germain: L'enseignement des langues, ce n'est pas
nouveau. Il y a des pays, la Belgique, la Suisse... Enfin, si vous êtes
un peu en contact avec la population du Québec, surtout les
immigrés, vous avez des gens qui savent parler deux ou trois langues
couramment, et ils ont appris cela à l'école. Il devrait exister
des façons dans le monde occidental d'enseigner l'anglais ou une langue
seconde. Ce n'est pas du nouveau. C'est vieux comme les hommes. Est-ce que le
ministère s'est intéressé à observer ce qui se
passait dans ces pays?
Mme Lavoie-Roux: C'est depuis la tour de Babel.
M. Morin (Sauvé): Bien sûr. J'aimerais beau- coup
vous voir déployer le même enthousiasme pour l'enseignement du
français qui, lui aussi, laisse à désirer, M. le
député. J'aurais pensé que vous nous feriez
également quelques représentations de ce côté. Pour
ce qui est de l'anglais langue seconde, nous avons effectivement suivi ce qui
se fait dans d'autres pays. Nous sommes au courant de certaines recherches en
Grande-Bretagne, notamment, qui nous porteraient à croire qu'il vaut
mieux retarder l'enseignement de la langue seconde au secondaire, parce que ces
études tendent à montrer que l'apprentissage trop jeune d'une
langue seconde crée de la confusion mentale.
M. Saint-Germain: ... aurait bien pu vous parler.
M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas si vous avez appris la
langue seconde très jeune, M. le député?
M. Saint-Germain: On ne fera pas l'histoire du Québec,
monsieur, mais seulement, il y a des choses simples, comme vous dites. Je peux
vous parler simplement, si vous voulez, de la question de I'éducation en
langue française.
M. Alfred: II y a du simplisme aussi.
M. Saint-Germain: J'ai résolu le problème de mes
enfants, parce que j'ai fait exactement comme vous. J'ai envoyé mon fils
au collège Stanislas. D'ailleurs, c'est là que j'ai appris
à vous connaître. Vous étiez pour moi un parfait inconnu;
je me souviens très bien, lors d'une assemblée de
parents-maîtres, que vous aviez soutenu les droits des Canadiens
français, au Stanislas, vis-à-vis de nos partenaires
français, exclusivement. Vous vous souvenez très bien de cela,
cela fait déjà quelques années. Cela n'a pas résolu
le problème du Québec. Une institution comme le Stanislas a
résolu le problème des langues, imaginez-vous. On y enseigne un
excellent français. Probablement que cela vous a marqué. Ces gens
ont eu la simple idée d'aller chercher à Londres des professeurs
d'anglais. Ce sont des idées simples. Avec des idées tout
à fait simples, ils ont réussi à se bâtir un
prestige, imaginez-vous donc; tous les élèves, même dans
les quartiers les plus pauvres, voudraient aller au Stanislas. Qu'est-ce que
vous voulez! Seulement, ces idées toutes simples des autorités du
collège Stanislas, c'est bien trop simple pour entrer dans le
système d'enseignement du Québec. On a un système
d'enseignement beaucoup trop compliqué pour cela.
M. Morin (Sauvé): II y aurait une idée simple qui
mérite d'être explorée, M. le député, et qui
serait, non pas d'aller chercher des enseignants à Londres, puisque nous
en avons tout de même en surplus ici, du côté
anglophone.
M. Saint-Germain: ... un autre, mais c'est simple. Allons, je
vous écoute.
M. Morin (Sauvé): Nous pourrions sans dou-
te il faudrait voir, évidemment, à quelles
conditions, dans quelles circonstances nous pourrions peut-être
faire en sorte que des enseignants francophones enseignent le français
à l'école anglaise et vice versa. Ce serait une idée
simple, du moins au premier énoncé; elle a déjà
fait l'objet de démarches sans grand succès. Je ne pense pas,
cependant, qu'on doive l'abandonner. Au cours de l'année qui vient,
j'aimerais explorer cette possibilité avec la partie syndicale.
M. Saint-Germain: Mais cette idée est tout à fait
simple, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Mais ça, c'est une idée
simple...
M. Saint-Germain: Vous ne l'avez pas inventée.
M. Morin (Sauvé): ... mais pas trop simpliste.
M. Saint-Germain: Vous ne l'avez pas inventée. Moi, j'ai
entendu émettre ces opinions dans mon comté par d'humbles
citoyens, sur le coin de la rue, dans une discussion. Vous dites qu'on a fait
des essais, je n'en doute pas. Vous avez dit que les idées simples
faisaient souvent leur chemin. Cela a l'air de prendre du temps, parce qu'il
n'y a rien de résolu encore à ce point de vue. (17 h 45)
M. Lacoste: Le Parti libéral n'en a jamais fait, par
exemple.
M. Saint-Germain: Mais c'est pourtant simple.
Mme Lavoie-Roux: II en a fait autant que ce qu'il y a
présentement.
M. Alfred: M. le Président...
M. Lacoste: Qu'est-ce que vous avez fait, vous autres?
M. Saint-Germain: Si tout ça ne se fait pas, c'est qu'il y
a des gens ou des groupes de gens qui ont des intérêts à
conserver. Tout le monde sait ça et tout le monde admet ça, et il
n'y a jamais eu, au-dessus de ces gens-là, des hommes assez forts, assez
de leadership, que ce soit au niveau des gouvernements ou au niveau des
ministres, des hommes capables de vendre ces opinions, d'aller chercher l'appui
de la population pour faire passer ces idées toutes simples dans le
système et arriver avec des conclusions pratiques qui ne coûtent
pas des millions, mais qui sont extrêmement efficaces. C'est ça
que la population attend. La population ne s'attend pas à des livres
verts, à des études. Le monde en a soupé de ces
choses.
Je n'ai absolument rien contre le fait qu'on étudie. On doit
toujours étudier, mais qu'on ne se serve jamais d'études pour
mettre de côté des solutions tout à fait simples, parce
qu'on s'est trop servi de ces arguments dans le passé.
Vous savez, pour un homme qui veut être im- mobile, pour un homme
qui est encarcané, qui ne peut pas bouger sans heurter les
intérêts de qui que ce soit ou de quelqu'un, c'est tout à
fait simple de former un comité, c'est classique, d'ailleurs, pour faire
des études, et on part. On va se chicaner, à savoir si on doit
enseigner le français en troisième, en quatrième ou en
première année. Qu'on fasse des recherches ou des études
pour savoir en quelle année on doit l'enseigner au point de vue
pédagogique, rien de mal, mais, pendant qu'on fait ça, qu'on ne
fasse rien, c'est absolument catastrophique.
On aimerait que vous preniez, sur des sujets comme ceux-ci, des
positions claires, au moins pour nous dire où vous allez. Vous savez,
c'est bien beau, on ne peut pas blâmer un ministre de faire le tour de la
province et d'entrer en contact avec les populations, c'est normal. Mais comme
on sait que le ministre n'est qu'un homme, sur 100 000 qui sont
intéressés à gagner leur vie dans l'éducation,
c'est bien peu. Lorsqu'on sait la limite de ses décisions, c'est bien
peu, et surtout lorsqu'on sait à quelle vitesse, au Québec, les
ministres de l'Éducation passent, on peut se demander, même un
professeur, jusqu'à quel point ça peut être pratique. C'est
très satisfaisant pour le ministre, le temps qu'il est là, (je
savoir ce qui se passe. C'est gratifiant. Cela lui donne du "pep". Tout
ça, qu'est-ce qu'il en a comme résultat? Il n'y a jamais eu de
miracle, entre vous, moi et nous deux! C'est ça, la vie, que
voulez-vous? C'est la raison pour laquelle j'ai insisté, hier, pour la
"décentra-tion" il ne faut pas que je me trompe...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Saint-Germain: Vous riez de ça?
Mme Lavoie-Roux: Non, décen...
M. Saint-Germain: Non, la décentralisation, voyons donc!
C'est pour ça que je vous dis que tous ces problèmes ne se
résoudront pas, il n'y aura pas de solution autrement. C'est là
la solution, mettre les décisions au niveau des autorités
locales, pour toute décision qui peut être prise localement. Il y
a moyen de faire cela et de rendre ce système démocratique de
façon que les gens sachent où sont les responsabilités.
Encadrez ce que vous voulez ou déconcentrez ce que vous voulez, cela ne
changera pas grand-chose dans cinq ou dix ans. Il faudra nécessairement
en arriver à décentraliser le système et laisser les
parents prendre leur décision. Tant que vous ne serez pas rendus
là, il n'y aura pas de miracle qui va se faire au Québec. Pas
parce que la population ne veut pas payer... On sait combien la population du
Québec a accepté de se faire taxer à la limite pour
améliorer son système d'éducation. S'il y a eu des
améliorations sensibles? Certainement. Ceux qui sont de notre âge
l'ont constaté; on ne l'a pas constaté par des lectures
prolongées, on l'a constaté dans la rue, de visu, terre à
terre. Mais au point où nous en sommes, avec les sommes dont nous
disposons et que nous dépensons, nous commençons à sentir
que les résultats laissent énormément à
désirer.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): II y a bien des points avec lesquels je
me trouvais d'accord dans ce qu'a dit le député de Gaspé,
notamment lorsqu'il parle de décentralisation et de l'idée qui
consiste à permettre aux parents de jouer un rôle plus
considérable dans la gestion de la commission scolaire...
M. Saint-Germain: Répondez-vous au député de
Gaspé ou à moi?
M. Le Moignan: C'est une réponse qu'il ne m'avait pas
donnée.
M. Saint-Germain: Bon, c'est que vous aviez dit le
député de Gaspé.
Le Président (M. Jolivet): Correction, c'est le
député de Jacques-Cartier.
M. Morin (Sauvé): C'est juste, excusez-moi. Je reprends le
fil de ma pensée...
M. Saint-Germain: Excusez-moi!
M. Morin (Sauvé): Je n'aurais pas dû confondre ces
deux députés si différents et si talentueux, chacun
à sa manière cependant.
Oui, vous avez totalement raison de penser que nous devons
décentraliser les décisions. C'est pour cela que nous songeons
à la possibilité de créer ces quatre plans-programmes
d'activités qui seront préparés par les commissions
scolaires avec l'aide des écoles et même avec l'aide des
principaux agents de l'éducation dans chaque école. Je crois que
c'est une idée simple pour utiliser votre vocabulaire mais
qu'elle a des chances de réussir...
M. Saint-Germain: On dira que c'est une idée
simpliste.
M. Morin (Sauvé): J'espère bien que non parce que
cette idée que vous venez d'énoncer me paraît assez
valable. De toute façon, je ne sais pas si vous avez lu le livre vert,
mais vous auriez retrouvé, dans celui-ci, des idées assez
analogues à celles que vous avez énoncées lorsque vous
avez parlé de décentralisation.
Sachez une chose: Nous allons nous attacher, dans la foulée du
livre vert, à donner le plus possible la chance aux commissions
scolaires de prendre des décisions portant sur des questions comme
celles-là. Évidemment, il doit y avoir au centre un
ministère qui est responsable d'assurer des services minimaux à
travers tout le territoire et un programme minimum pour tous les
Québécois. Ce ministère sera responsable de voir à
ce que, dans telle région, il n'y ait pas tel enseignement de la langue
seconde, alors que dans la région voisine ou une région plus
éloignée il n'y en a aucun. L'inconvénient de trop
décentraliser, c'est qu'on peut aboutir à des régimes
pédagogiques qui soient trop différents d'un endroit à
l'autre. Je pense qu'il faut éviter également cet
excès.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Saint-Germain: Si vous le permettez, pour terminer,
monsieur... Je n'ai pas terminé.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez plus de 20 minutes de
passées déjà.
M. Saint-Germain: Je termine là-dessus, M. le
Président, si vous voulez, en disant simplement que la différence
qu'il y a entre ma façon de voir et la façon du ministre,
puisqu'on s'entend sur ces principes de décentralisation, c'est que je
crois que la décentralisation sera efficace pour autant que les hommes
élus dans le bas de l'échelle auront des responsabilités.
Et parmi ces responsabilités, on pourrait parler de diviser la recherche
dans la province, ce sont des choses qui peuvent se faire, mais cette
responsabilité qu'ils ont de dépenser l'argent du public doit
nécessairement se refléter par un pouvoir de taxation. Tant qu'on
n'en arrivera pas là, cela restera des mots, la
décentralisation.
M. Morin (Sauvé): C'est la raison pour laquelle le
gouvernement maintiendra la possibilité d'un impôt foncier pour
fins non subventionnées.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Je voulais simplement, M. le Président,
ajouter quelques remarques aux propos du député de
Jacques-Cartier. J'ai trouvé qu'il était un peu radical, parce
que, si on fait table rase de tous nos professeurs francophones qui enseignent
la langue seconde, je pense qu'à ce moment-là le ministre de
l'Éducation va être dans une très mauvaise posture à
partir du mois de septembre. J'ai vécu ce problème dans notre
région. Je sais que beaucoup de...
M. Saint-Germain: Je ne voudrais pas vous interrompre, mais je
n'ai pas dit que tous les professeurs du Québec qui enseignaient
l'anglais ne connaissaient pas cette langue.
M. Le Moignan: Non, je m'en viens...
M. Saint-Germain: Je n'ai jamais dit qu'une telle décision
ferait qu'on se débarrasserait de la majorité des professeurs
d'anglais du Québec. Là, cela aurait été radical.
Je parle d'une minorité.
M. Le Moignan: Je me rapproche de vous tranquillement, mais je
connais un peu la situation. Je sais que beaucoup, avec des cours de
perfectionnement, pourraient certainement y réussir, parce qu'ils ont
déjà des rudiments de la langue, mais il y a une
expérience que j'ai tentée dans mon milieu quand j'étais
directeur des études, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): ... Ceux d'en haut ont fini
l'amiante en troisième lecture.
M. Le Moignan: Les chanceuxl Ils vont aller prendre une
crème d'amiante.
Mme Lavoie-Roux: Ils auraient pu nous inviter en passant.
Le Président (M. Jolivet): Continuez, là où
vous étiez.
M. Le Moignan: Ce ne sera pas très long, parce que j'ai
promis au député de Papineau de lui laisser quelques minutes.
M. le député de Jacques-Cartier, je ne veux pas
dramatiser, je sais qu'il y a un certain nombre de professeurs, mais il y a
toujours les cours de perfectionnement. J'ai fait une expérience quand
j'étais directeur des études. J'avais engagé des
professeurs anglophones et, chez nous, cela a été très
révélateur. Ils connaissaient un peu la langue française,
mais les progrès ont été marqués, évidents,
là où ces professeurs enseignaient la langue seconde au cours
classique.
Du côté anglophone j'ai une très bonne
expérience pour avoir visité leurs écoles, avoir
assisté à certains cours il y a un immense travail qui
doit être fait, parce que la langue seconde, dans les classes
anglophones, du moins de notre région que je connais très bien...
Les professeurs connaissent un peu la langue seconde, mais ils auraient aussi
besoin de se recycler, comme dans d'autres régions. Je pense qu'un
immense effort doit être fait de ce côté, quoique,
aujourd'hui, les professeurs se soint améliorés, c'est mieux que
c'était il y a dix ans ou vingt ans.
C'est un simple petit complément que je voulais apporter, non pas
pour détruire votre argumentation car elle est trop forte, mais pour la
compléter.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Alfred: M. le Président, je suis presque assuré
que le député de L'Acadie ne partage pas l'argumentation du
député de Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Un autre.
Mme Lavoie-Roux: Attendez et je vous le dirai après.
M. Alfred: Je pense que M. le député de
Jacques-Cartier a parlé de l'apprentissage de l'anglais comme langue
seconde pour nos Français. Il veut bien que nos Français soient
bilingues, ce sur quoi, nous, du gouvernement, sommes d'accord. Mais il n'a pas
insisté avec autant de vigueur sur l'apprentissage du français
comme langue seconde pour nos anglophones, d'une part.
Mme Lavoie-Roux: C'était la langue seconde.
M. Saint-Germain: On discutait de langue seconde.
M. Alfred: Langue seconde, de part et d'autre.
M. Saint-Germain: Oui, mais la langue seconde...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jacques-Cartier!
M. Alfred: Je dis pour les deux parties.
M. Saint-Germain: On me fait dire des choses que je n'ai pas
dites.
M. Alfred: Deuxièmement, M. le député de
Jacques-Cartier a parlé du perfectionnement des professeurs, il a
parlé des professeurs d'anglais qui ne sont pas compétents.
J'aurais voulu qu'il parle de perfectionnement pour tous les professeurs en
général. J'aurais voulu qu'il ne privilégie pas l'anglais
au détriment des mathématiques, au détriment du
français, au détriment de la chimie.
Une chose retient mon attention. En mettant en doute la
compétence des professeurs pour enseigner l'anglais, il met en
même temps en doute la compétence du directeur de l'école
qui doit évaluer mensuellement le rendement pédagogique de chaque
professeur. Il n'appartient donc pas au ministre de l'Éducation de
mettre tout le monde dehors. Il appartient au directeur de l'école de
mesurer le rendement pédagogique de chaque professeur. Si, à la
fin de l'année, il se rend compte que le professeur n'est pas en mesure
de répondre adéquatement à ce qu'on attend de lui, je
pense qu'à ce moment-là, il appartient au directeur de
l'école, à l'agent pédagogique du département en
question, d'en arriver aux conclusions qui s'imposent.
M. Saint-Germain: Vous irez leur dire.
M. Alfred: Sans les mettre dehors, mettre à la disposition
de ces professeurs qui seraient handicapés des méthodes de
perfectionnement pour qu'ils apprennent.
Mon Dieu, si on suivait, à mon humble avis, l'argumentation du
député de Jacques-Cartier, je me demande où nous irions.
Pour un libéral, cela m'étonne.
Le Président (M. Jolivet): On peut suspendre les travaux,
à moins que le ministre n'ait un dernier mot à dire.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, est-ce que je
pourrais souhaiter que nous passions à autre chose ce soir? Il nous
reste quand même divers aspects de l'enseignement primaire et secondaire
à couvrir. Il nous reste tout le collégial, l'universitaire. Si
on veut être là jusqu'à la mi-juin, on n'a qu'à
continuer au rythme actuel.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, les
préoccupations du ministre sont certainement justifiées. Il reste
qu'il y aurait quelques questions supplémentaires très
précises que je voudrais poser. Je ne pense pas avoir fait de discours
de vingt
minutes pour passer le temps. Vous pourriez peut-être me donner
une réponse à ces questions après le souper.
M. Morin (Sauvé): Sûrement. Voulez-vous nous les
donner maintenant? Il reste tout de même deux minutes avant six heures.
Si elles comportent des chiffres, nous pourrions... (18 heures)
Mme Lavoie-Roux: Non. Ce ne sont pas, d'une façon
générale, des questions qui comportent des chiffres. C'est une
question à laquelle vous n'avez pas répondu tout à
l'heure. On ne m'a pas répondu si, dans les commissions scolaires
protestantes, on enseignerait l'anglais en première année. Il
semble, dans le fond, y avoir un décalage entre l'enseignement de la
langue seconde on parle à ce moment-ci de la langue anglaise
entre les commissions scolaires catholiques et les commissions scolaires
protestantes.
Là-dessus qu'est-ce que le ministre compte faire? Tout à
l'heure vous déploriez le fait... étant donné que vous
n'aviez pas accédé à la demande que l'enseignement de
l'anglais soit donné aux Italiens... Il y a quand même deux
écoles qui fonctionne selon ce système à Montréal.
Pour des raisons que l'on connaît, elles étaient bilingues, elles
ont été graduellement... Ce sont quand même des questions
qui font que les gens se disent: Si on va dans le secteur protestant, il y a
peut-être plus de chances qu'on apprenne l'anglais. Comme je le disais
tout à l'heure, fondées ou non, ce sont des
réalités. Je sais qu'il y a beaucoup d'écoles juives
où on enseigne l'anglais très tôt, etc., enfin, c'est ce
genre de questions. Après cela, il y a des remarques que je voulais
faire. Par exemple, quelle évaluation a-t-on faite du programme de
perfectionnement des professeurs de langue seconde, que ce soit du
côté anglais ou du côté français, parce qu'on
y a quand même mis passablement de millions depuis... Est-ce qu'on est
à la cinquième année cette année?
M. Morin (Sauvé): C'est la cinquième année
du plan de développement des langues.
Mme Lavoie-Roux: Du plan de développement des langues. On
y a mis passablement d'argent. Dans quelle mesure a-t-on évalué
si ces professeurs se retrouvaient à enseigner l'anglais, langue seconde
ou vice versa? Je sais fort bien qu'à la suite, par exemple, du
"bumping", qu'à la suite du projet de rotation à
l'intérieur des écoles élémentaires qui avait
été prévu pour utiliser les professeurs qui
s'étaient perfectionnés, à la suite du fait aussi que
l'enseignement de l'anglais n'était prévu qu'au deuxième
cycle du secondaire, cette rotation s'avérait beaucoup plus difficile
que du côté anglais. On peut continuer dans la même veine.
Je pense qu'il faut que les gens se perfectionnent, mais il faudrait quand
même évaluer, après quatre ans, où se retrouvent ces
professeurs. On pourrait se retrouver, après y avoir mis
considérablement d'efforts financiers, devant un insuccès
relatif, si vous voulez.
Du point de vue du surplus des professeurs, ce que je voulais dire,
c'est que, par exemple, au PSBGM, je pense que le sous-ministre pourrait le
vérifier beaucoup plus facilement que moi, parmi leurs professeurs en
surplus mais qui ne demeureront peut-être pas tous en surplus à
cause des conditions qu'on connaît, la très grande majorité
des 103 professeurs qu'ils ont identifiés comme étant du surplus,
je pense que je n'exagérerais pas en disant que 90 d'entre eux sont des
professeurs d'anglais. Ce ne sont pas nécessairement des professeurs de
langue seconde, mais ce seraient peut-être des gens faciles à
recycler comme professeurs d'anglais langue seconde. Il y aurait 90 professeurs
d'anglais dans le surplus du PSBGM. Il faudrait également voir...
M. Morin (Sauvé): Combien dites-vous?
Mme Lavoie-Roux: Sur les 103, mais il n'en restera
peut-être pas 103. On connaît toutes les dispositions. Mais la
très grande majorité sont des professeurs d'anglais. Cela m'a
été dit par le PSBGM. Il y a également, et cela aussi, il
faudrait le vérifier, McGill qui contribue à un effort assez
considérable, je pense, dans la formation de professeurs d'anglais
langue seconde. En janvier, je pense, on m'a dit qu'il y avait une cinquantaine
de ces professeurs ou qui étaient sans emploi ou qui enseignaient dans
d'autres matières que celle pour laquelle ils avaient été
formés. Enfin, je me demande si on a vraiment fait l'inventaire des
ressources. Je connais les contraintes de la convention collective. Même
si, à certains moments, le député de Jacques-Cartier nous
a fait rire, et ce n'est peut-être pas mauvais rendu à 18 heures,
il y a beaucoup de vrai dans ce qu'il dit, à l'égard du fait
qu'on fait des efforts de perfectionnement des maîtres, mais qu'on ne les
retrouve pas là où ils devraient être.
Du côté de la prochaine négociation, je vous
souhaite bien d'être capable de créer un champ. C'est quand
même là un des gros handicaps que l'on a vis-à-vis de tout
cet enseignement de la langue seconde. Avec le surplus de professeurs, la
clause de l'ancienneté est toujours celle qui prévaut. On
pourrait se retrouver, malgré de gros efforts, dans cinq ou dix ans,
avec peu de progrès. Je ne sais pas de quel côté il faut
orienter les efforts, mais je crains que si on continue ce plan de
perfectionnement sans essayer d'évaluer ce qui s'est fait durant les
quatre premières années, on ne se retrouve avec des
déceptions assez grandes.
M. Morin (Sauvé): Merci, Mme le député. Je
vais tenter de répondre à ces questions tout à l'heure
à la reprise, vers 20 heures. Est-ce que je puis espérer, M. le
Président, que nous pourrons passer à l'enseignement
collégial durant la soirée?
Mme Lavoie-Roux: Non, je ne le crois pas, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que je puis espérer que
nous terminerons l'enseignement primaire et secondaire?
Mme Lavoie-Roux: Je ne peux pas vous donner de garantie
là-dessus, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Mme le député, je ne
voudrais pas avoir à vous rappeler que j'ai accepté de retarder
le début de cette commission parlementaire parce qu'on m'a bien
assuré, de votre part, que nous terminerions à temps, dans les
délais prévus, sinon j'aurais insisté pour que nous
commencions à la date et à l'heure prévue.
Mme Lavoie-Roux: Ce que je peux vous garantir, M. le ministre,
c'est que nous ne retarderons pas la date qui a été prévue
pour la fin des travaux.
M. Morin (Sauvé): C'est bien. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Les travaux sont suspendus
jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 6)
Reprise de la séance à 20 h 13
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'éducation poursuit l'étude des
crédits du ministère de l'Éducation.
Si on m'a bien informé, vous étiez à l'étude
du programme 4, enseignement primaire et secondaire public. La parole
était au député de...
Mme Lavoie-Roux: Non, elle était au ministre. Le
Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, Mme le
député de L'Acadie m'avait posé un certain nombre de
problèmes relatifs à l'enseignement des langues. Permettez-moi
d'apporter quelques réponses ou quelques esquisses de
réponses.
Pour ce qui est de l'enseignement de l'anglais, langue seconde, dans les
classes françaises du BEPGM, il semble bien, d'après les
renseignements que nous avons pu obtenir que, effectivement, il se donne un
enseignement de la langue seconde dans les petites classes, mais c'est à
vérifier, parce que nous n'en connaissons pas, du moins, nous n'avons
pas sous la main l'étendue exacte de cet enseignement.
Récemment, le BEPGM a fait part à la population d'un
projet au terme duquel il y aurait eu un enseignement non pas bilingue, mais
quasiment bilingue, dans ses classes françaises. Il y aurait eu une
proportion de 25% de l'enseignement qui se serait donné en anglais.
Mme Lavoie-Roux: C'est ce qu'il propose, je crois, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Oui, il propose cela et également
des techniques d'immersion. C'est tout à fait contraire à ce dont
nous avions convenu lors de nos rencontres. Je ne sais pas d'où est
venue exactement cette suggestion, mais il est clair d'ailleurs. M.
Gauthier, des écoles protestantes françaises, l'a fait savoir
publiquement que le programme qui s'applique dans les écoles
françaises du BEPGM est le programme normal, le programme
québécois. Je n'ai pas l'intention d'approuver un système
qui serait pour le quart anglophone.
Peut-être le BEPGM a-t-il pensé qu'en transformant, qu'en
bilinguisant son système d'écoles françaises, il
arriverait à attirer certains immigrants vers ses écoles. Mais,
si ce devait être le cas, je ne serais certainement pas d'accord. Ces
écoles françaises doivent le rester. Il reste, évidemment,
à discuter de la place exacte que doit avoir l'enseignement de la langue
seconde dans ces écoles, mais je ne saurais approuver une situation
où l'on trouverait le quart de l'enseignement en anglais, ou encore des
techniques d'immersion dès le primaire pour ces jeunes
élèves.
D'ailleurs, j'ai cru constater, à la lecture des journaux ces
temps derniers, que les enseignants et la direction des écoles
françaises du BEPGM partagent mon souci et n'ont pas l'intention de se
laisser transformer en écoles bilingues. Cela soulève et
avant même que la question ne vous vienne à l'esprit, j'y
réponds la question de connaître le statut exact des
écoles françaises du BEPGM à l'intérieur de cette
vaste structure.
Il va falloir, je crois, qu'on s'achemine, au fur et à mesure que
le nombre d'élèves francophones va augmenter au BEPGM, vers un
système analogue à celui que nous connaissons à la CECM,
en faveur des anglo-catholiques. Il faut absolument que les franco-protestants
du BEPGM arrivent à obtenir des droits semblables aux anglo-catholiques
de la CECM. Sur ce plan, je dois dire, Mme le député...
Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait d'accord avec
vous.
M. Morin (Sauvé): que la CECM a été
exemplaire depuis des années et que ces droits ne sont pas seulement
pour la minorité anglophone; ils sont également pour les
francophones qui sont en minorité dans un système. Voilà
pour la première question.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je peux quand même vous...
M. Morin (Sauvé): Oui, allez-y, puisque j'en ai plusieurs
auxquelles je dois vous apporter des réponses. Si vous voulez faire des
commentaires, je vous y invite.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que ce dont vous venez de parler est un
projet qui, quelles que soient les intentions du PSBGM j'ai dit le PSBGM
pendant trop longtemps, il va falloir que je me discipline à dire le
B...
M. Morin (Sauvé): BEPGM.
Mme Lavoie-Roux: ... EPGM. Ma question était celle-ci:
Seriez-vous contre... Et je crois qu'ils donnent cet enseignement de l'anglais
dans les basses classes, disons 20 minutes par jour, progressivement, selon le
programme final de 5e et 6e année. Vous n'écarteriez pas cette
possibilité? Je pense que cela se donne depuis des années, depuis
qu'ils ont des classes françaises.
M. Morin (Sauvé): Je ne serais pas tenté d'aller
à l'encontre de situations existantes, sauf si on me démontrait,
naturellement, que c'est péda-gogiquement néfaste. Donc, je ne
prévois pas de difficulté de ce côté, si on s'en
tient à des horaires de 20 minutes, bien sûr. Mais si on tentait
d'instaurer un enseignement de l'anglais pour le quart du temps, là je
ne marcherais pas du tout, je tiens à vous le dire.
Mme Lavoie-Roux: Cela va.
M. Morin (Sauvé): La seconde question portait sur les deux
écoles francophones ou en voie de francisation de la CECM, à
destination des italianophones, des jeunes enfants d'origine italienne, les
écoles Saint-Philippe-Benizi et Notre-Dame-de-la-Consolata qui
relèvent toutes les deux de la CECM.
Mme Lavoie-Roux: De la Défense.
M. Morin (Sauvé): De la Défense ou de la
Consolata?
Mme Lavoie-Roux: De la Défense.
M. Morin (Sauvé): Comme elle relève de la CECM, je
ne doute pas un seul instant que vous ayez raison, madame.
Mme Lavoie-Roux: À moins qu'on ne l'ait baptisée
à nouveau.
M. Morin (Sauvé): Dans ces cas, il s'agit d'écoles
qui étaient autrefois bilingues. Ce sont des expériences
libérales d'il y a quelques années, si ma mémoire est
bonne.
Mme Lavoie-Roux: II y a environ 60 ans, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Est-ce juste? Pour les deux
écoles?
Mme Lavoie-Roux: Oui, pour les deux écoles. M. Morin:
Bon.
Mme Lavoie-Roux: Enfin, cela date de très loin. Il y avait
vraiment une tradition. Au départ, c'étaient des écoles
trilingues qui, finalement, sont devenues plutôt bilingues.
M. Morin (Sauvé): Bien. Il s'agit donc, si j'ai bien
compris et là-dessus, vous pourrez nous éclairer puisque
vous avez connu l'expérience de plus près que nous d'une
sorte de processus de "phasing out"; il s'agit, peu à peu, de
transformer ces écoles en écoles françaises. Je crois que
c'était l'objectif visé par la politique de ces dernières
années.
Dans mon esprit, ces écoles doivent devenir des écoles
françaises avec un bon enseignement de l'anglais, langue seconde.
Autrement dit, nous devons évoluer vers une situation normale. Je ne
serais pas partisan d'avoir, pendant trop longtemps, sauf à titre de
transition, des cas particuliers qui pourraient avoir tendance, par la suite,
à se généraliser. Je ne crois pas que l'école
bilingue ou qui fait une trop large place à l'anglais, langue seconde,
dès le primaire soit souhaitable. Qu'on commence à y faire
l'apprentissage de la langue seconde, j'en suis; qu'on tente de consacrer le
quart ou le tiers du temps à l'anglais, cela, je n'en serais pas
partisan, sous aucun prétexte.
La vraie solution consiste, à mon avis, à des
apprentissages tout à fait élémentaires à ce niveau
et à un enseignement intensif de l'anglais au niveau secondaire, avec
des professeurs de qualité, des moyens d'enseignement idoines, de bonnes
techniques d'enseignement. C'est surtout à ce niveau, je pense, qu'on
peut arriver à atteindre les objectifs de formation que nous nous sommes
donnés dans le livre vert pour l'enseignement de l'anglais, langue
seconde.
Passons maintenant au perfectionnement des professeurs d'anglais, langue
seconde. Nous avons prévu, l'an dernier, un dégagement pour une
session complète et ce système semble avoir donné
satisfaction.
Mme Lavoie-Roux: Mais ceci était le cas pour les
professeurs de langue seconde, ils étaient dégagés pour
une session.
M. Morin (Sauvé): C'était effectivement le cas, en
vertu du plan de développement des langues.
Mme Lavoie-Roux: De développement des langues.
M. Morin (Sauvé):... depuis environ deux ans. Mme
Lavoie-Roux: Plus que cela.
M. Morin (Sauvé): Tournons-nous maintenant vers le
français, langue seconde. La solution qui avait été
trouvée était différente. C'était celle du
dégagement hebdomadaire qui permettait à l'enseignant de
continuer à enseigner, à exercer son métier. Cette
expérience s'est avérée moins intéressante, moins
rentable, par rapport aux résultats que nous avons obtenus. C'est la
raison pour laquelle, actuellement, nous cherchons d'autres solutions plus
pratiques, y compris celle que je mentionnais cet après-midi et qui a
trait à l'échange d'enseignants: les anglophones enseignant dans
les classes françaises et vice versa. C'est une solution difficultueuse
parce que vous n'ignorez pas qu'elle met en cause des postes d'enseignants et
que, de ce fait, elle évoque automatiquement des réticences du
côté des syndicats. Néanmoins,
c'est une solution que je veux explorer en vue des prochaines
négociations qui vont commencer en janvier 1979.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, excusez-moi de vous interrompre
mais, à l'intérieur de cette question à laquelle vous
tentez de me donner une réponse, la question précise que j'avais
posée était: Quelle évaluation avions-nous faite de ce
programme de perfectionnement des maîtres, que ce soit français ou
anglais, langue seconde quant à leur réaffectation dans des
postes qui correspondaient quand même à des études pour
lesquelles ils avaient été dégagés pendant un
semestre?
M. Morin (Sauvé): Le fonctionnement des règles de
la sécurité d'emploi fait qu'il nous est très difficile de
répondre à une question comme celle-là. Je dois vous dire
que je ne connais pas la réponse. Si vous le désirez, nous
pouvons entreprendre les recherches nécessaires, mais j'imagine que nous
en aurions pour quelque temps avant d'obtenir une réponse.
M. le Président, puis-je vous demander de faire cesser ces
bruits. Ils sont directement sur le mur de la salle, et nous n'arriverons pas
à nous entendre de la soirée?
Une voix: On s'est déjà entendu, M. le
ministre.
Mme Lavoie-Roux: Pour que vous me donniez une réponse dans
les 24 heures ou les 72 heures, ou même dans une semaine ou quinze jours,
mais je pense qu'on aura investi après cinq ans et le
sous-ministre ou M. le ministre, vous pourrez me corriger tout
près de $100 millions dans le plan de développement des langues,
durant les cinq dernières années.
M. Morin (Sauvé): Tout n'était pas pour le
perfectionnement, naturellement.
Mme Lavoie-Roux: Non, mais quand même, ce sont des sommes
considérables, et il faudrait, à un moment donné faire
l'évaluation de tout ceci, d'autant plus que, si j'ai bien lu dans le
livre, vous le continuez, vous le prolongez pour 1979/80 et ainsi de suite. Je
pense qu'après quatre ou cinq ans on a suffisamment de données
accumulées pour pouvoir faire l'évaluation et voir s'il y a lieu
de réorienter... C'est dans ce sens que je pose la question. Je sais
bien qu'on ne peut pas me donner de réponse précise et je n'en
demande pas.
M. Morin (Sauvé): De toute façon, comme vous le
suggérez, il est temps de faire le point sur cette question, avant
d'engager de nouveaux fonds l'année prochaine. Toujours dans la
foulée du livre vert, c'est une des questions que je compte tirer au
clair. Elle est bien notée d'ailleurs.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Morin (Sauvé): Vous aviez ensuite soulevé la
question du surplus d'enseignants au PSBGM et vous vous étiez
demandé s'il n'y avait pas moyen, justement, de les
transférer.
Mme Lavoie-Roux: De les recycler, toujours.
M. Morin (Sauvé): Ou de les recycler, mais nous ne
saurions les recycler et assumer les frais de recyclage que si on peut
être sûr de leur réaffectation à l'intérieur
d'un réseau qui aurait besoin d'eux. Or, vous savez comme moi que les
transferts interréseaux se sont révélés fort
difficiles jusqu'ici. Il ne faut pas abandonner pour autant, je crois, mais les
quelques expériences d'échanges poste à poste, qui ont eu
lieu de 1974 à 1976, à ce qu'on me dit c'est avant mon
arrivée au ministère on me dit que cela n'a pas
fonctionné. Mais peut-être que M. le sous-ministre peut vous
donner des détails, cela se passait avant que j'y sois. Il semble bien
que cela n'a pas donné les résultats qu'on en attendait. (20 h
30)
Absolument pas, pour différentes raisons; la première
était qu'il y avait une difficulté d'unité
d'accréditation syndicale. Un enseignant qui venait d'un syndicat de la
CECM et qui allait enseigner à Jérôme LeRoyer... il y avait
là des responsabilités d'unités syndicales. Il y avait
aussi surtout le climat à l'intérieur de l'école pour un
anglophone qui arrive et qui doit s'insérer dans une communauté
francophone. Ceci a causé plusieurs difficultés et a fait aussi
que des enseignants qui avaient accepté se sont retirés de ces
projets en cours d'année, pouvant difficilement se soumettre à ce
genre de choses. La première année de fonctionnement, on a vu une
vingtaine d'échanges; la deuxième année, une dizaine et,
finalement, la dernière année, on n'a pu en trouver à
cause de ces difficultés essentiellement d'ordre technique syndical et
aussi du climat à l'intérieur des écoles.
Mme Lavoie-Roux: II reste, M. le ministre, qu'au début
vous avez dit qu'une des difficultés pour l'anglais, c'est qu'il n'y a
pas suffisamment de professeurs. Là, je rejoins le député
de Jacques-Cartier qui l'a dit en d'autres mots: ce sont vraiment toutes ces
contraintes... C'est quand même extraordinaire qu'à
Montréal, avec un secteur anglais important et un secteur
français également très important, on ne puisse pas
profiter, dans l'apprentissage des langues, de cet échange.
M. Morin (Sauvé): Oui, c'est vraiment un peu
étonnant. On pourrait s'attendre que de tels échanges soient
courants. Si l'Angleterre et la France étaient voisins, j'imagine que de
tels échanges seraient courants. Mais, évidemment, chacun sait
qu'il y a ici un certain nombre de problèmes qui rendent les rapports
entre les groupes un peu plus difficiles et qui éveillent des
méfiances réciproques qui sont difficiles à dominer.
Néanmoins, si on pourrait arriver à recréer un certain
climat de confiance, dans la foulée du livre vert, j'espère qu'on
pourrait arriver à faire débloquer des solutions de ce genre.
J'ai dit, cet après-midi, que ces solutions
m'intéressaient, que j'ai l'intention de voir jusqu'à quel point
on pourrait les appliquer.
Mme Lavoie-Roux: Je remercie le ministre pour ses
réponses. Je répète ce que j'ai dit cet après-midi,
en dépit d'un programme intensif de perfectionnement des maîtres,
de mise en place d'une infrastructure favorable et de révision de
programmes également, je pense que cela prend du temps avant que l'effet
se fasse sentir dans les écoles et pour les parents. C'est probablement
la raison pour laquelle on entend encore autant de récriminations de ce
côté.
Pour finir les langues, parce que je pense qu'il faudrait passer
à un autre sujet, un mot sur l'enseignement du français. Je me
demandais si, compte tenu encore une fois des fameuses clauses
d'ancienneté et de "bumping", on ne se retrouvait pas avec le même
problème, à savoir que des professeurs se retrouvent professeurs
de français. Vous savez, je pense que tout le monde a connu et le
sous-ministre s'en rappellera le temps où tout le monde pouvait
enseigner le français; tout le monde ne peut enseigner la chimie mais
tout le monde peut enseigner le français. On est peut-être moins
porté à y attacher de l'importance, compte tenu que même
les parents disent: Je peux enseigner le français. C'est pour cela qu'il
y a tant de critiques sur le français, c'est là où tout le
monde pense se sentir familier. Ce serait quand même une chose à
surveiller et je me demandais s'il y avait une évaluation de ceci qui
était faite, de la même façon que pour l'enseignement de
l'anglais ou des langues secondes.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, dans les faits,
la situation pour l'enseignement du français est moins grave que celle
qu'on peut trouver à l'égard de certaines autres disciplines.
Pour une raison bien simple: c'est que la plupart des enseignants de
français ont plus d'années d'ancienneté et n'ont pas
été victimes, comme d'autres, de cette fameuse technique que vous
mentionniez tout à l'heure, la technique des conventions collectives
qu'on pourrait appeler la technique du déplacement. Il se fait que le
français n'a pas connu les mêmes déboires que, par exemple,
l'instruction religieuse ou l'enseignement des arts, où on trouve
effectivement un certain nombre d'enseignants qui n'ont pas été
spécialisés pour ces tâches spécifiques.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais être aussi optimiste que le
ministre, mais je pense qu'il y a des professeurs d'histoire, dans le temps
où on ne l'enseignait plus ou plutôt on l'enseignait moins, des
professeurs de science qui ont été refoulés vers
l'enseignement du français. Est-ce qu'on s'est préoccupé
de les perfectionner, ceux-là? Cela a peut-être été
moins généralisé que dans le cas de la langue seconde,
mais...
M. Morin (Sauvé): Oui. Prenons soin de bien distinguer
entre le niveau primaire et le niveau secondaire.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Morin (Sauvé): Les problèmes ne sont pas les
mêmes. Au primaire, vous le savez nous avons affaire à des
généralistes, en principe, de sorte que tout professeur du niveau
primaire doit pouvoir enseigner correctement le français.
Mme Lavoie-Roux: Je pensais au secondaire.
M. Morin (Sauvé): C'est au niveau secondaire que le
problème existe. On me dit que il doit bien y avoir quelques
exceptions à la règle de façon
générale, les professeurs de français ont
été moins victimes que d'autres de ces techniques de
déplacement.
Mme Lavoie-Roux: L'an dernier, M. le ministre, dans le programme
de perfectionnement des maîtres de français, vous aviez
l'intention de les mettre en congé, si vous voulez, pendant des
périodes plus longues que ce qui avait été auparavant. Par
contre, il y avait un problème d'agencement, c'est-à-dire de
remplacement des professeurs. Est-ce qu'on a pu facilement contourner la
difficulté et, finalement, ont-ils un programme de perfectionnement
différent?
M. Morin (Sauvé): Effectivement, j'avais doublé le
nombre de jours. Je l'avais porté de 15 à 30...
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Morin (Sauvé):... ce qui avait effectivement
doublé les crédits consacrés à ce programme. Il
semble qu'il n'y ait pas eu de difficulté, qu'en fait on soit
arrivé à surmonter les difficultés qui se sont
présentées dans le remplacement, dans l'agencement des
horaires.
Mme Lavoie-Roux: Je voulais simplement pour terminer... Je
regardais les Débats de l'an dernier parce qu'on a discuté,
à plusieurs reprises justement, du "bumping", du remplacement des
professeurs. L'an dernier, des statistiques nous avaient été
données: sur 70 000 professeurs, il y en avait 12 000 qui n'enseignaient
plus dans leur spécialité. Je ne crois pas qu'avec la diminution
de la population ceci se soit amélioré. Je pense que s'il y a eu
quelque chose, c'est que cela a pu s'accentuer un peu. D'ailleurs, le ministre,
à ce moment-là, admettait qu'il y avait un véritable
problème auquel il faudrait, au moment de la prochaine convention,
tenter d'apporter des remèdes.
M. Morin (Sauvé): Nous pensons avoir des chiffres tout
à fait précis au mois de juillet. Il est difficile de les obtenir
avant le mois de juillet cette année. Encore une fois, ce
problème est réel, surtout dans l'enseignement de certaines
matiè-
res. Au cours des négociations qui viennent l'an prochain, j'ai
bien l'intention d'examiner la possibilité de créer plus de
champs, de protéger plus de champs. Si, à l'heure actuelle, nous
avons toutes ces difficultés, ces situations qui, quelquefois, sont
inacceptables... Quelquefois cependant il faut dire que l'enseignant se recycle
et s'adapte; tous les cas ne sont pas désastreux mais, effectivement, il
y en a beaucoup qui entraînent des situations qui laissent à
désirer et c'est pour cela que j'ai l'intention de profiter de la
prochaine négociation collective pour revoir cette question.
Distribution du lait dans les écoles
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le ministre. Je ne sais pas si j'ai
encore le droit de parole. Je voudrais revenir sur une question que le
député de Gaspé avait soulevée très
brièvement avant le souper, c'est la question de la distribution du lait
dans les écoles. Nous avions soulevé cette question en Chambre
parce que je pense qu'on en avait décidé, ou elle a
été mise à l'oeuvre après l'étude des
crédits l'an dernier.
M. Morin (Sauvé): À l'automne, exactement.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Alors, deux questions très
précises: Est-ce qu'on a fait une évaluation de ce programme,
comme vous m'aviez informé qu'on ferait, avant de décider de
doubler les crédits ou d'augmenter les sommes pour ce programme?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour ce que nous
en savons, à la suite de conversations moi-même j'ai eu des
conversations avec les représentants de plusieurs commissions scolaires
l'évaluation au pif que j'ai pu en faire me conduit à la
conclusion que ce programme, jusqu'ici, a été un succès.
Cependant, l'évaluation formelle ne peut avoir lieu qu'à la fin
de la présente année, c'est-à-dire dans le courant de
l'été, avant que nous entrions dans la deuxième
année du programme.
D'après tout ce que nous en savons, donc, il y a lieu non
seulement de poursuivre ce programme, mais de l'étendre; ce que nous
faisons, évidemment, en l'étendant à 350 000
élèves l'an prochain et en espérant atteindre l'objectif
de 100%. Autrement dit, pour septembre 1981, nous espérons que tous les
enfants du Québec, dans leur école, auront droit au lait gratuit
tous les jours.
Maintenant, si vous voulez en savoir plus long sur l'évaluation,
je peux demander à M. le sous-ministre; je ne sais pas s'il a quelque
chose à ajouter.
C'est difficile d'ajouter quelque chose de plus, si ce n'est le nombre
de demandes que nous recevons de la part des commissions scolaires en vue
d'être choisies pour ce programme, ce qui manifeste quand même un
grand intérêt pour ce faire, parce que la plupart des commissions
scolaires, par leur directeur général, nous demandent
d'être choisies pour obtenir ce service de la distribution du lait.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je pense que je me dois de vous
faire part que j'ai passablement de réticence quant à
l'universalité du programme, tel que vous entendez le faire. Cela me
paraît beaucoup, de la part du gouvernement, une décision
politique et économique.
M. Morin (Sauvé): Economique, mais politique, s'il vous
plaît! Enfin, quoi! Qu'y a-t-il de politique dans le lait aux enfants? On
nous le réclame depuis des années. Je vous en prie!
Mme Lavoie-Roux: Je vous ferai remarquer, M. le ministre, que ce
fut déjà le cas, bien avant que j'y sois, cette fois à la
CECM, où on donnait le lait aux enfants et peut-être qu'un
sous-ministre qui est ici pourrait en témoigner. Finalement, ce
programme a été retiré, d'abord parce qu'il se faisait un
gaspillage. Deuxièmement, il n'était pas requis dans toutes les
écoles. J'ajouterais que, présentement, il met en veilleuse
certaines études qui avaient été faites au plan de
programmes d'alimentation, particulièrement dans les milieux
défavorisés. À l'heure actuelle, dans le fond, c'est que
vous prenez du lait ou vous n'avez rien. Alors, les gens prennent du lait. On
m'a dit... Pardon?
M. Alfred: II y a du Coke.
Mme Lavoie-Roux: Parlons-en du Coke. Je voudrais alors poser
cette autre question. Est-ce que le ministère de l'Éducation a
développé une politique d'alimentation ou une politique de
nutrition pour l'ensemble des écoles de la province? On peut bien donner
du lait aux enfants, et on pourrait arguer jusqu'à demain matin pour
savoir si c'est bon ou si c'est mauvais. Les arguments qui, je pense, vont
à l'encontre d'une politique généralisée,
entendez-moi bien, c'est le fait qu'on ne répond pas
nécessairement à des besoins et, deuxièmement, on ne
répond peut-être pas à des priorités au plan de
l'alimentation et, troisièmement, c'est un programme qui est
imposé sans tenir compte des besoins réels des milieux. On
dépense quand même des sommes considérables.
Si on songe, par exemple, que, dans la majorité des commissions
scolaires, il n'y a pas encore de programme alimentaire et que les commissions
scolaires sont obligées d'autofinancer leurs cafétérias,
leurs casse-croûte, appelez-les comme vous voudrez, soit qu'elles les
confient à des concessionnaires ou qu'elles les exploitent
elles-mêmes, et, comme on dit dans le langage populaire, pour que ces
cafétérias et ces casse-croûte puissent s'autofinancer, on
y met ce que les gens appellent des bons "vendeurs"... Vous avez
peut-être du lait distribué dans les écoles, mais, par
contre, vous avez des enfants qui s'alimentent fort mal. Je fais exception ici
pour l'île de Montréal, et probablement pour quelques autres
commissions scolaires qui doivent avoir des préoccupations de cet
ordre.
M. le ministre, je voudrais que vous alliez faire un tour dans les
cafétérias d'un grand nombre d'écoles de cette province
pour réaliser que c'est bien beau une politique du lait, mais, est-ce
qu'on répond vraiment aux besoins les plus fondamentaux
d'éducation en nutrition chez les enfants? Je pense que c'est une
question fondamentale que le ministère de l'Éducation devrait se
poser et essayer de voir là où sa priorité devrait
être. Je répète que c'est contre une distribution
généralisée, sans tenir compte des autres priorités
et besoins des milieux. (20 h 45)
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je me sens tout
à fait en sympathie avec les observations dont vient de nous faire part
Mme le député de L'Acadie. Cependant, je dois constater que le
fait de répandre l'habitude du lait, de la distribuer gratuitement aux
enfants ne va pas à l'encontre d'une politique de nutrition qui, en tout
état de cause, ne peut être que le résultat de longs
efforts. C'est vraiment une question à moyen et à long terme que
celle d'inculquer aux enfants des habitudes de nutrition saine. Autrement dit,
je ne voudrais pas sacrifier le court terme, ce que nous pouvons faire
immédiatement, comme la politique du lait, qui a l'avantage d'amener les
enfants à consommer du lait et à prendre des habitudes du lait,
plutôt que des boissons gazeuses et autres poisons, ce qui a donc des
retombées économiques sur le plan de l'agriculture, je ne
voudrais pas sacrifier le court terme dis-je, à des objectifs à
long terme. On peut poursuivre les deux de front.
Pour ce qui est des habitudes de nutrition chez les enfants, à
l'heure actuelle, il se fait des efforts. Je ne voudrais pas que vous laissiez
l'impression que tout est à l'abandon. Vous avez mentionné
vous-même que sur le plan montréalais, dans le cadre du CSIM, le
conseil a élaboré des politiques de nutrition dont j'ai entendu
dire le plus grand bien, à Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Je peux vous en parler longuement, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Je n'en doute pas. Ceci
s'améliore d'année en année et s'étend
d'année en année. Encore une fois, nous sommes appelés, je
crois, à faire une contribution financière, d'ailleurs. Nous
n'hésitons pas à le faire. De plus, il se fait dans ces domaines
des efforts que je vais demander à M. le sous-ministre de vous
décrire; il les connaît mieux que moi.
À la suite d'un comité de travail conjoint comprenant les
ministères de l'Agriculture et des Affaires sociales, la
Fédération des commissions scolaires et le ministère de
l'Éducation, une étude a été demandée pour
faire le point sur le développement d'une politique alimentaire dans les
écoles. Un rapport a été déposé, je crois,
au début de l'année 1977. Une des conclusions du rapport a
été de développer davantage une politique d'information
sur une saine alimentation, plutôt que d'investir directement dans des
repas ou des choses de ce genre dans les écoles, information
destinée, en particulier aux enfants.
De ce côté, le ministère des Affaires sociales avait
fait une enquête dans les écoles de la CECM. Les résultats
de l'enquête ne démontraient pas de résultat probant
à l'égard de la politique alimentaire d'aide à la
nutrition. Depuis, ce qui a été développé, c'est
une politique d'information à une saine alimentation, par les Affaires
sociales, à laquelle le ministère contribue grandement pour
l'introduire dans les écoles de façon telle que toute la
population scolaire puisse bénéficier d'une information
adéquate sur une saine alimentation à développer. C'est
dans ce sens qu'actuellement les efforts sont tournés.
Mme Lavoie-Roux: Si je suis le raisonnement du sous-ministre, M.
le ministre, je me demande s'il dit que le fait qu'on essaie de mettre des
aliments plus sains à l'intérieur des cafétérias ne
donne pas de résultat probant quant aux habitudes nutritives; on
pourrait se demander si le fait de distribuer du lait gratuitement, a des
effets probants au point de vue de l'éducation de la nutrition. Il
reste... .
M. Morin (Sauvé): II y a une différence, Mme le
député. Le lait est gratuit, tandis que les
cafétérias ne le sont pas, de façon
générale.
Mme Lavoie-Roux: Non, sauf que dans le cas des
cafétérias de l'île de Montréal d'ailleurs,
c'est un programme, tout le monde le sait, qui a débuté à
la CECM, et je suis très fière d'avoir été
là quand il a débuté, qui a ensuite été
étendu à l'île de Montréal il y a des
aliments qui sont subventionnés. Par exemple, si vous achetez je
vous donne cela comme exemple, je peux me tromper une poire au lieu
d'une tablette de chocolat, vous allez payer votre poire un prix minime. Je ne
sais pas si on a des poires à ce temps-ci de l'année, parce
qu'elles doivent être à un prix fabuleux...
M. Morin (Sauvé): Là, vous exprimez des
préférences personnelles.
Mme Lavoie-Roux: Mais vous paierez le maximum pour votre tablette
de chocolat, ce qui incite les enfants à le faire, et tous les menus
sont équilibrés, sont balancés. Je dois dire que le gros
effort à moins que je ne m'abuse et qu'il y ait eu des
changements durant les deux dernières années les gros
efforts financiers pour financer ce programme de nutrition sont pris à
même la surtaxe du conseil scolaire de l'île. Il se peut que,
maintenant, peut-être, le ministère y contribue d'une certaine
façon, mais, à ma connaissance, au moment où
j'étais là, c'était payé par la surtaxe de
l'île de Montréal. Mais, à tout événement, je
suis d'accord pour que le ministère des Affaires sociales fasse une
éducation, mais, cette politique du ministère, est-ce que vous
l'avez, est-ce que vous pouvez nous la donner, cette politique de nutrition,
développée conjointement par le ministère de
l'Éducation et le ministère des Affaires sociales?
M. Morin (Sauvé): Une politique d'information?
Mme Lavoie-Roux: Ah, vous n'avez pas de politique de
nutrition.
M. Morin (Sauvé): Non, c'est une politique d'information
développée par les Affaires sociales auprès de la
population.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous entendez développer une
politique de nutrition?
M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas de politique de
nutrition, mais, parmi les objectifs de formation que nous proposons pour
l'éducation physique au niveau primaire, nous voulons que l'enfant ait
compris l'importance des règles non seulement de l'hygiène
générale, mais également de l'hygiène alimentaire.
Si vous avez pu consulter...
Mme Lavoie-Roux: Oui, j'ai vu ça.
M. Morin (Sauvé): ... le livre vert, au paragraphe 2-44,
vous avez pu constater que cela fait partie de notre notion de ce que constitue
l'éducation physique, et il nous paraît que c'est une
première étape, non sans exclure que nous mettions en place des
politiques comme celle du lait, pour l'instant. Par la suite, quand nous aurons
généralisé le lait, nous pourrons songer à d'autres
étapes. Tout cela est évidemment coûteux et peut-être
pensez-vous que nous avons commencé par les choses les plus simples, ce
qui ne serait pas inexact. Il est évidemment plus simple de distribuer
du lait que d'offrir des repas complets, mais il faut, évidemment, tenir
compte des coûts qui sont impliqués dans une pareille
démarche.
Mme Lavoie-Roux: N'oubliez pas, M. le ministre, que cette
démarche va coûter de plus en plus cher au gouvernement. Vous
êtes rendus à $6 millions cette année et je pense qu'on
doit aller vers les $13 millions l'an prochain. C'est quand même beaucoup
d'argent, ce qui mérite, je pense, qu'on évalue très
prudemment... Je comprends qu'il y a des objectifs et je
répète, des objectifs, même si le ministre proteste
politiques et économiques dans cette distribution du lait, mais que ce
soit vraiment pour servir le mieux possible les intérêts de la
population scolaire. Je pense que j'ai pris mes vingt minutes.
Le Président (M. Marquis): M. le député
de...
M. Morin (Sauvé): Puis-je apporter une précision?
Il y a eu des efforts de définition d'une politique alimentaire, qui
avait été élaborée en 1976, et on s'est rendu
compte que ça nous coûterait $23 millions pour l'appliquer. Ce
n'était pas dans l'ordre des possibilités financières
à ce moment-là. C'est pourquoi nous avons
préféré commencer par une habitude alimentaire, qui est
celle du lait.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que ces $23 millions,
c'était pour une politique alimentaire pour l'ensemble des écoles
de la province?
M. Morin (Sauvé): Selon les critères tels que
développés à l'époque, à
Montréal...
Mme Lavoie-Roux: Bon!
M. Morin (Sauvé): ... pour des clientèles
données, ceux qui mangent à l'école le midi, qui doivent,
parce qu'ils sont transportés...
Mme Lavoie-Roux: Oui. Vous auriez peut-être pu faire comme
le lait et commencer par un certain nombre d'écoles, quitte, au fur et
à mesure, d'universaliser la mesure ou de la
généraliser.
M. Morin (Sauvé): Nous aurions pu faire mille et une
choses, mais nous avons choisi la politique du lait.
Mme Lavoie-Roux: Oui, et je sais fort bien.
M. Morin (Sauvé): Bon! Et nous allons d'abord
étendre celle-là, puis, ensuite, on passera à autre
chose.
Le Président (M. Marquis): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais poursuivre sur
le même sujet.
Nous parlons d'une masse de $6 millions et il y a deux clientèles
qui peuvent et, à mon sens, doivent bénéficier de cette
somme importante. Il y a, d'un côté, la classe agricole, les
producteurs de lait qui, de toute évidence, bénéficieront
de cette somme.
M. Morin (Sauvé): ... des retombées que suppose
l'habitude de consommer du lait par les jeunes.
M. Goldbloom: D'accord, M. le Président, j'y arriverai
dans un instant, parce que, deuxièmement, il y a la clientèle
scolaire, il y a les enfants. Si nous sommes, comme collectivité, comme
administration publique, pour dépenser $6 millions pour le
bénéfice des enfants, je pense bien que le ministre, dans le
contexte actuel, admettrait facilement que l'on doit être en mesure de
démontrer un bénéfice pour eux, pour justifier le
programme; parce que, si l'on pense aux cultivateurs, il y a, depuis l'histoire
du Québec, de nombreux programmes qui ont permis de leur verser des
sommes pour compenser le fait que l'écoulement de leurs produits
laissait à désirer dans les conditions de marché qui
existaient à l'époque.
Si l'on voulait donner en subventions un montant de $6 millions aux
producteurs de lait dans le cadre des programmes du ministère de
l'Agriculture, il y avait facilement moyen de le faire.
On a choisi d'ajouter à cela, à cette aide aux
cultivateurs, aux producteurs de lait, un élément additionnel,
c'est-à-dire la distribution de ce lait dans les écoles.
Le ministre nous dit, et je pense que le sous-ministre a renforcé
sa déclaration: Les commis-
sions scolaires nous ont demandé ce programme et cela depuis un
bon moment et avec insistance. M. le Président, je soumets
respectueusement à votre considération que si les commissions
scolaires demandaient une intensification importante de l'emploi des moyens
audio-visuels ou de la télévision à l'école, le
ministère étudierait en détail la valeur de ces moyens
d'enseignement avant d'accepter tout simplement que la demande des commissions
scolaires reçoive une réponse favorable, sans examen
critique.
Il me semble donc, M. le Président, qu'il aurait fallu
démontrer ou bien un état, généralisé ou
répandu de façon importante, de malnutrition chez les enfants, ou
bien une consommation inquiétante et dangereuse de boissons gazeuses. Le
ministre a lui-même offert ce dernier argument pour justifier la
distribution du lait dans les écoles.
Entre parenthèses, M. le Président, je voudrais lui dire
amicalement que c'est une bonne chose qu'il jouisse en ce moment-là de
son immunité parlementaire, parce qu'il a parlé des boissons
gazeuses et d'autres "poisons". C'est un mot qui est un peu fort. Je me demande
s'il existe véritablement une preuve que ce sont des poisons. On peut
dire que ce ne sont pas les éléments les mieux choisis pour
l'alimentation de nos enfants; mais les appeler "poisons", c'est aller un peu
loin.
M. Morin (Sauvé): C'était une image, mais je ne
puis que m'étonner d'entendre un médecin prendre la
défense des boissons gazeuses. C'est la première fois que cela
m'arrive, M. le Président.
M. Goldbloom: M. le Président...
M. Alfred: En politique, tout est permis.
M. Goldbloom: C'est une brillante intervention.
M. le Président, le ministre exagère, de toute
évidence. Je n'ai pas pris la défense des boissons gazeuses, j'ai
pris la défense du ministre, amicalement, en lui suggérant
d'être prudent dans son choix de mots. C'est tout ce que j'ai fait. De
plus, je lui ai dit que s'il incrimine les boissons gazeuses pour justifier son
programme "lait-école", il serait bien inspiré d'avoir des
chiffres, d'avoir des études qui prouvent qu'effectivement, il y en a
une consommation exagérée par des spécialistes en
nutrition, avant de dire: II faut donner du lait dans les écoles pour
diminuer la consommation des boissons gazeuses. (21 heures)
M. le Président, le ministre se rappellera les interventions de
l'Opposition, notamment pendant la période des questions, sur le sujet
du programme "lait-école". Je voudrais lui faire lecture d'une lettre
qui m'a été envoyée par un confrère pédiatre
qui est professeur titulaire de pédiatrie à l'Université
de Montréal et chef du service de pédiatrie à
l'hôpital Sainte-Justine. Suite aux questions que j'ai posées et
que d'autres députés ont posées en Chambre, notamment au
ministre de l'Agriculture mais si ma mémoire est fidèle,
à un moment donné le ministre de l'Éducation a
participé aux réponses j'ai écrit au
président de l'Association des pédiatres de la province de
Québec, le Dr Maurice Bouchard. Le Dr Bouchard a communiqué avec
le Dr Claude-C. Roy, qui est, comme je viens de le dire, professeur titulaire
à l'Université de Montréal et chef du service de
pédiatrie à l'hôpital Sainte-Justine de
Montréal.
Voici la réponse du Dr Roy au Dr Bouchard: "J'ai lu avec beaucoup
d'intérêt votre lettre en date du 29 août au sujet du
programme "lait-école" organisé par le ministère de
l'Agriculture du Québec. J'ai aussi pris connaissance de la lettre du
député de D'Arcy McGee, le Dr Victor Goldbloom, ainsi que du
communiqué de presse du ministère de l'Agriculture. "Ce programme
de distribution gratuite de lait à une clientèle choisie
d'enfants entre les âges de cinq et douze ans me paraît tout
à fait non défendable du côté nutrition.
L'enquête Nutrition Canada, en effet, révèle que la
quantité moyenne de produits laitiers consommés par les jeunes
Québécois dans ce groupe d'âge est de 602 grammes par jour;
ceci correspond à une consommation de deux portions et demie par rapport
à une quantité recommandée de deux à trois portions
par jour. La part de calcium pour ce groupe d'âge est, telle que
suggérée par la National Academy of Sciences, de 800
milligrammes. Or, l'enquête Nutrition Canada nous révèle
que nos jeunes Québécois absorbent 1071 milligrammes de calcium
quotidiennement, ce qui est bien au-delà du chiffre recommandé.
Par ailleurs, l'apport medium en vitamine D se situait au-dessous des
quantités recommandées, mais il faut retenir qu'au moment
où l'enquête Nutrition Canada a été faite,
l'enrichissement du lait entier en vitamine D n'était pas obligatoire.
Il est certain qu'aujourd'hui, la vitamine D absorbée quotidiennement
par les jeunes entre les âges de cinq et onze ans dépasse
largement le minimum recommandé de 400 unités par jour. "Il est
d'autre part absolument erroné de croire que les frais dentaires
diminueront en entreprenant ce programme de lait-école. Il s'agit d'un
argument tout à fait sans fondement. "Si ce programme de
"lait-école" n'est pas défendable du côté apport de
calcium et de vitamine D, il ne l'est pas non plus du côté
calories. En se référant à nouveau à
l'enquête Nutrition Canada, on réalise que les calories moyennes
ingérées par le groupe d'âge qui nous intéresse se
chiffrent à 2437 calories par jour, ce qui dépasse la moyenne
nationale, qui est de 2300, et les recommandations de la National Academy of
Sciences, qui est de 2400.
Pour ce qui est de l'effet nuisible à long terme d'une ingestion
augmentée de graisse animale saturée, je ne crois pas qu'il y ait
aucun danger de ce côté. Les informations disponibles ne nous
permettent pas non plus de recommander plutôt l'ingestion de lait 2% que
celle du lait entier. Par ailleurs, si nous voulons un traitement conforme
à la politique de nutrition amorcée par le ministère des
Affaires sociales, il y aurait peut-être lieu de recommander le lait 2%
plutôt que le lait entier,
étant donné l'incidence très élevée
d'obésité au Québec. "J'ai toujours été
frappé par le paradoxe entre le soin que prennent les chercheurs
à établir la validité de nouvelles connaissances en
matière de nutrition et l'absence d'évaluation des programmes de
nutrition entrepris par les gouvernements. Le ministère de l'Agriculture
n'échappe pas à ce paradoxe, car il semble d'emblée
convaincu du besoin du programme et d'avance du succès de ce programme.
"Je ne peux pas m'opposer à l'instauration de la distribution de lait
dans les écoles élémentaires, mais je n'en vois aucunement
l'utilité. Je crois qu'il existe des priorités beaucoup plus
grandes en matière de nutrition pour les enfants d'âge scolaire.
Le programme, en somme, sera beaucoup plus profitable à l'industrie
laitière qu'aux petits Québécois qui auront droit au verre
de lait-école".
M. le Président, je voudrais être tout à fait
honnête...
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, est-ce que la machine va
arrêter une autre fois?
Le Président (M. Marcoux): J'ai fait des
représentations à cet effet, jusqu'à 22 heures.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse.
M. Goldbloom: Je vous en prie. M. le Président, pour
être tout à fait honnête à l'égard du
ministre, je voudrais faire lecture d'une deuxième lettre qui m'a
été adressée par son collègue, le ministre des
Affaires sociales, à la suite de la remise, par votre humble serviteur,
au ministre des Affaires sociales, de la correspondance dont je viens de faire
lecture. Voici la réponse du ministre des Affaires sociales: "Je fais
suite à la lettre que vous m'avez adressée concernant le
programme "lait-école" du ministère de l'Agriculture et l'avis
qu'a exprimé M. Claude Sirois, chef du service de la pédiatrie de
l'hôpital Sainte-Justine à l'égard de ce programme. "Tout
d'abord, permettez-moi de vous faire remarquer que le lait-école est du
lait à 2% additionné de vitamines A et D et non du lait entier.
Au plan nutritionnel, ce lait convient à des jeunes en croissance. S'il
est vrai qu'en moyenne, les apports en produits laitiers sont suffisants chez
les élèves de l'élémentaire, il faut toutefois
signaler que le ministère des Affaires sociales a nettement
identifié des déficiences chez les enfants de
l'élémentaire des milieux défavorisés. C'est
d'ailleurs cet état de fait qui a incité les fonctionnaires de
mon ministère à demander que le programme "lait-école"
s'adresse prioritairement à ces enfants. "Par ailleurs, on m'informe que
le ministère de l'Agriculture projette d'évaluer le programme
"lait-école" à la fin de sa première année
d'application. Je vous prie de croire que le ministère des Affaires
sociales entend participer activement à cette évaluation et qu'il
formulera alors les re- commandations que lui dicteront les plus
récentes données qu'il aura pu recueillir sur cette
question".
M. le Président, dans les statistiques fournies par le
ministère de l'Éducation, je constate, outre le fait que $6
millions seront dépensés à cette fin, que sur 253
commissions scolaires, il y en a 136 qui participeront au programme, ce qui
veut dire, en chiffres ronds, 54% des commissions scolaires.
Le ministre peut-il affirmer que plus de 54% des commissions scolaires
et il est mentionné que la CECM et la CECQ sont du nombre des
commissions participantes que plus de 50% de nos commissions scolaires
se situent dans des milieux défavorisés et que,
spécifiquement, on a identifié des besoins par rapport à
un degré significatif de malnutrition chez la majorité des
enfants qui fréquentent la majorité de nos écoles?
M. Morin (Sauvé): Avez-vous terminé, M. le
député?
J'aurais quelques observations à faire en réponse à
votre exposé que j'ai trouvé fort intéressant. Tout
d'abord, je voudrais vous rappeler que cette politique du lait gratuit est
destinée, d'abord et avant tout, comme j'ai eu l'occasion de le dire
tout à l'heure, aux milieux défavorisés.
Elle est destinée également aux enfants qui n'ont pas
l'habitude du lait. Ce serait une erreur de croire que tous les enfants
québécois souffrent de la surconsommation que vous avez
mentionnée. Beaucoup d'enfants, vous le savez très bien, docteur,
se gavent de toutes sortes de boissons qui n'ont pas la valeur nutritive du
lait, qui sont enrichies de toutes sortes de sucres plus ou moins artificiels
et qui constituent des dangers pour les jeunes, pour leurs habitudes
alimentaires futures. De sorte que si votre correspondant eût voulu
être complet peut-être voudrez-vous lui écrire pour
lui demander de compléter sa recherche il eût fallu qu'il
compare la consommation du lait avec ce qui est consommé dans certaines
écoles, ou même à l'extérieur des écoles, par
les jeunes. Alors, j'aurais trouvé que la recherche était plus
éloquente et m'apportait davantage. Pour l'instant, je constate
simplement que le médecin tient pour acquis que tous les petits
Québécois ne boivent que du lait. Ce n'est pas le cas et vous
savez, comme pédiatre vous-même, que beaucoup d'enfants ne boivent
pas de lait, particulièrement dans les milieux
défavorisés, et que beaucoup d'enfants, même dans les
milieux non défavorisés, boivent trente-six choses plutôt
que du lait.
Ceci étant dit, je vous demanderais de me communiquer copie de la
correspondance, si vous n'y voyez pas d'objection, puisque ce programme doit
être évalué au cours de l'été qui vient,
avant qu'il ne soit étendu encore davantage; à la fin de
l'année prochaine, alors que nous aurons touché à peu
près la moitié de la clientèle scolaire du primaire, soit
350 000 élèves. Avant de procéder à une autre
extension, je serais intéressé à vérifier les
observations dont vous m'avez fait part il y a un instant. Mais avec 350 000
élèves touchés à la fin de l'année
prochaine, nous n'aurons touché
encore que les milieux défavorisés. Ils sont très
nombreux au Québec. Ce sont des régions entières qui sont
dans cet état. Même si vous affirmez que 54% des commissions
scolaires sont touchées, cela ne veut pas dire que 54% des écoles
le sont, parce que toutes les écoles de toutes les commissions scolaires
ne sont pas nécessairement touchées par le programme, jusqu'ici.
Nous n'avons pas eu les moyens de l'étendre nécessairement
à toutes les écoles des commissions scolaires qui se sont
prévalues de ce programme.
M. Goldbloom: M. le Président, s'il s'agit des
écoles élémentaires seulement, il s'agit de 136
commissions scolaires sur 202 seulement, ce qui veut dire 67% des commissions
scolaires.
Je n'ai pas utilisé les chiffres pour démontrer que les
enfants du Québec ne boivent que du lait, mais le Dr Roy, dans son
témoignage, indique que l'enfant moyen, au Québec, boit
déjà assez de lait.
Or, il me semble que si, en moyenne, les enfants du Québec
boivent déjà assez de lait, et même dépassent
légèrement les quantités recommandées, il serait
désirable de démontrer que la clientèle cible est
composée d'enfants qui sont en bas de la moyenne et ne consomment pas
assez de lait. C'est l'essentiel. (21 h 15)
Si le ministre me dit que ces mêmes enfants boivent, en même
temps, d'autres choses, et de façon exagérée, il me semble
que le ministre de l'Éducation pourrait exercer une influence s'il n'a
pas l'autorité pour émettre une directive, je ne le sais
pas, peut-être que non mais qu'il exerce au moins son influence
pour exclure des écoles les choses qu'il trouve dommageables à la
santé des enfants. Il me semble que ce serait une intervention plus
directe que de dire: Nous allons offrir du lait gratuitement pendant que les
enfants devront payer à la cafétéria les autres boissons,
et nous espérerons que le lait offert gratuitement déplacera,
dans le régime alimentaire de l'enfant moyen, les boissons gazeuses et
d'autres choses qui sont moins désirables.
Or, M. le Président, c'est simplement un souci
d'objectivité scientifique qui m'anime lorsque je soulève toute
cette question. Le ministre a répondu qu'à la fin de
l'année il y aura évaluation du programme. La seule chose qui
m'inquiète, devant cette réponse rassurante du ministre, c'est
que, rendus à la fin de l'année, les producteurs de lait se
seront habitués à recevoir annuellement $6 millions de plus, et
il ne se déshabitueront pas facilement à recevoir ce montant.
Le gouvernement continuera-t-il de fournir le montant, même si
l'évaluation démontre que le programme n'est pas
justifié?
M. Morin (Sauvé): S'il se révélait, à
la suite de recherches sans doute plus approfondies, que ce programme de lait
va contre la santé, se révèle plus nuisible, par exemple,
que les boissons gazeuses, il est évident que le gouvernement devrait
reconsidérer cette politique, mais je ne suis pas parfaitement
persuadé par la correspon- dance dont m'a fait part le Dr Goldbloom, le
ministre, le député de Jacques-Cartier, dis-je...
M. Goldbloom: De D'Arcy McGee.
M. Morin (Sauvé): ... de D'Arcy McGee, excusez-moi, toute
mes excuses.
M. Goldbloom: Pas toutes, c'est un bon gars le
député de Jacques-Cartier.
M. Morin (Sauvé): Non, ce n'était pas dit de
façon péjorative, mais...
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est un homme sympathique.
M. Saint-Germain: Si vous l'aviez appelé le
député de Papineau...
Une voix: Ne réveillez pas les...
M. Goldbloom: Ou de Rosemont, encore pire.
M. Morin: C'est la raison pour laquelle j'ai demandé au
député de D'Arcy McGee de me communiquer la correspondance dont
il a fait état. Je voudrais en prendre connaissance, y compris les
détails qui sont importants. Si j'avais une suggestion à faire au
député, ce serait d'écrire une autre lettre qui pourrait
compléter celle-là, aux mêmes chercheurs, aux mêmes
médecins pour leur demander s'ils ont quoi que ce soit à dire sur
la consommation des boissons gazeuses par les Québécois. C'est un
de nos soucis, je puis vous le dire, c'est un des soucis du point de vue de
l'éducation je ne parle pas du point de vue de l'agriculture
de substituer du lait aux boissons gazeuses.
Vous aurez quelques difficultés à me persuader qu'il vaut
mieux pour un jeune de consommer certaines de ces boissons gazeuses
plutôt que du lait, surtout qu'ils en consomment sans doute
déjà à l'extérieur de l'école aussi.
M. Goldbloom: Effectivement, M. le Président, il faut
tenir compte de l'ensemble du régime alimentaire de l'enfant. Cela est
clair. Il me semble cependant que le ministre, en disant qu'il serait
préférable, qu'il pourrait être préférable
que l'enfant consomme davantage de lait et moins de boissons gazeuses, risque
d'oublier un facteur additionnel qui est celui de la suralimentation qui peut
causer des problèmes importants.
Le ministre, avec sa formation scolaire, littéraire et autres, se
rappellera que, dans l'histoire du monde, on a souvent dit qu'il y avait deux
instruments qui avaient tué plus de monde que l'épée. Il y
avait la plume, et il y avait la fourchette.
Le fait que les enfants du Québec, en moyenne, consomment
déjà assez de lait, devrait nous faire réfléchir
sur l'opportunité de leur en donner davantage.
M. Morin (Sauvé): Si j'ai bien compris, M. le
député de D'Arcy McGee me suggère qu'après la
peste, la famine, l'épée et la fourchette, il y aurait le
berlingot.
Je suis sensible à ses arguments. Il n'est de politique
gouvernementale qui ne soit sujette à révision s'il
s'avère qu'elle ne porte pas les fruits qu'on en attend ou qu'elle
produit des résultats contraires à ceux qu'on en attend...
M. Goldbloom: C'est pourquoi on pourrait dire cela de la loi
101.
M. Morin (Sauvé): Nous changeons de sujet, mais là,
vous serez sur des bases scientifiques moins certaines.
M. Goldbloom: N'est-ce pas, n'est-ce pas!
M. Morin (Sauvé): Je suis, je vous l'avoue,
intéressé par les propos du député de D'Arcy McGee.
Je ne dirais certainement pas le contraire, parce que je dirais le contraire de
ma pensée, mais je voudrais que cela soit complété. M. le
député, puisque vous avez des relations dans le monde
médical et scientifique, s'il y avait moyen d'obtenir quelques
considérations du même ordre sur la consommation des boissons
gazeuses par les enfants, je crois qu'il y aurait de quoi faire dresser les
cheveux sur la tête.
On me parlait récemment de travailleurs qui certainement
n'ont pas acquis ces habitudes n'importe où, les habitudes scolaires y
ont peut-être contribué qui pendant une journée
buvaient jusqu'à la douzaine de bouteilles de boissons gazeuses. Vous
aurez quelque difficulté à me persuader que cela n'a pas d'effets
nocifs sur leur santé. Vous savez comment sont fabriquées ces
boissons gazeuses, vous savez quels produits artificiels elles contiennent. Le
lait a au moins l'avantage d'être un produit naturel.
M. Goldbloom: M. le Président, je ne reviendrai pas sur
l'argumentation...
Le Président (M. Marcoux): ... la dernière
goutte.
M. Goldbloom: ... de lait, c'est cela... Je ne reviendrai pas sur
l'argumentation que je viens de porter à l'attention du ministre il y a
quelques instants. Je lui dirai tout simplement que qui dit chercheur dit
chercheur de vérité, et je lui offre ma collaboration pour lui
fournir dans la mesure des moyens scientifiques et humains la
vérité sur l'alimentation des enfants et sur l'opportunité
d'ajouter du lait à ce que consomment déjà les
enfants.
M. Morin (Sauvé): J'accepte cette collaboration, M. le
député. Si vous avez l'amabilité de me tenir au courant de
votre correspondance scientifique, je tenterai d'en faire mon profit.
M. Goldbloom: Volontiers, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Non, de Jacques-Cartier.
Le Président (M. Marcoux): Pardon, de Jacques-Cartier.
Excusez-moi.
M. Goldbloom: Cette fois, c'est à moi d'être
insulté.
M. Saint-Germain: J'avoue, M. le Président, que je suis
très mal à l'aise pour faire cette intervention, moi qui ai
reproché antérieurement au ministère de l'Éducation
d'être toujours en étude. Voilà qu'on s'aperçoit
qu'on a mis en place un programme qui a coûté $6 millions, qui va
coûter $12 millions l'année prochaine et où il n'y a pas eu
d'étude du tout. C'est réellement le monde à l'envers.
M. Morin (Sauvé): Les crédits viennent du
ministère de l'Agriculture, M. le député.
M. Saint-Germain: Là on se comprend, M. le ministre,
là on se comprend. Quand le ministre de l'Éducation se met
à faire de l'agriculture, c'est ce que cela donne. C'est exactement ce
que cela donne.
M. Morin (Sauvé): En l'occurrence, ce serait plutôt
le ministre de l'Agriculture qui se serait mis à faire de
l'éducation, mais je suis loin d'être persuadé que ce soit
aussi nocif que vous voudriez le laisser croire.
M. Saint-Germain: Oui, mais rien n'empêche que vous avez
mis ce programme en place et vous n'avez fait aucune étude pour le
soutenir.
M. Morin (Sauvé): Si.
M. Saint-Germain: Si vous avez des études, dites-le nous,
déposez-les.
M. Morin (Sauvé): Si, si. Il y a tout de même des
études de plusieurs organismes internationaux qui nous démontrent
que le lait est un produit naturel et que les jeunes en croissance en ont
besoin.
M. Saint-Germain: Cela, c'est évident, mais on n'a jamais
dit qu'il n'y avait pas de ces études.
M. Morin (Sauvé): Alors, il vous faut des recherches pour
démontrer cela?
M. Saint-Germain: II faudrait faire des recherches pour savoir,
dans la province de Québec, une des provinces où le niveau de vie
est le plus haut au monde...
Mme Lavoie-Roux: Et où il y a beaucoup de vaches.
M. Saint-Germain: ... et où il y a beaucoup de vaches
il y en a même trop, il semble si, réellement...
Mme Lavoie-Roux: II y en a même à l'Assemblée
nationale.
M. Saint-Germain: ... on a besoin d'un tel programme. N'essayez
pas de croire qu'on défend la vente ou la consommation des liqueurs
gazeuses et des biscuits au chocolat, on parle de quelque chose de bien
spécifique. Vous avez établi, avec l'argent du public, un
programme, et voilà qu'on voit, en noir et blanc, que vous n'avez fait
aucune étude préliminaire, vous avez agi par oreille. Sous quelle
influence? Je ne le sais pas. Pour protéger les intérêts de
qui? Des cultivateurs?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je m'inscris en
faux contre cette intervention, puisque, dans l'intervention beaucoup plus
nuancée du député de D'Arcy McGee, il était tout de
même visible que certains milieux défavorisés peuvent faire
leur profit d'une politique comme celle-là. Donc, avant de la
dénoncer a priori, il faudrait tenir compte de cet aspect des
révélations scientifiques du député de D'Arcy
McGee. Si nous n'avions pas posé de geste comme celui-là,
aujourd'hui, le député de Jacques-Cartier, selon sa bonne
habitude, viendrait nous blâmer de passer notre temps à faire des
études. Cela me rappelle l'ancien député des
Îles-de-la-Madeleine qui disait tout le temps en Chambre: Ce n'est pas
des chercheurs qu'il nous faut, c'est des trouveurs. C'est aussi brillant que
cela.
M. Saint-Germain: M. le Président...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la commission de
l'agriculture siège en bas en ce moment, j'invite le
député à s'y rendre.
M. Saint-Germain: Peut-être, quand le ministre de
l'Éducation se lance dans des programmes qui, en fait, ne sont pas de sa
responsabilité, devrait-il demander des conseils à quelqu'un qui
s'y connaît dans le domaine. C'est tout ce qu'il en est. Pourquoi ne pas
donner du fromage, par exemple, à nos enfants? Ce serait peut-être
plus intelligent. C'est que, premièrement, c'est plus facile à
distribuer et cela se conserve mieux, il y aurait peut-être moins de
gaspillage. On pourrait leur fournir des pommes aussi; on produit beaucoup de
pommes dans le Québec, on dit même qu'on a des difficultés
de mise en marché. On pourrait aussi leur donner du poisson frais; on
dit que, au Québec, contrairement au Japon, on ne consomme pas assez de
poisson.
Mais, lorsqu'on voit comment le ministère de l'Éducation a
de la difficulté à éduquer les jeunes, s'il faut qu'il se
mette à les nourrir en plus, on n'a pas fini, cela va coûter cher
tout à l'heure, croyez-moi, et cela ne veut pas nécessairement
dire que cela va être beaucoup plus efficace, parce que le gouvernement
ne peut pas faire de discernement, il va donner du lait à tous les
enfants dans une école, il ne peut pas sélectionner les enfants
qui en auraient réellement besoin et ceux qui n'en ont pas besoin. Tout
à l'heure, on ne pourra pas même se limiter à certains
quartiers ou à certaines commissions scolaires. C'est bien typique du
gouvernement pour qui, lorsqu'il y a un programme, c'est de l'étendre
à tout le monde et de le généraliser. On s'aperçoit
qu'on est parti là dans une aventure. Je crois que le ministre devrait,
au moins, faire faire des études par des gens qui s'y connaissent.
D'ailleurs, il n'y a rien de nouveau là-dedans; je me souviens
très bien que, lorsqu'on allait à l'école, dans notre
paroisse, il y avait une distribution de lait qui se faisait.
M. Morin (Sauvé): Cela mène à
l'obésité, m'a-t-on dit.
M. Saint-Germain: Ce n'est pas le lait pour moi, M. le ministre,
soyez sans inquiétude, et je n'ai jamais envoyé mes enfants
à l'école pour les faire nourrir non plus. Je les ai
envoyés à l'école pour leur donner une éducation,
ce qu'on n'a pas toujours réussi à faire, malheureusement.
M. Goldbloom: Et, du côté gouvernemental, il y a une
certaine vulnérabilité sur ce sujet.
M. Saint-Germain: II me semble tout de même qu'il serait
excessivement important qu'il y ait, dans le domaine de la nutrition, une
formation que l'on pourrait donner dans nos écoles. Il me semble
important et je ne suis pas le seul à le dire qu'on donne
aux jeunes des cours valables au point de vue de la qualité des
nourritures que l'on consomme et des effets, au point de vue santé, de
cette nourriture. Cela a manqué dans le Québec. Il n'y a pas si
longtemps, dans cette province, on vivait une vie rurale, les gens
travaillaient, gagnaient leur vie au grand air, habituellement, et cette
société québécoise s'est transformée
très vite. Aujourd'hui, on mène une vie beaucoup plus
sédentaire, on vit à l'intérieur, avec des degrés
de température qui varient très peu. Malheureusement, nous avons
tout de même conservé, par tradition, une certaine façon de
se nourrir qui n'est plus et qui n'est pas adaptée aux
nécessités modernes. Cela aiderait énormément si le
ministère de l'Éducation donnait aux jeunes dans ses programmes,
au niveau élémentaire comme au niveau secondaire, et même
dans les études plus avancées, des cours sur la qualité de
la nutrition. D'ailleurs, au niveau du cégep, cela pourrait entrer
très aisément dans les cours de chimie ou les expériences
de laboratoire en chimie, et ainsi de suite. Mais on ne fait pas cela.
(21 h 30)
En plus, dans nos écoles, au niveau des restaurants ou de ceux
qui sont amenés à servir le lunch, on permet de vendre à
peu près n'importe quoi. On ne semble absolument pas s'en scandaliser.
Vous n'avez pas besoin de grandes études pour faire cela. Vous entrez
dans les écoles et vous voyez ce qui peut s'y vendre, toutes sortes de
choses dont les enfants ne devraient pas faire usage.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Jacques-Cartier a droit à vingt minutes.
M. Saint-Germain: Vous avez des mères de famille qui
s'évertuent à priver leurs enfants de liqueurs douces ou de
friandises et de gâteaux, et qui essaient de les nourrir de façon
convenable. Malheureusement, lorsqu'ils sont à l'école ils ne
sont plus sous l'autorité des parents. C'est là que les enfants
vont boire des liqueurs douces. On remet aux enfants des sommes pour se nourrir
et ils se limitent à acheter des friandises avec cet argent qu'on leur
remet. Il n'y a aucune autorité sur eux et ils en profitent.
Ce n'est pas en distribuant du lait à coup de millions qu'on va
arriver à solutionner un tel problème.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je
espérer que ce débat touche maintenant à sa fin et dire
que des deux dernières interventions, je retiendrai la plus scientifique
et j'en ferai mon bénéfice?
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je pourrais ajouter un mot?
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
M. Morin (Sauvé): Sur le même sujet.
Mme Lavoie-Roux: Sur le même sujet, mais très
brièvement. D'abord, une question très précise. Je vois
qu'on a fait l'acquisition d'un grand nombre de réfrigérateurs;
j'espère qu'on ne sera pas obligé de les revendre dans quelques
années. Mais là n'est pas le point de ma question. Est-ce qu'on
peut me dire qui en a fait l'acquisition? Est-ce que c'est le ministère
de l'Éducation? Si tel est le cas, a-t-on procédé par
soumissions?
M. Morin (Sauvé): Ce sont les commissions scolaires qui
ont acheté les réfrigérateurs avec une subvention du
ministère de l'Éducation. Pour la façon dont on a
procédé, je n'en suis pas sûr. Il me semble avoir entendu
dire entre les branches qu'on ait voulu que ces réfrigérateurs
soient fabriqués au Québec. C'est la seule notion que j'en ai. Je
vais prendre conseil, si vous voulez.
M. Saint-Germain: M. le Président...
M. Morin (Sauvé): La réponse, me dit-on, est la
suivante: Lors de la première série d'achat, qui devait sans
doute avoir lieu l'automne dernier au moment où la politique a
été mise en oeuvre, on a procédé par soumissions au
ministère de l'Agriculture auprès de firmes
québécoises. Cette fois-ci, nous allons passer par le service
général des achats. Il y aura, une fois de plus, soumissions et
application, cette fois, de la politique d'achat au Québec qui est
entrée en vigueur depuis lors.
Mme Lavoie-Roux: Parfait. M. le ministre, tout à l'heure,
vous disiez que jusqu'à maintenant il n'y avait que les milieux
défavorisés qui avaient été servis par cette
politique. Comme je le disais au début de mon intervention, je suis
contre la généralisation sans évaluation.
Il serait peut-être bon que vos services s'en-quièrent
auprès des diverses commissions scolaires. Il y a des commissions
scolaires où c'est rendu, non plus dans les milieux
défavorisés... parce que les sommes ont été
allouées par commission scolaire. Ce ne sont pas que des enfants de
milieux défavorisés qui reçoivent le lait. Si on tient
compte des remarques de mon collègue de D'Arcy McGee, je pense qu'on ne
peut que le regretter, même si on nous avait dit qu'avant de
procéder à une autre étape de cette distribution de lait,
ce serait évalué, d'autant plus que, tout à l'heure, vous
nous avez dit qu'en 1981 ce serait rendu universel...
M. Morin (Sauvé): C'est l'objectif, mais quitte à
le revoir, si l'évaluation nous révèle qu'il n'est pas
nécessaire d'étendre la politique à tout le monde.
Mme Lavoie-Roux: II faudrait se hâter de faire
l'évaluation; on est rendu à $6 millions, de toute façon.
Je pense que c'est fort regrettable qu'elle n'ait pas été faite.
J'inviterais le ministre qui, je comprends, veut être solidaire du
cabinet quand on fait ce genre de politique, à ne pas oublier qu'il est
le ministre de l'Éducation alors que le député de
Lévis est le ministre de l'Agriculture. Ceci me semble essentiel.
M. Morin (Sauvé): C'est une politique qui a
été largement approuvée par les parents, je peux vous le
dire. On m'en parle jusque durant ma tournée sur le livre vert. Les
parents sont ravis, de façon générale, de cette politique.
Ils savent très bien ce que les enfants consomment dans les
écoles quand il n'y a pas de lait. Il faut tenir compte de cette
dimension.
Mme Lavoie-Roux: Mais, M. le ministre, je serais prête
à vous appuyer et à réaliser que ce que vous dites est bon
si je ne savais pas qu'en même temps, dans nombre de
cafétérias là-dessus, vous pourriez peut-être
faire un autre lien ce qu'on donne aux enfants, ce sont les aliments
dont vous parliez tout à l'heure, que vous avez décrits comme
étant enfin, il ne faut pas que j'utilise le même terme, je
vais me faire réprimander par mon collègue...
M. Morin (Sauvé): N'hésitez pas, n'hésitez
pas, madame, je vous en prie.
Mme Lavoie-Roux:... de D'Arcy McGee. Écoutez, c'est de la
patate frite, c'est de la pizza, des pâtes et des desserts. C'est pour
cela que j'ai l'impression qu'on met un peu, dans certains milieux, la charrue
avant les boeufs. Enfin, comme on parle de l'agriculture...
M. Morin (Sauvé): Je dois dire que je suis très
favorablement impressionné, madame le député, par ce qui
se fait au sein du CSIM, dans sa tentative de sortir des écoles les
pires de ces poisons. Bien sûr, on n'a peut-être pas réussi
encore sur toute la ligne mais on a tout de même, par exemple, introduit
la pomme à la place d'un certain nombre de gâteaux qui se
vendaient auparavant et qui, sur le plan nutritif, ne représentaient
à peu près rien ou représentaient un apport qui
n'était pas nécessaire à la croissance de l'enfant.
Mais là, je vais laisser la place à l'homme scientifique
qui va sûrement me dire que ces gâteaux n'étaient pas si
mauvais que cela.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, M. le ministre, mais vous glissez
dans les argumentations du député de D'Arcy McGee pour essayer de
lui faire dire que les liqueurs gazeuses étaient bonnes alors que
évidemment, vous vous défendez comme vous pouvez, mais le fond du
problème n'est pas celui-là.
Bon, on pourrait peut-être passer à un autre sujet, M. le
ministre.
M. Saint-Germain: J'aimerais bien terminer, M. le
Président.
M. Morin (Sauvé): M. le député de D'Arcy
McGee va pouvoir y revenir.
M. Saint-Germain: Je sais bien que le ministre n'a pas trop
confiance en ma formation scientifique; d'ailleurs, dans sa dernière
phrase, il me l'a laissé sentir. Vu que c'est un sujet qui n'est pas
explosif, la nutrition, et qu'il a immensément confiance en son
système d'éducation, s'il faisait étudier ce que le Dr Roy
dit par ses commandos du pif, peut-être qu'on pourrait arriver à
des conclusions scientifiques et valables.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je vais
m'enquérir de cette possibilité.
M. Saint-Germain: Cela ne serait pas dangereux pour les enfants,
M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Ce serait le commando du lait.
M. Saint-Germain: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Ou de la nutrition, M. le ministre.
M. Goldbloom: M. le Président, peut-on demander au
ministre si l'introduction de la pomme à l'école a un rapport
avec un certain retour à des habitudes d'Adam et Eve dans la
deuxième phase de leur existence?
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): C'est le mot de la fin de ce
débat, je crois.
M. Morin (Sauvé): Oui, j'ose l'espérer.
Le Président (M. Marcoux): Je vous inviterais, pour les
vingt minutes environ...
M. Morin (Sauvé): Car nous voilà de retour au
paradis terrestre.
M. Saint-Germain: Vous avouerez...
M. Morin (Sauvé): Peut-être pourrions-nous
maintenant faire avancer les débats, compte tenu de la faute
originelle.
Le Président (M. Marcoux): J'ai peur qu'il ne se commette
quelques péchés...
M. Saint-Germain: Vous avouerez, M. le Président,
que...
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous désirez
aborder un autre sujet?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Les milieux défavorisés
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais, très
brièvement, je vais surprendre le ministre je pense qu'on est un
peu fatigué aborder le programme des milieux
défavorisés.
Je vois, M. le ministre, qu'on continue de mettre en place,
c'est-à-dire de développer le programme Passe-partout. On donne
des chiffres quant au nombre de commissions scolaires qui ont été
impliquées, à la façon dont les animateurs ont
travaillé, etc. Est-ce que, là aussi, encore une fois, on
procède à une évaluation de ce programme pour les milieux
défavorisés qui, en fait, on l'a dit l'année
dernière, est un programme qui va dans tous les foyers? Il faudrait
peut-être savoir s'il va davantage dans les foyers des familles moyennes
que dans celles des milieux défavorisés, sauf dans les cas
où vous avez des animateurs.
Est-ce qu'on évalue ce programme?
M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, je dois
vous dire, d'abord, que plusieurs types d'évaluation sont
appliqués à la série Passe-partout. Il y a d'abord une
évaluation qui porte sur chaque émission, sur le contenu de
chaque émission. Elle est regardée et critiquée sur le
plan pédagogique et sur le plan esthétique. En plus de cela, il
doit y avoir d'autres évaluations. Je vais demander au sous-ministre
responsable du secteur de vous donner les détails.
Il y a. effectivement, trois types d'évaluation. Il y a celle que
vient d'évoquer M. le ministre, qui est une évaluation par
émission, qui se fait par une équipe de pédagogues et qui
se fait beaucoup plus à partir du sens commun, de l'observation, de
l'expérience des éducateurs, que de grilles très
scientifiques. Elle fait l'objet de remarques consignées. Dans
certains cas, certaines séquences sont reprises pour améliorer
l'émission, mais c'est surtout par addition. C'est le premier type
d'évaluation.
Le deuxième type d'évaluation en est une que je
qualifierais d'évaluation d'impact. Les émissions sont-elles
écoutées? Elles sont écoutées par qui? Sont-elles
écoutées davantage par les plus jeunes, par les plus vieux? A ce
jour, les rapports que nous avons montrent que cette émission est celle
qui a la plus haute cote d'écoute de toutes les émissions pour
enfants, actuellement, au Québec, y compris les grandes émissions
comme Bobino, par exemple. C'est ce que j'appellerais l'évaluation de
l'impact.
Il y a un troisième type d'évaluation qui commence,
présentement, et qui est plus complexe, on le devine. C'est la
qualité de l'émission au plan de l'atteinte des objectifs. Comme
c'est une émission qui poursuit d'abord des objectifs de
développement psychomoteur et socio-affectif chez les enfants, davantage
que d'apprentissage des connaissances, il est difficile, évidemment,
d'évaluer les retombées d'une telle émission. Les travaux
sont avancés et on commence à valider des instruments pour ce
faire. C'est très complexe, c'est long, mais cela se fait. On a
commencé à le faire.
Mme Lavoie-Roux: Je vous félicite, je trouve cela
excellent.
Du point de vue des autres programmes prévus, il y a une
augmentation des budgets de $1 million pour les milieux
défavorisés, du moins d'après la page 41, où on
voit qu'il y a $1 million de plus pour les milieux défavorisés. A
quoi ce million sera-t-il affecté?
En même temps, je vous pose une autre question. Quels sont les
autres programmes que vous développez dans ce secteur, ou sur lesquels
vous mettez l'accent?
M. Morin (Sauvé): Pour la première partie de votre
réponse, cet argent est affecté, en priorité, à
l'encadrement de ces émissions Passe-partout. On devine bien que ces
émissions, qui sont faites pour des enfants d'âge
préscolaire, sont faites pour tous les enfants du Québec. Les
enfants défavorisés ne sont pas différents au point
où il faille des émissions spécifiques pour eux.
Cependant, dans la préparation et dans l'évaluation qu'on fait de
ces émissions, on est particulièrement attentif à
s'adresser à des enfants de milieux moyens et défavorisés.
On évite donc des séquences qui renvoient à des mondes
tout à fait impensables pour des enfants plus défavorisés.
C'est l'aspect de l'ajustement de l'émission. Il est difficile de
trouver une moyenne; pour vous donner un exemple, un téléphone
couleur, est-ce quelque chose qu'on met dans une émission
télévisée qui s'adresse à des enfants
défavorisés? Ce sont des questions aussi concrètes que
celle-là qui se posent. Si on fait manger les enfants, leur fait-on
je ne veux pas faire de chicane ici manger un cocktail de
crevettes comme entrée? (21 h 45)
Mme Lavoie-Roux: On était d'accord pour le lait.
M. Morin (Sauvé): Les réalisateurs ont des
problèmes techniques de ce genre. Pour être bien certains de
pallier cette difficulté qu'on essaie de contourner le mieux possible,
on assure aux commissions scolaires défavorisées un soutien
d'encadrement des familles qui soit supplémentaire. Le million qu'on
ajoute pour l'année prochaine, c'est pour l'encadrement. Cet
encadrement, il s'agit de pédagogues animateurs qui seront
engagés par les commissions scolaires, sur subventions spéciales
du ministère, et qui oeuvreront dans 35 commissions scolaires en
septembre prochain auprès des parents des milieux
défavorisés. Nous avons déjà
expérimenté dans quatre commissions scolaires ce mode d'approche.
On l'étendra aux 35 commissions scolaires les plus pauvres du
Québec, les plus défavorisées, en septembre prochain.
De plus nous doterons les parents de ces milieux
défavorisés d'instruments, de cahiers Passe-partout et les
enfants de baluchons Passe-partout qui vont comprendre un certain nombre de
petits outils dont les enfants ont besoin et qu'ils sont souvent trop pauvres
pour se procurer comme des plumes feutre, des cahiers à colorier, etc.
Le million est donc pour supporter, dans les milieux défavorisés,
l'émission.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces commissions scolaires ont des
prématernelles?
M. Morin (Sauvé): Quatre ans? Mme Lavoie-Roux:
Oui.
M. Morin (Sauvé): Le programme des maternelles quatre ans,
par voie de conséquence, ne sera pas développé davantage
au cours de la prochaine année. La logique, c'est de tenter,
graduellement, de ne pas dédoubler les maternelles quatre ans et
l'utilisation de la télévision éducative.
Plusieurs de ces commissions scolaires, cependant, ont
déjà des maternelles quatre ans; j'ai la liste ici et plusieurs
en ont déjà. Alors, on ne les enlève pas pour autant ces
maternelles quatre ans, parce que les maternelles quatre ans ont justement
été allouées aux milieux les plus
défavorisés depuis le début. Cela se dédouble en
partie. On les maintient pour le moment.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
De quelle façon faites-vous le regroupement des parents parce
qu'il s'agit d'enfants d'âge préscolaire? Est-ce que les
animateurs regroupent les parents pour faire l'animation?
M. Morin (Sauvé): On a eu quatre expériences cette
année, deux dans les régions urbaines deux en régions plus
éloignées. Ce que je sais je n'ai pas travaillé de
très près à cela c'est qu'aucun des quatre
animateurs n'a travaillé de la même façon. Il y a des
milieux très défavorisés où il faut faire
pratiquement du porte à porte pour aller
chercher les parents. Des milieux un peu plus organisés où
la commission scolaire peut déjà, par des activités
parapédagogiques d'information pour les parents, regrouper ces
parents.
On essaie justement de développer des modèles
d'intervention auprès des parents, d'où le fait que nos
critères de sélection et d'engagement de ces pédagogues
animateurs, c'est d'abord des gens qui doivent avoir un profil
d'éducateur et qui ont travaillé au préscolaire, qui ont
quelques années d'expérience, qui ont travaillé dans ces
milieux autant que possible et qui habitent dans les régions où
ils vont travailler. Vous connaissez bien ce problème de la localisation
des animateurs.
Mme Lavoie-Roux: En fait, l'argent va d'abord au
développement du programme de télévision lui-même,
à son évaluation et à la formation des animateurs. Est-ce
qu'il y a d'autres points il y a des prématernelles qui existent
à certains endroits sur lesquels vous mettez l'accent? Je vais
vous en nommer; par exemple, du côté de la formation des
maîtres, du côté de l'animation du milieu. Il reste que, de
plus en plus, on a prouvé que là où il peut y avoir
certains résultats, c'est là où on peut faire une
mobilisation générale du milieu, des ressources communautaires,
etc, qui vraiment s'impliquent comme un tout dans cette action. Est-ce que vous
avez ce type d'animation?
M. Morin (Sauvé): Ce vers quoi nous nous acheminons, dans
ce programme d'intervention en milieu défavorisé, c'est vers
l'élaboration d'une politique d'intervention. Une politique explicite,
aussi générale que possible et, par voie de conséquence,
d'un plan d'intervention en milieu défavorisé. Le mode de travail
que nous avons adopté depuis trois ans, au ministère de
l'Éducation, dans ce dossier délicat, c'est une double action
dans le fond. Une série de mesures sont expérimentées dans
divers milieux et à divers niveaux, concrètement. Donc, des
sommes qui sont versées dans les commissions scolaires et qui laissent
des traces de toute façon, même si parfois, comme c'est un peu
expérimental, il y a une certaine perte.
Parallèlement, des travaux de recherche et de réflexion
sont en cours sur la question des milieux défavorisés, sur les
choix sociaux qu'il faut retenir, en vue d'en arriver à une politique.
Ce que nous faisons le comité de travail qui élabore cette
politique en collaboration avec des gens de l'extérieur nous
mettons continuellement ensemble des réflexions plus théoriques
de recherche et des évaluations d'action.
Dans le milieu, nous avons présentement des actions du type
suivant: des expérimentations de formation
d'équipes-écoles, dans quatre écoles, dans quatre
commissions scolaires. Je me souviens que la Commission scolaire La Neigette
était impliquée dans ces expériences, de même que
trois autres. Il y a quatre commissions scolaires dans lesquelles nous avons
développé, depuis deux ans ces expériences... Nous sommes
partis de l'hypothèse que la présence d'une équipe
d'éducateurs, dans un milieu défavorisé, deman- dait un
type de sensibilisation particulier. Voilà une chose qui est assez
concluante. C'est un élément qui devrait sûrement
être retenu dans un plan la formation d'équipes-écoles.
Nous avons des expériences plus modestes, plus difficiles, du
côté du soutien au niveau secondaire. Nous avons alloué
$284 000 répartis entre un certain nombre de commissions scolaires qui
ont fait des propositions pour des projets concrets. Nous avons
déjà identifié un certain nombre de projets qui sont
porteurs d'avenir et qui pourront servir dans un plan sur tout le
territoire.
Nous avons les maternelles, bien sûr, quatre ans et cinq ans, qui
prennent $3 700 000 du budget. Le programme le plus important actuellement,
c'est le programme Passe-partout, qui prend une bonne partie du budget parce
qu'il est en production. Quand la production sera terminée, nous
bénéficierons de cette production pour dix ans; on calcule une
utilisation de dix ans de Passe-partout.
Mme Lavoie-Roux: Dans vos efforts d'animation du milieu pour
mobiliser l'ensemble du milieu, est-ce que vous avez à ce
moment-ci...
M. Morin (Sauvé): Quand vous parlez d'ensemble du milieu,
vous parlez d'un milieu défavorisé?
Mme Lavoie-Roux: Oui, dans un milieu
défavorisé.
M. Morin (Sauvé): Dans un milieu défavorisé,
ce que nous faisons présentement, c'est modeste. C'est un ou deux
animateurs dans la commission scolaire qui vont commencer à essayer de
regrouper les parents, de les sensibiliser aux problèmes particuliers de
leurs enfants. Parallèlement et concurremment, il y a des écoles
qui doivent développer une démarche particulière. C'est
concurrent et cela s'additionne aussi. On fait la promotion de Passe-partout
dans le même milieu. Certains de ces milieux bénéficient
déjà de la maternelle quatre ans. On fournit les outils
particuliers de soutien à l'émission Passe-partout. Cela commence
à faire une certaine somme de moyens; c'est par addition aussi.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Je suis d'accord pour cela mais, je
veux dire, est-ce que vous essayez de sortir de l'école parce que toutes
ces mesures, pour amener le milieu dans l'école et amener cet effort de
coordination... quand même, le milieu a des ressources en dehors de
l'école.
M. Morin (Sauvé): À ce jour, je dois dire qu'on a
fait peu de choses pour rendre un peu globale notre action. Le premier
problème que l'on rencontre quand on développe une politique
d'intervention en milieu défavorisé, c'est ce que je qualifierais
la limite de l'intervention éducative. Je pense qu'on le soulignera dans
la politique; on soulignera, dans le fond, que le ministère de
l'Éducation veut bien prendre la tranche qui lui revient
là-dedans et faire quelque chose plutôt que de dire que cela
prendrait de grandes politiques globales, attendons-les. Mais je crois que vous
allez convenir que cela prend d'autres interventions qu'éducatives.
Il faut songer que tout cela devrait être complété
par des politiques d'habitation, par des politiques d'allocation, par de
nombreuses politiques sociales mais que, cependant, à
l'éducation, nous n'étions pas obligés d'attendre que tout
aboutisse pour nous mettre en route, d'autant...
Mme Lavoie-Roux: ... on n'est jamais parti.
M. Morin (Sauvé): ... que nous nous sommes
persuadés que ce type d'intervention pouvait être
bénéfique et pouvait aider à placer les enfants sur un
pied d'égalité, au moment où ils entrent en
première année. C'est l'objectif que nous visons.
Mme Lavoie-Roux: Deux questions parce que je ne veux pas
m'étendre de toute façon, il est 21 h 55 qui sont des
questions plus concrètes. La première, je l'ai soulevée en
préambule l'autre jour, suite à une intervention du ministre:
Quelles sont les intentions du ministère à l'égard du
financement des programmes en milieu défavorisé du Conseil
scolaire de l'île de Montréal? On sait fort bien je pense
qu'on l'a établi l'autre jour avec le sous-ministre que c'est au
plus 20% à 25% que le ministère assume; ce n'est pas que les
milieux ne doivent pas essayer d'établir des priorités qui ne
soient pas celles-là.
Je pense que, eu égard aux sommes que le ministère verse
dans d'autres commissions scolaires, il y a un peu une question de justice,
à ce moment-là. Autant je veux que les milieux viennent à
mettre de côté, ou à établir, comme priorité,
dans leurs ressources financières, ce problème, tant et aussi
longtemps que vous ne demandez pas aux autres milieux de le faire, je trouve
qu'on est très exigeant à l'égard du conseil scolaire de
l'île de Montréal qui, quand même, y met des sommes
considérables.
M. Morin (Sauvé): La question s'adresse, bien sûr,
à M. le ministre.
Le budget du Conseil scolaire de l'île de Montréal
destiné aux milieux défavorisés est de $5 600 000, et vous
le saviez, je pense. De ce montant, $1 600 000 sont consacrés à
l'animation et à quelques autres activités, tandis que $4
millions sont consacrés aux maternelles 4 ans et aux
prématernelles. Sur ce montant de $5 600 000, le conseil recevra 28% du
gouvernement, c'est-à-dire $1 100 000.
Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez augmenté, je pense, de
quelques centaines de mille, cette année.
M. Morin (Sauvé): C'est cela, de façon que
Montréal reçoive, grosso modo, sa part de ce que nous distribuons
à travers l'ensemble du Québec, pour les milieux
défavorisés.
Mme Lavoie-Roux: Dans quelle mesure, les autres commissions
scolaires font-elles un effort pour financer elles-mêmes une partie, ou
même, aller au-delà des programmes que le ministère...?
M. Morin (Sauvé): II se fait quelques efforts sur lesquels
il faudrait aller chercher des précisions. Je dois vous dire que
Montréal est en avance.
Évidemment, il existe, au niveau du conseil, une motivation
particulière qui l'amène à s'occuper de ces questions.
C'est, tout simplement, que la loi 73 lui fait une obligation de s'en occuper,
alors que nous n'avons pas une pareille obligation...
Mme Lavoie-Roux: Oui, la loi 71.
M. Morin (Sauvé): Loi 71, dis-je. Une pareille obligation
n'existe pas pour les autres commissions scolaires.
Mme Lavoie-Roux: Vous savez pourquoi elle l'a, l'obligation.
C'est parce qu'elle se l'est créée elle-même.
C'est-à-dire que la CECM avait beaucoup insisté pour que ce soit
inclus dans la loi 71. Il faudrait aussi que ce même mouvement puisse
originer des autres commissions scolaires.
M. Morin (Sauvé): Oui. C'est une des raisons pour
lesquelles les budgets destinés aux milieux défavorisés
augmentent. Il faut dire que le milieu montréalais a peut-être
aussi des moyens dont ne disposent pas certaines autres régions. En tout
cas, je ne voudrais pas diminuer son mérite, parce que je
considère que ce qu'il s'y fait, dans ce domaine, est remarquable.
Mme Lavoie-Roux: C'est bien beau d'avoir un témoignage
d'estime, mais je me demande si, compte tenu du nombre de la population
à servir dans ces milieux, comparativement à d'autres commissions
scolaires, il n'y aurait pas un effort plus grand qui pourrait être fait
par le ministère de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): Ils ont leur part. Tant mieux s'ils font
davantage. Je crois qu'ils ont raison de faire davantage, parce que, vous savez
comme moi que les milieux défavorisés de certains quartiers de
Montréal ont grand besoin qu'on mette en place des programmes qui leur
soient destinés. Ils reçoivent leur dû, en proportion de la
population et du nombre d'élèves qui relèvent de leur
responsabilité.
Mme Lavoie-Roux: Je vais poser ma question
différemment.
Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir, alors, un effort plus grand de la
part du ministère à l'égard de toutes les commissions
scolaires, qui ferait
qu'elles pourraient recevoir davantage, ou même, développer
davantage de services, sans être traitées avec plus de faveur que
les autres?
M. Morin (Sauvé): Les autres commissions scolaires ne
peuvent être amenées à prendre des attitudes comme
celle-là que peu à peu. Il y a là un élément
d'éducation, pour les y amener graduellement. Nous tentons de le faire
avec ce que nous versons à destination des milieux
défavorisés. Je dois dire, cependant, qu'avant qu'on arrive au
niveau de ce qui se fait à Montréal, il va y avoir du travail
à faire. (22 heures)
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, dernièrement il y a un
rapport qui a été déposé, par Mme Giroux, touchant,
je crois, le Bas-du-Fleuve et la Gaspésie ou l'Est du
Québec on en faisait état à la radio,
c'était... Je ne sais pas si vous les appelez encore des études
de pauvreté. Est-ce qu'il n'y a pas un rapport qui dernièrement a
été...
M. Morin (Sauvé): Ce à quoi Mme Giroux a fait
allusion, à la télévision, lors d'une entrevue, c'est
cette étude sur les zones de pauvreté qu'on vous a d'ailleurs
fait tenir déjà. C'est l'étude à cahier rouge.
Mme Lavoie-Roux: Non, je ne l'ai pas reçue.
M. Morin (Sauvé): Oui, c'est moi qui vous l'ai
postée, l'année passée, mais on en a d'autres
exemplaires.
Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, je devrais la retrouver.
M. Morin (Sauvé): L'année dernière, à
la suite de la commission parlementaire. Il en avait été question
à la commission parlementaire, on en avait pris note et, quatre mois
après, quand elle est sortie, elle a été envoyée
aux membres de la commission parlementaire, mais cela dit, elle ne vous est
peut-être pas parvenue.
Mme Lavoie-Roux: C'est à celle-là qu'elle faisait
allusion.
M. Morin (Sauvé): C'est une étude qui s'appelle
"Les zones de pauvreté" dans laquelle il y a deux cartes couleur qui
montrent la distribution des commissions scolaires. C'est assez impressionnant,
d'ailleurs.
Mme Lavoie-Roux: II reste que les besoins sont quand même
très grands en dehors de Montréal également. Est-ce que
vous avez l'impression que vous développez à un rythme suffisant
pour servir tous les milieux défavorisés de l'extérieur de
Montréal?
M. Morin (Sauvé): Avant de nous lancer dans une politique
complète et détaillée, il fallait avoir des instruments de
travail. C'est la raison pour laquelle nous avons commencé par
établir cette fameuse carte des zones de sous-développement.
Mme Lavoie-Roux: Vous les avez maintenant!
M. Morin (Sauvé): Nous les avons et, à l'automne,
j'ai eu l'occasion de le dire déjà, une politique va être
construite à partir de ce rapport.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que vous vous engagez
à ce que ce plan de développement des zones
défavorisées soit déposé avant Noël? Je suis
même généreuse, je pourrais vous dire à l'automne,
je vous dis avant Noël.
M. Morin (Sauvé): Normalement, la politique
elle-même devrait être déposée chez le ministre
à l'automne, au mois de septembre ou du moins vers septembre et le plan
devrait suivre au cours de l'année, du moins d'après les travaux
que nous poursuivons.
Mme Lavoie-Roux: Cette année-ci ou l'autre?
M. Morin (Sauvé): II faudra que ce plan aille devant le
Comité permanent de développement social, il faudra qu'il aille
également devant le Conseil des ministres. Normalement c'est une
opération qui prend de six à sept semaines.
Mme Lavoie-Roux: Je pensais que vous alliez dire de six à
sept mois.
M. Morin (Sauvé): Non, de six à sept semaines. Il y
a eu des livres blancs qui ont pris plus de temps, mais d'autres ont
été expédiés en trois semaines, c'est variable.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Marcoux): Sur ces remarques, nous
allons...
M. Morin (Sauvé): Pouvons-nous adopter... Le
Président (M. Marcoux): Le programme 4?
M. Morin (Sauvé): ... ce qui est relatif au primaire et au
secondaire, madame?
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, mais j'aurais encore des questions
pour mardi matin.
M. Morin (Sauvé): Bon. M. le Président, je voudrais
simplement avoir une idée de la répartition du temps...
Mme Lavoie-Roux: Non, je pense...
M. Morin (Sauvé):... parce qu'il faut que nous ayons le
temps pour le collégial et l'universitaire.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je ne veux pas m'engager d'une
façon rigoureuse, je pense qu'on pourrait terminer
l'élémentaire et le secondaire mardi matin et que nous pourrions
commencer le collégial et la suite mardi après-midi.
M. Morin (Sauvé): Ce serait encore raisonnable et nous
aurions l'espoir de terminer jeudi.
Mme Lavoie-Roux: Je vous ai garanti que vous termineriez
jeudi.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais c'est que vous n'êtes
pas la seule dans le tableau, il y a l'éloquent député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Monsieur, moi j'en ai assez, croyez-moi; le
plus tôt fini, mieux ce sera.
Mme Lavoie-Roux: Voyons!
Le Président (M. Marcoux): La commission de
l'éducation ajourne ses travaux à mardi prochain, dix
heures...
(Fin de la séance à 22 h 4)