L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de l'éducation

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de l'éducation

Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le vendredi 4 mars 1983 - Vol. 26 N° 250

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes sur les causes du conflit scolaire dans le secteur de l'éducation


Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de l'éducation reprend ses travaux pour entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle.

Les membres de cette commission sont: M. Brouillet (Chauveau), M. Desbiens (Dubuc), M. Cusano (Viau), M. Gauthier (Roberval), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Hains (Saint-Henri), M. Laurin (Bourget), M. Leduc (Fabre), M. LeMay (Gaspé), M. Payne (Vachon), M. Ryan (Argenteuil).

Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Bérubé (Matane), M. Dauphin (Marquette), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Parizeau (L'Assomption), Mme Harel (Maisonneuve), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Paré (Shefford), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Rivest (Jean-Talon).

Les groupes à entendre aujourd'hui sont les suivants: la Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers de l'éducation, représentée par M. François Houle, secrétaire général de la Fédération des associations étudiantes collégiales du Québec, ainsi que M. Jean Baillargeon, secrétaire général du Regroupement des associations universitaires du Québec. En deuxième lieu, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, représentée par M. Jacques Chagnon, président. Le troisième à être entendu sera la Fédération québécoise des directeurs d'école représentée, par M. Réal de Guire, président. Le quatrième sera la Fédération des cégeps, représentée par M. Jean-Noël Tremblay, président. Le cinquième est l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, représentée par M. Michel Paquet, président. En sixième lieu, l'Association des cadres scolaires du Québec, représentée par M. Bernard Myette, président. En dernier lieu, la Fédération des comités de parents de la province de Québec, représentée par M. Jean Pontbriand, président.

Je tiens à vous faire remarquer que nous poursuivrons nos travaux jusqu'à 13 heures, nous reprendrons à 15 heures jusqu'à 18 heures et de 20 heures jusqu'à 24 heures, c'est-à-dire le temps qui nous est permis pour délibérer.

J'aimerais que les deux groupes en présence me disent de quelle façon ils ont l'intention de procéder pour entendre les mémoires aujourd'hui en sachant, premièrement, que normalement le temps qui est dévolu à chacun des organismes est d'au moins une heure. Je pense qu'il pourrait y avoir d'autres ententes que j'aimerais, dès le départ, bien clarifier afin qu'on sache où on va aujourd'hui avec l'audition des mémoires.

Le premier à intervenir est M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, nous proposons, compte tenu qu'il y a sept intervenants - c'est bien ça? - ...

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Leduc (Fabre): ...qu'un temps égal soit réparti entre les différents intervenants, en tenant compte bien sûr des besoins que les députés voudront bien manifester dans leurs interventions. Je pense qu'il faut tenir compte qu'il peut arriver qu'on dépasse légèrement ce temps, mais je pense qu'il ne faudrait pas trop dépasser. Il faudrait tenir compte qu'on termine à minuit.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Est-ce que j'ai bien compris le député de Mille-Îles? Vous avez dit une moyenne d'à peu près...

Le Président (M. Jolivet): Le député de Fabre.

M. Ryan: Le député de Fabre, excusez-moi. Le président avait parlé d'une heure, en moyenne, par groupe, puis vous, vous avez parlé d'une heure et demie, je pense.

M. Leduc (Fabre): Une heure et quart, environ.

M. Ryan: Une heure et quart, environ. Nous n'avons pas d'objection. Je pense que tout le monde va comprendre qu'étant donné le stade où nous en sommes dans les travaux de la commission, et que ces travaux ne sont qu'une étape préparatoire à ce que nous

espérons devoir être des négociations entre les parties intéressées, tout le monde va comprendre qu'il faut que le travail de la commission progresse un peu plus rapidement. Il y a toute la journée de lundi qui doit être réservée à des groupes.

Je devrais cependant faire une réserve dans le cas de deux groupes qui sont sur la liste d'aujourd'hui. Il y a la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec et la Fédération des cégeps. Je ne sais pas si l'on peut faire la rencontre dans l'espace d'à peu près une heure et demie dans les deux cas. J'en serais très heureux. Je pense que mes collègues de l'Opposition le seraient aussi. Je voudrais qu'on se réserve, dans ces deux cas-là, peut-être un petit peu plus de temps, au besoin, pour une raison qui m'apparaît évidente.

Ces deux organismes font partie, d'une manière tout à fait essentielle, de ce qu'on appelle la partie patronale dans les conflits qui perdurent. La Fédération des commissions scolaires est une partenaire du gouvernement à titre de partie patronale dans le cas des commissions scolaires, de l'enseignement public, élémentaire et secondaire. La Fédération des cégeps est partenaire du gouvernement au niveau des cégeps, je pense, qui sont partie prenante. Nous n'avons pas eu la chance de les entendre jusqu'à maintenant. Le gouvernement a eu amplement l'occasion, autant par des fonctionnaires que par les ministres, en particulier la batterie de ministres que nous avions hier soir, d'entendre l'exposé de leur point de vue.

Il me semble que, si nous en éprouvons le besoin, vous devriez nous accorder une marge de souplesse d'au moins une demi-heure dans ces deux cas, en plus du temps qui a été mentionné par le député de Fabre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre et adjoint parlementaire au ministre de l'Education.

M. Leduc (Fabre): II ne faudrait pas, M. le Président, je pense, être trop fermes à ce stade-ci, et aviser au moment où ces mémoires seront présentés, parce qu'il ne faudrait pas, non plus, léser les groupes qui interviendront en fin de soirée et leur accorder un temps qui serait en-deçà d'une heure.

Je pense qu'il va falloir juger au fur et à mesure que les intervenants se présenteront.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Je suis heureux, comme président, de constater que vous m'accorderez aussi un moment de souplesse, à certaines occasions, me permettant de juger au meilleur de ma connaissance et aussi, en sachant que le règlement prévoit qu'il y a une heure accordée à chaque organisme - et je parle aux organismes qui auront à présenter leur mémoire - tout en sachant que les deux premières journées ont été différentes de celles que je vais annoncer quant aux deux suivantes, c'est-à-dire 20 minutes d'intervention pour présenter le mémoire. Vous n'êtes pas obligé de les prendre, mais c'est le maximum accordé. Ensuite, de part et d'autre, les interventions d'abord du représentant officiel du gouvernement et du représentant de l'Opposition, ainsi que l'alternance prévue telle qu'on la connaît. J'essaierai d'être ponctuel à 15 heures, comme je le suis d'ailleurs de coutume comme président, et à 20 heures, de façon à commencer à l'heure précise. De cette façon, on aidera aussi les organismes qui ont l'intention de se présenter.

J'appelle donc la Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers de l'éducation à venir s'installer à la table en face de nous, à se présenter et à présenter son mémoire en lui rappelant les règles du jeu qu'on vient de déterminer. Je pense que c'est M. François Houle qui prendra la parole.

Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers de l'éducation

M. Houle (François): Bonjour! M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Bonjour!

M. Houle: Honorables députés. Que cesse le chacun pour soi, s'unir pour s'en sortir est le mémoire présenté par la Coalition étudiante pour la défense des droits des usagers de l'éducation.

La Coalition pour la défense des droits des usagers de l'éducation a vu le jour en janvier 1983, avant même que ne monte en flèche l'inflation des discours et des moyens de pression. Une fois de plus, les étudiants avaient senti l'inévitable cul-de-sac dans lequel s'en allaient les négociations. Une fois de plus, les étudiantes et les étudiants ont vu le peu de profondeur des discours, combien corporatistes, tenus de part et d'autres. Encore une fois, les usagers de l'éducation savaient qu'ils allaient faire les frais d'un affrontement institutionnalisée.

Deux fédérations distinctes d'associations étudiantes se retrouvent au sein de la coalition: le Regroupement des associations étudiantes universitaires du Québec, RAEU, et la Fédération des associations étudiantes collégiales du Québec, FAEQ. Au-delà de 90 000 jeunes citoyens et citoyennes responsables. La coalition existe surtout dans le but de promouvoir et de défendre un projet d'école québécoise plus démocratique à

l'intérieur de laquelle l'implication et la participation des usagers et usagères dans les diverses instances administratives et pédagogiques, seraient reconnues, encouragées et revalorisées. Les étudiants des niveaux collégial et universitaire ne veulent plus être des consommateurs passifs de cours. Ils sont les usagers d'un service public et de jeunes citoyens à part entière.

Nous pensons qu'il est inacceptable d'une part, qu'un système d'éducation qui coûte si cher aux contribuables québécois ne contribue pas à former ou à développer des citoyens responsables. Nous comptons défendre ici la thèse selon laquelle les droits acquis des uns ne peuvent plus brimer les droits des autres, c'est-à-dire des usagers et usagères de services. En d'autres mots, nous sommes tout à fait d'accord avec le fait que les travailleurs et les travailleuses du secteur public doivent avoir des conditions de travail décentes. Mais ces droits reconnus ne doivent plus aller à l'encontre des droits des plus démunis de cette société, surtout en temps de crise.

Une négociation biaisée au départ. Mon intervention portera ici sur les enjeux de la négociation. Trois points importants semblent être en litige, c'est-à-dire la tâche, la sécurité d'emploi et l'autonomie départementale. Mais avant de commencer, permettez-moi une triste remarque pour vous dire à quel point nous sommes étonnés, honnêtement, nous sommes déçus même de voir les principaux responsables de la situation que subissent actuellement les étudiants et les jeunes du Québec en général, qui ne voient pas l'ombre d'une solution aux problèmes que connaît présentement la société québécoise. Est-ce là le triste constat d'une société de corporatistes animés par une inexistante volonté à changer les mentalités?

Comme le demandait l'éditorialiste Jean-Louis Roy, le 27 janvier dernier, en réponse à un texte signé par Jean Baillargeon et moi-même dans le Devoir de la veille, sommes-nous condamnés à la répétition sans fin des discours corporatistes? Poursuivant en parlant de ceux-ci, il rappelait que le discours corporatiste est, par essence même, irresponsable car il se construit d'abord sur la négation de la réalité même la plus évidente.

Si tel fut le cas, il n'est pas surprenant de constater l'échec des dernières négociations car le discours corporatiste mène, à notre avis, inévitablement à la faillite. Une des solutions que nous mettions de l'avant, à ce moment-là, pour éviter l'affrontement, était de permettre la présence d'une tierce partie aux tables de négociation car nous croyons profondément que les usagers et les usagères ont un mot à dire à l'intérieur du processus de négociation.

Malheureusement, notre proposition ne fut pas retenue. Toutefois, nous aimerions réaffirmer notre désir, notre volonté de voir, une fois ce conflit terminé, la création d'une commission de révision du régime actuel de négociation dans les secteurs public et parapublic. Je pense que nous ne sommes pas les seuls à ce sujet-là.

En débutant, qu'il me soit permis de vous dire que le présent débat, fait au nom de la qualité de l'enseignement, a été quant à nous faussé du début à la fin, si fin il y a. Depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, on nous rebat les oreilles avec la qualité de l'enseignement. Hier, j'écoutais encore les représentants et représentantes de la FNEEQ et de la FEEQ-CEQ. À en croire certains, la qualité de l'enseignement ne se mesurait qu'en termes de minutes-semaine ou était directement proportionnelle au ratio professeur-élèves. Nous nous élevons contre cette définition étroite de la qualité de l'enseignement. Quant à nous, la véritable qualité de l'enseignement doit se mesurer en termes de contenu de cours ainsi que de programmes, en termes de rapports humains entre usagers de l'éducation et ceux qui dispensent les services, c'est-à-dire les professeurs. Nous tenons à affirmer que la charge d'enseignement ou les acquis des conventions collectives ne sont pas synonymes de qualité de l'enseignement, n'en déplaise à certains. (10 h 30)

Permettez-moi de vous rappeler certains faits concernant la tâche des enseignants. La présente commission doit avoir à l'esprit que certains professeurs, à l'heure actuelle, ont une tâche d'enseignement dépassant quinze heures/semaine. Ils sont de ces professeurs très impliqués au sein de la communauté collégiale, qui participent activement à plusieurs initiatives étudiantes et, généralement ils sont très disponibles et très facile d'accès. Ces professeurs, rappelons-le, sont aimés des étudiants et souvent qualifiés par ces derniers de supercompétents. Malheureusement il y a une contrepartie: les professeurs que les étudiants ont de la difficulté à rejoindre, ceux qui hors des classes n'existent plus. Après plusieurs observations, nous pouvons associer ce problème à deux éléments principaux: soit que le professeur a perdu intérêt à demeurer au cégep après ses cours à cause d'un manque d'espace adéquat ou d'un manque de motivation tout simplement, soit que le professeur, à cause d'une faible tâche d'enseignement, c'est-à-dire de 6 à 10 heures par semaine, jouit du privilège d'avoir un emploi ou une occupation extérieure au collège. Je soulève ici le problème relié au double emploi. Inutile ici de rappeler les cas de non-disponibilité pendant les semaines de relâche, c'est-à-dire aux mi-sessions ou à la fin d'une session. Fort heureusement, nous dira-t-on, ces

observations ne concernent pas la majorité du corps professoral. Cependant, il nous semblerait quand même important, avant de se gargariser avec la qualité de l'enseignement, qu'on tienne compte de ces graves lacunes du système.

Dans un deuxième temps, la coalition est très consciente qu'une augmentation de la charge d'enseignement amènerait une augmentation du nombre de professeurs mis en disponibilité. Le débat qui entoure le 80% ou le 50% pour la deuxième ou troisième année nous semble très secondaire. Un élément qui n'a pas été abordé demeure essentiel pour nous.

La société québécoise a-t-elle les moyens de payer des gens à ne rien faire? Aussi triste que cela puisse paraître, les professeurs mis en disponibilité sont des jeunes hommes et des jeunes femmes de cette société. Par conséquent, nous proposons un consensus sur le fait que les professeurs mis en disponibilité soient affectés, d'une part, à des tâches de supervision et de conception de projets communautaires, permettant ainsi une relance de l'emploi, particulièrement chez les jeunes de cette société; d'autre part, sur les projets de recherche et d'innovation pédagogique, professeurs et étudiants. D'ailleurs, laissez-moi vous rappeler que la Fédération des associations étudiantes collégiales du Québec entend mettre sur pied un centre d'innovation pédagogique étudiante du Québec qui permettrait ainsi aux étudiants intéressés d'innover à partir de leur vécu pédagogique sur le contenu des programmes et des cours. Nous verrions d'un bon oeil, d'ailleurs, la présence de professeurs dans une telle démarche de la part des étudiants. Ce sont là quelques solutions de rechange que nous osons proposer en tant que jeunes citoyens de cette société.

Les récents décrets viennent modifier substantiellement le fonctionnement des départements. Cette modification était prévisible depuis la présentation du livre blanc sur l'enseignement collégial. En effet, le projet de réglementation de l'enseignement collégial transférait bon nombre de pouvoirs des départements aux mains du DSP, mandataire du ministère de l'Éducation à l'intérieur des cégeps. Ainsi, ayant pressenti le débat, plusieurs associations étudiantes, membres de la fédération que je représente, motivées par le désir grandissant des étudiants d'être impliqués au niveau des structures pédagogiques, ont entrepris une réflexion dans le but de présenter une alternative valable à ce problème. Présidée au départ par le Mouvement réflexion-action de la ligne blanche, qui était alors un groupe de dissidents de l'association nationale, en 1980, et probablement l'ancêtre de la fédération que je représente, la réflexion a commencé avec la venue du projet sur l'éducation collégiale énoncé dans le livre blanc et signé par M. Jacques-Yvan Morin, l'ancien ministre de l'Éducation.

Après analyse, les divers intervenants de l'enseignement, et particulièrement les étudiants, avaient annoncé leur désaccord sur plusieurs points. Certains, et j'oserais dire la majorité, allaient même jusqu'à le rejeter complètement. Après plusieurs gestes de désaccord de la part des étudiants, le nouveau titulaire du MEQ, le Dr Laurin, décidait, comme on s'en souvient, d'établir une consultation auprès des associations étudiantes. Après maintes réflexions, il nous semblait important de participer à cette consultation pour établir une position claire, apporter une alternative et ainsi légitimer toute action pouvant survenir ultérieurement. Un point précis nous revenait constamment à l'esprit: Jamais le ministre n'avait situé clairement la place que devaient occuper les étudiants au sein des structures qui régissent leur enseignement. Dans la loi sur les collèges de 1967, une commission pédagogique était prévue. Cependant, elle était consultative au conseil d'administration et chaque collège avait la responsabilité d'établir la représentativité des groupes qui y siègent.

Dans certains collèges, cette commission pédagogique existe toujours, mais la voix des étudiants n'y est que très peu entendue. Par exemple, à Rivière-du-Loup, sur sept personnes composant la commission pédagogique départementale, seulement deux étudiants y prennent part. Ils ont le droit de parole et de vote mais certaines personnes siégeant à cette commission considèrent cela sans aucune importance.

Dans les collèges membres de la CEQ -car je les entendais hier parler de la commission pédagogique départementale laissez-moi vous rappeler que cette commission a disparu en 1975, après que son fonctionnement ait été jugé inutile, ce qui privait les étudiants d'une plate-forme intéressante, pour des raisons syndicales, semble-t-il. Restait le conseil d'administration où siège 1 étudiant sur 22.

Donc, afin d'assurer les droits étudiants quant à la pédagogie et permettre aux étudiants intéressés par l'innovation pédagogique, nous proposons que le collège et les divers intervenants de l'enseignement facilitent l'intégration de la participation étudiante aux structures pédagogiques par la mise sur pied d'une commission pédagogique départementale ou de concentration et spécialisation.

Le ministre de l'Éducation déplorait d'ailleurs, dans son livre blanc sur l'école communautaire et responsable, que l'école échappe au contrôle de ses usagers et usagères. En ce sens, la volonté des étudiants est assez claire. Ils veulent avoir une véritable place dans les structures

pédagogiques et ainsi assurer comme jamais leurs droits quant à cette dite pédagogie.

Nous nous devons ici de mentionner à nouveau la volonté exprimée à maintes reprises par les étudiants eux-mêmes de s'ouvrir à un dialogue avec les autres intervenants de l'enseignement et ce, dans le but de faire progresser le système d'éducation, revaloriser la pédagogie et surtout pour ne plus être des consommateurs de cours passifs.

Notre slogan à ce niveau serait plutôt, au lieu de "Sauver l'école publique", "Améliorons l'école publique". Le vrai problème se situe à ce niveau, à notre avis. Il n'est pas vrai que les professeurs doivent avoir le contrôle absolu sur la pédagogie. Ils doivent ouvrir les portes du département aux autres intervenants de l'enseignement, particulièrement les étudiants, afin de créer un lieu propice au dialogue où pourront -comme l'écrivait le Dr Laurin dans le livre blanc que je citais tout à l'heure - se confronter et s'harmoniser les points de vue des professeurs et ceux des usagers.

C'est donc dans le but de mettre définitivement fin aux guerres de juridiction entre les professeurs et les administrateurs de cégeps, partenaires du ministère de l'Éducation, que nous proposons une alternative valable aux décrets, au régime pédagogique et au projet de réglementation de l'enseignement collégial, quant au département toujours.

Quelques solutions furent mises de l'avant mais la solution qui fut retenue et considérée comme la plus concrète et la plus réalisable fut celle de la commission pédagogique départementale. Cette structure, étant celle qui correspond le plus à nos aspirations, parvient des structures départementales déjà existantes et de la commission pédagogique prévue dans la loi des collèges de 1967. Pourquoi cette structure vise exclusivement le département, M. le Président? En considérant que les affaires pédagogiques peuvent varier d'une concentration ou d'une spécialisation à l'autre, comme les sujets traités sont ceux des plans de cours, de l'évaluation, de l'apprentissage et de la création de programmes institutionnels, il nous semble important que ces discussions se tiennent à ce niveau.

Les buts de la Commission pédagogique départementale. Faire participer l'étudiant aux structures qui régissent son enseignement, en plus d'établir une communication et un dialogue nécessaire entre l'étudiant et les autres intervenants de l'enseignement, chose qui n'existe plus, particulièrement chez les professeurs. Ces échanges sont primordiaux pour l'efficacité et l'avancement de la pédagogie au Québec. Enfin, la Commission pédagogique départementale doit assurer, à l'intérieur d'un cadre, les droits fondamentaux des étudiants quant à la pédagogie.

Composition de la Commission pédagogique départementale. La Commission pédagogique départementale devrait être composée, à notre avis, malgré que ce sont des modalités, de deux étudiants, deux professeurs, d'un professionnel des services de la consultation ainsi que d'un directeur du service pédagogique ou d'un de ses adjoints. Elle se réunirait régulièrement et aurait à établir son règlement de régie interne, qui devrait être accepté tant par les étudiants que par les professeurs.

La Commission pédagogique départementale aurait sensiblement les mêmes pouvoirs et responsabilités que la structure départementale existant actuellement. Il s'agit là d'un compromis intéressant que pourraient faire, de part et d'autre, le ministère de l'Éducation et les syndicats de professeurs.

En terminant, nous déplorons fortement, malgré le fait que le sous-ministre Girard déclarait hier que les négociations n'étaient pas un endroit pour transformer le régime pédagogique, l'attitude des deux parties, qui n'ont cessé dans la dernière négociation de masquer le vrai débat. L'absence de règlement entre le gouvernement et les syndicats d'enseignants semble résulter, avant tout, d'un profond désaccord au niveau de la réforme pédagogique envisagée au collégial.

Dans ce sens, nous ne pouvons que dénoncer le fait d'avoir été tenus, en tant qu'usagers du service de l'éducation, à l'écart de toutes les délibérations concernant l'avenir de notre pédagogie.

En conséquence, nous demandons au ministère de l'Éducation d'accepter, avant d'aller plus loin avec son projet de réforme de l'enseignement collégial, la création d'une commission indépendante d'étude sur l'enseignement collégial ou, comme le demandait dernièrement la Fédération des associations de parents de cégeps, la création de véritables états généraux sur l'enseignement collégial.

Cette commission, ou états généraux, devrait regrouper les étudiants, comme tous les autres intervenants de l'enseignement, sans exception. C'est dans un souci d'améliorer la vraie qualité de l'enseignement que nous déposons cette dernière proposition.

En terminant, je passerai la parole à Jean Baillargeon, du RAEU. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole à M. Jean Baillargeon, j'aimerais seulement faire remarquer qu'on a déjà quinze minutes d'épuisées, mais - parce queje regardais les neuf pages - nous essayerons de faire le plus rapidement possible en étant souple sur le temps. M. Baillargeon.

M. Baillargeon (Jean): M. le Président, mesdames et messieurs de la commission, mon intervention s'intitule "Les négociations de la société corporatiste". Notre coalition se veut un nouveau courant de pensée chez les jeunes. Nous croyons que la position de notre coalition reflète un nouveau courant majoritaire parmi les étudiants et la jeunesse en général. On le qualifie de courant pragmatique. À travers lui, on cherche à trouver des solutions réalistes et concrètes aux problèmes des étudiants, de la jeunesse en général et des plus démunis de notre société.

Nous considérons que notre génération n'a plus rien à perdre. Elle ne se reconnaît dans aucun courant traditionnel, qu'il se définisse de droite ou de gauche. Nous rejetons complètement l'approche manichéenne qui voudrait que notre société soit divisée en deux clans: les bons et les méchants. Depuis le début du conflit, dès qu'on ose exprimer une opinion, on est catalogué soit du côté syndical ou du côté gouvernemental. En ne les appuyant pas, on nous reproche alors de faire le jeu de l'une ou de l'autre des parties.

En rompant avec la tradition qui voulait que les associations étudiantes ne pouvaient qu'être des inconditionnelles des professeurs, nous nous sommes fait reprocher de jouer le jeu du gouvernement. D'autre part, en ne cautionnant pas aveuglément les lois spéciales que le gouvernement a adoptées à un rythme et avec une virulence jamais vus, on nous reproche de jouer le jeu des syndicats.

D'aucuns voudraient nous donner l'étiquette prosyndicale ou progou- vernementale, comme si, dans notre société de rapport de force et de polarisation extrême ou continue, nous n'avions d'autre choix que d'observer la règle du "crois ou meurs", particulièrement en cette période de bouleversements majeurs.

Nous avons refusé de tomber dans le piège de la facilité ou du je-m'en-foutisme. Contrairement aux préjugés qui voudraient que nous fassions partie d'une génération amorphe, apolitique et anonyme, nous considérons avoir un mot à dire dans ce débat et nous tenons à le faire connaître.

Depuis plus d'un mois, après quatre conférences de presse, de multiples rencontres et conversations avec nos associations respectives, de même qu'avec les deux parties, gouvernement et syndicat, nous en sommes venus aux conclusions suivantes: premièrement, les usagers de services, malgré leur volonté, sont impuissants face au conflit actuel. Et autant du côté gouvernemental que syndical, on ne veut pas que cela change. Deuxièmement, les deux parties ne réalisent pas à quel point peuvent être graves les conséquences de l'escalade de la présente confrontation. Troisièmement, la population en général se perd quant aux raisons qui ont mené au blocage actuel et tout se joue au-dessus de la population entre technocrates spécialisés. Quatrièmement, autant du côté syndical que gouvernemental, on est impuissant à mettre sur la table une alternative de règlement valable ou à proposer des solutions à l'impasse actuelle. Cinquièmement, de part et d'autre, les parties n'ont manifesté aucune ouverture face aux propositions de notre coalition et ce, sans fournir d'explication ou de justification valable. (10 h 45)

De la génération sacrifiée à la société sacrifiée. Est-il besoin de répéter que l'on fait partie d'une génération que plusieurs appellent "sacrifiée", condamnée, dans bien des cas, au chômage, à l'aide sociale ou à la prostitution pour survivre? Que fait-on des 64 000 jeunes de moins de 30 ans qui n'ont que 144 $ par mois d'aide sociale pour joindre les deux bouts? Que penser de l'expérience de La chaudronnée, à Sherbrooke, où de 500 à 600 jeunes assistés sociaux peuvent manger trois repas par jour grâce aux dons de la population locale et au travail de bénévoles? C'est là, nous croyons, un exemple de solidarité communautaire qui devrait faire réfléchir ceux qui se permettent trop souvent de tenir en otages des malades, des personnes âgées et ce, à des fins strictement corporatistes. Nous ne voulons plus vivre dans une société corporatiste dominée par le chacun pour soi.

Le syndicalisme sacrifié. À titre de syndicaliste étudiant depuis de nombreuses années, je ne peux m'empêcher de constater que le syndicalisme actuel s'autodétruit, se discrédite par son discours égocentrique et "nombriliste". Tout se passe comme si la société devait tourner autour des conventions collectives et que le bien-être des uns procurait automatiquement le bonheur des autres.

Quand on milite dans les associations étudiantes, on hésite maintenant à employer le mot "syndicat" tellement il est associé au corporatisme et évoque l'absence de conscience sociale. Pensons aux traditionnelles grèves des transports en commun de Montréal et de Québec, où l'absence de services essentiels est considérée comme un moyen de pression de plus, et aux grèves dans les hôpitaux où la misère des uns sert d'argument aux autres.

Le discours de gauche dont on se gargarise tant ne sert qu'à masquer des intérêts corporatistes et ce, au mépris des plus démunis, des sans-voix et de ceux qui ne peuvent se faire entendre. On sait fort bien que les revenus des étudiants, par exemple, sont généralement en dessous du seuil de la pauvreté. Faute d'emplois ou de débouchés sur le marché du travail, ils sont souvent condamnés à l'endettement à partir

du système de prêts et bourses. Pourtant, lorsque les institutions d'enseignement subissent des coupures, on leur en fait payer la note en augmentant les frais des services. Depuis quelque temps, les étudiants ont répondu à cela en développant des services parallèles: café-étudiant, coop de livres usagés, services de photocopie. Les syndicats ont répliqué en traitant les associations étudiantes d'anti-syndicales, les accusant de faire une concurrence déloyale à des services universitaires régis par de complexes et enviables conventions collectives.

Si nous voulons une plus grande implication des usagers de services dans le processus de décision, c'est que le syndicalisme actuel est devenu socialement irresponsable, parce que trop corporatiste. La belle époque des années soixante et du front commun de 1972 est bel et bien révolue. Le syndicalisme québécois a déjà été une locomotive de progrès social, il est maintenant essoufflé, marqué par le repli sur soi et par un discours de gauche nostalgique et dépassé, faute d'une véritable remise en question. Le syndicalisme d'aujourd'hui a adopté l'attitude de la surprotection des acquis, de la pratique du camouflage et de la bureaucratisation des relations de travail.

Le faux débat de la sauvegarde de la démocratie. Avant de parler de préserver la démocratie dans notre société, les syndicats devraient se préoccuper de l'absence de démocratie à l'intérieur des institutions d'enseignement, alors qu'on refuse aux étudiants et aux parents un pouvoir de décision véritable, sous prétexte de subir l'arbitraire d'un tiers. Alors que l'école et l'enseignement sont sous la gouverne du laisser-faire et du laisser-aller, on refuse toute forme de contrôle ou d'évaluation.

Il est facile d'en conclure que le système d'éducation au Québec est soumis à l'arbitraire des uns par crainte de l'arbitraire des autres. Les professeurs sont régis dans leurs moindres faits et gestes par la sacro-sainte convention collective, imposant ainsi leur hégémonie et leur propre arbitraire sur tout le milieu scolaire.

Il faut se rendre à l'évidence que le syndicalisme tel que pratiqué actuellement ne peut et ne doit pas servir de modèle de progrès social. Les syndiqués qui refusent de suivre aveuglément les consignes et qui sont explusés de leur syndicat savent pour quelle démocratie ils se battent. C'est du syndicalisme où des mutations doivent se faire de toute urgence.

L'école ne doit plus servir de bastion au syndicalisme corporatiste, mais doit plutôt être ouverte à la communauté et responsable dans son fonctionnement. Qu'on me comprenne bien, nous voulons que le syndicalisme demeure, mais il doit subir de profondes mutations.

Un gouvernement sacrifié. Le gouvernement actuel n'a pas su s'élever au-dessus du rituel de la traditionnelle confrontation invoquant les restrictions budgétaires. Il a complètement mis de côté le processus de négociation pour adopter loi spéciale par-dessus loi spéciale, utilisant ainsi nos institutions démocratiques comme véhicule de moyen de pression, minant ainsi la légitimité et la crédibilité de notre Parlement.

D'autre part, le gouvernement actuel est mal placé pour faire la leçon. En suspendant les amendes aux syndicats, dès son arrivée au pouvoir en 1976, il a, du même coup, miné la crédibilité de l'institution parlementaire. On ne peut se surprendre qu'il récolte ce qu'il a semé.

À titre de citoyens responsables, nous croyons que les excès de lois et les excès de représailles jettent le discrédit sur l'institution parlementaire. À cet égard, le gouvernement devrait abroger ou, tout au moins, suspendre l'application de la loi 111. Son pouvoir moral y gagnerait en évitant de faire des enseignants des martyrs. L'opinion publique est très sensible et très humaniste. On ne peut manoeuvrer la Charte des droits et libertés de la personne sans toucher une corde sensible. La légitimité d'un gouvernement est dépendante de son pouvoir moral. C'est lui qui soutient et appuie son pouvoir exécutoire.

Pour que le gouvernement trouve des appuis chez les usagers de services, il faut, au départ, qu'il définisse un véritable projet d'école et un véritable projet de société. Dans ce sens, le livre blanc du ministre Laurin trace une piste intéressante vers l'école communautaire et responsable. Si l'orientation de ce livre nous paraît séduisante dans ses intentions, c'est au niveau des moyens mis à la disposition des usagers de services pour s'organiser que nous notons une grande faiblesse.

À ce titre, nous revendiquerons, dès la prochaine session parlementaire, un nouveau cadre juridique permettant une meilleure reconnaissance et un financement plus stable de nos associations étudiantes. Rappelons que le présent cadre juridique de reconnaissance des associations étudiantes, c'est-à-dire la troisième partie de la Loi sur les compagnies, organismes à but non lucratif, est inadéquat. Il ouvre la porte à l'arbitraire quant à la perception des cotisations et quant à la reconnaissance de nos organisations.

De plus, nous demandons la participation d'une tierce partie à l'école, parents ou étudiants selon le niveau, afin de mettre fin à la polarisation et à l'arbitraire actuels.

De la société sacrifiée à la société communautaire. Les droits des uns ont comme limite l'absence de droit des autres. Une approche communautaire. En crise

économique, il importe de mettre en commun ses ressources humaines et physiques et ce, au profit de la communauté. Il faut mettre fin au gaspillage et au dédoublement des ressources. Pour parvenir à de véritables changements, il faut tout d'abord changer les mentalités. Cela ne peut se faire qu'en définissant un nouveau code d'éthique sociale, ce que l'on appelait dans la société corporatiste un contrat social. Le nouveau code d'éthique sociale doit passer par le développement d'une solidarité nouvelle, de citoyens nouveaux qui cessent d'être des consommateurs passifs et désabusés. Il nous faut devenir des citoyens responsables de la coopération communautaire, c'est-à-dire de la mise en commun des ressources par la solidarité communautaire.

Pour y parvenir, nous proposons, premièrement, la création d'un fonds de développement et de solidarité communautaire à partir d'une contribution minime des entreprises privées et des travailleurs des secteurs public et privé. Hier, on a eu, justement, un exemple que ce courant a fait du chemin avec le fonds que proposait la Fédération des travailleurs du Québec pour trouver des emplois dans le secteur privé. Deuxièmement, nous proposons la création d'un centre étudiant de services communautaires, appelé CESC, permettant d'utiliser le potentiel étudiant, à travers sa formation, pour le mettre au service de la communauté et, particulièrement, des plus démunis. Le CESC deviendrait une solution permanente permettant d'amorcer le changement de mentalités et de promouvoir la solidarité communautaire. Le CESC pourrait devenir un instrument permanent permettant aux plus démunis de se prendre en main et constituerait un véritable investissement social et économique d'une portée inestimable. Il devrait, d'ailleurs, être financé en grande partie par le fonds de développement et de solidarité communautaire. On pourrait penser que le CESC serve de cadre à l'implication volontaire des jeunes. Vous avez, d'ailleurs, dans vos documents en annexe notre projet de CESC.

En conclusion, nous espérons que notre intervention sera perçue de façon constructive. Nous croyons que notre société est en mutation et qu'il faut changer les mentalités. Comme le veut le slogan du Sommet québécois de la jeunesse qui se tiendra cette année, "il faut s'unir pour s'en sortir". Je vous remercie de votre patience, mais cela faisait longtemps que nous attendions ce moment pour nous exprimer.

Le Président (M. Jolivet): M.

Baillargeon, vous avez dit, à la fin de votre intervention, qu'il y avait un document en annexe. Je n'en ai pas eu copie. Ah, il est à l'intérieur de la pochette?

M. Baillargeon: Oui, à l'intérieur de la chemise.

Le Président (M. Jolivet): Parfait! Avant de continuer, j'aimerais simplement dire que, pour dépôt à la commission, il sera donné à chacun des membres et à ceux qui en voudront, selon les formules habituelles, un mémoire présenté à la commission parlementaire de l'éducation sur la position des étudiants du collège Édouard-Montpetit et par l'Association générale des étudiants du collège Édouard-Montpetit, mémoires qui sont arrivés à mon bureau hier après-midi.

Je tiens à faire remarquer, à tous ceux qui auront à intervenir de vous partager le temps le plus équitablement, puisque déjà six personnes m'ont dit qu'elles avaient l'intention d'intervenir d'ici 11 h 35. La parole est d'abord à M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, j'ai pris un très vif intérêt à la lecture et à l'audition du mémoire qu'on vient de nous présenter, d'abord parce que ce mémoire est sérieux, marqué au coin du sens des responsabilités. Je pense qu'il est temps plus que jamais que nous entendions la voix des étudiants et de leurs organismes dans tous les grands débats sociaux que nous avons, et, particulièrement, dans le domaine de l'éducation.

Le sens de l'éducation, c'est de faire de l'étudiant, comme on vient de le dire, non pas un consommateur passif, non pas simplement un usager, mais un être libre, autonome, responsable et qui participe à son développement. Et je pense qu'on ne peut le faire participer à son développement que si on l'implique lui-même dans les responsabilités du système d'éducation. À ce titre, j'accueille avec énormément d'intérêt la suggestion qui nous est faite d'un organisme qui verrait à ce que cette implication dans la structure et le fonctionnement des écoles et des collèges devienne effective. On peut, certes, s'interroger sur l'une ou l'autre des modalités, mais le principe devrait être acquis aussi bien à l'école secondaire qu'au collège ou à l'université. Et à ce titre, effectivement, il faudra que ce droit soit reconnu d'une façon structurelle, qu'on assure à ces organismes étudiants un financement stable et aussi qu'on voie à ce que, dans le fonctionnement des écoles et des collèges, leur voix soit véritablement non seulement entendue, mais prise en compte. Car il convient absolument - c'est un droit qu'on ne peut leur contester - que les étudiants aient leur mot à dire sur les plans de cours, sur les plans de travail, sur les méthodes de certification, d'évaluation, d'examens. Et, à ce titre, j'accueille avec beaucoup d'intérêt les suggestions qui nous sont faites ce matin.

Bien sûr, ce mémoire est tellement riche qu'on ne peut l'épuiser par quelques

questions. Mais je peux assurer le représentant étudiant qui nous parle ce matin que c'est pour nous un document précieux que nous étudierons, mais qui surtout inspirera les décisions dans l'année qui vient.

Je pense aussi qu'il faut entendre les étudiants sur les grands enjeux sociaux qui se posent actuellement à notre société. Il revient à eux de nous dire leur opinion sur la façon dont nous devrions les aborder et dont nous devrions les régler. Et, à ce titre, j'ai été frappé non seulement par le caractère sérieux, responsable, réaliste et concret de leur mémoire, mais aussi par son caractère généreux, marqué au coin du sens des responsabilités et de la justice sociale.

En fait, la seule question que je voudrais vous poser, c'est celle-ci: Croyez-vous qu'il est opportun de faire en sorte que les ressources, dont dispose actuellement notre collectivité, soient réparties de la façon la plus juste qui soit, aussi bien sur la mission sociale que sur la mission éducative?

Le Président (M. Jolivet): M.

Baillargeon ou M. Houle?

M. Rivest: Y a-t-il quelqu'un qui est contre cela?

Le Président (M. Jolivet): M.

Baillargeon, vous avez la parole.

M. Baillargeon: Vous avez souvent l'art, M. le ministre, de poser des questions qui en fait, sont tellement larges que personne ne peut être contre, évidemment. C'est-à-dire que les intentions des gens sont pour la vertu, évidemment. Mais il est évident que, pour nous, actuellement, il ne s'agit pas de dire: Bon, les méchants, ce sont ceux... Ce serait facile, ce serait peut-être même démagogique de dire que les revendications actuelles des professeurs vont enlever le minimum dont ont besoin les plus démunis, vont enlever "le pain dans la bouche de la veuve et de l'orphelin". Je pense que ce serait injuste de tomber dans cet extrême. (11 heures)

Par contre, il faut voir aussi - et c'est un peu notre attitude, sans avoir employé ces termes-là - qu'on aurait parfois le goût d'être méchant parce qu'on en a beaucoup sur le coeur. Il y a une attitude de génération actuellement. Quand on dit une génération, c'est peut-être deux. Ceux qui nous ont précédés ont eu un projet de société, qui était de développer l'État québécois, de développer des services à la population. Ce projet de société social-démocrate, les deux partis ici présents ont beaucoup contribué à l'élaborer ce projet à travers, nos institutions. Avec la crise économique, les coûts nécessaires pour soutenir ces institutions nous ont amenés à faire des choix et à remettre en question l'utilisation de nos ressources, parce que justement les ressources sont limitées. C'est difficile après dix ans de fonctionnement selon un rythme où, entre autres, on négociait selon un rapport de force pour essayer d'en avoir plus.

Je me souviens que, quand on revendiquait des réaménagements, si minimes soient-ils, au niveau du régime des prêts et bourses lors de nos grèves en 1974 et 1978, quand le syndicalisme étudiant a repris de sa vigueur, on se faisait traiter de corporatistes et on nous disait que cela était exagéré parce qu'on ne faisait pas les grandes luttes glorieuses des années soixante: la guerre du Vietnam, etc. Nous, on se fiait au modèle acquis selon lequel tout le monde disait qu'il fallait établir un rapport de force. Donc, on faisait une grève et on disait qu'on voulait en avoir plus. Le modèle était celui-là. C'est l'héritage qu'on a eu de la génération précédente.

Maintenant, nous sommes rendus à un tournant. Notre société est en mutation et on doit partager davantage les ressources actuelles. Dans ce sens-là, je crois qu'il y aurait moyen, en ce moment, et là je tends à peu la perche du côté syndical... Je prends un exemple concret qu'on a vécu à l'Université de Montréal l'an dernier. Il y avait eu 105 professeurs de mis en disponibilité à cause des coupures budgétaires. L'ensemble des professeurs d'université a accepté de baisser de 1% son indexation de salaire pour permettre le réengagement des 105 professeurs. C'est cela, de la solidarité. Ils se sont dit: On verra dans l'avenir à faire notre part.

C'est un peu cela qui pourrait se passer actuellement, si l'ensemble des professeurs du Québec acceptait - même s'ils ont déjà subi beaucoup, il est vrai, plus que leur part par rapport à d'autres travailleurs, et il faut le reconnaître - au niveau des mises en disponibilité de 80% la première année, de 80% la deuxième année et de 50% la troisième année, une légère baisse de salaire pour permettre le réengagement des autres professeurs qui seraient mis en disponibilité. Si on augmente la tâche - parce que notre conception est de dire qu'une légère augmentation de la tâche ne remettra pas en question de façon irrémédiable la qualité de l'enseignement - on souhaiterait - et beaucoup de professeurs seraient prêts à le faire - qu'ils s'impliquent dans des projets communautaires pour aider les plus démunis de notre société, les jeunes qui ne font rien actuellement.

D'une part, qu'on accepte une baisse de salaire pour permettre que tout le monde ait un plein salaire et d'autre part, que ceux qui seront mis en disponibilité travaillent à des projets et à des travaux communautaires. Ce sont des propositions concrètes. Nous l'avons dit déjà aux professeurs. Ils connaissent notre

proposition. On trouve cela acceptable socialement actuellement. Ils auraient beaucoup de crédibilité aux yeux de l'opinion publique d'accepter une telle proposition.

Par contre, au niveau gouvernemental, il faudrait arrêter d'émettre dans l'opinion publique que les professeurs, par leur façon de revendiquer, empêchent irrémédiablement qu'on investisse dans des projets de création d'emplois. Si le gouvernement reprenait notre proposition et la proposait aux professeurs, on l'appuierait et on essaierait de convaincre les syndicats de professeurs de l'accepter.

Le Président (M. Paré): Vous avez terminé? La parole est maintenant à M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'essaierai de faire cela brièvement. J'émettrai une note légèrement discordante. Je pourrais bien faire des compliments sur toute la ligne, comme le ministre l'a fait, mais je pense que cela n'avancera pas beaucoup la discussion.

J'ai noté les critiques que vous faites au sujet de certains abus du syndicalisme. Je voudrais vous rappeler que la structure bipolaire que nous avons en matière d'organisation de rapports du travail est la meilleure qu'on ait trouvée jusqu'à maintenant dans les sociétés industrialisées. On n'a pas de modèle de remplacement à court terme. Je pense qu'il faut plutôt viser à améliorer celle-là qu'à remplacer les éléments de structure fondamentale sur lesquels elle repose. S'il y avait autre chose... Il y a bien des gens qui font de la recherche; on en paie dans les universités pour faire des recherches là-dessus, mais cela n'avance pas vite. Je vais vous dire une chose peut-être bien étonnante pour vous, c'est que les progrès les plus rapides se font généralement par des perturbations sociales, que n'aiment pas les gouvernements, encore plus que par les recherches. Les deux ont une part de contribution, mais il faut voir cela d'une manière très pratique.

Je trouve un peu bucolique la manière dont vous abordez le conflit dans lequel nous sommes pris. Je vous le dis bien simplement pour qu'on ait un échange de vues vrai et sincère. Il y a des propositions dans votre mémoire dont j'aimerais bien discuter. Je ne suis pas enclin à en discuter parce que la commission parlementaire est réunie à une fin précise: recevoir les vues des organismes sur un conflit précis qui existe actuellement, qui s'achemine vers un dénouement que nous souhaitons paisible et heureux pour tous. Certaines propositions que vous faites sont intéressantes, mais il y aurait peut-être lieu de les étudier à un autre forum que celui-ci. Quand vous demandez, par exemple, ia création d'une commission indépendante sur les cégeps, commission impartiale d'étude, nous y sommes favorables. Personnellement, je trouve que si vous demandiez au ministre de convoquer la commission parlementaire de l'éducation pour étudier le problème des cégeps, pour une couple de jours, comme nous l'avons fait pour le conflit actuel, nous collaborerions volontiers et nous aurions le temps d'aller en profondeur dans l'examen d'une proposition comme celle-là. Mais je ne ferai pas ce qu'on est peut-être enclin à faire en disant: Oui, c'est très bien, très bien. Parce que dans la réalité de tous les jours, ce n'est pas ainsi que cela se passe. Je vous dis cela bien simplement.

J'ai essayé de voir dans votre mémoire ce qui regarde le conflit. J'ai trouvé une proposition. Vous êtes favorables à l'entrée en scène d'une tierce partie qui pourrait aider au rapprochement des deux parties dans les échanges qu'elles doivent avoir pour en arriver à un règlement raisonnable et réaliste. Je veux vous dire que je suis tout à fait d'accord là-dessus. Si vous avez des précisions à donner quant aux modalités que cela pourrait revêtir, quant à l'utilité que cela pourrait avoir dans le stade actuel du conflit, ce serait très bien. S'il y a d'autres remarques que vous aviez à faire au sujet des moyens possibles auxquels on pourrait recourir en vue de favoriser un règlement ou une démarche plus rapide vers un règlement du conflit, je pense que cela pourrait être très utile. Encore une fois, ce n'est pas par manque d'intérêt pour d'autres aspects - mes collègues pourront y revenir, je vous donne simplement ma réaction personnelle - bien au contraire, mais étant donné les contraintes dans lesquelles nous évoluons, si vous aviez des précisions à apporter là-dessus, je l'apprécierais.

M. Houle: Donc, si vous le permettez, M. le député d'Argenteuil, au risque de vous contredire un peu, nous mentionnons dans notre mémoire que - nous avons écouté avec attention les sous-ministres avant-hier et les enseignants de cégeps, hier matin - le débat entourant la tâche, la sécurité d'emploi et l'autonomie départementale semble un faux débat. Les enseignants mentionnaient, hier, de façon assez claire, avec leur retour sur le fameux PREC (projet de réglementation de l'enseignement collégial) que le débat se situait à ce niveau. Nous accusons aussi les deux parties, dans notre mémoire, de s'être mises la tête dans le sable et d'avoir fait un débat biaisé sur ces trois éléments plutôt que sur ia réforme scolaire.

Concernant notre intervention ici qui peut être considérée comme un peu décrochée par rapport aux trois éléments de la négociation, je dois vous rappeler que c'est à peu près la seule tribune que nous avons pu obtenir pour nous faire entendre sur ce sujet.

Maintenant, concernant votre intervention sur la seule proposition que nous

faisons, qui est d'introduire une tierce partie dans les négociations, tout au moins, nous serions prêts à faire la concession suivante: une tierce partie quant à la redéfinition du processus de négociation parce qu'il faudra s'y pencher. Je pense que la grève, entre autres, est devenue quelque chose d'inacceptable en temps de crise économique surtout. On pourra faire le débat là-dessus une autre fois.

Il y a des propositions concrètes dans notre mémoire, de toute façon. Je voudrais simplement vous rappeler que nous ne sommes pas nécessairement en désaccord avec l'augmentation de la tâche. Je pense que c'est une proposition qui peut être jugée comme concrète. Dans un deuxième temps, nous apportons une alternative valable à l'aménagement du département. Les modalités, on pourra aussi y revenir. C'est le principe que nous voulions énoncer ici, beaucoup plus que les modalités. Nous pensons que les professeurs doivent avoir des comptes à rendre non seulement aux administrateurs, mais aussi aux usagers du service que sont les étudiants. C'est dans ce sens que la proposition a été faite.

D'autre part si on veut continuer le débat sur le corporatisme et savoir ce qu'on fait des professeurs mis en disponibilité - doit-il y en avoir 300 ou 2000? Il y a une guerre de chiffres à ce niveau et nous ne voulions pas, nous les étudiants, tomber dans une guerre de chiffres - nous amenons une alternative que nous jugeons valable de réaffecter les professeurs mis en disponibilité à des tâches communautaires, ou de la conception et de la supervision de projets, etc. Cela pourrait faire l'objet d'un bon débat aussi. Ce sont des choix qu'on propose. Donc, on pense faire des propositions concrètes malgré tout, ici.

Deuxièmement, vous mentionniez, M. Ryan, que le but de la commission n'était pas nécessairement cela, que la réalité était tout autre, etc. Je dois vous rappeler simplement que nous apportons ici le point de vue des étudiants et que la réalité au niveau des étudiants peut être vécue de façon différente aussi.

M. Baillargeon: Un complément de réponse.

Le Président (Paré): Oui.

M. Baillargeon: II est clair que, s'il y a une tierce partie en vue du rapprochement des deux parties actuelles, cela ne doit pas se faire en secret au Hilton. Est-ce qu'on se comprend là-dessus? Parce que cela fait assez de temps qu'on perd et là, il y a encore une grève qui aura peut-être lieu le 14 mars. S'il y a une tierce partie, ce n'est pas un spécialiste de la question qu'on veut. Cela prend des gens qui ont un pouvoir moral sur les deux parties pour les rapprocher.

Nous proposions d'avoir une commission, un comité de médiation à un moment donné où il y aurait des usagers de services, parents et étudiants, des représentants même de milieu syndical, du secteur privé, du clergé, etc., pour le rapprochement des deux parties. Parce que le débat n'est pas à un niveau technique. Le débat est beaucoup plus haut que cela actuellement. Nous, on est tanné de subir un climat d'insécurité tout le temps et de se demander: Est-ce qu'on va avoir une grève demain matin, etc?

Je pense - M. le député d'Argenteuil doit être d'accord avec cela - qu'il faut qu'il y ait un déblocage et, pour qu'il y ait un déblocage, il faut une tierce partie qui a un pouvoir moral véritable. Nous faisons des propositions et ce qu'on veut, c'est que les deux parties se prononcent sur nos propositions.

Deuxièmement, au niveau du système de négociation, vous avez dit: On n'a pas trouvé de meilleur système actuellement que celui qui nous régit. Nous, nous proposons la venue d'une troisième partie, justement, d'une tierce partie. Si c'est bon pour le rapprochement dans les négociations, cela peut peut-être être bon de façon permanente aussi. Vous devriez réfléchir à cette question et convoquer des usagers de services, parents ou étudiants, lorsqu'il y a des négociations qui englobent les conventions collectives. Les négociations actuelles débordent de beaucoup la question de la tâche, de la sécurité d'emploi; elles englobent aussi le régime pédagogique, les rapports professeurs-étudiants. Alors, il faut que les étudiants et les parents soient mis à contribution dans les futurs régimes de négociation. Vous devriez y réfléchir sérieusement parce que ce serait innovateur et cela pourrait devenir un modèle peut-être au niveau mondial même. Qu'on cesse, justement, de se chicaner comme cela semble être le cas actuellement pour tirer la couverture chacun de son bord. Je pense que vous êtes d'accord avec nous que le processus actuel n'est plus crédible aux yeux de la population, ni aux yeux de personne.

Le Président (M. Paré): Merci. La parole est maintenant au député de Vachon.

M. Payne: Je pense qu'on pourrait profiter aujourd'hui de cette commission pour essayer d'élargir le débat. Je m'inspire du mémoire qui vient de nous être présenté pour exprimer encore une fois mon étonnement qu'au moment où la partie patronale demande un plus grand rendement, une productivité accrue de ses employés publics ou enseignants on s'apprête quand même - pour moi, il s'agit d'un manque de cohérence - à accorder 80%, 80%, 50%

année après année pendant trois ans, sans demander aucun rendement en retour. (11 h 15)

Je serai très concret parce que je pense que nos électeurs sont très intéressés à regarder ce genre de problèmes de près. Je regarde le comté de Vachon, par exemple. Il y a 18 mois, au début de la crise, nous avons instauré le centre de référence et d'information de Vachon. On a cherché par tous les moyens à avoir l'aide du gouvernement pour que ce centre puisse fonctionner convenablement. Cela travaille et cela fonctionne à cause du bénévolat. Mais pourquoi la partie patronale n'a-t-elle pas essayé de discuter des modalités pour que ceux qui sont mis en disponibilité puissent être "utilisés au service de la collectivité"? Je n'aime pas utiliser ces mots mais cela revient à cela. Dans le décret - c'est peut-être cela, la nature de la bête: un décret, c'est plutôt une espèce de code juridique, une espèce de codex - on parle d'un programme de recyclage prévu pour les professeurs mis en disponibilité. J'ai dit l'autre soir et je le répète encore: II y a un manque de précision dans ce programme. De quel programme s'agit-il?

Un peu plus loin dans le même décret, on parle d'un comité paritaire de placement. De quoi s'agit-il? Je considère qu'on devrait discuter avec les syndicats dès la semaine prochaine de toute une série de mesures que vous, particulièrement, pouvez porter à leur attention et discuter peut-être avec le conseil des collèges, la partie patronale, et avec la Fédération des cégeps. Les prêts de services auprès des organismes communautaires, je pense que c'est une excellente idée. Chez nous, dans notre comté, il y a très peu de place où les jeunes peuvent se rassembler. Je peux vous dire que même le bureau du député devient une espèce de "drop in centre" souvent. C'est déplorable. Je déplore aussi qu'avec le manque d'entente entre les municipalités en temps de crise on ne soit pas capable d'utiliser nos services communautaires, nos écoles, comme locaux pour nos jeunes chômeurs qui ne gagnent que 144 $ par mois. C'est scandaleux.

J'aimerais bien élargir aujourd'hui le débat pour discuter des problèmes de la société en général. Je demande que la partie patronale reconsidère cette offre gratuite de 80%, 80%, 50%. Quel chauffeur de taxi, quel travailleur, pourrait avoir cet avantage social qui, à mon avis, peut être nécessaire, est très intéressant, est très important, mais, en retour, pourquoi? Avez-vous des commentaires?

Le Président (M. Paré): M. Houle.

M. Houle: M. le Président, brièvement, je voudrais remercier le député de Vachon pour son ouverture sur cette question. Pour reprendre ce que mon collègue, Jean Baillargeon, disait tout à l'heure, c'est dans ce sens que nous abordons un discours d'utilisation maximale des ressources dans cette société. Il y a 122 comtés au Québec qui auraient probablement besoin de projets communautaires. Les modalités ne sont pas définies parce que, nécessairement, on ne sait pas où le gouvernement veut en venir clairement sur cette question. On parle d'un fonds de relance de l'emploi, on parle d'un service communautaire, etc. Je pense que les syndiqués mis en disponibilité seraient d'accord avec cette alternative dans la mesure où on revalorise l'implication communautaire. À ce moment-là, il ne serait plus question de 80%, 80%, 50%, ou de 80%, 50%, 50%, pour les années de mise en disponibilité. Il y aurait probablement le maintien de la masse salariale et une équité envers et les professeurs mis en disponibilité affectés à des projets communautaires pour la relance de l'emploi et les professeurs qui enseignent. Donc, ce serait 100% pour tout le monde, dans la mesure où on serait capable de réduire un peu le traitement à ce niveau. C'est tout ce que je voulais dire.

Le Président (M. Paré): Merci. La parole est maintenant au député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président. Je tiens, d'abord, à vous remercier pour la présentation de votre mémoire. Je n'ai qu'un léger commentaire général à formuler. Évidemment, on a dit sur toutes les tribunes que les jeunes actuellement sont les premières victimes de la crise, si on se reporte à la récession économique et également si on se réfère au conflit actuel entre les enseignants et le gouvernement. Je pense qu'effectivement vous êtes, encore une fois, les victimes de ce conflit et votre présence ici aujourd'hui est plus qu'appréciée - j'en suis persuadé - par la majorité des parlementaires de la commission.

Le ministre nous disait tantôt, un peu avec des voeux pieux, qu'il était pour vous écouter - comme on. l'entend souvent dans un sens large - qu'il va voir à vos préoccupations et entend éventuellement régler pas mal tous les problèmes. D'ailleurs, depuis deux ans, j'ai eu l'occasion de travailler au projet de règlement des études collégiales. J'ai aussi eu l'occasion de m'entretenir avec vous sur le projet en question. Apparemment, il attend toujours le résultat des consultations avec les associations étudiantes. Je vois d'un bon oeil votre proposition de la création d'une commission indépendante avant que le ministre agisse d'une façon ou d'une autre pour mettre en application la majorité de ce qu'il propose dans son projet.

Concernant le financement des associations étudiantes, je suis aussi content que vous l'ayez soulevé. Ce n'est peut-être pas nécessairement le but de la commission actuelle de voir à régler ces problèmes, mais, comme vous le savez, il y a un échéancier le 1er avril. Il est donc de toute urgence d'aborder cette question dans les plus brefs délais, quitte à convoquer une commission parlementaire spéciale à un moment donné sur l'éducation, sur les problèmes des collèges, autant en ce qui a trait au financement des associations étudiantes qu'en ce qui a trait à l'application du projet de règlement des études collégiales.

Maintenant, je suis également content que le député de Vachon se scandalise au même titre que l'Opposition du sort qui est réservé aux jeunes en bas de trente ans, célibataires, avec 30 $ par semaine pour vivre. Je suis très heureux qu'il se joigne à nous pour tenter de convaincre le ministre Marois de modifier cela au plus sacrant.

Pour revenir de façon plus précise à votre mémoire, relativement aux professeurs en disponibilité, on a créé une certaine ouverture. Est-ce que vous avez eu des conversations sur ce sujet avec le monde syndical? Évidemment, le terrain est extrêmement chaud actuellement. Mais est-ce que vous avez eu des communications avec le monde syndical relativement aux professeurs en disponibilité afin qu'on s'en serve comme personnes-ressources dans les projets communautaires pour aider la jeunesse qui est en pleine crise actuellement, en pleine catastrophe?

Le Président (M. Paré): M. Baillargeon.

M. Baillargeon: Oui, effectivement, on a eu de nombreuses conversations; eux, pour nous convaincre de leurs arguments et nous, pour les convaincre des nôtres. Là-dessus, il y avait une ouverture dans les intentions. Je ne crois pas que la partie syndicale serait contre le fait que les professeurs puissent être affectés à des projets communautaires, qu'ils fassent quelque chose. Ce n'est pas sur ce sujet, je pense, quoique souvent on nous renvoie la balle. Si je me souviens bien des conversations, on disait: C'est au niveau gouvernemental qu'on est contre. Il semble que ce soit cela. Quand je vais voir le côté gouvernemental - parce qu'on fait souvent la navette - on nous dit: Non, ce sont les professeurs qui sont contre. Quand les deux nous disent qu'ils sont pour cela, on se demande quand il y aura des propositions concrètes pour faire en sorte que les professeurs qui seraient mis en disponibilité puissent être affectés à des projets d'implication communautaire. Les deux parties nous disent que c'est l'autre qui ne veut pas; en tout cas, cela bloque de l'autre côté. Dans ce sens, oui, il y avait une ouverture, d'après les conversations que j'ai eues.

Il y avait aussi une ouverture du côté syndical, sauf que là revient toujours la même question: On fait toujours un "package deal", c'est tout ou rien, c'est la tâche, la mise en disponibilité, les 80%, 50%, etc. On veut toujours se situer dans cet ensemble. Avec nos propositions d'aujourd'hui, on espère pouvoir trouver un compromis, un moyen de rapprochement des deux parties, comme je l'ai dit tout à l'heure. Notre proposition, c'est que les professeurs soient solidaires entre eux et acceptent peut-être une légère baisse de salaire pour que tout le monde puisse avoir un salaire à 100% et que l'argent qui serait économisé là-dessus puisse être affecté à des programmes d'emploi chez les jeunes, entre autres, et que les professeurs mis en disponibilité encadrent ces projets d'implication communautaire. Là, tout le monde serait satisfait, puis ce serait vraiment un geste d'ouverture vers la communauté, vers la société.

M. Houle: Si vous me le permettez, M. le Président, pour rassurer un peu le député de Marquette concernant la consultation sur le projet de réglementation des études collégiales, je voudrais simplement rappeler à cette commission ce que je rappelais au ministre de l'Éducation dans une lettre que je lui écrivais récemment.

À l'heure actuelle, le climat qui persiste dans les cégeps ne permettrait pas, malgré le fait que le décrets semblent être la locomotive d'une réforme préméditée, l'implantation d'un nouveau régime pédagogique où l'on pourrait avoir la collaboration de tous les intervenants de l'enseignement. Dans ce sens, la commission d'étude ou la commission indépendante d'étude ou une commission parlementaire, peu importe, serait très pertinente à ce niveau-là. Il serait difficile, justement, de procéder à une réforme, surtout avec l'attitude ou avec le climat dans lequel se trouve le corps professoral, entre autres, à l'heure actuelle. J'aimerais qu'on étudie sérieusement cette question.

Le Président (M. Paré): Merci.

M. Dauphin: Est-ce que j'ai droit à une autre question?

Le Président (M. Paré): Oui, allez, M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président. Vous avez eu l'occasion à trois ou quatre reprises depuis le début du conflit, je crois, de faire des conférences de presse sur vos préoccupations et tout ça. Maintenant, vous avez sûrement entendu, hier après-midi, le

mémoire de la CEQ relativement à l'une de ses propositions, c'est-à-dire la reprise des négociations au plus sacrant, évidemment -je pense que tout le monde le souhaite - et la présence d'un observateur ou médiateur.

Tantôt, dans votre mémoire, vous avez proposé une médiation spéciale avec un représentant des usagers, du monde étudiant. J'aimerais juste savoir brièvement si vous seriez d'accord effectivement que le gouvernement s'empresse également d'avoir un observateur ou un médiateur ou un conciliateur en présence des deux parties, aussitôt qu'il y aurait reprise des négociations, s'il y a reprise.

M. Baillargeon: Notre proposition est connue depuis longtemps. Cela fait un mois qu'on était d'accord avec la médiation. Du côté gouvernemental, comme vous le savez, on hésite à s'ouvrir à un médiateur pour toutes sortes de raisons qui peuvent être fondées, c'est-à-dire que le gouvernement ne peut déléguer à une tierce partie ses responsabilités. Le gouvernement a deux chapeaux finalement, il est négociateur de la partie patronale et il est aussi gouvernement, gestionnaire des fonds publics. C'est difficile.

Dans ce sens-là, à la fin, on a réaménagé notre proposition de médiation et on en est arrivé à une commission d'information du grand public. Là, on voulait finalement que les parties en présence dans cette commission, où il y aurait des représentants des usagers et aussi de beaucoup de milieux, entre autres un représentant du milieu des affaires, par exemple, que tout le monde puisse voir où ça bloque et trouver un compromis acceptable. Ce serait une tierce partie qui n'est pas impliquée directement au niveau des deux autres. Cette proposition nous semblait avoir été acceptée, à un certain moment, par le ministre, mais le ministre ne l'a jamais déclaré publiquement.

Probablement qu'il acceptait dans les intentions, mais je suppose qu'après la commission parlementaire, si ça ne débloque pas, peut-être qu'il va l'accepter ouvertement; on ne le sait pas. On l'espère, en tout cas, parce que ce serait vraiment la dernière chance. Nous, on l'appelait le comité de la dernière chance; maintenant, on l'appelle la commission d'information du grand public. Le grand public a le droit de savoir sur quoi ça bloque.

Cette commission ferait une proposition de rapprochement devant l'opinion publique et les deux parties devraient justifier pourquoi elles ne peuvent accepter cette proposition de compromis. C'est dans ce sens que nous, on pense qu'il peut y avoir un déblocage. On espère que l'Opposition reprendra notre proposition de commission d'information du grand public qui servirait à rappocher les deux parties, mais qui servirait aussi à trouver des solutions, justement, aux problèmes des jeunes, comme vous l'avez dit tout à l'heure. Les professeurs mis en disponibilité pourraient justement être orientés vers des programmes d'implication communautaire.

Le Président (M. Paré): M. Houle.

M. Houle: M. le Président, je voudrais juste dire que, quant à nous, bien que les étudiants le souhaitent, on est un peu perplexes quant à une reprise des négociations si les deux parties en présence ne décident pas de laisser de côté les discours que nous, on qualifie de corporatistes. En tout cas, je pense que, jusqu'ici, et en voyant la présentation des différents mémoires, il n'y a pas de volonté de rapprochement. Dans ce sens-là, on est très déçus. Je me demande de quelle façon réagiraient, finalement, les jeunes de cette société quand on voit qu'on n'est vraiment pas intéressé à étudier une solution valable et qu'on conserve des discours corporatistes. (11 h 30)

Le Président (M. Paré): Avant de poursuivre, je voudrais simplement rappeler que, selon l'horaire qu'on s'est fixé, il resterait cinq minutes pour la période des questions à adresser à l'organisme de la coalition étudiante. J'ai encore cinq intervenants à venir. Donc, je demanderais aux gens d'accélérer autant pour la période des questions que pour les réponses. La parole est maintenant au député de Chauveau.

M. Brouillet: Mon introduction sera très brève, étant donné le temps qu'il nous reste. Je veux tout simplement féliciter à mon tour les intervenants. Je crois que vous avez apporté une contribution très valable en ce qui concerne surtout les attitudes et les mentalités que vous souhaiteriez voir apparaître dans le décor québécois pour tâcher de s'unir plutôt que de se diviser et utiliser au maximum nos ressources pour l'édification de notre société. Il y a un message que vous livrez, message que nous devrons tous faire nôtre, je crois.

Il y a deux points sur lesquels j'aimerais revenir. Étant donné le peu de temps, je serai très bref. Tout d'abord la question de l'utilisation des personnes mises en disponibilité. Vous avez fait allusion à des services qu'elles pourraient rendre dans des groupes communautaires. Il y a toute une série de mesures que le gouvernement proposait pour utiliser les personnes mises en disponibilité. Parmi ces mesures, la quatorzième se lit comme suit: "Prêts de services auprès des organismes communautaires". C'est une mesure qui est mise de l'avant par le gouvernement. Elle fait partie des mesures non contenues dans

la convention collective. Vous savez qu'il y a toute une série de mesures contenues dans la convention collective et d'autres qui ne le sont pas. Je ne sais pas si cela a été déposé officiellement...

Une voix: On n'a jamais vu cela.

M. Brouillet: ...à quelque table que ce soit. Si cela n'a pas été fait, je me demande s'il ne serait pas temps de le faire au sein même de cette commission; qu'il y ait un dépôt de cette liste de mesures qui comprend, comme je l'ai dit, des "prêts de services auprès des organismes communautaires". Je suggère que le dépôt de cette liste de mesures se fasse au sein de cette commission parlementaire, si cela n'a pas été fait en quelque lieu ailleurs.

Maintenant, je reviendrais sur un point, qui est très important dans le débat actuel et qui masque un petit peu, à mon sens, l'endroit précis où il y a un désaccord et un écart entre les deux positions. Il y a un concept qu'on utilise, qui masque tout cela, c'est le concept qualité de l'enseignement. Vous avez laissé entendre, dans votre mémoire et dans vos propos, que, d'après vous, il y a dans les cégeps - vous en avez parlé un peu - une marge de manoeuvre pour augmenter la tâche sans que la qualité de l'enseignement ne soit en danger. Vous avez fait allusion à la disponibilité des professeurs dans certaines situations. Vous avez bien dit - je suis prêt à l'endosser parce que j'ai passé moi-même quatre ans dans un cégep -qu'il y a vraiment des professeurs qui, en dehors de leur tâche de cours, sont disponibles et consacrent énormément de temps à leurs étudiants. Je crois que c'est la majorité. Je suis même prêt à le dire. Plusieurs vont au-delà des 40 heures. Cela aussi, je suis prêt à le reconnaître. Mais il y a une chose. Il est vrai qu'il y a toute une marge de manoeuvre qui est laissée à la liberté du professeur. Vous avez fait allusion à des professeurs qui, effectivement, utilisent cette marge de manoeuvre pour faire autre chose que de se rendre disponibles pour leur étudiants. Vous avez rapporté ces faits.

Je vous repose la question. Il serait peut-être bon de préciser de nouveau votre idée sur ce point. Croyez-vous vraiment que l'augmentation de la tâche se situe encore dans des limites raisonnables qui permettent de maintenir une qualité de l'enseignement au collégial?

M. Houle: Si vous me permettez, brièvement, effectivement, je pense que vous me citez à la perfection. Pour répondre à votre question, non, nous ne croyons pas que l'augmentation de la tâche incluse dans les décrets va nuire à la qualité de l'enseignement. Cependant, et je pense que c'est clair, là où on accroche le plus, c'est qu'elle va provoquer une augmentation du nombre de professeurs mis en disponibilité. Là-dessus, notre proposition se veut claire, je pense. En tout cas, c'est une option à étudier.

Effectivement, je dois le dire, ce n'est pas la majorité des professeurs qui rendraient ce qu'on appelle "des mauvais services aux étudiants". Cependant, ce sont là des préoccupations profondes de la masse étudiante. Nous aimerions voir les professeurs plus impliqués, parce que cette solidarité collégiale, à l'intérieur de la communauté d'un cégep, n'existe plus, souvent, peut-être, à cause de la hausse du nombre de personnes qui étudient dans ces collèges. On sait qu'il y a une surpopulation dans la quasi-majorité des collèges. Les gens ne sont plus intéressés ou n'ont plus d'endroit où vivre à l'intérieur de ces collèges. C'est un autre élément qu'on ne mentionne pas dans le mémoire. Et je pense que les étudiants, peu à peu, ont pris le même modèle que les professeurs, ce qui est dommage pour la vie de l'enseignement. Une fois les cours terminés, les étudiants quittent le collège parce qu'effectivement il n'y a plus de place pour eux dans ces boîtes, en raison de la surpopulation.

Je voudrais vous rappeler que le Conseil supérieur de l'éducation disait en 1975 que le collège devait être un lieu d'épanouissement et de développement de l'individu. J'aurais le goût de poser une question à la commission. Est-ce que vous pensez que c'est toujours le cas?

Le Président (M. Paré): M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président.

Comme les parlementaires avant moi, je me réjouis de voir ici des représentants des associations étudiantes. J'y vois, M. le Président, un signe des temps. J'y vois la consécration de l'intérêt qu'ont les principaux usagers, les consommateurs de biens pédagogiques. Je vous félicite du travail que vous avez fait et j'ai été très heureux de vous entendre.

Maintenant, les propos que vous avez tenus dans certains cas me laissent un petit peu songeur. Je vous rejoins totalement tout d'abord en ce qui concerne les inquiétudes que vous avez concernant le nouveau régime pédagogique ou le projet de régime pédagogique du ministre de l'Éducation. Depuis un certain temps, il doit se faire une consultation. Je pense que cette consultation, en grande partie - et je profite de l'occasion pour le dire - est une consultation bidon qui vise à faire passer le temps, de façon que les étudiants qui sont actuellement les principaux intéressés et qui passent un an, deux ans, trois ans au cégep, auront dans un an, deux ans, trois ans été renouvelés et, par

conséquent, on devra rééduquer, réinventer, on devra sensibiliser de nouveau une nouvelle clientèle. Et comme on sait que les problèmes ne manquent pas, que les raisons de prendre des positions dans des problèmes qui sont plus immédiats ne manquent pas, il est probable alors que l'intérêt sera beaucoup moins grand dans un an ou deux. Et je vous incite, vous, les étudiants, à ne pas lâcher le morceau. La porte où il faut frapper, la porte où il faut insister et se tenir, c'est la porte du ministre de l'Éducation. Si vous ne le faites pas, cela va durer un an, deux ans, trois ans, et vous allez vous retrouver, comme vont nous le dire et nous l'ont dit un certain nombre d'intervenants dans le domaine de l'éducation, avec de supposées consultations et on dira: On a fait cela pendant un an, deux ans et trois ans, et, finalement, tant va la cruche à l'eau qu'elle se brise. À l'usure, on peut avoir n'importe qui.

M. le Président, cette remarque, je la crois importante et je crois qu'elle s'insère à l'intérieur des préoccupations de formation personnelle que vous avez, de formation de vos pairs, des gens qui sont aux études avec vous. Je sais les efforts que cela signifie. Et je sais personnellement, pour avoir trois cégeps dans mon comté, le comté de Louis-Hébert, je sais ce que cela suppose de sacrifices de la part des étudiants que de faire des études de la nature de celles qu'ils font, sans aucune garantie, M. le Président -c'est la tragédie actuellement. Je pense qu'il faut le dire - sans aucune garantie - et le gouvernement est en grande partie responsable de cela - d'emplois ou d'avenir qui soit acceptable à la fin de tout cela. Je pense que c'est extrêmement regrettable.

Les ouvertures que vous faites concernant un médiateur-observateur sont extrêmement intéressantes. Elles ont été faites par de nombreuses parties. Elles ont été faites par l'Opposition. Le ministre a semblé, à la suite de l'intervention de la CEQ hier, faire une ouverture de ce côté. Nous en sommes bien aises, mais que de retard à accepter une chose qui, à l'heure actuelle, entre nous tous, paraît d'une évidence totale! Pourquoi attendre minuit moins quart pour agir, alors qu'on s'aperçoit que, finalement, cela semble aller de soi? Pourquoi ne pas l'avoir fait au moment utile? Est-ce de l'entêtement? Est-ce du chantage? Est-ce la peur qu'on s'aperçoive que, finalement, les torts ne sont pas tous du même côté? Est-ce la crainte de mettre les cartes sur table? Ce sont toutes des questions qui se posent. Comment se fait-il qu'actuellement tout le monde reconnaît que la présence d'un observateur, d'un médiateur est quelque chose de désirable, qu'il a sa place et que cela ne cause de problème pour personne, et qu'on ait dû attendre la fin de la deuxième journée de cette commission parlementaire pour s'apercevoir que le gouvernement semblait se rallier à une telle proposition? Cela nous permet de nous poser des questions.

En ce qui concerne l'attitude des syndicats de professeurs, vous portez à certains moments des jugements très durs sur eux. J'aimerais attirer votre attention sur un certain nombre de choses et vous demander ce que vous en pensez. En filigrane dans votre mémoire, on trouve une certaine remise en question de la démocratie syndicale, de la représentation. J'aimerais attirer votre attention et vous demander si vous êtes au courant du degré de participation des professeurs aux assemblées syndicales qui ont décidé des gestes qu'ils ont posés? En quoi ces assemblées qui ont eu lieu - si vous les connaissez vous pourrez m'éclairer - auraient pu être plus représentatives, donner un mandat plus clair au syndicat? Où y a-t-il eu - s'il y a eu -une lacune? Quelle a été la lacune qui s'est produite dans ces assemblées syndicales? J'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.

Le Président (M. Paré): M. Houle.

M. Houle: Premièrement sur le projet de réglementation des études collégiales, je vais vous souligner quelque chose qui apparaît au mémoire et qui semble très important. À la page 7 on dit que pour nous il est important de participer à la consultation que le ministre a établie. On l'a fait, je pense. Certains groupes du milieu étudiant avaient refusé de le faire par souci bien évident de ne pas collaborer ou de ne pas se faire "fourrer" et cela est légitime. Cependant nous disions que nous avions participé à cette consultation pour établir une position claire, apporter une solution. Cela a été fait dans ce souci-là. On aurait pu tomber dans des excès corporatistes et dire: Nous, les étudiants, nous voulons le contrôle de la pédagogie et commencer à "s'enseigner" de différentes façons. Nous avons essayé de trouver un compromis qui pouvait rapprocher toutes les parties. Cela se faisait en février 1982. Cette phrase se terminait ainsi: "ainsi légitimer toute action pouvant survenir ultérieurement."

Il est bien évident que les étudiants, à l'heure actuelle, sont un peu désabusés. Au cours des derniers jours, dans différents cégeps, entre autres dans la région de Québec et dans l'Est du Québec, les étudiants ont posé certains gestes parce qu'ils considèrent qu'ils n'ont plus rien à perdre. Ils ont dit qu'il y avait une semaine de relâche de prévue, que nous ne devons pas subir de rallongement au calendrier scolaire à cause d'une grève que les professeurs auraient faite. Dans ce sens-là, c'est un peu paradoxal avec les orientations

pédagogiques ou la visée de la qualité de l'enseignement qu'on voudrait avoir. Pour ce qui est du calendrier scolaire que les étudiants revendiquaient, pour nous une session de 65 jours qui serait faite de façon motivée par tout le monde serait aussi valable qu'une session de 75 ou 80 jours dans les circonstances dans laquelle la pédagogie est dispensée.

Les orientations pédagogiques, la commission pédagogique départementale qu'on propose, ont présidé à la création de la fédération que je représente. Le discours pédagogique est encore très suivi à ce niveau-là. Au niveau de la participation des professeurs dans les syndicats, nous ne tenons pas à tomber dans ce jeu-là, parce que nous, les associations étudiantes, n'avons pas non plus en période creuse une représentativité exceptionnelle de nos membres aux assemblées générales par exemple. On doit être honnête là-dessus. Il est clair qu'il y a eu une bonne participation au niveau des syndicats de professeurs quand on vote sur des grèves ou sur le fait de défier une loi répressive comme la loi 111. Je ne m'inquiète pas à ce niveau-là. Je lisais la semaine dernière dans la Presse, dans un article de Mariane Favreau, que certains professeurs ont subi de la répression de la part de leurs collègues syndiqués parce qu'ils avaient décidé de traverser les lignes de piquetage. C'est à ce niveau-là. Si on veut tenir un discours sur la démocratie, nous sommes prêts à tenir un discours sur la démocratie, mais pas seulement à un niveau supérieur; au niveau du système d'éducation et des syndicats également.

M. Baillargeon: Je cherchais cet article-là qui a été cité et je ne l'ai pas retrouvé. Une chose est certaine, c'est qu'actuellement il y a un débat, une campagne qui se fait au nom de la démocratie au Québec dont une des coprésidentes est Mme Marie-Andrée Bertrand, de la FAPUQ, Fédération des associations de professeurs des universités du Québec. Nous avons eu au niveau du RAEU, le Regroupement des associations universitaires du Québec beaucoup de contacts avec la FAPUQ et jamais cette fédération-là n'a accepté que les étudiants aient une plus grande place dans les structures des universités, sauf en disant: oui, nous sommes pour la vertu, sauf que vous ferez vous-mêmes votre bataille, de votre côté. (11 h 45)

On sait qu'historiquement les associations étudiantes se sont battues, ont appuyé la syndicalisation des professeurs, entre autres, dans les universités et jamais ces mêmes syndicats de professeurs ne nous ont donné le même appui pour la reconnaissance et le financement de nos associations étudiantes. Donc, le syndicalisme à sens unique... C'est pour cela que nous sommes durs, parfois. Nous, du secteur universitaire, subissons encore plus cela qu'aux secteurs collégial, primaire ou secondaire, où on a effectivement moins de contacts avec ces syndicats. Dans les universités, les syndicats de professeurs sont extrêmement corporatistes et leur syndicalisme ne correspond pas du tout au syndicalisme étudiant, le même type de syndicalisme.

Le Président (M. Paré): Merci. J'aimerais rappeler aux membres de la commission qu'on a déjà dépassé de dix minutes le temps prévu pour l'audition et la période de questions. Est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre? Il y a encore trois intervenants et M. le député de Louis-Hébert qui...

M. Doyon: Je voulais tout simplement dire que j'avais d'autres questions, mais que j'y renonçais compte tenu du temps qui est dépassé.

Mme Harel: M. le Président, j'aimerais faire valoir mon intérêt à intervenir sur ce mémoire. Je ne pense pas avoir abusé du temps de la commission depuis le début. Je pense que nous sommes en étude depuis 18 heures et il me semble être intervenue très rapidement à une heure tardive, au début de la commission. Vous connaissez l'intérêt que je porte aux questions qui sont soulevées dans ce mémoire, alors, je demanderais le consentement de la commission.

Le Président (M. Paré): Est-ce qu'il y a consentement de la commission pour entendre en dernier Mme la députée de Maisonneuve? Il faudrait que ce ne soit qu'une question et rapidement, s'il vous plaît.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président. Le Président (M. Paré): Oui.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous me permettriez une remarque de quinze secondes - et je vous promets pas plus de quinze secondes - après la députée de Maisonneuve?

Le Président (M. Paré): Donc, est-ce que j'ai le consentement pour une très courte question de Mme la députée de Maisonneuve et pour entendre ensuite un très court commentaire de Mme la députée de L'Acadie? J'ai le consentement. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Le plus rapidement possible, M. le Président. Moi aussi je suis contente, notamment, de voir qu'il y a une dynamique qui permettra aux associations

étudiantes de vraiment se présenter comme des entités distinctes dans le sillage de personnes. Par ailleurs, ma question portera sur ceci: Quand vous faites le procès d'un héritage de générations qui serait celui du syndicalisme devant lequel on se retrouve présentement, j'aimerais vous poser la question à savoir s'il ne s'agit pas d'un héritage de société? Ne faisant pas partie de la même génération que la vôtre, il reste quand même...

Des voix: Oh! Voyons donc, presque!

Mme Harel: Non, non, attendez! C'est très gentil, je vous remercie beaucoup. Il reste que vous-même, par exemple, à la page 8, demandez un nouveau cadre juridique; vous demandez une intervention gouvernementale pour vous faire reconnaître et financer dans le cadre de vos associations étudiantes. La question que cela m'amène à vous poser, c'est la suivante: Est-ce qu'il n'est pas dangereux de jeter le bébé avec l'eau du bain? Avez-vous un modèle de remplacement? Est-ce que l'héritage dont on parle n'est pas plus un héritage du syndicalisme nord-américain, lequel conduit les parties, à cause de l'économie générale des relations du travail, à parcelliser, à fragmenter, à maximiser leurs propres intérêts?

Si tant est, comme vous semblez le dire, que les gains réalisés dans les secteurs public et parapublic ne peuvent plus avantager, comme c'était le cas dans le passé, les travailleurs du secteur privé, est-ce qu'il y a un modèle de remplacement? Est-ce que c'est simplement de réviser le mode de négociation dans le secteur public ou, si on veut poursuivre, en termes de progrès social, il n'y aurait pas lieu également d'aborder la question d'une substitution à ce qui, en fait, était pour tout de suite la seule forme de négociation élargie dans notre société? Est-ce qu'on pourra arriver à apporter aux travailleurs du secteur privé une amélioration de leur condition sans aussi réviser tout le mécanisme de négociation dans le secteur privé?

M. Baillargeon: En tout cas, par rapport au syndicalisme nord-américain, et même européen, nous ne sommes pas un modèle sur un plan, soit le droit de grève dans les hôpitaux. Je ne sais pas. D'après nos informations, en Europe, entre autres, beaucoup de syndicats ne font pas des grèves comme il s'en est déjà passé ici - pas cette année, mais c'est déjà arrivé. Cela est peut-être un abus. Je ne sais pas si c'est parce qu'on a un tempérament latin ou un mélange d'Européens ou d'Américains, mais là-dessus, pour ce qui est de l'utilisation du droit de grève, entre autres, dans les hôpitaux et même le transport en commun, on pense qu'il peut y avoir des abus actuellement de ce côté.

Quand on sait que l'utilisation du droit de grève est liée directement au processus de négociation, on ne peut pas abolir juste le droit de grève et continuer le même processus de négociation, parce qu'à ce moment, la partie syndicale n'aurait plus de moyens de pression.

Dans ce sens, nous proposons qu'il y ait une tierce partie, que les usagers des services aient un mot à dire, d'une part, sur la qualité des services publics et, d'autre part, sur l'aménagement des ressources qui sont utilisées à ces services. Nous subissons, on le sait - souvent, en tout cas, au niveau universitaire - nous constatons qu'il y a du gaspillage et de la bureaucratie énorme. Il y a une mauvaise utilisation des ressources, mais on n'a pas un mot à dire, et lorsque des coupures budgétaires arrivent, on dit aux étudiants: Vous n'avez pas le choix, vous allez payer la note. Et on se retrouve avec des services en trop, des services aux étudiants. Il y a des professionnels qui ont des gros salaires, mais ils n'ont plus de budget à administrer. On se retrouve finalement avec des services inutilisables.

Donc, il y a beaucoup de remises en question à faire là-dessus et on pense que c'est... La logique de la confrontation actuelle ne peut être brisée que par la venue d'une tierce partie qui est les usagers de services.

Au niveau de l'héritage de la société -oui, c'est un héritage de la société - entre autres, au niveau du syndicalisme étudiant, on a eu l'héritage aussi de l'UGEQ, c'est-à-dire le grand vide. En 1969, il y a eu un sabordement et vous, justement, Mme Harel, faisiez partie de la dernière équipe de l'UGEQ.

Évidemment, si on fait le parallèle, on trouve effectivement que c'est très lourd comme héritage. Dans ce sens, on aime mieux couper peut-être, dire à une certaine génération: Cessez d'être nostalgiques. Comme diraient souvent les marxistes dans notre milieu: Faites votre autocritique. À ce moment, cela ferait peut-être du bien à tout le monde.

Mme Harel: C'est intéressant, M. Baillargeon, parce que vous notez vous-même que l'absence de structures, l'absence de régulation dans le milieu étudiant, compte tenu de la disparition de l'UGEQ, a créé ce vide dont vous faites état. Je pense que vous le notez avec raison.

La conclusion que j'ai tirée de cet échec qu'a été l'UGEQ, c'est notamment que des structures, c'est très fragile et c'est très précaire, mais il faut les respecter.

Je pense que la réflexion doit se poursuivre dans votre milieu, dans le nôtre

également, mais doit se poursuivre. Est-ce qu'on peut comparer? Quand vous comparez, par exemple, des droits de travailleurs québécois par rapport aux droits des travailleurs européens, il faut comparer l'ensemble; il ne faut pas que l'arbre nous empêche de voir la forêt. Il y a un taux de syndicalisation qui est connu en Europe, dans le secteur privé, qu'on ne connaît pas ici. Dans la mesure où toute chose étant égale, il faudrait voir finalement des modèles de remplacement, il faudrait que vous travailliez là-dessus comme nous, j'imagine.

M. Houle: C'est juste.

Le Président (M. Paré): M. Houle.

M. Houle: Là-dessus, je dois dire, Mme la député de Maisonneuve, que nous sommes quand même confiants en l'avenir, au niveau des relations du travail, parce qu'on observe un certain virage, au niveau du syndicalisme nord-américain ou européen, vers un syndicalisme peut-être plus responsable au niveau des relations du travail, par exemple. Nous avons confiance à ce niveau, nous pensons qu'il peut y avoir une maturation du syndicalisme québécois.

Le Président (M. Paré): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, la réflexion ou la question que je vais poser à nos invités, je la pose à différents groupes. Mais elle m'apparaît encore plus importante avec votre groupe. Vous êtes ici une association d'étudiants, vous êtes la génération de demain qui fera les politiques, donnera les orientations à la société. Je ne peux m'empêcher de m'étonner qu'il n'y ait pas d'étudiantes avec vous et qu'elles ne fassent pas de représentations à cette table. J'imagine, et je suis certaine que, dans les postes de responsabilité à l'intérieur de votre coalition, les étudiantes ont une large place.

M. Baillargeon: Justement, si vous regardez notre projet de centre étudiant de services communautaires qui a été déposé, la responsable de ce projet majeur, c'est Julie Morency qui est une étudiante. Dans la plupart de nos exécutifs d'association de campus, il y a souvent des étudiantes qui sont présidentes ou secrétaires générales de ces associations. Si elles ne sont pas ici aujourd'hui, c'est parce qu'on nous disait que le temps était limité. Selon nos fonctions...

M. Rivest: Ah! Ah! Ah!

Mme Lavoie-Roux: Laisse-le faire, laisse-le faire.

M. Baillargeon: ...nous sommes secrétaires généraux réciproquement, donc les porte-parole de nos organisations respectives. Alors, on nous a dit: II ne faut pas qu'il y ait trop de gens. Vous avez dix minutes pour parler et faites cela vite, etc. J'ai couru quand j'ai fait mon exposé. On peut en faire défiler si vous voulez, il n'y a pas de problème. On peut vous exposer le projet de centre étudiant de services communautaires. Julie Morency s'en ferait sûrement...

Mme Lavoie-Roux: Fini, fini. Cela va, merci.

M. Baillargeon: D'accord.

Le Président (M. Paré): Seulement un peu, M. Houle.

M. Houle: M. le Président, je voudrais rappeler encore...

M. Baillargeon: Je voudrais vous présenter Mlle Morency, secrétaire au CESC, à l'exécutif du regroupement des associations étudiantes universitaires.

Mme Lavoie-Roux: J'espère qu'on n'est pas toujours derrière... Vous n'agissez pas selon le vieil adage selon lequel il y a toujours une femme derrière les hommes.

Le Président (M. Paré): Pour conclure rapidement...

M. Houle: À ce niveau-là, M. le Président, permettez-moi de vous rappeler que ce ne sont pas des débats qui préoccupent nécessairement notre génération. Entre autres, au niveau du système d'éducation et des structures d'associations étudiantes, nous cohabitons jeunes hommes et jeunes femmes depuis maintenant près de quinze ans.

Le Président (M. Paré): M. Houle et M. Baillargeon, merci beaucoup de votre participation et du temps que vous avez consacré à la commission. Merci, mademoiselle, dont malheureusement je n'ai pas le nom.

Mme Morency (Julie): Madame. M. Baillargeon: Julie Morency.

Le Président (M. Paré): Merci, Mlle Morency, ou madame, mademoiselle probablement.

Mme Morency: ...où est la place des femmes.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. J'invite maintenant les représentants de la Fédération des commissions scolaires

catholiques du Québec à prendre place ici en avant. J'en profite pendant que les gens prennent place pour inviter les membres de la commission à essayer d'être un peu plus rigoureux dans leurs interventions et un peu plus rapides pour qu'on puisse finalement respecter le temps qu'on s'est fixé de façon à être capable d'entendre, dans un temps raisonnable, aujourd'hui, tous les organismes qui ont manifesté l'intention de se faire entendre.

Bonjour messieurs et bienvenue à la commission. Je demanderais au porte-parole de se présenter et de nous présenter aussi les personnes qui l'accompagnent.

Fédération des commissions scolaires catholiques

M. Chagnon (Jacques): Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Paré): J'aimerais savoir de la part du porte-parole si c'est possible d'avoir un mémoire écrit.

M. Chagnon: Oui. Il vous est distribué à l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Les copies s'en viennent.

M. Chagnon: Je pense qu'on les distribue d'abord aux secrétaires de commission qui en feront une distribution autour de la table. Voilà! M. le Président, permettez-moi de vous présenter le directeur général de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, M. Jacques Audy, à ma droite; le directeur du service des relations du travail, M. Jean-Pierre Tessier, à ma gauche; et le président du Comité patronal de négociations pour les commissions scolaires pour catholiques, M. Roger Carette, à mon extrême gauche.

M. le Président, je tiens d'abord à remercier la commission parlementaire de nous avoir invités spécifiquement sur les sujets qui étaient mentionnés et je souhaite que cette initiative de la commission parlementaire de l'éducation soit reprise dans des moments qui seront peut-être témoins d'une hypertension ou d'une tension moins grande dans d'autres moments que des moments de crise.

M. le Président, mesdames et messieurs les députés. La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec est, depuis plusieurs années, engagée dans le processus des négociations du secteur public. Notre organisme représente les 214 commissions scolaires catholiques dans l'ensemble du Québec. Bien avant 1977, nous nous sommes engagés dans les négociations avec les divers personnels des commissions scolaires en offrant un service de support et de représentation dans les négociations locales. Depuis, la mise en place de négociations à l'échelle nationale, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec a été un partenaire très actif et engagé dans la défense des intérêts des commissions scolaires et de l'ensemble de la communauté québécoise auprès du gouvernement du Québec.

Nous avons participé activement à quatre rondes de négociations avec les enseignants et à trois rondes de négociations avec les personnels de soutien et professionnels, tout en assurant aide technique et suivi au niveau des négociations locales et représentation des commissions scolaires lors des réouvertures des conventions collectives pour chacune des catégories de personnel. (12 heures)

La loi 25 et les lois 46, 95 et 55 ont largement confirmé à la fédération son rôle de représentant et mandataire des commissions scolaires dans les négociations visant les personnels de ces dernières.

Nos opinions sont bien connues relativement aux difficultés qu'engendre le système actuel de négociation trop centralisé et trop politisé, parce qu'il est relié directement à l'État et à un front commun syndical. La fédération appréhendait la présente ronde de négociations, non seulement en raison des difficultés traditionnelles qui accompagnent les négociations provinciales avec les centrales syndicales, mais aussi en raison du fait que nos membres voyaient la ronde comme un élément de déstabilisation, un élément de changements de plus qui s'ajoutaient à la longue liste de ceux annoncés à l'automne 1981. Permettez-moi d'en mentionner quelques-uns: Par exemple, l'implantation du nouveau régime pédagogique pour le primaire et le secondaire; la réforme et la restructuration scolaire qui ont causé énormément de charivari dans le milieu et dans tout le réseau scolaire; le nouveau mode de financement qui est remanié année après année; les modifications au réseau informatique; les nouvelles politiques de formation professionnelle, dont nous avons eu les audiences au début de la semaine; l'enquête sur la formation des adultes, et les suites qui pourraient suivre; la réforme du transport scolaire, etc. On pourrait en nommer encore d'autres.

La conjugaison de l'ensemble de ces dossiers perturbe constamment les actions pédagogiques dans chacun des milieux scolaires et, à la longue, contribue effectivement à déstabiliser le système.

Malgré le rôle important que s'est donné le gouvernement dans l'établissement des conditions de travail de nos employés, nous avons tenté d'assumer le rôle qui nous était imparti par le législateur au sein du groupe patronal. Nous n'avons pas l'intention

de faire le procès des gestes qui furent posés de part et d'autre au cours de l'automne 1982.

La crise économique actuelle et la situation financière du gouvernement du Québec ont forcé le gouvernement à agir précipitamment et à réduire au minimum la période de négociation en se fixant comme échéance le 15 décembre 1982. Par ailleurs, les structures syndicales ne se sont pas laissé imposer ce cadre de négociation et ont été peu disposées à négocier véritablement dans ce contexte.

Nous pourrions discourir pendant plusieurs heures sur ce qui aurait pu se passer avant décembre 1982, mais cet exercice n'aiderait en rien à solutionner le conflit actuel.

La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec intervient dans le présent débat pour tenter de démontrer l'urgence de solutionner le conflit et la nécessité que la présente commission parlementaire se prononce sur des propositions qui pourraient constituer un règlement acceptable. C'est pourquoi, après un bref rappel de nos objectifs relativement aux conditions de travail des enseignants, nous identifierons les correctifs nécessaires proposés par les décrets et, enfin, les éléments qui pourraient permettre de solutionner l'impasse entre les parties.

M. le Président, à la suite de cet avant-propos, vous verrez que notre texte est structuré de la façon suivante, je serai bref: D'abord, les objectifs de la fédération; viennent ensuite les correctifs nécessaires -nous apparaissent-ils - les éléments de solution et, finalement, une conclusion qui se veut une espèce de conclusion générale du document présenté devant la commission parlementaire par la Fédération des commissions scolaires catholiques.

Premièrement, les objectifs de la fédération. Les commissions scolaires sont les premières responsables de la tâche de dispenser des services d'enseignement dans chacun de leur milieu. À titre d'agent négociateur pour celles-ci, nous avons cherché, à l'automne 1981, à obtenir le plus large consensus possible des agents du réseau de l'éducation sur les objectifs à poursuivre au cours de la présente ronde de négociations. La première démarche que nous avons entreprise dans ce sens a été de faire, simultanément avec le ministère de l'Éducation, la cueillette des opinions des commissions scolaires sur ce que devraient être les modifications aux conventions collectives.

Les commissaires, les directeurs généraux, les cadres d'école et de service, de même que certains comités de parents se sont impliqués dans les diverses régions pour nous transmettre leurs remarques sur les objectifs à poursuivre dans la négociation.

Nous voulons vous souligner que la majorité des opinions formulées vont dans le sens des correctifs proposés particulièrement par le livre vert qui a été, selon nous, probablement une espèce de point tournant en matière d'éducation au Québec un document sur lequel une intense consultation s'est faite et sur lequel aussi un large consensus s'est développé, entre autres sur le dossier des relations du travail.

Relativement au secteur enseignant, on a retenu trois axes de modification ou de reconduction comme fondement de nos orientations. Le premier, l'amélioration de la qualité de l'éducation. Le deuxième, l'amélioration de la qualité de la gérance de la commission et des écoles. Nous nous sommes de plus associés à l'objectif gouvernemental, soit la réduction des coûts de fonctionnement du réseau primaire et secondaire.

Premièrement, l'amélioration de la qualité de l'éducation et marge de gestion. Bien des éléments favorisent une éducation de qualité dans un milieu. Bien que nos élèves aient un enseignement de qualité, nous devons tenir compte de trois éléments: premièrement, et c'est certainement le plus important, des ressources humaines oeuvrant auprès des élèves dans des conditions les plus favorables possible; deuxièmement, un support financier adapté aux besoins de chaque milieu qui doit tenir compte du type de clientèle, de la situation géographique, etc.; troisièmement, une organisation matérielle adéquate, les locaux, les équipements, les manuels scolaires, les bibliothèques, etc.

Le premier élément, des ressources humaines, est sans aucun doute le plus déterminant dans l'organisation de l'enseignement. Les enseignants occupent la place la plus importante auprès des élèves qui fréquentent nos écoles. Leur implication dans la préparation et la dispensation de leur enseignement, la cohésion de l'équipe-école, leur implantation dans leur milieu scolaire et leur enracinement dans les valeurs à transmettre aux élèves constituent les éléments qui favorisent la dispensation d'un enseignement de qualité.

Toutefois, certaines composantes de la qualité globale des services éducatifs au primaire et au secondaire peuvent être la résultante directe de certains éléments des conditions de travail. Pensons à la formation des groupes d'élèves, la tâche d'enseignement, le nombre d'heures de présence auprès de l'élève, l'encadrement et les services et autres activités étudiantes.

Pour que les commissions scolaires puissent offrir un service adéquat aux élèves, il nous apparaît important d'obtenir une présence des enseignants auprès de l'élève; une charge globale d'enseignement qui, au-delà de la dispensation des cours et leçons, assure aux élèves un encadrement

suffisant, une surveillance adéquate et des activités étudiantes; une possibilité d'affectation du personnel qui tienne compte de ses qualifications et de son expérience dans les disciplines à enseigner; de plus, il nous fallait réduire et préciser les textes de convention relatifs à la tâche de l'enseignant afin d'éviter une renégociation journalière de la prestation de travail. La convention ne doit pas constituer un guide de gestion sur des éléments tels que la production de rapports, la préparation de tests et d'examens et la concertation entre les collègues.

Contrôle des coûts. Parallèlement à ces objectifs, nous nous sommes associés aux impératifs financiers du gouvernement. Le coût de l'éducation au Québec croît constamment. Il nous faut, tout en maintenant un service adéquat, rétablir un juste équilibre avec l'effort financier consenti, par ailleurs, dans les autres provinces. À cet égard, un autre objectif s'imposait: augmenter la productivité et limiter les coûts de la sécurité d'emploi dans le cadre d'une équité intersectorielle.

L'augmentation de la productivité se traduit au primaire par une majoration de la tâche d'enseignement de deux heures par semaine. Cette majoration doit s'accompagner de l'augmentation du temps d'enseignement à l'élève afin de maintenir l'équilibre de notre organisation scolaire et assurer la présence des spécialistes. Au secondaire, la majoration est de trois périodes de 50 minutes par semaine.

Nous avons par ailleurs jugé nécessaire de maintenir et même d'ajouter des garanties relativement à des éléments pédagogiques importants. Ainsi, les décrets maintiennent les règles de formation de groupe d'élèves. En général, on retrouvera de 27 à 29 élèves dans chaque classe du primaire, et une trentaine d'élèves par groupe pour les cours de formation générale au secondaire.

Nous avons insisté, et cette règle se retrouve dans les décrets, pour que des garanties de ressources spécialisées soient fournies pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Ainsi, la commission scolaire doit obligatoirement soumettre à la consultation des enseignants sa politique d'intégration des élèves en difficulté d'adaptation. De plus, les commissions scolaires doivent assurer des services spéciaux à ces élèves, soit en pondérant leur clientèle ou en y affectant comme appui, évidemment, du personnel spécialisé.

Les correctifs nécessaires prévus par les décrets. Nous croyons, en tant que représentants des commissions scolaires, que le statu quo intégral des conventions antérieures n'est plus possible. Dans la formation de nos objectifs, nous avons essayé de limiter les enjeux de la négociation. Les décrets, sur la majorité des chapitres, reconduisent intégralement les stipulations prévalant dans le dernier contrat de travail. Cependant, les objectifs suivants doivent être maintenus: Nous sommes en droit d'exiger, par exemple, une présence réelle des enseignants à l'école, une charge de travail globale, une possibilité d'affecter les enseignants selon leur qualification et leur expérience, une meilleure résorption des personnels et une limitation des coûts de la sécurité d'emploi. Finalement, une productivité accrue de la tâche des enseignants. Cependant, nous ne pouvons passer sous silence le fait que l'application intégrale, dès septembre 1983, des objectifs rattachés à l'augmentation de la productivité provoque, principalement au secondaire, un lourd chambardement du vécu pédagogique des écoles.

Des éléments de solution. Même si tous les objectifs sont valables en soi, nous croyons qu'il est nécessaire d'obtenir l'adhésion des enseignants sur la façon de les atteindre. En ce sens, nous avons cru bon, au cours des deux derniers mois, de formuler diverses propositions susceptibles de résoudre ce conflit. Ces propositions touchaient notamment trois points précis: la sécurité d'emploi et les effectifs enseignants, la tâche au primaire et au secondaire, la précision des textes dans certains chapitres, tel celui se rapportant à l'affectation et à la distribution des tâches.

Nos interventions. Dès la mi-janvier, nous avons adressé un télégramme au premier ministre, le 17 janvier précisément -vous vous en souviendrez certainement, c'était la journée où le premier ministre rencontrait les chefs des trois centrales syndicales - télégramme dans lequel nous rappelions que le secteur de l'éducation est très fortement touché en termes de récupération. Nous lui avons rappelé à ce moment-là que, par souci de maintenir une équité intersectorielle, il était important de formuler aux syndicats des propositions concrètes, assouplissant les paramètres financiers et permettant d'engager des pourparlers. Vous retrouverez le télégramme à l'annexe A du document que nous vous avons présenté ici ce matin.

Cette première étape n'a pas permis de résoudre le conflit avec la Centrale de l'enseignement du Québec. Par la suite, nous avons déposé un cadre de règlement à notre partenaire ministériel qui détaillait davantage les éléments que nous avions énoncés au premier ministre le 17 janvier. Cette rencontre, avec les sous-ministres et le ministre Laurin, ainsi que des discussions ultérieures débouchèrent sur l'offre de règlement qui fut rendue publique le 10 février 1983 et distribuée à la Commission des enseignants des commissions scolaires, de la Centrale de l'enseignement du Québec, la

veille, soit le 9 février, par le ministre, le représentant de la QAPSB et moi-même.

Nous avions d'ailleurs rencontré précédemment, à cette rencontre, les principaux agents du réseau primaire et secondaire. Nous avons pu, dès lors, en venir à un consensus sur l'offre de règlement avec l'Association des directeurs généraux, la Fédération des directeurs d'école, l'Association des cadres et la Fédération des parents qui, à leur jugement critique, semblaient heureux. Ils pourront mieux le préciser puisque ce sont les prochains intervenants. Ils pourront mieux préciser, dis-je, ce qui leur a plu à l'intérieur du cadre de règlement du 10 février dernier.

Puisque nous en sommes à la proposition du 10 février, parlons-en un peu. Selon nous, il se révélait nécessaire d'offrir -et c'est ce que nous retrouvons - de meilleures garanties salariales aux enseignants mais en disponibilité. La proposition que nous avions formulée le 9 février avec notre partenaire, le ministère de l'Éducation, garantit aux enseignants mis en disponibilité 80% de leur salaire en 1983- 1984, 80% en 1984-1985 et au moins 50% par la suite, pour ceux qui en seront à leur deuxième année de mise en disponibilité. Il est à noter toutefois que ce dernier chiffre est révisable, compte tenu des expériences de résorption du personnel au cours des deux premières années de convention.

(12 h 15)

Bien que ce correctif pécuniaire soit d'importance, nous avons aussi tenté de limiter substantiellement le nombre de mises en disponibilité en étalant, comme nous l'indiquerons bientôt, l'augmentation de la productivité sur trois ans.

En effet, au niveau primaire, nous proposons que la tâche de l'enseignant soit rajustée sur trois ans. Ainsi, en 1983-1984, la tâche serait augmentée d'une heure par semaine, le temps des élèves serait aussi augmenté dans la même proportion. En 1984- 1985, la tâche des enseignants serait maintenue en moyenne à 21 heures-semaine d'enseignement, tandis que le temps de présence des élèves augmenterait d'une demi-heure, passant de 24 heures à 24 heures 30. Cette augmentation implique au minimum 3 heures 30 minutes par semaine - c'est fort important - qui seront réservées à la dispensation des cours par des spécialistes. Cette proposition crée par le fait même 600 nouveaux postes de spécialistes au primaire. En 1985-1986, à la fin de la convention, les enseignants verraient leur charge d'enseignement majorée d'une demi-heure pour atteindre en moyenne 21 heures et demie par semaine. L'horaire de l'élève atteindrait, quant à lui, 25 heures. Cette proposition, nous semble-t-il, est juste et raisonnable. Elle garantit non seulement le maintien, mais aussi l'ajout de spécialistes à l'élémentaire. Elle permet une meilleure présence des enseignants auprès des élèves pour l'équivalent d'une heure par semaine.

Au niveau secondaire, notre proposition permet une application progressive de l'organisation des tâches d'enseignement. Ainsi, la tâche moyenne d'enseignement passerait de 20 périodes à 21 périodes de 50 minutes par semaine en 1983-1984. Elle passerait de 22 périodes l'année suivante pour atteindre 23 périodes de 50 minutes par semaine en 1985-1986. Cette proposition a pour effet de résorber de façon considérable le nombre de mises en disponibilité. Au lieu de 4000 en 1983-1984, ce nombre serait inférieur à 1500.

Sur le plan pédagogique, nous nous placerions dans une situation comparable à celle des autres provinces ou des États américains dont on a déjà parlé ici en commission parlementaire. Compte tenu que nous fonctionnons dans le cadre d'une charge globale, l'augmentation de la tâche d'enseignement de façon progressive permet qu'un nombre réduit d'enseignants se voient dans l'obligation de dispenser des cours à un groupe additionnel d'élèves par semaine. La majorité et, par la suite, une grande partie des enseignants maintiendraient leur tâche actuelle d'enseignement tout en se concentrant davantage sur les activités complémentaires telles que l'encadrement, la récupération, les activités étudiantes. Vous retrouverez des tableaux dans l'annexe "B" du document que nous avons présenté.

La proposition du 18 février. M. le Président, même si nous croyions à la justesse de notre proposition, nous avons cru bon de proposer au gouvernement et à la Centrale de l'enseignement, le 18 février 1983, de confier à un comité formé par le Conseil supérieur de l'éducation le soin d'étudier l'impact des décrets sur l'organisation de l'enseignement en dernière année de convention, 1985-1986. Vous retrouverez le document à la troisième annexe du document que nous avons présenté.

Il faut se souvenir que le 18 février, tant la partie gouvernementale que la partie syndicale étaient sous le coup d'une certaine hypertension il nous fallait tenter de faire en sorte que les ponts soient rétablis pour qu'on puisse éviter un lundi 21 février qui aurait pu être, finalement, dramatique pour tout le réseau de l'enseignement primaire et secondaire au Québec.

Nous sommes persuadés que l'étalement de l'augmentation de la productivité permettra aux commissions scolaires d'élaborer, avec leur personnel, des modes d'organisation de la tâche d'enseignement qui rallient l'objectif de l'accroissement de la productivité avec celui du maintien de standards de qualité dans l'enseignement secondaire. Tous ces éléments rejoignent les objectifs de personnalisation du rapport

maître-élèves et de l'instauration de formules de titulariat au premier cycle du secondaire, tel que recommandé spécifiquement par le livre vert sur l'enseignement, "L'école québécoise".

Cette proposition du 18 février s'adresse tant au gouvernement qu'à la Centrale de l'enseignement du Québec. Si elle a permis la trêve que nous aurons connue un tant soit peu, à tout le moins nous aurons quelques raisons de nous en réjouir. Cette proposition du 18 février débouche sur trois résultats immédiats. Le premier, que le gouvernement mandate le Conseil supérieur de l'éducation de former une commission d'étude afin d'évaluer l'impact des décrets sur l'organisation de l'enseignement en 1985 et 1986. Il devrait y avoir une négociation avec la centrale sur le sujet à la suite de cette étude.

Deuxième résultat, les décrets et les règles budgétaires seraient immédiatement amendés pour permettre l'étalement de l'augmentation de la tâche de 1983 à 1985 et pour ajouter des dispositions relatives à la sécurité d'emploi. Ce sont des éléments qu'on retrouve dans l'offre et le cadre de règlement du 10 février dernier.

Finalement, troisième résultat de l'offre de règlement du 18 février que nous présentions, des négociations devraient reprendre immédiatement entre la Centrale de l'enseignement du Québec et la partie patronale sur les sujets suivants: premièrement, la capacité; deuxièmement, l'affectation et la mutation; troisièmement, la distribution des tâches et, quatrièmement, les mesures de résorption.

Bref, en guise en conclusion, la Fédération des commissions scolaires croit, sur la base de sa réflexion et sur la base des consultations que nous avons faites avec les principaux agents de notre réseau, que les propositions de compromis des 10 et 18 février représentent des éléments de solution qui devraient être jugés satisfaisants tant par les enseignants que par leur centrale. L'ensemble de ces propositions clarifiait d'une façon nette et acceptable la situation à prévaloir au niveau primaire en garantissant le maintien et même les ajouts au nombre de spécialistes. Au cours des derniers mois, bien que nous ayons été écartés des rencontres qui ont eu lieu entre le gouvernement, le ministre et la Centrale de l'enseignement du Québec, nous avons cru de notre devoir, aussi bien en fonction du mandat d'agent négociateur que nous confie la loi 55 que par respect pour nos employés et les syndicats qui les représentent, de contribuer à alimenter le dialogue entre le gouvernement et la Centrale de l'enseignement du Québec.

Nous avons dernièrement exigé du gouvernement d'être présent à toute rencontre pouvant intervenir entre les parties relativement au contrat de travail des enseignants. Même si nous avons récemment obtenu une adhésion de représentants du ministère à ce sujet, nous croyons qu'il est important de réinsister sur ce point devant la présente commission parlementaire. La Fédération des commissions scolaires pense que les travaux de cette commission doivent déboucher sur des propositions d'action pour solutionner le présent conflit. Vous nous permettrez, M. le Président, en guise de conclusion d'y aller de quelques suggestions qui sont de deux ordres: premièrement, des constats et, deuxièmement, des recommandations.

Comme constats, la présente commission, nous semble-t-il, devrait retenir notamment: premièrement, qu'aucun des intervenants légalement reconnus dans la législation du Québec, gouvernement, ministère, Fédérations des commissions scolaires et syndicats, ne doit être écarté; deuxièmement, que le réseau scolaire doit retrouver plus de stabilité et le gouvernement réexaminer ses objectifs en évitant de réformer à tous les six mois l'un ou l'autre des éléments majeurs de celui-ci ou à tous les sept ou huit ans l'ensemble complet de l'organisation.

Les recommandations à dégager devraient proposer, à notre avis: 1- que le projet de règles budgétaires soit ajusté d'abord en fonction des décrets connus et, ensuite, amendé pour 1983-1984 afin que les commissions scolaires puissent préparer leur organisation scolaire selon les paramètres exposés dans notre offre de règlement du 10 février 1983; 2- de rouvrir conformément les négociations sur les sujets définis, notamment ceux supposés par nos propositions des 10 et 18 février et de le faire dans un terme défini qui, selon nous, ne pourrait dépasser une couple de semaines; enfin, 3- peut-être, est-ce, selon nous, un des points fondamentaux - surtout de procéder à cette ultime tentative de négociation, avec l'aide d'un tiers intervenant qui, selon nous, pourrait davantage, dans une certaine forme de conciliation que dans des formes d'observation et de médiation déjà refusées, permettre aux parties de cheminer ensemble et, bref, de trouver des consensus extrêmement nécessaires à la reprise d'un dialogue et d'une entente, et finalement, à la reprise, de trouver des solutions qui pourraient faire en sorte que le réseau de l'éducation se stabilise enfin à la suite, comme vous le savez M. le Président, de la plus longue grève jamais connue dans le secteur de l'éducation au Québec depuis la création du ministère en 1964.

J'ajouterais, comme quatrième point, que, pour nous, il nous apparaît important de regarder à travers l'expérience vécue des négociations hypercentralisées comme on l'a connue; de faire l'étude des rapports de

force politique qu'on a aussi vécus à partir de la multitude de comparaisons dont on a entendu parler à cette commission depuis les deux derniers jours, particulièrement entre le Québec et l'Ontario; de faire en sorte qu'on puisse aussi comparer nos systèmes de négociation entre le Québec et l'Ontario et -ce sont des pistes que je vous ouvre, M. le Président - et de faire en sorte qu'il y ait décentralisation de ces négociations et, en même temps, modification au Code du travail qu'on connaît et qui, selon nous, mériterait des ajustements très sérieux en ce qui regarde les négociations dans les secteurs public, parapublic et péripublic.

Quant à nous, de la Fédération des commissions scolaires, sur ce dernier point, nous consulterons nos membres sur ce sujet et, en même temps, nous présenterons un bilan de l'ensemble de la ronde lorsqu'elle sera terminée. Nous préparerons un rapport, à l'intention des membres de cette commission, si vous le souhaitez, de prospectives en matière de négocation dans les secteurs public et parapublic. Je vous remercie M. le Président; je vous remercie mesdames et messieurs les membres de cette commission de nous avoir entendus.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Juste avant de donner la parole à M. le ministre, compte tenu de l'entente que nous avons -qui est quand même souple - d'agir environ pendant une heure trente - nous avons déjà, depuis 11 h 55, commencé la discussion -j'aimerais savoir si nous suspendons à 13 heures et revenons à 15 heures ou si les membres de la commission acceptent qu'on dépasse 13 heures. Nous suspendons à 13 heures et nous reviendrons à 15 heures, donc vous êtes à notre disposition pour une partie de l'après-midi.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je n'ai pas eu le temps de consulter mes collègues, mais je pense que nous serions disposés à revenir à 14 h 30. Cela permettrait une demi-heure de plus.

Le Président (M. Jolivet): Si vous êtes d'accord, je n'ai pas d'objection, donc ce sera vers 14 h 30.

M. Chagnon: Quant à nous, nous sommes humblement soumis, et comme nous sommes vos invités, nous serons ici à l'heure que vous le désirez.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec de son mémoire qui, dans sa concision, fait véritablement le tour du problème et cerne avec clarté les véritables enjeux de cette négociation. Pour laisser plus de temps aux intervenants de poser leurs questions, je passerai tout de suite à deux questions. (12 h 30)

Nous avons proposé conjointement que le processus d'affectation et de mutation soit modifié de façon qu'il tienne davantage compte de l'expérience, de la capacité, de la compétence des enseignants. Je ne vous cacherai pas que cette modification a suscité des réaction négatives de la part de certains groupes; nous avons eu l'occasion de les entendre particulièrement hier. Je pense que la principale critique que l'on nous faisait était que cette modification remet à la gérance des fonctions qu'elle ne pourra exercer qu'en faisant montre d'une discrétion et d'un arbitraire auxquels, précisément, les dernières conventions collectives nous avaient permis d'échapper.

La question que j'aimerais vous poser est la suivante: Croyez-vous qu'il soit possible d'affecter, de muter les enseignants selon la capacité, la compétence, l'expérience, en vue d'assurer une meilleure stabilité du personnel pédagogique dans les écoles, tout en évitant cet inconvénient qu'on nous a signalé qui est de donner à la gérance des droits excessifs ou de voir la gérance tomber dans l'arbitraire ou la discrétion excessive?

Ma deuxième question porte sur l'enfance en difficulté. Nous avons proposé conjointement, dans les décrets, que les commissions scolaires se dotent maintenant d'une politique formelle d'intégration des enfants en difficulté dans les classes et, plus loin, qu'elles établissent véritablement une politique qui tienne compte de toutes les variations ou degrés de handicaps que nous connaissons.

On nous a fait, à cet égard, plusieurs critiques, encore une fois hier, d'une façon toute particulière, et on nous a rapporté certains exemples où cette politique existerait déjà et où elle est tellement floue, tellement imprécise, d'une part, qu'elle ne correspond à rien du tout; deuxièmement, qu'elle aussi laisse place à l'arbitraire, à la discrétion excessive de la gérance. Est-ce que vous pourriez nous dire si, effectivement, une politique pour les enfants en difficulté existe dans les commissions scolaires catholiques, jusqu'à quel point elle existe et dans combien de commissions? Deuxièmement, dans les efforts ultérieurs que les décrets connotent évidemment, cette politique sera-t-elle suffisamment explicite, suffisamment précise pour qu'elle puisse véritablement atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire de procurer

aux enfants en difficulté les meilleurs services éducatifs possible dans le respect de cette exigence d'intégration qui est la nôtre?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Quant à la première question, affectation et mutation, il faut se rappeler que c'était un objet de négociation locale dans les négociations antérieures, premièrement. Deuxièmement, en ce qui concerne l'écriture des textes ou encore, peut-être plus particulièrement, l'arbitraire dans le droit de gérance qui pourrait être laissé à la partie patronale, force nous est de conclure qu'il n'est nullement l'intention pour la partie des commissions scolaires de tomber dans l'arbitraire dans le dossier.

Toutefois, je demanderais à M. Roger Carette, président du CPNCC, de répondre à la première question sur l'affectation et la mutation, particulièrement dans tout ce qui regarde la mécanique et les écrits de cette dernière.

M. Carette (Roger): M. le Président, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, sur la question de l'affection-mutation, au moment de la requête des mandats de négociation, avait signifié comme étant une orientation de base de ses membres une recherche d'une conciliation acceptable entre, d'une part, le critère de capacité et le critère d'ancienneté aux fins de procéder à l'affectation des enseignants. À notre point de vue, le dépôt des offres patronales constituait un premier pas vers une recherche de cette conciliation qui nous apparaît normale entre, à la fois, la capacité et l'ancienneté.

À la lecture des textes des décrets et de la critique de ceux-ci que nous avons par la suite entendue, soit en décembre, soit en janvier, il nous est apparu qu'il y avait des améliorations à apporter à cette tentative de conciliation que nous avions faite au moment des offres patronales du 24 septembre. C'est sur la base de ce qu'on a entendu à ce moment-là qu'on s'est associé et je devrais même dire qu'on a prôné au nom de la fédération l'inclusion de la proposition no 2 dans le texte du 10 février qui, à notre point de vue, doit s'interpréter en lien avec la proposition no 12. Je m'explique là-dessus. Dans la proposition no 2, on dit qu'il nous faut réviser certaines mécaniques relativement à l'affectation-mutation notamment celle qui est inscrite dans la proposition du 10 février relativement à des affectations possibles à des tâches partielles, mais qu'on globalise par des additions. On a fait cette proposition le 10 février en lien aussi avec la proposition no 12, parce qu'à notre point de vue ce n'est pas le seul trou - pour prendre un jargon de négociateur - que comporte le décret en cette matière. Il y a des aspects un peu plus techniques qu'il nous faudrait aussi corriger. Quand on dit dans la proposition no 12 du 10 février qu'on souhaiterait que soit mis sur pied un comité chargé de corriger des erreurs de cet ordre, c'est la signification que cela avait.

La troisième et dernière chose que je voudrais dire là-dessus, c'est que c'est évident que cela peut être interprété, tel que libellé présentement, comme abusif, soit par les enseignants ou soit par la centrale. Je voudrais seulement dire que le texte décrété, s'il n'était pas amélioré par les propositions du 10 février et ce qui s'ensuivrait, présenterait toutes les faiblesses d'un texte non négocié, parce que je veux vous signaler que ce texte n'a fait l'objet d'aucune discussion de la période du 24 septembre au 29 novembre ou de discussions ultérieures, sauf peut-être ici, hier, où on l'a entendu commenter. Nous le déplorons énormément.

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon, sur les autres points?

M. Chagnon: Sur le deuxième point.

Le Président (M. Jolivet): Sur le deuxième point.

M. Chagnon: Sur la deuxième question du ministre de l'Éducation, c'est un fait que la convention collective décrétée crée une obligation nouvelle pour les commissions scolaires de bâtir une politique d'intégration des élèves en difficulté d'apprentissage pour les commissions scolaires qui veulent le faire.

On nous a soumis, hier, à la commission un exemple de politique de commissions scolaires qui était fort court. Il faut se rappeler, toutefois, que la politique ne doit comprendre que les principes essentiels. La mécanique de son application se retrouve très généralement dans une procédure substituée et rattachée à cette politique. Je pourrais vous citer le cas d'autres politiques de commissions scolaires sur l'intégration des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage qui sont même plus courtes que celles qu'on a entendues, hier, et qui parfois sont plus complètes.

Toutefois, il faut se rappeler une chose, c'est que, comme politique et procédure, l'enfance en difficulté d'apprentissage mérite un financement plus important parce que ce sont des enfants qui demandent des soins spéciaux. Dans ce cadre-là, il faut aussi prévoir des garanties financières pour faire en sorte que la commission puisse appliquer la politique qu'elle aura à établir - je tiens à le mentionner - en consultation avec le syndicat de sa région.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

M. Chagnon: II y a peut-être une question subsidiaire. M. le ministre m'a demandé combien de commissions scolaires ont déjà adopté des politiques. Je ne pourrais pas lui donner un chiffre précis, mais je pourrais lui dire, toutefois, qu'à ma connaissance un grand nombre de commissions scolaires ont déjà des politiques relatives à l'intégration d'élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage. Plusieurs de ces commissions, compte tenu des décrets, devront les modifier probablement pour faire en sorte qu'elles soient consultatives auprès du syndicat, etc. Plusieurs commissions scolaires en ont déjà adopté. J'en ai une ici devant moi; je peux la lire, si vous le jugez à propos. Je pourrai la présenter à la commission un peu plus tard, si vous le voulez.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Ce n'est pas nécessaire, mais, si vous l'avez pour dépôt, cela pourrait être fait. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je suis bien heureux de saluer la présence des dirigeants de la fédération des commissions scolaires parmi nous ce matin. J'ai écouté, comme mes collègues, avec beaucoup d'attention la lecture qui nous été faite du mémoire préparé pour cette rencontre.

Je me dispense de commentaires généraux étant donné l'économie de temps que nous devons faire. Je voudrais vous adresser une série de questions. Je vais vous les adresser toutes ensemble pour que cela vous permette de voir un peu la ligne de fond. Cela vous donnera plus de temps pour y répondre et vous pourrez peut-être disposer de moi avant l'heure du déjeuner. Si les réponses sont satisfaisantes, je ne reviendrai pas. S'il y avait des sous-questions, je reviendrai brièvement, mais je pense que ces questions sont d'intérêt général.

Premièrement, quel a été le rôle de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec dans tout le processus qui a précédé les décrets? La fédération a-t-elle été consultée au sujet du recours qui a été retenu par le gouvernement de la loi et du décret? Deuxièmement, a-t-elle approuvé cette méthode et a-t-elle été invitée à se prononcer sur le contenu des décrets et l'a-t-elle approuvé avant?

Deuxièmement, j'ai noté avec un très vif intérêt les télégrammes que vous avez adressés au premier ministre du Québec dans lesquels vous lui disiez, ni plus ni moins, que vous étiez traités en partenaires mineurs dans la conduite de la partie patronale. Le télégramme que vous adressiez tout récemment au premier ministre du Québec, M. Lévesque, est particulièrement éloquent à ce sujet. Vous lui dites, ni plus ni moins, qu'on vous laisse complètement en dehors. Vous aviez déjà adressé un télégramme dans ce sens le 17 janvier. Vous avez été obligés de revenir à la charge, je crois, le 25 février. Cela veut dire qu'il n'y a pas eu beaucoup de correctifs d'apportés entre-temps. Autrement, j'imagine que vous n'auriez pas senti l'obligation d'adresser un nouveau message pressant au premier ministre.

Je voudrais vous demander une chose. La loi est très précise à ce sujet. Je viens de consulter le texte de la loi sur l'organisation des parties syndicale et patronale en vue des négociations collectives dans les secteurs public et parapublic. La loi dit que vous êtes censés avoir une entente entre partenaires, une entente écrite, qui détermine les sujets sur lesquels le gouvernement se réserve le mot décisif et qui établisse entre vous des règles de conduite. J'aimerais savoir s'il y a eu une telle entente cette fois-ci. Pourriez-vous en déposer le texte pour notre information et nous dire si elle a été suivie? Au cas où elle n'aurait pas été suivie, étant donné que vous avez des droits qui vous sont garantis par la loi, est-ce que vous avez envisagé des recours en vue d'obtenir le respect intégral de ces droits? Est-ce que vous en avez pris ou est-ce que vous avez seulement fait des protestations auprès du premier ministre, lequel, apparemment, n'a pas bougé beaucoup, en tout cas jusqu'à ces derniers jours? C'est la deuxième question.

La troisième question est la suivante. Nous avons été saisis des résultats de plusieurs travaux de simulations qui ont été faits dans diverses commissions scolaires concernant l'impact éventuel des décrets. Je voudrais vous demander si vous avez été saisis de ces résultats-là, vous aussi. Est-ce que cela vous a impressionnés? Si vous avez fait des travaux semblables en vue d'en arriver aux propositions que vous avez faites concernant le cadre de règlement du 10 février, est-ce que les propositions incluses dans ce cadre de règlement s'appuyaient sur des simulations de même nature ou si cela s'appuyait sur d'autres sortes de considérations?

Quatrièmement, je pense qu'il y a un accord général sur la nécessité d'accroître la productivité dans tous les secteurs de la société québécoise, au gouvernement pour commencer, à l'Opposition, au patronat, chez les syndicats, chez les intellectuels, chez les producteurs agricoles. Je pense qu'il y a un problème général de course vers une productivité plus forte, qui est un effort attendu de tout le monde. Est-ce que vous pensez qu'il est sérieux de chercher à accroître la productivité d'un groupe de travailleurs, en l'occurrence les enseignants, en isolant d'autorité et unilatéralement un

seul élément de ce qui constitue la productivité d'un groupe de travailleurs ou d'un membre d'une profession donnée et en décrétant par loi que les choses se feront comme ceci sans tenir compte de l'impact que l'isolement de ce facteur peut avoir sur tous les autres facteurs qui entrent dans la productivité et évidemment, sur la motivation et les conditions de concorde et sur le climat de collaboration qui doivent être considérés comme essentiels à ce sujet? (12 h 45)

Cinquièmement, les commissions scolaires ont reçu, vers la fin de décembre, le projet de règles budgétaires du gouvernement. Comment ont-elles réagi? Est-ce qu'elles ont trouvé que ce projet de règles budgétaires était parfaitement cohérent par rapport à ce qui a été fait jusque-là? En particulier, j'aimerais savoir ce que vous avez dit au gouvernement à propos du modèle sur lequel s'appuyaient toutes ces règles budgétaires, sur la manière dont on a établi ce modèle, sur les critères qu'on a employés pour l'établir et sur les résultats que vous envisagiez comme devant découler de l'application éventuelle de ce modèle dans la forme où il vous avait été soumis. Deuxièmement, est-ce qu'il y a eu des nouvelles depuis? Où en êtes-vous à ce point de vue?

Sixièmement - et je termine par cela -hier soir, nous avons entendu des propositions de la part de la partie syndicale. Le gouvernement, par la voix des trois ministres qui sont intervenus dans le débat hier soir, a donné sa réaction. J'ai deux questions à vous poser à ce sujet. Premièrement, vu que vous êtes partenaires de la partie patronale avec le gouvernement, est-ce que le gouvernement vous a consultés avant de donner les éléments de réponse qu'il a apportés hier soir? Deuxièmement, vous autres, qu'est-ce que vous pensez des propositions qui ont été faites par les centrales syndicales hier soir? Comment y réagissez-vous et surtout comment pouvez-vous les raccorder avec les recommandations que vous faites vous-mêmes à la fin de votre mémoire?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: J'en ai trois pages. M. le député d'Argenteuil était rendu à huitièmement et moi, je suis rendu à dixièmement. En tout cas, on va essayer de se comprendre pareil.

Je vais reprendre les premières questions. Quel a été le rôle de la fédération dans le processus antérieur aux décrets? A-telle approuvé la méthode des décrets? Les deux télégrammes des 17 et 25 février au premier ministre et l'entente? J'imagine que le député d'Argenteuil faisait référence au protocole d'entente qui lie le ministère de l'Éducation et notre fédération des commissions scolaires à la suite de la loi 55. Vous faisiez référence à ce protocole d'entente, n'est-ce pas, M. le député?

Je vais vous faire un cheminement, un historique de ce qu'a été notre travail, notre rôle dans le processus antérieur aux décrets. Je ne veux pas remonter au déluge, mais, quand même, il faut remonter à l'automne 1981 où un comité, comprenant le ministère de l'Éducation et la fédération des commissions scolaires, a fait une tournée de la province pour rencontrer les différents agents de l'éducation: d'abord les commissions scolaires, les commissaires, les directeurs généraux, les cadres scolaires, les directeurs d'école, les parents, etc. Le comité voulait établir quelles devraient être la structure et les demandes des commissions scolaires dans le dossier. Cela a été fait conjointement.

Au cours de l'été, dans une phase préparatoire du dépôt des offres patronales, qui a été fait, si ma mémoire est bonne, autour du 24 ou du 25 septembre, il y a eu plusieurs rencontres, entre autres avec le ministre de l'Éducation et moi-même sur le sujet.

À partir du mois de mai - il ne faut pas oublier cette étape - il y a eu signature d'un protocole d'entente entre le ministère de l'Éducation et la fédération des commissions scolaires sur l'ensemble du rôle qui devait être joué par les deux parties. Le protocole d'entente, entre autres, met sur pied ou fait mettre sur pied le Comité patronal de négociation des commissions pour catholiques, soit le CPNCC. Le CPNCC s'est réuni, à partir du mois de mai et pendant les mois de juin, juillet, août et septembre, pour la préparation des offres patronales. Dans la préparation des offres patronales, comme je le disais tout à l'heure, nous avons rencontré le ministre à quelques reprises.

En même temps, il y a eu une réunion préparatoire au dépôt des offres patronales avec toutes les fédérations, tant des affaires sociales que du secteur de l'éducation. À cette réunion, nous avons pris connaissance, entre autres, que les sujets à caractère salarial étaient déjà fixés et légèrement connus depuis la conférence au sommet qui réunissait le monde gouvernemental et le monde syndical au mois d'avril. Quant à l'ensemble des positions normatives qui devaient être déposées, du moins la très grande partie, elles avaient été décrétées "d'intérêt gouvernemental". C'est-à-dire qu'il y avait eu un arrêté en conseil qui décrétait l'ensemble des positions normatives "d'intérêt gouvernemental" dans le secteur de l'éducation et dans le secteur des affaires sociales, dans les deux réseaux, finalement, pour tout le monde: cégeps, protestants, catholiques, dans le réseau de l'éducation et pour les différentes fédérations dans le réseau des affaires sociales.

Toutefois, il faut mentionner, pour être bien honnête - et c'est ce qui était peut-être un peu bizarre pour nous - que ce qui était devenu d'intérêt gouvernemental, donc difficilement "bougeable", en tout cas par nous, parce que l'intérêt gouvernemental avait été apposé par un arrêté en conseil, était, en très grande partie, le contenu demandé par les commissions scolaires dans le dossier de la négociation. On était un peu mal placé pour se plaindre de ce côté-là.

Entre le mois de septembre et le 29 novembre, c'est-à-dire la journée où a été déposé le cadre de règlement dont ont parlé les sous-ministres mercredi et les représentants du monde syndical hier, la fédération, par le biais du CPNCC, était représentée aux tables de négocation pour le personnel de soutien, pour le personnel professionnel et pour le personnel enseignant. Le cadre de règlement a été déposé le matin du 29 novembre. Tout le monde était représenté par le biais du CPNCC. À la suite de cette période et entre septembre et novembre, il y a eu d'autres rencontres entre le ministre de l'Éducation et moi-même, entre les sous-ministres et le directeur général de la fédération.

Depuis le début de décembre, on ne nous a effectivement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pas invités à participer à des réunions qui ont pu avoir lieu entre la partie patronale gouvernementale et les syndicats. Nous avons, à ce moment-là, un peu modifié notre râle, notre façon de procéder, notre comportement, si on veut, en inscrivant un lobby qui s'est voulu, en tout cas à certaines reprises, particulièrement efficace. On nous informait de ce qui se passait à ces réunions, toutefois. Et ça a été comme ça jusqu'à aujourd'hui, finalement, sauf pour le dépôt de l'offre du 9 février qui a été fait conjointement: le ministre de l'Éducation, un représentant du QAPSB et moi-même à la CECS, pour une quinzaine de minutes. Ensuite, il y a eu rencontre du comité technique formé, nous a-t-on dit, par le gouvernement, pour continuer d'expliquer aux représentants de la CECS notre offre du 10 février.

La façon dont on a procédé finalement, entre le 1er janvier et aujourd'hui, a été de rechercher de l'information, d'une part. Il était important pour nous de ne pas couper les ponts avec la partie avec laquelle on aurait dû être intégrés à ce moment-là, la partie gouvernementale, et la partie syndicale. On a aussi cherché à travailler, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. Dans le télégramme adressé au premier ministre en date du 17 février, auquel faisait allusion le chef de l'Opposition, on ne se plaignait pas des conditions qu'on nous faisait, mais on proposait des pistes de règlement lors de la rencontre du premier ministre avec les chefs syndicaux. Donc, nous avons fait cette première ouverture au premier ministre quant à sa rencontre.

Nous en avons fait une autre aux sous-ministres et au ministre de l'Éducation pour présenter, entre autres, le principe de l'étalement, regarder l'écriture de certains textes, comme on l'a mentionné plus tôt, sur l'affectation et la mutation. Finalement, le 18 février, on a rendu public un texte adressé simultanément au premier ministre et à la Centrale de l'enseignement du Québec pour faire en sorte d'éviter - je l'ai mentionné aussi un peu plus tôt - qu'il n'y ait des problèmes de taille, pour nous et pour l'ensemble du réseau aussi, le lundi qui devait suivre l'application de la loi 111.

En gros, cela a été notre rôle, un rôle qui, par certains bouts particulièrement autour du 18 février, pourrait être qualifié "de médiateur", mais cela était impossible compte tenu de notre rôle patronal. Dans ce cadre-là, je pourrais vous souligner qu'on a eu des informations, mais qu'on n'a pas participé aux rencontres gouvernement-syndicats entre le 1er janvier et la mi-février ou dernièrement. Lundi passé, le sous-ministre de l'Éducation nous a indiqué que, désormais, on serait associé. Cela a été long!

M. Ryan: Merci.

Le Président (M. Jolivet): Sur les autres questions?

M. Chagnon: Sur les autres questions, simulations selon les décrets de l'accroissement de la productivité des enseignants. Ces simulations selon un décret ont été déposées devant la commission. Nous les avons d'abord cherchées; deuxièmement, nous avons tenté de les étudier, troisièmement, de les anlyser, et, quatrièmement, puisque le député de Sainte-Marie nous avait télégraphié qu'il nous poserait la question, nous nous sommes préparés.

Je demanderai au directeur général de répondre à la question particulièrement sur la simulation des décrets et aussi à toute la question de l'accroissement de la productivité des enseignants et des règles budgétaires, avec leur cohérence et la problématique qu'elles posent.

Le Président (M. Jolivet): Je ne veux pas l'empêcher de parler, mais, compte tenu de l'heure, nous reporterons cela à 14 h 30. Avant de nous quitter, je dois vous mentionner qu'un télégramme a été envoyé. Il sera remis aux membres de la commission puisque c'est une sorte de mémoire sous forme de télégramme envoyé par The Philemon Wright School Committee.

Nous reprendrons à 14 h 30, en sachant

très bien que c'est vous qui m'avez demandé d'être présent à ce moment.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise de la séance à 14 h 42)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît;

La commission de l'éducation reprend ses travaux en vue d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au Québec.

Nous en étions, au moment de la suspension, à la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, qui avait encore quelques réponses à donner aux questions posées par le député d'Argenteuil. Je dois vous dire aussi que le temps qui reste à leur disposition est d'environ une demi-heure, mais, déjà, je pense que je pourrais d'office, à moins qu'on ne me dise l'inverse, accepter de dépasser de dix ou quinze minutes le temps prévu, de telle sorte qu'on pourrait aller jusqu'à 15 h 30 et permettre à chacun des collègues, de part et d'autre, de poser les questions qu'ils sont en droit de poser. Donc, M. Chagnon, nous en étions à votre déposition sur les questions additionnelles.

M. Chagnon: M. le Président, comme je vous le mentionnais avant la suspension pour le dîner, j'ai ici une question sur la simulation selon les décrets en fonction, probablement, des exemples qui ont été apportés devant cette commission. J'ai aussi une question qui s'associe à cette simulation, j'imagine, la question des règles budgétaires, de leur cohérence et des nouvelles règles. J'ai une autre question qui touche l'accroissement de la productivité des enseignants et, finalement, une dernière question sur la consultation gouvernementale en fonction des ministres qui ont été entendus devant la commission hier soir.

Alors, quant aux deux premières questions, c'est-à-dire simulation selon les décrets et les règles budgétaires, je demanderais au directeur général de la fédération, M. Jacques Audy, d'y répondre. Je répondrai aux deux autres questions.

Le Président (M. Jolivet): M. Jacques Audy.

M. Audy (Jacques): M. le Président, dans un premier temps, ce qu'on peut affirmer, c'est que les simulations en rapport avec les règles budgétaires et les décrets ont été effectivement faites dans plusieurs commissions scolaires et dans plusieurs écoles. Ce qu'on doit noter, toutefois, au point de départ, sur cette question, c'est que lesdites simulations n'ont pas tenu compte du cadre de règlement du 10 février.

Sur la question des décrets, dans un premier temps, ce qu'on peut affirmer à tout le moins, c'est que les décrets n'étaient pas satisfaisants puisque nous avons fait, les 10 et 18 février dernier des propositions d'étalement, d'aménagement et de bonification de façon à améliorer les décrets, mais cela devait se faire dans le cadre d'orientations que les commissions scolaires nous avaient signifiées, de même que d'une saine gestion des deniers publics.

Maintenant, il faut noter, sur cette question des décrets, qu'il y avait effectivement des récupérations sévères, compte tenu des propositions ultérieures que nous avons faites, comme je viens de vous le mentionner.

Concernant les règles budgétaires - je traiterai par la suite, dans un troisième temps, de la question de la cohérence entre les décrets et les règles budgétaires - la position des commissions scolaires est le résultat de la consultation que nous avons menée. Nécessairement, dans plusieurs commissions scolaires, nous avons obtenu des simulations de plusieurs écoles. Il est certain que dans le cas de l'école Jeanne-Mance, de Charlesbourg, des Compagnons de Cartier, etc., nous avons eu effectivement ces simulations. Nous avons regardé ces simulations. Elles ont été faites en rapport avec les décrets.

Les commentaires que portent 75% des commissions scolaires qui ont répondu aux règles budgétaires et aux simulations inhérentes se résument à peu près de la façon suivante. Le modèle des règles budgétaires ne corrige pas les paramètres en fonction de l'alourdissement des clientèles survenu depuis 1979-1980, ni ne rétablit les 200 postes coupés en 1980-1981, premier point.

Deuxième point: le modèle du ministère de l'Éducation se base sur des nombres d'élèves par groupes théoriques et non sur des moyennes vécues dans les commissions scolaires et dans les écoles.

Troisième point: le calcul du ministère de l'Éducation fait abstraction de l'impact de la baisse des clientèles.

Quatrième point: le ministère fait abstraction des petites écoles, ce qui était prévu au préalable dans les conventions collectives. Mais compte tenu que nous étions d'accord avec le retrait des ratios des conventions collectives, il est indispensable que les garanties financières soient accordées pour s'assurer de la qualité de l'éducation dans ces écoles.

Autre point: le calcul en fonction des régimes pédagogiques fait abstraction de la

période de transition entre les anciens programmes et les nouveaux, et de la multiplicité des options et de l'existence des voies. De plus, le modèle du ministère ne distingue pas entre les options en secondaire IV et V; il sous-estime donc le nombre de groupes requis.

En formation générale et professionnelle, le modèle du ministère postule le groupement des élèves du secteur général et du secteur professionnel pour leur formation générale. J'en passe quelques-uns.

Le calcul du ministère fait abstraction de l'intégration des élèves en classe régulière et ne tient pas compte de l'annexe XIX des dispositions tenant lieu de convention collective.

Un autre point sur les minutes d'enseignement: il peut s'avérer difficile d'atteindre la charge moyenne de 23 heures d'enseignement au secondaire.

Morcellement des tâches. L'application de la moyenne de 23 périodes d'enseignement au secondaire obligera les commissions scolaires à morceler les tâches.

Organisation scolaire. Le calcul du ministère élimine toute marge de manoeuvre et ne tient pas compte de l'alourdissement des clientèles. On rendra ainsi insolubles des problèmes d'organisation scolaire.

Je pourrais en mentionner quelques autres, mais ce sont les principaux problèmes que nous voyons en rapport avec le projet de règles budgétaires tel que formulé.

Ce qu'on peut mentionner, c'est que, d'une façon synthétique, le modèle ne tient pas suffisamment compte d'une multiplicité de facteurs de rigidité avec lesquels doivent vivre les commissions scolaires et qui rendent impossible le respect des moyennes ou des maxima d'élèves par groupe qu'utilise le modèle. Parmi les rigidités, je rappelle la question des petites écoles de 225 élèves et moins, l'obligation de former les groupes sur la base de clientèles prévisionnelles, les contraintes de la promotion par matière, les locaux spécialisés, l'existence d'options et de voies, la difficulté de faire accepter par les enseignants des tâches morcelées ou l'enseignement de plusieurs matières, la complémentarité difficile des tâches en enseignement professionnel, en plus du fait que le nouveau régime pédagogique pourrait créer de nouvelles rigidités, particulièrement dans la période de transition. Au niveau des règles budgétaires, cela touchait les principaux points.

Maintenant, les impacts pédagogique et administratif de ces règles budgétaires en relation avec les décrets, à la suite des simulations qui ont été faites, se résument comme suit. Il faut regarder l'aspect financier, mais il faut aussi regarder l'aspect pédagogique et l'aspect humain, la motivation des gens qui ont à intervenir pour une meilleure qualité de l'éducation auprès des élèves et des étudiants.

Les impacts pédagogiques. L'augmentation du nombre de groupes d'élèves à rencontrer par chacun des enseignants rend difficile l'amélioration de la relation maître-élèves. L'augmentation du nombre de matières aurait pour effet d'augmenter l'effort individuel des enseignants pour la préparation de chacun des cours. L'augmentation des fonctions d'évaluation rendrait presque impossible l'évaluation dite formative. L'augmentation du nombre de matières à dispenser par la plupart des enseignants exigerait une polyvalence accrue de ceux-ci. Il y a aussi l'augmentation du nombre d'élèves en atelier jumelé et ainsi de suite. J'en ajouterai un autre au niveau pédagogique et, ensuite, je passerai aux impacts administratifs. L'augmentation de la tâche de dispensateur de cours risquerait d'entraîner une démobilisation des enseignants face au projet éducatif qui préoccupe grandement les commissions scolaires et à l'implantation des nouveaux programmes.

Maintenant, les impacts administratifs. L'obligation de contingenter l'inscription des élèves de plusieurs spécialités augmenterait les coûts de déplacement ou freinerait le libre choix d'options. L'abolition ou la fermeture de plusieurs options dans les petites polyvalentes, obligeant de nombreux élèves au regroupement, aurait des incidences aussi sur plusieurs postes budgétaires.

Une simulation de l'application des clauses relatives à la tâche démontre que le nombre d'enseignants requis dans l'ensemble des écoles dépasserait le nombre admissible par l'application du paramètre. Les hypothèses sur lesquelles sont basées les règles de calcul ayant servi à l'établissement du paramètre révisé ne colle pas à la réalité des milieux où les écoles sont très distantes l'une de l'autre. Donc, cela touche les principaux impacts pédagogiques et administratifs des règles budgétaires en cohérence avec les décrets et ne tient pas compte du cadre de règlement du 10 février.

Donc, si nous regardons de quelle façon les règles budgétaires ont été faites selon les décrets, on peut dire que ça été fait de la façon suivante: c'est une organisation théorique maximale comme si tous les élèves, tous les professeurs, tous les cours, toutes les catégories de cours étaient dans une seule et même polyvalente. Je dois dire, toutefois, que certaines frictions ont été considérées de façon à ne pas maximiser à outrance la récupération plausible.

Donc, la position des commissions scolaires, telle qu'elle a été exprimée, à la suite de son adoption par le conseil d'administration de l'organisme, mentionnait très clairement que c'était une organisation théorique, la plus avantageuse possible, qui enlevait toute marge de manoeuvre aux

commissions scolaires dans le cadre des règles budgétaires telles que formulées. On sait fort bien que les écoles sont différentes autant quant à leur nombre d'élèves que quant aux cours qu'elles offrent, quant aux niveaux d'enseignement et quant aux matières. Dans ce contexte-là, il nous apparaît que les règles budgétaires ne tiennent pas compte, pour une bonne part, de ce qui était prévu aux décrets jusqu'à un certain point. Ceci touche la première intervention.

Maintenant, parlons de la méthode d'allocation des ressources qui a été effectivement adoptée il y a plus de trois ans déjà. Sur cette question-là, les objectifs qui avaient été fixés au point de départ et que la fédération des commissions scolaires, au nom des commissions scolaires, partageait était: premièrement, de s'assurer que le gouvernement paierait à 100% les coûts des objectifs nationaux de l'éducation; deuxièmement, que la compression des dépenses n'affecterait pas la qualité des services offerts; troisièmement, il fallait dégager une marge de manoeuvre plus grande pour les commissions scolaires.

Nous étions d'accord au niveau des objectifs et aussi de la méthode, au point de départ. En cours de route, que s'est-il produit? Même si au niveau des principes, cela devenait une enveloppe fermée, c'est-à-dire que les commissions scolaires étaient en tout point d'accord et avaient même suggéré, à plusieurs reprises, pour que celles-ci assument une gestion saine des deniers publics, d'avoir des enveloppes budgétaires fermées. Cela avait été suggéré à plusieurs reprises par les commissions scolaires. Au moment où la méthode d'allocation des ressources a finalement été adoptée, il devait aussi y avoir une plus grande transférabilité et on devait viser une certaine réduction des coûts de l'enseignement public. Nous partagions aussi ces principes.

Toutefois, que s'est-il passé dans la réalité au fur et à mesure des trois années qui se sont succédé? Bien que, jusqu'à un certain point, on se doit d'être d'accord sur un assainissement et une meilleure utilisation des deniers publics, la méthode a perdu de son efficacité. Les allocations sont devenues davantage discrétionnaires, c'est-à-dire qu'au lieu de les retrouver d'une façon où les commissions scolaires pouvaient faire une complète transférabilité, elles ont été réduites et, par la suite, nous avons eu à assumer de nombreuses compressions budgétaires dans les trois années dont on parle. Pour l'année en cours, ori peut parler d'un montant d'environ 169 000 000 $, c'est-à-dire que, selon le projet de règles budgétaires de 1983-1984, c'est 169 000 000 $ qui sont prévus et cela comprend les compressions prévues, la récupération prévue concernant l'article 1. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon, pour le reste.

M. Chagnon: Peut-être un dernier point concernant la simulation qui a été faite, entre autres, à la CECM. On nous a indiqué qu'elle avait été faite sur la base uniquement des décrets, celle-là, mais qu'on avait utilisé des moyennes maximales et des tâches maximales par enseignant, ce qui, évidemment, entraîne une réduction et un écart plus grand du nombre d'enseignants à l'intérieur de cette partie du réseau de la CECM.

Sur la question de l'accroissement de la productivité des enseignants, je voudrais mentionner que nous nous sommes associés, comme on le mentionne dans notre document, à un objectif gouvernemental qui fait en sorte, d'une part, de diminuer les coûts et, d'autre part, d'augmenter la productivité. Donc, pour nous, il nous semblait normal de chercher à atteindre progressivement les standards canadiens en termes de productivité ou en termes de travail pour les enseignants.

Toutefois, j'ajouterai, qu'on mentionne aussi dans notre document, à la page 9: "Même si tous ces objectifs sont valables en soi, nous croyons qu'il est nécessaire d'obtenir l'adhésion des enseignants sur la façon de les atteindre." Ces objectifs sont aussi pédagogiques, ils sont aussi d'ordre financier ou de gérance pour les commissions scolaires. C'est une question qui nous avait été posée ce matin, à laquelle je me devais de répondre.

La dernière, c'était: Le gouvernement vous a-t-il consulté hier soir? Hier soir, je pense qu'il y a eu trois interventions ministérielles, trois interventions de membres du cabinet, c'est-à-dire MM. les députés de L'Assomption, de Matane et de Bourget. Effectivement, le gouvernement aurait-il voulu nous consulter avant de parler que cela aurait été plutôt tannant. La réponse, c'est non, évidemment.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Compte tenu du partage équitable du temps, je me dois de dire qu'il y a quinze minutes en banque à ma droite. M. le député de Fabre a maintenant la parole. (15 heures)

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je veux revenir sur la question qui vient juste d'être traitée par les intervenants. Vous parlez de cette question, entre autres, à la page 8 de votre document, au chapitre II, intitulé Les correctifs nécessaires prévus par les décrets. Vous commencez par noter que les objectifs prévus dans le décret doivent être maintenus

et vous mentionnez, entre autres, la présence réelle des enseignants à l'école, la charge de travail globale, la possibilité d'affecter les enseignants selon leurs qualifications et leur expérience, une meilleure résorption des personnels, une limitation des coûts de la sécurité d'emploi et une productivité accrue de la tâche des enseignants. Par contre - et là, on rejoint un peu l'intervention que vous venez de faire - vous dites: "Nous ne pouvons pas passer sous silence le fait que l'application intégrale, dès septembre 1983, des objectifs rattachés à l'augmentation de la productivité provoque, principalement au secondaire, un lourd chambardement dans le vécu pédagogique des écoles." Ce que vous venez de décrire devant nous, si je comprends bien, c'est l'application, dès 1983, de l'augmentation prévue s'il n'y a pas étalement. C'est cela?

M. Chagnon: II y aura étalement.

M. Leduc (Fabre): Bon! Mais c'est ce que vous venez d'évoquer. S'il n'y a pas d'étalement, cela peut conduire au résultat que vous venez d'évoquer. Par contre, s'il y a étalement, avez-vous fait là, par rapport à l'étalement, des simulations; avez-vous des choses à nous dire à cet égard? J'aurais une autre question après votre réponse.

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon ou M. Audy.

M. Chagnon: Sur la question de l'étalement en fonction de la proposition du 10 février, il faut se souvenir de quelques éléments extrêmement importants, particulièrement en ce qui regarde la résorption du nombre de personnels mis en disponibilité. On sait que l'application intégrale des décrets pour 1983-1984 nous amènerait à un nombre glissant autour de 4000 ou 4200 enseignants en plus, mis en disponibilité. Vous savez que nous en avons déjà 2500. Cela fait, pour l'ensemble du portrait des mises en disponibilité, un nombre qui varie entre 6500 et 7000. Avec les mesures d'étalement en P-1 ou P-2, on est capable de ramener le nombre de mises en disponibilité d'entre 6500 ou 7000 à 4500. Évidemment, pour le réseau, c'est diablement intéressant parce que cela nous amène à diminuer la pression, entre autres, qui a été exprimée à plusieurs reprises ici sur l'augmentation du nombre de groupes d'élèves par enseignant, etc. Dans ce cadre, le fait d'aller progressivement vers les standards canadiens de productivité nous permet, premièrement, une gestion qui, du fait qu'elle soit étalée, devient plus claire et un peu plus facile à faire compte tenu de la diminution importante du nombre de mises en disponibilité.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): D'accord. Ma deuxième question touche à ce qu'on a évoqué non pas hier, mais avant-hier, devant cette commission, soit la possibilité d'organiser l'école secondaire suivant de nouveaux modèles qui, semble-t-il, sont déjà en application dans de petites ou moyennes écoles, mais qui ne seraient pas encore en application ou qui seraient plus difficiles d'application ou, en tout cas, qui causeraient un peu plus de problèmes dans les écoles du type des grosses polyvalentes. On nous a même affirmé qu'il serait sans doute possible pour les enseignants de rencontrer dans une semaine moins d'élèves qu'ils ne le font présentement et ce, malgré les décrets, si on se donnait la peine d'examiner de nouveaux modèles d'organisation dans les écoles secondaires. Je pense à des modèles polyvalents.

Enfin, je pense qu'on a évoqué devant cette commission la polarisation, si vous voulez, de deux types d'écoles possibles: l'école, boîte à cours - et si je comprends bien, votre simulation va dans ce sens - et un autre type d'école qui serait une école dite polyvalente basée sur le regroupement des élèves, sur une stabilité des élèves à l'intérieur des classes et, bien sûr, sur la possibilité pour les enseignants d'enseigner plus d'une matière. Vous avez dit, dans la liste que vous avez évoquée tout à l'heure, que cela pouvait poser un problème. Je vous demande, compte tenu que les nouveaux régimes pédagogiques permettent ces nouveaux modèles d'organisation, où vous en êtes dans vos discussions relativement à ces nouveaux modèles. Avez-vous une opinion quant à ces nouveaux modèles?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Le député de Fabre pense, entre autres, au titulariat...

M. Leduc (Fabre): Oui.

M. Chagnon: ...et au mariage d'enseignement de diverses matières dans un même champ. Je demanderais au directeur des relations du travail de la fédération, M. Tessier, de nous entretenir sur le sujet.

Le Président (M. Jolivet): M. Jean-Pierre Tessier.

M. Tessier (Jean-Pierre): M. le Président, les éléments de réponse se retrouvent dans notre mémoire à la page 9 quand nous parlons du fait d'associer les enseignants progressivement à des augmentations de productivité, d'abord, et, à la page 11, quand nous mentionnons ce que

pourrait faire l'application progressive de la proposition du 10 février. L'application progressive de la proposition du 10 février, nous l'avons validée avec des comités d'appui au niveau des négociations, mais elle n'a pas été validée dans chacune des commissions. Cependant, ce que cela nous révélait, c'est que, pour la première année - évidemment, ayant une productivité augmentée de 5% -cela permettait au niveau secondaire d'avoir, à l'occasion, un enseignant - étant donné que la tâche est globale - sur cinq, sur six ou sur huit, qui pouvait se voir ajouter un groupe d'élèves à moins que, comme cela a été mentionné précédemment en commission, dans des petites écoles, on ait des systèmes de regroupement de familles d'enseignement, de tutorat ou de titulariat, ce qui, à ce moment, augmentait la tâche, mais ne provoquait pas l'addition de groupes.

En P-1, cela devenait donc intéressant, en plus de mettre moins de gens en disponibilité. En deuxième année de convention - notre document le mentionne aussi en page 11 - si on ne fait pas le choix de regrouper des champs, si on garde les disciplines très étanches, on aura encore plus d'enseignants qui auront, moitié-moitié - des fois un peu plus que la moitié, mais ce serait autour de moitié-moitié - un groupe de plus.

Cependant, cela donnait encore un an et cela permettait d'inventorier et d'associer le milieu à des organisations qui pouvaient permettre de regrouper les familles. Cependant, en P-3, on a beau inventorier, trouver des modèles, ce n'est pas sûr que tout le monde embarquera dans le modèle de regrouper des champs. D'autres préféreront peut-être accepter d'avoir un groupe de plus plutôt que de regrouper des champs et d'avoir des matières qui ne soient pas spécialisées. Cela nous a fait ressortir notre proposition du 18 février où on dit: II y a peut-être un doute en P-3 et il faudrait étudier l'impact de P-3.

Comme le directeur général, M. Audy, l'a exposé tout à l'heure, les règles budgétaires à l'état pur et appliquées le 1er septembre 1983 sur des décrets qui restent intégralement comme ils sont, cela provoque un chambardement; c'est plus. On ne peut pas penser recoudre cela et retravailler cela. Les écoles, il y a des élèves dedans, il y a des parents qui tiennent à des spécialités, il y a des élèves qui tiennent à certaines spécialités, il y a des enseignants qui ont pris des habitudes de travail et il y a des équipes-école qui ont pris des habitudes de travail.

Nous, on se disait: Allons-y graduellement. Notre première expérience permettait de penser à un P-1 viable, une première année, une deuxième année et on s'est même rabattu à dire: En troisième année, là, attention. Les règles budgétaires, c'est un projet. Peut-être qu'elles seront corrigées - on l'espère - et cela nous permettra de voir si en P-3 on peut fonctionner. C'est ce qui a amené notre proposition du 18 février.

M. Leduc (Fabre): D'accord, je trouve cela intéressant. Cela éclaire en même temps un des objectifs, finalement, de la proposition du 18 février.

Juste une dernière question. Avez-vous inventorié les expériences qui existent présentement dans certaines écoles quant à ce nouveau modèle basé sur le tutorat et la polyvalence des enseignants en même temps?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Pour répondre à la question du député de Fabre, nous savons que quelques écoles travaillent sur des modèles particuliers et, en même temps, sur certaines expériences de modèles. Par contre, nous n'avons pas fait un inventaire exhaustif de chacun des modèles qui peuvent être mis en application dans le cadre d'une récupération dans le style de celle qu'on va vivre. Sur ce, je pourrais ajouter, qu'en fait, comme on l'a souligné vendredi après-midi, il y a plusieurs modèles qui pourraient être regardés. Il y a des variantes de ces modèles quasi à l'infini.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Avant de poser mes questions - j'en ai quatre - j'aimerais souligner qu'il est évident pour moi et, je crois, pour tout le monde qu'on ne peut pas considérer l'impact du décret sans considérer en même temps l'impact des règles budgétaires. Même si nous sommes ici pour considérer l'impact du décret, surtout pour la qualité de l'éducation, je crois qu'il y a une menace cachée derrière cette affaire. Ce sont les règles budgétaires, parce que, comme je l'ai dit il y a deux jours, quand nous avons entendu M. Girard, le gouvernement peut tirer une économie par le biais des règles budgétaires, même s'il ne réussit pas à tirer une certaine économie du décret. Je crois que c'est très important. Nous devrions peut-être avoir une autre commission parlementaire sur les règles budgétaires parce que c'est la clé de toute la situation.

J'ai quatre questions à poser et j'aimerais les poser une à la fois, parce que c'est plus clair pour tout le monde. D'abord, la question de l'autonomie des enseignants. J'ai été particulièrement frappée hier par le mémoire de la CEQ, à la page 26, où on dit: Dorénavant, les enseignants ne verront leur tâche définie qu'en fonction de l'application des règlements du ministre. Conséquences du décret: les enseignants ne sont plus les

professionnels qu'il interpellait - on parle du ministre Laurin - en décembre 1981, mais seulement des exécutants dociles et muets.

Je partage le but d'une vraie décentralisation, comme la Fédération des commissions scolaires. Que pensez-vous des conclusions tirées par le mémoire de la CEQ?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Premièrement, concernant l'impact du décret sur les règles budgétaires, il est évident qu'on peut faire des simulations. Tant à partir des décrets qu'à partir des règles budgétaires, on peut faire des simulations en conjuguant ces deux éléments. C'est une chose. Il faut savoir une deuxième chose, c'est que les règles budgétaires, en tant que telles, sont des propositions de règles budgétaires. Il y a un projet de règles budgétaires qui, en principe, est en consultation jusqu'à la semaine prochaine. Au ministère de l'Éducation, on prévoit une consultation qui devrait finir la semaine prochaine. En ce qui concerne la fédération, nous avons demandé des modifications au mécanisme des règles comme telles pour assouplir justement l'application, sur le plan de la gestion, des décrets que nous connaissons. (15 h 15)

Quant à la deuxième question que vous souleviez, l'autonomie des enseignants, qui est relevée à la page 26 du document de la Centrale de l'enseignement du Québec, celle-ci tire la conclusion que les enseignants et enseignantes ne sont plus, pour le ministre Laurin, "les professionnels qu'il interpellait en décembre 1981, mais seulement des exécutants dociles et muets".

Il y a deux choses: la première est que, d'une part, dans le livre vert de 1979, les différents agents de l'éducation ont fait mention de la nécessité d'améliorer le contenu des programmes-cadres, à l'époque, qui devaient justement être améliorés. Toutefois, cela peut avoir apporté une centralisation sur le plan pédagogique, j'en conviens avec vous.

Quant à nous, notre propre vision du rôle des enseignants dans l'école, nous l'avons déjà formulée dans un document pour consultation pour les commissions scolaires. C'est un document de propositions qui touche plus particulièrement le dossier de la restructuration scolaire et dans lequel nous disions ceci: Les enseignants devraient être intégrés, entre autres, au conseil d'orientation de l'école, parce que nous croyons à la formule du conseil d'orientation de l'école. Les enseignants devraient avoir la possibilité de travailler, entre autres, sur le projet éducatif de l'école, l'évaluation du projet éducatif de l'école et toutes ces matières sur lesquelles les enseignants, comme professionnels de l'acte pédagogique, sont certainement les maîtres d'oeuvre à privilégier. Dans ce contexte, nous croyons qu'il est possible pour les enseignants, dans chacune des unités-écoles, de jouer un rôle important sur le plan de la démarche pédagogique de l'école comme telle et même de l'ensemble de la commission.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée.

M. Dougherty: Je parle plutôt de leur marge de manoeuvre individuelle comme professionnels. Est-ce restreint à cause du décret? Peut-être n'y a-t-il pas de réponse. Mais j'ai été particulièrement frappée par leur interprétation de l'impact du décret, parce que cela va à l'encontre de toutes les affirmations du ministre qui était toujours pour une amélioration du professionnalisme des enseignants. C'est peut-être une chose à examiner comme impact du décret.

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Vous parlez des programmes-cadres qui sont remplacés. Je sais que les enseignants, chez nous et dans plusieurs régions, travaillent actuellement sur la préparation, pour 1983-1984 - c'est un problème qui sort directement du cadre des travaux de cette commission - des éléments didactiques qui leur permettront d'appliquer ces programmes-cadres. Ce sont des enseignants qui travaillent là-dessus chez nous. C'est toute la question qui est reliée à l'utilisation de manuels qui doivent être agréés par le ministère et qui sont en attente dans le milieu pour l'instant et qui, d'une façon ou d'une autre, permettent aux enseignants, justement, de travailler sur l'application pratique de la façon dont ils vont rendre les programmes pour lesquels ils ont été nouvellement formés.

M. Dougherty: Merci. J'aurais une deuxième question. Quel sera l'impact du décret sur la fermeture des écoles? Est-ce qu'il y aura plus ou moins de pressions sur les commissions scolaires pour fermer les écoles? C'est évident que les règles budgétaires seront impliquées. Mais est-ce qu'il y aura plus de pressions qu'il n'y en a à l'heure actuelle pour regrouper, compte tenu qu'il y aura moins d'enseignants, les ressources humaines dans une école au lieu de plusieurs écoles pour être plus efficace?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: C'est une question fort complexe que l'ensemble de la question de la fermeture des écoles. Il est difficile de la regarder uniquement sous l'angle des décrets; c'est plus facile de la regarder sous l'angle

des règles budgétaires. C'est évident que, pour certains milieux, il y aura intérêt, si ce n'est déjà fait - dans les quatre coins de la province, un effort a été fait à cet égard depuis déjà de nombreuses années; pensons à la CECM et à d'autres milieux - à faire en sorte que les écoles puissent regrouper les clientèles pour lesquelles elles ont été construites.

Toutefois, la fermeture d'une école dans un milieu pose toujours un problème. On a entendu plusieurs déclarations de commissions scolaires, plusieurs déclarations ministérielles aussi - par exemple, celle de l'ancien ministre de l'Éducation - qui parlaient de la dernière école de quartier. Il faut savoir que, pour garder la dernière école de quartier ou encore la dernière école d'un village - ça prend une signification encore plus particulière, plus profonde à ce moment-là - il n'y a pas de crédits supplémentaires d'alloués.

Maintenant, il y a un grand effort de rationalisation dans l'ensemble du réseau de l'éducation, depuis déjà trois ou quatre ans, en fonction des ressources matérielles et financières dont nous disposons. Cela n'a pas pu faire autrement qu'amener la fermeture de certaines écoles. Mais c'est toujours à contrecoeur qu'on doit fermer une école. On parlait des règles budgétaires, mais il y a un autre facteur qui nous force à fermer les écoles, c'est la diminution de la clientèle. La clientèle, on l'a évoqué, a pratiquement diminué de 30% dans les dix dernières années. Alors, veux veux pas, à cause des diminutions de la clientèle et de certaines contrictions dans les règles budgétaires, il faut que tu prennes de temps en temps des orientations de ce type. Je pense qu'en général les commissions scolaires ont su le faire de la façon la plus humaine possible, malgré que ce soit toujours un problème.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée.

Mme Dougherty: J'aimerais poser une question. C'est un peu hypothétique mais, je crois que c'est le noeud du problème: le modèle d'organisation surtout au niveau secondaire. Le gros problème qui se pose, surtout au niveau secondaire, c'est de donner une éducation de qualité avec moins d'enseignants - j'aimerais élargir le cadre de ces questions - avec moins de ressources humaines, donc avec une certaine économie.

Il y a deux jours, le sous-ministre a dit: Si on change le modèle - ça rejoint un peu la question du député de Fabre -d'organisation surtout en secondaire I et II, on peut faire mieux - au moins aussi bien que nous faisons maintenant - avec moins de ressources. Je crois que le modèle est important. On n'a pas comparé les modèles qu'on utilise en Ontario. On a parlé de productivité, mais on n'a pas parlé du tout des modèles dans d'autres provinces, d'autres pays. Le modèle est important.

J'aimerais vous poser cette question. Si vous étiez libre, comme commission scolaire ou comme fédération de plusieurs commissions scolaires, de jouer avec tous les paramètres, pas uniquement avec le nombre d'enseignants, mais aussi avec le nombre des professionnels non enseignants, avec toutes les ressources humaines, toutes les heures pour les élèves, les heures d'enseignement, les heures d'encadrement, les heures pour d'autres activités - je ne sais pas si vous ou vos administrateurs y avez pensé - est-ce qu'il y a, pour l'école secondaire, d'autres modèles que nous devrions implanter? Oubliez le régime pédagogique qu'on a implanté dans les deux ou trois dernières années. Est-ce qu'il y a d'autres modèles que nous devrions implanter pour une meilleure qualité de l'éducation avec moins de ressources humaines? Pour moi, cela est la question clé. Est-ce qu'on a examiné d'autres modèles? Je crois que les plaintes des enseignants sont basées sur l'hypothèse qu'on va implanter le décret sur le modèle que nous avons maintenant. Mais si on change le modèle, est-ce que cela ouvre toute la question et nous donne plus de possibilités de faire mieux avec moins?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon.

M. Chagnon: Sur la question des modèles - je l'ai souligné tout à l'heure - il y a une gamme de modèles possibles sur lesquels on peut travailler. Je demanderais à M. Roger Carette, qui lui-même travaille dans une commission scolaire quotidiennement, de répondre à la question de Mme la députée de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Jolivet): M. Carette.

M. Carette: Dans le cadre de la question hypothétique visant à savoir ce qu'on ferait si on était maître de l'ensemble des paramètres qui régissent la quantification des ressources humaines dont on dispose, il est fort probable qu'au niveau des commissions scolaires ou des écoles, des modèles différents de celui de la spécialisation à "outrance" qu'on vit depuis la période 1967-1968 seraient mis en application, notamment, celui évoqué par un des sous-ministres lors de la première séance de la commission et celui qui était effectivement repris par bien des gens et qui était prôné dans les opinions colligées dans le livre vert - je fais allusion au modèle de titulariat - à tout le moins au niveau du premier cycle du secondaire. Si on était tout à fait libre de contraintes, je pense que ce système-là serait déjà très largement - un peu plus qu'il ne l'est présentement - en

vigueur au niveau du premier cycle au secondaire.

Je dois dire là-dessus que ce ne sont peut-être pas seulement les paramètres numériques qui ont constitué des contraintes. Je ne dis pas, non plus, qu'elles sont toutes levées par le décret. C'est à l'analyse du milieu qu'on va pouvoir le constater. Je fais allusion ici à un facteur historique qui était majeur. Quand, dans les écoles, jusqu'à maintenant, on tentait d'implanter un système de titulariat pour le premier cycle ou un système un peu moins poussé à fond de regroupement d'élèves stable qui enlevait, à toutes fins utiles, les formules de décloisonnement au premier cycle, on était souvent confronté à des problèmes à peu près insolubles en raison des déterminants anciens de sécurité d'emploi où les gens étaient confrontés à devoir s'identifier à un champ d'enseignement pour s'assurer d'une stabilité ou d'une sécurité d'emploi à peu près proportionnelle à leurs états de service. C'était un problème majeur. Dans toutes les écoles où on a tenté d'implanter cela, on était confronté à cela.

Je pense que les enseignants - je fais allusion à un milieu que je connais, le mien - étaient prêts et ont même tenté des expériences, en étant à l'abri de risques de ce côté-là, de changer le modèle organisationnel. Quand on disait, dans la proposition du 10 février, qu'il fallait, à certains égards, modifier certains éléments des articles relatifs à la mutation et à l'affectation en lien avec le fait que cela devient un des définisseurs de la sécurité d'emploi, c'est une des choses qu'on voulait dire.

Je voudrais faire un deuxième commentaire là-dessus. Changer de modèle présume obligatoirement, pour que le nouveau modèle devienne un peu plus efficace, que les gens qui vont vivre le modèle soient associés au changement de modèle. Je pense que cela est possible. Cela n'a peut-être pas à être nécessairement conventionné. On ne fait pas cela d'autorité ni dans une commission ni dans un réseau. Je pense que cela est faisable. Ce sont fondamentalement les deux commentaires que je voulais apporter à votre question. (15 h 30)

Le Président (M. Jolivet): Merci. Le temps étant écoulé, d'office, cependant, après avoir consulté, je crois qu'il vaudrait la peine de donner quinze minutes additionnelles. Compte tenu du temps à être partagé le plus équitablement possible, je permettrai au député de Chauveau de prendre une dizaine de minutes puisque, déjà, il y a une différence. Mme la députée de L'Acadie aura cinq minutes ou quelqu'un d'autre.

M. le député de Chauveau.

M. Brouillet: II y a deux jours, j'étais intervenu pour faire part d'une de mes grandes préoccupations, celle d'un écart qui existait entre la perception, en particulier, des étudiants et de l'ensemble de la population quant au contenu des décrets et à leurs effets et ce que nous avait présenté, à ce moment, la partie patronale, les représentants gouvernementaux quant au contenu des décrets. J'avais posé des questions aux représentants gouvernementaux, aux sous-ministres, pour qu'ils réaffirment d'une façon très précise trois points des décrets. J'ai confronté leurs réponses avec ce qu'on retrouvait dans de la publicité ou de l'information provenant des syndicats. J'avais fait allusion, à ce moment, à une information provenant de l'alliance et surtout à une publicité que mes enfants ont rapportée de l'école.

Parmi les points en question, il y avait, entre autres, le nombre de spécialistes au primaire. Dans l'information provenant de l'alliance, à certains endroits on disait qu'on revendiquait le maintien des spécialistes. On a répliqué, hier soir, que dans le même texte on faisait allusion à deux hypothèses. C'est vrai qu'on fait allusion à deux hypothèses, mais partout dans le reste du texte on retient l'hypothèse qui ne sera pas appliquée dans le cadre de règlement déposé par le ministre, soit l'hypothèse de l'augmentation de la présence en classe. La preuve que partout dans le texte on retient l'hypothèse contraire c'est que, quand on pose des questions aux parents, la première question qu'on leur pose est la suivante: Voulez-vous l'abolition des spécialistes en éducation physique, arts plastiques, musique et anglais, langue seconde, aux niveaux primaire et secondaire? L'autre hypothèse n'y est pas. Autrement dit, on ne pose pas de question sur ce qui sera la réalité. On pose des questions sur l'hypothèse la plus défavorable, hypothèse qui, justement, n'a pas été retenue par le ministère.

Si je reviens maintenant à la publicité que mes enfants m'ont apportée, dans la même phrase, on s'appuie sur l'hypothèse d'une augmentation de la présence en classe pour dire qu'il va y avoir moins de spécialistes. Vous allez voir la confusion qui existe dans l'esprit. Je vais vous lire la phrase: Sans entrer dans tous les détails, disons que les offres qui nous sont faites représentent plus de temps de présence à l'école pour nos enfants, risque d'un plus grand nombre d'élèves par classe et moins de spécialistes. Dans la même phrase, sur l'hypothèse d'un plus grand nombre de temps de présence, on mentionne moins de spécialistes.

Il y avait aussi deux autres points, le point sur l'appui apporté aux enfants intégrés dans les classes, j'avais mentionné cela. On disait qu'il n'y aura pas d'appui. Je peux

vous le citer: Voulez-vous qu'on intègre dans une classe régulière des enfants en difficulté d'apprentissage sans l'appui de services d'appoint à ces élèves, ni aux enseignants? On retrouve la même chose ici.

De plus, dans la publicité transportée par mes enfants à la maison, les enfants en difficulté d'apprentissage seront intégrés à des classes régulières sans aucune garantie d'appui de personnes compétentes. J'espère que la commission a pu éclairer au moins les gens et les enseignants qui nous écoutent, mais j'en doute. Ils ne l'ont peut-être pas encore assez suivie. Hier matin, mes enfants revenaient à la maison avec encore de la publicité qu'on leur retransmet et voici ce que je lis: "Les enseignantes et enseignants de vos enfants par leur action revendiquent: le droit à une école de qualité en voulant conserver un vrai maximum d'élèves par classe - j'aimerais que vous me répondiez sur cela tantôt - des services appropriés pour tous les enfants en difficulté, nos spécialistes au primaire et, quatrièmement, le maintien actuel du nombre de groupes à rencontrer au secondaire." On voit que le quatrième point ne concerne pas le primaire, mais les trois premiers le concernent et, sur ces trois points, les réponses qui ont été fournies par la partie gouvernementale - j'attends votre réponse - semblent apporter des garanties.

Je vous pose la question suivante: À ce moment-là, les enseignants du primaire font des actions pour revendiquer des choses qui leur sont déjà garanties, au moins les trois points mentionnés. J'attends vos réponses. Quant au quatrième point, la question du nombre de groupes, par toutes les questions qui vous ont été posées tantôt, on a su qu'il y a même une possibilité de réduire le nombre de groupes si on introduit un nouveau modèle organisationnel qui impliquerait une polyvalence, une spécialisation moins à outrance - ce sont les expressions que vous employiez tantôt - et d'autres possibilités d'organisation.

Pour le premier point, un vrai maximum d'élèves par classe, ce qu'on nous a dit l'autre jour, c'est que dans le décret on maintient le statu quo quant au maximum et quant à la moyenne. Il y a un élément nouveau qui est intervenu, c'est la question du minimum de dix groupes. Donc, le maximum serait garanti partout, mais la moyenne serait garantie là où il y a au-delà de dix groupes, onze groupes en montant. Pourquoi cette modification est-elle là et a-t-elle vraiment un impact sérieux sur le maximum dans les groupes?

Le Président (M. Jolivet): M. Chagnon. M. Chagnon: Merci, M. le Président.

M. Brouillet: Je vais commencer par ces trois questions.

M. Chagnon: En réponse à la question du député de Chauveau, je dirai ceci: Peut-être qu'avant le 9 février il pouvait subsister certaines ambiguïtés sur l'ensemble du régime pédagogique à l'élémentaire, étant donné qu'on avait dit qu'il y aurait possiblement une commission parlementaire -probablement celle-ci - qui devrait étudier la question, autour des 20, 21 et 22 février, je pense. Toutefois, à partir du moment où le cadre de règlement du 10 février était déposé - le 9, et le 10 février, il était déposé publiquement - sur l'ensemble de la question, à l'élémentaire, des spécialistes, des spécialités, tout le monde pouvait conclure qu'il y avait une espèce de clause-ascenseur qui faisait en sorte d'augmenter, d'une part, la tâche des enseignants d'une heure et, en même temps, d'augmenter le temps d'enseignement à l'élève d'une heure aussi. Donc, on gardait le même modèle organisationnel que celui qu'on connaît. Quant à la deuxième année, on augmentait d'une demi-heure le temps de présence des élèves pour faire en sorte, justement, d'augmenter le temps d'enseignement des spécialités, qui passait de trois heures à trois heures trente minutes. Donc, simplement le fait d'avoir augmenté de trente minutes le temps d'enseignement spécialisé à l'élémentaire, que ce soit pour l'enseignement des arts, de l'éducation physique ou de la langue seconde, ajoutait 600 spécialistes à l'élémentaire.

Pour les questions concernant les règles de formation de groupes et les autres questions que vous avez mentionnées, M. le député...

M. Brouillet: Sur les services pour les enfants en difficulté.

M. Chagnon: ...comme les services pour les enfants en difficulté...

M. Brouillet: Ma question sera précise. Les décrets actuels, en comprenant aussi le cadre de règlement, offrent-ils plus de garanties que l'ancienne convention?

M. Chagnon: ...je demanderais à M. Tessier de répondre sur ces deux aspects.

M. Tessier: M. le Président, je répondrai, d'abord, à la question sous l'angle du niveau primaire. Au niveau du primaire, quant à la moyenne des groupes d'élèves et au maximum d'élèves par groupe, on a transcrit intégralement les deux versions entre les anciennes conventions collectives et les décrets quant aux chiffres. Cependant, il y a deux nuances. Quant à la situation géographique de l'école, on se souvient qu'antérieurement on devait avoir des arrangements ou des ententes là-dessus, parce qu'il y avait aussi dans la dernière

ronde beaucoup d'arrangements locaux et de la négociation locale. Cela faisait un sujet à englober dans le cadre de la négociation. Est-ce qu'on retrouverait cet élément d'entente sur la sitution géographique de l'école en tirant à vide dans les commissions? Vous savez que notre opinion là-dessus, c'est que des négociations locales, on en fera de véritables si on a l'ensemble des sujets, mais on ne tire pas pour une tractation et une négociation, une commission scolaire, à cette date, sur un point bien isolé. Donc, il y avait une sécurité quant aux groupes d'élèves pour leur situation géographique, de parler de consultation.

Sur l'autre aspect, les moyennes s'appliquent à la commission et on dit que "les règles de la formation de groupes d'élèves doivent être telles que la moyenne du nombre d'élèves par groupe, pour l'ensemble des groupes de chaque catégorie d'élèves définie au présent article, ne peut excéder les nombres indiqués à la commission scolaire, à condition qu'il y ait à la commission scolaire au moins dix groupes d'élèves de même catégorie." Pour l'élémentaire, il faudrait, évidemment, qu'il n'y ait pas dix1re année, qu'il n'y ait pas dix 2e année et qu'il n'y ait pas dix 3e année, etc., ce qui fait que cette règle peut s'appliquer moins souvent; elle peut intervenir dans de petites commissions scolaires. Alors, nous sommes régis par une autre règle, une autre protection qui serait la protection due aux petites écoles.

Remarquez que, là-dessus, les groupes d'élèves n'apparaissent pas comme le ratio ou la règle des petites écoles parce que c'était une approche patronale de ne plus vouloir mettre dans la convention des règles de gestion ou des règles budgétaires, donc un ratio école-enseignants. C'est cela que nous avons redéfini. Nous réclamons de l'avoir de façon précise dans les règles budgétaires pour qu'il n'y ait pas de confusion, de tractations et de pèlerinage à Québec -comme on le mentionne dans notre jargon -d'une commission qui doit justifier une demande pour ses petites écoles au cas où il y aurait des problèmes particuliers là-dessus. Quant à l'élémentaire, le maximum de groupes d'élèves, et la moyenne, on peut dire que, soit par le jeu des 10 groupes ou moins - et c'est rare qu'il y a moins de dix 1re année - par cycle, par degré ou par le jeu des petites écoles, il y a une protection là-dessus. Au secteur secondaire, le problème se pose. Nous avons d'autres clauses sur lesquelles nous rabattre: d'abord, le nombre d'enseignants spécialisés pour la matière etc.; évidemment, ce point peut faire sujet de discussions. Quant au primaire, pour aller dans le sens de votre question sur les éléments au primaire, je pense qu'il faut rassurer les gens sur ce sujet.

Concernant l'enfance inadaptée, je pense que nous avons parlé suffisamment d'un décret par rapport à la convention où des garanties étaient données sur la politique d'intégration des élèves et sur l'obligation de la commission d'indiquer si elle pondère l'élève, s'il y a moins d'élèves dans la classe parce que l'élève a un poids relatif plus fort ou bien si elle doit offrir des services additionnels de professionnels. Je pense que nous avons suffisamment débattu cette question et cela doit répondre à votre question.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de L'Acadie.

M. Brouillet: Je m'excuse, j'aurais peut-être une petite... Non, mais enfin.

Le Président (M. Desbiens): Je regrette, vous avez déjà dépassé de deux minutes l'enveloppe réservée.

M. Brouillet: Très bien. Alors, je vous remercie pour les réponses.

Mme Lavoie-Roux: Ma première question: Le transfert au plan provincial du processus d'affectation-mutation permet-il de tenir compte aussi bien des ajustements géographiques qui doivent être faits selon des régions? Ma deuxième question: Est-ce que vous avez fait une simulation, en ce qui a trait à l'enfance inadaptée, du nombre d'enfants qui pourraient être touchés par le décret? Je m'explique. À la page 113, on prévoit qu'il faut au moins dix groupes d'élèves par commission - et je parle toujours de l'enfance inadaptée - pour que la moyenne s'applique; sinon, on va au maximum des enfants difficilement intégrables et le nombre de cinq dans l'ancienne convention pourrait être rendu à sept aujourd'hui. Quel est l'impact de ceci sur l'ensemble des commissions scolaires? Ma troisième question: Quelle est votre réaction aux propositions que la CEQ a faites hier comme possibilité de rouvrir un dialogue ou une négociation pour arriver à une solution finale? Ma quatrième question: Vous avez mentionné qu'au point de vue du renouveau pédagogique, particulièrement au deuxième cycle du secondaire, il y aurait des difficultés d'ajustement si on les appliquait ensemble, même avec les nouveaux ajustements du 9 février et même avec ceux du 18. Pouvez-vous expliciter un peu cela? Est-ce que nous sommes vraiment prêts à procéder à toutes ces étapes ensemble à ce moment au deuxième cycle du secondaire, compte tenu de la préparation des maîtres, compte tenu de la polyvalence et des options que l'on doit maintenir au deuxième cycle du secondaire? Ce sont mes questions, j'attends vos réponses.

Le Président (M. Desbiens): M.

Chagnon. (15 h 45)

M. Chagnon: Alors, M. le Président, concernant les ajustements des règles d'affectation et de mutation par région et toute la question de l'enfance en difficulté d'apprentissage, la question de ante dans la convention collective par rapport à ce qu'on retrouve dans le décret, je demanderais à M. Carette de nous informer. Je prendrai à ma charge les deux dernières questions.

M. Carette: M. le Président, à notre point de vue, le transfert au niveau provincial des négociations en matière d'affectation et de mutation change évidemment les situations qui prévalent dans les milieux. Il y avait peut-être - je ne sais pas - autant de situations différentes qu'il y avait de conventions locales en cette matière. C'est évident que cela change les pratiques qui auront désormais lieu en cette matière; c'est sûr que cela les changera.

Le sens de votre question est-il de savoir si cela va améliorer ou diminuer le niveau d'adéquation entre les besoins des gens...

Mme Lavoie-Roux: ...peut-être s'adapter aux besoins des différents milieux.

M. Carette: Une situation univoque est toujours moins souple qu'une situation appliquée à chacun des milieux.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, cela me suffit.

M. Carette: Sur votre deuxième question, à savoir si nous avons des données relatives à la situation prévalant en enfance inadaptée, si dans les commissions scolaires on pourrait se restreindre à l'application de la règle du maximum par rapport à la règle de la moyenne, compte tenu du groupe de tels enfants au niveau d'une commission scolaire donnée, à ma connaissance, au niveau de la fédération, nous ne disposons pas de ces données. Je serais enclin à croire qu'au niveau secondaire les densités de clientèles - sans aller dans les écarts auxquels on a fait allusion à un moment donné - sont telles qu'il y a généralement plus de dix groupes dans chacune des catégories d'enfants inadaptés en regard desquels on organise des services d'enseignement. Ce n'est peut-être pas le cas au niveau primaire où les populations sont généralement plus petites, mais, à proprement parler, je n'ai pas de données là-dessus.

Mme Lavoie-Roux: Mais au niveau primaire, il pourra y avoir certainement des inconvénients.

M. Carette: C'est possible que pour certaines catégories...

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Carette: ...d'élèves, il n'y ait pas dix groupes par commission.

Le Président (M. Desbiens): Cela va? M. Chagnon.

M. Chagnon: Concernant la troisième question, c'est-à-dire le renouveau pédagogique pour le deuxième cycle du secondaire, vous faisiez allusion au nouveau programme?

Mme Lavoie-Roux: C'est vous-même qui avez mentionné que ce serait difficile d'application, particulièrement au deuxième cycle du secondaire. Alors, je voulais que vous nous expliquiez quelles en étaient les difficultés. Est-ce que c'est relié à la préparation des maîtres? Est-ce que c'est relié aux exigences du décret, coincés que vous êtes entre le décret et les règles budgétaires?

M. Chagnon: II y a bien des choses qui s'en viennent pour le deuxième cycle du secondaire. Il y a toute l'implantation des nouveaux programmes pédagogiques.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils sont prêts?

M. Chagnon: Ils pourraient être en voie d'implantation dans des circonstances plus normales au niveau du climat de travail qu'il y a dans l'ensemble des commissions sauf que, pour le premier cycle du secondaire, en général, à ma connaissance, les commissions scolaires sont prêtes pour 1983-1984 en fonction des demandes...

Mme Lavoie-Roux: Je vous demande pour le deuxième cycle, non pour le premier.

M. Chagnon: Pour le deuxième cycle, le début de l'implantation ne commencera pas en 1983-1984, mais en 1984-1985 et 1985-1986, ce qui fait qu'on a un an de jeu encore. Mais le temps file et, pour nous, en tout cas, il est évidemment nécessaire d'avoir un climat de travail qui soit le plus harmonieux possible pour s'assurer que l'implantation puisse se faire.

Quant à la question que vous avez formulée concernant le dialogue que la Centrale d'enseignement du Québec a suggéré hier dans ses propositions, je pense que nous avons dit assez souvent...

Mme Lavoie-Roux: II y avait deux propositions.

M. Chagnon: Deux propositions. Sur le statu quo...

Mme Lavoie-Roux: II y en avait une qui était le poste d'observateur, qui était la deuxième proposition; la première, c'était du point de vue de la récupération financière, c'est-à-dire que le gouvernement n'aille pas plus loin dans sa récupération financière, compte tenu de la récupération qu'il a déjà faite.

M. Chagnon: Concernant la récupération financière, nous sommes un peu mal placés pour faire l'évaluation de l'ensemble de la question budgétaire et de la question financière du gouvernement, premièrement. Deuxièmement, nous considérons - et nous l'avons dit dans notre document - qu'il devrait y avoir une augmentation progressive de la productivité pour s'aligner sur les standards canadiens.

Sur le plan de la récupération dont vous me parlez, là-dessus, l'augmentation de la productivité implique une augmentation de la tâche. Une augmentation de la tâche, dans le cadre de règlement et dans la proposition des décrets que nous avions, impliquait aussi des économies fortement subtantielles, comme l'a démontré, hier, la Centrale de l'enseignement du Québec. Quant à la question du dialogue et d'un tiers intervenant dans les propositions que nous vous avons soumises ce matin, nous avons dit ceci: Nous avons dit qu'effectivement un tiers intervenant pourrait être extrêmement utile. On a dit aussi que ce tiers intervenant pourrait davantage, à notre avis, peut-être vouer une certaine forme de conciliation pour permettre aux parties de pouvoir en arriver à trouver un compromis. Cela nous apparaîtrait peut-être la façon la mieux articulée pour justement faire en sorte de voir revenir une certaine harmonisation tant dans les relations du travail que pour l'ensemble des relations entre les enseignants et leur milieu. Dans ce cadre, on dit: Un tiers, oui. En plus, on pense qu'il devrait jouer une espèce de rôle de conciliation. Dans ce cadre, la parole est à vous, si vous trouvez que cela peut avoir un certain bon sens, si vous trouvez qu'à partir du moment où on est capable de s'entendre sur ce qu'on veut dire, sur ce que les termes veulent dire, pour vous, mesdames et messieurs de la commission, d'utiliser ce moyen si vous le jugez à propos.

Le Président (M. Desbiens): Pour conclure, je donnerais le droit de parole au député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, juste un mot pour remercier les délégués de la Fédération des commissions scolaires du Québec de leur mémoire et des réponses qu'ils ont apportées à nos questions. Je voudrais seulement que le gouvernement porte une attention toute spéciale à la recommandation suggérant que les parties négociantes devraient se rencontrer dans les meilleurs délais en présence d'un tiers intervenant, comme on le souligne. Je pense que c'est le point essentiel. J'aurais aimé avoir une prise de position plus nette de la fédération là-dessus. Le temps est écoulé, je ne le demande pas maintenant, vous pouvez le faire en sortant, il n'y a pas de problème. Sur les propositions qui ont été faites hier, il serait important qu'il y ait une prise de position claire et explicite de la Fédération des commissions scolaires. Ceci étant dit, je vous remercie encore une fois.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Laurin: De mon côté, je voudrais remercier la Fédération des commissions scolaires pour l'utile contribution qu'elle a apportée aux travaux de cette commission. Avant de vous quitter, j'aimerais aussi faire quelques brèves remarques. Tel que stipulé dans la loi, le ministre de l'Éducation a l'obligation de consulter les commissions scolaires sur un projet de règles budgétaires annuellement. Cette consultation est en cours. Nous avons déjà reçu un très grand nombre de mémoires concernant l'harmonisation et les allocations. Le passé est garant de l'avenir.

Nous avons chaque année, à la suite de l'analyse des réactions des commissions scolaires, des ressources qui permettent à celles-ci de respecter les obligations de la loi, les règlements et leurs propres priorités. À preuve, il est maintenant reconnu que la santé financière des commissions scolaires, qui sont financées à 94% par l'État, est excellente, je les en félicite, puisque la majorité d'entre elles ont déclaré des surplus budgétaires au cours des dernières années.

Par ailleurs, les propos du directeur général de votre fédération, M. Jacques Audy, m'ont étonné. J'aimerais qu'on clarifie cette question, même si ce n'est pas strictement l'objet du mandat de cette commission. Étant donné l'impact des règles budgétaires sur l'organisation des commissions scolaires, je déposerai, cet après-midi, deux documents sur cette question. Je souhaiterais également, comme nous l'avions convenu mercredi soir, inviter MM. Jacques Girard et André Rousseau à venir expliquer, à un moment donné des travaux de la commission, les processus de préparation des règles budgétaires, l'impact de ces règles sur les effectifs enseignants et sur les simulations que l'on peut faire de l'organisation scolaire.

Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. Je remercie les participants.

J'inviterais maintenant la Fédération québécoise des directeurs d'école à prendre place à l'avant, s'il vous plaît. Pendant que cela se fait, je suspends pour quelques secondes.

(Suspension de la séance à 15 h 56)

(Reprise de la séance à 15 h 58)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaîtl

La commission reprend ses travaux avec l'audition de la Fédération québécoise des directeurs d'école. Je demanderais au président, M. de Guire, de présenter les personnes qui l'accompagnent, s'il vous plaît.

Fédération québécoise des directeurs d'école

M. de Guire (Réal): Merci, M. le Président. À mon extrême droite, M. Léonce Gagnon, qui est de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean; M. Marcel Lebel, de la région de Rimouski; immédiatement à ma droite, M. Jacques Codère, de la région de Sherbrooke; à ma gauche immédiate, M. Jean-Guy Gobeil, de la ville de Québec; M. Jean Soumis, de l'agglomération de Montréal, et M. Bertrand Jean, de la région 03 et également président de l'association de cette région.

Je veux d'abord remercier la commission de nous avoir invités à présenter notre point de vue. Nous souhaitons, dès le départ, que l'exercice que nous faisons aujourd'hui et qui se fait depuis mercredi puisse se répéter. Il est dommage que ce genre de rencontre n'ait lieu qu'en temps de crise. Il faudrait que cela se fasse de façon régulière.

Beaucoup de choses ont été dites, M. le Président, depuis mercredi. Nous avons choisi de vous livrer un court exposé afin de permettre de répondre à vos interrogations, les interrogations de la commission.

Je voudrais d'abord vous présenter notre fédération. La Fédération québécoise des directeurs d'école est un organisme qui regroupe 27 associations régionales ou locales qui comptent 3500 directeurs ou directrices, adjoints ou adjointes des écoles primaires et secondaires du Québec.

Notre membership est composé de francophones travaillant dans des commissions scolaires catholiques auxquels s'ajoutent plus d'une cinquantaine de membres anglophones de ces mêmes commissions scolaires.

Le rôle du directeur ou de la directrice. Le directeur ou la directrice d'école occupe dans la structure scolaire une fonction qui le situe à la tête d'un groupe de personnes dont la responsabilité est d'assurer un ensemble de services éducatifs aux jeunes. Depuis la loi 71, il est imputable. Il est à la fois le mandataire de la commission scolaire dans l'application de ses politiques à elle ou de celles du ministère de l'Education. Il est le responsable de la mise en oeuvre d'un projet éducatif et de sa réalisation.

Le directeur ou la directrice d'école dirige son école et anime le personnel avec lequel il travaille. C'est d'ailleurs avec beaucoup d'appréhension que chacun d'entre nous considère la tâche d'animation qui le confrontera au sortir du conflit actuel.

Le 10 février 1983 nous étions présents à la préparation des 14 aménagements proposés par le ministère de l'Éducation et les fédérations de commissions scolaires aux enseignants, le 10 février dernier. Nous avons appuyé ces améliorations aux décrets pour deux raisons: d'abord parce qu'elles permettaient la reprise du dialogue entre les deux parties. Et effectivement, M. le Président, il y a eu trois jours de discussion.

Deuxièmement, elles permettaient d'espérer un retour harmonieux dans les écoles. Tout ça c'était évidemment avant la loi 111. On entrevoyait, à ce moment, un autre scénario tout à fait différent de celui qui est arrivé. Cependant le litige demeure.

Notre présence à la commission parlementaire. Notre fédération, en plus d'exprimer ses préoccupations dans le conflit actuel, désire expliciter les demandes qu'elle avait acheminées au ministère de l'Éducation, en mai 1981, alors que le ministère préparait les textes de base pour la négociation future, celle que nous vivons.

Nos demandes avaient été formulées à la suite d'une consultation, d'une vaste consultation à laquelle plus de 85% de nos membres avaient participé. C'est donc dire l'importance de cette question pour les directeurs d'école.

Nos principales demandes de mai 1981. Nous avions demandé l'élimination des contraintes relatives à la division de la tâche éducative entre le temps d'enseignement et le temps consacré aux activités étudiantes, à l'encadrement, à la récupération et à la surveillance.

Cette contrainte limitait la participation des enseignants et enseignantes à des maximums pour chacune des catégories que je viens de mentionner.

Ce minutage nous empêchait de donner à chaque enseignant la tâche convenant le mieux à ses aptitudes. En somme, ce que nous demandions alors c'est une tâche éducative globale.

Nous avions demandé que des précisions soient apportées quant au temps de disponibilité - le fameux 27 heures - des enseignants à l'école. Pourquoi? Afin de pouvoir répondre à certains besoins tels les rencontres individuelles de parents, les réunions pédagogiques, les rencontres des

divers comités surtout les comités avec les élèves, les rencontres d'élèves individuelles sans avoir toujours à quémander à chaque fois la présence des enseignants. Nous avions également insisté pour que le critère capacité soit considéré dans l'affectation et dans la répartition des fonctions. Ceci afin d'éviter que l'ancienneté d'un enseignant soit le critère prépondérant dans l'attribution des responsabilités.

Nous avons constaté que ces trois principales demandes de notre fédération se retrouvent dans le décret et permettent un meilleur service à l'élève. L'orientation de notre fédération a toujours été la qualité des apprentissages et la qualité du service rendu à l'élève dans chacune des écoles du Québec. Pour nous, cela veut dire une éducation complète de l'élève basée sur la qualité de la relation maître-élèves, relation humaine qui est au centre de l'acte éducatif; éducation complète basée sur un ensemble d'apprentissage réalisé dans les cours, dans des contacts de relation d'êtres, dans le vécu de différentes activités parascolaires qu'on retrouve aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'horaire de l'élève. Les directeurs et directrices d'école se sont engagés dans cette voie avec leur personnel, depuis plusieurs années.

Des choix et des inquiétudes. L'augmentation de la tâche proprement dite découle d'une décision politique et de contraintes budgétaires de l'Etat et non de notre demande d'une tâche globale. Un effort dit de productivité a été demandé aux enseignants pour répondre à ces contraintes. Nous le constatons. Le décret plus les ajouts du 10 février - parce que pour nous les ajouts du 10 février font partie intégrante du décret - permettent une organisation scolaire adéquate quant à la distribution des fonctions et des responsabilités. Mais cela exige des changements d'attitude de l'ensemble des personnels de l'école. Car il faudra possiblement en arriver à une plus grande polyvalence des enseignants et à une modification de l'organisation scolaire traditionnelle. Si on refuse d'envisager de tels changements, il y aura inévitablement augmentation du nombre d'élèves et du nombre de groupes par enseignant. Augmentation qui risquera de nuire à la qualité de la relation maître-élèves. On peut faire le choix d'enseigner une matière à six groupes d'élèves pour en rencontrer 180 et on peut aussi enseigner deux matières à trois groupes avec 90 élèves. Ce sont des choix. Un changement d'attitude nécessite une prise de conscience du problème, une investigation des différentes solutions possibles et une adhésion à l'orientation retenue. Cela demande du temps et un climat favorable.

Nous souhaitons, en conclusion, que la qualité des services de l'école permette à l'élève de faire tous les apprentissages qui lui assureront une formation complète. Cette qualité suppose un accord sur les conditions de travail qui se traduira par la qualité de la relation maître-élèves et la mise à la disposition de l'école des ressources humaines auxquelles elle a droit, en ajoutant évidemment l'autonomie nécessaire dont elle a besoin pour réaliser dans son projet d'école une véritable relation maître-élèves. Les normes budgétaires doivent posséder l'ampleur et la souplesse requises au maintien, tout au moins, de la qualité actuelle des services rendus aux jeunes du Québec.

Pour la Fédération québécoise des directeurs d'école, il est essentiel que le ministère de l'Éducation, les fédérations de commissions scolaires et les syndicats conviennent de ce que seront les conditions de travail des enseignants et des enseignantes. Il faut absolument qu'une fois pour toutes, notre régime de négociation dans le secteur public soit changé. Il est inadmissible qu'à tous les trois ans, l'école publique, au moment même où elle commence à bien vivre ou, si vous voulez, à s'adopter à la convention en cours, redevienne de nouveau l'otage de cette lutte de pouvoir que l'on connaît depuis plus de quinze ans. Il est temps de mettre à l'oeuvre des spécialistes en relations du travail pour préparer une nouvelle formule. Cela a assez duré, M. le Président. Je voudrais ajouter à cela qu'au mois de janvier, à la fin de janvier dernier, on pouvait lire dans les journaux de Montréal qu'il y avait eu une augmentation de 10% d'inscriptions au secteur privé pour l'année prochaine.

Cela a assez duré. Nous voudrions répéter que ce que nous souhaitons, nous, c'est que la qualité des services de l'école permette à l'élève de faire tous les apprentissages qui lui assureront une formation complète. Et je vous remercie.

Le Président (M. Desbiens): J'ai compris que, M. le député d'Argenteuil, vous aviez un mot à dire. Ce serait M. le ministre, d'abord. D'accord.

M. Laurin: M. le Président, je voudrais d'abord remercier le président de la fédération pour son mémoire qui, bien que bref, est chargé de signification. J'aurais deux questions à lui poser en rapport avec les pages 7 et 9 de son document. En page 9, vous dites: "Le décret permet une organisation scolaire adéquate quant à la distribution des fonctions et des responsabilités." Depuis une semaine ou deux, nous entendons beaucoup dire, dans certains milieux, que les décrets sont inapplicables ou sont invivables, même avec le nouveau cadre des règlements que nous avons présenté le 10 février et qui permet un étalement de la tâche sur les trois prochaines années. Étant

donné que vous, directeurs d'école, à titre de responsables directs de la gestion quotidienne de l'école, jouez un rôle majeur dans l'école, pour ne pas dire un rôle pivot, est-ce qu'on peut vous demander votre opinion, non pas sur les diverses simulations d'organisation qui circulent, mais sur la praticabilité, la faisabilité de l'application de ces décrets dans le cadre du nouveau régime pédagogique afin d'assurer, comme vous le dites un peu plus tard, la qualité de l'enseignement, la qualité des apprentissages?

Mon autre question porte sur un autre sujet. J'attendrai donc votre réponse à cet égard.

Le Président (M. Desbiens): M. de Guire. (16 h 15)

M. de Guire: M. le Président, en réponse à cette question, une première réflexion nous vient à l'esprit. Il est évident que dans l'ensemble des écoles du Québec, à la suite de la parution des décrets et à la suite de la consultation du ministère de l'Éducation, chacune des directrices et chacun des directeurs d'école a procédé à un exercice. Ils ont évidemment procédé à cet exercice pour la première fois et je pense qu'il faut le souligner. Cela explique peut-être la panique que nous avons vécue chez nous. C'était la première fois que nous faisions cet exercice à l'intérieur des écoles.

Jusqu'à cette année, nous avions, dans les conventions, des ratios qui, mathématiquement, se calculaient facilement au niveau de la commission. Donc, à partir de ce moment-là, il n'y a pas d'exercices qui ont été faits dans les écoles. On a demandé aux directrices et aux directeurs d'école de procéder à un exercice avec ce qu'ils connaissent des règles budgétaires, avec les informations qui venaient à la fois des décrets, qui venaient à la fois des nouveaux aménagements qui ont été ajoutés par la suite et dont ils n'ont pas du tout été informés au moment où ils ont fait l'exercice.

On est quand même arrivé à la conclusion que deux et deux, cela fait quatre. C'est évidemment faisable partout, mathématiquement, sauf que comme je le disais tantôt, des changements, c'est difficile. On a tous, humainement parlant, une résistance aux changements, surtout quand on a des données nouvelles ou des données qui n'existent pas sur notre table, mais qui existent sur d'autres tables, celle de la commission scolaire, par exemple. Je parle surtout des règles budgétaires. Donc, avec les données que les gens avaient, ils ont fait un exercice qui a été, dans certains milieux, beaucoup plus pénible que dans d'autres milieux, toujours en relation avec l'information complète que les gens avaient.

Je vais demander à mon collègue, Jean

Soumis, qui dirige une grosse polyvalente de la région de Montréal, la polyvalente André-Laurendeau - je pense que les gens ont déjà entendu parler des problèmes de cette polyvalente, ils connaissent l'endroit, c'est sûrement une polyvalente typique comme il y en a eu d'autres de citées - de répondre. Alors, Jean Soumis.

M. Soumis (Jean): M. le Président, j'insisterai au départ dans le même sens que M. de Guire pour préciser que nous avons, parmi toutes les écoles, différents modèles, différents types d'organisation scolaire et des clientèles différentes, ce qui m'amène à parler des conditions préalables à mettre en place pour la réalisation d'un horaire maître ou d'une opération de grille horaire. Dans la première condition, on retrouve le paramètre. Je pense que nous avons entendu parler à plusieurs reprises de ce fameux paramètre qui est basé sur la moyenne d'élèves par groupe avec un rapport tâches-moyens au niveau des enseignants, auquel on a ajouté les ajustements nécessaires. Là, je mets un point d'interrogation, je pense que les ajustements nécessaires à être ajoutés pourront être précisés par le ministère de l'Éducation mais, en gros, je parle des ajustements nécessaires pour les petites écoles, pour l'enfance en difficulté et pour le secteur professionnel, professionnel court et professionnel long. Les paramètres sont une photo de l'école ou de la commission d'il y a peut-être trois ans. À la suite de cette photo, il y a un paramètre qui est donné à la commission scolaire et qui est distribué par la suite dans les écoles.

Nous avons ici un premier souhait, c'est qu'on puisse aller prendre une photo un peu plus jeune et non pas à partir de la commission scolaire, mais à partir de l'école. C'est par l'addition du fonctionnement de l'école, des besoins existants dans l'enseignement qu'on pourra arriver, à notre avis, à donner un paramètre à la commission scolaire. Ici, je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion pour faire une petite remarque aux commissions scolaires pour leur dire que la photo partant des écoles les empêcherait peut-être de garder pour elles certains négatifs dans leur poche et de ne pas nous donner tous les professeurs auxquels nous avons droit dans chacune des écoles. C'est là la première partie d'information. Je pense que lors de la fabrication d'une simulation d'horaire, il est important que nous ayons l'information du nombre de professeurs qui nous reviennent, que nous ayons l'information sur ces paramètres. Je pense que, dans la province, plusieurs commissions scolaires n'ont pas encore nécessairement fait connaître tout le paramètre, n'ont pas fait l'addition des photos des écoles, mais ont pris la photo de la commission scolaire et l'ont distribuée par

la suite dans les écoles. Donc le premier point - je le redis - c'est que l'information nous manque pour le moment. C'est ce qui fait que plusieurs directeurs d'école ont fait des essais de simulation à partir des données que nous connaissons ou que nous ne connaissons pas. Ce qui fait que nous avons des différences assez marquées parfois si la photo de l'école n'est pas prise aujourd'hui.

Maintenant, à partir du décret, les simulations que nous avons pu faire, que nous avons pu vérifier d'une façon générale, compte tenu de l'auqmentation de tâche d'environ 15%, compte tenu des coupures... Les chiffres que j'ai entendus sont d'environ 14,8%, ce qui peut donner dans une école d'enseignement général une coupure de 18% et dans une école davantage spécialisée, tant au secteur professionnel qu'en adaptation scolaire, une coupure qui pourrait être inférieure à 14,8%. Je ne pense pas qu'il nous appartienne de faire la preuve ou de vérifier cette conformité du paramètre. Je pense que - d'ailleurs, M. le ministre de l'Éducation l'a annoncé tout à l'heure - les deux sous-ministres déposeront leur expertise sur ce sujet.

Pour nous, il est important de demander aux commissions scolaires et au ministère, dans un premier temps, de valider leur expertise, de valider ce paramètre afin que nous puissions avoir ce qu'il nous faut pour travailler et pour donner une expertise juste.

Maintenant, il ne faut pas croire que l'adéquation mathématique existant entre le décret et une simulation d'horaire est nécessairement justifiée sur le plan pédagogique. Je pense que nous avons besoin d'une marge de manoeuvre pour pouvoir non pas fabriquer un horaire, mais faire vivre un projet éducatif. Je pense que c'est une chose, une grille horaire et une autre chose de faire vivre cette école avec des enseignants et des étudiants.

Dans ce sens, nous sommes très heureux d'avoir vu des aménagements - on les appelle ainsi dans notre langage - en P-1 et en P-2, donc en 1re année d'application et en 2e année, qui nous apparaissent nous donner effectivement cette marge de manoeuvre, dans un premier temps. Est-ce que les apprentissages que nous ferons dans ces deux années, tant au niveau des enseignants dans la recherche d'un horaire ou d'une méthode ou d'un modèle pour faire vivre pédagogiquement l'école, nous amèneront à appliquer, ou en P-3, appliquer le décret avec la marge de manoeuvre suffisante et non pas strictement l'adéquation mathématique? Il est évident qu'au niveau d'une école, quand on a du secteur professionnel, qu'on a de l'adaptation, qu'on a de l'enseignement général, il y a des fractions de tâche qui sont parfois des pertes et qui, parfois, se superposent bien.

Bien sûr que cette tâche - je parle ici de grille horaire et je ne parle pas de l'augmentation du nombre de groupes due à l'adéquation mathématique de l'augmentation de tâche - bien sûr que l'augmentation de tâche donnera pour les enseignants une augmentation de groupes. Nous demandons l'information nécessaire pour gérer adéquatement. Nous demandons des partenaires dans la photo que les commissions scolaires et que le ministère prennent du milieu et nous souhaiterions, pour qu'il y ait plus de cohérence, qu'on parte de la photo de l'école pour en faire une somme.

Actuellement, il est pour nous difficile de faire des expertises ou des exercices sans ces conditions préalables de réalisation. Merci M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, vous avez beaucoup insisté pour que le critère capacité soit considéré dans la répartition des fonctions afin d'éviter, comme vous le dites que l'ancienneté d'un enseignant soit le caractère prépondérant dans l'attribution des responsabilités.

Mais on a entendu quelques témoignages à l'effet que ce nouvel aménagement, en regard de la mutation et de l'affectation, ouvrirait la porte toute grande à l'arbitraire de la part des directeurs d'école en particulier. J'aimerais vous demander ce que vous pensez de ce risque ou de cette affirmation.

Le Président (M. Desbiens): M. de Guire.

M. de Guire: Si vous voulez, je vais donner la parole à mon collègue, Jean-Guy Gobeil, pour répondre à cette question.

Le Président (M. Desbiens): M. Gobeil.

M. Gobeil (Jean-Guy): M. le Président et M. le ministre, vous faites référence au droit de gérance par rapport à l'aspect affectation relié non plus uniquement à l'ancienneté mais aussi faisant jouer l'aspect capacité.

Dans un premier temps, j'aurais le goût de vous entretenir de l'aspect du droit de gérance. Le droit de gérance, on l'associe bien souvent à une forme de subjectivité d'antant. Et lorsqu'on considère un droit de gérance tel qu'il s'annonce, avec des règles bien définies, j'ai l'impression qu'il s'agit d'un droit de gérance où les décisions qui vont en découler seront certainement objectives ou, du moins, la personne responsable qui prendra les décisions devra en répondre.

En ce qui a trait au critère de capacité, c'est quand même un concept que notre fédération véhicule depuis quelques années. Je vous apporte un exemple où, dans certaines commissions scolaires, dû à la dénatalité, il y avait des mises en disponibilité dans différents champs académiques et, par le seul fait de l'ancienneté - d'ailleurs ils avaient le droit de le faire d'après les règles du jeu qu'il y avait à ce moment-là - certains enseignants qui avaient une expertise sur l'aspect académique, venaient chercher des postes dans le secteur du champ 1 de l'adaptation.

Vous avez un exemple concret où bien souvent le champ 1 de l'adaptation a été envahi par des gens qui avaient une compétence académique, qui avaient une forte ancienneté et délogeaient des enseignants qui n'avaient pas le privilège d'avoir assez d'ancienneté mais qui, par contre, avaient été formés et avaient une expertise sur les cinq dernières ou dix dernières années en adaptation scolaire. C'est une illustration des phénomènes que l'on observait dans nos écoles. On pourrait trouver d'autres exemples d'un champ d'enseignement à l'autre. (16 h 30)

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, c'est terminé.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, je ferai seulement une très brève remarque pour ensuite passer la parole à mon collègue de Saint-Henri pour des raisons que j'indiquerai tout de suite. Je voudrais tout d'abord dire à M. de Guire et à l'équipe qui l'accompagne que je suis très heureux de le retrouver lui-même et de faire la connaissance de ses collègues.

Vous savez que dans le document que nous avons publié l'automne dernier sur le projet de réforme scolaire, nous accordions une importance capitale au directeur dans le fonctionnement de l'école, sans souscrire toutefois au type de statut hybride, à notre sens, que voudrait lui donner le livre blanc du ministre de l'Éducation. Nous considérons qu'il est vraiment un pivot et nous voulons aussi qu'il se situe dans un système, qu'il ne soit pas le directeur d'une corporation séparée mais qu'il soit le directeur d'une école dans un système d'école relevant de commissaires élus démocratiquement. Cela n'a pas de rapport avec le sujet d'aujourd'hui. Je le rappelle brièvement à des fins d'information.

Vous avez mentionné dans votre mémoire trois points sur lesquels vous avez insisté: d'abord, le temps de disponibilité de l'enseignant à l'école; deuxièmement, le décloisonnement de la tâche; troisièmement, l'insertion du critère de capacité. Je dois vous dire que dans les propositions de règlement que nous rendions publiques du côté de l'Opposition dès la fin de novembre, nous avions inclus ces trois propositions. De ce côté, par conséquent, il n'y a pas beaucoup de débat entre nous, cela va très bien. Sur le reste, je constate que vous ne prenez pas position. Vous dites que vous n'avez pas eu toute l'instrumentation voulue pour faire toutes les vérifications. Vous insistez beaucoup sur la nécessité d'une implication de tous les agents dans des changements et sur la nécessité d'une acceptation consciente de certains changements en profondeur, si on veut que certaines choses s'appliquent. Là, il y a matière à discussion avec vous.

Je ne vais pas plus loin là-dessus, sauf pour vous dire que nous avons grand plaisir de compter dans la délégation de l'Opposition à cette commission deux députés qui sont d'anciens directeurs d'école: M. Roma Hains, le député de Saint-Henri, et M. William Cusano, le député de Viau. Je pense qu'il est tout à fait normal que nous leur laissions le loisir de vous interroger pendant le temps qui nous est imparti. M. Hains va commencer.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le Président, je ne ferai vraiment pas de préambule, parce que je trouve qu'on déambule très lentement de ce temps-là. Chers confrères, vous nous aidez vraiment à aller plus vite parce que vous nous avez offert un mémoire qui est très court, mais en même temps très chargé et très bien fouillé.

Je vais donc aller assez rapidement pour laisser la place aux autres confrères. Ma première question est la suivante: J'ai d'abord une petite considération. On ne donne pas ce qu'on n'a pas. Souvent, j'ai répété, quand j'étais directeur, qu'un professeur triste était souvent un triste professeur, incapable de donner du succès à ses élèves. Par le fait même, les étudiants se ferment non seulement au travail accepté joyeusement, mais au travail tout court. D'ailleurs, vous dites vous-même, si je ne m'abuse, à la page 9, au bas de votre mémoire, que cela demande du temps et un climat favorable.

Dans les circonstances troublées que nous connaissons actuellement, comment cela se déroule-t-il dans nos écoles? C'est encore un petit reste de curiosité après la rentrée forcée. Comment cela va-t-il dans nos écoles actuellement?

Le Président (M. Desbiens): M. de Guire.

M. de Guire: M. le Président, comment cela va dans nos écoles? C'est vrai qu'on ne

donne pas ce qu'on n'a pas. Quand on n'est pas de bonne humeur, c'est difficile de transmettre la joie autour de soi. C'est vrai que pour avoir travaillé toute ma vie avec des enseignants, pour l'avoir été, je pense que le climat actuel n'aide pas du tout à donner dans nos classes ce qui doit être donné aux enfants, surtout à être attentifs à leurs besoins, parce qu'il est facile de donner des cours, il est facile de transmettre de la matière mais il est plus difficile d'être attentifs. Le climat est plus qu'important. Cependant je pense qu'il y a des décisions qui sont prises qui ne relèvent pas de nous.

Vous savez, le directeur d'école, on parlait tantôt qu'il était le pivot. J'écoutais M. le député d'Argenteuil nous dire combien il était d'accord qu'il voulait que notre rôle soit reconnu. Ce n'est pas facile de reconnaître le rôle d'un directeur d'école. C'est un petit peu comme quelqu'un qui est entre l'arbre et l'écorce. C'est un peu quelqu'un qui est sur un bord et qui est aussi de l'autre bord. Ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile du tout. Cependant une fois que les décisions sont prises nous les assumons. En attendant que les décisions se prennent nous donnons notre point de vue. Mais après nous devrons...

C'est un peu pour ça qu'on disait, en bas de la page 9, que pour nous, le plus difficile, dans le fond, qui reste à faire, c'est un changement d'attitude. Je pense qu'il faut donner le temps parce que cela demande du temps. Cela demande aussi un climat. C'est bien évident qu'actuellement le climat n'est peut-être pas le meilleur, mais il faut qu'on finisse par régler ce problème. Celui-là mais pas seulement celui-là, comme je le disais tantôt.

Cela me paraît fondamental qu'une fois pour toutes - puis ça devrait être, d'ailleurs, la seule décision ou la seule recommandation et ce serait déjà énorme - on change tout ce régime de relations du travail. Si vous voulez pour parler beaucoup plus davantage du climat, d'ingéniosité de ce qui vient ou de ce qui doit être actuellement, je vais demander à mon collègue Jacques Codère d'enchaîner ou peut-être de répondre davantage à cette question.

Le Président (M. Jolivet): M. Codère.

M. Codère (Jacques): C'est sûr qu'avec la grève que nous avons connue où des enseignants se présentaient ont été interceptés aux lignes de piquetage, où le retour finalement s'est fait et avec quel tiraillement entre ceux qui avaient voulu pénétrer dans l'école, les autres qui s'y opposaient, le climat dans les écoles, en tout cas ce que j'en sais, n'est pas des plus roses.

Quand on parle en plus des sacrifices -c'est peut-être beaucoup dire - de la tâche qu'on veut ajouter à celle qui est déjà dans la convention actuelle; quand on parle de régime pédagogique nouveau à implanter ou pour des matières qu'on va ajouter du temps, pour d'autres on va en soustraire, de nouveaux programmes qu'on veut mettre en application où les enseignants comptent sur des instruments, des outils pédagogiques qui ne sont pas encore tous connus, et quand on y ajoute la question de la réforme scolaire, nous vivons dans l'école beaucoup d'insécurité, et également beaucoup d'insatisfaction.

Si la décision qui a été prise d'augmenter la productivité chez les enseignants n'est pas acceptée par eux, je pense qu'il sera d'autant plus difficile de faire changer, et accepter les changements de modèles qui, techniquement, peuvent peut-être permettre que des enseignants aient moins de groupes d'étudiants, qu'ils aient moins d'élèves. Cela peut peut-être se réaliser techniquement. Il reste, je pense, à faire baisser, enlever l'insécurité et l'insatisfaction.

On a fait depuis une dizaine d'années tout au moins, dans les centres universitaires la formation des enseignants en les spécialisant. Ils sont devenus licenciés en français, en mathématique, en sciences. Chacun, en ce qui concerne le secondaire tout au moins, est devenu spécialiste dans une discipline.

Aujourd'hui, on dit: bon à l'occasion d'une crise, à l'occasion du décret établissant les conditions de travail, il faudrait changer les modèles. Je pense qu'on en demande beaucoup et tout à la fois. Je me dis - et on le dit d'ailleurs dans notre mémoire -qu'il faut prendre le temps de faire les choses. Il faut prendre le temps de changer des attitudes et je pense qu'en premier lieu il faudrait qu'entre enseignants et partie patronale il y ait - je ne sais plus si je dois dire le terme - une convention de quelque chose. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: II est sûr qu'avec ce que nous avons comme décret et comme aménagements du 10 février, la première année et, la deuxième année devraient peut-être nous permettre d'envisager une troisième année. Je pense qu'il y a peut-être une question d'ingéniosité pour laquelle je voudrais demander à mon collègue, M. Jean-Guy Gobeil de développer.

Le Président (M. Jolivet): M. Gobeil.

M. Gobeil: M. le Président, sans mettre mes lunettes roses, pour peu que le climat revienne au meilleur dans le milieu scolaire et que les règles du jeu soient de façon réciproque acceptées, je peux vous assurer que, dans l'ensemble du milieu scolaire, avec

l'engagement professionnel qu'en général on observe chez nos enseignants, l'école québécoise a quand même prouvé qu'elle était ingénieuse et créatrice. D'ailleurs, lorsqu'on sort du Québec, cela nous fait plaisir de le constater. J'insiste sur ce point parce que c'est un volet important de notre mémoire que le temps non seulement arrange les choses, mais qu'il est important que les choix de modèles de l'école québécoise des prochaines années obtiennent une adhésion de l'ensemble des intervenants d'un milieu scolaire et qu'ils soient appropriés au profit de nos jeunes Québécois

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Je remarque que vous insistez tous les deux pour nous dire que les règles du jeu - si on veut vraiment le bonheur, la paix, la tranquillité - soient acceptées réciproquement. Je me demande si, pour vous, cette qualité de vie scolaire ne vaut pas plusieurs millions. La deuxième question que je me pose est celle-ci - M. le ministre m'a coupé, mais je reviens quand même sur la question pour avoir votre opinion, M. le Président: le critère capacité est vraiment mis en doute par la Centrale de l'enseignement du Québec. C'est un retour, disent-ils, aux décrets de 1972. Les commissions scolaires exigent cette clause capacité; moi-même, je pense que je ne l'aurais peut-être pas crié trop fort dans le bon vieux temps; vous aussi vous l'exigez. Pensez-vous que ce critère, dans l'atmosphère actuelle, favorisera la bonne entente ou de la jalousie? Est-ce que cela favorisera le "bumping" ou la stabilité du personnel? Ou encore - allons-y franchement parce que je sais qu'on est capable de se parler - est-ce que cela favorisera - pas nous autres parce qu'on a toujours été bons et qu'on reste toujours bons - le favoritisme et la vraie indépendance de choix?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: Je pense que, dans le critère de capacité, il est bien évident qu'il y a une différence marquée entre la tradition qui dit que c'est l'ancienneté qui attribue les tâches. Entre l'ancienneté pure et tenir compte d'un critère de capacité, à un moment donné, je pense qu'il y a une marge de manoeuvre. Deuxièmement, on semble oublier qu'en 1983 ce n'est plus possible d'administrer une école où on connaît la crainte. Ce n'est pas vrai. Demain matin, on va avoir les pancartes à la porte si jamais le directeur d'école fait cela. D'ailleurs, on a déjà vu des exemples au Québec dans ce sens-là. Cela ne se peut pas. (16 h 45)

Deuxièmement, je dois ajouter que pour moi, une école ne peut plus s'administrer sans un minimum de consultation et de participation. Lorsque je dis un minimum, je veux dire que cela ne peut pas se faire s'il n'y en a pas. Une fois qu'on a consulté -parce qu'il faut arrêter de jouer avec cela -et qu'on a pris une décision contraire, il faut être capable de la justifier sinon on lève les pattes. Il faut arrêter de charrier avec cela. Le critère de capacité, ce n'est pas d'attribuer aux directeurs d'école la haute main sur un favoritisme, cela ne se peut pas, À mon sens, je ne peux pas comprendre, si j'ai, dans un secteur donné, dans un champ donné, un professeur qui enseigne, dans la construction, comment établir des charpentes de maisons, et qui devient en disponibilité parce qu'on n'en a plus besoin, qu'il n'y a plus d'élèves dans cela, mais parce qu'il est dans le même champ et que j'ai besoin d'un professeur de finition de meubles ou d'ébénisterie, qu'automatiquement il est bon.

Si cela est vrai, moi je dis: le critère de capacité, enlevons cela et revenons à l'ancienneté. Il n'y a personne qui est capable d'accepter automatiquement que parce que je suis le plus ancien, je suis en même temps le plus compétent, premièrement. Deuxièmement, je vous répète qu'en 1983 un directeur d'école qui ferait cela ne resterait pas deux jours à la direction de son école. Troisièmement, une école, indépendamment de ce qu'on peut dire et de ce qu'on peut faire, ne peut plus s'administrer sans une participation, sans une consultation de l'ensemble de l'équipe-école. Ce n'est plus possible. Ce n'est pas vrai. La participation est entrée dans les moeurs au Québec, autant dans les écoles qu'ailleurs.

Le Président (M. Jolivet): Cela va, M. le député?

M. Hains: Oui, cela va très bien, d'ailleurs. Ma prochaine question était un peu dans ce sens parce que dans leurs tâches, autrefois surtout, les professeurs jouissaient d'une certaine autonomie et d'une force aussi de consultation assez grande que, même, on allait jusqu'à la cogestion. Cela s'est fait dans quelques écoles. Là, avec le décret, on se plaint que les vrais professionnels de l'enseignement, les professeurs vont devenir encore une fois de simples exécutants des diktats du ministre, par vos voix, mes chers confrères de la direction d'école. Qu'est-ce que vous pensez de ce que nous disent les syndicats là-dessus?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: Si c'est vrai pour les enseignants, je vais être obligé de dire que cela va être aussi vrai pour le directeur d'école. Donc, si cette affirmation est vraie sur toute la ligne, il n'y a plus de

participation possible, il n'y a plus d'ingéniosité possible, cela ne se peut pas. Je ne crois pas que, parce qu'il y a des régimes pédagogiques ou parce qu'il y a des décrets, on va enlever l'ingéniosité à l'intérieur d'une classe, on va enlever la participation à l'intérieur d'une école, on va enlever l'élaboration d'un projet éducatif propre à une école, je ne crois pas.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: On commence déjà à me censurer à ma droite ici.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne fais qu'appliquer le règlement.

M. Hains: Les professeurs, pour régler leurs différents problèmes, demandent même actuellement un certain statu quo pour la reconduction des règles actuelles d'affectation, de mutation, de distribution des tâches. Ils affirment que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes avec l'ancienne loi. Pourquoi, allez-vous me dire alors, tout ce remue-ménage dans la tâche des professeurs? Vous nous dites aussi, je crois, en haut d'une page, que ce n'est vraiment pas vous autres qui avez demandé l'augmentation de la tâche. Je ne l'ai pas rêvé? C'est cela? "L'augmentation de la tâche proprement dite découle d'une décision politique et de contraintes budgétaires de l'État et non de notre demande d'une tâche globale." Je pose la question: Est-ce que cela aurait été mieux, surtout dans les circonstances actuelles, avec tous les régimes pédagogiques qui s'en viennent et tout cela, de prendre encore trois ans de répit et de rester tranquille? Il y a tellement de choses déjà en vue sans aller, par-dessus le marché, faire un remue-ménage complet dans la maison. Qu'est-ce que vous en pensez, M. le président?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: C'est une question à laquelle, en tout cas, pour au moins une partie, il m'est très difficile de répondre dans le sens suivant. L'augmentation de la tâche ou, si vous préférez, ce que j'appelle, dans mon langage, la capacité de payer des Québécois, je pense que cela appartient à vous, à l'Assemblée nationale, d'en décider. Cependant, j'insiste pour dire que quand nous parlons de tâche globale, on parle d'une tâche qui va permettre un meilleur service à l'élève, une meilleure relation entre l'élève et le maître.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Roberval.

M. Hains: J'ai fini?

Le Président (M. Jolivet): Oui, parce que je sais très bien que votre collègue, le député de Viau, a aussi des questions à poser. M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'avoir la possibilité d'interroger la Fédération québécoise des directeurs d'école, d'autant plus que les directeurs sont considérés comme des gens qui sont au coeur de l'action éducative et de l'organisation scolaire. Ils constituent la charnière essentielle au bon fonctionnement de chacune des écoles. Aussi, je me limiterai à des questions très simples pour permettre aux gens qui nous écoutent et qui veulent avoir une meilleure compréhension de ce qu'il y a dans les décrets du monde de l'enseignement de comprendre ce dont il s'agit. J'apprécierais des réponses brèves également et le plus simple possible pour l'éclairage des membres de la commission qui ne sont pas tous des experts, évidemment.

Ma première question est la suivante. Vous avez deux demandes; vous dites que le décret a respecté deux demandes que la Fédération québécoise des directeurs d'école formulait. Premièrement, vous avez dit que le minutage vous empêchait - c'est à peu près textuellement - de donner une tâche convenant mieux à la fonction éducative. Si je comprends bien - j'aimerais que vous me corrigiez si je fais erreur - dans l'ancienne convention collective, les temps étaient minutés, les temps de surveillance, les temps d'encadrement, les temps d'enseignement, bref, l'ensemble des tâches était minuté et, dans le décret, actuellement, il y aurait plus de souplesse. Est-ce exact? Est-ce bien ce que vous voulez dire par cette affirmation?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: Je vais demander à mon collègue, Marcel Lebel, de répondre à cette question.

M. Lebel (Marcel): M. le Président, sur la tâche globale, nous avons demandé ce processus d'intervention pédagogique pour une raison bien simple, c'est pour permettre d'abord à des enseignants d'aller au fond de leurs capacités d'actualiser. Dans les écoles, il y a des enseignants qui sont très bien préparés pour l'acte d'apprentissage de connaissances. Il y en a d'autres qui ont, en sus de leur qualité de travailleur de l'enseignement pour l'acte d'apprentissage, des talents d'animateur. Il y en a d'autres qui, en regard de l'appui individuel à des jeunes en difficulté, peuvent les prendre en charge individuellement ou en petits groupes pour faire de la récupération scolaire. Tous ces processus éducatifs, chaque enseignant

devait, antérieurement, en faire 100 minutes. Là, dans le décret, on peut dire à un enseignant après une consultation d'un projet éducatif, qu'il va donner toute sa tâche à l'enseignement. Il y en a d'autres qui vont donner 75% de leur temps à l'enseignement, 25% en récupération scolaire ou en encadrement des élèves. Ce sera aussi pour le bénéfice des enseignants, parce qu'il y a aussi des enseignants qui nous ont dit et qui continuent à dire qu'ils peuvent facilement donner de l'enseignement, donner une tâche éducative de cette nature. Il y en a pour qui cela peut être passager. Il n'y a rien qui empêche un enseignant qui, pendant deux ans, décide de vouloir faire uniquement de l'enseignement si c'est possible et qui, pendant ce temps, se prépare à d'autres types de gestes éducatifs aussi importants. Pour nous, les directeurs d'école, toutes les tâches éducatives sont foncièrement importantes à tous les niveaux. On le dit. On le vit et ce sont aussi les enseignants qui en retrouvent un très haut niveau de satisfaction professionnelle et le résultat ou l'impact sur l'élève est aussi directement proportionnel. C'est ce que le décret permet. C'est ce qu'on demandait. Cela fait partie, dans mon langage personnel, du virage pédagogique. En 1976, on a intégré l'universalité du B, C, D, dans le langage des conventions. Aujourd'hui, on a maintenu dans les règles budgétaires dont on connaît une partie, ce volume de temps disponible pour les écoles et c'est dans cet esprit que nous sommes satisfaits de la tâche globale.

M. Gauthier: La deuxième...

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant! M. de Guire veut ajouter quelque chose, je pense.

M. de Guire: Simplement un petit complément. On voudrait éviter aussi de ne plus être capable de faire face à des situations d'urgence. La classe vient de se terminer. On a droit à dix minutes de surveillance. Il y a une tempête de neige. Les autobus ne sont pas arrivés. Les dix minutes sont terminées, les gens sont partis et je suis pris tout seul avec 500 élèves pour attendre les autobus. C'est un exemple.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: La deuxième de ces demandes qui a été respectée par le décret -là-dessus, je diverge un peu d'opinion avec vous, M. de Guire - vous en avez parlé tout à l'heure, c'est concernant la notion de capacité. Par vos propos, vous avez laissé voir qu'évidemment on ne pourrait pas abuser de cette notion parce qu'il y avait de la concertation, qu'un directeur devait tenir compte de ses enseignants, mais, si ma mémoire est fidèle, la notion de capacité est définie dans le décret et dit ceci: Si un enseignant a un brevet d'enseignement, soit général pour un enseignement au premier cycle du secondaire ou un brevet en mathématiques, en physique ou autrement pour de l'enseignement plus spécialisé, il est réputé capable. Je ne vois pas ce qu'un directeur d'école a à dire là-dedans.

Deuxièmement, on dit: Si un enseignant a déjà enseigné une matière pendant un an, même s'il n'a pas de brevet, il est réputé capable. Je ne vois pas encore ce que le directeur d'école a à dire là-dedans.

Troisièmement, on dit: Si un enseignant est inscrit et suit des cours de formation dans la matière, il est réputé capable. Et je ne vois pas ce que le directeur d'école a à dire là-dedans.

Il reste le quatrième critère, mais l'un des critères permet de se qualifier, qui est plutôt une ouverture et qui dit: S'il n'y a aucune de ces trois affaires, il est jugé capable, il pourra aussi être réputé compétent. C'est le seul critère qui permet une certaine subjectivité.

À cet égard, la notion de capacité - je ne sais pas si vous réviserez ou si vous nuancerez votre réponse de tout à l'heure -finalement, est, à toutes fins utiles, indépendante des directeurs d'école pour, en tout cas, la grosse partie, au moins trois éléments sur quatre. Est-ce exact ou est-ce que j'ai une mauvaise compréhension du critère?

M. de Guire: Je demanderai à mon collègue, M. Jean Soumis, de compléter.

Le Président (M. Jolivet): M. Soumis.

M. Soumis: M. le député, vous avez une information tout à fait exacte sur le décret. Je pense que la nuance qui n'est pas suffisamment faite, c'est que le critère de capacité ne s'applique que dans un cas de changement de poste et que la capacité est reconnue automatiquement à l'enseignant qui répond à ce que vous avez énuméré. Je pense qu'il est important de faire la distinction entre changement de poste, affectation et distribution de tâches. Dans le décret, la capacité est une question d'affectation et non pas de distribution de tâches.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: J'aurais encore quelques questions M. le Président. Depuis les deux jours qu'on assiste ici aux travaux de la commission, la CEQ, hier, également dans un témoignage particulièrement intéressant, parce que ces gens sont aussi au coeur de

l'activité éducative, nous a démontré ou a essayé de nous démontrer - je n'en étais pas parfaitement convaincu - que la qualité de l'enseignement se traduisait finalement en majeure partie par le nombre d'élèves vus par un enseignant ou le nombre de groupes qu'il devait voir. On a beaucoup parlé, on a fait des liens en disant: La qualité baissera parce que le nombre de groupes augmente. Vous en parlez un peu dans votre mémoire. J'ai cru voir des choses à cet effet. Vous semblez dire qu'il y a des possibilités de diminuer le nombre de groupes qu'un enseignant devrait voir dans sa tâche. Je voudrais savoir s'il s'agit des modèles dont on parlait au cours de la commission, alors qu'on disait: II y a certains modèles qui permettent une action éducative plus globale etc. Je voudrais savoir comment il y a moyen de diminuer le nombre de groupes qu'un enseignant doit voir dans une semaine, sans entrer évidemment dans tout le détail de l'organisation. Quel est le moyen?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: M. le Président, je demanderai à mon collègue, M. Bertrand Jean, de répondre à cette question.

Le Président (M. Jolivet): M. Jean.

M. Jean (Bertrand): M. le Président, la réponse est qu'on revient encore aux fameux modèles que les différentes écoles pourraient établir. Ces modèles devront nécessairement s'établir en concertation. Nous avons fait une tentative de simulation pour voir s'il était possible d'aller vers ce qu'on appelle le titulaire. Voici un exemple très précis: secondaire I, où c'est peut-être le plus facile parce qu'il n'y a pas d'option. Nous prenons le professeur de français qui avait généralement quatre groupes de français, selon la convention qui est encore actuelle -en tout cas, ce que nous vivons présentement - on peut penser - j'ai dit "on peut penser" -que cela ne peut pas se faire sans concertation et sans prendre le temps de vivre avec notre monde et savoir comment les gens pourront vivre de cette façon. (17 heures)

Je vous l'explique. Secondaire I: trois groupes de français, deux groupes de géographie; cela fait exactement 23 périodes. Les mêmes groupes qu'il rencontre en français, il peut les rencontrer en géographie. Donc, il rencontre nécessairement trois groupes au maximum.

Je peux faire cela pour, par exemple, dix groupes. J'aurai, à ce moment, possiblement dix titulaires à 23 périodes. Le complément de 23 à 25 deviendra évidemment le râle de titulaire. C'est l'exemple précis qu'on peut donner. Mais je tiens à répéter que cela ne peut pas se faire sans concertation, du jour au lendemain. Les gens qui étaient spécialisés en français, je ne sais pas jusqu'à quel point maintenant il ne faudra pas mettre les ressources nécessaires pour leur donner également la possibilité d'enseigner la géographie.

Un autre exemple: ceux qui enseignent les mathématiques, dans le même champ, pourront enseigner trois groupes de mathématiques, deux groupes d'écologie. Il pourront rencontrer au maximum trois groupes également.

Finalement, faites l'exercice, quand on dit "mathématiquement, c'est possible", c'est cela qu'on veut dire. Mathématiquement c'est possible, mais entre possible et viable il y a une marge.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, y a-t-il encore d'autres questions? Allez-y.

M. de Guire: Vous permettez?

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. de Guire.

M. de Guire: Si vous permettez, j'aimerais que mon collègue ajoute un complément de réponse à cette question.

Le Président (M. Jolivet): C'est parfait.

M. Gobeil: C'est pour illustrer ceci. Quand on anticipe ici que le facteur temps sera important, je vais vous donner un exemple. Si on va de plus en plus au niveau de l'école secondaire, 1er cycle, vers le titulariat, plusieurs enseignants seront amenés à travailler sur deux matières.

Je vous rappelle qu'au cours des dernières années tout ce qui touche le perfectionnement et le recyclage des enseignants, par rapport au nouveau programme, a été axé sur la spécialisation. Cela veut dire qu'il va falloir refaire complètement la planification du perfectionnement et du recyclage des enseignants au secondaire pour tenir compte de cet aspect. Vous avez là l'illustration d'une opération qu'il faut vraiment réviser parce que, ces dernières années, on a axé uniquement le perfectionnement sur la matière que l'enseignant touchait.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Gauthier: II y a une question qui est un peu d'un autre ordre, M. le Président. Mon collègue, le député de Chauveau, a parlé un peu de certaines actions qui pouvaient se dérouler dans certaines écoles concernant la négociation.

Au début de votre mémoire - c'est vous-même qui en parlez - vous parlez de cette responsabilité du directeur d'école quant au fonctionnement de son école, mais

aussi de la dimension de l'animation de son école. Je voudrais savoir de la part du président de la Fédération des directeurs d'école... Évidemment, à mon point de vue, en tout cas, et au point de vue de certains citoyens, le port de macarons dans les écoles ou, encore, le fait d'utiliser les enfants comme boîtes aux lettres ou, encore, le fait d'enseigner - je ne sais quoi - l'historique de la loi 111 ou des relations du travail au Québec puisque ce n'est pas inclus dans les programmes actuellement, il faut bien qu'il y ait quelqu'un qui ait la responsabilité de voir à ce que l'enseignement qui se donne actuellement, même si on est dans une période difficile - il faut bien l'admettre -soit conforme au programme et non pas conforme à la situation pénible de travail que vivent les enseignants actuellement.

Comment voyez-vous le rôle de directeur d'école et est-ce que la fédération a pris des moyens pour informer ses membres de voir à mettre cartes sur table avec les enseignants? J'ai l'impression que les enseignants aimeraient bien savoir de la part de leur directeur d'école ce qu'il est permis et convenu de faire dans l'école et ce qui n'est pas permis, soit parce que ce n'est pas au programme ou que ce n'est pas dans la normalité des choses. Je voudrais savoir quelle est votre position là-dessus et si vous avez entrepris des actions à cet égard.

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: M. le Président, c'est une question qui touche l'intervention de l'ensemble des personnels à l'intérieur d'une école en situation de conflit ou en non situation de conflit. Je voudrais vous rappeler que notre fédération s'était élevée à un moment donné contre la distribution dans nos écoles par le ministère des Affaires intergouvernementales d'un texte qui s'est appelé "Minute Ottawa!" Nous nous étions élevés contre le fait qu'on pouvait utiliser les écoles, qu'on pouvait utiliser les enseignants pour véhiculer un message qui ne venait pas du ministère de l'Éducation.

Le contrat social, pour nous, est établi par l'Assemblée nationale. Il ne peut pas être établi par qui que ce soit d'autre. Nous nous sommes élevés également chaque fois que les enseignants sont intervenus pour véhiculer leur opinion par rapport soit à leur dossier ou à une situation ou pour distribuer - je rappelle surtout ceux-là - les documents qu'on a appelés du 1er mai. Autant l'un n'en avait pas le droit, autant l'autre n'en a pas le droit. Cependant, même si les règles du jeu sont établies, il reste au ministère de l'Éducation à établir des règles beaucoup plus strictes sur le contrôle de cette distribution. Je n'appelle pas cela de la censure, parce que, je pense qu'on vit dans un pays libre et qu'on a le droit de s'exprimer. Cependant, je ne crois pas qu'on ait le droit, à l'intérieur d'une école, de faire passer... Puisque je suis mandataire de l'État, je suis mandataire de l'ensemble des citoyens du Québec pour véhiculer des valeurs que l'ensemble des citoyens ont définies. À partir de ce moment, je n'ai pas le droit d'utiliser la tribune que j'ai pour faire autre chose.

M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président. Je serai très bref, M. de Guire. Je suis heureux de voir que votre mémoire est très bref. Cela a toujours été une caractéristique de la plupart de nos directeurs d'école. Vous dites à la page 11 qu'il est admissible qu'à tous les trois ans, dans l'école publique, au moment où on commence à vivre une convention, la lutte recommence. Je pense que tout le monde constate que c'est un des éléments majeurs de l'instabilité scolaire. Dans vos commentaires - et ceux de vos collègues - vous avez parlé aussi de l'instabilité dans le milieu scolaire, spécialement au sujet de directives qui arrivent soit de la commission scolaire directement, soit du gouvernement. Je suis sûr que vous avez vécu la même expérience que j'ai vécue. Chaque matin, lorsqu'on recevait le courrier, on trouvait toujours une directive qui venait de quelque part. Cela rend le râle du directeur pas très facile. Pour en revenir à ma question, je crois que l'instabilité est vraiment causée aussi par tout ce chambardement qui vient d'un côté ou de l'autre, soit de la commission scolaire, soit du gouvernement. Pourriez-vous me donner votre opinion sur la proposition suivante. Il est vrai que cela va être difficile, même s'il y a une espèce de règlement, d'une façon ou de l'autre, de s'assurer que les cicatrices soient bien guéries après la grève ou le conflit. Pensez-vous que pour aider à cette stabilité que tout le monde recherche, on devrait avoir un moratoire pour une certaine période de temps sur les changements qui sont proposés par le ministère de l'Éducation?

Le Président (M. Jolivet): M. de Guire.

M. de Guire: M. le Président, un moratoire, je pense que, en ce qui concerne l'ensemble des régimes pédagogiques, il y a une implantation graduelle qui se fait d'année en année. Je pense, en ce qui concerne ça, que cette question ne se pose pas pour nous.

Maintenant c'est bien sûr que quand vous parlez d'augmentation de tâche, si vous

parlez d'un changement de ce côté-là, c'est un peu comme je le disais tantôt, vous parlez de la capacité de payer des Québécois. La capacité de payer des Québécois, notre fédération n'est pas apte à se prononcer sur ça. Peut-être qu'en tant qu'individu, en tant que contribuable je peux avoir une opinion. Mais en tant que fédération, nous ne voulons pas intervenir dans le dossier qui s'appelle capacité de payer des Québécois.

Je dois vous dire cependant que, peu importent les décisions qui seront prises à la fin, peu importe la façon dont se réglera ce conflit, avec augmentation ou non, graduelle ou non, il y aura des ajustements à faire. Il y aura des serrages de coudes à recommencer. Il y aura en fait des climats à rétablir et cela, ça prendra le temps qu'il faut. Un peu comme je le disais tantôt, au moment où l'on s'habitue à vivre avec une convention il faut en recommencer une autre. C'est peut-être ça, M. le Président, qu'il faudrait réviser.

En ce qui nous concerne, si la capacité de payer des Québécois doit être définie par l'Assemblée nationale, peut-être que c'est là que se trouverait la solution à nos problèmes, c'est-à-dire que l'Assemblée nationale définirait la masse salariale et après, un autre organisme que le gouvernement négocierait les conditions de travail, les conditions d'exercice de la profession d'enseignant.

Le Président (M. Jolivet): Compte tenu que le temps est écoulé et qu'on essaie de se discipliner le plus possible, j'ai vérifié de chaque côté si on ajoutait du temps. On a dit que pour le moment on aimerait mieux procéder à l'audition d'un autre. Alors je tiendrais à vous remercier. Comme la coutume le veut, M. le député d'Argenteuil d'abord, et le ministre ensuite.

M. Ryan: Nous vous remercions cordialement messieurs de la délégation de la Fédération québécoise des directeurs d'école. Nous avons écouté vos observations avec beaucoup d'intérêt.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: Je vous remercie, de votre côté, pour ces nombreux témoignages que vous avez apportés. J'ai été heureux d'entendre plusieurs directeurs d'école s'exprimer sur l'un ou l'autre aspect des sujets qui ont été soulevés. Je pense que cela a contribué à apporter un point de vue tiré de leur propre expérience et qui revêtait un côté humain qui a été très apprécié et qui est axé justement sur l'expérience des milieux, ce que nous avons bien besoin de connaître à l'heure actuelle. Merci beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): Pendant que nous demandons à la Fédération des cégeps de se présenter, avec M. Jean-Noël Tremblay comme représentant, lequel nous fera la présentation des membres qui l'accompagnent, je tiens à dire à chacun des membres de la commission que nous avons fait distribuer par le secrétariat des commissions un document qui s'intitule: Entente entre les représentants désignés par la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, d'une part, et les représentants désignés par le ministre de l'Éducation, d'autre part, pour constituer le comité patronal de négociation des commissions pour catholiques seront les articles 10 et suivants de la loi 55.

Maintenant avant de demander à M. Jean-Noël Tremblay de présenter les membres qui l'accompagnent, je tiens aussi à vous rappeler une décision qui a été prise ce matin: pour la Fédération des cégeps le temps alloué est de une heure trente minutes. Comme nous sommes actuellement à 17 h 15, j'aimerais savoir si dans le cas de la fédération nous procédons jusqu'à 18 heures tel que prévu en partageant le temps en deux ou si nous passons l'heure de façon à prendre l'heure et demie d'affilée.

Donc, on me dit à ma droite que, compte tenu des circonstances nous allons terminer à 18 heures et nous reprendrons à 19 h 30. Madame la députée de L'Acadie. (17 h 15)

Mme Lavoie-Roux: M. le Président. Avant d'entendre la Fédération des cégeps... Il y a déjà maintenant près de 25 heures que nous siégeons ici; probablement que d'ici à lundi soir, nous aurons siégé pas loin de 40 heures ou davantage même. Il y a eu une demande de la CEQ, à savoir qu'un observateur soit nommé et qu'on retourne à une table de négociation. On n'a eu aucun signe de la part du ministre de l'Éducation ou de la part du gouvernement indiquant qu'on pourrait donner suite à cette demande. Le temps court. Le 14 mars s'en vient. Est-ce que le ministre de l'Éducation est toujours aussi muet sur cette demande de la CEQ?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: J'ai déjà fait part, hier soir, en réponse à une question qui m'était posée, que la deuxième recommandation de la CEQ, qui a trait à un observateur, n'était pas nouvelle, mais que, même si elle n'était pas nouvelle, je l'accueillais avec sympathie. J'avais, d'ailleurs, marqué dès la semaine dernière que j'acceptais le principe d'un tiers devant qui se déroulerait la négociation. Mais il reste qu'avant de me prononcer définitivement là-dessus j'aimerais entendre tout ce que les groupes ont à nous dire sur

les recommandations qui nous ont été faites.

Ils peuvent, d'ailleurs, en faire d'autres. Ceci nous permet d'étudier les modalités qui peuvent se prêter à l'application de ce principe. En conséquence, je peux vous assurer qu'à la fin de cette commission je ferai connaître mon opinion, ainsi que celle du gouvernement.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie, tout en étant... Allez.

Mme Lavoie-Roux: Oui, très brève, M. le Président. J'aimerais que le ministre infirme ou confirme cette rumeur qui nous est parvenue selon laquelle présentement le gouvernement est à constituer une tierce partie et que la constitution de cette tierce partie serait annoncée. Est-ce que le ministre peut nous dire si elle sera annoncée aujourd'hui, au conseil national du Parti québécois, ou à la fin de la commission, lundi soir? Et pour ne pas revenir avec une autre question...

M. Laurin: Je ne veux pas commenter des rumeurs qui peuvent s'avérer fondées ou mal fondées. Il s'agit de rumeurs. Je peux, cependant, dire qu'il est tout à fait normal que les autres membres du gouvernement puissent également réfléchir, ayant entendu la deuxième recommandation qui nous a été faite. C'est non seulement un processus légitime, mais responsable. Je ne veux donc pas commenter les rumeurs et je répète qu'à la fin de la commission je serai en mesure d'annoncer la décision du gouvernement à cet égard.

Le Président (M. Jolivet): Simplement pour éviter qu'un débat ne s'engage sur une chose qui n'est pas du mandat de la commission, je veux vous rappeler que les règlements de l'Assemblée nationale prévoient que ce que dit de son siège le représentant de quelque formation politique que ce soit, on doit le prendre comme étant la vérité à ce moment-là. Je ne voudrais en aucune façon qu'un débat s'engage. Les gens de la Fédération des cégeps étant devant nous, si nous sommes d'accord, je demanderais à M. le député d'Argenteuil d'intervenir, mais rapidement.

M. Ryan: M. le Président, je vous remercie de votre bienveillance. Je pense être dans l'exercice du droit d'un député à cette commission. Le but de la commission est d'examiner les implications du conflit actuel du point de vue de la qualité de l'enseignement, de la sécurité d'emploi et de toutes sortes d'aspects qui intéressent l'éducation en regard, comme on le dit, de la situation actuelle. Il me semble qu'une règle élémentaire de prudence qui s'impose à tout le monde et en particulier au gouvernement, c'est que, pendant qu'un effort pacificateur aussi exigeant est en cours, il faut éviter toute attitude, toute initiative qui soit de nature à jeter de l'huile sur le feu.

Or, cet après-midi, on fait distribuer dans les bureaux des députés une publication du ministère de l'Éducation dont je viens de prendre connaissance. C'est une publication qui est un exemple type du genre de propagande politique à laquelle le gouvernement se livre à même les fonds publics. Si on avait émis un document de stricte information sur certains éléments de la position du gouvernement dans toute cette affaire-là, je pourrais comprendre. Par exemple, on aurait pu donner une entrevue avec le ministre. Je n'ai pas d'objection à ce que, dans une publication du gouvernement, le ministre donne son opinion. D'ailleurs, il n'a pas à me demander de permission. Mais quand on est rendu à publier des articles...

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil, juste un instant. M. le député de Fabre, vous avez invoqué une question de règlement.

M. Leduc (Fabre): On a toléré quelques questions. Là, on est rendu à l'étape des discours. Je pense qu'il faut continuer. Le mandat de la commission est très précis et je pense qu'il faut poursuivre avec la Fédération des cégeps. J'y tiens, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Sur la question de règlement, très brièvement. Je pense que ce que le "chef de l'Opposition" veut invoquer, c'est la nature même du travail - le député d'Argenteuil, oui - de la commission parlementaire. Il serait peut-être utile de laisser conclure le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Ce sera très bref.

Le Président (M. Jolivet): Juste pour rendre, quand même, ma décision. J'essayais, justement, de comprendre ce qui se passait puisque je pensais qu'on était rendu à l'étape d'écouter les gens de la Fédération des cégeps. Mais j'ai cru comprendre que le représentant de l'Opposition avait une sorte de question de privilège à soulever que je voulais la plus brève possible, ce que j'ai demandé. S'il veut conclure, ensuite, on passera à la Fédération des cégeps.

M. Ryan: Je signalais que cette publication du ministère de l'Éducation, dont on me dit qu'elle fera peut-être l'objet d'une insertion dans des journaux quotidiens dès demain, entraînera, par conséquent, des

dépenses considérables. C'est farci de jugements politiques publiés sous le couvert de l'anonymat...

M. Leduc (Fabre): M. le Président, je m'excuse...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre, allez-y.

M. Leduc (Fabre): ...encore une fois, le député d'Argenteuil, au lieu de poser sa question, au lieu de conclure, engage un débat, poursuit son discours politique. Je vous demande de clore cette période de questions et de poursuivre avec le mandat de la commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous avez presque raison. Je dois vous dire que le député d'Argenteuil n'a certainement pas, lui non plus, complètement raison. Dans ce contexte, je lui avais demandé de terminer sa question de privilège, mais je pense qu'il abuse un peu de ma permission. Cependant, j'ai bien demandé au député d'Argenteuil de terminer.

M. Ryan: Je vous remercie. J'ai été interrompu par le député de Fabre justement au moment où j'allais poser ma question. Je veux demander au ministre s'il a connaissance de cette initiative de son ministère, s'il l'a approuvée, s'il trouve que c'est de nature à rendre service dans le contexte actuel où nous cherchons vraiment un rapprochement entre les parties, alors que ceci est, encore une fois, farci de jugements qui ne sont pas du tout de même nature.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: Oui, M. le Président, à toutes les questions. Pour le reste qui est un discours, un débat, je répondrais simplement: Quot homines tot opiniones. Permettez-moi donc de ne pas partager ces autres opinions.

Le Président (M. Jolivet): M. Jean-Noël Tremblay.

M. Rivest: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Question de règlement, de la part du député de Jean-Talon.

M. Rivest: Ce que le député d'Argenteuil soulève, c'est qu'on a invité des gens ici à venir se prononcer sur le mérite du problème que l'on vit actuellement. Or, d'une façon absolument unilatérale, une des parties au conflit...

M. Leduc (Fabre): M. le Président...

M. Rivest: ...qui est ici devant la commission et qui a témoigné par la voix des sous-ministres...

M. Leduc (Fabre): M. le Président...

M. Rivest: ...maintenant que son témoignage est fini pour les interlocuteurs...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon, je m'excuse; j'ai, à ma droite, de la part du député de Fabre, une question de règlement.

M. Leduc (Fabre): Je demande que la commission poursuive son mandat précis et qu'on entende la Fédération des cégeps.

M. Rivest: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Un instant, je vais les prendre une par une. Je pense qu'on fait un débat. Je me suis permis d'être un peu large pour permettre, justement, à un représentant de l'Opposition de faire ce qu'il a appelé une sorte de question de privilège. Je pense que je n'ai pas le mandat, cependant, comme président, de continuer dans cette voie. Il y a des moyens autres que la commission parlementaire qui, elle, a un mandat bien précis. Je vous le relis: "entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle."

Je dois, dans mon rôle de président, demander à M. Jean-Noël Tremblay, président de la Fédération des cégeps, de commencer à présenter son mémoire, en nous présentant d'abord ceux qui l'accompagnent. Mais j'ai aussi, cependant, un autre devoir qui est celui d'entendre les questions de règlement et les questions de privilège. Tout ce que j'espère, lorsqu'on invoque une question de règlement, c'est que cela en soit une. Jusqu'à maintenant, ce que, de part et d'autre, on a dit à une question présentée par le député d'Argenteuil, je l'ai permis, mais je n'accepterai pas d'autre chose que de vraies questions de règlement. Sinon, je passerai à la Fédération des cégeps.

M. Rivest: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon

M. Rivest: ...ma question de règlement touche précisément le mandat de cette commission qui invite des interlocuteurs

privilégiés du monde de l'enseignement à venir s'exprimer publiquement ici, non seulement, d'ailleurs, de la partie syndicale ou des administrateurs, mais également de la partie patronale par la voix des sous-ministres qui se sont exprimés en tant que tels. Or, M. le Président, je pense que le gouvernement, dans son râle de partie à la présente négociation - et c'est le point, je pense, que le député d'Argenteuil devait faire - en regard même des droits de cette commission parlementaire, devrait s'engager immédiatement à s'abstenir, en tant que partie à la négociation, de publier quelque écrit que ce soit qui prend position et qui ignore complètement la nature des témoignages qu'on a entendus ici. Quand on regarde cette feuille de propagande qu'on nous soumet...

Le Président (M. Jolivet): M. le député! M. le député!

M. Rivest: ...c'est indécent, M. le Président, pour la commission.

M. Leduc (Fabre): Je m'excuse, M. le Président, mais le député engage un débat.

M. Rivest: C'est indécent. C'est une mascarade, ce qu'ils sont en train de faire.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît: S'il vous plaît, M. le député de Fabre. Non, c'est terminé, M. le député.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, le député engage un débat.

Le Président (M. Jolivet): Je passe à M. Jean-Noël Tremblay.

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oh! Si vous avez une question de règlement, madame, je suis prêt à l'entendre. Mme la députée de L'Acadie, mais une vraie question de règlement, s'il vous plaît.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question repose sur l'objet de cette commission. Cette commission a été invitée à siéger, des deux côtés de la Chambre, pour entendre - je suis d'accord avec vous - des représentants, mais aussi pour essayer de faire la lumière le mieux possible sur ce qui est le noeud du conflit entre les enseignants et le gouvernement du Québec. Je trouve que c'est faire outrage aux membres de cette commission...

M. Leduc (Fabre): M. le Président...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce vous, le président, ou si c'est le député de Fabre?

M. Leduc (Fabre): Je m'excuse, mais vous portez des jugements, madame.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je pense que tout le monde va bien comprendre que, depuis trois jours, c'est moi qui suis le président. Cependant, on amorce un débat que je ne voudrais, en aucune façon, que l'on fasse. S'il faut relire le règlement, on le relira. Ce que vous êtes en train de me dire à moi, comme président, pour que je l'interprète pour l'ensemble des gens - ce que je n'ai malheureusement pas le droit de faire comme interprétation - c'est que vous avez eu connaissance en dehors de cette commission de choses...

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est à cette commission, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Non, non, je m'excuse, madame. Ce que je dis, c'est en vertu du règlement. Je ne parle pas de la connaissance que vous avez actuellement. Je dis qu'une chose s'est passée en dehors de cette commission que vous voulez amener à cette commission. Je pense qu'il faut bien le comprendre quand même et, dans ce contexte, le mandat que j'ai à faire respecter, c'est celui d'entendre des organismes. Les autres problèmes qui sont d'ordre différent, vous avez, je pense, à les régler autrement que par des questions de règlement qui engendrent des discours que je n'ai pas le droit d'accepter. Si c'étaient de vraies questions de règlement, j'accepterais, madame.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: ...espérons que, cette fois-ci, je respecterai le règlement. J'essaie toujours de respecter le règlement, M. le Président, vous le savez. Ce dont je veux parler - et vous êtes le président de la commission - ce sont des droits des membres de cette commission et vous en êtes le gardien, M. le Président. Je dois vous rendre hommage du fait que cette commission s'est déroulée avec peu de questions de procédure ou à peu près pas.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.

Mme Lavoie-Roux: Quand je parle des droits des membres de cette commission, c'était le mandat qu'on avait confié aux

membres de cette commission et qui était d'examiner, dans le meilleur climat possible, toutes les pistes de ce conflit, toutes les questions relatives au conflit des enseignants. Aujourd'hui, en plein au moment où on est à exercer, de bonne foi, de part et d'autre, ce mandat que le gouvernement nous a demandé de remplir, on vient faire entrer en ligne de compte une...

Le Président (M. Jolivet): Madame, je vais vous arrêter seulement un instant...

Mme Lavoie-Roux: Oui. (17 h 30)

Le Président (M. Jolivet): ...pour vous demander ceci. Cela m'aiderait beaucoup, vous savez, en termes de procédure. Si vous avez une motion à présenter, il s'agirait de la présenter et je verrai si elle est recevable ou pas. À partir de cela, je verrai si, oui ou non, on doit continuer le débat, parce qu'on risque de s'enferrer dans un débat qui, à mon avis, n'est pas le mandat de cette commission. Vous savez comme moi qu'il reste encore quatre organismes à voir et à entendre aujourd'hui. Mon mandat est de faire entendre ces quatre organismes d'ici minuit. C'est tout ce que je vous demande, Mme la députée.

Mme Lavoie-Roux: Dans ce cas, j'aimerais bien faire une motion pour demander que, tant et aussi longtemps que cette commission siégera pour entendre les parties intéressées ou tous les participants que nous avons invités, on s'abstienne, de part et d'autre, que ce soit du côté de l'Opposition ou que ce soit du côté du gouvernement, de poser des gestes de provocation qui viennent troubler le climat et empêcher que nous obtenions le meilleur éclairage possible pour en arriver aux solutions que le gouvernement souhaite.

M. Leduc (Fabre): M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Fabre, je voudrais savoir sur quoi...

M. Leduc (Fabre): ...on parle de geste de provocation - le mot est clair - à la suite de la distribution d'un journal. Un tel jugement soulève une série de questions et engage le débat. Alors, je vous demanderais de mettre un terme à cette période d'obstruction...

M. Rivest: Adoptez une loi!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Leduc (Fabre): ...systématique des travaux de la commission et de passer au mandat de la commission, s'il vous plaît, M. le Président. Nous avons des organismes à entendre jusqu'à minuit. M. le Président, je vous demande d'appliquer ce qui est le mandat de la commission.

M. Rivest: Appelez-la la loi 112.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai une motion.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît: Oui, laissez-moi parler. J'ai cru comprendre qu'à la suite de ce que j'ai demandé à Mme la députée de L'Acadie elle m'a donné une motion. Étant donné que j'ai une motion, j'ai à déterminer si elle est recevable ou non.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je tiendrais à vous faire remarquer, Mme la députée de L'Acadie, que j'apprécierais beaucoup qu'on me donne cette motion par écrit. Mais j'aurais une suggestion à vous faire: Compte tenu des circonstances, compte tenu qu'on demande environ 20 minutes aux gens qui présentent le mémoire, je souhaiterais que les gens de la fédération puissent commencer la présentation de leur mémoire. Vous me donnerez votre motion et, à l'heure du souper, je déterminerai si elle est recevable ou pas; après cela, on pourra la débattre s'il le faut, suivant la décision que je rendrai. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je suis tout à fait prête à me rendre à votre désir, sauf que, d'abord, il faut que je la rédige en bonne et due forme, ayant dû l'improviser. J'aimerais quand même que vous me permettiez, avant la suspension de nos travaux, de la lire à cette commission.

Le Président (M. Jolivet): C'est promis, madame.

M. le représentant de la Fédération des cégeps, M. Jean-Noël Tremblay, présentez-nous vos collègues.

Fédération des cégeps

M. Tremblay (Jean-Noël): Je sauterai sur l'occasion que vous me donnez de vous présenter d'abord, à mon extrême droite, M. Claude Larouche, qui est le président du conseil d'administration du cégep Bois-de-Boulogne et vice-président de la Fédération des cégeps. Vous avez ensuite M. Gilles Beauchemin, qui est directeur général du cégep de Rimouski et membre du conseil d'administration de la Fédération des cégeps; M. Luc Henrico, qui est directeur général du Collège John Abbott et membre du conseil d'administration de la Fédération des cégeps; M. Yvon Hamel, qui est spécialiste sur la

tâche, à la Fédération des cégeps; M. Yves de Belleval, qui est directeur du Service des relations du travail à la Fédération des cégeps, et M. Pierre Leduc, qui est directeur des services pédagogiques au cégep de Maisonneuve et président de la commission des affaires pédagogiques à la Fédération des cégeps.

M. le Président, la Fédération des collèges d'enseignement général et professionnel a accepté avec empressement l'invitation du leader parlementaire du gouvernement à participer à la commission parlementaire de l'éducation et ce, dans le but de porter à la connaissance de cette commission le dossier du réseau collégial tel que le vivent les administrateurs des cégeps. Nous entendons vous expliquer ce qui a motivé nos choix dans cette ronde de négociations et faire état des éléments qui nous paraissent les plus fondamentaux, tant sur les principes que sur le contenu des offres patronales.

Le réseau des établissements collégiaux publics est voué à la formation générale et professionnelle des jeunes et des adultes. Il accueille cette année au-delà de 132 000 élèves dits réguliers et environ 90 000 adultes qui suivent des cours à temps plein ou à temps partiel dans les collèges. Ses 44 établissements se partagent près de 675 000 000 $. Bien sûr, ces chiffres ne sont pas aussi impressionnants que ceux qui mesurent le niveau primaire et secondaire. Nous calculons en millions, pas en milliards et nos économies potentielles se chiffrent par dizaines de millions. Cela n'en est pas moins significatif pour la population québécoise, car il ne faut pas oublier que le niveau collégial constitue le passage, presque le goulot d'étranglement, dirions-nous, quelquefois entre le niveau secondaire et le marché du travail, entre le secondaire et les études supérieures. Il faut savoir que le niveau collégial, aussi petit soit-il en nombre et en importance sur le plan budgétaire, reçoit tous les étudiants ou à peu près tous les étudiants qui viennent du niveau secondaire, soit pour les diriger dans une spécialité au niveau du marché du travail, soit pour les diriger à l'université.

De là toute notre insistance sur la qualité des services que nous devons dispenser à une population étudiante encore en croissance, services d'enseignement, bien sûr, mais aussi nombre d'autres qui, gravitant autour de l'enseignement, contribuent à le compléter et, le complétant, assurent la réalisation de la mission fondamentale des cégeps qui en est une essentiellement de formation.

Un cégep, bien sûr, ce sont des cours, mais aussi c'est la bibliothèque, c'est l'assistance pédagogique, c'est l'orientation scolaire, ce sont les services de "counselling", c'est la recherche, les services de soutien matériel, bref, tout un environnement éducatif pour lequel on retrouve des spécialistes, professionnels et employés de soutien, qui travaillent et qui oeuvrent dans les collèges.

À ce titre, d'ailleurs, nous avons vécu une période faste qui a correspondu plus ou moins aux premières années d'implantation du réseau: investissements massifs, à partir des années soixante-sept en particulier, constructions nombreuses pour répondre aux besoins d'une clientèle en progression accélérée. Aboutissement original de la révolution tranquille, le nouveau réseau a crû rapidement et tout a été mis en oeuvre pour assurer son succès. Croissance des effectifs qui entraîna celle du corps enseignant, multiplication des services d'aide et d'encadrement qui rivalisèrent d'originalité pour satisfaire les besoins.

Ce foisonnement s'est traduit bientôt en dispositions de conventions collectives qui, au fur et à mesure de l'évolution des cégeps, sont devenues de plus en plus complexes pour tenter de couvrir tous les cas et protéger tous les droits. En période d'abondance comme nous l'étions au début des cégeps, on n'a pas lésiné sur la bonification des salaires et des conditions de travail. Que l'on songe simplement que c'est par décret qu'on imposa, en 1972, l'indexation des salaires.

Depuis quelques années, nous vivons complètement autre chose. Une distanciation toujours accrue entre les paramètres de révolution des conditions de travail et de salaires des enseignants et ceux des enveloppes budgétaires globales des collèges. Le fardeau des salaires s'accroît plus rapidement que ne progressent les sommes allouées aux autres dépenses.

Le déséquilibre qui a commencé vers 1979 s'accentue de façon dangereuse chaque année. Ainsi, entre 1979-1980 et 1982-1983, le nombre des étudiants réguliers a augmenté de plus de 13 000, le nombre de professeurs a augmenté en conséquence pour un ratio approximatif de 1 professeur pour 13 étudiants. La masse salariale des enseignants s'est accrue de plus de 150 000 000 $, soit d'environ 57%, pour un salaire moyen estimé à 37 100 $ pour cette année. Pendant ce temps, la masse salariale des autres personnels s'est accrue, elle, de 55 000 000 $ environ, soit une augmentation de 48% seulement. Cet écart dans la croissance des masses salariales s'explique par le fait que la proportion des autres personnels a diminué comme diminuaient et diminuent encore les sommes allouées aux autres coûts qui, de 72 000 000 $ en 1979-1980, se réduisent maintenant à 59 000 000 $, soit une réduction importante de 18%.

Ce qu'il faut comprendre de ces chiffres, c'est qu'en réalité, le réseau collégial en est à sa quatrième année de

restrictions budgétaires et qu'étant donné que la masse salariale des enseignants constitue, dans le budget global, une enveloppe protégée qui évolue au seul rythme des variations de clientèles étudiantes, les enseignants n'ont pas, jusqu'à très récemment, été touchés par la crise. Ce sont les autres coûts et les autres personnels qui ont fait les frais des coupures.

Là encore, la marge de manoeuvre était très mince, d'abord parce que la plupart des services ont déjà été délestés au cours des quatre dernières années et que continuer en ce sens équivaudrait à fermer des services entiers, ce qui met en danger l'équilibre des établissements d'enseignement collégial et la réponse minimale aux besoins des étudiants. Ensuite, parce que les conventions collectives et les règles ministérielles sont ainsi faites que les personnels mis en disponibilité continuent de recevoir leur plein salaire et que ce salaire, soi-disant économisé dans un poste budgétaire, est en fait assumé dans un autre poste de la même enveloppe du réseau collégial. C'est sur cette base concrète qui impose - vous le devinez facilement - des balises fort contraignantes que la fédération a entrepris la ronde de négociations.

Pour préserver l'équilibre et la qualité des services offerts, il fallait mieux répartir les ressources allouées à l'enseignement collégial et freiner l'enrichissement collectif des enseignants.

Un autre problème nous préoccupait au tout début des négociations, tout particulièrement celui de la qualité de l'enseignement. Un retour en arrière nous révèle qu'à tout le moins, depuis 1972, le thème de la qualité de l'enseignement est apparu à l'occasion de chacune des différentes rondes de négociations. Il nous semble, après analyse sommaire, que ce thème a souvent servi à dramatiser la situation. Il s'est révélé un puissant moteur de l'affectivité, de l'émotivité et de la mobilisation collective, nous en convenons. Il suffirait de revoir les différents placards publicitaires qu'ont payés les parties, depuis 1972 et jusqu'à tout récemment, pour s'en convaincre. Si les révolutions se font au nom de la liberté, il semble bien que les négociations, elles, se font au nom de la qualité. En dehors des périodes de négociation, et surtout en dehors de leur phase finale, qu'en est-il donc de cette qualité de l'enseignement?

On peut en effet s'interroger sur les éléments suivants. Nous nous sommes interrogés sur ces éléments. D'où vient l'attitude négative si souvent observée et qui s'est traduite par l'inféodation des instances de concertation, telles que la commission pédagogique, aux impératifs syndicaux, quand ce n'est pas le boycott pur et simple de ces activités? Nous savons que la commission pédagogique fait partie de la loi elle-même des collèges. Pourquoi un boycott généralisé de la remise des plans de cours ou encore des plans de travail ou des rapports annuels des départements? Comment interpréter le fait que les tentatives "patronales" de mettre sur pied des entreprises d'évaluation des pratiques, méthodes, expériences, contenus pédagogiques, soient quasi universellement vouées à l'échec, tant les résistances, refus, oppositions et autres attitudes négatives sont persistantes? Comme si ces entreprises d'évaluation ne visaient qu'à discipliner éventuellement les enseignants, alors qu'elles ont un tout autre objectif.

Toutes ces questions demeurent sans réponse dans les discours actuels. Pourtant, d'autres les ont abordées. Le Conseil des collèges, dans un avis au ministre de l'Éducation sur l'établissement de politiques d'évaluation dans les collèges, a souligné en novembre dernier, dans le rapport de sa commission de l'évaluation, et je cite: "Selon l'observation effectuée par la commission de l'évaluation du Conseil des collèges, l'idéologie autonomiste qui anime plusieurs départements est telle qu'elle menace souvent l'équilibre institutionnel du collège. Il arrive fréquemment que le comportement quotidien du département constitue une négation pratique de l'appartenance institutionnelle." (17 h 45)

Plus loin, cette commission dit encore, et je cite: "Pour que l'autonomie départementale soit telle, il faut qu'elle soit moins dépendante de l'idéologie du pouvoir et de la stratégie d'affrontement patronal-syndical, comme cela a été le cas jusqu'ici par le biais des négociations des conventions collectives." Elle ajoute: "On peut se demander si ces départements ne quittent pas un patron local institutionnel pour un patron central syndical. Où est alors le gain net d'autonomie pour les professionnels enseignants?"

D'où une recommandation que faisait le Conseil des collèges, que nous entérinons entièrement: "Le Conseil des collèges recommande au ministre de l'Éducation de prendre toutes les mesures nécessaires pour que disparaissent des prochaines conventions collectives des enseignants les différentes clauses qui autorisent les activités départementales en dehors de l'autorité du collège."

Reste qu'en l'absence d'une solide évaluation de l'enseignement sous toutes ses facettes, il est aléatoire pour quiconque de porter des jugements sur la qualité de l'enseignement et sur l'évolution de cette qualité. Nous constatons toutefois que, dans le présent débat, la question de la qualité se ramène beaucoup trop à une question de quantité. Il n'est donc pas surprenant que nous nous soyons inquiétés du contrôle de la

qualité de l'enseignement et que nous ayons proposé des conditions susceptibles de le garantir, comme, par ailleurs, nous avons souscrit aux mesures visant à mieux répartir les ressources disponibles dans le réseau.

Des propositions concrètes. Nous considérons, bien sûr, que tout est affaire d'équilibre et nous nous sommes employés, à titre de partenaire du gouvernement, à le maintenir, notamment, au chapitre de la tâche et de la sécurité d'emploi.

La hausse de productivité, qui est un des points clefs des discussions actuelles dans les négociations. En mars 1982, l'assemblée générale de la fédération votait à l'unanimité un mandat de négociation prévoyant la possibilité d'intervenir au niveau des ressources affectées à l'enseignement. Lorsque le ministère fit connaître l'ordre de grandeur de la récupération recherchée, les représentants de la Fédération des cégeps voulurent s'assurer que cette récupération ne romprait pas l'équilibre relativement satisfaisant de la répartition des ressources d'enseignement entre le secteur général et le secteur professionnel, les deux secteurs qui caractérisent le niveau collégial.

La fédération fit en sorte aussi d'éviter que les collèges plus petits, où le nombre de cours différents à préparer par enseignant est forcément plus élevé, ne soient pas desservis par l'augmentation de la productivité recherchée. Elle fit en outre effectuer par quelques collèges, des simulations sur la répartition proposée des ressources locales. Le résultat de ces simulations démontra qu'un coefficient d'augmentation de l'ordre de 13,5% pourrait être assumé au plan de l'organisation pédagogique. Cela devenait vivable.

Plus tard, lorsqu'il fut question de coefficient supérieur, la fédération est intervenue auprès du ministère pour qu'un certain nombre d'enseignants soit ajouté, de manière à éviter que le seuil de 13,5% soit franchi. Finalement, même au-delà de l'adoption de la loi 105 et des décrets, la fédération participa avec le ministère à la préparation d'une proposition bonifiant les décrets. C'est la proposition qui a été déposée le 9 février aux syndicats et le 10 février en conférence de presse en collaboration avec le ministre de l'Éducation.

Il est certain que l'augmentation de la productivité recherchée est importante. Mais il nous semble, compte tenu des cadres financiers dont il est largement question, que cela est nécessaire si nous voulons sauvegarder ou rétablir un équilibre dans la répartition des ressources dont nous allons disposer pour les services à rendre aux clientèles que dessert le réseau collégial public. Pour ce qui est de l'impact individuel ou collectif de cette hausse de productivité, il y a d'autres facteurs à considérer.

Le premier - nous ne pouvons le répéter assez - c'est l'urgence de régénérer l'appartenance institutionnelle et de mettre en lumière la conscience professionnelle des enseignants. Ce n'est pas d'abord à travers le discours des conventions collectives qu'il nous sera permis d'y arriver.

Le second, c'est l'effet de résorption des charges additionnelles qu'assumaient contre rémunération additionnelle des professeurs déjà titulaires d'un poste à temps complet. Idéalement, cela pourrait se faire volontairement par souci de la qualité de l'enseignement, par exemple. Nous croyons plutôt que cela se fera par l'affectation de professeurs mis en disponibilité à ces tâches autrefois confiées en contrats supplémentaires. Il faudra toutefois apporter une attention particulière à la gestion de ce phénomène.

Un troisième facteur est constitué par la baisse de l'allocation des libérations syndicales financées à même les ressources allouées pour fins d'enseignement. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître aux yeux d'un grand nombre d'observateurs, les collèges étaient appelés à libérer les enseignants de leurs tâches à même les ressources d'enseignement et sans remboursement par les syndicats. C'était alors les autres enseignants qui, globalement, assumaient le fardeau total des tâches conséquemment réparties entre moins d'enseignants dans un collège. Nous avons évalué à au-delà de 2 000 000 $ la valeur de ces libérations pour l'année d'engagement 1980-1981. Seuls les syndicats d'enseignants de cégep ont, à notre connaissance, bénéficié de telles dispositions, que les décrets n'ont d'ailleurs pas abolies. Ce type de libération est encore possible actuellement dans les décrets, mais il y a cependant un maximum qui a été fixé. L'abandon complet d'une telle mesure rendrait disponible à des fins d'enseignement l'équivalent de 45 enseignants pour l'ensemble du réseau collégial. Comme on le voit, il y a dans le système des facteurs compensatoires de la hausse recherchée de productivité, facteurs qui sont sans danger pour la qualité de l'enseignement, au contraire.

Concernant la sécurité d'emploi, c'est sous l'angle de l'octroi de la permanence que nous aborderons cette question. Nous ne remettons pas en cause la sécurité d'emploi de nos personnels réguliers. C'est plutôt contre la régénérescence artificielle de postes que nous en avons. Il est important, à cet égard, de souligner que la convention de 1979-1982 stipulait qu'une prévision de baisse de clientèle ne pouvait être invoquée comme motif pour refuser la permanence. Autrement dit, même s'il était prévu que le contenu de l'emploi n'était pas permanent à court terme, même s'il était prévu que la tâche de l'enseignant n'allait pas se maintenir pour l'année d'enseignement suivante, la

permanence devait néanmoins être octroyée.

De fait, plusieurs enseignants et enseignantes ont obtenu, le 1er avril d'une année donnée, leur permanence et reçurent avant le 1er mai de la même année, c'est-à-dire un mois plus tard, un avis de mise en disponibilité. Ainsi furent, pour une part, gonflés les coûts de la sécurité d'emploi. La signification profonde de la permanence, selon nous, fut de donner accès à la sécurité d'emploi et aux bénéfices qui en découlent. De façon générale, elle ne fut pas reliée à la reconnaissance de la valeur ou de la compétence de l'enseignant dûment constatée par le collège, mais plutôt aux normes de la convention collective. C'est pourquoi, dans le décret, les conditions relatives à l'octroi de la permanence ont été modifiées.

Selon nous, ces modifications ne portent pas uniquement sur la forme. Si elles sont rendues nécessaires par le cadre financier pour tenir compte de l'augmentation de la productivité, elles signifient aussi que dorénavant, l'octroi du statut de permanent devra correspondre à une permanence relative de l'emploi et d'une tâche à assumer, tâche reliée, elle, à la propriété d'un poste. La permanence sera donc accordée et, en conséquence, la sécurité d'emploi, dans la mesure où le poste occupé existera depuis deux ans et dans la mesure où l'on prévoira que ce poste existera pour une autre année d'enseignement au moins.

En ce qui a trait aux avantages de la sécurité d'emploi et aux mesures de résorption des enseignants et enseignantes en disponibilité, nous n'avons, sur ce sujet, aucune information particulière à ajouter, compte tenu des exposés précédents qui ont été faits, en particulier par les sous-ministres du ministère de l'Éducation.

En conclusion, nous voulons réaffirmer le fait que nous croyons que les modifications décrétées concernant la tâche et la sécurité d'emploi ne mettent pas en danger la qualité de l'enseignement dans les collèges. Elles sont significatives de notre volonté de mieux répartir les ressources tout en respectant la valeur de nos personnels. Elles constituent, selon nous, l'effort particulier demandé aux enseignants, mais déjà entrepris par les autres corps d'emploi pour sauvegarder l'intégrité du réseau collégial et l'atteinte de ses objectifs de formation.

Nous tenons à rester optimistes sur la capacité de réenlignement collectif des intervenants dans ce dossier et à manifester une ouverture à toute proposition visant une plus grande souplesse dans le respect des principes auxquels nous croyons et du cadre financier que le gouvernement a fixé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci beaucoup. Tel qu'entendu, Mme la députée de

L'Acadie peut présenter sa motion que j'aurai à évaluer durant l'arrêt. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Avant de lire la motion elle-même, je vais simplement prendre deux minutes pour resituer le contexte dans lequel ceci s'est présenté.

Le Président (M. Jolivet): Non, madame. Je m'excuse. L'entente était de la lire.

Motion proposant que le gouvernement

s'abstienne de publier tout

document relatif aux décrets dans

le domaine de l'enseignement

Mme Lavoie-Roux: Bon! D'accord. C'est en fonction de la publicité à caractère politique que le gouvernement a publiée en pleins travaux de cette commission.

La motion que je présente est la suivante, M. le Président: "Que cette commission exige que le gouvernement s'abstienne de publier et de distribuer à même les fonds publics tout document de nature politique relatif aux décrets dans le domaine de l'enseignement jusqu'à ce que la présente commission ait eu le temps d'accomplir son mandat."

Le Président (M. Jolivet): Merci, madame. Donc, j'aurai à évaluer cette motion. Les documents seront donnés, madame, les copies additionnelles, pour qu'on puisse les distribuer. Je suspends donc les travaux jusqu'à 19 h 30, tel qu'entendu. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise de la séance à 19 h 50)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'éducation continue ses travaux aux fins d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes, en regard de la situation actuelle au Québec.

Avant d'arriver aux témoignages des gens de la Fédération des cégeps, je dois d'abord vous dire que deux documents vous ont été distribués pour dépôt seulement, c'est-à-dire le mémoire de l'Association des comités de parents de la région 03 sur le conflit dans le secteur de l'éducation et, tel que promis par le député de Louis-Hébert, le document du groupe qui a travaillé sur la question de la polyvalente de Charlesbourg,

c'est ce qui nous avait été présenté comme étant un document à être déposé à la commission.

Avant l'ajournement de la séance pour le souper, tout le monde s'en souvient, il y a eu une motion qui a été présentée par Mme la députée de L'Acadie. Cette motion, on s'en souviendra, devait faire l'objet d'une décision du président de la commission parlementaire que nous avons actuellement.

J'avais averti, au cas où j'aurais eu à le faire, que la coutume et les habitudes veulent qu'il y ait deux façons de rendre une décision de la part du président. La première consiste à demander à des représentants, un de chaque côté, de faire valoir leur point de vue sur la recevabilité d'une telle motion. D'un autre côté, la deuxième façon de procéder, c'est que le président, s'il s'aperçoit, à sa face même, que la résolution n'est pas recevable ou qu'elle est recevable, peut la déclarer recevable ou non recevable.

Avant de rendre une décision quelconque sur le sujet, je tiendrais à vous rappeler, ce que j'ai fait au début d'ailleurs, le mandat de la commission. La commission élue permanente de l'éducation a pour mandat - qui lui a été confié par le leader du gouvernement en vertu des règlements -d'entendre les organismes directement impliqués dans l'administration scolaire qui veulent faire des représentations sur la qualité de l'enseignement, la tâche et la sécurité d'emploi des enseignants et enseignantes en regard de la situation actuelle au Québec.

Ce mandat, qui nous a été donné, jusqu'à maintenant, a été rempli de façon que des organismes se sont présentés devant nous depuis déjà maintenant deux jours et demi; il a été suivi avec les moyens habituels que se donne une commission parlementaire au début de ses travaux.

Ce matin, on s'en souviendra, à 10 heures et quelques minutes, quand nous avons commencé les travaux, nous nous sommes entendus sur un partage du temps qui nous permettait d'aller jusqu'à 24 heures ce soir. Puis, en vertu des règlements, possiblement pour faire en sorte de ne pas retarder à plus tard dans certains cas, il y a des ententes qui sont prises de la part des membres de la commission sous forme de consentement pour dépasser 24 heures. Cela est prévu par le règlement.

Le président de la commission a comme mandat de faire respecter l'ensemble du règlement de l'Assemblée nationale tout en ayant - comme bien du monde autour de cette table, ici même dans des commissions parlementaires, dans des rencontres, dans des discussions, au conseil des députés de chacun des partis politiques ou même à l'Assemblée nationale - exprimé qu'il y aurait peut-être intérêt à faire des changements à des commissions parlementaires qui sont prévues par le règlement.

Vous le savez tous, l'Assemblée nationale a adopté, en décembre dernier, une nouvelle loi de l'Assemblée nationale qui a trait à la vie parlementaire au Québec tout en sachant qu'il y avait des parties de discussions qui continuaient à se faire et pour lesquelles la sous-commission de l'Assemblée nationale avait un rapport à donner à la commission de l'Assemblée nationale sur la façon dont les commissions parlementaires pourraient à l'avenir se tenir.

En plus d'être directement convoquées par le leader du gouvernement, d'autres formules sont envisagées, mais ces commissions parlementaires n'existant pas, les décisions qui concernent ces commissions parlementaires doivent aussi être considérées par la sous-commission de l'Assemblée nationale. Une chose est certaine: ce qui existe au moment où on se parle, c'est les règlements actuels de l'Assemblée nationale. J'ai donc le devoir, même si, de part et d'autre, on peut exprimer des réserves quand vient le temps de décisions d'un président, d'appliquer les règlements tels qu'ils sont connus actuellement.

La commission est, bien sûr, maîtresse de l'ensemble de ses travaux, mais - et c'est un "mais" important - dans le cadre du règlement, c'est-à-dire en vue d'établir sa procédure uniquement et dans le seul but de réaliser son mandat, vous comprendrez bien, au moment où je vous parle, que je n'ai aucunement l'intention de demander à quelque parti que ce soit de m'éclairer, puisque j'ai eu l'occasion de regarder comme il faut cette motion même si, comme je le disais tout à l'heure, à première vue, elle pouvait sembler soit recevable ou irrecevable. Il peut arriver que la question soumise à une commission parlementaire soit précisée ou élargie par les moyens déjà connus, c'est-à-dire, en vertu du règlement. Le leader se prévaut, à ce moment, de l'article 140 ou l'Assemblée nationale use de l'article 152. Si je fais mention de l'Assemblée nationale, c'est pour bien faire savoir que des moyens sont peut-être limités au niveau des commissions parlementaires puisque les mandats lui sont donnés soit pendant que l'Assemblée nationale siège ou en dehors du moment où l'Assemblée nationale siège, c'est-à-dire ce qu'on appelle les intersessions.

Déjà, des décisions ont été rendues au niveau de ce qu'on peut appeler le mandat. Donc, la motion qui est devant nous, présentée par Mme la députée de L'Acadie -j'en ai fait mention tout à l'heure - ajoute, à première vue, au sujet qui était contenu dans l'avis de convocation et auquel la commission doit se limiter. Les fins poursuivies par la députée pourraient être servies en utilisant d'autres moyens qui sont prévus par notre règlement, mais je vous

signalerais - et ma décision, comme vous le savez, doit être rendue avec la sagesse normale que la présidence doit avoir, malgré les difficultés à rendre les décisions - tout de suite que, dans ces circonstances, les moyens pour faire valoir les fins que Mme la députée de L'Acadie poursuit pourraient être utilisés à un autre niveau, c'est-à-dire au niveau de l'Assemblée nationale du Québec ou, si elles ne peuvent pas être poursuivies à l'intérieur de l'Assemblée nationale du Québec au moment où on se parle, compte tenu que l'Assemblée nationale ne siège pas, par d'autres moyens externes à la commission parlementaire.

J'ai fait mention - et souvent, des gens ont certaines difficultés à comprendre les procédures établies par l'Assemblée nationale du Québec qui s'appellent le règlement de l'Assemblée nationale du Québec, qui est reproduit dans un volume ou un document nous permettant, comme toute assemblée délibérante, d'avoir des règles qui nous sont propres. On comprendra que dans des assemblées délibérantes où des décisions doivent être rendues, seules les personnes qui ont droit de parole sont habilitées par le règlement à l'avoir, c'est-à-dire ceux qui m'entourent, à ma droite ou à ma gauche et, en même temps, compte tenu des pouvoirs qui lui sont conférés, la possibilité d'entendre des témoins qui se trouvent actuellement, pour les besoins de la cause, en face de nous. La commission, donc, ayant comme mandat d'entendre des témoins, n'a pas les pouvoirs de se donner des mandats autres que celui qui nous a été déterminé par le leader du gouvernement.

En conséquence, pour toutes ces raisons, je dois malheureusement, ou heureusement - cela dépendra de quel côté de cette table vous vous trouvez, ou en face - pour toutes ces raisons, déclarer que la motion de Mme la députée de L'Acadie est irrecevable. Par conséquent, compte tenu de ces circonstances, nous devons procéder immédiatement à l'audition des témoins par les questions qui peuvent leur être posées par les intervenants ici. (20 heures)

La parole serait alors au ministre de l'Éducation. Comme je vois que des mains sont levées, à ma droite et à ma gauche, je dois vous dire - et en certaines circonstances, le président a ses pouvoirs et ses privilèges d'au moins appliquer le règlement - que ma décision étant rendue, en vertu du règlement - et vous le connaissez très bien - elle est irrévocable. Il s'agit maintenant de savoir si les questions qui sont posées ont trait à autre chose, sont des questions d'éclaircissement ou des questions de règlement. Mais je dois vous dire que toute question qui me sera posée et que je jugerai tendre à faire de façon indirecte ce que le règlement ne permet pas de façon directe, je me devrai de l'interrompre. La première personne qui a levé la main, c'est Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Alors, ce sera très bref, M. le Président. Je comprends votre décision, malgré, en fait, que je trouve cette publication complètement inopportune à ce stade des travaux de la commission parlementaire.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée, je dois...

Mme Harel: Ceci dit...

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée, s'il vous plaît!

Mme Harel: Oui, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Rendez au moins mon travail facile.

Mme Harel: Oui. D'accord. C'est pourquoi je voudrais vous suggérer une autre façon parlementaire d'examiner cette question et ce serait la suivante: Puisque le mandat de la commission parlementaire est d'entendre les témoins, et puisque l'équipe des sous-ministres doit, je pense, revenir devant la commission sur un certain nombre de questions, notamment sur les règles budgétaires, je pense qu'à ce moment il serait approprié de poser des questions sur la nature, la publication, la distribution et, j'imagine, le contenu qui est publié, en fait, dans le dossier.

Le Président (M. Jolivet): Ce sont des moyens qui sont prévus. Je vous rappelle simplement ce que la commission parlementaire avait prévu: à la fin de la commission parlementaire, un moment sera prévu. Il faudra le prévoir lundi, à moins que le leader ne m'ordonne autre chose ou que la commission, à la suite des demandes qu'elle fera au leader, puisse faire des ententes, à l'extérieur de cette audience, qui nous serait communiquées au commencement des travaux de lundi et que je n'ai pas à donner actuellement puisqu'il n'y a aucune entente dans ce sens. Je dois vous dire ce que je connais, comme président de l'actuelle commission parlementaire. C'est qu'à la fin de la commission, nous inviterons conjointement à la table des personnes qui se trouvent en face de nous, à la fois les représentants du ministère de l'Éducation soit les sous-ministres qui sont venus témoigner, et ceux des centrales syndicales, qui sont aussi venus témoigner, si je me souviens bien. Par conséquent, les questions pertinentes pourront être posées à ce moment.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, j'ai entendu avec une certaine consternation la décision que vous venez de rendre. Je voudrais, pour bien m'assurer que cette décision a été rendue après mûre considération de tous les aspects qui s'y rattachent et en tout respect pour votre fonction et votre personne, vous demander si vous avez bien considéré les aspects suivants: premièrement...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne voudrais pas entrer sur un terrain très glissant. Je vous comprends puisqu'une décision a été demandée et n'a pas été rendue jusqu'à maintenant à une autre commission parlementaire. On ne peut pas prendre, compte tenu qu'il n'y a aucune décision, connaissance de cette possibilité de décision sur d'autres sujets. Je vous ai dit que, sans vouloir vous être désagréable, M. le député d'Argenteuil, je l'ai considérée. J'ai bien employé mes termes et vous les connaissez d'ailleurs, ce sont des termes qu'on emploie souvent dans des assemblées délibérantes - on pourrait les employer en latin -: prima facie, à première vue, à sa face même, la commission a un mandat. Je ne voudrais pas vous être désagréable, non pas parce que vous êtes le représentant de l'Opposition, mais je ne voudrais pas, en aucune façon, qu'on embarque dans un débat qui, lui, malheureusement, n'est pas utile à ce moment.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, je regrette, mais je crains que votre évocation de certains faits récents ne soit entachée d'une information incomplète. Je me permets de rétablir les faits parce que c'est directement relié à la décision que vous venez de rendre. Vous avez dit tantôt que vous ne pouviez pas recevoir cette motion parce qu'elle ne se rattachait pas au mandat de la commission dont le mot clé, d'après ce que j'ai entendu sur vos lèvres, serait le mot "entendre". Elle a le mandat d'entendre les organismes.

Or il arrive que je siégeais récemment à la commission de l'agriculture...

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil... M. le député d'Argenteuil...

M. Ryan: ...des pêcheries et de l'alimentation et que...

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil. Je vous dis que le règlement me permet, quant à moi, d'avoir certains privilèges. Mes privilèges sont de faire respecter le règlement. Compte tenu que c'est d'entendre des témoins, de leur poser des questions, je ne voudrais pas qu'on s'engage dans un débat qui ne peut être tenu pour le moment, puisque c'est de façon indirecte qu'on essaie de miner la décision que j'ai rendue. Je ne voudrais pas que ce soit cela. J'ai simplement dit que ma décision, même mûrement réfléchie, comme vous le dites... À première vue, la décision à prendre sur cette motion est claire.

M. Ryan: M. le Président, vous avez dit qu'une chose s'était passée à une autre commission et, si ce que vous avez dit est faux, est-ce qu'on a le droit de redresser les faits ou si on n'a pas le droit? Est-ce que votre autorité va aussi loin que cela?

Le Président (M. Jolivet): Ce que j'ai dit, c'est que j'ai à rendre une décision sur le fait d'une question aujourd'hui. Je ne veux pas prendre des décisions rendues dans une autre commission comme étant des décisions qui m'ont permis de prendre ma décision ce soir.

M. Ryan: M. le Président, je m'excuse, mais vous avez dit qu'il y avait une autre commission où il y avait une décision qui était pendante. Elle n'est pas pendante, elle a été rendue et elle a été rendue dans un sens contraire à celui que vous adoptez ce soir. C'est pour cela que je pense qu'il est important de rétablir les faits, si vous me permettez de le faire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil, allez.

M. Ryan: La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation avait un mandat très assimilable à celui de la présente commission, c'est-à-dire celui d'entendre des organismes ou des témoins qui pouvaient apporter un éclairage sur tous les problèmes relatifs à l'avenir et au passé du territoire exproprié de Mirabel.

On est arrivé à la fin des travaux - je pense que le leader du gouvernement s'en souviendra parce qu'il rôdait autour ce jour-là aussi, nous sommes très heureux d'ailleurs qu'il soit ici actuellement, oui, oui et je l'en félicite et j'espère qu'il va marcher avec nous, cela sera encore mieux - et le gouvernement a présenté une série de recommandations. Le ministre de l'Agriculture qui représentait le gouvernement, au nom de tous les députés ministériels faisant partie de la commission, a déposé une série de recommandations et nous avons contesté la recevabilité de ce document. Nous avons émis d'autres considérations mais qui sont extrinsèques au débat actuel. Et le président a pris la chose en délibéré. Nous avons ajourné les travaux pendant une couple d'heures puis il est revenu et il a rendu une décision en faveur de la recevabilité de la motion.

Parce que c'était un précédent très important dont nous étions conscients, sur lequel nous avions attiré en toute connaissance de cause l'attention du président, nous avons demandé qu'il rende cette décision par écrit, vu son importance et ses répercussions considérables pour l'avenir. Nous n'avons pas reçu le texte écrit pour l'instant mais la décision a été rendue et, au procès-verbal des travaux de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation de ce jour, je suis sûr que c'est inscrit que la série de recommandations du gouvernement a été jugée recevable. Si c'est seulement le mot "motion" qui vous créait des problèmes, je suis sûr que la députée de L'Acadie pourrait très bien formuler son texte de manière qu'il soit transformé en une recommandation. Si le mot "motion" fait peur à cette commission, je veux le dire aux députés ministériels parce que nous, il ne nous fait aucunement peur pour des raisons évidentes, je pense bien que la députée de L'Acadie serait prête à le faire. À ce moment, votre décision serait exactement dans la même ligne que celle qui a été rendue il y a quelque temps. Parce que là, vous serez dans un problème; si la décision est rendue dans ce sens, ce soir, cela remet en cause l'autre décision, mais elle a été rendue. Encore une fois, c'est le point que je voulais souligner à votre attention.

Le Président (M. Jolivet): M. le leader, vous voulez parler?

M. Bertrand: M. le Président, dans ce dossier, je comprends la représentation que vient de faire le député d'Argenteuil de façon à tenter de s'appuyer sur une décision antérieure rendue dans une autre commission parlementaire qui avait un mandat spécifique mais, quant à nous, de ce côté-ci, à partir du moment où non seulement vous ne permettez pas qu'il y ait un débat sur la recevabilité ou la non-recevabilité de la motion qui a été présentée par Mme la députée de L'Acadie et à partir du moment où, vous prévalant de ce qui m'apparaît être tout à fait normal, étant donné les circonstances, des dispositions du règlement, vous prévalant du mandat de la commission, vous prévalant du devoir que vous avez de faire appliquer ce règlement avec toutes les difficultés que cela peut contenir - et vous en avez fait état - je crois que notre devoir, comme parlementaires, à ce moment-là, est de prendre note de votre décision et, partant de là, de la respecter et de faire en sorte que nous puissions continuer nos travaux, de telle sorte aussi que nous puissions, en continuant nos travaux, entendre tous les groupes qui se sont présentés et qui doivent être entendus aujourd'hui et lundi. Partant de là, M. le Président, je crois que nous devrions immédiatement passer à la période de questions.

Le Président (M. Jolivet): Je dois vous dire qu'à ce niveau, le mandat de la commission est bien clair. Je veux simplement faire remarquer aux gens de la commission qu'il reste encore trois groupes à entendre. Ces trois groupes... On s'est entendu ce matin... On m'a donné... J'ai fait exprès, ce matin, ayant été contesté sur certaines parties de décisions rendues hier... J'ai fait bien attention, ce matin, au fait -et je pense que tout le monde va bien comprendre le message que je transmets -que je n'avais pas l'intention de ne pas respecter ce que cette commission parlementaire avait à se donner comme mandat. Ce matin même - et je l'ai écrit sur ma feuille et c'est pour cela que je l'ai sortie - j'ai noté le temps qu'on avait alloué à chacun des groupes, parce qu'on s'était dit que notre but du travail d'aujourd'hui était d'entendre ces groupes. Que des événements extérieurs à cette commission parlementaire se soient produits, il y a des moyens qui ne sont pas d'empêcher, par quelque moyen que ce soit... Je ne veux pas dire que c'est le but de la motion, loin de moi cette idée. Je veux être bien clair pour ne pas être mal interprété. Ce que je veux dire, c'est que ces gens se sont déplacés pour que les gens autour de cette table leur posent des questions, comme le mandat nous le demandait ce matin. Dans ce contexte, je n'ai pas l'intention de changer ma décision. Vous savez quels sont les moyens que vous avez concernant les décisions que je peux rendre, comme dans toute commission parlementaire, des décisions, à certains moments, sont rendues. Dans ce contexte, je demanderais à la personne qui doit commencer à interroger les témoins, c'est-à-dire M. le ministre de l'Éducation, d'intervenir.

M. Ryan: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Question de règlement de la part du député d'Argenteuil.

M. Ryan: Vu que vous déclarez la motion irrecevable d'une manière pérempétoire, est-ce que nous pourrions...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Ryan: C'est notre droit de le constater.

Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.

M. Ryan: Merci. Nous pourrions peut-

être solliciter au moins la permission de demander aux députés qui représentent le parti ministériel à cette commission s'ils accepteraient de bonne grâce que l'on puisse discuter d'une motion aussi importante et aussi directement et essentiellement reliée au travail que fait cette commission.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison, monsieur, de me le demander comme cela; je permets de demander le consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, la réponse sera très claire, très courte. Dans le fond, elle est très simple à donner. À partir du moment où vous auriez indiqué que vous souhaitiez entendre un parlementaire de chacune des deux formations politiques sur la recevabilité ou la non-recevabilité de cette motion, vous auriez entendu un porte-parole ministériel débattre cette motion en disant qu'elle est non recevable. Or, comme vous venez de rendre la décision qu'elle n'était pas recevable, il est bien évident, M. le Président, qu'il n'est pas question d'entreprendre un tel débat, puisqu'une décision est déjà rendue avant même que qui que ce soit se soit fait entendre.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre. Je m'excuse. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais seulement faire une petite mise au point et après vous demander une directive. Pour les collègues qui sont autour de la table, - cela me semble normal de le dire -avant que nous commencions la séance, j'avais demandé au président de modifier la motion dans sa forme et je voudrais au moins indiquer de quelle façon - si vous me le permettez, M. le Président - elle avait été modifiée. Elle se lisait comme suit: "Que, de l'avis de cette commission, le gouvernement devrait s'abstenir de publier et de distribuer à même les fonds publics tout document de nature politique, relatif aux décrets, dans le domaine de l'enseignement jusqu'à ce que la présente commission ait eu le temps d'accomplir son mandat." Je pensais que dans ces conditions, c'était plus un voeu ou une recommandation et que vous auriez peut-être mieux reçu cette demande, mais je comprends que, comme vous la connaissiez, votre décision est demeurée la même. Je le regrette, mais je la respecte. (20 h 15)

Maintenant, une demande de directive, M. le Président. Nous avons reçu le mandat, tel qu'on l'a exprimé autour de la table à plusieurs reprises, du gouvernement de tenir cette commission parlementaire spéciale pour étudier le conflit qui sévit présentement entre le monde de l'enseignement et le gouvernement. De part et d'autre, je pense, certainement de notre côté - certainement de notre côté, je tiens à le répéter - c'est de bonne foi que nous avons accepté cet exercice dans le but d'arriver à des résultats positifs. Vous m'avez suggéré - c'est là qu'est la demande de directive - qu'il y avait d'autres moyens auxquels je pouvais faire appel pour discuter de ce problème qui, selon votre interprétation, est étranger au mandat que la commission a reçu. Vous me suggérez de faire appel ou de débattre ce sujet à l'Assemblée nationale, ou enfin que cela pourrait être l'objet d'un débat quelconque à l'Assemblée nationale ou d'une question, quelle que soit la forme que cela prendrait.

M. le Président, vous savez que l'Assemblée nationale ne siégera pas avant mardi prochain et, à la suite de la publicité gouvernementale que tout le monde connaît maintenant et qui demain, selon mes informations, sera publiée dans les journaux -c'est une publicité à fort caractère politique il m'apparaît que les conditions dans lesquelles devait s'exercer le mandat de cette commission ont été modifiées et que sans aucun doute, mardi prochain, quand l'Assemblée nationale sera réunie, je pourrais soulever la question, mais déjà le travail de la commission sera terminé. On aura modifié en cours de route les conditions dans lesquelles notre mandat devait s'exercer; c'est dans ce sens que le recours que vous m'avez suggéré sera caduc mardi prochain.

Il reste que la commission a été - c'est vrai, je l'admets avec vous que cela est venu de l'extérieur - saisie d'un problème important qui modifie les conditions mêmes dans lesquelles notre mandat devait s'exercer, qui était un mandat de bonne foi. Je dois dire que, devant cette publicité, il y a au moins une partie qui n'est plus de bonne foi et ceci remet même en doute, dans l'esprit de nos invités, l'utilité de l'exercice auquel ils devront se livrer ce soir et lundi prochain. Alors, j'aimerais vous demander s'il y a un autre type de directive que vous pourriez nous donner - je m'y soumettrai fort volontiers - qui serait un peu plus efficace que celui que vous venez de me proposer, alors que la commission sera défunte mardi prochain.

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on commence le débat parce que ce serait comme si je l'acceptais et je ne l'accepte pas. Vous ferez les corrections après si voulez. Je veux simplement vous dire, madame, que je vous ai indiqué ce que le règlement vous permettait. Je sais très bien que l'Assemblée nationale ne siège pas au moment où nous sommes en commission parlementaire. Cependant, je connais l'efficacité de d'autres moyens, que vous connaissez aussi bien que moi et qui sont

pris en dehors de la commission parlementaire et en dehors de l'Assemblée nationale, qui sont ceux de faire les conférences de presse que vous voulez. Je ne peux pas vous proposer quelque autre moyen que ce soit à l'intérieur du règlement qui est là, je n'en connais pas d'autres. Je fais simplement mention que vous connaissez beaucoup plus que moi les autres moyens qui sont à votre disposition. Si vous voulez me demander maintenant les dispositions qui sont prévues par le règlement de l'Assemblée nationale, ce sont les seules que je vous ai indiquées.

M. Bertrand: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je voudrais simplement, si Mme la députée de L'Acadie me le permet, faire une correction relativement à une information ou une impression qu'elle a eue relativement au document dont il est fait état, c'est qu'il ne sera pas publié dans les journaux demain matin.

Le Président (M. Jolivet): Avant de vous donner la parole, M. le député de Louis-Hébert - je n'ai pas l'intention de vous empêcher de parler, vous allez l'avoir - je veux simplement vous dire une chose. C'est que nous sommes en train de faire un débat que je voulais le plus bref possible au sujet d'une décision qui a été rendue parce que, vous le savez très bien, le mandat c'est d'entendre les gens en face de nous. Je vous le rappelle simplement. M. le député de Louis-Hébert, est-ce une question de règlement?

M. Doyon: Oui, M. le Président, c'est une question de règlement. Vous avez basé votre décision sur les articles 140 et 152 que vous avez cités et vous vous êtes référé au règlement de l'Assemblée nationale. J'aimerais avoir une directive de votre part. Vous considérez que le règlement de l'Assemblée nationale régit toutes les discussions et les procédures de cette commission. Cette commission parlementaire se réunit et entend des témoins. Ce à quoi je veux faire allusion, c'est que nous sommes un quasi-tribunal et qu'il existe telle chose qui n'est écrite nulle part, qui est la règle du sub judice, qui fait que des parties qui sont appelées à se faire entendre ne doivent pas agir de façon à influencer un tribunal. J'attire votre attention sur le fait que, dans les circonstances, nous sommes un quasi-tribunal et que...

M. Desbiens: Question de règlement. Le Président (M. Jolivet): M. le député de Dubuc, question de règlement.

M. Desbiens: Je ne voudrais pas interrompre le discours mais l'article 43.-2 de notre règlement me paraît assez clair: "Lorsque le président rend sa décision, il indique ce qui la justifie et il n'est pas permis de la critiquer ni de revenir sur la question décidée... C'est peut-être un règlement qui ne satisfait pas toujours l'ensemble des parlementaires qui ont à le vivre ou à le subir, mais je n'ai jamais eu connaissance encore, depuis six ans que je siège ici, qu'on remette en question de cette façon une décision du président. Je demande qu'on respecte le mandat de la commission et qu'on entende le groupe qui est devant nous.

Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député.

M. Doyon: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Oui. J'essaie simplement de vous amener sur un terrain qui serait plus propice ce soir à l'écoute des témoins qui sont convoqués devant cette commission, en vous rappelant toujours qu'on doit quand même une certaine politesse à ceux qu'on invite, sachant que dans certaines circonstances il y a des difficultés qui surgissent.

Mais je dois vous dire, au moment où je vous parle, que vous m'avez demandé une directive. J'aimerais que vous me la demandiez pour que je puisse y répondre le plus rapidement possible.

M. Doyon: Oui, M. le Président. Je vais le faire avec plaisir. Vous devrez reconnaître avec moi que si je n'ai pu me rendre là, je n'y suis pour rien. J'ai été interrompu par une question de règlement alors que j'y arrivais justement.

La question de directive que je vous demande est celle-ci: Dans les articles du règlement que vous considérez pour baser la décision que vous avez donnée tout à l'heure, est-ce que vous faites totalement abstraction d'une règle qui s'applique à tous les tribunaux, dans le monde civilisé, qui est la règle du sub judice? Est-ce que c'est une règle que vous considérez ne pas s'appliquer à cette commission et dont vous ne tenez absolument pas compte, étant donné que cette commission parlementaire tient du tribunal et qu'elle devrait se soumettre à certaines règles fondamentales qui régissent tous les tribunaux dans le monde civilisé et démocratique? Je veux savoir si vous la mettez de côté.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Louis-Hébert, pour répondre à votre question, ayant pendant près de six ans siégé

à cette Assemblée nationale, ayant connu des décisions aussi difficiles que celle que j'ai eu à rendre, je dois vous dire que même l'Assemblée nationale, dans ses décisions -c'est prévu par le règlement d'ailleurs - n'a pas à se substituer à une commission parlementaire. Souvent, on a posé des questions à l'Assemblée nationale sur des sujets discutés en commission parlementaire et on a dit à ce moment que c'était à la commission parlementaire de régler ses problèmes et de faire en sorte que s'il y a des choses à décider, elles soient décidées là où elles doivent être décidées.

L'Assemblée nationale ne doit pas connaître ce qui se passe ici. Ce que j'ai indiqué à Mme la députée de L'Acadie, c'est que la commission parlementaire a un mandat, et cela a fait sourire des gens cet après-midi quand j'ai dit qu'en dehors de la commission parlementaire, donc en dehors du mandat qui nous est confié, il s'est passé des choses que je n'ai pas, comme président, à juger ni à faire discuter à cette commission parlementaire. Dans ce sens, pour le bien-être des gens qui sont convoqués à cette commission, je voudrais qu'on puisse procéder à l'audition des gens qui sont ici depuis 19 h 30, puisqu'on y était en même temps que moi et qu'on attendait que débute cette commission, tel qu'entendu avant l'heure du repas. Donc...

M. Ryan: M. le Président, question de directive.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil, sur une question de directive.

M. Ryan: II est arrivé souvent, depuis le début des travaux de la présente commission, que grâce à votre compréhension et à celle du leader du gouvernement, nous ayons modifié quelque peu l'ordre de comparution des témoins afin d'éclairer la commission. Je voudrais vous demander s'il serait possible, étant donné le caractère grave et urgent du problème que nous essayons de soumettre à l'attention de la commission, que l'on envisage de faire comparaître de nouveau le sous-ministre de l'Éducation qui nous est apparu, par son intervention, comme un des vrais grands manitous du ministère, pour qu'il vienne nous dire ce qui s'est passé. Il nous a raconté tout ce qu'avait fait son ministère depuis quelques années. S'il pouvait venir ajouter ce soir, étant donné les répercussions très immédiates de cette affaire, sa version des faits et répondre à nos interrogations et à nos inquiétudes, je pense que cela compléterait beaucoup. Et je serais prêt à proposer que du côté de l'Opposition, nous acceptions de siéger une heure au-delà de l'échéance que nous nous sommes fixée, de manière à ne pas déranger les témoins qui sont ici. Je vous assurerais à ce moment-là que nous procéderions immédiatement avec toute la compréhension et la célérité requises à l'audition des témoins qui attendent de dialoguer avec nous.

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie beaucoup, M. le député d'Argenteuil de votre proposition. Mais je dois vous rappeler que je suis lié par une décision que nous avons prise tous ensemble ce matin. Cette décision était de suivre l'ordre du jour qu'on s'était fixé. Je n'ai aucun pouvoir, sauf celui que vous avez fait bien attention de poser, demander le consentement. À ce moment-là, je me dirige donc vers ma droite et je demande au...

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): J'aimerais régler une chose à la fois, si vous voulez.

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi.

Le Président (M. Jolivet): M. le leader, ai-je, oui ou non, le consentement pour agir de la façon demandée par le député d'Argenteuil?

M. Bertrand: M. le Président, nous souhaitons entendre la Fédération des cégeps, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, l'Association des cadres scolaires du Québec et la Fédération des comités de parents.

Le Président (M. Jolivet): M. le leader, comme je n'ai pas de consentement, je dois donc considérer que nous devons procéder. Mais j'ai encore une autre question de règlement, en espérant que ce n'est pas la même sorte de question de règlement... Non? D'accord. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela fait longtemps que j'ai accepté votre décision. C'est avec beaucoup de regret, mais c'est votre privilège. C'est presque une directive que je vous demande, parce que je veux tellement faire ce que vous voulez. Le leader du gouvernement a voulu rectifier de bonne foi, d'ailleurs, une chose qui n'était pas exacte, à savoir que ce ne sera pas dans les journaux demain matin. Me permettez-vous à mon tour, M. le Président, de poser une question au leader du gouvernement qu'a suscitée sa rectification?

Le Président (M. Jolivet): Je crois comprendre, parce que c'est ce que... et je dois vous rapporter les mots mêmes du député d'Argenteuil qui me disait: M. le Président, nous espérons que, par cette proposition que nous faisons, cette demande

de directive, ce consentement - peu importe comment on l'appelle dans les circonstances nous irons avec diligence à l'écoute des membres de la Fédération des cégeps. Ce que je voudrais - et là, je suis obligé dans ces circonstances de regarder aussi à ma droite avant de vous donner la réponse, et dire que si c'est la seule question avant qu'on procède et si elle n'a pas comme but d'engendrer un autre débat, parce que je ne le permettrais pas, si vous me le dites... Je vois vos signes de tête m'indiquant que c'est une petite question et une petite réponse. Et je demande au leader, puisque la question lui est adressée, d'accepter une petite question. Mme la députée de L'Acadie, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, lorsque j'ai dit tout à l'heure que cette publicité paraîtrait demain dans les journaux, le leader a cru bon de rectifier - et c'était tout à fait son droit - en disant que non, ce ne serait pas publié demain dans les journaux. Puis-je lui demander quand ce sera publié et à qui? Et si ceci ne doit pas être publié - parce que comme il faut que je fasse seulement une question, je vais ajouter le deuxième volet de la question - dans le cas où sa réponse serait négative, nous avons eu de la part du ministre de l'Éducation cet après-midi des informations à savoir que ce serait publié, que ce serait distribué sur une assez grande échelle...

Une voix: Un communiqué de presse à 400 000 exemplaires.

Mme Lavoie-Roux: ...tiré à 400 000 exemplaires. En plus de s'adresser aux abonnés, les publications du ministère doivent rejoindre à la fois les partenaires que sont les commissions scolaires, les directeurs d'école, les comités d'école et de parents, les associations d'étudiants et les administrateurs, mais également tous les députés. Les députés l'ont reçu comme vous pouvez le voir. Cela veut dire que cela ira à un grand nombre de personnes. Alors, je voudrais savoir par quel moyen cela sera distribué et quand ce le sera. (20 h 30)

Le Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement et sachant que cela termine le débat.

M. Bertrand: M. le Président, je remercie Mme la députée de L'Acadie. Elle a déjà, puisqu'elle vient d'en faire état elle-même, une bonne partie de la réponse dans le communiqué dont la source est la Direction des communications du ministère de l'Éducation du Québec. Alors, elle a une bonne partie de sa réponse, à savoir combien d'exemplaires seront tirés là-dessus et, deuxièmement, à qui cela s'adresse. Alors, il est bien indiqué que cela doit rejoindre à la fois les partenaires que sont les commissions scolaires, les directeurs d'école, les comités d'école et de parents, les associations étudiantes et les administrateurs, mais également tous les députés et tout les personnels oeuvrant dans le monde de l'Éducation. Dans ce paragaphe, elle a les informations relativement à qui est adressé, bien sûr, le document d'information en question.

Deuxièment, elle me demande de quelle façon ce sera fait. Si elle a bien regardé le document qu'elle a entre les mains, c'est marqué: "Canada Post", Postes Canada, première classe, permis no 1627, Québec. Donc, il y aura un certain nombre de ces exemplaires qui seront envoyés directement à ceux qui, habituellement, reçoivent, par exemple, la revue Informeq, du ministère de l'Éducation. Quant aux autres exemplaires, ils seront disponibles pour les gens qui voudraient y avoir accès, ce qui est tout à fait normal. Alors, voilà en gros la réponse à votre question.

Mme Lavoie-Roux: Quand cela sera-t-il fait?

M. Bertrand: À compter de maintenant, demain et dans les jours qui viennent.

Mme Lavoie-Roux: Ah! C'est déjà parti.

M. Bertrand: Je crois qu'effectivement...

Mme Lavoie-Roux: ...c'est déjà parti... M. Bertrand: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, M. le Président. On connaît maintenant....

Le Président (M. Jolivet): Madame, je voudrais...

M. Bertrand: Madame...

Mme Lavoie-Roux: ...la bonne foi du gouvernement.

M. Bertrand: Juste pour compléter, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Bertrand: Effectivement, les députés l'ont reçu aujourd'hui, donc les autres groupes du monde scolaire le recevront probablement au cours des prochains jours, comme les parents ont reçu hier, pendant que la commission parlementaire siégeait, par la voie de leurs enfants, un document provenant des enseignants et enseignantes et qui était aussi un document d'information.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais pas aux frais des contribuables, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, madame!

Mme Lavoie-Roux: ...je vous ferai remarquer...

Le Président (M. Jolivet): Madame! madame!

Mme Lavoie-Roux: ...qu'il y a une très grande différence.

Le Président (M. Jolivet): Le député d'Argenteuil voulait juste rectifier ce que j'ai dit. Je le lui permets en lui disant que tout de suite après nous passons à M. Jean-Noël Tremblay.

M. Ryan: M. le Président, il y a deux interprétations qui ont été données et qui m'apparaissent inexactes, dont l'une par vous-même, quand vous avez dit que j'avais pris l'engagement de procéder avec célérité et compréhension dès qu'on aurait disposé de l'affaire. J'avais dit ou voulu laissé entendre bien clairement que, dès que le gouvernement aurait accepté la proposition très raisonnable que nous lui faisions, cela réglerait tout le problème. Maintenant qu'il a refusé, cela ne règle pas le problème et je crains que les travaux de ce soir ne soient teintés de cette ombre que le gouvernement a fait planer.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Ryan: Vous le verrez.

Le Président (M. Jolivet): Rectification.

M. Ryan: Et un autre député a dit tantôt que nous faisions tout ce que nous pouvions pour nous opposer à votre sainte volonté. Loin de nous une pensée aussi mauvaise. Nous faisons tout pour respecter votre volonté, mais cela ne nous enlève aucunement le droit d'explorer tous les recours qui sont les nôtres comme parlementaires.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre, vous pouvez commencer à poser vos questions ou à faire vos commentaires sur le rapport présenté par M. Jean-Noël Tremblay.

M. Charbonneau (Yvon): J'avais demandé la parole, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, je ne peux vous l'accorder. La seule façon, j'en ai fait mention à la députée de Maissonneuve tout à l'heure, c'est lorsque viendra le moment qui a été décidée par la commission, c'est-à-dire le témoignage qui sera rendu par les deux groupes concernés, soit les sous-ministres et les organismes syndicaux, à cette table, à la fin de la soirée lundi.

M. Charbonneau (Yvon): J'aurais un complément de rapport à vous faire sur ce sujet.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse! Je m'excuse, M. Charbonneau. M. Charbonneau, je vous comprends, mais la seule chose, c'est que je n'ai pas le pouvoir de vous la donner.

M. Charbonneau (Yvon): ...

Le Président (M. Jolivet): Monsieur...

M. Charbonneau (Yvon): ...un débat qui a lieu ici et le ministre...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je dois suspendre les travaux pour quelques instants du moins.

(Suspension de la séance à 20 h 35)

(Reprise de la séance à 20 h 59)

Le Président (M. Jolivet): La commission parlementaire de l'éducation reprend ses travaux. Au moment où nous nous sommes quittés, nous en étions à la Fédération des cégeps. C'était au ministre d'intervenir, mais le député d'Argenteuil m'a demandé d'intervenir juste avant sous la forme d'une question de règlement ou de directive. Je ne sais pas comment la définir, mais je lui cède la parole, compte tenu qu'ils ont demandé une suspension de dix minutes qui a été un peu plus longue, et compte tenu des circonstances, je la lui avais accordée. Donc, M. le député d'Argenteuil a quelque chose à nous déclarer.

M. Ryan: M. le Président, tout d'abord, je voudrais regretter profondément les événements qui sont survenus tantôt et dans la mesure où ces événements dérogeaient à l'ordre qui doit présider aux travaux d'une institution parlementaire ou d'une commission parlementaire, en particulier, nous ne pouvons nous associer à ces événements en aucune manière. Comme vous l'aurez remarqué, depuis le début de la soirée, les choses ont été un peu plus compliquées que depuis le début des travaux de la commission, mais tout s'est fait dans l'ordre. Nous avons soulevé des interrogations. Nous vous avons posé des problèmes qui faisaient parfaitement partie des attributions qui sont les nôtres et nous entendons continuer dans cet esprit de travail au sein de la

commission.

Étant donné le contexte différent que crée cette initiative malheureuse du gouvernement dont nous essayons de parler depuis le début de la soirée, les députés de l'Opposition, qui font partie de la commission, ne peuvent pas maintenir l'entente qui avait été faite avec le gouvernement au sujet du partage du temps. Chacun exige de pouvoir exercer son droit de parole normal qui lui est reconnu par le règlement. Je voudrais vous prévenir que chaque député de l'Opposition entend se prévaloir de son droit de parole avec chaque organisme qui est appelé à se présenter devant nous. Ceci étant dit, nous respecterons entièrement les règles de travail et nous serons très intéressés à discuter avec les témoins qui sont devant nous.

Le Président (M. Jolivet): Cependant, avant de donner la parole au ministre, comme j'ai encore une autre décision à rendre, je vais la rendre avec d'autant plus d'aise que c'est la seconde fois en six ans que j'ai l'occasion de la rendre. Je vais la rappeler, puisque j'espère que ma mémoire ne me fera pas défaut, mais c'était sur un projet de loi qui était quand même important et qui demandait que tous les députés puissent intervenir à la commission parlementaire. C'était, à cette époque, M. Robert Burns qui était ministre. Le député de Châteauguay avait proposé, sur la réforme électorale, une motion au début de la commission parlementaire laquelle motion, qui faisait le consentement de l'ensemble des membres de la commission parlementaire, avait pour but d'accorder à tous les députés, même s'ils n'étaient pas membres de la commission parlementaire, la possibilité d'intervenir s'ils le jugeaient à propos.

Or, la commission parlementaire, dès le début, a très bien fonctionné et on est arrivé à un sujet qui s'appelait "le registre du directeur" et je m'en souviendrai longtemps. À ce moment, tous les députés ont commencé à intervenir selon ce qui avait été entendu au départ.

Le député de Châteauguay, ayant fait une proposition qui avait été adoptée, tout comme ce matin si on s'en souvient - je le rappelle simplement pour les besoins de la cause - il y avait une décision que j'avais à rendre, j'ai fait exprès, je le rappelle, compte tenu de certains événements que j'avais vécus, me disant qu'on respectait un emploi du temps pour permettre aux sept organismes qui étaient prévus ce soir et cette décision, j'en étais et, à ce moment, j'ai dit à l'ensemble de la commission qu'ils me donnaient quand même une latitude de quelques minutes en plus et quelques minutes en moins selon le besoin.

Par conséquent, c'est une décision qui a été prise sous forme de consentement. La décision qui avait été prise, à l'époque, était justement une proposition de consentement. Le député de Châteauguay voyant et même -je me le rappelle - il avait dans sa motion l'expression "à la condition que", à la condition que le monde respecte au moins un minimum, ce qui n'avait pas, selon lui, été respecté à ce moment. J'avais donc dû rendre une décision que nous avions vérifiée avec le responsable qui s'occupe des commissions parlementaires au niveau du droit pour voir si, oui ou non, on pouvait révoquer, en cours de route, une décision qui avait été prise par la majorité de l'ensemble des intervenants de cette commission sous forme de consentement. Et la réponse avait été bien claire: Une personne ne peut pas, une fois qu'elle a donné son consentement, le retirer. Ce consentement n'étant donc point retirable, je suis, comme président, obligé de me soumettre à une forme de consentement qui devient - à ce moment-là, ce matin - la forme de travail pour le reste de la journée et, en conséquence, je me dois de refuser votre proposition en vous disant qu'il reste une heure à la Fédération des cégeps pour être interrogée et que je procéderai, comme de coutume, du côté ministériel et du côté de l'Opposition. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, j'accepte votre décision et j'ai bien noté - vous me corrigerez si j'ai mal compris - que vous avez bien dit que le consentement valait pour le reste de la présente journée.

Le Président (M. Jolivet): Oui, vous avez bien raison, c'est-à-dire jusqu'à minuit.

M. Ryan: Très bien. Tout le reste est remis en question.

Le Président (M. Jolivet): Pour lundi, c'est une autre séance et, à ce moment, il y a d'autres consentements qui pourront être pris. M. le ministre.

Fédération des cégeps (suite)

M. Laurin: M. le Président, les collèges d'enseignement général et professionnel constituent un secteur clé essentiel de notre système scolaire. Ils sont une création originale du Québec dont, je pense, nous avons tout lieu d'être fiers. Ils remplissent un rôle irremplaçable, d'où l'importance du témoignage que nous avons entendu de la part de la fédération.

Leur mémoire est très informatif, en ce sens qu'il nous donne, sur la structure des cégeps, la situation des cégeps, les difficultés qu'ils rencontrent depuis un certain nombre d'années, des éclairages non seulement judicieux mais indispensables. C'est, je pense, dans ce contexte que se situe la présente négociation et c'est sur ce

thème que portent, au fond, en filigrane à tout le moins, les représentations qui nous ont été faites.

Je n'entends pas revenir sur chacun des aspects du mémoire mais je voudrais faire porter mes questions sur deux points. Votre mémoire souligne que les compressions budgétaires ont affecté tous les services autres que l'enseignement proprement dit. On a même l'impression, en lisant votre mémoire, que c'est pour cette raison que vous avez proposé que des gains de productivité soient effectués dans la tâche des enseignants afin qu'on puisse répartir, pour le maintien, le développement des autres services éducatifs proprement dits, les gains de productivité que les décrets pourraient effectuer afin d'en arriver à un équilibre nouveau qui permettrait le développement ultérieur.

Est-ce que vous pourriez commenter davantage cette interprétation que je tire, en tout cas, de votre mémoire et l'expliquer?

M. Tremblay (Jean-Noël): M. le Président, effectivement depuis quatre ans, les collèges connaissent des compressions budgétaires importantes, compte tenu relativement de la grosseur de l'enveloppe budgétaire du niveau collégial. Ces compressions budgétaires ont porté, à toutes fins utiles, sur peut-être 15% à 20% de l'ensemble du budget d'un collège puisque la grande partie de la masse salariale des enseignants faisait partie d'une enveloppe fermée à laquelle on ne pouvait pas toucher, ce qui fait que le pourcentage d'augmentation de la compression budgétaire - qui était faite à chaque année et des restrictions que vous nous avez faites -portait exclusivement sur les autres personnels, c'est-à-dire le personnel cadre, le personnel de soutien, le personnel des professionnels et sur l'ensemble des autres budgets de fonctionnement.

Comme les collèges, à toutes fins utiles, sont quand même des unités relativement petites où, pour un collège moyen, vous avez peut-être dix, douze ou quinze professionnels répartis dans les différents services, que ce soit la bibliothèque, le "counselling", les services aux étudiants, le socio-culturel, les sports, peu importe; comme, dans un collège moyen, le personnel de soutien requis pour l'ensemble des services nécessaires pour que les activités d'enseignement puissent se donner de près ou de loin, que ce soit par rapport à l'entretien ménager ou par rapport aux techniciens de laboratoire, à chaque fois qu'on a exercé des compressions budgétaires suffisamment importantes et après avoir éliminé, dans la plupart des collèges, toute autre forme de compression - j'entends par là, par exemple, les économies d'énergie, j'entends par là changer de système de téléphonie, réduire certains services qu'on pouvait considérer comme moins essentiels -chaque fois qu'on a fait ces compressions, presque dans chaque cas on a été obligé d'exercer une compression sur ces personnels de soutien, de professionnels et de cadres.

Pendant une année, pendant deux ans, cette compression a pu être possible et a probablement permis certains correctifs et certains réaménagements ou certaines réorganisations administratives. Mais dans les deux dernières années principalement où les compressions ont été encore plus fortes, s'attaquer à simplement une portion de 15% à 20% du budget des collèges mettait carrément en péril certains services.

Il est vrai que dans certains collèges on a, à toutes fins utiles, fermé des services, on a regroupé des services et, à chaque fois, la question se pose: Dans quelle mesure on ne touche pas à la qualité des enseignements, d'une certaine façon, et à la qualité des services qu'on doit donner aux étudiants qui viennent chez nous et qui s'attendent à ces services?

On a atteint le point limite de ces compressions à un point tel où on discutait dans le réseau collégial de la fermeture possible de certains collèges, compte tenu de leurs dimensions, les petits collèges en particulier, qui n'ont, à toutes fins utiles, qu'un seul professionnel par service. Si vous êtes obligé d'exercer une compression dans ce service et que vous coupez le poste de professionnel de ce service, vous n'avez plus ce service ou vous êtes encore obligé de le regrouper avec d'autres services tout en vous posant la question de la qualité qu'on doit continuer de donner.

Tout cela se faisait alors que 70%, 75% ou 80% du budget, selon les collèges, était gelé dans l'enveloppe salariale des enseignants. Dans le mémoire, très clairement, on a dit: Compte tenu de l'évolution, dans les quatre dernières années, de cette situation, il est important maintenant qu'on se retourne vers ce morceau important des budgets des collèges qui s'appelle le budget des salaires des enseignants et qu'on regarde s'il n'y a pas moyen, de ce côté, de faire un effort également, de mettre à contribution les enseignants pour qu'ils contribuent eux aussi à l'effort de compression budgétaire qu'on est obligé d'exercer.

C'est avec cet esprit qu'on est entré dans la présente ronde de négociations et qu'on partageait, dans une certaine mesure, les objectifs de récupération et de compression budgétaire qui sont suggérés du côté des enseignants.

M. Laurin: Dans un autre ordre, vous savez probablement que lorsqu'il a été question ici du niveau primaire et secondaire, il a été beaucoup question de l'impact des

décrets sur la qualité de l'enseignement, sur l'augmentation de la tâche des enseignants, sur l'organisation scolaire. On en soulignait parfois les côtés nocifs, très négatifs même. On nous a dit aussi, par ailleurs, que cela était possible, avec les nouveaux décrets, surtout depuis l'étalement promis le 10 février, d'en arriver à une organisation scolaire tout à fait compatible avec la qualité de l'enseignement et l'atteinte des objectifs que vise le système d'éducation.

Étant donné que l'augmentation de la tâche au collégial se situera aux environs de 13,5%, est-ce que vous pourriez me dire, en l'explicitant, si cette augmentation de la tâche vous paraît compatible avec le maintien de la qualité de l'enseignement et l'atteinte des objectifs proprement éducatifs que vise le système scolaire au niveau collégial?

M. Tremblay (Jean-Noel): M. le Président, je vais répondre à une partie de la question. Ensuite je passerai la parole à M. Hamel qui pourra peut-être donner plus de détails chiffrés sur l'impact comme tel de cette augmentation de la tâche.

Je pense que l'augmentation de la tâche a été au coeur des préoccupations de tous les cégeps pour savoir et pour effectivement être capables eux-mêmes -chacun chez eux - de répondre à cette question: Est-ce qu'on est en mesure d'exercer une augmentation de productivité de l'ordre d'environ 13,5% tout en s'assurant que chacun des départements, chacun des enseignements qu'on doit donner, va continuer d'être donné avec le personnel requis et avec la qualité requise? (21 h 15)

C'est une question complexe puisqu'il faut aussi distinguer le secteur général du secteur professionnel. On sait que dans le secteur professionnel, il y a des disciplines plus lourdes qui exigent qu'on regarde de très près ce que veut dire une augmentation de la tâche d'environ 13%. C'est à l'analyse faite par simulation dans un certain nombre de collèges qu'on en est arrivé à dire qu'au-delà de 13,5%, il y avait une lumière rouge qui s'allumait et qu'effectivement, dans certains secteurs d'activités, dans certains collèges, on en arriverait difficilement à donner les mêmes enseignements avec la même qualité. Je pense que, dans la mesure où on reste en deçà ou très près de 13,5%, on peut répondre positivement à cette question et je demanderais à M. Hamel de peut-être détailler de façon plus chiffrée ce que cela veut dire.

M. Hamel (Yvon): Des simulations qui ont été faites dans un certain nombre de collèges nous ont permis de constater que la récupération de 13,5% qui est possible, d'après les modifications aux paramètres de la tâche, ne sera pas vécue de façon identique dans toutes les disciplines. Il est faux de penser que, parce qu'on réduit de 13,5%, on pourra dire: Tous les professeurs de façon égale, toutes les disciplines de façon égale et tous les collèges de façon égale subiront l'augmentation de 13,5%. Les mécanismes qui sont disparus de la convention collective, mais qui ont été depuis négociés entre la Fédération des cégeps et le ministère permettent de répartir les ressources avec une récupération au niveau du réseau de 13,5%, mais avec des effets un peu différents en termes de récupération, d'un collège à l'autre, comme je le disais, surtout en termes de récupération différente à l'intérieur d'un même collège, d'une discipline à l'autre.

Dans certaines disciplines, les récupérations pourront être d'environ 5% et, dans d'autres disciplines, de 20% ou 22%. Je peux peut-être faire des listes plus longues, si vous le désirez. On peut dire que, de façon générale, les enseignements dits généraux, c'est-à-dire philosophie, français, sciences humaines, auront, globalement, une récupération un peu plus lourde en pourcentage à assumer que les disciplines du secteur professionnel, surtout les disciplines lourdes en termes de tâche, c'est-à-dire certaines disciplines où on retrouve des cours à pondération plus élevée. Il y a un certain nombre de disciplines dans le réseau où on retrouve assez souvent des cours de dix heures, de douze heures. Pour celles-là, la récupération sera un peu plus basse, compte tenu des jeux qu'il faut faire en termes de bâtir une tâche d'enseignant. Il ne sera pas toujours possible d'atteindre 43 ou 44 unités de charge pour ceux-là. En conséquence, la récupération sera un peu plus basse.

Le Président (M. Paré): Est-ce que vous avez terminé? La parole est maintenant à M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: C'est avec crainte et tremblement que je prends la parole à la suite de ce qui nous est arrivé depuis le début de la soirée, mais je le fais quand même parce qu'il faut que l'institution parlementaire fasse son travail, s'acquitte de ses responsabilités le mieux possible. Je ne saurais commencer ces remarques sans signaler à l'attention des représentants de la Fédération des cégeps qu'il y a évidemment des liens entre certains événements qui, nous a-t-on dit, sont survenus en dehors de cette commission et la présence qu'ils ont bien voulu avoir avec nous ce soir. Avant de faire ces remarques, je voudrais poser seulement quelques questions d'information pour commencer. Votre organisme s'intitule la Fédération des cégeps. Est-ce que c'est plutôt une fédération des directeurs généraux des cégeps ou une fédération des cégeps

comme institutions?

M. Tremblay (Jean-Noël): C'est une fédération des cégeps comme institutions puisque, depuis sa restructuration qui date maintenant de tout près de deux ans, les présidents de conseil d'administration et le directeur général sont membres de l'assemblée générale de la fédération, ce qui veut dire que les corporations en tant que telles sont représentées.

M. Ryan: Dans la délégation qui est ici ce soir, pourriez-vous me dire combien il y a de présidents de conseil d'administration et combien de directeurs généraux?

M. Tremblay (Jean-Noël): Il y a un président de conseil d'administration, M. Claude Larouche, qui est le vice-président du conseil d'administration. Parmi les autres membres, il y a deux directeurs généraux, les autres membres sont du côté technique et M. Yves de Belleval est du service des relations du travail, c'est-à-dire de la fédération comme telle. Cependant, il y a deux présidents de conseils d'administration et qui sont aussi membres du conseil d'administration de la fédération.

M. Ryan: Je voudrais vous demander comment a été préparé le mémoire que vous avez déposé ce soir. Une consultation a-t-elle été faite auprès de chaque cégep ou si c'est le conseil d'administration ou l'exécutif de la fédération qui l'a arrêté? Ce mémoire a-t-il été soumis à chaque cégep participant avant d'être présenté à la commission parlementaire? Je reconnais d'ailleurs - et c'est pour cette raison que je vous pose la question pour que tout soit clair - que le temps a été très bref. Je ne veux pas du tout vous instituer de procès. C'est seulement une question d'information pour que nous sachions où nous en sommes au juste.

M. Tremblay (Jean-Noël): Tous les éléments qui sont contenus dans le document que nous avons produit ce soir sont des prises de position antérieures faites en assemblée générale de la fédération. Toute la partie, par exemple, sur les compressions budgétaires et toute la démarche qu'on a expliquée dans la première partie du document font référence, entre autres choses, à un document qu'on a rendu public au printemps dernier sur la répartition des ressources, sur la question des compressions budgétaires et c'étaient des prises de position de la fédération. Toutes les autres parties sur la sécurité d'emploi, sur les départements, en particulier, sur la qualité de l'enseignement viennent ou sont issues d'un mandat que la fédération s'était donné dans la perspective de la négociation qui était en cours.

M. Ryan: Êtes-vous au courant que certains cégeps ont adopté des positions qui sont différentes de celles qui sont présentées dans le mémoire que vous nous communiquez aujourd'hui?

M. Tremblay (Jean-Noël): Oui, nous sommes au courant que certains cégeps ont pris des positions un peu différentes. Dans certains cas, ce sont des cégeps qui ne sont pas membres de la fédération, d'une part, et, dans d'autres cas, les prises de position portaient principalement sur la question de l'augmentation de la tâche. Quant à l'augmentation de la tâche, l'aménagement du décret, qui a été proposé les 9 et 10 février, correspondait aux voeux et aux désirs de certains collèges qui avaient manifesté publiquement des inquiétudes face à l'augmentation de la tâche.

M. Ryan: Pourriez-vous nous mentionner des collèges qui ont...

M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que le collège Édouard-Montpetit a pris un certain nombre de positions; c'est un collège qui n'est pas membre de la fédération. Je pense que le collège de Thetford-Mines a aussi fait connaître un certain nombre de positions et les membres de la fédération ont discuté de son dossier. Nous avons discuté en assemblée générale de ses prises de position. Je pense que nous avons tenu compte, effectivement, d'un certain nombre de recommandations. Nous les avons intégrées d'une certaine façon dans toute la démarche de négociation qui s'est poursuivie et, effectivement, dans la poursuite des objectifs sur la tâche des enseignants, ce genre d'intervention a certainement pesé dans les efforts qu'on a fournis pour essayer de réduire autant que possible l'augmentation de la tâche, ce qui nous a amenés à la position du 10 février dernier.

M. Ryan: M. le président de la fédération, je voudrais soumettre à votre attention un document qui a été publié par le ministère de l'Éducation qui a commencé à circuler aujourd'hui dans les bureaux des députés et qui traite du conflit actuel, sujet pour lequel vous êtes venus à la rencontre de la commission parlementaire de l'éducation. Je ne sais pas si vous avez eu connaissance de ce journal. Vous l'avez devant vous. Pour être bien sûr que c'est le même journal que nous avons, nous allons essayer de l'identifier par une couple de passages et, ensuite, nous en trouverons un qui vous intéresse directement. Dans ce journal, je lis, par exemple, à la page 3 des choses comme celle-ci: "Au total, le gouvernement aura offert successivement

quatre cadres de règlement. La CEQ n'aura eu pour toute réponse que quatre non consécutifs sans jamais aucune autre contre-proposition que le maintien du statu quo, une grève de trois semaines et les allées et venues du président de la CEQ chez le lieutenant-gouverneur et à Washington." Nous avons bien le même document. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Vous serez...

M. Bertrand: Vous, avec vous.

M. Ryan: Oui, parce qu'il paraît que les autorités gouvernementales avaient donné la directive de le laisser à la porte, mais moi j'ai trouvé, en ma qualité de député et de défenseur des droits des citoyens, que cette personne, étant surtout directement impliquée par la loi 111, avait le droit de pénétrer dans l'enceinte du parlement pour exercer les droits qui lui sont reconnus par notre constitution. J'ai mis en pratique la charte des droits que vous avez suspendue.

M. Hains: Bravo!

M. Ryan: Je n'ai pas eu peur de rendre compte de mes actes et j'en rendrai compte longtemps. Je n'en suis pas à ma première photographie. Je ne passe pas mon temps à penser à cela.

Pour terminer sur cet incident, je crois que nous sommes en présence de la même publication, une publication émise sous l'autorité du ministre de l'Éducation et de ses sous-ministres, de toute évidence, et qui ne porte même pas de date. Quand on voudra identifier cela dans quelque temps, on ne saura même pas la date à laquelle cela aura paru. Je ne sais pas quel éditeur est responsable de cette publication. La première chose qu'un éditeur apprend, c'est qu'il faut qu'il mette une date à son document pour qu'on sache quand cela est venu au monde dans le temps. C'est un document qui est rempli d'opinions et d'impressions et qui va bien au-delà du royaume des faits. Il est farci d'opinions politiques, d'interprétations du comportement de l'un ou l'autre des acteurs et est évidemment de nature à influencer le climat dans lequel vont se dérouler les jours qui suivent et en particulier les jours qui nous séparent de la fin de la trêve actuelle. On a vu tantôt une illustration du changement d'atmosphère. Je pense que jusqu'à maintenant à la commission les choses s'étaient très bien passées. Nous avons déploré tantôt les actes complètement contraires à l'ordre de nos travaux qui se sont produits. Je pense qu'encore une fois il y a des explications. Ce n'est pas tombé de nulle part. Ce ne sont pas des choses absolument spontanées. Je pense qu'il y a tout un contexte qui doit nous préoccuper autant que les actions elles-mêmes.

Nous avons pris connaissance en lisant ce journal d'un texte qui émane de la Fédération des cégeps, qui est à la page 6. C'est un extrait d'un document intitulé: "Les cégeps et les compressions budgétaires: la solution, mieux répartir les ressources", en date du mois d'avril 1982. Ce texte ne crée pas de problème en ce qui vous touche. C'est un extrait d'un document que vous avez déjà publié. Je pense que vous le reconnaissez. Est-ce qu'on avait demandé l'autorisation de la Fédération des cégeps pour inclure cet extrait du document dans cette publication gouvernementale?

M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que je peux répondre très clairement à votre question, M. le député. D'abord, disons que l'extrait du document est conforme au texte original qui a été déposé en avril 1982 et qui a été rendu public. Je pourrai le déposer à la commission, si la commission le désire. Je l'ai ici avec moi. Le document a été rendu public, c'est donc un document qui pouvait être utilisé et que le ministère, en conséquence, pouvait s'approprier. Je dois cependant faire une réserve importante. La présentation laisse croire que nous avons donné notre accord pour la reproduction de ce document, ce qui est faux. Nous n'avons pas été consultés sur cette question. J'ajouterai par ailleurs que le titre qui se retrouve dans ce document ne correspond pas, à mon avis, au contenu de l'article.

M. Ryan: Si on vous avait consultés... D'ordinaire la pratique de courtoisie élémentaire pour un bon éditeur lui suggère, avant de procéder à la publication d'extraits d'un texte, même s'il a déjà été rendu public, de communiquer avec l'autre partie pour lui demander: Qu'est-ce que vous en pensez? Auriez-vous objection à ce qu'on prenne un extrait de votre texte? Voici quel extrait nous entendrions publier. Est-ce que vous auriez objection à ce que nous le publiions? La question de droit est assez compliquée et je ne voudrais pas que nous la discutions parce que cela pourrait nous entraîner très loin ce soir. J'ai déjà été éditeur d'un journal et la question des droits de propriété est extrêmement complexe. Je ne veux pas vous engager là-dedans mais je vous pose une question. Si on vous avait demandé votre autorisation en vous disant le genre de publication qu'on s'apprêtait à mettre en circulation au Québec à ce moment-ci, à ce moment très délicat de la crise dans les négociations avec les enseignants des cégeps, des écoles primaires et secondaires publiques du Québec, si on vous avait dit: Nous aimerions que vous soyez partenaires du gouvernement dans cette publication, votre nom ferait du bien, cela serait bon et montrerait le sérieux de notre affaire, la dignité de l'opération, et

qu'on eût poussé la courtoisie jusqu'à vous dire: On va vous montrer le genre de texte qu'on publiera pour que vous sachiez en quelle compagnie vous serez, ayant vu tout cela, est-ce que vous auriez consenti allègrement à ce qu'un texte de votre fédération et le nom de votre fédération soient dans une publication gouvernementale de cette nature-là? (21 h 30)

M. Tremblay (Jean-Noël): Je pense que l'on pourrait effectivement débattre la question fort longtemps en question de droit ou en question politique. La fédération a toujours pris soin, en particulier en période de négociations, de choisir et de faire elle-même les publications qu'elle pense devoir être faites comme organisme autonome défendant les intérêts des collèges. Dans ce sens, nous n'avons pas décidé, dans les circonstances, de faire des publications d'une façon ou de l'autre, dans le contexte actuel.

M. Ryan: Trouvez-vous que ce genre de publication est de nature à faciliter la recherche d'un règlement négocié avec les professeurs syndiqués des cégeps?

M. Tremblay (Jean-Noël): Écoutez, je pense que, depuis plusieurs mois et en particulier depuis le mois de décembre, les collèges ont vécu, chacun dans sa région, toutes sortes de situations extrêmement pénibles et difficiles, dans les deux derniers mois en particulier. Des publications ou des commentaires, qu'ils soient par écrit, à la radio ou à la télévision, sont sortis et ont fait que l'administration même des collèges a été extrêmement difficile. Il est toujours difficile aussi de savoir si un événement ou un autre, un article ou un autre, une déclaration ou une autre est suffisamment déterminant pour modifier, si vous voulez, l'esprit de bonne foi et les efforts faits de part et d'autre pour arriver à des règlements négociés ou pour arriver à des ententes. Je ne suis pas en mesure de juger si ce document ou ces articles ont un effet ou pas dans ce sens. Mais je peux vous dire que depuis plusieurs mois, les administrations de collèges vivent des situations, comme celle qu'on a connue ce soir, qui sont pénibles, dans leur bureau, dans le collège, dans la rue, sur la ligne de piquetage à l'occasion. Nous ne sommes pas encore arrivés - je pense que le temps nous manque - à décaler toutes ces choses pour être capables d'interpréter une pareille chose.

M. Ryan: Toute chose étant considérée, ne trouvez-vous pas, surtout dans cette période de trêve, que la plus grande retenue de langage s'impose en particulier aux deux acteurs principaux?

M. Tremblay (Jean-Noël): On pourrait le souhaiter.

M. Ryan: Merci. Alors, je vais passer à d'autres aspects de la présentation de votre mémoire. Est-ce que vous pourriez nous dire quelle a été la position de la Fédération des cégeps au sujet des lois 105 et 111? Est-ce que vous avez pris position sur chacun de ces deux projets de loi et de quelle manière?

M. Tremblay (Jean-Noël): Nous n'avons pas pris position sur la loi 105 ni sur la loi 111. Notre position, comme Fédération des cégeps, était celle de partenaire dans la perspective de la négociation de la convention collective dans le cadre de la loi 55. À partir du moment où les activités de la loi 55 et de la négociation se sont terminées d'une manière ou de l'autre, je pense que ces responsabilités ont été transférées ailleurs, en particulier au palier de l'Assemblée nationale. Il appartenait au gouvernement et à l'Assemblée nationale de prendre les meilleures décisions dans les circonstances. Nous n'avons pas pris publiquement de position ni sur la loi 105 ni sur la loi 111.

M. Ryan: Le fait que dans la loi 105 l'on définissait toutes les conditions de travail pour trois années à venir, de manière unilatérale finalement, cela ne vous est pas apparu un petit peu exorbitant? Le fait que dans la loi 111, on suspendait, par l'article 28, les droits et libertés garantis dans la Charte des droits et libertés de la personne pour tous les travailleurs visés par la loi 111 et qu'on prévoyait, en cas de dérogation à la loi 111, les sanctions les plus dures, les plus sévères qui aient jamais été imaginées par le législateur québécois, cela vous a paru relever d'une autre juridiction? Cela ne vous regardait pas?

M. Tremblay (Jean-Noël): Ce que nous avons fait là-dessus? Je pense que la loi 105 qui a amené les décrets, résumait, le plus loin, semble-t-il, où on avait pu aller à ce moment-là dans les négociations qui ont été faites antérieurement à l'adoption de la loi 105. Et je pense que pour l'essentiel sont inscrits dans les décrets les dernières offres, les dernières discussions ou les derniers paraphes, selon les contextes et selon les conventions collectives avec lesquelles les différents groupes négociaient, et qui ont pu être discutées ou mises sur la table d'une façon ou de l'autre. Dans une bonne proportion, les mandats que la fédération s'était donnés pour aller négocier se sont retrouvés dans les décrets. Nous avons connu des décrets antérieurement, en 1972, par exemple, qui fixaient aussi les choses pour trois ans et cela nous est apparu là aussi une conclusion, semble-t-il, inévitable du contexte actuel des négociations.

Au sujet de la loi 111, je pense que chacun des administrateurs de collège, chacune des directions de collège pourrait dire ce qu'elle a ressenti devant la sévérité de la loi 111 et surtout du lot qui lui était fait de devoir, d'avoir l'obligation de l'appliquer. Mais en tant que fédération, nous n'avons pas pris position sur la loi 111 elle-même.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Vachon.

M. Payne: Merci, M. le Président. Je pense que l'heure est à la réflexion, mais aussi à la réconciliation. C'est le gouvernement qui est responsable de la masse salariale, des dispositions des conventions collectives qui touchent aux salaires et aux questions financières.

Cependant, lorsque les représentants des enseignants sont venus devant la commission de l'Assemblée nationale, ils ont porté une attention particulière et insistante sur un des trois points du litige, notamment le département. Les autres, on le sait très bien, étaient la tâche et la sécurité d'emploi. Au moment où la commission délibère sur les mérites des suggestions, des revendications et des plaintes déposées par les enseignants, je pense qu'on devrait aussi poser des questions à la Fédération des cégeps sur le département.

Lorsque je dis conciliation, je m'étonne du ton qu'il y a dans le mémoire tel que déposé par la fédération. Je présume que cela reflète les conseils que la fédération a donnés au gouvernement en tant que partenaire des négociations. Cela reflète une attitude réelle de son côté. Je trouve que le ton du mémoire est, je dois ie dire, démagogique. Il ne me semble pas démontrer une certaine sensibilité pour le professionnalisme des enseignants, pour le travail qu'ils font, la bonne foi qu'ils démontrent dans le système. Je me demande si le conseil que vous donnez au gouvernement est bien fondé en réalité. Le genre de langage, tel que celui qu'il y a à la page 9: "L'inféodation des instances de concertation telle la commission pédagogique aux impératifs syndicaux." Je dois dire que les impératifs syndicaux dans beaucoup, beaucoup de collèges sont l'ensemble des enseignants. Je pense aux enseignants de l'anglais langue seconde, des matières techniques, ce ne sont pas des syndicalistes irresponsables. Ce sont des gens dont l'expérience est éminemment sérieuse, compétente et professionnelle. Vous vous demandez comment interpréter le fait que les tentatives patronales n'incluent pas de suggestions de "partnership" ou de collaboration. Vous dites: "patronales de mettre sur pied des entreprises d'évaluation des pratiques, méthodes, expériences, contenu pédagogique..." Je me réjouis. Mais refusez- vous de croire que dans la commission pédagogique où les enseignants partagent la tâche, la mission éducative, ils sont de bonne foi? D'où vient que vous conseillez le gouvernement à insinuer que dans nos collèges, les intérêts des syndicats sont bornés? On peut bien voir et bien déplorer aussi les manifestations de frustration telles que celle montrée ce soir. Je peux vous dire que ce n'est pas nécessairement l'ensemble des enseignants qui y croient.

Vous dites un peu plus loin, je cite: "Selon l'observation effectuée par la commission d'évaluation l'idéologie autonomiste qui anime plusieurs départements, est telle qu'elle menace souvent l'équilibre institutionnel du collège." Remarquez bien, il ne faut pas dire que cela est généralisé. Je peux vous dire que je crois que la situation générale est une situation équilibrée entre les enseignants présents dans la commission pédagogique et dans le cas des départements, c'est une instance qui, normalement - nommez n'importe quelle matière, n'importe quel programme, n'importe quel département - va très bien. Cela allait d'ailleurs tellement bien que vous avez signé une entente, en 1979, une convention collective qui reconduisait essentiellement ce qui était contenu dans l'entente de 1976 signée par le parti de l'Opposition aujourd'hui. Vous voulez maintenant changer les règles du jeu. Je me demande si au moment de poser un geste -je ne parle pas pour le gouvernement, je pense qu'à titre de parlementaire on devrait être assez objectif face à la réalité - je ne suis pas sûr que vous vous soyez bien acquittés de la mission et que vous ayez bien conseillé le gouvernement en ce qui concerne le fonctionnement des départements.

Les enseignants ont fait des sacrifices. Le ministre a souligné à plusieurs reprises que cela était vrai, vous aussi d'ailleurs. Il y a la récupération salariale, c'est bien, c'est nécessaire. Je suis pour la position du gouvernement en ce qui concerne le fait que la tâche doit augmenter comparativement à ce qui se passe ailleurs. Je suis en faveur de la récupération salariale. Je suis pour les démunis afin qu'on puisse affecter la récupération vers les plus démunis de notre société. Cela est une question de principe. Pas seulement cela mais même dans l'allocation des ratios professeurs-élèves le nombre était - on se souvient très bien mais je veux vulgariser parce qu'on ne devrait pas entrer dans un langage technocrate - un professeur pour 15 étudiants. C'est ce qu'on appelle le ratio 1/15. En ce qui concerne les responsables de l'administration le ratio était 1/20. (21 h 45)

Maintenant, dans le décret, les nombres ne sont plus séparés. Cela vient à même les

fonds de la norme 1/15. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi là-dessus?

Une voix: ...

M. Payne: C'est un autre sacrifice à signaler en ce qui a trait à l'allocation des professeurs. Il faut bien, en toute justice, signaler que les professeurs, les enseignants, ont fait un sacrifice additionnel, nécessaire j'en conviens, mais il faut le reconnaître.

Au moment où les enseignants viennent devant la commission pour revendiquer, pour porter plainte sur un sujet sur trois - j'ai nommé les deux autres - ils disent: Pouvez-vous écouter notre point de vue? Je me demande si vous n'êtes pas prêts à être conciliants, à être un peu plus souples parce que c'est à ce chapitre que vous êtes le missionnaire avec les enseignants, le collaborateur, je dirais, avec les enseignants. Vous n'êtes pas le mandataire. S'il faut vraiment spécifier et localiser la mission éducative, c'est bien dans la salle de classe. Ce sont les enseignants qui sont responsables. Donc, le gouvernement n'est pas à ce chapitre. Votre rôle, à mon avis, est limité. L'important comme administrateur, comme gérant, c'est qu'il est toujours nécessaire d'avoir une dernière instance.

En bon gestionnaire, je pense, particulièrement au moment d'une crise, vous auriez peut-être dû conseiller le gouvernement parce que c'est vous qui avez une attitude là-dessus en tant que syndicat. Pourquoi n'étiez-vous pas prêts à vous asseoir avec les syndiqués? Comme je l'ai dit, ils ne sont pas braqués, selon mon expérience. Ce sont les enseignants de nos étudiants, qui sont sérieux, qui préparent leurs tâches et qui ajoutent des heures et des heures en dehors de leur horaire pour planifier la programmation, l'allocation des ressources humaines, l'ordre du jour de la commission pédagogique, les tournées pour les étudiants.

J'ai vu beaucoup de bonne foi chez la majorité des enseignants. Vous avez raison. Dans certains endroits, effectivement, particulièrement à la commission pédagogique - et même au sein du département lui-même - là où les représentants du personnel de soutien, les administrateurs et les enseignants s'asseoient ensemble pour discuter du contenu de nos programmes, vous faites des recommandations au collège, à l'administration et à la Direction des services pédagogiques. Normalement, ça marche bien. Il y a des exceptions, mais les exceptions ne font pas la règle.

J'ai une proposition à faire. Vous devriez peut-être, à ce moment-ci et peu importe le mérite pour le moment, pendant les prochains sept jours, vous asseoir avec les responsables des enseignants et vous demander si on ne pourrait pas trouver un modèle - il n'y a pas de modèle parfait; il y a des expériences plus ou moins bonnes - de cogestion? Si j'ai entendu ce que la FNEEQ a dit, particulièrement en lisant le mémoire - je n'aimais pas trop le langage, je le trouvais aussi démagogique que le vôtre - il était rempli des mêmes préoccupations, il manifestait les mêmes symptômes, et pour les mêmes causes, que le vôtre. Pour moi il y a là beaucoup de matière pour continuer à discuter avec eux.

Je pense qu'il pourrait être intéressant que quelqu'un puisse voir cela. Pour moi, il n'y a personne de mieux placé que le ministre pour voir exactement quelles sont les revendications des enseignants et les vôtres. C'est plus important que jamais parce qu'il y a des sacrifices dans les sociétés, dans les cégeps, chez le personnel de soutien et pour tout le monde. Mais là où cela ne coûte pas un cent, où c'est une question de bonne foi, une question de gérer la coopération, je préfère appeler cela un collège, c'est important de s'asseoir avec les enseignants.

J'aimerais revenir à un autre petit point pour terminer. Il y a eu beaucoup de discussions ce soir sur l'information, particulièrement de la part du député d'Argenteuil, concernant ce qu'on appelle les mesures de relocalisation. Cela veut dire que le gouvernement a cru bon, pour la première fois - et je pense que cela démontre la bonne foi du gouvernement - d'avoir toute une série de mesures pour absorber les enseignants mis en disponibilité. Vous savez très bien de quoi il s'agit, c'est écrit dans le décret; elles étaient aussi contenues dans le cadre de règlement du 10 février: 1. Congé sabbatique. 2. La possibilité, pour un enseignant qui choisit de recevoir pendant quatre ans 80% de son salaire, de prendre un congé sabbatique la cinquième année. Une excellente mesure pleine d'imagination proposée par le gouvernement. 3. La possibilité pour un enseignant de se déplacer dans la fonction publique, occuper une place libre. 4. La possibilité pour un enseignant, par exemple, d'aller dans l'entreprise privée. Le gouvernement offrait alors une prime - cela coûte de l'argent - à l'employeur. 5. La possibilité pour un enseignant senior de prendre une retraite anticipée, c'est-à-dire qu'il prend sa retraite un peu plus tôt que prévu pour permettre à de jeunes enseignants de prendre la place avec l'énergie, avec l'enthousiasme qu'ils ont après toutes ces années de formation. Donc, ceux qui voudraient prendre leur retraite pourraient le faire. Une excellente proposition qui coûte cher.

Ma question est la suivante: Avez-vous vraiment communiqué, à titre d'information, aux enseignants le contenu de cela? J'ai pris

la peine, comme député de l'Assemblée nationale, de rencontrer les enseignants. Mes portes de bureau n'étaient jamais fermées. D'ailleurs, je me suis déplacé pour les rencontrer. Je leur ai fait part du cadre de règlement et de certains éléments du décret et ils ont dit: Nous n'en savions rien, nous n'en connaissions rien.

Pourtant, et vous en êtes, les représentants des directeurs généraux des collèges et les présidents des collèges ont déploré tout à l'heure que le gouvernement distribue l'information. On peut juger de la qualité de l'information - quoiqu'on doive en discuter comme il le faut devant cette commission - mais le principe de communiquer quelque chose, je suis certain que le député d'Argenteuil n'a jamais remis cela en question. Donc, avez-vous vraiment communiqué aux enseignants les mesures incitatrices, d'encouragement, par exemple, à absorber les mises en disponibilité?

Je propose que vous vous assoyiez, la semaine prochaine, avec les responsables, pour discuter certaines choses des décrets qui m'inquiètent. Par exemple, là où c'est écrit que le collège peut accorder, dans les mesures que je viens de citer, un congé sabbatique. Si, à l'heure actuelle, il y a un manque de volonté, une certaine méfiance, vous pouvez peut-être conseiller le gouvernement sur les modalités possibles de mise en application de ces mesures incitatrices. Là encore, je pense que c'est important.

Je ne voudrais pas que vous vous moquiez d'une tentative nécessaire au moment d'une crise alors que la tension est aggravée. Si, comme parlementaires, nous pouvons entendre les frustrations des enseignants et les vôtres, eh bien, on a fait un bon bout de chemin pour la mission éducative.

Je reviens à mon thème principal.

Le Président (M. Paré): En concluant, s'il vous plaît:

M. Payne: Je ne serai pas content, comme député, comme parlementaire, aussi longtemps que vous n'aurez pas convaincu les parlementaires dans l'ensemble de la possibilité de continuer l'expérience qui est toujours limitée à un principe de cogestion tout en respectant votre droit ultime de gérer les collèges.

J'inviterais, en terminant, M. le Président, la FNEEQ à mettre de côté la démagogie et à regarder la possibilité de revenir s'asseoir avec le gouvernement, pour qu'on puisse trouver une solution qui ne coûte pas un cent, mais qui coûte beaucoup de bonne foi et beaucoup d'engagement moral, des deux côtés, pour concilier les deux parties en ce qui concerne le département particulièrement - c'est une autre disposition dans le décret - afin que cela soit plus vivable. Finalement, ceux qui vont être les vrais missionnaires des cégeps, à mon avis, ce seront les enseignants. Si on peut améliorer cette situation, on le fait pour nos enfants et pour les générations à venir.

Ce ne sont pas des questions que je pose dans mon intervention. J'ai certains éléments de réponse. Si vous avez des commentaires, j'aimerais les entendre.

M. Tremblay (Jean-Noël): Je demanderai tantôt à M. Leduc d'intervenir sur cette question plus précisément, celle du département dont vous faites part. Vous mentionnez, de façon plus large, un problème qui est senti dans les collèges et qui est vécu depuis de nombreuses années.

D'abord, permettez-moi un correctif. Lors de la dernière ronde de négociations sur la question du département, le mandat que la fédération s'était donné en termes de négociation n'a pas été le mandat retenu par le gouvernement. On a invoqué l'article 18b de la loi 55 pour arriver à un règlement négocié. Ce qui fait que la fédération n'était pas nécessairement d'accord avec le contenu de la dernière ronde de négociations sur le département.

Mais, plus largement, lorsqu'on parle des enseignants, je pense qu'il y a deux grandes dimensions très importantes. On parle souvent de l'enseignant dans le métier d'enseigner, c'est-à-dire dans les conditions objectives: le nombre d'heures de travail, le nombre d'heures de préparation, ce que cela suppose comme recherche, ce que cela suppose comme travail autour de cette question, comme vous l'avez illustré. Tout cela se traduit toujours dans des termes de convention collective d'une manière ou d'une autre. La charge, les heures de préparation, tout cela est inscrit dans la convention collective.

Mais lorsqu'on parle des enseignants -les administrateurs de collège sont bien placés, sous cet angle - il faut aussi parler de l'éducateur comme tel. C'est l'autre volet du même professionnel. Celui qui s'intéresse au suivi de ses étudiants, celui qui prépare des semaines thématiques, celui qui prépare des voyages pour faire des visites industrielles ou des choses comme celles-là, toute cette dimension qu'on pourrait ramener à un thème qu'on utilisait auparavant qui est une espèce de vocation de l'enseignant. Vous pouvez être assuré que, là-dessus, la Fédération des cégeps et les administrateurs des collèges sont conscients de cette réalité et ils ont énormément de respect pour cette dimension du travail dont on n'entend à peu près pas parler. (22 heures)

Un des éléments mentionnés dans notre document est justement que, trop souvent, le

discours concernant les enseignants, concernant le professionnalisme de ces gens, est trop limité à la partie objective de l'enseignant, celle qui est mesurable, celle qui est observable, laissant complètement de côté toutes les autres dimensions de ce métier qui en font effectivement la partie qualitative. C'est vrai non seulement durant la période des rondes de négociations, mais c'est aussi vrai entre les périodes de négociations puisque, dans les collèges, trop souvent, les discussions qui tournent autour du métier d'enseignant, qui tournent autour de l'enseignant, autour de toutes les conditions qui doivent être remplies, sont amenées tout près de l'interprétation des articles des conventions collectives, par exemple, ou autour des termes mêmes des articles ou des chapitres qu'on trouve dans les conventions collectives. C'est le sens qu'il faut donner aux interrogations que vous allez retrouver en page 9, en particulier.

Lorsqu'on s'interroge, comment se fait-il que, sachant tout cela, nous, le voyant à l'oeuvre, y contribuant aussi, travaillant avec les départements - il faut savoir que les administrateurs de collège et les directeurs de service pédagogique travaillent étroitement avec les départements - ce qui ressort de nos discussions plus officielles, à toutes fins utiles, que ce soit en commission pédagogique, dans les relations entre les départements et avec le chef de département, c'est que cela en revient toujours à cette dimension qui est très proche de la négociation, qui est toujours très proche des discussions autour des conventions collectives?

M. Payne: J'ai posé une question.

M. Tremblay (Jean-Noël): La réponse à cela - c'est pour cela qu'on l'a mentionné ici - le conseil des collèges en a fait une lecture, lui; ce n'est pas notre lecture à nous. C'est sa lecture, à lui, et je pense que c'est un organisme crédible.

M. Ryan: ... de la Fédération des cégeps. Je voudrais vous demander si le député de Vachon n'aurait pas dépassé le temps qui lui était imparti depuis un certain temps.

Le Président (M. Paré): Effectivement, M. le député de Vachon a utilisé le temps qui lui était alloué pour faire ses commentaires et poser ses questions.

M. Payne: M. le Président...

Le Président (M. Paré): C'est maintenant la réponse.

M. Ryan: Non, non, je regrette, mais la réponse compte avec le temps du député.

C'est le traitement qu'on nous applique depuis le début des travaux de la commission.

M. Payne: M. le Président, est-ce que je peux avoir la parole?

Le Président (M. Paré): Un instant. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'attends d'abord la réponse du président. J'aimerais qu'il nous dise exactement où nous en sommes. Ensuite, si le député de Vachon a des commentaires à faire, j'en aurai moi aussi.

M. Payne: M. le Président...

Le Président (M. Paré): Un instant, s'il vous plaît, je veux répondre à la question. Le député de Vachon a utilisé les vingt minutes qui lui étaient allouées. On peut entendre la réponse, s'il y a consentement; sinon, ce sera ensuite le député de Louis-Hébert qui se verra allouer une période de questions, même si le temps est dépassé, justement par équité et pour permettre aux deux partis de se faire entendre.

M. Payne: M. le Président...

Le Président (M. Paré): M. le député de Vachon.

M. Payne: ...je ne veux pas être exigeant quant à nos privilèges, mais je pense qu'à ce moment-ci, c'est assez important que nous déployions tous nos efforts pour trouver une solution, une entente de conciliation. Le député d'Argenteuil, tout à l'heure, a parlé de l'information.

Le Président (M. Paré): Vous avez raison, j'admets l'importance du dossier et des auditions, sauf que vous conviendrez avec moi que la commission doit observer le règlement qui permet un maximum de vingt minutes par intervenant. Donc, nous devons nous conformer au règlement. De plus, une entente est intervenue ce matin et il nous faut essayer de la respecter si nous voulons entendre tous les groupes qui sont ici. Étant donné que le règlement est clair et précis là-dessus, j'aimerais savoir s'il y a consentement des deux partis pour pouvoir entendre la réponse des gens qui sont ici pour répondre à nos questions.

M. Ryan: Par courtoisie pour les témoins qui sont ici, nous consentons volontiers à ce que le directeur général de la Fédération des cégeps complète sa réponse dans un temps qu'on souhaite assez bref. Ensuite, je pense qu'il faudra qu'un règlement de justice pour tout le monde que

l'on doit appliquer s'applique et cela n'est pas du tout, de ma part, l'expression de la moindre pensée de mauvaise disposition à l'endroit du député de Vachon, dont j'ai beaucoup apprécié l'intervention. Je pense que son intervention était valable. Il pourra la continuer sur d'autres tribunes, comme nous le conseillait tantôt le président. Il y a d'autres moyens. Le président nous a dit qu'on s'en tenait aux moyens qui étaient ceux de la commission ici. Deuxièmement, il nous a dit que les décisions qui ont été prises sur le partage du temps n'ont pas à être reprises et qu'elles ne doivent pas être changées d'ici la fin de la journée. J'aimerais qu'on s'en tienne à cela.

Le Président (M. Paré): Donc, effectivement, c'est ce qui a été décidé et, dans ce sens, nous allons poursuivre les travaux de la commission. On va vous demander, s'il vous plaît, de répondre rapidement aux questions du député de Vachon.

M. Tremblay (Jean-Noël): Je conclus sur l'intervention que je viens de faire pour dire simplement que les administrateurs de collège, la Fédération des cégeps, ont énormément de respect pour le métier d'enseignant et c'est évident que, dans ce sens, on recherche toute forme de collaboration qui pourrait être souhaitable et qui donne un climat de travail fort intéressant.

Je voudrais - à partir de maintenant, si vous voulez, depuis tout le temps, c'est un peu cela - répondre sur la question du département. Là-dessus, il y a un objectif fondamental qui est poursuivi. Il faut s'assurer, dans le cas du département, qu'on voit bien les responsabilités imparties à chacun: au coordonnateur du département, aux membres du département eux-mêmes, aux administrateurs du collège. Dans la mesure où on a des articles de convention qui sont clairs à ce sujet, en termes de responsabilités respectives, le département sera capable de rendre compte, comme il se doit, à l'institution de la manière dont les choses doivent être faites et des résultats obtenus, ce qui permet à cette institution de rendre compte d'elle-même au ministère de l'Éducation et au ministre de l'Éducation de la façon dont se déroule la mission qui lui a été impartie.

Il y a d'autres questions qui ont été posées concernant la relocalisation, concernant la tâche. Je demanderais à M. Yves de Belleval de répondre à la question sur la relocalisation.

M. de Belleval (Yves): Nous n'avons pas jugé bon, dans notre mémoire, de revenir sur les mesures de relocalisation qui ont déjà fait l'objet d'exposés. Nous n'avons pas communiqué aux enseignants le contenu de ces mesures. Nous n'avons communiqué aucune information aux enseignants relativement à la négociation. Je vous avoue que j'ai l'impression que la fédération et son assemblée générale hésiteraient énormément à utiliser cette façon de faire parce que je crois que c'est traditionnellement très bien reconnu que c'est là un procédé qui ne respecte pas les instances syndicales. Je crois que c'est cela la raison de fond pour laquelle... C'est extrêmement délicat, je crois, de communiquer directement d'une partie partronale négociante vers les salariés. Oui, nous avons informé notre assemblée générale de ces mesures à deux reprises dernièrement. Il y a environ une quinzaine de jours, la dernière fois.

Le Président (M. Paré): Merci. La parole est maintenant au député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Les appels à la réconciliation du député de Vachon font plaisir à entendre. Ils sont peut-être, cependant, un peu tardifs. Le reproche qu'il adresse à la Fédération est que les cégeps n'auraient peut-être pas fait les pressions qu'ils auraient du faire pour convaincre le ministère de s'ouvrir les yeux et d'agir d'une façon plus souple, plus flexible, plus conforme aux objectifs qui sont ceux des cégeps. Je soulignerai en passant que le député de Vachon a possiblement un devoir à ce sujet. Il est probablement beaucoup plus en contact ou a beaucoup plus de possibilités de parler, de rencontrer, de discuter, d'informer et de convaincre le ministre de l'Éducation, étant donné qu'il siège du même côté de la Chambre que lui. Mais étant donné que le député de Vachon semble être au fait d'un certain nombre de choses qu'il a très bien expliquées - je le rejoins sur la plupart de ses propos - est-il pour autant justifié, M. le Président, de lancer le ballon dans le camp de la Fédération des cégeps, alors que lui, comme député ministériel, est à même de pouvoir frapper à la porte du ministre de l'Éducation? Peut-être est-ce parce qu'il l'a fait sans succès. Peut-être a-t-il fait des tentatives. Peut-être a-t-il tenté d'attirer l'attention du ministre sur un certain nombre de lacunes des propositions gouvernementales, mais la réception qu'il a eue l'a peut-être découragé. C'est très compréhensible. Il ne serait pas le premier, d'ailleurs, mais à ce moment-là, la question que je lui pose est la suivante: Comment peut-il espérer que les gens qui sont excentriques, qui sont en dehors du centre, qui n'ont pas les contacts et les possibilités de discussion dont il peut disposer puissent avoir une réception qui soit meilleure que celle qu'il a eue lui-même? De deux choses l'une: ou il l'a fait et cela n'a

rien donné - à ce moment-là, la fédération est dans une situation difficile compte tenu de cela - ou possiblement, et j'en doute, il ne l'a pas fait et peut-être devrait-il le faire. Mais il l'a probablement fait.

Chacun son métier et les moutons seront bien gardés. Je pense que la Fédération des cégeps a une responsabilité qui est la sienne. Le gouvernement a la sienne et les députés ministériels ont la leur, de même que les députés de l'Opposition. Les appels à la réconciliation du député qui m'a précédé sont très bien et je les endosse, sauf que là où je me pose de sérieuses questions, c'est quand les gestes qui sont posés par le gouvernement du parti dont il est membre ne sont pas de nature conciliatoire. Je fais plus particulièrement allusion au document qui a fait l'objet de longues discussions et de tentatives de la part de l'Opposition de sensibiliser le ministre, le gouvernement sur le manque d'à-propos d'une démarche semblable. Cette démarche est-elle faite à ce moment précis tout simplement par maladresse ou est-ce par calcul purement politique? Est-ce que cela a un rapport avec des instances partisanes qui vont se tenir demain et après-demain à l'hôtel Le Concorde ici à Québec? A-t-on un message à faire passer à certaines personnes qui vont se réunir là? C'est peut-être le cas, sauf que j'attire l'attention de cette commission sur les effets néfastes d'une telle démarche. Cela peut enlever le feu pendant un certain nombre de jours, le temps nécessaire pour passer le samedi et le dimanche, mais cela risque d'attiser les flammes pour la semaine et les mois qui suivent. Je pense que les parlementaires et le gouvernement se doivent d'être inquiets de cette façon de faire. Je ne pense pas que cela a été fait d'une façon innocente. Je pense qu'il y a un calcul politique là-dedans. On n'improvise pas ce genre de choses. Ces choses se préparent. Ces choses sont calculées. Ces choses n'arrivent pas par hasard. Force nous est de le déplorer, et de le déplorer d'autant plus qu'on tente de faire cautionner partiellement par la Fédération des cégeps la publication en utilisant un document qui, nous dit-on, est exact, c'est-à-dire qu'il est reproduit intégralement, sauf que le titre a été changé, a été modifié et a même été qualifié comme ne représentant pas exactement le contenu du texte. Si nous avons des exemples semblables, on peut se poser de sérieuses questions, surtout quand on réalise que dans ce document il y a un éditorial qui représente une position officielle, j'imagine...

Mme Lavoie-Roux: Pas signé. (22 h 15)

M. Doyon: ...du gouvernement. On se fait fort de signer cet article "Comment mieux répartir nos ressources", mais on ne signe pas l'éditorial. On n'en donne d'aucune façon la source. Qui est le responsable de cet éditorial? On aimerait le savoir. Quand on se sert des documents qui ont été produits par autrui, on ne se gêne pas pour écrire "document par la Fédération des cégeps". Est-ce que c'est pour tenter de récupérer à son compte une crédibilité qu'on n'a plus? Est-ce que c'est cela le but? Et si les représentants de la Fédération des cégeps nous indiquent qu'ils n'ont pas été consultés sur cette utilisation, qu'ils n'ont pas eu leur mot à dire et que si on les avait consultés, compte tenu de ce qu'ils savent maintenant de la nature du document, ils auraient eu de très sérieuses réserves à son utilisation à des fins telles que celle-là. Cela rejoint ce que disait M. de Belleval tout à l'heure quand le député de Vachon lui demandait s'il y avait eu de l'information par les cégeps eux-mêmes vis-à-vis des membres des syndicats d'enseignants dans les cégeps. Il nous a fait part qu'il y avait une position qui était respectueuse des instances syndicales, de la hiérarchie syndicale et qui visait à respecter les représentants démocratiquement élus qui ont des responsabilités envers leurs membres. Je dois vous dire que c'est une position que nous endossons complètement. Et c'est tellement vrai, que les incidents disgracieux et malheureux dont nous avons été les témoins, ce soir, découlent de tentatives de supposée information par une partie qui est directement impliquée et ce, à même les fonds publics.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Paré): M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Je voudrais que vous nous disiez si nous sommes ici pour entendre des organismes qui ont été invités ou si nous sommes ici pour entendre des discours tels que celui prononcé présentement par le député de Louis-Hébert. C'est une directive que je vous demande. Je pense qu'on a invité des organismes, que nos questions, nos interventions doivent être adressées aux organismes invités. Notre mandat est d'apporter un éclairage sur les questions de la sécurité d'emploi, de la tâche, de la qualité de l'éducation. Je pense que le député de Louis-Hébert va au delà du mandat qui a été donné à cette commission.

Le Président (M. Paré): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, sans vouloir chercher à vous influencer en aucune manière, je voudrais essayer de contribuer à une décision juste dans ce cas. Je vous rappelle simplement que tout à l'heure, le

député de Vachon a mis 20 minutes complètes à faire un exposé - il n'écoutait pas pendant ce temps, il parlait - il exprimait ses opinions et c'était son droit le plus strict. Je crois que nous ne l'avons aucunement interrompu, nous l'avons laissé écouler son temps de parole au complet. Maintenant, le député de Louis-Hébert émet ses opinions en réaction à ce qu'il a entendu ce soir. Il émet des opinions sur le comportement de l'acteur majeur dans le présent conflit qui est le gouvernement et, en particulier, le ministère de l'Éducation. Le public jugera de la validité des opinions qui sont émises. Mais je pense que la pertinence de ses opinions ne saurait faire l'objet d'aucun doute et de vouloir l'interrompre à ce moment serait un abus de pouvoir.

Le Président (M. Paré): La commission est effectivement ici pour entendre des mémoires qui nous sont présentés par les différents organismes qui sont passés ou qui sont à venir. Les intervenants sont ici pour poser des questions relativement au dossier global de l'éducation et du conflit qu'on vit présentement. Donc, comme on a été depuis le début assez large quant aux questions, je ne suis pas en mesure de juger ou de décider si, versus la largesse qu'on a acceptée depuis le début, on pourrait être en mesure justement de limiter le débat. Sauf que j'aimerais rappeler au député de Louis-Hébert qu'il reste à peine quatre minutes pour avoir l'équité entre les deux partis.

M. Ryan: M. le Président, par souci de précision, je voudrais vous demander une chose. Vous avez dit que le rôle des députés consistait à poser des questions. J'espère que vous n'avez pas d'objection à reconnaître qu'il consiste aussi à exprimer des opinions s'ils jugent qu'ils doivent le faire.

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député d'Argenteuil. Effectivement, c'est presque toujours ce qui se passe par un préambule avant les questions. C'est ce qui s'est passé depuis le début et c'est certainement ce qui continuera de se faire. Donc, je demanderais de continuer pour le temps qui vous est alloué, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Les inquiétudes que j'exprime sont de nature à éclairer le débat que nous avons ce soir. Nous ne sommes pas désincarnés et nous sommes témoins de circonstances et d'événements qui se produisent et qui vont, j'en suis convaincu, avoir un effet très certain et très sérieux sur le déroulement, sur l'aboutissement des démarches de cette commission. Passer ces faits sous silence, ce serait desservir la commission parlementaire, ce serait manquer à notre devoir.

Je comprends que cela puisse être désagréable pour les gens qui nous font face d'entendre rappeler ces gestes malheureux et déplacés. Je crois cependant que l'Opposition est ici pour veiller au grain. Quelles que soient les objections que j'entende de l'autre côté, j'ai l'intention de continuer dans la même veine parce que ne pas le faire, ce serait éviter le fond du problème. Nous nous trouvons devant la situation où cette commission a été convoquée pour permettre aux parties de se rencontrer, d'exprimer leur point de vue et de le faire dans un climat de sérénité. Ce climat de sérénité doit être préservé par tout le monde, et je pose la question: Qui a brisé ce climat, qui a amené un élément de trouble et de dérangement à l'intérieur des travaux de cette commission, si ce n'est le gouvernement qui a pris la responsabilité, la décision, et il doit en porter le fardeau, de publier un document à 400 000 exemplaires, de le faire expédier en première classe, s'il vous plaît! en première classe, comme une lettre personnelle, aux frais des contribuables? Il a jugé bon de publier ce document qui est un document teinté d'opinions, de propagande et de messages qui sont ceux du gouvernement, et qui, pour dire le mot, est à proprement parler démagogique. Je voulais le rappeler au député de Vachon parce qu'il a reproché à la Fédération des cégeps d'avoir présenté un mémoire qui était démagogique.

M. le Président, si je compare le document que nous avons entre les mains, et dont la lecture nous a été faite par le président de la Fédération des cégeps, avec cet autre document qui nous a été remis par le gouvernement, il n'y a pas de commune mesure. Je ne pense pas qu'on puisse qualifier du même mot démagogique le document qui provient de la Fédération des cégeps et celui que le ministre de l'Éducation a pris la responsabilité de distribuer à travers la province de Québec en première classe, aux frais des contribuables du Québec encore une fois.

Quiconque s'insère dans une négociation en passant par-dessus la tête des instances syndicales le fait à ses risques et périls, et les dangers sont extrêmement grands. Je pense qu'il y a une leçon à tirer de tout cela et je termine là-dessus. Souhaitons que la maladresse, si c'est une simple maladresse, ou la malhonnêteté... Je demande à ceux qui en sont les victimes de ne pas tenir rigueur au gouvernement soit de cette maladresse, soit de cette malhonnêteté pour permettre quand même qu'on continue d'avoir espoir dans un règlement au bénéfice des usagers des services de l'éducation.

Cette commission doit amener non seulement les parties, mais la population à réaliser le rôle que joue le gouvernement. Il est ambigu, il est difficile à cerner. Je

termine sur ces mots: Espérons que demain, après-demain, la semaine prochaine, on ne prendra pas prétexte - parce que cela me paraît non seulement un prétexte, mais une raison qui pourrait être fondamentale - de la distribution d'un document, tel que celui qu'on a eu entre les mains, pour refuser de reprendre une forme de négociation qui pourrait nous amener à un règlement.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le député. Pour couper court à la tradition, je ne demanderai pas aux représentants de l'Opposition ni au ministre de vous remercier. Je vais le faire en leur nom et au nom de tous les membres de cette commission, en nous excusant des délais qui sont communs normalement ou anormalement, mais je n'ai pas à l'évaluer, mais je vais simplement vous dire qu'on vous remercie beaucoup de votre présence et de votre mémoire.

Maintenant, il y a un petit problème technique à régler. L'Association des directeurs généraux des commissions scolaires doit intervenir ainsi que l'Association des cadres scolaires du Québec et la Fédération des comités de parents de la province de Québec. Compte tenu des événements, je vais simplement dire qu'il nous reste environ le temps d'entendre un organisme, à moins que - c'est la question que je pose - ces deux organismes, qui sont différents d'une certaine façon en termes de travail à faire, l'Association des directeurs généraux ainsi que l'Association des cadres scolaires acceptent et que l'ensemble des membres de la commission acceptent qu'elles témoignent ensemble pour leur éviter des frais additionnels si elles devaient revenir, si on continue à travailler comme on l'a fait, c'est-à-dire que l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires serait convoquée la première.

Si vous me dites que...

Oui, M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, est-ce qu'on peut suspendre deux minutes pour se comprendre?

Le Président (M. Jolivet): II y a toujours moyen de suspendre, cela va permettre de régler certains petits problèmes techniques. Dans deux ou cinq minutes au maximum, je reviendrai.

M. Leduc (Fabre): Merci. (Suspension de la séance à 22 h 27)

(Reprise de la séance à 22 h 37)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il-vous-plaîtl

La commission reprend ses travaux, mais avant d'aller plus loin, je dois, au nom de la commission, nous excuser auprès de l'Association des cadres scolaires du Québec ainsi qu'auprès de la Fédération des comités de parents de la province de Québec qui, malheureusement, ne pourront pas passer ce soir. Ils seront reportés à lundi et on leur fera connaître l'heure de la présentation de leur mémoire.

J'invite donc l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, dont le représentant est M. Michel Paquet qui pourra nous présenter ses collègues. Avant de lui donner la parole, j'aimerais aussi rappeler que c'est le dernier organisme à être entendu ce soir. Tout en ne voulant en aucune façon brimer le droit de parole de personne, vous savez que le mandat de la commission - je l'ai assez répété depuis quelque temps - est d'entendre, mais aussi à la fois, par le fait même, de questionner pour connaître les réactions à nos demandes; il faudra se discipliner dans ce sens pour le reste de la soirée.

M. Paquet, vous avez la parole.

Association des directeurs généraux des commissions scolaires

M. Paquet (Michel): Merci, M. le Président. Vous me permettrez, bien sûr, avant de commencer notre intervention, de vous présenter les collègues qui m'accompagnent, soit, à ma droite, M. Gérard Tousignant, vice-président de notre association, ainsi qu'à ma gauche, M. Normand Lapointe, secrétaire.

Mesdames, messieurs les membres de la commission, notre association, qui regroupe les directeurs généraux ainsi que les directeurs généraux adjoints à temps plein des commissions scolaires du Québec, a pour objectif, outre sa mission de promouvoir le statut et les intérêts de ses membres, de contribuer aux débats touchant le fonctionnement du réseau des écoles primaires et secondaires du Québec.

Nous vivons présentement à nouveau une désorganisation des services pédagogiques, car il y a, en effet, une détérioration importante du climat des relations du travail dans le secteur particulier de l'éducation. Les élèves ont, quant à eux, perdu 17 jours de classe et il y a risque qu'ils en perdent davantage. Les décrets gouvernementaux auront, de toute évidence, des impacts sur l'organisation pédagogique des écoles et sur les bénéfices d'emploi des enseignants. Pour ces raisons, nous apprécions avoir la possibilité de faire connaître le point de vue des directeurs généraux sur les sujets faisant l'objet et de l'analyse, et des débats de la présente commission.

Toutefois, M. le Président, les

directeurs généraux n'ont pas choisi d'intervenir dans le sens d'une recherche, d'un partage des responsabilités dans ce nouvel affrontement. Nous convenons cependant qu'il faudra, en un temps plus serein - encore plus serein que ce soir - et davantage propice à l'échange, réaliser un tel exercice d'évaluation. Mais, aujourd'hui, à titre de premiers responsables administratifs des commissions scolaires, notre préoccupation est de tenter de démontrer s'il y a possibilité ou non de rendre applicables les modalités d'organisation découlant des décrets et ce, dans le respect de la qualité des services pédagogiques à dispenser.

Pour ce faire, nous avons donc, en premier lieu, fixé nos postulats sur la notion de la qualité des services et sur l'importance de l'éducation au Québec. Par la suite, nous avons déterminé l'approche de notre analyse pour cerner les problématiques faisant l'objet de notre intervention. Puis, nous avons établi certaines constatations quant aux décrets gouvernementaux, et nous avons convenu de certaines affirmations quant aux moyens nécessaires pour assurer le maintien de la qualité des services. Enfin, nous avons précisé nos attentes, voire nos réclamations, pour aider au règlement du présent conflit et garantir la qualité des services.

Quels ont donc été les postulats retenus par les directeurs généraux? Le premier touchera d'abord l'importance de l'éducation. Les directeurs généraux affirment que l'éducation doit demeurer l'outil privilégié du développement culturel, économique et social de la communauté québécoise et ce, même dans le contexte économique difficile que nous connaissons actuellement. Reconnaissant que les ressources de la société sont plus réduites et que ce fait invite, de toute évidence, à la créativité et à la mesure dans l'usage des moyens disponibles, nous rappelons qu'il faut cependant tout mettre en oeuvre pour tenter véritablement, premièrement, de maintenir la qualité pédagogique acquise progressivement depuis les années soixante et, deuxièmement, d'assurer au mieux le développement des moyens susceptibles de répondre aux besoins nouveaux en éducation. Tel a été notre premier postulat.

Notre deuxième postulat a trait à la notion de qualité des services. Les directeurs généraux reconnaissent que la qualité des services éducatifs est influencée forcément par les facilités organisationnelles ou par certaines conditions d'emploi permettant l'exercice de la pédagogie. Cependant, pour nous, cette qualité relève d'abord et avant tout de la qualité de la relation entre le maître et ses élèves. Sur cette question, j'ajoute que nous touchons, bien sûr, à la relation interpersonnelle et au contenu de la transmission et aux moyens pédagogiques pris pour ce faire. Deuxièmement, cette qualité relève aussi de la qualité de la relation qu'il y a entre les intervenants du monde scolaire et, par conséquent, de la qualité du climat dans nos écoles.

Toutefois, les directeurs généraux rejettent l'argument selon lequel toute modification à la baisse aux conditions d'emploi entraînent automatiquement une détérioration de la qualité des services.

Ces postulats avancés, les directeurs généraux ont privilégié une approche d'analyse qui se décrit de la façon suivante: Le gouvernement a pris la décision de réduire la croissance des coûts en éducation, en procédant à une augmentation de la productivité des personnels et à une diminution importante de certains avantages d'emploi; il a donc adopté des décrets pour fixer les conditions de travail des divers personnels. C'est à la lumière de ces décrets gouvernementaux que les directeurs généraux ont choisi de vérifier si le réseau scolaire public sera toujours en mesure de poursuivre l'implantation et les objectifs d'un nouveau régime pédagogique qui a fait l'objet d'un consensus des agents concernés et s'il sera en mesure d'assurer le maintien des services, de même que la réponse aux besoins nouveaux. Notre analyse a donc porté sur la faisabilité - si vous me permettez l'expression - des décisions gouvernementales. C'est dans cet esprit que nous avons préparé notre texte de ce soir. (22 h 45)

Quelles sont nos constatations face aux décrets? L'étude des décrets gouvernementaux touchant les enseignants conduit à diverses constations. Dans un premier temps, nous y relevons quelques correctifs normatifs de saine gestion, élément réclamé depuis longtemps par les administrateurs scolaires; par exemple: le concept de tâche globale et sa conséquence sur l'humanisation des écoles secondaires par une utilisation possible plus adéquate des compétences particulières de chaque enseignant, notamment en matière d'encadrement et d'activités d'animation.

Autre exemple: l'introduction d'une notion de capacité de l'enseignant permettant un certain contrepoids à l'arbitraire de l'ancienneté. Ensuite, la possible collaboration dans les écoles entre les enseignants et les directeurs pour réaliser le processus de détermination des tâches et responsabilités et pour élaborer les modèles d'organisation susceptibles de répondre aux projets du milieu. La présence effective plus grande de l'enseignant auprès des usagers. Enfin, dernier correctif, à titre d'exemple: l'obligation faite à chaque commission scolaire de procéder localement, après consultation, à l'élaboration d'une politique d'organisation des services à offrir aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage et de fournir, lors de l'intégration d'un élève en difficulté, des

mesures de pondération ou des services d'appui.

En contrepartie, il faut signaler certains éléments préoccupants. Par exemple, l'augmentation de la tâche pourrait avoir pour effet de réduire le nombre de spécialistes au primaire si le régime pédagogique n'est pas modifié.

L'augmentation brusque de la tâche au secondaire pourrait avoir pour effet d'augmenter le nombre d'élèves par enseignant si les modèles organisationnels ne sont pas modifiés. L'augmentation soudaine et considérable du nombre d'enseignants mis en disponibilité pourrait rendre problématique et difficile l'utilisation rationnelle de ces ressources.

Enfin, sur un thème accompagnant, les directeurs généraux signalent l'insuffisance des règles budgétaires soumises actuellement à la consultation du réseau. Pour nous, ces règles, dans leur forme présente, ferment les possibilités de manoeuvres locales pour gérer le processus de changement enclenché par les décrets de même qu'elles n'assurent pas rigoureusement les ressources financières nécessaires pour permettre l'application des mesures d'appui privilégiées par chaque commission en matière de service aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.

Les affirmations des directeurs généraux, maintenant, quant aux moyens d'assurer le maintien de la qualité des services. Les directeurs généraux n'ont évidemment pas la prétention de présenter un tableau exhaustif de tous les éléments pouvant assurer la détermination et le maintien de la qualité des services. Nous avons surtout tenté de retenir ce qui nous paraissait primordial et aussi ce qui faisait l'objet des préoccupations majeures de la population ou des intervenants impliqués.

La qualité des services sera maintenue pour autant que le climat scolaire favorisera à la fois la relation positive entre le maître et l'élève et entre les intervenants impliqués dans la dispensation des services. Elle sera maintenue pour autant que les dispositions incluses au contrat des personnels et touchant des aspects importants comme l'ancienneté et la capacité respecteront les besoins pédagogiques des élèves.

Elle sera maintenue pour autant que l'on permettra que les enfants du primaire profitent d'une bonne formation personnelle et intellectuelle et de services efficaces pour aider à la solution des difficultés qui surviennent dans la réalisation du processus de formation. Nous faisons ici, bien sûr, référence à la nécessité des spécialistes, des orthopédagogues et des enseignants dispensant des services dans les classes dites pour clientèle en difficulté.

Elle sera maintenue aussi pour autant que l'on favorisera au secondaire une relation plus intense et plus soutenue entre l'enseignant et ses élèves. La notion de tâche globale paraît donc souhaitable parce qu'elle élimine le minutage à outrance et sort l'enseignement de l'ornière de la surspécialisation. La qualité sera aussi maintenue pour autant que les commissions scolaires et les écoles auront le temps nécessaire pour élaborer et mettre en place les nouveaux modèles pédagogiques requis, d'évaluer l'efficacité de ces derniers et de procéder aux réajustements qui ne manqueront pas de s'imposer. J'ajoute ici, par exemple, qu'au fur et à mesure qu'on pourrait progresser dans l'étalement de l'installation de nouveaux modèles de décrets, nous aurions à nous interroger sur la faisabilité au fur et à mesure des années et nous nous interrogeons sur la question du deuxième cycle secondaire.

Enfin, que les commissions scolaires et les écoles auront le temps nécessaire pour procéder à la gestion progressive des modifications aux conditions d'emploi, pour profiter des résultats de l'application des mesures de résorption susceptibles de réduire le nombre de personnes mises en disponibilité, atténuant ainsi l'insécurité chez les personnels du réseau par une utilisation rationnelle des effectifs d'enseignement.

Devant ces affirmations et nos lectures des constatations sur les conséquences possibles du décret, quelles sont les attentes des directeurs généraux dans ce dossier? Les directeurs généraux reconnaissent qu'il est de la prérogative gouvernementale de prendre la décision de réduire les coûts en éducation. Cependant, tout en considérant qu'il est de notre mandat de prendre les mesures pour appliquer lesdites politiques gouvernementales, nous rappelons qu'il est aussi de notre responsabilité de réclamer les modalités et les disponibilités financières pouvant assurer le bon fonctionnement des écoles lors des processus de changements engagés par les autorités gouvernementales. Et, tout en insistant sur le fait que le régime pédagogique ne peut faire l'objet de négociation, les directeurs généraux réclament - nonobstant que le ministre de l'Éducation ait rappelé mercredi que le cadre de règlement du 10 février demeure une offre disponible - l'application de ce cadre de règlement avec toutes les garanties financières pour permettre sa mise en oeuvre. Le réseau a besoin de ce cadre de règlement et de ses garanties financières totales - nous référons ici aux sommes soulevées par le sous-ministre, lors de l'exposé de mercredi soir - pour assurer au minimum le changement rythmé, contrôlé, mesurable, tant sur le plan des modèles pédagogiques à découvrir que sur le plan des moyens à installer pour assurer une gérance efficace des nouvelles mesures relatives aux conditions d'emploi des enseignants.

Reprenant d'ailleurs les propos de M.

Laurin qui convenait, lors de son allocution d'ouverture, de certains risques au sujet de la qualité pédagogique, ce cadre intégral du 10 février prend toute son importance à cause, particulièrement, de son processus d'étalement pour gérer le changement, notamment dans l'organisation de l'enseignement au secondaire. Il prend aussi toute son importance à cause, notamment, des garanties relatives au maintien des spécialistes au primaire, de l'adoucissement des mesures de récupération salariale chez les enseignants mis en disponibilité et du temps qu'il donne pour mettre en place les mesures de résorption des effectifs mis en disponibilité, cherchant bien sûr à éviter éventuellement le départ des jeunes professionnels nécessaires au renouvellement de la profession.

A ces conditions, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires est d'avis qu'il serait possible d'assurer la qualité des services dans les réseaux primaire et secondaire. Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Merci, monsieur. M. le ministre.

M. Laurin: L'association des directeurs généraux au sein des commissions scolaires joue un rôle majeur également, analogue à un niveau plus élevé que celui des directeurs d'école. Leur rôle est également un rôle majeur, essentiel puisque ce sont les gestionnaires principaux quotidiens des commissions scolaires. Il est donc important d'accorder une grande attention à ce qu'ils nous disent ce soir.

Je relève que l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires est d'accord avec les principales dispositions du décret. Par exemple, les directeurs généraux sont d'accord sur le concept de la tâche globale, sur l'introduction d'une notion de capacité à l'enseignant, sur le processus de détermination des tâches et responsabilités poursuivi en concertation avec les enseignants et les directeurs, sur la présence effective plus grande de l'enseignant auprès des usagers, sur l'élaboration d'une politique d'organisation des services à offrir aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.

Cependant, ils nous signalent certains éléments qui les ont préoccupés, surtout en fonction du décret tel qu'il se présentait avec la loi 105. Par exemple, ils sont préoccupés au sujet d'une augmentation brusque de la tâche surtout si celle-ci avait pour effet de réduire le nombre de spécialistes au primaire, dans le cas où le régime pédagogique du primaire ne serait pas modifié.

Je pense que je peux répondre à cette préoccupation en répétant, encore une fois, que j'ai pris l'engagement de modifier le régime pédagogique de façon que le temps de présence des enfants au primaire soit augmenté de 23 heures à 25 heures. J'ai écrit aujourd'hui même, comme la Loi sur l'instruction publique m'y oblige, au Conseil supérieur de l'éducation pour lui demander son avis, en le priant de me le faire parvenir, évidemment, avec le plus de célérité possible. Le processus est donc engagé.

L'Association des directeurs généraux s'inquiète aussi ou se préoccupe également d'une augmentation brusque de la tâche au secondaire - ce qui pourrait avoir comme effet d'augmenter le nombre d'élèves par enseignant si les modèles organisationnels ne sont pas modifiés - et d'une augmentation soudaine et considérable du nombre d'enseignants mis en disponibilité qui pourrait suivre cette augmentation brusque de la tâche au secondaire. Mais, dans son mémoire, elle rappelle cependant qu'il y a eu, le 10 février, en concertation avec tous les partenaires de l'éducation, un cadre de règlement qui a été offert aux syndicats et qui prévoyait justement cet étalement de la tâche au cours de la période de trois ans que couvre normalement une convention collective. Donc, cet étalement auquel l'Association des directeurs généraux tient, et elle vient de nous le rappeler, aura précisément pour effet d'éliminer les causes de préoccupations qu'entretenait l'Association des directeurs généraux.

L'Association des directeurs généraux répète cependant que ceci est fonction de modèles organisationnels qui, non seulement rendraient faisables, praticables, applicables les décrets, mais également assureraient une plus grande qualité de l'éducation. Elle en fait même une condition de l'amélioration de la qualité de l'enseignement.

Est-ce que je pourrais demander à M. Paquet, le président, ou à ses collaborateurs, de nous en dire davantage sur ces modèles organisationnels qui commencent à être mis en application ou qu'élaborent actuellement les directeurs généraux de commissions scolaires, en vue, d'une part, de rendre applicables les décrets et, d'autre part, d'améliorer la qualité de l'enseignement?

Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Si vous me le permettez, M. Laurin, je serais porté à donner à M. Lapointe qui m'accompagne l'occasion de répondre à ce sujet, compte tenu des partages de dossiers que nous avons faits.

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

M. Lapointe (Normand): Je serai très bref. Je voudrais simplement rappeler qu'on a déjà, au cours des audiences qui ont

précédé, retenu certaines propositions, présenté certains projets; on a parlé de titulariat, de polyvalence de l'enseignement des matières, particulièrement au premier cycle. Je rappellerai essentiellement que notre proposition demande un temps pour valider un ensemble de projets qui pourraient naître de la concertation et de la collaboration des divers partenaires du réseau. L'étalement proposé dans le cadre du règlement du 10 février nous semble donner une marge de manoeuvre, tant par la moyenne des périodes d'enseignement plus basses comparativement à la tâche globale que par les effets moins brusques sur l'affectation du personnel.

Nous avons actuellement des inquiétudes, particulièrement quant au deuxième cycle du secondaire, où il faut tenir compte qu'il n'est pas facile d'arriver à une polyvalence de toutes les matières puisque certaines d'entre elles exigent, même de la part des attentes des étudiants, la présence de spécialistes. Le secteur professionnel en est un exemple évident. Certaines matières scientifiques présupposent aussi des qualifications particulières et le contexte particulier de certaines matières se prête mieux à la polyvalence que d'autres, selon les attentes des étudiants, les attentes du régime pédagogique et aussi la capacité des enseignants d'y faire face. (23 heures)

Nous avons mis une sourdine à savoir que ces deux premières années nous permettraient de valider la possibilité d'aller jusqu'à la proposition de tâche de troisième année, dans le cadre de règlement, afin de permettre que si les modèles organisationnels développés par les partenaires ne réussissaient pas à combler nos attentes et nos besoins, il puisse y avoir des réajustements qui pourraient être faits en cours de route, en pensant qu'en un an, deux ans, les partenaires du réseau auraient assez de créativité, d'ingéniosité pour développer ces modèles et faire ensemble les correctifs qui s'imposeraient, s'entendre sur les correctifs qui s'imposeraient si les difficultés d'application des mesures de la troisième année devenaient évidentes.

M. Laurin: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M.

Tousignant.

M. Tousignant (Gérard): En complément de réponse à la question du ministre de l'Éducation, la question fondamentale qu'on doit se poser est: Est-ce qu'on privilégie ce qu'on peut appeler la qualité pédagogique au sens que peut apporter un spécialiste ou s'il faut plutôt faire le choix d'une amélioration des relations élèves-adultes? La problématique telle qu'on la vit au secondaire, depuis plusieurs années, est qu'effectivement il faut affirmer que nous avons dans nos écoles des enseignants très qualifiés dans chacune des disciplines dispensées aux élèves. Le problème soulevé à la fois par les parents... Ici je fais même référence à des consultations que nous avons faites dans notre commission scolaire où les parents et les étudiants s'entendaient sur une chose en disant que ce qu'il faut de toute urgence c'est d'améliorer les relations élèves-adultes. Nous savons tous que pour améliorer les relations élèves-adultes il n'y a qu'une seule façon. C'est de développer une forme d'appartenance à un groupe afin d'être en interaction personnalisée avec un enseignant ou un nombre plus réduit d'enseignants. À notre avis, les nouveaux modèles d'organisation pédagogique doivent s'inspirer de ce postulat. Comme le disait M. Normand Lapointe, il est clair aussi que c'est davantage au premier cycle et qu'il faudra doser bien sûr le modèle au fur et à mesure qu'on progressera vers la quatrième ou la cinquième année du secondaire.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: Donc ce que vous visez, c'est une diminution de la mobilité des élèves d'une classe à l'autre au cours d'une même journée, la diminution du nombre d'élèves également qu'un professeur est appelé à rencontrer afin qu'une meilleure connaissance par le professeur de l'élève puisse ainsi s'avérer. De manière également que cette connaissance plus profonde permette l'identification des problèmes particuliers que peut connaître un élève, du rythme d'acquisition de ces apprentissages, des progrès plus rapides qu'il peut faire dans certaines matières, des retards qu'il peut connaître dans d'autres, afin que l'enseignement soit davantage individualisé d'une part et que, d'autre part, tous les autres éléments de la personnalité concourent à l'acquisition des apprentissages la plus rapide et la plus profonde possible. Vous pensez qu'avec ce modèle organisationnel on peut s'approcher davantage de l'objectif.

M. Tousignant: Nous croyons fondamentalement qu'il faut s'orienter vers ce modèle-là. Bien sûr, il faut faire le constat que depuis au delà de quinze ans au Québec nous avons travaillé selon un modèle différent, le modèle du spécialiste. Il faut ajouter en toute honnêteté que les enseignants ont répondu à ces demandes, à ces orientations en allant se spécialiser. J'affirme encore une fois que nous avons au Québec des enseignants compétents dans chacune des disciplines. Il faut dire qu'avec les nouveaux programmes, le nouveau régime pédagogique avec des programmes plus

précis, il s'agira sans doute d'un moyen pour permettre à un enseignant d'assumer une deuxième discipline sans trop de problèmes. Mais pour cela, il faudra du recyclage et, fondamentalement, du temps. C'est surtout l'élément de base. On ne le peut pas du jour au lendemain. D'ailleurs, nous-mêmes, dans nos expériences personnelles - cela fait dix ans qu'on fonctionne d'une façon - il nous faut au moins avoir l'occasion de réfléchir à cela, de se faire à l'idée, de s'y préparer, pour ensuite nous orienter dans l'optique de ce nouveau modèle.

M. Laurin: À ce même problème, ou à l'atteinte de ce même objectif, vous reliez une modification que les décrets annoncent sur la conception même que l'on se fait de la tâche de l'enseignant; je veux dire par là la tâche globale. Pourriez-vous nous expliquer davantage comment cette nouvelle notion de tâche globale peut concourir aux objectifs que l'on vient d'énoncer?

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

M. Lapointe: Encore brièvement, je pense qu'on peut se rappeler les réclamations faites par les administrateurs scolaires sur le minutage à outrance, des caractéristiques du modèle précédent de détermination de la tâche en A, B, C et D. Je pense que les gens qui ont traité des conventions sont familiers avec ces appellations.

D'autre part, nous savons tous que chez les enseignants on retrouve des personnes avec des qualités humaines différentes pour aider à l'acte éducatif. Certains ont une très grande facilité à l'enseignement proprement dit; certains ont plus de facilité pour l'animation, se sentent plus à l'aise avec les adolescents dans ce domaine et d'autres ont développé des habiletés particulières, ou des capacités particulières, dans des types d'activité scolaire et parascolaire, des activités étudiantes. Certains pourraient être plus habiles dans des mesures de récupération avec de petits groupes d'élèves ou des élèves à titre individuel.

Nous pensons que le concept de tâche globale, selon lequel, à l'intérieur d'un projet éducatif, une équipe-école serait en mesure de répartir des tâches non pas selon une formule mathématique d'égalité absolue des types de fonctions dans l'école, mais en fonction des capacités, goûts et intérêts de chacun des individus, pour répondre aux besoins identifiés des élèves dans le projet éducatif de cette école en particulier, le concept de tâche globale ouvre évidemment un ensemble d'horizons fort intéressants.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Laurin: Je vous remercie.

Le Président (M. Desbiens): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt du document que vous nous avez soumis. Il contient un bon nombre d'observations qui, évidemment, traduisent la connaissance intime que vous avez des problèmes de gestion de l'éducation, des services éducatifs aux niveaux primaire et secondaire. Je voudrais signaler qu'il m'est arrivé souvent, au cours des derniers mois, de recevoir une collaboration très appréciée de directeurs généraux de commissions scolaires. J'ai été mis en contact avec eux et j'ai été heureux de constater qu'ils étaient très bien structurés et qu'en général ils pouvaient répondre d'une manière rapide, efficace et fiable aux questions qu'on leur posait.

Quand on est député, qu'on s'occupe de bien des choses, qu'en plus on a un comté à surveiller, à servir, et qu'on a la charge d'un secteur comme celui de l'éducation, on doit compter sur la collaboration des agents du milieu. Cela a été une de mes découvertes dans le monde de l'éducation de constater que c'est peut-être un des secteurs de notre société où on peut s'appuyer sur un réservoir de collaborateurs extrêmement diversifiés et, dans l'ensemble, très disponibles.

Vous faites partie de ce groupe de personnes spécialisées, travaillant à temps plein ou à temps partiel, à titre professionnel dans votre cas, à titre bénévole dans d'autres, qui font du monde de l'éducation de chez nous un des secteurs les plus intéressants de la société québécoise. Par conséquent, c'est un plaisir pour nous de l'Opposition de renouer connaissance, d'échanger quelques opinions avec chaque groupe nouveau qui se présente devant la commission dans un climat de liberté aussi grand que possible.

À mesure que nous avançons dans nos travaux, nous devenons un petit peu plus impatients, parce que nous voudrions que le gouvernement bouge davantage et, au contraire, il semble continuer de baigner dans la placidité apparente dont les interventions du ministre de l'Éducation sont une bonne illustration. Nonobstant ceci, vous comprendrez qu'à mesure que nous avançons nous posions moins de questions de cathéchisme et peut-être plus de questions critiques. Cela fait partie de la démarche que nous faisons, pas du tout parce que nous voulons serrer un groupe un petit peu plus que l'autre, pas du tout.

J'ai remarqué une chose en lisant votre mémoire, il n'y a pas un mot sur la négociation. Je me disais à supposer - il y a de bonnes choses dedans, je les soulignerai ensuite - que nous vivions dans un autre monde où il n'y aurait que les décrets du Dr Laurin, il n'y aurait pas de conventions

collectives et de syndicats, je pense que les observations que nous avons lues ici pourraient pratiquement toutes s'appliquer très bien. Je ne veux pas du tout laisser entendre que vous êtes indifférents à cette réalité, mais nous sommes ici pour examiner cette réalité-là ces jours-ci. Je voudrais vous demander de me citer deux ou trois paragraphes dans votre mémoire, je les ai très bien vus et je vous serai reconnaissant de les rappeler à nos concitoyens, où vous signalez qu'il est très important qu'il y ait une bonne qualité de relations entre ce que vous appelez d'un terme un petit peu gestionnaire, les intervenants du monde scolaire.

Parmi ces intervenants, il y en a qui sont extrêmement importants, ce sont les travailleurs syndiqués, en particulier les enseignants dont l'organisation syndicale est plus forte et plus structurée parce qu'ils sont plus nombreux. Ils se sont bâti une tradition militante très forte depuis un quart de siècle. Je voudrais vous demander comment vous voyez le rôle du syndicalisme dans le monde scolaire. Comment voyez-vous la manière d'aborder le problème que nous avons, cette menace de conflit qui reste suspendue au-dessus de vos têtes et des nôtres, de manière à l'acheminer vers un règlement négocié et est-ce que vous pensez, parce que vous dites à la fin de votre mémoire: "Nous réclamons - en majuscules -l'application du cadre de règlement du 10 février", si j'ai bien compris, pensez-vous que ce serait préférable ou indifférent que surgisse plutôt au cours de la prochaine semaine ou des deux prochaines semaines, je ne sais trop, un règlement négocié, dut-il s'éloigner plus ou moins du cadre de règlement du 10 février dont nous convenons tous qu'il marquait un progrès par rapport au décret? C'est la première question que j'aimerais vous adresser parce qu'il me semble que c'est celle qu'en raison - j'espère que cette fois-ci la présidence sera d'accord avec moi - du mandat qui nous a été donné, nous devons vous adresser.

Le Président (M. Desbiens): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Je voudrais au moins préciser une chose en commençant, de façon à clarifier je dirais notre supposée absence notre intervention sur la question des négociations. Je reviendrai à notre première page, M. le député d'Argenteuil, où nous disions que nous supposions qu'il y avait un autre temps qui serait plus propice à cette évaluation. Mais j'insiste pour dire que ce n'était pas dans l'objectif de glisser à côté de la question. On supposait qu'elle viendrait, sauf qu'on avait pris comme stratégie d'approche, en communication avec la commission, comme le mandat de cette commission visait à rechercher les façons d'interroger ou des contenus interrogeant la qualité de l'enseignement, on s'est attaché à cela par souci d'une réponse claire aux questions posées.

Quant à la question des négociations, du rôle du syndicalisme et autres débats qui ont fait l'objet, durant la journée, de façon plus intense, des préoccupations qui sont venues, c'est très clair que nous avons un propos à vous tenir. Nous ne l'avions pas présenté parce que nous pensions que théoriquement, si cela avait bien été, on s'en serait tenu à un contenu d'organisation pédagogique. Mais soyez sans crainte, on y répondra très clairement. En même temps que cela fait notre affaire de ne pas l'avoir mis dans le texte, on se sentira plus à l'aise que dans un propos où les qualificatifs sont toujours retournées des fois. On ira donc verbalement.

Quant à votre question sur notre réclamation, je voudrais quand même dire que quand on dit que nous réclamons le cadre de règlement, ce n'est pas parce que nous nous opposons à une possible et nécessaire éventualité qu'il y ait un règlement, ce n'est pas parce que nous nous opposons à une éventualité et à une nécessaire éventualité qu'il y ait un règlement négocié. Je pense que l'idéal serait ce que nous espérons. Je pense que c'est ce que tout le monde a espéré et espère encore maintenant. (23 h 15)

Cependant, ce qu'on a voulu faire dans un contexte où il aurait pu arriver qu'il n'y ait pas possibilité de règlement négocié, nous avons voulu insister de nouveau sur une chose qui a été très claire. On s'est identifié clairement, dans le dépôt gouvernemental du 10 février, comme étant des collaborateurs à ce cadre de règlement. Au début de mon intervention, je voudrais rappeler que quand nous nous y sommes accolés, c'était par souci d'avoir fait un travail pour que le réseau obtienne des aménagements qui rendent le décret "gérable". Dans ce sens, vous avez vu, dans nos réclamations, les motifs pour lesquels nous l'avons fait. C'est bien sûr que, dans un contexte où le pis serait qu'il n'y ait pas de règlement négocié, de toute façon - nous le répétons ici; nous l'avons dit clairement à M. Laurin; il nous a entendus, je pense - nous souhaiterions qu'une position gouvernementale ferme ne soit pas en-deçà de cette proposition du 10 février. Nous sommes convaincus qu'il nous la faut, de façon minimale, pour avoir ce dont Normand et Gérard parlaient, le temps pour gérer la transition. Nous nous opposons à des transferts radicaux d'organisation, parce que nous avons à muter un système qui a quinze ans d'organisation et cela ne sera pas dans une organisation de printemps 1983 pour septembre 1983.

C'est le sens de notre réclamation et

ce n'est surtout pas une non-préoccupation pour un règlement négocié.

Quant à la question de la négociation comme telle, je vais vous donner la réaction que nous avions là-dessus. Cela va comprendre une partie que vous soulevez et cela va en ajouter aussi pour ce qui concerne la question du climat.

Il est très évident que les directeurs généraux appuient formellement tous ceux qui parlent, au Québec, de l'engorgement du climat et de l'organisation scolaires. Aussi curieux que cela puisse paraître, le pis, c'est que cela nous arrive, à nous tous. Que nous soyons administrateurs actuellement. Pour la plupart, nous tenons nos origines d'une carrière pédagogique; actuellement, nous sommes des professionnels de l'organisation administrative, mais notre vocation est de travailler en collaboration, premièrement, avec les professionnels de l'enseignement. Quand on constate que, dans la mission éducative, ceux qui sont les collaborateurs sont engorgés dans un processus systématique et répété d'opposition, c'est assez spécial et assez curieux. Nous qui nous targuons de principes pédagogiques pour le développement des jeunes, cela fait spécial, cela fait curieux, cela fait même "interrogeable".

Les motifs pour lesquels nous sommes arrivés à cela, c'est une autre chose. Je vais être très clair là-dessus. On n'est même pas convaincus qu'il y ait des réponses exclusives et définitives à cela. Ce qu'on constate, c'est qu'il y a possiblement des éléments à multiples facettes. On a entendu, ce matin, des représentants étudiants parler, par exemple, d'esprit corporatiste. C'est peut-être une possibilité. Comme directeurs généraux, dans le travail que nous faisons -nous l'avons dit dans la présentation de notre mémoire - nous avons des préoccupations tout à fait normales de défendre des intérêts qui concernent notre statut. C'est bien évident que les autres groupes font de même et, parfois, ce sont d'autres groupes. Il y a possiblement quelque chose qui puisse être de ce volet.

C'est peut-être parce que, depuis 1964, tout le monde de l'éducation s'est embarqué dans un processus exigeant de redressement et de réorganisation. Serait-ce, avec le temps, que nos esprits échauffés ont fait que le pourcentage d'écoute a baissé? C'est une deuxième hypothèse. Serait-ce que, finalement, à force de se coltailler entre nous pour trouver des réponses à ceci et à cela, pour trouver des garanties à la qualité et des garanties à nos statuts, on ait fini par créer entre nous, parfois, des agressivités? Finalement, serait-ce qu'à travers tous ces débats, on ait peut-être fini par oublier le sens de la vraie mission qui nous amenait? Ce sont des questions qu'on pose. Ce sont des questions qu'on se pose. J'avoue très humblement que nous serions très insécures d'affirmer qu'il n'y a que cela ou que cela.

Une chose est évidente, le fait est là, j'oserais dire, sans faire de pathos là-dessus, qu'on le considère dramatique. Ceux qui oeuvrent dans le métier depuis quinze ans, depuis 1967 et 1968, après les grands moments du rapport Parent et de la Loi sur l'instruction publique, etc., ne peuvent que dire - quand je dis "dans le métier", je ne parle pas que de nous, je parle de tous ceux qui oeuvrent dans l'éducation, à tous les niveaux - que c'est très difficile d'y oeuvrer. On est ballotté d'abord par un temps de création, car tout le monde est embarqué dans un processus de création. Je suis d'accord avec ce que M. Tousignant disait et je suis aussi d'accord avec ce que Normand disait. Les gens se crèvent à essayer de faire des modèles avantageux, de qualité, et quand ces bons moments arrivent, je suis convaincu qu'il sort des écoles, des commissions scolaires et du réseau en général des modèles organisationnels fort intéressants.

On est ballotté par ce moment de création, on est ballotté par un recommencement, parce qu'on a commencé à travailler ensemble à un effort de concertation et, oup!, à un moment donné, quand on ne s'y attend pas ou juste quand on ne le veut pas, un règlement de conflitl Ce qui s'ensuit, un moment de désillusion -excusez-moi l'expression, sans faire de vulgarité - un peu d'écoeurement, les gens n'ayant plus le goût de faire un effort de création, un radoucissement, parce qu'on est "tanné" de vivre ensemble et de se regarder de travers - on se dit qu'on va recommencer à travailler parce que cela n'a pas de bon sens - et un recommencement d'effort de création. Juste comme le cycle recommence, on retombe dans le processus de conflit. C'est un fait que personne ne peut contester et, à moins qu'on ne veuille pas le voir, c'est comme ça que ça se passe depuis quinze ans au Québec. Je vous répète qu'on ne cherche pas de coupable, on ne sait plus où on en est. Ce qui est clair, c'est qu'on est pris là-dedans.

Dans ce sens, on voudrait, sur les moyens pour y arriver, parler de ces concertations réelles qui sont à recréer. Comment y arriver? Cela va prendre entre les intervenants (enseignants, syndicats, organisation de réseaux, les commissions scolaires, les directeurs généraux, tant dans les écoles que dans les commissions) un processus nouveau, motivant, par lequel on va pouvoir recréer une concertation. Si on ne produit pas ce nouveau sommet en éducation, on va répéter le cycle jusqu'à ce que, finalement, le réseau public soit vraiment en processus de déclin sérieux. C'est à peu près notre sentiment à ce sujet.

M. Ryan: J'apprécie le caractère modeste de la réponse que vous apportez à cette question qui nous laisse tous très perplexes. Votre réponse démontre que vous êtes en recherche là-dessus, c'est une chose que nous devons apprécier. Nous allons souhaiter que votre recherche continue et qu'elle débouche sur des moyens plus précis que ceux que vous êtes en mesure d'indiquer ce soir.

Il y a une autre question que je voudrais vous adresser et qui me préoccupe depuis le début des travaux de la commission. On parle de la tâche globale. Dès la fin de novembre, nous avons dit, dans les propositions de règlement que nous mettions de l'avant, qu'il fallait une intégration de la tâche, que la fragmentation extrême inscrite dans les conventions collectives ne pouvait pas durer comme telle et qu'il faudrait un effort d'assouplissement de ce côté.

Il y a d'autres points que vous mentionnez dans votre mémoire et sur lesquels nous avons déjà exprimé notre accord, il y a déjà un certain temps, à la suite, d'ailleurs, de consultations avec toutes sortes d'intervenants du monde de l'éducation, mais il y a deux points qui me viennent à l'esprit à ce sujet. Je voudrais connaître votre réaction. Quand on parle de tâche globale, ne serait-il pas temps qu'on parle de la tâche globale au complet et non pas seulement de la partie qui est administrativement gérable et contrôlable? Vous vous rappellerez le rapport de la commission présidée par un monsieur de Saint-Jérôme, qui est principal d'une école secondaire à Saint-Jérôme actuellement, commission qui avait étudié le contenu de la tâche de l'enseignant dans les années soixante-quatorze ou soixante-quinze... Son nom m'échappe parce qu'il est tard.

Une voix: M. Montreuil.

M. Ryan: M. Montreuil, c'est cela, justement. Il avait fait toutes sortes de consultations, toutes sortes de sondages, d'études de contenu, évidemment, des journées de travail des enseignants. Il en est arrivé à établir que la semaine de travail d'un enseignant allait chercher entre 38 heures et 40 heures. La préparation qu'il fait chez lui, la correction des devoirs qu'il fait chez lui, c'est aussi important que le fait de savoir s'il va y avoir 22 ou 23 périodes dans la semaine; je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. On n'a pas entendu évoquer cela de la part de la très grande majorité des témoins qui sont venus ici. Je pense que cela fausse la perspective en partant parce qu'on se limite strictement à ce qui entre dans le cadre administratif et contrôlable du ministère de l'Éducation. Je ne sais pas s'il n'y aurait pas un effort à faire pour élargir cela. Il faudrait promouvoir aussi les dimensions dont on ne parle jamais, évidemment, et qui, à mon point de vue, sont peut-être plus impartantes à bien des égards.

Deuxièmement, je ne vois pas comment on peut arriver sérieusement à définir la tâche, surtout si on parle de la tâche globale, si on la compartimente. On peut toujours arriver à prendre des aspects et à les définir en dernière extrémité, unilatéralement, mais plus on parle de la globaliser, plus il me semble qu'il devient important de le faire en étroite concertation avec ceux qui sont visés, c'est-à-dire les enseignants. Là, je vois un problème. Toute cette opération se fait actuellement - je ne sais pas comment je dirais cela, mais en tout cas - sans entente avec les enseignants. De toute évidence, c'est le coeur du conflit, d'après ce qu'on nous dit. Je ne sais pas comment vous voyez cela. Ces deux carences qui me semblent évidentes dans la manière dont on présente le problème actuellement, comment pourrait-on y remédier à court terme pour arriver à donner plus de chance à l'instauration du climat de concertation, de collaboration que vous considérez comme indispensable? Je me dis: On peut avoir tous les plus beaux raffinements administratifs, budgétaires ou de contrôle, si le climat fait défaut, je pense qu'on arrive avec des crises comme celle qu'on connaît, dont vous disiez vous-même tantôt qu'elle revêt un caractère dramatique.

Maintenant, je vous préviens que j'ai terminé mon temps. Je ne voudrais pas que vous me répondiez longuement. Si vous ne répondez pas, cela ne me fait rien. Vous allez continuer à travailler là-dessus. Je voudrais donner la chance à d'autres de parler et, par conséquent, je ne veux pas que vous vous sentiez obligé de répondre. Si le président précise que j'ai épuisé mon temps, je n'invoquerai pas de question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): Vous avez épuisé votre temps, M. le député d'Argenteuil, sauf que vous savez qu'il s'agit, en fait, d'une répartition, je pense, pour que chaque côté puisse avoir le même temps pour poser des questions et obtenir des informations de nos invités. M. Paquet, vous voulez répondre dans le temps réservé à la partie de gauche?

M. Paquet (Michel): Justement, pour essayer d'écourter le temps, M. Lapointe va faire une première réponse et il y aura un commentaire par M. Tousignant.

Le Président (M. Desbiens): M.

Lapointe.

M. Lapointe: Très brièvement, effectivement, deux commentaires.

Évidemment, le rapport de la CETEES était volumineux, il a apporté des éléments très intéressants. Cependant, il est évident qu'il n'a pas, sans doute, atteint les objectifs puisqu'on l'a rapidement abandonné sur les tablettes. Il faut, cependant, se rappeler que la tâche globale, telle que mentionnée et définie implicitement par notre court mémoire, fait, évidemment, appel à la comparaison de la partie de la tâche qu'on pourrait appeler, entre guillemets, "conventionnée" et les 22 périodes apparaissant à la situation actuelle, 1982-1983, au secondaire, par exemple, en comparaison des 25 périodes, les 22 périodes comprenant 20 périodes au maximum de tâche stricte d'enseignement et 2 périodes d'activités autres comprenant animation, récupération, surveillance, etc. Je veux m'en tenir à cela.

Le Président (M. Desbiens): M. Tousignant.

M. Tousignant: Quand on parle de tâche globale, il faut y accoler immédiatement la notion de tâche moyenne. Cela ne se sépare pas. Deuxième point, par rapport à la question d'une recherche de solution au problème, je pense que, quand on recherche une solution à un problème, une bonne façon, c'est de bien le poser. Je pose l'hypothèse que, s'il n'y avait pas augmentation de la tâche, il n'y en aurait pas de problème et il ne se ferait pas un débat important actuellement sur la seule notion de la tâche globale. Le problème fondamental, c'est qu'il y a une augmentation de la tâche qui conduit, bien sûr, à des diminutions de postes en éducation, ce qui contribue à une augmentation des mises en disponibilité. Le problème n'est pas ailleurs. Au bout de la ligne, cela s'appelle des dollars.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout d'abord, remercier l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires de nous avoir présenté ce mémoire et d'avoir accepté d'attendre jusqu'à une heure aussi tardive pour nous présenter les intéressantes données contenues dans ce document. S'il y a des personnes, s'il y a un groupement qui aurait pu verser à outrance dans la technique, dans les calculs mathématiques, dans des normes que personne ne comprend sauf les spécialistes qui sont formés à cet effet, je pense que cela aurait pu être l'association des directeurs généraux, qui ont quotidiennement à organiser l'enseignement dans nos commissions scolaires et dans nos écoles. Sauf qu'ils ne l'ont pas fait et je les en félicite.

(23 h 30)

En effet, cette commission dure depuis trois jours déjà et, au moment où le gouvernement a accepté d'instaurer cette commission parlementaire, c'était pour permettre de faire la lumière sur tout ce débat qui s'est déroulé en vase clos, évidemment, dans un contexte de négociation qu'on connaît. Le fait de recevoir ici des spécialistes, des gens qui sont impliqués dans le monde de l'éducation, permet, avec les questions des parlementaires qui, pour la plupart, sont des profanes dans le domaine, de jeter un éclairage peut-être nécessaire ou à tout le moins, de rassurer l'ensemble de la population. Voici les trois questions auxquelles on essaie de répondre depuis trois jours et on continuera lundi. La première question, les directeurs généraux l'ont abordée dans leur document et c'est ce que les gens qui nous écoutent se demandent: Avec les décrets qui sont sur la table, avec les aménagements proposés, les enfants du Québec pourront-ils recevoir cette éducation de qualité à laquelle ils ont droit et à laquelle on tient tous? C'est la première des questions. Je reviendrai tout à l'heure sur la façon dont vous y avez répondu, à mon avis, dans le document. La deuxième question est la suivante: Sera-t-il possible pour les enseignants du Québec de vivre décemment ces conditions de travail modifiées? Est-ce que ce sera viable dans les écoles et cela permettra-t-il aux enseignants de donner le service de qualité auquel la grande partie des enseignants nous a habitués et auquel on tient toujours? Enfin, la troisième question est la suivante: Est-ce que c'est organisable, de l'enseignement, dans les conditions énoncées dans ces documents qui sont proposés par le gouvernement? Vous avez touché aux trois questions, mais davantage à la première.

Je me permettrai également une parenthèse dans cette intervention pour parler de ce dossier de l'éducation dont on a, tout à l'heure, critiqué la venue dans tout ce processus. En tête de ce document, on peut lire - et je me permettrai de le citer au texte - "Parce que tous les Québécois et les Québécoises, tous les parents, tous les enfants, tous les contribuables, tous les enseignants et toutes les enseignantes ont le droit et ont l'obligation de savoir quels sont les véritables problèmes, les véritables enjeux, les véritables choix qu'impose la crise actuelle dans le domaine de l'éducation." On a assisté ce soir, évidemment, à des scènes plutôt regrettables dans le contexte des travaux de cette commission. Mais est-ce qu'on peut s'étonner face à ce document faisant partie d'une stratégie gouvernementale d'information de bon aloi, stratégie qui n'a jamais cessé de part et d'autre? À cet égard, le député de Chauveau parlait tout à l'heure de ce

document daté du 3 mars qui a été véhiculé par la partie syndicale auprès de l'ensemble des parents dans les commissions scolaires, dans les quartiers, dans les villes et villages du Québec, où on invite les parents à venir une demi-heure avant le début des cours du matin, le vendredi 4 mars. C'est une stratégie d'information syndicale qui s'est poursuivie et il y a une stratégie, évidemment, d'information qui doit se faire pour présenter tous les aspects de ces décrets tenant lieu de conventions collectives, de ce cadre de règlement qui est proposé.

Il n'y a rien qui m'étonne là-dedans quand on considère que ce qu'on veut d'abord et avant tout, ce que chacun des parlementaires dans cette Chambre veut, c'est faire la lumière. Les enfants du Québec pourront-ils recevoir cet enseignement de qualité? Les enseignants pourront-ils vivre dans ce système proposé et, enfin, l'enseignement sera-t-il organisable, si vous me prêtez le terme, dans les conditions qui sont énumérées?

Je ferme la parenthèse, M. le président de l'association des directeurs généraux, pour passer, à proprement parler, au contenu de votre document qui, je le répète, est très intéressant parce qu'il s'attache principalement à la question fondamentale suivante: Les enfants du Québec pourront-ils recevoir un enseignement de qualité? On retrouve, à la page 4 de votre document, la phrase suivante: "Toutefois, les directeurs généraux rejettent l'argument selon lequel toute modification à la baisse aux conditions d'emploi entraîne automatiquement une détérioration de la qualité des services."

J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. Est-ce que j'interprète bien si je dis que les directeurs généraux expriment par là que les conditions énoncées dans le décret permettront une organisation de l'enseignement qui, tout en demandant un effort aux enseignants, leur permettra d'avoir un cadre de vie et de travail normal qu'ils accepteront une fois qu'ils auront vu la réalité de cette organisation scolaire? Est-ce que les directeurs généraux ont voulu dire par là que les enseignants seront surpris de l'intérêt et de la qualité de l'organisation scolaire qu'il sera possible de faire avec le décret? Cela est ma première question.

Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): J'aimerais reprendre votre question en la replaçant dans deux contextes. À la page précédente, nous affirmions aussi ceci: "Les directeurs généraux reconnaissent que la qualité est influencée forcément par les facilités organisationnelles ou par certaines conditions d'emploi." Je vais au paragraphe que vous avez cité où on dit que cela n'entraîne pas, lorsqu'il y a modification à la baisse, automatiquement une détérioration de la qualité des services. Quand je reprends votre question, cela ne peut être plus clair. Je pense que nous disons, dans l'ensemble du mémoire, que, lorsqu'il y a des modifications qui touchent les avantages sociaux - j'oublie la question des diminutions de salaire pour ceux qui sont mis en disponibilité; je parle de la quantité d'enseignants affectés au réseau d'enseignement secondaire, par exemple - si on considère qu'il y a là une quantité d'effectif qui facilite l'organisation, c'est bien sûr - et nous le disons un peu plus loin - que cela peut modifier par voie de conséquence l'organisation.

C'est là-dessus qu'on fait toute notre intervention. S'il y a une modification brusque, si on vise des objectifs de revue du système pédagogique, il ne faut cependant pas le faire d'une façon rythmée qui ne nous permette pas de découvrir les modèles qui accompagnent ces morceaux; sans cela, nous aurons dérangé la qualité parce qu'on aura voulu intervenir trop rapidement. Notre intervention va dans le sens de la vôtre, mais avec les nuances que j'y mets. Les décrets - on le dit plus loin - comprennent des risques. Il y a des risques potentiels. Nous croyons qu'ils sont "gérables" à condition qu'on nous permette d'avoir un rythme de temps et des compléments de budget. On signalait toute la question du cadre de règlement et des sommes qui l'accompagnent; si on nous permet d'avoir des facilités de rythme de temps et de ressources financières pour nous permettre de jouer sur la revue du système, j'agréerais votre commentaire, mais aux conditions qu'on y fait.

Le Président (M. Jolivet): M. le député.

M. Gauthier: J'aurais une seconde question. Vous parlez de la politique d'organisation des services à offrir aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, à la page 7 de votre mémoire. Hier, on a eu l'occasion de voir ici une politique d'élaboration des services offerts aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, qui n'était peut-être pas un modèle du genre. On parlait d'intégration d'élèves - et je veux surtout faire porter mon intervention sur cet aspect - en difficulté dans les commissions scolaires à partir d'un certain nombre de principes très généraux contre lesquels personne ne peut s'élever. Je voudrais savoir - et je m'adresse véritablement à l'expert que vous êtes -quels pourraient être les critères, comment pourrait se constituer une politique de services à offrir et surtout une politique d'intégration des élèves en difficulté d'apprentissage. Est-ce qu'on a raison d'être craintifs sur la qualité ou la validité d'une

telle politique dans certains cas? Est-ce qu'il y a moyen d'encadrer cette politique, d'en fixer les grands paramètres pour qu'elle soit effective, qu'elle soit efficace et qu'elle joue véritablement son râle?

Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Je vois deux parties dans votre question: l'une qui s'appelle les encadrements ou paramètres qui fixeraient des obligations et l'autre, la politique. J'ai aussi entendu l'argument sur la question de la politique. Sans l'agréer, j'ai pu constater qu'effectivement cela peut arriver que des politiques soient affaiblies par la clarification, les arguments ou les garanties qui y sont comprises. J'ai un peu l'embarras de prendre l'exemple que je connais le plus facilement, celui de ma commission scolaire. Si vous me permettez cet écart, je le présenterai.

À la suite des questions que le député d'Argenteuil soulevait, un des moyens qu'on prend et qu'on prône beaucoup au niveau de l'association, c'est d'en arriver un peu, beaucoup et vraiment à la réalisation de ce processus de décentralisation avec des pouvoirs locaux où on peut jouer sur des secteurs d'activités plus autonomes. On peut, si on respecte qu'il y ait une possibilité de différence au Québec entre les commissions, considérer que, dans certains milieux, les politiques puissent être plus ou moins élaborées, selon ce que les gens dans ce milieu acceptent et consentent d'y mettre. Mais ce n'est pas vrai que les politiques, à ma connaissance, soient souvent et toujours raccourcies et d'une simplicité qui ne laisse aucune prise à des contenus et à des comment.

L'exemple dont je vous parlais, chez nous, dans notre commission, nous avons quand même une politique qui s'inspire -quand vous me parlez des paramètres - dans ses principes, dans ses comment des politiques ministérielles qui touchent les services aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Il y a des documents dans ce secteur d'activités. Notre politique, en partant, dans son bout de référence, touche cet aspect. Cependant notre politique, après avoir fixé des principes, l'ayant travaillée en concertation avec les enseignants, en consultation formelle auprès des parents et ayant eu l'approbation du conseil des commissaires, précise très en détail toutes les étapes selon lesquelles un processus d'aide auprès des enfants peut se donner. Exemple: il y a d'abord, avant de décréter qu'on va donner des services d'aide particuliers, l'opération repérage, dépistage, analyse de cas, travail de concertation dans une classe avec le parent concerné et son enfant, l'enseignant, le spécialiste qui peut l'accompagner, comme le psychologue, l'orthopédagogue, la direction. Il y a d'abord tout un travail de la première étape qui est celui du repérage.

Dans la même politique, la deuxième étape, qui ne peut venir avant que la première ait été réalisée, est une étape qui concerne la détermination de "comment on va soutenir ce qui a été repéré?" La troisième étape - vous pouvez avoir des alternatives - peut être une question d'orthopédagogie, une question de récupération, une question de support en classe fermée pour une période donnée, etc. Cette question des politiques, à mon sens, me paraît possible, existe déjà et, dans un contexte où on clarifie des principes, des références à des politiques gouvernementales qui s'inspirent de grandes orientations et de "comment" locaux, le tout dans une élaboration qui comprend la collaboration, c'est très évident, des enseignants, des professionnels qui l'accompagnent, des parents, des directions et des administrateurs scolaires.

Affirmer qu'il n'y a dans le réseau que des politiques qui ne garantissent rien, cela peut être possible; je vais l'admettre, je n'ai pas à mesurer chacune des commissions. Mais il y a quand même des commissions où il y a des politiques qui sont organisées, structurées, formelles et garantissant la qualité des services.

M. Gauthier: J'avais noté un commentaire. Vous faites état dans le document et dans votre réponse de la nécessité d'avoir d'autre personnel que du personnel enseignant pour apporter de l'aide aux enfants en difficulté. Le ministre s'est exprimé très clairement à ce sujet au cours des derniers jours en exprimant cette nécessité d'une façon très précise. Je considère que vous êtes d'accord avec cette position ministérielle.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Paquet (Michel): On est d'accord, on la souhaite et on espère obtenir les ressources qui l'accompagneront aussi.

M. Gauthier: D'accord.

M. Paquet (Michel): On ne fait pas de cadeau sur cela, c'est très évident.

M. Gauthier: J'aurais une autre question, si vous me le permettez. J'aimerais...

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Question de règlement. Je ne veux pas enlever la parole

au député de Roberval. Il ne reste qu'un quart d'heure d'ici à minuit. Il a déjà utilisé un quart d'heure et je pense que le dernier quart d'heure devrait revenir à l'Opposition.

Le Président (M. Jolivet): Je ne pense pas, madame, malheureusement que ce soit une question de règlement. C'est peut-être une question de distribution du temps.

Mme Lavoie-Roux: Ou d'information.

Le Président (M. Jolivet): Oui, c'est cela. Le ministre a pris 14 minutes, M. le député d'Argenteuil a pris 21 minutes, le député de Roberval, s'il veut prendre ses 20 minutes, c'est son choix; il vous restera probablement une dizaine de minutes pour rejoindre environ le même temps quant aux deux interventions qui ont été faites de part et d'autre.

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci. Comme je suis inscrite sur la liste, je souhaiterais que mon collègue de Roberval me laisse un peu de temps pour intervenir sur l'excellent mémoire qui nous est présenté. (23 h 45)

Le Président (M. Jolivet): Le message étant fait, le député de Roberval peut le prendre, libre à lui. M. le député de Roberval.

M. Gauthier: J'ai bien noté les demandes de mes deux collègues, de ma collègue ministérielle et de ma collègue d'en face. Je vais essayer de ramasser mes dernières questions rapidement. J'aimerais avoir des explications, cependant, à la page 9 du document, sur une phrase qui me préoccupe un peu et que je comprends mal. Vous dites que la qualité des services sera maintenue pour autant que - et je vais au deuxième paragraphe - "les dispositions incluses aux contrats des personnels et touchant des aspects importants comme l'ancienneté et la capacité respecteront les besoins pédagogiques des élèves". Pourriez-vous en quelques minutes, puisque le temps nous presse, clarifier cette phrase?

Le Président (M. Jolivet): M.

Tousignant.

M. Tousignant: C'est, tout simplement, que nous ne sommes pas d'accord sur les modèles traditionnels, basés uniquement sur l'ancienneté, qui ne tenaient pas compte des besoins réels des élèves. Effectivement, on s'insurge contre les affirmations où on dit que la seule intention des responsables des écoles, c'est de trafiquer et de faire des jeux d'influence, de "discarter" telle personne ou telle autre. On pense qu'il y a des besoins réels. Quand on parle de capacité, c'est qu'on se demande: Pour tel type d'enfants, quel enseignant répondrait le mieux?

M. Gauthier: Concernant le critère de la capacité - c'est ma dernière question -j'ai eu l'occasion plus tôt cet après-midi, avec les directeurs d'école, de discuter de cette notion de capacité. Avez-vous pris véritablement connaissance de la définition de la notion de capacité telle qu'elle est donnée dans les documents? Elle est en quatre points, et j'aimerais revenir là-dessus: brevet d'enseignement ou une année d'expérience d'enseignement de la matière, suivre des cours actuellement dans la matière et une dernière notion qui est que, s'il n'y a aucune de ces trois conditions qui est remplie, la personne soit jugée capable par expérience ou autrement d'enseigner la matière. Concernant ce critère de la capacité, partagez-vous les craintes exprimées par certaines personnes, en particulier par la CEQ, à savoir que cela pourrait donner lieu à de l'arbitraire et à un jugement sommaire dans certains cas? J'aimerais avoir votre avis professionnel là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

M. Lapointe: La clause de la capacité fournit, comme l'ont mentionné les directeurs d'école cet après-midi, trois niveaux objectifs où, effectivement, il ne peut y avoir de contestation, à savoir le nombre d'années d'expérience acquise dans l'enseignement de la discipline, etc., et les crédits accumulés. Quant au quatrième, qui offre la possibilité qu'au niveau d'un projet éducatif des gens s'entendent pour faire face à des situations particulières, il y a là pour moi une souplesse qui offre à des enseignants engagés dans des projets éducatifs la possibilité d'y être maintenus, parce qu'on commencera à l'école à tenir compte de ce critère d'abord et avant tout pour répondre à des besoins particuliers.

M. Gauthier: En ce qui me concerne, c'est terminé. Je vous remercie. Vous avez répondu d'une façon très satisfaisante aux questions que je voulais vous poser. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Merci beaucoup. Avant de donner la parole à Mme la députée de L'Acadie, sans vouloir être mesquin sur le temps - environ 12 ou 15 minutes entre les deux - on m'a donné la permission de part et d'autre d'accorder une brève question à Mme la députée de Maisonneuve et, en même temps, une brève question à Mme la députée de Jacques-Cartier. Donc, la parole est à Mme la

députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela veut dire qu'il me reste quoi?

Le Président (M. Jolivet): Environ 14 ou 15 minutes.

Mme Lavoie-Roux: Ce sera en temps supplémentaire. Je ne prendrai pas 15 minutes, de toute façon. Merci, M. le Président.

Je n'ai pas l'intention de revenir sur le dossier de propagande du gouvernement, mais, comme le député de Roberval a cru bon de qualifier ce pamphlet démagogique d'information aux principaux intéressés, je vais simplement relever - cela rend d'ailleurs notre travail pénible - des inexactitudes. Si c'est cela, l'information que le gouvernement veut faire, elle ressemblera à certains messages de propagande qu'on a entendus à la radio, que j'aurai l'occasion de déposer lundi, ici, à l'Assemblée, propagande dégradante pour les enseignants.

Je voudrais simplement relever un point. Nous sommes ici depuis un jour avec un mandat - je ne reviendrai pas là-dessus, on en a assez parlé ce soir - et vous retrouvez dans ce dossier quatre offres gouvernementales refusées. Les rencontres des derniers jours n'ont toujours rien produit. On se demande si on est sur la même planète. On est ici pour essayer de trouver une voie de solution et le gouvernement fait de l'information au public en mettant de côté le fait qu'on est à étudier et à inventorier des pistes pour essayer d'éclairer tout le monde et de trouver des moyens de conciliation. On fait fi, comme si la commission parlementaire n'existait pas, de la dernière proposition de la CEQ hier, à laquelle même le ministre de l'Éducation avait montré une certaine ouverture. Il nous l'a répété cet après-midi. Pendant ce temps, on envoie cette information tout à fait malhonnête, incomplète et démagogique. Je regrette qu'on n'ait pas eu le temps d'en parler plus longtemps, mais, comme vous avez d'autres informations plus importantes à nous donner que de traiter plus longtemps de la démagogie de ce papier, je voudrais vous poser les questions suivantes.

Je voudrais revenir sur la notion de tâche globale. Il est vrai qu'on s'est beaucoup plaint du minutage, que vous avez X heures d'enseignement, deux périodes d'encadrement ou, enfin, une période de surveillance ou tant de minutes de surveillance, etc. C'est regrettable qu'on en soit rendu là, mais ceci n'est-il pas le résultat aussi du fait que beaucoup d'enseignants... Tout de suite, quand on pense que les enseignants font des revendications, tout le monde dit: Ce sont des militants, des revendicateurs. Il y a quand même eu, et j'en ai été témoin à plusieurs reprises, un trop grand nombre d'enseignants, vraiment de bons enseignants, qui disaient: Oui, mais les tâches deviennent finalement inégales dans les écoles. Je sais que M. Lapointe a dit: II y en a qui sont plus doués pour l'animation; il y en a qui sont plus doués pour la récupération et d'autres pour l'enseignement. À moins que vous ne me disiez qu'il y a un minimum d'enseignement qui soit requis de chaque enseignant dans le décret - et, si c'est le cas, je voudrais le savoir - il ne faudrait pas arriver avec les disparités qu'on connaissait dans le passé où vous aviez des enseignants qui avaient dix périodes d'enseignement pendant que d'autres en avaient jusqu'à 25. Vous vous souvenez du grand débat entre les 20 et les 25 périodes. C'est ma première question.

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

M. Lapointe: Je pense que la question d'équité de tâche est quelque chose de beaucoup plus complexe qu'une équivalence du nombre de périodes d'enseignement strict ou d'autres matières. On peut avoir deux professeurs qui ont le même nombre de périodes d'enseignement, mais qui, selon l'échelon et la matière, même avec le même nombre d'élèves, selon la nature des étudiants et les difficultés qu'ils ont, peuvent avoir objectivement une tâche inéquitable. Donc, la question de la tâche globale permet, à mon avis, d'apporter une pondération pour qu'un enseignant, ayant des élèves plus difficiles et une tâche plus contraignante, puisse se retrouver peut-être avec un peu moins d'enseignement qu'un autre qui sera plus favorisé, soit par la nature de sa discipline et des étudiants qui l'ont choisie. Je pourrais prendre, à titre un peu arbitraire, l'exemple d'enseigner la chimie ou la physique en secondaire V et le fait d'enseigner des mathématiques à des élèves en difficulté en secondaire III. On peut voir qu'il y a beaucoup d'autres connotations que celles du temps, des minutes passées à l'enseignement par rapport au nombre d'élèves, qui viennent pondérer la valeur relative de l'équité de la tâche à ce niveau. Il me semble fondamentalement injuste de prétendre qu'en répartissant le même nombre de minutes d'enseignement à des étudiants on est équitable; au contraire, je pense qu'on est nécessairement inéquitable en fin de compte.

Le Président (M. Jolivet): Je pense que M. Tousignant veut ajouter quelque chose.

M. Tousignant: Je veux seulement ajouter qu'il est vrai que la notion de tâche moyenne peut poser le problème de ce qu'on appelle l'équité de la tâche. C'est sûr que c'est plus complexe, que c'est plus compliqué

d'en débattre dans une école que lorsqu'il y a un automatisme au plan des minutes. Cependant, concrètement, dans la vie de tous les jours, la limite des maxima, par la force des choses, a pour effet de freiner une disparité. Étant donné que l'enseignant ne peut pas dépasser un certain nombre de minutes, ceci même constitue un frein à faire descendre quelqu'un d'autre, à aller trop loin, parce que cela ne balancera plus en fin de compte.

Mme Lavoie-Roux: Mais est-ce qu'il y a une limite inférieure d'enseignement qu'un enseignant doit faire?

Le Président (M. Jolivet): M. Tousignant ou M. Lapointe? M. Lapointe.

M. Lapointe: Dans les décrets, effectivement, il n'y a pas de temps minimal d'enseignement strict qu'un enseignant doit faire. Cependant, je répète l'argument de M. Tousignant qui me semble fort pertinent, à savoir que, avec le nombre d'effectifs disponibles, lorsque, dans une école, on voudra répartir équitablement des tâches et s'entendre avec ses partenaires enseignants là-dessus, il me semblerait très difficle d'arriver à pouvoir se passer des services de certains enseignants pour faire de l'enseignement strict et de leur confier totalement d'autres tâches. Cela me semble même à peu près impossible.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'accepte la variable que vous avez apportée, en ce sens d'enseigner telle matière plutôt que telle autre ou encore d'enseigner à deux niveaux ou d'enseigner deux matières. Enfin, il y a toutes sortes de variables pour analyser la lourdeur d'une tâche. Je le dis franchement: Je m'inquiète qu'il n'y ait pas, pour assurer cette équité des tâches, au moins un minimum d'heures, de périodes, de minutes d'enseignement exigé des enseignants.

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas à commenter cela, c'est un commentaire que je fais.

Le Président (M. Jolivet): Ah bon!

Mme Lavoie-Roux: Je pense que ceci fait l'objet de beaucoup d'inquiétude de la part des enseignants; compte tenu des expériences passées qui ont été vécues, je pense que ce n'est pas totalement sans fondement. Il y a eu beaucoup de discussions sur la fameuse simulation quant au nombre de groupes, compte tenu de la diminution de l'enseignement pour certaines matières, des minutes d'enseignement pour certaines matières et de la multiplication des groupes combinée avec l'augmentation de la tâche et ainsi de suite. Vous nous avez dit qu'il y a plusieurs modèles, qu'il y a surtout le modèle du titulariat qui est facilement applicable particulièrement au secondaire I, toujours dans la mesure où des enseignants sont compétents, il ne faut pas l'oublier, parce que vous avez aussi insisté sur le fait que tous nos enseignants avaient été spécialisés et qu'il faut penser à un certain temps de recyclage. Cela serait quand même plus plausible, peut-être même, au secondaire II. Mais quand vous arrivez en secondaire III, IV et V, l'appréhension de la multiplication de groupes d'élèves que les enseignants devront rencontrer vous apparaît-elle fondée?

Le Président (M. Jolivet): M.

Tousignant.

M. Tousignant: Nous l'avons mentionné, il est très clair que, si les modèles actuels ne changent pas, par le fait que la tâche augmente, il est évident que chaque enseignant, entre autres au deuxième cycle, sera appelé à avoir un plus grand nombre d'élèves. Effectivement, je pense que cela n'est pas souhaitable. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'il faut, le plus rapidement possible dans les mois qui viennent, commencer à élaborer les nouveaux modèles qui permettront d'éviter cette augmentation automatique du nombre de groupes et le fait que chaque enseignant sera appelé à rencontrer plus d'élèves. Je pense que le modèle, il faut viser à le réduire. Quant à nous, il y a des possibilités de trouver ces arrangements.

Mme Lavoie-Roux: II faut aussi penser au recyclage, particulièrement au deuxième cycle du secondaire, et à la combinaison de ceci avec la diminution de temps-minutes d'enseignement dans chaque matière. Vous dites: On aura deux ans pour se préparer et faire les simulations pour la troisième année. Mais il reste quand même que, objectivement, il y a là une augmentation du nombre de groupes d'élèves que les enseignants devront rencontrer.

Le Président (M. Jolivet): D'abord, M. Tousignant; ensuite, M. Lapointe.

M. Tousignant: Très rapidement, nous voulons être très clairs et très honnêtes, dans le sens de dire: II est clair que les changements aux décrets, bien sûr, impliquent des modifications aux organisations et provoquent un certain nombre de problèmes à résoudre. Ceci est clair. Ce que nous disons en même temps, c'est ceci: II n'est pas impossible de trouver, pour autant qu'on ait le temps et la souplesse nécessaire, des solutions à ces

problèmes.

Le Président (M. Jolivet): M. Lapointe.

M. Lapointe: J'ajouterais que, quant au problème des simulations - problème qui a été largement commenté - il est plus complexe que celui de simplement simuler à partir des conventions collectives actuelles, ou du décret plutôt, à partir des paramètres que les gens possédaient pour faire ces simulations dans les derniers jours. (minuit)

II faut tenir compte que le régime pédagogique, qui a fait, comme on le mentionnait, un certain consensus assez large auprès des divers agents concernés, impliquait de soi des réaménagements - par exemple, insistance sur les matières de base, particulièrement au premier cycle, comme la langue maternelle ou les mathématiques par opposition à d'autres matières dans la répartition du temps - amenait de soi déjà des modifications au nombre de groupes et d'élèves à voir.

Deuxièmement, concernant l'approche déjà mentionnée par plusieurs groupes, dont les principaux cet après-midi sont les directeurs d'école, à savoir que, en tenant compte des paramètres budgétaires en consultation actuellement et où les écoles ont simulé en mettant à l'extrême les paramètres qu'ils possédaient, la situation est loin d'être aussi simpliste qu'on a voulu le faire croire en mettant en évidence des exemples absolument extrêmes d'alourdissements de tâche. Je pense qu'il est vrai qu'il y aura des alourdissements de tâche. Nous pensons que dans certains cas les alourdissements de tâche peuvent même être des choix en termes d'enseignement strict par des enseignants par rapport à d'autres types d'activités parce qu'ils pourraient se sentir plus à l'aise. Cela peut faire partie des modèles organisationnels alors que, dans d'autres cas, ces modèles organisationnels eux-mêmes doivent changer.

Nous répétons que, pour la première et la deuxième année, nous avons une marge de manoeuvre beaucoup plus grande, en tenant compte d'une tâche globale de 25 et d'une période moyenne d'enseignement de 21 et 22, que nous avons toujours des inquiétudes quant à la troisième année et que nous avons soumis que des réajustements pourraient être nécessaires à la suite de l'expérience des deux premières années.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je dois dire à l'association des directeurs généraux, rapidement, que j'ai un intérêt personnel pour la fonction qu'ils occupent. Mon père ayant été pendant des années et des années directeur général, je sais le temps, l'ardeur et l'énergie qu'il y a consacrés. Moi, je dois vous dire que je suis profane. C'est, en fait, avec un esprit vierge que je suis venue à cette commission parlementaire et que j'y siège depuis trois jours, mais désireuse de comprendre les enjeux et de bien les comprendre.

Je voudrais faire rapidement un exercice avec vous, compte tenu du mémoire que vous nous présentez, qui rejoint en grande partie celui qui a été déposé par la Fédération québécoise des directeurs d'école. Ce serait à peu près le suivant. Est-ce que je me trompe de croire qu'il y avait des attentes chez un bon nombre d'intervenants du milieu de l'enseignement, attentes qui seraient grosso modo de trois ordres? D'abord la notion de capacité - vous en avez parlé dans votre mémoire - c'est-à-dire introduire, en plus de l'ancienneté, la notion de capacité, en souhaitant qu'elle puisse, finalement, bénéficier aux enseignants puisque c'est sans doute intéressant pour eux d'exercer dans le champ de leur profession. Également, la notion de tâche globale, donc la diminution de la parcellisation. Enfin, la plus grande disponibilité de temps à l'école. Cela m'apparaît être les trois demandes qui ont été exprimées autant par les directeurs d'école que par vous-même et qui ont été retenues dans les interventions gouvernementales.

Or il m'apparaît qu'il n'y a plus de relation directe entre ça et l'augmentation de la tâche parce que, vous savez, c'est difficile de penser que ce ne serait que pour 30 minutes d'enseignement de plus par jour ou pour 12 minutes qu'il y aurait une telle résistance de la part des enseignants. On pense possible que cette augmentation de la tâche résulte en une plus grande difficulté organisationnelle à l'école. C'est un peu, en fait, l'objet de ma question.

Vous nous dites que l'organisation scolaire qui va résulter de ces initiatives gouvernementales est faisable. Il me reste toujours la préoccupation, quant à moi, de savoir si elle est souhaitable. Précisément en ce qui concerne l'augmentation de la tâche, depuis le début de la commission ma réflexion est la suivante. S'il doit y avoir augmentation de la tâche - enfin, tenons pour acquis qu'il y a augmentation de la tâche - à quelle utilisation cette augmentation de la tâche doit-elle être consacrée? Par exemple, vous avez parlé de l'amélioration des relations adultes-élèves.

Il y a aussi un article qui a été cité ici en commission et qui m'a beaucoup impressionnée parce qu'il vient d'une direction d'une école de Montréal où il régnait un certain état de grâce. La direction disait: "Prendre connaissance d'un projet d'école, c'est du même coup s'exposer à reconnaître le rôle d'encadrement devenu

nécessaire et que doivent assumer les enseignants". Ces projets ont des noms. Elle les énumère: projet relié au phénomène de la drogue; projet concernant l'abandon scolaire; projet informatique, avec toute la préoccupation qu'il y a maintenant à introduire l'informatique à l'école; projet d'implantation de nouveaux programmes, etc. "Nous entrevoyons, avec une grande inquiétude pour nos jeunes, le jour où les enseignants, accaparés par leurs trop nombreux groupes, ne seront plus en mesure de travailler à des projets propres au milieu."

Depuis le début, c'est un peu aussi ma préoccupation. Donc, si on retient vos demandes en se disant qu'elles n'ont quand même pas une incidence directe sur l'augmentation de la tâche et, par ailleurs, si on retient l'utilité d'augmenter la tâche, ma question est de savoir à quelle fin il serait plus souhaitable de consacrer cette augmentation.

Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Je vais intervenir en faisant une séquence sur deux, pour le primaire; j'inviterais M. Tousignant à compléter pour le secondaire. À titre d'exemple, on pourrait signaler que, s'il y a augmentation de la tâche pour des fins qui touchent la tâche globale, la présence à l'usager - vous parliez de projets-écoles - on peut facilement concevoir à ce moment, à titre de commentaire pour le primaire, que recommenceraient les activités d'animation plus organisées pour la vie étudiante. Pensons à l'organisation des mouvements scouts, à l'organisation des brigadiers, enfin, à toutes les organisations qui faisaient que notre école avait une vie autre que la rentrée et la sortie pour les fins de cours. C'est un élément important.

Un deuxième élément important est celui des temps-présence complémentaires à l'horaire pour appuyer les enfants qui ont des difficultés dans leur apprentissage avant que commencent des mesures de récupération. C'est un deuxième type d'exemple. J'en donne un troisième qui est majeur maintenant, surtout si on comprend qu'on veut entrer dans un processus où l'école va appartenir à une collectivité qui va travailler ensemble à définir ce projet-école. Je considère que, si des enseignants participent à un comité de gestion-école, consacrent des fins de journée à définir des encadrements, à préciser des déterminations pour fins de budget, à travailler à des politiques-écoles, il y a là une contribution au milieu qui est importante et qui fait partie, sinon de l'encadrement précis auprès de l'élève, au moins de l'encadrement général de l'école. Ce sont des exemples pour les fins élémentaires. Quant au secondaire, M.

Tousignant pourrait nous en donner quelques-uns.

M. Tousignant: Effectivement, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires n'a pas réclamé que l'on augmente la tâche - il faut bien se comprendre là-dessus - en termes de présence d'élèves pour fins d'enseignement, puisque c'est ce dont on parle. Effectivement, nous n'avons pas réclamé du gouvernement qu'il augmente la tâche et, par voie de conséquence, qu'il réduise le nombre de postes d'enseignants. Nous serions tout à fait d'accord, demain matin, pour avoir autant d'enseignants à notre disposition que nous en avions en 1982-1983. Cependant, nous comprenons que le gouvernement a pris une décision de réduire les coûts en éducation. Je pense qu'il lui revient comme gouvernement d'appuyer par ces motifs sa décision. Cela étant dit, nous pensons, entre autres, qu'il y a un principe tout à fait simple qui est celui de se dire qu'il est tout à fait normal que les enseignants soient présents à l'école, à toutes fins utiles, tout le temps où les élèves sont là.

Nous pensons aussi que la tâche d'enseignement doit être une tâche à temps plein, dans le sens que cela doit se traduire par une présence concrète et une véritable disponibilité. Ce n'est pas les 27 heures de l'ancienne convention, mais bien 27 heures où, effectivement, une direction d'école peut utiliser les ressources humaines de l'école aux fins de répondre à la gamme des services requis par les besoins des élèves.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Si j'ai bien compris, le but du décret est d'augmenter la tâche des enseignants pour libérer certaines sommes d'argent qui pourraient être consacrées à d'autres priorités. J'ai été particulièrement intéressée par votre déclaration à la page 8. Vous avez signalé "l'insuffisance des règles budgétaires soumises actuellement à la consultation du réseau". Cet après-midi, nous avons entendu à peu près la même chose des commissions scolaires. Et vous continuez: "Pour nous, ces règles, dans leur forme présente, ferment les possibilités de manoeuvre locale pour gérer le processus de changement enclenché par les décrets". Et vous avez ajouté le cas des ressources pour les enfants en difficulté.

Voudriez-vous préciser un peu cette insuffisance? Pour moi, même si on en arrive à un règlement de ce conflit qui produise des conditions de travail justes pour nos enseignants et la possibilité d'une qualité adéquate d'éducation, on peut détruire le tout s'il n'y a pas assez d'argent pour appuyer notre système. Quels sont les

secteurs sous-financés selon les règles maintenant en consultation et quel est l'ordre de grandeur des écarts?

Le Président (M. Jolivet): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Si vous me le permettez, M. le Président, je vais faire une introduction sur la question du concept et M. Tousignant apportera un complément d'information.

J'entendais, mercredi, notre ministre des Finances parler de son trou de 500 000 000 $, ce qui nous avait fait, un peu dans la moquerie, compléter la réaction en disant qu'on était très contents d'apprendre que ce n'était pas le nôtre! À l'époque, cela avait été un débat fort important, mais il y avait eu des mouvements de redressement dans lesquels les commissions s'étaient fortement impliquées. Nous avons eu une rencontre en janvier avec les officiers du ministère où on a parlé des règles budgétaires qui sont en processus de consultation. J'ai eu à intervenir à ce moment-là et j'ai dit très sérieusement, mais aussi avec humour, que c'est vrai qu'il y a des surplus dans les commissions scolaires, mais qu'on les considérait comme une conséquence d'une préoccupation des directeurs généraux, des administrateurs scolaires et des commissaires d'écoles à faire l'effort pour que le réseau scolaire ne soit pas mis dans une situation -qualifions-la - déficitaire. On avait cherché à suivre les réclamations gouvernementales, à redresser les organisations, mais non au point de négliger certaines réserves - et j'insiste beaucoup sur les fameuses accumulations financières - qui nous permettent de voir venir les années de vaches maigres.

Le ministre des Finances signalait que, selon l'interprétation gouvernementale - ce que je ne conteste pas - les années sont rendues à un virage rapide et qu'il est d'autant plus important pour les commissions scolaires d'avoir un minimum de capacité pour suivre le mouvement rapide, sinon nous nous trouverons dans une situation où, comme administrateurs, nous n'aurons pas su prévoir les mouvements essentiels de rentrées de fonds pour permettre que, demain matin, à la question du député de Roberval, on ne se retrouve pas dans la nécessité de couper des services fondamentaux comme le support à l'enfance inadaptée.

Le sens de la démarche, je pense, que les directeurs généraux avec leurs commissaires, avec les administrateurs, ont tenté de faire, c'est de se donner une situation non pas d'accumulation pour fins d'intérêt, mais d'accumulation pour fins de prévoir - ce qu'on sentait venir - des difficultés de gestion et de pouvoir y répondre, si cela arrivait, par des mouvements secs. Je regarde les commissions scolaires qui ont à subir actuellement des contraintes majeures et quand je considère que, le lendemain matin, elles ont pu suivre le rythme financier en ne détériorant pas la qualité de l'enseignement, je dis bravo. Qu'il y ait eu un cumul d'argent pour le permettre, je pense que c'était là notre mission. (0 h 15)

Dans ce sens, quand on dit que les règles budgétaires, selon notre compréhension actuelle, risquent peut-être de ne pas répondre adéquatement à la gérance, on dit ceci: Les règles sont encore, dans un mouvement de récupération, une nécessité. C'est à discuter. On le considère comme administrateurs et on dit: C'est là, sauf que cette accumulation d'argent que nous avons en main aux fins dont je viens de parler, si on la perd trop rapidement, parce que dans l'enveloppe no 1, il y a des besoins de récupération qui touchent les enseignants, on se retrouve avec un problème de perte de nos réserves qui nous permettent de jouer sur les événements, qui font qu'on protège nos services. Dans ce sens-là, on souhaite que les règles budgétaires, aussi sévères doivent-elles être, ne le soient pas au point de nous enlever nos marges de manoeuvre. Nos marges de manoeuvre ne sont pas là aux fins d'une accumulation.

Je n'aurais pas de plaisir à constater que chez nous il y a une accumulation et à dire aux contribuables qu'il y a un fonds en réserve. Il n'est pas en réserve pour la réserve. Il est là parce qu'on sait qu'on vit des années de redressement. Je dois, devant les contribuables, devant les parents, devant les enfants, garder un rythme de réinstallation du système. Sinon, je ferais preuve d'imprévision et de non-respect des besoins de l'enfant qui ne vont pas au rythme des besoins gouvernementaux ou des capacités gouvernementales, mais au rythme de leurs besoins personnels. C'est dans ce sens-là qu'on dit: Faisons attention à cette récupération d'argent qu'on considère comme vraie. Laissez-nous cette manoeuvre qu'il faut pour garder le rythme. On en a beaucoup parlé dans notre texte, du rythme du changement.

Je ne sais pas si M. Tousignant voudrait rajouter des compléments. Je le laisserai intervenir.

M. Tousignant: Je vais tenter d'illustrer cela le plus rapidement possible. D'abord, dans les règles budgétaires actuelles, il y a un principe de bonne gestion qui s'appelle la transférabilité, c'est-à-dire que les budgets des commissions scolaires comprennent trois enveloppes: l'enveloppe des enseignants, l'enveloppe des autres personnels et l'enveloppe des autres coûts. Au cours des deux ou trois dernières années - je pense que cela a été signalé hier - il y a vraiment eu

un resserrement, des compressions dans les commissions scolaires. Ce principe de la transférabilité est fondamental. Il se produit que dans le projet de règles budgétaires il y a une intention annoncée de récupérer 40 000 000 $ qui, semble-t-il, sont identifiés par les responsables comme étant du "surfinancement" des commissions scolaires pour l'article 1.

À partir du moment où il y a transférabilité, notre principe était de modifier... Je vais donner un exemple concret: on prenait des enseignants et on les utilisait aux fins des centres de documentation, des bibliothèques de façon que ces personnes ne donnent pas que le temps d'enseignement requis, c'est-à-dire les 1100 minutes seulement. Plusieurs commissions scolaires les ont convertis en professionnels pour avoir plus de temps de présence aux centres de documentation. Pour ce faire, les commissions scolaires ont pris de l'argent de l'article 1 et l'ont transféré à l'article 2. Si quelqu'un fait l'analyse des états financiers de l'article 1, il constate que cette commission scolaire semble avoir un surplus à l'article 1. On pourrait donner d'autres exemples, il y en a d'autres. Deuxième volet il est largement connu, et je pense que cela est admis, qu'à l'article 3 les autres coûts n'ont pas été financés au rythme de l'inflation et au rythme des besoins. Il est très clair que les commissions scolaires ont réussi à s'en sortir par le mécanisme de la transférabilité, qui était le principe même de ce budget et qui est - je le répète - un excellent principe. On pense avoir réussi avec cela à donner de bons services et à réduire la progression des coûts.

Il se produit qu'avec l'augmentation de la tâche il va y avoir plus d'enseignants en disponibilité. Je vous donne un exemple concret. Dans ma commission scolaire, si on appliquait les 1150 minutes de moyenne, cela signifierait, pour 1983-1984, 157,4 postes d'enseignants de plus en disponibilité. Avec la mesure de l'étalement, qui est encore une mesure fort valable, les 157,4 deviendraient 57,4 postes. Étant donné que j'avais déjà 90 postes dus à la baisse de clientèle, plus 57, je me retrouve à 147,4. Le problème concret est qu'avec l'article 1 je devrai, évidemment, financer les enseignants autorisés et je devrai aussi, pour un bon pourcentage, utiliser les enseignants en disponibilité qui vont demeurer à la commission scolaire aux fins de la suppléance, aux fins de compléments de tâche par rapport à d'autres projets.

Notre inquiétude est la suivante. En fait, on pense qu'il y aurait des problèmes si cela n'était pas modifié. On tient pour acquis que c'est un projet. Alors, on a compris que c'était un projet, qu'on nous consultait, qu'on était prêt à nous écouter.

On sait aussi qu'il y a eu des modifications après des consultations comme celle-ci. Maintenant, on pense que, rendues là, avec les modifications de modèles qu'on doit apporter, là où il y a une bonne gestion, les commissions scolaires vont devoir avoir des marges de manoeuvre financières réelles pour permettre de corriger ce qui pourrait être des situations problématiques.

Quand on parle de l'aspect financier, c'est de cela qu'on veut parler. On ne veut pas dire, pour être très clairs, qu'il n'y a pas d'argent dans le système. Tout le monde sait qu'il y en a. Mais, on pense actuellement qu'à la fois les mesures de compression demandées, plus la récupération de 40 000 000 $, plus les modifications organisationnelles pourraient causer des problèmes. C'est dans ce sens-là.

Le Président (M. Jolivet): Merci.

Mme Dougherty: Est-ce que je pourrais...

Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme la députée.

Mme Dougherty: ...demander au ministre des Finances quelles sont les intentions du gouvernement à l'égard des règles budgétaires? La réponse appelle une autre question.

Le Président (M. Jolivet): Oui. Je ne veux pas vous en empêcher, mais...

Mme Dougherty: C'est la dernière.

Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas cela surtout, c'est parce que vous créez un précédent à la commission. On a dit qu'on intervenait en face. On l'a demandé à plusieurs occasions aujourd'hui et je ne voudrais pas que ce soit un précédent si jamais le ministre des Finances acceptait de répondre.

M. Parizeau: Je n'aurais pas d'objection à répondre dans un autre contexte, mais là, vraiment, on créerait un précédent assez étonnant et je suis persuadé qu'à l'Assemblée nationale, à partir de mardi, je pourrai donner toutes les réponses utiles à cet égard.

Le Président (M. Jolivet): Donc, cela étant dit, je demanderai au député d'Argenteuil de conclure et, après, le ministre de l'Éducation pourra parler. Je reviendrai ensuite, après avoir laissé la parole, à la fin, au leader du gouvernement, sur le menu qui nous attend dans les jours qui viennent. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, deux thèmes s'imposent à nous à ce moment tardif. Tout

d'abord, je veux offrir des remerciements à l'endroit des porte-parole de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires pour la rencontre très intéressante, très profitable, que nous avons eue avec eux et nos meilleurs voeux de bon travail dans la recherche de solutions au problème que nous considérons comme central, la recherche d'un règlement négocié au conflit actuel. Je pense que la plupart des considérations qu'ils nous ont apportées, si cette condition peut se réaliser, pourront elles-mêmes se réaliser dans un climat infiniment plus propice à la qualité de l'éducation, qui est notre souci premier à tous.

Nous terminons également une journée, nous terminons même une phase. Ma collègue de L'Acadie est extraordinaire, comme vous l'avez constaté, parce qu'à la fin de la journée elle est encore meilleure qu'au début et, après trois jours, elle n'en a compté que deux. Nous en avons compté trois et, au terme de ces trois jours, nous pensons qu'il est temps que les intentions du gouvernement commencent à se profiler avec un peu plus de netteté.

Il y a bien des choses qui ont été dites et je pense qu'on doit dire à l'avantage du ministre de l'Éducation qu'il a laissé les travaux se dérouler sans chercher à les dominer, sans chercher à les écraser d'aucune manière. Je pense que, de ce point de vue là, c'est excellent. Si le geste malheureux que nous avons dénoncé ce soir avec vigueur et dont il doit porter la responsabilité n'était pas survenu, ce serait meilleur encore. J'espère qu'on réussira à effacer cette mauvaise étape. Je pense que c'est infiniment regrettable. J'espère, toutefois, que cela ne viendra pas nuire de manière irréparable au processus de recherche qui est engagé depuis trois jours dans un esprit, je pense, de sincérité très profonde de la part de tout le monde. Je mets tout le monde sur un pied d'égalité quand il s'agit d'imputer de la sincérité aux autres. Je sais bien que des fois ce n'est pas la manière d'être le plus populaire, même de son propre côté, mais je veux croire que le gouvernement a ses moments de sincérité comme l'Opposition et que les syndicats les ont comme la partie patronale également dans une situation de conflit comme celle où nous nous trouvons.

Je pense que ce serait bon pour le déroulement de notre recherche collective qu'on entende au moins ce soir une réaffirmation, peut-être encore plus explicite que ce qu'on a entendu en fin d'après-midi aujourd'hui, de la volonté du gouvernement d'aller vers une démarche de conciliation et de rapprochement avec l'aide de mécanismes que notre tradition - beaucoup plus que nos lois d'ailleurs - pratique de relations de travail indique. On a eu des indications de ce côté-là en fin d'après-midi et il me semble qu'en vue de la dernière phase qui doit venir lundi, si on pouvait obtenir l'assurance que tout cet immense travail accompli dans un climat de bonne volonté par les parlementaires et par les témoins qui sont venus nombreux, dont certains devront d'ailleurs revenir lundi, n'a pas été fait pour rien, si on pouvait avoir dès maintenant des éléments permettant de dissiper les doutes raisonnables que certains peuvent entretenir, que ce soit parti d'un plan de propagande, d'une orchestration, de démarches visant à montrer au public que, quoi qu'il arrive, le gouvernement avait raison sur toute la ligne cela aiderait à détendre l'atmosphère et on pourrait rentrer dans nos comtés respectifs en fin de semaine en disant qu'on espère toujours.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, je veux, de mon côté, remercier très profondément l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires. Nous vous avons gardés plus longtemps que certains autres groupes, probablement en raison de circonstances exceptionnelles, mais peut-être aussi en raison de la qualité des informations que vous nous avez apportées.

À la fin de ces trois jours, je dois dire que les nombreux groupes que nous avons rencontrés nous ont permis de beaucoup mieux comprendre les enjeux du conflit. Chacun nous a apporté ses perspectives propres, ce qui était, je crois, essentiel, mais chacun nous a aussi apporté, du point de vue qui était le sien, des éclairages, des informations, des renseignements dont la population avait besoin, dont les membres de la commission avaient besoin également pour poursuivre leur travail et aller dans le sens de cette recherche d'avenues de solutions qui, au fond, est l'objectif que nous poursuivons.

Nous avons mieux compris la situation au terme de ces trois jours et, mieux comprendre une situation, c'est mieux se comprendre et, parfois, mieux se comprendre, c'est la condition qui peut nous amener à mieux nous entendre. D'ailleurs, plusieurs groupes, dont le vôtre, nous ont fait la recommandation du caractère hautement souhaitable d'un règlement négocié. C'est une recommandation que nous acceptons et à laquelle, d'emblée, nous souscrivons, car elle est tellement plus souhaitable qu'un conflit qui s'éternise. Donc, ce règlement négocié, nous le recherchons.

Certains groupes nous ont fait des recommandations pour que ce règlement négocié survienne; par exemple, cette recommandation qui revient dans plusieurs mémoires, d'une reprise des négociations en présence d'un tiers qui concilierait des points

de vue opposés, qui tenterait de trouver des moyens, des mécanismes et des objets d'entente. J'ai déjà dit, à deux occasions, à quel point c'est dans ce sens que ma propre réflexion s'orientait. D'accord avec le principe, il nous faut maintenant en rechercher les modalités. Je m'y emploie activement avec mes collègues du gouvernement et ce ne sont pas des incidents de parcours qui peuvent nous empêcher de poursuivre nos efforts dans cette direction.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire ce soir à la députée de L'Acadie, nous ne sommes peut-être pas encore prêts à parler de ces décisions, puisque nous étudions encore à ce moment-ci les modalités qui nous permettraient d'arriver à un mécanisme qui serait le plus opportun possible. Mais nous comptons aussi sur la journée de lundi pour que d'autres groupes puissent peut-être, sur ce point également, nous faire des suggestions qui pourraient nourrir notre réflexion. De toute façon, je pense que je peux assurer les membres de cette commission qu'au terme du processus le gouvernement a la décision très ferme d'annoncer que ce rapprochement, cette conciliation de points de vue opposés se fera selon les souhaits qui ont été exprimés et que cette décision, je l'espère, en tout cas, ira au devant des souhaits qui ont été exprimés devant cette commission au cours des trois derniers jours.

Sur ce, je vous remercie, encore une fois, de votre contribution. (0 h 30)

Le Président (M. Jolivet): Merci, messieurs.

Ordre des travaux

Comme nous devons clore nos débats, je dois simplement rappeler - c'est mon rôle - le nom des groupes qu'il nous reste à entendre. D'abord, les deux groupes de ce soir, soit l'Association des cadres scolaires du Québec, ainsi que la Fédération des comités de parents de la province de Québec, qu'on n'a pas entendus. Il y a, à l'ordre du jour de lundi - le leader nous en parlera davantage - neuf groupes, soit Quebec Federation of Home and School Association, Quebec Association of Catholic School Administrators, Quebec Association of Protestant School Boards, le Conseil des collèges, Quebec Association of School Administrators, l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires protestantes du Québec qui, avec l'Association of Protestant School Business Officials of Quebec, avait l'intention de présenter un mémoire conjoint - donc, deux groupes distincts qui peuvent être entendus en même temps - l'Association nationale des étudiants du Québec et l'Institut canadien de l'éducation des adultes. Ce sont les groupes qu'il nous reste à entendre.

Je demanderais au leader de nous dire ce qui va se passer lundi. Normalement, nous siégeons à 10 heures, mais si d'autres ententes sont intervenues, à quelle heure siégerons-nous?

M. Bertrand: M. le Président, après avoir entendu les propos du député d'Argenteuil et du ministre de l'Éducation, qui reflètent un optimisme, à mon avis, certain et une volonté de coopération tout aussi certaine, et après avoir cru comprendre que cette commission, qui s'est bien engagée mercredi, peut, à l'occasion, bien sûr, connaître certaines bourrasques - Dieu sait qu'en démocratie la mer n'est pas toujours calme; le président sait naviguer dans tout cela avec beaucoup de sérénité, même si le parcours est difficile - je sens une chose: c'est que le vieux proverbe chinois demeurera toujours vrai: "il faut laisser au temps le temps de faire son temps", même si, de part et d'autre, on peut avoir l'impression, à l'occasion, que le temps presse.

Dans un contexte comme celui-là, je suis convaincu qu'au-delà des propos qui ont été tenus ce soir nous conviendrons ensemble qu'il serait souhaitable que lundi, étant donné que deux groupes qui devaient être entendus ce soir reviendront lundi et, bien sûr, auront priorité, soit l'Association des cadres scolaires du Québec et la Fédération des comités de parents de la province de Québec - M. le Président, j'ai de la difficulté à le dire - sachant à quel point tout le monde s'intéresse à chaque présentation qui est faite et veut interroger les gens parce que les parlementaires cherchent à comprendre, à savoir et, ensuite, à faire un pas de plus dans la bonne direction, et que nous aurons, au total, onze groupes à entendre, si nous voulons les entendre, si nous désirons qu'ils soient entendus, je ne peux faire autrement que lancer une invitation non seulement à l'Opposition, mais je dirais même au parti ministériel pour que ces onze groupes puissent être entendus lundi.

Je crois savoir déjà que, par exemple, plusieurs groupes anglophones ont exprimé le désir de présenter conjointement leurs mémoires - au pluriel - et, par la suite, de répondre aux questions des parlementaires. Il y a six groupes anglophones qui viendront lundi. À mon avis, nous nous devons de les écouter. Nous nous devons d'entendre ce qu'ils ont à dire. Nous nous organiserons donc pour faire en sorte qu'ils puissent au moins présenter leurs mémoires, quitte à ce que, sachant ce que cela peut vouloir signifier, nous nous réservions moins de temps pour leur poser des questions. Il faut que nous puissions entendre leur point de vue. Je pense que ces groupes méritent vraiment d'être entendus. Certains, jusqu'à

maintenant, ont fait preuve de patience, c'est le moins qu'on puisse dire. Le Conseil des collèges attend depuis mercredi. La Fédération des comités de parents et l'Association des cadres scolaires sont probablement encore ici et reviendront lundi. Il y aura aussi l'Association nationale des étudiants du Québec et l'Institut canadien de l'éducation des adultes que nous avons acceptés parce qu'ils ont exprimé le désir de se présenter devant la commission. Nous répondions à un voeu aussi exprimé par le député d'Argenteuil.

Je demeure optimiste malgré tout, M. le Président, et je sais que c'est vous qui avez à veiller à ce que nous puissions en arriver à réaliser un objectif, une mission peut-être impossible, celle d'entendre tous ces groupes. Mais au-delà de ce qui a pu, ce soir, créer pendant un certain temps un climat qui n'était certes pas agréable pour personne, j'ai la conviction personnelle que, si nous mettons beaucoup de bonne foi à conclure nos travaux lundi, il sera possible d'entendre ces onze groupes. Partant de là, en nous appuyant sur les propos encourageants du député d'Argenteuil et du ministre de l'Éducation, nous appuyant sur quatre jours de commission parlementaire, l'avenir nous paraît prometteur et une certaine forme de lumière nous paraît venir du bout du tunnel. La commission parlementaire aura été, somme toute, une étape fructueuse dans ce processus. C'est une invitation que je lance. Je ne peux faire autrement, sachant le travail qu'il nous reste à faire et sachant que nous ne pourrons pas déborder la journée de lundi.

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie. Mon rôle est de vous inviter à être à l'heure lundi matin, 10 heures. La commission ajourne ses travaux à lundi matin, 10 heures.

M. Ryan: M. le Président, juste un point.

Le Président (M. Jolivet): Un instant. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Le problème du partage du temps, il faudra en discuter lundi matin...

Le Président (M. Jolivet): C'est cela.

M. Ryan: ...avant 10 heures, autant que possible. On attendra des nouvelles du leader à ce sujet. Pour l'instant, notre position demeure celle que nous avons établie plus tôt. Nous avons dit: Nous verrons comment les événements vont se présenter. Je voudrais prévenir le gouvernement que c'est facile de dire: II y a eu un incident, on passe l'éponge. J'ai remarqué qu'il n'y a eu aucune reconnaissance de responsabilité de la part du gouvernement, aucune manifestation de volonté de ne pas reprendre ces choses-là.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:

M. Ryan: Ce qui nous choque, c'est qu'on travaille dans un esprit de conciliation, ici, tout le monde, y compris les ministres qui sont venus ici. Pas tous, mais la plupart. Si on entend une déclaration du chef du gouvernement à la radio qui dit: On va leur passer la matraque, s'ils ne marchent pas, ou si on reçoit un journal comme celui qu'on a reçu, vous mettrez cela à votre programme, étant donné les événements que vous devez vivre en fin de semaine.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Ajournement de la commission.

(Fin de la séance à 00 h 39)

Document(s) associé(s) à la séance