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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux pour
entendre les organismes directement impliqués dans l'administration
scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de
l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des
enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle.
Les membres de cette commission sont: M. Brouillet (Chauveau), M.
Desbiens (Dubuc), M. Cusano (Viau), M. Gauthier (Roberval), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), M. Hains (Saint-Henri), M. Laurin (Bourget), M. Leduc
(Fabre), M. LeMay (Gaspé), M. Payne (Vachon), M. Ryan (Argenteuil).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Bérubé (Matane), M. Dauphin (Marquette), M. Doyon
(Louis-Hébert), M. Parizeau (L'Assomption), Mme Harel (Maisonneuve), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Paré (Shefford), M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. Rivest (Jean-Talon).
Les groupes à entendre aujourd'hui sont les suivants: la
Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers de
l'éducation, représentée par M. François Houle,
secrétaire général de la Fédération des
associations étudiantes collégiales du Québec, ainsi que
M. Jean Baillargeon, secrétaire général du Regroupement
des associations universitaires du Québec. En deuxième lieu, la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, représentée par M. Jacques Chagnon,
président. Le troisième à être entendu sera la
Fédération québécoise des directeurs d'école
représentée, par M. Réal de Guire, président. Le
quatrième sera la Fédération des cégeps,
représentée par M. Jean-Noël Tremblay, président. Le
cinquième est l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires, représentée par M. Michel Paquet,
président. En sixième lieu, l'Association des cadres scolaires du
Québec, représentée par M. Bernard Myette,
président. En dernier lieu, la Fédération des
comités de parents de la province de Québec,
représentée par M. Jean Pontbriand, président.
Je tiens à vous faire remarquer que nous poursuivrons nos travaux
jusqu'à 13 heures, nous reprendrons à 15 heures jusqu'à 18
heures et de 20 heures jusqu'à 24 heures, c'est-à-dire le temps
qui nous est permis pour délibérer.
J'aimerais que les deux groupes en présence me disent de quelle
façon ils ont l'intention de procéder pour entendre les
mémoires aujourd'hui en sachant, premièrement, que normalement le
temps qui est dévolu à chacun des organismes est d'au moins une
heure. Je pense qu'il pourrait y avoir d'autres ententes que j'aimerais,
dès le départ, bien clarifier afin qu'on sache où on va
aujourd'hui avec l'audition des mémoires.
Le premier à intervenir est M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, nous proposons, compte
tenu qu'il y a sept intervenants - c'est bien ça? - ...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Leduc (Fabre): ...qu'un temps égal soit réparti
entre les différents intervenants, en tenant compte bien sûr des
besoins que les députés voudront bien manifester dans leurs
interventions. Je pense qu'il faut tenir compte qu'il peut arriver qu'on
dépasse légèrement ce temps, mais je pense qu'il ne
faudrait pas trop dépasser. Il faudrait tenir compte qu'on termine
à minuit.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Est-ce que j'ai bien compris le député de
Mille-Îles? Vous avez dit une moyenne d'à peu près...
Le Président (M. Jolivet): Le député de
Fabre.
M. Ryan: Le député de Fabre, excusez-moi. Le
président avait parlé d'une heure, en moyenne, par groupe, puis
vous, vous avez parlé d'une heure et demie, je pense.
M. Leduc (Fabre): Une heure et quart, environ.
M. Ryan: Une heure et quart, environ. Nous n'avons pas
d'objection. Je pense que tout le monde va comprendre qu'étant
donné le stade où nous en sommes dans les travaux de la
commission, et que ces travaux ne sont qu'une étape préparatoire
à ce que nous
espérons devoir être des négociations entre les
parties intéressées, tout le monde va comprendre qu'il faut que
le travail de la commission progresse un peu plus rapidement. Il y a toute la
journée de lundi qui doit être réservée à des
groupes.
Je devrais cependant faire une réserve dans le cas de deux
groupes qui sont sur la liste d'aujourd'hui. Il y a la Fédération
des commissions scolaires catholiques du Québec et la
Fédération des cégeps. Je ne sais pas si l'on peut faire
la rencontre dans l'espace d'à peu près une heure et demie dans
les deux cas. J'en serais très heureux. Je pense que mes
collègues de l'Opposition le seraient aussi. Je voudrais qu'on se
réserve, dans ces deux cas-là, peut-être un petit peu plus
de temps, au besoin, pour une raison qui m'apparaît évidente.
Ces deux organismes font partie, d'une manière tout à fait
essentielle, de ce qu'on appelle la partie patronale dans les conflits qui
perdurent. La Fédération des commissions scolaires est une
partenaire du gouvernement à titre de partie patronale dans le cas des
commissions scolaires, de l'enseignement public, élémentaire et
secondaire. La Fédération des cégeps est partenaire du
gouvernement au niveau des cégeps, je pense, qui sont partie prenante.
Nous n'avons pas eu la chance de les entendre jusqu'à maintenant. Le
gouvernement a eu amplement l'occasion, autant par des fonctionnaires que par
les ministres, en particulier la batterie de ministres que nous avions hier
soir, d'entendre l'exposé de leur point de vue.
Il me semble que, si nous en éprouvons le besoin, vous devriez
nous accorder une marge de souplesse d'au moins une demi-heure dans ces deux
cas, en plus du temps qui a été mentionné par le
député de Fabre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Education.
M. Leduc (Fabre): II ne faudrait pas, M. le Président, je
pense, être trop fermes à ce stade-ci, et aviser au moment
où ces mémoires seront présentés, parce qu'il ne
faudrait pas, non plus, léser les groupes qui interviendront en fin de
soirée et leur accorder un temps qui serait en-deçà d'une
heure.
Je pense qu'il va falloir juger au fur et à mesure que les
intervenants se présenteront.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Je suis heureux, comme
président, de constater que vous m'accorderez aussi un moment de
souplesse, à certaines occasions, me permettant de juger au meilleur de
ma connaissance et aussi, en sachant que le règlement prévoit
qu'il y a une heure accordée à chaque organisme - et je parle aux
organismes qui auront à présenter leur mémoire - tout en
sachant que les deux premières journées ont été
différentes de celles que je vais annoncer quant aux deux suivantes,
c'est-à-dire 20 minutes d'intervention pour présenter le
mémoire. Vous n'êtes pas obligé de les prendre, mais c'est
le maximum accordé. Ensuite, de part et d'autre, les interventions
d'abord du représentant officiel du gouvernement et du
représentant de l'Opposition, ainsi que l'alternance prévue telle
qu'on la connaît. J'essaierai d'être ponctuel à 15 heures,
comme je le suis d'ailleurs de coutume comme président, et à 20
heures, de façon à commencer à l'heure précise. De
cette façon, on aidera aussi les organismes qui ont l'intention de se
présenter.
J'appelle donc la Coalition étudiante pour la défense des
droits des usagers de l'éducation à venir s'installer à la
table en face de nous, à se présenter et à
présenter son mémoire en lui rappelant les règles du jeu
qu'on vient de déterminer. Je pense que c'est M. François Houle
qui prendra la parole.
Coalition étudiante pour la défense des
droits des usagers de l'éducation
M. Houle (François): Bonjour! M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Bonjour!
M. Houle: Honorables députés. Que cesse le chacun
pour soi, s'unir pour s'en sortir est le mémoire présenté
par la Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers
de l'éducation.
La Coalition pour la défense des droits des usagers de
l'éducation a vu le jour en janvier 1983, avant même que ne monte
en flèche l'inflation des discours et des moyens de pression. Une fois
de plus, les étudiants avaient senti l'inévitable cul-de-sac dans
lequel s'en allaient les négociations. Une fois de plus, les
étudiantes et les étudiants ont vu le peu de profondeur des
discours, combien corporatistes, tenus de part et d'autres. Encore une fois,
les usagers de l'éducation savaient qu'ils allaient faire les frais d'un
affrontement institutionnalisée.
Deux fédérations distinctes d'associations
étudiantes se retrouvent au sein de la coalition: le Regroupement des
associations étudiantes universitaires du Québec, RAEU, et la
Fédération des associations étudiantes collégiales
du Québec, FAEQ. Au-delà de 90 000 jeunes citoyens et citoyennes
responsables. La coalition existe surtout dans le but de promouvoir et de
défendre un projet d'école québécoise plus
démocratique à
l'intérieur de laquelle l'implication et la participation des
usagers et usagères dans les diverses instances administratives et
pédagogiques, seraient reconnues, encouragées et
revalorisées. Les étudiants des niveaux collégial et
universitaire ne veulent plus être des consommateurs passifs de cours.
Ils sont les usagers d'un service public et de jeunes citoyens à part
entière.
Nous pensons qu'il est inacceptable d'une part, qu'un système
d'éducation qui coûte si cher aux contribuables
québécois ne contribue pas à former ou à
développer des citoyens responsables. Nous comptons défendre ici
la thèse selon laquelle les droits acquis des uns ne peuvent plus brimer
les droits des autres, c'est-à-dire des usagers et usagères de
services. En d'autres mots, nous sommes tout à fait d'accord avec le
fait que les travailleurs et les travailleuses du secteur public doivent avoir
des conditions de travail décentes. Mais ces droits reconnus ne doivent
plus aller à l'encontre des droits des plus démunis de cette
société, surtout en temps de crise.
Une négociation biaisée au départ. Mon intervention
portera ici sur les enjeux de la négociation. Trois points importants
semblent être en litige, c'est-à-dire la tâche, la
sécurité d'emploi et l'autonomie départementale. Mais
avant de commencer, permettez-moi une triste remarque pour vous dire à
quel point nous sommes étonnés, honnêtement, nous sommes
déçus même de voir les principaux responsables de la
situation que subissent actuellement les étudiants et les jeunes du
Québec en général, qui ne voient pas l'ombre d'une
solution aux problèmes que connaît présentement la
société québécoise. Est-ce là le triste
constat d'une société de corporatistes animés par une
inexistante volonté à changer les mentalités?
Comme le demandait l'éditorialiste Jean-Louis Roy, le 27 janvier
dernier, en réponse à un texte signé par Jean Baillargeon
et moi-même dans le Devoir de la veille, sommes-nous condamnés
à la répétition sans fin des discours corporatistes?
Poursuivant en parlant de ceux-ci, il rappelait que le discours corporatiste
est, par essence même, irresponsable car il se construit d'abord sur la
négation de la réalité même la plus
évidente.
Si tel fut le cas, il n'est pas surprenant de constater l'échec
des dernières négociations car le discours corporatiste
mène, à notre avis, inévitablement à la faillite.
Une des solutions que nous mettions de l'avant, à ce moment-là,
pour éviter l'affrontement, était de permettre la présence
d'une tierce partie aux tables de négociation car nous croyons
profondément que les usagers et les usagères ont un mot à
dire à l'intérieur du processus de négociation.
Malheureusement, notre proposition ne fut pas retenue. Toutefois, nous
aimerions réaffirmer notre désir, notre volonté de voir,
une fois ce conflit terminé, la création d'une commission de
révision du régime actuel de négociation dans les secteurs
public et parapublic. Je pense que nous ne sommes pas les seuls à ce
sujet-là.
En débutant, qu'il me soit permis de vous dire que le
présent débat, fait au nom de la qualité de
l'enseignement, a été quant à nous faussé du
début à la fin, si fin il y a. Depuis plusieurs semaines, voire
plusieurs mois, on nous rebat les oreilles avec la qualité de
l'enseignement. Hier, j'écoutais encore les représentants et
représentantes de la FNEEQ et de la FEEQ-CEQ. À en croire
certains, la qualité de l'enseignement ne se mesurait qu'en termes de
minutes-semaine ou était directement proportionnelle au ratio
professeur-élèves. Nous nous élevons contre cette
définition étroite de la qualité de l'enseignement. Quant
à nous, la véritable qualité de l'enseignement doit se
mesurer en termes de contenu de cours ainsi que de programmes, en termes de
rapports humains entre usagers de l'éducation et ceux qui dispensent les
services, c'est-à-dire les professeurs. Nous tenons à affirmer
que la charge d'enseignement ou les acquis des conventions collectives ne sont
pas synonymes de qualité de l'enseignement, n'en déplaise
à certains. (10 h 30)
Permettez-moi de vous rappeler certains faits concernant la tâche
des enseignants. La présente commission doit avoir à l'esprit que
certains professeurs, à l'heure actuelle, ont une tâche
d'enseignement dépassant quinze heures/semaine. Ils sont de ces
professeurs très impliqués au sein de la communauté
collégiale, qui participent activement à plusieurs initiatives
étudiantes et, généralement ils sont très
disponibles et très facile d'accès. Ces professeurs,
rappelons-le, sont aimés des étudiants et souvent
qualifiés par ces derniers de supercompétents. Malheureusement il
y a une contrepartie: les professeurs que les étudiants ont de la
difficulté à rejoindre, ceux qui hors des classes n'existent
plus. Après plusieurs observations, nous pouvons associer ce
problème à deux éléments principaux: soit que le
professeur a perdu intérêt à demeurer au cégep
après ses cours à cause d'un manque d'espace adéquat ou
d'un manque de motivation tout simplement, soit que le professeur, à
cause d'une faible tâche d'enseignement, c'est-à-dire de 6
à 10 heures par semaine, jouit du privilège d'avoir un emploi ou
une occupation extérieure au collège. Je soulève ici le
problème relié au double emploi. Inutile ici de rappeler les cas
de non-disponibilité pendant les semaines de relâche,
c'est-à-dire aux mi-sessions ou à la fin d'une session. Fort
heureusement, nous dira-t-on, ces
observations ne concernent pas la majorité du corps professoral.
Cependant, il nous semblerait quand même important, avant de se
gargariser avec la qualité de l'enseignement, qu'on tienne compte de ces
graves lacunes du système.
Dans un deuxième temps, la coalition est très consciente
qu'une augmentation de la charge d'enseignement amènerait une
augmentation du nombre de professeurs mis en disponibilité. Le
débat qui entoure le 80% ou le 50% pour la deuxième ou
troisième année nous semble très secondaire. Un
élément qui n'a pas été abordé demeure
essentiel pour nous.
La société québécoise a-t-elle les moyens de
payer des gens à ne rien faire? Aussi triste que cela puisse
paraître, les professeurs mis en disponibilité sont des jeunes
hommes et des jeunes femmes de cette société. Par
conséquent, nous proposons un consensus sur le fait que les professeurs
mis en disponibilité soient affectés, d'une part, à des
tâches de supervision et de conception de projets communautaires,
permettant ainsi une relance de l'emploi, particulièrement chez les
jeunes de cette société; d'autre part, sur les projets de
recherche et d'innovation pédagogique, professeurs et étudiants.
D'ailleurs, laissez-moi vous rappeler que la Fédération des
associations étudiantes collégiales du Québec entend
mettre sur pied un centre d'innovation pédagogique étudiante du
Québec qui permettrait ainsi aux étudiants
intéressés d'innover à partir de leur vécu
pédagogique sur le contenu des programmes et des cours. Nous verrions
d'un bon oeil, d'ailleurs, la présence de professeurs dans une telle
démarche de la part des étudiants. Ce sont là quelques
solutions de rechange que nous osons proposer en tant que jeunes citoyens de
cette société.
Les récents décrets viennent modifier substantiellement le
fonctionnement des départements. Cette modification était
prévisible depuis la présentation du livre blanc sur
l'enseignement collégial. En effet, le projet de réglementation
de l'enseignement collégial transférait bon nombre de pouvoirs
des départements aux mains du DSP, mandataire du ministère de
l'Éducation à l'intérieur des cégeps. Ainsi, ayant
pressenti le débat, plusieurs associations étudiantes, membres de
la fédération que je représente, motivées par le
désir grandissant des étudiants d'être impliqués au
niveau des structures pédagogiques, ont entrepris une réflexion
dans le but de présenter une alternative valable à ce
problème. Présidée au départ par le Mouvement
réflexion-action de la ligne blanche, qui était alors un groupe
de dissidents de l'association nationale, en 1980, et probablement
l'ancêtre de la fédération que je représente, la
réflexion a commencé avec la venue du projet sur
l'éducation collégiale énoncé dans le livre blanc
et signé par M. Jacques-Yvan Morin, l'ancien ministre de
l'Éducation.
Après analyse, les divers intervenants de l'enseignement, et
particulièrement les étudiants, avaient annoncé leur
désaccord sur plusieurs points. Certains, et j'oserais dire la
majorité, allaient même jusqu'à le rejeter
complètement. Après plusieurs gestes de désaccord de la
part des étudiants, le nouveau titulaire du MEQ, le Dr Laurin,
décidait, comme on s'en souvient, d'établir une consultation
auprès des associations étudiantes. Après maintes
réflexions, il nous semblait important de participer à cette
consultation pour établir une position claire, apporter une alternative
et ainsi légitimer toute action pouvant survenir ultérieurement.
Un point précis nous revenait constamment à l'esprit: Jamais le
ministre n'avait situé clairement la place que devaient occuper les
étudiants au sein des structures qui régissent leur enseignement.
Dans la loi sur les collèges de 1967, une commission pédagogique
était prévue. Cependant, elle était consultative au
conseil d'administration et chaque collège avait la
responsabilité d'établir la représentativité des
groupes qui y siègent.
Dans certains collèges, cette commission pédagogique
existe toujours, mais la voix des étudiants n'y est que très peu
entendue. Par exemple, à Rivière-du-Loup, sur sept personnes
composant la commission pédagogique départementale, seulement
deux étudiants y prennent part. Ils ont le droit de parole et de vote
mais certaines personnes siégeant à cette commission
considèrent cela sans aucune importance.
Dans les collèges membres de la CEQ -car je les entendais hier
parler de la commission pédagogique départementale laissez-moi
vous rappeler que cette commission a disparu en 1975, après que son
fonctionnement ait été jugé inutile, ce qui privait les
étudiants d'une plate-forme intéressante, pour des raisons
syndicales, semble-t-il. Restait le conseil d'administration où
siège 1 étudiant sur 22.
Donc, afin d'assurer les droits étudiants quant à la
pédagogie et permettre aux étudiants intéressés par
l'innovation pédagogique, nous proposons que le collège et les
divers intervenants de l'enseignement facilitent l'intégration de la
participation étudiante aux structures pédagogiques par la mise
sur pied d'une commission pédagogique départementale ou de
concentration et spécialisation.
Le ministre de l'Éducation déplorait d'ailleurs, dans son
livre blanc sur l'école communautaire et responsable, que l'école
échappe au contrôle de ses usagers et usagères. En ce sens,
la volonté des étudiants est assez claire. Ils veulent avoir une
véritable place dans les structures
pédagogiques et ainsi assurer comme jamais leurs droits quant
à cette dite pédagogie.
Nous nous devons ici de mentionner à nouveau la volonté
exprimée à maintes reprises par les étudiants
eux-mêmes de s'ouvrir à un dialogue avec les autres intervenants
de l'enseignement et ce, dans le but de faire progresser le système
d'éducation, revaloriser la pédagogie et surtout pour ne plus
être des consommateurs de cours passifs.
Notre slogan à ce niveau serait plutôt, au lieu de "Sauver
l'école publique", "Améliorons l'école publique". Le vrai
problème se situe à ce niveau, à notre avis. Il n'est pas
vrai que les professeurs doivent avoir le contrôle absolu sur la
pédagogie. Ils doivent ouvrir les portes du département aux
autres intervenants de l'enseignement, particulièrement les
étudiants, afin de créer un lieu propice au dialogue où
pourront -comme l'écrivait le Dr Laurin dans le livre blanc que je
citais tout à l'heure - se confronter et s'harmoniser les points de vue
des professeurs et ceux des usagers.
C'est donc dans le but de mettre définitivement fin aux guerres
de juridiction entre les professeurs et les administrateurs de cégeps,
partenaires du ministère de l'Éducation, que nous proposons une
alternative valable aux décrets, au régime pédagogique et
au projet de réglementation de l'enseignement collégial, quant au
département toujours.
Quelques solutions furent mises de l'avant mais la solution qui fut
retenue et considérée comme la plus concrète et la plus
réalisable fut celle de la commission pédagogique
départementale. Cette structure, étant celle qui correspond le
plus à nos aspirations, parvient des structures départementales
déjà existantes et de la commission pédagogique
prévue dans la loi des collèges de 1967. Pourquoi cette structure
vise exclusivement le département, M. le Président? En
considérant que les affaires pédagogiques peuvent varier d'une
concentration ou d'une spécialisation à l'autre, comme les sujets
traités sont ceux des plans de cours, de l'évaluation, de
l'apprentissage et de la création de programmes institutionnels, il nous
semble important que ces discussions se tiennent à ce niveau.
Les buts de la Commission pédagogique départementale.
Faire participer l'étudiant aux structures qui régissent son
enseignement, en plus d'établir une communication et un dialogue
nécessaire entre l'étudiant et les autres intervenants de
l'enseignement, chose qui n'existe plus, particulièrement chez les
professeurs. Ces échanges sont primordiaux pour l'efficacité et
l'avancement de la pédagogie au Québec. Enfin, la Commission
pédagogique départementale doit assurer, à
l'intérieur d'un cadre, les droits fondamentaux des étudiants
quant à la pédagogie.
Composition de la Commission pédagogique départementale.
La Commission pédagogique départementale devrait être
composée, à notre avis, malgré que ce sont des
modalités, de deux étudiants, deux professeurs, d'un
professionnel des services de la consultation ainsi que d'un directeur du
service pédagogique ou d'un de ses adjoints. Elle se réunirait
régulièrement et aurait à établir son
règlement de régie interne, qui devrait être accepté
tant par les étudiants que par les professeurs.
La Commission pédagogique départementale aurait
sensiblement les mêmes pouvoirs et responsabilités que la
structure départementale existant actuellement. Il s'agit là d'un
compromis intéressant que pourraient faire, de part et d'autre, le
ministère de l'Éducation et les syndicats de professeurs.
En terminant, nous déplorons fortement, malgré le fait que
le sous-ministre Girard déclarait hier que les négociations
n'étaient pas un endroit pour transformer le régime
pédagogique, l'attitude des deux parties, qui n'ont cessé dans la
dernière négociation de masquer le vrai débat. L'absence
de règlement entre le gouvernement et les syndicats d'enseignants semble
résulter, avant tout, d'un profond désaccord au niveau de la
réforme pédagogique envisagée au collégial.
Dans ce sens, nous ne pouvons que dénoncer le fait d'avoir
été tenus, en tant qu'usagers du service de l'éducation,
à l'écart de toutes les délibérations concernant
l'avenir de notre pédagogie.
En conséquence, nous demandons au ministère de
l'Éducation d'accepter, avant d'aller plus loin avec son projet de
réforme de l'enseignement collégial, la création d'une
commission indépendante d'étude sur l'enseignement
collégial ou, comme le demandait dernièrement la
Fédération des associations de parents de cégeps, la
création de véritables états généraux sur
l'enseignement collégial.
Cette commission, ou états généraux, devrait
regrouper les étudiants, comme tous les autres intervenants de
l'enseignement, sans exception. C'est dans un souci d'améliorer la vraie
qualité de l'enseignement que nous déposons cette dernière
proposition.
En terminant, je passerai la parole à Jean Baillargeon, du RAEU.
Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole
à M. Jean Baillargeon, j'aimerais seulement faire remarquer qu'on a
déjà quinze minutes d'épuisées, mais - parce queje regardais les neuf pages - nous essayerons de faire le plus rapidement
possible en étant souple sur le temps. M. Baillargeon.
M. Baillargeon (Jean): M. le Président, mesdames et
messieurs de la commission, mon intervention s'intitule "Les
négociations de la société corporatiste". Notre coalition
se veut un nouveau courant de pensée chez les jeunes. Nous croyons que
la position de notre coalition reflète un nouveau courant majoritaire
parmi les étudiants et la jeunesse en général. On le
qualifie de courant pragmatique. À travers lui, on cherche à
trouver des solutions réalistes et concrètes aux problèmes
des étudiants, de la jeunesse en général et des plus
démunis de notre société.
Nous considérons que notre génération n'a plus rien
à perdre. Elle ne se reconnaît dans aucun courant traditionnel,
qu'il se définisse de droite ou de gauche. Nous rejetons
complètement l'approche manichéenne qui voudrait que notre
société soit divisée en deux clans: les bons et les
méchants. Depuis le début du conflit, dès qu'on ose
exprimer une opinion, on est catalogué soit du côté
syndical ou du côté gouvernemental. En ne les appuyant pas, on
nous reproche alors de faire le jeu de l'une ou de l'autre des parties.
En rompant avec la tradition qui voulait que les associations
étudiantes ne pouvaient qu'être des inconditionnelles des
professeurs, nous nous sommes fait reprocher de jouer le jeu du gouvernement.
D'autre part, en ne cautionnant pas aveuglément les lois
spéciales que le gouvernement a adoptées à un rythme et
avec une virulence jamais vus, on nous reproche de jouer le jeu des
syndicats.
D'aucuns voudraient nous donner l'étiquette prosyndicale ou
progou- vernementale, comme si, dans notre société de rapport de
force et de polarisation extrême ou continue, nous n'avions d'autre choix
que d'observer la règle du "crois ou meurs", particulièrement en
cette période de bouleversements majeurs.
Nous avons refusé de tomber dans le piège de la
facilité ou du je-m'en-foutisme. Contrairement aux
préjugés qui voudraient que nous fassions partie d'une
génération amorphe, apolitique et anonyme, nous
considérons avoir un mot à dire dans ce débat et nous
tenons à le faire connaître.
Depuis plus d'un mois, après quatre conférences de presse,
de multiples rencontres et conversations avec nos associations respectives, de
même qu'avec les deux parties, gouvernement et syndicat, nous en sommes
venus aux conclusions suivantes: premièrement, les usagers de services,
malgré leur volonté, sont impuissants face au conflit actuel. Et
autant du côté gouvernemental que syndical, on ne veut pas que
cela change. Deuxièmement, les deux parties ne réalisent pas
à quel point peuvent être graves les conséquences de
l'escalade de la présente confrontation. Troisièmement, la
population en général se perd quant aux raisons qui ont
mené au blocage actuel et tout se joue au-dessus de la population entre
technocrates spécialisés. Quatrièmement, autant du
côté syndical que gouvernemental, on est impuissant à
mettre sur la table une alternative de règlement valable ou à
proposer des solutions à l'impasse actuelle. Cinquièmement, de
part et d'autre, les parties n'ont manifesté aucune ouverture face aux
propositions de notre coalition et ce, sans fournir d'explication ou de
justification valable. (10 h 45)
De la génération sacrifiée à la
société sacrifiée. Est-il besoin de répéter
que l'on fait partie d'une génération que plusieurs appellent
"sacrifiée", condamnée, dans bien des cas, au chômage,
à l'aide sociale ou à la prostitution pour survivre? Que fait-on
des 64 000 jeunes de moins de 30 ans qui n'ont que 144 $ par mois d'aide
sociale pour joindre les deux bouts? Que penser de l'expérience de La
chaudronnée, à Sherbrooke, où de 500 à 600 jeunes
assistés sociaux peuvent manger trois repas par jour grâce aux
dons de la population locale et au travail de bénévoles? C'est
là, nous croyons, un exemple de solidarité communautaire qui
devrait faire réfléchir ceux qui se permettent trop souvent de
tenir en otages des malades, des personnes âgées et ce, à
des fins strictement corporatistes. Nous ne voulons plus vivre dans une
société corporatiste dominée par le chacun pour soi.
Le syndicalisme sacrifié. À titre de syndicaliste
étudiant depuis de nombreuses années, je ne peux m'empêcher
de constater que le syndicalisme actuel s'autodétruit, se
discrédite par son discours égocentrique et "nombriliste". Tout
se passe comme si la société devait tourner autour des
conventions collectives et que le bien-être des uns procurait
automatiquement le bonheur des autres.
Quand on milite dans les associations étudiantes, on
hésite maintenant à employer le mot "syndicat" tellement il est
associé au corporatisme et évoque l'absence de conscience
sociale. Pensons aux traditionnelles grèves des transports en commun de
Montréal et de Québec, où l'absence de services essentiels
est considérée comme un moyen de pression de plus, et aux
grèves dans les hôpitaux où la misère des uns sert
d'argument aux autres.
Le discours de gauche dont on se gargarise tant ne sert qu'à
masquer des intérêts corporatistes et ce, au mépris des
plus démunis, des sans-voix et de ceux qui ne peuvent se faire entendre.
On sait fort bien que les revenus des étudiants, par exemple, sont
généralement en dessous du seuil de la pauvreté. Faute
d'emplois ou de débouchés sur le marché du travail, ils
sont souvent condamnés à l'endettement à partir
du système de prêts et bourses. Pourtant, lorsque les
institutions d'enseignement subissent des coupures, on leur en fait payer la
note en augmentant les frais des services. Depuis quelque temps, les
étudiants ont répondu à cela en développant des
services parallèles: café-étudiant, coop de livres
usagés, services de photocopie. Les syndicats ont répliqué
en traitant les associations étudiantes d'anti-syndicales, les accusant
de faire une concurrence déloyale à des services universitaires
régis par de complexes et enviables conventions collectives.
Si nous voulons une plus grande implication des usagers de services dans
le processus de décision, c'est que le syndicalisme actuel est devenu
socialement irresponsable, parce que trop corporatiste. La belle époque
des années soixante et du front commun de 1972 est bel et bien
révolue. Le syndicalisme québécois a déjà
été une locomotive de progrès social, il est maintenant
essoufflé, marqué par le repli sur soi et par un discours de
gauche nostalgique et dépassé, faute d'une véritable
remise en question. Le syndicalisme d'aujourd'hui a adopté l'attitude de
la surprotection des acquis, de la pratique du camouflage et de la
bureaucratisation des relations de travail.
Le faux débat de la sauvegarde de la démocratie. Avant de
parler de préserver la démocratie dans notre
société, les syndicats devraient se préoccuper de
l'absence de démocratie à l'intérieur des institutions
d'enseignement, alors qu'on refuse aux étudiants et aux parents un
pouvoir de décision véritable, sous prétexte de subir
l'arbitraire d'un tiers. Alors que l'école et l'enseignement sont sous
la gouverne du laisser-faire et du laisser-aller, on refuse toute forme de
contrôle ou d'évaluation.
Il est facile d'en conclure que le système d'éducation au
Québec est soumis à l'arbitraire des uns par crainte de
l'arbitraire des autres. Les professeurs sont régis dans leurs moindres
faits et gestes par la sacro-sainte convention collective, imposant ainsi leur
hégémonie et leur propre arbitraire sur tout le milieu
scolaire.
Il faut se rendre à l'évidence que le syndicalisme tel que
pratiqué actuellement ne peut et ne doit pas servir de modèle de
progrès social. Les syndiqués qui refusent de suivre
aveuglément les consignes et qui sont explusés de leur syndicat
savent pour quelle démocratie ils se battent. C'est du syndicalisme
où des mutations doivent se faire de toute urgence.
L'école ne doit plus servir de bastion au syndicalisme
corporatiste, mais doit plutôt être ouverte à la
communauté et responsable dans son fonctionnement. Qu'on me comprenne
bien, nous voulons que le syndicalisme demeure, mais il doit subir de profondes
mutations.
Un gouvernement sacrifié. Le gouvernement actuel n'a pas su
s'élever au-dessus du rituel de la traditionnelle confrontation
invoquant les restrictions budgétaires. Il a complètement mis de
côté le processus de négociation pour adopter loi
spéciale par-dessus loi spéciale, utilisant ainsi nos
institutions démocratiques comme véhicule de moyen de pression,
minant ainsi la légitimité et la crédibilité de
notre Parlement.
D'autre part, le gouvernement actuel est mal placé pour faire la
leçon. En suspendant les amendes aux syndicats, dès son
arrivée au pouvoir en 1976, il a, du même coup, miné la
crédibilité de l'institution parlementaire. On ne peut se
surprendre qu'il récolte ce qu'il a semé.
À titre de citoyens responsables, nous croyons que les
excès de lois et les excès de représailles jettent le
discrédit sur l'institution parlementaire. À cet égard, le
gouvernement devrait abroger ou, tout au moins, suspendre l'application de la
loi 111. Son pouvoir moral y gagnerait en évitant de faire des
enseignants des martyrs. L'opinion publique est très sensible et
très humaniste. On ne peut manoeuvrer la Charte des droits et
libertés de la personne sans toucher une corde sensible. La
légitimité d'un gouvernement est dépendante de son pouvoir
moral. C'est lui qui soutient et appuie son pouvoir exécutoire.
Pour que le gouvernement trouve des appuis chez les usagers de services,
il faut, au départ, qu'il définisse un véritable projet
d'école et un véritable projet de société. Dans ce
sens, le livre blanc du ministre Laurin trace une piste intéressante
vers l'école communautaire et responsable. Si l'orientation de ce livre
nous paraît séduisante dans ses intentions, c'est au niveau des
moyens mis à la disposition des usagers de services pour s'organiser que
nous notons une grande faiblesse.
À ce titre, nous revendiquerons, dès la prochaine session
parlementaire, un nouveau cadre juridique permettant une meilleure
reconnaissance et un financement plus stable de nos associations
étudiantes. Rappelons que le présent cadre juridique de
reconnaissance des associations étudiantes, c'est-à-dire la
troisième partie de la Loi sur les compagnies, organismes à but
non lucratif, est inadéquat. Il ouvre la porte à l'arbitraire
quant à la perception des cotisations et quant à la
reconnaissance de nos organisations.
De plus, nous demandons la participation d'une tierce partie à
l'école, parents ou étudiants selon le niveau, afin de mettre fin
à la polarisation et à l'arbitraire actuels.
De la société sacrifiée à la
société communautaire. Les droits des uns ont comme limite
l'absence de droit des autres. Une approche communautaire. En crise
économique, il importe de mettre en commun ses ressources
humaines et physiques et ce, au profit de la communauté. Il faut mettre
fin au gaspillage et au dédoublement des ressources. Pour parvenir
à de véritables changements, il faut tout d'abord changer les
mentalités. Cela ne peut se faire qu'en définissant un nouveau
code d'éthique sociale, ce que l'on appelait dans la
société corporatiste un contrat social. Le nouveau code
d'éthique sociale doit passer par le développement d'une
solidarité nouvelle, de citoyens nouveaux qui cessent d'être des
consommateurs passifs et désabusés. Il nous faut devenir des
citoyens responsables de la coopération communautaire,
c'est-à-dire de la mise en commun des ressources par la
solidarité communautaire.
Pour y parvenir, nous proposons, premièrement, la création
d'un fonds de développement et de solidarité communautaire
à partir d'une contribution minime des entreprises privées et des
travailleurs des secteurs public et privé. Hier, on a eu, justement, un
exemple que ce courant a fait du chemin avec le fonds que proposait la
Fédération des travailleurs du Québec pour trouver des
emplois dans le secteur privé. Deuxièmement, nous proposons la
création d'un centre étudiant de services communautaires,
appelé CESC, permettant d'utiliser le potentiel étudiant,
à travers sa formation, pour le mettre au service de la
communauté et, particulièrement, des plus démunis. Le CESC
deviendrait une solution permanente permettant d'amorcer le changement de
mentalités et de promouvoir la solidarité communautaire. Le CESC
pourrait devenir un instrument permanent permettant aux plus démunis de
se prendre en main et constituerait un véritable investissement social
et économique d'une portée inestimable. Il devrait, d'ailleurs,
être financé en grande partie par le fonds de développement
et de solidarité communautaire. On pourrait penser que le CESC serve de
cadre à l'implication volontaire des jeunes. Vous avez, d'ailleurs, dans
vos documents en annexe notre projet de CESC.
En conclusion, nous espérons que notre intervention sera
perçue de façon constructive. Nous croyons que notre
société est en mutation et qu'il faut changer les
mentalités. Comme le veut le slogan du Sommet québécois de
la jeunesse qui se tiendra cette année, "il faut s'unir pour s'en
sortir". Je vous remercie de votre patience, mais cela faisait longtemps que
nous attendions ce moment pour nous exprimer.
Le Président (M. Jolivet): M.
Baillargeon, vous avez dit, à la fin de votre intervention, qu'il
y avait un document en annexe. Je n'en ai pas eu copie. Ah, il est à
l'intérieur de la pochette?
M. Baillargeon: Oui, à l'intérieur de la
chemise.
Le Président (M. Jolivet): Parfait! Avant de continuer,
j'aimerais simplement dire que, pour dépôt à la commission,
il sera donné à chacun des membres et à ceux qui en
voudront, selon les formules habituelles, un mémoire
présenté à la commission parlementaire de
l'éducation sur la position des étudiants du collège
Édouard-Montpetit et par l'Association générale des
étudiants du collège Édouard-Montpetit, mémoires
qui sont arrivés à mon bureau hier après-midi.
Je tiens à faire remarquer, à tous ceux qui auront
à intervenir de vous partager le temps le plus équitablement,
puisque déjà six personnes m'ont dit qu'elles avaient l'intention
d'intervenir d'ici 11 h 35. La parole est d'abord à M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, j'ai pris un très vif
intérêt à la lecture et à l'audition du
mémoire qu'on vient de nous présenter, d'abord parce que ce
mémoire est sérieux, marqué au coin du sens des
responsabilités. Je pense qu'il est temps plus que jamais que nous
entendions la voix des étudiants et de leurs organismes dans tous les
grands débats sociaux que nous avons, et, particulièrement, dans
le domaine de l'éducation.
Le sens de l'éducation, c'est de faire de l'étudiant,
comme on vient de le dire, non pas un consommateur passif, non pas simplement
un usager, mais un être libre, autonome, responsable et qui participe
à son développement. Et je pense qu'on ne peut le faire
participer à son développement que si on l'implique
lui-même dans les responsabilités du système
d'éducation. À ce titre, j'accueille avec
énormément d'intérêt la suggestion qui nous est
faite d'un organisme qui verrait à ce que cette implication dans la
structure et le fonctionnement des écoles et des collèges
devienne effective. On peut, certes, s'interroger sur l'une ou l'autre des
modalités, mais le principe devrait être acquis aussi bien
à l'école secondaire qu'au collège ou à
l'université. Et à ce titre, effectivement, il faudra que ce
droit soit reconnu d'une façon structurelle, qu'on assure à ces
organismes étudiants un financement stable et aussi qu'on voie à
ce que, dans le fonctionnement des écoles et des collèges, leur
voix soit véritablement non seulement entendue, mais prise en compte.
Car il convient absolument - c'est un droit qu'on ne peut leur contester - que
les étudiants aient leur mot à dire sur les plans de cours, sur
les plans de travail, sur les méthodes de certification,
d'évaluation, d'examens. Et, à ce titre, j'accueille avec
beaucoup d'intérêt les suggestions qui nous sont faites ce
matin.
Bien sûr, ce mémoire est tellement riche qu'on ne peut
l'épuiser par quelques
questions. Mais je peux assurer le représentant étudiant
qui nous parle ce matin que c'est pour nous un document précieux que
nous étudierons, mais qui surtout inspirera les décisions dans
l'année qui vient.
Je pense aussi qu'il faut entendre les étudiants sur les grands
enjeux sociaux qui se posent actuellement à notre société.
Il revient à eux de nous dire leur opinion sur la façon dont nous
devrions les aborder et dont nous devrions les régler. Et, à ce
titre, j'ai été frappé non seulement par le
caractère sérieux, responsable, réaliste et concret de
leur mémoire, mais aussi par son caractère
généreux, marqué au coin du sens des
responsabilités et de la justice sociale.
En fait, la seule question que je voudrais vous poser, c'est celle-ci:
Croyez-vous qu'il est opportun de faire en sorte que les ressources, dont
dispose actuellement notre collectivité, soient réparties de la
façon la plus juste qui soit, aussi bien sur la mission sociale que sur
la mission éducative?
Le Président (M. Jolivet): M.
Baillargeon ou M. Houle?
M. Rivest: Y a-t-il quelqu'un qui est contre cela?
Le Président (M. Jolivet): M.
Baillargeon, vous avez la parole.
M. Baillargeon: Vous avez souvent l'art, M. le ministre, de poser
des questions qui en fait, sont tellement larges que personne ne peut
être contre, évidemment. C'est-à-dire que les intentions
des gens sont pour la vertu, évidemment. Mais il est évident que,
pour nous, actuellement, il ne s'agit pas de dire: Bon, les méchants, ce
sont ceux... Ce serait facile, ce serait peut-être même
démagogique de dire que les revendications actuelles des professeurs
vont enlever le minimum dont ont besoin les plus démunis, vont enlever
"le pain dans la bouche de la veuve et de l'orphelin". Je pense que ce serait
injuste de tomber dans cet extrême. (11 heures)
Par contre, il faut voir aussi - et c'est un peu notre attitude, sans
avoir employé ces termes-là - qu'on aurait parfois le goût
d'être méchant parce qu'on en a beaucoup sur le coeur. Il y a une
attitude de génération actuellement. Quand on dit une
génération, c'est peut-être deux. Ceux qui nous ont
précédés ont eu un projet de société, qui
était de développer l'État québécois, de
développer des services à la population. Ce projet de
société social-démocrate, les deux partis ici
présents ont beaucoup contribué à l'élaborer ce
projet à travers, nos institutions. Avec la crise économique, les
coûts nécessaires pour soutenir ces institutions nous ont
amenés à faire des choix et à remettre en question
l'utilisation de nos ressources, parce que justement les ressources sont
limitées. C'est difficile après dix ans de fonctionnement selon
un rythme où, entre autres, on négociait selon un rapport de
force pour essayer d'en avoir plus.
Je me souviens que, quand on revendiquait des
réaménagements, si minimes soient-ils, au niveau du régime
des prêts et bourses lors de nos grèves en 1974 et 1978, quand le
syndicalisme étudiant a repris de sa vigueur, on se faisait traiter de
corporatistes et on nous disait que cela était exagéré
parce qu'on ne faisait pas les grandes luttes glorieuses des années
soixante: la guerre du Vietnam, etc. Nous, on se fiait au modèle acquis
selon lequel tout le monde disait qu'il fallait établir un rapport de
force. Donc, on faisait une grève et on disait qu'on voulait en avoir
plus. Le modèle était celui-là. C'est l'héritage
qu'on a eu de la génération précédente.
Maintenant, nous sommes rendus à un tournant. Notre
société est en mutation et on doit partager davantage les
ressources actuelles. Dans ce sens-là, je crois qu'il y aurait moyen, en
ce moment, et là je tends à peu la perche du côté
syndical... Je prends un exemple concret qu'on a vécu à
l'Université de Montréal l'an dernier. Il y avait eu 105
professeurs de mis en disponibilité à cause des coupures
budgétaires. L'ensemble des professeurs d'université a
accepté de baisser de 1% son indexation de salaire pour permettre le
réengagement des 105 professeurs. C'est cela, de la solidarité.
Ils se sont dit: On verra dans l'avenir à faire notre part.
C'est un peu cela qui pourrait se passer actuellement, si l'ensemble des
professeurs du Québec acceptait - même s'ils ont
déjà subi beaucoup, il est vrai, plus que leur part par rapport
à d'autres travailleurs, et il faut le reconnaître - au niveau des
mises en disponibilité de 80% la première année, de 80% la
deuxième année et de 50% la troisième année, une
légère baisse de salaire pour permettre le réengagement
des autres professeurs qui seraient mis en disponibilité. Si on augmente
la tâche - parce que notre conception est de dire qu'une
légère augmentation de la tâche ne remettra pas en question
de façon irrémédiable la qualité de l'enseignement
- on souhaiterait - et beaucoup de professeurs seraient prêts à le
faire - qu'ils s'impliquent dans des projets communautaires pour aider les plus
démunis de notre société, les jeunes qui ne font rien
actuellement.
D'une part, qu'on accepte une baisse de salaire pour permettre que tout
le monde ait un plein salaire et d'autre part, que ceux qui seront mis en
disponibilité travaillent à des projets et à des travaux
communautaires. Ce sont des propositions concrètes. Nous l'avons dit
déjà aux professeurs. Ils connaissent notre
proposition. On trouve cela acceptable socialement actuellement. Ils
auraient beaucoup de crédibilité aux yeux de l'opinion publique
d'accepter une telle proposition.
Par contre, au niveau gouvernemental, il faudrait arrêter
d'émettre dans l'opinion publique que les professeurs, par leur
façon de revendiquer, empêchent irrémédiablement
qu'on investisse dans des projets de création d'emplois. Si le
gouvernement reprenait notre proposition et la proposait aux professeurs, on
l'appuierait et on essaierait de convaincre les syndicats de professeurs de
l'accepter.
Le Président (M. Paré): Vous avez terminé?
La parole est maintenant à M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: J'essaierai de faire cela brièvement.
J'émettrai une note légèrement discordante. Je pourrais
bien faire des compliments sur toute la ligne, comme le ministre l'a fait, mais
je pense que cela n'avancera pas beaucoup la discussion.
J'ai noté les critiques que vous faites au sujet de certains abus
du syndicalisme. Je voudrais vous rappeler que la structure bipolaire que nous
avons en matière d'organisation de rapports du travail est la meilleure
qu'on ait trouvée jusqu'à maintenant dans les
sociétés industrialisées. On n'a pas de modèle de
remplacement à court terme. Je pense qu'il faut plutôt viser
à améliorer celle-là qu'à remplacer les
éléments de structure fondamentale sur lesquels elle repose. S'il
y avait autre chose... Il y a bien des gens qui font de la recherche; on en
paie dans les universités pour faire des recherches là-dessus,
mais cela n'avance pas vite. Je vais vous dire une chose peut-être bien
étonnante pour vous, c'est que les progrès les plus rapides se
font généralement par des perturbations sociales, que n'aiment
pas les gouvernements, encore plus que par les recherches. Les deux ont une
part de contribution, mais il faut voir cela d'une manière très
pratique.
Je trouve un peu bucolique la manière dont vous abordez le
conflit dans lequel nous sommes pris. Je vous le dis bien simplement pour qu'on
ait un échange de vues vrai et sincère. Il y a des propositions
dans votre mémoire dont j'aimerais bien discuter. Je ne suis pas enclin
à en discuter parce que la commission parlementaire est réunie
à une fin précise: recevoir les vues des organismes sur un
conflit précis qui existe actuellement, qui s'achemine vers un
dénouement que nous souhaitons paisible et heureux pour tous. Certaines
propositions que vous faites sont intéressantes, mais il y aurait
peut-être lieu de les étudier à un autre forum que
celui-ci. Quand vous demandez, par exemple, ia création d'une commission
indépendante sur les cégeps, commission impartiale
d'étude, nous y sommes favorables. Personnellement, je trouve que si
vous demandiez au ministre de convoquer la commission parlementaire de
l'éducation pour étudier le problème des cégeps,
pour une couple de jours, comme nous l'avons fait pour le conflit actuel, nous
collaborerions volontiers et nous aurions le temps d'aller en profondeur dans
l'examen d'une proposition comme celle-là. Mais je ne ferai pas ce qu'on
est peut-être enclin à faire en disant: Oui, c'est très
bien, très bien. Parce que dans la réalité de tous les
jours, ce n'est pas ainsi que cela se passe. Je vous dis cela bien
simplement.
J'ai essayé de voir dans votre mémoire ce qui regarde le
conflit. J'ai trouvé une proposition. Vous êtes favorables
à l'entrée en scène d'une tierce partie qui pourrait aider
au rapprochement des deux parties dans les échanges qu'elles doivent
avoir pour en arriver à un règlement raisonnable et
réaliste. Je veux vous dire que je suis tout à fait d'accord
là-dessus. Si vous avez des précisions à donner quant aux
modalités que cela pourrait revêtir, quant à
l'utilité que cela pourrait avoir dans le stade actuel du conflit, ce
serait très bien. S'il y a d'autres remarques que vous aviez à
faire au sujet des moyens possibles auxquels on pourrait recourir en vue de
favoriser un règlement ou une démarche plus rapide vers un
règlement du conflit, je pense que cela pourrait être très
utile. Encore une fois, ce n'est pas par manque d'intérêt pour
d'autres aspects - mes collègues pourront y revenir, je vous donne
simplement ma réaction personnelle - bien au contraire, mais
étant donné les contraintes dans lesquelles nous évoluons,
si vous aviez des précisions à apporter là-dessus, je
l'apprécierais.
M. Houle: Donc, si vous le permettez, M. le député
d'Argenteuil, au risque de vous contredire un peu, nous mentionnons dans notre
mémoire que - nous avons écouté avec attention les
sous-ministres avant-hier et les enseignants de cégeps, hier matin - le
débat entourant la tâche, la sécurité d'emploi et
l'autonomie départementale semble un faux débat. Les enseignants
mentionnaient, hier, de façon assez claire, avec leur retour sur le
fameux PREC (projet de réglementation de l'enseignement
collégial) que le débat se situait à ce niveau. Nous
accusons aussi les deux parties, dans notre mémoire, de s'être
mises la tête dans le sable et d'avoir fait un débat biaisé
sur ces trois éléments plutôt que sur ia réforme
scolaire.
Concernant notre intervention ici qui peut être
considérée comme un peu décrochée par rapport aux
trois éléments de la négociation, je dois vous rappeler
que c'est à peu près la seule tribune que nous avons pu obtenir
pour nous faire entendre sur ce sujet.
Maintenant, concernant votre intervention sur la seule proposition que
nous
faisons, qui est d'introduire une tierce partie dans les
négociations, tout au moins, nous serions prêts à faire la
concession suivante: une tierce partie quant à la redéfinition du
processus de négociation parce qu'il faudra s'y pencher. Je pense que la
grève, entre autres, est devenue quelque chose d'inacceptable en temps
de crise économique surtout. On pourra faire le débat
là-dessus une autre fois.
Il y a des propositions concrètes dans notre mémoire, de
toute façon. Je voudrais simplement vous rappeler que nous ne sommes pas
nécessairement en désaccord avec l'augmentation de la
tâche. Je pense que c'est une proposition qui peut être
jugée comme concrète. Dans un deuxième temps, nous
apportons une alternative valable à l'aménagement du
département. Les modalités, on pourra aussi y revenir. C'est le
principe que nous voulions énoncer ici, beaucoup plus que les
modalités. Nous pensons que les professeurs doivent avoir des comptes
à rendre non seulement aux administrateurs, mais aussi aux usagers du
service que sont les étudiants. C'est dans ce sens que la proposition a
été faite.
D'autre part si on veut continuer le débat sur le corporatisme et
savoir ce qu'on fait des professeurs mis en disponibilité - doit-il y en
avoir 300 ou 2000? Il y a une guerre de chiffres à ce niveau et nous ne
voulions pas, nous les étudiants, tomber dans une guerre de chiffres -
nous amenons une alternative que nous jugeons valable de réaffecter les
professeurs mis en disponibilité à des tâches
communautaires, ou de la conception et de la supervision de projets, etc. Cela
pourrait faire l'objet d'un bon débat aussi. Ce sont des choix qu'on
propose. Donc, on pense faire des propositions concrètes malgré
tout, ici.
Deuxièmement, vous mentionniez, M. Ryan, que le but de la
commission n'était pas nécessairement cela, que la
réalité était tout autre, etc. Je dois vous rappeler
simplement que nous apportons ici le point de vue des étudiants et que
la réalité au niveau des étudiants peut être
vécue de façon différente aussi.
M. Baillargeon: Un complément de réponse.
Le Président (Paré): Oui.
M. Baillargeon: II est clair que, s'il y a une tierce partie en
vue du rapprochement des deux parties actuelles, cela ne doit pas se faire en
secret au Hilton. Est-ce qu'on se comprend là-dessus? Parce que cela
fait assez de temps qu'on perd et là, il y a encore une grève qui
aura peut-être lieu le 14 mars. S'il y a une tierce partie, ce n'est pas
un spécialiste de la question qu'on veut. Cela prend des gens qui ont un
pouvoir moral sur les deux parties pour les rapprocher.
Nous proposions d'avoir une commission, un comité de
médiation à un moment donné où il y aurait des
usagers de services, parents et étudiants, des représentants
même de milieu syndical, du secteur privé, du clergé, etc.,
pour le rapprochement des deux parties. Parce que le débat n'est pas
à un niveau technique. Le débat est beaucoup plus haut que cela
actuellement. Nous, on est tanné de subir un climat
d'insécurité tout le temps et de se demander: Est-ce qu'on va
avoir une grève demain matin, etc?
Je pense - M. le député d'Argenteuil doit être
d'accord avec cela - qu'il faut qu'il y ait un déblocage et, pour qu'il
y ait un déblocage, il faut une tierce partie qui a un pouvoir moral
véritable. Nous faisons des propositions et ce qu'on veut, c'est que les
deux parties se prononcent sur nos propositions.
Deuxièmement, au niveau du système de négociation,
vous avez dit: On n'a pas trouvé de meilleur système actuellement
que celui qui nous régit. Nous, nous proposons la venue d'une
troisième partie, justement, d'une tierce partie. Si c'est bon pour le
rapprochement dans les négociations, cela peut peut-être
être bon de façon permanente aussi. Vous devriez
réfléchir à cette question et convoquer des usagers de
services, parents ou étudiants, lorsqu'il y a des négociations
qui englobent les conventions collectives. Les négociations actuelles
débordent de beaucoup la question de la tâche, de la
sécurité d'emploi; elles englobent aussi le régime
pédagogique, les rapports professeurs-étudiants. Alors, il faut
que les étudiants et les parents soient mis à contribution dans
les futurs régimes de négociation. Vous devriez y
réfléchir sérieusement parce que ce serait innovateur et
cela pourrait devenir un modèle peut-être au niveau mondial
même. Qu'on cesse, justement, de se chicaner comme cela semble être
le cas actuellement pour tirer la couverture chacun de son bord. Je pense que
vous êtes d'accord avec nous que le processus actuel n'est plus
crédible aux yeux de la population, ni aux yeux de personne.
Le Président (M. Paré): Merci. La parole est
maintenant au député de Vachon.
M. Payne: Je pense qu'on pourrait profiter aujourd'hui de cette
commission pour essayer d'élargir le débat. Je m'inspire du
mémoire qui vient de nous être présenté pour
exprimer encore une fois mon étonnement qu'au moment où la partie
patronale demande un plus grand rendement, une productivité accrue de
ses employés publics ou enseignants on s'apprête quand même
- pour moi, il s'agit d'un manque de cohérence - à accorder 80%,
80%, 50%
année après année pendant trois ans, sans demander
aucun rendement en retour. (11 h 15)
Je serai très concret parce que je pense que nos électeurs
sont très intéressés à regarder ce genre de
problèmes de près. Je regarde le comté de Vachon, par
exemple. Il y a 18 mois, au début de la crise, nous avons
instauré le centre de référence et d'information de
Vachon. On a cherché par tous les moyens à avoir l'aide du
gouvernement pour que ce centre puisse fonctionner convenablement. Cela
travaille et cela fonctionne à cause du bénévolat. Mais
pourquoi la partie patronale n'a-t-elle pas essayé de discuter des
modalités pour que ceux qui sont mis en disponibilité puissent
être "utilisés au service de la collectivité"? Je n'aime
pas utiliser ces mots mais cela revient à cela. Dans le décret -
c'est peut-être cela, la nature de la bête: un décret, c'est
plutôt une espèce de code juridique, une espèce de codex -
on parle d'un programme de recyclage prévu pour les professeurs mis en
disponibilité. J'ai dit l'autre soir et je le répète
encore: II y a un manque de précision dans ce programme. De quel
programme s'agit-il?
Un peu plus loin dans le même décret, on parle d'un
comité paritaire de placement. De quoi s'agit-il? Je considère
qu'on devrait discuter avec les syndicats dès la semaine prochaine de
toute une série de mesures que vous, particulièrement, pouvez
porter à leur attention et discuter peut-être avec le conseil des
collèges, la partie patronale, et avec la Fédération des
cégeps. Les prêts de services auprès des organismes
communautaires, je pense que c'est une excellente idée. Chez nous, dans
notre comté, il y a très peu de place où les jeunes
peuvent se rassembler. Je peux vous dire que même le bureau du
député devient une espèce de "drop in centre" souvent.
C'est déplorable. Je déplore aussi qu'avec le manque d'entente
entre les municipalités en temps de crise on ne soit pas capable
d'utiliser nos services communautaires, nos écoles, comme locaux pour
nos jeunes chômeurs qui ne gagnent que 144 $ par mois. C'est
scandaleux.
J'aimerais bien élargir aujourd'hui le débat pour discuter
des problèmes de la société en général. Je
demande que la partie patronale reconsidère cette offre gratuite de 80%,
80%, 50%. Quel chauffeur de taxi, quel travailleur, pourrait avoir cet avantage
social qui, à mon avis, peut être nécessaire, est
très intéressant, est très important, mais, en retour,
pourquoi? Avez-vous des commentaires?
Le Président (M. Paré): M. Houle.
M. Houle: M. le Président, brièvement, je voudrais
remercier le député de Vachon pour son ouverture sur cette
question. Pour reprendre ce que mon collègue, Jean Baillargeon, disait
tout à l'heure, c'est dans ce sens que nous abordons un discours
d'utilisation maximale des ressources dans cette société. Il y a
122 comtés au Québec qui auraient probablement besoin de projets
communautaires. Les modalités ne sont pas définies parce que,
nécessairement, on ne sait pas où le gouvernement veut en venir
clairement sur cette question. On parle d'un fonds de relance de l'emploi, on
parle d'un service communautaire, etc. Je pense que les syndiqués mis en
disponibilité seraient d'accord avec cette alternative dans la mesure
où on revalorise l'implication communautaire. À ce
moment-là, il ne serait plus question de 80%, 80%, 50%, ou de 80%, 50%,
50%, pour les années de mise en disponibilité. Il y aurait
probablement le maintien de la masse salariale et une équité
envers et les professeurs mis en disponibilité affectés à
des projets communautaires pour la relance de l'emploi et les professeurs qui
enseignent. Donc, ce serait 100% pour tout le monde, dans la mesure où
on serait capable de réduire un peu le traitement à ce niveau.
C'est tout ce que je voulais dire.
Le Président (M. Paré): Merci. La parole est
maintenant au député de Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Je tiens, d'abord,
à vous remercier pour la présentation de votre mémoire. Je
n'ai qu'un léger commentaire général à formuler.
Évidemment, on a dit sur toutes les tribunes que les jeunes actuellement
sont les premières victimes de la crise, si on se reporte à la
récession économique et également si on se
réfère au conflit actuel entre les enseignants et le
gouvernement. Je pense qu'effectivement vous êtes, encore une fois, les
victimes de ce conflit et votre présence ici aujourd'hui est plus
qu'appréciée - j'en suis persuadé - par la majorité
des parlementaires de la commission.
Le ministre nous disait tantôt, un peu avec des voeux pieux, qu'il
était pour vous écouter - comme on. l'entend souvent dans un sens
large - qu'il va voir à vos préoccupations et entend
éventuellement régler pas mal tous les problèmes.
D'ailleurs, depuis deux ans, j'ai eu l'occasion de travailler au projet de
règlement des études collégiales. J'ai aussi eu l'occasion
de m'entretenir avec vous sur le projet en question. Apparemment, il attend
toujours le résultat des consultations avec les associations
étudiantes. Je vois d'un bon oeil votre proposition de la
création d'une commission indépendante avant que le ministre
agisse d'une façon ou d'une autre pour mettre en application la
majorité de ce qu'il propose dans son projet.
Concernant le financement des associations étudiantes, je suis
aussi content que vous l'ayez soulevé. Ce n'est peut-être pas
nécessairement le but de la commission actuelle de voir à
régler ces problèmes, mais, comme vous le savez, il y a un
échéancier le 1er avril. Il est donc de toute urgence d'aborder
cette question dans les plus brefs délais, quitte à convoquer une
commission parlementaire spéciale à un moment donné sur
l'éducation, sur les problèmes des collèges, autant en ce
qui a trait au financement des associations étudiantes qu'en ce qui a
trait à l'application du projet de règlement des études
collégiales.
Maintenant, je suis également content que le député
de Vachon se scandalise au même titre que l'Opposition du sort qui est
réservé aux jeunes en bas de trente ans, célibataires,
avec 30 $ par semaine pour vivre. Je suis très heureux qu'il se joigne
à nous pour tenter de convaincre le ministre Marois de modifier cela au
plus sacrant.
Pour revenir de façon plus précise à votre
mémoire, relativement aux professeurs en disponibilité, on a
créé une certaine ouverture. Est-ce que vous avez eu des
conversations sur ce sujet avec le monde syndical? Évidemment, le
terrain est extrêmement chaud actuellement. Mais est-ce que vous avez eu
des communications avec le monde syndical relativement aux professeurs en
disponibilité afin qu'on s'en serve comme personnes-ressources dans les
projets communautaires pour aider la jeunesse qui est en pleine crise
actuellement, en pleine catastrophe?
Le Président (M. Paré): M. Baillargeon.
M. Baillargeon: Oui, effectivement, on a eu de nombreuses
conversations; eux, pour nous convaincre de leurs arguments et nous, pour les
convaincre des nôtres. Là-dessus, il y avait une ouverture dans
les intentions. Je ne crois pas que la partie syndicale serait contre le fait
que les professeurs puissent être affectés à des projets
communautaires, qu'ils fassent quelque chose. Ce n'est pas sur ce sujet, je
pense, quoique souvent on nous renvoie la balle. Si je me souviens bien des
conversations, on disait: C'est au niveau gouvernemental qu'on est contre. Il
semble que ce soit cela. Quand je vais voir le côté gouvernemental
- parce qu'on fait souvent la navette - on nous dit: Non, ce sont les
professeurs qui sont contre. Quand les deux nous disent qu'ils sont pour cela,
on se demande quand il y aura des propositions concrètes pour faire en
sorte que les professeurs qui seraient mis en disponibilité puissent
être affectés à des projets d'implication communautaire.
Les deux parties nous disent que c'est l'autre qui ne veut pas; en tout cas,
cela bloque de l'autre côté. Dans ce sens, oui, il y avait une
ouverture, d'après les conversations que j'ai eues.
Il y avait aussi une ouverture du côté syndical, sauf que
là revient toujours la même question: On fait toujours un "package
deal", c'est tout ou rien, c'est la tâche, la mise en
disponibilité, les 80%, 50%, etc. On veut toujours se situer dans cet
ensemble. Avec nos propositions d'aujourd'hui, on espère pouvoir trouver
un compromis, un moyen de rapprochement des deux parties, comme je l'ai dit
tout à l'heure. Notre proposition, c'est que les professeurs soient
solidaires entre eux et acceptent peut-être une légère
baisse de salaire pour que tout le monde puisse avoir un salaire à 100%
et que l'argent qui serait économisé là-dessus puisse
être affecté à des programmes d'emploi chez les jeunes,
entre autres, et que les professeurs mis en disponibilité encadrent ces
projets d'implication communautaire. Là, tout le monde serait satisfait,
puis ce serait vraiment un geste d'ouverture vers la communauté, vers la
société.
M. Houle: Si vous me le permettez, M. le Président, pour
rassurer un peu le député de Marquette concernant la consultation
sur le projet de réglementation des études collégiales, je
voudrais simplement rappeler à cette commission ce que je rappelais au
ministre de l'Éducation dans une lettre que je lui écrivais
récemment.
À l'heure actuelle, le climat qui persiste dans les cégeps
ne permettrait pas, malgré le fait que le décrets semblent
être la locomotive d'une réforme préméditée,
l'implantation d'un nouveau régime pédagogique où l'on
pourrait avoir la collaboration de tous les intervenants de l'enseignement.
Dans ce sens, la commission d'étude ou la commission indépendante
d'étude ou une commission parlementaire, peu importe, serait très
pertinente à ce niveau-là. Il serait difficile, justement, de
procéder à une réforme, surtout avec l'attitude ou avec le
climat dans lequel se trouve le corps professoral, entre autres, à
l'heure actuelle. J'aimerais qu'on étudie sérieusement cette
question.
Le Président (M. Paré): Merci.
M. Dauphin: Est-ce que j'ai droit à une autre
question?
Le Président (M. Paré): Oui, allez, M. le
député de Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Vous avez eu
l'occasion à trois ou quatre reprises depuis le début du conflit,
je crois, de faire des conférences de presse sur vos
préoccupations et tout ça. Maintenant, vous avez sûrement
entendu, hier après-midi, le
mémoire de la CEQ relativement à l'une de ses
propositions, c'est-à-dire la reprise des négociations au plus
sacrant, évidemment -je pense que tout le monde le souhaite - et la
présence d'un observateur ou médiateur.
Tantôt, dans votre mémoire, vous avez proposé une
médiation spéciale avec un représentant des usagers, du
monde étudiant. J'aimerais juste savoir brièvement si vous seriez
d'accord effectivement que le gouvernement s'empresse également d'avoir
un observateur ou un médiateur ou un conciliateur en présence des
deux parties, aussitôt qu'il y aurait reprise des négociations,
s'il y a reprise.
M. Baillargeon: Notre proposition est connue depuis longtemps.
Cela fait un mois qu'on était d'accord avec la médiation. Du
côté gouvernemental, comme vous le savez, on hésite
à s'ouvrir à un médiateur pour toutes sortes de raisons
qui peuvent être fondées, c'est-à-dire que le gouvernement
ne peut déléguer à une tierce partie ses
responsabilités. Le gouvernement a deux chapeaux finalement, il est
négociateur de la partie patronale et il est aussi gouvernement,
gestionnaire des fonds publics. C'est difficile.
Dans ce sens-là, à la fin, on a
réaménagé notre proposition de médiation et on en
est arrivé à une commission d'information du grand public.
Là, on voulait finalement que les parties en présence dans cette
commission, où il y aurait des représentants des usagers et aussi
de beaucoup de milieux, entre autres un représentant du milieu des
affaires, par exemple, que tout le monde puisse voir où ça bloque
et trouver un compromis acceptable. Ce serait une tierce partie qui n'est pas
impliquée directement au niveau des deux autres. Cette proposition nous
semblait avoir été acceptée, à un certain moment,
par le ministre, mais le ministre ne l'a jamais déclaré
publiquement.
Probablement qu'il acceptait dans les intentions, mais je suppose
qu'après la commission parlementaire, si ça ne débloque
pas, peut-être qu'il va l'accepter ouvertement; on ne le sait pas. On
l'espère, en tout cas, parce que ce serait vraiment la dernière
chance. Nous, on l'appelait le comité de la dernière chance;
maintenant, on l'appelle la commission d'information du grand public. Le grand
public a le droit de savoir sur quoi ça bloque.
Cette commission ferait une proposition de rapprochement devant
l'opinion publique et les deux parties devraient justifier pourquoi elles ne
peuvent accepter cette proposition de compromis. C'est dans ce sens que nous,
on pense qu'il peut y avoir un déblocage. On espère que
l'Opposition reprendra notre proposition de commission d'information du grand
public qui servirait à rappocher les deux parties, mais qui servirait
aussi à trouver des solutions, justement, aux problèmes des
jeunes, comme vous l'avez dit tout à l'heure. Les professeurs mis en
disponibilité pourraient justement être orientés vers des
programmes d'implication communautaire.
Le Président (M. Paré): M. Houle.
M. Houle: M. le Président, je voudrais juste dire que,
quant à nous, bien que les étudiants le souhaitent, on est un peu
perplexes quant à une reprise des négociations si les deux
parties en présence ne décident pas de laisser de
côté les discours que nous, on qualifie de corporatistes. En tout
cas, je pense que, jusqu'ici, et en voyant la présentation des
différents mémoires, il n'y a pas de volonté de
rapprochement. Dans ce sens-là, on est très déçus.
Je me demande de quelle façon réagiraient, finalement, les jeunes
de cette société quand on voit qu'on n'est vraiment pas
intéressé à étudier une solution valable et qu'on
conserve des discours corporatistes. (11 h 30)
Le Président (M. Paré): Avant de poursuivre, je
voudrais simplement rappeler que, selon l'horaire qu'on s'est fixé, il
resterait cinq minutes pour la période des questions à adresser
à l'organisme de la coalition étudiante. J'ai encore cinq
intervenants à venir. Donc, je demanderais aux gens
d'accélérer autant pour la période des questions que pour
les réponses. La parole est maintenant au député de
Chauveau.
M. Brouillet: Mon introduction sera très brève,
étant donné le temps qu'il nous reste. Je veux tout simplement
féliciter à mon tour les intervenants. Je crois que vous avez
apporté une contribution très valable en ce qui concerne surtout
les attitudes et les mentalités que vous souhaiteriez voir
apparaître dans le décor québécois pour tâcher
de s'unir plutôt que de se diviser et utiliser au maximum nos ressources
pour l'édification de notre société. Il y a un message que
vous livrez, message que nous devrons tous faire nôtre, je crois.
Il y a deux points sur lesquels j'aimerais revenir. Étant
donné le peu de temps, je serai très bref. Tout d'abord la
question de l'utilisation des personnes mises en disponibilité. Vous
avez fait allusion à des services qu'elles pourraient rendre dans des
groupes communautaires. Il y a toute une série de mesures que le
gouvernement proposait pour utiliser les personnes mises en
disponibilité. Parmi ces mesures, la quatorzième se lit comme
suit: "Prêts de services auprès des organismes communautaires".
C'est une mesure qui est mise de l'avant par le gouvernement. Elle fait partie
des mesures non contenues dans
la convention collective. Vous savez qu'il y a toute une série de
mesures contenues dans la convention collective et d'autres qui ne le sont pas.
Je ne sais pas si cela a été déposé
officiellement...
Une voix: On n'a jamais vu cela.
M. Brouillet: ...à quelque table que ce soit. Si cela n'a
pas été fait, je me demande s'il ne serait pas temps de le faire
au sein même de cette commission; qu'il y ait un dépôt de
cette liste de mesures qui comprend, comme je l'ai dit, des "prêts de
services auprès des organismes communautaires". Je suggère que le
dépôt de cette liste de mesures se fasse au sein de cette
commission parlementaire, si cela n'a pas été fait en quelque
lieu ailleurs.
Maintenant, je reviendrais sur un point, qui est très important
dans le débat actuel et qui masque un petit peu, à mon sens,
l'endroit précis où il y a un désaccord et un écart
entre les deux positions. Il y a un concept qu'on utilise, qui masque tout
cela, c'est le concept qualité de l'enseignement. Vous avez
laissé entendre, dans votre mémoire et dans vos propos, que,
d'après vous, il y a dans les cégeps - vous en avez parlé
un peu - une marge de manoeuvre pour augmenter la tâche sans que la
qualité de l'enseignement ne soit en danger. Vous avez fait allusion
à la disponibilité des professeurs dans certaines situations.
Vous avez bien dit - je suis prêt à l'endosser parce que j'ai
passé moi-même quatre ans dans un cégep -qu'il y a vraiment
des professeurs qui, en dehors de leur tâche de cours, sont disponibles
et consacrent énormément de temps à leurs
étudiants. Je crois que c'est la majorité. Je suis même
prêt à le dire. Plusieurs vont au-delà des 40 heures. Cela
aussi, je suis prêt à le reconnaître. Mais il y a une chose.
Il est vrai qu'il y a toute une marge de manoeuvre qui est laissée
à la liberté du professeur. Vous avez fait allusion à des
professeurs qui, effectivement, utilisent cette marge de manoeuvre pour faire
autre chose que de se rendre disponibles pour leur étudiants. Vous avez
rapporté ces faits.
Je vous repose la question. Il serait peut-être bon de
préciser de nouveau votre idée sur ce point. Croyez-vous vraiment
que l'augmentation de la tâche se situe encore dans des limites
raisonnables qui permettent de maintenir une qualité de l'enseignement
au collégial?
M. Houle: Si vous me permettez, brièvement, effectivement,
je pense que vous me citez à la perfection. Pour répondre
à votre question, non, nous ne croyons pas que l'augmentation de la
tâche incluse dans les décrets va nuire à la qualité
de l'enseignement. Cependant, et je pense que c'est clair, là où
on accroche le plus, c'est qu'elle va provoquer une augmentation du nombre de
professeurs mis en disponibilité. Là-dessus, notre proposition se
veut claire, je pense. En tout cas, c'est une option à
étudier.
Effectivement, je dois le dire, ce n'est pas la majorité des
professeurs qui rendraient ce qu'on appelle "des mauvais services aux
étudiants". Cependant, ce sont là des préoccupations
profondes de la masse étudiante. Nous aimerions voir les professeurs
plus impliqués, parce que cette solidarité collégiale,
à l'intérieur de la communauté d'un cégep, n'existe
plus, souvent, peut-être, à cause de la hausse du nombre de
personnes qui étudient dans ces collèges. On sait qu'il y a une
surpopulation dans la quasi-majorité des collèges. Les gens ne
sont plus intéressés ou n'ont plus d'endroit où vivre
à l'intérieur de ces collèges. C'est un autre
élément qu'on ne mentionne pas dans le mémoire. Et je
pense que les étudiants, peu à peu, ont pris le même
modèle que les professeurs, ce qui est dommage pour la vie de
l'enseignement. Une fois les cours terminés, les étudiants
quittent le collège parce qu'effectivement il n'y a plus de place pour
eux dans ces boîtes, en raison de la surpopulation.
Je voudrais vous rappeler que le Conseil supérieur de
l'éducation disait en 1975 que le collège devait être un
lieu d'épanouissement et de développement de l'individu. J'aurais
le goût de poser une question à la commission. Est-ce que vous
pensez que c'est toujours le cas?
Le Président (M. Paré): M. le député
de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président.
Comme les parlementaires avant moi, je me réjouis de voir ici des
représentants des associations étudiantes. J'y vois, M. le
Président, un signe des temps. J'y vois la consécration de
l'intérêt qu'ont les principaux usagers, les consommateurs de
biens pédagogiques. Je vous félicite du travail que vous avez
fait et j'ai été très heureux de vous entendre.
Maintenant, les propos que vous avez tenus dans certains cas me laissent
un petit peu songeur. Je vous rejoins totalement tout d'abord en ce qui
concerne les inquiétudes que vous avez concernant le nouveau
régime pédagogique ou le projet de régime
pédagogique du ministre de l'Éducation. Depuis un certain temps,
il doit se faire une consultation. Je pense que cette consultation, en grande
partie - et je profite de l'occasion pour le dire - est une consultation bidon
qui vise à faire passer le temps, de façon que les
étudiants qui sont actuellement les principaux intéressés
et qui passent un an, deux ans, trois ans au cégep, auront dans un an,
deux ans, trois ans été renouvelés et, par
conséquent, on devra rééduquer, réinventer,
on devra sensibiliser de nouveau une nouvelle clientèle. Et comme on
sait que les problèmes ne manquent pas, que les raisons de prendre des
positions dans des problèmes qui sont plus immédiats ne manquent
pas, il est probable alors que l'intérêt sera beaucoup moins grand
dans un an ou deux. Et je vous incite, vous, les étudiants, à ne
pas lâcher le morceau. La porte où il faut frapper, la porte
où il faut insister et se tenir, c'est la porte du ministre de
l'Éducation. Si vous ne le faites pas, cela va durer un an, deux ans,
trois ans, et vous allez vous retrouver, comme vont nous le dire et nous l'ont
dit un certain nombre d'intervenants dans le domaine de l'éducation,
avec de supposées consultations et on dira: On a fait cela pendant un
an, deux ans et trois ans, et, finalement, tant va la cruche à l'eau
qu'elle se brise. À l'usure, on peut avoir n'importe qui.
M. le Président, cette remarque, je la crois importante et je
crois qu'elle s'insère à l'intérieur des
préoccupations de formation personnelle que vous avez, de formation de
vos pairs, des gens qui sont aux études avec vous. Je sais les efforts
que cela signifie. Et je sais personnellement, pour avoir trois cégeps
dans mon comté, le comté de Louis-Hébert, je sais ce que
cela suppose de sacrifices de la part des étudiants que de faire des
études de la nature de celles qu'ils font, sans aucune garantie, M. le
Président -c'est la tragédie actuellement. Je pense qu'il faut le
dire - sans aucune garantie - et le gouvernement est en grande partie
responsable de cela - d'emplois ou d'avenir qui soit acceptable à la fin
de tout cela. Je pense que c'est extrêmement regrettable.
Les ouvertures que vous faites concernant un
médiateur-observateur sont extrêmement intéressantes. Elles
ont été faites par de nombreuses parties. Elles ont
été faites par l'Opposition. Le ministre a semblé,
à la suite de l'intervention de la CEQ hier, faire une ouverture de ce
côté. Nous en sommes bien aises, mais que de retard à
accepter une chose qui, à l'heure actuelle, entre nous tous,
paraît d'une évidence totale! Pourquoi attendre minuit moins quart
pour agir, alors qu'on s'aperçoit que, finalement, cela semble aller de
soi? Pourquoi ne pas l'avoir fait au moment utile? Est-ce de
l'entêtement? Est-ce du chantage? Est-ce la peur qu'on s'aperçoive
que, finalement, les torts ne sont pas tous du même côté?
Est-ce la crainte de mettre les cartes sur table? Ce sont toutes des questions
qui se posent. Comment se fait-il qu'actuellement tout le monde reconnaît
que la présence d'un observateur, d'un médiateur est quelque
chose de désirable, qu'il a sa place et que cela ne cause de
problème pour personne, et qu'on ait dû attendre la fin de la
deuxième journée de cette commission parlementaire pour
s'apercevoir que le gouvernement semblait se rallier à une telle
proposition? Cela nous permet de nous poser des questions.
En ce qui concerne l'attitude des syndicats de professeurs, vous portez
à certains moments des jugements très durs sur eux. J'aimerais
attirer votre attention sur un certain nombre de choses et vous demander ce que
vous en pensez. En filigrane dans votre mémoire, on trouve une certaine
remise en question de la démocratie syndicale, de la
représentation. J'aimerais attirer votre attention et vous demander si
vous êtes au courant du degré de participation des professeurs aux
assemblées syndicales qui ont décidé des gestes qu'ils ont
posés? En quoi ces assemblées qui ont eu lieu - si vous les
connaissez vous pourrez m'éclairer - auraient pu être plus
représentatives, donner un mandat plus clair au syndicat? Où y
a-t-il eu - s'il y a eu -une lacune? Quelle a été la lacune qui
s'est produite dans ces assemblées syndicales? J'aimerais vous entendre
là-dessus, s'il vous plaît.
Le Président (M. Paré): M. Houle.
M. Houle: Premièrement sur le projet de
réglementation des études collégiales, je vais vous
souligner quelque chose qui apparaît au mémoire et qui semble
très important. À la page 7 on dit que pour nous il est important
de participer à la consultation que le ministre a établie. On l'a
fait, je pense. Certains groupes du milieu étudiant avaient
refusé de le faire par souci bien évident de ne pas collaborer ou
de ne pas se faire "fourrer" et cela est légitime. Cependant nous
disions que nous avions participé à cette consultation pour
établir une position claire, apporter une solution. Cela a
été fait dans ce souci-là. On aurait pu tomber dans des
excès corporatistes et dire: Nous, les étudiants, nous voulons le
contrôle de la pédagogie et commencer à "s'enseigner" de
différentes façons. Nous avons essayé de trouver un
compromis qui pouvait rapprocher toutes les parties. Cela se faisait en
février 1982. Cette phrase se terminait ainsi: "ainsi légitimer
toute action pouvant survenir ultérieurement."
Il est bien évident que les étudiants, à l'heure
actuelle, sont un peu désabusés. Au cours des derniers jours,
dans différents cégeps, entre autres dans la région de
Québec et dans l'Est du Québec, les étudiants ont
posé certains gestes parce qu'ils considèrent qu'ils n'ont plus
rien à perdre. Ils ont dit qu'il y avait une semaine de relâche de
prévue, que nous ne devons pas subir de rallongement au calendrier
scolaire à cause d'une grève que les professeurs auraient faite.
Dans ce sens-là, c'est un peu paradoxal avec les orientations
pédagogiques ou la visée de la qualité de
l'enseignement qu'on voudrait avoir. Pour ce qui est du calendrier scolaire que
les étudiants revendiquaient, pour nous une session de 65 jours qui
serait faite de façon motivée par tout le monde serait aussi
valable qu'une session de 75 ou 80 jours dans les circonstances dans laquelle
la pédagogie est dispensée.
Les orientations pédagogiques, la commission pédagogique
départementale qu'on propose, ont présidé à la
création de la fédération que je représente. Le
discours pédagogique est encore très suivi à ce
niveau-là. Au niveau de la participation des professeurs dans les
syndicats, nous ne tenons pas à tomber dans ce jeu-là, parce que
nous, les associations étudiantes, n'avons pas non plus en
période creuse une représentativité exceptionnelle de nos
membres aux assemblées générales par exemple. On doit
être honnête là-dessus. Il est clair qu'il y a eu une bonne
participation au niveau des syndicats de professeurs quand on vote sur des
grèves ou sur le fait de défier une loi répressive comme
la loi 111. Je ne m'inquiète pas à ce niveau-là. Je lisais
la semaine dernière dans la Presse, dans un article de Mariane Favreau,
que certains professeurs ont subi de la répression de la part de leurs
collègues syndiqués parce qu'ils avaient décidé de
traverser les lignes de piquetage. C'est à ce niveau-là. Si on
veut tenir un discours sur la démocratie, nous sommes prêts
à tenir un discours sur la démocratie, mais pas seulement
à un niveau supérieur; au niveau du système
d'éducation et des syndicats également.
M. Baillargeon: Je cherchais cet article-là qui a
été cité et je ne l'ai pas retrouvé. Une chose est
certaine, c'est qu'actuellement il y a un débat, une campagne qui se
fait au nom de la démocratie au Québec dont une des
coprésidentes est Mme Marie-Andrée Bertrand, de la FAPUQ,
Fédération des associations de professeurs des universités
du Québec. Nous avons eu au niveau du RAEU, le Regroupement des
associations universitaires du Québec beaucoup de contacts avec la FAPUQ
et jamais cette fédération-là n'a accepté que les
étudiants aient une plus grande place dans les structures des
universités, sauf en disant: oui, nous sommes pour la vertu, sauf que
vous ferez vous-mêmes votre bataille, de votre côté. (11 h
45)
On sait qu'historiquement les associations étudiantes se sont
battues, ont appuyé la syndicalisation des professeurs, entre autres,
dans les universités et jamais ces mêmes syndicats de professeurs
ne nous ont donné le même appui pour la reconnaissance et le
financement de nos associations étudiantes. Donc, le syndicalisme
à sens unique... C'est pour cela que nous sommes durs, parfois. Nous, du
secteur universitaire, subissons encore plus cela qu'aux secteurs
collégial, primaire ou secondaire, où on a effectivement moins de
contacts avec ces syndicats. Dans les universités, les syndicats de
professeurs sont extrêmement corporatistes et leur syndicalisme ne
correspond pas du tout au syndicalisme étudiant, le même type de
syndicalisme.
Le Président (M. Paré): Merci. J'aimerais rappeler
aux membres de la commission qu'on a déjà dépassé
de dix minutes le temps prévu pour l'audition et la période de
questions. Est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre? Il y a encore trois
intervenants et M. le député de Louis-Hébert qui...
M. Doyon: Je voulais tout simplement dire que j'avais d'autres
questions, mais que j'y renonçais compte tenu du temps qui est
dépassé.
Mme Harel: M. le Président, j'aimerais faire valoir mon
intérêt à intervenir sur ce mémoire. Je ne pense pas
avoir abusé du temps de la commission depuis le début. Je pense
que nous sommes en étude depuis 18 heures et il me semble être
intervenue très rapidement à une heure tardive, au début
de la commission. Vous connaissez l'intérêt que je porte aux
questions qui sont soulevées dans ce mémoire, alors, je
demanderais le consentement de la commission.
Le Président (M. Paré): Est-ce qu'il y a
consentement de la commission pour entendre en dernier Mme la
députée de Maisonneuve? Il faudrait que ce ne soit qu'une
question et rapidement, s'il vous plaît.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président. Le Président
(M. Paré): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous me permettriez une remarque de
quinze secondes - et je vous promets pas plus de quinze secondes - après
la députée de Maisonneuve?
Le Président (M. Paré): Donc, est-ce que j'ai le
consentement pour une très courte question de Mme la
députée de Maisonneuve et pour entendre ensuite un très
court commentaire de Mme la députée de L'Acadie? J'ai le
consentement. Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Le plus rapidement possible, M. le Président.
Moi aussi je suis contente, notamment, de voir qu'il y a une dynamique qui
permettra aux associations
étudiantes de vraiment se présenter comme des
entités distinctes dans le sillage de personnes. Par ailleurs, ma
question portera sur ceci: Quand vous faites le procès d'un
héritage de générations qui serait celui du syndicalisme
devant lequel on se retrouve présentement, j'aimerais vous poser la
question à savoir s'il ne s'agit pas d'un héritage de
société? Ne faisant pas partie de la même
génération que la vôtre, il reste quand même...
Des voix: Oh! Voyons donc, presque!
Mme Harel: Non, non, attendez! C'est très gentil, je vous
remercie beaucoup. Il reste que vous-même, par exemple, à la page
8, demandez un nouveau cadre juridique; vous demandez une intervention
gouvernementale pour vous faire reconnaître et financer dans le cadre de
vos associations étudiantes. La question que cela m'amène
à vous poser, c'est la suivante: Est-ce qu'il n'est pas dangereux de
jeter le bébé avec l'eau du bain? Avez-vous un modèle de
remplacement? Est-ce que l'héritage dont on parle n'est pas plus un
héritage du syndicalisme nord-américain, lequel conduit les
parties, à cause de l'économie générale des
relations du travail, à parcelliser, à fragmenter, à
maximiser leurs propres intérêts?
Si tant est, comme vous semblez le dire, que les gains
réalisés dans les secteurs public et parapublic ne peuvent plus
avantager, comme c'était le cas dans le passé, les travailleurs
du secteur privé, est-ce qu'il y a un modèle de remplacement?
Est-ce que c'est simplement de réviser le mode de négociation
dans le secteur public ou, si on veut poursuivre, en termes de progrès
social, il n'y aurait pas lieu également d'aborder la question d'une
substitution à ce qui, en fait, était pour tout de suite la seule
forme de négociation élargie dans notre société?
Est-ce qu'on pourra arriver à apporter aux travailleurs du secteur
privé une amélioration de leur condition sans aussi
réviser tout le mécanisme de négociation dans le secteur
privé?
M. Baillargeon: En tout cas, par rapport au syndicalisme
nord-américain, et même européen, nous ne sommes pas un
modèle sur un plan, soit le droit de grève dans les
hôpitaux. Je ne sais pas. D'après nos informations, en Europe,
entre autres, beaucoup de syndicats ne font pas des grèves comme il s'en
est déjà passé ici - pas cette année, mais c'est
déjà arrivé. Cela est peut-être un abus. Je ne sais
pas si c'est parce qu'on a un tempérament latin ou un mélange
d'Européens ou d'Américains, mais là-dessus, pour ce qui
est de l'utilisation du droit de grève, entre autres, dans les
hôpitaux et même le transport en commun, on pense qu'il peut y
avoir des abus actuellement de ce côté.
Quand on sait que l'utilisation du droit de grève est liée
directement au processus de négociation, on ne peut pas abolir juste le
droit de grève et continuer le même processus de
négociation, parce qu'à ce moment, la partie syndicale n'aurait
plus de moyens de pression.
Dans ce sens, nous proposons qu'il y ait une tierce partie, que les
usagers des services aient un mot à dire, d'une part, sur la
qualité des services publics et, d'autre part, sur l'aménagement
des ressources qui sont utilisées à ces services. Nous subissons,
on le sait - souvent, en tout cas, au niveau universitaire - nous constatons
qu'il y a du gaspillage et de la bureaucratie énorme. Il y a une
mauvaise utilisation des ressources, mais on n'a pas un mot à dire, et
lorsque des coupures budgétaires arrivent, on dit aux étudiants:
Vous n'avez pas le choix, vous allez payer la note. Et on se retrouve avec des
services en trop, des services aux étudiants. Il y a des professionnels
qui ont des gros salaires, mais ils n'ont plus de budget à administrer.
On se retrouve finalement avec des services inutilisables.
Donc, il y a beaucoup de remises en question à faire
là-dessus et on pense que c'est... La logique de la confrontation
actuelle ne peut être brisée que par la venue d'une tierce partie
qui est les usagers de services.
Au niveau de l'héritage de la société -oui, c'est
un héritage de la société - entre autres, au niveau du
syndicalisme étudiant, on a eu l'héritage aussi de l'UGEQ,
c'est-à-dire le grand vide. En 1969, il y a eu un sabordement et vous,
justement, Mme Harel, faisiez partie de la dernière équipe de
l'UGEQ.
Évidemment, si on fait le parallèle, on trouve
effectivement que c'est très lourd comme héritage. Dans ce sens,
on aime mieux couper peut-être, dire à une certaine
génération: Cessez d'être nostalgiques. Comme diraient
souvent les marxistes dans notre milieu: Faites votre autocritique. À ce
moment, cela ferait peut-être du bien à tout le monde.
Mme Harel: C'est intéressant, M. Baillargeon, parce que
vous notez vous-même que l'absence de structures, l'absence de
régulation dans le milieu étudiant, compte tenu de la disparition
de l'UGEQ, a créé ce vide dont vous faites état. Je pense
que vous le notez avec raison.
La conclusion que j'ai tirée de cet échec qu'a
été l'UGEQ, c'est notamment que des structures, c'est très
fragile et c'est très précaire, mais il faut les respecter.
Je pense que la réflexion doit se poursuivre dans votre milieu,
dans le nôtre
également, mais doit se poursuivre. Est-ce qu'on peut comparer?
Quand vous comparez, par exemple, des droits de travailleurs
québécois par rapport aux droits des travailleurs
européens, il faut comparer l'ensemble; il ne faut pas que l'arbre nous
empêche de voir la forêt. Il y a un taux de syndicalisation qui est
connu en Europe, dans le secteur privé, qu'on ne connaît pas ici.
Dans la mesure où toute chose étant égale, il faudrait
voir finalement des modèles de remplacement, il faudrait que vous
travailliez là-dessus comme nous, j'imagine.
M. Houle: C'est juste.
Le Président (M. Paré): M. Houle.
M. Houle: Là-dessus, je dois dire, Mme la
député de Maisonneuve, que nous sommes quand même confiants
en l'avenir, au niveau des relations du travail, parce qu'on observe un certain
virage, au niveau du syndicalisme nord-américain ou européen,
vers un syndicalisme peut-être plus responsable au niveau des relations
du travail, par exemple. Nous avons confiance à ce niveau, nous pensons
qu'il peut y avoir une maturation du syndicalisme québécois.
Le Président (M. Paré): Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, la réflexion ou
la question que je vais poser à nos invités, je la pose à
différents groupes. Mais elle m'apparaît encore plus importante
avec votre groupe. Vous êtes ici une association d'étudiants, vous
êtes la génération de demain qui fera les politiques,
donnera les orientations à la société. Je ne peux
m'empêcher de m'étonner qu'il n'y ait pas d'étudiantes avec
vous et qu'elles ne fassent pas de représentations à cette table.
J'imagine, et je suis certaine que, dans les postes de responsabilité
à l'intérieur de votre coalition, les étudiantes ont une
large place.
M. Baillargeon: Justement, si vous regardez notre projet de
centre étudiant de services communautaires qui a été
déposé, la responsable de ce projet majeur, c'est Julie Morency
qui est une étudiante. Dans la plupart de nos exécutifs
d'association de campus, il y a souvent des étudiantes qui sont
présidentes ou secrétaires générales de ces
associations. Si elles ne sont pas ici aujourd'hui, c'est parce qu'on nous
disait que le temps était limité. Selon nos fonctions...
M. Rivest: Ah! Ah! Ah!
Mme Lavoie-Roux: Laisse-le faire, laisse-le faire.
M. Baillargeon: ...nous sommes secrétaires
généraux réciproquement, donc les porte-parole de nos
organisations respectives. Alors, on nous a dit: II ne faut pas qu'il y ait
trop de gens. Vous avez dix minutes pour parler et faites cela vite, etc. J'ai
couru quand j'ai fait mon exposé. On peut en faire défiler si
vous voulez, il n'y a pas de problème. On peut vous exposer le projet de
centre étudiant de services communautaires. Julie Morency s'en ferait
sûrement...
Mme Lavoie-Roux: Fini, fini. Cela va, merci.
M. Baillargeon: D'accord.
Le Président (M. Paré): Seulement un peu, M.
Houle.
M. Houle: M. le Président, je voudrais rappeler
encore...
M. Baillargeon: Je voudrais vous présenter Mlle Morency,
secrétaire au CESC, à l'exécutif du regroupement des
associations étudiantes universitaires.
Mme Lavoie-Roux: J'espère qu'on n'est pas toujours
derrière... Vous n'agissez pas selon le vieil adage selon lequel il y a
toujours une femme derrière les hommes.
Le Président (M. Paré): Pour conclure
rapidement...
M. Houle: À ce niveau-là, M. le Président,
permettez-moi de vous rappeler que ce ne sont pas des débats qui
préoccupent nécessairement notre génération. Entre
autres, au niveau du système d'éducation et des structures
d'associations étudiantes, nous cohabitons jeunes hommes et jeunes
femmes depuis maintenant près de quinze ans.
Le Président (M. Paré): M. Houle et M. Baillargeon,
merci beaucoup de votre participation et du temps que vous avez consacré
à la commission. Merci, mademoiselle, dont malheureusement je n'ai pas
le nom.
Mme Morency (Julie): Madame. M. Baillargeon: Julie
Morency.
Le Président (M. Paré): Merci, Mlle Morency, ou
madame, mademoiselle probablement.
Mme Morency: ...où est la place des femmes.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. J'invite
maintenant les représentants de la Fédération des
commissions scolaires
catholiques du Québec à prendre place ici en avant. J'en
profite pendant que les gens prennent place pour inviter les membres de la
commission à essayer d'être un peu plus rigoureux dans leurs
interventions et un peu plus rapides pour qu'on puisse finalement respecter le
temps qu'on s'est fixé de façon à être capable
d'entendre, dans un temps raisonnable, aujourd'hui, tous les organismes qui ont
manifesté l'intention de se faire entendre.
Bonjour messieurs et bienvenue à la commission. Je demanderais au
porte-parole de se présenter et de nous présenter aussi les
personnes qui l'accompagnent.
Fédération des commissions scolaires
catholiques
M. Chagnon (Jacques): Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Paré): J'aimerais savoir de la
part du porte-parole si c'est possible d'avoir un mémoire
écrit.
M. Chagnon: Oui. Il vous est distribué à l'instant,
M. le Président.
Le Président (M. Paré): Les copies s'en
viennent.
M. Chagnon: Je pense qu'on les distribue d'abord aux
secrétaires de commission qui en feront une distribution autour de la
table. Voilà! M. le Président, permettez-moi de vous
présenter le directeur général de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, M. Jacques Audy, à ma droite; le directeur du service des
relations du travail, M. Jean-Pierre Tessier, à ma gauche; et le
président du Comité patronal de négociations pour les
commissions scolaires pour catholiques, M. Roger Carette, à mon
extrême gauche.
M. le Président, je tiens d'abord à remercier la
commission parlementaire de nous avoir invités spécifiquement sur
les sujets qui étaient mentionnés et je souhaite que cette
initiative de la commission parlementaire de l'éducation soit reprise
dans des moments qui seront peut-être témoins d'une hypertension
ou d'une tension moins grande dans d'autres moments que des moments de
crise.
M. le Président, mesdames et messieurs les députés.
La Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec est, depuis plusieurs années, engagée dans le
processus des négociations du secteur public. Notre organisme
représente les 214 commissions scolaires catholiques dans l'ensemble du
Québec. Bien avant 1977, nous nous sommes engagés dans les
négociations avec les divers personnels des commissions scolaires en
offrant un service de support et de représentation dans les
négociations locales. Depuis, la mise en place de négociations
à l'échelle nationale, la Fédération des
commissions scolaires catholiques du Québec a été un
partenaire très actif et engagé dans la défense des
intérêts des commissions scolaires et de l'ensemble de la
communauté québécoise auprès du gouvernement du
Québec.
Nous avons participé activement à quatre rondes de
négociations avec les enseignants et à trois rondes de
négociations avec les personnels de soutien et professionnels, tout en
assurant aide technique et suivi au niveau des négociations locales et
représentation des commissions scolaires lors des réouvertures
des conventions collectives pour chacune des catégories de personnel.
(12 heures)
La loi 25 et les lois 46, 95 et 55 ont largement confirmé
à la fédération son rôle de représentant et
mandataire des commissions scolaires dans les négociations visant les
personnels de ces dernières.
Nos opinions sont bien connues relativement aux difficultés
qu'engendre le système actuel de négociation trop
centralisé et trop politisé, parce qu'il est relié
directement à l'État et à un front commun syndical. La
fédération appréhendait la présente ronde de
négociations, non seulement en raison des difficultés
traditionnelles qui accompagnent les négociations provinciales avec les
centrales syndicales, mais aussi en raison du fait que nos membres voyaient la
ronde comme un élément de déstabilisation, un
élément de changements de plus qui s'ajoutaient à la
longue liste de ceux annoncés à l'automne 1981. Permettez-moi
d'en mentionner quelques-uns: Par exemple, l'implantation du nouveau
régime pédagogique pour le primaire et le secondaire; la
réforme et la restructuration scolaire qui ont causé
énormément de charivari dans le milieu et dans tout le
réseau scolaire; le nouveau mode de financement qui est remanié
année après année; les modifications au réseau
informatique; les nouvelles politiques de formation professionnelle, dont nous
avons eu les audiences au début de la semaine; l'enquête sur la
formation des adultes, et les suites qui pourraient suivre; la réforme
du transport scolaire, etc. On pourrait en nommer encore d'autres.
La conjugaison de l'ensemble de ces dossiers perturbe constamment les
actions pédagogiques dans chacun des milieux scolaires et, à la
longue, contribue effectivement à déstabiliser le
système.
Malgré le rôle important que s'est donné le
gouvernement dans l'établissement des conditions de travail de nos
employés, nous avons tenté d'assumer le rôle qui nous
était imparti par le législateur au sein du groupe patronal. Nous
n'avons pas l'intention
de faire le procès des gestes qui furent posés de part et
d'autre au cours de l'automne 1982.
La crise économique actuelle et la situation financière du
gouvernement du Québec ont forcé le gouvernement à agir
précipitamment et à réduire au minimum la période
de négociation en se fixant comme échéance le 15
décembre 1982. Par ailleurs, les structures syndicales ne se sont pas
laissé imposer ce cadre de négociation et ont été
peu disposées à négocier véritablement dans ce
contexte.
Nous pourrions discourir pendant plusieurs heures sur ce qui aurait pu
se passer avant décembre 1982, mais cet exercice n'aiderait en rien
à solutionner le conflit actuel.
La Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec intervient dans le présent débat pour tenter de
démontrer l'urgence de solutionner le conflit et la
nécessité que la présente commission parlementaire se
prononce sur des propositions qui pourraient constituer un règlement
acceptable. C'est pourquoi, après un bref rappel de nos objectifs
relativement aux conditions de travail des enseignants, nous identifierons les
correctifs nécessaires proposés par les décrets et, enfin,
les éléments qui pourraient permettre de solutionner l'impasse
entre les parties.
M. le Président, à la suite de cet avant-propos, vous
verrez que notre texte est structuré de la façon suivante, je
serai bref: D'abord, les objectifs de la fédération; viennent
ensuite les correctifs nécessaires -nous apparaissent-ils - les
éléments de solution et, finalement, une conclusion qui se veut
une espèce de conclusion générale du document
présenté devant la commission parlementaire par la
Fédération des commissions scolaires catholiques.
Premièrement, les objectifs de la fédération. Les
commissions scolaires sont les premières responsables de la tâche
de dispenser des services d'enseignement dans chacun de leur milieu. À
titre d'agent négociateur pour celles-ci, nous avons cherché,
à l'automne 1981, à obtenir le plus large consensus possible des
agents du réseau de l'éducation sur les objectifs à
poursuivre au cours de la présente ronde de négociations. La
première démarche que nous avons entreprise dans ce sens a
été de faire, simultanément avec le ministère de
l'Éducation, la cueillette des opinions des commissions scolaires sur ce
que devraient être les modifications aux conventions collectives.
Les commissaires, les directeurs généraux, les cadres
d'école et de service, de même que certains comités de
parents se sont impliqués dans les diverses régions pour nous
transmettre leurs remarques sur les objectifs à poursuivre dans la
négociation.
Nous voulons vous souligner que la majorité des opinions
formulées vont dans le sens des correctifs proposés
particulièrement par le livre vert qui a été, selon nous,
probablement une espèce de point tournant en matière
d'éducation au Québec un document sur lequel une intense
consultation s'est faite et sur lequel aussi un large consensus s'est
développé, entre autres sur le dossier des relations du
travail.
Relativement au secteur enseignant, on a retenu trois axes de
modification ou de reconduction comme fondement de nos orientations. Le
premier, l'amélioration de la qualité de l'éducation. Le
deuxième, l'amélioration de la qualité de la
gérance de la commission et des écoles. Nous nous sommes de plus
associés à l'objectif gouvernemental, soit la réduction
des coûts de fonctionnement du réseau primaire et secondaire.
Premièrement, l'amélioration de la qualité de
l'éducation et marge de gestion. Bien des éléments
favorisent une éducation de qualité dans un milieu. Bien que nos
élèves aient un enseignement de qualité, nous devons tenir
compte de trois éléments: premièrement, et c'est
certainement le plus important, des ressources humaines oeuvrant auprès
des élèves dans des conditions les plus favorables possible;
deuxièmement, un support financier adapté aux besoins de chaque
milieu qui doit tenir compte du type de clientèle, de la situation
géographique, etc.; troisièmement, une organisation
matérielle adéquate, les locaux, les équipements, les
manuels scolaires, les bibliothèques, etc.
Le premier élément, des ressources humaines, est sans
aucun doute le plus déterminant dans l'organisation de l'enseignement.
Les enseignants occupent la place la plus importante auprès des
élèves qui fréquentent nos écoles. Leur implication
dans la préparation et la dispensation de leur enseignement, la
cohésion de l'équipe-école, leur implantation dans leur
milieu scolaire et leur enracinement dans les valeurs à transmettre aux
élèves constituent les éléments qui favorisent la
dispensation d'un enseignement de qualité.
Toutefois, certaines composantes de la qualité globale des
services éducatifs au primaire et au secondaire peuvent être la
résultante directe de certains éléments des conditions de
travail. Pensons à la formation des groupes d'élèves, la
tâche d'enseignement, le nombre d'heures de présence auprès
de l'élève, l'encadrement et les services et autres
activités étudiantes.
Pour que les commissions scolaires puissent offrir un service
adéquat aux élèves, il nous apparaît important
d'obtenir une présence des enseignants auprès de
l'élève; une charge globale d'enseignement qui, au-delà de
la dispensation des cours et leçons, assure aux élèves un
encadrement
suffisant, une surveillance adéquate et des activités
étudiantes; une possibilité d'affectation du personnel qui tienne
compte de ses qualifications et de son expérience dans les disciplines
à enseigner; de plus, il nous fallait réduire et préciser
les textes de convention relatifs à la tâche de l'enseignant afin
d'éviter une renégociation journalière de la prestation de
travail. La convention ne doit pas constituer un guide de gestion sur des
éléments tels que la production de rapports, la
préparation de tests et d'examens et la concertation entre les
collègues.
Contrôle des coûts. Parallèlement à ces
objectifs, nous nous sommes associés aux impératifs financiers du
gouvernement. Le coût de l'éducation au Québec croît
constamment. Il nous faut, tout en maintenant un service adéquat,
rétablir un juste équilibre avec l'effort financier consenti, par
ailleurs, dans les autres provinces. À cet égard, un autre
objectif s'imposait: augmenter la productivité et limiter les
coûts de la sécurité d'emploi dans le cadre d'une
équité intersectorielle.
L'augmentation de la productivité se traduit au primaire par une
majoration de la tâche d'enseignement de deux heures par semaine. Cette
majoration doit s'accompagner de l'augmentation du temps d'enseignement
à l'élève afin de maintenir l'équilibre de notre
organisation scolaire et assurer la présence des spécialistes. Au
secondaire, la majoration est de trois périodes de 50 minutes par
semaine.
Nous avons par ailleurs jugé nécessaire de maintenir et
même d'ajouter des garanties relativement à des
éléments pédagogiques importants. Ainsi, les
décrets maintiennent les règles de formation de groupe
d'élèves. En général, on retrouvera de 27 à
29 élèves dans chaque classe du primaire, et une trentaine
d'élèves par groupe pour les cours de formation
générale au secondaire.
Nous avons insisté, et cette règle se retrouve dans les
décrets, pour que des garanties de ressources spécialisées
soient fournies pour les élèves en difficulté d'adaptation
et d'apprentissage. Ainsi, la commission scolaire doit obligatoirement
soumettre à la consultation des enseignants sa politique
d'intégration des élèves en difficulté
d'adaptation. De plus, les commissions scolaires doivent assurer des services
spéciaux à ces élèves, soit en pondérant
leur clientèle ou en y affectant comme appui, évidemment, du
personnel spécialisé.
Les correctifs nécessaires prévus par les décrets.
Nous croyons, en tant que représentants des commissions scolaires, que
le statu quo intégral des conventions antérieures n'est plus
possible. Dans la formation de nos objectifs, nous avons essayé de
limiter les enjeux de la négociation. Les décrets, sur la
majorité des chapitres, reconduisent intégralement les
stipulations prévalant dans le dernier contrat de travail. Cependant,
les objectifs suivants doivent être maintenus: Nous sommes en droit
d'exiger, par exemple, une présence réelle des enseignants
à l'école, une charge de travail globale, une possibilité
d'affecter les enseignants selon leur qualification et leur expérience,
une meilleure résorption des personnels et une limitation des
coûts de la sécurité d'emploi. Finalement, une
productivité accrue de la tâche des enseignants. Cependant, nous
ne pouvons passer sous silence le fait que l'application intégrale,
dès septembre 1983, des objectifs rattachés à
l'augmentation de la productivité provoque, principalement au
secondaire, un lourd chambardement du vécu pédagogique des
écoles.
Des éléments de solution. Même si tous les objectifs
sont valables en soi, nous croyons qu'il est nécessaire d'obtenir
l'adhésion des enseignants sur la façon de les atteindre. En ce
sens, nous avons cru bon, au cours des deux derniers mois, de formuler diverses
propositions susceptibles de résoudre ce conflit. Ces propositions
touchaient notamment trois points précis: la sécurité
d'emploi et les effectifs enseignants, la tâche au primaire et au
secondaire, la précision des textes dans certains chapitres, tel celui
se rapportant à l'affectation et à la distribution des
tâches.
Nos interventions. Dès la mi-janvier, nous avons adressé
un télégramme au premier ministre, le 17 janvier
précisément -vous vous en souviendrez certainement,
c'était la journée où le premier ministre rencontrait les
chefs des trois centrales syndicales - télégramme dans lequel
nous rappelions que le secteur de l'éducation est très fortement
touché en termes de récupération. Nous lui avons
rappelé à ce moment-là que, par souci de maintenir une
équité intersectorielle, il était important de formuler
aux syndicats des propositions concrètes, assouplissant les
paramètres financiers et permettant d'engager des pourparlers. Vous
retrouverez le télégramme à l'annexe A du document que
nous vous avons présenté ici ce matin.
Cette première étape n'a pas permis de résoudre le
conflit avec la Centrale de l'enseignement du Québec. Par la suite, nous
avons déposé un cadre de règlement à notre
partenaire ministériel qui détaillait davantage les
éléments que nous avions énoncés au premier
ministre le 17 janvier. Cette rencontre, avec les sous-ministres et le ministre
Laurin, ainsi que des discussions ultérieures débouchèrent
sur l'offre de règlement qui fut rendue publique le 10 février
1983 et distribuée à la Commission des enseignants des
commissions scolaires, de la Centrale de l'enseignement du Québec,
la
veille, soit le 9 février, par le ministre, le
représentant de la QAPSB et moi-même.
Nous avions d'ailleurs rencontré précédemment,
à cette rencontre, les principaux agents du réseau primaire et
secondaire. Nous avons pu, dès lors, en venir à un consensus sur
l'offre de règlement avec l'Association des directeurs
généraux, la Fédération des directeurs
d'école, l'Association des cadres et la Fédération des
parents qui, à leur jugement critique, semblaient heureux. Ils pourront
mieux le préciser puisque ce sont les prochains intervenants. Ils
pourront mieux préciser, dis-je, ce qui leur a plu à
l'intérieur du cadre de règlement du 10 février
dernier.
Puisque nous en sommes à la proposition du 10 février,
parlons-en un peu. Selon nous, il se révélait nécessaire
d'offrir -et c'est ce que nous retrouvons - de meilleures garanties salariales
aux enseignants mais en disponibilité. La proposition que nous avions
formulée le 9 février avec notre partenaire, le ministère
de l'Éducation, garantit aux enseignants mis en disponibilité 80%
de leur salaire en 1983- 1984, 80% en 1984-1985 et au moins 50% par la suite,
pour ceux qui en seront à leur deuxième année de mise en
disponibilité. Il est à noter toutefois que ce dernier chiffre
est révisable, compte tenu des expériences de résorption
du personnel au cours des deux premières années de
convention.
(12 h 15)
Bien que ce correctif pécuniaire soit d'importance, nous avons
aussi tenté de limiter substantiellement le nombre de mises en
disponibilité en étalant, comme nous l'indiquerons bientôt,
l'augmentation de la productivité sur trois ans.
En effet, au niveau primaire, nous proposons que la tâche de
l'enseignant soit rajustée sur trois ans. Ainsi, en 1983-1984, la
tâche serait augmentée d'une heure par semaine, le temps des
élèves serait aussi augmenté dans la même
proportion. En 1984- 1985, la tâche des enseignants serait maintenue en
moyenne à 21 heures-semaine d'enseignement, tandis que le temps de
présence des élèves augmenterait d'une demi-heure, passant
de 24 heures à 24 heures 30. Cette augmentation implique au minimum 3
heures 30 minutes par semaine - c'est fort important - qui seront
réservées à la dispensation des cours par des
spécialistes. Cette proposition crée par le fait même 600
nouveaux postes de spécialistes au primaire. En 1985-1986, à la
fin de la convention, les enseignants verraient leur charge d'enseignement
majorée d'une demi-heure pour atteindre en moyenne 21 heures et demie
par semaine. L'horaire de l'élève atteindrait, quant à
lui, 25 heures. Cette proposition, nous semble-t-il, est juste et raisonnable.
Elle garantit non seulement le maintien, mais aussi l'ajout de
spécialistes à l'élémentaire. Elle permet une
meilleure présence des enseignants auprès des
élèves pour l'équivalent d'une heure par semaine.
Au niveau secondaire, notre proposition permet une application
progressive de l'organisation des tâches d'enseignement. Ainsi, la
tâche moyenne d'enseignement passerait de 20 périodes à 21
périodes de 50 minutes par semaine en 1983-1984. Elle passerait de 22
périodes l'année suivante pour atteindre 23 périodes de 50
minutes par semaine en 1985-1986. Cette proposition a pour effet de
résorber de façon considérable le nombre de mises en
disponibilité. Au lieu de 4000 en 1983-1984, ce nombre serait
inférieur à 1500.
Sur le plan pédagogique, nous nous placerions dans une situation
comparable à celle des autres provinces ou des États
américains dont on a déjà parlé ici en commission
parlementaire. Compte tenu que nous fonctionnons dans le cadre d'une charge
globale, l'augmentation de la tâche d'enseignement de façon
progressive permet qu'un nombre réduit d'enseignants se voient dans
l'obligation de dispenser des cours à un groupe additionnel
d'élèves par semaine. La majorité et, par la suite, une
grande partie des enseignants maintiendraient leur tâche actuelle
d'enseignement tout en se concentrant davantage sur les activités
complémentaires telles que l'encadrement, la récupération,
les activités étudiantes. Vous retrouverez des tableaux dans
l'annexe "B" du document que nous avons présenté.
La proposition du 18 février. M. le Président, même
si nous croyions à la justesse de notre proposition, nous avons cru bon
de proposer au gouvernement et à la Centrale de l'enseignement, le 18
février 1983, de confier à un comité formé par le
Conseil supérieur de l'éducation le soin d'étudier
l'impact des décrets sur l'organisation de l'enseignement en
dernière année de convention, 1985-1986. Vous retrouverez le
document à la troisième annexe du document que nous avons
présenté.
Il faut se souvenir que le 18 février, tant la partie
gouvernementale que la partie syndicale étaient sous le coup d'une
certaine hypertension il nous fallait tenter de faire en sorte que les ponts
soient rétablis pour qu'on puisse éviter un lundi 21
février qui aurait pu être, finalement, dramatique pour tout le
réseau de l'enseignement primaire et secondaire au Québec.
Nous sommes persuadés que l'étalement de l'augmentation de
la productivité permettra aux commissions scolaires d'élaborer,
avec leur personnel, des modes d'organisation de la tâche d'enseignement
qui rallient l'objectif de l'accroissement de la productivité avec celui
du maintien de standards de qualité dans l'enseignement secondaire. Tous
ces éléments rejoignent les objectifs de personnalisation du
rapport
maître-élèves et de l'instauration de formules de
titulariat au premier cycle du secondaire, tel que recommandé
spécifiquement par le livre vert sur l'enseignement, "L'école
québécoise".
Cette proposition du 18 février s'adresse tant au gouvernement
qu'à la Centrale de l'enseignement du Québec. Si elle a permis la
trêve que nous aurons connue un tant soit peu, à tout le moins
nous aurons quelques raisons de nous en réjouir. Cette proposition du 18
février débouche sur trois résultats immédiats. Le
premier, que le gouvernement mandate le Conseil supérieur de
l'éducation de former une commission d'étude afin
d'évaluer l'impact des décrets sur l'organisation de
l'enseignement en 1985 et 1986. Il devrait y avoir une négociation avec
la centrale sur le sujet à la suite de cette étude.
Deuxième résultat, les décrets et les règles
budgétaires seraient immédiatement amendés pour permettre
l'étalement de l'augmentation de la tâche de 1983 à 1985 et
pour ajouter des dispositions relatives à la sécurité
d'emploi. Ce sont des éléments qu'on retrouve dans l'offre et le
cadre de règlement du 10 février dernier.
Finalement, troisième résultat de l'offre de
règlement du 18 février que nous présentions, des
négociations devraient reprendre immédiatement entre la Centrale
de l'enseignement du Québec et la partie patronale sur les sujets
suivants: premièrement, la capacité; deuxièmement,
l'affectation et la mutation; troisièmement, la distribution des
tâches et, quatrièmement, les mesures de résorption.
Bref, en guise en conclusion, la Fédération des
commissions scolaires croit, sur la base de sa réflexion et sur la base
des consultations que nous avons faites avec les principaux agents de notre
réseau, que les propositions de compromis des 10 et 18 février
représentent des éléments de solution qui devraient
être jugés satisfaisants tant par les enseignants que par leur
centrale. L'ensemble de ces propositions clarifiait d'une façon nette et
acceptable la situation à prévaloir au niveau primaire en
garantissant le maintien et même les ajouts au nombre de
spécialistes. Au cours des derniers mois, bien que nous ayons
été écartés des rencontres qui ont eu lieu entre le
gouvernement, le ministre et la Centrale de l'enseignement du Québec,
nous avons cru de notre devoir, aussi bien en fonction du mandat d'agent
négociateur que nous confie la loi 55 que par respect pour nos
employés et les syndicats qui les représentent, de contribuer
à alimenter le dialogue entre le gouvernement et la Centrale de
l'enseignement du Québec.
Nous avons dernièrement exigé du gouvernement d'être
présent à toute rencontre pouvant intervenir entre les parties
relativement au contrat de travail des enseignants. Même si nous avons
récemment obtenu une adhésion de représentants du
ministère à ce sujet, nous croyons qu'il est important de
réinsister sur ce point devant la présente commission
parlementaire. La Fédération des commissions scolaires pense que
les travaux de cette commission doivent déboucher sur des propositions
d'action pour solutionner le présent conflit. Vous nous permettrez, M.
le Président, en guise de conclusion d'y aller de quelques suggestions
qui sont de deux ordres: premièrement, des constats et,
deuxièmement, des recommandations.
Comme constats, la présente commission, nous semble-t-il, devrait
retenir notamment: premièrement, qu'aucun des intervenants
légalement reconnus dans la législation du Québec,
gouvernement, ministère, Fédérations des commissions
scolaires et syndicats, ne doit être écarté;
deuxièmement, que le réseau scolaire doit retrouver plus de
stabilité et le gouvernement réexaminer ses objectifs en
évitant de réformer à tous les six mois l'un ou l'autre
des éléments majeurs de celui-ci ou à tous les sept ou
huit ans l'ensemble complet de l'organisation.
Les recommandations à dégager devraient proposer, à
notre avis: 1- que le projet de règles budgétaires soit
ajusté d'abord en fonction des décrets connus et, ensuite,
amendé pour 1983-1984 afin que les commissions scolaires puissent
préparer leur organisation scolaire selon les paramètres
exposés dans notre offre de règlement du 10 février 1983;
2- de rouvrir conformément les négociations sur les sujets
définis, notamment ceux supposés par nos propositions des 10 et
18 février et de le faire dans un terme défini qui, selon nous,
ne pourrait dépasser une couple de semaines; enfin, 3- peut-être,
est-ce, selon nous, un des points fondamentaux - surtout de procéder
à cette ultime tentative de négociation, avec l'aide d'un tiers
intervenant qui, selon nous, pourrait davantage, dans une certaine forme de
conciliation que dans des formes d'observation et de médiation
déjà refusées, permettre aux parties de cheminer ensemble
et, bref, de trouver des consensus extrêmement nécessaires
à la reprise d'un dialogue et d'une entente, et finalement, à la
reprise, de trouver des solutions qui pourraient faire en sorte que le
réseau de l'éducation se stabilise enfin à la suite, comme
vous le savez M. le Président, de la plus longue grève jamais
connue dans le secteur de l'éducation au Québec depuis la
création du ministère en 1964.
J'ajouterais, comme quatrième point, que, pour nous, il nous
apparaît important de regarder à travers l'expérience
vécue des négociations hypercentralisées comme on l'a
connue; de faire l'étude des rapports de
force politique qu'on a aussi vécus à partir de la
multitude de comparaisons dont on a entendu parler à cette commission
depuis les deux derniers jours, particulièrement entre le Québec
et l'Ontario; de faire en sorte qu'on puisse aussi comparer nos systèmes
de négociation entre le Québec et l'Ontario et -ce sont des
pistes que je vous ouvre, M. le Président - et de faire en sorte qu'il y
ait décentralisation de ces négociations et, en même temps,
modification au Code du travail qu'on connaît et qui, selon nous,
mériterait des ajustements très sérieux en ce qui regarde
les négociations dans les secteurs public, parapublic et
péripublic.
Quant à nous, de la Fédération des commissions
scolaires, sur ce dernier point, nous consulterons nos membres sur ce sujet et,
en même temps, nous présenterons un bilan de l'ensemble de la
ronde lorsqu'elle sera terminée. Nous préparerons un rapport,
à l'intention des membres de cette commission, si vous le souhaitez, de
prospectives en matière de négocation dans les secteurs public et
parapublic. Je vous remercie M. le Président; je vous remercie mesdames
et messieurs les membres de cette commission de nous avoir entendus.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Juste avant de donner la
parole à M. le ministre, compte tenu de l'entente que nous avons -qui
est quand même souple - d'agir environ pendant une heure trente - nous
avons déjà, depuis 11 h 55, commencé la discussion
-j'aimerais savoir si nous suspendons à 13 heures et revenons à
15 heures ou si les membres de la commission acceptent qu'on dépasse 13
heures. Nous suspendons à 13 heures et nous reviendrons à 15
heures, donc vous êtes à notre disposition pour une partie de
l'après-midi.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Je n'ai pas eu le temps de consulter mes
collègues, mais je pense que nous serions disposés à
revenir à 14 h 30. Cela permettrait une demi-heure de plus.
Le Président (M. Jolivet): Si vous êtes d'accord, je
n'ai pas d'objection, donc ce sera vers 14 h 30.
M. Chagnon: Quant à nous, nous sommes humblement soumis,
et comme nous sommes vos invités, nous serons ici à l'heure que
vous le désirez.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
de son mémoire qui, dans sa concision, fait véritablement le tour
du problème et cerne avec clarté les véritables enjeux de
cette négociation. Pour laisser plus de temps aux intervenants de poser
leurs questions, je passerai tout de suite à deux questions. (12 h
30)
Nous avons proposé conjointement que le processus d'affectation
et de mutation soit modifié de façon qu'il tienne davantage
compte de l'expérience, de la capacité, de la compétence
des enseignants. Je ne vous cacherai pas que cette modification a
suscité des réaction négatives de la part de certains
groupes; nous avons eu l'occasion de les entendre particulièrement hier.
Je pense que la principale critique que l'on nous faisait était que
cette modification remet à la gérance des fonctions qu'elle ne
pourra exercer qu'en faisant montre d'une discrétion et d'un arbitraire
auxquels, précisément, les dernières conventions
collectives nous avaient permis d'échapper.
La question que j'aimerais vous poser est la suivante: Croyez-vous qu'il
soit possible d'affecter, de muter les enseignants selon la capacité, la
compétence, l'expérience, en vue d'assurer une meilleure
stabilité du personnel pédagogique dans les écoles, tout
en évitant cet inconvénient qu'on nous a signalé qui est
de donner à la gérance des droits excessifs ou de voir la
gérance tomber dans l'arbitraire ou la discrétion excessive?
Ma deuxième question porte sur l'enfance en difficulté.
Nous avons proposé conjointement, dans les décrets, que les
commissions scolaires se dotent maintenant d'une politique formelle
d'intégration des enfants en difficulté dans les classes et, plus
loin, qu'elles établissent véritablement une politique qui tienne
compte de toutes les variations ou degrés de handicaps que nous
connaissons.
On nous a fait, à cet égard, plusieurs critiques, encore
une fois hier, d'une façon toute particulière, et on nous a
rapporté certains exemples où cette politique existerait
déjà et où elle est tellement floue, tellement
imprécise, d'une part, qu'elle ne correspond à rien du tout;
deuxièmement, qu'elle aussi laisse place à l'arbitraire, à
la discrétion excessive de la gérance. Est-ce que vous pourriez
nous dire si, effectivement, une politique pour les enfants en
difficulté existe dans les commissions scolaires catholiques,
jusqu'à quel point elle existe et dans combien de commissions?
Deuxièmement, dans les efforts ultérieurs que les décrets
connotent évidemment, cette politique sera-t-elle suffisamment
explicite, suffisamment précise pour qu'elle puisse véritablement
atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire de
procurer
aux enfants en difficulté les meilleurs services éducatifs
possible dans le respect de cette exigence d'intégration qui est la
nôtre?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Quant à la
première question, affectation et mutation, il faut se rappeler que
c'était un objet de négociation locale dans les
négociations antérieures, premièrement.
Deuxièmement, en ce qui concerne l'écriture des textes ou encore,
peut-être plus particulièrement, l'arbitraire dans le droit de
gérance qui pourrait être laissé à la partie
patronale, force nous est de conclure qu'il n'est nullement l'intention pour la
partie des commissions scolaires de tomber dans l'arbitraire dans le
dossier.
Toutefois, je demanderais à M. Roger Carette, président du
CPNCC, de répondre à la première question sur
l'affectation et la mutation, particulièrement dans tout ce qui regarde
la mécanique et les écrits de cette dernière.
M. Carette (Roger): M. le Président, la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, sur la question de l'affection-mutation, au moment de la
requête des mandats de négociation, avait signifié comme
étant une orientation de base de ses membres une recherche d'une
conciliation acceptable entre, d'une part, le critère de capacité
et le critère d'ancienneté aux fins de procéder à
l'affectation des enseignants. À notre point de vue, le
dépôt des offres patronales constituait un premier pas vers une
recherche de cette conciliation qui nous apparaît normale entre, à
la fois, la capacité et l'ancienneté.
À la lecture des textes des décrets et de la critique de
ceux-ci que nous avons par la suite entendue, soit en décembre, soit en
janvier, il nous est apparu qu'il y avait des améliorations à
apporter à cette tentative de conciliation que nous avions faite au
moment des offres patronales du 24 septembre. C'est sur la base de ce qu'on a
entendu à ce moment-là qu'on s'est associé et je devrais
même dire qu'on a prôné au nom de la
fédération l'inclusion de la proposition no 2 dans le texte du 10
février qui, à notre point de vue, doit s'interpréter en
lien avec la proposition no 12. Je m'explique là-dessus. Dans la
proposition no 2, on dit qu'il nous faut réviser certaines
mécaniques relativement à l'affectation-mutation notamment celle
qui est inscrite dans la proposition du 10 février relativement à
des affectations possibles à des tâches partielles, mais qu'on
globalise par des additions. On a fait cette proposition le 10 février
en lien aussi avec la proposition no 12, parce qu'à notre point de vue
ce n'est pas le seul trou - pour prendre un jargon de négociateur - que
comporte le décret en cette matière. Il y a des aspects un peu
plus techniques qu'il nous faudrait aussi corriger. Quand on dit dans la
proposition no 12 du 10 février qu'on souhaiterait que soit mis sur pied
un comité chargé de corriger des erreurs de cet ordre, c'est la
signification que cela avait.
La troisième et dernière chose que je voudrais dire
là-dessus, c'est que c'est évident que cela peut être
interprété, tel que libellé présentement, comme
abusif, soit par les enseignants ou soit par la centrale. Je voudrais seulement
dire que le texte décrété, s'il n'était pas
amélioré par les propositions du 10 février et ce qui
s'ensuivrait, présenterait toutes les faiblesses d'un texte non
négocié, parce que je veux vous signaler que ce texte n'a fait
l'objet d'aucune discussion de la période du 24 septembre au 29 novembre
ou de discussions ultérieures, sauf peut-être ici, hier, où
on l'a entendu commenter. Nous le déplorons
énormément.
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon, sur les autres
points?
M. Chagnon: Sur le deuxième point.
Le Président (M. Jolivet): Sur le deuxième
point.
M. Chagnon: Sur la deuxième question du ministre de
l'Éducation, c'est un fait que la convention collective
décrétée crée une obligation nouvelle pour les
commissions scolaires de bâtir une politique d'intégration des
élèves en difficulté d'apprentissage pour les commissions
scolaires qui veulent le faire.
On nous a soumis, hier, à la commission un exemple de politique
de commissions scolaires qui était fort court. Il faut se rappeler,
toutefois, que la politique ne doit comprendre que les principes essentiels. La
mécanique de son application se retrouve très
généralement dans une procédure substituée et
rattachée à cette politique. Je pourrais vous citer le cas
d'autres politiques de commissions scolaires sur l'intégration des
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage qui
sont même plus courtes que celles qu'on a entendues, hier, et qui parfois
sont plus complètes.
Toutefois, il faut se rappeler une chose, c'est que, comme politique et
procédure, l'enfance en difficulté d'apprentissage mérite
un financement plus important parce que ce sont des enfants qui demandent des
soins spéciaux. Dans ce cadre-là, il faut aussi prévoir
des garanties financières pour faire en sorte que la commission puisse
appliquer la politique qu'elle aura à établir - je tiens à
le mentionner - en consultation avec le syndicat de sa région.
Le Président (M. Jolivet): Merci.
M. Chagnon: II y a peut-être une question subsidiaire. M.
le ministre m'a demandé combien de commissions scolaires ont
déjà adopté des politiques. Je ne pourrais pas lui donner
un chiffre précis, mais je pourrais lui dire, toutefois, qu'à ma
connaissance un grand nombre de commissions scolaires ont déjà
des politiques relatives à l'intégration d'élèves
en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Plusieurs de ces
commissions, compte tenu des décrets, devront les modifier probablement
pour faire en sorte qu'elles soient consultatives auprès du syndicat,
etc. Plusieurs commissions scolaires en ont déjà adopté.
J'en ai une ici devant moi; je peux la lire, si vous le jugez à propos.
Je pourrai la présenter à la commission un peu plus tard, si vous
le voulez.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Ce n'est pas
nécessaire, mais, si vous l'avez pour dépôt, cela pourrait
être fait. M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Je suis bien heureux de saluer la présence des
dirigeants de la fédération des commissions scolaires parmi nous
ce matin. J'ai écouté, comme mes collègues, avec beaucoup
d'attention la lecture qui nous été faite du mémoire
préparé pour cette rencontre.
Je me dispense de commentaires généraux étant
donné l'économie de temps que nous devons faire. Je voudrais vous
adresser une série de questions. Je vais vous les adresser toutes
ensemble pour que cela vous permette de voir un peu la ligne de fond. Cela vous
donnera plus de temps pour y répondre et vous pourrez peut-être
disposer de moi avant l'heure du déjeuner. Si les réponses sont
satisfaisantes, je ne reviendrai pas. S'il y avait des sous-questions, je
reviendrai brièvement, mais je pense que ces questions sont
d'intérêt général.
Premièrement, quel a été le rôle de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
dans tout le processus qui a précédé les décrets?
La fédération a-t-elle été consultée au
sujet du recours qui a été retenu par le gouvernement de la loi
et du décret? Deuxièmement, a-t-elle approuvé cette
méthode et a-t-elle été invitée à se
prononcer sur le contenu des décrets et l'a-t-elle approuvé
avant?
Deuxièmement, j'ai noté avec un très vif
intérêt les télégrammes que vous avez
adressés au premier ministre du Québec dans lesquels vous lui
disiez, ni plus ni moins, que vous étiez traités en partenaires
mineurs dans la conduite de la partie patronale. Le télégramme
que vous adressiez tout récemment au premier ministre du Québec,
M. Lévesque, est particulièrement éloquent à ce
sujet. Vous lui dites, ni plus ni moins, qu'on vous laisse complètement
en dehors. Vous aviez déjà adressé un
télégramme dans ce sens le 17 janvier. Vous avez
été obligés de revenir à la charge, je crois, le 25
février. Cela veut dire qu'il n'y a pas eu beaucoup de correctifs
d'apportés entre-temps. Autrement, j'imagine que vous n'auriez pas senti
l'obligation d'adresser un nouveau message pressant au premier ministre.
Je voudrais vous demander une chose. La loi est très
précise à ce sujet. Je viens de consulter le texte de la loi sur
l'organisation des parties syndicale et patronale en vue des
négociations collectives dans les secteurs public et parapublic. La loi
dit que vous êtes censés avoir une entente entre partenaires, une
entente écrite, qui détermine les sujets sur lesquels le
gouvernement se réserve le mot décisif et qui établisse
entre vous des règles de conduite. J'aimerais savoir s'il y a eu une
telle entente cette fois-ci. Pourriez-vous en déposer le texte pour
notre information et nous dire si elle a été suivie? Au cas
où elle n'aurait pas été suivie, étant donné
que vous avez des droits qui vous sont garantis par la loi, est-ce que vous
avez envisagé des recours en vue d'obtenir le respect intégral de
ces droits? Est-ce que vous en avez pris ou est-ce que vous avez seulement fait
des protestations auprès du premier ministre, lequel, apparemment, n'a
pas bougé beaucoup, en tout cas jusqu'à ces derniers jours? C'est
la deuxième question.
La troisième question est la suivante. Nous avons
été saisis des résultats de plusieurs travaux de
simulations qui ont été faits dans diverses commissions scolaires
concernant l'impact éventuel des décrets. Je voudrais vous
demander si vous avez été saisis de ces
résultats-là, vous aussi. Est-ce que cela vous a
impressionnés? Si vous avez fait des travaux semblables en vue d'en
arriver aux propositions que vous avez faites concernant le cadre de
règlement du 10 février, est-ce que les propositions incluses
dans ce cadre de règlement s'appuyaient sur des simulations de
même nature ou si cela s'appuyait sur d'autres sortes de
considérations?
Quatrièmement, je pense qu'il y a un accord général
sur la nécessité d'accroître la productivité dans
tous les secteurs de la société québécoise, au
gouvernement pour commencer, à l'Opposition, au patronat, chez les
syndicats, chez les intellectuels, chez les producteurs agricoles. Je pense
qu'il y a un problème général de course vers une
productivité plus forte, qui est un effort attendu de tout le monde.
Est-ce que vous pensez qu'il est sérieux de chercher à
accroître la productivité d'un groupe de travailleurs, en
l'occurrence les enseignants, en isolant d'autorité et
unilatéralement un
seul élément de ce qui constitue la productivité
d'un groupe de travailleurs ou d'un membre d'une profession donnée et en
décrétant par loi que les choses se feront comme ceci sans tenir
compte de l'impact que l'isolement de ce facteur peut avoir sur tous les autres
facteurs qui entrent dans la productivité et évidemment, sur la
motivation et les conditions de concorde et sur le climat de collaboration qui
doivent être considérés comme essentiels à ce sujet?
(12 h 45)
Cinquièmement, les commissions scolaires ont reçu, vers la
fin de décembre, le projet de règles budgétaires du
gouvernement. Comment ont-elles réagi? Est-ce qu'elles ont trouvé
que ce projet de règles budgétaires était parfaitement
cohérent par rapport à ce qui a été fait
jusque-là? En particulier, j'aimerais savoir ce que vous avez dit au
gouvernement à propos du modèle sur lequel s'appuyaient toutes
ces règles budgétaires, sur la manière dont on a
établi ce modèle, sur les critères qu'on a employés
pour l'établir et sur les résultats que vous envisagiez comme
devant découler de l'application éventuelle de ce modèle
dans la forme où il vous avait été soumis.
Deuxièmement, est-ce qu'il y a eu des nouvelles depuis? Où en
êtes-vous à ce point de vue?
Sixièmement - et je termine par cela -hier soir, nous avons
entendu des propositions de la part de la partie syndicale. Le gouvernement,
par la voix des trois ministres qui sont intervenus dans le débat hier
soir, a donné sa réaction. J'ai deux questions à vous
poser à ce sujet. Premièrement, vu que vous êtes
partenaires de la partie patronale avec le gouvernement, est-ce que le
gouvernement vous a consultés avant de donner les éléments
de réponse qu'il a apportés hier soir? Deuxièmement, vous
autres, qu'est-ce que vous pensez des propositions qui ont été
faites par les centrales syndicales hier soir? Comment y réagissez-vous
et surtout comment pouvez-vous les raccorder avec les recommandations que vous
faites vous-mêmes à la fin de votre mémoire?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: J'en ai trois pages. M. le député
d'Argenteuil était rendu à huitièmement et moi, je suis
rendu à dixièmement. En tout cas, on va essayer de se comprendre
pareil.
Je vais reprendre les premières questions. Quel a
été le rôle de la fédération dans le
processus antérieur aux décrets? A-telle approuvé la
méthode des décrets? Les deux télégrammes des 17 et
25 février au premier ministre et l'entente? J'imagine que le
député d'Argenteuil faisait référence au protocole
d'entente qui lie le ministère de l'Éducation et notre
fédération des commissions scolaires à la suite de la loi
55. Vous faisiez référence à ce protocole d'entente,
n'est-ce pas, M. le député?
Je vais vous faire un cheminement, un historique de ce qu'a
été notre travail, notre rôle dans le processus
antérieur aux décrets. Je ne veux pas remonter au déluge,
mais, quand même, il faut remonter à l'automne 1981 où un
comité, comprenant le ministère de l'Éducation et la
fédération des commissions scolaires, a fait une tournée
de la province pour rencontrer les différents agents de
l'éducation: d'abord les commissions scolaires, les commissaires, les
directeurs généraux, les cadres scolaires, les directeurs
d'école, les parents, etc. Le comité voulait établir
quelles devraient être la structure et les demandes des commissions
scolaires dans le dossier. Cela a été fait conjointement.
Au cours de l'été, dans une phase préparatoire du
dépôt des offres patronales, qui a été fait, si ma
mémoire est bonne, autour du 24 ou du 25 septembre, il y a eu plusieurs
rencontres, entre autres avec le ministre de l'Éducation et
moi-même sur le sujet.
À partir du mois de mai - il ne faut pas oublier cette
étape - il y a eu signature d'un protocole d'entente entre le
ministère de l'Éducation et la fédération des
commissions scolaires sur l'ensemble du rôle qui devait être
joué par les deux parties. Le protocole d'entente, entre autres, met sur
pied ou fait mettre sur pied le Comité patronal de négociation
des commissions pour catholiques, soit le CPNCC. Le CPNCC s'est réuni,
à partir du mois de mai et pendant les mois de juin, juillet, août
et septembre, pour la préparation des offres patronales. Dans la
préparation des offres patronales, comme je le disais tout à
l'heure, nous avons rencontré le ministre à quelques
reprises.
En même temps, il y a eu une réunion préparatoire au
dépôt des offres patronales avec toutes les
fédérations, tant des affaires sociales que du secteur de
l'éducation. À cette réunion, nous avons pris
connaissance, entre autres, que les sujets à caractère salarial
étaient déjà fixés et légèrement
connus depuis la conférence au sommet qui réunissait le monde
gouvernemental et le monde syndical au mois d'avril. Quant à l'ensemble
des positions normatives qui devaient être déposées, du
moins la très grande partie, elles avaient été
décrétées "d'intérêt gouvernemental".
C'est-à-dire qu'il y avait eu un arrêté en conseil qui
décrétait l'ensemble des positions normatives
"d'intérêt gouvernemental" dans le secteur de l'éducation
et dans le secteur des affaires sociales, dans les deux réseaux,
finalement, pour tout le monde: cégeps, protestants, catholiques, dans
le réseau de l'éducation et pour les différentes
fédérations dans le réseau des affaires sociales.
Toutefois, il faut mentionner, pour être bien honnête - et
c'est ce qui était peut-être un peu bizarre pour nous - que ce qui
était devenu d'intérêt gouvernemental, donc difficilement
"bougeable", en tout cas par nous, parce que l'intérêt
gouvernemental avait été apposé par un arrêté
en conseil, était, en très grande partie, le contenu
demandé par les commissions scolaires dans le dossier de la
négociation. On était un peu mal placé pour se plaindre de
ce côté-là.
Entre le mois de septembre et le 29 novembre, c'est-à-dire la
journée où a été déposé le cadre de
règlement dont ont parlé les sous-ministres mercredi et les
représentants du monde syndical hier, la fédération, par
le biais du CPNCC, était représentée aux tables de
négocation pour le personnel de soutien, pour le personnel professionnel
et pour le personnel enseignant. Le cadre de règlement a
été déposé le matin du 29 novembre. Tout le monde
était représenté par le biais du CPNCC. À la suite
de cette période et entre septembre et novembre, il y a eu d'autres
rencontres entre le ministre de l'Éducation et moi-même, entre les
sous-ministres et le directeur général de la
fédération.
Depuis le début de décembre, on ne nous a effectivement,
comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pas invités
à participer à des réunions qui ont pu avoir lieu entre la
partie patronale gouvernementale et les syndicats. Nous avons, à ce
moment-là, un peu modifié notre râle, notre façon de
procéder, notre comportement, si on veut, en inscrivant un lobby qui
s'est voulu, en tout cas à certaines reprises, particulièrement
efficace. On nous informait de ce qui se passait à ces réunions,
toutefois. Et ça a été comme ça jusqu'à
aujourd'hui, finalement, sauf pour le dépôt de l'offre du 9
février qui a été fait conjointement: le ministre de
l'Éducation, un représentant du QAPSB et moi-même à
la CECS, pour une quinzaine de minutes. Ensuite, il y a eu rencontre du
comité technique formé, nous a-t-on dit, par le gouvernement,
pour continuer d'expliquer aux représentants de la CECS notre offre du
10 février.
La façon dont on a procédé finalement, entre le 1er
janvier et aujourd'hui, a été de rechercher de l'information,
d'une part. Il était important pour nous de ne pas couper les ponts avec
la partie avec laquelle on aurait dû être intégrés
à ce moment-là, la partie gouvernementale, et la partie
syndicale. On a aussi cherché à travailler, comme je l'ai
mentionné tout à l'heure. Dans le télégramme
adressé au premier ministre en date du 17 février, auquel faisait
allusion le chef de l'Opposition, on ne se plaignait pas des conditions qu'on
nous faisait, mais on proposait des pistes de règlement lors de la
rencontre du premier ministre avec les chefs syndicaux. Donc, nous avons fait
cette première ouverture au premier ministre quant à sa
rencontre.
Nous en avons fait une autre aux sous-ministres et au ministre de
l'Éducation pour présenter, entre autres, le principe de
l'étalement, regarder l'écriture de certains textes, comme on l'a
mentionné plus tôt, sur l'affectation et la mutation. Finalement,
le 18 février, on a rendu public un texte adressé
simultanément au premier ministre et à la Centrale de
l'enseignement du Québec pour faire en sorte d'éviter - je l'ai
mentionné aussi un peu plus tôt - qu'il n'y ait des
problèmes de taille, pour nous et pour l'ensemble du réseau
aussi, le lundi qui devait suivre l'application de la loi 111.
En gros, cela a été notre rôle, un rôle qui,
par certains bouts particulièrement autour du 18 février,
pourrait être qualifié "de médiateur", mais cela
était impossible compte tenu de notre rôle patronal. Dans ce
cadre-là, je pourrais vous souligner qu'on a eu des informations, mais
qu'on n'a pas participé aux rencontres gouvernement-syndicats entre le
1er janvier et la mi-février ou dernièrement. Lundi passé,
le sous-ministre de l'Éducation nous a indiqué que,
désormais, on serait associé. Cela a été long!
M. Ryan: Merci.
Le Président (M. Jolivet): Sur les autres questions?
M. Chagnon: Sur les autres questions, simulations selon les
décrets de l'accroissement de la productivité des enseignants.
Ces simulations selon un décret ont été
déposées devant la commission. Nous les avons d'abord
cherchées; deuxièmement, nous avons tenté de les
étudier, troisièmement, de les anlyser, et, quatrièmement,
puisque le député de Sainte-Marie nous avait
télégraphié qu'il nous poserait la question, nous nous
sommes préparés.
Je demanderai au directeur général de répondre
à la question particulièrement sur la simulation des
décrets et aussi à toute la question de l'accroissement de la
productivité des enseignants et des règles budgétaires,
avec leur cohérence et la problématique qu'elles posent.
Le Président (M. Jolivet): Je ne veux pas l'empêcher
de parler, mais, compte tenu de l'heure, nous reporterons cela à 14 h
30. Avant de nous quitter, je dois vous mentionner qu'un
télégramme a été envoyé. Il sera remis aux
membres de la commission puisque c'est une sorte de mémoire sous forme
de télégramme envoyé par The Philemon Wright School
Committee.
Nous reprendrons à 14 h 30, en sachant
très bien que c'est vous qui m'avez demandé d'être
présent à ce moment.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise de la séance à 14 h 42)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît;
La commission de l'éducation reprend ses travaux en vue
d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration
scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de
l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des
enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au
Québec.
Nous en étions, au moment de la suspension, à la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, qui avait encore quelques réponses à donner aux
questions posées par le député d'Argenteuil. Je dois vous
dire aussi que le temps qui reste à leur disposition est d'environ une
demi-heure, mais, déjà, je pense que je pourrais d'office,
à moins qu'on ne me dise l'inverse, accepter de dépasser de dix
ou quinze minutes le temps prévu, de telle sorte qu'on pourrait aller
jusqu'à 15 h 30 et permettre à chacun des collègues, de
part et d'autre, de poser les questions qu'ils sont en droit de poser. Donc, M.
Chagnon, nous en étions à votre déposition sur les
questions additionnelles.
M. Chagnon: M. le Président, comme je vous le mentionnais
avant la suspension pour le dîner, j'ai ici une question sur la
simulation selon les décrets en fonction, probablement, des exemples qui
ont été apportés devant cette commission. J'ai aussi une
question qui s'associe à cette simulation, j'imagine, la question des
règles budgétaires, de leur cohérence et des nouvelles
règles. J'ai une autre question qui touche l'accroissement de la
productivité des enseignants et, finalement, une dernière
question sur la consultation gouvernementale en fonction des ministres qui ont
été entendus devant la commission hier soir.
Alors, quant aux deux premières questions, c'est-à-dire
simulation selon les décrets et les règles budgétaires, je
demanderais au directeur général de la fédération,
M. Jacques Audy, d'y répondre. Je répondrai aux deux autres
questions.
Le Président (M. Jolivet): M. Jacques Audy.
M. Audy (Jacques): M. le Président, dans un premier temps,
ce qu'on peut affirmer, c'est que les simulations en rapport avec les
règles budgétaires et les décrets ont été
effectivement faites dans plusieurs commissions scolaires et dans plusieurs
écoles. Ce qu'on doit noter, toutefois, au point de départ, sur
cette question, c'est que lesdites simulations n'ont pas tenu compte du cadre
de règlement du 10 février.
Sur la question des décrets, dans un premier temps, ce qu'on peut
affirmer à tout le moins, c'est que les décrets n'étaient
pas satisfaisants puisque nous avons fait, les 10 et 18 février dernier
des propositions d'étalement, d'aménagement et de bonification de
façon à améliorer les décrets, mais cela devait se
faire dans le cadre d'orientations que les commissions scolaires nous avaient
signifiées, de même que d'une saine gestion des deniers
publics.
Maintenant, il faut noter, sur cette question des décrets, qu'il
y avait effectivement des récupérations sévères,
compte tenu des propositions ultérieures que nous avons faites, comme je
viens de vous le mentionner.
Concernant les règles budgétaires - je traiterai par la
suite, dans un troisième temps, de la question de la cohérence
entre les décrets et les règles budgétaires - la position
des commissions scolaires est le résultat de la consultation que nous
avons menée. Nécessairement, dans plusieurs commissions
scolaires, nous avons obtenu des simulations de plusieurs écoles. Il est
certain que dans le cas de l'école Jeanne-Mance, de Charlesbourg, des
Compagnons de Cartier, etc., nous avons eu effectivement ces simulations. Nous
avons regardé ces simulations. Elles ont été faites en
rapport avec les décrets.
Les commentaires que portent 75% des commissions scolaires qui ont
répondu aux règles budgétaires et aux simulations
inhérentes se résument à peu près de la
façon suivante. Le modèle des règles budgétaires ne
corrige pas les paramètres en fonction de l'alourdissement des
clientèles survenu depuis 1979-1980, ni ne rétablit les 200
postes coupés en 1980-1981, premier point.
Deuxième point: le modèle du ministère de
l'Éducation se base sur des nombres d'élèves par groupes
théoriques et non sur des moyennes vécues dans les commissions
scolaires et dans les écoles.
Troisième point: le calcul du ministère de
l'Éducation fait abstraction de l'impact de la baisse des
clientèles.
Quatrième point: le ministère fait abstraction des petites
écoles, ce qui était prévu au préalable dans les
conventions collectives. Mais compte tenu que nous étions d'accord avec
le retrait des ratios des conventions collectives, il est indispensable que les
garanties financières soient accordées pour s'assurer de la
qualité de l'éducation dans ces écoles.
Autre point: le calcul en fonction des régimes
pédagogiques fait abstraction de la
période de transition entre les anciens programmes et les
nouveaux, et de la multiplicité des options et de l'existence des voies.
De plus, le modèle du ministère ne distingue pas entre les
options en secondaire IV et V; il sous-estime donc le nombre de groupes
requis.
En formation générale et professionnelle, le modèle
du ministère postule le groupement des élèves du secteur
général et du secteur professionnel pour leur formation
générale. J'en passe quelques-uns.
Le calcul du ministère fait abstraction de l'intégration
des élèves en classe régulière et ne tient pas
compte de l'annexe XIX des dispositions tenant lieu de convention
collective.
Un autre point sur les minutes d'enseignement: il peut s'avérer
difficile d'atteindre la charge moyenne de 23 heures d'enseignement au
secondaire.
Morcellement des tâches. L'application de la moyenne de 23
périodes d'enseignement au secondaire obligera les commissions scolaires
à morceler les tâches.
Organisation scolaire. Le calcul du ministère élimine
toute marge de manoeuvre et ne tient pas compte de l'alourdissement des
clientèles. On rendra ainsi insolubles des problèmes
d'organisation scolaire.
Je pourrais en mentionner quelques autres, mais ce sont les principaux
problèmes que nous voyons en rapport avec le projet de règles
budgétaires tel que formulé.
Ce qu'on peut mentionner, c'est que, d'une façon
synthétique, le modèle ne tient pas suffisamment compte d'une
multiplicité de facteurs de rigidité avec lesquels doivent vivre
les commissions scolaires et qui rendent impossible le respect des moyennes ou
des maxima d'élèves par groupe qu'utilise le modèle. Parmi
les rigidités, je rappelle la question des petites écoles de 225
élèves et moins, l'obligation de former les groupes sur la base
de clientèles prévisionnelles, les contraintes de la promotion
par matière, les locaux spécialisés, l'existence d'options
et de voies, la difficulté de faire accepter par les enseignants des
tâches morcelées ou l'enseignement de plusieurs matières,
la complémentarité difficile des tâches en enseignement
professionnel, en plus du fait que le nouveau régime pédagogique
pourrait créer de nouvelles rigidités, particulièrement
dans la période de transition. Au niveau des règles
budgétaires, cela touchait les principaux points.
Maintenant, les impacts pédagogique et administratif de ces
règles budgétaires en relation avec les décrets, à
la suite des simulations qui ont été faites, se résument
comme suit. Il faut regarder l'aspect financier, mais il faut aussi regarder
l'aspect pédagogique et l'aspect humain, la motivation des gens qui ont
à intervenir pour une meilleure qualité de l'éducation
auprès des élèves et des étudiants.
Les impacts pédagogiques. L'augmentation du nombre de groupes
d'élèves à rencontrer par chacun des enseignants rend
difficile l'amélioration de la relation
maître-élèves. L'augmentation du nombre de matières
aurait pour effet d'augmenter l'effort individuel des enseignants pour la
préparation de chacun des cours. L'augmentation des fonctions
d'évaluation rendrait presque impossible l'évaluation dite
formative. L'augmentation du nombre de matières à dispenser par
la plupart des enseignants exigerait une polyvalence accrue de ceux-ci. Il y a
aussi l'augmentation du nombre d'élèves en atelier jumelé
et ainsi de suite. J'en ajouterai un autre au niveau pédagogique et,
ensuite, je passerai aux impacts administratifs. L'augmentation de la
tâche de dispensateur de cours risquerait d'entraîner une
démobilisation des enseignants face au projet éducatif qui
préoccupe grandement les commissions scolaires et à
l'implantation des nouveaux programmes.
Maintenant, les impacts administratifs. L'obligation de contingenter
l'inscription des élèves de plusieurs spécialités
augmenterait les coûts de déplacement ou freinerait le libre choix
d'options. L'abolition ou la fermeture de plusieurs options dans les petites
polyvalentes, obligeant de nombreux élèves au regroupement,
aurait des incidences aussi sur plusieurs postes budgétaires.
Une simulation de l'application des clauses relatives à la
tâche démontre que le nombre d'enseignants requis dans l'ensemble
des écoles dépasserait le nombre admissible par l'application du
paramètre. Les hypothèses sur lesquelles sont basées les
règles de calcul ayant servi à l'établissement du
paramètre révisé ne colle pas à la
réalité des milieux où les écoles sont très
distantes l'une de l'autre. Donc, cela touche les principaux impacts
pédagogiques et administratifs des règles budgétaires en
cohérence avec les décrets et ne tient pas compte du cadre de
règlement du 10 février.
Donc, si nous regardons de quelle façon les règles
budgétaires ont été faites selon les décrets, on
peut dire que ça été fait de la façon suivante:
c'est une organisation théorique maximale comme si tous les
élèves, tous les professeurs, tous les cours, toutes les
catégories de cours étaient dans une seule et même
polyvalente. Je dois dire, toutefois, que certaines frictions ont
été considérées de façon à ne pas
maximiser à outrance la récupération plausible.
Donc, la position des commissions scolaires, telle qu'elle a
été exprimée, à la suite de son adoption par le
conseil d'administration de l'organisme, mentionnait très clairement que
c'était une organisation théorique, la plus avantageuse possible,
qui enlevait toute marge de manoeuvre aux
commissions scolaires dans le cadre des règles budgétaires
telles que formulées. On sait fort bien que les écoles sont
différentes autant quant à leur nombre d'élèves que
quant aux cours qu'elles offrent, quant aux niveaux d'enseignement et quant aux
matières. Dans ce contexte-là, il nous apparaît que les
règles budgétaires ne tiennent pas compte, pour une bonne part,
de ce qui était prévu aux décrets jusqu'à un
certain point. Ceci touche la première intervention.
Maintenant, parlons de la méthode d'allocation des ressources qui
a été effectivement adoptée il y a plus de trois ans
déjà. Sur cette question-là, les objectifs qui avaient
été fixés au point de départ et que la
fédération des commissions scolaires, au nom des commissions
scolaires, partageait était: premièrement, de s'assurer que le
gouvernement paierait à 100% les coûts des objectifs nationaux de
l'éducation; deuxièmement, que la compression des dépenses
n'affecterait pas la qualité des services offerts; troisièmement,
il fallait dégager une marge de manoeuvre plus grande pour les
commissions scolaires.
Nous étions d'accord au niveau des objectifs et aussi de la
méthode, au point de départ. En cours de route, que s'est-il
produit? Même si au niveau des principes, cela devenait une enveloppe
fermée, c'est-à-dire que les commissions scolaires étaient
en tout point d'accord et avaient même suggéré, à
plusieurs reprises, pour que celles-ci assument une gestion saine des deniers
publics, d'avoir des enveloppes budgétaires fermées. Cela avait
été suggéré à plusieurs reprises par les
commissions scolaires. Au moment où la méthode d'allocation des
ressources a finalement été adoptée, il devait aussi y
avoir une plus grande transférabilité et on devait viser une
certaine réduction des coûts de l'enseignement public. Nous
partagions aussi ces principes.
Toutefois, que s'est-il passé dans la réalité au
fur et à mesure des trois années qui se sont
succédé? Bien que, jusqu'à un certain point, on se doit
d'être d'accord sur un assainissement et une meilleure utilisation des
deniers publics, la méthode a perdu de son efficacité. Les
allocations sont devenues davantage discrétionnaires,
c'est-à-dire qu'au lieu de les retrouver d'une façon où
les commissions scolaires pouvaient faire une complète
transférabilité, elles ont été réduites et,
par la suite, nous avons eu à assumer de nombreuses compressions
budgétaires dans les trois années dont on parle. Pour
l'année en cours, ori peut parler d'un montant d'environ 169 000 000 $,
c'est-à-dire que, selon le projet de règles budgétaires de
1983-1984, c'est 169 000 000 $ qui sont prévus et cela comprend les
compressions prévues, la récupération prévue
concernant l'article 1. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon, pour le reste.
M. Chagnon: Peut-être un dernier point concernant la
simulation qui a été faite, entre autres, à la CECM. On
nous a indiqué qu'elle avait été faite sur la base
uniquement des décrets, celle-là, mais qu'on avait utilisé
des moyennes maximales et des tâches maximales par enseignant, ce qui,
évidemment, entraîne une réduction et un écart plus
grand du nombre d'enseignants à l'intérieur de cette partie du
réseau de la CECM.
Sur la question de l'accroissement de la productivité des
enseignants, je voudrais mentionner que nous nous sommes associés, comme
on le mentionne dans notre document, à un objectif gouvernemental qui
fait en sorte, d'une part, de diminuer les coûts et, d'autre part,
d'augmenter la productivité. Donc, pour nous, il nous semblait normal de
chercher à atteindre progressivement les standards canadiens en termes
de productivité ou en termes de travail pour les enseignants.
Toutefois, j'ajouterai, qu'on mentionne aussi dans notre document,
à la page 9: "Même si tous ces objectifs sont valables en soi,
nous croyons qu'il est nécessaire d'obtenir l'adhésion des
enseignants sur la façon de les atteindre." Ces objectifs sont aussi
pédagogiques, ils sont aussi d'ordre financier ou de gérance pour
les commissions scolaires. C'est une question qui nous avait été
posée ce matin, à laquelle je me devais de répondre.
La dernière, c'était: Le gouvernement vous a-t-il
consulté hier soir? Hier soir, je pense qu'il y a eu trois interventions
ministérielles, trois interventions de membres du cabinet,
c'est-à-dire MM. les députés de L'Assomption, de Matane et
de Bourget. Effectivement, le gouvernement aurait-il voulu nous consulter avant
de parler que cela aurait été plutôt tannant. La
réponse, c'est non, évidemment.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Compte tenu du partage
équitable du temps, je me dois de dire qu'il y a quinze minutes en
banque à ma droite. M. le député de Fabre a maintenant la
parole. (15 heures)
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je veux revenir
sur la question qui vient juste d'être traitée par les
intervenants. Vous parlez de cette question, entre autres, à la page 8
de votre document, au chapitre II, intitulé Les correctifs
nécessaires prévus par les décrets. Vous commencez par
noter que les objectifs prévus dans le décret doivent être
maintenus
et vous mentionnez, entre autres, la présence réelle des
enseignants à l'école, la charge de travail globale, la
possibilité d'affecter les enseignants selon leurs qualifications et
leur expérience, une meilleure résorption des personnels, une
limitation des coûts de la sécurité d'emploi et une
productivité accrue de la tâche des enseignants. Par contre - et
là, on rejoint un peu l'intervention que vous venez de faire - vous
dites: "Nous ne pouvons pas passer sous silence le fait que l'application
intégrale, dès septembre 1983, des objectifs rattachés
à l'augmentation de la productivité provoque, principalement au
secondaire, un lourd chambardement dans le vécu pédagogique des
écoles." Ce que vous venez de décrire devant nous, si je
comprends bien, c'est l'application, dès 1983, de l'augmentation
prévue s'il n'y a pas étalement. C'est cela?
M. Chagnon: II y aura étalement.
M. Leduc (Fabre): Bon! Mais c'est ce que vous venez
d'évoquer. S'il n'y a pas d'étalement, cela peut conduire au
résultat que vous venez d'évoquer. Par contre, s'il y a
étalement, avez-vous fait là, par rapport à
l'étalement, des simulations; avez-vous des choses à nous dire
à cet égard? J'aurais une autre question après votre
réponse.
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon ou M. Audy.
M. Chagnon: Sur la question de l'étalement en fonction de
la proposition du 10 février, il faut se souvenir de quelques
éléments extrêmement importants, particulièrement en
ce qui regarde la résorption du nombre de personnels mis en
disponibilité. On sait que l'application intégrale des
décrets pour 1983-1984 nous amènerait à un nombre glissant
autour de 4000 ou 4200 enseignants en plus, mis en disponibilité. Vous
savez que nous en avons déjà 2500. Cela fait, pour l'ensemble du
portrait des mises en disponibilité, un nombre qui varie entre 6500 et
7000. Avec les mesures d'étalement en P-1 ou P-2, on est capable de
ramener le nombre de mises en disponibilité d'entre 6500 ou 7000
à 4500. Évidemment, pour le réseau, c'est diablement
intéressant parce que cela nous amène à diminuer la
pression, entre autres, qui a été exprimée à
plusieurs reprises ici sur l'augmentation du nombre de groupes
d'élèves par enseignant, etc. Dans ce cadre, le fait d'aller
progressivement vers les standards canadiens de productivité nous
permet, premièrement, une gestion qui, du fait qu'elle soit
étalée, devient plus claire et un peu plus facile à faire
compte tenu de la diminution importante du nombre de mises en
disponibilité.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre.
M. Leduc (Fabre): D'accord. Ma deuxième question touche
à ce qu'on a évoqué non pas hier, mais avant-hier, devant
cette commission, soit la possibilité d'organiser l'école
secondaire suivant de nouveaux modèles qui, semble-t-il, sont
déjà en application dans de petites ou moyennes écoles,
mais qui ne seraient pas encore en application ou qui seraient plus difficiles
d'application ou, en tout cas, qui causeraient un peu plus de problèmes
dans les écoles du type des grosses polyvalentes. On nous a même
affirmé qu'il serait sans doute possible pour les enseignants de
rencontrer dans une semaine moins d'élèves qu'ils ne le font
présentement et ce, malgré les décrets, si on se donnait
la peine d'examiner de nouveaux modèles d'organisation dans les
écoles secondaires. Je pense à des modèles
polyvalents.
Enfin, je pense qu'on a évoqué devant cette commission la
polarisation, si vous voulez, de deux types d'écoles possibles:
l'école, boîte à cours - et si je comprends bien, votre
simulation va dans ce sens - et un autre type d'école qui serait une
école dite polyvalente basée sur le regroupement des
élèves, sur une stabilité des élèves
à l'intérieur des classes et, bien sûr, sur la
possibilité pour les enseignants d'enseigner plus d'une matière.
Vous avez dit, dans la liste que vous avez évoquée tout à
l'heure, que cela pouvait poser un problème. Je vous demande, compte
tenu que les nouveaux régimes pédagogiques permettent ces
nouveaux modèles d'organisation, où vous en êtes dans vos
discussions relativement à ces nouveaux modèles. Avez-vous une
opinion quant à ces nouveaux modèles?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Le député de Fabre pense, entre autres,
au titulariat...
M. Leduc (Fabre): Oui.
M. Chagnon: ...et au mariage d'enseignement de diverses
matières dans un même champ. Je demanderais au directeur des
relations du travail de la fédération, M. Tessier, de nous
entretenir sur le sujet.
Le Président (M. Jolivet): M. Jean-Pierre Tessier.
M. Tessier (Jean-Pierre): M. le Président, les
éléments de réponse se retrouvent dans notre
mémoire à la page 9 quand nous parlons du fait d'associer les
enseignants progressivement à des augmentations de productivité,
d'abord, et, à la page 11, quand nous mentionnons ce que
pourrait faire l'application progressive de la proposition du 10
février. L'application progressive de la proposition du 10
février, nous l'avons validée avec des comités d'appui au
niveau des négociations, mais elle n'a pas été
validée dans chacune des commissions. Cependant, ce que cela nous
révélait, c'est que, pour la première année -
évidemment, ayant une productivité augmentée de 5% -cela
permettait au niveau secondaire d'avoir, à l'occasion, un enseignant -
étant donné que la tâche est globale - sur cinq, sur six ou
sur huit, qui pouvait se voir ajouter un groupe d'élèves à
moins que, comme cela a été mentionné
précédemment en commission, dans des petites écoles, on
ait des systèmes de regroupement de familles d'enseignement, de tutorat
ou de titulariat, ce qui, à ce moment, augmentait la tâche, mais
ne provoquait pas l'addition de groupes.
En P-1, cela devenait donc intéressant, en plus de mettre moins
de gens en disponibilité. En deuxième année de convention
- notre document le mentionne aussi en page 11 - si on ne fait pas le choix de
regrouper des champs, si on garde les disciplines très étanches,
on aura encore plus d'enseignants qui auront, moitié-moitié - des
fois un peu plus que la moitié, mais ce serait autour de
moitié-moitié - un groupe de plus.
Cependant, cela donnait encore un an et cela permettait d'inventorier et
d'associer le milieu à des organisations qui pouvaient permettre de
regrouper les familles. Cependant, en P-3, on a beau inventorier, trouver des
modèles, ce n'est pas sûr que tout le monde embarquera dans le
modèle de regrouper des champs. D'autres préféreront
peut-être accepter d'avoir un groupe de plus plutôt que de
regrouper des champs et d'avoir des matières qui ne soient pas
spécialisées. Cela nous a fait ressortir notre proposition du 18
février où on dit: II y a peut-être un doute en P-3 et il
faudrait étudier l'impact de P-3.
Comme le directeur général, M. Audy, l'a exposé
tout à l'heure, les règles budgétaires à
l'état pur et appliquées le 1er septembre 1983 sur des
décrets qui restent intégralement comme ils sont, cela provoque
un chambardement; c'est plus. On ne peut pas penser recoudre cela et
retravailler cela. Les écoles, il y a des élèves dedans,
il y a des parents qui tiennent à des spécialités, il y a
des élèves qui tiennent à certaines
spécialités, il y a des enseignants qui ont pris des habitudes de
travail et il y a des équipes-école qui ont pris des habitudes de
travail.
Nous, on se disait: Allons-y graduellement. Notre première
expérience permettait de penser à un P-1 viable, une
première année, une deuxième année et on s'est
même rabattu à dire: En troisième année, là,
attention. Les règles budgétaires, c'est un projet.
Peut-être qu'elles seront corrigées - on l'espère - et cela
nous permettra de voir si en P-3 on peut fonctionner. C'est ce qui a
amené notre proposition du 18 février.
M. Leduc (Fabre): D'accord, je trouve cela intéressant.
Cela éclaire en même temps un des objectifs, finalement, de la
proposition du 18 février.
Juste une dernière question. Avez-vous inventorié les
expériences qui existent présentement dans certaines
écoles quant à ce nouveau modèle basé sur le
tutorat et la polyvalence des enseignants en même temps?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Pour répondre à la question du
député de Fabre, nous savons que quelques écoles
travaillent sur des modèles particuliers et, en même temps, sur
certaines expériences de modèles. Par contre, nous n'avons pas
fait un inventaire exhaustif de chacun des modèles qui peuvent
être mis en application dans le cadre d'une récupération
dans le style de celle qu'on va vivre. Sur ce, je pourrais ajouter, qu'en fait,
comme on l'a souligné vendredi après-midi, il y a plusieurs
modèles qui pourraient être regardés. Il y a des variantes
de ces modèles quasi à l'infini.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Avant de poser mes
questions - j'en ai quatre - j'aimerais souligner qu'il est évident pour
moi et, je crois, pour tout le monde qu'on ne peut pas considérer
l'impact du décret sans considérer en même temps l'impact
des règles budgétaires. Même si nous sommes ici pour
considérer l'impact du décret, surtout pour la qualité de
l'éducation, je crois qu'il y a une menace cachée derrière
cette affaire. Ce sont les règles budgétaires, parce que, comme
je l'ai dit il y a deux jours, quand nous avons entendu M. Girard, le
gouvernement peut tirer une économie par le biais des règles
budgétaires, même s'il ne réussit pas à tirer une
certaine économie du décret. Je crois que c'est très
important. Nous devrions peut-être avoir une autre commission
parlementaire sur les règles budgétaires parce que c'est la
clé de toute la situation.
J'ai quatre questions à poser et j'aimerais les poser une
à la fois, parce que c'est plus clair pour tout le monde. D'abord, la
question de l'autonomie des enseignants. J'ai été
particulièrement frappée hier par le mémoire de la CEQ,
à la page 26, où on dit: Dorénavant, les enseignants ne
verront leur tâche définie qu'en fonction de l'application des
règlements du ministre. Conséquences du décret: les
enseignants ne sont plus les
professionnels qu'il interpellait - on parle du ministre Laurin - en
décembre 1981, mais seulement des exécutants dociles et
muets.
Je partage le but d'une vraie décentralisation, comme la
Fédération des commissions scolaires. Que pensez-vous des
conclusions tirées par le mémoire de la CEQ?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Premièrement, concernant l'impact du
décret sur les règles budgétaires, il est évident
qu'on peut faire des simulations. Tant à partir des décrets
qu'à partir des règles budgétaires, on peut faire des
simulations en conjuguant ces deux éléments. C'est une chose. Il
faut savoir une deuxième chose, c'est que les règles
budgétaires, en tant que telles, sont des propositions de règles
budgétaires. Il y a un projet de règles budgétaires qui,
en principe, est en consultation jusqu'à la semaine prochaine. Au
ministère de l'Éducation, on prévoit une consultation qui
devrait finir la semaine prochaine. En ce qui concerne la
fédération, nous avons demandé des modifications au
mécanisme des règles comme telles pour assouplir justement
l'application, sur le plan de la gestion, des décrets que nous
connaissons. (15 h 15)
Quant à la deuxième question que vous souleviez,
l'autonomie des enseignants, qui est relevée à la page 26 du
document de la Centrale de l'enseignement du Québec, celle-ci tire la
conclusion que les enseignants et enseignantes ne sont plus, pour le ministre
Laurin, "les professionnels qu'il interpellait en décembre 1981, mais
seulement des exécutants dociles et muets".
Il y a deux choses: la première est que, d'une part, dans le
livre vert de 1979, les différents agents de l'éducation ont fait
mention de la nécessité d'améliorer le contenu des
programmes-cadres, à l'époque, qui devaient justement être
améliorés. Toutefois, cela peut avoir apporté une
centralisation sur le plan pédagogique, j'en conviens avec vous.
Quant à nous, notre propre vision du rôle des enseignants
dans l'école, nous l'avons déjà formulée dans un
document pour consultation pour les commissions scolaires. C'est un document de
propositions qui touche plus particulièrement le dossier de la
restructuration scolaire et dans lequel nous disions ceci: Les enseignants
devraient être intégrés, entre autres, au conseil
d'orientation de l'école, parce que nous croyons à la formule du
conseil d'orientation de l'école. Les enseignants devraient avoir la
possibilité de travailler, entre autres, sur le projet éducatif
de l'école, l'évaluation du projet éducatif de
l'école et toutes ces matières sur lesquelles les enseignants,
comme professionnels de l'acte pédagogique, sont certainement les
maîtres d'oeuvre à privilégier. Dans ce contexte, nous
croyons qu'il est possible pour les enseignants, dans chacune des
unités-écoles, de jouer un rôle important sur le plan de la
démarche pédagogique de l'école comme telle et même
de l'ensemble de la commission.
Le Président (M. Jolivet): Mme la
députée.
M. Dougherty: Je parle plutôt de leur marge de manoeuvre
individuelle comme professionnels. Est-ce restreint à cause du
décret? Peut-être n'y a-t-il pas de réponse. Mais j'ai
été particulièrement frappée par leur
interprétation de l'impact du décret, parce que cela va à
l'encontre de toutes les affirmations du ministre qui était toujours
pour une amélioration du professionnalisme des enseignants. C'est
peut-être une chose à examiner comme impact du décret.
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Vous parlez des programmes-cadres qui sont
remplacés. Je sais que les enseignants, chez nous et dans plusieurs
régions, travaillent actuellement sur la préparation, pour
1983-1984 - c'est un problème qui sort directement du cadre des travaux
de cette commission - des éléments didactiques qui leur
permettront d'appliquer ces programmes-cadres. Ce sont des enseignants qui
travaillent là-dessus chez nous. C'est toute la question qui est
reliée à l'utilisation de manuels qui doivent être
agréés par le ministère et qui sont en attente dans le
milieu pour l'instant et qui, d'une façon ou d'une autre, permettent aux
enseignants, justement, de travailler sur l'application pratique de la
façon dont ils vont rendre les programmes pour lesquels ils ont
été nouvellement formés.
M. Dougherty: Merci. J'aurais une deuxième question. Quel
sera l'impact du décret sur la fermeture des écoles? Est-ce qu'il
y aura plus ou moins de pressions sur les commissions scolaires pour fermer les
écoles? C'est évident que les règles budgétaires
seront impliquées. Mais est-ce qu'il y aura plus de pressions qu'il n'y
en a à l'heure actuelle pour regrouper, compte tenu qu'il y aura moins
d'enseignants, les ressources humaines dans une école au lieu de
plusieurs écoles pour être plus efficace?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: C'est une question fort complexe que l'ensemble de la
question de la fermeture des écoles. Il est difficile de la regarder
uniquement sous l'angle des décrets; c'est plus facile de la regarder
sous l'angle
des règles budgétaires. C'est évident que, pour
certains milieux, il y aura intérêt, si ce n'est
déjà fait - dans les quatre coins de la province, un effort a
été fait à cet égard depuis déjà de
nombreuses années; pensons à la CECM et à d'autres milieux
- à faire en sorte que les écoles puissent regrouper les
clientèles pour lesquelles elles ont été construites.
Toutefois, la fermeture d'une école dans un milieu pose toujours
un problème. On a entendu plusieurs déclarations de commissions
scolaires, plusieurs déclarations ministérielles aussi - par
exemple, celle de l'ancien ministre de l'Éducation - qui parlaient de la
dernière école de quartier. Il faut savoir que, pour garder la
dernière école de quartier ou encore la dernière
école d'un village - ça prend une signification encore plus
particulière, plus profonde à ce moment-là - il n'y a pas
de crédits supplémentaires d'alloués.
Maintenant, il y a un grand effort de rationalisation dans l'ensemble du
réseau de l'éducation, depuis déjà trois ou quatre
ans, en fonction des ressources matérielles et financières dont
nous disposons. Cela n'a pas pu faire autrement qu'amener la fermeture de
certaines écoles. Mais c'est toujours à contrecoeur qu'on doit
fermer une école. On parlait des règles budgétaires, mais
il y a un autre facteur qui nous force à fermer les écoles, c'est
la diminution de la clientèle. La clientèle, on l'a
évoqué, a pratiquement diminué de 30% dans les dix
dernières années. Alors, veux veux pas, à cause des
diminutions de la clientèle et de certaines contrictions dans les
règles budgétaires, il faut que tu prennes de temps en temps des
orientations de ce type. Je pense qu'en général les commissions
scolaires ont su le faire de la façon la plus humaine possible,
malgré que ce soit toujours un problème.
Le Président (M. Jolivet): Mme la
députée.
Mme Dougherty: J'aimerais poser une question. C'est un peu
hypothétique mais, je crois que c'est le noeud du problème: le
modèle d'organisation surtout au niveau secondaire. Le gros
problème qui se pose, surtout au niveau secondaire, c'est de donner une
éducation de qualité avec moins d'enseignants - j'aimerais
élargir le cadre de ces questions - avec moins de ressources humaines,
donc avec une certaine économie.
Il y a deux jours, le sous-ministre a dit: Si on change le modèle
- ça rejoint un peu la question du député de Fabre
-d'organisation surtout en secondaire I et II, on peut faire mieux - au moins
aussi bien que nous faisons maintenant - avec moins de ressources. Je crois que
le modèle est important. On n'a pas comparé les modèles
qu'on utilise en Ontario. On a parlé de productivité, mais on n'a
pas parlé du tout des modèles dans d'autres provinces, d'autres
pays. Le modèle est important.
J'aimerais vous poser cette question. Si vous étiez libre, comme
commission scolaire ou comme fédération de plusieurs commissions
scolaires, de jouer avec tous les paramètres, pas uniquement avec le
nombre d'enseignants, mais aussi avec le nombre des professionnels non
enseignants, avec toutes les ressources humaines, toutes les heures pour les
élèves, les heures d'enseignement, les heures d'encadrement, les
heures pour d'autres activités - je ne sais pas si vous ou vos
administrateurs y avez pensé - est-ce qu'il y a, pour l'école
secondaire, d'autres modèles que nous devrions implanter? Oubliez le
régime pédagogique qu'on a implanté dans les deux ou trois
dernières années. Est-ce qu'il y a d'autres modèles que
nous devrions implanter pour une meilleure qualité de l'éducation
avec moins de ressources humaines? Pour moi, cela est la question clé.
Est-ce qu'on a examiné d'autres modèles? Je crois que les
plaintes des enseignants sont basées sur l'hypothèse qu'on va
implanter le décret sur le modèle que nous avons maintenant. Mais
si on change le modèle, est-ce que cela ouvre toute la question et nous
donne plus de possibilités de faire mieux avec moins?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.
M. Chagnon: Sur la question des modèles - je l'ai
souligné tout à l'heure - il y a une gamme de modèles
possibles sur lesquels on peut travailler. Je demanderais à M. Roger
Carette, qui lui-même travaille dans une commission scolaire
quotidiennement, de répondre à la question de Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Le Président (M. Jolivet): M. Carette.
M. Carette: Dans le cadre de la question hypothétique
visant à savoir ce qu'on ferait si on était maître de
l'ensemble des paramètres qui régissent la quantification des
ressources humaines dont on dispose, il est fort probable qu'au niveau des
commissions scolaires ou des écoles, des modèles
différents de celui de la spécialisation à "outrance"
qu'on vit depuis la période 1967-1968 seraient mis en application,
notamment, celui évoqué par un des sous-ministres lors de la
première séance de la commission et celui qui était
effectivement repris par bien des gens et qui était prôné
dans les opinions colligées dans le livre vert - je fais allusion au
modèle de titulariat - à tout le moins au niveau du premier cycle
du secondaire. Si on était tout à fait libre de contraintes, je
pense que ce système-là serait déjà très
largement - un peu plus qu'il ne l'est présentement - en
vigueur au niveau du premier cycle au secondaire.
Je dois dire là-dessus que ce ne sont peut-être pas
seulement les paramètres numériques qui ont constitué des
contraintes. Je ne dis pas, non plus, qu'elles sont toutes levées par le
décret. C'est à l'analyse du milieu qu'on va pouvoir le
constater. Je fais allusion ici à un facteur historique qui était
majeur. Quand, dans les écoles, jusqu'à maintenant, on tentait
d'implanter un système de titulariat pour le premier cycle ou un
système un peu moins poussé à fond de regroupement
d'élèves stable qui enlevait, à toutes fins utiles, les
formules de décloisonnement au premier cycle, on était souvent
confronté à des problèmes à peu près
insolubles en raison des déterminants anciens de sécurité
d'emploi où les gens étaient confrontés à devoir
s'identifier à un champ d'enseignement pour s'assurer d'une
stabilité ou d'une sécurité d'emploi à peu
près proportionnelle à leurs états de service.
C'était un problème majeur. Dans toutes les écoles
où on a tenté d'implanter cela, on était confronté
à cela.
Je pense que les enseignants - je fais allusion à un milieu que
je connais, le mien - étaient prêts et ont même tenté
des expériences, en étant à l'abri de risques de ce
côté-là, de changer le modèle organisationnel. Quand
on disait, dans la proposition du 10 février, qu'il fallait, à
certains égards, modifier certains éléments des articles
relatifs à la mutation et à l'affectation en lien avec le fait
que cela devient un des définisseurs de la sécurité
d'emploi, c'est une des choses qu'on voulait dire.
Je voudrais faire un deuxième commentaire là-dessus.
Changer de modèle présume obligatoirement, pour que le nouveau
modèle devienne un peu plus efficace, que les gens qui vont vivre le
modèle soient associés au changement de modèle. Je pense
que cela est possible. Cela n'a peut-être pas à être
nécessairement conventionné. On ne fait pas cela
d'autorité ni dans une commission ni dans un réseau. Je pense que
cela est faisable. Ce sont fondamentalement les deux commentaires que je
voulais apporter à votre question. (15 h 30)
Le Président (M. Jolivet): Merci. Le temps étant
écoulé, d'office, cependant, après avoir consulté,
je crois qu'il vaudrait la peine de donner quinze minutes additionnelles.
Compte tenu du temps à être partagé le plus
équitablement possible, je permettrai au député de
Chauveau de prendre une dizaine de minutes puisque, déjà, il y a
une différence. Mme la députée de L'Acadie aura cinq
minutes ou quelqu'un d'autre.
M. le député de Chauveau.
M. Brouillet: II y a deux jours, j'étais intervenu pour
faire part d'une de mes grandes préoccupations, celle d'un écart
qui existait entre la perception, en particulier, des étudiants et de
l'ensemble de la population quant au contenu des décrets et à
leurs effets et ce que nous avait présenté, à ce moment,
la partie patronale, les représentants gouvernementaux quant au contenu
des décrets. J'avais posé des questions aux représentants
gouvernementaux, aux sous-ministres, pour qu'ils réaffirment d'une
façon très précise trois points des décrets. J'ai
confronté leurs réponses avec ce qu'on retrouvait dans de la
publicité ou de l'information provenant des syndicats. J'avais fait
allusion, à ce moment, à une information provenant de l'alliance
et surtout à une publicité que mes enfants ont rapportée
de l'école.
Parmi les points en question, il y avait, entre autres, le nombre de
spécialistes au primaire. Dans l'information provenant de l'alliance,
à certains endroits on disait qu'on revendiquait le maintien des
spécialistes. On a répliqué, hier soir, que dans le
même texte on faisait allusion à deux hypothèses. C'est
vrai qu'on fait allusion à deux hypothèses, mais partout dans le
reste du texte on retient l'hypothèse qui ne sera pas appliquée
dans le cadre de règlement déposé par le ministre, soit
l'hypothèse de l'augmentation de la présence en classe. La preuve
que partout dans le texte on retient l'hypothèse contraire c'est que,
quand on pose des questions aux parents, la première question qu'on leur
pose est la suivante: Voulez-vous l'abolition des spécialistes en
éducation physique, arts plastiques, musique et anglais, langue seconde,
aux niveaux primaire et secondaire? L'autre hypothèse n'y est pas.
Autrement dit, on ne pose pas de question sur ce qui sera la
réalité. On pose des questions sur l'hypothèse la plus
défavorable, hypothèse qui, justement, n'a pas été
retenue par le ministère.
Si je reviens maintenant à la publicité que mes enfants
m'ont apportée, dans la même phrase, on s'appuie sur
l'hypothèse d'une augmentation de la présence en classe pour dire
qu'il va y avoir moins de spécialistes. Vous allez voir la confusion qui
existe dans l'esprit. Je vais vous lire la phrase: Sans entrer dans tous les
détails, disons que les offres qui nous sont faites représentent
plus de temps de présence à l'école pour nos enfants,
risque d'un plus grand nombre d'élèves par classe et moins de
spécialistes. Dans la même phrase, sur l'hypothèse d'un
plus grand nombre de temps de présence, on mentionne moins de
spécialistes.
Il y avait aussi deux autres points, le point sur l'appui apporté
aux enfants intégrés dans les classes, j'avais mentionné
cela. On disait qu'il n'y aura pas d'appui. Je peux
vous le citer: Voulez-vous qu'on intègre dans une classe
régulière des enfants en difficulté d'apprentissage sans
l'appui de services d'appoint à ces élèves, ni aux
enseignants? On retrouve la même chose ici.
De plus, dans la publicité transportée par mes enfants
à la maison, les enfants en difficulté d'apprentissage seront
intégrés à des classes régulières sans
aucune garantie d'appui de personnes compétentes. J'espère que la
commission a pu éclairer au moins les gens et les enseignants qui nous
écoutent, mais j'en doute. Ils ne l'ont peut-être pas encore assez
suivie. Hier matin, mes enfants revenaient à la maison avec encore de la
publicité qu'on leur retransmet et voici ce que je lis: "Les
enseignantes et enseignants de vos enfants par leur action revendiquent: le
droit à une école de qualité en voulant conserver un vrai
maximum d'élèves par classe - j'aimerais que vous me
répondiez sur cela tantôt - des services appropriés pour
tous les enfants en difficulté, nos spécialistes au primaire et,
quatrièmement, le maintien actuel du nombre de groupes à
rencontrer au secondaire." On voit que le quatrième point ne concerne
pas le primaire, mais les trois premiers le concernent et, sur ces trois
points, les réponses qui ont été fournies par la partie
gouvernementale - j'attends votre réponse - semblent apporter des
garanties.
Je vous pose la question suivante: À ce moment-là, les
enseignants du primaire font des actions pour revendiquer des choses qui leur
sont déjà garanties, au moins les trois points mentionnés.
J'attends vos réponses. Quant au quatrième point, la question du
nombre de groupes, par toutes les questions qui vous ont été
posées tantôt, on a su qu'il y a même une possibilité
de réduire le nombre de groupes si on introduit un nouveau modèle
organisationnel qui impliquerait une polyvalence, une spécialisation
moins à outrance - ce sont les expressions que vous employiez
tantôt - et d'autres possibilités d'organisation.
Pour le premier point, un vrai maximum d'élèves par
classe, ce qu'on nous a dit l'autre jour, c'est que dans le décret on
maintient le statu quo quant au maximum et quant à la moyenne. Il y a un
élément nouveau qui est intervenu, c'est la question du minimum
de dix groupes. Donc, le maximum serait garanti partout, mais la moyenne serait
garantie là où il y a au-delà de dix groupes, onze groupes
en montant. Pourquoi cette modification est-elle là et a-t-elle vraiment
un impact sérieux sur le maximum dans les groupes?
Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon. M. Chagnon:
Merci, M. le Président.
M. Brouillet: Je vais commencer par ces trois questions.
M. Chagnon: En réponse à la question du
député de Chauveau, je dirai ceci: Peut-être qu'avant le 9
février il pouvait subsister certaines ambiguïtés sur
l'ensemble du régime pédagogique à
l'élémentaire, étant donné qu'on avait dit qu'il y
aurait possiblement une commission parlementaire -probablement celle-ci - qui
devrait étudier la question, autour des 20, 21 et 22 février, je
pense. Toutefois, à partir du moment où le cadre de
règlement du 10 février était déposé - le 9,
et le 10 février, il était déposé publiquement -
sur l'ensemble de la question, à l'élémentaire, des
spécialistes, des spécialités, tout le monde pouvait
conclure qu'il y avait une espèce de clause-ascenseur qui faisait en
sorte d'augmenter, d'une part, la tâche des enseignants d'une heure et,
en même temps, d'augmenter le temps d'enseignement à
l'élève d'une heure aussi. Donc, on gardait le même
modèle organisationnel que celui qu'on connaît. Quant à la
deuxième année, on augmentait d'une demi-heure le temps de
présence des élèves pour faire en sorte, justement,
d'augmenter le temps d'enseignement des spécialités, qui passait
de trois heures à trois heures trente minutes. Donc, simplement le fait
d'avoir augmenté de trente minutes le temps d'enseignement
spécialisé à l'élémentaire, que ce soit pour
l'enseignement des arts, de l'éducation physique ou de la langue
seconde, ajoutait 600 spécialistes à
l'élémentaire.
Pour les questions concernant les règles de formation de groupes
et les autres questions que vous avez mentionnées, M. le
député...
M. Brouillet: Sur les services pour les enfants en
difficulté.
M. Chagnon: ...comme les services pour les enfants en
difficulté...
M. Brouillet: Ma question sera précise. Les décrets
actuels, en comprenant aussi le cadre de règlement, offrent-ils plus de
garanties que l'ancienne convention?
M. Chagnon: ...je demanderais à M. Tessier de
répondre sur ces deux aspects.
M. Tessier: M. le Président, je répondrai, d'abord,
à la question sous l'angle du niveau primaire. Au niveau du primaire,
quant à la moyenne des groupes d'élèves et au maximum
d'élèves par groupe, on a transcrit intégralement les deux
versions entre les anciennes conventions collectives et les décrets
quant aux chiffres. Cependant, il y a deux nuances. Quant à la situation
géographique de l'école, on se souvient qu'antérieurement
on devait avoir des arrangements ou des ententes là-dessus, parce qu'il
y avait aussi dans la dernière
ronde beaucoup d'arrangements locaux et de la négociation locale.
Cela faisait un sujet à englober dans le cadre de la négociation.
Est-ce qu'on retrouverait cet élément d'entente sur la sitution
géographique de l'école en tirant à vide dans les
commissions? Vous savez que notre opinion là-dessus, c'est que des
négociations locales, on en fera de véritables si on a l'ensemble
des sujets, mais on ne tire pas pour une tractation et une négociation,
une commission scolaire, à cette date, sur un point bien isolé.
Donc, il y avait une sécurité quant aux groupes
d'élèves pour leur situation géographique, de parler de
consultation.
Sur l'autre aspect, les moyennes s'appliquent à la commission et
on dit que "les règles de la formation de groupes d'élèves
doivent être telles que la moyenne du nombre d'élèves par
groupe, pour l'ensemble des groupes de chaque catégorie
d'élèves définie au présent article, ne peut
excéder les nombres indiqués à la commission scolaire,
à condition qu'il y ait à la commission scolaire au moins dix
groupes d'élèves de même catégorie." Pour
l'élémentaire, il faudrait, évidemment, qu'il n'y ait pas
dix1re année, qu'il n'y ait pas dix 2e année et qu'il
n'y ait pas dix 3e année, etc., ce qui fait que cette règle peut
s'appliquer moins souvent; elle peut intervenir dans de petites commissions
scolaires. Alors, nous sommes régis par une autre règle, une
autre protection qui serait la protection due aux petites écoles.
Remarquez que, là-dessus, les groupes d'élèves
n'apparaissent pas comme le ratio ou la règle des petites écoles
parce que c'était une approche patronale de ne plus vouloir mettre dans
la convention des règles de gestion ou des règles
budgétaires, donc un ratio école-enseignants. C'est cela que nous
avons redéfini. Nous réclamons de l'avoir de façon
précise dans les règles budgétaires pour qu'il n'y ait pas
de confusion, de tractations et de pèlerinage à Québec
-comme on le mentionne dans notre jargon -d'une commission qui doit justifier
une demande pour ses petites écoles au cas où il y aurait des
problèmes particuliers là-dessus. Quant à
l'élémentaire, le maximum de groupes d'élèves, et
la moyenne, on peut dire que, soit par le jeu des 10 groupes ou moins - et
c'est rare qu'il y a moins de dix 1re année - par cycle, par
degré ou par le jeu des petites écoles, il y a une protection
là-dessus. Au secteur secondaire, le problème se pose. Nous avons
d'autres clauses sur lesquelles nous rabattre: d'abord, le nombre d'enseignants
spécialisés pour la matière etc.; évidemment, ce
point peut faire sujet de discussions. Quant au primaire, pour aller dans le
sens de votre question sur les éléments au primaire, je pense
qu'il faut rassurer les gens sur ce sujet.
Concernant l'enfance inadaptée, je pense que nous avons
parlé suffisamment d'un décret par rapport à la convention
où des garanties étaient données sur la politique
d'intégration des élèves et sur l'obligation de la
commission d'indiquer si elle pondère l'élève, s'il y a
moins d'élèves dans la classe parce que l'élève a
un poids relatif plus fort ou bien si elle doit offrir des services
additionnels de professionnels. Je pense que nous avons suffisamment
débattu cette question et cela doit répondre à votre
question.
Le Président (M. Desbiens): Mme la députée
de L'Acadie.
M. Brouillet: Je m'excuse, j'aurais peut-être une petite...
Non, mais enfin.
Le Président (M. Desbiens): Je regrette, vous avez
déjà dépassé de deux minutes l'enveloppe
réservée.
M. Brouillet: Très bien. Alors, je vous remercie pour les
réponses.
Mme Lavoie-Roux: Ma première question: Le transfert au
plan provincial du processus d'affectation-mutation permet-il de tenir compte
aussi bien des ajustements géographiques qui doivent être faits
selon des régions? Ma deuxième question: Est-ce que vous avez
fait une simulation, en ce qui a trait à l'enfance inadaptée, du
nombre d'enfants qui pourraient être touchés par le décret?
Je m'explique. À la page 113, on prévoit qu'il faut au moins dix
groupes d'élèves par commission - et je parle toujours de
l'enfance inadaptée - pour que la moyenne s'applique; sinon, on va au
maximum des enfants difficilement intégrables et le nombre de cinq dans
l'ancienne convention pourrait être rendu à sept aujourd'hui. Quel
est l'impact de ceci sur l'ensemble des commissions scolaires? Ma
troisième question: Quelle est votre réaction aux propositions
que la CEQ a faites hier comme possibilité de rouvrir un dialogue ou une
négociation pour arriver à une solution finale? Ma
quatrième question: Vous avez mentionné qu'au point de vue du
renouveau pédagogique, particulièrement au deuxième cycle
du secondaire, il y aurait des difficultés d'ajustement si on les
appliquait ensemble, même avec les nouveaux ajustements du 9
février et même avec ceux du 18. Pouvez-vous expliciter un peu
cela? Est-ce que nous sommes vraiment prêts à procéder
à toutes ces étapes ensemble à ce moment au
deuxième cycle du secondaire, compte tenu de la préparation des
maîtres, compte tenu de la polyvalence et des options que l'on doit
maintenir au deuxième cycle du secondaire? Ce sont mes questions,
j'attends vos réponses.
Le Président (M. Desbiens): M.
Chagnon. (15 h 45)
M. Chagnon: Alors, M. le Président, concernant les
ajustements des règles d'affectation et de mutation par région et
toute la question de l'enfance en difficulté d'apprentissage, la
question de ante dans la convention collective par rapport à ce qu'on
retrouve dans le décret, je demanderais à M. Carette de nous
informer. Je prendrai à ma charge les deux dernières
questions.
M. Carette: M. le Président, à notre point de vue,
le transfert au niveau provincial des négociations en matière
d'affectation et de mutation change évidemment les situations qui
prévalent dans les milieux. Il y avait peut-être - je ne sais pas
- autant de situations différentes qu'il y avait de conventions locales
en cette matière. C'est évident que cela change les pratiques qui
auront désormais lieu en cette matière; c'est sûr que cela
les changera.
Le sens de votre question est-il de savoir si cela va améliorer
ou diminuer le niveau d'adéquation entre les besoins des gens...
Mme Lavoie-Roux: ...peut-être s'adapter aux besoins des
différents milieux.
M. Carette: Une situation univoque est toujours moins souple
qu'une situation appliquée à chacun des milieux.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, cela me suffit.
M. Carette: Sur votre deuxième question, à savoir
si nous avons des données relatives à la situation
prévalant en enfance inadaptée, si dans les commissions scolaires
on pourrait se restreindre à l'application de la règle du maximum
par rapport à la règle de la moyenne, compte tenu du groupe de
tels enfants au niveau d'une commission scolaire donnée, à ma
connaissance, au niveau de la fédération, nous ne disposons pas
de ces données. Je serais enclin à croire qu'au niveau secondaire
les densités de clientèles - sans aller dans les écarts
auxquels on a fait allusion à un moment donné - sont telles qu'il
y a généralement plus de dix groupes dans chacune des
catégories d'enfants inadaptés en regard desquels on organise des
services d'enseignement. Ce n'est peut-être pas le cas au niveau primaire
où les populations sont généralement plus petites, mais,
à proprement parler, je n'ai pas de données là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Mais au niveau primaire, il pourra y avoir
certainement des inconvénients.
M. Carette: C'est possible que pour certaines
catégories...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Carette: ...d'élèves, il n'y ait pas dix groupes
par commission.
Le Président (M. Desbiens): Cela va? M. Chagnon.
M. Chagnon: Concernant la troisième question,
c'est-à-dire le renouveau pédagogique pour le deuxième
cycle du secondaire, vous faisiez allusion au nouveau programme?
Mme Lavoie-Roux: C'est vous-même qui avez mentionné
que ce serait difficile d'application, particulièrement au
deuxième cycle du secondaire. Alors, je voulais que vous nous expliquiez
quelles en étaient les difficultés. Est-ce que c'est relié
à la préparation des maîtres? Est-ce que c'est relié
aux exigences du décret, coincés que vous êtes entre le
décret et les règles budgétaires?
M. Chagnon: II y a bien des choses qui s'en viennent pour le
deuxième cycle du secondaire. Il y a toute l'implantation des nouveaux
programmes pédagogiques.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils sont prêts?
M. Chagnon: Ils pourraient être en voie d'implantation dans
des circonstances plus normales au niveau du climat de travail qu'il y a dans
l'ensemble des commissions sauf que, pour le premier cycle du secondaire, en
général, à ma connaissance, les commissions scolaires sont
prêtes pour 1983-1984 en fonction des demandes...
Mme Lavoie-Roux: Je vous demande pour le deuxième cycle,
non pour le premier.
M. Chagnon: Pour le deuxième cycle, le début de
l'implantation ne commencera pas en 1983-1984, mais en 1984-1985 et 1985-1986,
ce qui fait qu'on a un an de jeu encore. Mais le temps file et, pour nous, en
tout cas, il est évidemment nécessaire d'avoir un climat de
travail qui soit le plus harmonieux possible pour s'assurer que l'implantation
puisse se faire.
Quant à la question que vous avez formulée concernant le
dialogue que la Centrale d'enseignement du Québec a
suggéré hier dans ses propositions, je pense que nous avons dit
assez souvent...
Mme Lavoie-Roux: II y avait deux propositions.
M. Chagnon: Deux propositions. Sur le statu quo...
Mme Lavoie-Roux: II y en avait une qui était le poste
d'observateur, qui était la deuxième proposition; la
première, c'était du point de vue de la
récupération financière, c'est-à-dire que le
gouvernement n'aille pas plus loin dans sa récupération
financière, compte tenu de la récupération qu'il a
déjà faite.
M. Chagnon: Concernant la récupération
financière, nous sommes un peu mal placés pour faire
l'évaluation de l'ensemble de la question budgétaire et de la
question financière du gouvernement, premièrement.
Deuxièmement, nous considérons - et nous l'avons dit dans notre
document - qu'il devrait y avoir une augmentation progressive de la
productivité pour s'aligner sur les standards canadiens.
Sur le plan de la récupération dont vous me parlez,
là-dessus, l'augmentation de la productivité implique une
augmentation de la tâche. Une augmentation de la tâche, dans le
cadre de règlement et dans la proposition des décrets que nous
avions, impliquait aussi des économies fortement subtantielles, comme
l'a démontré, hier, la Centrale de l'enseignement du
Québec. Quant à la question du dialogue et d'un tiers intervenant
dans les propositions que nous vous avons soumises ce matin, nous avons dit
ceci: Nous avons dit qu'effectivement un tiers intervenant pourrait être
extrêmement utile. On a dit aussi que ce tiers intervenant pourrait
davantage, à notre avis, peut-être vouer une certaine forme de
conciliation pour permettre aux parties de pouvoir en arriver à trouver
un compromis. Cela nous apparaîtrait peut-être la façon la
mieux articulée pour justement faire en sorte de voir revenir une
certaine harmonisation tant dans les relations du travail que pour l'ensemble
des relations entre les enseignants et leur milieu. Dans ce cadre, on dit: Un
tiers, oui. En plus, on pense qu'il devrait jouer une espèce de
rôle de conciliation. Dans ce cadre, la parole est à vous, si vous
trouvez que cela peut avoir un certain bon sens, si vous trouvez qu'à
partir du moment où on est capable de s'entendre sur ce qu'on veut dire,
sur ce que les termes veulent dire, pour vous, mesdames et messieurs de la
commission, d'utiliser ce moyen si vous le jugez à propos.
Le Président (M. Desbiens): Pour conclure, je donnerais le
droit de parole au député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, juste un mot pour remercier les
délégués de la Fédération des commissions
scolaires du Québec de leur mémoire et des réponses qu'ils
ont apportées à nos questions. Je voudrais seulement que le
gouvernement porte une attention toute spéciale à la
recommandation suggérant que les parties négociantes devraient se
rencontrer dans les meilleurs délais en présence d'un tiers
intervenant, comme on le souligne. Je pense que c'est le point essentiel.
J'aurais aimé avoir une prise de position plus nette de la
fédération là-dessus. Le temps est écoulé,
je ne le demande pas maintenant, vous pouvez le faire en sortant, il n'y a pas
de problème. Sur les propositions qui ont été faites hier,
il serait important qu'il y ait une prise de position claire et explicite de la
Fédération des commissions scolaires. Ceci étant dit, je
vous remercie encore une fois.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: De mon côté, je voudrais remercier la
Fédération des commissions scolaires pour l'utile contribution
qu'elle a apportée aux travaux de cette commission. Avant de vous
quitter, j'aimerais aussi faire quelques brèves remarques. Tel que
stipulé dans la loi, le ministre de l'Éducation a l'obligation de
consulter les commissions scolaires sur un projet de règles
budgétaires annuellement. Cette consultation est en cours. Nous avons
déjà reçu un très grand nombre de mémoires
concernant l'harmonisation et les allocations. Le passé est garant de
l'avenir.
Nous avons chaque année, à la suite de l'analyse des
réactions des commissions scolaires, des ressources qui permettent
à celles-ci de respecter les obligations de la loi, les
règlements et leurs propres priorités. À preuve, il est
maintenant reconnu que la santé financière des commissions
scolaires, qui sont financées à 94% par l'État, est
excellente, je les en félicite, puisque la majorité d'entre elles
ont déclaré des surplus budgétaires au cours des
dernières années.
Par ailleurs, les propos du directeur général de votre
fédération, M. Jacques Audy, m'ont étonné.
J'aimerais qu'on clarifie cette question, même si ce n'est pas
strictement l'objet du mandat de cette commission. Étant donné
l'impact des règles budgétaires sur l'organisation des
commissions scolaires, je déposerai, cet après-midi, deux
documents sur cette question. Je souhaiterais également, comme nous
l'avions convenu mercredi soir, inviter MM. Jacques Girard et André
Rousseau à venir expliquer, à un moment donné des travaux
de la commission, les processus de préparation des règles
budgétaires, l'impact de ces règles sur les effectifs enseignants
et sur les simulations que l'on peut faire de l'organisation scolaire.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. Je remercie
les participants.
J'inviterais maintenant la Fédération
québécoise des directeurs d'école à prendre place
à l'avant, s'il vous plaît. Pendant que cela se fait, je suspends
pour quelques secondes.
(Suspension de la séance à 15 h 56)
(Reprise de la séance à 15 h 58)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaîtl
La commission reprend ses travaux avec l'audition de la
Fédération québécoise des directeurs
d'école. Je demanderais au président, M. de Guire, de
présenter les personnes qui l'accompagnent, s'il vous plaît.
Fédération québécoise des
directeurs d'école
M. de Guire (Réal): Merci, M. le Président.
À mon extrême droite, M. Léonce Gagnon, qui est de la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean; M. Marcel Lebel, de la région
de Rimouski; immédiatement à ma droite, M. Jacques Codère,
de la région de Sherbrooke; à ma gauche immédiate, M.
Jean-Guy Gobeil, de la ville de Québec; M. Jean Soumis, de
l'agglomération de Montréal, et M. Bertrand Jean, de la
région 03 et également président de l'association de cette
région.
Je veux d'abord remercier la commission de nous avoir invités
à présenter notre point de vue. Nous souhaitons, dès le
départ, que l'exercice que nous faisons aujourd'hui et qui se fait
depuis mercredi puisse se répéter. Il est dommage que ce genre de
rencontre n'ait lieu qu'en temps de crise. Il faudrait que cela se fasse de
façon régulière.
Beaucoup de choses ont été dites, M. le Président,
depuis mercredi. Nous avons choisi de vous livrer un court exposé afin
de permettre de répondre à vos interrogations, les interrogations
de la commission.
Je voudrais d'abord vous présenter notre
fédération. La Fédération québécoise
des directeurs d'école est un organisme qui regroupe 27 associations
régionales ou locales qui comptent 3500 directeurs ou directrices,
adjoints ou adjointes des écoles primaires et secondaires du
Québec.
Notre membership est composé de francophones travaillant dans des
commissions scolaires catholiques auxquels s'ajoutent plus d'une cinquantaine
de membres anglophones de ces mêmes commissions scolaires.
Le rôle du directeur ou de la directrice. Le directeur ou la
directrice d'école occupe dans la structure scolaire une fonction qui le
situe à la tête d'un groupe de personnes dont la
responsabilité est d'assurer un ensemble de services éducatifs
aux jeunes. Depuis la loi 71, il est imputable. Il est à la fois le
mandataire de la commission scolaire dans l'application de ses politiques
à elle ou de celles du ministère de l'Education. Il est le
responsable de la mise en oeuvre d'un projet éducatif et de sa
réalisation.
Le directeur ou la directrice d'école dirige son école et
anime le personnel avec lequel il travaille. C'est d'ailleurs avec beaucoup
d'appréhension que chacun d'entre nous considère la tâche
d'animation qui le confrontera au sortir du conflit actuel.
Le 10 février 1983 nous étions présents à la
préparation des 14 aménagements proposés par le
ministère de l'Éducation et les fédérations de
commissions scolaires aux enseignants, le 10 février dernier. Nous avons
appuyé ces améliorations aux décrets pour deux raisons:
d'abord parce qu'elles permettaient la reprise du dialogue entre les deux
parties. Et effectivement, M. le Président, il y a eu trois jours de
discussion.
Deuxièmement, elles permettaient d'espérer un retour
harmonieux dans les écoles. Tout ça c'était
évidemment avant la loi 111. On entrevoyait, à ce moment, un
autre scénario tout à fait différent de celui qui est
arrivé. Cependant le litige demeure.
Notre présence à la commission parlementaire. Notre
fédération, en plus d'exprimer ses préoccupations dans le
conflit actuel, désire expliciter les demandes qu'elle avait
acheminées au ministère de l'Éducation, en mai 1981, alors
que le ministère préparait les textes de base pour la
négociation future, celle que nous vivons.
Nos demandes avaient été formulées à la
suite d'une consultation, d'une vaste consultation à laquelle plus de
85% de nos membres avaient participé. C'est donc dire l'importance de
cette question pour les directeurs d'école.
Nos principales demandes de mai 1981. Nous avions demandé
l'élimination des contraintes relatives à la division de la
tâche éducative entre le temps d'enseignement et le temps
consacré aux activités étudiantes, à l'encadrement,
à la récupération et à la surveillance.
Cette contrainte limitait la participation des enseignants et
enseignantes à des maximums pour chacune des catégories que je
viens de mentionner.
Ce minutage nous empêchait de donner à chaque enseignant la
tâche convenant le mieux à ses aptitudes. En somme, ce que nous
demandions alors c'est une tâche éducative globale.
Nous avions demandé que des précisions soient
apportées quant au temps de disponibilité - le fameux 27 heures -
des enseignants à l'école. Pourquoi? Afin de pouvoir
répondre à certains besoins tels les rencontres individuelles de
parents, les réunions pédagogiques, les rencontres des
divers comités surtout les comités avec les
élèves, les rencontres d'élèves individuelles sans
avoir toujours à quémander à chaque fois la
présence des enseignants. Nous avions également insisté
pour que le critère capacité soit considéré dans
l'affectation et dans la répartition des fonctions. Ceci afin
d'éviter que l'ancienneté d'un enseignant soit le critère
prépondérant dans l'attribution des responsabilités.
Nous avons constaté que ces trois principales demandes de notre
fédération se retrouvent dans le décret et permettent un
meilleur service à l'élève. L'orientation de notre
fédération a toujours été la qualité des
apprentissages et la qualité du service rendu à
l'élève dans chacune des écoles du Québec. Pour
nous, cela veut dire une éducation complète de
l'élève basée sur la qualité de la relation
maître-élèves, relation humaine qui est au centre de l'acte
éducatif; éducation complète basée sur un ensemble
d'apprentissage réalisé dans les cours, dans des contacts de
relation d'êtres, dans le vécu de différentes
activités parascolaires qu'on retrouve aussi bien à
l'intérieur qu'à l'extérieur de l'horaire de
l'élève. Les directeurs et directrices d'école se sont
engagés dans cette voie avec leur personnel, depuis plusieurs
années.
Des choix et des inquiétudes. L'augmentation de la tâche
proprement dite découle d'une décision politique et de
contraintes budgétaires de l'Etat et non de notre demande d'une
tâche globale. Un effort dit de productivité a été
demandé aux enseignants pour répondre à ces contraintes.
Nous le constatons. Le décret plus les ajouts du 10 février -
parce que pour nous les ajouts du 10 février font partie
intégrante du décret - permettent une organisation scolaire
adéquate quant à la distribution des fonctions et des
responsabilités. Mais cela exige des changements d'attitude de
l'ensemble des personnels de l'école. Car il faudra possiblement en
arriver à une plus grande polyvalence des enseignants et à une
modification de l'organisation scolaire traditionnelle. Si on refuse
d'envisager de tels changements, il y aura inévitablement augmentation
du nombre d'élèves et du nombre de groupes par enseignant.
Augmentation qui risquera de nuire à la qualité de la relation
maître-élèves. On peut faire le choix d'enseigner une
matière à six groupes d'élèves pour en rencontrer
180 et on peut aussi enseigner deux matières à trois groupes avec
90 élèves. Ce sont des choix. Un changement d'attitude
nécessite une prise de conscience du problème, une investigation
des différentes solutions possibles et une adhésion à
l'orientation retenue. Cela demande du temps et un climat favorable.
Nous souhaitons, en conclusion, que la qualité des services de
l'école permette à l'élève de faire tous les
apprentissages qui lui assureront une formation complète. Cette
qualité suppose un accord sur les conditions de travail qui se traduira
par la qualité de la relation maître-élèves et la
mise à la disposition de l'école des ressources humaines
auxquelles elle a droit, en ajoutant évidemment l'autonomie
nécessaire dont elle a besoin pour réaliser dans son projet
d'école une véritable relation maître-élèves.
Les normes budgétaires doivent posséder l'ampleur et la souplesse
requises au maintien, tout au moins, de la qualité actuelle des services
rendus aux jeunes du Québec.
Pour la Fédération québécoise des directeurs
d'école, il est essentiel que le ministère de l'Éducation,
les fédérations de commissions scolaires et les syndicats
conviennent de ce que seront les conditions de travail des enseignants et des
enseignantes. Il faut absolument qu'une fois pour toutes, notre régime
de négociation dans le secteur public soit changé. Il est
inadmissible qu'à tous les trois ans, l'école publique, au moment
même où elle commence à bien vivre ou, si vous voulez,
à s'adopter à la convention en cours, redevienne de nouveau
l'otage de cette lutte de pouvoir que l'on connaît depuis plus de quinze
ans. Il est temps de mettre à l'oeuvre des spécialistes en
relations du travail pour préparer une nouvelle formule. Cela a assez
duré, M. le Président. Je voudrais ajouter à cela qu'au
mois de janvier, à la fin de janvier dernier, on pouvait lire dans les
journaux de Montréal qu'il y avait eu une augmentation de 10%
d'inscriptions au secteur privé pour l'année prochaine.
Cela a assez duré. Nous voudrions répéter que ce
que nous souhaitons, nous, c'est que la qualité des services de
l'école permette à l'élève de faire tous les
apprentissages qui lui assureront une formation complète. Et je vous
remercie.
Le Président (M. Desbiens): J'ai compris que, M. le
député d'Argenteuil, vous aviez un mot à dire. Ce serait
M. le ministre, d'abord. D'accord.
M. Laurin: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
le président de la fédération pour son mémoire qui,
bien que bref, est chargé de signification. J'aurais deux questions
à lui poser en rapport avec les pages 7 et 9 de son document. En page 9,
vous dites: "Le décret permet une organisation scolaire adéquate
quant à la distribution des fonctions et des responsabilités."
Depuis une semaine ou deux, nous entendons beaucoup dire, dans certains
milieux, que les décrets sont inapplicables ou sont invivables,
même avec le nouveau cadre des règlements que nous avons
présenté le 10 février et qui permet un étalement
de la tâche sur les trois prochaines années. Étant
donné que vous, directeurs d'école, à titre de
responsables directs de la gestion quotidienne de l'école, jouez un
rôle majeur dans l'école, pour ne pas dire un rôle pivot,
est-ce qu'on peut vous demander votre opinion, non pas sur les diverses
simulations d'organisation qui circulent, mais sur la praticabilité, la
faisabilité de l'application de ces décrets dans le cadre du
nouveau régime pédagogique afin d'assurer, comme vous le dites un
peu plus tard, la qualité de l'enseignement, la qualité des
apprentissages?
Mon autre question porte sur un autre sujet. J'attendrai donc votre
réponse à cet égard.
Le Président (M. Desbiens): M. de Guire. (16 h 15)
M. de Guire: M. le Président, en réponse à
cette question, une première réflexion nous vient à
l'esprit. Il est évident que dans l'ensemble des écoles du
Québec, à la suite de la parution des décrets et à
la suite de la consultation du ministère de l'Éducation, chacune
des directrices et chacun des directeurs d'école a procédé
à un exercice. Ils ont évidemment procédé à
cet exercice pour la première fois et je pense qu'il faut le souligner.
Cela explique peut-être la panique que nous avons vécue chez nous.
C'était la première fois que nous faisions cet exercice à
l'intérieur des écoles.
Jusqu'à cette année, nous avions, dans les conventions,
des ratios qui, mathématiquement, se calculaient facilement au niveau de
la commission. Donc, à partir de ce moment-là, il n'y a pas
d'exercices qui ont été faits dans les écoles. On a
demandé aux directrices et aux directeurs d'école de
procéder à un exercice avec ce qu'ils connaissent des
règles budgétaires, avec les informations qui venaient à
la fois des décrets, qui venaient à la fois des nouveaux
aménagements qui ont été ajoutés par la suite et
dont ils n'ont pas du tout été informés au moment
où ils ont fait l'exercice.
On est quand même arrivé à la conclusion que deux et
deux, cela fait quatre. C'est évidemment faisable partout,
mathématiquement, sauf que comme je le disais tantôt, des
changements, c'est difficile. On a tous, humainement parlant, une
résistance aux changements, surtout quand on a des données
nouvelles ou des données qui n'existent pas sur notre table, mais qui
existent sur d'autres tables, celle de la commission scolaire, par exemple. Je
parle surtout des règles budgétaires. Donc, avec les
données que les gens avaient, ils ont fait un exercice qui a
été, dans certains milieux, beaucoup plus pénible que dans
d'autres milieux, toujours en relation avec l'information complète que
les gens avaient.
Je vais demander à mon collègue, Jean
Soumis, qui dirige une grosse polyvalente de la région de
Montréal, la polyvalente André-Laurendeau - je pense que les gens
ont déjà entendu parler des problèmes de cette
polyvalente, ils connaissent l'endroit, c'est sûrement une polyvalente
typique comme il y en a eu d'autres de citées - de répondre.
Alors, Jean Soumis.
M. Soumis (Jean): M. le Président, j'insisterai au
départ dans le même sens que M. de Guire pour préciser que
nous avons, parmi toutes les écoles, différents modèles,
différents types d'organisation scolaire et des clientèles
différentes, ce qui m'amène à parler des conditions
préalables à mettre en place pour la réalisation d'un
horaire maître ou d'une opération de grille horaire. Dans la
première condition, on retrouve le paramètre. Je pense que nous
avons entendu parler à plusieurs reprises de ce fameux paramètre
qui est basé sur la moyenne d'élèves par groupe avec un
rapport tâches-moyens au niveau des enseignants, auquel on a
ajouté les ajustements nécessaires. Là, je mets un point
d'interrogation, je pense que les ajustements nécessaires à
être ajoutés pourront être précisés par le
ministère de l'Éducation mais, en gros, je parle des ajustements
nécessaires pour les petites écoles, pour l'enfance en
difficulté et pour le secteur professionnel, professionnel court et
professionnel long. Les paramètres sont une photo de l'école ou
de la commission d'il y a peut-être trois ans. À la suite de cette
photo, il y a un paramètre qui est donné à la commission
scolaire et qui est distribué par la suite dans les écoles.
Nous avons ici un premier souhait, c'est qu'on puisse aller prendre une
photo un peu plus jeune et non pas à partir de la commission scolaire,
mais à partir de l'école. C'est par l'addition du fonctionnement
de l'école, des besoins existants dans l'enseignement qu'on pourra
arriver, à notre avis, à donner un paramètre à la
commission scolaire. Ici, je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion
pour faire une petite remarque aux commissions scolaires pour leur dire que la
photo partant des écoles les empêcherait peut-être de garder
pour elles certains négatifs dans leur poche et de ne pas nous donner
tous les professeurs auxquels nous avons droit dans chacune des écoles.
C'est là la première partie d'information. Je pense que lors de
la fabrication d'une simulation d'horaire, il est important que nous ayons
l'information du nombre de professeurs qui nous reviennent, que nous ayons
l'information sur ces paramètres. Je pense que, dans la province,
plusieurs commissions scolaires n'ont pas encore nécessairement fait
connaître tout le paramètre, n'ont pas fait l'addition des photos
des écoles, mais ont pris la photo de la commission scolaire et l'ont
distribuée par
la suite dans les écoles. Donc le premier point - je le redis -
c'est que l'information nous manque pour le moment. C'est ce qui fait que
plusieurs directeurs d'école ont fait des essais de simulation à
partir des données que nous connaissons ou que nous ne connaissons pas.
Ce qui fait que nous avons des différences assez marquées parfois
si la photo de l'école n'est pas prise aujourd'hui.
Maintenant, à partir du décret, les simulations que nous
avons pu faire, que nous avons pu vérifier d'une façon
générale, compte tenu de l'auqmentation de tâche d'environ
15%, compte tenu des coupures... Les chiffres que j'ai entendus sont d'environ
14,8%, ce qui peut donner dans une école d'enseignement
général une coupure de 18% et dans une école davantage
spécialisée, tant au secteur professionnel qu'en adaptation
scolaire, une coupure qui pourrait être inférieure à 14,8%.
Je ne pense pas qu'il nous appartienne de faire la preuve ou de vérifier
cette conformité du paramètre. Je pense que - d'ailleurs, M. le
ministre de l'Éducation l'a annoncé tout à l'heure - les
deux sous-ministres déposeront leur expertise sur ce sujet.
Pour nous, il est important de demander aux commissions scolaires et au
ministère, dans un premier temps, de valider leur expertise, de valider
ce paramètre afin que nous puissions avoir ce qu'il nous faut pour
travailler et pour donner une expertise juste.
Maintenant, il ne faut pas croire que l'adéquation
mathématique existant entre le décret et une simulation d'horaire
est nécessairement justifiée sur le plan pédagogique. Je
pense que nous avons besoin d'une marge de manoeuvre pour pouvoir non pas
fabriquer un horaire, mais faire vivre un projet éducatif. Je pense que
c'est une chose, une grille horaire et une autre chose de faire vivre cette
école avec des enseignants et des étudiants.
Dans ce sens, nous sommes très heureux d'avoir vu des
aménagements - on les appelle ainsi dans notre langage - en P-1 et en
P-2, donc en 1re année d'application et en 2e année,
qui nous apparaissent nous donner effectivement cette marge de manoeuvre, dans
un premier temps. Est-ce que les apprentissages que nous ferons dans ces deux
années, tant au niveau des enseignants dans la recherche d'un horaire ou
d'une méthode ou d'un modèle pour faire vivre
pédagogiquement l'école, nous amèneront à
appliquer, ou en P-3, appliquer le décret avec la marge de manoeuvre
suffisante et non pas strictement l'adéquation mathématique? Il
est évident qu'au niveau d'une école, quand on a du secteur
professionnel, qu'on a de l'adaptation, qu'on a de l'enseignement
général, il y a des fractions de tâche qui sont parfois des
pertes et qui, parfois, se superposent bien.
Bien sûr que cette tâche - je parle ici de grille horaire et
je ne parle pas de l'augmentation du nombre de groupes due à
l'adéquation mathématique de l'augmentation de tâche - bien
sûr que l'augmentation de tâche donnera pour les enseignants une
augmentation de groupes. Nous demandons l'information nécessaire pour
gérer adéquatement. Nous demandons des partenaires dans la photo
que les commissions scolaires et que le ministère prennent du milieu et
nous souhaiterions, pour qu'il y ait plus de cohérence, qu'on parte de
la photo de l'école pour en faire une somme.
Actuellement, il est pour nous difficile de faire des expertises ou des
exercices sans ces conditions préalables de réalisation. Merci M.
le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, vous avez beaucoup
insisté pour que le critère capacité soit
considéré dans la répartition des fonctions afin
d'éviter, comme vous le dites que l'ancienneté d'un enseignant
soit le caractère prépondérant dans l'attribution des
responsabilités.
Mais on a entendu quelques témoignages à l'effet que ce
nouvel aménagement, en regard de la mutation et de l'affectation,
ouvrirait la porte toute grande à l'arbitraire de la part des directeurs
d'école en particulier. J'aimerais vous demander ce que vous pensez de
ce risque ou de cette affirmation.
Le Président (M. Desbiens): M. de Guire.
M. de Guire: Si vous voulez, je vais donner la parole à
mon collègue, Jean-Guy Gobeil, pour répondre à cette
question.
Le Président (M. Desbiens): M. Gobeil.
M. Gobeil (Jean-Guy): M. le Président et M. le ministre,
vous faites référence au droit de gérance par rapport
à l'aspect affectation relié non plus uniquement à
l'ancienneté mais aussi faisant jouer l'aspect capacité.
Dans un premier temps, j'aurais le goût de vous entretenir de
l'aspect du droit de gérance. Le droit de gérance, on l'associe
bien souvent à une forme de subjectivité d'antant. Et lorsqu'on
considère un droit de gérance tel qu'il s'annonce, avec des
règles bien définies, j'ai l'impression qu'il s'agit d'un droit
de gérance où les décisions qui vont en découler
seront certainement objectives ou, du moins, la personne responsable qui
prendra les décisions devra en répondre.
En ce qui a trait au critère de capacité, c'est quand
même un concept que notre fédération véhicule depuis
quelques années. Je vous apporte un exemple où, dans certaines
commissions scolaires, dû à la dénatalité, il y
avait des mises en disponibilité dans différents champs
académiques et, par le seul fait de l'ancienneté - d'ailleurs ils
avaient le droit de le faire d'après les règles du jeu qu'il y
avait à ce moment-là - certains enseignants qui avaient une
expertise sur l'aspect académique, venaient chercher des postes dans le
secteur du champ 1 de l'adaptation.
Vous avez un exemple concret où bien souvent le champ 1 de
l'adaptation a été envahi par des gens qui avaient une
compétence académique, qui avaient une forte ancienneté et
délogeaient des enseignants qui n'avaient pas le privilège
d'avoir assez d'ancienneté mais qui, par contre, avaient
été formés et avaient une expertise sur les cinq
dernières ou dix dernières années en adaptation scolaire.
C'est une illustration des phénomènes que l'on observait dans nos
écoles. On pourrait trouver d'autres exemples d'un champ d'enseignement
à l'autre. (16 h 30)
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, c'est
terminé.
M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, je ferai seulement une
très brève remarque pour ensuite passer la parole à mon
collègue de Saint-Henri pour des raisons que j'indiquerai tout de suite.
Je voudrais tout d'abord dire à M. de Guire et à l'équipe
qui l'accompagne que je suis très heureux de le retrouver lui-même
et de faire la connaissance de ses collègues.
Vous savez que dans le document que nous avons publié l'automne
dernier sur le projet de réforme scolaire, nous accordions une
importance capitale au directeur dans le fonctionnement de l'école, sans
souscrire toutefois au type de statut hybride, à notre sens, que
voudrait lui donner le livre blanc du ministre de l'Éducation. Nous
considérons qu'il est vraiment un pivot et nous voulons aussi qu'il se
situe dans un système, qu'il ne soit pas le directeur d'une corporation
séparée mais qu'il soit le directeur d'une école dans un
système d'école relevant de commissaires élus
démocratiquement. Cela n'a pas de rapport avec le sujet d'aujourd'hui.
Je le rappelle brièvement à des fins d'information.
Vous avez mentionné dans votre mémoire trois points sur
lesquels vous avez insisté: d'abord, le temps de disponibilité de
l'enseignant à l'école; deuxièmement, le
décloisonnement de la tâche; troisièmement, l'insertion du
critère de capacité. Je dois vous dire que dans les propositions
de règlement que nous rendions publiques du côté de
l'Opposition dès la fin de novembre, nous avions inclus ces trois
propositions. De ce côté, par conséquent, il n'y a pas
beaucoup de débat entre nous, cela va très bien. Sur le reste, je
constate que vous ne prenez pas position. Vous dites que vous n'avez pas eu
toute l'instrumentation voulue pour faire toutes les vérifications. Vous
insistez beaucoup sur la nécessité d'une implication de tous les
agents dans des changements et sur la nécessité d'une acceptation
consciente de certains changements en profondeur, si on veut que certaines
choses s'appliquent. Là, il y a matière à discussion avec
vous.
Je ne vais pas plus loin là-dessus, sauf pour vous dire que nous
avons grand plaisir de compter dans la délégation de l'Opposition
à cette commission deux députés qui sont d'anciens
directeurs d'école: M. Roma Hains, le député de
Saint-Henri, et M. William Cusano, le député de Viau. Je pense
qu'il est tout à fait normal que nous leur laissions le loisir de vous
interroger pendant le temps qui nous est imparti. M. Hains va commencer.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Henri.
M. Hains: M. le Président, je ne ferai vraiment pas de
préambule, parce que je trouve qu'on déambule très
lentement de ce temps-là. Chers confrères, vous nous aidez
vraiment à aller plus vite parce que vous nous avez offert un
mémoire qui est très court, mais en même temps très
chargé et très bien fouillé.
Je vais donc aller assez rapidement pour laisser la place aux autres
confrères. Ma première question est la suivante: J'ai d'abord une
petite considération. On ne donne pas ce qu'on n'a pas. Souvent, j'ai
répété, quand j'étais directeur, qu'un professeur
triste était souvent un triste professeur, incapable de donner du
succès à ses élèves. Par le fait même, les
étudiants se ferment non seulement au travail accepté
joyeusement, mais au travail tout court. D'ailleurs, vous dites
vous-même, si je ne m'abuse, à la page 9, au bas de votre
mémoire, que cela demande du temps et un climat favorable.
Dans les circonstances troublées que nous connaissons
actuellement, comment cela se déroule-t-il dans nos écoles? C'est
encore un petit reste de curiosité après la rentrée
forcée. Comment cela va-t-il dans nos écoles actuellement?
Le Président (M. Desbiens): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, comment cela va dans nos
écoles? C'est vrai qu'on ne
donne pas ce qu'on n'a pas. Quand on n'est pas de bonne humeur, c'est
difficile de transmettre la joie autour de soi. C'est vrai que pour avoir
travaillé toute ma vie avec des enseignants, pour l'avoir
été, je pense que le climat actuel n'aide pas du tout à
donner dans nos classes ce qui doit être donné aux enfants,
surtout à être attentifs à leurs besoins, parce qu'il est
facile de donner des cours, il est facile de transmettre de la matière
mais il est plus difficile d'être attentifs. Le climat est plus
qu'important. Cependant je pense qu'il y a des décisions qui sont prises
qui ne relèvent pas de nous.
Vous savez, le directeur d'école, on parlait tantôt qu'il
était le pivot. J'écoutais M. le député
d'Argenteuil nous dire combien il était d'accord qu'il voulait que notre
rôle soit reconnu. Ce n'est pas facile de reconnaître le rôle
d'un directeur d'école. C'est un petit peu comme quelqu'un qui est entre
l'arbre et l'écorce. C'est un peu quelqu'un qui est sur un bord et qui
est aussi de l'autre bord. Ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile du tout.
Cependant une fois que les décisions sont prises nous les assumons. En
attendant que les décisions se prennent nous donnons notre point de vue.
Mais après nous devrons...
C'est un peu pour ça qu'on disait, en bas de la page 9, que pour
nous, le plus difficile, dans le fond, qui reste à faire, c'est un
changement d'attitude. Je pense qu'il faut donner le temps parce que cela
demande du temps. Cela demande aussi un climat. C'est bien évident
qu'actuellement le climat n'est peut-être pas le meilleur, mais il faut
qu'on finisse par régler ce problème. Celui-là mais pas
seulement celui-là, comme je le disais tantôt.
Cela me paraît fondamental qu'une fois pour toutes - puis
ça devrait être, d'ailleurs, la seule décision ou la seule
recommandation et ce serait déjà énorme - on change tout
ce régime de relations du travail. Si vous voulez pour parler beaucoup
plus davantage du climat, d'ingéniosité de ce qui vient ou de ce
qui doit être actuellement, je vais demander à mon collègue
Jacques Codère d'enchaîner ou peut-être de répondre
davantage à cette question.
Le Président (M. Jolivet): M. Codère.
M. Codère (Jacques): C'est sûr qu'avec la
grève que nous avons connue où des enseignants se
présentaient ont été interceptés aux lignes de
piquetage, où le retour finalement s'est fait et avec quel tiraillement
entre ceux qui avaient voulu pénétrer dans l'école, les
autres qui s'y opposaient, le climat dans les écoles, en tout cas ce que
j'en sais, n'est pas des plus roses.
Quand on parle en plus des sacrifices -c'est peut-être beaucoup
dire - de la tâche qu'on veut ajouter à celle qui est
déjà dans la convention actuelle; quand on parle de régime
pédagogique nouveau à implanter ou pour des matières qu'on
va ajouter du temps, pour d'autres on va en soustraire, de nouveaux programmes
qu'on veut mettre en application où les enseignants comptent sur des
instruments, des outils pédagogiques qui ne sont pas encore tous connus,
et quand on y ajoute la question de la réforme scolaire, nous vivons
dans l'école beaucoup d'insécurité, et également
beaucoup d'insatisfaction.
Si la décision qui a été prise d'augmenter la
productivité chez les enseignants n'est pas acceptée par eux, je
pense qu'il sera d'autant plus difficile de faire changer, et accepter les
changements de modèles qui, techniquement, peuvent peut-être
permettre que des enseignants aient moins de groupes d'étudiants, qu'ils
aient moins d'élèves. Cela peut peut-être se
réaliser techniquement. Il reste, je pense, à faire baisser,
enlever l'insécurité et l'insatisfaction.
On a fait depuis une dizaine d'années tout au moins, dans les
centres universitaires la formation des enseignants en les spécialisant.
Ils sont devenus licenciés en français, en mathématique,
en sciences. Chacun, en ce qui concerne le secondaire tout au moins, est devenu
spécialiste dans une discipline.
Aujourd'hui, on dit: bon à l'occasion d'une crise, à
l'occasion du décret établissant les conditions de travail, il
faudrait changer les modèles. Je pense qu'on en demande beaucoup et tout
à la fois. Je me dis - et on le dit d'ailleurs dans notre mémoire
-qu'il faut prendre le temps de faire les choses. Il faut prendre le temps de
changer des attitudes et je pense qu'en premier lieu il faudrait qu'entre
enseignants et partie patronale il y ait - je ne sais plus si je dois dire le
terme - une convention de quelque chose. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: II est sûr qu'avec ce que nous avons comme
décret et comme aménagements du 10 février, la
première année et, la deuxième année devraient
peut-être nous permettre d'envisager une troisième année.
Je pense qu'il y a peut-être une question d'ingéniosité
pour laquelle je voudrais demander à mon collègue, M. Jean-Guy
Gobeil de développer.
Le Président (M. Jolivet): M. Gobeil.
M. Gobeil: M. le Président, sans mettre mes lunettes
roses, pour peu que le climat revienne au meilleur dans le milieu scolaire et
que les règles du jeu soient de façon réciproque
acceptées, je peux vous assurer que, dans l'ensemble du milieu scolaire,
avec
l'engagement professionnel qu'en général on observe chez
nos enseignants, l'école québécoise a quand même
prouvé qu'elle était ingénieuse et créatrice.
D'ailleurs, lorsqu'on sort du Québec, cela nous fait plaisir de le
constater. J'insiste sur ce point parce que c'est un volet important de notre
mémoire que le temps non seulement arrange les choses, mais qu'il est
important que les choix de modèles de l'école
québécoise des prochaines années obtiennent une
adhésion de l'ensemble des intervenants d'un milieu scolaire et qu'ils
soient appropriés au profit de nos jeunes Québécois
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Henri.
M. Hains: Je remarque que vous insistez tous les deux pour nous
dire que les règles du jeu - si on veut vraiment le bonheur, la paix, la
tranquillité - soient acceptées réciproquement. Je me
demande si, pour vous, cette qualité de vie scolaire ne vaut pas
plusieurs millions. La deuxième question que je me pose est celle-ci -
M. le ministre m'a coupé, mais je reviens quand même sur la
question pour avoir votre opinion, M. le Président: le critère
capacité est vraiment mis en doute par la Centrale de l'enseignement du
Québec. C'est un retour, disent-ils, aux décrets de 1972. Les
commissions scolaires exigent cette clause capacité; moi-même, je
pense que je ne l'aurais peut-être pas crié trop fort dans le bon
vieux temps; vous aussi vous l'exigez. Pensez-vous que ce critère, dans
l'atmosphère actuelle, favorisera la bonne entente ou de la jalousie?
Est-ce que cela favorisera le "bumping" ou la stabilité du personnel? Ou
encore - allons-y franchement parce que je sais qu'on est capable de se parler
- est-ce que cela favorisera - pas nous autres parce qu'on a toujours
été bons et qu'on reste toujours bons - le favoritisme et la
vraie indépendance de choix?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: Je pense que, dans le critère de
capacité, il est bien évident qu'il y a une différence
marquée entre la tradition qui dit que c'est l'ancienneté qui
attribue les tâches. Entre l'ancienneté pure et tenir compte d'un
critère de capacité, à un moment donné, je pense
qu'il y a une marge de manoeuvre. Deuxièmement, on semble oublier qu'en
1983 ce n'est plus possible d'administrer une école où on
connaît la crainte. Ce n'est pas vrai. Demain matin, on va avoir les
pancartes à la porte si jamais le directeur d'école fait cela.
D'ailleurs, on a déjà vu des exemples au Québec dans ce
sens-là. Cela ne se peut pas. (16 h 45)
Deuxièmement, je dois ajouter que pour moi, une école ne
peut plus s'administrer sans un minimum de consultation et de participation.
Lorsque je dis un minimum, je veux dire que cela ne peut pas se faire s'il n'y
en a pas. Une fois qu'on a consulté -parce qu'il faut arrêter de
jouer avec cela -et qu'on a pris une décision contraire, il faut
être capable de la justifier sinon on lève les pattes. Il faut
arrêter de charrier avec cela. Le critère de capacité, ce
n'est pas d'attribuer aux directeurs d'école la haute main sur un
favoritisme, cela ne se peut pas, À mon sens, je ne peux pas comprendre,
si j'ai, dans un secteur donné, dans un champ donné, un
professeur qui enseigne, dans la construction, comment établir des
charpentes de maisons, et qui devient en disponibilité parce qu'on n'en
a plus besoin, qu'il n'y a plus d'élèves dans cela, mais parce
qu'il est dans le même champ et que j'ai besoin d'un professeur de
finition de meubles ou d'ébénisterie, qu'automatiquement il est
bon.
Si cela est vrai, moi je dis: le critère de capacité,
enlevons cela et revenons à l'ancienneté. Il n'y a personne qui
est capable d'accepter automatiquement que parce que je suis le plus ancien, je
suis en même temps le plus compétent, premièrement.
Deuxièmement, je vous répète qu'en 1983 un directeur
d'école qui ferait cela ne resterait pas deux jours à la
direction de son école. Troisièmement, une école,
indépendamment de ce qu'on peut dire et de ce qu'on peut faire, ne peut
plus s'administrer sans une participation, sans une consultation de l'ensemble
de l'équipe-école. Ce n'est plus possible. Ce n'est pas vrai. La
participation est entrée dans les moeurs au Québec, autant dans
les écoles qu'ailleurs.
Le Président (M. Jolivet): Cela va, M. le
député?
M. Hains: Oui, cela va très bien, d'ailleurs. Ma prochaine
question était un peu dans ce sens parce que dans leurs tâches,
autrefois surtout, les professeurs jouissaient d'une certaine autonomie et
d'une force aussi de consultation assez grande que, même, on allait
jusqu'à la cogestion. Cela s'est fait dans quelques écoles.
Là, avec le décret, on se plaint que les vrais professionnels de
l'enseignement, les professeurs vont devenir encore une fois de simples
exécutants des diktats du ministre, par vos voix, mes chers
confrères de la direction d'école. Qu'est-ce que vous pensez de
ce que nous disent les syndicats là-dessus?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: Si c'est vrai pour les enseignants, je vais
être obligé de dire que cela va être aussi vrai pour le
directeur d'école. Donc, si cette affirmation est vraie sur toute la
ligne, il n'y a plus de
participation possible, il n'y a plus d'ingéniosité
possible, cela ne se peut pas. Je ne crois pas que, parce qu'il y a des
régimes pédagogiques ou parce qu'il y a des décrets, on va
enlever l'ingéniosité à l'intérieur d'une classe,
on va enlever la participation à l'intérieur d'une école,
on va enlever l'élaboration d'un projet éducatif propre à
une école, je ne crois pas.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Saint-Henri.
M. Hains: On commence déjà à me censurer
à ma droite ici.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne fais qu'appliquer le règlement.
M. Hains: Les professeurs, pour régler leurs
différents problèmes, demandent même actuellement un
certain statu quo pour la reconduction des règles actuelles
d'affectation, de mutation, de distribution des tâches. Ils affirment que
tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes avec l'ancienne loi.
Pourquoi, allez-vous me dire alors, tout ce remue-ménage dans la
tâche des professeurs? Vous nous dites aussi, je crois, en haut d'une
page, que ce n'est vraiment pas vous autres qui avez demandé
l'augmentation de la tâche. Je ne l'ai pas rêvé? C'est cela?
"L'augmentation de la tâche proprement dite découle d'une
décision politique et de contraintes budgétaires de l'État
et non de notre demande d'une tâche globale." Je pose la question: Est-ce
que cela aurait été mieux, surtout dans les circonstances
actuelles, avec tous les régimes pédagogiques qui s'en viennent
et tout cela, de prendre encore trois ans de répit et de rester
tranquille? Il y a tellement de choses déjà en vue sans aller,
par-dessus le marché, faire un remue-ménage complet dans la
maison. Qu'est-ce que vous en pensez, M. le président?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: C'est une question à laquelle, en tout cas,
pour au moins une partie, il m'est très difficile de répondre
dans le sens suivant. L'augmentation de la tâche ou, si vous
préférez, ce que j'appelle, dans mon langage, la capacité
de payer des Québécois, je pense que cela appartient à
vous, à l'Assemblée nationale, d'en décider. Cependant,
j'insiste pour dire que quand nous parlons de tâche globale, on parle
d'une tâche qui va permettre un meilleur service à
l'élève, une meilleure relation entre l'élève et le
maître.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Roberval.
M. Hains: J'ai fini?
Le Président (M. Jolivet): Oui, parce que je sais
très bien que votre collègue, le député de Viau, a
aussi des questions à poser. M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
d'avoir la possibilité d'interroger la Fédération
québécoise des directeurs d'école, d'autant plus que les
directeurs sont considérés comme des gens qui sont au coeur de
l'action éducative et de l'organisation scolaire. Ils constituent la
charnière essentielle au bon fonctionnement de chacune des
écoles. Aussi, je me limiterai à des questions très
simples pour permettre aux gens qui nous écoutent et qui veulent avoir
une meilleure compréhension de ce qu'il y a dans les décrets du
monde de l'enseignement de comprendre ce dont il s'agit. J'apprécierais
des réponses brèves également et le plus simple possible
pour l'éclairage des membres de la commission qui ne sont pas tous des
experts, évidemment.
Ma première question est la suivante. Vous avez deux demandes;
vous dites que le décret a respecté deux demandes que la
Fédération québécoise des directeurs d'école
formulait. Premièrement, vous avez dit que le minutage vous
empêchait - c'est à peu près textuellement - de donner une
tâche convenant mieux à la fonction éducative. Si je
comprends bien - j'aimerais que vous me corrigiez si je fais erreur - dans
l'ancienne convention collective, les temps étaient minutés, les
temps de surveillance, les temps d'encadrement, les temps d'enseignement, bref,
l'ensemble des tâches était minuté et, dans le
décret, actuellement, il y aurait plus de souplesse. Est-ce exact?
Est-ce bien ce que vous voulez dire par cette affirmation?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: Je vais demander à mon collègue,
Marcel Lebel, de répondre à cette question.
M. Lebel (Marcel): M. le Président, sur la tâche
globale, nous avons demandé ce processus d'intervention
pédagogique pour une raison bien simple, c'est pour permettre d'abord
à des enseignants d'aller au fond de leurs capacités
d'actualiser. Dans les écoles, il y a des enseignants qui sont
très bien préparés pour l'acte d'apprentissage de
connaissances. Il y en a d'autres qui ont, en sus de leur qualité de
travailleur de l'enseignement pour l'acte d'apprentissage, des talents
d'animateur. Il y en a d'autres qui, en regard de l'appui individuel à
des jeunes en difficulté, peuvent les prendre en charge individuellement
ou en petits groupes pour faire de la récupération scolaire. Tous
ces processus éducatifs, chaque enseignant
devait, antérieurement, en faire 100 minutes. Là, dans le
décret, on peut dire à un enseignant après une
consultation d'un projet éducatif, qu'il va donner toute sa tâche
à l'enseignement. Il y en a d'autres qui vont donner 75% de leur temps
à l'enseignement, 25% en récupération scolaire ou en
encadrement des élèves. Ce sera aussi pour le
bénéfice des enseignants, parce qu'il y a aussi des enseignants
qui nous ont dit et qui continuent à dire qu'ils peuvent facilement
donner de l'enseignement, donner une tâche éducative de cette
nature. Il y en a pour qui cela peut être passager. Il n'y a rien qui
empêche un enseignant qui, pendant deux ans, décide de vouloir
faire uniquement de l'enseignement si c'est possible et qui, pendant ce temps,
se prépare à d'autres types de gestes éducatifs aussi
importants. Pour nous, les directeurs d'école, toutes les tâches
éducatives sont foncièrement importantes à tous les
niveaux. On le dit. On le vit et ce sont aussi les enseignants qui en
retrouvent un très haut niveau de satisfaction professionnelle et le
résultat ou l'impact sur l'élève est aussi directement
proportionnel. C'est ce que le décret permet. C'est ce qu'on demandait.
Cela fait partie, dans mon langage personnel, du virage pédagogique. En
1976, on a intégré l'universalité du B, C, D, dans le
langage des conventions. Aujourd'hui, on a maintenu dans les règles
budgétaires dont on connaît une partie, ce volume de temps
disponible pour les écoles et c'est dans cet esprit que nous sommes
satisfaits de la tâche globale.
M. Gauthier: La deuxième...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant! M. de Guire
veut ajouter quelque chose, je pense.
M. de Guire: Simplement un petit complément. On voudrait
éviter aussi de ne plus être capable de faire face à des
situations d'urgence. La classe vient de se terminer. On a droit à dix
minutes de surveillance. Il y a une tempête de neige. Les autobus ne sont
pas arrivés. Les dix minutes sont terminées, les gens sont partis
et je suis pris tout seul avec 500 élèves pour attendre les
autobus. C'est un exemple.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: La deuxième de ces demandes qui a
été respectée par le décret -là-dessus, je
diverge un peu d'opinion avec vous, M. de Guire - vous en avez parlé
tout à l'heure, c'est concernant la notion de capacité. Par vos
propos, vous avez laissé voir qu'évidemment on ne pourrait pas
abuser de cette notion parce qu'il y avait de la concertation, qu'un directeur
devait tenir compte de ses enseignants, mais, si ma mémoire est
fidèle, la notion de capacité est définie dans le
décret et dit ceci: Si un enseignant a un brevet d'enseignement, soit
général pour un enseignement au premier cycle du secondaire ou un
brevet en mathématiques, en physique ou autrement pour de l'enseignement
plus spécialisé, il est réputé capable. Je ne vois
pas ce qu'un directeur d'école a à dire là-dedans.
Deuxièmement, on dit: Si un enseignant a déjà
enseigné une matière pendant un an, même s'il n'a pas de
brevet, il est réputé capable. Je ne vois pas encore ce que le
directeur d'école a à dire là-dedans.
Troisièmement, on dit: Si un enseignant est inscrit et suit des
cours de formation dans la matière, il est réputé capable.
Et je ne vois pas ce que le directeur d'école a à dire
là-dedans.
Il reste le quatrième critère, mais l'un des
critères permet de se qualifier, qui est plutôt une ouverture et
qui dit: S'il n'y a aucune de ces trois affaires, il est jugé capable,
il pourra aussi être réputé compétent. C'est le seul
critère qui permet une certaine subjectivité.
À cet égard, la notion de capacité - je ne sais pas
si vous réviserez ou si vous nuancerez votre réponse de tout
à l'heure -finalement, est, à toutes fins utiles,
indépendante des directeurs d'école pour, en tout cas, la grosse
partie, au moins trois éléments sur quatre. Est-ce exact ou
est-ce que j'ai une mauvaise compréhension du critère?
M. de Guire: Je demanderai à mon collègue, M. Jean
Soumis, de compléter.
Le Président (M. Jolivet): M. Soumis.
M. Soumis: M. le député, vous avez une information
tout à fait exacte sur le décret. Je pense que la nuance qui
n'est pas suffisamment faite, c'est que le critère de capacité ne
s'applique que dans un cas de changement de poste et que la capacité est
reconnue automatiquement à l'enseignant qui répond à ce
que vous avez énuméré. Je pense qu'il est important de
faire la distinction entre changement de poste, affectation et distribution de
tâches. Dans le décret, la capacité est une question
d'affectation et non pas de distribution de tâches.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: J'aurais encore quelques questions M. le
Président. Depuis les deux jours qu'on assiste ici aux travaux de la
commission, la CEQ, hier, également dans un témoignage
particulièrement intéressant, parce que ces gens sont aussi au
coeur de
l'activité éducative, nous a démontré ou a
essayé de nous démontrer - je n'en étais pas parfaitement
convaincu - que la qualité de l'enseignement se traduisait finalement en
majeure partie par le nombre d'élèves vus par un enseignant ou le
nombre de groupes qu'il devait voir. On a beaucoup parlé, on a fait des
liens en disant: La qualité baissera parce que le nombre de groupes
augmente. Vous en parlez un peu dans votre mémoire. J'ai cru voir des
choses à cet effet. Vous semblez dire qu'il y a des possibilités
de diminuer le nombre de groupes qu'un enseignant devrait voir dans sa
tâche. Je voudrais savoir s'il s'agit des modèles dont on parlait
au cours de la commission, alors qu'on disait: II y a certains modèles
qui permettent une action éducative plus globale etc. Je voudrais savoir
comment il y a moyen de diminuer le nombre de groupes qu'un enseignant doit
voir dans une semaine, sans entrer évidemment dans tout le détail
de l'organisation. Quel est le moyen?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, je demanderai à mon
collègue, M. Bertrand Jean, de répondre à cette
question.
Le Président (M. Jolivet): M. Jean.
M. Jean (Bertrand): M. le Président, la réponse est
qu'on revient encore aux fameux modèles que les différentes
écoles pourraient établir. Ces modèles devront
nécessairement s'établir en concertation. Nous avons fait une
tentative de simulation pour voir s'il était possible d'aller vers ce
qu'on appelle le titulaire. Voici un exemple très précis:
secondaire I, où c'est peut-être le plus facile parce qu'il n'y a
pas d'option. Nous prenons le professeur de français qui avait
généralement quatre groupes de français, selon la
convention qui est encore actuelle -en tout cas, ce que nous vivons
présentement - on peut penser - j'ai dit "on peut penser" -que cela ne
peut pas se faire sans concertation et sans prendre le temps de vivre avec
notre monde et savoir comment les gens pourront vivre de cette façon.
(17 heures)
Je vous l'explique. Secondaire I: trois groupes de français, deux
groupes de géographie; cela fait exactement 23 périodes. Les
mêmes groupes qu'il rencontre en français, il peut les rencontrer
en géographie. Donc, il rencontre nécessairement trois groupes au
maximum.
Je peux faire cela pour, par exemple, dix groupes. J'aurai, à ce
moment, possiblement dix titulaires à 23 périodes. Le
complément de 23 à 25 deviendra évidemment le râle
de titulaire. C'est l'exemple précis qu'on peut donner. Mais je tiens
à répéter que cela ne peut pas se faire sans concertation,
du jour au lendemain. Les gens qui étaient spécialisés en
français, je ne sais pas jusqu'à quel point maintenant il ne
faudra pas mettre les ressources nécessaires pour leur donner
également la possibilité d'enseigner la géographie.
Un autre exemple: ceux qui enseignent les mathématiques, dans le
même champ, pourront enseigner trois groupes de mathématiques,
deux groupes d'écologie. Il pourront rencontrer au maximum trois groupes
également.
Finalement, faites l'exercice, quand on dit "mathématiquement,
c'est possible", c'est cela qu'on veut dire. Mathématiquement c'est
possible, mais entre possible et viable il y a une marge.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, y
a-t-il encore d'autres questions? Allez-y.
M. de Guire: Vous permettez?
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. de Guire.
M. de Guire: Si vous permettez, j'aimerais que mon
collègue ajoute un complément de réponse à cette
question.
Le Président (M. Jolivet): C'est parfait.
M. Gobeil: C'est pour illustrer ceci. Quand on anticipe ici que
le facteur temps sera important, je vais vous donner un exemple. Si on va de
plus en plus au niveau de l'école secondaire, 1er cycle, vers le
titulariat, plusieurs enseignants seront amenés à travailler sur
deux matières.
Je vous rappelle qu'au cours des dernières années tout ce
qui touche le perfectionnement et le recyclage des enseignants, par rapport au
nouveau programme, a été axé sur la spécialisation.
Cela veut dire qu'il va falloir refaire complètement la planification du
perfectionnement et du recyclage des enseignants au secondaire pour tenir
compte de cet aspect. Vous avez là l'illustration d'une opération
qu'il faut vraiment réviser parce que, ces dernières
années, on a axé uniquement le perfectionnement sur la
matière que l'enseignant touchait.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Gauthier: II y a une question qui est un peu d'un autre ordre,
M. le Président. Mon collègue, le député de
Chauveau, a parlé un peu de certaines actions qui pouvaient se
dérouler dans certaines écoles concernant la
négociation.
Au début de votre mémoire - c'est vous-même qui en
parlez - vous parlez de cette responsabilité du directeur d'école
quant au fonctionnement de son école, mais
aussi de la dimension de l'animation de son école. Je voudrais
savoir de la part du président de la Fédération des
directeurs d'école... Évidemment, à mon point de vue, en
tout cas, et au point de vue de certains citoyens, le port de macarons dans les
écoles ou, encore, le fait d'utiliser les enfants comme boîtes aux
lettres ou, encore, le fait d'enseigner - je ne sais quoi - l'historique de la
loi 111 ou des relations du travail au Québec puisque ce n'est pas
inclus dans les programmes actuellement, il faut bien qu'il y ait quelqu'un qui
ait la responsabilité de voir à ce que l'enseignement qui se
donne actuellement, même si on est dans une période difficile - il
faut bien l'admettre -soit conforme au programme et non pas conforme à
la situation pénible de travail que vivent les enseignants
actuellement.
Comment voyez-vous le rôle de directeur d'école et est-ce
que la fédération a pris des moyens pour informer ses membres de
voir à mettre cartes sur table avec les enseignants? J'ai l'impression
que les enseignants aimeraient bien savoir de la part de leur directeur
d'école ce qu'il est permis et convenu de faire dans l'école et
ce qui n'est pas permis, soit parce que ce n'est pas au programme ou que ce
n'est pas dans la normalité des choses. Je voudrais savoir quelle est
votre position là-dessus et si vous avez entrepris des actions à
cet égard.
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, c'est une question qui
touche l'intervention de l'ensemble des personnels à l'intérieur
d'une école en situation de conflit ou en non situation de conflit. Je
voudrais vous rappeler que notre fédération s'était
élevée à un moment donné contre la distribution
dans nos écoles par le ministère des Affaires
intergouvernementales d'un texte qui s'est appelé "Minute Ottawa!" Nous
nous étions élevés contre le fait qu'on pouvait utiliser
les écoles, qu'on pouvait utiliser les enseignants pour véhiculer
un message qui ne venait pas du ministère de l'Éducation.
Le contrat social, pour nous, est établi par l'Assemblée
nationale. Il ne peut pas être établi par qui que ce soit d'autre.
Nous nous sommes élevés également chaque fois que les
enseignants sont intervenus pour véhiculer leur opinion par rapport soit
à leur dossier ou à une situation ou pour distribuer - je
rappelle surtout ceux-là - les documents qu'on a appelés du 1er
mai. Autant l'un n'en avait pas le droit, autant l'autre n'en a pas le droit.
Cependant, même si les règles du jeu sont établies, il
reste au ministère de l'Éducation à établir des
règles beaucoup plus strictes sur le contrôle de cette
distribution. Je n'appelle pas cela de la censure, parce que, je pense qu'on
vit dans un pays libre et qu'on a le droit de s'exprimer. Cependant, je ne
crois pas qu'on ait le droit, à l'intérieur d'une école,
de faire passer... Puisque je suis mandataire de l'État, je suis
mandataire de l'ensemble des citoyens du Québec pour véhiculer
des valeurs que l'ensemble des citoyens ont définies. À partir de
ce moment, je n'ai pas le droit d'utiliser la tribune que j'ai pour faire autre
chose.
M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Je serai très
bref, M. de Guire. Je suis heureux de voir que votre mémoire est
très bref. Cela a toujours été une caractéristique
de la plupart de nos directeurs d'école. Vous dites à la page 11
qu'il est admissible qu'à tous les trois ans, dans l'école
publique, au moment où on commence à vivre une convention, la
lutte recommence. Je pense que tout le monde constate que c'est un des
éléments majeurs de l'instabilité scolaire. Dans vos
commentaires - et ceux de vos collègues - vous avez parlé aussi
de l'instabilité dans le milieu scolaire, spécialement au sujet
de directives qui arrivent soit de la commission scolaire directement, soit du
gouvernement. Je suis sûr que vous avez vécu la même
expérience que j'ai vécue. Chaque matin, lorsqu'on recevait le
courrier, on trouvait toujours une directive qui venait de quelque part. Cela
rend le râle du directeur pas très facile. Pour en revenir
à ma question, je crois que l'instabilité est vraiment
causée aussi par tout ce chambardement qui vient d'un côté
ou de l'autre, soit de la commission scolaire, soit du gouvernement.
Pourriez-vous me donner votre opinion sur la proposition suivante. Il est vrai
que cela va être difficile, même s'il y a une espèce de
règlement, d'une façon ou de l'autre, de s'assurer que les
cicatrices soient bien guéries après la grève ou le
conflit. Pensez-vous que pour aider à cette stabilité que tout le
monde recherche, on devrait avoir un moratoire pour une certaine période
de temps sur les changements qui sont proposés par le ministère
de l'Éducation?
Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, un moratoire, je pense que,
en ce qui concerne l'ensemble des régimes pédagogiques, il y a
une implantation graduelle qui se fait d'année en année. Je
pense, en ce qui concerne ça, que cette question ne se pose pas pour
nous.
Maintenant c'est bien sûr que quand vous parlez d'augmentation de
tâche, si vous
parlez d'un changement de ce côté-là, c'est un peu
comme je le disais tantôt, vous parlez de la capacité de payer des
Québécois. La capacité de payer des
Québécois, notre fédération n'est pas apte à
se prononcer sur ça. Peut-être qu'en tant qu'individu, en tant que
contribuable je peux avoir une opinion. Mais en tant que
fédération, nous ne voulons pas intervenir dans le dossier qui
s'appelle capacité de payer des Québécois.
Je dois vous dire cependant que, peu importent les décisions qui
seront prises à la fin, peu importe la façon dont se
réglera ce conflit, avec augmentation ou non, graduelle ou non, il y
aura des ajustements à faire. Il y aura des serrages de coudes à
recommencer. Il y aura en fait des climats à rétablir et cela,
ça prendra le temps qu'il faut. Un peu comme je le disais tantôt,
au moment où l'on s'habitue à vivre avec une convention il faut
en recommencer une autre. C'est peut-être ça, M. le
Président, qu'il faudrait réviser.
En ce qui nous concerne, si la capacité de payer des
Québécois doit être définie par l'Assemblée
nationale, peut-être que c'est là que se trouverait la solution
à nos problèmes, c'est-à-dire que l'Assemblée
nationale définirait la masse salariale et après, un autre
organisme que le gouvernement négocierait les conditions de travail, les
conditions d'exercice de la profession d'enseignant.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu que le temps est
écoulé et qu'on essaie de se discipliner le plus possible, j'ai
vérifié de chaque côté si on ajoutait du temps. On a
dit que pour le moment on aimerait mieux procéder à l'audition
d'un autre. Alors je tiendrais à vous remercier. Comme la coutume le
veut, M. le député d'Argenteuil d'abord, et le ministre
ensuite.
M. Ryan: Nous vous remercions cordialement messieurs de la
délégation de la Fédération
québécoise des directeurs d'école. Nous avons
écouté vos observations avec beaucoup d'intérêt.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Je vous remercie, de votre côté, pour ces
nombreux témoignages que vous avez apportés. J'ai
été heureux d'entendre plusieurs directeurs d'école
s'exprimer sur l'un ou l'autre aspect des sujets qui ont été
soulevés. Je pense que cela a contribué à apporter un
point de vue tiré de leur propre expérience et qui revêtait
un côté humain qui a été très
apprécié et qui est axé justement sur l'expérience
des milieux, ce que nous avons bien besoin de connaître à l'heure
actuelle. Merci beaucoup.
Le Président (M. Jolivet): Pendant que nous demandons
à la Fédération des cégeps de se présenter,
avec M. Jean-Noël Tremblay comme représentant, lequel nous fera la
présentation des membres qui l'accompagnent, je tiens à dire
à chacun des membres de la commission que nous avons fait distribuer par
le secrétariat des commissions un document qui s'intitule: Entente entre
les représentants désignés par la Fédération
des commissions scolaires catholiques du Québec, d'une part, et les
représentants désignés par le ministre de
l'Éducation, d'autre part, pour constituer le comité patronal de
négociation des commissions pour catholiques seront les articles 10 et
suivants de la loi 55.
Maintenant avant de demander à M. Jean-Noël Tremblay de
présenter les membres qui l'accompagnent, je tiens aussi à vous
rappeler une décision qui a été prise ce matin: pour la
Fédération des cégeps le temps alloué est de une
heure trente minutes. Comme nous sommes actuellement à 17 h 15,
j'aimerais savoir si dans le cas de la fédération nous
procédons jusqu'à 18 heures tel que prévu en partageant le
temps en deux ou si nous passons l'heure de façon à prendre
l'heure et demie d'affilée.
Donc, on me dit à ma droite que, compte tenu des circonstances
nous allons terminer à 18 heures et nous reprendrons à 19 h 30.
Madame la députée de L'Acadie. (17 h 15)
Mme Lavoie-Roux: M. le Président. Avant d'entendre la
Fédération des cégeps... Il y a déjà
maintenant près de 25 heures que nous siégeons ici; probablement
que d'ici à lundi soir, nous aurons siégé pas loin de 40
heures ou davantage même. Il y a eu une demande de la CEQ, à
savoir qu'un observateur soit nommé et qu'on retourne à une table
de négociation. On n'a eu aucun signe de la part du ministre de
l'Éducation ou de la part du gouvernement indiquant qu'on pourrait
donner suite à cette demande. Le temps court. Le 14 mars s'en vient.
Est-ce que le ministre de l'Éducation est toujours aussi muet sur cette
demande de la CEQ?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: J'ai déjà fait part, hier soir, en
réponse à une question qui m'était posée, que la
deuxième recommandation de la CEQ, qui a trait à un observateur,
n'était pas nouvelle, mais que, même si elle n'était pas
nouvelle, je l'accueillais avec sympathie. J'avais, d'ailleurs, marqué
dès la semaine dernière que j'acceptais le principe d'un tiers
devant qui se déroulerait la négociation. Mais il reste qu'avant
de me prononcer définitivement là-dessus j'aimerais entendre tout
ce que les groupes ont à nous dire sur
les recommandations qui nous ont été faites.
Ils peuvent, d'ailleurs, en faire d'autres. Ceci nous permet
d'étudier les modalités qui peuvent se prêter à
l'application de ce principe. En conséquence, je peux vous assurer
qu'à la fin de cette commission je ferai connaître mon opinion,
ainsi que celle du gouvernement.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie, tout en étant... Allez.
Mme Lavoie-Roux: Oui, très brève, M. le
Président. J'aimerais que le ministre infirme ou confirme cette rumeur
qui nous est parvenue selon laquelle présentement le gouvernement est
à constituer une tierce partie et que la constitution de cette tierce
partie serait annoncée. Est-ce que le ministre peut nous dire si elle
sera annoncée aujourd'hui, au conseil national du Parti
québécois, ou à la fin de la commission, lundi soir? Et
pour ne pas revenir avec une autre question...
M. Laurin: Je ne veux pas commenter des rumeurs qui peuvent
s'avérer fondées ou mal fondées. Il s'agit de rumeurs. Je
peux, cependant, dire qu'il est tout à fait normal que les autres
membres du gouvernement puissent également réfléchir,
ayant entendu la deuxième recommandation qui nous a été
faite. C'est non seulement un processus légitime, mais responsable. Je
ne veux donc pas commenter les rumeurs et je répète qu'à
la fin de la commission je serai en mesure d'annoncer la décision du
gouvernement à cet égard.
Le Président (M. Jolivet): Simplement pour éviter
qu'un débat ne s'engage sur une chose qui n'est pas du mandat de la
commission, je veux vous rappeler que les règlements de
l'Assemblée nationale prévoient que ce que dit de son
siège le représentant de quelque formation politique que ce soit,
on doit le prendre comme étant la vérité à ce
moment-là. Je ne voudrais en aucune façon qu'un débat
s'engage. Les gens de la Fédération des cégeps
étant devant nous, si nous sommes d'accord, je demanderais à M.
le député d'Argenteuil d'intervenir, mais rapidement.
M. Ryan: M. le Président, je vous remercie de votre
bienveillance. Je pense être dans l'exercice du droit d'un
député à cette commission. Le but de la commission est
d'examiner les implications du conflit actuel du point de vue de la
qualité de l'enseignement, de la sécurité d'emploi et de
toutes sortes d'aspects qui intéressent l'éducation en regard,
comme on le dit, de la situation actuelle. Il me semble qu'une règle
élémentaire de prudence qui s'impose à tout le monde et en
particulier au gouvernement, c'est que, pendant qu'un effort pacificateur aussi
exigeant est en cours, il faut éviter toute attitude, toute initiative
qui soit de nature à jeter de l'huile sur le feu.
Or, cet après-midi, on fait distribuer dans les bureaux des
députés une publication du ministère de l'Éducation
dont je viens de prendre connaissance. C'est une publication qui est un exemple
type du genre de propagande politique à laquelle le gouvernement se
livre à même les fonds publics. Si on avait émis un
document de stricte information sur certains éléments de la
position du gouvernement dans toute cette affaire-là, je pourrais
comprendre. Par exemple, on aurait pu donner une entrevue avec le ministre. Je
n'ai pas d'objection à ce que, dans une publication du gouvernement, le
ministre donne son opinion. D'ailleurs, il n'a pas à me demander de
permission. Mais quand on est rendu à publier des articles...
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil, juste un instant. M. le député de Fabre, vous avez
invoqué une question de règlement.
M. Leduc (Fabre): On a toléré quelques questions.
Là, on est rendu à l'étape des discours. Je pense qu'il
faut continuer. Le mandat de la commission est très précis et je
pense qu'il faut poursuivre avec la Fédération des cégeps.
J'y tiens, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Sur la question de règlement, très
brièvement. Je pense que ce que le "chef de l'Opposition" veut invoquer,
c'est la nature même du travail - le député d'Argenteuil,
oui - de la commission parlementaire. Il serait peut-être utile de
laisser conclure le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Ce sera très bref.
Le Président (M. Jolivet): Juste pour rendre, quand
même, ma décision. J'essayais, justement, de comprendre ce qui se
passait puisque je pensais qu'on était rendu à l'étape
d'écouter les gens de la Fédération des cégeps.
Mais j'ai cru comprendre que le représentant de l'Opposition avait une
sorte de question de privilège à soulever que je voulais la plus
brève possible, ce que j'ai demandé. S'il veut conclure, ensuite,
on passera à la Fédération des cégeps.
M. Ryan: Je signalais que cette publication du ministère
de l'Éducation, dont on me dit qu'elle fera peut-être l'objet
d'une insertion dans des journaux quotidiens dès demain,
entraînera, par conséquent, des
dépenses considérables. C'est farci de jugements
politiques publiés sous le couvert de l'anonymat...
M. Leduc (Fabre): M. le Président, je m'excuse...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre, allez-y.
M. Leduc (Fabre): ...encore une fois, le député
d'Argenteuil, au lieu de poser sa question, au lieu de conclure, engage un
débat, poursuit son discours politique. Je vous demande de clore cette
période de questions et de poursuivre avec le mandat de la
commission.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous avez presque raison. Je dois vous dire que le député
d'Argenteuil n'a certainement pas, lui non plus, complètement raison.
Dans ce contexte, je lui avais demandé de terminer sa question de
privilège, mais je pense qu'il abuse un peu de ma permission. Cependant,
j'ai bien demandé au député d'Argenteuil de terminer.
M. Ryan: Je vous remercie. J'ai été interrompu par
le député de Fabre justement au moment où j'allais poser
ma question. Je veux demander au ministre s'il a connaissance de cette
initiative de son ministère, s'il l'a approuvée, s'il trouve que
c'est de nature à rendre service dans le contexte actuel où nous
cherchons vraiment un rapprochement entre les parties, alors que ceci est,
encore une fois, farci de jugements qui ne sont pas du tout de même
nature.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Oui, M. le Président, à toutes les
questions. Pour le reste qui est un discours, un débat, je
répondrais simplement: Quot homines tot opiniones. Permettez-moi donc de
ne pas partager ces autres opinions.
Le Président (M. Jolivet): M. Jean-Noël Tremblay.
M. Rivest: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Question de règlement,
de la part du député de Jean-Talon.
M. Rivest: Ce que le député d'Argenteuil
soulève, c'est qu'on a invité des gens ici à venir se
prononcer sur le mérite du problème que l'on vit actuellement.
Or, d'une façon absolument unilatérale, une des parties au
conflit...
M. Leduc (Fabre): M. le Président...
M. Rivest: ...qui est ici devant la commission et qui a
témoigné par la voix des sous-ministres...
M. Leduc (Fabre): M. le Président...
M. Rivest: ...maintenant que son témoignage est fini pour
les interlocuteurs...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon, je m'excuse; j'ai, à ma droite, de la part du
député de Fabre, une question de règlement.
M. Leduc (Fabre): Je demande que la commission poursuive son
mandat précis et qu'on entende la Fédération des
cégeps.
M. Rivest: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Un instant, je vais les prendre
une par une. Je pense qu'on fait un débat. Je me suis permis
d'être un peu large pour permettre, justement, à un
représentant de l'Opposition de faire ce qu'il a appelé une sorte
de question de privilège. Je pense que je n'ai pas le mandat, cependant,
comme président, de continuer dans cette voie. Il y a des moyens autres
que la commission parlementaire qui, elle, a un mandat bien précis. Je
vous le relis: "entendre les organismes directement impliqués dans
l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la
qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité
d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation
actuelle."
Je dois, dans mon rôle de président, demander à M.
Jean-Noël Tremblay, président de la Fédération des
cégeps, de commencer à présenter son mémoire, en
nous présentant d'abord ceux qui l'accompagnent. Mais j'ai aussi,
cependant, un autre devoir qui est celui d'entendre les questions de
règlement et les questions de privilège. Tout ce que
j'espère, lorsqu'on invoque une question de règlement, c'est que
cela en soit une. Jusqu'à maintenant, ce que, de part et d'autre, on a
dit à une question présentée par le député
d'Argenteuil, je l'ai permis, mais je n'accepterai pas d'autre chose que de
vraies questions de règlement. Sinon, je passerai à la
Fédération des cégeps.
M. Rivest: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon
M. Rivest: ...ma question de règlement touche
précisément le mandat de cette commission qui invite des
interlocuteurs
privilégiés du monde de l'enseignement à venir
s'exprimer publiquement ici, non seulement, d'ailleurs, de la partie syndicale
ou des administrateurs, mais également de la partie patronale par la
voix des sous-ministres qui se sont exprimés en tant que tels. Or, M. le
Président, je pense que le gouvernement, dans son râle de partie
à la présente négociation - et c'est le point, je pense,
que le député d'Argenteuil devait faire - en regard même
des droits de cette commission parlementaire, devrait s'engager
immédiatement à s'abstenir, en tant que partie à la
négociation, de publier quelque écrit que ce soit qui prend
position et qui ignore complètement la nature des témoignages
qu'on a entendus ici. Quand on regarde cette feuille de propagande qu'on nous
soumet...
Le Président (M. Jolivet): M. le député! M.
le député!
M. Rivest: ...c'est indécent, M. le Président, pour
la commission.
M. Leduc (Fabre): Je m'excuse, M. le Président, mais le
député engage un débat.
M. Rivest: C'est indécent. C'est une mascarade, ce qu'ils
sont en train de faire.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît: S'il vous plaît, M. le député de Fabre.
Non, c'est terminé, M. le député.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, le député
engage un débat.
Le Président (M. Jolivet): Je passe à M.
Jean-Noël Tremblay.
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oh! Si vous avez une question
de règlement, madame, je suis prêt à l'entendre. Mme la
députée de L'Acadie, mais une vraie question de règlement,
s'il vous plaît.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question repose sur
l'objet de cette commission. Cette commission a été
invitée à siéger, des deux côtés de la
Chambre, pour entendre - je suis d'accord avec vous - des représentants,
mais aussi pour essayer de faire la lumière le mieux possible sur ce qui
est le noeud du conflit entre les enseignants et le gouvernement du
Québec. Je trouve que c'est faire outrage aux membres de cette
commission...
M. Leduc (Fabre): M. le Président...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce vous, le
président, ou si c'est le député de Fabre?
M. Leduc (Fabre): Je m'excuse, mais vous portez des jugements,
madame.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! Je pense que tout le monde va bien comprendre que, depuis
trois jours, c'est moi qui suis le président. Cependant, on amorce un
débat que je ne voudrais, en aucune façon, que l'on fasse. S'il
faut relire le règlement, on le relira. Ce que vous êtes en train
de me dire à moi, comme président, pour que je
l'interprète pour l'ensemble des gens - ce que je n'ai malheureusement
pas le droit de faire comme interprétation - c'est que vous avez eu
connaissance en dehors de cette commission de choses...
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est à cette commission, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, non, je m'excuse, madame.
Ce que je dis, c'est en vertu du règlement. Je ne parle pas de la
connaissance que vous avez actuellement. Je dis qu'une chose s'est
passée en dehors de cette commission que vous voulez amener à
cette commission. Je pense qu'il faut bien le comprendre quand même et,
dans ce contexte, le mandat que j'ai à faire respecter, c'est celui
d'entendre des organismes. Les autres problèmes qui sont d'ordre
différent, vous avez, je pense, à les régler autrement que
par des questions de règlement qui engendrent des discours que je n'ai
pas le droit d'accepter. Si c'étaient de vraies questions de
règlement, j'accepterais, madame.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ...espérons que, cette fois-ci, je
respecterai le règlement. J'essaie toujours de respecter le
règlement, M. le Président, vous le savez. Ce dont je veux parler
- et vous êtes le président de la commission - ce sont des droits
des membres de cette commission et vous en êtes le gardien, M. le
Président. Je dois vous rendre hommage du fait que cette commission
s'est déroulée avec peu de questions de procédure ou
à peu près pas.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
Mme Lavoie-Roux: Quand je parle des droits des membres de cette
commission, c'était le mandat qu'on avait confié aux
membres de cette commission et qui était d'examiner, dans le
meilleur climat possible, toutes les pistes de ce conflit, toutes les questions
relatives au conflit des enseignants. Aujourd'hui, en plein au moment où
on est à exercer, de bonne foi, de part et d'autre, ce mandat que le
gouvernement nous a demandé de remplir, on vient faire entrer en ligne
de compte une...
Le Président (M. Jolivet): Madame, je vais vous
arrêter seulement un instant...
Mme Lavoie-Roux: Oui. (17 h 30)
Le Président (M. Jolivet): ...pour vous demander ceci.
Cela m'aiderait beaucoup, vous savez, en termes de procédure. Si vous
avez une motion à présenter, il s'agirait de la présenter
et je verrai si elle est recevable ou pas. À partir de cela, je verrai
si, oui ou non, on doit continuer le débat, parce qu'on risque de
s'enferrer dans un débat qui, à mon avis, n'est pas le mandat de
cette commission. Vous savez comme moi qu'il reste encore quatre organismes
à voir et à entendre aujourd'hui. Mon mandat est de faire
entendre ces quatre organismes d'ici minuit. C'est tout ce que je vous demande,
Mme la députée.
Mme Lavoie-Roux: Dans ce cas, j'aimerais bien faire une motion
pour demander que, tant et aussi longtemps que cette commission siégera
pour entendre les parties intéressées ou tous les participants
que nous avons invités, on s'abstienne, de part et d'autre, que ce soit
du côté de l'Opposition ou que ce soit du côté du
gouvernement, de poser des gestes de provocation qui viennent troubler le
climat et empêcher que nous obtenions le meilleur éclairage
possible pour en arriver aux solutions que le gouvernement souhaite.
M. Leduc (Fabre): M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Fabre, je voudrais savoir sur quoi...
M. Leduc (Fabre): ...on parle de geste de provocation - le mot
est clair - à la suite de la distribution d'un journal. Un tel jugement
soulève une série de questions et engage le débat. Alors,
je vous demanderais de mettre un terme à cette période
d'obstruction...
M. Rivest: Adoptez une loi!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Leduc (Fabre): ...systématique des travaux de la
commission et de passer au mandat de la commission, s'il vous plaît, M.
le Président. Nous avons des organismes à entendre jusqu'à
minuit. M. le Président, je vous demande d'appliquer ce qui est le
mandat de la commission.
M. Rivest: Appelez-la la loi 112.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai une motion.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît: Oui,
laissez-moi parler. J'ai cru comprendre qu'à la suite de ce que j'ai
demandé à Mme la députée de L'Acadie elle m'a
donné une motion. Étant donné que j'ai une motion, j'ai
à déterminer si elle est recevable ou non.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Je tiendrais à vous
faire remarquer, Mme la députée de L'Acadie, que
j'apprécierais beaucoup qu'on me donne cette motion par écrit.
Mais j'aurais une suggestion à vous faire: Compte tenu des
circonstances, compte tenu qu'on demande environ 20 minutes aux gens qui
présentent le mémoire, je souhaiterais que les gens de la
fédération puissent commencer la présentation de leur
mémoire. Vous me donnerez votre motion et, à l'heure du souper,
je déterminerai si elle est recevable ou pas; après cela, on
pourra la débattre s'il le faut, suivant la décision que je
rendrai. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait prête à
me rendre à votre désir, sauf que, d'abord, il faut que je la
rédige en bonne et due forme, ayant dû l'improviser. J'aimerais
quand même que vous me permettiez, avant la suspension de nos travaux, de
la lire à cette commission.
Le Président (M. Jolivet): C'est promis, madame.
M. le représentant de la Fédération des
cégeps, M. Jean-Noël Tremblay, présentez-nous vos
collègues.
Fédération des cégeps
M. Tremblay (Jean-Noël): Je sauterai sur l'occasion que vous
me donnez de vous présenter d'abord, à mon extrême droite,
M. Claude Larouche, qui est le président du conseil d'administration du
cégep Bois-de-Boulogne et vice-président de la
Fédération des cégeps. Vous avez ensuite M. Gilles
Beauchemin, qui est directeur général du cégep de Rimouski
et membre du conseil d'administration de la Fédération des
cégeps; M. Luc Henrico, qui est directeur général du
Collège John Abbott et membre du conseil d'administration de la
Fédération des cégeps; M. Yvon Hamel, qui est
spécialiste sur la
tâche, à la Fédération des cégeps; M.
Yves de Belleval, qui est directeur du Service des relations du travail
à la Fédération des cégeps, et M. Pierre Leduc, qui
est directeur des services pédagogiques au cégep de Maisonneuve
et président de la commission des affaires pédagogiques à
la Fédération des cégeps.
M. le Président, la Fédération des collèges
d'enseignement général et professionnel a accepté avec
empressement l'invitation du leader parlementaire du gouvernement à
participer à la commission parlementaire de l'éducation et ce,
dans le but de porter à la connaissance de cette commission le dossier
du réseau collégial tel que le vivent les administrateurs des
cégeps. Nous entendons vous expliquer ce qui a motivé nos choix
dans cette ronde de négociations et faire état des
éléments qui nous paraissent les plus fondamentaux, tant sur les
principes que sur le contenu des offres patronales.
Le réseau des établissements collégiaux publics est
voué à la formation générale et professionnelle des
jeunes et des adultes. Il accueille cette année au-delà de 132
000 élèves dits réguliers et environ 90 000 adultes qui
suivent des cours à temps plein ou à temps partiel dans les
collèges. Ses 44 établissements se partagent près de 675
000 000 $. Bien sûr, ces chiffres ne sont pas aussi impressionnants que
ceux qui mesurent le niveau primaire et secondaire. Nous calculons en millions,
pas en milliards et nos économies potentielles se chiffrent par dizaines
de millions. Cela n'en est pas moins significatif pour la population
québécoise, car il ne faut pas oublier que le niveau
collégial constitue le passage, presque le goulot d'étranglement,
dirions-nous, quelquefois entre le niveau secondaire et le marché du
travail, entre le secondaire et les études supérieures. Il faut
savoir que le niveau collégial, aussi petit soit-il en nombre et en
importance sur le plan budgétaire, reçoit tous les
étudiants ou à peu près tous les étudiants qui
viennent du niveau secondaire, soit pour les diriger dans une
spécialité au niveau du marché du travail, soit pour les
diriger à l'université.
De là toute notre insistance sur la qualité des services
que nous devons dispenser à une population étudiante encore en
croissance, services d'enseignement, bien sûr, mais aussi nombre d'autres
qui, gravitant autour de l'enseignement, contribuent à le
compléter et, le complétant, assurent la réalisation de la
mission fondamentale des cégeps qui en est une essentiellement de
formation.
Un cégep, bien sûr, ce sont des cours, mais aussi c'est la
bibliothèque, c'est l'assistance pédagogique, c'est l'orientation
scolaire, ce sont les services de "counselling", c'est la recherche, les
services de soutien matériel, bref, tout un environnement
éducatif pour lequel on retrouve des spécialistes, professionnels
et employés de soutien, qui travaillent et qui oeuvrent dans les
collèges.
À ce titre, d'ailleurs, nous avons vécu une période
faste qui a correspondu plus ou moins aux premières années
d'implantation du réseau: investissements massifs, à partir des
années soixante-sept en particulier, constructions nombreuses pour
répondre aux besoins d'une clientèle en progression
accélérée. Aboutissement original de la révolution
tranquille, le nouveau réseau a crû rapidement et tout a
été mis en oeuvre pour assurer son succès. Croissance des
effectifs qui entraîna celle du corps enseignant, multiplication des
services d'aide et d'encadrement qui rivalisèrent d'originalité
pour satisfaire les besoins.
Ce foisonnement s'est traduit bientôt en dispositions de
conventions collectives qui, au fur et à mesure de l'évolution
des cégeps, sont devenues de plus en plus complexes pour tenter de
couvrir tous les cas et protéger tous les droits. En période
d'abondance comme nous l'étions au début des cégeps, on
n'a pas lésiné sur la bonification des salaires et des conditions
de travail. Que l'on songe simplement que c'est par décret qu'on imposa,
en 1972, l'indexation des salaires.
Depuis quelques années, nous vivons complètement autre
chose. Une distanciation toujours accrue entre les paramètres de
révolution des conditions de travail et de salaires des enseignants et
ceux des enveloppes budgétaires globales des collèges. Le fardeau
des salaires s'accroît plus rapidement que ne progressent les sommes
allouées aux autres dépenses.
Le déséquilibre qui a commencé vers 1979 s'accentue
de façon dangereuse chaque année. Ainsi, entre 1979-1980 et
1982-1983, le nombre des étudiants réguliers a augmenté de
plus de 13 000, le nombre de professeurs a augmenté en
conséquence pour un ratio approximatif de 1 professeur pour 13
étudiants. La masse salariale des enseignants s'est accrue de plus de
150 000 000 $, soit d'environ 57%, pour un salaire moyen estimé à
37 100 $ pour cette année. Pendant ce temps, la masse salariale des
autres personnels s'est accrue, elle, de 55 000 000 $ environ, soit une
augmentation de 48% seulement. Cet écart dans la croissance des masses
salariales s'explique par le fait que la proportion des autres personnels a
diminué comme diminuaient et diminuent encore les sommes allouées
aux autres coûts qui, de 72 000 000 $ en 1979-1980, se réduisent
maintenant à 59 000 000 $, soit une réduction importante de
18%.
Ce qu'il faut comprendre de ces chiffres, c'est qu'en
réalité, le réseau collégial en est à sa
quatrième année de
restrictions budgétaires et qu'étant donné que la
masse salariale des enseignants constitue, dans le budget global, une enveloppe
protégée qui évolue au seul rythme des variations de
clientèles étudiantes, les enseignants n'ont pas, jusqu'à
très récemment, été touchés par la crise. Ce
sont les autres coûts et les autres personnels qui ont fait les frais des
coupures.
Là encore, la marge de manoeuvre était très mince,
d'abord parce que la plupart des services ont déjà
été délestés au cours des quatre dernières
années et que continuer en ce sens équivaudrait à fermer
des services entiers, ce qui met en danger l'équilibre des
établissements d'enseignement collégial et la réponse
minimale aux besoins des étudiants. Ensuite, parce que les conventions
collectives et les règles ministérielles sont ainsi faites que
les personnels mis en disponibilité continuent de recevoir leur plein
salaire et que ce salaire, soi-disant économisé dans un poste
budgétaire, est en fait assumé dans un autre poste de la
même enveloppe du réseau collégial. C'est sur cette base
concrète qui impose - vous le devinez facilement - des balises fort
contraignantes que la fédération a entrepris la ronde de
négociations.
Pour préserver l'équilibre et la qualité des
services offerts, il fallait mieux répartir les ressources
allouées à l'enseignement collégial et freiner
l'enrichissement collectif des enseignants.
Un autre problème nous préoccupait au tout début
des négociations, tout particulièrement celui de la
qualité de l'enseignement. Un retour en arrière nous
révèle qu'à tout le moins, depuis 1972, le thème de
la qualité de l'enseignement est apparu à l'occasion de chacune
des différentes rondes de négociations. Il nous semble,
après analyse sommaire, que ce thème a souvent servi à
dramatiser la situation. Il s'est révélé un puissant
moteur de l'affectivité, de l'émotivité et de la
mobilisation collective, nous en convenons. Il suffirait de revoir les
différents placards publicitaires qu'ont payés les parties,
depuis 1972 et jusqu'à tout récemment, pour s'en convaincre. Si
les révolutions se font au nom de la liberté, il semble bien que
les négociations, elles, se font au nom de la qualité. En dehors
des périodes de négociation, et surtout en dehors de leur phase
finale, qu'en est-il donc de cette qualité de l'enseignement?
On peut en effet s'interroger sur les éléments suivants.
Nous nous sommes interrogés sur ces éléments. D'où
vient l'attitude négative si souvent observée et qui s'est
traduite par l'inféodation des instances de concertation, telles que la
commission pédagogique, aux impératifs syndicaux, quand ce n'est
pas le boycott pur et simple de ces activités? Nous savons que la
commission pédagogique fait partie de la loi elle-même des
collèges. Pourquoi un boycott généralisé de la
remise des plans de cours ou encore des plans de travail ou des rapports
annuels des départements? Comment interpréter le fait que les
tentatives "patronales" de mettre sur pied des entreprises d'évaluation
des pratiques, méthodes, expériences, contenus
pédagogiques, soient quasi universellement vouées à
l'échec, tant les résistances, refus, oppositions et autres
attitudes négatives sont persistantes? Comme si ces entreprises
d'évaluation ne visaient qu'à discipliner éventuellement
les enseignants, alors qu'elles ont un tout autre objectif.
Toutes ces questions demeurent sans réponse dans les discours
actuels. Pourtant, d'autres les ont abordées. Le Conseil des
collèges, dans un avis au ministre de l'Éducation sur
l'établissement de politiques d'évaluation dans les
collèges, a souligné en novembre dernier, dans le rapport de sa
commission de l'évaluation, et je cite: "Selon l'observation
effectuée par la commission de l'évaluation du Conseil des
collèges, l'idéologie autonomiste qui anime plusieurs
départements est telle qu'elle menace souvent l'équilibre
institutionnel du collège. Il arrive fréquemment que le
comportement quotidien du département constitue une négation
pratique de l'appartenance institutionnelle." (17 h 45)
Plus loin, cette commission dit encore, et je cite: "Pour que
l'autonomie départementale soit telle, il faut qu'elle soit moins
dépendante de l'idéologie du pouvoir et de la stratégie
d'affrontement patronal-syndical, comme cela a été le cas
jusqu'ici par le biais des négociations des conventions collectives."
Elle ajoute: "On peut se demander si ces départements ne quittent pas un
patron local institutionnel pour un patron central syndical. Où est
alors le gain net d'autonomie pour les professionnels enseignants?"
D'où une recommandation que faisait le Conseil des
collèges, que nous entérinons entièrement: "Le Conseil des
collèges recommande au ministre de l'Éducation de prendre toutes
les mesures nécessaires pour que disparaissent des prochaines
conventions collectives des enseignants les différentes clauses qui
autorisent les activités départementales en dehors de
l'autorité du collège."
Reste qu'en l'absence d'une solide évaluation de l'enseignement
sous toutes ses facettes, il est aléatoire pour quiconque de porter des
jugements sur la qualité de l'enseignement et sur l'évolution de
cette qualité. Nous constatons toutefois que, dans le présent
débat, la question de la qualité se ramène beaucoup trop
à une question de quantité. Il n'est donc pas surprenant que nous
nous soyons inquiétés du contrôle de la
qualité de l'enseignement et que nous ayons proposé des
conditions susceptibles de le garantir, comme, par ailleurs, nous avons
souscrit aux mesures visant à mieux répartir les ressources
disponibles dans le réseau.
Des propositions concrètes. Nous considérons, bien
sûr, que tout est affaire d'équilibre et nous nous sommes
employés, à titre de partenaire du gouvernement, à le
maintenir, notamment, au chapitre de la tâche et de la
sécurité d'emploi.
La hausse de productivité, qui est un des points clefs des
discussions actuelles dans les négociations. En mars 1982,
l'assemblée générale de la fédération votait
à l'unanimité un mandat de négociation prévoyant la
possibilité d'intervenir au niveau des ressources affectées
à l'enseignement. Lorsque le ministère fit connaître
l'ordre de grandeur de la récupération recherchée, les
représentants de la Fédération des cégeps voulurent
s'assurer que cette récupération ne romprait pas
l'équilibre relativement satisfaisant de la répartition des
ressources d'enseignement entre le secteur général et le secteur
professionnel, les deux secteurs qui caractérisent le niveau
collégial.
La fédération fit en sorte aussi d'éviter que les
collèges plus petits, où le nombre de cours différents
à préparer par enseignant est forcément plus
élevé, ne soient pas desservis par l'augmentation de la
productivité recherchée. Elle fit en outre effectuer par quelques
collèges, des simulations sur la répartition proposée des
ressources locales. Le résultat de ces simulations démontra qu'un
coefficient d'augmentation de l'ordre de 13,5% pourrait être
assumé au plan de l'organisation pédagogique. Cela devenait
vivable.
Plus tard, lorsqu'il fut question de coefficient supérieur, la
fédération est intervenue auprès du ministère pour
qu'un certain nombre d'enseignants soit ajouté, de manière
à éviter que le seuil de 13,5% soit franchi. Finalement,
même au-delà de l'adoption de la loi 105 et des décrets, la
fédération participa avec le ministère à la
préparation d'une proposition bonifiant les décrets. C'est la
proposition qui a été déposée le 9 février
aux syndicats et le 10 février en conférence de presse en
collaboration avec le ministre de l'Éducation.
Il est certain que l'augmentation de la productivité
recherchée est importante. Mais il nous semble, compte tenu des cadres
financiers dont il est largement question, que cela est nécessaire si
nous voulons sauvegarder ou rétablir un équilibre dans la
répartition des ressources dont nous allons disposer pour les services
à rendre aux clientèles que dessert le réseau
collégial public. Pour ce qui est de l'impact individuel ou collectif de
cette hausse de productivité, il y a d'autres facteurs à
considérer.
Le premier - nous ne pouvons le répéter assez - c'est
l'urgence de régénérer l'appartenance institutionnelle et
de mettre en lumière la conscience professionnelle des enseignants. Ce
n'est pas d'abord à travers le discours des conventions collectives
qu'il nous sera permis d'y arriver.
Le second, c'est l'effet de résorption des charges additionnelles
qu'assumaient contre rémunération additionnelle des professeurs
déjà titulaires d'un poste à temps complet.
Idéalement, cela pourrait se faire volontairement par souci de la
qualité de l'enseignement, par exemple. Nous croyons plutôt que
cela se fera par l'affectation de professeurs mis en disponibilité
à ces tâches autrefois confiées en contrats
supplémentaires. Il faudra toutefois apporter une attention
particulière à la gestion de ce phénomène.
Un troisième facteur est constitué par la baisse de
l'allocation des libérations syndicales financées à
même les ressources allouées pour fins d'enseignement. Aussi
invraisemblable que cela puisse paraître aux yeux d'un grand nombre
d'observateurs, les collèges étaient appelés à
libérer les enseignants de leurs tâches à même les
ressources d'enseignement et sans remboursement par les syndicats.
C'était alors les autres enseignants qui, globalement, assumaient le
fardeau total des tâches conséquemment réparties entre
moins d'enseignants dans un collège. Nous avons évalué
à au-delà de 2 000 000 $ la valeur de ces libérations pour
l'année d'engagement 1980-1981. Seuls les syndicats d'enseignants de
cégep ont, à notre connaissance, bénéficié
de telles dispositions, que les décrets n'ont d'ailleurs pas abolies. Ce
type de libération est encore possible actuellement dans les
décrets, mais il y a cependant un maximum qui a été
fixé. L'abandon complet d'une telle mesure rendrait disponible à
des fins d'enseignement l'équivalent de 45 enseignants pour l'ensemble
du réseau collégial. Comme on le voit, il y a dans le
système des facteurs compensatoires de la hausse recherchée de
productivité, facteurs qui sont sans danger pour la qualité de
l'enseignement, au contraire.
Concernant la sécurité d'emploi, c'est sous l'angle de
l'octroi de la permanence que nous aborderons cette question. Nous ne remettons
pas en cause la sécurité d'emploi de nos personnels
réguliers. C'est plutôt contre la
régénérescence artificielle de postes que nous en avons.
Il est important, à cet égard, de souligner que la convention de
1979-1982 stipulait qu'une prévision de baisse de clientèle ne
pouvait être invoquée comme motif pour refuser la permanence.
Autrement dit, même s'il était prévu que le contenu de
l'emploi n'était pas permanent à court terme, même
s'il était prévu que la tâche de l'enseignant n'allait pas
se maintenir pour l'année d'enseignement suivante, la
permanence devait néanmoins être octroyée.
De fait, plusieurs enseignants et enseignantes ont obtenu, le 1er avril
d'une année donnée, leur permanence et reçurent avant le
1er mai de la même année, c'est-à-dire un mois plus tard,
un avis de mise en disponibilité. Ainsi furent, pour une part,
gonflés les coûts de la sécurité d'emploi. La
signification profonde de la permanence, selon nous, fut de donner accès
à la sécurité d'emploi et aux bénéfices qui
en découlent. De façon générale, elle ne fut pas
reliée à la reconnaissance de la valeur ou de la
compétence de l'enseignant dûment constatée par le
collège, mais plutôt aux normes de la convention collective. C'est
pourquoi, dans le décret, les conditions relatives à l'octroi de
la permanence ont été modifiées.
Selon nous, ces modifications ne portent pas uniquement sur la forme. Si
elles sont rendues nécessaires par le cadre financier pour tenir compte
de l'augmentation de la productivité, elles signifient aussi que
dorénavant, l'octroi du statut de permanent devra correspondre à
une permanence relative de l'emploi et d'une tâche à assumer,
tâche reliée, elle, à la propriété d'un
poste. La permanence sera donc accordée et, en conséquence, la
sécurité d'emploi, dans la mesure où le poste
occupé existera depuis deux ans et dans la mesure où l'on
prévoira que ce poste existera pour une autre année
d'enseignement au moins.
En ce qui a trait aux avantages de la sécurité d'emploi et
aux mesures de résorption des enseignants et enseignantes en
disponibilité, nous n'avons, sur ce sujet, aucune information
particulière à ajouter, compte tenu des exposés
précédents qui ont été faits, en particulier par
les sous-ministres du ministère de l'Éducation.
En conclusion, nous voulons réaffirmer le fait que nous croyons
que les modifications décrétées concernant la tâche
et la sécurité d'emploi ne mettent pas en danger la
qualité de l'enseignement dans les collèges. Elles sont
significatives de notre volonté de mieux répartir les ressources
tout en respectant la valeur de nos personnels. Elles constituent, selon nous,
l'effort particulier demandé aux enseignants, mais déjà
entrepris par les autres corps d'emploi pour sauvegarder
l'intégrité du réseau collégial et l'atteinte de
ses objectifs de formation.
Nous tenons à rester optimistes sur la capacité de
réenlignement collectif des intervenants dans ce dossier et à
manifester une ouverture à toute proposition visant une plus grande
souplesse dans le respect des principes auxquels nous croyons et du cadre
financier que le gouvernement a fixé. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci beaucoup. Tel qu'entendu,
Mme la députée de
L'Acadie peut présenter sa motion que j'aurai à
évaluer durant l'arrêt. Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Avant de lire la
motion elle-même, je vais simplement prendre deux minutes pour resituer
le contexte dans lequel ceci s'est présenté.
Le Président (M. Jolivet): Non, madame. Je m'excuse.
L'entente était de la lire.
Motion proposant que le gouvernement
s'abstienne de publier tout
document relatif aux décrets dans
le domaine de l'enseignement
Mme Lavoie-Roux: Bon! D'accord. C'est en fonction de la
publicité à caractère politique que le gouvernement a
publiée en pleins travaux de cette commission.
La motion que je présente est la suivante, M. le
Président: "Que cette commission exige que le gouvernement s'abstienne
de publier et de distribuer à même les fonds publics tout document
de nature politique relatif aux décrets dans le domaine de
l'enseignement jusqu'à ce que la présente commission ait eu le
temps d'accomplir son mandat."
Le Président (M. Jolivet): Merci, madame. Donc, j'aurai
à évaluer cette motion. Les documents seront donnés,
madame, les copies additionnelles, pour qu'on puisse les distribuer. Je
suspends donc les travaux jusqu'à 19 h 30, tel qu'entendu. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 56)
(Reprise de la séance à 19 h 50)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'éducation continue ses travaux aux fins
d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration
scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de
l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des
enseignants et enseignantes, en regard de la situation actuelle au
Québec.
Avant d'arriver aux témoignages des gens de la
Fédération des cégeps, je dois d'abord vous dire que deux
documents vous ont été distribués pour dépôt
seulement, c'est-à-dire le mémoire de l'Association des
comités de parents de la région 03 sur le conflit dans le secteur
de l'éducation et, tel que promis par le député de
Louis-Hébert, le document du groupe qui a travaillé sur la
question de la polyvalente de Charlesbourg,
c'est ce qui nous avait été présenté comme
étant un document à être déposé à la
commission.
Avant l'ajournement de la séance pour le souper, tout le monde
s'en souvient, il y a eu une motion qui a été
présentée par Mme la députée de L'Acadie. Cette
motion, on s'en souviendra, devait faire l'objet d'une décision du
président de la commission parlementaire que nous avons
actuellement.
J'avais averti, au cas où j'aurais eu à le faire, que la
coutume et les habitudes veulent qu'il y ait deux façons de rendre une
décision de la part du président. La première consiste
à demander à des représentants, un de chaque
côté, de faire valoir leur point de vue sur la recevabilité
d'une telle motion. D'un autre côté, la deuxième
façon de procéder, c'est que le président, s'il
s'aperçoit, à sa face même, que la résolution n'est
pas recevable ou qu'elle est recevable, peut la déclarer recevable ou
non recevable.
Avant de rendre une décision quelconque sur le sujet, je
tiendrais à vous rappeler, ce que j'ai fait au début d'ailleurs,
le mandat de la commission. La commission élue permanente de
l'éducation a pour mandat - qui lui a été confié
par le leader du gouvernement en vertu des règlements -d'entendre les
organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui
veulent faire des représentations sur la qualité de
l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des
enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au
Québec.
Ce mandat, qui nous a été donné, jusqu'à
maintenant, a été rempli de façon que des organismes se
sont présentés devant nous depuis déjà maintenant
deux jours et demi; il a été suivi avec les moyens habituels que
se donne une commission parlementaire au début de ses travaux.
Ce matin, on s'en souviendra, à 10 heures et quelques minutes,
quand nous avons commencé les travaux, nous nous sommes entendus sur un
partage du temps qui nous permettait d'aller jusqu'à 24 heures ce soir.
Puis, en vertu des règlements, possiblement pour faire en sorte de ne
pas retarder à plus tard dans certains cas, il y a des ententes qui sont
prises de la part des membres de la commission sous forme de consentement pour
dépasser 24 heures. Cela est prévu par le règlement.
Le président de la commission a comme mandat de faire respecter
l'ensemble du règlement de l'Assemblée nationale tout en ayant -
comme bien du monde autour de cette table, ici même dans des commissions
parlementaires, dans des rencontres, dans des discussions, au conseil des
députés de chacun des partis politiques ou même à
l'Assemblée nationale - exprimé qu'il y aurait peut-être
intérêt à faire des changements à des commissions
parlementaires qui sont prévues par le règlement.
Vous le savez tous, l'Assemblée nationale a adopté, en
décembre dernier, une nouvelle loi de l'Assemblée nationale qui a
trait à la vie parlementaire au Québec tout en sachant qu'il y
avait des parties de discussions qui continuaient à se faire et pour
lesquelles la sous-commission de l'Assemblée nationale avait un rapport
à donner à la commission de l'Assemblée nationale sur la
façon dont les commissions parlementaires pourraient à l'avenir
se tenir.
En plus d'être directement convoquées par le leader du
gouvernement, d'autres formules sont envisagées, mais ces commissions
parlementaires n'existant pas, les décisions qui concernent ces
commissions parlementaires doivent aussi être considérées
par la sous-commission de l'Assemblée nationale. Une chose est certaine:
ce qui existe au moment où on se parle, c'est les règlements
actuels de l'Assemblée nationale. J'ai donc le devoir, même si, de
part et d'autre, on peut exprimer des réserves quand vient le temps de
décisions d'un président, d'appliquer les règlements tels
qu'ils sont connus actuellement.
La commission est, bien sûr, maîtresse de l'ensemble de ses
travaux, mais - et c'est un "mais" important - dans le cadre du
règlement, c'est-à-dire en vue d'établir sa
procédure uniquement et dans le seul but de réaliser son mandat,
vous comprendrez bien, au moment où je vous parle, que je n'ai
aucunement l'intention de demander à quelque parti que ce soit de
m'éclairer, puisque j'ai eu l'occasion de regarder comme il faut cette
motion même si, comme je le disais tout à l'heure, à
première vue, elle pouvait sembler soit recevable ou irrecevable. Il
peut arriver que la question soumise à une commission parlementaire soit
précisée ou élargie par les moyens déjà
connus, c'est-à-dire, en vertu du règlement. Le leader se
prévaut, à ce moment, de l'article 140 ou l'Assemblée
nationale use de l'article 152. Si je fais mention de l'Assemblée
nationale, c'est pour bien faire savoir que des moyens sont peut-être
limités au niveau des commissions parlementaires puisque les mandats lui
sont donnés soit pendant que l'Assemblée nationale siège
ou en dehors du moment où l'Assemblée nationale siège,
c'est-à-dire ce qu'on appelle les intersessions.
Déjà, des décisions ont été rendues
au niveau de ce qu'on peut appeler le mandat. Donc, la motion qui est devant
nous, présentée par Mme la députée de L'Acadie
-j'en ai fait mention tout à l'heure - ajoute, à première
vue, au sujet qui était contenu dans l'avis de convocation et auquel la
commission doit se limiter. Les fins poursuivies par la députée
pourraient être servies en utilisant d'autres moyens qui sont
prévus par notre règlement, mais je vous
signalerais - et ma décision, comme vous le savez, doit
être rendue avec la sagesse normale que la présidence doit avoir,
malgré les difficultés à rendre les décisions -
tout de suite que, dans ces circonstances, les moyens pour faire valoir les
fins que Mme la députée de L'Acadie poursuit pourraient
être utilisés à un autre niveau, c'est-à-dire au
niveau de l'Assemblée nationale du Québec ou, si elles ne peuvent
pas être poursuivies à l'intérieur de l'Assemblée
nationale du Québec au moment où on se parle, compte tenu que
l'Assemblée nationale ne siège pas, par d'autres moyens externes
à la commission parlementaire.
J'ai fait mention - et souvent, des gens ont certaines
difficultés à comprendre les procédures établies
par l'Assemblée nationale du Québec qui s'appellent le
règlement de l'Assemblée nationale du Québec, qui est
reproduit dans un volume ou un document nous permettant, comme toute
assemblée délibérante, d'avoir des règles qui nous
sont propres. On comprendra que dans des assemblées
délibérantes où des décisions doivent être
rendues, seules les personnes qui ont droit de parole sont habilitées
par le règlement à l'avoir, c'est-à-dire ceux qui
m'entourent, à ma droite ou à ma gauche et, en même temps,
compte tenu des pouvoirs qui lui sont conférés, la
possibilité d'entendre des témoins qui se trouvent actuellement,
pour les besoins de la cause, en face de nous. La commission, donc, ayant comme
mandat d'entendre des témoins, n'a pas les pouvoirs de se donner des
mandats autres que celui qui nous a été déterminé
par le leader du gouvernement.
En conséquence, pour toutes ces raisons, je dois malheureusement,
ou heureusement - cela dépendra de quel côté de cette table
vous vous trouvez, ou en face - pour toutes ces raisons, déclarer que la
motion de Mme la députée de L'Acadie est irrecevable. Par
conséquent, compte tenu de ces circonstances, nous devons
procéder immédiatement à l'audition des témoins par
les questions qui peuvent leur être posées par les intervenants
ici. (20 heures)
La parole serait alors au ministre de l'Éducation. Comme je vois
que des mains sont levées, à ma droite et à ma gauche, je
dois vous dire - et en certaines circonstances, le président a ses
pouvoirs et ses privilèges d'au moins appliquer le règlement -
que ma décision étant rendue, en vertu du règlement - et
vous le connaissez très bien - elle est irrévocable. Il s'agit
maintenant de savoir si les questions qui sont posées ont trait à
autre chose, sont des questions d'éclaircissement ou des questions de
règlement. Mais je dois vous dire que toute question qui me sera
posée et que je jugerai tendre à faire de façon indirecte
ce que le règlement ne permet pas de façon directe, je me devrai
de l'interrompre. La première personne qui a levé la main, c'est
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, ce sera très bref, M. le
Président. Je comprends votre décision, malgré, en fait,
que je trouve cette publication complètement inopportune à ce
stade des travaux de la commission parlementaire.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée,
je dois...
Mme Harel: Ceci dit...
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée,
s'il vous plaît!
Mme Harel: Oui, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Rendez au moins mon travail
facile.
Mme Harel: Oui. D'accord. C'est pourquoi je voudrais vous
suggérer une autre façon parlementaire d'examiner cette question
et ce serait la suivante: Puisque le mandat de la commission parlementaire est
d'entendre les témoins, et puisque l'équipe des sous-ministres
doit, je pense, revenir devant la commission sur un certain nombre de
questions, notamment sur les règles budgétaires, je pense
qu'à ce moment il serait approprié de poser des questions sur la
nature, la publication, la distribution et, j'imagine, le contenu qui est
publié, en fait, dans le dossier.
Le Président (M. Jolivet): Ce sont des moyens qui sont
prévus. Je vous rappelle simplement ce que la commission parlementaire
avait prévu: à la fin de la commission parlementaire, un moment
sera prévu. Il faudra le prévoir lundi, à moins que le
leader ne m'ordonne autre chose ou que la commission, à la suite des
demandes qu'elle fera au leader, puisse faire des ententes, à
l'extérieur de cette audience, qui nous serait communiquées au
commencement des travaux de lundi et que je n'ai pas à donner
actuellement puisqu'il n'y a aucune entente dans ce sens. Je dois vous dire ce
que je connais, comme président de l'actuelle commission parlementaire.
C'est qu'à la fin de la commission, nous inviterons conjointement
à la table des personnes qui se trouvent en face de nous, à la
fois les représentants du ministère de l'Éducation soit
les sous-ministres qui sont venus témoigner, et ceux des centrales
syndicales, qui sont aussi venus témoigner, si je me souviens bien. Par
conséquent, les questions pertinentes pourront être posées
à ce moment.
M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, j'ai entendu avec une certaine
consternation la décision que vous venez de rendre. Je voudrais, pour
bien m'assurer que cette décision a été rendue
après mûre considération de tous les aspects qui s'y
rattachent et en tout respect pour votre fonction et votre personne, vous
demander si vous avez bien considéré les aspects suivants:
premièrement...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne voudrais pas entrer sur un terrain très glissant. Je vous comprends
puisqu'une décision a été demandée et n'a pas
été rendue jusqu'à maintenant à une autre
commission parlementaire. On ne peut pas prendre, compte tenu qu'il n'y a
aucune décision, connaissance de cette possibilité de
décision sur d'autres sujets. Je vous ai dit que, sans vouloir vous
être désagréable, M. le député d'Argenteuil,
je l'ai considérée. J'ai bien employé mes termes et vous
les connaissez d'ailleurs, ce sont des termes qu'on emploie souvent dans des
assemblées délibérantes - on pourrait les employer en
latin -: prima facie, à première vue, à sa face
même, la commission a un mandat. Je ne voudrais pas vous être
désagréable, non pas parce que vous êtes le
représentant de l'Opposition, mais je ne voudrais pas, en aucune
façon, qu'on embarque dans un débat qui, lui, malheureusement,
n'est pas utile à ce moment.
M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, je regrette, mais je crains que
votre évocation de certains faits récents ne soit entachée
d'une information incomplète. Je me permets de rétablir les faits
parce que c'est directement relié à la décision que vous
venez de rendre. Vous avez dit tantôt que vous ne pouviez pas recevoir
cette motion parce qu'elle ne se rattachait pas au mandat de la commission dont
le mot clé, d'après ce que j'ai entendu sur vos lèvres,
serait le mot "entendre". Elle a le mandat d'entendre les organismes.
Or il arrive que je siégeais récemment à la
commission de l'agriculture...
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil... M. le député d'Argenteuil...
M. Ryan: ...des pêcheries et de l'alimentation et
que...
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil. Je vous dis que le règlement me permet, quant à
moi, d'avoir certains privilèges. Mes privilèges sont de faire
respecter le règlement. Compte tenu que c'est d'entendre des
témoins, de leur poser des questions, je ne voudrais pas qu'on s'engage
dans un débat qui ne peut être tenu pour le moment, puisque c'est
de façon indirecte qu'on essaie de miner la décision que j'ai
rendue. Je ne voudrais pas que ce soit cela. J'ai simplement dit que ma
décision, même mûrement réfléchie, comme vous
le dites... À première vue, la décision à prendre
sur cette motion est claire.
M. Ryan: M. le Président, vous avez dit qu'une chose
s'était passée à une autre commission et, si ce que vous
avez dit est faux, est-ce qu'on a le droit de redresser les faits ou si on n'a
pas le droit? Est-ce que votre autorité va aussi loin que cela?
Le Président (M. Jolivet): Ce que j'ai dit, c'est que j'ai
à rendre une décision sur le fait d'une question aujourd'hui. Je
ne veux pas prendre des décisions rendues dans une autre commission
comme étant des décisions qui m'ont permis de prendre ma
décision ce soir.
M. Ryan: M. le Président, je m'excuse, mais vous avez dit
qu'il y avait une autre commission où il y avait une décision qui
était pendante. Elle n'est pas pendante, elle a été rendue
et elle a été rendue dans un sens contraire à celui que
vous adoptez ce soir. C'est pour cela que je pense qu'il est important de
rétablir les faits, si vous me permettez de le faire.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil, allez.
M. Ryan: La commission de l'agriculture, des pêcheries et
de l'alimentation avait un mandat très assimilable à celui de la
présente commission, c'est-à-dire celui d'entendre des organismes
ou des témoins qui pouvaient apporter un éclairage sur tous les
problèmes relatifs à l'avenir et au passé du territoire
exproprié de Mirabel.
On est arrivé à la fin des travaux - je pense que le
leader du gouvernement s'en souviendra parce qu'il rôdait autour ce
jour-là aussi, nous sommes très heureux d'ailleurs qu'il soit ici
actuellement, oui, oui et je l'en félicite et j'espère qu'il va
marcher avec nous, cela sera encore mieux - et le gouvernement a
présenté une série de recommandations. Le ministre de
l'Agriculture qui représentait le gouvernement, au nom de tous les
députés ministériels faisant partie de la commission, a
déposé une série de recommandations et nous avons
contesté la recevabilité de ce document. Nous avons émis
d'autres considérations mais qui sont extrinsèques au
débat actuel. Et le président a pris la chose en
délibéré. Nous avons ajourné les travaux pendant
une couple d'heures puis il est revenu et il a rendu une décision en
faveur de la recevabilité de la motion.
Parce que c'était un précédent très
important dont nous étions conscients, sur lequel nous avions
attiré en toute connaissance de cause l'attention du président,
nous avons demandé qu'il rende cette décision par écrit,
vu son importance et ses répercussions considérables pour
l'avenir. Nous n'avons pas reçu le texte écrit pour l'instant
mais la décision a été rendue et, au procès-verbal
des travaux de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation de ce jour, je suis sûr que c'est inscrit que la
série de recommandations du gouvernement a été
jugée recevable. Si c'est seulement le mot "motion" qui vous
créait des problèmes, je suis sûr que la
députée de L'Acadie pourrait très bien formuler son texte
de manière qu'il soit transformé en une recommandation. Si le mot
"motion" fait peur à cette commission, je veux le dire aux
députés ministériels parce que nous, il ne nous fait
aucunement peur pour des raisons évidentes, je pense bien que la
députée de L'Acadie serait prête à le faire.
À ce moment, votre décision serait exactement dans la même
ligne que celle qui a été rendue il y a quelque temps. Parce que
là, vous serez dans un problème; si la décision est rendue
dans ce sens, ce soir, cela remet en cause l'autre décision, mais elle a
été rendue. Encore une fois, c'est le point que je voulais
souligner à votre attention.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader, vous voulez
parler?
M. Bertrand: M. le Président, dans ce dossier, je
comprends la représentation que vient de faire le député
d'Argenteuil de façon à tenter de s'appuyer sur une
décision antérieure rendue dans une autre commission
parlementaire qui avait un mandat spécifique mais, quant à nous,
de ce côté-ci, à partir du moment où non seulement
vous ne permettez pas qu'il y ait un débat sur la recevabilité ou
la non-recevabilité de la motion qui a été
présentée par Mme la députée de L'Acadie et
à partir du moment où, vous prévalant de ce qui
m'apparaît être tout à fait normal, étant
donné les circonstances, des dispositions du règlement, vous
prévalant du mandat de la commission, vous prévalant du devoir
que vous avez de faire appliquer ce règlement avec toutes les
difficultés que cela peut contenir - et vous en avez fait état -
je crois que notre devoir, comme parlementaires, à ce moment-là,
est de prendre note de votre décision et, partant de là, de la
respecter et de faire en sorte que nous puissions continuer nos travaux, de
telle sorte aussi que nous puissions, en continuant nos travaux, entendre tous
les groupes qui se sont présentés et qui doivent être
entendus aujourd'hui et lundi. Partant de là, M. le Président, je
crois que nous devrions immédiatement passer à la période
de questions.
Le Président (M. Jolivet): Je dois vous dire qu'à
ce niveau, le mandat de la commission est bien clair. Je veux simplement faire
remarquer aux gens de la commission qu'il reste encore trois groupes à
entendre. Ces trois groupes... On s'est entendu ce matin... On m'a
donné... J'ai fait exprès, ce matin, ayant été
contesté sur certaines parties de décisions rendues hier... J'ai
fait bien attention, ce matin, au fait -et je pense que tout le monde va bien
comprendre le message que je transmets -que je n'avais pas l'intention de ne
pas respecter ce que cette commission parlementaire avait à se donner
comme mandat. Ce matin même - et je l'ai écrit sur ma feuille et
c'est pour cela que je l'ai sortie - j'ai noté le temps qu'on avait
alloué à chacun des groupes, parce qu'on s'était dit que
notre but du travail d'aujourd'hui était d'entendre ces groupes. Que des
événements extérieurs à cette commission
parlementaire se soient produits, il y a des moyens qui ne sont pas
d'empêcher, par quelque moyen que ce soit... Je ne veux pas dire que
c'est le but de la motion, loin de moi cette idée. Je veux être
bien clair pour ne pas être mal interprété. Ce que je veux
dire, c'est que ces gens se sont déplacés pour que les gens
autour de cette table leur posent des questions, comme le mandat nous le
demandait ce matin. Dans ce contexte, je n'ai pas l'intention de changer ma
décision. Vous savez quels sont les moyens que vous avez concernant les
décisions que je peux rendre, comme dans toute commission parlementaire,
des décisions, à certains moments, sont rendues. Dans ce
contexte, je demanderais à la personne qui doit commencer à
interroger les témoins, c'est-à-dire M. le ministre de
l'Éducation, d'intervenir.
M. Ryan: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Question de règlement de
la part du député d'Argenteuil.
M. Ryan: Vu que vous déclarez la motion irrecevable d'une
manière pérempétoire, est-ce que nous pourrions...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Ryan: C'est notre droit de le constater.
Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.
M. Ryan: Merci. Nous pourrions peut-
être solliciter au moins la permission de demander aux
députés qui représentent le parti ministériel
à cette commission s'ils accepteraient de bonne grâce que l'on
puisse discuter d'une motion aussi importante et aussi directement et
essentiellement reliée au travail que fait cette commission.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison, monsieur, de
me le demander comme cela; je permets de demander le consentement. M. le leader
du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, la réponse sera
très claire, très courte. Dans le fond, elle est très
simple à donner. À partir du moment où vous auriez
indiqué que vous souhaitiez entendre un parlementaire de chacune des
deux formations politiques sur la recevabilité ou la
non-recevabilité de cette motion, vous auriez entendu un porte-parole
ministériel débattre cette motion en disant qu'elle est non
recevable. Or, comme vous venez de rendre la décision qu'elle
n'était pas recevable, il est bien évident, M. le
Président, qu'il n'est pas question d'entreprendre un tel débat,
puisqu'une décision est déjà rendue avant même que
qui que ce soit se soit fait entendre.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre. Je
m'excuse. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais seulement
faire une petite mise au point et après vous demander une directive.
Pour les collègues qui sont autour de la table, - cela me semble normal
de le dire -avant que nous commencions la séance, j'avais demandé
au président de modifier la motion dans sa forme et je voudrais au moins
indiquer de quelle façon - si vous me le permettez, M. le
Président - elle avait été modifiée. Elle se lisait
comme suit: "Que, de l'avis de cette commission, le gouvernement devrait
s'abstenir de publier et de distribuer à même les fonds publics
tout document de nature politique, relatif aux décrets, dans le domaine
de l'enseignement jusqu'à ce que la présente commission ait eu le
temps d'accomplir son mandat." Je pensais que dans ces conditions,
c'était plus un voeu ou une recommandation et que vous auriez
peut-être mieux reçu cette demande, mais je comprends que, comme
vous la connaissiez, votre décision est demeurée la même.
Je le regrette, mais je la respecte. (20 h 15)
Maintenant, une demande de directive, M. le Président. Nous avons
reçu le mandat, tel qu'on l'a exprimé autour de la table à
plusieurs reprises, du gouvernement de tenir cette commission parlementaire
spéciale pour étudier le conflit qui sévit
présentement entre le monde de l'enseignement et le gouvernement. De
part et d'autre, je pense, certainement de notre côté -
certainement de notre côté, je tiens à le
répéter - c'est de bonne foi que nous avons accepté cet
exercice dans le but d'arriver à des résultats positifs. Vous
m'avez suggéré - c'est là qu'est la demande de directive -
qu'il y avait d'autres moyens auxquels je pouvais faire appel pour discuter de
ce problème qui, selon votre interprétation, est étranger
au mandat que la commission a reçu. Vous me suggérez de faire
appel ou de débattre ce sujet à l'Assemblée nationale, ou
enfin que cela pourrait être l'objet d'un débat quelconque
à l'Assemblée nationale ou d'une question, quelle que soit la
forme que cela prendrait.
M. le Président, vous savez que l'Assemblée nationale ne
siégera pas avant mardi prochain et, à la suite de la
publicité gouvernementale que tout le monde connaît maintenant et
qui demain, selon mes informations, sera publiée dans les journaux
-c'est une publicité à fort caractère politique il
m'apparaît que les conditions dans lesquelles devait s'exercer le mandat
de cette commission ont été modifiées et que sans aucun
doute, mardi prochain, quand l'Assemblée nationale sera réunie,
je pourrais soulever la question, mais déjà le travail de la
commission sera terminé. On aura modifié en cours de route les
conditions dans lesquelles notre mandat devait s'exercer; c'est dans ce sens
que le recours que vous m'avez suggéré sera caduc mardi
prochain.
Il reste que la commission a été - c'est vrai, je l'admets
avec vous que cela est venu de l'extérieur - saisie d'un problème
important qui modifie les conditions mêmes dans lesquelles notre mandat
devait s'exercer, qui était un mandat de bonne foi. Je dois dire que,
devant cette publicité, il y a au moins une partie qui n'est plus de
bonne foi et ceci remet même en doute, dans l'esprit de nos
invités, l'utilité de l'exercice auquel ils devront se livrer ce
soir et lundi prochain. Alors, j'aimerais vous demander s'il y a un autre type
de directive que vous pourriez nous donner - je m'y soumettrai fort volontiers
- qui serait un peu plus efficace que celui que vous venez de me proposer,
alors que la commission sera défunte mardi prochain.
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on
commence le débat parce que ce serait comme si je l'acceptais et je ne
l'accepte pas. Vous ferez les corrections après si voulez. Je veux
simplement vous dire, madame, que je vous ai indiqué ce que le
règlement vous permettait. Je sais très bien que
l'Assemblée nationale ne siège pas au moment où nous
sommes en commission parlementaire. Cependant, je connais l'efficacité
de d'autres moyens, que vous connaissez aussi bien que moi et qui sont
pris en dehors de la commission parlementaire et en dehors de
l'Assemblée nationale, qui sont ceux de faire les conférences de
presse que vous voulez. Je ne peux pas vous proposer quelque autre moyen que ce
soit à l'intérieur du règlement qui est là, je n'en
connais pas d'autres. Je fais simplement mention que vous connaissez beaucoup
plus que moi les autres moyens qui sont à votre disposition. Si vous
voulez me demander maintenant les dispositions qui sont prévues par le
règlement de l'Assemblée nationale, ce sont les seules que je
vous ai indiquées.
M. Bertrand: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Bertrand: Je voudrais simplement, si Mme la
députée de L'Acadie me le permet, faire une correction
relativement à une information ou une impression qu'elle a eue
relativement au document dont il est fait état, c'est qu'il ne sera pas
publié dans les journaux demain matin.
Le Président (M. Jolivet): Avant de vous donner la parole,
M. le député de Louis-Hébert - je n'ai pas l'intention de
vous empêcher de parler, vous allez l'avoir - je veux simplement vous
dire une chose. C'est que nous sommes en train de faire un débat que je
voulais le plus bref possible au sujet d'une décision qui a
été rendue parce que, vous le savez très bien, le mandat
c'est d'entendre les gens en face de nous. Je vous le rappelle simplement. M.
le député de Louis-Hébert, est-ce une question de
règlement?
M. Doyon: Oui, M. le Président, c'est une question de
règlement. Vous avez basé votre décision sur les articles
140 et 152 que vous avez cités et vous vous êtes
référé au règlement de l'Assemblée
nationale. J'aimerais avoir une directive de votre part. Vous considérez
que le règlement de l'Assemblée nationale régit toutes les
discussions et les procédures de cette commission. Cette commission
parlementaire se réunit et entend des témoins. Ce à quoi
je veux faire allusion, c'est que nous sommes un quasi-tribunal et qu'il existe
telle chose qui n'est écrite nulle part, qui est la règle du sub
judice, qui fait que des parties qui sont appelées à se faire
entendre ne doivent pas agir de façon à influencer un tribunal.
J'attire votre attention sur le fait que, dans les circonstances, nous sommes
un quasi-tribunal et que...
M. Desbiens: Question de règlement. Le Président
(M. Jolivet): M. le député de Dubuc, question de
règlement.
M. Desbiens: Je ne voudrais pas interrompre le discours mais
l'article 43.-2 de notre règlement me paraît assez clair: "Lorsque
le président rend sa décision, il indique ce qui la justifie et
il n'est pas permis de la critiquer ni de revenir sur la question
décidée... C'est peut-être un règlement qui ne
satisfait pas toujours l'ensemble des parlementaires qui ont à le vivre
ou à le subir, mais je n'ai jamais eu connaissance encore, depuis six
ans que je siège ici, qu'on remette en question de cette façon
une décision du président. Je demande qu'on respecte le mandat de
la commission et qu'on entende le groupe qui est devant nous.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le
député.
M. Doyon: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui. J'essaie simplement de
vous amener sur un terrain qui serait plus propice ce soir à
l'écoute des témoins qui sont convoqués devant cette
commission, en vous rappelant toujours qu'on doit quand même une certaine
politesse à ceux qu'on invite, sachant que dans certaines circonstances
il y a des difficultés qui surgissent.
Mais je dois vous dire, au moment où je vous parle, que vous
m'avez demandé une directive. J'aimerais que vous me la demandiez pour
que je puisse y répondre le plus rapidement possible.
M. Doyon: Oui, M. le Président. Je vais le faire avec
plaisir. Vous devrez reconnaître avec moi que si je n'ai pu me rendre
là, je n'y suis pour rien. J'ai été interrompu par une
question de règlement alors que j'y arrivais justement.
La question de directive que je vous demande est celle-ci: Dans les
articles du règlement que vous considérez pour baser la
décision que vous avez donnée tout à l'heure, est-ce que
vous faites totalement abstraction d'une règle qui s'applique à
tous les tribunaux, dans le monde civilisé, qui est la règle du
sub judice? Est-ce que c'est une règle que vous considérez ne pas
s'appliquer à cette commission et dont vous ne tenez absolument pas
compte, étant donné que cette commission parlementaire tient du
tribunal et qu'elle devrait se soumettre à certaines règles
fondamentales qui régissent tous les tribunaux dans le monde
civilisé et démocratique? Je veux savoir si vous la mettez de
côté.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Louis-Hébert, pour répondre à votre question, ayant
pendant près de six ans siégé
à cette Assemblée nationale, ayant connu des
décisions aussi difficiles que celle que j'ai eu à rendre, je
dois vous dire que même l'Assemblée nationale, dans ses
décisions -c'est prévu par le règlement d'ailleurs - n'a
pas à se substituer à une commission parlementaire. Souvent, on a
posé des questions à l'Assemblée nationale sur des sujets
discutés en commission parlementaire et on a dit à ce moment que
c'était à la commission parlementaire de régler ses
problèmes et de faire en sorte que s'il y a des choses à
décider, elles soient décidées là où elles
doivent être décidées.
L'Assemblée nationale ne doit pas connaître ce qui se passe
ici. Ce que j'ai indiqué à Mme la députée de
L'Acadie, c'est que la commission parlementaire a un mandat, et cela a fait
sourire des gens cet après-midi quand j'ai dit qu'en dehors de la
commission parlementaire, donc en dehors du mandat qui nous est confié,
il s'est passé des choses que je n'ai pas, comme président,
à juger ni à faire discuter à cette commission
parlementaire. Dans ce sens, pour le bien-être des gens qui sont
convoqués à cette commission, je voudrais qu'on puisse
procéder à l'audition des gens qui sont ici depuis 19 h 30,
puisqu'on y était en même temps que moi et qu'on attendait que
débute cette commission, tel qu'entendu avant l'heure du repas.
Donc...
M. Ryan: M. le Président, question de directive.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Argenteuil, sur une question de directive.
M. Ryan: II est arrivé souvent, depuis le début des
travaux de la présente commission, que grâce à votre
compréhension et à celle du leader du gouvernement, nous ayons
modifié quelque peu l'ordre de comparution des témoins afin
d'éclairer la commission. Je voudrais vous demander s'il serait
possible, étant donné le caractère grave et urgent du
problème que nous essayons de soumettre à l'attention de la
commission, que l'on envisage de faire comparaître de nouveau le
sous-ministre de l'Éducation qui nous est apparu, par son intervention,
comme un des vrais grands manitous du ministère, pour qu'il vienne nous
dire ce qui s'est passé. Il nous a raconté tout ce qu'avait fait
son ministère depuis quelques années. S'il pouvait venir ajouter
ce soir, étant donné les répercussions très
immédiates de cette affaire, sa version des faits et répondre
à nos interrogations et à nos inquiétudes, je pense que
cela compléterait beaucoup. Et je serais prêt à proposer
que du côté de l'Opposition, nous acceptions de siéger une
heure au-delà de l'échéance que nous nous sommes
fixée, de manière à ne pas déranger les
témoins qui sont ici. Je vous assurerais à ce moment-là
que nous procéderions immédiatement avec toute la
compréhension et la célérité requises à
l'audition des témoins qui attendent de dialoguer avec nous.
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie beaucoup, M.
le député d'Argenteuil de votre proposition. Mais je dois vous
rappeler que je suis lié par une décision que nous avons prise
tous ensemble ce matin. Cette décision était de suivre l'ordre du
jour qu'on s'était fixé. Je n'ai aucun pouvoir, sauf celui que
vous avez fait bien attention de poser, demander le consentement. À ce
moment-là, je me dirige donc vers ma droite et je demande au...
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): J'aimerais régler une
chose à la fois, si vous voulez.
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader, ai-je, oui ou
non, le consentement pour agir de la façon demandée par le
député d'Argenteuil?
M. Bertrand: M. le Président, nous souhaitons entendre la
Fédération des cégeps, l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires, l'Association des cadres
scolaires du Québec et la Fédération des comités de
parents.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader, comme je n'ai pas
de consentement, je dois donc considérer que nous devons
procéder. Mais j'ai encore une autre question de règlement, en
espérant que ce n'est pas la même sorte de question de
règlement... Non? D'accord. Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela fait longtemps que
j'ai accepté votre décision. C'est avec beaucoup de regret, mais
c'est votre privilège. C'est presque une directive que je vous demande,
parce que je veux tellement faire ce que vous voulez. Le leader du gouvernement
a voulu rectifier de bonne foi, d'ailleurs, une chose qui n'était pas
exacte, à savoir que ce ne sera pas dans les journaux demain matin. Me
permettez-vous à mon tour, M. le Président, de poser une question
au leader du gouvernement qu'a suscitée sa rectification?
Le Président (M. Jolivet): Je crois comprendre, parce que
c'est ce que... et je dois vous rapporter les mots mêmes du
député d'Argenteuil qui me disait: M. le Président, nous
espérons que, par cette proposition que nous faisons, cette demande
de directive, ce consentement - peu importe comment on l'appelle dans
les circonstances nous irons avec diligence à l'écoute des
membres de la Fédération des cégeps. Ce que je voudrais -
et là, je suis obligé dans ces circonstances de regarder aussi
à ma droite avant de vous donner la réponse, et dire que si c'est
la seule question avant qu'on procède et si elle n'a pas comme but
d'engendrer un autre débat, parce que je ne le permettrais pas, si vous
me le dites... Je vois vos signes de tête m'indiquant que c'est une
petite question et une petite réponse. Et je demande au leader, puisque
la question lui est adressée, d'accepter une petite question. Mme la
députée de L'Acadie, vous avez la parole.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lorsque j'ai dit tout
à l'heure que cette publicité paraîtrait demain dans les
journaux, le leader a cru bon de rectifier - et c'était tout à
fait son droit - en disant que non, ce ne serait pas publié demain dans
les journaux. Puis-je lui demander quand ce sera publié et à qui?
Et si ceci ne doit pas être publié - parce que comme il faut que
je fasse seulement une question, je vais ajouter le deuxième volet de la
question - dans le cas où sa réponse serait négative, nous
avons eu de la part du ministre de l'Éducation cet après-midi des
informations à savoir que ce serait publié, que ce serait
distribué sur une assez grande échelle...
Une voix: Un communiqué de presse à 400 000
exemplaires.
Mme Lavoie-Roux: ...tiré à 400 000 exemplaires. En
plus de s'adresser aux abonnés, les publications du ministère
doivent rejoindre à la fois les partenaires que sont les commissions
scolaires, les directeurs d'école, les comités d'école et
de parents, les associations d'étudiants et les administrateurs, mais
également tous les députés. Les députés
l'ont reçu comme vous pouvez le voir. Cela veut dire que cela ira
à un grand nombre de personnes. Alors, je voudrais savoir par quel moyen
cela sera distribué et quand ce le sera. (20 h 30)
Le Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement et
sachant que cela termine le débat.
M. Bertrand: M. le Président, je remercie Mme la
députée de L'Acadie. Elle a déjà, puisqu'elle vient
d'en faire état elle-même, une bonne partie de la réponse
dans le communiqué dont la source est la Direction des communications du
ministère de l'Éducation du Québec. Alors, elle a une
bonne partie de sa réponse, à savoir combien d'exemplaires seront
tirés là-dessus et, deuxièmement, à qui cela
s'adresse. Alors, il est bien indiqué que cela doit rejoindre à
la fois les partenaires que sont les commissions scolaires, les directeurs
d'école, les comités d'école et de parents, les
associations étudiantes et les administrateurs, mais également
tous les députés et tout les personnels oeuvrant dans le monde de
l'Éducation. Dans ce paragaphe, elle a les informations relativement
à qui est adressé, bien sûr, le document d'information en
question.
Deuxièment, elle me demande de quelle façon ce sera fait.
Si elle a bien regardé le document qu'elle a entre les mains, c'est
marqué: "Canada Post", Postes Canada, première classe, permis no
1627, Québec. Donc, il y aura un certain nombre de ces exemplaires qui
seront envoyés directement à ceux qui, habituellement,
reçoivent, par exemple, la revue Informeq, du ministère de
l'Éducation. Quant aux autres exemplaires, ils seront disponibles pour
les gens qui voudraient y avoir accès, ce qui est tout à fait
normal. Alors, voilà en gros la réponse à votre
question.
Mme Lavoie-Roux: Quand cela sera-t-il fait?
M. Bertrand: À compter de maintenant, demain et dans les
jours qui viennent.
Mme Lavoie-Roux: Ah! C'est déjà parti.
M. Bertrand: Je crois qu'effectivement...
Mme Lavoie-Roux: ...c'est déjà parti... M.
Bertrand: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, M. le Président. On
connaît maintenant....
Le Président (M. Jolivet): Madame, je voudrais...
M. Bertrand: Madame...
Mme Lavoie-Roux: ...la bonne foi du gouvernement.
M. Bertrand: Juste pour compléter, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: Effectivement, les députés l'ont
reçu aujourd'hui, donc les autres groupes du monde scolaire le recevront
probablement au cours des prochains jours, comme les parents ont reçu
hier, pendant que la commission parlementaire siégeait, par la voie de
leurs enfants, un document provenant des enseignants et enseignantes et qui
était aussi un document d'information.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais pas aux frais des contribuables, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît,
madame!
Mme Lavoie-Roux: ...je vous ferai remarquer...
Le Président (M. Jolivet): Madame! madame!
Mme Lavoie-Roux: ...qu'il y a une très grande
différence.
Le Président (M. Jolivet): Le député
d'Argenteuil voulait juste rectifier ce que j'ai dit. Je le lui permets en lui
disant que tout de suite après nous passons à M. Jean-Noël
Tremblay.
M. Ryan: M. le Président, il y a deux
interprétations qui ont été données et qui
m'apparaissent inexactes, dont l'une par vous-même, quand vous avez dit
que j'avais pris l'engagement de procéder avec
célérité et compréhension dès qu'on aurait
disposé de l'affaire. J'avais dit ou voulu laissé entendre bien
clairement que, dès que le gouvernement aurait accepté la
proposition très raisonnable que nous lui faisions, cela
réglerait tout le problème. Maintenant qu'il a refusé,
cela ne règle pas le problème et je crains que les travaux de ce
soir ne soient teintés de cette ombre que le gouvernement a fait
planer.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Ryan: Vous le verrez.
Le Président (M. Jolivet): Rectification.
M. Ryan: Et un autre député a dit tantôt que
nous faisions tout ce que nous pouvions pour nous opposer à votre sainte
volonté. Loin de nous une pensée aussi mauvaise. Nous faisons
tout pour respecter votre volonté, mais cela ne nous enlève
aucunement le droit d'explorer tous les recours qui sont les nôtres comme
parlementaires.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre, vous
pouvez commencer à poser vos questions ou à faire vos
commentaires sur le rapport présenté par M. Jean-Noël
Tremblay.
M. Charbonneau (Yvon): J'avais demandé la parole, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, je ne peux vous
l'accorder. La seule façon, j'en ai fait mention à la
députée de Maissonneuve tout à l'heure, c'est lorsque
viendra le moment qui a été décidée par la
commission, c'est-à-dire le témoignage qui sera rendu par les
deux groupes concernés, soit les sous-ministres et les organismes
syndicaux, à cette table, à la fin de la soirée lundi.
M. Charbonneau (Yvon): J'aurais un complément de rapport
à vous faire sur ce sujet.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse! Je m'excuse, M.
Charbonneau. M. Charbonneau, je vous comprends, mais la seule chose, c'est que
je n'ai pas le pouvoir de vous la donner.
M. Charbonneau (Yvon): ...
Le Président (M. Jolivet): Monsieur...
M. Charbonneau (Yvon): ...un débat qui a lieu ici et le
ministre...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! Je dois suspendre les travaux pour quelques instants du
moins.
(Suspension de la séance à 20 h 35)
(Reprise de la séance à 20 h 59)
Le Président (M. Jolivet): La commission parlementaire de
l'éducation reprend ses travaux. Au moment où nous nous sommes
quittés, nous en étions à la Fédération des
cégeps. C'était au ministre d'intervenir, mais le
député d'Argenteuil m'a demandé d'intervenir juste avant
sous la forme d'une question de règlement ou de directive. Je ne sais
pas comment la définir, mais je lui cède la parole, compte tenu
qu'ils ont demandé une suspension de dix minutes qui a été
un peu plus longue, et compte tenu des circonstances, je la lui avais
accordée. Donc, M. le député d'Argenteuil a quelque chose
à nous déclarer.
M. Ryan: M. le Président, tout d'abord, je voudrais
regretter profondément les événements qui sont survenus
tantôt et dans la mesure où ces événements
dérogeaient à l'ordre qui doit présider aux travaux d'une
institution parlementaire ou d'une commission parlementaire, en particulier,
nous ne pouvons nous associer à ces événements en aucune
manière. Comme vous l'aurez remarqué, depuis le début de
la soirée, les choses ont été un peu plus
compliquées que depuis le début des travaux de la commission,
mais tout s'est fait dans l'ordre. Nous avons soulevé des
interrogations. Nous vous avons posé des problèmes qui faisaient
parfaitement partie des attributions qui sont les nôtres et nous
entendons continuer dans cet esprit de travail au sein de la
commission.
Étant donné le contexte différent que crée
cette initiative malheureuse du gouvernement dont nous essayons de parler
depuis le début de la soirée, les députés de
l'Opposition, qui font partie de la commission, ne peuvent pas maintenir
l'entente qui avait été faite avec le gouvernement au sujet du
partage du temps. Chacun exige de pouvoir exercer son droit de parole normal
qui lui est reconnu par le règlement. Je voudrais vous prévenir
que chaque député de l'Opposition entend se prévaloir de
son droit de parole avec chaque organisme qui est appelé à se
présenter devant nous. Ceci étant dit, nous respecterons
entièrement les règles de travail et nous serons très
intéressés à discuter avec les témoins qui sont
devant nous.
Le Président (M. Jolivet): Cependant, avant de donner la
parole au ministre, comme j'ai encore une autre décision à
rendre, je vais la rendre avec d'autant plus d'aise que c'est la seconde fois
en six ans que j'ai l'occasion de la rendre. Je vais la rappeler, puisque
j'espère que ma mémoire ne me fera pas défaut, mais
c'était sur un projet de loi qui était quand même important
et qui demandait que tous les députés puissent intervenir
à la commission parlementaire. C'était, à cette
époque, M. Robert Burns qui était ministre. Le
député de Châteauguay avait proposé, sur la
réforme électorale, une motion au début de la commission
parlementaire laquelle motion, qui faisait le consentement de l'ensemble des
membres de la commission parlementaire, avait pour but d'accorder à tous
les députés, même s'ils n'étaient pas membres de la
commission parlementaire, la possibilité d'intervenir s'ils le jugeaient
à propos.
Or, la commission parlementaire, dès le début, a
très bien fonctionné et on est arrivé à un sujet
qui s'appelait "le registre du directeur" et je m'en souviendrai longtemps.
À ce moment, tous les députés ont commencé à
intervenir selon ce qui avait été entendu au départ.
Le député de Châteauguay, ayant fait une proposition
qui avait été adoptée, tout comme ce matin si on s'en
souvient - je le rappelle simplement pour les besoins de la cause - il y avait
une décision que j'avais à rendre, j'ai fait exprès, je le
rappelle, compte tenu de certains événements que j'avais
vécus, me disant qu'on respectait un emploi du temps pour permettre aux
sept organismes qui étaient prévus ce soir et cette
décision, j'en étais et, à ce moment, j'ai dit à
l'ensemble de la commission qu'ils me donnaient quand même une latitude
de quelques minutes en plus et quelques minutes en moins selon le besoin.
Par conséquent, c'est une décision qui a été
prise sous forme de consentement. La décision qui avait
été prise, à l'époque, était justement une
proposition de consentement. Le député de Châteauguay
voyant et même -je me le rappelle - il avait dans sa motion l'expression
"à la condition que", à la condition que le monde respecte au
moins un minimum, ce qui n'avait pas, selon lui, été
respecté à ce moment. J'avais donc dû rendre une
décision que nous avions vérifiée avec le responsable qui
s'occupe des commissions parlementaires au niveau du droit pour voir si, oui ou
non, on pouvait révoquer, en cours de route, une décision qui
avait été prise par la majorité de l'ensemble des
intervenants de cette commission sous forme de consentement. Et la
réponse avait été bien claire: Une personne ne peut pas,
une fois qu'elle a donné son consentement, le retirer. Ce consentement
n'étant donc point retirable, je suis, comme président,
obligé de me soumettre à une forme de consentement qui devient -
à ce moment-là, ce matin - la forme de travail pour le reste de
la journée et, en conséquence, je me dois de refuser votre
proposition en vous disant qu'il reste une heure à la
Fédération des cégeps pour être interrogée et
que je procéderai, comme de coutume, du côté
ministériel et du côté de l'Opposition. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, j'accepte votre décision
et j'ai bien noté - vous me corrigerez si j'ai mal compris - que vous
avez bien dit que le consentement valait pour le reste de la présente
journée.
Le Président (M. Jolivet): Oui, vous avez bien raison,
c'est-à-dire jusqu'à minuit.
M. Ryan: Très bien. Tout le reste est remis en
question.
Le Président (M. Jolivet): Pour lundi, c'est une autre
séance et, à ce moment, il y a d'autres consentements qui
pourront être pris. M. le ministre.
Fédération des cégeps
(suite)
M. Laurin: M. le Président, les collèges
d'enseignement général et professionnel constituent un secteur
clé essentiel de notre système scolaire. Ils sont une
création originale du Québec dont, je pense, nous avons tout lieu
d'être fiers. Ils remplissent un rôle irremplaçable,
d'où l'importance du témoignage que nous avons entendu de la part
de la fédération.
Leur mémoire est très informatif, en ce sens qu'il nous
donne, sur la structure des cégeps, la situation des cégeps, les
difficultés qu'ils rencontrent depuis un certain nombre d'années,
des éclairages non seulement judicieux mais indispensables. C'est, je
pense, dans ce contexte que se situe la présente négociation et
c'est sur ce
thème que portent, au fond, en filigrane à tout le moins,
les représentations qui nous ont été faites.
Je n'entends pas revenir sur chacun des aspects du mémoire mais
je voudrais faire porter mes questions sur deux points. Votre mémoire
souligne que les compressions budgétaires ont affecté tous les
services autres que l'enseignement proprement dit. On a même
l'impression, en lisant votre mémoire, que c'est pour cette raison que
vous avez proposé que des gains de productivité soient
effectués dans la tâche des enseignants afin qu'on puisse
répartir, pour le maintien, le développement des autres services
éducatifs proprement dits, les gains de productivité que les
décrets pourraient effectuer afin d'en arriver à un
équilibre nouveau qui permettrait le développement
ultérieur.
Est-ce que vous pourriez commenter davantage cette interprétation
que je tire, en tout cas, de votre mémoire et l'expliquer?
M. Tremblay (Jean-Noël): M. le Président,
effectivement depuis quatre ans, les collèges connaissent des
compressions budgétaires importantes, compte tenu relativement de la
grosseur de l'enveloppe budgétaire du niveau collégial. Ces
compressions budgétaires ont porté, à toutes fins utiles,
sur peut-être 15% à 20% de l'ensemble du budget d'un
collège puisque la grande partie de la masse salariale des enseignants
faisait partie d'une enveloppe fermée à laquelle on ne pouvait
pas toucher, ce qui fait que le pourcentage d'augmentation de la compression
budgétaire - qui était faite à chaque année et des
restrictions que vous nous avez faites -portait exclusivement sur les autres
personnels, c'est-à-dire le personnel cadre, le personnel de soutien, le
personnel des professionnels et sur l'ensemble des autres budgets de
fonctionnement.
Comme les collèges, à toutes fins utiles, sont quand
même des unités relativement petites où, pour un
collège moyen, vous avez peut-être dix, douze ou quinze
professionnels répartis dans les différents services, que ce soit
la bibliothèque, le "counselling", les services aux étudiants, le
socio-culturel, les sports, peu importe; comme, dans un collège moyen,
le personnel de soutien requis pour l'ensemble des services nécessaires
pour que les activités d'enseignement puissent se donner de près
ou de loin, que ce soit par rapport à l'entretien ménager ou par
rapport aux techniciens de laboratoire, à chaque fois qu'on a
exercé des compressions budgétaires suffisamment importantes et
après avoir éliminé, dans la plupart des collèges,
toute autre forme de compression - j'entends par là, par exemple, les
économies d'énergie, j'entends par là changer de
système de téléphonie, réduire certains services
qu'on pouvait considérer comme moins essentiels -chaque fois qu'on a
fait ces compressions, presque dans chaque cas on a été
obligé d'exercer une compression sur ces personnels de soutien, de
professionnels et de cadres.
Pendant une année, pendant deux ans, cette compression a pu
être possible et a probablement permis certains correctifs et certains
réaménagements ou certaines réorganisations
administratives. Mais dans les deux dernières années
principalement où les compressions ont été encore plus
fortes, s'attaquer à simplement une portion de 15% à 20% du
budget des collèges mettait carrément en péril certains
services.
Il est vrai que dans certains collèges on a, à toutes fins
utiles, fermé des services, on a regroupé des services et,
à chaque fois, la question se pose: Dans quelle mesure on ne touche pas
à la qualité des enseignements, d'une certaine façon, et
à la qualité des services qu'on doit donner aux étudiants
qui viennent chez nous et qui s'attendent à ces services?
On a atteint le point limite de ces compressions à un point tel
où on discutait dans le réseau collégial de la fermeture
possible de certains collèges, compte tenu de leurs dimensions, les
petits collèges en particulier, qui n'ont, à toutes fins utiles,
qu'un seul professionnel par service. Si vous êtes obligé
d'exercer une compression dans ce service et que vous coupez le poste de
professionnel de ce service, vous n'avez plus ce service ou vous êtes
encore obligé de le regrouper avec d'autres services tout en vous posant
la question de la qualité qu'on doit continuer de donner.
Tout cela se faisait alors que 70%, 75% ou 80% du budget, selon les
collèges, était gelé dans l'enveloppe salariale des
enseignants. Dans le mémoire, très clairement, on a dit: Compte
tenu de l'évolution, dans les quatre dernières années, de
cette situation, il est important maintenant qu'on se retourne vers ce morceau
important des budgets des collèges qui s'appelle le budget des salaires
des enseignants et qu'on regarde s'il n'y a pas moyen, de ce côté,
de faire un effort également, de mettre à contribution les
enseignants pour qu'ils contribuent eux aussi à l'effort de compression
budgétaire qu'on est obligé d'exercer.
C'est avec cet esprit qu'on est entré dans la présente
ronde de négociations et qu'on partageait, dans une certaine mesure, les
objectifs de récupération et de compression budgétaire qui
sont suggérés du côté des enseignants.
M. Laurin: Dans un autre ordre, vous savez probablement que
lorsqu'il a été question ici du niveau primaire et secondaire, il
a été beaucoup question de l'impact des
décrets sur la qualité de l'enseignement, sur
l'augmentation de la tâche des enseignants, sur l'organisation scolaire.
On en soulignait parfois les côtés nocifs, très
négatifs même. On nous a dit aussi, par ailleurs, que cela
était possible, avec les nouveaux décrets, surtout depuis
l'étalement promis le 10 février, d'en arriver à une
organisation scolaire tout à fait compatible avec la qualité de
l'enseignement et l'atteinte des objectifs que vise le système
d'éducation.
Étant donné que l'augmentation de la tâche au
collégial se situera aux environs de 13,5%, est-ce que vous pourriez me
dire, en l'explicitant, si cette augmentation de la tâche vous
paraît compatible avec le maintien de la qualité de l'enseignement
et l'atteinte des objectifs proprement éducatifs que vise le
système scolaire au niveau collégial?
M. Tremblay (Jean-Noel): M. le Président, je vais
répondre à une partie de la question. Ensuite je passerai la
parole à M. Hamel qui pourra peut-être donner plus de
détails chiffrés sur l'impact comme tel de cette augmentation de
la tâche.
Je pense que l'augmentation de la tâche a été au
coeur des préoccupations de tous les cégeps pour savoir et pour
effectivement être capables eux-mêmes -chacun chez eux - de
répondre à cette question: Est-ce qu'on est en mesure d'exercer
une augmentation de productivité de l'ordre d'environ 13,5% tout en
s'assurant que chacun des départements, chacun des enseignements qu'on
doit donner, va continuer d'être donné avec le personnel requis et
avec la qualité requise? (21 h 15)
C'est une question complexe puisqu'il faut aussi distinguer le secteur
général du secteur professionnel. On sait que dans le secteur
professionnel, il y a des disciplines plus lourdes qui exigent qu'on regarde de
très près ce que veut dire une augmentation de la tâche
d'environ 13%. C'est à l'analyse faite par simulation dans un certain
nombre de collèges qu'on en est arrivé à dire
qu'au-delà de 13,5%, il y avait une lumière rouge qui s'allumait
et qu'effectivement, dans certains secteurs d'activités, dans certains
collèges, on en arriverait difficilement à donner les mêmes
enseignements avec la même qualité. Je pense que, dans la mesure
où on reste en deçà ou très près de 13,5%,
on peut répondre positivement à cette question et je demanderais
à M. Hamel de peut-être détailler de façon plus
chiffrée ce que cela veut dire.
M. Hamel (Yvon): Des simulations qui ont été faites
dans un certain nombre de collèges nous ont permis de constater que la
récupération de 13,5% qui est possible, d'après les
modifications aux paramètres de la tâche, ne sera pas vécue
de façon identique dans toutes les disciplines. Il est faux de penser
que, parce qu'on réduit de 13,5%, on pourra dire: Tous les professeurs
de façon égale, toutes les disciplines de façon
égale et tous les collèges de façon égale subiront
l'augmentation de 13,5%. Les mécanismes qui sont disparus de la
convention collective, mais qui ont été depuis
négociés entre la Fédération des cégeps et
le ministère permettent de répartir les ressources avec une
récupération au niveau du réseau de 13,5%, mais avec des
effets un peu différents en termes de récupération, d'un
collège à l'autre, comme je le disais, surtout en termes de
récupération différente à l'intérieur d'un
même collège, d'une discipline à l'autre.
Dans certaines disciplines, les récupérations pourront
être d'environ 5% et, dans d'autres disciplines, de 20% ou 22%. Je peux
peut-être faire des listes plus longues, si vous le désirez. On
peut dire que, de façon générale, les enseignements dits
généraux, c'est-à-dire philosophie, français,
sciences humaines, auront, globalement, une récupération un peu
plus lourde en pourcentage à assumer que les disciplines du secteur
professionnel, surtout les disciplines lourdes en termes de tâche,
c'est-à-dire certaines disciplines où on retrouve des cours
à pondération plus élevée. Il y a un certain nombre
de disciplines dans le réseau où on retrouve assez souvent des
cours de dix heures, de douze heures. Pour celles-là, la
récupération sera un peu plus basse, compte tenu des jeux qu'il
faut faire en termes de bâtir une tâche d'enseignant. Il ne sera
pas toujours possible d'atteindre 43 ou 44 unités de charge pour
ceux-là. En conséquence, la récupération sera un
peu plus basse.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous avez
terminé? La parole est maintenant à M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: C'est avec crainte et tremblement que je prends la
parole à la suite de ce qui nous est arrivé depuis le
début de la soirée, mais je le fais quand même parce qu'il
faut que l'institution parlementaire fasse son travail, s'acquitte de ses
responsabilités le mieux possible. Je ne saurais commencer ces remarques
sans signaler à l'attention des représentants de la
Fédération des cégeps qu'il y a évidemment des
liens entre certains événements qui, nous a-t-on dit, sont
survenus en dehors de cette commission et la présence qu'ils ont bien
voulu avoir avec nous ce soir. Avant de faire ces remarques, je voudrais poser
seulement quelques questions d'information pour commencer. Votre organisme
s'intitule la Fédération des cégeps. Est-ce que c'est
plutôt une fédération des directeurs généraux
des cégeps ou une fédération des cégeps
comme institutions?
M. Tremblay (Jean-Noël): C'est une fédération
des cégeps comme institutions puisque, depuis sa restructuration qui
date maintenant de tout près de deux ans, les présidents de
conseil d'administration et le directeur général sont membres de
l'assemblée générale de la fédération, ce
qui veut dire que les corporations en tant que telles sont
représentées.
M. Ryan: Dans la délégation qui est ici ce soir,
pourriez-vous me dire combien il y a de présidents de conseil
d'administration et combien de directeurs généraux?
M. Tremblay (Jean-Noël): Il y a un président de
conseil d'administration, M. Claude Larouche, qui est le vice-président
du conseil d'administration. Parmi les autres membres, il y a deux directeurs
généraux, les autres membres sont du côté technique
et M. Yves de Belleval est du service des relations du travail,
c'est-à-dire de la fédération comme telle. Cependant, il y
a deux présidents de conseils d'administration et qui sont aussi membres
du conseil d'administration de la fédération.
M. Ryan: Je voudrais vous demander comment a été
préparé le mémoire que vous avez déposé ce
soir. Une consultation a-t-elle été faite auprès de chaque
cégep ou si c'est le conseil d'administration ou l'exécutif de la
fédération qui l'a arrêté? Ce mémoire a-t-il
été soumis à chaque cégep participant avant
d'être présenté à la commission parlementaire? Je
reconnais d'ailleurs - et c'est pour cette raison que je vous pose la question
pour que tout soit clair - que le temps a été très bref.
Je ne veux pas du tout vous instituer de procès. C'est seulement une
question d'information pour que nous sachions où nous en sommes au
juste.
M. Tremblay (Jean-Noël): Tous les éléments qui
sont contenus dans le document que nous avons produit ce soir sont des prises
de position antérieures faites en assemblée
générale de la fédération. Toute la partie, par
exemple, sur les compressions budgétaires et toute la démarche
qu'on a expliquée dans la première partie du document font
référence, entre autres choses, à un document qu'on a
rendu public au printemps dernier sur la répartition des ressources, sur
la question des compressions budgétaires et c'étaient des prises
de position de la fédération. Toutes les autres parties sur la
sécurité d'emploi, sur les départements, en particulier,
sur la qualité de l'enseignement viennent ou sont issues d'un mandat que
la fédération s'était donné dans la perspective de
la négociation qui était en cours.
M. Ryan: Êtes-vous au courant que certains cégeps
ont adopté des positions qui sont différentes de celles qui sont
présentées dans le mémoire que vous nous communiquez
aujourd'hui?
M. Tremblay (Jean-Noël): Oui, nous sommes au courant que
certains cégeps ont pris des positions un peu différentes. Dans
certains cas, ce sont des cégeps qui ne sont pas membres de la
fédération, d'une part, et, dans d'autres cas, les prises de
position portaient principalement sur la question de l'augmentation de la
tâche. Quant à l'augmentation de la tâche,
l'aménagement du décret, qui a été proposé
les 9 et 10 février, correspondait aux voeux et aux désirs de
certains collèges qui avaient manifesté publiquement des
inquiétudes face à l'augmentation de la tâche.
M. Ryan: Pourriez-vous nous mentionner des collèges qui
ont...
M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que le collège
Édouard-Montpetit a pris un certain nombre de positions; c'est un
collège qui n'est pas membre de la fédération. Je pense
que le collège de Thetford-Mines a aussi fait connaître un certain
nombre de positions et les membres de la fédération ont
discuté de son dossier. Nous avons discuté en assemblée
générale de ses prises de position. Je pense que nous avons tenu
compte, effectivement, d'un certain nombre de recommandations. Nous les avons
intégrées d'une certaine façon dans toute la
démarche de négociation qui s'est poursuivie et, effectivement,
dans la poursuite des objectifs sur la tâche des enseignants, ce genre
d'intervention a certainement pesé dans les efforts qu'on a fournis pour
essayer de réduire autant que possible l'augmentation de la tâche,
ce qui nous a amenés à la position du 10 février
dernier.
M. Ryan: M. le président de la fédération,
je voudrais soumettre à votre attention un document qui a
été publié par le ministère de l'Éducation
qui a commencé à circuler aujourd'hui dans les bureaux des
députés et qui traite du conflit actuel, sujet pour lequel vous
êtes venus à la rencontre de la commission parlementaire de
l'éducation. Je ne sais pas si vous avez eu connaissance de ce journal.
Vous l'avez devant vous. Pour être bien sûr que c'est le même
journal que nous avons, nous allons essayer de l'identifier par une couple de
passages et, ensuite, nous en trouverons un qui vous intéresse
directement. Dans ce journal, je lis, par exemple, à la page 3 des
choses comme celle-ci: "Au total, le gouvernement aura offert
successivement
quatre cadres de règlement. La CEQ n'aura eu pour toute
réponse que quatre non consécutifs sans jamais aucune autre
contre-proposition que le maintien du statu quo, une grève de trois
semaines et les allées et venues du président de la CEQ chez le
lieutenant-gouverneur et à Washington." Nous avons bien le même
document. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Vous serez...
M. Bertrand: Vous, avec vous.
M. Ryan: Oui, parce qu'il paraît que les autorités
gouvernementales avaient donné la directive de le laisser à la
porte, mais moi j'ai trouvé, en ma qualité de
député et de défenseur des droits des citoyens, que cette
personne, étant surtout directement impliquée par la loi 111,
avait le droit de pénétrer dans l'enceinte du parlement pour
exercer les droits qui lui sont reconnus par notre constitution. J'ai mis en
pratique la charte des droits que vous avez suspendue.
M. Hains: Bravo!
M. Ryan: Je n'ai pas eu peur de rendre compte de mes actes et
j'en rendrai compte longtemps. Je n'en suis pas à ma première
photographie. Je ne passe pas mon temps à penser à cela.
Pour terminer sur cet incident, je crois que nous sommes en
présence de la même publication, une publication émise sous
l'autorité du ministre de l'Éducation et de ses sous-ministres,
de toute évidence, et qui ne porte même pas de date. Quand on
voudra identifier cela dans quelque temps, on ne saura même pas la date
à laquelle cela aura paru. Je ne sais pas quel éditeur est
responsable de cette publication. La première chose qu'un éditeur
apprend, c'est qu'il faut qu'il mette une date à son document pour qu'on
sache quand cela est venu au monde dans le temps. C'est un document qui est
rempli d'opinions et d'impressions et qui va bien au-delà du royaume des
faits. Il est farci d'opinions politiques, d'interprétations du
comportement de l'un ou l'autre des acteurs et est évidemment de nature
à influencer le climat dans lequel vont se dérouler les jours qui
suivent et en particulier les jours qui nous séparent de la fin de la
trêve actuelle. On a vu tantôt une illustration du changement
d'atmosphère. Je pense que jusqu'à maintenant à la
commission les choses s'étaient très bien passées. Nous
avons déploré tantôt les actes complètement
contraires à l'ordre de nos travaux qui se sont produits. Je pense
qu'encore une fois il y a des explications. Ce n'est pas tombé de nulle
part. Ce ne sont pas des choses absolument spontanées. Je pense qu'il y
a tout un contexte qui doit nous préoccuper autant que les actions
elles-mêmes.
Nous avons pris connaissance en lisant ce journal d'un texte qui
émane de la Fédération des cégeps, qui est à
la page 6. C'est un extrait d'un document intitulé: "Les cégeps
et les compressions budgétaires: la solution, mieux répartir les
ressources", en date du mois d'avril 1982. Ce texte ne crée pas de
problème en ce qui vous touche. C'est un extrait d'un document que vous
avez déjà publié. Je pense que vous le reconnaissez.
Est-ce qu'on avait demandé l'autorisation de la Fédération
des cégeps pour inclure cet extrait du document dans cette publication
gouvernementale?
M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que je peux
répondre très clairement à votre question, M. le
député. D'abord, disons que l'extrait du document est conforme au
texte original qui a été déposé en avril 1982 et
qui a été rendu public. Je pourrai le déposer à la
commission, si la commission le désire. Je l'ai ici avec moi. Le
document a été rendu public, c'est donc un document qui pouvait
être utilisé et que le ministère, en conséquence,
pouvait s'approprier. Je dois cependant faire une réserve importante. La
présentation laisse croire que nous avons donné notre accord pour
la reproduction de ce document, ce qui est faux. Nous n'avons pas
été consultés sur cette question. J'ajouterai par ailleurs
que le titre qui se retrouve dans ce document ne correspond pas, à mon
avis, au contenu de l'article.
M. Ryan: Si on vous avait consultés... D'ordinaire la
pratique de courtoisie élémentaire pour un bon éditeur lui
suggère, avant de procéder à la publication d'extraits
d'un texte, même s'il a déjà été rendu
public, de communiquer avec l'autre partie pour lui demander: Qu'est-ce que
vous en pensez? Auriez-vous objection à ce qu'on prenne un extrait de
votre texte? Voici quel extrait nous entendrions publier. Est-ce que vous
auriez objection à ce que nous le publiions? La question de droit est
assez compliquée et je ne voudrais pas que nous la discutions parce que
cela pourrait nous entraîner très loin ce soir. J'ai
déjà été éditeur d'un journal et la question
des droits de propriété est extrêmement complexe. Je ne
veux pas vous engager là-dedans mais je vous pose une question. Si on
vous avait demandé votre autorisation en vous disant le genre de
publication qu'on s'apprêtait à mettre en circulation au
Québec à ce moment-ci, à ce moment très
délicat de la crise dans les négociations avec les enseignants
des cégeps, des écoles primaires et secondaires publiques du
Québec, si on vous avait dit: Nous aimerions que vous soyez partenaires
du gouvernement dans cette publication, votre nom ferait du bien, cela serait
bon et montrerait le sérieux de notre affaire, la dignité de
l'opération, et
qu'on eût poussé la courtoisie jusqu'à vous dire: On
va vous montrer le genre de texte qu'on publiera pour que vous sachiez en
quelle compagnie vous serez, ayant vu tout cela, est-ce que vous auriez
consenti allègrement à ce qu'un texte de votre
fédération et le nom de votre fédération soient
dans une publication gouvernementale de cette nature-là? (21 h 30)
M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que l'on pourrait
effectivement débattre la question fort longtemps en question de droit
ou en question politique. La fédération a toujours pris soin, en
particulier en période de négociations, de choisir et de faire
elle-même les publications qu'elle pense devoir être faites comme
organisme autonome défendant les intérêts des
collèges. Dans ce sens, nous n'avons pas décidé, dans les
circonstances, de faire des publications d'une façon ou de l'autre, dans
le contexte actuel.
M. Ryan: Trouvez-vous que ce genre de publication est de nature
à faciliter la recherche d'un règlement négocié
avec les professeurs syndiqués des cégeps?
M. Tremblay (Jean-Noël): Écoutez, je pense que,
depuis plusieurs mois et en particulier depuis le mois de décembre, les
collèges ont vécu, chacun dans sa région, toutes sortes de
situations extrêmement pénibles et difficiles, dans les deux
derniers mois en particulier. Des publications ou des commentaires, qu'ils
soient par écrit, à la radio ou à la
télévision, sont sortis et ont fait que l'administration
même des collèges a été extrêmement difficile.
Il est toujours difficile aussi de savoir si un événement ou un
autre, un article ou un autre, une déclaration ou une autre est
suffisamment déterminant pour modifier, si vous voulez, l'esprit de
bonne foi et les efforts faits de part et d'autre pour arriver à des
règlements négociés ou pour arriver à des ententes.
Je ne suis pas en mesure de juger si ce document ou ces articles ont un effet
ou pas dans ce sens. Mais je peux vous dire que depuis plusieurs mois, les
administrations de collèges vivent des situations, comme celle qu'on a
connue ce soir, qui sont pénibles, dans leur bureau, dans le
collège, dans la rue, sur la ligne de piquetage à l'occasion.
Nous ne sommes pas encore arrivés - je pense que le temps nous manque -
à décaler toutes ces choses pour être capables
d'interpréter une pareille chose.
M. Ryan: Toute chose étant considérée, ne
trouvez-vous pas, surtout dans cette période de trêve, que la plus
grande retenue de langage s'impose en particulier aux deux acteurs
principaux?
M. Tremblay (Jean-Noël): On pourrait le souhaiter.
M. Ryan: Merci. Alors, je vais passer à d'autres aspects
de la présentation de votre mémoire. Est-ce que vous pourriez
nous dire quelle a été la position de la Fédération
des cégeps au sujet des lois 105 et 111? Est-ce que vous avez pris
position sur chacun de ces deux projets de loi et de quelle manière?
M. Tremblay (Jean-Noël): Nous n'avons pas pris position sur
la loi 105 ni sur la loi 111. Notre position, comme Fédération
des cégeps, était celle de partenaire dans la perspective de la
négociation de la convention collective dans le cadre de la loi 55.
À partir du moment où les activités de la loi 55 et de la
négociation se sont terminées d'une manière ou de l'autre,
je pense que ces responsabilités ont été
transférées ailleurs, en particulier au palier de
l'Assemblée nationale. Il appartenait au gouvernement et à
l'Assemblée nationale de prendre les meilleures décisions dans
les circonstances. Nous n'avons pas pris publiquement de position ni sur la loi
105 ni sur la loi 111.
M. Ryan: Le fait que dans la loi 105 l'on définissait
toutes les conditions de travail pour trois années à venir, de
manière unilatérale finalement, cela ne vous est pas apparu un
petit peu exorbitant? Le fait que dans la loi 111, on suspendait, par l'article
28, les droits et libertés garantis dans la Charte des droits et
libertés de la personne pour tous les travailleurs visés par la
loi 111 et qu'on prévoyait, en cas de dérogation à la loi
111, les sanctions les plus dures, les plus sévères qui aient
jamais été imaginées par le législateur
québécois, cela vous a paru relever d'une autre juridiction? Cela
ne vous regardait pas?
M. Tremblay (Jean-Noël): Ce que nous avons fait
là-dessus? Je pense que la loi 105 qui a amené les
décrets, résumait, le plus loin, semble-t-il, où on avait
pu aller à ce moment-là dans les négociations qui ont
été faites antérieurement à l'adoption de la loi
105. Et je pense que pour l'essentiel sont inscrits dans les décrets les
dernières offres, les dernières discussions ou les derniers
paraphes, selon les contextes et selon les conventions collectives avec
lesquelles les différents groupes négociaient, et qui ont pu
être discutées ou mises sur la table d'une façon ou de
l'autre. Dans une bonne proportion, les mandats que la fédération
s'était donnés pour aller négocier se sont
retrouvés dans les décrets. Nous avons connu des décrets
antérieurement, en 1972, par exemple, qui fixaient aussi les choses pour
trois ans et cela nous est apparu là aussi une conclusion, semble-t-il,
inévitable du contexte actuel des négociations.
Au sujet de la loi 111, je pense que chacun des administrateurs de
collège, chacune des directions de collège pourrait dire ce
qu'elle a ressenti devant la sévérité de la loi 111 et
surtout du lot qui lui était fait de devoir, d'avoir l'obligation de
l'appliquer. Mais en tant que fédération, nous n'avons pas pris
position sur la loi 111 elle-même.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le
député de Vachon.
M. Payne: Merci, M. le Président. Je pense que l'heure est
à la réflexion, mais aussi à la réconciliation.
C'est le gouvernement qui est responsable de la masse salariale, des
dispositions des conventions collectives qui touchent aux salaires et aux
questions financières.
Cependant, lorsque les représentants des enseignants sont venus
devant la commission de l'Assemblée nationale, ils ont porté une
attention particulière et insistante sur un des trois points du litige,
notamment le département. Les autres, on le sait très bien,
étaient la tâche et la sécurité d'emploi. Au moment
où la commission délibère sur les mérites des
suggestions, des revendications et des plaintes déposées par les
enseignants, je pense qu'on devrait aussi poser des questions à la
Fédération des cégeps sur le département.
Lorsque je dis conciliation, je m'étonne du ton qu'il y a dans le
mémoire tel que déposé par la fédération. Je
présume que cela reflète les conseils que la
fédération a donnés au gouvernement en tant que partenaire
des négociations. Cela reflète une attitude réelle de son
côté. Je trouve que le ton du mémoire est, je dois ie dire,
démagogique. Il ne me semble pas démontrer une certaine
sensibilité pour le professionnalisme des enseignants, pour le travail
qu'ils font, la bonne foi qu'ils démontrent dans le système. Je
me demande si le conseil que vous donnez au gouvernement est bien fondé
en réalité. Le genre de langage, tel que celui qu'il y a à
la page 9: "L'inféodation des instances de concertation telle la
commission pédagogique aux impératifs syndicaux." Je dois dire
que les impératifs syndicaux dans beaucoup, beaucoup de collèges
sont l'ensemble des enseignants. Je pense aux enseignants de l'anglais langue
seconde, des matières techniques, ce ne sont pas des syndicalistes
irresponsables. Ce sont des gens dont l'expérience est éminemment
sérieuse, compétente et professionnelle. Vous vous demandez
comment interpréter le fait que les tentatives patronales n'incluent pas
de suggestions de "partnership" ou de collaboration. Vous dites: "patronales de
mettre sur pied des entreprises d'évaluation des pratiques,
méthodes, expériences, contenu pédagogique..." Je me
réjouis. Mais refusez- vous de croire que dans la commission
pédagogique où les enseignants partagent la tâche, la
mission éducative, ils sont de bonne foi? D'où vient que vous
conseillez le gouvernement à insinuer que dans nos collèges, les
intérêts des syndicats sont bornés? On peut bien voir et
bien déplorer aussi les manifestations de frustration telles que celle
montrée ce soir. Je peux vous dire que ce n'est pas
nécessairement l'ensemble des enseignants qui y croient.
Vous dites un peu plus loin, je cite: "Selon l'observation
effectuée par la commission d'évaluation l'idéologie
autonomiste qui anime plusieurs départements, est telle qu'elle menace
souvent l'équilibre institutionnel du collège." Remarquez bien,
il ne faut pas dire que cela est généralisé. Je peux vous
dire que je crois que la situation générale est une situation
équilibrée entre les enseignants présents dans la
commission pédagogique et dans le cas des départements, c'est une
instance qui, normalement - nommez n'importe quelle matière, n'importe
quel programme, n'importe quel département - va très bien. Cela
allait d'ailleurs tellement bien que vous avez signé une entente, en
1979, une convention collective qui reconduisait essentiellement ce qui
était contenu dans l'entente de 1976 signée par le parti de
l'Opposition aujourd'hui. Vous voulez maintenant changer les règles du
jeu. Je me demande si au moment de poser un geste -je ne parle pas pour le
gouvernement, je pense qu'à titre de parlementaire on devrait être
assez objectif face à la réalité - je ne suis pas
sûr que vous vous soyez bien acquittés de la mission et que vous
ayez bien conseillé le gouvernement en ce qui concerne le fonctionnement
des départements.
Les enseignants ont fait des sacrifices. Le ministre a souligné
à plusieurs reprises que cela était vrai, vous aussi d'ailleurs.
Il y a la récupération salariale, c'est bien, c'est
nécessaire. Je suis pour la position du gouvernement en ce qui concerne
le fait que la tâche doit augmenter comparativement à ce qui se
passe ailleurs. Je suis en faveur de la récupération salariale.
Je suis pour les démunis afin qu'on puisse affecter la
récupération vers les plus démunis de notre
société. Cela est une question de principe. Pas seulement cela
mais même dans l'allocation des ratios professeurs-élèves
le nombre était - on se souvient très bien mais je veux
vulgariser parce qu'on ne devrait pas entrer dans un langage technocrate - un
professeur pour 15 étudiants. C'est ce qu'on appelle le ratio 1/15. En
ce qui concerne les responsables de l'administration le ratio était
1/20. (21 h 45)
Maintenant, dans le décret, les nombres ne sont plus
séparés. Cela vient à même les
fonds de la norme 1/15. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi
là-dessus?
Une voix: ...
M. Payne: C'est un autre sacrifice à signaler en ce qui a
trait à l'allocation des professeurs. Il faut bien, en toute justice,
signaler que les professeurs, les enseignants, ont fait un sacrifice
additionnel, nécessaire j'en conviens, mais il faut le
reconnaître.
Au moment où les enseignants viennent devant la commission pour
revendiquer, pour porter plainte sur un sujet sur trois - j'ai nommé les
deux autres - ils disent: Pouvez-vous écouter notre point de vue? Je me
demande si vous n'êtes pas prêts à être conciliants,
à être un peu plus souples parce que c'est à ce chapitre
que vous êtes le missionnaire avec les enseignants, le collaborateur, je
dirais, avec les enseignants. Vous n'êtes pas le mandataire. S'il faut
vraiment spécifier et localiser la mission éducative, c'est bien
dans la salle de classe. Ce sont les enseignants qui sont responsables. Donc,
le gouvernement n'est pas à ce chapitre. Votre rôle, à mon
avis, est limité. L'important comme administrateur, comme gérant,
c'est qu'il est toujours nécessaire d'avoir une dernière
instance.
En bon gestionnaire, je pense, particulièrement au moment d'une
crise, vous auriez peut-être dû conseiller le gouvernement parce
que c'est vous qui avez une attitude là-dessus en tant que syndicat.
Pourquoi n'étiez-vous pas prêts à vous asseoir avec les
syndiqués? Comme je l'ai dit, ils ne sont pas braqués, selon mon
expérience. Ce sont les enseignants de nos étudiants, qui sont
sérieux, qui préparent leurs tâches et qui ajoutent des
heures et des heures en dehors de leur horaire pour planifier la programmation,
l'allocation des ressources humaines, l'ordre du jour de la commission
pédagogique, les tournées pour les étudiants.
J'ai vu beaucoup de bonne foi chez la majorité des enseignants.
Vous avez raison. Dans certains endroits, effectivement,
particulièrement à la commission pédagogique - et
même au sein du département lui-même - là où
les représentants du personnel de soutien, les administrateurs et les
enseignants s'asseoient ensemble pour discuter du contenu de nos programmes,
vous faites des recommandations au collège, à l'administration et
à la Direction des services pédagogiques. Normalement, ça
marche bien. Il y a des exceptions, mais les exceptions ne font pas la
règle.
J'ai une proposition à faire. Vous devriez peut-être,
à ce moment-ci et peu importe le mérite pour le moment, pendant
les prochains sept jours, vous asseoir avec les responsables des enseignants et
vous demander si on ne pourrait pas trouver un modèle - il n'y a pas de
modèle parfait; il y a des expériences plus ou moins bonnes - de
cogestion? Si j'ai entendu ce que la FNEEQ a dit, particulièrement en
lisant le mémoire - je n'aimais pas trop le langage, je le trouvais
aussi démagogique que le vôtre - il était rempli des
mêmes préoccupations, il manifestait les mêmes
symptômes, et pour les mêmes causes, que le vôtre. Pour moi
il y a là beaucoup de matière pour continuer à discuter
avec eux.
Je pense qu'il pourrait être intéressant que quelqu'un
puisse voir cela. Pour moi, il n'y a personne de mieux placé que le
ministre pour voir exactement quelles sont les revendications des enseignants
et les vôtres. C'est plus important que jamais parce qu'il y a des
sacrifices dans les sociétés, dans les cégeps, chez le
personnel de soutien et pour tout le monde. Mais là où cela ne
coûte pas un cent, où c'est une question de bonne foi, une
question de gérer la coopération, je préfère
appeler cela un collège, c'est important de s'asseoir avec les
enseignants.
J'aimerais revenir à un autre petit point pour terminer. Il y a
eu beaucoup de discussions ce soir sur l'information, particulièrement
de la part du député d'Argenteuil, concernant ce qu'on appelle
les mesures de relocalisation. Cela veut dire que le gouvernement a cru bon,
pour la première fois - et je pense que cela démontre la bonne
foi du gouvernement - d'avoir toute une série de mesures pour absorber
les enseignants mis en disponibilité. Vous savez très bien de
quoi il s'agit, c'est écrit dans le décret; elles étaient
aussi contenues dans le cadre de règlement du 10 février: 1.
Congé sabbatique. 2. La possibilité, pour un enseignant qui
choisit de recevoir pendant quatre ans 80% de son salaire, de prendre un
congé sabbatique la cinquième année. Une excellente mesure
pleine d'imagination proposée par le gouvernement. 3. La
possibilité pour un enseignant de se déplacer dans la fonction
publique, occuper une place libre. 4. La possibilité pour un enseignant,
par exemple, d'aller dans l'entreprise privée. Le gouvernement offrait
alors une prime - cela coûte de l'argent - à l'employeur. 5. La
possibilité pour un enseignant senior de prendre une retraite
anticipée, c'est-à-dire qu'il prend sa retraite un peu plus
tôt que prévu pour permettre à de jeunes enseignants de
prendre la place avec l'énergie, avec l'enthousiasme qu'ils ont
après toutes ces années de formation. Donc, ceux qui voudraient
prendre leur retraite pourraient le faire. Une excellente proposition qui
coûte cher.
Ma question est la suivante: Avez-vous vraiment communiqué,
à titre d'information, aux enseignants le contenu de cela? J'ai pris
la peine, comme député de l'Assemblée nationale, de
rencontrer les enseignants. Mes portes de bureau n'étaient jamais
fermées. D'ailleurs, je me suis déplacé pour les
rencontrer. Je leur ai fait part du cadre de règlement et de certains
éléments du décret et ils ont dit: Nous n'en savions rien,
nous n'en connaissions rien.
Pourtant, et vous en êtes, les représentants des directeurs
généraux des collèges et les présidents des
collèges ont déploré tout à l'heure que le
gouvernement distribue l'information. On peut juger de la qualité de
l'information - quoiqu'on doive en discuter comme il le faut devant cette
commission - mais le principe de communiquer quelque chose, je suis certain que
le député d'Argenteuil n'a jamais remis cela en question. Donc,
avez-vous vraiment communiqué aux enseignants les mesures incitatrices,
d'encouragement, par exemple, à absorber les mises en
disponibilité?
Je propose que vous vous assoyiez, la semaine prochaine, avec les
responsables, pour discuter certaines choses des décrets qui
m'inquiètent. Par exemple, là où c'est écrit que le
collège peut accorder, dans les mesures que je viens de citer, un
congé sabbatique. Si, à l'heure actuelle, il y a un manque de
volonté, une certaine méfiance, vous pouvez peut-être
conseiller le gouvernement sur les modalités possibles de mise en
application de ces mesures incitatrices. Là encore, je pense que c'est
important.
Je ne voudrais pas que vous vous moquiez d'une tentative
nécessaire au moment d'une crise alors que la tension est
aggravée. Si, comme parlementaires, nous pouvons entendre les
frustrations des enseignants et les vôtres, eh bien, on a fait un bon
bout de chemin pour la mission éducative.
Je reviens à mon thème principal.
Le Président (M. Paré): En concluant, s'il vous
plaît:
M. Payne: Je ne serai pas content, comme député,
comme parlementaire, aussi longtemps que vous n'aurez pas convaincu les
parlementaires dans l'ensemble de la possibilité de continuer
l'expérience qui est toujours limitée à un principe de
cogestion tout en respectant votre droit ultime de gérer les
collèges.
J'inviterais, en terminant, M. le Président, la FNEEQ à
mettre de côté la démagogie et à regarder la
possibilité de revenir s'asseoir avec le gouvernement, pour qu'on puisse
trouver une solution qui ne coûte pas un cent, mais qui coûte
beaucoup de bonne foi et beaucoup d'engagement moral, des deux
côtés, pour concilier les deux parties en ce qui concerne le
département particulièrement - c'est une autre disposition dans
le décret - afin que cela soit plus vivable. Finalement, ceux qui vont
être les vrais missionnaires des cégeps, à mon avis, ce
seront les enseignants. Si on peut améliorer cette situation, on le fait
pour nos enfants et pour les générations à venir.
Ce ne sont pas des questions que je pose dans mon intervention. J'ai
certains éléments de réponse. Si vous avez des
commentaires, j'aimerais les entendre.
M. Tremblay (Jean-Noël): Je demanderai tantôt à
M. Leduc d'intervenir sur cette question plus précisément, celle
du département dont vous faites part. Vous mentionnez, de façon
plus large, un problème qui est senti dans les collèges et qui
est vécu depuis de nombreuses années.
D'abord, permettez-moi un correctif. Lors de la dernière ronde de
négociations sur la question du département, le mandat que la
fédération s'était donné en termes de
négociation n'a pas été le mandat retenu par le
gouvernement. On a invoqué l'article 18b de la loi 55 pour arriver
à un règlement négocié. Ce qui fait que la
fédération n'était pas nécessairement d'accord avec
le contenu de la dernière ronde de négociations sur le
département.
Mais, plus largement, lorsqu'on parle des enseignants, je pense qu'il y
a deux grandes dimensions très importantes. On parle souvent de
l'enseignant dans le métier d'enseigner, c'est-à-dire dans les
conditions objectives: le nombre d'heures de travail, le nombre d'heures de
préparation, ce que cela suppose comme recherche, ce que cela suppose
comme travail autour de cette question, comme vous l'avez illustré. Tout
cela se traduit toujours dans des termes de convention collective d'une
manière ou d'une autre. La charge, les heures de préparation,
tout cela est inscrit dans la convention collective.
Mais lorsqu'on parle des enseignants -les administrateurs de
collège sont bien placés, sous cet angle - il faut aussi parler
de l'éducateur comme tel. C'est l'autre volet du même
professionnel. Celui qui s'intéresse au suivi de ses étudiants,
celui qui prépare des semaines thématiques, celui qui
prépare des voyages pour faire des visites industrielles ou des choses
comme celles-là, toute cette dimension qu'on pourrait ramener à
un thème qu'on utilisait auparavant qui est une espèce de
vocation de l'enseignant. Vous pouvez être assuré que,
là-dessus, la Fédération des cégeps et les
administrateurs des collèges sont conscients de cette
réalité et ils ont énormément de respect pour cette
dimension du travail dont on n'entend à peu près pas parler. (22
heures)
Un des éléments mentionnés dans notre document est
justement que, trop souvent, le
discours concernant les enseignants, concernant le professionnalisme de
ces gens, est trop limité à la partie objective de l'enseignant,
celle qui est mesurable, celle qui est observable, laissant complètement
de côté toutes les autres dimensions de ce métier qui en
font effectivement la partie qualitative. C'est vrai non seulement durant la
période des rondes de négociations, mais c'est aussi vrai entre
les périodes de négociations puisque, dans les collèges,
trop souvent, les discussions qui tournent autour du métier
d'enseignant, qui tournent autour de l'enseignant, autour de toutes les
conditions qui doivent être remplies, sont amenées tout
près de l'interprétation des articles des conventions
collectives, par exemple, ou autour des termes mêmes des articles ou des
chapitres qu'on trouve dans les conventions collectives. C'est le sens qu'il
faut donner aux interrogations que vous allez retrouver en page 9, en
particulier.
Lorsqu'on s'interroge, comment se fait-il que, sachant tout cela, nous,
le voyant à l'oeuvre, y contribuant aussi, travaillant avec les
départements - il faut savoir que les administrateurs de collège
et les directeurs de service pédagogique travaillent étroitement
avec les départements - ce qui ressort de nos discussions plus
officielles, à toutes fins utiles, que ce soit en commission
pédagogique, dans les relations entre les départements et avec le
chef de département, c'est que cela en revient toujours à cette
dimension qui est très proche de la négociation, qui est toujours
très proche des discussions autour des conventions collectives?
M. Payne: J'ai posé une question.
M. Tremblay (Jean-Noël): La réponse à cela -
c'est pour cela qu'on l'a mentionné ici - le conseil des collèges
en a fait une lecture, lui; ce n'est pas notre lecture à nous. C'est sa
lecture, à lui, et je pense que c'est un organisme crédible.
M. Ryan: ... de la Fédération des cégeps. Je
voudrais vous demander si le député de Vachon n'aurait pas
dépassé le temps qui lui était imparti depuis un certain
temps.
Le Président (M. Paré): Effectivement, M. le
député de Vachon a utilisé le temps qui lui était
alloué pour faire ses commentaires et poser ses questions.
M. Payne: M. le Président...
Le Président (M. Paré): C'est maintenant la
réponse.
M. Ryan: Non, non, je regrette, mais la réponse compte
avec le temps du député.
C'est le traitement qu'on nous applique depuis le début des
travaux de la commission.
M. Payne: M. le Président, est-ce que je peux avoir la
parole?
Le Président (M. Paré): Un instant. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: J'attends d'abord la réponse du président.
J'aimerais qu'il nous dise exactement où nous en sommes. Ensuite, si le
député de Vachon a des commentaires à faire, j'en aurai
moi aussi.
M. Payne: M. le Président...
Le Président (M. Paré): Un instant, s'il vous
plaît, je veux répondre à la question. Le
député de Vachon a utilisé les vingt minutes qui lui
étaient allouées. On peut entendre la réponse, s'il y a
consentement; sinon, ce sera ensuite le député de
Louis-Hébert qui se verra allouer une période de questions,
même si le temps est dépassé, justement par
équité et pour permettre aux deux partis de se faire
entendre.
M. Payne: M. le Président...
Le Président (M. Paré): M. le député
de Vachon.
M. Payne: ...je ne veux pas être exigeant quant à
nos privilèges, mais je pense qu'à ce moment-ci, c'est assez
important que nous déployions tous nos efforts pour trouver une
solution, une entente de conciliation. Le député d'Argenteuil,
tout à l'heure, a parlé de l'information.
Le Président (M. Paré): Vous avez raison, j'admets
l'importance du dossier et des auditions, sauf que vous conviendrez avec moi
que la commission doit observer le règlement qui permet un maximum de
vingt minutes par intervenant. Donc, nous devons nous conformer au
règlement. De plus, une entente est intervenue ce matin et il nous faut
essayer de la respecter si nous voulons entendre tous les groupes qui sont ici.
Étant donné que le règlement est clair et précis
là-dessus, j'aimerais savoir s'il y a consentement des deux partis pour
pouvoir entendre la réponse des gens qui sont ici pour répondre
à nos questions.
M. Ryan: Par courtoisie pour les témoins qui sont ici,
nous consentons volontiers à ce que le directeur général
de la Fédération des cégeps complète sa
réponse dans un temps qu'on souhaite assez bref. Ensuite, je pense qu'il
faudra qu'un règlement de justice pour tout le monde que
l'on doit appliquer s'applique et cela n'est pas du tout, de ma part,
l'expression de la moindre pensée de mauvaise disposition à
l'endroit du député de Vachon, dont j'ai beaucoup
apprécié l'intervention. Je pense que son intervention
était valable. Il pourra la continuer sur d'autres tribunes, comme nous
le conseillait tantôt le président. Il y a d'autres moyens. Le
président nous a dit qu'on s'en tenait aux moyens qui étaient
ceux de la commission ici. Deuxièmement, il nous a dit que les
décisions qui ont été prises sur le partage du temps n'ont
pas à être reprises et qu'elles ne doivent pas être
changées d'ici la fin de la journée. J'aimerais qu'on s'en tienne
à cela.
Le Président (M. Paré): Donc, effectivement, c'est
ce qui a été décidé et, dans ce sens, nous allons
poursuivre les travaux de la commission. On va vous demander, s'il vous
plaît, de répondre rapidement aux questions du
député de Vachon.
M. Tremblay (Jean-Noël): Je conclus sur l'intervention que
je viens de faire pour dire simplement que les administrateurs de
collège, la Fédération des cégeps, ont
énormément de respect pour le métier d'enseignant et c'est
évident que, dans ce sens, on recherche toute forme de collaboration qui
pourrait être souhaitable et qui donne un climat de travail fort
intéressant.
Je voudrais - à partir de maintenant, si vous voulez, depuis tout
le temps, c'est un peu cela - répondre sur la question du
département. Là-dessus, il y a un objectif fondamental qui est
poursuivi. Il faut s'assurer, dans le cas du département, qu'on voit
bien les responsabilités imparties à chacun: au coordonnateur du
département, aux membres du département eux-mêmes, aux
administrateurs du collège. Dans la mesure où on a des articles
de convention qui sont clairs à ce sujet, en termes de
responsabilités respectives, le département sera capable de
rendre compte, comme il se doit, à l'institution de la manière
dont les choses doivent être faites et des résultats obtenus, ce
qui permet à cette institution de rendre compte d'elle-même au
ministère de l'Éducation et au ministre de l'Éducation de
la façon dont se déroule la mission qui lui a été
impartie.
Il y a d'autres questions qui ont été posées
concernant la relocalisation, concernant la tâche. Je demanderais
à M. Yves de Belleval de répondre à la question sur la
relocalisation.
M. de Belleval (Yves): Nous n'avons pas jugé bon, dans
notre mémoire, de revenir sur les mesures de relocalisation qui ont
déjà fait l'objet d'exposés. Nous n'avons pas
communiqué aux enseignants le contenu de ces mesures. Nous n'avons
communiqué aucune information aux enseignants relativement à la
négociation. Je vous avoue que j'ai l'impression que la
fédération et son assemblée générale
hésiteraient énormément à utiliser cette
façon de faire parce que je crois que c'est traditionnellement
très bien reconnu que c'est là un procédé qui ne
respecte pas les instances syndicales. Je crois que c'est cela la raison de
fond pour laquelle... C'est extrêmement délicat, je crois, de
communiquer directement d'une partie partronale négociante vers les
salariés. Oui, nous avons informé notre assemblée
générale de ces mesures à deux reprises
dernièrement. Il y a environ une quinzaine de jours, la dernière
fois.
Le Président (M. Paré): Merci. La parole est
maintenant au député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Les appels à la
réconciliation du député de Vachon font plaisir à
entendre. Ils sont peut-être, cependant, un peu tardifs. Le reproche
qu'il adresse à la Fédération est que les cégeps
n'auraient peut-être pas fait les pressions qu'ils auraient du faire pour
convaincre le ministère de s'ouvrir les yeux et d'agir d'une
façon plus souple, plus flexible, plus conforme aux objectifs qui sont
ceux des cégeps. Je soulignerai en passant que le député
de Vachon a possiblement un devoir à ce sujet. Il est probablement
beaucoup plus en contact ou a beaucoup plus de possibilités de parler,
de rencontrer, de discuter, d'informer et de convaincre le ministre de
l'Éducation, étant donné qu'il siège du même
côté de la Chambre que lui. Mais étant donné que le
député de Vachon semble être au fait d'un certain nombre de
choses qu'il a très bien expliquées - je le rejoins sur la
plupart de ses propos - est-il pour autant justifié, M. le
Président, de lancer le ballon dans le camp de la
Fédération des cégeps, alors que lui, comme
député ministériel, est à même de pouvoir
frapper à la porte du ministre de l'Éducation? Peut-être
est-ce parce qu'il l'a fait sans succès. Peut-être a-t-il fait des
tentatives. Peut-être a-t-il tenté d'attirer l'attention du
ministre sur un certain nombre de lacunes des propositions gouvernementales,
mais la réception qu'il a eue l'a peut-être
découragé. C'est très compréhensible. Il ne serait
pas le premier, d'ailleurs, mais à ce moment-là, la question que
je lui pose est la suivante: Comment peut-il espérer que les gens qui
sont excentriques, qui sont en dehors du centre, qui n'ont pas les contacts et
les possibilités de discussion dont il peut disposer puissent avoir une
réception qui soit meilleure que celle qu'il a eue lui-même? De
deux choses l'une: ou il l'a fait et cela n'a
rien donné - à ce moment-là, la
fédération est dans une situation difficile compte tenu de cela -
ou possiblement, et j'en doute, il ne l'a pas fait et peut-être
devrait-il le faire. Mais il l'a probablement fait.
Chacun son métier et les moutons seront bien gardés. Je
pense que la Fédération des cégeps a une
responsabilité qui est la sienne. Le gouvernement a la sienne et les
députés ministériels ont la leur, de même que les
députés de l'Opposition. Les appels à la
réconciliation du député qui m'a
précédé sont très bien et je les endosse, sauf que
là où je me pose de sérieuses questions, c'est quand les
gestes qui sont posés par le gouvernement du parti dont il est membre ne
sont pas de nature conciliatoire. Je fais plus particulièrement allusion
au document qui a fait l'objet de longues discussions et de tentatives de la
part de l'Opposition de sensibiliser le ministre, le gouvernement sur le manque
d'à-propos d'une démarche semblable. Cette démarche
est-elle faite à ce moment précis tout simplement par maladresse
ou est-ce par calcul purement politique? Est-ce que cela a un rapport avec des
instances partisanes qui vont se tenir demain et après-demain à
l'hôtel Le Concorde ici à Québec? A-t-on un message
à faire passer à certaines personnes qui vont se réunir
là? C'est peut-être le cas, sauf que j'attire l'attention de cette
commission sur les effets néfastes d'une telle démarche. Cela
peut enlever le feu pendant un certain nombre de jours, le temps
nécessaire pour passer le samedi et le dimanche, mais cela risque
d'attiser les flammes pour la semaine et les mois qui suivent. Je pense que les
parlementaires et le gouvernement se doivent d'être inquiets de cette
façon de faire. Je ne pense pas que cela a été fait d'une
façon innocente. Je pense qu'il y a un calcul politique
là-dedans. On n'improvise pas ce genre de choses. Ces choses se
préparent. Ces choses sont calculées. Ces choses n'arrivent pas
par hasard. Force nous est de le déplorer, et de le déplorer
d'autant plus qu'on tente de faire cautionner partiellement par la
Fédération des cégeps la publication en utilisant un
document qui, nous dit-on, est exact, c'est-à-dire qu'il est reproduit
intégralement, sauf que le titre a été changé, a
été modifié et a même été
qualifié comme ne représentant pas exactement le contenu du
texte. Si nous avons des exemples semblables, on peut se poser de
sérieuses questions, surtout quand on réalise que dans ce
document il y a un éditorial qui représente une position
officielle, j'imagine...
Mme Lavoie-Roux: Pas signé. (22 h 15)
M. Doyon: ...du gouvernement. On se fait fort de signer cet
article "Comment mieux répartir nos ressources", mais on ne signe pas
l'éditorial. On n'en donne d'aucune façon la source. Qui est le
responsable de cet éditorial? On aimerait le savoir. Quand on se sert
des documents qui ont été produits par autrui, on ne se
gêne pas pour écrire "document par la Fédération des
cégeps". Est-ce que c'est pour tenter de récupérer
à son compte une crédibilité qu'on n'a plus? Est-ce que
c'est cela le but? Et si les représentants de la
Fédération des cégeps nous indiquent qu'ils n'ont pas
été consultés sur cette utilisation, qu'ils n'ont pas eu
leur mot à dire et que si on les avait consultés, compte tenu de
ce qu'ils savent maintenant de la nature du document, ils auraient eu de
très sérieuses réserves à son utilisation à
des fins telles que celle-là. Cela rejoint ce que disait M. de Belleval
tout à l'heure quand le député de Vachon lui demandait
s'il y avait eu de l'information par les cégeps eux-mêmes
vis-à-vis des membres des syndicats d'enseignants dans les
cégeps. Il nous a fait part qu'il y avait une position qui était
respectueuse des instances syndicales, de la hiérarchie syndicale et qui
visait à respecter les représentants démocratiquement
élus qui ont des responsabilités envers leurs membres. Je dois
vous dire que c'est une position que nous endossons complètement. Et
c'est tellement vrai, que les incidents disgracieux et malheureux dont nous
avons été les témoins, ce soir, découlent de
tentatives de supposée information par une partie qui est directement
impliquée et ce, à même les fonds publics.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Je voudrais que vous nous disiez si nous sommes
ici pour entendre des organismes qui ont été invités ou si
nous sommes ici pour entendre des discours tels que celui prononcé
présentement par le député de Louis-Hébert. C'est
une directive que je vous demande. Je pense qu'on a invité des
organismes, que nos questions, nos interventions doivent être
adressées aux organismes invités. Notre mandat est d'apporter un
éclairage sur les questions de la sécurité d'emploi, de la
tâche, de la qualité de l'éducation. Je pense que le
député de Louis-Hébert va au delà du mandat qui a
été donné à cette commission.
Le Président (M. Paré): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, sans vouloir chercher à
vous influencer en aucune manière, je voudrais essayer de contribuer
à une décision juste dans ce cas. Je vous rappelle simplement que
tout à l'heure, le
député de Vachon a mis 20 minutes complètes
à faire un exposé - il n'écoutait pas pendant ce temps, il
parlait - il exprimait ses opinions et c'était son droit le plus strict.
Je crois que nous ne l'avons aucunement interrompu, nous l'avons laissé
écouler son temps de parole au complet. Maintenant, le
député de Louis-Hébert émet ses opinions en
réaction à ce qu'il a entendu ce soir. Il émet des
opinions sur le comportement de l'acteur majeur dans le présent conflit
qui est le gouvernement et, en particulier, le ministère de
l'Éducation. Le public jugera de la validité des opinions qui
sont émises. Mais je pense que la pertinence de ses opinions ne saurait
faire l'objet d'aucun doute et de vouloir l'interrompre à ce moment
serait un abus de pouvoir.
Le Président (M. Paré): La commission est
effectivement ici pour entendre des mémoires qui nous sont
présentés par les différents organismes qui sont
passés ou qui sont à venir. Les intervenants sont ici pour poser
des questions relativement au dossier global de l'éducation et du
conflit qu'on vit présentement. Donc, comme on a été
depuis le début assez large quant aux questions, je ne suis pas en
mesure de juger ou de décider si, versus la largesse qu'on a
acceptée depuis le début, on pourrait être en mesure
justement de limiter le débat. Sauf que j'aimerais rappeler au
député de Louis-Hébert qu'il reste à peine quatre
minutes pour avoir l'équité entre les deux partis.
M. Ryan: M. le Président, par souci de précision,
je voudrais vous demander une chose. Vous avez dit que le rôle des
députés consistait à poser des questions. J'espère
que vous n'avez pas d'objection à reconnaître qu'il consiste aussi
à exprimer des opinions s'ils jugent qu'ils doivent le faire.
Le Président (M. Paré): Oui, M. le
député d'Argenteuil. Effectivement, c'est presque toujours ce qui
se passe par un préambule avant les questions. C'est ce qui s'est
passé depuis le début et c'est certainement ce qui continuera de
se faire. Donc, je demanderais de continuer pour le temps qui vous est
alloué, M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. Les inquiétudes
que j'exprime sont de nature à éclairer le débat que nous
avons ce soir. Nous ne sommes pas désincarnés et nous sommes
témoins de circonstances et d'événements qui se produisent
et qui vont, j'en suis convaincu, avoir un effet très certain et
très sérieux sur le déroulement, sur l'aboutissement des
démarches de cette commission. Passer ces faits sous silence, ce serait
desservir la commission parlementaire, ce serait manquer à notre
devoir.
Je comprends que cela puisse être désagréable pour
les gens qui nous font face d'entendre rappeler ces gestes malheureux et
déplacés. Je crois cependant que l'Opposition est ici pour
veiller au grain. Quelles que soient les objections que j'entende de l'autre
côté, j'ai l'intention de continuer dans la même veine parce
que ne pas le faire, ce serait éviter le fond du problème. Nous
nous trouvons devant la situation où cette commission a
été convoquée pour permettre aux parties de se rencontrer,
d'exprimer leur point de vue et de le faire dans un climat de
sérénité. Ce climat de sérénité doit
être préservé par tout le monde, et je pose la question:
Qui a brisé ce climat, qui a amené un élément de
trouble et de dérangement à l'intérieur des travaux de
cette commission, si ce n'est le gouvernement qui a pris la
responsabilité, la décision, et il doit en porter le fardeau, de
publier un document à 400 000 exemplaires, de le faire expédier
en première classe, s'il vous plaît! en première classe,
comme une lettre personnelle, aux frais des contribuables? Il a jugé bon
de publier ce document qui est un document teinté d'opinions, de
propagande et de messages qui sont ceux du gouvernement, et qui, pour dire le
mot, est à proprement parler démagogique. Je voulais le rappeler
au député de Vachon parce qu'il a reproché à la
Fédération des cégeps d'avoir présenté un
mémoire qui était démagogique.
M. le Président, si je compare le document que nous avons entre
les mains, et dont la lecture nous a été faite par le
président de la Fédération des cégeps, avec cet
autre document qui nous a été remis par le gouvernement, il n'y a
pas de commune mesure. Je ne pense pas qu'on puisse qualifier du même mot
démagogique le document qui provient de la Fédération des
cégeps et celui que le ministre de l'Éducation a pris la
responsabilité de distribuer à travers la province de
Québec en première classe, aux frais des contribuables du
Québec encore une fois.
Quiconque s'insère dans une négociation en passant
par-dessus la tête des instances syndicales le fait à ses risques
et périls, et les dangers sont extrêmement grands. Je pense qu'il
y a une leçon à tirer de tout cela et je termine
là-dessus. Souhaitons que la maladresse, si c'est une simple maladresse,
ou la malhonnêteté... Je demande à ceux qui en sont les
victimes de ne pas tenir rigueur au gouvernement soit de cette maladresse, soit
de cette malhonnêteté pour permettre quand même qu'on
continue d'avoir espoir dans un règlement au bénéfice des
usagers des services de l'éducation.
Cette commission doit amener non seulement les parties, mais la
population à réaliser le rôle que joue le gouvernement. Il
est ambigu, il est difficile à cerner. Je
termine sur ces mots: Espérons que demain, après-demain,
la semaine prochaine, on ne prendra pas prétexte - parce que cela me
paraît non seulement un prétexte, mais une raison qui pourrait
être fondamentale - de la distribution d'un document, tel que celui qu'on
a eu entre les mains, pour refuser de reprendre une forme de négociation
qui pourrait nous amener à un règlement.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le
député. Pour couper court à la tradition, je ne demanderai
pas aux représentants de l'Opposition ni au ministre de vous remercier.
Je vais le faire en leur nom et au nom de tous les membres de cette commission,
en nous excusant des délais qui sont communs normalement ou
anormalement, mais je n'ai pas à l'évaluer, mais je vais
simplement vous dire qu'on vous remercie beaucoup de votre présence et
de votre mémoire.
Maintenant, il y a un petit problème technique à
régler. L'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires doit intervenir ainsi que l'Association des cadres
scolaires du Québec et la Fédération des comités de
parents de la province de Québec. Compte tenu des
événements, je vais simplement dire qu'il nous reste environ le
temps d'entendre un organisme, à moins que - c'est la question que je
pose - ces deux organismes, qui sont différents d'une certaine
façon en termes de travail à faire, l'Association des directeurs
généraux ainsi que l'Association des cadres scolaires acceptent
et que l'ensemble des membres de la commission acceptent qu'elles
témoignent ensemble pour leur éviter des frais additionnels si
elles devaient revenir, si on continue à travailler comme on l'a fait,
c'est-à-dire que l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires serait convoquée la première.
Si vous me dites que...
Oui, M. le député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): M. le Président, est-ce qu'on peut
suspendre deux minutes pour se comprendre?
Le Président (M. Jolivet): II y a toujours moyen de
suspendre, cela va permettre de régler certains petits problèmes
techniques. Dans deux ou cinq minutes au maximum, je reviendrai.
M. Leduc (Fabre): Merci. (Suspension de la séance à
22 h 27)
(Reprise de la séance à 22 h 37)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre,
s'il-vous-plaîtl
La commission reprend ses travaux, mais avant d'aller plus loin, je
dois, au nom de la commission, nous excuser auprès de l'Association des
cadres scolaires du Québec ainsi qu'auprès de la
Fédération des comités de parents de la province de
Québec qui, malheureusement, ne pourront pas passer ce soir. Ils seront
reportés à lundi et on leur fera connaître l'heure de la
présentation de leur mémoire.
J'invite donc l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires, dont le représentant est M. Michel Paquet qui
pourra nous présenter ses collègues. Avant de lui donner la
parole, j'aimerais aussi rappeler que c'est le dernier organisme à
être entendu ce soir. Tout en ne voulant en aucune façon brimer le
droit de parole de personne, vous savez que le mandat de la commission - je
l'ai assez répété depuis quelque temps - est d'entendre,
mais aussi à la fois, par le fait même, de questionner pour
connaître les réactions à nos demandes; il faudra se
discipliner dans ce sens pour le reste de la soirée.
M. Paquet, vous avez la parole.
Association des directeurs généraux des
commissions scolaires
M. Paquet (Michel): Merci, M. le Président. Vous me
permettrez, bien sûr, avant de commencer notre intervention, de vous
présenter les collègues qui m'accompagnent, soit, à ma
droite, M. Gérard Tousignant, vice-président de notre
association, ainsi qu'à ma gauche, M. Normand Lapointe,
secrétaire.
Mesdames, messieurs les membres de la commission, notre association, qui
regroupe les directeurs généraux ainsi que les directeurs
généraux adjoints à temps plein des commissions scolaires
du Québec, a pour objectif, outre sa mission de promouvoir le statut et
les intérêts de ses membres, de contribuer aux débats
touchant le fonctionnement du réseau des écoles primaires et
secondaires du Québec.
Nous vivons présentement à nouveau une
désorganisation des services pédagogiques, car il y a, en effet,
une détérioration importante du climat des relations du travail
dans le secteur particulier de l'éducation. Les élèves
ont, quant à eux, perdu 17 jours de classe et il y a risque qu'ils en
perdent davantage. Les décrets gouvernementaux auront, de toute
évidence, des impacts sur l'organisation pédagogique des
écoles et sur les bénéfices d'emploi des enseignants. Pour
ces raisons, nous apprécions avoir la possibilité de faire
connaître le point de vue des directeurs généraux sur les
sujets faisant l'objet et de l'analyse, et des débats de la
présente commission.
Toutefois, M. le Président, les
directeurs généraux n'ont pas choisi d'intervenir dans le
sens d'une recherche, d'un partage des responsabilités dans ce nouvel
affrontement. Nous convenons cependant qu'il faudra, en un temps plus serein -
encore plus serein que ce soir - et davantage propice à
l'échange, réaliser un tel exercice d'évaluation. Mais,
aujourd'hui, à titre de premiers responsables administratifs des
commissions scolaires, notre préoccupation est de tenter de
démontrer s'il y a possibilité ou non de rendre applicables les
modalités d'organisation découlant des décrets et ce, dans
le respect de la qualité des services pédagogiques à
dispenser.
Pour ce faire, nous avons donc, en premier lieu, fixé nos
postulats sur la notion de la qualité des services et sur l'importance
de l'éducation au Québec. Par la suite, nous avons
déterminé l'approche de notre analyse pour cerner les
problématiques faisant l'objet de notre intervention. Puis, nous avons
établi certaines constatations quant aux décrets gouvernementaux,
et nous avons convenu de certaines affirmations quant aux moyens
nécessaires pour assurer le maintien de la qualité des services.
Enfin, nous avons précisé nos attentes, voire nos
réclamations, pour aider au règlement du présent conflit
et garantir la qualité des services.
Quels ont donc été les postulats retenus par les
directeurs généraux? Le premier touchera d'abord l'importance de
l'éducation. Les directeurs généraux affirment que
l'éducation doit demeurer l'outil privilégié du
développement culturel, économique et social de la
communauté québécoise et ce, même dans le contexte
économique difficile que nous connaissons actuellement. Reconnaissant
que les ressources de la société sont plus réduites et que
ce fait invite, de toute évidence, à la créativité
et à la mesure dans l'usage des moyens disponibles, nous rappelons qu'il
faut cependant tout mettre en oeuvre pour tenter véritablement,
premièrement, de maintenir la qualité pédagogique acquise
progressivement depuis les années soixante et, deuxièmement,
d'assurer au mieux le développement des moyens susceptibles de
répondre aux besoins nouveaux en éducation. Tel a
été notre premier postulat.
Notre deuxième postulat a trait à la notion de
qualité des services. Les directeurs généraux
reconnaissent que la qualité des services éducatifs est
influencée forcément par les facilités organisationnelles
ou par certaines conditions d'emploi permettant l'exercice de la
pédagogie. Cependant, pour nous, cette qualité relève
d'abord et avant tout de la qualité de la relation entre le maître
et ses élèves. Sur cette question, j'ajoute que nous touchons,
bien sûr, à la relation interpersonnelle et au contenu de la
transmission et aux moyens pédagogiques pris pour ce faire.
Deuxièmement, cette qualité relève aussi de la
qualité de la relation qu'il y a entre les intervenants du monde
scolaire et, par conséquent, de la qualité du climat dans nos
écoles.
Toutefois, les directeurs généraux rejettent l'argument
selon lequel toute modification à la baisse aux conditions d'emploi
entraînent automatiquement une détérioration de la
qualité des services.
Ces postulats avancés, les directeurs généraux ont
privilégié une approche d'analyse qui se décrit de la
façon suivante: Le gouvernement a pris la décision de
réduire la croissance des coûts en éducation, en
procédant à une augmentation de la productivité des
personnels et à une diminution importante de certains avantages
d'emploi; il a donc adopté des décrets pour fixer les conditions
de travail des divers personnels. C'est à la lumière de ces
décrets gouvernementaux que les directeurs généraux ont
choisi de vérifier si le réseau scolaire public sera toujours en
mesure de poursuivre l'implantation et les objectifs d'un nouveau régime
pédagogique qui a fait l'objet d'un consensus des agents
concernés et s'il sera en mesure d'assurer le maintien des services, de
même que la réponse aux besoins nouveaux. Notre analyse a donc
porté sur la faisabilité - si vous me permettez l'expression -
des décisions gouvernementales. C'est dans cet esprit que nous avons
préparé notre texte de ce soir. (22 h 45)
Quelles sont nos constatations face aux décrets? L'étude
des décrets gouvernementaux touchant les enseignants conduit à
diverses constations. Dans un premier temps, nous y relevons quelques
correctifs normatifs de saine gestion, élément
réclamé depuis longtemps par les administrateurs scolaires; par
exemple: le concept de tâche globale et sa conséquence sur
l'humanisation des écoles secondaires par une utilisation possible plus
adéquate des compétences particulières de chaque
enseignant, notamment en matière d'encadrement et d'activités
d'animation.
Autre exemple: l'introduction d'une notion de capacité de
l'enseignant permettant un certain contrepoids à l'arbitraire de
l'ancienneté. Ensuite, la possible collaboration dans les écoles
entre les enseignants et les directeurs pour réaliser le processus de
détermination des tâches et responsabilités et pour
élaborer les modèles d'organisation susceptibles de
répondre aux projets du milieu. La présence effective plus grande
de l'enseignant auprès des usagers. Enfin, dernier correctif, à
titre d'exemple: l'obligation faite à chaque commission scolaire de
procéder localement, après consultation, à
l'élaboration d'une politique d'organisation des services à
offrir aux élèves en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage et de fournir, lors de l'intégration d'un
élève en difficulté, des
mesures de pondération ou des services d'appui.
En contrepartie, il faut signaler certains éléments
préoccupants. Par exemple, l'augmentation de la tâche pourrait
avoir pour effet de réduire le nombre de spécialistes au primaire
si le régime pédagogique n'est pas modifié.
L'augmentation brusque de la tâche au secondaire pourrait avoir
pour effet d'augmenter le nombre d'élèves par enseignant si les
modèles organisationnels ne sont pas modifiés. L'augmentation
soudaine et considérable du nombre d'enseignants mis en
disponibilité pourrait rendre problématique et difficile
l'utilisation rationnelle de ces ressources.
Enfin, sur un thème accompagnant, les directeurs
généraux signalent l'insuffisance des règles
budgétaires soumises actuellement à la consultation du
réseau. Pour nous, ces règles, dans leur forme présente,
ferment les possibilités de manoeuvres locales pour gérer le
processus de changement enclenché par les décrets de même
qu'elles n'assurent pas rigoureusement les ressources financières
nécessaires pour permettre l'application des mesures d'appui
privilégiées par chaque commission en matière de service
aux élèves en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage.
Les affirmations des directeurs généraux, maintenant,
quant aux moyens d'assurer le maintien de la qualité des services. Les
directeurs généraux n'ont évidemment pas la
prétention de présenter un tableau exhaustif de tous les
éléments pouvant assurer la détermination et le maintien
de la qualité des services. Nous avons surtout tenté de retenir
ce qui nous paraissait primordial et aussi ce qui faisait l'objet des
préoccupations majeures de la population ou des intervenants
impliqués.
La qualité des services sera maintenue pour autant que le climat
scolaire favorisera à la fois la relation positive entre le maître
et l'élève et entre les intervenants impliqués dans la
dispensation des services. Elle sera maintenue pour autant que les dispositions
incluses au contrat des personnels et touchant des aspects importants comme
l'ancienneté et la capacité respecteront les besoins
pédagogiques des élèves.
Elle sera maintenue pour autant que l'on permettra que les enfants du
primaire profitent d'une bonne formation personnelle et intellectuelle et de
services efficaces pour aider à la solution des difficultés qui
surviennent dans la réalisation du processus de formation. Nous faisons
ici, bien sûr, référence à la
nécessité des spécialistes, des orthopédagogues et
des enseignants dispensant des services dans les classes dites pour
clientèle en difficulté.
Elle sera maintenue aussi pour autant que l'on favorisera au secondaire
une relation plus intense et plus soutenue entre l'enseignant et ses
élèves. La notion de tâche globale paraît donc
souhaitable parce qu'elle élimine le minutage à outrance et sort
l'enseignement de l'ornière de la surspécialisation. La
qualité sera aussi maintenue pour autant que les commissions scolaires
et les écoles auront le temps nécessaire pour élaborer et
mettre en place les nouveaux modèles pédagogiques requis,
d'évaluer l'efficacité de ces derniers et de procéder aux
réajustements qui ne manqueront pas de s'imposer. J'ajoute ici, par
exemple, qu'au fur et à mesure qu'on pourrait progresser dans
l'étalement de l'installation de nouveaux modèles de
décrets, nous aurions à nous interroger sur la faisabilité
au fur et à mesure des années et nous nous interrogeons sur la
question du deuxième cycle secondaire.
Enfin, que les commissions scolaires et les écoles auront le
temps nécessaire pour procéder à la gestion progressive
des modifications aux conditions d'emploi, pour profiter des résultats
de l'application des mesures de résorption susceptibles de
réduire le nombre de personnes mises en disponibilité,
atténuant ainsi l'insécurité chez les personnels du
réseau par une utilisation rationnelle des effectifs d'enseignement.
Devant ces affirmations et nos lectures des constatations sur les
conséquences possibles du décret, quelles sont les attentes des
directeurs généraux dans ce dossier? Les directeurs
généraux reconnaissent qu'il est de la prérogative
gouvernementale de prendre la décision de réduire les coûts
en éducation. Cependant, tout en considérant qu'il est de notre
mandat de prendre les mesures pour appliquer lesdites politiques
gouvernementales, nous rappelons qu'il est aussi de notre responsabilité
de réclamer les modalités et les disponibilités
financières pouvant assurer le bon fonctionnement des écoles lors
des processus de changements engagés par les autorités
gouvernementales. Et, tout en insistant sur le fait que le régime
pédagogique ne peut faire l'objet de négociation, les directeurs
généraux réclament - nonobstant que le ministre de
l'Éducation ait rappelé mercredi que le cadre de règlement
du 10 février demeure une offre disponible - l'application de ce cadre
de règlement avec toutes les garanties financières pour permettre
sa mise en oeuvre. Le réseau a besoin de ce cadre de règlement et
de ses garanties financières totales - nous référons ici
aux sommes soulevées par le sous-ministre, lors de l'exposé de
mercredi soir - pour assurer au minimum le changement rythmé,
contrôlé, mesurable, tant sur le plan des modèles
pédagogiques à découvrir que sur le plan des moyens
à installer pour assurer une gérance efficace des nouvelles
mesures relatives aux conditions d'emploi des enseignants.
Reprenant d'ailleurs les propos de M.
Laurin qui convenait, lors de son allocution d'ouverture, de certains
risques au sujet de la qualité pédagogique, ce cadre
intégral du 10 février prend toute son importance à cause,
particulièrement, de son processus d'étalement pour gérer
le changement, notamment dans l'organisation de l'enseignement au secondaire.
Il prend aussi toute son importance à cause, notamment, des garanties
relatives au maintien des spécialistes au primaire, de l'adoucissement
des mesures de récupération salariale chez les enseignants mis en
disponibilité et du temps qu'il donne pour mettre en place les mesures
de résorption des effectifs mis en disponibilité, cherchant bien
sûr à éviter éventuellement le départ des
jeunes professionnels nécessaires au renouvellement de la
profession.
A ces conditions, l'Association des directeurs généraux
des commissions scolaires est d'avis qu'il serait possible d'assurer la
qualité des services dans les réseaux primaire et secondaire. Je
vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Laurin: L'association des directeurs généraux au
sein des commissions scolaires joue un rôle majeur également,
analogue à un niveau plus élevé que celui des directeurs
d'école. Leur rôle est également un rôle majeur,
essentiel puisque ce sont les gestionnaires principaux quotidiens des
commissions scolaires. Il est donc important d'accorder une grande attention
à ce qu'ils nous disent ce soir.
Je relève que l'Association des directeurs généraux
des commissions scolaires est d'accord avec les principales dispositions du
décret. Par exemple, les directeurs généraux sont d'accord
sur le concept de la tâche globale, sur l'introduction d'une notion de
capacité à l'enseignant, sur le processus de détermination
des tâches et responsabilités poursuivi en concertation avec les
enseignants et les directeurs, sur la présence effective plus grande de
l'enseignant auprès des usagers, sur l'élaboration d'une
politique d'organisation des services à offrir aux élèves
en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
Cependant, ils nous signalent certains éléments qui les
ont préoccupés, surtout en fonction du décret tel qu'il se
présentait avec la loi 105. Par exemple, ils sont
préoccupés au sujet d'une augmentation brusque de la tâche
surtout si celle-ci avait pour effet de réduire le nombre de
spécialistes au primaire, dans le cas où le régime
pédagogique du primaire ne serait pas modifié.
Je pense que je peux répondre à cette préoccupation
en répétant, encore une fois, que j'ai pris l'engagement de
modifier le régime pédagogique de façon que le temps de
présence des enfants au primaire soit augmenté de 23 heures
à 25 heures. J'ai écrit aujourd'hui même, comme la Loi sur
l'instruction publique m'y oblige, au Conseil supérieur de
l'éducation pour lui demander son avis, en le priant de me le faire
parvenir, évidemment, avec le plus de célérité
possible. Le processus est donc engagé.
L'Association des directeurs généraux s'inquiète
aussi ou se préoccupe également d'une augmentation brusque de la
tâche au secondaire - ce qui pourrait avoir comme effet d'augmenter le
nombre d'élèves par enseignant si les modèles
organisationnels ne sont pas modifiés - et d'une augmentation soudaine
et considérable du nombre d'enseignants mis en disponibilité qui
pourrait suivre cette augmentation brusque de la tâche au secondaire.
Mais, dans son mémoire, elle rappelle cependant qu'il y a eu, le 10
février, en concertation avec tous les partenaires de
l'éducation, un cadre de règlement qui a été offert
aux syndicats et qui prévoyait justement cet étalement de la
tâche au cours de la période de trois ans que couvre normalement
une convention collective. Donc, cet étalement auquel l'Association des
directeurs généraux tient, et elle vient de nous le rappeler,
aura précisément pour effet d'éliminer les causes de
préoccupations qu'entretenait l'Association des directeurs
généraux.
L'Association des directeurs généraux répète
cependant que ceci est fonction de modèles organisationnels qui, non
seulement rendraient faisables, praticables, applicables les décrets,
mais également assureraient une plus grande qualité de
l'éducation. Elle en fait même une condition de
l'amélioration de la qualité de l'enseignement.
Est-ce que je pourrais demander à M. Paquet, le président,
ou à ses collaborateurs, de nous en dire davantage sur ces
modèles organisationnels qui commencent à être mis en
application ou qu'élaborent actuellement les directeurs
généraux de commissions scolaires, en vue, d'une part, de rendre
applicables les décrets et, d'autre part, d'améliorer la
qualité de l'enseignement?
Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): Si vous me le permettez, M. Laurin, je serais
porté à donner à M. Lapointe qui m'accompagne l'occasion
de répondre à ce sujet, compte tenu des partages de dossiers que
nous avons faits.
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
M. Lapointe (Normand): Je serai très bref. Je voudrais
simplement rappeler qu'on a déjà, au cours des audiences qui
ont
précédé, retenu certaines propositions,
présenté certains projets; on a parlé de titulariat, de
polyvalence de l'enseignement des matières, particulièrement au
premier cycle. Je rappellerai essentiellement que notre proposition demande un
temps pour valider un ensemble de projets qui pourraient naître de la
concertation et de la collaboration des divers partenaires du réseau.
L'étalement proposé dans le cadre du règlement du 10
février nous semble donner une marge de manoeuvre, tant par la moyenne
des périodes d'enseignement plus basses comparativement à la
tâche globale que par les effets moins brusques sur l'affectation du
personnel.
Nous avons actuellement des inquiétudes, particulièrement
quant au deuxième cycle du secondaire, où il faut tenir compte
qu'il n'est pas facile d'arriver à une polyvalence de toutes les
matières puisque certaines d'entre elles exigent, même de la part
des attentes des étudiants, la présence de spécialistes.
Le secteur professionnel en est un exemple évident. Certaines
matières scientifiques présupposent aussi des qualifications
particulières et le contexte particulier de certaines matières se
prête mieux à la polyvalence que d'autres, selon les attentes des
étudiants, les attentes du régime pédagogique et aussi la
capacité des enseignants d'y faire face. (23 heures)
Nous avons mis une sourdine à savoir que ces deux
premières années nous permettraient de valider la
possibilité d'aller jusqu'à la proposition de tâche de
troisième année, dans le cadre de règlement, afin de
permettre que si les modèles organisationnels développés
par les partenaires ne réussissaient pas à combler nos attentes
et nos besoins, il puisse y avoir des réajustements qui pourraient
être faits en cours de route, en pensant qu'en un an, deux ans, les
partenaires du réseau auraient assez de créativité,
d'ingéniosité pour développer ces modèles et faire
ensemble les correctifs qui s'imposeraient, s'entendre sur les correctifs qui
s'imposeraient si les difficultés d'application des mesures de la
troisième année devenaient évidentes.
M. Laurin: Merci.
Le Président (M. Jolivet): M.
Tousignant.
M. Tousignant (Gérard): En complément de
réponse à la question du ministre de l'Éducation, la
question fondamentale qu'on doit se poser est: Est-ce qu'on privilégie
ce qu'on peut appeler la qualité pédagogique au sens que peut
apporter un spécialiste ou s'il faut plutôt faire le choix d'une
amélioration des relations élèves-adultes? La
problématique telle qu'on la vit au secondaire, depuis plusieurs
années, est qu'effectivement il faut affirmer que nous avons dans nos
écoles des enseignants très qualifiés dans chacune des
disciplines dispensées aux élèves. Le problème
soulevé à la fois par les parents... Ici je fais même
référence à des consultations que nous avons faites dans
notre commission scolaire où les parents et les étudiants
s'entendaient sur une chose en disant que ce qu'il faut de toute urgence c'est
d'améliorer les relations élèves-adultes. Nous savons tous
que pour améliorer les relations élèves-adultes il n'y a
qu'une seule façon. C'est de développer une forme d'appartenance
à un groupe afin d'être en interaction personnalisée avec
un enseignant ou un nombre plus réduit d'enseignants. À notre
avis, les nouveaux modèles d'organisation pédagogique doivent
s'inspirer de ce postulat. Comme le disait M. Normand Lapointe, il est clair
aussi que c'est davantage au premier cycle et qu'il faudra doser bien sûr
le modèle au fur et à mesure qu'on progressera vers la
quatrième ou la cinquième année du secondaire.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: Donc ce que vous visez, c'est une diminution de la
mobilité des élèves d'une classe à l'autre au cours
d'une même journée, la diminution du nombre d'élèves
également qu'un professeur est appelé à rencontrer afin
qu'une meilleure connaissance par le professeur de l'élève puisse
ainsi s'avérer. De manière également que cette
connaissance plus profonde permette l'identification des problèmes
particuliers que peut connaître un élève, du rythme
d'acquisition de ces apprentissages, des progrès plus rapides qu'il peut
faire dans certaines matières, des retards qu'il peut connaître
dans d'autres, afin que l'enseignement soit davantage individualisé
d'une part et que, d'autre part, tous les autres éléments de la
personnalité concourent à l'acquisition des apprentissages la
plus rapide et la plus profonde possible. Vous pensez qu'avec ce modèle
organisationnel on peut s'approcher davantage de l'objectif.
M. Tousignant: Nous croyons fondamentalement qu'il faut
s'orienter vers ce modèle-là. Bien sûr, il faut faire le
constat que depuis au delà de quinze ans au Québec nous avons
travaillé selon un modèle différent, le modèle du
spécialiste. Il faut ajouter en toute honnêteté que les
enseignants ont répondu à ces demandes, à ces orientations
en allant se spécialiser. J'affirme encore une fois que nous avons au
Québec des enseignants compétents dans chacune des disciplines.
Il faut dire qu'avec les nouveaux programmes, le nouveau régime
pédagogique avec des programmes plus
précis, il s'agira sans doute d'un moyen pour permettre à
un enseignant d'assumer une deuxième discipline sans trop de
problèmes. Mais pour cela, il faudra du recyclage et, fondamentalement,
du temps. C'est surtout l'élément de base. On ne le peut pas du
jour au lendemain. D'ailleurs, nous-mêmes, dans nos expériences
personnelles - cela fait dix ans qu'on fonctionne d'une façon - il nous
faut au moins avoir l'occasion de réfléchir à cela, de se
faire à l'idée, de s'y préparer, pour ensuite nous
orienter dans l'optique de ce nouveau modèle.
M. Laurin: À ce même problème, ou à
l'atteinte de ce même objectif, vous reliez une modification que les
décrets annoncent sur la conception même que l'on se fait de la
tâche de l'enseignant; je veux dire par là la tâche globale.
Pourriez-vous nous expliquer davantage comment cette nouvelle notion de
tâche globale peut concourir aux objectifs que l'on vient
d'énoncer?
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
M. Lapointe: Encore brièvement, je pense qu'on peut se
rappeler les réclamations faites par les administrateurs scolaires sur
le minutage à outrance, des caractéristiques du modèle
précédent de détermination de la tâche en A, B, C et
D. Je pense que les gens qui ont traité des conventions sont familiers
avec ces appellations.
D'autre part, nous savons tous que chez les enseignants on retrouve des
personnes avec des qualités humaines différentes pour aider
à l'acte éducatif. Certains ont une très grande
facilité à l'enseignement proprement dit; certains ont plus de
facilité pour l'animation, se sentent plus à l'aise avec les
adolescents dans ce domaine et d'autres ont développé des
habiletés particulières, ou des capacités
particulières, dans des types d'activité scolaire et
parascolaire, des activités étudiantes. Certains pourraient
être plus habiles dans des mesures de récupération avec de
petits groupes d'élèves ou des élèves à
titre individuel.
Nous pensons que le concept de tâche globale, selon lequel,
à l'intérieur d'un projet éducatif, une
équipe-école serait en mesure de répartir des tâches
non pas selon une formule mathématique d'égalité absolue
des types de fonctions dans l'école, mais en fonction des
capacités, goûts et intérêts de chacun des individus,
pour répondre aux besoins identifiés des élèves
dans le projet éducatif de cette école en particulier, le concept
de tâche globale ouvre évidemment un ensemble d'horizons fort
intéressants.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: J'ai pris connaissance avec beaucoup
d'intérêt du document que vous nous avez soumis. Il contient un
bon nombre d'observations qui, évidemment, traduisent la connaissance
intime que vous avez des problèmes de gestion de l'éducation, des
services éducatifs aux niveaux primaire et secondaire. Je voudrais
signaler qu'il m'est arrivé souvent, au cours des derniers mois, de
recevoir une collaboration très appréciée de directeurs
généraux de commissions scolaires. J'ai été mis en
contact avec eux et j'ai été heureux de constater qu'ils
étaient très bien structurés et qu'en
général ils pouvaient répondre d'une manière
rapide, efficace et fiable aux questions qu'on leur posait.
Quand on est député, qu'on s'occupe de bien des choses,
qu'en plus on a un comté à surveiller, à servir, et qu'on
a la charge d'un secteur comme celui de l'éducation, on doit compter sur
la collaboration des agents du milieu. Cela a été une de mes
découvertes dans le monde de l'éducation de constater que c'est
peut-être un des secteurs de notre société où on
peut s'appuyer sur un réservoir de collaborateurs extrêmement
diversifiés et, dans l'ensemble, très disponibles.
Vous faites partie de ce groupe de personnes spécialisées,
travaillant à temps plein ou à temps partiel, à titre
professionnel dans votre cas, à titre bénévole dans
d'autres, qui font du monde de l'éducation de chez nous un des secteurs
les plus intéressants de la société
québécoise. Par conséquent, c'est un plaisir pour nous de
l'Opposition de renouer connaissance, d'échanger quelques opinions avec
chaque groupe nouveau qui se présente devant la commission dans un
climat de liberté aussi grand que possible.
À mesure que nous avançons dans nos travaux, nous devenons
un petit peu plus impatients, parce que nous voudrions que le gouvernement
bouge davantage et, au contraire, il semble continuer de baigner dans la
placidité apparente dont les interventions du ministre de
l'Éducation sont une bonne illustration. Nonobstant ceci, vous
comprendrez qu'à mesure que nous avançons nous posions moins de
questions de cathéchisme et peut-être plus de questions critiques.
Cela fait partie de la démarche que nous faisons, pas du tout parce que
nous voulons serrer un groupe un petit peu plus que l'autre, pas du tout.
J'ai remarqué une chose en lisant votre mémoire, il n'y a
pas un mot sur la négociation. Je me disais à supposer - il y a
de bonnes choses dedans, je les soulignerai ensuite - que nous vivions dans un
autre monde où il n'y aurait que les décrets du Dr Laurin, il n'y
aurait pas de conventions
collectives et de syndicats, je pense que les observations que nous
avons lues ici pourraient pratiquement toutes s'appliquer très bien. Je
ne veux pas du tout laisser entendre que vous êtes indifférents
à cette réalité, mais nous sommes ici pour examiner cette
réalité-là ces jours-ci. Je voudrais vous demander de me
citer deux ou trois paragraphes dans votre mémoire, je les ai
très bien vus et je vous serai reconnaissant de les rappeler à
nos concitoyens, où vous signalez qu'il est très important qu'il
y ait une bonne qualité de relations entre ce que vous appelez d'un
terme un petit peu gestionnaire, les intervenants du monde scolaire.
Parmi ces intervenants, il y en a qui sont extrêmement importants,
ce sont les travailleurs syndiqués, en particulier les enseignants dont
l'organisation syndicale est plus forte et plus structurée parce qu'ils
sont plus nombreux. Ils se sont bâti une tradition militante très
forte depuis un quart de siècle. Je voudrais vous demander comment vous
voyez le rôle du syndicalisme dans le monde scolaire. Comment voyez-vous
la manière d'aborder le problème que nous avons, cette menace de
conflit qui reste suspendue au-dessus de vos têtes et des nôtres,
de manière à l'acheminer vers un règlement
négocié et est-ce que vous pensez, parce que vous dites à
la fin de votre mémoire: "Nous réclamons - en majuscules
-l'application du cadre de règlement du 10 février", si j'ai bien
compris, pensez-vous que ce serait préférable ou
indifférent que surgisse plutôt au cours de la prochaine semaine
ou des deux prochaines semaines, je ne sais trop, un règlement
négocié, dut-il s'éloigner plus ou moins du cadre de
règlement du 10 février dont nous convenons tous qu'il marquait
un progrès par rapport au décret? C'est la première
question que j'aimerais vous adresser parce qu'il me semble que c'est celle
qu'en raison - j'espère que cette fois-ci la présidence sera
d'accord avec moi - du mandat qui nous a été donné, nous
devons vous adresser.
Le Président (M. Desbiens): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): Je voudrais au moins préciser une
chose en commençant, de façon à clarifier je dirais notre
supposée absence notre intervention sur la question des
négociations. Je reviendrai à notre première page, M. le
député d'Argenteuil, où nous disions que nous supposions
qu'il y avait un autre temps qui serait plus propice à cette
évaluation. Mais j'insiste pour dire que ce n'était pas dans
l'objectif de glisser à côté de la question. On supposait
qu'elle viendrait, sauf qu'on avait pris comme stratégie d'approche, en
communication avec la commission, comme le mandat de cette commission visait
à rechercher les façons d'interroger ou des contenus interrogeant
la qualité de l'enseignement, on s'est attaché à cela par
souci d'une réponse claire aux questions posées.
Quant à la question des négociations, du rôle du
syndicalisme et autres débats qui ont fait l'objet, durant la
journée, de façon plus intense, des préoccupations qui
sont venues, c'est très clair que nous avons un propos à vous
tenir. Nous ne l'avions pas présenté parce que nous pensions que
théoriquement, si cela avait bien été, on s'en serait tenu
à un contenu d'organisation pédagogique. Mais soyez sans crainte,
on y répondra très clairement. En même temps que cela fait
notre affaire de ne pas l'avoir mis dans le texte, on se sentira plus à
l'aise que dans un propos où les qualificatifs sont toujours
retournées des fois. On ira donc verbalement.
Quant à votre question sur notre réclamation, je voudrais
quand même dire que quand on dit que nous réclamons le cadre de
règlement, ce n'est pas parce que nous nous opposons à une
possible et nécessaire éventualité qu'il y ait un
règlement, ce n'est pas parce que nous nous opposons à une
éventualité et à une nécessaire
éventualité qu'il y ait un règlement
négocié. Je pense que l'idéal serait ce que nous
espérons. Je pense que c'est ce que tout le monde a espéré
et espère encore maintenant. (23 h 15)
Cependant, ce qu'on a voulu faire dans un contexte où il aurait
pu arriver qu'il n'y ait pas possibilité de règlement
négocié, nous avons voulu insister de nouveau sur une chose qui a
été très claire. On s'est identifié clairement,
dans le dépôt gouvernemental du 10 février, comme
étant des collaborateurs à ce cadre de règlement. Au
début de mon intervention, je voudrais rappeler que quand nous nous y
sommes accolés, c'était par souci d'avoir fait un travail pour
que le réseau obtienne des aménagements qui rendent le
décret "gérable". Dans ce sens, vous avez vu, dans nos
réclamations, les motifs pour lesquels nous l'avons fait. C'est bien
sûr que, dans un contexte où le pis serait qu'il n'y ait pas de
règlement négocié, de toute façon - nous le
répétons ici; nous l'avons dit clairement à M. Laurin; il
nous a entendus, je pense - nous souhaiterions qu'une position gouvernementale
ferme ne soit pas en-deçà de cette proposition du 10
février. Nous sommes convaincus qu'il nous la faut, de façon
minimale, pour avoir ce dont Normand et Gérard parlaient, le temps pour
gérer la transition. Nous nous opposons à des transferts radicaux
d'organisation, parce que nous avons à muter un système qui a
quinze ans d'organisation et cela ne sera pas dans une organisation de
printemps 1983 pour septembre 1983.
C'est le sens de notre réclamation et
ce n'est surtout pas une non-préoccupation pour un
règlement négocié.
Quant à la question de la négociation comme telle, je vais
vous donner la réaction que nous avions là-dessus. Cela va
comprendre une partie que vous soulevez et cela va en ajouter aussi pour ce qui
concerne la question du climat.
Il est très évident que les directeurs
généraux appuient formellement tous ceux qui parlent, au
Québec, de l'engorgement du climat et de l'organisation scolaires. Aussi
curieux que cela puisse paraître, le pis, c'est que cela nous arrive,
à nous tous. Que nous soyons administrateurs actuellement. Pour la
plupart, nous tenons nos origines d'une carrière pédagogique;
actuellement, nous sommes des professionnels de l'organisation administrative,
mais notre vocation est de travailler en collaboration, premièrement,
avec les professionnels de l'enseignement. Quand on constate que, dans la
mission éducative, ceux qui sont les collaborateurs sont engorgés
dans un processus systématique et répété
d'opposition, c'est assez spécial et assez curieux. Nous qui nous
targuons de principes pédagogiques pour le développement des
jeunes, cela fait spécial, cela fait curieux, cela fait même
"interrogeable".
Les motifs pour lesquels nous sommes arrivés à cela, c'est
une autre chose. Je vais être très clair là-dessus. On
n'est même pas convaincus qu'il y ait des réponses exclusives et
définitives à cela. Ce qu'on constate, c'est qu'il y a
possiblement des éléments à multiples facettes. On a
entendu, ce matin, des représentants étudiants parler, par
exemple, d'esprit corporatiste. C'est peut-être une possibilité.
Comme directeurs généraux, dans le travail que nous faisons -nous
l'avons dit dans la présentation de notre mémoire - nous avons
des préoccupations tout à fait normales de défendre des
intérêts qui concernent notre statut. C'est bien évident
que les autres groupes font de même et, parfois, ce sont d'autres
groupes. Il y a possiblement quelque chose qui puisse être de ce
volet.
C'est peut-être parce que, depuis 1964, tout le monde de
l'éducation s'est embarqué dans un processus exigeant de
redressement et de réorganisation. Serait-ce, avec le temps, que nos
esprits échauffés ont fait que le pourcentage d'écoute a
baissé? C'est une deuxième hypothèse. Serait-ce que,
finalement, à force de se coltailler entre nous pour trouver des
réponses à ceci et à cela, pour trouver des garanties
à la qualité et des garanties à nos statuts, on ait fini
par créer entre nous, parfois, des agressivités? Finalement,
serait-ce qu'à travers tous ces débats, on ait peut-être
fini par oublier le sens de la vraie mission qui nous amenait? Ce sont des
questions qu'on pose. Ce sont des questions qu'on se pose. J'avoue très
humblement que nous serions très insécures d'affirmer qu'il n'y a
que cela ou que cela.
Une chose est évidente, le fait est là, j'oserais dire,
sans faire de pathos là-dessus, qu'on le considère dramatique.
Ceux qui oeuvrent dans le métier depuis quinze ans, depuis 1967 et 1968,
après les grands moments du rapport Parent et de la Loi sur
l'instruction publique, etc., ne peuvent que dire - quand je dis "dans le
métier", je ne parle pas que de nous, je parle de tous ceux qui oeuvrent
dans l'éducation, à tous les niveaux - que c'est très
difficile d'y oeuvrer. On est ballotté d'abord par un temps de
création, car tout le monde est embarqué dans un processus de
création. Je suis d'accord avec ce que M. Tousignant disait et je suis
aussi d'accord avec ce que Normand disait. Les gens se crèvent à
essayer de faire des modèles avantageux, de qualité, et quand ces
bons moments arrivent, je suis convaincu qu'il sort des écoles, des
commissions scolaires et du réseau en général des
modèles organisationnels fort intéressants.
On est ballotté par ce moment de création, on est
ballotté par un recommencement, parce qu'on a commencé à
travailler ensemble à un effort de concertation et, oup!, à un
moment donné, quand on ne s'y attend pas ou juste quand on ne le veut
pas, un règlement de conflitl Ce qui s'ensuit, un moment de
désillusion -excusez-moi l'expression, sans faire de vulgarité -
un peu d'écoeurement, les gens n'ayant plus le goût de faire un
effort de création, un radoucissement, parce qu'on est "tanné" de
vivre ensemble et de se regarder de travers - on se dit qu'on va recommencer
à travailler parce que cela n'a pas de bon sens - et un recommencement
d'effort de création. Juste comme le cycle recommence, on retombe dans
le processus de conflit. C'est un fait que personne ne peut contester et,
à moins qu'on ne veuille pas le voir, c'est comme ça que
ça se passe depuis quinze ans au Québec. Je vous
répète qu'on ne cherche pas de coupable, on ne sait plus
où on en est. Ce qui est clair, c'est qu'on est pris
là-dedans.
Dans ce sens, on voudrait, sur les moyens pour y arriver, parler de ces
concertations réelles qui sont à recréer. Comment y
arriver? Cela va prendre entre les intervenants (enseignants, syndicats,
organisation de réseaux, les commissions scolaires, les directeurs
généraux, tant dans les écoles que dans les commissions)
un processus nouveau, motivant, par lequel on va pouvoir recréer une
concertation. Si on ne produit pas ce nouveau sommet en éducation, on va
répéter le cycle jusqu'à ce que, finalement, le
réseau public soit vraiment en processus de déclin
sérieux. C'est à peu près notre sentiment à ce
sujet.
M. Ryan: J'apprécie le caractère modeste de la
réponse que vous apportez à cette question qui nous laisse tous
très perplexes. Votre réponse démontre que vous êtes
en recherche là-dessus, c'est une chose que nous devons
apprécier. Nous allons souhaiter que votre recherche continue et qu'elle
débouche sur des moyens plus précis que ceux que vous êtes
en mesure d'indiquer ce soir.
Il y a une autre question que je voudrais vous adresser et qui me
préoccupe depuis le début des travaux de la commission. On parle
de la tâche globale. Dès la fin de novembre, nous avons dit, dans
les propositions de règlement que nous mettions de l'avant, qu'il
fallait une intégration de la tâche, que la fragmentation
extrême inscrite dans les conventions collectives ne pouvait pas durer
comme telle et qu'il faudrait un effort d'assouplissement de ce
côté.
Il y a d'autres points que vous mentionnez dans votre mémoire et
sur lesquels nous avons déjà exprimé notre accord, il y a
déjà un certain temps, à la suite, d'ailleurs, de
consultations avec toutes sortes d'intervenants du monde de l'éducation,
mais il y a deux points qui me viennent à l'esprit à ce sujet. Je
voudrais connaître votre réaction. Quand on parle de tâche
globale, ne serait-il pas temps qu'on parle de la tâche globale au
complet et non pas seulement de la partie qui est administrativement
gérable et contrôlable? Vous vous rappellerez le rapport de la
commission présidée par un monsieur de Saint-Jérôme,
qui est principal d'une école secondaire à
Saint-Jérôme actuellement, commission qui avait
étudié le contenu de la tâche de l'enseignant dans les
années soixante-quatorze ou soixante-quinze... Son nom m'échappe
parce qu'il est tard.
Une voix: M. Montreuil.
M. Ryan: M. Montreuil, c'est cela, justement. Il avait fait
toutes sortes de consultations, toutes sortes de sondages, d'études de
contenu, évidemment, des journées de travail des enseignants. Il
en est arrivé à établir que la semaine de travail d'un
enseignant allait chercher entre 38 heures et 40 heures. La préparation
qu'il fait chez lui, la correction des devoirs qu'il fait chez lui, c'est aussi
important que le fait de savoir s'il va y avoir 22 ou 23 périodes dans
la semaine; je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. On n'a pas
entendu évoquer cela de la part de la très grande majorité
des témoins qui sont venus ici. Je pense que cela fausse la perspective
en partant parce qu'on se limite strictement à ce qui entre dans le
cadre administratif et contrôlable du ministère de
l'Éducation. Je ne sais pas s'il n'y aurait pas un effort à faire
pour élargir cela. Il faudrait promouvoir aussi les dimensions dont on
ne parle jamais, évidemment, et qui, à mon point de vue, sont
peut-être plus impartantes à bien des égards.
Deuxièmement, je ne vois pas comment on peut arriver
sérieusement à définir la tâche, surtout si on parle
de la tâche globale, si on la compartimente. On peut toujours arriver
à prendre des aspects et à les définir en dernière
extrémité, unilatéralement, mais plus on parle de la
globaliser, plus il me semble qu'il devient important de le faire en
étroite concertation avec ceux qui sont visés,
c'est-à-dire les enseignants. Là, je vois un problème.
Toute cette opération se fait actuellement - je ne sais pas comment je
dirais cela, mais en tout cas - sans entente avec les enseignants. De toute
évidence, c'est le coeur du conflit, d'après ce qu'on nous dit.
Je ne sais pas comment vous voyez cela. Ces deux carences qui me semblent
évidentes dans la manière dont on présente le
problème actuellement, comment pourrait-on y remédier à
court terme pour arriver à donner plus de chance à l'instauration
du climat de concertation, de collaboration que vous considérez comme
indispensable? Je me dis: On peut avoir tous les plus beaux raffinements
administratifs, budgétaires ou de contrôle, si le climat fait
défaut, je pense qu'on arrive avec des crises comme celle qu'on
connaît, dont vous disiez vous-même tantôt qu'elle
revêt un caractère dramatique.
Maintenant, je vous préviens que j'ai terminé mon temps.
Je ne voudrais pas que vous me répondiez longuement. Si vous ne
répondez pas, cela ne me fait rien. Vous allez continuer à
travailler là-dessus. Je voudrais donner la chance à d'autres de
parler et, par conséquent, je ne veux pas que vous vous sentiez
obligé de répondre. Si le président précise que
j'ai épuisé mon temps, je n'invoquerai pas de question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez épuisé
votre temps, M. le député d'Argenteuil, sauf que vous savez qu'il
s'agit, en fait, d'une répartition, je pense, pour que chaque
côté puisse avoir le même temps pour poser des questions et
obtenir des informations de nos invités. M. Paquet, vous voulez
répondre dans le temps réservé à la partie de
gauche?
M. Paquet (Michel): Justement, pour essayer d'écourter le
temps, M. Lapointe va faire une première réponse et il y aura un
commentaire par M. Tousignant.
Le Président (M. Desbiens): M.
Lapointe.
M. Lapointe: Très brièvement, effectivement, deux
commentaires.
Évidemment, le rapport de la CETEES était volumineux, il a
apporté des éléments très intéressants.
Cependant, il est évident qu'il n'a pas, sans doute, atteint les
objectifs puisqu'on l'a rapidement abandonné sur les tablettes. Il faut,
cependant, se rappeler que la tâche globale, telle que mentionnée
et définie implicitement par notre court mémoire, fait,
évidemment, appel à la comparaison de la partie de la tâche
qu'on pourrait appeler, entre guillemets, "conventionnée" et les 22
périodes apparaissant à la situation actuelle, 1982-1983, au
secondaire, par exemple, en comparaison des 25 périodes, les 22
périodes comprenant 20 périodes au maximum de tâche stricte
d'enseignement et 2 périodes d'activités autres comprenant
animation, récupération, surveillance, etc. Je veux m'en tenir
à cela.
Le Président (M. Desbiens): M. Tousignant.
M. Tousignant: Quand on parle de tâche globale, il faut y
accoler immédiatement la notion de tâche moyenne. Cela ne se
sépare pas. Deuxième point, par rapport à la question
d'une recherche de solution au problème, je pense que, quand on
recherche une solution à un problème, une bonne façon,
c'est de bien le poser. Je pose l'hypothèse que, s'il n'y avait pas
augmentation de la tâche, il n'y en aurait pas de problème et il
ne se ferait pas un débat important actuellement sur la seule notion de
la tâche globale. Le problème fondamental, c'est qu'il y a une
augmentation de la tâche qui conduit, bien sûr, à des
diminutions de postes en éducation, ce qui contribue à une
augmentation des mises en disponibilité. Le problème n'est pas
ailleurs. Au bout de la ligne, cela s'appelle des dollars.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout
d'abord, remercier l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires de nous avoir présenté ce mémoire et
d'avoir accepté d'attendre jusqu'à une heure aussi tardive pour
nous présenter les intéressantes données contenues dans ce
document. S'il y a des personnes, s'il y a un groupement qui aurait pu verser
à outrance dans la technique, dans les calculs mathématiques,
dans des normes que personne ne comprend sauf les spécialistes qui sont
formés à cet effet, je pense que cela aurait pu être
l'association des directeurs généraux, qui ont quotidiennement
à organiser l'enseignement dans nos commissions scolaires et dans nos
écoles. Sauf qu'ils ne l'ont pas fait et je les en félicite.
(23 h 30)
En effet, cette commission dure depuis trois jours déjà
et, au moment où le gouvernement a accepté d'instaurer cette
commission parlementaire, c'était pour permettre de faire la
lumière sur tout ce débat qui s'est déroulé en vase
clos, évidemment, dans un contexte de négociation qu'on
connaît. Le fait de recevoir ici des spécialistes, des gens qui
sont impliqués dans le monde de l'éducation, permet, avec les
questions des parlementaires qui, pour la plupart, sont des profanes dans le
domaine, de jeter un éclairage peut-être nécessaire ou
à tout le moins, de rassurer l'ensemble de la population. Voici les
trois questions auxquelles on essaie de répondre depuis trois jours et
on continuera lundi. La première question, les directeurs
généraux l'ont abordée dans leur document et c'est ce que
les gens qui nous écoutent se demandent: Avec les décrets qui
sont sur la table, avec les aménagements proposés, les enfants du
Québec pourront-ils recevoir cette éducation de qualité
à laquelle ils ont droit et à laquelle on tient tous? C'est la
première des questions. Je reviendrai tout à l'heure sur la
façon dont vous y avez répondu, à mon avis, dans le
document. La deuxième question est la suivante: Sera-t-il possible pour
les enseignants du Québec de vivre décemment ces conditions de
travail modifiées? Est-ce que ce sera viable dans les écoles et
cela permettra-t-il aux enseignants de donner le service de qualité
auquel la grande partie des enseignants nous a habitués et auquel on
tient toujours? Enfin, la troisième question est la suivante: Est-ce que
c'est organisable, de l'enseignement, dans les conditions
énoncées dans ces documents qui sont proposés par le
gouvernement? Vous avez touché aux trois questions, mais davantage
à la première.
Je me permettrai également une parenthèse dans cette
intervention pour parler de ce dossier de l'éducation dont on a, tout
à l'heure, critiqué la venue dans tout ce processus. En
tête de ce document, on peut lire - et je me permettrai de le citer au
texte - "Parce que tous les Québécois et les
Québécoises, tous les parents, tous les enfants, tous les
contribuables, tous les enseignants et toutes les enseignantes ont le droit et
ont l'obligation de savoir quels sont les véritables problèmes,
les véritables enjeux, les véritables choix qu'impose la crise
actuelle dans le domaine de l'éducation." On a assisté ce soir,
évidemment, à des scènes plutôt regrettables dans le
contexte des travaux de cette commission. Mais est-ce qu'on peut
s'étonner face à ce document faisant partie d'une
stratégie gouvernementale d'information de bon aloi, stratégie
qui n'a jamais cessé de part et d'autre? À cet égard, le
député de Chauveau parlait tout à l'heure de ce
document daté du 3 mars qui a été
véhiculé par la partie syndicale auprès de l'ensemble des
parents dans les commissions scolaires, dans les quartiers, dans les villes et
villages du Québec, où on invite les parents à venir une
demi-heure avant le début des cours du matin, le vendredi 4 mars. C'est
une stratégie d'information syndicale qui s'est poursuivie et il y a une
stratégie, évidemment, d'information qui doit se faire pour
présenter tous les aspects de ces décrets tenant lieu de
conventions collectives, de ce cadre de règlement qui est
proposé.
Il n'y a rien qui m'étonne là-dedans quand on
considère que ce qu'on veut d'abord et avant tout, ce que chacun des
parlementaires dans cette Chambre veut, c'est faire la lumière. Les
enfants du Québec pourront-ils recevoir cet enseignement de
qualité? Les enseignants pourront-ils vivre dans ce système
proposé et, enfin, l'enseignement sera-t-il organisable, si vous me
prêtez le terme, dans les conditions qui sont
énumérées?
Je ferme la parenthèse, M. le président de l'association
des directeurs généraux, pour passer, à proprement parler,
au contenu de votre document qui, je le répète, est très
intéressant parce qu'il s'attache principalement à la question
fondamentale suivante: Les enfants du Québec pourront-ils recevoir un
enseignement de qualité? On retrouve, à la page 4 de votre
document, la phrase suivante: "Toutefois, les directeurs généraux
rejettent l'argument selon lequel toute modification à la baisse aux
conditions d'emploi entraîne automatiquement une
détérioration de la qualité des services."
J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. Est-ce que
j'interprète bien si je dis que les directeurs généraux
expriment par là que les conditions énoncées dans le
décret permettront une organisation de l'enseignement qui, tout en
demandant un effort aux enseignants, leur permettra d'avoir un cadre de vie et
de travail normal qu'ils accepteront une fois qu'ils auront vu la
réalité de cette organisation scolaire? Est-ce que les directeurs
généraux ont voulu dire par là que les enseignants seront
surpris de l'intérêt et de la qualité de l'organisation
scolaire qu'il sera possible de faire avec le décret? Cela est ma
première question.
Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): J'aimerais reprendre votre question en la
replaçant dans deux contextes. À la page
précédente, nous affirmions aussi ceci: "Les directeurs
généraux reconnaissent que la qualité est
influencée forcément par les facilités organisationnelles
ou par certaines conditions d'emploi." Je vais au paragraphe que vous avez
cité où on dit que cela n'entraîne pas, lorsqu'il y a
modification à la baisse, automatiquement une
détérioration de la qualité des services. Quand je
reprends votre question, cela ne peut être plus clair. Je pense que nous
disons, dans l'ensemble du mémoire, que, lorsqu'il y a des modifications
qui touchent les avantages sociaux - j'oublie la question des diminutions de
salaire pour ceux qui sont mis en disponibilité; je parle de la
quantité d'enseignants affectés au réseau d'enseignement
secondaire, par exemple - si on considère qu'il y a là une
quantité d'effectif qui facilite l'organisation, c'est bien sûr -
et nous le disons un peu plus loin - que cela peut modifier par voie de
conséquence l'organisation.
C'est là-dessus qu'on fait toute notre intervention. S'il y a une
modification brusque, si on vise des objectifs de revue du système
pédagogique, il ne faut cependant pas le faire d'une façon
rythmée qui ne nous permette pas de découvrir les modèles
qui accompagnent ces morceaux; sans cela, nous aurons dérangé la
qualité parce qu'on aura voulu intervenir trop rapidement. Notre
intervention va dans le sens de la vôtre, mais avec les nuances que j'y
mets. Les décrets - on le dit plus loin - comprennent des risques. Il y
a des risques potentiels. Nous croyons qu'ils sont "gérables" à
condition qu'on nous permette d'avoir un rythme de temps et des
compléments de budget. On signalait toute la question du cadre de
règlement et des sommes qui l'accompagnent; si on nous permet d'avoir
des facilités de rythme de temps et de ressources financières
pour nous permettre de jouer sur la revue du système, j'agréerais
votre commentaire, mais aux conditions qu'on y fait.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Gauthier: J'aurais une seconde question. Vous parlez de la
politique d'organisation des services à offrir aux élèves
en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, à la page 7 de
votre mémoire. Hier, on a eu l'occasion de voir ici une politique
d'élaboration des services offerts aux élèves en
difficulté d'adaptation et d'apprentissage, qui n'était
peut-être pas un modèle du genre. On parlait d'intégration
d'élèves - et je veux surtout faire porter mon intervention sur
cet aspect - en difficulté dans les commissions scolaires à
partir d'un certain nombre de principes très généraux
contre lesquels personne ne peut s'élever. Je voudrais savoir - et je
m'adresse véritablement à l'expert que vous êtes -quels
pourraient être les critères, comment pourrait se constituer une
politique de services à offrir et surtout une politique
d'intégration des élèves en difficulté
d'apprentissage. Est-ce qu'on a raison d'être craintifs sur la
qualité ou la validité d'une
telle politique dans certains cas? Est-ce qu'il y a moyen d'encadrer
cette politique, d'en fixer les grands paramètres pour qu'elle soit
effective, qu'elle soit efficace et qu'elle joue véritablement son
râle?
Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): Je vois deux parties dans votre question:
l'une qui s'appelle les encadrements ou paramètres qui fixeraient des
obligations et l'autre, la politique. J'ai aussi entendu l'argument sur la
question de la politique. Sans l'agréer, j'ai pu constater
qu'effectivement cela peut arriver que des politiques soient affaiblies par la
clarification, les arguments ou les garanties qui y sont comprises. J'ai un peu
l'embarras de prendre l'exemple que je connais le plus facilement, celui de ma
commission scolaire. Si vous me permettez cet écart, je le
présenterai.
À la suite des questions que le député d'Argenteuil
soulevait, un des moyens qu'on prend et qu'on prône beaucoup au niveau de
l'association, c'est d'en arriver un peu, beaucoup et vraiment à la
réalisation de ce processus de décentralisation avec des pouvoirs
locaux où on peut jouer sur des secteurs d'activités plus
autonomes. On peut, si on respecte qu'il y ait une possibilité de
différence au Québec entre les commissions, considérer
que, dans certains milieux, les politiques puissent être plus ou moins
élaborées, selon ce que les gens dans ce milieu acceptent et
consentent d'y mettre. Mais ce n'est pas vrai que les politiques, à ma
connaissance, soient souvent et toujours raccourcies et d'une simplicité
qui ne laisse aucune prise à des contenus et à des comment.
L'exemple dont je vous parlais, chez nous, dans notre commission, nous
avons quand même une politique qui s'inspire -quand vous me parlez des
paramètres - dans ses principes, dans ses comment des politiques
ministérielles qui touchent les services aux élèves en
difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Il y a des documents dans ce
secteur d'activités. Notre politique, en partant, dans son bout de
référence, touche cet aspect. Cependant notre politique,
après avoir fixé des principes, l'ayant travaillée en
concertation avec les enseignants, en consultation formelle auprès des
parents et ayant eu l'approbation du conseil des commissaires, précise
très en détail toutes les étapes selon lesquelles un
processus d'aide auprès des enfants peut se donner. Exemple: il y a
d'abord, avant de décréter qu'on va donner des services d'aide
particuliers, l'opération repérage, dépistage, analyse de
cas, travail de concertation dans une classe avec le parent concerné et
son enfant, l'enseignant, le spécialiste qui peut l'accompagner, comme
le psychologue, l'orthopédagogue, la direction. Il y a d'abord tout un
travail de la première étape qui est celui du
repérage.
Dans la même politique, la deuxième étape, qui ne
peut venir avant que la première ait été
réalisée, est une étape qui concerne la
détermination de "comment on va soutenir ce qui a été
repéré?" La troisième étape - vous pouvez avoir des
alternatives - peut être une question d'orthopédagogie, une
question de récupération, une question de support en classe
fermée pour une période donnée, etc. Cette question des
politiques, à mon sens, me paraît possible, existe
déjà et, dans un contexte où on clarifie des principes,
des références à des politiques gouvernementales qui
s'inspirent de grandes orientations et de "comment" locaux, le tout dans une
élaboration qui comprend la collaboration, c'est très
évident, des enseignants, des professionnels qui l'accompagnent, des
parents, des directions et des administrateurs scolaires.
Affirmer qu'il n'y a dans le réseau que des politiques qui ne
garantissent rien, cela peut être possible; je vais l'admettre, je n'ai
pas à mesurer chacune des commissions. Mais il y a quand même des
commissions où il y a des politiques qui sont organisées,
structurées, formelles et garantissant la qualité des
services.
M. Gauthier: J'avais noté un commentaire. Vous faites
état dans le document et dans votre réponse de la
nécessité d'avoir d'autre personnel que du personnel enseignant
pour apporter de l'aide aux enfants en difficulté. Le ministre s'est
exprimé très clairement à ce sujet au cours des derniers
jours en exprimant cette nécessité d'une façon très
précise. Je considère que vous êtes d'accord avec cette
position ministérielle.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Paquet (Michel): On est d'accord, on la souhaite et on
espère obtenir les ressources qui l'accompagneront aussi.
M. Gauthier: D'accord.
M. Paquet (Michel): On ne fait pas de cadeau sur cela, c'est
très évident.
M. Gauthier: J'aurais une autre question, si vous me le
permettez. J'aimerais...
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Question de règlement. Je ne veux pas
enlever la parole
au député de Roberval. Il ne reste qu'un quart d'heure
d'ici à minuit. Il a déjà utilisé un quart d'heure
et je pense que le dernier quart d'heure devrait revenir à
l'Opposition.
Le Président (M. Jolivet): Je ne pense pas, madame,
malheureusement que ce soit une question de règlement. C'est
peut-être une question de distribution du temps.
Mme Lavoie-Roux: Ou d'information.
Le Président (M. Jolivet): Oui, c'est cela. Le ministre a
pris 14 minutes, M. le député d'Argenteuil a pris 21 minutes, le
député de Roberval, s'il veut prendre ses 20 minutes, c'est son
choix; il vous restera probablement une dizaine de minutes pour rejoindre
environ le même temps quant aux deux interventions qui ont
été faites de part et d'autre.
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci. Comme je suis inscrite sur la liste, je
souhaiterais que mon collègue de Roberval me laisse un peu de temps pour
intervenir sur l'excellent mémoire qui nous est présenté.
(23 h 45)
Le Président (M. Jolivet): Le message étant fait,
le député de Roberval peut le prendre, libre à lui. M. le
député de Roberval.
M. Gauthier: J'ai bien noté les demandes de mes deux
collègues, de ma collègue ministérielle et de ma
collègue d'en face. Je vais essayer de ramasser mes dernières
questions rapidement. J'aimerais avoir des explications, cependant, à la
page 9 du document, sur une phrase qui me préoccupe un peu et que je
comprends mal. Vous dites que la qualité des services sera maintenue
pour autant que - et je vais au deuxième paragraphe - "les dispositions
incluses aux contrats des personnels et touchant des aspects importants comme
l'ancienneté et la capacité respecteront les besoins
pédagogiques des élèves". Pourriez-vous en quelques
minutes, puisque le temps nous presse, clarifier cette phrase?
Le Président (M. Jolivet): M.
Tousignant.
M. Tousignant: C'est, tout simplement, que nous ne sommes pas
d'accord sur les modèles traditionnels, basés uniquement sur
l'ancienneté, qui ne tenaient pas compte des besoins réels des
élèves. Effectivement, on s'insurge contre les affirmations
où on dit que la seule intention des responsables des écoles,
c'est de trafiquer et de faire des jeux d'influence, de "discarter" telle
personne ou telle autre. On pense qu'il y a des besoins réels. Quand on
parle de capacité, c'est qu'on se demande: Pour tel type d'enfants, quel
enseignant répondrait le mieux?
M. Gauthier: Concernant le critère de la capacité -
c'est ma dernière question -j'ai eu l'occasion plus tôt cet
après-midi, avec les directeurs d'école, de discuter de cette
notion de capacité. Avez-vous pris véritablement connaissance de
la définition de la notion de capacité telle qu'elle est
donnée dans les documents? Elle est en quatre points, et j'aimerais
revenir là-dessus: brevet d'enseignement ou une année
d'expérience d'enseignement de la matière, suivre des cours
actuellement dans la matière et une dernière notion qui est que,
s'il n'y a aucune de ces trois conditions qui est remplie, la personne soit
jugée capable par expérience ou autrement d'enseigner la
matière. Concernant ce critère de la capacité,
partagez-vous les craintes exprimées par certaines personnes, en
particulier par la CEQ, à savoir que cela pourrait donner lieu à
de l'arbitraire et à un jugement sommaire dans certains cas? J'aimerais
avoir votre avis professionnel là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
M. Lapointe: La clause de la capacité fournit, comme l'ont
mentionné les directeurs d'école cet après-midi, trois
niveaux objectifs où, effectivement, il ne peut y avoir de contestation,
à savoir le nombre d'années d'expérience acquise dans
l'enseignement de la discipline, etc., et les crédits accumulés.
Quant au quatrième, qui offre la possibilité qu'au niveau d'un
projet éducatif des gens s'entendent pour faire face à des
situations particulières, il y a là pour moi une souplesse qui
offre à des enseignants engagés dans des projets éducatifs
la possibilité d'y être maintenus, parce qu'on commencera à
l'école à tenir compte de ce critère d'abord et avant tout
pour répondre à des besoins particuliers.
M. Gauthier: En ce qui me concerne, c'est terminé. Je vous
remercie. Vous avez répondu d'une façon très satisfaisante
aux questions que je voulais vous poser. Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci beaucoup. Avant de donner
la parole à Mme la députée de L'Acadie, sans vouloir
être mesquin sur le temps - environ 12 ou 15 minutes entre les deux - on
m'a donné la permission de part et d'autre d'accorder une brève
question à Mme la députée de Maisonneuve et, en même
temps, une brève question à Mme la députée de
Jacques-Cartier. Donc, la parole est à Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela veut dire qu'il me
reste quoi?
Le Président (M. Jolivet): Environ 14 ou 15 minutes.
Mme Lavoie-Roux: Ce sera en temps supplémentaire. Je ne
prendrai pas 15 minutes, de toute façon. Merci, M. le
Président.
Je n'ai pas l'intention de revenir sur le dossier de propagande du
gouvernement, mais, comme le député de Roberval a cru bon de
qualifier ce pamphlet démagogique d'information aux principaux
intéressés, je vais simplement relever - cela rend d'ailleurs
notre travail pénible - des inexactitudes. Si c'est cela, l'information
que le gouvernement veut faire, elle ressemblera à certains messages de
propagande qu'on a entendus à la radio, que j'aurai l'occasion de
déposer lundi, ici, à l'Assemblée, propagande
dégradante pour les enseignants.
Je voudrais simplement relever un point. Nous sommes ici depuis un jour
avec un mandat - je ne reviendrai pas là-dessus, on en a assez
parlé ce soir - et vous retrouvez dans ce dossier quatre offres
gouvernementales refusées. Les rencontres des derniers jours n'ont
toujours rien produit. On se demande si on est sur la même
planète. On est ici pour essayer de trouver une voie de solution et le
gouvernement fait de l'information au public en mettant de côté le
fait qu'on est à étudier et à inventorier des pistes pour
essayer d'éclairer tout le monde et de trouver des moyens de
conciliation. On fait fi, comme si la commission parlementaire n'existait pas,
de la dernière proposition de la CEQ hier, à laquelle même
le ministre de l'Éducation avait montré une certaine ouverture.
Il nous l'a répété cet après-midi. Pendant ce
temps, on envoie cette information tout à fait malhonnête,
incomplète et démagogique. Je regrette qu'on n'ait pas eu le
temps d'en parler plus longtemps, mais, comme vous avez d'autres informations
plus importantes à nous donner que de traiter plus longtemps de la
démagogie de ce papier, je voudrais vous poser les questions
suivantes.
Je voudrais revenir sur la notion de tâche globale. Il est vrai
qu'on s'est beaucoup plaint du minutage, que vous avez X heures d'enseignement,
deux périodes d'encadrement ou, enfin, une période de
surveillance ou tant de minutes de surveillance, etc. C'est regrettable qu'on
en soit rendu là, mais ceci n'est-il pas le résultat aussi du
fait que beaucoup d'enseignants... Tout de suite, quand on pense que les
enseignants font des revendications, tout le monde dit: Ce sont des militants,
des revendicateurs. Il y a quand même eu, et j'en ai été
témoin à plusieurs reprises, un trop grand nombre d'enseignants,
vraiment de bons enseignants, qui disaient: Oui, mais les tâches
deviennent finalement inégales dans les écoles. Je sais que M.
Lapointe a dit: II y en a qui sont plus doués pour l'animation; il y en
a qui sont plus doués pour la récupération et d'autres
pour l'enseignement. À moins que vous ne me disiez qu'il y a un minimum
d'enseignement qui soit requis de chaque enseignant dans le décret - et,
si c'est le cas, je voudrais le savoir - il ne faudrait pas arriver avec les
disparités qu'on connaissait dans le passé où vous aviez
des enseignants qui avaient dix périodes d'enseignement pendant que
d'autres en avaient jusqu'à 25. Vous vous souvenez du grand débat
entre les 20 et les 25 périodes. C'est ma première question.
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
M. Lapointe: Je pense que la question d'équité de
tâche est quelque chose de beaucoup plus complexe qu'une
équivalence du nombre de périodes d'enseignement strict ou
d'autres matières. On peut avoir deux professeurs qui ont le même
nombre de périodes d'enseignement, mais qui, selon l'échelon et
la matière, même avec le même nombre d'élèves,
selon la nature des étudiants et les difficultés qu'ils ont,
peuvent avoir objectivement une tâche inéquitable. Donc, la
question de la tâche globale permet, à mon avis, d'apporter une
pondération pour qu'un enseignant, ayant des élèves plus
difficiles et une tâche plus contraignante, puisse se retrouver
peut-être avec un peu moins d'enseignement qu'un autre qui sera plus
favorisé, soit par la nature de sa discipline et des étudiants
qui l'ont choisie. Je pourrais prendre, à titre un peu arbitraire,
l'exemple d'enseigner la chimie ou la physique en secondaire V et le fait
d'enseigner des mathématiques à des élèves en
difficulté en secondaire III. On peut voir qu'il y a beaucoup d'autres
connotations que celles du temps, des minutes passées à
l'enseignement par rapport au nombre d'élèves, qui viennent
pondérer la valeur relative de l'équité de la tâche
à ce niveau. Il me semble fondamentalement injuste de prétendre
qu'en répartissant le même nombre de minutes d'enseignement
à des étudiants on est équitable; au contraire, je pense
qu'on est nécessairement inéquitable en fin de compte.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que M. Tousignant veut
ajouter quelque chose.
M. Tousignant: Je veux seulement ajouter qu'il est vrai que la
notion de tâche moyenne peut poser le problème de ce qu'on appelle
l'équité de la tâche. C'est sûr que c'est plus
complexe, que c'est plus compliqué
d'en débattre dans une école que lorsqu'il y a un
automatisme au plan des minutes. Cependant, concrètement, dans la vie de
tous les jours, la limite des maxima, par la force des choses, a pour effet de
freiner une disparité. Étant donné que l'enseignant ne
peut pas dépasser un certain nombre de minutes, ceci même
constitue un frein à faire descendre quelqu'un d'autre, à aller
trop loin, parce que cela ne balancera plus en fin de compte.
Mme Lavoie-Roux: Mais est-ce qu'il y a une limite
inférieure d'enseignement qu'un enseignant doit faire?
Le Président (M. Jolivet): M. Tousignant ou M. Lapointe?
M. Lapointe.
M. Lapointe: Dans les décrets, effectivement, il n'y a pas
de temps minimal d'enseignement strict qu'un enseignant doit faire. Cependant,
je répète l'argument de M. Tousignant qui me semble fort
pertinent, à savoir que, avec le nombre d'effectifs disponibles,
lorsque, dans une école, on voudra répartir équitablement
des tâches et s'entendre avec ses partenaires enseignants
là-dessus, il me semblerait très difficle d'arriver à
pouvoir se passer des services de certains enseignants pour faire de
l'enseignement strict et de leur confier totalement d'autres tâches. Cela
me semble même à peu près impossible.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'accepte la variable
que vous avez apportée, en ce sens d'enseigner telle matière
plutôt que telle autre ou encore d'enseigner à deux niveaux ou
d'enseigner deux matières. Enfin, il y a toutes sortes de variables pour
analyser la lourdeur d'une tâche. Je le dis franchement: Je
m'inquiète qu'il n'y ait pas, pour assurer cette équité
des tâches, au moins un minimum d'heures, de périodes, de minutes
d'enseignement exigé des enseignants.
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas à commenter cela, c'est
un commentaire que je fais.
Le Président (M. Jolivet): Ah bon!
Mme Lavoie-Roux: Je pense que ceci fait l'objet de beaucoup
d'inquiétude de la part des enseignants; compte tenu des
expériences passées qui ont été vécues, je
pense que ce n'est pas totalement sans fondement. Il y a eu beaucoup de
discussions sur la fameuse simulation quant au nombre de groupes, compte tenu
de la diminution de l'enseignement pour certaines matières, des minutes
d'enseignement pour certaines matières et de la multiplication des
groupes combinée avec l'augmentation de la tâche et ainsi de
suite. Vous nous avez dit qu'il y a plusieurs modèles, qu'il y a surtout
le modèle du titulariat qui est facilement applicable
particulièrement au secondaire I, toujours dans la mesure où des
enseignants sont compétents, il ne faut pas l'oublier, parce que vous
avez aussi insisté sur le fait que tous nos enseignants avaient
été spécialisés et qu'il faut penser à un
certain temps de recyclage. Cela serait quand même plus plausible,
peut-être même, au secondaire II. Mais quand vous arrivez en
secondaire III, IV et V, l'appréhension de la multiplication de groupes
d'élèves que les enseignants devront rencontrer vous
apparaît-elle fondée?
Le Président (M. Jolivet): M.
Tousignant.
M. Tousignant: Nous l'avons mentionné, il est très
clair que, si les modèles actuels ne changent pas, par le fait que la
tâche augmente, il est évident que chaque enseignant, entre autres
au deuxième cycle, sera appelé à avoir un plus grand
nombre d'élèves. Effectivement, je pense que cela n'est pas
souhaitable. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'il faut, le plus
rapidement possible dans les mois qui viennent, commencer à
élaborer les nouveaux modèles qui permettront d'éviter
cette augmentation automatique du nombre de groupes et le fait que chaque
enseignant sera appelé à rencontrer plus d'élèves.
Je pense que le modèle, il faut viser à le réduire. Quant
à nous, il y a des possibilités de trouver ces arrangements.
Mme Lavoie-Roux: II faut aussi penser au recyclage,
particulièrement au deuxième cycle du secondaire, et à la
combinaison de ceci avec la diminution de temps-minutes d'enseignement dans
chaque matière. Vous dites: On aura deux ans pour se préparer et
faire les simulations pour la troisième année. Mais il reste
quand même que, objectivement, il y a là une augmentation du
nombre de groupes d'élèves que les enseignants devront
rencontrer.
Le Président (M. Jolivet): D'abord, M. Tousignant;
ensuite, M. Lapointe.
M. Tousignant: Très rapidement, nous voulons être
très clairs et très honnêtes, dans le sens de dire: II est
clair que les changements aux décrets, bien sûr, impliquent des
modifications aux organisations et provoquent un certain nombre de
problèmes à résoudre. Ceci est clair. Ce que nous disons
en même temps, c'est ceci: II n'est pas impossible de trouver, pour
autant qu'on ait le temps et la souplesse nécessaire, des solutions
à ces
problèmes.
Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.
M. Lapointe: J'ajouterais que, quant au problème des
simulations - problème qui a été largement commenté
- il est plus complexe que celui de simplement simuler à partir des
conventions collectives actuelles, ou du décret plutôt, à
partir des paramètres que les gens possédaient pour faire ces
simulations dans les derniers jours. (minuit)
II faut tenir compte que le régime pédagogique, qui a
fait, comme on le mentionnait, un certain consensus assez large auprès
des divers agents concernés, impliquait de soi des
réaménagements - par exemple, insistance sur les matières
de base, particulièrement au premier cycle, comme la langue maternelle
ou les mathématiques par opposition à d'autres matières
dans la répartition du temps - amenait de soi déjà des
modifications au nombre de groupes et d'élèves à voir.
Deuxièmement, concernant l'approche déjà
mentionnée par plusieurs groupes, dont les principaux cet
après-midi sont les directeurs d'école, à savoir que, en
tenant compte des paramètres budgétaires en consultation
actuellement et où les écoles ont simulé en mettant
à l'extrême les paramètres qu'ils possédaient, la
situation est loin d'être aussi simpliste qu'on a voulu le faire croire
en mettant en évidence des exemples absolument extrêmes
d'alourdissements de tâche. Je pense qu'il est vrai qu'il y aura des
alourdissements de tâche. Nous pensons que dans certains cas les
alourdissements de tâche peuvent même être des choix en
termes d'enseignement strict par des enseignants par rapport à d'autres
types d'activités parce qu'ils pourraient se sentir plus à
l'aise. Cela peut faire partie des modèles organisationnels alors que,
dans d'autres cas, ces modèles organisationnels eux-mêmes doivent
changer.
Nous répétons que, pour la première et la
deuxième année, nous avons une marge de manoeuvre beaucoup plus
grande, en tenant compte d'une tâche globale de 25 et d'une
période moyenne d'enseignement de 21 et 22, que nous avons toujours des
inquiétudes quant à la troisième année et que nous
avons soumis que des réajustements pourraient être
nécessaires à la suite de l'expérience des deux
premières années.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je dois dire à
l'association des directeurs généraux, rapidement, que j'ai un
intérêt personnel pour la fonction qu'ils occupent. Mon
père ayant été pendant des années et des
années directeur général, je sais le temps, l'ardeur et
l'énergie qu'il y a consacrés. Moi, je dois vous dire que je suis
profane. C'est, en fait, avec un esprit vierge que je suis venue à cette
commission parlementaire et que j'y siège depuis trois jours, mais
désireuse de comprendre les enjeux et de bien les comprendre.
Je voudrais faire rapidement un exercice avec vous, compte tenu du
mémoire que vous nous présentez, qui rejoint en grande partie
celui qui a été déposé par la
Fédération québécoise des directeurs
d'école. Ce serait à peu près le suivant. Est-ce que je me
trompe de croire qu'il y avait des attentes chez un bon nombre d'intervenants
du milieu de l'enseignement, attentes qui seraient grosso modo de trois ordres?
D'abord la notion de capacité - vous en avez parlé dans votre
mémoire - c'est-à-dire introduire, en plus de
l'ancienneté, la notion de capacité, en souhaitant qu'elle
puisse, finalement, bénéficier aux enseignants puisque c'est sans
doute intéressant pour eux d'exercer dans le champ de leur profession.
Également, la notion de tâche globale, donc la diminution de la
parcellisation. Enfin, la plus grande disponibilité de temps à
l'école. Cela m'apparaît être les trois demandes qui ont
été exprimées autant par les directeurs d'école que
par vous-même et qui ont été retenues dans les
interventions gouvernementales.
Or il m'apparaît qu'il n'y a plus de relation directe entre
ça et l'augmentation de la tâche parce que, vous savez, c'est
difficile de penser que ce ne serait que pour 30 minutes d'enseignement de plus
par jour ou pour 12 minutes qu'il y aurait une telle résistance de la
part des enseignants. On pense possible que cette augmentation de la
tâche résulte en une plus grande difficulté
organisationnelle à l'école. C'est un peu, en fait, l'objet de ma
question.
Vous nous dites que l'organisation scolaire qui va résulter de
ces initiatives gouvernementales est faisable. Il me reste toujours la
préoccupation, quant à moi, de savoir si elle est souhaitable.
Précisément en ce qui concerne l'augmentation de la tâche,
depuis le début de la commission ma réflexion est la suivante.
S'il doit y avoir augmentation de la tâche - enfin, tenons pour acquis
qu'il y a augmentation de la tâche - à quelle utilisation cette
augmentation de la tâche doit-elle être consacrée? Par
exemple, vous avez parlé de l'amélioration des relations
adultes-élèves.
Il y a aussi un article qui a été cité ici en
commission et qui m'a beaucoup impressionnée parce qu'il vient d'une
direction d'une école de Montréal où il régnait un
certain état de grâce. La direction disait: "Prendre connaissance
d'un projet d'école, c'est du même coup s'exposer à
reconnaître le rôle d'encadrement devenu
nécessaire et que doivent assumer les enseignants". Ces projets
ont des noms. Elle les énumère: projet relié au
phénomène de la drogue; projet concernant l'abandon scolaire;
projet informatique, avec toute la préoccupation qu'il y a maintenant
à introduire l'informatique à l'école; projet
d'implantation de nouveaux programmes, etc. "Nous entrevoyons, avec une grande
inquiétude pour nos jeunes, le jour où les enseignants,
accaparés par leurs trop nombreux groupes, ne seront plus en mesure de
travailler à des projets propres au milieu."
Depuis le début, c'est un peu aussi ma préoccupation.
Donc, si on retient vos demandes en se disant qu'elles n'ont quand même
pas une incidence directe sur l'augmentation de la tâche et, par
ailleurs, si on retient l'utilité d'augmenter la tâche, ma
question est de savoir à quelle fin il serait plus souhaitable de
consacrer cette augmentation.
Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): Je vais intervenir en faisant une
séquence sur deux, pour le primaire; j'inviterais M. Tousignant à
compléter pour le secondaire. À titre d'exemple, on pourrait
signaler que, s'il y a augmentation de la tâche pour des fins qui
touchent la tâche globale, la présence à l'usager - vous
parliez de projets-écoles - on peut facilement concevoir à ce
moment, à titre de commentaire pour le primaire, que recommenceraient
les activités d'animation plus organisées pour la vie
étudiante. Pensons à l'organisation des mouvements scouts,
à l'organisation des brigadiers, enfin, à toutes les
organisations qui faisaient que notre école avait une vie autre que la
rentrée et la sortie pour les fins de cours. C'est un
élément important.
Un deuxième élément important est celui des
temps-présence complémentaires à l'horaire pour appuyer
les enfants qui ont des difficultés dans leur apprentissage avant que
commencent des mesures de récupération. C'est un deuxième
type d'exemple. J'en donne un troisième qui est majeur maintenant,
surtout si on comprend qu'on veut entrer dans un processus où
l'école va appartenir à une collectivité qui va travailler
ensemble à définir ce projet-école. Je considère
que, si des enseignants participent à un comité de
gestion-école, consacrent des fins de journée à
définir des encadrements, à préciser des
déterminations pour fins de budget, à travailler à des
politiques-écoles, il y a là une contribution au milieu qui est
importante et qui fait partie, sinon de l'encadrement précis
auprès de l'élève, au moins de l'encadrement
général de l'école. Ce sont des exemples pour les fins
élémentaires. Quant au secondaire, M.
Tousignant pourrait nous en donner quelques-uns.
M. Tousignant: Effectivement, l'Association des directeurs
généraux des commissions scolaires n'a pas réclamé
que l'on augmente la tâche - il faut bien se comprendre là-dessus
- en termes de présence d'élèves pour fins d'enseignement,
puisque c'est ce dont on parle. Effectivement, nous n'avons pas
réclamé du gouvernement qu'il augmente la tâche et, par
voie de conséquence, qu'il réduise le nombre de postes
d'enseignants. Nous serions tout à fait d'accord, demain matin, pour
avoir autant d'enseignants à notre disposition que nous en avions en
1982-1983. Cependant, nous comprenons que le gouvernement a pris une
décision de réduire les coûts en éducation. Je pense
qu'il lui revient comme gouvernement d'appuyer par ces motifs sa
décision. Cela étant dit, nous pensons, entre autres, qu'il y a
un principe tout à fait simple qui est celui de se dire qu'il est tout
à fait normal que les enseignants soient présents à
l'école, à toutes fins utiles, tout le temps où les
élèves sont là.
Nous pensons aussi que la tâche d'enseignement doit être une
tâche à temps plein, dans le sens que cela doit se traduire par
une présence concrète et une véritable
disponibilité. Ce n'est pas les 27 heures de l'ancienne convention, mais
bien 27 heures où, effectivement, une direction d'école peut
utiliser les ressources humaines de l'école aux fins de répondre
à la gamme des services requis par les besoins des
élèves.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Si j'ai bien
compris, le but du décret est d'augmenter la tâche des enseignants
pour libérer certaines sommes d'argent qui pourraient être
consacrées à d'autres priorités. J'ai été
particulièrement intéressée par votre déclaration
à la page 8. Vous avez signalé "l'insuffisance des règles
budgétaires soumises actuellement à la consultation du
réseau". Cet après-midi, nous avons entendu à peu
près la même chose des commissions scolaires. Et vous continuez:
"Pour nous, ces règles, dans leur forme présente, ferment les
possibilités de manoeuvre locale pour gérer le processus de
changement enclenché par les décrets". Et vous avez ajouté
le cas des ressources pour les enfants en difficulté.
Voudriez-vous préciser un peu cette insuffisance? Pour moi,
même si on en arrive à un règlement de ce conflit qui
produise des conditions de travail justes pour nos enseignants et la
possibilité d'une qualité adéquate d'éducation, on
peut détruire le tout s'il n'y a pas assez d'argent pour appuyer notre
système. Quels sont les
secteurs sous-financés selon les règles maintenant en
consultation et quel est l'ordre de grandeur des écarts?
Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.
M. Paquet (Michel): Si vous me le permettez, M. le
Président, je vais faire une introduction sur la question du concept et
M. Tousignant apportera un complément d'information.
J'entendais, mercredi, notre ministre des Finances parler de son trou de
500 000 000 $, ce qui nous avait fait, un peu dans la moquerie,
compléter la réaction en disant qu'on était très
contents d'apprendre que ce n'était pas le nôtre! À
l'époque, cela avait été un débat fort important,
mais il y avait eu des mouvements de redressement dans lesquels les commissions
s'étaient fortement impliquées. Nous avons eu une rencontre en
janvier avec les officiers du ministère où on a parlé des
règles budgétaires qui sont en processus de consultation. J'ai eu
à intervenir à ce moment-là et j'ai dit très
sérieusement, mais aussi avec humour, que c'est vrai qu'il y a des
surplus dans les commissions scolaires, mais qu'on les considérait comme
une conséquence d'une préoccupation des directeurs
généraux, des administrateurs scolaires et des commissaires
d'écoles à faire l'effort pour que le réseau scolaire ne
soit pas mis dans une situation -qualifions-la - déficitaire. On avait
cherché à suivre les réclamations gouvernementales,
à redresser les organisations, mais non au point de négliger
certaines réserves - et j'insiste beaucoup sur les fameuses
accumulations financières - qui nous permettent de voir venir les
années de vaches maigres.
Le ministre des Finances signalait que, selon l'interprétation
gouvernementale - ce que je ne conteste pas - les années sont rendues
à un virage rapide et qu'il est d'autant plus important pour les
commissions scolaires d'avoir un minimum de capacité pour suivre le
mouvement rapide, sinon nous nous trouverons dans une situation où,
comme administrateurs, nous n'aurons pas su prévoir les mouvements
essentiels de rentrées de fonds pour permettre que, demain matin,
à la question du député de Roberval, on ne se retrouve pas
dans la nécessité de couper des services fondamentaux comme le
support à l'enfance inadaptée.
Le sens de la démarche, je pense, que les directeurs
généraux avec leurs commissaires, avec les administrateurs, ont
tenté de faire, c'est de se donner une situation non pas d'accumulation
pour fins d'intérêt, mais d'accumulation pour fins de
prévoir - ce qu'on sentait venir - des difficultés de gestion et
de pouvoir y répondre, si cela arrivait, par des mouvements secs. Je
regarde les commissions scolaires qui ont à subir actuellement des
contraintes majeures et quand je considère que, le lendemain matin,
elles ont pu suivre le rythme financier en ne détériorant pas la
qualité de l'enseignement, je dis bravo. Qu'il y ait eu un cumul
d'argent pour le permettre, je pense que c'était là notre
mission. (0 h 15)
Dans ce sens, quand on dit que les règles budgétaires,
selon notre compréhension actuelle, risquent peut-être de ne pas
répondre adéquatement à la gérance, on dit ceci:
Les règles sont encore, dans un mouvement de récupération,
une nécessité. C'est à discuter. On le considère
comme administrateurs et on dit: C'est là, sauf que cette accumulation
d'argent que nous avons en main aux fins dont je viens de parler, si on la perd
trop rapidement, parce que dans l'enveloppe no 1, il y a des besoins de
récupération qui touchent les enseignants, on se retrouve avec un
problème de perte de nos réserves qui nous permettent de jouer
sur les événements, qui font qu'on protège nos services.
Dans ce sens-là, on souhaite que les règles budgétaires,
aussi sévères doivent-elles être, ne le soient pas au point
de nous enlever nos marges de manoeuvre. Nos marges de manoeuvre ne sont pas
là aux fins d'une accumulation.
Je n'aurais pas de plaisir à constater que chez nous il y a une
accumulation et à dire aux contribuables qu'il y a un fonds en
réserve. Il n'est pas en réserve pour la réserve. Il est
là parce qu'on sait qu'on vit des années de redressement. Je
dois, devant les contribuables, devant les parents, devant les enfants, garder
un rythme de réinstallation du système. Sinon, je ferais preuve
d'imprévision et de non-respect des besoins de l'enfant qui ne vont pas
au rythme des besoins gouvernementaux ou des capacités gouvernementales,
mais au rythme de leurs besoins personnels. C'est dans ce sens-là qu'on
dit: Faisons attention à cette récupération d'argent qu'on
considère comme vraie. Laissez-nous cette manoeuvre qu'il faut pour
garder le rythme. On en a beaucoup parlé dans notre texte, du rythme du
changement.
Je ne sais pas si M. Tousignant voudrait rajouter des
compléments. Je le laisserai intervenir.
M. Tousignant: Je vais tenter d'illustrer cela le plus rapidement
possible. D'abord, dans les règles budgétaires actuelles, il y a
un principe de bonne gestion qui s'appelle la transférabilité,
c'est-à-dire que les budgets des commissions scolaires comprennent trois
enveloppes: l'enveloppe des enseignants, l'enveloppe des autres personnels et
l'enveloppe des autres coûts. Au cours des deux ou trois dernières
années - je pense que cela a été signalé hier - il
y a vraiment eu
un resserrement, des compressions dans les commissions scolaires. Ce
principe de la transférabilité est fondamental. Il se produit que
dans le projet de règles budgétaires il y a une intention
annoncée de récupérer 40 000 000 $ qui, semble-t-il, sont
identifiés par les responsables comme étant du "surfinancement"
des commissions scolaires pour l'article 1.
À partir du moment où il y a
transférabilité, notre principe était de modifier... Je
vais donner un exemple concret: on prenait des enseignants et on les utilisait
aux fins des centres de documentation, des bibliothèques de façon
que ces personnes ne donnent pas que le temps d'enseignement requis,
c'est-à-dire les 1100 minutes seulement. Plusieurs commissions scolaires
les ont convertis en professionnels pour avoir plus de temps de présence
aux centres de documentation. Pour ce faire, les commissions scolaires ont pris
de l'argent de l'article 1 et l'ont transféré à l'article
2. Si quelqu'un fait l'analyse des états financiers de l'article 1, il
constate que cette commission scolaire semble avoir un surplus à
l'article 1. On pourrait donner d'autres exemples, il y en a d'autres.
Deuxième volet il est largement connu, et je pense que cela est admis,
qu'à l'article 3 les autres coûts n'ont pas été
financés au rythme de l'inflation et au rythme des besoins. Il est
très clair que les commissions scolaires ont réussi à s'en
sortir par le mécanisme de la transférabilité, qui
était le principe même de ce budget et qui est - je le
répète - un excellent principe. On pense avoir réussi avec
cela à donner de bons services et à réduire la progression
des coûts.
Il se produit qu'avec l'augmentation de la tâche il va y avoir
plus d'enseignants en disponibilité. Je vous donne un exemple concret.
Dans ma commission scolaire, si on appliquait les 1150 minutes de moyenne, cela
signifierait, pour 1983-1984, 157,4 postes d'enseignants de plus en
disponibilité. Avec la mesure de l'étalement, qui est encore une
mesure fort valable, les 157,4 deviendraient 57,4 postes. Étant
donné que j'avais déjà 90 postes dus à la baisse de
clientèle, plus 57, je me retrouve à 147,4. Le problème
concret est qu'avec l'article 1 je devrai, évidemment, financer les
enseignants autorisés et je devrai aussi, pour un bon pourcentage,
utiliser les enseignants en disponibilité qui vont demeurer à la
commission scolaire aux fins de la suppléance, aux fins de
compléments de tâche par rapport à d'autres projets.
Notre inquiétude est la suivante. En fait, on pense qu'il y
aurait des problèmes si cela n'était pas modifié. On tient
pour acquis que c'est un projet. Alors, on a compris que c'était un
projet, qu'on nous consultait, qu'on était prêt à nous
écouter.
On sait aussi qu'il y a eu des modifications après des
consultations comme celle-ci. Maintenant, on pense que, rendues là, avec
les modifications de modèles qu'on doit apporter, là où il
y a une bonne gestion, les commissions scolaires vont devoir avoir des marges
de manoeuvre financières réelles pour permettre de corriger ce
qui pourrait être des situations problématiques.
Quand on parle de l'aspect financier, c'est de cela qu'on veut parler.
On ne veut pas dire, pour être très clairs, qu'il n'y a pas
d'argent dans le système. Tout le monde sait qu'il y en a. Mais, on
pense actuellement qu'à la fois les mesures de compression
demandées, plus la récupération de 40 000 000 $, plus les
modifications organisationnelles pourraient causer des problèmes. C'est
dans ce sens-là.
Le Président (M. Jolivet): Merci.
Mme Dougherty: Est-ce que je pourrais...
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la
députée.
Mme Dougherty: ...demander au ministre des Finances quelles sont
les intentions du gouvernement à l'égard des règles
budgétaires? La réponse appelle une autre question.
Le Président (M. Jolivet): Oui. Je ne veux pas vous en
empêcher, mais...
Mme Dougherty: C'est la dernière.
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas cela surtout,
c'est parce que vous créez un précédent à la
commission. On a dit qu'on intervenait en face. On l'a demandé à
plusieurs occasions aujourd'hui et je ne voudrais pas que ce soit un
précédent si jamais le ministre des Finances acceptait de
répondre.
M. Parizeau: Je n'aurais pas d'objection à répondre
dans un autre contexte, mais là, vraiment, on créerait un
précédent assez étonnant et je suis persuadé
qu'à l'Assemblée nationale, à partir de mardi, je pourrai
donner toutes les réponses utiles à cet égard.
Le Président (M. Jolivet): Donc, cela étant dit, je
demanderai au député d'Argenteuil de conclure et, après,
le ministre de l'Éducation pourra parler. Je reviendrai ensuite,
après avoir laissé la parole, à la fin, au leader du
gouvernement, sur le menu qui nous attend dans les jours qui viennent. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, deux thèmes s'imposent
à nous à ce moment tardif. Tout
d'abord, je veux offrir des remerciements à l'endroit des
porte-parole de l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires pour la rencontre très intéressante,
très profitable, que nous avons eue avec eux et nos meilleurs voeux de
bon travail dans la recherche de solutions au problème que nous
considérons comme central, la recherche d'un règlement
négocié au conflit actuel. Je pense que la plupart des
considérations qu'ils nous ont apportées, si cette condition peut
se réaliser, pourront elles-mêmes se réaliser dans un
climat infiniment plus propice à la qualité de
l'éducation, qui est notre souci premier à tous.
Nous terminons également une journée, nous terminons
même une phase. Ma collègue de L'Acadie est extraordinaire, comme
vous l'avez constaté, parce qu'à la fin de la journée elle
est encore meilleure qu'au début et, après trois jours, elle n'en
a compté que deux. Nous en avons compté trois et, au terme de ces
trois jours, nous pensons qu'il est temps que les intentions du gouvernement
commencent à se profiler avec un peu plus de netteté.
Il y a bien des choses qui ont été dites et je pense qu'on
doit dire à l'avantage du ministre de l'Éducation qu'il a
laissé les travaux se dérouler sans chercher à les
dominer, sans chercher à les écraser d'aucune manière. Je
pense que, de ce point de vue là, c'est excellent. Si le geste
malheureux que nous avons dénoncé ce soir avec vigueur et dont il
doit porter la responsabilité n'était pas survenu, ce serait
meilleur encore. J'espère qu'on réussira à effacer cette
mauvaise étape. Je pense que c'est infiniment regrettable.
J'espère, toutefois, que cela ne viendra pas nuire de manière
irréparable au processus de recherche qui est engagé depuis trois
jours dans un esprit, je pense, de sincérité très profonde
de la part de tout le monde. Je mets tout le monde sur un pied
d'égalité quand il s'agit d'imputer de la sincérité
aux autres. Je sais bien que des fois ce n'est pas la manière
d'être le plus populaire, même de son propre côté,
mais je veux croire que le gouvernement a ses moments de
sincérité comme l'Opposition et que les syndicats les ont comme
la partie patronale également dans une situation de conflit comme celle
où nous nous trouvons.
Je pense que ce serait bon pour le déroulement de notre recherche
collective qu'on entende au moins ce soir une réaffirmation,
peut-être encore plus explicite que ce qu'on a entendu en fin
d'après-midi aujourd'hui, de la volonté du gouvernement d'aller
vers une démarche de conciliation et de rapprochement avec l'aide de
mécanismes que notre tradition - beaucoup plus que nos lois d'ailleurs -
pratique de relations de travail indique. On a eu des indications de ce
côté-là en fin d'après-midi et il me semble qu'en
vue de la dernière phase qui doit venir lundi, si on pouvait obtenir
l'assurance que tout cet immense travail accompli dans un climat de bonne
volonté par les parlementaires et par les témoins qui sont venus
nombreux, dont certains devront d'ailleurs revenir lundi, n'a pas
été fait pour rien, si on pouvait avoir dès maintenant des
éléments permettant de dissiper les doutes raisonnables que
certains peuvent entretenir, que ce soit parti d'un plan de propagande, d'une
orchestration, de démarches visant à montrer au public que, quoi
qu'il arrive, le gouvernement avait raison sur toute la ligne cela aiderait
à détendre l'atmosphère et on pourrait rentrer dans nos
comtés respectifs en fin de semaine en disant qu'on espère
toujours.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je veux, de mon
côté, remercier très profondément l'Association des
directeurs généraux des commissions scolaires. Nous vous avons
gardés plus longtemps que certains autres groupes, probablement en
raison de circonstances exceptionnelles, mais peut-être aussi en raison
de la qualité des informations que vous nous avez apportées.
À la fin de ces trois jours, je dois dire que les nombreux
groupes que nous avons rencontrés nous ont permis de beaucoup mieux
comprendre les enjeux du conflit. Chacun nous a apporté ses perspectives
propres, ce qui était, je crois, essentiel, mais chacun nous a aussi
apporté, du point de vue qui était le sien, des
éclairages, des informations, des renseignements dont la population
avait besoin, dont les membres de la commission avaient besoin également
pour poursuivre leur travail et aller dans le sens de cette recherche d'avenues
de solutions qui, au fond, est l'objectif que nous poursuivons.
Nous avons mieux compris la situation au terme de ces trois jours et,
mieux comprendre une situation, c'est mieux se comprendre et, parfois, mieux se
comprendre, c'est la condition qui peut nous amener à mieux nous
entendre. D'ailleurs, plusieurs groupes, dont le vôtre, nous ont fait la
recommandation du caractère hautement souhaitable d'un règlement
négocié. C'est une recommandation que nous acceptons et à
laquelle, d'emblée, nous souscrivons, car elle est tellement plus
souhaitable qu'un conflit qui s'éternise. Donc, ce règlement
négocié, nous le recherchons.
Certains groupes nous ont fait des recommandations pour que ce
règlement négocié survienne; par exemple, cette
recommandation qui revient dans plusieurs mémoires, d'une reprise des
négociations en présence d'un tiers qui concilierait des
points
de vue opposés, qui tenterait de trouver des moyens, des
mécanismes et des objets d'entente. J'ai déjà dit,
à deux occasions, à quel point c'est dans ce sens que ma propre
réflexion s'orientait. D'accord avec le principe, il nous faut
maintenant en rechercher les modalités. Je m'y emploie activement avec
mes collègues du gouvernement et ce ne sont pas des incidents de
parcours qui peuvent nous empêcher de poursuivre nos efforts dans cette
direction.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire ce soir à la
députée de L'Acadie, nous ne sommes peut-être pas encore
prêts à parler de ces décisions, puisque nous
étudions encore à ce moment-ci les modalités qui nous
permettraient d'arriver à un mécanisme qui serait le plus
opportun possible. Mais nous comptons aussi sur la journée de lundi pour
que d'autres groupes puissent peut-être, sur ce point également,
nous faire des suggestions qui pourraient nourrir notre réflexion. De
toute façon, je pense que je peux assurer les membres de cette
commission qu'au terme du processus le gouvernement a la décision
très ferme d'annoncer que ce rapprochement, cette conciliation de points
de vue opposés se fera selon les souhaits qui ont été
exprimés et que cette décision, je l'espère, en tout cas,
ira au devant des souhaits qui ont été exprimés devant
cette commission au cours des trois derniers jours.
Sur ce, je vous remercie, encore une fois, de votre contribution. (0 h
30)
Le Président (M. Jolivet): Merci, messieurs.
Ordre des travaux
Comme nous devons clore nos débats, je dois simplement rappeler -
c'est mon rôle - le nom des groupes qu'il nous reste à entendre.
D'abord, les deux groupes de ce soir, soit l'Association des cadres scolaires
du Québec, ainsi que la Fédération des comités de
parents de la province de Québec, qu'on n'a pas entendus. Il y a,
à l'ordre du jour de lundi - le leader nous en parlera davantage - neuf
groupes, soit Quebec Federation of Home and School Association, Quebec
Association of Catholic School Administrators, Quebec Association of Protestant
School Boards, le Conseil des collèges, Quebec Association of School
Administrators, l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires protestantes du Québec qui, avec l'Association of
Protestant School Business Officials of Quebec, avait l'intention de
présenter un mémoire conjoint - donc, deux groupes distincts qui
peuvent être entendus en même temps - l'Association nationale des
étudiants du Québec et l'Institut canadien de l'éducation
des adultes. Ce sont les groupes qu'il nous reste à entendre.
Je demanderais au leader de nous dire ce qui va se passer lundi.
Normalement, nous siégeons à 10 heures, mais si d'autres ententes
sont intervenues, à quelle heure siégerons-nous?
M. Bertrand: M. le Président, après avoir entendu
les propos du député d'Argenteuil et du ministre de
l'Éducation, qui reflètent un optimisme, à mon avis,
certain et une volonté de coopération tout aussi certaine, et
après avoir cru comprendre que cette commission, qui s'est bien
engagée mercredi, peut, à l'occasion, bien sûr,
connaître certaines bourrasques - Dieu sait qu'en démocratie la
mer n'est pas toujours calme; le président sait naviguer dans tout cela
avec beaucoup de sérénité, même si le parcours est
difficile - je sens une chose: c'est que le vieux proverbe chinois demeurera
toujours vrai: "il faut laisser au temps le temps de faire son temps",
même si, de part et d'autre, on peut avoir l'impression, à
l'occasion, que le temps presse.
Dans un contexte comme celui-là, je suis convaincu
qu'au-delà des propos qui ont été tenus ce soir nous
conviendrons ensemble qu'il serait souhaitable que lundi, étant
donné que deux groupes qui devaient être entendus ce soir
reviendront lundi et, bien sûr, auront priorité, soit
l'Association des cadres scolaires du Québec et la
Fédération des comités de parents de la province de
Québec - M. le Président, j'ai de la difficulté à
le dire - sachant à quel point tout le monde s'intéresse à
chaque présentation qui est faite et veut interroger les gens parce que
les parlementaires cherchent à comprendre, à savoir et, ensuite,
à faire un pas de plus dans la bonne direction, et que nous aurons, au
total, onze groupes à entendre, si nous voulons les entendre, si nous
désirons qu'ils soient entendus, je ne peux faire autrement que lancer
une invitation non seulement à l'Opposition, mais je dirais même
au parti ministériel pour que ces onze groupes puissent être
entendus lundi.
Je crois savoir déjà que, par exemple, plusieurs groupes
anglophones ont exprimé le désir de présenter
conjointement leurs mémoires - au pluriel - et, par la suite, de
répondre aux questions des parlementaires. Il y a six groupes
anglophones qui viendront lundi. À mon avis, nous nous devons de les
écouter. Nous nous devons d'entendre ce qu'ils ont à dire. Nous
nous organiserons donc pour faire en sorte qu'ils puissent au moins
présenter leurs mémoires, quitte à ce que, sachant ce que
cela peut vouloir signifier, nous nous réservions moins de temps pour
leur poser des questions. Il faut que nous puissions entendre leur point de
vue. Je pense que ces groupes méritent vraiment d'être entendus.
Certains, jusqu'à
maintenant, ont fait preuve de patience, c'est le moins qu'on puisse
dire. Le Conseil des collèges attend depuis mercredi. La
Fédération des comités de parents et l'Association des
cadres scolaires sont probablement encore ici et reviendront lundi. Il y aura
aussi l'Association nationale des étudiants du Québec et
l'Institut canadien de l'éducation des adultes que nous avons
acceptés parce qu'ils ont exprimé le désir de se
présenter devant la commission. Nous répondions à un voeu
aussi exprimé par le député d'Argenteuil.
Je demeure optimiste malgré tout, M. le Président, et je
sais que c'est vous qui avez à veiller à ce que nous puissions en
arriver à réaliser un objectif, une mission peut-être
impossible, celle d'entendre tous ces groupes. Mais au-delà de ce qui a
pu, ce soir, créer pendant un certain temps un climat qui n'était
certes pas agréable pour personne, j'ai la conviction personnelle que,
si nous mettons beaucoup de bonne foi à conclure nos travaux lundi, il
sera possible d'entendre ces onze groupes. Partant de là, en nous
appuyant sur les propos encourageants du député d'Argenteuil et
du ministre de l'Éducation, nous appuyant sur quatre jours de commission
parlementaire, l'avenir nous paraît prometteur et une certaine forme de
lumière nous paraît venir du bout du tunnel. La commission
parlementaire aura été, somme toute, une étape fructueuse
dans ce processus. C'est une invitation que je lance. Je ne peux faire
autrement, sachant le travail qu'il nous reste à faire et sachant que
nous ne pourrons pas déborder la journée de lundi.
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie. Mon
rôle est de vous inviter à être à l'heure lundi
matin, 10 heures. La commission ajourne ses travaux à lundi matin, 10
heures.
M. Ryan: M. le Président, juste un point.
Le Président (M. Jolivet): Un instant. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Le problème du partage du temps, il faudra en
discuter lundi matin...
Le Président (M. Jolivet): C'est cela.
M. Ryan: ...avant 10 heures, autant que possible. On attendra des
nouvelles du leader à ce sujet. Pour l'instant, notre position demeure
celle que nous avons établie plus tôt. Nous avons dit: Nous
verrons comment les événements vont se présenter. Je
voudrais prévenir le gouvernement que c'est facile de dire: II y a eu un
incident, on passe l'éponge. J'ai remarqué qu'il n'y a eu aucune
reconnaissance de responsabilité de la part du gouvernement, aucune
manifestation de volonté de ne pas reprendre ces choses-là.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Ryan: Ce qui nous choque, c'est qu'on travaille dans un esprit
de conciliation, ici, tout le monde, y compris les ministres qui sont venus
ici. Pas tous, mais la plupart. Si on entend une déclaration du chef du
gouvernement à la radio qui dit: On va leur passer la matraque, s'ils ne
marchent pas, ou si on reçoit un journal comme celui qu'on a
reçu, vous mettrez cela à votre programme, étant
donné les événements que vous devez vivre en fin de
semaine.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Ajournement de la
commission.
(Fin de la séance à 00 h 39)