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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le jeudi 14 avril 1988 - Vol. 30 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Ministère de l'Éducation


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance ouverte. Je voudrais souhaiter la bienvenue à M. le ministre de l'Éducation ainsi qu'aux gens qui l'accompagnent, plus particulièrement à certains de mes électeurs du comté de Beauce-Nord. Boujour!

Je vous rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Éducation pour l'année financière 1987-1988. On a prévu une durée de huit heures pour l'étude des crédits du ministère de l'Éducation selon l'horaire suivant: ce matin, jusqu'à 12 h 30; cet après-midi, après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures, et ce soir, de 20 heures à 23 heures.

M. le secrétaire, est-ce que vous pourriez annoncer les remplacements, s'il vous plaît?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Audet (Beauce-Nord) remplace M. Parent (Sauvé).

Le Président (M. Audet): II n'y a pas d'autres remplacements?

Le Secrétaire: Non.

Le Président (M. Audet): Cela va. Je crois qu'il y a aussi une entente pour étudier le programme 2 concernant le Conseil supérieur de l'éducation, ce soir, après le programme 5. Cela va?

J'invite maintenant M. le ministre à nous faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous avez la parole.

Remarques préliminaires M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, au moment où nous entrons dans une nouvelle année budgétaire, le paysage scolaire se distingue au Québec par une atmosphère sans précédent de stabilité, de tranquillité productive et de recherche ordonnée mais résolue de l'excellence. Partout, commissaires, enseignants, personnels professionnels et de soutien, parents et élèves sont à l'oeuvre. Dans la plupart des écoles et des commissions scolaires, les initiatives visant à promouvoir la qualité des apprentissages et la rigueur dans l'effort se multiplient. Les grands dossiers de l'éducation sont abordés de plus en plus souvent dans un climat de dialogue et de collaboration entre partenaires. Après avoir, pendant deux décennies, mis l'accent sur l'expansion des effectifs, des installations et des équipements, le système d'enseignement semble vouloir trouver sa voie en cette époque de contraction budgétaire et de redressement douloureux dans la recherche de la qualité et l'approfondissement de sa mission. Déjà, nous pouvons entrevoir les premiers résultats de l'effort de révision que notre société a exigé ces dernières années de son système d'enseignement. Les premiers résultats indiquent que l'accessibilité continue d'enregistrer des gains encourageants, que la qualité progresse et que nous continuons d'avancer dans la voie de la rationalisation des dépenses publiques consacrées à l'éducation.

De nouveau, cette année, le ministère de l'Éducation publie, à l'occasion de l'étude annuelle de ses crédits budgétaires, sa brochure intitulée "Indicateurs sur la situation de l'enseignement primaire et secondaire". Je voudrais extraire de cette brochure quelques données instructives sur les progrès accomplis pendant la dernière année pour laquelle nous disposons de données complètes, c'est-à-dire l'année 1986. Au chapitre de l'accessibilité, le degré de scolarisation de la population québécoise continue de progresser. Au plan des clientèles régulières composées en presque totalité d'élèves d'âge scolaire le taux d'accès à une formation secondaire complète enregistre de nouveaux progrès. Le relèvement de la note de passage des examens à 60 % a sans doute entraîné un léger fléchissement de l'accès à la quatrième et à la cinquième année du cours secondaire, mais tout indique que la tendance de fond vers une persévérance accrue au niveau secondaire est appelée à se maintenir. En 1986, l'accessibilité atteignait 99 % en première secondaire, 96 % en deuxième secondaire, 94 % en troisième secondaire et 87, 3 % en quatrième secondaire. Si l'on ajoute à cela la progression du nombre de diplômes secondaires obtenus par les adultes - ce nombre est passé de 4861, en 1976, à 9788 en 1986 - on est justifié de considérer que le Québec s'oriente à grands pas vers un stade de développement où pratiquement toute sa population apte aura reçu au minimum une formation complète de niveau secondaire.

Parmi les obstacles qui se dressent encore sur notre route, il y a notamment les retards et les abandons scolaires. La proportion des élèves accusant un certain retard pendant leurs études primaires et secondaires s'établissait en 1986 à 45 %. Ce taux demeure très élevé. Il dénote toutefois une progression importante par comparaison avec l'année 1981, alors que le taux était de 53 %. Les abandons scolaires sont pour leur part en nette régression. En 1976, le nombre d'élèves qui abandonnaient les études sans avoir obtenu le diplôme d'études secondaires s'élevait à 63 000. En 1986, il n'était plus que de 31 000. En dix ans, le taux d'abandon probable des études avant l'obtention du diplôme d'études secondaires est passé de 48 % à 28 %, soit une progression très nette de la scolarisation. Des écarts importants subsistent toutefois à ce chapitre entre les différentes régions.

II ne suffit pas de garder les élèves plus longtemps à l'école, il faut surtout que l'école leur offre une formation valable, surtout dans les matières fondamentales qui sont sa principale raison d'être. Grâce aux politiques de divulgation des résultats des épreuves ministérielles que nous avons instituées depuis deux, ans nous disposons désormais chaque année de données qui nous permettent de mesurer de manière plus précise le chemin parcouru par les élèves inscrits dans nos écoles. Si nous examinons les résultats des 118 épreuves administrées en 1987 dans les classes de troisième, quatrième et cinquième secondaire par le ministère de l'Éducation, nous enregistrons les principales constatations suivantes: premièrement, légère progression de la moyenne des résultats mais baisse du taux de réussite - ce dernier résultat de la baisse du taux de réussite provient surtout du relèvement de la note de passage des épreuves de cinquième secondaire, laquelle a été haussée en 1987 de 50 % à 60 % - deuxièmement, résultat supérieur à la moyenne aux épreuves de langue seconde, anglais et français, mais résultat inférieur à la moyenne en mathématiques, en sciences, en géographie et en histoire; troisièmement, légère amélioration à l'épreuve ministérielle de français écrit; quatrièmement, résultat généralement supérieur obtenu par les élèves des établissements privés; cinquièmement, différence à peu près nulle entre les résultats obtenus par les garçons et les filles pour l'ensemble des épreuves ministérielles, mais résultat nettement supérieur pour les filles à l'épreuve de français écrit.

Par-delà ces résultats dont chacun doit être interprété avec les nuances nécessaires, je tiens à souligner l'effort impressionnant de reprise pédagogique, de rapprochement des enseignants et des élèves, de personnalisation du travail éducatif, de recherche de modes plus humains et plus efficaces d'organisation scolaire qui se multiplient à travers les commissions scolaires et les écoles. J'ai personnellement visité de nombreuses écoles primaires et secondaires au cours des derniers mois. J'en suis revenu chaque fois avec une impression très favorable quant à la qualité du travail accompli par les enseignantes et les enseignants, par les cadres scolaires et les autres personnels, par les parents des élèves et les commissaires d'école.

L'actuel gouvernement s'était fixé comme premier objectif le rétablissement graduel d'un climat d'engagement, de stabilité, de confiance et de saine fierté dans le système d'enseignement. De nouveaux pas significatifs ont été franchis dans cette direction en 1987. Je veux en remercier tous ceux et toutes celles qui ont rendu ces progrès possibles par leur travail consciencieux auprès des quelques 1 132 805 élèves que comptait en 1986-1987 notre système d'enseignement primaire et secondaire public et privé.

Au seuil d'une nouvelle année budgétaire, l'étude des crédits du ministère de l'Éducation invite le ministère à dévoiler ses priorités pour l'année à venir. Je le ferai en signalant certains objectifs majeurs que nous entendons poursuivre au cours de la prochaine année.

Dans le domaine de l'enseignement proprement dit, nous poursuivrons l'effort vigoureux de réaménagement de l'enseignement professionnel que nous avons entrepris en 1987. Les objectifs établis pour 1987-1988 ont été pratiquement atteints: lancement de plusieurs programmes devant conduire au diplôme d'études professionnelles, mise en place de mesures de recyclage et de perfectionnement pour les enseignants, jonction entre le système d'enseignement et les milieux de travail, etc. Malgré les circonstances très difficiles dans lesquelles elle fut lancée -on se souvient des retards avec lesquels il fallut composer - la première phase de la réforme a réussi. Nous entendons également réussir la deuxième phase de l'opération, laquelle est déjà commencée avec les inscriptions pour 1988-1989.

L'année 1988-1989 sera marquée au premier chef par l'implantation de la nouvelle carte des enseignements professionnels, par le lancement de nombreux programmes nouveaux ou renouvelés, par l'implantation de 163 programmes différents, dont 27 seront des programmes nouveaux, par l'implantation des programmes conduisant au certificat d'études professionnelles, par la création d'attestations de spécialisation professionnelle, par la mise en route d'un système de cheminement particulier à l'intention des élèves qui éprouvent des difficultés spéciales, par d'importants investissements consacrés à la modernisation des équipements, par l'implantation d'un nouveau système de sanction des études, par de nouvelles expériences d'harmonisation de la formation offerte aux jeunes et aux adultes, et par la mise en oeuvre de modifications importantes au régime pédagogique. Ces modifications touchent la durée des études devant conduire au certificat d'études professionnelles et l'autorisation d'un mode de sanction décentralisé pour des études de courte durée ne pouvant être sanctionnées dans le cadre des trois diplômes reconnus à l'échelle nationale.

Deuxièmement, au plan pédagogique toujours, le renforcement de l'apprentissage du français, langue maternelle, surtout du français écrit, demeure la priorité majeure du gouvernement. Au cours des prochains jours, j'aurai l'honneur de dévoiler le plan d'action que nous avons conçu à cette fin. Largement inspiré des résultats de la consultation faite auprès des milieux scolaires au printemps de l'année dernière, le plan d'action visera surtout à susciter l'engagement de tous les intervenants à chaque niveau de responsabilité. Il visera à promouvoir une prise en charge collective par les milieux scolaires eux-mêmes de leur présent et de leur devenir linguistiques. Des mesures visant à renforcer l'étude objective de la langue française dans les programmes d'études, à promouvoir l'usage du dictionnaire et de la grammaire, à améliorer la qualité des bibliothèques scolaires, à

stimuler l'initiative dans chaque école et dans chaque commission scolaire, à promouvoir l'engagement de tout le personnel enseignant et non seulement des professeurs de français, à promouvoir la recherche et à récompenser l'excellence seront comprises dans le plan d'action. Des crédits additionnels de 3 000 000 $ seront consacrés à ces mesures en 1988-1989.

Lorsque le plan d'action, en vue de l'amélioration du français écrit et parlé, aura été solidement implanté, d'autres initiatives suivront en vue de renforcer la qualité de l'apprentissage du français et de l'anglais, langue seconde, de l'anglais, langue maternelle, des mathématiques et des sciences. Tant et aussi longtemps que ce travail de base n'aura pas été solidement implanté, nous continuerons d'accueillir avec réserve les propositions innombrables visant à faire de l'école une sorte de fourre-tout que l'on utilise pour la promotion de causes toutes aussi nobles les unes que les autres.

L'évaluation revêt désormais dans les systèmes scolaires une importance grandissante. Les gouvernements et les citoyens qui défraient des coûts sans cesse plus élevés de l'éducation tiennent à obtenir des assurances vérifiables quant à la qualité du travail accompli dans ce secteur. L'évaluation des apprentissages faits par les élèves offre à cette fin des possibilités nombreuses. En même temps qu'il met au point des épreuves multiples visant à mesurer la qualité des apprentissages des élèves, le ministère de l'Éducation procède à une vérification systématique de la qualité des programmes d'études. En 1987-1988, les programmes suivants ont été l'objet d'une révision: anglais langue seconde, sixième primaire; histoire générale, deuxième secondaire; histoire du Québec et du Canada, quatrième secondaire. En 1988-1989, le travail de révision portera sur le français, langue maternelle en troisième primaire et en sixième primaire. L'anglais langue maternelle en deuxième secondaire et les mathématiques en troisième secondaire.

La forme des épreuves ministérielles visant à vérifier la qualité des apprentissages est appelée à connaître au cours des prochaines années d'importantes modifications. À ma grande satisfaction, les épreuves totalement objectives qui ont saturé la scène scolaire québécoise depuis une vingtaine d'années céderont graduellement le pas à des épreuves laissant une place plus importante à l'écriture et à l'expression personnelle chez l'élève.

En plus des épreuves offertes au deuxième cycle du cours secondaire, le ministère offrira à l'avenir aux commissions scolaires des épreuves d'appoint pour certaines matières à la fin de chacun des deux cycles du primaire et à la fin du premier du secondaire. Les premières épreuves offertes aux commissions scolaires porteront sur la langue maternelle, la langue seconde et les mathématiques.

Vers l'automne de cette année, nous prendrons également connaissance des résultats d'une épreuve internationale portant sur les apprentissages d'élèves âgés de 13 ans en mathématiques et en sciences à laquelle le Québec a accepté de participer, de concert avec les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Espagne, la Corée, l'Irlande, l'Ontario, la Colombie britannique et le Nouveau-Brunswick. Je souhaiterais depuis longtemps que la qualité du travail éducatif accompli au Québec puisse donner lieu, de manière fréquente, à des comparaisons rigoureuses avec la performance enregistrée dans d'autres sociétés comparables. Cette première expérience est très intéressante.

Dans la poursuite de ses objectifs fondamentaux, le gouvernement continuera de s'appuyer au premier chef sur l'école publique et les commissions scolaires regroupant plus de 91 % de tous les élèves inscrits dans des établissements primaires et secondaires et se voyant attribuer 95 % des ressources atttribuées par la société québécoise à l'enseignement primaire et secondaire. L'école publique est, aux yeux du gouvernement, l'école commune, l'école prioritaire, celle où la très grande majorité des parents inscrivent leurs enfants. En raison du rôle majeur qui lui est dévolue, l'école publique est l'objet de l'attention prioritaire du gouvernement. Le gouvernement entend maintenir cette ligne de conduite. C'est pourquoi il se réjouit tout particulièrement de l'effort de valorisation et de promotion de l'école publique entrepris par de nombreuses commissions scolaires. Faire en sorte que l'école soit vivante, forte, humaine, accueillante et attrayante, voilà un objectif auquel souscrit sans réserve le gouvernement.

En 1988-1989, le gouvernement continuera d'entretenir avec les commissions scolaires, dont relèvent au Québec les écoles publiques, des rapports continus de collaboration et d'échanges. Dans chaque région, les rapports du ministère avec les commissions scolaires sont principalement assurés par les directions régionales du ministère, lesquelles ont établi avec les commissions scolaires de leur territoire respectif des rapports embrassant tous les aspects de la vie scolaire et empreints de respect mutuel et de collaboration.

Au plan national, le cabinet du ministre et la direction du ministère entretiennent des rapports quotidiens avec un grand nombre de commissions scolaires. Ils ont également de nombreux rapports de collaboration avec les deux grandes fédérations regroupant les commissions scolaires, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec et l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, de même qu'avec les autres associations regroupant divers intervenants du monde scolaire: directeurs généraux, cadres, parents, directeurs et directrices d'école, enseignants et enseignantes, etc. (10 h 30)

La priorité accordée à l'école publique n'empêche pas le gouvernement d'accueillir avec

intérêt, voire d'apprécier à sa juste valeur l'apport substantiel des établissements privés au travail d'éducation. Les établissements privés ne sont pas tous d'égale valeur. Certains sont plutôt des entreprises commerciales n'ayant parfois d'éducatif que le nom ou la réclame commerciale dont elles se parent. Mais de nombreux établissements privés offrent en contrepartie une formation de haute qualité qui leur a valu d'être reconnus par le gouvernement comme ayant droit à des subventions importantes. Le gouvernement reconnaît sans hésitation le rôle utile de ces établissements. Il voit, dans leur existence, un précieux aiguillon pour l'ensemble du système d'enseignement. Tout en insistant pour que les parents intéressés à inscrire leurs enfants dans des établissements privés, consentent pour ce faire à des sacrifices financiers significatifs, le gouvernement demeure disposé à soutenir financièrement les établissements privés et à permettre leur développement ordonné. Vu la situation financière générale du gouvernement, il est toutefois hors de question, pendant le présent mandat, que soit augmenté le niveau des subventions accordées aux établissements privés.

Dans les décisions qu'il a prises cette année en matière de statuts nouveaux et de statuts améliorés, le gouvernement s'est inspiré des orientations que je définissais l'an dernier, lors de l'étude des crédits du ministère de l'Éducation. En vertu des décisions annoncées ces derniers jours, trois établissements se voient accorder pour la première fois un statut subventionné, trois autres voient leur statut passer de la reconnaissance à des fins de subvention à la déclaration d'intérêt public; deux autres obtiennent l'autorisation d'ajouter de nouveaux services à ceux qu'ils offrent déjà. Au total, le nombre de places nouvelles subventionnées s'élèvera, en 1988-1989, à 440 au primaire et à 410 au secondaire.

En pourcentage, les inscriptions à l'enseignement en langue française accusent une progression constante depuis quelques années. En 1984-1985, la proportion des élèves du primaire et du secondaire inscrits à l'enseignement en langue française était de 88,4 %. Cette proportion a augmenté à 88,8 % en 1985-1986; à 89,1 % en 1986-1987; à 89,5 % en 1987-1988. Si l'on considère que la proportion des francophones dans la population totale du Québec est de 84 %, les résultats des inscriptions scolaires témoignent 'd'une application efficace de la Charte de la langue française dans le milieu scolaire.

Ces résultats ont été obtenus en même temps que le gouvernement décidait d'appliquer la Charte de la langue française de manière plus respectueuse des personnes. Ils ont été rendus possibles, entre autres, par la décision qu'ont prise quelques milliers dé parents anglophones d'inscrire volontairement leurs enfants à l'enseignement en langue française.

Concernant l'admissibilité à l'enseignement en langue anglaise, deux éléments doivent être soulignés. En premier lieu, le traitement et le contrôle des demandes d'admission à l'école anglaise seront désormais assurés par des personnes désignées oeuvrant au sein des directions régionales du ministère et non plus dans un bureau centralisé comme autrefois. Les demandes d'admission seront ainsi traitées par des personnes plus proches des milieux concernés. En second lieu, il convient de souligner l'excellent travail accompli par la Commission d'appel sur la langue d'enseignement, laquelle a réussi au cours de la dernière année à traiter de manière humaine et efficace tous les dossiers dont elle avait été saisie. En 1987-1988, la commission a recommandé l'admission à l'enseignement en langue anglaise de 31 enfants dont le dossier avait révélé une situation grave d'ordre humanitaire ou familial. Ce sont 31 enfants situés dans 25 familles différentes. Après examen de la documentation pertinente, je fus heureux d'accéder à la recommandation de la commission, dans chacun de ces cas.

De manière très générale, les dispositions de la Charte de la langue française et du régime pédagogique en matière de langue d'enseignement sont fidèlement observées par les commissions scolaires. Là où des critiques s'élèvent, je vois à ce qu'une enquête soit instituée sans délai. Ainsi, j'ai demandé a la direction régionale de Montréal du ministère de faire une étude approfondie sur la qualité des services offerts à sa clientèle francophone par la Commission des écoles protestantes du grand Montréal. Cette étude, qui embrasse tous les sujets importants relatifs à la vie scolaire, se poursuit présentement. Une situation difficile ayant surgi à Val-d'Or, où la Commission scolaire protestante Northwestern Quebec a ravi quelque 300 élèves à la commission scolaire catholique, j'ai institué une enquête à ce sujet. Le rapport de l'enquête vient de m'être remis. Il sera rendu public aujourd'hui même à Val-d'Or et à Québec. J'annoncerai en temps utile les mesures que je déciderai d'instituer à la suite de ce rapport.

En ces jours où la communauté anglophone manifeste des signes d'inquiétude, il convient de rappeler les mesures prises par le gouvernement pour assurer à cette dernière une situation satisfaisante au plan scolaire. Par l'ajout de ressources humaines importantes en provenance de la communauté anglophone, par une meilleure distribution de ses ressources à travers les directions régionales et les principaux services du ministère, par la création de nouveaux mécanismes de collaboration entre la direction des services aux élèves anglophones et des unités administratives du ministère, la participation de la communauté anglophone à la préparation et à l'exécution des politiques est mieux assurée. Les dossiers de la communauté anglophone sont traités de façon plus immédiate, moins marginale. L'égalité d'accès aux services du ministère devient graduellement une réalité. Pour ne

prendre qu'un exemple récent, la préparation de la carte des enseignements professionnels s'est faite en tenant compte des besoins du secteur anglophone en même temps que l'on procédait à l'examen des besoins du secteur francophone. Il en va de même des différentes étapes qui entourent la mise au point des règles budgétaires des commissions scolaires, des négociations collectives et des autres mesures instituées par le ministère.

À un autre niveau, le gouvernement a favorisé, depuis 1986, plusieurs regroupements de clientèles scolaires anglo-catholiques qui étaient menacés de perdre leurs services éducatifs propres. De tels regroupements ont eu lieu, notamment à Québec, dans la région de Laval-Mille-Îles, et à Aylmer. À Québec, une entente entre la Commission des écoles catholiques de Québec et la Commission scolaire des Découvreurs a permis de regrouper les élèves anglo-catholiques de ces deux commissions scolaires dans une même école primaire et dans une même école secondaire. Cette entente a permis d'améliorer la qualité de l'organisation scolaire et les services offerts aux élèves anglo-catholiques. Dans la région de Laval-Mille-Îles, une entente d'une durée de six ans a été conclue entre les commissions scolaires des Mille-Îles, de Sainte-Thérèse et Chomedey de Laval à la suite du rapport présenté par un groupe de travail que j'avais formé. En vertu de cette entente, la Commission scolaire Chomedey de Laval s'est vue attribuer la responsabilité de la scolarisation des élèves catholiques anglophones des trois commissions scolaires au niveau primaire. Cette entente impliquait le transfert de 441 élèves à la Commission scolaire Chomedey. En vertu de cet ajout d'élèves, cette commission scolaire a pu améliorer sensiblement la qualité des services pédagogiques offerts à sa clientèle anglophone.

Signalons enfin que les projets de loi 106 et 107 permettent d'entrevoir des changements susceptibles d'améliorer sensiblement la situation scolaire des anglophones. La création de commissions scolaires linguistiques devrait permettre à chaque communauté linguistique de regrouper tous ses effectifs scolaires sous une direction unifiée émanant d'elle-même. Les projets de loi prévoient en outre, à l'intention des communautés linguistiques minoritaires, des mécanismes inédits de représentation qui devraient, du moins pendant la période de transition devant précéder l'implantation des commissions scolaires linguistiques, favoriser leur participation à la gestion des affaires scolaires.

De nouveau, au cours des derniers mois, l'âge d'admission à l'école a retenu l'attention. Même si l'abaissement de l'âge d'admission figure toujours au programme du Parti libéral, le gouvernement, pour des raisons financières, a dû reporter de nouveau cette année les changements qu'il projette d'apporter aux dispositions réglementaires touchant l'âge d'admission à l'école. Le gouvernement ne pouvait cependant demeurer indifférent aux représentations qui lui parvenaient de parents dont les enfants pourraient subir un préjudice sérieux à la suite d'une application aveugle et littérale de la réglementation actuelle. Aussi, à la lumière de l'expérience vécue l'année dernière et des demandes des parents qui expriment des besoins réels, j'ai décidé d'ajouter trois nouveaux critères à ceux qui étaient déjà utilisés pour justifier des dérogations. Ces nouveaux critères: le développement précoce de l'enfant, la situation du milieu familial et le cas particulier de deux enfants d'une même famille admissibles à l'école pour la première fois la même année, ont été précisés dans un formulaire adressé aux commissions scolaires au début de la présente année. Ils s'appliquent pour l'examen des demandes d'admission en vue de l'année 1988-1989. Ils permettront de tenir compte des problèmes très sérieux auxquels font face des parents québécois, tandis que les critères déjà reçus favorisaient surtout les enfants venant de l'extérieur du Québec.

Au cours de l'année 1987-1988, 468 dérogations furent accordées, dont 229 pour l'admission au préscolaire, 177 pour l'admission en première année du primaire et 62 pour la reprise de la classe maternelle. Le nombre de dérogations accordées au titre des nouveaux critères mentionnés ci-dessus a été de 150.

En vertu des politiques gouvernementales, tout adulte québécois qui poursuit sa formation en vue de l'obtention d'un diplôme d'études secondaires ou d'une spécialisation professionnelle peut s'inscrire à des cours dispensés par les commissions scolaires. Deux enveloppes budgétaires sont disponibles à cette fin: celle du ministère de l'Éducation et celle du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. L'enveloppe dont dispose le ministère de l'Éducation est une enveloppe ouverte. Un budget est prévu au début de l'année mais ce budget peut être dépassé si les inscriptions le justifient. L'allocation de base réservée à ce programme est passée de 85 000 000 $, en 1985-1986, à 121 700 000 $ en 1986-1987. Pour l'année scolaire 1987-1988, nous estimons que le coût du programme sera d'environ 130 000 000 $. Pour l'année 1988-1989, nous avons institué des mesures de stabilisation qui permettront de contrôler davantage l'augmentation des coûts. Ces mesures porteront principalement sur le contrôle et le calcul des clientèles et sur le financement des services d'encadrement et de soutien. Des économies de quelque 20 000 000 $ sont prévues en raison de ces mesures. Le principe de l'enveloppe ouverte est toutefois maintenu.

Le programme d'aide aux organismes volontaires d'éducation populaire sera maintenu sous une nouvelle appellation et amélioré en 1988-1989. Une addition de crédits de 1 000 000 $ à ce chapitre permettra de mettre fin au moratoire qui pèse sur ce programme depuis 1984. Le programme d'aide aux OVEP a également fait l'objet d'un examen approfondi

par un groupe de travail que présidait M. Réal Charbonneau. Le rapport du groupe de travail m'a été remis à la fin de 1987. Sur le concept d'éducation populaire, sur les critères d'admissibilité des organismes, sur la gestion du programme, le rapport contient de nombreuses recommandations qui donneront lieu à des décisions ministérielles d'ici à la fin de la présente année. Je compte être en mesure de communiquer ces orientations avant l'ajournement d'été de la session. Je puis d'ores et déjà laisser entrevoir qu'un bon nombre des recommandations formulées par le comité Charbonneau seront retenues.

En matière d'alphabétisation, deux réseaux principaux interviennent: les services d'éducation des adultes des commissions scolaires et les organismes autonomes. Le ministère consacrera à ce poste, en 1988, le même budget qu'en 1987- 1988, soit 19 700 000 $ pour le réseau des commissions scolaires et 1 700 000 $ pour les organismes volontaires d'éducation populaire. Toute proportion gardée, je crois que le Québec est la province qui accomplit l'effort le plus considérable de toutes les provinces canadiennes en matière d'alphabétisation.

Les clientèles présentant des difficultés d'adaptation et d'apprentissage ont connu, ces dernières années, une progression numérique préoccupante. En 1985-1986, le nombre d'élèves souffrant de difficultés d'adaptation et d'apprentissage s'élevait à 109 864, soit 2058 en maternelle, 66 146 au primaire et 41 660 au secondaire. En 1987-1988, les commissions scolaires ont déclaré 130 007 élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, soit 2247 à la maternelle, 76 397 au primaire et 51 363 au secondaire.

Des ajustements aux règles budgétaires ont permis, en 1987-1988, ajout de 150 postes d'enseignants dans ce secteur. Ces ajustements ont également permis une répartition plus équitable des sommes disponibles à cette fin entre les commissions scolaires. De nouveaux ajustements seront apportés aux règles budgétaires en 1988-1989, de manière à tenir compte, dans toute la mesure du possible, du facteur de défavorisation socio-économique dans la répartition des ressources. Un ajout de 126 postes d'enseignants est également prévu pour 1988- 1989, à la suite d'ajustements dans les règles budgétaires.

(10 h 45)

Au primaire, les élèves en difficulté représentent 11, 8 % de la clientèle totale et se voient attribuer 17 % des ressources aux enseignants. Au secondaire, les élèves en difficulté représentent 14 % de la clientèle totale et se voient attribuer 16 % des ressources enseignantes.

Le système scolaire compte quelque 12 500 élèves souffrant de handicaps physiques ou mentaux sérieux. Les subventions versées pour ces élèves atteignent en moyenne 10 500 $ par année, alors que le coût moyen d'un élève régulier est de 3500 $. À l'intérieur des paramè- tres budgétaires définis par le ministère, la responsabilité de fournir aux clientèles en difficulté des services éducatifs incombe aux commissions scolaires. Devant l'ampleur qu'a prise la situation, le ministère a toutefois procédé au cours de la dernière année à une enquête sur l'état des services offerts à ces clientèles. L'enquête a révélé que la politique d'intégration des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage dans les classes régulières a produit des résultats substantiels. Elle a toutefois permis de déceler également des difficultés majeures touchant l'intégration d'élèves qui souffrent de déficience intellectuelle ou de déficiences multiples.

Le ministère compte mettre au point en 1988-1989 un plan d'action concernant ce secteur. Le plan comprendra notamment des mesures visant à procurer une meilleure connaissance de la situation réelle, à préciser les dispositions du régime pédagogique touchant ces élèves, à définir une carte nationale et des mandats pour des services très spécialisés qui doivent être faits de manière à embrasser plusieurs territoires scolaires. Ce projet de loi 107 permettra pour sa part de définir avec plus de précision la responsabilité des commissions scolaires en matière de services à fournir aux élèves en difficulté et de favoriser une meilleure participation des parents à l'élaboration des politiques des commissions scolaires dans ce domaine.

La confessionnalité scolaire sera au coeur des débats qui entoureront au cours des prochains mois les travaux de l'Assemblée nationale autour des projets de loi 106 et 107 traitant de la Loi sur l'instruction publique. Le gouvernement a choisi de réorganiser les commissions scolaires sur une base linguistique plutôt que sur une base confessionnelle. Il est convaincu que ce nouveau mode d'organisation reflétera mieux la réalité diversifiée et changeante d'aujourd'hui. Par souci de prudence et de justice, le gouvernement, avant d'implanter la réforme, verra toutefois à faire valider son projet par les tribunaux compétents. Il veut éviter ainsi de plonger inconsidérément le système scolaire dans des modifications majeures qui risqueraient par la suite d'être annulées par les tribunaux.

Soucieux de préserver le rôle important des. valeurs religieuses et morales dans la formation de la jeunesse québécoise et voulant agir en ces matières en conformité avec la volonté des parents, le gouvernement a apporté aux règlements des comités confessionnels concernant la confessionnalité des écoles et l'enseignement moral et religieux d'importantes modifications dont la plupart entreront en vigueur dès le début de la prochaine année scolaire, c'est-à-dire à compter du 1er juillet 1988. Ces modifications visent à assurer une révision périodique du vécu confessionnel de l'école et une meilleure qualification des enseignants chargés de l'enseignement moral et religieux confessionnel. Elles visent à introduire à la fois une plus grande liberté et

une plus haute mesure de vérité dans l'aménagement des structures scolaires sous l'angle confessionnel. Le gouvernement a également inscrit dans le projet de loi 107 de nombreuses dispositions visant à garantir le droit des élèves à des services d'enseignement moral et religieux et d'animation pastorale conformes aux valeurs de leurs parents.

En 1987-1988, le gouvernement, suivant le rythme modifié qu'il approuvait en 1985, a poursuivi l'implantation du plan de développement de la micro-informatique scolaire. Une somme de 5 000 000 $ a été consacrée à l'achat d'appareils spécialisés dans le secteur de la formation professionnelle. Une autre somme de 3 500 000 $ a été consacrée à l'acquisition d'appareils en formation générale. Pour l'année 1987-1988, le ministère de l'Éducation disposait en outre d'un budget de fonctionnement de 4 500 000 $ destiné à assurer la poursuite des initiatives instituées au cours des années précédentes. En cours d'année, des ressources financières additionnelles de 2 000 000 $ ont été obtenues pour l'implantation de centres d'enrichissement en microinformatique scolaire.

À l'aide des crédits de 7 100 000 $ qui lui ont été accordés au titre du budget de fonctionnement pour la micro-informatique, le ministère mettra l'accent en 1988-1989 sur les objectifs suivants: perfectionnement du personnel enseignant, production, évaluation et achat de logiciels, expérimentation et innovation pédagogique, centres d'enrichissement en micro-informatique scolaire. Dans chaque région du Québec et, éventuellement, dans chaque commission scolaire, le ministère veut implanter des centres d'excellence en micro-informatique où l'on pourra trouver en quantité suffisante des ressources de qualité, tant au point de vue humain qu'au point des vues des équipements. Aux trois centres pilotes déjà créés en 1987-1988 viendront s'ajouter, en 1988-1989, au moins 18 centres régionaux et locaux.

Les services de garde en milieu scolaire occupent une place grandissante dans la gamme des services éducatifs offerts par l'école moderne. Ces services répondent aux besoins nouveaux des familles. De 1984-1985 à 1987-1988, le nombre d'écoles dotées de services de garde a augmenté de 299 à 484. Le nombre d'élèves inscrits à ces garderies est passé pendant la même période de 14 195 à 30 500. Les budgets consacrés aux garderies scolaires sont passés de 2 071 770 $ en 1984-1985 à 3 917 800 $ en 1987-1988. En 1988-1989, des crédits additionnels de 2 000 000 $ permettront d'accroître sensiblement le nombre de places disponibles dans les garderies scolaires.

La présence des communautés culturelles dans le système d'enseignement revêt de plus en plus d'importance. Ce phénomène se manifeste surtout dans la région de Montréal, où s'établissent plus de 80 % des immigrants qui élisent domicile au Québec. À la Commission des écoles catholiques de Montréal, par exemple, les élèves allophones représentent désormais 37 % de la clientèle totale de cette commission scolaire la plus importante au Québec. Dans certaines écoles, les élèves allophones représentent désormais une forte majorité des effectifs étudiants. Aux nombreux défis proprement pédagogiques que pose cette situation nouvelle viennent s'ajouter des difficultés additionnelles découlant du fait que dans plusieurs quartiers la présence d'une forte population allophone coïncide avec un indice élevé de défavorisation socio-économique.

À l'intention des milieux allophones, le ministère de l'Éducation a maintenu en 1987-1988 son programme de classes d'accueil. La clientèle des classes d'accueil a connu une progression importante au cours de la dernière année. Les effectifs inscrits dans les classes d'accueil étaient de 4700 élèves en septembre 1987, alors que la moyennes des inscriptions au cours des dix années précédentes se situait entre 3200 et 3500. L'augmentation provient surtout de l'accroissement du nombre d'immigrants et de réfugiés, lequel a beaucoup augmenté depuis deux ans et est destiné à augmenter de nouveau l'an prochain. On peut augurer en conséquence que le nombre d'inscriptions dans les classes d'accueil continuera de progresser. Je suis heureux de signaler que des instruments pédagogiques adaptés au besoin de ces classes d'accueil ont été mis au point par le ministère. Nous disposons désormais de programmes et de guides destinés à faciliter le travail dans les classes d'accueil. Les programmes et les guides maintenant disponibles portent sur l'apprentissage du français, les éléments fondamentaux des mathématiques, les arts, l'éducation physique, l'intégration à la société québécoise et l'éducation interculturelle. Il manque cependant encore du matériel de base pour les élèves: vu la clientèle peu nombreuse qui serait atteinte par de telles publications, les éditeurs ne se montrent guère empressés.

Aux commissions scolaires plus directement affectées par l'augmentation des effectifs allophones, soit la CECM et la CEPGM, le ministère a versé, au titre de ces clientèles, des subventions d'appoint de 1 300 000 $ et de 300 000 $ respectivement en 1987-1988. Une somme additionnelle de 300 000 $ a en outre été attribuée au Conseil scolaire de l'île de Montréal pour être répartie entre les autres commissions scolaires de l'île. Pour l'année 1988-1989, une somme totale de 2 000 000 $ sera versée aux commissions scolaires de l'île de Montréal au titre des clientèles allophones. Dès que le ministère disposera de ressources suffisantes, il entend définir une politique qui permettra d'étendre aussi à d'autres commissions scolaires concernées par ce problème les mesures d'appoint au titre des clientèles allophones.

Lors de la création du ministère de l'Éducation, en 1964, le législateur a sagement tenu à entourer le ministre de l'Éducation de corps consultatifs chargés de l'aviser sur diverses

matières reliées à son mandat. Ces corps consultatifs sont le Conseil supérieur de l'éducation, ses deux comités confessionnels et ses commissions sectorielles, et la Commission consultative de l'enseignement privé. Le principal de ces organismes est le Conseil supérieur de l'éducation dont le champ d'intérêt embrasse tout le monde de l'éducation, même si, en pratique, ses interventions portent surtout sur l'enseignement primaire et secondaire. Au cours de 1987-1988, le conseil supérieur a produit, à l'intention du gouvernement, de nombreux avis empreints de réalisme, d'équilibre et de générosité. Refusant de céder aux modes du jour, s'appuyant toujours sur une documentation largement diversifiée, oeuvrant dans une atmosphère de grande liberté, formé de membres venus d'horizons très divers, le conseil supérieur est intervenu sur des sujets aussi variés que le nouveau régime de formation professionnelle, l'éducation préscolaire, le perfectionnement de la main-d'oeuvre, la qualité du français à l'école, les défis éducatifs de la pluralité, l'enseignement et la recherche en sciences sociales et humaines. Pour une seule année de travail, voilà un bilan fort impressionnant! Pendant toute l'année, le conseil supérieur a entretenu avec le ministre et ses collaborateurs des rapports empreints de collaboration et de respect réciproque.

Les deux comités confessionnels du conseil supérieur ont également connu, en 1987-1988, une année très active. Cette année a été marquée par l'adoption de nouveaux règlements gouvernementaux sur la confessionnalité scolaire et sur les qualifications devant être exigées des enseignants chargés de l'enseignement moral et religieux confessionnel. Les comités confessionnels ont en outre continué d'assurer la vérification, sous l'angle moral et religieux, des projets de manuels soumis à l'approbation du ministre.

La Commission consultative de l'enseignement privé est appelée, pour sa part, à connaître un nouveau départ en 1988-1989. Désormais munie de son propre secrétariat, disposant d'un modeste budget pour ses travaux de recherche, formée presque entièrement de membres nouveaux, dirigée par un nouveau président, M. Paul-Aimé Paiement, dont les états de service dans le monde de l'éducation sont largement connus dans tout le Québec. La commission, avec l'accord du ministre, envisage d'élargir son champ d'intérêt en 1988-1989. En plus de continuer, comme le requiert la Loi sur l'enseignement privé à émettre des avis sur les demandes de permis ou de statut subventionné soumises à l'examen du ministre, la commission entend aussi se prononcer sur des questions plus larges concernant l'enseignement privé et ses rapports avec le monde de l'éducation en général. Je me félicite des rapports actifs et productifs qu'entretiennent avec mes collaborateurs et moi-même les comités consultatifs chargés par la loi de me conseiller. Ces organismes accomplissent un travail digne et compétent qui leur vaut d'agir d'une manière influente sur le processus de préparation et de vérification des politiques gouvernementales.

En matière de relations du travail, l'année 1987-1988 commençait par la signature formelle des ententes conclues en décembre 1986 avec les syndicats de salariés oeuvrant dans le secteur scolaire, en particulier avec les syndicats d'enseignants. Ces négociations conclues dans un esprit constructif et respectueux de chacune des parties ont permis de retrouver un climat de collaboration nécessaire à la bonne marche des écoles.

En 1987-1988, les conventions collectives ont permis d'ajouter quelque 350 enseignants au système, soit 200 enseignants au secteur général secondaire, 100 enseignants pour les trois programmes de commerce et de secrétariat et 50 postes pour les élèves déficients mentaux profonds. Les mesures prévues dans la convention collective entraîneront, en 1988-1989, l'injection de 20 500 000 $ dans l'enseignement primaire et secondaire public.

L'année 1987-1988 a aussi permis que s'amorce le travail des huit nouveaux comités paritaires prévus à la convention collective des enseignants. Un comité paritaire national sur les mesures de résorption s'est employé à mettre sur pied des mesures spéciales visant à résoudre en particulier les problèmes des professeurs mis en disponibilité au secteur professionnel et chez les généralistes du secteur anglophone. Le comité a accordé 259 primes de séparation à 100 % et approuvé 111 projets de recyclage de courte ou de longue durée. Le comité disposait d'un budget supplémentaire de 5 300 000 $. En 1988-1989, ce budget s'élèvera à 4 700 000 $, en plus d'un montant de 58 000 000 $ affecté à l'ensemble des mesures de sécurité d'emploi prévue à la convention collective des enseignants. (11 heures)

Le comité chargé de la répartition des 200 postes additionnels au secteur général et le comité sur les cheminements particuliers ont terminé leurs travaux. Le comité sur la formation professionnelle est associé aux principales étapes de l'implantation de la nouvelle politique et formule les recommendations qu'il juge nécessaire. Le comité sur la rémunération des enseignants complétera ses travaux en 1988. Les comités relatifs aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage à l'éducation des adultes et aux milieux pluri-ethniques socio-économiquement faibles poursuivent leurs travaux à un rythme un peu plus lent. Toutefois, le rythme des travaux permet d'anticiper que, dans l'ensemble, la plupart des comités auront rempli leur mandat d'ici à la reprise de la prochaine ronde de négociations.

La situation au chapitre des mises en disponibilité s'est grandement améliorée ces dernières années. On dénombrait, en juin 1984, 2167 professeurs en disponibilité. Le nombre des enseignants en disponibilité ne s'élève plus en mars 1988 qu'à 1509. Le 30 juin 1987, on retrou-

vait très peu de mises en disponibilité chez les professeurs du secteur général francophone, soit seulement 246. Les disponibles se concentrent surtout dans le secteur anglophone où on en retrouvait 532 et dans le secteur professionnel où on en retrouvait 712. En ce qui concerne plus particulièrement les enseignants du secteur professionnel en disponibilité, leur nombre est passé de 1480, le 1er juillet 1987, à 797 le 30 septembre de la même année.

J'en viens maintenant à des considérations plus générales sur l'ensemble des crédits budgétaires du ministère. Pour saisir la portée des données concernant les ressources à l'Éducation, il importe de rappeler la courbe qu'a suivie le Québec depuis quinze ans l'évolution des dépenses publiques consacrées à l'enseignement primaire et secondaire. Ainsi que le souligne la brochure "Indicateurs 1988", les dépenses des commissions scolaires par élève étaient moins élevées au Québec qu'en Ontario en 1972-1973. Tandis qu'en Ontario, les commissions scolaires dépensaient 894 $, le Québec dépensait 854 $ par élève, soit 50 $ de moins. À compter de 1976-1977 - je n'ai pas besoin de préciser - on assista à un renversement de la tendance, si bien qu'en 1981-1982 les dépenses par élève des commissions scolaires atteignaient au Québec la somme de 3563 $ par an, tandis qu'en Ontario elles étaient de 2813 $ par an, soit un coût supérieur de plus de 25% par élève au Québec. L'explication du phénomène découle des politiques différentes suivies dans les deux provinces. Les diminutions d'effectifs scolaires se produisirent surtout dans chacune des deux provinces pendant les années 1970. Tandis que l'Ontario commençait dès cette époque à ajuster ses dépenses en fonction de cette nouvelle réalité, le Québec, obéissant à des contraintes et à des rigidités de toutes sortes, voyait ses dépenses par élève continuer à augmenter. À partir de 1982-1983, un effort de redressement fut entrepris dans les circonstances dramatiques dont on se souvient qui entraînèrent une ponction de 20 % rétroactive sur les salaires des employés des secteurs public et parapublic et l'imposition de décrets en lieu et place de conventions collectives.

Pendant les années suivantes, l'effort de redressement s'est poursuivi, quoique dans une atmosphère toute différente. Pour l'année 1986-1987, l'écart entre les dépenses des commissions scolaires parallèles n'était plus que de 33 % entre le Québec et l'Ontario, c'est-à-dire qu'il était passé de 25 % en 1981-1982 à moins de 1 % en 1986-1987. Même à son niveau de 1987, l'écart est cependant plus significatif qu'il ne le semble à première vue. Il doit, en effet, être compris à la lumière de l'écart de richesse qui favorise nettement l'Ontario. Étant donné sa richesse inférieure d'environ 15 % à celle de l'Ontario, le Québec, à dépenses égales, consacre ainsi un effort plus lourd que l'Ontario à l'enseignement primaire et secondaire.

Un autre facteur a influencé la politique gouvernementale ces dernières années. Il fallait ramener les dépenses publiques en général à un niveau davantage compatible avec les ressources de la population québécoise et davantage comparable aux normes canadiennes. Pour cela, il fallait réduire le niveau des dépenses publiques, car elles avaient atteint un sommet dangereusement supérieur aux moyennes canadiennes, tout comme l'endettement, lequel découle fatalement des excès de dépenses autant, dans la vie publique que dans la vie privée. Pour produire des fruits, l'effort du gouvernement devait logiquement impliquer tous les secteurs d'activité où l'on trouvait des niveaux de dépenses supérieurs aux moyennes canadiennes. Étant donné sa situation par rapport à l'Ontario, le secteur de l'éducation ne pouvait éviter d'être mis à contribution. De là ont découlé les mesures de compression qui ont lourdement affecté les budgets de l'enseignement primaire et secondaire au cours des dernières années.

Sous l'effet des mesures d'austérité instituées par le gouvernement, la situation des finances publiques s'est déjà sensiblement améliorée. Le niveau des déficits de fonctionnement et de l'endettement est loin, cependant, d'avoir atteint un seuil satisfaisant. Aussi le gouvernement, pour une troisième année consécutive, a-t-il décidé d'imposer en 1988-1989 certaines compressions qui s'appliquent à l'ensemble de l'administration gouvernementale et paragouvernementale, sauf à certains secteurs qui ont été l'objet d'un traitement d'exception en raison de leurs besoins jugés particulièrement aigus et urgents.

Lors de la préparation des crédits en vue de l'exercice 1988-1989, il a été jugé que le ministère de l'Éducation devait assumer de nouveau cette année sa juste part des compressions. Les compressions assumées par le ministère de l'Éducation s'établissent ainsi: non-indexation des dépenses autres que les salaires, c'est-à-dire des dépenses d'achat de biens et de services, 12 600 000 $ - c'est dans tout le système, y compris l'administration du ministère et les organismes subventionnés, en particulier les commissions scolaires - compression de 1, 5 % sur la masse des personnels autres que syndiqués, 11 200 000 $; baisse des effectifs du ministère, 700 000 $; total, 24 500 000 $. De ce total, 19 700 000 $ sont assumés par les réseaux d'enseignement et le reste, par le ministère.

En contrepartie, diverses mesures, provenant les unes des dispositions des conventions collectives, les autres d'ajustements mécaniques aux règles budgétaires, les autres de demandes additionnelles de crédits acceptées par le gouvernement, apporteront en 1988-1989 des ajouts de crédits de 30 100 000 $ ainsi répartis: plan d'action sur le français, 3 000 000 $; services de garde en milieu scolaire, 2 000 000 $; microinformatique, 2 400 000 $; OVEP, 1 000 000 $; conventions collectives, 20 500 000 $; ajustements mécaniques aux règles budgétaires,

1 200 000 $, pour un total de 30 100 000 $. Au total, les crédits de l'exercice 1988-1989 se soldent ainsi par un ajout net de ressources de 5 600 000 $.

À la suite des compressions des dernières années, la part des dépenses gouvernementales attribuée à l'enseignement primaire et secondaire a inévitablement connu une diminution appréciable. De 19 % en 1980-1981, elle est passée à 16,4 % en 1988-1989. Ce résultat s'explique en bonne partie par l'effet à retardement des mesures d'ajustement qui eussent dû être prises plus tôt, mais qui ne furent vraiment mises en oeuvre qu'à compter de 1982-1983.

Pour apprécier la portée de ces chiffres, il faut situer les données québécoises en égard des données embrassant l'ensemble du Canada. La brochure "Indicateurs 1988" montre que le Québec, par delà l'effet des compressions des dernières années, consacrait, en 1986, 5,4 % de son produit intérieur brut aux dépenses de l'enseignement primaire et secondaire, tandis que les dépenses du même secteur absorbaient dans le reste du Canada seulement 4,4 % du PIB. L'écart entre le Québec et le Canada avait atteint, en 1981, un niveau de 1,8 point. Il n'est plus désormais que de 1,0 point. En dollars, cet écart signifie néanmoins, pour 1986, des coûts supérieurs relatifs, compte tenu de l'indice de richesse pour le Québec, d'environ 1 000 000 000 $ par année, par rapport au reste du Canada. Ces coûts seraient plus élevés si les calculs devaient tenir compte de la durée plus longue de l'enseignement primaire et secondaire dans les autres provinces canadiennes.

Au cours des dernières années, le secteur de l'enseignement primaire et secondaire a ainsi assumé sa lourde part de l'effort de rationalisation qu'avait décidé de s'imposer le gouvernement. À la lumière de ces faits, il convient de rendre un hommage particulier aux commissions scolaires, lesquelles ont su, malgré tout, améliorer la santé de leurs finances. Suivant les derniers relevés du ministère de l'Éducation, les commissions scolaires affichaient, au 30 juin 1987, un surplus cumulatif de plus de 150 000 000 $, lequel inclut un surplus d'exercice d'environ 30 000 000 $ réalisé en 1986-1987, nonobstant le régime d'austérité sévère auquel elles ont été acculées ces dernières années. Cette situation témoigne que, tout en continuant d'offrir des services de qualité à leurs clientèles et tout en s'engageant résolument à un effort de poursuite de l'excellence proposé par le gouvernement et demandé par la population, les commissions scolaires ont participé de manière substantielle, à leur niveau propre, à l'effort de rationalisation que devait s'imposer toute la société québécoise pour devenir de plus en plus compétitive. Le Québec ne saurait toutefois continuer longtemps d'évoluer dans la voie empruntée ces dernières années sans risquer de mettre en danger la qualité des services qu'il doit offrir à sa population en matière d'éduca- tion. Déjà, certains secteurs névralgiques, comme celui de l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, se ressentent sévèrement de la trop faible augmentation des budgets qui leur a été attribuée au cours des dernières années. De même, le parc scolaire québécois, nos immeubles scolaires, nos équipements en matière scolaire, enregistrent un vieillissement et des carences inquiétantes, surtout par suite des négligences des années précédentes.

Le moment approche où il faudra donner un vigoureux coup de barre, afin d'assurer que le système d'enseignement du Québec reste à la hauteur du défi très exigeant que lui pose la perspective d'un avenir où il n'y aura de chance de survie et d'épanouissement pour les peuples et les individus que s'ils sont munis à tout point de vue d'un équipement intellectuel et professionnel à toute épreuve. Je me réjouis, à cet égard, des propos récents du président du Conseil du trésor qui, lors du dévoilement des crédits budgétaires pour l'année 1988-1989, indiquait que la période des compressions et des mesures d'austérité touchait à sa fin. Merci.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le ministre.

Je reconnais maintenant la porte-parole de l'Opposition pour l'éducation, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

L'étude des crédits du ministère de l'Éducation nous fournit l'occasion d'examiner et de commenter les politiques du gouvernement dans ce secteur crucial de notre vie collective, aussi bien sur le plan des ressources qui y sont consacrées que des divers dossiers ou questions en rapport a l'organisation, au fonctionnement et aux orientations de notre système éducatif. J'ai donc l'intention, M. le Président, de prendre quelques minutes, à l'ouverture de cette commission parlementaire, pour aborder un certain nombre de dossiers qui m'apparaissent particulièrement importants, en plus de tracer un portrait des politiques budgétaires de ce gouvernement en matière d'éducation.

Les crédits alloués au ministère de l'Éducation pour 1988-1989 s'élèvent à quelque 5 189 000 000 $, ce qui représente une augmentation de 4,5 % par rapport aux dépenses probables de 1987-1988. En dollars constants, il ne s'agit cependant que d'une croissance de 0,4 %. De plus, celle-ci demeure inférieure de 1 % à la croissance générale des dépenses du gouvernement, qui se chiffre, on le sait, à 5,5 %. Par rapport à l'ensemble de celle-ci, la part des dépenses du ministère de l'Éducation diminue donc cette année pour représenter 16,4 %. Quand à la part des dépenses du MEQ dans le produit intérieur brut, elle ne s'élève plus qu'à 3,7 %, en comparaison de 4,2 % en 1985-1986 et à un

sommet de 5 %, rappelons-le, en 1981-1982. Soulignons également que les dépenses par élève au secteur public, en dollars constants, ont accusé un recul depuis trois ans, passant de 2385 $ à 2353 $, c'est-à-dire une diminution de 32 $ par élève. (11 h 15)

Que peut-on conclure de ces différentes données, un peu comme le faisait tout à l'heure le ministre de l'Éducation en disant qu'on ne pouvait plus poursuivre sur cette voie sans menacer la qualité et le développement de l'éducation au Québec? Ce qu'on peut conclure, c'est que l'éducation ne constitue pas une priorité pour le gouvernement libéral. Son importance relative par rapport à l'ensemble des activités de l'État ne s'est même pas maintenue. Lors de la dernière campagne électorale, le Parti libéral, par la voie du député d'Argenteuil, n'en finissait plus de critiques dramatiques touchant les compressions pratiquées par le gouvernement précédent, compressions, rappelons-le, dictées par une crise économique sans précédent. Et ce même député, actuellement ministre, s'engageait à accorder a l'éducation une place de premier plan parmi les priorités gouvernementales des prochaines années. On est amené à penser qu'il ne faisait pas le poids auprès du président du Conseil du trésor. Force nous est de conclure qu'il s'agissait de mots creux et que les actes n'ont pas suivi les paroles.

En effet, pour une troisième année d'affilée, trois sur trois, le gouvernement pratique des compressions substantielles dans le budget du ministère de l'Éducation. Probablement pour se laisser une marge de manoeuvre pour en ajouter à l'occasion de l'année où il se produira des élections générales. En effet, elles totalisent, en 1988-1989, 25 000 000 $ - et, donc, plus de 32 000 000 $ en année scolaire - que sont très loin de compenser les 8 500 000 $ au titre des activités prioritaires du ministre. En fait, ce que le ministre fait, c'est une ponction de près de 32 000 000 $. Il dit: Généreusement on vous en retourne 8 000 000 $, selon des activités qu'il estime être prioritaires. Sur trois ans, le niveau de compression s'établit à quelque 82 000 000 $ et ce, alors que, selon le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances, le Québec connaît une prétendue période de vaches grasses.

Chaque année, depuis trois ans, le ministre de l'Éducation, le grand défenseur de l'éducation du temps de l'Opposition, qui dénonçait avec une violence et une certaine démagogie les compressions budgétaires, vient confier à cette commission, l'âme en peine, se réjouissant enfin que le président du Conseil du trésor entende raison, le coeur en bandoulière, qu'il regrette de procéder à des compressions et que des jours meilleurs s'en viennent. Mais cela ne semble pas ébranler le président du Conseil du trésor, à tout le moins pas pour cette année. On aurait pourtant pu s'attendre que le système d'éducation bénéficie de la conjoncture économique favorable que nous connaissons présentement. Les besoins à satisfaire demeurent pourtant criants, les nouveaux défis à relever exigeants, que ce soit sur le plan de l'alphabétisation, des clientèles pluriethniques, des milieux défavorisés, des équipements comme du perfectionnement des enseignants. Tout cela devra encore attendre.

Si l'on considère plus particulièrement l'enseignement primaire et secondaire public, l'augmentation des crédits est de 4,3 % et s'explique essentiellement par l'effet de l'augmentation des traitements. Le réseau public subit 75 % des compressions du ministère, soit 18 800 000 $ en année budgétaire, compressions qui découlent de la diminution de 1,5 % de la masse salariale du personnel non enseignant et de la non-indexation des autres dépenses. Sur trois ans, le réseau public aura subi plus de 65 000 000 $ de compression.

C'est particulièrement intéressant de comparer la situation qui prévaut dans les réseaux public et privé. De 1985-1986 à 1988-1989, les sommes consacrées à l'enseignement primaire et secondaire public ont connu une croissance de 12,9 %, à peu près équivalente à l'inflation, dans un contexte de stabilité des clientèles. Pendant cette même période, le budget du secteur privé augmentait de 25,4 %, soit à un rythme proportionnellement deux fois plus rapide que dans le public. Si l'on exclut les établissements privés faisant l'objet d'une entente internationale et dont les fonds ont été transférés cette année, du ministère des Relations internationales à celui de l'Éducation, les subventions au secteur privé, en année scolaire, auront bondi, en trois ans, de près de 40 000 000 $, soit 21 %, depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir. On n'a pas à chercher longtemps pour savoir où se trouvent les priorités du ministre de l'Éducation: du côté des écoles privées qui, on le sait, rejoignent une clientèle plus favorisée. En effet, on ne retrouve pas dans les écoles privées les clientèles du ministre Paradis.

Seulement pour cette année la croissance des crédits au privé se chiffre à 7,2 %, comparativement à 4,3 % au public. Celle-ci découle d'une augmentation des clientèles et témoigne éloquemment du parti pris résolument affiché par ce gouvernement à l'endroit de l'enseignement privé. En tenant compte des décisions récemment annoncées par le ministre, la levée du moratoire a signifié jusqu'à maintenant l'octroi de nouveaux statuts subventionnés à quatorze établissements privés, dont sept nouvelles écoles, et l'amélioration du financement de douze autres. Seulement pour 1988-1989, cela représente un ajout de 2 200 000 $ et la création de 850 nouvelles places. À la lumière de ces chiffres, comment le ministre peut-il prétendre qu'un tel développement demeure compatible avec la priorité qu'il prétend accorder à l'enseignement public? Comment prétendre valoriser le système public, alors que les ressources de ce réseau stagnent et que le développement se fait dans le privé? Cela

prend une bonne dose de cynisme pour essayer de nous faire croire que l'enseignement public est pour lui digne d'encouragement, est pour lui une priorité.

En soustrayant l'augmentation découlant de l'indexation des traitements et des dépenses, c'est au moins 15 000 000 $ d'argent neuf qui a été consacré à l'expansion du secteur privé depuis trois ans plutôt qu'à la satisfaction des besoins des clientèles du système public. Les principaux intervenants de celui-ci ont raison d'être inquiets et de plus en plus d'une telle tendance. On peut se demander jusqu'où ira une telle expansion lorsque l'on considère que la proportion des élèves du secondaire inscrits dans les écoles privées atteint les 18 %. Sur le territoire de la commission scolaire Les Découvreurs, c'est plus de 25 % des élèves du secondaire qui sont inscrits au privé. La situation est semblable dans la région de Sherbrooke et dans certaines commissions scolaires de l'île de Montréal.

Si la tendance se poursuit, c'est plus de 20 % des élèves du secondaire qui seront au privé, avec une variation importante selon les milieux socio-économiques, car il y a gros à parier que, toute proportion gardée, on retrouve moins d'enfants des quartiers de Saint-Henri et de Limoilou au privé que ceux issus de Sainte-Foy, Sillery ou de Westmount.

Pourquoi retrouve-t-on moins d'enfants des milieux défavorisés dans les écoles privées? Un observateur non informé pourrait penser que les milieux défavorisés sont moins intéressés à envoyer leurs enfants dans les écoles privées, et ce, en dépit de l'intérêt que le ministre accorde à ces écoles. Mais détrompez-vous, n'entre pas à l'école privée qui veut. Voyons le profil de ces élèves. Ils ont de bonnes capacités intellectuelles et, s'ils entrent au secondaire, c'est avec un bon dossier scolaire. Ils ont un comportement jugé normal. Les perturbateurs, les asociaux, les enfants souffrant de troubles de comportement, les socio-affectifs ne se retrouvent pas dans les écoles privées. Ces enfants ont des parents qui encouragent leurs études et qui sont soucieux de leur réussite, des parents qui estiment avoir plus de chance de succès dans les écoles privées et en cela le message du ministre est clair puisque c'est là qu'il investit. Et l'ingrédient ultime: ces enfants ont des parents qui ont l'argent, c'est-à-dire les moyens financiers, la clé pour ouvrir les écoles privées. En fait, ces élèves qui se retrouvent dans les écoles privées réunissent les qualités qui font les bons sujets dans toutes les écoles, c'est-à-dire pas exclusivement en raison de leurs qualités intellectuelles ou de leur capacité intellectuelle, mais surtout par l'encouragement et l'encadrement qu'ils reçoivent dans leur milieu.

L'école publique se retrouve ainsi privée d'éléments dynamiques qui donnent du souffle à l'enseignement, des élèves motivés et des parents qui s'intéressent à l'éducation et qui sont prêts et capables d'y investir temps et argent. Si ces mêmes énergies étaient investies dans les écoles publiques, on assisterait à des changements remarquables. Le développement de l'école privée, alors que les clientèles stagnent, c'est une saignée qui vient anémier l'école publique, qui menace son développement et qui compromet son avenir. La clientèle des écoles publiques s'alourdit, 12,5 % d'enfants souffrant de troubles de comportement, socio-affectifs ou mésadaptés. Dans de telles conditions, il est pour le moins odieux de faire des comparaisons entre le public et le privé. Je dis donc: Si la tendance continue et se maintient, si la croissance du privé se poursuit, on se retrouvera, au public, particulièrement au niveau secondaire, avec des élèves financièrement démunis et, comme le milieu économique a des effets sur le développement intellectuel, des enfants intellectuellement plus défavorisés, donc, des écoles pour favoriser, des écoles pour défavoriser. Les chances de réussite dans les écoles publiques s'amenuiseront et viendront donner raison à leurs détracteurs. Le ministre aura réussi le clivage des classes, clivage rejeté par le rapport Parent comme par l'ensemble de la population québécoise. Ajoutons à ce portrait la création ou le retour, pour l'enseignement professionnel, aux écoles de métiers, où l'on retrouvera fatalement des jeunes et des adultes issus des milieux défavorisés. Le portrait est complet, les classes sociales bien démarquées, chacun a sa place. Le Québec cassé en deux, quoi: des pauvres de plus en plus pauvres, avec de moins en moins de moyens pour s'en sortir, des favorisés de plus en plus favorisés et dont on accroît les privilèges. Je reviendrai plus loin sur toute cette question de la réforme de l'enseignement professionnel.

Par ailleurs, nous attendons toujours, de la part du ministre, les critères délimitant l'ouverture de nouvelles écoles privées, la politique d'ensemble devant présider à l'expansion de ce secteur qui, au Québec, faut-il le rappeler, recueille près de 80 % des fonds publics alloués aux écoles privées dans l'ensemble du Canada. Il faut peut-être se rappeler que l'argument qui est souvent utilisé pour maintenir et développer le secteur public, c'est que le secteur privé constitue en quelque sorte un secteur témoin qui viendrait stimuler le secteur public. Il faudrait peut-être savoir que, comme ces 80 % des subventions accordées au secteur public viennent du Québec, au Canada, et que le secteur privé subventionné est pour ainsi dire inexistant ailleurs au Canada, cela veut donc dire, si on reprend ces conclusions, que le secteur public serait absolument nul dans le reste du Canada et non performant, ou "contre performant", ce qui n'est vraiment pas le cas.

Par ailleurs, un tout autre domaine où s'affiche tout particulièrement la propension au paternalisme et à l'élitisme de l'actuel ministre de l'Éducation, c'est celui des dérogations à l'âge d'admission à l'école. Après avoir accordé de

telles dérogations à 150 enfants l'automne dernier, sur la base de critères de son propre crû, notamment la précocité, il a décidé, pour septembre prochain, d'officialiser ces trois nouveaux critères par le biais d'une nouvelle directive adressée aux commissions scolaires. Celles-ci doivent, en principe, procéder à un premier examen des demandes et formuler des recommandations à la direction régionale du ministère, qui transmet ensuite le dossier au ministre qui, nous dit-on, les étudie un à un avant de donner son "imprimatur". L'application de deux de ces critères, soit le préjudice pouvant découler du développement précoce de l'enfant ou d'une situation sociale ou familiale particulière, est soumise à une expertise professionnelle.

J'ai déjà eu l'occasion de condamner sévèrement la voie dans laquelle s'engage le ministre, compte tenu des inéquités que, forcément, elle engendre. Certaines commissions scolaires, divers intervenants, comme l'Association des cadres scolaires, les professionnels des commissions scolaires et même la Corporation des psychologues ont vivement critiqué cette nouvelle politique de dérogation et les conditions dans lesquelles elle s'exerce. (11 h 30)

II y a d'abord la pertinence même d'un critère comme celui de la précocité. On pourrait, en effet, se demander si le soi-disant préjudice occasionné par le délai dans la fréquentation scolaire n'est pas plus grand pour l'élève moins stimulé par son milieu que pour le "précoce". Encore plus fondamentalement, c'est l'application même des principes qui pose problème. La très grande majorité des commissions scolaires ont clairement indiqué qu'elles n'entendaient pas effectuer les expertises nécessaires, préférant consacrer les ressources professionnelles existantes aux clientèles déjà en place. Le ministre, pour sa part, ne leur accorde pas de ressources supplémentaires pour ce faire. Ceci signifie que les parents devront avoir recours à des professionnels de pratique privée, à un coût pouvant atteindre quelque 400 $. Ceci n'est pas à la portée de toutes les bourses, comme le soulignait fort justement la Corporation des psychologues, sans compter les dangers d'expertises complaisantes.

Dans un tel contexte, de qui proviendront les demandes de dérogation? De parents qui sont informés, d'abord - on n'a d'ailleurs pas vu beaucoup de commissions scolaires ni le ministère faire de la publicité à ce sujet, informer les parents - de parents, par ailleurs, qui auront aussi les moyens de payer l'expertise Élitisme et paternalisme, car l'accès à l'éducation qui constituait jusqu'à maintenant un droit devient un privilège. Et c'est inacceptable.

Qui plus est, le ministre tente de cette façon de faire oublier sa promesse électorale à l'effet de reporter au 31 décembre la date servant à fixer l'âge d'admissibilité à l'école. Il essaie de gagner du temps, mais en attendant il érige un système de privilèges qui vient favoriser les mieux informés, les mieux nantis financièrement. Car il ne suffit pas que l'enfant soit intellectuellement précoce, encore faudra-t-il que ses parents puissent acquitter les frais d'une expertise professionnelle.

Le paternalisme du ministre se révèle aussi dans le dossier de l'accès à l'école anglaise. On se rappellera que, au moment de l'adoption de la loi amnistiant les élèves fréquentant illégalement l'école anglaise, le ministre avait amendé la loi 101 afin de donner le pouvoir d'y admettre exceptionnellement des enfants en vertu d'une "situation grave d'ordre familial ou humanitaire". Usant de ce pouvoir discrétionnaire, il a octroyé, l'automne dernier, 25 dérogations (je pense qu'il nous a dit 27 tout à l'heure), en fait tous les cas qui lui avaient été référés par la Commission d'appel de la langue d'enseignement et ce, sur la base de motifs discutables et pouvant créer de dangereux précédents. On n'a qu'à penser à ce que certains ont qualifié de clause "ma tante".

Mais cela ne suffisait pas au ministre qui, par le biais d'une opération de réorganisation de la gestion de l'admissibilité à l'enseignement en anglais, a procédé à l'établissement d'un contrôle politique sur ce processus de nature administrative. Les personnes désignées dans chacune des régions afin de vérifier l'admissibilité des enfants à l'école anglaise et de statuer à ce sujet qui, jusque-là, rendaient leurs décisions de façon autonome relèvent dorénavant d'un comité de coordination où s'étend, comme on le sait, le bras politique du ministre. Il se donne ainsi un droit de regard et la possibilité d'intervenir directement en matière d'admissibilité à l'école anglaise. Ce comité de coordination s'est également vu confier la tâche d'effectuer la révision du guide d'application des dispositions législatives et réglementaires de la loi 101 en matière de langue d'enseignement. Connaissant l'inclination du ministre dont tous les gestes posés depuis deux ans ont concouru à faciliter l'accès à l'école anglaise, il y a de quoi s'inquiéter des visées et du résultat d'une telle révision.

Le ministre nous dira, bien sûr, être uniquement motivé par un souci d'humanité. Cette attitude peut paraître dangereuse et à double titre. D'abord, comme le soulignait fort justement une observatrice avisée, par cette manie du cas par cas, le ministre brosse ainsi un bien singulier tableau de la vie et des rouages de l'État: la loi est rigide, mais le ministre est souple. "Les officiers à l'admissibilité apparaissent comme de petits juges tatillons qui imposent aux immigrants l'école française, comme une sorte de punition, le ministre comme juge de dernière instance, bon prince, bon père de famille, qui gracie in extremis les condamnés". Plus pernicieux encore, c'est le message envoyé aux allophones lorsqu'il leur signifie qu'être humain c'est bien sûr les soustraire aux griffes de la Charte de la langue française pour leur ouvrir les portes de l'école anglaise. Bien

curieuse façon d'oeuvrer à l'intégration des immigrants à la communauté francophone. Être humain, ne serait-ce pas plutôt favoriser leur intégration à cette majorité plutôt qu'à la minorité et d'y consacrer les ressources nécessaires?

Pour faire avaler tout cela, le ministre y va de statistiques sur la fréquentation des deux réseaux d'enseignement. En dépit d'une application plus humaine de la loi 101, nous dit-il, on retrouve à l'école française plus de 60 % des élèves de langue maternelle autre que le français. Nous constatons pour notre part qu'après dix ans d'application de la loi 101 il y a encore plus du tiers des allophones inscrits à l'école anglaise. Compte tenu de la fragilité de notre situation linguistique et démographique, c'est beaucoup trop. Le processus doit se poursuivre sans hésitation ou compromission. Par un raisonnement pour le moins douteux, le ministre nous dit: C'est extraordinaire, 89 % des effectifs scolaires sont présentement inscrits au secteur français, alors qu'il n'y a que 84 % de francophones au Québec. On pourrait lui répondre que le secteur anglais compte 11 % des élèves alors que la population anglophone, elle, n'est que de 7 % ou 8 %. Cela illustre qu'en matière de langue d'enseignement comme dans les autres domaines le gouvernement ne fait pas preuve de la fermeté nécessaire. La francisation des nouveaux arrivants comme des allophones déjà installés chez nous exige une volonté politique nette qui n'a pas peur de s'affirmer. Leur intégration au Québec francophone pose un défi constant et même d'une ampleur croissante compte tenu de la conjoncture démo-linguistique.

Le réseau scolaire compte environ 7 % ou 8 % de jeunes allophones dont près de 80 % sur l'île de Montréal seulement. Il constitue le quart des effectifs scolaires à Montréal et près du tiers de la clientèle de la Commission des écoles catholiques de Montréal, aussi bien que de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal. D'ici quelques années, compte tenu du fait que la quasi-totalité des nouveaux arrivants s'installent à Montréal et que leur croissance démographique est supérieure à la nôtre, on prévoit à la CECM une clientèle à 50 % non francophone d'origine. Déjà, les cas se comptent par dizaines d'écoles où les élèves sont à plus de 70 % ou 80 % allophones.

Cette nouvelle conjoncture pose des défis de taille sur le plan de la francisation, bien sûr, sur le plan aussi de la cohabitation dans la meilleure harmonie possible des différentes communautés. Nous sommes témoins depuis quelque temps d'incidents violents, d'affrontements à caractère ethnique ou racial dans des écoles de la région montréalaise. Il ne s'agit pas de dramatiser une situation qui n'a pas de commune mesure avec ce qui se vit dans d'autres sociétés occidentales, mais il ne faut pas non plus se fermer les yeux sur les manifestations de xénophobie, les comportements racistes qui peuvent à l'occasion se manifester au sein des diverses composantes de la société québécoise, chez les francophones comme chez les autres. Nos jeunes de diverses origines doivent apprendre à s'apprivoiser, à s'apprécier et à respecter leurs différences. Cela doit se faire dans une langue commune, le français. L'école fournit un terrain de premier plan à cet égard, mais encore faut-il fournir les conditions propices et leur en donner les moyens.

Force est pourtant de constater que ce gouvernement abdique ses responsabilités dans un domaine aussi crucial. On ne constate aucune initiative nouvelle. Certaines commissions scolaires font beaucoup, mais elles ont besoin d'être mieux soutenues. Par exemple, la période de dix mois passés en classes d'accueil est nettement insuffisante pour certains enfants pour qui l'apprentissage du français pose des difficultés particulières. Nous aurions pu nous attendre que le gouvernement y consacre des crédits additionnels de façon que cette période puisse être prolongée comme le recommandait le Conseil de la langue française en avril 1987. Nous ne les voyons pas. L'animation et l'éducation interculturelle nécessiteraient aussi qu'on y accorde une attention plus soutenue. Les écoles, notamment à Montréal, auraient besoin davantage de ressources pour faire face adéquatement aux exigences de la pluriethnicité sur le plan de la francisation et de l'intégration, et non pas de coupures de postes et de budgets.

Qui plus est, par certaines de ses politiques, le gouvernement compromet dangereusement la réussite de cet important processus. J'ai abordé tantôt la question de l'accès à l'école anglaise. Il y a aussi son attentisme en matière de déconfes-sionnalisation et de restructuration scolaire. Après avoir refusé de porter en appel le jugement Brossard et ainsi fait perdre trois ans, le ministre nous déposait en décembre dernier un projet de refonte de la Loi sur l'instruction publique. Sans commenter ici en détail ce projet, ce que nous aurons l'occasion de faire lors de la consultation générale en commission parlementaire prochainement, je ne peux m'empêcher de souligner que la démarche privilégiée par le ministre reporte encore d'au moins quatre ans la création de commissions scolaires linguistiques et ce, si les cours lui donnent raison.

De plus, sur le territoire de l'île de Montréal où l'existence de structures confessionnelles n'a plus de rapport avec la réalité d'une société indiscutablement pluraliste, le projet du ministre n'apporte pas de réelle solution. D'une part, il maintient les commissions scolaires confessionnelles protégées en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique dans leurs territoires actuels. D'autre part, il entend vérifier devant les tribunaux si le Québec aurait le pouvoir d'en modifier les limites et de venir y superposer des commissions scolaires linguistiques. Il est cependant loin d'être évident qu'il a l'intention de le faire. S'il s'avérait qu'il en ait l'intention, le

pouvoir et la volonté, cela créerait des difficultés considérables, des problèmes complexes d'organisation. On se retrouverait avec quatre commissions scolaires ayant juridiction sur un même territoire, les parents pouvant envoyer leurs enfants dans trois de celles-ci, et avec au moins une dizaine d'écoles de type différent, compte tenu des variables linguistiques et confessionnelles. Sans parler de l'imbroglio qui en découlerait au niveau des élections scolaires, du partage des équipements, de la taxation et j'en passe.

La seule véritable solution, nous l'avons souvent répété, réside dans l'abrogation ou la modification de l'article 93 de 1867, incorporé à factuelle constitution canadienne lors du coup de force de 1982, ce même article que le gouvernement libéral n'a pas daigné inclure lors des dernières négociations constitutionnelles. Il n'est même pas sûr qu'il en sera question lors de l'éventuelle et deuxième ronde de négociations, les autres provinces ayant d'autres priorités. Il est impératif que soit levé tout obstacle à l'exercice par le Québec de sa compétence pleine et entière en matière d'éducation, qu'il s'agisse des structures scolaires aussi bien que de la langue d'enseignement. L'actuel gouvernement ne partage cependant pas cette orientation, avec les conséquences que l'on connaît.

Le corollaire de son immobilisme, c'est le gonflement au sein des commissions scolaires protestantes d'un secteur français. Il nous apprenait tout à l'heure qu'il s'inquiétait de la situation prévalant dans le Nord-Ouest québécois. C'est rassurant de voir qu'après deux ans et demi il commence à s'intéresser à ce dossier. Il faut savoir que les commissions scolaires qui comptent au total 8 % des inscriptions accueillent présentement près du quart des allophones qui se répartissent à peu près également dans les secteurs anglais et français. Les écoles franco-protestantes qui, selon de nombreuses indications, ne constituent pas le milieu le plus propice à la francisation des jeunes allophones en regroupent présentement 7000. Sans parler des griefs répétés des parents dont les enfants fréquentent ce secteur, notamment à Montréal, quant à la qualité des services obtenus: écoles surpeuplées, bibliothèques déficientes, personnel de direction encore largement anglophone. Le ministre est visiblement peu empressé de remédier à ces difficultés, à ce qui apparaît à certains égards comme de la discrimination, trop occupé qu'il est à examiner cas par cas les nombreuses demandes de dérogation en matière d'âge et d'admission ou d'accès à l'école anglaise. (11 h 45)

Abordons maintenant l'important dossier de la réforme de l'enseignement au secondaire. Après plusieurs années de consultations et de discussions, l'actuel ministre de l'Éducation soumettait à l'automne 1986 son plan d'action dans ce secteur, plan qui avait été dans l'ensemble, faut-il le dire, bien accueilli par les intervenants. Un an et demi plus tard, nous constatons que l'implantation de cette réforme suscite de nombreuses critiques. Elle a d'ailleurs déjà subi des modifications importantes par rapport aux intentions initiales.

En janvier dernier, le ministre faisait amender le règlement sur le régime pédagogique afin d'introduire un nouveau programme de formation de courte durée, à caractère spécifique et pratique, d'un niveau inférieur à celui requis pour les filières de formation professionnelle, formations sanctionnées par une "attestation de capacité". Par la même occasion, les programmes de certification d'études professionnelles, dont la mise en application est prévue pour septembre prochain, se voyaient délester des cours de formation générale pour ne garder que les cours de formation professionnelle. La durée minimale des certificats d'études professionnelles se trouve ramenée de 900 à 450 heures, de sorte qu'ils pourront être dispensés en un an plutôt que deux. Cet allégement des programmes de certificats d'études professionnelles au détriment de la formation générale et en faveur d'une économie, faut-il le dire, a été dénoncé par divers intervenants qui ont vu un net pas en arrière. Ceci se justifie en effet difficilement dans un contexte où l'importance d'une solide formation de base est largement reconnue et de plus en plus recherchée et ce, par les employeurs eux-mêmes. Le Conseil supérieur de l'éducation a vu dans la suppression du volet de formation générale une perte sèche et recommandait d'établir un double seuil d'admissibilité. Le conseil a bien souligné dans son avis l'importance de poursuivre les grands objectifs d'accès du plus grand nombre de jeunes et d'adultes à une formation de base riche et variée. Amputé des cours de formation générale, le certificat d'études professionnelles ferme la voie à la formation continue, car le diplômé n'aura pas les préalables qui lui permettraient de passer à un niveau d'enseignement supérieur.

Une telle mesure ne peut aussi qu'accentuer la dévalorisation de cette filière écourtée de formation professionnelle. Les tiraillements auxquels a donné lieu l'opération de classification des métiers entre le diplôme et le certificat d'études professionnelles en témoignent éloquem-ment. Parmi les intervenants, les enseignants, personne ne voulait voir son métier classé comme CEP, rejeté parce qu'associé à l'ancien professionnel court qui, on le sait, avait une réputation plutôt dévalorisante. Le ministre a néanmoins décidé d'aller de l'avant en classant 36 métiers dans la filière menant au CEP, y compris des programmes qui avaient déjà été partiellement implantés comme DEP. Reste à espérer qu'il acceptera dans quelques dossiers de reconsidérer sa décision.

Toute cette démarche d'allégement du Certificat d'études professionnelles, les assouplissements introduits au chapitre du calendrier scolaire, vise en fait essentiellement à faciliter

l'harmonisation entre les dispositifs de formation destinés aux jeunes et aux adultes. Il faut bien comprendre qu'harmonisation signifie intégration des clientèles. Sous prétexte d'assurer le maintien d'un plus grand nombre d'options, tout est fait pour encourager le regroupement dans les mêmes classes de jeunes et d'adultes. Ce qui était considéré jusqu'ici comme une mesure exceptionnelle semble devenir le modèle autour duquel le ministère entend axer le développement de la formation professionnelle.

On doit s'interroger. L'élargissement de cette pratique vise-t-elle à assurer une meilleure formation? On en doute. Il viserait davantage à faire des économies en faisant assumer certains frais administratifs par le biais des cours subventionnés qui, on le sait, sont payés par le fédéral. Un tel processus suscite aussi de sévères réserves, car les économies réalisées se font, encore une fois, sur le dos des clientèles les plus fragiles, les étudiants adultes et les jeunes.

Ces clientèles jeunes adultes ont des besoins spécifiques auxquels les dispositifs de formation doivent apporter des réponses adaptées sur le plan des contenus aussi bien que sur le plan des méthodes pédagogiques. On se rappellera que le rapport de la commission d'étude sur la formation des adultes insistait tout particulièrement sur la spécificité de l'éducation des adultes. Devant un principe qui s'inspire de la constitution de groupes distincts pour les jeunes et les adultes, certains intervenants, notamment les syndicats d'enseignants, ont demandé un moratoire sur la fusion des clientèles. Ils réclament, avant d'aller plus avant dans cette voie, une évaluation rigoureuse de la quelque demi-douzaine d'expériences d'intégration présentement en cours, d'autant plus que tout ce processus d'intégration va de pair avec la création, dans diverses commissions scolaires de centres spécialisés de formation professionnelle, consacrant le retour en douce aux anciennes écoles de métiers et au clivage social qui s'ensuit. Sous couvert de la spécificité de la formation professionnelle, sous couvert de rationalisation, on assiste ainsi à l'amorce d'un changement profond dans l'organisation même du système d'enseignement: d'un côté, les élèves jeunes en formation générale, de l'autre, regroupés dans des centres spécialisés et séparés, les jeunes et les adultes en formation professionnelle. Ce mouvement se produit et s'accentue sans qu'il y ait de véritable débat public.

La question de l'intégration jeunes-adultes n'est pas la seule à créer des appréhensions du côté des politiques gouvernementales en éducation des adultes. Si l'on examine d'abord les crédits qui y sont alloués pour 1988-1989, nous constatons une augmentation apparente de 13,5 % par rapport à 1987-1988. Mais, si l'on considère plutôt les subventions allouées pour l'enseignement aux adultes en année scolaire, nous assistons à une baisse substantielle de 16 %, puisqu'elle chute de 170 500 000 $ en 1987-1988 à 147 400 000 $ en 1988-1989. Celle-ci s'explique par une diminution de 6 300 000 $ pour le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs dans le cadre de l'accord Canada-Québec sur lequel nous aurons l'occasion de revenir, et surtout par une réduction anticipée du volume d'activités pour 20 500 000 $.

En guise d'explication nous pouvons lire dans le cahier des crédits des phrases comme: "Une identification plus précise des clientèles pouvant faire l'objet d'un financement est toutefois prévue", ou encore: "Ces modifications aux règles budgétaires ont pour effet de réajuster le financement de la formation des adultes en privilégiant la clientèle cible visée par la politique d'ouverture des adultes à la formation de base." Veut-on signifier par là que cette politique d'ouverture a connu trop de succès, des débordements imprévus? Chose certaine, la préoccupation centrale du gouvernement réside maintenant dans le contrôle des clientèles adultes. Nous nous interrogeons quant aux objectifs réels poursuivis quant à la rationalisation des coûts de l'éducation des adultes. Nous craignons que les mesures de contrôle des clientèles viennent en fait compromettre les principes de gratuité et d'accessibilité pour les adultes, principes, faut-il le rappeler, défendus avec vigueur par l'actuel ministre de l'Éducation, alors qu'il était critique au dossier de l'éducation.

L'inquiétude est d'autant plus justifiée que le projet de loi 107, déposé par le ministre de l'Éducation, un ardent défenseur, le champion de l'éducation des adultes pendant de nombreuses années, comporte des brèches importantes sur le plan de la gratuité des services éducatifs pour les adultes. Encore un domaine où les actes n'auront pas suivi les paroles, comme nous aurons l'occasion de le démontrer lors de la commission parlementaire. Mais c'est d'autant plus grave dans un domaine comme l'éducation des adultes où les intervenants s'attendaient à beaucoup mieux et beaucoup plus de la part de l'actuel ministre, d'un ex-président de l'Institut canadien d'éducation des adultes.

Cette déception est particulièrement vive dans les milieux de l'éducation populaire. Le ministre viendra se bomber le torse en invoquant le million de dollars ajouté cette année à l'enveloppe des organismes volontaires d'éducation populaire. Il s'agit, faut-il le rappeler, d'une première hausse depuis trois ans. Depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir, les OVEP ont connu une croissance nulle de leur budget, compte tenu de l'inflation. De plus, on nous annonce une compression de quelque 400 000 $, soit 20 % des fonds alloués aux commissions scolaires pour les services d'accueil et de référence. Investissement dans le privé, désinvestissement dans le public, plus particulièrement en éducation des adultes.

Pour en revenir aux OVEP, nous savons que le comité de révision du programme d'aide a remis son rapport au ministre en décembre dernier. Il comporte de nombreuses recommanda-

tions propres à assurer le développement rigoureux de l'éducation populaire autonome, notamment de lever le moratoire sur l'accréditation et le financement de nouveaux organismes, de porter le budget alloué à l'éducation populaire autonome à 1,5 % du budget total du MEQ d'ici quelques années, d'accorder des budgets de fonctionnement aux structures de représentation. Le ministre, jusqu'à aujourd'hui, s'est contenté de réserver un accueil poli au rapport et, jusqu'à ce matin n'a pris aucun engagement concret.

Le ministre a par ailleurs laissé entendre qu'il y aura l'an prochain de nouvelles accréditations, attendues par environ 500 organismes. Compte tenu de la faiblesse des moyens supplémentaires investis au niveau des OVEP, on peut craindre les conditions dans lesquelles s'effectueront la levée du moratoire et la sélection des projets. Les organismes ont de bonnes raisons d'être inquiets, si l'on considère la façon dont s'est effectuée la sélection au cours des dernières années: des centaines d'activités ont été jugées inadmissibles, dont plusieurs activités traditionnellement financées au cours des dernières années. Fait étonnant, concours de circonstances, plusieurs activités jugées inadmissibles visaient l'information: le journal, le bulletin, l'animation, les colloques, les débats ou rencontres, la concertation, il s'agissait de tables sectorielles ou de tables régionales. On isole les groupes. On désorganise et on minimise ainsi les risques de protestation ou de contestation structurées. Plusieurs activités jusqu'alors subventionnées sont aujourd'hui jugées inadmissibles, et les cotes allouées à plusieurs organismes ont aussi diminué sans raison apparente. La sévérité du processus a été telle que le ministère a dû mettre en place une dizaine de mesures de transition et d'ajustement, ce qui n'a pas empêché le programme de connaître un important résiduel - fait étonnant, compte tenu de l'ampleur des besoins et des demandes - pour finalement déboucher sur un mécanisme de révision qui a produit ce résultat dans des délais considérables. Tout ceci pour dire que l'insatisfaction gronde dans les milieux de l'éducation populaire qui attendent toujours une reconnaissance réelle de la part de ce gouvernement qui leur avait pourtant promis beaucoup. Beaucoup de promesses, peu de concret. (12 heures)

Voici donc un rapide tour d'horizon des quelques dossiers qui retiennent l'attention de l'Opposition. Il s'en dégage quelques conclusions. D'abord, que sur le plan budgétaire l'éducation ne constitue pas une priorité pour le gouvernement libéral. Pour une troisième année d'affilée le ministère subit d'importantes compressions et ses crédits augmentent à un rythme moindre que l'ensemble des dépenses gouvernementales. Pendant que le secteur public, dont les besoins sont pourtant criants, est en proie à la stagnation, le secteur privé connaît une importante progression en termes à la fois de budget et de clientèle, progression que le ministre n'a pas l'intention d'enrayer, bien au contraire. Cette tendance à l'élitisme du ministre ne s'arrête pas aux investissements massifs dans un secteur qui recrute la majeure partie de sa clientèle dans les milieux les plus favorisés. Elle s'incarne aussi dans la multiplication des dérogations à l'âge d'admission sous motif de précocité, ou encore dans le retour aux anciennes écoles de métiers encouragé par les politiques gouvernementales en matière de formation professionnelle.

Par ailleurs, la gestion de l'éducation, sous la houlette du ministre, se caractérise de plus par un paternalisme avoué. Les manifestations en sont éloquentes. Songeons aux dérogations à l'âge d'admission ou pour l'accès à l'école anglaise. Mais, pendant que sa manie du cas par cas l'emporte, d'importants dossiers sont carrément négligés par le ministre. Pensons seulement aux besoins des milieux défavorisés, à la francisation et à l'intégration des clientèles plurieth-niques, à l'éducation des adultes où l'on semble vouloir compromettre une accessibilité fraîchement acquise alors que le Québec compte toujours plus de 300 000 analphabètes.

En somme, les visées élitistes et le paternalisme du ministre traduisent un déplacement des priorités qui ne va pas sans soulever des inquiétudes quant à l'avenir de notre système d'éducation.

Le Président (M. Audet): Merci, Mme la députée.

Est-ce qu'il y a d'autres remarques avant de procéder a l'étude des programmes? Cela va? M. le ministre, est-ce que cela va? On peut procéder?

D'abord, à la demande de quelques-uns des membres de la commission, je vous rappelle les règles qui régissent l'étude des crédits. Chaque membre a un temps de parole de 20 minutes pour chaque élément d'un programme. Toutefois, la tradition veut que la majorité du temps soit réservée au porte-parole de l'Opposition, ce qui n'empêche pas, par exemple, les membres ministériels de poser des questions. Je vous rappelle aussi, M. le ministre, que, si les gens qui vous accompagnent fournissent des réponses, c'est sur votre enveloppe de temps, soit 20 minutes.

Alors, avant de procéder à l'étude des programmes, j'aimerais, M. le ministre, si vous le permettez, que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent, pour le Journal des débats. Si, toutefois, ces gens-là ont à prendre la parole, j'apprécierais qu'ils se présentent d'abord.

M. Ryan: M. le Président, je vous remercie. À ma gauche, il y a le sous-ministre de l'Éducation, M. Thomas Boudreau; à la gauche de M. Boudreau, il y a M. Robert Trempe, sous-ministre adjoint de l'Education, en charge de l'administration et de la planification; à ma droite, il y a M. Jean-Claude Rondeau, sous-ministre adjoint à

la direction des réseaux; et, derrière nous, plusieurs cadres du ministère de l'Éducation nous accompagnent également. Je vais en nommer un en particulier, M. Jean-Claude Cadieux, sous-ministre à l'Éducation, au développement et à la planification pédagogique.

Le Président (M. Audet): Merci. J'appelle le programme 1, Administration.

M. Ryan: M. le Président, si vous voulez m'excuser, j'allais commettre quelques oublis que je voudrais réparer tout de suite.

Le Président (M. Audet): Allez-y.

M. Ryan: En plus des personnes que j'ai nommées, m'accompagnent également ce matin M. Jean-Guy Gagnon, sous-ministre adjoint à la direction des ressources humaines, M. Michel Stein, sous-ministre associé de foi catholique et Mme Ann Schlutz, sous-ministre associée de foi protestante.

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, le programme 1, Administration. Est-ce que vous préférez procéder par élément ou poser des questions d'ordre général? C'est à votre discrétion, madame.

Mme Blackburn: II est de coutume qu'il y ait des remarques générales sur l'état du budget et ensuite par programme.

Le Président (M. Audet): Allez-y, vous avez la parole.

Discussion générale

Mme Blackburn: En fait, j'aurais eu quelques questions plus d'un ordre général. C'était dans cette perspective que je voulais faire les prochaines interventions. Cela convient-il?

Le Président (M. Audet): Avant de procéder à l'étude du programme 1?

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Audet): D'accord, allez-y.

Mme Blackburn: En fait, si on résume le budget du ministère de l'Éducation pour 1988-1989, ce budget totalise 5 186 000 000 $, soit une augmentation de 223 000 000 $ ou 4, 5 % par rapport aux dépenses probables de 1987-1988. En dollars constants, il s'agit en fait d'une augmentation de 6, 4 %. La croissance générale des dépenses du gouvernement, quant à elle, cette année est de 5, 5 %, donc, une croissance plus lente pour le MEQ, c'est-à-dire 1 % de moins.

Cette augmentation des crédits est le résultat de l'indexation, plus particulièrement des traitements, et de la croissance des clientèles du réseau public, de la forte croissance des crédits permanents pour le RREGOP et des mesures d'économie budgétaire et des crédits additionnels pour certaines activités prioritaires.

En fait, les compressions totalisent quelque 24 000 000 $. Et ces compressions résultent essentiellement d'une compression de 1 500 000 $ à la masse des autres personnels, c'est-à-dire 1, 5 % de la masse des autres personnels et de la non-indexation des autres coûts.

Il faudrait peut-être rappeler que les compressions s'élevaient, l'an dernier, à 20 000 000 $, 20 900 000 $, et en 1986-1987, à 36 000 000 $, cela fait 45 000 000 $ sur deux ans et, avec la compression de cette année, c'est 82 000 000 $ sur trois ans.

Les activités prioritaires, elles, reçoivent 8 000 000 $.

La part des dépenses du ministère par rapport aux dépenses gouvernementales se chiffre à 16, 4 %, comparativement à 16, 6 % en 1985-1986, et à 19, 8 % en 1981-1982.

La part des dépenses du ministère dans le produit intérieur brut s'élève à 3, 7 % par rapport à 3, 8 % en 1987-1988, 4 % en 1986-1987, 4, 2 % et un sommet de 5 %, rappelons-le, en 1981-1982.

La tendance est à la baisse par rapport à l'importance relative du budget du ministère de l'Éducation dans l'ensemble des activités du gouvernement et par rapport au produit intérieur brut.

Les dépenses par élève, par ailleurs, au public, et en dollars constants sont de 2353 $ en 1988-1989, comparativement à 2385 $ en 1985-1986, c'est-à-dire une baisse de 1 % ou 32 $.

Comment le ministre - et là j'avais un certain nombre de questions - peut-il expliquer des compressions de cette nature, qui viennent affecter, je le rappelle, plus particulièrement le secteur public alors que l'actuel gouvernement nous dit être en excellente santé financière? Comment le ministre peut-il nous dire que l'éducation est encore une priorité? Si l'éducation est encore une priorité, il n'a pas réussi à en convaincre ses collègues.

M. Ryan: M. le Président, il y aurait bien des choses qu'il faudrait redresser dans les affirmations qu'a faites la députée de Chicoutimi lors de son allocution liminaire. Nous aurons l'occasion de reprendre ces sujets lors de l'examen de chacun des postes qui sont inscrits au programme de nos débats d'aujourd'hui. Par conséquent, je me dispense de toute réplique là-dessus, dans le but de favoriser et d'entrer, par les députés, dans le vif du sujet le plus vite possible.

La députée m'a adressé une remarque sur les chiffres, de caractère plutôt générale. Je voudrais faire quelques observations à ce sujet. Tout d'abord, je pense qu'il y a un élément de la présentation que j'ai faite qui n'a pas été saisi par la députée de Chicoutimi. Je ne lui en veux pas parce qu'il y a certains souvenirs qui sont

difficiles à extirper de son esprit, étant donné le parti auquel elle appartient; cela se comprend; je ne lui en veux pas. Mais j'ai bien expliqué que, pendant que l'Ontario faisait son ajustement aux nouvelles contraintes découlant à la fois de la baisse des clientèles et du resserrement de l'économie, au moins cinq ans avant le Québec, au Québec le gouvernement laissait les dépenses continuer à monter et s'est réveillé tout d'un coup avec la crise économique de 1980-1982. Il aurait voulu nous faire croire que tout dépendait de cette crise-là, que tout était causé par elle. Cela n'est pas vrai. Quand une crise arrive, les gens prévoyants l'ont vue venir, l'ont préparée, puis se sont arrangés pour être capables de faire face aux difficultés. Mais vous avez été pris comme la cigale dans la fable de La Fontaine: après avoir chanté tout l'été, vous fûtes pris à l'automne par la première tempête arrivée. C'est ce qui est arrivé. C'est pour cela que le président du Conseil du trésor ne cesse de répéter, et le ministre des Finances aussi, qu'il faut se préparer pour des temps difficiles. Il est trop tard pour crier quand on est rendu dedans. C'est ce que le gouvernement actuel est en train de faire. Il est en train de remonter la force financière du gouvernement, de manière que la prochaine crise on puisse la prendre un peu plus humainement que vous ne l'avez fait en 1982-1983.

Vous avez dit justement: On a atteint un sommet en 1981-1982, 19, 8 % des dépenses totales étaient consacrées à l'éducation. Mais c'est justement le point qu'il fallait corriger. Si on était encore à 19, 8 %, vous seriez justifié de me dire: Vous n'avez rien fait. Imaginez qu'on aurait fait cela sur toute la ligne au gouvernement, on serait rendu à un déficit de 4 000 000 000 $ et plus aujourd'hui pour l'ensemble des finances publiques. On l'a ramené en réalité à 2 000 000 000 $ cette année. Il fallait bien que cela vienne de quelque part, ce redressement-là. Il ne pouvait pas venir directement d'une autre planète. Je l'ai dit dans mon allocution, il est venu des secteurs qui enregistraient un surplus par rapport aux moyennes des dépenses en vigueur dans l'ensemble du Canada. C'est une norme qui a été prise pour tout le gouvernement.

Là, nous sommes rendus à... Est-ce que c'est 16, 4 % ou 16, 6 % que vous avez dit tantôt pour l'année 1981-1982? Je pense que c'est 16, 4 %. C'est un fait, c'est l'objectif que nous poursuivions. Je serais malvenu de vous dire qu'on ne l'a pas atteint, c'est un objectif que nous poursuivons, mais quand la députée infère que l'éducation n'est pas une priorité du gouvernement, je pense qu'elle trompe la population et qu'elle se trompe elle-même. Cela peut très bien être une priorité du gouvernement sans qu'on dépense l'argent inconsidérément. Trop souvent, les observateurs jugent uniquement des priorités du gouvernement en comptant dans la colonne des dollars ce qui est attribué. Il y a bien d'autres choses que des dollars dans le leadership attendu du gouvernement et qui peut être exercé par celui-ci. Nous croyons qu'un leadership beaucoup plus créateur peut être exercé en mettant l'accent sur la discipline et sur le souci que nous devons toujours avoir de ne pas être hypothéqués plus lourdement que les autres si nous voulons être capables de participer à la course avec eux. C'est toute l'orientation du gouvernement qui est prise là-dedans. Je fais partie de ce gouvernement. J'ai participé à la définition de ces orientations et je suis assez fier des résultats que nous pouvons montrer aujourd'hui à la population. C'est un premier point.

Autre point. La députée a parlé des compressions. C'est évident qu'il y a des compressions. Nous ne cherchons point à les cacher, nous les avons étalées dans toute leur nudité. Nous eussions préféré qu'il n'y en eût point, évidemment, mais encore une fois, quand nous étions placés devant les chiffres que j'ai évoqués dans ma présentation et que l'on me faisait part de la responsabilité du ministère de l'Éducation dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental, je suis obligé d'avoir l'esprit d'équipe et de voir les problèmes en pensant au bien général du gouvernement. Et je voudrais signaler, parce que cela ne semble pas avoir été compris clairement, qu'en même temps qu'il y a des compressions il y a des injections de ressources nouvelles dans le système. Les compressions sont de l'ordre de 24 500 000 $ et les ressources nouvelles injectées dans le système, soit sous l'empire des demandes additionnelles acceptées par le gouvernement, soit sous l'empire des conventions collectives, soit sous l'empire d'ajustements mécaniques aux règles budgétaires, sont de l'ordre de 30 100 000 $. Ce qui donne un surplus, comme la députée le reconnaît - je pense qu'il n'y a pas de débat entre nous sur ce chiffre-là - de ressources additionnelles nettes dans le système de 5 600 000 $. On ne peut pas dire qu'il y a une diminution de ressources, ce ne serait pas juste. On va à égalité de ressources, à toutes fins utiles. On en convient, on n'essaie pas de tourner autour du pot. (12 h 15)

Mais ce qui se produit finalement, c'est un déplacement de ressources, c'est-à-dire que les ressources qui étaient distribuées d'un côté, nous les affectons autrement. Je vais vous donner un exemple qui est bien facile pour illustrer ce que nous voulons dire. Pour le vieillissement des personnels dans les commissions scolaires, nous donnons chaque année une allocation. Alors, le taux de vieillissement était établi à un certain niveau. Nous avons constaté par l'expérience qu'en réalité, pour cette année et l'année prochaine, le taux sera moins élevé qu'on ne l'avait pensé. Alors, l'allocation est ajustée un peu. Il y a compression de ce côté-là et économie de réalisée. Il n'y a de diminution d'argent pour personne, parce qu'ils pourront faire face à

leurs obligations abondamment en matière de vieillissement, excepté qu'on prenait le surplus et on l'affectait à autre chose. Nous avons convenu, dans le contexte des conventions collectives, dans le contexte des autres priorités gouvernementales, qu'il y avait un déplacement de ressources. Ce sont, en fait, des déplacements de ressources mineurs d'un secteur à l'autre du milieu de l'éducation primaire et secondaire qui sont affectés. Il n'y a pas de diminution nette de ressources. On maintient le niveau et il y a cette légère augmentation dont nous avons parlé tantôt. Je pense que c'est le portrait véritable de la situation. J'aimerais beaucoup mieux que nous disposions de 100 000 000 $ de plus en argent neuf, mais je fais partie du gouvernement qui veut donner au Québec des finances publiques saines en même temps que des services de qualité. Je prends mes responsabilités et je défends la politique gouvernementale. Si je ne voulais point le faire, je n'aurais qu'à démissionner du gouvernement, ce que je n'hésiterais pas à faire si je désapprouvais la politique du gouvernement.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Je ne voudrais pas abonder dans le même sens que le discours du ministre et faire de la démagogie, quand ce n'est pas une attitude carrément mesquine. Ce que je voudrais simplement rappeler au ministre, c'est qu'il semble avoir aussi la mémoire faible à certains égards. C'est le discours qu'il tenait alors que la participation de l'État était plus élevée en matière d'investissement en éducation. Il tenait un discours complètement démagogique. Il dramatisait la situation à un point tel qu'on aurait cru que les écoles publiques auraient dû fermer leurs portes. Et il vient nous dire aujourd'hui que c'est de la saine gestion alors qu'on se retrouve avec une diminution dans les budgets de 82 000 000 $ sur trois ans sous la gouverne de ce gouvernement. Il maintient que l'éducation est une priorité, et j'ajoute que l'éducation est une priorité pour lui, alors qu'il y a des compressions et alors que l'argent qu'il a, il est en train de le détourner au service du public. L'actuel gouvernement, je pense qu'il faut le dire, s'il est en train de redresser l'économie au Québec, il le fait sur le dos des plus démunis.

Je vais rappeler quelque chose qui ne fera pas plaisir au ministre non plus. La première décision de ce gouvernement en décembre 1985 a été de modifier la table d'impôt pour retourner 86 000 000 $ dans les poches de ceux qui font les plus hauts revenus au Québec. C'est récurrent. Ce sont les priorités du gouvernement actuel. On voit la politique de Paradis et ainsi de suite. Ce que je trouve dramatique, c'est qu'on retrouve cela dans l'éducation. Je dois le dire, probablement qu'on est toujours plus déçu lorsqu'on a fait confiance à quelqu'un. J'avoue simplement, comme beaucoup de gens dans la population, que je croyais que le ministre accorderait son discours et le discours qu'il tenait à ses actions, qu'il accorderait son action à son discours. Ce qu'on constate, c'est que ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai. Il favorise des clientèles favorisées. Je pense à l'éducation des adultes en particulier. Ce ne sont pas les classes sociales les plus favorisées qu'on retrouve à l'éducation des adultes. C'est traditionnellement, et on le reconnaît, les classes les plus défavorisées. Non seulement le gouvernement fait des choix et impose les compressions, mais le ministre lui-même choisit d'investir au service et au bénéfice des plus favorisés. C'est ce que je trouve déplorable.

Évidemment que ma déception est grande. Elle est comme la plupart de ces gens qui faisaient confiance au ministre en disant: D'accord, on connaît les attitudes de ce gouvernement. Le gouvernement libéral a toujours servi une certaine clientèle, mais on en attendait plus du député d'Argenteuil à cause du discours qu'il tenait. C'est juste cela que je voulais dire ce matin. Ce que je trouve déplorable, c'est que non seulement on impose des compressions à son ministère, on s'y attendait, mais que les choix du ministre viennent défavoriser les plus défavorisés. C'est cela que j'essayais d'expliquer. Les quelques millions de dollars de plus, il les accorde pour développer le secteur privé et il diminue les budgets dans les services d'accueil et de référence à l'éducation des adultes. Là, je pourrais multiplier les exemples, qui s'en vont comme cela, sur lesquels je me questionne et le Québec se questionne quant aux priorités du ministre. On ne parle pas du gouvernement, on parle du ministre qui est au sein de ce gouvernement et les décisions du ministre ne sont pas imposées par le président du Conseil du trésor. A l'intérieur de son enveloppe, elles lui appartiennent.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: J'arrive difficilement à comprendre, M. le Président, que l'on ne puisse admettre que, dans un budget de plus de 5 000 000 000 $, il n'y ait pas matière à compressions chaque année dans certains secteurs. Il n'y a pas une entreprise qui pourrait survivre au test de la concurrence si elle n'accepte pas cette loi élémentaire. Même un chef de famille sérieux va tracer son budget à la fin de l'année, il va préparer son année à venir. Il va dire: II faut qu'on coupe un peu, on a trop dépensé sur le vêtement cette année, on a trop dépensé ici, on va mettre un peu moins d'argent sur la voiture. C'est une règle normale de gestion rationnelle. Alors, qu'on arrive et qu'on retouche pour une valeur de 24 500 000 $ sur un budget de 5 000 000 000 $, je pense qu'il faut être joliment irréaliste ou ignorant de la réalité pour s'en

formaliser. Je le dis avec toute la force dont je suis capable. Dans les secteurs dont nous parlons, j'aimerais mieux qu'on en discute quand on passera secteur par secteur. Cela permettrait une discussion beaucoup plus fonctionnelle que ce genre de placardage qu'essaie de faire la députée de Chicoutimi.

Prenons l'éducation des adultes. Où avez-vous pris vos chiffres pour affirmer ce que vous affirmez? Les sommes que nous avons dépensées pour l'éducation des adultes n'ont cessé d'augmenter depuis trois ans. Comment pouvez-vous dire qu'elles ont diminué? Elles ont augmenté, j'ai les chiffres devant moi. En 1984-1985, c'était 67 000 000 $. En 1985-1986, c'était 81 900 000 $. En 1986-1987, c'était 140 700 000 $. En 1987-1988, nous prévoyons 146 400 000 $. Nous maintenons le même montant pour 1988-1989, mais l'augmentation a été tellement rapide, on a mis une enveloppe ouverte.

Il s'est produit des secteurs de gonflement des dépenses dans plusieurs endroits. On s'est dit: On va essayer de serrer les choses de manière que les allocations budgétaires soient en conformité avec les coûts réels. La députée de Chicoutimi doit savoir qu'il y a des commissions scolaires qui se vantaient de faire des surplus au chapitre de l'éducation des adultes. Quand on déclare une clientèle, disons, à la fin de septembre, que les élèves sont partis au mois d'octobre et que le gouvernement continue de les payer jusqu'à la fin de l'année, est-ce que la députée trouve que c'est une politique rationnelle? Pas moi. Quand nous instituons des contrôles plus serrés afin que les dépenses et les subventions soient accordées aux dépenses réelles, je pense qu'on fait une oeuvre de santé publique. C'est le genre de mesure qu'on prend pour rationaliser les choses.

Dans le secteur de l'enseignement privé, je vais faire une précision tout de suite. Les compressions qui sont appliquées au secteur public s'appliquent également au secteur privé. Toutes les compressions dont j'ai parlé tantôt s'appliquent dans le secteur privé. J'ai fait faire une étude, je voulais en avoir le coeur net: le taux d'augmentation des dépenses par élève dans le secteur public au cours des dernières années et dans le secteur privé, c'est exactement le même pour des raisons élémentaires, c'est qu'on applique les mêmes compressions d'un côté et de l'autre et le barème des subventions est établi en fonction d'un pourcentage X. On ne peut pas arriver autrement. Et la légère augmentation qui arrive au titre de l'augmentation des clientèles, là, elle nous est dictée par les besoins de la population.

Nous, ce qui nous sépare du Parti québécois, largement, c'est que nous ne voulons pas mettre tous les gens en prématernelle. Nous voulons leur donner la chance de voler de leurs propres ailes. Nous voulons tenir compte de leur volonté. En matière d'inscription scolaire, la députée doit savoir comme moi que la plupart des établissements . privés subventionnés ont de longues listes d'attente. Ils sont obligés d'en refuser, la grande majorité d'entre eux. Est-ce que nous leur avons dit d'ouvrir leurs portes inconsidérément? Pas du tout. Nous leur avons dit: II y aura un développement ordonné, mesuré et limité. C'est ce qui se produit. Le développement que nous faisons, j'ai fait effectuer des calculs également quant au coût qui en découle pour le gouvernement et les calculs que nous faisons établissent qu'en longue période il y a une économie pour le gouvernement.

Si un parent met 1000 $ pour faire instruire son enfant et que le gouvernement paie à rétablissement privé 60 % de ce qu'il paierait à la commission scolaire, c'est évident que pour le Trésor public, en fin de compte, il y a une économie. Entre les deux, il va se produire le phénomène de certains enseignants mis en disponibilité. Il y en a qui vont être engagés par l'établissement privé. Il y a des jeunes qui restent à la porte actuellement et qui sont engagés par des établissements privés aussi. Tout compte fait, suivant les meilleurs calculs que nous puissions faire, il y a une économie nette pour le gouvernement, cela va coûter à peu près les deux tiers en longue période. On ne peut pas dire qu'on dilapide les fonds publics. Quand la députée veut faire croire qu'on favorise les riches, elle se trompe et elle trompe la population. Ce n'est pas vrai. La clientèle des établissements privés se compose en très grande majorité d'enfants de foyers de petite classe moyenne, des gens laborieux, industrieux, qui ne veulent pas prendre de risques avec la formation de leurs enfants - on peut ne pas partager leur opinion - qui veulent leur donner la meilleure chance possible d'un bon départ dans la vie et qui décident de les inscrire à l'école privée pendant quelques années, la très grande majorité au niveau de l'école secondaire où avec les problèmes de l'adolescence et tous les problèmes du passage à la maturité, il se présente des difficultés et des défis particuliers.

Il y a un collège privé dans mon comté, le Collège du Sacré-Coeur. J'en ai déjà parlé ici. Je défie qui que ce soit de prouver que c'est un collège qui est au service de la bourgeoisie et des possédants. La plupart des collèges privés, au cas où la députée l'ignorerait, se sont donné des fonds d'aide à des enfants de foyers qui n'ont pas les mêmes ressources que d'autres, de manière à rendre l'accès plus intéressant. Est-ce qu'on va les blâmer de cela? Est-ce qu'on va commencer à les placarder en public? Je ne pense pas que ce serait une attitude responsable.

Je donne ces explications. Encore une fois, les compressions, on peut bien essayer de faire toutes les tempêtes qu'on voudra à ce sujet-là, mais ce sont en réalité des déplacements de ressources à l'intérieur du système. Il n'y a pas eu de diminution. Que le gouvernement augmente un peu plus la part de certains secteurs... Le

secteur qui a reçu le plus depuis deux ans, je pense que tout le monde le connaît ici, c'est le secteur de la santé et des services sociaux. Est-ce que je pourrais décemment élever une protestation? Je n'en suis pas capable. Je connais, dans mon propre comté, la situation de l'hôpital d'Argenteuil dont j'ai saisi à maintes reprises la députée qui est ministre de la Santé et des Services sociaux. Je connais les besoins que nous avons en matière de ressources pour nos centres d'accueil étant donné que la clientèle s'est alourdie énormément depuis dix ans. La moyenne d'âge, autrefois, pouvait être de 72 ans, 74 ans; aujourd'hui elle est rendue à 82 ans, je pense. Il est évident que les soins dont ils ont besoin sont très différents. On injecte, cette année, 23 000 000 $ de ressources additionnelles là-dedans. J'en suis fier, comme membre du gouvernement. Mais est-ce que je vais me plaindre parce qu'on en donne un peu moins à l'éducation qui a déjà une base solidement établie par rapport au reste du Canada? Non. Je pense qu'il n'y a pas lieu... On peut essayer de faire de la chicane, provoquer de la division à l'intérieur du gouvernement, mais je n'embarque pas dans ce jeu-là.

Je suis content que ce soit soulevé. J'apprécie que la députée de Chicoutimi pose ces questions, M. le Président, parce que cela nous amène à voir le fond des choses.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le ministre. Mme la députée, je vous rappelle qu'il reste une minute cinquante avant l'ajournement des travaux.

Mme Blackburn: Bien, merci, M. le Président. Il y a une contradiction dans le discours du ministre. Lui-même reconnaît, dans son allocution de tout à l'heure, que le Québec ne saurait toutefois continuer longtemps d'évoluer dans la voie empruntée ces dernières années sans risquer de mettre en danger la qualité des services qu'il doit offrir à sa population en matière d'éducation. Je n'invente rien. Je ne fais que reprendre le discours que le ministre tient exactement depuis trois ans. Nous sommes à notre troisième année d'étude des crédits et revoyez les textes antérieurs.

Donc, je dois conclure que ce seuil est dépassé. Je n'invente rien. Cela fait trois ans qu'on entend la même chose: On ne pourra pas continuer d'aller plus loin sans menacer la qualité de l'éducation. Cela fait trois ans, et cela diminue tout le temps. Donc, on doit conclure que nécessairement la qualité de l'éducation finit par être affectée. Seconde remarque, M. le Président: le ministre nous donne des chiffres. On reviendra sur l'enseignement privé un peu plus longuement au moment où on abordera le programme. Je voudrais savoir ce que cela veut dire lorsqu'il parle de la composition socio-économique des élèves du privé et je voudrais savoir combien d'élèves issus des familles d'assis- tés sociaux se retrouvent dans les écoles privées. Je voudrais voir cela.

Il nous parle d'un collège, je voudrais savoir sur l'ensemble du territoire comment se répartissent les élèves, leur milieu socio-économique. Je mets en doute l'affirmation qu'il nous fait, disant qu'on fait des économies. Parce que dans les pays ou dans les provinces où il n'y a pas de réseau privé subventionné, il y a quand même des écoles privées, mais elles sont entièrement aux frais des parents. Cela n'abolirait pas toutes les écoles privées au Québec si on arrêtait de les subventionner, sauf que les parents, eux, subventionneraient en totalité, et c'est tout. Ce n'est pas vrai qu'il y aurait une économie telle que le ministre le dit.

Alors, M. le Président, la minute est écoulée...

Le Président (M. Audet): La conclusion ?

Mme Blackburn: ...et on abordera, si le ministre est prêt, le programme 1 en après-midi.

Le Président (M. Audet): D'accord. Alors, comme votre question a plusieurs volets aussi, je crois que le ministre préférera y répondre cet après-midi en début des travaux, étant donné que nous devons suspendre.

Nous suspendons les travaux de la commission jusqu'après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures. Alors, après la période des questions nous reprenons nos travaux.

Après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures.

D'accord? Alors, bon appétit!

M. le ministre.

M. Ryan: Ce soir, quelle est la période que vous avez prévue?

Le Président (M. Audet): De 20 heures à 23 heures.

D'accord?

Alors, la commission suspend ses travaux.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 15 h 24)

Le Président (M. Audet): La commission de l'éducation reprend ses travaux.

Administration

À ce qu'il semble, nous serions prêts à procéder à l'étude du programme I. Alors, je vais appeler le programme I et je cède la parole à la critique de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi.

Âge d'admission à la maternelle et à l'école primaire

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Au programme I, je voudrais commencer par aborder toute la question de la dérogation à l'âge d'admission. Je ne reprendrai pas, évidemment, ce que j'ai dit ce matin dans le texte d'ouverture, mais il est peut-être important de rappeler certains des éléments.

Au cours de la dernière année, le ministre a accordé 153 dérogations: trois selon les critères préétablis et 150 selon les nouveaux critères. Oui, c'est 153, trois pour la situation familiale particulière. En fait, au total, il y en a beaucoup plus que cela.

Le ministre, en annonçant l'établissement des trois nouveaux critères, a décidé d'impliquer les commissions scolaires et les directions générales dans l'examen des dossiers. Cependant, il y a un porte-parole du ministère de l'Éducation qui, à une question des journalistes, disait: On s'attend, cette année, à' recevoir beaucoup plus de demandes, mais on ne s'attend pas à accepter plus de cas que l'an dernier.

Alors, moi, je me dis devant une telle situation. C'est quoi l'attitude du gouvernement? Est-ce qu'il ouvre ou est-ce qu'il n'ouvre pas? Est-ce qu'il tient compte de la précocité ou s'il ne tient pas compte de la précocité? Sur quelle base est-ce qu'il va sélectionner? L'enfant qui va passer les tests, qui va être reconnu comme étant précoce selon les expertises professionnelles, en vertu de quels critères le ministre pourra-t-il le refuser? Et s'il a admis, cette année, 153 élèves, en fonction de ces nouveaux critères-là, est-ce à dire que, s'il y en a 450, 500 ou 1 000, qui se qualifient, il en acceptera seulement 150?

Je voudrais entendre le ministre là-dessus.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Tout d'abord, je pense qu'il serait bon de rappeler le contexte général dans lequel ce problème se pose. La politique actuelle, définie dans le régime pédagogique, prévoit qu'un enfant peut être admis à l'enseignement préscolaire ou en première année du primaire, selon le cas, s'il a atteint, le 30 septembre de l'année scolaire qui va commencer à ce moment-là, l'âge de 5 ans ou de 6 ans.

Un mouvement d'opinion important demande depuis de nombreuses années que cette date de naissance servant à déterminer l'âge d'admission soit reportée, de manière à donner plus de chance à un certain nombre d'enfants, en particulier à des enfants nés entre le 1er octobre et le 31 décembre. On pourrait jouer indéfiniment. Pourquoi pas le 31 janvier, pourquoi pas le 28 février, pourquoi pas l'autre année après? La raison est bien simple; tout le monde est d'accord que, si l'admission à l'école pouvait se faire à 5 ans plutôt qu'à 6 ans en maternelle, ce serait infiniment préférable, car, quand un enfant est obligé d'attendre un an, s'il a atteint l'âge de 5 ans le 1er octobre, cela veut dire qu'à toutes fins utiles il entre en maternelle à 6 ans, même s'il lui reste un mois à faire.

Alors, notre politique et celle de toutes les personnes qui ont examiné ce problème-là, c'est d'essayer de reporter la date de naissance vers le milieu de l'année scolaire, de manière que les avantages et les inconvénients soient à peu près également répartis. C'est pour cela que, dans le programme du Parti libéral, nous avions pris l'engagement de reporter progressivement la date de naissance du 30 septembre au 31 décembre.

Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir - je l'ai expliqué à bien des reprises - nous avons constaté que les contraintes financières auxquelles nous faisions face étaient beaucoup plus lourdes que nous ne l'avions pensé, que les engagements auxquels nous devrions répondre en tant que gouvernement étaient beaucoup plus exigeants que ne nous l'avaient révélé les états financiers mis à jour jusque-là. Il a fallu différer la mise en oeuvre de cet engagement qui reste à notre programme et qui a été ratifié, d'ailleurs, encore au dernier congrès d'orientation du Parti libéral tenu au mois de février de cette année.

En attendant, les demandes parvenaient aux commissions scolaires, aux directions régionales du ministère et à mon propre cabinet en provenance de parents qui nous soumettaient des cas très difficiles. Là, j'ai découvert - j'ignorais cette chose - que déjà des dérogations étaient accordées pour certaines raisons. Par exemple, une famille venait s'implanter au Québec en provenance d'une autre société où l'âge d'admission était plus avancé que chez nous; alors, on donnait une chance à cet enfant pour qu'il ne perde pas de temps. Il passait au nez du petit Québécois qui, lui, n'avait aucune espèce de considération. Il n'y avait pas de cas qui avaient retenu l'attention du gouvernement auparavant au Québec, sauf certains cas très particuliers.

Devant ces cas-là qui étaient soumis à mon attention, je me suis dit - et la députée de l'Opposition en conviendra - que ma responsabilité, c'est de mettre un esprit d'accueil et d'ouverture dans le système d'enseignement à tous les échelons et non pas un esprit de jardin d'enfants, comme je l'ai dit plus tôt, ni de noviciat: un esprit d'ouverture et d'accueil. Alors, devant ces cas qui nous étaient présentés, on a dit: On ya les écouter. Cela aurait été facile de dire aux fonctionnaires: Vous avez huit cases, cela tombe dans une neuvième case, fermez cela et ne dites pas un mot. C'est la pratique que voudrait la députée de Chicoutimi. On a dit: Ce n'est pas cela. Vous allez écouter ces gens-là, vous allez les recevoir poliment, vous allez nous donner des rapports circonstanciels. On veut savoir ce qu'il y a et, après cela, on jugera du genre de problèmes auxquels on a affaire.

Beaucoup de cas ont abouti à mon propre bureau. Pourquoi? Peut-être parce que je répondais plus aux demandes qui m'étaient faites que certaines commissions scolaires. Ils se sont aperçus que, quand ils s'adressaient au bureau du ministre, ils avaient une réponse et cela ne prenait pas de temps. Quand j'avais un problème dont j'étais saisi, j'en informais la commission scolaire et la direction régionale concernée. Je leur disais: Vous voyez bien que ça n'a pas de bon sens une affaire comme cela. Ils me disaient: Oui, on le sait, M. le ministre, mais on est pris avec un règlement.

Là, il y a des gens qui m'ont dit: Vous avez un recours parce que, dans le régime pédagogique, c'est écrit que le ministre, lorsqu'il juge qu'un article du régime pédagogique, s'il est appliqué, est de nature à causer un préjudice à un enfant, peut accorder une exemption, une dérogation. Alors, je me suis dit: Oh! On va regarder cela parce que ce n'est plus seulement un privilège; c'est un devoir que j'ai. Si le régime pédagogique me confère cette prérogative, il m'attribue l'obligation de m'en servir si je constate qu'un préjudice va découler d'une application inconsidérée du régime.

Or, c'est comme cela que nous avons été amenés à examiner des cas qui tombent sous les trois catégories que nous avons ajoutées à celles qui existent déjà. Je vais résumer ces cas pour qu'on les comprenne bien. Enfant d'une famille où un frère ou une soeur est né à moins de douze mois d'intervalle, de sorte que les dates de naissance feraient en sorte qu'ils se retrouvent admissibles à l'école la même année. Je comprends d'autant plus cela que, dans mes enfants, j'en ai deux qui sont dans cette situation. J'en ai un qui est né le 15 janvier et une qui est née - j'oublie la date - le 20 ou le 21 décembre.

Mme Blackburn: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Celui qui est né le 15 janvier avait une année d'avance sur sa soeur, même si cela ne tombait pas sous l'article X du régime pédagogique. Je le dis d'autant plus librement qu'ils sont passés bien avant cela. Mais ce que je sais - ce n'est pas moi qui avais fait les arrangements, c'est ma femme à l'époque - c'est qu'il y en a un qui a commencé une année plus vite que l'autre. Or, cet article-ci a pour but de permettre cela. Parce que, à supposer qu'il y en a un qui serait né le 2 octobre et l'autre le 28 septembre, ils se trouveraient à tomber dans la même année et, avec cela, on peut leur donner deux années différentes. Je pense bien qu'il n'y a pas de quoi fouetter un chat là-dedans. Il faudrait être extrêmement mesquin pour trouver qu'il y a de l'injustice envers qui que ce soit.

Deuxièmement, enfant particulièrement apte à débuter la maternelle ou la première année et dont le niveau de développement est tel qu'il subirait un préjudice réel et sérieux si l'on devait retarder son admission à l'école. Il est arrivé qu'on m'a soumis des cas, par exemple, d'enfants qui avaient parfois presque un pied de taille de plus que les enfants de leur âge, un développement considérable pour toutes sortes de circonstances. Tous leurs copains s'en allaient à l'école cette année-là et cet enfant aurait dû rester chez lui à ne rien faire pendant un an parce qu'encore là il y avait un règlement. Le ministre n'était pas assez intelligent pour s'apercevoir qu'il subirait un préjudice. Il y a des cas qu'on a soumis à mon attention. On les a examinés soigneusement. Dans les cas où il y avait indication claire d'un préjudice éventuel et probable, on a dit: On va laisser parler pas seulement la raison, mais aussi le coeur. Un mélange des deux, c'est ce qui fait de bonnes décisions. Remarquez que la députée de Chicoutimi n'écoute pas cette partie de mon discours. Je continue.

Mme Blackburn: Non, non. C'est parce que cela fait bien des fois qu'on l'entend.

M. Ryan: Troisième raison, troisième motif: enfant vivant une situation familiale ou sociale particulière...

Mme Blackburn: Cela fait longtemps que je l'ai lu, à part cela.

M. Ryan:... et ou le report de l'admission pourrait engendrer un préjudice grave pour l'enfant.

Mme Blackburn: II ne faudrait pas que ce soit un discours.

M. Ryan: Je peux donner une couple de cas dont j'ai été saisi au cours des derniers mois. Il y en a un dont je me souviens: c'était un enfant dont le père avait été victime d'un grave accident d'automobile. Il a eu son fonctionnement mental et psychologique dérangé. Il est obligé de vivre à la maison à longueur de journée. Cela crée une atmosphère particulière dans la maison, qui n'est pas spécialement propice pour le développement de l'enfant. La mère demande, avec instance, qu'on puisse l'accepter à l'école. L'enfant est né, disons, dans la première quinzaine d'octobre. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je n'ai pas eu des grosses hésitations et je ne suis allé consulter ni des juristes, ni des théologiens. J'ai consulté mon bon sens, mon sens des responsabilités et cela a été assez clair. Cela n'a pas niaisé, la décision n'a pas niaisé, je vous le dis franchement.

Un autre cas de même nature avait été soumis à mon attention. C'était un enfant d'un foyer monoparental dont la mère doit travailler. Elle m'avait écrit une lettre très détaillée, me disant que son enfant devait l'attendre à l'extérieur de la maison toute la journée quand elle allait travailler. Il avait tout ce qu'il fallait pour aller à l'école, il lui manquait trois ou

quatre jours quant à la date de naissance à laquelle la députée de Chicoutimi m'a l'air bien attachée. J'ai dit: Bon, on va le détacher. On a autorisé ce cas-là aussi. Il y en a eu 150 comme ça au cours de la dernière année. J'en suis fier, j'en suis très fier.

C'est pour cela qu'ayant donné des dérogations pour des cas relevant de ces trois critères-là, on a dit: On ne veut pas faire de privilège pour eux, on va porter cela à la connaissance de toutes les commissions scolaires et on va leur demander d'examiner des demandes dont elles sont saisies dans cet esprit. Là où il y aura des cas semblables, la commission scolaire peut nous faire une recommandation d'admission. C'est le ministre qui doit l'accorder en vertu du régime pédagogique. Non seulement la commission scolaire doit faire une recommandation, elle doit référer le cas à la direction régionale du ministère de l'Éducation, laquelle réfère le cas ensuite, avec sa recommandation, à mon bureau.

Ce n'est pas une affaire qui est dirigée à partir du bureau du ministre, comme voulait le laisser entendre malicieusement la députée de Chicoutimi ce matin. C'est une affaire qui est faite suivant des procédures très rationnelles et très ordonnées. En fin de compte, on ne veut pas que n'importe qui s'arroge le pouvoir de prendre des décisions que le règlement attribue au ministre. Les cas arrivent au bureau du ministre où ils sont examinés conjointement à la fois par le directeur d'un service du ministère et par une personne qui est attachée à mon cabinet avec, entre autres attributions, celle d'examiner ces choses-là. On me fait une recommandation. Je regrette d'informer la députée de Chicoutimi; je comprends qu'elle est intéressée à me faire une réputation et une légende, mais je n'ai pas le temps d'examiner tous ces cas moi-même un à un jusque dans le détail. J'aime à en regarder un de temps à autre qui passe devant moi et j'ai des très bons conseillers et collaborateurs qui font leur travail d'une manière fort consciencieuse. Il n'y a à peu près aucun danger d'arbitraire dans cela.

Maintenant, en fin de compte, c'est à la commission scolaire qu'il incombe de faire l'examen des demandes qui lui sont présentées, cela est entendu. À la commission scolaire, il incombe de prendre les moyens voulus pour s'acquitter de sa responsabilité. Une de ses premières responsabilités, c'est, quand une demande lui est faite, d'avoir la porte ouverte et non pas fermée.

Mme Blackburn: M. le Président, le ministre, d'abord, n'a pas répondu à la question très simple que j'ai posée. La question est la suivante: A-t-il l'intention, comme le dit le porte-parole du ministère, de ne pas en admettre plus, même si les demandes sont plus nombreuses?

M. Ryan: Non, moi, je n'ai jamais fait de déclaration dans ce sens-là, je regrette infiniment. Si c'est la question...

Mme Blackburn: C'était cela, la question.

M. Ryan: ...je n'ai pas fait de déclaration. Ce sera peut-être 125, ce sera peut-être 225, je l'ignore pour l'instant.

Mme Blackburn: Bien. Moi, je voudrais que...

M. Ryan: Et cela ne m'empêche pas de dormir.

Une voix: Vous êtes d'accord avec cela?

Mme Blackburn: ...le ministre réalise une chose. Là, il nous dit: Je suis généreux et humain.

M. Ryan: Bien oui.

Mme Blackburn: La députée de Chicoutimi est stricte. Elle voudrait qu'on applique la lettre.

M. Ryan: Bien oui, c'est vrai.

Mme Blackburn: On ouvre un tiroir et ce n'est pas dedans. On le referme et on le met là. Je n'ai jamais dit de telles choses.

M. Ryan: Non, mais cela aboutit à cela.

Mme Blackburn: C'est de la démagogie et c'est de la mesquinerie. Moi, je dis au ministre que ce qu'il est en train d'instaurer, c'est un système de privilèges. C'est rien que cela que je dis. Du jour au lendemain, l'accès à l'école est devenu un privilège réservé à deux catégories de personnes; d'abord, aux personnes informées. À ma connaissance, je n'ai pas vu de campagne de publicité informant les parents que leurs enfants pouvaient avoir accès à l'école selon de nouvelles conditions. Je n'ai pas vu les commissions scolaires, non plus, faire de telle campagne. J'ai lu, cependant, et j'ai consulté les commissions scolaires qui, dans la très grande majorité des cas, refusent d'offrir l'expertise. Elles vont d'autant la refuser qu'on vient de couper, de faire des ponctions dans le personnel professionnel. Le parent qui est bien informé peut se prévaloir de ce privilège et le parent qui a les sous pour payer l'expertise. Parce que les commissions scolaires, de façon générale, ne sont pas prêtes à mettre au service de clients potentiels, qui prétendent avoir droit à l'école, des ressources qui sont insuffisantes pour la clientèle existante. Le ministre n'est pas sans savoir cela. On sait également que la Corporation des psychologues s'est élevée contre une telle pratique.

La question n'est pas de savoir si je suis, oui ou non, d'accord pour reporter l'âge d'admission au 1er janvier. À la limite il faudrait peut-

être se demander s'il ne serait pas plus pertinent d'ouvrir les maternelles à plein temps. C'est un autre débat. Ce que je dis, c'est qu'on ne peut pas ériger un système de privilèges lorsqu'il s'agit d'accès à l'école publique. C'est un droit égal pour tous.

Faisons un petit calcul. Il y a environ 90 000 élèves inscrits à la maternelle et autant en première année; si vous additionnez ces deux nombres, cela donne à peu près 180 000 élèves. Normalement, selon les données, c'est sensiblement le même nombre qu'on devrait retrouver au cours des prochaines années en maternelle. C'est assez stable. Si vous prenez ces 180 000 élèves et que vous les répartissez sur trois mois, on peut dire qu'au Québec actuellement on a quelque 45 000 enfants qui pourraient se prévaloir de ce privilège. C'est le quart de l'année: c'est-à-dire octobre, novembre et décembre. On a 45 000 parents qui pourraient demander une expertise. Dans ces 45 000 enfants, je pense qu'on admet tous qu'à peu près 8 %, sont généralement précoces, mais on pourrait peut-être en avoir 10 % ou 15 % qui subissent des situations familiales préjudiciables. C'est cela, le problème. On n'est pas dans un réseau où on peut faire entrer les enfants comme cela. Oh est généreux, on signe une lettre, ils entrent. Ce n'est pas cela. On est dans un réseau public où on a fait de l'accès à l'éducation un droit et non pas un privilège. C'est de cela dont qu'il est question.

Le ministre dit: Je suis généreux, j'ouvre la porte. La générosité voudrait qu'il traite tous les cas qui font une demande, mais qu'il informe toute la population que ces nouveaux critères existent pour qu'elle puisse s'en prévaloir. C'est cela, l'équité. On n'est pas dans un système où il faut commencer à acheter sa place à l'école. Actuellement, c'est ce qui se fait. Les deux parents travaillent. L'enfant est en garderie, aux frais des parents. Cela ne leur fera absolument rien d'aller donner 400 $ ou 500 $ pour faire faire l'expertise et faire entrer un enfant à l'école. Ils font des économies importantes.

Deuxième chose: la notion de préjudice. Est-ce qu'il est plus préjudiciable de voir un enfant supposément précoce perdre une année - à savoir si c'est perdu, c'est une autre chose - ou de voir un enfant qui n'a pas la stimulation dans son milieu?

Le ministre nous donnait un exemple, tout à l'heure. Parlant du dernier critère touchant la situation familiale ou sociale qui pouvait porter préjudice à l'enfant - c'est intéressant de connaître les critères - il nous citait le cas d'un enfant gardé par un père qui, dans un accident de voiture, s'était vu pertubé à la fois intellectuellement et physiquement. Est-ce à dire, M. le ministre, que tous les enfants dont les parents sont handicapés subissent une situation préjudiciable? Quand on entre dans ce genre d'argumentation, c'est extrêmement dangereux. On érige un privilège qui fait que l'accès à l'école est réservé aux personnes informées qui ont les moyens de se payer la place. C'est ce qui est inacceptable. (15 h 45)

Tout à l'heure, le ministre nous disait - et je le relève, parce que j'ai l'impression qu'il n'a pas très bien lu sa directive - Écoutez, il n'est pas question de porter cela bien loin, d'étendre la pratique au-delà du 31 décembre. Pourtant, selon la directive, dans des cas exceptionnels, cela peut aller jusqu'en janvier ou en février. Mais, on sait très bien que, lorsqu'il y a un règlement stipulant que cela arrête à une telle date... C'est comme la majorité et les élections. Vous avez beau être majoritaire le lendemain des élections, cela ne vous donne pas le droit de vote le jour des élections. Il faut que cela arrête quelque part. À l'école, c'est aussi cela. Un tel système, on l'érigé vraiment et on le rend accessible à tous... Avec le système du ministre qui étend cela à janvier et février, on reportera l'âge d'admission au 31 décembre et on aura toujours le même problème. C'est cela qui fait problème. Et c'est ce que j'appelle une attitude paternaliste. Ce n'est pas être rigide de dire: Moi, je trouve que l'idée d'ouvrir l'école, c'est bien, mais rendez-la accessible à tous et aux mêmes conditions. Et la rendre accessible, c'est s'assurer de donner aux commissions scolaires les ressources nécessaires pour qu'elles puissent offrir l'expertise aux parents.

Qu'est-ce qu'on va retrouver? J'aimerais que le ministre nous donne le profil socio-économique des enfants qui ont été admis en vertu de ces nouveaux critères; cela nous permettrait de nous faire une meilleure idée de la situation. Je voudrais savoir cela. Cela m'étonnerait énormément d'y retrouver les enfants des milieux d'ouvriers, de même que des enfants de milieux d'assistés sociaux. C'est cela, l'inéquité et l'injustice sous prétexte d'humanisme. Ce qui m'étonne chaque fois dans le discours du ministre, c'est que son humanisme s'exerce toujours à l'endroit des mêmes clientèles: les plus favorisées.

En même temps, est-ce que le ministre pourrait me dire quelles démarches il a faites pour s'assurer, par exemple, auprès de sa collègue de la Santé et des Services sociaux que l'allocation scolaire des enfants d'assités sociaux soit haussée de 35 $ à 100 $, tel que s'y était engagé le gouvernement libéral? C'est cela qu'on ne voit pas avec ce gouvernement. Ma question est la suivante: Est-ce que le ministre entend donner aux commissions scolaires - dans le budget, dans les crédits, cela n'apparaît pas -des ressources qui vont leur permettre de répondre à ces demandes? Est-ce que le ministre a l'intention d'informer les parents de l'existence de ce nouveau critère et de les informer de façon suffisamment large pour qu'ils puissent se prévaloir de ce privilège?

Le Président (M. Audet): M. le ministre

M. Ryan: D'abord, je vois que la députée de

Chicoutimi veut faire du pathos avec cela. Le régime général demeure le même; il n'a pas été modifié par le gouvernement. Le régime général, c'est que l'admission à l'école se fait pour l'enfant dont la date de naissance arrive avant le 30 septembre. Il n'y a pas de changement à cela. C'est la communication qui est faite très généralement aux parents qui veulent obtenir l'admission de leur enfant à l'école pour la prochaine année. C'est la règle générale.

Maintenant, il y a des parents qui viennent vous dire: Moi, j'ai un cas particulier, un cas extrêmement difficile, pourriez-vous l'examiner? On nous dit que l'enfant va subir un préjudice grave si l'admission est retardée à cause des caprices d'un règlement qui est nécessairement arbitraire dans sa disposition. On dit: II y a un article du régime pédagogique qui donne au ministre le pouvoir de se pencher sur un cas comme celui-là et de le traiter avec humanité. Ce n'est pas autre chose que cela. Il n'est pas question de généraliser et d'étendre cela de manière universelle. On le généralisera quand on changera le règlement. C'est notre intention de le changer dès que les conditions financières le permettront.

En attendant que nous puissions le modifier, nous disons: Pour les cas qui présentent un risque évident et sérieux de préjudice pour l'avenir de l'enfant, pour le développement de l'enfant, nous allons faire preuve de l'humanité qu'autorise le régime pédagogique. Ce n'est pas autre chose que cela.

On peut bien faire du pathos... La députée fait la même chose avec l'admission à l'école anglaise. C'est encore plus déplorable à cause du caractère explosif de la question linguistique; on va y venir tantôt et j'ai bien hâte qu'on y vienne aussi. Nous avons plaidé pendant longtemps pour qu'on cesse d'administrer ces lois avec l'espèce d'indifférence et d'inflexibilité qui ont caractérisé le gouvernement précédent. Ce n'est pas pour rien qu'il y a eu un changement de gouvernement; c'est pour qu'il y ait une ligne un peu plus humaine dans la conduite des affaires, moins bureaucratisée et moins idéologique, à part cela. C'est cela, la différence.

Dans ce cas-ci, situez le problème dans sa juste perspective. N'essayez pas de l'étendre au-delà de ce que justifie la politique même du gouvernement et je pense qu'on va se comprendre facilement. De ce point de vue là, la réponse a été donnée à la question qui a été posée. Deuxièmement, il n'y a pas de ressources additionnelles.

Mme Blackburn: M. le Président, question de règlement. Généralement, il est admis que le partage du temps se fait à 50-50. Ce que je voudrais savoir, c'est sur chacune des questions, comment on va procéder. Comme les interventions et les réponses du ministre sont très longues et comptent sur son temps, je voudrais savoir comment on va se partager cela.

Le Président (M. Audet): En vertu du règlement, Mme la députée de Chicoutimi, il n'y a pas d'entente concernant la répartition du temps pour l'étude des crédits. Le règlement stipule clairement que le ministre, lors de l'étude des crédits, peut intervenir aussi souvent qu'il le désire. Alors, je pense que les interventions du ministre, à ce stade-ci, ont respecté le règlement dans son ensemble.

Mme Blackburn: Je comprends, M. le Président...

Le Président (M. Audet): Si, toutefois, il y a un règlement en particulier que vous visez ou que vous touchez, on pourra le regarder et considérer si vous avez raison ou si vous avez tort.

Mme Blackburn: Alors, si je comprends bien, le ministre pourrait prendre la totalité du temps sur chacun des points et ce serait cela, l'étude des crédits.

Le Président (M. Audet): Pas nécessairement. Ce n'est pas ce que je viens de mentionner. Ce que je viens de mentionner, c'est que le ministre peut intervenir aussi souvent qu'il le désire. C'est parce que vous avez posé une question qui, je pense, avait plusieurs volets. Alors, si vos questions étaient peut-être un peu plus brèves, je pense que ce serait plus facile pour le ministre de donner des réponses un peu plus courtes.

Mme Blackburn: M. le Président, ma première question était très brève: Avez-vous l'intention d'admettre plus d'enfants que l'an passé? La réponse a été plutôt longue. Donc, c'est une réponse de dix minutes à une question qui en a pris à peu près une. Ce que je veux savoir, c'est comment on va se partager le temps. C'était simplement cette question-ià.

Le Président (M. Audet): Pour ce qui est de la répartition du temps, à ce stade-ci, il n'y a pas d'entente entre les leaders pour l'étude des crédits. Si c'est la question que vous posez, c'est la réponse que je vous donne. Est-ce que cela va?

Mme Blackburn: Non, cela ne va pas, mais....

Le Président (M. Audet): Alors, je cède maintenant la parole à la députée de Jacques-Cartier. Mme la députée.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. J'aimerais soulever la question des petites écoles.

Mme Blackburn: On n'a pas terminé le

programme 1.

Mme Dougherty: Non, c'est le programme 1.

Mme Blackburn: On n'a pas terminé l'élément 1.

Une voix: On se fait couper.

Le Président (M. Audet): Un instant. J'avais reconnu la députée de Jacques-Cartier. C'est sur le programme 1, c'est sur le même sujet, Mme la députée?

Mme Dougherty: C'est sur le programme 1. Cela touche la planification et le développement pédagogique, élément 2 du programme 1.

Le Président (M. Audet): Cela va. D'accord, vous avez la parole. Je vous ai reconnue. Continuez, madame.

Mme Dougherty: Les études faites par le ministère...

Mme Blackburn: Ce n'est pas une question d'information, c'est une question de règlement. Est-ce qu'il ne serait pas plus pertinent de terminer un élément de programme, le sujet qu'on est en train de traiter, plutôt que d'en aborder un autre?

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi, je regrette, mais ce matin j'ai suggéré qu'il y ait entente, si vous le vouliez, pour débattre, justement, des programmes. J'ai demandé si on devait procéder par élément ou par programme dans l'ensemble ou faire une discussion plus large, comme cela s'est fait pour d'autres ministères, et je n'ai pas eu de réponse. Alors, à ce stade-ci, on étudie le programme 1. Si certains membres de la commission veulent intervenir sur d'autres éléments du programme 1, je ne peux pas les en empêcher.

Alors, j'ai reconnu la députée de Jacques-Cartier. Mme la députée, vous avez la parole.

Les petites écoles

Mme Dougherty: Merci. C'est la question des petites écoles. Nous avons plusieurs petites écoles au Québec, particulièrement dans les régions périphériques, où il est de plus en plus difficile d'offrir une formation adéquate aux élèves. Plusieurs de ces écoles rapetissent avec le temps, dans certaines régions, à cause de la dénatalité et aussi à cause de la population qui a tendance à délaisser les petites communautés. Le phénomène est particulièrement critique dans les régions où on retrouve une petite population anglophone qui voit son école comme essentielle à sa propre survivance en tant que communauté. Je sais que le ministère est sensible à ce dossier et qu'il a récemment organisé un colloque sur la

Côte-Nord. Des parents et des éducateurs concernés venant des quatre coins de la province s'y étaient réunis pour examiner ce problème et tenter de trouver des solutions.

M. le ministre, pourriez-vous nous dire quels sont les principaux problèmes identifiés à ce colloque? Quelles recommandations ont été faites pour régler ces problèmes? Qu'est-ce que le ministre entend faire pour répondre à ces recommandations?

M. Ryan: Je remercie la députée de Jacques-Cartier de sa question qui témoigne de son intérêt toujours pertinent pour les questions de l'éducation.

Le problème des petites écoles est l'un de ceux qui ont attiré mon attention dès mon entrée en fonctions. J'ai été saisi à maintes reprises, depuis deux ans et demi, de situations aiguës qui avaient surgi dans différentes parties du Québec autour d'un projet ou d'une menace de fermeture d'école. Dans ces conditions, comme les députés le savent, les citoyens, surtout les parents concernés, se regroupent, font des pressions auprès de leur commission scolaire et, quand cela ne fonctionne pas auprès de leur commission scolaire, ils s'adressent au ministre de l'Éducation et à ses collaborateurs. Nous héritons chaque année d'un certain nombre de situations semblables.

Il y a d'autres écoles qui sont fermées sans même que les parents jugent à propos de manifester leur frustration de quelque manière que ce soit. Il y a d'autres cas où les parents comprennent que, faute d'effectifs, une école doit fermer pour que ses étudiants puissent être fusionnés avec d'autres. Il y a toutes sortes de situations possibles. Le problème est de plus en plus fréquent à cause du nombre moins élevé d'enfants que nous avons maintenant, de la taille des locaux scolaires dont nous disposons et des ressources limitées qui sont disponibles.

Malgré tout cela, nous essayons, chaque fois que c'est possible, de favoriser le maintien de l'école locale. Nous avons pris, en particulier au cours de l'année 1987-1988, une série de mesures visant à favoriser l'obtention de ce résultat. Nous avons investi, 37 800 000 $, en 1987-1988, pour différentes mesures visant à favoriser des règlements - je m'excuse de répéter ce mot-là - humains, qui ne sont pas conformes aux normes les plus sèches, les plus strictes, donnant à nos directions régionales la possibilité de faire certaines adaptations. Nous avons défini les normes d'espace de locaux scolaires avec plus de libéralité pour les populations ou les régions qui sont éloignées des grands centres.

Parmi les mesures que nous avons prises, il y a le modèle d'allocation des postes enseignants qui comporte des normes plus généreuses pour les endroits où il y a des petites écoles, les commissions scolaires qui ont des écoles éloignées, autres que celles qui sont prévues dans la convention collective. À ce titre, nous avons

ajouté, l'an dernier, 79 postes au primaire, 120 postes au secondaire, pour un total de 8 320 000 $.

Nous avons décidé d'ajouter des enseignants pour aider au fonctionnement des classes à triple division. Je n'étais pas au courant, quand j'ai commencé comme ministre de l'Éducation, qu'il existait encore au Québec des endroits où on avait des classes à triple division, des élèves de trois niveaux dans la même classe. On essaie de faire en sorte qu'il y ait deux niveaux au maximum. À cette fin, on a ajouté, l'an dernier, 57 enseignants.

D'autres corrections particulières, répondant à des situations qui n'étaient pas encore dans nos normes et même dans les mesures dont je viens de parler, ont été soumises à notre attention et ont entraîné l'ajout de 30 postes dans des petites commissions scolaires pour aider à maintenir, encore une fois, les écoles en situation éloignée.

On a une allocation spéciale pour les dépenses administratives des commissions scolaires de moins de 3500 élèves. Cela a entraîné une dépense de 2 420 000 $. Le mode d'allocation pour les autres dépenses des commissions scolaires prend en compte la présence de petites écoles au niveau primaire. Il y en a pour 18 000 000 $. Finalement, un dernier montant vise particulièrement le phénomène de la dispersion, de l'éloignement des petites écoles. Il y en a pour 4 700 000 $. En tout, 37 800 000 $. (16 heures)

L'automne dernier, des commissions scolaires ont tenu ensemble, avec le ministère de l'Éducation, un colloque sur la Côte-Nord, colloque qui a été éminemment constructif, mais qui n'a pas produit un train de recommandations à l'intention du gouvernement. C'était plutôt un colloque pour échanger des expériences. Une commission scolaire disait: Voici ce que nous avons fait. Il y avait des représentants de telle école qui disaient: Voici comment les problèmes se posent chez nous. Cela a été essentiellement un colloque de mise en commun d'expériences et de points de vue. Le colloque a été tellement réussi qu'on est en train de préparer une recommandation pour en faire un autre. Alors, on suit cette question-là de très près. Mon cabinet accorde beaucoup d'attention à ces problèmes et je suis fier de dire que nous en avons réglé un bon nombre. Je rends hommage à nos directions régionales du ministère qui font un travail très compréhensif de ce point de vue là aussi.

Mme Dougherty: En ce qui concerne les ressources professionnelles qui n'existent pratiquement pas dans ces régions, qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on subventionne des professionnels itinérants? Qu'est-ce qui se passe pour les services psychologiques, des spécialistes en français, peut-être, en anglais? Qu'est-ce qu'on fait pour aider ces petites écoles, qui ont toujours été petites, pour qu'elles puissent fournir une éducation adéquate? Je parle uniquement des ressources additionnelles.

M. Ryan: On m'informe que, du côté des commissions scolaires protestantes, il existe depuis longtemps une habitude de collaboration qui permet de mettre à la disposition des petites écoles des professionnels itinérants. Les commissions scolaires protestantes, en dehors de la région de Montréal et de Québec, sont habituées depuis longtemps au phénomène de l'éloignement et de la dispersion de leurs ressources. Alors, elles ont développé avec les années des systèmes de professionnels itinérants qui rendent de très grands services. Du côté des commissions scolaires catholiques, c'est moins développé. Il y a des commissions scolaires qui le font à l'aide des ressources additionnelles mises à leur disposition. Mais là je n'ai pas de données quantifiées sur l'ampleur du phénomène.

Mme Dougherty: Même dans les commissions scolaires protestantes, je ne sais pas qui finance ces ressources. Je crois que McGill est impliquée, n'est-ce pas, et le PSBGM aussi. Est-ce que le ministère subventionne cette activité?

M. Ryan: II y a avec moi le directeur des Services éducatifs aux anglophones, M. Gérald Brown. Avec votre permission je lui demanderais peut-être de nous fournir des explications sur ce sujet.

Le Président (M. Audet): Est-ce que vous pourriez vous identifier, s'il vous plaît, monsieur.

M. Brown (Gérald): Je suis M. Gérald Brown, directeur des Services éducatifs aux anglophones au ministère.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. Brown: Alors, ce qu'on a mis en place, Mme la députée: on a des responsables anglophones dans toutes les directions régionales, on a une unité centrale pour les services éducatifs aux anglophones et on a mis en place un mécanisme de concertation entre nous et les directions régionales pour implanter les nouveaux programmes. Alors, ce qu'on fait, ce sont ces sessions au niveau provincial, qui forment des personnes-ressources pour chacune des régionales et, après cela, concertation avec les directions régionales dans certaines régions, avec les commissions scolaires, on implante les programmes. Ce qu'on fait, c'est qu'on forme des personnes-ressources au niveau provincial, qui sont disponibles dans chacune des directions régionales et dans chacune des régions.

Le Président (M. Audet): D'accord. Avant de procéder, s'il vous plaît, j'aurais peut-être un éclaircissement à apporter concernant le point de

règlement qui a été soulevé tantôt, à propos de l'article 287, concernant les interventions du ministre ou de son représentant, soit les gens de la fonction publique ou autres.

L'article 287 stipule que "le président ou le ministre qui répond de ses crédits en commission peut intervenir aussi souvent qu'il le désire." De cette règle, nous pouvons émettre deux principes: le premier est que le président de la commission ou le président de séance doit céder la parole au ministre lorsque ce dernier désire intervenir à la suite d'un autre intervenant, et le deuxième principe se rattache au temps de parole du ministre qui, tout en pouvant intervenir aussi souvent qu'il le désire, ne peut parler plus de vingt minutes à chaque intervention. Alors, chaque fois que vous avez une question, M. le ministre, vous avez le droit de prendre vingt minutes. Est-ce que c'est clair?

Maintenant, pour le bon déroulement des travaux de la commission, on a demandé aussi tantôt si on devait procéder par élément de programme ou par programme comme tel. Pour procéder par élément et puis, lorsque le sujet sera vidé, si des députés ont des questions sur cet élément, il n'y a pas de problème. Si, toutefois, vous avez des questions sur d'autres éléments dans le même programme, je vous demanderais peut-être d'attendre le moment où l'on entamera cet élément-là pour poser vos questions. Parce que là on a sauté d'un élément à l'autre, ce qui peut créer certaines confusions. Cela va?

M. Gardner: M. le Président, quant aux éléments qui sont déjà faits, est-ce qu'on va revenir là-dessus?

Le Président (M. Audet): Non, mais c'est parce que la critique de l'Opposition, Mme la députée de Chicoutimi, n'avait pas terminé sur l'élément 1 du programme. Alors, c'est pour cela que cela peut créer certaines contraintes.

Une voix: L'élément 1 du programme I?

Le Président (M. Audet): De toute façon, je voulais éclaircir cette règle-là. Je vous demanderais de la respecter, s'il vous plaît.

Alors, je cède la parole à Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je dois dire que, touchant mes commentaires ou mes questions sur la dérogation à l'âge d'admission, le ministre m'accuse de faire du pathos. Je suis loin d'être certaine que ce n'est pas lui qui en fait et plus souvent qu'à son tour. Dans le fond, il n'a pas répondu à mes questions qui sont claires, qui sont simples et qui sont limpides.

A-t-il l'intention de mettre à la disposition de tous les parents les ressources qui leur permettront de faire faire des expertises professionnelles et a-t-il l'intention d'en informer les parents? Là, seuls ceux qui ont le bonheur ou la chance de connaître les nouveaux règlements et qui, en plus, ont l'argent pour payer l'expertise ont accès à l'école, dans les conditions qu'on connaît. Ce n'est pas compliqué. Le ministre trouve-t-il que cette situation est plus humaine que de servir seulement ceux qui connaissent cette information, qui ont les moyens de s'offrir ce service-là? Est-ce que c'est plus humain d'agir comme cela ou ne serait-il pas plus humain et plus démocratique de l'offrir à l'ensemble de la population?

Mais j'ai terminé sur ce point parce que, de toute façon, le ministre ne répond pas. Je vais donc aborder, à son grand plaisir...

M. Ryan: M. le Président, je voudrais faire une remarque. Avant qu'on passe à un autre point, là...

Le Président (M. Audet): M. le ministre. M. Ryan: ...je demande l'autorisation de...

Une voix: Vous avez droit à une réplique de vingt minutes.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je voudrais simplement porter à la connaissance des députés, pour leur information, un fait, entre autres. Savez-vous, dans le réseau scolaire primaire et secondaire, combien il y a actuellement de psychologues professionnels? Il y en a 521. Et cela, c'est en plus des autres ressources professionnelles que comptent nos commissions scolaires.

Notre position: il ne peut pas y avoir des tonnes de demandes. Le maximum de demandes qui pourraient arriver de ce côté-là, on a calculé que c'est à peu près 7 000 enfants qui étaient impliqués par tranche de chaque mois qui pourrait faire l'objet d'un changement éventuellement. Nous croyons que, de manière générale, les commissions scolaires sont capables d'ajouter ce service-là à leur clientèle dans cette période où elles sont très soucieuses d'aller chercher toute la part de clientèle qui leur revient normalement. On ne va pas chercher la clientèle en l'éloignant, mais on va la chercher en l'attirant, puis en la servant bien. Cela, c'est le point sur lequel nous insistons le plus fortement. Nous croyons que, de manière générale, on est capable de fournir cet ajout de services aux parents qui le demandent et qui ne sont pas légion, je tiens à le souligner. Un grand nombre de parents, qui ne sont pas intéressés à envoyer leur enfant à l'école à l'âge de cinq ans ou de cinq ans et demi, préfèrent le garder plus longtemps à la maison. Puis, c'est leur droit. Jamais je ne proposerai un changement de réglementation qui leur enlèverait ce droit-là.

Mais nous avons estimé qu'on est capable, avec la collaboration des commissions scolaires,

de gérer cette situation-là en faisant une révision d'action chaque année. Au bout de la présente année, on aura une réunion avec nos responsables des commissions scolaires. On fera le point avec elles. S'il y a des ajustements qui s'imposent, on n'a pas l'esprit fermé, on fera les ajustements. Mais on demande, cette année, qu'il y ait une collaboration.

Je tiens à ajouter qu'il y a certaines commission scolaires qui ont dit: Non, on ne fera rien. J'ai même reçu des résolutions à cette fin-là, me disant qu'on ne bougerait pas d'un pouce. Je causais avec une commission scolaire très importante, l'autre jour, qui avait adopté une résolution dans ce sens-là. J'ai dit au président: Est-ce que vous pensez que c'est humain, ce que vous faites là? Est-ce que vous pensez que c'est un bon moyen pour valider l'école publique aux yeux des parents d'enfants qui vont commencer les études? À mon grand plaisir, j'ai reçu une lettre, quelques jours après, me disant que nous nous étions mal compris et qu'ils étaient prêts à collaborer dans le sens de l'action proposée par le ministre de l'Éducation. J'ai trouvé cela formidable.

Aux commissions scolaires qui m'écrivent rigidement, dont certaines m'envoient même des résolutions types, je réponds en demandant de se servir judicieusement du formulaire qui a été mis à leur disposition pour la présente année. Au bout de l'année, quand on aura fini la période des admissions, on fera le bilan et on tirera les conclusions appropriées. Ce n'est pas plus sorcier que cela.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, on va aborder une question qui fera plaisir au ministre, l'accès à l'école anglaise.

M. Ryan: Très bien.

Le Président (M. Audet): Nous sommes dans quel élément du programme, Mme la députée?

Mme Blackburn: Je ne les ai même pas nommés.

Le Président (M. Audet): À la direction?

Mme Blackburn: Ce sont des sujets dans un programme.

Le Président (M. Audet): Aux membres de la commission... À l'ordre, s'il vous plaît! Il faudra établir une certaine règle. Alors, on ne retient pas d'élément, on y va "at large"?

Une voix: C'est cela, M. le Président.

Mme Blackburn: M. le Président, si vous me le permettez...

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: ...le souhait que j'ai exprimé, c'est qu'une fois qu'on a commencé un sujet - pas un élément, un thème, je ne sais pas comment vous allez l'appeler - on le vide. Mais il faudrait vérifier s'il est terminé avant d'en aborder un autre. C'était simplement ma suggestion.

Le Président (M. Audet): D'accord. Alors, on s'en tiendra au sujet... D'accord. Il n'y a pas d'objection, cela va? Mme la députée de Chicoutimi, vous avez la parole.

L'accès à l'école anglaise

Mme Blackburn: M. le Président, on va faire plaisir au ministre, je le rappelle, on va parler de l'accès à l'école anglaise. Il est important de rappeler pour bien situer la question que, depuis que ce gouvernement est au pouvoir, tous les gestes du ministre ont concouru à faciliter l'accès à l'école anglaise. Pour ceux qui en douteraient, il est important que je rappelle un peu le bilan des décisions qui ont été prises concernant cette question.

Dès sa venue au pouvoir, il a amnistié des élèves qui fréquentaient illégalement l'école anglaise, environ 1500, auxquels élèves il faut ajouter les frères, les soeurs et tantôt, évidemment, les descendants. On sait depuis qu'il a même amnistié rétroactivement des enfants, des élèves qui avaient quitté le Québec un moment, qui étaient inscrits à des écoles anglaises au moment où ils ont quitté le Québec illégalement, qui sont revenus. Ils les a aussi amnistiés: un ou deux.

M. Ryan: Quitté le Québec illégalement? C'est rendu qu'il faut avoir la permission?

Mme Blackburn: M. le Président, si le ministre écoutait et s'il n'était pas si émotif, il comprendrait que j'ai dit qu'ils étaient inscrits... Le sujet lui fait mal, et je le comprends, parce que ce n'est pas un beau dossier; c'est le dossier le plus triste à voir aller au Québec actuellement. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait des enfants qui étaient inscrits illégalement dans des écoles anglaises au Québec. Les parents ont quitté pour un moment le Québec et y sont revenus et rétroactivement ils ont aussi été amnistiés. Le ministre a également amendé la loi 101 afin de conférer au ministre de l'Éducation le pouvoir d'admettre exceptionnellement à l'école anglaise des enfants en vertu d'une situation grave d'ordre familial et humanitaire. On sait que cette année c'est 31 cas pour 25 familles, si je me le rappelle bien.

En 1986-1987, ce sont 25 dérogations en vertu d'un pouvoir discrétionnaire sur la base de motifs que l'on peut qualifier, comme le faisait

un journaliste du Devoir, de discutables et qui créent de fait des précédents dangereux. Une de ces clauses s'appelle la clause "ma tante" parce que là on commence à élargir la famille au sens méditerranéen du terme. Cela couvre les cousins, les cousines, les "mon oncles", les "ma tantes"; alors, clause "ma tante". (16 h 15)

II a refusé également de porter en appel le jugement Steinberg. Ceci ouvre la porte à l'école anglaise, selon le ministre, à quelque 40 élèves, mais, selon le PSBGM, à 200. En passant, j'aimerais bien savoir lequel des deux a raison, le ministre ou le PSBGM qui évalue que cela touche 200 enfants et non pas 40, comme le dit le ministre.

L'abolition du bureau...

Le Président (M. Audet): D'accord. Mme la députée, c'est parce que vous...

Mme Blackburn: L'abolition du bureau d'admissibilité à l'école anglaise. La révision qui est en cours du guide des dispositions de la loi 101 par un comité d'orientation où siège un attache politique du ministre qui a fait ses écoles à Alliance Québec et qui s'appelle Jeff Polenz... Pour reprendre les propos d'une journaliste, d'une commentatrice, un propos qu'on a vu dans un commentaire dans La Presse ou dans Le Devoir et qui disait en parlant de M. Polenz: C'est un peu comme de mettre le lapin pour surveiller la laitue. Je prétends que c'est de mettre le renard pour surveiller le poulailler.

M. Ryan: J'ai bien...

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Blackburn: Également, ce que le ministre a fait, c'est qu'il annonce une modification à la loi 101 pour inclure la clause Canada. Mais on sait que déjà, au moment où il accordait les dérogations, il est allé plus loin que la clause Canada puisque la clause Canada comprend le primaire alors que le ministre est allé en maternelle. Il a inclus la maternelle dans ses dérogations. Il va essayer de nous faire croire qu'un enfant qui est à la maternelle à l'école anglaise va être terriblement perturbé s'il s'en va en français.

Sur les structures scolaires, et c'est là que le dossier s'alourdit, il a refusé de porter en appel le jugement sur la loi 3, qui rendait inconstitutionnelle la loi 3. Il n'a pas non plus réussi et peut-être pas tenté d'inclure dans les négociations constitutionnelles l'article 93. Actuellement, on sait que son projet de loi, et le ministre le reconnaît même si la cour lui donnait raison... Établir des commissions scolaires linguistiques sur l'île de Montréal, c'est pour ainsi dire impensable. Cela va créer une espèce d'imbroglio comme on n'en aura jamais vu. Donc, ce n'est pas faisable. De plus, le ministre s'est ingéré dans des services offerts à la clientèle fréquentant... C'est-à-dire que le ministre est toujours resté indifférent, malgré les appels que je lui ai faits à de nombreuses reprises, à la situation qui était celle des élèves inscrits dans les sections françaises des commissions scolaires protestantes, et plus particulièrement au PSBGM. Cela a fait des pleines pages de journaux à de nombreuses reprises. On l'a vu plus prompt à amnistier les illégaux qu'à aller voir comment cela se passait et quelle était la qualité des services offerts aux élèves inscrits dans les écoles françaises des commissions scolaires protestantes.

Je dis que c'est un dossier qui est lourd et je comprends que le ministre ne soit pas très heureux d'en entendre parler, d'autant plus qu'il prête à critique, comme il a pu le constater par le biais de plusieurs articles de journaux, en étendant ce que j'appelle un bras politique dans des décisions qui étaient jusqu'à aujourd'hui beaucoup plus administratives et quasi judiciaires. Cela avait ce caractère de neutralité qui donnait toute sa qualité à l'intervention.

Jugement Steinberg et guide d'application

Je voudrais savoir du ministre, dans le cas du jugement Steinberg, s'il s'agit de 40 ou de 200 élèves et quand il entend publier son nouveau guide. Je voudrais savoir du ministre s'il ne croit pas qu'une telle attitude constitue un message à l'endroit de la communauté des immigrants qui est le suivant: Si vous insistez suffisamment, si vous faites appel à Alliance Québec pour soutenir votre démarche devant la cour, si vous savez frapper à la bonne porte, vous avez de bonnes chances si vous êtes tenaces, d'être admis à l'école anglaise. Est-ce que le ministre ne craint pas que cette attitude fasse paraître la loi 101 comme étant une punition? Est-ce que le ministre ne considère pas qu'un humanisme bien placé, pour autant qu'on croie en l'avenir du français au Québec, un humanisme bien placé et bien senti l'inviterait à s'assurer, quand il y a des problèmes d'intégration, de mettre les ressources nécessaires pour s'assurer que ces enfants puissent s'intégrer à la majorité? Comment peut-on trouver humain d'intégrer des nouveaux arrivants à une minorité, où qu'on se trouve dans le monde? L'humanisme serait davantage de les intégrer à la majorité, mais cet humanisme, on ne le comprendrait qu'à la condition de croire que l'avenir du Québec se fera en français. C'est le message qui est laissé. Est-ce que le ministre ne croit pas qu'il laisse un message dangereux et que c'est un glissement qui risque d'avoir des effets pernicieux?

Le Président (M. Audet): M. le ministre, vous avez la parole.

Des voix:...

Le Président (M. Audet): M. le ministre, vous avez la parole. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ryan: M. le Président, je vous remercie infiniment. Je vais répondre aux questions de la députée de Chicoutimi en commençant par corriger une impression fausse et calomnieuse qu'elle répand depuis déjà plusieurs semaines au sujet d'un de mes collaborateurs, M. Jeff Polenz, en laissant insinuer...

Mme Blackburn: Question de... Non, je ne sais pas comment vous appelez cela.

Le Président (M. Audet): Est-ce que c'est une question de règlement? Si ce n'est pas une question de règlement, madame, la parole est à M. le ministre.

Mme Blackburn: Question de privilège ou je ne sais pas.

M. Ryan: Cela n'existe pas.

Mme Blackburn: M. le Président, est-ce qu'on a le droit d'utiliser des termes à l'endroit d'un parlementaire? Est-ce qu'on a le droit d'accuser un parlementaire de faire de la calomnie? Non, M. le Président.

M. Ryan: Ce sont les propos que j'ai dit qu'ils étaient calomnieux, la personne m'intéresse peu.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Audet): C'est ce que j'allais mentionner.

Mme Blackburn: L'arrogance du ministre ne le sert pas davantage.

Le Président (M. Audet): Un instant, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous me laissez quelques secondes.

Mme Blackburn: Non plus que sa misogynie.

Le Président (M. Audet): M. le ministre va répondre à votre question, Mme la députée. Si vous me laissez quelques secondes, on va vérifier nos règlements ici. Cela peut...

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): On va vérifier, enfin. M. le ministre, je vous invite à continuer votre réponse.

M. Ryan: Cela fait plusieurs fois que la députée de Chicoutimi attaque insidieusement mon collaborateur, M. Jeff Polenz, en laissant entendre qu'il serait à mon bureau l'exécuteur des hautes oeuvres ou le représentant manichéen d'un groupement qui s'appelle Alliance Québec, parce qu'il a travaillé au service d'Alliance Québec pendant un an sur une carrière qui en compte déjà une bonne dizaine, dont plus de deux à mon service et dont je suis très fier. Tout d'abord, le genre de propos que colporte la députée de Chicoutimi laisse entendre qu'Alliance Québec serait presque une organisation subversive. À ma connaissance, c'est une organisation de bonne foi qui agit dans la légalité, qui agit avec des moyens démocratiques, qui présente des points de vue différents de ceux du Parti québécois et parfois de ceux du Parti libéral. Même quand nous sommes en désaccord avec Alliance Québec, nous ne la présentons ni comme une organisation subversive, ni comme une organisation ténébreuse, ni comme une organisation qui travaillerait de manière hostile au bien général du Québec. Nous lui reconnaissons la bonne foi, nous lui reconnaissons le droit à ses opinions et je récuse profondément l'espèce de délit d'association que la députée de Chicoutimi voudrait créer entre les positions prises par Alliance Québec et le travail qu'accomplit mon collaborateur, M. Polenz. Qu'elle juge M. Polenz à l'aune du travail qu'il accomplit comme collaborateur du ministre de l'Éducation, s'il accomplit des choses qui sont critiquables, qu'elle les dénonce publiquement, comme c'est son droit. Mais ce genre d'insinuation, j'en ai soupe et je suis bien content qu'elle me fournisse aujourd'hui, en répétant ce genre de propos, l'occasion de replacer les choses. M. Polenz est un Québécois authentique, de très bonne volonté, très compétent, très droit et que je suis fier d'avoir à mon service au ministère de l'Éducation. Je voudrais assurer la députée de Chicoutimi que, plus elle va le dénoncer comme elle le fait, plus je vais désirer le garder à mon service. Cela est un premier point.

Mme Blackburn: M. Polenz va avoir une longue...

M. Ryan: Deuxième point. La députée a énuméré toutes sortes de questions. L'amnistie aux élèves illégaux. Pourquoi y avait-il des élèves illégaux dans les écoles anglaises? Pourquoi?

Mme Blackburn: Parce qu'il y avait des gens qui les encourageaient à y aller. C'étaient les libéraux, à part cela.

M. Ryan: Parce qu'il y avait un gouvernement qui avait été assis sur son derrière pendant neuf ans, qui n'a pas agi, qui a laissé moisir et pourrir la situation sur place. C'est cela, le dossier.

Mme Blackburn: II légalise des illégalités.

M. Ryan: Nous sommes arrivés au pouvoir, nous avions promis de régler le problème, nous l'avons réglé. Aujourd'hui, il n'y a plus d'élèves illégaux dans les écoles. Non seulement nous avons réglé le problème qui restait, mais nous avons prévenu les commissions scolaires que la loi serait appliquée dans toute sa rigueur si des commissions scolaires dérogeaient aux prescriptions de la loi 101 en matière d'admission à l'enseignement en langue anglaise.

La députée a parlé de l'article 85. 1 qui a été ajouté à la loi 101, l'article qui prévoit des cas d'une gravité exceptionnelle au plan familial ou humanitaire. C'est vrai, nous avons ajouté cette disposition de propos délibéré. Nous avions constaté qu'il y avait une situation.

En matière linguistique je diverge profondément avec l'Opposition, quand celle-ci voudrait que tout fût classifié rigidement sous des lois et des règlements. C'est une réalité tellement mouvante et tellement subtile qu'il y a une infinité de situations auxquelles aucune loi, aucun règlement ne pourra jamais répondre complètement. Il faut par conséquent prévoir des soupapes dans notre appareil législatif et réglementaire qui permettront de traiter certaines situations avec les égards qui sont requis par la nature de la situation. Quand nous avons introduit cette disposition dans la loi, la députée a voté contre, c'était son droit. Elle voulait qu'on continue d'être régimentés comme voulaient le faire les auteurs de cette loi. Très bien. Mais nous l'avons amendée en toute légitimité. Maintenant, c'est la loi, nous l'appliquons. Pour prévenir l'arbritaire du ministre, qui nous intéresse aussi peu qu'elle, nous avons prévu qu'il faudrait une recommandation de la Commission d'appel sur la langue d'enseignement pour que des dérogations puissent être accordées, des autorisations à l'admission à l'enseignement en langue anglaise à certains enfants répondant aux critères d'une situation exceptionnellement grave, d'ordre humanitaire ou familial. Il y a eu 31 cas dans toute une année représentant 25 familles. Je pense qu'on ferait mieux de s'occuper d'autre chose si on veut assurer l'avenir de la race. Il y a beaucoup d'autres problèmes infiniment plus pressants que celui-là. Cela coule à la douzaine dans d'autres secteurs. Je pense qu'on est aussi bien d'arrêter de s'acharner sur certains cas et de passer à des affaires plus importantes.

En tout cas, je suis très heureux de la manière dont fonctionne l'application de cette disposition de la loi. Je rends hommage, encore une fois, à la commission d'appel qui a très bien accompli son travail, tout en regrettant que les trois membres que nous avions nommés, il y a deux ans, aient dû démissionner pour des raisons propres à chacun et nous les remplacerons très prochainement par des personnes également intéressantes.

En ce qui concerne la situation à la Commission des écoles protestantes du grand Montréal, au lieu de parler à travers notre chapeau, comme cela aurait été facile de le faire et comme la députée de Chicoutimi aime le faire, nous sommes allés aux faits. J'ai téléphoné aux autorités de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal. Je les ai fait venir à mon bureau. J'ai dit: II y a un problème chez vous. On va regarder ce problème ensemble. Justement, j'ai pu apprendre que, à travers toutes les déclarations qu'elle faisait, la députée de Chicoutimi n'avait jamais même daigné prendre le téléphone pour s'informer auprès de ces gens-là de Ce qu'ils faisaient. Cela aurait peut-être été le début d'une démarche impartiale et accueillante. Je défie la députée de nous dire si elle est déjà allée voir les gens de la commission des écoles protestantes pour leur demander ce qu'ils font. Quand je les ai rencontrés il y a quelques mois, ils n'avaient jamais eu de nouvelles de la députée de Chicoutimi.

J'ai discuté avec eux. J'ai dit: II y a des représentations qui nous sont faites. Les représentations des parents étaient multiformes, elles étaient diverses. Il y en a qui disent une chose à la presse. Il y en a d'autres qui nous disent: N'écoutez pas ces gens-là, ils ne nous représentent pas véritablement. Il y a toutes sortes de points de vue. Ce n'est pas parce qu'un article a paru dans La Presse ou Le Devoir que c'est la vérité infaillible et absolue. Il faut aller plus loin. Il faut vérifier davantage. C'est pour cela que je suis convenu avec la Commission des écoles protestantes du grand Montréal que la direction régionale du ministère de Montréal fait une enquête approfondie sur la qualité des services offerts à la clientèle francophone de la Commission des écoles protestantes du grand Montréal. Cette étude se fait sous ma responsabilité par la direction régionale du ministère de l'Éducation à Montréal. Pour ce qui regarde la Commission des écoles protestantes, je pense que c'est plus sérieux que des accusations lancées à travers les manchettes des journaux. (16 h 30)

Un autre cas s'est présenté à mon attention au cours des deux dernières années, surtout la dernière année, parce que je n'en avais pas été vraiment saisi avant, c'est le cas de la commission scolaire de Val d'Or et de la commission scolaire Northwestern Quebec où un transfert de quelque 300 élèves s'est effectué de la commission catholique à la commission protestante pour toutes sortes de raisons dont une reliée à l'enseignement de l'anglais langue seconde dès le premier cycle du primaire. J'ai mandaté un enquêteur pour faire un travail là-dessus, M. Sauvé, qui m'a remis son rapport ces jours derniers. Le rapport est rendu public aujourd'hui à Québec et à Val-d'Or, comme je le déclarais ce matin. C'est une situation extrêmement complexe.

Je vais vous donner le contexte et ceci est très important. Il y a la Commission des écoles protestantes du grand Montréal également qui enseigne l'anglais langue seconde au premier cycle du primaire dans ses écoles françaises.

C'est contraire aux dispositions du régime pédagogique. Nous avons hérité de cette situation que le gouvernement précédent a laissé pourrir pendant neuf ans. Il y a une cause devant les tribunaux concernant la compétence du ministère de l'Éducation et des commissions scolaires en matière de régime pédagogique, y compris par conséquent la langue d'enseignement et les matières enseignées à chaque cycle d'enseignement. La cause étant devant la Cour suprême, je crois qu'on est obligé, au point où en sont les choses, d'attendre que la Cour suprême se soit prononcée avant de régler ce problème à la fois à la Commission des écoles protestantes du grand Montréal et à la commission scolaire de Val d'Or. Je ne pense pas qu'il serait de bonne politique de donner un ukase, d'interrompre l'année scolaire ou le cheminement scolaire des enfants qui ont commencé comme cela tant que nous n'aurons pas la certitude judiciaire que c'est notre pouvoir d'agir dans ce domaine. Encore une fois, c'est un exemple assez éloquent des conséquences auxquelles peut conduire l'inaction d'un gouvernement quand elle se prolonge pendant longtemps. Je peux vous assurer que j'ai eu l'oeil sur ce problème de très près. J'en ai parlé à plusieurs reprises avec la commission des écoles protestantes et j'ai prévenu le directeur général lors de la dernière rencontre que j'ai eue avec lui que, si la Cour suprême confirme le point de vue du gouvernement en matière de compétence sur le régime pédagogique, le point de vue que nous avons défendu devant les tribunaux, immédiatement après ce jugement, des mesures devront être prises pour corriger la situation qui a été créée par les années d'inertie dont j'ai parlé.

Maintenant, il faudrait parler également... On a fait des changements. On a aboli le bureau central d'admissibilité à l'enseignement en langue anglaise. On l'a remplacé par des personnes désignées qui sont situées chacune dans les directions régionales du ministère. Les demandes d'admission à l'école, c'est une question qui relève de nos directions régionales. Cela relève des commissions scolaires et, quand il y a des problèmes, elles transigent avec les directions régionales. C'est une question d'admission. On a dit: Cela s'en va là. On a désigné des personnes compétentes et objectives; on en a retenu une couple de celles qui étaient déjà en place auparavant et on en a nommé de nouvelles aussi. Je pense qu'on a un système qui va donner un service beaucoup plus direct à la clientèle. Il faut avoir vu combien c'était traité de manière bureaucratique sous l'ancien gouvernement pour se rendre compte que des améliorations étaient souhaitables. En plus, nous avons introduit tout un système administratif qui permet de vérifier de beaucoup plus près la présence d'élèves français dans des écoles anglaises contrairement aux dispositions de la loi. J'ai eu connaissance de cas où nos services ont écrit immédiatement aux commissions scolaires concernées pour les rappeler à l'ordre. Il y avait des cas difficiles et on les rappelle à l'ordre. On leur dit: Une loi est là et c'est pour tout le monde.

La députée m'a demandé quand le guide d'application serait rendu public. Ce ne sont pas des documents qui sont rendus publics. Ce sont des documents pour l'usage et la gouverne des fonctionnaires chargés de l'application de ces lois. Si la députée veut avoir accès à ces documents, elle pourra les demander et on les lui donnera volontiers, de même qu'à une personne qui peut être intéressée. On ne fait pas des dépenses pour publier seulement pour l'usage de quelques personnes sous forme imprimée des documents qui ont 300, 400 pages. Ces documents sont disponibles. Pardon?

Mme Blackburn: À quel moment le nouveau guide sera-t-il prêt?

M. Ryan: D'ici quelques semaines tout au plus.

Je pense qu'on a fait pas mal le tour. La députée m'a demandé combien d'enfants affectait le jugement Steinberg. Il y a des opinions divergentes. Il y en a qui disent que c'est une cinquantaine, d'autres que cela peut aller jusqu'à 200. Je n'ai pas d'élément pour donner une opinion là-dessus avec assurance. Ce que je peux vous dire, c'est qu'une fois que le juge Steinberg a rendu sa décision nous l'avons examinée sous tous ses aspects et nous avons dû conclure que les chances de gagner en appel ne seraient pas très grandes. Nous avons décidé d'accepter le critère qu'a retenu le juge Steinberg. Lui, il a dit que c'est la majorité du temps qui aura été fait dans une langue ou dans l'autre qui déterminera l'admissibilité, et la majorité, on va l'interpréter le plus près possible de la notion arithmétique de la majorité, comme le juge Steinberg le demande. Alors, de ce côté-là, je ne suis pas en mesure de donner un chiffre précis à la députée, mais, après cette année, je pense qu'on le saura mieux, parce qu'on pourra compiler les statistiques là-dessus.

Je rappelle, finalement, que les statistiques donnent raison à la politique que nous avons suivie. Pour l'année 1987-1988, le pourcentage des inscriptions à l'école française: 89,5 %; augmentation chaque année depuis que nous sommes au pouvoir. Pourtant, s'il n'y avait pas eu amélioration sensible, quand nous avons décrété l'amnistie pour les quelque 1300 élèves qui étaient illégalement dans les écoles anglaises, cela aurait dû diminuer le pourcentage d'élèves dans les écoles françaises. C'est parce qu'on en injectait 1300 d'un coup, mais l'augmentation a continué de se faire quand même. C'est signe que le climat général que nous avons créé favorise l'orientation volontaire vers l'école française et c'est infiniment préférable au genre de carcan dans lequel l'Opposition voudrait enfermer le gouvernement et le Québec tout entier en matière linguistique.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: M. le Président, je voudrais savoir si le ministre a l'intention de répondre favorablement aux recommandations qui ont été faites par la CEQ pour colmater les brèches qui sont en train d'être faites dans la loi 101, plus particulièrement à la suite du jugement Steinberg. Je vais les retrouver. La CEQ suggère de préciser qu'un parent immigrant doit avoir reçu son enseignement au primaire en anglais lorsqu'il était domicilié au Québec et ce, en conformité avec la loi 101. La deuxième recommandation: la CEQ propose de préciser que l'anglais, dans ce cas, doit être une langue officielle ou une langue qui est enseignée dans une école primaire publique du pays où demeurait le parent auparavant, et non pas l'anglais comme langue seconde, comme dans le cas du jugement Steinberg.

M. Ryan: II faut bien comprendre que le jugement Steinberg s'applique à des cas où les parents étaient au Québec au moment de l'entrée en vigueur de la loi 101. Il faut arrêter de créer des épouvantails. Ce nombre-là est inévitablement en diminution et éventuellement aura disparu parce que les gens ont déjà vieilli. La loi 101 remonte à quelle année? Elle remonte à 1977. Cela fait déjà onze ans. Alors, chaque année, le nombre de candidats possibles, de parents qui peuvent avoir des enfants en âge de commencer l'école, arrivés ici avant 1977, diminue. Par conséquent, ce n'est pas un problème grave. Il n'y a pas de danger que cela prenne des proportions. Cela ne peut que diminuer par rapport à ce que c'est. Pour tous ceux qui sont arrivés au Québec après l'application de la loi 101, c'est l'inscription à l'école française qui s'impose. C'est pour cela que je ne vois pas tout le tralala qu'on veut créer autour de cela. Il me semble que mieux vaudrait qu'on prenne le problème dans ses termes véritables et qu'on fasse un peu plus d'analyse et un peu moins de démagogie.

Le Président (M. Audet): D'autres remarques sur le même sujet?

Mme Blackburn: Cela va, c'est terminé.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Jacques-Cartier, sur le même sujet?

Mme Dougherty: Sur un autre sujet, sauf s'il y a de mes collègues...

Le Président (M. Audet): Alors, c'est fini pour ce sujet-là? Mme la députée de Jacques-Cartier, vous aviez demandé la parole? Mme la députée de Jacques-Cartier.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, allez-y!

M. Ryan: Est-ce que c'est sur le sujet de l'admission à l'école anglaise? Non. Sur ce sujet-là, je me permettrai de faire une dernière remarque, M. le Président, avec votre autorisation. Je voudrais dire que je suis fier du dossier du gouvernement en matière linguistique dans le domaine scolaire. Je pense que nous avons appliqué la loi 101 avec sincérité, avec fermeté, avec humanité. Les résultats parlent par eux-mêmes. Les chiffres sont là. Il y a des points qu'il faudra toujours chercher à améliorer. Surviendront des situations qui requerront notre attention. Nous faisons preuve de vigilance. Nous allons continuer de le faire. Je crois que c'est un dossier où nous n'avons aucune espèce de crainte des critiques que pourrait chercher à soulever l'Opposition.

Le Président (M. Audet): D'accord, merci. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Recherche et expérimentation en éducation

M. Dougherty: Merci. Ma question porte sur la recherche et l'expérimentation en éducation. Depuis longtemps, je perçois qu'au Québec on ne porte pas toujours une attention suffisante à la recherche et à l'expérimentation en éducation. Quand une recherche ou une expérience importante se fait, on ne retrouve fréquemment aucun reflet des résultats dans nos programmes scolaires. En d'autres mots, il existe souvent un trop grand écart entre ce que nous savons d'une bonne formation et ce que nous faisons dans nos écoles. D'autre part, il y a beaucoup de petites expériences individuelles qui sont entreprises dans nos écoles, habituellement grâce à l'initiative d'un professeur ou d'un directeur audacieux. Ces personnes se découragent si elles ne reçoivent aucun appui moral et financier pour leurs efforts et, le plus important, si elles ne voient aucune reconnaissance de leur travail en termes du désir de généraliser leur succès à d'autres écoles.

Mes questions sont les suivantes: Quelle est la politique ou quelles sont les priorités du ministère concernant la recherche et l'expérimentation en éducation? Je parle ici de la recherche fondamentale, mais surtout de la recherche expérimentale sous forme de projets pilotes dans les écoles, ce qu'on appelle en anglais "the school-based action research".

Deuxièmement, est-ce que le ministère a un budget identifié spécifiquement pour la recherche et l'expérimentation? Quels sont les critères d'affectation?

Troisièmement, quel soutien est apporté à l'expérimentation en milieu scolaire local?

Quatrièmement, y a-t-il des mécanismes au sein du ministère pour aider les écoles à améliorer leurs programmes à la lumière des résultats

d'expériences isolées?

Le Président (M. Gardner): M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, j'ai avec moi des représentants de la section planification et développement pédagogique, qui est une section importante du ministère de l'Éducation.

Tout à l'heure, avec votre autorisation, j'aimerais que celui qui vient de s'installer à mes côtés, M. Maurice Morand, qui est directeur des programmes, puisse dire quelques mots. Il y aura M. Babin, que j'aimerais également vous faire entendre, qui est directeur de la recherche et du développement au ministère. Je serai par conséquent très bref, voulant donner à ces personnes l'occasion de vous présenter un peu leurs projets et leurs travaux en relation avec la question très importante qui a été soulevée par la députée de Jacques-Cartier.

Je voudrais dire essentiellement qu'avec les compressions que nous avons eues ces dernières années, la dimension recherche n'a pas pu connaître tout le développement qu'on pourrait souhaiter. Il serait très souhaitable, pour donner un exemple, qu'on puisse disposer d'un budget substantiel pour soutenir des projets de recherche dans nos universités, par exemple. Il y a des universités... Les sciences de l'éducation sont l'un des secteurs les plus développés de l'enseignement universitaire au Québec et, malheureusement, nous ne disposons pas du budget pour promouvoir des projets de recherche que pourraient entreprendre nos professeurs et nos chercheurs dans les facultés de sciences de l'éducation. Ils font des travaux de leur côté. Ils obtiennent des fonds des corps subventionnaires, autant le fonds FCAR que les organismes subventionnaires fédéraux, mais nous n'avons pas la latitude qu'il faudrait et c'est un des points sur lesquels il faudra que le ministère puisse disposer de ressources un peu plus abondantes. D'ailleurs, en relation avec le plan d'action pour le français, nous avons libéré certaines sommes qui permettront de promouvoir des projets de recherche parce que nous avons constaté, en préparant le plan d'action en français, que nous n'avions pas toutes les connaissances scientifiques sur certains aspects, sur la pédagogie, par exemple, en matière linguistique, que nous pourrions requérir. Alors, de ce point de vue-là, je pense que c'est une limite qu'il faut inscrire en toute vérité.

Maintenant, j'aimerais que M. Morand, pour commencer, et peut-être M. Babin par la suite nous disent les travaux de recherche qui se font à l'intérieur du ministère de l'Éducation. Il y a plusieurs projets qui sont en marche présentement.

Mme Blackburn: M. le Président, vous permettez une question? (16 h 45)

Le Président (M. Gardner): Est-ce que vous avez une question de privilège?

Mme Blackburn: De règlement.

Le Président (M. Gardner): De règlement.

Mme Blackburn: On est ici pour étudier les crédits et, généralement, il est admis, c'est dans la coutume, dans les traditions que la majeure partie du temps soit laissée à l'Opposition pour vraiment faire une étude des crédits, et non pour encenser le gouvernement. Ce qu'on veut savoir... Si le ministre veut s'encenser, se féliciter et se trouver bien bon, il a d'autres tribunes pour le faire. Ici, c'est généralement reconnu que c'est fait pour permettre à l'Opposition de poser des questions pertinentes par rapport à la gestion du ministère. C'est le rôle et c'est la fonction de l'Opposition. Le ministre dit: Je vais être bref. Après cela, il va s'en aller là-dessus, il va énumérer les travaux de recherche, on n'en sortira pas. Qu'est ce que le ministre vise, en fait? M. le Président, ce qu'on peut suggérer au ministre...

Le Président (M. Gardner): Sur la question?

Mme Blackburn: ...avec tout le respect que j'ai pour ces personnes qui travaillent et qui collaborent avec lui, c'est qu'il nous envoie la liste des travaux de recherche; je pense d'ailleurs qu'on en a déjà quelques-unes. Dans le fond, cela serait aussi pratique et on n'userait pas inutilement d'un temps qui est précieux pour nous donner ou nous faire le répertoire des travaux de recherche actuellement en cours au ministère.

Le Président (M. Gardner): M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: M. le Président, sur la question de règlement soulevée par la députée de Chicou-timi, il faut remarquer quelque chose. Quand est intervenue la députée de Chicoutimi, elle est intervenue comme elle le croyait bon. Le ministre, à l'heure actuelle, veut intervenir pour répondre d'une façon bien déterminée. Cela lui revient, la façon de répondre, cela ne revient pas à la députée de Chicoutimi. C'est très simple, c'est très normal. Quand vous avez parlé dans votre intervention de vingt minutes des cultures et que vous avez ridiculisé les cultures d'autres communautés, on n'a rien dit, on a souri. Mais laissez le ministre répondre d'une façon cohérente et directe à des questions directes de la part d'un député ministériel. M. le Président, le ministre a le drqit de disposer de la façon qu'il va répondre, dans quelle orientation et dans quel sens. Merci.

Le Président (M. Audet): Mme la députée

de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, une dernière intervention sur la question de règlement. Ce que je voudrais essayer d'établir ici, c'est un climat qui nous permette de passer à travers les nombreuses questions qui sont soulevées à l'examen des crédits non seulement par l'Opposition, mais également par les différents intervenants scolaires. Le ministre a certainement comme moi pris connaissance des critiques qui ont été soulevées à l'endroit des crédits du gouvernement et du ministère de l'Éducation en particulier. L'objectif à cette commission, c'est d'apporter un éclairage qui permette aux gens de mieux saisir cette réalité. Moi, ce que je demande, c'est qu'il y ait un minimum de collaboration pour qu'on puisse passer à travers l'étude de ces crédits de façon assez sereine et avec un maximum d'information. Les réponses que j'ai, c'est exactement comme en Chambre, je n'ai pas vraiment de réponse, sauf qu'on fait du paternalisme et on pontifie. En plus, on allonge.

Moi, ce que je souhaiterais, c'est qu'on le fasse de façon un peu plus sereine, mais de façon un peu plus sérieuse également, et qu'on ne continue pas à étirer le temps et à perdre du temps. J'imagine que les gens qui sont ici ont autre chose à faire que d'écouter le ministre pontifier et se vanter et prendre un temps infini pour répondre à des questions qui pourraient être faites par le biais de communications écrites.

Le Président (M. Audet): D'accord. Une dernière intervention sur la question de règlement, Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Je regrette infiniment que Mme la députée ne s'intéresse pas à la recherche et je note que, dans le programme I, à l'élément 2, section planification et développement pédagogique, il y a un budget, on discute des crédits. Je n'ai pas posé cette question pour féliciter le ministère ni le ministre. Je souligne qu'il y a un élément du programme du ministère qui est sous-développé, ce qui me préoccupe beaucoup. D'accord? J'aimerais savoir ce que le ministre entend faire à l'avenir. C'est toute la portée de ma question et je regrette, mais je vais la poser et j'attends la réponse du ministre.

Mme Blackburn: M. le Président, ma remarque ne s'adressait pas à la députée de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme la députée.

Mme Blackburn: Si on doit passer une partie des crédits à répondre à une question, on va avoir des problèmes.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme la députée.

Alors, le règlement permet au ministre de céder la parole à un représentant de son ministère. Je vous demanderais quand même d'être assez bref en réponse à la question que Mme la députée de Jacques-Cartier a posée. La tradition parlementaire reconnaît que l'étude des crédits budgétaires, que le temps de parole mis à la disposition des membres de la commission, normalement, c'est pour l'Opposition. Alors, je voudrais qu'on respecte quand même cet esprit-là, cette tradition-là, parce que c'est surtout le travail de l'Opposition. Cela n'empêche pas toutefois les membres ministériels de poser quelques questions, mais je devrai faire respecter la règle de l'alternance... À l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre! Je devrai faire respecter la règle de l'alternance. Si on est dans un sujet et qu'il y a un député qui demande la parole, je devrai lui céder immédiatement la parole et revenir après immédiatement à l'Opposition. Est-ce que cela va? C'est bien clair pour cela?

Alors, monsieur, si vous voulez terminer votre réponse. M. Morand?

M. Morand (Maurice): Maurice Morand, directeur général des programmes.

Le Président (M. Audet): M. Morand, d'accord, allez-y. Soyez bref.

M. Morand: Je serai bref, M. le Président. Il y a une mesure budgétaire, entre autres, qui s'appelle l'expérimentation pédagogique dans laquelle le ministère investit chaque année 300 000 $ et les commissions scolaires à peu près les deux tiers dans des plans conjoints. Chaque année, nous essayons d'établir des priorités et, depuis deux ans, les priorités ont porté essentiellement sur les cheminements particuliers, donc, les élèves les plus démunis du secondaire, sur les cheminements particuliers des 12-16 ans et, cette année, des 16-18 ans, tant au niveau de l'enseignement, de l'évaluation que de la préparation de matériel didactique dans des projets conjoints avec les commissions scolaires. Nous avons aussi, cette année, travaillé avec quatre commissions scolaires à des projets de l'enseignement des sciences au secondaire, les nouveaux programmes de sciences. Nous avons aussi, il y a deux ans, travaillé conjointement à des projets sous le thème de la douance avec quelques commissions scolaires.

Alors, ce sont des projets conjoints et, sur appel d'offres, les commissions scolaires présentent leur projet. Elles investissent de leur argent et nous les soutenons avec le budget de 300 000 $.

Le Président (M. Audet): D'accord, merci. M. le ministre.

M. Ryan: Maintenant, M. le Président, pour compléter cet exposé, je pense qu'il est impor-

tant d'entendre également M. Babin, qui est directeur du service recherche et développement, lequel est responsable du budget auquel fait allusion la députée de Jacques-Cartier, budget qui est évoqué à l'élément 2, section 1: 2 984 700 $ pour la présente année, pour l'année 1988-1989. Alors, j'aimerais que M. Babin nous dise en quelques mots ce que fait cette section recherche et développement.

Le Président (M. Audet): Tout en étant bref et en vous présentant, s'il vous plaît!

M. Babin (Jacques): Oui, Jacques Babin. Je suis directeur général de la recherche et du développement au secteur de la planification et du développement pédagogique.

Je vais rappeler d'abord quelques-unes des caractéristiques des travaux de recherche et d'analyse qui se font à la direction générale. C'est essentiellement une recherche centrée ou axée vers la prise de décisions et qui, de ce fait, s'apparente beaucoup plus à la recherche-développement qu'à la recherche fondamentale. Donc c'est une recherche qui est destinée à soutenir l'élaboration ou la révision d'orientations de politiques ou de programmes d'action du mi-- nistère. Dans certains milieux, on appellerait cette recherche une recherche plutôt institutionnelle.

Dans les faits, c'est une recherche qui porte essentiellement sur les clientèles scolaires, sur les personnels, sur l'évolution des dépenses et sur les services éducatifs. C'est une recherche qui est souvent evaluative, recherche donc qui porte sur l'évaluation du fonctionnement du système. Un des premiers résultats ou des résultats les plus évidents de cette démarche evaluative est celle que vous avez vue ce matin dans le cadre de la brochure des indicateurs de performance du système. C'est une recherche aussi qui, à l'occasion, peut se faire avec des collaborateurs externes. Je signale qu'à cet effet, à la catégorie 4, donc la catégorie des contrats, on dispose d'environ 200 000 $ par année dont près de 60 000 $ sont alloués annuellement à la centrale des bibliothèques pour la publication d'un répertoire informatisé de recherche en éducation. Donc, il reste relativement peu de ressources pour faire faire des recherches à l'extérieur.

Voilà pour la nature des travaux d'analyse qui sont faits. Si vous me permettez, j'aimerais vous citer quelques exemples de travaux qui sont en cours présentement et qui illustrent le genre de concept que je viens de mentionner. Il y a des travaux qui ont été faits cette année sur l'enfance en difficulté, donc sur l'évaluation de la politique, particulièrement sur l'évolution des clientèles de l'enfance en difficulté, l'évolution des services offerts et les conditions de financement, les travaux qui ont été faits pour alimenter la préparation du plan ministériel en français et des travaux qui vont bientôt conduire à la publication d'un rapport sur l'orientation des filles vers les formations non traditionnelles.

Mme Blackburn: Si je ne m'abuse, on retrouve dans le cahier des crédits l'essentiel des propos que nous présente M. Babin, qui explique un peu les principales recherches effectuées au ministère. Si Mme la députée de Jacques-Cartier veut prendre la peine de lire le cahier des crédits, je pense qu'elle va retrouver l'essentiel des informations qu'est en train de nous livrer M. Babin. C'est ce que je voulais souligner tout à l'heure. Quand on utilise une partie du temps pour refaire les lectures qu'on a peut-être omis de faire ou qu'on n'a pas eu le temps de faire, je trouve que ce n'est pas correct. Ce n'est pas là l'objectif de l'étude des crédits en commission parlementaire.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi, si vous avez remarqué, avant de donner la parole à M. Babin, j'ai avisé M. Babin d'être quand même assez bref dans sa réponse. J'imagine qu'il va bientôt conclure, à la suite de la question qui a été posée par Mme la députée de Jacques-Cartier. M. Babin, pourriez-vous être un peu plus bref, s'il vous plaît?

M. Babin: Je peux vous rappeler qu'il s'agit de travaux essentiellement centrés sur la prise de décisions à l'interne, qui ont une dimension de publication, de compilation et d'analyse des statistiques concernant les personnels, les clientèles et les coûts de l'éducation. Je vous citais quelques projets qui, effectivement, se retrouvent en bonne partie dans le cahier des crédits et sur lesquels je peux élaborer si vous le souhaitez, madame.

Le Président (M. Audet): Merci, M. Babin. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi sur le même sujet.

Mme Blackburn: Non, cela va, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Cela va. M. Khelfa: M. le Président.

Le Président (M. Audet): M. le député de

Richelieu.

M. Khelfa: Juste pour avoir une information, la recherche que vous faites, le mandat est déterminé à partir de quel besoin? Qui détermine le besoin de la recherche? Vous avez fait une recherche sur l'enfance inadaptée. Qu'est-ce qui vous donne l'indication de faire une recherche dans tel domaine plutôt que tel autre?

M. Babin: Je pense que tous les intervenants dans le monde de l'éducation et nos patrons au ministère voyaient que des difficultés

commençaient à poindre concernant l'enfance en difficulté. Il y avait de toute évidence un volume de ressources qui était impliqué dans ce domaine et dont on savait mal comment il évoluerait dans les années à venir. Alors, tout cela permettait d'identifier assez facilement un chantier de travail.

M. Khelfa:...que vous faites périodiquement? M. Babin: Oui. M. Khelfa: Merci.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Programme 3, enseignement privé.

Le Président (M. Audet): Au programme 3? Est-ce que le programme 1 est adopté?

Mme Blackburn: Adopté.

Mme Dougherty: Donc, on n'a pas la chance de poser d'autres questions là-dessus?

Le Président (M. Audet): Le programme 1 est adopté. Est-ce que le programme 1 est adopté?

Mme Blackburn: Adopté. Le Président (M. Audet): Programme 3? Mme Blackburn: Programme 3. Enseignement privé

Le Président (M. Audet): J'appelle le programme 3. Le programme 2 sera étudié à la fin de la journée tel qu'entendu ce matin. Alors, sur le programme 3, Mme la députée de Chicoutimi. (17 heures)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Au programme 3, je voudrais parler de tout le dossier de l'enseignement privé et plus par-ticulièrement du financement et des nouveaux permis. Je ne reviendrai pas sur les données touchant les budgets ou je vais le faire de façon assez brève. On sait que depuis que le gouvernement libéral a été élu, le ministre a d'abord levé le moratoire sur l'enseignement privé. Au total, cette année le ministre aura créé quelque 850 nouvelles places pour des déboursés additionnels de 2 200 000 $. La croissance du budget de l'enseignement privé se situe aux alentours de 25 % en trois ans, alors que dans le public, c'est environ 12,9 %. L'an passé, c'est dix établissements qui ont été subventionnés: trois nouvelles écoles, et sept qui ont vu leur financement amélioré. Pour 1988-1989, le ministre vient de nous annoncer l'octroi d'un statut à trois nouvelles écoles et une amélioration des subventions à cinq autres. En fait, je le rappelle, c'est 850 places pour cette année seulement. Il faut peut-être rappeler... Parce que, quand je dis ces choses, le ministre m'accuse de faire de la démagogie. Je vais rapporter les propos du président de l'Académie Laurentienne qui disait, en parlant de l'académie, qui est une nouvelle école subventionnée: Celle-ci s'adresse aux élèves moyens et forts parce qu'elle n'a pas de ressources pour accueillir les faibles. Dans le fond, ce que je voudrais essayer de comprendre et de voir avec le ministre, c'est: Qu'est-ce que cela représente au Québec cette nouvelle tendance à ouvrir et à encourager le développement du réseau privé au détriment du réseau public?

Je vais essayer de placer la situation de façon à amener le ministre à comprendre les effets à long terme d'une telle politique sur la capacité des écoles publiques de relever le défi de la scolarisation. Actuellement, au Québec, il y a environ 18 % - les données viennent du ministère - des élèves du niveau secondaire qui se retrouvent inscrits dans des écoles privées. Les élèves qui sont inscrits dans les écoles privées, comme le rappelle le président de l'Académie Laurentienne, sont moyens et forts. Les faibles, il n'y a pas de place dans les écoles privées pour eux, pour un certain nombre de raisons qu'on connaît: on fait de la sélection. Les élèves qui sont inscrits dans les écoles privées sont généralement, et je le rappelle, bien encadrés dans leur famille. Ils ont des parents qui encouragent la scolarisation, des parents qui s'occupent de leur formation et de leur éducation. Donc, l'effet net, c'est que les éléments les plus dynamiques, 18 % des éléments les plus dynamiques des jeunes Québécois d'aujourd'hui du niveau secondaire se retrouvent dans les écoles privées. Si on prenait ces éléments dynamiques, qui ont généralement des capacités intellectuelles un peu plus élevées, mieux encadrés dans la famille, mieux soutenus, plus motivés, qui ont des parents qui s'occupent de l'école, si on les prenait et qu'on les envoyait dans des écoles publiques, ils s'intéresseraient aussi à l'école publique parce que ces parents sont soucieux de voir leurs enfants réussir. Mais là, comme on leur ouvre l'école privée et qu'on encourage les inscriptions à l'école privée, l'effet net, c'est qu'on écréme les clientèles. Dans cinq ans, on va voir à peu près 20 % de nos jeunes Québécois de niveau secondaire dans les écoles privées.

Le drame, c'est qu'on va laisser à l'école publique la partie de la population étudiante moins favorisée, moins soutenue dans la famille, et carrément tous ceux qui ont des troubles de comportement socio-affectifs, et on sait qu'actuellement c'est 12,5 % de la population étudiante, quoique ce soit un peu plus élevé au niveau primaire qu'au secondaire. On va se retrouver avec une école publique écrémée des meilleurs éléments, sans ressources suffisantes pour relever

le défi. Évidemment, comme vous n'avez pas tout à fait les bonnes ressources, comme vous avez une clientèle moins bien préparée, la performance va nécessairement être moins bonne et la tendance va aller en s'accentuant. La performance étant moins bonne, on va avoir de plus en plus tendance sinon intérêt à inscrire ses enfants à l'école privée et on va se trouver à appauvrir constamment l'école publique.

Encore une fois, le message qui est laissé par le ministre dans cette situation est: Si vous voulez recevoir une bonne éducation, envoyez vos enfants au privé. On ouvre les portes du privé et on vient encourager cette vision que l'enseignement dans le secteur privé est supérieur à l'enseignement du secteur public, alors qu'en réalité le privé reçoit une clientèle qui est dans de meilleures conditions pour apprendre. Ce qui est malhonnête et malsain, ce sont les comparaisons qu'on fait actuellement entre le privé et le public, qui n'ont pas les mêmes conditions. Les deux secteurs ne reçoivent pas les mêmes clientèles et, même si les enfants qui sont admis dans les écoles privées peuvent avoir dans certains cas... Ce ne sont pas tous des "bolés", comme on dit, ce ne sont pas tous des quotients intellectuels très supérieurs, ils semblent être moyens, mais ils sont mieux encadrés dans leur famille et ils ont des parents qui les suivent et qui s'intéressent à leur formation. Ce qu'on est en train de créer et le risque que cela fait peser sur l'école publique, c'est qu'on écrème les clientèles au niveau secondaire où, dans nos grandes polyvalentes, il y a des problèmes d'encadrement. Le message que le ministre laisse à la population du Québec en investissant dans les écoles privées alors qu'il fait des compressions dans le réseau public, c'est que la priorité du ministre va à l'enseignement privé.

Le ministre nous disait: On doit laisser le choix aux parents. Moi, je vous dis que, lorsque je choisis de prendre ma voiture plutôt que de prendre le transport en commun, je paie pour ma voiture. Je prétends que le choix des parents, il est là au moment où on a des écoles publiques. On ne paie pas nécessairement pour les écoles publiques, mais, comme cela fait partie de la tradition... Je n'ai pas vraiment d'objection à reconnaître que cela fait un peu partie de la culture du Québec. Mais ce qu'on ne sait pas généralement, et on s'assure de ne jamais informer la population du Québec là-dessus, c'est qu'un système privé subventionné, c'est quasi exclusif au Québec. Cela existe marginalement dans les autres provinces, c'est nul en Ontario. On se compare souvent à l'Ontario? Il n'y en a pas de système privé subventionné en Ontario et, pourtant, les écoles publiques sont très performantes. Est-ce qu'on ne pourrait pas se demander si elles ne sont pas performantes précisément parce qu'elles recueillent tous les éléments, c'est-à-dire les bons comme les moins bons? On se retrouve dans le public, je le rappelle particulièrement au niveau secondaire, avec une clientèle qui est écrémée dans certains cas de façon importante. Ici, à la commission scolaire des Découvreurs, à Québec, à la commission scolaire Chutes-de-la-Chaudière, à certaines commissions scolaires de la région de Montréal, à Sherbrooke également, c'est plus de 25 % des clientèles de niveau secondaire qui se retrouvent au secteur privé. On va se retrouver tantôt.... Cela va aller en augmentant, alors que la clientèle stagne au Québec. On sait qu'il y a une croissance presque nulle des clientèles étudiantes au Québec et cela va avoir comme effet de créer un réseau pour ceux qui sont capables de se payer l'école privée et de s'éloigner des cas difficiles, parce que l'école publique reçoit tout le monde, y compris ceux qui ont des troubles de comportement et ceux qui ont des troubles de santé ou des handicaps. On va se retrouver avec des écoles de pauvres, parce que, si vous prenez le profil socio-économique des enfants inscrits dans les écoles privées, vous allez constater qu'il y en a plus qui sont issus de la haute ville de Québec que du quartier Limoilou. C'est la même chose: il y en a plus du West Island, de Notre-Dame-de-Grâce et d'Outremont qu'il y en a de Saint-Henri. Vous allez constater également que vous ne retrouvez aucun - je pense être capable de le dire - enfant issu de familles d'assistés sociaux.

L'action du gouvernement nous mène à un nouveau clivage de la société: on va avoir des écoles pour ceux qui sont capables de se les payer et qui ont aussi le quotient intellectuel pour y aller, et les écoles publiques pour les autres. Le ministre justifie l'ouverture des écoles en disant: Cela répond à un besoin, la liste d'attente est de plus en plus longue. C'est bien évident, on "désinvestit" dans le public; on laisse le message que l'école privée est supérieure et on s'étonne que la liste d'attente soit longue dans les écoles privées. Cela n'a pas de quoi surprendre, sauf que c'est dangereux. C'est seulement cela que je voudrais amener le ministre à saisir, soit l'importance de ce mouvement sur la capacité de l'école publique tantôt de relever ces défis - je le dis encore en insistant - plus particulièrement au niveau secondaire.

Ce que je voudrais savoir du ministre: Les listes d'attente sont longues, nous a-t-il dit tout à l'heure. Est-ce qu'il a l'intention de poursuivre l'ouverture d'écoles secondaires au rythme des demandes? Est-ce qu'il n'est pas préoccupé des effets d'une telle politique sur la démobilisation qui pourra se faire dans les écoles secondaires en particulier et plus particulièrement sur les effets que cela pourra avoir si on continue ce clivage des élèves, d'autant accentué que, je le rappelle - tantôt, on va revenir au programme d'enseignement professionnel - on est en train de revenir aux écoles de métier, pour compléter le clivage? Je voudrais savoir du ministre: s'il est conscient des effets que cela va avoir tantôt, si la tendance se poursuit, sur les écoles publi-

ques de niveau secondaire en particulier et sur leur capacité à relever le défi d'une bonne scolarisation, d'une qualité de l'éducation.

M. Ryan: Je voudrais signaler tout d'abord, M. le Président, que la députée de Chicoutimi finit son intervention par une ou deux questions. Elle émet tellement de considérations avant d'en venir à des questions, qui restent assez peu claires, que c'est bien difficile de répondre seulement à la question, il faut répondre aux propos qui l'ont précédée parce que c'est tout un discours qu'elle nous tient. Je pense que c'est important qu'on situe les choses dans leur juste perspective.

Une première chose que je voudrais noter, qui me paraît très importante, je ne sais pas au nom de qui la députée de Chicoutimi parle ici; je ne sais pas si elle parle au nom de son parti ou en son nom personnel. Je me souviens que le Parti québécois avait inscrit dans son programme, avant d'accéder au pouvoir, une disposition prévoyant l'abolition des subventions aux établissements privés. Il n'a pas été capable de l'appliquer. Il a essayé pendant neuf ans d'enfanter une politique de l'enseignement privé; il y avait de la division dans le parti et il n'a jamais été capable d'en mettre une au point. Année après année, le ministre venait faire des promesses qui ne connaissaient jamais de réalisation. Je crois que cet article est disparu du programme. Je crois qu'il est formulé autrement maintenant; en tout cas, la députée pourra nous le dire tantôt. Je crois que les propos qu'elle tient ne sont pas tout à fait dans la ligne qu'a suivie ce parti-là au cours des dernières années.

Pour en donner une indication claire, je vais montrer une chose. La députée se scandalise. C'est bien facile. Qu'est-ce qui s'est passé entre 1975-1976 et 1983-1984, pendant que ces chers éclaireurs de la nation dirigeaient les affaires communes? Voici ce qui s'est passé. Dans l'enseignement privé, il y avait 80 000 élèves subventionnés en 1975-1976. En 1983-1984, nous en avons trouvé 93 390. Une augmentation de 13 000 sur 80 000, cela fait une augmentation de 16 %, pendant que certains tenaient des propos comme ceux qu'on entend ici. Il faut être logique, il faut que le discours suive les actes, autrement on n'est pas pris au sérieux. (17 h 15)

Nous avons dit: Nous allons avoir une politique conséquente avec notre discours, nous allons pratiquer une politique d'ouverture franche et loyale, mais dans la modération et la rationalité. Qu'est-ce qui s'est produit en trois ans? Le nombre total d'élèves subventionnés au secondaire sous le Parti libéral est passé de 66 000 à 69 000, augmentation de 3000 sur 66 000. Si je compte bien, combien cela fait-il? Cela fait seulement un peu plus de 1 % par année. C'est ce qui vous scandalise? C'est ce qui vous fait craindre pour l'avenir de la nation? Je le regrette infiniment mais vos craintes sont inspirées beaucoup plus de préjugés que d'une analyse de la situation réelle.

Nous avons vu jusqu'à maintenant... Voici ce qui se produisait. Vous allez me poser une question: Combien se fait-il que le nombre d'élèves subventionnés ait augmenté autant sous le régime du Parti québécois alors qu'il pratiquait un moratoire? La réponse est bien simple, c'est qu'ils ont laissé certains établissements se développer au-delà de toute mesure pendant qu'on empêchait des initiatives nouvelles de prendre naissance. C'est ce qui est arrivé concrètement. Il y a des établissements qui ont multiplié leur clientèle pendant que vous empêchiez d'autres de prendre des initiatives et que des régions entières demeuraient privées de l'accès à l'enseignement de cette nature. C'est ce qui est arrivé, le dossier parle par lui-même. Je ne blâme pas l'ancien gouvernement d'avoir laissé ces choses-là se faire, il n'était pas capable de les empêcher. Quand il y a une volonté des parents qui s'exprime, à moins qu'on soit dans un pays dictarorial, il faut bien que cela se manifeste. C'est comme un ruisseau qui finit par percer le rocher, la volonté des parents.

La députée s'étonne qu'il n'y ait rien de cela en Ontario. Je ne sais pas si elle a étudié l'histoire des systèmes d'éducation dans le monde. On peut lui donner d'autres pays où cela existe, où cela est monnaie courante. En Amérique du Nord anglaise - pourtant il me semblait que la députée de Chicoutimi n'aimait pas trop cela! l'Amérique du Nord anglo-saxonne, c'est dangereux - on a opté, dès le milieu du siècle dernier, pour une tradition de développement du système d'enseignement qui donnait le monopole au secteur public. Alors, ce n'est pas étonnant qu'il n'y ait pas d'écoles privées subventionnées en Ontario. C'est ce qui se pratique dans toute l'Amérique du Nord pour les écoles primaires et secondaires. Sauf qu'aux États-Unis on a forcé les catholiques à avoir un système d'écoles privées, qu'ils sont obligés de payer entièrement, système que je trouve personnellement injuste et que les catholiques américains trouvent injuste également et qui semble répondre à la philosophie de la députée de Chicoutimi, suivant les prémisses qu'on a entendu énoncer ici depuis le début de la journée.

Par conséquent, en Amérique du Nord, ils ont choisi cette tradition-là du côté anglo-saxon et nous avons plutôt choisi la tradition des pays d'Europe continentale. En France, ils ont un régime d'écoles privées subventionnées qui recrute au bas mot entre 20 % et 25 % de la clientèle des niveaux primaire et secondaire. En Belgique, on a des écoles privées qui recrutent une proportion plus forte que celle-là, en Hollande également, en Allemagne, la même chose. Chaque pays développe sa tradition propre quand il s'agit de ses structures scolaires. Nous avons notre tradition propre. Votre parti aurait voulu étouffer les écoles privées, du moins dans leur dimension subventionnée, mais il a été

obligé lui-même de se rendre compte au pouvoir qu'il n'était pas capable de le faire, parce que la pression des parents et de l'opinion était trop forte.

Sur cela, entendons-nous une fois pour toutes, changez votre programme, dites des choses claires et après vous essaierez de vous faire élire avec cela. Nous, une chose que je sais, c'est que nous avons des actions qui correspondent exactement au discours que nous avons tenu pendant la campagne électorale et avant. Les développements que nous avons faits, ainsi que l'attestent les statistiques, sont extrêmement modestes. Nous avons permis l'an dernier... Combien d'écoles secondaires l'an dernier, accession au statut et subventionnées? Je pense que c'est bon qu'on fasse le tour parce qu'il faut mettre la vérité d'abord et avant toute chose. L'an dernier, on a autorisé l'Académie séfarade. On lui a donné une RFS pour 45 élèves. C'est une école, comme vous le savez, qui réunit des Juifs, des élèves de la communauté juive séfarade, communauté juive française. Académie Sainte-Thérèse, on a donné une RFS au niveau secondaire, elle l'avait déjà au niveau primaire. On a donné - attendez un petit peu, oui c'est cela - Collège français de Longueuil, on a donné une RFS à un nouveau pavillon d'enseignement secondaire qui prolonge les pavillons. Ils ont sept pavillons. Cela est un des organismes les plus considérables qui se sont développés beaucoup à la faveur de la politique de l'ancien gouvernement.

On a donné un statut DIP à la corporation de l'école secondaire de Rimouski, région où il n'y avait pas d'enseignement privé. On en a donné un à l'école Jean-Paul-ll à Baie-Comeau, aussi. Ce sont deux écoles nouvelles. On en a donné un à l'école communautaire Hassidique de Montréal. C'est une section très nettement caractéristique de la communauté juive orthodoxe. On a donné un statut RFS à l'école de l'église arménienne Sourp-Hagop, un autre statut RFS à l'école secondaire Mont Bebnilde, en tout 971 élèves l'an dernier. Cette année trois écoles accèdent au statut d'établissements subventionnés au secondaire. Il y a l'école Lafontaine qui se voit attribuer un DIP. C'est un cas particulier. La décision avait été prise l'an dernier et nous avions posé certaines conditions pour l'octroi du permis. Les conditions n'ont pas pu être satisfaites à temps pour l'ouverture de l'année scolaire 1987-1988. Cela a été différé à l'année 1988-1989. Ensuite, il y a l'Académie Lauren-tienne dont a parlé la députée de Chicoutimi qui offre un service de pensionnat et de formation présentant beaucoup d'aspects innovateurs, puis nous trouvons que c'est bon d'encourager l'expérimentation également, et l'autre cas, c'est l'école Pasteur de Cartierville dont la section qui s'adresse particulièrement à des élèves d'origine libanaise se voit accorder pour le secondaire un statut subventionné. Alors, c'est tout, cela fait le tour. Je ne pense pas qu'il y ait de quoi semer la panique nulle part.

Le Président (M. Audet): Cela va, M. le ministre? M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Une question, M. le ministre. Vous dites qu'entre 1976 et 1983 il y a eu un développement de quelques collèges privés. Cela a augmenté de 66 000 à 69 000 élèves.

M. Ryan: M. le Président, je ne sais pas si vous pouvez me permettre une précision?

M. Khelfa: Oui.

M. Ryan: Entre 1986 et 1989, le nombre d'élèves inscrits dans des établissements privés secondaires est passé de 66 000 à 69 000.

M. Khelfa: Et entre 1976 et 1983?

M. Ryan: Entre 1976 et 1983, on est passé, de 1975-1976, de 59 000 à 64 000 de ce côté-là. En tout, 80 000 à 93 000.

M. Khelfa: Cela malgré le moratoire existant? Mais comment ont-ils pu réussir à faire cela?

M. Ryan: II faudrait le leur demander.

M. Khelfa: Probablement que vous n'avez pas de données, mais est-ce que ce serait où il y avait des fréquentations d'élèves d'anciens ministres péquistes dans ces collèges privés, malgré le discours? Ne me répondez pas, merci.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Si le ministre ne se croyait pas constamment éclairé par l'Esprit-Saint et le seul détenteur de la vérité, il essaierait de comprendre un peu ce que j'essaie de dire. Il estime toujours qu'il n'y a que lui qui comprend; les autres ne comprennent jamais parce que comme il a la vérité, les autres ne sont pas supposés la détenir. Mais de temps en temps il serait peut-être sage qu'il écoute un peu ce que j'essaie de lui faire comprendre. D'une part, le message qu'il laisse c'est qu'on encourage le développement de l'enseignement privé, alors qu'on effectue des compressions dans l'enseignement public. C'est cela le message. Je ne suis pas la seule à percevoir ce message puisqu'il y en a d'autres qui réagissent dans le même sens.

À présent, le ministre me dit: Je vais continuer. Si la tendance se poursuit, je le maintiens, on écrème les clientèles. Comme le ministre ne nous a pas donné de politique, ses critères ne sont connus que de lui, il nous en livre comme ça de temps en temps, on ne sait

pas où il amène le réseau privé, ce qui aura des conséquences, évidemment, sur le réseau public. Il dit: On peut se comparer aux autres pays d'Europe. J'ai rarement entendu le ministre de l'Éducation se comparer à autre chose qu'à l'Ontario; tout à coup cela lui plaît de se comparer à quelques pays comme la Belgique, ainsi de suite, on connaît la situation. Là, pour faire comprendre, il est en train de s'ouvrir l'esprit tout à coup, parce que cela sert sa cause. Il est bon de dire et de rappeler aux Québécois que c'est exceptionnel, c'est la tradition qui veut qu'on ait un tel système, mais il n'est pas dit qu'il faut absolument qu'on continue à le maintenir, comme il n'est pas dit qu'il faut absolument continuer à maintenir l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui avait peut-être des raisons d'être en 1867. Ce que je dis, c'est que le message qu'il laisse va certainement, automatiquement et fatalement amener de plus en plus de monde à demander l'ouverture d'écoles privées et va fatalement amener plus de parents à demander des places pour leurs enfants aux écoles privées. Moi, je voudrais savoir: Est-ce que le ministre sait combien il y a de demandes sur la table dans les écoles privées? Ensuite, ce que je voudrais savoir également: Combien y a-t-il de groupes, de conseils d'administration qui ont fait de nouvelles demandes pour l'ouverture d'écoles? Cela va être la mode tantôt, vous savez. Cela va être la mode. Si on veut échapper à la plèbe, on va s'ouvrir une école privée. Mes craintes viennent du fait que le message que le ministre laisse va dans cette direction.

Par rapport au programme du Parti québécois, je le dis en toute simplicité, ce n'est pas tout le monde qui était prêt à couper les subventions du privé. Les gens comprenaient que couper les subventions du privé équivalait à fermer les écoles privées. Cela n'a pas de rapport. Vous pouvez couper les subventions au privé sans que les écoles ferment automatiquement. Il va y avoir fatalement une diminution de la clientèle, mais les écoles ne fermeraient pas. Cependant, ce que le gouvernement, mon gouvernement, a fart à l'époque, cela a été de réduire les subventions au privé et on se rappellera la levée de boucliers, la démagogie qu'a faite le Parti libéral à cette occasion, à un point tel qu'on aurait cru qu'on était en train d'ébranler les colonnes du temple. Écoutez, on a fait proprement de la démagogie à ce moment-là. On a également imposé un moratoire sur le développement des écoles privées. Ce qu'on n'était pas en mesure de contrôler, c'était le développement des clientèles, parce que si je ne m'abuse - et là je ne connais pas bien la Loi sur l'enseignement privé sur cet aspect - une fois qu'on a reconnu un permis, la loi ne prévoit pas qu'on puisse en contrôler l'expansion. Par exemple, on s'est retrouvé, pour parler du niveau collégial, avec un collège à Sillery ou Cap-Rouge avec un secteur très développé en techniques de garde à l'en- fance. Alors qu'on contingentait dans le public, on était incapable, on n'avait pas le pouvoir en vertu de la loi de contingenter dans le privé. Alors, si je ne m'abuse, il y avait quelque chose comme cela qui explique la croissance des clientèles.

Je voudrais aussi rassurer le ministre. Je ne trouve pas plus normal que lui.... Il m'accuse et dit: La députée doit trouver normal que les Américains catholiques paient les écoles pour leurs enfants. Voyons donc! Je ne trouve pas cela plus normal. Le réseau public est accessible à tout le monde. C'est accessible à tout le monde et, au Québec, on le sait, on a été extrêmement ouvert là-dessus. Si je ne m'abuse, c'est le seul pays au monde, à l'exception évidemment d'Israël, où vous retrouvez une commission scolaire juive, des écoles juives gérées par eux-mêmes, une structure complètement gérée par la communauté juive. Je pense avoir entendu dire que cela n'existait nulle part au monde. Des écoles privées subventionnées, des écoles privées il y en a évidemment un peu partout, mais des écoles subventionnées. Le Québec a toujours fait preuve de beaucoup d'ouverture. On n'a qu'à voir la qualité des services offerts à la minorité anglophone. Cela n'existe nulle part ailleurs dans les autres provinces canadiennes. Alors, ce n'est pas de l'intolérance, c'est tout simplement du sens commun. Un État a la responsabilité d'offrir les meilleurs services possible au public, à la masse, et non pas à une élite.

Le Président (M. Audet): M. le ministre. (17 h 30)

M. Ryan: Je voudrais d'abord donner une précision qui ne me semble pas dénuée d'importance. Il me déplaît de voir la députée de Chicoutimi introduire le facteur religieux dans nos discussions, ce que, personnellement, je ne fais jamais, sauf quand on discute de religion. Dire que je prétends être inspiré par l'Esprit-Saint, je ne sais pas comment appeler cela, mais cela ne tient pas debout, c'est de la folie. Qu'on discute des questions qui sont au programme, c'est très bien. Ce genre d'affaires, franchement, on peut s'en passer.

Deuxièmement, je crois que, si quelqu'un s'emploie actuellement à créer l'impression fausse dans tout le Québec que le gouvernement actuel favorise l'enseignement privé au détriment de l'enseignement public, c'est la députée de Chicoutimi, pas d'autre. Je l'ai dit clairement dans ma déclaration liminaire, nous avons une politique de priorité à l'école publique. 95 % des ressources consacrées à l'enseignement primaire et secondaire sont attribuées à l'école publique, alors qu'elle réunit 91 % des effectifs. Le secteur privé, qui réunit 9 % des effectifs, se voit attribuer 5 % des ressources. Nous avons montré que le développement était à peine de 1000 par année au cours des trois dernières années, c'est-à-dire un rythme de croissance moins rapide que sous le gouvernement précédent. On continue à

chercher à laisser croire un peu partout que nous favorisons un développement injuste de ce secteur. Je pense que c'est du mensonge.

Troisièmement, on nous disait tantôt: On développe le secteur privé pendant qu'on impose des compressions au secteur public. Je l'ai dit explicitement plusieurs fois aujourd'hui que les compressions s'appliquent également au secteur public et au secteur privé. C'est exactement le même régime. J'ai fait faire l'examen per capita, révolution des subventions est exactement la même des deux côtés, avec une différence de moins un dixième pour le secteur privé.

On ne peut pas invoquer cet argument honnêtement si on veut discuter sur la base du dossier. Si on veut discuter sur une autre base, cela me rend la partie un peu plus difficile, parce que c'est un genre que j'aime moins. Sur ce point-là, les choses doivent être clairement affirmées.

On parlait des écoles juives tantôt. Là je veux rendre hommage à mes prédécesseurs, M. Jacques-Yvan Morin, même M. Camille Laurin, je pense. C'est sous le régime du Parti québécois que les écoles juives sont passées d'un statut RFS à un statut DIP. Ce n'est pas moi qui leur ai créé des difficultés à cause de cela, au contraire. Tantôt on nous disait: II n'y a pas d'autre pays au monde où les écoles juives sont reconnues. Tant mieux, si le Québec a la générosité pour le faire. Oui, tant mieux.

Mme Blackburn: C'est tout à fait le sens de mon intervention.

M. Ryan: Très bien.

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Ryan: Je ne voudrais pas briser l'harmonie si elle existe entre nous sur ce point-là. Je passe immédiatement à un autre point.

Un phénomène que j'aimerais signaler. Récemment au ministère, il y avait une conférence. Récemment, ce n'est pas plus tard qu'hier. Au ministère, quand on dit récemment, c'est toujours très proche d'aujourd'hui parce que cela marche vite. Il y avait une conférence, une réunion d'étude des cadres du ministère, au cours de laquelle un professeur de la Faculté des sciences de l'éducation, M. Claude Lessard, est venu faire une conférence dont M. Boudreau m'a remis le texte hier soir. En lisant cela j'ai trouvé un passage qui se rapporte directement à ce que nous discutons actuellement et qui rend, peut-être, plus compte de ce qui se passe dans la réalité que les propos qu'on a entendus cet après-midi: II y a actuellement une telle compétition entre le secteur privé et les écoles des commissions scolaires, pour une clientèle scolaire par ailleurs décroissante, que l'on observe une évolution du secteur public dans le sens de sa privatisation. Je veux dire par là que tout se passe comme si les responsables locaux du primaire-secondaire public avaient décidé de présenter leur produit comme possédant les caractéristiques traditionnellement associées au secteur privé: un encadrement des élèves plus marqué, une importance accrue accordée au rendement académique, des cheminements particuliers pour les élèves doués, une ouverture sur l'international, des écoles professionnelles distinctes, voire des activités parascolaires plus développées. En d'autres termes, la compétition a des effets homogénéisants, l'école publique cherchant à se rapprocher de l'école privée. Beaucoup applaudiront, y compris, je pense, des enseignants du public, d'autres crieront à la trahison de l'esprit de la réforme, de la Révolution tranquille. Je me contente pour le moment - je cite toujours M. Lessard - de constater que la compétition entre le public et le privé induit effectivement une dynamique à la base du système, mais que cette dynamique n'a pas tellement pour effet d'accentuer la complémentarité des deux secteurs que d'homogénéiser autant les orientations et les pratiques entre le public et le privé. À mon avis, c'est cette compétition qui donne sa force au mouvement de retour à l'essentiel qui est notre version québécoise du "back to basics" américain.

Il y a un effet d'homogénéisation qui est très intéressant aussi. Je crois que le privé, avec lequel j'ai de nombreux contacts à titre de ministre de l'Éducation, ressent aussi l'impact de ce réveil qui se produit dans le secteur public. Je me rappelle, M. Rondeau me disait cela quand il était mon conseiller autrefois. Il m'avait dit: On s'en va vers une situation où chaque école va devoir se personnaliser et s'individualiser si elle veut recruter et conserver une clientèle. C'est vers cela qu'on s'en va actuellement. Dans la mesure où les commissions scolaires prennent le virage et personnalisent de plus en plus le produit qu'elles offrent à la population, dans la même mesure on va revenir au véritable esprit de notre système d'enseignement et on va faire en sorte que le public va prendre toute sa place. Déjà, j'ai des nouvelles pour vous. Il y a des gens des écoles privées qui m'ont dit: Allez-vous laisser le public dévelqpper tout cela, devant les initiatives nouvelles? J'ai dit: Pour l'amour du ciel, certainement! Nous l'encourageons très fortement à le faire. Vous autres, vous aimez à parler d'émulation, bien grouillez-vous! C'est l'esprit qu'on veut mettre dans le système. Mettre un peu d'aiguillon dans chacun des deux secteurs de manière que tous offrent à la population des services de plus grande qualité. C'est cela notre philosophie véritable. Je n'ai pas de prédilection particulière pour l'un ou pour l'autre. Quand je vais dans une école comme l'école de Repentigny, qui est la plus grosse école secondaire du Québec, et que je trouve qu'on a mis sur pied effectivement un système d'organisation scolaire qui permet une personnalisation du contact entre l'éducateur et l'élève

à tous les niveaux, je les encourage fortement. L'autre jour, j'étais dans une école privée, je disais à la supérieure, parce que c'est une école dirigée par une communauté religieuse: J'ai vu une école secondaire l'autre jour qui est aussi bonne que la vôtre. Savez-vous ce qu'elle m'a dit? Elle a dit: Ils sont venus chercher leur modèle ici. Ils sont venus nous voir et on leur a dit comment cela marchait. Ils l'ont transposé chez eux. Ce phénomène d'interfécondation, la fécondation réciproque, si on peut le multiplier au lieu de fomenter la chicane et les guerres, je pense que c'est infiniment préférable pour l'épanouissement de notre système. C'est cela qui est notre esprit.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Ce sera terminé sur ce sujet.

Le Président (M. Audet): C'est terminé sur ce sujet. Et le programme?

Mme Blackburn: Programme 3.

Le Président (M. Audet): Programme 3, adopté?

Mme Blackburn: Adopté.

Le Président (M. Audet): J'appelle maintenant le programme 4. Enseignement primaire et secondaire public.

Enseignement primaire et secondaire public Compressions budgétaires

Mme Blackburn: J'aimerais parler un peu des compressions. Le ministre vient de réaffirmer que l'école publique était pour lui et demeurait pour lui une priorité, alors qu'on sait que dans les faits il y a des compressions qui sont exercées dans certains postes, et je vais y revenir.

Le ministre nous dit: L'éducation est une priorité et l'éducation dans le réseau public davantage. Pourtant, je rappelle son texte de ce matin, parlant du budget des crédits alloués à son ministère: Le Québec ne saurait toutefois continuer longtemps d'évoluer dans la voie empruntée ces dernières années, c'est-à-dire la voie des compressions, sans risquer de mettre en danger la qualité des services qu'il doit offrir à sa population en matière d'éducation. Comme le ministre semble toujours vouloir oublier ce qu'il a dit quelques heures plus tôt, il est important de le lui rappeler. Le ministre nous dit: C'est une priorité. Il n'y a rien d'alarmant dans la situation. Pourtant, cet après-midi, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec tenait _une_ conférence de presse pour précisément dénoncer les coupures effectuées dans le budget des commissions scolaires. Je me permets de lire quelques paragraphes dû* communiqué de presse émis à cette occasion. Le communiqué, qui est daté du 14 avril 1988, a comme titre: Le ministère de l'Éducation coupe une fois de plus les crédits de l'école publique. La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec a dénoncé vivement en conférence de presse aujourd'hui les coupures que le ministère de l'Éducation effectue une fois de plus dans les budgets de l'école publique. Au moment où tous s'entendent à dire qu'il faut améliorer la qualité de l'enseignement et de l'encadrement des élèves, le ministre impose aux commissions scolaires des compressions budgétaires qui mettent en jeu non seulement l'aide aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage mais le support à l'ensemble des clientèles du système public d'enseignement. C'est une déclaration de M. Légaré. Et il ajoute: Les commissions scolaires ont reçu à la mi-février leurs projets de règles budgétaires pour 1988-1989. Pourtant, elles ont fait savoir, à cette occasion, au ministre que les commissions scolaires lui expliquent, une fois de plus, qu'il ne peut couper impunément dans les subventions à l'école publique sans limiter l'accès à l'égalité des chances pour tous en éducation. Ce n'est pas la députée de Chicoutimi qui parle, c'est la Fédération des commissions scolaires des écoles catholiques: Une commission scolaire en milieu rural, avec les nouvelles règles budgétaires, d'environ 1650 élèves répartis dans une douzaine d'écoles perdra près de 400 000 $ équivalant à environ dix enseignants, même si sa clientèle augmente. Cette commission scolaire, si elle est au sommet de sa taxe locale, ne pourra faire face à ces compressions si des correctifs ne sont pas apportés. Et la fédération poursuit en se disant surprise que le ministre modifie le coût subventionné par enseignant en ajoutant un facteur de mobilité dans le calcul du taux de vieillissement sans qu'elle n'ait été informée de cette mesure.

Le ministre se vantait ce matin des rapports courants qu'il avait avec les différents intervenants du réseau. Si je ne m'abuse, il le faisait plus particulièrement en parlant de la commission de l'enseignement privé. Il serait peut-être souhaitable qu'il entretienne les mêmes rapports de collaboration et de concertation avec la Fédération des commissions scolaires alors qu'il est en train de modifier les règles budgétaires.

Toujours dans le même communiqué, parlant de l'éducation des adultes, la fédération dit: L'éducation des adultes n'échappe pas au couperet du ministre. Même si le MEQ vise des objectifs de rationalisation budgétaire dans le soutien de l'éducation des adultes, il nous apparaît important que les commissions scolaires aient les ressources suffisantes pour répondre notamment aux besoins des Québécoises et des Québécois qui retournent à l'école pour parfaire leur formation et pour l'alphabétisation, qui

constitue un problème sérieux au Québec.

Et la fédération conclut en disant: Nous constatons en effet que l'éducation n'est plus une priorité pour le gouvernement du Québec. Moi, j'ajouterais: À la lumière des trois derniers exercices financiers, l'éducation n'a jamais été une priorité pour le gouvernement libéral.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Le ministre nous dit: Écoutez! J'accorde toute l'attention qu'il faut à l'enseignement privé et public, mais les chiffres qu'on a en main démontrent de façon évidente qu'il y a une croissance des budgets au privé et qu'elle est beaucoup plus grande, le double en fait, que la croissance des budgets au secteur public. C'est ce que dénonce la Fédération des commissions scolaires.

Je voudrais à nouveau amener le ministre sur ceci: Le ministre a-t-il bien mesuré... Je sais qu'il se dit inquiet, je sais qu'il est inquiet, il nous l'a livré ce matin et il nous l'a dit, mais c'est la troisième année qu'il nous le dit, cela ne peut pas continuer comme cela. Comme cela fait la troisième année qu'il nous dit que ça ne peut pas continuer comme cela sans affecter la qualité de l'éducation, l'accessibilité à des services de qualité et que c'est la troisième année qu'on connaît des compressions dans ce réseau. Le ministre n'est-il pas inquiet de ces nouvelles compressions qui viennent affecter le réseau public d'écoles au Québec? Le ministre a-t-il mesuré l'impact de la coupure des postes des professionnels? Alors qu'il vient d'ajouter aux exigences des commissions scolaires seulement par le biais de ces dérogations, quand on sait que le nombre de ces professionnels est déjà estimé insuffisant... Dans les chiffres qu'il nous fournissait tout à l'heure, il a dit: on a 521 professionnels...

Des voix: ...psychologues. (17 h 45)

Mme Blackburn: ...psychologues dans les commissions scolaires de tout le réseau du Québec. Il faut dire qu'il y a aussi 1 000 000 d'élèves et un peu plus dans le réseau. Alors, qu'il y ait 521 psychologues, cela ne nous apparaît pas être complètement démesuré comme proportion. Est-ce que le ministre a mesuré l'impact des coupures de postes de professionnels, déjà en nombre insuffisant dans les commissions scolaires, et les commissions scolaires seront-elles obligées de couper des postes équivalents ou est-ce qu'elles pourront procéder à des réaménagements budgétaires? On sait qu'il y a eu 1,5 % de coupures faites à ce poste.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Tout d'abord, je pense que c'est bien important de rappeler clairement que la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec a fait une déclaration aujourd'hui et qu'on l'examine avec attention. On me l'avait transmise hier. Je suis très heureux de la courtoisie qui caractérise nos rapports, d'ailleurs, entre les deux fédérations de commissions scolaires et le ministère de l'Éducation.

Un premier point que je veux rappeler clairement, c'est qu'il y a déplacement de priorités. Mais il n'y a pas de diminution de ressources accordées aux commissions scolaires cette année. Il y a augmentation nette de 5 600 000 $. Je pense que c'est un fait qu'on doit reconnaître au départ. La députée l'a reconnu elle-même dans son intervention liminaire.

Mme Blackburn: Bien oui. Ce sont les salaires.

M. Ryan: C'est important de le remarquer clairement. Là où nous effectuons les compressions, elles sont compensées par des ajouts de ressources ailleurs. C'est bien clair.

Là, j'en viens au rapport avec les commissions scolaires. Nous avons une commission nationale des finances qui réunit régulièrement les représentants des commissions scolaires et d'autres grandes associations du monde éducatif avec le ministre et ses principaux collaborateurs. Je me souviens que, l'an dernier, on avait présenté des perspectives budgétaires à la fédération et on nous avait dit: Cela n'a pas de bon sens; il y a des compressions de 20 000 000 $ à 23 000 000 $. Je pense que, l'an dernier, c'était 23 000 000 $ ou 25 000 000 $, je ne me souviens pas exactement. Là, on leur avait dit: Si vous voulez être justes, on va tenir également des ajouts de ressources et, finalement, je crois qu'il y avait un surplus net d'ajouts de ressources de l'ordre de 20 000 000 $ à 30 000 000 $. C'est cela, la réalité. C'est cela que les commissions scolaires ont eu en 1987-1988 pour gérer leurs affaires. Ce ne sont pas seulement les compressions envoyées dans un paquet séparé. C'est un tout, les mesures budgétaires.

Encore une fois, même pour cette année, il y a accroissement de ressources, 5 600 000 $. On peut dire que c'est trop faible; c'est un point de vue qui se défend. Mais on ne peut pas dire qu'il y a diminution de ressources, ce n'est pas vrai. C'est mon humble point de vue confirmé par les chiffres que nous avons présentés depuis le début du débat.

En plus de cette commission nationale des finances qui se réunit environ deux fois par année - les commissions scolaires, le ministère, les grandes associations de l'éducation - nous avons un comité d'allocation des ressources composé de représentants des Fédérations de commissions scolaires et du ministère qui, lui, se réunit quatre ou cinq fois par année et avec lequel on discute de tout ce qui regarde lés règles budgétaires, les modes d'allocations de ressources et tout cela. On le consulte à différents stades. Encore demain, je crois qu'il y a une réunion au cours de laquelle on discutera de

nouveau de certains aspects des règles budgétaires.

Maintenant, la députée a cité tantôt le cas d'une commission scolaire qui était évoqué dans le communiqué de la Fédération des commissions scolaires catholiques. Nous avons passé la soirée là-dedans hier soir, mais nous avons reconnu le cas tout de suite, parce que nous avons reçu des correspondances et, ce cas-là, nous l'avons reconnu tout de suite. Je peux vous dire que, dans ce cas particulier, il y avait certaines données qui étaient incomplètes dans les données qui ont servi de base à l'envoi de projets de règles budgétaires. Cela donnera lieu à une correction. Dans ce cas-ci, au lieu de dix enseignants, cela va probablement être deux enseignants. Alors, ce sont des propos, je les comprends.

Il y avait un autre point. Pour le calcul des sommes à verser aux commissions scolaires au titre des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, on introduisait, cette année, ce qu'on appelle un indice de défavorisation pour donner plus d'enseignants à des commissions scolaires où le milieu socio-économique est plus mal en point. On avait proposé un indice qui a soulevé des difficultés et qui provoquait des iniquités assez grandes d'une commission scolaire à l'autre. Pour l'ensemble, cela marchait très bien, mais il y avait un certain nombre de cas qui étaient vraiment paradoxaux, qui étonnaient. Je vous donne un exemple. En vertu de cet indice, la commission scolaire Sainte-Croix à Montréal avait un indice de défavorisation très élevé. La commission scolaire catholique de Verdun, c'était zéro. À la connaissance qu'on peut avoir des faits, on serait porté à penser que les gens sont moins riches dans Verdun que dans le territoire de la commission scolaire Sainte-Croix. On s'est dit: Cela demande des vérifications plus pointues. On est en train de les faire. Si on voyait que cet indice crée des inégalités injustifiées, on reviendra à la position de l'an dernier. Mais, honnêtement, c'est un effort d'amélioration qu'on a fait.

Alors, encore une fois, quand on regarde l'ensemble, je comprends les représentations des commissions scolaires. Il est normal qu'elles fassent ces représentations. J'en ai eu des semblables des universités. J'en ai eu des semblables de la Fédération des cégeps. J'en ai des semblables des deux grandes associations qui regroupent les établissements privés de niveau secondaire et de niveau collégial. Nous essayons de faire pour le mieux mais, encore une fois, il n'y a pas de diminution de ressources. Au contraire. Il y a ajout modeste mais quand même réel de ressources qui vont nous permettre, entre autres, d'avoir un certain nombre de projets spéciaux en 1988-1989, dont j'ai décrit les grandes lignes au cours de la journée.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Je reconnais qu'il y a effectivement un ajout des ressources et je n'ai jamais dit le contraire. C'est d'ailleurs détaillé dans la présentation de ce matin. On le retrouve dans les crédits. C'est écrit: Conventions collectives: 20 000 000 $; ajustement mécanique aux règles budgétaires: 1 200 000 $. Ajoutez à cela, si je ne m'abuse, le montant de 8 400 000 $ pour les activités prioritaires.

Par ailleurs, on sait également que les compressions sont détaillées de la façon suivante. J'ai vu cela. Un moment, s'il vous plaît. C'est ici. Non - indexation des autres dépenses, 12 600 000 $. Ce n'est pas parce qu'on dépense 20 000 000 $ dans les conventions collectives pour de nouveaux postes que cela vient indexer les autres dépenses automatiquement. Il y a, de façon nette et claire, une compression de 12 600 000 $ là, une compression de 1 500 000 $ sur la masse des personnels autres que syndiqués, c'est un montant de 11 200 000 $, et la baisse des effectifs, 0, 7 %, pour un total de 24 500 000 $. Ce que je dis au ministre, c'est que dans ces postes il y a effectivement une compression. Le total de ces compressions, sur trois ans, s'élève à 65 000 000 $ pour le réseau public, évidemment.

Je pense que l'alarme qui est sonnée par la Fédération des commissions scolaires est justifiée. Elle est justifiée, je le rappelle, par le discours du ministre lui-même qui se disait alarmé de faire des compressions au printemps 1986, alarmé au printemps 1987 et qui se dit encore alarmé en 1988. J'ai hâte qu'il soit assez alarmé pour que l'alarme sonne en haut, au Conseil des ministres.

Je voudrais savoir du ministre, dans le montant de 20 000 000 $ qui est ajouté à des fins de conventions collectives, s'il s'agit de nouveaux postes pour l'année 1988-1989 ou pour des postes qui avaient été ajoutés l'an passé. Est-ce simplement l'effet récurrent ou si ce sont vraiment des nouveaux postes?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Pour la dernière année, c'est-à-dire l'année scolaire en cours ou plutôt pour l'année budgétaire terminée le 31 mars, l'ajout net de ressources a été de 10 500 000 $, d'après les prévisions qu'on avait faites. Il y avait des compressions pour 20 000 000 $ environ. Il y avait des ajouts de ressources pour un montant d'environ 10 000 000 $. Cette année, c'est un montant de 5 600 000 $. C'est un petit peu moins que l'an dernier. Mais encore une fois, dans tout le contexte où nous évoluons, je pense que ce ne sont pas des choses de nature à provoquer des déclarations apocalyptiques.

Il faut signaler une chose...

Mme Blackburn: Pour le montant de 20 500 000 $, en vertu des conventions collec-

tives, s'agit-il de nouveaux postes pour 1988-1989 ou si ce sont simplement les postes qui ont été créés l'an passé et qui sont récurrents?

M. Ryan: Ce sont les mêmes postes, évidemment. Ce sont des dépenses qui continuent. Ce sont les mêmes postes.

Mme Blackburn: Ce sont les mêmes postes? M. Ryan: Oui.

Mme Blackburn: Alors, il ne s'agit pas vraiment d'ajouts. Est-ce qu'il faut compter l'ajout deux fois? L'ajout de l'an passé et celui de cette année?

M. Ryan: C'est parce qu'on paie ce salaire en plus. On le paie quand même cette année. Il s'ajoute. Cela dérive de la convention collective. Cela n'a pas été inscrit dans le système de dépenses récurrentes encore. C'est cela. C'est comme les dépenses pour le programme de formation professionnelle. Elles vont être insérées dans le système graduellement. On prévoit cette année un ajout de 18 000 000 $ de ce côté.

Mme Blackburn: Cela veut dire que, si on fait le calcul selon l'information qu'on vient d'obtenir, ce n'est plus 30 100 000 $ qui ont été ajoutés, mais plutôt 9 600 000 $ parce qu'on ne pourra pas compter année après année de façon récurrente les postes qui ont été créés en 1982, 1983, 1984 et 1985.

M. Ryan: Ces postes sont des ajouts de dépenses.

Mme Blackburn: De l'an passé.

M. Ryan: Oui. Mais oui. Mais par rapport aux obligations strictes, les règles de formation de groupes, on aurait pu s'en tenir à l'autre. Cela vient ajouter des enseignants.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme la députée?

Mme Blackburn: Non.

Le Président (M. Audet): M. le ministre. D'autres commentaires à ajouter?

M. Ryan: J'ai été interrompu. J'étais en train de compléter ma réponse.

Le Président (M. Audet): Allez-y. Vous avez la parole.

M. Ryan: J'ai été interrompu par la députée de Chicoutimi avec votre bienveillante permission, sans la mienne.

Ce qu'il faut ajouter, quand on prend tout le tableau, c'est le potentiel financier des commissions scolaires également. Comme je l'ai dit ce matin, les commissions scolaires, à la fin de l'exercice de l'année scolaire de 1986-1987, au 30 juin 1987, avaient un surplus cumulatif de 151 000 000 $. Pour l'année scolaire 1986-1987, elles ont fait un surplus d'exercice d'à peu près 30 000 000 $. L'année précédente, elles avaient fait un surplus de 25 000 000 $ à 30 000 000 $ également. Ce sont des chiffres qui indiquent qu'on n'a pas le couteau sur la gorge. Quand un réseau sort d'une année avec un surplus d'exercice de 30 000 000 $, c'est signe qu'il n'a pas été pressuré au point d'être menacé de mort. Il y a autre chose qu'il faut ajouter, pour l'information des députés, c'est que les ressources attribuées aux commissions scolaires sont pour une grande partie transférables. Cela veut dire que, si une commission scolaire ne dépense pas tout le budget qui lui a été attribué pour un poste, elle a une latitude beaucoup plus grande qu'autrefois pour transférer les ressources obtenues à ce titre à un autre poste. Elle n'est pas obligée de rendre de comptes de cela ou de demander de permission à personne. Avec les nouvelles règles budgétaires que nous avons introduites, il y a deux ans, il y a une transférabilité beaucoup plus grande des décisions et des ressources attribuées à la commission scolaire que ce n'était le cas auparavant.

Quand nous avions parlé de responsabiliser les commissions scolaires, nous n'avions jamais promis de leur transférer des pouvoirs qui doivent appartenir au ministre. Nous avions dit que nous faciliterions l'exercice de leurs pouvoirs propres au plan administratif et financier en leur permettant de faire plus de décisions qui tiendraient compte de leurs réalités particulières. Quand on tient compte de tout cela, le surplus cumulatif de 151 000 000 $, le surplus d'exercice de l'an dernier... Cette année, je ne sais pas quels seront les résultats, je n'ai pas les toutes dernières perspectives, mais tout me permet de croire que nous devrions avoir des résultats aussi bons que l'année précédente. Je pense qu'il ne faut pas crier au loup non plus. On peut dire -et je l'ai dit moi-même ce matin - qu'il faut faire attention parce qu'on arrive à un point où il faut être bien conscient que, si on allait continuer indéfiniment, on aurait des dangers sérieux de corrosion et de diminution de qualité. Je crois que pour le moment nous sommes encore dans une situation qui est tout à fait viable, qui permet aux commissions scolaires de s'acquitter de leurs responsabilités un peu serrées. C'est la même chose pour nous. Je prends dans mon propre cabinet. J'ai deux ministères dont je suis responsable et j'ai le personnel d'un cabinet. J'ai demandé au gouvernement: Cela me prendrait plus de personnel. Ils ont dit: On traite tout le monde sur le même pied. On vous donne la même chose qu'aux autres ministres. Je fais mon travail quand même et vous ne m'entendez pas à passer mon temps à me lamenter parce que je serais

privé de ressources. Cela m'en prendrait plus. Mais je me dis: On est capable de faire la "job" avec les ressources qu'on nous donne. Au bout de la ligne, il faut bien que quelqu'un décide. Cela ne peut pas être chaque ministre. On est dans un gouvernement libéral et non pas dans l'ancien gouvernement péquiste.

Le Président (M. Audet): Cela va, M. le ministre? Alors, étant donné que l'enveloppe est maintenant terminée, avant d'ajourner les travaux, je voudrais revenir un peu sur la question de règlement que Mme la députée de Chicoutimi a soulevée en cours d'après-midi, que le ministre de l'Éducation aurait tenu des propos antiparlementaires.

Je dois vous dire, Mme la députée, qu'en vertu de l'article 35, ainsi que des jurisprudences quant aux paroles interdites ou aux propos antiparlementaires, les propos que le ministre a tenus ne me permettent pas de vous donner raison, à la suite de votre question de règlement. Évidemment, ce n'est peut-être pas un hommage à des propos que vous auriez tenus incessamment; toutefois, je ne peux pas vous donner raison lorsque vous invoquez l'article 35 pour dire que le ministre aurait tenu des propos antiparlementaires.

Alors, avant d'ajourner les travaux, je demande le consentement pour que nous puissions reprendre à 19 h 30 au lieu de 20 heures, pour terminer à 22 h 30 au lieu de 23 heures. Cela irait?

Mme Blackburn: Alors, cela dépend de la disponibilité du ministre. On avait parlé de 19 heures.

Le Président (M. Audet): Bien, selon plusieurs collègues, cela semblait aller pour 19 h 30, alors...

M. Gardner: Si on peut reprendre à 19 heures, je serais d'accord, moi aussi.

Mme Blackburn: Oui, à 19 heures.

M. Ryan: Je serais d'accord aussi, M. le Président.

Une voix: On a une heure.

Le Président (M. Audet): C'est peut-être serré un petit peu. Pour votre président c'est peut-être serré un peu.

Une voix: C'est serré pour votre président?

Une voix: Le président, on peut s'en passer. C'est un détail.

Mme Blackburn: II est arrivé en retard ce midi.

Le Président (M. Audet): Alors...

M. Ryan: Je serais disponible à 19 heures.

Une voix: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Audet): Merci de votre grande collaboration, M. le ministre! Alors, puisqu'il a consentement, on va reprendre nos travaux à 19 heures, pour terminer à 22 heures.

Alors, j'ajourne la commission jusqu'à 19 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

(Reprise à 19 h 5)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux. À la suite d'un consentement qui a été obtenu contre le gré du président, nous devions reprendre à 19 heures; nous sommes déjà en retard de cinq minutes, alors, nous allons immédiatement reprendre nos travaux.

Messieurs, si vous voulez reprendre vos places, s'il vous plaît. Nous en étions au programme 4, Enseignement primaire et secondaire public. C'est bien cela?

Mme Blackburn: Programme 4, c'est bien cela.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi, vous avez la parole.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais, très brièvement, revenir aux compressions effectuées dans les réseaux primaire et secondaire publics un peu pour décomposer les chiffres qui nous ont été donnés tout à l'heure, alors que, dans le poste Conventions collectives, on retrouve des crédits additionnels de 20 500 000 $. J'ai cru comprendre à la fin de l'intervention du ministre qu'il s'agit effectivement d'engagements qui ont été pris l'an passé et il ne s'agit pas de ressources nouvelles additionnelles. Si ces 20 500 000 $ ne constituent pas de l'argent neuf, ce n'est plus 30 100 000 $ additionnels d'argent neuf qu'on a cette année, mais bien 9 600 000 $ et, si je reprends le texte du ministre ce matin, au total les crédits de l'exercice 1988-1989 se soldent ainsi non pas par un ajout de ressources de 5 600 000 $, mais par une diminution de 15 000 000 $, c'est-à-dire l'équivalent de l'écart entre les deux. Je voudrais comprendre ces chiffres, à la lumière de l'information que le ministre nous a donnée tout à l'heure.

M. Ryan: L'explication que je pourrais donner, c'est que, si on l'avait inséré dans les

crédits réguliers de l'année passée, cela aurait été un ajout de 20 500 000 $ l'an dernier, et au lieu de 10 500 000 $ nets, comme je l'ai dit tantôt, cela aurait été 31 000 000 $. On a dit 10 500 000 $ l'an dernier. Cette année, on le garde en dehors des crédits réguliers, on le déploie de nouveau, on le laisse là. S'il n'était pas dans cette colonne, il serait dans une autre.

Mme Blackburn: Cela n'apparaîtrait pas dans des crédits additionnels, dans des demandes additionnelles?

M. Ryan: Non. On ne le présente pas comme cela, non plus.

Mme Blackburn: Écoutez, je...

M. Ryan: Cela reste en dehors des catégories établies. On ne sait pas ce qui va arriver de ces 200 postes quand la convention sera expirée. Peut-être que les règles de formation des groupes seront modifiées. Il faut que ce soit intégré; à ce moment-là, ce sera dans les crédits réguliers.

Mme Blackburn: Si je comprends bien, ces 20 000 000 $ étaient déjà inscrits dans les crédits de l'an passé dans les demandes dites additionnelles.

M. Ryan: Non, c'est là qu'est le point. C'était compté dans les ajustements mécaniques découlant des conventions collectives.

Mme Blackburn: Oui, mais, d'une façon ou d'une autre, ils étaient déjà là, et on les fait apparaître deux années d'affilée.

M. Ryan: Oui, il y est encore cette année.

Mme Blackburn: Je veux essayer de comprendre cela avec le ministre: s'il y était l'an passé et qu'il y est cette année, c'est qu'au fur et à mesure qu'on ajoute des ressources humaines dans le réseau on les considère nouvelles pendant combien de budgets? Deux, trois, quatre, cinq budgets?

M. Ryan: Comme on le dit, on a 24 500 000 $ de compressions cette année. Si, l'an dernier, on avait ajouté ce montant dans les crédits réguliers, cela n'aurait pas été 10 500 000 $ nets, cela aurait été 31 000 000 $. On ne l'a pas ajouté, et il reste en dehors encore cette année. Alors, on l'ajoute à notre équilibre général, il faut. bien qu'il soit quelque part. On ne s'est jamais vanté que c'était une demande additionnelle acceptée qu'on avait introduite dans les crédits réguliers.

Mme Blackburn: En fait, je comprends que ce n'est pas vraiment de l'argent neuf, vous incluez cela sous le titre "Demandes additionnel- les".

M. Ryan: Mais non!

Mme Blackburn: Je me réfère à votre texte, en page 38.

M. Ryan: Les demandes additionnelles, c'est seulement pour les quatre premiers postes. C'est pour cela que c'est marqué "total" en dessous. Les autres, ce sont des articles différents. Si c'est là la source de confusion, je m'en excuse.

Mme Blackburn: Comme il ne s'agit pas de demandes additionnelles, vous dites que ce sont quand même des ajouts de l'ordre de 30 000 000 $ dans l'enveloppe, mais si on avait déjà ces 20 000 000 $ dans l'enveloppe de l'an passé...

M. Ryan: Ils n'étaient pas dans l'enveloppe régulière l'an dernier et ils n'y sont pas cette année, non plus.

Mme Blackburn: Ils n'étaient pas dans l'enveloppe régulière...

M. Ryan: Non.

Mme Blackburn:... mais ils étaient dans l'enveloppe des crédits. Autrement, vous n'auriez pas pu payer ces 350 postes.

M. Ryan: C'est entendu. Dans le solde net, les 10 500 000 $ y étaient.

Mme Blackburn: Bon; donc, ils y étaient déjà l'an passé.

M. Ryan: Ils y étaient de la même manière que cette année.

Mme Blackburn: Alors, combien d'années est-ce qu'on va considérer que ces postes qui relèvent d'ententes de conventions collectives vont être considérés comme étant quelque chose de neuf à l'enveloppe?

M. Ryan: Quand on va les ranger au chapitre...

Mme Blackburn: Bon, d'accord.

M. Ryan:... soit des crédits réguliers, soit des demandes additionnelles qui ont été acceptées par le gouvernement. Gela va entrer dedans.

Mme Blackburn: Donc, il n'y a rien...

Le Président (M. Audet): À l'ordre! Un instant! Pour faciliter la bonne marche des travaux, si vous voulez attendre que je vous reconnaisse, s'il vous plaît, parce que là on voit des échanges d'une part et de l'autre et M. le

ministre n'a pas terminé sa réponse, madame n'a pas terminé sa question.

Mme Blackburn: Cela allait bien.

Le Président (M. Audet): Alors, s'il vous plaît, veuillez attendre que je vous reconnaisse pour aussi faciliter l'alternance entre les deux formations. Alors, M. le ministre, vous aviez la parole. Allez-y.

M. Ryan: Alors, je pense que j'ai expliqué clairement de quoi il s'agit. On ne l'a jamais introduit dans les crédits réguliers. Dans les crédits réguliers on donne le total de ce que c'est, mais on ne l'a pas introduit non plus cette année dans les demandes additionnelles et dans les ajustements qui se feront dans le total des sommes liquides qui sont injectées dans le système. On l'injecte de nouveau cette année comme on l'a fait l'an dernier, mais il n'est pas classé comme un crédit régulier.

Mais, au bout de la convention collective, quand les négociations auront été conclues pour une prochaine fois, il va falloir qu'il arrive quelque chose de ce montant-là. Soit qu'on l'incorpore dans les règles de formation de groupes, soit qu'on le laisse séparé, on ne le sait pas. C'est à négocier. Mais, pour le moment, on ne l'a pas intégré dans nos règles de calcul. C'est un ajout spécial découlant de la convention collective, pour la durée de la convention.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président; en fait, c'est tout à fait artificiel et cela n'ajoute en rien quelque chose de neuf cette année. Je pense que c'est important. La nuance est importante. C'est majeur comme...

Le Président (M. Audet): M. le ministre, avez-vous quelque chose à ajouter...

Mme Blackburn: À présent...

Le Président (M. Audet): ...ou si vous avez terminé?

Mme Blackburn: ...j'aborderais...

M. Ryan: Les ajouts substantiels, cette année, nous l'avons dit depuis le début de la journée, ce sont les demandes additionnelles qui ont été acceptées. Il y en a pour 8 500 000 $.

Mme Blackburn: Oui, oui. Mais, si on exclut ces 20 000 000 $, cela vient changer considérablement le tableau.

M. Ryan: On ne peut pas l'exclure.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: C'est le point qui nous sépare. Je regrette. C'est que nous considérons que nous ne pouvons pas l'exclure parce qu'il va être effectivement ajouté...

Mme Blackburn: Oui...

M. Ryan: ...aux ressources financières mises à la disposition des réseaux.

Mme Blackburn: M. le Président...

Le Président (M. Audet): Mme la députée.

Mme Blackburn: ...elles apparaissent dans une colonne et elles apparaissaient aussi dans une colonne l'an passé. Ce n'est rien de neuf. Cela rapporte ce qu'on avait ajouté l'an passé, parce que n'étant pas partie intégrante des crédits du ministère, étant dans le bloc de demandes additionnelles. Mais dans les faits cela n'ajoute rien, pas un sou de plus, par rapport à ces 20 000 000 $. Je ne parle pas du reste.

C'était l'an passé. C'est cette année. Même si vous réussissiez à vous promener pendant cinq ans avec cela, cela n'ajouterait rien de neuf pendant cinq ans. Cela aurait ajouté du neuf la première année. Cela ajoutait du neuf l'an passé. Mais cette année ce n'est pas neuf, c'est récurrent, sauf que cela n'apparaît pas dans les crédits réguliers. Je comprends la nuance, mais ce n'est rien de neuf.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je suis prêt à accepter la position de la députée de Chicoutimi à condition qu'elle reconnaisse que l'an dernier on ne l'a jamais compté comme demande additionnelle ou comme crédit régulier. Si on l'avait compté l'an dernier...

Mme Blackburn: Je comprends cela.

M. Ryan: ...cela aurait fait un surplus net de ressources de 30 600 000 $ dans le réseau et là il faudrait effacer, a poseriori, toutes les critiques fausses qui nous auraient été adressées par l'Opposition. Mais on ne l'a pas réclamé l'an dernier. On ne le réclame pas non plus cette année au titre des crédits réguliers. Mais...

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi. (19 h 15)

Mme Blackburn: Oui, M. le Président, je ne voudrais pas reprendre le ministre et il faudrait revoir les galées. Mais je pense que le ministre vient de nous dire que c'était compté dans son montant de 10 000 000 $, l'an passé, les 10 000 000 $ étant l'ajout net. Mais on pourra y revenir. Je pensais qu'il était important de bien clarifier cela: Est-ce que, sous une forme ou

sous une autre, cette dépense avait été effectuée l'an passé? On sait que oui et elle réapparaît cette année comme si elle était neuve alors qu'il n'y a vraiment rien de neuf puisqu'elle apparaissait déjà l'an passé et qu'elle pourrait apparaître l'an prochain si on n'a pas encore changé cela et qu'on n'a pas de nouvelle convention collective. Elle serait considérée comme neuve, mais neuve usagée depuis trois ans.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je ne peux pas accepter cette interprétation-là. Elle y était l'an dernier et elle y est cette année.

Mme Blackburn: Oui.

M. Ryan: On ne dit pas que c'est neuf ou pas neuf. On dit que ça y était et ça y est. C'est tout.

Mme Blackburn: Ah!

M. Ryan: Les choses neuves, c'est 8 500 000 $. Je l'ai dit aussi clairement que je peux le dire.

Mme Blackburn: Cela va.

Le Président (M. Audet): Cela va? Je reconnais maintenant le député de Richelieu. M. le député, vous avez la parole.

Enseignement des sciences

M. Khelfa: Merci, M. le Président. J'aimerais avoir quelques brèves informations sur un sujet qui me préoccupe personnellement. C'est l'enseignement des sciences de la nature aux niveaux primaire et secondaire. Je sais qu'il y a eu pas mil 3e débats pour améliorer l'acquisition de cette connaissance au cours des dernières années. On a rencontré pas mal de problèmes concernant la grille horaire par rapport au nombre de minutes par discipline. Par exemple, à l'heure actuelle, l'écologie devient obligatoire en secondaire I. La biologie humaine est presque obligatoire; elle est obligatoire en secondaire III. Il y a eu, à un moment donné, un débat sur l'ISP. Le plus grand débat, à l'heure actuelle, concerne la chimie et la physique au 2e cycle secondaire. Le problème majeur, c'est la grille matière elle-même. Est-ce qu'il y a une orientation que le ministère entreprend à l'heure actuelle ou entreprendra dans l'avenir pour au moins donner une connaissance à l'élève, une base de connaissance de la chimie et de la physique, sachant qu'il y a quelques années, jusqu'en 1984-1985, un élève pouvait faire son cours secondaire au complet sans toucher à une science de quelque nature que ce soit? Vous le savez très bien - je ne suis pas pour vous l'exposer - que c'est un problème de société que nous vivons à l'heure actuelle. On est obligé d'importer des cerveaux de l'extérieur dans des disciplines des sciences. Si on n'habitue pas l'élève et l'étudiant à se familiariser avec l'ensemble des sciences, on va se retrouver devant un problème majeur et l'élève n'aura pas le goût de continuer dans cette discipline. On va manquer de chercheurs. On va manquer de personnes dans plusieurs domaines de l'avenir comme celui de la chimie de l'environnement et de la physique comme telle. C'est au niveau de la recherche. Si on n'habitue pas l'élève à côtoyer et, comme le ministre a utilisé le terme, à embrasser ces disciplines, on va se retrouver devant un divorce de cette connaissance. Est-ce que je pourrais avoir des indications? C'est vrai que, depuis une couple d'années, deux ou trois ans, il y a eu un progrès majeur et l'élève commence à côtoyer les sciences de la nature.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais que M. Morand donne d'abord les faits, résume le point où nous en sommes à propos des disciplines qu'a mentionnées le député de Richelieu. Après, j'ajouterai quelques observations de mon cru.

Le Président (M. Audet): M. Morand.

M. Morand: M. le Président, au primaire nous avons un programme de sciences obligatoire, deux heures par semaine. C'est un nouveau programme d'application obligatoire à compter de cette année, au 1er cycle et au 2e cycle du primaire l'an prochain. Je pense qu'il faut convenir qu'à l'enseignement primaire il faudra sûrement, et on commence à le prévoir, investir sérieusement dans la formation des maîtres du primaire. Ce n'est pas tout d'avoir des programmes et du matériel didactique.

Au secondaire, le nouveau régime pédagogique de 1981 qui est en application jusqu'en secondaire IV présentement, secondaire V, a rehaussé de beaucoup le curriculum ou l'ensemble des programmes de sciences, de sorte qu'un élève dans le nouveau régime pédagogique doit obligatoirement avoir suivi quatre programmes de sciences, un en secondaire I qui s'appelle écologie qui est déjà obligatoire et qui se donne déjà, un en sciences physiques, en secondaire II, qui est déjà obligatoire, un en biologie en secondaire III et déjà, en secondaire IV, le cours de sciences est obligatoire, mais on demande aux commissions scolaires de se servir d'un des nombreux programmes de sciences qui existent actuellement. Donc, les élèves suivent déjà quatre programmes de sciences.

À compter de 1991, l'élève de secondaire IV devra de plus avoir réussi son programme de sciences physiques de quatrième secondaire pour obtenir son diplôme d'études secondaires. Donc, c'est une exigence encore supplémentaire. Nous

sommes actuellement en train de travailler et d'élaborer nos nouveaux programmes de physique et de chimie, ou de sciences physiques, de quatrième et cinquième secondaire, très étroitement avec le collégial, pour assurer l'arrimage et le passage au collégial parce que le niveau collégial exige aussi les cours préalables pour entrer dans certaines options de sciences. Tout n'est pas terminé, loin de là; d'ailleurs, je l'ai dit plus tôt cet après-midi, nous avons expérimenté nos nouveaux programmes de sciences cette année dans quatre commissions scolaires et on s'attend, je pense, que nos nouveaux programmes puissent s'arrimer avec le collégial, peut-être avec de petites différences de 50 ou 75 heures. Il y aura peut-être des questions d'ajustement des régimes pédagogiques qu'on pourra voir à ce moment-là, mais on travaille actuellement à l'élaboration en étroite concertation avec le collégial.

M. Khelfa: M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci. Oui, M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: Est-ce que je pourrais savoir le nombre de minutes qu'on envisage pour le nouveau programme en expérimentation?

M. Morand: Les nouveaux...

Mme Blackburn:... régime pédagogique.

M. Khelfa: Pardon?

Le Président (M. Audet): Vous avez la parole, allez-y, M. Morand.

M. Morand: La grille-matières du régime pédagogique prévoit que l'enseignement des sciences obligatoire, en quatrième secondaire, est de 100 heures par année, de secondaire 1 jusqu'à secondaire IV. Les programmes qu'on appelle optionnels, mais qui sont très importants pour le niveau collégial, sont aussi de 100 heures.

Si on veut calculer par rapport à l'ancien régime, je pense que c'est cela aussi le dessous de la question, évidemment il y a une diminution d'heures. C'est dans ce sens-là qu'on travaille très étroitement avec le collégial pour assurer cette harmonisation entre les deux niveaux. C'est évident qu'il y a une diminution d'heures parce qu'on a ajouté aussi de nouveaux programmes dans le nouveau régime pédagogique, comme l'éducation économique et autres.

M. Khelfa: D'accord. Cela veut dire que ce sera applicable à partir de 1991.

M. Morand: En quatrième secondaire, le programme de sciences sera applicable à compter de 1989-1990. Quand je parlais de 1991, c'est ce groupe d'élèves qui aura cheminé dans tout le secondaire et qui passera avec le nouveau diplôme d'études secondaires.

M. Khelfa: Est-ce un examen du ministère ou un examen local?

M. Morand: Ministériel.

M. Khelfa: Ministériel, c'est-à-dire uniforme.

M. Morand: Oui.

M. Khelfa: Bon. À l'heure actuelle, combien d'examens uniformes reste-t-il au ministère, au chapitre des sciences?

M. Morand: II y en a beaucoup actuellement parce qu'il y a beaucoup de programmes.

M. Ryan: C'est un autre département. M. Khelfa: II y a la physique 452, je crois. M. Ryan: M. Vachon. C'est M. Paul Vachon.

Le Président (M. Audet): Est-ce que vous pourriez vous présenter, s'il vous plaît?

M. Vachon (Paul): Oui, Paul Vachon, directeur général de l'évaluation.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. Vachon: II reste présentement des épreuves ministérielles en chimie et en physique.

Mme Blackburn: M. le Président, si vous me le permettez.

Le Président (M. Audet): Est-ce une question de règlement, Mme la députée?

Mme Blackburn: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Audet): En vertu de quel article?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Je vous fais confiance pour le trouver, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Un instant! En vertu du règlement, lorsque vous évoquez un article de règlement, vous devez évoquer les motifs et vous rapprocher aussi de l'article en question. Si cela concerne le temps de parole du ministre, le ministre a le loisir d'intervenir à son gré autant de fois qu'il le désire, on a parlé de 20 minutes par intervention.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Audet): Si le ministre n'est pas en mesure de le faire, il peut céder son droit de parole aux gens de son ministère.

Mme Blackburn: M. le Président, avant de conclure ou de porter des jugements sur ma question, il faut peut-être encore l'entendre.

Le Président (M. Audet): Allez-y, je vous écoute.

Mme Blackburn: La coutume veut, même si on ne cite pas l'article, qu'on ait le droit de parole. Ce que je veux rappeler, c'est que ce sont des informations qu'on trouve très facilement dans tous les documents officiels du ministère.

Le Président (M. Audet): Je regrette, Mme la députée, mais ce n'est pas une question de règlement.

Mme Blackburn: Dans ce sens, la question de règlement est la suivante. La commission parlementaire veut donner l'occasion à l'Opposition d'apporter...

Le Président (M. Audet): Et aux ministériels aussi.

Mme Blackburn: ...des clarifications sur les crédits et les politiques gouvernementales. Lorsqu'il s'agit d'information qu'on peut retrouver n'importe quand dans le régime pédagogique du secondaire et dans des documents officiels du ministère, je ne vois pas qu'on occupe une partie du temps sur ces informations. Je n'en veux pas à monsieur qui est là...

Le Président (M. Audet): Mme la députée, je regrette, mais ce n'est pas une question de règlement. Les députés, les ministériels peuvent poser les questions qu'ils veulent poser, d'accord. Toutefois, j'invite les gens qui donnent les réponses à être quand même assez brefs et concis dans leurs réponses. Évidemment que s'il y a 100 programmes, je ne m'attends pas que les responsables mentionnent les 100 programmes ou cours qui existent. Je ne le pense pas. En tout cas, je le suppose.

Une voix:...

Le Président (M. Audet): Enfin; un instant, M. le député, si vous le permettez. Présentement, je pense que la commission se déroule selon ce qu'on a décidé ce matin. J'en ai parlé cet après-midi. Il y a une tradition, mais il n'y a pas d'entente entre les leaders.

Je ne pense pas que les députés ministériels aient abusé à ce stade-ci. Le député de Richelieu a demandé la parole avant l'ajournement de 18 heures, ce soir. Je vous ai reconnue en débutant.

Vous avez posé huit questions, je les ai notées. J'ai reconnu le député de Richelieu lorsque vous avez terminé votre sujet. Alors, le député de Richelieu en est rendu à sa troisième question. Je vais permettre à M. Vachon de lui rendre une réponse qui, j'espère, sera quand même claire et précise, quitte peut-être à référer le député au manuel ou au programme pédagogique. Enfin, on verra. M. Vachon, vous êtes...

M. Khelfa: Sur la question de règlement.

Le Président (M. Audet): Oui, M. le député de Richelieu.

Mme Blackburn: II n'y avait pas de question de règlement.

M. Khelfa: Sur la question de règlement. On parle du quatrième programme et à la page 17 on parle des programmes au primaire et au secondaire, on parle des orientations, on parle de la formation générale, on parle des sciences de la nature. Mes questions sont pertinentes. D'ailleurs, comme élu, membre de l'Assemblée nationale...

Le Président (M. Audet): Ce n'était pas une question de règlement, M. le député de Richelieu. Je vous remercie de vos commentaires.

M. Khelfa: ...j'ai le droit de poser des questions. Peut-être que cela pourrait informer l'Opposition...

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! M. Vachon, vous aviez commencé à donner la réponse. Si vous vouliez compléter, s'il vous plaît. Merci.

M. Vachon: Très brièvement. Oui, il y a des épreuves ministérielles en chimie...

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vachon: ...et en physique. En physique, en quatrième secondaire, quelques programmes de quatrième... La physique en quatrième et la chimie en cinquième.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais reconnaître Mme la députée de Chicoutimi.

M. Khelfa: Toujours dans la même...

Le Président (M. Audet): Une dernière, mais très brève.

Mme Blackburn: Ce ne sont pas les questions qui sont longues, M. le Président, ce sont les réponses.

Le Président (M. Audet): Mme la députée,

je l'ai mentionné à maintes reprises, le ministre dispose de 20 minutes par réponse. Alors, on ne peut rien y faire, c'est écrit dans le règlement. Si vous voulez contester le règlement, il faudra vous référer au droit parlementaire. Ce n'est pas dans mon pouvoir.

Mme Blackburn: M. le Président, c'est que - vous l'avez reconnu à multiples reprises - traditionnellement la coutume veut que cette période soit réservée à l'Opposition. Lorsque les membres parlementaires posent des questions qu'on trouve facilement dans le cahier des crédits, c'est une façon d'enlever une partie du temps à l'Opposition pour éviter qu'on puisse faire correctement notre travail. C'est dans ce sens que mon intervention voulait être faite. Si on ajoute les invités aux invités, il est bien évident qu'à un moment donné il ne restera plus de temps.

Le Président (M. Audet): Tout en respectant l'article du règlement qui prévoit une réponse de 20 minutes, Mme la députée, je tiendrais à rappeler qu'il y a un an il y avait une entente entre les leaders lors de l'étude des crédits sur la répartition du temps pour une enveloppe de 90 % du temps à l'Opposition et de 10 % du temps aux ministériels. Cette année il n'y a pas eu d'entente entre les principaux leaders. Je reconnais qu'il y a une certaine tradition. Je pense que, jusqu'à maintenant, j'ai respecté cette tradition parce que vous avez eu davantage la parole. Ce n'est peut-être pas dans un cadre de 90 % - 10 %, c'est peut-être un peu moins, c'est peut-être un peu plus, aussi.

Par contre, je tiens à vous aviser que, lorsque vous intervenez pour des questions de règlement comme celle-ci, vous minez directement votre enveloppe de temps. Alors, quand on intervient dans des questions de règlement, c'est évident qu'on ne peut pas parler des crédits.

Votre dernière question, M. le député de Richelieu, très brève, s'il vous plaît.

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Ma question se rapporte toujours aux sciences. Quand vous avez mentionné que les spécialistes du niveau primaire enseignent deux périodes-semaine, cela veut dire 90 minutes, est-il prévisible, à un moment donné, de considérer la tâche de cet enseignant au primaire comme spécialiste de même nature que la tâche d'enseignant spécialiste au secondaire?

Le Président (M. Audet): M. Morand. (19 h 30)

M. Morand: Brièvement, je pense que ce n'est pas l'orientation que nous avons actuellement d'augmenter le nombre de spécialistes au primaire. C'est plutôt de les rendre aptes à enseigner un programme qu'ils peuvent enseigner à ce niveau.

M. Khelfa: Oui, mais tout en sachant...

Le Président (M. Audet): M. le député de Richelieu, excusez-moi...

M. Khelfa: C'est toujours la même question. Mon droit de parole...

Le Président (M. Audet): ...mais j'avais reconnu une dernière question. Je vais céder la parole à Mme la députée de Chicoutimi tout en respectant la tradition.

À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme la députée de Chicoutimi, la parole est à vous. Allez-y.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. On pourrait peut-être suggérer au député de Richelieu de demander une entrevue au ministre, ou encore à...

Une voix: Vous n'avez qu'à faire une interpellation si vous désirez plus d'information.

Une voix: On ne peut en faire en ce moment. Le règlement ne le permet pas.

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Réforme de l'enseignement professionnel

Mme Blackburn: Bien. M. le Président, je voudrais aborder la question de la réforme de l'enseignement professionnel. La réforme de l'enseignement professionnel, comme je le disais; à l'ouverture de cette commission, a suscité beaucoup d'attentes et, en général, a été reçue assez favorablement dans tout le réseau. Depuis, il s'est passé des événements qui en surprennent plusieurs et qui ne sont pas sans nous inquiéter. J'ajouterais que l'inquiétude n'est pas exclusivement du côté de l'Opposition, mais de plusieurs intervenants dans le réseau.

En effet, en janvier dernier, le ministre a amendé le règlement sur le régime pédagogique du secondaire au chapitre de la formation professionnelle pour permettre la création de programmes de courte durée sanctionnés par une attestation de capacité. Mais le changement le plus important réside dans l'allégement du contenu des programmes de certificat d'études professionnelles et par la suppression des crédits de formation générale. Le nombre d'heures minimum est ainsi ramené à 450 plutôt qu'à 900; c'est la moitié moins long. Plutôt que d'être d'une durée de deux ans, cela dure une année. Si on ajoute à cette modification la volonté d'apporter des assouplissements dans le calendrier scolaire, on est obligé de conclure que ces décisions viennent exclusivement justifier un désir dit d'harmonisation entre les niveaux de formation destinée aux jeunes et aux adultes.

L'inquiétude et la préoccupation qui sont

les nôtres sont les suivantes. Depuis déjà de nombreuses années, tant dans le réseau secondaire que dans le réseau collégial, on s'est attaché à défendre la nécessité de maintenir des exigences de formation qui facilitent le passage d'un niveau de formation à un autre. En amputant le certificat d'études professionnelles de ses crédits de formation générale, on conduit ces jeunes diplômés dans des culs-de-sac, parce que non seulement ces jeunes diplômés du certificat d'études professionnelles ne pourront pas, avec la formation qu'ils ont, à moins d'aller chercher la formation générale, s'inscrire au collège, mais ils ne pourraient même pas s'inscrire à un programme de diplôme d'études professionnelles. On les amène dans un cul-de-sac, une impasse qui est sans issue, le moindrement que ces jeunes travailleurs désireraient poursuivre leurs études. Cela vient tout à fait contredire tout ce qui a été défendu jusqu'ici. Partout, au Québec comme à l'étranger, on reconnaît qu'il est important que nos jeunes diplômés aient une solide formation de base, une solide formation générale. Cette décision vient non seulement réduire les chances des jeunes travailleurs de pouvoir retourner aux études, mais elle a comme effet de déprécier un certain nombre de programmes. Au total, ce sont 36 programmes d'enseignement professionnel de niveau secondaire qui seraient affectés par cette mesure.

Différents groupes sont venus faire des représentations à mon bureau - je pense à Techniques de vente et de représentation, je pense à Assistance dentaire, et il y en a d'autres - pour venir réclamer qu'on maintienne dans sa version originale le programme qui était prévu.

L'inquiétude, je disais, est grande, et elle n'est pas seulement le fait de l'Opposition puisque, dans un avis qu'émettait le Conseil supérieur de l'éducation à la demande du ministre, cette décision d'enlever la formation générale du certificat d'études professionnelles était qualifiée de pas en arrière très grave, de perte sèche. En fait, il y a l'Alliance des professeurs de Montréal qui s'est opposée à cette décision et qui demande qu'il y ait un moratoire, et toute la question de l'harmonisation des programmes jeunes et adultes a été vivement critiquée par les syndicats comme par le milieu. Le programme d'intégration des jeunes et des adultes vient s'ajouter à cette tendance ou à cette mode dans les commissions scolaires de créer à nouveau des centres spécialisés, ce qui constitue, en fait, un retour aux écoles de métiers. Comme je le disais ce matin, si on conjugue un certain nombre de décisions prises par le ministre, on finit par marginaliser une certaine population étudiante au Québec, et ce sera de plus en plus vrai pour les jeunes qui vont s'orienter vers cette formation.

Il y a deux questions, en fait. La première: Est-ce qu'il était vraiment nécessaire de réduire ou d'enlever les cours de formation générale des certificats d'études professionnelles, du curriculum? Est-ce qu'on est capable d'établir un rapport entre la diminution des inscriptions en enseignement professionnel et la présence de ces cours de formation générale? Est-ce qu'on pense, avec cette mesure, ramener un niveau plus élevé de jeunes dans ces programmes? Est-ce qu'on a véritablement évalué les effets de ces modifications sur la capacité des jeunes de poursuivre leur formation éventuellement? De façon plus fondamentale, est-ce qu'il est souhaitable de réunir dans les mêmes écoles, dans les mêmes classes, dans les mêmes cours, les jeunes et les adultes? Si on me dit oui, je suis obligée de dire que le ministre a énormément changé depuis la commission Jean où il réclamait avec beaucoup de vigueur la nécessité de maintenir des services distincts et spécifiques aux clientèles jeunes et adultes.

Si, en plus, on vient modifier le calendrier scolaire, c'est toute une partie de la population jeune qui se trouve inscrite dans un autre processus de formation, dans un autre cadre de formation. Il faut se rappeler que les jeunes et les adultes qu'on retrouve dans les écoles de métiers, encore une fois, sont issus des milieux les plus défavorisés. C'est ceux-là dont on est en train d'affecter la capacité de poursuivre éventuellement leur formation. Toutes les données et les analyses prouvent qu'il y a très peu de jeunes issus de milieux professionnels moyens et favorisés que l'on retrouve dans les cours de formation professionnelle. C'est encore majoritairement l'apanage, le fait de jeunes issus des milieux plus défavorisés et moins nantis.

Cette décision risque d'avoir des effets sur la capacité de ces jeunes qui ne sont pas particulièrement favorisés, de ces adultes, aussi, qui ne l'ont pas été dans le temps, de poursuivre éventuellement leur formation. Là-dessus, je ne me fais que l'écho de différents groupes qui se sont prononcés sur cette décision.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je pense que la députée de Chicoutimi soulève, peut-être un peu tardivement, mais quand même de façon fort pertinente un des aspects les plus importants de l'action du ministère au cours de la dernière année et au cours de l'année à venir. Il me fait plaisir, tout d'abord, de vous informer que j'ai à mes côtés M. Jacques Henry, qui est directeur de la formation professionnelle au ministère. Et, pour l'instant, je vais essayer d'apporter certains éléments de réponses aux questions qu'a posées la députée de Chicoutimi.

Il est vrai qu'au cours de l'année 1987-1988 nous avons procédé à certaines modifications du régime pédagogique, en particulier, une modification ou une série de modifications qui apportent un changement au nombre d'heures requis pour la formation conduisant au certificat d'études

professionnelles. La durée avait été fixée à un minimum de 900 heures. Et là, c'est maintenant de 450 à 900 heures.

Après étude - ainsi que la députée s'en souvient probablement - nous avions annoncé que nous procéderions à un réaménagement complet des programmes. Nous avions hérité de 250 programmes et nous avions dit que nous ferions un nouvel aménagement des programmes de manière qu'ils correspondent mieux aux réalités d'aujourd'hui. Or, en abordant l'examen des programmes de manière plus immédiate, nous avons constaté que dans certains métiers la période de formation qui avait été prévue ne correspondait pas du tout aux nécessités. Il fallait procéder à des ajustements en consultation avec les éléments intéressés du milieu. C'est là qu'on s'est rendu compte qu'il y avait certains métiers pour lesquels une formation de 450 heures était suffisante. Et, d'autre part, nous avions constaté une chose, c'est que, pour accéder à ces métiers qui requièrent une formation moins longue, certains jeunes exigeaient que cela se fasse dans un temps minimum. Et on était sérieusement menacé, sur la foi des représentations qui nous sont venues des commissions scolaires, de perdre un grand nombre d'inscriptions si ces cours-là étaient trop chargés de formation générale qui n'intéressait pas une grande partie de ces jeunes-là. Là, ils avaient le choix entre les laisser s'en aller directement dans la rue ou leur donner une chance d'acquérir un minimum de formation professionnelle.

Des consultations abondantes ont eu lieu pendant de nombreux mois. Nous avons consulté tous les organismes intéressés, y compris le Conseil supérieur de l'éducation. Et l'avis très général que nous avons reçu était favorable aux changements proposés. C'est évident que, quand on descend le seuil minimum de 900 à 450 heures, c'est une perte sèche, comme l'a écrit le Conseil supérieur de l'éducation. Nonobstant cette observation, le Conseil supérieur de l'éducation a dit qu'il comprenait les raisons pratiques qui nous amenaient à proposer ces changements et a donné son aval. De même qu'à peu près tous les organismes que nous avons consultés.

Je dois dire que tous les changements que nous faisons en formation professionnelle, nous les effectuons après et avec les consultations intensives avec les milieux concernés tant patronaux que syndicaux. Alors, de ce côté-là, il y a eu des réserves. La CEQ a fait des réserves. C'est peut-être celle qui a fait les réserves les plus fortes. Mais, de manière générale, il y avait un consentement très large à ces changements qui ont été insérés dans le régime pédagogique. Les changements que nous avons faits ne modifiaient en rien le seuil d'admission à la formation professionnelle. Le seuil d'admission est demeuré le même. C'est-à-dire que, pour le cours de certificat, il faut l'équivalent d'une troisième année générale et, pour le cours de diplôme d'études professionnelles, il faut l'équivalent d'une quatrième année.

Par conséquent, je pense que de ce point de vue on a maintenu... Et cela était un des points de fond, qu'il fallait un certain seuil de base de formation générale avant d'accéder à la formation professionnelle. Là-dessus il n'y a pas eu de changement ni de recul. Le jeune qui s'inscrit au cours de certificat, en général, je pense qu'il va se destiner au marché du travail, mais il n'y a rien qui l'empêche de suivre des cours de formation pour adultes ensuite. Les cours de formation pour adultes de niveau secondaire général lui restent ouverts à titre gratuit. Il peut s'inscrire à ces cours-là et continuer sa formation. Encore une fois, ce n'est pas nous qui le poussons là. C'est lui qui décide d'aller là pour toutes sortes de raisons. (19 h 45)

Jeunes et adultes. Je pense que cela vaut la peine d'en dire un mot. C'est un des points sur lesquels nous avons le plus d'appréhension de la part des syndicats. Il faut bien comprendre les syndicats d'enseignants. S'il arrive qu'il y ait sept inscriptions chez les jeunes et huit chez les adultes pour un cours d'agent de bureau dans une polyvalente, cela fait quinze, est-ce qu'on va former deux groupes ou si on va en former un qui va concentrer les énergies et les ressources? Quand on a un nombre qui est voisin du nombre requis pour la formation d'un groupe et qui doit comprendre des représentants des deux éléments, on les met ensemble. Je dois dire une chose. J'ai visité moi-même un certain nombre de lieux où cela s'est passé comme ça. Partout où je suis allé, on m'a dit que les conditions étaient beaucoup meilleures pour la dispensation des programmes dans ce climat. D'abord, la différence d'âge n'est pas toujours considérable. Sont jeunes ceux qui sont inscrits à titre régulier. Dès que vous avez été une année en dehors du système, vous êtes classés comme adultes. Il y a des personnes de 16 ans et il y en a de 18 et 19 ans. Ceux de 18 et 19 ans sont considérés comme adultes et les autres, jeunes. En pratique, ce sont des gens qui communiquent très facilement ensemble. La présence d'adultes ajoute un élément de sérieux, de réalisme à l'atmosphère des cours qui est très salutaire. Des enseignants à qui j'ai parlé m'ont dit que c'étaient des conditions très propices. Les syndicats, je les comprends parce qu'ils disent qu'on va perdre des jobs avec cela. C'est évident que, s'il fallait former deux groupes à chaque fois, cela fait plus de postes pour des enseignants, mais le système d'enseignement n'existe pas pour créer des postes. Il existe pour offrir des services dans les meilleures conditions de rationalité possible.

Nous tenons compte, cependant, des représentations qui nous ont été faites et, ces jours prochains, une lettre sera adressée aux commissions scolaires leur rappelant ce qui leur a déjà été dit verbalement à plusieurs reprises, que

partout où c'est possible on forme des groupes distincts de gens et qu'on forme des groupes comprenant des jeunes et des adultes là où c'est nécessaire. C'est cela, la politique du ministère. J'ai devant moi un projet de lettre que nous allons achever de fignoler, qui va être adressée aux commissions scolaires la semaine prochaine. C'est la manière dont les choses se passent.

En ce qui touche le calendrier scolaire, c'est évident qu'on s'en va vers une formation par blocs de formation, une formation modulaire, et on n'est pas pour dire à quelqu'un: Vous allez attendre trois mois ou six mois. Si on peut faire la formation plus vite en donnant tous les éléments qui sont requis, tant mieux, et cela oblige à regrouper la formation par semestre davantage. On va vers cela et je pense que ce n'est pas de nature à créer d'injustice envers personne. Cela va favoriser le cheminement scolaire des étudiants, jeunes et adultes.

C'est l'essentiel. Pour les cours de certificat, on a approuvé une liste il y a quelques semaines. Je pense que c'est autour de 37. Il y en a un certain nombre qui seront inaugurés cette année dans diverses commissions scolaires. On va voir comment les choses iront.

Sur le certificat, je vous dirai une chose. Il reste de l'incertitude. Cela commence au mois de septembre. Nous allons voir comment cela va retomber. Nous suivons cela de très près. C'est évident que notre préférence va d'abord vers la formation générale. On veut que le jeune termine sa formation générale au niveau secondaire et, fort heureusement, en 4e et 5e secondaire, je pense qu'il y a au-delà des quatre cinquièmes des jeunes qui sont en formation générale. Par conséquent, c'est l'orientation préférentielle.

Deuxièmement, nous favorisons le diplôme d'études professionnelles qui donne l'équivalent de deux ans de formation. C'est là que seront inscrits cette année la grande majorité des élèves inscrits au professionnel. Il y a une troisième catégorie à qui vont convenir mieux certains métiers, qui requièrent un certificat. Il y a même une quatrième catégorie. Il y en a qui ne peuvent même pas se qualifier pour le certificat. On a donc des cheminements particuliers qu'on appelle qui vont les prendre par le bras dès que c'est nécessaire pour essayer de les acheminer vers des éléments de métier, des éléments de formation qui vont les rendre capables de gagner leur vie. Ce sont les différents éléments du programme. Il y en a d'autres qu'on pourrait ajouter, mais je pense que c'est l'essentiel.

Le Président (M. Audet): Est-ce que M. Henry ne devait pas ajouter quelque chose? Cela va.

Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre n'estime pas que ce retour aux écoles spécialisées de formation professionnelle est à l'encontre de la philosophie générale qui préconise une formation générale de base plus solide, plus fondamentale? Est-ce que cela n'est pas, en quelque sorte, un retour au clivage de classes qu'on avait voulu diminuer ou atténuer par le biais du rapport Parent en créant à la fois ces écoles dans lesquelles on retrouvait des jeunes qui se préparaient à exercer un métier, comme des jeunes qui se préparaient à exercer une profession? Pour les mêmes raisons, d'ailleurs, et c'est sur ce modèle qu'on a constitué le curriculum des programmes de niveau collégial, la volonté alors - et je ne pense pas qu'aucun indice ne nous permette de penser que cela ait changé - était d'éviter de créer très tôt une division dans les classes de la société, où on parquait les métiers ensemble, les techniciens ailleurs et les collèges classiques qui se destinaient aux professions dites nobles ou libérales, dans d'autres écoles. Alors, il n'y avait pas interpénétration des différentes cultures. C'est ce qu'on voulait éviter. Là, dans les commissions scolaires, on sent ce désir de retour aux écoles de métiers.

Le ministre dit: On comprend que la CEQ soit contre ça, elle va perdre des jobs. Mais j'ai une petite nouvelle pour lui; il n'y a pas que la CEQ qui était contre ça, il y a également l'ICEA qui, à son colloque, a fait consensus disant qu'il fallait maintenir des services spécifiques aux jeunes et aux adultes. J'imagine que le ministre a un certain respect pour l'ICEA compte tenu de ses antécédents, c'est un organisme sérieux. Je ne pense pas que ce soit un organisme qui cherche absolument à protéger des jobs. Ce n'est pas son cas. Il essaie de voir comment et dans quelles conditions on peut donner la formation la plus adéquate aux adultes. L'ICEA s'est prononcé contre ce mouvement.

La question que je me pose devant la décision d'un nombre croissant de commissions scolaires de fusionner les jeunes et les adultes, de les intégrer dans les mêmes classes, est la suivante: Est-ce qu'il n'y a pas là un souci davantage d'économie que de qualité de l'enseignement? On sait que les cours subventionnés par le gouvernement fédéral le sont de façon un peu plus généreuse que par le gouvernement provincial, ce qui fait qu'une partie de l'administration des frais généraux se trouve ainsi assumée par le biais d'un budget qui vient du fédéral. N'est-ce pas davantage par souci d'économie que par souci d'assurer une meilleure qualité de la formation qu'on est en train de prendre cette direction, c'est-à-dire d'intégrer dans les mêmes classes les jeunes et les adultes?

Deux questions: Est-ce que ce n'est pas à contre-courant, le fait de diminuer la formation générale? Est-ce que cela ne risque pas de ramener ce clivage de classes qu'on a connu? Est-ce qu'il n'y a pas là-dedans davantage un souci de faire des économies plutôt que de réaliser une formation de qualité?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je pense que c'est un sujet inépuisable. On va essayer de le traiter de manière concise.

Tout d'abord, une première chose qu'il faut souligner, c'est qu'il n'y a plus de formation professionnelle avant l'âge de 16 ans. Avant cela, on avait le fameux professionnel court dans lequel les jeunes étaient engagés parfois à l'âge de 13, 14 ou 15 ans. On a dit que cela n'avait pas de bon sens et qu'il fallait y mettre fin. C'est pour cela que le seuil que je mentionnais tantôt est maintenu, pour presque tout le monde, à 16 ans, qui est l'équivalent d'une formation générale dans les principales matières de troisième ou de quatrième année selon ces certificats ou diplômes. Ce premier point est très important.

Un deuxième point. On parle de clivage. Quand on parte en théorie, on peut justifier à peu près n'importe quelle hypothèse; on n'a qu'à aligner des lignes sur le tableau et on fait ce qu'on veut. Mais, quand on parle en analysant la réalité, ce n'est pas tout à fait la même chose. On me signale que, dans nos inscriptions pour le programme conduisant au diplôme d'études professionnelles en 1987-1988, 52 % des inscrits étaient des diplômés d'études secondaires, des personnes qui détenaient un diplôme d'études secondaires. Par conséquent, ce ne sont pas des voies de garage, ce ne sont pas des gens qu'on envoie là en les ayant sortis du système prématurément, 52 %. En plus, phénomène très intéressant, il y a un nombre appréciable de personnes qui ont reçu une formation collégiale - M. Henry me dit même une formation universitaire dans certains cas - qui n'ont pu se trouver d'emploi à la suite de la formation qu'ils ont reçue au niveau collégial ou universitaire et qui reviennent au secondaire professionnel parce que cela va les conduire à des débouchés pratiques. De se lamenter et de penser que les jeunes sont dévoyés socialement ou culturellement, je pense que cela ne répond pas à la réalité comme nous autres la mesurons jour après jour. M. Henry me signale que les cours de formation professionnelle de main-d'oeuvre subventionnés par le fédéral sont tous distincts, sont tous des cours uniquement pour adultes et ne comportent pas de mélanges de jeunes et d'adultes. Les seuls cours où il y ait intégration jeunes et adultes sont des cours qui relèvent du budget ouvert du ministère de l'Éducation. Ces harmonisations ne sont conseillées ou approuvées que lorsqu'elles sont - comme je l'ai dit tantôt - nécessaires.

Je pense que ce sont autant de points importants à noter. Un dernier point. La députée a dit: On s'en retourne vers les écoles de métiers qu'on a connues autrefois. Physiquement, c'est vrai qu'il y a un certain nombre de commissions scolaires qui concentrent leur formation professionnelle dans un lieu. J'étais à Rivière-du-Loup la semaine dernière et on a pris une école secondaire, on l'appelle le Pavillon de l'avenir...

Ils ont deux pavillons là-bas. Il y en a un pour la formation générale, un pour la formation professionnelle. Le Pavillon de l'avenir, c'est la formation professionnelle. C'est intégré dans l'ensemble de l'enseignement secondaire. Physiquement, c'est séparé parce qu'au point de vue des laboratoires, des ateliers c'est plus pratique.

Je pense qu'il y a des avantages à cette concentration. Il ne faut pas en tirer davantage qu'elle ne contient, mais l'intégration dans l'ensemble du système secondaire demeure très forte. À cet égard, je pense que la distinction avec l'ancien régime qu'on a connu autrefois demeure très importante et très substantielle.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député d'Arthabaska.

Mme Blackburn: J'ai mes 20 minutes.

Le Président (M. Audet): Oui, mais il y a l'alternance. Vous avez posé quelques questions.

M. Gardner: Merci, M. le Président. Moi c'est pour compléter. Je vis actuellement ce petit problème dans mon comté où la commission scolaire doit commencer cela cet automne et, bien sûr, les enseignants sont venus me voir, comme vous l'avez mentionné. Il y en a plusieurs qui ont peur de perdre leur ouvrage. Je pense qu'au contraire cela leur donne de l'ouvrage parce que, s'il n'y avait que trois ou quatre élèves au secondaire et sept ou huit pour les adultes, ceux du secondaire tomberaient.

Maintenant, je vais être très bref dans mes questions aussi. Y a-t-il des conditions à respecter, quand vous provoquez ce nouveau système jeunes et adultes? Exemple: le cours doit-il être préféré d'abord le jour et autant que possible que les jeunes aillent dans le cours le jour et non pas le soir? Parce que, si vous êtes obligé de les envoyer à l'école le soir vous allez être obligé probablement de leur fournir un système d'autobus scolaires et cela créerait, selon certains psychologues que j'ai connus, que je connais, des problèmes majeurs chez les jeunes qui devraient aller à l'école le soir et rester chez eux le jour.

Y a-t-il d'autres conditions comme le statut des enseignants? Demeurent-ils dans l'enseignement régulier ou s'ils s'en vont dans l'enseignement aux adultes? Les programmes sont-ils ceux du jour et non pas ceux du soir? Y a-t-il un encadrement des régimes pédagogiques qui doit être comme celui du jour, le soir? Demandez-vous toutes ces conditions aux commissions scolaires? Exigez-vous cela des commissions scolaires? Suis-je assez clair, M. le ministre?

M. Ryan: M. le Président, avec votre autorisation, il faudrait demander à M. Henry de répondre peut-être à cette question.

Le Président (M. Audet): M. Henry, vous

avez la parole.

M. Henry (Jacques): Merci. Jour, soir, les groupes mixtes, à notre connaissance se donnent le jour. Il y a une tendance même à l'éducation des adultes pour des groupes homogènes adultes de dispenser la formation le jour à chaque fois que c'est possible et qu'il y a des locaux disponibles. Les adultes eux-mêmes préfèrent cela. Donc, les groupes mixtes, à notre connaissance, organisés sous l'enveloppe ministérielle jeunes et adultes sont des groupes de jour. Même pour les groupes exclusifs d'adultes, à chaque fois que la commission scolaire a les locaux disponibles ou un centre de formation, elle dispense la formation le jour. C'est une tendance pour les cours à temps plein, évidemment.

Les cours à temps partiel, ce n'est pas pour le secteur régulier. Cela se dispense le soir. Quant au statut des enseignants qui oeuvrent dans des groupes mixtes, s'ils proviennent du régulier, ils sont régis par leur convention collective du secteur régulier, chapitre 8, normalement. S'ils proviennent du jour, ou s'ils sont en statut précaire, ils restent dans leur champ d'appartenance. Il peut arriver que, moyennant entente avec un syndicat local, il puisse y avoir un aménagement transitoire ou temporaire qui fasse qu'un enseignant est affecté temporairement dans un autre champ, mais il revient à son champ en fin d'année. (20 heures)

Sur le troisième volet de votre question, les programmes aux jeunes et aux adultes ont été harmonisés cette année en épousant à 99 % à peu près toutes les dimensions de souplesse qui existaient à l'éducation des adultes depuis quinze ans. Tous les programmes sont modulaires, ils ont tous la même valeur en crédits, ils ont la même durée, mais ils peuvent être organisés dans des modèles différents, jeunes, adultes ou mixtes, suivant les décisions des commissions scolaires.

Quant au régime pédagogique lui-même qui encadre les programmes, lui aussi, avec les modifications apportées le 10 décembre 1986 et en janvier 1988, à peu près toutes les dispositions du régime pédagogique de la formation professionnelle dans l'école secondaire maintenant, à quelques détails près, sont applicables, contrairement à ce qui existait avant, à une clientèle jeune ou adulte ou mixte. Ce n'est plus un irritant ou une contrainte à l'organisation et à la dispensation de la formation professionnelle.

Le Président (M. Audet): M. le député d'Arthabaska.

M. Gardner: M. le Président, je reviens sur la question des enseignants. Est-ce qu'il se pourrait que deux enseignants travaillent dans le même domaine, dans la même matière et qu'ils n'aient pas le même statut? Par exemple, qu'il y en ait un possédant le même nombre d'années de scolarité, le même nombre d'annés d'ensei- gnement que son collègue et que l'un reçoive le salaire d'un enseignant régulier tandis que l'autre travaillant le même nombre d'heures reçoive un salaire de cours du soir?

M. Henry: C'est techniquement possible, oui.

M. Gardner: Est-ce que vous ne pensez pas que cela peut créer des problèmes assez délicats entre enseignants?

M. Henry: Tout à fait. C'est pourquoi je pense que, dans la poursuite de l'implantation de la réforme, va se poser le problème d'harmoniser les conventions collectives et le système de financement à cette nouvelle réalité du régime pédagogique, mais c'est en devenir, c'est une question qu'il faut ouvrir.

M. Gardner: N'est-il pas vrai qu'un enseignant régulier, vous pourriez quand même, étant donné que vous ne pouvez pas lui donner un cours avec deux ou trois élèves, l'envoyer en champ de disponibilité - je ne me souviens pas du numéro...

Une voix: C'est 38.

M. Gardner:... 38, cela me revient. Je ne suis jamais allé là quand même. Vous pourriez l'envoyer là et automatiquement - je suis en disponibilité maintenant - l'envoyer aux cours des adultes avec les conditions salariales de cette catégorie de cours. Est-ce que vous pourriez faire cela?

M. Henry: Malheureusement, je ne peux pas répondre à cette question, mais il y a peut-être quelqu'un ici qui peut le faire.

M. Ryan: Excusez-moi. Il y a M. Jean-Guy Gagnon, qui est notre sous-ministre adjoint aux ressources humaines.

M. Gardner: Ecusez-moi de vous causer des problèmes comme cela...

M. Ryan: Non, mais je pense que ce sont des questions... Excusez-moi, M. le Président. Est-ce que je peux compléter?

Le Président (M. Audet): Allez-y, M. le ministre.

M. Ryan: Je pense qu'on soulève des questions très pertinentes et M. Gagnon, sous-ministre à la Direction des ressources humaines, en particulier chargé des relations du travail, pourrait nous fournir des explications intéressantes là-dessus.

Le Président (M. Audet): M. Gagnon, vous avez la parole.

M. Gagnon (Jean-Guy): Merci, M. le Président. Nous avons à l'éducation des adultes un nombre limité de postes réguliers, quelque 300 pour tout le réseau, alors que l'enseignement professionnel aux jeunes se donne principalement par des enseignants réguliers. Alors, il est certain qu'à partir du moment où on se met à créer des situations où des enseignants se partageraient des groupes où il y aurait des jeunes et des adultes certains d'entre eux pourraient, comme vous le dites, s'ils viennent du côté des jeunes, être des enseignants réguliers alors que les autres seraient dans une large mesure des enseignants à taux horaire.

La convention collective, pour ce qui est de la tâche, avait été négociée en prévoyant deux sortes de situations distinctes: un enseignant enseigne à des jeunes ou il enseigne à des adultes et les conditions sont régies par deux chapitres différents. À partir du moment où on a des groupes mixtes, il est évident que cela pose le problème de savoir sous quel chapitre de conditions de travail l'enseignant travaille. C'est pourquoi dans la lettre dont le ministre parlait tout à l'heure, à savoir qu'il attirerait l'attention des commissions scolaires sur la nécessité d'y aller avec prudence, cela suppose dans bien des cas de clarifier ce qui pourrait être confus et la commission devrait s'entendre avec son syndicat sur les démarches qu'elle entend prendre lorsqu'elle juge nécessaire de procéder à une intégration dans un groupe particulier. Ce n'est pas le fait que l'enseignant appartienne à la catégorie de jour qui détermine ses conditions de travail, c'est la clientèle à qui il enseigne. S'il enseigne à un groupe d'adultes, même s'il est de jour, il y a certainement des problèmes à vouloir lui appliquer les conditions de jour et vice versa.

Le Président (M. Audet): M. le député d'Arthabaska, une dernière question.

M. Gardner: Une dernière question à deux volets, si vous le permettez, M. le Président. Qui a priorité? Attendez, mon deuxième volet, je vais le faire... Qui a priorité? Disons que vous avez deux enseignants, l'un qui vient des cours du soir et l'autre des cours de jour; à qui donnez-vous prioritairement l'enseignement de jour? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de prévoir une période de transition, étant donné qu'il s'agit d'une transition où il y aura, dans quelques années, peut-être, une convention qui gérera tous les enseignants de quelque niveau que ce soit? Est-ce qu'il n'y a pas lieu de prévoir une période de transition et permettre, s'il y a deux enseignants, un du soir et un du jour, de donner les meilleures conditions de travail ou salariales possible, en période de transition?

M. Gagnon: D'abord, la question de priorité ne découle pas du fait que ce soit de jour ou de soir, mais du fait qu'il s'agit d'un groupe de jeunes ou d'un groupe d'adultes à qui on va enseigner. C'est toujours clair, sauf lorsqu'il s'agit d'un groupe où il y a des jeunes et des adultes. On entre dans des situations un peu confuses. Bien sûr, on dit: Deux adultes dans un groupe de jeunes, cela ne pose pas de problème, la commission peut fonctionner avec certitude, n'importe quel arbitre dira: Comme il n'y a pas de chapitre qui prévoit ce qui arrive lorsqu'il y a quelques adultes dans un groupe, j'ai donc à décider si c'est un groupe de jeunes ou un groupe d'adultes et, dans ce cas, il m'apparaît évident que c'est un groupe de jeunes.

Vous avez raison, nous devons prévoir à court terme des conditions de travail pour les cas où il serait nécessaire de procéder à l'intégration parce que la convention collective se trouve prise au dépourvu, en quelque sorte, par ces situations. C'est pourquoi, entre-temps - la lettre du ministre va en ce sens - on demande aux commissions scolaires de s'assurer avec leurs syndicats que les conditions de travail sont respectées et, au besoin, qu'ils fassent les arrangements nécessaires pour ce que vous appelez à juste titre cette période de transition.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, vous voulez compléter?

M. Ryan: J'ajoute brièvement que nous avons prévu un comité mixte syndicat-patron pour suivre le développement de la réforme de l'enseignement professionnel et veiller à faire les ajustements qui s'imposent en cours de route. Des rapports constants sont maintenus avec la partie syndicale. Comme le laissait entrevoir M. Gagnon, nous sommes conduits à une situation où il faudra éventuellement rouvrir certains chapitres des conventions collectives d'enseignement afin qu'elles soient mieux ajustées aux nouvelles réalités qui se développent. Jusqu'à maintenant, les rapports se maintiennent dans un esprit de collaboration. J'ai moi-même été participant à des réunions où étaient présents des représentants de la CEQ. On a même eu des réunions à mon bureau pour faire le point sur toutes ces choses. Je dois dire que, tout en exprimant des inquiétudes, les syndicats d'enseignants sont conscients, à la fois, de l'importance de la réforme et, deuxièmement, de la nécessité de faire des expériences. Ce n'est pas à eux de les proposer et de prendre les devants; ils formulent plutôt des avertissements. On sent qu'ils se rendent compte qu'il doit se passer quelque chose. Pourvu qu'ils ne soient pas laissés complètement de côté, je pense qu'ils comprennent qu'on a une responsabilité qu'il n'est pas possible d'éluder. C'est une situation qui est fluide et je pense qu'il y aura des développements très significatifs au cours de la prochaine année.

Le Président (M. Audet): Cela va. Mme la députée de Chicoutimi, vous avez la parole.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Tout à l'heure, le ministre affirmait - ou peut-être M. Babin - qu'à sa connaissance il n'y avait pas, dans les programmes dits d'achat direct de formation en établissement, d'intégration jeunes et adultes. Pour certaines commissions scolaires, cela m'apparaissait être une volonté de faire des économies en mixant ces deux groupes dans le cadre d'un cours subventionné par le biais des achats directs de formation en établissement. Il faudrait que je retourne à mes documents, mais si je ne m'abuse, au moment où on faisait la tournée l'automne dernier, on a porté à mon attention ce fait qu'il y avait effectivement intégration des clientèles jeunes et adultes dans de tels programmes. Cela mériterait probablement des vérifications, mais si vous me dites, comme l'a dit le ministre tout à l'heure, que l'intégration jeunes et adultes se faisait exclusivement dans le cas des cours à l'éducation des adultes subventionnés par le biais de l'enveloppe du ministère de l'Éducation, ce n'est pas ce que j'ai vu au moment où on faisait la tournée.

Ma deuxième question. Il y a plusieurs groupes qui sont venus faire des représentations. Le ministre n'a pas réagi à cette question tout à l'heure, demandant de réviser les décisions concernant le classement qui avait été fait du métier en certificat plutôt qu'en diplôme. Bon, il y a eu le cours de vente et représentation et il y a le cours d'assistante dentaire où on sait qu'il y a un conflit actuellement entre les hygiénistes et les assistantes dentaires. Est-ce que le ministre a l'intention de revoir quelques-unes de ces décisions sur l'ensemble de ces 36 ou 37 programmes - j'ai cru entendre tantôt 37 programmes - de certificats classés comme étant des certificats d'études professionnelles?

M. Ryan: Monsieur...

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je vais répondre à la deuxième question et M. Henry répondra à la première.

En ce qui touche les programmes qu'a mentionnés la députée de Chicoutimi, le cours de vente et représentation a été maintenu au niveau CEP pour la présente année. Le cours d'assistante dentaire a été mis DEP et le cours de diététique aussi à propos duquel nous avions eu beaucoup - soins esthétiques, plutôt, et maquillage - de représentations, a été maintenu à DEP après que nous l'eussions d'abord inscrit comme CEP. Nous avons modifié notre décision à la suite des représentations nombreuses et, à notre point de vue, justifiées qui nous avaient été soumises.

Maintenant... Pardon?

Mme Blackburn: Cela va.

M. Ryan: Cela va pour ces points-là. Maintenant, tous ces programmes seront l'objet d'un examen approfondi au cours des mois à venir. Et, sur la foi de l'examen qui sera poussé plus loin, il y aura peut-être des ajustements qui s'imposeront. Mais, pour l'année 1988-1989, c'est ce que je viens de donner qui va se passer.

Le Président (M. Audet): Merci. M. Henry.

M. Henry: Pour le mixage de clientèles jeunes-adultes, dans le cadre de l'achat de cours du fédéral, il faut savoir, à ce stade-ci, les difficultés qu'il y a à faire des groupes mixtes avec un groupe acheté du fédéral par rapport à un groupe régulier ou un groupe enveloppe ouverte MEQ. C'est que nous n'avons pas encore modifié tout le processus d'achat de cours du fédéral en fonction de cette nouvelle réforme. De sorte que les seuils d'entrée des cours que le fédéral achète ne sont pas les mêmes que ceux appliqués dans le régime pédagogique et ce n'est pas la même sanction. La durée des programmes est souvent différente. Quand elle est la même, supposons 1200 heures, au secteur régulier il faut faire une année et quart, et quand on achète un cours du fédéral, il faut qu'il soit fait à l'intérieur de 52 semaines, sinon on ne l'achète pas. Il y a des empêchements assez importants au fait que puissent être mixés des groupes d'achat de cours du fédéral avec des groupes réguliers.

Je disais qu'à ma connaissance, si cela a été fait, c'est exceptionnel. Ce sont possiblement des jeunes qui ont été intégrés dans des groupes d'achat du fédéral, ce qui est à la marge un peu contraire de l'esprit du régime et des règles budgétaires existantes. Et c'est marginal. Le contraire est très difficile, comme je vous le signalais. Mais, à ma connaissance, il n'y a pas de tels groupes. Mais il y a beaucoup de groupes mixtes qui existent. Ce sont des groupes financés par l'enveloppe ouverte du MEQ pour les adultes et l'enveloppe de base régulière pour les clientèles régulières. Vous avez raison de dire qu'il y a des groupes mixtes.

Le Président (M. Audet): Mme la députée.

Mme Blackburn: Oui. Il faut comprendre dans les propos de M. Henry, lorsqu'il dit: On n'a pas encore modifié les programmes pour rendre la chose possible, on n'a pas levé les difficultés... Est-ce que le ministère entend lever ces difficultés pour permettre cette intégration des jeunes et adultes dans les cours d'achat direct de formation professionnelle?

M. Henry: L'objectif qui est visé, ce n'est pas l'intégration. C'est de faire en sorte que, quand un jeune ou un adulte veut devenir mécanicien d'automobiles, débutant ou en perfectionnement ou recyclage, contrairement à la situation que nous avions jusqu'à maintenant, il puisse y avoir un programme souple qui puisse être appliqué dans toutes les formes d'organisations possibles. Ce que j'ai dit c'est qu'actuelle-

ment nous n'avions pas modifié les conditions pour les achats de cours du fédéral mais, effectivement, il va arriver un jour, quelque part à compter de septembre 1989, où il sera possible au fédéral d'acheter le programme de base de mécanique auto conduisant au diplôme d'études professionnelles de mécanique auto: le même programme qu'au secteur régulier, le même programme que dans l'enveloppe ouverte MEQ, le même régime pédagogique, les mêmes seuils d'entrée et le même diplôme, rendant possible toutes les possibilités de mixage de groupes, ajoutant celle-là, vous avez bien raison. Mais, comme il va rester l'allocation qui est donnée par le fédéral et qui n'est pas donnée au régulier ou à l'enveloppe ouverte, il y aura toujours un certain nombre de difficultés. Et, dans le mesure où, quand le gouvernement fédéral achète un cours il ne le laisse démarrer que si le groupe est complet le problème est en partie théorique. C'est que le fédéral ne laisse pas démarrer un cours s'il n'a pas son nombre d'élèves et son quota établi qui est de douze par rapport à un groupe de quinze. Sans cela il ne le laisse pas démarrer. Le problème, théoriquement, ne peut pas se poser. On achète un cours, même un cours harmonisé. Si on a un commanditaire, le cours va démarrer en fonction des exigences du commanditaire et c'est très difficile de faire du mixage de groupes. (20 h 15)

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Si je comprends bien, la tendance est d'essayer de vendre ces cours destinés et préparés pour les jeunes, de les vendre éventuellement au gouvernement fédéral par le biais d'achat direct de formation en établissement.

M. Ryan: II y a une chose qu'il faut dire. Les cours ne sont pas préparés en fonction des jeunes. Ils sont préparés en fonction des métiers. On veut précisément que ce soient les mêmes cours de métier pour les jeunes et les adultes, qu'il n'y ait pas deux classes de formation. C'est un des éléments essentiels de notre action.

Mme Blackburn: Donc, la spécificité "jeune", son niveau de formation, d'inexpérience, on ne tiendra plus compte de cela dorénavant.

M. Ryan:... la formation professionnelle proprement dite, c'est le métier qui est déterminant.

Mme Blackburn: II n'y a plus de spécificité.

M. Ryan: II y a des pédagogues qui sont là. Ils ne sont pas là pour rien. Le programme lui-même est déterminé par les exigences du métier.

Mme Blackburn: Oui.

Le Président (M. Audet): Cela va. Mme la députée de Chicoutimi, d'autres questions?

Mme Blackburn: M. le Président, si je comprends, c'est que les besoins particuliers des clientèles, les approches pédagogiques différentes... On ne me fera pas dire, lorsque vous avez des jeunes et des adultes dans un même groupe, qu'on va avoir une pédagogie pour traiter le quart de la classe et une autre pédagogie pour traiter les trois quarts de la classe. J'imagine qu'on va finir par avoir la même pédagogie. À quel groupe va-t-elle s'adapter? Aux jeunes ou aux adultes? Comment va-t-on traiter ces besoins particuliers? J'insiste pour le rappeler, le ministre se le rappelle, il a toujours défendu la nécessité d'une approche distincte et spécifique pour les clientèles selon qu'ils étaient jeunes ou adultes. Là, on a l'air de nous laisser entendre que cela ne pose plus de problème. Est-ce que c'est par l'effet du Saint-Esprit? Je ne pense pas que les jeunes aient tant changé après deux ans et demi, même avec le pouvoir libéral.

Une voix: Ne recommencez pas.

Mme Blackburn: On peut l'invoquer le Saint-Esprit. Je dis qu'on est en train, d'une part, de recréer un système qui va provoquer un clivage des classes, mais, en plus, on vient installer nos jeunes issus des milieux les plus défavorisés, avec plus de difficultés de s'adapter, de maîtriser les matières, dans des situations qui vont leur rendre les choses encore plus difficiles. Les groupes mixtes peuvent-ils effectivement tenir compte des besoins spécifiques des clientèles? Le ministre a beau me dire: Les pédagogues ne sont pas là pour rien. Il faut absolument qu'ils fassent une pédagogie adaptée. Mais est-ce qu'ils peuvent faire deux pédagogies adaptées dans un même groupe? C'est cela l'inquiétude qui a été manifestée à la fois par I'ICEA et par la CEQ.

J'ai une dernière question. J'aimerais demander au ministre s'il a l'intention d'accéder à la septième recommandation du Conseil supérieur de l'éducation. Le Conseil supérieur de l'éducation, dans l'avis qu'il a émis sur la formation professionnelle, la modification au régime pédagogique, dit ce qui suit: "Recommande au ministre de l'Éducation d'établir, comme pour le DEP, un double seuil d'accessibilité à la filière du certificat d'études professionnelles, c'est-à-dire avoir réussi les crédits de 4e année déjà prescrits pour l'admission au DEP ou avoir 16 ans au 30 septembre et avoir réussi les crédits de 3e année actuellement prescrits pour l'admission au CEP. Est-ce que le ministre a l'intention d'accepter la recommandation du Conseil supérieur de l'éducation?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Celle-là a été acceptée. Elle a été insérée dans le régime pédagogique. C'est accepté, cette recommandation-là du Conseil supérieur de l'éducation. Oui.

Mme Blackburn: Si je comprends bien... M. Ryan: Crédits de 4e année ou 16 ans.

Mme Blackburn: Si je ne m'abuse, la première version du régime ne prévoyait pas de faire obligation aux étudiants d'avoir réussi les crédits de secondaire III.

M. Ryan: Oui, on a toujours eu ça. C'est l'âge de 16 ans, je pense, qui n'était pas obligatoire pour le certificat, On l'a ajoute.

Mme Blackburn: Alors, il y a actuellement deux exigences: si vous avez 15 ans, vous devez avoir réussi vos crédits de quatrième.

M. Ryan: M. Henry va vous répondre à cela.

Là-dessus, nous avons fait un ajustement au cours de derniers mois dans le régime pédagogique de manière à tenir compte de l'avis qui nous avais été fourni par le Conseil supérieur de l'éducation. M. Henry va vous donner des précisions, M. le Président, si vous l'en autorisez.

Le Président (M. Audet): Allez-y, M. Henry.

M. Henry: Le conseil supérieur a recommandé la symétrie des seuils d'entrée pour le DEP et le CEP. Or, dans le régime, c'est écrit, pour le DEP: est réputé pouvoir entrer au diplôme d'études professionnelles celui qui a un diplôme d'études du secondaire ou 16 ans et quatre matières de quatrième. La symétrie, pour le CEP, qui nous a été recommandée et acceptée était de dire: peut entrer au certificat d'études professionnelles celui qui a une quatrième secondaire ou 16 ans et les quatre matières de troisième réussies, ce qui a été intégré dans le régime pédagogique. Il y a une symétrie de seuils d'accueils pour faire pression sur le rehaussement des seuils d'entrée.

Alors, DES au quatrième avec 16 ans et, dans le cas du CEP, quatrième ou 16 ans, troisième, pour illustrer ce qu'on souhaite finalement, c'est que les jeunes restent davantage longtemps en formation de base et générale avant d'amorcer leur formation professionnelle et cela a été agréé puisque c'est un fondement de la réforme.

Mme Blackburn: Touchant les autres recommandations du conseil supérieur, le conseil supérieur insiste beaucoup sur la nécessité de mettre en place des mesures qui incitent les jeunes à s'inscrire davantage dans les diplômes que dans les certificats. En fait, est-ce qu'il ne s'agit pas là plus d'un voeu pieux et est-ce qu'on est en mesure de prendre les mesures concrètes favorisant l'inscription dans des DEP plutôt que dans les CEP? Il y a une question que je me posais; par quoi sont justifiées toutes ces modifications? Je l'ai posée au commmencement. Est-ce qu'on est en meusre d'établir un rapport direct entre la diminution du nombre d'inscriptions dans les cours de formation professionnelle et les exigences qui étaient préalablement prévues pour le certificat? Est-ce qu'il y a un rapport direct de cause à effet entre ces deux choses et est-ce qu'on a un minimum de garanties que cela devrait nous assurer qu'il y ait moins de décrochages scolaires? Est-ce qu'on s'est assuré de ça? Est-ce qu'il n'y aurait pas eu lieu de faire des évaluations plus sérieurses avant de procéder à des changements aussi importants?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je voudrais d'abord ajouter une chose. Cette réforme était en panne depuis des années. La députée se souvient sans doute que plusieurs ministres précédents avaient tenté de la faire approuver et qu'ils s'étaient toujours heurtés à des obstacles invincibles à l'intérieur du gouvernement, en particulier au Conseil du trésor. M. Gendron, mon prédécesseur immédiat, avait soumis un plan au gouvernement en 1985, lequel a été rejeté par le Conseil du trésor. Quand je suis entré en fonction, tous les milieux concernés m'ont dit qu'il était très important d'agir rapidement parce que cela s'en allait dans une situation de découragement très très prononcée. C'est évident qu'on n'a pas pu régler tous les problèmes avant de commencer, en particulier des questions comme celle que vous posez, il y en a beaucoup qui vont recevoir leur réponse de l'expérience. Mais vous avons commence par le DEP; la première année, cela a été le DEP. Pourquoi? Parce que c'est celui sur lequel nous voulions évidemment mettre l'accent. Ce sera l'élément principal.

Comme la députée l'a souligné, la plupart des métiers ne veulent pas aller dans le CEP. Ils veulent aller dans le DEP parce qu'au point de vue de statut social c'est meilleur. C'est évident qu'un cours de deux ans est meilleur qu'un cours d'un an; je pense que cela saute aux yeux. Dans la mesure où c'est justifié objectivement, nous aimons mieux que le cours de DEP se développe. Comme je l'ai dit, notre première préférence est pour que les jeunes complètent d'abord le diplôme d'études du secondaire général et ensuite qu'un certain nombre s'oriente vers des études professionnelles spécialisées, cela va très bien. Mais c'est la ligne de fond. À la fin de la présente année, on va déjà avoir des indications bien meilleures sur les questions que pose la députée de Chicoutimi.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Sur le même sujet, M. le Président, une courte question. Est-ce que l'intention du ministère de mettre sur pied, éventuellement, des programmes de travail-étude, comme partie intégrante du programme professionnel pour tous les enfants?

Le Président (M. Audet): M. Henry.

M. Henry: C'est une intention qui circule dans le réseau scolaire à laquelle on est très attentif. Tout le monde sait dans le réseau scolaire la difficulté que nous avons à organiser de tels programmes parce que les relations éducation-monde du travail, c'est à reconstruire. Il y a un problème de crédibilité et de confiance réciproque à rétablir pour qu'on puisse arriver à faire en sorte que de tels programmes existent. Mais, concrètement, il y a quand même sept commissions scolaires cette année qui ont vu accepter des projets d'alternance travail et étude, subventionnés par le gouvernement fédéral et qui vont dans le sens souligné par Mme la députée. Quant à des organisations systématiques de formation du type apprentissage comme dans certains pays ou certaines provinces où un bout à l'école, on fait un bout en entreprise, un bout à l'école, tout cela fait partie d'un programme d'ensemble cohérent, on en est aux premiers pas de développement. On va essayer de faire en sorte que cela se passe comme cela avec l'industrie de la construction, où on a un premier pas dans ce sens. Mais il faut comprendre que ce sont des programmes très difficiles à organiser parce que cela implique des ententes de très haut niveau entre les partenaires socio-économiques et les partenaires de l'éducation concernant l'encadrement et le financement de tels programmes. C'est à l'étude et je pense que cela va être davantage possible quand le climat va être rétabli, un climat de confiance entre les partenaires du monde du travail et de l'éducation. Pour le moment, on a une approche cas par cas, secteur par secteur professionnel, si vous voulez.

Mme Dougherty: Merci.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Chicoutimi, cela va pour ce programme? Est-on prêt à l'adopter ou...

Mme Blackburn: Non, non. On va...

Le Président (M. Audet): Non?

Mme Blackburn:... passer à un autre sujet toujours dans le programme 4.

Le Président (M. Audet): Allez-y.

Rationalisation du coût de l'éducation des adultes

Mme Blackburn: L'éducation des adultes. Selon son habitude, le ministre disait, au moment où je commentais l'éducation des adultes, que je n'avais encore rien compris, qu'il y avait une augmentation dans l'enveloppe de l'éducation des adultes et non pas une diminution. J'aimerais qu'on revoie les chiffres un peu. En fait, les crédits alloués à l'éducation des adultes, pour 1988-1989, s'élèvent à 154 400 000 $, soit une augmentation apparente, je dis bien apparente, de 13, 5 % par rapport à 1987-1988. Si l'on considère les subventions allouées pour l'enseignement aux adultes en année scolaire, elles passent plutôt de 170 500 000 $ en 1987-1988 à 147 400 000 $ pour 1988-1989, soit une baisse de quelque 16 %.

La baisse s'explique par une diminution de 6 300 000 $ pour le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs dans le cadre de l'accord Canada-Québec, et par une réduction du volume d'activités pour quelque 20 200 000 $. Ce qui au premier regard apparaît comme étant une augmentation constitue plutôt une diminution. Le ministre nous dit: On va resserrer les règles. On paie en double pour des élèves qui ne sont plus dans les classes. On va identifier les clientèles. Bon, un certain nombre de mesures qui seraient susceptibles de lui faire faire les économies qu'on voit là.

Moi je voudrais savoir, et j'irai un peu plus loin tout à l'heure, pour commencer, les 147 400 000 $...

Une voix: Juste ici. (20 h 30)

Mme Blackburn:... et la baisse qui s'explique, d'une part, par une diminution de 6 300 000 $ pour le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs, dans le cadre de l'accord Canada, et par une réduction du volume d'activités de quelque 20 000 000 $... Je voudrais avoir la composition des 147 000 000 $. D'où viennent ces 147 000 000 $? Quelle est la part de ces 147 000 000 $ qui vient des accords Québec-Canada? Est-ce qu'il y a une part de ces 147 000 000 $ qui vient de ce que vous appelez l'enveloppe ouverte pour l'éducation des adultes et qui émane du ministère de l'Éducation?

M. Ryan: L'allocation de base vient entièrement du budget du ministère de l'Éducation et, par conséquent, des crédits émanant du gouvernement du Québec.

Mme Blackburn: Alors, je voudrais comprendre...

M. Ryan: Nous avons prévu sur les 147 000 000 $, comme c'est inscrit à la page 45, un montant de 10 000 000 $ qui sera dépensé pour la formation sur mesure et les achats directs sous l'empire de l'accord Canada-Québec.

Tout le reste est de l'argent qui vient du trésor québécois.

Mme Blackburn: Le reste, c'est 147 000 000 $ moins 10 000 000 $?

M. Ryan: C'est cela.

Mme Blackburn: Alors, ce que je voudrais... Vous expliquez une diminution du budget par une diminution de 6 300 000 $ pour le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs. Est-ce que cela fait partie... Je ne comprends pas très bien votre mécanique, parce qu'on sait que, par ailleurs, dans les achats de formation sur mesure, en 1987, on prévoyait dans les accords un montant de 32 665 000 $ et, dans les achats directs de formation en établissement, un montant de 106 000 000 $. Je voudrais savoir comment cela est réparti. Quelle est la part dans ce que vous nous présentez comme étant un investissement du gouvernement du Québec en matière d'éducation des adultes? Comment cela est-il ventilé? Est-ce qu'on a réussi à dépenser effectivement le montant tel que prévu dans l'accord?

M. Ryan: Peut-être M. Rondeau pourrait-il donner quelques explications sur les achats directs, en particulier pour la formation sur mesure. Ensuite, il y aura d'autres explications qu'on pourra donner.

M. Rondeau (Jean-Claude): M. le Président, je pense que c'est plus simple de traiter séparément les fonds qui viennent du fédéral et, ensuite, l'enveloppe ouverte du Québec. En ce qui concerne les fonds qui viennent du fédéral, il y a depuis plusieurs années une enveloppe qui est restée stable à 139 000 000 $. Donc, avant il y a un an et demi, l'enveloppe de 139 000 000 $ était consacrée entièrement à des achats directs. Il y a un an et demi, le fédéral a changé son orientation et a introduit une modification pour permettre la formation sur mesure dont les sommes ont été déduites des 139 000 000 $. Donc, l'année dernière, qui était la première année d'application de ce nouveau plan, on a eu 139 000 000 $ moins 13 000 000 $, soit 126 000 000 $ pour les achats directs et 13 000 000 $ pour la formation sur mesure. Cette année, on a donc 139 000 000 $ moins 32 000 000 $ consacrés à la formation sur mesure et, l'année prochaine, on devait avoir 51 000 000 $ consacrés à la formation sur mesure. Mais la somme des deux reste fixe à 139 000 000 $.

La deuxième partie de la question de la députée de Chicoutimi, à savoir si on a dépensé les sommes, effectivement, l'année dernière, qui était la première année d'application, on a dépensé une partie qui représentait à peu près la moitié des 13 000 000 $ prévus. Cette année, par rapport aux 32 000 000 $, on arrive aux derniers chiffres et, la semaine dernière, on se situait autour de 16 000 000 $ ou 17 000 000 $. Cependant, on a obtenu du fédéral que l'enveloppe demeure stable pour la troisième année plutôt que de passer à 50 000 000 $ et les derniers chiffres démontrent un tel effort dans la formation sur mesure qu'il semble qu'on va arriver au sommet des 32 000 000 $ très rapidement au début de l'année. Donc, on va être pris, contrairement à ce qu'on avait anticipé, avec un plafonnement des dépenses pour la formation sur mesure, donc, la partie qui reste consacrée à des achats directs. Cela, c'est pour l'enveloppe en provenance du gouvernement fédéral. Mais c'est l'enveloppe ouverte du Québec qui compte pour la plus grande partie dans les données du ministère.

Mme Blackburn: Où vont les sommes non dépensées dans le volet Achat de formation sur mesure? Est-ce que les sommes transitent par le ministère de l'Éducation ou par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu?

M. Ryan: Ce n'est pas payé par Ottawa si les activités n'ont pas eu lieu. Comme on a eu moins la première année, nous sommes en négociation avec le gouvernement fédéral pour essayer d'en faire transférer une partie à la formation en établissement.

Mme Blackburn: Vous parlez de ce qui n'a pas été dépensé, on a dépensé à peu près la moitié des 32 000 000 $...

Une voix: La moitié des 13 000 000 $.

Mme Blackburn:... la moitié des 13 000 000 $. Le Québec demande de récupérer ces sommes, mais il n'est pas certain qu'on les conserve.

M. Ryan: Ce n'est pas certain, mais les choses étaient avancées, cependant. C'est M.

Paradis qui négocie au nom du gouvernement du Québec, mais après entente avec nous.

Mme Blackburn: À présent, si je comprends, selon la même règle, il y aura l'an prochain une partie de plus en plus importante des budgets de l'accord Canada-Québec qui vont transiter par le biais de la formation sur mesure, avec le problème que cela pose. On sait ce que cela veut dire, les collèges sont moins prêts, les écoles sont moins prêtes à les offrir et il y a une tendance à vouloir offrir ces cours dans des espèces d'écoles patentées qui se qualifient pour donner ce type de formation. L'an prochain, si je ne m'abuse, cela nous donnerait 51 000 000 $ en 1988-1989 pour l'achat de formation sur mesure. Est-ce que c'est là l'entente?

M. Rondeau: M. le Président, on a obtenu que pour la troisième année, plutôt que de passer à 51 000 000 $ comme c'était prévu dans le plan

fédéral, on en reste à 32 000 000 $ parce qu'on avait de la difficulté à prendre le rythme de croisière. Maintenant, les efforts des dernières semaines nous démontrent qu'on va effectivement arriver aux 32 000 000 $. Quant au partage des projets, la quasi-totalité des projets - à ce jour, c'est 97 % ou 98 % des projets - se déroulent dans les établissements publics, soit cégeps ou commissions scolaires, mais avec une légère prédominance des cégeps à ce jour. Les cégeps obtiennent près de 60 % des activités par rapport à un peu plus de 40 % pour les commissions scolaires.

La manière dont cela se fait, c'est au niveau des commissions de formation professionnelle que les projets se préparent et il y a le partage entre les ordres d'enseignement et les établissements par le biais des responsables régionaux d'éducation des adultes.

Mme Blackburn: Est-ce que tout ce qui apparaît là passe par le ministère de l'Éducation? Il n'y a que l'achat de formation sur mesure. Quand vous me dites que vous avez demandé qu'on reste à 32 000 000 $ pour les achats de formation sur mesure, est-ce que l'enveloppe pour les achats directs restera à 106 000 000 $ ou si on va la baisser à 85 000 000 $?

M. Rondeau: M. le Président, en ce qui concerne les achats qui viennent du fédéral, ils restent à 139 000 000 $. Il n'y a pas de perspective selon laquelle les montants seraient modifiés.

Mme Blackburn: À présent, M. le Président, je voudrais comprendre le montant de 147 000 000 $. Est-ce qu'on peut le décomposer? On dit que la diminution s'explique par une diminution de 6 300 000 $ sur le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs dans le cadre de l'accord Canada-Québec. Si cela paraît dans les diminutions, c'est que l'enveloppe de 147 000 000 $ qu'on nous présente n'est pas composée exclusivement de crédits qui émargent au ministère de l'Éducation, mais ils viennent aussi des accords Canada-Québec.

M. Ryan: On a expliqué tantôt qu'il y a un montant de 10 000 000 $ qui vient du fédéral. C'est une contribution qui va surtout pour des frais d'encadrement. Il y a une diminution cette année pour le ministère de l'Éducation parce qu'une entente est intervenue entre les deux ministères, Éducation et Enseignement supérieur, de manière que le montant total soit réparti en suivant d'aussi près que possible le volume des activités.

Mme Blackburn: Et la diminution de 6 300 000 $, étant donné que vous n'êtes même pas certain que cet argent-là reste... Où sont passés ces 6 300 000 $? C'est une diminution de 6 300 000 $ pour le soutien à la formation sur mesure et aux achats directs.

M. Rondeau: M. le Président...

Le Président (M. Audet): M. Rondeau.

M. Rondeau: ...quand on avait 139 000 000 $ qui étaient consacrés entièrement aux achats directs, il y avait donc une partie de ces sommes-là qui allaient pour les coûts de base. À partir du moment où il y eu une ponction des 139 000 000 $ pour en consacrer une partie à la formation sur mesure, il y a eu, pour les commissions scolaires, une perte de fonds sur ce plan-là. C'est ce qui explique la diminution pour les commissions scolaires qui est identifiée dans le document. Donc, pour parler de façon très simple, pour les services d'éducation des adultes au Québec, l'avènement de la formation sur mesure a entraîné une diminution des sommes disponibles dans les commissions scolaires pour les coûts de base.

Mme Blackburn: Alors, sur 147 000 000 $ si l'on enlève les 10 000 000 $ qui sont fournis par le biais des accords Canada-Québec pour l'encadrement, est-ce qu'on pourrait savoir comment se décomposent les 170 000 000 $ de 1987-1988? Quelle était la partie de ces 170 000 000 $ qui était...

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Nous avons ces renseignements que demande la députée à la page 45 du cahier.

Le Président (M. Audet): Cela va?

Mme Blackburn: Donc, c'étaient 16 000 000 $. J'avais donc cru comprendre que vos 6 300 000 $ étaient davantage un transfert que vous faisiez au niveau collégial. Mais ce que je comprends actuellement c'est que...

M. Rondeau: M. le Président, il y a une partie qui va au collégial, effectivement, par le transfert de volume d'activités et il y a une partie de perte actuellement parce qu'on n'a pas réussi à utiliser la totalité des sommes qui avaient été planifiées par le fédéral pour être utilisées.

Mme Blackburn: Je voudrais savoir du ministre ou encore de M. le sous-ministre... Le ministre nous dit qu'il y a un ajout de ressources et l'examen que nous en faisons se traduit par une diminution du volume d'activités pour quelque 20 000 000 $. Donc, une diminution d'environ 16 %. Le ministre explique cette diminution par une identification plus précise des clientèles et par une rationalisation. Alors, ce que voudrais savoir, d'autant plus qu'on sait que le projet de loi 107 qui est sur la table prévoit une espèce de resserrement... Ce sont en quelque sorte des brèches par rapport à la gratuité au service de l'éducation aux adultes. Si je me

rappelle, cela sera gratuit mais selon la disponibilité et les disponibilités financières des commissions scolaires. Alors, c'est moins gratuit que cela l'était, si je comprends un peu cet article-là. Je voudrais savoir quels sont les objectifs réels poursuivis par le ministère et le ministre quant à la rationalisation des coûts de l'éducation des adultes. Qu'est-ce qu'il entend par privilégier la clientèle cible visée par la politique d'ouverture? C'est du chinois. Je ne comprends pas. (20 h 45)

M. Ryan: Je vais vous donner une brève explication générale. S'il y a lieu d'aller plus dans les détails, nous le ferons, mais ce ne sera peut-être pas nécessaire. Essentiellement, ce que veut favoriser le gouvernement, c'est l'activité éducative des adultes qui s'inscrivent à des cours de formation en vue de l'obtention du diplôme d'études secondaires. Deuxièmement, le gouvernement veut financer des étudiants réels et non pas des étudiants fantômes ou de passage. Par exemple, cela s'est développé très vite, ça, l'enveloppe ouverte, et on s'est aperçu qu'il s'est accumulé beaucoup d'éléments qui ne se prêtaient pas facilement à des mesures quantifiables. Le Conseil du trésor avait ses exigences et il a dit: Si un élève est inscrit à la fin de septembre, nous aimerions bien avoir des preuves qu'il est encore là au mois de novembre. Il y a toutes sortes d'éléments qui sont ajoutés de manière à contrôler de façon plus efficace la présence aux cours et la persévérance afin de s'assurer que le gouvernement paie pour des frais réels. Je pense que ce n'est pas de la diminution. Si nous avons plus de demandes, l'enveloppe reste ouverte et cela va aller au-delà de 147 000 000 $, mais nous espérons récupérer une vingtaine de millions de dollars grâce à des contrôles plus serrés qui vont empêcher que l'argent s'en aille dans la caisse même, disons, des commissions scolaires ou à d'autres fins que celles des cours pour adultes.

Un autre exemple. Cela paraît mal - je pense que ma collègue de Jacques-Cartier peut être intriguée par cela - réduction de l'enveloppe pour les langues secondes. On avait une enveloppe de 8 000 000 $ pour les cours de langue seconde pour les adultes. Là, elle est réduite à 4 000 000 $. En fait, la demande, l'an dernier, a été d'à peu près 3 000 000 $. Alors, on n'enlève rien ici. On ajuste nos prévisions en tenant compte de ce qu'a été la demande réelle. C'est comme cela qu'on arrive à prévoir en tout une vingtaine de millions de dollars, mais cela ne change absolument rien aux besoins réels des adultes. S'il y a plus de demandes, l'enveloppe va augmenter en conséquence parce qu'elle est restée ouverte.

Mme Blackburn: Le ministre nous dit que les contrôles des clientèles étaient insuffisants au niveau secondaire.

M. Ryan: Oui.

Mme Blackburn: Les contrôles des clientèles adultes.

M. Ryan: Oui, c'est cela.

Mme Blackburn: Au public, parce qu'on sait qu'au privé cela fait problème quant aux contrôles des clientèles. Je pensais plus particulièrement au niveau collégial, mais on aura l'occasion d'y revenir la semaine prochaine. Cela va.

M. Ryan: Les contrôles auxquels fait allusion la députée de Chicoutimi concernent le collégial, comme elle le sait très bien. Nous aurons l'occasion d'en parler la semaine prochaine.

Mme Blackburn: C'est ce que je disais d'ailleurs.

M. Ryan: Très bien.

Le Président (M. Audet): Cela va pour le programme 4. Est-ce qu'il y a d'autres remarques? Cela va?

L'état des bibliothèques scolaires

Mme Blackburn: Non, ça ne se termine pas là. J'avais une question au programme 4 sur les bibliothèques scolaires. Le ministre nous parle beaucoup d'augmenter la qualité du français écrit et parlé. Une des façons par excellence de le faire, c'est la qualité des volumes mis à la disposition des enfants et des élèves. Un nombre impressionnant de bibliothèques scolaires de niveau primaire et de niveau secondaire sont dans un état tout à fait lamentable. J'ai vu des écoles primaires sans bibliothèque. Cela existe au Québec. Il n'y a pas de volumes dans les bibliothèques. Il y a des écoles primaires qui n'ont pas de volumes dans les bibliothèques. Quel est l'état des bibliothèques dans les écoles publiques du Québec au moment où on se parle? Est-ce que le ministre a des données là-dessus? Est-ce qu'on a le portrait de la situation, un tableau de la situation par rapport à l'état des bibliothèques dans les écoles primaires et secondaires? Plus généralement, j'aimerais les avoir selon les secteurs, j'allais dire selon les quartiers. Il y a, là aussi, gros à parier que, par souci et par certaines préoccupations, on retrouve des bibliothèques mieux garnies selon le milieu socio-économique. J'aimerais voir si cela correspond à cette réalité que j'appréhende parce que ce que j'ai vu me semblait correspondre à ça.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: II y a trois éléments, M. le Président. Tout d'abord, nous n'avons pas

actuellement les données qui nous permettraient de former un jugement d'ensemble sur la situation des bibliothèques scolaires. Nous en discutions justement il y a quelque temps à une réunion qui regroupait le ministre, le sous-ministre et quelques collaborateurs et il a été décidé de constituer un groupe de travail qui va précisément faire un inventaire de la situation et me soumettre un rapport au cours des prochains mois sur la situation réelle.

Deuxièmement, dans le plan d'action pour le redressement ou le renforcement de l'apprentissage du français que nous dévoilerons la semaine prochaine, il y aura des mesures visant à améliorer ce qui se fait pour les bibliothèques scolaires, des mesures modestes, mais qui permettront quand même d'augmenter le niveau des dépenses par étudiant à cet fin-là.

En troisième lieu, comme la députée le sait sans doute, les ressources attribuées aux commissions scolaires pour fins de bibliothèques s'inscrivent dans une enveloppe "autres coûts" dont les commissions scolaires font l'usage qu'elles jugent opportun. Certaines commissions scolaires se servent de cette enveloppe pour mettre de l'argent sur les bibliothèques; d'autres trouvent que ce n'est pas important. Nous trouverons, j'en suis convaincu, une situation très diverse d'un endroit à l'autre. Cela fait partie de la politique de responsabilisation des commissions scolaires que nous avons développée et dont je parlais tantôt, que les commissions scolaires sachent affecter a ce poste extrêmement important, j'en conviens sans aucune réserve avec la députée de Chicoutimi, les ressources appropriées. Le plan que nous instituerons de ce côté-là sera un plan à frais partagés de manière à assurer que pour 1 $ que le ministère de l'Éducation investira, les commissions scolaires feront leur part.

Mme Blackburn: Est-ce que le ministre ne craint pas que ce plan à frais partagés ou d'appariement ne soit pas nécessairement plus incitatif? Si les commissions scolaires ne se montrent pas plus intéressées que ça à développer les bibliothèques, ce n'est pas parce que le ministère met 1 $ alors que la commission scolaire en met 1 $ que cela les incitera davantage à les développer. Le ministre l'a peut-être dit, mais je n'en suis pas certaine, je ne l'ai pas entendu, mais avez-vous l'intention d'essayer de recueillir des données qui nous présenteraient le portrait le plus précis possible de l'état des bibliothèques dans les écoles du Québec?

M. Ryan: Oui, le groupe de travail aura précisément cette mission.

Mme Blackburn: Le rapport...

M. Ryan: II sera également chargé de nous faire des recommandations.

Mme Blackburn: Le rapport serait disponible quand?

M. Ryan: Là, je ne sais pas pour l'instant. Mme Blackburn: II n'y a pas d'échéancier?

M. Ryan: Non, il n'y en a pas encore. Il y en aura un cependant, mais il n'a pas encore été fixé.

Mme Blackburn: Vous savez, si on ajoute à cette détérioration des collections des bibliothèques dans les écoles publiques les compressions effectuées par le ministère des Affaires culturelles dans les bibliothèques publiques, on atteint une situation de sous-développement absolument dramatique. J'en sais quelque chose. La bibliothèque municipale de Chicoutimi est la plus pauvre au Québec et on sait que les bibliothèques publiques au Québec sont les plus pauvres du Canada. Alors, cela vous donne une idée de la situation de la bibliothèque chez nous.

Évidemment, plusieurs autres se retrouvent dans des situations qui se rapprochent de celle de Chicoutimi. Quand on ajoute à ça le fait que les bibliothèques scolaires soient pauvres en collections et en volumes, cela nous explique peut-être un peu les difficultés qu'éprouvent les jeunes à bien parler ou écrire leur français. Lorsqu'on n'a pas accès à des volumes convenables ou intéressants, ou à des choses complètement dépassées ou défraîchies, cela n'a pas de quoi susciter l'intérêt à l'endroit de la lecture.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, est-ce que vous avez une remarque à faire? Non, cela va?

Mme la députée, vous avez toujours la parole.

Intégration des élèves en difficulté d'apprentissage

Mme Blackburn: Toujours dans le même programme, j'aimerais aborder la question de l'intégration des élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Je le rappelais tout à l'heure, on sait que ces élèves représentent une proportion importante des jeunes inscrits dans nos écoles primaires et secondaires. C'est 12,5 % du total des clientèles inscrites dans le réseau primaire et secondaire qui se trouvent classées comme ayant soit des handicaps ou des difficultés d'adaptation ou d'apprentissage.

On sait qu'il y a des mesures qui ont été prises pour leur assurer un plus grand encadrement. C'est probablement l'aspect de la question qui me préoccupe le plus. Au moment où on publiait au Québec le rapport de l'Office des personnes handicapées, je ne me rappelle plus le titre

Une voix: À part entière.

Mme Blackburn: ...À part entière, qui préconisait l'intégration des enfants handicapés dans les écoles et dans les classes régulières, il y avait sur la table du ministre un protocole d'entente qui était prêt pour signature entre la ministre des Affaires sociales et le ministre de l'Éducation pour à la fois prévoir un certain partage des responsabilités, comme, j'imagine, des frais encourus par la présence de handicapés lourds ou multiples dans les écoles. Cette politique a suscité beaucoup d'intérêt chez les parents des enfants handicapés. Un nombre important de parents réclament que ces enfants soient intégrés dans les classes régulières. On sait qu'il y a même, si je ne m'abuse, des causes qui sont devant la cour en ce moment, au moment où on se parle. Ici même à Québec, je pense que c'est le cas Rousseau.

Moi ce que je voudrais savoir, c'est à quelle place est rendu le protocole d'entente qui devait être signé depuis plus d'une année. Cela doit faire un an et demi, près de deux ans, si cela n'est pas plus de deux ans, que ce protocole est sur la table des deux ministres, des Affaires sociales et de l'Éducation. Va-t-il y avoir une entente qui va intervenir entre les deux ministères de manière que ces enfants reçoivent l'encadrement qui leur est nécessaire et pour que les commissions scolaires ne se retrouvent pas comme j'ai vu le cas à Matane l'automne dernier, maintenir ces enfants à la porte de l'école? Ils deviennent en quelque sorte des otages et des otages qui n'osent pas trop contester parce qu'on n'est pas pour prendre un enfant en chaise roulante et le laisser une journée devant l'école.

Donc, les parents les ramènent, les pressions se font moindres. Dans certains cas, j'en ai un à la commission scolaire de Chicoutimi, ils finissent par les garder à la maison carrément. Ce sont des cas assez pathétiques sur lesquels, je pense, il faudrait s'attarder à accorder une attention toute particulière. Cela existe et les cas sont traités de façon fort différente selon les commissions scolaires et dans certaines commissions scolaires, on a - et j'utilise les termes des parents - parqué ces enfants dans des écoles particulières, ce qui ne les incite pas à acquérir plus d'autonomie et à développer plus d'habileté. Je voudrais savoir où en est rendu ce protocole. Quelle est la position du ministre par rapport à cette grande question, à savoir est-ce qu'on devrait favoriser l'intégration des jeunes handicapés dans les classes régulières - je sais que le ministre l'a abordée brièvement ce matin - ou, encore, carrément leur créer des classes séparées comme c'est le cas actuellement dans plusieurs commissions scolaires?

Le Président (M. Audet): M. le ministre. (21 heures)

M. Ryan: C'est évidemment un des problèmes les plus importants auxquels nous fassions face pour l'instant. Ce problème a pris de l'importance un peu hors du contrôle du ministère de l'Éducation parce que la responsabilité était largement laissée aux commissions scolaires de déclarer les cas d'élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage, et les définitions n'étaient peut-être pas toujours les plus claires. Il y a une chose qui est certaine, c'est que nous avons connu une augmentation considérable au cours des dernières années, comme je l'ai mentionné ce matin.

J'avais souhaité que nous puissions, en 1987-1988, mettre au point le programme d'action dans ce secteur; je l'avais mentionné l'an dernier. Malheureusement, avec tout ce qui est arrivé, nous n'avons pas été capables et nous sommes obligés de remettre cet objectif au rang des priorités de l'année 1988-1989, pour être bien franc. En 1987-1988, une enquête a été faite par nos services auprès des commissions scolaires pour connaître les conditions dans lesquelles elles dispensent les services aux élèves en difficulté, les élèves handicapés. Le rapport de cette enquête m'a été remis. Le bureau des sous-ministres - je dois le dire à son crédit - s'est penché sur ce rapport et en a tiré des perspectives d'action qui ont été soumises à mon attention il y a déjà quelques semaines. J'ai examiné ce document et j'éprouve le besoin de travailler sérieusement avec le bureau des sous-ministres, mais nous n'en avons pas encore eu le temps. Même remarque à propos de l'entente qui avait été préparée entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et le ministère de l'Éducation. C'est vrai qu'un protocole a été déposé sur ma table il y a déjà quelques mois - pas deux ans, quelques mois - et je n'ai pas été capable de mettre ma signature sur ce protocole, parce que je ne comprenais pas ce qu'on voulait dire dans bien des cas. C'est un protocole qui nous dirigeait vers une politique normée, comme on en a beaucoup: tu as 122 comtés au Québec, tu mets 4 postes par comté, cela te fait 488 postes et tu ne sais pas ce que cela va faire; tu en ajoutes 488 et, au bout de la ligne, cela fait tant. Le gouvernement s'éloigne de ce genre d'orientation. On veut partir d'une problématique mieux définie au départ et, ensuite, on prendra les mesures qui s'imposent. J'éprouvais le besoin de durcir la problématique. C'est ce que nous devons compléter, les deux ministères ensemble, et des retards sont intervenus récemment. Je pense que c'est l'une des choses qui commandent notre attention pour les mois à venir. Je veux vous dire que je suis personnellement très très préoccupé par ce problème. Déjà, nous faisons des choses considérables. Je ne voudrais pas dire qu'il ne se fait rien, loin de là. En particulier, l'objectif d'intégration de ces élèves en difficulté, même des élèves handicapés, dans les classes régulières a quand même fait un progrès formidable. Sur les quelque 130 000 élèves en difficulté que nous comptions dans le système cette année, il y en a, selon les chiffres qu'on me donne, près de

80 000 qui sont intégrés dans des classes régulières. Mais ce n'est pas tout de les intégrer dans des classes régulières, il faut leur fournir le soutien approprié. Dans certains cas, ils ont besoin de personnes pour les assister, parce qu'ils n'ont pas toujours tout ce qu'il faut pour suivre les événements ou les développements au même rythme que les autres. Cela reste notre politique de base.

On nous signale de plus en plus fortement qu'il y a des difficultés pour certaines catégories d'élèves handicapés, ou en difficulté, en ce qui touche l'intégration, et il me semble évident qu'on ne pourra pas avoir l'intégration universelle. Mais où est la ligne exactement? Quels sont les critères qui doivent nous guider? Il y a encore du travail de définition à faire de ce côté et je dois dire, au crédit de mes fonctionnaires, qu'ils ont fait beaucoup de travail de ce côté et qu'on a déjà des matériaux importants qui ont été réunis en vue de la définition d'une politique pour laquelle il faudra, évidemment, des ressources appropriées.

Le Président (M. Audet): Cela va, Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Le ministre nous dit, et on l'avait vu dans les rapports, que 80 000 des quelque 130 000 enfants souffrant de handicaps ou de troubles de comportement se retrouvent intégrés aux classes régulières. Je voudrais seulement lui rappeler, et en même temps rappeler ma question, que les pratiques sont fort variées d'une commission scolaire à l'autre et que des professeurs, des enseignants se refusent systématiquement à recevoir dans leur classe des enfants handicapés physiquement - on ne parle même pas de handicapés mentaux. De là à recevoir ceux qui souffrent de handicaps mentaux, on voit la marge' Ce que je voudrais savoir, c'est comment on peut avoir avec une même convention collective des écarts d'interprétation tels qu'on puisse prétendre que cela ne fait pas partie de la tâche. Comment le ministre entend-il lever ce genre de difficulté et quels sont les moyens qu'il entend mettre en application pour qu'il y ait un traitement à peu près égal dans tout le Québec des cas des enfants et plus particulièrement des enfants souffrant de handicaps multiples ou de handicap physique ou intellectuel? Je traiterais autrement, évidemment, tous ceux qui ont des problèmes de comportement ou des problèmes socio-affectifs.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je ne suis pas en mesure de répondre à cette question maintenant pour les raisons que j'ai données tantôt, tant que nous n'aurons pas été jusqu'au bout du travail qui a été entrepris. Je je pourrais dire des généralités, occuper le micro pendant deux ou trois minutes, mais cela ne vous éclairerait pas beaucoup. J'ai dit ce que j'avais à dire là-dessus et je crois qu'au cours de la prochaine année, nous allons enregistrer des progrès importants; c'est une de nos toutes premières priorités. Je ne peux pas aller plus loin sans vous dire des choses qui n'auraient pas été vraiment vérifiées.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Si j'ai bien compris, les décisions devraient être prises à l'automne? Cela veut donc dire qu'on n'aura pas de jeunes handicapés en chaise roulante qui attendront devant les portes des écoles parce que les écoles ne veulent pas les recevoir? J'ai vu cela.

M. Ryan: Je vous dirai qu'aucun cas de cette nature n'a été porté à ma connaissance. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu. Si un cas comme cela avait été porté à ma connaissance, avec la méthode que la députée de Chicoutimi me connaît, il ne serait pas resté à la porte.

Mme Blackburn: Je dois vous dire qu'ils ne sont pas restés à la porte parce que les parents que j'ai rencontrés trouvaient la situation inacceptable et, évidemment, on le laisse pas un enfant dans cette situation à la porte de l'école. Les parents les ramenaient chez eux, sauf qu'avant que cela ne se règle... J'ai rencontré ces personnes au mois de septembre et cela a dû aller à la fin d'octobre avant que cela ne se règle. Dans mon comté, cela ne s'est pas réglé. L'enfant est dans une famille d'accueil et la dame maintenait que l'enfant devait être intégré dans une école, dans une classe régulière, alors qu'on voulait l'envoyer à l'école La Source, qui est une école réservée aux enfants handicapés. On le lui a systématiquement refusé et, plus que cela, on a refusé à un autre enfant qui a des handicaps multiples de l'intégrer à l'école prévue à cette fin.

Il y a des problèmes dans le réseau, vous savez, sauf que, évidemment, dans ces cas, les parents qui sont constamment avec des enfants handicapés ont tendance à croire que c'est un peu un privilège qu'on leur fait que d'accepter ces enfants dans les écoles régulières. Ils ne manifestent pas très fort. Ils sont venus me rencontrer encore récemment, il y a cinq ou six semaines. J'ai rencontré les groupes qui représentent les parents de la région, le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ils ont porté à mon attention des problèmes liés à l'intégration pour toutes sortes de handicaps. Il y a des handicaps pour lesquels on comprend difficilement que l'école refuse d'intégrer les enfants. Ce sont des problèmes réels. Vous savez, il faut comprendre les parents qui ont des enfants dans cette situation, ils sont beaucoup moins mobiles, si vous me passez l'expression, que les parents qui vont travailler

tous les matins. Souvent, ces parents sont obligés, à cause de cette situation, de rester à la maison. Ils sont moins équipés, moins organisés pour manifester leurs difficultés.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, vous vouliez ajouter un commentaire?

M. Ryan: Je voulais ajouter un commentaire dans le sens suivant, c'est que j'ai visité un bon nombre d'écoles au cours de la dernière année. J'ai visité plusieurs écoles où il y a des services pour les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage et je dois dire que, d'après les choses que j'ai vues, il y a un bon nombre de commissions scolaires où ce travail se fait très bien. J'étais à Rivière-du-Loup jeudi dernier et j'ai commencé ma journée par la visite d'une école primaire. Dans cette école primaire, on m'a dit: Tu vas d'abord venir voir des groupes d'élèves en difficulté pour voir comment ils travaillent. Il y avait là à la fois du personnel auxiliaire et des enseignants professionnels. Ils faisaient un travail qui m'a semblé magnifique. Je ne peux pas, en l'espace d'une matinée, porter un jugement d'ensemble non plus, mais j'ai vu des gens qui avaient le coeur à l'ouvrage en vrai, et des élèves qui semblaient s'épanouir beaucoup dans ce contexte. À la CECM, j'ai visité des écoles où on fait un travail remarquable de ce côté également, mais je ne peux pas porter de jugement d'ensemble pour la raison que j'ai donnée tantôt et je ne voudrais pas que mes propos laissent entendre que, parce que je n'ai pas encore acquis la connaissance complète de la situation, il ne se fait rien de bon dans les commissions scolaires. C'est exactement le contraire que je veux plutôt laisser entendre.

Le Président (M. Audet): Nous n'avons aucun doute là-dessus, M. le ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Mon intention n'était pas non plus de prétendre qu'il ne se faisait rien dans les commissions scolaires. J'ai dit que c'était fort inégal d'une commission scolaire à l'autre. Il y a des commissions scolaires qui ont su, en collaboration avec le syndicat des enseignants, mettre en place des services de qualité et d'ouverture à cette clientèle, alors que d'autres n'ont pas réussi à le faire.

Sur un autre sujet, toujours dans le programme 4, M. le Président...

Le Président (M. Audet): Allez-y, Mme la députée, vous avez la parole.

Baccalauréat international

Mme Blackburn: ... les écoles internationales. Ce matin, dans son intervention touchant l'enseignement privé, le ministre se réjouissait de la tendance qui est en train de se manifester dans les commissions scolaires de privatiser le public. La privatisation est populaire d'ailleurs chez ce gouvernement. On comprend l'état de réjouissance dans lequel se trouvait le ministre, mais, blague à part, on connaît plusieurs projets qui sont actuellement, ou en préparation, ou en état d'avancement certain. On parle même d'une école internationale, si je ne m'abuse, à Rivière-du-Loup. Je me demandais ce qu'il y avait d'international, mais quand même. Il y a Sault-Saint-Louis, il y a la CEM et il y a Les Découvreurs. Il y a un certain nombre de projets. Il y a Chambly qui est déjà ouverte et qui fonctionne. Le ministère a déjà accordé des subventions de quelque 100 000 $ pour ce type de projet à la CECM... C'est-à-dire qu'il y a une demande de subvention. On sait que la CECM, dans le projet qu'elle a présenté, qui prévoit une formation un peu plus longue et un peu plus de présence en classe par semaine, prévoyait imposer des frais de scolarité. D'abord, est-ce que c'est permis? Est-ce qu'en vertu de la Loi sur l'instruction publique on peut imposer des frais de scolarité dans une école publique et est-ce que le ministre a l'intention de répondre favorablement à la demande de la CECM de lui accorder un budget spécial pour l'ouverture de son école spécialisée, de son école internationale?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Le baccalauréat international, rattaché au baccalauréat international de Genève, suscite beaucoup d'intérêt dans les milieux éducatifs québécois depuis quelques mois. Je pense qu'une personne s'est faite le promoteur de ce baccalauréat à travers le Québec, M. Belle-lsle, qui a déjà été directeur général de la commission scolaire régionale de Chambly, qui a été ensuite directeur d'une école internationale à l'Organisation des Nations unies à New York et qui a été libéré de cette charge il y a à peu près un an ou deux. Je sais qu'il est très actif, très convaincu des avantages du baccalauréat international.

Les premières expériences que nous avons eues de cette formule pédagogique se font au Séminaire de Québec et au Collège Jean-de-Brébeuf, et je crois, aussi, au Cégep de Sainte-Foy. Au niveau du cégep, cela se pose comme ceci: les étudiants poursuivent les objectifs réguliers du régime d'études collégiales et vient s'ajouter à cet effort, un effort supplémentaire pour un programme de baccalauréat qui exige davantage d'eux au point de vue de la maîtrise de la langue, au point de vue de la maîtrise de la langue seconde, au point de vue de connaissances en histoire, de connaissances internationales, de connaissances en mathématiques, etc., ce qui donne un enseignement encore plus exigeant. Alors, j'ai moi-même visité les gens qui sont engagés dans cette expérience au Collège Jean-de-Brébeuf et il m'a semblé, ma foi, que c'était une expérience très intéressante. C'est

évident que celui qui fait plus est plus satisfait que celui qui fait moins. Alors, si on leur demande plus, je pense que... Personellement, je me réjouis parce que j'ai toujours trouvé que notre système d'enseignement ne demandait pas assez aux étudiants; avec toutes ces contraintes et ces stratifications que nous avons, je trouve qu'il ne demande pas assez. Alors, ce programme permet aux institutions concernées de demander davantage, une performance plus forte, un effort plus rigoureux. Je me dis: Tant mieux, que le ciel soit béni! Premièrement. (21 h 15)

Deuxièmement, dans la mesure... Là, II y a des commissions scolaires qui ont commencé à s'intéresser à cela, et ça pose différents problèmes. Un problème, par exemple, le programme de baccalauréat embrasse une partie des études qui concerne le collégial. Comment une commission scolaire va-t-elle s'embarquer dans un programme de baccalauréat international? D'après son mandat, elle est chargée de dispenser l'enseignement secondaire. Est-ce qu'on va l'autoriser à dispenser l'enseignement collégial? Jusqu'à maintenant, non. Nous disons: Si vous voulez aller dans le collégial, il faut que vous ayez une entente avec un cégep. La commission scolaire du Sault-Saint-Louis donne le baccalauréat international. La partie secondaire, elle s'en charge. La partie collégiale, elle a une entente avec le cégep André-Laurendeau. Il n'y a pas de problème pour nous. Si un cégep prend la responsabilité, supervise l'expérience ou la dirige lui-même, il n'y a pas de problème de ce côté-là, tant mieux!

Il y a une question qui se pose à Chambly parce qu'eux avaient conçu un programme de six ans. Actuellement, on a le secondaire qui est de cinq ans et le collégial pré-universitaire de deux ans. Cela fait sept ans. À Chambly, on a prévu un programme de six ans, un programme original qui fond ensemble des objectifs pédagogiques du secondaire et des objectifs pédagogiques du collégial dans une synthèse originale où des éléments du collégial peuvent être atteints dès la 2e année et des éléments du secondaire actuel atteints la 5e ou la 6e année. Au terme du programme, ils ont l'assurance des universités, des deux universités principales du Québec, que leurs diplômés pourront être admis aux études universitaires directement. Cela pose un problème extrêmement complexe. J'ai eu des représentations de la part du collège voisin, le cégep Édouard-Montpetit. J'ai demandé aux deux organismes de se rencontrer et d'essayer de trouver une solution entre eux. Je ne voulais pas être obligé de trancher. Les rencontres sont commencées. Je dois aller de ce côté-là d'ici une semaine ou deux pour d'autres raisons, mais je vais en profiter pour faire le point avec eux là-dessus. Nous veillons à ce que chaque ordre d'enseignement reste à son niveau propre et n'aille point empiéter sur l'autre.

Évidemment, au secondaire comme au collégial et même davantage, nous exigeons que les objectifs et les exigences du régime pédagogique soient respectés, soient atteints.

Ensuite, il y a un autre problème qui se pose et qui nous est venu de la commission scolaire de Montréal, la Commission des écoles catholiques de Montréal. Il y a deux problèmes. D'abord, il était question de donner un enseignement en langue anglaise plus développé que celui qui est permis par le régime pédagogique. Cela posait un problème. M. Proulx, du Devoir, est immédiatement entré dans un état d'alarme; il a sonné la cloche. Il faut vérifier cela. Il faut s'assurer que le régime pédagogique sera respecté. Il y a bien des manières de le respecter. Deuxièmement, la CECM a dit qu'elle voulait exiger des frais d'inscription. C'est évident que, si ce sont des frais d'inscription, un organisme public comme la CECM n'est pas autorisé à exiger des frais de scolarité. S'il s'agit de frais pour des activités qui débordent le régime pédagogique - il y en a déjà de ces frais qui sont requis - c'est une matière qui peut être examinée. On m'a soumis les grandes lignes d'un projet pour l'instant, mais cela doit faire l'objet d'examens approfondis de la part de nos fonctionnaires avec ceux de la CECM. Un peu plus tard, nous allons trancher le problème, d'autant plus pertinemment que la CECM a demandé une subvention et, contrairement à ce que semblait croire la députée de Chicoutimi tantôt, cette subvention n'a pas été accordée. C'est évident que nous ne prendrons pas de décision tant que nous n'aurons pas examiné le projet à fond, et c'est ce qui commence à peine.

Le Président (M. Audet): Cela va, M. le ministre? Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Je voudrais comprendre par rapport aux frais de scolarité qu'on pourrait éventuellement exiger pour avoir accès à ce programme. Le ministre a dit: Si ce sont des activités qui débordent les cadres du régime pédagogique, cela pourrait éventuellement faire l'objet de frais additionnels. En fait, le projet de la CECM, si j'ai bien compris, c'est effectivement cela. Elle propose une durée plus longue de la semaine, donc plus de temps de présence en classe. C'est effectivement plus que ce qui est prévu dans le régime pédagogique. Donc, à ce titre, il pourrait y avoir des frais de scolarité. Mais, si on introduit des frais de scolarité pour avoir accès à ce type de programme dans les écoles publiques, est-ce qu'on ne crée pas des précédents dangereux si on s'en va dans cette direction? Commencer à imposer en plus des frais de scolarité dans les écoles publiques, je trouve que cela "questionne".

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Je pensais que vous alliez dire que c'est le mouvement de privatisation qui s'accen-

tue.

Mme Blackburn: Je vous laisse le dire.

M. Ryan: C'est un élément que nous allons examiner de très près avec eux. Nous n'avons pas encore eu les détails du projet. Je ne suis pas sûr qu'ils aient même été élaborés encore. Mais c'est évident qu'avant de donner une approbation et, encore bien plus, une assistance à la réalisation d'un tel projet, nous allons l'examiner sous tous ses aspects avec toute l'attention souhaitable.

Mme Blackburn: Je n'aurais peut-être pas dit que c'était la privatisation qui s'accentuait, quoique, si vous le dites, je serais assez d'accord avec ça, mais j'aurais plutôt parlé d'élitisme.

M. Khelfa: Vous êtes d'accord avec la privatisation du système.

Mme Blackburn: D'élitisme, d'accord avec le ministre qui prétend que c'est une façon de privatiser.

Le Président (M. Audet): Est-ce que cela va pour le programme 4?

M. Ryan: Tout revient finalement à la vie privée. Le public existe pour le privé, j'espère.

Le Président (M. Audet): Est-ce que cela va pour le programme 4?

Mme Blackburn: Oui. Le public existe pour le privé et le ministre a la responsabilité de s'assurer que tout se passe selon les règles démocratiques. Lorsqu'on va au cas pas cas, la démocratie en prend un coup.

Le Président (M. Audet): Est-ce que cela va pour le programme 4...

Mme Blackburn: La démocratie, c'est l'accès.

M. Khelfa: Vous êtes fatiguée.

Mme Blackburn: Cela ne risque pas de vous arriver.

Le Président (M. Audet): ...ou s'il reste d'autres remarques?

M. Ryan: Une autre forme d'arbitraire.

Le Président (M. Audet): Je vous rappelle qu'il reste environ 45 minutes pour terminer l'étude du programme 4 et du programme 5, ainsi que du programme 2.

Construction d'écoles

Mme Blackburn: Construction d'écoles, programme 4. Dans les projets d'immobilisation, en 1987-1988, 37 nouveaux projets avaient été autorisés pour un montant global de quelque 35 000 000 $ au programme d'ajout d'espaces. Les demandes étaient de l'ordre de 285 000 000 $. En 1988-1989, les projets d'ajout d'espaces sont au nombre de 118 pour un coût de quelque 292 000 000 $. En fait, le coût total des projets d'immobilisation soumis au MEQ atteint 350 000 000 $, si on inclut les gymnases et les centres administratifs. On sait que le plan de conservation et de développement des équipements en 1988-1989 a été transmis au Conseil du trésor pour autorisation. Au moment de l'étude des crédits provisoires, le ministre a indiqué qu'il ne connaissait pas encore l'enveloppe qui lui sera allouée et que les décisions seront annoncées en juin. On se retrouve...

M. Ryan: Est-ce que je pourrais vous demander à quelle page vous êtes?

Mme Blackburn: En fait, c'est la compilation faite à partir des demandes particulières.

M. Ryan: À quelle page êtes-vous dans le cahier?

Mme Blackburn: Ce n'est pas dans le cahier, c'était dans les...

Une voix: C'est dans les demandes de...

M. Ryan: Ah! ce sont les demandes spéciales? D'accord, très bien.

Le Président (M. Audet): Cela va? Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Parmi les demandes de nouvelles écoles, on retrouve les cas de Chambly et de Mascouche. Je voudrais savoir d'abord pour ces deux cas-là où en sont les discussions. Dans le cas de Chambly, c'est un engagement du Parti libéral en campagne électorale. Je voudrais savoir où est rendue cette discussion. Pour l'école de Mascouche, on sait que cela fait l'objet de demandes et de réclamations permanentes et continues depuis déjà plusieurs années. Je voudrais savoir où en sont les cas de ces deux écoles et, de façon plus générale, est-ce qu'on peut savoir combien le ministre a demandé et de quelle somme il pense pouvoir disposer pour la construction et les agrandissements en 1988-1989?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Évidemment, nous discutons un petit peu par anticipation parce que je n'ai pas encore reçu l'enveloppe dont nous disposerons

pour le programme d'immobilisation du ministère de l'Éducation en 1988-1989. Je causais avec le président du Conseil du trésor, l'autre jour. Il souhaite me faire part de cette enveloppe vers la fin du mois d'avril ou au tout début du mois de mai. Lorsque je connaîtrai l'importance de l'enveloppe qui nous est accordée, je serai mieux en mesure d'aborder les projets particuliers dont nous avons été saisis en provenance des commissions scolaires. Le montant que nous avons demandé est de 85 000 000 $ pour l'année 1988-1989, pour les initiatives nouvelles strictement. L'an dernier, nous avons obtenu 35 000 000 $. Nous verrons ce qui sera communiqué. Je pense que le montant que nous avons demandé nous permettrait, s'il est renouvelé dans des proportions comparables, les deux années suivantes, de reprendre un peu les immenses retards accumulés au cours des années précédentes en matière de construction et de modernisation des équipements scolaires.

Pour les deux écoles dont a parlé la députée, le cas de l'école de Sainte-Julie est à l'étude actuellement avec la commission scolaire. Nous sommes en conversation régulière avec la commission scolaire autour de ce problème. Il y a plusieurs solutions qui sont possibles là-bas, mais pas nécessairement la construction d'une école polyvalente à Sainte-Julie, comme il avait été envisagé d'abord. Il y a plusieurs autres solutions qui sont envisagées. Mon collaborateur, M. Rodrigue Dubé, est en contact étroit avec la Commission scolaire régionale de Chambly autour de ce problème.

En ce qui touche le projet de l'école secondaire de Mascouche, à la Commission scolaire des Manoirs, c'est un projet dont nous serons vraisemblablement saisis de nouveau cette année. J'avais indiqué à la commission scolaire, l'an dernier, que nous n'étions pas en mesure de retenir son projet parce qu'à quelques kilomètres de là il y avait une école qui n'était pas remplie à capacité, qui a beaucoup d'espace. S'il fallait construire une autre école à Mascouche, on viderait davantage l'école Leblanc. Un comité a été formé avec des collaborateurs du ministère et de la commission scolaire concernée, et même du cégep Montmorency à Laval, pour voir si éventuellement l'édifice présentement occupé par l'école Leblanc ne pourrait pas servir à d'autres fins, en tout ou en partie. Si, évidemment, nous trouvions une autre vocation à cet immeuble, le problème de l'école secondaire de Mascouche se poserait dans une autre perspective.

Mme Blackburn: Le ministre nous dit que, dans le cas de l'école de Sainte-Julie, on envisage différentes hypothèses et pas forcément la construction d'une école polyvalente à Sainte-Julie. J'aimerais juste rappeler au ministre une information qu'il connaît peut-être, et peut-être pas non plus. C'est qu'à l'occasion des dernières élections de 1985 - on sait que cette école se retrouve, si je ne m'abuse, dans le comté de

Bertrand - le candidat libéral, qui était nul autre que l'actuel premier ministre du Québec, s'était engagé devant cette population à construire une école. On connaît le résultat des élections. J'espère que cela n'a pas un rapport direct avec la décision de l'actuel ministre de l'Éducation de refuser la construction de cette école, le fait que le premier ministre n'ait pas franchi la barrière des élections à ce moment et se soit fait battre dans le comté de Bertrand. C'est l'impression que cela laisse lorsqu'on rencontre ces gens qui disent: II y avait là un engagement qu'on n'a plus l'air de vouloir respecter, alors que la situation est assez pénible dans ce coin.

J'ai rencontré les gens. Ils me disent qu'il y a des espaces vacants, qu'il y a des places libres dans d'autres écoles. On connaît la situation, sauf que la durée de déplacement est longue et il y a une espèce de déplacement, je dirais, de populations. On prend des élèves d'un milieu plutôt semi-urbain, plutôt rural, et on les envoie dans de grandes écoles où ils ont à franchir des distances importantes. Si je ne m'abuse, ils font un bout sur la route 20 en autobus, évidemment, mais quand même. Il y a des déplacements de clientèles importants. Alors, ce que les gens demandent: On a un secteur en développement dans ce milieu. On devrait avoir une école chez nous pour conserver chez nous, le plus près de leur milieu naturel, les jeunes. Il n'est pas souhaitable qu'on les déplace un peu partout dans les écoles de ce secteur, même s'il y a des places vacantes. Je trouve que cela fait déjà plusieurs années que cette situation est pendante. Pour les gens, les parents et les élèves de ces milieux, c'est une situation qui traîne en longueur et qui crée des tensions. (21 h 30)

Pour ce qui est de Chambly, on sait que le député de Chambly, malgré les engagements qui avaient été pris antérieurement, est en train de jouer un peu à la chaise musicale. Il s'assied un peu du côté de ceux qui disent: II y a des espaces, on pourrait les envoyer ailleurs, de ceux qui prétendent qu'il n'y a plus là une priorité ou qu'il faut encore examiner le dossier pour y trouver d'autres solutions. Tout cela, je le rappelle, ne facilite pas la recherche de solutions qui viennent assurer aux élèves dans ces secteurs... Il y en a plusieurs autres, mais je pense en particulier à ces trois secteurs. Les parents ont mis beaucoup de temps et beaucoup d'énergie là-dedans. Il y a une volonté des parents qui veulent offrir à leurs enfants les meilleures conditions pour leur donner une formation de qualité et cela ne vient pas contribuer à offrir à ces enfants une formation de qualité. Je pense qu'il faudrait que le ministre accorde une attention prioritaire à ces dossiers. Je pourrais en faire la liste éventuellement, mais ce sont des cas importants, et le ministre le sait.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je dois vous informer que nous sommes en rapports fréquents avec le député du comté concerné et que celui-ci manifeste une connaissance et une compréhension du problème évidemment plus approfondies que ne l'indiquent les propos que nous venons d'entendre. J'ai trouvé qu'il avait une approche raisonnable, très empreinte de compréhension. Nous cherchons avec lui et avec la Commission scolaire régionale de Chambly une solution appropriée. Maintenant, nous devons tenir compte aussi des perspectives éventuelles d'intégration scolaire. Il y a des commissions scolaires de ce côté qui veulent faire leur intégration. Cela va conditionner l'étalement des ressources en matière de formation secondaire. On ne sait pas si cela se fera, il est trop tôt pour le dire, mais il y a des commissions scolaires qui nous sollicitent. Il y en a une qui veut me voir très prochainement pour me parler de ses intentions très fortement arrêtées de ce côté.

Maintenant, puisque nous parlons de construction scolaire, je tiens à signaler que le problème le plus aigu se pose présentement dans la région située au nord de la rivière des Mille îles, sur la bande de territoire qui va d'Oka jusqu'à Repentigny. C'est là que sont les problèmes les plus aigus, les plus pressants en matière de construction scolaire, parce qu'il s'est produit dans cette région un développement domiciliaire considérable. Il y a actuellement une carence de locaux scolaires qui est criante. Dans les choix que nous serons appelés à faire, je pense que c'est la région qui devra recevoir la priorité. Cela ne veut pas dire que les autres régions seront oubliées ou ignorées, tout au contraire. Mais, si on veut faire le tour du problème honnêtement, c'est la région qui a les problèmes les plus abondants, les plus criants.

Mme Blackburn: Bien...

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, comme il est de mise, plusieurs commission scolaires et des comités de parents me font parvenir des documents qu'ils font parvenir en même temps au ministre demandant soit des agrandissements, soit de nouvelles constructions. Pour l'information de ces personnes, j'aimerais avoir la réaction du ministre sur certaines demandes qui lui sont parvenues. Je voudrais savoir ce qu'il en est du dossier de l'école Marie-Guyart de Matane où le comité d'école appuie évidemment une demande de la commission scolaire pour des améliorations à l'état des établissements. Selon les parents, on offre à cette école une excellente formation et les conditions physiques finissent par avoir des effets sur la qualité de l'enseignement dispensé à cette école. Je voudrais savoir si le ministre a l'intention de faire quelque chose à l'école Marie-Guyart cette année, dans l'hypothèse où il obtienne les budgets qu'il a demandés au Conseil du trésor.

M. Ryan: Je ne peux malheureusement pas répondre à cette question maintenant pour la raison suivante: les commissions scolaires qui ont des projets à soumettre les transmettent d'abord à la direction régionale du ministère; celle-ci en fait une étude suivant les normes indiquées par la direction du ministère, ensuite envoie le résultat de ses études de tous les projets concernant sa région à la direction du ministère à Québec et celle-ci fait une synthèse du tout et me soumet ensuite pour examen tous les projets dont nous avons été saisis avec les recommandations appropriées à la fois de chaque direction régionale et de la direction du ministère. Là, nous faisons plusieurs séances d'examen des projets de chaque territoire et c'est seulement après cela que nous tirons des conclusions. Je n'ai pas eu le temps en conséquence d'examiner le dossier de l'école Marie-Guyart de Matane dont parie la députée de Chicoutimi. Il viendra à mon ordre du jour prochainement. Dès que j'aurai l'enveloppe que j'attends du président du Conseil du trésor, je me mettrai à l'étude de tous ces dossiers. C'est là que je me ferai une opinion. Pour le moment, je n'en ai pas.

Mme Blackburn: Ce que je comprends, c'est que le ministre n'a pas encore établi ses priorités même s'il a demandé une enveloppe, ce qui m'étonne un peu, vous me permettrez de le dire, parce que, lorsqu'on demande une enveloppe, j'imagine qu'on a déjà un peu arrêté ses priorités et je présume que le ministre me fera la même réponse si je lui demande quelle est sa décision ou ses intentions quant à la construction de l'école à Fleurimont. C'est une demande qui été placée au ministère, mais avec un dossier bien étayé et qui a été également présenté à la députée de ce comté, Mme Gagnon-Tremblay, de Saint-François. Il s'agit d'une petite municipalité tout près de Sherbrooke, une espèce de dortoir où on vit des situations particulières et où on souhaiterait la construction d'une école. Alors, j'imagine que le ministre me fera la même réponse que pour la question précédente: On n'a pas encore établi de priorités, mais cela m'étonne que l'on puisse présenter une demande au Conseil du trésor sans dire au ministre qu'il y a un certain nombre de priorités plus urgentes les unes que les autres.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Sur les projets qui nous ont été soumis d'une valeur totale de quelque 350 000 000 $, il y en a qui ont été classés tout de suite à des fins administratives et budgétaires comme étant conformes aux normes du ministère en matière de construction. Quand nous avons transmis notre demande au Conseil du trésor, elle était accompagnée d'une liste de projets jugés

conformes aux normes du ministère. C'étaient des projets d'une valeur totale de 161 000 000 $. Nous avons demandé 85 000 000 $. On sait qu'on ne peut pas obtenir tout ce qui est jugé conforme. Des fois, cela peut être conforme mais n'avoir pas le même degré de nécessité pressante. Alors, ce sont les chiffres sur lesquels nous nous sommes appuyés. Par conséquent, ce ne sont pas des données en l'air. Cela va?

Mme Blackburn: Non, cela va. Le Président (M. Audet): Cela va?

M. Ryan: L'école de Fleurimont, c'est un projet d'agrandissement, d'après ce que je crois comprendre. Il me semble qu'on avait...

Mme Blackburn: C'était un projet de construction.

M. Ryan: En tout cas, on va en prendre connaissance en temps utile, c'est-à-dire prochainement.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, j'aurais une question, si vous le permettez. Puisqu'on parle de choix de site - la députée de Chicoutimi a parlé de choix d'emplacement, de choix de site, de choix de comté dans une question antérieure - j'aimerais connaître votre position concernant la demande de la commission scolaire Chutes-de-la-Chaudière en ce qui a trait à la construction d'une école dans la municipalité de Saint-Jean-Chrysostome qui est située dans mon comté. Cette municipalité se retrouve dans une commission scolaire. On a vécu un peu le problème l'an passé; vous en êtes informé. J'aimerais connaître votre position là-dessus. Vous pourriez peut-être nous faire en même temps une petite mise en situation du dossier parce que cela a été discuté lors de la dernière commission plénière qui s'est tenue à l'Assemblée nationale avec le député de Lévis.

M. Ryan: Oui. L'an dernier, comme on s'en souvient peut-être, nous avions autorisé dans le territoire de la commission scolaire Chutes-de-la-Chaudière la mise en train de travaux de plans et devis pour l'éventuelle construction d'une école secondaire de premier cycle. Nous avons autorisé des dépenses de 400 000 $ pour des plans et devis. Maintenant, il faut qu'une décision soit prise autorisant la construction même. La décision n'a pas été prise encore. Elle devra être prise dans le cadre des décisions que nous prendrons pour la programmation 1988-1989. Je ne peux pas prendre plus celle-là que les autres dont nous avons parlé jusqu'à maintenant. Mais il est survenu un problème entre-temps, cela a été celui du choix de l'emplacement. Pour procéder aux plans et devis, il fallait avoir un site, parce que les plans et devis peuvent varier beaucoup, suivant la nature de l'emplacement. Alors, il y a eu un débat là-dessus auquel le député de Beauce-Nord a été étroitement associé, dans lequel il a joué un rôle très actif et, finalement, la commission scolaire avait choisi un emplacement à Saint-Nicolas, dans le comté de Lévis, représenté par le député péquiste que l'on connaît. Il y a des besoins très importants dans la section de Saint-Jean-Chrysostome. Le ministre de l'Éducation, dans son souci d'objectivité bien connu...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Dans son paternalisme reconnu.

M. Ryan: Justement antipaternaliste.

Mme Blackburn: II faut qu'il se vante de temps en temps.

Le Président (M. Audet): Allez-y, M. le ministre!

M. Ryan: La députée sait qu'on a donné une école l'an dernier à côté de chez elle. Elle n'en parle pas souvent de celle-là. On en a donné une dans Normandin aussi. On va peut-être en entendre parler à l'occasion de la campagne électorale. Pardon?

Mme Blackburn: Ce n'était pas dans mon comté, Laterrière.

M. Ryan: Je sais bien, mais juste à côté et vous étiez bien contente quand on vous l'a dit.

Mme Blackburn: Oui, c'est juste.

M. Ryan: On ne vous a pas fait de faveur, on a trouvé qu'on avait besoin d'une école, que c'était une priorité. On l'a donnée sans partisanerie. On a fait la même chose dans le cas de la Commission scolaire Chutes-de-la-Chaudière. Je veux remercier le député de Beauce-Nord de l'attitude compréhensive qu'il a adoptée dans ce dossier-là, alors que ses intérêts électoraux, bien compréhensibles, eussent justifié de faire toutes sortes d'obstructions. Mais, en même temps, on m'a fait valoir que la construction d'une école de premier cycle dans la partie est du territoire ne répondra pas aux besoins considérables qui se développent à un rythme très rapide dans la partie est, c'est-à-dire du côté de Saint-Jean-Chrysostome. La commission scolaire doit m'arriver avec un autre projet pour une école secondaire de premier cycle - il y aura peut-être une partie de primaire aussi dedans - du côté de Saint-Jean-Chrysostome. Je n'ai pas pris connaissance du projet encore. Cela va dans les dossiers de l'année 1988-1989 que j'étudierai et je tiendrai volontiers le député informé du cheminement de ma démarche.

Le Président (M. Audet): Je vous remercie de votre magnifique réponse, M. le ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Audet): Alors, est-ce que le programme 4 est adopté?

Mme Blackburn: Est-ce que je dois comprendre que vous le félicitez pour les magnifiques remarques parce que vous venez d'obtenir votre note de passage?

Le Président (M. Audet): Non, mais peut-être une école, Mme la députée.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Alors, le programme 4 est adopté.

Le Président (M. Audet): Le programme 4 est adopté.

Programme 5: éducation populaire.

M. Ryan: Avez-vous décidé de ne pas vous occuper du programme 2?

Le Président (M. Audet): Le programme 2 viendra à la fin complètement, après le programmes.

Mme Blackburn: Oui, c'est ce qu'on avait convenu.

Le Président (M. Audet): II va quand même falloir faire vite, parce qu'il nous reste approximativement 25 minutes. Étant donné qu'on a commencé en retard, il nous reste de 25 à 28 minutes.

Mme la députée de Chicoutimi.

Éducation populaire OVEP

Mme Blackburn: Je voudrais aborder le dossier des OVEP, de l'éducation populaire. En fait, en matière d'éducation aux adultes, c'est le seul budget qui bénéficiera cette année d'une augmentation. On ajoute 1 000 000 $ à l'enveloppe des crédits qui étaient de 11 927 000 $ l'an dernier, c'est-à-dire une hausse d'environ 5, 8 %.

Moi, sans rappeler toutes ces données-là, je voudrais qu'on parle un peu plus longuement du dossier des OVEP. On sait que, dans les organismes volontaires d'éducation populaire, les conditions de travail de ceux qui font de la formation populaire, qui font de l'alphabétisation sont au seuil de la pauvreté. J'ai visité des groupes d'alphabétisation dans la région de Montréal et je garde en mémoire plus particulièrement celui de Longueuil où non seulement on était phy- siquement installés dans des lieux que je qualifierais d'à peine potables, mais on était encore, en septembre avancé, en attente d'une réponse quant aux subventions qui seraient accordées. (21 h 45)

Les gens qui travaillent auprès de ces groupes, auprès des personnes analphabètes le font dans des conditions d'extrême précarité. Ils réussissent, avec un minimum de sous, à survivre pendant une année et à attendre la prochaine subvention pour venir en aide à ces personnes qui ont le besoin premier de savoir écrire et de comprendre un peu ce qui se passe dans leur environnement. L'alphabétisation, et je pense que les expériences ont tendance à le démontrer, est plus facile lorsqu'elle se fait par des groupes d'éducation populaire que par la voie normale et régulière des commissions scolaires. Les gens se sentent un peu plus à l'aise lorsqu'ils passent par ce type de groupe. L'an passé, les nouveaux critères d'admissibilité des groupes ont affecté de nombreuses activités qui étaient jusque-là admissibles au financement. Est-ce que c'est par un concours de circonstances? Est-ce que c'est le fait du hasard? Mais les activités jugées inadmissibles étaient très majoritairement destinées à la formation, à l'information et à l'animation, activités qui voulaient favoriser le regroupement, qui voulaient favoriser la diffusion de l'information, un petit bulletin ou un journal. C'est dans ces activités qu'on a fait des compressions. Ce sont ces activités qui ont été considérées comme non admissibles alors qu'elles l'étaient de façon traditionnelle.

À la table provinciale des OVEP, on nous dit que cette tendance a comme effet de réduire la capacité des groupes de se réunir, de se rencontrer et d'échanger de l'information. Est-ce que c'est un hasard, est-ce que c'est de volonté délibérée qu'on réduit les moyens plus que modestes mis à la disposition de ces groupes pour se retrouver et se concerter? Est-ce qu'il y a une volonté délibérée de couper dans les moyens mis à la disposition des groupes pour se concerter? Est-ce que le ministre a l'intention d'accepter une des recommandations du MEPAC et du rapport Charbonneau, c'est-à-dire d'accorder des subventions considérables pour favoriser précisément les regroupements, les lieux de concertation et de coordination des activités en éducation populaire? Je reviendrai un peu plus loin sur le 1 000 000 $.

M. Ryan: La question est double, je pense. C'est sur le concept d'éducation populaire et son extension possible que certaines restrictions ont été apportées la dernière année, aux dires de la députée de Chicoutimi, et, deuxièmement, les subventions pour les regroupements.

Sur le premier point, il a pu y avoir des interprétations données l'an dernier qui étaient discutables. On a quand même eu la chance d'avoir un comité de révision qui a pu recommander un certain nombre d'ajustements qui ont

tous été acceptés par moi. À compter de maintenant, nous avons le rapport du comité Charbonneau qui revient sur le concept d'éducation populaire qu'il définit dans la ligne traditionnelle que j'ai bien connue moi-même naguère quand j'étais engagé dans des organismes bénévoles, comme essentiellement orientée vers une prise en charge collective par des personnes d'un milieu qui n'ont pas les moyens ordinaires de contrôle de leur destinée en vue d'acquérir un développement en même temps qu'ils travaillent à la solution de leurs problèmes. Ce concept de base est un; concept qui nous intéresse au plus haut point et je suis enclin à le retenir moi-même. Nos fonctionnaires m'ont soumis ces derniers temps un projet de politique pour l'année 1988-1989 tenant compte des recommandations du rapport Charbonneau, que dans l'ensemble je trouve fort acceptable. Je les mandaterai prochainement pour tenir une rencontre avec des représentants autorisés des groupements d'éducation populaire afin de recueillir l'avis de ceux-ci avant que nous en venions à une politique pour la prochaine année. Tout cela va se faire dans un avenir très rapproché de manière que nous puissions devancer l'échéancier des trois dernières années. Ces trois dernières années, les subventions ont été accordées à un stade très avancé de l'été. Cette année nous voulons devancer tout cela. Je crois que le travail sera énormément facilité par le fait que les recommandations du rapport Charbonneau, sauf ce qui touche aux questions purement financières, sont des recommandations qui, dans l'ensemble, présentent beaucoup d'intérêt. Je crois qu'il y aura moyen de s'entendre sur un cadre de travail pour la prochaine année quitte à le réviser annuellement jusqu'à ce que nous ayons trouvé une formule institutionnalisée et stable. De ce côté, je pense qu'au cours des prochaines semaines, il va y avoir un cheminement très important. Pour les regroupements, le comité Charbonneau a formulé une suggestion voulant qu'ils soient l'objet d'un subventionnement particulier.

En principe, il m'apparaît qu'on doit retenir cette suggestion. Il restera à déterminer le quantum.

Mme Blackburn: Je dois comprendre que la recommandation majeure du rapport Charbonneau, c'est qu'il soit consacré à cette activité d'éducation populaire l'équivalent de 1, 5 % du budget total du MEQ. Encore une fois, il s'agit de clientèles défavorisées. Quand on parte des milieux populaires, c'est populaire dans tous les sens du terme, et vous le savez mieux que moi, et dans le sens le plus premier du terme. La recommandation du rapport Charbonneau, c'est qu'il soit accordé quelque 80 000 000 $ pour les budgets de fonctionnement des structures de représentation pour l'ensemble du budget des OVEP et, évidemment, pour permettre également le fonctionnement des structures. Je viens de comprendre que le ministre, sur cette recommandation, n'est pas prêt à aller aussi loin. Pourtant, il y a des besoins absolument criants. On a là des clientèles encore une fois défavorisées, je le rappelle. Le ministre va dire que je fais de la démagogie parce que je parle constamment de cela. Il faut bien que quelqu'un en parle, au Québec, on ne parle plus que des favorisés comme s'il n'y avait plus de pauvres au Québec.

Moi, ce qui m'a le plus étonnée, pour ne pas dire peinée, c'est qu'on ait réussi, en dépit des besoins criants de ce secteur d'activité, à périmer 92 000 $. Il faut le faire! Le budget est en deçà de ce qui était prévu et là... Alors, 92 000 $ dans le programme des OVEP et cela, après révision.

M. Ryan:...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Qu'est-ce qu'il a demandé?

Mme Blackburn: S'ils étaient contents de cela en arrière les OVEP. Si mon information n'est pas juste, qu'on me le dise. Il y a eu 400 000 $ de périmés dans l'ensemble du budget de l'éducation populaire mais, par rapport à l'enveloppe des OVEP, c'est 92 000 $ qui ne seront pas affectés et ce, après la révision. Quand on connaît les besoins absolument criants de ce secteur d'activité, cela demeure complètement inacceptable et incompréhensif. Je voudrais que le ministre m'explique comment ils ont réussi ce tour de force. Dans la région, chez nous, c'est particulièrement dramatique quand on sait les traditions d'éducation populaire au Saguenay-Lac-Saint-Jean. TEVEC, c'était chez nous. On sait qu'à la fois par tradition, par coutume et par souci de mettre à la disposition le plus de ressources possible auprès des milieux on a développé des pratiques dans notre région qui sont exceptionnelles. La région a été la plus affectée par les coupures sous prétexte que sa façon de présenter les budgets n'était pas tout à fait conforme, qu'elle s'écartait de la règle. On a comprimé chez nous plus que partout ailleurs. La première année, la totalité des coupures faites dans le budget des OVEP l'a été au Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans la région 02. Encore cette année, cela pose ce problème d'interprétation par rapport à la qualité des programmes qui sont présentés là. Un projet qui a été refusé chez nous, c'est au théâtre La Rubrique, un petit théâtre d'intervention qui, partant d'un petit budget qu'il obtenait de la part des OVEP, présentait des projets d'intervention auprès des différents groupes, des écoles, des municipalités. On lui a refusé son budget et vous connaissez le prétexte, simplement parce qu'il n'avait pas de projets identifiés tout de suite. Pourtant, il y avait une tradition dans ce théâtre d'intervention et il a été capable de montrer un bilan d'interventions tout à fait exceptionnelles au cours des

années précédentes. On lui a refusé le budget.

Alors, quand le ministre me dit qu'il faut absolument faire preuve de beaucoup de souplesse, mettre fin à ces règles très strictes, très rigides, cela n'a pas l'air... S'il en tient compte lorsqu'il s'agit de donner des dérogations, il ne semble pas tenir compte d'un assouplissement des règles lorsqu'il s'agit de donner des subventions aux groupes populaires. Sa rigidité, ou la rigidité de ses fonctionnaires, ne semble pas s'être assouplie dans le cas des OVEP. Je voudrais comprendre pourquoi on a deux poids deux mesures.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Précisément pour faire face au genre de problème qui vient d'être évoqué, nous avions prévu cette année une réserve nous permettant de procéder à une révision des décisions et à certains ajustements dans les montants des subventions qui ont été accordées. La révision a été faite par un comité que j'avais institué et qui a procédé à un examen très sérieux, qui a tenu plusieurs séances. Il a rendu compte de ses recommandations au ministre et tous les organismes ont été informés. Bon nombre d'ajustements ont été faits et c'est là qu'est allé le gros du résidu dont parlait tantôt la députée de Chicoutimi. Il n'y a pas eu de crédits périmés de 92 000 $ au chapitre de l'éducation populaire, d'après ce que me disent mes collaborateurs. J'ai été tellement surpris moi-même que je leur ai demandé tantôt quand est-ce qu'ils nous avaient volé cela. Je ne me souviens pas qu'on ait eu des crédits périmés de ce côté.

Pour l'autre point que soulève la députée, les organismes qui ont une tradition solidement enracinée et qui, une année, ne sont peut-être pas en mesure de présenter un projet identifiable, dans les lignes de conduite que nous retiendrons, il y aura une disposition pour que ces organismes-là ne soient pas éliminés à cause de cela. Je pense que c'est un point qui se défend.

Mme Blackburn: M. le Président.

Le Président (M. Audet): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, vous allez me permettre de corriger une affirmation que vient de faire le ministre, à savoir que les 400 000 $ étaient une réserve pour prévoir un peu les cas qui seraient à la marge.

M. Ryan: Je n'ai jamais parlé de 400 000 $. Mme Blackburn: Ou 220 000 $.

M. Ryan: Ah non! Moins que cela.

Mme Blackburn: De toute façon...

M. Ryan: En bas de 100 000 $.

Mme Blackburn: La somme qui avait été prévue pour répondre à des besoins particuliers. Dans la directive qui a été émise par le ministère aux organismes, il était clairement spécifié qu'il n'y aurait pas de révision. Si j'avais le document en main... Je l'ai lu et j'ai rencontré les groupes. Il était clairement dit, dans la première directive, qu'il n'y aurait pas de révision. Alors, qu'on arrête d'en demander. Il n'était pas question qu'il y en ait. On sait que, par la suite, il y en a eu. Par rapport aux sommes périmées dans cette enveloppe, dans les questions qu'on a posées, il y en avait une qui portait sur le programme d'aide aux organismes volontaires d'éducation populaire. Alors, l'enveloppe globale, c'est-à-dire le budget disponible, était de 7 993 000 $. Les recommandations d'octobre 1987 étaient de 7 776 617 $, une différence de 223 883 $. La recommandation du comité spécial de révision a entraîné un ajout de 134 722 $ et une différence, en février 1988, de 92 161 $. Si je reconnais la signature, c'est celle du sous-ministre adjoint au nom du ministre... Le ministre a signé, effectivement. Il y a quatre signatures qui apparaissent au document: celle du directeur général, du sous-ministre adjoint, du sous-ministre, M. Boudreau, et du ministre Ryan. M. le ministre aurait signé plus précisément le 9 mars 1988 ce document que je cite. (22 heures)

M. Ryan: M. le Président.

Mme Blackburn: Les 92 000 $, qu'est-ce que c'est?

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: L'exercice se terminait le 31 mars. Alors, on va vérifier ce qui s'est produit entre le 9 mars et le 31 mars.

Mme Blackburn: Cet argent aurait été dépensé?

M. Ryan: On va le vérifier. Je crois qu'il a été dépensé, mais je n'oserais l'affirmer sans avoir vérifié.

Mme Blackburn: Mais...

M. Ryan: Je pense qu'il y a eu des décisions de prises.

Mme Blackburn: Est-ce qu'on pourrait nous communiquer ce document par rapport aux décisions qui auraient été prises après la date de signature?

M. Ryan: II n'y en a peut-être pas seulement une. Les informations vous seront commu-

niquées avec document à l'appui au besoin. Pas de problème.

Mme Blackburn: Cela veut dire qu'il y a eu une deuxième étape de révision à ce moment-ci? On pourra distribuer ces 92 000 $?

M. Ryan: Mais il restait un montant, d'après ce qu'on vous a donné, un montant de 92 000 $. Il a pu arriver que certains cas particuliers aient été réglés là. On va le vérifier.

Mme Blackburn: On pourra nous faire tenir l'information?

M. Ryan: Certainement. Mme Blackburn: Bien.

Le Président (M. Audet): Est-ce que cela va pour le programme 5?

Mme Blackburn: Non, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Je vous ferais remarquer qu'il nous reste 8 minutes pour adopter le programme 5...

Mme Blackburn: Oui, c'est vrai, c'est juste.

Le Président (M. Audet): ...et discuter du programme 2, le Conseil supérieur de l'éducation.

Mme Blackburn: Je voudrais savoir comment le ministre, par quel tour de passe-passe... Est-ce que le ministre va réussir à répondre - il veut lever le moratoire - aux besoins des organismes populaires quand on sait qu'il y a quelque 500 groupes en attente? Comment va-t-il pouvoir satisfaire à ces besoins avec 1 000 000 $?

M. Ryan: M. le Président, on va satisfaire aux besoins pour lesquels on aura les ressources suffisantes. On ne pourra pas aller plus loin, c'est évident.

Mme Blackburn: J'imagine qu'avec 1 000 000 $, on ne pourra satisfaire les 500 groupes. On évalue à combien le nombre de demandes d'organismes auxquelles on pourra répondre et selon quels critères cela se fera-t-il?

M. Ryan: Nous n'avons pas encore procédé à cet examen. Comme je l'ai dit tantôt, nous allons faire des consultations avec les organismes représentatifs. Nous recevrons des suggestions. Le montant moyen de la subvention versée l'an dernier était autour de 10 000 $. Disons que c'était entre 10 000 $ et 15 000 $. Alors, cela donne une indication. Je pense qu'on ne pourra pas faire de miracle d'imagination.

Mme Blackburn: Est-ce que le ministre peut assurer les organismes qui sont actuellement subventionnés qu'ils vont voir non seulement leurs subventions actuelles maintenues, mais au minimum indexées?

M. Ryan: Je ne peux pas donner cette réponse actuellement. On va voir les projets qui seront présentés. On va recevoir le point de vue des organismes concernés. Vous le savez, vous les connaissez un peu. Ils exigent d'être consultés sur à peu près tous les iotas qui sont dans le document.

Mme Blackburn: Une chance!

M. Ryan: Ils ont raison et je pense qu'avec l'expérience ils vont s'apercevoir que cela prend un peu trop de temps, mais nous sommes prêts à faire l'exercice. Nous avons des gens très patients à notre service de l'éducation des adultes. Nous sommes prêts et, une fois qu'ils auront été consultés, nous aurons arrêté les lignes de conduite pour l'année 1988-1988 et la question posée fera l'objet des déterminations à ce moment-là.

Le Président (M. Audet): Cela va pour le programme 5? Programme 5, adopté?

Mme Blackburn: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Adopté sur division.

Conseil supérieur de l'éducation

J'appelle le programme 2, le Conseil supérieur de l'éducation. Au programme 2, est-ce qu'il y a des commentaires?

Mme Blackburn: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Vous avez la parole.

Mme Blackburn: Les organismes consultatifs. Je voudrais d'abord saluer le président du Conseil du trésor...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Blackburn: Cela viendra peut-être, monsieur! Le président du Conseil supérieur de l'éducation et lui dire que je suis avec beaucoup d'attention les travaux du conseil. Comme on le connaît et comme on connaît les travaux du conseil, il fait un excellent travail. Je sais. qu'une des activités qui est prévue et sur laquelle vous voulez mettre l'accent, il s'agit de faire circuler davantage les avis du conseil supérieur. J'espère que de cette façon - j'imagine que c'est aussi votre voeu - il y aura une plus grande sensibilisation des différents milieux

et que des pressions pourront éventuellement s'exercer sur l'appareil politique pour qu'il prenne des décisions plus pertinentes.

Pour être pratique, parce qu'il nous reste peu de temps et parce que j'ai déjà su ce que c'était que de subir des compressions... Lorsqu'elles sont minimes, elles peuvent quand même affecter considérablement le fonctionnement d'un organisme. On sait que les crédits du Conseil supérieur de l'éducation passent de 2 102 500 $ à 2 117 800 $, c'est-à-dire une augmentation de 0, 7 %. En fait, le conseil subit une compression de 32 000 $ au titre des traitements et autres dépenses. Quelles activités cela risque-t-il d'affecter? Est-ce que cela affectera des activités particulières en 1988-1989?

Comme vous parlez dans votre rapport annuel de traiter de l'État et des besoins de l'éducation - je sais que cela fait partie de la loi qui régit le conseil - je voudrais savoir quels thèmes vous entendez aborder en 1988-1989. Je sais que vous ne traiterez pas de l'ensemble des questions; généralement, c'est thématique.

Le Président (M. Audet): M. le ministre.

M. Ryan: Oui, M. le Président. Je ne veux pas interrompre le président du Conseil supérieur de l'éducation. Il nous reste très peu de temps, mais je veux au moins lui souhaiter la bienvenue parmi nous et lui dire qu'à titre de ministre de l'Éducation, il me fait plaisir de répéter publiquement en sa présence ce que j'ai dit ce matin dans mon message liminaire, à savoir l'appréciation que j'ai de l'excellent travail qu'accomplit le Conseil supérieur de l'éducation et l'appréciation que j'ai en particulier de l'intelligence qu'a le président du conseil.

Il y a un mot clé inscrit dans la loi et c'est le mot collaboration. Le conseil n'est pas un journal. Il n'est pas une tribune éditoriale pour qu'on puisse dire n'importe quoi à l'endroit du gouvernement ou des organismes concernés. C'est un organisme qui existe pour collaborer avec le gouvernement et lui donner des avis en toute indépendance et en toute liberté. Je pense que le conseil s'acquitte très bien de ce double volet de sa mission. Je voulais le signaler en présence du président, après l'avoir inscrit dans mon message de ce matin. Je remercie le président et le prie de transmettre à tous ses collègues mes salutations cordiales. D'ailleurs, je me fais un devoir, chaque année, de tenir une rencontre avec le conseil pour faire le point sur les travaux et les projets du conseil. Ces rencontres sont toujours éminemment profitables pour moi.

Le Président (M. Audet): S'il vous plaît, pourriez-vous vous présenter pour les fins du Journal des débats?

M. Lucier (Pierre): Pierre Lucier, président du Conseil supérieur de l'éducation. Je voudrais remercier M. le ministre et Mme la députée de Chicoutimi pour les marques d'appréciation et d'estime qu'ils ont exprimées à l'endroit du conseil. Je m'empresserai de les transmettre dès demain matin aux membres du conseil qui sont actuellement en session.

Il y a une double question. La première porte sur la compression. C'est le sort commun de l'ensemble de l'administration gouvernementale que nous avons accepté de faire cette année parce qu'il est assez simple, pour l'année qui vient, en tout cas, étant donné les économies générées par les modifications au régime d'allocations de présence, d'assumer cette compression sans porter atteinte aux activités. Pour cette année, nous avons cru tout à fait raisonnable de partager le sort commun de l'ensemble des organismes. C'est virtuellement sans effet négatif sur les activités du conseil.

Quant à la deuxième question, pour ce qui est du thème du rapport de 1988-1989, nous sommes actuellement en processus de choix. Ce n'est pas encore arrêté, mais cela devrait l'être quelque part en mai, d'après la programmation que nous avons établie.

Le Président (M. Audet): Merci. Mme la députée de Chicoutimi, il nous reste une minute cinq secondes.

Mme Blackburn: Je sais que le temps est presque écoulé, M. le Président, mais je pense qu'avec le consentement nous pourrions accorder quelques minutes de plus. Étant donné que M. Lucier est ici déjà depuis un bon moment, je trouverais plutôt indélicat de ne pas au moins poursuivre encore quelques minutes. Avec le consentement du parti ministériel, on pourrait poursuivre.

Le Président (M. Audet): En vertu du règlement, on a une enveloppe qui nous est allouée. On doit respecter cette enveloppe pour les crédits. Alors, il n'y a pas de consentement à demander. Je ne peux pas le demander. Il y a une enveloppe de 200 heures qui est prévue pour l'ensemble des crédits, on doit la respecter. C'est inscrit dans le règlement. Alors, étant donné que le temps est écoulé, nous devons procéder à l'adoption du programme 2 concernant le Conseil supérieur de l'éducation. Est-ce que le programme 2 est adopté?

Mme Blackburn: Adopté.

Le Président (M. Audet): Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère de l'Education pour l'année financière 1988-1989 est adopté?

Mme Blackburn: Adopté.

Le Président (M. Audet): Est-ce qu'il y a des remarques finales? M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais...

Mme Blackburn: Pas de remarques finales, le temps est écoulé.

Le Président (M. Audet): Une petite remarque finale. On permet une petite remarque finale.

Une voix: Qui s'ajoute au temps.

Le Président (M. Audet): Très brève. M. le ministre, allez-y!

M. Ryan: Je voudrais tout d'abord remercier les députés de l'attention qu'ils ont portée à nos travaux, spécialement les députés du côté ministériel, parce qu'il y en avait plusieurs, et de manière particulière la députée de Chicoutimi dont...

Mme Blackburn: 99.

M. Ryan: ...nous comprenons, la solitude qu'elle a dû éprouver devant l'indifférence apparente de ses collègues aux questions de l'éducation. Je voudrais profiter de ce dernier mot pour remercier tout particulièrement les fonctionnaires qui m'ont accompagné pendant cette journée dont plusieurs ont pu être entendus de vous aujourd'hui et qui m'accordent une collaboration compétente, loyale et empressée. J'apprécie énormément à la fois ce type de collaboration qui existe entre nous et aussi l'esprit d'équipe dans lequel nous travaillons. Je voudrais rendre un hommage particulier à l'un d'entre eux, qui a été discret aujourd'hui mais qui est au coeur de l'appareil et qui assure l'unité et le bon fonctionnement de l'appareil, le sous-ministre, M. Thomas Boudreau, et tous ceux qui l'entourent, les sous-ministres adjoints, en particulier les deux sous-ministres associés. De manière générale, il existe au ministère de l'Éducation un esprit d'équipe, un esprit de service, dont je me félicite hautement parce qu'il facilite le travail du gouvernement considérablement.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Chicoutimi, critique de l'Opposition.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. La remarque du ministre à mon avis touchant l'absence de mes collègues est déplacée.

M. Ryan: C'est vrai pareil.

Mme Blackburn: Elle est déplacée puisqu'il le sait pertinemment, il siège de front quatre commissions parlementaires actuellement. En parlant de solitude, le ministre sait de quoi il parle parce qu'il était constamment seul au moment où il était dans l'Opposition et il y a eu d'autres occasions...

M. Ryan: C'est faux. Mensonge!

Mme Blackburn: ...où la solitude a dû être beaucoup plus lourde pour lui qu'elle ne l'est actuellement pour moi.

Je voudrais, M. le Président, remercier les fonctionnaires à la fois pour la qualité des informations qui ont été fournies, pour leur présence assidue et, je dirais, attentive également parce que je sais que, bien que cela soit assez prenant de tenir une commission parlementaire à la fois pour le ministre et pour les députés qui sont constamment au banc, c'est aussi extrêmement épuisant pour ceux qui y assistent et y participent souvent comme observateurs ou intervenants, à un moment ou à un autre. Ce sont des journées assez longues. Je me rappelle ces expériences-là. Alors, je voudrais vous remercier pour votre présence ici, de même que pour votre disponibilité.

Le Président (M. Audet): M. le ministre, messieurs, mesdames, on vous remercie. La commission a accompli son mandat. Nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de séance à 22 h 4)

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