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(Quinze heures trente et une minute)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire de l'éducation continue
l'étude des crédits du ministère de l'Éducation.
Les membres de la commission aujourd'hui sont: M. Brouillet (Chauveau), M.
Champaqne (Mille-Îles), M. Chevrette (Joliette), M. Cusano (Viau), M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Hains
(Saint-Henri), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laurin (Bourget), M. Leduc
(Fabre), M. Paquet (Rosemont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. French
(Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), M. Paré (Shefford), M. Polak
(Sainte-Anne), M. Proulx (Saint-Jean), M. Rochefort (Gouin), M. Ryan
(Argenteuil), M. Saintonge (Laprairie).
Comme il y avait déjà un rapporteur, on n'en nommera pas
un nouveau. Je pense, étant donné que ce n'était pas moi
qui étais président à la dernière séance,
qu'on était rendu au programme 4, d'ailleurs le premier à
être étudier. Est-ce que le programme 4 sera adopté?
M. Lalonde: Non, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Enseignement primaire et secondaire public
(suite)
M. Lalonde: M. le Président, nous avons abordé
l'étude du programme 4 de façon fort générale.
J'avais, jeudi dernier, indigué que la question des coupures ferait
l'objet d'une discussion après la rencontre avec le gouvernement,
rencontre qu'il a refusée aux parlementaires, mais qu'il a eue avec un
certain nombre d'intervenants dans le monde de l'éducation, vendredi.
Aujourd'hui, j'aimerais que le ministre, fort de l'éclairage qu'il a
obtenu, tout d'abord, jeudi soir, pour un secteur particulier,
c'est-à-dire l'enseignement privé, et celui obtenu vendredi, lors
de cette réunion à Montréal, nous indique de façon
claire et concise -j'insiste sur le mot concise, puisque les activités
ministérielles ont déjà amputé nos travaux d'une
demi-heure aujourd'hui et de vingt minutes jeudi après-midi, et comme
notre temps est limité à onze heures, on doit terminer à
minuit - j'aimerais, dis-je, que le ministre fasse un effort pour raccourcir
ses réponses et faire un retour à l'essentiel, ce qu'il
suggère à tout le monde de faire en matière
d'éducation.
Alors, pourguoi avoir coupé - je vais nommer deux secteurs bien
particuliers - à l'éducation aux adultes, même si cela ne
fait pas partie du programme 4, et à l'aide aux étudiants?
M. Laurin: Le premier exemple est peut-être bien choisi,
mais le deuxième ne l'est pas, puisque pour l'aide financière aux
étudiants, conformément à ce que nous avons dit à
quelques reprises au cours de la campagne électorale, avec les
éclaircissements, les éclairages qu'on a donnés, il faut
conclure que le montant qui apparaît aux crédits ne correspond pas
aux sommes qui seront réellement dépensées, pas plus que,
l'an dernier, la somme qui apparaissait aux crédits ne s'est traduite
par des chiffres identiques à la fin de l'exercice. En
réalité...
M. Lalonde: Pour l'aide aux étudiants, le ministre
n'accepte aucune critique et n'a l'intention de faire aucun changement.
M. Laurin: Non, au contraire, je dis que ce qui apparaissait l'an
dernier aux livres de crédits, n'est pas en fait ce qui a
été dépensé, les dépenses ont
été de 12 000 000 $ supérieures à ce qui
apparaissait aux crédits, pour la raison bien simple qu'une partie des
sommes dépensées dans cette enveloppe dépend du travail
d'été des étudiants et, selon qu'il y a plus ou moins
d'étudiants qui travaillent, selon qu'ils qagnent plus ou moins, le
montant de leur prêt varie et surtout le montant de la bourse
consécutive au prêt. Donc on peut bien faire des estimations
budgétaires, mais comme il s'agit d'un programme ouvert, dont la somme
dépend d'autres éléments conjoncturels, ce n'est qu'en fin
d'exercice qu'on peut véritablement dire combien sera
dépensé à cette enveloppe. C'est la même chose cette
année.
M. Lalonde: Alors, quel montant le ministre estime-t-il le
gouvernement devra dépenser au-delà des montants prévus et
indiqués dans les livres des crédits?
M. Laurin: Cela va dépendre du travail
d'été.
M. Lalonde: Oui, mais j'imagine qu'il y a des études qui
sont faites et, à l'expérience de l'an dernier, est-ce que
ça va dépasser de 10 000 000 $, de 20 000 000 $, de quel ordre de
grandeur?
M. Laurin: Voyez-vous, par exemple, !'an dernier on avait
prévu à peu près 72 000 000 $ ou 73 000 000 $ pour les
bourses consécutives aux prêts et en fin de compte on en a
dépensé 87 000 000 $.
Cette année on a inscrit aux livres de crédits 77 000 000
$; on est conservateur. Mais c'est difficile à dire quelle somme totale
sera dépensée, ca va dépendre encore une fois du travail
d'été; ca dépend aussi du taux de l'inflation, parce que
c'est une des dimensions qui sert éqalement à calculer le montant
des bourses et le montant des prêts.
M. Lalonde: Mais qu'est-ce qui a justifié le ministre
à indiquer un montant inférieur de ]0 000 000 $ à l'an
dernier?
M. Laurin: On espérait que beaucoup d'étudiants
travaillent cet été et qu'ils gagnent beaucoup d'arqent.
M. Lalonde: C'était seulement un espoir?
M. Laurin: Oui, c'était seulement un espoir.
M. Lalonde: Est-ce que votre livre est rempli d'espoirs comme ca
qui...
M. Laurin: Non, comme je l'ai indiqué en Chambre, il
s'agit uniquement de programmes ouverts et il y en a peu de programmes ouverts
au ministère de l'Éducation.
M. Lalonde: À la lumière de l'information que le
gouvernement a actuellement, nous sommes au 15 juin, les emplois
d'été sont soit trouvés ou enfin ont commencé dans
la grande majorité des cas. Est-ce que le ministre peut nous dire si les
espoirs qu'il nourrissait en novembre, l'an dernier, lorsqu'il a
commencé à travailler, ou en mars, lorsque les crédits ont
été déterminés, sont fondés et si on ne
dépassera pas 77 000 000 $?
M. Laurin: Ce qu'on me dit, pour le moment, c'est que la
situation est plus encouraqeante que l'an dernier, mais il est encore trop
tôt véritablement pour qu'on puisse tabler des certitudes
là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): Sur le même sujet, M.
le député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, je constate que les deux
questions du député de Marquerite-Bourgeoys commencent à
se rapprocher des problèmes les plus pressants auxquels on ait à
faire face effectivement, les prêts et bourses et l'éducation aux
adultes. Parce qu'on avait l'impression, pendant un bout de temps, qu'il y
avait seulement l'enseiqnement privé qui les préoccupait.
M. Lalonde: M. le Président, je pense que le
député de Rosemont a assez d'honnêteté
intellectuelle pour reconnaître que depuis le début de
l'étude des crédits...
M. Paquette: M. le Président...
M. Lalonde: ... ca veut dire combien d'heures - on n'a pas dit un
seul mot de l'enseiqnement privé. Même le ministre a eu tout le
loisir de nous faire une démonstration de chacun des problèmes
qu'on avait soulevé, à son plus grand loisir.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Je faisais référence à vos
interventions en Chambre et également en particulier à la loi 11
dont nous avons discuté jeudi soir.
Cependant, je suis d'accord avec le député de
Marguerite-Bourqeoys que là où il y a problème
actuellement, c'est au niveau des prêts et bourses et de
l'éducation des adultes, ce sont les principaux problèmes
auxquels on ait à faire face.
M. le Président, c'est toujours difficile, en tant que
député ministériel et particulièrement en tant
qu'adjoint parlementaire du ministre, connaissant la situation difficile dans
laquelle il a été placé, comme tous ses collègues
du gouvernement, de faire un certain nombre d'affirmations, mais je pense
qu'elles doivent être faites à ce moment-ci.
Lorsque le gouvernement a décidé, en décembre
dernier, d'établir un certain nombre de coupures dans les demandes des
ministères d'environ ] 000 000 000 $, c'était imposé par
la conjoncture actuelle. Cependant, à ce moment, il était
impossible, compte tenu du processus budgétaire qui est suivi, de se
rendre compte de l'effet exact qu'allaient avoir les coupures, c'est un
exercice, c'est une évaluation qu'on peut faire presque en fin de
course. On commence par répartir le ralentissement ou les coupures entre
les différents ministères. Chaque ministère regarde
à l'intérieur, dans ses différents secteurs, où ces
coupures sont possibles. Dans le domaine de l'éducation, la marge de
manoeuvre est assez mince, il y a 87% du budqet qui est gelé; alors, il
n'y a pas beaucoup d'endroits où on peut faire des
coupures. Une fois qu'on les a faites, on pense toujours qu'il y a
certains aménagements qui pourront être faits sur le terrain.
Là, parfois, c'est très difficile au niveau local, au niveau des
institutions elles-mêmes qui ont leurs priorités, qui ont leur
autonomie éqalement.
Le seul commentaire que je voudrais faire: Je souhaiterais que le
gouvernement, à ce moment-ci, se dise: Maintenant que nous en voyons les
effets, nous allons réévaluer le montant global des coupures que
nous avions l'intention de faire de façon à soulager certains
secteurs, notamment les prêts et bourses et l'éducation des
adultes, cette année et à étaler un peu plus dans le temps
également certaines compressions qui peuvent être utiles. Il y a
trop de paperasse, il y a trop de bureaucratie dans nos réseaux. Je
pense qu'il y a même des coupures utiles qui pourraient être faites
dans ces secteurs.
Je souhaiterais - c'est une recommandation que je fais au ministre,
quoique je sache qu'il a déjà fait des efforts dans ce
sens-là - qu'on demande au Conseil des ministres de
réévaluer le montant qui est attribué dans ces
secteurs.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que ça va pour
le proqramme 4?
M. Lalonde: M. le Président, soyez patientl
Le Président (M. Bordeleau): Je veux bien être
patient.
M. Lalonde: On avait convenu avec celui qui vous
précédait de parler d'à peu près tous les
problèmes de l'enseignement primaire et secondaire et,
éventuellement, d'adopter le programme globalement.
Le Président (M. Bordeleau): C'est aux membres de la
commission de décider du fonctionnement.
M. le député de Marquerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: La réponse du ministre en ce gui concerne
l'aide aux étudiants ne semble pas avoir satisfait le
député de Rosemont, mais je vais le laisser lui-même
exprimer.
M. Paquette: M. le Président, je m'excuse, mais c'est
totalement faux de dire cela.
M. Lalonde: Vous êtes satisfait?
M. Paquette: Au niveau des prêts et bourses, le ministre a
fait des propositions au Conseil des ministres, propositions qui sont en
discussion actuellement. C'était simplement à partir de cet
exemple que j'ai dit que ca devrait être fait également dans
d'autres secteurs où on s'aperçoit, une fois les coupures faites,
que les effets sont difficiles à absorber dans une seule année
budgétaire comme cette année. Je pense qu'au niveau des
prêts et bourses il y a quand même des efforts énormes qui
ont été faits par le ministre et il n'était pas de mon
intention de le critiquer à ce point de vue, pas du tout.
M. Lalonde: Ah, bon! J'ai mal compris. Je pensais que le
député de Rosemont avait des griefs à exprimer contre les
coupures en ce qui concerne l'aide aux étudiants. Il me dit qu'il y a un
projet à l'étude au Conseil des ministres.
M. Paquette: C'est public, cela a été publié
dans les journaux; je pense ne rien révéler.
M. Lalonde: Naturellement, si on étudie les crédits
et qu'on ne sait plus lesquels on étudie! Ce ne sont peut-être pas
les mêmes chiffres que ceux qu'on a actuellement, mais enfin... Le
ministre a guand même eu une réponse gui est source d'espoir,
c'est-à-dire que c'est un budqet ouvert. Donc, il ne semble pas qu'un
étudiant - je pense que le ministre pourrait prendre cet engagement,
ici, à la commission parlementaire - se verra refuser l'aide,
conformément aux règlements, aux normes établies,
simplement à cause du fait que le chiffre inscrit dans le livre des
crédits est plus bas que celui qui devrait être là.
Je ne sais pas si le ministre m'écoute; je m'excuse de vous
distraire ou de vous déranger. D'après votre réponse,
c'est un budqet ouvert en ce qui concerne l'aide aux étudiants. On me
dit que vous avez aussi un projet à l'étude au Conseil des
ministres, de sorte que ce ne sont peut-être pas les mêmes chiffres
qu'on va retrouver éventuellement. Est-ce qu'on peut recevoir du
ministre l'engagement qu'aucun étudiant, durant l'année scolaire
qui commence au mois de septembre ou au mois d'août, ne se verra refuser
de l'aide, conformément aux rèqlements et aux normes actuellement
en vigueur, simplement du fait que les chiffres que vous avez inscrits au livre
des crédits ne sont pas, d'après nous, suffisants? Est-ce que cet
engagement peut être pris, au moins?
M. Laurin: C'est un espoir gue je partage avec le
député. Il y a tellement de paramètres dans le calcul des
prêts et bourses, le chiffre total des étudiants varie d'une
année à l'autre selon qu'il y a plus de prêts ou plus de
bourses; dans l'ensemble, je pense pouvoir prendre cet engagement, mais pas sur
le détail.
M. Lalonde: Non. Je vous remercie pour cet engagement, au moins;
j'espère que cela
pourra rassurer les étudiants, leurs parents ou leur entourage
qui pourraient être inquiets de la diminution nette du montant
prévu à ce titre. (15 h 45)
Maintenant, en ce qui concerne l'éducation des adultes, il ne
s'agit pas de coupures, il s'agit d'amputations. Le ministre, à une
question que je lui posais en Chambre, a eu l'explication suivante: II s'agit
d'un secteur en effervescence et qui a eu beaucoup d'expansion ces
dernières années. Il y a une commission qui étudie tous
les tenants et aboutissants de cette question et nous avons donc
décidé de couper - je parodie un peu - dans ce secteur. Cela
m'apparaît manquer de loqique. Au moment où il a confié, ou
son prédécesseur, enfin c'est tout a fait récent,
l'étude de ce secteur extrêmement important pour un très
grand nombre de personnes, comment se fait-il que le ministre ait
décidé de sabrer -parce qu'il s'agit réellement d'une
réduction cruelle dans le secteur de l'éducation des adultes -
sans plus de cohérence ou d'explications? S'il y avait un gaspillage
épouvantable, si on avait trouvé une façon de mettre fin
au gaspillage et de donner le même service, mais ce n'est pas la
même explication qu'on nous a donnée.
M. Laurin: D'abord, M. le Président, je rappellerai que,
quand il a institué la commission d'enquête sur l'éducation
socioculturelle des adultes, le gouvernement n'avait pas à faire face
aux mêmes contraintes économiques qui sont devenues
évidentes au cours de la fin de l'année dernière. Cette
commission d'enquête a été instituée - je ne me
rappelle plus exactement - je pense, en mars 1979, bien avant donc que la
situation économique américaine, canadienne et
québécoise, par voie de conséquence, se
détériorât à ce point. Si nous avons institué
cette commission d'enquête à l'époque, c'est parce que ce
secteur nous paraissait être en effervescence pour correspondre aux
aspirations démocratiques des Québécois, conforme aux
principes auxquels nous adhérions de l'égalité des
chances, conforme à nos idéaux et aspirations de
développement culturel maximum des Québécois. D'autre
part, parce que nous avions constaté, comme il arrive souvent dans tous
les domaines en effervescence, que le développement se faisait d'une
façon quelque peu empirique, parfois quelque peu anarchique, c'est
à-dire avec des dédoublements d'un niveau d'éducation
à l'autre, enqendrant ainsi des chevauchements, engendrant aussi des
problèmes de gestion du fait que justement les règles de
financement n'avaient jamais été déterminées avec
toute la sagesse nécessaire.
II y avait aussi d'autres problèmes qui motivaient la
création de cette commission d'enquête comme, par exemple, la
reconnaissance des acquis, la formation professionnelle, l'arrimaqe entre le
marché de l'emploi et la formation. C'est donc pour réqler tous
ces problèmes et pour indiquer des liqnes d'orientation plus
rationnelles et plus éclairées pour l'avenir que nous avons mis
sur pied cette commission d'enquête. Mais, à la fin de
l'année dernière, nous nous sommes trouvés face à
une situation difficile; nous en avons tellement parlé depuis quelques
mois que je ne voudrais pas trop m'étendre sur ce point. Mais il reste
que la problématique budgétaire se présente à peu
près comme ceci. D'un côté, la simple reconduction
mécanigue de nos programmes d'éducation, quel que soit le secteur
envisagé, engendrerait une augmentation de l'enveloppe budgétaire
de 18%. D'un autre côté, l'augmentation des revenus se situe aux
environs de 11%, laissant donc subsister un écart de près de 8%
ou 9% gui, s'ajoutant aux écarts des années
précédentes, peut constituer à la longue une menace pour
l'économie québécoise aussi bien que pour les budgets du
gouvernement.
Il est donc apparu au gouvernement gue tous les efforts devaient
être faits pour réduire cet écart dans toute la mesure du
possible.
Il n'y a pas beaucoup de façons de réduire cet
écart. Le premier moyen gui s'impose à nous, c'est la compression
des dépenses ou le ralentissement de la croissance des dépenses.
L'autre moyen, c'est l'augmentation des taxes. Entre les deux moyens, le
gouvernement a décidé d'opter pour un ralentissement de la
croissance, donc, de maintenir les programmes actuels, mais d'une façon
telle que l'écart soit comblé en partie.
Il s'agissait donc d'effectuer des compressions sur des programmes
existants de façon qu'ils croissent moins vite que prévu et il
devenait aussi important peut-être de supprimer, ne serait-ce que
temporairement, certains programmes.
Comment arriver à cette répartition? Là aussi nous
avons dû faire face à des contraintes. Pour être bref, je ne
vais prendre qu'un exemple, je vais prendre le secteur du primaire-secondaire
où il y a cette année une augmentation de 10,8% de l'enveloppe
budgétaire.
Dans le primaire-secondaire, encore une fois, la simple reconduction des
programmes actuels nous aurait fait atteindre les 18%, mais, par ailleurs,
même avec une réduction de cette croissance à 10,8%, nous
sommes devant des contraintes qu'il nous faut respecter. Par exemple, cette
année, avec les crédits actuels, avec la croissance de 10,8%,
l'enveloppe budgétaire gue nous verserons aux commissions scolaires sera
de 3 300 000 000 $.
Le simple respect des conventions collectives va prendre la majeure
partie de ces 3 000 000 000 $, parce que nos conventions collectives,
signées il y a maintenant plus d'un an, prévoient que si
l'inflation dépasse un certain niveau, les salaires seront
indexés à la pleine valeur de l'indice des prix a la
consommation, l'inflation cette année se situe à 12,42%. Ce qui
veut dire que sur les 3 300 000 000 $ que nous devrons verser, 3 000 000 000 $
devront être consacrés au respect de nos conventions collectives,
ne laissant que 300 000 000 $ pour les autres programmes, pour les autres
volets de notre subvention.
Ce n'est donc que cette partie de 300 000 000 $ qui est compressible
techniquement. Nous ne pouvons pas couper dans les 3 000 000 000 $, puisqu'il
nous faut honorer nos conventions collectives. Il nous faut donc comprimer dans
les secteurs techniquement compressibles, et comme l'éducation des
adultes constitue un secteur important quand même des programmes du
ministère de l'Éducation, c'est un des secteurs qui a
été touché. Effectivement, dans le livre des
crédits, nous aboutissions à une diminution des crédits
par rapport à ce que nous avions versé l'année
dernière.
Cependant, je suis heureux de dire que ce qui apparaît aux
crédits sera quand même amendé à la hausse. À
force de recherches, d'une part, et deuxièmement, du fait des bons
effets du nouveau mode de gestion que nous avons adopté depuis
maintenant deux ans auprès des commissions scolaires,
c'est-à-dire grâce à la méthode du budqet
fermé, non seulement les commissions scolaires ont-elles
amélioré leur gestion, mais il y eu des surplus, ce qui fait dire
que, pour la première fois dans l'histoire des budgets du primaire et du
secondaire du ministère de l'Éducation, nous allons pouvoir
déclarer des crédits périmés. Ces crédits
périmés, au lieu de les retourner au fonds consolidé du
Québec, comme cela arrive toujours, j'ai pu, en raison de l'urgence des
besoins, persuader le gouvernement, et en particulier le ministre des Finances,
de les affecter au domaine de l'éducation des adultes. Ce qui veut dire
que cette année, en 1981-1982, au lieu de distribuer au
primaire-secondaire, au chapitre de l'éducation des adultes, 134 000 000
$, comme nous l'avions prévu au titre des crédits pour
l'année scolaire, nous allons être en mesure de distribuer 144 000
000 $, c'est-à-dire près d'une dizaine de millions de plus.
Nous avons aussi aiguisé notre réflexion et nous avons
pensé, à la lumière des expériences en cours depuis
quelques années, qu'il nous était possible, même avant la
présentation du rapport de la commission Jean, d'effectuer certains
correctifs par rapport à la situation actuelle. Par exemple, il nous a
paru possible de limiter d'une certaine façon les dédoublements
ou les chevauchements d'un niveau d'éducation à l'autre. Il nous
a aussi paru nécessaire, en même temps que pas trop contraignant
pour les clientèles, d'élever quelque peu les frais d'inscription
pour la formation des adultes aux niveaux primaire et secondaire. Bien
sûr, les commissions scolaires pourront - c'est une moyenne, nous avons
souhaité dans nos rèqles budgétaires que les frais
d'inscription soient de 5 t en moyenne - à l'intérieur des divers
programmes d'éducation des adultes, affecter, par exemple, tel proqramme
de frais d'inscription de 10 $ ou 15 $, ou de frais d'inscription
négatifs, comme cela se fait, eu égard aux clientèles. Par
exemple, s'il s'agit vraiment de clientèles démunies,
défavorisées, il ne leur est pas interdit de ne pas demander de
frais d'inscription, quitte à les augmenter pour des clientèles
inscrites à des programmes qui attirent davantage des clientèles
mieux nanties.
Nous avons aussi souhaité dans nos rèqles
budgétaires que les commissions scolaires fassent beaucoup d'efforts
pour dispenser l'enseignement à des groupes plus nombreux. Car
l'expérience nous a démontré qu'en certains quartiers
l'enseignement pouvait se dispenser à des clientèles très
réduites de trois ou quatre élèves par groupe. Nous avons
pensé qu'il convenait de demander aux commissions scolaires de faire
tous les efforts possibles pour dispenser l'enseignement à un plus grand
nombre d'élèves par groupe. Nous avons pensé aussi qu'il
était possible pour les commissions scolaires de diminuer leurs frais de
gestion. Grâce aux consultations que nous avons tenues avec elles, il
s'est en effet avéré possible d'améliorer les
méthodes de qestion de façon que nous puissions soustraire, des
sommes antérieurement consacrées à la gestion, des sommes
qui pourraient être affectées au service à la
clientèle.
C'est ce qui nous permet de dire qu'avec ces diverses mesures,
qlissements de crédits périmés vers l'éducation des
adultes au primaire-secondaire, augmentation moyenne des frais d'inscription,
diminution des frais de gestion, augmentation des élèves par
groupe, sommes à peu près équivalentes à celles de
l'an dernier, il serait possible de conserver pour l'année qui vient
à peu près le même nombre d'heures-cours et de faire
bénéficier le même nombre de citoyens que par les
années passées des programmes d'éducation aux adultes.
Je sais bien que ce n'est pas l'idéal. Nous aurions aimé
faire davantaqe car, encore une fois, c'est vrai, c'est un domaine en
effervescence, c'est une domaine qu'il convient d'augmenter, de pousser, de
développer, d'accentuer. Il reste qu'il faut également tenir
compte de nos contraintes et, en attendant que la conjoncture s'améliore
ou que nous puissions faire
davantage en tant que gouvernement à la suite du
dépôt du rapport de la commission Jean, je pense que la situation
ne sera pas catastrophique, que nous pourrons maintenir l'essentiel de l'acquis
et que nous garderons les infrastructures nécessaires pour un autre bond
à venir. (16 heures')
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Marquerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Le ministre a d'abord amendé les chiffres que
l'on retrouve ici à la page 11-17.
M. Laurin: Dans le livre des crédits, c'est l'année
financière...
M. Lalonde: Oui, oui.
M. Laurin: ...alors que là, j'ai parlé de chiffres
qui se rapportaient à l'année scolaire, ce que nous allons
effectivement débourser au réseau au cours de la présente
année.
M. Lalonde: Ce n'est pas 10 000 000 $ pour le livre des
crédits. C'est combien, alors, pour le livre des crédits?
M. Laurin: Je peux vous le dire exactement, si vous êtes
patient. J'aime mieux calculer en termes d'année scolaire, parce que
cela correspond aux sommes réelles que nous allons verser.
M. Lalonde: M. le Président, à ce
moment-là...
M. Laurin: Cela donne une idée plus exacte de la
réalité.
M. Lalonde: Si le ministre veut discuter en termes d'année
scolaire, je n'ai pas d'objection, il ne faudrait pas qu'il donne des chiffres
en termes d'année financière.
M. Laurin: En termes d'année financière, ce sera
147 100 000 $, au lieu de 138 600 000 $.
M. Lalonde: Alors, une augmentation de 1 000 000 $ par rapport
à l'an dernier.
M. Laurin: Non, de 9 000 000 $, à peu près.
M. Lalonde: C'est ça, 146 000 000 S l'an dernier.
M. Laurin: De 8 500 000 $.
M. Lalonde: Dans le livre que vous nous avez donné, c'est
vous qui l'avez préparé, à la paqe 11-17, pour 1980-1981,
on a un total de crédits à voter, pour le programme 7, de 138 600
000 $, comparé à 146 831 000 $ l'an dernier.
M. Laurin: Et voilà, le réajustement portera la
somme, au livre des crédits, à 147 100 000 $, soit une
augmentation de 8 500 000 $.
M. Lalonde: 8 000 000 $ sur vos crédits que vous aviez
proposés au début, mais moins de 1 000 000 $, c'est à peu
près 300 000 $ de plus que l'an dernier.
Si on accepte le taux d'inflation, que le ministre nous a
mentionné tout à l'heure, de 12,42% et simplement en laissant
l'inflation s'opérer sur les crédits de l'an dernier, on aurait
une augmentation de 146 000 000 $, à 12%, c'est à peu près
17 000 000 $. Ce serait à peu près 164 000 000 S, seulement pour
garder le même niveau de services, s'il n'y avait aucun changement. De
164 000 000 $, on baisse à 147 100 000 $, une réduction
d'à peu près 15 000 000 $. Le ministre nous dit qu'il peut nous
assurer que le même niveau de services, je pose la question,
guantité et qualité, pourra être atteint, grâce
à d'autres dispositions qui ont été prises, par exemple,
quant à la gestion par les commissions scolaires, l'augmentation du
nombre de membres de qroupes. J'aimerais qu'il nous quantifie ces dispositions.
C'est bien beau de dire: On en a parlé aux commissions scolaires, les
commissions scolaires vont améliorer leur qestion, est-ce que vous avez
pu mettre un chiffre là-dessus ou si c'est encore un espoir?
M. Laurin: J'ai d'abord relevé votre affirmation.
Effectivement, au livre des crédits, l'an dernier, à
l'éducation des adultes, c'était 146 831 000 $, mais
effectivement, à cause d'un chanqement dans les règles
budgétaires, il aurait fallu, avec ce changement des règles
budgétaires, transformer ce chiffre de 146 000 000 $ pour 138 000 000 $,
à cause du changement dans les règles budgétaires. Je vais
laisser mon sous-ministre vous expliguer cela.
En fait, le chiffre de 146 000 000 $ qui apparaît au livre des
crédits de l'an dernier est un chiffre gonflé, l'an dernier, par
la modification de la transformation d'année financière en
année scolaire. Antérieurement, on était à 75% sur
une année et 25% sur l'autre année, on est passé à
70%-30%. S'il n'y avait pas eu cette modification, le montant apparaissant au
livre des crédits aurait été de 138 000 000 $. Donc, si on
veut faire. la comparaison avec l'année en cours où on est
effectivement à 70%-30%, l'augmentation est effectivement de 8 000 000
$, puisgue le point de départ est de 138 000 000 $.
M. Lalonde: Je vous remercie de ces
précisions. C'est toujours bon de savoir quels sont les chiffres
exacts avant de commencer à discuter.
M. Laurin: Donc, c'est une augmentation...
M. Lalonde: Est-ce qu'il y a beaucoup d'autres chiffres dans
votre..
M. Laurin: ...plus considérable...
M. Lalonde: ...chapitre, M. le ministre, qu'il faut changer comme
ça?
M. Laurin: C'est une augmentation plus considérable que ce
que vous aviez..
M. Lalonde: On a l'aide aux étudiants, jeudi,
c'était le nombre de fonctionnaires, maintenant, c'est
l'éducation aux adultes.
M. Laurin: Ce que vient de vous expliquer le sous-ministre vous
était peut-être déjà connu.
M. Lalonde: Cela ne nous était pas du tout connu, cela ne
nous a pas été communiqué depuis le début de
l'étude des crédits, M. le ministre. Je ne veux pas dire que le
ministre l'a caché, mais vous n'aviez pas eu l'occasion de nous le dire.
Quels sont les montants que vous avez à allouer pour
l'amélioration de la gestion par les commissions scolaires et
l'augmentation des groupes? Est-ce que vous êtes à même de
quantifier ces montants?
M, Laurin: M. Girard va vous répondre.
Au programme de la formation éducative et socioculturelle, par
rapport au budget initial prévu pour 1981-1982 de 12 744 000 $, il y a
un ajout de 6 000 000 $, ce qui porte le programme de la formation
éducative et socioculturelle à 18 000 000 $; à la
formation socio-économigue, l'ajout est de 5 000 000 $, ce qui porte le
budget à 74 000 000 $ par rapport à 69 000 000 $; au soutien
à la formation des adultes, même montant qu'initialement
prévu; à la recherche et au développement, même
montant; à la gestion du secteur des adultes, réduction de 32 512
000 $ à 31 512 000 $; aux immobilisations, même chiffre, pour une
différence totale de 134 000 000 $ à 144 000 000 $ pour
l'année scolaire.
M. Lalonde: Ce n'est pas le sens de ma question. Le ministre nous
a dit: On espère obtenir le même niveau de services à la
population, la même qualité de services. C'est ce que j'ai cru
comprendre de sa démonstration de tout à l'heure. Il n'a pas
admis qu'on réduisait les services aux adultes ni en qualité, ni
en quantité. Il a dit: En plus du fait qu'on consacre un montant plus
élevé, il y a pour l'année scolaire 10 000 000 $ de
crédits périmés qui vont être directement
injectés dans ce secteur, il y aurait la question aussi de la gestion.
Vous nous affirmez que les commissions scolaires vont pouvoir resserrer leur
gestion de façon telle gu'on pourra atteindre le même niveau de
services à un moindre coût. Quel est le coût que vous avez
inscrit à l'amélioration de la gestion? Quel est le coût
que vous avez inscrit à l'augmentation des groupes? 1 000 000 $
chacun?
M. Laurin: 1 000 000 $ pour la gestion, ce gui peut comprendre
aussi bien les nouvelles méthodes de gestion que nous avons
suggérées que la méthode des frais d'inscription
augmentée à 5%. Évidemment, cela va dépendre aussi
de la correspondance que nous trouvons au sein des commissions scolaires. Tout
ne se traduit pas immédiatement du ministère aux commissions
scolaires. Il faut une coopération, une concertation entre le
ministère et les commissions scolaires. Il y a des modes
différents de gestion d'une commission scolaire à l'autre. Il
n'est pas sûr que toutes les commissions scolaires vont ou
interpréter de la même façon les règles
budgétaires ou les directives du ministère ou adopter les
mêmes comportements. Dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, on
doit compter sur la coopération des commissions scolaires.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le ministre, lorsgue vous parlez de ces
ajustements, est-ce qu'il y aurait moyen de préciser ou de traduire ce
que cela veut dire pour des projets qui existent présentement et qui se
voient mourir? Je vais prendre un exemple, le service à la
collectivité du cégep de Rosemont. On nous informe qu'il passe
d'un budget de 900 000 $ à 200 000 $. Est-ce que dans vos chiffres,
votre manipulation, cela veut dire que le budget de 900 000 $ passe à
200 000 $ ou ne passera plus à 200 000 $ ou est-ce qu'il reste tel
quel?
M. Laurin: Cela n'a rien à voir avec les chiffres que je
viens de vous citer, parce que les chiffres que je viens de citer, à
titre d'exemple, ne s'appliquaient qu'au secteur primaire et secondaire, alors
que l'exemple que vous prenez touche le collégial.
M. Cusano: Je voudrais avoir une explication sur le
système collégial, spécialement le service à la
collectivité du céqep de Rosemont. Pour vous informer, je ne sais
pas si vous êtes au courant, ce service était un service au
troisième âge. Il
y a eu plus de 3000 usagers qui se sont rendus au cégep de
Rosemont; M. le député de Rosemont, est-ce bien cela? Il y a
plusieurs solutions envisagées, je l'espère. Une des solutions
semble comporter l'augmentation - vous l'avez mentionné - des frais
d'inscription de 15 $; le couple corrigez-moi si mes chiffres ne sont pas
exacts - à 95$ le couple. Ce serait de plus de 630%. Est-ce de cette
façon que vous traduisez vos chiffres ou est-ce que je suis dans
l'erreur?
M. Laurin: Encore une fois vous abordez le domaine du
collégial. Le domaine du colléqial est différent en ce
sens que, dans ce qui était notre énoncé de politique pour
les collèqes du Québec, nous avions changé des
éléments assez importants qui touchent l'éducation des
adultes. Les règles antérieures voulaient que, pour qu'un
programme soit reconnu et subventionné par le ministère, il
était exigé gu'un adulte s'inscrivît à quatre cours.
À ce moment-là, c'était subventionné par le
collège et par le gouvernement.
Dans les collèqes du Québec nous avons souhaité
changer cette règle. Effectivement, elle a été
changée par la suite. Pour que le ministère subventionne un
cours, il n'était plus nécessaire que l'étudiant
s'inscrive à quatre cours. L'étudiant pouvait s'inscrire à
un seul cours et le cours était subventionné.
Il faut bien savoir qu'en vertu de cette règle qui a
été changée un étudiant pouvait
théoriquement s'inscrire à quatre cours, mais dans un certain
nombre de collèges; par la suite, l'étudiant ne prenait gu'un ou
deux cours sur les quatre auxguels il s'était inscrit. Pourtant, aux
livres du collège, les guatre cours étaient inscrits et les
quatre cours étaient subventionnés. Grâce à cela,
évidemment, on peut penser que les collèges pouvaient accumuler
de l'arqent à certains postes et peut-être utiliser cet argent
pour d'autres initiatives qu'ils prenaient dans d'autres secteurs, comme, par
exemple, celui des services à la collectivité. C'est un premier
élément.
Le deuxième élément, c'est qu'à la suite des
études menées au ministère, et pas seulement au
ministère de l'Éducation, mais dans d'autres ministères,
comme, par exemple, au ministère d'État au Développement
économigue, au ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, il est apparu opportun, à un moment
donné, d'accroître l'effort du gouvernement pour la formation
professionnelle, parce qu'il devenait important de faire correspondre la
formation avec l'essor que prenait le développement de certaines
disciplines, ou de certains métiers, ou de certaines orientations
économiques.
Donc, à la suite de cette réflexion et de ces conclusions
communes, le ministère de l'Éducation a voulu privilégier,
au sein de l'éducation des adultes, certains secteurs de formation
professionnelle. Ceci s'est traduit par des règles budgétaires
gui privilégiaient ia formation socioprofessionnelle par rapport
à la formation socioculturelle ou à la formation
générale. Certains collèqes ont
bénéficié de ce double changement; certains autres, gui
s'étaient surtout spécialisés dans la formation
socioculturelle ou dans la formation générale, en ont
été pénalisés. Le collège de Rosemont
appartient à cette deuxième catégorie. C'est la raison
pour laquelle le collège de Rosemont a actuellement beaucoup de
difficultés à financer les programmes dont il s'était fait
une spécialité dans le passé. (16 h 15)
En fonction des compressions générales qu'il nous a fallu
effectuer dans le domaine de l'éducation des adultes - parce que
là, je suis d'accord avec le député de
Marguerite-Bourgeoys: le fait de ne pas indexer complètement constitue,
en fait, une diminution - il est évident gue ces collèges se
trouvent dans une situation plus difficile. Nous leur donnons cette
année une enveloppe générale, que ce soit au titre de la
formation des adultes, programme spécifique qui dépend de la
direction générale des adultes, ou gue ce soit au titre des fonds
que nous leur versons au titre de l'enseignement colléqial proprement
dit. Les collèges, en tirant sur ces deux enveloppes, sont
obligés de réévaluer leurs activités.
Nous, nous pouvons dire: Nous donnons à tel collège tant
d'argent, mais il revient par la suite au conseil d'administration du
collège, à l'intérieur de l'enveloppe globale gue nous lui
donnons pour l'éducation des adultes, soit en vertu du programme gui
dépend de la direction générale de l'éducation des
adultes ou de celui gui dépend de la direction de l'enseignement
collégial, de répartir ces sommes selon ce qu'il juge opportun.
Nous ne pouvons pas nous substituer à l'administration de quelque
collèqe que ce soit et je pense que je ne pourrais même pas vous
donner les chiffres précis gu'on a pu vous soumettre, à vous
comme à nous, en ce qui concerne la situation du collège de
Rosemont. Ils devront, je pense, effectuer leurs dépenses à
même l'enveloppe globale gue nous leur dispensons, en essayant de
répartir ces sommes le plus judicieusement possible pour conserver dans
toute la mesure du possible les programmes qu'ils ont pris l'habitude de
dispenser.
M. Cusano: Mais lorsque vous avez offert ces enveloppes telles
quelles aux collèges, il y a certainement dû y avoir une
réaction de la deuxième catégorie non seulement au
cégep de Rosemont, mais
ailleurs dans la province. Vous avez mentionné que vous auriez
tenté de regrouper ces services pour que ces gens ne soient pas
pénalisés indûment. Est-ce que vous pouvez nous dire
quelles démarches ont été faites pour s'assurer que ces
services à la collectivité soient relocalisés ou
réaménagés non seulement au collège de Rosemont,
mais aussi dans l'ensemble de la province? Tout à coup ces personnes du
troisième âge sont le groupe le plus pénalisé et on
les oublie à cause de priorités. Je crois gu'on se doit d'avoir
une responsabilité. Ces services sont coupés à 50%, 60%.
Le ministère devrait tenter d'offrir ces services ailleurs et de fournir
du transport pour ces gens-là, parce qu'on parle des personnes du
troisième âge.
M. Laurin: Effectivement, nous avons rencontré ces groupes
à quelques reprises et, en particulier, une délégation du
cégep de Rosemont. Nous avons pu, à l'intérieur des
règles actuelles, procéder à certains réajustements
mineurs cependant, mais la conclusion à laguelle nous en sommes
arrivés, c'est qu'il nous fallait réviser les critères
antérieurement adoptés et qu'il convenait peut-être de
moins privilégier la formation professionnelle que nous l'avions fait au
cours des années antérieures. En somme, essayer d'être plus
égaux dans la faveur que nous accordions à tel programme par
rapport à l'autre. Par exemple, nous sommes en train actuellement de
réviser nos règles en ce qui concerne les collèges et il
est probable que, dans les règles gue nous préparons
actuellement, l'accent ne sera pas mis autant qu'il l'était par le
passé sur la formation professionnelle de façon à donner
une chance plus grande à la formation socioculturelle.
M. Cusano: Mais cette réévaluation dont vous
parlez, elle sera terminée guand? Parce que si on prend encore le cas du
cégep de Rosemont, certains de ses cours allaient commencer dès
le 1er juillet. Maintenant, s'ils n'ont pas une réévaluation de
votre part, ils seront complètement démunis et ne peuvent rien
faire. Est-ce que cette réévaluation ou des directives sur la
façon de procéder dans l'espoir d'avoir 200 000 $ de plus vont
leur arriver bientôt?
M. Laurin: La décision n'appartient pas uniquement au
ministère, en l'occurrence. Comme je l'ai dit tout à l'heure, le
ministère consent une enveloppe budgétaire globale à un
collège et, à l'intérieur de cette enveloppe
budgétaire, il y a transférabilité des postes. Donc, le
collège peut parfaitement décider de dépenser moins, par
exemple, pour son service d'informatique, et transférer les
économies ainsi réalisées au secteur de l'éducation
des adultes. C'est sa décision.
M. Cusano: M. le ministre, je suis d'accord gue les
collèges ont cette liberté. Mais ce que je me demande, c'est
à quel point ces usagers peuvent attendre une réponse pour
continuer. Comme plusieurs d'entre eux l'ont dit, pour eux, ces cours
remplaçaient les médicaments. Je pense que c'est assez
important.
M. Laurin: Évidemment, si le gouvernement décidait
d'augmenter demain ou après-demain l'enveloppe totale des
collèges, le cégep de Rosemont en bénéficierait.
Mais même si le gouvernement faisait cela, il restera un bout de la route
à faire par le collège gui, lui, devra décider, à
l'intérieur de l'enveloppe budgétaire gui lui est consentie,
quelle somme il convient d'affecter à tel poste ou à tel
autre.
Quant aux ajustements techniques qui sont encore possibles, là
encore, je demanderais à M. Girard de vous donner un
éclairage.
Les règles budgétaires pour la prochaine année,
pour l'enseignement régulier au collèqe et à
l'intérieur de l'enseignement réqulier, il y a une partie qui est
consacrée à la formation des adultes, ont été
envoyées dans les cégeps.
Les règles budgétaires émanant de la Direction
générale de l'éducation des adultes ne sont pas encore
envoyées dans les cégeps. Donc, les cégeps ne peuvent pas
prendre les décisions maintenant. Les règles vont être
envoyées incessamment.
Par rapport aux priorités qui avaient été
données à la formation professionnelle, il y a un comité
mixte Fédération des cégeps, Direction
qénérale de l'enseignement collégial, Direction
générale de l'éducation des adultes, qui siège
actuellement et qui fait que la priorité absolue à l'enseignement
professionnel sera réduite pour l'an prochain.
Par ailleurs, nous avons dit aux collèges que nous
tolérerions une marge de manoeuvre dont il serait tenu compte l'an
prochain, si elle décidait de maintenir des programmes en formation
socioculturelle cette année.
M. Cusano: La marge de manoeuvre étant de combien?
M. Laurin: La marge de manoeuvre ne peut pas être
évaluée globalement. Chague collèqe verra ce qu'il peut
faire, ce qui lui est possible de faire à l'intérieur des
enveloppes qui lui sont consenties.
Le Président (M. Bordeleau): M. le déptué de
Rosemont.
M. Paquette: Je pense que la question des problèmes qui se
posent au céqep de Rosemont, c'est un bon exemple qui aide à nous
faire comprendre la nature des coupures. Un peu comme on l'avait vu dans
l'étude de l'enseignement privé, c'étaient les
cégeps gui avaient fait le plus d'efforts du côté du
professionnel qui étaient pénalisés. Là, c'est
l'inverse. Ce sont les cégeps qui ont fait le plus d'efforts au niveau
de la formation socioculturelle qui sont pénalisés à cause
de règles budgétaires qui ont été établies
l'année passée, même en cours d'année, au moment
où l'année était commencée.
Quand le collège parle d'un manque à gagner de 700 000 $,
c'est sur deux ans. C'est par rapport à l'année 1979-1980. Il y a
un montant de 250 000 $ qui a été coupé en 1980-1981 et
cette année, si on en reste au livre des crédits, avec les
aménagements qui semblent se dessiner, c'est un autre montant de 460 000
$ qui s'ajouterait, dont 315 000 $ de même nature que l'année
passée, c'est-à-dire un accent qui a été mis
davantage sur la formation professionnelle que sur la formation socioculturelle
et un montant de 145 000 $ qui viendrait directement des compressions
budgétaires.
Je suis très heureux de noter l'ouverture que fait le ministre
quant à la révision de ces rèqles et quant à la
révision des règles budgétaires.
Le député de Viau demandait tout à l'heure si on
avait fait des efforts pour relocaliser. Si on connaît un peu ce qui
s'est fait dans les services à la collectivité au cégep de
Rosemont, on ne peut pas parler de relocaliser. Il s'agit d'un pôle
d'animation sociale qui a été développé depuis sept
ans, envers et contre les traditions. Dans une boîte d'enseignement, on
est habitué à des cours bien précis. Qu'on donne un cours
de mathématigues à telle place ou à telle autre, on peut
toujours relocaliser les gens, c'est beaucoup plus facile. Quand il s'agit de
cours taillés sur mesure, en fonction des besoins des citoyens du
quartier, comme cela s'est fait au niveau des cours de préparation
à la retraite, comme cela se fait avec les groupes de femmes, avec les
groupes de chômeurs, avec les coopératives d'habitation, on ne
peut pas déraciner un pôle, transformer le personnel, rompre les
éguipes, en envoyer un bout là et un autre bout là.
Autrement dit, le modèle de l'éducation calqué sur
l'usine, ça ne marche pas, dans ce cas-là. C'est pour cela que
c'est particulièrement important qu'on maintienne les équipes,
qu'on maintienne les réseaux d'usagers aussi qui se sont
constitués en association. Pour une fois, on a une éducation qui
sert à la prise en charge, à la "responsabilisation" des
citoyens. Les usagers ont raison de dire que l'éducation, ça
coûte des cents, mais ça peut également en épargner
beaucoup si les gens prennent en main leurs problèmes. Je pense aux
retraités et aux préretraités. Il y a des gens du
cégep de Rosemont qui disent avec raison: On va sauver sur les
médicaments, on va sauver sur un tas de problèmes sociaux qui ne
se produiront pas parce que, pour une fois, l'éducation sert à
"responsabiliser" les citoyens, à leur faire prendre conscience de leurs
problèmes et à les aider à trouver des solutions.
Je trouve dommage - je le disais dans mon intervention au début -
que ce soit seulement un peu en fin de course qu'on voie l'impact réel
des coupures. On se rend très bien compte que dans le secteur de
l'éducation des adultes, les cégeps les plus
pénalisés sont ceux qui ont développé de tels
services à la population, qui se sont vraiment ouverts à la
population. Parmi ceux-là, le cégep de Rosemont est le plus
pénalisé. Je ne dirais pas que le problème est le
même pour tous les cégeps, il y a des cégeps qui ont
accumulé des surplus.
Je suis très heureux de l'ouverture du ministre et je souhaite
qu'il y ait une réunion du cégep et des fonctionnaires du
ministère, si le ministre est d'accord, dans les prochains jours pour
vraiment compléter tout cela et faire en sorte gue le service ne ferme
pas ses portes l'année prochaine et maintienne son niveau
d'activités actuel parce que c'est un service essentiel à la vie
du guartier de Rosemont.
M. Laurin: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Laurin: ... nous avons fait une incursion qui se prolonge dans
l'enseignement collégial, mais je pense que vous nous pardonnerez parce
gu'elle a été utile pour éclairer la situation.
Pour répondre au député de Rosemont, il est bien
entendu qu'il nous fera plaisir de rencontrer le plus tôt possible
à nouveau la délégation du collèqe de Rosemont pour
discuter de ses problèmes avec elle.
M. Lalonde: M. le Président...
M. Cusano: Seulement une petite précision. Si j'ai bien
compris le député de Rosemont, vous avez mentionné des
chiffres qui seront ajoutés au présent budget. Est-ce que j'ai
bien compris?
M. Paquette: Non, non. J'ai décomposé le montant de
700 000 $. En fait, le budget accordé par le ministère au Service
de l'éducation des adultes était de 1 800 000 $ en 1979-1980; il
est passé à 1 100 000 $ en 1981-1982, donc deux ans plus tard.
Donc, la coupure de 700 000 $, qui est une coupure de 38% du budget, ce qui est
énorme, s'est faite sur deux ans. Je l'ai décomposée comme
suit: un montant l'année dernière, à cause de la
priorité qui a été mise en cours d'année sur la
formation professionnelle.
C'est-à-dire qu'on a financé la formation professionnelle,
on a fait augmenter le volume d'activités à 1,33% alors que la
formation socioculturelle était baissée de 1,33%; alors un
cégep, comme le cégep de Rosemont, qui avait mis tellement
d'accent depuis sept ans sur la formation socioculturelle, s'est vu
pénaliser de 250 000 $ pour l'année 1980-1981. Pour
l'année prochaine, si le même système se continue - mais le
ministre nous dit qu'il est en train de réévaluer cela - on
aurait encore 315 000 $ qui s'ajouteraient, qui viendraient de la même
source, plus 145 000 $ qui viendraient des compressions budgétaires, ce
qui fait en tout 700 000 $.
Cela vous montre qu'il y a certains collèqes qui sont beaucoup
plus pénalisés que d'autres parce que de tels chiffres, vous ne
les aurez pas dans un collège qui s'est concentré sur la
formation professionnelle, c'est évident.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: En fait, c'est une incursion dans le programme 7
qu'on a faite; si vous le permettez, on va le vider.
Le Président (M. Bordeleau): ... au programme 4?
Éducation des adultes
M. Lalonde: En fait, j'ai compris que tous les membres
consentaient à ce qu'on parle de l'éducation des adultes à
l'intérieur des coupures.
Le Président (M. Bordeleau): C'est ce que j'ai compris
aussi, c'est pourquoi je vous ai laissé aller. (16 h 30)
M. Lalonde: Le ministre nous dit, dans sa grande explication sur
les coupures: On a 3 000 000 000 $ engagés à cause des
conventions collectives. Je lui rappellerai que c'est une décision
gouvernementale et le gouvernement est responsable des conséquences de
ses décisions. C'est difficilement acceptable que le gouvernement dise:
On a pris des décisions l'an dernier, il y a deux ans, cela va
coûter plus cher cette année, alors, il faut faire payer cela par
quelqu'un. Exact. On a déjà un déficit de 3 000 000 000 $
et il faut décider si on en aura un de 4 000 000 000 $ ou bien si on le
laisse à 3 000 000 000 $, si on augmente les taxes ou si on ne les
augmente pas. On a décidé de faire un déficit de 3 000 000
000 $ qui peut être augmenté un petit peu, à cause des
budgets ouverts, d'après ce que je vois, et des crédits
périmés qu'on remet déjà dans le réseau. On
a décidé de ne pas augmenter les taxes, mais encore faut-il
choisir la troisième possibilité, c'est-à-dire de
réduire les services en calculant avec un qrand soin les faits concrets
dans le champ. C'est techniquement facile, j'en conviens, de couper au niveau
des transferts et de dire aux commissions scolaires: Arrangez-vous. C'est plus
facile. C'est pour cela que ça m'apparaît une solution de
commodité.
En ce qui concerne l'éducation des adultes, je présume que
le ministre a reçu le dernier mémoire, qui est daté
d'aujourd'hui, d'ailleurs, de la Coalition nationale contre les coupures en
éducation des adultes. Est-ce qu'il partage l'avis de la coalition qui
apparaît à la paqe 4, à savoir que cela prend un budqet
supplémentaire? On parle d'un budget supplémentaire ou, en fait,
ce qu'on a voulu dire, j'imaqine, c'est qu'il ne s'agit pas
nécessairement d'attendre à l'automne pour faire adopter un
budqet supplémentaire; ça prend des fonds additionnels de 33 019
000 $ pour tout le domaine de l'enseignement des adultes, dont 19 000 000 $ au
secteur de l'éducation des adultes dans les commissions scolaires
régionales. À moins que je ne fasse erreur, c'est là que
les 10 000 000 $ de crédits périmés sont injectés
aux commissions scolaires. Deuxièmement, 9 082 000 $ au secteur de
l'éducation des adultes des cégeps. On a déjà
commencé à mesurer les conséquences sur un cégep.
Troisièmement, 2 000 000 $ au secteur d'éducation des adultes des
universités, 12 000 000 $ à la formation syndicale et enfin 2 025
000 $ aux OVEP, Organisations volontaires d'éducation populaire.
J'aimerais savoir si le ministre est d'accord avec la conclusion de la
coalition.
Comme question additionnelle, j'aimerais attirer son attention sur la
page 6 et lui demander si les dispositions qu'il nous a annoncées,
l'utilisation des crédits périmés, vont corriger cette
situation qui est, en fait, une coupure dont les victimes sont les personnes
à peu près les plus démunies et sur le plan
socio-économique, au point de vue formation, les
analphabètes.
Il y aurait une coupure de 4 000 000 $, soit 30% du budqet, au secteur
formation socio-culturelle, formation générale à temps
partiel, activité d'alphabétisation. Il y aurait 600 000
analphabètes au Québec, d'après les derniers calculs. Le
phénomène analphabète est sûrement une
conséquence directe de beaucoup d'autres situations, y compris les
situations à caractère socio-économique, donc, il s'aqit
sûrement des plus démunis ou de qens qui se retrouvent dans les
secteurs les moins favorisés. Après avoir étudié,
jeudi dernier, l'effet des coupures sur les programmes comme Passe-partout, les
maternelles maisons, les autres programmes qui s'adressent aux moins
favorisés dans notre société, le ministre pourrait-il
nous
rassurer à savoir que les fonds vont se retrouver dans ce
programme pour permettre la correction et l'augmentation du mouvement dans ce
sens?
M. Laurin: Encore une fois, si le gouvernement avait
disposé de l'argent nécessaire, il est bien évident qu'il
aurait fortement encouragé la progression des secteurs dont vient de
parler le député de Marguerite-Bourgeoys, car je pense bien qu'il
y a encore unanimité entre toutes les parties et que le gouvernement est
le milieu pour continuer à faire progresser ces secteurs, c'est bien
évident.
Étant donné les contraintes dont j'ai fait état
tout à l'heure gui tiennent à la conjoncture
générale, étant donné la décision qui a
été prise de ne pas augmenter le niveau de taxation, étant
donné les contraintes auxquelles nous devions faire face du fait que
nous voulons respecter les conventions collectives que nous avons
siqnées, nous n'avions pas d'autre choix que d'effectuer des
compressions dans ce qui était compressible techniquement. Cependant,
encore une fois grâce aux surplus des commissions scolaires cette
année, nous avons pu divertir ces crédits périmés
et atténuer les effets des compressions là où elles
avaient dû être faites. Un des secteurs qui en a
bénéficié, c'est précisément le secteur de
l'éducation des adultes. Grâce à cela, comme je le disais
tout à l'heure, je pense que nous avons pu maintenir l'essentiel des
services actuels et surtout des infrastructures nécessaires pour un
autre bond en avant. Un des secteurs qui en ont bénéficié,
c'est particulièrement le programme des milieux sociaux
économiquement défavorisés. Par exemple, nous pourrons
maintenir les 182 maternelles maison que nous avions instaurées au cours
des deux dernières années.
Sans accorder au programme Passepartout les crédits dont il avait
pu bénéficier dans le passé, nous avons pu quand
même verser à ce programme des sommes additionnelles à la
suite des compressions que nous avions dû effectuer. Ce programme pourra
disposer cette année d'un budget d'environ 2 000 000 $ qui permettra de
continuer les bons effets qu'il avait eu, particulièrement auprès
des milieux économiquement faibles. Voilà donc deux volets d'un
programme pour les milieux économiquement faibles que nous avons pu
maintenir.
En ce qui concerne les autres programmes, je pense qu'avec les
réformes que nous instituerons au cours de l'année avec la
collaboration des commissions scolaires, encore une fois, nous pourrons
maintenir, à leur niveau actuel ou à peu près d'une
façon substantielle, les programmes déjà en cours. En
particulier, nous ne croyons pas que les programmes destinés aux
analphabètes seront amputés d'une façon notable. Je
pourrais dire la même chose des programmes en cours cette année
à l'avantage des handicapés, des autochtones et aussi de la
clientèle féminine. Grâce à cette nouvelle injection
de crédits, nous avons réussi à protéger les
programmes au niveau actuel, en attendant que nous puissions faire davantage,
évidemment, dans l'avenir.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...la coalition calcule gue 33 190 000 $ seront
nécessaires pour tout le domaine de l'enseignement des adultes. Dans
l'ensemble, si on lit le mémoire, il ne semble pas y avoir
d'exagération, c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas de créer
de nouveaux programmes, d'explorer de nouvelles avenues, mais seulement de
maintenir le niveau des services. Le ministre dit: J'ajoute 10 000 000 $ et je
maintiens la qualité. Quelle est la raison de cet écart entre 33
000 000 $ et 10 000 000 $? Il y a 23 000 000 $ qui manquent. Le ministre a-t-il
assuré les représentants de la coalition qui l'ont
rencontré qu'ils faisaient erreur dans leur calcul ou les a-t-il
convaincus que tout était bien et que toutes leurs appréhensions
n'étaient pas fondées?
M. Laurin: En fait, je sais bien que les crédits que nous
consentons actuellement sont loin de correspondre aux attentes et aux besoins
qui ne font que s'accroître au fil des années, parce que c'est
l'évolution même de la société qui amène des
clientèles, comme l'a dit mon collègue de Rosemont tout à
l'heure, à vouloir se prendre en charge de plus en plus, à se
"responsabiliser", à prendre en main leur propre destinée. Il est
évident qu'à ce moment-là notre société, en
tant que société, est appelée à faire un effort
plus qrand dans les années qui viennent, mais cette année, nous
avons à faire face à une conjoncture extrêmement difficile.
Je n'ai aucune objection au contenu de ce mémoire de la coalition. Je
partage ses objectifs. Je voudrais bien que le gouvernement ait les sommes
disponibles pour contenter chacune de ses demandes, mais il reste que pour le
moment nous sommes obligés d'inclure ces demandes à
l'intérieur du cadre que nous avons unaniment décidé au
gouvernement. Théoriquement, il est possible de le faire, mais il
faudrait pour cela augmenter les taxes, comme je le disais tout à
l'heure, ou augmenter le déficit et, par exemple, présenter un
budget supplémentaire incluant cette dépense comme d'autres
dépenses qui nous sont demandées par le réseau
collégial ou par le réseau universitaire. Il s'agira de
savoir, en tant que gouvernement, à la lumière de la
situation économique à laquelle nous devons faire face, à
la lumière des équilibres budgétaires qu'il nous faut
préserver pour l'avenir, si c'est là la meilleure solution. C'est
une réponse générale.
Maintenant, une réponse plus particulière et
peut-être plus technique, c'est que, là aussi, il est difficile,
au moment où on se parle, de prévoir avec exactitude ce qui va
arriver dans le domaine de l'éducation des adultes. Nous allons voir la
demande qui va être faite au cours des prochains mois. À la
lumière des nouvelles rèqles budgétaires qui ont
été communiquées aux commissions scolaires, un moment est
prévu, à la fin de septembre ou au début d'octobre, pour
une évaluation nouvelle des clientèles et si, à ce
moment-là, les commissions scolaires nous disent que la demande pour
l'éducation des adultes dépasse les attentes, il nous sera
toujours possible de voir s'il est souhaitable aussi bien que possible
d'effectuer des réaménagements en utilisant peut-être des
crédits qui n'auront pas été dépensés
à d'autres postes budgétaires. Donc, on a un autre moment qui
viendra probablement à la fin de septembre ou à la mi-octobre
pour que nous puissions nous faire une idée plus juste de
l'évolution des clientèles en même temps que de
l'évolution des besoins et à ce moment-là, il sera
peut-être possible également, à l'intérieur des
budqets existants, de procéder à des
réaménagements.
M. Lalonde: M. le Président, le ministre parle de
demandes. Dans le secteur d'activité qui nous intéresse, comment
voulez-vous juger par la demande lorsque les frais d'inscription auront, dans
un cas comme celui que le député de Viau mentionnait,
augmenté par six? Cela va sûrement décourager un grand
nombre de personnes de s'inscrire dans le réseau et on ne pourra pas
juger de la demande simplement par les inscriptions.
M. Laurin: II reste que le député non plus ne peut
pas prévoir l'évolution exacte de la clientèle. Nous avons
toujours des surprises chaque année. Par exemple, l'an dernier, nous
attendions plus d'élèves. Il y en a eu moins dans le secteur
primaire-secondaire. De même dans le domaine du collégial, les
estimations qui avaient été faites ne se sont pas
avérées tout à fait justes, et je suis sûr qu'il
peut en être de même également dans le secteur de
l'éducation des adultes. Par ailleurs, je répète ce que je
disais tout à l'heure, la règle qui a été
énoncée par le ministère concernant les frais
d'inscription n'était pas absolue. Ce que nous avons souhaité,
c'est que les frais d'inscription, en moyenne, s'établissent à 5
$ par étudiant, mais comme je le disais tout à l'heure, cela
n'empêche pas les commissions scolaires de fixer des frais d'inscription
plus élevés pour certains types de clientèles mieux
nanties de façon à ne pas charger de frais d'inscription pour des
clientèles plus démunies qui ne pourraient pas les payer. Je
reviens toujours à la nécessité de cette collaboration
entre un ministère qui édicte des normes qénérales,
basées habituellement sur des moyennes de coûts, et le travail des
commissions scolaires ou des administrations collégiales locales qui,
elles, établissent des règles beaucoup plus précises en
fonction d'une situation qui leur est beaucoup mieux connue.
M. Lalonde: M. le Président, je ne veux pas passer tout
l'après-midi sur ce programme. Je remercie la coalition d'avoir fait cet
effort d'éclairage à l'égard du gouvernement et de tous
les députés de cette commission, qui nous permet de ne pas nous
laisser endormir par les vagues promesses du ministre. Il est évident
que les 10 000 000 $, oui, c'est mieux que rien, mais, si on en croit la
démonstration faite par la coalition nationale contre les coupures
à l'éducation des adultes, même ces 10 000 000 $ sont
totalement insuffisants. (16 h 45)
L'éducation des adultes va souffrir un recul au Québec, au
cours de l'année qui commence, recul qu'on devra payer un jour ou
l'autre. Quand je dis on, je ne parle par du gouvernement, je parle de la
société. Je crois qu'il s'aqit d'un geste irresponsable et
incohérent de la part du qouvernement. Si pour faire payer ses
générosités lorsqu'il a négocié les
dernières conventions collectives,
Il doit s'en prendre à des programmes commodes, techniquement
possibles, je pense qu'il ne fait pas preuve de responsabilité à
l'éqard de la population en ce qui concerne -puisque c'est le programme
qui nous occupe actuellement - l'éducation des adultes.
M. Laurin: M. le Président, malgré qu'il faut bien
relever une des affirmations que faisait le député de
Marguerite-Bourgeoys au tout début de son exposé, quand il disait
que c'est le qouvernement qui a quand même signé ces conventions
collectives.
Effectivement, nous les avons signées, nous les avons
respectées. Mais, lors de cette dernière négociation, nous
avons déjà commencé à corriger l'excès des
concessions que le gouvernement précédent avait faites puisque,
malgré les avantages gu'en ont retirés les enseignants, nous
avons guand même pu réduire l'écart entre les salaires des
enseignants du secteur public par rapport au secteur privé qu'avait
consentis le gouvernement antérieur. Même si nous avons
réussi à diminuer quelque peu cet écart, il faut bien dire
que nous partions de loin. Aussi, je pense qu'il conviendrait de corriger le
mémoire de la coalition à la lumière des
nouveaux chiffres que j'ai eu l'occasion d'énoncer tout à
l'heure. Maintenant, l'écart n'est plus de 33 000 000 $ comme le dit le
mémoire de la coalition, mais bien de 20 000 000 $,, puisque les
crédits prévus étaient de 162 000 000 $ que le budqet
réel, maintenant, sera de 142 000 000 $. L'écart sera donc
moindre que prévu.
M. Lalonde: J'entends des voix ici autour qui disent non.
Peut-être qu'on pourrait inviter les responsables de la coalition
à confirmer les propos du ministre ou à les infirmer.
M. Laurin: De toute façon, comme vous l'avez dit, il reste
que nous avons fait des efforts pour diminuer cet écart et que nous
aurions aimé en faire davantage. Idéalement, nous aurions
même voulu donner plus que ce que demande aujourd'hui la coalition. Cela
aurait été parfaitement souhaitable et parfaitement
léqitime. Ce qui nous empêche de le faire, c'est justement
l'évolution de cette conjoncture qui fait que, pour satisfaire ces
demandes, il faudrait auqmenter le déficit. Je peux bien demander au
gouvernement, au prochain Conseil des ministres, d'augmenter ce déficit.
Je le ferai, d'ailleurs. Mais, encore une fois, je ne vois pas d'autre solution
que celle, d'auqmenter le déficit pour pouvoir satisfaire des demandes
que, par ailleurs, j'estime tout à fait normales et légitimes. Il
n'y a pas d'autre solution que celle d'auqmenter le déficit.
M. Lalonde: J'espère que le ministre sera plus...
Le Président (M. Brouillet): Excusez-moi. Une minute, s'il
vous plaît. Le député de Shefford demande la parole depuis
lonqtemps. Je vais laisser M. Lalonde peut-être parler
immédiatement, mais, après cela, j'aimerais peut-être vous
annoncer que le député de Shefford devrait prendre la parole pour
son temps.
M. Lalonde: Seulement une remarque, M. le Président. Si le
ministre ne fait pas preuve de plus de conviction à l'éqard du
Conseil des ministres pour auqmenter le déficit, nos espoirs sont assez
minces. M. le Président, il est exact que le qouvernement devait faire
des coupures et je vais le répéter, on l'a fait la semaine
dernière. C'est vrai, c'est possible aussi que la dernière
négociation a dû forcer le gouvernement à réduire
les avantages qui avaient été accordés, mais dans une
période de croissance. Ce que je reproche au qouvernement, c'est de ne
pas avoir géré la décroissance et cela fait cinq ans.
Pensez au dernier déficit de Raymond Garneau, qui a été de
moins de 1 000 000 000 $ et qui commençait à annoncer cette
période de décroissance. Ce qu'on voit actuellement, c'est
malheureux, c'est que ce sont des secteurs qui sont les plus démunis,
ceux qui ont le moins de puissance ou de pouvoir, disons, qui en sont les
victimes. C'est ce qu'on appelle du "management by crisis"; on va au plus vite,
au plus facile et le résultat est le gâchis qu'on voit
actuellement, autant à l'éducation des adultes que dans d'autres
secteurs démunis dont on a étudié les conséquences
des coupures la semaine dernière.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Je ne veux pas faire une guerre ou une lutte de
chiffres et reculer bien loin parce qu'on sait qu'il y a des milliers de
professeurs aux secteurs primaire, secondaire et même plus haut qui sont
mis en disponibilité. Cela dépend, entre autres, de
négociations qui remontent avant notre arrivée au pouvoir, mais
je ne veux pas revenir là-dessus; sauf que, là, on est
obligé de couper. On est poigné dans une situation
économique où on est forcé de le faire et ce n'est
vraiment pas de gaité de coeur, on aimerait mieux pouvoir augmenter les
crédits partout. Au départ, je pense que c'est facile à
comprendre. Je ne vois pas un gouvernement se plaire à faire des
coupures et à subir des demandes répétées de tout
le monde. Je comprends ces demandes et je les appuie parce que j'ai suivi des
cours du soir et je sais ce que c'est, sauf qu'on est poigné dans la
situation dont on parle depuis tantôt et on n'a pas le choix. Je nous
verrais très mal répondre à 100% à toutes les
demandes; l'Opposition, qui semble vouloir défendre présentement
les augmentations de crédit, serait la première, à la
période des questions de l'Assemblée nationale, à nous
dire: Vous avez dépassé votre budget, vous n'êtes pas de
bons administrateurs, vous ne tenez pas parole; vous aviez promis de ne pas
dépasser le budget.
Il y a un autre point. Je fais partie de six commissions parlementaires
et ce n'est pas le seul endroit où on demande des auqmentations de
crédit, c'est partout gu'on nous le demande. On n'a pas le choix, on est
obligé.
M. Lalonde: La crise est épouvantable! La crise est
partout!
M. Paré: II ne faut pas oublier qu'aux États-Unis
c'est par 26 000 000 000 $ qu'on coupe le budget annuellement. Nous, on essaie
de le restreindre au minimum, de couper le moins possible, mais on n'a pas le
choix, il faut couper là où c'est "coupable". C'est une chose que
je tenais à dire. Ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on
coupe.
M. Lalonde: Est-ce l'éducation des adultes qui est
coupable? Je dirais qu'elle est non coupable.
M. Paré: Ce que j'espère, c'est qu'on va couper le
moins possible partout et qu'on va réussir à en ajouter un peu
partout si on réussit à contrôler tous les
ministères, y compris l'Éducation, mais aussi ailleurs de
façon à avoir des crédits périmés ailleurs.
Ce qu'il faut faire, c'est un bon contrôle pour qu'il y ait le moins de
gaspillaqe possible, le plus d'efficacité possible.
Face à cela, où je veux en venir, c'est de dire qu'il y a
eu dans le système de l'éducation, au primaire, au secondaire et
ailleurs, comme je le disais tantôt, des coupures aussi. Ce n'est pas
seulement à l'éducation des adultes, il y en a eu partout. Cela
implique entre autres, seulement dans mon comté, deux fermetures
d'écoles et des dizaines de mises à pied de professeurs. Il y en
a des milliers au niveau du Québec.
Ma question au ministre est celle-ci. Ce qui est important dans
l'éducation des adultes, je pense, c'est de donner le meilleur service
possible et de donner la chance au maximum de citoyens du Québec qui
veulent suivre les cours offerts aux adultes l'occasion, la chance de pouvoir
suivre ces cours. Je pense que le but premier de tout le monde, y compris ceux
qui sont ici, est de donner la chance au plus grand nombre possible de
Québécois de suivre des cours et d'avoir les meilleurs cours
possible.
Face à cela, la question est de savoir, dans les commissions
scolaires et ailleurs, où il y a des fermetures d'école et des
mises à pied, s'il serait possible d'utiliser ce qui est payé
ailleurs et qui n'est pas utilisé et de l'utiliser justement pour
l'éducation des adultes. Est-ce qu'il y aurait une possibilité ou
une ouverture de ce côté-là?
M. Laurin: II y aurait possibilité, mais il va falloir que
les commissions scolaires, que les syndicats locaux et que le syndicat national
des enseiqnants nous y aide. Il est vrai que les mises en disponibilité
seront passablement nombreuses cette année, mais, pour qu'on puisse
affecter les enseiqnants mis en disponibilité à des tâches
comme celles que vous mentionnez, il faut le faire avec leur accord car les
conventions collectives à cet éqard sont assez contraiqnantes.
Lorsqu'il s'agit d'affecter à un travail quelqu'un qui est mis en
disponibilité, il faut respecter les contraintes que contient la
convention collective.
Par exemple, il n'est pas possible d'affecter à une tâche
qu'il ne voudrait pas et qui ne constituerait pas de l'enseignement à
strictement parler un enseignant mis en disponibilité. Il ne faudrait
pas non plus faire en sorte que des enseiqnants qui seraient affectés
à l'éducation des adultes dérangent de quelque
façon les ratios maître-élèves qui ont
été édictés par la convention collective. Il reste
cependant qu'à l'intérieur de ces contraintes, il est
sûrement possible d'en arriver à des accords sur le plan national
qui pourraient ensuite se répercuter au niveau réqional ou au
niveau local. C'est pour en arriver à un accord de ce genre que j'ai
demandé au président de la Centrale des enseignants du
Québec de nous rencontrer prochainement pour discuter toutes les pistes
et toutes les avenues possibles qui nous permettraient d'utiliser les
enseignants mis en disponibilité pour des tâches d'enseignement,
que ce soit dans le secteur régulier ou le secteur des adultes, dans le
plein respect des conventions collectives, et j'espère que nous pourrons
compter sur cette collaboration et que nos rencontres aboutiront à des
résultats fructueux.
Le Président (M. Rordeleau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: J'aimerais avoir quelques clarifications. Combien de
professeurs en disponibilité y avait-il en 1975? Est-ce que quelqu'un a
ça, s'il vous plaît?
M. Laurin: Cela prendra quelques minutes, comme on remonte, six
ans en arrière...
M. Cusano: C'est parce qu'il y a certaines affirmations qui ont
été faites et qui, je crois, sont fausses. En reqardant...
M. Laurin: II faut dire qu'en 1975 la sécurité
d'emploi n'existait pas, c'est un acquis de la convention collective
négociée entre les centrales et le gouvernement Bourassa en
1976.
M. Cusano: C'est parce que je voulais corriqer les
déclarations du député, qui disait que la question de
sécurité d'emploi était quelque chose d'antérieur
à votre gouvernement.
M. Laurin: C'est en 1976, excusez. M. Cusano: C'est en
1976? Pas avant?
M. Paquette: Cela a été signé sous le
gouvernement Bourassa et c'est une excellente chose.
M. Cusano: Cela a été siqné par vous? Mon
point, M. le ministre, c'est que, dans cette question de disponibilité,
on ne s'est pas réveillé un matin pour s'apercevoir qu'on aurait
1 000, 2 000 ou même 3 000 professeurs en disponibilité. Il y a
dans vos négociations, certaines clauses, même des congés
de paternité. Je ne suis pas contre les congés de
paternité, mais, quand ils sont
donnés six mois plus tard, je me pose des questions. Est-ce qu'on
a considéré, par exemple, que ce qui se produit avec la question
de disponibilité, M. le ministre? Je vous en fait mention parce que,
avant d'arriver ici, j'étais directeur d'une école. La plupart
des gens mis en disponibilité sont des gens qui ont maintenant cinq,
six, sept, huit, dix et même douze années d'ancienneté et
d'expérience. Avec l'évolution des années soixante dans la
formation des professeurs, on peut dire, généralement parlant,
que les professeurs qui étaient les mieux préparés
à nos programmes d'aujourd'hui sont ceux qui sont sortis des
institutions collégiales de formation de professeurs dans les
années 1971, 1972, 1973, 1974. Maintenant, ces professeurs sont ceux mis
en disponibilité. Est-ce qu'il y aurait lieu, de votre part, puisque
vous parlez de rouvrir ces négociations, de penser à un
système où on renverserait la disponibilité?
C'est-à-dire qu'on prendrait des personnes qui sont arrivées
à leur trentième, leur trente et unième, leur
trente-troisième année de services et elles se contenteraient de
faire de la suppléance. Après trente-trois ans dans une classe,
on a son voyage. Est-ce que ce serait quelque chose d'approchable
d'après vous, M. le ministre?
M. Laurin: Si je comprends bien, le député de Viau
me fait des suggestions pour la prochaine négociation collective?
M. Cusano: J'ai peut-être compris, excusez-moi, le
français n'étant pas ma langue maternelle...
M. Laurin: Non, non, j'ai bien compris. Je pense que ce sont des
suggestions que vous me faites pour la prochaine négociation.
M. Cusano: Excusez-moi, il me semble que vous avez dit tout
à l'heure que vous avez approché les syndicats pour rouvrir les
négociations présentes? (17 heures)
M. Laurin: Nous approchons les syndicats pour voir s'il est
possible, en respectant les conventions collectives actuelles, de
réaffecter à certaines tâches des enseignants mis en
disponibilité sans cependant revoir les ratios
maître-élèves, parce que ç'a été
acquis par la dernière négociation collective. Mais je pense
gu'il y a des possibilités. Par exemple, des prêts de services
d'enseignants mis en disponibilité qui pourraient travailler à
l'implantation de nouveaux programmes, à de l'animation, à du
perfectionnement, à de l'encadrement, à des activités
périscolaires, à un travail de dépannage dans le domaine
de l'éducation des adultes pour certaines clientèles; ce sont ces
pistes et ces avenues dont nous allons discuter prochainement, à une
table conjointe, avec des représentants de la Centrale des enseignants
du Québec.
M. Cusano: Entre-temps, l'autre jour, vous avez mentionné
- on ne le saura pas avant le mois de septembre, je ne vous demanderai pas de
me donner des chiffres -qu'à peu près 90% des professeuers en
disponibilité, si on regarde l'année qui vient de finir, sont
rappelés ou réaffectés durant l'année.
M. Laurin: L'an dernier, c'a été 70%.
M. Cusano: 70%. Je crois qu'il faudrait préciser que ces
70%, c'est à la fin de l'année, c'est-à-dire que si au
mois de septembre, l'année dernière, on avait un nombre x, c'est
qu'à la fin de septembre, il y en a un dixième qui ont
été réaffectés... C'est bien important de le
préciser lorsqu'on fait des affirmations pour dire qu'un tel pourcentage
a été rappelé.
Pour ces professeurs qui sont en disponiblité présentement
- je ne veux pas embarquer dans la bataille entre le ministère et les
commissions scolaires sur la suppléance telle quelle - y a-t-il moyen,
de la part du ministère, d'empêcher que ces personnes - j'ai
vécu l'expérience - qui entrent le matin à 8 h 30,
viennent s'asseoir dans la salle des professeurs et la quittent à 15 h
30? C'est un gaspillage éléphantesque. Est-ce que c'est dans vos
pouvoirs, par un arrêté en conseil ou autrement, de mettre ces
gens à l'ouvrage?
M. Laurin: Oui, je comprends parfaitement le souci du
député et je le partage entièrement. Mais nous avons
effectué un changement cette année qui va peut-être amener
une amélioration. Jusqu'ici, le ministère finançait
à 100% la suppléance, mais cette année, nous ne
financerons pas à 100% la suppléance, afin d'inciter davantage
les commissions scolaires à utiliser leur personnel en
disponiblité pour fins de suppléance, au lieu d'aller engager du
personnel additionnel. Nous espérons gue cette mesure que nous avons
prise va inciter davantage les commissions scolaires à recourir à
leur personnel en disponibilité, avant de procéder à tout
autre engagement de personnel.
M. Cusano: Est-ce que je pourrais amener la question des
budgets?
M. Laurin: Oui.
M. Cusano: II a été déclaré que 87%
des sommes déboursées allaient pour fins de salaire. 87%? Puisque
le nombre de professeurs ou le personnel dans le domaine scolaire n'a pas
diminué proportionnellement à la baisse telle quelle, c'est que
l'enveloppe
qui est donnée aux commissions scolaires... c'est-à-dire
que si l'année dernière, elles avaient x millions, cette
année, pour le salaire du personnel, ce montant reste presque le
même, parce qu'il n'y a pas de diminution de personnel.
M. Laurin: J'ai donné des chiffres tout à l'heure,
les 3 300 000 000 $ que nous allons verser en salaire, ce qui correspond,
à ce qu'on me dit, à 89% même du budget total.
M. Cusano: ...ça veut dire que le responsable du budget
dans l'école ne peut pas toucher aux salaires tels quels, si on prend
comme exemple les écoles qui ont des budgets totalement
décentralisés et lorsqu'on voit une augmentation de 12% et
même 14% dans le matériel didactique, ainsi de suite, là,
il se trouve à y avoir une baisse. On tombe dans un cercle vicieux,
c'est-à-dire que les professeurs ne peuvent pas enseigner comme il le
faut, parce qu'il leur manque le matériel didactique et on n'a pas
d'argent à leur donner pour augmenter leur efficacité. Est-ce
que, parmi les ajustements dont vous parlez, on considérerait encore
d'augmenter ce budget? Je sais que vous allez me dire que c'est totalement
transférable de la part des commissions, mais lorsqu'on les met dans une
camisole, elles ne peuvent pas trop s'en sortir. Si on prend comme exemple des
directives qui ont été données aux commissions scolaires,
où on augmente le coût de l'huile à chauffage de seulement
5%, les "tanks" vont être remplies guand même. Ce ne sont pas eux
qui vont dire aux compagnies de pétrole combien elles devraient
facturer. Les commissions doivent aller chercher des fonds seulement où
c'est compressible. Ce que je trouve déplorable, c'est que les personnes
qui ont le plus le droit - je crois que ce sont les enfants - à une
éducation adéquate sont pénalisées d'une
façon incroyable.
Ma question est la suivante: Dans vos révisions - vous semblez
nous donner l'espoir que vous allez réaménager, vous allez
chercher de l'argent guelgue part, je ne sais pas où - est-ce qu'il y a
un espoir que ce montant pour le matériel didactique ou éducatif
augmente?
M. Laurin: En réalité, comme le
député de Marguerite-Bourgeoys y faisait allusion tout à
l'heure, grâce à l'utilisation des crédits
périmés, en grande partie pour améliorer la situation au
sein des commissions scolaires, nous avons pu injecter des sommes
additionnelles pour le soutien pédagogique, une somme de 10 000 000 $.
C'est sûr que cela va diminuer la pression sur les commissions
scolaires.
M. Cusano: Du côté très pratique, M. le
ministre, lorsqu'on arrive avec ces cadeaux -ce n'est pas au mois de septembre
qu'on va y arriver...
M. Laurin: Elles le savent déjà.
M. Cusano: ... est-ce que cela veut dire qu'on encouraqe les
directions d'école à fonctionner dans le rouge avec l'espoir
qu'il va y avoir des crédits additionnels?
M. Laurin: Elles les ont déjà puisque, dès
le mois de mars, les commissions scolaires, à la suite de rencontres que
nous avons eues avec elles, ont été mises au courant des
crédits dont elles pourraient disposer. Nous les encourageons
évidemment à utiliser pleinement les services de leurs
professeurs, à faire en sorte gue chaque professeur donne 1000 heures
d'enseignement, par exemple. Il est évident gu'étant donné
gue la plus grande partie du budget va aux salaires et qu'il reste 300 000 000
$ pour les autres programmes, on ne pourra pas, comme par le passé,
consacrer autant d'argent aux autres postes du budget, dont le matériel
didactigue. Je pense bien qu'il reviendra aux commissions scolaires de
répartir le plus judicieusement possible les sommes dont elles disposent
pour les autres programmes gue les salaires aux enseignants.
M. Cusano: M. le ministre, là où je veux en venir,
c'est que les commissions scolaires sont placées dans une camisole. Un
exemple: à la CECM, secteur anglophone, pour une population d'environ 25
000 à 29 000 pour l'année prochaine, on parle de quatre
psychologues; cela veut dire environ 6000 enfants par psychologue. Juste pour
votre information, qu'est-ce qui se produit lorsqu'un psychologue arrive dans
une école pour voir un enfant? Parce gu'on arrive dans un
problème très pratique, on dit qu'on offre des services à
ces enfants, mais lorsqu'on les traduit dans la réalité, il n'y a
pas de services. Je vais vous expliquer. Lorsqu'un enfant est
référé au psychologue, c'est parce que le professeur n'a
pas été capable d'identifier le problème. S'il avait
identifié le problème, il n'aurait pas eu besoin de psychologue.
Lorsque le psychologue arrive, il a une rencontre avec le professeur. On peut
dire que la rencontre avec le professeur devrait professionnellement être
d'environ une demi-heure à une heure pour que les deux puissent savoir
quels sont les problèmes. Une fois que cette rencontre avec le
professeur a eu lieu, le psychologue doit administrer une batterie de tests,
n'est-ce pas? D'après les psychologues avec lesquels j'ai fait affaires
au cours des dix dernières années, cela prend deux heures pour
administrer cette batterie de tests. Il faut corriger les tests, en faire une
évaluation et, pour les enfants qui ont des problèmes plus
spécifiques, on arrive à des tests très
concentrés qui vont prendre à peu près une heure et demie.
De là, "there is the scoring, the interpreting and the writing of the
report". Je crois que n'importe quel professionnel va nous dire que cela prend
à peu près une heure et demie pour faire ce rapport. Une fois que
les recommandations sont sorties, je crois que cette information devrait
être fournie au professeur, soit au professeur d'une classe
régulière ou soit au professeur d'une classe d'éducation
spéciale. Cela devrait prendre encore entre une demi-heure et une heure.
À part cela, il y a la rencontre du psychogue avec les parents gui prend
encore à peu près une heure, une heure et demie, M. le ministre.
Si on met tout cela ensemble, toutes ces heures, cela veut dire qu'un
psychologue ne peut pas voir plus d'un enfant par jour. Lorsqu'on ajoute
à tout cela qu'un psychologue va être réparti parmi six
écoles, qu'il va passer une demi-heure dans une école ou une
demi-journée et qu'il sera obligé d'aller ailleurs, je me demande
à combien d'enfants vraiment on est capable de donner les services dont
ils ont besoin. Avec le MEQ, on ne peut pas apporter comme arguments des voeux
pieux, mais lorsqu'on arrive au niveau de l'école, c'est
différent comme la nuit et le jour, M. le ministre.
M. Laurin: II y a plusieurs réponses à votre longue
question. Il reste que, malgré les contraintes gui sont les nôtres
et gui existaient déjà d'une certaine façon l'an dernier,
l'enveloppe...
M. Cusano: Mais il y avait plus de psycholoques l'année
dernière, M. le ministre.
M. Laurin: Oui. ... budgétaire que nous consentons aux
commissions scolaires leur laisse quand même une marge de manoeuvre. Je
vais vous donner un exemple. L'an dernier, nous avons financé dans les
commissions scolaires 65 565 postes. Pourtant, une fois les rapports
compilés, il s'est avéré que les commissions scolaires
n'avaient engagé que 64 244 enseignants, ce qui leur laissait une marge
de manoeuvre de 40 000 000 $ à 50 000 000 $. C'est à
l'intérieur de cette marge de manoeuvre qu'elles ont puisé
probablement pour engager les psychologues dont vous parlez, qui était
plus nombreux l'an dernier, ou pour acheter du matériel didactique ou
pour quelque autre poste budgétaire que ce soit.
Cette année, en dépit des contraintes dont je viens de
parler, l'enveloppe budgétaire que nous allons consentir aux commissions
scolaires permet une marge de manoeuvre à peu près
équivalente. Il y aura donc moyen de dégager une marge de
manoeuvre qui permettra éventuellement, en cours d'année, aux
commissions scolaires, surtout après le 30 septembre, de dégager
des montants pour le rappel d'un très grand nombre, d'un bon nombre en
tout cas de ces personnels.
Deuxièmement, il revient également aux commissions
scolaires de décider, avec la marge de manoeuvre ou l'enveloppe
budgétaire donc elles disposent, qui est compressible, si elles gardent
à leur service par exemple, un cadre administratif, un ADP ou un
psychologue. C'est donc le jugement de la commission scolaire qui
prévaudra dans la circonstance. Si la commission scolaire décide
de garder dans son état actuel sa structure administrative, c'est
sûr que c'est le personnel non enseignant qui en souffrira, c'est le
service aux écoles qui en souffrira. Mais si la commission scolaire
décide qu'il faut privilégier les services que peuvent rendre aux
élèves certains personnels non enseignants, comme les
travailleuses sociales, les infirmières ou les psychologues, ce sera sa
décision. (17 h 15)
Un troisième élément de réponse, c'est
celui-ci: Peut-être qu'en période d'abondance, les enseignants ont
tendu à référer trop vite, trop facilement des cas
problèmes à des psychologues. Après tout, un enseignant
qui a poursuivi pendant trois ans sa formation universitaire a eu, à son
curriculum, guelgues notions de psychologie de développement de
l'enfant, a pu apprendre ce que les disciplines pédagogiques ou
psychologiques pouvaient lui enseigner sur des difficultés
socio-affectives de l'enfant. Et peut-être gue s'il avait recours plus
facilement, plus volontiers à son stock de connaissances, il
référerait moins rapidement, moins volontiers quelque
problème psycho-affectif que ce soit à des psychologues. Il
pourrait puiser davantage, dans son temps et dans son savoir et dans ses
capacités et dans l'amour qu'il a pour l'enfant, ce gu'il faut pour
régler un certain nombre de problèmes qui ne demandent
peut-être pas, qui n'exigent peut-être pas le recours automatique
aux services d'un spécialiste tel que le psychologue.
Je pense que la nécessité est la mère de
l'invention et qu'en période d'austérité ou de
difficulté, on puisera davantage dans le savoir ou les ressources gue
l'on possède pour régler, autrement que par des voies plus
faciles ou trop faciles, certains problèmes.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, à moins que ce soit sur le même sujet. J'ai
déjà une liste d'attente.
M. Lalonde: Sur ce sujet, vous avez une liste d'attente.
Voulez-vous inscrire mon nom au bas de la liste?
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Sur le même
sujet, M. le député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, je ne pensais pas que nos
amis allaient aborder des questions plus générales concernant les
commissions scolaires. C'était simplement sur l'éducation des
adultes. Cela va être très bref.
Dans le document que nous a soumis la coalition tout à l'heure,
il y a plusieurs chiffres qui semblent être contestés au niveau du
ministère. Est-ce qu'il serait possible, au ministère, de nous
donner un peu plus succinctement - pas nécessairement tout de suite,
mais nous faire parvenir à nos bureaux, dans les meilleurs délais
- les chiffres quant au nombre d'usagers qui seraient touchés? Dans le
document, on dit: Remet en cause les services aux 150 000 usagers de la
formation socio-culturelle par une réduction de 60% des ressources. Ils
supposent que cela va fermer partout. Ce n'est pas nécessairement le
cas. À moins qu'on les ait tout de suite.
L'autre question, c'était sur l'augmentation des frais de
scolarité. Je pense que vous avez répondu à cette
question. Dans le document, on parlait d'une augmentation de 40% des frais de
scolarité. J'imagine que c'est encore dans certaines clientèles
précises que ce chiffre est exact.
Une fois qu'on verra l'ampleur des chiffres, peut-être qu'on
s'apercevra que le problème est plus localisé qu'on pense. Si
c'est le cas, je voudrais simplement réitérer le souhait - je
pense qu'on est prêts à y travailler, tous les
députés ministériels ici, si c'est possible -
d'empêcher qu'il n'y ait aucun des services de formation socioculturelle
dans les institutions d'enseignement qui ferme.
M. Laurin: M. le Président, je vais laisser les autres
reprendre le sujet principal et durant ce temps-là, je vais faire mes
recherches pour voir si je peux répondre à cela tout de
suite.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Vous aviez une grande liste, apparemment, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. Je vous avais
noté quand même dans ma liste avant que vous n'exprimiez le
désir d'intervenir.
Enseignement primaire et secondaire public
(suite)
M. Lalonde: Vous êtes bien gentil. On est revenu au
programme 4, quoique l'on n'ait pas réglé le programme de
l'éducation des adultes. Les 1600 postes gui ont été
accordés par le gouvernement lors de la dernière
négociation, le ministre pourrait-il nous dire combien ces 1600 postes
vont coûter au gouvernement, dans le programme 4, pour l'année
1981-1982?
M. Laurin: Tout ce que je peux vous dire c'est que les 1600
postes étaient des postes théoriques. En réalité,
il n'y en a pas eu autant que cela. Mais pour vous donner le chiffre exact, je
vais passer la parole à M. Rousseau.
Nous avions effectivement prévu 1600 postes pour permettre la
réalisation des ajouts aux conventions collectives, soit le nombre
d'élèves par groupe dont le maximum était fixé;
aussi pour permettre l'allégement des tâches au niveau
préscolaire et au niveau primaire pour l'année 1980-1981. Dans la
réalité, les commissions scolaires ont fait appel au
ministère pour l'ajout seulement de 600 postes pour 1980-1981 par une
gestion un peu plus serrée, c'est-à-dire par une meilleure
organisation scolaire, une bonne collaboration également dans
l'affectation des enseignants pour permettre que le nombre de périodes
prévues ne soit pas allégé pour mille et une raisons, mais
qu'on puisse appliquer la convention collective tel que convenu entre les
centrales, les syndicats et le gouvernement. Ceci a coûté 8 300
000 $ pour l'année 1980-1981; pour l'année 1981-1982, nous
n'avons pas, non plus, à prévoir le nombre total gui avait
été prévu à partir, évidemment, de
l'historique de 1980-1981.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le
député de Marquerite-Bourgeoys?
M. Lalonde: Non, ça ne va pas du tout! Pour 1981-1982,
est-ce que vous prévoyez un nombre équivalent ou plus
élevé de postes qui seront remplis par suite de cette ouverture
qui est maintenant "injectée" dans la convention collective?
M. Laurin: Si, pour l'année 1980-1981, le ministère
n'a pas eu à verser l'équivalent de 1600 postes, c'est dû
surtout au fait qu'un très grand nombre d'enseignants n'avaient pas
à couvrir la tâche globale prévue dans la convention
collective, mais avaient une tâche allégée.
Pour 1981-1982, nous prévoyons environ 10 000 000 $ pour les
ajouts aux conventions collectives, mais, là encore, ces 10 000 000 $ se
situent dans des allocations supplémentaires, ce qui veut dire que les
commissions scolaires devront faire la preuve qu'elles en ont besoin par une
distribution des postes et éqalement par l'utilisation selon les
tâches prévues dans les conventions collectives. C'est là
qu'il y avait la plus grande marge de manoeuvre, finalement,
entre la tâche prévue dans les conventions collectives qui
permettait un calcul du nombre de postes et les réalités qui
étaient observées.
M. Lalonde: Pour l'année 1980-1981, vous dites 600 postes
et un montant de 8 300 000 $. Si je fais un calcul rapide, cela équivaut
à peu près, en moyenne, à 14 000 $ par poste.
M. Laurin: C'est-à-dire que les 8 000 000 $, c'est ce qui
a été ajouté pour des fins de bonification. Si, par
exemple, on ajoute un certain nombre d'élèves par classe, on ne
finance pas un salaire complet; le salaire de base est déjà
financé. Les 1600 postes incluaient les équivalences à
temps complet pour couvrir le nombre d'élèves maximum par groupe.
Il faut bien dire qu'en 1979-1980 et en 1978-1979 on retrouvait un très
grand nombre de groupes d'élèves qui dépassaient la
moyenne fixée dans la convention collective, mais, lorsque la commission
scolaire dépassait cette moyenne, il n'y avait absolument aucune
sanction, elle n'avait pas à financer l'enseignant. C'est à
partir de 1980-1981, soit l'an 1 de la nouvelle convention collective, qu'on
retrouve cette forme de sanction budgétaire qui vient,
évidemment, favoriser l'enseignant qui accepte des élèves
supplémentaires, mais, en général, on est porté
à refuser des élèves supplémentaires. C'est une des
grandes raisons de l'écart: l'allégement des tâches qui
nous était connu, mais qui, à toutes fins utiles, pouvait
être éliminé et, deuxièmement, le nombre
d'élèves par groupe qui pouvait être respecté dans
un très grand nombre de cas.
M. Lalonde: À ce poste, vous prévoyez 10 000 000 $
de plus, enfin 10 000 000 $...
M. Laurin: De plus.
M. Lalonde: ... dans le budqet de l'année courante.
M. Laurin: 1981-1982.
M. Lalonde: Ce sont 10 000 000 $ qui n'existeraient pas si on
n'avait pas accordé les 1600 postes théoriques lors de la
dernière convention collective.
M. Laurin: C'est-à-dire que ce n'est vraiment là
qu'en fonction de la clientèle du 30 septembre; on pourra voir s'il y a
des surplus, s'il y a moins d'élèves que prévu ou si
l'orqanisation scolaire permet davantage de respecter les contraintes des
conventions collectives sans qu'il y ait de sommes additionnelles de
versées au personnel syndiqué; c'est là qu'on pourrait
découvrir des surplus; c'est ce qui s'est passé au 30 septembre
1980.
M. Lalonde: Est-ce que le ministère est au courant de
qriefs de la part de certains syndiqués ou syndicats relativement
à l'application de cette clause dite de 1600 postes?
M. Laurin: Je pense que là-dessus il faut être
très précis et il y a un double problème. Au niveau de
l'entente nationale, l'utilisation des ratios n'existe plus en tant que telle
sauf pour deux exceptions: la détermination des surplus dans les
commissions scolaires au moment des mises en disponibilité et,
deuxièmement, les ratios sont maintenus pour l'enfance en
difficulté, mais l'enfance en difficulté lourde. Pour les autres,
les ratios sont disparus. Ce qui remplace les ratios, ce sont deux clauses de
la convention collective: la première, qui détermine la
tâche maximale et la tâche moyenne des enseignants; la
deuxième, qui détermine le nombre maximum d'élèves
par groupes. En appliquant ces deux clauses de la convention collective,
plutôt que les ratios comme antérieurement, cela donne un nombre
de professeurs inférieur au nombre de professeurs que donnait
l'application des ratios. Cela a été signé clairement au
niveau national.
Comme, dans le réseau primaire, secondaire, il y a des
négociations au niveau national et ensuite des négociations au
niveau local, au niveau local certains syndicats ont tenté de
défoncer, suivant l'expression consacrée, l'entente nationale. Il
y a eu à ce moment une loi que vous connaissez pour faire respecter
l'entente nationale. Le respect de l'entente nationale par les commissions
scolaires locales ou au niveau local peut avoir provoqué de la part de
certains syndiqués des griefs, mais je pense que la base légale
du ministère pour déterminer le nombre de ces postes est claire,
ce sont les clauses de la convention collective nationale signée. S'il y
a eu des dépassements au niveau des ententes locales, à ce
moment, il y a non-respect de l'entente nationale. Les commissions scolaires
qui l'ont fait se trouvent dans l'illégalité. Donc, les
paramètres utilisés pour la détermination du nombre de
professeurs tiennent compte des dispositions dont je vous ai parlé dans
l'entente nationale et ces dispositions réduisent effectivement le
nombre de professeurs.
M. Lalonde: Je vous remercie de ces précisions. Mais, en
fait, je ne demandais pas au ministre de trancher à savoir si la
convention collective avait été appliquée
conformément aux interprétations du ministère ou
conformément aux clauses de l'entente nationale. Je sais qu'il y a eu
problème, à un moment donné, quant aux
négociations locales. Ma question, c'est: Est-ce que vous
êtes au courant de l'existence de griefs, peu nombreux ou nombreux - vous
allez nous le dire - relativement à l'application de ces clauses, au
niveau local quelle que soit l'issue de ces qriefs? On saura qui a raison ou
tort.
M. Laurin: Je vous dis qu'effectivement il y a des griefs qui ont
été déposés.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y en a plusieurs?
M. Laurin: Nous savons qu'il y en a un au syndicat des Vieilles
forges, une demande de jugement déclaratoire. Il y a peut-être
d'autres griefs sur le plan local, mais cela n'a pas été
porté à notre attention.
M. Lalonde: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): J'avais à la suite Mme
la députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: On parle de convention collective et des
problèmes là-dedans. Le député de Viau a
abordé le problème et j'aimerais le pousser un peu plus loin.
Lors de la réunion qui a eu lieu vendredi à Montréal sur
les coupures budqétaires dans les affaires sociales, je crois que le
président du Conseil du trésor a parlé de la
possibilité de rouvrir une partie peut-être des conventions
collectives dans le secteur public. Je ne sais pas s'il a parlé au
niveau de l'éducation ou des affaires sociales ou globalement, je ne
sais pas. (17 h 30)
Je me demande, s'il n'y a pas deux façons d'améliorer la
situation. Ou on coupe dans les dollars, l'argent, ou on augmente la
productivité. D'accord? Je me demande s'il y a quelques aspects des
conventions collectives qu'on peut discuter de nouveau, non pas pour couper de
l'argent, mais pour augmenter la productivité. On parle du nombre
d'élèves par classe et tout le monde sait qu'après les
dernières conventions collectives, les commissions scolaires ont
coupé dans les heures au niveau élémentaire. On a
coupé des programmes au niveau secondaire, même avec une
augmentation du nombre d'enseignants, les programmes ont diminué chaque
année. Donc, y a-t-il une possibilité de discuter de nouveau de
la productivité des enseignants dans nos écoles, surtout
peut-être au niveau secondaire? Peut-on améliorer les programmes
sans verser plus d'argent là-dedans? C'est un aspect dont personne n'a
parlé.
M. Laurin: J'assistais à cette réunion de vendredi
et je vous avoue ne pas avoir entendu le président du Conseil du
trésor parler d'ouvrir de nouveau les conventions collectives.
Mme Dougherty: Peut-être en entrevue après?
M. Laurin: II a dit cependant ce que j'ai moi-même dit tout
à l'heure, qu'il serait peut-être bon que les centrales syndicales
rencontrent la partie ministérielle pour oarler ensemble des meilleures
façons à l'intérieur des conventions collectives
d'utiliser d'une façon plus rationnelle, plus abondante, plus
complète, le personnel mis en disponibilité. Il a donné
deux exemples: l'exemple de l'enseiqnement, par exemple, où il serait
peut-être possible, encore une fois à l'intérieur des
conventions collectives, de réaffecter à certaines tâches
les enseignants mis en disponibilité selon les pistes ou avenues que
j'énonçais tout à l'heure. Il a donné aussi un
autre exemple à l'intérieur du réseau des Affaires
sociales en vertu duquel, par exemple, il serait possible, lorsque nous ouvrons
un centre d'accueil, au lieu d'engager du nouveau personnel, d'affecter
à ces centres d'accueil comme nouveaux employés des
employés en surplus dans certains hôpitaux généraux
de soins aigus. Ce sont les deux exemples qu'il a donnés, mais je ne
l'ai pas entendu dire qu'il était possible d'ouvrir de nouveau en cours
de route les conventions collectives.
Quant à l'augmentation de la productivité, je suis bien
d'accord avec la députée de Jacques-Cartier que ce serait
souhaitable d'augmenter la productivité de tous les employés des
secteurs public et parapublic. D'ailleurs, c'est le sens de ce que
j'énonçais tout à l'heure quand j'ai mentionné le
fait qu'il serait peut-être souhaitable que les commissions scolaires
utilisent leurs enseignants de façon que la convention collective soit
intégralement respectée, c'est-à-dire que les enseignants
puissent donner, selon le cas, au primaire ou au secondaire, leurs 1100 minutes
de présence auprès des élèves ou leurs 1000 minutes
d'enseiqnement aux élèves, ce qui est loin d'être le cas
à l'heure actuelle. Cependant, avec les nouvelles règles
budgétaires et les directives que nous avons émises, il serait
peut-être plus difficile maintenant pour les commissions scolaires de ne
pas faire les efforts afin d'augmenter la productivité des enseignants,
puisgue, comme vient de le dire M. Rousseau, un certain montant a
été prévu aux allocations supplémentaires et non
plus dans les montants de base, ce qui veut dire que si les commissions
scolaires n'utilisent pas la productivité de leurs enseignants
conformément aux conventions collectives, elles devront faire la preuve
qu'elles ont besoin de personnel supplémentaire. C'est une façon
que nous avons prise, nous, pour essayer d'auqmenter la productivité;
mais même si nous avons pris cette façon, ceci ne
décharge pas les commissions scolaires d'assumer
complètement leurs responsabilités et d'effectuer un
contrôle plus rigoureux de la fécondité de leur personnel.
Il y aura là un effort que seules les commissions scolaires peuvent
faire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député,
avant d'aller plus loin, je voudrais seulement qu'on s'entende peut-être
avec les membres de la commission pour savoir si on peut prévoir une
heure pour terminer et si on va devoir revenir à 20 heures, comme
c'était prévu d'ailleurs. Puis-je avoir une indication de...
M. Lalonde: M. le Président, on va sûrement revenir
à 20 heures. Il n'y a aucun doute là-dessus. Il y a un seul
problème. Comment pourrons-nous avoir les réponses à
toutes nos questions sur le programme 4 avant 20 heures? On aimerait terminer
le programme 4 à 18 heures. On a commencé à 15 h 30, on a
perdu une demi-heure; je vais essayer, avec mes collèques, de resserrer
davantage le débat et de réduire le nombre des questions, quoique
toutes soient très importantes.
On aimerait, ce soir, attaquer le proqramme des collèges et des
universités. Ensuite, il y a le programme 11 qui est très
important, celui de la lanque, et il y a d'autres programmes aussi.
L'éducation des adultes, on l'a pas mal vue. C'est à peu
près dans ce sens-là qu'on s'aligne.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Cela veut dire, en
termes d'heures, selon les ententes antérieures entre les leaders,
qu'à 18 heures il nous resterait à peu près 2 h 30 de
temps.
M. Lalonde: M. le Président, je voudrais vous signaler
qu'on a perdu une demi-heure cet après-midi et 20 minutes jeudi. Si
c'était possible d'aller jusqu'à minuit, à moins qu'on
termine et que le ministre accepte toutes nos suggestions ou nous donne des
réponses tellement étincelantes et rapides, surtout, à ce
moment-là, on pourrait peut-être libérer les membres et
nous-mêmes nous libérer à 22 h 30.
Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, on
n'en est pas à une demi-heure près, on verra ce soir. J'entends
que nous suspendions à 18 heures pour reprendre à 20 heures.
Bon, on peut continuer. J'ai sur ma liste le député de
Fabre.
M. Leduc: On a beaucoup parlé des professeurs mis en
disponibilité. Je crois - et je voudrais avoir une confirmation - que
les professeurs du niveau collégial mis en disponibilité peuvent
être affectés à l'éducation des adultes. Ce serait
ma première question. Je crois qu'il y a une souplesse de ce
côté qui n'existait pas dans les conventions collectives des
enseignants du primaire et du secondaire.
M. Laurin: Excusez-moi, M. le député?
Le Président (M. Bordeleau): Pourriez-vous
répéter, M. le député de Fabre?
M. Leduc: On a beaucoup parlé de l'utilisation des
professeurs mis en disponibilité. Au niveau collégial - je
voudrais avoir une confirmation - je crois que les professeurs mis en
disponibilité peuvent être affectés à
l'éducation des adultes, ce qui contribuerait à réduire le
coût de l'éducation des adultes au niveau collégial. Je
crois que cette souplesse n'existe pas dans les conventions collectives des
enseignants du primaire et du secondaire. Je voudrais simplement savoir si
c'est juste. Oui?
M. Laurin: C'est exact, à l'enseignement collégial,
il est possible de faire consacrer à un enseignant une partie de sa
tâche à l'éducation des adultes, mais ça ne peut pas
dépasser un certain pourcentage.
M. Leduc: Donc, il existe une souplesse de ce côté.
Il a été envisagé, à la dernière
négociation, d'intégrer cette souplesse à la convention
des enseiqnants du primaire et du secondaire. Est-ce qu'il y a eu obstacle de
la part des enseignants? Est-ce la partie patronale qui n'a pas voulu ou est-ce
qu'il y avait des raisons techniques qui empêchaient d'intéqrer
cette souplesse? Il me semble que les coûts majeurs, dans
l'éducation comme ailleurs, ont toujours rapport aux salaires.
M. Laurin: Lorsqu'on parle du primaire et du secondaire, la
grande difficulté, encore une fois, est le double niveau de
négociation. Théoriquement, à partir de l'entente
nationale, il serait possible d'affecter des enseignants de l'enseignement
régulier à l'éducation des adultes. Par ailleurs, tout le
problème de l'affectation aux niveaux primaire et secondaire est
relié au niveau local en vertu du partage des pouvoirs et des
prépondérances qui avaient été
néqociées au début de la dernière convention
collective. Donc, dans plusieurs conventions locales, l'affectation à
l'éducation des adultes a été rendue impossible par la
convention néqociée localement.
M. Leduc: Vous me dites donc que c'est possible à la
condition que ce soit négocié localement. Est-ce que vous
connaissez des commissions scolaires où cela se fait, où des
enseignants sont affectés en partie, en tout cas, à
l'éducation des adultes?
M. Laurin: II y en a, mais de là à vous donner le
nombre précis, je ne pense pas qu'on l'ait.
M. Leduc: Au niveau colléqial, vous ne connaissez pas non
plus le nombre de professeurs qui sont affectés à
l'éducation des adultes en partie et le montant que cela peut
représenter.
M. Laurin: On n'a pas le chiffre actuellement.
M. Leduc: Vous n'avez pas de chiffre.
Le Président (M. Bordeleau): Cela semblait être sur
le même sujet, M. le député de Westmount.
M. French: Oui, c'est sur le même sujet, je veux juste
enchaîner. Dans un article sur les propos du Conseil des collèqes
au sujet des coupures dans le secteur collégial, entre autres, il est
question justement de réaffectation des professeurs mis en
disponibilité aux tâches d'éducation des adultes. Ce n'est
pas totalement clair dans l'article alors c'est pour cela que je pose la
question. Je crois que les porte-parole du conseil ont laissé entendre
clairement que les conventions collectives en vigueur enlèvent aux
professeurs le droit de refuser d'enseigner aux adultes. Maintenant, vous avez
répondu qu'ils pouvaient avoir une partie de la tâche, mais je ne
sais si vous parlez d'un professeur en fonction ou d'un professeur qui a
été mis en disponibilité. Est-ce qu'on peut avoir une
clarification là-dessus?
M. Laurin: II faudrait que je vérifie les conventions
collectives. De mémoire, c'est ce que je vous ai dit tantôt. On
peut vérifier la convention collective du collégial
rapidement.
M. French: Je pense que cela vaudrait la peine de le
vérifier parce que, évidemment, si on paie de toute façon
les professeurs mis en disponibilité et s'il y a des besoins criants,
dont on a entendu parler depuis une couple d'heures, dans le secteur
d'éducation des adultes, il me semble qu'une des priorités pour
le ministre, dans ces pourparlers qu'il va amorcer bientôt, serait de
suggérer au moins un peu plus de flexibilité. Je ne voudrais pas
demander l'impossible, de rouvrir une convention collective; par contre, il me
semble évident que le contribuable qui voit ce genre de
phénomène perd à la fois sa foi dans la bonne
volonté des syndiqués ainsi que dans l'efficacité du
Québec à fournir les services aux adultes qui en ont besoin.
Le Président (M. Bordeleau): Nous revenons au
député de Fabre.
M. Leduc: Un commentaire, M. le Président, étant
donné qu'encore une fois les salaires représentent au moins 80%
des budgets des collèges et des commissions scolaires, il semble que la
voie à explorer est de ce côté, c'est-à-dire avec un
surplus de personnel. L'intégration des enseiqnants à
l'éducation des adultes tant au niveau secondaire qu'au niveau
collégial - on me dit qu'au niveau colléqial cela se fait pour
une partie du temps; il me semble que cela pourrait être la
totalité de la tâche d'un enseignant mis en disponibilité -
cela me semble être la principale voie de solution, étant
donné le coût des salaires.
Un autre facteur. On a parlé des sommes accumulées par
certains cégeps grâce à l'ancienne formule d'inscription
pour les étudiants en éducation des adultes. Je connais au moins
un cégep où cette accumulation représente 500 000 $; c'est
beaucoup d'argent qui peut être affecté à
l'éducation des adultes. Est-ce qu'on connaît le nombre de
céqeps qui ont ce genre de surplus accumulés et ce que cela
représente comme montant dans les coffres des cégeps?
M. Laurin: Je ne pourrais pas vous donner le nombre exact de
cégeps où ces surplus ont pu être accumulés. On
pourra peut-être vous fournir la réponse guand on arrivera
à l'enseignement collégial. On essaiera de faire les recherches
durant le dîner; cependant, une autre façon d'améliorer le
rendement ou la productivité du secteur de l'enseignement des adultes,
particulièrement en raison des compressions que nous avons dû y
effectuer, est d'inciter, pour ne pas dire obliqer, les collèges qui ont
accumulé des surplus au secteur de l'éducation des adultes
à utiliser ces surplus, mais spécifiquement pour
l'éducation des adultes. Je suis sûr que, dans un certain nombre
de cas, ceci va encore améliorer la situation actuelle gui mérite
d'être améliorée, justement. (17 h 45)
Je voudrais seulement ajouter une remarque aussi. Il y a quand
même une limite à l'utilisation du personnel mis en
disponibilité, même au niveau des collèges, parce qu'il ne
faut quand même pas - il y a un caveat - que l'utilisation de ce
personnel en disponibilité alourdisse le coût du système en
changeant, en modifiant ce qui a été néqocié lors
des conventions collectives, c'est-à-dire les ratios
maître-élèves. II ne faudrait pas que les
aménagements nous amènent à augmenter ce ratio, ou
plutôt alléger dans le cas présent le ratio
maître-élèves parce que cela se traduirait par un
alourdissement du coût du système. En fait, ce serait une
modification des conventions collectives et, finalement, cela coûterait
plus cher.
M. French: Une question. Donc, le ratio
maître-élèves s'applique au niveau collégial?
M. Laurin: À la lumière des conventions collectives
que nous avons signées, je dis simplement cela pour le
primaire-secondaire, parce que la suggestion a également
été faite pour le primaire-secondaire d'utiliser du personnel mis
en disponibilité pour l'enseignement aux adultes.
M. French: Mais cela ne s'applique pas au niveau
collégial.
M. Laurin: Oui, d'accord, mais à condition qu'il soit bien
entendu que cela n'amène pas un alourdissement du système.
M. French: Cela ne s'applique pas, le ratio
maître-élèves, au collégial.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Sur la question que vous avez mentionnée tout
à l'heure, à savoir que le ratio tel quel a été
laissé de côté, est-il vrai que certaines commissions
scolaires s'en tiennent présentement à former des groupes de 28
élèves, indépendamment de la population,
c'est-à-dire que si une école se trouve à avoir dix
élèves en première année, dix élèves
en deuxième année et huit élèves en
troisième année, on prend ces enfants et on en forme une classe?
Si c'est le cas, pédagogiquement parlant, le ministre est-il d'accord
avec cette pratique?
M. Laurin: La commission scolaire n'a aucune raison d'agir de
cette façon. Tout d'abord, comme il a été dit
tantôt, il y a eu pour 1980-1981, uniquement à titre des postes
d'enseignants, dans l'enveloppe de base, une marge de manoeuvre de plus de 1000
postes. Deuxièmement, en ce qui concerne les commissions scolaires - on
peut prendre des exemples - comme la CECM, -si je comprends bien, c'est une
commission scolaire que vous connaissez bien - la moyenne de nombre de
périodes pour 1980-1981 au secondaire était entre 18,5 et 19
périodes par semaine, alors que la convention collective...
M. Cusano: Excusez-moi...
M. Laurin: ...indique 20. Il y a...
M. Cusano: ...mais le problème que je veux souligner, ce
n'est pas au secondaire, c'est à l'élémentaire.
M. Laurin: Oui, mais il y a une transférabilité
totale dans les nombres de postes entre le secondaire et le primaire,
c'est-à-dire que la majorité des commissions scolaires
observées au cours de 1980-1981 avaient une marge de manoeuvre en ce qui
concerne la tâche des enseignants, ce qui veut dire que si cette marge de
manoeuvre était utilisée pour les fins d'organisation scolaire,
elles ne seraient pas obligées d'imposer une contrainte de 28
élèves par groupe. Il n'y a absolument rien qui impose cela
à la commission scolaire, ni la convention collective, ni les
subventions du ministère de l'Éducation.
M. Cusano: Les rumeurs sont qu'elles sont présentement en
train de travailler sur cela. Allez-vous parler aux dirigeants des commissions
scolaires pour vous assurer que cela ne se produise pas, ou si ce serait de
l'inqérence?
M. Laurin: Ce que nous allons faire, c'est ce que j'ai dit tout
à l'heure qu'on ferait, c'est-à-dire inciter fortement les
commissions scolaires à utiliser l'enveloppe budgétaire
conformément à la convention collective que nous avons
signée, qui fixe justement à 1100 minutes la présence de
l'enseignant auprès des élèves et à 1000 minutes
l'enseignement aux élèves.
M. Cusano: Pouvez-vous me garantir qu'il n'y aura pas trois
différents groupes d'élèves dans une telle classe?
M. Laurin: Si les règles sont suivies, on ne devrait pas
aboutir à des exemples comme ceux que vous mentionnez.
M. Cusano: C'est une qarantie de votre part.
M. Laurin: Je ne peux pas donner la garantie en ce sens que je ne
peux pas me substituer aux commissions scolaires. On ne peut le faire que par
le biais de contrôles a posteriori comme ceux que je mentionnais tout
à l'heure, étant donné que ces montants sont prévus
aux allocations supplémentaires et qu'elles devront faire la preuve de
la nécessité d'enseignants additionnels. C'est là un
contrôle gui pourra avoir son effet, mais, encore une fois, je ne peux
pas me substituer aux commissions scolaires. On peut bien multiplier les appels
au bon sens, à la sagesse, les incitations de toutes sortes, mais il
reste que la loi donne aux commissions scolaires une latitude que le ministre
ne peut pas leur enlever.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Apparemment nos micros ne se rendent pas aux
haut-parleurs de ce côté-ci de la table?
Le Président (M. Bordeleau): Oui,
effectivement, il y a un petit problème qui fait que votre voix
ne se rend pas dans les haut-parleurs de la salle. On me dit quand même
que c'est très bien enreqistré.
M. Lalonde: Pourvu que le ministre l'enregistre, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): À condition que vous
parliez peut-être un peu plus fort.
M. Lalonde: Je suis sûr que c'est un accident, mais on est
un peu inquiet étant donné que le ministre avait essayé de
nous empêcher de parler à la dernière commission
parlementaire jeudi soir.
Éducation sexuelle
M. le Président, il reste beaucoup de questions maintenant. On
veut passer à autres choses, quoiqu'on ait déjà
commencé à parler des collèges. Sur l'éducation
sexuelle, le ministre nous a expliqué assez longuement - je le remercie
de sa réponse - jeudi dernier, le cheminement de cette question. Il a
mentionné dans sa réponse, par exemple, que les commissions
scolaires ne sont pas satisfaites. Une enquête récente aurait
révélé que certaines commissions scolaires - à peu
près une cinquantaine - pourvoient cet enseignement. J'aimerais savoir
quels étaient leurs griefs. Est-ce que c'était à propos du
contenu ou des méthodes pédagoqiques?
M. Laurin: C'est une enquête que nous avons
effectuée auprès des commissions scolaires à
l'échelle du Québec. Cette enquête comprend plusieurs
questions et les commissions scolaires ont bien répondu au questionnaire
et à toutes les questions. C'est la compilation des résultats qui
nous montre que les commissions scolaires sont loin d'être satisfaites du
programme que dispensent actuellement quarante-huit commissions scolaires. Le
reproche qénéral, c'est que ce proqramme est un programme-cadre
qui peut être adapté par chacune des commissions scolaires selon
ce qu'elle juqe bon et, souvent, il y manque des notions essentielles, par
exemple, au niveau de l'aspect prévention, de l'information dans le
domaine de la santé ou encore au point de vue du caractère plus
ou moins complet de l'information qui est dispensée. Je pourrais
reprendre chacune des questions du questionnaire mais ça serait un peu
long. De toute façon, la conclusion des commissions scolaires, c'est
qu'il y avait lieu pour le ministère de reprendre totalement l'examen de
ce problème et d'arriver avec un programme qui cette fois-là ne
soit pas un programme-cadre mais qu'il aille jusqu'au fond des choses et qu'il
couvre tous les volets que les parents, en particulier, estiment
nécessaires de couvrir.
M. Lalonde: Merci. Le ministre, de toute évidence, n'est
pas d'accord avec le projet qui a été publié il y a
quelques semaines puisqu'il l'a rappelé. J'aurais deux questions.
Comment se fait-il d'abord que le projet ait été publié si
le ministre n'était pas d'accord? Et, deuxièmement, quel... Oui,
allez.
M. Laurin: Pour répondre à la première
question, je n'ai pas rappelé le programme. Nous avons suivi la
procédure habituelle. Souvent, après qu'un premier projet de
programme est rédigé nous l'envoyons à des
spécialistes, à des lecteurs privilégiés, à
certaines commissions scolaires pour avoir leurs commentaires,
réactions, avis. Nous l'avons fait dans ce cas-là et nous avons
fait quelque chose de plus, nous avons demandé à quelques
commissions scolaires sur la base de ce premier projet de voir à une
tentative de modalité d'application. Il était bien entendu au
départ que ce n'est qu'après avoir reçu la réaction
ou des lecteurs priviléqiés, ou des spécialistes, ou des
commissions scolaires que nous avons consultés, ou des commissions
scolaires qui avaient mis ce programme à l'essai, que nous
procéderions à la révision de ce premier projet.
La rédaction" de ce deuxième projet est sur le point
d'être terminée actuellement. C'est véritablement un
nouveau projet que nous avons devant nous, enrichi, alimenté par les
réactions de tous ces spécialistes, lecteurs
priviléqiés, commissions scolaires et aussi de tous ceux qui se
sont exprimés sur le sujet.
M. Lalonde: Le ministre nous a parlé de lecteurs
privilégiés, d'un certain nombre de personnes à qui le
nouveau programme ou le nouveau projet sera communiqué, est-ce qu'il
pourrait nous donner l'assurance qu'il sera communiqué à la
majorité, sinon la totalité des groupes au moins qui
s'intéressent à la question, qui ont réagi à son
premier projet? Plusieurs on reproché l'absence d'encadrement moral de
ce projet. Est-ce que le ministre est d'accord avec ce reproche qui a
été adressé au premier projet?
M. Laurin: Je pense qu'il y a lieu d'améliorer
l'intégration des autres volets de la formation personnelle de l'enfant
à l'éducation de la sexualité proprement dite. En ce sens,
oui, je pense qu'il y a une amélioration à apporter.
M. Lalonde: Est-ce que ça comprend les valeurs
morales?
M. Laurin: Oui, ça comprend incontestablement les valeurs
morales.
M. Lalonde: Si vous avez d'autres questions, je peux vous laisser
la parole.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: M. le Président, je ne veux pas revenir sur ce
qu'on a déjà parcouru, mais est-ce que le ministre a vu le projet
avant qu'il sorte?
M. Laurin: Non, le premier projet a été
rédigé et envoyé avant que j'assume mes
responsabilités comme ministre de l'Éducation.
M. French: Je ne peux que le regretter parce que je suis
convaincu que le ministre n'aurait pas laissé un tel projet sortir tout
en étant d'accord avec le principe de la chose, je pense qu'il y a des
dommages qui ont été faits, parce que cela a donné une
opportunité à toutes sortes d'opinions réactionnaires de
s'exprimer et d'influencer de façon très malheureuse l'avenir du
projet même. Je ne veux pas entrer dans les détails, mais c'est
sûrement une question importante pour l'avenir, oeuvrant dans un secteur
si controversé, pas seulement l'éducation sexuelle, mais toute
l'éducation, que de contrôler un peu mieux la circulation. Du fait
que c'était sélectif, que le ministre n'était pas vraiment
impliqué, c'est très difficile d'avoir une responsabilité
nécessaire dans le gouvernement comme tel avec un système de
contrôle comme ça. Je sais que, dans un ministère comme
l'Éducation, il faut que la vie continue même en l'absence du
ministre quand il est préoccupé par un autre problème.
Quand même, quelque chose de cette importance, de cette ampleur, ne
devrait jamais circuler de cette façon à l'avenir. Ce n'est pas
une question.
M. Laurin: J'y attache effectivement une très grande
importance et, depuis que j'ai assumé mes responsabilités, j'ai
eu, à plusieurs reprises, l'occasion de m'entretenir de ce projet
à l'intérieur du ministère et à l'extérieur
du ministère. Nous y accorderons le plus qrand soin pour la suite des
choses.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Mille-Îles.
M. Champagne: C'est un qenre de commentaire que je fais. Bien
sûr, le ministre n'est peut-être pas obligé de voir à
ce que tous les projets qui sortent de son ministère, dans tous les
domaines passent par ses mains pour être étudiés.
C'était quand même, M. le ministre, un projet pilote dans cinq
commissions scolaires. C'était un projet pour étude, de toute
façon, avec rétroaction et, à un moment donné, il y
a eu une explosion de protestations venant je ne sais de quel milieu, si bien
que l'Assemblée des évêques du Québec a
été obligée d'intervenir et de dire que l'éducation
sexuelle, de toute façon, était un besoin et un droit. La
question que je me pose: Comment se fait-il - quand même, c'était
un projet pilote - que cela ait débordé, comme on le sait, de
toute façon, en une espèce d'autocritique à la grandeur de
la province, dans tous les milieux?
M. Laurin: Quand on envoie un projet pour expérimentation
à quelques commissions scolaires, le fait qu'il y aura une
publicité autour de ce projet dépend beaucoup de la
matière concernée. Si cela avait été un programme
de mathématiques ou de géométrie, je ne pense pas que cela
aurait provoqué beaucoup de réactions dans le milieu. Mais
étant donné que cela touchait à un problème aussi
sensible et aussi fondamental, je pense qu'il est très difficile de
garder quelque confidentialité à l'expérimentation d'un
pareil programme. En tant que spécialiste en sciences humaines, la
réaction ne m'étonne pas.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Abandon
scolaire
M. Lalonde: M. le Président, nous avons un qrand nombre
d'autres questions que nous pourrions peut-être réduire à
trois questions. Sur l'abandon scolaire - je ne sais pas si le ministre a
répondu aux questions que j'avais soulevées au départ -
quelles sont les dispositions concrètes qu'il entend prendre pour tenter
de comprendre le problème, toutes ses modalités, toutes ses
données et qu'est-ce qu'on peut faire? Si je me souviens bien des
chiffres, le taux d'abandon au secondaire est de 18% et, au collégial,
de 30% ou 31%. C'est possible que mes chiffres ne soient pas exacts, mais c'est
quand même, avec quelques variantes près, un
phénomène qui remet en question ou qui met en doute, sinon la
qualité de l'enseignement, du moins son à propos ou son
adaptation. Je me demande guelle préoccupation le ministère a
à cet égard. (18 heures)
M. Laurin: II y a longtemps que le ministère se
préoccupe du taux trop élevé d'abandon scolaire. En
1972-1973, nos statistiques montrent qu'il y a 95 000 élèves qui
ont abandonné le système scolaire. C'était à peu
près 13% des clientèles totales. C'était beaucoup trop
élevé. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles il nous a
paru nécessaire de reprendre la question de la réforme scolaire,
surtout sur le plan pédagogique. Quand il y a des taux d'abandon aussi
élevés, cela veut dire que le système est imparfait, qu'il
faut l'améliorer, particulièrement au plan de la qualité,
au
plan de la pédagogie. Peut-être qu'on a fait des
progrès, puisque les statistiques de 1979-1980 montrent qu'il y a eu 55
000 abandons, ce qui constitue une réduction par rapport à
1972-1973, le taux d'abandon maintenant n'est plus que de 10%. C'est encore
beaucoup trop élevé. Nous pensons que les réformes
amorcées, surtout maintenant qu'elles sont inscrites dans le nouveau
régime pédagogique, vont amener une autre diminution de ce taux
d'abandon, ne serait-ce que par l'accent que nous mettons maintenant sur la
relation personnelle entre l'élève et le professeur,
l'encadrement, le suivi, la récupération. Nous espérons
que les taux d'abandon vont être encore réduits de ce fait.
Nous pensons aussi que l'accent plus grand qui va être mis sur la
formation fondamentale, la formation générale, l'enseignement
obligatoire de certaines sciences de base va contribuer également
à améliorer la qualité de l'enseignement et,
conséquemment, à diminuer les taux d'abandon. Nous avons mis
aussi d'autres mesures en marche qui ont pour but de faciliter le
dépistage hâtif des élèves qui sont susceptibles de
décrocher par rapport à d'autres, peut-être une plus grande
importance accordée à la connaissance intime de
l'élève, ce qui nous permettrait de mieux connaître ses
besoins et d'y faire face plus rapidement.
Vous verrez aussi que, dans les règlements pédagogiques,
on met l'accent sur les services personnels et les services collectifs aux
élèves. Il y a toute une politique qui est mise en place, et
là aussi nous espérons qu'avec ces services personnels et
collectifs aux élèves on va améliorer la situation. De la
même façon, notre réforme en cours sur la formation
professionnelle, la disparition de la voie allégée, un passage
plus facile du professionnel court à la formation
générale, une attention plus grande apportée à la
formation professionnelle proprement dite, donc une adéquation plus
grande entre la personnalité de l'étudiant et le curriculum qui
est mis à sa disposition, contribueront aussi d'une façon
indirecte à cette diminution. Il y a enfin quelques initiatives qui ont
été prices comme celle que vient de prendre la CECM, une
école spéciale pour décrocheurs. C'est une
expérience pilote, en même temps qu'une tentative de régler
le problème dans une commission scolaire qui en souffre
particulièrement. C'est là aussi un indice favorable pour
l'avenir.
Je continue à dire, cependant, comme je l'ai dit dans le Devoir -
le député de Marguerite-Bourgeoys le signalait - que le
problème me préoccupe au plus haut point et qu'il indique qu'on
n'aura jamais cessé de faire des efforts pour en arriver à une
adéquation plus parfaite entre les besoins de l'enfant et ce que
l'école peut lui apporter.
Le Président (M. Bordeleau): Comme il est passé 18
heures...
M. Lalonde: M. le Président, justement, en terminant, on
ne pourra pas adopter le proqramme 4 avant 20 heures; on aura quelques minutes
pour quelques questions.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. On pourra
continuer.
M. Lalonde: Simplement pour conclure, cette adéquation est
difficile à faire entre les préoccupations du ministre, ses
discours et ses actes, parce que les coupures affectent au premier chef ces
services aux étudiants. Quand on sait qu'une centaine d'orienteurs ont
été coupés et que c'est là que les commissions
scolaires ont leur seule marge de manoeuvre, c'est très difficile de
croire - je crois le ministre comme tel - à l'efficacité de ces
mesures.
M. Laurin: Mais l'amélioration ne passe pas simplement par
une augmentation de crédits ou une augmentation de personnel, elle passe
par une augmentation de fécondité et de productivité et
par l'amélioration de la qualité de l'enseignement.
M. Lalonde: Ce sont des discours, jusqu'au moment où vous
mettez l'argent là.
Le Président (M. Bordeleau): La commission parlementaire
de l'Éducation suspend ses travaux jusqu'à ce soir, 20
heures.
(Suspension de la séance à 18 h 06)
(Reprise de la séance à 20 h 20)
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, messieurs!
La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux. La
parole est au député de Marguerite-Bourgeoys. M. le
député.
Conseils d'orientation
M. Lalonde: Qui aurait préféré l'exercer
à partir de 20 heures, M. le Président. Cela devient de la
récidive, M. le ministre.
En effet, nous avons quelques autres questions concernant le secteur
primaire et secondaire. J'aimerais seulement en poser deux sur la loi 71. On a
eu quelques réponses sur la mise en place de la loi. Le ministre dit
qu'il y un certain nombre de conseils d'orientation qui ont été
mis sur pied, un certain nombre de projets éducatifs, sans être
plus précis. Est-ce qu'il pourrait
nous dire combien d'écoles ont mis sur pied leur conseil
d'orientation?
M. Laurin: Aux dernières informations que nous
possédons, il y a dix conseils d'orientation qui fonctionnent selon les
formules prévues à la loi 71.
M. Lalonde: Sur un total possible de combien?
M. Laurin: II y a 3500 écoles. Mais cependant, il y a
d'autres écoles qui ont trouvé d'autres formules qui
répondent aux objectifs ou à l'esprit du conseil d'orientation,
mais dont la composition ne correspond pas exactement à ce qui a
été prévu dans la loi 71.
M. Lalonde: Est-ce que la loi ne crée pas une obligation
de la part...
M. Laurin: Non, la loi n'en crée pas une obligation.
M. Lalonde: Non, c'est pour le projet éducatif.
M. Laurin: Oui, la loi ne crée pas une obligation. En ce
qui concerne le conseil d'orientation, elle ne crée pas en tout cas une
obligation. Ce sur quoi elle crée une obligation, c'est celle de
consulter les parents sur les points que les parents estiment importants, lors
de leur réunion annuelle.
M. Lalonde: Les dix conseils d'orientation comprennent-ils des
enseiqnants?
M. Laurin: Oui, ceux qui sont installés
conformément à la loi, comme la loi prévoit la
participation des enseignants, il y en a donc dix où les enseignants
sont représentés, malgré les réticences de leur
orqanisme central pour ne pas dire l'opposition.
M. Lalonde: Sans être pessimiste, c'est un résultat
un peu mince, ne trouvez-vous pas, M. le ministre, dix sur un total possible de
plus de 1000?
M. Laurin: Évidemment, l'essentiel, c'est la constitution
d'un projet éducatif. Le conseil d'orientation avait été
prévu comme un moyen, une modalité susceptible de favoriser
l'éclosion d'un projet éducatif. Dans plusieurs cas, des
écoles ont choisi d'autres moyens que celui du conseil d'orientation
pour travailler à leur projet éducatif. C'est d'ailleurs pour
cette raison que la loi ne faisait pas à l'école une obligation
d'instaurer son conseil d'orientation.
M. Lalonde: II y a combien d'écoles maintenant avec un
projet éducatif?
M. Laurin: Cela dépend. Si vous dites un projet
éducatif terminé, constitué, il n'y en a peut-être
pas beaucoup, mais il y a un bon nombre d'écoles qui travaillent
à leur projet éducatif, où le projet éducatif est
en bonne voie d'avancement. Je ne pourrais pas vous en donner le chiffre exact,
parce que chacune des écoles est à une étape
différente.
M. Lalonde: Ne trouvez-vous pas que la mise en oeuvre des
nouveaux mécanismes comme le conseil d'orientation est
sérieusement compromise par l'attitude de la Centrale de l'enseignement
du Québec qui a recommandé à ses membres de bouder?
M. Laurin: Évidemment, c'est un obstacle de taille,
étant donné l'importance que joue la Centrale de l'enseignement
du Québec dans le monde de l'éducation. Par ailleurs, on sait
qu'il est plus facile de chanqer les lois que les structures, qu'il est plus
facile de chanqer les structures que les institutions et qu'il est plus facile
de chanqer les institutions que les mentalités, ce qui indique que le
changement est toujours difficile.
M. Lalonde: C'est pour cela que vous avez commencé par la
loi.
M. Laurin: Oui, parce que c'est plus facile.
M. Lalonde: C'est un aveu de taille.
M. Laurin: II faut ensuite implanter les changements dans la
mentalité des gens.
M. Lalonde: C'est comme pour les coupures, vous êtes
allé au plus facile.
M. Laurin: Les coupures, c'est différent.
M. Lalonde: Je sais qu'elles sont assez cruelles.
M. Laurin: Non, les coupures ne sont pas des lois, c'est un
budget, ce n'est pas la même chose. Il s'agit simplement de faire
l'adéquation entre les ressources dont nous disposons et les besoins. Ce
n'est pas dans le même ordre qu'une loi et qu'un changement de
mentalité.
M. Lalonde: Non, mais la mentalité du gouvernement a
été la même, d'aller au plus facile.
M. Laurin: Non, pas du tout. Cela a été
extrêmement douleureux, pénible et difficile de se résoudre
à effectuer ces coupures et c'est en nous arrachant le coeur que nous
l'avons fait.
M. Lalonde: Avant que vous ne pleuriez, je vais vous poser une
autre question sur la loi 71. Est-ce que ce n'est pas quand même - je ne
veux pas être pessimiste - presque un aveu d'échec?
M. Laurin: C'est l'amorce d'un chanqement.
M. Lalonde: C'est l'amorce d'un changement, mais cela semble
être un embryon très petit d'un succès
problématique.
M. Laurin: Dix conseils d'orientation après un an et demi,
c'est quand même un grand progrès.
M. Lalonde: Avec dix conseils d'orientation, cela fait quand
même un bout de temps que la loi est en vigueur.
M. Laurin: Mais, encore une fois, ce n'est qu'une des
modalités possibles de réalisation d'un projet éducatif.
Et comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il y a un certain nombre
d'écoles qui ont pris d'autres moyens que le conseil d'orientation pour
travailler à leur projet éducatif, pour en convaincre tous les
agents et intervenants du milieu.
M. Lalonde: Combien d'écoles ont pris un autre moyen?
M. Laurin: Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, je ne
peux pas vous donner le chiffre exact, parce que les écoles ne sont pas
toutes rendues à la même étape dans l'élaboration de
leur projet éducatif. C'est une élaboration compliquée
puisqu'elle doit inclure les divers aqents et intervenants du milieu et aussi,
puisque le projet éducatif doit refléter les besoins, ententes,
aspirations du milieu et le processus de consultation, cela prend quand
même un certain temps.
M. Lalonde: Pour pouvoir évaluer, pour pouvoir
déterminer si la loi est pertinente, si les moyens que le gouvernement a
proposés sont utiles, est-ce que le gouvernement ne fait pas des
évaluations périodiques de la situation dans toutes les
écoles?
M. Laurin: Évidemment, si nous en arrivons, à force
de conversations, de rencontres, à faire tomber, à
atténuer la résistance de la Centrale des enseignants du
Québec, une fois cet obstacle levé, les progrès seront
infiniment plus rapides.
M. Lalonde: Si je comprends bien, le ministre....
M. Laurin: Je ne désespère pas.
M. Lalonde: ... qui, quand même résiste au
désespoir, reconnaît que le principal écueil, c'est la
résistance de la centrale...
M. Laurin: Je le reconnais bien volontiers.
M. Lalonde: Mais quelles sont les dispositions que le
gouvernement prend pour tenter de convaincre la centrale?
M. Laurin: Quand on se trouve devant un obstacle, on essaie de le
gruger, on essaie de le faire disparaître à force de dialoguer
entre qens de bonne foi. Il est toujours possible d'échanger des points
de vue, faire le tour de nos divergences, tenter de dépasser des
divergences en se mettant d'accord sur un objectif plus large. C'est ce que
nous essayons de faire actuellement avec la Centrale des enseignants du
Québec.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, je continue à garder
espoir de venir à bout de cet obstacle, puisqu'il y a quand même,
dans nos rencontres avec la Centrale des enseignants du Québec, des
points de convergence sur lesquels nous allons essayer de tabler. Ce n'est pas,
par exemple, que la Centrale des enseignants est opposée à
l'idée d'un projet éducatif pour chaque école. Non, c'est
qu'elle pense que, dans l'implantation de ce projet éducatif, elle
devrait jouer un rôle infiniment plus grand que celui que la loi 71 lui
assigne.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre est d'accord avec cette
attitude?
M. Laurin: Je pense que, dans le domaine qui est à
l'étude, celui du projet éducatif, il y a place pour tous les
agents et intervenants scolaires, pas seulement pour les enseignants, il
s'agit, par la voie de la discussion, d'en arriver à un consensus sur ce
point et je continue d'espérer que nous y arriverons.
M. Lalonde: Je vais laisser cette guestion pour l'instant.
Classes d'accueil
J'aimerais maintenant parler des classes d'accueil. On sait que vous
avez réduit, pour la prochaine année scolaire, le budget pour les
classes d'accueil de 30 000 000 $ à 13 000 000 $ environ, ce qui aura
pour conséquence de limiter considérablement les
possibilités d'accès à ces classes de langue et de culture
française.
Quelles raisons autres que financières, s'il y en a, justifient
la décision du ministre de refuser aux parents anglophones d'envoyer
librement leurs enfants - j'espère que le député de
Verchères ne sera pas scandalisé si je pose la question
concernant les parents anglophones, en tout cas, vous pourrez lui
expliquer que je l'ai fait en toute iqnorance de cause - à
l'école française, alors que l'immigrant anglophone ou allophone
verra son enfant admis en classe d'accueil? Est-ce que vous voyez une
justification qui pourrait vous faire accepter cette espèce de
discrimination? (20 h 30)
M. Laurin: Ici aussi, il nous a fallu trancher entre ce qui
était essentiel et ce qui était souhaitable. Bien sûr que
la première raison, c'est une raison financière, pour les
mêmes raisons que j'ai expliquées tout à l'heure et sur
lesquelles je ne voudrais pas revenir, étant donné qu'il nous
fallait comprimer de façon radicale la croissance de nos dépenses
et étant donné qu'il y avait quand même des postes
budgétaires intouchables, incompressibles, comme celui de la masse
salariale des enseignants, étant donné que l'enveloppe où
il était techniquement possible de comprimer était relativement
très faible - j'ai parlé tout à l'heure de 300 000 000 $ -
il nous fallait donc réduire les services là où il
était possible de le faire. Et un des services où il était
possible de le faire, c'était celui des classes d'accueil. Remarquez que
nous ne les avons pas abolies. Nous avons simplement diminué les
crédits qui étaient affectés aux classes d'accueil et nous
l'avons fait là où il semblait le moins dommageable de le faire,
c'est-à-dire au niveau des pré-maternelles quatre ans. Nous avons
donc aboli les pré-maternelles quatre ans dans le secteur anglophone
comme dans le secteur francophone, car il y en avait aussi dans le secteur
anglophone.
Nous avons quand même gardé l'essentiel des classes
d'accueil. Les classes d'accueil, quand elles ont été
instituées, avaient pour but, et ça a bien été dit
à ce moment-là dans les directives du ministère de
l'Éducation, d'intégrer, de faciliter l'intégration des
nouveaux arrivants, c'est-à-dire des enfants d'immigrants au
Québec et particulièrement au Québec francophone, puisque
les francophones constituent 80% de la population. C'est dans ce but que les
classes d'accueil ont été instituées pour le
bénéfice des enfants d'immigrants, c'est-à-dire non
admissibles à l'enseignement en anglais.
Malgré les compressions que nous avons effectuées, ce but
demeure et les maternelles d'accueil à temps plein gui seront
financées à même les 13 000 000 $ continueront de recevoir
des enfants d'immigrants, soit qui viennent d'arriver ou qui sont
installés au Québec depuis cinq ans. Je crois que c'est là
revenir à l'esprit pour lequel les classes d'accueil ont
été instituées.
Pour ceux qui sont déjà à un niveau plus
élevé que celui de la pré-maternelle, nous
prévoyons quand même financer à même ces 13 000 000 $
des mesures de support linguistique. Par exemple, si un enfant d'immigrant ou
quelques enfants d'immigrants se retrouvent dans quelques classes du primaire
et du secondaire, il est prévu qu'il y aura à leur intention des
mesures d'accueil, des mesures de support linguistique qui permettront, par
exemple, à un élève en troisième primaire ou en
deuxième secondaire de bénéficier de l'enseignement
approprié d'un professeur qui se rendra à cette école.
S'il y en a plusieurs, on pourra faire de petites classes pour des groupes
constitués de ces enfants-là.
Nous prévoyons aussi des classes de francisation à l'usage
de certains enfants de parents anglophones qui voudraient continuer à
envoyer leurs enfants dans ces classes pour qu'ils bénéficient
d'une mesure de francisation. Donc, nous croyons que l'essentiel du programme
est maintenu et surtout que les objectifs que poursuivait la loi 101 en ce qui
concerne les nouveaux arrivants seront maintenus.
Bien sûr, si nous avions eu plus d'arqent, il aurait
été possible de faire davantage mais, encore une fois, le
ralentissement des dépenses nous a obligés à ces
compressions.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, avez-vous terminé?
M. Lalonde: Cela va, je vous remercie.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le ministre. À la maquette du régime
pédagogique, vous mentionnez que le français langue seconde aux
écoles anqlaises aurait une période de deux heures par semaine.
Est-ce le strict minimum ou êtes-vous au courant qu'il se donne
présentement au-delà de trois heures par semaine de
français au secteur anglais?
M. Laurin: II faut bien indiquer qu'à l'intérieur
des régimes pédagogiques le temps consacré à
l'enseignement des matières n'est qu'une suggestion, et si vous faites
la somme des périodes prévues ou allouées à chaque
matière, vous n'atteignez pas le maximum d'heures prévues. Ce qui
veut dire que chaque école, chaque commission scolaire a la
liberté de répartir le temps selon ses priorités.
L'essentiel, c'est que les objectifs des programmes plus précis puissent
être respectés dans chacune des écoles.
M. Cusano: En ce gui regarde l'enseignement moral et
l'enseignement religieux, il est possible maintenant qu'un parent demande
l'exemption des cours tels quels.
Combien d'élèves faut-il dans une école avant qu'on
puisse engager un professeur
pour s'occuper de ces enfants qui sont exemptés des cours?
M. Laurin: Dans les écoles reconnues comme étant
catholiques, le règlement impose, lorsque l'élève est
majeur ou, s'il est mineur, lorsque les parents demandent l'exemption à
l'enseignement religieux, que l'école donne, offre un cours de morale ou
des périodes de recherche dans le domaine de la formation morale ou dans
le domaine du phénomène religieux. C'est l'esprit du
règlement. En ce qui concerne le nombre, puisque, dans plusieurs
écoles reconnues comme étant catholiques, il y a souvent un
problème d'organisation, le ministère de l'Éducation, pour
1981-1982, prévoit un budget de 2 100 000 $ pour soutenir les
commissions scolaires ou les écoles qui ont une problématique
particulière.
Il faut bien comprendre que cela constitue un budget d'appoint, parce
que c'est la commission scolaire qui demande la reconnaissance d'une
école. Lorsque la commission scolaire demande la reconnaissance d'une
école comme catholique ou comme protestante, à ce
moment-là, elle a l'obligation de respecter les règlements des
comités ou protestants ou catholiques, selon le cas, et il va sans dire
que, par cette demande de reconnaissance, les commissions scolaires acceptent
de respecter les règlements. Sauf pour des cas bien particuliers, il y a
un montant prévu, mais comme service ou comme subvention d'appoint, non
pas pour couvrir l'ensemble du coût de l'exemption de l'enseignement
religieux.
M. Cusano: Dans le passé, jusqu'au 12 avril, ce qui se
passait, spécialement à l'élémentaire, lorsqu'il
n'y a pas de bibliothécaire, lorsqu'il n'y a personne de disponible pour
ces enfants, ils se promenaient d'un bout à l'autre de l'école
et, quand ils étaient chanceux, ils se ramassaient dans le bureau du
directeur. La question, je la répète, peut-être n'a-t-elle
pas été comprise: Vous avez à peu près 2 000 000 $;
s'il y a un enfant dans une école, est-ce que cet enfant va avoir des
services?
M. Laurin: La commission scolaire est tenue, lorsqu'elle demande
que ses écoles soient reconnues comme protestantes ou catholiques, de
respecter les règlements et le ministère...
M. Cusano: J'aimerais qu'une enquête soit faite
aussitôt que possible sur ce point.
Une autre question, on parle d'intégration de l'enfance
inadaptée. Je ne voudrais pas m'éterniser sur le sujet, mais
j'aurais une suggestion très concrète à soumettre à
votre considération. La plupart des enfants identifiés comme
ayant des difficultés d'apprentissage, en prenant toutes les
catégories, on peut les catégoriser ainsi: les enfants - vous
allez m'excuser s'il vous plaît, je vais parler en anglais - "that have
perceptual motor difficulties", on parle de mouvement de gauche à droite
ou de haut en bas, et ainsi de suite; "we also talk about auditory
discrimination, about reversal of letters, and so on and so forth."
M. Laurin: La dyslexie...
M. Cusano: Générale, parce qu'en parlant de
dyslexie on inclut pas mal toutes sortes de problèmes, comme des
testicules qui sont descendus ou qui ne sont pas descendus.
Une voix: C'est dans l'éducation sexuelle.
M. Cusano: Une fois que ces enfants sont identifiés,
présentement, on les sort de la classe, parce qu'ils demandent beaucoup
plus d'attention dans l'instruction. On parle d'exercices avec du papier
sablé, on parle d'exercices de suivi, ça prend beaucoup de temps.
Je sais que plusieurs fois ces enfants se ramassent dans un ghetto, dans une
classe et sont séparés du reste de l'école; socialement,
ce n'est pas tout à fait acceptable. Une des suggestions que j'aimerais
présenter, c'est quelque chose que j'ai vécu personnellement en
tant que directeur d'école, où j'ai renversé
l'intégration, c'est-à-dire qu'au lieu de prendre des enfants
d'une classe spéciale et de les placer dans une classe normale, j'ai
pris des enfants de la classe normale, du cours régulier tel quel, et je
les ai intégrés dans la classe spéciale. Il se produisait
toutes sortes d'effets parce que l'enfant qu'on choisissait pour l'envoyer
là pouvait contribuer comme tuteur, comme lecteur et ainsi de suite.
J'aimerais bien que cette suggestion soit bien notée. D'abord, qu'est-ce
qui arrive avec l'enfant qui est intégré ou même l'enfant
qui est retiré d'une classe temporairement? Il tombe dans un cercle
vicieux. Lorsqu'il est retiré d'une classe, il manque le cours que le
professeur a donné et, lorsqu'il revient, en ayant manqué le
cours comme tel, il est encore plus en arrière. Si le professeur de la
classe était compétent ou avait la connaissance pour aller
à tous les exercices nécessaires, avec une classe de 28, 29 ou
30, il ne peut pas leur donner l'attention nécessaire. Je le
présente dans un esprit de collaboration. Si jamais quelqu'un du
ministère voulait en discuter un peu plus, il me ferait plaisir de
donner un coup de main.
M. Laurin: Je remercie beaucoup le député de Viau
pour sa suggestion et ses
commentaires. C'est précisément pour les raisons qu'il
vient d'expliquer que, même avec les handicapés lourds, nous
conservons l'objectif d'intégration dans le sens positif du terme...
M. Cusano: Lorsqu'on parle d'intégration...
M. Laurin: ... et de déségrégation et de
démarginalisation dans le sens négatif du terme. Cependant, je
pense que tout le monde admet que, pour certains handicapés lourds,
c'est très difficile d'intégrer ces handicapés dans des
classes régulières. Il faut des mesures très
spéciales. Je trouve la suggestion du député très
intéressante. Je dois, cependant, lui faire remarquer que, s'il a
appliqué cette mesure qui semble avoir apporté des
résultats fructueux, c'est parce qu'il était directeur
d'école et qu'à ce titre il dépendait de la commission
scolaire, que cette mesure dépendait de l'approbation de la commission
scolaire.
M. Cusano: Je pourrais avouer, M. le ministre, que je l'ai fait
sans la permission de la commission scolaire.
M. Laurin: Ah! On va vous taper sur les doigts
rétrospectivement. Je pense, pour que cette mesure puisse recevoir toute
la publicité désirable et peut-être engendrer des
imitations, il faudrait que nous puissions communiquer cette suggestion que
vient de nous faire le député de Viau aux diverses commissions
scolaires pour qu'elles l'expérimentent, pour qu'elles la mettent
à l'essai, pour qu'elles convainquent leur directeur d'école de
faire comme l'ex-directeur d'école devenu le député de
Viau l'a fait. Je m'engage à communiquer cette suggestion, en même
temps que cette expérimentation aux commissions scolaires, en
espérant qu'elle aura des suites, mais, pour notre part, nous
l'étudierons aussi à notre niveau.
M. Cusano: J'ai une dernière question. J'avais
commencé à poser la question l'autre jour, mais j'ai
été interrompu de façon un peu vulgaire par le
député de Verchères et le député de
Rosemont. En vue de la loi qui a été présentée par
Mme Bantey, guelles dispositions allez-vous prendre pour vous assurer qu'au
ministère de l'Éducation il puisse y avoir une
représentation pour aqir comme interlocuteur pour cette population qui
existe et qui est reconnue, qui se trouve présentement - je fais la
distinction - dans le milieu catholique anglophone? Informez-moi si je suis
dans l'erreur, mais il y a très peu de personnes qui peuvent être
interlocuteurs. Le manque de succès, on l'a vu bien souvent, lorsque le
ministère a pris un programme. Vous l'avez mentionné l'autre
jour. Pour l'enseignement de la langue anglaise comme langue première,
lorsque le ministère est allé directement dans les commissions,
qu'il a employé les personnes qui étaient proches de la
population, il n'y a eu aucun problème à implanter et à
développer un tel programme. Puisque l'éducation en
général, ce n'est pas seulement des programmes, mais toutes les
décisions qui sont prises au ministère de l'Éducation, il
me semblait que... Je ne réclame pas une représentation de 20%
pour le moment, mais je me contenterais d'une représentation de 5%. (20
h 45)
M. Laurin: Lors des colloques que j'ai tenus à l'intention
des communautés culturelles, lorsque j'étais ministre
d'État au Développement culturel, je pense avoir
été le premier ministre d'un gouvernement québécois
à signaler cette importante lacune d'une représentation largement
insuffisante de l'élément anglophone à tous les niveaux de
la fonction publique. Lorsque j'ai vu apparaître, lors de ces divers
colloques, des recommandations disant que le gouvernement devait faire tous les
efforts possibles pour augmenter la représentation, j'ai
immédiatement signifié mon approbation. Lorsque j'ai
préparé, encore une fois lorsgue j'étais ministre
d'État au Développement culturel, notre énoncé de
politique et notre plan d'action à cet égard, j'ai bien pris soin
d'y inclure cette recommandation dans le sens d'augmenter la
représentation des anglophones au sein de la fonction publique en
général et particulièrement dans certains
ministères comme celui de l'Éducation ou celui des Affaires
sociales, qui sont davantage en contact avec la population.
Avant même de présenter le plan d'action et
l'énoncé de politique, j'avais fait des démarches, des
représentations auprès de divers ministères pour les
alerter à ce problème et afin qu'ils précèdent
même dans leur action la présentation publique de notre politique.
Je pense vous dire que les efforts ont été faits. C'est un peu
à la suite de ces représentations que certains ministères,
dont celui de l'Éducation, ont rencontré les représentants
de la communauté culturelle anglophone de Montréal.
Il faut cependant constater qu'il y avait des obstacles de taille. Trop
longtemps les anglophones comme les allophones ne se sont guère
préoccupés de la fonction publique québécoise.
Leurs intérêts étaient ailleurs, mais je pense que la
situation est en train de changer maintenant d'une façon importante.
Depuis deux ans, il y a des représentants de la fonction publique
québécoise qui se rendent régulièrement dans les
institutions anglophones, soit les collèges ou soit les
universités, et qui tentent de faire du recrutement pour la fonction
publique québécoise. J'espère que cela finira
par porter des fruits.
M. Cusano: De ce côté-là, du
côté du recrutement, je pourrais vous fournir une banque de noms
de gens qui sont prêts à travailler.
M. Laurin: Nous serions ravis de le faire.
M. Cusano: Juste avant qu'on termine sur cela, j'aimerais vous
dire que j'aime bien vos propositions telles quelles, mais je crois qu'il
faudrait les traduire dans un plan concret. C'est que je crois que le MEQ
devrait se dire, en vue de la loi qui vient d'être adoptée ou le
sera: Dans 6 mois, 12 mois ou 18 mois, notre objectif est d'embaucher tant de
personnes. Pourrait-on avoir des garanties, dans les limites des
possibilités?
M. Laurin: Les démarches sont en cours à cet effet.
Nous avons déjà rencontré à quelques reprises des
représentants de la communauté anglo-catholique et de la
communauté anglo-protestante. Nous avons discuté tous les aspects
du problème. Qu'il s'agisse de la représentation des deux
sections de cette communauté aux niveaux les plus élevés,
au niveau de la direction régionale, au niveau des directions
pédagogiques, au niveau de la préparation des programmes, je dois
vous dire que déjà nos fonctionnaires anglophones nous aident
d'une façon très importante pour la révision des
programmes.
M. Cusano: Mais, lorsque vous parlez de vos fonctionnaires
anglophones, combien en avez-vous?
M. Laurin: Je n'ai pas le chiffre exact, mais, par exemple, pour
certains programmes, particulièrement l'enseignement de l'anglais langue
maternelle, je peux dire que les programmes ont été
révisés et sont en voie d'élaboration uniquement par des
fonctionnaires anglophones.
M. Cusano: Au niveau régional et non ici.
M. Laurin: Non, au niveau du ministère aussi.
M. Cusano: D'accord. Mais combien y en a-t-il?
M. Laurin: Je n'ai pas le chiffre exact, je ne sais pas si M.
Rousseau l'a. Mais, de toute façon, le nombre de fonctionnaires
anglophones est insuffisant.
M. Cusano: C'est la qualité qui compte, ce n'est pas le
nombre, c'est la qualité.
M. Laurin: Nous espérons pouvoir l'augmenter rapidement
dans les mois et dans les années qui viennent, particulièrement
au niveau de la pédagogie et de la préparation des
programmes.
M. Cusano: On veut entreprendre le problème
collégial. Pourrait-on avoir la liste des ces personnes et les fonctions
qu'elles occupent et pourriez-vous nous dire à quel niveau ces fonctions
sont occupées?
M. Laurin: C'est avec plaisir que je vous ferai parvenir ces
renseignements.
Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci. J'ai deux ou trois questions à poser
sur le régime pédagogique, surtout au niveau secondaire.
Régime pédagogique
Premièrement, dans les cours de sciences qu'on est en train de
préparer pour les niveaux du secondaire IV et V, je crois, selon mon
information, qu'on diminue les standards par rapport aux standards actuels.
L'intention est que les cégeps aient des cours plus avancés. Pour
des centaines d'anglophones, cela représente un vrai problème. Il
y a des centaines - ce n'est pas un jugement de valeur - et peut-être des
milliers de gens qui quittent la province pour aller faire leur
éducation postsecondaire. À cause de cette diminution des
standards dans les cours de sciences, ils ne seront pas préparés
pour les niveaux demandés par les institutions en Ontario, par exemple.
Est-ce un problème dont vous êtes au courant et quelle est votre
réponse?
M. Laurin: Je ne sais pas si la députée de
Jacques-Cartier était présente à la commission lorsque je
me suis exprimé là-dessus, lors de la première
journée de la défense de mes crédits, mais j'ai fait le
point sur la question.
Mme Dougherty: Non, je n'étais pas là.
M. Laurin: II paraissait très clair que l'effort
commencé depuis déjà quatre ans au niveau du
ministère pour la révision, l'amélioration, l'accentuation
de l'enseignement des sciences commence à porter des fruits. Nous avons
augmenté guantitativement le temps consacré à
l'enseignement des sciences, aussi bien au niveau primaire qu'au niveau
secondaire. Dans les régimes pédagogiques aussi, l'enseignement
de certaines sciences est devenu obligatoire alors qu'auparavant il n'y en
avait pas. Par exemple, l'enseignement de l'écologie est maintenant
obligatoire,
l'enseignement de la biologie est obligatoire.
Il y a aussi, dans le régime pédagogigue, un enseignement
prévu de la chimie, de la physique et de la géologie et on ne
pourra obtenir son certificat d'enseignement secondaire sans avoir passé
au moins un examen dans ces trois matières, sans avoir réussi un
examen dans au moins l'une de ces trois matières. Cela, sur le plan
guantitatif.
Maintenant, sur le plan gualitatif, nous poursuivons notre
révision de tous les programmes d'enseignement des sciences, que ce soit
ceux gui étaient déjà dispensés ou que ce soit des
programmes nouveaux. La mise en place de ces programmes est terminée
pour certains d'entre eux - par exemple, l'écologie et la biologie - et
nous sommes en train de mettre la dernière main aux programmes de
chimie, de physigue et de géologie. Nous pensons pouvoir les terminer
bientôt.
Sur le plan de la gualité, il y a aussi des choix que nous avons
dû faire, et ce sont des choix qui concernent l'orientation même de
l'enseignement des sciences. Comme j'ai souvent eu l'occasion de le dire, nous
avons choisi entre deux options. La première est de transmettre à
l'étudiant le savoir accumulé; à ce moment-là,
évidemment, on peut penser transmettre le plus possible de savoir
accumulé. L'autre option qui se présentait à nous
était celle de donner à un étudiant, au niveau secondaire,
dans l'optigue de la formation générale gue nous voulons
privilégier, non pas seulement une instruction scientifique, mais une
véritable éducation scientifique, c'est-à-dire le
sensibiliser aux arcanes du raisonnement scientifique et lui apprendre à
raisonner comme les hommes de sciences raisonnent, afin de faire ce qu'on
appelle du "problem solving" en anglais, et en même temps une
éducation scientifique qui préparerait le futur citoyen à
mieux utiliser le savoir acquis à l'école pour son
développement personnel, pour son insertion sociale, pour la progression
de la société à laquelle il appartient. Évidemment,
le temps que nous consacrons à cette éducation scientifique,
à cette méthodologie scientifique, nous ne pouvons pas l'utiliser
simplement pour la transmission d'un savoir accumulé. Dans un certain
sens, il y a donc perte, et je pense que c'est dans ce sens que vous vous
exprimiez. Mais nous croyons que, dans un autre sens, il y a gain si nous
pouvons parvenir à donner à l'élève, futur citoyen,
une meilleure conception de la science, une meilleure intégration de la
formation scientifique aux autres volets de sa formation, et si nous lui
apprenons à poser correctement des problèmes afin de pouvoir les
résoudre. Donc, cela peut sembler un lien lorsqu'on conçoit
l'enseignement des sciences dans cette optique.
Évidemment, je suis d'accord avec la députée de
Jacques-Cartier que le temps que nous consacrons à cette optique sera
enlevé à l'acquisition d'un savoir qu'il est plus facile au fond
de transmettre. Je peux comprendre que pour les élèves,
évidemment, qui veulent faire leurs études postsecondaires dans
une autre province ou dans un autre pays où la philosophie ou
l'orientation est différente, cela peut peut-être le
pénaliser à première vue. Mais justement, peut-être
juste à première vue, car on sait très bien qu'un
élève qui a une bonne formation générale,
même s'il manque de connaissances spécifiques dans un domaine,
peut peut-être plus facilement retomber sur ses pieds, reprendre sa
marche en-avant lorsqu'il peut s'appuyer sur une bonne formation
générale. On l'a vu très souvent. D'ailleurs, les
employeurs sont les premiers qui nous disent préférer un
élève mieux formé à une tête bien remplie,
parfois trop remplie, sans que cette tête puisse disposer et utiliser le
savoir acquis d'une façon inventive, imaginative ou créatrice.
Donc, je suis d'accord que peut-être cela peut, en apparence ou à
première vue, pénaliser un certain nombre d'étudiants,
mais peut-être qu'à la longue, même les autres pays feront
le tournant gue nous sommes en train de faire et amélioreront leur
enseignement des sciences dans le sens de celui que nous avons fait.
Mme Dougherty: Je suis d'accord avec votre théorie, mais
cela présente un problème au niveau pratique pour plusieurs
enfants.
Deuxième question. Dans le régime pédagogique, il y
a un crédit par an, je crois, dans l'éducation au choix des
carrières. Je me demande gui va enseigner ce sujet. Est-ce que ce sont
les enseignants réquliers? Parce qu'il y a une grande carence, comme
tout le monde sait, entre le monde de l'école et le monde du travail.
C'est une carence très grave. Je me demande si vous planifiez des cours
spéciaux pour des enseignants pour les préparer à
enseigner ce cours, et ce gue vous envisagez dans ce domaine.
M. Laurin: II est prévu gue cet enseignement prendra place
à l'intérieur de ce que nous avons estimé être
l'enseignement de la technologie. Donc, c'est le professeur titulaire de
technoloqie qui fera cet enseignement. Mais cependant, je suis d'accord avec la
députée pour dire gue ceci ne résout pas tout le
problème. Il faudra probablement améliorer nos programmes
d'information scolaire et professionnelle. Il faudra probablement aussi
améliorer notre programme de formation des maîtres. J'ai
déjà commencé à expliciter mes orientations
à cet éqard il y a quelques mois et à l'automne, comme
j'ai eu l'occasion de le
dire en commission parlementaire, nous tiendrons un certain nombre
d'ateliers où nous discuterons avec des représentants de
l'université et aussi du primaire et secondaire sur les orientations,
sur le contenu de la formation qu'il faudra donner à nos futurs
maîtres. Il ne fait pas de doute que l'élément que vous
mentionnez devra être abordé. (21 heures)
II y a aussi un autre élément. Il importe, en effet, de
combler ce fossé qui existe actuellement entre le monde de l'industrie,
le monde de la main-d'oeuvre et le monde de l'éducation, sans sacrifier
cependant l'accent que l'on doit, à mon avis, continuer de mettre sur la
formation générale et sur le tronc commun obligatoire de
l'enseignement. Il y a là un équilibre à trouver entre,
d'une part, formation fondamentale, formation générale et aussi
préparation plus immédiate au marché du travail en
fonction des développements qui se produisent constamment dans le milieu
du travail comme, par exemple, certaines professions que plus personne ne
pratique ou d'autres professions qui apparaissent. Il importe d'observer
constamment les mouvements qui s'effectuent dans ce milieu.
Donc, même si nous avons paré à l'essentiel pour le
moment en introduisant ce cours au niveau primaire, même si nous
prévoyons que c'est le professeur de technologie qui le fera, nous
continuons à travailler sur les autres chantiers que je viens de
mentionner. Je dois ajouter aussi que nous continuons à travailler sur
ce chantier très important que constitue l'information scolaire et
professionnelle. Là aussi, à l'automne, nous tiendrons une
semaine spécifiquement consacrée à l'information scolaire
et professionnelle. Nous espérons qu'au cours de cette semaine beaucoup
d'information circulera dans le monde enseignant et dans le monde du travail et
que cet arrimage que vous souhaitez et que nous souhaitons se fasse aussi d'une
façon effective et plus fructueuse que dans le passé. En
même temps, nous pensons créer un centre d'information scolaire et
professionnelle. C'est une idée sur laquelle nous travaillons
actuellement.
Mme Dougherty: J'ai soulevé ce problème, parce
qu'à la commission scolaire protestante, par exemple, nous avons mis sur
pied un programme très efficace auquel nous avons consacré
plusieurs spécialistes, "career advisers" et nous avons eu beaucoup de
difficultés à les retenir à cause des coupures de budget.
Pour nous, cela a été quelque chose de très important et
nous avons peut-être eu le commencement d'un modèle qui est
très efficace dans ce domaine. Je me demande si les enseignants que nous
avons auront vraiment les capacités nécessaires pour être
efficaces dans ce domaine. Peut-être que le qouvernement doit envisaqer,
malgré les coupures, les problèmes de budget, la venue de
spécialistes dans les écoles pour rendre efficace ce
programme.
M. le Président, j'ai d'autres questions, mais je sais que nous
avons les cégeps et les universités à discuter. Je vais
peut-être laisser là mes questions.
Le Président (M. Gagnon): Merci. La parole est au
député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais
revenir à la première question que le député de
Viau a posée il y a quelques instants à propos du droit à
l'exemption de l'enseiqnement religieux. À la guestion du
député de Viau, le ministre a répondu en nous expliguant
l'obligation qui pèse sur les commissions scolaires à partir du
moment où une école est reconnue comme catholique ou protestante,
obligation de fournir un enseignement moral ou des périodes
d'étude consacrées au phénomène religieux.
Je voudrais demander au ministre, à partir de cette obligation
gui pèse sur les commissions scolaires, avec guel empressement les
commissions scolaires s'acguittent de cette obligation. Première
question.
M. Laurin: En réalité, la position des commissions
scolaires là-dessus varie d'une région à l'autre et
certaines manifestent sûrement plus de réticence que d'autres. On
en a eu des exemples, je crois, particulièrement dans la région
de Montréal. Il est heureux que la réticence ne soit pas aussi
forte dans certaines régions que d'autres, mais en ce qui me concerne,
j'aimerais bien que cette réticence diminue là où elle
m'apparaît exagérée ou trop forte et c'est en ce sens que
nous nous exprimons lorsque nous avons l'occasion de consulter les commissions
scolaires concernées et c'est en ce sens que, même si nous n'avons
pas le droit de leur donner des ordres, nous exprimons nos
préférences et nos souhaits.
M. de Bellefeuille: M. le Président, est-ce qu'il serait
exagéré, de l'avis du ministre, de dire que, dans certains cas,
ce droit qui existe depuis déjà plusieurs années est
littéralement bafoué à cause des réticences que les
commissions scolaires manifestent à fournir l'enseiqnement moral ou les
périodes d'étude des phénomènes religieux et, si ce
droit est bafoué, est-ce que nous, comme gouvernement, allons pouvoir
continuer indéfiniment à dire gue nous ne pouvons pas donner
d'ordres aux commissions scolaires et accepter, en guelque sorte, qu'une
certaine proportion des élèves québécois et des
parents québécois voient ce droit bafoué.
M. Laurin: Je ne pense pas que nous pourrons accepter
indéfiniment que ce droit ne soit pas respecté, d'autant plus que
le ministère, de son côté, a fait véritablement
beaucoup d'efforts. C'est depuis 1975 que nous avons édicté nos
premiers programmes de formation morale. Nous y avons travaillé sans
cesse depuis. Nous les révisons. Actuellement, il y a des programmes de
formation morale qui sont en révision et je pense, aussi bien du
côté catholique que du côté protestant, que ces
programmes sont excellents. Je pense donc qu'il devrait y avoir le même
effort et la même compréhension du côté des
commissions scolaires. Si les tentatives que nous faisons actuellement pour en
arriver à un consensus là-dessus s'avéraient encore et
lonqtemps infructueuses, je pense qu'il faudrait aviser en conformité
avec ce que nous dicte la Charte des droits et libertés de la
personne.
M. de Bellefeuille: Merci.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Seulement pour enchaîner, n'y aurait-il pas une
autre raison à ce peu d'empressement des commissions scolaires à
donner suite à ce droit? Une enquête menée par la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
n'a-t-elle pas confirmé ce fait que plusieurs commissions scolaires ne
répondent pas à toutes les demandes d'exemption, en
révélant que le ministère de l'Éducation du
Québec ne financerait qu'à 51% les dépenses
occasionnées pour le respect du droit à cet enseignement? Pour
combler la différence, les commissions scolaires doivent puiser à
même leur budget régulier ou encore augmenter leurs
dépenses dites inadmissibles aux subventions gouvernementales. Selon
l'enquête effectuée par la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec, à peine 2% des
étudiants des écoles primaires et secondaires du Québec
sont exemptés de l'enseignement religieux et moins de 1% des professeurs
sont dispensés d'enseigner la religion et pourtant, malgré le
petit nombre d'exemptés, cette mesure coûte près de 4 000
000 $ aux commissions scolaires. Si le gouvernement décidait de financer
à 100%, le problème ne se réglerait-il pas de
lui-même?
M. Laurin: À une question précédente, j'ai
répondu tout à l'heure que les commissions scolaires jouissent
quand même d'une marge de manoeuvre beaucoup plus confortable que ce que
l'on veut bien dire. Rappelez-vous, M. le Président, que j'ai
mentionné à la séance antérieure que, l'an dernier,
nous avions donné aux commissions scolaires une enveloppe qui leur
aurait permis d'engager plus de 65 000 enseignants et qu'en fait, elles n'en
ont engagé que 64 000, ce qui leur laissait une marge de manoeuvre de 30
000 000 $ ou 40 000 000 $. À l'intérieur de cette marge de
manoeuvre, elles auraient pu, selon leur choix, selon leurs priorités,
affecter des sommes plus considérables à l'enseignement moral
prévu pour les élèves qui demandent à être
exemptés de l'enseignement religieux. Nous ne pouvons pas intervenir
à leur place à cet égard et c'est là un choix que
nous ne pouvons pas faire du lieu où nous sommes. Donc, il y a lieu, je
crois, de qualifier ou de nuancer les résultats de cette enquête
dont vous nous avez livré quelques points saillants.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 4 est-il
adopté?
M. Lalonde: Sur division, M. le Président.
M. Laurin: Avant que nous terminions, à moins qu'il n'y
ait d'autres questions, je voudrais apporter une réponse à deux
questions qui nous avaient été posées. On nous avait
demandé quel était le surplus accumulé dans les
collèges au titre de l'éducation des adultes avant le changement
des règles budgétaires, à la suite de la
présentation du plan d'action. On m'informe qu'au 30 juin 1980, date de
la présentation des derniers états financiers, il y avait,
accumulé dans les collèges à ce titre, un montant de 14
543 600 $. Quand j'ai dit que nous demanderions aux collèges de
tempérer l'effet des compressions en utilisant les surplus
accumulés, c'est à cette somme que nous pensions.
Quant à l'autre question qui nous avait été
posée sur les conventions collectives et ce qu'elles permettent, je vais
demander à M. Girard d'y répondre.
Il faut distinguer entre la convention collective signée avec la
FNEQ, qui est affiliée à la CSN, et la convention collective
signée avec la FEQ, affiliée à la CEQ. Dans le cas de la
CSN, le professeur peut compléter sa charge à l'éducation
des adultes. Si le professeur est mis en disponibilité, il peut recevoir
une pleine charge à l'éducation des adultes, à condition
gue la pleine charge soit faite à l'intérieur de la plage horaire
habituelle, c'est-à-dire à l'intérieur des moments
où se donne l'enseignement régulier. Donc, c'est une
première contrainte qui fait que l'on ne peut pas dégaqer des
professeurs à l'enseignement réqulier pour l'éducation des
adultes si c'est après 18 heures.
Pour ce qui est de la FNEQ, le professeur, lorsqu'il n'est pas mis en
disponibilité, peut compléter sa tâche à
l'éducation des adultes, s'il le désire et s'il le souhaite. Le
cégep ne peut pas le forcer à accepter un complément de
charge. S'il est
mis en disponibilité, il peut recevoir une pleine charge à
l'éducation des adultes, quel que ce soit le moment de la
journée. Donc, il y a des distinctions importantes entre les deux
conventions collectives, mais les conditions auxquelles je me
référais plus tôt cet après-midi sont celles que je
viens d'exposer.
Le Président (M. Gagnon): Le député de
Westmount.
M. French: Je m'excuse, M. le député de Rosemont,
est-ce que c'est...
M. Paquette: C'est simplement sur une des informations que le
ministre vient de fournir. J'avais demandé quels étaient les
surplus accumulés dans les cégeps. On me donne le chiffre de 14
500 000 $ au 30 juin 1980, c'est-à-dire à la fin de
l'année financière 1979-1980. Ce qui serait intéressant de
savoir, c'est pour l'année en cours, qui se termine dans les jours qui
viennent, l'année 1980-1981, quel a été l'effet des
nouvelles règles budgétaires sur ce surplus accumulé, de
façon à déterminer quels cégeps sont en
difficultés actuellement.
M. Laurin: Nous n'avons pas encore les états financiers
pour l'année en cours. Quand nous les aurons, il est bien sûr que
nous comparerons les états financiers de 1981 avec ceux de 1980 et nous
verrons la différence, nous en tirerons nos conclusions.
M. French: Pour ce qui est de la mise en disponibilité
dans les cégeps, il ressort qu'il y a des contraintes substantielles
importantes, différentes dans les deux cas, mais quand même
importantes. Alors, le point que j'ai soulevé, je pense, reste valable:
c'est qu'il y a les professeurs de cégeps qui sont payés selon
les conventions collectives, il y a les adultes qui veulent s'instruire, et il
y a des clauses dans les conventions collectives qui empêchent le mariage
entre les besoins et les services. Je souligne encore au ministre - je pense
qu'il en a pris connaissance - que ce serait un excellent point de discussion
dans les pourparlers qui s'en viennent, qu'il planifie.
Je pense que c'est inacceptable, au point de vue du contribuable
québécois, au point de vue des adultes, clientèle cible de
ces programmes, gu'une telle situation dure. Je vois mal que refuser de
travailler après 18 heures ou refuser d'enseigner à une
clientèle léqèrement différente de celle
visée dans l'engagement des professeurs puisse s'inscrire dans les
droits d'un travailleur de cégep. Je ne l'accepte pas et je pense que la
plupart des contribuables québécois ne l'accepteraient pas non
plus. (21 h 15)
Pour ce qui est des classes d'accueil, pour le bénéfice du
ministre, parce que je pense que c'est quelque chose qui est vraiment
très important, sur le plan symbolique, que le recul du gouvernement
dans ce dossier, quand on connaît l'insécurité qui
règne, à tort ou à raison, dans les milieux en question,
quand on connaît l'état pitoyable de l'enseignement du
français dans nos écoles anglaises, quand on connaît
l'essentiel qui est le français dans le Québec d'aujourd'hui,
quand on connaît tous les problèmes qui découlent de la
nécessité de sauter constamment la clôture de langue, je ne
peux que qualifier cette coupure de tragique.
Cela est vu, encore une fois, à tort ou à raison, comme
une démission du gouvernement face à l'engagement moral qui est
l'inverse des exigences de la Charte de la langue française. Cela est vu
comme étant la fermeture d'une voie d'accès à la vie de la
collectivité québécoise à laquelle les parents en
question tenaient absolument. Je ne peux que recommander au ministre, avec
toute la sincérité dont je suis capable, que cela devrait
être une de ses priorités pour récupérer, si jamais
il y a des crédits périmés, afin de reprendre ces
programmes. Ils sont très importants pour concrétiser... Ils ont
eu un succès éclatant. Ils concrétisent l'engagement du
gouvernement de vouloir impliquer les gens qui, pour des raisons historiques
qui ne sont pas leur faute, n'ont pas accès, comme la plupart des
Québécois, à la vie collective. Cela va au coeur des
engagements du gouvernement et de sa vision de l'avenir du Québec de
rendre concrets ces engagements. La coupure ou le recul face aux places
d'accueil va exactement dans le sens inverse.
M. Laurin: II reste cependant qu'il ne faudrait quand même
pas qualifier cette compression de plus majeure qu'elle ne l'est. Ce qui a
été supprimé, ce sont les prématernelles d'accueil
pour les anglophones et les francophones également, d'ailleurs. Il reste
toutes les autres mesures qui ont commencé à être
appliquées à une cadence accélérée depuis
quelques années. On sait que l'enseignement du français dans le
secteur anglophone connaît des progrès remarquables depuis
quelques années. J'ai parlé, à une séance
antérieure, des méthodes d'immersion qui sont nées
d'ailleurs au Québec et qui ont été
expérimentées d'abord au Québec. Ces
expérimentations se poursuivent. D'autres expériences se
poursuivent également. Dans certaines écoles, il y a des
matières qui sont maintenant enseignées en français. C'est
là un progrès notable.
Il faut aussi signaler que pour les anglophones qui vivent depuis
très longtemps au Québec, qui connaissent les
caractéristiques de notre société
québécoise,
il y a aussi d'autres façons d'apprendre le français ou
d'avoir une meilleure connaissance du phénomène culturel
francophone. Il y a les journaux, il y a la télévision, il y a
les échanges ordinaires de la vie quotidienne. Donc, il ne faudrait pas
faire peser sur cette suppression des prématernelles plus d'effets
éventuels qu'elles n'en comportent, surtout en comparaison avec les
autres mesures qui sont encore appliquées.
Je rappelle enfin au député que même dans le budget
actuel, avec les compressions, nous avons gardé les classes de
francisation auxquelles seront admissibles des jeunes enfants anglophones. Si
la demande s'avérait plus forte que prévue, nous pourrons ajuster
les budgets prévus pour ces maternelles de francisation. Donc, il
importe de qualifier vos affirmations et de dire que malgré que nous
pouvons déplorer dans ce domaine comme dans tous les autres des
compressions inévitables, il reste que l'essentiel demeure encore une
fois acquis.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 4 est adopté
sur division, on l'a dit tantôt. J'appelle le programme 5.
Enseignement collégial public
M. Laurin: M. le Président, les grandes orientations de
l'enseignement collégial se sont précisées au cours des
dernières années. C'est ainsi qu'on s'est appliqué
à accroître l'accessibilité aux études
collégiales, à développer l'enseignement professionnel de
niveau collégial, en tenant compte de facteurs socio-économiques
locaux, régionaux et nationaux, à améliorer les programmes
d'enseignement, à faire progresser la pédagogie, à
améliorer la qualité des divers services offerts aux
étudiants, à rationaliser la qestion des établissements et
l'utilisation de leurs équipements, à assurer le
développement qualitatif des ressources humaines.
À l'automne de 1978, la publication du livre blanc Les
collèges du Québec est venue confirmer ces grandes orientations
en les intégrant sous le thème du développement de la
pédagogie et de la gualité de l'enseignement. Ce thème
unificateur déterminait de lui-même la nature des travaux à
entreprendre ou à poursuivre au cours des années à
venir.
La première suite au livre blanc a été, au
printemps 1979, la promulgation de la Loi sur le Conseil des collèges et
de la loi amendant la loi des collèges, deux lois qui ont donné
un nouveau cadre juridique aux activités des collèges et du
ministère de l'Éducation. Mais c'est au cours de l'année
1980-1981 que la plupart des mesures annoncées dans le livre blanc ont
été mises en vigueur. Cette entreprise se poursuivra en
1981-1982.
Les mesures qui ont connu cette année un début
d'application seront développées ou menées à leur
terme; les autres seront implantées ou, tout au moins, donneront lieu
à des travaux préparatoires à leur implantation. L'accent
sera mis en priorité sur la dimension pédagogigue de la vie des
collèges. Le règlement des études fera passer dans les
faits les intentions exprimées dans le livre blanc.
Un projet de règlement est actuellement soumis à une large
consultation. Celle-ci est déjà riche d'enseignement sur les
ajustements qui devront encore être faits avant la promulgation du
règlement. La période prévue pour la consultation a
d'ailleurs été prolongée afin que nous puissions aussi
tenir compte des travaux de la commission Jean sur l'éducation des
adultes et de la politique de l'enseignement professionnel en cours
d'élaboration.
L'importance du régime pédagogique dans la vie d'un
établissement et l'influence qu'il exercera sur de nombreuses
générations d'étudiants nous invitent à mûrir
prudemment ce projet.
L'année 1981-1982 sera également marquée par
l'adoption d'autres mesures réglementaires actuellement en cours
d'élaboration ou de consultation. Ces mesures touchent notamment aux
conditions spéciales d'admission, au régime de vie dans les
établissements collégiaux, au contenu des rapports annuels, aux
états financiers et à la vérification externe.
Les grandes orientations que je rappelais tout à l'heure
demeurent les lignes directrices de l'activité des collèges.
Elles ont conduit et conduiront encore à des réalisations que je
voudrais illustrer de quelques exemples concrets.
Ainsi, au chapitre de l'accessibilité aux études
collégiales, il convient de rappeler l'extension de la gratuité
scolaire aux étudiants adultes inscrits à temps partiel, ce qui a
permis d'accroître de façon remarquable le nombre de
bénéficiaires. De même, les efforts entrepris ces
dernières années pour attirer un plus grand nombre de jeunes aux
études collégiales, campagnes de publicité, passerelles
entre secteurs d'enseignement, bourses d'études, etc., ont porté
fruit. Ce succès se reflète dans l'amélioration du taux de
passage du secondaire au collégial. L'élévation
déjà observée en 1980-1981 semble se maintenir, sinon
s'accentuer pour l'année 1981-1982.
En matière de développement de l'enseignement
professionnel, l'accès à quelques programmes a été
facilité grâce à des implantations plus nombreuses dans le
réseau. Il s'agit de programmes correspondant à des secteurs
d'activité où le marché de l'emploi est
généralement excellent.
De plus, pour stimuler l'intérêt des
étudiants pour des secteurs d'activité où l'offre
d'emploi est supérieure à la demande, un programme de bourses
d'incitation a été créé. Les résultats ont
dépassé les espérances, notamment dans le domaine de la
technologie minière où le recrutement était
traditionnellement difficile.
De plus, des travaux préliminaires à la création de
centres spécialisés dans des secteurs clefs de la technologie
québécoise ont été entrepris par plusieurs
collèges. De son côté, le ministère disposera
bientôt d'un document définissant ses orientations en cette
matière. Mais, par delà ces efforts particuliers, une
réflexion beaucoup plus large a été entreprise au
ministère sur la formation professionnelle des jeunes au Québec.
J'y ai fait allusion tout à l'heure. Cette réflexion sera
poursuivie en 1981-1982 et conduira à une politique d'ensemble portant
sur les différents aspects de ce secteur d'enseignement.
Depuis leur création, les cégeps ont eu a coeur de faire
progresser la pédagogie. À ce chapitre, il y a lieu de souligner
l'effort entrepris depuis deux ans pour mettre à la disposition des
étudiants des manuels rédigés en français d'une
haute qualité scientifique et bien adaptés aux
réalités québécoises. Cette documentation
didactique s'enrichit constamment. Elle connaît une utilisation de plus
en plus large et sa qualité lui donne un rayonnement qui, dans certains
cas, franchit les frontières du Québec.
L'amélioration de la pédagogie va de pair avec celle des
divers services offerts aux étudiants. Ainsi qu'on l'avait
annoncé dans le livre blanc, le ministère a entrepris depuis un
an les travaux qui lui permettront d'énoncer prochainement les
orientations à privilégier dans le développement des
services aux étudiants.
C'est en s'inspirant également du livre blanc, qui place
l'évaluation parmi les conditions du renouveau de l'enseignement
collégial, que les collèges ont entrepris un effort collectif
pour se doter de politiques institutionnelles d'évaluation.
De son côté, la Commission d'évaluation du Conseil
des collèges a fait connaître ses orientations et se propose de
mettre prochainement un service d'évaluation à la disposition des
collèqes. L'effort de rationalisation de la gestion des
établissements se poursuit depuis plusieurs années. Il prend
cependant une signification toute particulière au moment où la
croissance des dépenses affectées à l'éducation se
fait plus modeste, au moment aussi où le niveau collégial
s'apprête à subir les effets de la dénatalité.
Cet effort s'est manifesté notamment par l'achat en groupe
d'équipements informatiques, par l'utilisation de systèmes
collectifs de gestion, par la création de sociétés de
services, par l'application de plans d'économie d'énerqie et de
politiques d'achat inspirées des directives gouvernementales.
Les orientations définies dans notre politique du
développement culturel ont aussi inspiré l'action des
collèqes. Elles les ont amenés, par exemple, à faciliter
l'accès des personnes handicapées à l'enseiqnement
collégial et à assurer une meilleure transition entre les
études et le travail. C'est ainsi qu'une campagne d'information
rejoiqnant 100 000 employeurs du Québec a été
organisée. Elle avait pour objectif de sensibiliser les employeurs au
potentiel de compétence que représentent pour eux les techniciens
diplômés de l'enseignement collégial.
Ces quelques exemples n'épuisent pas tant s'en faut la liste des
réalisations à mettre au compte des cégeps. À eux
seuls cependant, ils suffisent à témoigner de la santé et
de la vitalité de ces établissements d'enseignement. Les
cégeps constituent encore aujourd'hui, quatorze ans après leur
création, une des pièces les plus oriqinales du système
scolaire québécois.
Comme les autres secteurs d'activité, l'enseignement
collégial sera appelé à participer à l'effort de
rationalisation des dépenses publiques. Cependant, le gouvernement a
tenu à assurer aux cégeps les ressources financières
nécessaires à la réalisation des objectifs fondamentaux de
l'enseignement dont ils sont responsables. C'est cette préoccupation qui
a présidé à l'élaboration de la politique
budgétaire de l'enseignement collégial. L'enveloppe
budgétaire des collèqes, qui totalisait 537 200 000 $ en
1980-1981, passera en 1981-1982 à 581 300 000 $, ce qui
représente une augmentation de 8,2%. Cette enveloppe contient les sommes
d'argent nécessaires au paiement des traitements de toutes les
catégories de personnel couvertes par les conventions collectives que le
gouvernement a signées. Cette enveloppe contient aussi les sommes
d'argent nécessaires au paiement des dépenses jugées
incompressibles. La gestion de la décroissance ne sera pas chose
aisée pour autant, et je reconnais que les collèges devront faire
des choix. Des services devront être réduits, certains devront
même disparaître au profit d'autres jugés essentiels dans le
cadre de la mission des collèges.
La répartition de l'enveloppe entre les collèges sera
faite selon les mêmes règles budgétaires qu'en 1980-1981.
Le Conseil des collèqes m'a d'ailleurs soumis un avis à ce propos
et nous donnerons suite dans la mesure du possible aux recommandations qu'il y
a exprimées.
Le plan d'équipement 1981-1984 des collèges marquera le
parachèvement du développement de ces institutions par la mise en
chantier prochaine du cégep de
Drummondville. Par ailleurs, une hypothèse de localisation
définitive du collège Dawson est a l'étude et une
proposition d'aménagement sera sous peu acheminée au Conseil du
trésor et au Conseil des ministres en vue d'obtenir l'autorisation de
prendre les mesure préparatoires à la réalisation de ce
projet. Nous respecterons donc les échéances dont nous avons fait
publiguement état.
Le plan ne prévoit pas de construction de nouveaux
établissements collégiaux. Seuls quelques agrandissements ou
ajouts aux édifices existants seront réalisés durant cette
période et cela, afin de pouvoir dispenser des enseignements très
spécialisés. Rien souvent, le développement de certains
enseignements sera assuré par l'utilisation d'édifices existants
telle l'école Saint-Patrick, à Jonquière, pour le
programme art et technologie des médias. (21 h 30)
Le plan d'investissement sera donc axé sur la priorité de
maintenir ou de remettre en bon état les équipements des
collèges afin d'assurer la qualité de l'enseignement, la
sécurité et la santé des occupants, l'économie
d'énergie et d'autres impératifs du même ordre. À
une période marguée par le nombre et l'importance des
constructions succède ainsi une période de consolidation;
à tout point de vue, peut-on dire, l'enseiqnement collégial a
atteint son rythme de croisière.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: Le premier sujet que je voudrais soulever est
justement le projet de règlement des études collégiales
gu'a soulevé le ministre dans son avant-propos. On sait que depuis
décembre, ou peut-être même avant cela, beaucoup
d'intervenants dans le milieu collégial ont émis de
sérieuses réserves sur le règlement des études
collégiales, tel que proposé par le ministère. Entre
autres, et les étudiants et les professeurs et le conseil des
universités ont souligné l'auqmentation du nombre de cours
obligatoires et la réduction du nombre de cours dits
complémentaires, l'accréditation possible de toute
expérience non scolaire, le contrôle de la présence
obligatoire aux cours, l'autorité accrue dévolue au directeur des
services pédagogiques et toute la question de l'évaluation.
Maintenant, le ministre nous annonce qu'on devra attendre les
résultats du processus prolongé de consultation avant la fin de
cette année. Je me demande s'il est en mesure de nous dire sur quels
aspects en particulier du projet on peut s'attendre à des changements
par rapport à l'ébauche originale, aux propos originaux.
M. Laurin: La consultation qui a eu lieu nous a
déjà fait valoir un certain nombre des points qu'a
soulevés le député, nous avons aussi pris contact avec
certains organismes gui n'avaient pas encore transmis au ministère leur
opinion, avis, réaction. Je pense ici, en particulier, aux organismes
étudiants. La prolongation de la consultation nous permettra
évidemment d'entendre tous ces organismes ou qui n'avaient pas jusqu'ici
répondu à notre appel, ou qui ont quelque chose à ajouter
à la lumière du débat public sur les avis qu'ils nous
avaient déjà fait parvenir.
J'ai dit aussi, dans ma présentation, qu'il ne convenait pas
d'adopter un règlement pédaqogique qui est l'incarnation
suprême et définitive des orientations de l'enseignement
colléqial sans prendre toutes les garanties et précautions
nécessaires que les moindres suggestions ou oppositions ont
été évaluées à leur juste mérite. Il
y avait déjà là de quoi justifier une prolongation de la
consultation, mais de plus, le fait que nous ayons remis sur le métier
notre politique d'enseignement professionnel touche d'une façon
très importante l'enseiqnement collégial puisque plus de la
moitié des étudiants, au niveau collégial, ont
décidé d'opter pour l'enseignement professionnel, sans compter
les populations adultes qui, elles aussi, s'orientent d'une façon de
plus en plus marquée vers la formation professionnelle, soit à
temps partiel, soit à temps plein, soit pour des fins de
développement personnel, soit pour des fins de recyclage, soit pour des
fins de promotion professionnelle.
Comme nous remettions sur le chantier notre conception et nos
orientations en matière d'enseignement professionnel, je pense qu'il
s'imposait d'attendre que nous ayons terminé et notre réflexion
et notre consultation avec le milieu sur ce point avant de penser à
incarner nos conclusions dans un régime pédagogigue. La
même chose vaut pour les travaux de la commission Jean qui,
forcément, a été amenée à se pencher
intensément sur ce problème au cours de sa réflexion et au
cours de ses deux rondes de consultation. Nous savons maintenant que nous
aurons en main les recommandations de la commission Jean d'ici quelques mois.
Je pense qu'il était sage d'attendre que tout ce travail
préliminaire ait été fait avant que nous puissions penser
à adopter de façon définitive un rèqlement qui sera
longtemps avec nous et qui vivra longtemps car on ne révise pas pour le
plaisir, tous les ans, un règlement pédagogique.
Donc, je pense qu'il convenait de prolonger la période de
consultation. Maintenant, quelle sera notre position sur les points que vous
avez mentionnés? L'auqmentation du nombre de cours obligatoires, la
réduction des cours complémentaires, la présence aux
cours, l'autorité qu'il convient d'accorder aux
directeurs des services pédagogiques par rapport, par exemple,
aux pratiques habituelles dans les départements? Ce sont
précisément là des matières très importantes
sur lesquelles nous avons besoin d'être éclairés le mieux
possible et le plus possible. Je continue à croire, pour ma part, qu'il
faut augmenter le nombre de cours obligatoires, particulièrement dans
les domaines qu'énonçait le livre blanc. Par exemple, en
formation générale, et aussi dans les nouvelles matières
que nous estimons essentielles comme tronc commun de base pour tous les
étudiants québécois. Je pense ici à l'histoire du
Québec et à l'économie du Québec.
Je pense, par ailleurs, qu'il ne conviendrait pas réduire de par
trop le nombre de cours complémentaires car il y a là
déjà, pour un étudiant qui s'autonomise et se
responsabilise de plus en plus, un champ de liberté qui peut
correspondre à ses talents, à ses aptitudes, à ses choix
vocationnels ou professionnels. Il s'aqit d'en arriver à un
équilibre sur ce point. Déjà la consultation nous a fait
voir qu'il y avait des aménagements possibles entre ces deux
impératifs. Il y a moyen d'augmenter le nombre de cours obligatoires
sans réduire de façon excessive les cours complémentaires.
Ce sont des aménagements fins, nuancés auxquels il nous faudra
parvenir. Je ne peux pas encore dire à quelles conclusions nous en
arriverons puisque notre réflexion se poursuit. Notre idée n'est
pas faite là-dessus, mais déjà je peux dire au
député que des aménagements sont possibles.
Quant à la présence obligatoire aux cours, si le livre
blanc en parlait, ce n'était pas d'une façon improvisée et
gratuite. Si nous en avons parlé, c'est que l'observation, les rapports
qui nous ont été faits montraient que beaucoup trop
d'étudiants ne profitaient pas de l'enseignement qui était mis
à leur disposition. Il faut bien sûr, d'une part, respecter la
liberté de l'étudiant. Il devrait idéalement assister aux
cours puisque cet enseignement est mis à sa disposition pour sa
promotion, son développement personnel. Mais nous savons, la nature
humaine étant ce qu'elle est, qu'il y a parfois loin de la coupe aux
lèvres; un objectif peut être mis en place, mais la
réalisation peut tarder. Il y a donc là aussi un compromis
à trouver entre un impératif de liberté, pour un
adolescent en pleine croissance, mais aussi un impératif
économique, si on veut me pardonner ce terme, selon lequel il
conviendrait que l'étudiant utilise à fond un enseignement que
met la collectivité à son profit, à grands renforts de
frais. Il y a donc là aussi un équilibre à atteindre sur
lequel nous réfléchissons à l'heure actuelle.
Il en est de même pour l'autorité qu'il convient d'accorder
aux directeurs des services pédagogigues. Pour ma part, je suis
conscient qu'il importe d'accorder aux départements toute la latitude
désirable. Je crois que les professeurs sont les premiers maîtres
de l'enseignement et de la formation et qu'ils en constituent la cheville
principale. Idéalement, on pourrait même envisaqer qu'un directeur
de services pédagogiques ne serait pas nécessaire, mais dans les
faits la présence d'un directeur des services pédagogiques
s'impose, ne serait-ce que pour fins de coordination, ne serait-ce que pour
fins d'aménagement des horaires, ne serait-ce aussi que pour fins de
vérification que l'enseignement qui est mis à la disposition des
élèves est donné et donné de la meilleure
façon qui soit. Si le livre blanc concluait à la
nécessité d'augmenter l'autorité des directeurs des
services pédagogigues, c'était pour pallier certaines lacunes qui
avaient été constatées ou pour contrer certaines tendances
malencontreuses qui nous avaient été signalées. Je pense
que tout le débat qui a déjà entouré cette question
a eu un effet bénéfique. Je pense que certains
départements de collège ont vu qu'il y avait danger, si la
situation ne s'améliorait pas, qu'une intervention vienne
peut-être porter atteinte à la latitude ou à la
liberté qu'ils possédaient. Déjà, je me
réjouis de cette évolution, mais cette évolution est-elle
telle qu'il nous faille renoncer à ce que nous avions
énoncé dans le livre blanc? Je n'en suis pas encore sûr. De
toute façon, il y a là aussi un problème
d'équilibre à assurer entre le degré d'autonomie
nécessaire au département et le degré d'autorité
nécessaire au directeur du service pédagogique pour que
l'arrimage se fasse entre les objectifs de l'éducation collégiale
et le rôle nécessaire de coordination et de vérification
que doit exercer un directeur de services pédagogiques.
Dans ce domaine, je dois signaler au député qu'une autre
dimension du problème qui s'est récemment introduite c'est la
participation de l'étudiant dans ce processus. Dans toutes les
rencontres que nous avons tenues avec ce milieu, nous avons souvent entendu les
étudiants ou les organismes d'étudiants réclamer une
présence. Ils veulent être partie prenante à ce processus
de coordination ou de vérification des enseignements. Ils veulent eux
aussi s'assurer de la qualité de l'enseignement qu'on leur dispense. Ils
veulent même demander des comptes, le cas échéant. Dans la
réflexion qui se poursuit, il faudra faire place à cette
dimension à laquelle nous n'avions peut-être pas consacré
toute l'importance voulue dans un premier temps.
Tout ceci pour dire que cette prolongation de la consultation nous
apparaissait très justifiable et qu'en raison même de cette
prolongation nous avons bon
espoir d'arriver à un règlement pédagogique qui
dépasse encore les espoirs que nous avions mis en lui il y a un an et
demi.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. Laurin: Je pense que ce que j'ai dit montre à peu
près l'échéancier que nous nous sommes fixé. Les
ateliers que nous tiendrons sur la formation professionnelle auront lieu
à l'automne. Les consultations que nous menons avec les étudiants
se poursuivent à une cadence normale. La commission Jean déposera
son rapport probablement en décembre. Je pense que, dans les premiers
mois de 1982, nous serons en mesure d'élaborer un projet
définitif à la lumière de tout ce que nous aurons acquis,
à la lumière aussi des avis que le Conseil des collèges
continue à nous faire parvenir sur l'une et l'autre des aspects de ce
projet.
M. French: Dans le contexte de l'aménagement qui va se
faire à propos des cours obligatoires et des cours
complémentaires, est-ce qu'on peut prévoir qu'il y aura plus de
flexibilité de transfert entre programmes qu'il y en aurait eu avec les
propos originaux? (21 h 45)
M. Laurin: C'est là un de nos objectifs. La
flexibilité, nous ne la poursuivions pas en tant que telle. Elle n'a pas
de mérite en soi, la flexibilité, mais elle nous apparaît
nécessaire en l'occurrence si nous voulons concilier divers
impératifs, comme je le disais tout à l'heure. Évidemment,
si nous voulons concilier ces impératifs, il nous faudra trouver des
compromis qui sont marqués au coin de la souplesse et de la
flexibilité.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Fabre.
M. Leduc: Dans le même ordre d'idées, le projet de
régime pédagogique propose une augmentation des cours
obligatoires en mathématiques; en histoire et en économie, je
crois. Le français est cours obligatoire au niveau collégial.
Présentement, on l'enseigne trois heures par semaine. On sait qu'il y a
aussi une consultation en cours au sujet des cours de français qui sont
donnés au niveau collégial, il y a un débat qui se
poursuit entre les tenants de l'enseignement normatif et les tenants de
l'enseignement plus littéraire.
Nous savons aussi que tous les pays francophones au monde donnent au
moins six heures d'enseignement de français par semaine. C'est le cas,
notamment de la France. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, M. le ministre,
d'envisager une augmentation des heures de français, étant
donné la situation qu'on peut qualifier de lamentable dans laquelle se
trouve l'enseignement du français présentement au niveau
collégial? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'envisager une augmentation
des heures de français au niveau collégial au lieu d'envisager
une augmentation des cours de mathématiques ou des cours d'histoire,
compte tenu de l'importance de la langue maternelle au Québec?
M. Laurin: II y a des choix difficiles à faire.
Déjà l'augmentation du nombre de cours obligatoires a
provoqué une certaine opposition, pour ne pas dire une opposition
certaine, dans plusieurs milieux. S'il nous fallait ajouter au nombre de cours
obligatoires, on peut prévoir que cette opposition serait encore plus
marquée de la part de spécialistes, par exemple, qui nous
diraient qu'on défavorise l'enseignement de leur discipline par rapport
à celui du français. Par ailleurs, je ne sais pas si, en France,
cet enseignement de six heures se situe exactement au niveau où se situe
l'enseignement collégial, c'est-à-dire les trois dernières
années de l'ex-cours classique. Je pourrai vérifier
là-dessus.
Il reste, cependant, que l'amélioration de la qualité de
l'enseignement du français constitue pour nous une priorité. Il
est sûrement possible de mieux utiliser les trois heures d'enseignement
obligatoire du français et, effectivement, le ministère travaille
depuis un bon nombre de mois à la révision de ce programme de
français. Encore ce matin, au bureau des sous-ministres, on en a
discuté abondamment.
Donc, des révisions sont en cours et devraient aboutir dans un
avenir assez rapproché. Voilà une des premières avenues,
améliorer l'enseignement actuel du français, peut-être
établir une ligne de pensée définitive à
l'intérieur des deux impératifs que vous avez mentionnés,
l'enseignement normatif du français ou l'enseignement littéraire
du français. J'aurais tendance à ne pas négliger l'aspect
normatif de l'enseignement du français, puisque le français que
nous devons enseigner ici, même s'il doit être marqué de la
couleur de notre appartenance, doit quand même se situer à
l'intérieur du français, langue internationale, que nous
connaissons.
Il y a moyen aussi, et il y a même besoin je crois,
d'améliorer l'enseignement du français aux élèves
du collégial en leur permettant de rattraper certains retards qui ont
été pris au niveau du primaire et du secondaire par suite des
erreurs, involontaires ou non, que nous avons pu faire dans le passé
à cet égard.
Dans notre programme, nous prévoyons pour les étudiants du
collégial des cours de rattrapage spécifiques pour ceux qui en
ont besoin. Comme je l'ai dit tout à l'heure,
nous faisons aussi d'immenses efforts pour procurer aux étudiants
du collégial des manuels bien écrits, préparés par
des professeurs du cru, dans un nombre de matières qui s'étend
avec les années. L'introduction de ce matériel didactique
constitue, je crois, une autre façon d'améliorer l'enseignement
du français.
Je crois que, de la convergence de tous ces efforts, pourra naître
un nouveau programme d'enseignement du français, qui, même s'il
n'est pas parfait, nous permettra d'atteindre l'essentiel.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: Dans tout ce projet, si je l'interprète
à travers les conversations que j'ai eues avec les étudiants des
cégeps de mon comté et aux alentours, le portrait qui se dessine,
c'est un changement dramatique entre un régime pédagogique et un
projet de règlement, parce que ce sont des lignes directrices en rapport
avec les règlements de l'État, comme dans n'importe quel genre de
réglementation de l'État. Cela crée une espèce de
chemise de force autour de la vie intellectuelle et scolaire du collège
de question. Je pense que c'est tout ça la perception des sanctions
à la disposition du ministre, conséquemment à un projet de
règlement qui fait peur un peu. Quand c'est marié avec une
espèce de mentalité de la "secondarisation" du cégep,
c'est-à-dire plus de cours obligatoires, la question d'assistance
obligatoire, les pouvoirs accrus d'une autorité centrale, comme
directeur de services pédagogiques par rapport à la
liberté professorale des professeurs du cégep qui se confronte
plus avec le monde universitaire qu'avec le monde secondaire.
Il y a toute cette gamme de questions qui se posent et, en tant que
profane, je ne suis pas vraiment capable de répondre, mais je pense
qu'il incombe vraiment au ministre de se prononcer là-dessus.
M. Laurin: On a souvent dit que l'adolescence est un monde entre
deux âges, on peut dire aussi du cégep qu'il est un niveau
véritablement intermédiaire entre le primaire et le secondaire
premier cycle en particulier et l'universitaire. Bien sûr, je comprends
et partaqe les préoccupations du député. Il faut que le
régime pédagogique du collégial soit différent,
dans son esprit, dans son orientation, du régime pédagogique du
primaire-secondaire. Non seulement doit-il tenir compte de l'état plus
avancé du savoir des élèves qui s'inscrivent à ce
niveau, mais également il faut qu'il tienne compte de l'évolution
psycho-affective de l'élève, de son âge, de sa maturation
progressive, de ses besoins, de ses attentes, de son apprentissage graduel de
la liberté. Il ne faut pas qu'un régime pédagogique propre
à cet âqe et à ce niveau encarcane l'élève;
bien au contraire, il faut qu'il favorise l'émergence et l'apprentissage
de plus en plus marqué de sa liberté.
En ce sens, encore une fois, je partage entièrement les
préoccupations du député et je m'opposerais le premier
à ce qu'il a appelé la "secondarisation" du régime
pédagogique du cégep. D'ailleurs, beaucoup d'avis nous ont
été donnés à cet égard, de plusieurs
milieux, du Conseil des collèges, du Conseil supérieur de
l'éducation. Je pense qu'on prêchait à des convertis, parce
que nous sommes tous convaincus, au ministère de l'Éducation,
qu'il ne faut pas secondariser le régime pédaqogique du
collégial, qu'il faut, au contraire, en arriver à un
règlement qui épouse aussi bien l'état du savoir de
l'étudiant que son évolution, son développement en tant
qu'être humain, en tant que citoyen déjà responsable de
lui-même, de sa vie et même en partie de son milieu.
Je remercie quand même le député de nous rappeler
cette préoccupation. Je pense que je peux le rassurer, le régime
pédagogique, quelle que soit sa forme, ne sera pas véritablement
secondarisé. Ceci ne veut pas dire que le problème sera facile
à résoudre, car je ne sais pas s'il est possible de donner
à un régime pédagogique et collégial, le même
degré d'autonomie complète que celui qui est consacré
à l'universitaire. D'une part, il faut que le régime
pédagogique corresponde au niveau où se situent les études
que fait l'étudiant, et, d'autre part, il faut qu'il tienne compte aussi
que l'étudiant du collégial, tout avancé qu'il soit dans
la voie de l'apprentissage de sa liberté, n'a pas encore atteint ce
point final de son évolution. Il faut donc en tenir compte aussi dans le
règlement pédagogique, mais encore une fois, dans un sens
positif, de façon à favoriser pour l'étudiant la
complétion de son passage vers la maturation complète.
C'est dans ce sens que nous essaierons d'élaborer ce
régime pédagogique, non pas à mi-chemin entre celui du
secondaire et celui de l'universitaire, mais en tentant de bien identifier,
bien discerner les besoins, l'attente, le savoir de l'étudiant et de
l'aider à parachever son évolution aussi bien intellectuelle
qu'affective.
M. French: M. le Président, je voudrais brièvement
souligner que c'est excessivement dangereux de généraliser la
maturité de ces individus, parce qu'il y en a qui sont tout à
fait prêts à toutes les libertés que la
société peut leur fournir, et d'autres qui sont évidemment
très loin de là. C'est justement ce qui est inquiétant
vis-à-vis d'une approche qui semble au moins basée sur une
conception centrale, je ne dirai pas
centralisatrice, mais uniforme et presque technocratique qui s'applique
à toute la population des étudiants du cégep, parce qu'il
y en a qui sont évidemment bien au-delà de cela, et ce sont eux
qui sont les promesses pour l'avenir. Ce sont eux qui vont payer le coût
pour des gens qui ne devraient peut-être même pas être dans
la même situation qu'eux.
Dans ce sens, je voudrais poser une dernière question.
Là-dessus, n'est-ce pas un aveu d'échec, la conception d'un
cégep, tout cet effort dont on est témoin actuellement?
M. Laurin: Bien au contraire, M. le Président. Je crois,
et je l'ai dit dans ma présentation, que malgré les imperfections
que l'on peut encore constater au niveau des cégeps - aucune institution
humaine n'est parfaite - depuis dix ans la situation ne cesse de
s'améliorer. Le milieu du cégep se fait remarquer par sa
vitalité, sa créativité, les efforts qu'il fait pour
améliorer la qualité de l'enseignement. Je pense qu'il n'y a pas
lieu de craindre à cet égard, bien que je sois d'accord qu'il
faille éviter, non seulement la secondarisation dont parlait
déjà le député de Westmount, mais aussi la
bureaucratisation, l'uniformisation, la technocratisation. Il y a
sûrement une marge de manoeuvre beaucoup plus importante à laisser
aux administrations collégiales, aux organismes étudiants
collégiaux, aux diverses instances collégiales. Il y a lieu de
leur donner sûrement beaucoup plus d'autonomie que ce que nous faisons
pour le collégial. Il reste cependant que, comme je le disais tout
à l'heure, cette évolution, il faut bien le dire, sur le plan
général n'est pas aussi achevée qu'elle puisse
l'être lorsque nous avons affaire à des étudiants
universitaires, par exemple.
Pour rassurer le député davantage, je lui dirais que du
fait que les adultes sont de plus en plus partie prenante à
l'enseignement collégial, du fait qu'il va falloir prévoir dans
le régime pédagogique leur accorder toute la place qui convient,
je pense que, de ce mariage entre les préoccupations qui visent les
adultes comme les élèves plus jeunes, pourront résulter
des articles qui respecteront justement cet idéal que nous trace le
député de Westmount et qui se situe aux antipodes de
l'uniformisation et de la technocratisation.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Chauveau. (22 heures)
M. Brouillet: M. le Président, constatant le rythme
d'évolution de nos questions et les programmes que nous avons encore
à parcourir, je pense bien que nous en avons encore pour quelques
heures. Je proposerais qu'on suspende pour quelques minutes, au moins dix ou
quinze minutes pour se donner le temps et le loisir de se détendre
l'esprit pour revenir par la suite.
Le Président (M. Gagnon): Vous voulez dire sûrement
suspendre les travaux pour une dizaine de minutes.
M. Brouillet: Les suspendre.
Le Président (M. Gagnon): Si cette commission est
d'accord, de façon qu'on puisse ventiler un peu la salle, je suis
disposé à suspendre les travaux pour cinq à dix
minutes.
M. Paquette: Notre qualité de vie diminue
dangereusement.
M. Champagne: J'aurais une question d'information pour ma
part.
Le Président (M. Gagnon): Oui.
M. Champagne: II nous reste le programme des universités,
l'éducation des adultes, le point de vue administratif et je pense que
les gens de la Charte de la langue française sont ici. Nous finissons
à minuit, ce soir, si on se comprend bien. Il faudrait peut-être
s'entendre, diviser tous les programmes et partager le temps entre chacun.
Le Président (M. Gagnon): J'allais justement vous proposer
qu'après la suspension, lorsqu'on reprendra les travaux, on s'entende
sur un temps limité pour chaque programme. Comme c'est là, minuit
va arriver, L'ordre de la Chambre se termine, je crois, à minuit et il y
aura peut-être un certain nombre de programmes qu'on n'aura pas eu le
temps de voir. Si la commission est d'accord, je pense qu'on devrait s'imposer
un certain nombre de minutes par programme. M. le député de
Westmount.
M. French: M. le Président, j'arrive mal à
comprendre que, d'un côté, on se rende compte qu'on n'a pas
tellement de temps et que, d'un autre, on propose une pause. Quant à
nous, nous voudrions continuer. Si le député de Chauveau veut
s'absenter, évidemment, c'est son droit. Je m'excuse.
M. Brouillet: Je ne pense pas qu'à moi, je pense au
ministre et à d'autres personnes. Si tout le monde sort pendant que vous
êtes seul à parler, ce ne sera pas intéressant pour
vous.
Deuxièmement, je pense qu'on peut envisager aussi d'employer
d'une façon plus qualitative le temps qu'il nous reste. Il n'y a pas
seulement la quantité des questions, mais il y a aussi la
qualité. Vous pourriez peut-être choisir parmi vos questions. J'ai
aussi beaucoup de questions à poser. Je regrette
beaucoup de ne pas pouvoir poser toutes celles que j'aurais à
poser.
M. French: Je regrette que le député de Chauveau
trouve que la quantité est trop grande. Il se préoccupe du
bien-être du ministre. Je suis convaincu que . le ministre est prêt
à relever le défi. Quant à nous, nous voulons continuer,
avec tout le respect que nous vous devons. Nous avons perdu vingt minutes au
début, ce soir, une demi-heure cet après-midi, vingt minutes la
semaine dernière. Nous voudrions tout simplement continuer. Je ne trouve
pas que nos questions soient... Je m'excuse, M. le...
Le Président (M. Gagnon): Le député de
Westmount a toujours la parole, je crois.
M. French: Je serais prêt à entendre le ministre
là-dessus, s'il a des problèmes. Je veux simplement signaler que
nous sommes préparés de notre côté. Je ne trouve pas
que nos questions gaspillent le temps des gens. Je ne trouve pas non plus
qu'elles soient extrêmement partisanes ou quoi que ce soit. Nous voulons
de l'information, nous en acquérons actuellement et nous voudrions
continuer, c'est aussi simple que cela.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Je voudrais simplement dire, M. le Président,
qu'à minuit, on aura dépassé les dix heures qui
étaient prévues pour l'étude des crédits de
l'Éducation, même en tenant compte du fait qu'il y a eu des
retards dans le début des travaux. Cet après-midi, je pense que
le député de Westmount ne nous fera pas grief d'avoir entendu la
coalition nationale sur l'éducation des adultes qui voulait rencontrer
le ministre, mais cela ne nous a pas empêchés d'avoir quand
même le nombre d'heures prévues à la commission.
Sur la question de mon collègue de Chauveau, si les gens de
l'Opposition se sentent lésés à dix minutes près,
on peut toujours, par consentement unanime, finir à minuit dix, de
façon que notre qualité de vie, qui se détériore
dangeureusement depuis le début de la soirée, remonte quelque peu
et nous permette de finir le débat en beauté.
Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, comme c'est une
question de règlement, il ne faudrait pas discuter un heure de temps sur
la question de règlement, parce qu'on n'aura plus le temps de suspendre.
Si vous êtes d'accord, on prendrait cinq à dix minutes de repos.
Si la commission n'est pas d'accord, évidemment, on va continuer de
travailler. Mais si on prenait cinq à dix minutes de repos, j'ai
l'impression que ce temps serait facilement récupérable par la
suite. Est-ce que vous êtes d'accord pour suspendre les travaux pour dix
minutes, le temps de ventiler cette salle?
Des voix: D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Les travaux sont suspendus pour
dix minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 04)
(Reprise de la séance à 22 h 16)
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Lors de la suspension, la parole était au député de
Fabre.
Avant de céder la parole au député de Fabre, est-ce
qu'on pourrait s'entendre sur le partage du temps qu'il reste? Il reste encore
huit programmes à étudier. Est-ce qu'on pourrait s'entendre sur
le temps qu'on doit allouer à chacun des programmes?
M. le député de Westmount.
M. French: Je pense que, pour ce qui est de l'aide
financière et de l'éducation des adultes, on peut maintenant les
passer plus ou moins tout de suite, losqu'on aura terminé avec les
collèges. Après, le financement des universités. Ensuite,
l'Office de la langue française. Je ne sais pas si le
député de Marguerite-Bourgeoys aurait d'autres idées.
M. Lalonde: ... tout ce que vous dites.
Le Président (M. Gagnon): On s'était entendu pour
réserver une demi-heure aux organismes de la langue française.
C'était entendu entre les leaders.
M. Lalonde: Minimum.
Le Président (M. Gagnon): Minimum. Les programmes dont
vous parlez, M. le député, ce sont les programmes 6 et 7 qui
seraient prêts à être adoptés actuellement.
M. French: C'est-à-dire l'aide financière et la
formation des adultes.
M. Lalonde: 03, l'aide financière aux étudiants. On
attendait le député de Verchères. Il n'est pas venu. Il
m'a dit qu'il serait ici jeudi. Il m'avait fait assurer de ne pas accepter cela
avant lundi parce que apparemment il voulait faire la même petite
révolte qu'il avait faite dans un caucus. Apparemment le conseil
général l'a ramolli un peu. On peut l'adopter, nous autres, sur
division, naturellement, étant donné gu'on est parfaitement en
désaccord avec tout ce que le ministre nous dit.
Le Président (M. Gagnon): Le programme no 3 est
adopté sur division.
M. Lalonde: Oui.
Formation des adultes
Le Président (M. Gagnon): Et le programme no 7?
M. Lalonde: Ce sont les adultes? Sur division
également.
Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division.
Nous revenons au programme no 5 et la parole est au député
de Fabre.
M. Laurin: M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Laurin: Avant qu'on adopte le programme de l'éducation
des adultes, j'aimerais déposer l'introduction que j'avais
préparée pour l'enseignement aux adultes, mais que je ne lirai
pas, dans la mesure où elle paraîtra quand même aux
délibérations de la commission.
M. Lalonde: On ne saurait s'en passer, M. le ministre.
M. Laurin: En 1981-1982, les crédits consacrés aux
programmes de la Direction générale de l'éducation des
adultes dans ses divers réseaux seront de 138 600 000 $, comparativement
aux 146 831 000 $ de 1980-1981. Il s'agit donc d'une baisse de 6%. De ces 138
600 000 $, 108 151 000 $ seront affectés au réseau des
commissions scolaires, 23 704 200 $ au réseau des collèges
publics et 6 744 500 $ aux activités des organismes volontaires
d'éducation populaire (OVEP), aux activités de formation
syndicale et à celles des institutions spécialisées.
Cependant, je dois ajouter que, depuis le discours sur le budget, le
gouvernement a accepté, après une évaluation plus
poussée de l'impact des compressions annoncées, de revoir le
niveau de cette enveloppe. Le budget a donc été
réaménagé pour permettre l'addition aux programmes de
l'éducation des adultes d'une somme de 3 500 000 $ en crédits
pour l'année financière 1981-1982, ce qui donne 5 000 000 $ de
plus au budqet de la prochaine année scolaire.
Je n'ai pas à reprendre ici les arguments exposés par le
ministre des Finances pour établir la nécessité
d'appliquer des mesures immédiates de compression des dépenses
gouvernementales; ces compressions budgétaires constituent une dure
nécessité, dont l'objectif général est admis et
difficilement contestable. Je rappellerai seulement que l'application de ces
mesures, qui a atteint tous les programmes d'intervention du ministère
de l'Éducation, a fortement touché l'éducation des
adultes, un secteur plus fragile et plus vulnérable en raison de ce que
ses programmes ne sont pas obligatoires et de ce que nous y avons moins
d'engagements découlant des conventions collectives. En raison aussi de
ce que certains programmes peuvent sembler moins prioritaires et de ce que nous
pouvons parfois avoir des doutes sur la nécessité de les
maintenir et de les développer.
Pourtant, j'ai déjà affirmé - et cela reste vrai -
que l'éducation des adultes est un dossier prioritaire pour le ministre
et pour le ministère de l'Éducation. D'aucuns me demanderont sans
doute comment une telle affirmation peut être compatible avec une
proposition de compressions budgétaires. Je leur répondrai que la
conjoncture générale n'a pas permis au ministère de
l'Éducation d'assurer le même niveau de ressources à ce
secteur, pour les raisons mêmes qui ont poussé le gouvernement
à créer une commission d'étude sur la formation des
adultes. Depuis de nombreuses années, on réclame une politique
gouvernementale globale d'éducation des adultes, seule capable de
permettre à l'État de faire, au plan quantitatif comme au plan
qualitatif, des choix fondés et éclairés. Dans cette
perspective, on comprend qu'il est important d'adopter un comportement prudent
et de ne pas compromettre l'avenir. Le budget de l'éducation des adultes
subit donc sa part de réduction, mais nous devrons redoubler
d'imagination pour que les effets négatifs soient réduits au
minimum. C'est à cette tâche que tous les intervenants sont
conviés.
Ainsi, le ministère de l'Éducation propose aux organismes
de ses réseaux les objectifs suivants: 1. Autant que possible, maintenir
le niveau des activités de 1980-1981, en réaffectant aux
activités de formation des crédits antérieurement
prévus pour la qestion et l'encadrement; 2. Réduire au minimum
l'impact auprès des clientèles d'une diminution
d'activités, en augmentant, partout où cela est possible, le
nombre d'adultes par groupe; 3. Recourir, auprès des clientèles
qui peuvent se le permettre, aux ressources de l'autofinancement pour limiter
la mise en disponibilité des effectifs; 4. Tenter d'éliminer les
dédoublements coûteux occasionnés par l'organisation
d'activités de formation de même nature par les divers niveaux
d'enseignement; nous pensons ici, en particulier, aux cours de langue et
à certains programmes de sciences humaines.
Concrètement, la proposition de répartition des
crédits devrait permettre de maintenir les activités de formation
professionnelle des adultes au même niveau
que l'an dernier, sauf pour certains programmes à temps partiel
offerts par les commissions scolaires. En formation générale,
tous les projets spéciaux visant des clientèles jugées
prioritaires, particulièrement celles provenant de milieux
socio-économiquement faibles (analphabètes, autochtones,
handicapés, travailleurs en difficulté face au marché du
travail, femmes en processus de réinsertion sociale et professionnelle,
bénéficiaires d'aide sociale, etc.) sont maintenus. En ce qui
concerne la formation socioculturelle et l'éducation populaire, le
ministère ne subventionnera plus certaines activités
apparentées aux loisirs socioculturels offertes dans les commissions
scolaires; il y favorisera plutôt des activités d'apprentissage
visant le développement personnel et collectif. Ces mesures auront pour
effet de réduire d'environ 170 000 le nombre d'inscriptions à des
activités gratuites - il s'agit bien d'inscriptions à un cours et
non de personnes, puisqu'une même personne peut s'inscrire à
plusieurs cours. Par ailleurs, le budget du programme d'aide aux organismes
volontaires d'éducation populaire sera accru de 250 000 $ et celui de la
formation syndicale sera maintenu au niveau actuel. De plus, je tiens à
souligner que tous les organismes ayant oeuvré en éducation des
adultes en 1980-1981 continueront de le faire en 1981-1982; il s'agit de
soixante-dix-neuf commissions scolaires, de quarante-six cégeps, de
trois cent cinquante organismes volontaires d'éducation populaire, des
grandes organisations syndicales, de quelques institutions
spécialisées et d'un grand nombre d'entreprises.
Enfin, il me semble opportun de signaler ici l'action dynamique
menée au cours des derniers mois par la Commission d'étude sur la
formation professionnelle et socioculturelle des adultes. Choisissant une
démarche concrète et vivante, s'attachant à donner
l'exemple de la fidélité aux principes qu'elle propose
relativement à la participation des adultes à la
réalisation de leur entreprise de formation, la commission Jean a
mobilisé tous ceux et toutes celles qui font exister ce secteur de
l'éducation et leur a demandé de l'aider à bien cerner,
à partir de leur vécu et de leurs perceptions, la
problématique de l'éducation des adultes.
Le ministère de l'Éducation et, plus
particulièrement, la Direction générale de
l'éducation des adultes, observent attentivement les travaux de la
commission Jean; ils y participent et y collaborent. Il y a là un
exercice stimulant dont les résultats devraient inspirer notre
démarche des prochaines années. Je m'engage à accorder
moi-même toute l'attention requise au rapport final que cette commission
d'étude remettra au gouvernement au mois de décembre 1981.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Fabre.
Enseignement collégial public (suite)
M. Leduc: Dans son exposé, le ministre a parlé
d'une amélioration du taux de passage du secondaire au collégial.
J'aimerais connaître les chiffres les plus récents qu'on
possède, tant pour le secteur francophone que pour le secteur
anglophone.
Et je voudrais connaître aussi les chiffres les plus
récents en ce qui concerne le taux de passage du collégial
à l'universitaire, pour les deux secteurs, francophone et
anglophone.
M. Laurin: Pour répondre à la première
partie de la question, en 1978-1979, le taux de passage pour l'ensemble du
Québec du secondaire V au collégial était de 40,2%. En
1979-1980, le taux de passage du secondaire V au collégial a
été de 41,8%.
Pour la deuxième partie de la question, nous faisons actuellement
les compilations et je pourrais répondre ultérieurement à
cette deuxième partie.
M. Leduc: Et est-ce que vous avez les chiffres pour les deux
secteurs, francophone et anglophone?
M. Laurin: Malheureusement, non.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: J'aurais deux questions qui concernent des sujets
qui ont déjà été abordés, mais ça ne
sera pas très long. Sur le projet de règlement des études
collégiales, le ministre a annoncé qu'il y aurait une nouvelle
étude à la suite des commentaires qui ont été faits
lors de la consultation, qu'il y aurait une décision à l'automne.
Non? Alors, quel est l'échéancier pour la remise à jour du
règlement des études collégiales?
M. Laurin: En réponse à la question du
député de Westmount, j'ai dit qu'après les échanges
que nous aurons à l'automne et le dépôt du rapport de la
commission Jean en décembre 1981 nous mettrions la dernière main
au projet de règlement. On peut penser que dans les premiers mois de
l'année nous pourrons présenter la nouvelle version du projet de
règlement.
M. Paquette: À ce point de vue, on a eu un accord assez
unanime sur la discussion de tout à l'heure concernant le fait qu'il ne
fallait pas avoir une approche technocratique, bureaucratique face à la
vie pédagogique au niveau des collèges, qu'il fallait valoriser
l'autonomie des intervenants pédagogiques et,
à ce point de vue, du principal intervenant pédagogique
qui est l'étudiant lui-même, qui est l'apprenant, celui qui est en
situation d'apprentissage. À ce point de vue, le ministre a fait part,
il y a quelques mois, de son intention d'appuyer la constitution, dans les
collèges et dans les universités également, d'associations
étudiantes représentatives.
Concrètement, qu'est-ce que cela représente en termes de
plan de travail au niveau du ministère? Est-ce qu'il y a une
réglementation à adopter qui pourrait faciliter les protocoles
d'entente entre les administrations des collèges et les
étudiants? Qu'est-ce qui est prévu à ce point de vue au
niveau du ministère pour la prochaine année?
M. Laurin: Nous avons rencontré les organismes
étudiants qui sont en train de pousser leur propre réflexion. Ils
n'ont pas encore fait l'accord entre eux sur ce problème. Les uns
voudraient que les droits étudiants, y compris la reconnaissance de leur
association, soient inscrits dans une sorte de convention, que les
étudiants négocieraient avec le conseil d'administration soit du
collège soit de l'université, les autres voudraient que leur
organisme étudiant soit reconnu au même titre que les organismes
syndicaux, ce qui impliquerait une modification au Code du travail.
La Charte des droits et libertés de la personne, de son
côté, pousse ses réflexions sur le sujet. Lors de la
Semaine de l'éducation, la Commission des droits et libertés de
la personne a présenté ses propositions. C'est donc en conjugant
les réflexions diverses sur ce point qu'il nous faudra en arriver
à une décision. Pour le moment, nous laissons les organismes
étudiants continuer leurs réflexions en espérant qu'ils en
arrivent à une position commune. Pour notre part, nous continuons aussi
notre réflexion. Je ne crois pas que la solution que nous adopterons
sera univoque. Que nous reconnaissions les organismes étudiants en vertu
du Code du travail ou que nous les reconnaissions à l'intérieur
des règlements que nous élaborerons, que ce soit le
règlement d'admission aux études collégiales, que ce soit
les règlements de vie étudiante, que ce soit le règlement
pédagogique, il faudra prendre le problème sous plusieurs angles
de façon à respecter l'objectif, que j'ai énoncé
à plusieurs occasions, qui est de respecter le degré
d'évolution de la personnalité de l'étudiant et de
l'amener à participer aux prises de décisions qui le concernent,
que ce soit au niveau pédagogique ou au niveau de son vécu, et de
façon aussi à permettre aux organismes étudiants de
prendre une part plus grande à la gestion des services collégiaux
qui les concernent, qu'il s'agisse de loisirs, qu'il s'agisse de comptoirs
coopératifs, qu'il s'agisse des autres activités que nous
connaissons. C'est la raison pour laquelle je dis qu'une vaste réflexion
s'est engagée sur l'ensemble de ces problèmes, menée
conjointement et simultanément par les organismes étudiants, par
les conseils aussi, Conseil des collèqes, Conseil supérieur de
l'éducation, et par le ministère. Je pense que lorsque notre
réflexion commune sera plus avancée, nous mettrons ensemble les
réflexions ainsi que les hypothèses auxquelles nous en serons
arrivés et c'est de cette réflexion que naîtront les
décisions que nous serons appelés à prendre et qui
pourront s'incarner dans des documents différents ou selon des
modalités différentes.
M. Paquette: Une autre question dans un autre ordre
d'idées, M. le Président. Le député de Westmount a
souligné, c'est-à-dire mon collègue de Fabre a
souligné l'augmentation qui semble s'effectuer en termes du taux de
passage du secondaire au collégial. Selon les informations que j'ai, en
tout cas, dans la région de Montréal, il y a un accroissement de
la clientèle assez important prévu pour l'année prochaine.
J'aimerais savoir si c'est un phénomène
généralisé, quelle est son ampleur et quel impact cela a
sur les crédits. Est-ce que les crédits vont pouvoir être
ajustés en fonction de l'augmentation de clientèle? Je parle des
cégeps, au niveau des cégeps.
M. Laurin: Je vais laisser M. Van Der Donckt répondre
à cette question.
Il est un fait, M. le Président, que nous avons constaté
une augmentation inattendue du nombre d'étudiants qui veulent entrer au
cégep en septembre prochain. Ce phénomène est
généralisé, donc, il se manifeste un peu partout à
travers le Québec. Il se manifeste en particulier dans la région
de Montréal et dans la région de Québec. Nous avons donc
rencontré les collèges en cause pour faire en sorte que tous les
étudiants qui terminent leur secondaire V et qui sont aptes à
entrer au niveau collégial en septembre prochain puissent avoir
accès à l'un ou l'autre des collèges de leur région
si possible. Nous avons obtenu la collaboration en particulier de certains
collèges de la région de Montréal où la
capacité d'accueil leur permet d'accueillir un plus grand nombre
d'étudiants. Je pense au collège André-Laurendeau, au
collège Montmorency et au collèqe Rosemont, en particulier, et,
dans la région de Québec, je pense au collège Garneau et
au collège de Sainte-Foy qui ont accepté d'accueillir un plus
grand nombre d'étudiants que ce qui avait été
prévu. Nous allons aider ces collèges à obtenir les
ressources pour effectivement accepter ces étudiants.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Westmount.
M. French: Je voudrais soulever le cas - c'est une
préoccupation paroissiale - du collège Dawson. M. le
député de Vachon s'est permis quelques mots lors du débat
sur le discours inaugural, à ce propos, et je cite: "Who was the first
government to try and make a home, a permanent home for Dawson College? For
years, it had dragged on the debate; with the previous governments, not a bit
of action. This government moved on it." Donc, je pense que le ministre sait ce
qui suit. Dans l'optique d'un étudiant du collège Dawson,
qu'est-ce que le gouvernement actuel a fait de plus que les autres
gouvernements ou, plus simplement, quand est-ce qu'on peut attendre quelque
chose de concret et de définitif au sujet de l'achat de la maison
mère de la Congrégation des Soeurs de Notre-Dame, l'approbation
définitive par le gouvernement du Québec? (22 h 30)
M. Laurin: Nous avons bien failli régler le
problème du collège Dawson il y a quelques années. Une des
propositions qu'on nous avait faites, était de relocaliser les
activités du collège Dawson dans une école qui appartenait
à une commission scolaire que connaît très bien le
député de Jacques-Cartier. Cela aurait été une
solution très rentable sur le plan économique et qui aurait en
même temps satisfait les besoins de la population étudiante de
Dawson.
Malheureusement, à la dernière minute, il n'a pas
été possible d'effectuer la transaction avec cette commission
scolaire, et il a fallu trouver une autre solution.
C'est à la suite de cette décision que nous avons
recommencé notre prospection et en fin de compte, d'un accord unanime,
nous avons jeté les yeux sur la maison mère de la
congrégation Notre-Dame. Les démarches ont été
faites et nous avons obtenu des autorités de la congrégation
Notre-Dame l'autorisation de pousser nos études. C'est ce qui a
été fait, mais encore une fois le Conseil du trésor
demande des chiffres définitifs, ce que nous ne pouvions pas lui
fournir, il y a quelques mois.
Le Conseil du trésor s'est donc contenté d'adopter, en
principe, la relocalisation des diverses unités de Dawson dans la
"mother house" des soeurs de la congrégation Notre-Dame. Par la suite,
il nous fallait procéder à l'estimation des travaux
nécessaires pour l'implantation du devis pédagogique de Dawson
d'une façon plus fouillée, plus détaillée. Ces
travaux sont toujours menés, au ministère de l'Éducation
comme dans les autres ministères, par des équipes qui
appartiennent au ministère des Travaux publics.
À la suite de la décision que j'ai annoncée il y a
quelques mois, nous avons confié la tâche de l'estimation des
travaux à faire et également de la somme qu'il faudrait
débourser pour l'acquisition de l'édifice à une
équipe des Travaux publics en lui disant que nous avions besoin d'une
réponse le plus tôt possible sur ces divers points, prix
d'acquisition de l'immeuble, prix de rénovation de l'immeuble, pour que
cela puisse épouser chacune des composantes du devis pédagogique
de Dawson.
J'ai annoncé, dans mon exposé liminaire, que j'attendais
le rapport de cette équipe des Travaux publics. Ce rapport nous est
arrivé aujourd'hui, je crois, vendredi de la semaine dernière au
ministère de l'Éducation; nous sommes actuellement en train de
l'étudier, de l'analyser et nous le ferons parvenir incessamment au
Conseil du trésor, avec nos suggestions, commentaires et
recommandations. Il reviendra ensuite au Conseil du trésor de nous dire
s'il accepte ou non les recommandations que nous lui ferons.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que le programme 5 est
adopté? Une autre question, M. le député de Westmount?
M. French: Un instant, s'il vous plaît. Donc, le rapport
des Travaux publics était à peu près deux semaines en
retard sur l'échéancier qui a été annoncé.
On a dit...
M. Laurin: J'avais demandé aux Travaux publics de nous
faire parvenir ce rapport vers le 17 juin et, aujourd'hui, nous sommes le 15
juin, il nous est arrivé cinq jours plus tôt que prévu.
M. French: J'avais lu le 29 mai quelque part, je m'excuse.
Il reste donc une seule étape, celle de consulter le Conseil du
trésor.
M. Laurin: Pas consulter, c'est le Conseil du trésor qui
donne son approbation.
M. French: Je m'excuse. De soumettre humblement et
respectueusement au Conseil du trésor la possibilité qu'il
considère qu'un jour, peut-être, on va avoir un site central pour
le campus. Est-ce que je peux oser...
M. Laurin: Dawson aura sûrement son site unique pour
relocaliser toutes ces unités constituantes. La décision de
principe est prise, mais il s'agit de savoir où.
Une voix: Oui, justement.
M. Laurin: J'espère que le rapport des travaux publics ne
nous propose pas des sommes qui feront reculer le Conseil du trésor.
M. French: Sur ce point, il s'agit toujours de comparer ces
sommes avec les sommes que le pluralisme de campus actuels, la collection de
campus actuels engendre de
plus que le fonctionnement typique d'un céqep.
M. Laurin: II faudra tenir compte effectivement de cette
dimension.
M. French: Elle est assez élevée, je pense.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 5 est-il
adopté? Adopté. Programme 6.
M. le ministre.
M. Laurin: Je voudrais essayer de répondre à la
deuxième partie de la question que me posait le député de
Fabre. Je n'ai malheureusement pas de chiffres précis à lui
apporter, mais je pourrais quand même lui donner quelques indications.
À l'automne 1980, dans l'ensemble du réseau
québécois, parmi tous les candidats qui ont
présenté au moins une demande d'admission dans un programme de
premier cycle universitaire, en excluant les certificats, 75,6% ont
été admis dans au moins une université, 87,5% des
candidats en provenance des collèges décernant un DEC ont
été admis à l'université. Les taux d'admis sont
à peu près identiques, quelle que soit la région
administrative de provenance des candidats issus des collèges
décernant un DEC. Déjà, cela donne quelques indications
intéressantes.
Nous passons à l'autre programme, M. le Président?
Enseignement universitaire et formation des
chercheurs
M. Lalonde: Avant de passer au programme 6, je demanderais le
consentement de la commission pour aborder en même temps le programme 9,
le fonds pour la formation des chercheurs et action concertée.
M. Laurin: Oui, d'accord.
M. Lalonde: On pourrait les adopter ensemble.
M. Laurin: D'accord.
Le Président (M. Gagnon): Les programmes 6 et 9 sont
étudiés en même temps.
M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, comme tous les autres secteurs
de notre système scolaire, le secteur...
Le Président (M. Gagnon): Une question de
règlement?
M. French: Non. Je voudrais proposer respectueusement au ministre
qu'on suive la même procédure avec son avant-propos pour permettre
plus de questions.
M. Laurin: Non, M. le Président, parce que je pense qu'en
lisant mon exposé liminaire, je vais me trouver à répondre
à l'avance à un certain nombre de questions que vous me poseriez
inévitablement.
M. French: Vous ne serez pas étonné que je les pose
quand même.
M. Laurin: M. le Président, comme tous les autres secteurs
de notre système scolaire, le secteur universitaire doit se disposer
à vivre des années difficiles, mais décisives pour
l'avenir. Les universités sont entrées elles aussi dans une
ère d'austérité financière qui va exiger d'elles
des choix plus clairs et une productivité plus marquée. Ce n'est
donc pas par pur hasard qu'en même temps qu'aura sonné l'alarme
des contraintes budgétaires, l'année 1980-1981 a vu s'amorcer
pour les universités une démarche collective d'orientation et de
concertation qui, à tout le moins dans le secteur universitaire, a tous
les traits d'une première. Avant de présenter certaines
caractéristiques de l'enveloppe budgétaire de 1981-1982, je dirai
quelques mots de cette démarche et des orientations qui s'y
affirment.
Dans le prolongement des politiques québécoises du
développement culturel et du développement scientifique et
à la lumière des recommandations de la commission d'étude
sur l'avenir des universités et des avis du Conseil des
universités, j'ai récemment eu l'occasion d'énoncer devant
la communauté universitaire les orientations majeures que le
gouvernement entend privilégier au cours des prochaines années en
ce qui a trait au développement du secteur universitaire.
Dans le respect du statut d'autonomie et de la liberté des
universités, aussi bien qu'en pleine conscience des exigences qui
découlent de leurs fonctions sociales et publiques, j'ai ainsi
posé les premiers jalons d'une politique québécoise des
universités. J'entends poursuivre la démarche amorcée, en
procédant l'automne prochain à des consultations intensives du
milieu universitaire dans le cadre d'ateliers portant sur la coordination du
réseau universitaire, le financement des universités, la vie
professorale et la vie étudiante. Je présiderai à des
discussions analogues au sujet de la formation et du perfectionnement des
maîtres.
Ce que j'ai proposé aux universités, c'est essentiellement
de concentrer leurs efforts sur la réalisation de la mission
fondamentalement éducative et culturelle qui constitue leur raison
d'être, convaincu que
c'est dans et par leur mission d'enseignement et de recherche que les
universités peuvent le mieux contribuer au développement
culturel, social, économique et technologique de notre
collectivité. Plus spécifiquement, je leur ai proposé de
consolider les études de premier cycle, c'est-à-dire
d'améliorer la qualité des activités d'enseignement de ce
niveau, leur fondement disciplinaire et méthodologique, l'encadrement
des étudiants et la pédagogie, de rééquilibrer les
programmes en fonction des besoins de formation fondamentale et des exigences
du marché du travail.
J'ai également attiré leur attention sur la
nécessité de stimuler le développement des études
de deuxième et de troisième cycle et de la recherche, surtout
dans les secteurs jugés prioritaires pour notre développement
scientifique et économique. J'ai aussi rappelé que le
ministère entend poursuivre sa politique d'accessibilité et de
démocratisation des études universitaires en demandant aux
universités d'y contribuer par une amélioration de leur
productivité qui prenne en considération l'effort financier
déjà considérable consenti par la société
pour leur développement. Des actions de soutien destinées
à faciliter l'accès aux universités devront être de
plus en plus sélectives, orientées, différenciées
afin de favoriser un plus grand accès de certains groupes cibles.
Enfin, la nouvelle conjoncture des années quatre-vingt et les
actions prioritaires à conduire amènent tout naturellement
à reconnaître que la santé et le développement d'un
réseau aussi décentralisé de celui de nos
universités exigent une concertation et une coordination dont la mise en
oeuvre ne peut plus être reportée.
Il importe donc de définir plus concrètement les
responsabilités et les rôles des principaux agents du
réseau universitaire, les universités, le Conseil des
universités et le ministère de l'Éducation. C'est
là l'objet d'un des ateliers que je tiendrai l'automne prochain avec la
communauté universitaire.
Parlons maintenant de l'enveloppe de 1981-1982. Au cours des deux
dernières décennies, le gouvernement du Québec a
assumé la responsabilité de fournir aux universités les
ressources financières nécessaires à l'accomplissement de
leur mission, des ressources énormes, comme vous le savez. Tant et si
bien que le Québec est aujourd'hui doté d'un réseau
universitaire dont la qualité et les ressources se comparent
avantageusement à celles de plusieurs de nos voisins. Mais tout le monde
comprendra qu'on ne peut pas demander à la population
québécoise d'accroître indéfiniment son effort
financier dans ce secteur sans compromettre le développement d'autres
secteurs encore en émergence.
Il reste qu'en augmentant ces subventions de 6,9% par rapport à
celles de 1980-1981, et si l'on tient compte des autres revenus des
universités, le gouvernement permettra un niveau de financement de 6800
$ par étudiant.
En raison des contraintes budqétaires que nous traversons, le
gouvernement a décidé d'augmenter, à compter de septembre
1981, les droits de scolarité des étudiants étrangers.
Cette nouvelle politique, qui ne s'applique pas aux étudiants dont le
pays d'origine a signé un accord particulier avec le Québec,
haussera les droits de scolarité des nouveaux étudiants
étrangers à 60% du coût moyen d'un étudiant
équivalent à temps complet, soit 4128 $.
Pour les étudiants étrangers déjà inscrits
dans les universités, les droits de scolarité seront annuellement
augmentés de 1000 $, jusqu'à concurrence de 60% du coût
moyen.
Par ailleurs, le ministère a créé un fonds de
dépannage destiné à aider certains étudiants qui se
retrouveraient momentanément dans une situation financière
susceptible de les empêcher de poursuivre leurs études.
Cette hausse des frais de scolarité des étudiants
étrangers, une mesure à laquelle recourent de nombreux
États, permettra d'alléger quelque peu le lourd fardeau de
l'enveloppe de base octroyée aux universités. Exception faite de
quelques programmes et de quelgues cas particuliers, cette enveloppe de base
est répartie entre les universités selon une formule d'indexation
historique basée sur l'accroissement des clientèles.
Au cours des années et malgré sa simplicité
d'application, cette formule a contribué à créer de fortes
disparités entre les universités. Le gouvernement est conscient
de cette situation et entend la corriger de façon graduelle.
L'automne prochain, je tiendrai un atelier de consultation sur ce sujet,
escomptant en tirer des renseignements précieux pour la mise au point
d'une formule mieux adaptée à nos besoins. (22 h 45)
Face à la nouvelle conjoncture financière, plusieurs
universités prévoient des déficits budgétaires en
1981-1982. Je vous rappelle que, comme par le passé, les
universités auront à soumettre, le 1er septembre prochain leurs
prévisions budgétaires pour l'année 1981-1982. De plus,
elles devront présenter un plan d'équilibre budgétaire
faisant état des actions prises pour respecter l'enveloppe
budgétaire qui leur est accordée. Ce plan d'équilibre
devra être fait dans une perspective pluriannuelle. Les institutions qui
présentent déjà une situation déficitaire devront
soumettre un plan de résorption du déficit, même si
celui-ci n'atteint pas les 5% permis par les règles antérieures.
Il est urgent que les universités prennent les mesures
nécessaires pour
fonctionner avec une enveloppe budgétaire plus serrée,
sans quoi elles risquent inévitablement d'être soumises à
un contrôle plus étroit de la part de l'État.
En m'adressant à la communauté universitaire, le 3
février dernier, j'ai publiquement fait le pari qu'on pouvait, dans le
cadre des lois actuelles, trouver et pratiquer des formules de concertation et
de coordination qui permettent, pour autant que chaque partenaire prenne ses
responsabilités, d'accroître la productivité de notre
réseau. Je me permets de réitérer aujourd'hui ce pari,
confiant qu'à l'intérieur de chaque université les
différents éléments de la communauté universitaire
accepteront les contraintes nouvelles; confiant aussi qu'entre les
universités on cherchera à partager les ressources dans un esprit
de saine concurrence et qu'entre les universités et l'État on
trouvera des formules de coordination qui n'enfreignent pas l'autonomie de
gestion et la liberté académique des universités.
Quant au développement physique de nos universités, le
plan quinquennal d'investissements des universités pour la
période 1981-1986 prévoit accorder la priorité au maintien
en bon état des équipements actuels. Rappelons que plusieurs
projets immobiliers sont en voie de réalisation; je pense ici à
l'agrandissement des campus de l'Université du Québec à
Rimouski, à Trois-Rivières et à Chicoutimi, de même
qu'à la construction devant desservir la faculté de
médecine dentaire de l'Université Laval. Le plan prévoit
peu de nouveaux projets de construction, le réseau étant
globalement assez bien pourvu d'équipements et de locaux. Il faut aussi
noter que les projets à réaliser dans la région de
Montréal devront s'inscrire dans le cadre d'une perspective de
développement de l'enseignement supérieur que le ministère
s'apprête à proposer aux établissements
concernés.
Un dernier mot sur le fonds FCAC. Enfin, je dois souligner une
importante mesure prise par le gouvernement pour améliorer le
financement de la recherche scientifique. Je veux parler de la transformation
du programme FCAC en corporation autonome, une mesure qui donne suite à
une décision contenue dans l'énoncé d'orientation et le
plan d'action pour la mise en oeuvre d'une politique québécoise
de la recherche scientifique. Les montants des crédits de recherche mis
à la disposition du fonds FCAC pour l'aide et le soutien à la
recherche pour l'année 1981-1982 sont composés des 13 200 000 $
affectés au programme FCAC en 1980-1981 et de 2 300 000 $ de
crédits nouveaux, soit une augmentation de 17%. Au cours de ces deux
années, les crédits directement affectés à la
recherche auront donc augmenté de 19% par année, ce qui traduit
l'importance que le gouvernement attache à la recherche universitaire
dans notre développement collectif.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: La situation financière dans les
universités, si on se fie aux intervenants de ce milieu, est
extrêmement pénible. Je ne voudrais pas dire que le système
universitaire est obligé de porter plus que sa juste part du fardeau
mais, avec la façon dont l'ajustement se fait en l'occurrence, il y a au
moins trois, quatre points majeurs à souligner. D'abord, les coupures en
question sont arrivées très tard dans le processus de
planification universitaire et représentent un virage dramatique dans le
"momentum" et toutes les attentes qu'avaient les administrateurs universitaires
avec le système. Donc, il y a un problème dans la manière
dont les coupures ont été apportées. Deuxièmement,
il y a une conviction, de la part du ministre, que tout ce qu'on attendait du
système universitaire reste encore très possible dans la
situation actuelle, surtout quant à l'accessibilité à la
démocratisation. Il y a une espèce de sentiment dans le monde
universitaire que le ministre essaie de faire la pluie et le beau temps et que,
par contre, la situation financière est allée beaucoup moins loin
que cela.
Étant donné que le réseau universitaire est le seul
des secteurs d'enseignement québécois qui attend une hausse de
clientèle, étant donné l'importance que nous donnons tous
à l'écart entre le taux de fréquentation des
universités entre les Québécois francophones et nos
concurrents à l'extérieur du Québec, comment le ministre
justifie-t-il une augmentation de 6,7% dans le financement des
universités, soit nettement au-dessous des augmentations pour certains
autres secteurs dans l'éducation?
M. Laurin: M. le Président, il faut situer cette phrase du
député de Westmount dans son contexte. Et le contexte, c'est que
le Québec a fait un effort financier considérable au cours des
quinze dernières années pour le développement de son
réseau universitaire. Il l'a fait parce qu'il y avait un rattrapage
sérieux à effectuer, particulièrement dans l'enseignement
universitaire de certaines disciplines. Je pense par exemple aux disciplines
qui ont trait au développement technologique ou au développement
économique du Québec et aussi à certains champs de la
science fondamentale qui sont générateurs, peu de temps
après, de développements nouveaux dans le domaine technologique
et économique.
Le Québec a fait un effort tellement considérable que
même jusqu'à l'année
dernière, le pourcentage des fonds publics que nous y consacrions
était encore, et de loin, supérieur à celui de l'Ontario
dont pourtant la richesse collective dépasse de 16% celle du
Québec. Et malgré cette infériorité sur le plan de
la productivité nationale, le Québec consacrait 1,21% de plus que
l'Ontario, 1,21% de sa richesse collective à l'enseignement
universitaire, ce qui est 45% de plus que ce que l'Ontario y consacrait.
Encore l'an dernier, les montants que le Québec dépensait
par étudiant étaient de loin supérieurs à ceux que
consacrait l'Ontario. Par exemple, pour les 18-29 ans, catégorie
d'âge dans laquelle se retrouvent la plupart des étudiants
universitaires, cet effort équivalait à une allocation de 470 $
par personne au Québec, contre 410 $ en Ontario.
Je pourrais continuer indéfiniment pour montrer que cet effort
financier du Québec a permis d'élargir considérablement
l'accès aux études universitaires, aux citoyens du
Québec.
C'est là le résultat d'une étude récente,
que je pourrai communiquer au député ainsi qu'aux membres de
l'Opposition, qui a été effectuée par M. Michel Falardeau
de nos services. Après avoir lu ce document, le député de
Westmount n'osera plus me poser ce genre de question.
Donc, il faut bien situer le ralentissement de croissance pour le
secteur universitaire dans le contexte de l'effort considérable, massif,
que le Québec fait depuis plusieurs années, malgré une
richesse collective encore une fois inférieure à celle de
l'Ontario, au financement de son enseignement universitaire.
Cela dit, il est évident que les compressions auxquelles nous
avons dû nous résigner cette année constituent un
ralentissement dans cet effort que nous avions poursuivi
systématiquement et intensément depuis quinze ans. Et encore une
fois, je le déplore. J'aurais souhaité que nos ressources nous
permettent de continuer dans le même sens parce que l'effort de
rattrapage n'est pas terminé et l'effort de développement, non
plus, n'est pas terminé. Nous avons développé, dans
chacune des régions du Québec, une université dont la
croissance commence à répondre de plus en plus aux besoins et de
ces régions et de la collectivité québécoise. Je
pense que, si chacune de nos universités connaît des
problèmes financiers ou des problèmes de croissance, notre
réseau universitaire en tant que tel est maintenant bien pourvu, on peut
même parler d'un réseau riche. Je pense que ce réseau
universitaire nous met dans une situation comparable à celle des autres
provinces et celle de plusieurs autres États du monde.
Ceci n'est pas pour dire que je pense que le moment d'y injecter des
sommes additionnelles est dépassé; je pense que cet effort, il
aurait fallu le continuer encore quelques années, ne serait-ce que pour
la raison qu'a mentionnée le député de Westmount, c'est
que la clientèle continue de croître et elle va continuer de
croître, d'autant plus qu'au Québec, maintenant, le goût des
études universitaires s'est profondément développé,
a pris une coloration particulière. Par exemple, les études
à temps partiel par comparaison avec les études à temps
plein, le goût pour les études courtes, c'est-à-dire qui
permettent d'obtenir un certificat ou un diplôme de premier cycle
après quelque temps et qui permettent soit un développement
personnel intéressant ou l'entrée dans un marché du
travail où la rémunération est meilleure que celle dont
l'étudiant jouissait auparavant.
Il est évident que dans ces circonstances les compressions de
cette année constituent un phénomène que nous
déplorons autant que les universités, qui, depuis quelque temps,
se plaignent que leur budget ne correspond pas à leurs besoins. Et je
les comprends. Mais est-ce à dire cependant que, forcé d'accepter
en tant que société ces contraintes, ces compressions, ce
ralentissement, il faille renoncer au développement? Je ne le crois pas
car, après avoir accordé beaucoup d'efforts et d'argent au
développement des clientèles aussi bien qu'au
développement des investissements, il y a peut-être lieu
maintenant - et nous y sommes forcés - de faire porter l'effort sur une
amélioration de la rentabilité, de la productivité, de la
fécondité afin que nous puissions continuer notre
développement, notre marche en avant avec des ressources qui seraient,
bien que moindres, aussi efficaces parce que dépensées d'une
façon plus judicieuse et plus rationnelle.
Par exemple, il est peut-être possible d'envisager à
nouveau, pour les résoudre autrement, certains problèmes comme
celui de l'arrimage de l'éducation et de la recherche. Est-il possible,
par exemple, de demander à certains professeurs de consacrer un nombre
d'heures beaucoup plus grand à l'éducation et moins d'heures
à la recherche quitte à ce que d'autres professeurs, mieux
doués pour la recherche, plus capables de l'effectuer, y consacrent,
eux, davantage de temps? N'est-il pas temps de reprendre l'examen de ce
problème qu'est le maximum d'élèves par classe? Je
comprends qu'au niveau universitaire il s'impose parfois d'organiser un
enseignement sous forme de séminaire, un enseignement plus
individualisé, surtout quand nous en arrivons à la formation
pratique, mais l'enseignement universitaire comporte aussi sa dimension
théorique et l'évolution des dernières années
à l'université a tendu à diminuer de plus en plus le
nombre d'élèves par classe. En temps
de contraintes budgétaires, serait-il possible d'envisager des
solutions différentes où, par exemple, un enseignement de nature
plus didactique, plus théorique, serait dispensé à des
groupes plus nombreux?
Ne serait-il pas temps aussi de repenser le problème des charges
d'enseignement? Par exemple, ne serait-il pas plus rentable d'augmenter le
nombre de cours ou d'heures d'enseignement que chaque professeur doit dispenser
alors qu'on sait maintenant que certains professeurs d'université,
à même la charge qu'ils doivent donner, répètent le
même cours pour des groupes différents d'étudiants? (23
heures)
Quand je parlais au mois de février de rentabilité, de
productivité, de fécondité, c'est à de tels
problèmes que je faisais allusion et à un certain nombre d'autres
également. Je pense que nous sommes forcés d'y revenir et
peut-être d'y trouver des solutions mieux adaptées et plus
rentables que celles que nous pratiquons à l'heure actuelle. Je ne veux
mentionner ces exemples que comme illustration d'une orientation plus
générale. Je pense à examiner de plus près nos
méthodes de gestion, nos méthodes de financement. Il sera
possible de découvrir certaines aires où des progrès
peuvent s'avérer possibles, pour ne pas dire souhaitables et même
indispensables, tellement il est vrai que l'augmentation de la
productivité ne passe pas toujours ni nécessairement par une
injection plus considérable de capital. L'abondance des ressources n'est
pas le corollaire obligé du succès ou du progrès. Je pense
qu'il est peut-être temps de se remettre en tête cette
vérité que je n'ai pas inventée, parce qu'elle est
éternelle, mais à laquelle il importerait de revenir maintenant
que nous y sommes plus ou moins forcés.
M. French: Je pense, M. le Président, que personne ne
nierait les propos du ministre au sujet de la productivité. Je pense
qu'il a sorti quelques idées intéressantes. Elles vaudraient la
peine d'être discutées. Il demeure que cela reste quand même
central pour cette année qui s'en vient, et pour l'immédiat,
c'est que justement l'effort de rattrapage, justement toutes les politiques
jusqu'à ce point, avaient créé une espèce de
"momentum", avaient créé toute une série d'attentes chez
les étudiants, chez les professeurs, chez les administrateurs qui
viennent maintenant de voir se briser par ce qui est effectivement je
répète un virage dramatique au point de vue du financement. Si on
voulait vraiment favoriser un ajustement dans le sens que le ministre vient de
révéler, il ne faudrait évidemment pas arriver à la
dernière minute avec un serrage de ceinture dramatique mais plutôt
de prévenir sur un plan de quelques années, ce que le
gouvernement aurait dû faire sur un plan beaucoup plus étendu que
simplement celui des universités, d'abord, mais aussi arriver avec un
plan-cadre qui s'étale sur un certain nombre d'années, pour
permettre à tous les intervenants, à tous les participants d'un
réseau d'y participer en conséquence.
Quelles sont les conséquences de l'autre démarche qu'on a
vue? C'est l'élimination des programmes, c'est la fermeture de postes de
professeurs, c'est le congédiement de personnel enseignant ainsi que de
soutien, c'est le prolongement, c'est la rémission des cours
obligatoires parfois dans des régimes pédagogiques qui
entraîne le prolongement des cours des étudiants sur d'autres
années, c'est-à-dire avec tous les coûts sociaux et
financiers que cela peut entraîner, c'est le contingentement des
admissions, c'est toute une gamme de conséquences qui créent dans
les universités une atmosphère qui ne prend pas du tout en
considération les changements fondamentaux qu'a proposés le
ministre. C'est une atmosphère de crise qui se prête très
mal aux changements très importants, je l'avoue, qu'a soulevés le
ministre. Mais comment veut-il, dans une atmosphère de crise qui
implique des déficits comme les suivants, qu'on fasse ces changements?
Les déficits de l'Université du Québec à
Montréal vont monter à 12 000 000 $, 13 000 000 $ d'après
les autorités universitaires; à Concordia, le même montant;
à Sherbrooke, à peu près 8 000 000 $ ou 9 000 000 $;
à McGill, 8 000 000 $ ou 15 000 000 $, selon qu'on décide de
liquider sa dotation; à l'Université de Montréal, c'est de
10 000 000 S; à Laval, c'est 6 000 000 $, à
Trois-Rivières, c'est 8 000 000 $, à Chicoutimi, 2 700 000 $.
Dans une atmosphère comme cela, c'est très difficile de faire les
ajustements fondamentaux qu'attend le ministre.
M. Laurin: Je pense que le député de Westmount, M.
le Président, fait de l'alarmisme et du catastrophisme. Je ne crois pas
qu'avec un budget de 800 000 000 $, les universités du Québec
vont se trouver dans une situation aussi dangereuse ou périlleuse que
veut bien nous le dire le député de Westmount. Je le dis d'autant
plus volontiers que la sonnette d'alarme a été sonnée
beaucoup plus tôt en Ontario qu'au Québec. En fait, elle y a
sonné il y trois ans et le gouvernement de l'Ontario a effectué
des compressions plus radicales encore que celles que nous faisons cette
année au Québec, compressions qui ont provoqué les
mêmes réactions angoissées et alarmistes que celles que
nous entendons actuellement au Québec. Pourtant, après trois ans,
l'état des universités ontariennes n'est pas à plaindre au
point tel que l'on parle de disparition de programmes, que l'on parle de baisse
de la qualité, que l'on parle d'inadéquation entre
l'université ontarienne et les besoins de la
société ontarienne. Je rappelle au député de
Westmount que ces coupures non seulement ont été encore plus
draconniennes que celles du Québec, mais qu'elles ont été
annoncées avec encore plus de rapidité que nous ne l'avons fait
au Québec, car c'est dès février de cette année que
nous avons rencontré les universités et que nous leur avons
transmis l'annonce de ce qui allait venir, ainsi que les règles
budgétaires qu'il faudrait adopter en conséquence.
Évidemment, comme je l'ai dit à l'occasion de la
discussion des crédits des autres secteurs, il est difficile, pour une
institution qui a appris à croître, à se développer
en période d'abondance, d'accepter quelque réduction ou quelque
changement que ce soit. Cela est particulièrement vrai des
universités qui, au Québec, ont toujours joui d'un très
grand degré d'autonomie et qui, bien sûr, acceptaient volontiers
les centaines et les centaines de millions de dollars que la
collectivité déboursait, mais qui, une fois qu'elles les avaient
reçus, exigeaient la liberté complète pour l'instauration
de leurs programmes, pour la multiplication de leurs programmes, pour leur
gestion interne.
Je pense que, tout en respectant l'autonomie des universités, il
importe que la société, la collectivité qui les finance
quand même fasse connaître également ses contraintes, ses
difficultés, ses problèmes et demande à
l'université, comme aux autres secteurs, d'en prendre sa part et d'en
tirer des conséquences en ce qui concerne, par exemple,
l'amélioration des secteurs, volets ou programmes dont je parlais tout
à l'heure. Il y a un effort de révision, d'approfondissement, de
rationalisation et de rentabilisation qui s'impose à l'université
comme à tous les autres secteurs. Même si les universités
nous annoncent un déficit à l'heure actuelle, il n'est pas dit
que la seule façon de régler ce déficit qu'elles nous
annoncent soit l'injection de nouveaux crédits car, encore une fois,
l'abondance n'est pas le corollaire obligé du succès. Il est
peut-être possible de réduire ces déficits autrement que
par l'injection de nouveaux fonds, peut-être par le non-remplacement de
certains personnels, peut-être par des économies pratiquées
dans des secteurs administratifs où le contact avec l'étudiant
est moins direct, peut-être en réaménageant les
tâches au sein des départements ou des écoles.
De toute façon, je pense qu'il importe, qu'il est souhaitable de
faire l'exercice. Il est possible qu'une fois l'exercice effectué, on se
rende compte que le déficit qu'on nous annonce s'avérera moins
lourd que prévu et moins contraignant pour le développement
futur.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: Je trouve à peine réconfortant le fait
que l'Ontario a déjà fait pire. Je dois avouer que j'ai fait le
choix entre l'Université de Toronto et McGill. Justement, j'ai choisi
McGill parce qu'il y avait deux professeurs dans un bureau à
l'Université de Toronto et cela ne me tentait pas. Je ne trouve pas que
c'est un exemple tellement... Personnellement, je dois avouer que sur le plan
personnel, cela a une signification à l'inverse de ce que voudrait le
ministre, mais en tout cas, il me semble quand même...
M. Laurin: Une université d'abondance.
M. French: Justement, je l'ai trouvé dans un contexte qui
était justement encourageant et j'avoue tout de suite que le "momentum"
derrière le système m'a impressionné et ça continue
de m'impressionner, le potentiel est là. Ce que je reproche au
gouvernement, c'est de ne pas avoir vu, il y a trois ans, il y a deux ans,
qu'inévitablement ce jour arriverait, de ne pas avoir commencé,
avec un peu plus de fermeté et avec un peu plus de
spécificité, à planifier, à prévoir ce qui
allait arriver pour permettre non seulement au réseau universitaire,
mais à beaucoup d'autres réseaux de s'ajuster en
conséquence.
Quant au déficit - je pense que c'est une question assez
importante - est-ce que le ministre croit vraiment que le non-remplacement des
professeurs, les économies dans le réaménagement des
tâches toucheront un déficit de cet ordre? Est-ce que ça va
vraiment l'affecter ou est-ce qu'on n'est pas témoin de l'amorce d'un
déficit chronique, ce qui devient une autre partie de la dette publique
québécoise? Combien de temps peut-on vivre avec cette pratique
dans le réseau universitaire?
M. Laurin: D'abord, je voudrais dire que cet effort de
rationalisation, même s'il s'est accentué cette année, a
quand même commencé il y a déjà quelques
années. Nous sentons venir cette période de ralentissement de la
croissance depuis un certain nombre d'années et ceci a fait l'objet de
consultations, d'échanges entre les universités et le
ministère de l'Éducation. Déjà, au cours des deux
ou trois dernières années, la croissance des budgets
universitaires ne se poursuivait pas tout à fait au même rythme
que celle, par exemple, de 1974 ou de 1972 ou de 1973. Donc, il est faux de
dire que nous n'avons pas vu venir le phénomène. Cependant, il
faut admettre que cette année, il y a eu une accélération
de tous les indices négatifs. Par exemple, je ne pense pas que le
député de Westmount aurait pu prévoir, il y a un an, que
les taux d'intérêt
connaîtraient cette hausse faramineuse qu'ils ont connue au cours
des derniers mois. L'an dernier, nous ne parlions pas de taux
d'intérêt de 20%.
Le député de Westmount aurait pu difficilement
prévoir aussi que le taux d'inflation augmente d'une façon aussi
rapide. Il y a donc des facteurs nouveaux qui sont apparus, qui ont
augmenté la difficulté. Je pense aussi que cette période
de gestion des années qui viennent a été abordée
avec les universités il y a déjà un certain nombre
d'années; même dans la rencontre qu'on a eue avec elles au mois de
février, nous leur avons dit qu'en même temps que nous leur
demanderions de justifier leur déficit, elles devraient également
nous présenter un plan de résorption de leur déficit.
Si le passé est garant de l'avenir, nous pouvons dire que ces
mesures de contrôle ou de contrainte que l'administration gouvernementale
a déjà imposées à certaines institutions du secteur
public, qu'il s'agisse des collèges ou qu'il s'agisse des
hôpitaux, ont déjà, dans le passé, apporté
des résultats inespérés, c'est-à-dire bien plus
positifs que ce que nous avions escompté. Des hôpitaux nous
disaient qu'ils ne pouvaient absolument pas résorber leur
déficit, mais ils l'ont cependant fait, et avec des résultats qui
ont maintenu la qualité des services aux malades. Si certaines
institutions l'ont fait dans le passé, que ce soit dans le secteur
scolaire ou dans le secteur hospitalier, pourquoi serait-il impossible aux
universités d'atteindre ce même résultat?
Encore une fois, nous faisons tous face ensemble à une situation
difficile qui doit mobiliser le meilleur de nos énergies et de nos
qualités d'imagination, de créativité. C'est justement en
période difficile qu'il importe de recourir, de puiser dans ce fond de
la nature humaine, pour trouver des solutions aux problèmes qui nous
confrontent. C'est l'invitation que nous avons lancée aux
universités, comme à tous les autres secteurs du système
scolaire. (23 h 15)
Le Président (M. Gagnon): Avant de laisser la parole au
député de Marguerite-Bourgeoys qui me l'a demandée, je
voudrais vous faire remarquer qu'il nous reste à peine quinze minutes et
nous avons encore six programmes à adopter, quinze minutes, si on
exclut. les trente minutes qui ont été réservées,
après entente entre les deux leaders, pour entendre les organismes de
langue française.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Là-dessus, M. le Président, je voulais
justement soulever cela aussi. Il est presgue impossible d'étudier des
crédits de cette importance, autant en chiffres qu'en usage, des fonds
qui sont consacrés par l'État en si peu de temps. Le ministre de
l'Éducation, cette année, est responsable de l'application de la
Charte de la langue française. L'an dernier, on n'avait pas ce
programme, et on avait plusieurs heures de plus. On me dit, de mémoire,
qu'on avait 17 ou 18 heures pour l'étude des crédits de
l'Éducation. On est rendu à plus d'une dizaine d'heures. Est-ce
que le ministre considérerait - je comprends que c'est toujours
difficile, les gens sont ici, ils sont venus de Montréal, en ce qui
concerne l'Office de la langue française, pour le plus grand nombre - la
possibilité de demander aux leaders de nous reconvoquer d'ici jeudi? On
a un peu de temps libre pour les entendre. Je ne veux pas escamoter la question
de la Charte de la langue française, c'est extrêmement important,
nous attachons beaucoup d'importance à cela. On va arriver à 23 h
50 et on va commencer ce programme. Les questions universitaires sont
importantes aussi, on l'a vu par les réponses du ministre aux questions
du député de Westmount; on ne peut pas escamoter cela. Si on
pouvait terminer les deux crédits - il y a la recherche aussi, c'est
aussi très important - et inviter les gens à revenir
étudier avec nous les crédits de l'Office de la langue
française demain ou après-demain ou même jeudi.
Le Président (M. Gagnon): M. le député
de...
M. Paquette: En tant que responsable du côté
ministériel du déroulement de nos travaux en commission,
j'aimerais dire au député de Marquerite-Bourgeoys que, d'une
part, les heures qui nous sont allouées ont été
établies, comme il le sait très bien, par entente entre les deux
leaders. Nous avons eu les heures qui ont été établies par
consentement mutuel, des deux côtés de la Chambre. D'autre part,
nous sommes actuellement à l'étude du programme concernant les
universités. Si on regarde ce qu'il resterait à parcourir, on a
touché la plupart des sujets, notamment le programme concernant les
prêts et bourses; concernant l'éducation des adultes, on a fait la
discussion un peu plus tôt; concernant également l'enseignement
privé, je reconnais que le débat s'est fait plutôt au
niveau de la loi 11, mais il y a la commission des finances qui se
réunit demain, qui va encore traiter à fond de cette question, de
sorte qu'on a couvert à peu près tous les sujets, j'ai
l'impression, à moins que...
M. Lalonde: Je n'ai pas l'enseignement privé dans mes
prévisions, parce qu'il y a seulement une question qu'on va aborder,
c'est la question des calculs, demain soir, à l'étude de la loi
11.
M. Paquette: Pour terminer, j'ai
l'impression qu'on pourrait peut-être poursuivre avec les
questions sur l'enseignement universitaire pour encore quinze minutes, et
passer ensuite aux crédits de l'Office de la langue française. Il
ne devrait pas rester grand-chose après cela normalement.
M. Lalonde: Vous croyez que c'est suffisant, une demi-heure, pour
parler du progrès de la langue française?
M. Paquette: C'est la même chose pour toutes les
commissions. On a une fin de session extrêmement serrée. La
commission de l'éducation n'est pas dans une situation
particulière. Cela va être très difficile, même
impossible d'obtenir du leader du temps supplémentaire d'ici la fin de
la session.
M. Lalonde: Je l'offre au gouvernement comme porte-parole de
l'Opposition en matière d'éducation et de langue. Je suis
même convaincu que je pourrais obtenir un consentement pour avoir trois
commissions parlementaires pendant que la Chambre siège pour une heure,
une heure et demie ou deux heures pour étudier la question de la langue,
si c'est possible, si c'est nécessaire d'obtenir ce consentement, parce
qu'il me semble que c'est faire injure à cette question et aux gens qui
sont venus que de passer cela à la sauvette a la fin d'une
soirée.
M. Paquette: M. le Président, je pense qu'on doit donner
une réponse un peu finale sur cette question. Je pense qu'on a fait le
tour d'à peu près tous les programmes. Je reconnais avec le
député de Marguerite-Bourgeoys...
M. Lalonde: À moins de prolonger.
M. Paquette: ... que c'est relativement serré, comme dans
toutes les autres commissions, mais enfin ce sont les ententes qui ont
été établies entre les leaders des deux partis et nous
souhaiterions de ce côté-ci que l'étude des crédits
se termine ce soir comme prévu, qu'on passe encore quinze minutes sur
les crédits de l'enseignement universitaire et de la recherche et
ensuite qu'on passe à l'Office de la langue française comme
prévu.
M. Lalonde: En ce qui me concerne, puisque le gouvernement
n'offre pas plus de collaboration que cela...
M. Paquette: L'Opposition a d'autres moyens pour faire valoir
ses...
M. Lalonde: M. le Président, non, on a une occasion par
année d'avoir le ministre devant nous pour répondre à des
questions.
Vous savez très bien qu'on a offert notre collaboration, qu'on
n'a pas fait de difficultés, mais il reste qu'il y a des questions
très fondamentales là-dedans et on doit donner l'occasion
à tous les députés, ministériels comme de
l'Opposition, de les traiter. On va continuer l'enseignement universitaire, M.
le Président. On va essayer de faire le plus rapidement possible. On
prendra le temps qu'il faut, enfin ce qui va nous rester pour la Charte de la
lanque française. Je vais peut-être demander à mes
collègues un consentement pour aller au-delà de minuit.
M. Paquette: On verra à ce moment-là, d'accord.
Le Président (M. Gagnon): La parole est au
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: En ce qui concerne l'enseignement universitaire, M.
le Président, je voulais savoir quand... D'ailleurs je fais un peu
écho aux remarques du député de Westmount qui rappelait...
Je ne sais pas s'il était là lorsque j'avais fait mes remarques
préliminaires au début de l'étude des crédits, mais
j'avais reproché au gouvernement de faire du "management by crisis" et
d'avoir simplement fait des coupures inspirées plutôt par la
panique que la planification. La décroissance, on la connaît, on
la voit venir depuis cinq ans, surtout depuis trois ans. Un gouvernement
responsable aurait dû l'indiquer, surtout à ceux qui
dépendent directement et presque entièrement du gouvernement,
comme tout le réseau d'enseignement. Il aurait dû établir
une politique, planifier la décroissance, apprendre à la
gérer plutôt qu'à demander aux autres de la gérer
pour le gouvernement. Mais reste que tout cela ne peut se faire sans un
énoncé de politique. On a un plan d'investissement de cinq ans.
L'éducation supérieure comme l'éducation primaire,
secondaire et collégiale, ce n'est pas seulement une affaire de mortier.
Il me semble que le minimum qu'on doit exiger du gouvernement, c'est de nous
dire, trois ans à l'avance, où on s'en va, surtout quand on est
dans une période où on doit faire des virages et où on
impose, on exige des virages aussi importants de la part des réseaux.
Pourquoi le ministère de l'Éducation n'a-t-il pas encore
réagi aux recommandations de la commission d'étude sur les
universités, de façon formelle? Est-ce que ce sommet ou enfin
peut-être pas tout à fait ce sommet, mais ce colloque
annoncé pour l'automne se veut la consultation qui va faire suite au
rapport de la commission d'étude sur les universités?
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Laurin: Dans nos rencontres avec les universités au
cours des dernières années, nous avons annoncé aux
universités un ralentissement dans la croissance des dépenses. On
ne peut pas dire que les universités ont été prises par
surprise. Non seulement leur avons-nous annoncé la fin de la croissance
sinon illimitée, du moins rapidement accélérée des
budgets, mais nous avons déjà pris au cours des dernières
années des mesures qui permettaient ce ralentissement de la
croissance.
D'autre part, il faut aussi réaliser que, d'une façon
quasi systématique dans le passé, les déficits
annoncés, anticipés par les universités ont toujours
été, et parfois d'assez loin, supérieurs aux
déficits réels constatés en fin d'exercice. Cela fait
peut-être partie de la marge de négociation que se donne
normalement tout corps constitué.
Troisièmement, je voudrais dire au député de
Marguerite-Bourgeoys que le gouvernement a commencé à
réagir au rapport de la commission Angers. Dans l'exposé que j'ai
eu l'occasion de faire aux universités le 3 février et que je
vais faire distribuer à tous les membres de la commission - long
exposé; le député de Marguerite-Bourgeoys sait que j'aime
m'exprimer longuement - j'ai déjà fait part de la position du
gouvernement sur un bon nombre de sujets qui avaient été
abordés par la commission Angers. D'une façon plus importante, je
pense que ce texte annonçait les couleurs, les orientations majeures du
ministère et qu'il en découlera, au chapitre des explications
à venir, des mesures que les universités peuvent d'ores et
déjà anticiper et qui seront précisées lors des
ateliers, lors des échanges que nous aurons avec elles à
l'automne.
Donc, je refuse la prétention du député de
Marguerite-Bourgeoys que le ministère n'a pas planifié, non pas
la décroissance, comme il l'a dit, car c'est faux, mais un
ralentissement de la croissance, puisgu'une augmentation du budget de 6,9%, si
j'en crois le sens commun, constitue quand même une augmentation du
budget par rapport à celui de l'an dernier.
Je ne suis donc pas d'accord avec le député de
Marguerite-Bourgeoys quand il parle de décroissance et je ne suis pas
d'accord non plus avec le député de Marguerite-Bourgeoys quand il
dit que le gouvernement a failli à ses responsabilités en ne
planifiant pas pour des années à venir.
Je rappelle aussi ce que j'ai déjà signalé au
député de Westmount, que si les efforts que nous allons faire
ensemble portent fruit, le développement des universités sera de
loin supérieur à 6,9%, puisqu'une amélioration des
méthodes de gestion pourra rentabiliser cet accroissement de
façon qu'il porte davantage fruit que les accroissements
antérieurs.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Marquerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je ne sais pas si le ministre
prétend que son discours du 3 février se veut un
énoncé de politique. Ce qu'il a lui-même...
M. Laurin: J'ai dit qu'il donnait déjà les grandes
orientations de notre politique; il reste à venir les explicitations.
Mais déjà c'est important, quand on fait un énoncé
de politique, d'annoncer nos couleurs, de donner nos orientations et de
spécifier à l'avance les projets, les points sur lesquels la
discussion devra porter.
M. Lalonde: Alors, quand cette politique sera-t-elle
énoncée de façon formelle, complète, cette suite de
ce que vous appelez "vers une politique", sur laquelle vous faisiez le
discours?
M. Laurin: À la suite des échanges que nous aurons
avec les universités à l'automne et portant sur tous les volets
qui sont mentionnés dans ce texte, et ils sont nombreux.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre favorise la création
d'une loi des universités? Est-ce qu'il entend adopter une loi des
universités, tel que recommandé par le rapport?
M. Laurin: Pour le moment, ma conviction n'est pas faite
là-dessus. Donc, je ne serais sûrement pas prêt à
proposer dans l'immédiat une loi des universités. Mais c'est
là un des sujets qui pourraient être discutés entre nous
à l'automne.
M. Lalonde: Le ministre n'a pas de... M. Laurin: Non.
M. Lalonde: ... d'idée précise sur cette question,
à savoir s'il favoriserait...
M. Laurin: Aussi longtemps que nous pourrons éviter une
loi des universités, nous le ferons.
M. Lalonde: Et quand allez-vous arrêter de pouvoir
l'éviter?
M. Laurin: À la suite de nos délibérations,
de nos rencontres à l'automne, j'espère acquérir la
conviction que cette loi n'est pas nécessaire.
M. Lalonde: Vous semblez la faire planer comme une menace
au-dessus du monde universitaire.
M. Laurin: Au contraire. J'ai dit que la
pente de mon esprit actuellement ne va pas dans ce sens-là,
puisque la preuve définitive ne m'a pas été
apportée quant à sa nécessité.
M. Lalonde: Je vois l'influence de l'ancien ministre de
l'Éducation dans les remarques du présent ministre. Il pourra
toujours invoquer le Conseil des universités.
M. Laurin: II y a une certaine continuité..
M. Lalonde: Dans la longueur des discours aussi.
M. Laurin: ... entre l'ex-ministre et moi à cet
égard.
Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse auprès des
membres de cette commission ... Si, à ce moment-ci, j'ai le consentement
pour continuer après minuit, compte tenu qu'il y a eu une entente pour
entendre le groupe et qu'on lui a alloué 30 minutes...
M. Lalonde: Est-ce qu'on entend des gens?
Le Président (M. Gagnon): On m'a dit...
M. Laurin: C'est-à-dire que ceux qui doivent m'assister
pour la défense des crédits affectés aux organismes...
M. Lalonde: Comme on entend avec grand plaisir vos
sous-ministres, oui, sûrement, on pourrait les entendre n'importe
quand.
M. Paquette: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
demander à l'Opposition de combien de temps elle proposerait de
prolonger nos travaux passé minuit?
M. Lalonde: C'est un consentement qui est en suspens, à ce
moment-là, si vous êtes fatigués, vous dites: Le
consentement, je l'enlève. C'est une espèce de guillotine. On est
habitué, vous en avez voté plusieurs contre l'Opposition. Je ne
m'attends pas à rester ici toute la nuit, on peut dépasser...
M. Paquette: Quinze ou vingt minutes?
M. Lalonde: C'est un ordre de grandeur qui me paraît
raisonnable.
M. Paquette: D'accord, très bien.
Le Président (M. Gagnon): II y a consentement de la
commission pour poursuivre après minuit. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous aviez encore la parole.
M. Lalonde: Oui.
Le Président (M. Gagnon): À ce moment-là,
vous pouvez passez la parole à...
M. Brouillet: Je serai très bref. Je veux simplement faire
allusion à l'effet de choc qu'a pu provoquer dans nos institutions
universitaires l'annonce des coupures. On laisse entendre du côté
de l'Opposition que ce fut quelque chose qui ne fut annoncé d'aucune
façon, quelque chose de subit, à l'improviste, qui a surpris les
gens comme ça, sans avertissement. J'ai vécu finalement les trois
dernières années dans un milieu universitaire et, dans mon
université, on a planifié adéquatement depuis au moins
trois ans. Je ne sais pas si les directives venaient du ministère, je le
suppose, mais chaque unité pédagogique administrative devait, il
y a deux ans, préparer son plan triennal de développement selon
trois hypothèses: l'hypothèse d'une croissance très minime
d'un certain poucentage, l'hypothèse de croissance zéro et selon
l'hypothèse d'une décroissance de 3% à peu près. On
devait déterminer nos priorités en fonction de chacune de ces
hypothèses et prévoir, dans le cas d'une décroissance de
3% quels étaient les programmes qu'on devrait laisser tomber en premier
lieu. Cela s'est fait depuis 1979 et, l'an dernier, ces plans de
développement triennaux ont été remis, comprenant
l'hypothèse d'une décroissance.
Je pense qu'il faudrait peut-être nuancer. Il est évident
que chacun espérait que ne se produise jamais la décroissance que
l'on planifiait et peut-être qu'on ne la prévoyait pas non plus
même si on la planifiait. Cela peut expliquer le choc quand même
d'une annonce d'une décroissance réelle, mais il ne faut pas dire
que cela n'a pas été du tout pressenti, prévu et
planifié. C'était dans l'air depuis quelques années.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: Je pense avoir compris dans le préambule du
ministre qu'il entend changer des formules d'une façon qui changerait la
situation actuelle, soit que les universités en croissance de
clientèle se trouvent défavorisées par l'application de
formules. Est-ce que ces changements seraient faits pour que le contingentement
des cours à l'UQAM commençant probablement l'année
prochaine - sûrement l'année prochaine - dans les conditions
actuelles, d'une façon qui permettrait de ne pas contingenter les
admissions à l'Université du Québec à
Montréal?
M. Laurin: C'est là la conclusion qu'a annoncée
l'UQAM ou dont l'UQAM a menacé le gouvernement. Ceci ne veut pas
dire que c'est la situation qui prévaudra en
réalité, car l'UQAM fait partie du réseau de
l'Université du Québec et déjà, à
l'intérieur de l'enveloppe budgétaire consentie à
l'Université du Québec en général, il est possible
d'effectuer des transferts de fonds, des virements de fonds, des
réaménagements de fonds.
Il y a aussi à l'intérieur de l'enveloppe des
universités des fonds spéciaux, par exemple pour le
développement pédagogique. Il y a des règles de
financement des clientèles, à partir du moment où la
clientèle dépasse un certain rythme d'accroissement.
Je pense qu'il y a donc, à l'intérieur de l'enveloppe
générale des universités, des possibilités de
réaménagement qui, après discussion avec les
autorités de l'Université du Québec, autant qu'avec les
représentants de l'UQAM, permettraient peut-être des ajustements
qui, une fois effectués, nous permettraient d'éviter des
solutions aussi draconiennes que celles dont parlait le député de
Westmount ou dont parle l'Université du Québec à
Montréal.
M. French: Le ministre semble être en mesure de garantir
que tous les étudiants qui ont compté sur la politique actuelle
du gouvernement, à savoir que si on a son DEC, on peut avoir
accès à la formation universitaire, pourront continuer de le
faire. Est-ce qu'il peut nous le garantir?
M. Laurin: Ce que j'ai dit à plusieurs reprises, c'est que
l'objectif d'une plus grande accessibilité des clientèles
étudiantes des cégeps ou des clientèles adultes à
l'université demeure pour nous une priorité importante. Il nous
restera à utiliser les moyens qui demeurent à notre disposition
pour que cet objectif d'accessibilité soit atteint dans toute la mesure
du possible.
M. French: Ma question est celle-ci: Est-ce qu'on avance dans
l'objectif ou si on recule?
M. Laurin: Nous continuons d'avancer vers l'objectif. Comme le
député de Westmount, j'aimerais y atteindre le plus rapidement
possible mais, dans une optique de responsabilité, il faudrait quand
même le faire à l'intérieur des contraintes qui sont celles
de la société où nous vivons actuellement.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, sur le même sujet. Je
partage les mêmes préoccupations que le député de
Westmount en ce qui concerne la possibilité que l'UQAM puisse
contingenter ses clientèles, dans certains programmes du moins, à
partir de l'année prochaine, pour un certain nombre de raisons. Je pense
que l'Université du Québec à Montréal a fait, ces
dernières années, un effort particulier d'ouverture à la
clientèle adulte. C'est probablement l'université où on
retrouve le plus grand équilibre entre la clientèle masculine et
la clientèle féminine; celle où l'on retrouve
également le meilleur équilibre entre les enfants qui sont issus
de milieux ouvriers par rapport à ceux qui sont issus de milieux plus
aisés.
Est-ce que le ministre partage cette opinion qui nous a
été soumise par les responsables de l'UQAM, à savoir que
le principal problème n'est pas tellement les compressions
budgétaires prévues dans le présent budget, ni non plus le
fait que l'UQAM appartienne à un réseau. Cela a été
un problème pendant quelques années, mais cela semble
s'être résorbé; il semble que le réseau de
l'Université du Québec ait fait des efforts pour faire en sorte
que l'UQAM, en tant qu'université montréalaise, ne soit pas
défavorisée par rapport aux autres avec lesquelles elle est en
concurrence dans la région de Montréal. Donc, ce ne serait pas
tellement ces deux facteurs, ni les coupures, ni l'appartenance de l'UQAM au
réseau, mais plutôt le mode de subvention face à
l'accroissement de clientèle qui donne un per capita moins
élevé en fonction de...
M. Laurin: Non, je ne crois pas, M. le Président, parce
que le mode de financement qui a été prévu pour les
universités où les clientèles croissent très
rapidement favorise, d'une certaine façon, ces universités. Par
exemple, quand l'accroissement de la clientèle dépasse un certain
pourcentage, la subvention versée par le gouvernement reprend son taux
croissant, alors que quand l'augmentation se situe à un niveau assez
inférieur, là, la proportion du budget dans l'enveloppe
décroît. Donc, ce seul point devait favoriser les
universités à forte croissance. C'est d'ailleurs pas seulement le
cas de l'UQAM, c'est le cas d'autres constituantes de l'Université du
Québec.
D'une façon plus importante, cependant, il faudrait
peut-être dire que si le taux d'accroissement à l'UQAM a connu une
telle progression, ce n'est pas uniquement parce que l'Université du
Québec à Montréal est populaire ou qu'elle a des
programmes qui répondent aux attentes des étudiants qui viennent
s'y inscrire mais c'est parce que les autres universités utilisent
souvent leur autonomie, leur liberté totale pour contingenter
l'admission à leurs propres programmes. Par exemple, il y a une certaine
université à Montréal où le taux d'admission
à des programmes de baccalauréat ne se situe actuellement
qu'à 38% alors que le taux d'admission aux programmes de
baccalauréat à l'UQAM était
de 58% l'an dernier. Il y a d'autres universités qui pratiquent
la même politique et qui, en plus, favorisent l'inscription
d'étudiants venant d'autres provinces canadiennes ou d'autres pays,
alors qu'il est très difficile pour un francophone, client
régulier actuel de l'Université du Québec à
Montréal, de s'y inscrire. C'est la raison pour laquelle je disais, le 3
février, qu'une bonne partie de nos problèmes pourrait être
réglée par l'utilisation d'une procédure qui n'a jamais
été adoptée jusqu'ici, c'est-à-dire celle de la
concertation entre les quatre universités montréalaises.
Il s'impose, plus que jamais, d'instituer une table de travail, une
table de concertation entre les universités montréalaises
où tous ces problèmes seront présentés et
discutés avec l'idée de dépasser les égoïsmes,
et les particularismes pour adopter des solutions inspirées par le sens
commun, mais, aussi, par l'intérêt commun et
l'intérêt public. C'est bien l'intention que j'ai annoncée,
le 3 février, de faire en sorte que ces tables de concertation voient le
jour dans les plus brefs délais possible parce que je veux moi aussi que
les solutions soient trouvées. Je ne veux pas que ce soit le
ministère qui les impose, je veux que nous les trouvions tous ensemble
pour le plus grand intérêt de nos populations.
M. Paquette: Une dernière courte question
là-dessus, M. le Président. Est-ce que le ministre partage l'avis
que l'UQAM est dans une situation financière peut-être un peu plus
difficile que d'autres universités? Est-ce que des rencontres ont eu
lieu pour évaluer l'étendue du problème ou est-ce qu'il y
en aura bientôt?
M. Laurin: II y en a déjà eu, M. le
Président et il y en aura d'autres dans un très proche avenir.
Nous avons des pistes, des avenues qui pourraient nous permettre
d'améliorer la situation.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Westmount.
M. French: En parlant des vocations des universités
montréalaises, en particulier, de la concertation entre elles, et en
parlant de l'Université Concordia qui est l'autre petit frère
pauvre du système avec l'UQAM -toutes les deux sont, je le souligne, des
universités importantes sur le plan de la mobilité sociale et le
temps partiel - est-ce que le ministre peut partager sa vision de l'avenir de
l'Université Concordia avec nous? Est-ce qu'il a une quelconque
idée là-dessus?
M. Laurin: Une bonne partie des commentaires que j'ai pu faire
à l'occasion de l'étude de la situation de l'Université du
Québec à Montréal, s'applique également à
l'Université Concordia, puisqu'elle est née à peu
près à la même époque, qu'elle partage avec l'UQAM
un grand nombre de caractéristiques, que ce soit au niveau de la
clientèle ou au niveau des programmes. Donc, mutatis mutandis, je
pourrais appliquer à l'Université Concordia une bonne partie de
mes commentaires antérieurs sans vouloir les répéter.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que les programmes 6 et 9
seront adoptés?
M. Laurin: Adopté.
M. Lalonde: Sur division.
Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division.
J'appelle maintenant le programme 11.
Enseignement privé et administration du
ministère
M. Laurin: Avant de passer au programme 11, M. le
Président, je demanderais encore une fois à mes bons amis d'en
face de pouvoir leur épargner la lecture de l'exposé que j'avais
l'intention de faire sur l'enseignement privé et sur l'administration du
ministère. Je voudrais simplement le déposer pour qu'il puisse
paraître au journal des Débats.
M. Lalonde: Est-ce qu'on a adopté le programme de
l'administration du ministère?
Le Président (M. Gagnon): Non. 1, 2, 8.
M. Lalonde: C'est très important pour examiner comment
fonctionnent les sous-ministres et tout ça...
M. Laurin: Oui. Donc, je demanderais que puisse figurer au
procès-verbal la présentation que je voulais faire de ces
programmes.
Le Président (M. Gagnon): Si j'ai bien compris est-ce que
je dois...
M. Laurin: 8 et 1, 2. C'est ça?
Le Président (M. Gagnon): ... appeler 1, 2...
M. Lalonde: Non, on consent à ce que l'exposé du
ministre soit reproduit au journal des Débats comme s'il avait
été dit. (23 h 45)
M. Laurin: C'est cela, au journal des Débats.
Le Président (M. Gagnon): ...l'enseignement privé
n'était pas adopté formellement non plus.
M. Lalonde: Oui, parce que j'avais une question au programme 8
là-dessus. À 8, je voulais savoir quand va être
publié l'énoncé de politique du gouvernement promis depuis
quatre ans sur l'enseignement privé.
M. Laurin: Dans les plus brefs délais.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 8 est-il
adopté?
M. Lalonde: Un instant! On n'était pas prêt à
un énoncé aussi immédiat, M. le Président, à
autant de contenu. Qu'est-ce que cela veut dire, "dans les plus brefs
délais"? Est-ce que c'est de trois mois en trois mois comme c'est depuis
quatre ans?
M. Laurin: Comme le député le sait, nous avons
déjà beaucoup travaillé à ce programme, mais des
éléments doivent être révisés à la
lumière des contraintes budgétaires que nous connaissons
actuellement. Ceci nous oblige à reprendre non pas totalement, mais
partiellement le travail et j'espère que nous serons en mesure de
pousser nos études de façon que nous puissions arriver à
annoncer cette politique générale le plus tôt possible.
L'enseignement privé. En 1981-1982, le montant total des
subventions allouées aux 195 institutions subventionnées sera de
189 000 000 $, soit: 174 500 000 $ pour les institutions
déclarées d'intérêt public (DIP) et 14 500 000 $
pour les institutions reconnues pour fins de subventions (RFS).
Nouveau mode de calcul des subventions. Les crédits de
l'enseignement privé revêtent cette année un
caractère particulier du fait qu'ils sont établis à partir
de mécanismes différents de ceux qui avaient cours depuis 1968,
année de l'adoption de la Loi sur l'enseignement privé.
Les modifications apportées au mode de financement s'appuient sur
trois principes. D'abord, il s'agissait de faire partager par toutes les
catégories d'institutions, de la façon la plus équitable
possible, le ralentissement prévu de la croissance des subventions.
Ensuite, il a été considéré plus juste de tenir
compte au maximum de la valeur locative de chaque institution, cette
façon de faire étant le seul moyen de distinguer les institutions
les unes par rapport aux autres en fonction de leurs équipements
propres. Enfin, il a été jugé bon de maintenir entre les
catégories d'institutions un écart comparable à celui qui
existait traditionnellement entre les statuts DIP, qui étaient
subventionnés à 80%, et les statuts RFS, suventionnés
à 60%. On pourra trouver dans le document de défense des
crédits tous les détails concernant ce nouveau mode de calcul des
subventions, de même que les montants de base per capita qui en ont
découlé.
Il importe de souligner que, modifiant le mode traditionnel de calcul
des subventions, nous mettons fin à une façon de procéder
qui était unanimement dénoncée par tous les intervenants.
En effet, la référence au coût moyen de l'année
antérieure du secteur public retardait d'un an les ajustements à
opérer dans le secteur privé. De plus, la transposition du
coût moyen du secteur public au secteur privé s'est
avérée depuis longtemps complexe, discutable et carrément
insatisfaisante. Dorénavant, les institutions privées sauront
donc très exactement à quoi s'en tenir quant aux subventions sur
lesquelles elles pourront compter d'année en année. En effet, ces
subventions seront établies comme devant être ajustées en
fonction des "variations du montant des subventions allouées, durant la
même année et pour un même niveau", aux institutions
analogues du secteur public.
La refonte de la loi. Il ne fait aucun doute que le ralentissement
général de l'accroissement des subventions en éducation
aura des effets déterminants sur le secteur privé d'enseignement.
Tout comme les institutions du secteur public, celles du secteur privé
devront, au cours des prochaines années, évoluer dans une
conjoncture économique difficile. Ce qui, en raison de la dynamique
propre du secteur privé, devrait avoir des répercussions
importantes, par exemple, sur la participation pécuniaire des parents
et, par voie de conséquence, sur la courbe générale de
l'évolution des clientèles.
Nous sommes d'avis que cette réalité est de nature
à éclairer la suite de l'étude du dossier de
l'enseignement privé. C'est d'ailleurs dans cette optique que nous
entendons poursuivre, en collaboration de plus en plus étroite avec tous
les intéressés, les études requises en vue d'une
réforme en profondeur de la Loi sur l'enseignement privé. Les
associations représentatives de tous les types d'institutions ont
déjà été approchées à ce sujet et les
indications que nous en avons obtenues nous permettent de croire qu'elles
contribueront à cette réévaluation depuis longtemps
attendue.
Divers éléments de la loi seront révisés, et
notamment les deux suivants. D'abord, nous apporterons des corrections sur des
points qui se sont avérés, à la pratique, inapplicables.
Puis, dans un souci de cohérence et pour mettre fin à une trop
longue marginalisation, nous nous emploierons à resituer l'enseignement
privé par rapport à l'ensemble du système scolaire
québécois, tel que celui-ci a été modifié,
ces dernières années, par les orientations fondamentales du plan
d'action pour le primaire et le secondaire et par celles du livre blanc sur
l'enseignement collégial. C'est d'ailleurs déjà dans cet
esprit que, au cours de la prochaine année, aucun nouvel enseignement
général ou
professionnel ne sera autorisé sans que le secteur public ne soit
consulté et sans que la preuve ne soit faite qu'il est nécessaire
d'ajouter à ce qui existe déjà. Ce qu'il reviendra, bien
sûr, à la commission consultative d'évaluer, puis au
ministre de déterminer.
L'avenir de l'enseignement privé au Québec. Je m'en
voudrais de ne pas dire un mot, en terminant, de l'avenir de l'enseignement
privé au Québec.
D'abord, s'il n'en tient qu'au gouvernement, l'enseignement privé
subsistera au Québec. Les préoccupations des membres de cette
chambre en témoignent, eux qui sont précisément à
réfléchir aux modifications qu'il faut apporter à la loi
actuelle. Mais, malgré la multiplicité des travaux
effectués depuis 1975 et malgré l'ardeur que l'on y a mis, le
gouvernement n'est pas en mesure de définir actuellement selon quelles
modalités précises le secteur privé d'enseignement
continuera d'apporter sa contribution à notre système scolaire.
Cependant, on peut d'ores et déjà affirmer que, contrairement aux
prétentions de certains tenants du libre choix absolu,
l'évolution de ce secteur d'éducation ne pourra jamais plus
être tout-à-fait indépendante de celle du secteur public.
Les motifs à l'appui sont de sens commun. Quant à savoir comment
seront établis la complémentarité et l'appariement d'un
secteur par rapport à l'autre, c'est une question encore
débattue, qui devra faire l'objet de décisions encore à
venir.
Quoi qu'il en soit, quand un État doit faire face à des
réalités aussi contraignantes que le ralentissement
nécessaire de la croissance des dépenses publiques et que le
phénomène de la dénatalité - et cela, après
avoir tant investi dans son système d'éducation - il est normal
que la réflexion sur l'avenir du secteur privé y soit
attentivement approfondie. On ne nous en voudra donc pas d'y consacrer tout le
temps et toutes les énergies souhaitables, quitte à ce que des
gens trop impatients nous en fassent grief.
L'administration du ministère. Il me reste à vous
présenter brièvement les crédits des programmes 1 et 2,
qui concernent l'administration du ministère de l'Éducation. Ces
crédits s'élèvent à 104 607 200 $ et seront
affectés à l'administration des réseaux d'enseignement
aussi bien qu'à l'administration interne du ministère. Ce montant
représente une augmentation de seulement 1,6% par rapport aux
crédits de 1980-1981.
La rationalisation de la gestion du ministère. Il importe de
noter que le ministère de l'Éducation, qu'on qualifie souvent de
"grosse machine", ne consacrera, en 1981-1982, que 1,8% de son budget à
son administration générale et à l'administration de ses
réseaux d'enseignement; ce pourcentage était de 3,9% en
1974-1975. De plus, entre le 1er avril 1980 et le 1er avril 1982, le
ministère aura réduit de 177 le nombre de personnes-années
affectées à son administration interne, soit une diminution de
12,7%. Comme la diminution pour l'ensemble du ministère a
été de 4,4%, c'est donc surtout sur l'administration interne que
les efforts de restriction ont porté, plutôt que sur
l'administration des réseaux d'enseignement. Au cours de la même
période, l'effectif affecté à l'administration des
réseaux est passé de 1383 à 1441.
Ces données témoignent des résultats obtenus par le
ministère dans ses efforts pour rationaliser son administration interne
et pour participer à l'entreprise gouvernementale de compression des
dépenses. Ce n'est d'ailleurs pas là un phénomène
nouveau. Depuis 1976-1977, l'effectif du ministère a diminué de
plus de 9%, passant de 2862 personnes-années à 2622. De
même, alors que, au cours de cette même période, les
subventions versées aux réseaux d'enseignement ont connu une
croissance de 113%, la portion du budget du ministère qui est
consacrée à l'administration générale n'a
augmenté que de 45%. Ce résultat a été atteint
grâce aux mesures énergiques prises par le gouvernement pour
réduire ses dépenses d'administration et pour freiner la
croissance de l'effectif des ministères.
Et nous n'avons pas l'intention de nous arrêter là. Nous
croyons que, en ces temps où les ressources sont moins abondantes, le
ministère doit faire preuve d'une efficacité administrative qui
devrait avoir valeur d'exemple. Nous croyons aussi que les millions de dollars
que le ministère réussit à épargner au chapitre de
son administration servent la cause de l'éducation, puisque cela permet
d'alléger quelque peu le fardeau des compressions budgétaires des
réseaux d'enseignement.
L'organisation interne du ministère. Au plan de son organisation,
le ministère a connu d'importants remaniements au cours des derniers
mois. C'est ainsi que, en créant un secteur de l'administration, nous
avons regroupé sous la responsabilité d'un même
sous-ministre adjoint toutes les unités du ministère qui ont un
rôle à jouer dans l'administration interne. Cela, j'en suis
convaincu, permettra d'accroître encore l'efficacité et
l'efficience de l'administration et de réduire les coûts de
l'administration interne.
Dans le même esprit, nous avons procédé à une
réorganisation des ressources consacrées à l'informatique,
en divisant le Service de l'informatique en deux unités distinctes:
l'une qui est axée sur les besoins du ministère, l'autre qui
répond aux besoins des réseaux d'enseignement. Dans ce
dernier
cas, le mode de financement retenu tient compte des nouvelles
responsabilités qui sont confiées aux administrateurs des
réseaux dans le développement des systèmes informatiques
dont ils ont besoin.
Une des premières tâches confiées au nouveau secteur
de l'administration est d'une importance capitale: réviser l'ensemble
des politiques de gestion du ministère et préparer une politique
renouvelée des ressources humaines. Des pas importants ont
déjà été faits en ce sens, dans le cadre du
programme d'égalité en emploi, dont deux volets sont
déjà en oeuvre: la promotion des femmes et l'emploi des
handicapés.
C'est aussi ma volonté ferme, au cours de 1981-1982, de mettre
l'accent sur le développement des politiques d'éducation. Dans un
contexte où les ressources diminuent, il devient de plus en plus
important de prévoir et de planifier, si on veut éviter la
dispersion, l'à-peu-près et l'improvisation qui finissent
toujours par coûter cher. C'est pourquoi j'ai demandé au secteur
de la planification de concentrer ses efforts sur la préparation de
politiques et de plans d'action. Je compte donc beaucoup sur les travaux de ce
secteur pour définir les stratégies et les mesures relatives aux
grands chantiers dont j'ai fait état dans ma présentation
générale.
Avec cette réorganisation des unités du ministère,
je considère que tous les champs essentiels d'activités sont
adéquatement couverts. Nous devrions donc être en mesure de
remplir notre mission et de poursuivre efficacement l'ensemble de nos
objectifs.
Les moyens d'enseignement et la recherche. Je terminerai par guelgues
mots sur deux services intégrés à l'administration du
ministère, mais dont l'action de soutien est particulièrement
importante pour la qualité des pratiques pédagogiques des
réseaux d'enseignement: le Service général des moyens
d'enseignement, auquel on doit des réalisations aussi marquantes que la
série Passe-partout, et le Service de la recherche, bien connu dans nos
réseaux pour ses travaux majeurs, par exemple, sur les
caractéristiques des enseignants et enseignantes du Québec.
En 1981-1982, les orientations et les priorités d'action du
Service général des moyens d'enseignement se regrouperont sous
six chefs principaux: 1) la production et la distribution du matériel
didactique audiovisuel et imprimé; 2) la gestion et l'élaboration
des cours par correspondance; 3) l'assistance aux politiques de recyclage et de
perfectionnement en moyens d'enseignement et en technologie éducative;
4) le soutien aux réseaux d'enseignement en vue de l'organisation, du
fonctionnement et de l'utilisation des moyens d'enseignement, notamment des
bibliothèques et des services audiovisuels; 5) la recherche et le
développement dans le domaine des moyens d'enseignement et de la
technologie éducative; 6) l'expertise dans les systèmes de
communication utilisés à des fins éducatives.
Quant au Service de la recherche, il poursuivra en 1981-1982, ses
travaux de diffusion de l'information scientifique et de coordination de
l'ensemble des stratégies et des activités de recherche des
unités du ministère; il devrait pouvoir proposer bientôt
les premières bases d'une politique québécoise de la
recherche en éducation. Il mettra aussi en marche deux nouvelles
études importantes: l'une sur l'enseignement des sciences au secondaire
et au collégial, l'autre sur les rapports entre l'école et les
acquis extra-scolaires des jeunes.
Je tenais à mentionner explicitement les travaux de ces deux
unités administratives, car ils témoignent de ce que, même
dans son administration interne, le ministère est orienté vers
des préoccupations prioritairement pédagogiques.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 8 est-il
adopté?
M. Lalonde: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): Adopté sur division.
Avant de passer au programme 11, est-ce qu'on doit faire adopter...
M. Laurin: 1 et 2.
Le Président (M. Gagnon): ...1 et 2? Adopté?
M. Lalonde: C'est difficile de les adopter si on ne les a pas
vus. J'aimerais les adopter sur division. On en a bien adopté un sur
division et je ne vois pas de raison pourquoi on ne l'adopterait pas unaniment
si on avait le temps de les voir, mais on n'a pas le temps de les voir. Comment
voulez-vous qu'on soit d'accord, M. le Président?
Le Président (M. Gagnon): Les programmes 1 et 2...
M. Lalonde: 1 et 2 sur division.
Le Président (M. Gagnon): ...adoptés sur division.
Le programme 11.
M. French: 9?
Le Président (M. Gagnon): Pardon?
M. Laurin: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): 9 a été
adopté avec 6.
M. French: Moi je voudrais dire très brièvement que
c'est un succès, ce
programme, et j'apprécie la neutralité et
l'objectivité avec laquelle cela fonctionne et je...
Une voix: ...
M. French: Non, mais je voulais le souligner parce que c'est, je
pense, important; le programme est beaucoup apprécié et le
pluralisme dans les ressources pour la recherche est très important. La
contribution du Québec là-dedans est importante.
Une voix: Adopté.
M. Laurin: Je remercie le député de Westmount.
M. French: C'est justement pour cela que...
Une voix: Cela veut dire que celui-là est adopté
sans division, à l'unanimité.
M. Lalonde: Oui, à l'unanimité.
Charte de la langue française
M. Laurin: M. le Président, si l'on passe...
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Laurin: ...au programme 11 sur l'Office de la langue
française, je dois d'abord transmettre aux membres de la commission les
regrets du président de l'Office de la langue française qui ne
peut être avec nous ce soir. Il sera remplacé par le
vice-président de la commission M. Lavigne. M. Gosselin avait cependant
fait une présentation des crédits de son ministère que
j'aurais pu lire si j'avais eu le temps nécessaire, mais je pense qu'il
est préférable que le temps soit consacré aux questions.
Je demanderais donc à mes collègues la permission de
déposer la présentation des crédits pour qu'elle puisse
figurer au journal des Débats.
M. Lalonde: Accepté, M. le Président et on va
même accepter le vice-président de l'office.
Le Président (M. Gagnon): La parole est au ministre.
M. Laurin: Je pense, M. le Président, que le programme de
l'Office de la langue française se poursuit avec un succès
certain. L'essentiel de ce programme porte sur la francisation de l'entreprise
avec tout ce qu'elle comporte, l'octroi des certificats, la dispensation de la
terminologie nécessaire aux entreprises pour qu'elles aient les moyens
de cette francisation à laquelle la loi les oblige. Donc, cette
année, nous entendons poursuivre la certification des entreprises de
tous les secteurs économiques ayant plus de 50 personnes, de
l'administration ainsi que des membres des ordres professionnels.
Nous entendons aussi continuer à travailler au maintien
général des activités de soutien terminologique aux
entreprises et organismes certifiés tout en privilégiant certains
secteurs reconnus prioritaires, et nous ouvrirons enfin notre dernier bureau
régional à Saint-Jérôme, ce qui complétera la
régionalisation des services de l'office. Voilà à peu
près le sens général de nos activités de cette
année.
Pour le reste, nous continuerons nos activités habituelles comme,
par exemple, les subventions à la recherche, les contrats et les achats
pour la banque de terminologie qui continue de s'enrichir ainsi que la
promotion du français dans chacune de nos régions.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Ne serait-ce que pour donner l'occasion à
l'Opposition de réaffirmer son intérêt dans la mission
principale de l'Office de la langue française, à savoir la
francisation des entreprises, l'étude des crédits devrait
être multipliée par trois ou quatre par année, ce qui nous
permettrait de voir l'évolution du travail dans cette entreprise
fondamentale. Vous me permettrez, malgré l'heure tardive, de
répéter que rendre le français nécessaire a
été l'objectif premier recherché par la commission
Gendron, qui a fait la seule étude indépendante, objective,
poussée, scientifique de l'état du français au
Québec. Cela fait déjà 13 ans, en 1968, si ma
mémoire est bonne, et c'est le diagnostic qui avait été
fait et le verdict qui avait été rendu par la commission Gendron
que l'on retrouvait d'abord dans la loi 22 et dans la loi 101 pour permettre
aux Québécois francophones de travailler dans leur langue.
On ne le dira jamais assez parce que, souvent, on est un peu
porté à croire que c'est ailleurs que le défi nous est
lancé comme, par exemple, en ce qui concerne la langue de
l'enseignement, problème important, difficile, mais ce serait un
exercice stérile si, en même temps, on ne permettait pas aux
francophones de travailler dans leur langue chez eux. C'est donc pour cette
raison, en particulier, que nous suivons avec un grand intérêt
l'évolution du dossier de la francisation des entreprises. Il
était assez évident l'an dernier, au cours de l'étude des
crédits, qu'un certain retard avait
été marqué dans l'évolution de ce dossier,
dans le travail difficile d'analyses linguistiques, de préparation de
programmes de francisation, d'implantation des programmes. Ma première
question au ministre ou au vice-président de l'office, c'est: Est-ce que
ces retards ont été rattrapés, ou sont-ils en train de
l'être, ce qui permettrait d'atteindre les objectifs que ie
législateur a proposés à l'office, à savoir qu'en
1983 cette première partie de l'entreprise sera
complétée?
M. Laurin: Je voudrais d'abord dire, M. le Président, que
je suis d'accord avec le député de Marguerite-Bourgeoys pour
affirmer que d'un gouvernement à l'autre, depuis douze ou treize ans, il
y a eu continuité dans l'affirmation des mêmes objectifs, mais
que, particulièrement depuis quatre ans, il y a progression,
approfondissement, affermissement et enracinement. L'an dernier, nous avions
constaté ensemble, effectivement, qu'il y avait eu un certain retard par
rapport à l'échéancier originalement prévu en ce
qui a trait aux certifications d'entreprises. D'ailleurs, le président,
dans la note que j'ai fait distribuer et qui annonce les crédits, fait
allusion à ces retards et en donne d'ailleurs des explications
très pertinentes que j'encourage les membres de la commission à
lire à tête reposée. Ces retards sont parfaitement
explicables. Les uns s'expliquent par le fait que l'adoption des
règlements dans certains cas, je pense en particulier à celui sur
les sièges sociaux et les laboratoires de recherche, s'est
effectuée plus tard que prévu et il s'en suivit un certain retard
dans nos négociations avec les entreprises.
Il y a d'autres explications à ce retard qui sont, toutefois,
moins reluisantes et qui tiennent d'une certaine réticence, opposition,
résistance, peut-être explicable, mais, qui graduellement perdent
de leur importance. Il reste que nous avons fait d'immenses efforts pour
rattrapper ce retard. Sur le plan technique, je pourrais demander à M.
Lavigne de nous en indiquer les principales étapes.
M. le Président, la situation se présente de la
façon suivante. Il y a au Québec environ 1600 entreprises qui
emploient plus de 100 personnes. Ces 1600 entreprises devaient mettre sur pied
un comité de francisation et demander un certificat provisoire. 1569
l'ont obtenu. Elles ont ensuite dû préparer une analyse de la
situation linguistique; c'a été le cas de 1403 entreprises.
À l'examen de ces documents, l'office a décerné les
certificats permanents à 233 entreprises qui emploient plus de 100
personnes. L'office a demandé à 841 entreprises de
préparer un programme de francisation; de ces 841 entreprises, 566 l'ont
déposé. L'office en a entériné 440. C'est la
situation pour celles qui emploient plus de 100 personnes.
M. Lalonde: Est-ce que d'après le calendrier que le
gouvernement s'est imposé ou qu'il a imposé à l'office par
règlement -je ne pense pas que le calendrier soit dans la loi, c'est la
date ultime de 1983 qu'on retrouve dans la loi - celui-ci accuse un certain
nombre de retards, soit au niveau de l'analyse ou du certificat ou de la
préparation du programme ou de la mise en marche du programme de
francisation?
M. Laurin: Nous continuons à garder l'espoir d'atteindre
cette date ultime de 1983 en nous approchant d'une façon presque totale
de l'objectif que nous nous étions fixé. Mais il importe de
distinguer entre la délivrance des certificats et l'application des
programmes de francisation. Il a toujours été prévu que
l'application des programmes de francisation prendrait plus de temps que la
délivrance des certificats. Mais nous pensons pouvoir atteindre, en
1983, l'émission quasi totale du nombre de certificats prévus aux
entreprises.
M. Lalonde: Je ne parle pas du certificat provisoire - on
reçoit le certificat provisoire quand on commence le processus -mais du
certificat permanent. J'en vois 233 sur 1483 qui ont fait leur analyse
linguistique. Est-ce que ces 233 couvrent des entreprises qui devaient avoir
leur certificat permanent à cette date, disons la mi-juin 1981?
M. Laurin: Oui. En gros au niveau des analyses linguistiques, les
retards qui ont pu être occasionnés l'an passé ou
l'année précédente sont, à toutes fins utiles,
rattrappés. Pour les programmes de francisation, il faut faire attention
parce que si on parle de 233 entreprises qui détiennent le certificat
permanent, ce sont des entreprises où à l'analyse linguistigue,
il s'est avéré que le français avait déjà un
très haut niveau.
M. Lalonde: Alors, elles n'ont pas besoin d'appliquer un
programme de francisation?
M. Laurin: Ce qui est intéressant, ce sont les 566
entreprises qui ont dans les faits déposé leur programme.
L'office continue à en recevoir environ 50 par mois.
M. Lalonde: Est-ce que vous croyez, à ce rythme, pouvoir
atteindre l'objectif de 1983? Sinon, de combien de temps vous allez le
dépasser?
M. Laurin: L'office va certainement atteindre l'objectif de 1983
pour la fin des
négociations des programmes de francisation dans toutes les
entreprises qui emploient plus de 100 personnes. À partir de ce moment,
il s'écoulera des délais qui pourront varier entre un an et
peut-être deux ans et demi, pour les dernières entreprises, afin
qu'elles puissent terminer le processus. (24 heures)
M. Lalonde: Quand vous parlez des dernières entreprises,
cela comprend celles des 100 employés et plus? Pour les autres, les
moins de 100 employés, vous avez un processus, je pense, qui est en
marche aussi?
M. Laurin: La situation se présente de la façon
suivante: on avait divisé les entreprises par règlement; un
règlement avait été adopté par l'office
prévoyant que les 2500 entreprises qui emploient entre 50 et 100
personnes soient touchées plus tard.
En premier lieu, une entreprise de 1200 employés a
été touchée au début de 1980. Je pense qu'il est
important de dire aujourd'hui que 1035 des 1085 entreprises qui se sont
inscrites au processus ont déposé leur analyse de programme. Dans
le cas des PME, on a combiné la documentation, alors il s'agit d'un seul
rapport à préparer. C'est un niveau assez important.
Peut-être qu'il vous intéressera de savoir que, sur les 1035
entreprises, l'office en a traité 363; 110 entreprises ont obtenu un
certificat permanent et 253 autres ont vu leur programme de francisation
entériné. Â chaque mois, les données augmentent.
Quant à la deuxième partie, la catégorie N, le
travail est amorcé depuis le 15 décembre dernier et, au cours de
la prochaine année, on devrait avoir des données importantes,
mais on pourrait souligner qu'il y a au-delà de 60% des entreprises qui
ont déjà reçu leur attestation d'inscription. Sur le
dernier lot d'entreprises, on peut difficilement montrer des résultats
au niveau des programmes de francisation.
M. Lalonde: Est-ce que ces quelques retards, qui sont bien
compréhensibles quand on considère l'ampleur de la tâche et
le caractère un peu nouveau de l'entreprise, pourraient être
réduits si le gouvernement donnait à l'office des ressources
additionnelles, plus considérables? Autrement dit, est-ce que c'est un
manque de personnel? Je ne sais pas, je pose la question au ministre, je
n'aurai peut-être pas la même réponse que si je posais la
question à l'office, mais il est minuit et c'est l'heure de la
vérité.
M. Laurin: Pour répondre à votre question et je
pense que vous en tirerez la conclusion à la lecture de la
présentation des crédits par le président de l'office - la
réussite de nos efforts n'est pas tellement en fonction du personnel que
nous avons en place. Je pense que nous avons un personnel suffisant. Les
résistances auxquelles nous avons fait face, dont fait état le
président, ne sont pas en fonction du nombre de personnes qui
travaillent.
Cependant, cette année, en raison de la compression dans le
ralentissement des dépenses qui a été imposée
à l'office comme à tous les autres, pour pouvoir continuer notre
marche en avant au même rythme, nous avons dû effectuer un
transfert d'employés de certains services à d'autres et, en
particulier, vers le service de francisation des entreprises. Nous avons
dû, par exemple, transférer 21 postes des autres services vers le
service de francisation des entreprises et ceci comprend, évidemment,
les équipes de soutien terminologique qui doivent fournir aux
entreprises les termes dont elles ont absolument besoin pour leur programme de
francisation. Donc, malgré les compressions et à
l'intérieur des compressions, nous allons pouvoir continuer à
affecter à ces programmes le personnel nécessaire.
M. Lalonde: On sait que l'instrument presque essentiel de toute
cette entreprise, c'est la terminoloqie. Je n'ai pas eu le temps de lire le
rapport du président qui nous a été remis. En le
feuilletant, je vois que la banque de terminoloqie contient, au 31 mars 1.981 -
donc très récemment 900 000 fiches portant sur 1 500 000 termes.
Est-ce que cela correspond aux objectifs que vous aviez il y a quelques
années, quand tout ce processus avait été entrepris?
M. Laurin: Je vais laisser M. Lavigne répondre à
cela, mais, précédemment, j'aimerais dire que, pour mieux
s'assurer de la francisation des entreprises, nous avons pris aussi une autre
initiative, c'est celle de divertir vers le tronc industriel commun une partie
des efforts que nous consacrions auparavant au tronc de gestion. Le tronc
industriel commun intéresse davantage d'abord les entreprises, et un
plus grand nombre d'entreprises, que gestion. C'est là une autre mesure
qui, je crois, nous permettra d'atteindre à temps l'objectif. En ce qui
concerne les travaux de la banque de terminoloqie elle-même, quant
à la quantité des fiches inscrites, je vais demander à M.
Lavigne de répondre.
Le chiffre de 900 000, en gros représente les objectifs qui
avaient été fixés dans le passé. Il faut comprendre
qu'à l'étape où on en est nous allons consacrer beaucoup
d'efforts à l'épuration de la banque de terminologie de
façon à diminuer les coûts informatiques...
M. Lalonde: Excusez-moi, à diminuer les coûts...
M. Laurin: ... de façon aussi à
améliorer la qualité du produit que nous offrons. Les
quelques prochaines années vont essentiellement être
consacrées à cela.
M. Lalonde: Vous n'avez pas l'objectif d'atteindre un autre
million de termes, mais plutôt de vous assurer de la qualité de
l'acquis? J'aurais beaucoup d'autres questions, mais...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Rosemont avait demandé la parole. Vous pourriez y revenir
après?
M. Paquette: M. le Président, depuis sa création,
l'Office de la langue française ne ménage pas les efforts pour
donner à l'ensemble des Québécois des outils qui leur
permettent d'affirmer le caractère français de notre
société, caractère qui est toujours aléatoire et
menacé par l'entourage de 250 000 000 de parlant anglais. De ce point de
vue, l'appartenance du Québec au régime fédéral
pose un certain nombre de contraintes à la loi. On a vu que tout un
chapitre de la loi a été déclaré inconstitutionnel,
sans compter les menaces qu'on nous annonce au niveau du projet
fédéral de rapatriement de la constitution quant à la
langue d'enseignement.
Il y a un autre domaine où notre appartenance au régime
fédéral se fait sentir, c'est celui des ministères
fédéraux et des compagnies de la couronne, lesquels ne sont pas
soumis à la loi 101, mais sont soumis à la Loi sur les langues
officielles. Je vous passe, M. le Président, les rapports du commissaire
aux langues officielles, qui pourrait en dire long sur le degré
d'application de cette loi, même au Québec. Ce qui
m'intéresse ici, c'est d'établir l'impact que peut avoir au
Québec même le fonctionnement des ministères et des
compagnies de la couronne qui utilisent encore largement, semble-t-il,
l'anglais dans leurs opérations. Est-ce que cela empêche
l'application de certaines parties? On peut imaginer que, si ces entrepises ou
compagnies de la couronne et ces ministères utilisent l'anglais dans
leurs communications avec des entreprises du Québec, avec des
entreprises auxquelles elles donnent des sous-contrats, la francisation de la
vie économique, de la vie au travail peut s'en trouver compromise dans
d'autres entreprises qui, elles, sont soumises à la charte du
français.
M. Laurin: Effectivement, c'est l'un des principaux obstacles,
pour ne pas dire le principal, auxquels nous faisons face dans notre travail
quotidien. Dans son exposé liminaire, M. le président de l'office
souligne cette résistance des ministères fédéraux.
Il dit, par exemple, que si les ministères fédéraux et les
agences fédérales ne sont pas soumis à la charte,
puisqu'ils doivent respecter la Loi sur les langues officielles, il n'en
demeure pas moins gu'ils ne doivent pas nuire aux efforts que nous faisons au
Québec pour franciser les communications et la langue du travail et des
affaires.
Malheureusement, poursuit-il, nous nous devons de rapporter que certains
ministères et certaines compagnies de la couronne fédérale
n'utilisent au Québec que la langue anglaise dans certaines de leurs
opérations et dans plusieurs de leurs documents. De plus, dit-il, ces
agences et ces ministères exigent parfois de leurs fournisseurs, gui
sont des compagnies québécoises et donc sujettes au processus de
francisation, que les communications continuent à se faire entre eux
exclusivement en anglais. Enfin, il n'est pas nécessaire, dit-il encore,
de rappeler que les agences et les ministères fédéraux
font souvent assez peu de cas des recommandations du commissaire aux langues
officielles du gouvernement fédéral, comme en fait d'ailleurs foi
son dernier rapport d'activité. Le président n'entend pas citer
les noms de ministères et d'agences fédéraux, mais dans la
poursuite de son activité, il espère pouvoir leur faire
comprendre que l'imposition de l'anglais au Québec est non seulement
contraire à la Charte de la langue française, mais
également à la Loi sur les langues officielles du gouvernement
canadien. "Cependant, nous ne pouvons tous ensemble que regretter
amèrement cet état de choses et nous ne pouvons que porter
à l'attention des autorités le manque de coopération de la
part de ces organismes qui, très souvent, continuent encore à
recruter au Québec des unilingues anglophones, tout en exigeant des
francophones la connaissance de la langue anglaise pour travailler sur le
territoire québécois. "De plus, nous devons indiquer, poursuit-il
enfin, les difficultés que nous avons à travailler avec
Consommation et Corporations Canada, de même qu'avec certains
ministères impliqués dans le domaine de la terminologie
agro-alimentaire. Malgré la qualité des travaux terminologiques
de l'office, ces ministères qui n'ont véritablement aucune
compétence en matière terminologique imposent, sous le couvert de
la protection du consommateur, des termes et des expressions que l'Office de la
langue française réprouve. L'Office s'est longuement
efforcé de faire prévaloir la qualité de ces travaux
auprès de ces ministères et continue à le faire, mais,
malheureusement, il ne rencontre pas toujours, loin de là, la
collaboration que l'office serait en droit d'attendre de ces ministères
du gouvernement canadien qui imposent parfois unilatéralement des
terminologies inadéquates et qui, de ce fait, peuvent induire en erreur
le consommateur."
M. Paquette: M. le Président, une question additionnelle
là-dessus.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Est-ce qu'il est arrivé que des
ministères fédéraux ou des compagnies de la couronne
fassent appel aux services de l'Office de la langue française? On a
l'impression que la Loi sur les langues officielles semble d'application
très difficile. Peut-être que ces ministères ou compagnies
de la couronne pourraient bénéficier de l'expertise qu'a acquise
l'Office de la langue française.
D'autre part, une autre question de détail mais qui a son
importance, je pense, est le fait que les compagnies à charte
fédérale, les compagnies privées à charte
fédérale, sont soumises à la charte du français,
n'est-ce pas?
M. Laurin: Oui.
M. Paquette: Il n'y a pas de problème de ce
côté-là, très bien, d'accord.
M. Laurin: Non, il n'y a pas eu...
M. Lalonde: Un grief de moins, vous ne dormirez pas. On va vous
en trouver un autre demain.
M. Paquette: Non, mais cela permet de cerner. On n'en manque pas.
On est content de voir qu'il y en a moins qu'on pensait.
M. Lalonde: C'est de valeur, il y en a un de
réglé.
M. Laurin: Pour répondre à la double question du
député de Rosemont, il n'y a eu de demande officielle de la part
d'aucun ministère ou organisme fédéral à l'Office
de la langue française. Il y a eu cependant des contacts officieux.
L'Office a dispensé ses bons offices, lorsque le cas s'est
présenté. Malheureusement, cela est trop rare pour qu'on puisse
s'en féliciter.
Quant à la deuxième question, effectivement, ces
compagnies qui ont leur place d'affaires au Québec sont obligées
de se conformer à la loi 101, à la Charte de la langue
française, mais un certain nombre d'entre elles ont quant même
été très réticentes à s'y plier, ce qui a
obligé l'office à allonger la période de
négociation, négociation qui, dans plusieurs cas, a
été très difficile. Je ne sais pas si vous voulez des
détails là-dessus, M. Lavigne pourrait vous en fournir, mais nous
constatons, depuis le 13 avril, un certain attiédissement, une certaine
érosion de la résistance.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Laurin: Je ne sais pas si M. Lavigne voudrait ajouter quelques
commentaires sur quelques cas précis.
On pourrait dire ceci qu'au Québec, il y a 285
sociétés qui emploient plus de 500 personnes et que l'office
s'est entendu avec 254 de ces sociétés. Certaines ont obtenu un
certificat permanent, il y en a une quarantaine. Les autres, plus de 200, ont
négocié des programmes de francisation. Cependant, il y a encore
31 sociétés aujourd'hui, surtout des sociétés qui
ont ce qu'on a appelé tantôt une charte fédérale,
qui, même 18 mois ou 24 mois après les délais prévus
par la charte, n'ont toujours pas réussi à conclure avec l'office
une entente touchant leur programme de francisation. Peut-être qu'on
pourrait ajouter une chose aussi, c'est qu'un des problèmes avec
l'administration fédérale, c'est que, lorsque certaines
sociétés fédérales et certains ministères
placent des commandes d'approvisionnement dans les entreprises
québécoises, lorsque ces commandes sont en anglais, ainsi que les
devis qui les accompagnent, les informations pour la fabrication, on se trouve
à faire travailler en anglais des gens du Québec qui normalement
travailleraient en français. (0 h 15)
Le Président (M. Gagnon): Le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Quelques minutes seulement, pour avoir des
détails sur cette situation fédérale. On parle de combien
d'employés? Les sociétés de la couronne, qui ont des
usines ou des bureaux, ici au Québec, ou les ministères
fédéraux qui ont des bureaux à Québec, cela fait
combien de milliers de personnes? Avez-vous un ordre de grandeur?
M. Laurin: On n'a pas de données précises à
l'office la-dessus, ce que l'on sait, c'est que cela dépasse les 100 000
personnes au Québec.
M. Lalonde: Sur 100 000 personnes, en proportion, combien de
travailleurs cela représente-t-il?
M. Laurin: Dans l'entreprise privée, je ne sais pas, cela
pourrait être entre 5% et 10%. Mais il y a les entreprises du
Québec qui doivent travailler en anglais, parce que les commandes
qu'elles reçoivent de l'état en général...
M. Lalonde: Vous l'avez dit. Mais on parle de 5% à 10% des
travailleurs. Est-ce qu'une, quelques-unes ou plusieurs de ces entreprises
offrent des conditions de travail qui permettent aux travailleurs de
travailler
en français, en tout ou en partie?
M. Laurin: Vous parlez des sociétés?
M. Lalonde: Des sociétés de la couronne, Air
Canada, par exemple, ou Canadair ou le Canadien National.
M. Laurin: Je pense qu'il faut clarifier certaines choses.
Lorsqu'on parle de Canadair, c'est un cas particulier, c'est une
société de la couronne, temporairement, le gouvernement
fédéral a acquis le contrôle de Canadair pour
éventuellement le remettre à l'entreprise privée, à
ce que l'on dit. Alors, cette société s'est donnée un
programme de francisation...
M. Lalonde: C'est dommage, une bonne nouvelle pour le
député de Rosemont.
M. Laurin: C'est une société dont les actions sont
détenues temporairement par le gouvernement fédéral.
Lorsqu'on parle des véritables sociétés de la couronne et
des ministères fédéraux, personne ne nous a
approchés; l'office a fait dans le passé des tentatives plus ou
moins fructueuses.
M. Lalonde: Alors, on n'a pas de données afin de savoir
qu'elle est la proportion de l'usage du français comme langue de travail
dans ces sociétés?
M. Laurin: C'est un secret bien gardé.
M. Lalonde: Alors, dans l'ignorance, on prévoit le
pire?
M. Laurin: Non.
M. Paquette: On aurait de bonnes indications...
M. Lalonde: J'aurais quelques questions concernant la recherche.
L'office a entrepris plusieurs études, notamment dans le cadre de son
programme de subventions à la recherche afin de mettre au point des
modes de transmission de la terminologie technique aux travailleurs, de
façon qu'ils les utilisent couramment dans leur activité
quotidienne. Quelles sont les orientations dégagées par ces
études jusqu'à maintenant?
M. Laurin: Est-ce qu'on peut me donner la
référence, la page du rapport?
M. Lalonde: Je ne parle pas du rappport du président, on
travaille avec autre chose, nous avons notre service de recherche.
M. Laurin: Depuis plusieurs années, l'office a fait faire
des études, dont l'importance varie d'une année à l'autre,
touchant l'implantation de la terminologie.
Au cours du dernier exercice, nous avons commandé une
étude importante et nous allons recevoir au cours des prochaines
semaines les résultats, nous ne les avons pas encore reçus. Nous
ne sommes donc pas en mesure de vous les donner.
M. Lalonde: À qui cela a-t-il été
confié et quel est le coût de cette étude importante?
M. Laurin: La société SORECOM de
Montréal.
M. Lalonde: Pour combien?
M. Laurin: II s'agit d'examiner les meilleures façons pour
faire passer dans la pratique les terminologies développées par
l'office et les entreprises. On s'est aperçu qu'il ne suffit pas de
donner les terminologies, encore faut-il donner des méthodes
d'implantation. Il arrive, à première vue, que les travailleurs
qui reçoivent ces nouvelles terminologies, à l'occasion, se
rebiffent.
M. Lalonde: Ils résistent un peu.
M. Laurin: Ils ont des habitudes et cela prend un certain temps
pour leur permettre de changer leurs habitudes, leurs moyens de fonctionnement.
La façon que l'office a trouvé - et que les entreprises aussi ont
trouvé - la façon idéale, c'est d'inclure ces
terminologies dans les documents qui sont préparés. Cela a
été la stratégie de tous les temps de l'office et de la
régie, autrefois, d'utiliser le nouveau vocabulaire français dans
les formulaires, de façon que la réaction soit passive, d'abord,
et qu'on en vienne à l'utiliser plus couramment.
M. Lalonde: Si je comprends bien, le problème de la
transmission de la terminologie technique aux travailleurs n'est pas
réglé. Cela fait l'objet d'une autre étude qui n'est pas
terminée. Celle de SORECOM n'est pas terminée.
M. Laurin: L'étude de SORECOM, le montant approximatif est
de 130 000 $. On pourra fournir des explications additionnelles en
déposant ...
M. Lalonde: Et vous attendez des résultats quand?
M. Laurin: L'office attend le rapport au cours des prochaines
semaines.
M. Lalonde: Au cours des prochaines semaines.
Est-ce qu'on pourrait parler d'une autre préenquête sur la
situation des manuels d'enseignement universitaires en français que
l'office aurait réalisée? Une enquête plus
approfondie devait être faite à l'automne 1980 auprès des
universités québécoises. J'aimerais savoir si on est en
mesure de nous dévoiler les résultats préliminaires et
aussi avoir l'opinion du ministre sur l'utilisation fréquente des
manuels scolaires de lanque anglaise dans les universités
francophones.
M. Laurin: Je peux répondre tout de suite à la
deuxième partie. C'est un effort qui est mené conjointement par
l'Office de la langue française et le ministère de
l'Éducation. J'ai dit précédemment que, surtout au niveau
collégial, un gros effort avait été fait pour procurer aux
élèves des diverses options professionnelles des manuels
rédigés par des professeurs québécois, en
français. Le progrès est continu dans ce domaine. L'office
participe, en ce sens que c'est lui qui révise la terminologie, parce
qu'il faut quand même respecter les termes que nous avons
normalisés. Il contribue aussi par l'expertise de nos
linguistes-conseils. L'effort se poursuit d'une façon
systématique.
Au niveau du fonds FCAC d'aide et de soutien à la recherche, il y
a aussi un volet consacré aux revues scientifiques de langue
française. Voilà une autre avenue que nous pouvons emprunter pour
améliorer le français au niveau des collèges et surtout de
l'université. Le progrès sera sûrement plus lent à
cet égard parce que, au niveau universitaire, surtout dans certaines
spécialités, on continue d'utiliser abondamment - et je le
comprends - des manuels ou "text books", comme on dit en anglais, de langue
anglaise. Je pense que dans ce domaine le progrès va être
très lent, mais doit être quand même poursuivi d'une
façon continue.
Le volet revues scientifiques du fonds FCAC y contribue. Le
ministère de l'Éducation aussi a pris contact avec les
universités de langue française pour que les autorités
universitaires incitent un certain nombre de leurs professeurs à
travailler à la rédaction de manuels, remplacer les notes de
cours par des manuels. Cela se poursuit. C'est le volet d'aide à
l'édition en langue française qui fait partie du programme du
MEQ. Cela a déjà donné des résultats
intéressants. Par exemple, au cours de l'année qui vient de
s'écouler, il y a un certain nombre de manuels universitaires de langue
française qui ont été édités par certaines
de nos maisons d'édition. Encore une fois, même si le
progrès est lent, il est là. Il se poursuit et, graduellement,
j'espère que nous pourrons rapporter progrès.
M. Lalonde: Le ministère s'est-il enquis de la situation
en France? Je me souviens, il y a quelques années, d'une rencontre avec
les responsables, je pense que c'étaient les autorités du Conseil
du patronat, qui a une représentativité peut-être un peu
différente de celle qu'on a ici. Ils étaient très
inquiets, a ce moment-là, de la pénétration des manuels
américains, surtout dans les disciplines de haute technicité.
M. Laurin: Je ne crois pas que la situation soit aussi
difficultueuse que celle que nous connaissons ici en ce sens que la plupart des
universités françaises, dans la plupart des matières,
peuvent compter sur un plus grand nombre de manuels de lanque française
que nous ici au Québec, mais il reste que les professeurs
français utilisent, eux aussi et en nombre croissant, sinon des manuels,
sinon les textes de référence écrits en langue anglaise et
même qu'ils publient de plus en plus souvent des articles qui font
état de leurs travaux en anglais dans des revues anglaises. C'est
peut-être l'une des raisons pour lesquelles le précédent
gouvernement, le gouvernement Giscard d'Estaing, a cru bon de lancer un appel
vigoureux aux citoyens français pour corriger la situation et a mis en
place un plan d'action très vigoureux également pour corriger la
situation.
Je ne sais pas si ce sera repris par le présent gouvernement,
mais cela ne m'étonnerait pas, parce que nous avons reçu ici au
Québec une mission française composée de
représentants appartenant à tous les partis, qui nous ont fait
part de leur préoccupation et de leur volonté commune, à
partir du Parti communiste français jusqu'à l'UDF en passant par
le Parti socialiste. Je serais donc bien étonné que le
présent gouvernement ne reprenne pas à son compte cette
politique.
Nous entendons aussi faire notre part, et c'est la raison pour laquelle
le Conseil de la langue française tiendra l'automne prochain un colloque
sur l'utilisation du français comme langue scientifique, un colloque
international; nous y aurons une participation des autres pays francophones et
en particulier de la France, de la Belgique et de la Suisse.
Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse auprès des
membres de cette commission, mais on nous avait donné le consentement
pour poursuivre nos travaux dans un ordre de grandeur de quinze minutes
passé minuit. Nous sommes presque rendus...
M. Lalonde: On ne peut pas arrêter là.
Le Président (M. Gagnon): Cela me prend un autre
consentement de la commission pour continuer.
M. Lalonde: Un autre consentement pour une demi-heure au moins
sur le temps.
Une voix: Encore une demi-heure?
M. Laurin: Une demi-heure, c'est un peu trop. Je suis
fatigué.
M. Lalonde: Cela va. Cela va peut-être être moins que
cela, mais on a plusieurs questions.
M. Laurin: D'accord.
M. Lalonde: J'aimerais parler des modifications à la
loi.
M. Paquette: Consentement pour quinze minutes.
Le Président (M. Gagnon):
Consentement pour quinze minutes?
M. Lalonde: II me fait penser au leader, lui.
Le Président (M. Gagnon): On est d'accord pour quinze
minutes?
M. Laurin: Quinze minutes.
Le Président (M. Gagnon): Quinze minutes.
M. Lalonde: Au minimum. "Quand le moment sera venu après
notre réélection, nous envisagerons de réexaminer la loi
en ce qui touche au monde des affaires." C'est le Soleil, le 1er octobre 1980,
qui citait le ministre. Quel sens précis peut-on donner...
M. Laurin: II n'y avait pas de date et il n'y a pas encore de
date. Nous attendons évidemment que la conjoncture se dessine avant que
la nécessité d'amendements à apporter ne s'impose à
nous.
M. Lalonde: Dans quels secteurs en particulier de la loi, M. le
ministre?
M. Laurin: Dans tous les secteurs?
M. Lalonde: Vous ne pouvez pas être plus précis?
M. Laurin: Non.
M. Lalonde: En ce qui concerne les tests, M. le Président,
on a vu toute une série d'articles. Je pense que jamais une étude
ou un examen aussi poussé n'a été fait que par la
journaliste Lysiane Gagnon. Dans ce secteur particulier, le ministre se
propose-t-il d'apporter des modifications aux tests ou d'étudier de
nouveau les tests tels qu'ils sont appliqués actuellement aux
professionnels? (0 h 30)
M. Laurin: J'ai trouvé moi aussi ces articles très
intéressants; non seulement les ai-je lus mais relus avec beaucoup
d'attention. Il me semble que, de ces articles, quatre affirmations principales
ressortent. La première, c'est qu'il y a une proportion anormalement
élevée de candidats qui échouent aux tests. C'est vrai,
mais uniquement pour les infirmières auxiliaires. Pour les autres
professions, y compris même les infirmières, le pourcentage de
réussite, après un ou plusieurs essais, varie entre 80% et 100%.
L'office examine actuellement la possibilité de faire des tests
spécifiques pour les infirmières auxiliaires, étant
donné que, malgré tous nos efforts, il semble que le taux de
réussite ne s'accroisse pas, du moins d'une façon sensible et
selon les désirs que nous avons nous-mêmes. Nous étudions
actuellement la possibilité de faire des tests spécifiques pour
les infirmières auxiliaires afin de tenir compte des divers facteurs qui
ont été mentionnés dans les articles de Mme Gagnon, par
exemple la différence d'âge, la différence de
scolarité, la différence de formation, selon le lieu de
provenance de ces infirmières auxiliaires.
Une deuxième affirmation qui ressortait, c'était que les
tests ne tenaient pas compte des différences culturelles des candidats.
Cela est vrai en grande partie, mais il faut quand même se rappeler les
contraintes à l'intérieur desquelles nous avons dû
travailler au cours des trois dernières années. Par exemple,
l'Office de la langue française fait passer depuis trois ans, chaque
année, près de 3000 tests. Puisque le permis d'exercer est
assujetti à la réussite de ces tests, je pense qu'il était
important de faire connaître rapidement les résultats aux
candidats. Il fallait donc trouver une forme de test qui allie
l'objectivité de la démarche à la rapidité de la
correction afin de donner un service qui soit le plus efficace possible
à la clientèle visée. C'est pour cette raison que nous
avons choisi, comme instrument d'évaluation, les tests objectifs.
Une troisième affirmation de Mme Gagnon qui semble ressortir de
ces textes, c'est que les tests contiennent certaines incorrections ou
ambiguïtés de forme et de contenu. Je pense que, sur ce point, elle
a particulièrement raison. Mais avec la mise en vigueur prochaine du
sous-test de spécialité pour mesurer la connaissance de la
terminologie" propre à la profession, la très grande
majorité des remarques et des suggestions qu'elle nous fait seront
prises en considération. En même temps, nous profiterons de la
mise en vigueur prochaine de ces nouveaux sous-tests pour épurer la
plupart des incorrections relevées, par exemple en ce qui a trait aux
illustrations. Nous tenterons de réduire également le nombre de
questions et nous tenterons d'éliminer certaines questions qui
pourraient
paraître trop ambiguës ou farfelues. Nous allons continuer
aussi d'améliorer l'environnement technique des tests, afin de diminuer
le stress des étudiants, afin de mettre les candidats beaucoup plus
à l'aise. Par exemple, nous avons déjà commencé et
nous continuerons d'améliorer l'environnement, c'est-à-dire les
salles d'entrevue qui seront mieux décorées, un équipement
qui sera plus adéquat, un accueil qui sera plus attentif, ainsi que
d'autres mesures susceptibles d'améliorer l'environnement.
Une dernière affirmation qui ressortait des articles de Mme
Gagnon, c'était que les tests n'auraient pas été l'objet
d'une validation scientifique. À ceci, nous pourrions rétorquer
que le comité qui a été chargé d'établir les
tests, lequel est composé d'un représentant de l'office, d'un
représentant du ministre, qui est le même que celui que vous aviez
choisi, d'ailleurs, et d'un représentant de l'Office des professions, a
convenu, lors d'une réunion tenue en décembre 1980, que la
validation pratique ou empirique des tests pendant six années
d'application, à pas moins de 7000 candidats, constitue de soi une
véritable validation qui est acceptée telle quelle par la plupart
des experts en docimologie, deuxièmement, que les travaux d'analyse et
de vérification contenus aux tests méritent d'être
maintenus, après analyse et après étude, mais qu'il
convient peut-être de prendre des précautions techniques plus
poussées, et c'est ce à quoi nous nous emploierons au cours des
mois qui viennent.
De toute façon, cette question est régulièrement
étudiée aux réunions de l'office, et je puis assurer le
député qu'on fera tous les efforts pour que justice et
équité soient notre marque de commerce dans toutes les
activités qui auront à être prises dans ce domaine.
M. Lalonde: M. le Président, je remercie le ministre de sa
réponse. Je l'invite à ne ménager aucun effort pour
qu'aucun doute ne subsiste dans l'esprit de qui que ce soit et surtout de ceux
qui sont soumis à ces tests, sur la validité et l'à-propos
de ces tests. J'aurais une question concernant la commission de surveillance.
Il a été mentionné dans les journaux que le ministre
aurait imposé par-dessus la tête du président de la
Commission de surveillance de la langue française une
procédure-cadre pour la conduite des enquêtes de ladite
commission. Cette procédure-cadre qui aurait été
jugée illégale, remplacerait une autre procédure mise en
viqueur par le président. Cette procédure aurait
été jugée légale par plusieurs avis, y compris ceux
du ministère de la Justice. D'après la procédure-cadre que
le ministre aurait imposée, le président est
dépouillé des pouvoirs de direction sur les
commissaires-enquêteurs et sur leur travail, pouvoirs qui lui ont
été conférés de façon spécifique par
le législateur.
De plus, toujours d'après cette procédure
ministérielle, cet ukase ministériel, le rôle du
président de la commission est réduit à celui de
conseiller auprès des commissaires-enquêteurs, puisque
relativement aux enquêtes, premièrement le président ne
peut que donner son avis par écrit aux commissaires-enquêteurs -
je cite l'ukase -sans que cet avis soit contraignant et qu'en cas de conflit,
c'est le ministre qui décide.
Une telle procédure n'est certainement pas conforme à la
loi, à moins que le ministre ait découvert un article dans la loi
qui aurait échappé à notre attention lors de l'adoption de
la loi. L'application de cette procédure constituerait clairement une
inqérence politique dans l'administration de la loi, notamment dans la
conduite des enquêtes, et c'est grave, ce que le léqislateur a
manifestement voulu éviter en créant la commission. Si on avait
voulu que ce soit le ministre qui soit responsable des enquêtes, on
n'aurait pas créé une commission. C'est la raison d'être
d'une régie ou d'une commission, soit éviter que le ministre soit
impliqué dans le déroulement, dans le fonctionnement des
enquêtes.
Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a réellement
imposé cette procédure-cadre et si elle est actuellement en
vigueur à la commission?
M. Laurin: M. le Président, je voudrais d'abord profiter
de l'occasion pour demander à nouveau que soit inscrit aux
procès-verbaux de la commission le petit exposé que je voulais
faire au début de la présentation des crédits de la
commission de surveillance. Je pense qu'on l'a distribué. Pendant que
j'y suis, j'aimerais bien faire la même demande pour la
présentation des crédits du Conseil de la langue
française.
En ce qui concerne les affirmations que vient de faire le
député de Marguerite-Bourgeoys, elles sont tirées
d'articles de journaux. On sait que parfois les journaux disent beaucoup de
choses et ça ne correspond pas toujours ou du moins dans tous les
détails à la réalité. Le sujet qu'il vient
d'aborder concerne des problèmes de régie interne,
c'est-à-dire l'adoption de rèqles pratiques de fonctionnement.
Comme il peut arriver à propos de l'adoption ou de l'application de
n'importe quelle loi ou comme cela peut arriver à l'occasion de
l'application de quelque projet ou mesure administrative, il est parfaitement
possible que le problème de l'interprétation de tel ou tel
article réglementaire ou législatif puisse prêter le flanc
à une discussion ou à des problèmes d'explicitation. Il
n'est pas étonnant que ceci puisse arriver, à l'occasion,
à l'intérieur de la loi 101 qui
comporte, comme vous le savez, un très grand nombre d'articles.
Si cela s'est produit - cela peut s'être effectivement produit -cela a
donné lieu aux échanges habituels entre le ministre et son
sous-chef, ainsi que quelques autres membres de l'administration et nous avons
poursuivi nos échanges, nos réflexions à cet égard.
Certaines décisions internes ont été prises et sont
maintenant appliquées.
M. Lalonde: Que ces choses sont bien dites, M. le
Président. Donc, le ministre ne nie pas qu'il ait imposé sa
propre procédure et qu'il ait, en fait, mis de côté,
l'autorité du président. Le ministre peut-il nous dire en vertu
de quelle loi il peut empêcher le président d'un organisme, dont
il est responsable à l'Assemblée nationale, mais dont il n'a pas
la direction, d'exercer ses fonctions de direction? Le ministre ne voit-il pas
là le danger qu'une telle enquête soit contestée en cour
puisque des avis juridiques existeraient - ce n'est pas dans les journaux qu'on
les trouve, on les trouve partout - à savoir que la
procédure-cadre du ministre est illégale et que celle qui avait
été imposée par le président, conformément
à son autorité légale...
M. Laurin: M. le Président, je n'ai fait
référence qu'aux procédures habituellement en usage dans
quelque ministère que ce soit et aux pratiques administratives qui
s'appliquent couramment dans les ministères. Donc, il n'y a pas d'autres
explications à donner.
Quant aux hypothèses que soulève le député
de Marquerite-Bourgeoys, ce ne sont que des hypothèses qui, dans les
faits, ne se sont jamais avérées puisqu'il n'y a pas eu de ces
contestations judiciaires du genre de celles qu'il appréhende dans ses
remarques.
M. Lalonde: Ce n'est pas une hypothèse que je fais
là. Y a-t-il eu effectivement une procédure cadre imposée
par le ministre?
M. Laurin: J'ai dit que l'interprétation de l'un ou
l'autre des articles à propos de cette loi peut avoir donné lieu
aux mêmes échanges ou aux mêmes discussions qui ont pu avoir
lieu dans d'autres ministères à propos de l'application d'autres
lois. Les mêmes procédures ou mêmes mécanismes qui
prévalent dans les autres ministères ont été de la
même façon poursuivis à l'intérieur de mon
ministère et ces problèmes internes ont reçu une solution
interne, comme il se doit.
M. Lalonde: M. le Président, le ministre se rend-il compte
qu'il est ministre et qu'il est de ce fait responsable vis-à-vis de
l'Assemblée nationale dont nous sommes une extraction - nous
représentons l'Assemblée nationale ici - et qu'il doit dire la
vérité?
Je ne parle pas de ce qui se passe dans tous les ministères. Je
ne parle pas de régie interne. Je pose la question suivante au ministre:
Est-il exact qu'il a lui-même imposé à la commission de
surveillance sa propre procédure-cadre et, s'il en veut une copie, je
peux la lui donner?
M. Laurin: Je dis simplement que cette loi, comme toute autre,
peut être justifiable d'interprétations différentes dans
tel ou tel de ses articles, ou dans le libellé de tel ou tel de ses
articles et que, comme cela arrive, cela a conduit à des échanges
de vue.
M. Lalonde: Cette procédure-cadre serait datée du
24 janvier 1980.
M. Laurin: Ah! C'est bien possible.
M. Lalonde: Le ministre reconnaît-il que des opinions
légales écrites, ont été rendues par la Direction
générale des affaires civiles et pénales du
ministère de la Justice dont une, le 20 décembre 1979?
M. Laurin: C'est bien possible.
M. Lalonde: Non, je ne demande pas si c'est bien possible. Vous
avez à dire la vérité ici. On n'est pas dans le domaine
du...
M. Laurin: Cela fait partie de ces échanges internes qui
ont eu lieu dans un ministère à propos de l'interprétation
de quelque loi que ce soit. Même si le député de
Marguerite-Bourgeoys continue à me citer d'autres opinions, je pourrais
lui citer d'autres cas où à propos de l'application et de
l'interprétation d'autres lois il y a eu une multiplication d'avis
juridiques venant de tous les côtés. C'est là une
procédure tout à fait normale.
M. Lalonde: Je ne parle pas des autres lois.
M. Laurin: Moi, je parle de celle-là en disant que j'ai
poursuivi et assumé mes responsabilités dans ce domaine comme
quelque autre ministre a pu le faire dans des lois qui relevaient de sa
juridiction.
M. Paquette: M. le Président, sur cette question, le
député de Marguerite-Bourgeoys a demandé au ministre,
à deux reprises, de dire la vérité, ce qui est une
façon à peine voilée d'affirmer qu'il ne la dit pas.
Pourrait-il amener quelques preuves à l'appui de ce genre d'affirmation?
C'est quand même assez qrave.
M. Lalonde: Qui pose des questions ici, M. le
député de Rosemont?
M. Paquette: M. le Président, je pense
que c'est une question de procédure parlementaire et...
M. Lalonde: J'ai rappelé au ministre qu'il doit dire la
vérité et ce rappel n'est pas inutile.
M. Paquette: Moi, je rappelle au député de
Marguerite-Bourgeoys qu'il doit dire la vérité et amener des
preuves quand il fait des affirmations de ce genre. (0 h 45)
M. Lalonde: Je comprends que le ministre ait besoin d'aide
actuellement...
M. Paquette: II n'en a absolument pas besoin.
M. Lalonde: ... et que son adjoint parlementaire essaie de le
sortir du trou, mais est-il exact que le ministre a imposé à la
commission une procédure cadre pour la conduite des enquêtes
à la Commission de surveillance de la langue française
datée du 24 janvier 1980? C'est clair, ça?
M. Laurin: Je ne l'ai pas nié, M. le
Président...
M. Lalonde: Alors, vous l'avez admis.
M. Laurin: J'ai dit simplement que j'ai assumé normalement
mes fonctions, comme tout ministre les assume.
M. Lalonde: Mais comment pouvez-vous expliquer, M. le ministre,
que dans cette procédure cadre vous dites: Le président donne son
avis par écrit sans que cet avis soit contraignant sur le fonctionnement
même de la commission dont il a la direction? Est-ce que vous ne vous
rendez pas compte que vous avez littéralement mis de côté
le président, contrairement à la loi?
M. Laurin: Vous avez droit à vos opinions, vos
hypothèses, et je ne les conteste pas.
M. Lalonde: Est-ce que vous ne...
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, je vous prie!
On a encore, pour la deuxième fois, dépassé le temps.
M. Lalonde: Vous pouvez être sûr que le
député de Rosemont va me refuser ce consentement.
Le Président (M. Gagnon): On a dépassé le
temps alloué à cette commission. À ce moment-ci, je me
dois...
M. Lalonde: Est-ce qu'on donne un autre consentement?
M. Paquette: M. le Président, vous en avez pour combien de
temps encore?
M. Lalonde: Si le ministre était un peu plus
précis, peut-être que ce serait rapide, mais j'ai beaucoup de
documents.
M. Champagne: Est-ce qu'on a notre mot à dire
là-dessus?
M. Lalonde: Oui, oui, vous êtes sûrement
intéressé de savoir que le ministre a outrepassé la loi,
ce qui est très dangereux.
M. Laurin: Je laisse le député de
Marguerite-Bourgeoys à ses hypothèses.
Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse...
M. Paquette: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): Le temps limite est
arrivé, mais si la commission est d'accord, nous pouvons poursuivre les
travaux; ça prend le consentement unanime de la commission, sinon, je
dois mettre fin aux travaux.
M. Champagne: Cela fait trois fois.
M. Paquette: M. le Président, si le député
de Marguerite-Bourgeoys a des allégations précises à
faire, il y a d'autres moyens dans le cadre de nos procédures
parlementaires, il y a aussi la possibilité d'autres moyens
extra-parlementaires. Je ne pense pas que prolonger ce qenre d'échanges
encore quinze minutes ou une demi-heure aiderait en guoi que ce soit.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que le programme 11 sera
adopté?
M. Lalonde: II n'y a pas consentement. M. Paquette:
Non. M. Lalonde: Une autre guillotine. M. Paquette: C'est
ça.
M. Lalonde: Quand ce que dit l'Opposition ne fait pas
l'affaire...
M. Paquette: Ce n'est pas que ça ne fait pas l'affaire, M.
le Président, c'est qu'il est minuit quarante-cinq actuellement. Cela
fait deux fois qu'on prolonge.
M. Lalonde: C'est la censure.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que le programme 11 sera
adopté?
M. Paquette: Adopté.
M. Lalonde: M. le Président, je demande le consentement
pour poursuivre l'étude du programme 11 encore quinze minutes.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Paquette: Non, M. le Président. Je comprends que
ça fasse l'affaire du député de Marguerite-Bourgeoys sur
le plan de l'image, mais ça fait deux fois qu'on prolonge.
M. Lalonde: On voit où se situe le député de
Rosemont quant à la transparence.
Le Président (M. Gagnon): Est-ce que le programme 11 sera
adopté?
M. Paquette: Adopté.
Une voix: Sur division, sûrement.
M. Lalonde: Non, pas' sur division, nous avons trop de respect
pour la francisation des entreprises pour l'adopter sur division, même si
nous rejetons le mépris du ministre à l'égard de la loi
dans le geste qu'il a posé vis-à-vis de la Commission de
surveillance de la langue française.
Le Président (M. Gagnon): Le programme 11 sera
adopté.
M. Paquette: Est-ce qu'on a adopté le programme 10, M. le
Président?
Le Président (M. Gagnon): Oui, le programme 10...
M. Lalonde: On n'avait pas à l'adopter, cela relève
d'une autre commission. Le représentant du gouvernement n'est pas
informé?
M. Paquette: Ahl c'est l'Office des professions. Très
bien.
Le Président (M. Gagnon): Les crédits de la
commission de l'éducation sont adoptés. Je prierais le
rapporteur, le député de Rosemont, d'en faire rapport à
l'Assemblée nationale.
Les travaux de cette commission sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 0 h 49)